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Version finale

31st Legislature, 4th Session
(March 6, 1979 au June 18, 1980)

Monday, May 28, 1979 - Vol. 21 N° 99

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Auditions concernant le projet de loi no 4 - Loi sur la programmation éducative et le projet de loi no 5 - Loi modifiant la Loi de l'Office de radio-télédiffusion du Québec


Journal des débats

 

Étude des projets de loi nos 4 et 5

(Quatorze heures dix-neuf minutes)

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

Mme Lavoie-Roux: Le porte-parole est le député de Jean-Talon et il doit être ici d'une minute à l'autre.

Le Président (M. Jolivet): Nous allons attendre encore un peu. On va faire l'appel des noms et présenter les gens.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

Le Président (M. Jolivet): La commission des communications est maintenant ouverte pour étudier les mémoires concernant les projets de loi no 4 et no 5 du ministère des Communications. Les membres de cette commission sont: M. Beauséjour (Iberville) remplacé par M. Gosselin (Sherbrooke), M. Bertrand (Vanier), M. Blank (Saint-Louis) remplacé par M. Rivest (Jean-Talon), M. Godin (Mercier) remplacé par M. Guay (Taschereau), M. Goldbloom (D'Arcy McGee) remplacé par Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Laberge (Jeanne-Mance), M. Le Moi-gnan (Gaspé), M. Michaud (Laprairie) remplacé par M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. O'Neill (Chauveau).

Je vais donner l'ordre de présentation des mémoires pour vérifier si les gens sont arrivés dans la salle. J'aimerais que quelqu'un du groupe m'en fasse part. LORTQ, M. Gérard Barbin; il est ici. Les comités régionaux de Radio-Québec, un groupe des régions: centre du Québec, Est du Québec, Estrie, Saguenay-Lac-Saint-Jean et Côte-Nord, il y a un représentant? Merci. Comité régional d'implantation de Radio-Québec en Abitibi-Témiscamingue; merci. Syndicat général des employés de Radio-Québec; oui, merci. Association des réalisateurs de Radio-Québec; merci. L'Union des artistes; on nous a dit qu'ils arriveraient après 20 heures ce soir, ses représentants ont averti en conséquence. Syndicat des employés en radio-télédiffusion; Association des directeurs techniques; Institut canadien d'éducation des adultes; Regroupement des organismes communautaires de communication; Association des réalisateurs de films du Québec.

Les cinq derniers organismes avaient fait mention qu'ils étaient intéressés à être convoqués mais, pour le moment, il n'y a aucun mémoire qui a été reçu de leur part. Quelques-uns parmi ceux-là ont dit qu'ils voulaient simplement déposer un mémoire et ne faire aucune autre intervention; donc, nous considérons qu'ils seront écoutés à la suite des organismes qui sont ici présents, incluant l'Union des artistes qui sera ici après 20 heures.

Oui, Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Si je comprends bien, M. le Président, les organismes que vous avez mentionnés sont ceux qui ont été convoqués soit pour aujourd'hui ou pour demain?

Le Président (M. Jolivet): Non, c'étaient les gens qui... Je prends les sept premiers qui sont ici présents, sauf l'Union des artistes qui sera ici ce soir. Ce sont ceux qui ont présenté des mémoires et qui sont ici présents, dans la majorité des cas. Ils ont donc été convoqués pour aujourd'hui. Dans l'autre cas, il y a des gens, individuellement, qui avaient fait mention — et j'ai parlé des cinq derniers organismes qui ont aussi été convoqués pour aujourd'hui mais qui, dans ces cas, avaient dit qu'ils présenteraient seulement un mémoire mais presque pas d'autre sorte de présentation. Pour le moment, ces cinq organismes ont été convoqués, mais aucun mémoire n'a été reçu jusqu'à maintenant.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, l'Opposition officielle avait donné les noms de deux personnes qui seraient peut-être venues présenter un mémoire conjointement, remarquez bien — de l'Université Concordia, du département des communications. À moins que j'aie été distraite, les noms ne se trouvent pas là-dessus.

Le Président (M. Jolivet): Ce sera probablement demain soir puisqu'il y en a d'autres qui ont été convoqués pour demain soir, mais je n'ai pas la liste des gens actuellement.

Mme Lavoie-Roux: Ah! bon. D'accord. Ce n'est pas exact, cette liste.

Le Président (M. Jolivet): C'est pour aujourd'hui.

Mme Lavoie-Roux: C'est pour aujourd'hui.

Le Président (M. Jolivet): Nous demandons un rapporteur pour la commission, M. Laberge de Jeanne-Mance?

M. Laberge: J'accepte.

Le Président (M. Jolivet): Donc, nous avons actuellement de la part du ministre une petite introduction que je peux permettre à M. le ministre de faire.

Remarques préliminaires M. Louis O'Neill

M. O'Neill: M. le président, je veux d'abord souhaiter la bienvenue aux représentants des différents organismes qui s'intéressent aux projets de loi 4 et 5, projet de loi 4 sur la programmation éducative et projet de loi 5 qui apporte quelques amendements à la Loi de Radio-Québec.

Le but de la commission parlementaire — il est peut-être bon de le rappeler — c'est d'abord d'écouter différentes remarques, différentes recommandations de groupes qui s'intéressent au développement de la radio-télévision éducative au Québec et de façon particulière, au développement de Radio-Québec. Parmi ces groupes, je pense qu'il va de soi qu'on reconnaisse une sorte

de priorité de Radio-Québec même qui, lui, est invité ici à rencontrer des représentants de la commission parlementaire dans le cadre de sa comparution annuelle.

Je rappelle que, pour le projet de loi 4, ce qui a retenu principalement l'attention et sans doute — j'imagine — ce qui fera l'objet d'un certain nombre de commentaires, c'est la notion même de télévision ou de programmation éducative, le projet d'encadrer cette programmation éducative et de fournir un encadrement pour tous les diffuseurs tant en radio qu'en télévision sur l'ensemble du territoire du Québec. Le projet de loi prévoit aussi un rôle particulier devant être exercé par la Régie des services publics qui sera chargée d'évaluer cette authenticité de la programmation éducative, qu'elle soit éducative en tout ou en partie.

On trouve aussi dans le projet de loi une possibilité reconnue, dans des cas qu'il reste encore à établir, c'est-à-dire où il reste à établir des normes, d'une aide qui pourrait être, à un moment donné, fournie pour la diffusion de programmation éducative par des diffuseurs, soit dans le secteur de la radio ou dans celui de la télévision.

Ce qui a retenu et ce qui retient, je pense, de façon particulière, l'attention dans le projet de loi de Radio-Québec, c'est la connaissance du principe même de la régionalisation, cette consécration de la régionalisation de Radio-Québec par l'établissement de comités régionaux. La loi prévoit la composition de ces comités régionaux de même qu'elle prévoit aussi la présence de représentants des régions sur le conseil d'administration de Radio-Québec. Elle prévoit également que Radio-Québec devra, comme les autres diffuseurs, faire reconnaître sa programmation éducative par la Régie des services publics.

Ces amendements qui sont apportés à la Loi de Radio-Québec suivent aussi un certain nombre de décisions du Conseil des ministres concernant le mandat de Radio-Québec, concernant le principe même de l'extension des antennes, la mise en application de ce programme du développement de l'implantation des antennes sur l'ensemble du territoire et, ensuite, un certain nombre d'autres mandats plus circonscrits qui ont été donnés à Radio-Québec, ne serait-ce que, par exemple, de l'attention devant être portée aux groupes culturels minoritaires.

Alors, le but de cette commission, c'est avant tout de donner la parole aux représentants du public et des milieux spécialisés avant les débats en deuxième lecture. Quant à nous, quant à ceux qui sont membres de la commission, je suis certain que chacun d'entre eux voudra écouter avec attention chacune des propositions qui nous sera soumise. Nous pensons que ces propositions nous aideront encore, dans certains cas, peut-être même à perfectionner les deux projets de loi en question.

Encore une fois, nous estimons que cet échange sera fort utile, et je tiens, une fois de plus, à remercier ceux qui manifestent si concrètement leur collaboration en nous envoyant des mémoires et en venant dialoguer ici avec nous aujourd'hui.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Jean-Talon.

M. Jean-Claude Rivest

M. Rivest: M. le Président, je voudrais, au nom de notre groupe parlementaire, souhaiter la bienvenue à tous les — un drôle de micro — participants à cette commission. Nous entendons, bien sûr, apporter notre collaboration à la bonne marche des audiences de cette commission tout en regrettant cependant... Sur le plan parlementaire, c'est certainement une attitude qui soulève de nombreuses interrogations dans la mesure où, plus souvent qu'à son tour, le gouvernement, depuis quelque temps, procède aux commissions parlementaires strictement sur invitation. Bien sûr, généralement, ce sont les gens les premiers intéressés aux divers projets de loi qui sont ainsi invités, mais, néanmoins, je pense que dans le processus normal de fonctionnement d'une commission parlementaire il serait hautement préférable qu'on laisse les commissions parlementaires ouvertes et qu'on redonne sa signification première à cette institution qui s'appelle la commission parlementaire et qui, comme on le sait est largement utilisée ici, à l'Assemblée nationale.

Très simplement, pour ne pas retarder indûment les travaux de la commission, au nom de notre groupe parlementaire, je veux simplement souhaiter la bienvenue et assurer tous les participants, tous les invités à cette commission, de notre intérêt pour les propos qu'ils apporteront sur les projets de loi.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gaspé.

M. Michel Le Moignan

M. Le Moignan: M. le Président, je voudrais abonder dans le même sens et souhaiter également la plus cordiale bienvenue à tous ceux qui viendront nous soumettre leur point de vue sur la programmation éducative et, en même temps, nous donner leurs commentaires sur tout l'ensemble du problème de Radio-Québec. Nous avons eu l'occasion, l'an dernier, de travailler sur cette question et je crois qu'il est très sage de consacrer quelques heures à l'audition de ces mémoires. (14 h 30)

Comme vient de l'indiquer le ministre, si les projets de loi 4 et 5 que nous désirons veulent donner la plus grande satisfaction possible à l'ensemble du Québec, il est bien normal que nous écoutions les principaux intéressés dans la matière, ceux qui travaillent déjà, qui oeuvrent dans le champ de la radio, de la télévision, de la publicité, etc., et qu'ensuite, à l'aide de leurs commentaires, des réponses à nos questions, ceci puisse éclairer la commission et travailler dans le sens de tout projet de loi, qui est de mieux servir les intérêts du public.

Le Président (M. Jolivet): Le premier organisme invité est l'Office de radio-télédiffusion du

Québec, M. Gérard Barbin, s'il vous plaît. Pour les besoins du journal des Débats, je vous demanderais de présenter vos collaborateurs.

Office de radio-télédiffusion du Québec

M. Barbin (Gérard): En plus des documents, nous avons surtout des collaborateurs. J'ai, à ma droite, le vice-président à l'exploitation, M. Claude Caron et, à ma gauche, M. Gilbert Buzaré, le vice-président à l'administration. Derrière moi, il y a un certain nombre de personnes en partant de la programmation, M. Sylvestre qui est directeur des programmes et son adjoint, M. Fortier, notre directeur du contentieux, M. Benoit ainsi que M. Bachand. J'en oublie sans doute, mais c'est un bon nombre de collaborateurs prêts à répondre à toutes les questions que vous et les membres de la commission aurez à nous poser.

Je vous remercie de l'invitation que vous nous avez transmise et, dans un premier temps, j'imagine que je devrais faire lecture de ce court mémoire que nous avons préparé. Sans le résumer, comme il est court, je pourrai quand même sauter quelques pages puisque vous l'avez en main depuis un certain temps. Comme il est court, tout de même, je pense que je vais le lire assez intégralement.

M. le Président, nous n'étonnerons personne en affirmant que nous nous réjouissons du mandat clair qui a été confié à Radio-Québec, au plan de la programmation éducative et du développement régional, dans les projets de loi 4 et 5, mandat qui nous permet, après une période d'incertitude dont vous avez été témoin, particulièrement au cours de la dernière année, de jouer véritablement le rôle qu'on attend de nous.

Jusqu'à tout récemment, l'ORTQ a dû, pour diverses raisons, fonctionner en zone grise, sans être jamais sûr ni de ses arrières ni de ce qui l'attendait dans l'avenir. Cela s'est révélé paralysant et a provoqué un certain nombre de crises.

Malgré cette situation précaire, Radio-Québec a continué de susciter de l'intérêt et de l'espoir chez les Québécois, que ce soit au plan national ou au plan régional. Ce phénomène à lui seul suffit pour démontrer la nécessité absolue d'un organisme comme Radio-Québec et à justifier les précisions apportées dans les projets de loi qui sont déposés devant l'Assemblée nationale. Ces projets de loi sont indispensables au développement de Radio-Québec.

Pour avoir participé aux diverses étapes conduisant au dépôt de ces projets de loi, au niveau interne et au niveau de notre conseil d'administration, nous croyons sérieusement que nous y retrouvons, notamment au plan de la programmation éducative et de la régionalisation, ainsi que des structures et des activités, les ingrédients nécessaires et les orientations précises permettant à Radio-Québec de devenir un véritable instrument de développement et de communication de la société québécoise, par l'établissement d'un réseau de radiotélévision éducative qui devra couvrir tout le territoire et rejoindre plus de 95% des

Québécois et, en même temps, permettre aux régions et aux diverses communautés qui constituent notre société de s'exprimer et de communiquer entre elles.

Il faut bien comprendre, en effet, que Radio-Québec n'est pas un luxe que se paient les Québécois, à côté de Radio-Canada ou de la télévision commerciale francophone ou anglophone. D'autres provinces canadiennes, d'autres pays ont déjà mis sur pied des télévisions éducatives et ont senti le besoin de développer des réseaux du même genre.

Nous avons, à cet égard, une spécificité importante qui réside dans chacun des termes du mandat qui nous est tracé dans ces projets de loi et qui peuvent se résumer en deux mots: Un projet collectif. Car Radio-Québec — c'est sa nature même — doit fonder son développement sur la consultation et la participation à tous les niveaux. Ces efforts d'ouverture devront être soutenus quotidiennement par des mécanismes qui nous aideront à mieux sentir le pouls de la population ainsi desservie.

Il faut — c'est le sens du projet de développement régional compris dans le projet de loi no 5 — que le milieu puisse influencer Radio-Québec de façon que nous qualifierons d'organique. Grâce à la mise en place de structures régionales, M. le Président, les citoyens seront plus près du centre d'influence dans l'élaboration des contenus d'émissions proprement régionales et des activités connexes.

Ils disposeront ainsi de porte-parole qui feront connaître leurs besoins en matière de programmation nationale et chaque région aura son représentant au sein du conseil d'administration.

Nous croyons fermement que c'est la population qui doit inspirer notre programmation et nous le disons non pas en fonction des cotes d'écoute, mais par rapport aux services que nous devons rendre aux divers groupes de la société, ceux qui sont traditionnellement influents, mais aussi ceux qui sont habituellement laissés pour compte.

La tournée que nous avons terminée récemment des diverses régions nous démontre clairement cette unanimité au plan du développement régional, mais je ne voudrais pas déborder sur ceux qui auront à vous communiquer leur opinion au nom des régions.

Nous notons tout de même une certaine impatience face à la cadence d'implantation des stations nécessaires à compléter notre réseau sur le plan de la production et de la diffusion. Car, s'il doit survivre et se développer, Radio-Québec doit devenir un instrument professionnel de diffusion culturelle et éducative spécifique pour les Québécois, adhérant à leur structure et à leur réalité. En même temps, sa justification vient du fait qu'il constitue un instrument de communication entre les Québécois de toutes les régions. Et c'est graduellement que ces deux objectifs seront atteints, au fur et à mesure de la capacité de payer des Québécois, et en tenant compte, évidemment, de la qualité nécessaire pour une télévision de cette nature.

II n'est évidemment pas question de créer 8, 10 ou 12 Radio-Québec régionaux. Il nous faut disposer d'un centre national fort, qui ne craint cependant pas d'associer à son orientation et à sa gestion des représentants de tous les milieux et de toutes les régions, et qui délègue une part de responsabilités à des conseils régionaux qui assureront la production régionale. Ce qui est important, c'est qu'éventuellement, toutes les régions puissent être interreliées dans tous les sens du mot.

Démocratique par rapport aux citoyens de diverses régions, Radio-Québec entend également l'être dans ses relations avec l'autorité publique. Il devra ainsi rendre des comptes à l'Assemblée nationale et à la Régie des services publics. Son autonomie la plus totale devra, en ce sens, être respectée. L'analyse des projets de loi nous confirme à ce propos, que le gouvernement reconnaît à l'ORTQ la liberté d'action et d'expression qui lui est nécessaire. Sa seule obligation sera d'exploiter une radiotélévision éducative respectueuse de ses auditeurs.

Voilà l'orientation fondamentale de Radio-Québec que tracent ces projets de loi pour les années à venir. Nous acceptons cette orientation avec satisfaction, et même avec enthousiasme.

L'assainissement du climat des relations entre les diverses constituantes de Radio-Québec nous permet d'ailleurs de croire que les précisions apportées à notre mandat constituent des éléments essentiels à l'instauration graduelle d'un climat positif de travail car ils tiennent compte du vécu de l'organisme qui compte cette année dix années d'existence laborieuses. Dans le cadre de la commission parlementaire, en mai 1978, les employés de Radio-Québec présentaient un mémoire dans lequel ils souhaitaient, et je cite: "Qu'une harmonie nouvelle s'installe à Radio-Québec où pourraient s'exercer les bonnes volontés du début et où cesseront les stérilisations des talents et des énergies". Je ferme les guillemets.

Les projets de loi nos 4 et 5 nous permettent d'envisager avec réalisme, sérénité et confiance la réalisation de tels objectifs qui rejoignent ceux retenus — et je le rappelle, M. le Président — par tous les gouvernements qui se sont succédé depuis les débuts de Radio-Québec, une société d'État oeuvrant dans le domaine de la radiotélévision éducative à l'intention de tous les Québécois. Je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. O'Neill: M. le Président, je vais commencer par une première question brève et je laisserai la parole à d'autres, quitte à revenir plus tard avec d'autres questions.

Ma première question va porter sur le rôle de Radio-Québec à l'égard des communautés culturelles. Dans le mandat qui a été confié à Radio-Québec par le Conseil des ministres, on parle à un moment donné d'une responsabilité que devra assumer de plus en plus — je dis bien de plus en plus parce que nous ne croyons pas que Radio-

Québec se soit désintéressé de cette question — Radio-Québec à l'égard des communautés culturelles. Depuis ce temps, certains représentants de ces communautés nous ont posé des questions et il est fort possible que nous nous en fassions poser d'autres bientôt là-dessus.

J'aimerais entendre de M. le président son point de vue, la façon dont il envisage cette activité et cette responsabilité de Radio-Québec à l'égard des communautés culturelles? Comment voit-il l'avenir de ce côté? Est-ce que Radio-Québec a déjà des projets? Quelle sera la nature de ces projets?

M. Barbin: M. le Président, je vais essayer au cours de cette réunion, et vous me direz si mes réponses sont assez explicites; je préférerais répondre plus brièvement, quitte à ce que vous me demandiez des explications parce que le temps est court et je sais qu'il y a beaucoup de points qui demeurent en suspens ou qui ont besoin d'être éclairés. Pour répondre à votre question, je vous dirai que nous avons eu comme mandat...

Mme Lavoie-Roux: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Oui, Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: J'entends le président de Radio-Québec dire que le temps est limité. C'est évident que le temps est limité mais nous n'avons pas convenu du temps qui serait mis à la disposition des différents organismes. Ce serait peut-être important de s'entendre là-dessus avant de débuter. Je m'excuse de vous avoir interrompu, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Nous ne l'avons pas fait; simplement, on s'est entendu sur la possibilité de prendre à peu près la valeur d'une demi-heure par organisme qui est ici, compte tenu du nombre de personnes qui sont à entendre d'ici ce soir mais on peut le faire officiellement si vous voulez, quitte à donner un peu plus de temps à Radio-Québec au niveau de sa présentation et de ses questions, à moins que vous proposiez autre chose.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je m'étais abstenue de faire la remarque au départ; j'avais laissé à mon collègue le soin de le faire mais comme il n'était pas ici quand vous avez énuméré la liste des organismes que nous devons entendre, cela explique pourquoi il n'a pas soulevé le problème. Mais je ne me souviens pas qu'on ait eu une commission parlementaire où on ait limité à une demi-heure la présentation et la discussion. Je pense qu'on se retrouve encore vis-à-vis du même problème. Si on a convoqué trop d'organismes pour la journée, je pense que ce n'est pas une raison pour précipiter les présentations et les discussions. Il s'agit de deux projets de loi qui auront des implications considérables au plan

financier, au plan de l'orientation de Radio-Québec et de toute la population que Radio-Québec va toucher dans ses nouvelles orientations. Je m'étonne qu'on nous annonce que, sauf pour Radio-Québec où on serait peut-être un peu plus large, nous allons être limités à une demi-heure. Je souhaiterais, sans faire de proposition précise, qu'on ne soit pas encadrés d'une façon aussi rigide. Je ne m'oppose à ce qu'il y ait un organisme qui prenne 20 minutes, mais je n'aime pas qu'une demi-heure... Il est déjà 14 h 45. Il y a cinq organismes convoqués pour aujourd'hui? (14 h 45)

Le Président (M. Jolivet): Sept.

Mme Lavoie-Roux: Sept.

Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député de Taschereau.

M. Guay: Sur la question de règlement, vous avez bien indiqué que cela faisait peut-être une moyenne d'une demi-heure, mais il n'y a pas d'ordre de la Chambre ou d'ordre de la commission, de décision de la commission de limiter qui que ce soit à une demi-heure. On verra comment cela se présentera. Il n'y a pas du tout de... C'est simplement une moyenne mathématique sans plus. On verra rendu à 22 heures ce soir ce que cela donne.

Le Président (M. Jolivet): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Encore une fois, M. le Président, on prend des risques sérieux quand on invite sept organismes à une commission parlementaire qui débute à 14 h 30, en admettant qu'il y ait eu dix minutes qui aient été de notre faute — je suis prêt à l'admettre — à se faire entendre dans ce cours laps de temps.

M. Guay: En toute amitié pour le député de L'Acadie, qu'on entende les parties plutôt que discuter entre nous.

Mme Lavoie-Roux: Allez-vous payer leur coucher à Québec ce soir?

M. Guay: C'est un problème qui relève du Conseil du trésor et non de la commission.

Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou d'une autre, au niveau de l'ensemble, on s'était parlé tout à l'heure en se donnant cette ligne de direction, tout en étant assez larges dans l'ensemble comme on le fait toujours au niveau de la commission, à moins qu'on ne s'entende sur un temps limite.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je suis d'accord qu'on procède de cette façon plus souple ou plus flexible, mais à la condition qu'à la fin de la soirée, comme on le fait trop souvent, on ne tienne pas les partis d'Opposition responsables du fait que peut-être deux ou trois organismes — s'ils peuvent tous être entendus, tant mieux — mais dans l'hypothèse ou deux ou trois ne pourraient pas être entendus, que le gouvernement en prenne la responsabilité.

Le Président (M. Jolivet): D'accord. Donc, nous continuons, Monsieur.

M. Barbin: Quant à nous de Radio-Québec, nous n'avons aucune limite de temps. Alors, vous nous direz si nous sommes trop longs.

Pour la question qui vient de nous être posée, nous avons reçu, évidemment en recevant notre budget, un mandat du gouvernement nous demandant de traiter d'une façon particulière les groupes ethniques et, de plus, les populations inuit et amérindiennes. Aussitôt que le mandat a été reçu, en février et mars dernier, nous sommes entrés en communication avec les organismes gouvernementaux qui assurent la coordination de ces activités, que ce soit au Conseil exécutif, au ministère des Communications ou au ministère de l'Immigration. Pour ce qui est du milieu ethnique, de concert avec le ministère de l'Immigration, nous avons formé un comité bipartite composé de représentants du ministère des Communications ainsi que de notre service de la programmation — j'ai des réminiscences de ministère — qui ont établi un échéancier et des modalités. Nous avons des rencontres, — il y en a ces jours-ci — et nous essayons d'éviter que ce que nous prônons par la participation soit contredit par les gestes que nous posions. Nous ne voulons pas intervenir en fabriquant des émissions pour les groupes ethniques, mais nous voulons les faire avec eux.

Voilà pourquoi ces groupes de travail sont en place et on peut prévoir déjà que, d'ici un certain temps, d'ici l'automne, une période d'environ une heure et demie sera consacrée, soit le samedi, soit le dimanche, en matinée ou en après-midi, à la diffusion de programmes destinés aux groupes ethniques. Les modalités ne sont pas encore définies. Nous continuons à multiplier les contacts et nous aurons affecté deux employés de Radio-Québec, qui sont des Néo-Québécois et qui comprennent mieux peut-être les problèmes des groupes ethniques, même s'ils sont Québécois depuis très longtemps. Deux employés sont donc affectés à ces dossiers.

Pour ce qui est des Inuit, nous sommes rendus à des choses très concrètes à la suite de rencontres que nous avons eues avec l'Association des communicateurs inuit, présidée par M. Josepi Padlayat, et nous avons convenu déjà de mettre sur pied, d'ici quelques semaines, des équipes pour les aider à entretenir des postes de radio et à former des techniciens. Nous agissons comme conseil pour l'implantation d'un studio de télévision. Nous allons assurer avec eux — c'est modeste, ce sont quelques personnes, mais c'est un départ — des équipes de production et nous allons être associés à la programmation de de qu'ils veulent faire dans le Nouveau-Québec, mais nous le faisons dans le même esprit, c'est-à-dire en étant à

leur disposition sans leur dicter le contenu dont ils doivent être responsables.

Pour ce qui est des Amérindiens, c'est un peu plus complexe, parce qu'ils sont répartis à travers tout le territoire. Là, nous participons à un groupe de travail formé de communicateurs des divers ministères et Radio-Québec y est associé. Ce n'est pas avant la fin de l'été ou le début de l'automne que nous aurons des choses plus précises sur la façon d'intervenir avec les populations amérindiennes.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Oui, M. le Président. Comme première, évidemment, c'est une question qui est large, mais j'aimerais quand même vous entendre à ce sujet. C'est au sujet du mandat spécifique confié à Radio-Québec. Je remarque que, dans votre texte, vous vous référez par rapport sans doute au mandat de la loi organique, la loi consécutive, à cette espèce de situation de zone grise dans laquelle a plus ou moins fonctionné Radio-Québec dans le passé. Je remarque que, dans votre texte — je sais que le projet de loi apporte certaines précisions, mais c'est au sujet de la notion de programmation éducative comme telle sur lequel j'aimerais vous entendre — vous parlez, par exemple, à la page 2, d'un instrument de développement et de communication de la société québécoise par l'établissement d'un réseau de radiotélévision. Au sens large, vous avez modifié vos termes, en cours de route, vous avez abandonné ce terme au sens large en disant télévision éducative au moment où vous avez donné votre mémoire.

M. Barbin: C'est écrit.

M. Rivest: Deuxièmement, je remarque que, par ailleurs, à d'autres occasions, vous parlez un peu plus loin d'un instrument professionnel de diffusion culturelle et éducative. Finalement, vous parlez également de radio-télédiffusion éducative. Tout cela pour dire que, compte tenu de l'ancienne rédaction de la loi consécutive, l'article 21, de même que la nouvelle version, à l'article 9, et également de l'article 3, qui définit programmation éducative, j'aimerais vous poser la question suivante: Par rapport au système de télévision, soit privé ou même de la Société Radio-Canada, comment, très concrètement, Radio-Québec va-t-il se définir à l'avenir, à votre point de vue?

M. Barbin: M. le Président, c'est une question majeure et c'est évidemment celle sur laquelle Radio-Québec est le plus soucieux d'essayer de trouver des réponses non pas uniquement dans des mots, mais dans une programmation de télévision. Il est évident que lorsqu'on dit télévision éducative au sens large, on inclut, en plus, évidemment, de la télévision scolaire, tout ce qui peut s'appeler une télévision. Je n'entrerai pas dans de grandes discussions sur l'éducation permanente, l'éducation des adultes et des choses du genre, quitte à ce que nous puissions échanger là-dessus, si vous le désirez. Je vais essayer de vous donner des grandes lignes sur la façon dont on conçoit cela, comment on veut faire cela dans la réalité et comment on peut se comparer à d'autres télévisions, en particulier, Radio-Canada, comme vous le dites.

Ce que nous essayons de viser, c'est une télévision qui diffuse à des heures d'écoute de première importance, qu'on appelle le "prime time", une télévision qui est différente, qui est une alternative, en quelque sorte, essentielle à ce que la télévision commerciale, qu'elle soit publique comme Radio-Canada ou qu'elle soit privée comme les autres réseaux, diffuse en fonction des commanditaires. Je pense qu'on reconnaît facilement que ceux qui dictent le choix des émissions à cette période de "prime time", d'heures d'écoute maximales, à compter de 18 heures jusqu'en fin de soirée, ce sont ceux qui décident de commanditer des émissions qui rejoignent le plus d'auditeurs possible, et c'est normal. C'est une télévision commerciale, je répète, qu'elle soit publique ou privée.

Radio-Québec a comme mandat, sans recevoir de revenus de commandites, donc, sans commerciaux, en choisissant délibérément lui-même des émissions de caractère culturel, de caractère informatif, qui traitent d'affaires publiques, que ce soit dans le sens d'une éducation scolaire ou d'une éducation permanente, appelons cela l'éducation au sens large, de présenter une gamme d'émissions qui répondent aux besoins de l'ensemble des Québécois, qu'ils soient des régions ou qu'ils soient de l'ensemble des grandes agglomérations montréalaises. Donc, c'est une télévision essentielle et non pas uniquement une télévision d'alternative qui vient mettre à côté de ce qui se fait, des choses qui sont un peu superflues. C'est une télévision qui vient placer, aux meilleures heures d'écoute, des émissions d'enrichissement. On exclut donc, au départ, un certain nombre d'émissions qui sont de caractère sportif professionnel, ce qui ne veut pas dire qu'on ne ferait pas des émissions sportives mais de caractère plus éducatif, amateur, etc., qui excluent actuellement ce qu'on peut appeler l'information salle de nouvelles qui est déjà faite par d'autres réseaux, qui excluent aussi les variétés comme telles ou les téléromans comme tels, ce qui ne nous empêche pas d'utiliser ces formules pour agrémenter des émissions d'affaires publiques, pour les rendre plus légères, plus digestibles, ou d'agrémenter aussi certaines émissions plus sérieuses, plus culturelles.

En gros, ce serait ma première réponse, M. le Président, à la question qu'on vient de me poser. Je sais bien que c'est insatisfaisant. Si on veut aller plus loin, il faudrait que je vous donne un aperçu de notre conception des priorités dans le domaine de l'éducation des diverses clientèles que nous voulons atteindre et quels sont les sujets prioritaires que nous voulons développer, que ce soit avec les ministères parce qu'il y a eu, dans le passé une sorte d'hiatus entre les organismes

d'éducation — je sais que cette question a préoccupé à un certain moment les membres de cette commission — entre le ministère de l'Éducation et Radio-Québec, entre les universités, et je pense à Télé-université de l'Université du Québec et Radio-Québec. Je pense qu'on a fonctionné un peu en vase clos et je pense que Radio-Québec doit être ce lieu où on essaie de se coordonner pour être à la fois un diffuseur scolaire à de bonnes périodes de la journée, un diffuseur éducatif pour les parties de la soirée où il y a un bon public à l'écoute qui veut autre chose que la télévision commerciale et aussi rejoindre des populations spécialisées qui veulent se former dans un contexte plus strict d'éducation permanente, c'est-à-dire, avec un certain nombre de diplômes.

Je pense à l'Université du Québec. J'oublie l'autre clientèle qui est celle un peu spéciale des groupes ethniques dont j'ai parlé tout à l'heure, les Amérindiens et les Inuit.

M. Rivest: Dans ce sens, quelle est votre fonction à Radio-Québec sur la possibilité pour le gouvernement — je comprends que vous voulez faire, dans le sens que vous l'avez défini, le lieu par excellence en matière de télédiffusion éducative, que ce soit Radio-Québec — la possibilité pour le ministre des Communications d'accorder à d'autres entreprises — je pense bien qu'on ne peut pas s'y opposer — de radiodiffusion et de câblodiffusion, une assistance financière pour des fins de programmation éducative. Quelle est la réaction? Est-ce que Radio-Québec, dans la perspective nouvelle dans laquelle les projets de loi vont nécessairement l'inscrire, s'attend de la part du ministre à un certain nombre de critères ou un peu dans le sens que vous avez signalé pour la télévision de Radio-Québec?

M. Barbin: Nous n'avons pas l'ambition d'être un organisme qui a le monopole de la télévision, de la radio-télévision éducative au Québec. Nous avons un mandat du gouvernement qui est clair et si l'Assemblée nationale approuve les projets de loi, nous aurons un statut encore plus précis et un cadre de travail qui peut quand même se contrôler par des mécanismes où on nous obligera de rendre des comptes, que ce soit la Régie des services publics avec tous les groupes qui pourront venir donner leur opinion et évaluer la programmation de Radio-Québec, ou l'Assemblée nationale où on aura à justifier les fonds qui nous sont confiés.

Nous n'avons pas, donc, cette intention de monopoliser quoi que ce soit. Je crois que ce serait mauvais. Je crois qu'il y a au Québec — et je le sais pour y avoir été associé avant d'être associé à Radio-Québec — beaucoup d'énergies créatrices qui utilisent de petits moyens financiers pour développer des moyens de communication, qu'on appelle la télévision communautaire, la radio communautaire ou d'autres organismes qui, au Québec, animent notre milieu. Il ne faudrait pas que Radio-Québec avale ces organismes dans cette télévision professionnelle qui coûte cher parce qu'on a choisi cette voie de travailler dans un milieu où il nous faut être en concurrence avec le milieu professionnel, parce que nous sommes normalisés et nos syndicats qui sont associés à la vie de Radio-Québec défendent les intérêts professionnels de leurs membres et on ne peut pas contester cela. (15 heures)

Ce type de télévision professionnelle est coûteux et nécessaire, mais il ne doit pas paralyser les autres énergies et voilà pourquoi tous les groupes qui, au Québec, sont dans les moyens de communication, radio-télévision, se doivent d'avoir une aide. Radio-Québec souhaite collaborer avec ces organismes quand c'est possible de faire les arrimages entre ce qu'ils produisent et ce type de télévision que nous faisons.

Il y a quelques années, on a reproché à Radio-Québec — j'espère que ce n'est pas trop long, M. le Président — d'être trop sophistiqué dans son équipement et d'avoir des choses qui ne s'arrimaient pas avec ce qu'on pouvait faire en région. La technique s'est développée. Il y a moyen d'avoir des équipements plus légers et il y a moyen de faire les concordances avec ce que font des télévisions communautaires, qui expriment des besoins d'un milieu à un niveau parfois régional, mais parfois sous-régional. C'est impensable pour Radio-Québec de faire du développement régional si on ne veut pas s'associer à ceux qui ont une expertise régionale et ce sont les groupes dont vous parlez qui ont besoin d'aide.

M. Rivest: Dans ce sens-là, pour la dimension régionale, la programmation régionale de Radio-Québec, on voit que vous allez mettre l'accent de ce côté-là. J'aimerais que vous explicitiez un peu la nature des rapports, justement, que vous avez évoqués en votre fin de réponse, de la collaboration en termes d'équipement technique ou autre où Radio-Québec pourrait, étant donné ses moyens, ses ressources, agir, en quelque sorte, comme soutien à la télévision proprement locale ou régionale, c'est-à-dire la télévision communautaire. C'est le premier aspect et, dans le sens contraire également, est-ce que Radio-Québec compte inscrire ce dynamisme, qui est souvent très local, à sa propre définition de sa programmation au niveau des régions?

M. Barbin: M. le Président, je vais vous donner de bonnes intentions. C'est une question à laquelle la réponse est facile, avec les intentions que nous avons de vraiment décentraliser et collaborer au niveau des régions. Je suis bien conscient quand je le dis que ce sont de bonnes intentions et que ce n'est pas facile; ceux qui viennent des régions et qui ont connu des rapports avec Radio-Québec ou d'autres organismes gouvernementaux depuis un certain nombre d'années savent qu'il y a loin, souvent, de la coupe aux lèvres. Je ne voudrais pas, non plus, contredire ce que nous voulons faire avec les gens des régions, parce que nous ne voulons pas faire la télévision à leur place et nous voulons qu'eux-mêmes créent leur propre dynamisme.

Ce qui est indiqué dans le projet de loi, s'il est adopté, c'est que les régions auront des comités régionaux qu'elles choisiront elles-mêmes parmi leurs propres réseaux, socioculturel, socio-économique, maisons d'enseignement et représentants aussi des employés de Radio-Québec. Ce groupe de personnes, puisqu'il sera choisi par les régions et nommé par le gouvernement, aura à définir des modes de collaboration.

Il est certain — vous pourrez poser la question aux représentants des régions — que les gens vont s'opposer à ce que Radio-Québec s'installe dans leur région de la même façon que la télévision traditionnelle: des bâtiments, des équipements, une structure, des personnes choisies par le national et quelques heures d'émission à peine, je ne dis pas, par semaine, par mois, en provenance de la région. Toutes ces énergies régionales se doivent d'être canalisées par les comités régionaux. Il nous faudra enfin essayer de nous ajuster à ceux qui ont des studios dans les régions. Il y a des écoles secondaires, il y a des cégeps qui ont de bons studios. Avec peu de transformation, ça pourrait devenir des studios professionnels. Il nous faut nous associer pour développer, à travers le Québec, des réseaux de production, parce que je suis convaincu que nous n'aurons pas les fonds, si nous sommes exigeants en termes financiers, pour développer un appareillage sophistiqué. Mais il nous faut quand même faire de la télévision professionnelle et c'est là notre défi, M. le Président, d'être capables de faire ces ajustements. Les techniques nouvelles et la créativité des gens des régions et, de notre côté, une certaine souplesse, parce que c'est notre avenir, la régionalisation, je pense qu'il va falloir trouver nous-mêmes les réponses à cela.

Je ne sais pas si j'ai couvert les deux aspects de votre question, M. le Président.

M. Rivest: Oui, d'accord. Je voudrais maintenant, M. le Président, si vous permettez, sans abuser et céder la parole par la suite à mes collègues, vous ramener à la rédaction de l'article 3 d'une façon plus spécifique du projet sur la programmation éducative.

Sur l'éducation et sur sa fonction, l'accès au patrimoine culturel, je pense, en gros, que ça exprime les réalités régionales dont vous avez parlé.

Je voudrais parler d'un sujet un peu plus délicat, mais, tout de même, qui doit faire l'objet des préoccupations de cette commission. Comment, à Radio-Québec, interprétez-vous cette disposition de la loi, dans la mesure même où vous avez vous-même employé dans votre texte, l'expression "projets collectifs", lorsque, à l'égard de l'exercice du droit des citoyens à la liberté d'expression et d'information, notamment — je comprends que ce n'est pas exclusif — la discussion des enjeux collectifs, comment, sur cet aspect, à Radio-Québec, dans votre conception, dans la conception du conseil d'administration, avez-vous l'intention d'interpréter cette disposition de la loi?

M. Barbin: Encore là, M. le Président, c'est une question qui est difficile. Je me permets, et sans agressivité — de dire, que, parfois, on est méfiant vis-à-vis de Radio-Québec. Je ne dis pas cela parce que je sens de la méfiance dans votre question, mais je le dis parce que je le sens dans plusieurs réactions qui nous viennent du milieu québécois, à partir du moment où on doit traiter de questions qui sont délicates, appelons cela le référendum, appelons cela des débats politiques majeurs, à Radio-Québec, on doute qu'on puisse être objectif.

Et je le dis parce que c'est une réalité. Radio-Québec a plus de liberté que Radio-Canada sur ce plan, parce que la société Radio-Canada, dans son mandat, est obligée de favoriser l'unité nationale. Et cela l'oblige à prendre une orientation. Radio-Québec n'a pas de mandat de défendre l'autonomie provinciale ni de défendre un aspect ou l'autre du débat politique.

Radio-Québec a la responsabilité d'être objectif. On nous jugera à nos gestes. Il est important, de plus en plus, que nous précisions nos politiques, et je pourrais les rendre publiques, éventuellement, lorsque nous aurons complété ce travail. Radio-Québec, dans le domaine des affaires publiques, en est à des opérations plus récentes que les télévisions plus expérimentées. Et je le dis humblement.

Voilà pourquoi nous sentons le besoin d'avoir avec nous, à l'interne, au niveau du personnel, et aussi dans notre personnel de soutien, c'est-à-dire ceux qui feront les émissions, des gens compétents, reconnus comme objectifs, et on espère qu'ils le sont. Et s'ils ne le sont pas, on sera jugé par ce que l'on fera et on devra se corriger. On se doit d'être ceux qui présenteront tous les aspects des problèmes, qui devront donner le temps d'antenne, de façon équitable, à tous ceux qui ont des choses à dire, et, en particulier, le droit de réplique.

