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(Douze heures vingt-deux minutes)
Le Président (M. Lachance): La commission du budget et de
l'administration se réunit ce matin avec le mandat de procéder
à l'étude détaillée du projet de loi 37, Loi sur le
régime de négociation des conventions collectives dans les
secteurs public et parapublic. Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le
secrétaire?
Le Secrétaire: M. le Président, aucun remplacement,
ne m'a été signalé.
Le Président (M. Lachance): Alors, nous en étions
hier à l'étude de l'article 42 et nous avions reçu une
motion d'amendement du député de Rosemont, qui se lisait comme
suit: Remplacer, dans le troisième alinéa, les deux
premières lignes par "détermine la masse budgétaire
globale à la disposition des comités et des sous-comités
patronaux". Alors, M. le député de Rosemont.
Organisation des travaux
M. Paquette: M. le Président, non pas que je pense que
leur présence soit indispensable, mais je constate qu'il n'y a personne
de l'Opposition officielle.
M. de Bellefeuille: II ne faut surtout pas nous confondre.
M. Paquette: Je ne veux pas en faire une question de
règlement, mais on peut procéder quand même, M. le
Président.
M. Blais: Nous avons quorum. M. Paquette: Nous avons
quorum.
Le Président (M. Lachance): Nous pouvons procéder,
compte tenu que la motion d'amendement vient de vous et que nous n'avons pas
encore, si ma mémoire est fidèle, entrepris la discussion sur
votre motion d'amendement.
M. Paquette: C'est exact, M. le Président.
M. de Bellefeuille: M. le Président, sur la question de
règlement soulevée par le député de Rosemont...
Le Président (M. Lachance): Préci- sément,
M. le député de Rosemont m'a dit qu'il n'en faisait pas une
question de règlement.
M. de Bellefeuille: J'en fais, moi, M. le Président, une
question de règlement. Je ne me souviens pas d'avoir jamais vu une
commission siéger sans la participation de l'Opposition officielle. Cela
me paraît contraire à toutes nos traditions. Il me semble qu'il
faudrait...
Mme Juneau: Les membres de l'Opposition sont là.
M. Paquette: Nous ne sommes pas l'Opposition officielle.
M. de Bellefeuille: Si Mme la députée veut
intervenir.
Mme Juneau: On enfreint quel règlement?
M. de Bellefeuille: J'ai fait allusion Mme la
députée... Allez-y, expliquez-vous. J'ai fait allusion à
la tradition.
Mme Juneau: On ne veut pas faire perdre le temps de ta
commission.
M. de Bellefeuille: Mais pas du tout! Je suppose que plaider le
respect des règles parlementaires et le "fair play", c'est faire perdre
le temps de la commission, selon Mme la députée?
Mme Juneau: C'est ce que vous faites depuis...
Le Président (M. Lachance): M. le député,
laissez-moi vous informer que cela ne saurait tarder, il devrait y avoir
quelqu'un de l'Opposition officielle ici dans quelques instants. Comme la
motion d'amendement a été proposée et
déposée par le député de Rosemont, votre
collègue, je pense qu'il n'y a rien qui s'oppose à ce que nous
puissions poursuivre les travaux de la commission.
M. de Bellefeuille: Au contraire, M. le Président, je
maintiens totalement mon objection. Ce n'est pas parce que le sujet
immédiat de la discussion est un amendement qui n'a pas
été présenté par l'Opposition officielle que nous
pouvons procéder sans les représentants de l'Opposition
officielle. Je
maintiens que c'est totalement irrégulier, contraire à
l'esprit de nos institutions et contraire à toutes nos traditions.
Mme Juneau: M. le Président.
Le Président (M. Lachance): Mme la députée
de Johnson.
Mme Juneau: Selon les avis de la Chambre, à quelle heure
la commission avait-elle été prévue?
Le Président (M. Lachance): De 12 heures à 13
heures.
Mme Juneau: Est-ce que l'Opposition, tout comme le parti
ministériel et les indépendants, avait été
avertie et avait entendu l'heure de la commission?
Le Président (M. Lachance): Sans aucun doute, Mme la
députée.
Mme Juneau: Merci beaucoup. Le député est plus que
raisonnable, il y a vingt-cinq minutes de retard.
Le Président (M. Lachance): II est 12 h 25 et j'estime -
il y a eu une certaine période d'attente pour les parlementaires et il y
a quorum - que nous pouvons poursuivre nos travaux.
M. Paquette: M. le Président, si vous n'y voyez pas
d'incompatibilité avec notre règlement, j'ai d'autant moins
d'objection que nous étions ici, à 12 heures pile. Je pense que
notre ponctualité est exemplaire à cette commission; c'est
simplement parce que c'est démocratique que je voulais le soulever.
M. de Bellefeuille: M. le Président, je maintiens mon
objection. Nous nous sommes pliés ce matin à la convenance du
ministre qui n'était pas disponible à la fin des affaires
courantes, qui a été retenu ailleurs; nous avons, par
conséquent, été convoqués non pas à la fin
des affaires courantes immédiatement, mais à midi. Puisque nous
nous sommes prêtés à la commodité du ministre, je ne
vois pas pourquoi nous ne nous inquiéterions pas de ce qui convient
à l'Opposition officielle.
M. Clair: M. le Président, sur une question de
règlement.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre, sur une
question de règlement.
M. Clair: Le député de Deux-Montagnes invoque mon
absence pour justifier le report des travaux de la commission jusqu'à
l'arrivée des députés libéraux. Je voudrais lui
dire que, s'il s'intéressait aux travaux de la
Chambre autant qu'il s'intéresse à ceux de cette
commission, il saurait que j'étais convoqué en Chambre de 11
heures à 12 heures et que je ne vaquais pas à des occupations
personnelles.
M. de Bellefeuille: Je le sais, M. le ministre.
M. Clair: Ce n'était donc pas pour arranger mon horaire,
mais pour arranger l'horaire de la Chambre, M. le Président.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Bourassa.
M. de Bellefeuille: J'ai bien dit que vous étiez retenu
ailleurs, M. le ministre, ce que vous venez de confirmer.
M. Paquette: Le problème vient de se régler.
M. Laplante: Vous avez rendu une décision, M. le
Président...
Le Président (M. Lachance): D'accord, je pense qu'on en a
assez discuté.
M. Laplante:... et je pense que ce n'est pas de bonne
grâce, actuellement, que votre décision soit discutée.
Le Président (M. Lachance): De toute façon, je vois
apparaître le député de Brome-Missisquoi. Cette discussion
dilatoire va se terminer, je l'espère et j'espère, aussi que le
député de Rosemont va pouvoir prendre la parole.
M. de Bellefeuille: M. le Président, je m'insurge contre
l'expression que vous venez d'employer. Il est extrêmement grave qu'un
président de commission accuse un député d'user de
tactique dilatoire quand il s'agit d'un député qui soutient les
institutions et qui soutient qu'une commission ne doit pas procéder sans
la participation d'au moins un représentant du parti de l'Opposition
officielle.
Vu l'arrivée du député de Brome-Missisquoi, qui
s'est maintenant joint à nous, mon objection ne tient plus puisque
l'Opposition officielle est maintenant représentée. Je maintiens
qu'il n'est pas acceptable que vous m'ayez accusé d'avoir usé de
tactique dilatoire et je vais aviser des moyens à prendre en
l'occurrence.
M. Paradis: M. le Président, sur la question...
Mme Juneau: M. le Président, je voudrais prendre les mots
du président à mon compte.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Brome-Missisquoi, votre arrivée est bien appréciée.
M. Paradis: Je m'excuse du retard, mais, lorsque le leader du
gouvernement a fait l'appel des commissions parlementaires,
immédiatement après les affaires de ce matin en Chambre, le whip
du parti a spécifiquement demandé au leader du gouvernement, dans
le cas de cette commission parlementaire, si on siégeait
immédiatement. Le leader a répondu immédiatement et je
suis venu ici immédiatement, mais seul naturellement. À ce
moment, j'ai aperçu, en retournant à mon bureau, le
président du Conseil du trésor qui était retenu au salon
bleu en commission plénière et je ne savais pas à quelle
heure on reprenait. Il n'y a pas eu d'autre ordre de la Chambre. Vous serez
à même de le vérifier au Journal des débats.
Je profite de l'occasion pour remercier les députés
indépendants qui, face à un projet de loi aussi important, ont
pris sur eux-mêmes de faire en sorte que l'Opposition officielle soit
représentée pour l'étude complète du projet de loi.
J'en profite pour vous exprimer mes remerciements.
M. Beauséjour: M. le Président.
Le Président (M. Lachance): M. le député
d'Iberville, sur la question...
M. Beauséjour: Juste pour signaler au député
de Brome-Missisquoi que, contrairement à ce qu'il vient de dire, on
avait indiqué à la Chambre un ordre de siéger tout de
suite après la période de questions. Ensuite, on a
rectifié pour indiquer que ce serait à midi. J'étais
là et je l'ai entendu.
M. Paradis: Je suis prêt à prendre votre parole. Je
n'ai pas beaucoup le choix, mais vous devez également prendre la mienne.
J'étais présent en Chambre lorsque le whip de l'Opposition a
demandé au leader du gouvernement si cela siégeait
immédiatement et que le leader du gouvernement a répondu
positivement.
M. Beauséjour: C'est exact. M. Paradis: C'est
exact.
M. Beauséjour: Cela a été corrigé
après.
M. Paradis: À ce moment, je me suis retrouvé seul
ici prêt à procéder au moment où il n'y avait
personne. Ce n'était la faute de personne. Le président du
Conseil du trésor était retenu au salon bleu, je l'ai vu sur mon
petit écran.
Le Président (M. Lachance): Bon! Bon!
M. Beauséjour: C'est parce que vous écoutez
seulement la moitié des choses.
Le Président (M. Lachance): Ceci dit...
M. Beauséjour: C'est parce que vous avez
écouté seulement la moitié des choses.
M. Paradis: J'ai écouté la moitié qui me
concernait.
Conventions collectives des secteurs de
l'éducation et des affaires sociales
Le Président (M. Lachance): Maintenant, je cède la
parole au député de Rosemont.
Organisation des parties (suite)
M. Paquette: Merci, M. le Président. Hier soir, nous avons
abordé l'étude d'un article extrêmement important,
l'article 42, qui traite des attributions du Conseil du trésor. Au
deuxième alinéa, on lit que le Conseil du trésor autorise
les mandats de négociations des comités et des
sous-comités patronaux, donc, des trois comités, plus les deux
comités pour les commissions scolaires crie et Kativik, les trois
comités dans le domaine de l'éducation et les cinq
sous-comités sectoriels dans le domaine des affaires sociales. Face
à ces comités et ces sous-comités, le Conseil du
trésor pourra décider de décréter
d'intérêt gouvernemental toute question. Après avoir
confié un premier mandat de négociation et avoir
déterminé la masse budgétaire à la disposition de
chacun des comités, donc, dans chacun des secteurs, le Conseil du
trésor se réserve le droit de rappeler les gens et de dire: Cela
ne va pas à notre goût, on va modifier les mandats, on va jouer
dans cela.
Hier soir, le député d'Argenteuil... et c'est pour cela
que j'ai fait la remarque initiale tantôt, parce que le
député d'Argenteuil était très
intéressé par mon amendement et j'imagine que le
député de Brome-Missisquoi ne le sera pas moins. Cet amendement
vise à respecter les attributions du Conseil du trésor telles que
définies dans la Loi sur l'administration financière. Hier, le
député d'Argenteuil a passé en revue tous les articles de
la Loi sur l'administration financière et le ministre a dû
convenir que cet article allait bien au-delà de la Loi sur
l'administration financière.
Le rôle du Conseil du trésor, c'est d'assurer la bonne
gestion des fonds publics, de s'assurer que les montants dépensés
par le gouvernement... Là, on se trouve devant un projet de loi
où 50 % du budget de l'État est en cause. Il doit avoir la
possibilité de contrôler la masse budgétaire, si importante
pour les équilibres financiers du
gouvernement, lorsque les négociations sont en cause. De
là à dire que cela correspond à un esprit de
décentralisation que d'avoir une telle implication, à un tel
niveau du Conseil du trésor, je pense qu'on s'éloigne
complètement de l'esprit, si ce projet de loi doit améliorer le
cadre actuel, parce que, s'il n'améliore pas le cadre actuel, on est
aussi bien de garder le même cadre, Les gens vont s'habituer è
travailler dans le même cadre que la dernière fois. Il y a
d'ailleurs de moins en moins de jours perdus dans les grèves, dans le
secteur public notamment. Je crois qu'on a avantage à éviter
cette manie qu'à chaque négociation on change le cadre de la
négociation. À toutes les négociations depuis 1960, on n'a
jamais travaillé avec le même cadre. Dès que les gens
commencent à s'habituer à un concept lié au cadre de la
négociation, on le change. Donc, s'il n'y a pas d'amendements
substantiels qui vont dans la direction d'une véritable
responsabilisation des parties, d'une véritable autonomie pour laisser
les gens compétents discuter des questions qui les concernent, on est
aussi bien de garder le cadre actuel de la loi 55.
M. le Président, le ministre nous dit: Cela reconduit à
peu près à la pratique - je pense que je vous ai bien compris sur
cela -qui a été suivie la dernière fois. Mais, en
même temps, il nous dit: On a une volonté de
décentralisation. On verra plus loin que la décentralisation au
niveau local ne va pas loin et n'a pas grand-chance de succès, n'a pas
grand-chance de permettre aux gens de régler sur le plan local les
questions qui concernent leur vie au travail et les services qu'ils rendent
à la population. Ici, on est dans un tout petit aspect mineur, mais
complètement mineur, de la décentralisation. C'est ia confiance
que le Conseil du trésor doit accorder aux comités patronaux qui
auront à discuter avec leurs vis-à-vis syndicaux.
L'amendement que j'ai déposé, M. le Président, est
tout à fait compatible avec la Loi sur l'administration
financière - sinon, j'aimerais que le ministre me démontre le
contraire - plus précis que l'amendement qu'avait déposé
mon collègue de Deux-Montagnes hier, que le ministre a rejeté en
disant qu'il n'était pas assez précis. Ce que je propose, c'est
qu'on remplace les deux premières lignes du troisième
alinéa de l'article 42, donc, le paragraphe qui commence par "2°",
qu'on remplace les mots "autorise les mandats de négociations des
comités et des sous-comités patronaux dans les matières
qu'il juge d'intérêt gouvernemental" par les mots suivants:
"détermine la masse budgétaire globale à la disposition
des comités et sous-comités patronaux".
La différence est fondamentale. Cette disposition respecte le
rôle du Conseil du trésor, lui permet de contrôler
l'ensemble des fonds, d'éviter qu'il y ait une croissance indue de la
masse budgétaire que le gouvernement met à la disposition de ses
négociateurs et des négociateurs de ses partenaires patronaux.
Quand on dit: "détermine la masse budgétaire globale", cela veut
dire que, si, en cours de négociation, un comité patronal
s'aperçoit qu'il serait utile d'excéder - parce que c'est
rarement réduit, évidemment - la masse à sa disposition,
il devra retourner au Conseil du trésor, et c'est tout à fait
légitime et normal. Mais, tant que le comité patronal ou un
sous-comité patronal resterait dans le cadre budgétaire
défini par le Conseil du trésor, il aurait entière
liberté de manoeuvre pour mettre plus d'accent à tel endroit
plutôt qu'à tel autre: parfois moins d'accent sur les salaires,
plus sur les conditions de travail, parfois l'inverse. La situation peut
être très différente d'un réseau à
l'autre.
M. le Président, je soutiens qu'un tel mécanisme
permettrait aux ministres sectoriels et à leurs
délégués aux comités patronaux, qui sont soit
présidents, soit vice-présidents des comités, et aux
partenaires des réseaux, en discussion avec leurs vis-à-vis
syndicaux, d'utiliser au mieux la masse budgétaire, à l'abri des
interventions fréquentes, soutenues, répétées et
omniprésentes du Conseil du trésor qui risque de fausser
complètement le jeu des négociations et qui risque de nous donner
des réseaux, finalement, moins adaptés aux besoins de la
population. Je fais le pari que les ministres sectoriels, les collègues
du ministre, président du Conseil du trésor, et que les
dirigeants d'établissements sont de grands garçons et de grandes
filles qui connaissent bien les besoins, qui ont une attitude de
responsabilité, qui vont travailler au maximum à ne pas
dépasser le cadre budgétaire fixé par le Conseil du
trésoir et, s'ils doivent le dépasser, qui vont se conformer
à la loi, qui vont revenir devant le Conseil du trésor et qui
vont essayer d'obtenir une marge de manoeuvre différente du Conseil du
trésor.
L'amendement touche simplement à un tout petit morceau de la
décentralisation, celui entre le palier supérieur... Dans cette
loi, il y a quatre paliers dans le secteur des affaires sociales et trois dans
l'éducation. Il y a le Conseil du trésor, qui est le grand boss,
il y a le palier sectoriel ou sous-sectoriel - dans les affaires sociales, il y
a le palier des affaires sociales et les paliers sous-sectoriels - et, ensuite
les paliers locaux. On touche simplement à ce qui se passe entre les
deux premiers paliers; on n'est pas rendu très loin dans la
décentralisation. On nous dit que c'est impossible, inimaginable, qu'il
ne faut pas bouleverser les habitudes. Le ministre nous a dit lui-même
que ses collègues sectoriels ne
s'opposeraient pas à avoir une marge de manoeuvre plus grande
dans le cadre défini par le Conseil du trésor, le cadre
général, global. Le député d'Argenteuil a soutenu
que les collèges et les commissions scolaires le réclament. J'ai
mis en évidence que, dans le mémoire des associations patronales,
dans le secteur de la santé également, on le réclame. Si
je comprends bien, il y a seulement le ministre, président du Conseil du
trésor, qui s'oppose à ce début extrêmement modeste
de décentralisation où, pour une fois, le Conseil du
trésor ferait confiance aux gens dans les différents secteurs,
sans abdiquer son rôle de contrôle des finances publiques.
M. le Président, on a besoin d'un changement d'attitude dans les
négociations. On a besoin de personnaliser les services publics. On a
besoin de faire en sorte que les gens compétents, les gens proches des
besoins, les gens responsables décident. Je comprends la crainte du
président du Conseil du trésor, qui est de dire: II y a
peut-être des "patterns" qui indirectement vont se créer si on n'a
pas nos observateurs et si on ne peut pas contrôler de très
près tout ce qui va se faire dans les comités ou les
sous-comités patronaux. Cela va créer des "patterns" et,
éventuellement, cela va créer une inflation des coûts. Je
fais d'abord le pari que les gens vont respecter la loi et que,
deuxièmement, ils sont tout aussi responsables et qu'ils vont essayer
d'utiliser au mieux les fonds mis à leur disposition par le Conseil du
trésor.
M. le Président, si le ministre veut qu'on passe rapidement
à un autre article, on n'a aucune objection, parce qu'il y a des aspects
beaucoup plus importants de la décentralisation que celui-là.
Est-ce qu'il pourrait modifier son attitude? Depuis le début de cette
commission parlementaire, chaque fois qu'on amène un amendement un tant
soit peu substantiel, le ministre refuse de l'envisager. Les seuls articles qui
ont été réévalués par le ministre sont des
questions tout à fait mineures de mécanique.
Là, on arrive à un point extrêmement substantiel et
qui va, d'ailleurs, dans le sens du programme du Parti québécois.
Hier, le ministre m'accusait d'épouser le programme du Parti
libéral. Je ne l'ai pas lu, sauf le bout constitutionnel qui
m'intéressait récemment, mais je vais me faire un devoir de lire
les autres aspects. J'en connais les grandes lignes, mais le programme du Parti
québécois, ce n'est pas parce que le ministre et ses
collègues ont balancé le chapitre I sur la souveraineté
qu'ils doivent balancer tous les chapitres, j'espère.
M. le Président, l'approche générale à la
politique budgétaire et aux négociations dans le programme du
Parti québécois, à la page 11, au chapitre sur la
démocratie économique et la concertation et au chapitre sur le
syndicalisme et les relations du travail, témoigne d'une attitude tout
à fait à l'opposé de l'attitude de méfiance tant
face aux centrales syndicales qu'en ce qui concerne l'institut sur la
rémunération, où le ministre prévoit une soupape:
l'institut pourra fonctionner même sans l'accord des parties,
méfiance face à ses partenaires patronaux et face même aux
autorités ministérielles sectorielles que témoigne cette
résistance curieuse du ministre à garder intact ce
troisième alinéa, alors qu'il pourrait pleinement jouer son
rôle en faisant confiance aux gens responsables dans les divers
réseaux de l'éducation ou des affaires sociales.
Je ne sais pas comment le ministre peut concilier cette attitude avec le
programme de son parti. Je ne sais pas comment il peut concilier cela avec
l'attitude, l'objectif général de décentralisation qu'il
dit avoir voulu inscrire dans ce projet de loi. Je ne vois pas comment un
changement aussi mineur qui concerne les deux paliers supérieurs de la
négociation - le Conseil du trésor et les comités
patronaux - vient bouleverser les attitudes, c'est une évolution dans la
bonne direction. Est-ce qu'il y a un seul argument qui fait en sorte que le
ministre ne pourrait pas accepter cet amendement? Merci, M. le
Président. (12 h 45)
M. Clair: Rapidement, M. le Président. Je voterai contre
l'amendement du député de Rosemont pour les raisons suivantes:
premièrement, l'adoption d'un tel amendement supposerait que, dès
le départ des négociations, le Conseil du trésor impose un
plafond définitif aux masses budgétaires qui seraient
allouées à chacun des secteurs. Le député de
Rosemont invoque lui-même un argument qui milite contre sa proposition.
Non impliqué dans les négociations, le Conseil du trésor
pourrait faire face rapidement et ferait sans doute face - le
député le soulève lui-même comme probabilité
- à de nouvelles demandes pour accroître la masse. Sa proposition
n'aurait de sens que dans la mesure où la détermination de la
masse budgétaire globale serait définitive, ce qui revient
à dire qu'il s'approche du programme du Parti libéral qui
propose, effectivement, que, après consultation, les masses
budgétaires consacrées aux salaires ou aux coûts des
conventions collectives soient définitivement arrêtées
avant le début de la négociation, ce qui revient à dire
qu'il n'y aurait pas de négociation. C'est ce que cela veut dire: qu'il
n'y aurait pas de négociation sur la masse salariale.
Deuxièmement, ce que cela veut dire, c'est que, en matière
de coordination des négociations, le Conseil du trésor ne joue
plus un tel rôle. Sur le plan de la
coordination en ce qui a trait au contenu, au "pattern" et à
l'exportabilité ou à la "portabilité" des dispositions
convenues dans un secteur par rapport à l'autre, le Conseil du
trésor ne serait plus présent. Je vous donne simplement un
exemple. En 1976, lors des négociations, le Conseil du trésor
n'avait pas d'observateurs dans les comités, et on sait ce que cela a
donné comme résultat des conventions collectives et comme
explosion des dépenses publiques.
Troisièmement, par exemple, en matière de politique
salariale, de lutte aux discriminations et de protection des bas
salariés, ce que le député propose, c'est que le
gouvernement abandonne complètement cette responsabilité aux
comités patronaux. Cela me semble inacceptable. Cela me semble une
proposition réactionnaire et non d'avant-garde. Quand le
député parle de la décentralisation, ces dispositions ne
concernent pas la décentralisation, mais strictement les rapports entre
le Conseil du trésor et les comités et sous-comités
patronaux.
En terminant, M. le Président, réglons
immédiatement la question. Le député me dit que je ne suis
pas gentil parce que je n'accepte pas les propositions d'amendement sur les
questions de fond qui nous viennent de sa part. Je dirai là-dessus, M.
le Président, que je pense qu'il appartient au ministre responsable d'un
projet de loi de manifester de l'ouverture d'esprit quant à des
amendements possibles, mais je pense que le député de Rosemont a
de la difficulté à s'habituer à son nouveau rôle.
C'est sur le gouvernement que repose la responsabilité de proposer des
projets de loi, de les défendre, de les faire adopter et de recevoir le
point de vue de l'Opposition, mais, tant que le gouvernement a la confiance de
la Chambre, M. le Président, c'est à lui de proposer des projets
de loi et de tenter de les faire adopter. C'est l'Assemblée nationale
qui en juge et pas seulement un député qui reproche au ministre
de ne pas tenir compte des amendements de fond. Autrement dit, M. le
Président, le fait de rester comme celui de partir avait un certain
nombre de conséquences; c'est l'une d'entre elles.
M. Paquette: M. le Président, je ne comprends pas les
reproches que le ministre fait à la fin de son exposé. Je pense
qu'on a tous vécu, et, en ce qui me concerne, maintenant, des deux
côtés de la Chambre, plusieurs commissions parlementaires. La plus
récente que tout le monde va se rappeler, c'est celle sur la loi 42
où le ministre a accepté une centaine d'amendements, où le
ministre n'a pas cédé sur les questions les plus vitales, ce qui
nous a amenés à voter contre le projet de loi, mais il a quand
même fait des bonifications sur des questions qui n'étaient pas
liées au principe de son projet de loi.
Lorsque je suis arrivé à l'Assemblée nationale, en
1976, j'ai vécu une commission parlementaire sur la loi 101 où il
y a eu, là aussi, une centaine d'amendements et où les
députés ministériels, dont j'étais, participaient,
contrairement à cette commission-ci où on dirait que les
députés ministériels ont complètement
abdiqué leurs responsabilités. En 1977, sur la loi 101, les
députés de l'Opposition soumettaient des amendements et lesdéputés ministériels aussi. C'était
extraordinaire. Cela fait longtemps qu'on a vu cela. Les députés
ministériels aussi soumettaient des amendements. Le ministre
écoutait et lorsqu'il lui apparaissait qu'il y avait un problème,
s'il n'était pas tout à fait satisfait de l'amendement, il le
prenait en délibéré et il revenait plus tard.
J'ai vécu la même expérience lors de l'étude
de la Loi sur l'assurance automobile. Je l'ai vécue à plusieurs
reprises, M. le Président. Par conséquent, je n'ai pas dit que le
ministre n'était pas gentil. J'ai dit que le ministre n'était pas
ouvert d'esprit et que cela nous amenait à présenter des
amendements et à tenter de convaincre le ministre très
longuement, parce qu'il ne manifestait pas d'ouverture d'esprit. Il semble
avoir la conviction que son projet de loi est parfait. Or, il ne l'est pas. Au
contraire, je pense que c'est un projet de loi qui va être
contreproductif. Je vais reprendre les arguments du ministre qu'enfin il vient
de donner. Il vient de donner trois arguments. Je pense qu'on a discuté
pendant deux heures ou deux heures et demie, hier, sur cette question.
Une voix: Quatre heures.
M. Paquette: Quatre heures? Je ne sais pas, on va
vérifier, on a un décompte qui témoigne d'ailleurs de
l'efficacité respective des divers députés autour de cette
table et qui démontre, au contraire, que certains députés
se sont bien adaptés à leur rôle d'opposition,
contrairement à ce qu'a dit le ministre tout à l'heure. Le
ministre vient, finalement, de nous donner trois arguments. Il aurait pu nous
les donner hier, cela aurait fait avancer le débat, et je vais
répondre à ses arguments.
M. Clair: M. le Président...
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le ministre, sur une
question de règlement?
M. Clair: Oui, sur une question de règlement parce que le
député de Rosemont dit que je n'ai pas soulevé ces
arguments hier. Il a soumis cet amendement à 23 h 55 hier soir.
M. Paquette: Oui, M. le Président, mais toute la
discussion qui s'est faite hier portait sur un autre amendement et sur la
signification de l'article 42, et on a traité de cette question des
relations entre le Conseil du trésor et les comités patronaux. On
a examiné la Loi sur l'administration financière. Le ministre a
dû constater que l'approche que nous développions n'était
aucunement contraire aux responsabilités qui doivent être
dévolues au Conseil du trésor.
Là, il a trois arguments: l'amendement impose un plafond, au
départ, et définitif er plus. Bien sûr que cela va
être, au départ, un plafond définitif si le
président du Conseil du trésor a la même attitude dans ses
relations avec ses collègues que celle qu'il a face aux membres de cette
commission, c'est-à-dire qu'une fois que la masse est fixée, peu
importent les représentations qu'on va lui faire, peu importe si, dans
certains coins, les services essentiels ne sont pas assurés, non pas
parce qu'il y a une grève, mais parce que les fonds sont insuffissants
ou l'organisation des services est inadéquate, il ne va pas se laisser
fléchir ou s'il y a, à un moment donné, une proposition
qui coûte peut-être quelques sous de plus, mais qui permet une
amélioration considérable de la qualité des services,
parce que les enseignants ont préféré une meilleure
qualité de vie au travail que de mettre l'accent sur les salaires, par
exemple, et que du côté patronal on convient que c'est une bonne
chose, il va demeurer inflexible.
M. le Président, quand je propose de remplacer les mots
"détermine la masse budgétaire globale à la disposition
des comités et des sous-comités patronaux", c'est
"détermine" et "redétermine" au besoin. C'est une
responsabilité générale, c'est-à-dire que cela peut
être déterminé au départ. Je vois le ministre
sourire. Le ministre est dans une dynamique qui l'amène à dire
qu'une fois que c'est fixé, on n'en discute plus. Je ne le pense pas. Je
pense que rien n'interdit au ministre de se concerter. Même au Conseil du
trésor, j'imagine que les ministres sectoriels vont, après avoir
discuté avec les comités patronaux, soumettre une demande pour
une masse budgétaire, vont essayer de savoir si les fonds correspondent
à leurs aspirations quant à l'évolution des
réseaux. Il va y avoir une discussion au Conseil du trésor et
là, les discussions vont se faire. Le président du Conseil du
trésor n'est pas un mauvais administrateur, il va peut-être se
garder un fonds. Il ne donnera peut-être pas tout l'argent tout de suite
en prévision de besoins. Il pourra même le faire savoir à
ses collègues sectoriels. Les gens vont négocier à partir
de la masse qu'il leur aura fixée. Si, en cours de négociation,
cette masse doit être modifiée, rien n'interdit que le Conseil du
trésor détermine à nouveau la masse budgétaire
globale, de façon différente, à la disposition des
comités. Cela peut aller très facilement dans un secteur et moins
dans l'autre. Il peut y avoir des besoins différents qui se manifestent
dans l'un et l'autre, mais cela permettrait... C'est faux de dire -j'arrive
à son deuxième argument - que le Conseil du trésor ne
jouerait pas son rôle de coordination. Pas du tout. Le Conseil du
trésor...
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Rosemont...
M. Paquette:... jouerait son rôle de conciliation entre les
intérêts sectoriels, il miserait sur la responsabilité de
ses collègues qui sont membres des comités sectoriels et
sous-sectoriels, et qui peuvent négocier avec leurs partenaires
patronaux des établissements des règles de fonctionnement...
Le Président (M. Lachance):... je dois vous signaler que
votre...
M. Paquette:... qui peuvent garantir tout aussi bien le respect
des priorités gouvernementales.
Le Président (M. Lachance):... temps de parole est
terminé.
M. Laplante: II ne comprend pas cela.
Le Président (M. Lachance): Alors, sur la motion
d'amendement, votre temps de parole de 20 minutes est écoulé.
M. Paquette: D'accord, M. le Président.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Concernant le premier argument...
M. de Bellefeuille: M. le Président, je ne sais pas si M.
le député de Bourassa aurait la courtoisie de
répéter ce qu'il nous a dit il y a quelques instants et que je
n'ai pas saisi.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Brome-Missisquoi, vous avez la parole.
M. Paradis: Est-ce que M. le député de Bourassa a
répondu?
Le Président (M. Lachance): II n'est pas obligé de
répondre aux questions...
M. Paradis: Ah! II n'est pas obligé de
répondre.
Le Président (M. Lachance):... qui lui
sont posées.
M. Paquette: II n'est pas obligé de parler non plus.
M. Paradis: Sur le premier argument apporté par le
président du Conseil du trésor concernant la plafond qui
apparaîtrait imposé par l'amendement déposé, je
pense que l'explication fournie par le député de Rosemont,
à savoir que, lorsque le gouvernement a le pouvoir de déterminer,
il a ce pouvoir de déterminer à plusieurs reprises... Je pense
que cela est important.
Mais il y a un point sur lequel l'argument du président du
Conseil du trésor m'impressionne a priori, et je le dis, c'est la
question du traitement des plus bas salariés et du rôle que le
gouvernement doit jouer, finalement, dans sa politique gouvernementale. J'ai
saisi l'essentiel de l'argumentation, et je m'en porte garant, du
président du Conseil du trésor.
J'aimerais, si cela m'était permis, de consentement, poser une
brève question au député de Rosemont. Comment peut-il
prétendre que cette argumentation, que vous avez
présentée, M. le ministre, n'est pas fondée?
Brièvement, si j'avais le consentement - je sais que cela me prend le
consentement pour le faire - parce que c'est important, c'est capital.
M. Clair: Brièvement.
M. Paradis: Très brièvement.
M. Paquette: M. le Président, je vais me conformer
à la brièveté parce que vous m'avez bien indiqué
que mon temps était écoulé. Je pense que le ministre
s'imagine que seul le Conseil du trésor peut protéger les bas
salariés. Je prétends, une fois qu'une politique gouvernementale
est établie et discutée au Conseil du trésor entre le
président et ses collègues impliqués dans la
négociation, qui sont présents aux comités patronaux, que
ceux-ci peuvent être aussi garants que lui, doivent être aussi
garants que lui des orientations gouvernementales qui peuvent être de
protéger les bas salariés, si le gouvernement qui est au pouvoir
a une optique social-démocrate, et, malheureusement, une autre
orientation, si c'est un autre gouvernement qui est au pouvoir. Mais là
n'est pas la question. Les accusations de réactionnaire sont tout
à fait farfelues, et le ministre le sait à part cela. Non, je
plaide pour la responsabilité ministérielle.
Le ministre des Affaires sociales, une fois que la politique
gouvernementale est établie, est aussi capable que le président
du Conseil du trésor de faire respecter les orientations de la politique
gouvernementale, qu'elle concerne les bas salariés ou toute autre
question qui se rapporte au secteur des affaires sociales. Alors, j'attends
encore que le ministre amène des arguments sérieux pour refuser
un tel amendement.
M. Paradis: Vous avez peut-être raison de dire que le
ministre des Affaires sociales est à même d'intervenir, mais,
lorsqu'on parle d'une action concertée sur le plan gouvernemental,
lorsqu'il s'agit d'un choix, justement, d'orientation de société,
il m'apparaît - je vais peut-être terminer mon propos
là-dessus - qu'on a davantage de garanties. Oui, le ministre des
Affaires sociales aura son bout à faire, tout comme le ministre de
l'Éducation l'aura aussi. Mais que ce bout soit fait par quelqu'un qui
est en haut et qui, vraiment, répète au ministre des Affaires
sociales, au ministre de l'Éducation et à l'ensemble des
intervenants, cela m'apparaît quelque chose qu'on ne devrait pas laisser
tomber sans avoir fouillé complètement cette question, ce que le
temps ne nous permet malheureusement pas de faire avec les droits de parole qui
sont limités.
M. Paquette: M. le Président, je ne peux pas réagir
à cela, mon temps est écoulé, mais je répète
que je pense que le ministre des Affaires sociales n'a pas besoin de se faire
rappeler les orientations... Il peut se les faire rappeler dans des
conversations privées, mais il n'a pas besoin de se promener au Conseil
du trésor à tout instant pour nous assurer que chaque ministre
sectoriel va respecter les politiques gouvernementales. C'est aberrant.
Le Président (M. Lachance): Alors, il est maintenant 13
heures et la commission du budget et de l'administration suspend ses travaux
jusqu'à 15 heures, cet après-midi.
(Suspension de la séance à 13 h 1)
(Reprise à 15 h 11)
Le Président (M- Lachance): À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission du budget et de l'administration poursuit ses
travaux avec le mandat de procéder à l'étude
détaillée du projet de loi 37, Loi sur le régime de
négociation des conventions collectives dans les secteurs public et
parapublic. Au moment de la suspension de nos travaux, vers 13 heures, nous en
étions toujours à la discussion sur la motion d'amendement du
député de Rosemont. Mme la députée des
Îles-de-la-Madeleine.
Mme Le Blanc-Bantey: M. le Président, j'aimerais faire un
certain nombre de commentaires sur la motion d'amendement. Je pense que ce
qu'on recherche
essentiellement ici, depuis hier soir, d'ailleurs, c'est, compte tenu
des objectifs qui sont poursuivis par la réforme, de trouver un meilleur
équilibre entre les responsabilités du Conseil du trésor,
des ministres sectoriels, des comités et sous-comités patronaux.
En fait, ce que tout le monde cherche à éviter, c'est ce qu'on a
pu vivre par le passé, la situation où une trop grande
centralisation de la responsabilité au Conseil du trésor peut
effectivement miner la crédibilité ou la rentabilité d'une
négociation dans laquelle les parties sectorielles sont
véritablement impliquées.
Le président du Conseil du trésor, ce matin, a
souligné un certain nombre d'objections à l'amendement du
député de Rosemont. Si ma mémoire est bonne, les trois
principales étaient, premièrement, qu'il fallait éviter de
remettre les masses salariales aux sous-comités et aux comités
patronaux, par exemple, parce que cela impliquerait, que les salaires ne
seraient pas négociables et qu'il faudrait déterminer à
l'avance les masses salariales. Si, effectivement, on devait les remettre aux
comités et aux sous-comités patronaux, cela reviendrait à
dire qu'il n'y a pas de négociation.
Deuxièmement, il a souligné le fait que c'était
très important de garder le rôle de coordination du Conseil du
trésor et qu'il devait, à cet égard, jouer le rôle
que lui concède l'article 42.
En troisième lieu, il a dit que ce serait irresponsable de la
part du Conseil du trésor d'abandonner aux comités et
sous-comités patronaux la responsabilité qu'a l'État de
travailler à la lutte aux disparités.
Je vais essayer de revenir sur ces trois objections en particulier et
tenter de convaincre le ministre que, même s'il y a certains dangers
à cela, il pourrait malgré tout trouver une façon de
contourner ces dangers.
D'une part, pour revenir à sa première objection qui
était la nécessité qu'il y ait une masse salariale
négociable, à toutes fins utiles, je ne trouve pas que son
argument vaille la peine d'être retenu. Que la masse salariale soit au
Conseil du trésor, qu'elle soit entre les mains des ministres sectoriels
ou des comités et des sous-comités patronaux, le problème
reste le même. Je pense que le Conseil du trésor veut
éviter, ou la surenchère, ou qu'il n'y ait aucune
négociation, si la masse devait être
prédéterminée. Le problème reste le même, que
cette masse soit au Conseil du trésor, ou qu'elle soit entre les mains
des comités ou des sous-comités patronaux. Il faut donc, d'une
part, pour éviter la surenchère et, d'autre part, pour permettre
une véritable négociation, trouver, sinon des mécanismes,
du moins des critères qui nous permettraient d'éviter ces deux
écueils.
Si le ministre voulait accepter de confier une partie de cette
responsabilité à quelqu'un d'autre qu'au Conseil du
trésor, il devrait y avoir moyen de trouver des critères ou des
objectifs qui permettent une négociation véritable, tout en
évitant la surenchère qui a pu avoir tendance à avoir
cours dans certaines négociations, quand les négociations,
surtout, deviennent très politiques.
Le ministre devrait admettre, comme le député de
Sainte-Marie l'a dit hier, que le fait que tout soit, à toutes fins
utiles, en termes de responsabilités, centralisé au Conseil du
trésor a pour effet de créer un peu un simulacre de
négociations sur le plan sectoriel, parce que les parties
impliquées se disent: De toute façon, un jour ou l'autre, cela va
arriver au Conseil du trésor et, comme le véritable patron, c'est
le Conseil du trésor, on peut faire semblant de négocier, mais le
jour venu, on ira frapper ou a la porte du Conseil du trésor ou à
la porte du premier ministre, si le Conseil du trésor ne nous donne pas
ce qu'on veut. Donc, cela a comme conséquence - c'est cela, en
particulier, que le député de Sainte-Marie a souligné hier
- de politiser considérablement les négociations et de donner
lieu à un certain nombre d'abus, de part et d'autre, qu'on a pu
connaître.
Je demanderais donc au ministre de réfléchir à cet
aspect et de se demander s'il n'y aurait pas lieu, tout en confiant des
responsabilités aux comités et aux sous-comités patronaux
ou, encore, aux ministres sectoriels, de le baliser pour répondre
à ces préoccupations. Je pense qu'on accepterait de
réfléchir avec lui s'il acceptait, lui, d'aller dans ce sens.
Il dit, en même temps: Le Conseil du trésor a un rôle
de coordination important qu'il faut qu'il garde. Mais, il m'apparaît
que, justement, ce rôle de coordination, pour être vraiment
efficace, pourrait impliquer que le Conseil du trésor soit moins juge et
partie dans la négociation que je qualifierai, par exemple, de
quoditienne ou de très sectorielle où, à la limite, le
Conseil du trésor, compte tenu du rôle qu'il a
développé ou qu'on lui a concédé au cours des
années précédentes, s'occupe de tous les détails
d'une négociation.
Il me semble que, pour jouer un véritable rôle de
coordination qui soit plus efficace, plus neutre et, en même temps, plus
juste, plus équitable, il devrait justement, comme organisme,
éviter de se mêler de trop près à tous les aspects
de la négociation qui sont extrêmement techniques et multiples et
que, à toutes fins utiles, le Conseil du trésor gagnerait
beaucoup à prendre un peu de distance quant aux tables sectorielles et
quotidiennes des négociations.
Il dit aussi: Bon, si on remettait les masses salariales aux
comités et sous-comités
patronaux, on pourrait faire face à des disparités
énormes et l'État, par le biais du Conseil du trésor, a
une responsabilité là-dedans et doit voir à ce qu'il n'y
ait pas trop de disparités et qu'on travaille à la
réduction des écarts, qu'il s'agisse des bas salariés ou
qu'il s'agisse des écarts entre les hommes et les femmes. Je dois dire
que je suis extrêmement sensible à celte préoccupation et
je pense que le président du Conseil du trésor n'en sera pas
surpris. Encore là, s'il faut être très prudent quand on
parle de décentralisation pour éviter ce type de disparité
qui a eu cours dans le passé et qui a aussi contribué à
amener la trop grande décentralisation qu'on connaît, il devrait y
avoir moyen, même si le Conseil du trésor confiait des masses
salariales aux parties impliquées sectoriellement, de donner un certain
nombre d'objectifs que l'État pourrait exiger des parties en cause.
Comme exemple: faire en sorte que les négociations qui viendront, que ce
soit la prochaine ou des négociations futures, ne contribuent pas
à élargir les fossés existants entre les
différentes catégories de salariés, soit les bas
salariés ou les haut salariés, qu'il s'agisse des hommes et des
femmes.
Donc, encore une fois, le Conseil du trésor pourrait donner des
directives à cet égard et voir à ce que ces
disparités ne s'élargissent pas, mais, au contraire, se
rétrécissent, comme, il faut l'admettre, le gouvernement a
tenté de le faire lors de la dernière négociation. Je
pense que tout le monde a reconnu qu'il s'était agi là d'une
action extrêmement méritoire du gouvernement. Je ne pense donc pas
que le Conseil du trésor puisse abdiquer devant cette
responsabilité, bien au contraire. Voilà le genre de rôle
qu'il pourrait jouer, que tout le monde accepterait naturellement et qui
m'apparaît aussi, sur de grands enjeux, un rôle de coordination qui
peut être dévolu au Conseil du trésor.
En conclusion, M. le Président, compte tenu que cet article 42
pose un véritable problème à l'ensemble des intervenants
de l'Opposition, compte tenu que c'est pour nous une question de principe
extrêmement importante quand il s'agit de voir véritablement s'il
y a lieu de décentraliser ou non, s'il y a une volonté
réelle de décentraliser - il m'apparaît que c'est un des
articles les plus importants de cette loi à cet égard - compte
tenu de tout cela, compte tenu du fait qu'on ne peut pas progresser
actuellement dans l'étude de la loi article par article parce qu'il
semble qu'il n'y a aucun consensus que nous puissions dégager de part et
d'autre, est-ce que le ministre ne pourrait pas accepter de
réfléchir à tout ce qui s'est dit autour de cette table
depuis hier soir, à un certain nombre d'amendements qui ont
été apportés et nous proposer un certain nombre
d'amendements qui pourraient venir de lui, s'il trouve que les nôtres
sont inacceptables, qui iraient dans le sens d'un meilleur équilibre
entre les objectifs de la loi et une décentralisation pas trop brusque,
dans le sens d'une amorce véritable de décentralisation et, donc,
d'un meilleur équilibre entre les responsabilités du Conseil du
trésor à l'égard de cet objectif et les
responsabilités des ministres sectoriels et des sous-comités
patronaux, comme des comités patronaux?
J'aimerais bien, comme le député de Rosemont a eu
l'occasion de s'exprimer assez longuement encore ce matin, avoir à ce
moment-ci une réaction du ministre pour voir s'il accepte de cheminer un
peu dans ce sens.
M. Clair: Ma réaction sera brève, M. le
Président. J'ai eu l'occasion de faire valoir les arguments pour
lesquels, de ce côté-ci, nous voterons contre la proposition
d'amendement du député de Rosemont.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que nous pouvons
disposer de l'amendement proposé par le député de
Rosemont? Je vais en faire de nouveau la lecture: Remplacer, dans le
troisième alinéa, les deux premières lignes par...
Mme Le Blanc-Bantey: M. le Président, je voudrais invoquer
le règlement. Excusez-moi, je ne suis pas très familière
avec la procédure. Si je veux suggérer un sous-amendement. Est-ce
que je le fais maintenant ou est-ce que j'attends?
Le Président (M. Lachance): Une fois que l'amendement est
mis aux voix, il est un peu tard. À ce moment-là, cela
deviendrait plutôt un amendement. Ce serait le moment de proposer un
sous-amendement à l'amendement qui est déjà sur la
table.
Mme Le Blanc-Bantey: C'est parce que ce que je veux qu'on...
Une voix: Le vote a été appelé, M. le
Président.
M. Paquette: Tu feras un amendement après.
Mme Le Blanc-Bantey: Je ferai un amendement après?
Le Président (M. Lachance): D'accord. Nous allons disposer
de la motion puisque, effectivement, le vote a été demandé
sur l'amendement déjà proposé. Est-ce que la motion du
député de Rosemont est adoptée?
M. Clair: Rejeté.
M. Paquette: Sur division.
Mme Le Blanc-Bantey: Sur division.
Le Président (M. Lachance): Nous revenons à
l'article 42.
