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Étude des projets de loi nos 4 et 5
(Vingt heures dix-huit minutes)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît, messieurs!
La commission des communications est à nouveau réunie pour
entendre les mémoires concernant les projets de loi nos 4 et 5.
Les membres de cette commission sont M. Beauséjour (Iberville),
M. Bertrand (Vanier), M. Blank (Saint-Louis), remplacé par Mme
Lavoie-Roux (L'Acadie); M. Godin (Mercier), remplacé par M. Bisaillon
(Sainte-Marie); M. Goldbloom (D'Arcy McGee) remplacé par M. Rivest
(Jean-Talon); M. Laberge (Jeanne-Mance), M. Le Moignan (Gaspé), M.
Michaud (Laprairie), M. O'Neill (Chauveau).
Les intervenants sont M. Ciaccia (Mont-Royal), remplacé par M.
Forget (Saint-Laurent); M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Dussault
(Châteauguay), M. Fallu (Terrebonne), M. Goulet (Bellechasse), M. Laurin
(Bourget) remplacé par M. Guay (Taschereau); M. Lazure (Chambly), M.
Samson (Rouyn-Noranda).
Au moment où nous nous sommes quittés hier soir lors de
l'étude des mémoires, il y avait les groupes suivants qui
n'avaient pas encore été entendus: l'Association des
réalisateurs de Radio-Québec, l'Union des artistes; il y a un
autre groupe parmi les convoqués, mais dont aucun mémoire n'avait
été reçu, qui avait fait mention de son intention de se
présenter devant la commission, l'Institut canadien d'éducation
des adultes. Il y avait ces trois cas, ainsi que les noms indiqués hier
soir comme groupes: Father O'Brien, Dennis Murphy, du département de
communications de l'Université de Concordia, ainsi que Mme
Michèle Jean, de l'éducation des adultes du cégep de
Bois-de-Boulogne de Montréal. Ces groupes ont manifesté leur
intention de ne pas se présenter devant la commission, de telle sorte
qu'ils enverront les télégrammes nécessaires à
l'organisme qui les a convoqués.
Entre-temps, les groupes qui restent à entendre, ce soir, sont
l'Association des groupes ethniques du monde de la radio et de la
télévision du Québec, qui sera le premier entendu, ainsi
que le groupe de la télé-communautaire qui est connu sous le nom
de Regroupement des organismes communautaires des communications, dont M.
Gérard Lafleur sera le porte-parole, selon les indications que nous
avons. Le document qu'ils ont préparé vous sera distribué
aussitôt qu'on aura fini de faire les photocopies nécessaires.
Donc, c'est le groupe appelé Regroupement des organismes communautaires
des communications.
Le groupe que nous avons devant nous, qui nous a présenté
un mémoire et qui va être le premier entendu ce soir, est
l'Association des groupes ethniques du monde de la radio et de la
télévision du Québec.
M. Laberge: M. le Président. Le Président (M.
Jolivet): Oui?
M. Laberge: Attendu que nous espérions hier avoir le temps
d'entendre l'Association des réalisateurs ainsi que l'Union des artistes
qui s'étaient présentées, du moins l'Union des artistes
avait fait part qu'elle serait ici à compter de 20 heures hier soir,
serait-il possible de faire porter au journal des Débats le contenu de
leurs mémoires pour qu'ils y soient inscrits. Ils ne sont pas
très longs, l'un et l'autre, et je pense qu'ils contiennent des
remarques intéressantes et ce serait leur faire honneur que de porter au
journal, à la connaissance du public, leur contenu. J'en fais la
proposition, est-ce accepté?
Le Président (M. Jolivet): S'il y a consentement de part
et d'autre de la table, il n'y a pas de problème. Donc, les deux
mémoires de l'Association des réalisateurs de Radio-Québec
et de l'Union des artistes paraîtront intégralement au journal des
Débats. (Voir annexes A et B)
Nous pouvons donc débuter avec le groupe. M. Winston et Mme Mary
Griffith.
Association des groupes ethniques du monde de la radio et de la
télévision
M. Winston (Milton): Mme Mary Griffith parlera la
première. D'accord?
Le Président (M. Jolivet): Cela va.
Mme Griffith (Mary): Avant de commencer, excusez mon jouai, je ne
suis jamais allée à l'école française, alors je
parle le français que j'ai appris des voisins et des amis.
Nous sommes une association de quatorze groupes ethniques et nous sommes
dans le domaine de la radio et de la télévision depuis plusieurs
années dans la province de Québec. En tant qu'association, nous
ne pouvons parler qu'au nom de nos membres. En principe, nous sommes d'accord
avec le projet de loi no 4 et nous croyons qu'il est de la
responsabilité du gouvernement provincial de négocier les
programmes éducatifs. Nous n'avons pas l'intention de discuter des
problèmes légaux ou constitutionnels dans le domaine des
communications, mais nous parlerons en termes de principes et concepts.
Suite à la lecture du projet de loi no 4, nous désirons
déclarer notre joie à constater enfin qu'un intérêt
est porté envers la catégorie de programmation en laquelle sont
impliqués plusieurs réalisateurs et animateurs, depuis plusieurs
années, sans reconnaissance.
En principe, la loi proposée résume le besoin des citoyens
québécois de préserver leur propre culture, qu'ils soient
francophones ou autres. Mais il est regrettable que l'intention, bien qu'elle
soit
très bonne, soit loin d'être accomplie. En d'autres mots,
qui, à l'intérieur de la régie, jugerait si une
émission de télévision ou de radio proposée est
applicable comme étant éducative? Quelle sera l'attitude de ces
membres de la régie qui prendront des décisions vis-à-vis
des réalisateurs ethniques?
Ces membres seront-ils conscients des véritables besoins et
problèmes des communautés ethniques ou se retourneront-ils vers
les compagnies de câble pour déterminer quelles émissions
éducatives seront présentées aux communautés
ethniques sans consulter directement les réalisateurs et animateurs qui
sont dans ce domaine depuis plusieurs années?
Si, par exemple, une compagnie de câble obtient une certification
de la régie pour un poste éducatif, conformément à
la loi, ceci ne l'oblige nullement à rendre disponibles aux groupes
ethniques les services convenables.
Notre raisonnement, c'est qu'avant d'attribuer une telle certification
à une compagnie de câble afin d'entreprendre de la programmation
éducative, on devrait au préalable tenir une audience publique
où serait rendu public un sommaire de ses intentions, en plus du budget
et des services prévus. La régie devrait se réserver le
pouvoir de retirer toute certification dans l'éventualité
où ces engagements ne soient pas respectés.
L'assistance financière et technique mentionnée dans cette
loi ne devrait pas être adjugée aux compagnies de câble,
mais plutôt décernée aux groupes eux-mêmes qui
élaboreront cette programmation.
Il est aussi primordial que le gouvernement prenne la
responsabilité envers tous les citoyens du Québec de
vérifier et d'assurer que le ou les groupes désignés
soient choisis très attentivement en considérant les
mérites suivants:
A) Depuis quand sont-ils réalisateurs et/ou animateurs de
programmation communautaire?
B)Leurs réalisations passées peuvent-elles être
considérées comme étant éducatives?
C) Est-il certain que plusieurs groupes n'aboutissent pas aux
mêmes résultats?
D) Peut-on s'assurer que ces groupes n'utiliseront pas cette technologie
à des fins personnelles ou politiques?
La loi no 5 modifiant la Loi de l'Office de
radio-télédiffusion du Québec devrait, en principe,
assurer l'accès des commaunautés ethniques à
Radio-Québec sur une base professionnelle. Toutes les difficultés
relatives à la programmation éducative mentionnées
précédemment devraient être considérées lors
de l'amendement de la loi no 5 afin de ne pas causer de frictions, de
fragmentation ou d'aliénation à l'intérêt des
communautés.
Il est important, pour une société telle que celle du
Québec, de voir à ce que les divers citoyens qui la composent
sentent qu'ils font partie intégrante de cette aventure dans les
communications. Nous sommes tous partenaires dans l'édification de notre
avenir. Ou nous réussissons ensemble, ou nous échouons
individuellement. Soyons maîtres d'une maison unifiée, tous sous
un même toit.
On doit encore souligner l'importance de fixer des objectifs
constructifs lorsqu'on déterminera qui fera usage de ces facultés
d'éducation, afin de ne pas perdre le but et les objectifs de cette aide
que nous accorde le gouvernement du Québec.
Le domaine des communications est le plus influent, qu'il soit
utilisé dans le but d'unir tous les Québécois et non de
les diviser. Ce gouvernement est responsable de la tournure que prendra ce
programme. Le résultat comptera grandement sur le choix des responsables
de ce projet important de tous les membres qui représentent 14
différents pays de l'Association des groupes ethniques du monde de la
radio et de la télévision du Québec.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.
M. O'Neill: M. le Président, je serai bref, d'autant plus
que j'ai eu le plaisir de passer aujourd'hui la journée avec
l'Association des groupes ethniques et, déjà, nous avons
échangé sur beaucoup de problèmes, incluant, par exemple,
le rôle que jouera Radio-Québec à l'égard des
groupes ethniques. Ce sont des points sur lesquels je n'insisterai pas. Cela
va?
M. Bisaillon: C'est que j'avais cru que monsieur avait des choses
à ajouter à la présentation.
Le Président (M. Jolivet): Oui. Si c'est cela, je
pense...
M. Winston (Milton): Si vous me permettez de parler en
anglais.
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Winston: I am the President of the association and I am not
going to go into the details of the Bill. I am President of 14 members and when
we talk about 14 associations or groupings, we talk about Chinese, German,
Asian, Pakistani, Indian, Jewish, Lebanese, Portuguese, Spanish, Egyptian,
Mexican, Vietnamese, Italian groups. And we spent the day, today, feeling that
we were an integral part of the Province of Québec. One of the reasons
was that a minister of the Government was with us, an entire day, to learn
about our problems.
We look upon the legislation as presented very favorably, because we
fell that we will be an important parcel of that legislation. We look into it,
naturally, our interests are to see that, as a community, an ethnic community,
non French, non English, even if my language here, for historical reasons, is
English, we look upon this as an exciting potential where it should be in this
Legislature. II should be here where these things are discussed and we have to
be, in a way we are, partners with you.
We want to again appreciate the effort in time you have taken as a
government to bring us in. Now, there are many areas where we and ethnic
associations may have a great deal to say which will not be in accord with the
government, but in this
we would very much approve of bill 4 and following which we looked over
and which we discussed that Mary so well put together. In this manner, I think
together all of us can help each other and I want to thank you very much for
letting us be here today.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.
