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Version finale

32nd Legislature, 5th Session
(October 16, 1984 au October 10, 1985)

Wednesday, June 12, 1985 - Vol. 28 N° 26

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi 37 - Loi sur le régime de négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic


Journal des débats

 

(Douze heures vingt-deux minutes)

Le Président (M. Lachance): La commission du budget et de l'administration se réunit ce matin avec le mandat de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 37, Loi sur le régime de négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic. Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: M. le Président, aucun remplacement, ne m'a été signalé.

Le Président (M. Lachance): Alors, nous en étions hier à l'étude de l'article 42 et nous avions reçu une motion d'amendement du député de Rosemont, qui se lisait comme suit: Remplacer, dans le troisième alinéa, les deux premières lignes par "détermine la masse budgétaire globale à la disposition des comités et des sous-comités patronaux". Alors, M. le député de Rosemont.

Organisation des travaux

M. Paquette: M. le Président, non pas que je pense que leur présence soit indispensable, mais je constate qu'il n'y a personne de l'Opposition officielle.

M. de Bellefeuille: II ne faut surtout pas nous confondre.

M. Paquette: Je ne veux pas en faire une question de règlement, mais on peut procéder quand même, M. le Président.

M. Blais: Nous avons quorum. M. Paquette: Nous avons quorum.

Le Président (M. Lachance): Nous pouvons procéder, compte tenu que la motion d'amendement vient de vous et que nous n'avons pas encore, si ma mémoire est fidèle, entrepris la discussion sur votre motion d'amendement.

M. Paquette: C'est exact, M. le Président.

M. de Bellefeuille: M. le Président, sur la question de règlement soulevée par le député de Rosemont...

Le Président (M. Lachance): Préci- sément, M. le député de Rosemont m'a dit qu'il n'en faisait pas une question de règlement.

M. de Bellefeuille: J'en fais, moi, M. le Président, une question de règlement. Je ne me souviens pas d'avoir jamais vu une commission siéger sans la participation de l'Opposition officielle. Cela me paraît contraire à toutes nos traditions. Il me semble qu'il faudrait...

Mme Juneau: Les membres de l'Opposition sont là.

M. Paquette: Nous ne sommes pas l'Opposition officielle.

M. de Bellefeuille: Si Mme la députée veut intervenir.

Mme Juneau: On enfreint quel règlement?

M. de Bellefeuille: J'ai fait allusion Mme la députée... Allez-y, expliquez-vous. J'ai fait allusion à la tradition.

Mme Juneau: On ne veut pas faire perdre le temps de ta commission.

M. de Bellefeuille: Mais pas du tout! Je suppose que plaider le respect des règles parlementaires et le "fair play", c'est faire perdre le temps de la commission, selon Mme la députée?

Mme Juneau: C'est ce que vous faites depuis...

Le Président (M. Lachance): M. le député, laissez-moi vous informer que cela ne saurait tarder, il devrait y avoir quelqu'un de l'Opposition officielle ici dans quelques instants. Comme la motion d'amendement a été proposée et déposée par le député de Rosemont, votre collègue, je pense qu'il n'y a rien qui s'oppose à ce que nous puissions poursuivre les travaux de la commission.

M. de Bellefeuille: Au contraire, M. le Président, je maintiens totalement mon objection. Ce n'est pas parce que le sujet immédiat de la discussion est un amendement qui n'a pas été présenté par l'Opposition officielle que nous pouvons procéder sans les représentants de l'Opposition officielle. Je

maintiens que c'est totalement irrégulier, contraire à l'esprit de nos institutions et contraire à toutes nos traditions.

Mme Juneau: M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Johnson.

Mme Juneau: Selon les avis de la Chambre, à quelle heure la commission avait-elle été prévue?

Le Président (M. Lachance): De 12 heures à 13 heures.

Mme Juneau: Est-ce que l'Opposition, tout comme le parti ministériel et les indépendants, avait été avertie et avait entendu l'heure de la commission?

Le Président (M. Lachance): Sans aucun doute, Mme la députée.

Mme Juneau: Merci beaucoup. Le député est plus que raisonnable, il y a vingt-cinq minutes de retard.

Le Président (M. Lachance): II est 12 h 25 et j'estime - il y a eu une certaine période d'attente pour les parlementaires et il y a quorum - que nous pouvons poursuivre nos travaux.

M. Paquette: M. le Président, si vous n'y voyez pas d'incompatibilité avec notre règlement, j'ai d'autant moins d'objection que nous étions ici, à 12 heures pile. Je pense que notre ponctualité est exemplaire à cette commission; c'est simplement parce que c'est démocratique que je voulais le soulever.

M. de Bellefeuille: M. le Président, je maintiens mon objection. Nous nous sommes pliés ce matin à la convenance du ministre qui n'était pas disponible à la fin des affaires courantes, qui a été retenu ailleurs; nous avons, par conséquent, été convoqués non pas à la fin des affaires courantes immédiatement, mais à midi. Puisque nous nous sommes prêtés à la commodité du ministre, je ne vois pas pourquoi nous ne nous inquiéterions pas de ce qui convient à l'Opposition officielle.

M. Clair: M. le Président, sur une question de règlement.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre, sur une question de règlement.

M. Clair: Le député de Deux-Montagnes invoque mon absence pour justifier le report des travaux de la commission jusqu'à l'arrivée des députés libéraux. Je voudrais lui dire que, s'il s'intéressait aux travaux de la

Chambre autant qu'il s'intéresse à ceux de cette commission, il saurait que j'étais convoqué en Chambre de 11 heures à 12 heures et que je ne vaquais pas à des occupations personnelles.

M. de Bellefeuille: Je le sais, M. le ministre.

M. Clair: Ce n'était donc pas pour arranger mon horaire, mais pour arranger l'horaire de la Chambre, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Bourassa.

M. de Bellefeuille: J'ai bien dit que vous étiez retenu ailleurs, M. le ministre, ce que vous venez de confirmer.

M. Paquette: Le problème vient de se régler.

M. Laplante: Vous avez rendu une décision, M. le Président...

Le Président (M. Lachance): D'accord, je pense qu'on en a assez discuté.

M. Laplante:... et je pense que ce n'est pas de bonne grâce, actuellement, que votre décision soit discutée.

Le Président (M. Lachance): De toute façon, je vois apparaître le député de Brome-Missisquoi. Cette discussion dilatoire va se terminer, je l'espère et j'espère, aussi que le député de Rosemont va pouvoir prendre la parole.

M. de Bellefeuille: M. le Président, je m'insurge contre l'expression que vous venez d'employer. Il est extrêmement grave qu'un président de commission accuse un député d'user de tactique dilatoire quand il s'agit d'un député qui soutient les institutions et qui soutient qu'une commission ne doit pas procéder sans la participation d'au moins un représentant du parti de l'Opposition officielle.

Vu l'arrivée du député de Brome-Missisquoi, qui s'est maintenant joint à nous, mon objection ne tient plus puisque l'Opposition officielle est maintenant représentée. Je maintiens qu'il n'est pas acceptable que vous m'ayez accusé d'avoir usé de tactique dilatoire et je vais aviser des moyens à prendre en l'occurrence.

M. Paradis: M. le Président, sur la question...

Mme Juneau: M. le Président, je voudrais prendre les mots du président à mon compte.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Brome-Missisquoi, votre arrivée est bien appréciée.

M. Paradis: Je m'excuse du retard, mais, lorsque le leader du gouvernement a fait l'appel des commissions parlementaires, immédiatement après les affaires de ce matin en Chambre, le whip du parti a spécifiquement demandé au leader du gouvernement, dans le cas de cette commission parlementaire, si on siégeait immédiatement. Le leader a répondu immédiatement et je suis venu ici immédiatement, mais seul naturellement. À ce moment, j'ai aperçu, en retournant à mon bureau, le président du Conseil du trésor qui était retenu au salon bleu en commission plénière et je ne savais pas à quelle heure on reprenait. Il n'y a pas eu d'autre ordre de la Chambre. Vous serez à même de le vérifier au Journal des débats.

Je profite de l'occasion pour remercier les députés indépendants qui, face à un projet de loi aussi important, ont pris sur eux-mêmes de faire en sorte que l'Opposition officielle soit représentée pour l'étude complète du projet de loi. J'en profite pour vous exprimer mes remerciements.

M. Beauséjour: M. le Président.

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Iberville, sur la question...

M. Beauséjour: Juste pour signaler au député de Brome-Missisquoi que, contrairement à ce qu'il vient de dire, on avait indiqué à la Chambre un ordre de siéger tout de suite après la période de questions. Ensuite, on a rectifié pour indiquer que ce serait à midi. J'étais là et je l'ai entendu.

M. Paradis: Je suis prêt à prendre votre parole. Je n'ai pas beaucoup le choix, mais vous devez également prendre la mienne. J'étais présent en Chambre lorsque le whip de l'Opposition a demandé au leader du gouvernement si cela siégeait immédiatement et que le leader du gouvernement a répondu positivement.

M. Beauséjour: C'est exact. M. Paradis: C'est exact.

M. Beauséjour: Cela a été corrigé après.

M. Paradis: À ce moment, je me suis retrouvé seul ici prêt à procéder au moment où il n'y avait personne. Ce n'était la faute de personne. Le président du Conseil du trésor était retenu au salon bleu, je l'ai vu sur mon petit écran.

Le Président (M. Lachance): Bon! Bon!

M. Beauséjour: C'est parce que vous écoutez seulement la moitié des choses.

Le Président (M. Lachance): Ceci dit...

M. Beauséjour: C'est parce que vous avez écouté seulement la moitié des choses.

M. Paradis: J'ai écouté la moitié qui me concernait.

Conventions collectives des secteurs de l'éducation et des affaires sociales

Le Président (M. Lachance): Maintenant, je cède la parole au député de Rosemont.

Organisation des parties (suite)

M. Paquette: Merci, M. le Président. Hier soir, nous avons abordé l'étude d'un article extrêmement important, l'article 42, qui traite des attributions du Conseil du trésor. Au deuxième alinéa, on lit que le Conseil du trésor autorise les mandats de négociations des comités et des sous-comités patronaux, donc, des trois comités, plus les deux comités pour les commissions scolaires crie et Kativik, les trois comités dans le domaine de l'éducation et les cinq sous-comités sectoriels dans le domaine des affaires sociales. Face à ces comités et ces sous-comités, le Conseil du trésor pourra décider de décréter d'intérêt gouvernemental toute question. Après avoir confié un premier mandat de négociation et avoir déterminé la masse budgétaire à la disposition de chacun des comités, donc, dans chacun des secteurs, le Conseil du trésor se réserve le droit de rappeler les gens et de dire: Cela ne va pas à notre goût, on va modifier les mandats, on va jouer dans cela.

Hier soir, le député d'Argenteuil... et c'est pour cela que j'ai fait la remarque initiale tantôt, parce que le député d'Argenteuil était très intéressé par mon amendement et j'imagine que le député de Brome-Missisquoi ne le sera pas moins. Cet amendement vise à respecter les attributions du Conseil du trésor telles que définies dans la Loi sur l'administration financière. Hier, le député d'Argenteuil a passé en revue tous les articles de la Loi sur l'administration financière et le ministre a dû convenir que cet article allait bien au-delà de la Loi sur l'administration financière.

Le rôle du Conseil du trésor, c'est d'assurer la bonne gestion des fonds publics, de s'assurer que les montants dépensés par le gouvernement... Là, on se trouve devant un projet de loi où 50 % du budget de l'État est en cause. Il doit avoir la possibilité de contrôler la masse budgétaire, si importante pour les équilibres financiers du

gouvernement, lorsque les négociations sont en cause. De là à dire que cela correspond à un esprit de décentralisation que d'avoir une telle implication, à un tel niveau du Conseil du trésor, je pense qu'on s'éloigne complètement de l'esprit, si ce projet de loi doit améliorer le cadre actuel, parce que, s'il n'améliore pas le cadre actuel, on est aussi bien de garder le même cadre, Les gens vont s'habituer è travailler dans le même cadre que la dernière fois. Il y a d'ailleurs de moins en moins de jours perdus dans les grèves, dans le secteur public notamment. Je crois qu'on a avantage à éviter cette manie qu'à chaque négociation on change le cadre de la négociation. À toutes les négociations depuis 1960, on n'a jamais travaillé avec le même cadre. Dès que les gens commencent à s'habituer à un concept lié au cadre de la négociation, on le change. Donc, s'il n'y a pas d'amendements substantiels qui vont dans la direction d'une véritable responsabilisation des parties, d'une véritable autonomie pour laisser les gens compétents discuter des questions qui les concernent, on est aussi bien de garder le cadre actuel de la loi 55.

M. le Président, le ministre nous dit: Cela reconduit à peu près à la pratique - je pense que je vous ai bien compris sur cela -qui a été suivie la dernière fois. Mais, en même temps, il nous dit: On a une volonté de décentralisation. On verra plus loin que la décentralisation au niveau local ne va pas loin et n'a pas grand-chance de succès, n'a pas grand-chance de permettre aux gens de régler sur le plan local les questions qui concernent leur vie au travail et les services qu'ils rendent à la population. Ici, on est dans un tout petit aspect mineur, mais complètement mineur, de la décentralisation. C'est ia confiance que le Conseil du trésor doit accorder aux comités patronaux qui auront à discuter avec leurs vis-à-vis syndicaux.

L'amendement que j'ai déposé, M. le Président, est tout à fait compatible avec la Loi sur l'administration financière - sinon, j'aimerais que le ministre me démontre le contraire - plus précis que l'amendement qu'avait déposé mon collègue de Deux-Montagnes hier, que le ministre a rejeté en disant qu'il n'était pas assez précis. Ce que je propose, c'est qu'on remplace les deux premières lignes du troisième alinéa de l'article 42, donc, le paragraphe qui commence par "2°", qu'on remplace les mots "autorise les mandats de négociations des comités et des sous-comités patronaux dans les matières qu'il juge d'intérêt gouvernemental" par les mots suivants: "détermine la masse budgétaire globale à la disposition des comités et sous-comités patronaux".

La différence est fondamentale. Cette disposition respecte le rôle du Conseil du trésor, lui permet de contrôler l'ensemble des fonds, d'éviter qu'il y ait une croissance indue de la masse budgétaire que le gouvernement met à la disposition de ses négociateurs et des négociateurs de ses partenaires patronaux. Quand on dit: "détermine la masse budgétaire globale", cela veut dire que, si, en cours de négociation, un comité patronal s'aperçoit qu'il serait utile d'excéder - parce que c'est rarement réduit, évidemment - la masse à sa disposition, il devra retourner au Conseil du trésor, et c'est tout à fait légitime et normal. Mais, tant que le comité patronal ou un sous-comité patronal resterait dans le cadre budgétaire défini par le Conseil du trésor, il aurait entière liberté de manoeuvre pour mettre plus d'accent à tel endroit plutôt qu'à tel autre: parfois moins d'accent sur les salaires, plus sur les conditions de travail, parfois l'inverse. La situation peut être très différente d'un réseau à l'autre.

M. le Président, je soutiens qu'un tel mécanisme permettrait aux ministres sectoriels et à leurs délégués aux comités patronaux, qui sont soit présidents, soit vice-présidents des comités, et aux partenaires des réseaux, en discussion avec leurs vis-à-vis syndicaux, d'utiliser au mieux la masse budgétaire, à l'abri des interventions fréquentes, soutenues, répétées et omniprésentes du Conseil du trésor qui risque de fausser complètement le jeu des négociations et qui risque de nous donner des réseaux, finalement, moins adaptés aux besoins de la population. Je fais le pari que les ministres sectoriels, les collègues du ministre, président du Conseil du trésor, et que les dirigeants d'établissements sont de grands garçons et de grandes filles qui connaissent bien les besoins, qui ont une attitude de responsabilité, qui vont travailler au maximum à ne pas dépasser le cadre budgétaire fixé par le Conseil du trésoir et, s'ils doivent le dépasser, qui vont se conformer à la loi, qui vont revenir devant le Conseil du trésor et qui vont essayer d'obtenir une marge de manoeuvre différente du Conseil du trésor.

L'amendement touche simplement à un tout petit morceau de la décentralisation, celui entre le palier supérieur... Dans cette loi, il y a quatre paliers dans le secteur des affaires sociales et trois dans l'éducation. Il y a le Conseil du trésor, qui est le grand boss, il y a le palier sectoriel ou sous-sectoriel - dans les affaires sociales, il y a le palier des affaires sociales et les paliers sous-sectoriels - et, ensuite les paliers locaux. On touche simplement à ce qui se passe entre les deux premiers paliers; on n'est pas rendu très loin dans la décentralisation. On nous dit que c'est impossible, inimaginable, qu'il ne faut pas bouleverser les habitudes. Le ministre nous a dit lui-même que ses collègues sectoriels ne

s'opposeraient pas à avoir une marge de manoeuvre plus grande dans le cadre défini par le Conseil du trésor, le cadre général, global. Le député d'Argenteuil a soutenu que les collèges et les commissions scolaires le réclament. J'ai mis en évidence que, dans le mémoire des associations patronales, dans le secteur de la santé également, on le réclame. Si je comprends bien, il y a seulement le ministre, président du Conseil du trésor, qui s'oppose à ce début extrêmement modeste de décentralisation où, pour une fois, le Conseil du trésor ferait confiance aux gens dans les différents secteurs, sans abdiquer son rôle de contrôle des finances publiques.

M. le Président, on a besoin d'un changement d'attitude dans les négociations. On a besoin de personnaliser les services publics. On a besoin de faire en sorte que les gens compétents, les gens proches des besoins, les gens responsables décident. Je comprends la crainte du président du Conseil du trésor, qui est de dire: II y a peut-être des "patterns" qui indirectement vont se créer si on n'a pas nos observateurs et si on ne peut pas contrôler de très près tout ce qui va se faire dans les comités ou les sous-comités patronaux. Cela va créer des "patterns" et, éventuellement, cela va créer une inflation des coûts. Je fais d'abord le pari que les gens vont respecter la loi et que, deuxièmement, ils sont tout aussi responsables et qu'ils vont essayer d'utiliser au mieux les fonds mis à leur disposition par le Conseil du trésor.

M. le Président, si le ministre veut qu'on passe rapidement à un autre article, on n'a aucune objection, parce qu'il y a des aspects beaucoup plus importants de la décentralisation que celui-là. Est-ce qu'il pourrait modifier son attitude? Depuis le début de cette commission parlementaire, chaque fois qu'on amène un amendement un tant soit peu substantiel, le ministre refuse de l'envisager. Les seuls articles qui ont été réévalués par le ministre sont des questions tout à fait mineures de mécanique.

Là, on arrive à un point extrêmement substantiel et qui va, d'ailleurs, dans le sens du programme du Parti québécois. Hier, le ministre m'accusait d'épouser le programme du Parti libéral. Je ne l'ai pas lu, sauf le bout constitutionnel qui m'intéressait récemment, mais je vais me faire un devoir de lire les autres aspects. J'en connais les grandes lignes, mais le programme du Parti québécois, ce n'est pas parce que le ministre et ses collègues ont balancé le chapitre I sur la souveraineté qu'ils doivent balancer tous les chapitres, j'espère.

M. le Président, l'approche générale à la politique budgétaire et aux négociations dans le programme du Parti québécois, à la page 11, au chapitre sur la démocratie économique et la concertation et au chapitre sur le syndicalisme et les relations du travail, témoigne d'une attitude tout à fait à l'opposé de l'attitude de méfiance tant face aux centrales syndicales qu'en ce qui concerne l'institut sur la rémunération, où le ministre prévoit une soupape: l'institut pourra fonctionner même sans l'accord des parties, méfiance face à ses partenaires patronaux et face même aux autorités ministérielles sectorielles que témoigne cette résistance curieuse du ministre à garder intact ce troisième alinéa, alors qu'il pourrait pleinement jouer son rôle en faisant confiance aux gens responsables dans les divers réseaux de l'éducation ou des affaires sociales.

Je ne sais pas comment le ministre peut concilier cette attitude avec le programme de son parti. Je ne sais pas comment il peut concilier cela avec l'attitude, l'objectif général de décentralisation qu'il dit avoir voulu inscrire dans ce projet de loi. Je ne vois pas comment un changement aussi mineur qui concerne les deux paliers supérieurs de la négociation - le Conseil du trésor et les comités patronaux - vient bouleverser les attitudes, c'est une évolution dans la bonne direction. Est-ce qu'il y a un seul argument qui fait en sorte que le ministre ne pourrait pas accepter cet amendement? Merci, M. le Président. (12 h 45)

M. Clair: Rapidement, M. le Président. Je voterai contre l'amendement du député de Rosemont pour les raisons suivantes: premièrement, l'adoption d'un tel amendement supposerait que, dès le départ des négociations, le Conseil du trésor impose un plafond définitif aux masses budgétaires qui seraient allouées à chacun des secteurs. Le député de Rosemont invoque lui-même un argument qui milite contre sa proposition. Non impliqué dans les négociations, le Conseil du trésor pourrait faire face rapidement et ferait sans doute face - le député le soulève lui-même comme probabilité - à de nouvelles demandes pour accroître la masse. Sa proposition n'aurait de sens que dans la mesure où la détermination de la masse budgétaire globale serait définitive, ce qui revient à dire qu'il s'approche du programme du Parti libéral qui propose, effectivement, que, après consultation, les masses budgétaires consacrées aux salaires ou aux coûts des conventions collectives soient définitivement arrêtées avant le début de la négociation, ce qui revient à dire qu'il n'y aurait pas de négociation. C'est ce que cela veut dire: qu'il n'y aurait pas de négociation sur la masse salariale.

Deuxièmement, ce que cela veut dire, c'est que, en matière de coordination des négociations, le Conseil du trésor ne joue plus un tel rôle. Sur le plan de la

coordination en ce qui a trait au contenu, au "pattern" et à l'exportabilité ou à la "portabilité" des dispositions convenues dans un secteur par rapport à l'autre, le Conseil du trésor ne serait plus présent. Je vous donne simplement un exemple. En 1976, lors des négociations, le Conseil du trésor n'avait pas d'observateurs dans les comités, et on sait ce que cela a donné comme résultat des conventions collectives et comme explosion des dépenses publiques.

Troisièmement, par exemple, en matière de politique salariale, de lutte aux discriminations et de protection des bas salariés, ce que le député propose, c'est que le gouvernement abandonne complètement cette responsabilité aux comités patronaux. Cela me semble inacceptable. Cela me semble une proposition réactionnaire et non d'avant-garde. Quand le député parle de la décentralisation, ces dispositions ne concernent pas la décentralisation, mais strictement les rapports entre le Conseil du trésor et les comités et sous-comités patronaux.

En terminant, M. le Président, réglons immédiatement la question. Le député me dit que je ne suis pas gentil parce que je n'accepte pas les propositions d'amendement sur les questions de fond qui nous viennent de sa part. Je dirai là-dessus, M. le Président, que je pense qu'il appartient au ministre responsable d'un projet de loi de manifester de l'ouverture d'esprit quant à des amendements possibles, mais je pense que le député de Rosemont a de la difficulté à s'habituer à son nouveau rôle. C'est sur le gouvernement que repose la responsabilité de proposer des projets de loi, de les défendre, de les faire adopter et de recevoir le point de vue de l'Opposition, mais, tant que le gouvernement a la confiance de la Chambre, M. le Président, c'est à lui de proposer des projets de loi et de tenter de les faire adopter. C'est l'Assemblée nationale qui en juge et pas seulement un député qui reproche au ministre de ne pas tenir compte des amendements de fond. Autrement dit, M. le Président, le fait de rester comme celui de partir avait un certain nombre de conséquences; c'est l'une d'entre elles.

M. Paquette: M. le Président, je ne comprends pas les reproches que le ministre fait à la fin de son exposé. Je pense qu'on a tous vécu, et, en ce qui me concerne, maintenant, des deux côtés de la Chambre, plusieurs commissions parlementaires. La plus récente que tout le monde va se rappeler, c'est celle sur la loi 42 où le ministre a accepté une centaine d'amendements, où le ministre n'a pas cédé sur les questions les plus vitales, ce qui nous a amenés à voter contre le projet de loi, mais il a quand même fait des bonifications sur des questions qui n'étaient pas liées au principe de son projet de loi.

Lorsque je suis arrivé à l'Assemblée nationale, en 1976, j'ai vécu une commission parlementaire sur la loi 101 où il y a eu, là aussi, une centaine d'amendements et où les députés ministériels, dont j'étais, participaient, contrairement à cette commission-ci où on dirait que les députés ministériels ont complètement abdiqué leurs responsabilités. En 1977, sur la loi 101, les députés de l'Opposition soumettaient des amendements et lesdéputés ministériels aussi. C'était extraordinaire. Cela fait longtemps qu'on a vu cela. Les députés ministériels aussi soumettaient des amendements. Le ministre écoutait et lorsqu'il lui apparaissait qu'il y avait un problème, s'il n'était pas tout à fait satisfait de l'amendement, il le prenait en délibéré et il revenait plus tard.

J'ai vécu la même expérience lors de l'étude de la Loi sur l'assurance automobile. Je l'ai vécue à plusieurs reprises, M. le Président. Par conséquent, je n'ai pas dit que le ministre n'était pas gentil. J'ai dit que le ministre n'était pas ouvert d'esprit et que cela nous amenait à présenter des amendements et à tenter de convaincre le ministre très longuement, parce qu'il ne manifestait pas d'ouverture d'esprit. Il semble avoir la conviction que son projet de loi est parfait. Or, il ne l'est pas. Au contraire, je pense que c'est un projet de loi qui va être contreproductif. Je vais reprendre les arguments du ministre qu'enfin il vient de donner. Il vient de donner trois arguments. Je pense qu'on a discuté pendant deux heures ou deux heures et demie, hier, sur cette question.

Une voix: Quatre heures.

M. Paquette: Quatre heures? Je ne sais pas, on va vérifier, on a un décompte qui témoigne d'ailleurs de l'efficacité respective des divers députés autour de cette table et qui démontre, au contraire, que certains députés se sont bien adaptés à leur rôle d'opposition, contrairement à ce qu'a dit le ministre tout à l'heure. Le ministre vient, finalement, de nous donner trois arguments. Il aurait pu nous les donner hier, cela aurait fait avancer le débat, et je vais répondre à ses arguments.

M. Clair: M. le Président...

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le ministre, sur une question de règlement?

M. Clair: Oui, sur une question de règlement parce que le député de Rosemont dit que je n'ai pas soulevé ces arguments hier. Il a soumis cet amendement à 23 h 55 hier soir.

M. Paquette: Oui, M. le Président, mais toute la discussion qui s'est faite hier portait sur un autre amendement et sur la signification de l'article 42, et on a traité de cette question des relations entre le Conseil du trésor et les comités patronaux. On a examiné la Loi sur l'administration financière. Le ministre a dû constater que l'approche que nous développions n'était aucunement contraire aux responsabilités qui doivent être dévolues au Conseil du trésor.

Là, il a trois arguments: l'amendement impose un plafond, au départ, et définitif er plus. Bien sûr que cela va être, au départ, un plafond définitif si le président du Conseil du trésor a la même attitude dans ses relations avec ses collègues que celle qu'il a face aux membres de cette commission, c'est-à-dire qu'une fois que la masse est fixée, peu importent les représentations qu'on va lui faire, peu importe si, dans certains coins, les services essentiels ne sont pas assurés, non pas parce qu'il y a une grève, mais parce que les fonds sont insuffissants ou l'organisation des services est inadéquate, il ne va pas se laisser fléchir ou s'il y a, à un moment donné, une proposition qui coûte peut-être quelques sous de plus, mais qui permet une amélioration considérable de la qualité des services, parce que les enseignants ont préféré une meilleure qualité de vie au travail que de mettre l'accent sur les salaires, par exemple, et que du côté patronal on convient que c'est une bonne chose, il va demeurer inflexible.

M. le Président, quand je propose de remplacer les mots "détermine la masse budgétaire globale à la disposition des comités et des sous-comités patronaux", c'est "détermine" et "redétermine" au besoin. C'est une responsabilité générale, c'est-à-dire que cela peut être déterminé au départ. Je vois le ministre sourire. Le ministre est dans une dynamique qui l'amène à dire qu'une fois que c'est fixé, on n'en discute plus. Je ne le pense pas. Je pense que rien n'interdit au ministre de se concerter. Même au Conseil du trésor, j'imagine que les ministres sectoriels vont, après avoir discuté avec les comités patronaux, soumettre une demande pour une masse budgétaire, vont essayer de savoir si les fonds correspondent à leurs aspirations quant à l'évolution des réseaux. Il va y avoir une discussion au Conseil du trésor et là, les discussions vont se faire. Le président du Conseil du trésor n'est pas un mauvais administrateur, il va peut-être se garder un fonds. Il ne donnera peut-être pas tout l'argent tout de suite en prévision de besoins. Il pourra même le faire savoir à ses collègues sectoriels. Les gens vont négocier à partir de la masse qu'il leur aura fixée. Si, en cours de négociation, cette masse doit être modifiée, rien n'interdit que le Conseil du trésor détermine à nouveau la masse budgétaire globale, de façon différente, à la disposition des comités. Cela peut aller très facilement dans un secteur et moins dans l'autre. Il peut y avoir des besoins différents qui se manifestent dans l'un et l'autre, mais cela permettrait... C'est faux de dire -j'arrive à son deuxième argument - que le Conseil du trésor ne jouerait pas son rôle de coordination. Pas du tout. Le Conseil du trésor...

Le Président (M. Lachance): M. le député de Rosemont...

M. Paquette:... jouerait son rôle de conciliation entre les intérêts sectoriels, il miserait sur la responsabilité de ses collègues qui sont membres des comités sectoriels et sous-sectoriels, et qui peuvent négocier avec leurs partenaires patronaux des établissements des règles de fonctionnement...

Le Président (M. Lachance):... je dois vous signaler que votre...

M. Paquette:... qui peuvent garantir tout aussi bien le respect des priorités gouvernementales.

Le Président (M. Lachance):... temps de parole est terminé.

M. Laplante: II ne comprend pas cela.

Le Président (M. Lachance): Alors, sur la motion d'amendement, votre temps de parole de 20 minutes est écoulé.

M. Paquette: D'accord, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Concernant le premier argument...

M. de Bellefeuille: M. le Président, je ne sais pas si M. le député de Bourassa aurait la courtoisie de répéter ce qu'il nous a dit il y a quelques instants et que je n'ai pas saisi.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Brome-Missisquoi, vous avez la parole.

M. Paradis: Est-ce que M. le député de Bourassa a répondu?

Le Président (M. Lachance): II n'est pas obligé de répondre aux questions...

M. Paradis: Ah! II n'est pas obligé de répondre.

Le Président (M. Lachance):... qui lui

sont posées.

M. Paquette: II n'est pas obligé de parler non plus.

M. Paradis: Sur le premier argument apporté par le président du Conseil du trésor concernant la plafond qui apparaîtrait imposé par l'amendement déposé, je pense que l'explication fournie par le député de Rosemont, à savoir que, lorsque le gouvernement a le pouvoir de déterminer, il a ce pouvoir de déterminer à plusieurs reprises... Je pense que cela est important.

Mais il y a un point sur lequel l'argument du président du Conseil du trésor m'impressionne a priori, et je le dis, c'est la question du traitement des plus bas salariés et du rôle que le gouvernement doit jouer, finalement, dans sa politique gouvernementale. J'ai saisi l'essentiel de l'argumentation, et je m'en porte garant, du président du Conseil du trésor.

J'aimerais, si cela m'était permis, de consentement, poser une brève question au député de Rosemont. Comment peut-il prétendre que cette argumentation, que vous avez présentée, M. le ministre, n'est pas fondée? Brièvement, si j'avais le consentement - je sais que cela me prend le consentement pour le faire - parce que c'est important, c'est capital.

M. Clair: Brièvement.

M. Paradis: Très brièvement.

M. Paquette: M. le Président, je vais me conformer à la brièveté parce que vous m'avez bien indiqué que mon temps était écoulé. Je pense que le ministre s'imagine que seul le Conseil du trésor peut protéger les bas salariés. Je prétends, une fois qu'une politique gouvernementale est établie et discutée au Conseil du trésor entre le président et ses collègues impliqués dans la négociation, qui sont présents aux comités patronaux, que ceux-ci peuvent être aussi garants que lui, doivent être aussi garants que lui des orientations gouvernementales qui peuvent être de protéger les bas salariés, si le gouvernement qui est au pouvoir a une optique social-démocrate, et, malheureusement, une autre orientation, si c'est un autre gouvernement qui est au pouvoir. Mais là n'est pas la question. Les accusations de réactionnaire sont tout à fait farfelues, et le ministre le sait à part cela. Non, je plaide pour la responsabilité ministérielle.

Le ministre des Affaires sociales, une fois que la politique gouvernementale est établie, est aussi capable que le président du Conseil du trésor de faire respecter les orientations de la politique gouvernementale, qu'elle concerne les bas salariés ou toute autre question qui se rapporte au secteur des affaires sociales. Alors, j'attends encore que le ministre amène des arguments sérieux pour refuser un tel amendement.

M. Paradis: Vous avez peut-être raison de dire que le ministre des Affaires sociales est à même d'intervenir, mais, lorsqu'on parle d'une action concertée sur le plan gouvernemental, lorsqu'il s'agit d'un choix, justement, d'orientation de société, il m'apparaît - je vais peut-être terminer mon propos là-dessus - qu'on a davantage de garanties. Oui, le ministre des Affaires sociales aura son bout à faire, tout comme le ministre de l'Éducation l'aura aussi. Mais que ce bout soit fait par quelqu'un qui est en haut et qui, vraiment, répète au ministre des Affaires sociales, au ministre de l'Éducation et à l'ensemble des intervenants, cela m'apparaît quelque chose qu'on ne devrait pas laisser tomber sans avoir fouillé complètement cette question, ce que le temps ne nous permet malheureusement pas de faire avec les droits de parole qui sont limités.

M. Paquette: M. le Président, je ne peux pas réagir à cela, mon temps est écoulé, mais je répète que je pense que le ministre des Affaires sociales n'a pas besoin de se faire rappeler les orientations... Il peut se les faire rappeler dans des conversations privées, mais il n'a pas besoin de se promener au Conseil du trésor à tout instant pour nous assurer que chaque ministre sectoriel va respecter les politiques gouvernementales. C'est aberrant.

Le Président (M. Lachance): Alors, il est maintenant 13 heures et la commission du budget et de l'administration suspend ses travaux jusqu'à 15 heures, cet après-midi.

(Suspension de la séance à 13 h 1)

(Reprise à 15 h 11)

Le Président (M- Lachance): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission du budget et de l'administration poursuit ses travaux avec le mandat de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 37, Loi sur le régime de négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic. Au moment de la suspension de nos travaux, vers 13 heures, nous en étions toujours à la discussion sur la motion d'amendement du député de Rosemont. Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine.

Mme Le Blanc-Bantey: M. le Président, j'aimerais faire un certain nombre de commentaires sur la motion d'amendement. Je pense que ce qu'on recherche

essentiellement ici, depuis hier soir, d'ailleurs, c'est, compte tenu des objectifs qui sont poursuivis par la réforme, de trouver un meilleur équilibre entre les responsabilités du Conseil du trésor, des ministres sectoriels, des comités et sous-comités patronaux. En fait, ce que tout le monde cherche à éviter, c'est ce qu'on a pu vivre par le passé, la situation où une trop grande centralisation de la responsabilité au Conseil du trésor peut effectivement miner la crédibilité ou la rentabilité d'une négociation dans laquelle les parties sectorielles sont véritablement impliquées.

Le président du Conseil du trésor, ce matin, a souligné un certain nombre d'objections à l'amendement du député de Rosemont. Si ma mémoire est bonne, les trois principales étaient, premièrement, qu'il fallait éviter de remettre les masses salariales aux sous-comités et aux comités patronaux, par exemple, parce que cela impliquerait, que les salaires ne seraient pas négociables et qu'il faudrait déterminer à l'avance les masses salariales. Si, effectivement, on devait les remettre aux comités et aux sous-comités patronaux, cela reviendrait à dire qu'il n'y a pas de négociation.

Deuxièmement, il a souligné le fait que c'était très important de garder le rôle de coordination du Conseil du trésor et qu'il devait, à cet égard, jouer le rôle que lui concède l'article 42.

En troisième lieu, il a dit que ce serait irresponsable de la part du Conseil du trésor d'abandonner aux comités et sous-comités patronaux la responsabilité qu'a l'État de travailler à la lutte aux disparités.

Je vais essayer de revenir sur ces trois objections en particulier et tenter de convaincre le ministre que, même s'il y a certains dangers à cela, il pourrait malgré tout trouver une façon de contourner ces dangers.

D'une part, pour revenir à sa première objection qui était la nécessité qu'il y ait une masse salariale négociable, à toutes fins utiles, je ne trouve pas que son argument vaille la peine d'être retenu. Que la masse salariale soit au Conseil du trésor, qu'elle soit entre les mains des ministres sectoriels ou des comités et des sous-comités patronaux, le problème reste le même. Je pense que le Conseil du trésor veut éviter, ou la surenchère, ou qu'il n'y ait aucune négociation, si la masse devait être prédéterminée. Le problème reste le même, que cette masse soit au Conseil du trésor, ou qu'elle soit entre les mains des comités ou des sous-comités patronaux. Il faut donc, d'une part, pour éviter la surenchère et, d'autre part, pour permettre une véritable négociation, trouver, sinon des mécanismes, du moins des critères qui nous permettraient d'éviter ces deux écueils.

Si le ministre voulait accepter de confier une partie de cette responsabilité à quelqu'un d'autre qu'au Conseil du trésor, il devrait y avoir moyen de trouver des critères ou des objectifs qui permettent une négociation véritable, tout en évitant la surenchère qui a pu avoir tendance à avoir cours dans certaines négociations, quand les négociations, surtout, deviennent très politiques.

Le ministre devrait admettre, comme le député de Sainte-Marie l'a dit hier, que le fait que tout soit, à toutes fins utiles, en termes de responsabilités, centralisé au Conseil du trésor a pour effet de créer un peu un simulacre de négociations sur le plan sectoriel, parce que les parties impliquées se disent: De toute façon, un jour ou l'autre, cela va arriver au Conseil du trésor et, comme le véritable patron, c'est le Conseil du trésor, on peut faire semblant de négocier, mais le jour venu, on ira frapper ou a la porte du Conseil du trésor ou à la porte du premier ministre, si le Conseil du trésor ne nous donne pas ce qu'on veut. Donc, cela a comme conséquence - c'est cela, en particulier, que le député de Sainte-Marie a souligné hier - de politiser considérablement les négociations et de donner lieu à un certain nombre d'abus, de part et d'autre, qu'on a pu connaître.

Je demanderais donc au ministre de réfléchir à cet aspect et de se demander s'il n'y aurait pas lieu, tout en confiant des responsabilités aux comités et aux sous-comités patronaux ou, encore, aux ministres sectoriels, de le baliser pour répondre à ces préoccupations. Je pense qu'on accepterait de réfléchir avec lui s'il acceptait, lui, d'aller dans ce sens.

Il dit, en même temps: Le Conseil du trésor a un rôle de coordination important qu'il faut qu'il garde. Mais, il m'apparaît que, justement, ce rôle de coordination, pour être vraiment efficace, pourrait impliquer que le Conseil du trésor soit moins juge et partie dans la négociation que je qualifierai, par exemple, de quoditienne ou de très sectorielle où, à la limite, le Conseil du trésor, compte tenu du rôle qu'il a développé ou qu'on lui a concédé au cours des années précédentes, s'occupe de tous les détails d'une négociation.

Il me semble que, pour jouer un véritable rôle de coordination qui soit plus efficace, plus neutre et, en même temps, plus juste, plus équitable, il devrait justement, comme organisme, éviter de se mêler de trop près à tous les aspects de la négociation qui sont extrêmement techniques et multiples et que, à toutes fins utiles, le Conseil du trésor gagnerait beaucoup à prendre un peu de distance quant aux tables sectorielles et quotidiennes des négociations.

Il dit aussi: Bon, si on remettait les masses salariales aux comités et sous-comités

patronaux, on pourrait faire face à des disparités énormes et l'État, par le biais du Conseil du trésor, a une responsabilité là-dedans et doit voir à ce qu'il n'y ait pas trop de disparités et qu'on travaille à la réduction des écarts, qu'il s'agisse des bas salariés ou qu'il s'agisse des écarts entre les hommes et les femmes. Je dois dire que je suis extrêmement sensible à celte préoccupation et je pense que le président du Conseil du trésor n'en sera pas surpris. Encore là, s'il faut être très prudent quand on parle de décentralisation pour éviter ce type de disparité qui a eu cours dans le passé et qui a aussi contribué à amener la trop grande décentralisation qu'on connaît, il devrait y avoir moyen, même si le Conseil du trésor confiait des masses salariales aux parties impliquées sectoriellement, de donner un certain nombre d'objectifs que l'État pourrait exiger des parties en cause. Comme exemple: faire en sorte que les négociations qui viendront, que ce soit la prochaine ou des négociations futures, ne contribuent pas à élargir les fossés existants entre les différentes catégories de salariés, soit les bas salariés ou les haut salariés, qu'il s'agisse des hommes et des femmes.

Donc, encore une fois, le Conseil du trésor pourrait donner des directives à cet égard et voir à ce que ces disparités ne s'élargissent pas, mais, au contraire, se rétrécissent, comme, il faut l'admettre, le gouvernement a tenté de le faire lors de la dernière négociation. Je pense que tout le monde a reconnu qu'il s'était agi là d'une action extrêmement méritoire du gouvernement. Je ne pense donc pas que le Conseil du trésor puisse abdiquer devant cette responsabilité, bien au contraire. Voilà le genre de rôle qu'il pourrait jouer, que tout le monde accepterait naturellement et qui m'apparaît aussi, sur de grands enjeux, un rôle de coordination qui peut être dévolu au Conseil du trésor.

En conclusion, M. le Président, compte tenu que cet article 42 pose un véritable problème à l'ensemble des intervenants de l'Opposition, compte tenu que c'est pour nous une question de principe extrêmement importante quand il s'agit de voir véritablement s'il y a lieu de décentraliser ou non, s'il y a une volonté réelle de décentraliser - il m'apparaît que c'est un des articles les plus importants de cette loi à cet égard - compte tenu de tout cela, compte tenu du fait qu'on ne peut pas progresser actuellement dans l'étude de la loi article par article parce qu'il semble qu'il n'y a aucun consensus que nous puissions dégager de part et d'autre, est-ce que le ministre ne pourrait pas accepter de réfléchir à tout ce qui s'est dit autour de cette table depuis hier soir, à un certain nombre d'amendements qui ont été apportés et nous proposer un certain nombre d'amendements qui pourraient venir de lui, s'il trouve que les nôtres sont inacceptables, qui iraient dans le sens d'un meilleur équilibre entre les objectifs de la loi et une décentralisation pas trop brusque, dans le sens d'une amorce véritable de décentralisation et, donc, d'un meilleur équilibre entre les responsabilités du Conseil du trésor à l'égard de cet objectif et les responsabilités des ministres sectoriels et des sous-comités patronaux, comme des comités patronaux?

J'aimerais bien, comme le député de Rosemont a eu l'occasion de s'exprimer assez longuement encore ce matin, avoir à ce moment-ci une réaction du ministre pour voir s'il accepte de cheminer un peu dans ce sens.

M. Clair: Ma réaction sera brève, M. le Président. J'ai eu l'occasion de faire valoir les arguments pour lesquels, de ce côté-ci, nous voterons contre la proposition d'amendement du député de Rosemont.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que nous pouvons disposer de l'amendement proposé par le député de Rosemont? Je vais en faire de nouveau la lecture: Remplacer, dans le troisième alinéa, les deux premières lignes par...

Mme Le Blanc-Bantey: M. le Président, je voudrais invoquer le règlement. Excusez-moi, je ne suis pas très familière avec la procédure. Si je veux suggérer un sous-amendement. Est-ce que je le fais maintenant ou est-ce que j'attends?

Le Président (M. Lachance): Une fois que l'amendement est mis aux voix, il est un peu tard. À ce moment-là, cela deviendrait plutôt un amendement. Ce serait le moment de proposer un sous-amendement à l'amendement qui est déjà sur la table.

Mme Le Blanc-Bantey: C'est parce que ce que je veux qu'on...

Une voix: Le vote a été appelé, M. le Président.

M. Paquette: Tu feras un amendement après.

Mme Le Blanc-Bantey: Je ferai un amendement après?

Le Président (M. Lachance): D'accord. Nous allons disposer de la motion puisque, effectivement, le vote a été demandé sur l'amendement déjà proposé. Est-ce que la motion du député de Rosemont est adoptée?

M. Clair: Rejeté.

M. Paquette: Sur division.

Mme Le Blanc-Bantey: Sur division.