Mme Le Blanc-Bantey: M. le Président, j'arriverai avec un
nouvel amendement qui, cette fois-ci, sera peut-être plus acceptable pour
le ministre. Si j'ai bien compris une partie de son argumentation, ce qu'il
craint, c'est que nous allions trop vite dans cet objectif de
décentralisation et qu'en voulant aller trop vite on rate l'objectif.
Cela peut être une préoccupation louable et il a donc
refusé l'amendement du député de Rosemont voulant que le
gouvernement détermine la masse budgétaire globale à la
disposition des comités et sous-comités patronaux.
J'aimerais faire un nouvel amendement qui est le suivant: Que le Conseil
du trésor... Je vais le relire en fonction de l'article. Remplacer, dans
le premier alinéa...
M. Paquette: C'est le troisième alinéa.
Mme Le Blanc-Bantey: On va se retrouver...
M. Paquette: Le troisième alinéa.
Mme Le Blanc-Bantey: Dans le troisième alinéa:
"détermine la masse budgétaire globale à la disposition
des ministres sectoriels" au lieu "des comités et des
sous-comités patronaux". Je vais argumenter rapidement, cette fois-ci.
Pour aller dans l'esprit de la préoccupation du ministre, s'il craint
que de confier cette masse à la disposition des comités et des
sous-comités patronaux...
M. Clair: Sur la recevabilité de la motion, M. le
Président.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre, sur la
recevabilité.
M. Clair: Brièvement, M. le Président. Je pense que
cet amendement a le même effet que le précédent puisque les
comités et sous-comités patronaux sont sous l'autorité du
ministre délégué par le gouvernement. Je pense que
l'amendement a exactement le même effet que le
précédent.
M. Laplante: C'est une redondance, l'amendement.
Le Président (M. Lachance): Toujours sur la
recevabilité, M. le député de Rosemont?
M. Paquette: Sur la recevabilité, M. le Président.
Cette intervention du ministre m'étonne beaucoup parce qu'il semblait
craindre dans son intervention, ce matin et hier aussi, que les associations
patronales ne prennent trop de place, qu'en confiant la masse aux
comités patronaux - si je l'ai bien compris - le gouvernement dilue un
peu sa responsabilité. Le contrôle du Conseil du trésor
serait moins grand et le Conseil du trésor aurait plus de
difficulté dans la pratique à réaliser son rôle de
contrôle de la masse budgétaire impliquée dans les
négociations.
M. le Président, l'amendement de ma collègue des
Îles-de-la-Madeleine est recevable puisque, si le ministre craint les
comités patronaux, il n'en va pas de même, j'espère, de ses
collègues sectoriels. Cela veut dire qu'au sein des comités
patronaux ce sont ses collègues sectoriels qui seraient les
gardiens de cette décision du Conseil du trésor et verraient
à ce que les comités patronaux en tiennent compte. Les
comités patronaux devraient fonctionner sous cette
responsabilité.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Sainte-Anne, toujours sur la recevabilité?
M. Polak: Oui. M. le Président, je suis d'accord avec le
ministre que cet amendement ne soit pas recevable. Je dois ajouter qu'il y a
quelque chose qui m'a beaucoup surpris. Hier soir, j'ai quitté la
réunion à 10 h 15 environ parce qu'il fallait que j'aille
à une autre commission toute la matinée, la commission sur le
Code civil. C'est très intéressant et on étudie cela
sérieusement, article par article. Ici, je note que nous sommes encore
à étudier le même article 42. Donc, je ne pense pas, avec
tout le respect que je dois aux députés et à la
députée, qu'on soit en train d'étudier sérieusement
le projet de loi. Je trouve cela malheureux parce que je crois qu'on est en
face d'une obstruction systématique. On présente un amendement
après l'autre sur un bout de papier. On ajoute un mot ici et là
au même amendement. J'espère que ces députés vont
continuer à étudier sérieusement le projet de loi article
par article. De toute façon, je suis venu pour cela. Je le regrette,
même, parce que je dois aller à la commission sur le Code civil.
Je ne peux pas m'absenter parce que j'attends un député qui va me
remplacer. Entre-temps, je trouve cela un peu triste. Je trouve que c'est une
sorte d'abus du processus.
Le Président (M. Lachance): J'aimerais, avant d'aller plus
loin, avoir copie du libellé de la motion de la députée
des lles-de-la-Madeleine, ce que je n'ai pas sous les yeux.
M. Paquette: M. le Président, si vous
me permettez, sur la question de recevabilité soulevée par
le député de Sainte-Anne...
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député de Rosemont, une dernière intervention
là-dessus. (15 h 30)
M. Paquette: Très brièvement. Le
député de Sainte-Anne n'est probablement pas au courant que nous
n'avons eu qu'une demi-heure de travaux ce matin. Nous venons de recommencer,
il y a environ quinze minutes. S'il avait été là hier
soir, à la fin de la séance, il aurait constaté que son
collègue d'Argenteuil est intervenu pour mettre en évidence le
fait que le ministre faisait une interprétation abusive de la Loi sur
l'administration financière. Nous avons tenté de convaincre le
ministre, qui n'était pas d'accord avec la première formulation.
On lui a présenté une deuxième formulation. Il n'est
toujours pas d'accord avec la deuxième formulation. On lui en
présente une troisième en espérant que, s'il n'est pas
capable de faire confiance aux comités et aux sous-comités
patronaux, à la demande d'ailleurs des associations patronales - j'ai
encore ici le texte de l'association des collèges dont on a parlé
hier, d'ailleurs; je ne le relirai pas - il fasse au moins confiance à
ses collègues sectoriels qui, dans le meilleur principe de
responsabilité ministérielle, devraient avoir une certaine marge
de manoeuvre à l'intérieur de la masse que le Conseil du
trésor fixe, et qui peuvent, aussi bien que le Conseil du trésor,
être garants des orientations générales du gouvernement
face à la négociation. Ma collègue des
Îles-de-la-Madeleine espère que cet amendement sera plus
acceptable pour le ministre que celui que j'ai déposé hier. Je
crois que l'amendement est recevable, M. le Président. Il est
différent de celui que j'ai présenté.
Le Président (M. Lachance): Très bien. J'ai devant
les yeux le libellé de la motion de la députée des
Îles-de-la-Madeleine. Après avoir entendu les avis sur la
recevabilité, j'en viens à la conclusion que l'amendement
proposé par la députée des lles-de-la-Madeleine va dans
une parenté extrêmement étroite avec ce qui a
déjà été rejeté antérieurement. En
définitive, ça devient le même objet, ou à peu
près. Donc, je déclare irrecevable cette motion. Nous revenons
sur l'article 42.
M. Clair: Est-ce que l'article 42 est adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Lachance): Est-ce qu'on peut disposer de
l'article 42?
M. Laplante: Le vote a été demandé.
Mme Le Blanc-Bantey: Vous faites un vote nominal?
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le secrétaire,
vous pouvez procéder au vote nominal sur l'article 42.
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Juneau
(Johnson).
Mme Juneau: Qu'est-ce que vous avez demandé? C'est sur
l'article 42?
Le Président (M. Lachance): C'est sur l'article 42.
Mme Juneau: Pour.
Le Secrétaire: M. Blais (Terrebonne).
M. Blais: Pour.
Le Secrétaire: M. Beauséjour (Iberville).
M. Beauséjour: Pour.
Le Secrétaire: M. Gauthier (Roberval).
M. Gauthier: Pour.
Le Secrétaire: M. Laplante (Bourassa).
M. Laplante: Pour.
Le Secrétaires M. Clair (Drummond).
M. Clair: Pour.
Le Secrétaire: Mme Le Blanc-Bantey
(lles-de-la-Madeleine).
Mme Le Blanc-Bantey: Contre.
Le Secrétaire: M. Ryan (Argenteuil).
M. Ryan: Contre.
Le Secrétaire: Pour: 6 Contre: 2
Le Président (M. Lachance): L'article 42 est adopté
sur division.
M. Clair: M. le Président, je n'ai pas d'amendement
à proposer à l'article 43.
Le Président (M. Lachance): Mme la députée
des Îles-de-la-Madeleine, sur l'article 43.
Mme Le Blanc-Bantey: Le député de Sainte-Anne, je
crois, s'est scandalisé du travail que nous avons tenté de faire
depuis hier pour faire amender l'article 42. Ne
comprenant pas que cet article était un article fondamental dans
le projet de loi actuel, dans l'esprit, semble-t-il, qui aurait animé le
ministre de décentraliser un peu les négociations dans les
secteurs public et parapublic, nous nous sommes opposés farouchement en
espérant que le ministre reviendrait sur son attitude et accepterait de
rechercher un meilleur équilibre entre les responsabilités du
Conseil du trésor, des ministres sectoriels, des comités et des
sous-comités patronaux. Mais le ministre - comme il le fait depuis le
début - pense que sa réforme est parfaite et qu'elle ne
mérite aucune amélioration, même si, en toute franchise et
en toute sérénité - je pense que nous avons fait un
débat avec le plus de courtoisie possible - nous essayons de le
convaincre que, dans la recherche des objectifs qu'il s'est donnés, il
fait fausse route en maintenant un déséquilibre aussi
évident que vient de confirmer l'article 42 quant aux
responsabilités dévolues au Conseil du trésor. La moindre
des choses que je pourrais dire sur l'article 43, c'est que cela confirme un
rôle symbolique des ministres sectoriels dans la négociation. Bon,
on ne peut pas faire autrement, cela existait déjà dans
l'ancienne loi, mais, dans certains cas, cela n'a pas été plus
efficace que ce qu'il faut. Donc, on permet aux ministres sectoriels de
participer aux délibérations du Conseil du trésor.
On sait, M. le Président, faut-il le dire, qu'un des
problèmes qu'on a vécus dans les négociations
précédentes, c'est que les parties impliquées, sachant que
le grand boss là-dedans, c'est le Conseil du trésor, quand ce
n'est pas le bureau du premier ministre, peuvent s'amuser à faire
semblant de négocier avec les ministres sectoriels et les comités
et les sous-comités patronaux, mais savent fort bien que ce n'est pas
là que les décisions essentielles se prennent et qu'un jour finit
toujours par arriver où la négociation remonte au Conseil du
trésor et devient extrêmement politisée, parce qu'on sait
que c'est là que les véritables décisions se prennent et
que ce sont eux les véritables patrons de la négociation.
Donc, le Conseil du trésor ne joue pas qu'un rôle de
coordination, ce qu'il devrait jouer, mais il joue le rôle de juge et
partie dans tous les cas et il est en dernier ressort l'arbitre ultime quand il
ne prend pas la peine d'aller au Conseil des ministres. Je trouve cela
extrêmement désolant qu'aux articles 42 et 43 on continue de
confirmer dans ce sens ce qui s'est passé dans les négociations
antérieures et qu'effectivement on handicape encore plus lourdement que
par d'autres aspects de la loi les chances d'une véritable
réforme.
Je ne ferai pas d'autres commentaires, mais j'aurais aimé que le
ministre - apparemment, il semble croire à la chance de réussir
cette réforme - accepte d'y réfléchir et accepte de
trouver un meilleur équilibre, pour que nous puissions ensemble
améliorer cette loi en fonction des objectifs qui sont poursuivis.
Le Président (M. Lachance): Alors, est-ce que nous pouvons
adopter l'article? Adopté?
M. Paquette: M. le Président.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Rosemont?
M. Paquette: Est-ce que le ministre qui a affirmé
l'importance du rôle de coordination du Conseil du trésor, de
coordination des négociations, n'adopte pas ici un mode curieux de
coordination, à l'article 43?
Si on relit bien l'article, on dit que le "Conseil du trésor
invite le ministre de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la
Technologie, le ministre de l'Éducation ou, suivant le cas, le ministre
des Affaires sociales, à participer à ses
délibérations lorsqu'elles portent sur les négociations
visées dans les articles 44 et 53", c'est-à-dire l'article 44 sur
les stipulations négociées et agréées à
l'échelle nationale, et l'article 53 sur les questions de salaire et
d'échelle salariale, à la suite de la publication par l'institut
du rapport prévu à l'article 19.
Si on comprend bien le mode de coordination du ministre, il y a le
Conseil du trésor qui est là et qui, de temps en temps, fait
venir un ministre, discute avec ce dernier, serre la vis, c'est fini et il s'en
va; on fait venir un autre ministre, on discute avec lui, on serre la vis, il
s'en va, et ainsi de suite. Curieux mode de coordination, M. le
Président! On se serait attendu que les responsables de la
négociation... Le président du Conseil du trésor a l'air
de s'amuser, mais je suis certain que, s'il était ministre de
l'Éducation dans un contexte comme celui-là, pris pour
défendre des positions communes sur la place publique, pris à
justifier parfois des choses avec lesquelles il est plus ou moins d'accord, qui
lui ont été imposées par le Conseil du trésor, il
trouverait cela moins drôle. 11 y a une question, encore là, de
responsabilité ministérielle qui est en cause.
Ma question au ministre est la suivante: Qu'est-ce qui lui a fait opter
pour ce mode de coordination plutôt qu'un mode de coordination plus
normal, où, peut-être, un comité présidé par
le président du Conseil du trésor - personnellement, je n'ai pas
de préférence là-dessus - et formé des ministres
impliqués dans la négociation aurait pu être formé,
et, sur un pied d'égalité, ces ministres auraient pu discuter
entre eux des besoins financiers requis par les réseaux dont
ils ont la responsabilité?
M. Clair: M. le Président, le meilleur argument que je
peux utiliser pour convaincre le député de Rosemont d'adopter
l'article 43, lui qui a longuement plaidé au cours des quatre
dernières heures en faveur du statu quo, c'est le statu quo de la loi
55.
Une voix: Ah! Ah! Ah!
M. Paquette: M. le Président, est-ce que...
M. Clair: J'ajouterai, M. le Président...
M. Paquette:... le ministre s'engage à appliquer le statu
quo dans les chapitres qui viennent? À ce moment-là, on peut
s'entendre.
M. Clair: J'ajouterai brièvement, M. le Président,
simplement, que le Conseil du trésor dégage les mandats
financiers. Maintenant, il est sans doute au courant, à la suite de sa
connaissance du fonctionnement du gouvernement, qu'existe parallèlement
au Conseil du trésor ce qui s'appelle le comité
ministériel permanent de coordination des négociations qui est
présidé effectivement par le Conseil du trésor, qui n'a
pas une existence juridique reconnue au sens de la loi, mais qui est un
sous-comité du Conseil des ministres, qui a une importance tout aussi
grande sur les questions de négociation que le Conseil du trésor,
qui s'attache davantage aux questions financières et où sont
régulièrement présents les ministres sectoriels
responsables. D'ailleurs, j'indiquerai au député que la plupart
des réunions qui se sont tenues depuis que cette responsabilité
m'incombe, la plupart de ces réunions, ou, en tout cas, un très
grand nombre d'entre elles, ont été convoquées à la
demande des ministres sectoriels. Donc, la question d'égalité des
ministres entre eux à cet égard ne se pose pas, sauf qu'il ne
peut pas y avoir quatre Conseils du trésor dans un gouvernement, il n'y
en a qu'un.
Le Président (M. Lachance): Mme la députée
des Îles-de-la-Madeleine.
Mme Le Blanc-Bantey: J'avais promis que je n'interviendrais pas,
mais je vais y aller très rapidement.
Dans un autre ordre d'idées, est-ce que le ministre a
songé à faire participer, puisque, semble-t-il, on n'arrivera pas
à le convaincre de changer le statu quo sur quoi que ce soit,
d'ailleurs...
Une voix: Là-dessus.
Mme Le Blanc-Bantey: Là-dessus. Est- ce que le ministre a
songé, compte tenu de la grande préoccupation qui a
été véhiculée au cours des années
précédentes par les ministres successives
déléguées à la Condition féminine quant
à la nécessité de réduire les écarts ou la
disparité dans certains cas, est-ce que le ministre a songé
à inviter justement, en vertu de la loi, la ministre
déléguée à la Condition féminine à
participer aux délibérations pour les éventuelles
négociations?
M. Clair: Non, M. le Président. J'ai cru comprendre
jusqu'à maintenant que c'était devenu presque une tradition que
la ministre responsable de la condition féminine siège au Conseil
du trésor et siège également au comité
ministériel de coordination des négociations.
Mme Le Bianc-Bantey: M. le Président...
M. Clair: Mais, comme elle n'est pas juridiquement
impliquée dans les négociations, je pense que, si cette approche
devait être retenue pour la ministre responsable de la Condition
féminine, elle conviendra que plusieurs autres ministres ont, je dirais,
une responsabilité assez horizontale - je pense au ministre responsable
des Relations avec les citoyens, je pense au ministre responsable de l'Office
des personnes handicapées, je pense au ministre responsable de la Charte
des droits et libertés de la personne et à plusieurs autres qui
ne sont pas impliqués. Il faut bien comprendre qu'à l'article 43
c'est l'organisation de la partie patronale, principalement sur les questions
financières.
Mme Le Blanc-Bantey: Justement, M. le Président, c'est
parce qu'il s'agit de questions financières et aussi, à l'article
53, de questions salariales, si ma mémoire est bonne, qu'il
m'apparaissait important, compte tenu de ce que je viens de dire, que la
ministre déléguée à la Condition féminine
soit associée. C'est vrai qu'il est arrivé occasionnellement -
parce que, quand j'étais ministre à la Condition féminine,
je ne siégeais pas au Conseil du trésor - que la ministre
déléguée à la Condition féminine soit en
même temps membre du Conseil du trésor, mais ce n'est pas parce
que c'est arrivé à quelques reprises qu'on doit tenir pour acquis
que, dans l'avenir, ce sera le cas. Je dirai aussi au ministre que chaque fois
qu'on veut écarter - et c'est un argument que j'ai souvent entendu quand
j'étais à la Condition féminine - les
préoccupations de la Condition féminine, quand on veut les
écarter, on met dans la balance les préoccupations d'autres
clientèles qu'on invoque allègrement à ce
moment-là. Je rappellerai au ministre que la ministre
déléguée à la Condition féminine a une
clientèle qui comporte 52 % de la population. Il m'apparaît
tout à fait inopportun, parce qu'on ne veut pas associer d'autres
personnes, de dire qu'il ne faudrait pas que la ministre
déléguée à la Condition féminine y soit
associée. (15 h 45)
M. Clair: M. le Président, je suis bien conscient des
avantages, mais aussi des inconvénients que peut comporter le fait
d'être invité au Conseil du trésor. Je rappelle simplement
à la députée que la portée de cet article 43 vise
simplement les ministres responsables des trois réseaux du gouvernement,
ce qui n'empêche absolument pas que, par ailleurs, le premier ministre
accorde toute l'importance qui doit être accordée à la
ministre déléguée à la Condition féminine.
C'est ce que je lui rappelle. Cette ministre était, jusqu'à ce
que Mme Lalonde démissionne, membre du comité des
priorités, membre du Conseil du trésor et membre du comité
ministériel de coordination des négociations. On ne peut pas dire
que le premier ministre n'a pas été sensible à cette
préoccupation de la députée des
Îles-de-la-Madeleine.
Mme Le Blanc-Bantey: Je m'amuserai juste à rappeler au
ministre que, pour le comité des priorités, cela a pris deux
batailles successives par deux ministres déléguées
à la Condition féminine.
M. Clair: Alors, vos voeux ont été
exaucés.
Une voix: Avec le résultat qu'on n'en a plus!
Le Président (M. Lachance): Alors, l'article 43 est
adopté?
M. Clair: C'est la faute encore à Bourassa! Si on n'a plus
de ministre déléguée à la Condition
féminine, ce n'est toujours bien pas notre faute, c'est la
vôtre!
Une voix: Elle est bonne celle-là!
M. Clair: Au moins, ne nous reprochez pas cela.
Le Président (M. Lachance): Alors, sur l'article 43, M. le
député de Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, une dernière
question. Le député d'Argenteuil, hier, a soulevé un
aspect, au sujet de l'article 42, du mémoire de la
Fédération des cégeps à la commission
parlementaire. Je voudrais simplement poser une question au ministre concernant
l'article 43. Dans le mémoire, la Fédération des
cégeps propose qu'à l'égard des comités patronaux
de négociation les rôles soient clarifiés comme suit: En ce
qui concerne le Conseil du trésor, il établit les
paramètres financiers de la négociation sectorielle et il
s'assure que ceux-ci sont respectés. En ce qui concerne les
ministères sectoriels, ceux-ci fixent les mandats de négociation
- ce qui est bien différent du projet de loi - pour les matières
qui concernent les prérogatives et les politiques ministérielles,
compte tenu des paramètres financiers arrêtés par le
Conseil du trésor. En ce qui concerne les représentants des
groupements d'employeurs, ceux-ci fixent les mandats de négociation pour
les matières qui concernent l'organisation du travail, les mouvements de
personnel et les rapports collectifs du travail, compte tenu des
paramètres financiers arrêtés par le Conseil du
trésor.
Je reconnais que le ministre a repoussé tous les amendements qui
nous rapprochaient de cela. Il reste quand même une question, et je
poursuis. Dans le mémoire, on nous dit: Si la proposition qui
précède est retenue, l'article 43 du projet de loi doit
être biffé et les articles qui concernent le Conseil du
trésor réaménagés, sinon l'article 43 devrait
être modifié ou remplacé. On est devant ce choix.
Cet article traite d'une question de régie gouvernementale. Il
est étrange qu'il apparaisse dans une loi. Ce qui doit être
prévu dans la loi, c'est la modification que nous recherchons. Le
Conseil du trésor invite des représentants des associations
patronales concernées à participer à ses
délibérations lorsqu'elles portent sur les matières
négociées à l'échelle nationale, puisqu'elles
représentent les véritables employeurs.
Sur le plan juridique, je pense qu'on ne peut pas en disconvenir; on ne
peut pas disconvenir non plus de la responsabilité
générale du gouvernement. Que pense le ministre de cette
proposition de la Fédération des cégeps et ne devrait-on
pas en tenir compte dans l'article 43?
M. Clair: Je pense qu'elle va exactement dans le sens de toute
l'argumentation de la Fédération des cégeps et d'autres
associations patronales et, encore là, je dirais de l'argumentation
première, parce qu'il y a toujours une argumentation seconde quand on se
rencontre pour parler des vraies choses, que les associations patronales
préféreraient ne pas être soumises à
l'autorité déléguée du ministre sectoriel et
traiter directement avec le Conseil du trésor, ce que tous les
gouvernements successifs se sont toujours refusés à accepter
parce que l'on pense que le ministre sectoriel, même si vous
considérez que son rôle n'est que symbolique, c'est lui qui doit,
en vertu des articles 36 et suivants, être le grand maître de la
négociation sectorielle.
Le Président (M. Lachance): L'article
43 est-il adopté?
Une voix: Non, M. le Président.
Le Président (M. Lachance): Ah! Eh bien, cela arrive!
M. Paquette: M. le Président, pendant que le
député de Deux-Montagnes se prépare, est-ce que je dois
considérer que nous avons un témoin à la barre en la
présence du député de Saint-Jean ou si sa position
signifie qu'il a préféré se placer entre deux tables?
Le Président (M. Lachance): Vous enfreignez le
règlement, M. le député de Rosemont.
M. Pagé: M. le Président, si le
député de Rosemont n'avait pas enfreint le règlement,
est-ce qu'il m'aurait été permis de demander au
député de Saint-Jean quel groupe il représente?
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Deux-Montagnes. M. le député de Deux-Montagnes, je voudrais vous
dire que nous en étions à l'article 43.
M. de Bellefeuille: Oui, j'avais déjà compris cela,
M. le Président. Au sujet de l'article 43, je ne vais pas
m'étendre sur l'aspect de la question que je vais soulever parce que je
crains que cela ne vous mette de mauvaise humeur, mais vous ne pouvez quand
même pas m'empêcher de signaler au ministre, et, par le biais du
ministre, au gouvernement, qu'il aurait été facile, dans le texte
de l'article 43, de dire que le Conseil du trésor invite le ou la
ministre de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la
Technologie, le ou la ministre de l'Éducation ou, suivant le cas, le ou
la ministre des Affaires sociales...
Mme Le Blanc-Bantey: Et la ministre déléguée
à la Condition féminine.
M. de Bellefeuille:... à participer à ses
délibérations lorsqu'elles portent sur les négociations
visées dans les articles 44 et 53.
Cela aurait été facile, cela aurait été de
bonne inspiration. J'ai déjà expliqué à plusieurs
reprises les raisons pour lesquelles il me semble que le ministre, en
particulier, parce qu'il est ministre responsable de l'Année
internationale de la jeunesse, aurait dû... N'est-ce pas, M. le ministre,
que je vous ai déjà expliqué cela à quelques
reprises?
M. Clair: Effectivement. Je voulais simplement vous signaler que
je vous comprenais tellement bien que je pourrais réciter presque par
coeur, mot à mot, ce que vous dites.
M. de Bellefeuille: M. le Président, j'ai une petite
nouvelle pour le ministre, c'est que j'ai un ajout.
Une voix: "Une" ajout.
M. de Bellefeuille: Mme la députée de Johnson propose que
je dise "une ajoute"?
Mme Juneau: Un ou une députée qui parle.
M. de Bellefeuille: Je ne suis pas contre. Mon ajout, c'est de
signaler qu'il y a une espèce de vide politique en ce qui concerne la
condition féminine au Québec. On n'a pas de ministre et ce
portefeuille se trouve temporairement entre les mains d'un homme qui a beaucoup
à faire, beaucoup de chats à fouetter.
Le Président (M. Lachance): Je vous signale que vous
enfreignez tout à fait le règlement.
M. de Bellefeuille: Ce n'est pas exact, M. le Président,
qu'on parle ici du ministre? C'est exact, on dit: "Le Conseil du trésor
invite le ministre... " et je suis en train de dire qu'on devrait dire le ou la
ministre, mais je n'en ferai pas un amendement, M. le Président.
Le Président (M. Lachance): Cette question de
féminisation des titres a déjà été
réglée.
M. de Bellefeuille: Elle a été réglée
en ce qui concerne les observateurs et les observatrices, en ce qui concerne
les présidents et les présidentes, les vice-présidents et
les vice-présidentes. Elle a été réglée en
ce qui concerne certains articles parce qu'elle n'a été
réglée que là où on a voté sur des articles
en particulier.
Le Président (M. Lachance): Et par extension pour tout ce
qui pourrait être féminisé.
M. de Bellefeuille: Ah oui? C'est très original comme
interprétation, M. le Président.
Le Président (M. Lachance): Écoutez, M. le
député, si vous voulez parler de l'article 43...
M. de Bellefeuille: C'est exactement ce que je fais, M. le
Président.
Le Président (M. Lachance): J'ai de la misère
à vous suivre.
M. de Bellefeuille: Faites un effort de plus! Je vais en rester
là, M. le Président, pour le moment. Je suis sûr que la
question que je soulève est d'une importance telle qu'elle
apparaîtra de nouveau dans nos délibérations. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 43 est
adopté?
Une voix: Adopté.
Mme Le Blanc-Bantey: Vote nominal, M. le Président.
Une voix: Sur division.
Une voix: Pas encore!
Mme Le Blanc-Bantey: Bien oui, parce que c'est le même
principe que l'article 42.
Le Président (M. Lachance): M. le secrétaire, si
vous voulez faire l'appel sur l'article 43.
Le Secrétaire: Mme Juneau (Johnson)?
Mme Juneau: Pour.
Le Secrétaire: M. Blais (Terrebonne)?
M. Blais: Pour.
Le Secrétaire: M. Gauthier (Roberval)?
M. Gauthier: Pour.
Le Secrétaire: M. Laplante (Bourassa)?
M. Laplante: Pour.
Le Secrétaire: M. Clair (Drummond)?
M. Clair: Pour.
Le Secrétaire: Mme Le Blanc-Bantey
(Îles-de-la-Madeleine)?
Mme Le Blanc-Bantey: Contre.
Le Secrétaire: M. Ryan (Argenteuil)?
M. Ryan: Pour.
Le Secrétaire: M. Pagé (Portneuf)?
M. Pagé: Pour.
Le Secrétaire: Pour: 7 Contre: 1
Le Président (M. Lachance): Alors, l'article 43 est
adopté.
Article 44. Nous entrons dans la section III, Le mode de
négociation, Les stipulations négociées et
agréées à l'échelle nationale.
Articles en suspens
M. Clair: Maintenant, M. le Président, avant d'aborder
cette nouvelle section, peut-être est-ce le moment de faire le point sur
un certain nombre d'articles que nous avions laissés en suspens.
Le Président (M. Lachance): Très bien, M. le
ministre. Lesquels?
M. Clair: Les articles qu'on avait laissés en suspens ou
sur lesquels j'avais accepté de réfléchir. Dites-moi si je
fais erreur. J'ai l'article 5, l'article 8, l'article 11, l'article 21,
l'article 30, l'article 31 et l'article 36.
Le Président (M. Lachance): C'est bien cela, M. le
ministre.
M. Clair: Donc, les articles 5, 8, 11, 21, 30, 31 et 36.
M. le Président, en ce qui concerne l'article 5, on se souviendra
que j'avais accepté de soumettre à la décision du Conseil
des ministres le deuxième alinéa qui prévoit que,
malgré la nomination par l'Assemblée nationale des trois
présidents et vice-présidents de l'Institut de recherche sur la
rémunération, c'est le gouvernement qui "détermine la
rémunération, les avantages sociaux et les autres conditions de
travail de ces membres". Comme j'en avais pris l'engagement, j'ai soumis cette
question au Conseil des ministres, il y a à peine quelques heures, et la
décision du Conseil des ministres a été de ne pas proposer
d'amendements à ce deuxième alinéa. Alors, je n'ai pas de
mandat pour proposer des amendements.
Le Président (M. Lachance): Alors, ce serait l'article 8
tel que libellé?
M. Clair: L'article 5, M. le Président.
Le Président (M. Lachance): Pardon. Ce serait l'article 5
tel que libellé?
M. Paquette: M. le Président, le débat n'a pas
été fait sur l'amendement.
M. Clair: L'article 5 a été longuement
débattu et cette question-là aussi. J'ai fait valoir au Conseil
des ministres les différents points de vue que j'avais notés et
le mandat que j'ai reçu est de ne pas modifier cet article.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre, cela a
été longuement débattu. Cependant, il y avait une motion
d'amendement présentée par la députée des
Îles-de-la-Madeleine qui se lisait comme suit: Remplacer le
deuxième alinéa par: "L'Assemblée nationale
détermine la rémunération, les avantages sociaux et les
autres conditions de travail de ces membres. "
M. Clair: Vous avez raison, et on avait suspendu nos travaux
à ce moment-là.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, que le ministre se rassure, nous
avons hâte de discuter des articles 44 et suivants qui concernent la
négociation à l'échelle locale, mais je dois cependant
dire que cela commence mal. Le ministre vient de nous dire
lui-même qu'il avait accepté de réfléchir sur
cinq ou six articles sur les 44 que nous avons étudiés
jusqu'à présent. Sur les articles les plus importants, sa
réflexion était toute faite. Son projet de loi est parfait. Sur
un article comme l'article 5, cela commence mal. Il commence par nous dire que
l'amendement n'est pas acceptable par le gouvernement. Je ne peux que...
M. Clair: Je tiens à préciser que j'aurai des
amendements à apporter sur d'autres articles.
M. Paquette Ah bon! Enfin, je l'espère. M. le
Président, je veux simplement exprimer mes regrets sur cette attitude un
peu cavalière face à l'Assemblée nationale. On fait nommer
par l'Assemblée nationale aux deux tiers un président et deux
vice-présidents dont nous n'avons aucunement besoin et qui
témoignent uniquement de la méfiance du gouvernement face aux
organisations syndicales. C'est une soupape au cas où l'une des parties
ne nommerait pas ses membres à l'Institut de recherche sur la
rémunération, auquel cas on a besoin de deux
vice-présidents additionnels, donc de trois personnes à temps
plein, de trois cadres de haut niveau qui vont apporter le statut moral de
l'Assemblée nationale et qui vont donner, espère le ministre, de
cette façon une crédibilité à l'institut. On
voudrait que ce soit le gouvernement seul qui fixe la
rémunération, les avantages sociaux et les autres conditions de
travail des membres. Comme on l'a indiqué, on n'a pas d'objection
à ce que le président exerce ses responsabilités à
temps plein, mais pour ce qui est des deux vice-présidents, il en va
tout autrement. Le ministre a refusé un amendement pour que ces
vice-présidents ne soient pas à temps plein. Il a refusé
un autre amendement visant à limiter les chances que ces personnes
deviennent à temps plein. Je vous rappelle qu'on est en présence
d'un institut qui aura probablement une vingtaine de personnes à son
service.
(16 heures)
Maintenant, on voudrait que le gouvernement détermine tout cela,
la rémunération, les avantages sociaux et les autres conditions
de travail de personnes nommées par l'Assemblée nationale. Je
vous signale, M. le Président, que c'est l'Assemblée nationale
qui fixe ces questions dans le cas des hauts fonctionnaires nommés par
l'Assemblée nationale. Le seul argument qu'on nous a amené est la
volonté du gouvernement d'éviter que les salaires de ces
personnes ne soient discutés par l'Assemblée nationale, privant
ainsi l'Assemblée nationale de décider elle-même de
l'étendue des fonctions et du niveau de rémunération des
fonctionnaires qu'elle nomme. C'est un abus de pouvoir de l'exécutif
face au législatif. C'est une question très grave. C'est une
tendance qui s'installe, qu'il faut dénoncer. Je pense que la population
est en droit de savoir que, quand l'Assemblée nationale nomme ses
fonctionnaires, elle en gère les conditions. L'argument selon lequel ces
discussions seraient publiques ne tient pas puisque c'est le cas,
déjà, de certains hauts fonctionnaires. C'est le cas des
députés et des ministres aussi. Je pense que les gens ont le
droit de savoir le salaire des personnes qu'ils élisent à
l'Assemblée nationale et, par conséquent, des personnes que
ceux-ci ou celles-ci nomment comme hauts fonctionnaires de l'Assemblée
nationale.
M. le Président, je pense qu'il faudra renverser cette tendance
un jour. Elle ne va pas dans le sens de la démocratie. Elleconstitue, encore une fois, un abus de pouvoir de l'exécutif par
rapport au législatif.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: M. le Président, on a déjà
eu l'occasion de débattre et de discuter de cette question. L'amendement
est sur la table. Le débat et la discussion autour de cet amendement
étaient suspendus. Essentiellement, je voudrais réitérer
ici notre position, à savoir que le président et les
vice-présidents étant nommés par les deux tiers de la
Chambre, ce mode de désignation vient consacrer le principe
témoignant de l'importance rattachée à cette fonction.
Toute personne qui est désignée ainsi l'est avec un mandat qui
lui est finalement conféré par la population, par la voie des
deux tiers des députés. Comme on le sait, la règle des
deux tiers prévoit généralement que les deux parties ou
l'ensemble des parlementaires doivent s'associer à cette
démarche. Je dis bien généralement, sauf exception,
lorsque le Parlement comprend certaines distorsions. D'ailleurs, la coutume a
toujours voulu que ces personnes soient désignées à
l'unanimité. Cependant, nous ne
comprenons pas que cela soit l'Assemblée nationale qui ait le
pouvoir de les nommer et que ce ne soit pas l'Assemblée nationale qui
ait le pouvoir d'établir leur rémunération et leurs
conditions de travail.
Le ministre a évoqué le fait que les personnes ainsi
nommées n'apprécieraient pas que leur rémunération
soit établie publiquement, au grand jour. Comme j'ai eu
déjà l'occasion de le soutenir, c'est le cas pour le
Vérificateur général, pour le Protecteur du citoyen, pour
le président ou la présidente de la Commission des droits
de la personne, c'est le cas des juges, c'est le cas des députés,
c'est le cas des ministres, c'est le cas des dirigeants d'organismes. Le
salaire du président d'Hydro-Québec est connu. Je ne vois pas en
quoi l'aspect confidentiel ou la non-divulgation des conditions de travail et
de la rémunération qui seront les leurs les empêcherait
d'être connues au même titre que pour les autres.
L'autre élément est: Dis-moi qui te nomme et je te dirai
qui établit tes conditions. Nous étions bien encouragés de
voir l'ouverture manifestée par le ministre dès le début
de nos travaux. J'aurais apprécié, cet après-midi, que le
ministre nous indique s'il a appuyé cette position au Conseil des
ministres. Je suis persuadé qu'il n'osera pas le faire. Je voudrais donc
vous exprimer ma déception sans reprendre, évidemment, tout le
débat qui a entouré cette question. Si ma mémoire est
fidèle, cela avait duré près d'une heure et demie.
M. Clair: M. le Président, je veux simplement rappeler que
ce n'est pas strictement pour des questions de publicité du salaire de
ces personnes puisque c'est bien évident que leur salaire ne pourra pas
être tenu confidentiel. C'est la procédure de la fixation du
salaire. Ce que le Conseil des ministres retient, c'est qu'il y a très
peu de personnes dont le salaire est fixé par une procédure de
ballottage à l'Assemblée nationale. C'est contre cette
procédure que le Conseil des ministres en a. L'orientation
générale du gouvernement, actuellement, est que ces personnes,
dorénavant, ne soient plus soumises à un tel processus de
nomination. Il n'y a pas de cachotterie. Il est bien évident que cela ne
peut être caché. Cela fait partie des renseignements que
l'individu serait amené à divulguer, ne serait-ce que dans la
commission parlementaire qui pourrait vouloir l'entendre. Mais c'est plus le
processus qui est un peu odieux. C'est ce que le Conseil des ministres a
considéré. Je me fais son porte-parole.
Alors, est-ce que l'article 5 est adopté, M. le
Président?
Le Président (M. Lachance): L'amendement d'abord.
M. Clair: L'amendement. Non, il n'y a pas d'amendement. Ah
oui!
Une voix: Ah oui!
M. Clair: Moi, je n'en ai pas, mais, vous, vous en avez un, c'est
vrai.
Le Président (M. Lachance): Oui, l'amendement de la
députée des Îles-de-la-Madeleine. Est-ce qu'on peut en
disposer? Est-ce que l'amendement est adopté?
Une voix: Adopté. M. Clair: Rejeté.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Deux-Montagnes, sur l'amendement.
M. de Bellefeuille: Oui, sur l'amendement, M. le
Président,
M. Pagé: L'amendement est adopté? M. Clair:
Rejeté.
Le Président (M. Lachance): Non, non, le
député de Deux-Montagnes m'a demandé la parole.
M. de Bellefeuille: Je crois que Mme la députée de
Jonhson veut intervenir, M. le Président.
Mme Juneau: Vous avez demandé la parole, c'est vous, mais
je ne sais pas si c'est vous au féminin ou vous au masculin.
M. de Bellefeuille: Mais vous la prenez sans l'avoir
demandée, madame.
Le Président (M. Lachance): Vous faites preuve de grande
courtoisie, M. le député, mais la parole vous appartient.
M. de Bellefeuille: Oui. M. le Président, le ministre
vient de nous parler sur un ton calme et réfléchi, qui est
louable dans les circonstances, de l'orientation générale du
gouvernement. Quelle est l'orientation générale du gouvernement?
En l'occurrence, il s'agit de ne pas étaler sur la place publique, pour
employer le vocabulaire, je suppose, qui est courant dans les officines
gouvernementales, ne pas étaler sur la place publique, étant
donné que l'Assemblée nationale est un lieu vulgaire, ne pas
étaler sur la place publique les salaires de hauts fonctionnaires ou de
personnalités occupant...
M. Clair: Question de règlement, M. le
Président.
M. de Bellefeuille:... des fonctions
élevées dans l'État.
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le ministre.
M. Clair: Question de règlement, M. le
Président.
M. de Bellefeuille: Quel article? Une voix: L'article 79.
M. Clair: Oui, l'article 79. C'est une bonne idée.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Paquette: Celui qui parle des questions de privilège en
commission, c'est cela?
Une voix: Non, non. L'article 79.
M. Clair: Question de règlement, M. le
Président.
Une voix: Le député est-il en train d'engendrer un
débat?
M. Clair: Je demande une directive, M. le Président. Le
député ne peut prêter d'intention à un membre de
cette commission autour de la table, même si j'ai eu la tentation
à plusieurs reprises de lui en prêter quant au "filibuster" qu'il
mène. Je ne l'ai pas fait et je ne vois pas pourquoi il me
prêterait des intentions ou en prêterait d'autres à mes
collègues dans les officines gouvernementales, entre guillemets.
M. Pagé: M. le Président, sur la question de
règlement, c'est vraiment l'article 79 qui s'applique. Le
député de Deux-Montagnes, par les propos qu'il tient, est
susceptible de susciter un débat. Il est le dernier intervenant sur
cette motion.
M. de Bellefeuille: Sur la question de règlement, M. le
Président, le ministre affirme que je mène un "filibuster". Je
mets le ministre au défi de démontrer, par la transcription de
nos débats, que les propos que j'ai tenus ne sont pas pertinents. Tous
les propos que j'ai tenus sont pertinents au texte qui est devant nous, qui est
proposé par le ministre et dont il porte l'entière
responsabilité. Je reconnais la responsabilité des propos que
j'ai tenus et je maintiens qu'ils ont tous été pertinents. Ils
n'ont peut-être pas été à la satisfaction du
ministre. Peut-être que je n'ai pas exprimé les mêmes avis
que le ministre, mais c'est son problème et non le mien. Cela ne veut
pas dire que, parce que ce que je dis ne fait pas l'affaire du ministre, je
mène un "filibuster". Cela fait huit ans et demi que je suis membre de
cette noble Assemblée et j'ai déjà assisté à
des "filibusters". Je me souviens d'avoir entendu des députés
discourir longuement sur les saints du jour et les saintes du jour.
Le Président (M. Lachance): J'aimerais bien que vous
reveniez à la pertinence du débat.
M. de Bellefeuille: Vous avez permis, M. le Président, au
ministre de poser sa question de règlement. J'ai parfaitement le droit
de la commenter. C'est lui qui a prétendu que je menais un "filibuster".
J'ai le droit de répondre à cela. Est-ce que vous allez me
bâillonner, M. le Président, m'empêcher d'expliquer au
ministre que ce n'est pas cela, un "filibuster"? Un "filibuster", c'est lorsque
des députés occupent du temps en disant des choses qui ne sont
pas pertinentes.
Le Président (M. Lachance): À l'ordre, M. le
député. À l'ordre!
Une voix: II n'a pas trop de respect pour le
président.
M. Clair: M. le Président, question de
règlement.
M. de Bellefeuille: Mais demandez la parole! M. le
député de Portneuf, M. le député de Roberval
veulent intervenir. Demandez la parole!
Le Président (M. Lachance): M. le ministre.
M. Clair: Oui, je voulais simplement demander au
député de Rosemont, qui est cité dans la Presse de ce
matin... Je cite M. Mario Roy, journaliste à Québec: Par exemple,
Gilbert Paquette ne rejette pas l'expression de "filibuster
modéré". Moi, j'ai parlé de "filibuster", je ne le
qualifie pas. Est-ce que le député de Deux-Montagnes est d'accord
avec l'opinion du député de Rosemont?
Le Président (M. Lachance): Écoutez, je pense qu'en
parlant de "filibuster" et de choses semblables, nous allons à
l'encontre du règlement. J'aimerais que nous revenions à
l'essentiel de l'article 5.
M. de Bellefeuille: M. le Président, apparemment, il y a
le ministre qui a le droit de parler de "filibuster" seulement?
Le Président (M. Lachance): Je viens de lui indiquer,
comme à tous les participants de chaque côté de la table,
que nous devrions revenir à la motion d'amendement.
M. de Bellefeuille: Je mets fin à mon
intervention sur cette fausse question de règlement, parce que ce
n'était pas vraiment une question de règlement, et j'en reviens
à l'article...
Le Président (M. Lachance): La motion sur l'article 5.
M. de Bellefeuille:... à la motion d'amendement sur
l'article 5. Contrairement à ce que prétend le ministre, je ne
faisais pas de procès d'intention. Ce n'est pas très original ce
que je dis quand je constate, comme beaucoup d'autres observateurs de la
scène politique au Québec, que la manie du secret s'étend
dans le gouvernement, cette manie de vouloir cacher des choses, en particulier
les salaires que touchent les fonctionnaires de l'État et du
gouvernement, ce qui, il me semble, est contraire à l'esprit dans lequel
nos institutions démocratiques doivent fonctionner. Elles doivent
fonctionner dans un esprit d'ouverture. Ce gouvernement se vantait de sa
transparence. Où est-elle sa transparence quand on nous dit que ces gens
ne peuvent pas, comme d'autres fonctionnaires analogues, toucher des
rémunérations, avantages sociaux et autres conditions de travail
établies par l'Assemblée nationale? Il faut que cela soit le
gouvernement qui les détermine dans le secret. Au nom de quoi, sinon au
nom de cette déplorable tendance qu'on observe dans le gouvernement
à étendre le secret sur un plus grand nombre de questions
continuellement?
Et cela fait partie d'un autre phénomène qu'on peut
observer, la main mise de l'exécutif sur le législatif. On est
très condescendant, le gouvernement est très condescendant. J'ai
félicité le ministre, d'ailleurs, d'avoir prévu que
l'Assemblée nationale joue un rôle, en l'occurrence, mais c'est un
geste manqué, c'est un geste incomplet puisque l'Assemblée
nationale aura à se prononcer sur des noms, mais n'aura pas à
déterminer les conditions de travail, la rémunération et
les avantages sociaux de ces trois personnes. C'est un geste incomplet, le
ministre n'est pas allé au bout de sa logique. Il nous dit que le
gouvernement, en Conseil des ministres, aujourd'hui, a décidé de
ne pas accepter la suggestion faite par notre collègue des
Îles-de-la-Madeleine, mais il ne nous a pas vraiment expliqué
pourquoi. C'est-à-dire qu'il a parlé d'une orientation
générale du gouvernement. On la connaît cette orientation
générale du gouvernement: c'est l'obscurité, c'est
l'opacité. Ce gouvernement n'a plus le droit de parler de transparence,
parce que c'est l'opacité qui s'étend sur les affaires de
l'État.
J'aurais souhaité que le ministre se rallie à cet
amendement d'excellente inspiration, très cohérent, très
logique. Je constate avec regret que tel n'est pas le cas. Je ne peux que
répéter au président et au ministre, qui, j'espère,
m'écoute encore, que c'est dommage que ce geste d'impliquer
l'Assemblée nationale dans le processus soit, dans le texte de l'article
5, un geste incomplet, un geste avorté. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Lachance): Alors, est-ce que la motion
d'amendement de la députée des Îles-de-la-Madeleine est
adoptée?
Une voix: Un vote.
Le Président (M. Lachance): Un vote?