M. O'Neill: Merci beaucoup, M. Winston et Mme Griffith. Je
voudrais d'abord vous rassurer concernant deux points du projet de loi. Vous
avez soulevé une première interrogation concernant la
compétence de la régie. Ce qu'il faut se dire, c'est que dans ce
domaine-là comme dans tout autre domaine la régie, lorsqu'elle a
à prendre une décision, doit évidemment s'appuyer sur une
bonne expertise, c'est-à-dire avoir les conseils de gens qui connaissent
le secteur.
De plus, dans ce cas-ci, si vous remarquez l'article 9, il est bien dit
que "la Régie avise le ministre des Communications et le ministre de
l'Éducation de toute requête qu'elle reçoit et de toute
audience publique vous vous étiez interrogés sur les
audiences publiques qu'elle tient en vertu de la présente loi.
Ils peuvent les deux ministres eux-mêmes par des
représentants, c'est ce qui se fait de façon habituelle
participer à l'enquête et à l'audition et faire les
représentations qu'ils jugent utiles."
C'est un devoir de la régie de faire appel à l'expertise
nécessaire, tout comme la régie le fait, par exemple,
actuellement pour les problèmes de téléphonie. Il y a eu
un cas récemment où la régie a eu à juger du
problème d'un passage de propriété d'une entreprise
à d'autres. À ce moment-là, la régie a dû
faire appel à des experts compétents pour l'aider à porter
un bon jugement. Dans ce cas-ci, remarquez que dans l'éventualité
d'une décision à prendre, vous avez l'intervention possible du
ministère des Communications et du ministère de
l'Éducation.
J'aimerais maintenant vous poser une question, avoir un
éclaircissement concernant ce que vous dites à la page 2 du
mémoire, au deuxième paragraphe. Vous dites: "Toutes les
difficultés relatives à la programmation éducative
mentionnées précédemment devraient être
considérées, lors de l'amendement de la loi 5, afin de ne pas
causer de friction, de fragmentation ou d'aliénation à
l'intérieur des communautés." J'aimerais que vous
précisiez cet énoncé, s'il vous plaît!
Mme Griffith: On a vu, depuis plusieurs années,
différents groupes et organismes qui ont essayé ou qui ont
tenté de faire de la radiotélévision pour des
communautés ethniques. On a vu aussi parfois des résultats, et je
vais vous donner des exemples, par des programmes ou d'autres moyens, comme des
programmes de télévision ou de radio auxquels nous avons
travaillé pendant des années. Tout ce qu'on veut dire, c'est que
c'est quelque chose qu'on a vu souvent dans les communautés ethniques.
On voudrait essayer de n'avoir jamais à y faire face ici, au
Québec, avec une loi progressive du gouvernement. Les communications
sont vraiment la plus grande influence qu'il y ait. Pour nous, les ethnies, qui
ne sommes ni anglophones, ni francophones, les moyens de communication qui
existent déjà pour nous, qui ne sont pas grands on
espère les élargir éventuellement jouent un grand
rôle. L'influence est peut-être plus grande que pour un francophone
qui veut écouter un poste francophone.
Si ces moyens de communication tombent dans les mains d'une personne qui
n'a peut-être pas trop bien vérifié ou qui a
peut-être passé pardessus des choses on fait tous des
erreurs et qu'elle se charge de ces moyens comme animateur... Parce que,
comme animateurs ou comme responsables, nous, on travaille pour nos
communautés. On fait et on sert les besoins de la communauté, pas
ce qui est de nos propres besoins, parce que, parfois, ce serait bien
différent, ce qu'on présenterait, si on regardait nos propres
intérêts au lieu de servir le mieux qu'on peut notre propre
communauté. Si ces moyens économiques et techniques ne sont pas
donnés aux bons groupes, aux bonnes personnes, à la bonne
compagnie prenez-le comme vous voulez et que quelqu'un se sert de
ces moyens pour des raisons politiques personnelles ou pour des raisons
simplement personnelles, sans penser à placer toujours en premier le
bien-être de sa communauté et non pas son propre bien-être,
cela peut causer de la friction et de la fragmentation.
Parce qu'on est dans un nouveau pays, nos communautés sont
très sensibles. La personne qui les sert dans les communications, il
faut vous assurer, comme gouvernement, que c'est une personne neutre. Parfois,
c'est très difficile d'être neutre. Quand on sert une
communauté dans les media électroniques, surtout la radio et la
télévision qui, pour nous, sont un accès, c'est beaucoup
de demander à un pays dont nous ne sommes pas originaires. Le
Québec nous le permet maintenant. On dit merci. On veut les faire bien
fonctionner, mais on croit que le plus gros danger, ce serait cela. Si cela
commence, si cette erreur se produit, ce n'est pas facile de l'arrêter,
parce que le gouvernement est toujours, d'après moi c'est une
opinion personnelle mal placé pour l'arrêter après
qu'il l'a permis à quelqu'un, parce qu'il y a toujours d'autres raisons.
On dit que ce n'est pas démocratique, on n'a pas la libre expression de
la parole. Ce n'est pas ce qu'on veut dire. La libre expression de parole des
auditeurs n'est pas une expression de parole pour montrer un point de vue
politique ou essayer d'influencer l'animateur ou le responsable, parce que
l'influence, comme je l'ai dit, est très grande vis-à-vis d'un
animateur ethnique et de sa communauté. On a vu dans le passé que
cela a servi à ces moyens. Cela n'a pas duré longtemps, mais cela
a causé de la friction dans nos communautés.
C'est le seul danger qu'on voit dans les lois de ce genre. Vous, vous
êtes responsables à tout le monde, comme Québécois,
de nous sauver vraiment de ce danger.
M. O'Neill: Remarquez que ce sera à la régie de
veiller à cela. D'ailleurs, c'est la régie qui va porter un
jugement, dans ce cas-ci du projet de loi no 4, sur une programmation
éducative et qui, à un moment donné, aura à
vérifier pour savoir si les gens se conforment au mandat qui leur a
été accordé. Évidemment, c'est une instance quasi
judiciaire, non politique, en qui, évidemment, nous avons confiance,
parce que nous pensons que c'est une instance fiable et qui, à ce
moment-là, devra procéder aux interventions nécessaires,
s'il y a lieu.
Mme Griffith: Oui. Si vous permettez, je ne sais pas si je peux
continuer une autre minute. Comme ethnie, ici, quand on voit une chance de ce
genre, on forme des groupes et même les groupes qui existent
déjà, on aimerait tous avoir les moyens. On sait que, dans les
communications, c'est pareil pour les francophones et les anglophones. On ne
peut pas donner à tout le monde qui veut avoir quelque chose. On prend
des décisions de "oui" pour accorder des décisions de "non".
La raison pour laquelle on le mentionne, nous, c'est parce qu'on voit le
danger. Il y a des choses dans nos communautés qui n'existent
peut-être pas dans une communauté de millions, comme les
francophones, disons, et on aimerait se sauver avant que ce soit donné
et que cela arrive, parce que c'est très difficile d'enlever un moyen de
communication à quelqu'un, même si la régie n'en est pas
heureuse ensuite.
C'est pour ça qu'on pose la question à savoir qui va
décider. Si ces communicateurs ne font pas ce qu'ils étaient
censés faire, est-ce que la régie peut leur retirer... Si c'est
un gros montant, par exemple, et qu'il y a dix groupes qui se
présentent, vous êtes obligés d'en choisir un,
peut-être deux; si ce ne sont pas les deux bons, les deux qui
étaient dans les huit que vous n'avez pas choisis, ces huit, ensuite,
s'ils ont des preuves, au moins, à qui peuvent-ils venir le dire:
Écoutez, ils ne font pas ceci, ils ne font pas cela? Ils ne sont pas
neutres. Ils ne donnent pas un service comme il faut, ils ne travaillent pas
pour les communautés. Ils donnent trop d'opinions personnelles; ils
penchent d'un côté, n'importe quel côté.
Je ne suis pas ici, comme on l'a dit, pour parler sur la constitution,
ni la politique dans les communications, à savoir qui devrait avoir le
pouvoir ou non. C'est parce que ça existe dans les communautés.
Tout le monde va courir quand une occasion comme celle-là se
présente. On aimerait simplement s'assurer qu'avant de les choisir, vous
allez bien vérifier, non pas les choisir et attendre ensuite pour voir
s'ils vont bien faire ou non. Pour nous, c'est très important.
M. O'Neill: Maintenant, j'ajoute simplement une autre remarque
là-dessus. Elargissons un peu le débat, parce qu'en fait, ici,
vous dites que votre préoccupation dépasse la programmation
éducative et je pense que vous avez dans la tête toutes les
expériences qui se font de ce qu'on appelle télévision
communautaire ou les expériences mêmes que les groupes ethniques
dans le moment mènent à Montréal, n'est-ce pas?
Mme Griffith: Oui.
M. O'Neill: Bon! Je vous signale que, dans le cas des programmes
d'aide aux media communautaires, c'est un jury qui porte jugement pour savoir
s'il y a lieu d'aider ou non ces media, mais ça demeure très
large. Une fois que certains critères ont été
vérifiés, c'est un fait que nous n'allons pas plus loin et
ça fait partie, quand même, des risques de la liberté.
Il nous arrive, à l'occasion, des échos de la façon
que tel ou tel TV ou radio se comporte. Mais ça fait partie des risques
de la liberté. C'est normal dans un pays et admettez que ça
deviendrait extrêmement délicat je vous écoutais
tout à l'heure de mettre ça en pratique. Vous savez, il y
a un risque encore plus grand que celui de gens qui ne s'expriment pas de la
façon qu'on souhaiterait, c'est lorsque les gens ne s'expriment pas du
tout.
Dans le principe général de ces media communautaires,
c'est une façon de redonner une sorte de possession aux gens de la base,
aux gens du milieu, avec des moyens de communication qui, en vertu de certaines
de nos traditions, appartiennent souvent à des groupes
économiquement forts. Là, on leur donne des moyens de s'exprimer.
On ne va pas voir, après ça, une fois que le jury a
regardé si ça répond à des critères
généraux, s'il y a, par exemple, une sorte d'approbation
collective, une participation du milieu, des critères comme
ceux-là.
Pour le reste, on s'attend, comme dans toute société libre
et pluraliste, qu'il y aura beaucoup de courants assez divers qui
s'exprimeront. Mais ce serait une précaution excessive que de vouloir
croire que ça puisse fonctionner selon des critères trop
rigoureux ou rigides. Alors, je comprends un peu votre inquiétude, mais
il va falloir que vous viviez avec votre inquiétude.