Le Président (M. Lachance): Nous revenons à l'article 42.

Mme Le Blanc-Bantey: M. le Président, j'arriverai avec un nouvel amendement qui, cette fois-ci, sera peut-être plus acceptable pour le ministre. Si j'ai bien compris une partie de son argumentation, ce qu'il craint, c'est que nous allions trop vite dans cet objectif de décentralisation et qu'en voulant aller trop vite on rate l'objectif. Cela peut être une préoccupation louable et il a donc refusé l'amendement du député de Rosemont voulant que le gouvernement détermine la masse budgétaire globale à la disposition des comités et sous-comités patronaux.

J'aimerais faire un nouvel amendement qui est le suivant: Que le Conseil du trésor... Je vais le relire en fonction de l'article. Remplacer, dans le premier alinéa...

M. Paquette: C'est le troisième alinéa.

Mme Le Blanc-Bantey: On va se retrouver...

M. Paquette: Le troisième alinéa.

Mme Le Blanc-Bantey: Dans le troisième alinéa: "détermine la masse budgétaire globale à la disposition des ministres sectoriels" au lieu "des comités et des sous-comités patronaux". Je vais argumenter rapidement, cette fois-ci. Pour aller dans l'esprit de la préoccupation du ministre, s'il craint que de confier cette masse à la disposition des comités et des sous-comités patronaux...

M. Clair: Sur la recevabilité de la motion, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre, sur la recevabilité.

M. Clair: Brièvement, M. le Président. Je pense que cet amendement a le même effet que le précédent puisque les comités et sous-comités patronaux sont sous l'autorité du ministre délégué par le gouvernement. Je pense que l'amendement a exactement le même effet que le précédent.

M. Laplante: C'est une redondance, l'amendement.

Le Président (M. Lachance): Toujours sur la recevabilité, M. le député de Rosemont?

M. Paquette: Sur la recevabilité, M. le Président. Cette intervention du ministre m'étonne beaucoup parce qu'il semblait craindre dans son intervention, ce matin et hier aussi, que les associations patronales ne prennent trop de place, qu'en confiant la masse aux comités patronaux - si je l'ai bien compris - le gouvernement dilue un peu sa responsabilité. Le contrôle du Conseil du trésor serait moins grand et le Conseil du trésor aurait plus de difficulté dans la pratique à réaliser son rôle de contrôle de la masse budgétaire impliquée dans les négociations.

M. le Président, l'amendement de ma collègue des Îles-de-la-Madeleine est recevable puisque, si le ministre craint les comités patronaux, il n'en va pas de même, j'espère, de ses collègues sectoriels. Cela veut dire qu'au sein des comités patronaux ce sont ses collègues sectoriels qui seraient les gardiens de cette décision du Conseil du trésor et verraient à ce que les comités patronaux en tiennent compte. Les comités patronaux devraient fonctionner sous cette responsabilité.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Sainte-Anne, toujours sur la recevabilité?

M. Polak: Oui. M. le Président, je suis d'accord avec le ministre que cet amendement ne soit pas recevable. Je dois ajouter qu'il y a quelque chose qui m'a beaucoup surpris. Hier soir, j'ai quitté la réunion à 10 h 15 environ parce qu'il fallait que j'aille à une autre commission toute la matinée, la commission sur le Code civil. C'est très intéressant et on étudie cela sérieusement, article par article. Ici, je note que nous sommes encore à étudier le même article 42. Donc, je ne pense pas, avec tout le respect que je dois aux députés et à la députée, qu'on soit en train d'étudier sérieusement le projet de loi. Je trouve cela malheureux parce que je crois qu'on est en face d'une obstruction systématique. On présente un amendement après l'autre sur un bout de papier. On ajoute un mot ici et là au même amendement. J'espère que ces députés vont continuer à étudier sérieusement le projet de loi article par article. De toute façon, je suis venu pour cela. Je le regrette, même, parce que je dois aller à la commission sur le Code civil. Je ne peux pas m'absenter parce que j'attends un député qui va me remplacer. Entre-temps, je trouve cela un peu triste. Je trouve que c'est une sorte d'abus du processus.

Le Président (M. Lachance): J'aimerais, avant d'aller plus loin, avoir copie du libellé de la motion de la députée des lles-de-la-Madeleine, ce que je n'ai pas sous les yeux.

M. Paquette: M. le Président, si vous

me permettez, sur la question de recevabilité soulevée par le député de Sainte-Anne...

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le député de Rosemont, une dernière intervention là-dessus. (15 h 30)

M. Paquette: Très brièvement. Le député de Sainte-Anne n'est probablement pas au courant que nous n'avons eu qu'une demi-heure de travaux ce matin. Nous venons de recommencer, il y a environ quinze minutes. S'il avait été là hier soir, à la fin de la séance, il aurait constaté que son collègue d'Argenteuil est intervenu pour mettre en évidence le fait que le ministre faisait une interprétation abusive de la Loi sur l'administration financière. Nous avons tenté de convaincre le ministre, qui n'était pas d'accord avec la première formulation. On lui a présenté une deuxième formulation. Il n'est toujours pas d'accord avec la deuxième formulation. On lui en présente une troisième en espérant que, s'il n'est pas capable de faire confiance aux comités et aux sous-comités patronaux, à la demande d'ailleurs des associations patronales - j'ai encore ici le texte de l'association des collèges dont on a parlé hier, d'ailleurs; je ne le relirai pas - il fasse au moins confiance à ses collègues sectoriels qui, dans le meilleur principe de responsabilité ministérielle, devraient avoir une certaine marge de manoeuvre à l'intérieur de la masse que le Conseil du trésor fixe, et qui peuvent, aussi bien que le Conseil du trésor, être garants des orientations générales du gouvernement face à la négociation. Ma collègue des Îles-de-la-Madeleine espère que cet amendement sera plus acceptable pour le ministre que celui que j'ai déposé hier. Je crois que l'amendement est recevable, M. le Président. Il est différent de celui que j'ai présenté.

Le Président (M. Lachance): Très bien. J'ai devant les yeux le libellé de la motion de la députée des Îles-de-la-Madeleine. Après avoir entendu les avis sur la recevabilité, j'en viens à la conclusion que l'amendement proposé par la députée des lles-de-la-Madeleine va dans une parenté extrêmement étroite avec ce qui a déjà été rejeté antérieurement. En définitive, ça devient le même objet, ou à peu près. Donc, je déclare irrecevable cette motion. Nous revenons sur l'article 42.

M. Clair: Est-ce que l'article 42 est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Est-ce qu'on peut disposer de l'article 42?

M. Laplante: Le vote a été demandé.

Mme Le Blanc-Bantey: Vous faites un vote nominal?

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le secrétaire, vous pouvez procéder au vote nominal sur l'article 42.

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Juneau (Johnson).

Mme Juneau: Qu'est-ce que vous avez demandé? C'est sur l'article 42?

Le Président (M. Lachance): C'est sur l'article 42.

Mme Juneau: Pour.

Le Secrétaire: M. Blais (Terrebonne).

M. Blais: Pour.

Le Secrétaire: M. Beauséjour (Iberville).

M. Beauséjour: Pour.

Le Secrétaire: M. Gauthier (Roberval).

M. Gauthier: Pour.

Le Secrétaire: M. Laplante (Bourassa).

M. Laplante: Pour.

Le Secrétaires M. Clair (Drummond).

M. Clair: Pour.

Le Secrétaire: Mme Le Blanc-Bantey (lles-de-la-Madeleine).

Mme Le Blanc-Bantey: Contre.

Le Secrétaire: M. Ryan (Argenteuil).

M. Ryan: Contre.

Le Secrétaire: Pour: 6 Contre: 2

Le Président (M. Lachance): L'article 42 est adopté sur division.

M. Clair: M. le Président, je n'ai pas d'amendement à proposer à l'article 43.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine, sur l'article 43.

Mme Le Blanc-Bantey: Le député de Sainte-Anne, je crois, s'est scandalisé du travail que nous avons tenté de faire depuis hier pour faire amender l'article 42. Ne

comprenant pas que cet article était un article fondamental dans le projet de loi actuel, dans l'esprit, semble-t-il, qui aurait animé le ministre de décentraliser un peu les négociations dans les secteurs public et parapublic, nous nous sommes opposés farouchement en espérant que le ministre reviendrait sur son attitude et accepterait de rechercher un meilleur équilibre entre les responsabilités du Conseil du trésor, des ministres sectoriels, des comités et des sous-comités patronaux. Mais le ministre - comme il le fait depuis le début - pense que sa réforme est parfaite et qu'elle ne mérite aucune amélioration, même si, en toute franchise et en toute sérénité - je pense que nous avons fait un débat avec le plus de courtoisie possible - nous essayons de le convaincre que, dans la recherche des objectifs qu'il s'est donnés, il fait fausse route en maintenant un déséquilibre aussi évident que vient de confirmer l'article 42 quant aux responsabilités dévolues au Conseil du trésor. La moindre des choses que je pourrais dire sur l'article 43, c'est que cela confirme un rôle symbolique des ministres sectoriels dans la négociation. Bon, on ne peut pas faire autrement, cela existait déjà dans l'ancienne loi, mais, dans certains cas, cela n'a pas été plus efficace que ce qu'il faut. Donc, on permet aux ministres sectoriels de participer aux délibérations du Conseil du trésor.

On sait, M. le Président, faut-il le dire, qu'un des problèmes qu'on a vécus dans les négociations précédentes, c'est que les parties impliquées, sachant que le grand boss là-dedans, c'est le Conseil du trésor, quand ce n'est pas le bureau du premier ministre, peuvent s'amuser à faire semblant de négocier avec les ministres sectoriels et les comités et les sous-comités patronaux, mais savent fort bien que ce n'est pas là que les décisions essentielles se prennent et qu'un jour finit toujours par arriver où la négociation remonte au Conseil du trésor et devient extrêmement politisée, parce qu'on sait que c'est là que les véritables décisions se prennent et que ce sont eux les véritables patrons de la négociation.

Donc, le Conseil du trésor ne joue pas qu'un rôle de coordination, ce qu'il devrait jouer, mais il joue le rôle de juge et partie dans tous les cas et il est en dernier ressort l'arbitre ultime quand il ne prend pas la peine d'aller au Conseil des ministres. Je trouve cela extrêmement désolant qu'aux articles 42 et 43 on continue de confirmer dans ce sens ce qui s'est passé dans les négociations antérieures et qu'effectivement on handicape encore plus lourdement que par d'autres aspects de la loi les chances d'une véritable réforme.

Je ne ferai pas d'autres commentaires, mais j'aurais aimé que le ministre - apparemment, il semble croire à la chance de réussir cette réforme - accepte d'y réfléchir et accepte de trouver un meilleur équilibre, pour que nous puissions ensemble améliorer cette loi en fonction des objectifs qui sont poursuivis.

Le Président (M. Lachance): Alors, est-ce que nous pouvons adopter l'article? Adopté?

M. Paquette: M. le Président.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Rosemont?

M. Paquette: Est-ce que le ministre qui a affirmé l'importance du rôle de coordination du Conseil du trésor, de coordination des négociations, n'adopte pas ici un mode curieux de coordination, à l'article 43?

Si on relit bien l'article, on dit que le "Conseil du trésor invite le ministre de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie, le ministre de l'Éducation ou, suivant le cas, le ministre des Affaires sociales, à participer à ses délibérations lorsqu'elles portent sur les négociations visées dans les articles 44 et 53", c'est-à-dire l'article 44 sur les stipulations négociées et agréées à l'échelle nationale, et l'article 53 sur les questions de salaire et d'échelle salariale, à la suite de la publication par l'institut du rapport prévu à l'article 19.

Si on comprend bien le mode de coordination du ministre, il y a le Conseil du trésor qui est là et qui, de temps en temps, fait venir un ministre, discute avec ce dernier, serre la vis, c'est fini et il s'en va; on fait venir un autre ministre, on discute avec lui, on serre la vis, il s'en va, et ainsi de suite. Curieux mode de coordination, M. le Président! On se serait attendu que les responsables de la négociation... Le président du Conseil du trésor a l'air de s'amuser, mais je suis certain que, s'il était ministre de l'Éducation dans un contexte comme celui-là, pris pour défendre des positions communes sur la place publique, pris à justifier parfois des choses avec lesquelles il est plus ou moins d'accord, qui lui ont été imposées par le Conseil du trésor, il trouverait cela moins drôle. 11 y a une question, encore là, de responsabilité ministérielle qui est en cause.

Ma question au ministre est la suivante: Qu'est-ce qui lui a fait opter pour ce mode de coordination plutôt qu'un mode de coordination plus normal, où, peut-être, un comité présidé par le président du Conseil du trésor - personnellement, je n'ai pas de préférence là-dessus - et formé des ministres impliqués dans la négociation aurait pu être formé, et, sur un pied d'égalité, ces ministres auraient pu discuter entre eux des besoins financiers requis par les réseaux dont

ils ont la responsabilité?

M. Clair: M. le Président, le meilleur argument que je peux utiliser pour convaincre le député de Rosemont d'adopter l'article 43, lui qui a longuement plaidé au cours des quatre dernières heures en faveur du statu quo, c'est le statu quo de la loi 55.

Une voix: Ah! Ah! Ah!

M. Paquette: M. le Président, est-ce que...

M. Clair: J'ajouterai, M. le Président...

M. Paquette:... le ministre s'engage à appliquer le statu quo dans les chapitres qui viennent? À ce moment-là, on peut s'entendre.

M. Clair: J'ajouterai brièvement, M. le Président, simplement, que le Conseil du trésor dégage les mandats financiers. Maintenant, il est sans doute au courant, à la suite de sa connaissance du fonctionnement du gouvernement, qu'existe parallèlement au Conseil du trésor ce qui s'appelle le comité ministériel permanent de coordination des négociations qui est présidé effectivement par le Conseil du trésor, qui n'a pas une existence juridique reconnue au sens de la loi, mais qui est un sous-comité du Conseil des ministres, qui a une importance tout aussi grande sur les questions de négociation que le Conseil du trésor, qui s'attache davantage aux questions financières et où sont régulièrement présents les ministres sectoriels responsables. D'ailleurs, j'indiquerai au député que la plupart des réunions qui se sont tenues depuis que cette responsabilité m'incombe, la plupart de ces réunions, ou, en tout cas, un très grand nombre d'entre elles, ont été convoquées à la demande des ministres sectoriels. Donc, la question d'égalité des ministres entre eux à cet égard ne se pose pas, sauf qu'il ne peut pas y avoir quatre Conseils du trésor dans un gouvernement, il n'y en a qu'un.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine.

Mme Le Blanc-Bantey: J'avais promis que je n'interviendrais pas, mais je vais y aller très rapidement.

Dans un autre ordre d'idées, est-ce que le ministre a songé à faire participer, puisque, semble-t-il, on n'arrivera pas à le convaincre de changer le statu quo sur quoi que ce soit, d'ailleurs...

Une voix: Là-dessus.

Mme Le Blanc-Bantey: Là-dessus. Est- ce que le ministre a songé, compte tenu de la grande préoccupation qui a été véhiculée au cours des années précédentes par les ministres successives déléguées à la Condition féminine quant à la nécessité de réduire les écarts ou la disparité dans certains cas, est-ce que le ministre a songé à inviter justement, en vertu de la loi, la ministre déléguée à la Condition féminine à participer aux délibérations pour les éventuelles négociations?

M. Clair: Non, M. le Président. J'ai cru comprendre jusqu'à maintenant que c'était devenu presque une tradition que la ministre responsable de la condition féminine siège au Conseil du trésor et siège également au comité ministériel de coordination des négociations.

Mme Le Bianc-Bantey: M. le Président...

M. Clair: Mais, comme elle n'est pas juridiquement impliquée dans les négociations, je pense que, si cette approche devait être retenue pour la ministre responsable de la Condition féminine, elle conviendra que plusieurs autres ministres ont, je dirais, une responsabilité assez horizontale - je pense au ministre responsable des Relations avec les citoyens, je pense au ministre responsable de l'Office des personnes handicapées, je pense au ministre responsable de la Charte des droits et libertés de la personne et à plusieurs autres qui ne sont pas impliqués. Il faut bien comprendre qu'à l'article 43 c'est l'organisation de la partie patronale, principalement sur les questions financières.

Mme Le Blanc-Bantey: Justement, M. le Président, c'est parce qu'il s'agit de questions financières et aussi, à l'article 53, de questions salariales, si ma mémoire est bonne, qu'il m'apparaissait important, compte tenu de ce que je viens de dire, que la ministre déléguée à la Condition féminine soit associée. C'est vrai qu'il est arrivé occasionnellement - parce que, quand j'étais ministre à la Condition féminine, je ne siégeais pas au Conseil du trésor - que la ministre déléguée à la Condition féminine soit en même temps membre du Conseil du trésor, mais ce n'est pas parce que c'est arrivé à quelques reprises qu'on doit tenir pour acquis que, dans l'avenir, ce sera le cas. Je dirai aussi au ministre que chaque fois qu'on veut écarter - et c'est un argument que j'ai souvent entendu quand j'étais à la Condition féminine - les préoccupations de la Condition féminine, quand on veut les écarter, on met dans la balance les préoccupations d'autres clientèles qu'on invoque allègrement à ce moment-là. Je rappellerai au ministre que la ministre déléguée à la Condition féminine a une

clientèle qui comporte 52 % de la population. Il m'apparaît tout à fait inopportun, parce qu'on ne veut pas associer d'autres personnes, de dire qu'il ne faudrait pas que la ministre déléguée à la Condition féminine y soit associée. (15 h 45)

M. Clair: M. le Président, je suis bien conscient des avantages, mais aussi des inconvénients que peut comporter le fait d'être invité au Conseil du trésor. Je rappelle simplement à la députée que la portée de cet article 43 vise simplement les ministres responsables des trois réseaux du gouvernement, ce qui n'empêche absolument pas que, par ailleurs, le premier ministre accorde toute l'importance qui doit être accordée à la ministre déléguée à la Condition féminine. C'est ce que je lui rappelle. Cette ministre était, jusqu'à ce que Mme Lalonde démissionne, membre du comité des priorités, membre du Conseil du trésor et membre du comité ministériel de coordination des négociations. On ne peut pas dire que le premier ministre n'a pas été sensible à cette préoccupation de la députée des Îles-de-la-Madeleine.

Mme Le Blanc-Bantey: Je m'amuserai juste à rappeler au ministre que, pour le comité des priorités, cela a pris deux batailles successives par deux ministres déléguées à la Condition féminine.

M. Clair: Alors, vos voeux ont été exaucés.

Une voix: Avec le résultat qu'on n'en a plus!

Le Président (M. Lachance): Alors, l'article 43 est adopté?

M. Clair: C'est la faute encore à Bourassa! Si on n'a plus de ministre déléguée à la Condition féminine, ce n'est toujours bien pas notre faute, c'est la vôtre!

Une voix: Elle est bonne celle-là!

M. Clair: Au moins, ne nous reprochez pas cela.

Le Président (M. Lachance): Alors, sur l'article 43, M. le député de Rosemont.

M. Paquette: M. le Président, une dernière question. Le député d'Argenteuil, hier, a soulevé un aspect, au sujet de l'article 42, du mémoire de la Fédération des cégeps à la commission parlementaire. Je voudrais simplement poser une question au ministre concernant l'article 43. Dans le mémoire, la Fédération des cégeps propose qu'à l'égard des comités patronaux de négociation les rôles soient clarifiés comme suit: En ce qui concerne le Conseil du trésor, il établit les paramètres financiers de la négociation sectorielle et il s'assure que ceux-ci sont respectés. En ce qui concerne les ministères sectoriels, ceux-ci fixent les mandats de négociation - ce qui est bien différent du projet de loi - pour les matières qui concernent les prérogatives et les politiques ministérielles, compte tenu des paramètres financiers arrêtés par le Conseil du trésor. En ce qui concerne les représentants des groupements d'employeurs, ceux-ci fixent les mandats de négociation pour les matières qui concernent l'organisation du travail, les mouvements de personnel et les rapports collectifs du travail, compte tenu des paramètres financiers arrêtés par le Conseil du trésor.

Je reconnais que le ministre a repoussé tous les amendements qui nous rapprochaient de cela. Il reste quand même une question, et je poursuis. Dans le mémoire, on nous dit: Si la proposition qui précède est retenue, l'article 43 du projet de loi doit être biffé et les articles qui concernent le Conseil du trésor réaménagés, sinon l'article 43 devrait être modifié ou remplacé. On est devant ce choix.

Cet article traite d'une question de régie gouvernementale. Il est étrange qu'il apparaisse dans une loi. Ce qui doit être prévu dans la loi, c'est la modification que nous recherchons. Le Conseil du trésor invite des représentants des associations patronales concernées à participer à ses délibérations lorsqu'elles portent sur les matières négociées à l'échelle nationale, puisqu'elles représentent les véritables employeurs.

Sur le plan juridique, je pense qu'on ne peut pas en disconvenir; on ne peut pas disconvenir non plus de la responsabilité générale du gouvernement. Que pense le ministre de cette proposition de la Fédération des cégeps et ne devrait-on pas en tenir compte dans l'article 43?

M. Clair: Je pense qu'elle va exactement dans le sens de toute l'argumentation de la Fédération des cégeps et d'autres associations patronales et, encore là, je dirais de l'argumentation première, parce qu'il y a toujours une argumentation seconde quand on se rencontre pour parler des vraies choses, que les associations patronales préféreraient ne pas être soumises à l'autorité déléguée du ministre sectoriel et traiter directement avec le Conseil du trésor, ce que tous les gouvernements successifs se sont toujours refusés à accepter parce que l'on pense que le ministre sectoriel, même si vous considérez que son rôle n'est que symbolique, c'est lui qui doit, en vertu des articles 36 et suivants, être le grand maître de la négociation sectorielle.

Le Président (M. Lachance): L'article

43 est-il adopté?

Une voix: Non, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Ah! Eh bien, cela arrive!

M. Paquette: M. le Président, pendant que le député de Deux-Montagnes se prépare, est-ce que je dois considérer que nous avons un témoin à la barre en la présence du député de Saint-Jean ou si sa position signifie qu'il a préféré se placer entre deux tables?

Le Président (M. Lachance): Vous enfreignez le règlement, M. le député de Rosemont.

M. Pagé: M. le Président, si le député de Rosemont n'avait pas enfreint le règlement, est-ce qu'il m'aurait été permis de demander au député de Saint-Jean quel groupe il représente?

Le Président (M. Lachance): M. le député de Deux-Montagnes. M. le député de Deux-Montagnes, je voudrais vous dire que nous en étions à l'article 43.

M. de Bellefeuille: Oui, j'avais déjà compris cela, M. le Président. Au sujet de l'article 43, je ne vais pas m'étendre sur l'aspect de la question que je vais soulever parce que je crains que cela ne vous mette de mauvaise humeur, mais vous ne pouvez quand même pas m'empêcher de signaler au ministre, et, par le biais du ministre, au gouvernement, qu'il aurait été facile, dans le texte de l'article 43, de dire que le Conseil du trésor invite le ou la ministre de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie, le ou la ministre de l'Éducation ou, suivant le cas, le ou la ministre des Affaires sociales...

Mme Le Blanc-Bantey: Et la ministre déléguée à la Condition féminine.

M. de Bellefeuille:... à participer à ses délibérations lorsqu'elles portent sur les négociations visées dans les articles 44 et 53.

Cela aurait été facile, cela aurait été de bonne inspiration. J'ai déjà expliqué à plusieurs reprises les raisons pour lesquelles il me semble que le ministre, en particulier, parce qu'il est ministre responsable de l'Année internationale de la jeunesse, aurait dû... N'est-ce pas, M. le ministre, que je vous ai déjà expliqué cela à quelques reprises?

M. Clair: Effectivement. Je voulais simplement vous signaler que je vous comprenais tellement bien que je pourrais réciter presque par coeur, mot à mot, ce que vous dites.

M. de Bellefeuille: M. le Président, j'ai une petite nouvelle pour le ministre, c'est que j'ai un ajout.

Une voix: "Une" ajout.

M. de Bellefeuille: Mme la députée de Johnson propose que je dise "une ajoute"?

Mme Juneau: Un ou une députée qui parle.

M. de Bellefeuille: Je ne suis pas contre. Mon ajout, c'est de signaler qu'il y a une espèce de vide politique en ce qui concerne la condition féminine au Québec. On n'a pas de ministre et ce portefeuille se trouve temporairement entre les mains d'un homme qui a beaucoup à faire, beaucoup de chats à fouetter.

Le Président (M. Lachance): Je vous signale que vous enfreignez tout à fait le règlement.

M. de Bellefeuille: Ce n'est pas exact, M. le Président, qu'on parle ici du ministre? C'est exact, on dit: "Le Conseil du trésor invite le ministre... " et je suis en train de dire qu'on devrait dire le ou la ministre, mais je n'en ferai pas un amendement, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Cette question de féminisation des titres a déjà été réglée.

M. de Bellefeuille: Elle a été réglée en ce qui concerne les observateurs et les observatrices, en ce qui concerne les présidents et les présidentes, les vice-présidents et les vice-présidentes. Elle a été réglée en ce qui concerne certains articles parce qu'elle n'a été réglée que là où on a voté sur des articles en particulier.

Le Président (M. Lachance): Et par extension pour tout ce qui pourrait être féminisé.

M. de Bellefeuille: Ah oui? C'est très original comme interprétation, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Écoutez, M. le député, si vous voulez parler de l'article 43...

M. de Bellefeuille: C'est exactement ce que je fais, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): J'ai de la misère à vous suivre.

M. de Bellefeuille: Faites un effort de plus! Je vais en rester là, M. le Président, pour le moment. Je suis sûr que la question que je soulève est d'une importance telle qu'elle apparaîtra de nouveau dans nos délibérations. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 43 est adopté?

Une voix: Adopté.

Mme Le Blanc-Bantey: Vote nominal, M. le Président.

Une voix: Sur division.

Une voix: Pas encore!

Mme Le Blanc-Bantey: Bien oui, parce que c'est le même principe que l'article 42.

Le Président (M. Lachance): M. le secrétaire, si vous voulez faire l'appel sur l'article 43.

Le Secrétaire: Mme Juneau (Johnson)?

Mme Juneau: Pour.

Le Secrétaire: M. Blais (Terrebonne)?

M. Blais: Pour.

Le Secrétaire: M. Gauthier (Roberval)?

M. Gauthier: Pour.

Le Secrétaire: M. Laplante (Bourassa)?

M. Laplante: Pour.

Le Secrétaire: M. Clair (Drummond)?

M. Clair: Pour.

Le Secrétaire: Mme Le Blanc-Bantey (Îles-de-la-Madeleine)?

Mme Le Blanc-Bantey: Contre.

Le Secrétaire: M. Ryan (Argenteuil)?

M. Ryan: Pour.

Le Secrétaire: M. Pagé (Portneuf)?

M. Pagé: Pour.

Le Secrétaire: Pour: 7 Contre: 1

Le Président (M. Lachance): Alors, l'article 43 est adopté.

Article 44. Nous entrons dans la section III, Le mode de négociation, Les stipulations négociées et agréées à l'échelle nationale.

Articles en suspens

M. Clair: Maintenant, M. le Président, avant d'aborder cette nouvelle section, peut-être est-ce le moment de faire le point sur un certain nombre d'articles que nous avions laissés en suspens.

Le Président (M. Lachance): Très bien, M. le ministre. Lesquels?

M. Clair: Les articles qu'on avait laissés en suspens ou sur lesquels j'avais accepté de réfléchir. Dites-moi si je fais erreur. J'ai l'article 5, l'article 8, l'article 11, l'article 21, l'article 30, l'article 31 et l'article 36.

Le Président (M. Lachance): C'est bien cela, M. le ministre.

M. Clair: Donc, les articles 5, 8, 11, 21, 30, 31 et 36.

M. le Président, en ce qui concerne l'article 5, on se souviendra que j'avais accepté de soumettre à la décision du Conseil des ministres le deuxième alinéa qui prévoit que, malgré la nomination par l'Assemblée nationale des trois présidents et vice-présidents de l'Institut de recherche sur la rémunération, c'est le gouvernement qui "détermine la rémunération, les avantages sociaux et les autres conditions de travail de ces membres". Comme j'en avais pris l'engagement, j'ai soumis cette question au Conseil des ministres, il y a à peine quelques heures, et la décision du Conseil des ministres a été de ne pas proposer d'amendements à ce deuxième alinéa. Alors, je n'ai pas de mandat pour proposer des amendements.

Le Président (M. Lachance): Alors, ce serait l'article 8 tel que libellé?

M. Clair: L'article 5, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Pardon. Ce serait l'article 5 tel que libellé?

M. Paquette: M. le Président, le débat n'a pas été fait sur l'amendement.

M. Clair: L'article 5 a été longuement débattu et cette question-là aussi. J'ai fait valoir au Conseil des ministres les différents points de vue que j'avais notés et le mandat que j'ai reçu est de ne pas modifier cet article.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre, cela a été longuement débattu. Cependant, il y avait une motion d'amendement présentée par la députée des

Îles-de-la-Madeleine qui se lisait comme suit: Remplacer le deuxième alinéa par: "L'Assemblée nationale détermine la rémunération, les avantages sociaux et les autres conditions de travail de ces membres. "

M. Clair: Vous avez raison, et on avait suspendu nos travaux à ce moment-là.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Rosemont.

M. Paquette: M. le Président, que le ministre se rassure, nous avons hâte de discuter des articles 44 et suivants qui concernent la négociation à l'échelle locale, mais je dois cependant dire que cela commence mal. Le ministre vient de nous dire lui-même qu'il avait accepté de réfléchir sur cinq ou six articles sur les 44 que nous avons étudiés jusqu'à présent. Sur les articles les plus importants, sa réflexion était toute faite. Son projet de loi est parfait. Sur un article comme l'article 5, cela commence mal. Il commence par nous dire que l'amendement n'est pas acceptable par le gouvernement. Je ne peux que...

M. Clair: Je tiens à préciser que j'aurai des amendements à apporter sur d'autres articles.

M. Paquette Ah bon! Enfin, je l'espère. M. le Président, je veux simplement exprimer mes regrets sur cette attitude un peu cavalière face à l'Assemblée nationale. On fait nommer par l'Assemblée nationale aux deux tiers un président et deux vice-présidents dont nous n'avons aucunement besoin et qui témoignent uniquement de la méfiance du gouvernement face aux organisations syndicales. C'est une soupape au cas où l'une des parties ne nommerait pas ses membres à l'Institut de recherche sur la rémunération, auquel cas on a besoin de deux vice-présidents additionnels, donc de trois personnes à temps plein, de trois cadres de haut niveau qui vont apporter le statut moral de l'Assemblée nationale et qui vont donner, espère le ministre, de cette façon une crédibilité à l'institut. On voudrait que ce soit le gouvernement seul qui fixe la rémunération, les avantages sociaux et les autres conditions de travail des membres. Comme on l'a indiqué, on n'a pas d'objection à ce que le président exerce ses responsabilités à temps plein, mais pour ce qui est des deux vice-présidents, il en va tout autrement. Le ministre a refusé un amendement pour que ces vice-présidents ne soient pas à temps plein. Il a refusé un autre amendement visant à limiter les chances que ces personnes deviennent à temps plein. Je vous rappelle qu'on est en présence d'un institut qui aura probablement une vingtaine de personnes à son service.

(16 heures)

Maintenant, on voudrait que le gouvernement détermine tout cela, la rémunération, les avantages sociaux et les autres conditions de travail de personnes nommées par l'Assemblée nationale. Je vous signale, M. le Président, que c'est l'Assemblée nationale qui fixe ces questions dans le cas des hauts fonctionnaires nommés par l'Assemblée nationale. Le seul argument qu'on nous a amené est la volonté du gouvernement d'éviter que les salaires de ces personnes ne soient discutés par l'Assemblée nationale, privant ainsi l'Assemblée nationale de décider elle-même de l'étendue des fonctions et du niveau de rémunération des fonctionnaires qu'elle nomme. C'est un abus de pouvoir de l'exécutif face au législatif. C'est une question très grave. C'est une tendance qui s'installe, qu'il faut dénoncer. Je pense que la population est en droit de savoir que, quand l'Assemblée nationale nomme ses fonctionnaires, elle en gère les conditions. L'argument selon lequel ces discussions seraient publiques ne tient pas puisque c'est le cas, déjà, de certains hauts fonctionnaires. C'est le cas des députés et des ministres aussi. Je pense que les gens ont le droit de savoir le salaire des personnes qu'ils élisent à l'Assemblée nationale et, par conséquent, des personnes que ceux-ci ou celles-ci nomment comme hauts fonctionnaires de l'Assemblée nationale.

M. le Président, je pense qu'il faudra renverser cette tendance un jour. Elle ne va pas dans le sens de la démocratie. Elleconstitue, encore une fois, un abus de pouvoir de l'exécutif par rapport au législatif.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, on a déjà eu l'occasion de débattre et de discuter de cette question. L'amendement est sur la table. Le débat et la discussion autour de cet amendement étaient suspendus. Essentiellement, je voudrais réitérer ici notre position, à savoir que le président et les vice-présidents étant nommés par les deux tiers de la Chambre, ce mode de désignation vient consacrer le principe témoignant de l'importance rattachée à cette fonction. Toute personne qui est désignée ainsi l'est avec un mandat qui lui est finalement conféré par la population, par la voie des deux tiers des députés. Comme on le sait, la règle des deux tiers prévoit généralement que les deux parties ou l'ensemble des parlementaires doivent s'associer à cette démarche. Je dis bien généralement, sauf exception, lorsque le Parlement comprend certaines distorsions. D'ailleurs, la coutume a toujours voulu que ces personnes soient désignées à l'unanimité. Cependant, nous ne

comprenons pas que cela soit l'Assemblée nationale qui ait le pouvoir de les nommer et que ce ne soit pas l'Assemblée nationale qui ait le pouvoir d'établir leur rémunération et leurs conditions de travail.

Le ministre a évoqué le fait que les personnes ainsi nommées n'apprécieraient pas que leur rémunération soit établie publiquement, au grand jour. Comme j'ai eu déjà l'occasion de le soutenir, c'est le cas pour le Vérificateur général, pour le Protecteur du citoyen, pour le président ou la présidente de la Commission des droits de la personne, c'est le cas des juges, c'est le cas des députés, c'est le cas des ministres, c'est le cas des dirigeants d'organismes. Le salaire du président d'Hydro-Québec est connu. Je ne vois pas en quoi l'aspect confidentiel ou la non-divulgation des conditions de travail et de la rémunération qui seront les leurs les empêcherait d'être connues au même titre que pour les autres.

L'autre élément est: Dis-moi qui te nomme et je te dirai qui établit tes conditions. Nous étions bien encouragés de voir l'ouverture manifestée par le ministre dès le début de nos travaux. J'aurais apprécié, cet après-midi, que le ministre nous indique s'il a appuyé cette position au Conseil des ministres. Je suis persuadé qu'il n'osera pas le faire. Je voudrais donc vous exprimer ma déception sans reprendre, évidemment, tout le débat qui a entouré cette question. Si ma mémoire est fidèle, cela avait duré près d'une heure et demie.

M. Clair: M. le Président, je veux simplement rappeler que ce n'est pas strictement pour des questions de publicité du salaire de ces personnes puisque c'est bien évident que leur salaire ne pourra pas être tenu confidentiel. C'est la procédure de la fixation du salaire. Ce que le Conseil des ministres retient, c'est qu'il y a très peu de personnes dont le salaire est fixé par une procédure de ballottage à l'Assemblée nationale. C'est contre cette procédure que le Conseil des ministres en a. L'orientation générale du gouvernement, actuellement, est que ces personnes, dorénavant, ne soient plus soumises à un tel processus de nomination. Il n'y a pas de cachotterie. Il est bien évident que cela ne peut être caché. Cela fait partie des renseignements que l'individu serait amené à divulguer, ne serait-ce que dans la commission parlementaire qui pourrait vouloir l'entendre. Mais c'est plus le processus qui est un peu odieux. C'est ce que le Conseil des ministres a considéré. Je me fais son porte-parole.

Alors, est-ce que l'article 5 est adopté, M. le Président?

Le Président (M. Lachance): L'amendement d'abord.

M. Clair: L'amendement. Non, il n'y a pas d'amendement. Ah oui!

Une voix: Ah oui!

M. Clair: Moi, je n'en ai pas, mais, vous, vous en avez un, c'est vrai.

Le Président (M. Lachance): Oui, l'amendement de la députée des Îles-de-la-Madeleine. Est-ce qu'on peut en disposer? Est-ce que l'amendement est adopté?

Une voix: Adopté. M. Clair: Rejeté.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Deux-Montagnes, sur l'amendement.

M. de Bellefeuille: Oui, sur l'amendement, M. le Président,

M. Pagé: L'amendement est adopté? M. Clair: Rejeté.

Le Président (M. Lachance): Non, non, le député de Deux-Montagnes m'a demandé la parole.

M. de Bellefeuille: Je crois que Mme la députée de Jonhson veut intervenir, M. le Président.

Mme Juneau: Vous avez demandé la parole, c'est vous, mais je ne sais pas si c'est vous au féminin ou vous au masculin.

M. de Bellefeuille: Mais vous la prenez sans l'avoir demandée, madame.

Le Président (M. Lachance): Vous faites preuve de grande courtoisie, M. le député, mais la parole vous appartient.

M. de Bellefeuille: Oui. M. le Président, le ministre vient de nous parler sur un ton calme et réfléchi, qui est louable dans les circonstances, de l'orientation générale du gouvernement. Quelle est l'orientation générale du gouvernement? En l'occurrence, il s'agit de ne pas étaler sur la place publique, pour employer le vocabulaire, je suppose, qui est courant dans les officines gouvernementales, ne pas étaler sur la place publique, étant donné que l'Assemblée nationale est un lieu vulgaire, ne pas étaler sur la place publique les salaires de hauts fonctionnaires ou de personnalités occupant...

M. Clair: Question de règlement, M. le Président.

M. de Bellefeuille:... des fonctions

élevées dans l'État.

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le ministre.

M. Clair: Question de règlement, M. le Président.

M. de Bellefeuille: Quel article? Une voix: L'article 79.

M. Clair: Oui, l'article 79. C'est une bonne idée.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Paquette: Celui qui parle des questions de privilège en commission, c'est cela?

Une voix: Non, non. L'article 79.

M. Clair: Question de règlement, M. le Président.

Une voix: Le député est-il en train d'engendrer un débat?

M. Clair: Je demande une directive, M. le Président. Le député ne peut prêter d'intention à un membre de cette commission autour de la table, même si j'ai eu la tentation à plusieurs reprises de lui en prêter quant au "filibuster" qu'il mène. Je ne l'ai pas fait et je ne vois pas pourquoi il me prêterait des intentions ou en prêterait d'autres à mes collègues dans les officines gouvernementales, entre guillemets.

M. Pagé: M. le Président, sur la question de règlement, c'est vraiment l'article 79 qui s'applique. Le député de Deux-Montagnes, par les propos qu'il tient, est susceptible de susciter un débat. Il est le dernier intervenant sur cette motion.

M. de Bellefeuille: Sur la question de règlement, M. le Président, le ministre affirme que je mène un "filibuster". Je mets le ministre au défi de démontrer, par la transcription de nos débats, que les propos que j'ai tenus ne sont pas pertinents. Tous les propos que j'ai tenus sont pertinents au texte qui est devant nous, qui est proposé par le ministre et dont il porte l'entière responsabilité. Je reconnais la responsabilité des propos que j'ai tenus et je maintiens qu'ils ont tous été pertinents. Ils n'ont peut-être pas été à la satisfaction du ministre. Peut-être que je n'ai pas exprimé les mêmes avis que le ministre, mais c'est son problème et non le mien. Cela ne veut pas dire que, parce que ce que je dis ne fait pas l'affaire du ministre, je mène un "filibuster". Cela fait huit ans et demi que je suis membre de cette noble Assemblée et j'ai déjà assisté à des "filibusters". Je me souviens d'avoir entendu des députés discourir longuement sur les saints du jour et les saintes du jour.

Le Président (M. Lachance): J'aimerais bien que vous reveniez à la pertinence du débat.

M. de Bellefeuille: Vous avez permis, M. le Président, au ministre de poser sa question de règlement. J'ai parfaitement le droit de la commenter. C'est lui qui a prétendu que je menais un "filibuster". J'ai le droit de répondre à cela. Est-ce que vous allez me bâillonner, M. le Président, m'empêcher d'expliquer au ministre que ce n'est pas cela, un "filibuster"? Un "filibuster", c'est lorsque des députés occupent du temps en disant des choses qui ne sont pas pertinentes.

Le Président (M. Lachance): À l'ordre, M. le député. À l'ordre!

Une voix: II n'a pas trop de respect pour le président.

M. Clair: M. le Président, question de règlement.

M. de Bellefeuille: Mais demandez la parole! M. le député de Portneuf, M. le député de Roberval veulent intervenir. Demandez la parole!

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Clair: Oui, je voulais simplement demander au député de Rosemont, qui est cité dans la Presse de ce matin... Je cite M. Mario Roy, journaliste à Québec: Par exemple, Gilbert Paquette ne rejette pas l'expression de "filibuster modéré". Moi, j'ai parlé de "filibuster", je ne le qualifie pas. Est-ce que le député de Deux-Montagnes est d'accord avec l'opinion du député de Rosemont?

Le Président (M. Lachance): Écoutez, je pense qu'en parlant de "filibuster" et de choses semblables, nous allons à l'encontre du règlement. J'aimerais que nous revenions à l'essentiel de l'article 5.

M. de Bellefeuille: M. le Président, apparemment, il y a le ministre qui a le droit de parler de "filibuster" seulement?

Le Président (M. Lachance): Je viens de lui indiquer, comme à tous les participants de chaque côté de la table, que nous devrions revenir à la motion d'amendement.

M. de Bellefeuille: Je mets fin à mon

intervention sur cette fausse question de règlement, parce que ce n'était pas vraiment une question de règlement, et j'en reviens à l'article...

Le Président (M. Lachance): La motion sur l'article 5.

M. de Bellefeuille:... à la motion d'amendement sur l'article 5. Contrairement à ce que prétend le ministre, je ne faisais pas de procès d'intention. Ce n'est pas très original ce que je dis quand je constate, comme beaucoup d'autres observateurs de la scène politique au Québec, que la manie du secret s'étend dans le gouvernement, cette manie de vouloir cacher des choses, en particulier les salaires que touchent les fonctionnaires de l'État et du gouvernement, ce qui, il me semble, est contraire à l'esprit dans lequel nos institutions démocratiques doivent fonctionner. Elles doivent fonctionner dans un esprit d'ouverture. Ce gouvernement se vantait de sa transparence. Où est-elle sa transparence quand on nous dit que ces gens ne peuvent pas, comme d'autres fonctionnaires analogues, toucher des rémunérations, avantages sociaux et autres conditions de travail établies par l'Assemblée nationale? Il faut que cela soit le gouvernement qui les détermine dans le secret. Au nom de quoi, sinon au nom de cette déplorable tendance qu'on observe dans le gouvernement à étendre le secret sur un plus grand nombre de questions continuellement?

Et cela fait partie d'un autre phénomène qu'on peut observer, la main mise de l'exécutif sur le législatif. On est très condescendant, le gouvernement est très condescendant. J'ai félicité le ministre, d'ailleurs, d'avoir prévu que l'Assemblée nationale joue un rôle, en l'occurrence, mais c'est un geste manqué, c'est un geste incomplet puisque l'Assemblée nationale aura à se prononcer sur des noms, mais n'aura pas à déterminer les conditions de travail, la rémunération et les avantages sociaux de ces trois personnes. C'est un geste incomplet, le ministre n'est pas allé au bout de sa logique. Il nous dit que le gouvernement, en Conseil des ministres, aujourd'hui, a décidé de ne pas accepter la suggestion faite par notre collègue des Îles-de-la-Madeleine, mais il ne nous a pas vraiment expliqué pourquoi. C'est-à-dire qu'il a parlé d'une orientation générale du gouvernement. On la connaît cette orientation générale du gouvernement: c'est l'obscurité, c'est l'opacité. Ce gouvernement n'a plus le droit de parler de transparence, parce que c'est l'opacité qui s'étend sur les affaires de l'État.

J'aurais souhaité que le ministre se rallie à cet amendement d'excellente inspiration, très cohérent, très logique. Je constate avec regret que tel n'est pas le cas. Je ne peux que répéter au président et au ministre, qui, j'espère, m'écoute encore, que c'est dommage que ce geste d'impliquer l'Assemblée nationale dans le processus soit, dans le texte de l'article 5, un geste incomplet, un geste avorté. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Alors, est-ce que la motion d'amendement de la députée des Îles-de-la-Madeleine est adoptée?

Une voix: Un vote.