M. de Bellefeuille: Adopté, M. le Président.
M. Clair: Rejeté.
M. Ryan: Je voudrais seulement signaler, à la suite des
remarques du député des Deux-Montagnes, qu'il ne fait pas de
"filibuster" mais qu'il a le cheminement mental plus lent que d'habitude. (16 h
15)
M. Paquette: M. le Président, j'espère que la
remarque du député d'Argenteuil n'a pas pour but de signifier
à cette commission que, même si le Parti libéral a
l'intention de voter contre ce projet de loi, il a bien hâte qu'il soit
adopté et qu'il préfère étudier les articles
rapidement et à la vapeur.
Le Président (M. Lachance): M. le député, ce
n'est pas très pertinent.
M. Ryan: M. le Président, nous autres, il y a
peut-être une légère différence, c'est que je crois
que nous avons fait la preuve à maintes reprises, depuis le début
du travail, que nous avons fait notre travail d'étude et de
préparation avant de venir ici et non pas en arrivant autour de la
table, et nous essayons, quand il y en a un qui a occupé la place
pendant un certain temps, de ne pas reprendre le processus à zéro
quand il y en a un autre qui arrive. À part cela, on s'entend
très bien.
Le Président (M. Lachance): Alors, l'amendement est
adopté?
M. Clair: Rejeté.
Le Président (M. Lachance): L'amendement
présenté par la députée des
Îles-de-la-Madeleine est rejeté. Nous revenons à l'article
5. Est-ce que l'article 5 est adopté?
M. Clair: Adopté.
M. Paquette: Sur division.
Le Président (M. Lachance): L'article 5 est adopté
sur division. J'appelle maintenant l'article 8.
M. Clair: Oui, j'aurais une proposition d'amendement qui,
malheureusement, est encore à la...
Une voix: L'article 7 ou 8?
M. Clair: L'article 8.
Le Président (M. Lachance): L'article 8.
M. Clair: Est-ce que vous l'avez? On se souviendra qu'à
l'article 7 noua avons accepté la proposition d'amendement du
député de Rosemont, si ma mémoire est fidèle,
à savoir que la durée du mandat des membres de l'institut soit de
trois ans et qu'il fallait faire de la concordance à l'article 8. Je
propose donc que l'article 8 soit modifié par le remplacement des mots
"en suivant le mode de nomination prescrit pour la nomination du membre
à remplacer" par les mots "pour la durée non
écoulée du mandat du membre à remplacer en suivant le mode
de nomination de ce dernier".
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement du
ministre est adopté?
M. Clair: Est-ce que j'ai lu assez lentement?
Une voix: Oui.
Le Président (M. Lachance): C'est adopté?
M. Paquette: M. le Président, je pense qu'effectivement
c'est un amendement qui est tout à fait conforme à l'esprit de
nos discussions. J'espère que l'ouverture d'esprit du ministre va se
poursuivre.
Le Président (M. Lachance): Très bien. Alors,
l'amendement est adopté. Est-ce que l'article 8, tel qu'amendé,
est adopté?
M. Clair: Adopté.
Le Président (M. Lachance): Adopté.
M. Clair: Ensuite, M. le Président, il y avait l'article
11 que nous avions laissé en suspens.
Le Président (M. Lachance): C'est bien cela.
M. Clair: À la réflexion, M. le Président,
constatant le problème posé par l'éventualité que
les deux vice-présidents forment le quorum, forment la majorité
des membres et déterminent eux-mêmes leurs fonctions, je n'ai pas
d'amendement à proposer, de sorte que l'article 11 se lirait toujours
ainsi: "Les vice-présidents exercent les fonctions que détermine
le président dans le cadre des règlements de l'institut. "
Le Président (M. Lachance): Alors, je comprends bien
que...
M. Clair: Je pense que le député de Rosemont, dans
son cheminement intellectuel, la dernière fois, était rendu
très près d'être d'accord avec moi. On avait quand
même accepté de part et d'autre d'y réfléchir, on
avait débattu de cela et...
Le Président (M. Lachance): Si je comprends bien, M. le
ministre, vous retirez votre motion d'amendement.
M. Clair: Oui, je retire... Le Président (M. Lachance):
Très bien. M. Clair:... ma motion d'amendement.
M. Paquette: M. le Président...
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette:... sur l'article, le ministre a raison de souligner
que dans nos cheminements mentaux nous étions effectivement en
résonance, mais pas nécessairement d'accord, en ce sens que
j'avais souligné au ministre qu'effectivement si, à l'un ou
l'autre des articles, on pouvait trouver le moyen de s'assurer qu'on limiterait
cette propension naturelle des organismes à grossir leur personnel cadre
et à trouver des fonctions pour justifier des salaires d'une autre
façon, il m'apparaîtrait acceptable de laisser l'article 11 tel
quel, mais tel n'est pas le cas, M. le Président. À l'article 9,
le ministre a refusé un amendement que j'ai présenté et
qui visait à faire en sorte que les membres de l'institut, à
l'exception du président, ne soient pas rémunérés,
ce qui incluait les vice-présidents et ce qui nous aurait assurés
que ces vice-présidents se contenteraient d'allocations de
présence et du remboursement de frais raisonnables.
Tout à l'heure, le ministre nous a mentionné que le
gouvernement seul déterminera la rémunération, les
avantages sociaux et les autres conditions. À l'article 11, tel qu'il
est là, les vice-présidents exerceront les fonctions que
déterminera le président dans le cadre des règlements de
l'institut, lesquels - si on comprend l'article 18 - seront soumis à
l'approbation du gouvernement. Donc, en définitive, rien n'empêche
le gouvernement de faire de ces deux postes des postes superflus, inutiles,
qui, encore une fois, témoignent de la méfiance du
gouvernement face aux mécanismes qu'il propose et à la
participation des organisations syndicales. Donc, le gouvernement pourra faire
de ces postes des postes à temps plein et pourra déterminer la
rémunération en conséquence. M. le Président, je
pense que ce n'est pas dans l'intérêt de la bonne gestion des
fonds publics. Je vais terminer mes remarques là, M. le
Président. Encore une fois, on ne peut que regretter cet
entêtement du gouvernement à se donner la possibilité de
faire de ces deux postes de vice-présidents des postes à temps
plein.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 11 est
adopté?
M. Clair: Adopté.
M. Paquette: Sur division.
Le Président (M. Lachance): Adopté sur division.
J'appelle l'article 21.
M. Clair: À l'article 21, on se souviendra, M. le
Président, que nous avions gardé cet article en suspens pour
vérifier quelles étaient les autorisations requises pour
contracter un emprunt, qui appartenaient à un certain nombre d'autres
organismes. Cette question avait été soulevée par le
député d'Argenteuil.
Je puis indiquer au député d'Argenteuil que dans quelques
cas, notamment dans la Loi constituant l'Institut québécois de
recherche sur la culture, on lit: L'institut ne peut, sans l'autorisation du
gouvernement, prendre un engagement financier pour une somme excédant le
montant déterminé par le gouvernement. Donc, l'expression "pour
un montant déterminé par le gouvernement" revient dans quelques
cas.
Au sujet de l'Institut national de productivité, on lit:
L'institut ne peut, sans l'autorisation du gouvernement, contracter un emprunt
qui porte à plus de 1 000 000 $ le total des sommes empruntées
par lui et non encore remboursées. Donc, c'est un montant de 1 000 000
$. En ce qui concerne l'IRSST, le fonctionnement est très
différent. En fait, selon le rapport annuel de 1983 de la CSST, au cours
de cet exercice l'institut, qui est un organisme sans but lucratif, en grande
partie subventionné par la commission, avait reçu de cette
dernière une contribution de 7 900 000 $, dont 944 000 $ provenaient du
gouvernement.
Je pense que j'avais raison quand je disais l'autre jour que, de
mémoire, 1 000 000 $ est la somme minimale utilisée, ou encore un
montant qu'autorise le gouvernement. Quant à moi, il m'apparaît
préférable que ce soit un montant déterminé dans la
loi.
M. Ryan: Dans ce cas-ci?
M. Clair: Pardon?
M. Ryan: Dans ce cas-ci en particulier?
M. Clair: Oui, dans ce cas-ci en particulier.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 21 est
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Lachance): J'appelle maintenant l'article
30.
M. Clair: À l'article 30, c'était la question des
commissions scolaires confessionnelles. J'ai un libellé à
proposer. Le député d'Argenteuil, qui est un expert de ces
questions, voudra sûrement le lire deux fois plutôt qu'une. Je
propose que l'article 30 soit modifié, premièrement, par
l'addition, au premier paragraphe, après le mot "catholiques", des mots
"les commissions scolaires confessionnelles catholiques et les corporations de
syndics d'écoles pour catholiques".
Deuxièmement, par l'addition, au deuxième paragraphe,
après le mot "protestants", des mots "les commissions scolaires
confessionnelles protestantes et les corporations de syndics d'écoles
pour protestants". Il y aura de la concordance aux articles suivants.
On m'a indiqué que c'était le plus loin qu'on pouvait
aller pour éviter la création de nouveaux comités
patronaux et être sûr qu'ils sont couverts par les comités
patronaux existants.
M. Ryan: L'amendement répond à l'inquiétude
qui avait été exprimée. C'est une réponse
satisfaisante qui tient compte de la réalité.
M. Clair: Les corporations de syndics d'écoles pour
catholiques couvrent, j'imagine, ce que le député d'Argenteuil
appelait les dissidents?
M. Ryan: C'est cela.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement est
adopté?
M. Clair: Adopté.
Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que
l'article 30, tel qu'amendé, est adopté?
M. Paquette: Non, M. le Président. J'avais soulevé
une autre question qui n'est pas couverte par l'amendement du ministre.
J'ai travaillé assez longuement sur cette question de
restructuration scolaire qui a mené à la loi 3 et à la loi
29, M. le Président, et l'économie générale de la
loi, c'est de faire en sorte que nous nous orientions vers une transformation
assez substantielle, adoptée par l'Assemblée, des structures
scolaires aux niveaux élémentaire et secondaire.
Nous allons nous retrouver bientôt avec des commissions scolaires
qui seront généralement linguistiques. Il y aura des commissions
scolaires françaises et des commissions scolaires anglaises, et,
à cause de la Constitution canadienne, il est prévu que certaines
commissions scolaires confessionnelles puissent subsister. L'étendue du
territoire et le nombre de ces commissions scolaires restent à
déterminer. Il y a des causes pendantes devant les tribunaux, mais,
éventuellement, nous allons nous retrouver dans un régime qui
normalement sera linguistique avec des exceptions confessionnelles.
Le ministre nous a indiqué qu'il voulait tenir compte dans son
projet de loi de la tradition qui fait en sorte que, depuis qu'il y a des
négociations centralisées, depuis les années soixante, les
conventions collectives avaient pu évoluer différemment du
côté catholique que du côté protestant et que cela
justifiait la création de deux comités différents, un pour
les protestants et un pour les catholiques. Son amendement vient clarifier
quels sont les organismes patronaux qui pourront s'insérer dans les
comités patronaux, mais il maintient quand même deux
comités.
Je soutiens, M. le Président, que, de toute façon et
à brève échéance, il faudra en arriver sauf pour
les questions de négociations locales - on va discuter de cela
tantôt - à une seule convention collective. Il me semble que la
souplesse nécessaire à cette période de transition que va
subir notre système scolaire serait beaucoup mieux servie si on
regroupait en un seul comité patronal tous les secteurs,
élémentaire et secondaire. Je pense que c'est au sein de ce
comité patronal unique que nous pourrions tenir compte de
l'évolution du système scolaire et du poids respectif des divers
organismes impliqués. Je pense également que cette approche est
dans l'esprit de la réforme scolaire que le gouvernement a fait adopter
par la loi 3. Je pense également qu'une telle proposition va dans le
sens de réduire la complexité ou, je dirais encore mieux,
d'adapter le mode de fonctionnement des négociations à la
réalité, parce que nous ne nous sommes pas opposés
à ce qu'il y ait des comités par réseau dans le domaine
des affaires sociales, mais, ici, il n'y a pas de justification du même
ordre. Qu'il y ait un comité patronal de négociation pour les
collèges, certainement. Qu'il y ait deux comités pour les
commissions scolaires, cela m'apparaît tout à fait inutile, un
manque de flexibilité, une augmentation de la complexité, une
mauvaise adaptation à la réalité. Je ne sais pas si le
ministre a réfléchi à cet aspect de la question.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre.
M. Clair: Oui, très brièvement, M. le
Président. D'abord, les lois 3 et 29, comme je l'ai indiqué,
créeront un nouveau contexte, éventuellement, mais,
jusqu'à preuve du contraire, je ne retiens aucunement l'argumentation du
député de Rosemont. Il me semble qu'elle est contradictoire.
Uniformisons, standardisons, cela nous donnera plus de flexibilité. Je
ne suis pas d'accord avec cela. Je pense, M. le Président, que, si on
veut de la souplesse, de la flexibilité, ce n'est pas en imposant de
force un comité patronal unique dans ce secteur, non plus que du
côté syndical, que les choses iront mieux. Je ne dis pas que, dans
un nouveau contexte, dans un contexte différent qui est très
évolutif dans le domaine de l'enseignement primaire et secondaire et des
commissions scolaires, avec les lois 3 et 29, éventuellement on ne
pourra pas en venir là. Mais je pense qu'à très court
terme on atteindrait un objectif contraire à celui qu'on dit
poursuivre.
Le Président (M. Lachance): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: Je crois qu'on légifère en fonction de la
ronde de négociations qui s'en vient immédiatement à
l'automne. Le ministre nous a prévenus hier qu'il faudrait apporter des
amendements à cet article de la loi lorsque la loi 3 entrera pleinement
en vigueur, à compter de juillet 1986. Il faudra réviser la loi
à ce moment-là. Mais, même au moment où la loi 3
entrera pleinement en vigueur, je ne pense pas qu'on doive s'orienter vers la
formation d'un comité patronal unique pour les commissions scolaires qui
existeront à l'époque. Nous aurons deux réseaux de
commissions scolaires, un réseau de commissions scolaires francophones,
un réseau de commissions scolaires anglophones, auxquels viendront se
greffer un nombre indéterminé pour l'instant de commissions
scolaires confessionnelles, catholiques ou protestantes. (16 h 30)
Parions seulement des commissions scolaires linguistiques. Je crois que
les différences entre les deux réseaux demeureront suffisantes
pour justifier le maintien de deux comités patronaux de
négociation. Si la volonté était émise par les
organismes concernés de former seulement une table patronale de
négociation, ce serait
une chose qu'il faudrait accueillir d'une manière
éminemment positive. Mais c'est tellement improbable que cela soit
exprimé par eux à l'état de volonté, que cela
devient assez chimérique de penser que cela sera possible. Je ne pense
pas qu'il incombe au législateur de leur dire: Vous allez, de force,
entrer dans une seule table patronale. S'il y a des facteurs qui justifient
l'existence de deux comités patronaux, je ne pense pas que cela soit la
fin du monde. Dans la perspective de décentralisation, de
responsabilisation des parties dont nous parlons depuis le début du
débat sur le projet de loi, c'est plutôt un geste qui doit
être accueilli favorablement. Je me souviens - je ne sais pas si vous
vous souvenez de cela, M. le député de Rosemont - qu'il y a
plusieurs années, à la Commission des écoles catholiques
de Montréal, on a voulu regrouper tous les enseignants dans une seule
unité de négociation. C'étaient les enseignants des
écoles catholiques, de la Commission des écoles catholiques de
Montréal. Cette approche a été contestée devant le
Tribunal du travail. Je ne me rappelle pas comment il s'appelait à
l'époque. Je ne crois pas que c'était le tribunal que nous avons
actuellement. Elle a été contestée et le tribunal a conclu
qu'il devait y avoir deux unités d'accréditation, étant
donné des différences très importantes de
mentalité, de contexte, de caractéristiques culturelles qui
avaient été observées d'un secteur à l'autre. Il
avait conclu qu'à l'intérieur même de cet univers qui
s'appelait la Commission des écoles catholiques de Montréal il
devait y avoir deux unités de négociation pour les enseignants,
et c'est le régime que nous avons encore aujourd'hui. On vit encore sous
l'empire de cette décision.
En plus, il y a un autre facteur qui va probablement jouer. On aura
à peu près dix commissions scolaires de langue anglaise pour tout
le Québec. Cela vient justement d'être annoncé ces jours
derniers par le ministre de l'Éducation. Le territoire de ces
commissions scolaires sera beaucoup plus étendu. Il n'y aura pas le
même genre de problèmes qui se posent dans les autres. D'avoir la
possibilité de former leur propre comité patronal de
négociation, je pense qu'elles vont l'apprécier. De toute
manière, nous discutons par anticipation. Ce n'est peut-être pas
mauvais qu'on puisse le faire pour une fois. D'habitude, on est toujours
à la remorque des événements ou des
échéances très immédiates qui nous pèsent au
bout du nez. Je crois que, dans ce cas-ci, les facteurs que nous connaissons
indiquent qu'il y aura probablement de très bonnes raisons de maintenir
un comité patronal national pour la partie francophone et un
comité national patronal pour la partie anglophone, jusqu'à
nouvel ordre. C'est une question sur laquelle je n'ai pas d'opinion doctrinale,
mais je fais seulement de la conjecture la plus raisonnable et la plus
responsable possible.
M. Paquette: M. le Président, je voudrais simplement dire
que les arguments du député d'Argenteuil sont assez convaincants
sauf sur un point, évidemment: on a un seul comité pour les
commissions scolaires catholiques, même si, du côté
syndical, il y a plusieurs parties, il y a l'association des professeurs
catholiques, la PACT, et les enseignants francophones sont regroupés
dans la CEQ. Mais, effectivement, puisque le ministre nous dit qu'il pourra
revenir et qu'il reviendra très sûrement avec des amendements
à la loi pour tenir compte de la nouvelle situation créée
dans les commissions scolaires, je pense qu'on pourrait accepter qu'il y ait
deux comités dans cet article.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 30 tel
qu'amendé est adopté? C'est adopté?
M. Clair: Adopté. L'amendement d'abord...
Le Président (M. Lachance): L'amendement avait
déjà été adopté.
M. Clair: II a déjà été
adopté. D'accord.
Le Président (M. Lachance): L'article 30, tel
qu'amendé, est adopté. J'appelle maintenant l'article 31.
M. Clair: Je fais motion pour que l'article 31 du projet de loi
soit modifié, premièrement, par le remplacement, dans la
quatrième ligne du premier alinéa, des mots "pour catholiques"
par les mots "visées au premier paragraphe de l'article 30".
Deuxièmement, par le remplacement, dans la quatrième ligne
du premier alinéa, des mots "pour protestants" par les mots
"visées au deuxième paragraphe de cet article".
Troisièmement, par le remplacement, dans la troisième
ligne du deuxième alinéa, des mots "pour catholiques" par les
mots "visées au premier paragraphe de l'article 30".
Quatrièmement, par le remplacement, dans la quatrième
ligne du deuxième alinéa, des mots "pour protestants" par les
mots "visées au deuxième paragraphe de cet article". C'est de
concordance.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que c'est
adopté? M. le député de Bourassa.
M. Laplante: Je voudrais souligner quelque chose à celui
qui a préparé cet amende-
ment, et vous me corrigerez si je fais erreur, puisque c'est au Journal
des débats: L'article 31 du projet est modifié
premièrement, par le remplacement, à la quatrième ligne du
premier alinéa... Un, deux, trois, quatre: c'est à la
cinquième ligne, je crois.
Une voix: Quatrième et cinquième.
Le Président (M. Lachance): Quatrième et
cinquième, oui.
M. Ryan: Cela commence à la quatrième ligne.
Le Président (M. Lachance): II n'y a pas de
problème, M. le député de Bourassa. Je pense que, tel que
formulé, c'est facilement compréhensible. "Pour" commence
à la quatrième ligne. Est-ce que l'amendement...
M. de Bellefeuille: M. le Président, le
député de Bourassa a eu raison de vérifier ces petits
calculs, parce que les mots "pour protestants" n'apparaissent pas à la
quatrième ligne. Ils apparaissent à la...
M. Laplante: Quatrième et cinquième lignes.
Le Président (M. Lachance):... précision.
M. de Bellefeuille:... une, deux, trois, quatre, cinquième
ligne. Dans le cas des mots "pour protestants", c'est à la
cinquième ligne.
M. Laplante: Non, mais c'est, pour le Journal des débats,
quand on fait la transcription pour amender la loi, lorsqu'on s'y
réfère. C'est pour éviter ces erreurs.
Le Président (M. Lachance): Très bien, c'est
noté. Est-ce que l'amendement est adopté?
M. Laplante: Adopté. M. Clair: Adopté.
Le Président (M. Lachance): C'est adopté.
L'amendement est adopté. Est-ce que l'article 31 tel qu'amendé
est adopté?
M. Laplante: Adopté.
Le Président (M. Lachance): L'article 31 tel
qu'amendé est adopté. Nous allons maintenant passer à
l'article...
Une voix: 34.
Le Président (M. Lachance): Ho! L'article 34 avait
déjà été adopté au cours...
Une voix: Mais on va le rouvrir.
Le Président (M. Lachance): On va le rouvrir?
M. Clair: Oui.
Le Président (M. Lachance): D'accord.
M. Clair: II avait été question de le suspendre ou
de le modifier après.
M. Paquette: C'est un amendement de concordance, probablement,
que le ministre devrait apporter à l'article 34.
M. Clair: Oui.
Le Président (M. Lachance): Alors, nous allons le
rouvrir.
M. Paquette: C'est cela.
M. Clair: Je voudrais proposer, une fois acceptée la
réouverture de l'article 34, que celui-ci soit modifié par le
remplacement, à la deuxième ligne du deuxième
alinéa, des mots "pour catholiques" par les mots "visées au
premier paragraphe de l'article 30", et, deuxièmement, par le
remplacement, à la deuxième ligne du deuxième
aiinéa, des mots "pour protestants" par les mots "visées au
deuxième paragraphe de l'article 30".
Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est
adopté?
Une voix: Oui.
Le Président (M. Lachance): L'amendement est
adopté. Est-ce que l'article 34 tel qu'amendé est
adopté?
M. Clair: Adopté.
Le Président (M. Lachance): J'appelle l'article 36.
M. Clair: Nous avions également suspendu l'étude de
cet article. Je propose que le deuxième alinéa de l'article 36
soit remplacé par le suivant: "Le comité patronal de
négociation pour le secteur des affaires sociales est composé des
présidents et vice-présidents des sous-comités patronaux,
des autres membres désignés suivant des modalités
agréées par ces derniers ainsi que d'un président. "
On se souviendra que j'avais proposé que l'amendement se lise
"entre autres membres", ce qui était très imprécis et trop
vague. Alors, on a reformulé l'amendement pour dire que ce seraient les
membres désignés suivant des modalités
agréées par ces derniers ainsi qu'un président, ces
derniers étant les vice-présidents et
présidents des sous-comités.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement est
adopté?
M. Paquette: M. le Président, cela m'apparaît
satisfaisant. Cela veut dire que le gouvernement et les réseaux devront
être d'accord pour ajouter ou inviter d'autres membres.
M. Clair: On les invitera... La formulation qui avait
été avancée était "sur accord du ministre et des
associations patronales", ce qui était là une formulation
beaucoup trop lourde, alors que, dès le départ, des
modalités pourront être agréées entre les parties
pour déterminer qui peut venir et quand.
Le Président (M. Lachance): L'amendement est-il
adopté? Est-ce que l'article 36 tel qu'amendé est
adopté?
Une voix: Adopté.
Le mode de négociation
Le Président (M. Lachance): C'est adopté. Nous
revenons où nous en étions, c'est-à-dire à
l'article 44. À ce stade-ci, je voudrais indiquer aux parlementaires que
nous avons effectivement 43 articles d'adoptés sur un total de 93. Sur
l'article 44, M. le ministre, y a-t-il des commentaires?
M. Clair: Non, M. le Président, je n'ai pas d'amendement
à proposer. Cet article définit simplement le champ d'application
de la négociation nationale. Sont donc exclues les matières
locales ou régionales, et le deuxième alinéa
prévoit la possibilité pour les parties de prévoir des
modalités de discussion en cours de convention collective.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Rosemont?
M. Paquette: Oui, M. le Président, je pense que cet
article mérite discussion. On aborde une nouvelle section du projet de
loi et il s'agit de déterminer - je pense que c'est l'un des effets de
cet article - quelles sont les matières qui seront discutées
à l'échelle nationale et celles qui le seront à
l'échelle locale ou régionale, celles-ci étant
stipulées dans les articles 57 et 58.
J'ai un certain nombre de questions a poser au ministre à cet
effet. La première, c'est qu'on traite, bien sûr,
différemment le secteur des affaires sociales et celui de
l'éducation. Pour celui des affaires sociales, on dit à l'article
57 que les stipulations négociées à l'échelle
locale ou régionale sont celles que définissent les parties,
alors que, dans le secteur de l'éducation, on établit par la loi
une liste de questions négociées et agréées
à l'échelle locale ou régionale qui figure à
l'annexe A.
Première question: Qu'est-ce qui a amené le ministre
à adopter un comportement différent, dans le réseau des
affaires sociales de celui qu'il adopte dans les réseaux de
l'éducation?
M. Clair: Alors, M. le Président, j'ai beaucoup
consulté et écouté, tant les gens du réseau des
affaires sociales que ceux des deux réseaux de l'éducation. Au
niveau des affaires sociales, on m'a fait valoir que la tradition de
négociations locales était beaucoup plus pauvre, beaucoup plus
limitée que celle du secteur de l'éducation, qu'un bon nombre
d'institutions ou d'établissements, devrais-je dire, du réseau
des affaires sociales sont nés après le phénomène
de centralisation, de sorte qu'il n'y a à peu près jamais eu de
négociations au niveau local et qu'il était
préférable, dans un premier temps, de se contenter de permettre
des arrangements locaux pour répondre aux besoins des parties, puisqu'on
sait qu'un très grand nombre d'ententes "illégales" - entre
guillemets - surviennent au niveau local. De tels arrangements existent
déjà dans les faits et, d'autre part, nous avons, comme nous
l'avons vu précédemment, pris l'orientation de reconnaître
comme palier formel de négociation le sous-sectoriel et non plus le
sectoriel. Ce sont les deux premiers pas qui sont franchis.
En ce qui concerne le réseau de l'éducation, j'ai
également tenu compte des représentations qui m'ont
été faites, tant par la fédération des commissions
scolaires, les cégeps, les enseignants du primaire et du secondaire
représentés par la CEQ et, également, les syndicats de
niveau collégial. Les positions étaient très difficiles
à concilier dans ce domaine puisque, du côté de la
Fédération des cégeps, on aurait voulu une
décentralisation très poussée et, du côté
syndical, la volonté de décentraliser était beaucoup plus
limitée; du côté des enseignants du primaire et du
secondaire, il y avait une volonté de décentraliser assez loin,
je dois dire, tant du côté des porte-parole de la CEQ que du
côté de la fédération des commissions scolaires. Les
parties n'étaient pas loin d'être d'accord même pour
convenir que cette négociation au niveau local puisse comporter, dans
des circonstances qui ont évolué, un droit de grève au
niveau local. Le gouvernement a décidé de ne pas octroyer un tel
droit de grève au niveau local, mais de retenir, cependant, la
décentralisation d'une liste de matières fixées par
l'effet de la loi qui apparaissent en annexe afin de tenir compte d'une plus
grande expérience de négociation au niveau de l'enseignement
primaire et secondaire. Et, comme le gouvernement ne
veut pas écarter la possibilité qu'éventuellement,
dans une, deux ou trois négociations au niveau des cégeps, on en
vienne à une décentralisation des négociations beaucoup
plus poussée, je dirais, pour employer une comparaison qui est toujours
boiteuse du style université, afin de conserver ouverte cette
possibilité de ne pas y aller dès maintenant, mais de commencer
à franchir des pas qui pourraient permettre d'aller dans cette
direction, d'aller vers une décentralisation un peu plus poussée
des négociations au niveau des cégeps, même si, encore
là, certains d'entre eux... Je prends l'exemple du cégep de
Drummondville, celui de ma région, qui n'a été
constitué qu'en 1980. C'est sûr que l'expérience de la
négociation locale est assez limitée. Il existait auparavant un
cégep régional, mais il y a quand même eu constitution
d'une nouvelle équipe depuis 1980. On a voulu franchir des pas dans
cette direction. (16 h 45)
Le Président (M. Lachance): M. le député
d'Argenteuil.
M. Clair: C'est la présentation générale que
je peux faire.
M. Ryan: Si je comprends bien, pour qu'on s'entende clairement au
départ, c'est bien difficile de discuter de l'article 44 sans se
référer aux articles 57 et suivants, parce que c'est comme les
deux volets, c'est un même diptyque. Par conséquent, je pense
qu'avant de commencer l'étude détaillée de l'article 44 il
serait bon qu'on s'entende clairement sur ce que cela signifie. Dans votre
projet, M. le ministre, je crois comprendre que, dans le secteur des affaires
sociales, la possibilité d'arrangements locaux est prévue, mais
pas de stipulations négociées au sens fort du terme.
M. Clair: Oui, cela serait possible si les parties en
convenaient. Il faut bien comprendre..
M. Ryan: Très bien, c'est cela que je veux dire. Il n'y a
pas de liste obligatoire. La seule liste obligatoire porte sur des arrangements
et non sur des stipulations négociées.
M. Clair: Les arrangements locaux ne sont pas obligatoires, mais
ils sont permis sur des matières déterminées et
légales par l'effet de la loi, selon une liste
déterminée.
M. Ryan: Très bien. Cela ne demande pas l'accord des
comités nationaux pour qu'on en discute au plan local.
M. Clair: Non.
M. Ryan: C'est cela que je veux dire.
M. Clair: Les parties, localement, sont, par le fait de la loi,
habilitées à convenir d'arrangements locaux sur ces
matières.
M. Ryan: Vous avez la même chose pour le personnel de
soutien des commissions scolaires et des collèges.
M. Clair: Oui, les collèges peuvent en avoir.
M. Ryan: Oui, les collèges, et la même chose pour le
personnel de soutien et le personnel professionnel non enseignant des
commissions scolaires.
M. Clair: C'est exact.
M. Ryan: Pour le personnel enseignant, vous avez
négociation de certaines matières au plan national et un certain
nombre de matières contenues dans l'annexe A-I pour les collèges
et A-II pour les commissions scolaires. Cela peut faire l'objet de stipulations
négociées à l'échelle locale.
M. Clair: C'est exact.
M. Ryan: Et sans droit de grève.
M. Clair: Exactement.
M. Ryan: Là-dessus, nous trouvons que ces dispositions
témoignent de l'incertitude dans laquelle a baigné la politique
du gouvernement relative à ces choses jusqu'à un passé
très très récent. L'exemple le plus éloquent que
l'on puisse invoquer, c'est évidemment l'énergie qui a
été dépensée par le ministre de l'Éducation
et ses collaborateurs pour mettre au point une hypothèse de
règlement autour du chapitre 8 de la convention collective des
enseignants qui est peut-être et sûrement un des chapitres les plus
importants de toute cette convention collective qui est présentement un
décret plutôt qu'une convention. On avait élaboré
une hypothèse de règlement à laquelle le ministre de
l'Éducation, dont, entre parenthèses, je regrette l'absence
à cette table... Cela fait deux ou trois fois que je remarque, dans
l'étude de projets de loi qui affectent directement le ministre de
l'Éducation, son absence à la table des
délibérations de la commission parlementaire chargée
d'étudier le projet de loi. Je le déplore vivement. Je pense que
son devoir serait d'être ici avec nous parce que le président du
Conseil du trésor, si averti soit-il, n'a pas reçu du premier
ministre la responsabilité du secteur de l'Éducation et je trouve
que cela serait bon qu'il soit ici, de même que les autres ministres
concernés, et, au premier chef, le ministre des Affaires sociales parce
que là, on tranche dans des choses qui les regardent et ils ne sont
même
pas là. On a fait la même chose l'autre jour. On nous a
présenté un projet de loi sur la création du
ministère de l'Enseignement supérieur et, dans ce projet de loi,
on sabrait dans les attributions du ministre de l'Éducation et il
n'était même pas là pour se défendre. Je ne sais pas
si c'est la règle qui a été établie dans le cabinet
qu'on se laisse tondre sans dire un mot. Mais cela m'a étonné et
frustré parce que j'aime bien la compagnie du ministre de
l'Éducation qui est un homme très gentil en discussions.
Pour revenir à notre sujet, on avait élaboré une
hypothèse de règlement qui était extrêmement
importante et dans laquelle était contenu, notamment - cela s'en vient
directement au sujet dont nous discutons, M. le Président, je ne veux
pas que vous ayez d'inquiétude quant à la pertinence - on avait
établi dans cette hypothèse de règlement qu'il y aurait
quatre matières de base qui seraient l'objet de négociations
à l'échelle locale: l'affectation et la mutation des enseignants,
la répartition des fonctions et des responsabilités entre les
enseignants d'une école, la distribution, dans l'année scolaire,
des 200 jours de travail et, enfin, les modalités de distribution des 27
heures de travail de la semaine régulière. On ajoutait ceci, dans
l'hypothèse de règlement: il s'agit d'une liste définitive
dont le projet de loi sur la réforme du régime de
négociation tiendrait compte. On ajoutait aussi que ces quatre objets
seraient négociés dans le cadre de la loi 55. À compter du
premier janvier 1986, la négociation s'engagerait et les
résultats seraient applicables à compter de 1986-1987. Je passe
sur le reste, nous y reviendrons lorsque nous traiterons de ces autres aspects
qui sont traités dans la suite du texte.
Ceci, si je comprends bien, voulait dire que le ministre de
l'Éducation, sur avis de ses conseillers, après des pourparlers
prolongés avec la partie syndicale, avait décidé de
recommander au gouvernement un régime de négociation qui aurait
été sensiblement proche de celui que nous connaissons
actuellement, c'est-à-dire qu'il y aurait eu négociation à
l'échelle nationale comme principe de base. Ensuite, il y aurait eu
quatre matières qui auraient été renvoyées
obligatoirement à la négociation locale avec droit de
grève. Ensuite, il y aurait eu la possibilité d'arrangements
locaux qui serait demeurée dans le paysage sous l'empire des
dispositions de la loi 55, comme nous la connaissons actuellement, qui aurait
été reprise dans le projet de loi 37.
Le gouvernement a refusé cette proposition qui lui avait
été faite après de nombreuses négociations,
propositions qui auraient assuré la paix dans le secteur scolaire
pendant une période de trois ans. Je trouve cela profondément
déplorable. Je pense qu'on avait fait un bout de chemin énorme
et, pour une symétrie dont nous recherchons en vain le secret, quand
nous étudions le projet de loi actuel, on a laissé tomber un
document, une hypothèse de règlement qui était le fruit de
véritables -le ministre a refusé d'accepter le mot
-négociations, à l'époque. Vous vous en souvenez, à
l'époque, il avait dit qu'il y avait eu des conversations, mais pas de
négociations. On lui avait laissé le choix du dictionnaire. S'il
aimait mieux le Petit Robert plutôt que le Larousse, cela ne nous
dérangeait pas. Ce qui nous intéressait...
Une voix: Nous autres, c'est le Petit René!
M. Ryan: Vous autres, c'est le Petit René! Ce qui nous
intéressait, dis-je, c'était le produit de ces conversations qui
était extrêmement encourageant et positif.
Alors, là, nous nous retrouvons à pied d'oeuvre. Plus rien
n'est entendu, d'après ce que je comprends. Tout a été
remis sur le métier. Ensuite, il a été question de faire
une entente pour une période de trois ans sur certaines matières;
ensuite, une entente pour une période d'une année. Nous ne savons
pas où nous en sommes parce qu'il n'y a pas eu de communication
livrée au public à ce sujet depuis que ces
événements sont survenus.
Je vous préviens tout de suite de notre intention
générale pour que vous sachiez où nous allons et, ensuite,
nous pourrons revenir à la discussion sur l'article 44. Nous allons
proposer des amendements à l'article 57 de manière à
laisser tomber de l'article 57 certains passages qui modifient
substantiellement la situation que nous avons actuellement. Nous demanderons de
laisser tomber, si vous avez le texte de l'article 57, les mots: "à
l'égard du personnel de soutien et du personnel professionnel non
enseignant des commissions scolaires". Pour nous, l'article 57 se lirait comme
suit: Dans le secteur des affaires sociales et dans le secteur de
l'éducation, les matières sur lesquelles portent les stipulations
négociées et agréées à l'échelle
locale ou régionale sont celles que définissent les parties
à l'occasion de la négociation des stipulations
négociées et agréées à l'échelle
nationale. Nous revenons, en somme, au texte de la loi 55 comme nous
l'avons.
De plus, dans la même logique, nous demanderons que l'article 58
soit laissé de côté parce que l'article 58 est un
prolongement de l'article 57. C'est l'article qui contient la liste des
matières obligatoirement négociées sans droit de
grève à l'échelon local. Nous demanderons enfin
qu'à l'article 60 on écrive, au deuxième alinéa:
Cette négociation ne peut toutefois donner lieu à un
différend dans le secteur des affaires sociales, plutôt que de
manière
générale. Vous comprendrez la portée exacte de ces
modifications que nous proposerons tantôt, ceci pour vous dire que,
grosso modo, nous envisageons dans le secteur de l'éducation la
négociation comme suit: vous avez d'abord la négociation entre
les parties au plan national. C'est la règle de base.
Deuxièmement, si on avait accepté l'hypothèse de
règlement du ministre de l'Éducation, on aurait
inséré dans le texte de loi - nous aurions été tout
à fait heureux de le faire - les quatre points qui auraient
été l'objet obligatoire de négociations à
l'échelle locale. On les aurait mis volontiers et, sur indication des
parties, on aurait été très heureux d'en ajouter d'autres,
mais on aurait au moins mis ces quatre points.
Je souligne que la Fédération des commissions scolaires
catholiques et l'Association des commissions scolaires protestantes avaient
donné leur aval à cette hypothèse de règlement. Je
ne sais pas dans quel contexte exact elles l'avaient fait, mais ces deux
fédérations de commissions scolaires avaient donné leur
aval à cette hypothèse de règlement. Ce sont des faits
récents qui témoignent que la négociation est une chose
possible quand la volonté de négocier est présente.
Nous demanderons par conséquent la négociation entre les
parties à l'échelle nationale et, deuxièmement, si le
gouvernement est prêt à revenir sur la décision qu'il a
prise il y a environ un mois et demi, l'inclusion de certaines matières
qui seraient obligatoirement négociées à l'échelle
locale, mais négociées véritablement, c'est-à-dire
avec droit de grève. S'il n'y a pas de droit de grève, une
négociation n'existe pas au sens véritable du terme. La seule
raison qui peut justifier la suppression du droit de grève, à
notre point de vue - c'est notre thèse générale - c'est
une raison reliée directement à la santé publique ou
à la sécurité publique.
Le Président (M. Blais):...
M. Ryan: Pardon?
Le Président (M. Blais):...
M. Ryan: Je regrette. Je ne puis souscrire à cette
interprétation généreuse que propose le président.
C'est notre position de fond. C'est pour cela que dans les
établissements de santé nous avons une position claire et que
nous ne cherchons pas à plaire à la partie syndicale. Nous savons
que la partie syndicale ne veut pas l'accepter. Plutôt que d'essayer
d'enrubanner cela dans 56 considérations pseudoscientifiques, nous
disons carrément et franchement: Là-dedans, non decet, non decet,
pas plus pour les policiers que pour les pompiers. C'est notre raisonnement sur
la base de notre expérience.
C'est clair, c'est net, et on le dit franchement.
Le ministre nous dit que cela ne pourra pas marcher. Mais supprimer en
réalité ou en apparence, je pense bien que cela va se retrouver
en fin de compte. Des gens vont savoir qu'on ne leur permettra plus de faire la
grève comme on en a vu depuis 25 ans. Au besoin, des procédures
seront prises pour qu'on sache ce que le public pense là-dessus, mais il
va falloir qu'on sache où se situe la responsabilité de prendre
des décisions là-dedans. Il va falloir que cela soit clair. Cela
a été une des grosses faiblesses ces dernières
années.
Ici, nous disons: Dans le secteur de l'éducation, nous n'avons
pas de raison de demander que soit supprimé le droit degrève. Je pense que la partie syndicale devra se rendre compte,
d'autre part, et je l'ai dit à plusieurs reprises qu'elle ne pourra pas
faire la grève indéfiniment dans ce secteur. Pas une
société ne serait assez folle pour laisser ses écoles
fermer par un conflit de travail pendant an. Si un conflit surgit, il faudra
qu'il se règle par la négociation et, au bout d'un certain temps,
la société se gardera toujours d'apprécier si le conflit a
duré assez longtemps pour qu'il se règle autrement. Je ne veux
pas enlever cette règle, mais comme principe de base...
Troisièmement, la possibilité d'arrangements à
l'échelle locale, sans droit de grève - on ne peut quand
même pas multiplier cela à gauche et à droite simplement
pour le plaisir de le faire - sur des matières qui auraient
été convenues et agréées entre les deux
parties. Je crois qu'on aurait un régime simple et clair, et on saurait
où on s'en va.
Dans le domaine des établissements sociaux, je regrette que mon
collègue de Brome-Missisquoi ne soit pas ici pour en parler, il sera
probablement de retour ce soir...
Une voix:...
M. Ryan: Pardon? Non, je regrette qu'il ne soit pas ici pour en
parler, mais je crois que ce qui est dans le projet de loi est plus acceptable,
parce qu'on ne peut pas recommencer toutes les négociations au niveau de
chaque établissement, cela n'a pas de bon sens. Qu'il y ait
possibilité d'arrangements à ce niveau, cela ne crée pas
de problème majeur en ce qui nous touche. (17 heures)
C'est la position que nous allons défendre en gros
là-dessus et nous allons vous distribuer des projets d'amendements quand
nous arriverons à chaque article. Je l'ai énoncé
maintenant pour une raison assez simple. Dès l'article A4, on dit que
"les stipulations négociées et agréées à
l'échelle nationale portent sur toutes les matières que
contient la convention collective à l'exception des
matières définies comme devant faire l'objet de stipulations
négociées et agréées à l'échelle
locale et régionale suivant les articles 57 et 58. " Il fallait par
conséquent préciser la position qu'on tient sur les articles 57
et 58 et, pour nous autres, cela va être un peu embarrassant de voter
là-dessus. Si vous nous demandez de le faire, nous le ferons. Nous
voterons en réservant toujours cet espace relatif au contenu des
articles 57 et 58. Il faudra qu'on sache ce qu'il y a dans les articles 57 et
58. S'il était pour y avoir des modifications aux articles 57 et 58,
peut-être qu'on peut voter pour l'article 44 sans difficulté,
mais, si c'est pour l'article 44 en fonction des articles 57 et 58 comme ils
sont définis actuellement, je pense que notre position serait
plutôt négative là-dessus parce que nous avons des
objections majeures sur la formulation actuelle des articles 57 et 58.
Est-ce que j'ai été assez clair, M. le Président?
Je me réserve de l'être davantage, mais je pense que le ministre
m'a bien compris. Mes collègues de Rosemont et de Deux-Montagnes
également, je pense bien.
Le Président (M. Blais): Alors, tout le monde trouve cela
clair? L'article 44 est prêt à être voté?
Une voix: Accepté. Adopté.
M. Ryan: On est prêt à faire un vote global.
Le Président (M. Blais): Mais non! Vous êtes
prêts à voter sur l'article 44? Tout est clair, m'a-t-on dit. Je
le demande.
M. Paquette: La position du député d'Argenteuil est
claire, je pense, assez claire. J'aimerais à mon tour, M. le
Président, informer le ministre de l'approche générale que
nous avons à toute cette section extrêmement importante du projet
de loi qui vise - du moins, c'est l'objectif du ministre - à une
décentralisation des négociations, à faire en sorte que le
maximum de matières puissent être négociées. On peut
se demander dans le projet de loi si elles peuvent être
véritablement négociées. Sûrement pas. Nous, dans
notre optique, c'est véritablement: négociées au niveau
local et régional. Je dois vous dire au départ, M. le
Président, que, dans le contexte général où arrive
ce projet de loi, nous pensons que toute décentralisation, par ailleurs
souhaitable, est probablement illusoire ou, du moins, très difficile
dans la mesure où le secteur public est extrêmement
centralisé, hypercentralisé, et où on se retrouve avec
divers paliers ministériels, divers paliers de décision, avec des
autorités déléguées, encadrées dans des
règles budgétaires. Donc, de multiples paliers de
responsabilité qui font en sorte que, indépendamment des
négociations collectives, il y a un droit de gérance prévu
dans les lois et un certain droit également de déléguer
à travers de multiples paliers qui fait en sorte que, le système
étant très centralisé, on aura beau essayer de coller un
régime de négociation sur un système très
centralisé, très bureaucratique, très
hiérarchisé, on va atteindre très difficilement cet
objectif premier de la décentralisation qui, est la personnalisation du
travail et de la prestation des services dans les établissements
publics, que ce soit dans le domaine de l'éducation ou des affaires
sociales.
J'ai eu l'occasion, et je ne voudrais pas m'étendre longuement
là-dessus, mais j'expliquais au ministre à une session
précédente de nos travaux que, jadis, le système scolaire
dans lequel j'ai vécu était extrêmement
personnalisé. Il est arrivé, dans un collège
d'enseignement général et professionnel où j'enseignais,
que la direction, parce qu'elle avait la possibilité de te faire, se
présentait au département et disait: Voilà l'ensemble des
élèves et des cours que nous avons à dispenser.
Voilà le nombre de professeurs que je peux mettre à la
disposition du gouvernement et, à partir de là, vous allez vous
organiser pour donner dans votre discipline que vous connaissez bien les
meilleurs services possible. À ce moment-là, les professeurs du
département se réunissaient, établissaient la
répartition des tâches, décidaient des méthodes
pédagogiques et pouvaient décider d'un partage de tâche
inégal, pouvaient décider que certains professeurs allaient
consacrer plus de temps, parce que tels étaient leurs capacités,
leur intérêt, leur motivation, à la préparation
d'instruments pédagogiques pendant que d'autres allaient assumer plus de
temps en classe, sous forme d'animation pédagogique. Cela permettait
toutes sortes d'adaptations et, en définitive, l'utilisation maximale
des ressources humaines, une qualité de vie au travail accrue et de
meilleurs services à la clientèle scolaire. Je pense que ce
raisonnement vaut également pour les commissions scolaires et les
établissements de santé, et que c'est très certainement
une direction dans laquelle il faut aller, une direction de gestion
participative dans le cadre de grandes balises qui assurent quand même
une certaine équité de traitement d'un bout à l'autre de
la province ou à l'intérieur d'une région, une certaine
possibilité de personnaliser le travail, d'améliorer la
qualité de vie au travail et la qualité de la prestation des
services.