Mme Griffith: Ah oui, je vais vivre dans l'inquiétude. Je
voudrais juste dire, pour terminer, que, si vous choisissez avec autant de
sincérité et d'attention que ce gouvernement l'a fait avec les
ethnies les animateurs qui font de la programmation communautaire, je pense que
vous éliminerez vos risques d'erreurs. Je demande que vous continuiez
à nous donner cette attention; c'est formidable. Pour nous, c'est une
reconnaissance qui vaut plus que n'importe quoi d'autre. Merci.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Juste une précision de départ. Je
comprends que votre association a une activité très
précise. Est-ce que votre association a des rapports ou des liens,
est-ce qu'elle fait partie de la Fédération des groupes
ethniques?
Mme Griffith: Non, du tout. La Fédération des
groupes ethniques est un groupe qui représente
comme groupe. Pour nous, comme vous le voyez dans le titre, ce sont des
animateurs ethniques de radio et de télévision au Québec.
Nous sommes quatorze pays différents; des animateurs font des
émissions hebdomadaires et même quotidiennes à la radio en
d'autres langues que l'anglais ou le français.
M. Rivest: En tant que telle, votre association ne fait pas
partie de la grande fédération des groupes ethniques. C'est
simplement une association spécialisée dans le sens que vous
venez d'indiquer.
Mme Griffith: Du tout, ce sont des animateurs dans les media
électroniques ethniques.
M. Rivest: Spontanément, dans vos propres mots, qu'est-ce
qui vous intéresse dans la notion même de
télédiffusion éducative, de programmation
éducative, vis-à-vis de vos clientèles
particulières? Quel genre d'information ou de contact vous vient
spontanément et immédiatement à l'esprit? Pour vous,
autrement dit, c'est quoi la programmation éducative?
Mme Griffith: Je suis une Grecque née en Grèce;
j'ai été élevée ici et j'ai appris le
français; même si ce n'est pas le bon français, si ce n'est
pas le français de l'école, je me débrouille. Je suis
venue à l'assemblée; je me débrouille. Malheureusement,
c'est vrai que c'est malheureux, parce que je les vois souffrir tous les jours
de ce problème. Le handicap de la langue, pour la majorité de nos
communautés, est très grave. C'est le mur incassable ou le mur
qu'il est impossible d'enlever dans une journée, parce que, pour
apprendre une langue assez bien pour suivre, disons, un journal francophone ou
pour prendre votre projet de loi, le lire et le comprendre...
On pourrait choisir vingt Grecs ou vingt Portugais et je suis sûre
qu'il n'y en a pas deux qui seraient capables de le lire et de bien le
comprendre. Donc, l'handicap de la langue, en premier lieu, c'est ce sur quoi
notre groupe a du succès. Quand je parle de succès, je veux dire
succès de reconnaissance par nos communautés mêmes. On
commence à demander une reconnaissance des anglophones et des media
francophones. Mais ça fait trois ans que notre groupe est formé,
ça fait onze ans qu'on est animateurs pour nos communautés. Onze,
huit, neuf, sept ans, ça fait longtemps qu'on existe et la
reconnaissance de nos communautés, c'est le plus grand des cadeaux pour
nous. Elles ont besoin de nos services. Qu'est-ce que nous voyons? Nous voyons
une occasion formidable donnée par le projet de loi no 4 de les informer
encore mieux. On parle encore d'information. Nous travaillons pour elles.
J'ai donné des exemples aujourd'hui. Quand la Régie de
l'assurance automobile a été fondée, c'est nous, les
quatorze animateurs, qui avons informé quatorze ethnies. On a fait venir
Mme Payette; comme elle ne pouvait pas venir, elle a envoyé des
représentants. On a fait des lignes ouvertes, les gens appelaient et on
avait des interprètes pour traduire les questions. On leur a tout
expliqué la loi, qu'ils sont couverts en Ontario s'ils ont un
accident... C'est un exemple. L'augmentation des allocations familiales: le
montant du provincial a monté, le montant du fédéral a
baissé, mais on a donné un crédit de $200 en impôt.
C'est encore nous qui avons expliqué tout cela à nos
communautés.
Nous faisons la programmation éducationnelle depuis 1955 au
Québec. Nous sommes la première province au Canada à avoir
eu quelqu'un qui se soit présenté à un poste francophone
dans le temps c'était CHLP ce qui a permis, parce qu'on
croyait qu'il y avait un besoin, même en 1955, de contacter notre
nationalité, nos frères, nos soeurs, dans notre propre langue,
pour les aider à mieux s'adapter et à s'intégrer, parce
que le plus gros handicap, c'est la langue. C'est malheureux, mais c'est bien
vrai.
M. Rivest: D'accord. Alors, vous exercez... Une des dimensions de
votre activité peut être de communiquer par exemple les
décisions de l'Assemblée nationale ou du gouvernement à
vos communautés. Maintenant, sur les activités propres à
chacune des communautés de votre association, ou, enfin, aux
clientèles auxquelles vous vous adressez, j'imagine que vous vous faites
les porte-parole ou les animateurs de vos propres activités. En dehors
de l'explication des lois ou des actions du gouvernement... vous faites
ça aussi? (20 h 45)
Mme Griffith: Oui. Je vais vous dire que, pour nos propres
communautés, on travaille beaucoup suivant l'accès libre. Quand
je parle d'accès libre, je prends un exemple chez la communauté
hellénique de l'île de Montréal. Si elle veut faire un
spécial, elle vient me voir. Dernièrement, on a eu justement un
spécial qui a été accordé la semaine
dernière. Il y a un problème avec la constitution de notre
communauté hellénique, les gens veulent la changer. Ils demandent
une espèce de souveraineté eux aussi de leur Eglise.
Actuellement, il y a un problème avec les archevêques. On a eu une
ligne ouverte sur ça. La communauté est venue nous voir, elle
nous a dit: C'est un thème chaud chez la communauté grecque.
Peut-on faire une ligne ouverte? Nous avons travaillé avec la compagnie
du câble. On a le temps, on a l'équipement de production, on va
faire une ligne ouverte sur ça. Il va y avoir deux archevêques et
le président de la communauté avec son attaché. Les gens
vont pouvoir leur poser des questions, ensuite j'aurai une entrevue de 20
minutes avec eux. Cela nous garde ensemble, ça nous aide.
M. Rivest: Bon, c'est ça. D'accord. Cela donne une
idée aux membres de la commission de la nature exacte de vos
activités. Quant aux remarques du ministre au sujet des garanties
au troisième paragraphe je pense qu'au niveau de la régie
vous pourrez recevoir, comme vous l'a dit le ministre, les expertises. Il a
parfaitement raison
de ce côté-là. Vos inquiétudes...
Évidemment, il peut y avoir des erreurs, comme vous l'avez
vous-même signalé en cours de route...
Mme Griffith: Oui.
M. Rivest: ... mais je pense que globalement vous pouvez
être rassurés de ce côté-là du moins.
Je voudrais vous demander également, dans le quatrième
paragraphe, de façon précise, lorsque vous dites: "Si une
compagnie de câble au début du quatrième paragraphe
obtient une certification de la régie pour un poste
éducatif conformément à la loi, ceci ne l'oblige nullement
à rendre disponibles aux groupes ethniques les facilités
convenables"... Je voudrais que vous parliez un peu plus de vos besoins,
autrement dit les dispositifs, les appareils, tout ce qu'on peut mettre
à votre service. Dites-nous de quoi exactement votre communauté
ethnique manque le plus, sur ce plan. Est-ce de la technique, du personnel?
Mme Griffith: Je vais vous expliquer. Le groupe grec a
été le premier à commencer les programmes de
télévision en grec, dans une langue autre que le français
au Québec, en 1965. En 1968, on était trois groupes, on avait une
heure chaque semaine dans un grand studio avec trois caméras, on avait
une équipe mobile pour sortir, si on voulait. On pouvait montrer des
diapositives, des films. Quand le nombre de groupes a été rendu
à huit, on nous a restreints à une demi-heure, mais avec toutes
les accommodations techniques que j'ai mentionnées avec l'heure. Quand
les groupes sont passés à douze, on a baissé notre
demi-heure à vingt minutes, on nous a enlevé l'unité
mobile, on nous a enlevé les diapositives, les films, et on nous a
permis d'avoir l'animateur avec deux invités.
Quand les groupes sont passés, il y a deux ans, à
quatorze, on nous a limités de 20 minutes à 15 minutes par
semaine, plus de studio, une petite chambre comme une grande salle de bain,
avec une petite caméra automatisée qu'on fait fonctionner
nous-mêmes. Nous sommes réalisateurs, re-cherchistes, animateurs,
cameramen, on fait le son, l'éclairage, on est très
professionnels, on a appris bien des choses. On est là dans un petit
studio automatisé, avec un invité, pas de diapositives, pas de
lettres, on ne peut même pas présenter le nom de notre
invité. Si notre invité fait la grave erreur de faire ça,
il sort de l'écran. Ce qui nous inquiète, si on va au
national...
Vous savez, je vais expliquer quelque chose. On n'est pas ici contre le
national, parce qu'il ne faut jamais mordre la main qui vous donne à
manger. C'est la seule compagnie qui nous ait acceptés, même si
elle diminue notre temps. C'est notre maison jusqu'à maintenant, c'est
la seule qui nous accepte. Mais au lieu de les améliorer on a
diminué les services, c'est là où on a vu tout de suite la
différence. Ce qui nous inquiète, c'est déjà
arrivé, la compagnie de câble s'était
présentée au secrétariat d'État et avait
demandé une subvention en notre nom. C'est bien beau, je n'ai rien
contre ça, je ne dis pas que ce sont des voleurs, mais on n'a pas vu la
subvention.
Mais si cela a été donné, on aurait voulu savoir
combien, à quoi cet argent va servir, peut-être que ces gens
aimeraient avoir vingt employés, mais on sait qu'on peut s'arranger
mieux avec une autre caméra et seulement neuf employés. Cela
n'est jamais arrivé. Ce qu'on dit ici, c'est la même chose. Si ces
gens se présentent et disent: D'accord, on veut toute une nouvelle
équipe mobile, on veut que vous nous payiez quatre employés pour
aider à la programmation communautaire éducative des groupes
ethniques, on croit qu'on a le droit d'être entendus, sinon avant que
vous l'accordiez, sinon lors de la présentation, au cours d'une audience
publique où on peut être présents. Parce que si la
régie leur donne une certification on aimerait savoir ce que vous leur
donnez, pour qu'on puisse venir vous assurer ensuite que cette équipe
sert pour la programmation éducationnelle, et non pas pour le hockey.