Le Président (M. Lachance): Un vote?

M. de Bellefeuille: Adopté, M. le Président.

M. Clair: Rejeté.

M. Ryan: Je voudrais seulement signaler, à la suite des remarques du député des Deux-Montagnes, qu'il ne fait pas de "filibuster" mais qu'il a le cheminement mental plus lent que d'habitude. (16 h 15)

M. Paquette: M. le Président, j'espère que la remarque du député d'Argenteuil n'a pas pour but de signifier à cette commission que, même si le Parti libéral a l'intention de voter contre ce projet de loi, il a bien hâte qu'il soit adopté et qu'il préfère étudier les articles rapidement et à la vapeur.

Le Président (M. Lachance): M. le député, ce n'est pas très pertinent.

M. Ryan: M. le Président, nous autres, il y a peut-être une légère différence, c'est que je crois que nous avons fait la preuve à maintes reprises, depuis le début du travail, que nous avons fait notre travail d'étude et de préparation avant de venir ici et non pas en arrivant autour de la table, et nous essayons, quand il y en a un qui a occupé la place pendant un certain temps, de ne pas reprendre le processus à zéro quand il y en a un autre qui arrive. À part cela, on s'entend très bien.

Le Président (M. Lachance): Alors, l'amendement est adopté?

M. Clair: Rejeté.

Le Président (M. Lachance): L'amendement présenté par la députée des Îles-de-la-Madeleine est rejeté. Nous revenons à l'article 5. Est-ce que l'article 5 est adopté?

M. Clair: Adopté.

M. Paquette: Sur division.

Le Président (M. Lachance): L'article 5 est adopté sur division. J'appelle maintenant l'article 8.

M. Clair: Oui, j'aurais une proposition d'amendement qui, malheureusement, est encore à la...

Une voix: L'article 7 ou 8?

M. Clair: L'article 8.

Le Président (M. Lachance): L'article 8.

M. Clair: Est-ce que vous l'avez? On se souviendra qu'à l'article 7 noua avons accepté la proposition d'amendement du député de Rosemont, si ma mémoire est fidèle, à savoir que la durée du mandat des membres de l'institut soit de trois ans et qu'il fallait faire de la concordance à l'article 8. Je propose donc que l'article 8 soit modifié par le remplacement des mots "en suivant le mode de nomination prescrit pour la nomination du membre à remplacer" par les mots "pour la durée non écoulée du mandat du membre à remplacer en suivant le mode de nomination de ce dernier".

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement du ministre est adopté?

M. Clair: Est-ce que j'ai lu assez lentement?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Lachance): C'est adopté?

M. Paquette: M. le Président, je pense qu'effectivement c'est un amendement qui est tout à fait conforme à l'esprit de nos discussions. J'espère que l'ouverture d'esprit du ministre va se poursuivre.

Le Président (M. Lachance): Très bien. Alors, l'amendement est adopté. Est-ce que l'article 8, tel qu'amendé, est adopté?

M. Clair: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté.

M. Clair: Ensuite, M. le Président, il y avait l'article 11 que nous avions laissé en suspens.

Le Président (M. Lachance): C'est bien cela.

M. Clair: À la réflexion, M. le Président, constatant le problème posé par l'éventualité que les deux vice-présidents forment le quorum, forment la majorité des membres et déterminent eux-mêmes leurs fonctions, je n'ai pas d'amendement à proposer, de sorte que l'article 11 se lirait toujours ainsi: "Les vice-présidents exercent les fonctions que détermine le président dans le cadre des règlements de l'institut. "

Le Président (M. Lachance): Alors, je comprends bien que...

M. Clair: Je pense que le député de Rosemont, dans son cheminement intellectuel, la dernière fois, était rendu très près d'être d'accord avec moi. On avait quand même accepté de part et d'autre d'y réfléchir, on avait débattu de cela et...

Le Président (M. Lachance): Si je comprends bien, M. le ministre, vous retirez votre motion d'amendement.

M. Clair: Oui, je retire... Le Président (M. Lachance): Très bien. M. Clair:... ma motion d'amendement.

M. Paquette: M. le Président...

Le Président (M. Lachance): M. le député de Rosemont.

M. Paquette:... sur l'article, le ministre a raison de souligner que dans nos cheminements mentaux nous étions effectivement en résonance, mais pas nécessairement d'accord, en ce sens que j'avais souligné au ministre qu'effectivement si, à l'un ou l'autre des articles, on pouvait trouver le moyen de s'assurer qu'on limiterait cette propension naturelle des organismes à grossir leur personnel cadre et à trouver des fonctions pour justifier des salaires d'une autre façon, il m'apparaîtrait acceptable de laisser l'article 11 tel quel, mais tel n'est pas le cas, M. le Président. À l'article 9, le ministre a refusé un amendement que j'ai présenté et qui visait à faire en sorte que les membres de l'institut, à l'exception du président, ne soient pas rémunérés, ce qui incluait les vice-présidents et ce qui nous aurait assurés que ces vice-présidents se contenteraient d'allocations de présence et du remboursement de frais raisonnables.

Tout à l'heure, le ministre nous a mentionné que le gouvernement seul déterminera la rémunération, les avantages sociaux et les autres conditions. À l'article 11, tel qu'il est là, les vice-présidents exerceront les fonctions que déterminera le président dans le cadre des règlements de l'institut, lesquels - si on comprend l'article 18 - seront soumis à l'approbation du gouvernement. Donc, en définitive, rien n'empêche le gouvernement de faire de ces deux postes des postes superflus, inutiles,

qui, encore une fois, témoignent de la méfiance du gouvernement face aux mécanismes qu'il propose et à la participation des organisations syndicales. Donc, le gouvernement pourra faire de ces postes des postes à temps plein et pourra déterminer la rémunération en conséquence. M. le Président, je pense que ce n'est pas dans l'intérêt de la bonne gestion des fonds publics. Je vais terminer mes remarques là, M. le Président. Encore une fois, on ne peut que regretter cet entêtement du gouvernement à se donner la possibilité de faire de ces deux postes de vice-présidents des postes à temps plein.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 11 est adopté?

M. Clair: Adopté.

M. Paquette: Sur division.

Le Président (M. Lachance): Adopté sur division. J'appelle l'article 21.

M. Clair: À l'article 21, on se souviendra, M. le Président, que nous avions gardé cet article en suspens pour vérifier quelles étaient les autorisations requises pour contracter un emprunt, qui appartenaient à un certain nombre d'autres organismes. Cette question avait été soulevée par le député d'Argenteuil.

Je puis indiquer au député d'Argenteuil que dans quelques cas, notamment dans la Loi constituant l'Institut québécois de recherche sur la culture, on lit: L'institut ne peut, sans l'autorisation du gouvernement, prendre un engagement financier pour une somme excédant le montant déterminé par le gouvernement. Donc, l'expression "pour un montant déterminé par le gouvernement" revient dans quelques cas.

Au sujet de l'Institut national de productivité, on lit: L'institut ne peut, sans l'autorisation du gouvernement, contracter un emprunt qui porte à plus de 1 000 000 $ le total des sommes empruntées par lui et non encore remboursées. Donc, c'est un montant de 1 000 000 $. En ce qui concerne l'IRSST, le fonctionnement est très différent. En fait, selon le rapport annuel de 1983 de la CSST, au cours de cet exercice l'institut, qui est un organisme sans but lucratif, en grande partie subventionné par la commission, avait reçu de cette dernière une contribution de 7 900 000 $, dont 944 000 $ provenaient du gouvernement.

Je pense que j'avais raison quand je disais l'autre jour que, de mémoire, 1 000 000 $ est la somme minimale utilisée, ou encore un montant qu'autorise le gouvernement. Quant à moi, il m'apparaît préférable que ce soit un montant déterminé dans la loi.

M. Ryan: Dans ce cas-ci?

M. Clair: Pardon?

M. Ryan: Dans ce cas-ci en particulier?

M. Clair: Oui, dans ce cas-ci en particulier.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 21 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): J'appelle maintenant l'article 30.

M. Clair: À l'article 30, c'était la question des commissions scolaires confessionnelles. J'ai un libellé à proposer. Le député d'Argenteuil, qui est un expert de ces questions, voudra sûrement le lire deux fois plutôt qu'une. Je propose que l'article 30 soit modifié, premièrement, par l'addition, au premier paragraphe, après le mot "catholiques", des mots "les commissions scolaires confessionnelles catholiques et les corporations de syndics d'écoles pour catholiques".

Deuxièmement, par l'addition, au deuxième paragraphe, après le mot "protestants", des mots "les commissions scolaires confessionnelles protestantes et les corporations de syndics d'écoles pour protestants". Il y aura de la concordance aux articles suivants.

On m'a indiqué que c'était le plus loin qu'on pouvait aller pour éviter la création de nouveaux comités patronaux et être sûr qu'ils sont couverts par les comités patronaux existants.

M. Ryan: L'amendement répond à l'inquiétude qui avait été exprimée. C'est une réponse satisfaisante qui tient compte de la réalité.

M. Clair: Les corporations de syndics d'écoles pour catholiques couvrent, j'imagine, ce que le député d'Argenteuil appelait les dissidents?

M. Ryan: C'est cela.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement est adopté?

M. Clair: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'article 30, tel qu'amendé, est adopté?

M. Paquette: Non, M. le Président. J'avais soulevé une autre question qui n'est pas couverte par l'amendement du ministre.

J'ai travaillé assez longuement sur cette question de restructuration scolaire qui a mené à la loi 3 et à la loi 29, M. le Président, et l'économie générale de la loi, c'est de faire en sorte que nous nous orientions vers une transformation assez substantielle, adoptée par l'Assemblée, des structures scolaires aux niveaux élémentaire et secondaire.

Nous allons nous retrouver bientôt avec des commissions scolaires qui seront généralement linguistiques. Il y aura des commissions scolaires françaises et des commissions scolaires anglaises, et, à cause de la Constitution canadienne, il est prévu que certaines commissions scolaires confessionnelles puissent subsister. L'étendue du territoire et le nombre de ces commissions scolaires restent à déterminer. Il y a des causes pendantes devant les tribunaux, mais, éventuellement, nous allons nous retrouver dans un régime qui normalement sera linguistique avec des exceptions confessionnelles.

Le ministre nous a indiqué qu'il voulait tenir compte dans son projet de loi de la tradition qui fait en sorte que, depuis qu'il y a des négociations centralisées, depuis les années soixante, les conventions collectives avaient pu évoluer différemment du côté catholique que du côté protestant et que cela justifiait la création de deux comités différents, un pour les protestants et un pour les catholiques. Son amendement vient clarifier quels sont les organismes patronaux qui pourront s'insérer dans les comités patronaux, mais il maintient quand même deux comités.

Je soutiens, M. le Président, que, de toute façon et à brève échéance, il faudra en arriver sauf pour les questions de négociations locales - on va discuter de cela tantôt - à une seule convention collective. Il me semble que la souplesse nécessaire à cette période de transition que va subir notre système scolaire serait beaucoup mieux servie si on regroupait en un seul comité patronal tous les secteurs, élémentaire et secondaire. Je pense que c'est au sein de ce comité patronal unique que nous pourrions tenir compte de l'évolution du système scolaire et du poids respectif des divers organismes impliqués. Je pense également que cette approche est dans l'esprit de la réforme scolaire que le gouvernement a fait adopter par la loi 3. Je pense également qu'une telle proposition va dans le sens de réduire la complexité ou, je dirais encore mieux, d'adapter le mode de fonctionnement des négociations à la réalité, parce que nous ne nous sommes pas opposés à ce qu'il y ait des comités par réseau dans le domaine des affaires sociales, mais, ici, il n'y a pas de justification du même ordre. Qu'il y ait un comité patronal de négociation pour les collèges, certainement. Qu'il y ait deux comités pour les commissions scolaires, cela m'apparaît tout à fait inutile, un manque de flexibilité, une augmentation de la complexité, une mauvaise adaptation à la réalité. Je ne sais pas si le ministre a réfléchi à cet aspect de la question.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Clair: Oui, très brièvement, M. le Président. D'abord, les lois 3 et 29, comme je l'ai indiqué, créeront un nouveau contexte, éventuellement, mais, jusqu'à preuve du contraire, je ne retiens aucunement l'argumentation du député de Rosemont. Il me semble qu'elle est contradictoire. Uniformisons, standardisons, cela nous donnera plus de flexibilité. Je ne suis pas d'accord avec cela. Je pense, M. le Président, que, si on veut de la souplesse, de la flexibilité, ce n'est pas en imposant de force un comité patronal unique dans ce secteur, non plus que du côté syndical, que les choses iront mieux. Je ne dis pas que, dans un nouveau contexte, dans un contexte différent qui est très évolutif dans le domaine de l'enseignement primaire et secondaire et des commissions scolaires, avec les lois 3 et 29, éventuellement on ne pourra pas en venir là. Mais je pense qu'à très court terme on atteindrait un objectif contraire à celui qu'on dit poursuivre.

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Je crois qu'on légifère en fonction de la ronde de négociations qui s'en vient immédiatement à l'automne. Le ministre nous a prévenus hier qu'il faudrait apporter des amendements à cet article de la loi lorsque la loi 3 entrera pleinement en vigueur, à compter de juillet 1986. Il faudra réviser la loi à ce moment-là. Mais, même au moment où la loi 3 entrera pleinement en vigueur, je ne pense pas qu'on doive s'orienter vers la formation d'un comité patronal unique pour les commissions scolaires qui existeront à l'époque. Nous aurons deux réseaux de commissions scolaires, un réseau de commissions scolaires francophones, un réseau de commissions scolaires anglophones, auxquels viendront se greffer un nombre indéterminé pour l'instant de commissions scolaires confessionnelles, catholiques ou protestantes. (16 h 30)

Parions seulement des commissions scolaires linguistiques. Je crois que les différences entre les deux réseaux demeureront suffisantes pour justifier le maintien de deux comités patronaux de négociation. Si la volonté était émise par les organismes concernés de former seulement une table patronale de négociation, ce serait

une chose qu'il faudrait accueillir d'une manière éminemment positive. Mais c'est tellement improbable que cela soit exprimé par eux à l'état de volonté, que cela devient assez chimérique de penser que cela sera possible. Je ne pense pas qu'il incombe au législateur de leur dire: Vous allez, de force, entrer dans une seule table patronale. S'il y a des facteurs qui justifient l'existence de deux comités patronaux, je ne pense pas que cela soit la fin du monde. Dans la perspective de décentralisation, de responsabilisation des parties dont nous parlons depuis le début du débat sur le projet de loi, c'est plutôt un geste qui doit être accueilli favorablement. Je me souviens - je ne sais pas si vous vous souvenez de cela, M. le député de Rosemont - qu'il y a plusieurs années, à la Commission des écoles catholiques de Montréal, on a voulu regrouper tous les enseignants dans une seule unité de négociation. C'étaient les enseignants des écoles catholiques, de la Commission des écoles catholiques de Montréal. Cette approche a été contestée devant le Tribunal du travail. Je ne me rappelle pas comment il s'appelait à l'époque. Je ne crois pas que c'était le tribunal que nous avons actuellement. Elle a été contestée et le tribunal a conclu qu'il devait y avoir deux unités d'accréditation, étant donné des différences très importantes de mentalité, de contexte, de caractéristiques culturelles qui avaient été observées d'un secteur à l'autre. Il avait conclu qu'à l'intérieur même de cet univers qui s'appelait la Commission des écoles catholiques de Montréal il devait y avoir deux unités de négociation pour les enseignants, et c'est le régime que nous avons encore aujourd'hui. On vit encore sous l'empire de cette décision.

En plus, il y a un autre facteur qui va probablement jouer. On aura à peu près dix commissions scolaires de langue anglaise pour tout le Québec. Cela vient justement d'être annoncé ces jours derniers par le ministre de l'Éducation. Le territoire de ces commissions scolaires sera beaucoup plus étendu. Il n'y aura pas le même genre de problèmes qui se posent dans les autres. D'avoir la possibilité de former leur propre comité patronal de négociation, je pense qu'elles vont l'apprécier. De toute manière, nous discutons par anticipation. Ce n'est peut-être pas mauvais qu'on puisse le faire pour une fois. D'habitude, on est toujours à la remorque des événements ou des échéances très immédiates qui nous pèsent au bout du nez. Je crois que, dans ce cas-ci, les facteurs que nous connaissons indiquent qu'il y aura probablement de très bonnes raisons de maintenir un comité patronal national pour la partie francophone et un comité national patronal pour la partie anglophone, jusqu'à nouvel ordre. C'est une question sur laquelle je n'ai pas d'opinion doctrinale, mais je fais seulement de la conjecture la plus raisonnable et la plus responsable possible.

M. Paquette: M. le Président, je voudrais simplement dire que les arguments du député d'Argenteuil sont assez convaincants sauf sur un point, évidemment: on a un seul comité pour les commissions scolaires catholiques, même si, du côté syndical, il y a plusieurs parties, il y a l'association des professeurs catholiques, la PACT, et les enseignants francophones sont regroupés dans la CEQ. Mais, effectivement, puisque le ministre nous dit qu'il pourra revenir et qu'il reviendra très sûrement avec des amendements à la loi pour tenir compte de la nouvelle situation créée dans les commissions scolaires, je pense qu'on pourrait accepter qu'il y ait deux comités dans cet article.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 30 tel qu'amendé est adopté? C'est adopté?

M. Clair: Adopté. L'amendement d'abord...

Le Président (M. Lachance): L'amendement avait déjà été adopté.

M. Clair: II a déjà été adopté. D'accord.

Le Président (M. Lachance): L'article 30, tel qu'amendé, est adopté. J'appelle maintenant l'article 31.

M. Clair: Je fais motion pour que l'article 31 du projet de loi soit modifié, premièrement, par le remplacement, dans la quatrième ligne du premier alinéa, des mots "pour catholiques" par les mots "visées au premier paragraphe de l'article 30".

Deuxièmement, par le remplacement, dans la quatrième ligne du premier alinéa, des mots "pour protestants" par les mots "visées au deuxième paragraphe de cet article".

Troisièmement, par le remplacement, dans la troisième ligne du deuxième alinéa, des mots "pour catholiques" par les mots "visées au premier paragraphe de l'article 30".

Quatrièmement, par le remplacement, dans la quatrième ligne du deuxième alinéa, des mots "pour protestants" par les mots "visées au deuxième paragraphe de cet article". C'est de concordance.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que c'est adopté? M. le député de Bourassa.

M. Laplante: Je voudrais souligner quelque chose à celui qui a préparé cet amende-

ment, et vous me corrigerez si je fais erreur, puisque c'est au Journal des débats: L'article 31 du projet est modifié premièrement, par le remplacement, à la quatrième ligne du premier alinéa... Un, deux, trois, quatre: c'est à la cinquième ligne, je crois.

Une voix: Quatrième et cinquième.

Le Président (M. Lachance): Quatrième et cinquième, oui.

M. Ryan: Cela commence à la quatrième ligne.

Le Président (M. Lachance): II n'y a pas de problème, M. le député de Bourassa. Je pense que, tel que formulé, c'est facilement compréhensible. "Pour" commence à la quatrième ligne. Est-ce que l'amendement...

M. de Bellefeuille: M. le Président, le député de Bourassa a eu raison de vérifier ces petits calculs, parce que les mots "pour protestants" n'apparaissent pas à la quatrième ligne. Ils apparaissent à la...

M. Laplante: Quatrième et cinquième lignes.

Le Président (M. Lachance):... précision.

M. de Bellefeuille:... une, deux, trois, quatre, cinquième ligne. Dans le cas des mots "pour protestants", c'est à la cinquième ligne.

M. Laplante: Non, mais c'est, pour le Journal des débats, quand on fait la transcription pour amender la loi, lorsqu'on s'y réfère. C'est pour éviter ces erreurs.

Le Président (M. Lachance): Très bien, c'est noté. Est-ce que l'amendement est adopté?

M. Laplante: Adopté. M. Clair: Adopté.

Le Président (M. Lachance): C'est adopté. L'amendement est adopté. Est-ce que l'article 31 tel qu'amendé est adopté?

M. Laplante: Adopté.

Le Président (M. Lachance): L'article 31 tel qu'amendé est adopté. Nous allons maintenant passer à l'article...

Une voix: 34.

Le Président (M. Lachance): Ho! L'article 34 avait déjà été adopté au cours...

Une voix: Mais on va le rouvrir.

Le Président (M. Lachance): On va le rouvrir?

M. Clair: Oui.

Le Président (M. Lachance): D'accord.

M. Clair: II avait été question de le suspendre ou de le modifier après.

M. Paquette: C'est un amendement de concordance, probablement, que le ministre devrait apporter à l'article 34.

M. Clair: Oui.

Le Président (M. Lachance): Alors, nous allons le rouvrir.

M. Paquette: C'est cela.

M. Clair: Je voudrais proposer, une fois acceptée la réouverture de l'article 34, que celui-ci soit modifié par le remplacement, à la deuxième ligne du deuxième alinéa, des mots "pour catholiques" par les mots "visées au premier paragraphe de l'article 30", et, deuxièmement, par le remplacement, à la deuxième ligne du deuxième aiinéa, des mots "pour protestants" par les mots "visées au deuxième paragraphe de l'article 30".

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est adopté?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Lachance): L'amendement est adopté. Est-ce que l'article 34 tel qu'amendé est adopté?

M. Clair: Adopté.

Le Président (M. Lachance): J'appelle l'article 36.

M. Clair: Nous avions également suspendu l'étude de cet article. Je propose que le deuxième alinéa de l'article 36 soit remplacé par le suivant: "Le comité patronal de négociation pour le secteur des affaires sociales est composé des présidents et vice-présidents des sous-comités patronaux, des autres membres désignés suivant des modalités agréées par ces derniers ainsi que d'un président. "

On se souviendra que j'avais proposé que l'amendement se lise "entre autres membres", ce qui était très imprécis et trop vague. Alors, on a reformulé l'amendement pour dire que ce seraient les membres désignés suivant des modalités agréées par ces derniers ainsi qu'un président, ces derniers étant les vice-présidents et

présidents des sous-comités.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement est adopté?

M. Paquette: M. le Président, cela m'apparaît satisfaisant. Cela veut dire que le gouvernement et les réseaux devront être d'accord pour ajouter ou inviter d'autres membres.

M. Clair: On les invitera... La formulation qui avait été avancée était "sur accord du ministre et des associations patronales", ce qui était là une formulation beaucoup trop lourde, alors que, dès le départ, des modalités pourront être agréées entre les parties pour déterminer qui peut venir et quand.

Le Président (M. Lachance): L'amendement est-il adopté? Est-ce que l'article 36 tel qu'amendé est adopté?

Une voix: Adopté.

Le mode de négociation

Le Président (M. Lachance): C'est adopté. Nous revenons où nous en étions, c'est-à-dire à l'article 44. À ce stade-ci, je voudrais indiquer aux parlementaires que nous avons effectivement 43 articles d'adoptés sur un total de 93. Sur l'article 44, M. le ministre, y a-t-il des commentaires?

M. Clair: Non, M. le Président, je n'ai pas d'amendement à proposer. Cet article définit simplement le champ d'application de la négociation nationale. Sont donc exclues les matières locales ou régionales, et le deuxième alinéa prévoit la possibilité pour les parties de prévoir des modalités de discussion en cours de convention collective.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Rosemont?

M. Paquette: Oui, M. le Président, je pense que cet article mérite discussion. On aborde une nouvelle section du projet de loi et il s'agit de déterminer - je pense que c'est l'un des effets de cet article - quelles sont les matières qui seront discutées à l'échelle nationale et celles qui le seront à l'échelle locale ou régionale, celles-ci étant stipulées dans les articles 57 et 58.

J'ai un certain nombre de questions a poser au ministre à cet effet. La première, c'est qu'on traite, bien sûr, différemment le secteur des affaires sociales et celui de l'éducation. Pour celui des affaires sociales, on dit à l'article 57 que les stipulations négociées à l'échelle locale ou régionale sont celles que définissent les parties, alors que, dans le secteur de l'éducation, on établit par la loi une liste de questions négociées et agréées à l'échelle locale ou régionale qui figure à l'annexe A.

Première question: Qu'est-ce qui a amené le ministre à adopter un comportement différent, dans le réseau des affaires sociales de celui qu'il adopte dans les réseaux de l'éducation?

M. Clair: Alors, M. le Président, j'ai beaucoup consulté et écouté, tant les gens du réseau des affaires sociales que ceux des deux réseaux de l'éducation. Au niveau des affaires sociales, on m'a fait valoir que la tradition de négociations locales était beaucoup plus pauvre, beaucoup plus limitée que celle du secteur de l'éducation, qu'un bon nombre d'institutions ou d'établissements, devrais-je dire, du réseau des affaires sociales sont nés après le phénomène de centralisation, de sorte qu'il n'y a à peu près jamais eu de négociations au niveau local et qu'il était préférable, dans un premier temps, de se contenter de permettre des arrangements locaux pour répondre aux besoins des parties, puisqu'on sait qu'un très grand nombre d'ententes "illégales" - entre guillemets - surviennent au niveau local. De tels arrangements existent déjà dans les faits et, d'autre part, nous avons, comme nous l'avons vu précédemment, pris l'orientation de reconnaître comme palier formel de négociation le sous-sectoriel et non plus le sectoriel. Ce sont les deux premiers pas qui sont franchis.

En ce qui concerne le réseau de l'éducation, j'ai également tenu compte des représentations qui m'ont été faites, tant par la fédération des commissions scolaires, les cégeps, les enseignants du primaire et du secondaire représentés par la CEQ et, également, les syndicats de niveau collégial. Les positions étaient très difficiles à concilier dans ce domaine puisque, du côté de la Fédération des cégeps, on aurait voulu une décentralisation très poussée et, du côté syndical, la volonté de décentraliser était beaucoup plus limitée; du côté des enseignants du primaire et du secondaire, il y avait une volonté de décentraliser assez loin, je dois dire, tant du côté des porte-parole de la CEQ que du côté de la fédération des commissions scolaires. Les parties n'étaient pas loin d'être d'accord même pour convenir que cette négociation au niveau local puisse comporter, dans des circonstances qui ont évolué, un droit de grève au niveau local. Le gouvernement a décidé de ne pas octroyer un tel droit de grève au niveau local, mais de retenir, cependant, la décentralisation d'une liste de matières fixées par l'effet de la loi qui apparaissent en annexe afin de tenir compte d'une plus grande expérience de négociation au niveau de l'enseignement primaire et secondaire. Et, comme le gouvernement ne

veut pas écarter la possibilité qu'éventuellement, dans une, deux ou trois négociations au niveau des cégeps, on en vienne à une décentralisation des négociations beaucoup plus poussée, je dirais, pour employer une comparaison qui est toujours boiteuse du style université, afin de conserver ouverte cette possibilité de ne pas y aller dès maintenant, mais de commencer à franchir des pas qui pourraient permettre d'aller dans cette direction, d'aller vers une décentralisation un peu plus poussée des négociations au niveau des cégeps, même si, encore là, certains d'entre eux... Je prends l'exemple du cégep de Drummondville, celui de ma région, qui n'a été constitué qu'en 1980. C'est sûr que l'expérience de la négociation locale est assez limitée. Il existait auparavant un cégep régional, mais il y a quand même eu constitution d'une nouvelle équipe depuis 1980. On a voulu franchir des pas dans cette direction. (16 h 45)

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Argenteuil.

M. Clair: C'est la présentation générale que je peux faire.

M. Ryan: Si je comprends bien, pour qu'on s'entende clairement au départ, c'est bien difficile de discuter de l'article 44 sans se référer aux articles 57 et suivants, parce que c'est comme les deux volets, c'est un même diptyque. Par conséquent, je pense qu'avant de commencer l'étude détaillée de l'article 44 il serait bon qu'on s'entende clairement sur ce que cela signifie. Dans votre projet, M. le ministre, je crois comprendre que, dans le secteur des affaires sociales, la possibilité d'arrangements locaux est prévue, mais pas de stipulations négociées au sens fort du terme.

M. Clair: Oui, cela serait possible si les parties en convenaient. Il faut bien comprendre.. •

M. Ryan: Très bien, c'est cela que je veux dire. Il n'y a pas de liste obligatoire. La seule liste obligatoire porte sur des arrangements et non sur des stipulations négociées.

M. Clair: Les arrangements locaux ne sont pas obligatoires, mais ils sont permis sur des matières déterminées et légales par l'effet de la loi, selon une liste déterminée.

M. Ryan: Très bien. Cela ne demande pas l'accord des comités nationaux pour qu'on en discute au plan local.

M. Clair: Non.

M. Ryan: C'est cela que je veux dire.

M. Clair: Les parties, localement, sont, par le fait de la loi, habilitées à convenir d'arrangements locaux sur ces matières.

M. Ryan: Vous avez la même chose pour le personnel de soutien des commissions scolaires et des collèges.

M. Clair: Oui, les collèges peuvent en avoir.

M. Ryan: Oui, les collèges, et la même chose pour le personnel de soutien et le personnel professionnel non enseignant des commissions scolaires.

M. Clair: C'est exact.

M. Ryan: Pour le personnel enseignant, vous avez négociation de certaines matières au plan national et un certain nombre de matières contenues dans l'annexe A-I pour les collèges et A-II pour les commissions scolaires. Cela peut faire l'objet de stipulations négociées à l'échelle locale.

M. Clair: C'est exact.

M. Ryan: Et sans droit de grève.

M. Clair: Exactement.

M. Ryan: Là-dessus, nous trouvons que ces dispositions témoignent de l'incertitude dans laquelle a baigné la politique du gouvernement relative à ces choses jusqu'à un passé très très récent. L'exemple le plus éloquent que l'on puisse invoquer, c'est évidemment l'énergie qui a été dépensée par le ministre de l'Éducation et ses collaborateurs pour mettre au point une hypothèse de règlement autour du chapitre 8 de la convention collective des enseignants qui est peut-être et sûrement un des chapitres les plus importants de toute cette convention collective qui est présentement un décret plutôt qu'une convention. On avait élaboré une hypothèse de règlement à laquelle le ministre de l'Éducation, dont, entre parenthèses, je regrette l'absence à cette table... Cela fait deux ou trois fois que je remarque, dans l'étude de projets de loi qui affectent directement le ministre de l'Éducation, son absence à la table des délibérations de la commission parlementaire chargée d'étudier le projet de loi. Je le déplore vivement. Je pense que son devoir serait d'être ici avec nous parce que le président du Conseil du trésor, si averti soit-il, n'a pas reçu du premier ministre la responsabilité du secteur de l'Éducation et je trouve que cela serait bon qu'il soit ici, de même que les autres ministres concernés, et, au premier chef, le ministre des Affaires sociales parce que là, on tranche dans des choses qui les regardent et ils ne sont même

pas là. On a fait la même chose l'autre jour. On nous a présenté un projet de loi sur la création du ministère de l'Enseignement supérieur et, dans ce projet de loi, on sabrait dans les attributions du ministre de l'Éducation et il n'était même pas là pour se défendre. Je ne sais pas si c'est la règle qui a été établie dans le cabinet qu'on se laisse tondre sans dire un mot. Mais cela m'a étonné et frustré parce que j'aime bien la compagnie du ministre de l'Éducation qui est un homme très gentil en discussions.

Pour revenir à notre sujet, on avait élaboré une hypothèse de règlement qui était extrêmement importante et dans laquelle était contenu, notamment - cela s'en vient directement au sujet dont nous discutons, M. le Président, je ne veux pas que vous ayez d'inquiétude quant à la pertinence - on avait établi dans cette hypothèse de règlement qu'il y aurait quatre matières de base qui seraient l'objet de négociations à l'échelle locale: l'affectation et la mutation des enseignants, la répartition des fonctions et des responsabilités entre les enseignants d'une école, la distribution, dans l'année scolaire, des 200 jours de travail et, enfin, les modalités de distribution des 27 heures de travail de la semaine régulière. On ajoutait ceci, dans l'hypothèse de règlement: il s'agit d'une liste définitive dont le projet de loi sur la réforme du régime de négociation tiendrait compte. On ajoutait aussi que ces quatre objets seraient négociés dans le cadre de la loi 55. À compter du premier janvier 1986, la négociation s'engagerait et les résultats seraient applicables à compter de 1986-1987. Je passe sur le reste, nous y reviendrons lorsque nous traiterons de ces autres aspects qui sont traités dans la suite du texte.

Ceci, si je comprends bien, voulait dire que le ministre de l'Éducation, sur avis de ses conseillers, après des pourparlers prolongés avec la partie syndicale, avait décidé de recommander au gouvernement un régime de négociation qui aurait été sensiblement proche de celui que nous connaissons actuellement, c'est-à-dire qu'il y aurait eu négociation à l'échelle nationale comme principe de base. Ensuite, il y aurait eu quatre matières qui auraient été renvoyées obligatoirement à la négociation locale avec droit de grève. Ensuite, il y aurait eu la possibilité d'arrangements locaux qui serait demeurée dans le paysage sous l'empire des dispositions de la loi 55, comme nous la connaissons actuellement, qui aurait été reprise dans le projet de loi 37.

Le gouvernement a refusé cette proposition qui lui avait été faite après de nombreuses négociations, propositions qui auraient assuré la paix dans le secteur scolaire pendant une période de trois ans. Je trouve cela profondément déplorable. Je pense qu'on avait fait un bout de chemin énorme et, pour une symétrie dont nous recherchons en vain le secret, quand nous étudions le projet de loi actuel, on a laissé tomber un document, une hypothèse de règlement qui était le fruit de véritables -le ministre a refusé d'accepter le mot -négociations, à l'époque. Vous vous en souvenez, à l'époque, il avait dit qu'il y avait eu des conversations, mais pas de négociations. On lui avait laissé le choix du dictionnaire. S'il aimait mieux le Petit Robert plutôt que le Larousse, cela ne nous dérangeait pas. Ce qui nous intéressait...

Une voix: Nous autres, c'est le Petit René!

M. Ryan: Vous autres, c'est le Petit René! Ce qui nous intéressait, dis-je, c'était le produit de ces conversations qui était extrêmement encourageant et positif.

Alors, là, nous nous retrouvons à pied d'oeuvre. Plus rien n'est entendu, d'après ce que je comprends. Tout a été remis sur le métier. Ensuite, il a été question de faire une entente pour une période de trois ans sur certaines matières; ensuite, une entente pour une période d'une année. Nous ne savons pas où nous en sommes parce qu'il n'y a pas eu de communication livrée au public à ce sujet depuis que ces événements sont survenus.

Je vous préviens tout de suite de notre intention générale pour que vous sachiez où nous allons et, ensuite, nous pourrons revenir à la discussion sur l'article 44. Nous allons proposer des amendements à l'article 57 de manière à laisser tomber de l'article 57 certains passages qui modifient substantiellement la situation que nous avons actuellement. Nous demanderons de laisser tomber, si vous avez le texte de l'article 57, les mots: "à l'égard du personnel de soutien et du personnel professionnel non enseignant des commissions scolaires". Pour nous, l'article 57 se lirait comme suit: Dans le secteur des affaires sociales et dans le secteur de l'éducation, les matières sur lesquelles portent les stipulations négociées et agréées à l'échelle locale ou régionale sont celles que définissent les parties à l'occasion de la négociation des stipulations négociées et agréées à l'échelle nationale. Nous revenons, en somme, au texte de la loi 55 comme nous l'avons.

De plus, dans la même logique, nous demanderons que l'article 58 soit laissé de côté parce que l'article 58 est un prolongement de l'article 57. C'est l'article qui contient la liste des matières obligatoirement négociées sans droit de grève à l'échelon local. Nous demanderons enfin qu'à l'article 60 on écrive, au deuxième alinéa: Cette négociation ne peut toutefois donner lieu à un différend dans le secteur des affaires sociales, plutôt que de manière

générale. Vous comprendrez la portée exacte de ces modifications que nous proposerons tantôt, ceci pour vous dire que, grosso modo, nous envisageons dans le secteur de l'éducation la négociation comme suit: vous avez d'abord la négociation entre les parties au plan national. C'est la règle de base. Deuxièmement, si on avait accepté l'hypothèse de règlement du ministre de l'Éducation, on aurait inséré dans le texte de loi - nous aurions été tout à fait heureux de le faire - les quatre points qui auraient été l'objet obligatoire de négociations à l'échelle locale. On les aurait mis volontiers et, sur indication des parties, on aurait été très heureux d'en ajouter d'autres, mais on aurait au moins mis ces quatre points.

Je souligne que la Fédération des commissions scolaires catholiques et l'Association des commissions scolaires protestantes avaient donné leur aval à cette hypothèse de règlement. Je ne sais pas dans quel contexte exact elles l'avaient fait, mais ces deux fédérations de commissions scolaires avaient donné leur aval à cette hypothèse de règlement. Ce sont des faits récents qui témoignent que la négociation est une chose possible quand la volonté de négocier est présente.

Nous demanderons par conséquent la négociation entre les parties à l'échelle nationale et, deuxièmement, si le gouvernement est prêt à revenir sur la décision qu'il a prise il y a environ un mois et demi, l'inclusion de certaines matières qui seraient obligatoirement négociées à l'échelle locale, mais négociées véritablement, c'est-à-dire avec droit de grève. S'il n'y a pas de droit de grève, une négociation n'existe pas au sens véritable du terme. La seule raison qui peut justifier la suppression du droit de grève, à notre point de vue - c'est notre thèse générale - c'est une raison reliée directement à la santé publique ou à la sécurité publique.

Le Président (M. Blais):...

M. Ryan: Pardon?

Le Président (M. Blais):...

M. Ryan: Je regrette. Je ne puis souscrire à cette interprétation généreuse que propose le président. C'est notre position de fond. C'est pour cela que dans les établissements de santé nous avons une position claire et que nous ne cherchons pas à plaire à la partie syndicale. Nous savons que la partie syndicale ne veut pas l'accepter. Plutôt que d'essayer d'enrubanner cela dans 56 considérations pseudoscientifiques, nous disons carrément et franchement: Là-dedans, non decet, non decet, pas plus pour les policiers que pour les pompiers. C'est notre raisonnement sur la base de notre expérience.

C'est clair, c'est net, et on le dit franchement.

Le ministre nous dit que cela ne pourra pas marcher. Mais supprimer en réalité ou en apparence, je pense bien que cela va se retrouver en fin de compte. Des gens vont savoir qu'on ne leur permettra plus de faire la grève comme on en a vu depuis 25 ans. Au besoin, des procédures seront prises pour qu'on sache ce que le public pense là-dessus, mais il va falloir qu'on sache où se situe la responsabilité de prendre des décisions là-dedans. Il va falloir que cela soit clair. Cela a été une des grosses faiblesses ces dernières années.

Ici, nous disons: Dans le secteur de l'éducation, nous n'avons pas de raison de demander que soit supprimé le droit degrève. Je pense que la partie syndicale devra se rendre compte, d'autre part, et je l'ai dit à plusieurs reprises qu'elle ne pourra pas faire la grève indéfiniment dans ce secteur. Pas une société ne serait assez folle pour laisser ses écoles fermer par un conflit de travail pendant an. Si un conflit surgit, il faudra qu'il se règle par la négociation et, au bout d'un certain temps, la société se gardera toujours d'apprécier si le conflit a duré assez longtemps pour qu'il se règle autrement. Je ne veux pas enlever cette règle, mais comme principe de base... Troisièmement, la possibilité d'arrangements à l'échelle locale, sans droit de grève - on ne peut quand même pas multiplier cela à gauche et à droite simplement pour le plaisir de le faire - sur des matières qui auraient été convenues et agréées entre les deux parties. Je crois qu'on aurait un régime simple et clair, et on saurait où on s'en va.

Dans le domaine des établissements sociaux, je regrette que mon collègue de Brome-Missisquoi ne soit pas ici pour en parler, il sera probablement de retour ce soir...

Une voix:...

M. Ryan: Pardon? Non, je regrette qu'il ne soit pas ici pour en parler, mais je crois que ce qui est dans le projet de loi est plus acceptable, parce qu'on ne peut pas recommencer toutes les négociations au niveau de chaque établissement, cela n'a pas de bon sens. Qu'il y ait possibilité d'arrangements à ce niveau, cela ne crée pas de problème majeur en ce qui nous touche. (17 heures)

C'est la position que nous allons défendre en gros là-dessus et nous allons vous distribuer des projets d'amendements quand nous arriverons à chaque article. Je l'ai énoncé maintenant pour une raison assez simple. Dès l'article A4, on dit que "les stipulations négociées et agréées à l'échelle nationale portent sur toutes les matières que

contient la convention collective à l'exception des matières définies comme devant faire l'objet de stipulations négociées et agréées à l'échelle locale et régionale suivant les articles 57 et 58. " Il fallait par conséquent préciser la position qu'on tient sur les articles 57 et 58 et, pour nous autres, cela va être un peu embarrassant de voter là-dessus. Si vous nous demandez de le faire, nous le ferons. Nous voterons en réservant toujours cet espace relatif au contenu des articles 57 et 58. Il faudra qu'on sache ce qu'il y a dans les articles 57 et 58. S'il était pour y avoir des modifications aux articles 57 et 58, peut-être qu'on peut voter pour l'article 44 sans difficulté, mais, si c'est pour l'article 44 en fonction des articles 57 et 58 comme ils sont définis actuellement, je pense que notre position serait plutôt négative là-dessus parce que nous avons des objections majeures sur la formulation actuelle des articles 57 et 58.

Est-ce que j'ai été assez clair, M. le Président? Je me réserve de l'être davantage, mais je pense que le ministre m'a bien compris. Mes collègues de Rosemont et de Deux-Montagnes également, je pense bien.

Le Président (M. Blais): Alors, tout le monde trouve cela clair? L'article 44 est prêt à être voté?

Une voix: Accepté. Adopté.

M. Ryan: On est prêt à faire un vote global.

Le Président (M. Blais): Mais non! Vous êtes prêts à voter sur l'article 44? Tout est clair, m'a-t-on dit. Je le demande.

M. Paquette: La position du député d'Argenteuil est claire, je pense, assez claire. J'aimerais à mon tour, M. le Président, informer le ministre de l'approche générale que nous avons à toute cette section extrêmement importante du projet de loi qui vise - du moins, c'est l'objectif du ministre - à une décentralisation des négociations, à faire en sorte que le maximum de matières puissent être négociées. On peut se demander dans le projet de loi si elles peuvent être véritablement négociées. Sûrement pas. Nous, dans notre optique, c'est véritablement: négociées au niveau local et régional. Je dois vous dire au départ, M. le Président, que, dans le contexte général où arrive ce projet de loi, nous pensons que toute décentralisation, par ailleurs souhaitable, est probablement illusoire ou, du moins, très difficile dans la mesure où le secteur public est extrêmement centralisé, hypercentralisé, et où on se retrouve avec divers paliers ministériels, divers paliers de décision, avec des autorités déléguées, encadrées dans des règles budgétaires. Donc, de multiples paliers de responsabilité qui font en sorte que, indépendamment des négociations collectives, il y a un droit de gérance prévu dans les lois et un certain droit également de déléguer à travers de multiples paliers qui fait en sorte que, le système étant très centralisé, on aura beau essayer de coller un régime de négociation sur un système très centralisé, très bureaucratique, très hiérarchisé, on va atteindre très difficilement cet objectif premier de la décentralisation qui, est la personnalisation du travail et de la prestation des services dans les établissements publics, que ce soit dans le domaine de l'éducation ou des affaires sociales.

J'ai eu l'occasion, et je ne voudrais pas m'étendre longuement là-dessus, mais j'expliquais au ministre à une session précédente de nos travaux que, jadis, le système scolaire dans lequel j'ai vécu était extrêmement personnalisé. Il est arrivé, dans un collège d'enseignement général et professionnel où j'enseignais, que la direction, parce qu'elle avait la possibilité de te faire, se présentait au département et disait: Voilà l'ensemble des élèves et des cours que nous avons à dispenser. Voilà le nombre de professeurs que je peux mettre à la disposition du gouvernement et, à partir de là, vous allez vous organiser pour donner dans votre discipline que vous connaissez bien les meilleurs services possible. À ce moment-là, les professeurs du département se réunissaient, établissaient la répartition des tâches, décidaient des méthodes pédagogiques et pouvaient décider d'un partage de tâche inégal, pouvaient décider que certains professeurs allaient consacrer plus de temps, parce que tels étaient leurs capacités, leur intérêt, leur motivation, à la préparation d'instruments pédagogiques pendant que d'autres allaient assumer plus de temps en classe, sous forme d'animation pédagogique. Cela permettait toutes sortes d'adaptations et, en définitive, l'utilisation maximale des ressources humaines, une qualité de vie au travail accrue et de meilleurs services à la clientèle scolaire. Je pense que ce raisonnement vaut également pour les commissions scolaires et les établissements de santé, et que c'est très certainement une direction dans laquelle il faut aller, une direction de gestion participative dans le cadre de grandes balises qui assurent quand même une certaine équité de traitement d'un bout à l'autre de la province ou à l'intérieur d'une région, une certaine possibilité de personnaliser le travail, d'améliorer la qualité de vie au travail et la qualité de la prestation des services.