On est bien loin de cette gestion participative dans les
établissements d'enseignement, M. le Président, ce qui fait en
sorte que l'objectif de ce projet de loi
est forcément dévié, quand on décide d'une
liste de matières, par exemple, à l'annexe A, dans le secteur des
collèges ou dans celui des commissions scolaires, et qu'on dit:
Voilà, cela va se - je pense qu'il ne faut pas employer le terme
négocier, mais le terme discuter - cela va être discuté au
niveau local et, quand il n'y aura pas entente, le statu quo aura
priorité. Quand i! n'y aura pas entente, on pourra faire appel à
un négociateur arbitre, mais il faudra que les deux parties soient
d'accord pour lui confier le mandat et le rendre exécutoire.
Il faut comprendre, M. le Président, que l'article 57 en
particulier est largement illusoire parce que, puisqu'il n'y aura pas de
véritables négociations au niveau local, la tendance sera de
décentraliser le moins de choses possible et d'en garder le maximum au
palier central. La partie syndicale pourra se dire avec raison qu'au palier
local, puisqu'il n'y a pas de véritables négociations et qu'en
définitive, en cas de non-entente, le droit de gérance locale
prévaudra, que, finalement, on va décentraliser très peu
de choses.
À l'article 58, on impose un certain nombre de matières
avec lesquelles les parties ne sont pas nécessairement d'accord. C'est
la position du gouvernement qui dit que les matières qui sont là
devraient être négociées au niveau local, qu'il n'y aura
pas de droit de grève, qu'il y aura un mécanisme de
médiateur arbitre et qu'en définitive le droit de gérance
locale sera prépondérant. C'est sa position à lui.
Compte tenu de tout ce contexte, je me demande comment le ministre peut
penser qu'il y aura une véritable décentralisation et
jusqu'à quel point il estime que l'article 57 pourra
véritablement avoir un effet quelconque sur la décentralisation.
C'est la première question que je voulais lui poser.
La deuxième: Les matières établies à
l'annexe A, jusqu'à quel point font-elles consensus de la part des
parties et qu'est-ce qui amène le ministre à privilégier,
surtout dans le contexte de la mécanique prévue au niveau local,
cette annexe et à l'imposer, plutôt que de laisser cours à
une véritable décentralisation agréée par les
parties - je pense que c'est le mieux qu'on peut faire dans le contexte actuel
- qui mène à de véritables négociations sur le plan
local?
Donc, sur l'effet prévisible d'une décentralisation
réelle, j'aimerais savoir ce qui a amené le ministre à
adopter cette approche et, deuxièmement, comment il en est arrivé
à la liste des sujets établis à l'annexe A.
M. Clair: Je commencerai par la dernière question. Les
listes qui apparaissent en annexe ont été établies en
concertation avec les ministres sectoriels concernés, leur
ministère, les associations patronales et, dans une beaucoup moins
grande mesure, en tenant compte des représentations qui avaient
été faites par les associations de salariés. Sur
des sujets qui ont déjà été
négociés au niveau local, j'indique que ce n'est pas par mauvaise
volonté que nous n'avons pas pu tenir compte davantage du point de vue
syndical. Nous avions offert aux syndicats de se mettre à table avec
leur ministre sectoriel pour arrêter les listes et, sauf erreur, il n'y a
eu qu'au niveau du cégep, au niveau collégial, où un ou
deux représentants syndicaux se sont présentés. Je dois
dire qu'il y a eu d'autres propositions qui ont été faites par
les représentants des associations de salariés des secteurs
public et parapublic pour tenter de convenir d'autres règles, mais
toujours est-il qu'il n'y a pas eu entente avec les syndicats sur ces listes.
C'est dans cette mesure que nous avons tenté de tenir compte au maximum
de leur avis, de ce qui s'était déjà négocié
au niveau local, de l'opinion des ministres, des ministères, des
associations patronales concernées.
C'est évident, M. le Président, que l'orientation est fort
différente de celle qui existe actuellement. Qu'est-ce qui nous a
amenés à choisir cette voie-là plutôt que toute
autre? Je dirai au député, en caricaturant un peu, que le
gouvernement considère qu'en ce qui concerne le droit de grève au
niveau local cela n'est pas en mettant le droit de grève dans
l'ascenseur, pour employer une expression qu'on a déjà
utilisée dans d'autres circonstances, que l'on va modifier le climat,
les approches, les traditions et les habitudes de négociation au
Québec, que cela soit au niveau local, au niveau régional ou
national. Le moment était venu d'expérimenter, de mettre de
l'avant d'autres formules moins conflictuelles s'inspirant du concept de la
décentralisation, de la négociation permanente, s'inspirant aussi
de rapports moins conflictuels pour des objets importants, mais de
portée limitée, jusqu'à un certain point, concernant
principalement trois thèmes: les mouvements de personnel, l'organisation
du travail et les droits syndicaux.
M. le Président, le député d'Argenteuil, le voisin
de comté du député de Deux-Montagnes, a posé un
certain nombre de questions concernant les explorations et l'hypothèse
de règlement qui avait été développée par le
ministère de l'Éducation, la fédération des
commissions scolaires et la CEQ. Je dirai sur cette exploration, sur cette
hypothèse de règlement que, par rapport au débat qu'on a
eu tantôt en ce qui concerne les mandats du Conseil du trésor et
du gouvernement, c'est certainement la preuve dans ce cas-là que, si
cela a entraîné des déceptions légitimes, le genre
d'exploration que l'on peut mener
occasionnellement peut parfois donner des résultats
satisfaisants, mais que, dans la mesure où on agit sur des
hypothèses de règlement, que des gens travaillent de bonne foi
sur des hypothèses sans qu'il y ait un mandat bien arrêté,
bien défini par le Conseil du trésor et, éventuellement,
par le gouvernement quant aux matières les plus substantielles, on ne
peut pas, effectivement - je suis d'accord avec le député - on
aura beau utiliser diverses expressions, parler d'explorations, de discussions,
de pourparlers, de toute espèce d'autres synonymes, il n'en demeure pas
moins que, dans l'esprit des deux parties, elles en viennent à
considérer que c'est, quant à chacune d'entre elles, de la
négociation. Si on veut qu'une telle négociation soit aussi
productive que possible, je pense qu'on voit là toute l'importance du
Conseil du trésor, notamment, qui est le sous-comité le plus
puissant du gouvernement, je le reconnais, qu'il soit... Il est
préférable qu'il agisse avant, détermine des mandats et
que le gouvernement soit lié à l'avance par ses porte-parole, en
quelque sorte, plutôt que d'explorer et de connaître des
déceptions.
Qu'est-ce qui a achoppé dans cette hypothèse de
règlement? C'est essentiellement la question du droit de grève au
niveau local et une autre question, soit l'ajout récurrent, permanent,
devrais-je dire, de 200 postes dans l'enseignement primaire et secondaire pour
régler ce qu'il est convenu d'appeler le problème du
septième groupe. Pourquoi ne pas ajouter 200 postes permanents? La
raison était fort simple. Le Conseil des ministres, de même que le
Conseil du trésor, évaluait que d'autres moyens moins
coûteux avaient été développés au
comité mixte du ministère de l'Éducation sur la
tâche et l'organisation du travail des enseignants, et que point
n'était besoin d'injecter de façon permanente 200 postes pour
régler cela. (17 h 15)
Deuxième raison, le droit de grève au niveau local sur un
nombre limité de matières. Le Conseil des ministres a
évalué plusieurs hypothèses de décentralisation.
L'une d'entre elles était effectivement une décentralisation
beaucoup plus poussée avec un droit de grève au niveau local dans
tous les secteurs, que ce soit l'enseignement primaire, secondaire,
collégial ou universitaire, qui l'ont déjà, ou le
réseau de la santé. Finalement, le Conseil des ministres en est
venu à la conclusion que, dans un premier temps, pour permettre aux
parties de se réapproprier progressivement leurs responsabilités
au niveau local, en matière de négociations, il était
préférable de retenir les mécanismes proposés
plutôt que de se contenter de mettre le droit de grève dans
l'ascenseur et, encore là, sur quatre matières bien
limitées et dans un seul secteur, de . l'enseignement primaire et
secondaire. Il nous apparaissait qu'il y avait là un problème de
cohérence avec les autres secteurs. Sans rechercher une symétrie
théorique parfaite, il nous apparaissait que cela aurait
été déséquilibré par rapport aux autres
secteurs.
Deuxième chose, il aurait été très
difficile, au niveau local, de départager les matières sur
lesquelles il y aurait eu décentralisation avec droit de grève et
d'autres sans droit de grève. L'hypothèse de règlement -
j'ignore si c'était la dernière version écrite mais on m'a
fait valoir que la dernière hypothèse prévoyait même
la possibilité que ces quatre matières fassent l'objet d'un droit
de grève une dernière fois, invoquant le droit de gérance,
les décrets, etc., pour justifier l'exercice d'un dernier rapport de
forces fondé sur le droit de grève comme mode de règlement
du différend pour ces quatre matières.
Le Conseil des ministres s'est demandé comment départager
les matières sur lesquelles on aurait le droit de grève et
d'autres sur lesquelles on ne l'aurait pas. Serait-il écrit, d'un
côté de la pancarte: Je suis en grève sur ces quatre
matières. Sur les 17 autres, je ne suis pas d'accord, mais je ne suis
pas en grève sur ces quatre matières? Ce qui revenait en
substance à donner le droit de grève au niveau local, ce que le
gouvernement rejetait comme hypothèse.
Troisièmement, le Conseil des ministres a considéré
que, sur les matières en question, qu'elles aient été
soumises à l'arbitrage, qu'elles aient fait l'objet du contenu de
conventions collections déjà convenues et reconduites par la
suite, dans l'ensemble, le contenu de base des conventions collectives
actuelles, en garantissant le statu quo, protégeait les parties et les
incitait à modifier de gré à gré, sans rapport de
forces, donc sans droit de grève, les contenus et à les faire
évoluer au fur et à mesure des besoins des deux parties. Dans ce
sens, point n'était besoin d'accorder un droit de grève au niveau
local.
Finalement, un autre argument. Le Conseil des ministres a
considéré que, pour ces questions, il n'était pas
nécessaire de disposer d'un arsenal aussi fort que le droit de
grève pour convenir de matières qui concernent le vécu
dans un établissement ou dans une institution. Par conséquent, il
nous est apparu au Conseil des ministres que ce mécanisme de
règlement des différends, fondé sur le droit de
grève et de lock-out, constituait un arsenal trop lourd par rapport aux
questions à débattre et que, s'il y avait une place où
l'on pouvait introduire de nouvelles formules de règlement des
différends, soit la formule du médiateur arbitre dont on parlera
plus tard, c'était bien là l'endroit où l'introduire.
Je dirai également - on a parlé du
droit de gérance du côté du député de
Rosemont - sans déformation professionnelle, puisque je n'ai jamais
été ni d'un côté ni de l'autre dans ces
négociations, je dois dire que je n'ai pas honte, quant à moi, de
défendre occasionnellement, lorsque cela me semble raisonnable, le droit
de gérance. Il me semble que, comme parlementaire, on n'a pas non plus
à avoir honte du droit de gérance, que cela n'est pas en soi
quelque chose de méchant, de malin, de suspect, de pas trop
démocratique, de pas trop correct. Il me semble que cela n'est pas
anormal que, tout autant, les parlementaires se préoccupent des droits
des syndiqués, des travailleurs et travailleuses, et des droits de
gérance de ceux qui ont quotidiennement à gérer ces
établissements. Entre les deux, il y a toujours une ligne à
tirer. Le gouvernement a tenté de la tirer de la façon la plus
juste, la plus raisonnable, la plus honnête possible.
Le député d'Argenteuil nous indique que, quant à
lui, il préférerait le statu quo. Ce qu'il propose s'approche
beaucoup du statu quo. Quant à nous, il nous a semblé que, si
nous voulions amorcer véritablement la décentralisation,
l'expérience nous amenait à conclure qu'il fallait imposer une
liste de sujets sur lesquels il y aurait négociation locale puisque, que
l'on parle aux commissions scolaires, aux syndicats, que l'on parle è la
Fédération des cégeps ou à d'autres, lorsqu'on
parle de décentralisation, tout le monde est pour cela. C'est comme la
vertu, c'est en quelque sorte une nouvelle mode. Mais quand on arrive pour
demander à quelqu'un: Mets-moi la liste des sujets sur lesquels tu
t'engages à être le grand défenseur, que cette liste soit
décentralisée par convenance, là, la liste se met à
raccourcir rapidement. C'était pour bien marquer la volonté du
gouvernement qu'il y a une décentralisation progressive des
négociations que de telles listes ont été annexées
à la loi.
Je conclurai en disant que je n'ai aucunement mandat de la part du
gouvernement de proposer des amendements qui iraient dans le sens
proposé par le député d'Argenteuil.
Le Président (M. Lachance>. M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: Juste une seconde, si vous me le permettez. Il faut que
je prenne mes directives de mon collaborateur.
Le Président (M. Lachance): Je voudrais signaler aux
membres de la commission un détail technique qui peut avoir son
importance. C'est à l'article 36. Cela m'a été
signalé par le secrétaire de la commission. Hier, le ministre
avait manifesté son désir de déposer un amendement. Il l'a
déposé effectivement, mais il n'a pas été
adopté. Pour éviter toute ambiguïté...
M. Clair: Quel était-il?
Le Président (M. Lachance):... je lui demanderais
d'indiquer qu'il le retire. Il était libellé comme suit:
L'article 36 du projet de loi est modifié par l'insertion, à la
deuxième ligne du deuxième alinéa, après le mot
"composé", des mots "entre autres membres.
M. Clair: Oui, je le retire, M. le Président.
Le Président (M. Lachance): Alors, on considère que
c'est retiré. Cela clarifie la situation. M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: M. le Président, tout d'abord, je voudrais
signaler une manière de s'exprimer du ministre qui me paraît
trahir une approche fort discutable de toutes les questions dont nous
discutons. Je l'ai entendu dire à plusieurs reprises dans son
intervention: On accorde le droit de grève... si on accorde le droit de
grève. Il me semble que ce n'est pas la manière d'aborder ces
questions. Je pense que la vraie situation, c'est que ce droit de grève
existe indépendamment du bon plaisir du prince. C'est vous autres qui le
retirez dans certains secteurs. Il existe dans nos lois actuellement et il a
été mis dans nos lois parce qu'il existait dans la
réalité et qu'on voulait qu'il existe, qu'on trouvait que
c'était un corollaire indispensable de la liberté de
négociation. Quand vous dites: On l'accorde et on ne l'accorde pas, je
n'aime pas trop cette approche. Je pense que vous allez la corriger
vous-même en y pensant. Le problème, c'est ceci: Vous le retirez
en ce qui touche la négociation sur le plan local. Le système
actuel - et pour qu'on se comprenne très bien, je reste dans le secteur
de l'éducation où, à mon point de vue, se posent les
difficultés les plus considérables en rapport avec le projet de
loi 37, à ce point-ci de notre examen - suivant la loi actuelle, cela se
passe comme ceci: on négocie sur le plan national, les parties
conviennent ensuite d'une série de sujets qui seront l'objet de
négociation sur le plan local. Les négociations ont lieu sur le
plan local assorties du droit de grève ou de lockout. Le gouvernement
nous dit: On ne veut pas de cela. Il nous dit: II faut qu'on négocie
véritablement sur le plan local; on va leur montrer comment faire cela
nous autres. Il y a une chose, il faudrait que vous fassiez la preuve qu'il n'y
a pas eu de négociations sur le plan local, depuis vingt ans.
M. Clair: Je n'ai absolument pas dit cela, M. le
Président. J'ai dit le contraire plutôt. J'ai dit qu'il y avait,
dans le domaine
de l'enseignement primaire et secondaire, dans les commissions
scolaires, tant catholiques que protestantes, une tradition de
négociations locales. C'est la raison pour laquelle on peut diverger
quant à la façon de le faire. Le député conviendra
sûrement avec moi que le dispositif prévu va plus loin dans le cas
de l'enseignement primaire, secondaire et collégial que dans le cas des
affaires sociales.
M. Ryan: Oui, il va... On pourra en reparler. On emploie un autre
vocabulaire, mais est-ce que, dans la réalité, cela va être
tellement différent? Cela reste à voir. J'en reviens à mon
point de fond. Depuis, disons, vingt ans, cela a commencé. Je pense que
la première négociation à l'échelle nationale a eu
lieu vers 1966 ou 1967. Depuis ce temps, on a eu un régime en vertu
duquel certaines clauses étaient négociées sur le plan
national et d'autres sur le plan local. Il y en a eu beaucoup, par
conséquent. Si on calcule qu'on a à peu près 255
commissions scolaires, il y en a eu beaucoup. Je ne sais pas si le ministre
aurait un dossier à présenter de toutes les matières qui
ont déjà fait l'objet de négociations sur le plan local.
En tout cas, il y avait un grand nombre de sujets qu'on renvoyait sur le plan
local. On disait: Très bien, on va y aller. Avec les décrets,
cela a changé; cela a été des arrangements qui pouvaient
être aménagés sur le plan local. Il n'était plus
question de négociations. Il n'en était pas davantage question
sur le plan national. Il y avait une certaine logique dans la position du
gouvernement.
Mon point est le suivant: avant de consentir, c'est vous autres qui avez
le fardeau de la preuve. C'est vous autres qui changez des choses dans le
régime. Il faut que vous nous apportiez une preuve solide justifiant ce
changement que vous voulez effectuer. Dans ce qui a été dit
jusqu'à maintenant, je n'ai pas trouvé cette preuve. Je vais vous
donner des éléments de réflexion qui m'ont inspiré
dans la position que je décris au nom de notre groupe parlementaire en
ce qui touche le secteur de l'éducation, encore une fois. Là, on
a eu beaucoup de négociations. Disons qu'on a eu au moins trois, quatre
rondes de négociations. Sur le plan local, quand on pense à 255
commissions scolaires du coup; c'est énorme. II n'y en a pas eu partout,
mais disons qu'il y en a eu dans la majorité des commissions scolaires.
Combien a-t-on eu de conflits pendant tout ce temps?
On me signale que, à la suite de la ronde de négociations
de 1976, il y a eu une grève d'à peu près 25 à 30
jours à la commission scolaire Jérôme-Le Royer, il y a eu
une grève à la commission scolaire des Milles-Îles et une
autre dans une commission scolaire de la région de Québec. Trois
conflits pour 255 commissions scolaires qui ont été
engagées dans les négociations sur le plan local, d'une
durée qui a été assez longue dans un cas, soit
Jérôme-Le Royer, de 25 à 30 jours. Pour les deux autres
cas, je pense que cela a été un peu moins long. Je n'ai pas les
données précises; vos collaborateurs les ont sans doute.
En 1979, il y a eu trois conflits. Il y a eu le conflit à la
commission scolaire des Vieilles-Forges, il y a eu le conflit à la CECM
et il y a eu un conflit à la commission scolaire Carignan - je pense que
c'est dans la région de Sorel. Le conflit de la CECM a duré,
à notre souvenance, à peu près une dizaine de jours. Il
est arrivé qu'à ce moment-là - c'était
l'époque où le gouvernement couchait plus facilement avec la
partie syndicale - je crois que, à l'instigation de la partie syndicale,
il a mis la commission des écoles catholiques en tutelle. Vous vous
souvenez tous de la tutelle qui est arrivée inopinément.
M. Clair: Je me souviens; j'ai accompagné le tuteur
jusqu'à Montréal.
M. Ryans Oui, mais le conflit s'est réglé dans une dizaine
de jours.
M. Clair: Par un concours de circonstances. (17 h 30)
M. Ryan: Je n'ai pas les chiffres quant à la durée
du conflit à Carignan. Vous pourrez me les donner tantôt, cela
m'intéressera. À la commission scolaire des Vieilles-Forges, le
conflit a duré quatre mois. Au terme de cette période, le
gouvernement a déposé un projet de loi à
l'Assemblée nationale, que nous avons adopté rapidement dans ce
cas, parce que je pense que tout le monde était d'accord. U fallait
mettre un terme à ce conflit. Je me souviens qu'à l'occasion
j'étais intervenu dans le débat et que j'avais dit: II va falloir
qu'on se rende compte de part et d'autre qu'au bout d'un certain temps une
grève ne peut pas durer indéfiniment dans ce secteur. Mais je
regarde le bilan, pour une période que j'ai examinée de plus de
dix ans au cours de laquelle il y a eu trois rondes de
négociations...
Le Président (M. Lachance): Est-ce que je peux avoir
à ce moment-ci, M. le député d'Argenteuil, le consentement
des membres de la commission pour que le député d'Argenteuil
puisse poursuivre?
M. Ryan: Cela ne fait pas déjà 20 minutes?
Le Président (M. Lachance): Le temps passe vite, M. le
député.
M. Laplante: Cela fait plus que ça.
M. Clair: Cela passe si vite!
M. Ryan: C'est une matière tellement riche sur laquelle on
nous a tellement peu informés. Avant de faire tous les changements
proposés, il faut bien examiner le dossier solidement. Je vous remercie.
J'apprécie énormément le consentement que vous me donnez,
M. le député de Bourassa.
M. Laplante: Ce n'est pas un consentement illimité.
M. Ryan: C'est bien conforme à votre hospitalité
intellectuelle coutumière. On l'apprécie toujours. Ce ne sera pas
long.
Ici, je disais - c'est parce que cela touche au fond, cela embrasse
plusieurs articles en même temps... Ce ne sont pas des plaisanteries
qu'on fait. C'est une position de fond. Moi, c'est le bilan que j'ai. Je me dis
que, devant un bilan comme celui-là, comme législateurs, est-ce
que nous avons le droit de souscrire, sans autre examen, au changement radical
que nous propose le gouvernement et qui s'accompagne, finalement, d'une
amputation de la négociation collective dans un de ses volets
essentiels? Je dis non. Je dis qu'il incombe au gouvernement de nous faire la
preuve que, vraiment, cela a tellement mal marché dans ce secteur qu'il
faut changer. Je trouve que l'équilibre que nous avons actuellement
entre les négociations nationales avec droit de grève, les
négociations locales... Le droit de grève sur le plan national,
nous sommes d'accord des deux côtés qu'en matière
salariale, il ne pourra pas s'exercer au complet. On ne peut pas jouer avecla collectivité indéfiniment. On ne peut pas dire à un
groupe de citoyens qui représentent, par exemple, 15 % ou 20 % de la
main-d'oeuvre, en tout et partout: Vous allez pouvoir tenir un revolver sur la
tempe de cette société à votre guise. On va être
là et on ne pourra pas se défendre. Je pense qu'étant
donné la période de ressources très limitées dans
laquelle nous sommes entrés, il y a certains exercices qui deviennent
plus futiles qu'ils n'ont pu paraître à d'autres époques.
De ce côté-là, il y a des éléments dans la
politique de notre parti, dans celle du gouvernement, d'ailleurs, qui se
rejoignent, même si elles divergent à certains points de vue,
parce qu'il y a un accord là-dessus qu'on ne peut pas jouer avec cela
comme si on jouait avec l'avenir d'une entreprise à côté de
laquelle 150 autres peuvent fournir le même service à la
population.
Dans ce cas-ci, c'est une situation entièrement
différente, mais, je trouve que cet équilibre qu'on a,
négociations nationales, d'autres négociations s'en vont sur le
plan local sur des sujets qui sont de portée beaucoup plus
limitée, dont la liste sera évidemment aussi limitée, je
crois que c'est un équilibre qui n'est pas mauvais. Il serait
préférable de ne pas jouer avec cela actuellement. Il serait
préférable en face de cet équilibre d'avoir une attitude
que j'appellerais sainement conservatrice. On a un actif. Cela dépend du
jugement qu'on porte. On peut porter un jugement négatif et dire: C'est
un passif. On peut porter un jugement positif et dires C'est un actif,
imparfait sans doute, qu'il faut améliorer, mais on va bâtir
là-dessus plutôt que d'essayer de défaire cela et de
bâtir un château de cartes à côté. C'est la
position de fond que nous essayons de faire comprendre et apprécier au
gouvernement à l'occasion de notre débat, et c'est pour cela que
nous avons conçu des propositions de modification que nous
déposerons plus tard. Encore une fois, j'aimerais que le ministre, avec
l'aide de ses collaborateurs, au besoin, fournisse un dossier solide, un
dossier des faits, un dossier d'analyses de situations concrètes qui
justifieraient le recours à des changements aussi radicaux que celui qui
est proposé et qui altère tout notre régime de
négociation dans le secteur scolaire.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre.
M. Clair: M. le Président, en ce qui concerne les faits,
le nombre de commissions scolaires locales, je souligne que, dans les cas que
le député d'Argenteuil a mentionnés, quand on parle, par
exemple, de la CECM, on ne parle pas tout à fait de la plus petite
commission scolaire; quand on parle de Carignan non plus. On parle de
commissions scolaires régionales qui concernent un grand nombre
d'étudiants. Cependant, je partage à peu près - je n'ai
pas un dossier complet avec moi sur les faits des négociations de 1976,
1979 et 1982... J'ajouterai simplement qu'il faut considérer aussi,
même si l'impact est moins important que dans le cas du réseau de
la santé, qu'il y a également le phénomène de la
grève appréhendée et la longueur des négociations
au niveau local qui ont prévalu dans certaines commissions scolaires
où, sauf erreur, dans certains cas, il n'y a même pas eu de
signature avant l'échéance de la convention collective.
Ce que je veux indiquer au député d'Argenteuil, c'est que,
sur ce bilan, lui, de son côté, considère que c'est un
actif. Nous, nous considérons plutôt, même s'il ne s'agit
pas du plus important passif de notre régime de négociation, que
c'en est un. Nous avons voulu, au niveau local, nous orienter vers un concept
de négociations permanentes. J'aimerais que le député
m'écoute. Il m'écoute sûrement en même temps. Au
niveau local, l'orientation fondamentale du gouvernement est d'aller vers la
négociation permanente. Dans ce sens, nous avons considéré
- je ne sais pas si le député
d'Argenteuil sera d'accord avec cela - nous avons décidé
d'exclure la possibilité d'un droit de grève permanent. Si nous
avions voulu introduire, en retenant le mécanisme actuel de
règlement des différends, la négociation permanente, cela
aurait conduit à un droit de grève permanent, ce qui a
été une hypothèse rejetée. Une fois cette
orientation prise, nous avons tenté de trouver d'autres
mécanismes qui permettraient aux parties d'évoluer dans le cadre
de la négociation permanente, sans droit de grève permanent et
avec une très forte incitation pour les deux parties à
s'entendre. Nous avons retenu la formule du médiateur arbitre.
Nous considérons que, dans tous les conflits locaux -
là-dessus, on peut considérer ce qui s'est passé dans
certaines commissions scolaires, ce qui s'est passé à
Saint-Ferdinand d'Halifax, dans un autre réseau, ce qui se passe
présentement à Marine Industries - ceux-ci ont tendance à
remonter très rapidement au niveau national.
Cela n'est pas parce que c'est une commission scolaire moins importante
que la CECM qui subit une grève ou un lock-out, où les services
sont interrompus, que l'enjeu n'est pas aussi important pour ces
gens-là. Vous vous souviendrez sûrement du fameux débat sur
une loi spéciale concernant la CTCUM et la CTCUQ et des arguments que,
de part et d'autre, les gens ont fait valoir. Mais toujours est-il que les
conflits locaux ont - et c'est une tendance lourde de nos relations du travail
au cours des 20 dernières années - de plus en plus tendance
à remonter au niveau national. Nous avons considéré, dans
ce sens, qu'il fallait responsabiliser davantage les parties sans créer,
par le mécanisme de règlement des différends, une pression
telle dans l'opinion publique que, rapidement, le gouvernement se saisisse du
dossier ou encore qu'on demande au gouvernement de se saisir du dossier.
Deux autres considérations nous ont amenés à
prendre la décision qui est reproduite dans les articles du projet de
loi. Il nous semble tomber sous le sens commun que, pour ces matières
qui ont été négociées, arbitrées,
renégociées, reparaphées, après 20 ans de
négociations dans le secteur des affaires sociales et, en particulier,
de l'éducation, cela n'était pas nécessaire de recommencer
à zéro chaque fois, de faire table rase de tout le contenu qui a
été négocié et de dire: On repart à
zéro sans que rien de ce qui existe comme conditions qui, finalement,
sont acceptables grosso modo, pour les deux parties, soit assuré quant
à sa pérennité. C'était une considération
importante. Cela nous semble tomber sous le sens commun que ce n'est pas
nécessaire de recommencer à zéro chaque fois. Cela nous a
conduits à amener la garantie du statu quo pour les deux parties,
étant convaincus que, dans l'ensemble, ce contenu est vivable et viable
pour les deux parties et qu'elles auront mutuellement intérêt
à faire des concessions pour le faire évoluer. Ce n'est pas vrai
que les patrons, par exemple, du secteur de l'éducation pourront,
surtout par les nouvelles lois 3 et 29... Ce n'est pas vrai que les patrons
auront avantage à s'asseoir indéfiniment sur le statu quo et que
tout le contenu de ces matières sera du droit de gérance pur et
simple. Les deux parties seront incitées à se faire des
concessions, des compromis réciproques en dehors d'un rapport de forces,
en dehors de relations du travail conflictuelles. Il nous semble que cette
avenue est porteuse d'avenir.
Finalement, une des considérations qui a aussi retenu l'attention
du Conseil des ministres a été les attentes des salariés
eux-mêmes. Il suffit de discuter avec bon nombre d'entre eux,
au-delà des structures syndicales, contre lesquelles je n'ai rien...
À l'occasion, ce n'est pas mauvais de tester un peu notre point de vue
et celui de nos vis-à-vis en discutant à gauche et à
droite avec des gens qui sont impliqués tous les jours. Le concept d'une
négociation permanente, en dehors d'un rapport de forces, sur la base
d'une formule de 'médiateur arbitre, sans droit de grève,
reçoit l'adhésion d'un beaucoup plus grand nombre de personnes
qu'on peut le penser au premier abord. D'ailleurs, je ne l'ai pas avec moi,
mais j'ai déjà eu l'occasion de déposer à la
commission, au moment de l'étude des crédits de mon
ministère, du secrétariat du Conseil du trésor, les
résultats d'un sondage qui démontraient nettement que tout autant
les salariés consultés dans le cadre de ces sondages
scientifiques favorisaient la décentralisation, considéraient que
notre régime de négociation était trop centralisé,
tout autant une majorité d'entre eux - est-ce qu'on a les chiffres? -
une pluralité d'entre eux était d'accord avec une approche de
négociation permanente au niveau local, formule de médiateur
arbitre, sans droit de grève.
Je sais que cela a un poids très relatif, il s'agit d'un sondage
scientifique, quand même seulement d'un sondage, mais il nous semble que
c'est là une voie d'avenir. Ce n'est pas vrai qu'on a besoin, pour
régler le moindre problème dans nos relations du travail, d'un
arsenal lourd de part et d'autre et qu'à chaque négociation on
doive recommencer table rase, à zéro, comme si tout ce qui avait
été fait précédemment avait à être
remis en cause en entier. Ce sont ces principes qui nous ont guidés, ces
considérations qui nous ont guidés dans le choix des
mécanismes que nous avons retenus et qui sont reproduits dans le projet
de loi.
Le Président (M. Lachance): M. le
député de Rosemont.
M. Paquette: Oui, M. le Président. D'abord, je dois
constater, en tout cas, dans le secteur de l'éducation, que le
député d'Argenteuil semble avoir une approche beaucoup plus
près de la nôtre que celle du ministre dans son projet de loi. Je
n'en dirais pas autant dans le secteur des affaires sociales parce que
là, évidemment, la position du Parti libéral est
l'élimination du droit de grève. Nous, nous pensons que c'est une
fausse solution. Dans le domaine de l'éducation, il m'est difficile
d'être en désaccord avec le député d'Argenteuii qui,
contrairement au ministre, ne semble pas craindre l'exercice du rapport de
forces.
Je partage cette philosophie que notre système scolaire,
lorsqu'on parle de négociations locales, peut évoluer avec
davantage de garanties de qualité de vie au travail et de qualité
des services à la population dans un contexte de rapport de forces que
dans un contexte où la règle générale est le droit
de gérance. Le ministre, tout à l'heure, a dit: II ne faut pas
penser que le droit de gérance est un concept qu'il faut combattre, et
tout cela. Je veux bien, je pense qu'à un moment donné il faut
qu'il y ait des responsabilités qui soient attribuées dans la
société. Le problème n'est pas là. Lorsque
j'évoquais le droit de gérance, c'est que règle
générale le droit de gérance s'applique. Là, le
ministre nous dit: On va mettre un certain nombre de sujets dans l'annexe A qui
seront obligatoirement discutés localement dans un contexte où il
n'y a pas de droit de grève, où il y a un mécanisme de
médiateur arbitre, et, s'il n'y a pas entente entre les parties, on se
retrouve essentiellement avec le statu quo. (17 h 45)
II affirme que les deux parties auront intérêt, dans un tel
contexte, à se faire mutuellement des concessions. Je ne le pense pas,
M. le Président, car la règle générale étant
qu'en l'absence d'adhésion des deux parties, c'est la situation
précédente qui prévaut et que dans toutes les questions
qui ne sont pas discutées, de toute façon, le droit de
gérance prévaut. Je pense que le ministre, par son projet de loi,
vient de déséquilibrer complètement le rapport de forces
au niveau local, ce qui fait qu'au niveau national on va avoir tendance
à décentraliser le moins de choses possible et que dans le cas
des matières prévues à l'annexe A, on va
complètement faire basculer le rapport de forces du côté de
la partie patronale.
Or, malgré les effets désagréables de certaines
formes d'exercice du rapport de forces qui ont mené à des
conflits, on constate que ces conflits ne sont pas si nombreux et, à mon
avis, cela ne vaut pas la peine de se priver de l'apport des travailleurs et
des travailleuses syndiqués, particulièrement dans les
institutions d'enseignement qui peuvent, par le biais de la négociation
locale, confronter leur conception de l'organisation de la vie au travail et
des services qui sont offerts aux diverses clientèles avec celle des
patrons, des administrateurs au niveau local dans une optique
d'égalité. Ces deux points de vue peuvent être
confrontés sainement, sans que l'un ait le pouvoir de renvoyer l'autre
partie au statu quo ante ou à l'exercice régulier, qui est le
régime normal, de son droit de gérance.
M. le Président, je pense que le rapport de forces est quelque
chose de sain dans notre société et que le ministre a tort de le
supprimer. On aura l'occasion d'y revenir un peu plus loin, mais juste pour
donner un exemple, à l'annexe A, le ministre a prévu qu'au niveau
local, sans droit de grève permanent, comme il l'indique, on aura
à décider des mouvements de personnel, de l'organisation du
travail, des droits syndicaux.
Je prends l'exemple des droits syndicaux, qui m'apparaît
particulièrement évident. Cela veut dire qu'au niveau local on ne
pourra modifier le régime de droits syndicaux sans qu'il y ait exercice
d'un rapport de forces. Cela veut dire que le rapport de forces va être,
comme c'est la règle normale, du côté des administrateurs.
Je trouve cela un petit peu embêtant, pour ne pas dire totalement
inacceptable, que le ministre, notamment en ce qui concerne les droits
syndicaux, mais aussi divers aspects de l'organisation du travail, supprime -
c'est là où le bât blesse - le droit de grève au
niveau local, particulièrement dans le secteur de
l'éducation.
Je pense que le ministre et le gouvernement en général se
sont peut-être trop laissés influencer par un
phénomène qui est réel dans la population, qui est une
certaine exaspération face à l'exercice du droit de grève
et, disons-le franchement, un certain sentiment antisyndical. Je n'accuserai
pas le ministre de partager de telles intentions, mais son projet de loi en est
imprégné d'un bout à l'autre et nous allons nous priver de
l'apport d'un syndicalisme responsable, nous allons nous priver de l'apport des
travailleurs et des travailleuses dans l'organisation des services scolaires
qui ne pourront plus exercer le rapport de forces et corriger des situations
qui sont très souvent intenables, néfastes pour les services
à la population, pour ce qui est du fonctionnement concret des
institutions.
M. le Président, j'aimerais proposer, à l'article 44, un
amendement. Je pense qu'il va aller dans le sens de ce que le
député d'Argenteuil proposait tout à l'heure. Je pense
que, dès l'article 44, il faut commencer à imprégner, si
possible, un
nouvel esprit à ce projet de loi. Je proposerais au ministre de
remplacer, à la troisième ligne du premier alinéa, le mot
"définies" par les mots "convenues entre les parties".
M. le Président, je pense que cela fait en sorte qu'on s'assurera
que les questions qui seront renvoyées au niveau local, compte tenu du
mécanisme que le ministre maintient... Si le ministre nous avait
indiqué qu'il avait l'intention de modifier les mécanismes et de
restaurer le droit de grève au niveau local, l'attitude aurait pu
être différente, cela aurait atténué le
problème. Mais là, compte tenu qu'il ne souhaite pas,
semble-t-il, modifier ces dispositions, nous aimerions que les matières
devant faire l'objet de stipulations négociées et
agréées à l'échelle locale ou régionale,
suivant les articles 57 et 58, ne soient pas définies dans le projet de
loi, mais convenues entre les parties. Il y a un amendement aussi de
concordance. Comme le député d'Argenteuil a souligné son
intention de biffer l'article 58 un peu plus loin et je suis d'accord avec
cette optique, il faudrait enlever les mots "et 58", toujours dans le premier
alinéa.
Le Président (M. Lachance): Est-ce qu'il y a des
interventions sur la recevabilité? La motion d'amendement du
député de Rosemont est recevable.
M. Pagé: Le ministre semble impatient de le recevoir.
M. Clair: Je ne m'y attendais pas du tout, c'est une surprise
totale.
Le Président (M. Lachance): À l'article 44, la
motion d'amendement du député de Rosemont est la suivante:
Remplacer, à la troisième ligne du premier alinéa, le mot
"définies" par les mots "convenues entre les parties";
deuxièmement, biffer, à la cinquième ligne du premier
alinéa, les mots "et 58".
M. Clair: Est-ce que vous avez déclaré l'amendement
recevable, M. le Président?
Une voix: Oui.
Le Président (M. Lachance): J'ai demandé s'il y
avait des commentaires à faire sur la recevabilité. Par la suite,
j'ai déclaré l'amendement recevable.
M- Clair: De sorte qu'il serait trop tard pour moi, de plaider contre la
recevabilité.
Le Président (M. Lachance): J'en doute.
M. Pagé: Cela va être moins long.
M. Paquette: M. le Président, de consentement, je suis
bien prêt à entendre le ministre plaider sur la
recevabilité.
M. Clair: Je pense, M. le Président, que l'un des
principes fondamentaux du projet de loi, c'est, effectivement, la
décentralisation sans droit de grève, avec une liste
limitée de sujets. C'est l'un des principes. Chacun peut avoir son
évaluation, être pour ou contre. Mais c'est sans doute l'un des
principes fondamentaux de ce projet de loi: décentralisation de
matières obligatoires sans droit de grève, avec formule de
médiateur arbitre. Le projet de loi ayant été
adopté en deuxième lecture par l'Assemblée nationale, je
soutiens humblement qu'une interprétation valable du règlement et
du contenu de la loi pourrait certainement vous amener à conclure que
cet amendement, qui modifie en apparence seulement un mot, par
"négociées ou convenues", qui ont le même sens,
réintroduirait le droit de grève, éliminerait la liste des
matières décentralisées obligatoires et par là
viendrait modifier l'un des principes fondamentaux du projet de loi. Je le
soumets à votre appréciation et je me rendrai à votre
décision.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Rosemont, sur la recevabilité.
M. Paquette: M. le Président, sur la recevabilité,
si, chaque fois qu'on travaille les modalités, le ministre évoque
que le principe a été adopté à l'Assemblée
nationale...
M. Clair: Vous disiez vous-même tantôt que
c'était une question très importante.
M. Paquette: C'est une question très importante,
effectivement...
M. Clair: Ne venez pas dire maintenant que c'est une
modalité.
M. Paquette: Si le ministre veut me laisser compléter...
Il est exact que l'un des principes fondamentaux du projet de loi est de
favoriser la centralisation. Or, je soutiens que le fait que le ministre impose
un certain nombre de questions sans droit de grève et stipule dans
d'autres articles qu'on pourra, par la suite, déléguer d'autres
questions sans qu'il y ait de droit de grève au niveau local ne favorise
aucunement la décentralisation. Cela favorise le blocage, le statu quo,
l'"inexercice" du rapport de forces. Je ne pense pas qu'être en
désaccord avec les modalités que propose le ministre, c'est
d'être en désaccord avec le principe de favoriser la
décentralisation.
Le Président (M. Lachance): M. le député
d'Argenteuil, sur la recevabilité.
M. Ryan: Oui. Étant donné qu'il est 17 h 55 et
qu'on vous saisit d'une question qui a des implications assez
considérables, je me demande si ce ne serait pas une bonne chose de vous
suggérer de faire des consultations qui peuvent vous apparaître
opportunes et de nous soumettre une décision écrite ce soir au
début de la séance. C'est le genre de difficulté que nous
sommes susceptibles de rencontrer de nouveau dans l'examen des articles qui
viennent après celui que nous étudions, après l'article
44. Je pense que cela nous mettrait tous sur un terrain plus sûr. Je ne
veux pas du tout mettre en doute votre autorité. Si vous rendiez une
décision maintenant, je serais le premier à l'accepter, comme
vous le savez.
Je voudrais simplement vous mettre en garde contre
l'interprétation que vous propose le ministre parce qu'en même
temps que le ministre parlait à l'appui de sa demande, j'exminais les
notes explicatives qui ont été rédigées par le
gouvernement pour aider à comprendre les buts du projet de loi. Ce
projet a principalement pour objet... L'un des objets est de déterminer
des matières susceptibles de faire l'objet de négociations
à l'échelle régionale et des matières pouvant faire
l'objet d'arrangements locaux. Nous sommes d'accord. C'est un des objectifs
généraux du projet de loi. Maintenant, on peut le réaliser
de bien des manières. On peut bien établir que certaines
matières seront négociées à l'échelle locale
suivant telle et telle modalité, suivant tel et tel cheminement, suivant
un autre type de modalité qui conviendra davantage au gouvernement
qu'à l'Opposition, ou vice versa, je ne pense pas qu'on soit, dans le
domaine des principes, dans un domaine où aucun amendement ne saurait
être jugé recevable, aucun amendement du type de celui qui est
proposé. Maintenant, c'est un point de vue que je vous soumets avec
toute la considération nécessaire pour votre autorité et
la décision qu'il vous incombe de rendre en cette affaire.
M. Clair: Rien, c'est une blague.
Le Président (M. Lachance): M. le député
d'Argenteuil, je vous remercie de votre suggestion. Je me rends à cette
suggestion et, effectivement, je crois qu'il y aurait lieu...
M. Clair: Je voulais simplement intervenir, M. le
Président, un peu dans le même sens que le député
d'Argenteuil et sans vous demander nécessairement de décision
écrite. Le député d'Argenteuil a eu la gentillesse de me
remettre les amendements qu'il entend proposer dans ce chapitre. Je pense que
ce serait bon que vous en preniez connaissance, s'il avait l'amabilité
de vous en remettre également une copie. Cela pourrait faciliter vos
décisions à venir dans d'autres cas. Dans vos
considérations, je souligne que, si vous vous inspirez des notes
explicatives, sans doute pourrez-vous tenir compte du paragraphe 3 des notes
explicatives: Ce projet a principalement pour objet de, troisièmement,
qui traite de cette question, mais sans doute aussi du deuxième
alinéa de la deuxième page des notes explicatives qui
décrit assez substantiellement l'ensemble de la problématique
proposée par le projet de loi concernant la décentralisation, la
formule de médiateur arbitre et l'absence de droit de grève. De
la même façon, je me soumettrai sans hésiter à votre
décision.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: J'aimerais simplement, à la suite de la
remarque du ministre, dans votre réflexion, vous indiquer qu'il serait
faux de fonder votre décision sur l'ensemble des notes explicatives,
puisqu'il suffirait à un ministre parrain d'un projet de loi, d'allonger
les notes explicatives de façon à élargir indûment
le principe d'un projet de loi ce qui bloquerait toute discussion possible au
niveau de l'étude article par article. Je pense qu'il faudrait se fonder
bien davantage sur le début des notes explicatives que sur les
paragraphes qui suivent, qui viennent détailler et amplifier, où
on commence à entrer dans les modalités.
M. Clair: Je suis assez d'accord avec le député de
Rosemont, mais, dans la mesure où vous tiendriez compte, pour votre
prise de décision, des notes explicatives, je constate simplement
qu'elles sont plus longues que les deux ou trois lignes que le
député d'Argenteuil a lues.
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député d'Argenteuil.
M. Laplante: On va tous vous donner des conseils.
M. Ryan: M. le Président, juste un point pour vous
informer que, tout à l'heure, par esprit de courtoisie, j'ai
communiqué au ministre ainsi qu'à mes collègues, les
députés de Rosemont et de Deux-Montagnes, le texte d'un certain
nombre d'amendements que nous allons déposer en temps et lieu sur
certains articles qui viendront, les articles 57, 58 et 60. J'aimerais mieux ne
pas vous les communiquer maintenant pour ne vous embarrasser d'aucune
manière, étant donné que vous êtes l'arbitre
impartial et désintéressé de nos débats, et que
c'est toujours préférable, pour le bon exercice de vos fonctions,
que vous ne soyez pas mêlé aux gestes de nature plus politique
qui
peuvent se dérouler ici, même quand ils sont empreints de
courtoisie, comme l'Opposition en est capable.
Le Président (M. Lachance): Je tiendrai compte de vos
propos judicieux, M. le député d'Argenteuil. Effectivement, on va
prendre cette décision en délibéré. Comme il est 18
heures, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 2)
(Reprise à 20 h 15)
Le Président (M. Lachance): La commission du budget et de
l'administration poursuit ses travaux avec le mandat de procéder
à l'étude détaillée du projet de loi 37, Loi sur le
régime de négociation des conventions collectives dans les
secteurs public et parapublic.
Nous en étions à l'article 44; un amendement avait
été proposé par le député de Rosemont. Je me
suis rendu à la suggestion du député d'Argenteuil de
réexaminer la recevabilité de l'amendement. Je suis très
conscient qu'avant de rendre la décision, puisque je suis prêt
à la rendre, cette décision...
M. Pagé:... fera jurisprudence.
Le Président (M. Lachance):... n'aura pas de
conséquence historique.