Peut-être que le hockey est éducationnel pour d'autres, mais je
pense qu'il y a des choses plus importantes. C'est ça qu'on a peur de
voir arriver, peut-être par suite d'une erreur administrative, je ne dis
pas que ce serait intentionnel. On ne le sait pas, ça n'a pas
été fait encore, mais on veut éliminer les risques que
quelque chose marche mal. C'est une loi qui peut marcher très bien, j'en
suis sûre, parce que ça fait onze ans qu'on fait des programmes
éducationnels, bénévolement.
C'est comme j'ai dit dans ma présentation, on nous
reconnaît, c'est un des premiers pas et nous avons le plaisir d'avoir
connu le succès après toutes ces années.
M. Rivest: Sur le plan de... je suis rendu à la
deuxième... Juste une précision, en réponse à une
question du ministre au sujet des frictions, etc. De quel ordre, d'une
façon générale, sont les problèmes que vous avez
connus? Est-ce que c'est avec les intercommunautés ethniques? Est-ce que
c'est au niveau des personnes? Est-ce que c'est au niveau de la programmation,
des initiatives que vous prenez? Dites-nous où il y a des critiques,
où il y a des frictions.
Mme Griffith: II y a deux exemples qui m'étonnent. Encore
une fois, la liberté de parler, c'est une démocratie, je suis
bien d'accord, mais quand je vois un groupe qui est censé faire de la
programmation éducationnelle ou communautaire, et quand je vois les
besoins de ma communauté et que je vois quelqu'un prendre une demi-heure
pour parler des partis politiques en Grèce, comment il faut s'organiser
ici pour ramasser de l'argent pour l'envoyer là-bas, pour faire tomber
l'autre gouvernement, et qu'on ne prend pas cette demi-heure pour expliquer
notre propre gouvernement, pour expliquer le référendum avant que
le monde vote, pour que les gens sachent quoi voter, pour ne pas voter comme
des fous, quand je vois quelqu'un prendre un journal et que, dans le journal,
on parle contre les
ministres qui ont donné les subventions, qu'on rit d'eux à
leur face et qu'il n'y a rien qui arrive, cela me révolte. C'est avec
votre aide technique et financière, mais avant que cela arrive avec la
loi no 4, je voudrais vous en parler. Je ne dis pas que c'est votre faute.
Peut-être que ce n'est pas arrivé à vos oreilles, mais
j'étais très contente que cela commence et que vous vouliez nous
attendre.
M. Rivest: Remarquez que parler pour un ministre, c'est exercer
sans doute une liberté tout à fait légitime, ne pas parler
d'un ministre personnellement, mais parler de ses politiques; parler contre
aussi, c'est exercer...
M. Bisaillon: Prendre le double du temps contre...
M. Rivest: Absolument pas. La seule chose, c'est que... Vous
répondrez à la suite de cela. Ils m'ont interrompu. Je suis
pourtant très prudent, j'avance sur le terrain d'une façon
remarquablement prudente.
Voici ce que je voulais vous demander. Qui, d'après vous, devrait
décider de ces arbitrages entre vous? Le danger à cela, c'est que
vous, vous pouvez avoir un point de vue tout à fait légitime, et
d'autres membres de votre communauté peuvent également avoir un
point de vue tout à fait légitime sur le partage du temps, de
l'utilisation des équipements. Qui, d'après vous,
spontanément, peut faire l'arbitrage de façon que le bon exercice
de la liberté puisse présenter, dans votre programmation, pour
vos communautés, les deux côtés d'un problème?
Mme Griffith: Avant de répondre à cela, je voudrais
spécifier que ce n'est pas une opinion qu'on a donnée dans le
journal. On a ouvertement traité un ministre de menteur. D'après
moi, il y a beaucoup plus de choses qui peuvent aider la communauté,
qu'on aurait pu mettre dans cette page.
M. Rivest: Est-ce que c'est un ministre
fédéral?
Mme Griffith: Non, provincial. Pour moi, ce n'est pas de la
programmation éducationnelle, cette page qui a été
écrite.
M. Rivest: Je comprends votre point de vue, madame. La seule
chose sur quoi je veux insister, c'est que je crains que ce que vous
évoquez avec beaucoup de conviction et je suis convaincu que vous
avez des problèmes réels, vous n'avez pas inventé cela, je
suis sûr que c'est réel il faut faire attention...
Mme Griffith: Bien sûr.
M. Rivest: ... parce que vous exprimez un point de vue, et on
l'accepte, en tant que tel. Vous le faites très bien, on vous en
félicite. Mais il peut y avoir d'autres gens, dans les
différentes communautés, qui peuvent avoir d'autres point de
vue.
Mme Griffith: II y en a.
M. Rivest: Je vous demande comment vous allez faire l'arbitrage
d'une façon sereine, de façon à rendre justice à
tout le monde, à l'intérieur des moyens qui vont être mis
à la disposition de vos gens?
Mme Griffith: Selon moi, cela fonctionne vraiment à trois
niveaux. Premièrement, le premier niveau, le gouvernement. Il faut
choisir quelqu'un à qui permettre cette aide-là. Si cette
aide-là est accordée on parle de plusieurs heures ou d'un
temps qu'on ne limite pas la personne à qui vous l'accordez doit
être neutre, afin de permettre toutes les différentes opinions,
comme vous venez de le dire.
Maintenant, on tombe au deuxième niveau. Cette personne que vous
choisissez devra choisir après. Disons qu'il y en a vingt qui se
présentent et qu'on a du temps seulement pour cinq. Sur les vingt, il
faut choisir les cinq. Cette responsabilité-là revient à
la personne que vous avez choisie. C'est pour cela que c'est important d'avoir
une personne neutre, parce que, s'il faut en choisir cinq sur les vingt, on ne
doit pas entendre cinq opinions semblables. Il faut essayer d'en choisir cinq
avec des opinions assez différentes ou un point de vue assez
intéressant. Après, il reste aussi les vingt qui se
présentent. Qui les a choisies? Qui les a envoyées? Là, on
retombe au troisième niveau, c'est la communauté même.
Peut-être que la première personne a été
choisie par 30 000 personnes, peut-être que la vingtième, c'est
1000, mais la vingtième devrait être entendue autant que la
première.
M. Rivest: En termes pratiques, par exemple, vous avez dit
tantôt que vous aviez invité, je crois, un ministre pour le
problème de l'assurance automobile...
Mme Griffith: Oui.
M. Rivest: ... disons les allocations familiales. Il y a eu un
conflit entre Québec et Ottawa à ce sujet-là; entre
autres, les allocations familiales. Est-ce que vous avez eu quelqu'un qui a
représenté le gouvernement du Québec à une de vos
émissions?
Mme Griffith: Pour les allocations familiales? M. Rivest:
Oui.
Mme Griffith: Non, ce sont des programmes qu'on a faits
nous-mêmes, on a fait des recherches. On a les informations et on les
transmet à notre auditoire. On n'émet jamais d'opinions. Si les
informations sont bien données, on est très fiers et je suis
sûre que mon peuple, que les Grecs, même s'ils ne parlent pas la
langue, si cela a été explicité honnêtement, peuvent
décider eux autres mêmes ce qu'ils veulent faire, quel
côté ils veulent prendre et qui ils veulent supporter.
M. Rivest: Je suppose qu'il y en a qui ne sont pas d'accord et,
à ce moment-là, ils vous le disent.
Mme Griffith: II y en a qui ne sont pas d'accord, qui aimeraient
qu'on soit révolutionnaire, très à droite, très au
centre, très à gauche, mais cela ne se fait pas, parce que, dans
ma cause, on est 80 000 Grecs. Je ne peux pas exclure ou courir le risque de
limiter même une petite opinion de cette communauté-là; je
n'ai pas le droit de le faire, d'après moi. Je pense qu'une
qualité importante pour des animateurs de radio et de
télévision... Pour nous, il n'y a pas de media qui aient une plus
grande influence que les communications. Peut-être qu'on termine de
manière un peu raide. Le gouvernement est responsable de la tournure que
prendrait ce programme. On veut s'unir sur un toit, ce qui est très
difficile. Il y a un temps où on nous a dit que c'était
impossible de le faire, mais regardez, on est quatorze ethnies avec le sang
chaud et cela pète vite... C'est mon jouai de la rue
Bourbonnière!
M. Rivest: Non, le seul problème, c'est pour le journal
des Débats.
Mme Griffith: On a réussi à le faire. On est
quatorze ethnies. On prend nos décisions et on vote pour le respect de
la majorité. On a la chance d'exprimer nos opinions, on fait nos
programmes très neutres et on donne toutes nos informations. En
politique, aux élections municipales, on a fait des lignes ouvertes, on
a fait venir tous les partis. On a donné la chance aux Grecs, aux
Allemands, aux Juifs, aux Vietnamiens de poser des questions dans leur langue
maternelle. Ils ont compris après. Quand ils sont allés voter,
ils ont cru qu'ils jouaient finalement un rôle comme vrais
Québécois à 100%, parce qu'ils savaient, ils
étaient informés et ils votaient pour ce qu'ils croyaient le
meilleur pour Montréal.
M. Rivest: Est-ce qu'ils se sont trompés?
Mme Griffith: Je ne le sais pas, je n'ai pas le droit de le
dire.
M. Rivest: Je vous remercie. Je ne veux pas abuser du temps de la
commission. Merci, madame.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: M. le Président, quand madame a
parlé au début de quatorze pays, je comprends que
c'étaient quatorze groupes ethniques habitant la région de
Montréal, par exemple...
Mme Griffith: Oui.
M. Le Moignan: ... que votre groupe, votre association
représente de façon très particulière.
Quand vous mentionnez vos expériences du passé, pour ceux
qui vous desservaient, vous avez fait certaines nuances, certaines
réserves quant aux réalisateurs, quant aux animateurs, à
leur compétence, à leur expérience. Vous n'étiez
pas sur un réseau public, mais vous faisiez affaires avec une compagnie,
comme vous l'appelez, de câble...
Mme Griffith: Câblodistribution, oui.
M. Le Moignan: À ce moment-là, quand on arrive ici
avec le projet de loi 4 sur la programmation éducative,
évidemment, au début, cela a commencé par une ou deux ou
trois associations et on vous donnait peut-être une heure d'antenne.