Là-dessus encore, je ne peux que vous déclarer que ce que nous avons, dans notre réglementation interne, dans notre éthique professionnelle, répond à ce que je peux appeler une objectivité souhaitée. Et si, là-dessus, il y a des choses à changer, M. le Président, je voudrais qu'on me le rappelle, parce que nous avons une liberté complète vis-à-vis du pouvoir politique, qui peut nous couper les vivres, qui peut nous couper des nominations, qui peut changer les membres du conseil d'administration, mais qui ne peut pas intervenir dans le contenu de la programmation de Radio-Québec.

M. Rivest: Pour compléter cette partie de réponse, j'adresserais peut-être ma question au ministre, étant donné le caractère un peu plus précis de cette question, si le ministre me le permet.

Dans la mesure où Radio-Québec définit son mandat au niveau de la programmation éducative, dans le projet de loi, comme des fonctions d'éducation, d'accès au patrimoine, de l'expression des

régions, de la liberté d'expression et d'information en tant que telle, je voudrais demander au ministre d'où vient la nécessité pour le gouvernement, dans le projet de loi, d'avoir inscrit spécifiquement cette mention, cette référence directe qui a été faite aux enjeux collectifs, comme le mandat...

Le Président (M. Jolivet): Juste une minute. Je vais répondre à cette question. Au départ, si c'est pour y revenir lors de l'étude article par article, nous y reviendrons lors de l'étude article par article. Le ministre n'est pas obligé de répondre, s'il ne le désire pas.

M. Rivest: Je ne veux pas en faire un débat. C'est simplement pour faire suite à la réponse du président de Radio-Québec. Est-ce que c'était absolument nécessaire de faire une référence directe à celle-là, dans la mesure où le président de Radio-Québec lui-même vient de dire, d'une façon assez claire, que Radio-Québec jouit d'une liberté sur le choix des émissions?

M. Guay: Encore là, M. le Président, inévitablement, par le genre de questions posées, si on se met à poser des questions au ministre et à partir des débats de part et d'autre, on va justement prendre le temps précieux de la commission, comme Mme le député de L'Acadie l'a bien dit tantôt. On pourra y revenir.

M. Rivest: Si M. le ministre ne veut pas y répondre tout de suite, on reviendra là-dessus.

M. O'Neill: M. le Président, si vous êtes d'accord, cela risque d'être long, j'aimerais autant qu'on continue comme cela, et on va se revoir en commission parlementaire.

Le Président (M. Jolivet): C'est ce que je mentionnais; c'est qu'à l'étude article par article, nous pourrons avoir les questions en conséquence.

M. Rivest: D'accord.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: M. le Président, je pense que M. Barbin a mentionné lui-même tout à l'heure, peut-être indirectement, que lors de la commission parlementaire de l'an dernier, on sentait ici beaucoup de tension, beaucoup de méfiance. Vous avez mentionné, dans vos propres paroles, que vous vouliez établir un climat d'harmonie. Je pense que c'est sage. Pour ce qui est du passé, on peut ensevelir les morts et on peut peut-être regarder l'avenir avec un peu plus d'optimisme.

Ma première question, quand vous avez mentionné que vous aviez des relations avec les différents ministères, dont le ministère de l'Éducation, par exemple, vous avez mentionné qu'il y a eu certaines tentatives. Dans votre programmation future, est-ce qu'il y a des pourparlers qui nous permettent de conclure déjà que la collaboration pourrait s'établir de façon très intime, très étroite entre votre organisme et surtout le ministère de l'Éducation et, inévitablement, d'autres ministères qui peuvent être concernés?

M. Barbin: M. le Président, c'est un problème majeur. Dès mon entrée à Radio-Québec, j'ai pris contact avec le ministre de l'Éducation et avec le sous-ministre de l'Éducation pour essayer de nous asseoir le plus rapidement possible à une table, au plus haut niveau possible, afin de mettre sur papier toutes les questions où nous nous devons de collaborer ensemble. Une des premières collaborations — et je le dis parce que c'est un fait important — c'est que le ministère de l'Éducation nous a prêté une période de deux ans le directeur des Communications du ministère de l'Éducation, M. Bédard, qui est devenu directeur des communications à Radio-Québec et c'est déjà une intention avouée de se rapprocher de ce ministère qui est notre premier interlocuteur après, évidemment, le ministère des Communications.

Nous aurons bientôt une rencontre au sommet pour discuter avec le ministère des Communications de tout un ordre du jour dont je vous donne quelques points: l'étude des projets de loi, les comités de programmation, les nominations des représentants du ministère de l'Éducation au conseil d'administration, la délimitation des normes, les projets de radio éducative qui peuvent survenir, le problème de l'éducation des adultes versus l'éducation permanente, le perfectionnement des maîtres, le droit d'auteur, etc. Je pense répondre par cette rencontre qui, pour nous, est majeure, à ce désir de coordination avec ce ministère important. Il en va aussi pour les autres ministères; je pense aux universités et je pense à tous ceux qui, dans le grand réseau de l'éducation au Québec, ont quelque chose à dire. Pour nous, c'est majeur.

M. de Bellefeuille: M. le Président, je me demande s'il n'y a pas eu un lapsus dans l'intervention que vient de faire le président de Radio-Québec. Il a parlé de l'ordre du jour d'une rencontre à venir avec le ministère des Communications.

M. Barbin: Je m'excuse, de l'Éducation.

M. de Bellefeuille: Je pense qu'il voulait dire le ministère de l'Éducation.

M. Barbin: Merci, je m'excuse.

M. Le Moignan: Pour demeurer peut-être dans le même secteur, vous avez mentionné les heures de pointe, à partir de 18 heures. On sait qu'il y a beaucoup de postes privés, de postes de télévision et de radio; à ce moment-là, les gens sont passablement partagés et dispersés. J'aimerais savoir comment vous pouvez concilier une certaine programmation éducative qui se donne également par des postes privés. Est-ce que c'est un sujet de discussion à venir, est-ce qu'il y a des ententes possibles dans ce domaine?

M. Barbin: Si nous regardons l'horaire d'une soirée, on s'aperçoit qu'il y a — on n'a pas le mo-

nopole de l'éducation à Radio-Québec — d'autres émissions que nous souhaitons voir écoutées aussi par les auditeurs québécois à d'autres postes. Nous ne sommes pas un poste de télévision de concurrence sur ce plan et nous essayons, autant que possible, de répartir nos émissions pour éviter qu'elles soient en concurrence avec des émissions éducatives. Il a pu arriver dans le passé que des émissions de même nature aient passé aux mêmes heures. Parfois ce n'est pas simple parce que notre programmation d'automne n'est pas complétée, celle des autres diffuseurs non plus. Je sais que notre direction des programmes est en relation étroite avec les autres postes de télévision pour éviter ces doubles emplois. (15 h 15)

M. Le Moignan: Vous avez parlé de la consultation, de la participation. Il y a déjà eu une vaste consultation dans le passé. Il y a eu le rapport Rocher. Vous tenez compte, évidemment, de toutes ces consultations ou avez-vous l'intention de recommencer encore? Non?

M. Barbin: M. le Président, j'ai le goût de dire que ce ne sont pas les rapports qui ont manqué à Radio-Québec. Quand j'ai occupé ce poste en décembre dernier, mon bureau était rempli de rapports — fort bien faits sans doute par beaucoup de gens — et qui ont inspiré beaucoup de solutions qui ont été trouvées à l'orientation de Radio-Québec. Je ne pense pas qu'on passe le temps, à Radio-Québec, à faire des rapports, sinon des rapports d'écoute pour être sûrs qu'on rejoint les gens. Mais je pense qu'on a la responsabilité de mettre en pratique ce qui a été convenu par une espèce de consensus des Québécois pour qu'on fasse de la télévision à Radio-Québec et c'est ce qu'on a l'intention de faire. Quand on parle de régionalisation, on ne parle pas d'études. On parle de mise en place de structures de participation réelle avec un pouvoir entre les mains des régions, avec des antennes et non pas avec des rapports sur des antennes. On pense à un réseau qui va couvrir le Québec. Espérons, si on a les fonds, qu'on couvrira tout le Québec d'ici cinq ans. On parle de choses concrètes, et j'espère qu'on pourra réaliser tout ce qui a été écrit à Radio-Québec.

M. Le Moignan: Cela me fait plaisir de vous entendre dire que vous allez beaucoup tenir compte des régions. Anciennement, il y avait une tendance à tout ramener au pouvoir central, et les plaintes formulées par les régions, l'an dernier, étaient qu'elles avaient l'impression qu'on voulait les éliminer. C'est peut-être une mauvaise impression, mais c'est l'impression qu'elles nous ont donnée, ici, en commission parlementaire. Je sais très bien que dans les régions, ce n'est pas tellement facile, mais il faut tout de même que vous laissiez les pouvoirs de décision, de façon qu'elles travaillent en collaboration avec vous. Quand vous mentionnez de couvrir le territoire du Québec à 95%, là, je n'ai aucune crainte pour les villes de Montréal, Québec et l'Outaouais, je crois, qui sont déjà organisées. Je pense à l'ensemble du territoi- re québécois. Vous dites que d'ici cinq ans, vous prévoyez... Je sais qu'il y a déjà des projets pour l'Abitibi, la Côte-Nord, le Bas Saint-Laurent, dans un avenir, d'ici un an ou deux, ou... je ne suis pas trop certain.

M. Barbin: Ce que je dis là, M. le Président, c'est une façon indirecte de faire pression sur le gouvernement pour le convaincre qu'un plan de dix ans qui nous a été tracé pour couvrir l'ensemble du Québec pourrait être raccourci parce que les régions vont d'ailleurs vous en parler. Les antennes que nous avons actuellement sont situées à Montréal, Québec, l'Outaouais et, d'ici l'automne, l'Ouest québécois, en plus de quelques projets de réémetteurs. Ce que le gouvernement du Québec nous a demandé de couvrir comme prioritaires, ce sont les régions de la Gaspésie et du Bas Saint-Laurent et les régions de la Côte-Nord et du Saguenay-Lac Saint-Jean. Il reste à couvrir deux régions au centre du Québec, la Mauricie et l'Estrie, qui sont censées venir dans un deuxième temps. Nous croyons que nous pourrions plus rapidement couvrir l'ensemble du Québec parce que les régions de la Mauricie et de l'Estrie sont pratiquement faciles à couvrir en termes financiers. Par contre, les régions éloignées sont plus coûteuses, mais c'est une question de justice — on l'a déjà dit — que de permettre à tous les Québécois de retrouver Radio-Québec en ondes ouvertes et non pas par le cablodistributeur, alors qu'ils sont obligés de payer. Quels seront les fonds disponibles pour pouvoir planter nos antennes non pas uniquement dans la région de Rimouski, mais aussi à travers la Gaspésie, et je pense aux Îles-de-la-Madeleine, où les gens nous le demandent? Je pense à la Côte-Nord et non pas uniquement à Sept-Îles, mais je pense aussi aux villes nordiques. Il y a la côte jusqu'à Blanc Sablon. Il y a la région de Baie-Comeau. Quand on pense au Saguenay-Lac Saint-Jean, il ne faut pas oublier aussi la région de Chibougamau. Pour nous, c'est important que Radio-Québec rejoigne tous les Québécois, mais l'argent, nous ne le créons pas. Nous n'avons d'autres revenus que nos subventions gouvernementales et les quelques revenus de placement qui nous restent lorsqu'on ne dépense pas tous les fonds rapidement. Nous attendons les fonds pour pouvoir répondre à notre mandat qui est de rejoindre tous les Québécois le plus tôt possible.

M. Le Moignan: C'est bien consolant de voir que vous connaissez votre géographie aussi bien, mais vous comptez beaucoup, je crois, sur le travail des députés, sur les crédits à l'Assemblée nationale pour vous aider. Sinon, cela pourrait traîner, comme vous le dites, dix ans et peut-être plus que dix ans.

M. Barbin: M. le Président, je n'ai pas dit que cela traînerait dix ans.

M. Le Moignan: Non, non. J'ai...

M. Barbin: J'ai dit que le plan prévoyait dix ans.

M. Le Moignan: Le plan, mais nous autres, on pense que cela peut traîner. Ce n'est pas vous qui l'avez dit, là. On sait qu'avec le gouvernement, ce n'est pas toujours tellement rapide. Quand vous avez parlé de justice, je crois que les contribuables de tout le Québec aimeraient bien en profiter et être servis là-dedans.

J'aurais une autre question. La programmation éducative comme telle, est-ce que c'est vraiment clair? Est-ce que c'est quelque chose qu'il faut réellement inventer? Est-ce qu'on est bien situé sur cette programmation à l'heure actuelle?

M. Barbin: Je le pense, M. le Président. Je ne veux pas avoir l'air prétentieux en disant cela. Dans le fond, tous s'entendent sur ce que c'est que de la télévision éducative. Il s'agit de regarder les émissions. Prenons la question des films — c'est une question qui a été posée. Est-ce de la télévision éducative que de présenter de bons films? Là-dessus, j'ai déjà dit que, lorsqu'on présentait des films à l'école ou au collège — plusieurs ici en ont l'expérience — on ne demandait pas aux étudiants de se retirer, on leur présentait des films comme un instrument culturel. À Radio-Québec, dans le passé, lorsqu'on présentait un film, on avait l'impression parfois qu'il fallait s'excuser et faire avant une espèce de ciné-club plat. L'on croit qu'on peut présenter de bons films, à condition que ce soient de bons films, mais si on en présente de mauvais, on remplit mal notre rôle, on choisit mal nos films et on peut se le faire reprocher. Si on inclut les films, les émissions d'affaires publiques, l'information, les émissions générales, je pense qu'on sait de façon générale ce que peut être une télévision à caractère éducatif au sens large. Là où on aurait des problèmes à nous justifier — on le sent bien — c'est si on présentait les joutes de hockey du Canadien. Mais si on présente des joutes de hockey pendant des concours d'amateurs ou des concours sportifs pour faire l'éducation des jeunes, c'est différent. Je pense qu'on a un bon instinct de cela. Je pense que les définitions sont utiles pour pouvoir couvrir l'ensemble de la télévision éducative et avoir des modes de référence. On sait bien ce qu'est la télévision scolaire. Ce qui est important, c'est de diffuser ces émissions sans avoir de directives, en terme commercial, pour les placer aux meilleures heures d'écoute. C'est cela qui est important. Quand on diffuse les débats de l'Assemblée nationale, M. le Président, on sait bien que c'est éducatif et c'est de l'information en même temps. Personne ne nous a contesté cela.

M. Rivest: M. le Président, est-ce que vous pourriez élaborer votre idée sur votre sourire?

M. Barbin: Pardon? Non, j'essaie de faire des blagues et parfois on manque son coup.

M. Le Moignan: Tout le monde est d'accord avec vous. Les débats, c'est très éducatif et très formateur, de très haut style.

Mme Lavoie-Roux: À formateur, je me permets de...

M. Le Moignan: De très haut style aussi, très souvent. Tout cela et entre guillemets. Maintenant, j'aurais une dernière question. Je me souviens d'avoir lu un article, M. Barbin, l'an dernier; malheureusement, je n'ai pas la référence. On mettait Radio-Québec en garde contre les régions, parce qu'on nous dit que les régions vont nous sortir toutes sortes de choses, elles n'ont pas de spécialistes, elles sont mal équipées, elles vont nous présenter des programmes à l'eau de rose. Je crois tout de même qu'il y aura une entente possible et il y a tout de même certains spécialistes en communication, en audio-visuel, qui ont des maîtrises, dans certaines régions du Québec. Cette crainte qu'on fait ressortir, on voudrait que tout soit centralisé, soit à Montréal, par exemple, et que les régions n'aient pas un mot à dire ou encore qu'elles présentent de petits programmes insignifiants. Vous avez tendance, j'imagine, à amener vos spécialistes ou les spécialistes des régions à constituer quelque chose de valable — vous avez parlé d'inter-régions — qui puisse servir à droite et à gauche.

M. Barbin: M. le Président, là-dessus je dis souvent, en réponse à des questions qui me sont posées, que ceux qui font la télévision dans les grands centres viennent souvent des régions. Les régions ont de l'expérience dans le domaine de la production. Elles n'ont peut-être pas autant d'occasions que d'autres télévisions des grandes villes de mettre en pratique, dans une télévision professionnelle, ce qu'elles connaissent. Mais il est sûr qu'on ne peut pas, du jour au lendemain, trouver, dans les territoires des régions, tout le personnel compétent parce que, souvent, il est parti et il travaille ailleurs. Il va falloir soit les rapatrier — ceux qui veulent retourner travailler en région — soit former ceux qui veulent se perfectionner. La décision que nous avons prise de régionaliser Radio-Québec, et si c'est rendu conforme par l'adoption de ces projets de loi, ce sera de remettre sur pied le service des stages à Radio-Québec qui permettait à tout le personnel interne — cela a été demandé par nos syndicats — et à tout le personnel aussi des régions d'avoir une connaissance professionnelle de la télévision. Tous ces employés en région feront partie des mêmes unités syndicales que celle de la centrale et nos syndicats seront aussi exigeants pour les qualités professionnelles, de même que Radio-Québec, qu'on l'est pour la production au niveau national.

Il est sûr qu'il faut avoir confiance aux régions. À ceux qui le pensent, comme vous l'avez dit, vous leur poserez la question. Nous ne croyons pas cela et nous avons confiance que, dans un avenir rapproché, avec l'utilisation et la formation de nos équipes régionales, on pourra avoir en région des gens qui feront d'aussi bonnes émissions qu'au national. C'est ce qu'on vise.

M. Le Moignan: Ma dernière question: Cela fait peut-être deux ans que vous avez des représentants dans les régions, je n'en suis pas trop certain. Qu'est-ce que cela a donné? Qu'est-ce que cela a produit? Très peu peut-être ou si vous voulez relancer, repenser votre formule?

M. Barbin: Cela a donné le projet de loi actuel parce que tous les efforts qui ont été investis par ceux qui, dans des moments difficiles suite à la première consultation que Radio-Québec a eue il y a trois ans... Les premières audiences publiques ont donné naissance à des comités régionaux qui, contre vents et marées, malgré toutes les indécisions quant à l'orientation de Radio-Québec, ont tenu ferme; dans certains cas, les gens se sont découragés; d'autres ont maintenu les comités en place. En plus d'aider Radio-Québec au niveau du développement régional par la distribution d'émissions, de cassettes et l'animation du milieu, ces comités ont produit des émissions régionales qui ont été diffusées sur le national parce que cela se fait depuis quelques années, des productions régionales diffusées par le national et réalisées grâce à la collaboration de nos comités régionaux. Ces comités existent pour la plupart — ils vont vous présenter un mémoire et pourront répondre à vos questions; je ne veux pas parler en leur nom — et auront pour mandat d'assurer la mutation entre le comité provisoire qu'ils ont maintenant et les comités permanents qui découlent de la nouvelle loi.

M. Le Moignan: Merci.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Taschereau.

M. Guay: M. le Président, j'aurais deux questions. La première: Vous avez semblé exclure tantôt, au niveau des principes, la possibilité que Radio-Québec ne fasse jamais de l'information dite de salle de nouvelles. Je comprends que faire de l'information dite de salle de nouvelles est un exercice extrêmement onéreux et que les budgets de Radio-Québec ne sont pas suffisants à l'heure actuelle ni dans un avenir prévisible d'autant plus que vous avez comme priorité de couvrir l'ensemble du territoire québécois. Je suis bien d'accord avec vous là-dessus.

Il n'en demeure pas moins que l'information télévisée brute, l'information dite de salle de nouvelles au Québec souffre, dans certains cas, de sérieuses carences et le fait de dire que d'autres la font justifie qu'on ne la fasse pas, qu'au plan des principes en tout cas, cela me semble étonnant en ce sens que — d'une part, bien sûr, Radio-Canada avec des moyens considérables en fait mais à l'intérieur d'un mandat que vous avez vous-même évoqué — inévitablement, plus souvent qu'autrement, plutôt que de savoir ce qui se passe dans les régions du Québec, on a tendance à nous dire ce qui se passe dans des régions du Canada qui sont, pour les Québécois dans certains cas, d'un intérêt moindre. Je ne dis pas que c'est par manque complet d'intérêt mais seulement, un incendie à Regina n'est certainement pas plus intéressant qu'un incendie à Chicoutimi, au contraire.

D'autre part, dans le cas de TVA, on a vu récemment ce que les journalistes de la station mère de Montréal ont eu à dire sur les pratiques d'information — à tort ou à raison, je ne l'ai pas vérifié — mais, chose certaine, malgré des profits considérables, on ne met pas l'accent, comme on pourrait le faire, sur l'information à ce réseau et en particulier à Télé-Métropole à Montréal si bien que je voudrais bien m'assurer que, sur le plan des principes, on ne fait pas une distinction entre l'information dite d'affaires publiques et l'information dite de salle des nouvelles, qu'éventuellement il n'est pas nécessairement exclu et que cela peut entrer à l'intérieur du mandat éducatif de Radio-Québec de renseigner la population sur les faits bruts qui se sont passés au cours d'une journée pour lui permettre d'être mieux à même ensuite de porter des jugements que toute population doit porter épisodiquement sur les orientations locales, régionales ou nationales.

M. Barbin: M. le Président, je ne dirai pas que j'ai été mal cité; je dirai que je me suis mal exprimé parce qu'il est évident que, sur le plan des principes, on ne peut pas exclure l'information de type quoditien avec toutes les équipes professionnelles appropriées. J'ai dit que, pour le moment, nous ne faisions pas concurrence dans ce domaine à ceux qui étaient déjà équipés. Je ne porte pas de jugement là-dessus. Par rapport aux fonds qui étaient disponibles et par rapport aux coûts qu'implique la constitution de salles de nouvelles, nous n'avons pas mis sur pied actuellement de service d'information comme tel mais nous n'excluons pas qu'à un moment donné, suite aux décisions du conseil d'administration et aux besoins du moment, nous puissions intervenir dans ce secteur. (15 h 30)

M. Guay: Ma deuxième question...

M. Barbin: Mais je voudrais ajouter, M. le Président, un autre élément. Il se peut très bien, cependant, que les régions, les conseils, les comités régionaux décident que pour répondre à des besoins dans leurs régions, ils ont, eux, des priorités plus grandes qu'au niveau national sur le plan des couvertures d'information. Il y aura cette possibilité, parce que ce n'est pas une question de principe, c'est une question d'opportunité, de financement, de priorités, de stratégie et il se pourrait très bien que les régions développent des systèmes d'information avant le national.

M. Guay: Ma deuxième question est d'un intérêt plus local, si vous voulez. Radio-Québec a actuellement une antenne de diffusion dans la capitale, ici à Québec, mais n'a pas de studio de production. Est-ce qu'on prévoit effectivement l'implantation de moyens de production dans la capitale et à quel moment est-ce que c'est prévu dans l'échéancier?

M. Barbin: Toute cette question de la production a été posée par le rapport Rocher qui a inspiré la décision gouvernementale de nous donner ce mandat de développer notre réseau d'antennes, dans un premier temps, dans les trois régions prioritaires dont j'ai parlé tout à l'heure, dans l'Est et au Saguenay-Lac-Saint-Jean et on nous dit en même temps que nous devons commencer immédiatement les études qui nous permettraient d'implanter à côté de chaque antenne des studios de production. Québec fait partie du groupe de régions où il y a déjà des antennes. Donc, nos études nous permettront de répondre de façon plus précise à la question qui m'est posée, M. le Président, lorsque nous les aurons complétées pour la préparation de nos prochaines demandes budgétaires. Je pourrais difficilement mettre une date et ce ne sera certainement pas avant deux ans.

Le Président (M. Jolivet): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Mon collègue...

Le Président (M. Jolivet): Oui. M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Je voudrais avoir votre commentaire, M. le Président, avant de donner la parole, très brièvement, sur l'ensemble du mandat, défini autant dans la loi 109 que dans cette nouvelle loi sur la programmation éducative. Est-ce que vous n'avez pas l'impression que le projet de loi tel que rédigé — je sais qu'en pratique vous pourrez, à l'intérieur de votre programmation, faire écho à ce type de préoccupation — dans l'ensemble du mandat qu'on confie à Radio-Québec au titre de la programmation éducative, ignore complètement ou, enfin il me semble ignorer complètement toute espèce de préoccupation économique et sociale et que l'ensemble du mandat est un mandat globalement politique, dans le sens non péjoratif du terme, et un mandat culturel. J'en veux simplement comme illustration que le seul moment, dans la définition de programmation éducative, où on parle des problèmes régionaux, c'est au titre de l'accès des citoyens à leur patrimoine culturel. Or, tout le monde sait qu'il y a, au niveau du public et des citoyens en général, un immense besoin de connaissances et d'information sur les réalités proprement sociales et, également, sur les réalités économiques. Cette dimension, dans l'ensemble des deux projets de loi, m'apparaît complètement écartée et dès lors que vous entrez au niveau des régions, sans doute que dans les consultations que vous avez menées ou celles mêmes que le ministère des Communications a menées, le type de préoccupation qu'on vous aurait signalé — parce que ce sont les informations que tous ceux qui se promènent en province recueillent — c'est que les questions économiques et les questions sociales sont aussi extrêmement importantes.

Dans la rédaction de l'article 3, la nouvelle rédaction, je comprends qu'on a essayé d'écarter l'expression "enjeu collectif" par l'euphémisme "questions d'intérêt général" et que vous pouvez me dire que les questions économiques et sociales vont être couvertes par cela, mais on sent manifestement qu'il y a la pression de Radio-Québec, la définition de Radio-Québec est beaucoup plus dans l'ordre culturel, ordre culturel et politique entendus dans un sens restreint, ce qui semble ignorer les réalités économiques et sociales qui sont tout de même l'objet des premières préoccupations d'un très grand nombre de citoyens.

M. Barbin: M. le Président, nous n'avons pas senti à Radio-Québec, ni au niveau interne, ni au niveau du conseil d'administration, que cette définition qui est inspirée de la définition de l'éducation de l'UNESCO n'était pas englobante et si jamais ce que vous dites ne découlait pas de ce qui est là, j'ai l'impression qu'il faudrait le mettre, parce que, dans les orientations de Radio-Québec, on voudrait davantage coller à cette réalité québécoise où les problèmes économiques sont importants. Je pense à beaucoup d'émissions que je pourrais vous donner en exemple sur lesquelles on réfléchit pour la prochaine année, où on veut s'interroger sur le secteur économique, pouvoir couvrir l'ensemble de l'éventail des préoccupations des Québécois dans tous les grands secteurs de l'éducation. Je ne l'ai pas senti jusqu'à présent, ni au niveau de notre conseil d'administration. On a travaillé sur plusieurs documents et ce sont toujours des documents qui sont assez englobants et ça nous permet, nous, de réaliser les grands objectifs de programmation qui collent à ces besoins que vous avez signalés et qui sont, à notre point de vue, exacts.

M. Rivest: Je pense que vous avez raison. D'ailleurs, vous avez retransmis le sommet économique. On voit qu'il y a une préoccupation de Radio-Québec de cet ordre, mais, en tout cas... Simplement pour conclure, je pense qu'éventuellement, au niveau de l'étude article par article, il y aura peut-être moyen d'introduire cette dimension.

Le Président (M. Jolivet): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je dois vous dire que je suis assez surprise de lire votre mémoire. C'est la première fois qu'à une commission parlementaire, j'ai conscience de la nature d'un tel mémoire.

Vous arrivez ici et vous n'avez aucune critique sur les deux projets de loi qui sont devant l'Assemblée nationale. Ordinairement, quand des organismes se présentent, ils peuvent être en faveur d'un projet de loi et le supporter abondamment. Mais, à aucun moment, je ne vous ai entendu exprimer quelque restriction ou quelque critique que ce soit à l'égard de ces projets de loi, si bien que j'avais presque — je suis sûre que je me trompe — l'impression que vous aviez préparé les projets de loi

et que c'étaient les projets de Radio-Québec et non pas les projets de loi du gouvernement.

Enfin, est-ce que tout vous convient dans les deux projets de loi qui sont devant l'Assemblée nationale?

M. Barbin: M. le Président, nous n'avons pas préparé les projets de loi.

Mme Lavoie-Roux: J'ai bien l'impression que je me trompe, oui.

M. Barbin: Nous avons critiqué les projets de loi sous forme de documents de travail et j'aurais une pile de dossiers de toutes les remarques que nous avons faites au niveau de notre conseil d'administration pour arriver à une rédaction qui puisse satisfaire Radio-Québec, puisqu'il est le premier concerné par ce projet de loi.

On me glisse un papier. Il y a eu 31 projets, avant celui-ci, qui ont circulé depuis un an et où ces documents ont été étudiés par le contentieux de Radio-Québec, par le personnel interne, par celui des communications, par celui du conseil exécutif, par les comités de législation, et Radio-Québec se doit de reconnaître aujourd'hui que les projets de loi, tels qu'ils sont présentés, ont été modifiés pour correspondre à l'essentiel de la marge de manoeuvre que nous souhaitions et des critiques que nous avions faites, ce qui explique que notre mémoire reconnaît l'utilité des projets de loi.

Mme Lavoie-Roux: Alors, sur aucun article, à aucun moment, vous n'avez de recommandation à nous faire.

M. Barbin: À ce moment-ci, non, M. le Président, et je ne vous parle pas en mon nom. Je vous parle au nom du conseil d'administration.

Mme Lavoie-Roux: Bon! C'est quand même assez étonnant. Je n'ai jamais vu ça à une commission parlementaire, mais je suppose qu'il y a un début à tout.

Je voudrais revenir quand même... Est-ce que votre définition de la télévision éducative est la même que celle qui nous a été donnée par le ministre, qui est extrêmement englobante, celle de l'UNESCO? Est-ce que c'est ça, votre définition de la télévision éducative?

M. Barbin: Celle qui a été retenue après plusieurs études, c'est celle de l'UNESCO, M. le Président.

Mme Lavoie-Roux: Alors, elle vous permet d'aller un peu dans toutes les directions parce que tout peut être interprété comme étant éducatif.

M. Barbin: Parce que ce que tout ce qui est éducatif est possible à Radio-Québec.

Mme Lavoie-Roux: Oui... Vous disiez tout à l'heure, dans votre mémoire, à la page 2, qu'il faut bien comprendre que

Radio-Québec n'est pas un luxe que se paient les Québécois, à côté de Radio-Canada et de la télévision commerciale francophone ou anglophone. Vous donniez comme exemple qu'il y en avait une, entre autres, en Ontario. J'imagine aussi qu'il y en a aux États-Unis et en Angleterre.

Mais parlons de celle de l'Ontario. Vous ajoutez: Nous avons, à cet égard, une spécificité importante qui réside dans chacun des termes du mandat qui nous est tracé dans ces projets de loi et qui peuvent se résumer en deux mots: un projet collectif.

Je voudrais que vous explicitiez votre pensée là-dessus. Vous parlez de la justification pour que le Québec ait aussi une télévision éducative, ce sur quoi je suis totalement d'accord. C'est l'exemple de l'Ontario. Mais vous y ajoutez une spécificité importante, que vous appelez le projet collectif.

Quelle est la différence entre une télévision éducative en Ontario et une télévision éducative au Québec, compte tenu que je reconnais, dans l'élément b) de la programmation éducative, qu'évidemment, il y a une spécificité au Québec, au point de vue culturel. Je suis d'accord avec cela. Votre projet collectif, pourriez-vous me définir cela? Qu'est-ce que cela englobe?

M. Barbin: La différence, M. le Président, entre la télévision éducative de Radio-Québec, si le projet de loi est adopté, et la télévision de l'Ontario ou de Radio-Canada, c'est que, pour la première fois, dans les moyens de communication nationaux ou de grande envergure, il y a une décentralisation des pouvoirs au niveau des régions. Pas une décentralisation au niveau de comités consultatifs, comme cela existe ailleurs, pas une décentralisation en envoyant du personnel gérer en région, mais une décentralisation réelle.

Si je prends le Devoir d'aujourd'hui, je vois que Radio-Canada dit non à une demande d'autonomie de L'Acadie. Il n'y a pas de rapport...

Mme Lavoie-Roux: M. le Président...

M. Barbin: Je continue, si vous le permettez, M. le Président. J'ai l'air de partir de loin, mais c'est le problème majeur. Par le nouveau projet de loi, Radio-Québec donne aux régions une autonomie réelle de gestion, confirmée par un projet de loi, de gestion administrative et financière, de gestion aussi du personnel et de gestion de la programmation.

Ceci veut donc dire qu'en région, il y aura un pouvoir réel des gens pour décider, dans le cadre d'un budget qui sera alloué par le national, ce que veulent faire comme télévision les représentants des régions, et, automatiquement, le président du conseil d'administration de la région, sera membre du conseil d'administration de Radio-Québec.

Lorsqu'on parle d'un projet collectif, on veut dire que les gens des régions sont représentés véritablement, ont un pouvoir régional et peuvent participer, d'autorité, au niveau national. Peut-être que le mot de projet collectif est un peu gros.

C'est une façon, pour nous, de transmettre cette idée.

En Ontario, il n'y a pas de décentralisation, ni à Radio-Canada, ni dans d'autres stations. C'est la première fois que cette expérience est faite et, dans ce sens-là, elle est positive à ce point que nous croyons que Radio-Québec devient vraiment l'affaire de tous les Québécois, non pas uniquement en termes de diffusion, mais aussi en termes de production et en termes politiques.

Mme Lavoie-Roux: Je suis contente que vous admettiez que le terme soit un peu gros, parce que ce que vous venez de me décrire, c'est une question de structure. Au lieu d'avoir une structure centralisée, on semble vouloir s'efforcer d'avoir une structure décentralisée, quoique, là encore, on puisse même se poser des questions sur les explications que vous venez de donner. Quand on voit, au paragraphe c) de l'article 5, que le conseil d'administration de Radio-Québec va établir des normes de gestion financière, c'est vous qui établissez les normes de gestion financière. Que vous établissiez des enveloppes globales pour chaque région, cela irait encore, mais quand vous dites que vous allez établir des normes de gestion financière... Ce n'est pas vous, c'est le projet de loi, je m'excuse. Mais vous comprenez, j'ai un peu de difficulté à faire la différence entre vous et le gouvernement, dans ceci.

M. Guay: Regardez donc la composition du conseil d'administration, c'est intéressant.

Mme Lavoie-Roux: On y reviendra. M. Guay: C'est la somme des régions. Le Président (M. Jolivet): M. le député.

M. Barbin: M. le Président, est-ce que je peux ajouter une chose? Quand nous parlons du niveau national à Radio-Québec, du conseil d'administration national, nous parlons d'un conseil d'administration qui est formé, avec un nombre très important de gens des régions. (15 h 45)

Mme Lavoie-Roux: Dix sur 23, vous êtes majoritaires.

M. Barbin: Un maximum de dix sur 23.

Mme Lavoie-Roux: Oui, vous demeurez majoritaires dans ce conseil d'administration.

M. Barbin: C'est-à-dire ceux qui demeurent majoritaires... je ne comprends pas, M. le Président.

Mme Lavoie-Roux: C'est-à-dire que Radio-Québec...

M. Barbin: Qui est majoritaire?

Mme Lavoie-Roux:... l'organisation nationale, comme vous l'appelez, demeure majoritaire par rapport aux régions.

M. Barbin: Si on oppose à ceux qui ne sont pas des régions, ceux qui sont des régions. Mais on ne connaît pas la composition du conseil d'administration, on ne peut pas dire qu'il y a deux blocs. Ce qu'il est important de dire pour moi, M. le Président, c'est qu'il y aura dix représentants des régions qui vont fonctionner avec des mandats de leur région pour défendre les intérêts des régions au conseil d'administration de Radio-Québec.

Mme Lavoie-Roux: Pour revenir à la programmation éducative, je reviens sur les remarques de mon collègue de Jean-Talon, en ce qui touche a et b, je pense que je n'ai pas, à première vue, de réticence; mais en ce qui touche c, notamment la discussion des questions d'intérêt général, il est fort clair qu'on a remplacé le mot "enjeu collectif" par le mot "question d'ordre général" parce que ceci avait soulevé un certain remous. À votre point de vue, dans quelle mesure peut-on déborder à ce moment-là des questions qui sont strictement d'information dans un sens éducatif et, finalement, toucher à des questions qui sont d'ordre politique et qui pourraient facilement glisser, non plus sur une télévision éducative, mais sur une télévision qui pourrait avoir un certain caractère de propagande? Bien, c'est ce que je pense, je vais le dire, M. le Président.

M. O'Neill: C'est Radio-Canada qui vous fait penser à cela?

M. Guay: Vous avez dit ce que vous pensiez.

Mme Lavoie-Roux: Peut-être, peut-être, peut-être. Mais Radio-Canada ne se cache pas derrière une télévision...

Le Président (M. Jolivet): Mme le député de L'Acadie!

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je peux faire une réflexion, c'est moi qui ai le droit de parole.

Le Président (M. Jolivet): Sauf que je pensais que c'était à M. le président de Radio-Québec de répondre.

Mme Lavoie-Roux: Mais comme on m'a interrompue...

Le Président (M. Jolivet): J'ai demandé qu'on arrête cette chose.

M. Rivest: C'est une question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Ce n'est pas pareil. J'ai voulu interrompre toute conversation entre les membres de la table et reprendre vers la personne...

Mme Lavoie-Roux: Je ferai la remarque après, si vous ne voulez pas que je la fasse avant. D'accord, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Vous avez toujours le droit de la faire après. M. le président de Radio-Québec.

M. Barbin: M. le Président, il est impensable qu'un organisme de télévision qui a une mission éducative ne puisse aborder tous les sujets dont ceux qui sont politiques, ceux qui sont d'intérêt général ou appelons cela les grands enjeux, c'est une question de mots. Ce qui est important pour nous, c'est d'être présent à la communauté québécoise comme instrument de diffusion; on se doit d'être objectif et on devra exiger à nos oeuvres — et si on se trompe et si on est partisan, on se devra de nous contester. Tout ce que j'ai dit jusqu'à présent et toute la liberté d'action dont dispose Radio-Québec, et le conseil d'administration a scruté ses dossiers là-dessus, nous croyons que nous avons la liberté de manoeuvre et une grande liberté pour être objectif.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, ce que je voulais dire — et non pas à l'adresse du président — c'est que Radio-Canada ne prétend pas être uniquement une télévision éducative alors que le rôle de Radio-Québec est d'être une télévision éducative. Je pense qu'il y a là une énorme différence. Cela n'excuse pas, de toute façon, Radio-Canada, même si elle n'est pas uniquement une télévision éducative, de faire de la propagande dans un sens ou dans l'autre. Là-dessus, je suis d'accord.

M. Guay: ... l'entendre dire.

Mme Lavoie-Roux: Avez-vous certains critères que vous avez établis pour, justement, nous assurer qu'en encourageant les discussions, les questions d'intérêt général, vous resteriez bien dans votre rôle de télévision-éducative? Quelles sont les balises que vous vous donnez pour, justement... Je pense qu'il est évident qu'on peut facilement glisser quand on réfère à une notion aussi vaste que la discussion des questions d'ordre général; est-ce que vous avez certaines balises, certains critères dont vous pouvez nous faire part?

M. Barbin: M. le Président, vous me permettez de demander au directeur des programmes, M. Sylvestre, de répondre à cette question? Est-ce que vous permettez, Mme le député?

Mme Lavoie-Roux: Allez.

M. Barbin: M. Claude Sylvestre.

M. Sylvestre (Claude): M. le Président, madame, nous avons, à Radio-Québec, rédigé attentivement une politique des programmes qui, justement, veut nous donner d'une façon interne des balises assez précises sur l'éthique professionnelle qui doit nous régir quand nous faisons de l'information au sens large, quand nous abordons des questions qu'on appelle d'affaires publiques. Il nous est apparu évident que Radio-Québec ne pouvait pas se mettre à diffuser des émissions éducatives au sens large et des émissions culturelles en dehors du temps, un peu comme en circuit fermé, sans aucune prise sur la réalité, sans être le miroir de ce qui se passe d'important pour la collectivité québécoise. C'est dans ce sens-là qu'on a développé une politique d'affaires publiques.

Vous nous demandez quels sont les critères, qu'est-ce qui nous fait juger si un événement a une importance collective. Évidemment, c'est l'expérience et le bon sens. Je pense que l'opinion publique, l'Assemblée nationale, les journalistes sont garants du reflet du miroir démocratique que doit être Radio-Québec quand Radio-Québec décide de couvrir ou de ne pas couvrir un événement. Voilà des décisions aux programmes qui sont prises coup par coup, mais dans un éclairage de fonctionnement qui relève d'une éthique, des politiques de programmes qui sont rédigées article par article et qui sont une sorte de petit code interne, mais qui sont garants de notre procédure interne.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que, par exemple, la discussion des institutions politiques canadiennes pourrait faire partie de l'information à la population québécoise, dans un esprit éducatif?