M. Pagé: En raison de son contenu ou parce qu'elle est
rendue par vous?
Le Président (M. Lachance): Certainement en raison de son
contenu. Je n'ai pas l'intention de faire référence à de
savants experts dans le domaine, tels...
M. Clair:... le député de...
Le Président (M. Lachance):... MM. Erskine May, Beauchesne
et compagnie.
M. Paquette: Ah! Quelle érudition!
Le Président (M. Lachance): L'un des principes
fondamentaux du projet de loi 37 est d'assurer la décentralisation des
négociations. Or, biffer l'article 58, tel que c'est dit dans la
deuxième partie de l'amendement du député de Rosemont,
viendrait modifier substantiellement l'un des objectifs de base du projet de
loi. L'article 244 de nos règles de procédure se lit comme suit:
"La commission saisie étudie chaque article du projet de loi et les
débats portent sur les détails du projet. Les amendements doivent
se rapporter à son objet et être conformes à son esprit et
à la fin qu'il vise. " J'insiste particulièrement sur "son
esprit". Tel que présentée dans son ensemble, à cause de
la deuxième partie de la motion du député de Rosemont, je
dois donc juger la motion irrecevable. Cependant, je puis me permettre de faire
une suggestion: Si le député veut représenter cette motion
d'amendement...
Une voix:... la scinder...
Le Président (M. Lachance): Oui, en la scindant, à
ce moment-là, la première partie pourra être...
M. Laplante: N'allez pas trop vite.
M. de Bellefeuille: M. le Président, je suis sûr que
le député de Rosemont va vouloir intervenir sur la question, mais
je veux très brièvement vous féliciter de la sagesse de la
suggestion que vous venez de faire. Vous dites que votre décision n'est
pas historique. Je ne sais pas ce qui justifie pareille humilité de
votre part puisque je ne me souviens pas d'avoir entendu une décison
aussi directement fondée sur un article du règlement. D'autre
part, votre suggestion est extrêmement opportune et je suis sûr que
le député de Rosemont aura quelques propos à tenir
à ce sujet.
M. Paquette: M. le Président, je pense...
M. Laplante: Juste une question...
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député de Bourassa.
M. Laplante: Lorsqu'on a commencé nos travaux cet
après-midi, il y a eu un long exposé du député de
Vaudreuil-Soulanges...
Une voix:... Vaudreuil-Soulanges?
M. Laplante:... de Rosemont, enfin les deux...
M. Paquette: M. le député de Vaudreuil-Soulanges
n'était pas là.
M. Laplante:... sur l'absence de l'Opposition à ce
moment-là qui avait été mal informée, par un
concours de circonstance.
M. Paquette: Vaudreuil-Soulanges?
M. de Bellefeuille: Il veut dire le député de
Deux-Montagnes.
M. Laplante: Trouvez-vous qu'il est sage de commencer nos travaux
sans la représentation et en l'absence de la députée des
Îles-de-la-Madeleine qui, elle, est
inscrite et, actuellement, chef du groupe des indépendants?
Le Président (M. Lachance); M. le député, je
n'ai pas à formuler d'opinion sur l'absence ou la présence de
membres à cette commission. Si je regarde ceux qui sont là, c'est
avec ces personnes que nous devons travailler.
M. Laplante: Maintenant, un deuxième point, c'est
seulement une information que je veux vous demander. Le député de
Deux-Montagnes vous a fait à un moment donné un genre de menace,
d'aller plus haut pour contester une décision que vous aviez prise cet
après-midi. Il la trouvait impolie à son égard. Avec les
félicitations qu'il vient de vous faire, est-ce qu'il va retirer tout
cela?
M. Clair: Vous êtes-vous senti menacé?
M. Laplante: Vous êtes-vous senti menacé avec
cela?
M. Pagé: Êtes-vous affecté, M. le
Président?
Le Président (M. Lachance): J'ai eu l'occasion de prendre
un repas depuis ce temps et je sens que ma digestion se fait très
bien.
M. Pagé: Cela ne vous a pas empêché de
manger. Vous dormez bien...
M. de Bellefeuille: M. le Président, sur la question
soulevée par le député de Bourassa - je ne sais si c'est
une question de règlement - sur le premier point, je serais le premier
à appuyer l'idée d'une suspension en attendant le retour parmi
nous de Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine, si c'est
ce que le député de Bourassa propose, mais je reconnais que c'est
débattable. D'autre part, je n'ai jamais prétendu que le
président avait été impoli. Je me suis élevé
contre le fait qu'il m'accusait d'user de procédés dilatoires. Je
n'ai fait aucune menace. J'ai tout simplement indiqué que j'allais
examiner la question, à savoir si je devais recourir à des
moyens. Je voudrais vous informer, M. le Président - je remercie le
député de Bourassa de m'en donner l'occasion qu'ayant
mûrement réfléchi, ayant effectivement consulté sur
la question, j'ai décidé qu'il n'y avait pas de quoi fouetter un
chat. Par conséquent, l'incident qui n'a pas eu lieu est
déjà clos.
M. Laplante: Cela prouve, M. le député, que vous
êtes un bon chrétien. Vous en trouverez la signification dans le
dictionnaire.
Le Président (M. Lachance): Si vous le permettez, nous
allons revenir à l'article 44. M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, j'aimerais bien comprendre
votre décision parce que je pense qu'elle a des conséquences sur
notre attitude face aux autres articles qui viendront par la suite. Il y a des
interrelations très étroites dans le projet de loi.
D'une part, vous semblez dire que la première partie... Remarquez
que ma première intention était de présenter les deux
amendements séparément, mais, parce que les deux m'apparaissaient
très étroitement reliés, j'ai décidé de les
présenter en bloc. Ce qui m'étonne dans votre décision...
Comment peut-on avoir à la fois une liste convenue entre les parties,
qui est l'objectif de la première partie de l'amendement, et, en
même temps, une liste définie en annexe dans le projet de loi? Si
mon amendement était accepté, nous aurions une liste où
seraient négociées et agréées à
l'échelle nationale toutes les matières que contient la
convention collective à l'exception - et là mon amendement a pour
but de dire: des matières convenues entre les parties comme faisant
l'objet de stipulations négociées et agréées
à l'échelle locale.
Vous me dites que j'ai le droit de présenter cet amendement, mais
qu'en même temps je n'ai pas le droit d'extraire l'article 58 de cet
alinéa. Ce qui veut dire qu'on pourrait avoir à la fois, dans le
même article, si mon amendement était accepté, une liste
convenue entre les parties, mais qui serait en même temps fixée
dans l'annexe. C'est cela que j'ai de la misère à concilier.
M. Clair: Sur la question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le ministre.
M. Clair: Le député de Rosemont me fait penser
à l'avocat qui, ayant lu un obiter dictum, c'est-à-dire au juge
qui se prononce au-delà des questions qui lui sont soumises et qui
indique quelle pourrait être une orientation qu'il retiendrait advenant
que... Le député de Rosemont retient de vos propos que vous lui
auriez dit que, s'il proposait l'amendement scindé, vous l'accepteriez,
alors que l'interprétation que je fais de vos propos n'est absolument
pas celle-là. Votre obiter dictum était pour dire au
député de Rosemont qu'il y avait une possibilité de
scinder son amendement et, en conséquence, qu'il serait jugé
à sa juste valeur, mais que la deuxième partie de son amendement
était clairement irrecevable. Le président, à mon sens,
n'a pas disposé, dans sa décision, de l'amendement
éventuel que le député de Rosemont pourrait faire. Je
pense que le
on peut continuer avec la suite - peut-être que, M. le
Président, vous préférez qu'on procède comme cela -
mais on peut se retrouver à d'autres articles où on va
présenter des amendements, où on va faire un long débat
comme semble le souhaiter le ministre, d'ailleurs, sur la recevabilité
et, chaque fois, on va reprendre les débats de recevabilité,
alors que, si vous êtes en mesure de le faire - si vous n'êtes pas
en mesure de le faire, tant pis - vous pourriez me préciser sur cette
question ce que vous considérez être le principe du projet de loi.
Est-ce que le principe, c'est qu'une liste de matières faisant l'objet
d'une négociation locale ou régionale soit constituée et
est-ce que vous étendez le principe à la modalité que le
ministre a prévue dans son projet de loi, c'est-à-dire que c'est
le gouvernement qui fixe cette liste-là?
M. Clair: J'invoque à nouveau le règlement, M. le
Président. Le député de Rosemont cherche à obtenir
de vous un avis, une opinion préalable à la présentation
d'une motion et, quand il dit que par mes interventions sur le règlement
je cherche à allonger le débat, je réfute cet argument.
C'est le député de Rosemont qui cherche à obtenir de vous
une opinion avant même d'être saisi d'un amendement.
M. Laplante: Et on vous demande de trancher, M. le
Président, de demander s'il a une motion, oui ou non.
M. Paquette: M. le Président, je vous rappelle que c'est
le ministre qui a commencé le débat sur la recevabilité et
pas celui qui vous parle. (20 h 30)
Le Président (M. Lachance): II y a une décision qui
a été rendue, M. le député de Rosemont, et vous
savez fort bien que, dans nos règles de procédure, la
décision du président ne peut être discutée. Or,
c'est ce que nous faisons depuis cinq bonnes minutes. Je vous demanderais, si
vous avez une ou des motions, ou encore de la discussion à faire sur
l'article 44, de bien vouloir vous en tenir à cela.
M. de Bellefeuille: M. le Président, sur la question de
règlement. J'ai l'impression que nous ne sommes pas en train de discuter
votre décision. Le député de Rosemont cherche plutôt
à obtenir des éclaircissements qu'il ne peut obtenir que de vous,
M. le Président.
Le Président (M. Lachance): Je n'ai pas, M. le
député de Deux-Montagnes, à donner quelque indication que
ce soit sur le jugement éventuel sur la recevabilité, s'il y
avait éventuellement quelque motion que ce soit. Par conséquent,
je vous inviterais, s'il y a lieu, à poursuivre l'étude de
l'article 44.
M. Paquette: Très bien, M. le Président. En ce cas,
je vais vous proposer un amendement, qui est la première partie de
l'amendement que j'ai déposé tout à l'heure. Je pense que
vous l'avez devant vous. Il suffit de biffer la deuxième partie. Il
s'agit de remplacer, à la troisième ligne du premier
alinéa, le mot "définies" par les mots "convenues entre les
parties".
Le Président (M. Lachance): Sur la recevabilité, M.
le ministre.
M. Clair: Très brièvement, sur la
recevabilité, je pense que dans son argumentation, tantôt, le
député de Rosemont a lui même reconnu que ce
deuxième amendement serait également irrecevable puisqu'il
n'aurait guère de sens avec le reste de l'article.
Une voix: C'est cela.
M. Clair: Comme le législateur n'est pas censé
parler pour ne rien dire, il est encore moins censé parler pour dire des
choses contradictoires, ce qui serait le cas à l'article 44 si on
retient des annexes qui déterminent un contenu de sujets qui seraient
obligatoirement négociés au plan local, ce qui est incompatible
avec le remplacement du mot "définies" par le mot "convenues". Ce n'est
pas tant que cela s'en prendrait à un principe du projet de loi - je
pense que oui, cela vient à l'encontre de l'un des principes du projet
de loi - mais c'est surtout que, sur un article donné, l'article
n'aurait plus aucun sens et il est impossible que le législateur veuille
dire des choses contradictoires, surtout à l'intérieur du
même article.
M. Paquette: M. le Président, sur la
recevabilité.
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député de Rosemont.
M. Paquette: Le ministre a apporté deux arguments. Sur le
premier, le fait que l'amendement serait contradictoire par rapport à
l'un des principes du projet de loi, je vous ferai remarquer que le principe du
projet de loi en cause ici est qu'une liste de matières faisant l'objet
d'une négociation locale ou régionale soit constituée.
L'article 44 actuel stipule que cette liste est déterminée par le
gouvernement. Mon amendement vise à faire en sorte que cette liste soit
déterminée par négociation et entente entre les parties.
Le ministre étend le principe démesurément à ce qui
constitue des modalités.
Quant à son deuxième argument, à savoir que
l'article, tel qu'amendé, si
l'amendement était accepté par la commission, serait
"autocontradictoire". Je pense que le ministre préjuge du sort que nous
ferons à l'article 58, lorsque nous y serons. À ce moment-ci de
nos travaux, nous n'avons pas à préjuger du contenu de l'article
58.
M. Laplante: Monsieur...
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député de Bourassa.
M. Laplante: Vous lirez l'annexe B, à la page 30. Vous y
avez toute la liste définie qui correspond à l'article 44. Cela
avait pour effet de faire sauter une annexe qui est déjà dans le
préambule du projet de loi.
Le deuxième argument, c'est que la prudence du ministre qui
présente le projet de loi a été de s'assurer qu'il n'y ait
aucun coût pour l'État là-dedans et que rien ne fasse
l'objet, par le Conseil du trésor, de négociations
financières, etc. En ouvrant cette liste, aucun de nous ne peut
déterminer, au moment où on se parle, quel coût cela
pourrait entraîner pour l'État québécois. Seul le
ministre peut, par l'article 192, déterminer des articles qui peuvent
entraîner des dépenses. Pardon?
Le Président (M. Lachance): L'article 191.
M. Laplante: C'est l'article 191 au lieu de 192?
Le Président (M. Lachance): Oui.
M. Laplante: J'en perds; je les savais tous sur le bout de mes
doigts, à un moment donné.
Le Président (M. Lachance): C'est l'article 192, oui.
Une voix: C'est l'âge.
M. Laplante: Oui, c'est l'âge.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre.
M. Clair: Sur la recevabilité, toujours, M. le
Président, le député de Rosemont, je l'apprécie,
soulève un argument assez fin. Il dit: Nous ne pouvons présumer
du sort que nous réserverons aux articles 57 et 58 et, en
conséquence, l'argument du ministre, à savoir que mon amendement
aurait pour effet de rendre l'article "autocontradictoire", ne tient pas. C'est
assez fin, M. le Président, et j'apprécie. Cependant, je voudrais
lui souligner que, dans la décision antérieure que vous avez
déjà rendue et non dans une décision que vous pourriez
éventuellement rendre, vous avez dit, tantôt, que les articles 57
et 58, quant à eux, comportaient des questions de principe par rapport
au projet de loi. Or, il pourrait arriver que le député de
Rosemont propose des amendements aux articles 57 et 58. Il pourrait arriver que
le ministre, par ouverture d'esprit et avec sa majorité
ministérielle, décide de voter en faveur de ces amendements,
mais, en tout état de cause, ces amendements ne pourraient contredire le
principe des articles 57 et 58, de sorte qu'on revient à mon argument,
à savoir que, si l'on adoptait maintenant la motion d'amendement du
député de Rosemont, cela rendrait l'article 44
"autocontradictoire" puisque vous avez déjà indiqué, dans
votre décision précédente, celle que vous venez tout juste
de rendre, que des principes fondamentaux étaient contenus aux articles
57 et 58 et qu'on ne pouvait y déroger par amendement. Même le
ministre, M. le Président, est lié par cette règle. Non
seulement un député de l'Opposition ne peut modifier un principe
adopté par l'Assemblée nationale, mais même le ministre ne
peut proposer une telle modification parce qu'elle serait jugée
irrecevable également.
M. Paquette: M. le Président, sur la nouvelle question de
recevabilité posée par le député de Bourassa,
d'abord qui prétend que cet article implique des coûts...
M. Laplante: Pourrait. J'ai dit "pourrait".
M. Paquette: M. le Président, je pense que l'argument du
député nous interdirait de faire des amendements si, dès
qu'on modifie le régime de négociation, on pouvait se dire que
cela va changer la facture, en fin de compte. Tous les articles, ou presque, du
projet de loi vont être irrecevables; cela n'a aucun sens.
Deuxièmement, quant au nouvel argument du ministre, j'ai bien
compris que vous m'avez dit tout à l'heure que ce qui était
irrecevable, c'était de biffer, ici, l'article 58. Je ne pense pas que
vous ayez préjugé et que vous songiez à nous interdire
toute modification ultérieure, lorsque nous serons rendus à
l'article 58. Donc, il est faux de prétendre que, si mon amendement
était accepté, l'article 44, tel qu'amendé, serait
"autocontradictoire"; cela dépendra de ce qu'on fera à l'article
58.
Le Président (M. Lachance): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: Justement, je pense que le vrai débat va avoir
lieu autour des articles 57 et 58. Je ne pense pas qu'on ait profit à le
faire ici; cela dépendra de la logique qui sera retenue en fin de
compte. Ce qu'on dit
ici, essentiellement, c'est que, si on négociait à
l'échelle nationale toutes les matières que contient la
convention collective, à l'exception des matières définies
comme devant faire l'objet de négociations à l'échelle
locale, aux articles 57 et 58, je ne vois pas... Je ne pense pas qu'on devrait
s'épuiser à chercher des amendements ici. À mon point de
vue, c'est à l'autre endroit qu'il va falloir discuter et envisager la
possibilité d'amendements. Si on fait des amendements aux autres
articles, ce dont on peut douter, étant donné les orientations
indiquées par le ministre, mais on va le faire quand même, cela
entraînera inévitablement des modifications à l'article 44.
Je crois que, si on ne veut pas tourner en rond - c'est vraiment le cas d'un
groupe qui tourne en rond depuis déjà un certain temps - et je ne
voudrais pas faire perdre trop de temps au député de Rosemont et
au député de Deux-Montagnes en entrant dans des
considérations interminables non plus là-dessus, mais il me
semble qu'on a d'autres clauses qui viennent. Je pense qu'il faut
également discuter des articles 45 à 56.
Il y a deux choses qu'on peut faire: l'adopter en se disant: Si jamais
on modifie les autres, il va falloir y revenir ou le garder en suspens en se
disant: On l'adoptera en même temps que les autres. Je ne crois pas que
ce soit le bon endroit pour faire une discussion éclairée. C'est
un strict point de vue de méthode.
M. Paquette: M. le Président, je partage en partie
l'opinion du député d'Argenteuil. Je pense que les articles 44,
57 et 58, notamment, sont tellement intimement liés que, si on modifie
les articles 57 ou 58, il faudra faire des amendements de concordance ici et
inversement. J'ai pensé qu'on pouvait faire le débat ici à
l'article 44. Le ministre a préféré s'engager dans un
débat de procédure. Cela fait deux fois qu'on discute de
recevabilité. Cependant, M. le Président, cela nous a
peut-être permis de mieux comprendre jusqu'où s'étendait le
principe du projet de loi. Cependant, j'aimerais bien qu'on entende votre
décision, qu'on dispose de l'amendement que j'ai soumis et qu'on en
arrive au débat de fond, à un moment donné.
Le Président (M. Lachance): Ma compréhension de...
Oui, M. le député d'Argenteuil?
M. Ryan: Juste un dernier point. Je n'aime pas qu'on vous oblige
à rendre des décisions, parce que, même si vous les rendez
consciencieusement et de manière compétente, j'ai toujours
l'impression qu'elles limitent ma liberté future. Chaque fois qu'on vous
soumet un problème, il faut que vous le régliez. Vous devez
être heureux quand vous n'en avez pas à régler.
Le Président (M. Lachance): Vous avez raison, M. le
député d'Argenteuil.
M. Ryan: Merci.
M. Paquette: M. le Président, je voulais simplement dire
que c'est le ministre qui a demandé au président si l'article
était recevable. Par conséquent, on s'attend que vous rendiez une
décision sur la recevabilité. Je ne voulais pas vous imposer une
décision.
M. Clair: M. le Président, ce n'est pas moi qui ai pris
l'initiative de proposer un amendement, c'est le député de
Rosemont...
M. Paquette: M. le Président, j'espère qu'on a le
droit de faire des amendements à cette commission?
M. Clair:... qui, en soumettant un amendement, soumettait cet
amendement à votre opinion quant à sa recevabilité.
Le Président (M. Lachance): Le président doit
toujours, lorsqu'une motion d'amendement lui est présentée,
déclarer qu'elle est ou non recevable. Il n'y a pas d'erreur
là-dessus. Alors, j'accepterai une dernière intervention avant de
rendre une décision, à moins que le député de
Rosemont ne retire sa motion d'amendement. J'aime bien les derniers propos du
député d'Argenteuil. Personnellement, je ne suis pas un fanatique
de la procédurite. Le rôle de la présidence exige la prise
de certaines décisions, mais cette façon de procéder ne me
sourit guère. M. le député de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, pour le peu que j'ai pu en
comprendre, il me semble qu'on réglerait facilement la question que vous
venez de soulever. Il n'est pas intéressant de s'enfermer et de se
bloquer les pieds dans le ciment. Je ne pense pas que ce soit l'objectif de
personne. Une solution bien simple, qui réglerait à la fois le
problème dont vous venez de parler et une partie de l'intervention du
député d'Argenteuil, serait, comme les deux sont reliés et
qu'on pourra difficilement faire le débat de fond à un article
sans parler de l'autre, que le ministre accepte de suspendre l'article 44. Cela
vous empêcherait pour l'instant de vous prononcer sur la
recevabilité comme telle.
Il est clair qu'en tant que président, chaque fois qu'il y a un
amendement, vous devez vous prononcer sur la recevabilité, mais
peut-être que, lorsqu'on sera rendu à l'article 57 et qu'on aura
discuté des articles 57 et 58, l'article 44 n'aura plus d'utilité
et qu'il n'y aura plus d'utilité, lorsqu'on y
reviendra, d'apporter un amendement parce que la question aura
été réglée. Il me semble qu'il serait prudent de
faire cela parce qu'un débat réglera l'autre, finalement. Tandis
que, même si vous ne reteniez pas l'amendement, je suppose bien que la
réaction de n'importe quel député serait d'essayer de
trouver une autre façon de relier des choses qui, dans le texte
même de la loi, sont reliées, c'est-à-dire l'article 58 en
fonction de l'article 44. Je ne sais pas si le ministre accepterait, pour aller
plus rapidement, d'attendre qu'on fasse le débat à l'article 58
et de revenir à l'article 44 par la suite. (20 h 45)
M. Clair: Voilà enfin le leader du groupe; Je lui dirai
que j'ai eu l'occasion de consentir au moins six ou sept fois à des
suspensions d'articles et je pense que mes collègues n'ont consenti
qu'une fois à l'adoption d'un article, sous réserve qu'il soit
modifié par concordance. Peut-être serait-ce votre tour d'accepter
que l'on adopte l'article 44 tel qu'il est et, s'il y a de la concordance
à effectuer, lorsqu'on sera rendu aux articles 57 et 58, je pense qu'il
ira de soi que l'article 44 sera modifié par concordance.
M. Bisaillon: Je ne veux pas prolonger les discussions, M. le
Président. Je veux indiquer au ministre que le premier soir où
j'ai participé à la commission, je me souviens fort bien
qu'à deux reprises on a adopté des articles sous réserve
d'une reformulation à laquelle le ministre devait songer. Cela ne
m'inquiète pas de procéder de cette façon.
Dans les circonstances, il y a un débat de fond à
l'article 44. Nous demander de l'adopter sous réserve et d'attendre de
faire le débat de fond, il me semble que cela n'est pas cohérent
au moment où on se parle. Ce qui serait plus cohérent, ce serait
de procéder au débat là où il va devoir se faire,
à l'article 58, et probablement qu'il n'y aura plus de débat
à l'article 44 par la suite. Il se fera véritablement à
l'article 58.
M. de Bellefeuille: M. le Président...
Le Président (M. Lachance): L'article 44 est
suspendu...
M. Clair: Vous noterez sûrement dans votre petit calepin
que j'ai consenti plus souvent qu'on suspende des articles que cela fait de
fois que vous acceptez qu'on en adopte et qu'on les modifie par
concordance.
M. de Bellefeuille: M. le Président, avant que vous ne le
suspendiez, est-ce que...
M. Paquette: Cela ne change rien, le ministre n'accepte
pratiquement aucun de nos amendements.
M. Clair: Si cela ne change rien, M. le Président, le
député de Rosemont pourrait lâcher tout autant quemoi, mais c'est accepté.
M. de Bellefeuille: M. le Président, est-ce qu'il y a
moyen d'intervenir sur le deuxième alinéa de l'article 44 avant
de le suspendre?
M. Laplante: II est suspendu.
Le Président (M. Lachance): II est suspendu dans sa
totalité. Nous en arrivons à l'article 45. J'appelle l'article
45. Il se lit comme suit: "Les stipulations négociées et
agréées à l'échelle nationale peuvent faire l'objet
d'arrangements négociés et agréés à
l'échelle locale ou régionale conformément à
l'article 70. "
M. Clair: Je n'ai pas d'amendement à proposer, M. le
Président.
M. Bisaillon: N'est-ce pas le même problème que
celui qu'on vient de discuter?
M. Clair: Voilà le jeu, M. le Président!
M. Bisaillon: Non, les articles suivants ne sont...
M. Clair: On va tous les suspendre. M. Bisaillon:... pas
de cet ordre.
Une voix: II faudrait commencer par la fin.
Le Président (M. Lachance): On peut adopter les
annexes.
M. Bisaillon: Ce n'est pas bête: Si on discutait des
annexes? Si le ministre veut bien regarder... M.Clair: M. le
Président, ce n'est pas sérieux. On vient tout juste de consentir
en toute bonne foi à suspendre l'étude d'un article. On n'a pas
sitôt entamé l'étude de l'autre que le député
de Sainte-Marie dit: Celui-là aussi, on le suspend. Allons-y
gaiement!
M. Bisaillon: Je ne vous ai pas dit qu'on le suspendait. J'ai dit
qu'il me semblait que c'était le même problème.
M. Clair: Cela a des chances d'être le même
problème tout au long de la section III qui, au complet, traite du mode
de négociation des stipulations négociées et
agréées à l'échelle nationale. Quand vous
voulez aller aux articles 57 et 58, on parle des stipulations
négociées et agrées à l'échelle locale ou
régionale.
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député d'Argenteuil.
M. Ryan: À des fins d'information, est-ce que la loi 55
nous rapporte à l'article 4?
M. Clair: Oui, M. le Président, il remplace en partie
l'article 4 de la loi 55.
M. Ryan: Est-ce qu'il y a quelque chose de différent dans
notre article 45 par rapport à l'article 4 de la loi 55, sauf les mots
"conformément à l'article 70" qui remplacent les mots "dans la
mesure où ces dernières y pourvoient". Est-ce qu'il y a quelque
chose de différent à part cela?
M. Clair: Je n'ai pas le texte des anciens articles à cet
article-ci, mais je pense que c'est substantiellement la même idée
que l'article 4 de l'ancienne loi.
M. Ryan: Je vous donne mon impression. Je crois que cela va de
soi dans la perspective où je me situe. Les parties négocient
à l'échelle nationale et les stipulations qui ont
été négociées et agréées à
l'échelle nationale peuvent faire l'objet d'arrangements
négociés et agréés à l'échelle locale
ou régionale. Il me semble que...
M. Clair: C'était déjà le cas.
M. Ryan:... cela va de soi. Il y a les mots "conformément
à l'article 70" qui peuvent donner naissance à un
problème, quoique je ne le croie pas. J'ai lu l'article 70 et je ne
crois pas qu'il y ait de problème là.
M. Clair: Je ne le crois pas non plus, M. le
Président.
M. Ryan: Sauf l'affaire des annexes, je mets un point de
suspension général là-dessus.
M. Clair: C'est la relation avec les annexes qui prévoient
une liste limitée de sujets sur lesquels les parties sont, selon la loi,
habilitées à procéder à des arrangements locaux
sans qu'il soit nécessaire pour les parties nationales d'en
convenir.
M. Ryan: Vous comprendrez que dans mon cas il y a toujours la
réserve relative au régime différent que je souhaiterais
voir pour le secteur de l'éducation par rapport au secteur des affaires
sociales.
Cela dit, je crois que c'est une chose qui va de soi, qui est assez
difficile de refuser parce qu'elle me semble, d'abord, s'inscrire dans la
tradition qui est déjà implantée et, deuxièmement,
parce que cela me semble une affaire assez logique.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Une question seulement, M. le Président. La
plupart des conventions collectives qui ont été
négociées à l'échelon national comportaient au
moins à l'intérieur une clause qui prévoyait, quand ce
n'était pas la loi, un certain nombre d'arrangements locaux si les
parties y consentaient. Sauf que je ne vois pas l'utilité - j'aimerais
que le ministre m'explique - de relier cela nécessairement à
l'article 70. Autrement dit, si je lisais le texte sans dire
"conformément à l'article 70", j'atteindrais les mêmes
objectifs que ceux qu'on poursuivait dans le passé et qu'on poursuit,
dans la loi actuelle. Si je dis: "les stipulations négociées et
agréées à l'échelle nationale peuvent faire l'objet
d'arrangements négociés et agréés à
l'échelle locale ou régionale", je comprends que cela peut
vouloir dire les deux choses: ou bien une fois qu'elles ont été
négociées à l'échelon national, elles pourraient
faire l'objet d'arrangements locaux, ou encore on pourrait
ultérieurement décider qu'elles seront agréées et
négociées à l'échelon local. Il y a les deux.
Tandis que: "conformément à l'article 70", ça nous
ramène uniquement à ce qui est prévu à l'article
70, c'est-à-dire aux situations prévues à l'article 70.
Pour être plus clair, M. le ministre, si, par exemple, une question de
négociation nationale était prévue...
M. Clair: Cela doit se lire ensemble. L'article 70 dans son
premier alinéa fait référence à l'annexe B qui
prévoit des sujets sur lesquels il y a des arrangements locaux qui
peuvent intervenir de droit, je dirais. Le deuxième paragraphe indique
que, outre ce qui est prévu au premier alinéa, les parties
à une convention collective peuvent également négocier et
agréer de tels arrangements dans la mesure où une stipulation
négociée et agréée à l'échelle
nationale y pourvoit.
M. Bisaillon: C'est le sens de ma question. Si, par exemple, une
question n'est pas d'objet local, n'est pas prévue à l'annexe,
est négociée, est donc convenue à l'échelon
national...
M. Ryan: Prévue à l'annexe quoi? M. Bisaillon:
À l'annexe B.
M. Ryan: Mais qu'est-ce qui n'est pas prévu?
M. Bisaillon: L'objet de négociation. Supposons qu'on
prévoie quinze objets de
négociation qui seront discutés uniquement au palier local
et qu'on en prévoie d'autres qui seront uniquement
négociés et convenus à l'échelon national, ma
question est: Est-ce que les objets de négociation qui ne seront que
discutés à l'échelon national pourraient, une fois qu'ils
auront été convenus à l'échelon national et si les
parties locales sont d'accord, faire l'objet d'arrangements locaux? Si oui, je
ne vois pas pourquoi on ajoute "conformément à l'article 70"
parce qu'on le restreint. Je comprends l'objectif de relier cela à
l'article 70 pour ce qui est du local. Les matières prévues par
l'annexe B, auquel l'article fait référence, ce sont les sujets
de la négociation selon les secteurs d'activité. Dans le secteur
des affaires sociales, il y a la règle d'éthique entre les
parties, la reconnaissance syndicale, le régime syndical, etc. On a une
série de 35 sujets. Dans le secteur de l'éducation, il y en a 27;
dans le secteur des commissions scolaires, il y en a 22; en ce qui a trait au
personnel de soutien, il y en a 18. Si je comprends bien, l'annexe B
prévoit les matières négociables à l'échelon
local. Quand on se réfère à l'article 70, ça
prévoit aussi ces discussions. Ma question au ministre, c'est de dire:
Si ce sont des matières qui ne sont que discutées à
l'échelon national, est-ce qu'elles pourraient quand même faire
l'objet, après entente entre les parties, d'arrangements locaux?
M. Clair: La différence entre l'article 45 et l'article
70, c'est que l'article 45, dans le fond, donne le pouvoir aux parties
nationales... Attendez un peu que je le relise l'un donne des pouvoirs aux
parties nationales de convenir entre elles de déléguer le pouvoir
aux parties locales et de s'entendre, l'autre prévoit que les parties
locales sont habilitées de par la loi à exercer le pouvoir
d'arrangements locaux sur certaines matières définies dans la loi
pour une partie et, deuxièmement, de recevoir la
délégation qui leur serait faite des parties nationales quant
à d'autres matières.
M. Bisaillon: Uniquement à partir du moment où
l'entente nationale le prévoit. Si je lis l'article 70, c'est dans la
mesure où une stipulation négociée...
M. Clair:... prévue par les parties. Un juriste...
M. Bisaillon: C'est la différence que j'aimerais que l'on
m'explique entre l'article 45 et le deuxième paragraphe de l'article
70.
M. Clair: Je ne comprends rien à la question du
député.
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député d'Argenteuil.
M. Clair: On va donner l'explication.
M. Bisaillon: Bien, on va peut-être avoir une
réponse.
M. Ryan: II me semble que le premier paragraphe de 70, c'est pour
les articles qui sont mentionnés à l'annexe B, les 35 sujets.
M. Bisaillon: Oui.
M. Ryan: Le deuxième paragraphe, c'est pour d'autres
sujets...
M. Bisaillon: Oui.
M. Ryan:... dont la convention nationale pourrait convenir sans
qu'ils soient compris dans la liste.
M. Bisaillon: Oui, mais pour autant que... Si je comprends bien
le deuxième paragraphe de 70, c'est pour autant que la convention
nationale stipule que telle clause peut être négociée et
agréée à l'échelon local...
Une voix: Exactement.
M. Bisaillon:... tandis que l'article 45 est plus large que cela
dans sa première formulation. Cela dit: Une fois que les parties
nationales ont convenu, les parties locales pourraient procéder à
des arrangements.
M. Ryan: Parce que l'article 45 dit: conformément à
l'article 70.
M. Bisaillon: Voilà:
M. Ryan: C'est l'article 70 qui donne les limites, les
paramètres.
M. Bisaillon: Alors, ma question est la suivante: Si on dit:
conformément à l'article 70, c'est parce qu'on veut le
restreindre par l'article 70 et, si on veut le restreindre par la portée
de l'article 70, l'article 70 devient suffisant et l'article 45 n'ajoute rien.
C'est ce que je voudrais me faire expliquer.
M. Clair: Me Jean-François Munn.
M. Munn (Jean-François): L'article 45, c'est la
création du droit à des stipulations négociées et
agréées à l'échelle nationale, le droit de faire
des arrangements locaux, et l'article 70, c'est le pouvoir de le faire pour les
parties locales. L'article 45, c'est ce qui donne ouverture à ce qu'il y
ait des arrangements locaux sur les stipulations négociées et
agréées à l'échelle nationale.
M. Bisaillon: Et l'article 70?
M. Munn: L'article 70, c'est le pouvoir pour les parties locales,
conformément à la façon dont c'est écrit à
l'article 70, de le faire.
M. Bisaillon: Mais le pouvoir de le faire dans les limites que
l'article 70 fixe.
M. Munn: Oui, le pouvoir de le faire dans les limites
fixées par l'article 70, mais le droit vient de l'article 45.
M. Bisaillon: D'accord, mais le pouvoir qui est donné
à l'article 70 pour ce qui est des clauses agréées
à l'échelon national est limité par le texte même du
texte national, c'est-à-dire que, si le texte national prévoit
que sur tel sujet convenu à l'échelon national, il peut y avoir
des aménagements, l'article 70 va pouvoir s'appliquer. D'accord? Donc,
le droit reconnu à l'article 45 va pouvoir s'appliquer à
l'article 70 pour autant que la clause même du texte de l'entente
nationale va stipuler que cela peut faire l'objet d'arrangements locaux, comme
cela existait dans le passé; il n'y a rien de neuf, cela existait.
M. Ryan: Cela prend cela, autrement on aurait deux
négociations, une par-dessus l'autre, cela ne tiendrait pas debout. On
ne peut pas faire la négociation deux fois.
M. Bisaillon: C'est-à-dire qu'il y a déjà eu
au niveau national - M. le ministre s'en souviendra - il y a déjà
eu au niveau national une clause générale permettant des
arrangements locaux pour autant que cela ne modifiait pas le paiement en fin de
compte. Je vous donne un exemple: On ne le pourrait pas sur la classification.
On ne pourrait même pas s'arranger localement sur la classification parce
que c'est convenu. Ce n'est même pas négocié au niveau
national.
M. Ryan: On va le mettre dans la convention nationale, cela.
M. Bisaillon: Pardon?
M. Ryan: On va pouvoir le mettre cela dans la convention
nationale. C'est ce que veut dire le deuxième paragraphe.
M. Bisaillon: À ce moment-là, j'aurais une
deuxième question sur l'expérience du passé sur les
discussions que cela entraîne au niveau d'une table centrale. Je suppose
bien que chaque fois qu'il y a un sujet de cet ordre, on essaie de voir si on
pourra l'arranger localement. Quelles sont les discussions que cela
entraîne en termes de temps, en termes d'investissement
d'énergies? Est-ce que cela a été important dans le
passé?
M. Munn: Si vous voulez parier de la situation concrète
comme elle se vit dans les établissements, les commissions scolaires ou
les collèges, c'est que, dans le passé, les parties au niveau
national ont très peu prévu de possibilités d'arrangements
locaux sur des articles et que, dans la réalité, les parties
locales ont fait énormément d'arrangements locaux de telle sorte
que ces arrangements locaux, comme ils n'étaient pas prévus dans
les stipulations négociées et agréées aux
échelles nationales, étaient des arrangements
illégaux...
M. Bisaillon: Illégaux.
M. Munn:... avec lesquels les parties vivaient.
Or, ce que l'article 45 vient faire, pour répondre à votre
question, l'article 45 donne ouverture au droit de faire des arrangements
locaux, mais il y donne ouverture de deux façons, alors qu'auparavant il
n'y avait qu'une façon. Le pouvoir et les façons de le faire se
retrouvent à l'article 70, c'est-à-dire soit l'annexe qui...
M. Bisaillon: Les objets spécifiques.
M. Munn:... l'annexe qui dans les faits vient tout simplement
concrétiser la situation existante, c'est-à-dire que les sujets
en annexe sont, en gros, les sujets sur lesquels il y avait des arrangements
locaux autrefois...
M. Bisaillon: Possibles.
M. Munn:... mais qui n'étaient pas prévus par les
parties au niveau national.
M. Clair: Pas des arrangements possibles, des arrangements locaux
qui, dans les faits... (21 heures)
M. Bisaillon:... actuellement.
M. Clair:... actuellement, ont cours. M. Munn: C'est
ça.
M. Bisaillon: D'accord, pas seulement ceux qu'on retrouvait dans
les décrets ou dans les conventions collectives.
M. Munn: Et la souplesse se retrouve au deuxième
paragraphe de l'article 70 où on dit que les parties à
l'échelle nationale peuvent aussi prévoir en dehors des listes de
l'annexe B d'autres sujets sur lesquels il y aurait des arrangements locaux.
L'article 45 est nécessaire, parce que c'est ce qui crée le droit
et, l'article 70, c'est le pouvoir pour les parties locales,
conformément...
M. Bisaillon: Les pouvoirs et les
limites.
M. Munn: Et les limites, oui. M. Bisaillon: D'accord.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 45 est
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Lachance): L'article 45 est
adopté. J'appelle l'article 46 où il y a un amendement.
M. Clair: Oui, M. le Président. Je propose que l'article
46 du projet de loi soit modifié de la façon suivante:
premièrement, par l'insertion, à la fin de la troisième
ligne, des mots "à l'exception des salaires et échelles de
salaires", et, deuxièmement, par l'addition de l'alinéa suivant,
et je cite: "Dans le secteur des affaires sociales, la demande au ministre est
faite par un sous-comité patronal de négociation ou par la partie
syndicale qui négocie avec ce sous-comité. Le différend
que le médiateur ainsi nommé est chargé de régler
comprend l'ensemble des matières visées par l'article 44 qui
concernent les établissements que représente le
sous-comité, à l'exception des salaires et échelles de
salaires. "
M. le Président, une brève explication. Ces amendements
visent à exclure les salaires et échelles de salaires de la
médiation, puisque, à toutes fins utiles, il existe une
mécanique à l'institut de recherche dont c'est, en quelque sorte,
le rôle même, l'essence même de son existence est de tenter
de rapprocher les parties sur leurs connaissances communes de
l'évolution et du niveau des salaires, même si ce n'est pas un
organisme de médiation proprement dit, en aucune façon, mais je
pense que point n'est besoin, à cet égard, d'ajouter une
étape de médiation.
Deuxièmement, le deuxième alinéa vise à
éviter le dédoublement des mandats de médiateurs dans le
secteur des affaires sociales.
Le Président (M. Lachance): Est-ce qu'il y a un
amendement? M. le député d'Argenteuil.
M. Ryan: J'aurais une question d'information à poser au
ministre, pour commencer. Je ne retrouve pas du tout dans le texte du projet de
loi le concept de conciliation. Qu'est-ce qui arrive de l'étape de la
conciliation dans tout ce projet de loi?
M. Clair: M. le Président, sauf erreur, dans les faits et
dans la loi, le ministre du Travail aurait toujours pu, en vertu du Code du
travail, nommer un conciliateur, mais semble-t-il que, sauf en de très
rares exceptions, une telle procédure de conciliation n'a pas
été mise en marche, de sorte que, sur le plan de la conciliation,
ce sont les dispositions générales du Code du travail qui
continueraient de s'appliquer.
M. Ryan: Je voudrais que ce soit bien clair. À votre avis,
est-ce que les relations de travail et la négociation des conventions
collectives dans le secteur que veut embrasser le projet de loi 37 tomberaient
en même temps sous les dispositions générales du Code du
travail et les dispositions de la loi 37 ou si, aux fins de la
négociation dans les secteurs public et parapublic, ce n'est pas
la loi 37? Est-ce qu'il y a des clauses qui précisent cela, le rapport
entre les deux?
M. Clair: Le Code du travail est une loi d'application
générale et, à moins qu'une loi particulière comme
la loi 37 ne vienne modifier les contenus du Code du travail, c'est le Code du
travail qui s'applique.
Le Président (M. Laplante): D'accord?
M. Ryan: J'ai besoin d'autres précisions là-dessus.
Comment cela va-t-il s'inscrire dans nos lois par rapport au Code du travail?
C'est cela qui m'intéresse. C'est une loi complètement distincte.
Je ne sais pas si vos conseillers juridiques pourraient me fournir des
précisions, M. le ministre. Ils pourraient nous en fournir, et je ne
veux pas mettre en doute votre autorité, pas du tout.
M» Clair: Oui, sans aucun doute, M. le Président, avec
plaisir. Allez-y donc!
M. Ryan: Parce que c'est une question assez technique.
M. Clair: Voulez-vous la répéter, s'il vous
plaît?
M. Ryan: Oui, c'est le rapport entre le Code du travail et le
projet de loi 37, comment cela va s'imbriquer l'un dans l'autre. Quelles sont
les dispositions du Code du travail qui ne s'appliqueront plus dans ce secteur
et quelles sont celles qui continuent de s'appliquer, s'il y a lieu?
M. Munn: Je vais vous rappeller l'article 111. 1 du Code du
travail qui dit: À l'exception...
M. Ryan: Attendez un peu. On va y aller tranquillement. J'ai tout
cela ici. Vous dites l'article 111. 1?
M. Munn: L'article 111. 1 des secteurs public et
parapublic...
M. Ryan: C'est ce que je voulais
savoir.
M. Munn:... la section III. Alors, dispositions applicables:
"À l'exception de la section 1. 1 du chapitre IV, les dispositions du
présent code s'appliquent aux relations du travail dans les secteurs
public et parapublic, sauf dans la mesure où elles sont inconciliables
avec celles du présent chapitre. "
M. Ryan; H ne resterait qu'à vérifier ce qu'est la
section 1. 1 du chapitre IV.
M. Munn: Le chapitre IV, c'est: "Du règlement des
différends et des griefs".
M. Ryan: Attendez un peu. Règlement des
différends?
M. Munn: "Du règlement des différends et des
griefs", et la section 1. 1, c'est la première convention
collective.
M. Ryan: Voulez-vous me dire quels sont les articles du chapitre
IV?
M. Munn: Le chapitre IV, ce sont les articles 74 et suivants et
plus spécifiquement les articles 93. 1 et suivants. C'est le
système de la première convention collective.
M. Ryan: C'est ce que je pensais. À l'exception de cela,
les dispositions du code s'appliquent aux relations du travail dans les
secteurs public et parapublic, sauf dans la mesure où elles sont
inconciliables avec celles du présent chapitre.
Qu'est-ce qui arrive de ce qu'on appelle le présent chapitre?
Qu'est-ce qui arrive de la loi 37?
M. Munn: "Des secteurs public et parapublic"? Il y a des
amendements qui sont apportés au Code du travail.
M. Ryan: Très bien.
M. Munn:... à partir du chapitre VI, à la page 20,
les articles 82 et suivants qui viennent modifier la section III du Code du
travail, c'est-à-dire les articles 111 et suivants.
M. Ryan: D'accord. Alors, selon votre interprétation,
l'intervention d'un conciliateur prévue dans le Code du travail pourrait
s'exercer dans ce cas-ci. Est-ce que d'après le Code du travail le
conciliateur n'intervient pas même avant la fin de la période
prévue pour la négociation d'une convention?
Le ministre a dit tantôt que la conciliation n'était pas
intervenue souvent dans le secteur public par le passé. C'est vrai,
c'est nous qui avons insisté pour que le gouvernement la fasse
intervenir la dernière fois. Vous vous souvenez, le gouvernement avait
refusé. Nous trouvions que cela n'avait pas de bon sens et, à
force d'insister, nous avons fini par obtenir la commission parlementaire, et
vos collaborateurs qui sont ici s'en souviennent comme moi, pour que le
gouvernement accepte de se soumettre lui aussi à l'étape de la
conciliation comme n'importe quel employeur. Je ne sais pas si cela avait
été bénéfique ou maléfique, mais cela a
produit des résultats qui ont permis de déboucher sur une entente
qui a atténué sensiblement les effets de la politique
décrétale du gouvernement. Cela resterait, la conciliation
pourrait intervenir, d'après vous, M. le Président?
M. Munn: Sous réserve de vérifier quelque chose
dans le cas de M. Ryan, à ma connaissance, la conciliation n'est jamais
intervenue dans les négociations des secteurs public et parapublic. Si
je me souviens bien, en 1976, lors de différends dans le secteur de
l'éducation, il y avait eu trois sages de nommés qui ont
assisté au déroulement des négociations, pour une partie,
vers la fin. En 1979...
M. Ryan: Je ne m'en souviens pas, mais en 1983?
M. Munn:... je pense qu'il n'y en a pas eu. La dernière
fois, il y en a eu dans le secteur des cégeps et...
M. Ryan: Des commissions scolaires.
M. Munn:... des commissions scolaires. Maintenant,
c'était...