À ce moment-là, vous donniez de l'information, vous ne
répondiez pas nécessairement aux normes de programmation
éducative que le gouvernement aimerait voir s'implanter. (21 heures)
Quand vous parlez d'information, de politique et d'éducation,
quelle différence faites-vous entre... Vous avez parlé tout
à l'heure d'éducationnel et de communautaire. Quelle est votre
expérience vécue au début qui vous a attiré des
ennuis?
Mme Griffith: Les ennuis dont j'ai parlé tout à
l'heure?
M. Le Moignan: Oui.
Mme Griffith: J'ai des exemples, mais je ne mentionnerai pas de
noms ni de groupes. Si jamais vous faites une commission pour vérifier
cela, je serai très heureuse de venir, mais en parlant de
moi-même, cela fait huit ans que je fais de la radio et de la
télévision à temps plein pour les communautés
ethniques. J'ai eu du bon temps. Pour nous, le temps n'a pas de valeur quand on
veut faire de la programmation de ce genre. Quand on voit une demi-heure, ou
qu'on lit une page, ou qu'il y a une heure à la radio, d'après
nous, gaspillée... parce qu'informer, éduquer, ce n'est pas
donner ton opinion et dire à la communauté: Fais cela, crois
cela, il faut supporter cela. Ce n'est pas cela. D'après moi, ce n'est
pas seulement elles qui sont en charge de ces moyens de communication. Quand je
vois qu'on va encore plus loin et qu'on commence à insulter... Ce n'est
pas la manière d'aider notre peuple à s'adapter à ce
nouveau pays que de montrer qu'on n'a pas de respect pour les gouvernements. Je
pense qu'on peut consacrer ce temps... Vraiment, on a beaucoup de murs à
franchir et, avant qu'on ne brise tous ces murs... Après,
peut-être qu'on pourra se permettre des opinions personnelles et des
choses que les médias francophones et anglophones se permettent
aujourd'hui. Pour les ethnies, c'est quelque chose de nouveau, c'est un nouveau
bébé, le média, sutout qu'on puisse s'en servir dans notre
langue maternelle. Même si j'ai dit depuis 1955, c'est nouveau, parce que
cela fait deux ans qu'on est reconnu. Avant cela...
M. Le Moignan: Quand vous avez commencé, vous étiez
seuls, ensuite vous étiez trois. La com-
pagnie en question vous donnait une heure d'antenne. Maintenant, quand
vous avez abordé six, huit, douze groupes, normalement, la cote
d'écoute ou le nombre d'auditeurs a dû aller en
s'élar-gissant...
Mme Griffith: Plus grande, naturellement.
M. Le Moignan: J'aimerais savoir pourquoi on a diminué, on
a rétréci le nombre de minutes.
Mme Griffith: D'accord. La raison qu'on nous donne est que
l'argent disponible pour les groupes ethniques est d'un tel montant. Les
groupes ont grandi, mais le montant disponible reste le même. Avec le
même montant d'argent, il faut accommoder huit groupes, puis douze, puis
quatorze groupes. Les compagnies nous disent: On n'avait le choix que de
diminuer le temps pour le consacrer à tous les groupes. C'est leur
réponse.
M. Le Moignan: En somme, comment peut-on arriver à
justifier une répartition du temps qui soit équitable pour les
Grecs, les Italiens, les Polonais?
Mme Griffith: Je vais vous le dire. National cablevision, le
canal 9, nous donne à tous quinze minutes. Maintenant, on a quinze
minutes par semaine dans le studio automatisé, comme je l'ai dit tout
à l'heure au début. Il y a un programme qui est entré il y
a environ une couple de mois, qui a une heure et demie par semaine dans les
grands studios parce qu'on paie pour. Nous, on est un groupe sans but lucratif,
on n'a pas le droit de faire de la publicité. C'est un canal
communautaire. Payer pour, cela coûte trop cher. Parfois, on demande
l'équipe mobile les fins de semaine pour aller couvrir quelque chose
d'important. On nous demande de payer les employés, les techniciens en
double, mais on est endetté de $200, on n'a rien dans notre caisse. On
n'est pas pour commencer à payer toutes les semaines $2000 ou $3000
à des équipes.
M. Le Moignan: Ceux qui profitent de ces moyens de communication,
est-ce qu'ils versent une contribution ou est-ce qu'ils ne versent rien?
Mme Griffith: On ne verse absolument rien. La compagnie du
câble y gagne, parce que, comme vous l'avez dit, elle a des
abonnés qui viennent des communautés ethniques qui veulent suivre
nos programmes. 10% de tout son argent est supposé être
consacré, d'après la loi du CRTC, à la programmation
communautaire. Je n'ai jamais vu son budget. Je ne sais pas combien elle fait
par année. Je n'en suis pas sûre, mais on pense que les 10% ne
vont pas aux quinze minutes par semaine, c'est impossible. Les compagnies de
câble font un grand profit. Elles ont 200 000 abonnés, si je ne me
trompe pas. 10% de tous ces abonnés par mois, on ne voit pas cet argent,
ces 10% en facilités, on ne les voit pas du tout. On a commencé
avec quelque chose de bon et cela a diminué. La raison qu'on nous donne,
c'est que le montant est le même mais que les groupes ont
augmenté. Naturellement, il faut couper quelque part. On coupe le temps
des huit pour en permettre dix; on coupe le temps des dix pour en permettre
douze; on coupe le temps des douze pour en permettre quatorze. On lui a
posé la question, à savoir que, s'il y en a deux autres qui
entrent, est-ce qu'on va nous couper nos quinze minutes à cinq?
Après cela, s'il y en a deux autres qui entrent, qu'est-ce qu'elle va
faire? On va se présenter une fois par six mois!
M. Le Moignan: Vous avez mentionné quelque part que vous
aimeriez préparer votre programmation vous-mêmes. Est-ce qu'il y a
eu des discussions, des pourparlers avec cette compagnie pour vous permettre de
discuter et de faire une programmation qui soit éducative?
Mme Griffith: Oui, on a essayé depuis 1976, quand cette
association s'est formée. La raison pour laquelle on s'est formé,
comme le président peut vous le confirmer, et n'importe quel de nos
quatorze membres, était le besoin qu'on avait, nous, de se donner
premièrement le courage et la force l'un à l'autre pour endurer
ce qui arrivait aux compagnies de câble. On s'est formé, on s'est
présenté assez souvent et on avait toujours la même
histoire, à savoir qu'ils sont très sympathiques, comme ils nous
l'ont dit. Ils aimeraient nous aider. C'est bien dommage, nous disaient-ils,
mais les moyens économiques ne permettent que ça.
M. Le Moignan: Mais, aujourd'hui, vous avez passé une
belle journée avec le ministre, nous avez-vous dit.
Mme Griffith: Oui.
M. Le Moignan: Vous avez probablement parlé de
Radio-Québec.
Mme Griffith: Un petit peu, oui.
M. Le Moignan: Radio-Québec, the head office is in
Montréal.
Mme Griffith: Yes, I know.
M. Le Moignan: Maintenant, est-ce que, du côté du
ministre, il y a des possibilités d'utiliser Radio-Québec?
Mme Griffith: Je pense que tout cela dépend de vous ici,
à l'Assemblée nationale.
M. Le Moignan: Mais est-ce que vous l'avez demandé?
Mme Griffith: Oui, on l'a demandé depuis longtemps.
M. Le Moignan: Est-ce que vous avez eu une réponse du
ministre?
Mme Griffith: Très intéressée, et c'est
à vous à décider, vous tous ensemble, je crois.
M. Le Moignan: Le ministre demeure intéressé.
Mme Griffith: J'espère.
M. Le Moignan: Mais vous n'avez pas de réponse
concrète?
Mme Griffith: À l'automne. Ils sont censés
consacrer, si possible, un peu de temps aux ethnies.
M. Le Moignan: On vous le souhaite.
Mme Griffith: J'espère.
M. Le Moignan: Be careful!
Mme Griffith: Merci.
M. Le Moignan: On vous le souhaite.
Mme Griffith: Merci.
M. O'Neill: M. le Président, j'ajoute que je leur ai
transmis la réponse même que M. Barbin nous a donnée ici,
à savoir que, dans une première étape, il
prévoyait, dès l'automne, mettre à la disposition des
groupes ethniques une heure et demie par semaine au départ.
M. Le Moignan: Cela, c'est...
M. O'Neill: Dans une première étape.
M. Le Moignan:... dans la région de Montréal, par
exemple?
M. O'Neill: Oui, il y a déjà deux personnes de
Radio-Québec qui s'occupent de ce dossier et prennent contact avec les
groupes ethniques pour savoir ce qu'ils veulent, ce qu'ils désirent,
quel genre de réalisation ils voudraient, quel genre d'objectifs ils
voudraient atteindre avec eux.
M. Le Moignan: Oui, à ce moment-là, vous allez
gagner du temps. Je suis content pour vous autres.
Mme Griffith: Merci.
M. Le Moignan: Mais est-ce que vous allez continuer de transiger
avec votre compagnie quand même?
Mm* Griffith: Avec National Cablevision? Ce qu'on a
décidé jusqu'à maintenant je ne peux pas parler
pour tous les membres et dire si ça va changer demain on a
décidé de rester. SI National Cablevision nous permet du temps,
on va le garder. Comme je vous l'ai dit, le temps, pour nous, a une valeur...
Si on gagne un peu de temps ici, on ne voudrait pas laisser l'autre. Mais si
c'est dans les arrangements, on ne le sait pas, peut-être que ça
changera plus tard. Mais, comme c'est maintenant, on aimerait garder ce qu'on
a, même si c'est un petit peu, chez National Cablevision, oui.
M. Le Moignan: Oui, et si Radio-Québec vient à
votre secours, je suis bien content pour vous. Merci.
Mme Griffith: Merci beaucoup!
Le Président (M. Jolivet): Avec la permission des membres
de la commission, le ministre de l'Immigration voudrait prendre quelques
instants.
M. Le Moignan: D'accord.
M. Couture: Ce n'est pas forcément pour parler sur le
fond, M. le Président, c'est peut-être pour apporter une
correction au niveau de l'information. Le député de Jean-Talon,
au début de ses observations, demandait à l'association si elle
faisait partie de la Fédération des groupes ethniques et il
parlait de cette fédération en disant: Est-ce que vous faites
partie de la grande fédération?