M. Sylvestre: Absolument. Si, en période préréférendaire ou référendaire, le débat politique sur l'avenir du Québec à l'intérieur de la Confédération devenait un enjeu majeur pour la collectivité québécoise, il nous apparaîtrait tout à fait artificiel d'éviter de parler, d'analyser, de confronter les opinions.

Mme Lavoie-Roux: Là, vous me parlez d'une situation prise dans un contexte de référendum, mais dans une période qui se situe à l'extérieur du référendum, est-ce que cela fait encore partie de...

M. Sylvestre: On peut bien imaginer qu'à l'intérieur... Je vous donne un tout petit exemple. Nous avons à l'horaire une émission qui s'appelle Studio 1 qui, deux fois par semaine, fait appel à des invités qui représentent une actualité assez immédiate. Il est tout à fait pensable qu'à Studio 1, on ait un homme politique de la scène fédérale qui vienne expliquer ce qui s'est passé quant à lui dans l'enjeu des dernières élections fédérales. Il n'y a vraiment pas une exclusion. La vie, elle est fédérale et provinciale. Elle est éducative et culturelle pour le moment.

Mme Lavoie-Roux: Oui. M. Rivest: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): II y en a d'autres qui ont demandé la parole. Le mieux est de continuer.

Mme Lavoie-Roux: L'autre question est la suivante. Pouvez-vous me dire quelle a été la con-

certation? Vous en avez parlé, mais très brièvement. Vous avez l'intention de vous rencontrer prochainement et vous avez rencontré dans le passé les représentants du ministère de l'Éducation. Quel est le poids que devrait avoir le ministère de l'Éducation dans une télévision qui se dit éducative? Quel est le poids, le rôle que devrait jouer, selon vous, le ministère de l'Éducation dans une telle télévision? En Ontario, je pense que la part du ministère de l'Éducation — je ne sais pas exactement l'articulation — est très lourde. Est-ce que même cela ne relèverait pas du ministère de l'Éducation? Je peux me tromper. Je vous le demande comme information.

M. Barbin: On me dit, M. le Président, que la subvention passe par le ministère de l'Éducation, mais il y a une autonomie assez complète en Ontario. Pour nous, il est bien clair que le ministère de l'Éducation a un rôle important à jouer dans toutes les activités de Radio-Québec, mais, évidemment, beaucoup plus dans toutes les activités de domaine scolaire où là, c'est un rôle majeur. Nous ne sommes pour ce secteur-là de nos activités que des diffuseurs et la responsabilité du contenu d'une bonne partie de notre production dite scolaire qui est importante, qui se situe aux alentours de 20% de la diffusion relève du ministère de l'Éducation. On doit lui donner des heures qui lui conviennent et on doit travailler avec lui pour répondre à ses besoins.

Du côté de l'éducation permanente aussi, appelons cela l'éducation un peu plus formelle, nous croyons que les maisons d'enseignement et le ministère de l'Éducation ont un rôle important à jouer. C'est un secteur privilégié que nous avons comme clientèle. Pour ce qui est de la partie plus d'éducation au sens large, Radio-Québec se doit d'être maître d'oeuvre et responsable, ce qui ne veut pas dire que nous ne devons pas mettre en discussion un certain nombre de choses. La rencontre que nous avons avec le ministère de l'Éducation vient justement préciser ce type de collaboration. Je serai plus en mesure de vous répondre, M. le Président, dans quelque temps, lorsque nous aurons eu ces rencontres et lorsque nous aurons créé les mécanismes appropriés. La nouvelle loi prévoit la nomination par le ministre, sur la recommandation du ministre de l'Éducation, de deux représentants au conseil d'administration national. Elle prévoit aussi, au niveau régional, la représentation de deux maisons d'enseignement régionales de façon à nous rapprocher davantage au niveau — entre guillemets — "des structures" d'une collaboration organique. Je pourrais difficilement, à ce stade-ci, aller plus loin dans des choses très concrètes.

Mme Lavoie-Roux: II reste que c'est un peu surprenant que cette chose-là ne soit pas articulée entre Radio-Québec et le ministère de l'Éducation avant qu'on adopte un projet de loi sur la télévision éducative. Il me semble que cela aurait dû être fait antérieurement plutôt que postérieurement. Mais on sait que...

M. Barbin: M. le Président. Est-ce que vous me permettez, madame, un commentaire là-dessus?

Mme Lavoie-Roux: Oui, certainement.

M. Barbin: Dans les études qui ont été faites et auxquelles je n'ai pas participé, mais dont j'ai eu les résultats, le contenu, il y a eu beaucoup d'hypothèses qui ont été faites où Radio-Québec aurait pu devenir autre chose que ce qu'il était et ce qu'il deviendrait par le nouveau projet de loi. Ces hypothèses ont été analysées et on est arrivé à la conclusion que Radio-Québec se devait de continuer dans les structures actuelles. Ces discussions ont eu lieu au cours des dernières années, et principalement l'année dernière, particulièrement au comité Rocher.

Mme Lavoie-Roux: Vous vous entendez avec le ministère de l'Éducation, au moins dans les grandes lignes ou dans les grandes orientations, sur ce que devrait être le contenu de la télévision éducative. Pouvez-vous m'assurer de cela?

M. Barbin: Non, madame. Non, M. le Président. Mais espérons que l'on arrivera à une sorte de compagnonnage créateur.

Mme Lavoie-Roux: On vit d'espoir. On sait que le gouvernement n'a pas réussi encore à définir une politique globale d'éducation permanente et d'éducation des adultes. Est-ce que, à Radio-Québec, on a réussi à faire ce coup de maître? En fait, la raison de ma question, c'est que je m'étonne, à ce moment-ci, qu'on soit prêt à débloquer des crédits importants pour la télévision éducative alors que ceci, à mon point de vue, demeure une question fondamentale non seulement à l'égard de Radio-Québec, mais à l'égard de l'élaboration d'une politique générale de l'éducation permanente et de l'éducation des adultes.

M. Barbin: M. le Président, je serais prétentieux de dire qu'on a trouvé toutes les solutions à Radio-Québec et mon mandat, c'est d'administrer Radio-Québec, et, en administrant Radio-Québec, le faire avec la loi qui existe. Il y a beaucoup de questions qui me sont posées qui pourraient être posées au ministère de l'Éducation. Dans notre mandat, M. le Président, nous avons à réaliser des choses qui sont de plus en plus précises et nous sentons le besoin de le faire avec des organismes comme le ministère de l'Éducation et les autres. Mais on ne peut pas, à Radio-Québec, se prononcer sur des débats comme ceux-là. Je me sens incapable de le faire aujourd'hui.

Mme Lavoie-Roux: C'est quand même une question qui m'apparaît fondamentale devant une radio qui a pour objectif et raison de vivre, raison fondamentale d'exister, l'éducation. Ces questions-là ne sont pas encore résolues et peut-être qu'essayer de les résoudre totalement, c'est difficile, mais que vous ne soyez pas plus avancé dans

ce cheminement, je trouve cela quand même un peu surprenant.

Vu qu'on a le directeur de la programmation, une dernière question... (16 heures)

Le Président (M. Jolivet): Je me posais la question. On s'est donné un large moment; vos 20 minutes s'écoulent.

Mme Lavoie-Roux: Je le sais bien; c'est cela que je réalise.

Le Président (M. Jolivet): Dans ce contexte, si on me dit qu'il n'y a pas de problème et que vous pouvez continuer à poser les questions qu'il vous reste, je vais vous laisser aller.

M. Guay: Non, cela ne déborde pas démesurément.

M. O'Neill: J'ai une petite question. Le Président (M. Jolivet): D'accord.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais simplement rappeler au ministre des Communications qu'au moment de l'étude des crédits du ministère des Communications...

Le Président (M. Jolivet): II n'a pas dit une petite question; c'est lui qui a une petite question à poser.

M. O'Neill: J'attends que vous terminiez pour poser ma question.

Mme Lavoie-Roux: Au moment de l'étude des crédits du ministère des Communications — le ministre s'en rappellera sûrement — il nous avait assurés que nous aurions l'occasion de lui poser toutes les questions que nous voudrions au moment de la commission parlementaire sur les projets de loi 4 et 5; est-ce exact?

M. O'Neill: Au président de Radio-Québec.

Mme Lavoie-Roux: Ou au président de Radio-Québec.

M. O'Neill: D'accord, allez.

Mme Lavoie-Roux: Une question que je voudrais demander au directeur de la programmation pour revenir sur cette question des politiques ou du contenu politique ou éducatif: Pouvez-vous nous dire quel programme existe ou a existé à Radio-Québec en regard de l'information ou de la connaissance des institutions politiques existantes?

M. Sylvestre: II y a eu, il y a trois ans, une série d'émissions qui ont parlé directement du fonctionnement de l'Assemblée nationale mais nous avons actuellement à l'horaire de Radio-Québec une émission hebdomadaire qui s'appelle "La vie parlementaire dans la vieille capitale" où nous résumons les principales questions de l'Assemblée nationale, les principaux sujets des débats et aussi, nous faisons écho aux commissions parlementaires. En plus de faire écho et de résumer, nous expliquons aussi dans quel contexte les projets de loi ont été débattus, dans quel contexte les commissions parlementaires ont siégé. Voilà, à notre avis, une émission hebdomadaire comme exemple qui explique et qui éclaire le téléspectateur québécois sur le fonctionnement des organismes qui sont la base de la vie démocratique.

Mme Lavoie-Roux: Sur les institutions parlementaires canadiennes, il n'y a jamais rien eu. Cela ne fait pas partie de la réalité du Québec?

M. Sylvestre: Actuellement, non, madame.

Mme Lavoie-Roux: Cela ne fait pas partie de la réalité du Québec?

M. Sylvestre: De la grille, pardon, j'ai mal compris. Cela fait partie de la réalité, oui, mais à Radio-Québec, nous diffusons quatre heures et demie d'émissions par jour que nous rediffusons le lendemain après-midi. Évidemment, avec les moyens que nous avons et l'éventail de la grille-horaire qui nous permettent de porter nos différents objectifs, il est évident que l'éventail total de nos objectifs n'est pas atteint.

Mme Lavoie-Roux: Je suis d'accord avec vous; vous retransmettez les débats de l'Assemblée nationale — une partie en direct et une partie qui est retransmise — cela couvre l'Assemblée nationale du Québec. Évidemment, je ne vous demande pas de couvrir les débats de la Chambre des communes mais je vous demande précisément si dans votre programmation éducative, informative, il y a eu des sujets portant sur l'ensemble des institutions canadiennes qui font aussi partie de la réalité de la vie du Québec?

M. Sylvestre: Non, madame, pas comme tels.

Mme Lavoie-Roux: Je vais laisser la parole à d'autres; je reviendrai parce que j'ai plusieurs autres questions.

Le Président (M. Jolivet): Le député de Gaspé.

M. Le Moignan: Je voudrais faire préciser. J'ai parlé tout à l'heure des régions et M. Barbin a mentionné que la province était divisée en dix régions. Je sais que l'an dernier...

M. Barbin: J'ai parlé de dix régions... M. Le Moignan: Existantes ou à prévoir?

M. Barbin:... qui existaient suite à la mise sur pied des comités régionaux et des consultations que nous avions eues. Je parlais des régions

administratives. Il se pourrait et il existe sans doute plusieurs régions au Québec; il pourrait y en avoir, suivant notre façon de calculer, un plus grand nombre. Je ne me suis pas prononcé là-dessus. J'ai référé aux dix régions administratives, et, dans le projet de loi, on limite le nombre des représentants des régions à dix au cas où, si jamais on créait 20 régions, on se retrouve avec un conseil d'administration formé de 35 personnes.

M. Le Moignan: Si je vous pose cette question, ce n'est pas tellement le chiffre 10 qui me paralyse en ce moment, c'est que l'an dernier, évidemment, j'avais insisté comme d'autres sur les régions périphériques. Un de mes amis de Montréal m'avait appelé pour me dire: Oublies-tu que Montréal, c'est une région; ceux qui vivent au centre-ville de Montréal ont peut-être toutes les facilités, mais en dehors, on est à peu près situé comme en Gaspésie ou ailleurs. Dans votre idée de région, est-ce que Montréal est une région, Québec, une région, je parle des villes qui ont déjà plus de facilités, alors qu'à l'intérieur des mêmes régions, des gens sont peut-être défavorisés aussi?

M. Barbin: C'est une grande question, M. le Président, celle-là. On a fait l'hypothèse qu'on commencerait par les régions administratives actuelles, mais il est sûr que ce débat, il va nous falloir l'avoir. On a même demandé conseil à un certain nombre d'organismes dont l'Institut canadien d'éducation des adultes. Nous demanderons conseil à d'autres organismes qui ont réfléchi à toutes ces questions. Il est sûr qu'il n'est pas facile de parler de Montréal comme d'une région. On sait et on a eu des consultations tout autour de la ville de Montréal, même chose pour la région de Québec. Quand on prend les régions, il y a la Gaspésie, il y a la région du Bas-Saint-Laurent, Rivière-du-Loup constitue une région d'après ceux qui nous ont écrit et qui voudraient collaborer avec Radio-Québec, de même que la Beauce. Il y a tout un débat. Il va falloir qu'on arrive à définir les régions et cela se fera sur une période donnée. Au préalable, nous faisons l'hypothèse que nous pourrions commencer par les régions administratives de façon à démarrer, quitte à ce que cette discussion et toutes les précisions viennent ensuite.

M. Le Moignan: Comme il y a d'autres groupes qui attendent, c'est ma dernière question. Je vous ai posé une question au sujet de votre collaboration avec le ministère de l'Éducation. Mme le député de L'Acadie est revenue sur le même sujet. Je me souviens qu'il y a quelque temps, lors de l'étude des crédits du ministère de l'Éducation, on semblait vouloir restreindre aux organismes, par exemple, l'OVEP, l'éducation populaire. À ce moment, si le ministère de l'Éducation vous comprime de plus en plus, c'est là que je vois une collaboration plus difficile, le ministère de l'Éducation qui cumule déjà des budgets énormes à comparer peut-être à $25 millions, je ne me souviens pas, pour votre ministère. À ce moment, vous allez être obligés de tirer sur le ministre de l'Éducation pour qu'il vous passe un petit peu d'argent, je ne sais trop.

M. Barbin: C'est le genre de discussion que nous aurons avec le ministère de l'Éducation, mais le ministère de l'Éducation, lorsqu'il prépare et lorsqu'il a des budgets pour toute la programmation, la production scolaire, cela n'émarge pas au budget de Radio-Québec. C'est en plus des $26 millions. Ce que nous faisons, nous sommes diffuseurs pour le ministère de l'Éducation et le ministère de l'Éducation, dans le cadre de son budget, peut développer davantage l'éducation par la télévision, l'éducation scolaire suivant les politiques qu'il définira et c'est ce genre de discussion que nous aurons avec eux bientôt, mais ce sont des problèmes qui ne sont pas faciles, je le reconnais.

M. O'Neill: Une brève question, M. le Président. Lorsque nous nous sommes rencontrés, l'an dernier, lors de la commission parlementaire, vous vous rappelez qu'il y avait une atmosphère assez tendue à cause du conflit de travail, de relations de travail plutôt difficiles entre la direction de Radio-Québec et les employés et, depuis ce temps, les choses semblent, vues de l'extérieur, être au beau fixe. Je veux simplement vous demander de confirmer cela ou de corriger peut-être. Est-ce qu'on peut dire qu'actuellement, au plan de relations de travail, les choses se déroulent de façon extrêmement positives à Radio-Québec? Est-ce que vous pourriez peut-être nous parler un peu d'efforts qui sont accomplis des deux côtés dans ce sens, afin qu'il y ait à l'intérieur de l'institution un climat beaucoup plus favorable pour le travail d'équipe?

M. Barbin: M. le Président, cette question, j'aimerais mieux qu'on la pose aux syndicats qui auront à présenter des mémoires. Quant à nous, à Radio-Québec, nous essayons de transformer un climat de confrontation en un climat davantage de collaboration. Nous essayons de mettre en place des mécanismes appropriés et nous croyons que tout n'est pas réglé. Il y a un bon nombre de problèmes qui ont été réglés. Ce qui est important, c'est qu'il n'y ait pas d'arrêt de travail à Radio-Québec et qu'on puisse produire de la télévision à la satisfaction de nos employés et du public. Il y a des associations à voir. Nous sommes en négociation actuellement avec l'association des réalisateurs.

On ne peut pas conclure que tout est réglé à Radio-Québec. Il y a des choses qui sont en discussion et que je peux difficilement commenter. Nous aurons à recommencer à négocier l'année prochaine, parce que nos conventions avec nos techniciens et avec le Syndicat général des employés seront échues l'année prochaine. Nous commençons déjà à réfléchir, avant de déposer des offres patronales, à des modes de collaboration, à des modes de relations de travail d'un type qu'on voudrait plus positif de part et d'autre. Je

crois que c'est dans ce climat, qui est positif actuellement, que nous travaillons. Mais il faudrait quant aux autres aspects, poser les questions aux intéressés qui sont représentés ici.

M. O'Neill: Merci.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Oui. Je voudrais revenir à la question de Mme le député de L'Acadie. Tantôt, au début de ses remarques, le président a fait écho à certaines critiques sur le plan politique qui étaient adressées à Radio-Québec. Sans porter de jugement de valeur sur la nature de ces critiques, je pense que, pour les fins de ma question et de la discussion, on peut tenir pour acquis qu'elles existent, sans savoir qui a raison ou non.

Pour ma part, j'ai été assez étonné d'entendre M. Sylvestre dire qu'il n'y avait pas eu, ou, enfin, peut-être, il y a trois ans, un programme quelconque qui concernait spécifiquement les institutions ou la réalité canadienne comme partie de la réalité québécoise.

Cela m'amène à poser une question au président de Radio-Québec. Vous avez parlé tantôt des priorités. Il y a, bien sûr, le rapport Rocher, etc. Il y a le projet de loi qui a réfléchi là-dessus. Vos priorités doivent correspondre à une demande que vous recueillez non seulement sur la dimension régionale des choses, mais une demande que le téléspectateur, sur une base individuelle, vous adresse. Or, s'il est vrai que plusieurs Québécois ont certaines réticences, dès lors qu'il s'agit de commenter l'ensemble de la programmation de Radio-Québec en regard des questions politiques en tant que telles, cela m'amène à vous demander quelles sont les réactions du conseil d'administration face à cette réalité première? C'est la première question. Est-ce que vous réagissez, d'une façon concrète, non pas d'une façon politique, en disant: Non, c'est exagéré? Pour ça, vous pouvez avoir raison, mais, d'une façon, au niveau de la programmation.

Deuxièmement, si la définition de l'UNESCO sur les fins de l'éducation... Cela veut dire quoi, l'éducation? Cela veut dire faire de la télévision éducative, etc. Il y a quand même des dispositions... Cela touche un peu, finalement, à la liberté. Il y a quand même, dans la définition de programmation éducative du projet de loi, le gouvernement et, enfin, l'Assemblée nationale, éventuellement, vous imposent certaines notions qui ont cours dans le contexte politique actuel autour du patrimoine culturel, etc. Il y a toute une charge politique que le projet de loi vous transmet.

Je voudrais savoir quelle est la réaction de Radio-Québec au niveau de sa programmation en tant que telle face à cette réalité, parce que, dans bien des horizons, je pense qu'on passerait pas mal à côté du sujet si, au moins, on ne vous posait pas la question et si on ne faisait pas écho à ce que plusieurs, autant ici, au niveau de l'Assemblée nationale, mais également dans le public et même au niveau de l'Assemblée nationale, mais également dans le public et même au niveau des cotes d'écoute, certains transmettent ça à ce niveau, vous adressent là-dessus. C'est un sujet délicat — j'en suis bien conscient — mais je voudrais quand même que ce soit assez clair, parce que, comme je vous l'ai dit tantôt, au niveau du mandat de la programmation éducative, quand on met, au niveau de la lettre, complètement de côté les questions économiques, les questions sociales et qu'à cela s'ajoute, au niveau de la programmation, une absence assez large de programmes d'information pour améliorer la connaissance sur les institutions existantes et qu'on a de la considération pour les enjeux collectifs à venir, c'est-à-dire strictement dans un cadre référendaire, ce dont on a discuté, je me dis que, au niveau du conseil d'administration, il y a certainement là des éléments de réflexion sur votre liberté réelle en tant que radio-diffuseurs.

M. Barbin: M. le Président, les définitions auxquelles on s'est référé et qui provenaient de l'UNESCO, ce sont des définitions qui ont été acceptées par ceux qui, au pays, font de la télévision ou de la télévision éducative, que ce soit le fédéral —on m'a donné l'information tout à l'heure pour le confirmer — l'Ontario, I'Alberta, le Québec.

Les télévisions éducatives, à cause de la réglementation fédérale qui donne la liberté de la responsabilité du contenu aux provinces, se sont entendues sur la définition de l'UNESCO, et les mécanismes appropriés ont été développés dans chaque province pour se prononcer sur le contenu dont ils sont responsables.

Nous n'avons pas senti les contraintes dont on me parle ici. Et je ne dis pas que ce genre de débat, on ne l'aura pas au conseil d'administration, à un moment donné. Est-ce qu'il est normal que Radio-Québec diffuse les débats de l'Assemblée nationale et pas ceux de la Chambre des communes? Je pense que là-dessus, on s'entend tous. Est-ce qu'il est normal que Radio-Québec ne diffuse pas beaucoup d'émissions parlant du Canada, a exclu ce genre de programmation — je ne dis pas d'une façon systématique — au cours des dernières années, n'a pas mis la priorité là-dessus? Est-ce que c'est normal? Ce sont des discussions, sans doute, que le conseil d'administration se devra d'avoir. Le conseil a demandé de s'intéresser davantage à l'orientation de la programmation. Et ce sont des dossiers qui sont en cours actuellement. Le débat n'est pas terminé là-dessus. Si le président du conseil d'administration de Radio-Québec était ici, il vous confirmerait que le débat n'est pas clos.

Mais pour le moment, comme je l'ai dit tout à l'heure, ce n'était pas dans nos priorités de faire de l'information à Radio-Québec, au sens de l'information, salle de nouvelles régulière. De la même façon, cela n'a pas été reconnu comme prioritaire de faire, par exemple, des émissions de langue anglaise, autres que pour l'enseignement de la langue, et en collaboration avec TV-Ontario, avec qui, d'ailleurs, nous avons des ententes et

avec les autres postes de télévision éducative canadiens, avec qui nous échangeons des émissions à l'occasion, avec qui nous faisons des coproductions. On en a fait dans le passé sur le pays, sur le Canada. Mais cela a été plus ou moins réussi, non pas parce qu'on parlait du Canada, mais parce que c'est une coproduction qui a un peu achoppé. Mais c'était un effort dans le passé. Comment s'appelait cette série? À l'ombre de Liberty. C'était une coproduction Ontario-Québec. Il n'y a pas exclusion à tout cela. Mais ce n'est pas dans nos priorités actuellement et ce n'est pas un débat qui est tranché par le conseil d'administration. Je répète que nous ne sentons pas de contrainte, par la loi actuelle, parce que d'autres provinces ont des contraintes semblables.

M. Rivest: Est-ce que vous sentez une demande de la part du public québécois à ce que vous traitiez davantage des institutions canadiennes?

M. Barbin: II faudrait poser la question à M. Sylvestre ou à M. Caron.

M. Sylvestre: Non, on ne ressent pas cela. Avant de prévoir les thèmes que la programmation va aborder pour une saison à venir, avec l'aide du service de la recherche de Radio-Québec, nous avons des consultations à l'extérieur de Radio-Québec et nous avons eu aussi cette année des consultations avec les employés de Radio-Québec. Nous avons aussi des comités directement rattachés à la direction des programmes, qui ont pour but de bien sentir les thèmes principaux. Et on fait une programmation qui, avec nos moyens, semble répondre à des besoins prioritaires. On peut évidemment avoir des opinions différentes pour certaines priorités, mais comme, par exemple, on s'est aperçu de toute évidence que le citoyen québécois était celui qui avait les habitudes alimentaires les plus néfastes en Occident, on pense que c'est vraiment nécessaire que Radio-Québec s'occupe de la question de l'alimentation.

M. Rivest: Est-ce qu'il y a une demande très grande? S'il n'y a pas de demande pour les institutions canadiennes, est-ce qu'il y a une demande très grande pour l'accès, l'information du citoyen à son patrimoine culturel.

M. Sylvestre: Oui, sûrement. Cela nous apparaît, en plus, être une évidence qui provient de la mission même de Radio-Québec. Radio-Québec doit être, comme télévision éducative au sens large, le miroir de la culture. On doit exprimer, dans nos émissions, les racines, expliquer ce qui nous a faits tels que nous sommes aujourd'hui. On y porte une attention particulière.

Évidemment...

M. Rivest: Est-ce que, dans ces racines, la filière canadienne est présente?

M. Sylvestre: Nous avons déjà fait une émission il y a un an et demi, qui s'appelait "Les

Anglais sont arrivés" et qui expliquait le contexte historique du Québec. Justement, nous voulons, au début de l'an prochain, prévoir une série qui va parler de l'histoire du Québec, évidemment, dans le contexte nord-américain. Ce n'est pas vraiment exclu.

M. Rivest: Je conclus ici. Je pense que le président a répondu que le conseil d'administration était sensible à ces préoccupations. Et je pense, pour un, contrairement à ce que M. Sylvestre a laissé entendre, qu'effectivement, un des éléments critiques majeurs, en tout cas dans les milieux que nous fréquentons, pour ne rien vous cacher...

Des voix: Ah, ah!

M. Rivest: ... mais ce sont des milieux qui représentent — pour me restreindre, par exemple, à la seule circonscription de Jean-Talon — j'ai senti cela. Très sérieusement, je suis convaincu que, dans l'opinion publique, je ne sais pas comment vous pourriez réussir au niveau de la programmation à traduire cela, je comprends les difficultés du conseil d'administration, mais c'est un problème. Je vous dis en second lieu, que la nature même du projet de loi tel que défini — j'ai parlé, encore une fois et j'insiste là-dessus, parce que, pour moi c'est aussi important, les questions économiques et les questions sociales — cela donne une fonction très culturelle à Radio-Québec et qui est mise en cause, culturelle s'entendant dans un sens très particulier, il me semble, par une partie importante de la population, pour ne pas soulever de débat.

Le Président (M. Jolivet): Mme la député de L'Acadie.

Mme La voie-Roux: Je vois que les choses évoluent, le président nous appelle "la" député maintenant. C'est pour le mieux.

M. Guay:... cela aussi, c'est de l'évolution positive.

Mme Lavoie-Roux: Je le signale comme étant une évolution positive.

M. Guay: Vous êtes pour cela? Mme Lavoie-Roux: Oui, absolument.

M. Guay: Je pensais que vous étiez contre toute évolution.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais poser une question au président quant à la composition qui est prévue pour les comités régionaux. Est-ce que cela vous apparaît satisfaisant pour l'ensemble des régions, c'est-à-dire prises séparément?

M. Barbin: II y a eu beaucoup de discussions là-dessus, M. le Président, à l'occasion des consultations. Il y a d'ailleurs des divergences d'opinion;

il y a des groupes qui vont comparaître aujourd'hui et qui ne pensent pas la même chose. Il nous semble que c'est un compromis acceptable à ce moment-ci, mais il y a d'autres hypothèses qu'on aurait pu faire. Parmi les hypothèses, c'était d'essayer d'élargir l'assiette de ceux qui ont à choisir des délégués régionaux, mais on cherchait le mode d'élection et on a pensé que c'était préférable de regrouper, comme cela s'est fait dans bien d'autres organisations semblables, les corps intermédiaires pour arriver à déléguer des gens à Radio-Québec. Ce n'est pas facile. Il nous semble que l'équilibre de nommer quatre représentants des groupes socio-économiques et culturels d'une région, deux représentants des maisons d'enseignement, de façon à maintenir un équilibre entre ceux qui sont pour l'enseignement plus formel et ceux qui ont moins d'obligations du côté de l'éducation permanente proprement dite et qui sont préoccupés par l'éducation au sens large, cela nous semblait un équilibre intéressant, en insérant de plus la représentation d'un employé.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, quand vous dites que c'est un compromis, c'est un compromis entre qui?

M. Barbin: Entre, par exemple, une élection au suffrage universel dans la région et le choix par délégation.

Mme Lavoie-Roux: Ouais. Mais la discussion s'est faite entre qui? Est-ce qu'elle s'est faite entre Radio-Québec central et Radio-Québec régional?

M. Barbin: Cela s'est fait au cours des années; cela s'est fait au cours de tournées que j'ai faites dès mon arrivée en poste l'automne dernier; cela s'est fait par des consultations du ministère des Communications, et j'en passe. Ces débats durent depuis deux ans. La régionalisation, je l'ai dit tout à l'heure en répondant à une question, ce n'est pas de la génération spontanée qui arrive à ce moment-ci, cela date de trois ans, au moment où un autre gouvernement avait fait organiser une consultation provinciale à la demande de l'Institut canadien de l'éducation des adultes qui contestait la centralisation de Radio-Québec. De là est né ce désir des régions de se structurer en étant autre chose que des gens consultés et en ayant une partie du pouvoir de Radio-Québec, sans aller jusqu'à la création d'unités complètement autonomes, fédérées dans un Radio-Québec national. C'est ce genre de compromis qui arrive dans le projet de loi et qui est réalisable maintenant à la satisfaction, semble-t-il, de la majorité des régionaux.

Mme Lavoie-Roux: Je vois, par exemple, quatre personnes sur la recommandation des organismes socio-économiques et culturels de la région. Ensuite, vous avez les deux personnes de l'enseignement et la personne employée par la société. Je pense que dans une région qui est plus peuplée, où les institutions sont moins dispersées et représentent même, à l'intérieur d'une région, des intérêts passablement dispersés, ce qui ne serait pas le cas, par exemple, pour la région de Montréal, la région de Québec, probablement la région de Sherbrooke où... Et quand on arrive dans des régions beaucoup plus éloignées des grands centres, est-ce que ceci vous apparaît suffisant, d'autant plus que le projet de loi joint des organismes socio-économiques et culturels? Si déjà on avait divisé le domaine socio-économique et le domaine culturel, on aurait peut-être eu une chance d'élargir un peu l'éventail et risquer moins que, finalement, les deux deviennent synonymes à cause, comme je le disais tout à l'heure, de la grandeur des régions et peut-être aussi à cause du nombre plus restreint des groupes socio-économiques et culturels d'où on pourra tirer les personnes.

M. Barbin: M. le Président, c'est une hypothèse de travail qui nous semblait plausible et basée sur l'expérience de certains groupes qui ont eu en région à s'organiser de la même manière. C'est une expérience qu'on doit tenter et si ce n'était pas suffisant, il faudrait la modifier, mais je n'ai pas d'argument pour vous dire que c'est la seule formule, qu'elle est réfléchie et qu'elle est mathématique. C'est une hypothèse de travail plausible, bâtie à la suite d'un certain nombre de consultations.

Mme Lavoie-Roux: Croyez-vous que, par exemple, si cette composition est conservée telle que dans le projet de loi, la population sera vraiment représentée? Ceci m'apparaît particulièrement important dans les régions éloignées. Aura-t-on vraiment le pouls, la représentation, le sentiment de la population ou des groupes populaires, si je peux m'exprimer ainsi?

M. Barbin: Encore là, c'est difficile de répondre, M. le Président, mais l'expérience passée de Radio-Québec a été la suivante au niveau de la régionalisation: II y a eu des audiences publiques où on a fait appel à tous les groupes intéressés et à toute la population par des annonces dans les journaux. Un certain nombre de personnes se sont manifestées, et des individus et des groupes. À la suite des consultations, on a convoqué de nouveau les mêmes personnes encore par des annonces dans les journaux. Un certain nombre de personnes se sont réunies et ont choisi des représentants qui constituent aujourd'hui une bonne partie des délégués qui forment les comités régionaux provisoires. Il y a des gens qui ont été nommés par cooptation. On se dit qu'avec la formule où on élargit, on oblige à consulter tous les groupes socio-économiques, tous les groupes culturels et toutes les maisons d'enseignement, c'est déjà une amélioration très grande sur ce qui se faisait dans le passé avec des moyens assez limités. Il est sûr qu'on pourrait subdiviser davantage. Il est sûr qu'on aura des problèmes dans des régions comme Montréal et Québec où, sans doute, on aura à créer des sous-régions. Il y aura toute une mécanique. C'est pour cette raison que je dis que c'est

une hypothèse plausible qu'il nous faudra peut-être ajuster dans quelque temps.

Mme Lavoie-Roux: Je devrais peut-être poser cette question au ministre, mais vous pouvez peut-être y répondre. Pourquoi se limiter à sept membres? Radio-Québec aura 23 membres siégeant à son conseil d'administration. Je ne vous suggère pas 23 membres. C'est beaucoup de monde, mais entre 7 et 23, il me semble que...

M. Barbin: M. le Président, je vais retourner la politesse au ministre. Comme il m'a référé beaucoup de questions quand j'ai été absent récemment, je proposerais que M. le ministre réponde à celle-là.

M. O'Neill: On pourra la reprendre lors de l'étude en deuxième lecture, mais je vais vous dire tout de suite ceci: C'est une sorte de calcul, de pondération. On aurait pu mettre onze.

Mme Lavoie-Roux: Mais vous n'avez pas — pour utiliser l'expression à la mode à l'Assemblée nationale — les pieds dans le béton pour cela?

M. O'Neill: Non, on préfère partir avec ce que j'appellerais une artillerie légère, une machine légère plutôt que de commencer tout de suite à mettre sur pied une grosse machine.

Mme Lavoie-Roux: Non. Ma seule préoccupation, ce n'est pas de grossir. Je sais que c'est plus compliqué. Mais c'est du point de vue d'assurer une représentativité qui soit satisfaisante pour la population.

M. O'Neill: C'est le genre de problème que la direction aura d'ailleurs à discuter avec les comités régionaux au moment de leur implantation, à savoir si les gens sont capables de fonctionner normalement à ce nombre-là. (16 h 30)

M. Barbin: M. le Président, il y a des groupes régionaux qui vont participer tout à l'heure. Il y aura une bonne question à leur poser, parce que nous ne sommes pas non plus, à Radio-Québec, fermes là-dessus. On parle d'une hypothèse de travail; c'est intéressant pour partir.

Mme Lavoie-Roux: Pourquoi a-t-on changé le titre de l'Office de Radio-Québec en Société de Radio-Québec? C'est peut-être au ministre que je devrais demander cela.

M. O'Neill: Oui. Encore là, si vous commencez à me poser une série de questions, je vais vous répondre que c'est une exigence de linguistique tout simplement, parce que c'est plus une société qu'un office, tout en gardant le terme "office" dans l'usage courant. Cela ne veut pas dire que les gens vont cesser d'appeler cela l'Office de Radio-Québec ou Radio-Québec comme tel. Mais cela se définit au plan linguistique comme étant une société.

Mme Lavoie-Roux: J'aurais quelques autres questions qui sont davantage rattachées au fonctionnement de Radio-Québec, tel qu'on en avait convenu au moment de l'étude des crédits. Est-ce que vous pourriez nous dire quelle est la cote d'écoute à l'heure actuelle à Radio-Québec, selon le type d'émissions, en mettant à part les débats de l'Assemblée nationale qui constituent quand même un programme...

M. Barbin: M. le Président, pour parler de cote d'écoute et être vraiment bien compris, il y a toutes sortes de façons de parler de cote d'écoute...

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Barbin: ... ou de mesure de l'auditoire.

Mme Lavoie-Roux: Mais il y a quand même des mesures...

M. Barbin: Oui.

Mme Lavoie-Roux: ... qui sont de...

M. Barbin: Mais je pourrais vous donner des mesures qui touchent la portée de Radio-Québec. Même si on se réfère à la firme qui s'appelle BBM...

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Barbin: ... et qui prend ces mesures. Il y a trois façons de calculer les cotes d'écoute. On peut parler de la portée. Si on parle de la portée, on peut parler de la portée générale ou de la portée francophone. Comme on ne diffuse qu'en français, on parle de portée francophone. La portée de Radio-Québec, c'est le nombre de personnes qui écoutent Radio-Québec ou une émission quinze minutes par semaine. Si on prend cette portée comme mesure, je vous répondrais qu'à Montréal — on vient de recevoir les derniers sondages du BBM — il y a 23% de l'auditoire qui écoutent Radio-Québec, à Québec il y en a 20% — cela comprend tout, cela inclut les débats de l'Assemblée nationale; on n'a pas les cotes séparément, c'est-à-dire qu'on ne peut donner des cotes séparées pour chaque émission. Ce que je donne là, M. le Président, c'est global — et à Hull, il y en a 13%.

L'autre façon de calculer l'écoute, c'est en prenant la part du marché. La part du marché, c est le nombre d'auditeurs — c'est toujours par les mêmes spécialistes que je vous fais ces nuances — dont l'appareil est ouvert au moment où l'émission qui est étudiée passe. En d'autres mots, on sait qu'à telle heure, le samedi soir, il y a plus d auditeurs qu'en pleine nuit. Si on prenait une cote d'écoute en pleine nuit et que seul Radio-Québec ait une émission nocturne, on aurait, comme part du marché 100%. Alors, il faut faire des nuances. La part du marché de Radio-Québec, de façon générale, à Montréal, c'est 9%, à Québec, c'est 13% et à Hull, c'est 1%. Si on parle de cote

d'écoute maintenant, la cote d'écoute, c'est le nombre global de téléviseurs dans un endroit donné ou le nombre global de spectateurs. Si on prend la région de Montréal, c'est la région couverte par une antenne, cela nous est assez difficile de faire des comparaisons. Mais on peut dire que, de façon générale, dans une ville comme Montréal, les auditeurs sont sollicités par beaucoup de gens. Donc, le nombre des auditeurs qui se répartissent les émissions est beaucoup plus petit. Par exemple, une émission très populaire va chercher à peine 30% de la cote d'écoute totale. Ce sont les grandes émissions alors que la portée et la part du marché, c'est différent.

Pour ce qui est de la cote d'écoute de Radio-Québec, en moyenne, cela varie de 15 000 à 200 000 téléspectateurs, ce qui veut dire entre 1% et 5%. La cote d'écoute maximale qu'on peut avoir pour une émission, qu'on pourrait avoir, si on était écouté par un grand nombre de personnes, ce serait aux alentours de 30% ou 40%.

Disons que ce sont des chiffres qui sont vérifiés par des maisons qui font ce genre de télévision comme nous, que ce soit l'Ontario, que ce soit PBS aux États-Unis, le grand réseau américain de télévision éducative publique, quand une télévision éducative rejoint en termes de cote d'écoute aux alentours de 5% — on s'est rendu jusqu'à 7% dans la région de Québec, à un moment donné, avec l'émission de Keith Spicer — cela varie suivant les émissions, parfois ce sont des films, parfois ce sont des émissions produites par Radio-Québec. Quand on atteint 5%, on justifie la rentabilité de ce type de télévision. Nous faisons actuellement tous les efforts pour essayer d'atteindre en moyenne ces 5% de façon à pouvoir justifier des productions qui rejoignent des publics restreints mais qui sont nécessaires en éducation permanente et les équilibrer avec des émissions qui vont rejoindre davantage l'auditeur pour que notre programmation soit maintenue. Je ne sais si ce que je vous ai dit est exact; j'ai des collègues ici qui sont beaucoup plus spécialisés que moi qui suis nouveau dans le métier. Si ce que j'ai dit n'est pas exact, je leur demanderais de le corriger parce que ce sont des questions qui nous sont souvent posées et je ne voudrais pas vous induire en erreur.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que quelqu'un voudrait ajouter quelque chose? Non? Est-ce que cette évaluation de 5% de la cote d'écoute faite par les firmes expertes est la même ou moindre pour la télévision éducative en Ontario? Vous n'avez pas les données pour l'Ontario?

M. Barbin: Oui. M. le Président, dans la préparation que nous avons faite de cette rencontre, et suite aux questions qui ont été posées et que nous avons lues lors de la dernière commission, on a pu vérifier ce genre de choses et on peut dire qu'en moyenne, aux États-Unis, on joue aux alentours de 5%, ce qui ne veut pas dire que les meilleures émissions du réseau américain ne sont pas plus élevées que 5%. Quant à la télévision de l'Ontario, la moyenne est à peu près semblable; je n'ai pas le détail des émissions cependant. Ce ne sont pas les cotes d'écoute; je vous réfère à ce que j'ai dit tout à l'heure, nous parlons de portée, donc, le nombre d'auditeurs qui regardent quinze minutes par semaine; ce n'est pas ce qu'il y a de plus complet mais cela donne quand même une bonne idée de l'habitude d'écoute. Radio-Québec comparé à l'OACA, la télévision éducative ontarienne, la portée de télévision Ontario pour la région métropolitaine de Toronto est de 24% au printemps 1979, 19% à l'automne 1978; la portée réelle francophone — on doit faire l'ajustement ici — de Radio-Québec à Montréal est de 23%.