On est bien loin de cette gestion participative dans les établissements d'enseignement, M. le Président, ce qui fait en sorte que l'objectif de ce projet de loi

est forcément dévié, quand on décide d'une liste de matières, par exemple, à l'annexe A, dans le secteur des collèges ou dans celui des commissions scolaires, et qu'on dit: Voilà, cela va se - je pense qu'il ne faut pas employer le terme négocier, mais le terme discuter - cela va être discuté au niveau local et, quand il n'y aura pas entente, le statu quo aura priorité. Quand i! n'y aura pas entente, on pourra faire appel à un négociateur arbitre, mais il faudra que les deux parties soient d'accord pour lui confier le mandat et le rendre exécutoire.

Il faut comprendre, M. le Président, que l'article 57 en particulier est largement illusoire parce que, puisqu'il n'y aura pas de véritables négociations au niveau local, la tendance sera de décentraliser le moins de choses possible et d'en garder le maximum au palier central. La partie syndicale pourra se dire avec raison qu'au palier local, puisqu'il n'y a pas de véritables négociations et qu'en définitive, en cas de non-entente, le droit de gérance locale prévaudra, que, finalement, on va décentraliser très peu de choses.

À l'article 58, on impose un certain nombre de matières avec lesquelles les parties ne sont pas nécessairement d'accord. C'est la position du gouvernement qui dit que les matières qui sont là devraient être négociées au niveau local, qu'il n'y aura pas de droit de grève, qu'il y aura un mécanisme de médiateur arbitre et qu'en définitive le droit de gérance locale sera prépondérant. C'est sa position à lui.

Compte tenu de tout ce contexte, je me demande comment le ministre peut penser qu'il y aura une véritable décentralisation et jusqu'à quel point il estime que l'article 57 pourra véritablement avoir un effet quelconque sur la décentralisation. C'est la première question que je voulais lui poser.

La deuxième: Les matières établies à l'annexe A, jusqu'à quel point font-elles consensus de la part des parties et qu'est-ce qui amène le ministre à privilégier, surtout dans le contexte de la mécanique prévue au niveau local, cette annexe et à l'imposer, plutôt que de laisser cours à une véritable décentralisation agréée par les parties - je pense que c'est le mieux qu'on peut faire dans le contexte actuel - qui mène à de véritables négociations sur le plan local?

Donc, sur l'effet prévisible d'une décentralisation réelle, j'aimerais savoir ce qui a amené le ministre à adopter cette approche et, deuxièmement, comment il en est arrivé à la liste des sujets établis à l'annexe A.

M. Clair: Je commencerai par la dernière question. Les listes qui apparaissent en annexe ont été établies en concertation avec les ministres sectoriels concernés, leur ministère, les associations patronales et, dans une beaucoup moins grande mesure, en tenant compte des représentations qui avaient été faites par les associations de salariés. Sur des sujets qui ont déjà été négociés au niveau local, j'indique que ce n'est pas par mauvaise volonté que nous n'avons pas pu tenir compte davantage du point de vue syndical. Nous avions offert aux syndicats de se mettre à table avec leur ministre sectoriel pour arrêter les listes et, sauf erreur, il n'y a eu qu'au niveau du cégep, au niveau collégial, où un ou deux représentants syndicaux se sont présentés. Je dois dire qu'il y a eu d'autres propositions qui ont été faites par les représentants des associations de salariés des secteurs public et parapublic pour tenter de convenir d'autres règles, mais toujours est-il qu'il n'y a pas eu entente avec les syndicats sur ces listes. C'est dans cette mesure que nous avons tenté de tenir compte au maximum de leur avis, de ce qui s'était déjà négocié au niveau local, de l'opinion des ministres, des ministères, des associations patronales concernées.

C'est évident, M. le Président, que l'orientation est fort différente de celle qui existe actuellement. Qu'est-ce qui nous a amenés à choisir cette voie-là plutôt que toute autre? Je dirai au député, en caricaturant un peu, que le gouvernement considère qu'en ce qui concerne le droit de grève au niveau local cela n'est pas en mettant le droit de grève dans l'ascenseur, pour employer une expression qu'on a déjà utilisée dans d'autres circonstances, que l'on va modifier le climat, les approches, les traditions et les habitudes de négociation au Québec, que cela soit au niveau local, au niveau régional ou national. Le moment était venu d'expérimenter, de mettre de l'avant d'autres formules moins conflictuelles s'inspirant du concept de la décentralisation, de la négociation permanente, s'inspirant aussi de rapports moins conflictuels pour des objets importants, mais de portée limitée, jusqu'à un certain point, concernant principalement trois thèmes: les mouvements de personnel, l'organisation du travail et les droits syndicaux.

M. le Président, le député d'Argenteuil, le voisin de comté du député de Deux-Montagnes, a posé un certain nombre de questions concernant les explorations et l'hypothèse de règlement qui avait été développée par le ministère de l'Éducation, la fédération des commissions scolaires et la CEQ. Je dirai sur cette exploration, sur cette hypothèse de règlement que, par rapport au débat qu'on a eu tantôt en ce qui concerne les mandats du Conseil du trésor et du gouvernement, c'est certainement la preuve dans ce cas-là que, si cela a entraîné des déceptions légitimes, le genre d'exploration que l'on peut mener

occasionnellement peut parfois donner des résultats satisfaisants, mais que, dans la mesure où on agit sur des hypothèses de règlement, que des gens travaillent de bonne foi sur des hypothèses sans qu'il y ait un mandat bien arrêté, bien défini par le Conseil du trésor et, éventuellement, par le gouvernement quant aux matières les plus substantielles, on ne peut pas, effectivement - je suis d'accord avec le député - on aura beau utiliser diverses expressions, parler d'explorations, de discussions, de pourparlers, de toute espèce d'autres synonymes, il n'en demeure pas moins que, dans l'esprit des deux parties, elles en viennent à considérer que c'est, quant à chacune d'entre elles, de la négociation. Si on veut qu'une telle négociation soit aussi productive que possible, je pense qu'on voit là toute l'importance du Conseil du trésor, notamment, qui est le sous-comité le plus puissant du gouvernement, je le reconnais, qu'il soit... Il est préférable qu'il agisse avant, détermine des mandats et que le gouvernement soit lié à l'avance par ses porte-parole, en quelque sorte, plutôt que d'explorer et de connaître des déceptions.

Qu'est-ce qui a achoppé dans cette hypothèse de règlement? C'est essentiellement la question du droit de grève au niveau local et une autre question, soit l'ajout récurrent, permanent, devrais-je dire, de 200 postes dans l'enseignement primaire et secondaire pour régler ce qu'il est convenu d'appeler le problème du septième groupe. Pourquoi ne pas ajouter 200 postes permanents? La raison était fort simple. Le Conseil des ministres, de même que le Conseil du trésor, évaluait que d'autres moyens moins coûteux avaient été développés au comité mixte du ministère de l'Éducation sur la tâche et l'organisation du travail des enseignants, et que point n'était besoin d'injecter de façon permanente 200 postes pour régler cela. (17 h 15)

Deuxième raison, le droit de grève au niveau local sur un nombre limité de matières. Le Conseil des ministres a évalué plusieurs hypothèses de décentralisation. L'une d'entre elles était effectivement une décentralisation beaucoup plus poussée avec un droit de grève au niveau local dans tous les secteurs, que ce soit l'enseignement primaire, secondaire, collégial ou universitaire, qui l'ont déjà, ou le réseau de la santé. Finalement, le Conseil des ministres en est venu à la conclusion que, dans un premier temps, pour permettre aux parties de se réapproprier progressivement leurs responsabilités au niveau local, en matière de négociations, il était préférable de retenir les mécanismes proposés plutôt que de se contenter de mettre le droit de grève dans l'ascenseur et, encore là, sur quatre matières bien limitées et dans un seul secteur, de . l'enseignement primaire et secondaire. Il nous apparaissait qu'il y avait là un problème de cohérence avec les autres secteurs. Sans rechercher une symétrie théorique parfaite, il nous apparaissait que cela aurait été déséquilibré par rapport aux autres secteurs.

Deuxième chose, il aurait été très difficile, au niveau local, de départager les matières sur lesquelles il y aurait eu décentralisation avec droit de grève et d'autres sans droit de grève. L'hypothèse de règlement - j'ignore si c'était la dernière version écrite mais on m'a fait valoir que la dernière hypothèse prévoyait même la possibilité que ces quatre matières fassent l'objet d'un droit de grève une dernière fois, invoquant le droit de gérance, les décrets, etc., pour justifier l'exercice d'un dernier rapport de forces fondé sur le droit de grève comme mode de règlement du différend pour ces quatre matières.

Le Conseil des ministres s'est demandé comment départager les matières sur lesquelles on aurait le droit de grève et d'autres sur lesquelles on ne l'aurait pas. Serait-il écrit, d'un côté de la pancarte: Je suis en grève sur ces quatre matières. Sur les 17 autres, je ne suis pas d'accord, mais je ne suis pas en grève sur ces quatre matières? Ce qui revenait en substance à donner le droit de grève au niveau local, ce que le gouvernement rejetait comme hypothèse.

Troisièmement, le Conseil des ministres a considéré que, sur les matières en question, qu'elles aient été soumises à l'arbitrage, qu'elles aient fait l'objet du contenu de conventions collections déjà convenues et reconduites par la suite, dans l'ensemble, le contenu de base des conventions collectives actuelles, en garantissant le statu quo, protégeait les parties et les incitait à modifier de gré à gré, sans rapport de forces, donc sans droit de grève, les contenus et à les faire évoluer au fur et à mesure des besoins des deux parties. Dans ce sens, point n'était besoin d'accorder un droit de grève au niveau local.

Finalement, un autre argument. Le Conseil des ministres a considéré que, pour ces questions, il n'était pas nécessaire de disposer d'un arsenal aussi fort que le droit de grève pour convenir de matières qui concernent le vécu dans un établissement ou dans une institution. Par conséquent, il nous est apparu au Conseil des ministres que ce mécanisme de règlement des différends, fondé sur le droit de grève et de lock-out, constituait un arsenal trop lourd par rapport aux questions à débattre et que, s'il y avait une place où l'on pouvait introduire de nouvelles formules de règlement des différends, soit la formule du médiateur arbitre dont on parlera plus tard, c'était bien là l'endroit où l'introduire.

Je dirai également - on a parlé du

droit de gérance du côté du député de Rosemont - sans déformation professionnelle, puisque je n'ai jamais été ni d'un côté ni de l'autre dans ces négociations, je dois dire que je n'ai pas honte, quant à moi, de défendre occasionnellement, lorsque cela me semble raisonnable, le droit de gérance. Il me semble que, comme parlementaire, on n'a pas non plus à avoir honte du droit de gérance, que cela n'est pas en soi quelque chose de méchant, de malin, de suspect, de pas trop démocratique, de pas trop correct. Il me semble que cela n'est pas anormal que, tout autant, les parlementaires se préoccupent des droits des syndiqués, des travailleurs et travailleuses, et des droits de gérance de ceux qui ont quotidiennement à gérer ces établissements. Entre les deux, il y a toujours une ligne à tirer. Le gouvernement a tenté de la tirer de la façon la plus juste, la plus raisonnable, la plus honnête possible.

Le député d'Argenteuil nous indique que, quant à lui, il préférerait le statu quo. Ce qu'il propose s'approche beaucoup du statu quo. Quant à nous, il nous a semblé que, si nous voulions amorcer véritablement la décentralisation, l'expérience nous amenait à conclure qu'il fallait imposer une liste de sujets sur lesquels il y aurait négociation locale puisque, que l'on parle aux commissions scolaires, aux syndicats, que l'on parle è la Fédération des cégeps ou à d'autres, lorsqu'on parle de décentralisation, tout le monde est pour cela. C'est comme la vertu, c'est en quelque sorte une nouvelle mode. Mais quand on arrive pour demander à quelqu'un: Mets-moi la liste des sujets sur lesquels tu t'engages à être le grand défenseur, que cette liste soit décentralisée par convenance, là, la liste se met à raccourcir rapidement. C'était pour bien marquer la volonté du gouvernement qu'il y a une décentralisation progressive des négociations que de telles listes ont été annexées à la loi.

Je conclurai en disant que je n'ai aucunement mandat de la part du gouvernement de proposer des amendements qui iraient dans le sens proposé par le député d'Argenteuil.

Le Président (M. Lachance>. M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Juste une seconde, si vous me le permettez. Il faut que je prenne mes directives de mon collaborateur.

Le Président (M. Lachance): Je voudrais signaler aux membres de la commission un détail technique qui peut avoir son importance. C'est à l'article 36. Cela m'a été signalé par le secrétaire de la commission. Hier, le ministre avait manifesté son désir de déposer un amendement. Il l'a déposé effectivement, mais il n'a pas été adopté. Pour éviter toute ambiguïté...

M. Clair: Quel était-il?

Le Président (M. Lachance):... je lui demanderais d'indiquer qu'il le retire. Il était libellé comme suit: L'article 36 du projet de loi est modifié par l'insertion, à la deuxième ligne du deuxième alinéa, après le mot "composé", des mots "entre autres membres.

M. Clair: Oui, je le retire, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Alors, on considère que c'est retiré. Cela clarifie la situation. M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: M. le Président, tout d'abord, je voudrais signaler une manière de s'exprimer du ministre qui me paraît trahir une approche fort discutable de toutes les questions dont nous discutons. Je l'ai entendu dire à plusieurs reprises dans son intervention: On accorde le droit de grève... si on accorde le droit de grève. Il me semble que ce n'est pas la manière d'aborder ces questions. Je pense que la vraie situation, c'est que ce droit de grève existe indépendamment du bon plaisir du prince. C'est vous autres qui le retirez dans certains secteurs. Il existe dans nos lois actuellement et il a été mis dans nos lois parce qu'il existait dans la réalité et qu'on voulait qu'il existe, qu'on trouvait que c'était un corollaire indispensable de la liberté de négociation. Quand vous dites: On l'accorde et on ne l'accorde pas, je n'aime pas trop cette approche. Je pense que vous allez la corriger vous-même en y pensant. Le problème, c'est ceci: Vous le retirez en ce qui touche la négociation sur le plan local. Le système actuel - et pour qu'on se comprenne très bien, je reste dans le secteur de l'éducation où, à mon point de vue, se posent les difficultés les plus considérables en rapport avec le projet de loi 37, à ce point-ci de notre examen - suivant la loi actuelle, cela se passe comme ceci: on négocie sur le plan national, les parties conviennent ensuite d'une série de sujets qui seront l'objet de négociation sur le plan local. Les négociations ont lieu sur le plan local assorties du droit de grève ou de lockout. Le gouvernement nous dit: On ne veut pas de cela. Il nous dit: II faut qu'on négocie véritablement sur le plan local; on va leur montrer comment faire cela nous autres. Il y a une chose, il faudrait que vous fassiez la preuve qu'il n'y a pas eu de négociations sur le plan local, depuis vingt ans.

M. Clair: Je n'ai absolument pas dit cela, M. le Président. J'ai dit le contraire plutôt. J'ai dit qu'il y avait, dans le domaine

de l'enseignement primaire et secondaire, dans les commissions scolaires, tant catholiques que protestantes, une tradition de négociations locales. C'est la raison pour laquelle on peut diverger quant à la façon de le faire. Le député conviendra sûrement avec moi que le dispositif prévu va plus loin dans le cas de l'enseignement primaire, secondaire et collégial que dans le cas des affaires sociales.

M. Ryan: Oui, il va... On pourra en reparler. On emploie un autre vocabulaire, mais est-ce que, dans la réalité, cela va être tellement différent? Cela reste à voir. J'en reviens à mon point de fond. Depuis, disons, vingt ans, cela a commencé. Je pense que la première négociation à l'échelle nationale a eu lieu vers 1966 ou 1967. Depuis ce temps, on a eu un régime en vertu duquel certaines clauses étaient négociées sur le plan national et d'autres sur le plan local. Il y en a eu beaucoup, par conséquent. Si on calcule qu'on a à peu près 255 commissions scolaires, il y en a eu beaucoup. Je ne sais pas si le ministre aurait un dossier à présenter de toutes les matières qui ont déjà fait l'objet de négociations sur le plan local. En tout cas, il y avait un grand nombre de sujets qu'on renvoyait sur le plan local. On disait: Très bien, on va y aller. Avec les décrets, cela a changé; cela a été des arrangements qui pouvaient être aménagés sur le plan local. Il n'était plus question de négociations. Il n'en était pas davantage question sur le plan national. Il y avait une certaine logique dans la position du gouvernement.

Mon point est le suivant: avant de consentir, c'est vous autres qui avez le fardeau de la preuve. C'est vous autres qui changez des choses dans le régime. Il faut que vous nous apportiez une preuve solide justifiant ce changement que vous voulez effectuer. Dans ce qui a été dit jusqu'à maintenant, je n'ai pas trouvé cette preuve. Je vais vous donner des éléments de réflexion qui m'ont inspiré dans la position que je décris au nom de notre groupe parlementaire en ce qui touche le secteur de l'éducation, encore une fois. Là, on a eu beaucoup de négociations. Disons qu'on a eu au moins trois, quatre rondes de négociations. Sur le plan local, quand on pense à 255 commissions scolaires du coup; c'est énorme. II n'y en a pas eu partout, mais disons qu'il y en a eu dans la majorité des commissions scolaires. Combien a-t-on eu de conflits pendant tout ce temps?

On me signale que, à la suite de la ronde de négociations de 1976, il y a eu une grève d'à peu près 25 à 30 jours à la commission scolaire Jérôme-Le Royer, il y a eu une grève à la commission scolaire des Milles-Îles et une autre dans une commission scolaire de la région de Québec. Trois conflits pour 255 commissions scolaires qui ont été engagées dans les négociations sur le plan local, d'une durée qui a été assez longue dans un cas, soit Jérôme-Le Royer, de 25 à 30 jours. Pour les deux autres cas, je pense que cela a été un peu moins long. Je n'ai pas les données précises; vos collaborateurs les ont sans doute.

En 1979, il y a eu trois conflits. Il y a eu le conflit à la commission scolaire des Vieilles-Forges, il y a eu le conflit à la CECM et il y a eu un conflit à la commission scolaire Carignan - je pense que c'est dans la région de Sorel. Le conflit de la CECM a duré, à notre souvenance, à peu près une dizaine de jours. Il est arrivé qu'à ce moment-là - c'était l'époque où le gouvernement couchait plus facilement avec la partie syndicale - je crois que, à l'instigation de la partie syndicale, il a mis la commission des écoles catholiques en tutelle. Vous vous souvenez tous de la tutelle qui est arrivée inopinément.

M. Clair: Je me souviens; j'ai accompagné le tuteur jusqu'à Montréal.

M. Ryans Oui, mais le conflit s'est réglé dans une dizaine de jours.

M. Clair: Par un concours de circonstances. (17 h 30)

M. Ryan: Je n'ai pas les chiffres quant à la durée du conflit à Carignan. Vous pourrez me les donner tantôt, cela m'intéressera. À la commission scolaire des Vieilles-Forges, le conflit a duré quatre mois. Au terme de cette période, le gouvernement a déposé un projet de loi à l'Assemblée nationale, que nous avons adopté rapidement dans ce cas, parce que je pense que tout le monde était d'accord. U fallait mettre un terme à ce conflit. Je me souviens qu'à l'occasion j'étais intervenu dans le débat et que j'avais dit: II va falloir qu'on se rende compte de part et d'autre qu'au bout d'un certain temps une grève ne peut pas durer indéfiniment dans ce secteur. Mais je regarde le bilan, pour une période que j'ai examinée de plus de dix ans au cours de laquelle il y a eu trois rondes de négociations...

Le Président (M. Lachance): Est-ce que je peux avoir à ce moment-ci, M. le député d'Argenteuil, le consentement des membres de la commission pour que le député d'Argenteuil puisse poursuivre?

M. Ryan: Cela ne fait pas déjà 20 minutes?

Le Président (M. Lachance): Le temps passe vite, M. le député.

M. Laplante: Cela fait plus que ça.

M. Clair: Cela passe si vite!

M. Ryan: C'est une matière tellement riche sur laquelle on nous a tellement peu informés. Avant de faire tous les changements proposés, il faut bien examiner le dossier solidement. Je vous remercie. J'apprécie énormément le consentement que vous me donnez, M. le député de Bourassa.

M. Laplante: Ce n'est pas un consentement illimité.

M. Ryan: C'est bien conforme à votre hospitalité intellectuelle coutumière. On l'apprécie toujours. Ce ne sera pas long.

Ici, je disais - c'est parce que cela touche au fond, cela embrasse plusieurs articles en même temps... Ce ne sont pas des plaisanteries qu'on fait. C'est une position de fond. Moi, c'est le bilan que j'ai. Je me dis que, devant un bilan comme celui-là, comme législateurs, est-ce que nous avons le droit de souscrire, sans autre examen, au changement radical que nous propose le gouvernement et qui s'accompagne, finalement, d'une amputation de la négociation collective dans un de ses volets essentiels? Je dis non. Je dis qu'il incombe au gouvernement de nous faire la preuve que, vraiment, cela a tellement mal marché dans ce secteur qu'il faut changer. Je trouve que l'équilibre que nous avons actuellement entre les négociations nationales avec droit de grève, les négociations locales... Le droit de grève sur le plan national, nous sommes d'accord des deux côtés qu'en matière salariale, il ne pourra pas s'exercer au complet. On ne peut pas jouer avecla collectivité indéfiniment. On ne peut pas dire à un groupe de citoyens qui représentent, par exemple, 15 % ou 20 % de la main-d'oeuvre, en tout et partout: Vous allez pouvoir tenir un revolver sur la tempe de cette société à votre guise. On va être là et on ne pourra pas se défendre. Je pense qu'étant donné la période de ressources très limitées dans laquelle nous sommes entrés, il y a certains exercices qui deviennent plus futiles qu'ils n'ont pu paraître à d'autres époques. De ce côté-là, il y a des éléments dans la politique de notre parti, dans celle du gouvernement, d'ailleurs, qui se rejoignent, même si elles divergent à certains points de vue, parce qu'il y a un accord là-dessus qu'on ne peut pas jouer avec cela comme si on jouait avec l'avenir d'une entreprise à côté de laquelle 150 autres peuvent fournir le même service à la population.

Dans ce cas-ci, c'est une situation entièrement différente, mais, je trouve que cet équilibre qu'on a, négociations nationales, d'autres négociations s'en vont sur le plan local sur des sujets qui sont de portée beaucoup plus limitée, dont la liste sera évidemment aussi limitée, je crois que c'est un équilibre qui n'est pas mauvais. Il serait préférable de ne pas jouer avec cela actuellement. Il serait préférable en face de cet équilibre d'avoir une attitude que j'appellerais sainement conservatrice. On a un actif. Cela dépend du jugement qu'on porte. On peut porter un jugement négatif et dire: C'est un passif. On peut porter un jugement positif et dires C'est un actif, imparfait sans doute, qu'il faut améliorer, mais on va bâtir là-dessus plutôt que d'essayer de défaire cela et de bâtir un château de cartes à côté. C'est la position de fond que nous essayons de faire comprendre et apprécier au gouvernement à l'occasion de notre débat, et c'est pour cela que nous avons conçu des propositions de modification que nous déposerons plus tard. Encore une fois, j'aimerais que le ministre, avec l'aide de ses collaborateurs, au besoin, fournisse un dossier solide, un dossier des faits, un dossier d'analyses de situations concrètes qui justifieraient le recours à des changements aussi radicaux que celui qui est proposé et qui altère tout notre régime de négociation dans le secteur scolaire.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Clair: M. le Président, en ce qui concerne les faits, le nombre de commissions scolaires locales, je souligne que, dans les cas que le député d'Argenteuil a mentionnés, quand on parle, par exemple, de la CECM, on ne parle pas tout à fait de la plus petite commission scolaire; quand on parle de Carignan non plus. On parle de commissions scolaires régionales qui concernent un grand nombre d'étudiants. Cependant, je partage à peu près - je n'ai pas un dossier complet avec moi sur les faits des négociations de 1976, 1979 et 1982... J'ajouterai simplement qu'il faut considérer aussi, même si l'impact est moins important que dans le cas du réseau de la santé, qu'il y a également le phénomène de la grève appréhendée et la longueur des négociations au niveau local qui ont prévalu dans certaines commissions scolaires où, sauf erreur, dans certains cas, il n'y a même pas eu de signature avant l'échéance de la convention collective.

Ce que je veux indiquer au député d'Argenteuil, c'est que, sur ce bilan, lui, de son côté, considère que c'est un actif. Nous, nous considérons plutôt, même s'il ne s'agit pas du plus important passif de notre régime de négociation, que c'en est un. Nous avons voulu, au niveau local, nous orienter vers un concept de négociations permanentes. J'aimerais que le député m'écoute. Il m'écoute sûrement en même temps. Au niveau local, l'orientation fondamentale du gouvernement est d'aller vers la négociation permanente. Dans ce sens, nous avons considéré - je ne sais pas si le député

d'Argenteuil sera d'accord avec cela - nous avons décidé d'exclure la possibilité d'un droit de grève permanent. Si nous avions voulu introduire, en retenant le mécanisme actuel de règlement des différends, la négociation permanente, cela aurait conduit à un droit de grève permanent, ce qui a été une hypothèse rejetée. Une fois cette orientation prise, nous avons tenté de trouver d'autres mécanismes qui permettraient aux parties d'évoluer dans le cadre de la négociation permanente, sans droit de grève permanent et avec une très forte incitation pour les deux parties à s'entendre. Nous avons retenu la formule du médiateur arbitre.

Nous considérons que, dans tous les conflits locaux - là-dessus, on peut considérer ce qui s'est passé dans certaines commissions scolaires, ce qui s'est passé à Saint-Ferdinand d'Halifax, dans un autre réseau, ce qui se passe présentement à Marine Industries - ceux-ci ont tendance à remonter très rapidement au niveau national.

Cela n'est pas parce que c'est une commission scolaire moins importante que la CECM qui subit une grève ou un lock-out, où les services sont interrompus, que l'enjeu n'est pas aussi important pour ces gens-là. Vous vous souviendrez sûrement du fameux débat sur une loi spéciale concernant la CTCUM et la CTCUQ et des arguments que, de part et d'autre, les gens ont fait valoir. Mais toujours est-il que les conflits locaux ont - et c'est une tendance lourde de nos relations du travail au cours des 20 dernières années - de plus en plus tendance à remonter au niveau national. Nous avons considéré, dans ce sens, qu'il fallait responsabiliser davantage les parties sans créer, par le mécanisme de règlement des différends, une pression telle dans l'opinion publique que, rapidement, le gouvernement se saisisse du dossier ou encore qu'on demande au gouvernement de se saisir du dossier.

Deux autres considérations nous ont amenés à prendre la décision qui est reproduite dans les articles du projet de loi. Il nous semble tomber sous le sens commun que, pour ces matières qui ont été négociées, arbitrées, renégociées, reparaphées, après 20 ans de négociations dans le secteur des affaires sociales et, en particulier, de l'éducation, cela n'était pas nécessaire de recommencer à zéro chaque fois, de faire table rase de tout le contenu qui a été négocié et de dire: On repart à zéro sans que rien de ce qui existe comme conditions qui, finalement, sont acceptables grosso modo, pour les deux parties, soit assuré quant à sa pérennité. C'était une considération importante. Cela nous semble tomber sous le sens commun que ce n'est pas nécessaire de recommencer à zéro chaque fois. Cela nous a conduits à amener la garantie du statu quo pour les deux parties, étant convaincus que, dans l'ensemble, ce contenu est vivable et viable pour les deux parties et qu'elles auront mutuellement intérêt à faire des concessions pour le faire évoluer. Ce n'est pas vrai que les patrons, par exemple, du secteur de l'éducation pourront, surtout par les nouvelles lois 3 et 29... Ce n'est pas vrai que les patrons auront avantage à s'asseoir indéfiniment sur le statu quo et que tout le contenu de ces matières sera du droit de gérance pur et simple. Les deux parties seront incitées à se faire des concessions, des compromis réciproques en dehors d'un rapport de forces, en dehors de relations du travail conflictuelles. Il nous semble que cette avenue est porteuse d'avenir.

Finalement, une des considérations qui a aussi retenu l'attention du Conseil des ministres a été les attentes des salariés eux-mêmes. Il suffit de discuter avec bon nombre d'entre eux, au-delà des structures syndicales, contre lesquelles je n'ai rien... À l'occasion, ce n'est pas mauvais de tester un peu notre point de vue et celui de nos vis-à-vis en discutant à gauche et à droite avec des gens qui sont impliqués tous les jours. Le concept d'une négociation permanente, en dehors d'un rapport de forces, sur la base d'une formule de 'médiateur arbitre, sans droit de grève, reçoit l'adhésion d'un beaucoup plus grand nombre de personnes qu'on peut le penser au premier abord. D'ailleurs, je ne l'ai pas avec moi, mais j'ai déjà eu l'occasion de déposer à la commission, au moment de l'étude des crédits de mon ministère, du secrétariat du Conseil du trésor, les résultats d'un sondage qui démontraient nettement que tout autant les salariés consultés dans le cadre de ces sondages scientifiques favorisaient la décentralisation, considéraient que notre régime de négociation était trop centralisé, tout autant une majorité d'entre eux - est-ce qu'on a les chiffres? - une pluralité d'entre eux était d'accord avec une approche de négociation permanente au niveau local, formule de médiateur arbitre, sans droit de grève.

Je sais que cela a un poids très relatif, il s'agit d'un sondage scientifique, quand même seulement d'un sondage, mais il nous semble que c'est là une voie d'avenir. Ce n'est pas vrai qu'on a besoin, pour régler le moindre problème dans nos relations du travail, d'un arsenal lourd de part et d'autre et qu'à chaque négociation on doive recommencer table rase, à zéro, comme si tout ce qui avait été fait précédemment avait à être remis en cause en entier. Ce sont ces principes qui nous ont guidés, ces considérations qui nous ont guidés dans le choix des mécanismes que nous avons retenus et qui sont reproduits dans le projet de loi.

Le Président (M. Lachance): M. le

député de Rosemont.

M. Paquette: Oui, M. le Président. D'abord, je dois constater, en tout cas, dans le secteur de l'éducation, que le député d'Argenteuil semble avoir une approche beaucoup plus près de la nôtre que celle du ministre dans son projet de loi. Je n'en dirais pas autant dans le secteur des affaires sociales parce que là, évidemment, la position du Parti libéral est l'élimination du droit de grève. Nous, nous pensons que c'est une fausse solution. Dans le domaine de l'éducation, il m'est difficile d'être en désaccord avec le député d'Argenteuii qui, contrairement au ministre, ne semble pas craindre l'exercice du rapport de forces.

Je partage cette philosophie que notre système scolaire, lorsqu'on parle de négociations locales, peut évoluer avec davantage de garanties de qualité de vie au travail et de qualité des services à la population dans un contexte de rapport de forces que dans un contexte où la règle générale est le droit de gérance. Le ministre, tout à l'heure, a dit: II ne faut pas penser que le droit de gérance est un concept qu'il faut combattre, et tout cela. Je veux bien, je pense qu'à un moment donné il faut qu'il y ait des responsabilités qui soient attribuées dans la société. Le problème n'est pas là. Lorsque j'évoquais le droit de gérance, c'est que règle générale le droit de gérance s'applique. Là, le ministre nous dit: On va mettre un certain nombre de sujets dans l'annexe A qui seront obligatoirement discutés localement dans un contexte où il n'y a pas de droit de grève, où il y a un mécanisme de médiateur arbitre, et, s'il n'y a pas entente entre les parties, on se retrouve essentiellement avec le statu quo. (17 h 45)

II affirme que les deux parties auront intérêt, dans un tel contexte, à se faire mutuellement des concessions. Je ne le pense pas, M. le Président, car la règle générale étant qu'en l'absence d'adhésion des deux parties, c'est la situation précédente qui prévaut et que dans toutes les questions qui ne sont pas discutées, de toute façon, le droit de gérance prévaut. Je pense que le ministre, par son projet de loi, vient de déséquilibrer complètement le rapport de forces au niveau local, ce qui fait qu'au niveau national on va avoir tendance à décentraliser le moins de choses possible et que dans le cas des matières prévues à l'annexe A, on va complètement faire basculer le rapport de forces du côté de la partie patronale.

Or, malgré les effets désagréables de certaines formes d'exercice du rapport de forces qui ont mené à des conflits, on constate que ces conflits ne sont pas si nombreux et, à mon avis, cela ne vaut pas la peine de se priver de l'apport des travailleurs et des travailleuses syndiqués, particulièrement dans les institutions d'enseignement qui peuvent, par le biais de la négociation locale, confronter leur conception de l'organisation de la vie au travail et des services qui sont offerts aux diverses clientèles avec celle des patrons, des administrateurs au niveau local dans une optique d'égalité. Ces deux points de vue peuvent être confrontés sainement, sans que l'un ait le pouvoir de renvoyer l'autre partie au statu quo ante ou à l'exercice régulier, qui est le régime normal, de son droit de gérance.

M. le Président, je pense que le rapport de forces est quelque chose de sain dans notre société et que le ministre a tort de le supprimer. On aura l'occasion d'y revenir un peu plus loin, mais juste pour donner un exemple, à l'annexe A, le ministre a prévu qu'au niveau local, sans droit de grève permanent, comme il l'indique, on aura à décider des mouvements de personnel, de l'organisation du travail, des droits syndicaux.

Je prends l'exemple des droits syndicaux, qui m'apparaît particulièrement évident. Cela veut dire qu'au niveau local on ne pourra modifier le régime de droits syndicaux sans qu'il y ait exercice d'un rapport de forces. Cela veut dire que le rapport de forces va être, comme c'est la règle normale, du côté des administrateurs. Je trouve cela un petit peu embêtant, pour ne pas dire totalement inacceptable, que le ministre, notamment en ce qui concerne les droits syndicaux, mais aussi divers aspects de l'organisation du travail, supprime - c'est là où le bât blesse - le droit de grève au niveau local, particulièrement dans le secteur de l'éducation.

Je pense que le ministre et le gouvernement en général se sont peut-être trop laissés influencer par un phénomène qui est réel dans la population, qui est une certaine exaspération face à l'exercice du droit de grève et, disons-le franchement, un certain sentiment antisyndical. Je n'accuserai pas le ministre de partager de telles intentions, mais son projet de loi en est imprégné d'un bout à l'autre et nous allons nous priver de l'apport d'un syndicalisme responsable, nous allons nous priver de l'apport des travailleurs et des travailleuses dans l'organisation des services scolaires qui ne pourront plus exercer le rapport de forces et corriger des situations qui sont très souvent intenables, néfastes pour les services à la population, pour ce qui est du fonctionnement concret des institutions.

M. le Président, j'aimerais proposer, à l'article 44, un amendement. Je pense qu'il va aller dans le sens de ce que le député d'Argenteuil proposait tout à l'heure. Je pense que, dès l'article 44, il faut commencer à imprégner, si possible, un

nouvel esprit à ce projet de loi. Je proposerais au ministre de remplacer, à la troisième ligne du premier alinéa, le mot "définies" par les mots "convenues entre les parties".

M. le Président, je pense que cela fait en sorte qu'on s'assurera que les questions qui seront renvoyées au niveau local, compte tenu du mécanisme que le ministre maintient... Si le ministre nous avait indiqué qu'il avait l'intention de modifier les mécanismes et de restaurer le droit de grève au niveau local, l'attitude aurait pu être différente, cela aurait atténué le problème. Mais là, compte tenu qu'il ne souhaite pas, semble-t-il, modifier ces dispositions, nous aimerions que les matières devant faire l'objet de stipulations négociées et agréées à l'échelle locale ou régionale, suivant les articles 57 et 58, ne soient pas définies dans le projet de loi, mais convenues entre les parties. Il y a un amendement aussi de concordance. Comme le député d'Argenteuil a souligné son intention de biffer l'article 58 un peu plus loin et je suis d'accord avec cette optique, il faudrait enlever les mots "et 58", toujours dans le premier alinéa.

Le Président (M. Lachance): Est-ce qu'il y a des interventions sur la recevabilité? La motion d'amendement du député de Rosemont est recevable.

M. Pagé: Le ministre semble impatient de le recevoir.

M. Clair: Je ne m'y attendais pas du tout, c'est une surprise totale.

Le Président (M. Lachance): À l'article 44, la motion d'amendement du député de Rosemont est la suivante: Remplacer, à la troisième ligne du premier alinéa, le mot "définies" par les mots "convenues entre les parties"; deuxièmement, biffer, à la cinquième ligne du premier alinéa, les mots "et 58".

M. Clair: Est-ce que vous avez déclaré l'amendement recevable, M. le Président?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Lachance): J'ai demandé s'il y avait des commentaires à faire sur la recevabilité. Par la suite, j'ai déclaré l'amendement recevable.

M- Clair: De sorte qu'il serait trop tard pour moi, de plaider contre la recevabilité.

Le Président (M. Lachance): J'en doute.

M. Pagé: Cela va être moins long.

M. Paquette: M. le Président, de consentement, je suis bien prêt à entendre le ministre plaider sur la recevabilité.

M. Clair: Je pense, M. le Président, que l'un des principes fondamentaux du projet de loi, c'est, effectivement, la décentralisation sans droit de grève, avec une liste limitée de sujets. C'est l'un des principes. Chacun peut avoir son évaluation, être pour ou contre. Mais c'est sans doute l'un des principes fondamentaux de ce projet de loi: décentralisation de matières obligatoires sans droit de grève, avec formule de médiateur arbitre. Le projet de loi ayant été adopté en deuxième lecture par l'Assemblée nationale, je soutiens humblement qu'une interprétation valable du règlement et du contenu de la loi pourrait certainement vous amener à conclure que cet amendement, qui modifie en apparence seulement un mot, par "négociées ou convenues", qui ont le même sens, réintroduirait le droit de grève, éliminerait la liste des matières décentralisées obligatoires et par là viendrait modifier l'un des principes fondamentaux du projet de loi. Je le soumets à votre appréciation et je me rendrai à votre décision.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Rosemont, sur la recevabilité.

M. Paquette: M. le Président, sur la recevabilité, si, chaque fois qu'on travaille les modalités, le ministre évoque que le principe a été adopté à l'Assemblée nationale...

M. Clair: Vous disiez vous-même tantôt que c'était une question très importante.

M. Paquette: C'est une question très importante, effectivement...

M. Clair: Ne venez pas dire maintenant que c'est une modalité.

M. Paquette: Si le ministre veut me laisser compléter... Il est exact que l'un des principes fondamentaux du projet de loi est de favoriser la centralisation. Or, je soutiens que le fait que le ministre impose un certain nombre de questions sans droit de grève et stipule dans d'autres articles qu'on pourra, par la suite, déléguer d'autres questions sans qu'il y ait de droit de grève au niveau local ne favorise aucunement la décentralisation. Cela favorise le blocage, le statu quo, l'"inexercice" du rapport de forces. Je ne pense pas qu'être en désaccord avec les modalités que propose le ministre, c'est d'être en désaccord avec le principe de favoriser la décentralisation.

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Argenteuil, sur la recevabilité.

M. Ryan: Oui. Étant donné qu'il est 17 h 55 et qu'on vous saisit d'une question qui a des implications assez considérables, je me demande si ce ne serait pas une bonne chose de vous suggérer de faire des consultations qui peuvent vous apparaître opportunes et de nous soumettre une décision écrite ce soir au début de la séance. C'est le genre de difficulté que nous sommes susceptibles de rencontrer de nouveau dans l'examen des articles qui viennent après celui que nous étudions, après l'article 44. Je pense que cela nous mettrait tous sur un terrain plus sûr. Je ne veux pas du tout mettre en doute votre autorité. Si vous rendiez une décision maintenant, je serais le premier à l'accepter, comme vous le savez.

Je voudrais simplement vous mettre en garde contre l'interprétation que vous propose le ministre parce qu'en même temps que le ministre parlait à l'appui de sa demande, j'exminais les notes explicatives qui ont été rédigées par le gouvernement pour aider à comprendre les buts du projet de loi. Ce projet a principalement pour objet... L'un des objets est de déterminer des matières susceptibles de faire l'objet de négociations à l'échelle régionale et des matières pouvant faire l'objet d'arrangements locaux. Nous sommes d'accord. C'est un des objectifs généraux du projet de loi. Maintenant, on peut le réaliser de bien des manières. On peut bien établir que certaines matières seront négociées à l'échelle locale suivant telle et telle modalité, suivant tel et tel cheminement, suivant un autre type de modalité qui conviendra davantage au gouvernement qu'à l'Opposition, ou vice versa, je ne pense pas qu'on soit, dans le domaine des principes, dans un domaine où aucun amendement ne saurait être jugé recevable, aucun amendement du type de celui qui est proposé. Maintenant, c'est un point de vue que je vous soumets avec toute la considération nécessaire pour votre autorité et la décision qu'il vous incombe de rendre en cette affaire.

M. Clair: Rien, c'est une blague.

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Argenteuil, je vous remercie de votre suggestion. Je me rends à cette suggestion et, effectivement, je crois qu'il y aurait lieu...

M. Clair: Je voulais simplement intervenir, M. le Président, un peu dans le même sens que le député d'Argenteuil et sans vous demander nécessairement de décision écrite. Le député d'Argenteuil a eu la gentillesse de me remettre les amendements qu'il entend proposer dans ce chapitre. Je pense que ce serait bon que vous en preniez connaissance, s'il avait l'amabilité de vous en remettre également une copie. Cela pourrait faciliter vos décisions à venir dans d'autres cas. Dans vos considérations, je souligne que, si vous vous inspirez des notes explicatives, sans doute pourrez-vous tenir compte du paragraphe 3 des notes explicatives: Ce projet a principalement pour objet de, troisièmement, qui traite de cette question, mais sans doute aussi du deuxième alinéa de la deuxième page des notes explicatives qui décrit assez substantiellement l'ensemble de la problématique proposée par le projet de loi concernant la décentralisation, la formule de médiateur arbitre et l'absence de droit de grève. De la même façon, je me soumettrai sans hésiter à votre décision.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Rosemont.

M. Paquette: J'aimerais simplement, à la suite de la remarque du ministre, dans votre réflexion, vous indiquer qu'il serait faux de fonder votre décision sur l'ensemble des notes explicatives, puisqu'il suffirait à un ministre parrain d'un projet de loi, d'allonger les notes explicatives de façon à élargir indûment le principe d'un projet de loi ce qui bloquerait toute discussion possible au niveau de l'étude article par article. Je pense qu'il faudrait se fonder bien davantage sur le début des notes explicatives que sur les paragraphes qui suivent, qui viennent détailler et amplifier, où on commence à entrer dans les modalités.

M. Clair: Je suis assez d'accord avec le député de Rosemont, mais, dans la mesure où vous tiendriez compte, pour votre prise de décision, des notes explicatives, je constate simplement qu'elles sont plus longues que les deux ou trois lignes que le député d'Argenteuil a lues.

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le député d'Argenteuil.

M. Laplante: On va tous vous donner des conseils.

M. Ryan: M. le Président, juste un point pour vous informer que, tout à l'heure, par esprit de courtoisie, j'ai communiqué au ministre ainsi qu'à mes collègues, les députés de Rosemont et de Deux-Montagnes, le texte d'un certain nombre d'amendements que nous allons déposer en temps et lieu sur certains articles qui viendront, les articles 57, 58 et 60. J'aimerais mieux ne pas vous les communiquer maintenant pour ne vous embarrasser d'aucune manière, étant donné que vous êtes l'arbitre impartial et désintéressé de nos débats, et que c'est toujours préférable, pour le bon exercice de vos fonctions, que vous ne soyez pas mêlé aux gestes de nature plus politique qui

peuvent se dérouler ici, même quand ils sont empreints de courtoisie, comme l'Opposition en est capable.

Le Président (M. Lachance): Je tiendrai compte de vos propos judicieux, M. le député d'Argenteuil. Effectivement, on va prendre cette décision en délibéré. Comme il est 18 heures, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 2)

(Reprise à 20 h 15)

Le Président (M. Lachance): La commission du budget et de l'administration poursuit ses travaux avec le mandat de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 37, Loi sur le régime de négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic.

Nous en étions à l'article 44; un amendement avait été proposé par le député de Rosemont. Je me suis rendu à la suggestion du député d'Argenteuil de réexaminer la recevabilité de l'amendement. Je suis très conscient qu'avant de rendre la décision, puisque je suis prêt à la rendre, cette décision...

M. Pagé:... fera jurisprudence.

Le Président (M. Lachance):... n'aura pas de conséquence historique.