M. Ryan: Gauthier-Désilets.
M. Munn: C'est ce que l'on pourrait appeler par analogie un
conseil de médiation qui était tripartite dans les faits.
M. Ryan: Cela a été appelé conciliation,
cependant, mais on pourrait dire que c'était plus de la
médiation.
M. Munn: Oui. Comme les trois sages de 1976 avaient
été appelés à la conciliation, si je me souviens
bien, mais c'est une formule ad hoc qui avait été trouvée
pour 1976 et, dans le cas de la dernière ronde de négociations,
la formule était similaire dans les cégeps,
l'élémentaire et le secondaire, mais c'était un conseil de
médiation tripartite.
M. Ryan: Là, juste pour préciser la situation qui
découlerait de l'adoption de l'article 46, au premier stade de la
négociation, pendant, disons, les trois mois qui
précéderaient l'expiration de la convention collective, est-ce
que la
conciliation interviendrait obligatoirement ou non?
M. Munn: Vous voulez dire la conciliation prévue dans le
Code du travail?
M. Ryan: Oui. Vous m'avez dit tantôt...
M. Munn: La conciliation prévue dans le Code du travail
est volontaire, c'est-à-dire que les parties ne sont pas obligées
d'y recourir. Je n'ai pas la date de l'amendement, mais il y a à peu
près cinq ou six ans, si ce n'est pas un peu plus, le code a
été amendé pour rendre la conciliation volontaire, alors
qu'autrefois elle était obligatoire dans l'ensemble des secteurs.
M. Ryan: Juste pour mon information, est-ce qu'actuellement il
faut qu'elle soit demandée d'un commun accord par les deux parties ou
s'il suffit d'une demande d'une des deux parties pour qu'il y ait
conciliation?
M. Munn: Je pense que c'est à la demande d'un des
deux.
M. Ryan: Je pense que oui.
M. Munn: L'article 55 dit: "À toute phase des
négociations, le ministre peut, d'office, désigner un
conciliateur; il doit alors informer les parties de cette nomination. "
M. Ryan: C'est l'article 54 qui se rapporte à notre
affaire.
M. Munn: À l'article 54: "À toute phase des
négociations, l'une ou l'autre des parties peut demander au ministre de
désigner un conciliateur pour les aider à effectuer une entente.
"
M. Ryan: D'après vous, cet article s'appliquerait dans le
cas d'un différend ou d'une négociation en cours dans le secteur
public ou parapublic, d'après l'interprétation que vous donniez
tantôt d'un autre article.
M. Munn: Vous voulez parler de l'article 111. 1. À moins
que ce soit inconciliable, c'est-à-dire si on prend les
amendements...
M. Ryan: Je ne voudrais pas avoir une réponse
prématurée; si vous vouliez le vérifier avant, j'aimerais
bien ça. Je vais vous dire pourquoi j'attache de l'importance à
cela, si vous me permettez. Je trouve que la fonction de médiation,
c'est une fonction qui doit être employée de manière
exceptionnelle, tellement exceptionnelle que, dans notre Code du travail,
à ma connaissance, il n'en a jamais été question de
manière explicite. Ce n'est pas pour rien. C'est un trait qui est
inhérent au génie de notre législation du travail. C'est
tellement délicat et difficile à manier qu'on ne le
prévoit même pas à l'état explicite dans les textes.
Cela veut dire que ça va intervenir selon des modalités qui
peuvent varier, mais c'est généralement en tout dernier recours
qu'on prend ce moyen d'intervention, et je me dis qu'il faut être bien
assuré que l'autre va s'appliquer. C'est beaucoup mieux de faire
intervenir d'abord la conciliation, parce que ça permet de faire un
travail de déblaiement considérable. Et, lorsque arrivera la
médiation, elle va porter sur des points qui sont vraiment le "hard
core", le noyau extrêmement dur d'un conflit.
C'est dans ce sens que je pose ma question. Je veux bien m'assurer de ce
qui va être possible dans ce système que vous nous proposez. Le
ministre se souviendra que j'avais mentionné cette difficulté
quand j'ai parlé lors de l'adoption du principe. H faut clarifier cela
comme il faut, pour qu'on sache clairement où on s'en va.
M. Munn: On peut discuter longtemps, dans le fond, du sens des
mots "conciliation" ou "médiation", ou "conseil de médiation". Il
y a des dictionnaires de relations du travail, mais je ne suis pas certain que
les différents théoriciens ou même praticiens des relations
du travail s'entendent sur un sens exact, si ce n'est le fait que l'un fait un
rapport et que l'autre n'en fait pas.
M. Ryan: Si ce n'est l'autre fait qu'il y en a un qui intervient
après l'autre.
M. Munn: Pas nécessairement, cela dépend des lois
du travail, M. le député. Dans certains cas, il y a uniquement
des conciliateurs; dans d'autres cas, il y a une série de
possibilités, si on prend la loi fédérale; dans d'autres
lois, ce sont uniquement des médiateurs.
M. Ryan: Parlons de la loi du Québec, c'est la
conciliation; l'autre, ce n'est même pas dans la loi, sauf qu'on en
discute aujourd'hui, on l'introduit, mais, dans notre Code du travail,
l'idée de médiation n'y est pas, à ma connaissance.
M. Munn: Cela n'y est pas, mais, sous réserve d'une
vérification, la Loi sur le ministère du Travail permet au
ministre du Travail de nommer l'équivalent d'un médiateur.
M. Ryan: Vous admettrez avec moi que cela intervient en
dernière analyse. Dans le cas de Marine Industrie...
M. Munn: Pas nécessairement, je dois être en
désaccord avec vous là-dessus, cela
dépend des circonstances. Je vais vous donner un exemple.
À United Aircraft, le groupe d'intérêt public qui a
été formé aurait peut-être eu intérêt
à intervenir dès le départ, et peut-être que le
conflit aurait été réglé.
M. Ryan: Là, vous êtes en mauvais terrain parce
que...
M. Munn: Je sais que vous étiez là, mais
peut-être que cela aurait été l'inverse aussi. On peut
difficilement juger, cela dépend de la façon que les conflits se
déroulent. (21 h 15)
M. Ryan: Mais je ne suis pas de votre avis qu'il aurait pu
intervenir à un stade plus avancé, vous savez, parce que
c'était vraiment un dernier recours, on avait tout essayé. Il
restait seulement des citoyens de bonne volonté. Après, je sais
qu'il y en a qui avaient parlé de généraliser cela, mais
ce n'était pas possible, c'était trop exceptionnel,
c'était un conflit bien particulier. C'est trop loin. Je ne sais pas
quel était le statut légal de cette équipe. On n'a jamais
essayé de le définir. On essayait de rendre service.
M. Clair: II n'y en avait aucun, mais il me semble que cela a
aidé.
M. Ryan: Peut-être parce qu'il n'avait pas de statut
légal, justement, M. le ministre. D'accord.
Ce que vous me dites, c'est que cela pourrait fonctionner. Le
mécanisme de conciliation prévu au Code du travail pourrait-il
fonctionner dans le cas d'un différend dans les secteurs public et
parapublic? C'est ma question pour que je puisse émettre une opinion sur
l'article 46.
M. Munn: En soi, ce n'est pas inconciliable. En soi, la seule
question qui se poserait est: Est-ce que le fait de prévoir
l'intervention d'un médiateur à la demande de l'une et l'autre
des parties est inconciliable avec les articles du Code du travail qui parlent
du conciliateur? À première vue, je pense que ce n'est pas
inconciliable.
M. Clair: Surtout compte tenu de notre tradition dans les
relations du travail voulant que... Je pense que la tendance est plus qu'il y
ait d'abord une étape de conciliation et, ensuite, une étape de
médiation, et non l'inverse. Je verrais mal le tribunal déclarer
que c'est inconciliable.
M. Ryan: Je pense que c'est un double cran de sûreté
pour le déroulement et surtout l'aboutissement heureux de la
négociation. Je pense que, si on a ces deux crans, c'est plus sûr
que si on en a seulement un. En général, c'est cela.
M. Clair: En général, le député
d'Argenteuil a sans doute raison. En théorie, c'est d'une logique
implacable, c'est sûr. Maintenant, est-ce qu'en pratique c'est possible
qu'avant qu'il y ait conflagration, en quelque sorte, on ait le temps de faire
intervenir un conciliateur, un médiateur? C'est sujet à
évaluation.
M. Ryan: Cela étant...
M. Clair: Deux précautions valent mieux qu'une.
M. Ryan: J'aimerais cela; peut-être, jusqu'à plus
ample information, qu'on peut tenir pour acquis que ceci n'exclut pas
l'étape de la conciliation.
M. Clair: C'est clair que cela ne l'exclut pas juridiquement.
Pour que cela l'exclue, il faudrait qu'un tribunal déclare que c'est
inconciliable suivant l'article 111. 1. C'est ce que je comprends. Je ne pense
pas que, en vertu de nos lois et de notre jurisprudence, on puisse
déclarer que ces deux procédures sont inconciliables.
M. Ryan: Est-ce que ce serait trop vous demander, M. le ministre,
que demander à vos conseillers de faire une vérification un peu
plus poussée pour nous arriver avec un avis plus ferme à leur
convenance?
M. Clair: Sans doute, M. le Président.
M. Ryan: C'est bien. Juste un autre point, si vous me permettez.
Si vous voulez me dire que j'ai pris assez de temps, je n'ai pas d'objection,
je reviendrai tantôt, mais je pense que cela éclaire la discussion
de fond.
Ceci dit, je vais émettre une opinion très brève
sur l'article 46. Je n'ai pas d'objection à cet article, mais on est sur
l'amendement, c'est vrai.
Le Président (M. Lachance): Vous pouvez toujours...
M. Ryan: Je n'ai pas d'objection sur l'article 46, parce qu'il
écrit dans la loi le droit d'une des deux parties de demander une
médiation, alors que sous le régime commun cela dépend du
bon plaisir du ministre du Travail. J'aime mieux que ce soit dans la loi comme
une chose que les parties peuvent réclamer légalement
plutôt que d'être une chose entièrement laissée au
bon plaisir du ministre du Travail qui va nommer un médiateur quand il
le veut, au moment de son choix et dans les circonstances de son choix.
Cela dit, j'ai des objections très sérieuses à
l'encontre de l'amendement
déposé par le ministre. J'en viens au point qui nous est
proposé. Le ministre nous dit... Je vais juste être obligé
d'ouvrir une petite parenthèse, je pose un problème pour vos
experts, M. le ministre. Si une partie demande la conciliation et l'autre la
médiation en même temps, qu'est-ce qui arrive? Une partie demande
la conciliation en vertu du Code du travail et l'autre demande la
médiation en vertu de l'article 46. Comment cela se passe-t-ii? Je ferme
la parenthèse pour tout de suite.
M. Clair: La discrétion me semble appartenir au ministre
du Travail qui, dans ni l'un ni l'autre des cas, sauf erreur, n'est
obligé de nommer.
M. Bisaillon: Si le député d'Argenteuil me le
permet, avant qu'il n'aborde d'autres points...
M. Ryan: Très bien.
M. Bisaillon: Quant à moi, la question de la conciliation,
ce n'est pas tout à fait terminée, quoique je ne sois pas
nécessairement en accord avec le député d'Argenteuil sur
la nécessité absolue de la conciliation à ce niveau, au
moment où on en parle, au niveau national. La conciliation existait dans
les lois, autrefois, mais elle était perçue dans les secteurs
public et parapublic comme étant la clé pour acquérir le
droit de grève. Alors, la conciliation était dans la loi pour les
syndicats et les employeurs des secteurs public et parapublic, mai3 elle
n'avait pas d'effet, c'est-à-dire que ce n'est pas un conciliateur du
ministère du Travail qui pouvait rapprocher les parties au plan
national. Alors, qu'est-ce qui se produisait? On demandait la conciliation
parce que c'était une étape dans le processus qui permettait
d'arriver au droit de grève. C'est cela que les lois spéciales
des régimes de négociation dans les secteurs public et parapublic
ont changé. Quand on me dit que, maintenant, la conciliation
prévue au Code du travail resterait encore, je me pose des questions. Je
pense qu'elle disparaît, à toutes fins utiles, la conciliation,
comme on la connaît dans le Code du travail, avec le projet de loi 37.
Cela ne veut pas dire que je sois en désaccord. Cela veut juste dire
que, d'après mon interprétation, elle disparaîtrait.
M. Clair: Pourquoi? Elle disparaît juridiquement ou elle
disparaît dans les faits?
M. Bisaillon: Si on part avec la loi 37 par rapport à ce
qu'on avait avant. Avant, la conciliation n'était plus une règle
essentielle, cela avait été enlevé. Le droit de
grève était obtenu à l'échéance de la
convention collective. Le droit de grève était automatique. Donc,
on n'avait pas besoin de prérequis et de préalable, comme,
autrefois, la conciliation était une étape. À partir du
moment où on a enlevé cela dans le passé, je me dis que
pour le réinstaller dans le cas des secteurs public et parapublic il
faudrait qu'on le dise. À partir du moment où on ne le dit pas,
je pensais que c'était remplacé dans les circonstances par
l'article 46 qui prévoit la médiation.
M. Clair: Je ne partage pas l'avis du député de
Sainte-Marie. Le Code du travail. ne dit pas que la conciliation est une
étape obligatoire préalable à l'exercice du droit de
grève.
M. Bisaillon: Il le disait.
M. Clair: II le disait autrefois. Maintenant, cela demeure une
étape possible, mais non obligatoire.
M. Bisaillon: En pratique, qu'est-ce qui...
M. Clair: Ah! Vous parlez de la pratique. Moi, je vous disais que
cela dépend si on parle de la pratique ou du droit. Est-ce que vous
parlez du droit? En droit, ce n'est pas inconciliable.
M. Bisaillon: En pratique, qu'est-ce qui est arrivé?
À partir du moment où les lois spéciales ont donné
le droit de grève automatiquement à l'échéance de
la convention ou à d'autres moments, dans certaines lois, la
conciliation n'a plus jamais été demandée. Qu'est-ce que
c'est, les parties au niveau national? C'est une table centrale formée
de centrales syndicales et du gouvernement. Quel intérêt le
gouvernement aurait-il, lui qui négocie lui-même, à
demander l'intervention d'un conciliateur, si bon soit-il, qui demeure un
employé du ministère du Travail et qui fait habituellement son
travail, qui exerce plutôt ses fonctions dans le secteur privé? En
pratique, ce n'est jamais resté. Et je prétends que le
député d'Argenteuil a raison de dire que, lorsqu'il y a eu des
étapes de conciliation, ç'a toujours - et Me Munn l'a
souligné aussi tantôt - été des procédures
spéciales où les mécanismes de conciliation
utilisés ont été spéciaux aussi. Ceci me laisse
croire que... Par exemple, ce à quoi se référait le
député d'Argenteuil en 1982 et ce à quoi se
référait ce qu'on a appelé le conseil des sages en 1976,
ce pourquoi ç'a a existé, c'est par une décision
spéciale. Si le code 3'était appliqué, on aurait pris le
mécanisme du code. Comme on ne l'a pas appliqué, le
mécanisme du code, c'est qu'on a donc pris une formule spéciale
pour le faire et c'est la Loi sur le ministère du
Travail, comme le disait Me Munn, qui permet au ministre du Travail de
procéder de cette façon-là. Ça, c'est le premier
aspect. C'est pour cela que j'aimerais qu'on fouille la question du
député d'Argenteuil et qu'on ait une réponse
là-dessus. Le deuxième aspect...
M. Clair: Je pense qu'on peut la clarifier tout de suite. Dans les
faits, je partage l'avis du député de Sainte-Marie, quant
à moi. En droit, cependant, je pense que légalement les deux
procédures ne sont pas inconciliables, mais, dans les faits, je partage
l'avis du député de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Bon, alors revenons aux faits. L'argumentation du
député d'Argenteuil, c'est de dire quoi? C'est de dire: La
médiation, c'est une procédure spéciale, extraordinaire,
qui doit arriver une fois qu'on a tenté d'autres modes de rapprochement.
Si la conciliation traditionnelle, celle qu'on voit régulièrement
dans le Code du travail, dans le cas de conflits du secteur privé, si on
pense qu'elle ne peut pas donner de résultats au niveau du secteur
public, je dois comprendre qu'on pourrait s'attendre à avoir une formule
de rapprochement des parties qui pourrait être particulière,
compte tenu des parties en cause.
Si c'était au niveau local, je serais beaucoup plus d'accord avec
le député d'Argenteuil pour dire: Le Code du travail, quant
à la conciliation, pourrait s'appliquer. Parce que là ce sont des
parties plus réduites qui peuvent discuter avec un conciliateur, mais,
lorsqu'on est rendu au niveau national et qu'on a une table de concertation
syndicale et le gouvernement ou l'État de l'autre côté, il
me semble que, si on veut une étape de conciliation, cela prendrait une
étape de conciliation spéciale, particulière, qui soit
différente de la médiation, je veux bien, mais elle ne peut pas
être comme celle du Code du travail. Cela m'étonnerait.
M. de Bellefeuille: M. le Président.
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député de Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: Est-ce que votre intelligence de la chose,
c'est que nous sommes en train de discuter en même temps de l'article 46
et de l'article...
M. Ryan: II a le droit de désigner, c'est l'article
54.
Le Président (M. Lachance): Effectivement, M. le
député de Deux-Montagnes, je comprends qu'on discute globalement
l'ensemble de ce qui est relié à l'article 46, y compris
l'amendement.
M. de Bellefeuille: Ceci étant, je voudrais demander au
ministre s'il envisagerait d'inclure dans la loi à l'article 46,
plutôt qu'un médiateur ou une médiatrice, un conseil de
médiation.
M. Clair: M. le Président, on prévoit
déjà, aux articles 48 et 49, qu'au-delà d'un
médiateur les parties peuvent faire une entente sur une procédure
de médiation différente de celle des articles 46 et 47, qu'il
s'agisse du recours en conseil de médiation, en groupe
d'intérêt public ou groupe de sages, et que, même, elles
peuvent s'entendre pour faire conjointement un rapport sur l'objet de leurs
différends et le rendre public.
M. Bisaillon: Et cela, c'est après entente entre les
parties.
M. Clair: Oui.
M. Bisaillon: Pourquoi avez-vous fait cette distinction entre la
médiation régulière et une médiation
spéciale qui serait, elle, objet d'entente entre les parties?
M. Clair: Je pense que c'est parce que, dans la mesure où
le ministre du Travail peut nommer un médiateur, si les parties
considèrent, elles, qu'un conseil de médiation ou un groupe
d'intérêt public présente de meilleures chances de
résultats, c'est à elles d'être impliquées dans ce
choix-là.
Le Président (M. Lachance): Bon. Est-ce qu'on peut
disposer de l'amendement du ministre?
M. de Bellefeuille: Bien, je ne suis pas convaincu. Pourquoi le
ministre ne prévoit-il pas un conseil de médiation dans tous les
cas plutôt qu'un seul médiateur? Il me semble que le conseil de
médiation, c'est plus prometteur, cela offre plus de garanties.
M. Clair: C'était pour laisser, je dirais, un
caractère encore un peu plus exceptionnel au conseil de médiation
ou à un groupe d'intérêt public qu'à la stricte
formule d'un médiateur que nous avons prévue et que, dans ce
cas-là, c'étaient les parties qui pouvaient convenir de. (21 h
30)
M. de Bellefeuille: Oui, mais le ministre ne répond pas
à ma question. Pourquoi, lui, ne préfère-t-il pas
prévoir dans tous les cas un conseil plutôt qu'une seule
personne?
M. Clair: Autrement dit, ce que vous souhaiteriez, c'est
qu'à l'article 46 on puisse lire: Une partie peut demander au
ministre
du Travail de charger un médiateur, un conseil de
médiation ou un groupe d'intérêt public. Est-ce que je
comprends bien...
M. de Bellefeuille: Non, ce serait, dans mon esprit, un conseil
de médiation.
M. Clair: Et jamais un médiateur?
M. de Bellefeuille: Et jamais un médiateur. C'est une
question que je pose au ministre, d'ailleurs. Il y a peut-être une
raison, mais j'aimerais savoir la raison.
M. Clair: Pourquoi exclure une possibilité? La formule
habituelle, c'est un médiateur et je pense que, au contraire, il vaut
mieux prévoir que le ministre puisse, en tout temps, nommer un
médiateur. Si l'amendement du député était de dire
"et un conseil de médiation et un groupe d'intérêt public",
là, je verrais des avantages possibles à la solution
proposée par le député de Deux-Montagnes. Mais purement et
simplement retrancher la possibilité de nommer un médiateur et ne
conserver que celle d'un conseil de médiation, il me semble que c'est
priver le ministre du Travail d'une possibilité. On a voulu, par ces
articles, élargir l'éventail des formes de médiation et
non pas les rétrécir.
M. de Bellefeuille: D'autre part, M. le Président, est-ce
que le ministre nous a expliqué le premier alinéa de son
amendement, là où il excepte les salaires et échelles de
salaires? Selon mon souvenir, le ministre n'a pas expliqué pourquoi il
propose que le gouvernement s'empêche, en quelque sorte, lui-même,
de prévoir un mécanisme de médiation sur les salaires et
les échelles de salaires dans l'éventualité où il
le désirerait lui-même.
M. Clair: Très brièvement - je l'avais
expliqué et je peux le répéter - c'est simplement que,
dans la mesure où nous constituons un Institut de recherche sur la
rémunération, dont le mandat n'est pas de procéder
à une médiation entre les parties, mais, par une recherche
commune de statistiques, de données sur le marché du travail, sur
la comparaison des salaires dans les secteurs public et parapublic... Si, une
fois que les parties sont en possession de tous ces renseignements et qu'elles
ont procédé à une période de négociations de
trois mois sur la base des mêmes données, elles ne s'entendent
pas, je ne pense pas que ce soit un médiateur qui viendrait intervenir,
par-delà toutes les études scientifiques qui auraient
été menées par l'Institut de recherche sur la
rémunération, par delà les négociations qui
auraient duré trois mois entre les parties, par-delà une
commission parlementaire qui aurait siégé pour entendre des
parties sur cette question, comme le prévoit le projet de loi qui
pourrait venir rapprocher les parties. Je pense que cela ne ferait que retarder
les échéances et diminuer à la fois le rôle de
l'institut de recherche et les chances de succès d'un médiateur
dans une telle situation.
M. Bisaillon: M. le Président, quand on a parlé de
l'institut de recherche, il me semblait qu'on était sur la même
longueur d'onde, le ministre et moi, au moins sur une chose, quand j'utilisais
l'expression: l'institut de recherche, c'est un photographe. Il photographie la
situation et fait des constatations. Il ne fait pas de recommandations. Le
médiateur, lui, analyse une situation. Je comprends que la
médiation prévue à l'article 46 n'est pas une
médiation qui mène à une décision, mais ce doit
être une médiation qui amène des recommandations. Or,
là, il y a une nuance. Il y a une étape: par rapport à
l'institut de recherche, ce serait un plus.
M. Clair: Oui, mais simplement ce qu'on dit, c'est que, disposant
de deux exemplaires de la même photographie, les parties ayant
conjointement pris la photographie, ayant négocié pendant trois
mois sur la base de cette photographie, ayant eu l'occasion d'être
entendues en commission parlementaire sur la base de cette photographie, si
elles ne s'entendent pas après tout cela, les chances qu'un
médiateur au-delà de tout ce processus puisse, par un rapport,
rapprocher les parties... Je pense qu'il ne pourrait malheureusement que
contribuer à envenimer le débat et non à rapprocher les
parties.
M. Bisaillon; Le raisonnement du ministre est inattaquable, à
partir du moment où la prémisse est que les parties qui sont
à l'institut de recherche ou les composantes de l'institut de recherche
font la même photographie. Mais, en prenant comme prémisse que les
parties ou les composantes de l'institut de recherche ne font pas la même
photographie, un tiers ajouterait, à ce moment, en termes de
recommandations, ce qui ne lie pas davantage le gouvernement.
M. Clair: Ce qui?
M. Bisaillon: Ce qui ne lierait pas davantage. Cela lui ajoute un
poids moral, c'est bien sûr, ou cela lui donne une force morale.
M. Clair: Après la commission parlementaire pour des
augmentations de salaires et échelles de salaires - c'est toujours de
ça dont on parle, on ne parle pas de rémunération globale,
on ne parle que de
salaires, d'échelles de salaires - j'imagine que les
parlementaires voudraient entendre les photographes de l'institut de recherche
en rémunération sur leurs photographies, entendre les deux
parties, entendre le président du Conseil du trésor, entendre,
éventuellement, les gens du CRSMT. Que viendrait faire un pauvre
médiateur pour tenter de rapprocher les parties? Je pense que ça
compliquerait et que ça risquerait d'être perçu même
comme un dernier truc pour retarder un règlement entre les mains du
gouvernement. Je vois que le député hoche du bonnet.
M. Bérubé: Oui, il est d'accord avec vous.
M. Bisaillon: Cela va bien, ne venez pas mettre le trouble
là-dedans, vous!
Le Président (M. Lachance): M. le député
d'Argenteuil, vous m'aviez signalé votre intention de prendre la parole
il y a déjà plusieurs minutes; si vous voulez y aller.
M. Ryan: Je suis patient, je suis même prêt à
céder mon tour au député de Portneuf.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Je veux
m'inscrire, à ce moment-ci, de nos travaux, parce que l'amendement
proposé par le ministre, plus particulièrement le premier
alinéa, me surprend beaucoup. L'article 46 prévoit qu'une partie
peut demander au ministre du Travail de charger un médiateur de tenter
de régler un différend sur les matières qui font l'objet
de stipulations négociées et agréées à
l'échelle nationale.
Jusque-là, c'était intéressant. Le libellé
et l'article disaient ce qu'ils voulaient bien dire, à savoir
qu'après que les parties se soient conviées à un exercice
d'analyse, de négociation, de représentation, une des deux
parties pouvait demander l'intervention d'un médiateur, ce qui est en
droit du travail tout à fait justifié, explicable, et plus
souvent qu'autrement, utile.
Or, dans l'amendement proposé par le ministre, lorsqu'il dit
qu'on devrait insérer, à la fin de la troisième ligne, les
mots "à l'exception des salaires et échelles de salaires", je ne
comprends pas le ministre de vouloir...
M. Laplante: Enfin...
M. Pagé: M. le Président, qu'est-ce qui arrive pour
que le député de Bourassa soit aussi enthousiaste?
M. Laplante: II est en demande depuis ce matin.
Le Président (M. Lachance): Vous avez la parole, M. le
député de Portneuf, allez-y, continuez.
M. Pagé: J'en étais à dire, M. le
Président, que, si on suit le raisonnement du ministre, on ne devrait
pas adopter cet amendement. Le ministre nous dit: Au niveau de la
rémunération, on aura un institut de recherche qui va
siéger, qui va être, entre guillemets, paritaire, où les
parties pourront se retrouver dans cet organisme. L'organisme
bénéficiera de sommes importantes pour conclure les ententes ou
conduire les études qu'il jugera opportun de conduire. Le rapport sera
produit le 30 novembre de chaque année et, finalement, constituera,
comme d'autres de mes collègues le disaient, une lecture de
l'évolution des conditions de rémunération et de
traitement dans le secteur public pour certaines fonctions par rapport à
d'autres dans le secteur privé ou encore dans d'autres provinces, si
c'est accepté et si c'est adopté à la majorité des
deux tiers. C'est ça?
Le rapport sera produit, les études seront rendues publiques au
fur et à mesure qu'elles seront complétées, et tout le
monde à la table est unanime à retenir que le rapport d'un tel
institut sera susceptible de rapprocher les parties. Là, ce n'est pas
moi qui parle, c'est le ministre qui disait, il y a trois ou quatre jours, que
la simple production du rapport par un organisme aussi crédible que
celui-là sera de nature à rapprocher les parties.
Il nous disait: Le rapport aura été déposé,
un débat aura eu cours à l'Assemblée nationale, le
gouvernement aura eu tous les moyens parlementaires pour justifier ses choix
budgétaires, la population sera, par conséquent, un peu plus
sensibilisée aux enjeux et, finalement, au traitement qui est fait aux
employés de l'État et jusqu'où le gouvernement respecte
son obligation d'État employeur et, par la suite, il y aura
médiation.
Le ministre nous dit: S'ils ne se sont pas entendus après ces
différentes étapes, j'hésite à croire qu'un
médiateur puisse faire quelque chose de fructueux. Je soutiens
exactement le contraire, c'est que toutes ces étapes qui seront
préliminaires à l'intervention du médiateur vont faire en
sorte que l'écart, si je peux utiliser le terme, entre les parties sera
susceptible d'être réduit. Je m'excuse, j'étais au salon
bleu pour d'autres activités, mais je ne crois pas avoir abusé du
temps de cette commission jusqu'à maintenant, mais j'apprécierais
que le ministre nous indique ce sur quoi il s'appuie. Pour moi, il
m'apparaît, M. le Président, que cela n'a purement et simplement
pas de bon sens, ce que vous êtes en train de faire là.
M. Clair: J'ai donné mes meilleurs arguments, je pense, en
présence du député de Portneuf.
M. Pagé: C'était juste cela?
M. Clair: C'est son choix de dire que cela n'a pas de bon sens.
Mon meilleur argument, c'est simplement que, d'abord, nous ne parlons pas de la
rémunération globale au sens du normatif lourd. Nous avons bien
indiqué que c'est pour salaires et échelles de salaires. C'est
donc dire que dans la négociation aux trois ans, l'année
où il y a droit de grève, où tout ce qui est
rémunération globale, sans être salaires et échelles
de salaires, est négocié, il pourait y avoir médiation,
mais que sur la stricte détermination de salaires et échelles de
salaires, après la photographie prise conjointement par les parties,
pour employer l'expression du député de Sainte-Marie,
après que celles-ci aient négocié sur la base de cette
photographie pendant trois mois, qu'une commission parlementaire ait
été tenue, que l'institut de recherche soit venu expliquer ses
constatations auprès des parlementaires, que la partie syndicale ait
été entendue, que le président du Conseil du trésor
ait été entendu, et peut-être d'autres intervenants, je me
dis: Après tout cela, est-ce que cela ne vient pas discréditer
à l'avance l'institut de recherche, d'une part, et, d'autre part, je
dirais, donner une mission impossible à un médiateur, susciter de
faux espoirs dans les attentes des salariés si on se dit: II y a d'abord
le processus de l'institut de recherche, après, la négociation,
après, la commission parlementaire et, après cela, une nouvelle
médiation.
M. le Président, je pense que, dans l'intérêt
même du concept de la médiation, il n'y a pas avantage à ce
qu'il y ait possibilité d'un médiateur sur les salaires et
échelles de salaires pour la deuxième et la troisième
année. Il me semble que, de la même façon que le
député nous dit que le contraire lui semble tomber sous le sens,
mes arguments devraient le convaincre du contraire.
M. Pagé: Pour compléter, je...
M. Bérubé: II me semblait aussi parce que
c'était faible à date comme argumentation.
M. Pagé: M. le Président, jusqu'à
maintenant, cela allait très bien dans le déroulement de nos
travaux jusqu'à ce que le député de Matane, qui a une
habilité consommée à mettre la bisbille partout où
il passe, intervienne. J'apprécierais que vous l'ayez à l'oeil.
Si vos interventions auprès de lui ont comme résultat qu'il foute
le camp, on en serait fort aise, quant à moi.
M. Clair: Oh! M. le Président.
M. Pagé: Le "troublemaker", le "bullshitter", le faiseur
de troubles du Conseil des ministres.
M. Bérubé: M. le Président...
M. Clair: Que ces propos sont durs, M. le Président!
M. Pagé: Oui, parce que c'est tout ce qu'il
mérite.
M. Clair: Le député de Matane, ministre de
l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie, a
été invité cet après-midi par le
député d'Argenteuil à venir participer à nos
travaux. Drôle d'accueil du député de Portneuf!
M. Pagé: Qu'il vienne, mais qu'il participe de
façon utile, M. le Président, plutôt que d'énerver
et d'achaler tout le monde comme il le fait.
M. Bérubé: M. le Président, je trouve que
les propos du député de Portneuf sont inutilement agressifs. Je
suis au contraire intéressé à ce qu'il complète son
argumentation parce que la première partie de son argumentation m'a paru
faible et n'est pas suffisante, en tous les cas, pour m'amener à changer
d'idée.
Le Président (M. Lachance): Alors, tous les membres de
cette commission ont le droit dévolu aux parlementaires de pouvoir
s'exprimer en le demandant au président. Jusqu'à maintenant, je
n'ai pas observé autour de cette table des comportements qui soient
indignes de la tenue d'un parlementaire. Alors, M. le député de
Portneuf, si vous voulez revenir à l'essence de l'article 46.
M. Ryan:... un verdict facile. Il a été absous
assez facilement. (21 h 45)
M. Pagé: M. le Président, le ministre a dit que la
décision d'un médiateur ou le travail du médiateur
était susceptible de conduire à des conclusions qui risquaient de
diminuer la crédibilité de l'institut en regard des conclusions
de cet organisme. Le rapport que produira cet institut, ce sera une
photographie, une lecture du degré de comparabilité entre ce qui
se paie dans le privé et ce qui se paie dans le public, mais cela
n'implique pas pour autant que le rapport de cet institut et ses conclusions
doivent constituer la position gouvernementale. Rien n'empêche que le
gouvernement, par un choix politique, intervienne en deçà, en
plus ou en moins, ce sera son choix, et c'est son pouvoir légitime,
d'ailleurs. Je voudrais que cela soit bien confirmé par le
ministre parce qu'il ne faudrait pas qu'il laisse croire que le rapport, ce
sera la bible, point final, à la ligne.
M. Clair: Le rapport de l'institut ne lie...
M. Pagé: Bon.
M. Clair:... juridiquement ni l'une ni l'autre des parties, il a
un pouvoir moral à l'égard des parties.
M. Pagé: Le ministre nous dit: Pas de problème en
ce qui concerne l'enveloppe, la somme globale que le gouvernement entendra
consacrer au chapitre de la rémunération pour un secteur
donné, mais, quand vient le temps de la ventilation de ces sommes, pas
de recours à la médiation.
M. Clair: Ce n'est pas ce que j'ai dit.
M. Pagé: Oui, c'est ce que vous avez dit.
M. Clair: Ce n'est pas ce que j'ai expliqué.
M. Pagé: Bien, qu'est-ce que vous avez dit, d'abord?
M. Clair: Regardez bien le mandat de l'institut. L'institut a
pour fonction d'informer le public de l'état et de l'évolution
comparés...
M. Pagé: Je ne parle pas de l'institut, je parle du
rôle du médiateur.
M. Clair: J'ai besoin de remonter à aussi loin pour
expliquer mon point de vue. On dit qu'il a pour fonction d'informer le public
de l'état et de l'évolution comparés de la
rémunération globale des salariés du gouvernement, etc.,
avec celle des autres salariés québécois.
La façon dont la négociation va se passer, c'est qu'il va
y avoir pour la durée d'une même convention collective deux modes
de négociation de la rémunération globale, l'une qui va
concerner les salaires et échelles de salaires pour la deuxième
et la troisième année, et, bien sûr, que le rapport annuel
de l'institut va être utile à cet égard. Le rapport de
l'institut va également être utile pour la première
année de la convention collective où là non seulement, on
va fixer les salaires et échelles de salaires de la première
année, mais où - je fais une pure hypothèse - à
l'avance les parties pourront convenir que, quelles que soient les
augmentations à survenir au cours des deux dernières
années, il y aura, à l'intérieur de ce qui se
dégagera, une protection particulière pour les bas
salariés. Cette disposition lie les parties et, dans la mesure où
il s'agit de rémunération globale, de congés,
d'assurances, de toute autre espèce de matières autres que
strictement les salaires et échelles de salaires, pour la
première année, la médiation pourra intervenir, mais,
lorsqu'il est question strictement des salaires et échelles de salaires,
il ne pourra y avoir de médiation.
M. Pagé: M. le Président, là où se
situent le contentieux et les conflits, au niveau des salaires et
échelles de salaires et des répartitions de l'enveloppe globale,
c'est là que le médiateur peut jouer un rôle plus utile. Je
ne vous comprends pas.
M. Clair: Non. Pour la deuxième et la troisième
année, entendons-nous, il ne sera pas possible, à moins qu'il en
ait été convenu la première année, de modifier
autre chose que les salaires et échelles de salaires de sorte que, si on
en vient... On ne joue pas, en deuxième et en troisième
année, sur les relativités internes de la
rémunération des différents employés de
l'État, à moins qu'il n'en ait été convenu
préalablement, lors de la première année. C'est ce que
cela veut dire.
M. Pagé: Oui, on le comprend. Mais je ne comprends pas
votre position parce que le médiateur est susceptible de jouer un
rôle plus utile à la période où cela risque
d'être plus conflictuel et où il y aura plus de problèmes.
On va voter contre cela, M. le Président.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président. Avant que le
député de Portneuf ne le fasse, je voulais signaler la
présence parmi nous du ministre de l'Enseignement supérieur, de
la Science et de la Technologie. Je voulais le faire en termes courtois et
exprimer ma satisfaction de voir qu'il y a au moins une personne au
gouvernement, à part le président du Conseil du trésor,
qui a compris qu'il serait très bon que nos travaux soient suivis de
près par tous les ministres impliqués dans les
négociations des secteurs public et parapublic. Il en manque. C'est
cela, le député de Terrebonne nous signale qu'il y en a d'autres.
Effectivement, il en manque. Il manque, en particulier, le ministre du Travail
qui sera chargé de l'application de cette loi.
Une voix: Il est venu.
M. de Bellefeuille: Oui, oui, il est venu faire acte de
présence quelques instants, ce
n'est pas suffisant. Alors, ceci dit, je voudrais exprimer ma
satisfaction, M. le Président, de voir qu'il y a au moins un ministre
qui s'est joint è nous. J'espère qu'il va rester et qu'il va
participer à nos travaux avec le même esprit que nous tous dans
notre collégialité non partisane»
Deuxièmement, je voudrais reprendre les observations du
député de Portneuf. D'ailleurs, il a posé des questions au
ministre sur un sujet que j'avais soulevée Je voudrais faire observer au
ministre qu'il nous donne l'impression que la présence de l'institut
dans tout ce mécanisme fait qu'on n'a pas besoin de médiation
dans les matières dont l'institut s'occupera. De là à
conclure que l'institut joue un rôle de médiation, il n'y a qu'un
pas. Cela m'étonne parce que, lorsque nous avons discuté des
articles du projet de loi relatifs à l'institut, il n'a aucunement
été question d'un rôle de médiation et si on se
référait au Journal des débats, je crois que nous
pourrions même relever des affirmations gouvernementales selon lesquelles
cet institut ne jouera pas un rôle de médiation, ni aucun
rôle analogue.
Alors, je comprends mai la pensée du ministre. Ce n'est pas
clair. C'est une loi dont nous ne pourrons discuter, de toute évidence,
qu'en aller et retour. On va d'un article à l'autre parce que les
articles ne se comprennent que les uns par rapport aux autres, ce qui est assez
fréquent, évidemment. Mais là, on a déjà
adopté ce qui touche à l'institut, cela va être difficile
de revenir en arrière et de préciser, dans le chapitre II, que
l'institut a cette espèce de rôle supplétif de
médiation que le ministre nous a présenté. Comme le
ministre m'écoute avec une attention soutenue, je ne doute pas qu'il
voudra tout de suite nous éclairer là-dessus.
M. Bérubé: M. le Président, à la
place du ministre qui est en train, je pense, d'approfondir les arguments que
l'Opposition lui soumet, pour tenter d'abord d'en saisir véritablement
le sens, car les arguments présentés ne sont pas toujours
nécessairement probants, nécessairement assis sur une prise en
considération des faits les plus complets... Par conséquent, il
faut procéder à une exégèse assez totale et
intégrée des intervenants, ce qui rend, évidemment, la
réflexion du ministre un peu plus lente. Néanmoins, je suis
convaincu maintenant que le ministre peut répondre.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre.
M. Clair: Alors, je répète substantiellement ce que
j'ai dit tantôt, je ne sais pas si c'est assez clair. C'est sûr
qu'il pourrait y avoir une certaine zone grise là-dessus, mais je pense
que le ministre du
Travail exercerait son jugement et sa discrétion. Il faut bien
comprendre, encore une fois, que, sur strictement les salaires et
échelles de salaires, il ne pourra y avoir de médiation, mais,
sur le contenu de la rémunération globale, au-delà des
salaires et des échelles de salaires pour la première, la
deuxième et la troisième année, qui est
négociée en première année, là, le
médiateur pourra intervenir. La raison pour laquelle on pense qu'il
n'est pas utile qu'un médiateur puisse intervenir au niveau des salaires
et des échelles de salaires, c'est ce que j'exprimais tantôt! une
photographie prise conjointement par le parties qui sont en possession des
mêmes données, une période de négociations qui dure
trois mois, une commission parlementaire, audition des parties. Je ne vois plus
guère l'utilité d'une médiation.
Par ailleurs, j'ajoute un argument ou une information additionnelle
qu'on m'a donnée, qu'on m'a souligné que je devrais fournir aux
parlementaires. C'est que la table centrale des négociations, sur le
plan salarial n'existe pas par l'effet de la loi, mais existe par consensus, en
quelque sorte, entre la partie patronale générale et la partie
syndicale en général. Il pourrait advenir que, si on permettait
une médiation sur les salaires et les échelles de salaires, on se
retrouve dans une situation où une demi-douzaine par table nationale
fasse de la médiation sur les salaires et les échelles de
salaires et aboutisse à des conclusions différentes. Remarquez
que c'est plus un problème opérationnel qu'un problème de
fond, mais cela présente quand même des difficultés.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Sainte-Marie et M. le député d'Argenteuil m'avaient
demandé la parole. M. le député de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, toute l'argumentation du
ministre repose et a comme point de départ l'institut, qu'il nous
présente, selon moi, en tout cas, de façon différente de
la façon dont on l'a voté. Je vous rappellerai les commentaires
que je formulais à ce moment-là sur les craintes concernant
l'utilisation qu'on ferait de l'institut. On en a là une preuve
évidente. Le ministre a comme point de départ le fait qu'un
institut aura pris un portrait, une photographie. Il a repris là-dessus
mes propres termes, ma propre image. Il ajoute un élément
important qui n'existe pas devant nous, au moment où on se parle. Il
dit: une photographie conjointe. Il prend donc comme prémisse, comme
prérequis, comme préalable, le fait que les composantes de
l'institut de recherche vont forcément faire la même analyse de la
situation, ce qui n'est pas nécessairement vrai. Il tient aussi pour
acquis que, forcément, l'institut sera composé à la
fois de gens issus du milieu syndical et du milieu patronal, ce qui n'est pas
non plus un acquis au moment où on se parle. Alors, le mot conjoint sur
lequel le ministre base l'ensemble de son argumentation n'existe pas
présentement.
Deuxièmement, le ministre dit: L'institut va avoir fait une
photographie conjointe; donc, comme elle est conjointe, les parties ont la
même approche. Elles vont avoir discuté entre elles pendant trois
mois et, parce qu'elles ne se seront pas entendues sur l'application, on va
nommer un médiateur. Il dit: Cette médiation va pouvoir se faire,
mais pas sur les salaires. Le médiateur, en passant, va rendre son
rapport, il ne fait que des recommandations. Il ne lie pas le gouvernement par
le rapport de médiation, il ne fait que des recommandations.
Regardons comment cela se passe ailleurs, dans le secteur...
M. Clair: M. le Président, le député de
Sainte-Marie ne se souvient-il pas d'une fort mauvaise expérience
à laquelle il s'est lui-même référé, je
pense, celle de la formule d'arbitrage sur recommandation qui prévaut
à la Sûreté du Québec? La position gouvernementale
était extrêmement difficile à défendre dans ce
cas-là, exclusivement parce qu'il y avait une formule d'arbitrage avec
recommandations, sans que cela ne lie le gouvernement. Allez raconter cela aux
pompiers, ils vont vous arroser, c'est le cas de le dire. La loi n'a pas
traversé l'opinion publique. L'impression d'un grand nombre de personnes
a été que le gouvernement avait triché parce qu'il n'avait
pas suivi, dans le fond, la recommandation d'un médiateur qui
était un juge...
M. Bisaillon: À l'article 46...
M. Clair:... qui portait le nom d'arbitre au lieu de celui de
médiateur.
M. Bisaillon: Ce que le ministre est en train de nous dire, c'est
qu'à l'article 46 c'est exactement ce système qu'il nous propose:
un médiateur qui va faire rapport de ses constatations au public, mais
il se préserve. Ce que le ministre est en train de nous dire, c'est que,
justement, on a raison de ne pas vouloir faire d'exception sur les salaires,
parce que le ministre, par son amendement, veut se prémunir contre ce
qui lui est arrivé au niveau public, ce qui lui est arrivé avec
les policiers.
M. Clair: C'est une règle d'honnêteté, M. le
Président.
M. Bisaillon: Regardons comment...
M. Clair: D'honnêteté.
M. Bisaillon: M. le Président, j'aimerais pouvoir finir
mon intervention.
M. Clair: D'honnêteté.
M. Bisaillon: J'aimerais pouvoir finir mon intervention.
Merci.
M. Clair: Excusez-moi. (22 heures)
M. Bisaillon: II faudrait regarder comment cela se passe
ailleurs, toujours dans le secteur public où des budgets sont en cause.
Dans les municipalités, par exemple, où un certain nombre
d'employés n'ont pas le droit de grève et où le Code du
travail prévoit l'arbitrage, de quelle nature est cet arbitrage ou cette
intervention spéciale? Elle est décisionnelle. La seule
restriction que la loi prévoit, c'est que les recommandations ou les
constats de l'arbitre ne seront pas applicables rétroactivement à
l'intérieur de l'année budgétaire, mais, par la suite,
elles s'appliqueront. Or, dans les circonstances, le mouvement syndical, avec
le projet de loi 37, devant quoi est-il placé? Il est placé
devant un droit de grève réduit quant aux questions salariales.
Ce n'est que la première année que le rapport de forces peut
s'exercer. Les autres années, il n'y a pas de droit de grève
possible. Je prétends que, justement, parce qu'on a limité le
droit de grève, on pourrait au moins permettre à un tiers de
donner aussi son appréciation sans lier le gouvernement pour autant. Si
le gouvernement trouve la constatation trop odieuse, il avisera et il
décidera de ce qui se fait. De la même façon que, pour le
reste des matières négociables, quand une des parties va demander
la publication... D'ailleurs, en passant, M. le ministre, je ne vois pas la
nécessité de cet article qui dit que le rapport serait rendu
public seulement si une des parties le demande. D'après moi, il devrait
être rendu public, point, en tout temps. Cela se trouve à
l'article plus loin. Je saute, mais j'indique juste que je ne vois pas...