Mme Lavoie-Roux: En fait, c'est à peu près la même.

M. Barbin: II faut considérer que Radio-Québec a été arrêté pendant sept mois l'année dernière; c'était donc une reprise d'activités. Pour nous, Radio-Québec connaît un nouveau départ et on espère pouvoir encore augmenter notre public.

Mme Lavoie-Roux: II y a eu quand même les débats de l'Assemblée nationale qui ont dû vous donner un coup de pouce pour repartir.

M. Barbin: Cela nous a sauvés au départ et cela nous aide encore à rejoindre beaucoup de public parce que c'est une émission populaire.

Permettez-moi, M. le Président, de faire une mise au point sur ce que j'ai dit tout à l'heure concernant la télévision éducative de l'Ontario. J'ai mentionné que la télévision éducative de l'Ontario était financée par le ministère de l'Éducation, mais ce n'est pas exact; c'est une partie de la subvention; le reste provient du ministère de la Culture et de la Récréation.

Mme Lavoie-Roux: Pourriez-vous, je ne veux pas que vous les énumériez tous, me dire quel est le programme qui a la plus haute cote d'écoute à Québec, au printemps 1979?

M. Barbin: Je vais me faire aider, M. le Président.

Mme Lavoie-Roux: Je pense que M. Sylvestre a la réponse.

M. Barbin: M. Fortier est adjoint de M. Sylvestre.

M. Sylvestre: Si vous me permettez, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Sylvestre: La part de marché pour l'antenne de Québec, la plus forte que Radio-Québec ait eue, a été une part de marché de 11% pour l'émission "Les invités de Keith Spicer".

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que le programme est encore en cours ou...

M. Sylvestre: Oui.

Mme Lavoie-Roux: Alors, cela reste toujours le programme avec la plus haute cote d'écoute?

M. Barbin: À Québec. Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Barbin: Cela varie entre Québec, Montréal ou l'Outaouais.

Mme Lavoie-Roux: À Montréal, c'est lequel?

M. Sylvestre: Les cinq meilleures émissions à Montréal...

Mme Lavoie-Roux: Je veux seulement la première à Québec, Montréal et Hull.

M. Sylvestre: Le monde en guerre est une série qui a une égale percée d'auditoire et à Montréal et à Québec. Ensuite, le cinéma du mardi et le cinéma du vendredi.

Mme Lavoie-Roux: Pourriez-vous me dire quelle est la partie de votre programmation qui est réservée à la présentation de films actuellement, le pourcentage?

M. Barbin: M. le Président, j'ai fait ces calculs et nous parlons de longs métrages ou de films parce que là cela devient très difficile car il y a des acquisitions, films produits...

Mme Lavoie-Roux: Parlons donc de longs métrages et ensuite on pourra parler de documentaires, si vous voulez.

M. Barbin: D'accord. Si nous parlons de longs métrages sur la diffusion annuelle totale en heures d'écoute qui est de 3056, nous comptons 6% de cette diffusion totale en longs métrages ce qui équivaut, à peu près, à deux longs métrages par semaine.

Mme Lavoie-Roux: Quand vous tombez dans le documentaire, évidemment, le documentaire a plus de chances d'être de nature vraiment éducative.

M. Barbin: Si nous parlons d'acquisitions, c'est une question qui avait été posée par rapport à la production maison, nous avons 30% à peu près de notre diffusion annuelle incluant les reprises, 29% qui sont des acquisitions.

Mme Lavoie-Roux: L'autre question. Il y avait eu des critiques formulées l'an dernier au cours des auditions que nous avions eues avec le président de Radio-Québec d'alors sur les dépenses ou enfin sur les acquisitions d'équipement qui apparaissaient... enfin, qu'on a critiquées comme étant trop considérables du point de vue des coûts et aussi l'acquisition d'un équipement qui était trop coûteux par rapport à d'autres équipements qui auraient été beaucoup moins coûteux et qui auraient pu tout aussi bien servir. Enfin, c'est les représentations qu'on nous faisait. Je ne suis pas une spécialiste de ce type d'équipement. Mais il y avait eu plusieurs critiques exprimées à ce sujet. Est-ce qu'il y a eu un renversement de la situation? Où en êtes-vous à l'égard de ce problème?

M. Barbin: Je peux vous dire, M. le Président, que l'année dernière, il y a eu $400 000 d'investissement dans l'équipement. Il n'y a pas actuellement à Radio-Québec de besoin majeur d'équipement. L'équipement que nous avons, nous l'utilisons et nous pourrons vous dire de façon très précise, d'ici six mois, ce que cela peuvent signifier à Radio-Québec le coût de production et toutes les immobilisations en termes de prix de revient, et tous ces calculs sont disponibles pour répondre à toutes les questions de l'Assemblée nationale.

Ce que l'on peut dire, actuellement, à la défense un peu de tous ceux qui ont oeuvré à Radio-Québec depuis un bon nombre d'années, c'est que lorsqu'on compare les coûts horaires de production avec des concurrents, que ce soit Radio-Canada français, que ce soit l'OACA... Nous avons aussi envoyé quelqu'un récemment à Washington chercher des chiffres pour répondre à ces questions. Ce sont des chiffres préliminaires qui devront être complétés par des études beaucoup plus spécifiques mais sans le besoin de justifier l'argent qui est investi à Radio-Québec, et on n'a pas le droit de faire des choses qui ne se comparent pas avantageusement ou au moins qui ne se comparent pas normalement avec ce qui se fait ailleurs. Si on compare donc en coût horaire, à Radio-Québec on arrive à une moyenne en 1977/78 de $30 000.70, $30 000 de coût/horaire de production, environ une moyenne générale. Pour Radio-Canada française, évidemment, si on compare avec les émissions de même nature — là ce sont des indicatifs et on pourrait en discuter plus longuement et je tiens à mettre ces nuances — on arrive à $44 000, mais on a exclu de cela les émissions sportives, les émissions qui sont de coût de production moins élevé. Si on compare avec l'OACA, ils ont la meilleure cote avec $25 000 de moyenne. (16 h 45)

II y a un problème là-bas, c'est qu'on produit en anglais et en français, ce qui augmente les heures et réduit les coûts de production. Quant à la télévision américaine, c'est $46 000.

Ce sont des indicatifs d'autres coûts horaires quant aux acquisitions. Parfois, c'est avantageux, parfois, ça ne l'est pas, mais on se doit d'être là-dessus et c'est par des études plus complètes, dont mon vice-président à l'administration a déjà parlé à cette commission, par des études de prix de revient, qu'on pourra être beaucoup plus précis avec vous, M. le Président.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, il y a une chose qui m'a échappé. Comment expliquez-vous

que le fait que l'Ontario produise des émissions en anglais et en français, ce soit moins coûteux que de les produire uniquement dans une langue?

M. Barbin: Parce que souvent — je répète ce qu'on m'a dit — ce sont... M. Caron va vous expliquer, M. le Président.

M. Caron (Claude): C'est tout simplement que ce sont des émissions qui sont doublées. Obligatoirement, les émissions originales en anglais, qu'on double en français, ça ne coûte pas le même prix pour les produire. L'émission est déjà produite. Donc, il s'agit seulement de compter peut-être $3000, $3500 pour faire une version française et, comme ils sont bilingues, ils doublent presque toutes les émissions.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce toujours l'intention de Radio-Québec de ne pas produire d'émissions en anglais? Un instantl Je comprends qu'il ne s'agit pas de mettre le poids du côté de productions ou d'émissions en langue anglaise. Mais, selon les objectifs qui sont décrits dans la programmation éducative, si on prend le B, par exemple, et aussi même le A, il me semble qu'il y aurait peut-être lieu d'examiner ceci. Évidemment, dans le raisonnement, on s'est dit: Ils sont bien pourvus du côté anglais et ça n'a pas été fait avec mauvaise volonté. Je pense que, comme premier réflexe, ça pourrait sembler logique.

Mais il reste que, dans des émissions qui sont retransmises ou produites aux États-Unis ou produites dans les autres provinces, je pense que la communauté anglaise du Québec, tant au niveau scolaire qu'à d'autres niveaux, a peut-être aussi des traits qui lui sont particuliers. Est-ce que c'est simplement à court terme que, pour le moment, vous n'avez pas eu le temps de vous pencher sur ce problème ou si, au plan... même à plus long terme, vous rejetez, vous mettez de côté cette idée?

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre...

M. O'Neill: Je veux simplement dire, M. le Président, que ça n'a pas été inclus dans le mandat actuel de Radio-Québec, c'est vrai. Nous ne l'avons pas inclus pour la raison, au fond, que vous avez mentionnée, c'est-à-dire que, étant donné le fait que la communauté anglophone, surtout à Montréal, dispose d'un nombre aussi élevé de media d'expression, tant à la radio qu'à la télévision, étant donné qu'il serait possible aussi, en vertu de la loi 4, de se voir conférer pour une partie de programmation le statut de radiotélévision éducative, il nous a semblé que ça ne devenait pas, dans le cadre actuel, une urgence, tout simplement. C'est pour ça que ce n'est pas inclus dans le mandat actuel de Radio-Québec. Cela ne veut pas dire que, tout à coup, on ne pourrait pas envisager ce que vous mentionnez comme une chose utile, mais, encore une fois, cela a été jugé comme non prioritaire dans le moment.

Mme Lavoie-Roux: Vous savez, quand on parle de spécificité, peut-être que les anglophones de Montréal, on peut, jusqu'à un certain point seulement, les identifier aux anglophones de Toronto, mais il faudrait y mettre bien des nuances. Mais vous avez quand même des communautés anglophones dans les régions, du côté de la Gaspésie, du côté des Cantons de l'Est, qui, je pense, ont quand même un patrimoine qui leur est propre. Enfin, ce n'est pas un plaidoyer que je veux faire pour elles, mais si on veut suivre le raisonnement qu'on semble faire ici en disant: II faut promouvoir l'accès à leur patrimoine culturel, il faut leur donner l'information, etc., je pose la question, mais il semble bien que ce n'est pas prévu.

M. O'Neill: Non, rien n'empêche les comités régionaux d'étudier la question et de tenir compte des besoins de chaque région. Je pense, par exemple, à ce qui pourrait se passer dans la Basse-Côte-Nord où vous avez beaucoup de communautés anglophones qui sont isolées le long du littoral. Mais ce problème est évidemment très différent de celui qui se pose à Montréal, tandis que, pour ce qui est de Montréal, nous avons plutôt pensé à ce qu'on appelle les communautés culturelles minoritaires.

Mme Lavoie-Roux: Bon!

M. Barbin: Est-ce que je pourrais ajouter quelque chose au nom de Radio-Québec?

Il est sûr que nous recevons le mandat du gouvernement et les fonds sont affectés à des grandes orientations. Il n'est pas impensable que Radio-Québec, dans tous les contacts qu'il aura bientôt avec les groupes ethniques, et à la suite de l'analyse des situations pour répondre mieux aux besoins des régions, en particulier des régions qui vont s'animer, puisse, de ce côté-là, s'intéresser à faire des propositions ou à faire remarquer que cela répondrait peut-être à un besoin.

Là-dessus, Radio-Québec n'a pas fermé son dossier. C'est un dossier sur lequel nous refléchissons.

Mme Lavoie-Roux: Une autre question, M. le Président. Quelle est présentement la part faite, dans votre programmation, aux problèmes régionaux ou aux questions régionales? C'est une plainte, je comprends que... Mais quelle est exactement la part de la programmation que vous accordez à la production régionale?

M. Barbin: M. Sylvestre va répondre.

M. Sylvestre: M. le Président, nous avons consacré une émission hebdomadaire, dans notre saison régulière, à une série faite par les régions, qui s'appelle "Chacun son tour". Nous avons aussi une émission hebdomadaire, qui est une sorte de magazine culturel, dont le gros du contenu fait le relevé des événements artistiques

et culturels, importants et significatifs, dans les régions.

Voilà vraiment les deux seules émissions qui, directement, parlent des régions: une faite entièrement par les régions et l'autre fabriquée à Montréal, mais avec des collaborateurs régionaux. Ceci fait un modeste pourcentage, autout de 1% de la programmation de Radio-Québec.

Mme Lavoie-Roux: Ma question n'est peut-être pas pertinente, mais je la pose comme information. On sait que le développement ou la régionalisation doit s'étendre sur une période de X années. On parle de dix ans, si c'est moins long, peu importe. Entre-temps, est-ce que Radio-Québec entend quand même augmenter ce pourcentage de la production régionale, compte tenu du fait que, même si les projets de loi sont adoptés demain et que les crédits sont débloqués à la fin juillet, il y a toute cette période de dix ans? Entre-temps, qu'est-ce que Radio-Québec a l'intention de faire?

M. Barbin: M. le Président, de ce côté-là, le mandat que nous a confié le gouvernement est explicite quant à l'utilisation des fonds. On nous demande, sur une période d'un certain nombre d'années, d'arriver à une parité entre la production nationale et la production régionale. Évidemment, il va falloir mettre en place toute l'infrastructure de production, mais on nous donne déjà des indications dans la façon de dépenser nos fonds. On nous demande de stabiliser la production nationale à 400 heures et on nous demande de produire, au niveau régional national, parce qu'il n'y a pas d'antenne pour diffuser en dehors du réseau actuellement. Il n'y a qu'un seul grand réseau national et nous n'aurons des antennes régionales, avec des studios de production régionale, que dans deux ou trois ans. On nous demande tout de même d'augmenter la production régionale nationale à 18 heures en 1979/80, 25 heures, etc., en augmentant jusqu'à plusieurs centaines d'heures dans plusieurs années. On nous demande aussi de produire en région, d'ici deux ou trois ans — il nous faut faire les études appropriées — 125 heures par année, la première année de notre diffusion avec production régionale, pour arriver à une parité ou à une diffusion régionale supérieure d'ici cinq ou six ans.

Ce que l'on nous demande, au niveau du gouvernement, c'est d'équilibrer cette production et même d'augmenter la production régionale, c'est-à-dire diffusée en région.

Mme Lavoie-Roux: Ma dernière question, M. le Président, c'est au point de vue budgétaire. Tout à l'heure, vous avez expliqué qu'il y avait déjà des équipements en région qui, avec un peu de développement, pourraient peut-être satisfaire les besoins, quoique j'étais fort étonnée d'entendre dire qu'il y en avait dans les écoles secondaires. Dans les cégeps il y en a, mais dans les écoles secondaires, il ne doit pas y en avoir beaucoup, s'il y en a. Quels sont les budgets que vous prévoyez justement, à moyen et à long terme, pour ce plan de développement régional? Et quel est celui qui vous est accordé dans cette première année pour réaliser une partie de l'objectif à long terme?

M. Barbin: M. le Président, je demanderais au vice-président aux finances de répondre à cette question.

M. Buzaré (Gilbert): La première année et la deuxième année du plan, nous allons procéder uniquement à des études d'ingénierie, c'est-à-dire pour voir ce qui est disponible en région. Donc, il n'y a pas de capital qui est inscrit au budget de Radio-Québec. Ce sont simplement des dépenses de fonctionnement que nous utiliserons pour faire un inventaire complet de ce qui est disponible en région. Le plan prévoit avec les années, naturellement selon ce qui est disponible en région, des équipements et des installations de l'ordre de $2 500 000 dans chaque région. Mais ce sont des budgets encore à négocier avec les années futures.

Mme Lavoie-Roux: Cela c'est touchant uniquement l'équipement?

M. Buzaré: Touchant l'équipement uniquement.

Mme Lavoie-Roux: Maintenant, touchant le personnel, comment prévoyez-vous l'échéancier au point de vue budgétaire?

M. Buzaré: II faudra, dépendamment des installations qui seront là, avoir de l'équipement de création, de l'équipement technique, du personnel technique pour produire les émissions et il pourrait arriver dans le temps qu'une région robot, par exemple, ait à peu près une centaine de personnes en production. Je parle d'ici dix ans à peu près.

Mme Lavoie-Roux: D'ici dix ans. M. Buzaré: D'ici dix ans.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président. Tout à l'heure, le président de Radio-Québec et le directeur des programmes ont tous les deux fait allusion à l'émission qui est animée par M. Keith Spicer et lorsque je vous ai demandé la parole, il y a déjà longtemps, c'était avant ces deux allusions, au moment où les député de Jean-Talon et de L'Acadie étaient en train de "freaker" à propos d'expressions comme "grands enjeux", et "projet collectif" et où ils cherchaient à nous convaincre tous que Radio-Québec devrait faire de l'éducation fédéraliste. Cela m'a tout de suite fait penser à Keith Spicer.

Je pense que personne ne peut nier que Keith Spicer est un des plus ardents fédéralistes qui

soient au Canada, quels que soient par ailleurs ses talents que je ne nie pas. Une de ses caractéristiques, c'est qu'il est un très ardent fédéraliste. J'ai eu l'occasion de causer de cela avec lui, alors que nous avons fait ensemble un long voyage en avion et il conçoit son rôle dans la vie comme la défense, l'illustration, le soutien contre vents et marées de la cause fédéraliste canadienne. Ceci m'amène à vous demander à tous les deux, M. le président de Radio-Québec et M. le directeur des programmes, si le conseil d'administration et la direction des programmes considèrent que M. Spi-cer a mis de côté cette croisade personnelle qu'il a entreprise à la défense du fédéralisme canadien, s'il s'est comporté avec l'objectivité indispensable, s'il a évité de présenter de la réalité une vision faussée? J'ai remarqué, par exemple, qu'un de ses invités était M. Gérard Pelletier; je trouvais que c'était se donner beaucoup de mal que d'aller à Paris pour interviewer un personnage qui était peut-être dans l'actualité il y a une quinzaine d'années mais qui est aujourd'hui un peu oublié. Ce ne sont pas des critiques formelles que je voudrais faire mais il me semble que la question se pose. Voilà ce croisé du fédéralisme canadien qui est animateur de l'émission de Radio-Québec qui a, on vient de nous dire, la plus grosse cote d'écoute. N'y a-t-il pas là un danger et est-ce que ce danger a été contourné?

M. Barbin: M. le Président, je n'ai pas beaucoup de commentaires à faire là-dessus. On n'a pas eu non plus de critiques s'il y a eu abus. Je me suis fait donner la liste des invités de Keith Spicer, il y en a cinq pages. Ils n'ont pas tous accepté, certains ont retardé de venir, d'autres n'y sont pas allés. La gamme est très variée; cela passe par le président de Radio-Québec aussi qui a été interviewé. J'ai l'impression que M. Spicer fait un travail professionnel que tout le monde n'aime pas. Il est critiqué mais certains le trouvent excellent puisque sa cote d'écoute est bonne. Je n'ai pas d'autres commentaires à faire là-dessus. M. Sylvestre? (17 heures)

Le Président (M. Jolivet): N'ayant pas d'autres questions...

M. Barbin: M. le Président, M. Sylvestre voudrait peut-être compléter ma...

Le Président (M. Jolivet): Oui. Allez, M. Sylvestre.

M. Sylvestre: Oui, M. le Président. Nous sommes particulièrement attentifs à la direction des programmes, de regarder vraiment si la démarche de M. Spicer dans la série qu'il anime est vraiment objective et ne sert pas de tremplin politique. Nous avons justement exclu M. Spicer de la couverture d'invités qui seraient directement rattachés à une actualité politique. Pour nous, Spicer ne fait pas une émission d'affaires publiques justement parce que ses idées, d'autre part, sont connues. Il fait des entretiens humanistes avec des invités extrê- mement variés. Il y a M. Gérard Pelletier, mais il y a aussi Mme Pauline Julien qui font partie de ses invités. Nous sommes attentifs à voir si M. Spicer ne se sert pas de son émission pour faire de la propagande et nous sommes convaincus que non.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: Je reviens là-dessus et c'est ma toute dernière question. Nous avons parlé de programmation éducative. Vous avez mentionné la définition de l'UNESCO. Évidemment, je ne la connais pas par coeur. Je dois avouer mon ignorance là-dedans, mais vous avez parlé — et dans le rapport Rocher, on en parle aussi — de sens élargi. Ce n'est pas seulement scolaire. C'est culturel. C'est de l'éducation permanente. Pourrait-on avoir cette définition de l'UNESCO, non pas séance tenante, mais à un autre moment ou dans quelle publication pourrait-on la retrouver?

M. Barbin: Cela peut être déposé. Notre conseiller juridique nous dit que c'est l'article 3 de la loi.

Le Président (M. Jolivet): Mme le député de L'Acadie.

Mme La voie-Roux: C'est seulement une remarque que je veux faire. Je ne voudrais pas soulever une question de règlement. Je voudrais simplement vous faire remarquer, M. le Président, qu'on n'a pas demandé à Radio-Québec de défendre la cause du fédéralisme. Nous avons simplement demandé si à tel programme éducatif, on avait prévu à un moment ou à un autre, de parler des institutions politiques canadiennes. Je pense qu'il y a une très large différence entre parler de défendre la cause fédéraliste, comme le disait le député de Deux-Montagnes, et la question que nous avons posée. Mais j'en profite pour remercier les gens de Radio-Québec qui ont répondu à nos questions avec beaucoup de patience.

M. Barbin: M. le Président, lors de la dernière commission, on nous avait demandé de déposer un document concernant la répartition des effectifs permanents par catégories d'emplois et selon le sexe...

Mme Lavoie-Roux: Ah! oui, c'est vrai!

M. Barbin:... ce que nous faisons avec plaisir. Notre pourcentage est meilleur que les ministères où j'ai déjà oeuvré, ce qui ne veut pas dire qu'il est élevé. Je dépose ce document.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, pour terminer.

M. O'Neill: Je voudrais simplement, M. le Président, à mon tour, remercier le président directeur général de Radio-Québec et ceux qui l'accompagnent pour leur excellente collaboration et

les féliciter aussi pour le nouveau départ de Radio-Québec. Les cotes d'écoute sont là qui indiquent que c'est un succès et aussi un grand nombre d'appréciations de la part des critiques de journalistes. Je pense que nous avons tous raison de nous réjouir. Il s'agit d'une institution québécoise qui est en plein essor, que nous devons en grande partie à l'équipe de direction actuelle et aussi aux travailleurs de Radio-Québec, aux représentants des syndicats, à chaque travailleur. Je pense qu'il y a maintenant là un esprit d'équipe qui est extrêmement intéressant et qui est un signe de grand encouragement pour l'avenir. Encore une fois, merci pour le travail que vous faites et merci de votre excellente collaboration dans cette étude des projets de loi 4 et 5.

Le Président (M. Jolivet): Merci. J'inviterais donc, en conséquence, les comités régionaux de Radio-Québec des régions mentionnées tout à l'heure.

Je crois comprendre que c'est M. Édouard Gagnon qui est le porte-parole.

M. Gagnon: Oui.

Le Président (M. Jolivet): Vous allez présenter vos autres adjoints des régions.

Comités régionaux de Radio-Québec

M. Gagnon (Édouard): M. le Président, je vais être le porte-parole de cinq comités régionaux, l'Abitibi-Témiscamingue ayant décidé de présenter son propre mémoire.

Le Président (M. Jolivet): C'est cela.

M. Gagnon (Édouard): Alors, les cinq comités que je présente sont ceux identifiés dans le document. Il s'agit des régions de la Côte-Nord, du Saguenay-Lac-Saint-Jean, de l'Estrie, de l'Est du Québec et du Centre du Québec.

Le Président (M. Jolivet): C'est cela.

M. Gagnon (Édouard): Les présidents sont là et, par la suite, s'il y a des questions, tous ensemble, nous serons à la disposition des membres pour répondre aux questions qui pourront être posées.

Le Président (M. Jolivet): Je crois comprendre que les personnes sont: M. Christian Gagnon pour la Côte-Nord.

M. Gagnon (Édouard): Oui.

Le Président (M. Jolivet): M. André Bouchard pour le Saguenay-Lac-Saint-Jean.

M. Gagnon (Édouard): Exactement.

Le Président (M. Jolivet): M. Jean Chouinard pour l'Estrie. M. Nelson Dumais pour l'Est du Qué- bec et M. Édouard Gagnon pour le Centre du Québec.

M. Gagnon (Édouard): Oui. En plus, j'ai, à mes côtés, M. Dubuc qui fait partie du comité du Centre du Québec. Selon les questions qui seront posées, nous avons une personne pouvant répondre à des questions techniques auxquelles je ne suis pas capable de répondre moi-même. Elle sera présente, si nécessaire.

Le Président (M. Jolivet): Cela va.

M. Gagnon (Édouard): M. le Président, depuis la tenue d'audiences publiques, au cours de 1975, sur l'avenir de la radio-télévision éducative au Québec, les voix des régions n'ont jamais cessé de se faire entendre pour exprimer les attentes et les besoins de leurs citoyens face à Radio-Québec.

Sans vouloir imposer aux membres de cette commission le rappel un peu fastidieux des revendications qu'ils ont sans doute déjà eu l'occasion d'entendre et d'assimiler, nous désirons néanmoins évoquer brièvement une dernière fois les objectifs et la perspective qui ont guidé les actions des dernières années. Car si nous partageons l'esprit des projets de loi 4 et 5 et considérons que leur adoption marquera une étape essentielle et significative eu égard à la démarche des comités régionaux de Radio-Québec depuis quatre ans, nous demeurons aussi fermement d'avis que les régions devront continuer, même à l'avenir, à se montrer vigilantes et combatives dans la mise en oeuvre du projet de régionalisation.

En 1975, sans qu'il y ait eu de concertation préalable entre les organismes et les citoyens des différentes régions qui ont décidé de se faire entendre sur l'avenir de Radio-Québec, c'est tout de même avec une certaine unanimité qu'ont été exprimés les besoins des régions en matière de radio-télévision éducative. Depuis, lors de leur création les comités régionaux, mandatés par leur population respective, ont pu préciser les véritables dénominateurs communs de ces besoins et définir la base jugée indispensable à une régionalisation effective des services de Radio-Québec.

Essentiellement, les comités régionaux ont réclamé le droit pour chaque région de prendre en charge, totalement et sans interférence, la radiotélévision éducative sur son territoire. C'est donc que cette radio-télévision éducative doit pouvoir s'adapter, tant dans sa forme, sa programmation, la production et la diffusion de ses émissions, à la réalité différente des régions. Une semblable perspective ne rejette pas l'importance d'une conception aussi nationale de Radio-Québec, mais elle suggère simplement que les régions doivent posséder les moyens nécessaires de réaliser et de diffuser chez elles des émissions répondant aux attentes des gens de chez eux.

Dans le contexte national de Radio-Québec, il va de soi que les régions doivent, encore là, avoir droit au chapitre. Il serait autrement extrêmement difficile de concilier les intérêts nationaux et régionaux de ce qui est appelé à devenir la Société de

radio-télévision du Québec. C'est donc dans une participation réelle à l'administration de Radio-Québec que les régions ont trouvé le seul moyen d'exercer leur influence sur la distribution des ressources, la programmation nationale, la conduite en somme des affaires de Radio-Québec.

Face à l'orientation générale définie par les comités régionaux, le gouvernement propose aujourd'hui deux projets de loi qui ont le mérite de donner pour la première fois un sens et une portée véritables à la régionalisation de Radio-Québec. Un peu tardivement sans doute, si on considère que l'élaboration du projet de décentralisation est en route depuis 1975, les régions ont l'impression de se retrouver maintenant face à de nouvelles propositions de travail qui soulèvent leur espoir.

Nous ne voudrions pas cependant laisser croire au législateur que le projet de loi sur la programmation éducative et l'autre modifiant la Loi de l'Office de radio-télédiffusion du Québec répondent aux moindres attentes exprimées par les régions depuis 1975. Nous affirmons uniquement que les projets de loi mentionnés ouvrent la porte à la réalisation d'un projet de régionalisation qui finit par correspondre plus intimement à ces attentes.

Le projet de loi no 5, par exemple, consacre un chapitre entier à la définition des éventuelles structures régionales et la place qu'elles doivent tenir dans l'organisation. L'intention du ministre des Communications qu'on y décèle nous satisfait dans la mesure où elle est porteuse de promesses d'avenir. Dans le contexte proposé, les comités régionaux sont disposés à apporter leur aide et leur coopération à réaliser la future Société de radio-télévision du Québec.

Néanmoins, les comités régionaux ont appris au cours des quatre dernières années qu'ils avaient besoin de porter une attention vigilante et constante au cheminement du projet de régionalisation. Même si les projets de loi 4 et 5 nourrissent certains espoirs, les comités régionaux ont la très ferme intention de ne pas relâcher leur surveillance et de s'impliquer très activement dans le déroulement des étapes futures de changement à Radio-Québec. L'Assemblée nationale aura, nous l'espérons, dans une échéance très rapprochée, posé la base sur laquelle il faudra construire le nouveau Radio-Québec. Les comités régionaux y seront ouvriers et surveillants de chantier.

En ce qui a trait à l'extension du réseau d'antennes, évidemment, deux régions et peut-être deux régions et demie, à ce qu'on me dit, sont intéressées parce qu'elles auront peut-être à souffrir d'un manque d'antennes pour un certain nombre d'années. L'extension du réseau d'antennes représente sans l'ombre d'un doute une dimension essentielle de la régionalisation de Radio-Québec, même si nous sommes aussi d'avis que la réalisation de ce seul aspect ne saurait satisfaire les profondes aspirations des régions en termes de prise en charge réelle du médium.

Le 19 février dernier, lorsque le ministre des Communications définissait publiquement les orientations du développement de Radio-Québec, il n'hésitait pas à affirmer que "dans l'optique gouvernementale, la régionalisation apparaît comme un critère majeur d'un développement culturel authentique". Il en reconnaissait du même coup la nécessité et décidait d'en consacrer le rythme progressif de croissance en annonçant premièrement l'approbation de l'extension du réseau d'antennes.

Nous nous sommes, bien sûr, réjouis de cette décision, en pensant qu'il était indispensable que la programmation de Radio-Québec soit accessible à toute la population de chacune de nos régions. Nous attachons de fait une importance considérable à l'extension du réseau d'antennes, sans laquelle la régionalisation ne saurait avoir ni de sens ni de portée véritables.

C'est pourquoi l'implantation sélective d'antennes dans les régions, telle qu'annoncée par le ministre Louis O'Neill, suscite d'énormes déceptions dans les régions du Centre du Québec et de l'Estrie. Nous nous sommes interrogés depuis le 19 février sur les raisons qui pouvaient justifier le choix des régions prioritaires effectué par le conseil d'administration de Radio-Québec et entériné par le gouvernement. Malheureusement, nous n'avons trouvé nulle part de motifs sérieux et valables d'empêcher que la régionalisation s'engage partout au même rythme.

Dans la région du Centre du Québec, le comité régional a tenté, malgré ses faibles moyens, d'explorer différentes solutions à l'implantation d'antennes pouvant desservir son territoire. Il était d'autant plus convaincu du bien-fondé de ses démarches que les autorités de Radio-Québec et du gouvernement avaient affirmé que les raisons d'un développement sélectif n'étaient nullement d'ordre économique. Elles sont plutôt, semble-t-il, de nature "technique", vu le manque de disponibilité de ressources compétentes pour réaliser les études d'ingénierie nécessaires.

Or, des recherches très sommaires ont vite fait de nous assurer du contraire. Le comité régional du Centre du Québec soutient en outre qu'il est possible de desservir son bassin de 425 000 personnes par des moyens et dans des délais raisonnables. Des installations déjà existantes sur le mont Carmel pourraient par exemple recevoir un émetteur diffusant des fréquences soit UHF, soit VHF. Les recherches exploratoires menées permettent aussi de croire qu'il serait possible d'utiliser la bande 3 pour une station VHF, ou les canaux 37 et 69 en UHF.

Les régions du Centre du Québec et de l'Estrie sont sans doute assez bien desservies par les réseaux de câblodistribution, mais ce fait ne peut non plus empêcher d'entreprendre maintenant les études d'ingénierie requises pour l'implantation d'autres moyens de diffusion. La câblodistribution possède en effet une dimension antisociale inacceptable dans la perspective d'une radio-télévision éducative s'adressant à tous les Québécois. Elle n'existe à toutes fins utiles qu'en milieu urbain, laissant pour compte la population des zones moins densément peuplées.

En conséquence, nous réclamons du gouvernement qu'il autorise le plus tôt possible la réalisation des études d'ingénierie nécessaires à l'implantation d'antennes en Estrie et au Centre du Québec. Les comités régionaux sont disposés à offrir toute leur collaboration pour que ces études s'effectuent dans les meilleurs délais et avec l'aide des compétences techniques et professionnelles qui sont disponibles à l'heure actuelle.

Cela complète le document, M. le Président. Comme je l'ai dit tantôt, mes collègues présidents de cinq régions sont là et sont prêts à répondre avec moi, au meilleur de notre connaissance, aux questions qui pourront nous être posées.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre. (17 h 15)

M. O'Neill: M. le Président, pour la première partie du mémoire, je n'ai vraiment pas de commentaire, en ce sens que nous sommes vraiment sur la même longueur d'onde. À partir du moment où vous traitez du problème d'extension de l'antenne, peut-être qu'on peut soulever certaines questions. La première raison du choix qui a été proposé par le conseil d'administration avec lequel nous étions bien d'accord, c'était de donner une priorité à des régions qui, dans le domaine des communications, avaient peu ou n'avaient rien et, en ce sens, c'est sûr que les régions Abitibi-Témiscamingue, Bas-du-Fleuve, Gaspésie, Côte-Nord, Saguenay-Lac-Saint-Jean nous ont semblé devoir faire l'objet d'une attention prioritaire.

Deuxièmement, je suis un petit peu perplexe devant une affirmation qui est à la page 7, disant que les raisons d'un développement sélectif n'étaient nullement d'ordre économique. Il reste que quand vous faites la répartition d'un budget sur plusieurs années, c'est un peu d'ordre économique aussi, c'est-à-dire, que c'est sûr que cela implique moins de dépenses la première année.

Je signale en passant, par exemple, ceci. On a fait allusion tout à l'heure à l'idée que cela ne veut pas dire que les gens sont pris dans un plan de développement de dix ans. Ce qui a été adopté au Conseil des ministres, c'est une politique précise sur deux ans, quitte à être révisée et peut-être accélérée par la suite. Il nous a semblé que ce qui avait été proposé dans un premier jet d'un plan sur dix ans, en s'inspirant du rapport Rocher, demeurait quand même, étant donné un certain nombre d'imprécisions et d'incertitudes au plan du développement technologique, quelque chose de trop vague pour être accepté en bloc, c'est-à-dire que cela peut donc être moins de dix ans. Cela veut dire simplement qu'au bout de deux ans, il y aura une réévaluation et possiblement une accélération. Maintenant, je comprends moi aussi la raison de votre frustration et c'est une chose, de toute façon, que nous l'examinerons de nouveau. Je sais, d'ailleurs, qu'à Radio-Québec aussi on regarde à nouveau cette question à savoir si, pour des régions qui ont actuellement accès, toutes proportions gardées, à un nombre plus élevé de moyens de transmission, un effort spécial ne devra pas être fait dans un proche avenir.

Quand vous dites, à un moment donné, par exemple: La câblodistribution possède une dimension inacceptable. Il reste que, de fait, quand vous regardez la façon dont les populations sont servies concrètement, soit par ondes ouvertes, soit par câblodistribution, il y a des régions actuellement mieux servies que d'autres. Il y en a vraiment où tout manque. C'est comme cela que le raisonnement s'est fait et une fois le principe général d'extension des antennes sur l'ensemble du territoire adopté, il est certain que là où ce sera possible, on pourra aussi tenter de donner le service à des régions qui, tout en ayant, encore une fois, une meilleure couverture que d'autres, ont bien le droit d'avoir une couverture globale, complète.

M. Gagnon (Édouard): Si vous le permettez, M. le Président, seulement deux remarques.

M. O'Neill: La seule phrase que je n'ai pas tout à fait comprise, c'est quand vous dites que les raisons d'un développement sélectif n'étaient nullement d'ordre économique. Vous dites: Le gouvernement a dit cela des autorités de Radio-Québec. Je ne suis... Il reste quand même qu'en fonction d'un budget des deux premières années, oui, il y a un élément d'ordre économique aussi.

M. Gagnon (Édouard): II y a quelque chose que je voudrais relever d'abord. Lorsqu'on dit que la région du centre du Québec et l'Estrie sont des régions bien servies — et on dit même, à certaines occasions, que ce sont des régions surmédiatisées — évidemment, si on installe une antenne dans sa cour avec une tour de 150 pieds, on prend tous les postes américains. Par le fait même, je ne crois pas que, parce qu'on prend des postes américains, on est des régions surmédiatisées. Au contraire. Cela peut vouloir dire autre chose.

D'autre part, on nous avait dit que le gros problème était d'ordre technique; ce n'était pas tellement un problème économique parce que, dans la région de la Mauricie, plus particulièrement, il y a déjà une antenne sur le mont Carmel qui dessert le poste CKTM. Ce serait, semble-t-il, une des régions les moins dispendieuses pour s'organiser de façon à desservir toute la région. Ce serait moins dispendieux, de toute façon, que les régions éloignées comme la Côte-Nord, le Bas-du-Fleuve et d'autres régions. Si ce sont des régions économiques, cela me surprend un peu qu'on ait choisi les régions les moins dispendieuses pour ne pas installer d'antenne avant quelques années. On s'est posé des questions là-dessus.

Si ce sont des raisons techniques, on pense qu'elles n'existent pas, qu'il serait possible de faire les études d'ingénierie dans le Centre du Québec et l'Estrie en même temps que dans le reste de la province et du territoire et, par le fait même, avoir des antennes en même temps que les autres. Vous comprendrez que pour un comité régional quel qu'il soit, après l'adoption des projets de loi nos 4 et 5, il y aura certainement un

nouveau comité régional, ce ne sera peut-être pas nous qui serons là, se limiter à faire des émissions, trois ou quatre par année, pour un comité régional, pendant quatre, cinq ou six ans, c'est plutôt ennuyeux et c'est plutôt décourageant.

Pour nous, il nous semble que, quant à établir un réseau d'antennes et permettre à toute la population l'accès à Radio-Québec, on ne sait pas pourquoi le Centre du Québec et l'Estrie pourraient être privés pendant quelques années, alors que tout le monde l'a. On dit: On a commencé par les régions les plus éloignées. Mais, à ce moment-là, il aurait fallu enlever Radio-Québec à Montréal et à Québec et commencer sur la Côte-Nord et en Abitibi.

M. O'Neill: Je pense que votre deuxième suggestion est moins bien fondée.

M. Gagnon (Édouard): Elle vaut ce qu'elle vaut, mais l'autre argument aussi.

M. O'Neill: Quant à moi, selon les renseignements que j'ai de Radio-Québec, il n'y a pas de raisons techniques, comme on parle. Au contraire, il y a parties de l'Estrie où il y a même des facilités techniques dans le sens d'installations ici d'un réseau d'ondes ouvertes.

Ce qui pouvait être économique, c'était de faire à la fois et ça et les régions lointaines. C'est sûr que, quand vous nous dites: II en coûterait moins cher de couvrir notre région. Le problème n'est pas celui-là. C'est de savoir si, couvrant et cette région et d'autres régions considérées comme prioritaires, à un moment donné, on ne doit pas répartir sur une année ou deux années de plus. Ce n'est pas parce qu'on a dit que ça coûtait plus cher dans le Centre du Québec que sur la Côte-Nord, pas du tout. Mais c'est quand vous mettez les deux ensemble, à partir du principe que Radio-Québec a décidé de privilégier des régions qui, jusqu'ici, avaient peu d'accès aux moyens de communication en général, avaient moins de services que d'autres et des régions mêmes qui ne possèdent pas Radio-Québec ou très peu, sont mal desservies. On a pensé qu'en même temps il fallait leur accorder une attention particulière, ce qui ne veut pas dire que nous estimons que vous êtes dans une situation idéale. Mais, entre une situation idéale, si vous voulez, et rien du tout, il y a parfois un milieu en quelque part.

Le Président (M. Jolivet): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je veux d'abord remercier les présidents des comités régionaux qui participent à cette commission parlementaire.

Avant de poser des questions, je dois dire que, personnellement, et je ne voudrais pas être injuste envers les autres régions, je serais sympathique à l'Estrie, qui est souvent enterrée par la télévision américaine, non seulement la télévision, mais à la radio, et quand vous ouvrez votre appareil le samedi soir, surtout la radio, je pense qu'au moins à la télévision, vous avez Radio-Canada, mais, à la radio, les ondes sont vraiment brouillées. Mais ceci est une parenthèse et, comme je le dis, je connais moins la situation des autres régions. Alors, je ne voudrais pas faire un plaidoyer en faveur d'une plutôt que des autres. Je ne connais pas suffisamment les conditions particulières.