M. Pagé: En raison de son contenu ou parce qu'elle est rendue par vous?

Le Président (M. Lachance): Certainement en raison de son contenu. Je n'ai pas l'intention de faire référence à de savants experts dans le domaine, tels...

M. Clair:... le député de...

Le Président (M. Lachance):... MM. Erskine May, Beauchesne et compagnie.

M. Paquette: Ah! Quelle érudition!

Le Président (M. Lachance): L'un des principes fondamentaux du projet de loi 37 est d'assurer la décentralisation des négociations. Or, biffer l'article 58, tel que c'est dit dans la deuxième partie de l'amendement du député de Rosemont, viendrait modifier substantiellement l'un des objectifs de base du projet de loi. L'article 244 de nos règles de procédure se lit comme suit: "La commission saisie étudie chaque article du projet de loi et les débats portent sur les détails du projet. Les amendements doivent se rapporter à son objet et être conformes à son esprit et à la fin qu'il vise. " J'insiste particulièrement sur "son esprit". Tel que présentée dans son ensemble, à cause de la deuxième partie de la motion du député de Rosemont, je dois donc juger la motion irrecevable. Cependant, je puis me permettre de faire une suggestion: Si le député veut représenter cette motion d'amendement...

Une voix:... la scinder...

Le Président (M. Lachance): Oui, en la scindant, à ce moment-là, la première partie pourra être...

M. Laplante: N'allez pas trop vite.

M. de Bellefeuille: M. le Président, je suis sûr que le député de Rosemont va vouloir intervenir sur la question, mais je veux très brièvement vous féliciter de la sagesse de la suggestion que vous venez de faire. Vous dites que votre décision n'est pas historique. Je ne sais pas ce qui justifie pareille humilité de votre part puisque je ne me souviens pas d'avoir entendu une décison aussi directement fondée sur un article du règlement. D'autre part, votre suggestion est extrêmement opportune et je suis sûr que le député de Rosemont aura quelques propos à tenir à ce sujet.

M. Paquette: M. le Président, je pense...

M. Laplante: Juste une question...

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le député de Bourassa.

M. Laplante: Lorsqu'on a commencé nos travaux cet après-midi, il y a eu un long exposé du député de Vaudreuil-Soulanges...

Une voix:... Vaudreuil-Soulanges?

M. Laplante:... de Rosemont, enfin les deux...

M. Paquette: M. le député de Vaudreuil-Soulanges n'était pas là.

M. Laplante:... sur l'absence de l'Opposition à ce moment-là qui avait été mal informée, par un concours de circonstance.

M. Paquette: Vaudreuil-Soulanges?

M. de Bellefeuille: Il veut dire le député de Deux-Montagnes.

M. Laplante: Trouvez-vous qu'il est sage de commencer nos travaux sans la représentation et en l'absence de la députée des Îles-de-la-Madeleine qui, elle, est

inscrite et, actuellement, chef du groupe des indépendants?

Le Président (M. Lachance); M. le député, je n'ai pas à formuler d'opinion sur l'absence ou la présence de membres à cette commission. Si je regarde ceux qui sont là, c'est avec ces personnes que nous devons travailler.

M. Laplante: Maintenant, un deuxième point, c'est seulement une information que je veux vous demander. Le député de Deux-Montagnes vous a fait à un moment donné un genre de menace, d'aller plus haut pour contester une décision que vous aviez prise cet après-midi. Il la trouvait impolie à son égard. Avec les félicitations qu'il vient de vous faire, est-ce qu'il va retirer tout cela?

M. Clair: Vous êtes-vous senti menacé?

M. Laplante: Vous êtes-vous senti menacé avec cela?

M. Pagé: Êtes-vous affecté, M. le Président?

Le Président (M. Lachance): J'ai eu l'occasion de prendre un repas depuis ce temps et je sens que ma digestion se fait très bien.

M. Pagé: Cela ne vous a pas empêché de manger. Vous dormez bien...

M. de Bellefeuille: M. le Président, sur la question soulevée par le député de Bourassa - je ne sais si c'est une question de règlement - sur le premier point, je serais le premier à appuyer l'idée d'une suspension en attendant le retour parmi nous de Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine, si c'est ce que le député de Bourassa propose, mais je reconnais que c'est débattable. D'autre part, je n'ai jamais prétendu que le président avait été impoli. Je me suis élevé contre le fait qu'il m'accusait d'user de procédés dilatoires. Je n'ai fait aucune menace. J'ai tout simplement indiqué que j'allais examiner la question, à savoir si je devais recourir à des moyens. Je voudrais vous informer, M. le Président - je remercie le député de Bourassa de m'en donner l'occasion qu'ayant mûrement réfléchi, ayant effectivement consulté sur la question, j'ai décidé qu'il n'y avait pas de quoi fouetter un chat. Par conséquent, l'incident qui n'a pas eu lieu est déjà clos.

M. Laplante: Cela prouve, M. le député, que vous êtes un bon chrétien. Vous en trouverez la signification dans le dictionnaire.

Le Président (M. Lachance): Si vous le permettez, nous allons revenir à l'article 44. M. le député de Rosemont.

M. Paquette: M. le Président, j'aimerais bien comprendre votre décision parce que je pense qu'elle a des conséquences sur notre attitude face aux autres articles qui viendront par la suite. Il y a des interrelations très étroites dans le projet de loi.

D'une part, vous semblez dire que la première partie... Remarquez que ma première intention était de présenter les deux amendements séparément, mais, parce que les deux m'apparaissaient très étroitement reliés, j'ai décidé de les présenter en bloc. Ce qui m'étonne dans votre décision... Comment peut-on avoir à la fois une liste convenue entre les parties, qui est l'objectif de la première partie de l'amendement, et, en même temps, une liste définie en annexe dans le projet de loi? Si mon amendement était accepté, nous aurions une liste où seraient négociées et agréées à l'échelle nationale toutes les matières que contient la convention collective à l'exception - et là mon amendement a pour but de dire: des matières convenues entre les parties comme faisant l'objet de stipulations négociées et agréées à l'échelle locale.

Vous me dites que j'ai le droit de présenter cet amendement, mais qu'en même temps je n'ai pas le droit d'extraire l'article 58 de cet alinéa. Ce qui veut dire qu'on pourrait avoir à la fois, dans le même article, si mon amendement était accepté, une liste convenue entre les parties, mais qui serait en même temps fixée dans l'annexe. C'est cela que j'ai de la misère à concilier.

M. Clair: Sur la question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le ministre.

M. Clair: Le député de Rosemont me fait penser à l'avocat qui, ayant lu un obiter dictum, c'est-à-dire au juge qui se prononce au-delà des questions qui lui sont soumises et qui indique quelle pourrait être une orientation qu'il retiendrait advenant que... Le député de Rosemont retient de vos propos que vous lui auriez dit que, s'il proposait l'amendement scindé, vous l'accepteriez, alors que l'interprétation que je fais de vos propos n'est absolument pas celle-là. Votre obiter dictum était pour dire au député de Rosemont qu'il y avait une possibilité de scinder son amendement et, en conséquence, qu'il serait jugé à sa juste valeur, mais que la deuxième partie de son amendement était clairement irrecevable. Le président, à mon sens, n'a pas disposé, dans sa décision, de l'amendement éventuel que le député de Rosemont pourrait faire. Je pense que le

on peut continuer avec la suite - peut-être que, M. le Président, vous préférez qu'on procède comme cela - mais on peut se retrouver à d'autres articles où on va présenter des amendements, où on va faire un long débat comme semble le souhaiter le ministre, d'ailleurs, sur la recevabilité et, chaque fois, on va reprendre les débats de recevabilité, alors que, si vous êtes en mesure de le faire - si vous n'êtes pas en mesure de le faire, tant pis - vous pourriez me préciser sur cette question ce que vous considérez être le principe du projet de loi. Est-ce que le principe, c'est qu'une liste de matières faisant l'objet d'une négociation locale ou régionale soit constituée et est-ce que vous étendez le principe à la modalité que le ministre a prévue dans son projet de loi, c'est-à-dire que c'est le gouvernement qui fixe cette liste-là?

M. Clair: J'invoque à nouveau le règlement, M. le Président. Le député de Rosemont cherche à obtenir de vous un avis, une opinion préalable à la présentation d'une motion et, quand il dit que par mes interventions sur le règlement je cherche à allonger le débat, je réfute cet argument. C'est le député de Rosemont qui cherche à obtenir de vous une opinion avant même d'être saisi d'un amendement.

M. Laplante: Et on vous demande de trancher, M. le Président, de demander s'il a une motion, oui ou non.

M. Paquette: M. le Président, je vous rappelle que c'est le ministre qui a commencé le débat sur la recevabilité et pas celui qui vous parle. (20 h 30)

Le Président (M. Lachance): II y a une décision qui a été rendue, M. le député de Rosemont, et vous savez fort bien que, dans nos règles de procédure, la décision du président ne peut être discutée. Or, c'est ce que nous faisons depuis cinq bonnes minutes. Je vous demanderais, si vous avez une ou des motions, ou encore de la discussion à faire sur l'article 44, de bien vouloir vous en tenir à cela.

M. de Bellefeuille: M. le Président, sur la question de règlement. J'ai l'impression que nous ne sommes pas en train de discuter votre décision. Le député de Rosemont cherche plutôt à obtenir des éclaircissements qu'il ne peut obtenir que de vous, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Je n'ai pas, M. le député de Deux-Montagnes, à donner quelque indication que ce soit sur le jugement éventuel sur la recevabilité, s'il y avait éventuellement quelque motion que ce soit. Par conséquent, je vous inviterais, s'il y a lieu, à poursuivre l'étude de l'article 44.

M. Paquette: Très bien, M. le Président. En ce cas, je vais vous proposer un amendement, qui est la première partie de l'amendement que j'ai déposé tout à l'heure. Je pense que vous l'avez devant vous. Il suffit de biffer la deuxième partie. Il s'agit de remplacer, à la troisième ligne du premier alinéa, le mot "définies" par les mots "convenues entre les parties".

Le Président (M. Lachance): Sur la recevabilité, M. le ministre.

M. Clair: Très brièvement, sur la recevabilité, je pense que dans son argumentation, tantôt, le député de Rosemont a lui même reconnu que ce deuxième amendement serait également irrecevable puisqu'il n'aurait guère de sens avec le reste de l'article.

Une voix: C'est cela.

M. Clair: Comme le législateur n'est pas censé parler pour ne rien dire, il est encore moins censé parler pour dire des choses contradictoires, ce qui serait le cas à l'article 44 si on retient des annexes qui déterminent un contenu de sujets qui seraient obligatoirement négociés au plan local, ce qui est incompatible avec le remplacement du mot "définies" par le mot "convenues". Ce n'est pas tant que cela s'en prendrait à un principe du projet de loi - je pense que oui, cela vient à l'encontre de l'un des principes du projet de loi - mais c'est surtout que, sur un article donné, l'article n'aurait plus aucun sens et il est impossible que le législateur veuille dire des choses contradictoires, surtout à l'intérieur du même article.

M. Paquette: M. le Président, sur la recevabilité.

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le député de Rosemont.

M. Paquette: Le ministre a apporté deux arguments. Sur le premier, le fait que l'amendement serait contradictoire par rapport à l'un des principes du projet de loi, je vous ferai remarquer que le principe du projet de loi en cause ici est qu'une liste de matières faisant l'objet d'une négociation locale ou régionale soit constituée. L'article 44 actuel stipule que cette liste est déterminée par le gouvernement. Mon amendement vise à faire en sorte que cette liste soit déterminée par négociation et entente entre les parties. Le ministre étend le principe démesurément à ce qui constitue des modalités.

Quant à son deuxième argument, à savoir que l'article, tel qu'amendé, si

l'amendement était accepté par la commission, serait "autocontradictoire". Je pense que le ministre préjuge du sort que nous ferons à l'article 58, lorsque nous y serons. À ce moment-ci de nos travaux, nous n'avons pas à préjuger du contenu de l'article 58.

M. Laplante: Monsieur...

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le député de Bourassa.

M. Laplante: Vous lirez l'annexe B, à la page 30. Vous y avez toute la liste définie qui correspond à l'article 44. Cela avait pour effet de faire sauter une annexe qui est déjà dans le préambule du projet de loi.

Le deuxième argument, c'est que la prudence du ministre qui présente le projet de loi a été de s'assurer qu'il n'y ait aucun coût pour l'État là-dedans et que rien ne fasse l'objet, par le Conseil du trésor, de négociations financières, etc. En ouvrant cette liste, aucun de nous ne peut déterminer, au moment où on se parle, quel coût cela pourrait entraîner pour l'État québécois. Seul le ministre peut, par l'article 192, déterminer des articles qui peuvent entraîner des dépenses. Pardon?

Le Président (M. Lachance): L'article 191.

M. Laplante: C'est l'article 191 au lieu de 192?

Le Président (M. Lachance): Oui.

M. Laplante: J'en perds; je les savais tous sur le bout de mes doigts, à un moment donné.

Le Président (M. Lachance): C'est l'article 192, oui.

Une voix: C'est l'âge.

M. Laplante: Oui, c'est l'âge.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Clair: Sur la recevabilité, toujours, M. le Président, le député de Rosemont, je l'apprécie, soulève un argument assez fin. Il dit: Nous ne pouvons présumer du sort que nous réserverons aux articles 57 et 58 et, en conséquence, l'argument du ministre, à savoir que mon amendement aurait pour effet de rendre l'article "autocontradictoire", ne tient pas. C'est assez fin, M. le Président, et j'apprécie. Cependant, je voudrais lui souligner que, dans la décision antérieure que vous avez déjà rendue et non dans une décision que vous pourriez éventuellement rendre, vous avez dit, tantôt, que les articles 57 et 58, quant à eux, comportaient des questions de principe par rapport au projet de loi. Or, il pourrait arriver que le député de Rosemont propose des amendements aux articles 57 et 58. Il pourrait arriver que le ministre, par ouverture d'esprit et avec sa majorité ministérielle, décide de voter en faveur de ces amendements, mais, en tout état de cause, ces amendements ne pourraient contredire le principe des articles 57 et 58, de sorte qu'on revient à mon argument, à savoir que, si l'on adoptait maintenant la motion d'amendement du député de Rosemont, cela rendrait l'article 44 "autocontradictoire" puisque vous avez déjà indiqué, dans votre décision précédente, celle que vous venez tout juste de rendre, que des principes fondamentaux étaient contenus aux articles 57 et 58 et qu'on ne pouvait y déroger par amendement. Même le ministre, M. le Président, est lié par cette règle. Non seulement un député de l'Opposition ne peut modifier un principe adopté par l'Assemblée nationale, mais même le ministre ne peut proposer une telle modification parce qu'elle serait jugée irrecevable également.

M. Paquette: M. le Président, sur la nouvelle question de recevabilité posée par le député de Bourassa, d'abord qui prétend que cet article implique des coûts...

M. Laplante: Pourrait. J'ai dit "pourrait".

M. Paquette: M. le Président, je pense que l'argument du député nous interdirait de faire des amendements si, dès qu'on modifie le régime de négociation, on pouvait se dire que cela va changer la facture, en fin de compte. Tous les articles, ou presque, du projet de loi vont être irrecevables; cela n'a aucun sens.

Deuxièmement, quant au nouvel argument du ministre, j'ai bien compris que vous m'avez dit tout à l'heure que ce qui était irrecevable, c'était de biffer, ici, l'article 58. Je ne pense pas que vous ayez préjugé et que vous songiez à nous interdire toute modification ultérieure, lorsque nous serons rendus à l'article 58. Donc, il est faux de prétendre que, si mon amendement était accepté, l'article 44, tel qu'amendé, serait "autocontradictoire"; cela dépendra de ce qu'on fera à l'article 58.

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Justement, je pense que le vrai débat va avoir lieu autour des articles 57 et 58. Je ne pense pas qu'on ait profit à le faire ici; cela dépendra de la logique qui sera retenue en fin de compte. Ce qu'on dit

ici, essentiellement, c'est que, si on négociait à l'échelle nationale toutes les matières que contient la convention collective, à l'exception des matières définies comme devant faire l'objet de négociations à l'échelle locale, aux articles 57 et 58, je ne vois pas... Je ne pense pas qu'on devrait s'épuiser à chercher des amendements ici. À mon point de vue, c'est à l'autre endroit qu'il va falloir discuter et envisager la possibilité d'amendements. Si on fait des amendements aux autres articles, ce dont on peut douter, étant donné les orientations indiquées par le ministre, mais on va le faire quand même, cela entraînera inévitablement des modifications à l'article 44. Je crois que, si on ne veut pas tourner en rond - c'est vraiment le cas d'un groupe qui tourne en rond depuis déjà un certain temps - et je ne voudrais pas faire perdre trop de temps au député de Rosemont et au député de Deux-Montagnes en entrant dans des considérations interminables non plus là-dessus, mais il me semble qu'on a d'autres clauses qui viennent. Je pense qu'il faut également discuter des articles 45 à 56.

Il y a deux choses qu'on peut faire: l'adopter en se disant: Si jamais on modifie les autres, il va falloir y revenir ou le garder en suspens en se disant: On l'adoptera en même temps que les autres. Je ne crois pas que ce soit le bon endroit pour faire une discussion éclairée. C'est un strict point de vue de méthode.

M. Paquette: M. le Président, je partage en partie l'opinion du député d'Argenteuil. Je pense que les articles 44, 57 et 58, notamment, sont tellement intimement liés que, si on modifie les articles 57 ou 58, il faudra faire des amendements de concordance ici et inversement. J'ai pensé qu'on pouvait faire le débat ici à l'article 44. Le ministre a préféré s'engager dans un débat de procédure. Cela fait deux fois qu'on discute de recevabilité. Cependant, M. le Président, cela nous a peut-être permis de mieux comprendre jusqu'où s'étendait le principe du projet de loi. Cependant, j'aimerais bien qu'on entende votre décision, qu'on dispose de l'amendement que j'ai soumis et qu'on en arrive au débat de fond, à un moment donné.

Le Président (M. Lachance): Ma compréhension de... Oui, M. le député d'Argenteuil?

M. Ryan: Juste un dernier point. Je n'aime pas qu'on vous oblige à rendre des décisions, parce que, même si vous les rendez consciencieusement et de manière compétente, j'ai toujours l'impression qu'elles limitent ma liberté future. Chaque fois qu'on vous soumet un problème, il faut que vous le régliez. Vous devez être heureux quand vous n'en avez pas à régler.

Le Président (M. Lachance): Vous avez raison, M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Merci.

M. Paquette: M. le Président, je voulais simplement dire que c'est le ministre qui a demandé au président si l'article était recevable. Par conséquent, on s'attend que vous rendiez une décision sur la recevabilité. Je ne voulais pas vous imposer une décision.

M. Clair: M. le Président, ce n'est pas moi qui ai pris l'initiative de proposer un amendement, c'est le député de Rosemont...

M. Paquette: M. le Président, j'espère qu'on a le droit de faire des amendements à cette commission?

M. Clair:... qui, en soumettant un amendement, soumettait cet amendement à votre opinion quant à sa recevabilité.

Le Président (M. Lachance): Le président doit toujours, lorsqu'une motion d'amendement lui est présentée, déclarer qu'elle est ou non recevable. Il n'y a pas d'erreur là-dessus. Alors, j'accepterai une dernière intervention avant de rendre une décision, à moins que le député de Rosemont ne retire sa motion d'amendement. J'aime bien les derniers propos du député d'Argenteuil. Personnellement, je ne suis pas un fanatique de la procédurite. Le rôle de la présidence exige la prise de certaines décisions, mais cette façon de procéder ne me sourit guère. M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: M. le Président, pour le peu que j'ai pu en comprendre, il me semble qu'on réglerait facilement la question que vous venez de soulever. Il n'est pas intéressant de s'enfermer et de se bloquer les pieds dans le ciment. Je ne pense pas que ce soit l'objectif de personne. Une solution bien simple, qui réglerait à la fois le problème dont vous venez de parler et une partie de l'intervention du député d'Argenteuil, serait, comme les deux sont reliés et qu'on pourra difficilement faire le débat de fond à un article sans parler de l'autre, que le ministre accepte de suspendre l'article 44. Cela vous empêcherait pour l'instant de vous prononcer sur la recevabilité comme telle.

Il est clair qu'en tant que président, chaque fois qu'il y a un amendement, vous devez vous prononcer sur la recevabilité, mais peut-être que, lorsqu'on sera rendu à l'article 57 et qu'on aura discuté des articles 57 et 58, l'article 44 n'aura plus d'utilité et qu'il n'y aura plus d'utilité, lorsqu'on y

reviendra, d'apporter un amendement parce que la question aura été réglée. Il me semble qu'il serait prudent de faire cela parce qu'un débat réglera l'autre, finalement. Tandis que, même si vous ne reteniez pas l'amendement, je suppose bien que la réaction de n'importe quel député serait d'essayer de trouver une autre façon de relier des choses qui, dans le texte même de la loi, sont reliées, c'est-à-dire l'article 58 en fonction de l'article 44. Je ne sais pas si le ministre accepterait, pour aller plus rapidement, d'attendre qu'on fasse le débat à l'article 58 et de revenir à l'article 44 par la suite. (20 h 45)

M. Clair: Voilà enfin le leader du groupe; Je lui dirai que j'ai eu l'occasion de consentir au moins six ou sept fois à des suspensions d'articles et je pense que mes collègues n'ont consenti qu'une fois à l'adoption d'un article, sous réserve qu'il soit modifié par concordance. Peut-être serait-ce votre tour d'accepter que l'on adopte l'article 44 tel qu'il est et, s'il y a de la concordance à effectuer, lorsqu'on sera rendu aux articles 57 et 58, je pense qu'il ira de soi que l'article 44 sera modifié par concordance.

M. Bisaillon: Je ne veux pas prolonger les discussions, M. le Président. Je veux indiquer au ministre que le premier soir où j'ai participé à la commission, je me souviens fort bien qu'à deux reprises on a adopté des articles sous réserve d'une reformulation à laquelle le ministre devait songer. Cela ne m'inquiète pas de procéder de cette façon.

Dans les circonstances, il y a un débat de fond à l'article 44. Nous demander de l'adopter sous réserve et d'attendre de faire le débat de fond, il me semble que cela n'est pas cohérent au moment où on se parle. Ce qui serait plus cohérent, ce serait de procéder au débat là où il va devoir se faire, à l'article 58, et probablement qu'il n'y aura plus de débat à l'article 44 par la suite. Il se fera véritablement à l'article 58.

M. de Bellefeuille: M. le Président...

Le Président (M. Lachance): L'article 44 est suspendu...

M. Clair: Vous noterez sûrement dans votre petit calepin que j'ai consenti plus souvent qu'on suspende des articles que cela fait de fois que vous acceptez qu'on en adopte et qu'on les modifie par concordance.

M. de Bellefeuille: M. le Président, avant que vous ne le suspendiez, est-ce que...

M. Paquette: Cela ne change rien, le ministre n'accepte pratiquement aucun de nos amendements.

M. Clair: Si cela ne change rien, M. le Président, le député de Rosemont pourrait lâcher tout autant quemoi, mais c'est accepté.

M. de Bellefeuille: M. le Président, est-ce qu'il y a moyen d'intervenir sur le deuxième alinéa de l'article 44 avant de le suspendre?

M. Laplante: II est suspendu.

Le Président (M. Lachance): II est suspendu dans sa totalité. Nous en arrivons à l'article 45. J'appelle l'article 45. Il se lit comme suit: "Les stipulations négociées et agréées à l'échelle nationale peuvent faire l'objet d'arrangements négociés et agréés à l'échelle locale ou régionale conformément à l'article 70. "

M. Clair: Je n'ai pas d'amendement à proposer, M. le Président.

M. Bisaillon: N'est-ce pas le même problème que celui qu'on vient de discuter?

M. Clair: Voilà le jeu, M. le Président!

M. Bisaillon: Non, les articles suivants ne sont...

M. Clair: On va tous les suspendre. M. Bisaillon:... pas de cet ordre.

Une voix: II faudrait commencer par la fin.

Le Président (M. Lachance): On peut adopter les annexes.

M. Bisaillon: Ce n'est pas bête: Si on discutait des annexes? Si le ministre veut bien regarder... M.Clair: M. le Président, ce n'est pas sérieux. On vient tout juste de consentir en toute bonne foi à suspendre l'étude d'un article. On n'a pas sitôt entamé l'étude de l'autre que le député de Sainte-Marie dit: Celui-là aussi, on le suspend. Allons-y gaiement!

M. Bisaillon: Je ne vous ai pas dit qu'on le suspendait. J'ai dit qu'il me semblait que c'était le même problème.

M. Clair: Cela a des chances d'être le même problème tout au long de la section III qui, au complet, traite du mode de négociation des stipulations négociées et agréées à l'échelle nationale. Quand vous

voulez aller aux articles 57 et 58, on parle des stipulations négociées et agrées à l'échelle locale ou régionale.

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: À des fins d'information, est-ce que la loi 55 nous rapporte à l'article 4?

M. Clair: Oui, M. le Président, il remplace en partie l'article 4 de la loi 55.

M. Ryan: Est-ce qu'il y a quelque chose de différent dans notre article 45 par rapport à l'article 4 de la loi 55, sauf les mots "conformément à l'article 70" qui remplacent les mots "dans la mesure où ces dernières y pourvoient". Est-ce qu'il y a quelque chose de différent à part cela?

M. Clair: Je n'ai pas le texte des anciens articles à cet article-ci, mais je pense que c'est substantiellement la même idée que l'article 4 de l'ancienne loi.

M. Ryan: Je vous donne mon impression. Je crois que cela va de soi dans la perspective où je me situe. Les parties négocient à l'échelle nationale et les stipulations qui ont été négociées et agréées à l'échelle nationale peuvent faire l'objet d'arrangements négociés et agréés à l'échelle locale ou régionale. Il me semble que...

M. Clair: C'était déjà le cas.

M. Ryan:... cela va de soi. Il y a les mots "conformément à l'article 70" qui peuvent donner naissance à un problème, quoique je ne le croie pas. J'ai lu l'article 70 et je ne crois pas qu'il y ait de problème là.

M. Clair: Je ne le crois pas non plus, M. le Président.

M. Ryan: Sauf l'affaire des annexes, je mets un point de suspension général là-dessus.

M. Clair: C'est la relation avec les annexes qui prévoient une liste limitée de sujets sur lesquels les parties sont, selon la loi, habilitées à procéder à des arrangements locaux sans qu'il soit nécessaire pour les parties nationales d'en convenir.

M. Ryan: Vous comprendrez que dans mon cas il y a toujours la réserve relative au régime différent que je souhaiterais voir pour le secteur de l'éducation par rapport au secteur des affaires sociales.

Cela dit, je crois que c'est une chose qui va de soi, qui est assez difficile de refuser parce qu'elle me semble, d'abord, s'inscrire dans la tradition qui est déjà implantée et, deuxièmement, parce que cela me semble une affaire assez logique.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Une question seulement, M. le Président. La plupart des conventions collectives qui ont été négociées à l'échelon national comportaient au moins à l'intérieur une clause qui prévoyait, quand ce n'était pas la loi, un certain nombre d'arrangements locaux si les parties y consentaient. Sauf que je ne vois pas l'utilité - j'aimerais que le ministre m'explique - de relier cela nécessairement à l'article 70. Autrement dit, si je lisais le texte sans dire "conformément à l'article 70", j'atteindrais les mêmes objectifs que ceux qu'on poursuivait dans le passé et qu'on poursuit, dans la loi actuelle. Si je dis: "les stipulations négociées et agréées à l'échelle nationale peuvent faire l'objet d'arrangements négociés et agréés à l'échelle locale ou régionale", je comprends que cela peut vouloir dire les deux choses: ou bien une fois qu'elles ont été négociées à l'échelon national, elles pourraient faire l'objet d'arrangements locaux, ou encore on pourrait ultérieurement décider qu'elles seront agréées et négociées à l'échelon local. Il y a les deux. Tandis que: "conformément à l'article 70", ça nous ramène uniquement à ce qui est prévu à l'article 70, c'est-à-dire aux situations prévues à l'article 70. Pour être plus clair, M. le ministre, si, par exemple, une question de négociation nationale était prévue...

M. Clair: Cela doit se lire ensemble. L'article 70 dans son premier alinéa fait référence à l'annexe B qui prévoit des sujets sur lesquels il y a des arrangements locaux qui peuvent intervenir de droit, je dirais. Le deuxième paragraphe indique que, outre ce qui est prévu au premier alinéa, les parties à une convention collective peuvent également négocier et agréer de tels arrangements dans la mesure où une stipulation négociée et agréée à l'échelle nationale y pourvoit.

M. Bisaillon: C'est le sens de ma question. Si, par exemple, une question n'est pas d'objet local, n'est pas prévue à l'annexe, est négociée, est donc convenue à l'échelon national...

M. Ryan: Prévue à l'annexe quoi? M. Bisaillon: À l'annexe B.

M. Ryan: Mais qu'est-ce qui n'est pas prévu?

M. Bisaillon: L'objet de négociation. Supposons qu'on prévoie quinze objets de

négociation qui seront discutés uniquement au palier local et qu'on en prévoie d'autres qui seront uniquement négociés et convenus à l'échelon national, ma question est: Est-ce que les objets de négociation qui ne seront que discutés à l'échelon national pourraient, une fois qu'ils auront été convenus à l'échelon national et si les parties locales sont d'accord, faire l'objet d'arrangements locaux? Si oui, je ne vois pas pourquoi on ajoute "conformément à l'article 70" parce qu'on le restreint. Je comprends l'objectif de relier cela à l'article 70 pour ce qui est du local. Les matières prévues par l'annexe B, auquel l'article fait référence, ce sont les sujets de la négociation selon les secteurs d'activité. Dans le secteur des affaires sociales, il y a la règle d'éthique entre les parties, la reconnaissance syndicale, le régime syndical, etc. On a une série de 35 sujets. Dans le secteur de l'éducation, il y en a 27; dans le secteur des commissions scolaires, il y en a 22; en ce qui a trait au personnel de soutien, il y en a 18. Si je comprends bien, l'annexe B prévoit les matières négociables à l'échelon local. Quand on se réfère à l'article 70, ça prévoit aussi ces discussions. Ma question au ministre, c'est de dire: Si ce sont des matières qui ne sont que discutées à l'échelon national, est-ce qu'elles pourraient quand même faire l'objet, après entente entre les parties, d'arrangements locaux?

M. Clair: La différence entre l'article 45 et l'article 70, c'est que l'article 45, dans le fond, donne le pouvoir aux parties nationales... Attendez un peu que je le relise l'un donne des pouvoirs aux parties nationales de convenir entre elles de déléguer le pouvoir aux parties locales et de s'entendre, l'autre prévoit que les parties locales sont habilitées de par la loi à exercer le pouvoir d'arrangements locaux sur certaines matières définies dans la loi pour une partie et, deuxièmement, de recevoir la délégation qui leur serait faite des parties nationales quant à d'autres matières.

M. Bisaillon: Uniquement à partir du moment où l'entente nationale le prévoit. Si je lis l'article 70, c'est dans la mesure où une stipulation négociée...

M. Clair:... prévue par les parties. Un juriste...

M. Bisaillon: C'est la différence que j'aimerais que l'on m'explique entre l'article 45 et le deuxième paragraphe de l'article 70.

M. Clair: Je ne comprends rien à la question du député.

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le député d'Argenteuil.

M. Clair: On va donner l'explication.

M. Bisaillon: Bien, on va peut-être avoir une réponse.

M. Ryan: II me semble que le premier paragraphe de 70, c'est pour les articles qui sont mentionnés à l'annexe B, les 35 sujets.

M. Bisaillon: Oui.

M. Ryan: Le deuxième paragraphe, c'est pour d'autres sujets...

M. Bisaillon: Oui.

M. Ryan:... dont la convention nationale pourrait convenir sans qu'ils soient compris dans la liste.

M. Bisaillon: Oui, mais pour autant que... Si je comprends bien le deuxième paragraphe de 70, c'est pour autant que la convention nationale stipule que telle clause peut être négociée et agréée à l'échelon local...

Une voix: Exactement.

M. Bisaillon:... tandis que l'article 45 est plus large que cela dans sa première formulation. Cela dit: Une fois que les parties nationales ont convenu, les parties locales pourraient procéder à des arrangements.

M. Ryan: Parce que l'article 45 dit: conformément à l'article 70.

M. Bisaillon: Voilà:

M. Ryan: C'est l'article 70 qui donne les limites, les paramètres.

M. Bisaillon: Alors, ma question est la suivante: Si on dit: conformément à l'article 70, c'est parce qu'on veut le restreindre par l'article 70 et, si on veut le restreindre par la portée de l'article 70, l'article 70 devient suffisant et l'article 45 n'ajoute rien. C'est ce que je voudrais me faire expliquer.

M. Clair: Me Jean-François Munn.

M. Munn (Jean-François): L'article 45, c'est la création du droit à des stipulations négociées et agréées à l'échelle nationale, le droit de faire des arrangements locaux, et l'article 70, c'est le pouvoir de le faire pour les parties locales. L'article 45, c'est ce qui donne ouverture à ce qu'il y ait des arrangements locaux sur les stipulations négociées et agréées à l'échelle nationale.

M. Bisaillon: Et l'article 70?

M. Munn: L'article 70, c'est le pouvoir pour les parties locales, conformément à la façon dont c'est écrit à l'article 70, de le faire.

M. Bisaillon: Mais le pouvoir de le faire dans les limites que l'article 70 fixe.

M. Munn: Oui, le pouvoir de le faire dans les limites fixées par l'article 70, mais le droit vient de l'article 45.

M. Bisaillon: D'accord, mais le pouvoir qui est donné à l'article 70 pour ce qui est des clauses agréées à l'échelon national est limité par le texte même du texte national, c'est-à-dire que, si le texte national prévoit que sur tel sujet convenu à l'échelon national, il peut y avoir des aménagements, l'article 70 va pouvoir s'appliquer. D'accord? Donc, le droit reconnu à l'article 45 va pouvoir s'appliquer à l'article 70 pour autant que la clause même du texte de l'entente nationale va stipuler que cela peut faire l'objet d'arrangements locaux, comme cela existait dans le passé; il n'y a rien de neuf, cela existait.

M. Ryan: Cela prend cela, autrement on aurait deux négociations, une par-dessus l'autre, cela ne tiendrait pas debout. On ne peut pas faire la négociation deux fois.

M. Bisaillon: C'est-à-dire qu'il y a déjà eu au niveau national - M. le ministre s'en souviendra - il y a déjà eu au niveau national une clause générale permettant des arrangements locaux pour autant que cela ne modifiait pas le paiement en fin de compte. Je vous donne un exemple: On ne le pourrait pas sur la classification. On ne pourrait même pas s'arranger localement sur la classification parce que c'est convenu. Ce n'est même pas négocié au niveau national.

M. Ryan: On va le mettre dans la convention nationale, cela.

M. Bisaillon: Pardon?

M. Ryan: On va pouvoir le mettre cela dans la convention nationale. C'est ce que veut dire le deuxième paragraphe.

M. Bisaillon: À ce moment-là, j'aurais une deuxième question sur l'expérience du passé sur les discussions que cela entraîne au niveau d'une table centrale. Je suppose bien que chaque fois qu'il y a un sujet de cet ordre, on essaie de voir si on pourra l'arranger localement. Quelles sont les discussions que cela entraîne en termes de temps, en termes d'investissement d'énergies? Est-ce que cela a été important dans le passé?

M. Munn: Si vous voulez parier de la situation concrète comme elle se vit dans les établissements, les commissions scolaires ou les collèges, c'est que, dans le passé, les parties au niveau national ont très peu prévu de possibilités d'arrangements locaux sur des articles et que, dans la réalité, les parties locales ont fait énormément d'arrangements locaux de telle sorte que ces arrangements locaux, comme ils n'étaient pas prévus dans les stipulations négociées et agréées aux échelles nationales, étaient des arrangements illégaux...

M. Bisaillon: Illégaux.

M. Munn:... avec lesquels les parties vivaient.

Or, ce que l'article 45 vient faire, pour répondre à votre question, l'article 45 donne ouverture au droit de faire des arrangements locaux, mais il y donne ouverture de deux façons, alors qu'auparavant il n'y avait qu'une façon. Le pouvoir et les façons de le faire se retrouvent à l'article 70, c'est-à-dire soit l'annexe qui...

M. Bisaillon: Les objets spécifiques.

M. Munn:... l'annexe qui dans les faits vient tout simplement concrétiser la situation existante, c'est-à-dire que les sujets en annexe sont, en gros, les sujets sur lesquels il y avait des arrangements locaux autrefois...

M. Bisaillon: Possibles.

M. Munn:... mais qui n'étaient pas prévus par les parties au niveau national.

M. Clair: Pas des arrangements possibles, des arrangements locaux qui, dans les faits... (21 heures)

M. Bisaillon:... actuellement.

M. Clair:... actuellement, ont cours. M. Munn: C'est ça.

M. Bisaillon: D'accord, pas seulement ceux qu'on retrouvait dans les décrets ou dans les conventions collectives.

M. Munn: Et la souplesse se retrouve au deuxième paragraphe de l'article 70 où on dit que les parties à l'échelle nationale peuvent aussi prévoir en dehors des listes de l'annexe B d'autres sujets sur lesquels il y aurait des arrangements locaux. L'article 45 est nécessaire, parce que c'est ce qui crée le droit et, l'article 70, c'est le pouvoir pour les parties locales, conformément...

M. Bisaillon: Les pouvoirs et les

limites.

M. Munn: Et les limites, oui. M. Bisaillon: D'accord.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 45 est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): L'article 45 est adopté. J'appelle l'article 46 où il y a un amendement.

M. Clair: Oui, M. le Président. Je propose que l'article 46 du projet de loi soit modifié de la façon suivante: premièrement, par l'insertion, à la fin de la troisième ligne, des mots "à l'exception des salaires et échelles de salaires", et, deuxièmement, par l'addition de l'alinéa suivant, et je cite: "Dans le secteur des affaires sociales, la demande au ministre est faite par un sous-comité patronal de négociation ou par la partie syndicale qui négocie avec ce sous-comité. Le différend que le médiateur ainsi nommé est chargé de régler comprend l'ensemble des matières visées par l'article 44 qui concernent les établissements que représente le sous-comité, à l'exception des salaires et échelles de salaires. "

M. le Président, une brève explication. Ces amendements visent à exclure les salaires et échelles de salaires de la médiation, puisque, à toutes fins utiles, il existe une mécanique à l'institut de recherche dont c'est, en quelque sorte, le rôle même, l'essence même de son existence est de tenter de rapprocher les parties sur leurs connaissances communes de l'évolution et du niveau des salaires, même si ce n'est pas un organisme de médiation proprement dit, en aucune façon, mais je pense que point n'est besoin, à cet égard, d'ajouter une étape de médiation.

Deuxièmement, le deuxième alinéa vise à éviter le dédoublement des mandats de médiateurs dans le secteur des affaires sociales.

Le Président (M. Lachance): Est-ce qu'il y a un amendement? M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: J'aurais une question d'information à poser au ministre, pour commencer. Je ne retrouve pas du tout dans le texte du projet de loi le concept de conciliation. Qu'est-ce qui arrive de l'étape de la conciliation dans tout ce projet de loi?

M. Clair: M. le Président, sauf erreur, dans les faits et dans la loi, le ministre du Travail aurait toujours pu, en vertu du Code du travail, nommer un conciliateur, mais semble-t-il que, sauf en de très rares exceptions, une telle procédure de conciliation n'a pas été mise en marche, de sorte que, sur le plan de la conciliation, ce sont les dispositions générales du Code du travail qui continueraient de s'appliquer.

M. Ryan: Je voudrais que ce soit bien clair. À votre avis, est-ce que les relations de travail et la négociation des conventions collectives dans le secteur que veut embrasser le projet de loi 37 tomberaient en même temps sous les dispositions générales du Code du travail et les dispositions de la loi 37 ou si, aux fins de la négociation dans les secteurs public et parapublic, ce n'est pas la loi 37? Est-ce qu'il y a des clauses qui précisent cela, le rapport entre les deux?

M. Clair: Le Code du travail est une loi d'application générale et, à moins qu'une loi particulière comme la loi 37 ne vienne modifier les contenus du Code du travail, c'est le Code du travail qui s'applique.

Le Président (M. Laplante): D'accord?

M. Ryan: J'ai besoin d'autres précisions là-dessus. Comment cela va-t-il s'inscrire dans nos lois par rapport au Code du travail? C'est cela qui m'intéresse. C'est une loi complètement distincte. Je ne sais pas si vos conseillers juridiques pourraient me fournir des précisions, M. le ministre. Ils pourraient nous en fournir, et je ne veux pas mettre en doute votre autorité, pas du tout.

M» Clair: Oui, sans aucun doute, M. le Président, avec plaisir. Allez-y donc!

M. Ryan: Parce que c'est une question assez technique.

M. Clair: Voulez-vous la répéter, s'il vous plaît?

M. Ryan: Oui, c'est le rapport entre le Code du travail et le projet de loi 37, comment cela va s'imbriquer l'un dans l'autre. Quelles sont les dispositions du Code du travail qui ne s'appliqueront plus dans ce secteur et quelles sont celles qui continuent de s'appliquer, s'il y a lieu?

M. Munn: Je vais vous rappeller l'article 111. 1 du Code du travail qui dit: À l'exception...

M. Ryan: Attendez un peu. On va y aller tranquillement. J'ai tout cela ici. Vous dites l'article 111. 1?

M. Munn: L'article 111. 1 des secteurs public et parapublic...

M. Ryan: C'est ce que je voulais

savoir.

M. Munn:... la section III. Alors, dispositions applicables: "À l'exception de la section 1. 1 du chapitre IV, les dispositions du présent code s'appliquent aux relations du travail dans les secteurs public et parapublic, sauf dans la mesure où elles sont inconciliables avec celles du présent chapitre. "

M. Ryan; H ne resterait qu'à vérifier ce qu'est la section 1. 1 du chapitre IV.

M. Munn: Le chapitre IV, c'est: "Du règlement des différends et des griefs".

M. Ryan: Attendez un peu. Règlement des différends?

M. Munn: "Du règlement des différends et des griefs", et la section 1. 1, c'est la première convention collective.

M. Ryan: Voulez-vous me dire quels sont les articles du chapitre IV?

M. Munn: Le chapitre IV, ce sont les articles 74 et suivants et plus spécifiquement les articles 93. 1 et suivants. C'est le système de la première convention collective.

M. Ryan: C'est ce que je pensais. À l'exception de cela, les dispositions du code s'appliquent aux relations du travail dans les secteurs public et parapublic, sauf dans la mesure où elles sont inconciliables avec celles du présent chapitre.

Qu'est-ce qui arrive de ce qu'on appelle le présent chapitre? Qu'est-ce qui arrive de la loi 37?

M. Munn: "Des secteurs public et parapublic"? Il y a des amendements qui sont apportés au Code du travail.

M. Ryan: Très bien.

M. Munn:... à partir du chapitre VI, à la page 20, les articles 82 et suivants qui viennent modifier la section III du Code du travail, c'est-à-dire les articles 111 et suivants.

M. Ryan: D'accord. Alors, selon votre interprétation, l'intervention d'un conciliateur prévue dans le Code du travail pourrait s'exercer dans ce cas-ci. Est-ce que d'après le Code du travail le conciliateur n'intervient pas même avant la fin de la période prévue pour la négociation d'une convention?

Le ministre a dit tantôt que la conciliation n'était pas intervenue souvent dans le secteur public par le passé. C'est vrai, c'est nous qui avons insisté pour que le gouvernement la fasse intervenir la dernière fois. Vous vous souvenez, le gouvernement avait refusé. Nous trouvions que cela n'avait pas de bon sens et, à force d'insister, nous avons fini par obtenir la commission parlementaire, et vos collaborateurs qui sont ici s'en souviennent comme moi, pour que le gouvernement accepte de se soumettre lui aussi à l'étape de la conciliation comme n'importe quel employeur. Je ne sais pas si cela avait été bénéfique ou maléfique, mais cela a produit des résultats qui ont permis de déboucher sur une entente qui a atténué sensiblement les effets de la politique décrétale du gouvernement. Cela resterait, la conciliation pourrait intervenir, d'après vous, M. le Président?

M. Munn: Sous réserve de vérifier quelque chose dans le cas de M. Ryan, à ma connaissance, la conciliation n'est jamais intervenue dans les négociations des secteurs public et parapublic. Si je me souviens bien, en 1976, lors de différends dans le secteur de l'éducation, il y avait eu trois sages de nommés qui ont assisté au déroulement des négociations, pour une partie, vers la fin. En 1979...