Au niveau de l'information, c'est peut-être utile de dire qu'au
Québec, il y a près de 600 associations ethniques. Il y a
plusieurs fédérations. La Fédération des groupes
ethniques, je suis obligé de le dire, n'est pas une grande
fédération. C'est une des fédérations des groupes
ethniques. Pour donner un exemple, le Congrès italo-canadien, qui couvre
énormément d'associations italiennes, ne fait pas partie de la
fédération et aussi le Rassemblement des Africains, le
Rassemblement des groupes d'Amérique latine, etc.
Je pense que c'était utile de le dire, parce que ça
donnait l'impression que le fait de ne pas faire partie de la
Fédération des groupes ethniques lui donnait moins d'importance.
Je pense que la Fédération des groupes ethniques regroupe un
certain nombre d'associations, peut-être au-delà de 20 à
25, mais elle a une importance assez réduite, je crois,
actuellement.
Le Président (M. Jolivet): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Les groupes
ethniques peuvent utiliser le câble 9, vous l'appelez le...
Mme Griffith: Cablevision?
Mme Lavoie-Roux: Oui, National Cablevision. Est-ce que le seul
temps mis à votre disposition, c'est, disons, quinze minutes
multipliées par quatorze groupes présentement, par semaine?
Mme Griffith: Cela, c'est ce qu'on a de régulier.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Mme Griffith: On peut se présenter chaque semaine, la
journée qu'on enregistre.
Mme Lavoie-Roux: Chacun des groupes?
Mme Griffith: On sait qu'on a nos quinze petites minutes, chaque
groupe. Mais on a droit aussi à plus si on a une fête très
spéciale. Tout à l'heure, j'ai mentionné que j'ai
demandé le grand studio pour faire un spécial d'une heure de
ligne ouverte, concernant un problème de la communauté grecque,
pour permettre aux gens de poser leurs questions aux deux parties et entendre
les opinions. Cela nous a été accordé.
Mais quand c'est quelque chose comme le programme de PELO, quand M.
Morin l'a présenté à l'école
Barthélemy-Vimont, le spectacle n'était pas assez long. On
voulait l'équipe mobile pour aller le couvrir. Cela a été
un programme juste pour les ethnies, couvert par les media anglophones et
francophones. Les Anglais savaient ce que c'était PELO, les
Français le savaient naturellement, mais les ethnies, quand
c'était pour nous, on n'avait pas l'équipement ni les services
pour s'en servir.
On a su plus tard qu'ils auraient pu facilement nous donner
l'équipe. Peut-être que ce n'était pas vrai, quelqu'un
voulait nous dire ça ou peut-être... les fins de semaine. Chez
nous, on fête les fêtes nationales. C'est comme pour la
Saint-Jean-Baptiste, les fins de semaine, c'est le meilleur temps. On ne peut
l'avoir les fins de semaine. Ils nous permettent des spéciaux si on le
demande dans le bon temps, si l'équipe est prête. Parfois, elle ne
marche pas, parfois il manque une pièce, parfois, les techniciens sont
malades, le samedi et le dimanche. Je ne sors pas. Cela dépend.
Mme Lavoie-Roux: D'accord. Est-ce qu'il y a des groupes ou
d'autres groupes à l'extérieur de l'Association des groupes
ethniques du monde de la radio et de la télévision du
Québec qui utilisent le Câble national?
Mme Griffith: D'autres groupes qu'anglais ou français?
Juste des ethnies?
Mme Lavoie-Roux: Oui, à l'extérieur de votre
association.
Mme Griffith: Sur le Câble national, il y a un groupe
arménien qui fait un programme. Il l'avait laissé un certain
temps, mais il a recommencé. Il y a un autre groupe qui est
entré: deux Juifs. Le groupe juif est représenté, mais ce
sont des Juifs qui parlent français. Cela s'appelle les
Séfarades, qui deviennent la semaine prochaine membres de notre
association. Je leur ai parlé encore aujourd'hui. Il reste un groupe sur
seize qui n'est pas membre de notre association et qui se sert des services du
canal 9, de National Cablevision.
Mme Lavoie-Roux: C'est le groupe arménien. Mme
Griffith: Oui.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'il y a d'autres groupes qui utilisent
la télévision? Par exemple, est-ce qu'il n'y a pas le canal 12,
à un moment donné, qui...
Mme Griffith: Oui, le canal 12, CFCF, comme on l'appelle. Il y a
le programme italien et le programme grec. Mais ici on tombe dans un
problème, parce que nous avons pensé également d'aller
acheter du temps, peut-être, d'une station privée.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'ils achètent ce temps ou...
Mme Griffith: Ils l'achètent et c'est ça qui le
rend rentable. Par exemple, le groupe grec achète une demi-heure.
Déjà, il commerce avec un autre commerce, d'accord? Il a une
agence de voyages. Il faut qu'il y consacre la plupart de son temps. La
première chose qu'il fait, c'est de passer assez d'annonces pour refaire
l'argent que ça lui a coûté pour la demi-heure. C'est
possible d'en faire un peu d'autre aussi pour le temps que ça lui prend.
S'il reste du temps, il faut qu'il montre des choses culturelles. D'habitude,
il y a un petit film de la Grèce qu'on montre, un chanteur ou des
danseurs, des fois, de petites pièces de théâtre qu'on
montre, de cinq à huit minutes, parce qu'il y a juste une demi-heure. Le
reste du temps, c'est s'il a le temps de faire de petites nouvelles et de la
publicité, parce qu'il faut donner son attention à la
publicité pour refaire l'argent que ça lui a coûté
d'acheter l'heure. C'est ça, les problèmes avec les institutions
privées de media.
M. Guay: Si le député de L'Acadie me le permet, je
voudrais élucider cette question. Si je comprends bien, dans le cas de
CFCF, le canal 12, à l'intérieur d'un bloc d'une demi-heure, un
commerçant ou des commerçants achètent la période
totale de la demi-heure...
Mme Griffith: Non, le monsieur qui fait le programme, qui est
responsable du programme, achète la demi-heure et, après, avec
deux employés, il fait une tournée dans la communauté pour
chercher des annonces. Les magasins paient juste sur le "spot" de 30 secondes
ou de 60 secondes.
M. Guay: À ce moment, si je m'y comprends bien, le
résultat du compte, c'est qu'il y a beaucoup plus d'annonces
commerciales au cours de la demi-heure qu'il n'y en a normalement, pendant une
émission du soir.
Mme Lavoie-Roux: C'est communautaire.
M. Guay: Restons à CFCF, parce qu'il y a des
règlements du CRTC au sujet du nombre de minutes de publicité
qu'on peut diffuser à l'intérieur d'une période d'un quart
d'heure, d'une demi-heure, d'une heure, si je comprends bien ce que vous dites,
sous réserve de vérifier ces
règlements, qu'on ne respecterait pas ces règlements,
c'est-à-dire qu'on aurait une plus grande quantité de
publicité que celle que l'on retrouve normalement dans des
émissions en anglais de CFCF à 19 heures le soir.
Mme Griffith: Premièrement, non seulement je ne me permets
pas, mais je ne suis pas en mesure de vous répondre, parce que je ne
connais pas du tout les règlements du CRTC. Peut-être que ce n'est
rien du tout, concernant les règlements, mais, pour moi, ça a
l'air de beaucoup. Je vois plus d'annonces dans cette demi-heure, comme vous
l'avez dit, qu'à un programme régulier. Mais le problème,
c'est qu'il y a beaucoup de différentes annonces de 15 secondes et 30
secondes, parce que ça coûte cher. C'est difficile pour un petit
commerçant comme Costas' Grocery de payer $300 pour faire 60 secondes
à un gros canal comme le 12. Alors, ils vendent beaucoup de courtes
annonces de 10, 15, 20, 30 secondes. Quand on regarde ça,
peut-être pour ça que ça me semble long, toutes ces minutes
accumulées, comme les lois le disent. (21 h 15)
Mme Lavoie-Roux: En dehors du canal 12 je vais
peut-être apprendre le nom ...
Mme Griffith: Ce sont les compagnies de câble
seulement...
Mme Lavoie-Roux: National Cable...
M. Guay: Câblevision Nationale, depuis quelques
années, parce que ces gens ont dû se franciser.
Mme Lavoie-Roux: Tout ce que je sais, c'est que c'est le canal 9.
Je vais l'appeler le canal 9, je vais avoir moins de problèmes.
Mme Griffith: C'est ça, le 9, c'est parfait.
Mme Lavoie-Roux: ... qui offre du temps d'antenne aux quatorze
groupes; il y en aura quinze, il y a le groupe arménien qui est encore
à l'extérieur...
Mme Griffith: Si vous permettez, j'aurais peut-être
dû le dire le président l'a mentionné les
compagnies de câble, comme vous le savez, sont licenciées par
territoire et c'est complètement séparé l'une de l'autre,
comme entreprise privée, disons. Câble TV est aussi une compagnie
de câble, pas aussi puissante, mais aussi une des classes A, comme on
appelle les compagnies de câble. Câble TV, à un moment
donné, prenait nos programmes, les montrait, comme National Cablevision
les montrait et les donnait ensuite à Câble TV pour les montrer
sur son territoire. Quand on a changé pour se servir des studios
automatisés, Câble TV elle-même a répondu que la
qualité de ces programmes dans les studios automatisés
était tellement pauvre qu'elle n'acceptait plus de les montrer.
Maintenant, douze groupes ne passent plus au Câble TV qui est l'autre
canal 9 d'un autre district. Il ne reste que deux groupes qui peuvent se servir
des studios de Câble TV, parce que chaque compagnie a ses propres studios
pour faire de la production.
Il y a aussi un groupe sur Câble TV qui n'est pas National
Cablevision, qui s'appelle les "Black Is"; ce sont les Noirs africains de
Québec. Eux aussi deviennent membres de l'association ils ont
été acceptés la semaine prochaine, à la
même rencontre que pour les Sefaraddim. Maintenant, il y a
Télécâble Vidéotron qui couvre la rive sud. Elle
aussi est assez puissante. Télécâble Vidéotron ne
nous a jamais refusé accès à ses studios
automatisés. Ce gens possèdent eux aussi des studios
automatisés. Ils sont même allés plus loin, ils sont
prêts à montrer à deux techniciens ou à deux types
que nous trouverons comment fonctionnent les "portapacks" qui sont noir et
blanc, très difficiles à faire fonctionner. La seule raison pour
laquelle les quatorze groupes ne se sont pas encore rendus à
Télécâble Vidéotron, c'est parce que ça
dessert la rive sud et c'est trop difficile pour nous actuellement de nous
rendre sur la rive sud parce que notre travail est
bénévole, après avoir fini notre travail régulier
chaque jour de traverser le pont, d'aller à Saint-Hubert pour
préparer du travail pour Télécâble Vidéotron.