En page 2 de votre mémoire, vous réclamez, pour chaque région, la prise en charge totale de la radio-télévision éducative dans la région. La structure proposée à l'article 12 du projet de loi no 5 veut que le conseil d'administration de Radio-Québec définisse les régions et les normes budgétaires. Ne vous apparaît-elle pas comme une contrainte quand même assez sérieuse?

Je n'ai pas pu m'empêcher de faire un parallèle avec la situation des commissions scolaires qui, finalement, ayant eu des normes définies par un centre ou un organisme central quand elles ont voulu développer des services qui leur soient propres, qui répondent vraiment à leurs besoins, ou innover, se trouvent dans des situations difficiles. Enfin, est-ce que ça vous apparaît comme une contrainte ou est-ce que ça vous satisfait? Je l'ai soulevé tout à l'heure avec Radio-Québec, qui, évidemment, n'y voit pas de problème, mais, vous autres, vous pouvez peut-être vous placer dans une optique différente.

M. Gagnon (Édouard): Je pense que mes camarades auront peut-être quelque chose à ajouter, mais, en ce qui a trait à cet aspect de la loi, nous y avons évidemment pensé et nous en avons discuté, mais nous nous fions beaucoup à l'interprétation assez généreuse qu'en fait actuellement la direction de Radio-Québec. Dans le corps de la loi actuelle, au moins, nous sommes prêts à jouer le jeu et à l'essayer. Nous pensons que les régions pourront jouer un rôle primordial dans l'orientation de la programmation et dans l'orientation de la télévision éducative, dans chacune des régions, dans le corps de la loi actuelle. Mais, comme on l'a dit plus tôt, dans le mémoire, quant à nous, nous sommes là et nous resterons vraiment les chiens de garde de l'application de cette loi.

Mme Lavoie-Roux: Quelquefois, c'est plus difficile après qu'avant, vous savez, de corriger des choses. Est-ce que les autres partagent cette opinion?

M. Chouinard (Jean): Radio-Québec nous a plus ou moins promis qu'il y aurait un rattrappage qui se ferait et qu'éventuellement la production d'émissions régionales va équilibrer la production nationale. À notre avis, cela suppose automatiquement que le budget va suivre une évolution qui devrait être normale pour nous. C'est la chose, comme Édouard vient de le mentionner, qu'il va falloir surveiller. Il va falloir voir si l'évolution est normale, et en autant que cela se tienne, dans le domaine concret, c'est-à-dire qu'on puisse voir une évolution qui tende vers l'équilibre des deux

productions, nationale et régionale, on est satisfaits.

Le Président (M. Jolivet): Pour les besoins du journal des Débats, si vous intervenez pour une première fois, voulez-vous indiquer votre nom?

M. Chouinard (Jean): Jean Chouinard.

Mme Lavoie-Roux: Ce que je voudrais simplement porter à votre attention, c'est le fait qu'aux normes sont attachées des exigences. On peut faire une part généreuse, en disant: Vous aurez X milliers de dollars, avec des exigences très particulières. Je pense que ma comparaison avec les commissions scolaires n'est peut-être pas si mauvaise que cela, après tout. À un moment donné, si vous ne respectez pas ce type de norme, vous n'avez pas accès à l'argent. Ou encore, ces normes peuvent vous imposer un carcan du point de vue de votre propre conception ou de vos propres priorités. C'est là le sens de ma question.

M. Chouinard: À toutes fins utiles, on a noté, jusqu'à maintenant, une nette amélioration à Radio-Québec national, par rapport au régional. Il y a peu de temps, ce n'était pas drôle et finalement, on voit qu'il y a cette espèce de rapprochement.

Ce qui est pour nous une garantie, c'est un peu l'idée du conseil d'administration. Comme vous le mentionniez tantôt, on suppose dix personnes au conseil d'administration sur 23. C'est vrai que lors d'un vote, si jamais il y a un vote serré à prendre, la motion va être défaite. Mais, d'un autre côté, le fait qu'il y ait dix personnes au conseil d'administration, je pense que pour nous c'est une garantie qui est quand même très tangible.

Mme Lavoie-Roux: Alors, si cela ne vous inquiète pas, on y verra peut-être, nous autres. Mais l'expérience, quelquefois, nous a enseigné des choses un peu différentes.

Comme vous réclamez la prise en charge de la télévision éducative pour la région, pourriez-vous me dire quels liens vous entendez entretenir avec les télévisions communautaires existantes? Et également, quelle part comptez-vous accorder aux organismes volontaires d'éducation populaire?

M. Chouinard: Naturellement, dans chacune des régions, il va y avoir un comité de programmation qui va voir à répartir le nombre d'heures de production à travers le spectre des demandes qui vont venir de tous les milieux. C'est une chose qui est réelle. Ce seront des choses ad hoc, d'une région à l'autre.

Pour ce qui est des relations avec les autres qui produisent des émissions de télévision, il y a toutes sortes de possibilités qui sont offertes et qui sont très concrètes. Par exemple, une région va devenir un diffuseur en soi et, durant les heures possibles ou potentielles de diffusion, il y aura une partie de la diffusion qui aura trait au national, une autre partie qui sera régionale, et il restera des heures de diffusion qui serviront aux autres organismes de la région; que ce soient des gens de l'éducation ou des gens du développement culturel, peu importe. Donc, il y a cette espèce de répartition des heures de diffusion qui est possible à travers les régions qui seront, chacune d'elles, diffuseurs en soi. (17 h 30)

Mme Lavoie-Roux: II n'est pas dans vos intentions — j'aurais dû poser la question à Radio-Québec — de faire main-mise sur les équipements des télévisions communautaires existantes, là où il y en a?

M. Gagnon (Édouard): Actuellement, nous ne croyons pas que Radio-Québec régional soit en compétition avec les télévisions communautaires. J'ai eu l'occasion de rencontrer des personnes de télévisions communautaires dans la région où je demeure, le centre du Québec, et, après discussions, il semble qu'il puisse s'établir de la collaboration entre ces deux groupes. Évidemment, la télévision communautaire étant bien intégrée dans une ville — je pourrais nommer celle de Victoria-ville par exemple — elle connaît les problèmes de la région et de la ville et cela peut être d'une grande utilité pour le comité régional de Radio-Québec. Je pense que cela pourrait se compléter, bien que certaines télévisions communautaires pensent encore que cela pourrait devenir une compétition entre les deux, mais je pense que ce sont des appréhensions qui sont fausses au départ.

Mme Lavoie-Roux: Et ce n'est pas dans vos intentions de vous substituer à la télévision communautaire?

M. Gagnon (Édouard): Pas au niveau des comités régionaux, certainement pas.

Mme Lavoie-Roux: Bon. Maintenant, à ma question: Quelle est la part que vous voulez accorder aux organismes volontaires d'éducation populaire, est-ce que c'est un problème sur lequel vous vous êtes penchés?

M. Gagnon (Édouard): Évidemment, cela n'a pas été défini très très clairement. Ce qu'on a devant nous, ce sont deux projets de loi et comme tous les projets de loi, il faut en attendre l'application et l'interprétation pour savoir de quelle façon nous pourrons évoluer là-dedans. Il est évident qu'aux comités régionaux il est prévu qu'il y aura deux personnes qui viennent des institutions éducatives et il y aura des personnes qui viendront des groupements socio-économiques. Alors, je vois un certain problème, mais qu'il faudra bien résoudre. Je ne vois pas du tout aux comités des gens qui soient représentatifs en même temps d'une chambre de commerce et du mouvement syndical. Pourtant, ils sont tous deux considérés comme des groupes socioéconomiques. Il faudra faire en sorte que, lorsqu'il y aura des élections pour élire

un comité régional, la distribution des membres du comité soit tellement représentative que ces problèmes puissent être discutés au sein même des comités régionaux, lorsqu'ils surviendront.

Mme Lavoie-Roux: J'ai peut-être mal exprimé ma question, je m'en excuse. Quand je parlais du taux de participation, parce que, évidemment, des organismes d'éducation populaire il y en a beaucoup, c'était au niveau de la programmation sur le plan régional.

M. Gagnon (Édouard): Actuellement, ce qui a été fait pour les quelques émissions qui ont été réalisées dans les régions, dans la plupart des régions — je parle de celle du centre du Québec parce que c'est celle que je connais le plus — il y a eu consultation des organismes et les thèmes d'émissions qui ont été sélectionnés par le comité étaient les thèmes d'émissions qui avaient été soumis par des groupes socio-économiques, culturels et autres. Lorsqu'un thème d'émission revient souvent chez différents groupes, on y est plus sensible et il est possible qu'on choisisse ces émissions. Actuellement, cela a été fait comme cela, mais on espère qu'avec l'avènement de nouveaux comités régionaux mieux structurés, ayant un budget, la consultation sera encore plus démocratique et plus complète et permettra à un plus grand nombre de groupes et d'individus de s'exprimer et d'avoir l'influence nécessaire sur le comité. Il y aura peut-être un comité de programmation également qui aidera le comité régional à choisir les thèmes d'émissions.

Mme Lavoie-Roux: Dans le projet de loi no 4, à l'article 3, on décrit la programmation, on en a parlé auparavant. Quelles sont vos priorités? Je comprends qu'elles peuvent être différentes de l'une à l'autre, mais quelles sont vos priorités au point de vue de la télévision éducative?

M. Chouinard: Voyez-vous, cela rejoint un peu votre précédente question. Dans chacune des régions, il y aura un comité de programmation qui va se satisfaire en tenant compte de la région. Donc, région par région, la priorité sera mise là où il est souhaitable qu'elle le soit. C'est pour cela que je ne crois pas qu'il existe de règles par lesquelles on puisse forcer ou fortement suggérer aux régions d'aller de ce côté plutôt que de l'autre. Ce sera vraiment une affaire régionale.

Mme Lavoie-Roux: Avez-vous déjà identifié des besoins dans vos régions respectives?

M. Chouinard: Bon Dieu, oui! On a fait faire toutes sortes d'études. On a fait des études nous aussi. Par exemple, si on parle de l'Estrie, pour vous donner un cas précis, l'année dernière, notre priorité, c'étaient les problèmes reliés aux villes mono-industrielles parce qu'on vivait ce problème très intensément dans l'Estrie à ce moment-là. Mais cela n'empêche pas du tout qu'aujourd'hui on puisse avoir d'autres genres de priorités. C'est une chose qui va suivre l'évolution de la vie des gens. Les priorités ne sont pas fermes. Les priorités deviennent très élastiques d'après les événements qui se passent dans la région ou qui sont reliés à la politique, etc.

Mme Lavoie-Roux: Avez-vous identifié des besoins d'éducation que j'appellerais plus formels, tenant compte, par exemple, du nombre d'analphabètes qui peuvent se retrouver dans vos régions? Avez-vous pensé à des initiatives de ce type-là?

M. Chouinard: Non. Le genre de pensée qu'on a pu avoir en comité régional a été beaucoup plus de discuter de ce problème avec les personnes concernées plus tard. Actuellement, la production qu'on pouvait faire en région, c'étaient trois émissions par année dans chacune des régions.

Mme Lavoie-Roux: Oui, je sais cela.

M. Chouinard: II n'était pas question pour nous de penser...

Mme Lavoie-Roux: Oui, je l'admets bien.

M. Chouinard: ... d'ensemble ou de programmes comme cela. D'un autre côté, on voit des rapprochements, en prenant Sherbrooke comme exemple, avec l'Université de Sherbrooke au niveau de l'éducation permanente pour faire une programmation qui rejoigne ces besoins, mais ce sera fait à ce moment-là. Nous, cela veut dire à peu près dans cinq ans. Tant qu'on ne sera pas équipés en moyens de diffusion, cela posera un problème aussi.

M. Gagnon (Édouard): II faut retenir le fait que les comités régionaux ont été des comités provisoires sans beaucoup de moyens, sans budget et les recherches qu'on peut faire pour l'avenir sont limitées. Si les deux projets de loi sont adoptés, on pense qu'on aura des moyens plus concrets à notre disposition pour inventorier et aller chercher les informations requises pour répondre aux aspirations de la région.

Mme Lavoie-Roux: La composition du conseil d'administration des régions qui est suggérée dans le projet de loi, la trouvez-vous satisfaisante?

M. Gagnon (Édouard): Ce sera dans la pratique. Peut-être bien que l'an prochain on reviendra devant une commission parlementaire pour dire que ce n'est pas satisfaisant, mais, comme il n'y a pas eu beaucoup d'expériences jusqu'à maintenant — les seules expériences qu'on a, ce sont celles que nous avons acquises depuis deux ou trois ans aux comités régionaux provisoires — ce qui nous est présenté là pour le moment nous satisfait jusqu'à un certain point. On verra dans l'avenir et dans la pratique si cela demeure satisfaisant. C'est très difficile de vous répondre pour l'avenir. On aura un comité régional avec des

assises réelles, un budget et une certaine autonomie qui nous permettra de tenter de rendre cela valable. Mais je pense que c'est seulement l'expérience de l'avenir qui nous le dira.

Mme Lavoie-Roux: Je veux seulement vous faire une petite mise en garde. Ne comptez pas trop revenir en commission parlementaire l'an prochain pour faire modifier une loi. Ordinairement, elles sont en vigueur pour un bout de temps, à moins qu'il y ait des problèmes extrêmement sérieux qui surviennent. C'est pour cette raison que je vous demandais s'il vous convient tel quel cette année. N'oubliez pas que ces gens seront nommés par le gouvernement après consultation. Ils ne sont pas élus dans les régions. C'est aussi une considération quant à la représentativité possible.

M. Gagnon (Édouard): À moins qu'on soit dans l'erreur nous-mêmes, on pense que les régions pourront élire leurs membres qui seront nommés par la suite par le gouvernement, suivant la recommandation des structures régionales, je suppose.

Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas ce que la loi dit.

M. Gagnon (Édouard): Je pense que...

Mme Lavoie-Roux: "Un comité régional se compose de sept membres nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil".

M. Gagnon (Édouard): Oui, mais l'interprétation qu'on nous a donnée de ce texte...

Mme Lavoie-Roux: Sur recommandation.

M. Gagnon (Édouard): ... sur recommandation, oui... serait que les assises régionales, les organismes régionaux pourraient décider des personnes qui siégeront au comité régional et ce serait entériné ou suivant notre recommandation elles seraient nommées par le gouvernement, par la suite.

Mme Lavoie-Roux: Bon! Je vais passer pour le moment.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: M. le Président, l'an dernier nous avons eu le bonheur de vous rencontrer en certaines circonstances. Il y a un point que j'aimerais voir précisé. Ici, vous représentez la Côte-Nord. Très bien, c'est un vaste territoire. Le Saguenay-Lac-Saint-Jean, c'est peut-être mieux défini dans mon esprit, l'Estrie également, le Centre du Québec encore mieux. Quant à l'Est du Québec, vous êtes inquiets et vous vous posez des questions, à savoir pourquoi implanter des antennes de Radio-Québec dans des régions aussi éloi- gnées. Alors, si cela se fait dans la Gaspésie, par exemple, dans l'Est, ce sera une très grande première. Cela ne s'est jamais produit dans le passé; on arrive toujours 20 ans après les autres, tout le monde sait cela. Je ne veux pas vous priver de vos demandes et des statistiques que vous apportez.

Quand on parle de régions, j'aimerais bien savoir sur quoi le gouvernement se base pour dire qu'il y a dix ou douze régions. La région de l'Est du Québec n'est pas une région, c'est un pays. De Sainte-Anne-de-la-Pocatière à Gaspé, il y a 400 milles. Cela prend une heure d'avion pour aller aux Îles-de-la-Madeleine. C'est cela qu'on appelle une région. La région de Montréal, c'est simple à comprendre. D'autres régions sont peut-être faciles à situer. Quand on voit qu'il y a tellement de problèmes au centre de ces régions-là, cela me cause une certaine inquiétude. Je comprends qu'un réseau d'antennes, c'est facile à implanter. Ce n'est pas pire de commencer par les Cantons de l'Est, le Centre du Québec, la Côte-Nord, c'est de la technique, c'est de l'ingénierie. Cela n'est pas tellement malin.

L'an dernier, quand vous êtes venus ici, vous aviez certaines inquiétudes. Quand je regarde votre mémoire, même si cela n'est pas dit clairement, il y a encore des nuages. Cela ressemble à la température extérieure. Vous parlez de beaucoup de vigilance de la part des comités régionaux. C'est vrai que vous avez besoin d'être très vigilants. Alors, il y a cette question de ces régions qui m'inquiète, qui me chicote. Comment sont-elles réparties? Est-ce que des changements vont être apportés plus tard? L'an passé — vous le demandez encore cette année — vous aviez demandé cette mise sur pied de mécanismes opérationnels et décisionnels. L'autre groupe qui vous a précédés aborde timidement la question. On vous dit: Oui, il y a une heure, il y aura un certain temps, il y aura certaines émissions, on va y aller progressivement, alors que vous demandez de produire plus, d'avoir de l'équipement léger, et non pas d'avoir seulement de l'équipement lourd, qui vous permettrait d'agir et de fonctionner selon vos besoins.

En même temps, l'an dernier, vous aviez lutté contre l'uniformisation culturelle. Vous aviez surtout insisté sur le rôle que chacune des régions devrait jouer, Radio-Québec devait être un outil culturel au développement même d'une région donnée. Je ne sais pas si ces préoccupations vous animent toujours et dans quel sens avez-vous l'intention de les faire valoir?

M. Gagnon (Christian): Christian Gagnon, Côte-Nord. Il est sûr que ces préoccupations nous animent toujours. Le sens de notre intervention aujourd'hui est surtout de signifier que le projet de loi, tel qu'il est proposé, nous donne des garanties satisfaisantes.

En même temps, je pourrais répondre un peu à la dernière question de Mme Lavoie-Roux lorsqu'elle nous demande si nous sommes satisfaits du nombre de représentants et de la façon dont

les prochains comités régionaux seront nommés, Je pense qu'on peut dire qu'on est satisfait, parce qu'il appartiendra aux comités régionaux actuels de définir avec Radio-Québec et avec le conseil d'administration de Radio-Québec comment et quels seront les mécanismes qui vont permettre la nomination des représentants des régions, donc des représentants de l'ensemble des gens selon les secteurs socioéconomiques ou socioculturels. (17 h 45)

Dans cette mesure, au niveau de chacun des conseils régionaux, il est certain que, dans le cas des régions — je vais parler pour la Côte-Nord, qui connaît une situation semblable à celle du Québec, c'est-à-dire que c'est une région qui est immense, qui va de Tadoussac jusqu'à Blanc-Sablon, en couvrant les villes nordiques de Gagnon et Schefferville, nous ne croyons pas que le prochain comité régional qui va voir au développement de la société dans cette région aura le mandat réel de rejoindre l'ensemble de toute cette population.

Il est fort possible qu'éventuellement, à partir du moment où la machine va commencer à être en marche, des demandes de division de cette immense région apparaissent, mais, dans un premier temps, c'est une première étape et on en est vraiment au début de ce projet, et nous croyons que les limites qui sont données à l'intérieur du projet nous permettent d'espérer et de ne pas oublier, bien sûr, ces appréhensions que nous avions. Il ne faut pas oublier que le prochain conseil d'administration de Radio-Québec va avoir le pouvoir de rediviser les régions, et bien sûr, ce pouvoir de rediviser les régions va se faire à la demande de ses propres membres dont près de la moitié vont provenir des régions.

M. Le Moignan: Dans vos relations futures avec la maison mère, dont le siège social sera à Montréal évidemment, supposons qu'il y ait dix membres des comités régionaux, dix représentants, est-ce que vous allez avoir le poids voulu pour faire peser dans la balance des décisions qui seront prises? On pourra certainement vous consulter à l'occasion, mais, quand on regarde ce qui se faisait dans le passé, les relations, les consultations étaient assez minces, je crois. Ne craignez-vous pas pour l'avenir que toutes les décisions soient prises et qu'à un moment donné, vous serez en minorité et que vous serez appelés pour entériner, peut-être, des choses que vous ne partagez pas, ou bien pensez-vous que vous aurez assez de poids pour influer sur les décisions?

M. Gagnon (Christian): Au point de départ, c'est sûr que, sur 23, nous avons, de façon très officielle, dix représentants qui vont provenir spécifiquement des régions, mais il demeure que, parmi les treize autres, ce ne sont pas des Martiens, ce sont des gens qui vont quand même provenir d'un certain nombre de régions et qui vont être nommés bien sûr, selon leurs qualités et selon les ministères qu'ils vont représenter, dans le cas, en tout cas, des représentants du monde de l'éducation. Ceci fait que, dans le fond, ce conseil d'administration, avec les pouvoirs qu'il a, devrait normalement — bien sûr, on peut difficilement projeter dans l'avenir — respecter les aspirations des régions.

M. Le Moignan: Je suis d'accord avec vous. Je ne parle pas des dix contre treize, je ne vois pas cela parce qu'il y aurait tout de même des gens parmi les treize qui sont natifs, qui comprennent le problème de la région également. Dans vos concertations à l'intérieur de vos régions, intra-ré-gions, est-ce que déjà vous songez à élaborer des politiques que vous aurez à soumettre à ce conseil suprême? Je crois que c'est très important. Quelles seront d'après vous vos préoccupations du centre de l'Est rie, de la Côte-Nord, parce qu'à un moment, vous allez conjuguer tous vos efforts pour en arriver à un certain consensus afin d'éviter le rnéli-mélo dans une politique régionale, provinciale et nationale. Je pense que c'est très important et ce sont des points sur lesquels vous vous êtes probablement déjà penchés parce qu'il faut bien dire que le national va dominer dans des antennes, je suis tout à fait d'accord avec cela.

Il y a des émissions pour tout le peuple du Québec. Maintenant, il y a des émissions qui peuvent être bâties en régions qui vont nous servir très bien, qui vont intéresser et agrémenter les populations d'autres régions. C'est comme cela que les régions du Québec auront l'occasion de se faire mieux connaître. Est-ce que déjà vous avez des mécanismes sur place pour essayer de prévoir votre propre programmation même si elle n'était que de douze heures pendant l'année?

M. Gagnon (Christian): Actuellement, honnêtement, on ne peut pas dire qu'on a ce type de mécanismes puisque les comités régionaux actuels sont des comités provisoires qui avaient spécifiquement deux objectifs: un premier provenant de par la nature même de ses comités qui était de voir à la production de trois demi-heures par année et un deuxième objectif, bien sûr, qui fait que nous sommes devant vous aujourd'hui, qui était d'assurer l'implantation régionale de Radio-Québec. Le fond de la lutte des comités régionaux a été d'amener spécifiquement des assurances quant à ce type d'implantation. Quant à prévoir les modalités d'application des prochains comités régionaux dont nous aurons à travailler à la mise sur pied, nous n'avions ni les moyens, ni le temps de mettre en marche de telles prospectives. Cependant, il est certain — je pense qu'il est naturel de le croire — que les prochains comités régionaux auront spécifiquement dès leur nomination à voir à établir semblable concertation.

M. Gagnon (Édouard): M. le Président, nous partons de loin. Nous n'étions pas là. Comme mon camarade vient de le dire, on était des comités provisoires avec des mandats bien précis et bien restreints, sans aucun pouvoir au conseil d'admi-

nistration, sauf celui de se parler et de crier fort de temps en temps. On peut vous assurer que les dix qui seront là, auront la voix de dix et sauront, en temps et lieu, si cela ne se déroule pas comme, nous, nous le prévoyons et l'espérons, le dire non seulement à la population mais aux autorités gouvernementales. On l'a dit: On veut surveiller de près le déroulement du développement régional de Radio-Québec tout particulièrement. Il est certain que les comités qui seront là, encore une fois — ce ne sera peut-être pas nous qui serons là dans quelques mois, ce seront d'autres personnes — auront certainement cette responsabilité et le fait qu'on part de rien et qu'on se réveille avec au conseil d'administration, même si c'est dix sur 23, pour nous, c'est déjà un pied dans l'étrier et c'est déjà une voix que nous n'avions pas auparavant.

M. Le Moignan: ...

Le Président (M. Jolivet): Un instant! Il y avait un monsieur qui voulait ajouter quelque chose, je pense.

M. Bouchard (André R.): Mon nom est André R. Bouchard, du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Je pense qu'un des premiers sauts que fera le prochain comité permanent, ce sera une question de partage des pouvoirs. Il est évident que ce qu'on veut dans les régions, quand on parlait d'autonomie, c'est un instrument de travail pour qu'on puisse fonctionner en dehors de la lourdeur administrative du national. Je pense qu'un des premiers points qu'on aura à clarifier, ce sera les instruments régionaux qu'on aura pour pouvoir fonctionner d'une façon, je dirais, beaucoup plus légère que nationale ou qu'on ne traîne pas trop le national dans les régions.

M. Le Moignan: Quant à moi, je vous souhaite le temps, l'argent, les disponibilités, les moyens pour bien vous entendre et, surtout, travailler au progrès de Radio-Québec dans vos milieux respectifs.

M. Gosselin: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Sherbrooke.

M. Gosselin: Oui, je connais un peu la laborieuse histoire de l'implantation dans les régions de Radio-Québec et j'avoue qu'à un moment donné, j'ai trouvé ça tellement pénible que j'ai été quasiment tenté de cesser d'y croire.

Le projet de loi consacre des garanties quant à la représentation, quant à la formation des comités régionaux, etc. Par ailleurs, il ne me semble pas clair encore — peut-être que ça l'est davantage à vos yeux, de quelle manière on va vraiment réussir à utiliser au maximum les traditions et les collaborations dans les milieux. En tout cas, un des dilemmes qui m'apparaissaient, c'est que Radio-Québec étant une boîte centrale, ultracentralisatrice, partant d'un noyau très fort, comme toute boîte gouvernementale, a de la misère à se déconcentrer, d'accord? Et la structure ou la manière dont elle se déconcentre, c'est qu'elle tient toujours la région ou les régions en otage, parce qu'elle a les moyens; c'est elle qui approuve les CT, les dépenses, etc. Alors, c'est toujours dans une sorte de relation de quémandage, où il faut constamment faire des rapports de force et, évidemment, la pression, on essaie de l'engendrer au niveau régional, mais on se bat contre une grosse machine. Évidemment, le projet de loi, ouvrant la participation beaucoup plus large au niveau du conseil d'administration de la société d'État, ça donne des garanties que les régionaux, les dix, mais aussi les autres qui, j'espère, épouseront la cause des régionaux vers une véritable déconcentration de Radio-Québec, pousseront dans la même direction.

Mais il y a quand même le problème des traditions des milieux, des équipements des milieux et de la manière dont on va réussir à faire bouger Radio-Québec — excusez-moi si je tiens ce langage — dans le sens d'utiliser le milieu et de collaborer carrément avec le milieu, y compris pour les productions, possiblement.

L'impression que je me suis faite, à suivre un peu l'évolution dans ma région, c'est qu'à un moment donné, Radio-Québec prenait une décision, le comité provisoire poussait fort. À un moment donné, on décidait d'engager un recher-chiste. On engageait quelqu'un sur le pif pour six mois, huit mois, pour faire un bout de travail. Après cela, c'était encore en suspens, il fallait recommencer.

Par ailleurs, il y a des organismes, dans des régions, qui ont déjà des traditions en communications, et il y a des équipements très lourds qui sont éparpillés dans les institutions. Évidemment, on ne peut peut-être pas réutiliser tout cela, mais, ce que je veux dire, c'est jusqu'à quel point y a-t-il moyen d'affirmer, soit dans la loi ou dans les règlements... Je vous impute des réserves quant au projet de loi. Je suis quasiment en train de vous en imputer. Peut-être que cela ne peut pas être défini par la loi. Mais ce que je veux dire, c'est que je me demande si on a des moyens, actuellement, et si la philosophie de Radio-Québec est suffisamment claire pour les régionaux que vous êtes, que vous pourrez, dorénavant, confier des commandites pour bâtir des émissions, qui, au CRD de sa région... Au Saguenay-Lac-Saint-Jean, il y a un regroupement des organismes volontaires qui est très significatif dans le domaine de l'éducation et il s'y regroupe des coopératives également.

Est-ce qu'il serait concevable, pour les régionaux que vous êtes, que la fabrication, dans toutes les phases de l'émission que cela peut supposer, soit commandée par des contrats de services, aux OVEP régionaux, dans ma région à moi, au CRD ou tout cela?

M. Chouinard: Naturellement, dans ce qui anime les régions, il y a une chose qu'il ne faut pas oublier. La plupart de nous, ici, nous sommes des vieux de la régionalisation. On date de plu-

sieurs années. Ce qui nous anime actuellement, c'est un esprit très positif. Si on était encore à l'époque où on comparait la régionalisation à une véranda par rapport à une cuisine qu'on va démolir pour construire la véranda, c'est bien sûr qu'on ne serait même pas ici pour vous parler. On ne pourrait pas être animé positivement. On serait animé très négativement, par rapport à Radio-Québec.

Ce qui fait qu'on a l'air pleins d'espoir, qu'on a l'air euphorique un peu, jusqu'à un certain point, c'est qu'on est très positifs, on y croit vraiment. On croit à Radio-Québec, on les croit sincères dans ce qu'ils ont avancé.

On a déjà fait des tentatives, particulièrement dans l'Estrie, de co-production ou de confier à une autre maison le soin de produire une émission pour nous selon des mandats bien précis qu'on aurait élaborés mais, à ce moment-là, cela ne s'est pas avéré possible, pour toutes sortes de raisons techniques. Depuis ce temps-là, je fais allusion à la période de la véranda, la technique aussi était à la période de la véranda, mais, aujourd'hui, on croit que cela a vraiment changé et que ce sera possible. C'est là-dessus qu'on croit au développement de Radio-Québec. Cela va sûrement coûter beaucoup moins cher de produire dans le sens que vous le proposez, ou que vous le laissez entendre, que de produire avec une machine très alourdie par Radio-Québec national.

Donc, pour nous, les régionaux, quand on parle de production régionale, on la voit de façon très flexible, très facile, très détendue. C'est à peu près la seule façon qu'on va pouvoir vraiment produire en région, tout en maintenant naturellement une qualité qui va se devoir de rencontrer des normes techniques bien précises.

Ce qui nous anime, ce qui nous maintient encore en poste, c'est qu'on a le goût de continuer. Vraiment, actuellement, on croit beaucoup à Radio-Québec et d'une façon très très positive. Donc, si on reculait seulement d'une année ou de deux ans, on ne pourrait pas du tout avoir ce langage qu'on a aujourd'hui.

M. Gosselin: Je veux simplement dire qu'il m'apparaît essentiel que les régionaux s'affirment très fort au sein du ponseil d'administration en vertu des dispositions que la loi leur donne et qu'ils puissent déblayer une plateforme vis-à-vis de Radio-Québec, qui consisterait à vraiment formuler que là où il existe des ressources sensément potables pour réaliser des productions locales, des expertises aussi et des traditions, on tente de procéder par association de ces groupes à réaliser les productions requises. Cela fera peut-être l'objet d'un manifeste que vous aurez à écrire ou que vous avez déjà en partie écrit, j'imagine, mais je dois dire que si on se revoit en commission parlementaire, il me fera plaisir de voir où les choses en sont et d'espérer avec vous qu'on réussira cette trame très fondamentale de la régionalisation. (18 heures)

M. Chouinard: Si vous permettez, pour reprendre les paroles de M. Barbin, tantôt, qui disait que les représentants des régions au conseil d'administration seront là pour défendre le point de vue des régions, c'est bien sûr que les gens des régions vont savoir élire les bonnes personnes à ce conseil d'administration puisque, je pense, c'est le président de la région qui siégera au conseil d'administration, le président étant élu d'abord comme membre du comité et ensuite élu par ses pairs comme président; il faut faire confiance à ce mécanisme pour que le président soit vraiment quelqu'un qui soit considéré comme convenant à la région.

Le Président (M. Jolivet): Pour permettre que le comité ici présent finisse, on s'est entendu — et on l'annonce pour les besoins du journal des Débats — pour continuer un peu plus tard que 18 heures. Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, à la page 3 du mémoire, vous suggérez que les régions possèdent les moyens nécessaires de réaliser et de diffuser chez elles des émissions répondant aux attentes des gens de chez elles. Dois-je en déduire que, selon vous, chaque région devra avoir son studio de production?

M. Chouinard: Un studio de production, cela veut dire beaucoup de choses, si on pense à un studio de production lourd. Normalement, quand on parle d'un studio de production, on pense à un studio de production lourd. Je ne crois pas qu'à ce moment-ci ce soit dans l'esprit des régions. Mais c'est sûr qu'en télévision vous avez toujours besoin d'un studio, ne serait-ce que pour faire les titres de votre émission. Vous avez toujours besoin d'un endroit qui soit quelque part où il y ait moyen de faire quelque chose. Mais dans l'esprit des régions, la télévision, étant donné qu'on doit couvrir de si grands territoires et toute la diversité des besoins d'une population, va se vouloir très mobile. De là toute la problématique de la mobilité des équipements pour les régions. C'est sûr qu'il va falloir, en plus d'être mobile, un pied-à-terre quelque part qui nous permette de faire des choses en studio, mais je ne crois pas qu'il faille donner à la définition de studio le sens péjoratif d'un gros studio de télévision très lourd qui coûte $500 000 en soi.

Mme Lavoie-Roux: D'accord pour le genre d'équipement que vous aurez, qu'il y ait de l'équipement léger pour circuler, pour être plus mobile, etc., mais dans votre idée à vous, est-ce que ce sont des équipements qui appartiendront en totalité à la région ou, par exemple, verriez-vous que Radio-Québec central puisse aller dans vos régions répondre aux devis que vous auriez préparés ou si... Qu'ils soient légers — la nature des équipements, je ne connais pas cela, mais je peux au moins imaginer ce que c'est... Est-ce que vous jugez que chaque région devra avoir tous les

équipements dont elle a besoin, quelle qu'en soit la nature, pour les fins de ses programmes?

M. Chouinard: Dans chacune des régions, il y a un équipement de base qui va nécessairement résider en région, mais à l'occasion d'événements exceptionnels — prenons, par exemple, les Jeux du Québec ou, enfin, des choses exceptionnelles — c'est bien sûr qu'il va y avoir là, pour une raison ou pour une autre, des renforts de Montréal qui vont venir. Mais la région devra être munie d'un ensemble d'appareils qui lui permettront d'assurer une production mobile en région. De ce fait-là, elle est tout à fait indépendante en soi.

Mme Lavoie-Roux: Oui, sauf pour des choses, comme vous le disiez tout à l'heure, comme les Jeux olympiques, qui feront déplacer, de toute façon, d'autres équipements que ceux de Radio-Québec, probablement ceux de Radio-Canada ou autres.

M. Chouinard: C'est cela.

Mme Lavoie-Roux: Mais vous pensez qu'une région devrait être autosuffisante en termes d'équipements.

M. Chouinard: Oui.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous jugez qu'au conseil d'administration de Radio-Québec deux représentants du ministère de l'Éducation, pour une télévision qui se dit être télévision éducative, vous apparaissent suffisants?

M. Gagnon (Édouard): II faut dire que le fait qu'au sein des comités régionaux il y aura deux personnes qui proviennent des institutions éducatives, il est fort possible que de celles-là il y en a qui iront siéger au conseil d'administration à Montréal, qui pourront être élues à la présidence et qui, automatiquement, iront siéger. On ne sait pas combien parmi celles-là. On sait, de toute façon, que dans les comités régionaux, il y en aura deux. Maintenant, si vous nous demandez si cela sera suffisant, il faudrait voir la composition du comité quand cela sera terminé. On est certain qu'au niveau régional il y aura deux personnes qui viendront des institutions éducatives.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais on parle d'une télévision éducative. C'est la raison d'être de Radio-Québec. Au conseil d'administration central, pour le distinguer des régions, en fait il n'y a que deux personnes de l'Éducation qui sont assurées d'être présentes. Par un hasard de circonstances, il se peut qu'il y en ait deux autres qui s'ajoutent, mais cela m'étonnerait que tous les présidents des comités régionaux soient des gens émanant de l'Éducation. Cela serait une curieuse de coïncidence. Cela serait peut-être une coïncidence souhaitable, remarquez bien, à mon point de vue.

M. Chouinard: J'aimerais seulement attirer votre attention sur un point. Si Radio-Québec était une télévision scolaire, je serais d'accord avec vous. Mais ce n'est pas une télévision scolaire ou académique comme telle. C'est une télévision éducative et le contenu scolaire en soi ne sera pas prédominant en termes d'heures de production.

C'est plutôt dans le sens plus large du mot éducation, tel que défini plus tôt, que Radio-Québec va se situer. C'est pour cela que le ministère de l'Éducation devrait avoir une certaine influence mais qu'il ne devrait pas aller plus loin qu'un certain point, puisque ce n'est vraiment pas scolaire en soi; exclusivement, je veux dire.

Mme Lavoie-Roux: Ce que vous me semblez dire, c'est que le contenu scolaire — il faudrait s'entendre — peut être du contenu à tous les niveaux parce que scolaire, c'est l'élémentaire et le secondaire, mais vous avez aussi, dans un contexte comme l'éducation permanente...

M. Chouinard: J'ai dit académique.

Mme Lavoie-Roux: .. il peut y avoir beaucoup plus de contenu académique que strictement au niveau scolaire. Ce que vous me dites, c'est que cela serait une proportion peut-être pas infime mais assez limitée de l'ensemble de la programmation éducative. Quels moyens d'évaluation allez-vous mettre en place? J'aurais peut-être dû demander cela à Radio-Québec plutôt qu'à vous mais prévoyez-vous mettre en place, quant aux objectifs que vous allez tenter d'atteindre... Si on parle de télévision éducative, il faut quand même se fixer des objectifs; cela deviendra peut-être assez difficile de les mesurer si cela demeure une télévision éducative dans un contexte très large. Est-ce que vous avez songé à cette question d'évaluation?

M. Chouinard: C'est ce qu'il y a de formidable dans la loi qu'on nous propose; chacune des régions va avoir cette liberté de répondre aux besoins propres d'une région ou d'une autre. On ne pourra pas avoir des règles pour définir: Vous en faites assez ou vous n'en faites pas assez. C'est beaucoup plus en termes de réponses à des besoins. Il s'agit, pour le comité, et c'est là qu'il va y avoir le défi pour le comité d'une région donnée, de rejoindre ces désirs de la population. C'est là qu'est tout le défi pour nous d'arriver à temporiser ou d'arriver à contrebalancer, à l'intérieur du mot "éducatif", le contenu académique par rapport au contenu éducatif en soi. Mais, chacune des régions va avoir cette espèce de liberté d'action pour répondre sur place à cette préoccupation.

Mme Lavoie-Roux: On peut répondre à des besoins mais il reste que dans un organisme comme Radio-Québec, même au niveau régional, il devrait y avoir des objectifs et il devrait y avoir moyen d'évaluer les objectifs. Est-ce que vous vous êtes penchés sur ce problème d'évaluation

des objectifs que vous poursuivrez ou des demandes auxquelles vous répondrez?

M. Chouinard: On ne peut pas dire qu'on se soit penché vraiment sur une évaluation pure, mais on s'est penché sur des moyens. Comme on disait tantôt, les heures de diffusion vont être réparties à l'intérieur de Radio-Québec et aussi pour desservir d'autres moyens comme, par exemple, des commissions scolaires ou d'autres institutions qui font des documents éducatifs qui vont pouvoir être diffusés sur les antennes de Radio-Québec. Donc, on s'est beaucoup plus penché sur les moyens que sur la mesure d'évaluation en soi. Ce serait une chose à définir, région par région, parce qu'on est tellement différent d'une région à l'autre, les besoins sont tellement différents, sont presque à l'opposé souvent, que ce serait une chose vraiment régionale, pour répondre à cette question. C'est une chose régionale qui va se produire.

Mme Lavoie-Roux: Je soulève le problème parce que je pense que c'est une préoccupation que vous devriez avoir, mais la grande question devrait être posée au ministre lui-même quand on arrivera à la discussion plus en avant. Je vous remercie, messieurs.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. O'Neill: M. le Président, je serais bien mal placé pour ne pas me réjouir d'un mémoire pareil. Au fond, il y a deux questions qu'on pouvait se poser sur la régionalisation. L'une était de savoir si le projet de loi fait une place suffisante à la régionalisation et, d'après votre évaluation, il semble bien que la réponse soit oui. Je sais qu'il y a des groupes qui auraient souhaité encore plus, mais je pense que comme étape, on peut dire, d'implantation première, j'ai l'impression qu'on se rejoint et qu'on est d'accord pour cela.

Deuxièmement, vous avez dit, à un moment donné, que vous faisiez passablement confiance à la direction actuelle de Radio-Québec pour ce qui est de la régionalisation, c'est-à-dire qu'il s'agit d'une direction d'un conseil d'administration qui prend cela au sérieux. J'ai exactement le même sentiment que vous; il y a une loi et il y a la façon de l'appliquer et, moi aussi, j'ai le même sentiment que vous tous. Je suis content d'avoir votre réaction là-dessus. Sur ce point aussi je dois me réjouir. Encore une fois, merci d'être venus, merci de votre collaboration.