M. Ryan: Je ne m'en souviens pas, mais en 1983?

M. Munn:... je pense qu'il n'y en a pas eu. La dernière fois, il y en a eu dans le secteur des cégeps et...

M. Ryan: Des commissions scolaires.

M. Munn:... des commissions scolaires. Maintenant, c'était...

M. Ryan: Gauthier-Désilets.

M. Munn: C'est ce que l'on pourrait appeler par analogie un conseil de médiation qui était tripartite dans les faits.

M. Ryan: Cela a été appelé conciliation, cependant, mais on pourrait dire que c'était plus de la médiation.

M. Munn: Oui. Comme les trois sages de 1976 avaient été appelés à la conciliation, si je me souviens bien, mais c'est une formule ad hoc qui avait été trouvée pour 1976 et, dans le cas de la dernière ronde de négociations, la formule était similaire dans les cégeps, l'élémentaire et le secondaire, mais c'était un conseil de médiation tripartite.

M. Ryan: Là, juste pour préciser la situation qui découlerait de l'adoption de l'article 46, au premier stade de la négociation, pendant, disons, les trois mois qui précéderaient l'expiration de la convention collective, est-ce que la

conciliation interviendrait obligatoirement ou non?

M. Munn: Vous voulez dire la conciliation prévue dans le Code du travail?

M. Ryan: Oui. Vous m'avez dit tantôt...

M. Munn: La conciliation prévue dans le Code du travail est volontaire, c'est-à-dire que les parties ne sont pas obligées d'y recourir. Je n'ai pas la date de l'amendement, mais il y a à peu près cinq ou six ans, si ce n'est pas un peu plus, le code a été amendé pour rendre la conciliation volontaire, alors qu'autrefois elle était obligatoire dans l'ensemble des secteurs.

M. Ryan: Juste pour mon information, est-ce qu'actuellement il faut qu'elle soit demandée d'un commun accord par les deux parties ou s'il suffit d'une demande d'une des deux parties pour qu'il y ait conciliation?

M. Munn: Je pense que c'est à la demande d'un des deux.

M. Ryan: Je pense que oui.

M. Munn: L'article 55 dit: "À toute phase des négociations, le ministre peut, d'office, désigner un conciliateur; il doit alors informer les parties de cette nomination. "

M. Ryan: C'est l'article 54 qui se rapporte à notre affaire.

M. Munn: À l'article 54: "À toute phase des négociations, l'une ou l'autre des parties peut demander au ministre de désigner un conciliateur pour les aider à effectuer une entente. "

M. Ryan: D'après vous, cet article s'appliquerait dans le cas d'un différend ou d'une négociation en cours dans le secteur public ou parapublic, d'après l'interprétation que vous donniez tantôt d'un autre article.

M. Munn: Vous voulez parler de l'article 111. 1. À moins que ce soit inconciliable, c'est-à-dire si on prend les amendements...

M. Ryan: Je ne voudrais pas avoir une réponse prématurée; si vous vouliez le vérifier avant, j'aimerais bien ça. Je vais vous dire pourquoi j'attache de l'importance à cela, si vous me permettez. Je trouve que la fonction de médiation, c'est une fonction qui doit être employée de manière exceptionnelle, tellement exceptionnelle que, dans notre Code du travail, à ma connaissance, il n'en a jamais été question de manière explicite. Ce n'est pas pour rien. C'est un trait qui est inhérent au génie de notre législation du travail. C'est tellement délicat et difficile à manier qu'on ne le prévoit même pas à l'état explicite dans les textes. Cela veut dire que ça va intervenir selon des modalités qui peuvent varier, mais c'est généralement en tout dernier recours qu'on prend ce moyen d'intervention, et je me dis qu'il faut être bien assuré que l'autre va s'appliquer. C'est beaucoup mieux de faire intervenir d'abord la conciliation, parce que ça permet de faire un travail de déblaiement considérable. Et, lorsque arrivera la médiation, elle va porter sur des points qui sont vraiment le "hard core", le noyau extrêmement dur d'un conflit.

C'est dans ce sens que je pose ma question. Je veux bien m'assurer de ce qui va être possible dans ce système que vous nous proposez. Le ministre se souviendra que j'avais mentionné cette difficulté quand j'ai parlé lors de l'adoption du principe. H faut clarifier cela comme il faut, pour qu'on sache clairement où on s'en va.

M. Munn: On peut discuter longtemps, dans le fond, du sens des mots "conciliation" ou "médiation", ou "conseil de médiation". Il y a des dictionnaires de relations du travail, mais je ne suis pas certain que les différents théoriciens ou même praticiens des relations du travail s'entendent sur un sens exact, si ce n'est le fait que l'un fait un rapport et que l'autre n'en fait pas.

M. Ryan: Si ce n'est l'autre fait qu'il y en a un qui intervient après l'autre.

M. Munn: Pas nécessairement, cela dépend des lois du travail, M. le député. Dans certains cas, il y a uniquement des conciliateurs; dans d'autres cas, il y a une série de possibilités, si on prend la loi fédérale; dans d'autres lois, ce sont uniquement des médiateurs.

M. Ryan: Parlons de la loi du Québec, c'est la conciliation; l'autre, ce n'est même pas dans la loi, sauf qu'on en discute aujourd'hui, on l'introduit, mais, dans notre Code du travail, l'idée de médiation n'y est pas, à ma connaissance.

M. Munn: Cela n'y est pas, mais, sous réserve d'une vérification, la Loi sur le ministère du Travail permet au ministre du Travail de nommer l'équivalent d'un médiateur.

M. Ryan: Vous admettrez avec moi que cela intervient en dernière analyse. Dans le cas de Marine Industrie...

M. Munn: Pas nécessairement, je dois être en désaccord avec vous là-dessus, cela

dépend des circonstances. Je vais vous donner un exemple. À United Aircraft, le groupe d'intérêt public qui a été formé aurait peut-être eu intérêt à intervenir dès le départ, et peut-être que le conflit aurait été réglé.

M. Ryan: Là, vous êtes en mauvais terrain parce que...

M. Munn: Je sais que vous étiez là, mais peut-être que cela aurait été l'inverse aussi. On peut difficilement juger, cela dépend de la façon que les conflits se déroulent. (21 h 15)

M. Ryan: Mais je ne suis pas de votre avis qu'il aurait pu intervenir à un stade plus avancé, vous savez, parce que c'était vraiment un dernier recours, on avait tout essayé. Il restait seulement des citoyens de bonne volonté. Après, je sais qu'il y en a qui avaient parlé de généraliser cela, mais ce n'était pas possible, c'était trop exceptionnel, c'était un conflit bien particulier. C'est trop loin. Je ne sais pas quel était le statut légal de cette équipe. On n'a jamais essayé de le définir. On essayait de rendre service.

M. Clair: II n'y en avait aucun, mais il me semble que cela a aidé.

M. Ryan: Peut-être parce qu'il n'avait pas de statut légal, justement, M. le ministre. D'accord.

Ce que vous me dites, c'est que cela pourrait fonctionner. Le mécanisme de conciliation prévu au Code du travail pourrait-il fonctionner dans le cas d'un différend dans les secteurs public et parapublic? C'est ma question pour que je puisse émettre une opinion sur l'article 46.

M. Munn: En soi, ce n'est pas inconciliable. En soi, la seule question qui se poserait est: Est-ce que le fait de prévoir l'intervention d'un médiateur à la demande de l'une et l'autre des parties est inconciliable avec les articles du Code du travail qui parlent du conciliateur? À première vue, je pense que ce n'est pas inconciliable.

M. Clair: Surtout compte tenu de notre tradition dans les relations du travail voulant que... Je pense que la tendance est plus qu'il y ait d'abord une étape de conciliation et, ensuite, une étape de médiation, et non l'inverse. Je verrais mal le tribunal déclarer que c'est inconciliable.

M. Ryan: Je pense que c'est un double cran de sûreté pour le déroulement et surtout l'aboutissement heureux de la négociation. Je pense que, si on a ces deux crans, c'est plus sûr que si on en a seulement un. En général, c'est cela.

M. Clair: En général, le député d'Argenteuil a sans doute raison. En théorie, c'est d'une logique implacable, c'est sûr. Maintenant, est-ce qu'en pratique c'est possible qu'avant qu'il y ait conflagration, en quelque sorte, on ait le temps de faire intervenir un conciliateur, un médiateur? C'est sujet à évaluation.

M. Ryan: Cela étant...

M. Clair: Deux précautions valent mieux qu'une.

M. Ryan: J'aimerais cela; peut-être, jusqu'à plus ample information, qu'on peut tenir pour acquis que ceci n'exclut pas l'étape de la conciliation.

M. Clair: C'est clair que cela ne l'exclut pas juridiquement. Pour que cela l'exclue, il faudrait qu'un tribunal déclare que c'est inconciliable suivant l'article 111. 1. C'est ce que je comprends. Je ne pense pas que, en vertu de nos lois et de notre jurisprudence, on puisse déclarer que ces deux procédures sont inconciliables.

M. Ryan: Est-ce que ce serait trop vous demander, M. le ministre, que demander à vos conseillers de faire une vérification un peu plus poussée pour nous arriver avec un avis plus ferme à leur convenance?

M. Clair: Sans doute, M. le Président.

M. Ryan: C'est bien. Juste un autre point, si vous me permettez. Si vous voulez me dire que j'ai pris assez de temps, je n'ai pas d'objection, je reviendrai tantôt, mais je pense que cela éclaire la discussion de fond.

Ceci dit, je vais émettre une opinion très brève sur l'article 46. Je n'ai pas d'objection à cet article, mais on est sur l'amendement, c'est vrai.

Le Président (M. Lachance): Vous pouvez toujours...

M. Ryan: Je n'ai pas d'objection sur l'article 46, parce qu'il écrit dans la loi le droit d'une des deux parties de demander une médiation, alors que sous le régime commun cela dépend du bon plaisir du ministre du Travail. J'aime mieux que ce soit dans la loi comme une chose que les parties peuvent réclamer légalement plutôt que d'être une chose entièrement laissée au bon plaisir du ministre du Travail qui va nommer un médiateur quand il le veut, au moment de son choix et dans les circonstances de son choix.

Cela dit, j'ai des objections très sérieuses à l'encontre de l'amendement

déposé par le ministre. J'en viens au point qui nous est proposé. Le ministre nous dit... Je vais juste être obligé d'ouvrir une petite parenthèse, je pose un problème pour vos experts, M. le ministre. Si une partie demande la conciliation et l'autre la médiation en même temps, qu'est-ce qui arrive? Une partie demande la conciliation en vertu du Code du travail et l'autre demande la médiation en vertu de l'article 46. Comment cela se passe-t-ii? Je ferme la parenthèse pour tout de suite.

M. Clair: La discrétion me semble appartenir au ministre du Travail qui, dans ni l'un ni l'autre des cas, sauf erreur, n'est obligé de nommer.

M. Bisaillon: Si le député d'Argenteuil me le permet, avant qu'il n'aborde d'autres points...

M. Ryan: Très bien.

M. Bisaillon: Quant à moi, la question de la conciliation, ce n'est pas tout à fait terminée, quoique je ne sois pas nécessairement en accord avec le député d'Argenteuil sur la nécessité absolue de la conciliation à ce niveau, au moment où on en parle, au niveau national. La conciliation existait dans les lois, autrefois, mais elle était perçue dans les secteurs public et parapublic comme étant la clé pour acquérir le droit de grève. Alors, la conciliation était dans la loi pour les syndicats et les employeurs des secteurs public et parapublic, mai3 elle n'avait pas d'effet, c'est-à-dire que ce n'est pas un conciliateur du ministère du Travail qui pouvait rapprocher les parties au plan national. Alors, qu'est-ce qui se produisait? On demandait la conciliation parce que c'était une étape dans le processus qui permettait d'arriver au droit de grève. C'est cela que les lois spéciales des régimes de négociation dans les secteurs public et parapublic ont changé. Quand on me dit que, maintenant, la conciliation prévue au Code du travail resterait encore, je me pose des questions. Je pense qu'elle disparaît, à toutes fins utiles, la conciliation, comme on la connaît dans le Code du travail, avec le projet de loi 37. Cela ne veut pas dire que je sois en désaccord. Cela veut juste dire que, d'après mon interprétation, elle disparaîtrait.

M. Clair: Pourquoi? Elle disparaît juridiquement ou elle disparaît dans les faits?

M. Bisaillon: Si on part avec la loi 37 par rapport à ce qu'on avait avant. Avant, la conciliation n'était plus une règle essentielle, cela avait été enlevé. Le droit de grève était obtenu à l'échéance de la convention collective. Le droit de grève était automatique. Donc, on n'avait pas besoin de prérequis et de préalable, comme, autrefois, la conciliation était une étape. À partir du moment où on a enlevé cela dans le passé, je me dis que pour le réinstaller dans le cas des secteurs public et parapublic il faudrait qu'on le dise. À partir du moment où on ne le dit pas, je pensais que c'était remplacé dans les circonstances par l'article 46 qui prévoit la médiation.

M. Clair: Je ne partage pas l'avis du député de Sainte-Marie. Le Code du travail. ne dit pas que la conciliation est une étape obligatoire préalable à l'exercice du droit de grève.

M. Bisaillon: Il le disait.

M. Clair: II le disait autrefois. Maintenant, cela demeure une étape possible, mais non obligatoire.

M. Bisaillon: En pratique, qu'est-ce qui...

M. Clair: Ah! Vous parlez de la pratique. Moi, je vous disais que cela dépend si on parle de la pratique ou du droit. Est-ce que vous parlez du droit? En droit, ce n'est pas inconciliable.

M. Bisaillon: En pratique, qu'est-ce qui est arrivé? À partir du moment où les lois spéciales ont donné le droit de grève automatiquement à l'échéance de la convention ou à d'autres moments, dans certaines lois, la conciliation n'a plus jamais été demandée. Qu'est-ce que c'est, les parties au niveau national? C'est une table centrale formée de centrales syndicales et du gouvernement. Quel intérêt le gouvernement aurait-il, lui qui négocie lui-même, à demander l'intervention d'un conciliateur, si bon soit-il, qui demeure un employé du ministère du Travail et qui fait habituellement son travail, qui exerce plutôt ses fonctions dans le secteur privé? En pratique, ce n'est jamais resté. Et je prétends que le député d'Argenteuil a raison de dire que, lorsqu'il y a eu des étapes de conciliation, ç'a toujours - et Me Munn l'a souligné aussi tantôt - été des procédures spéciales où les mécanismes de conciliation utilisés ont été spéciaux aussi. Ceci me laisse croire que... Par exemple, ce à quoi se référait le député d'Argenteuil en 1982 et ce à quoi se référait ce qu'on a appelé le conseil des sages en 1976, ce pourquoi ç'a a existé, c'est par une décision spéciale. Si le code 3'était appliqué, on aurait pris le mécanisme du code. Comme on ne l'a pas appliqué, le mécanisme du code, c'est qu'on a donc pris une formule spéciale pour le faire et c'est la Loi sur le ministère du

Travail, comme le disait Me Munn, qui permet au ministre du Travail de procéder de cette façon-là. Ça, c'est le premier aspect. C'est pour cela que j'aimerais qu'on fouille la question du député d'Argenteuil et qu'on ait une réponse là-dessus. Le deuxième aspect...

M. Clair: Je pense qu'on peut la clarifier tout de suite. Dans les faits, je partage l'avis du député de Sainte-Marie, quant à moi. En droit, cependant, je pense que légalement les deux procédures ne sont pas inconciliables, mais, dans les faits, je partage l'avis du député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Bon, alors revenons aux faits. L'argumentation du député d'Argenteuil, c'est de dire quoi? C'est de dire: La médiation, c'est une procédure spéciale, extraordinaire, qui doit arriver une fois qu'on a tenté d'autres modes de rapprochement. Si la conciliation traditionnelle, celle qu'on voit régulièrement dans le Code du travail, dans le cas de conflits du secteur privé, si on pense qu'elle ne peut pas donner de résultats au niveau du secteur public, je dois comprendre qu'on pourrait s'attendre à avoir une formule de rapprochement des parties qui pourrait être particulière, compte tenu des parties en cause.

Si c'était au niveau local, je serais beaucoup plus d'accord avec le député d'Argenteuil pour dire: Le Code du travail, quant à la conciliation, pourrait s'appliquer. Parce que là ce sont des parties plus réduites qui peuvent discuter avec un conciliateur, mais, lorsqu'on est rendu au niveau national et qu'on a une table de concertation syndicale et le gouvernement ou l'État de l'autre côté, il me semble que, si on veut une étape de conciliation, cela prendrait une étape de conciliation spéciale, particulière, qui soit différente de la médiation, je veux bien, mais elle ne peut pas être comme celle du Code du travail. Cela m'étonnerait.

M. de Bellefeuille: M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Est-ce que votre intelligence de la chose, c'est que nous sommes en train de discuter en même temps de l'article 46 et de l'article...

M. Ryan: II a le droit de désigner, c'est l'article 54.

Le Président (M. Lachance): Effectivement, M. le député de Deux-Montagnes, je comprends qu'on discute globalement l'ensemble de ce qui est relié à l'article 46, y compris l'amendement.

M. de Bellefeuille: Ceci étant, je voudrais demander au ministre s'il envisagerait d'inclure dans la loi à l'article 46, plutôt qu'un médiateur ou une médiatrice, un conseil de médiation.

M. Clair: M. le Président, on prévoit déjà, aux articles 48 et 49, qu'au-delà d'un médiateur les parties peuvent faire une entente sur une procédure de médiation différente de celle des articles 46 et 47, qu'il s'agisse du recours en conseil de médiation, en groupe d'intérêt public ou groupe de sages, et que, même, elles peuvent s'entendre pour faire conjointement un rapport sur l'objet de leurs différends et le rendre public.

M. Bisaillon: Et cela, c'est après entente entre les parties.

M. Clair: Oui.

M. Bisaillon: Pourquoi avez-vous fait cette distinction entre la médiation régulière et une médiation spéciale qui serait, elle, objet d'entente entre les parties?

M. Clair: Je pense que c'est parce que, dans la mesure où le ministre du Travail peut nommer un médiateur, si les parties considèrent, elles, qu'un conseil de médiation ou un groupe d'intérêt public présente de meilleures chances de résultats, c'est à elles d'être impliquées dans ce choix-là.

Le Président (M. Lachance): Bon. Est-ce qu'on peut disposer de l'amendement du ministre?

M. de Bellefeuille: Bien, je ne suis pas convaincu. Pourquoi le ministre ne prévoit-il pas un conseil de médiation dans tous les cas plutôt qu'un seul médiateur? Il me semble que le conseil de médiation, c'est plus prometteur, cela offre plus de garanties.

M. Clair: C'était pour laisser, je dirais, un caractère encore un peu plus exceptionnel au conseil de médiation ou à un groupe d'intérêt public qu'à la stricte formule d'un médiateur que nous avons prévue et que, dans ce cas-là, c'étaient les parties qui pouvaient convenir de. (21 h 30)

M. de Bellefeuille: Oui, mais le ministre ne répond pas à ma question. Pourquoi, lui, ne préfère-t-il pas prévoir dans tous les cas un conseil plutôt qu'une seule personne?

M. Clair: Autrement dit, ce que vous souhaiteriez, c'est qu'à l'article 46 on puisse lire: Une partie peut demander au ministre

du Travail de charger un médiateur, un conseil de médiation ou un groupe d'intérêt public. Est-ce que je comprends bien...

M. de Bellefeuille: Non, ce serait, dans mon esprit, un conseil de médiation.

M. Clair: Et jamais un médiateur?

M. de Bellefeuille: Et jamais un médiateur. C'est une question que je pose au ministre, d'ailleurs. Il y a peut-être une raison, mais j'aimerais savoir la raison.

M. Clair: Pourquoi exclure une possibilité? La formule habituelle, c'est un médiateur et je pense que, au contraire, il vaut mieux prévoir que le ministre puisse, en tout temps, nommer un médiateur. Si l'amendement du député était de dire "et un conseil de médiation et un groupe d'intérêt public", là, je verrais des avantages possibles à la solution proposée par le député de Deux-Montagnes. Mais purement et simplement retrancher la possibilité de nommer un médiateur et ne conserver que celle d'un conseil de médiation, il me semble que c'est priver le ministre du Travail d'une possibilité. On a voulu, par ces articles, élargir l'éventail des formes de médiation et non pas les rétrécir.

M. de Bellefeuille: D'autre part, M. le Président, est-ce que le ministre nous a expliqué le premier alinéa de son amendement, là où il excepte les salaires et échelles de salaires? Selon mon souvenir, le ministre n'a pas expliqué pourquoi il propose que le gouvernement s'empêche, en quelque sorte, lui-même, de prévoir un mécanisme de médiation sur les salaires et les échelles de salaires dans l'éventualité où il le désirerait lui-même.

M. Clair: Très brièvement - je l'avais expliqué et je peux le répéter - c'est simplement que, dans la mesure où nous constituons un Institut de recherche sur la rémunération, dont le mandat n'est pas de procéder à une médiation entre les parties, mais, par une recherche commune de statistiques, de données sur le marché du travail, sur la comparaison des salaires dans les secteurs public et parapublic... Si, une fois que les parties sont en possession de tous ces renseignements et qu'elles ont procédé à une période de négociations de trois mois sur la base des mêmes données, elles ne s'entendent pas, je ne pense pas que ce soit un médiateur qui viendrait intervenir, par-delà toutes les études scientifiques qui auraient été menées par l'Institut de recherche sur la rémunération, par delà les négociations qui auraient duré trois mois entre les parties, par-delà une commission parlementaire qui aurait siégé pour entendre des parties sur cette question, comme le prévoit le projet de loi qui pourrait venir rapprocher les parties. Je pense que cela ne ferait que retarder les échéances et diminuer à la fois le rôle de l'institut de recherche et les chances de succès d'un médiateur dans une telle situation.

M. Bisaillon: M. le Président, quand on a parlé de l'institut de recherche, il me semblait qu'on était sur la même longueur d'onde, le ministre et moi, au moins sur une chose, quand j'utilisais l'expression: l'institut de recherche, c'est un photographe. Il photographie la situation et fait des constatations. Il ne fait pas de recommandations. Le médiateur, lui, analyse une situation. Je comprends que la médiation prévue à l'article 46 n'est pas une médiation qui mène à une décision, mais ce doit être une médiation qui amène des recommandations. Or, là, il y a une nuance. Il y a une étape: par rapport à l'institut de recherche, ce serait un plus.

M. Clair: Oui, mais simplement ce qu'on dit, c'est que, disposant de deux exemplaires de la même photographie, les parties ayant conjointement pris la photographie, ayant négocié pendant trois mois sur la base de cette photographie, ayant eu l'occasion d'être entendues en commission parlementaire sur la base de cette photographie, si elles ne s'entendent pas après tout cela, les chances qu'un médiateur au-delà de tout ce processus puisse, par un rapport, rapprocher les parties... Je pense qu'il ne pourrait malheureusement que contribuer à envenimer le débat et non à rapprocher les parties.

M. Bisaillon; Le raisonnement du ministre est inattaquable, à partir du moment où la prémisse est que les parties qui sont à l'institut de recherche ou les composantes de l'institut de recherche font la même photographie. Mais, en prenant comme prémisse que les parties ou les composantes de l'institut de recherche ne font pas la même photographie, un tiers ajouterait, à ce moment, en termes de recommandations, ce qui ne lie pas davantage le gouvernement.

M. Clair: Ce qui?

M. Bisaillon: Ce qui ne lierait pas davantage. Cela lui ajoute un poids moral, c'est bien sûr, ou cela lui donne une force morale.

M. Clair: Après la commission parlementaire pour des augmentations de salaires et échelles de salaires - c'est toujours de ça dont on parle, on ne parle pas de rémunération globale, on ne parle que de

salaires, d'échelles de salaires - j'imagine que les parlementaires voudraient entendre les photographes de l'institut de recherche en rémunération sur leurs photographies, entendre les deux parties, entendre le président du Conseil du trésor, entendre, éventuellement, les gens du CRSMT. Que viendrait faire un pauvre médiateur pour tenter de rapprocher les parties? Je pense que ça compliquerait et que ça risquerait d'être perçu même comme un dernier truc pour retarder un règlement entre les mains du gouvernement. Je vois que le député hoche du bonnet.

M. Bérubé: Oui, il est d'accord avec vous.

M. Bisaillon: Cela va bien, ne venez pas mettre le trouble là-dedans, vous!

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Argenteuil, vous m'aviez signalé votre intention de prendre la parole il y a déjà plusieurs minutes; si vous voulez y aller.

M. Ryan: Je suis patient, je suis même prêt à céder mon tour au député de Portneuf.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, M. le Président. Je veux m'inscrire, à ce moment-ci, de nos travaux, parce que l'amendement proposé par le ministre, plus particulièrement le premier alinéa, me surprend beaucoup. L'article 46 prévoit qu'une partie peut demander au ministre du Travail de charger un médiateur de tenter de régler un différend sur les matières qui font l'objet de stipulations négociées et agréées à l'échelle nationale.

Jusque-là, c'était intéressant. Le libellé et l'article disaient ce qu'ils voulaient bien dire, à savoir qu'après que les parties se soient conviées à un exercice d'analyse, de négociation, de représentation, une des deux parties pouvait demander l'intervention d'un médiateur, ce qui est en droit du travail tout à fait justifié, explicable, et plus souvent qu'autrement, utile.

Or, dans l'amendement proposé par le ministre, lorsqu'il dit qu'on devrait insérer, à la fin de la troisième ligne, les mots "à l'exception des salaires et échelles de salaires", je ne comprends pas le ministre de vouloir...

M. Laplante: Enfin...

M. Pagé: M. le Président, qu'est-ce qui arrive pour que le député de Bourassa soit aussi enthousiaste?

M. Laplante: II est en demande depuis ce matin.

Le Président (M. Lachance): Vous avez la parole, M. le député de Portneuf, allez-y, continuez.

M. Pagé: J'en étais à dire, M. le Président, que, si on suit le raisonnement du ministre, on ne devrait pas adopter cet amendement. Le ministre nous dit: Au niveau de la rémunération, on aura un institut de recherche qui va siéger, qui va être, entre guillemets, paritaire, où les parties pourront se retrouver dans cet organisme. L'organisme bénéficiera de sommes importantes pour conclure les ententes ou conduire les études qu'il jugera opportun de conduire. Le rapport sera produit le 30 novembre de chaque année et, finalement, constituera, comme d'autres de mes collègues le disaient, une lecture de l'évolution des conditions de rémunération et de traitement dans le secteur public pour certaines fonctions par rapport à d'autres dans le secteur privé ou encore dans d'autres provinces, si c'est accepté et si c'est adopté à la majorité des deux tiers. C'est ça?

Le rapport sera produit, les études seront rendues publiques au fur et à mesure qu'elles seront complétées, et tout le monde à la table est unanime à retenir que le rapport d'un tel institut sera susceptible de rapprocher les parties. Là, ce n'est pas moi qui parle, c'est le ministre qui disait, il y a trois ou quatre jours, que la simple production du rapport par un organisme aussi crédible que celui-là sera de nature à rapprocher les parties.

Il nous disait: Le rapport aura été déposé, un débat aura eu cours à l'Assemblée nationale, le gouvernement aura eu tous les moyens parlementaires pour justifier ses choix budgétaires, la population sera, par conséquent, un peu plus sensibilisée aux enjeux et, finalement, au traitement qui est fait aux employés de l'État et jusqu'où le gouvernement respecte son obligation d'État employeur et, par la suite, il y aura médiation.

Le ministre nous dit: S'ils ne se sont pas entendus après ces différentes étapes, j'hésite à croire qu'un médiateur puisse faire quelque chose de fructueux. Je soutiens exactement le contraire, c'est que toutes ces étapes qui seront préliminaires à l'intervention du médiateur vont faire en sorte que l'écart, si je peux utiliser le terme, entre les parties sera susceptible d'être réduit. Je m'excuse, j'étais au salon bleu pour d'autres activités, mais je ne crois pas avoir abusé du temps de cette commission jusqu'à maintenant, mais j'apprécierais que le ministre nous indique ce sur quoi il s'appuie. Pour moi, il m'apparaît, M. le Président, que cela n'a purement et simplement pas de bon sens, ce que vous êtes en train de faire là.

M. Clair: J'ai donné mes meilleurs arguments, je pense, en présence du député de Portneuf.

M. Pagé: C'était juste cela?

M. Clair: C'est son choix de dire que cela n'a pas de bon sens. Mon meilleur argument, c'est simplement que, d'abord, nous ne parlons pas de la rémunération globale au sens du normatif lourd. Nous avons bien indiqué que c'est pour salaires et échelles de salaires. C'est donc dire que dans la négociation aux trois ans, l'année où il y a droit de grève, où tout ce qui est rémunération globale, sans être salaires et échelles de salaires, est négocié, il pourait y avoir médiation, mais que sur la stricte détermination de salaires et échelles de salaires, après la photographie prise conjointement par les parties, pour employer l'expression du député de Sainte-Marie, après que celles-ci aient négocié sur la base de cette photographie pendant trois mois, qu'une commission parlementaire ait été tenue, que l'institut de recherche soit venu expliquer ses constatations auprès des parlementaires, que la partie syndicale ait été entendue, que le président du Conseil du trésor ait été entendu, et peut-être d'autres intervenants, je me dis: Après tout cela, est-ce que cela ne vient pas discréditer à l'avance l'institut de recherche, d'une part, et, d'autre part, je dirais, donner une mission impossible à un médiateur, susciter de faux espoirs dans les attentes des salariés si on se dit: II y a d'abord le processus de l'institut de recherche, après, la négociation, après, la commission parlementaire et, après cela, une nouvelle médiation.

M. le Président, je pense que, dans l'intérêt même du concept de la médiation, il n'y a pas avantage à ce qu'il y ait possibilité d'un médiateur sur les salaires et échelles de salaires pour la deuxième et la troisième année. Il me semble que, de la même façon que le député nous dit que le contraire lui semble tomber sous le sens, mes arguments devraient le convaincre du contraire.

M. Pagé: Pour compléter, je...

M. Bérubé: II me semblait aussi parce que c'était faible à date comme argumentation.

M. Pagé: M. le Président, jusqu'à maintenant, cela allait très bien dans le déroulement de nos travaux jusqu'à ce que le député de Matane, qui a une habilité consommée à mettre la bisbille partout où il passe, intervienne. J'apprécierais que vous l'ayez à l'oeil. Si vos interventions auprès de lui ont comme résultat qu'il foute le camp, on en serait fort aise, quant à moi.

M. Clair: Oh! M. le Président.

M. Pagé: Le "troublemaker", le "bullshitter", le faiseur de troubles du Conseil des ministres.

M. Bérubé: M. le Président...

M. Clair: Que ces propos sont durs, M. le Président!

M. Pagé: Oui, parce que c'est tout ce qu'il mérite.

M. Clair: Le député de Matane, ministre de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie, a été invité cet après-midi par le député d'Argenteuil à venir participer à nos travaux. Drôle d'accueil du député de Portneuf!

M. Pagé: Qu'il vienne, mais qu'il participe de façon utile, M. le Président, plutôt que d'énerver et d'achaler tout le monde comme il le fait.

M. Bérubé: M. le Président, je trouve que les propos du député de Portneuf sont inutilement agressifs. Je suis au contraire intéressé à ce qu'il complète son argumentation parce que la première partie de son argumentation m'a paru faible et n'est pas suffisante, en tous les cas, pour m'amener à changer d'idée.

Le Président (M. Lachance): Alors, tous les membres de cette commission ont le droit dévolu aux parlementaires de pouvoir s'exprimer en le demandant au président. Jusqu'à maintenant, je n'ai pas observé autour de cette table des comportements qui soient indignes de la tenue d'un parlementaire. Alors, M. le député de Portneuf, si vous voulez revenir à l'essence de l'article 46.

M. Ryan:... un verdict facile. Il a été absous assez facilement. (21 h 45)

M. Pagé: M. le Président, le ministre a dit que la décision d'un médiateur ou le travail du médiateur était susceptible de conduire à des conclusions qui risquaient de diminuer la crédibilité de l'institut en regard des conclusions de cet organisme. Le rapport que produira cet institut, ce sera une photographie, une lecture du degré de comparabilité entre ce qui se paie dans le privé et ce qui se paie dans le public, mais cela n'implique pas pour autant que le rapport de cet institut et ses conclusions doivent constituer la position gouvernementale. Rien n'empêche que le gouvernement, par un choix politique, intervienne en deçà, en plus ou en moins, ce sera son choix, et c'est son pouvoir légitime,

d'ailleurs. Je voudrais que cela soit bien confirmé par le ministre parce qu'il ne faudrait pas qu'il laisse croire que le rapport, ce sera la bible, point final, à la ligne.

M. Clair: Le rapport de l'institut ne lie...

M. Pagé: Bon.

M. Clair:... juridiquement ni l'une ni l'autre des parties, il a un pouvoir moral à l'égard des parties.

M. Pagé: Le ministre nous dit: Pas de problème en ce qui concerne l'enveloppe, la somme globale que le gouvernement entendra consacrer au chapitre de la rémunération pour un secteur donné, mais, quand vient le temps de la ventilation de ces sommes, pas de recours à la médiation.

M. Clair: Ce n'est pas ce que j'ai dit.

M. Pagé: Oui, c'est ce que vous avez dit.

M. Clair: Ce n'est pas ce que j'ai expliqué.

M. Pagé: Bien, qu'est-ce que vous avez dit, d'abord?

M. Clair: Regardez bien le mandat de l'institut. L'institut a pour fonction d'informer le public de l'état et de l'évolution comparés...

M. Pagé: Je ne parle pas de l'institut, je parle du rôle du médiateur.

M. Clair: J'ai besoin de remonter à aussi loin pour expliquer mon point de vue. On dit qu'il a pour fonction d'informer le public de l'état et de l'évolution comparés de la rémunération globale des salariés du gouvernement, etc., avec celle des autres salariés québécois.

La façon dont la négociation va se passer, c'est qu'il va y avoir pour la durée d'une même convention collective deux modes de négociation de la rémunération globale, l'une qui va concerner les salaires et échelles de salaires pour la deuxième et la troisième année, et, bien sûr, que le rapport annuel de l'institut va être utile à cet égard. Le rapport de l'institut va également être utile pour la première année de la convention collective où là non seulement, on va fixer les salaires et échelles de salaires de la première année, mais où - je fais une pure hypothèse - à l'avance les parties pourront convenir que, quelles que soient les augmentations à survenir au cours des deux dernières années, il y aura, à l'intérieur de ce qui se dégagera, une protection particulière pour les bas salariés. Cette disposition lie les parties et, dans la mesure où il s'agit de rémunération globale, de congés, d'assurances, de toute autre espèce de matières autres que strictement les salaires et échelles de salaires, pour la première année, la médiation pourra intervenir, mais, lorsqu'il est question strictement des salaires et échelles de salaires, il ne pourra y avoir de médiation.

M. Pagé: M. le Président, là où se situent le contentieux et les conflits, au niveau des salaires et échelles de salaires et des répartitions de l'enveloppe globale, c'est là que le médiateur peut jouer un rôle plus utile. Je ne vous comprends pas.

M. Clair: Non. Pour la deuxième et la troisième année, entendons-nous, il ne sera pas possible, à moins qu'il en ait été convenu la première année, de modifier autre chose que les salaires et échelles de salaires de sorte que, si on en vient... On ne joue pas, en deuxième et en troisième année, sur les relativités internes de la rémunération des différents employés de l'État, à moins qu'il n'en ait été convenu préalablement, lors de la première année. C'est ce que cela veut dire.

M. Pagé: Oui, on le comprend. Mais je ne comprends pas votre position parce que le médiateur est susceptible de jouer un rôle plus utile à la période où cela risque d'être plus conflictuel et où il y aura plus de problèmes. On va voter contre cela, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président. Avant que le député de Portneuf ne le fasse, je voulais signaler la présence parmi nous du ministre de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie. Je voulais le faire en termes courtois et exprimer ma satisfaction de voir qu'il y a au moins une personne au gouvernement, à part le président du Conseil du trésor, qui a compris qu'il serait très bon que nos travaux soient suivis de près par tous les ministres impliqués dans les négociations des secteurs public et parapublic. Il en manque. C'est cela, le député de Terrebonne nous signale qu'il y en a d'autres. Effectivement, il en manque. Il manque, en particulier, le ministre du Travail qui sera chargé de l'application de cette loi.

Une voix: Il est venu.

M. de Bellefeuille: Oui, oui, il est venu faire acte de présence quelques instants, ce

n'est pas suffisant. Alors, ceci dit, je voudrais exprimer ma satisfaction, M. le Président, de voir qu'il y a au moins un ministre qui s'est joint è nous. J'espère qu'il va rester et qu'il va participer à nos travaux avec le même esprit que nous tous dans notre collégialité non partisane»

Deuxièmement, je voudrais reprendre les observations du député de Portneuf. D'ailleurs, il a posé des questions au ministre sur un sujet que j'avais soulevée Je voudrais faire observer au ministre qu'il nous donne l'impression que la présence de l'institut dans tout ce mécanisme fait qu'on n'a pas besoin de médiation dans les matières dont l'institut s'occupera. De là à conclure que l'institut joue un rôle de médiation, il n'y a qu'un pas. Cela m'étonne parce que, lorsque nous avons discuté des articles du projet de loi relatifs à l'institut, il n'a aucunement été question d'un rôle de médiation et si on se référait au Journal des débats, je crois que nous pourrions même relever des affirmations gouvernementales selon lesquelles cet institut ne jouera pas un rôle de médiation, ni aucun rôle analogue.

Alors, je comprends mai la pensée du ministre. Ce n'est pas clair. C'est une loi dont nous ne pourrons discuter, de toute évidence, qu'en aller et retour. On va d'un article à l'autre parce que les articles ne se comprennent que les uns par rapport aux autres, ce qui est assez fréquent, évidemment. Mais là, on a déjà adopté ce qui touche à l'institut, cela va être difficile de revenir en arrière et de préciser, dans le chapitre II, que l'institut a cette espèce de rôle supplétif de médiation que le ministre nous a présenté. Comme le ministre m'écoute avec une attention soutenue, je ne doute pas qu'il voudra tout de suite nous éclairer là-dessus.

M. Bérubé: M. le Président, à la place du ministre qui est en train, je pense, d'approfondir les arguments que l'Opposition lui soumet, pour tenter d'abord d'en saisir véritablement le sens, car les arguments présentés ne sont pas toujours nécessairement probants, nécessairement assis sur une prise en considération des faits les plus complets... Par conséquent, il faut procéder à une exégèse assez totale et intégrée des intervenants, ce qui rend, évidemment, la réflexion du ministre un peu plus lente. Néanmoins, je suis convaincu maintenant que le ministre peut répondre.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Clair: Alors, je répète substantiellement ce que j'ai dit tantôt, je ne sais pas si c'est assez clair. C'est sûr qu'il pourrait y avoir une certaine zone grise là-dessus, mais je pense que le ministre du

Travail exercerait son jugement et sa discrétion. Il faut bien comprendre, encore une fois, que, sur strictement les salaires et échelles de salaires, il ne pourra y avoir de médiation, mais, sur le contenu de la rémunération globale, au-delà des salaires et des échelles de salaires pour la première, la deuxième et la troisième année, qui est négociée en première année, là, le médiateur pourra intervenir. La raison pour laquelle on pense qu'il n'est pas utile qu'un médiateur puisse intervenir au niveau des salaires et des échelles de salaires, c'est ce que j'exprimais tantôt! une photographie prise conjointement par le parties qui sont en possession des mêmes données, une période de négociations qui dure trois mois, une commission parlementaire, audition des parties. Je ne vois plus guère l'utilité d'une médiation.

Par ailleurs, j'ajoute un argument ou une information additionnelle qu'on m'a donnée, qu'on m'a souligné que je devrais fournir aux parlementaires. C'est que la table centrale des négociations, sur le plan salarial n'existe pas par l'effet de la loi, mais existe par consensus, en quelque sorte, entre la partie patronale générale et la partie syndicale en général. Il pourrait advenir que, si on permettait une médiation sur les salaires et les échelles de salaires, on se retrouve dans une situation où une demi-douzaine par table nationale fasse de la médiation sur les salaires et les échelles de salaires et aboutisse à des conclusions différentes. Remarquez que c'est plus un problème opérationnel qu'un problème de fond, mais cela présente quand même des difficultés.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Sainte-Marie et M. le député d'Argenteuil m'avaient demandé la parole. M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: M. le Président, toute l'argumentation du ministre repose et a comme point de départ l'institut, qu'il nous présente, selon moi, en tout cas, de façon différente de la façon dont on l'a voté. Je vous rappellerai les commentaires que je formulais à ce moment-là sur les craintes concernant l'utilisation qu'on ferait de l'institut. On en a là une preuve évidente. Le ministre a comme point de départ le fait qu'un institut aura pris un portrait, une photographie. Il a repris là-dessus mes propres termes, ma propre image. Il ajoute un élément important qui n'existe pas devant nous, au moment où on se parle. Il dit: une photographie conjointe. Il prend donc comme prémisse, comme prérequis, comme préalable, le fait que les composantes de l'institut de recherche vont forcément faire la même analyse de la situation, ce qui n'est pas nécessairement vrai. Il tient aussi pour

acquis que, forcément, l'institut sera composé à la fois de gens issus du milieu syndical et du milieu patronal, ce qui n'est pas non plus un acquis au moment où on se parle. Alors, le mot conjoint sur lequel le ministre base l'ensemble de son argumentation n'existe pas présentement.

Deuxièmement, le ministre dit: L'institut va avoir fait une photographie conjointe; donc, comme elle est conjointe, les parties ont la même approche. Elles vont avoir discuté entre elles pendant trois mois et, parce qu'elles ne se seront pas entendues sur l'application, on va nommer un médiateur. Il dit: Cette médiation va pouvoir se faire, mais pas sur les salaires. Le médiateur, en passant, va rendre son rapport, il ne fait que des recommandations. Il ne lie pas le gouvernement par le rapport de médiation, il ne fait que des recommandations.

Regardons comment cela se passe ailleurs, dans le secteur...

M. Clair: M. le Président, le député de Sainte-Marie ne se souvient-il pas d'une fort mauvaise expérience à laquelle il s'est lui-même référé, je pense, celle de la formule d'arbitrage sur recommandation qui prévaut à la Sûreté du Québec? La position gouvernementale était extrêmement difficile à défendre dans ce cas-là, exclusivement parce qu'il y avait une formule d'arbitrage avec recommandations, sans que cela ne lie le gouvernement. Allez raconter cela aux pompiers, ils vont vous arroser, c'est le cas de le dire. La loi n'a pas traversé l'opinion publique. L'impression d'un grand nombre de personnes a été que le gouvernement avait triché parce qu'il n'avait pas suivi, dans le fond, la recommandation d'un médiateur qui était un juge...

M. Bisaillon: À l'article 46...

M. Clair:... qui portait le nom d'arbitre au lieu de celui de médiateur.

M. Bisaillon: Ce que le ministre est en train de nous dire, c'est qu'à l'article 46 c'est exactement ce système qu'il nous propose: un médiateur qui va faire rapport de ses constatations au public, mais il se préserve. Ce que le ministre est en train de nous dire, c'est que, justement, on a raison de ne pas vouloir faire d'exception sur les salaires, parce que le ministre, par son amendement, veut se prémunir contre ce qui lui est arrivé au niveau public, ce qui lui est arrivé avec les policiers.

M. Clair: C'est une règle d'honnêteté, M. le Président.

M. Bisaillon: Regardons comment...

M. Clair: D'honnêteté.

M. Bisaillon: M. le Président, j'aimerais pouvoir finir mon intervention.

M. Clair: D'honnêteté.

M. Bisaillon: J'aimerais pouvoir finir mon intervention. Merci.

M. Clair: Excusez-moi. (22 heures)

M. Bisaillon: II faudrait regarder comment cela se passe ailleurs, toujours dans le secteur public où des budgets sont en cause. Dans les municipalités, par exemple, où un certain nombre d'employés n'ont pas le droit de grève et où le Code du travail prévoit l'arbitrage, de quelle nature est cet arbitrage ou cette intervention spéciale? Elle est décisionnelle. La seule restriction que la loi prévoit, c'est que les recommandations ou les constats de l'arbitre ne seront pas applicables rétroactivement à l'intérieur de l'année budgétaire, mais, par la suite, elles s'appliqueront. Or, dans les circonstances, le mouvement syndical, avec le projet de loi 37, devant quoi est-il placé? Il est placé devant un droit de grève réduit quant aux questions salariales. Ce n'est que la première année que le rapport de forces peut s'exercer. Les autres années, il n'y a pas de droit de grève possible. Je prétends que, justement, parce qu'on a limité le droit de grève, on pourrait au moins permettre à un tiers de donner aussi son appréciation sans lier le gouvernement pour autant. Si le gouvernement trouve la constatation trop odieuse, il avisera et il décidera de ce qui se fait. De la même façon que, pour le reste des matières négociables, quand une des parties va demander la publication... D'ailleurs, en passant, M. le ministre, je ne vois pas la nécessité de cet article qui dit que le rapport serait rendu public seulement si une des parties le demande. D'après moi, il devrait être rendu public, point, en tout temps. Cela se trouve à l'article plus loin. Je saute, mais j'indique juste que je ne vois pas... Forcément, le rapport de médiation va déplaire plus ou moins à une des deux parties et c'est sûr que la partie qui y trouve le plus son compte va demander qu'il soit rendu public. Cela me semble assez évident. Si ce n'est pas le cas, c'est parce qu'on aura intérêt à connaître vraiment le portrait.