On pourrait faire des copies de nos programmes. Je l'avais fait en 1977, cela a
duré six mois, parce que chaque copie coûte $47; c'était
impossible de continuer. Les autres groupes voulaient faire la même chose
quand ils ont vu que National ne donnait pas les programmes pour qu'on les
garde, pour qu'on puisse les passer sur les autres câbles. Il fallait
faire des copies, c'était trop cher; alors, on a arrêté ce
système-là.
Quand on doit faire les copies des programmes qu'on prépare pour
National et qu'il faut les payer c'est $47 par copie de vidéo;
$47 multiplié par quatorze, à toutes les semaines, si je ne me
trompe pas, ça fait environ $600; on ne les a pas, cela a
éliminé ça.
Si on peut s'organiser avec l'aide du projet de loi no 4, on aimerait
couvrir tous les territoires de toutes les compagnies de câble, si on ne
progresse pas comme à Radio-Québec, comme monsieur a dit tout
à l'heure.
Mme Lavoie-Roux: Si je comprends bien, il y a votre
fédération ou votre association de groupes ethniques du monde de
la radio qui est un groupe intéressé à la
télévision ou à la production d'émissions pour les
groupes ethniques, mais il y a, en dehors de cette association, d'autres
groupes qui vont utiliser CFCF ou les autres câbles dont vous parliez,
mais ceux-là n'ont pas été invités, si je comprends
bien, M. le ministre...
M. O'Neill: Vous parlez de quels groupes?
Mme Lavoie-Roux: D'autres groupes, ce ne sont pas les seuls
groupes ethniques qui s'intéressent à la télévision
pour les groupes ethniques.
Mme Griffith: II y en a deux qui ne sont pas
représentés par nous, ce sont les "Black Is" et les
Sefaraddim qui sont acceptés, qui vont devenir membres. Le seul
groupe qui n'est pas représenté par nous, ce sont les
Arméniens, c'est M. Baghdjian.
Une voix: C'est le groupe le plus important.
Mme La voie-Roux: Bon! Il reste qu'on a fait un choix bien
précis. Je ne mets pas en doute votre représentativité,
vous représentez quatorze groupes, mais il reste que l'on revient quand
même au point de départ. Dans une commission comme celle-ci, il
aurait été intéressant d'entendre le plus grand nombre de
groupes possible.
M. O'Neill: Madame, on a proposé un compromis, vous l'avez
accepté; alors, marchez donc suivant ce compromis.
Mme Lavoie-Roux: Si on ne l'avait pas accepté, il n'y
aurait pas eu de commission parlementaire du tout.
M. O'Neill: Cela fait quatre ans qu'on consulte le monde. On a
fait une autre consultation.
Mme Lavoie-Roux: Quand avez-vous commencé?
M. O'Neill: C'est vous qui avez commencé.
Le Président (M. Jolivet): Si vous voulez faire cette
dispute lors de... s'il vous plaît!
M. O'Neill: En plus de consulter, on veut décider à
un moment donné. C'est le groupe le plus représentatif, aucun
problème.
Mme Lavoie-Roux: Je ne pensais pas que vous vous offusquiez, M.
le ministre.
M. O'Neill: Je le précise, parce que, excusez-moi, vous
radotez. Cela fait à peu près cinq fois que vous dites la
même chose là-dessus. Nous avons accepté ensemble un
compromis, mettons-le en pratique et continuons.
Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie de votre langage, M. le
ministre. Je pourrais vous retourner le compliment...
M. O'Neill: Retournez-le, si vous voulez.
Mme Griffith: Si vous permettez, madame, excusez-moi, le groupe
qui n'est pas présent, l'arménien, se trouve sur le même
réseau que nous, avec le même temps, il n'y a rien de
différent de ce qu'on vous expliquait du tout.
Mme Lavoie-Roux: D'accord. Tout à l'heure, mon
collègue de Jean-Talon vous a posé une question, à savoir
quelles étaient vos priorités ou vos objectifs en regard d'une
télévision éducative. Si j'ai bien compris, le
problème, que vous avez identifié comme en étant un
majeur, a été celui de la langue ou de la communication, à
cause de la barrière de la langue.
Mme Griffith: C'est ça.
Mme Lavoie-Roux: À ce moment-là, vos efforts ont
porté sur l'interprétation, et je crois que vous parliez surtout
pour la communauté grecque, à l'intention de votre
communauté de certaines mesures gouvernementales...
Mme Griffith: Les ministères, les services, tout
ça.
Mme Lavoie-Roux: ... des ministères et des services.
À part cette dimension, comment voyez-vous les services que la
télévision éducative pourrait rendre à votre
communauté, parce que c'est elle que vous connaissez le mieux?
Mme Griffith: Je peux prendre l'exemple de la langue tout de
suite, parce qu'on a déjà offert le projet. On a un rêve,
peut-être qu'on rêve très grand, mais avec votre
coopération, je suis sûre qu'on peut tous ensemble, en
travaillant, le réaliser. Il faut apprendre le français. On
trouve que par l'entremise de la télévision, avec l'image et un
bon professeur, on pourrait faire apprendre le français aux 14
communautés ethniques avec un succès que personne d'autre ne peut
réussir. Le plus grand problème quand il y a des groupes
subventionnés, on a fait beaucoup de recherche durant ces années,
c'est qu'un groupe qui est subventionné pour apprendre le
français, il faut qu'il se déplace. On est fatigué, on
travaille tous les deux dans la famille, et quand on arrive chez soi, ça
ne vous tente pas, quand on a des enfants surtout, de les laisser pour aller
suivre un cours d'une heure ou deux.
Avec la technologie qu'on a ici dans cette formidable province, surtout
avec la câblodistri-bution, si on veut rester sur ça, si on peut
amener tout ça dans les foyers, ce serait un rêve. À part
le français, il y a notre propre culture, notre propre héritage.
Nous faisons présentement un effort auprès des jeunes qui sont
nés ici ou qui sont venus très jeunes comme moi. Je suis
arrivé ici venant de la Grèce à l'âge de deux ans.
Grâce à ma grand-mère, qui me parlait toujours en grec, qui
me montrait un peu notre héritage, notre culture... mes parents
travaillaient toujours, ils avaient deux emplois, je ne les ai presque jamais
vus jusqu'à l'âge de 7 ou 8 ans. C'est l'histoire de presque tous
les immigrants qui arrivent. C'est un autre moyen d'aider nos jeunes à
garder cette richesse qu'on ne voudrait jamais qu'ils perdent. C'est notre
héritage.
Ensuite, il y a la vie quotidienne, les ministères, les lois, les
changements. Il faut informer sur les cultures, sur les différents
partis et leurs programmes quand c'est le temps des élections pour qu'on
sache comment décider. Si on est allés
faire le marché et que le gars qui coupe la viande nous a
chanté une grande chanson concernant les libéraux, les
péquistes ou les unionistes, on croit ça ou on ne sait pas quoi
croire. Si on l'apprend dans notre propre langue, on est sûrs. Comme
ça, on peut participer, on peut décider, on se sent des citoyens
qui ont joué un rôle dans l'adoption de telle loi ou dans l'appui
de telle personne.
À part ça, au point de vue culturel, il y a notre
théâtre, nos pièces. Il y a aussi un autre aspect que je
n'ai pas mentionné, celui d'informer les francophones à notre
sujet et d'informer nous-mêmes les groupes les uns des autres. J'ai
appris des affaires sur les Libanais, justement la dernière semaine,
quand on préparait l'historique pour notre colloque. J'ai appris des
affaires sur les Libanais, qu'un des plus grands policiers de la police
provinciale du Québec, en 1904, je crois, était le Sherlock
Holmes du Québec. Il est très connu. Il y a un livre écrit
sur cet homme, la presse a fait tout un article l'an passé sur ce type.
Il fait partie d'un groupe ethnique, c'est un Libanais. Des hommes connus
viennent des groupes ethniques, comme le juge Malouf, c'est un autre Libanais.
J'ai lu beaucoup sur les Libanais. On trouve des choses de ce genre dans toutes
les cultures ethniques. Juste les savoir, ça nous aide à mieux se
comprendre. Mieux que ça, on aimerait le faire en français
directement à la population québécoise pour qu'elle nous
comprenne mieux.
Un bon exemple, notre Pâques a lieu deux semaines plus tard que la
fête de Pâques catholique. Quand quelqu'un en auto arrive
près d'une église grecque et qu'il y a six ou huit rues
bloquées par la police et qu'il voit cela, ces gens-là, avec
leurs petits mouchoirs noirs et les grosses chandelles dans la rue, il se
demande ce qui arrive. Mais si c'est présenté dans une
émission en français, pour la valeur que cela a vraiment, et
qu'on expliquait l'histoire derrière ces 8000 personnes qui sont dehors,
devant leur église, et pourquoi on voit huit prêtres porter une
espèce de mort sur leurs épaules on rit de cela et il y a
des préjugés qui se forment.
Je crois qu'on peut jouer un grand rôle non seulement à
limiter les préjugés, mais les effacer complètement par
l'entremise des media électroniques.
Mme Lavoie-Roux: Qui décide des sujets qui vont être
apportés, qui vont être retenus pour la
télévision?
Mme Griffith: Présentement, depuis un an et demi, nous
sommes limités à cause du peu de facilité de production.
On ne peut pas présenter une troupe de danse culturelle, c'est
impossible, parce qu'il faut qu'elle se place en entier sur une chaise à
côté de moi. C'est difficile de danser! Dans le studio
automatisé... Ce n'est pas drôle! Vous devriez venir nous visiter.
Vous allez pleurer.
Mme Lavoie-Roux: Je le connais, je suis allée.
Mme Griffith: Nous sommes limités dans ce que nous pouvons
présenter. Notre recherche n'a pas été trop difficile, la
dernière année et demie. Sur les spéciaux, on choisit nos
propres thèmes, comme la fête nationale.
Mme Lavoie-Roux: Mais qui décide?