Le Président (M. Jolivet): Merci. L'ajournement jusqu'à 20 heures environ. Le Comité régional d'implantation de Radio-Québec en Abitibi-Témiscamingue.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'aimerais mieux qu'on dise 20 h 15 pour ne pas les faire attendre.

Le Président (M. Jolivet): 20 h 15. Allons-y pour 20 h 15.

Suspension de la séance à 18 h 13

Reprise de la séance à 20 h 20

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission des communications reprend ses travaux où elle les avait laissés à la fermeture, à 18 h 15 environ. Le Comité régional d'implantation de Radio-Québec en Abitibi-Témiscamingue, Mme Pauline Trépanier.

Comité régional d'implantation de Radio-Québec en Abitibi-Témiscamingue

Mme Blais (Joanne): Joanne... Le Président (M. Jolivet): Joanne? Mme Blais: Blais. Le Président (M. Jolivet): Blais. Mme Lavoie-Roux: M. le Président... Le Président (M. Jolivet): Oui.

Mme Lavoie-Roux:... est-ce qu'on me permettrait d'adresser une demande au ministre. Est-ce qu'il serait possible d'avoir le nouvel organigramme qui est prévu pour Radio-Québec? J'imagine que, compte tenu qu'on a rédigé les projets de loi, qu'il y a certaines dispositions, cet organigramme doit exister.

M. O'Neill: Si je vois M. Barbin ce soir ou demain, je vais lui demander de...

Mme Lavoie-Roux: Vous pourriez nous le remettre?

M. O'Neill: Oui.

Le Président (M. Jolivet): Le plus tôt possible?

M. O'Neill: Vous voulez dire l'organigramme qui inclut toute la structure régionale.

Mme Lavoie-Roux: Oui, toute la restructuration de Radio-Québec.

M. O'Neill: Écoutez, je ne sais pas s'il y a quelqu'un de Radio-Québec ici pour nous répondre. M. Buzaré, peut-être?

M. Buzaré: Oui.

M. O'Neill: Est-ce que vous avez déjà mis au point l'organigramme qui représente toute la structure de Radio-Québec, incluant la représentation régionale?

M. Buzaré: À venir? On a un organigramme à l'heure actuelle qui représente la structure présente...

M. O'Neill: Oui.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Buzaré: ... mais on n'a pas un organigramme qui représente la structure déconcentrée. On va le produire très bientôt. Est-ce que c'est celui-ci que vous désirez?

Mme Lavoie-Roux: Pour le moment, je vais devoir me contenter de l'organigramme de la structure présente, mais dès que l'autre sera prêt... L'autre sera prêt dans combien de semaines?

M. Buzaré: Je dirais, selon la loi et tout ça, la mise en place des comités régionaux, à ce moment-là, nous allons formuler un organigramme officiel.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais vous avez quand même dû simuler un organigramme...

M. Buzaré: Oui.

Mme Lavoie-Roux: ... en prévision de la prochaine loi?

M. Buzaré: Oui.

Mme Lavoie-Roux: Celui-là, est-ce qu'il y a moyen de l'avoir?

M. Buzaré: Oui, il est toujours à l'état de projet, par exemple.

Mme Lavoie-Roux: Oui, à l'état de projet. Cela me satisferait.

M. Buzaré: On ne l'a pas ici. On pourrait vous en faire parvenir copie par la suite.

Mme Lavoie-Roux: J'apprécierais beaucoup. M. Buzaré: D'accord.

Le Président (M. Jolivet): Donc, on tient pour acquis que les membres de la commission en recevront une copie.

Madame Blais, la parole est à vous.

Mme Blais: Merci, M. le Président.

Pour commencer, comme le temps nous presse, j'aimerais apporter une toute petite spécification. Lorsqu'on parle d'antennes chez nous, ce sont des antennes seulement en Abitibi et non au Témiscamingue; je tiendrais à le souligner.

Comme, aussi, il y a d'autres intervenants après moi, j'aimerais peut-être faire un résumé de l'étude qu'on a faite et vous souligner les articles que nous, en Abitibi-Témiscamingue, on trouve les plus importants.

Au niveau du projet de loi no 4, Loi sur la programmation éducative, la section I, interprétation, article 2, 1er paragraphe, se lit comme suit: "Pour les fins de la présente loi, l'expression "programmation éducative" désigne toute programmation ou toute partie de programmation."

Ce qu'on propose, nous, ce serait: "Pour les fins de la présente loi, l'expression "program- mation éducative" désigne toute programmation." On supprime "ou toute partie". Notre commentaire va être en concordance avec nos propositions d'amendement des articles 6 et 7 du présent projet de loi.

L'article 2a se lit comme suit: "Conçue de façon à être présentée à la fois dans un contexte susceptible de permettre aux auditoires auxquels elle est destinée, la poursuite d'une formation par l'acquisition ou par l'enrichissement des connaissances ou l'élargissement du champ de la perception, et dans des conditions telles que cette acquisition ou cet enrichissement des connaissances ou cet élargissement du champ de la perception puisse être surveillé ou évalué."

Nous, on dit: "Ou cet élargissement du champ de la perception puisse et doive être surveillé ou évalué."

Le comité considère très important que ces activités soient surveillées et évaluées.

À l'article 3b: "Promouvoir l'accès des concitoyens à leur patrimoine culturel, notamment en reflétant la vie des différentes régions et des différentes communautés ethniques, en favorisant les échanges interrégionaux et interculturels, en encourageant la création et la diffusion de productions sonores, visuelles ou audiovisuelles québécoises, ou en privilégiant, d'une façon générale, la culture québécoise."

On propose de supprimer "québécoise ou en privilégiant, d'une façon générale, la culture québécoise." On trouve que la formulation actuelle est restrictive pour les autres communautés ethniques.

Dans les pouvoirs de la régie, l'article 4 se lit comme suit: "La régie peut, à la requête d'une entreprise de radiotélévision ou de câblodistribu-tion, déclarer éducative une programmation ou une partie de programmation qui lui est soumise."

Ce qu'on propose: "La régie peut, à la requête d'une entreprise de radiotélévision ou de câblodis-tribution, déclarer éducative une programmation qui lui est soumise." C'est aussi en concordance avec les propositions d'amendement des articles 6 et 7.

À l'article 5: "Une entreprise de radiotélévision ou de câblodistribution qui entend modifier substantiellement une programmation déclarée éducative doit, par requête, soumettre cette modification à l'approbation préalable de la régie." Notre proposition: "Une entreprise de radiotélévision ou de câblodistribution qui entend modifier — on supprime le mot "substantiellement" — une programmation déclarée éducative doit, par requête soumettre cette modification à l'approbation préalable de la régie." Nous croyons que toute modification à la programmation déclarée éducative est importante.

L'article 6 se lit comme suit: "Une entreprise de radiotélévision ne peut se désigner comme entreprise de radiotélévision éducative à moins que sa programmation n'ait été, en tout ou en partie, déclarée éducative par la régie." On devrait lire, ce qu'on propose: "Une entreprise de radiotélévision ne peut se désigner comme une entreprise tie

radiotélévision éducative à moins que sa programmation n'ait été, en tout ou à la très grande majorité, déclarée éducative par la régie." Nous considérons l'expression "en partie" trop vague; une entreprise de radiotélévision devrait être désignée éducative lorsque sa programmation comporte plus de 50% d'émissions jugées éducatives.

L'article 7: "Une entreprise de câblodistribu-tion ne peut désigner l'un de ses canaux comme canal éducatif de câblodistribution à moins que la programmation qu'elle distribue pas ce canal n'ait été, en tout ou en partie, déclarée éducative par la régie." Le même processus que pour l'article 6 et les mêmes commentaires aussi.

Pour le projet de loi no 5, si vous me permettez à cause du temps, on pourrait passer tout de suite au niveau des comités régionaux, ce qui nous tient le plus à coeur. L'article 20.1c, premier paragraphe, se lit comme suit: "D'assurer la gestion des ressources humaines et matérielles affectées à la programmation et à la production d'émissions pour cette région." Ce que nous proposons: "D'assurer la gestion des ressources humaines, matérielles et financières affectées à la programmation et à la production d'émissions pour cette région." Dans le mémoire présenté par notre comité, rappel des positions du Comité d'implantation de Radio-Québec en Abitibi-Témiscamingue, nous avons tenu à rappeler l'importance que nous accordons à l'administration par les régions de leur enveloppe budgétaire. Sans ce pouvoir, toute décentralisation devient illusoire.

Il est fort possible que lorsqu'on parle de gestion des ressources matérielles, qu'il soit sous-entendu que ce soient les ressources financières, mais on aimerait se le faire préciser. "Le comité régional exerce en outre toute autre fonction que peut lui attribuer le conseil d'administration de la société." Ce qu'on propose: "Le comité régional exerce en outre toute autre fonction que peut lui attribuer le conseil d'administration de la société. La société doit veiller à ne pas surcharger les tâches des comités participants par des mandats secondaires." (10 h 30)

Nous sommes d'accord avec la position prise par le Regroupement populaire des usagers des moyens de communication de l'Abitibi-Témiscamingue dans son avis adressé au président de Radio-Québec lors de sa visite, le 9 avril, où il est dit: "Radio-Québec doit veiller à ne pas surcharger les tâches des comités participants par des mandats secondaires. C'est une tactique bureaucratique trop facile pour rendre indigeste toute participation. Que les tâches du comité soient en priorité consacrées au développement régional et que la nationale soit au service des régions et non les régions au service du national." On implique là-dedans aussi surtout la production, c'est-à-dire qu'on ne voudrait pas qu'à un moment donné, Radio-Québec se serve de ces régions pour faire de la grosse production nationale qui épuise nos ressources humaines et tout cela. "Un comité régional se compose de sept membres nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil." Je n'ai pas besoin de vous répéter comment c'est proposé. Ce qu'on propose, nous: "Un comité régional se compose de sept membres nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil, dont deux personnes sur la recommandation des organismes socio-économiques de la région, deux personnes sur la recommandation des organismes socio-culturels de la région, deux personnes sur la recommandation des groupements populaires de la région, une personne qui est un des employés de la société dans la région, sur la recommandation de ces derniers." Pour que le comité régional soit vraiment représentatif de sa population selon l'esprit de la loi, nous avons tenu à en préciser la composition afin qu'elle corresponde aux réalités régionales. "Tout membre d'un comité régional ayant un intérêt dans une entreprise doit, sous peine de déchéance de sa charge, le révéler par écrit au président et s'abstenir de participer à toute délibération et à toute décision portant sur l'entreprise dans laquelle il a un intérêt." Ce qu'on propose: "Tout membre d'un comité régional ne peut, sous peine de déchéance de sa charge, avoir un intérêt — au niveau de l'intérêt, on parle d'intérêt financier dans une entreprise de télévision, radio privée ou câblodistribution — direct ou indirect dans toute entreprise mettant en conflit son intérêt personnel et celui de la société. Toutefois, cette déchéance n'a pas lieu, etc.".

C'est un problème qu'on a vécu, nous, en région. On sait ce que cela peut impliquer si cela reste comme cela. Nous croyons que les modifications proposées par notre Comité régional d'implantation de Radio-Québec en Abitibi-Témiscamingue sont pertinentes et nécessaires à une saine régionalisation.

Le comité croit important de souligner l'article 20-8, paragraphes 1 et 2, en insistant pour que les recommandations régionales ne servent pas de paravent à des décisions venant du national.

Telles sont donc nos propositions d'amendement pour ces deux projets de loi issues de l'accord unanime des cinq membres du Comité régional d'implantation de Radio-Québec en Abitibi-Témiscamingue.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. O'Neill: Ma première question, M. le Président, c'est sur la programmation éducative, lorsqu'il est question d'une programmation éducative qui le soit en partie ou qui le soit substantiellement par opposition à "en grande partie ou majoritairement". Pourriez-vous fournir quelques explications supplémentaires au sujet de cette proposition, s'il vous plaît?

Mme Blais: Oui, notre inquiétude vient des notes explicatives au projet de loi 4 qui disent: "Le ministre des Communications pourra accorder aux entreprises de radiotélévision ou de câblodistribution, dont la programmation a été déclarée éducative par la régie, une assistance financière et technique suivant les normes et modalités fixées par règlement du gouvernement."

Les règlements, évidemment, on ne les connaît pas. La programmation, une fois qu'elle a été déclarée éducative: ici, on ne dit pas que, pour recevoir une subvention, il faut que la programmation ait été déclarée majoritairement ou toute éducative. Alors, on se dit qu'au niveau des entreprises privées, si elles décident de faire une demi-heure d'émission éducative justement parce que le mot "éducative", c'est large, au sens large du mot, elles peuvent avoir des subventions et cela pourrait enlever des cents aux radios communautaires ou aux télévisions communautaires ou aux câblodistributeurs qui, eux, seraient prêts à fonctionner en canal majoritairement éducatif. Alors, on veut avoir plus de précisions sur la quantité. Avant d'avoir une programmation éducative, on veut s'assurer d'une certaine quantité. Il se peut que ce soient des modalités fixées par règlement, mais on aimerait qu'on tienne compte de nos réglementations, si ce n'est pas au niveau du projet de loi, que ce soit, au moins, au niveau des règlements d'application. On ne veut vraiment pas que tout le monde déclare, demain matin, faire de la télévision éducative parce qu'on produit une demi-heure de télévision éducative par semaine, pas plus qu'au niveau des câblodiffuseurs.

M. O'Neill: Je comprends un peu votre sentiment. Je voudrais simplement vous présenter l'hypothèse suivante, par exemple, dans le cas de la radiodiffusion. Il y a, sur le territoire québécois, en gros, une centaine de postes privés de toutes sortes, dont certains ne disposent que de ressources au plan culturel et humain qui sont plutôt limitées, plutôt modestes. À un moment donné, il pourrait arriver que, dans certains secteurs, parfois dans des régions périphériques, ces gens soient intéressés quand même à améliorer leur programmation en y introduisant une partie de programmation éducative qui ne sera pas une partie majoritaire évidemment; ce qui ne veut pas dire nécessairement qu'il y aurait à ce moment-là une subvention; mais si c'est une porte ouverte à des subventions, cela ne veut pas dire que c'est mécanique, mais est-ce que cela ne vaut pas la peine de reconnaître cet effort, surtout quand on sait comment, dans certaines régions, la radiophonie ne se distingue pas toujours par sa qualité culturelle et éducative, qu'il y ait un certain encouragement au moins en reconnaissant cet effort? Mais, encore une fois, une effort qui, compte tenu de l'ensemble de la grille de programmation, ne concerne qu'une partie mineure de la programmation? Je ne sais pas ce que vous pensez de cette hypothèse.

Mme Blais: Disons que l'expérience qu'on a eue en région avec les télédiffuseurs privés nous a montré que ces gens font cela pour faire de l'argent; en fait, pour eux, tous les moyens sont bons. Si on leur ouvre une porte en disant que s'ils produisent une demi-heure de télévision éducative par semaine, il auront des subventions, c'est officiel qu'ils vont le faire. Maintenant, si vous pensez que...

M. O'Neill: Quant à moi, je ne fais pas un lien direct entre un effort de programmation éducative et une subvention, surtout qu'il y a des gens qui sont capables de s'autosubventionner ou de s'autofinancer. Je comprends votre réticence, vous voyez le danger d'un prétexte pour absorber une partie des fonds publics qui pourraient être avantageusement accordés à d'autres groupes beaucoup plus méritants comme les télévisions communautaires, par exemple, je comprends cela.

Mme Blais: Oui, les cégeps, les universités et tout cela.

M. O'Neill: Et ce serait à retenir dans votre démarche. Je suis prêt à retenir cela aussi.

Mme Blais: Oui, c'est pour cela que je disais que les recommandations qu'on fait peuvent très bien servir pour le règlement d'application de la loi aussi, mais on avait envie de vous en faire part. C'était une des inquiétudes qu'on ressentait parce qu'on a vécu des expériences aussi.

M. O'Neill: Très bien, mais vous comprenez, en revanche, que si on pouvait en arriver à ce qu'en certains endroits, on puisse hausser un petit peu cette qualité, je pense surtout à la radiophonie.

Mme Blais: Bien sûr qu'on est d'accord avec cela aussi. On est d'accord avec cela...

M. O'Neill: Un stimulant qui aide à la pratique de la vertu, si vous voulez.

Mme Blais: Ce qu'on demande, c'est que la réglementation soit assez sévère pour ne pas permettre à ceux qui ont les cents d'aller chercher des subventions parce qu'ils font une petite demi-heure de télévision éducative par semaine.

M. O'Neill: Maintenant, je voudrais vous donner une deuxième précision concernant une autre suggestion ou recommandation que vous faites concernant l'expression "qui doive être évalué." J'essaie de la retrouver — un instant — dans le texte. Donc, c'est l'article 2, la fin du paragraphe a), "que... cet élargissement du champ de la perception puisse être surveillé ou évalué." Il s'agit ici d'un certain nombre d'activités, par exemple, cela peut être la télévision scolaire qui soit évaluée en ce sens qu'elle soit soumise à l'évaluation du ministère de l'Éducation. Si vous mettez "doive être évalué", je trouve que c'est un peu embarrassant parce qu'il peut y avoir quand même beaucoup d'émissions de caractère éducatif, au sens étroit et au sens large, qui ne se prêtent pas toujours à une évaluation. Le sens de doive, de puisse ici, c'est de laisser la place à une évaluation possible dans le cas où on reconnaîtrait, par exemple, des cours; cela pourrait être des cours télévisés. Quand vous mettez "doive", vous en réduisez assez considérablement, me semble-t-il, la possibilité. Il me semble enfin que

vous dressez des balises assez sévères pour ceux qui vont faire la programmation éducative. Je voulais simplement vous signaler cela.

Mme Blais: C'est toujours notre crainte. L'esprit de notre crainte est de voir n'importe qui faire de la télévision éducative.

M. O'Neill: J'ai retenu votre remarque concernant une sorte de caractère privilégié de la culture québécoise. Nous relirons le texte à la lumière de votre recommandation. Dans notre esprit, dans l'esprit de ceux qui ont rédigé ce texte, la culture québécoise n'exclut pas des apports culturels de groupes minoritaires parce que cela fait également partie de la culture québécoise, ce sont même des enrichissements de la culture québécoise. Quant à nous, il faudra voir la façon dont cela a été formulé. Pour nous, cela n'a pas été formulé comme étant soit l'un, soit l'autre, mais l'un et l'autre.

Mme Blais: II faudrait peut-être changer la formulation, parce que cela porte à confusion.

M. O'Neill: II faudrait regarder cela de près parce que, même lorsque nous avons demandé à Radio-Québec d'accorder de l'attention à la culture des groupes qu'on dit minoritaires... Nous ne considérons pas ceux-ci comme étrangers à la culture québécoise, mais comme des éléments d'enrichissement à la culture québécoise. Je sens ici votre inquiétude. Ce serait de...

Mme Blais: On a fait l'étude du projet de loi no 4 pas seulement en fonction de Radio-Québec.

M. O'Neill: Oui.

Mme Blais: On a fait l'étude du projet de loi en fonction de tout ce qui s'appelle radio et télévision dans la province. C'est pour ça que... C'est sûr qu'on est persuadé que Radio-Québec a un mandat très précis et qu'il va le suivre, mais on parle aussi pour les autres radios et les autres télévisions et, à ce moment-là, la façon dont c'est formulé, peut prêter à confusion.

M. O'Neill: D'accord. Mais, à partir de l'idée que l'expression "culture québécoise" inclut tous les champs d'expression culturelle qui se font à l'intérieur de ce pays d'ici, à ce moment-là, si on envisage les choses de cette façon, vous seriez moins inquiète, par exemple, devant la proposition.

Mme Blais: Ah oui.

M. O'Neill: D'accord. Mais, de toute façon, je retiens votre remarque là-dessus, pour être bien certain que l'expression "culture québécoise" n'exclut, d'aucune façon, dans sa formulation ici, l'apport de ces cultures minoritaires.

Mme Blais: Oui, il faudrait le spécifier.

M. O'Neill: Un instant! Au sujet de... Vous avez dit "le danger de confier à des comités régionaux toute autre fonction qu'il jugerait bon de leur confier". Là, évidemment, on est devant le problème du bon jugement de la direction de Radio-Québec. Il reste qu'on peut voir le sens suivant la proposition: C'est qu'à mesure que les comités seront bien implantés, assumeront les tâches qui leur seront confiées, il faut prévoir aussi qu'on puisse élargir l'éventail de ces tâches, c'est-à-dire une sorte de progression dans la responsabilité régionale. L'idée n'était sûrement pas de les écraser avec toutes sortes de tâches diverses qui les empêcheraient de s'occuper de ce dont ils doivent s'occuper, mais l'idée, c'est simplement qu'à un moment donné, à mesure que l'expérience s'avérera un succès, il sera possible, à ce moment-là, au conseil d'administration de déléguer des choses et d'en arriver à une étape où ces comités régionaux seront aptes à assumer beaucoup de tâches nouvelles qui leur conviennent, qui sont conformes à leur mandat, mais ce n'était évidemment pas dans notre esprit de les noyer dans un certain nombre de tâches onéreuses quotidiennes qui les empêcheraient de faire leur travail principal.

Mme Blais: Je pense que dans mon commentaire aussi, j'ai surtout insisté... Je parlais au niveau de la production et je pense que si c'est comme ça que tout le monde l'interprète, il n'y aura pas de problème à ce qu'on ajoute "que les tâches du comité soient en priorité consacrées au développement régional." Si tout le monde l'entend comme ça, il n'y aura pas de problèmes à l'ajouter et ce sera plus clair.

M. O'Neill: Leur crainte, j'imagine, c'est qu'on leur confie un tas de tâches que j'oserais appeler de cuisine, en un sens, c'est-à-dire qui les empêcheraient...

Mme Blais: Oui, c'est ça.

M. O'Neill: ... de jouer le rôle pour lequel ils ont été créés.

Une dernière remarque. Je reviendrai peut-être plus tard, parce que je ne voudrais pas en priver d'autres de leur temps d'intervention.

Vous nous proposez que, dans la composition des comités régionaux, on exclue les représentants des milieux d'enseignement. Je vous avoue que cela avait été inscrit là pour manifester toutes nos bonnes intentions, nos bons sentiments à l'égard du ministère de l'Éducation et des milieux de l'enseignement. Je ne sais pas ce que notre collègue, le député de L'Acadie va en penser. Vous nous dites qu'en fait, ça correspond mieux à l'esprit de la loi. "Pour que le comité régional soit vraiment représentatif de sa population, selon l'esprit de la loi, nous avons tenu à en préciser la composition, afin qu'elle corresponde aux réalités régionales." (20 h 45)

Ce que nous n'aurions pas accepté, cela aurait été des gens représentant le milieu de l'enseignement et nommés par le ministre. Cela aurait été de pousser vraiment un peu loin le paternalisme. Mais que les milieux de l'enseignement des régions soient représentés, quand on sait l'importance de ces institutions en région, je vous avoue que cela nous est apparu comme une chose assez logique. Vous nous proposez, en somme, de les éliminer. Ils ne seraient pas nécessairement éliminés, parce qu'ils pourraient entrer dans les groupes socio-culturels. Et vous nous proposez des groupements populaires.

Je vous pose successivement les questions suivantes: 1 - Pourquoi votre proposition est-elle plus conforme à l'esprit de la loi, ce qui est possible? 2 - Pourquoi éliminer les milieux de l'enseignement? 3 - Qui seraient ces gens des groupements populaires?

Je vous laisse avec ces trois questions.

Mme Blais: Encore au niveau des expériences régionales, ces quatre personnes représentant les organismes socio-économiques, deux personnes des institutions de l'enseignement et une personne des employés, pour nous, ce n'était vraiment pas représentatif. On voulait aussi avoir des spécifications.

Nous sommes d'accord qu'au niveau d'organismes socio-économiques et culturels de la région, il pourrait y avoir, avec pas mal de chance, un représentant des groupements populaires. Mais on sait fort bien — l'expérience l'a prouvé — que la majorité des groupements populaires est noyée dans les groupements socio-économiques, au niveau des régions. On voulait leur assurer une représentativité.

Le moyen qu'on a trouvé, on avait sept membres. Il fallait jouer avec cela. On a eu envie d'en mettre neuf. On a dit: On va rester avec sept membres. On va faire la répartition autrement. Deux personnes sur les organismes socio-économiques, on pense que cela va être vraiment représentatif pour ces groupes. Deux personnes sur la recommandation des organismes socio-culturels, on peut retrouver les maisons d'enseignement là-dedans, il n'y a vraiment pas de problème. Et on ouvre la porte à nos groupements populaires. Les groupements populaires, cela peut être les comités de citoyens, cela peut être les télévisions communautaires ou les radios communautaires, enfin, tout ce qui touche au niveau vraiment populaire et qui n'est pas reconnu, comme les chambres de commerce, les CRD, les conseils régionaux de la culture, les jeunes chambres de commerce, tout ce qui a un beau nom, qui porte le nom d'incorporé au bout, qui va être vraiment représentatif de la population. Et Radio-Québec, de la façon que nous le concevons en région, s'adresse aussi à ces gens-là, et surtout à ces gens-là. Ce sont eux qui en ont besoin de Radio-Québec, dans un premier temps. Nous autres aussi, mais eux autres en premier. Il faudrait quand même leur laisser la chance de venir nous dire ce qu'ils veulent, à Radio-Québec, comment ils le veulent Radio-Québec, quelle sorte d'émissions ils veulent, pour eux.

Cet après-midi, on discutait: Quelles sont vos priorités dans les régions? Si on ne leur laisse jamais la chance de les exprimer, leurs priorités, on ne le saura pas. On ne sera jamais une région qui va présenter une réalité régionale. C'est pour cela qu'on demande des changements sur la formation des comités, qu'on demande des spécifications. On veut laisser une porte ouverte aux groupements populaires.

M. O'Neill: Mais permettez-moi de vous signaler que l'expression "groupement populaire" est assez difficile à cerner. Tout à l'heure, vous nous avez donné deux exemples. Vous nous avez donné l'exemple des chambres de commerce. Cela m'apparaît faire partie des organismes socio-économiques.

Mme Blais: Oui.

M. O'Neill: Vous avez donné l'exemple des conseils régionaux de la culture qui, à mon avis, peuvent faire partie des organismes socio-culturels.

Mme Blais: Socio-culturels. Oui, c'est pour cela...

M. O'Neill: Vous reconnaissez que l'expression pourtant populaire, tout en rejoignant une réalité, est un peu plus difficile à cerner.

Mme Blais: Dans l'original, ce sont quatre personnes des organismes socio-économiques et culturels. À ce moment-là, c'est là qu'on retrouve les chambres de commerce, les CRD, les conseils de la culture et qu'on ne rejoint pas les groupements populaires.

M. O'Neill: Ah! Vous ne les incluez pas dans les groupements populaires?

Mme Blais: Non, non, non, non.

M. O'Neill: J'ai cru comprendre que vous mettiez les chambres de commerce dans les groupements populaires.

Mme Blais: Non, pas du tout.

M. O'Neill: Ce ne sont pas des groupes populaires. Ce seraient surtout des groupes comme les associations de consommateurs, supposons, vous m'avez parlé de télévision communautaire, de coopératives...

Mme Blais: Les coopératives, oui, pour leur laisser la chance aussi, parce que ce sont des organismes...

M. O'Neill: ... les comités de citoyens. En somme, vous seriez bien plus à l'aise si on mettait

neuf membres au lieu de sept. Et là, vous accepteriez deux représentants des milieux d'enseignement.

Mme Blais: Ah! oui.

M. O'Neill: J'ai terminé pour le moment, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Mme "la" député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier d'une façon particulière le Comité régional de l'Abitibi-Témiscamingue pour la qualité de son mémoire. Je pense que c'est le premier mémoire où on fait vraiment une étude des deux projets de loi article par article et où on apporte des suggestions que le gouvernement acceptera ou n'acceptera pas mais qui, je pense, méritent réflexion, méritent qu'on s'y arrête.

Comme on nous avait dit qu'on avait demandé à tous les comités régionaux de présenter un mémoire commun, j'étais un petit peu surprise de voir que vous aviez décidé ou choisi de présenter votre propre rapport. À tout événement, j'en suis fort aise parce que je pense que cela nous donne l'occasion d'avoir un mémoire qui, comme je le disais, fait des suggestions et a vraiment examiné sérieusement le projet de loi. Je comprends que le groupe qui vous a précédé était tellement emballé qu'il voyait seulement de belles choses dans le projet de loi, mais il reste qu'il n'y a pas de projet de loi, à ma connaissance, qui ne mérite pas quelques améliorations et, dans le cas des deux qui sont devant nous, peut-être plusieurs améliorations.

Je regrette avec vous aussi que vous ayez eu aussi peu de temps pour vous préparer et, encore une fois, devant des projets de loi aussi importants que ceux-là, qu'on ait convoqué une commission parlementaire qui soit limitée quant au nombre de gens qui peuvent s'y présenter, qui ne soit pas ouverte à l'ensemble de la population. J'aurais presque vraiment cru que ceci avait été fait à dessein, si je m'en rapporte au premier mémoire en particulier, en me demandant si le gouvernement convoque seulement les gens qui sont d'accord avec lui. Je me sens tout à fait rassurée parce que je vois qu'il y en a d'autres qui semblent, d'une façon très constructive d'ailleurs, prendre leur distance face au gouvernement vis-à-vis de ces projets de loi.

Plus concrètement, votre recommandation concernant l'article 2 est très explicite et je voudrais savoir si je vous interprète mal en croyant que, d'une certaine façon, vous voulez restreindre le sens très large donné aux termes "programmation éducative". Pourriez-vous expliquer un petit peu plus votre pensée là-dessus? Est-ce que vous trouvez, par exemple, que les trois paragraphes sur la programmation éducative devraient être restreints, sont peut-être trop ouverts? Enfin, si vous pouviez expliciter davantage vos intentions ou vos objectifs.

Mme Blais: On les trouvait très ouverts mais, en même temps, c'était une définition qui nous convenait assez bien. Là où on a voulu limiter, je l'ai expliqué tantôt, c'est au niveau des entreprises privées. On veut qu'au niveau de la réglementation on soit plus restrictif, face à la programmation, quant aux quantités parce que la programmation éducative, pour nous, représente beaucoup de choses. Il y a cependant des choses que cela ne représente pas, comme au niveau des échanges culturels; on est bien persuadé qu'une émission de "western" venant de Mont-Laurier à Val-d'Or, pour nous ce n'est vraiment pas un échange culturel. Pour d'autres, cela peut l'être. Mais si on ne met pas de réglementation sévère, justement, on va être obligé de dire: Oui, c'est culturel. C'est la même chose au niveau de la programmation éducative. On demande une réglementation plus sévère pour éviter les abus et pour éviter qu'on joue avec la définition du mot "éducative"; par contre, on est d'accord avec la définition du mot "éducative", il faut quand même se laisser des portes ouvertes, cela peut englober beaucoup de choses. C'est au niveau de la réglementation qu'on demande que cela soit plus sévère.

Mme Lavoie-Roux: Dans nos échanges avec le ministre, je vous ai entendu dire ou du moins, j'ai cru entendre dire que vous seriez satisfaite que ce pourcentage de réglementation ou cette exigence d'un certain pourcentage touchant le domaine éducatif soit contenue dans les règlements. Ne croyez-vous pas que ce serait préférable que ce soit précisé dans la loi elle-même?

Mme Blais: Non. Je pense qu'au niveau de la réglementation, ce serait très bien.

Mme Lavoie-Roux: Ce serait très bien? Mme Blais: Oui.

Mme Lavoie-Roux: Parce qu'une réglementation, cela se modifie beaucoup plus facilement qu'une loi.

Mme Blais: Oui, mais les projets de loi aussi, du toute façon. Cela fait que...

Mme Lavoie-Roux: Un projet de loi moins facilement. C'est plus long.

J'ai noté votre excellente suggestion concernant l'article 3b. En tout cas — le ministre en a parlé — il y a certainement lieu de l'examiner parce que même si — et je veux attirer votre attention là-dessus — on parle de communautés ethniques dans le même paragraphe, après avoir parlé des communautés ethniques, on dit: "... en privilégiant d'une façon générale la culture québécoise." Il me semble y avoir un peu... En tout cas, on pourrait l'interpréter comme une certaine contradiction au niveau des bonnes intentions. On dit oui et, ensuite, on semble venir le restreindre. Il y aurait probablement lieu de réexaminer cette formulation pour que, justement, personne ne se

sente exclu. Je pense que le gouvernement se rappellera qu'il a déjà eu certains déboires quand il a voulu trop insister sur le "québécois" de ses projets de loi. On ne rappellera pas le projet de loi no 1 ou le projet de loi no 101.

M. Guay: Êtes-vous en train de dire comme cela a été dit au congrès du Parti libéral récemment, au conseil du Parti libéral, que cela n'existait pas, la culture québécoise?

M. Bertrand: Ils n'ont pas dit cela?

M. Guay: II y a quelqu'un qui a dit cela.

Mme La voie-Roux: Quelqu'un a dit cela?

M. Guay: Quelqu'un a dit cela. J'espère que ce n'est pas ce que vous êtes en train de dire.

Mme Lavoie-Roux: Non, mais je pense que, quand on l'utilise, il faut l'utiliser avec toute la prudence que ceci appelle. Comme l'a signalé le porte-parole du groupe de l'Abitibi, à ce moment-ci, cela pourrait devenir exclusif de communautés ethniques et je pense que, dans ce sens, il y a lieu de l'examiner de plus près, M. le député de...

Une voix: Taschereau.

Mme Lavoie-Roux: ... Taschereau.

M. Guay: C'est une interprétation bien restrictive. Taschereau, c'est bien cela.

Mme Lavoie-Roux: Concernant l'article 2 de la Loi de Radio-Québec, vous exigez que tout le monde soit sur le même pied dans le cas de conflits d'intérêts. Au niveau des intentions, je suis prête à vous suivre là-dessus, mais ne croyez-vous pas que ceci pourrait peut-être éliminer certaines personnes qui pourraient s'avérer utiles à Radio-Québec? Vous avez fait allusion à certains problèmes que vous avez connus dans votre région à cet égard. C'est trop difficile d'entrer dans des exemples précis dans une commission parlementaire dont les propos sont quand même publics. Est-ce que les cas que vous avez connus sont suffisamment sérieux pour que, vraiment, on doive insister pour que cette exigence s'applique à l'égard de tous les membres du conseil d'administration au plan régional?

Mme Blais: Au plan régional, oui. Oui, je pense que l'expérience qu'on a connue justifie amplement notre recommandation parce qu'au niveau d'une région — il y a seulement sept membres siégeant au comité — les influences se font très facilement, le trafic d'influences aussi. Même si la personne en question n'est pas là au moment où on discute de son entreprise, elle réussit quand même à faire passer son idée.

Mme Lavoie-Roux: À l'article 20-1c, vous vous inquiétez, je pense, quant à la spécification des normes financières. Pourriez-vous élaborer votre pensée un peu là-dessus? Quelle est votre inquiétude exactement à l'article 20-1c?

Mme Blais: 20-1c, c'est le premier paragraphe?

Mme Lavoie-Roux: Touchant les normes budgétaires.

Mme Blais: Ah bon! Dans les négociations avec Radio-Québec pour les régions, cela a toujours été une question bien importante que les régions aient leur enveloppe et administrent leur enveloppe budgétaire. On trouve qu'assurer la gestion des ressources humaines et matérielles, cela ne spécifie pas assez. On a besoin de se sentir sécurisé à ce niveau. Nous sommes des gens très méfiants en Abitibi. (21 heures)

On veut absolument que le terme "financier" soit là. À ce moment-là, on va se sentir en sécurité, on va savoir que notre région va avoir ses budgets pour s'occuper de l'administration, de la production, bien sûr, en concordance avec la grosse boîte qui est Radio-Québec sur les mêmes principes aussi, mais au moins que cela se passe en région, que ce soit nous qui nous occupions de l'administration. On veut en être sûr.

Mme Lavoie-Roux: Dans ce sens-là, votre opinion semble différente de celle qui a été exprimée cet après-midi alors qu'on semblait moins inquiet du fait que les normes étaient établies par Radio-Québec, central par opposition à régional.

Mme Blais: C'est parce que, en Abitibi, on doit souffrir d'un gros manque de sécurité. On a besoin d'en avoir.

Mme Lavoie-Roux: Maintenant, relativement à la composition des comités régionaux, je pense que je rejoignais votre préoccupation. Je l'ai soulevée cet après-midi. Je pense qu'il y a tous les comités de citoyens, qu'il y a tous les organismes d'éducation populaire qui, si on se réfère à certains gestes restrictifs, volontairement ou non, sont posés par le gouvernement à leur endroit... Si je regarde, par exemple, la façon dont les budgets des OVEP au ministère de l'Éducation ont été coupés cette année, ils ont été difficiles à obtenir, et également les subventions pour les ADDS, l'Association pour la défense des droits sociaux, etc. Je pense que c'est important qu'on les signale comme groupes, comme entités, les groupes populaires, parce que je craindrais qu'on les épargne et que, finalement, on retrouve, comme représentants dans les comités régionaux, davantage de gens provenant des groupes socio-économiques auxquels vous avez fait référence ou encore les groupes, le comité régional de la culture, etc., qui sont des groupes déjà très officiels; enfin, des groupes qui sont peut-être...

Mme Blais: Officiels et favorisés.

Mme Lavoie-Roux: Oui, là-dessus, on pourrait peut-être aussi examiner cela de plus près, mais je pense que vous avez vraiment une préoccupation pour que la population, la base ait son mot à dire.

Mme Blais: Oui. Cela nous semble très important si Radio-Québec veut remplir un vrai mandat régional.

Mme Lavoie-Roux: Oui. Maintenant, une dernière réponse qu'il m'intéresserait de savoir puisqu'on a la chance d'avoir l'Abitibi qui présente un mémoire séparé. Qu'est-ce qui vous apparaît comme étant les priorités, à ce moment-ci, en Abitibi, touchant la télévision éducative? Disons que demain, tout serait en place et que vous pourriez démarrer. Quelles sont les priorités que vous avez identifiées au point de vue de la télévision éducative chez vous?

Mme Blais: L'Abitibi-Témiscamingue a déjà dix ans d'expérience au niveau de la télévision régionale avec le groupe Multi-Media. Les priorités pour le Comité régional d'implantation sont justement de faire une étude et de faire l'inventaire de ce qui a été fait, d'établir des structures de participation et, par ces structures de participation, aller chercher les priorités. En tant que comité d'implantation, on n'avait ni les budgets, ni le temps, parce qu'on n'était pas à Radio-Québec à plein temps pour le faire et pour vous les sortir. Les seules que je pourrais vous donner ce soir serait les priorités du comité et cela ne serait pas représentatif. Mais on a pensé, par exemple, à une façon d'aller les chercher, c'est-à-dire établir des structures de participation par zones et aller chercher nos priorités là-bas. C'est aux gens de la région à les déterminer; ce n'est vraiment pas à nous. C'est là aussi qu'il arrive qu'on dise: II faut des représentants de partout, des groupements populaires. Il faut faire cela tous ensemble.

Mme Lavoie-Roux: Alors, je comprends que dans votre groupe se retrouve le comité régional qui existait l'an dernier et qui est venu devant cette commission. Vous avez encore un peu les mêmes membres. Votre comité est loin de s'être disloqué après la présentation de l'an dernier.

Mme Blais: II en reste deux de l'ancien comité.

Mme Lavoie-Roux: Seulement deux.

Mme Blais: Au moment où il s'est présenté en commission, il y avait Pauline et moi. Les trois autres sont nouveaux.

Mme Lavoie-Roux: Les trois autres sont nouveaux.

Mme Blais: Oui.

Mme Lavoie-Roux: C'était prévu par élection ou ont-ils démissionné?

Mme Blais: Les autres ont démissionné. Mme Lavoie-Roux: Ils ont démissionné. Mme Blais: Cela a été dur à Radio-Québec. Mme Lavoie-Roux: Oui.

Mme Blais: Tant qu'on n'avait pas de projet de loi.

Mme Lavoie-Roux: Je suis heureuse aussi de voir que vous semblez travailler de très près avec la télévision communautaire. Ce sont des relations que vous semblez vouloir privilégier et conserver dans les milieux respectifs; est-ce que je me trompe?

Mme Blais: Non, c'est surtout avec les groupements de radio parce qu'on n'a pas encore de télévision communautaire.

Mme Lavoie-Roux: Nulle part? Mme Blais: Non.

Mme Lavoie-Roux: C'est de la radio communautaire.

Mme Blais: C'est de la radio communautaire qu'on a chez nous. C'est certain qu'on veut privilégier cette démarche et c'est certain qu'on a envie que Radio-Québec soit au service de tous les gens qui font une démarche constructive et auxquels Radio-Québec pourrait apporter quelque chose.

Mme Lavoie-Roux: Vous parlez de votre inquiétude de voir Radio-Québec vous donner des mandats même si vous êtes un peu marginaux par rapport à l'ensemble de votre action. Est-ce que vous avez quelque chose de précis en tête qui pourrait vous être demandé?