Forcément, le rapport de médiation va déplaire plus ou
moins à une des deux parties et c'est sûr que la partie qui y
trouve le plus son compte va demander qu'il soit rendu public. Cela me semble
assez évident. Si ce n'est pas le cas, c'est parce qu'on aura
intérêt à connaître vraiment le portrait.
Alors, quant à moi, le rapport du médiateur devrait
être forcément public. Sur tout le reste, le ministre accepte de
faire porter la charge des recommandations de l'arbitre sur les épaules
de l'une ou de l'autre partie, pourquoi n'accepte-t-il pas de faire la
même chose sur la question des salaires? Dans le fond, c'est faire porter
une charge morale sur une ou l'autre des parties.
Le ministre tient pour acquis que cela va être sur le dos du
gouvernement. Ce n'est pas sûr non plus. Par ailleurs, il y a un avantage
certain, c'est que cela dégagerait l'institut de recherche de ce
rôle un peu de médiation ou de rapprochement des parties qu'on
veut lui faire jouer, ce qui n'est pas dans les faits au moment où on se
parle.
Rappelons que le ministre nous a dit: S'il n'y a pas six
représentants ou six personnes issues des deux milieux, il y en aura
seulement trois à l'institut de recherche. Alors, ce ne sera plus quinze
personnes, cela sera trois. Donc, conjointement, il y aura moins de force et,
s'il y a moins de force, d'après moi, on devrait permettre au moins au
public d'être renseigné sur l'évaluation que quelqu'un peut
en faire.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre.
M. Clair: M. le Président, personnellement, sur ces
questions, surtout quand on parle de 12 000 000 000 $ par année, je
suis, quant à moi, en faveur d'une approche de la vérité
et non des doubles poches ou des valises à double fond. Une fois qu'il y
aura eu production d'un rapport annuel de l'institut de recherche,
période de négociations, audition des parties concernées
en commission parlementaire, occasion pour les parlementaires de questionner
sur ses constatations l'institut de recherche et les parties sur leur position,
ce que je dis au député, c'est qu'il n'y a plus de fonds de
tiroir ou il y en a un. S'il y a encore un fond de tiroir du côté
du gouvernement, c'est parce qu'il n'y a pas eu véritable
négociation sur 12 000 000 000 $ et, à ce moment-là,
l'intervention d'un médiateur ne va que conduire le gouvernement, quel
qu'il soit, à justement essayer d'avoir des doubles fonds dans ses
valises, des doubles poches, et de jouer le jeu pour qu'à la toute
dernière minute il puisse sortir un autre lapin du chapeau, comme cela
est arrivé trop souvent dans le passé. Je pense, M. le
Président, qu'on ne peut pas confier la responsabilité de
"médiateur" sur 12 000 000 000 $ à une seule personne quand
l'Assemblée nationale est composée de 122 représentants
élus par le peuple. Cela me semble tomber sous le sens.
Le Président (M. Lachance): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan; Si cela tombe sous le sens, M. le ministre, comment se
fait-il que vous n'y ayez pas pensé quand vous avez rédigé
votre projet de loi et que cela ne vous soit venu que ces jours-ci?
M. Clair: M. le Président, c'est simplement que nous
pensions que cela était prévu par l'effet de la loi et, à
la relecture, on se rend compte qu'effectivement il y a un problème
là. Maintenant, comment se fait-il que les articles aient
été libellés de cette façon et qu'on s'en soit
rendu compte à la dernière minute ou il y a quelques
semaines...
M. Ryan: Vous admettrez que...
M. Clair: Le député sait fort bien que, lorsqu'on
prépare un projet de loi, il y a toujours une deuxième, une
troisième, quatrième, cinquième lecture d'un projet de loi
et qu'il est toujours possible que des amendements surviennent.
M. Ryan: Vous admettrez que, si cela tombe sous le sens, c'est
plutôt de date récente parce que ce n'était pas clair pour
vous quand vous avez rédigé votre projet de loi.
M. Clair: Au niveau de ma conception personnelle, je peux dire
que cela fait longtemps que c'est très clair, M. le
Président.
M. Ryan: Vous avez joué de stratégie avec nous.
Vous trouviez que nous n'étions pas mûrs pour ententre ce langage
dur avant ces jours-cU
M. Clair: Pardon?
M. Ryan: Vous trouviez que nous n'étions pas mûrs
avant ces jours derniers pour entendre ce langage dur.
M. Clair: Ce n'est pas parce que je hausse le ton, M. le
Président, que c'est un langage dur. C'est simplement parce que je
faisais état de convictions profondes à savoir qu'en
négociation, s'il y a une règle fondamentale que doit s'imposer
le gouvernement, c'est bien celle de l'honnêteté.
M. Ryan: On a déjà tout entendu cela. M. le
Président.
Le Président (M. Lachance): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: La médiation, d'après le libellé de
l'article 46, peut intervenir à n'importe quel stade à partir de
la fin de la dernière convention collective. Il n'y a pas de date
prévue là-dedans. Par conséquent, il pourrait très
bien arriver, à moins que je ne me méprenne, qu'une demande de
médiation soit faite avant même la période qui est
prévue plus loin pour l'examen du projet gouvernemental sur les salaires
en commission parlementaire. Est-ce vrai ou
faux?
Le Président (M. Lachance): J'ai l'impression que c'est
une bonne question, M. le député.
M. Ryan: La mécanique là-dedans...
M. Clair: Voulez-vous répéter, s'il vous
plaît?
M. Ryan: Oui. La médiation peut faire l'objet d'une
demande de la part de l'une ou l'autre des parties à n'importe quel
stade à compter du premier jour qui suit l'expiration de la convention
collective précédente.
M. Munn: Non, à partir du début de la phase de
négociation.
M. Ryan: Trois mois avant l'expiration.
M. Munn: Si on prend l'exemple actuel, si je ne me trompe pas, la
phase de négociation commence le 5 juillet. 11 faut quand même que
les offres et les demandes soient déposées. Si le
dépôt des offres, c'est le 3 ou le 4 octobre, cela veut dire que,
théoriquement, la médiation pourrait être demandée
le 5 octobre.
M. Ryan: C'est encore plus tôt que je ne pensais.
Tantôt, le ministre nous disait: On aura franchi toutes les
étapes, on aura eu le rapport de l'Institut de recherche et
d'information sur la rémunération et on aura eu la
présentation du projet gouvernemental en commission parlementaire,
à la deuxième ou à la troisième semaine de
mars.
M. Munn: M. Ryan, dans le cas du rapport de l'Institut de
recherche et d'information sur la rémunération, les demandes et
les offres sur les salaires ou les échelles de salaires, un amendement a
été déposé qui fait en sorte que le rapport de
l'institut de recherche sort le 30 novembre et que les demandes et les offres
sur les salaires et échelles de salaires devraient être
déposées dans les 30 jours du rapport de l'Institut de recherche
et d'information sur la rémunération. Donc, cela modifie le
calendrier habituel, ce qui veut dire que les demandes et les offres sur
l'ensemble de ce qui se négocie à l'échelle nationale
devraient théoriquement être déposées au complet le
3 ou le 4 octobre de part et d'autre, sauf quant aux salaires et
échelles de salaires qui, eux, viendraient au plus tard dans les 30
jours qui suivent le dépôt du rapport.
M. Ryan: Au plus tard avant la fin de l'année.
M. Munn: C'est cela.
M. Ryan: C'est exactement ce que j'entrevoyais. Il pourrait
s'écouler, entre le dépôt des offres salariales et le
moment de l'étude du projet de règlement du gouvernement en
commission parlementaire, une période de deux mois et demi à peu
près. D'après le projet de loi, l'étude en commission
parlementaire viendrait vers la deuxième ou la troisième semaine
de mars.
M. Munn: Le rapport sortant le 30 novembre, il y a,
théoriquement, la période qu'il y a entre le 30 novembre et la
deuxième ou la troisième semaine de mars pour le
dépôt du projet de règlement et la deuxième ou
troisième semaine d'avril pour son adoption.
M. Ryan: On n'aurait pas d'abord le dépôt d'un
projet de règlement. Il y aurait dépôt d'offres salariales
aux tables de négociation. Les gens vont discuter un peu, j'imagine, et,
au bout d'un certain temps, le gouvernement conçoit un projet de
règlement qu'il va déposer à l'Assemblée nationale
au moment prévu à l'article 54 du projet de loi.
Mon point est le suivant: on va prendre une période
théorique, entre le 15 janvier et le 15 mars, où il va
s'écouler deux mois. Je suppose que les propositions gouvernementales
n'ont pas été déposées avant la fin de
décembre, que les gens sont en vacances, qu'ils n'ont pas le temps de
discuter sérieusement, ils commencent à discuter vers le 10
janvier. Je me dis qu'entre le 10 janvier et le 15 mars il peut intervenir une
demande de médiation de la part de l'une ou l'autre des deux parties,
n'est-ce pas?
M. Munn: Pas selon les amendements déposés
actuellement. S'il n'y a pas de médiation sur les salaires et les
échelles de salaires...
M. Ryan: Cela va, mais avant vos amendements? Sur les autres
matières, il peut intervenir une demande de médiation dans cette
période. Là, j'en viens justement à l'amendement. C'est
pour cela que je pose cette question, pour essayer de situer cela clairement
sur le plan opérationnel.
Une demande de médiation faite entre le 15 janvier et le 15 mars
pourrait permettre une intervention salutaire, même sur la question de
l'échelle des salaires. Le médiateur ou l'équipe de
médiation... Le ministre du Travail, on veut lui réserver un
certain choix quant à la modalité retenue pour l'intervention
médiatrice. Je n'ai pas d'objection à cela, je trouve que c'est
bon qu'il puisse avoir du jeu un peu.
Supposez qu'une médiation intervienne à ce
moment-là, je n'y vois pas d'objection, ça va aller à la
commission parlementaire après. Je ne vois pas d'objection à ce
que l'intervention médiatrice se saisisse
également de l'aspect salarial. Je regarde cela à la
lumière des documents d'information qui ont été rendus
publics par l'Institut de recherche et d'information sur la
rémunération. Là, la médiation produit son rapport.
Cela fait partie du dossier qui s'en va à la commission parlementaire
où on a toutes les pièces; à ce moment-là, on a une
pièce de plus. Le gouvernement n'est pas obligé de suivre les
recommandations du médiateur, s'il ne veut pas les suivre, mais
ça donne quand même une garantie d'objectivité. On aura un
autre point de repère.
Dans la négociation, on aura développé bien des
aspects qui n'auront pas été touchés dans les documents de
recherche de l'Institut de recherche et d'information sur la
rémunération. Je me dis: Est-ce que c'est une bonne chose que le
gouvernement exclue toute possibilité d'action modératrice de la
part d'une force de médiation? Je ne sais pas au nom de quelle
rationalité il va faire cela, mais il me semble que ça pourrait
être utile. On a un médiateur que j'ai bien connu, un conciliateur
médiateur qui a été une personne remarquable dans ce
domaine pendant des années au Canada, Carl Goldenberg.
Il me semble qu'un gouvernement ne s'abaisse pas en disant: M. Carl
Goldenberg -ou l'équivalent - on a un problème avec nos
syndiqués, on ne s'entend pas sur la rémunération. Notre
institut de recherche a produit ses documents, eux ont leurs informations, ils
ont leur interprétation des données. On ne s'entend pas, il y a
beaucoup de points qui nous séparent. On voudrait avoir une intervention
médiatrice là-dessus. On vous prévient que, d'après
la loi, nous avons le pouvoir d'amener cela devant la commission parlementaire
et de statuer au bout de la ligne. Je comprends très bien cela. Surtout
pour la première année ou il y a le droit de grève, je
crois que ce serait important pour tout le monde d'avoir un
élément comme ça. Cela peut être un point de
repère extrêmement utile dans la recherche d'un règlement
définitif.
Tout ce qu'il y a comme genre de recours de la part du gouvernement
actuel, c'est le décret. Cela a été votre plus belle
invention, le décret pur et simple. Le ministre est là, il se
souvient de l'auteur de tout cela. Il n'a même pas eu le temps d'en
prendre connaissance lui-même; il nous a présenté cela, il
n'a même pas eu le temps...
M. Bérubé: C'est comme en Autriche, en Allemagne,
en France. Vous aimez beaucoup les modèles français, ça
fonctionne sur la base d'un décret.
M. Ryan: Les modèles français quand ils sont bons,
oui, mais je n'ai de culte aveugle pour aucun pays en particulier.
M. Bérubé: On prend ceux qui font notre
affaire.
M. Ryan: Vous me connaissez très bien. J'aime beaucoup les
États-Unis, l'Angleterre, la France, l'Italie, ça dépend
de ce que chacun peut avoir de bon. Je n'ai pas d'attache, je ne suis pas comme
le gouvernement actuel du Québec, je ne suis pas orienté
seulement vers un pays.
Cela dit, je vous pose le problème en toute bonne foi,
étant une personne qui a suivi ces choses de près durant 25 ans.
Est-ce qu'on peut s'interdire la possibilité d'une intervention utile
comme celle-là? Est-ce que vous pouvez affirmer en toute certitude et en
toute tranquillité que ce ne pourrait être d'aucune
utilité, au point de dire: Vous ne toucherez pas à cela, monsieur
le médiateur? (22 h 15)
M. Munn: Sans prétendre vous donner une réponse
complète, M. le député, depuis 1970, la négociation
de 1970, 1972, les salaires et les échelles de salaires, entre autres,
ont été négociés centralement de telle sorte que,
dans la structure salariale des secteurs public et parapublic, les groupes sont
imbriqués les uns dans les autres, et ce qui est donné à
un groupe dépend, jusqu'à un certain point, de ce qui est
donné à un autre groupe.
Avec la loi actuelle, un peu comme avec l'ancienne, d'ailleurs,
l'existence d'une table centrale n'est pas prévue pour l'année
où les salaires et les échelles de salaires peuvent faire l'objet
de l'exercice d'un droit de grève. Elle pourra exister ou ne pourra pas
exister selon les décisions qui seront prises ou les ententes qui
interviendront entre le gouvernement et ses partenaires et les syndicats.
Maintenant, en ce qui a trait au problème de la médiation
sur les salaires et les échelles de salaires, tel que je le vois,
prenons, à titre d'exemple, la table des négociations des
enseignants. Un médiateur qui interviendrait sur les salaires et les
échelles de salaires à la table des négociations des
enseignants, s'il ne tient pas compte du fait que l'ensemble de la structure
salariale est interrelié, il pourrait éventuellement arriver
à des recommandations qui sont détachées de la
réalité québécoise. Je vais vous donner un exemple
pratique de cela.
Depuis 1972, il y a eu, à plusieurs reprises de façon
convenue, une politique de protection des bas salariés, ce qui a eu pour
effet que certains hauts salariés ont reçu des augmentations de
salaire moins élevées que les bas salariés, mais cela a
fait l'objet d'ententes entre les parties. À ce moment-ci, un
médiateur devrait tenir compte de cet historique des relations du
travail dans le secteur public au Québec, de politiques qui n'ont pas
nécessairement existé ailleurs dans
le secteur privé ou dans d'autres groupes qui pourraient
être comparables.
Donc, s'il y avait un médiateur qui intervenait sur un groupe
précis, sans tenir compte de cet élément, cela pourrait
avoir comme conséquence de fausser les interrelations entre les
différents corps d'emploi. C'est un peu la raison pour laquelle il n'y a
pas de médiation sur les salaires et les échelles de
salaires.
M. Clair: J'ajouterai que, si on voulait éviter
l'écueil, cela voudrait qu'il faudrait qu'il y ait un médiateur
qui intervienne sur l'ensemble de toute la problématique salariale. Ce
que j'indiquais tantôt au député d'Argenteuil, c'est
qu'après toutes les procédures ou tenant compte de toutes les
autres procédures possibles, il me semble que la portée de cette
action médiatrice serait très limitée par rapport aux
enjeux réels et risquerait de conduire à des attentes qui
seraient bien difficiles à satisfaire, puisqu'il serait très
difficile sans doute pour un seul médiateur de remplacer les parties
négociantes dans l'ensemble du processus.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement est
adopté?
M. de Bellefeuille: M. le Président...
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Deux-Montagnes, sur l'amendement?
M. de Bellefeuille: Oui. Les explications de M. Munn, à
mon avis, ne sont pas plus convaincantes que celles du ministre. Tout cela
semble se résumer - je m'excuse de répéter cela - à
une espèce de vision technocratique. S'il y a véritablement
négociations, il est bien sûr qu'il va y avoir un grand nombre de
facteurs qui vont jouer, qui vont avoir une influence sur les salaires et les
échelles de salaires de telles et telles catégories. On ne
résout rien en disant que les salaires et les échelles de
salaires de divers groupes sont imbriqués les uns dans les autres. Ils
sont imbriqués comme résultat de négociations, ils ne sont
pas imbriqués dans l'abstrait, dans une espèce de grand
schéma technocratique. Ils sont imbriqués comme résultat
d'une négociation. Alors, rien de ce que le ministre et M. Munn ont dit
ne démontre que l'étape de la médiation que la loi
prévoit ne doit pas s'appliquer aux salaires et aux échelles de
salaires. Je continue à croire que, puisqu'il y a ce mécanisme de
médiation, il devrait s'appliquer aux salaires et aux échelles de
salaires comme au reste, et, comme le député d'Argenteuil, je
m'étonne qu'un amendement aussi important nous soit
présenté. Comment cela se fait-il que cela ne faisait pas partie
de la loi? Je partage l'inquiétude du député d'Argenteuil
à ce sujet. Comment cela se fait-il que cela vient après coup,
comme amendement, puisque, dans l'esprit du ministre, cela semble
fondamental?
Par ailleurs, je ne comprends pas exactement quel rôle le
législateur - en l'occurrence, le ministre qui propose le projet de loi
- veut attribuer à l'Assemblée nationale. Parce que, là
encore, il y a une certaine confusion, il me semble. Je ne vois pas du tout
comment l'Assemblée nationale, en ces matières, puisse jouer un
rôle qui soit, d'une façon ou d'une autre, analogue à un
rôle de médiation. Le rôle de l'Assemblée nationale,
c'est de prendre connaissance d'une question et d'en discuter.
Le député de Terrebonne fait un signe qui semble vouloir
dire qu'à son avis l'Assemblée nationale tranche. Bien, je ne
pense pas et je voudrais que le ministre m'éclaire là-dessus.
Est-ce que c'est l'Assemblée nationale qui tranche? Si c'est
l'Assemblée nationale qui tranche, on a, devant nous, un bien curieux
projet de loi. Ce n'est pas le rôle de l'Assemblée nationale de
trancher en ces matières. Si ce n'est pas de trancher, c'est quoi, le
rôle de l'Assemblée nationale?
Un troisième point, M. le Président: Puisque vous m'avez
confirmé, dans cette situation de faits, que nous sommes en train de
discuter à la fois l'article 46 et les amendements du ministre, je
voudrais profiter de la présence parmi nous de Mme la
députée de Johnson pour soulever la question de la
féminisation du vocabulaire, très brièvement...
M. Blais: Non...
Le Président (M. Lachance): Non, M. le
député de Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: Je ne propose pas un amendement. Je ne fais
qu'observer... M. le Président, voulez-vous ramener le
député de Terrebonne à l'ordre?
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Deux-Montagnes, la question de la féminisation a déjà
été réglée et c'est...
M. de Bellefeuille: Mais ils sont terribles, ces "machos"; ils
sont absolument terriblesl
Le Président (M. Lachance):... complètement
antiréglementaire.
M. de Bellefeuille: Ils ne veulent absolument pas discuter la
question. Ce sont des misogynesl
M. Blais: M. le Président.
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député de Terrebonne.
M. Blais M. le Président.
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député de Terrebonne.
M. Blais: Toutes les fois que M. le député de
Deux-Montagnes, que je respecte... Je suis d'accord sur le fond... Il se
retourne toujours pour voir s'il n'y aurait pas un journaliste autour pour
prendre une manchette; ce n'est que cela qu'il cherche.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Deux-Montagnes, je vous prierais de revenir...
M. de Bellefeuille: Ce que le député de Terrebonne
vient de dire, c'est un stupide procès d'intention. S'il n'a rien
d'autre à dire, il devrait respecter le silence qu'il a observé
depuis une semaine complète.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Deux-Montagnes, je vous prierais de...
Une voix: M. le député de Deux-Anges!
Le Président (M. Lachance):... faire attention à
vos propos. Vous savez, vous avez beaucoup de vocabulaire, habituellement, et
j'espère que vous allez l'utiliser à bon escient. Je vous
prierais, s'il vous plaît, de revenir à l'essentiel de l'article
46.
M. de Bellefeuille: Oui, je note à la deuxième
ligne de l'article 46, M. le Président, les deux mots "un
médiateur" et je déplore le fait qu'on ne lise pas là "un
médiateur ou une médiatrice": Une partie peut demander au
ministre du Travail de charger un médiateur ou une médiatrice de
tenter de régler un différend.
Je ne vois pas pourquoi, comme c'était le cas pour les
présidents et les vice-présidents, le vérificateur, les
ministres, toujours au masculin, le gouvernement refuse d'envisager la
possibilité qu'il nommerait une médiatrice. Je ne comprends pas
cette obstination du gouvernement, M. le Président, et je m'en tiendrai
à cela pour le moment.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement
proposé par le ministre est adopté?
M. Clair: Adopté sur division.
M. Bisaillon: J'avais compris, M. le Président, qu'on
avait étudié le premier alinéa de l'amendement, parce que,
jusqu'à maintenant, on a discuté uniquement de
celui-là.
Le Président (M. Lachance): Non, on a parlé de
l'amendement globalement, en général.
M. Bisaillon: D'accord, M. le Président, si c'est votre
décision, cela me va.
Le Président (M. Lachance): L'amendement est-il
adopté sur division?
M. Clair: Adopté.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 46,
tel... Oui, M. le député d'Argenteuil.
M. Ryan: À propos de l'article 46, brièvement, M.
le Président. Je vois dans le Code du travail que, sur réception
d'une demande de conciliation, le ministre doit nommer un conciliateur. Ce
n'est pas précisé ici. Est-ce que c'est à dessein que vous
n'avez pas précisé cela? Sur réception de la demande,
est-ce qu'il doit ou non en désigner un? Là, il le peut. Une
partie peut le demander et on ne sait pas ce qui va arriver.
M. de Bellefeuille: II peut même ne pas accuser
réception. Il peut se permettre de ne pas accuser réception.
M. Ryan: Est-ce que vous ne devriez pas ajouter cette phrase? Je
vais proposer un amendement pour que ce soit bien clair sans m'imposer de vous
l'expliquer longuement, tellement cela tombe sous le sens. L'amendement se
formulerait comme ceci: Sur réception de cette demande, le ministre doit
désigner un médiateur. Tout de suite après les mots
"à l'échelle nationale".
M. de Bellefeuille: Ou une médiatrice.
M. Ryan: Ou une médiatrice, je n'ai pas d'objection du
tout. On pourrait leur jouer un tour.
Le Président (M. Lachance): M. le député
d'Argenteuil, je voudrais vous signaler que l'amendement avait
déjà été adopté.
M. Ryan: Mais j'en propose un autre. Le Président (M.
Lachance): Oui?
M. Ryan: Oui, j'en propose un autre. Il n'y a pas de
problème.
Le Président (M. Lachance): Alors, après les mots
"à l'échelle nationale", on doit ajouter les mots "à
l'exception des salaires et échelles de salaires".
M. Ryan: Exactement. Oui, d'accord. Ma formulation était
erronée, fautive.
Le Président (M. Lachance): Alors, cela s'ajouterait
à cela.
M. Ryan: Après ces mots, après les derniers mots
dont vous avez parlé "à l'exception des salaires et
échelles de salaires" ajouter les mots "sur réception de cette
demande, le ministre doit désigner un médiateur".
M. de Bellefeuille: Ou une médiatrice. M. Ryan: Ou
une médiatrice.
Le Président (M. Lachance): Alors, "sur réception
de cette demande, le ministre doit...
M. Ryan: Désigner un médiateur.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre.
M. Ryan: Je vais m'expliquer auprès de mon collègue
de Deux-Montagnes. Le président a déjà
décidé que ces discussions étaient
antiréglementaires, qu'il avait statué il y a déjà
un certain bout de temps sur ces questions qui sont portées sur une
autre tribune et je ne veux pas ouvrir le débat, étant toujours
soumis à la présidence.
Le Président (M. Lachance): Vous êtes assez
respectueux, M. le député d'Argenteuil, des règles de
procédure et des décisions de la présidence, et je
l'apprécie beaucoup. Vous devriez être suivi sur cette
façon de procéder par les collègues autour de la
table.
M. Ryan: Je suis comblé. L'amendement est proposé
et je ne veux pas l'expliquer davantage tellement il me semble...
Le Président (M. Lachance): D'accord. Oui, M. le
ministre.
M. Clair: M. le Président, deux choses, rapidement. La
première, c'est qu'en général, dans la législation
canadienne, il n'y a pas de telle obligation d'en nommer. Cependant, compte
tenu que la médiation est une étape préalable à
l'exercice du droit de grève, si le ministre du Travail n'en nommait
pas, il pourrait faire l'objet d'un mandamus, je pense, tel que l'objet d'un
recours extraordinaire pour le forcer à en nommer un, devant les
tribunaux. Ce que j'ai indiqué, premièrement, en
général, dans la législation canadienne - et je pense que
c'est la même chose dans la Loi sur le ministère du Travail - on
n'a fait obligation, semble-t-il, nulle part, à un ministre du Travail
de nommer un médiateur. Cependant, je souligne que, dans ce cas-ci,
compte tenu que des droits dépendent de la nomination d'un
médiateur, si le ministre du Travail n'en nommait pas un, il pourrait
être soumis à l'exercice d'un recours extraordinaire du Code de
procédure civile qui s'appelle un mandamus pour le forcer à en
nommer un. Cela me surprendrait que le ministre du Travail se soumette à
cela, mais il a une certaine discrétion. En général, dans
la législation canadienne, c'est qu'il n'y a pas d'obligation d'en
nommer un. Il peut en nommer un et, compte tenu qu'il serait sujet à un
recours à un mandamus s'il ne procédait pas sur le plan
juridique, je pense que le texte actuel est suffisant.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, tout dépend de la
formulation qu'on utilise pour les articles et tout dépend aussi de la
volonté gouvernementale. J'indique au ministre que le même
ministre du Travail dont il est question ici, dans le cadre de la loi 42, par
exemple, s'est imposé lui-même, par la formulation d'au moins une
dizaine d'articles, une telle obligation. Ce n'était pas écrit
que le ministre est obligé, mais cela disait: Sur réception, le
ministre nomme... Et on pourrait le formuler de cette façon. Autrement
dit, pour que l'article ait du sens, il faut qu'il s'applique. Si on ne le dit
pas, cela ne veut rien dire. (22 h 30)
M. Ryan: Oui, mais il y a le mandamus.
M. Bisaillon: Le mandamus, c'est de dire: Prenez les tribunaux
pour régler un problème qu'on essaie maintenant de régler
par une loi. Je voudrais juste, M. le Président, rappeler au ministre
que l'argument qu'il nous a donné, qu'on ne peut pas obliger un ministre
à faire telle chose, le même ministre du Travail, dans la loi 42,
s'est imposé cette formulation.
M. Clair: Je n'ai pas dit qu'on ne pouvait pas obliger un
ministre à faire telle chose, le Parlement peut obliger le ministre X, Y
ou Z à faire ce que la loi dira. Ce n'est pas ce que je dis. Ce que je
dis simplement, c'est que la législation canadienne, de façon
générale, ne prévoit pas précisément
d'obligation à un ministre du Travail de nommer un médiateur;
premièrement, c'est ce que je dis. Deuxièmement...
Une voix: So what?
M. Clair:... je dis que, cependant, compte tenu qu'à
l'article 50 on indique qu'il doit y avoir un rapport écrit, un
rapport
public suivant les articles 47, 48 et 49, ayant donné avis
écrit au ministre du Travail, si on va à l'article 111. 10. 8, on
prévoit qu"'Une partie ne peut déclarer une grève ou un
lock-out avant l'expiration d'un délai de 20 jours de la date où
le ministre a reçu l'avis prévu à l'article 50... ". Donc,
l'exercice du droit de grève est relié, dans un premier temps,
à la "cooling-off period", dans un deuxième temps, à la
production et à la publication du rapport de médiation. Je dis
donc que, même si ce n'est pas écrit à l'article 46, par le
jeu des articles 50 et 111. 7 et suivants, si le ministre du Travail ne nommait
pas un tel médiateur, il serait sujet à l'exercice d'un mandamus
contre lui pour le forcer à en nommer un.
M. Bisaillon: Alors, l'argumentation du ministre, M. le
Président, c'est de nous dire que la façon dont on prévoit
cela, c'est que le ministre, dans le fond, va devoir répondre à
un droit. S'il n'y répond pas, la partie demanderesse va être
obligée d'aller devant la cour, de se prendre un mandamus pour faire
respecter le droit que les articles 47 et suivants pourraient lui donner.
M. Clair: De sorte que c'est évident que le ministre va en
nommer un.
M. Bisaillon: J'ajoute, M. le Président, que le ministre
vient de nous dire qu'à l'article 111 du Code du travail, qu'on
amendera, le droit de grève ne pourra être exercé que dans
les 20 jours qui vont suivre le délai de l'article 50. Or, si, à
l'article 46, le ministre du Travail, pour toutes sortes de raisons, retarde
d'un mois, même si les parties allaient se chercher un mandamus pendant
ce mois, l'article 111 n'a plus à s'appliquer.
M. Clair: Je suis tout à fait d'accord.
M. Bisaillon: II va falloir attendre 20 jours de plus. Autrement
dit, à partir du moment où le gouvernement prévoit la
nomination d'un médiateur pour tenter de rapprocher les parties, il me
semble que son intérêt, c'est que cela se fasse le plus rapidement
possible et qu'on prévoie que cette nomination se fasse sur
réception. Je sais que le ministre est d'accord avec nous, mais il dit
que c'est implicite. Nous disons: Cela va être implicite tant qu'une
partie va le faire, tant que le ministre du Travail va le faire. À
partir du moment où il ne le fera pas, l'autre partie va être
obligée de se rendre devant un juge pour le faire interpréter de
la même façon que le ministre. Pourquoi ne pas le mettre tout
simplement?
M. Clair: Mais l'envers de la médaille, c'est que s'il y
a... D'une part, il peut y avoir avantage, dans l'intérêt de la
solution à un conflit X, Y, Z, que le ministre du Travail retarde ou
conserve une discrétion pour au moins quelques jours. Un ministre du
Travail qui refuserait, pendant un, deux ou trois ans, de nommer un
médiateur, voyons donc, c'est ridicule! Alors, je pense qu'il y a un
argument de souplesse pour le ministre du Travail, d'une part; et, d'autre
part, il peut y avoir aussi un intérêt pour le ministre du Travail
de ne pas avoir à nommer des médiateurs, dans un premier temps,
à partir de l'équipe dont il dispose, de les nommer dans une
quinzaine de dossiers en même temps et de prévoir un
échelonnement, parce que certains dossiers pourraient être en
remorque parfaite par rapport à d'autres et qu'une médiation dans
un dossier va amener une solution dans l'autre et que, dans ce sens-là,
cela peut devenir avantageux.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Lachance): On est toujours sur
l'amendement du député...
M. de Bellefeuille: D'Argenteuil.
Le Président (M. Lachance):... d'Argen-teuil.
M. de Bellefeuille: Oui, M. le Président. Le ministre nous
parle de mandamus. Je ne suis pas juriste, j'ai une idée de ce que cela
veut dire. D'abord, je constate - je crois que le député de
Sainte-Marie a déjà fait la même observation - que cela a
pour effet de "judiciariser" le processus, si vous me permettez d'utiliser ce
barbarisme très répandu, alors que le gouvernement, par la voix
du député de Prévost et par la voix du
député de Sherbrooke, ne cesse de nous dire que son principal
souci en matière de relations du travail, c'est de
"déjudiciariser" ces mécanismes-là.
Alors, là, le président du Conseil du trésor va
dans l'autre sens de la "judiciari-sation" du mécanisme. Première
observation. La deuxième observation, M. le Président, c'est que,
si je comprends bien comment cela se passe, un mandamus, cela peut être
refusé. Ce n'est pas parce qu'une partie demande un mandamus que c'est
nécessairement obtenu, puisque cela peut être refusé. Cela
ne donne pas les garanties que l'on est en droit de rechercher.
De plus, M. le Président, d'après ce que le ministre nous
dit lui-même, si j'ai bien compris, le ou la ministre a ici le moyen
d'annuler le droit de grève, puisque, s'il n'y a pas médiation,
il ne peut pas y avoir grève. Alors, le ministre n'a qu'à ne
pas nommer de médiateur ni de médiatrice et, à ce
moment-là, les travailleurs et les travailleuses n'acquièrent
jamais le droit de grève.
M. Pagé: M. le Président, j'ai l'impression que M.
le ministre voudrait s'amender.
M. Clair: M. le Président, j'accepte l'amendement qu'on
peut relire une dernière fois pour être certain.
Le Président (M. Lachance): Certainement: Ajouter à
la fin du premier alinéa, tel que déjà amendé, les
mots suivants: Sur réception de cette demande, le ministre doit
désigner un médiateur.
M. Pagé: Vous voulez dire que les députés
péquistes s'apprêtaient à voter contre.
M. Clair: M. le Président, ce sont juste les mots "sur
réception"...
M. Bérubé: Non, non, interventions auprès
des ministres responsables.
M. Clair: C'est peut-être un peu fort. Qu'on fasse
l'obligation au ministre de nommer le jour où il reçoit, c'est
peut-être un peu fort.
M. Bisaillon: L'expression, "sur réception", c'est la
même chose que "dans le plus bref délai".
M. Ryan: Mais, qu'est-ce que vous voulez écrire?
M. Clair: Simplement de faire obligation au ministre du Travail
de nommer. Je ne sais comment on pourrait le formuler: Une partie peut demander
au ministre du Travail de charger un médiateur de tenter... Non, je
m'égarais de la formulation. Le ministre du Travail doit nommer un tel
médiateur, parce que "sur réception"... Mais, "sur
réception", c'est encore plus court.
M. Ryan: Si vous mettiez un délai de huit jours cela
aurait du bon sens, mais il ne faut pas que cela traîne. S'il nous arrive
après trois semaines en disant: Je suis obligé mais la loi ne
m'indique aucun moment, alors, ne vous inquiétez pas, mon obligation
j'en suis conscient comme vous, on a l'air fin.
M. Clair: Mais, encore une fois, je ferai remarquer au
député que...
M. Ryan: On ne peut pas légiférer pour ne rien
dire.
M. Clair: Oui. Mais je ferai remarquer encore une fois qu'il y a
plusieurs législateurs qui auraient légiféré pour
ne rien dire, y compris celui-ci, parce que la Loi sur le ministère du
Travail ne fait pas obligation au ministre du Travail de nommer un
médiateur.
C'est le député d'Argenteuil qui me reprochait à
plusieurs reprises de vouloir faire du droit nouveau. Cette fois-ci, c'est lui
qui veut faire du droit nouveau.
M. Ryan: Au contraire, je m'inspire de la législation
existante.
M. Bisaillon: M. le Président, on porte à mon
attention le texte du Code du travail, article 54, qui s'applique à la
conciliation où c'est dit: "Sur réception de cette demande, le
ministre doit désigner un conciliateur. " Alors, cette formulation est
déjà dans le Code du travail. Elle a dû elle aussi,
être jugée et testée. Alors, c'est le texte du Code du
travail, article 54, sur la conciliation. Quand une partie demande la
conciliation, le texte qui suit, c'est: "Sur réception de cette demande,
le ministre doit désigner un conciliateur. "
Alors, cela me semble répondre exactement en tous points au texte
même de l'amendement, appliqué à la médiation, du
député d'Argenteuil.
M. Clair: M. le député de Sainte-Marie faisait
lui-même tantôt une distinction entre la conciliation et la
médiation. Je proposerais plutôt: À la demande d'une
partie, le ministre du Travail charge un médiateur.
M. Ryan: Oui.
M. Clair: À ce moment-là...
M. Ryan: Merci. C'est exact.
M. Clair: Alors, M. le Président, je propose de modifier
la... Oui, il faudrait que vous retiriez votre amendement.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que vous acceptez de
retirer votre motion d'amendement, M. le député d'Argenteuil?
M. Ryan: Oui, volontiers, si cela peut simplifier et hâter
les procédures.
M. Bisaillon: Puisque la motion nous appartient, nous
acceptons.
M. Ryan: C'est cela, c'est entendu.
M. Pagé: La commission en était déjà
saisie.
M. Clair: M. le Président, je propose, à
l'article 46, de remplacer la première ligne par les mots
suivants: "À la demande d'une partie, le ministre du Travail charge un
médiateur".
Une voix: C'est un ministre très conciliant.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est
adopté?
M. Ryan: On portera le jugement à la fin.
M. Clair: L'avez-vous bien noté, M. le
député?
M. Ryan: II faut le garder à l'épreuve.
M. Bérubé: Très ouvert aux amendements.
M. Clair: Pour le Journal des débats, je vais
répéter.
M. Ryan: Cela paraît que vous n'avez pas été
ici longtemps.
M. Clair: Je propose, M. le Président, de biffer la
première ligne de l'article 46, c'est-à-dire les mots "Une partie
peut demander au ministre du Travail de charger" pour les remplacer par:
"À la demande d'une partie, le ministre du Travail charge".
M. Bérubé: M. le Président, je dois vous
avouer que les arguments du président du Conseil du trésor
m'avaient convaincu qu'il fallait rejeter l'amendement, mais je trouve qu'il
est très ouvert aux amendements de l'Opposition. Il est également
convaincant dans la révision de sa position.
M. Ryan: M. le Président, comme les membres du
gouvernement ont développé une véritable aptitude à
s'ajuster journellement aux orientations ou aux décisions qui paraissent
contraires ou profanes...
M. Clair: C'est mon métier.
M. Ryan:... on accepterait bien l'aveu du ministre de
l'Enseignement supérieur comme s'inscrivant dans la ligne d'orthodoxie
la plus récente.
Le Président (M. Lachance): J'en conclus que l'amendement
est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Lachance): Adopté.
M. Clair: Est-ce que l'article 46 est adopté?
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 46 tel
qu'amendé est adopté? Il faut bien comprendre qu'il y a deux
amendements qui ont été adoptés à l'article 46.
Est-ce que l'article 46 est adopté tel qu'amendé?
M. Bisaillon: Si on avait à voter, on voterait sur
division, mais, comme on ne vote pas, on ne le fera pas.
M. Clair: On peut l'adopter sur division.
Le Président (M. Lachance): J'appelle l'article... Il n'y
a personne qui a le droit de vote parmi les gens qui sont là, M. le
député.
M. Clair: On est habitué à leur division, M. le
Président.
Le Président (M. Lachance): Mais ils ont le droit de
parole.
M. Bisaillon: J'ai juste dit que, si j'avais eu à voter,
je l'aurais fait sur division.
Le Président (M. Lachance): J'appelle l'article 47.
M. Clair: M. le Président, j'aurais deux amendements
à proposer à l'article 47. Premièrement, qu'il soit
modifié par le remplacement, dans la première ligne du premier
alinéa, du chiffre "30" par le chiffre "60". Deuxièmement, un
nouvel amendement que vous pouvez faire parvenir aux collègues. Je
propose que l'article 47 du projet de loi soit modifié par la
suppression, dans la troisième ligne du premier alinéa, des mots
"règlement du".
Je peux donner quelques explications. À la suite des
représentations qui nous ont été faites par le
ministère du Travail, il a été convenu de modifier la
période de médiation de 30 à 60 jours et,
deuxièmement, de rayer à la fin les mots "le règlement"
puisqu'on voit que ces mots s'imbriquaient dans la fin de la phrase: "un
rapport contenant ses recommandations sur le règlement du
différend". Pour plus de souplesse, on nous a demandé de retenir
simplement les mots "ses recommandations sur le différend".
M. de Bellefeuille: M. le Président, c'est un nouvel
amendement, c'est-à-dire qu'il y en a un qu'on a déjà par
écrit et l'autre, c'est un nouvel amendement.
M. Clair: Effectivement.
Le Président (M. Lachance): Le premier amendement,
à la première ligne, c'est de remplacer le chiffre "30" par le
chiffre "60". Est-ce que c'est adopté? M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, je voudrais juste rappeler
ici aux membres de la commission que, selon l'explication que nous a
donnée le ministre tantôt, on vient par le fait même de
repousser la période du droit de grève de 30 jours additionnels.
(22 h 45)
M. Clair: M. le Président, drapeau blanc encore une fois
là-dessus. Il y a deux choses: d'abord, la formulation du projet de loi
telle qu'elle était prévoyait 30 jours avec possibilité de
prolongation, avec l'accord des parties. Si le président du Conseil du
trésor a droit à la présomption de bonne foi, j'insiste
pour dire que c'est à la suite de représentations qui nous ont
été faites par le ministère du Travail et ses experts
selon lesquelles on préférait obtenir 60 jours plutôt que
30 jours. Ce n'est aucunement quelque finasserie que ce soit de la part du
président du Conseil du trésor.
M. Bisaillon: Non, non, M. le Président, je voudrais bien
qu'on me comprenne. Je n'ai pas essayé d'expliquer que c'était
par finasserie que cela était fait comme ça, mais les effets sont
les mêmes.
M. Clair: D'accord.
M. Bisaillon: Dans le texte original, cela pouvait être
après une période de 60 jours, mais au moins les parties en
convenaient. Donc, les parties trouvaient qu'il était opportun ou
intéressant de se donner du temps additionnel, tandis que l'article 111
que vous m'avez lu tantôt, que vous allez amender dans le projet de loi
37, repose sur l'article 50. Or, l'article 50, c'est à partir des avis
qui sont fournis au ministre du Travail en fonction des articles 47, 48 ou 49.
Si je mets 60 jours au lieu de 30 jours, cela veut dire que le droit de
grève dans ce cas-là, de façon automatique, va arriver 20
jours après l'avis que le ministre va avoir reçu, 30 jours plus
tard que ce qui était prévu initialement.
M. Clair: Suivant la date à laquelle la médiation a
été demandée, parce que la médiation peut
être demandée à compter du 3 octobre.
M. Bisaillon: Oui, mais peu importe, M. le ministre...
M. Clair: Le député a raison: en tout état
de cause, cela retarde tout le processus de 30 jours, mais c'est la raison pour
laquelle j'indiquais au député que c'est à la suite de
représentations qui nous ont été faites par le
ministère du Travail et ses experts.
M. Bisaillon: Qu'est-ce qu'ils vous ont dit là-dessus, les
parties syndicales et leurs experts, puisque vous avez pris avis du
ministère du Travail et de ses experts?
M. Clair: M. le Président...
M. Bisaillon: Est-ce qu'ils l'ont en main, cet amendement que
vous nous déposez aujourd'hui?
M. Clair: L'amendement n'a pas été
déposé aujourd'hui, mais j'ai déposé dès le
début des travaux de la commission ces amendements.
M. Bisaillon: Oui, oui, excusez.
M. Clair: J'ignore s'il y a eu des pourparlers
récents.
M. Bisaillon: Est-ce qu'il y a eu distribution des
amendements?
M. Clair: Oui, oui, les amendements ont tous été
distribués et je suis convaincu qu'une distribution élargie a
été effectuée par la suite.
M. Bisaillon: M. le Président, je vais terminer avec cette
intervention-là. Le projet de loi 37 non seulement enlève des
outils, diminue le rapport de forces et met en position plus difficile les
représentants des travailleurs et des travailleuses, mais, avec un
certain nombre d'amendements qui ont l'air anodin, on vise aussi à le
rendre encore plus difficile d'application. Les quelques éléments
que les discussions entre les parties avaient laissés en place glissent
tranquillement au fur et à mesure qu'on s'en va. Je prétends que
c'est un des éléments... Je n'accuse pas le ministre de mauvaise
foi, le président du Conseil du trésor de mauvaise foi. Je dis
juste que cela a un effet pour une des parties seulement. Je trouve qu'on se
préparait à voter cela rapidement, sans le mentionner. Je trouve
un peu abusif de ne pas dire que c'est ce que cela a pour effet. Quant à
moi, dans l'ordre de la démarche qui est entreprise, les discussions
avaient réussi à ne pas trop en enlever et là on en
enlève encore tranquillement dans le processus parlementaire. Quand on
va commencer les véritables négociations sous ce régime,
on va en enlever encore et probablement qu'on sera obligé aussi
d'adopter une autre loi spéciale où on les enlèvera
toutes.
M. Clair: M. le député de Sainte-Marie me fait un
procès d'intention, M. le Président, quand il dit...
M. Bisaillon: Non, je fais comme vous, je fais de la
prédiction.
M. Clair:... qu'on en enlèvera encore ou
que c'est..
M. Bisaillon: Je fais comme vous hier, M. le ministre, une
prédiction.
M. Clair: Une prédiction? Ah bon!
Le Président (M. Lachance): Est-ce que ce premier
amendement est adopté?
M. Clair: Je voudrais insister, M. le Président, pour dire
au député de Sainte-Marie - on va le vérifier - que je me
souviens que cet article a été modifié à de
multiples reprises dans les différentes versions de la loi en
préparation. Si ma mémoire est fidèle - on va le
vérifier, peut-être que je fais erreur - je pense que dans
l'avant-projet de loi c'était 60 jours. Nous sommes revenus à 30
jours à la suite de certaines représentations et, finalement,
aujourd'hui, la vérité vraie, je vous la dis, simple et
sincère, c'est à la suite de représentations qui nous ont
été faites par le ministère du Travail. C'est la
vérité toute...
M. Bérubé: Toute nue. M. Clair:... toute nue.
Le Président (M. Lachance): Alors, ce premier amendement
est adopté?
Une voix: Oui.
Le Président (M. Lachance): Adopté.
M. Bisaillon: La vérité toute nue n'est pas
toujours belle. Si j'avais l'occasion de le dire, M. le Président, je
vous dirais que ce serait sur division, mais je n'ai pas le droit.
Le Président (M. Lachance): Alors, j'appelle le
deuxième amendement.
M. Clair: Cela fait également suite à des
représentations du ministère du Travail.
Le Président (M. Lachance): L'article 47 du projet de loi
est modifié par la suppression, dans la troisième ligne du
premier alinéa, des mots "règlement du". Est-ce que c'est
adopté?
M. Bisaillon: Sur le différend, nouvelle version. C'est
ça?