Alors, quant à moi, le rapport du médiateur devrait être forcément public. Sur tout le reste, le ministre accepte de faire porter la charge des recommandations de l'arbitre sur les épaules de l'une ou de l'autre partie, pourquoi n'accepte-t-il pas de faire la même chose sur la question des salaires? Dans le fond, c'est faire porter une charge morale sur une ou l'autre des parties.

Le ministre tient pour acquis que cela va être sur le dos du gouvernement. Ce n'est pas sûr non plus. Par ailleurs, il y a un avantage certain, c'est que cela dégagerait l'institut de recherche de ce rôle un peu de médiation ou de rapprochement des parties qu'on veut lui faire jouer, ce qui n'est pas dans les faits au moment où on se parle.

Rappelons que le ministre nous a dit: S'il n'y a pas six représentants ou six personnes issues des deux milieux, il y en aura seulement trois à l'institut de recherche. Alors, ce ne sera plus quinze personnes, cela sera trois. Donc, conjointement, il y aura moins de force et, s'il y a moins de force, d'après moi, on devrait permettre au moins au public d'être renseigné sur l'évaluation que quelqu'un peut en faire.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Clair: M. le Président, personnellement, sur ces questions, surtout quand on parle de 12 000 000 000 $ par année, je suis, quant à moi, en faveur d'une approche de la vérité et non des doubles poches ou des valises à double fond. Une fois qu'il y aura eu production d'un rapport annuel de l'institut de recherche, période de négociations, audition des parties concernées en commission parlementaire, occasion pour les parlementaires de questionner sur ses constatations l'institut de recherche et les parties sur leur position, ce que je dis au député, c'est qu'il n'y a plus de fonds de tiroir ou il y en a un. S'il y a encore un fond de tiroir du côté du gouvernement, c'est parce qu'il n'y a pas eu véritable négociation sur 12 000 000 000 $ et, à ce moment-là, l'intervention d'un médiateur ne va que conduire le gouvernement, quel qu'il soit, à justement essayer d'avoir des doubles fonds dans ses valises, des doubles poches, et de jouer le jeu pour qu'à la toute dernière minute il puisse sortir un autre lapin du chapeau, comme cela est arrivé trop souvent dans le passé. Je pense, M. le Président, qu'on ne peut pas confier la responsabilité de "médiateur" sur 12 000 000 000 $ à une seule personne quand l'Assemblée nationale est composée de 122 représentants élus par le peuple. Cela me semble tomber sous le sens.

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan; Si cela tombe sous le sens, M. le ministre, comment se fait-il que vous n'y ayez pas pensé quand vous avez rédigé votre projet de loi et que cela ne vous soit venu que ces jours-ci?

M. Clair: M. le Président, c'est simplement que nous pensions que cela était prévu par l'effet de la loi et, à la relecture, on se rend compte qu'effectivement il y a un problème là. Maintenant, comment se fait-il que les articles aient été libellés de cette façon et qu'on s'en soit rendu compte à la dernière minute ou il y a quelques semaines...

M. Ryan: Vous admettrez que...

M. Clair: Le député sait fort bien que, lorsqu'on prépare un projet de loi, il y a toujours une deuxième, une troisième, quatrième, cinquième lecture d'un projet de loi et qu'il est toujours possible que des amendements surviennent.

M. Ryan: Vous admettrez que, si cela tombe sous le sens, c'est plutôt de date récente parce que ce n'était pas clair pour vous quand vous avez rédigé votre projet de loi.

M. Clair: Au niveau de ma conception personnelle, je peux dire que cela fait longtemps que c'est très clair, M. le Président.

M. Ryan: Vous avez joué de stratégie avec nous. Vous trouviez que nous n'étions pas mûrs pour ententre ce langage dur avant ces jours-cU

M. Clair: Pardon?

M. Ryan: Vous trouviez que nous n'étions pas mûrs avant ces jours derniers pour entendre ce langage dur.

M. Clair: Ce n'est pas parce que je hausse le ton, M. le Président, que c'est un langage dur. C'est simplement parce que je faisais état de convictions profondes à savoir qu'en négociation, s'il y a une règle fondamentale que doit s'imposer le gouvernement, c'est bien celle de l'honnêteté.

M. Ryan: On a déjà tout entendu cela. M. le Président.

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: La médiation, d'après le libellé de l'article 46, peut intervenir à n'importe quel stade à partir de la fin de la dernière convention collective. Il n'y a pas de date prévue là-dedans. Par conséquent, il pourrait très bien arriver, à moins que je ne me méprenne, qu'une demande de médiation soit faite avant même la période qui est prévue plus loin pour l'examen du projet gouvernemental sur les salaires en commission parlementaire. Est-ce vrai ou

faux?

Le Président (M. Lachance): J'ai l'impression que c'est une bonne question, M. le député.

M. Ryan: La mécanique là-dedans...

M. Clair: Voulez-vous répéter, s'il vous plaît?

M. Ryan: Oui. La médiation peut faire l'objet d'une demande de la part de l'une ou l'autre des parties à n'importe quel stade à compter du premier jour qui suit l'expiration de la convention collective précédente.

M. Munn: Non, à partir du début de la phase de négociation.

M. Ryan: Trois mois avant l'expiration.

M. Munn: Si on prend l'exemple actuel, si je ne me trompe pas, la phase de négociation commence le 5 juillet. 11 faut quand même que les offres et les demandes soient déposées. Si le dépôt des offres, c'est le 3 ou le 4 octobre, cela veut dire que, théoriquement, la médiation pourrait être demandée le 5 octobre.

M. Ryan: C'est encore plus tôt que je ne pensais. Tantôt, le ministre nous disait: On aura franchi toutes les étapes, on aura eu le rapport de l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération et on aura eu la présentation du projet gouvernemental en commission parlementaire, à la deuxième ou à la troisième semaine de mars.

M. Munn: M. Ryan, dans le cas du rapport de l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération, les demandes et les offres sur les salaires ou les échelles de salaires, un amendement a été déposé qui fait en sorte que le rapport de l'institut de recherche sort le 30 novembre et que les demandes et les offres sur les salaires et échelles de salaires devraient être déposées dans les 30 jours du rapport de l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération. Donc, cela modifie le calendrier habituel, ce qui veut dire que les demandes et les offres sur l'ensemble de ce qui se négocie à l'échelle nationale devraient théoriquement être déposées au complet le 3 ou le 4 octobre de part et d'autre, sauf quant aux salaires et échelles de salaires qui, eux, viendraient au plus tard dans les 30 jours qui suivent le dépôt du rapport.

M. Ryan: Au plus tard avant la fin de l'année.

M. Munn: C'est cela.

M. Ryan: C'est exactement ce que j'entrevoyais. Il pourrait s'écouler, entre le dépôt des offres salariales et le moment de l'étude du projet de règlement du gouvernement en commission parlementaire, une période de deux mois et demi à peu près. D'après le projet de loi, l'étude en commission parlementaire viendrait vers la deuxième ou la troisième semaine de mars.

M. Munn: Le rapport sortant le 30 novembre, il y a, théoriquement, la période qu'il y a entre le 30 novembre et la deuxième ou la troisième semaine de mars pour le dépôt du projet de règlement et la deuxième ou troisième semaine d'avril pour son adoption.

M. Ryan: On n'aurait pas d'abord le dépôt d'un projet de règlement. Il y aurait dépôt d'offres salariales aux tables de négociation. Les gens vont discuter un peu, j'imagine, et, au bout d'un certain temps, le gouvernement conçoit un projet de règlement qu'il va déposer à l'Assemblée nationale au moment prévu à l'article 54 du projet de loi.

Mon point est le suivant: on va prendre une période théorique, entre le 15 janvier et le 15 mars, où il va s'écouler deux mois. Je suppose que les propositions gouvernementales n'ont pas été déposées avant la fin de décembre, que les gens sont en vacances, qu'ils n'ont pas le temps de discuter sérieusement, ils commencent à discuter vers le 10 janvier. Je me dis qu'entre le 10 janvier et le 15 mars il peut intervenir une demande de médiation de la part de l'une ou l'autre des deux parties, n'est-ce pas?

M. Munn: Pas selon les amendements déposés actuellement. S'il n'y a pas de médiation sur les salaires et les échelles de salaires...

M. Ryan: Cela va, mais avant vos amendements? Sur les autres matières, il peut intervenir une demande de médiation dans cette période. Là, j'en viens justement à l'amendement. C'est pour cela que je pose cette question, pour essayer de situer cela clairement sur le plan opérationnel.

Une demande de médiation faite entre le 15 janvier et le 15 mars pourrait permettre une intervention salutaire, même sur la question de l'échelle des salaires. Le médiateur ou l'équipe de médiation... Le ministre du Travail, on veut lui réserver un certain choix quant à la modalité retenue pour l'intervention médiatrice. Je n'ai pas d'objection à cela, je trouve que c'est bon qu'il puisse avoir du jeu un peu.

Supposez qu'une médiation intervienne à ce moment-là, je n'y vois pas d'objection, ça va aller à la commission parlementaire après. Je ne vois pas d'objection à ce que l'intervention médiatrice se saisisse

également de l'aspect salarial. Je regarde cela à la lumière des documents d'information qui ont été rendus publics par l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération. Là, la médiation produit son rapport. Cela fait partie du dossier qui s'en va à la commission parlementaire où on a toutes les pièces; à ce moment-là, on a une pièce de plus. Le gouvernement n'est pas obligé de suivre les recommandations du médiateur, s'il ne veut pas les suivre, mais ça donne quand même une garantie d'objectivité. On aura un autre point de repère.

Dans la négociation, on aura développé bien des aspects qui n'auront pas été touchés dans les documents de recherche de l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération. Je me dis: Est-ce que c'est une bonne chose que le gouvernement exclue toute possibilité d'action modératrice de la part d'une force de médiation? Je ne sais pas au nom de quelle rationalité il va faire cela, mais il me semble que ça pourrait être utile. On a un médiateur que j'ai bien connu, un conciliateur médiateur qui a été une personne remarquable dans ce domaine pendant des années au Canada, Carl Goldenberg.

Il me semble qu'un gouvernement ne s'abaisse pas en disant: M. Carl Goldenberg -ou l'équivalent - on a un problème avec nos syndiqués, on ne s'entend pas sur la rémunération. Notre institut de recherche a produit ses documents, eux ont leurs informations, ils ont leur interprétation des données. On ne s'entend pas, il y a beaucoup de points qui nous séparent. On voudrait avoir une intervention médiatrice là-dessus. On vous prévient que, d'après la loi, nous avons le pouvoir d'amener cela devant la commission parlementaire et de statuer au bout de la ligne. Je comprends très bien cela. Surtout pour la première année ou il y a le droit de grève, je crois que ce serait important pour tout le monde d'avoir un élément comme ça. Cela peut être un point de repère extrêmement utile dans la recherche d'un règlement définitif.

Tout ce qu'il y a comme genre de recours de la part du gouvernement actuel, c'est le décret. Cela a été votre plus belle invention, le décret pur et simple. Le ministre est là, il se souvient de l'auteur de tout cela. Il n'a même pas eu le temps d'en prendre connaissance lui-même; il nous a présenté cela, il n'a même pas eu le temps...

M. Bérubé: C'est comme en Autriche, en Allemagne, en France. Vous aimez beaucoup les modèles français, ça fonctionne sur la base d'un décret.

M. Ryan: Les modèles français quand ils sont bons, oui, mais je n'ai de culte aveugle pour aucun pays en particulier.

M. Bérubé: On prend ceux qui font notre affaire.

M. Ryan: Vous me connaissez très bien. J'aime beaucoup les États-Unis, l'Angleterre, la France, l'Italie, ça dépend de ce que chacun peut avoir de bon. Je n'ai pas d'attache, je ne suis pas comme le gouvernement actuel du Québec, je ne suis pas orienté seulement vers un pays.

Cela dit, je vous pose le problème en toute bonne foi, étant une personne qui a suivi ces choses de près durant 25 ans. Est-ce qu'on peut s'interdire la possibilité d'une intervention utile comme celle-là? Est-ce que vous pouvez affirmer en toute certitude et en toute tranquillité que ce ne pourrait être d'aucune utilité, au point de dire: Vous ne toucherez pas à cela, monsieur le médiateur? (22 h 15)

M. Munn: Sans prétendre vous donner une réponse complète, M. le député, depuis 1970, la négociation de 1970, 1972, les salaires et les échelles de salaires, entre autres, ont été négociés centralement de telle sorte que, dans la structure salariale des secteurs public et parapublic, les groupes sont imbriqués les uns dans les autres, et ce qui est donné à un groupe dépend, jusqu'à un certain point, de ce qui est donné à un autre groupe.

Avec la loi actuelle, un peu comme avec l'ancienne, d'ailleurs, l'existence d'une table centrale n'est pas prévue pour l'année où les salaires et les échelles de salaires peuvent faire l'objet de l'exercice d'un droit de grève. Elle pourra exister ou ne pourra pas exister selon les décisions qui seront prises ou les ententes qui interviendront entre le gouvernement et ses partenaires et les syndicats.

Maintenant, en ce qui a trait au problème de la médiation sur les salaires et les échelles de salaires, tel que je le vois, prenons, à titre d'exemple, la table des négociations des enseignants. Un médiateur qui interviendrait sur les salaires et les échelles de salaires à la table des négociations des enseignants, s'il ne tient pas compte du fait que l'ensemble de la structure salariale est interrelié, il pourrait éventuellement arriver à des recommandations qui sont détachées de la réalité québécoise. Je vais vous donner un exemple pratique de cela.

Depuis 1972, il y a eu, à plusieurs reprises de façon convenue, une politique de protection des bas salariés, ce qui a eu pour effet que certains hauts salariés ont reçu des augmentations de salaire moins élevées que les bas salariés, mais cela a fait l'objet d'ententes entre les parties. À ce moment-ci, un médiateur devrait tenir compte de cet historique des relations du travail dans le secteur public au Québec, de politiques qui n'ont pas nécessairement existé ailleurs dans

le secteur privé ou dans d'autres groupes qui pourraient être comparables.

Donc, s'il y avait un médiateur qui intervenait sur un groupe précis, sans tenir compte de cet élément, cela pourrait avoir comme conséquence de fausser les interrelations entre les différents corps d'emploi. C'est un peu la raison pour laquelle il n'y a pas de médiation sur les salaires et les échelles de salaires.

M. Clair: J'ajouterai que, si on voulait éviter l'écueil, cela voudrait qu'il faudrait qu'il y ait un médiateur qui intervienne sur l'ensemble de toute la problématique salariale. Ce que j'indiquais tantôt au député d'Argenteuil, c'est qu'après toutes les procédures ou tenant compte de toutes les autres procédures possibles, il me semble que la portée de cette action médiatrice serait très limitée par rapport aux enjeux réels et risquerait de conduire à des attentes qui seraient bien difficiles à satisfaire, puisqu'il serait très difficile sans doute pour un seul médiateur de remplacer les parties négociantes dans l'ensemble du processus.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement est adopté?

M. de Bellefeuille: M. le Président...

Le Président (M. Lachance): M. le député de Deux-Montagnes, sur l'amendement?

M. de Bellefeuille: Oui. Les explications de M. Munn, à mon avis, ne sont pas plus convaincantes que celles du ministre. Tout cela semble se résumer - je m'excuse de répéter cela - à une espèce de vision technocratique. S'il y a véritablement négociations, il est bien sûr qu'il va y avoir un grand nombre de facteurs qui vont jouer, qui vont avoir une influence sur les salaires et les échelles de salaires de telles et telles catégories. On ne résout rien en disant que les salaires et les échelles de salaires de divers groupes sont imbriqués les uns dans les autres. Ils sont imbriqués comme résultat de négociations, ils ne sont pas imbriqués dans l'abstrait, dans une espèce de grand schéma technocratique. Ils sont imbriqués comme résultat d'une négociation. Alors, rien de ce que le ministre et M. Munn ont dit ne démontre que l'étape de la médiation que la loi prévoit ne doit pas s'appliquer aux salaires et aux échelles de salaires. Je continue à croire que, puisqu'il y a ce mécanisme de médiation, il devrait s'appliquer aux salaires et aux échelles de salaires comme au reste, et, comme le député d'Argenteuil, je m'étonne qu'un amendement aussi important nous soit présenté. Comment cela se fait-il que cela ne faisait pas partie de la loi? Je partage l'inquiétude du député d'Argenteuil à ce sujet. Comment cela se fait-il que cela vient après coup, comme amendement, puisque, dans l'esprit du ministre, cela semble fondamental?

Par ailleurs, je ne comprends pas exactement quel rôle le législateur - en l'occurrence, le ministre qui propose le projet de loi - veut attribuer à l'Assemblée nationale. Parce que, là encore, il y a une certaine confusion, il me semble. Je ne vois pas du tout comment l'Assemblée nationale, en ces matières, puisse jouer un rôle qui soit, d'une façon ou d'une autre, analogue à un rôle de médiation. Le rôle de l'Assemblée nationale, c'est de prendre connaissance d'une question et d'en discuter.

Le député de Terrebonne fait un signe qui semble vouloir dire qu'à son avis l'Assemblée nationale tranche. Bien, je ne pense pas et je voudrais que le ministre m'éclaire là-dessus. Est-ce que c'est l'Assemblée nationale qui tranche? Si c'est l'Assemblée nationale qui tranche, on a, devant nous, un bien curieux projet de loi. Ce n'est pas le rôle de l'Assemblée nationale de trancher en ces matières. Si ce n'est pas de trancher, c'est quoi, le rôle de l'Assemblée nationale?

Un troisième point, M. le Président: Puisque vous m'avez confirmé, dans cette situation de faits, que nous sommes en train de discuter à la fois l'article 46 et les amendements du ministre, je voudrais profiter de la présence parmi nous de Mme la députée de Johnson pour soulever la question de la féminisation du vocabulaire, très brièvement...

M. Blais: Non...

Le Président (M. Lachance): Non, M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Je ne propose pas un amendement. Je ne fais qu'observer... M. le Président, voulez-vous ramener le député de Terrebonne à l'ordre?

Le Président (M. Lachance): M. le député de Deux-Montagnes, la question de la féminisation a déjà été réglée et c'est...

M. de Bellefeuille: Mais ils sont terribles, ces "machos"; ils sont absolument terriblesl

Le Président (M. Lachance):... complètement antiréglementaire.

M. de Bellefeuille: Ils ne veulent absolument pas discuter la question. Ce sont des misogynesl

M. Blais: M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le député de Terrebonne.

M. Blais M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Toutes les fois que M. le député de Deux-Montagnes, que je respecte... Je suis d'accord sur le fond... Il se retourne toujours pour voir s'il n'y aurait pas un journaliste autour pour prendre une manchette; ce n'est que cela qu'il cherche.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Deux-Montagnes, je vous prierais de revenir...

M. de Bellefeuille: Ce que le député de Terrebonne vient de dire, c'est un stupide procès d'intention. S'il n'a rien d'autre à dire, il devrait respecter le silence qu'il a observé depuis une semaine complète.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Deux-Montagnes, je vous prierais de...

Une voix: M. le député de Deux-Anges!

Le Président (M. Lachance):... faire attention à vos propos. Vous savez, vous avez beaucoup de vocabulaire, habituellement, et j'espère que vous allez l'utiliser à bon escient. Je vous prierais, s'il vous plaît, de revenir à l'essentiel de l'article 46.

M. de Bellefeuille: Oui, je note à la deuxième ligne de l'article 46, M. le Président, les deux mots "un médiateur" et je déplore le fait qu'on ne lise pas là "un médiateur ou une médiatrice": Une partie peut demander au ministre du Travail de charger un médiateur ou une médiatrice de tenter de régler un différend.

Je ne vois pas pourquoi, comme c'était le cas pour les présidents et les vice-présidents, le vérificateur, les ministres, toujours au masculin, le gouvernement refuse d'envisager la possibilité qu'il nommerait une médiatrice. Je ne comprends pas cette obstination du gouvernement, M. le Président, et je m'en tiendrai à cela pour le moment.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement proposé par le ministre est adopté?

M. Clair: Adopté sur division.

M. Bisaillon: J'avais compris, M. le Président, qu'on avait étudié le premier alinéa de l'amendement, parce que, jusqu'à maintenant, on a discuté uniquement de celui-là.

Le Président (M. Lachance): Non, on a parlé de l'amendement globalement, en général.

M. Bisaillon: D'accord, M. le Président, si c'est votre décision, cela me va.

Le Président (M. Lachance): L'amendement est-il adopté sur division?

M. Clair: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 46, tel... Oui, M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: À propos de l'article 46, brièvement, M. le Président. Je vois dans le Code du travail que, sur réception d'une demande de conciliation, le ministre doit nommer un conciliateur. Ce n'est pas précisé ici. Est-ce que c'est à dessein que vous n'avez pas précisé cela? Sur réception de la demande, est-ce qu'il doit ou non en désigner un? Là, il le peut. Une partie peut le demander et on ne sait pas ce qui va arriver.

M. de Bellefeuille: II peut même ne pas accuser réception. Il peut se permettre de ne pas accuser réception.

M. Ryan: Est-ce que vous ne devriez pas ajouter cette phrase? Je vais proposer un amendement pour que ce soit bien clair sans m'imposer de vous l'expliquer longuement, tellement cela tombe sous le sens. L'amendement se formulerait comme ceci: Sur réception de cette demande, le ministre doit désigner un médiateur. Tout de suite après les mots "à l'échelle nationale".

M. de Bellefeuille: Ou une médiatrice.

M. Ryan: Ou une médiatrice, je n'ai pas d'objection du tout. On pourrait leur jouer un tour.

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Argenteuil, je voudrais vous signaler que l'amendement avait déjà été adopté.

M. Ryan: Mais j'en propose un autre. Le Président (M. Lachance): Oui?

M. Ryan: Oui, j'en propose un autre. Il n'y a pas de problème.

Le Président (M. Lachance): Alors, après les mots "à l'échelle nationale", on doit ajouter les mots "à l'exception des salaires et échelles de salaires".

M. Ryan: Exactement. Oui, d'accord. Ma formulation était erronée, fautive.

Le Président (M. Lachance): Alors, cela s'ajouterait à cela.

M. Ryan: Après ces mots, après les derniers mots dont vous avez parlé "à l'exception des salaires et échelles de salaires" ajouter les mots "sur réception de cette demande, le ministre doit désigner un médiateur".

M. de Bellefeuille: Ou une médiatrice. M. Ryan: Ou une médiatrice.

Le Président (M. Lachance): Alors, "sur réception de cette demande, le ministre doit...

M. Ryan: Désigner un médiateur.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Ryan: Je vais m'expliquer auprès de mon collègue de Deux-Montagnes. Le président a déjà décidé que ces discussions étaient antiréglementaires, qu'il avait statué il y a déjà un certain bout de temps sur ces questions qui sont portées sur une autre tribune et je ne veux pas ouvrir le débat, étant toujours soumis à la présidence.

Le Président (M. Lachance): Vous êtes assez respectueux, M. le député d'Argenteuil, des règles de procédure et des décisions de la présidence, et je l'apprécie beaucoup. Vous devriez être suivi sur cette façon de procéder par les collègues autour de la table.

M. Ryan: Je suis comblé. L'amendement est proposé et je ne veux pas l'expliquer davantage tellement il me semble...

Le Président (M. Lachance): D'accord. Oui, M. le ministre.

M. Clair: M. le Président, deux choses, rapidement. La première, c'est qu'en général, dans la législation canadienne, il n'y a pas de telle obligation d'en nommer. Cependant, compte tenu que la médiation est une étape préalable à l'exercice du droit de grève, si le ministre du Travail n'en nommait pas, il pourrait faire l'objet d'un mandamus, je pense, tel que l'objet d'un recours extraordinaire pour le forcer à en nommer un, devant les tribunaux. Ce que j'ai indiqué, premièrement, en général, dans la législation canadienne - et je pense que c'est la même chose dans la Loi sur le ministère du Travail - on n'a fait obligation, semble-t-il, nulle part, à un ministre du Travail de nommer un médiateur. Cependant, je souligne que, dans ce cas-ci, compte tenu que des droits dépendent de la nomination d'un médiateur, si le ministre du Travail n'en nommait pas un, il pourrait être soumis à l'exercice d'un recours extraordinaire du Code de procédure civile qui s'appelle un mandamus pour le forcer à en nommer un. Cela me surprendrait que le ministre du Travail se soumette à cela, mais il a une certaine discrétion. En général, dans la législation canadienne, c'est qu'il n'y a pas d'obligation d'en nommer un. Il peut en nommer un et, compte tenu qu'il serait sujet à un recours à un mandamus s'il ne procédait pas sur le plan juridique, je pense que le texte actuel est suffisant.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: M. le Président, tout dépend de la formulation qu'on utilise pour les articles et tout dépend aussi de la volonté gouvernementale. J'indique au ministre que le même ministre du Travail dont il est question ici, dans le cadre de la loi 42, par exemple, s'est imposé lui-même, par la formulation d'au moins une dizaine d'articles, une telle obligation. Ce n'était pas écrit que le ministre est obligé, mais cela disait: Sur réception, le ministre nomme... Et on pourrait le formuler de cette façon. Autrement dit, pour que l'article ait du sens, il faut qu'il s'applique. Si on ne le dit pas, cela ne veut rien dire. (22 h 30)

M. Ryan: Oui, mais il y a le mandamus.

M. Bisaillon: Le mandamus, c'est de dire: Prenez les tribunaux pour régler un problème qu'on essaie maintenant de régler par une loi. Je voudrais juste, M. le Président, rappeler au ministre que l'argument qu'il nous a donné, qu'on ne peut pas obliger un ministre à faire telle chose, le même ministre du Travail, dans la loi 42, s'est imposé cette formulation.

M. Clair: Je n'ai pas dit qu'on ne pouvait pas obliger un ministre à faire telle chose, le Parlement peut obliger le ministre X, Y ou Z à faire ce que la loi dira. Ce n'est pas ce que je dis. Ce que je dis simplement, c'est que la législation canadienne, de façon générale, ne prévoit pas précisément d'obligation à un ministre du Travail de nommer un médiateur; premièrement, c'est ce que je dis. Deuxièmement...

Une voix: So what?

M. Clair:... je dis que, cependant, compte tenu qu'à l'article 50 on indique qu'il doit y avoir un rapport écrit, un rapport

public suivant les articles 47, 48 et 49, ayant donné avis écrit au ministre du Travail, si on va à l'article 111. 10. 8, on prévoit qu"'Une partie ne peut déclarer une grève ou un lock-out avant l'expiration d'un délai de 20 jours de la date où le ministre a reçu l'avis prévu à l'article 50... ". Donc, l'exercice du droit de grève est relié, dans un premier temps, à la "cooling-off period", dans un deuxième temps, à la production et à la publication du rapport de médiation. Je dis donc que, même si ce n'est pas écrit à l'article 46, par le jeu des articles 50 et 111. 7 et suivants, si le ministre du Travail ne nommait pas un tel médiateur, il serait sujet à l'exercice d'un mandamus contre lui pour le forcer à en nommer un.

M. Bisaillon: Alors, l'argumentation du ministre, M. le Président, c'est de nous dire que la façon dont on prévoit cela, c'est que le ministre, dans le fond, va devoir répondre à un droit. S'il n'y répond pas, la partie demanderesse va être obligée d'aller devant la cour, de se prendre un mandamus pour faire respecter le droit que les articles 47 et suivants pourraient lui donner.

M. Clair: De sorte que c'est évident que le ministre va en nommer un.

M. Bisaillon: J'ajoute, M. le Président, que le ministre vient de nous dire qu'à l'article 111 du Code du travail, qu'on amendera, le droit de grève ne pourra être exercé que dans les 20 jours qui vont suivre le délai de l'article 50. Or, si, à l'article 46, le ministre du Travail, pour toutes sortes de raisons, retarde d'un mois, même si les parties allaient se chercher un mandamus pendant ce mois, l'article 111 n'a plus à s'appliquer.

M. Clair: Je suis tout à fait d'accord.

M. Bisaillon: II va falloir attendre 20 jours de plus. Autrement dit, à partir du moment où le gouvernement prévoit la nomination d'un médiateur pour tenter de rapprocher les parties, il me semble que son intérêt, c'est que cela se fasse le plus rapidement possible et qu'on prévoie que cette nomination se fasse sur réception. Je sais que le ministre est d'accord avec nous, mais il dit que c'est implicite. Nous disons: Cela va être implicite tant qu'une partie va le faire, tant que le ministre du Travail va le faire. À partir du moment où il ne le fera pas, l'autre partie va être obligée de se rendre devant un juge pour le faire interpréter de la même façon que le ministre. Pourquoi ne pas le mettre tout simplement?

M. Clair: Mais l'envers de la médaille, c'est que s'il y a... D'une part, il peut y avoir avantage, dans l'intérêt de la solution à un conflit X, Y, Z, que le ministre du Travail retarde ou conserve une discrétion pour au moins quelques jours. Un ministre du Travail qui refuserait, pendant un, deux ou trois ans, de nommer un médiateur, voyons donc, c'est ridicule! Alors, je pense qu'il y a un argument de souplesse pour le ministre du Travail, d'une part; et, d'autre part, il peut y avoir aussi un intérêt pour le ministre du Travail de ne pas avoir à nommer des médiateurs, dans un premier temps, à partir de l'équipe dont il dispose, de les nommer dans une quinzaine de dossiers en même temps et de prévoir un échelonnement, parce que certains dossiers pourraient être en remorque parfaite par rapport à d'autres et qu'une médiation dans un dossier va amener une solution dans l'autre et que, dans ce sens-là, cela peut devenir avantageux.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): On est toujours sur l'amendement du député...

M. de Bellefeuille: D'Argenteuil.

Le Président (M. Lachance):... d'Argen-teuil.

M. de Bellefeuille: Oui, M. le Président. Le ministre nous parle de mandamus. Je ne suis pas juriste, j'ai une idée de ce que cela veut dire. D'abord, je constate - je crois que le député de Sainte-Marie a déjà fait la même observation - que cela a pour effet de "judiciariser" le processus, si vous me permettez d'utiliser ce barbarisme très répandu, alors que le gouvernement, par la voix du député de Prévost et par la voix du député de Sherbrooke, ne cesse de nous dire que son principal souci en matière de relations du travail, c'est de "déjudiciariser" ces mécanismes-là.

Alors, là, le président du Conseil du trésor va dans l'autre sens de la "judiciari-sation" du mécanisme. Première observation. La deuxième observation, M. le Président, c'est que, si je comprends bien comment cela se passe, un mandamus, cela peut être refusé. Ce n'est pas parce qu'une partie demande un mandamus que c'est nécessairement obtenu, puisque cela peut être refusé. Cela ne donne pas les garanties que l'on est en droit de rechercher.

De plus, M. le Président, d'après ce que le ministre nous dit lui-même, si j'ai bien compris, le ou la ministre a ici le moyen d'annuler le droit de grève, puisque, s'il n'y a pas médiation, il ne peut pas y avoir grève. Alors, le ministre n'a qu'à ne

pas nommer de médiateur ni de médiatrice et, à ce moment-là, les travailleurs et les travailleuses n'acquièrent jamais le droit de grève.

M. Pagé: M. le Président, j'ai l'impression que M. le ministre voudrait s'amender.

M. Clair: M. le Président, j'accepte l'amendement qu'on peut relire une dernière fois pour être certain.

Le Président (M. Lachance): Certainement: Ajouter à la fin du premier alinéa, tel que déjà amendé, les mots suivants: Sur réception de cette demande, le ministre doit désigner un médiateur.

M. Pagé: Vous voulez dire que les députés péquistes s'apprêtaient à voter contre.

M. Clair: M. le Président, ce sont juste les mots "sur réception"...

M. Bérubé: Non, non, interventions auprès des ministres responsables.

M. Clair: C'est peut-être un peu fort. Qu'on fasse l'obligation au ministre de nommer le jour où il reçoit, c'est peut-être un peu fort.

M. Bisaillon: L'expression, "sur réception", c'est la même chose que "dans le plus bref délai".

M. Ryan: Mais, qu'est-ce que vous voulez écrire?

M. Clair: Simplement de faire obligation au ministre du Travail de nommer. Je ne sais comment on pourrait le formuler: Une partie peut demander au ministre du Travail de charger un médiateur de tenter... Non, je m'égarais de la formulation. Le ministre du Travail doit nommer un tel médiateur, parce que "sur réception"... Mais, "sur réception", c'est encore plus court.

M. Ryan: Si vous mettiez un délai de huit jours cela aurait du bon sens, mais il ne faut pas que cela traîne. S'il nous arrive après trois semaines en disant: Je suis obligé mais la loi ne m'indique aucun moment, alors, ne vous inquiétez pas, mon obligation j'en suis conscient comme vous, on a l'air fin.

M. Clair: Mais, encore une fois, je ferai remarquer au député que...

M. Ryan: On ne peut pas légiférer pour ne rien dire.

M. Clair: Oui. Mais je ferai remarquer encore une fois qu'il y a plusieurs législateurs qui auraient légiféré pour ne rien dire, y compris celui-ci, parce que la Loi sur le ministère du Travail ne fait pas obligation au ministre du Travail de nommer un médiateur.

C'est le député d'Argenteuil qui me reprochait à plusieurs reprises de vouloir faire du droit nouveau. Cette fois-ci, c'est lui qui veut faire du droit nouveau.

M. Ryan: Au contraire, je m'inspire de la législation existante.

M. Bisaillon: M. le Président, on porte à mon attention le texte du Code du travail, article 54, qui s'applique à la conciliation où c'est dit: "Sur réception de cette demande, le ministre doit désigner un conciliateur. " Alors, cette formulation est déjà dans le Code du travail. Elle a dû elle aussi, être jugée et testée. Alors, c'est le texte du Code du travail, article 54, sur la conciliation. Quand une partie demande la conciliation, le texte qui suit, c'est: "Sur réception de cette demande, le ministre doit désigner un conciliateur. "

Alors, cela me semble répondre exactement en tous points au texte même de l'amendement, appliqué à la médiation, du député d'Argenteuil.

M. Clair: M. le député de Sainte-Marie faisait lui-même tantôt une distinction entre la conciliation et la médiation. Je proposerais plutôt: À la demande d'une partie, le ministre du Travail charge un médiateur.

M. Ryan: Oui.

M. Clair: À ce moment-là...

M. Ryan: Merci. C'est exact.

M. Clair: Alors, M. le Président, je propose de modifier la... Oui, il faudrait que vous retiriez votre amendement.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que vous acceptez de retirer votre motion d'amendement, M. le député d'Argenteuil?

M. Ryan: Oui, volontiers, si cela peut simplifier et hâter les procédures.

M. Bisaillon: Puisque la motion nous appartient, nous acceptons.

M. Ryan: C'est cela, c'est entendu.

M. Pagé: La commission en était déjà saisie.

M. Clair: M. le Président, je propose, à

l'article 46, de remplacer la première ligne par les mots suivants: "À la demande d'une partie, le ministre du Travail charge un médiateur".

Une voix: C'est un ministre très conciliant.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Ryan: On portera le jugement à la fin.

M. Clair: L'avez-vous bien noté, M. le député?

M. Ryan: II faut le garder à l'épreuve.

M. Bérubé: Très ouvert aux amendements.

M. Clair: Pour le Journal des débats, je vais répéter.

M. Ryan: Cela paraît que vous n'avez pas été ici longtemps.

M. Clair: Je propose, M. le Président, de biffer la première ligne de l'article 46, c'est-à-dire les mots "Une partie peut demander au ministre du Travail de charger" pour les remplacer par: "À la demande d'une partie, le ministre du Travail charge".

M. Bérubé: M. le Président, je dois vous avouer que les arguments du président du Conseil du trésor m'avaient convaincu qu'il fallait rejeter l'amendement, mais je trouve qu'il est très ouvert aux amendements de l'Opposition. Il est également convaincant dans la révision de sa position.

M. Ryan: M. le Président, comme les membres du gouvernement ont développé une véritable aptitude à s'ajuster journellement aux orientations ou aux décisions qui paraissent contraires ou profanes...

M. Clair: C'est mon métier.

M. Ryan:... on accepterait bien l'aveu du ministre de l'Enseignement supérieur comme s'inscrivant dans la ligne d'orthodoxie la plus récente.

Le Président (M. Lachance): J'en conclus que l'amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté.

M. Clair: Est-ce que l'article 46 est adopté?

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 46 tel qu'amendé est adopté? Il faut bien comprendre qu'il y a deux amendements qui ont été adoptés à l'article 46. Est-ce que l'article 46 est adopté tel qu'amendé?

M. Bisaillon: Si on avait à voter, on voterait sur division, mais, comme on ne vote pas, on ne le fera pas.

M. Clair: On peut l'adopter sur division.

Le Président (M. Lachance): J'appelle l'article... Il n'y a personne qui a le droit de vote parmi les gens qui sont là, M. le député.

M. Clair: On est habitué à leur division, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Mais ils ont le droit de parole.

M. Bisaillon: J'ai juste dit que, si j'avais eu à voter, je l'aurais fait sur division.

Le Président (M. Lachance): J'appelle l'article 47.

M. Clair: M. le Président, j'aurais deux amendements à proposer à l'article 47. Premièrement, qu'il soit modifié par le remplacement, dans la première ligne du premier alinéa, du chiffre "30" par le chiffre "60". Deuxièmement, un nouvel amendement que vous pouvez faire parvenir aux collègues. Je propose que l'article 47 du projet de loi soit modifié par la suppression, dans la troisième ligne du premier alinéa, des mots "règlement du".

Je peux donner quelques explications. À la suite des représentations qui nous ont été faites par le ministère du Travail, il a été convenu de modifier la période de médiation de 30 à 60 jours et, deuxièmement, de rayer à la fin les mots "le règlement" puisqu'on voit que ces mots s'imbriquaient dans la fin de la phrase: "un rapport contenant ses recommandations sur le règlement du différend". Pour plus de souplesse, on nous a demandé de retenir simplement les mots "ses recommandations sur le différend".

M. de Bellefeuille: M. le Président, c'est un nouvel amendement, c'est-à-dire qu'il y en a un qu'on a déjà par écrit et l'autre, c'est un nouvel amendement.

M. Clair: Effectivement.

Le Président (M. Lachance): Le premier amendement, à la première ligne, c'est de remplacer le chiffre "30" par le chiffre "60". Est-ce que c'est adopté? M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: M. le Président, je voudrais juste rappeler ici aux membres de la commission que, selon l'explication que nous a donnée le ministre tantôt, on vient par le fait même de repousser la période du droit de grève de 30 jours additionnels. (22 h 45)

M. Clair: M. le Président, drapeau blanc encore une fois là-dessus. Il y a deux choses: d'abord, la formulation du projet de loi telle qu'elle était prévoyait 30 jours avec possibilité de prolongation, avec l'accord des parties. Si le président du Conseil du trésor a droit à la présomption de bonne foi, j'insiste pour dire que c'est à la suite de représentations qui nous ont été faites par le ministère du Travail et ses experts selon lesquelles on préférait obtenir 60 jours plutôt que 30 jours. Ce n'est aucunement quelque finasserie que ce soit de la part du président du Conseil du trésor.

M. Bisaillon: Non, non, M. le Président, je voudrais bien qu'on me comprenne. Je n'ai pas essayé d'expliquer que c'était par finasserie que cela était fait comme ça, mais les effets sont les mêmes.

M. Clair: D'accord.

M. Bisaillon: Dans le texte original, cela pouvait être après une période de 60 jours, mais au moins les parties en convenaient. Donc, les parties trouvaient qu'il était opportun ou intéressant de se donner du temps additionnel, tandis que l'article 111 que vous m'avez lu tantôt, que vous allez amender dans le projet de loi 37, repose sur l'article 50. Or, l'article 50, c'est à partir des avis qui sont fournis au ministre du Travail en fonction des articles 47, 48 ou 49. Si je mets 60 jours au lieu de 30 jours, cela veut dire que le droit de grève dans ce cas-là, de façon automatique, va arriver 20 jours après l'avis que le ministre va avoir reçu, 30 jours plus tard que ce qui était prévu initialement.

M. Clair: Suivant la date à laquelle la médiation a été demandée, parce que la médiation peut être demandée à compter du 3 octobre.

M. Bisaillon: Oui, mais peu importe, M. le ministre...

M. Clair: Le député a raison: en tout état de cause, cela retarde tout le processus de 30 jours, mais c'est la raison pour laquelle j'indiquais au député que c'est à la suite de représentations qui nous ont été faites par le ministère du Travail et ses experts.

M. Bisaillon: Qu'est-ce qu'ils vous ont dit là-dessus, les parties syndicales et leurs experts, puisque vous avez pris avis du ministère du Travail et de ses experts?

M. Clair: M. le Président...

M. Bisaillon: Est-ce qu'ils l'ont en main, cet amendement que vous nous déposez aujourd'hui?

M. Clair: L'amendement n'a pas été déposé aujourd'hui, mais j'ai déposé dès le début des travaux de la commission ces amendements.

M. Bisaillon: Oui, oui, excusez.

M. Clair: J'ignore s'il y a eu des pourparlers récents.

M. Bisaillon: Est-ce qu'il y a eu distribution des amendements?

M. Clair: Oui, oui, les amendements ont tous été distribués et je suis convaincu qu'une distribution élargie a été effectuée par la suite.

M. Bisaillon: M. le Président, je vais terminer avec cette intervention-là. Le projet de loi 37 non seulement enlève des outils, diminue le rapport de forces et met en position plus difficile les représentants des travailleurs et des travailleuses, mais, avec un certain nombre d'amendements qui ont l'air anodin, on vise aussi à le rendre encore plus difficile d'application. Les quelques éléments que les discussions entre les parties avaient laissés en place glissent tranquillement au fur et à mesure qu'on s'en va. Je prétends que c'est un des éléments... Je n'accuse pas le ministre de mauvaise foi, le président du Conseil du trésor de mauvaise foi. Je dis juste que cela a un effet pour une des parties seulement. Je trouve qu'on se préparait à voter cela rapidement, sans le mentionner. Je trouve un peu abusif de ne pas dire que c'est ce que cela a pour effet. Quant à moi, dans l'ordre de la démarche qui est entreprise, les discussions avaient réussi à ne pas trop en enlever et là on en enlève encore tranquillement dans le processus parlementaire. Quand on va commencer les véritables négociations sous ce régime, on va en enlever encore et probablement qu'on sera obligé aussi d'adopter une autre loi spéciale où on les enlèvera toutes.

M. Clair: M. le député de Sainte-Marie me fait un procès d'intention, M. le Président, quand il dit...

M. Bisaillon: Non, je fais comme vous, je fais de la prédiction.

M. Clair:... qu'on en enlèvera encore ou

que c'est..

M. Bisaillon: Je fais comme vous hier, M. le ministre, une prédiction.

M. Clair: Une prédiction? Ah bon!

Le Président (M. Lachance): Est-ce que ce premier amendement est adopté?

M. Clair: Je voudrais insister, M. le Président, pour dire au député de Sainte-Marie - on va le vérifier - que je me souviens que cet article a été modifié à de multiples reprises dans les différentes versions de la loi en préparation. Si ma mémoire est fidèle - on va le vérifier, peut-être que je fais erreur - je pense que dans l'avant-projet de loi c'était 60 jours. Nous sommes revenus à 30 jours à la suite de certaines représentations et, finalement, aujourd'hui, la vérité vraie, je vous la dis, simple et sincère, c'est à la suite de représentations qui nous ont été faites par le ministère du Travail. C'est la vérité toute...

M. Bérubé: Toute nue. M. Clair:... toute nue.

Le Président (M. Lachance): Alors, ce premier amendement est adopté?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Lachance): Adopté.

M. Bisaillon: La vérité toute nue n'est pas toujours belle. Si j'avais l'occasion de le dire, M. le Président, je vous dirais que ce serait sur division, mais je n'ai pas le droit.

Le Président (M. Lachance): Alors, j'appelle le deuxième amendement.

M. Clair: Cela fait également suite à des représentations du ministère du Travail.

Le Président (M. Lachance): L'article 47 du projet de loi est modifié par la suppression, dans la troisième ligne du premier alinéa, des mots "règlement du". Est-ce que c'est adopté?