Mme Blais: Notre inquiétude est surtout au niveau, comme on le disait, de la production, que les régions deviennent les fournisseurs de la production nationale et qu'à ce moment-là on soit obligé de négliger notre production régionale. Il ne faudrait pas non plus que le comité régional perde comme priorité le fait qu'il faut développer Radio-Québec en région. C'est bien important. Chez nous, les seuls qui écoutent Radio-Québec sont ceux qui ont le câble; c'est une minorité, mais cela s'en vient. À l'automne, l'Abitibi va être couverte par les antennes de Radio-Québec, mais il y a un gros travail à faire pour dire que cela existe Radio-Québec, que c'est là, à quoi cela sert et ce que cela fait, par qui Radio-Québec est fait et comment on peut prendre part à Radio-Québec. Il faut que cela devienne vraiment pour les gens quelque chose qui leur appartient et que par consultation on puisse connaître leurs priorités.

Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie de votre mémoire. Encore une fois, je vous félicite.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de L'Acadie — excusez — de Gaspé. Je me suis trompé de bout; c'était le début de l'Acadie.

M. Le Moignan: Vous vouliez lui redonner la parole.

Le Président (M. Jolivet): Non, je pensais que le berceau était l'Acadie.

M. Le Moignan: L'Acadie nous touche de près chez nous aussi. Je voudrais également féliciter le porte-parole de la région de l'Abitibi-Témiscamin-gue. Si votre mémoire est différent — je l'avais également noté — je crois que c'est très heureux et que les autres groupes qui vous suivront vont voir le projet de loi sous un angle tout à fait différent. Je crois que ceci donne aux membres de la commission un meilleur éclairage. J'avais une question au sujet de la programmation éducative. Comme elle vient d'être posée, je vais la laisser de côté. Mme le député a très bien réussi à connaître votre point de vue, étant donné que les groupes précédents avaient également manifesté leur opinion en ce sens.

Je voudrais me limiter à deux ou trois points. Il y a d'abord l'article 2a du projet de loi no 4; je ne veux pas relire tout l'article ici, mais on dit que la programmation éducative doit être conçue de façon à être présentée, etc....."et dans des conditions telles que cette acquisition ou cet enrichissement des connaissances, ou cet élargissement du champ de la perception puisse être surveillé ou évalué." D'abord, là-dedans, il y a un jugement qui semble assez vague; il semble y avoir un manque de précision. Si on revient aux conditions, d'après vous, quelles sont ces conditions? Qui va déterminer ces conditions? Quelles sont les conditions prioritaires de tout cela? Est-ce que vous vous êtes arrêtés sur cette formulation?

Mme Blais: Non, vu le peu de temps dont on a disposé pour faire l'étude du projet de loi. Les recommandations que nous avons faites sur ces articles sont toujours en fonction des subventions; on était d'accord avec la définition de la télévision éducative, mais on s'est dit: Oui, c'est vrai, la définition est bonne, il faut trouver un moyen pour limiter et fermer la porte aux abus.

Lorsqu'on a vu que le niveau du champ de la perception peut être surveillé ou évalué, on a dit; peut et doit être évalué. On mettait une autre condition aux câblodistributeurs, aux télédiffuseurs avant de devenir une télévision éducative. C'est qu'en plus d'avoir le nom, il y avait aussi quand même des critères à remplir, entre autres qu'au niveau de sa programmation et au niveau de toute cette paperasse, il devait, il ne devait pas seulement pouvoir, mais il devait être surveillé ou évalué.

Maintenant, comme M. le ministre l'a expliqué tantôt, cela peut représenter des problèmes au niveau du ministère de l'Éducation. On n'a vraiment pas eu le temps et on n'est vraiment pas spécialistes dans toutes les questions de projets de loi non plus pour savoir toute la portée d'un tel projet de loi. On s'est rencontrés trois fois. On voulait exprimer nos inquiétudes. C'est ce qu'on fait.

On pense qu'il va être possible de trouver une réglementation qui va répondre à nos inquiétudes, qui va nous dire: Non, les gens qui font de la télévision privée ou les câblodistributeurs ne pourront pas avoir des subventions comme ils veulent et ils ne pourront pas être déclarés, la programmation ne pourra pas être déclarée éducative comme ils vont vouloir. Cela va être plus sévère que cela. C'est dans ce sens qu'on a fait notre intervention et on s'est servi de tous les articles parce qu'on voulait vraiment que personne ne passe à côté.

M. Le Moignan: Je voulais justement vous parler de critères de surveillance ou d'évaluation. On voit un peu plus loin à l'article 13 que le ministre des Communications est chargé de l'application de cette loi. Je pense bien que ceci est tout à fait normal, mais à ce moment, est-ce que les critères vont être déterminés par le ministre uniquement, n'y a-t-il pas un danger là-dedans qu'il y ait trop de pouvoirs, trop de centralisation? Le ministre pourrait peut-être répondre à cela. Je pose la question à madame, je ne sais pas si elle a des impressions.

M. O'Neill: Non, en fait, c'est la régie qui elle, va appliquer la loi concrètement. Vous parlez surtout, d'ailleurs dans le cas des deux lois, mais surtout la Loi de la programmation éducative. Le principe général que ce soit le ministre qui veille à l'application de la loi, cela, je pense que cela va de soi, mais c'est la régie qui va faire les évaluations, qui va, par exemple, dans le domaine de la programmation éducative, porter jugement sur la programmation qui lui est soumise. Je pense que cela est important, parce que je crois qu'il y a lieu de ne pas confier cela à une instance politique, mais à une régie.

M. Le Moignan: J'aurais une autre question au sujet du projet de loi no 5, à l'article 20, je pense, quand vous parlez de la constitution des organismes régionaux. Dans le projet de loi, on nous dit ceci: "Quatre personnes sur la recommandation des organismes socio-économiques et culturels de la région" et vous revenez, évidemment, vous conservez la même idée, mais vous le subdivisez. Vous dites: Deux personnes sur la recommandation des organismes socio-économiques et, deuxièmement, recommandation des organismes socio-culturels. Je me demande si dans le premier paragraphe de la loi actuelle, si ce n'est pas sous-entendu, recommandation des organismes socio-économiques et socio-culturels tel que vous le définissez dans votre proposition. Est-ce que cela serait un oubli ou est-ce qu'on parle de socio-économique et ensuite de culturel, puisque le groupe ici a jugé bon de préciser? On a ça à la page 4...

M. O'Neill: Je crois qu'on aurait avantage à revoir le paragraphe pour être plus sûr de la

distinction entre socio-économique et culturel ou encore socio-culturel.

M. Le Moignan: La recommandation. Oui, je pense que c'est très juste d'apporter une telle précision.

M. O'Neill: Ensuite, elle ajoute une autre représentation qui s'appelle les groupements populaires.

M. Le Moignan: Je crois que c'est juste de préciser ce premier point. Si on se fie au texte de la loi comme tel, on peut avoir quatre représentants d'organismes socio-économiques seulement, ou bien quatre culturels. Je pense que vous avez voulu prévenir cette chose. (21 h 15)

M. O'Neill: Oui, mais je vous signale, M. le député de Gaspé, qu'au moment où les recommandations nous sont faites, c'est à nous, à ce moment, je dirais, d'être attentifs pour voir si vraiment les deux secteurs sont bien représentés, sauf que ce serait peut-être plus avantageux de clarifier cela dans le texte.

M. Le Moignan: Je sais que vous allez être attentif, M. le ministre. Je n'ai aucun doute.

M. O'Neill: Si on nous arrive avec quatre... Je ne sais pas moi, le président, le vice-président, le secrétaire et le trésorier de la chambre de commerce, on va trouver que ça fait non seulement socio-économique, mais un peu trop centré au même endroit. Mais vous avez quand même ces genres de catégories dans la composition des conseils d'administration des cégeps, par exemple, et, habituellement, ce que je peux en savoir, on essaie d'assurer cette variation, par exemple, socio-économique, il faut penser aux syndicats. Ce serait assez malséant qu'à un moment donné, le milieu syndical ne soit pas représenté. Peut-être qu'il y aura lieu, dans la formulation, d'être encore un peu plus précis pour être plus certain que les objectifs de la loi sont atteints.

M. Le Moignan: Oui, je crois que ce serait très sage et je pense qu'il faut retenir votre suggestion. Je vous remercie. Je n'ai pas autre chose, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Donc, s'il n'y a pas d'autres questions... M. le ministre?

M. O'Neill: Une dernière remarque. D'abord, je crois aussi que c'est un mémoire extrêmement bien structuré et bien intéressant.

Je voulais simplement vous signaler, au sujet de votre remarque concernant ce que vous avez appelé une convocation hâtive, qu'il ne faudrait pas oublier que ça fait trois ans ou moins, pour ne pas dire quatre ans, que les gens sont consultés surtout au sujet de Radio-Québec et il y a des milieux où les gens commencent à être fatigués d'être consultés. Il ne s'agit pas d'une unique étape de consultation, mais une toute dernière, et il y avait en même temps la hâte que le projet de loi soit adopté, et il y avait le fait, c'est sûr, qu'entre le recours à ce mécanisme d'invitation de commission, avec gens invités, et l'autre qui tiendrait compte d'un long délai avant que les mémoires soient reçus, il y avait quand même une différence. On est arrivé à cette formule de compromis, et si on tient compte de tout ce qui a été fait avant, je pense qu'on doit vraiment dire que la population a été consultée au sujet de Radio-Québec.

Quant à moi, je regarde toutes les tournées qui ont été faites. Quand j'ai fait les tournées régionales en 1976 et en 1977, je n'étais pas le premier à faire des tournées. Les gens me parlaient des tournées, à ce moment-là, que M. Barbin avait déjà faites, que M. L'Allier avait faites, que M. Labonté avait faites. C'était tournée sur tournée. Là, nous sommes rendus, je pense bien, à une étape où les gens aimeraient bien que nous cessions de tourner et que, finalement, nous arrivions à un projet de loi.

Je suis prêt à réévaluer votre remarque concernant les conflits d'intérêts. Je vous signale quand même ceci. Il y a toute une différence entre quelqu'un qui est à temps plein au service d'une entreprise et quelqu'un qui est là à un conseil d'administration ou à un comité de programmation. C'est quand même très différent comme situation.

Il faudrait aussi retenir le fait que s'il y avait moyen de concilier cela avec, dans certains cas, ce que je n'appellerais peut-être pas une rareté, mais, enfin, une étendue un peu modeste des ressources dans un milieu, il ne faudrait pas non plus se priver parfois de ressources précieuses, et ce n'est pas parce que quelqu'un appartient à l'entreprise privée qu'il est nécessairement malsonnant, si vous voulez. Il peut aussi nous aider.

Moi, je retiens votre remarque sur la composition des comités régionaux, à savoir qu'au fond, si on modifiait le nombre, ou si on l'étendait légèrement, on pourrait, à ce moment-là, à la fois, garder une représentation des milieux d'enseignement et, d'autre part, faire place à ces groupements populaires dont vous nous avez parlé.

J'ai relu, à la suite de votre exposé, le texte du paragraphe b) de l'article 3 et je dois simplement vous dire que je le relirai encore, mais je ne suis pas encore convaincu qu'il puisse y avoir une contradiction entre cet accueil, cette ouverture aux cultures des groupes minoritaires et le fait de privilégier la culture québécoise. Pour moi, l'un est une composante de l'autre, puisque, dans notre esprit, une culture québécoise, c'est une culture qui s'ouvre à toutes les composantes d'une culture de groupes culturels sur un territoire. Je relirai encore ce texte. Je comprends votre inquiétude, votre préoccupation. J'ai, jusqu'à ce jour, le sentiment, quand même, que le paragraphe b), tel que rédigé, me semble-t-il, répond quand même à votre préoccupation. Mais nous le regarderons encore attentivement, vous savez.

Encore une fois, un grand merci.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Le Syndicat général des employés de Radio-Québec, avec M. Richard L'Ecuyer comme porte-parole.

Si vous voulez faire la présentation des gens qui vous accompagnent.

Syndicat général des employés de Radio-Québec

M. L'Ecuyer (Richard): Je vais vous présenter ceux qui m'accompagnent. À ma droite, Marc Aras, responsable du comité de griefs et membre du comité d'orientation; Philippe Gariépy, notre représentant au comité des programmes et membre du comité d'orientation; Manon Forget, responsable de l'information au syndicat, membre de l'exécutif et membre du comité d'orientation; Pierre Daigneault, membre du comité d'orientation.

Le Président (M. Jolivet): Merci.

M. L'Ecuyer: M. le Président. Depuis plusieurs années maintenant, le Syndicat général des employés de Radio-Québec s'intéresse vivement au problème de la télévision éducative et de ses orientations et ce, malgré les conflits de travail qui l'ont opposé à son employeur.

Durant la grève de quatre mois et demi, en 1973, le SGERQ, conjointement avec un autre syndicat de Radio-Québec, avait étudié le problème de l'orientation de la télévision éducative et du développement de Radio-Québec. Cette étude avait mené à la publication du document intitulé "Opération 300" qui se voulait la réponse des employés de l'office au plan triennal de développement de Radio-Québec, élaboré alors par la direction de l'office, sans aucune consultation auprès de ses employés syndiqués.

Plus près de nous, au cours du lock-out de huit mois dont les membres du SGERQ ont été victimes — lock-out qui, croyons-nous, fut tout de même porteur de changements positifs majeurs pour Radio-Québec — nous avons continué à démontrer notre intérêt en nous présentant à la commission parlementaire sur Radio-Québec et en y posant un diagnostic, croyons-nous, assez juste des problèmes de l'office.

Enfin, en réponse au comité Rocher, le SGERQ a présenté un mémoire détaillé sur ses réactions face aux orientations qui y étaient suggérées pour la télévision éducative de Radio-Québec.

C'est donc dans un esprit d'intérêt soutenu pour la question que le SGERQ se présente aujourd'hui devant cette commission pour livrer ses réactions aux projets de loi nos 4 et 5.

Les positions du SGERQ face à l'orientation de la télévision éducative et au développement de Radio-Québec ont toujours été claires. Elles peuvent être résumées dans les termes suivants: —Une vocation éducative et culturelle; — Démocratisation et décentralisation des structures de Radio-Québec; —Participation des employés syndiqués et de la population du Québec à l'élaboration de la programmation éducative de Radio-Québec; —Régionalisation de Radio-Québec et prise en charge par les régionaux de la programmation régionale; —Accessibilité de Radio-Québec à l'ampleur du territoire habité.

C'est à la lumière de ces principes et de leurs corollaires déjà longuement explicités par nous que nous avons lu les projets de loi à l'étude et que nous vous livrons aujourd'hui nos réactions.

Globalement, le SGERQ est très heureux de constater la relation directe entre les thèmes majeurs de ses revendications face à l'orientation de Radio-Québec et les thèmes majeurs des projets de loi nos 4 et 5. Il nous semble, à première vue, se dégager une volonté d'apporter des solutions importantes aux principaux problèmes qu'a vécus la télévision éducative du Québec durant ses dix dernières années d'existence.

Évidemment, et c'est une caractéristique probablement inévitable de tout projet de loi, certains points demeurent ou certaines parties demeurent vagues et confuses et, même, vont en contradiction avec les objectifs déclarés de la loi. Nous nous permettons donc d'apporter des remarques qui, nous l'espérons, permettront de clarifier et d'améliorer les projets de loi présentement à l'étude.

Le projet de loi no 4. Loi sur la programmation éducative.

Section I, article 2: Nous trouvons intéressante la définition d'une programmation éducative, particulièrement au niveau de la place qu'on fait à l'évaluation de l'impact de cette programmation.

Notons toutefois l'imprécision de l'expression "permettre aux auditoires auxquels elle est destinée." Cette imprécision, croyons-nous, laisse porte ouverte à une conception de la télévision uniquement orientée vers la culture de masse qui est en contradiction avec une réelle démarche éducative. Nous l'avons déjà dit, une télévision éducative doit procéder à une segmentation de l'auditoire en faisant l'identification des besoins de segments précis de la population et en concevant et produisant des émissions de télévision qui s'adressent prioritairement à ces segments de la population.

Nous insistons énormément sur ce point, car la direction de Radio-Québec est toujours demeurée et demeure réfractaire à cette orientation pour favoriser une orientation de télévision culturelle de masse qui ne colle en rien à une démarche éducative. À ce niveau, nous référons la présente commission aux plans de programmation des années passées et, principalement, à celui des deux prochaines années récemment publié par la direction des programmes à Radio-Québec, dans lequel on constate un renforcement aux niveaux culture et affaires publiques.

Nous ne sommes pas opposés à la télévision culturelle de masse, loin de là. Nous croyons simplement qu'un juste partage des deux orientations fait partie intégrale de la vocation de Radio-

Québec; d'ailleurs, cette vision de la télévision existe dans plusieurs réseaux éducatifs à travers le monde.

Enfin, la définition présentée au paragraphe 2 ne fait pas mention de l'expérimentation, concept selon nous directement relié à la télévision éducative.

Section II, article 3: En concordance avec ce qui précède, nous suggérons que l'expression "répondant à des besoins spécifiques de la population" fasse place à l'expression "répondant à des besoins spécifiques de la population et/ou des segments spécifiques de la population".

Section III: Le SGERQ est extrêmement réticent aux pouvoirs de la Régie des services publics face à Radio-Québec. Nous vous livrons en vrac ces réticences: le fait pour Radio-Québec d'avoir à se présenter annuellement devant la régie crée selon nous une municipalité des contrôles qui risque d'encarcanner les opérations de Radio-Québec; il serait déplorable que le développement harmonieux de Radio-Québec soit remis en cause par des querelles politiques de juridictions — on fait référence ici au CRTC; il n'est pas clair si Radio-Québec doit faire approuver annuellement sa programmation à venir. Si tel est le cas, la liberté de presse et l'autonomie de Radio-Québec nous semblent gravement menacées. Depuis toujours, l'autonomie de l'office face au contenu de ses émissions nous est apparue comme essentielle à la qualité et à la survie de notre télévision éducative. Nous croyons que les contrôles prévus par ailleurs dans le projet de loi no 5 sont amplement suffisants pour garantir la qualité de la mission éducative de Radio-Québec.

Le projet de loi no 5, Loi modifiant la Loi de l'Office de radio-télédiffusion du Québec. Section IA, paragraphe 6. Nous notons avec joie l'effort de démocratisation du conseil d'administration de la société. Toutefois, les remarques suivantes nous semblent appropriées. Au sous-paragraphe d), mis à part les deux représentants du milieu de l'éducation, l'imprécision quant aux autres membres est totale. Pourquoi pas des représentants des divers milieux populaires nommés sur la recommandation de groupements représentatifs de ces milieux.

Au sous-paragraphe e), le terme "employé" de la société est vague; pourrait-il être un employé-cadre? De toute façon, le nombre suggéré nous paraît insuffisant. À Radio-Québec, il existe quatre groupes précis d'employés: les cadres, les réalisateurs, les employés syndiqués SERT et les employés syndiqués du SGERQ. Nous laisserons les employés non syndiqués parler pour eux, mais nous croyons que la loi devrait prévoir deux employés syndiqués au sein de conseil d'administration de Radio-Québec. Pourquoi le président ne serait-il pas désigné par les membres du conseil d'administration ou sur la recommandation des membres du conseil d'administration?

Paragraphe 8-4. Le conseil d'administration est, croyons-nous, l'instance privilégiée pour prévoir un remplaçant au président-directeur général en cas de vacance ou en cas d'incapacité d'agir. Nous suggérons donc que la nomination s'ef- fectue sur la recommandation du conseil d'administration.

Section 1B. Nous constatons avec plaisir l'autonomie relative des comités régionaux et nous nous en réjouissons. Nous laissons aux représentants des régions le soin d'apporter les remarques particulières qu'ils jugeront pertinentes.

Paragraphe 21-1. Nous tenons à répéter ici nos craintes face à la régie, particulièrement celles concernant la possibilité de devoir soumettre annuellement sa programmation future à un organisme de contrôle tel que la régie. Ce processus ouvre la porte à des ingérences graves qui vont, selon nous, à l'encontre des principes de liberté d'expression. De plus, la régie risque de neutraliser l'esprit démocratique qui émane du conseil d'administration.

En guise de conclusion, nous voudrions souligner que le problème de l'orientation de Radio-Québec déborde largement le cadre d'une simple loi. Le législateur élaborera une loi, la plus parfaite soit-elle, ses efforts seront vains si les instances chargées de la mettre en application n'adhèrent pas aux principes et aux orientations fondamentaux liés à cette loi, particulièrement les dirigeants de la société.

Nous sentons un vent nouveau souffler dans les murs de Radio-Québec: un nouveau président-directeur général est nommé. Déjà, plusieurs problèmes sont disparus, plusieurs autres se sont amenuisés. Il en reste toutefois plusieurs qui nous portent à nous interroger sur les orientations profondes de certains dirigeants de la société: notons principalement la faiblesse chronique de Radio-Québec face aux orientations sociales et à sa capacité historique d'établir des relations de travail avec des organismes ou groupements sociaux extérieurs; la pratique de la production qui connaît toujours beaucoup de problèmes autant avec les administrateurs qu'avec certains animateurs vedettes que la direction semble vouloir de plus en plus faire entrer dans nos murs; la faiblesse des plans de programmation qui privilégient toujours plus l'orientation culturelle de masse au détriment d'une véritable démarche éducative; l'absence des employés syndiqués et de la population au sein des comités stratégiques et décisionnels de programmation et de la majorité des autres comités où l'orientation de Radio-Québec est en cause. (21 h 30)

Néanmoins, nous nous plaisons à retenir surtout la direction nouvelle que semblent prendre le développement et l'orientation de Radio-Québec. Espérons que les problèmes qui subsistent ne sont que l'héritage d'un passé obscur et non pas une vision du futur.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. O'Neill: Je tiens d'abord à vous remercier de votre mémoire qui est à la fois très substantiel, extrêmement intéressant et bien articulé. Je voudrais d'abord poser une première question sur ce qui est écrit à la page 4 du mémoire concernant la

Loi sur la programmation éducative. J'aimerais que vous nous donniez des explications supplémentaires sur cette notion de segmentation qui serait plus étroitement reliée à une télévision éducative. De même, j'aimerais avoir des explications sur ce qui est écrit en haut de la page 5 sur la notion d'expérimentation, quand vous dites que la définition ne fait pas mention de l'expérimentation, "concept, selon nous, directement relié à la télévision éducative". Pourrais-je avoir un peu plus d'explications sur ces deux points?

M. L'Ecuyer: Oui. Au sujet de la programmation, je vais céder la parole à Philippe Gariépy, qui est notre représentant au comité des programmes. Pour l'orientation, je pense que ce sera Pierre Daigneault qui s'occupera de vous répondre.

M. Gariépy (Philippe): Évidemment, ce qui est au coeur, c'est la notion de programme éducatif. On en a déjà parlé tout l'après-midi. On en parlera encore ce soir. Tout ce qu'on peut dire ici, c'est que dans notre mémoire on est assez clair. D'un côté, on dit bien à la page 4 que nous ne sommes pas opposés à la télévision culturelle de masse et que nous croyons à un juste partage des deux orientations qui font partie intégrante de la vocation de Radio-Québec. Au fond, nous insistons en faisant intervenir un concept qui s'appelle la segmentation — cela a l'air d'être un peu du charabia — mais on insiste beaucoup sur la notion de public spécialisé. On croit qu'à l'heure actuelle Radio-Québec ne met pas l'accent sur ce qu'on appelle, nous, la segmentation ou sur ce qu'on pourrait appeler le volet éducation permanente ou le volet proprement éducatif de Radio-Québec.

Cette question de la programmation éducative est une question assez difficile. Je ne pense pas qu'on pourra régler cette question ce soir. C'est une question extrêmement complexe. Tout ce qu'on dit, nous, c'est que, quand on prend la définition de l'UNESCO, c'est une définition assez générale avec laquelle, je pense, tout le monde est assez d'accord. Ce qui nous intéresse dans le projet de loi, ce sont les trois objectifs qu'on fixe à la télévision éducative, en d'autres mots, les trois parties du projet de loi qui parlent du domaine culturel, de l'information, qui peuvent même se traduire dans les affaires publiques, et qui parlent aussi du domaine éducatif au sens de l'éducation permanente. On est d'accord avec cela parce que c'est "opérationnalisable".

Dans le fond, on trouve que le projet de loi est assez précis sur le plan des trois grands objectifs qui peuvent se traduire dans des cadres très précis à Radio-Québec. On trouve cela intéressant, mais on insiste sur le volet public précis, public cible en relation avec l'éducation permanente parce qu'on croit qu'on ne renforce pas ce côté-là. Ce côté-là est problématique. Quand on parle de segments précis ou de publics cibles précis, c'est assez difficile de définir quels sont les publics qui auraient besoin de la télévision et qui auraient besoin d'entrer dans un concept d'éducation permanente. Quand on parle de segments précis de publics, on pourrait en déterminer deux ou trois. Par exemple, on ne parle jamais du public des jeunes travailleurs. On ne parle jamais des jeunes travailleurs du Québec, de leurs besoins et de ce que pourrait faire la télévision éducative de ce côté-là. Quand on lit, par exemple, ce qui se passe en éducation permanente, quand on lit ce qui se passe du côté du Conseil supérieur de l'éducation qui a identifié au moins deux ou trois publics cibles — on pense, par exemple, aux femmes, aux jeunes travailleurs.

À Radio-Québec, on n'en parle jamais. Nous, quand on parle de segmentation, c'est à cela qu'on fait référence: à un public-cible comme les femmes ou à un public-cible comme les jeunes travailleurs, de même qu'à un public-cible qui pourrait être suggéré par une étude qui a été faite récemment au niveau de l'éducation des adultes et qui porte sur l'analphabétisme au Québec. On ne parle jamais de cela. Quand on insiste sur la segmentation, on insiste vraiment en référence à ce concept de public-cible.

Un autre point sur lequel on pourrait peut-être insister, c'est qu'on n'a peut-être pas fini de se chicaner sur le concept de télévision éducative. Au fond, d'un côté, on se réfère à la télévision et la télévision n'est peut-être pas essentiellement et prioritairement éducative au sens strict du mot. C'est d'abord un organe d'information. C'est une question difficile qui se profile en plus sur une toile de fond au Québec, où tout ce qui s'appelle éducation permanente, télévision éducative avec Multi-Media, est là, a été réalisé. Au fond, c'est une toile de fond qui reste quand même un peu problématique. Ce qui fait que, quand on parle de ce concept de télévision éducative, c'est compliqué et je ne pense pas que ce soit à la commission... Autrement dit, c'est une question qui est à fouiller encore. Mais je pense que, si je résume notre pensée là-dessus, c'est que, d'un côté, on dit: Le projet de loi est opérationnalisable; il est très précis. Par contre, on met l'accent sur la segmentation ou sur les publics-cibles en sachant que — je pense aussi que la direction de Radio-Québec est assez consciente — tout ce qui s'appelle éducation permanente et télévision ou éducation populaire et télévision, actuellement, n'est pas assez développé.

Quant à l'expérimentation, je vais laisser mon collègue Daigneault répondre à cela.

M. Daigneault (Pierre): En ce qui concerne le concept d'expérimentation, en fait, il aurait peut-être été plus juste de parler d'innovation et d'expérimentation. Depuis plusieurs années déjà, notre syndicat prétend qu'une télévision ou un medium, qui a une vocation éducative, demeure un terrain particulièrement privilégié à la recherche de nouvelles formes ou de nouvelles formules en télévision et de vérification d'impact de ces nouvelles formules ou de nouvelles utilisations du medium face à une démarche éducative auprès de groupes précis à l'intérieur de la population. Dans ce sens-là, il nous semble que la télévision éducative devrait avoir, de par sa définition même, le

concept d'innovation et d'expérimentation à l'intérieur même de la définition pour permettre justement l'avancement de la démarche éducative dans son ensemble. Il nous semble que c'est actuellement absent de la définition formelle, telle que proposée dans la loi, et même de la démarche pratique, telle qu'elle est pratiquée à Radio-Québec. On a toujours revendiqué que cette expérimentation et que l'innovation, la recherche de nouvelles formules ou de nouvelles démarches avec évaluation... C'est dans ce sens-là qu'on disait, non pas dans les termes de la partie scolaire de la programmation de Radio-Québec, mais bien dans le sens de la télévision qui s'adresse à la population où on était content et où on disait que la démarche devait être évaluée. On était content de cette présence de la démarche de l'évaluation où on croit que l'innovation, l'expérimentation et l'évaluation de ces expériences demeuraient des concepts qui, selon nous, sont extrêmement liés à la télévision éducative. On constate qu'ils sont absents et c'est dans ce sens-là qu'on aimerait qu'ils soient inclus à l'intérieur de la loi.

M. O'Neill: Écoutez! Je retiens ces deux remarques. Je formule simplement la question suivante à savoir que, si cela doit être dans la loi ou doit être compris comme faisant partie du mandat de ceux qui, à Radio-Québec, ont à appliquer la loi, en somme, si vous voulez, quelque chose qui est à l'intérieur même de leurs tâches... Je sais que la limite ou la frontière entre ce qui est dans un texte de loi et ce que les gens doivent faire après cela, dans la pratique, n'est peut-être pas toujours facile à délimiter. Mais remarquez que j'aimerais bien savoir ce qu'on pense dans le moment à Radio-Québec sur ces deux propositions. Mais il me semble qu'un mandat donné par une loi ne doit pas non plus trop aller dans les détails, surtout que vous avez quand même une évolution là-dessus. Vous parlez, par exemple, de groupes; vous dites, en principe, qu'il faut se préoccuper de certains groupes particuliers qui ne sont pas représentés. Vous mentionniez tout à l'heure le groupe des travailleurs. Je me dis qu'à Radio-Québec, logiquement, les gens doivent penser à cela. Généralement, quand on les choisit, on les choisit parce qu'ils sont censés être capables de penser à beaucoup de choses.

J'ajoute cela comme première réaction, l'interrogation qui m'est présente à l'esprit à savoir si on doit dépasser dans une loi les énoncés généraux que l'on trouve ici dans le projet de loi no 4, article 3a, b) et c) ou si on doit aller plus dans le détail que cela, surtout que ce que vous avez dans l'article 3 du projet de loi no 4 ne vise pas seulement Radio-Québec, il ne faudrait pas l'oublier; cela peut rejoindre d'autres diffuseurs aussi. Je trouve votre préoccupation fondée, très légitime, mais la question que je vous pose c'est si cela doit vraiment faire partie de la composante même, de la structure même d'une loi comme telle ou si cela ne fait pas partie de ce qu'on peut appeler le mandat que, normalement, la lumière de la loi doit mettre en application, ceux à qui on confie la responsabilité de réaliser la télévision éducative au sein d'une entreprise, d'une institution comme celle de Radio-Québec.

J'ai une autre question sur ce que vous dites aussi à la page 5, concernant votre inquiétude au sujet de la Régie des services publics face à Radio-Québec. En vous entendant, je me suis posé des questions à savoir si vous aviez les mêmes inquiétudes vis-à-vis du CRTC qui, quand même, pose des questions au moment où les diffuseurs, télédiffuseurs ou radio-diffuseurs comparaissent devant le CRTC. On admet qu'il existe au plan fédéral un organisme qui, tout à coup, s'interroge sur le fonctionnement, le contenu des organismes de radio-télévision; est-ce que cela pose des problèmes différents à partir du moment où cet organisme de réglementation, quasi judiciaire d'ailleurs ici, est québécois? Est-ce que c'est la présence même d'un organisme comme celui-là qui pose des problèmes, parce que j'imagine que vous avez les mêmes interrogations à l'égard du CRTC, ou bien, est-ce que vous avez des interrogations différentes parce qu'il s'agit ici de la Régie des services publics?

M. L'Ecuyer: Je ne pense pas que ce soit nécessairement parce que c'est un organisme québécois. J'aimerais laisser Marc Aras répondre à votre question parce que c'est lui qui fait mention principalement des réticences, en ce qui a trait à la régie. Je pense qu'il a aussi des réticences en ce qui a trait au CRTC. Je ne crois pas que ce soit parce que c'est un organisme uniquement québécois, loin de là.

M. Aras: Pour répondre, M. le Président, le problème du CRTC et de la régie, nous l'avons soulevé depuis au-delà d'un an lorsque le Comité permanent de développement culturel a sorti son rapport, dit rapport Rocher. Nous avions remarqué à l'époque qu'effectivement, il pouvait y avoir certains problèmes quant à la régie et au CRTC. Pourquoi le mentionnons-nous? Parce que nous savons qu'actuellement, Radio-Québec doit demander un permis d'antenne au CRTC et, souvent, lorsque Radio-Québec est présent devant le CRTC, il a des recommandations. Si je prends la dernière recommandation du CRTC, il y a eu deux faits qui ont été soulevés.

Premièrement, le CRTC ne voyait pas la nécessité d'avoir une commandite de prestige et, deuxièmement, le CRTC se demandait pourquoi Radio-Québec n'avait pas de programmation éducative en anglais. Pour cette raison, effectivement, il me semble que si, par exemple, la régie demandait à Radio-Québec de ne pas faire de télévision éducative en anglais et que, d'autre part, le CRTC nous le demandait, nous nous trouverions vraiment pris dans un dilemme. Ce dilemme pourrait causer de très graves problèmes au niveau de Radio-Québec, à notre avis. Je sais que dans un projet de loi, on ne se retrouve pas tout à fait au niveau du problème. Je pense que le problème est un problème de fond qui dépasse la loi elle-même, mais il reste qu'à notre avis, il serait important que

ce problème se clarifie le plus vite possible de telle sorte que Radio-Québec ne se retrouve pas devant ce dilemme. C'est pour cela que nous avons insisté, plus d'une fois justement, sur ce problème de la régie face au CRTC. Je pense que j'ai terminé.

M. Guay: Si vous me permettez, M. le Président, j'aimerais simplement savoir en vertu de quoi ou de quels pouvoirs le CRTC pourrait demander ou imposer à Radio-Québec de faire de la programmation de quelque manière que ce soit, puisqu'il s'agit d'une programmation éducative qui relève de la compétence des provinces? (21 h 45)

M. Aras: Oui, effectivement, sauf que le CRTC a fait cette recommandation la dernière fois. C'est ce que nous avons retrouvé, et justement parce que nous sommes dans une zone grise, nous aimerions que ce soit clarifié effectivement, qu'une fois pour toutes, on sache quelles sont les limites de l'un et quelles sont les limites de l'autre, ou qu'il y en ait un qui disparaisse derrière le tableau et que l'autre demeure. Mais, à se retrouver comme on l'est actuellement, il n'en reste pas moins que le CRTC pourrait à un certain moment empêcher que Radio-Québec diffuse l'année suivante.

Face à ce problème, nous nous demandons comment Radio-Québec pourrait s'en sortir. C'est pour cela que ce sont vraiment des questions qu'on se pose. Nous n'avons pas de réponse, mais je pense que le législateur devrait se les poser assez rapidement avant que des problèmes de ce genre puissent apparaître.

M. Guay: Si tous les projets de loi qui sont justement devant l'Assemblée nationale ne viennent pas clarifier toute ambiguïté et si tant est qu'il y avait ambiguïté, il se peut que le CRTC se prononce sur des sujets qui ne sont pas de sa compétence. À ce moment, cela devient simplement l'opinion des membres du CRTC, mais cela n'a aucune espèce de force.

M. Aras: En fait, c'est le seul espoir que le législateur québécois peut avoir effectivement face à ces problèmes, mais il demeure qu'à notre avis, il restera quand même des cas types qui se présenteront peut-être à un moment donné. On aimerait savoir si, effectivement, cette loi aura préséance sur la loi du CRTC face aux télécommunications au Canada.

M. O'Neill: Évidemment, M. le Président, une façon de clarifier la zone grise, c'est de faire en sorte qu'il n'y ait pas deux organismes de réglementation qui s'occupent de la même chose. Évidemment, c'est le problème, comme vous le disiez tout à l'heure, qui dépasse ce projet de loi, un problème politique plus vaste. C'est un problème que nous réglerons un de ces jours. Il demeure qu'à ce moment-ci, dans ce cas-ci, lorsqu'il s'agit de télévision éducative, je pense que le doute n'est pas très grand. Il s'agit bien de quelque chose qui, tout comme l'éducation en général dans le régime actuel, relève de la Confédération, relève des États provinciaux. Je comprends, d'autre part, votre inquiétude. Vous dites que vous êtes pris un peu dans cette situation. Oui, nous sommes tous pris dans cette situation. Il faut vivre avec elle encore un certain temps.

J'aurais une autre question. Vous avez votre proposition qu'il y ait deux employés plutôt qu'un au conseil d'administration. Remarquez, nous avions pensé que de passer de zéro à un, c'était déjà un certain progrès. Vous parlez de un à deux. Actuellement, enfin, du côté de la direction de Radio-Québec, on accepte cette idée. C'est un domaine où on peut y aller progressivement, par étapes, mais, enfin, je note votre suggestion tout en vous soulignant qu'on peut se demander si on ne doit pas commencer par, si vous voulez, une étape qui est de passer de zéro à un, mais je la note ici.

Au sujet de la nomination du président-directeur général, du fait qu'il soit nommé par le gouvernement, je pense qu'ici, si je ne m'abuse, il s'agit d'une habitude générale dans les organismes du genre, et cela pas seulement au Québec, mais également au fédéral. Personnellement, je ne saisis pas trop les raisons pour lesquelles il y aurait lieu dans le moment de modifier cela, à savoir que, devant l'importance de cette société d'État qui, d'autre part, fonctionne de façon extrêmement autonome, au moins pour ce qui est de cette nomination d'un président-directeur général, elle continue d'être faite de la même façon. Ici, on est dans des opinions...

M. Daigneault: M. le ministre, il s'agit du président du CA et non pas du président-directeur général.

M. O'Neill: Je croyais qu'il s'agissait du président-directeur général.

M. Daigneault: Non. C'est le président du conseil d'administration.

M. O'Neill: Enfin, on est prêt à regarder cette proposition, mais, dans le moment, j'avoue que c'est nommé... Remarquez que ce n'est jamais nommé sans un grand nombre de consultations. Par exemple, ce n'est pas du tout nommé de façon arbitraire comme cela, mais on regarde autour pour savoir si vraiment la nomination est celle qui serait attendue des gens immédiatement concernés.

M. Daigneault: Je m'excuse, un instant, si vous me permettez de revenir sur la première de vos remarques. Premièrement, je dis que dans le rapport on notait avec joie l'effort de démocratisation du conseil. Pour revenir à un employé, il n'était pas nécessairement question de deux plutôt qu'un dans notre revendication. On notait que le mot employé était vague. On ne savait pas quel groupe exactement était inclus dans le mot "employé". On aimerait, si possible, avoir des précisions quant à l'esprit de la loi à ce niveau.

Deuxièmement, on notait aussi qu'on désirait avoir, à cause de la nature même des divers groupes d'employés présents actuellement à Radio-Québec et des problèmes pratiques d'ailleurs que pourraient poser les modes de nomination d'un seul employé, on désirait avoir deux employés syndiqués au conseil d'administration et on spécifiait aussi qu'on laissait les autres groupes d'employés revendiquer pour eux-mêmes, ce qui pouvait laisser la porte ouverte à un ou deux autres représentants également.

M. O'Neill: Dans l'esprit de ceux qui ont fait la première rédaction du projet de loi, "employé" ne désigne pas "employé cadre". C'est le mot qui a été retenu par le comité de législation. Je pourrais faire les vérifications nécessaires pour bien m'assurer que le mot, tel qu'utilisé, désigne bien quelqu'un qui n'est pas employé cadre, pour vous rassurer là-dessus.

Vous savez, cette suggestion vient en fait de vous autres, d'une certaine façon. Cela vient de l'an dernier, des débats qui ont eu lieu l'an dernier concernant la composition du conseil d'administration de Radio-Québec. Mais nous ferons la vérification nécessaire auprès du comité de législation pour être certains que le mot tel qu'utilisé ici désigne bien un employé qui n'est pas un employé cadre.

Le Président (M. Jolivet): Avant de passer la parole à Mme le député de L'Acadie, j'aimerais d'abord avoir le consentement pour continuer au moins avec ce groupe jusqu'à la fin des questions qui seront posées. Si j'ai ce consentement de part et d'autre, on pourra continuer au moins jusqu'à 22 h 30, maximum à réviser à ce moment-là, s'il le faut.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je suis bien prête à faire une concession jusqu'à 22 h 15, mais j'ai d'autres obligations qui m'attendent et je trouverais difficile d'aller au-delà de 22 h 15. Je vais essayer d'être aussi brève que possible dans mes questions, mais...

Le Président (M. Jolivet): D'accord. Il restait trois groupes ce soir. Je suis malheureusement obligé de dire qu'on ne pourra pas les entendre ce soir: l'Association des réalisateurs de Radio-Québec; l'Union des artistes, ainsi que, parmi les organismes convoqués mais dont aucun mémoire n'a été reçu jusqu'à maintenant, le Regroupement des organismes communautaires des communications.