Le Président (M. Lachance): L'amendement est-il
adopté? Oui, M. le ministre.
M. Clair: Amende honorable: dans l'avant-projet de loi,
c'était également 30.
Une voix: C'était quoi?
M. Clair: C'était également 30.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 47, tel
qu'amendé, est adopté? C'est adopté. J'appelle l'article
48.
M. Bisaillon: Un instant, M. le Président! Ce sont les
amendements qu'on vient de voter.
M. Clair: Oui.
M. Bisaillon: On n'a pas adopté l'article.
Le Président (M. Lachance): C'est la question que j'ai
posée.
M. Bisaillon: C'est parce qu'à l'article 47 il y a deux
autres paragraphes et j'ai, dans une intervention préalable, fait part
au ministre de ma réaction au deuxième alinéa: "Ce rapport
doit être rendu public à la demande d'une partie. " Je ne vois pas
ce que cela vise ou ce que cela veut préserver pour une ou l'autre
partie, dans la tête du ministre, au deuxième paragraphe de
l'article 47.
M. Clair: Cela veut simplement ménager la
possibilité que les deux parties aient un intérêt
réciproque à ne pas le rendre public et désirent profiter
d'un court délai pour tenter de s'entendre avant que le rapport ne soit
rendu public.
M. Bisaillon: Habituellement, quand cela se produit, le
médiateur est au courant. Habituellement, un médiateur, avant de
rendre un rapport public, quand il doit le rendre public, les parties ont une
période pour se rapprocher. Il leur donne une période d'une, deux
ou trois journées pour aménager les affaires. Quant à le
formuler comme cela, je trouverais préférable qu'on dise: Ce
rapport doit être rendu public. Je trouverais préférable
qu'on dise cela. Cela enlèverait toutes les petites questions de
stratégie et cela obligerait, dans le fond, le médiateur à
donner la possibilité d'une période de deux ou trois jours
à l'interne pour que les parties qui pensent qu'elles pourraient
régler sur la base du rapport du médiateur le fassent. Je
préférerais: Ce rapport doit être rendu public.
M. Clair: Je suis en désaccord avec le
député de Sainte-Marie. Il me semble que cela ne fait que donner
un élément de souplesse et je ne vois pas pourquoi le
député veut enlever cet élément.
M. Bisaillon: M. le Président, je vais en faire un
amendement formel en vous l'expliquant. Autrement dit, je propose qu'au
deuxième paragraphe de l'article 47 on
enlève: "à la demande d'une partie". Je vais expliquer ma
position et je vais vous dire en quoi cela pourrait ajouter quelque chose. Au
niveau public, quand une partie va faire la demande que le rapport soit public,
elle va avoir automatiquement, en partant, de plus grandes chances de
crédibilité que l'autre. Si je demande que le rapport soit rendu
public, c'est parce que, moi, je n'ai rien à perdre. Juste par
stratégie, je pourrais demander la publication du rapport pour mettre
l'autre partie en position difficile. Comme on sait que, de toute façon,
une des deux parties va avoir un intérêt à un moment
donné, ce qu'on voulait préserver, si j'ai bien compris le
ministre, c'était juste quand les deux parties avaient
intérêt à ce qu'il ne 'soit pas rendu public. Mais, si les
deux parties n'ont pas intérêt à ce qu'il soit rendu
public, c'est parce que le médiateur a encore un petit travail à
faire et qu'il va faire ce travail à l'interne.
À partir du moment où une des deux parties peut le
demander, celle qui va le demander va avoir le plus de
crédibilité au niveau public. Dans les circonstances, pour ne pas
que la publication fasse l'objet de stratégie, mais que cela fasse
l'objet d'une volonté de rendre publiques des recommandations, je
trouverais préférable que ce soit automatiquement rendu public.
Comme cela, aucune des deux parties n'a à gagner, entre guillemets,
à la publication. Les deux parties sont sur le même pied, les deux
parties savent, dès le départ, les règles du jeu
étant connues, que le rapport va être rendu public.
Sur le plan de la présence publique et de la
crédibilité publique, je trouve qu'il pourrait y avoir uniquement
une question de stratégie. La partie qui ne le demande pas ou qui
l'aurait peut-être demandé, mais qui n'a pas pensé le
faire, va être moins bien placée sur le plan de l'opinion
publique.
Je ne sais pas, par exemple, comment réagirait quelqu'un du
milieu de l'information là-dessus, quelqu'un habitué à
analyser les façons de se comporter des groupes. Je pense, entre autres,
à certains éditorialistes. Quand une partie demande: Je veux que
ce soit rendu public, c'est parce qu'elle dit: Je n'ai rien à cacher et
je n'ai pas peur. Sur le plan de l'analyse, les gens doivent se dire cela en
partant. Donc, on met, entre guillemets, une partie en position plus difficile
par rapport à la publication. C'est aussi bien que ce soit clair et
franc, en partant, que cela va être rendu public.
Le Président (M. Lachance): Je relis l'amendement du
député de Sainte-Marie: Au deuxième alinéa,
après les mots "rendu public", biffer les mots "à la demande
d'une partie".
M. Bisaillon: M. le Président, M. le ministre hochait la
tête un peu. J'aimerais savoir s'il a des... Il m'a donné un
argument et j'ai essayé d'y répondre.
M. Clair: Entre le risque de l'utilisation des fins
stratégiques et la souplesse, j'ai plutôt tendance à
choisir la souplesse, quant à moi.
Le Président (M. Lachance): Alors, est-ce que l'amendement
est adopté?
Une voix: Non.
M. Pagé: Oui, M. le Président, adopté.
Une voix: Oui, adopté.
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Lachance): L'amendement est.
M. Clair: Suspendu.
M. Pagé: La séance ou l'article, M. le
ministre?
Une voix: Un ministre ouvert.
Une voix: Ouvert aux suggestions, conciliant.
M. Bisaillon: M. le Président, quand on siège 24
heures en ligne, est-ce qu'on pourrait se permettre de se lever deux minutes?
Suspendre pendant deux ou trois minutes, on reste autour, mais cela permet
à tout le monde de consulter.
Le Président (M. Lachance): Je vous fais confiance.
J'accepte de bon gré votre suggestion. Est-ce qu'on peut se dire
qu'à 23 heures pile on recommence?
M. Bisaillon: Très bien, M. le Président.
Le Président (M. Lachance): Très bien. Alors
suspension de cinq minutes.
(Suspension de la séance à 22 h 56)
(Reprise à 23 h 2)
Le Président (M. Lachance): La commission poursuit ses
travaux. Nous allons suspendre pour quelques instants
supplémentaires.
(Suspension de la séance à 23 h 3)
(Reprise à 23 h 15)
Le Président (M. Lachance): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission du budget et de l'administration poursuit ses travaux
après cette suspension. Est-ce qu'on peut disposer de l'amendement
proposé par le député de Sainte-Marie?
M. Clair: Si le député de Sainte-Marie acceptait
que je fasse mienne une partie de son amendement et que j'y fasse une
modification pour que le deuxième alinéa se lise comme suit:
À défaut d'entente sur le différend, ce rapport doit
être rendu public...
M. Bisaillon: L'ex-député de Bourget...
M. Clair: Je répète, je pense que, lors du
conciliabule qui a eu lieu lors de la suspension, on a tenté d'avoir la
formulation idéale. Ce que je proposais, c'était que le
deuxième alinéa se lise comme suit: À défaut
d'entente sur le différend, ce rapport doit être rendu public.
M. Bisaillon: L'ex-député de Bourget, le Dr Laurin,
dirait que c'est superfétatoire. L'article commence par "À
défaut d'entente". Autrement dit, l'article dit que le médiateur
doit fournir un rapport s'il n'y a pas d'entente parce que, s'il y a entente,
il n'aura plus besoin de rapport de médiation. Ce qui est l'objet de la
médiation, c'est de rapprocher les parties. Le médiateur va
travailler avec ces gens pour une période de 60 jours; s'ils
s'entendent, il n'y aura pas de rapport de médiation, il y aura une
entente entre les parties. S'ils ne s'entendent pas, mais qu'ils sont proches
d'une entente et qu'ils ont besoin de plus de temps pour s'entendre et pour
consulter, c'est le troisième paragraphe de l'article qui va jouer. La
période prévue par le premier alinéa peut être
prolongée avec l'accord des parties. Les parties auront un
intérêt à prolonger.
Je n'ai pas d'objection à ce que le ministre le dise ainsi, mais,
comme le disait l'ex-député de Bourget, c'est
superfétatoire. L'ensemble du paragraphe prévoit un rapport
uniquement lorsque c'est à défaut d'entente. Forcément, ce
rapport doit être rendu public. Je le relis au premier paragraphe:
"À défaut d'entente", c'est déjà marqué. Je
ne sais pas ce que le ministre en pense, mais il me semble que c'est
déjà marqué.
Je comprends que, pour certains, trop fort ne casse pas, mais dans nos
lois, on a avantage à ce que les gens comprennent du premier coup.
M. Pagé: M. le Président, là-dessus, je
comprends que le libellé, la motion d'amendement proposée par le
ministre porte à croire que le législateur parlerait ainsi pour
ne rien dire. Il est bien mentionné que c'est à défaut
d'entente, après l'expiration d'une période de 30 jours.
M. Bisaillon: De 60 jours, maintenant.
M. Pagé: Cela fixe un cadre beaucoup plus restrictif par
rapport à l'échange qu'on a eu, j'en conviens, au moment de
l'ajournement. Si on l'adoptait tel quel, ça ne respecterait pas
l'intention ou l'interprétation qu'on a voulu donner, aux dispositions
qu'on s'apprêtait à adopter.
M. Bisaillon: Qu'on me comprenne bien, M. le
Président...
M. Clair: Évidemment, on a des problèmes de
rédaction.
M. Bisaillon: C'est ça. Qu'on me comprenne bien, je
l'accepterais, la proposition du ministre.
M. Clair: J'hésite à forcer l'adoption parce que je
ne suis pas sûr si c'est le meilleur libellé. Dans le fond, si ce
n'était de risquer une confusion, la meilleure façon de le
formuler, ce serait: Ce rapport doit être rendu public à moins
qu'il n'y ait entente entre les parties. Mais, là, "à moins qu'il
n'y ait entente entre les parties", est-ce que ça signifie sur la
publication ou sur le fond? Alors, ce qu'on veut, c'est que ce soit sur le
fond. Pour contrecarrer cette difficulté, j'essayais de le formuler
autrement, et c'est là qu'on en arrivait à: "À
défaut d'entente sur le différend, ce rapport doit être
rendu public".
M. Bisaillon: Parce que vous vouliez que ça s'applique au
fond, parce que l'entente dont on parle, c'est l'entente sur le fond.
M. Clair: C'est exact, sur le fond.
M. Bisaillon: II me semble clair que, dans la première
phrase de l'article 47, quand on dit "À défaut d'entente", on
parle du fond.
M. Ryan: Là, on est rendu à un autre stade...
M. Bisaillon: Oui, mais...
M. Clair: On est à l'expiration du mandat de
médiateur.
M. Ryan: S'il pouvait clarifier sa rédaction pour montrer
que c'est un autre stade, je pense que ça éviterait la critique
de répétition que vous avez formulée. Je pense que c'est
ce qu'on essaie de trouver. Vous avez raison, c'est...
M. Clair: Je vous demande votre avis: Est-ce que vous pensez
qu'il y aurait effectivement risque de confusion si on disait: Ce rapport doit
être rendu public à moins qu'une entente n'intervienne entre les
parties?
M. Ryan: Sur le différend.
M. Clair: À moins qu'une entente sur le différend
n'intervienne entre les parties.
M. Bisaillon: À moins qu'une entente sur le
différend n'intervienne entre les parties.
M. Ryan: Je pense que ce serait correct avec ça.
M. Bisaillon: Je l'accepterais, pour ne pas retarder les
travaux.
Le Président (M. Lachance): M. le député,
est-ce que vous accepteriez de retirer votre amendement?
M. Bisaillon: Oui, bien sûr.
M. Ryan:... une médaille de l'ordre de
l'indépendance socialiste.
Le Président (M. Lachance): Alors, l'amendement du
député de Sainte-Marie est retiré? Je demanderais à
M. le ministre de nous libeller son amendement.
M. Clair: L'amendement que je propose, techniquement, c'est de
rayer les mots, au deuxième alinéa de l'article 47 "à la
demande d'une partie" et de les remplacer par les mots: à moins qu'une
entente n'intervienne...
Une voix: C'est bon, cela.
M. Clair:... sur le différend entre les parties.
M. Ryan: II n'est pas nécessaire d'ajouter "entre les
parties".
M. Clair: À moins qu'une entente n'intervienne sur le
différend.
M. Ryan: C'est cela. M. Bisaillon: C'est cela.
M. Ryan: Si ce n'est pas entre les parties, il n'y aura pas
d'entente.
M. Clair: Là, ce serait superfétatoire. M. Ryan: Je crois
qu'avec cela... Une voix: N'intervienne?
M. Dussault: Intervienne.
M. Clair: À moins qu'une entente intervienne ou
n'intervienne?
M. Pagé: M. le député de Terrebonne va
répondre à cela.
M. Bisaillon: C'est: n'intervienne. M. Clair: Que
ne...
M. Blais: C'est le "n" qui fait la liaison. Le "n"' doit
sauter.
Une voix: C'est la liaison qui nous t'ait prononcer...
M. Dussault: À moins qu'une entente intervienne.
M. Blais: La liaison est pour éviter...
M. Clair: À moins qu'une entente intervienne.
M. Blais: Le "n"' doit sauter.
M. Pagé: Comme c'est facile de s'entendre après 23
heuresl Je propose qu'on commence, demain soir, à 23 heures.
M. Blais: C'est parce que c'est notre première apostrophe,
M. le député.
M. Clair: Alors, c'est: "à moins qu'une entente
intervienne sur le différend". Est-ce que vous avez bien noté, M.
le Président?
Le Président (M. Lachance): Oui, voilà! Voici, et
vous me corrigerez si c'est inexact, M. le ministre. Votre amendement se lirait
comme suit: Au deuxième alinéa, biffer les mots "à la
demande d'une partie" et les remplacer par "à moins qu'une entente
intervienne sur le différend".
M. Clair: C'est exact.
Le Président (M. Lachance): C'est bien cela? Est-ce que
cet amendement est adopté?
M. Clair: Adopté.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 47 tel
qu'amendé est adopté?
M. Clair: Adopté.
M. Bisaillon: M. le Président, un bref commentaire sur le
troisième paragraphe, pour dire que j'ai l'impression qu'on a un peu
abusé de moi parce que, tantôt, lorsque j'ai fait des commentaires
sur les 30 jours ou 60 jours, le ministre m'avait expliqué que la
première formulation c'était 30 jours et un délai
prolongé s'il y avait une entente entre les parties. Le ministre m'avait
répondu: Le ministère du Travail nous a demandé de
remplacer tout cela par les 60 jours. J'avais compris que tout cela,
c'était tout, mais là, je me rends compte que le troisième
paragraphe est toujours là. Autrement dit, c'est 60 jours et cela peut
être prolongé encore s'il y a une entente entre les parties pour
le faire. C'est cela?
M. Clair: Le député relira mes propos. Je n'ai
jamais dit qu'on nous avait demandé de modifier tout cela. On nous avait
demandé deux choses: de modifier le délai et d'enlever les mots
"le règlement".
Le Président (M. Lachance): L'article 47 est-il
adopté tel qu'amendé?
M. Clair: Adopté.
Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 48?
M. Clair: Je n'ai pas d'amendement, M. le Président.
M. Bisaillon: Un instant, M. le Président. À
l'article 48, dans une première remarque, par concordance, ne devrait-on
pas enlever "sur le règlement" pour dire "sur le différend" afin
de respecter ce qu'on a corrigé à l'article 47? À
l'article 47, on a enlevé les mots "règlement du" et les
recommandations portaient sur le différend. Il me semble qu'on devrait
faire la même chose à l'article 48.
Le Président (M. Lachance): Au deuxième
alinéa?
M. Clair: Que ferions-nous si nous n'avions pas le
député de Sainte-Marie?
M. Bisaillon: Le député de Bourassa dirait que
c'est de la concordance.
M. Clair: C'est de la concordance, M. le Président. Il
faudrait rayer les mots...
M. Bisaillon: "Règlement du".
M. Clair: C'est cela, il faut rayer les mots "règlement
du" à la deuxième ligne du deuxième alinéa.
M. Ryan: II en est de même pour le troisième
alinéa, M. le ministre.
M. Clair: De même qu'au troisième alinéa,
c'est ce que j'allais dire. Il faudrait aussi faire la même modification
que celle que nous avons faite: "Ce rapport doit être rendu public,
à moins qu'une entente intervienne sur le différend".
Le Président (M. Lachance): Pour être bien certain
de ne pas faire d'erreurs, au deuxième alinéa, à la
deuxième ligne, il faut rayer les mots...
M. Clair: C'est: sur le différend. Nous rayons les mots
"règlement du".
Le Président (M. Lachance): Les mots "règlement
du".
M. Clair: Effectivement.
Le Président (M. Lachance): D'accord.
M. Clair: Et, au dernier alinéa...
Le Président (M. Lachance): Au troisième
alinéa...
M. Clair:... on raie les mots "à la demande d'une partie"
et on les remplace par "à moins qu'une entente intervienne sur le
différend".
M. Bisaillon: C'est ce qu'on disait tantôt.
M. Clair: Est-ce que cet amendement est adopté?
M. Bisaillon: Lequel est-ce? La concordance?
M. Clair: Les deux membres de concordance.
M. Bisaillon: Les deux concordances?
Le Président (M. Lachance): Je relis: À l'article
48, deuxième alinéa, deuxième ligne, rayer les mots
"règlement du"; au troisième alinéa, rayer les mots
"à la demande d'une partie" et les remplacer par "à moins qu'une
entente intervienne sur le différend". Est-ce que cet amendement est
adopté?
M. Clair: Adopté.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 48...
M. Bisaillon: M. le Président...
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député.
M. Bisaillon:... selon la première partie, le premier
paragraphe de l'article 48, "Les parties peuvent faire une entente sur une
procédure de médiation... ". Pour ce qui est du français,
est-ce qu'on ne pourrait pas dire: Les parties peuvent s'entendre ou peuvent
convenir, mais non "peuvent faire
une entente... "? En tout cas, cela ne me semble pas être du bon
français, c'est sûr. ... "sur une procédure de
médiation différente de celle prévue par les articles 46
et 47", cela va. "Elles peuvent notamment avoir recours à un conseil de
médiation ou à un groupe d'intérêt public. "
Qu'est-ce que cela ajoute aux yeux du ministre, cette partie? Si elles peuvent
s'entendre sur une procédure différente, tout leur est possible,
y compris ce qui suit. Est-il essentiel aux yeux du ministre que cela soit
là?
Alors, mon premier commentaire, c'est "peuvent faire une entente"
à remplacer par "peuvent s'entendre". La deuxième partie du
premier paragraphe, est-ce que le ministre trouve que c'est essentiel? Pourquoi
l'a-t-il placée là? Il devait avoir des raisons.
M. Ryan: Ce n'est pas nécessaire.
M. Clair: Comment dites-vous? Je ne suis pas sûr d'avoir...
"Peuvent faire une entente", je pense que c'est encore mieux que s'entendre.
Peuvent convenir...
M. Bisaillon: Oui, peuvent convenir, c'est ce que je disais.
M. Clair: Peuvent convenir.
M. Bisaillon: Peuvent convenir d'une procédure de
médiation différente.
M. Clair: Peuvent convenir d'une procédure de
médiation différente.
M. Bisaillon: Point.
M. Clair: Alors, si cela ne vous complique pas trop la vie, M. le
Président, remplacer les mots "faire une entente sur" par "convenir
d'".
M. Bisaillon: Oui, "d"'.
M. Clair: "d"'. Et vous en avez contre la deuxième partie
de l'alinéa?
M. Bisaillon: À partir du moment où la
première partie du paragraphe dit que "les parties peuvent convenir
d'une procédure de médiation différente", c'est que tout
leur est possible.
M. Clair: Oui, mais ce qui...
M. Bisaillon: Alors, le fait de préciser qu'elles peuvent
notamment avoir recours à un conseil de médiation ou à un
groupe d'intérêt public, cela n'ajoute rien au premier paragraphe.
Cela précise des modes possibles, mais cela n'ajoute rien. Alors, je me
demandais si vous aviez eu des raisons spéciales ou particulières
pour noter ces deux modes de médiation ou ces deux procédures
différentes plutôt que d'autres.
M. Clair: C'est à des fins, je reconnais...
M. Bisaillon: Pédagogiques. M. Clair:...
pédagogiques.
M. Ryan: Vous pensiez que vous écriviez un editorial pour
le Devoir.
M. Blais: Des vieux souvenirs. M. Pagé: Des bons?
M. Blais: Ah oui!
M. Ryan: Non, mais ce sont des choses qui ne sont pas
nécessaires dans les textes de loi.
M. Blais: Surtout celui du 14 novembre 1976.
Le Président (M. Lachance): On s'ennuie parfois
là-dessus, justement.
M. Clair: J'ai la conviction qu'avec l'ensemble des lois qui
existent dans...
M. Ryan: Vous en aviez pourtant un bon ce matin.
Le Président (M. Lachance): Oui, on aurait pu se passer de
celui-là.
M. Blais: C'était sur quoi ce matin?
M. Ryan: C'était sur le livre choc du Parti
québécois. Le directeur du Devoir, avec sa formation d'historien,
a montré que cela ne valait rien.
M. Blais: Est-ce qu'il y a une bonne appréciation?
M. Ryan: Très sévère. C'est sûr que
pour vous cela va avoir beaucoup de poids.
Une voix: Mais je ne l'ai pas lu.
M. Clair: M. le Président, le député...
Une voix:... ne commencez pas une bataille.
M. Clair:... d'Argenteuil sème le trouble.
Le Président (M. Lachance): Ce n'est pas son habitude.
M. Clair: Je pense que je vais avoir... S'il ne veut pas que
j'adopte l'attitude du député de Portneuf à son
égard...
Le Président (M. Lachance): Alors, je relis...
M. Clair:... comme celle que le député adoptait
tantôt à l'égard du ministre de la Science et de la
Technologie.
M. Pagé: Oui, cela remonte à avril 1981.
M. Clair: Ah oui!
M. Pagé: Oui.
M. Clair: Alors cela remonte à...
Le Président (M. Lachance): Les gens ressassent leurs
vieux souvenirs.
M. Clair: Je n'ai rien qui remonte à rien avec le
député d'Argenteuil. Je n'ai toujours eu que de bonnes
relations.
M. Ryan: La remarque que je faisais avait simplement pour objet
de dire que je serais d'accord avec le député de Sainte-Marie
pour considérer que la deuxième phrase de l'alinéa n'est
pas nécessaire dans un texte de loi. Je n'en fais pas de casus belli.
(23 h 30)
M. Bisaillon: Comment dites-vous cela?
M. Ryan: Casus belli, un cas de guerre.
M. Bisaillon: C'est un vrai éditorial du Devoir!
M. Clair: J'y tiendrais. Comme législateur, je n'ai pas
souvent insisté pour avoir des formules pédagogiques dans nos
lois, mais celle-ci, il me semble qu'elle pourrait inspirer les parties.
M. Bisaillon: Cela les oriente, voulez-vous dire, vers...
M. Clair: Cela les oriente.
M. Bisaillon: De telle sorte que si, par exemple, la partie
patronale pensait qu'un groupe d'intérêt public lui est, dans les
circonstances, plus utile, comme c'est déjà dans la loi, elle
serait en meilleure position pour faire valoir aux yeux du public cette
méthode plutôt qu'une autre.
M. Clair: Si je me souviens bien, M. le Président, dans le
document du regroupement des syndicats des secteurs public et parapublic
où on parlait d'un conseil de médiation, on a fait
référence à ces formules. Je ne pense pas que cela fasse
de mai à personne.
M. Ryan: Cela ne fait pas de mal.
M. Blais: M. le Président, seriez-vous tenté
d'ajouter à l'amendement "et l'éditorialiste du Devoir" ou si
c'est juste en badinant?
M. Ryan: Non, dès qu'ils vont parler à un groupe
d'intérêt public, ils vont penser à cela. Ce n'est pas
nécessaire de l'ajouter.
Le Président (M. Lachance): Je reviens à
l'amendement proposé. À la première ligne du premier
alinéa, biffer les mots "faire une entente sur" et les remplacer par
"convenir d"'.
Une voix: Oui.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que c'est
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Lachance): L'amendement est
adopté. Est-ce que l'article 48, tel qu'amendé...
M. Bisaillon: Moi non plus, je n'en fais pas de casus - je ne
sais pas trop comment vous dites - mais le ministre ne peut me donner que des
arguments pédagogiques. Il persiste à me dire que c'est
uniquement pour des fins pédagogiques que ces deux choses sont
là.
M. Clair: II s'agit d'indiquer clairement que, notamment, ces
deux formes de médiation sont permises aux parties.
M. Bisaillon: Est-ce qu'il ne considère pas que l'argument
que je lui ai apporté - ce n'était pas un argument - que la
considération, dis-je, que je lui ai apportée pourrait
éventuellement être utilisée et que, à ce
moment-là, loin d'avoir une valeur pédagogique, cela jouerait
dans les relations ou dans les stratégies des parties?
M. Clair: Les deux sont prévus: conseil de
médiation ou groupe d'intérêt public.
M. Bisaillon: Voyez-vous ce que vous me dites déjà?
Vous me donnez raison: les deux sont prévus. Donc, quand on va vouloir
envisager des procédures différentes de médiation, on va
automatiquement se référer aux deux.
M. Clair: À laquelle vous...
M. Bisaillon: II peut y en avoir d'autres.
M. Clair: Oui, mais on dit "notamment"; cela n'exclut pas,
mais...
M. Bisaillon: Je suis d'accord avec vous
que cela n'exclut pas d'autres formes, mais je dis que l'effet est
à ce point pédagogique que les gens vont être portés
à dire ce que vous venez de dire: les deux sont là. Donc, il n'y
en a pas d'autres.
M. Clair: À quoi le député pense-t-il? Qu'il
me nomme donc une autre forme.
M. Bisaillon: Cela pourrait être... M. Clair: Un groupe de
cardinaux?
M. Bisaillon: Non, mais cela pourrait être, par exemple,
une discussion télévisée plutôt que le groupe
d'intérêt public. Vous vous souvenez, M. le ministre, que cela a
déjà été demandé en cours de
négociation. Une partie a déjà demandé, au lieu
d'avoir un conseil de médiation, que les discussions devant un tiers se
déroulent à la télévision pour que le public puisse
se faire une opinion directe sur les discussions. Peut-être que les
parties voudraient discuter d'une formule comme celle-là. Je sors cela
ainsi; le ministre m'en a demandé une. On a beaucoup d'imagination quand
on est en plein conflit. La seule chose que je veux dire, c'est que c'est vrai
que ce n'est pas limitatif, votre formulation; c'est vrai et j'accepte cela,
mais je dis que cela a tellement une valeur pédagogique que cela revient
à dire ce que je disais tantôt. Ce que je crains, c'est que les
parties, parce que cela les sert davantage à un moment donné,
refusent d'envisager d'autres procédures ou d'autres formes, parce qu'on
aura dit: Les deux sont là. Je n'en ferai pas un long débat, mais
admettez qu'il puisse y avoir des inconvénients au fait de vouloir, en
même temps qu'on fait des lois, faire de la pédagogie. M. Samson
vous aurait dit: Laissons la pédagogie aux enseignants et la
législation aux législateurs.
Le Président (M. Lachance): M. le député
d'Iberville m'avait demandé la parole.
M. Beauséjour: C'est tout simplement une interrogation qui
rejoint un peu ce que le député de Sainte-Marie dit.
Ordinairement, on dit que les législateurs ne parlent pas pour rien
dire. En ajoutant ces deux formes, je ne sais si, de cette façon, un
juge pourrait interpréter que ce qui vient après viendrait
préciser la façon différente et, que, notamment, ce serait
les deux seules façons. Je m'interroge là-dessus.
M. Clair: Le mot "notamment" a fait l'objet de diverses
interprétations et n'est pas exclusif. Le mot "notamment" indique
simplement deux ou trois choses. Premièrement, que ce qui suit n'est pas
exclusif; deuxièmement, que ces formes-là sont bel et bien
légalement assises et, troisièmement, cela indique une certaine
intention du législateur, à savoir que ces deux formes soient
utilisées, puisqu'il tient à ce qu'elles soient
mentionnées spécifiquement et qu'elles soient effectivement
reconnues par l'effet de la loi. Il n'y a aucun effet restrictif
là-dedans.
Le Président (M. Lachance): M. le député
d'Argenteuil. Cela va? Alors, l'article 48...
M. Bisaillon: M. le Président, pour les fins du Journal
des débats et sans argumenter - je n'argumenterai pas - je vais le
formuler et on pourra passer au vote immédiatement. Je vais faire
l'amendement pour que l'on biffe, dans le premier paragraphe, les mots "Elles
peuvent notamment avoir recours à un conseil de médiation ou
à un groupe d'intérêt public. "
M. Clair: Rejeté sur division, même dans ma propre
formation!
M. Bisaillon: On va les laisser l'écrire.
Le Président (M. Lachance): On a des petits
problèmes parce qu'on ne connaît pas la sténo. Pouvez-vous
reformuler, M. le député de Sainte-Marie?
M. Bisaillon: Dans le premier paragraphe de l'article 48, on
biffe la deuxième phrase: "Elles peuvent notamment avoir recours
à un conseil de médiation ou à un groupe
d'intérêt public. " Je n'argumente plus.
Le Président (M. Lachance): M. le député
d'Argenteuil? Non?
Une voix: On est divisés, M. le Président.
M. Ryan: Blague à part, qu'est-ce que vous dites?
M. Pagé: L'amendement est reçu, M. le
Président?
Le Président (M. Lachance): Oui, c'est reçu et je
comprends que c'est rejeté sur division?
M. Pagé: M. le Président, un amendement ne peut pas
être rejeté sur division. Il est rejeté. Il peut être
adopté sur division, mais il ne peut pas être rejeté sur
division.
Le Président (M. Lachance): Mais tout le monde
était d'accord...
M. Clair: On est tellement habitué de faire des choses sur
division avec ce groupe-là, M. le Président.
Le Président (M. Lachance): Alors, l'amendement est
rejeté. Est-ce que l'article 48, tel qu'amendé, est
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Lachance): Adopté. Nous passons
è l'article 49.
M. Clair: Je n'ai pas d'amendement à proposer, M. le
Président.
M. Pagé: Sur l'article 49...
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député de Portneuf.
M. Pagé:... le ministre ne croit-il pas qu'il y a un
danger que le législateur parle pour ne rien dire?
M. Ryan: C'est un beau cas.
M. Pagé: Si vous le voulez, on pourrait le relire
ensemble: "En cas de différend sur ce qui est objet de stipulation
négociée et agréée à l'échelle
nationale, les parties peuvent également s'entendre pour faire
conjointement un rapport sur l'objet de leur différend et le rendre
public. " Rien n'empêche les parties de s'entendre pour la production
conjointe d'un rapport et de le rendre public.
M. Clair: M. le Président, la question que se pose le
député dans le fond, c'est: Est-ce que de toute façon les
parties n'ont pas ce pouvoir? La réponse est que, si les parties
décident de faire cela, cela vient remplacer les articles 47 et 48 et
modifier les conséquences du retard du rapport du médiateur, la
"cooling-off period", etc. Cela prend un pouvoir habilitant aux parties pour le
faire.
M. Bisaillon: Donc, cela enlève le délai de 60
jours. Si c'était seulement cela comme explication, je tiens à
souligner que ce que je comprends de l'article 49, c'est un peu comme dans les
procès quand les avocats des deux parties font des admissions: On est
d'accord avec ces faits-là et voici où se situe notre
différend. C'est un peu cela, mais je comprends qu'à l'article
49, même si les parties s'entendaient pour faire un rapport conjoint sur
la nature et le contenu de leur différend, il resterait un
différend. Donc, l'article 47 devrait quand même s'appliquer, sauf
qu'il serait restreint, au départ, à un rapport public
publié par les parties, disant: Voici quelle est la nature de notre
différend. Or, je prétends que, si c'est cela, cela n'ajoute
rien, effectivement, parce que les parties peuvent le faire. De toute
façon, il n'y a pas de loi qui peut les empêcher de faire une
conférence de presse.
Deuxièmement, rien ne les empêche de parler au
médiateur dès la première journée. Lorsque des
avocats font des admissions au début d'une cause, je ne suis pas avocat,
mais je suppose bien que la loi ne contient pas un article disant qu'avant
chaque cause les avocats font des admissions.
M. Ryan: II y a peu de chance, s'ils sont en conflit, qu'il
s'entendent pour faire conjointement un rapport public. Ce serait hautement
fantaisiste. Je ne connais pas un cas où cela s'est fait dans l'histoire
passée.
M. Clair: Dans l'histoire future, vous ne le savez pas?
M. Ryan: Dans le monde idéalisé où vous avez
conçu votre projet, peut-être, oui.
M. Clair: Vous avez dit dans l'histoire passée.
M. Ryan: Mais vous savez très bien que ce n'est pas
concevable, même en pratique. C'est contraire à toute idée
du genre de situation qu'on a à ce moment-là. En tout cas, s'ils
le peuvent, cela ne change pas grand-chose.
Le Président (M. Lachance): L'article 49 est-il
adopté?
M. Clair: J'aimerais que...
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député. M. Jean-François Munn.
M. Munn: L'objectif de l'article 49, effectivement, fait sauter
la médiation prévue à l'article 47 ou une entente sur une
forme de médiation différente prévue à l'article
48. Ce que cela suppose, c'est qu'effectivement les parties s'entendent pour
faire un rapport sur ce sur quoi elles ne s'entendent pas. Souvent, en
négociation, c'est déjà un élément positif
que les parties puissent définir conjointement ce qui fait l'objet de
leur différend et le rendre public.
M. Bisaillon: Vraiment, ce que vous nous dites par cela, c'est
qu'à partir du moment où les parties appliqueraient l'article 49
un médiateur n'interviendrait pas, même sur ce qui persiste comme
différend?
M. Munn: C'est cela.
M. Bisaillon: L'avis prévu à l'article 50 serait
enclenché par le rapport conjoint prévu à l'article 49.
Donc, le droit de grève suivrait dans les 20 jours?
M. Munn: C'est cela.
M. Bisaillon: Vous voulez dire qu'une
partie patronale, par exemple, aurait intérêt, dans les
circonstances, à accélérer le droit de grève de 60
jours. Ce que vous voulez me dire, en tout cas dans la pratique, c'est
qu'à l'article 49, lorsque la partie patronale va faire cela, elle va
savoir qu'il n'y aura pas l'intervention d'un médiateur.
Évidemment, elle ne risque pas un rapport défavorable pour elle,
mais elle permet l'application du droit de grève 60 jours avant.
M. Munn: Mais les parties peuvent avoir ou ont certainement
intérêt à s'entendre. L'exercice conjoint de définir
ce qui fait l'objet du différend et de rendre public un rapport sur ce
qui...
Une voix:... les sépare...
M. Munn:... les sépare, je pense que cela peut
accélérer un règlement et il est fort possible que les
parties, autant la partie patronale que la partie syndicale, puissent
s'entendre sur cette forme.
M. Bisaillon: Sauf que, dans le texte et dans vos explications,
un différend va persister. Elles vont seulement mieux l'identifier
qu'à l'article 46 lorsqu'une partie demande l'intervention d'un
médiateur.
M. Munn: Je dois dire que...
M. Bisaillon: Ce sera seulement mieux identifié, mais un
différend va persister.
M. Munn: C'est-à-dire que vous présumez qu'un
différend va persister, mais le simple exercice entre les parties, sans
la présence d'un tiers, de définir ce qui fait l'objet de leur
différend peut amener un règlement. Éventuellement, s'il
n'y a pas eu de règlement, il y aura un rapport conjoint sur ce qui fait
l'objet du différend, oui.
M. Bisaillon: Mais est-ce que ce n'est pas un peu de
l'angélisme, parce que, si c'est possible, on n'a pas besoin de ce
mécanisme pour le faire? Si le seul fait d'essayer d'identifier les
différences nous permet de nous rendre compte que, dans le fond, on
s'entend, la négociation simple et directe aurait permis le même
résultat.
M. Munn: J'oserais vous dire que, si les parties, à
certains moments, dans des dossiers de négociation, avaient su
exactement sur quoi elles ne s'entendaient pas, peut-être qu'elles se
seraient entendues.
M. Bisaillon: Et vous pensez que l'article de la loi plutôt
que le changement de mentalité va permettre cela? (23 h 45)
M. Munn: C'est une possibilité qui est offerte aux
parties. Dans le fond, ce qui est recherché, c'est d'avoir le maximum de
souplesse. Il y a une règle générale qui est la
règle de la loi. Il y a deux autres possibilités qui viennent
d'une entente préalable entre les parties, ce qui fait que, plutôt
que de recourir à la règle générale qui est
prévue à l'article 47, on recourt soit à une formule
différente prévue à l'article 48 ou à la formule
prévue à l'article 49.
M. Bisaillon: M. le Président, j'ai une question de
directive, dans le fond. Un amendement doit proposer d'enlever une partie d'un
texte et de le remplacer par un autre. Quand on pense que tout un article est
en surplus ou ajoute peu de choses, peut-on faire un amendement pour proposer
de le biffer au complet?
Je ne nie pas les bonnes intentions qu'il peut y avoir derrière
l'article 49, mais je prétends que dans le cadre du projet de loi qu'on
discute il n'ajoute rien. Non seulement il n'ajoute rien, mais, en plus de
cela, il est quasiment rendu inapplicable en pratique par le fait qu'il
enlève la possibilité de recourir aux articles 46, 47 et 48,
donc, aux "avantages" qu'une partie pourrait avoir à obtenir un rapport
d'un médiateur ou d'un tiers neutre dans le litige parce qu'il va
toujours persister un différend. Je serais tenté, sans en faire
non plus une grande bataille, de demander au ministre de prendre cela en
considération parce que cela n'ajoute pas grand-chose qui ne pourrait se
faire autrement. Comprenons bien. Ce que je veux dire, ce n'est pas qu'il n'y a
pas de bonnes intentions derrière cela et que les parties n'ont pas
avantage à se parler. Je ne pense pas que c'est l'article 49 qui va plus
les amener à se parler. C'est bien plus des changements de
mentalité, toute une structure autour de la négociation et toute
une approche autour de la négociation qui vont le faire.
L'article 49, pris isolément, ne sera pas un
élément majeur d'un règlement. C'est une démarche
pour identifier les différences. Les différences demeurent, selon
moi, et si elles sont importantes, elles vont rester importantes et le droit de
grève va arriver 20 jours avant. Donc, la partie patronale a
intérêt à précipiter la grève et elle va
vouloir utiliser ce moyen ou elle n'a pas intérêt à le
faire et, à ce moment, elle ne l'utilisera pas du tout.
M. le Président, je serais prêt à faire un
amendement pour proposer de biffer l'article 49.
M. Clair: M. le Président, même si le
député de Sainte-Marie propose de retirer un des articles du
projet de loi, je lui dirai que ses paroles sont douces à mes oreilles,
après m'être fait traiter de satanique, de mesquin...
M. Bisaillon: Je n'ai jamais dit cela.
M. Clair: Pas de sa part, mais de la part d'autres de ses
collègues... mesquin, basé sur la méfiance... Qu'il y ait
un article dans ce projet de loi que le député veuille rayer
parce que c'est de l'angélisme, c'est doux à mes oreilles.
M. Bisaillon; L'enfer est pavé de bonnes intentions. J'ai
dit que c'était pavé de bonnes intentions.
M. Clair: M. le Président, je pense que cela ne vient
qu'offrir une possibilité, une alternative aux parties. Je suis
conscient du fait que ce n'est peut-être pas là le coeur du projet
de loi et la disposition qui sera la plus utilisée. Il me semble qu'elle
peut quand même être utile aux parties et je pense qu'il n'y a pas
lieu d'accepter l'amendement du député de Sainte-Marie.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 49 est
adopté?
M. Ryan: Sur division.
M. Pagé: Sur division, M. le Président.
Le Président (M. Lachance): L'article 49 est adopté
sur division. J'appelle l'article 50.
M. Bisaillon: C'est le projet de loi du ministre, n'est-ce
pas?
M. Clair: Je n'ai pas d'amendement à proposer, M. le
Président.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 50 est
adopté? M. le député de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: L'article 50, on est obligé de le
rédiger sous cette forme à cause de l'article 49 parce
qu'à l'article 49 c'est un groupe de personnes, si je comprends, ou cela
peut être aussi une procédure différente.
M. Clair:... d'intérêt public et procédure
différente.
M. Bisaillon: De toute façon, on réfère,
à l'article 50, au rapport de médiation.
M. Clair: Donc, il rend un rapport public.
M. Bisaillon: Est-ce qu'à l'article 50 on fait
référence à un rapport de médiation?
M. Clair: Non, puisque, dans la mesure où on fait
référence à l'article 49, l'article 49 ne prévoit
pas un rapport de médiation mais un rapport sur l'objet de leur
différend.
M. Bisaillon: Dans la formulation on dit: "La personne ou le
groupe de personnes qui rend un rapport public suivant l'article 47, 48 ou 49
doit, le même jour, en donner avis écrit au ministère du
Travail. Ce dernier informe les parties sans délai de la date où
il a reçu cet avis. " Je ne sais pas ce que cela ajoute aux parties de
savoir à quelle date a été envoyé le rapport.
M. Clair: Vous avez vous-même plaidé tantôt,
aux articles 111. 10, 111. 8 et suivants, que c'est ce qui déclenche la
"cooling-off period", le droit de grève, etc.
M. Bisaillon: Oui, mais avec les modifications...
M. Clair: C'est important que ce soit précis.
M. Bisaillon:... qu'on a apportées aux articles 47 et 48,
on n'a pas réglé cela? À défaut d'une entente sur
le différend, automatiquement, le rapport sera rendu public. C'est un
automatisme. Il n'y avait pas d'automatisme dans les articles 47 et 48, puis je
comprends que vous l'avez formulé de cette façon-là parce
qu'il n'y avait pas d'automatisme aux articles 47 et 48.
Je trouverais cela plus clair, M. le Président, si c'était
dit: Tout rapport de médiation, ou toute entente prévue à
l'article 49, doit être transmis au ministre en même temps qu'il
est rendu public.
M. Clair: On va le suspendre, M. le Président, au cas
où il y aurait de la concordance.
Le Président (M. Lachance): L'article 50 est suspendu.
J'appelle l'article 51 où je crois qu'il y a un amendement.
M. Clair: M. le Président, je voudrais proposer que
l'article 51 du projet de loi soit modifié par le remplacement, dans les
troisième et quatrième lignes, des mots "d'une nouvelle
convention collective" par les mots " de nouvelles stipulations
négociées et agréées à l'échelle
nationale".
La précision vise à éviter une
ambiguïté sur la date d'expiration de la stipulation. Il est
à noter que, suivant l'article 111. 6 du Code du travail,
édicté par l'article 85, la date d'expiration de la convention
collective aux fins du code est celle de l'expiration des stipulations
négociées et agréées à l'échelle
nationale. Magnifique?
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement est
adopté?
M. Bisaillon: Un instant! On remplace "de nouvelles conventions
collectives" par "de nouvelles...
M. Clair: Stipulations négociées et
agréées à l'échelle nationale. C'est en concordance
avec l'article 111. 6 du Code du travail, édicté par l'article 85
du projet de loi, qui prévoit que la date d'expiration de la convention
collective aux fins du code est la date de l'expiration des stipulations
négociées et agréées à l'échelle
nationale. C'est de la précision qu'on apporte et non pas... C'est par
pure concordance avec...
Le Président (M. Lachance): L'amendement est-il
adopté?
M. Pagé: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que
l'article...
M. Bisaillon: Non. M. le Président, "Les conditions de
travail prévues par des stipulations négociées et
agréées à l'échelle nationale continuent de
s'appliquer... " Pourquoi les conditions de travail? Pourquoi pas les
stipulations de la convention collective? Parce que les conditions de travail,
c'est limité, cela ne comprend pas toutes les dispositions d'une
convention collective. C'est un aspect d'une convention collective. Cela ne
comprend pas, par exemple, les échelles de salaires, les conditions de
travail, nécessairement, à moins qu'on ne me démontre le
contraire. Les termes normalement utilisés, ce sont les stipulations de
la convention collective ou les dispositions de la convention collective.
M. Ryan: M. le Président.
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député d'Argenteuil.
M. Clair: Tout simplement une information: C'est l'article 59,
troisième alinéa, du Code du travail qui dit: "Les parties
peuvent prévoir dans une convention collective que les conditions de
travail contenues dans cette dernière vont continuer de s'appliquer
jusqu'à la signature d'une nouvelle convention", et c'est de cette
stipulation qu'on s'est inspiré pour la rédaction ici.
M. Bisaillon: Est-ce que le ministre peut dire si cette
formulation a déjà été interprétée de
façon restrictive? Est-ce qu'on a déjà compris que les
conditions de travail ne comprenaient pas un certain nombre de clauses de la
convention collective?
M. Clair: J'ai dit au député hier que je ne pouvais
nier mon inexpérience sur ces questions.
Le Président (M. Lachance): M. le député
d'Argenteuil, est-ce que vous voulez ajouter en attendant? Non? Cela va?
M. Ryan: Je pense que je ne pourrais pas ajouter de choses qui
vous éclaireraient.
Le Président (M. Lachance): Vous êtes sage.
M. Clair: M. le Président, mes conseillers me disent qu'il
n'y a pas eu, à leur connaissance, de telles interprétations
restrictives.
M. Munn: Quand il y a des demandes d'accréditation, ce
sont les conditions de travail qui... Dans les endroits où il n'y a pas
de syndicat, s'il y a une demande d'accréditation, l'employeur ne peut
pas modifier les conditions de travail. Dans le fond, on s'est inspiré
de l'économie générale du Code du travail pour
rédiger cet article.
M. Bisaillon: Ce qu'on vise, c'est l'ensemble des dispositions de
la convention.
M. Munn: C'est cela.
M. Bisaillon: L'ensemble des dispositions convenues et
stipulées à l'échelon...
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 51 est
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Lachance): Adopté. L'article 51
est adopté tel qu'amendé. Maintenant, l'article 52...
M. Clair: II y aurait les articles 52 à 56, si vous voulez
faire cela rapidement.
M. Pagé: Ajournement, M. le Président.
Le Président (M. Lachance): La commission du budget et de
l'administration, ayant rempli une journée où nous avons
progressé, ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 23 h 55)