M. Bisaillon: Sur le différend, nouvelle version. C'est ça?

Le Président (M. Lachance): L'amendement est-il adopté? Oui, M. le ministre.

M. Clair: Amende honorable: dans l'avant-projet de loi, c'était également 30.

Une voix: C'était quoi?

M. Clair: C'était également 30.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 47, tel qu'amendé, est adopté? C'est adopté. J'appelle l'article 48.

M. Bisaillon: Un instant, M. le Président! Ce sont les amendements qu'on vient de voter.

M. Clair: Oui.

M. Bisaillon: On n'a pas adopté l'article.

Le Président (M. Lachance): C'est la question que j'ai posée.

M. Bisaillon: C'est parce qu'à l'article 47 il y a deux autres paragraphes et j'ai, dans une intervention préalable, fait part au ministre de ma réaction au deuxième alinéa: "Ce rapport doit être rendu public à la demande d'une partie. " Je ne vois pas ce que cela vise ou ce que cela veut préserver pour une ou l'autre partie, dans la tête du ministre, au deuxième paragraphe de l'article 47.

M. Clair: Cela veut simplement ménager la possibilité que les deux parties aient un intérêt réciproque à ne pas le rendre public et désirent profiter d'un court délai pour tenter de s'entendre avant que le rapport ne soit rendu public.

M. Bisaillon: Habituellement, quand cela se produit, le médiateur est au courant. Habituellement, un médiateur, avant de rendre un rapport public, quand il doit le rendre public, les parties ont une période pour se rapprocher. Il leur donne une période d'une, deux ou trois journées pour aménager les affaires. Quant à le formuler comme cela, je trouverais préférable qu'on dise: Ce rapport doit être rendu public. Je trouverais préférable qu'on dise cela. Cela enlèverait toutes les petites questions de stratégie et cela obligerait, dans le fond, le médiateur à donner la possibilité d'une période de deux ou trois jours à l'interne pour que les parties qui pensent qu'elles pourraient régler sur la base du rapport du médiateur le fassent. Je préférerais: Ce rapport doit être rendu public.

M. Clair: Je suis en désaccord avec le député de Sainte-Marie. Il me semble que cela ne fait que donner un élément de souplesse et je ne vois pas pourquoi le député veut enlever cet élément.

M. Bisaillon: M. le Président, je vais en faire un amendement formel en vous l'expliquant. Autrement dit, je propose qu'au deuxième paragraphe de l'article 47 on

enlève: "à la demande d'une partie". Je vais expliquer ma position et je vais vous dire en quoi cela pourrait ajouter quelque chose. Au niveau public, quand une partie va faire la demande que le rapport soit public, elle va avoir automatiquement, en partant, de plus grandes chances de crédibilité que l'autre. Si je demande que le rapport soit rendu public, c'est parce que, moi, je n'ai rien à perdre. Juste par stratégie, je pourrais demander la publication du rapport pour mettre l'autre partie en position difficile. Comme on sait que, de toute façon, une des deux parties va avoir un intérêt à un moment donné, ce qu'on voulait préserver, si j'ai bien compris le ministre, c'était juste quand les deux parties avaient intérêt à ce qu'il ne 'soit pas rendu public. Mais, si les deux parties n'ont pas intérêt à ce qu'il soit rendu public, c'est parce que le médiateur a encore un petit travail à faire et qu'il va faire ce travail à l'interne.

À partir du moment où une des deux parties peut le demander, celle qui va le demander va avoir le plus de crédibilité au niveau public. Dans les circonstances, pour ne pas que la publication fasse l'objet de stratégie, mais que cela fasse l'objet d'une volonté de rendre publiques des recommandations, je trouverais préférable que ce soit automatiquement rendu public. Comme cela, aucune des deux parties n'a à gagner, entre guillemets, à la publication. Les deux parties sont sur le même pied, les deux parties savent, dès le départ, les règles du jeu étant connues, que le rapport va être rendu public.

Sur le plan de la présence publique et de la crédibilité publique, je trouve qu'il pourrait y avoir uniquement une question de stratégie. La partie qui ne le demande pas ou qui l'aurait peut-être demandé, mais qui n'a pas pensé le faire, va être moins bien placée sur le plan de l'opinion publique.

Je ne sais pas, par exemple, comment réagirait quelqu'un du milieu de l'information là-dessus, quelqu'un habitué à analyser les façons de se comporter des groupes. Je pense, entre autres, à certains éditorialistes. Quand une partie demande: Je veux que ce soit rendu public, c'est parce qu'elle dit: Je n'ai rien à cacher et je n'ai pas peur. Sur le plan de l'analyse, les gens doivent se dire cela en partant. Donc, on met, entre guillemets, une partie en position plus difficile par rapport à la publication. C'est aussi bien que ce soit clair et franc, en partant, que cela va être rendu public.

Le Président (M. Lachance): Je relis l'amendement du député de Sainte-Marie: Au deuxième alinéa, après les mots "rendu public", biffer les mots "à la demande d'une partie".

M. Bisaillon: M. le Président, M. le ministre hochait la tête un peu. J'aimerais savoir s'il a des... Il m'a donné un argument et j'ai essayé d'y répondre.

M. Clair: Entre le risque de l'utilisation des fins stratégiques et la souplesse, j'ai plutôt tendance à choisir la souplesse, quant à moi.

Le Président (M. Lachance): Alors, est-ce que l'amendement est adopté?

Une voix: Non.

M. Pagé: Oui, M. le Président, adopté.

Une voix: Oui, adopté.

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): L'amendement est™.

M. Clair: Suspendu.

M. Pagé: La séance ou l'article, M. le ministre?

Une voix: Un ministre ouvert.

Une voix: Ouvert aux suggestions, conciliant.

M. Bisaillon: M. le Président, quand on siège 24 heures en ligne, est-ce qu'on pourrait se permettre de se lever deux minutes? Suspendre pendant deux ou trois minutes, on reste autour, mais cela permet à tout le monde de consulter.

Le Président (M. Lachance): Je vous fais confiance. J'accepte de bon gré votre suggestion. Est-ce qu'on peut se dire qu'à 23 heures pile on recommence?

M. Bisaillon: Très bien, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Très bien. Alors suspension de cinq minutes.

(Suspension de la séance à 22 h 56)

(Reprise à 23 h 2)

Le Président (M. Lachance): La commission poursuit ses travaux. Nous allons suspendre pour quelques instants supplémentaires.

(Suspension de la séance à 23 h 3)

(Reprise à 23 h 15)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission du budget et de l'administration poursuit ses travaux après cette suspension. Est-ce qu'on peut disposer de l'amendement proposé par le député de Sainte-Marie?

M. Clair: Si le député de Sainte-Marie acceptait que je fasse mienne une partie de son amendement et que j'y fasse une modification pour que le deuxième alinéa se lise comme suit: À défaut d'entente sur le différend, ce rapport doit être rendu public...

M. Bisaillon: L'ex-député de Bourget...

M. Clair: Je répète, je pense que, lors du conciliabule qui a eu lieu lors de la suspension, on a tenté d'avoir la formulation idéale. Ce que je proposais, c'était que le deuxième alinéa se lise comme suit: À défaut d'entente sur le différend, ce rapport doit être rendu public.

M. Bisaillon: L'ex-député de Bourget, le Dr Laurin, dirait que c'est superfétatoire. L'article commence par "À défaut d'entente". Autrement dit, l'article dit que le médiateur doit fournir un rapport s'il n'y a pas d'entente parce que, s'il y a entente, il n'aura plus besoin de rapport de médiation. Ce qui est l'objet de la médiation, c'est de rapprocher les parties. Le médiateur va travailler avec ces gens pour une période de 60 jours; s'ils s'entendent, il n'y aura pas de rapport de médiation, il y aura une entente entre les parties. S'ils ne s'entendent pas, mais qu'ils sont proches d'une entente et qu'ils ont besoin de plus de temps pour s'entendre et pour consulter, c'est le troisième paragraphe de l'article qui va jouer. La période prévue par le premier alinéa peut être prolongée avec l'accord des parties. Les parties auront un intérêt à prolonger.

Je n'ai pas d'objection à ce que le ministre le dise ainsi, mais, comme le disait l'ex-député de Bourget, c'est superfétatoire. L'ensemble du paragraphe prévoit un rapport uniquement lorsque c'est à défaut d'entente. Forcément, ce rapport doit être rendu public. Je le relis au premier paragraphe: "À défaut d'entente", c'est déjà marqué. Je ne sais pas ce que le ministre en pense, mais il me semble que c'est déjà marqué.

Je comprends que, pour certains, trop fort ne casse pas, mais dans nos lois, on a avantage à ce que les gens comprennent du premier coup.

M. Pagé: M. le Président, là-dessus, je comprends que le libellé, la motion d'amendement proposée par le ministre porte à croire que le législateur parlerait ainsi pour ne rien dire. Il est bien mentionné que c'est à défaut d'entente, après l'expiration d'une période de 30 jours.

M. Bisaillon: De 60 jours, maintenant.

M. Pagé: Cela fixe un cadre beaucoup plus restrictif par rapport à l'échange qu'on a eu, j'en conviens, au moment de l'ajournement. Si on l'adoptait tel quel, ça ne respecterait pas l'intention ou l'interprétation qu'on a voulu donner, aux dispositions qu'on s'apprêtait à adopter.

M. Bisaillon: Qu'on me comprenne bien, M. le Président...

M. Clair: Évidemment, on a des problèmes de rédaction.

M. Bisaillon: C'est ça. Qu'on me comprenne bien, je l'accepterais, la proposition du ministre.

M. Clair: J'hésite à forcer l'adoption parce que je ne suis pas sûr si c'est le meilleur libellé. Dans le fond, si ce n'était de risquer une confusion, la meilleure façon de le formuler, ce serait: Ce rapport doit être rendu public à moins qu'il n'y ait entente entre les parties. Mais, là, "à moins qu'il n'y ait entente entre les parties", est-ce que ça signifie sur la publication ou sur le fond? Alors, ce qu'on veut, c'est que ce soit sur le fond. Pour contrecarrer cette difficulté, j'essayais de le formuler autrement, et c'est là qu'on en arrivait à: "À défaut d'entente sur le différend, ce rapport doit être rendu public".

M. Bisaillon: Parce que vous vouliez que ça s'applique au fond, parce que l'entente dont on parle, c'est l'entente sur le fond.

M. Clair: C'est exact, sur le fond.

M. Bisaillon: II me semble clair que, dans la première phrase de l'article 47, quand on dit "À défaut d'entente", on parle du fond.

M. Ryan: Là, on est rendu à un autre stade...

M. Bisaillon: Oui, mais...

M. Clair: On est à l'expiration du mandat de médiateur.

M. Ryan: S'il pouvait clarifier sa rédaction pour montrer que c'est un autre stade, je pense que ça éviterait la critique de répétition que vous avez formulée. Je pense que c'est ce qu'on essaie de trouver. Vous avez raison, c'est...

M. Clair: Je vous demande votre avis: Est-ce que vous pensez qu'il y aurait effectivement risque de confusion si on disait: Ce rapport doit être rendu public à moins qu'une entente n'intervienne entre les parties?

M. Ryan: Sur le différend.

M. Clair: À moins qu'une entente sur le différend n'intervienne entre les parties.

M. Bisaillon: À moins qu'une entente sur le différend n'intervienne entre les parties.

M. Ryan: Je pense que ce serait correct avec ça.

M. Bisaillon: Je l'accepterais, pour ne pas retarder les travaux.

Le Président (M. Lachance): M. le député, est-ce que vous accepteriez de retirer votre amendement?

M. Bisaillon: Oui, bien sûr.

M. Ryan:... une médaille de l'ordre de l'indépendance socialiste.

Le Président (M. Lachance): Alors, l'amendement du député de Sainte-Marie est retiré? Je demanderais à M. le ministre de nous libeller son amendement.

M. Clair: L'amendement que je propose, techniquement, c'est de rayer les mots, au deuxième alinéa de l'article 47 "à la demande d'une partie" et de les remplacer par les mots: à moins qu'une entente n'intervienne...

Une voix: C'est bon, cela.

M. Clair:... sur le différend entre les parties.

M. Ryan: II n'est pas nécessaire d'ajouter "entre les parties".

M. Clair: À moins qu'une entente n'intervienne sur le différend.

M. Ryan: C'est cela. M. Bisaillon: C'est cela.

M. Ryan: Si ce n'est pas entre les parties, il n'y aura pas d'entente.

M. Clair: Là, ce serait superfétatoire. M. Ryan: Je crois qu'avec cela... Une voix: N'intervienne?

M. Dussault: Intervienne.

M. Clair: À moins qu'une entente intervienne ou n'intervienne?

M. Pagé: M. le député de Terrebonne va répondre à cela.

M. Bisaillon: C'est: n'intervienne. M. Clair: Que ne...

M. Blais: C'est le "n" qui fait la liaison. Le "n"' doit sauter.

Une voix: C'est la liaison qui nous t'ait prononcer...

M. Dussault: À moins qu'une entente intervienne.

M. Blais: La liaison est pour éviter...

M. Clair: À moins qu'une entente intervienne.

M. Blais: Le "n"' doit sauter.

M. Pagé: Comme c'est facile de s'entendre après 23 heuresl Je propose qu'on commence, demain soir, à 23 heures.

M. Blais: C'est parce que c'est notre première apostrophe, M. le député.

M. Clair: Alors, c'est: "à moins qu'une entente intervienne sur le différend". Est-ce que vous avez bien noté, M. le Président?

Le Président (M. Lachance): Oui, voilà! Voici, et vous me corrigerez si c'est inexact, M. le ministre. Votre amendement se lirait comme suit: Au deuxième alinéa, biffer les mots "à la demande d'une partie" et les remplacer par "à moins qu'une entente intervienne sur le différend".

M. Clair: C'est exact.

Le Président (M. Lachance): C'est bien cela? Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Clair: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 47 tel qu'amendé est adopté?

M. Clair: Adopté.

M. Bisaillon: M. le Président, un bref commentaire sur le troisième paragraphe, pour dire que j'ai l'impression qu'on a un peu abusé de moi parce que, tantôt, lorsque j'ai fait des commentaires sur les 30 jours ou 60 jours, le ministre m'avait expliqué que la

première formulation c'était 30 jours et un délai prolongé s'il y avait une entente entre les parties. Le ministre m'avait répondu: Le ministère du Travail nous a demandé de remplacer tout cela par les 60 jours. J'avais compris que tout cela, c'était tout, mais là, je me rends compte que le troisième paragraphe est toujours là. Autrement dit, c'est 60 jours et cela peut être prolongé encore s'il y a une entente entre les parties pour le faire. C'est cela?

M. Clair: Le député relira mes propos. Je n'ai jamais dit qu'on nous avait demandé de modifier tout cela. On nous avait demandé deux choses: de modifier le délai et d'enlever les mots "le règlement".

Le Président (M. Lachance): L'article 47 est-il adopté tel qu'amendé?

M. Clair: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 48?

M. Clair: Je n'ai pas d'amendement, M. le Président.

M. Bisaillon: Un instant, M. le Président. À l'article 48, dans une première remarque, par concordance, ne devrait-on pas enlever "sur le règlement" pour dire "sur le différend" afin de respecter ce qu'on a corrigé à l'article 47? À l'article 47, on a enlevé les mots "règlement du" et les recommandations portaient sur le différend. Il me semble qu'on devrait faire la même chose à l'article 48.

Le Président (M. Lachance): Au deuxième alinéa?

M. Clair: Que ferions-nous si nous n'avions pas le député de Sainte-Marie?

M. Bisaillon: Le député de Bourassa dirait que c'est de la concordance.

M. Clair: C'est de la concordance, M. le Président. Il faudrait rayer les mots...

M. Bisaillon: "Règlement du".

M. Clair: C'est cela, il faut rayer les mots "règlement du" à la deuxième ligne du deuxième alinéa.

M. Ryan: II en est de même pour le troisième alinéa, M. le ministre.

M. Clair: De même qu'au troisième alinéa, c'est ce que j'allais dire. Il faudrait aussi faire la même modification que celle que nous avons faite: "Ce rapport doit être rendu public, à moins qu'une entente intervienne sur le différend".

Le Président (M. Lachance): Pour être bien certain de ne pas faire d'erreurs, au deuxième alinéa, à la deuxième ligne, il faut rayer les mots...

M. Clair: C'est: sur le différend. Nous rayons les mots "règlement du".

Le Président (M. Lachance): Les mots "règlement du".

M. Clair: Effectivement.

Le Président (M. Lachance): D'accord.

M. Clair: Et, au dernier alinéa...

Le Président (M. Lachance): Au troisième alinéa...

M. Clair:... on raie les mots "à la demande d'une partie" et on les remplace par "à moins qu'une entente intervienne sur le différend".

M. Bisaillon: C'est ce qu'on disait tantôt.

M. Clair: Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Bisaillon: Lequel est-ce? La concordance?

M. Clair: Les deux membres de concordance.

M. Bisaillon: Les deux concordances?

Le Président (M. Lachance): Je relis: À l'article 48, deuxième alinéa, deuxième ligne, rayer les mots "règlement du"; au troisième alinéa, rayer les mots "à la demande d'une partie" et les remplacer par "à moins qu'une entente intervienne sur le différend". Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Clair: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 48...

M. Bisaillon: M. le Président...

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le député.

M. Bisaillon:... selon la première partie, le premier paragraphe de l'article 48, "Les parties peuvent faire une entente sur une procédure de médiation... ". Pour ce qui est du français, est-ce qu'on ne pourrait pas dire: Les parties peuvent s'entendre ou peuvent convenir, mais non "peuvent faire

une entente... "? En tout cas, cela ne me semble pas être du bon français, c'est sûr. ... "sur une procédure de médiation différente de celle prévue par les articles 46 et 47", cela va. "Elles peuvent notamment avoir recours à un conseil de médiation ou à un groupe d'intérêt public. " Qu'est-ce que cela ajoute aux yeux du ministre, cette partie? Si elles peuvent s'entendre sur une procédure différente, tout leur est possible, y compris ce qui suit. Est-il essentiel aux yeux du ministre que cela soit là?

Alors, mon premier commentaire, c'est "peuvent faire une entente" à remplacer par "peuvent s'entendre". La deuxième partie du premier paragraphe, est-ce que le ministre trouve que c'est essentiel? Pourquoi l'a-t-il placée là? Il devait avoir des raisons.

M. Ryan: Ce n'est pas nécessaire.

M. Clair: Comment dites-vous? Je ne suis pas sûr d'avoir... "Peuvent faire une entente", je pense que c'est encore mieux que s'entendre. Peuvent convenir...

M. Bisaillon: Oui, peuvent convenir, c'est ce que je disais.

M. Clair: Peuvent convenir.

M. Bisaillon: Peuvent convenir d'une procédure de médiation différente.

M. Clair: Peuvent convenir d'une procédure de médiation différente.

M. Bisaillon: Point.

M. Clair: Alors, si cela ne vous complique pas trop la vie, M. le Président, remplacer les mots "faire une entente sur" par "convenir d'".

M. Bisaillon: Oui, "d"'.

M. Clair: "d"'. Et vous en avez contre la deuxième partie de l'alinéa?

M. Bisaillon: À partir du moment où la première partie du paragraphe dit que "les parties peuvent convenir d'une procédure de médiation différente", c'est que tout leur est possible.

M. Clair: Oui, mais ce qui...

M. Bisaillon: Alors, le fait de préciser qu'elles peuvent notamment avoir recours à un conseil de médiation ou à un groupe d'intérêt public, cela n'ajoute rien au premier paragraphe. Cela précise des modes possibles, mais cela n'ajoute rien. Alors, je me demandais si vous aviez eu des raisons spéciales ou particulières pour noter ces deux modes de médiation ou ces deux procédures différentes plutôt que d'autres.

M. Clair: C'est à des fins, je reconnais...

M. Bisaillon: Pédagogiques. M. Clair:... pédagogiques.

M. Ryan: Vous pensiez que vous écriviez un editorial pour le Devoir.

M. Blais: Des vieux souvenirs. M. Pagé: Des bons? M. Blais: Ah oui!

M. Ryan: Non, mais ce sont des choses qui ne sont pas nécessaires dans les textes de loi.

M. Blais: Surtout celui du 14 novembre 1976.

Le Président (M. Lachance): On s'ennuie parfois là-dessus, justement.

M. Clair: J'ai la conviction qu'avec l'ensemble des lois qui existent dans...

M. Ryan: Vous en aviez pourtant un bon ce matin.

Le Président (M. Lachance): Oui, on aurait pu se passer de celui-là.

M. Blais: C'était sur quoi ce matin?

M. Ryan: C'était sur le livre choc du Parti québécois. Le directeur du Devoir, avec sa formation d'historien, a montré que cela ne valait rien.

M. Blais: Est-ce qu'il y a une bonne appréciation?

M. Ryan: Très sévère. C'est sûr que pour vous cela va avoir beaucoup de poids.

Une voix: Mais je ne l'ai pas lu.

M. Clair: M. le Président, le député...

Une voix:... ne commencez pas une bataille.

M. Clair:... d'Argenteuil sème le trouble.

Le Président (M. Lachance): Ce n'est pas son habitude.

M. Clair: Je pense que je vais avoir... S'il ne veut pas que j'adopte l'attitude du député de Portneuf à son égard...

Le Président (M. Lachance): Alors, je relis...

M. Clair:... comme celle que le député adoptait tantôt à l'égard du ministre de la Science et de la Technologie.

M. Pagé: Oui, cela remonte à avril 1981.

M. Clair: Ah oui!

M. Pagé: Oui.

M. Clair: Alors cela remonte à...

Le Président (M. Lachance): Les gens ressassent leurs vieux souvenirs.

M. Clair: Je n'ai rien qui remonte à rien avec le député d'Argenteuil. Je n'ai toujours eu que de bonnes relations.

M. Ryan: La remarque que je faisais avait simplement pour objet de dire que je serais d'accord avec le député de Sainte-Marie pour considérer que la deuxième phrase de l'alinéa n'est pas nécessaire dans un texte de loi. Je n'en fais pas de casus belli. (23 h 30)

M. Bisaillon: Comment dites-vous cela?

M. Ryan: Casus belli, un cas de guerre.

M. Bisaillon: C'est un vrai éditorial du Devoir!

M. Clair: J'y tiendrais. Comme législateur, je n'ai pas souvent insisté pour avoir des formules pédagogiques dans nos lois, mais celle-ci, il me semble qu'elle pourrait inspirer les parties.

M. Bisaillon: Cela les oriente, voulez-vous dire, vers...

M. Clair: Cela les oriente.

M. Bisaillon: De telle sorte que si, par exemple, la partie patronale pensait qu'un groupe d'intérêt public lui est, dans les circonstances, plus utile, comme c'est déjà dans la loi, elle serait en meilleure position pour faire valoir aux yeux du public cette méthode plutôt qu'une autre.

M. Clair: Si je me souviens bien, M. le Président, dans le document du regroupement des syndicats des secteurs public et parapublic où on parlait d'un conseil de médiation, on a fait référence à ces formules. Je ne pense pas que cela fasse de mai à personne.

M. Ryan: Cela ne fait pas de mal.

M. Blais: M. le Président, seriez-vous tenté d'ajouter à l'amendement "et l'éditorialiste du Devoir" ou si c'est juste en badinant?

M. Ryan: Non, dès qu'ils vont parler à un groupe d'intérêt public, ils vont penser à cela. Ce n'est pas nécessaire de l'ajouter.

Le Président (M. Lachance): Je reviens à l'amendement proposé. À la première ligne du premier alinéa, biffer les mots "faire une entente sur" et les remplacer par "convenir d"'.

Une voix: Oui.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que c'est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): L'amendement est adopté. Est-ce que l'article 48, tel qu'amendé...

M. Bisaillon: Moi non plus, je n'en fais pas de casus - je ne sais pas trop comment vous dites - mais le ministre ne peut me donner que des arguments pédagogiques. Il persiste à me dire que c'est uniquement pour des fins pédagogiques que ces deux choses sont là.

M. Clair: II s'agit d'indiquer clairement que, notamment, ces deux formes de médiation sont permises aux parties.

M. Bisaillon: Est-ce qu'il ne considère pas que l'argument que je lui ai apporté - ce n'était pas un argument - que la considération, dis-je, que je lui ai apportée pourrait éventuellement être utilisée et que, à ce moment-là, loin d'avoir une valeur pédagogique, cela jouerait dans les relations ou dans les stratégies des parties?

M. Clair: Les deux sont prévus: conseil de médiation ou groupe d'intérêt public.

M. Bisaillon: Voyez-vous ce que vous me dites déjà? Vous me donnez raison: les deux sont prévus. Donc, quand on va vouloir envisager des procédures différentes de médiation, on va automatiquement se référer aux deux.

M. Clair: À laquelle vous...

M. Bisaillon: II peut y en avoir d'autres.

M. Clair: Oui, mais on dit "notamment"; cela n'exclut pas, mais...

M. Bisaillon: Je suis d'accord avec vous

que cela n'exclut pas d'autres formes, mais je dis que l'effet est à ce point pédagogique que les gens vont être portés à dire ce que vous venez de dire: les deux sont là. Donc, il n'y en a pas d'autres.

M. Clair: À quoi le député pense-t-il? Qu'il me nomme donc une autre forme.

M. Bisaillon: Cela pourrait être... M. Clair: Un groupe de cardinaux?

M. Bisaillon: Non, mais cela pourrait être, par exemple, une discussion télévisée plutôt que le groupe d'intérêt public. Vous vous souvenez, M. le ministre, que cela a déjà été demandé en cours de négociation. Une partie a déjà demandé, au lieu d'avoir un conseil de médiation, que les discussions devant un tiers se déroulent à la télévision pour que le public puisse se faire une opinion directe sur les discussions. Peut-être que les parties voudraient discuter d'une formule comme celle-là. Je sors cela ainsi; le ministre m'en a demandé une. On a beaucoup d'imagination quand on est en plein conflit. La seule chose que je veux dire, c'est que c'est vrai que ce n'est pas limitatif, votre formulation; c'est vrai et j'accepte cela, mais je dis que cela a tellement une valeur pédagogique que cela revient à dire ce que je disais tantôt. Ce que je crains, c'est que les parties, parce que cela les sert davantage à un moment donné, refusent d'envisager d'autres procédures ou d'autres formes, parce qu'on aura dit: Les deux sont là. Je n'en ferai pas un long débat, mais admettez qu'il puisse y avoir des inconvénients au fait de vouloir, en même temps qu'on fait des lois, faire de la pédagogie. M. Samson vous aurait dit: Laissons la pédagogie aux enseignants et la législation aux législateurs.

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Iberville m'avait demandé la parole.

M. Beauséjour: C'est tout simplement une interrogation qui rejoint un peu ce que le député de Sainte-Marie dit. Ordinairement, on dit que les législateurs ne parlent pas pour rien dire. En ajoutant ces deux formes, je ne sais si, de cette façon, un juge pourrait interpréter que ce qui vient après viendrait préciser la façon différente et, que, notamment, ce serait les deux seules façons. Je m'interroge là-dessus.

M. Clair: Le mot "notamment" a fait l'objet de diverses interprétations et n'est pas exclusif. Le mot "notamment" indique simplement deux ou trois choses. Premièrement, que ce qui suit n'est pas exclusif; deuxièmement, que ces formes-là sont bel et bien légalement assises et, troisièmement, cela indique une certaine intention du législateur, à savoir que ces deux formes soient utilisées, puisqu'il tient à ce qu'elles soient mentionnées spécifiquement et qu'elles soient effectivement reconnues par l'effet de la loi. Il n'y a aucun effet restrictif là-dedans.

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Argenteuil. Cela va? Alors, l'article 48...

M. Bisaillon: M. le Président, pour les fins du Journal des débats et sans argumenter - je n'argumenterai pas - je vais le formuler et on pourra passer au vote immédiatement. Je vais faire l'amendement pour que l'on biffe, dans le premier paragraphe, les mots "Elles peuvent notamment avoir recours à un conseil de médiation ou à un groupe d'intérêt public. "

M. Clair: Rejeté sur division, même dans ma propre formation!

M. Bisaillon: On va les laisser l'écrire.

Le Président (M. Lachance): On a des petits problèmes parce qu'on ne connaît pas la sténo. Pouvez-vous reformuler, M. le député de Sainte-Marie?

M. Bisaillon: Dans le premier paragraphe de l'article 48, on biffe la deuxième phrase: "Elles peuvent notamment avoir recours à un conseil de médiation ou à un groupe d'intérêt public. " Je n'argumente plus.

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Argenteuil? Non?

Une voix: On est divisés, M. le Président.

M. Ryan: Blague à part, qu'est-ce que vous dites?

M. Pagé: L'amendement est reçu, M. le Président?

Le Président (M. Lachance): Oui, c'est reçu et je comprends que c'est rejeté sur division?

M. Pagé: M. le Président, un amendement ne peut pas être rejeté sur division. Il est rejeté. Il peut être adopté sur division, mais il ne peut pas être rejeté sur division.

Le Président (M. Lachance): Mais tout le monde était d'accord...

M. Clair: On est tellement habitué de faire des choses sur division avec ce groupe-là, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Alors, l'amendement est rejeté. Est-ce que l'article 48, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Nous passons è l'article 49.

M. Clair: Je n'ai pas d'amendement à proposer, M. le Président.

M. Pagé: Sur l'article 49...

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le député de Portneuf.

M. Pagé:... le ministre ne croit-il pas qu'il y a un danger que le législateur parle pour ne rien dire?

M. Ryan: C'est un beau cas.

M. Pagé: Si vous le voulez, on pourrait le relire ensemble: "En cas de différend sur ce qui est objet de stipulation négociée et agréée à l'échelle nationale, les parties peuvent également s'entendre pour faire conjointement un rapport sur l'objet de leur différend et le rendre public. " Rien n'empêche les parties de s'entendre pour la production conjointe d'un rapport et de le rendre public.

M. Clair: M. le Président, la question que se pose le député dans le fond, c'est: Est-ce que de toute façon les parties n'ont pas ce pouvoir? La réponse est que, si les parties décident de faire cela, cela vient remplacer les articles 47 et 48 et modifier les conséquences du retard du rapport du médiateur, la "cooling-off period", etc. Cela prend un pouvoir habilitant aux parties pour le faire.

M. Bisaillon: Donc, cela enlève le délai de 60 jours. Si c'était seulement cela comme explication, je tiens à souligner que ce que je comprends de l'article 49, c'est un peu comme dans les procès quand les avocats des deux parties font des admissions: On est d'accord avec ces faits-là et voici où se situe notre différend. C'est un peu cela, mais je comprends qu'à l'article 49, même si les parties s'entendaient pour faire un rapport conjoint sur la nature et le contenu de leur différend, il resterait un différend. Donc, l'article 47 devrait quand même s'appliquer, sauf qu'il serait restreint, au départ, à un rapport public publié par les parties, disant: Voici quelle est la nature de notre différend. Or, je prétends que, si c'est cela, cela n'ajoute rien, effectivement, parce que les parties peuvent le faire. De toute façon, il n'y a pas de loi qui peut les empêcher de faire une conférence de presse.

Deuxièmement, rien ne les empêche de parler au médiateur dès la première journée. Lorsque des avocats font des admissions au début d'une cause, je ne suis pas avocat, mais je suppose bien que la loi ne contient pas un article disant qu'avant chaque cause les avocats font des admissions.

M. Ryan: II y a peu de chance, s'ils sont en conflit, qu'il s'entendent pour faire conjointement un rapport public. Ce serait hautement fantaisiste. Je ne connais pas un cas où cela s'est fait dans l'histoire passée.

M. Clair: Dans l'histoire future, vous ne le savez pas?

M. Ryan: Dans le monde idéalisé où vous avez conçu votre projet, peut-être, oui.

M. Clair: Vous avez dit dans l'histoire passée.

M. Ryan: Mais vous savez très bien que ce n'est pas concevable, même en pratique. C'est contraire à toute idée du genre de situation qu'on a à ce moment-là. En tout cas, s'ils le peuvent, cela ne change pas grand-chose.

Le Président (M. Lachance): L'article 49 est-il adopté?

M. Clair: J'aimerais que...

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le député. M. Jean-François Munn.

M. Munn: L'objectif de l'article 49, effectivement, fait sauter la médiation prévue à l'article 47 ou une entente sur une forme de médiation différente prévue à l'article 48. Ce que cela suppose, c'est qu'effectivement les parties s'entendent pour faire un rapport sur ce sur quoi elles ne s'entendent pas. Souvent, en négociation, c'est déjà un élément positif que les parties puissent définir conjointement ce qui fait l'objet de leur différend et le rendre public.

M. Bisaillon: Vraiment, ce que vous nous dites par cela, c'est qu'à partir du moment où les parties appliqueraient l'article 49 un médiateur n'interviendrait pas, même sur ce qui persiste comme différend?

M. Munn: C'est cela.

M. Bisaillon: L'avis prévu à l'article 50 serait enclenché par le rapport conjoint prévu à l'article 49. Donc, le droit de grève suivrait dans les 20 jours?

M. Munn: C'est cela.

M. Bisaillon: Vous voulez dire qu'une

partie patronale, par exemple, aurait intérêt, dans les circonstances, à accélérer le droit de grève de 60 jours. Ce que vous voulez me dire, en tout cas dans la pratique, c'est qu'à l'article 49, lorsque la partie patronale va faire cela, elle va savoir qu'il n'y aura pas l'intervention d'un médiateur. Évidemment, elle ne risque pas un rapport défavorable pour elle, mais elle permet l'application du droit de grève 60 jours avant.

M. Munn: Mais les parties peuvent avoir ou ont certainement intérêt à s'entendre. L'exercice conjoint de définir ce qui fait l'objet du différend et de rendre public un rapport sur ce qui...

Une voix:... les sépare...

M. Munn:... les sépare, je pense que cela peut accélérer un règlement et il est fort possible que les parties, autant la partie patronale que la partie syndicale, puissent s'entendre sur cette forme.

M. Bisaillon: Sauf que, dans le texte et dans vos explications, un différend va persister. Elles vont seulement mieux l'identifier qu'à l'article 46 lorsqu'une partie demande l'intervention d'un médiateur.

M. Munn: Je dois dire que...

M. Bisaillon: Ce sera seulement mieux identifié, mais un différend va persister.

M. Munn: C'est-à-dire que vous présumez qu'un différend va persister, mais le simple exercice entre les parties, sans la présence d'un tiers, de définir ce qui fait l'objet de leur différend peut amener un règlement. Éventuellement, s'il n'y a pas eu de règlement, il y aura un rapport conjoint sur ce qui fait l'objet du différend, oui.

M. Bisaillon: Mais est-ce que ce n'est pas un peu de l'angélisme, parce que, si c'est possible, on n'a pas besoin de ce mécanisme pour le faire? Si le seul fait d'essayer d'identifier les différences nous permet de nous rendre compte que, dans le fond, on s'entend, la négociation simple et directe aurait permis le même résultat.

M. Munn: J'oserais vous dire que, si les parties, à certains moments, dans des dossiers de négociation, avaient su exactement sur quoi elles ne s'entendaient pas, peut-être qu'elles se seraient entendues.

M. Bisaillon: Et vous pensez que l'article de la loi plutôt que le changement de mentalité va permettre cela? (23 h 45)

M. Munn: C'est une possibilité qui est offerte aux parties. Dans le fond, ce qui est recherché, c'est d'avoir le maximum de souplesse. Il y a une règle générale qui est la règle de la loi. Il y a deux autres possibilités qui viennent d'une entente préalable entre les parties, ce qui fait que, plutôt que de recourir à la règle générale qui est prévue à l'article 47, on recourt soit à une formule différente prévue à l'article 48 ou à la formule prévue à l'article 49.

M. Bisaillon: M. le Président, j'ai une question de directive, dans le fond. Un amendement doit proposer d'enlever une partie d'un texte et de le remplacer par un autre. Quand on pense que tout un article est en surplus ou ajoute peu de choses, peut-on faire un amendement pour proposer de le biffer au complet?

Je ne nie pas les bonnes intentions qu'il peut y avoir derrière l'article 49, mais je prétends que dans le cadre du projet de loi qu'on discute il n'ajoute rien. Non seulement il n'ajoute rien, mais, en plus de cela, il est quasiment rendu inapplicable en pratique par le fait qu'il enlève la possibilité de recourir aux articles 46, 47 et 48, donc, aux "avantages" qu'une partie pourrait avoir à obtenir un rapport d'un médiateur ou d'un tiers neutre dans le litige parce qu'il va toujours persister un différend. Je serais tenté, sans en faire non plus une grande bataille, de demander au ministre de prendre cela en considération parce que cela n'ajoute pas grand-chose qui ne pourrait se faire autrement. Comprenons bien. Ce que je veux dire, ce n'est pas qu'il n'y a pas de bonnes intentions derrière cela et que les parties n'ont pas avantage à se parler. Je ne pense pas que c'est l'article 49 qui va plus les amener à se parler. C'est bien plus des changements de mentalité, toute une structure autour de la négociation et toute une approche autour de la négociation qui vont le faire.

L'article 49, pris isolément, ne sera pas un élément majeur d'un règlement. C'est une démarche pour identifier les différences. Les différences demeurent, selon moi, et si elles sont importantes, elles vont rester importantes et le droit de grève va arriver 20 jours avant. Donc, la partie patronale a intérêt à précipiter la grève et elle va vouloir utiliser ce moyen ou elle n'a pas intérêt à le faire et, à ce moment, elle ne l'utilisera pas du tout.

M. le Président, je serais prêt à faire un amendement pour proposer de biffer l'article 49.

M. Clair: M. le Président, même si le député de Sainte-Marie propose de retirer un des articles du projet de loi, je lui dirai que ses paroles sont douces à mes oreilles, après m'être fait traiter de satanique, de mesquin...

M. Bisaillon: Je n'ai jamais dit cela.

M. Clair: Pas de sa part, mais de la part d'autres de ses collègues... mesquin, basé sur la méfiance... Qu'il y ait un article dans ce projet de loi que le député veuille rayer parce que c'est de l'angélisme, c'est doux à mes oreilles.

M. Bisaillon; L'enfer est pavé de bonnes intentions. J'ai dit que c'était pavé de bonnes intentions.

M. Clair: M. le Président, je pense que cela ne vient qu'offrir une possibilité, une alternative aux parties. Je suis conscient du fait que ce n'est peut-être pas là le coeur du projet de loi et la disposition qui sera la plus utilisée. Il me semble qu'elle peut quand même être utile aux parties et je pense qu'il n'y a pas lieu d'accepter l'amendement du député de Sainte-Marie.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 49 est adopté?

M. Ryan: Sur division.

M. Pagé: Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): L'article 49 est adopté sur division. J'appelle l'article 50.

M. Bisaillon: C'est le projet de loi du ministre, n'est-ce pas?

M. Clair: Je n'ai pas d'amendement à proposer, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 50 est adopté? M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: L'article 50, on est obligé de le rédiger sous cette forme à cause de l'article 49 parce qu'à l'article 49 c'est un groupe de personnes, si je comprends, ou cela peut être aussi une procédure différente.

M. Clair:... d'intérêt public et procédure différente.

M. Bisaillon: De toute façon, on réfère, à l'article 50, au rapport de médiation.

M. Clair: Donc, il rend un rapport public.

M. Bisaillon: Est-ce qu'à l'article 50 on fait référence à un rapport de médiation?

M. Clair: Non, puisque, dans la mesure où on fait référence à l'article 49, l'article 49 ne prévoit pas un rapport de médiation mais un rapport sur l'objet de leur différend.

M. Bisaillon: Dans la formulation on dit: "La personne ou le groupe de personnes qui rend un rapport public suivant l'article 47, 48 ou 49 doit, le même jour, en donner avis écrit au ministère du Travail. Ce dernier informe les parties sans délai de la date où il a reçu cet avis. " Je ne sais pas ce que cela ajoute aux parties de savoir à quelle date a été envoyé le rapport.

M. Clair: Vous avez vous-même plaidé tantôt, aux articles 111. 10, 111. 8 et suivants, que c'est ce qui déclenche la "cooling-off period", le droit de grève, etc.

M. Bisaillon: Oui, mais avec les modifications...

M. Clair: C'est important que ce soit précis.

M. Bisaillon:... qu'on a apportées aux articles 47 et 48, on n'a pas réglé cela? À défaut d'une entente sur le différend, automatiquement, le rapport sera rendu public. C'est un automatisme. Il n'y avait pas d'automatisme dans les articles 47 et 48, puis je comprends que vous l'avez formulé de cette façon-là parce qu'il n'y avait pas d'automatisme aux articles 47 et 48.

Je trouverais cela plus clair, M. le Président, si c'était dit: Tout rapport de médiation, ou toute entente prévue à l'article 49, doit être transmis au ministre en même temps qu'il est rendu public.

M. Clair: On va le suspendre, M. le Président, au cas où il y aurait de la concordance.

Le Président (M. Lachance): L'article 50 est suspendu. J'appelle l'article 51 où je crois qu'il y a un amendement.

M. Clair: M. le Président, je voudrais proposer que l'article 51 du projet de loi soit modifié par le remplacement, dans les troisième et quatrième lignes, des mots "d'une nouvelle convention collective" par les mots " de nouvelles stipulations négociées et agréées à l'échelle nationale".

La précision vise à éviter une ambiguïté sur la date d'expiration de la stipulation. Il est à noter que, suivant l'article 111. 6 du Code du travail, édicté par l'article 85, la date d'expiration de la convention collective aux fins du code est celle de l'expiration des stipulations négociées et agréées à l'échelle nationale. Magnifique?

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement est adopté?

M. Bisaillon: Un instant! On remplace "de nouvelles conventions collectives" par "de nouvelles...

M. Clair: Stipulations négociées et agréées à l'échelle nationale. C'est en concordance avec l'article 111. 6 du Code du travail, édicté par l'article 85 du projet de loi, qui prévoit que la date d'expiration de la convention collective aux fins du code est la date de l'expiration des stipulations négociées et agréées à l'échelle nationale. C'est de la précision qu'on apporte et non pas... C'est par pure concordance avec...

Le Président (M. Lachance): L'amendement est-il adopté?

M. Pagé: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'article...

M. Bisaillon: Non. M. le Président, "Les conditions de travail prévues par des stipulations négociées et agréées à l'échelle nationale continuent de s'appliquer... " Pourquoi les conditions de travail? Pourquoi pas les stipulations de la convention collective? Parce que les conditions de travail, c'est limité, cela ne comprend pas toutes les dispositions d'une convention collective. C'est un aspect d'une convention collective. Cela ne comprend pas, par exemple, les échelles de salaires, les conditions de travail, nécessairement, à moins qu'on ne me démontre le contraire. Les termes normalement utilisés, ce sont les stipulations de la convention collective ou les dispositions de la convention collective.

M. Ryan: M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le député d'Argenteuil.

M. Clair: Tout simplement une information: C'est l'article 59, troisième alinéa, du Code du travail qui dit: "Les parties peuvent prévoir dans une convention collective que les conditions de travail contenues dans cette dernière vont continuer de s'appliquer jusqu'à la signature d'une nouvelle convention", et c'est de cette stipulation qu'on s'est inspiré pour la rédaction ici.

M. Bisaillon: Est-ce que le ministre peut dire si cette formulation a déjà été interprétée de façon restrictive? Est-ce qu'on a déjà compris que les conditions de travail ne comprenaient pas un certain nombre de clauses de la convention collective?

M. Clair: J'ai dit au député hier que je ne pouvais nier mon inexpérience sur ces questions.

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Argenteuil, est-ce que vous voulez ajouter en attendant? Non? Cela va?

M. Ryan: Je pense que je ne pourrais pas ajouter de choses qui vous éclaireraient.

Le Président (M. Lachance): Vous êtes sage.

M. Clair: M. le Président, mes conseillers me disent qu'il n'y a pas eu, à leur connaissance, de telles interprétations restrictives.

M. Munn: Quand il y a des demandes d'accréditation, ce sont les conditions de travail qui... Dans les endroits où il n'y a pas de syndicat, s'il y a une demande d'accréditation, l'employeur ne peut pas modifier les conditions de travail. Dans le fond, on s'est inspiré de l'économie générale du Code du travail pour rédiger cet article.

M. Bisaillon: Ce qu'on vise, c'est l'ensemble des dispositions de la convention.

M. Munn: C'est cela.

M. Bisaillon: L'ensemble des dispositions convenues et stipulées à l'échelon...

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 51 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. L'article 51 est adopté tel qu'amendé. Maintenant, l'article 52...

M. Clair: II y aurait les articles 52 à 56, si vous voulez faire cela rapidement.

M. Pagé: Ajournement, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): La commission du budget et de l'administration, ayant rempli une journée où nous avons progressé, ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 23 h 55)

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