Demain soir sont retenus les groupes suivants: l'Association des groupes ethniques du monde de la radio et de la télévision du Québec; Father O'Brien et Dennis Murphy, du département des communications de l'Université Concordia, et Mme Michèle Jean, de l'éducation des adultes du cégep de Bois-de-Boulogne. Ce sont les trois organismes à comparaître demain de 20 heures à 22 heures. Nous devrons vérifier, en conséquence, avec le leader de la Chambre à quel moment on pourra entendre les autres groupes et on les avisera en conséquence. Mme le député.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, est-ce que vous avez dit que l'Institut canadien pour l'éducation des adultes venait ou ne venait pas? Il a été invité, n'est-ce pas?

Le Président (M. Jolivet): Oui. Il a été invité pour aujourd'hui, sauf qu'on n'a pas eu, jusqu'à maintenant, de représentants dans la salle.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'il a envoyé un mémoire?

Le Président (M. Jolivet): Non, pas pour le moment.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

M. le Président, je pense que j'ai la parole?

Le Président (M. Jolivet): Oui.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais d'abord remercier les représentants du Syndicat général des employés de Radio-Québec d'être venus une fois de plus à la commission parlementaire des communications discuter des projets de loi touchant Radio-Québec.

Je voudrais simplement reprendre pas tellement la remarque du ministre qu'une observation que M. Aras faisait. Il disait que vous aviez eu une recommandation du CRTC disant que vous devriez avoir une programmation bilingue ou, enfin, offrir des programmes en anglais.

Est-ce que ceci n'était pas dû au fait, justement, qu'il n'était pas très clair dans les statuts de Radio-Québec que c'était une télévision éducative? Le projet de loi actuel ne doit-il pas régler ce problème, s'il existe?

M. Aras: Nous espérons effectivement que le projet de loi clarifiera ce problème, mais nous avons quand même — je le répète — voulu le soulever pour que le législateur puisse effectivement clarifier ce problème le plus vite possible, de telle sorte qu'effectivement, on ne se retrouve pas avec plusieurs personnes à qui nous devons rendre des comptes.

C'est pour ces raisons, effectivement, qu'il nous semblait important, depuis un bout de temps et, comme nous n'avons pas eu de réponse jusqu'à présent à ce sujet, nous avons pensé le soulever encore cette fois-ci en commission parlementaire de telle sorte qu'on puisse peut-être avoir une réponse de la part des législateurs.

Mme Lavoie-Roux: Évidemment, on parle de télévision éducative dans un sens extrêmement large, mais je pense que si on peut établir que c'est de la télévision éducative, le ministre n'aura pas besoin de faire de souhait ultérieur pour une éventuelle solution constitutionnelle. Je pense qu'en soi, si vraiment Radio-Québec fonctionne

comme une télévision éducative, c'est du ressort provincial. Il n'a pas besoin de...

Mais comme le ministre faisait allusion, selon ses bonnes habitudes, à ce qui arrivera dans le futur et à ce qui, à mon point de vue, n'arrivera peut-être pas, je pense qu'il faut quand même espérer...

M. Guay: Remarquez, Mme le député, si vous le permettez, qu'on a déjà prétendu — l'ancien gouvernement et le nôtre — que nous avions juridiction sur le câble. Et six juges anglophones de la Cour suprême contre trois québécois nous ont dit que nous avions tort. Il faut se méfier un peu des institutions fédérales qui penchent toujours du même bord.

Mme La voie-Roux: On a déjà vu d'autres choses aussi.

À tout événement, je suis contente que vous signaliez, ou que vous fassiez un effort pour dire: Une télévision éducative, cela doit quand même avoir des populations cibles. Sans cela, toutes les télévisions éducatives, ou à peu près toutes... Les populations cibles que vous avez soulignées sont des populations qui ont été signalées, à plusieurs reprises, par le Conseil supérieur de l'éducation. Le ministre de l'Éducation et le ministre des Communications, à qui j'avais suggéré que Radio-Québec soit utilisé pour atteindre la population des analphabètes ou le groupe des analphabètes, se sont dits réceptifs à cette suggestion, parce que je pense que, pour des analphabètes, ce serait peut-être plus facile par la télévision que s'inscrire à des cours réguliers, enfin pour un certain nombre d'entre eux.

Je pense que les efforts faits dans ce sens-là pour rejoindre les populations particulières me convaincraient peut-être davantage, qu'on n'essaie pas de tout noyer, à peu près tout, dans ce qui est décrit comme programmation éducative, particulièrement dans le paragraphe c).

Mes questions plus précises. Vous soulevez, en page 2, la participation des employés syndiqués — c'est dans vos remarques générales — et de la population du Québec, à l'élaboration de la programmation éducative de Radio-Québec. C'est un problème que vous souleviez l'an dernier, lorsque vous êtes venus discuter de tous les problèmes touchant les conflits à Radio-Québec. À la suite du règlement de ce conflit, est-ce que, de ce côté-là, il y a amélioration ou quels sont les mécanismes de participation qu'on a mis à votre disposition? Ou si, somme toute, la situation est à peu près identique à celle que vous nous décriviez l'an dernier.

M. L'Ecuyer: Non. Là, il faut dire qu'il y a eu amélioration. Au retour du travail, quelques mois après le retour au travail, il y a eu une consultation auprès des employés, sur le plan de programmation 15-A qui, il faut l'avouer, n'a pas donné des succès retentissants parce que la majorité des employés, depuis dix ans ont vu des problèmes, n'ont pas eu l'habitude d'être consultés et se sont dit, quand ils ont vu apparaître cela: Cela ne donne rien.

Donc, ils n'ont pas répondu en grand nombre. Aussi, on a accepté lors du règlement qu'il y ait un représentant du syndicat au comité des programmes; on en a discuté avec M. Barbin et, là aussi, il y a des problèmes parce qu'on sent, on a l'impression que c'est un comité où on reçoit de l'information; on a eu l'impression que c'est un comité qui avait été créé, où on avait accepté qu'il y ait un représentant de notre syndicat uniquement pour qu'on se la ferme. Là, on a discuté de cela avec M. Barbin et on va en discuter encore; on nous a promis qu'on en discuterait, pour essayer de rendre ce comité un peu plus décisionnel, pour qu'il puisse être plus représentatif. On sent que les personnes qui sont autour de ce comité sont souvent les mêmes personnes qui décident avant. Elles prennent les décisions avant et on sent que l'information nous est transmise après pour, peut-être, qu'on soit content d'avoir un comité des programmes, mais c'est un problème qui a été soulevé lors de notre dernière rencontre avec M. Barbin; je pense qu'il a été très sensible à cette demande et il nous a promis qu'on en rediscuterait. (22 heures)

Mme Lavoie-Roux: En fait, ce que vous me dites, le mécanisme a été mis en place pour vous assurer une meilleure participation mais pour des raisons, soit du côté des syndiqués, soit du côté de la direction générale, cela ne fonctionne pas aussi bien que cela devrait fonctionner. D'un côté, les syndiqués ne sont peut-être pas habitués, de l'autre côté, vous n'êtes pas sûrs de la motivation profonde des gens. Je pense que c'est cela.

M. L'Ecuyer: C'est cela.

Mme La vole-Roux: D'accord. Une autre question que je voulais vous poser concerne la conclusion. "La faiblesse chronique de Radio-Québec face aux orientations sociales et à sa capacité historique d'établir des relations de travail avec les organismes ou groupements sociaux extérieurs". Pourriez-vous préciser un peu cela, me donner des exemples?

M. L'Ecuyer: Je vais demander à Philippe Gariépy de donner cette précision.

M. Gariépy: Là-dessus, évidemment, je ne suis pas à Radio-Québec depuis assez longtemps pour faire un historique des relations houleuses entre Radio-Québec et des organismes d'éducation, que ce soit la CECM que vous connaissez bien, ou que ce soient d'autres organismes. Tout ce que je sais — et là, peut-être que M. Daigneault pourrait aller plus loin avec moi et vous rapporter des faits — tout ce que je constate, moi, c'est qu'au fond, à Radio-Québec, on est resté assez traumatisé du genre de relations établies entre la maison et des organismes extérieurs qui sont des organismes d'éducation, que ce soit d'éducation populaire ou d'éducation formelle. C'est le constat que je fais;

on est resté traumatisé avec cela. Cela ne veut pas dire qu'on ne peut pas repartir. Je n'ai pas de faits à vous apporter d'une façon très précise, sinon que la dernière entente qu'on avait eue entre Radio-Québec et la CECM a été annulée, mais le constat que je fais, c'est qu'on a quand même été assez traumatisé, ces relations ont quand même créé un certain problème et, en fin de compte, tout est à refaire actuellement dans les relations entre l'organisme qui s'appelle Radio-Québec et le ministère de l'Éducation, la CECM, ou des organismes d'éducation populaire; l'impression que j'en garde, comme quelqu'un qui vient quand même d'arriver à Radio-Québec, c'est qu'il faut refaire, il faut repartir en sachant quand même que c'est une zone très difficile, les relations à établir, disons, entre un organisme de télévision et des milieux d'éducation.

Des expériences sans doute positives ont été faites dans le passé, mais je pense que ce sont surtout des expériences négatives qui ont primé, de sorte qu'à l'heure actuelle il faut reprendre le tout. Je pense que c'est un peu dans cette direction qu'on s'organise lentement, péniblement, quand on établira bientôt les relations entre Radio-Québec et le ministère de l'Éducation, sauf qu'on en reste peut-être trop actuellement dans des relations entre sous-ministres et directeurs haut gradés à Radio-Québec. On n'est pas rendu, je pense, beaucoup plus bas à l'heure actuelle. Peut-être que Pierre pourrait ajouter des choses en termes de faits passés.

M. Daigneault: Je n'ai pas envie non plus de faire un historique à ce niveau-là.

Mme Lavoie-Roux: On vous demande des faits précis dans la vie.

M. Daigneault: Peut-être que le cas le plus général à ce niveau, c'étaient les collaborations qu'il y avait entre le SGME et Radio-Québec où, par exemple, on faisait pour le compte du SGME des productions audio-visuelles qui se devaient d'être éducatives. Je me souviens que, par exemple, les pédagogues qui étaient attachés à ces productions étaient beaucoup plus perçus comme des empêcheurs de tourner en rond que des aides qui devaient amener Radio-Québec à déterminer une démarche éducative qui soit plus précise. Remarquez que cela allait peut-être aussi dans les deux sens. Les pédagogues avaient peut-être aussi des réticences face aux producteurs de Radio-Québec, mais je me souviens que les relations à ce niveau étaient relativement tendues. Je pense qu'il n'est pas nécessaire de donner une longue série d'exemples. Il s'agit tout simplement de relever le fait et de s'orienter vers le futur où il nous apparaît que l'ouverture ou la capacité de Radio-Québec de travailler avec des organismes ou des groupes extérieurs à l'éducation nous apparaîtra comme un indice extrêmement fiable, en tout cas, de la volonté de Radio-Québec de se lancer dans une démarche réellement éducative à partir du médium de la télévision.

Mme Lavoie-Roux: Là-dessus, je suis d'accord avec vous. Je pense que c'est une mesure, en tout cas. Vous faisiez allusion tout à l'heure à des organismes d'éducation populaire. Il y en a peut-être davantage maintenant, mais à ma connaissance, il y avait au moins quatre centres d'éducation populaire. Par exemple, il y en avait un à Pointe-Saint-Charles; il y en avait un dans Hochelaga-Maisonneuve. Les autres m'échappent. Ces gens-là ont-ils des contacts avec vous? Établissez-vous des relations avec eux ou s'il n'y a pas de demande de leur part?

M. Daigneault: Évidemment, c'est une question qui déborde le projet de loi.

Mme Lavoie-Roux: Oui, oui, mais on a questionné tout à l'heure Radio-Québec sur des questions qui débordaient le projet de loi et vous venez...

M. Daigneault: Pour répondre franchement, je pense que c'est le directeur des programmes qui pourrait le mieux répondre à cette question. Moi, évidemment, je suis représentant au comité des programmes. C'est clair qu'on n'a pas discuté de cette question à l'heure actuelle. À l'heure actuelle, il y a des orientations assez précises touchant le développement de certains secteurs de Radio-Québec très clairement identifiés, mais je pense que dans ce qu'on appelle le secteur de l'éducation permanente ou de l'éducation populaire, on est actuellement au stade de la recherche. On est au niveau des contacts préliminaires à l'heure actuelle. Ce serait ma réponse. Très préliminaires.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, dans un autre paragraphe de la page 8, vous indiquez qu'il y a certains problèmes, non pas qui surviennent — apparemment, vous les connaissez toujours, c'est votre expression — mais "la pratique de la production qui connaît toujours des problèmes autant avec les administrateurs qu'avec certains animateurs-vedettes que la direction semble vouloir de plus en plus faire entrer dans nos murs." Il y avait eu l'an dernier un problème que j'ai soulevé — si je me souviens bien — justement des gens qu'on prenait à la pige et d'autres qui constituaient un personnel permanent de Radio-Québec. Quand vous parlez des animateurs-vedettes, est-ce que c'est du même problème que vous parlez ou si c'est une nouvelle tendance de Radio-Québec?

M. L'Ecuyer: Disons que c'est un nouveau problème parce que, à Radio-Québec, on n'avait pas l'habitude de travailler avec des animateurs-vedettes. Maintenant, on semble vouloir en approcher quelques-uns. Il a été question de Simon Durivage, de Pierre Nadeau. Il y a Keith Spicer. En tout cas, on a peur de cela. On a peur que ces animateurs-vedettes arrivent à Radio-Québec et briment les équipes de production, qu'on ne donne pas un mandat clair à ces animateurs-vedettes et qu'on ne définisse pas leur rôle

précisément. Cela aussi est un problème qu'on a soulevé dernièrement avec la direction de Radio-Québec. On nous a promis un comité conjoint pour discuter de ces problèmes. On a demandé que ce soit un comité qui puisse en arriver à des solutions et non pas un comité d'information seulement. On est à le mettre sur pied. On devrait avoir des propositions là-dessus cette semaine, mais on fait mention qu'on avait peur de ces animateurs-vedettes, peur que ces animateurs arrivent sans mandat précis, qu'ils aient le droit de faire à peu près ce qu'ils voulaient avec leur émission et que ce soient les équipes de production qui en subissent les conséquences.

On a réagi à cela quand on a vu ces gros noms arriver. On en a fait part et on nous a promis un comité conjoint pour étudier le problème. Mais il reste qu'on en est là.

Mme Lavoie-Roux: Cela répond à quelle orientation? Peut-être aurais-je dû poser la question au président-directeur général de Radio-Québec? À quelle orientation nouvelle de Radio-Québec cela répond-il que d'aller vers l'extérieur comme cela pour chercher des animateurs-vedettes — pour utiliser votre expression?

M. Gariépy: Quand on parle de télévision éducative, il ne faut pas trop mettre l'accent sur l'éducatif. On se leurre un peu. Il faut d'abord mettre l'accent sur le concept télévision. Qui dit télévision dit "show", dit divertissement, dit information avant éducation prise dans un sens très restreint comme on l'entend dans les milieux d'éducation. Dans une optique où on sait très bien que Radio-Québec n'est pas écouté par le monde, dans une optique où on sait que Radio-Québec n'est pas regardé, il faut faire des efforts pour aller chercher des noms qui sont populaires, qui vont faire en sorte que Radio-Québec soit plus écouté, soit plus visionné. Je pense qu'actuellement, du côté de la direction, on fait cet effort.

Mais vous savez que le monde de la télévision, c'est un monde petit; on passe facilement de Radio-Québec à Radio-Canada ou de Radio-Canada à Radio-Québec. C'est un monde très petit de sorte qu'en termes d'orientation vous demandez à quelle orientation cela correspond? Premièrement, le choix d'aller chercher des animateurs-vedettes, je pense que cela se défend dans une certaine optique. On comprend que la télévision, c'est d'abord du divertissement et de l'information. Dans l'optique où on veut renforcer ce côté, faire en sorte que Radio-Québec soit écouté et visionné, je pense que cela correspond à cette orientation que d'aller chercher des gens qui sont connus. C'est la première orientation. La deuxième orientation correspond, disons, à la volonté de renforcer ce qu'on appelle à Radio-Québec un secteur qui s'appelle le secteur des affaires publiques, qui est aussi un secteur d'éducation auquel on n'est peut-être pas habitué, ou auquel on est habitué quand on regarde Radio-Canada. Je pense qu'à Radio-Québec on essaie de développer un nouveau secteur des affaires publiques qui soit un petit peu différent de celui de Radio-Canada. Malheureusement, on est obligé d'aller chercher encore des vedettes à Radio-Canada pour faire en sorte que Radio-Québec soit écouté. Je ne sais pas si je réponds à votre question mais je pense que cela correspond à ces deux orientations: aller chercher la population et, deuxièmement, tenir compte de l'expérience et de l'expertise de gens qui connaissent cela pour renforcer un secteur qui est quand même nouveau à Radio-Québec actuellement et qui s'inscrit dans une optique d'éducation.

Mme Lavoie-Roux: J'aimerais revenir sur votre conception de la télévision éducative. Vous venez de dire que la télévision éducative n'était pas dans le sens où l'entendent généralement les milieux de l'éducation; je suis d'accord avec vous. Tout à l'heure, on parlait de groupes-cibles. Si vous vous adressez aux femmes, si vous vous adressez aux jeunes travailleurs, si vous vous adressez aux jeunes décrocheurs, si vous vous adressez aux jeunes chômeurs, vous ne leur donnerez pas un cours formel de mathématiques à la télévision, mais vous allez quand même essayer de parler de problèmes qui les concernent, vous allez essayer de faire un travail d'orientation ou je ne sais quoi exactement. Mais quand vous arrivez avec des animateurs comme ceux-là, est-ce qu'il n'y a pas le risque que, même si la télévision éducative doit être entendue dans un sens plus large que l'éducation formelle, stricte, finalement on dilue passablement la vocation éducative d'une société comme Radio-Québec?

Mme Forget (Manon): Si je peux me permettre, notre principale préoccupation, c'est cela dans le fond. On n'a rien en principe contre les animateurs-vedettes, mais notre principal souci se situe à ce niveau. On a peur qu'on engage des animateurs-vedettes qui vont probablement hausser notre cote d'écoute, parce que cela a été un des objectifs de Radio-Québec à la rentrée du dernier conflit, mais en se souciant moins du mandat éducatif ou alors, en faisant le mandat éducatif en fonction de l'animateur-vedette, et non pas l'inverse. Je ne sais pas si je m'explique assez clairement, mais notre préoccupation se situe là, non pas...

Mme Lavoie-Roux: En tout cas, ce qui me préoccupe, c'est que tout à l'heure... Je vais prendre un exemple qui va faire plaisir au député de Deux-Montagnes; je vais le prendre du côté, comme il disait tout à l'heure, fédéraliste. Que Keith Spicer interviewe Gérard Pelletier, je n'ai rien contre cela. Mais je me demande ce qu'il y a de différent, pour une télévision éducative, entre Keith Spicer qui interviewe Gérard Pelletier à Radio-Québec et Keith Spicer qui interviewe Gérard Pelletier à Radio-Canada. Je me demande si justement, à ce moment, on ne s'éloigne pas... C'est intéressant, on peut toujours apprendre quelque chose quand quelqu'un interviewe un autre, surtout quelqu'un qui occupe un poste qui,

enfin, que ce soit au plan scientifique, au plan international, etc., peut avoir plusieurs aspects; c'est intéressant. Mais, est-ce qu'à ce moment, justement, on fait de la télévision — je dirais, ce que Radio-Québec a comme objectif — de la télévision éducative. Finalement, une société qui ne se distingue pas tellement, du moins dans ces programmes, de Radio-Canada qui a probablement certains objectifs éducatifs, mais dont les objectifs sont beaucoup plus globaux que Radio-Québec.

M. Daigneault: Je pense que nous sommes d'accord avec ce que vous venez de dire. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'on a fait des représentations au début du projet de loi 4 en terme de segmentation de l'histoire où on reconnaissait que ce que vous déterminez comme ce qui nous apparaît à nous comme la télévision culturelle de masse, nous apparaît faire partie du mandat de Radio-Québec, mais si cela devenait uniquement cela, je pense qu'on ne pourrait plus parler tellement de télévision éducative. (22 h 15)

L'expression télévision éducative au sens large est une expression qui nous apparaît très dangereuse. À ce moment, comme on l'a dit, elle nous semble ouvrir la porte uniquement à la télévision qu'on pourrait appeler culturelle de masse qui se rapproche de ce que fait déjà, en tout cas en partie, Radio-Canada et c'est pour cela que pour nous, l'approche à propos de groupes, auprès de groupes spécifiques, nous apparaissait essentielle. Effectivement, c'est à partir des craintes que vous avez mentionnées qu'on partage, qu'on demande que la loi spécifie que la vocation éducative s'adresse à des segments spécifiques de la population, concernant des problèmes spécifiques et non pas uniquement à la population dans le sens large du terme.

Je pense qu'il serait assez malaisé de revendiquer uniquement cette orientation pour Radio-Québec qui, comme le disait Philippe tantôt, est quand même une maison de télévision qui doit aussi fonctionner, servir dans une bonne partie de sa programmation... essayer de représenter le patrimoine culturel, etc. Donc, il faut qu'il y ait des émissions de culture de masse, mais je pense que les deux doivent — cela ne nous apparaît pas contradictoire — essayer de coexister. Par contre, il serait dangereux que ça tourne simplement d'un côté, comme vous le dites.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que j'interprète mal en disant que votre recommandation à l'égard des segments de population rejoint peut-être, d'une certaine façon, la recommandation qui a été faite par le porte-parole du groupe qui vous a précédés et qui, en d'autres mots, disait: II faudrait qu'il y ait un pourcentage de 50% pour qu'une télévision soit dite éducative ou soit reconnue comme étant éducative? Est-ce que c'est...

M. Daigneault: À ce moment-là on revient au problème fondamental de la définition. Il faudrait exclure de la définition de la télévision éducative tout ce qui ne serait pas segmentation de l'auditoire et ça m'apparaît dangereux comme revendication. La position de compromis qui nous apparaît à nous la plus viable, c'est celle de la coexistence des deux à l'intérieur même de la définition de la programmation éducative.

Mme Lavoie-Roux: Mais il faut qu'il y ait un équilibre raisonnable entre les deux.

Une dernière question — parce que ce ne sera plus vrai que je devais partir à 22 h 15 — relativement aux animateurs-vedettes. Quand ces personnes sont engagées, le sont-elles selon des conditions analogues quant aux... même si c'est une base d'un an, disons, je ne sais pas quelle est la durée du mandat ou du contrat, est-ce qu'elles sont engagées sur le plan du salaire sur des bases qui se comparent, par exemple, aux vôtres ou aux responsables de programmation, d'émissions, aux syndiqués?

M. Daigneault: Je pense qu'il faudrait poser la question aux représentants de Radio-Québec. Je ne crois pas que cette question s'adresse à nous.

Mme Forget: On n'a pas... ce genre de dossier.

Mme Lavoie-Roux: ... je ne les ai plus devant moi. C'est pour ça que je m'adresse à vous autres.

En tout cas, je vous remercie, parce que c'est quand même intéressant d'avoir pu pousser un petit peu plus loin, quoique bien superficiellement encore, quand même! Cette notion de télévision éducative nous prendrait beaucoup plus de temps que cette commission parlementaire. Vous-mêmes, vous êtes en recherche vis-à-vis de l'éducation permanente, vis-à-vis de l'éducation des adultes.

Le problème reste assez entier, somme toute. Je pense que même le ministère de l'Éducation est en recherche vis-à-vis de ces notions, et même le ministre d'État au développement culturel. C'est une question extrêmement importante, quand on pense aux besoins du Québec. La culture de masse, cela va, mais on a encore tellement de besoins auxquels il faut répondre et auxquels on répond si mal. La télévision pourrait être un media important pour pallier certaines situations qui m'apparaissent encore déplorables pour l'ensemble de la population, enfin, des segments particuliers, et je pense que c'est important qu'on y réfléchisse encore longtemps et plus en profondeur. Je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: Je vous remercie. Vous êtes tellement intéressants et convaincus que c'est regrettable de voir les minutes s'envoler aussi rapidement. Je voudrais aborder avec vous quelques points. Je suis l'avocat du diable. Je voudrais que vous me donniez raison quant à vos réticences, j'en prends une en particulier. Vous mention-

nez le fait que Radio-Québec doive se présenter annuellement devant la régie, et vous trouvez que c'est encarcané un peu.

Moi, ma réflexion est que Radio-Québec a tout de même des comptes à rendre à la régie et, personnellement, je verrais d'un bon oeil Radio-Québec se présenter. Maintenant, je voudrais que vous me convainquiez du contraire. C'est tout.

M. L'Ecuyer: Marc Aras va faire cela.

M. Aras: Ce que nous voulions soulever, M. le Président, c'est non pas que la régie est superflue, loin de là notre pensée, mais, par les projets de loi 4 et 5, on s'aperçoit qu'au niveau des intervenants auprès de Radio-Québec, il existe la régie, une commission parlementaire annuelle sur les budgets, il existe certains pouvoirs du ministre des Communications et certains pouvoirs indirects du ministre de l'Éducation. Cet ensemble, plus le CRTC, dont on parlait plus tôt, cet ensemble de groupes nous fait peur, non pas tellement parce que, effectivement, il existe des problèmes à l'heure actuelle, mais il se pourrait, à un moment donné, qu'il y ait des conflits entre plusieurs groupes.

Disons que c'est en raison de la liberté d'expression ou de la liberté de presse que nous avons voulu soulever ce problème. Que la régie existe, oui, nous sommes d'accord mais qu'on multiplie le problème par quatre et cinq en ayant plusieurs intervenant auprès de Radio-Québec, il me semble qu'à ce moment-là Radio-Québec n'aurait pas toute la liberté nécessaire pour faire son travail.

Nous avons essayé, depuis très longtemps, dans tous nos mémoires, tous nos rapports auprès des différents organismes, que ce soit auprès de la direction de Radio-Québec ou devant la commission parlementaire, de privilégier la participation du public, la démocratisation de Radio-Québec et il nous semblait qu'avec ces points, plus peut-être un contrôle minimal du gouvernement du Québec, on pouvait arriver effectivement à donner un produit qui soit très acceptable par le plus grand segment de la population possible. C'est en regard de cela que nous voulons soulever quand même le danger des différents articles de loi qui pourraient effectivement nous empêcher de fonctionner pleinement.

On retrouve, par exemple, dans un des articles le fait que le conseil d'administration sera nommé souvent, si c'est au niveau des régions, par les comités régionaux, par recommandation des comités régionaux, que ce soit l'employé à Radio-Québec et aussi par recommandation de l'ensemble des employés. Nous pensons qu'avec tous ces mécanismes, on a une certaine garantie effectivement que Radio-Québec puisse fonctionner proprement, je pense. En plus de cela, le fait de devoir rendre compte annuellement, devant la régie, devant la commission parlementaire au niveau des budgets, et devant l'Assemblée nationale, il semble qu'effectivement on a tellement de contrôle que je vois difficilement Radio-Québec pouvoir s'écarter véritablement de son but qui est de fournir le service à la plus grande partie de la population possible.

C'est en regard de cela que nous nous posons des questions. Nous n'avons pas voulu présenter, suggérer effectivement des changements au niveau du projet de loi mais nous avons voulu simplement soulever ces problèmes.

M. Le Moignan: Je retiens vos remarques et le ministre également; c'est lui qui aura le dernier mot. Maintenant, ma deuxième question qui est très brève, c'est que le but de tout poste de radio, de télévision, évidemment, c'est de hausser sa cote d'écoute; c'est tout à fait normal, autrement on travaille dans le vide. Comment, quand vous avez parlé de catégories de segmentation, déterminer ces catégories pour répondre en même temps aux objectifs de Radio-Québec qui est d'atteindre tout de même une bonne cote d'écoute dans tous les domaines? Est-ce que vous avez des domaines privilégiés ou bien un vaste éventail?

M. Daigneault: Je m'excuse, pouvez-vous préciser votre question, s'il vous plaît?

M. Le Moignan: On dit que la télévision éducative veut hausser sa cote d'écoute. C'est son but. Si on fonctionne à 1%, si personne ne vous écoute, ce n'est pas très intéressant. Vous avez parlé tout à l'heure de segmentation. On parle de la clientèle cible, que ce soient de jeunes travailleurs, que ce soient des adultes, que ce soient des chômeurs, vos objectifs précis dans ce domaine, c'est quoi?

M. Daigneault: Je vais essayer de donner une réponse. Votre question implique quand même plusieurs choses. On disait tantôt que l'objectif d'un poste de télévision était d'augmenter sa cote d'écoute. D'un certain côté, oui, c'est vrai. Je tiens quand même à préciser que la cote d'écoute ou la portée actuelle de Radio-Québec n'est pas mauvaise du tout, qu'elle se compare à ce qui nous apparaît, nous, au syndicat, comme ses vrais, entre guillemets, "concurrents" ou ses proches, c'est-à-dire la télévision éducative d'Amérique du Nord, que ce soit en Ontario ou aux États-Unis. Évidemment, on espère toujours rejoindre le plus grand nombre de gens possible et dans une perspective de segmentation, à ce moment précis, ce qu'on espérait rejoindre... L'objectif, évidemment, serait de rejoindre ce segment précis pour lequel l'émission a été faite. Il ne demeure pas moins que l'ensemble de l'auditoire de la station est constitué de l'ensemble des gens qui regardent une émission ou qui regardent plus d'une émission durant une semaine. À ce moment-là, il reste quand même beaucoup d'émissions qui peuvent être faites pour l'ensemble de la population et beaucoup d'autres émissions sont faites pour des segments précis.

L'ensemble de l'auditoire est la somme de tous ces gens-là. Mais je ne pense pas que dans une perspective de télévision éducative, le seul

objectif de la télévision soit d'augmenter sa cote d'écoute. Je pense qu'il faut aussi dire qu'un autre objectif est de rendre des services à la population. Si, à un moment donné, un service est identifié à un groupe — supposons les femmes — ce qui implique la moitié, grosso modo, de la population, je ne pense pas que cela handicape, de faire des émissions pour des segments de la population, la somme des individus qui, au bout d'une semaine ou au bout d'une période de temps, peuvent avoir bénéficié des services de la télévision éducative.

M. Le Moignan: J'ai une dernière question. Tous les groupes ont eu à se prononcer sur une définition d'une programmation éducative. L'an dernier, on nous a présenté un mémoire qui servira un jour à ceux qui feront l'histoire de Radio-Québec. Je ne veux pas entrer dans les détails de votre mémoire; quand on le relit après coup, c'est très intéressant. Mais vous avez tout de même posé une question. Le titre: "Radio-Québec, une télévision éducative à réinventer." J'ai posé la même question à d'autres groupes. Depuis un an, avez-vous constaté certains changements, certains progrès ou votre attitude est-elle encore la même?

M. Gariépy: C'est une question difficile. C'est une question difficile. Ce que je veux dire, c'est qu'actuellement Radio-Québec n'a pas toutes les réponses; vous l'avez vu. C'est bien beau mettre dans un mémoire qu'une télévision éducative est à réinventer. Depuis un an, je pense que des efforts ont été faits. En fin de compte, on a essayé, à Radio-Québec, de repartir tranquillement et on est reparti simplement depuis le mois de janvier. Alors, repartir et demander une évaluation depuis un an, c'est quand même assez court. Je ne pense pas qu'on puisse juger de la trajectoire de Radio-Québec simplement sur une période, en fin de compte, de sept mois. Je me demande si cela fait sept mois qu'on est reparti. Je pense que votre question est une bonne question, mais essayer d'évaluer, disons, l'impact de Radio-Québec depuis que c'est reparti, je pense que c'est trop tôt. Il va falloir juger Radio-Québec sur une période de trois ans.

À ce jour, je pense qu'on a essayé, dans le domaine culturel, du côté du secteur culturel, d'offrir aux Québécois des choses qui soient au moins intéressantes. Je pense que du côté du secteur des affaires publiques, il y a eu des choses intéressantes aussi de proposées. Ce n'est vraiment pas parfait et je pense qu'actuellement on est en train de tout réviser ce domaine-là, en particulier le côté des affaires publiques. Du côté de l'éducation permanente et de l'éducation populaire, il y a quelques petites choses de faites, mais cela ne va pas très loin. C'est seulement sur une période de sept mois.

On sait qu'un organisme de télévision, c'est gros, c'est lourd, cela coûte cher. J'ai l'impression qu'on sera mieux à même de juger, disons, de l'impact éducatif de Radio-Québec sur une période de trois ans. C'est tout ce que je peux répondre à la question. Je ne sais pas si mes collègues ont d'autre chose à ajouter, mais je ne peux pas aller beaucoup plus loin, à moins que vous ayez des sous-questions. (22 h 30)

M. Le Moignan: Alors, mon souhait le plus ardent, c'est que, dans trois ans, votre groupe et moi-même soyons présents et je vous reposerai la même question. Merci.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Vu l'heure, M. le Président, je serai bref. C'est que je ne voulais pas rater l'occasion de faire un échange de bons procédés avec Mme le député de L'Acadie qui a repris, tout à l'heure, une question que j'avais soulevée cet après-midi. Alors, je voudrais maintenant soulever de nouveau une question qu'elle-même a soulevée. Il s'agit de la répartition des effectifs permanents par catégories et selon le sexe.

Le document qu'on nous a remis aujourd'hui montre que la représentation féminine dans le personnel de Radio-Québec est de l'ordre de 30%, ce qui est très peu si l'on tient compte du fait que les femmes sont surreprésentées dans les catégories d'employés de bureau, ce qui veut dire que chez les cadres et plusieurs autres catégories, les femmes sont sous-représentées. Je sais, évidemment, que cette question relève au premier chef de la direction de Radio-Québec; je sais par ailleurs que Radio-Québec n'est pas le seul organisme dans ce cas, mais c'est, je pense, une aspiration assez répandue que de faire en sorte que les femmes puissent améliorer leur condition, parvenir à des postes plus intéressants et ne soient plus cantonnées dans des postes subalternes. Comme par ailleurs, les syndicats, comme organismes démocratiques, ont souvent tendance à épouser les bonnes causes — je le dis sans ironie — je me demande si votre syndicat s'intéresse à cette question, s'il a pris position là-dessus. S'il a pris position, qu'est-ce qu'il a fait pour faire valoir sa position et s'il n'a pas pris position, est-ce qu'il envisage de le faire, l'objectif étant d'assurer une meilleure représentation des femmes aux divers paliers de responsabilité dans les diverses catégories d'emplois à Radio-Québec?

M. L'Écuyer: Je ne pense pas qu'on ait encore pris une position ferme là-dessus. Tout ce qu'on peut faire, c'est le demander. Ce n'est pas nous qui disposons de tout cela. Ce qu'on peut dire, c'est que dans le moment on est en train d'étudier, aux ressources humaines, les lignes de promotion, les modes de perfectionnement, les reclassifications de postes, etc. Peut-être que lorsque cette étude sera complétée, c'est-à-dire d'ici à janvier 1980, on s'apercevra qu'il y a beaucoup d'employés de bureau qui pourraient accéder à des emplois différents. On l'espère; je ne pense pas qu'on ait jamais pris de position ferme là-dessus, mais avec tout ce qui se présente devant nous, on espère que cela pourra permettre aux employés de

bureau qui sont représentés majoritairement par des femmes d'accéder à d'autres postes plus importants à Radio-Québec.

Mme Forget: Ce que je voudrais dire, puisque c'est une question qui concerne les femmes et que je suis la seule à cette table, c'est qu'au sein du syndicat, la représentation des femmes est très bonne, il n'y a pas de problème à ce niveau-là. Je pense que globalement, à Radio-Québec, il y a beaucoup d'amélioration à faire à la direction, à tous les niveaux de la production un peu partout. C'est aussi beaucoup l'affaire des femmes, d'abord, et il faut que les femmes s'en mêlent, qu'on décide de foncer et qu'on décide de faire quelque chose. Je pense que c'est aux deux parties de se décider et de faire quelque chose. Effectivement, on n'a pas de décision là-dessus.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. O'Neill: Très brièvement, M. le Président. D'abord, au sujet de la Régie des services publics et du rôle qu'elle joue face à la programmation éducative, j'ai relu l'article 21-1 du projet de loi et je n'ai pas trouvé le mot "annuellement". J'ai l'impression qu'on a peut-être confondu cela avec la comparution devant la commission parlementaire. Donc, il relève de ce qu'on appellerait la régie interne et de la régie de savoir selon quel échéancier, selon quel rythme, en fait, un groupe de radio-diffuseurs doit comparaître pour faire approuver sa programmation éducative. Il ne faudrait donc peut-être pas y voir là un contrôle aussi rigide que celui que vous avez cru voir. Je vous signale aussi que l'article 6, au sujet de l'employé, de la façon dont le texte est rédigé, cela se lit comme suit: "Une personne nommée par le lieutenant-gouverneur en conseil parmi les employés de la société sur la recommandation de ces derniers." On imagine que les employés n'iront pas recommander un cadre, à moins qu'ils l'aiment beaucoup. Si vous estimez que ce n'est pas encore assez précis comme cela, on pourra voir s'il y aura moyen de trouver une autre formulation.

On suppose aisément que les employés, encore une fois, n'iront pas recommander un cadre supérieur pour les représenter au sein du conseil d'administration. Ce n'est pas exclu, mais ce n'est pas ce qu'on attendrait.

M. Daigneault: Le problème était par rapport à la définition du terme "employé", si, les employés nommaient leurs représentants, les cadres étaient inclus dans ce groupe, si les cadres étaient des employés, autrement dit.

M. O'Neill: C'est-à-dire, dans mon esprit, selon l'esprit de la loi, en tout cas, ici, c'est non, mais surtout selon la formulation, la recommandation de ces derniers, je veux dire, est-ce qu'ils vont recommander, je ne sais pas, le secrétaire général, le directeur général de la programmation, je ne sais pas trop? Cela m'apparaîtrait plutôt improbable. J'ai l'impression que cette recommanda- tion, cette formulation est suffisante, parce que ce sont vraiment les employés et les syndiqués qui vont faire les recommandations. On pourra voir quand même s'il n'y a pas lieu d'en trouver une encore plus précise, plus étanche que celle-là. D'accord?

M. Daigneault: Vous venez de dire que ce sont les employés syndiqués, M. le ministre, qui vont faire la recommandation. Est-ce que le terme "syndiqué" pourrait être ajouté à la loi?

M. O'Neill: Étant donné que les employés en général, syndiqués ou peut-être même non syndiqués qui n'appartiennent pas aux cadres, sont en très grande majorité, on peut supposer que c'est leur recommandation qui va l'emporter inévitablement et qu'ils vont choisir l'un des leurs. En tout cas, vous relirez, si vous voulez, l'article 6, paragraphe c) et si ce n'est pas suffisant, on pourra voir si on peut trouver une meilleure formulation.

M. le Président, je termine également en formulant mes remerciements et en disant aussi la satisfaction que nous avons de retrouver cette année un Syndicat des employés de Radio-Québec qui, après de longues luttes méritoires, vient ici et nous offre sa collaboration. Je ne vous cache pas que nous espérons beaucoup, évidemment, que, dans les mois qui vont suivre, étant donné tout ce que nous avons comme projets, tout ce que Radio-Québec a comme projets, et je dirais tout ce que les employés de Radio-Québec ont comme projets, tous les défis qui nous attendent, enfin, ce que nous envisageons comme mission, comme rôle très important de Radio-Québec à l'avenir.

Il y a des gens qui, jusqu'ici, regardaient parfois avec condescendance Radio-Québec, estimant que, quand on regardait Radio-Québec à côté de Radio-Canada, aucune comparaison n'était possible. Déjà, actuellement, il y a des gens qui commencent à dire: Eh bien, il y a peut-être des comparaisons possibles. Je pense évidemment que ces défis seront beaucoup plus faciles à affronter, ces objectifs beaucoup plus faciles à atteindre, maintenant que certaines difficultés sont disparues, se sont estompées, et nous pouvons maintenant faire un travail d'équipe, ce qui n'empêche pas, à l'occasion, la confrontation et même — cela est très souhaitable aussi et souvent fructueux — l'expression de points de vue différents.

Je dois vous avouer que, tout en reconnaissant la légitimité de tous ces affrontements qui ont eu lieu dans le passé, du fait de nous retrouver cette année dans cette atmosphère, je pense qu'il y a quelque chose d'extrêmement encourageant et de réjouissant pour chacun des groupes représentés.

Encore une fois, merci.

Le Président (M. Jolivet): Merci. J'ajourne les travaux de la commission sine die, sachant très bien qu'on aura un ordre de la Chambre pour demain, 20 heures.

Fin de la séance à 22 h 39

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