Mme Griffith: Nous sommes trois de même nationalité
par groupe. Pour le groupe grec, il y a trois Grecs, pour le groupe allemand,
il y a trois Allemands, qui travaillent à ces émissions. Et,
encore une fois, chacun d'eux, des bénévoles qui consacrent et
qui donnent ce temps, est heureux de le donner. C'est pourquoi on croit qu'on a
eu du succès toutes ces années. Il n'y a personne qui le faisait
pour l'argent et il n'y a personne qui le faisait parce que cela lui donnait de
la renommée, parce que nous avons passé dix ans sans être
reconnus du tout. On le faisait parce qu'on était fiers d'aider notre
communauté, nous qui parlions un peu la langue, qui pouvions être
leur intermédiaire dans cette nouvelle province qu'ils ont choisie.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'il y a des groupes ou des
associations, et même des groupes ou des associations à
l'extérieur de votre propre communauté, qui vous suggèrent
des thèmes ou des programmes?
Mme Griffith: Oui, souvent. J'ai eu l'école de
Saint-Laurent, avec la directrice, Mme Saint-Denis, qui faisait un programme
spécial concernant les petits enfants québécois de
nouvelle souche. Elle est venue nous demander d'informer la communauté.
Elle a non seulement eu deux programmes, mais elle a fait une ligne ouverte par
l'entremise de la radio aussi. On a d'autres exemples. Tout le monde qui vient
nous voir... Un autre exemple: aux dernières élections, le Parti
marxiste-léniniste, le Parti libéral et le Parti conservateur
nous ont demandé du temps. On a donné le même temps
à tous. On a donné de dix à quinze minutes à chaque
groupe qui voulait se servir de nos moyens pour communiquer aux groupes
ethniques.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'il y a des gouvernements qui vous
suggèrent des thèmes aussi?
Mme Griffith: Je n'ai jamais eu de gouvernement qui,
officiellement, m'ait dit: II faut faire cela, ou: Dites à vos groupes
de faire cela. Jamais.
Mme Lavoie-Roux: Officieusement?
Mme Griffith: Jamais. C'est moi qui les ai invités,
souvent les libéraux, avant 1976. Ils sont toujours venus, comme le
gouvernement d'aujourd'hui. Quand on les a invités, ils n'ont jamais dit
non. On a travaillé avec eux, parce que c'est du monde et c'est
pour cela que vous êtes ici aujourd'hui qui comprend ce besoin;
chaque fois qu'on a demandé quelqu'un des différents
ministères ou des responsables de la Régie des loyers... En ce
qui concerne la Régie des loyers, en janvier et février, chaque
groupe fait deux pro-
grammes, avant la fin de la limite de 90 jours pour signifier la fin du
bail, qui est la fin de mars, pour aider les gens, pour leur expliquer encore
leurs droits, s'ils veulent partir, s'ils veulent sous-louer. On fait cela
régulièrement, en janvier et février, et on n'a jamais eu
de problème. Les dames qui sont venues de la Régie des loyers ont
toujours été très coopératives, de même que
tous les ministères, l'Éducation, etc.; il n'y a jamais eu de
problème, ni du municipal, ni du fédéral.
Mme Lavoie-Roux: S'il y avait un projet de loi qui était
discuté à l'Assemblée nationale, c'est toujours
d'intérêt général pour la population, mais qui
serait d'un intérêt plus particulier, disons qui toucherait la
population de plus près et que ce serait un projet de loi très
controversé, est-ce que, à ce moment-là, vous demanderiez
à des représentants des différents partis d'aller faire
valoir leur point de vue?
Mme Griffith: Cela dépend. Je ne pourrais pas
répondre pour les autres membres. Mais si c'est quelque chose qui touche
différents points de vue et que cela serait d'intérêt pour
les communautés de le savoir, on couvrirait tous les points de vue avec
le même temps alloué à tous.
Mme Lavoie-Roux: Mais cela ne s'est jamais présenté
sur des projets de loi antérieurs?
Mme Griffith: Sur des projets de loi, non. La seule fois, c'est
avec la nouvelle loi de l'immigration que le fédéral a
adoptée, avant l'entente Couture-Cullen, puisqu'on a couvert cela
très bien aussi. On a parlé avec M. Couture et M. Cullen. (21 h
30)
Avant cela, avant que le projet de loi ne soit présenté,
parce que les Grecs, les Italiens et les Portugais ne comprenaient pas
très bien le système de points, on a fait venir quelqu'un du
ministère fédéral de l'immigration. Il n'y a jamais eu de
problème. Il a simplement expliqué la loi. Nous l'avons dit dans
la langue d'origine. Il y a eu une couple de questions sur la ligne ouverte.
S'il y avait eu une opposition de l'autre partie qui aurait dit: Non, il n'a
pas bien expliqué. Bravo, monsieur! Venez au programme de ligne ouverte,
le même soir, si vous voulez, et expliquez-le mieux. Corrigez, si vous
pensez qu'il y a eu des erreurs. Mais cela n'est jamais arrivé.
Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie. Mme Griffith: Merci
beaucoup, madame!
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Seulement une dernière question. Est-ce qu'au
niveau du ministère de l'Immigration ou du ministère des
Communications, quand vous faites une émission sur un projet de loi ou
une décision gouvernementale, on vous fournit la documentation dont vous
pouvez avoir besoin ou est-ce qu'on vous en offre?
Mme Griffith: Je vais vous dire qu'elle est envoyée. On
avait eu une rencontre et on avait parlé...
M. Rivest: Sur tous les projets de loi?
Mme Griffith: Presque tous, ceux qui sont les plus graves, ceux
qui intéressent le plus.
M. Rivest: C'est cela.
Mme Griffith: Mais, encore une fois, cela nous prend de l'aide
technique. Un bon exemple serait d'être relié au Telbec, d'avoir
les téléscripteurs qu'on n'a pas, d'avoir un bureau central qu'on
n'a pas. Cela ne me gêne pas de le dire. On se rencontre chez moi. Ma
mère est rendue folle. Ma mère est rendue folle, quatorze
différentes ethnies dans son salon tous les dimanches...
M. Rivest: Elle n'a pas le temps de regarder vos
émissions. Est-ce qu'elle regarde vos émissions?
Mme Griffith: Pardon?
M. Rivest: Votre mère, est-ce qu'elle regarde vos
émissions?
Mme Griffith: Ah oui! elle les regarde, sans faute.
M. Rivest: Non, ce que je veux dire vous pouvez le
demander, si on ne le fait pas Si vous dites: On n'est pas abonné
à Telbec, etc. Est-ce que les cabinets de ministres peuvent vous envoyer
des communiqués? Est-ce qu'ils vous les envoient?
Mme Griffith: Ah oui! on apprécierait cela. M.Rivest: Ils ne vous les envoient pas.
Mme Griffith: La plupart, on les a, surtout les ministères
majeurs. On les a.
M. Rivest: Oui.
Mme Griffith: J'ai même ceux du ministère des Terres
et Forêts et ceux des Richesses naturelles. J'ai tout cela.
M. Rivest: Comme par exemple, tantôt, vous parliez de
l'assurance automobile. On vous a envoyé le projet de loi, vous avez
tout reçu?
Mme Griffith: J'ai reçu tout cela, ah oui.
M. Bisaillon: Qu'est-ce que vous cherchez? Ce sont des bibites,
ce sont des bebelles?
M. Rivest: Non, je les ai reçus et je ne m'en plains pas,
je voudrais que vous lui donniez de l'aide.
M. Bisaillon: Elle les reçoit elle aussi, comme tous les
citoyens.
M. Rivest: C'est cela.
M. Bisaillon: Pourquoi voudriez-vous qu'elle ne les
reçoive pas?
M. Rivest: Ce que vous êtes venue demander, c'est de
l'aide?
M. Griffith: De l'aide, oui.
M. Rivest: Répondez à cette demande-là! De
quoi se mêle-t-il, lui?
M. Bisaillon: Comment, de quoi je me mêle? Ce n'est pas
à vous à venir me dire de quoi il faut que je me mêle et de
quoi il faut que je ne me mêle pas. Vous arrivez, vous, prenez votre
temps. Vous arrivez, vous, vous arrivez de loin à part cela.
M. Rivest: Vous êtes suffisamment mêlé. Le
Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. O'Neill: M. le Président, je remercie M. Winston et Mme
Griffith. Ils nous ont présenté un très bon
mémoire. Je veux simplement dire qu'aujourd'hui, ce qui m'a
particulièrement plu, c'est le fait que, d'une part, les groupes qu'ils
représentent ici ce soir étaient tous très
intéressés non seulement à faciliter l'expression
culturelle de chacune des communautés concernées, mais aussi
à leur transmettre l'information vous avez insisté
beaucoup là-dessus et, en même temps aussi, il y a une
préoccupation évidente chez vous aussi de travailler à ce
que ces groupes se sentent membres à part entière de la
communauté québécoise. Je pense que, là-dessus,
c'est excellent, et je veux vous dire simplement que, de notre part, nous
ferons tout ce qui est possible, à la mesure de nos moyens, pour vous
aider à réaliser vos objectifs. Encore une fois, merci
d'être venus et merci de votre collaboration.
Mme Griffith: Merci. Vous serez fiers de nous, donnez-nous la
chance, vous allez voir.
M. Rivest: J'espère que le gouvernement va vous aider
davantage qu'il vous aide, c'est cela que je voulais prouver.
Le Président (M. Jolivet): Merci. J'inviterais maintenant
M. Gérard Lafleur, comme porte-parole pour présenter le
mémoire du Regroupement des organismes communautaires de communications
du Québec. Mme le député, je vous demanderais de
présenter les membres.
Regroupement des organismes
communautaires de communications
du Québec
Mme Roy (Lynda): Lynda Roy. Je suis...
Le Président (M. Jolivet): Seulement un instant.
Mme Roy: Lynda Roy, directrice à l'exécutif du
Regroupement des organismes communautaires de communications du
Québec.
Mme Rheault: Je suis Françoise Rheault, secrétaire
du regroupement.
M. Lafleur (Gérard): Gérald Lafleur, permanent au
regroupement également.
Mme Lavoie-Roux: Je n'ai pas compris votre nom.
Mme Rheault: Françoise Rheault. Nous nous excusons du
contretemps.
Le Président (M. Jolivet): Seulement un instant, pour les
besoins... Vous pouvez approcher votre micro pour qu'on puisse mieux vous
entendre.
Mme Rheault: Nous voulons intervenir dans le cadre de cette
commission parlementaire sur les projets de loi nos 4 et 5, en tant que
regroupement des organismes communautaires de communication, qui sont aussi
communément appelés les télévisions communautaires
du Québec. Nous représentons 14 groupes de
télévision communautaire qui oeuvrent dans leur milieu respectif
depuis de nombreuses années. C'est au début des années 70
que les premières expériences de media communautaires voient le
jour, principalement par l'entremise des télévisions
communautaires. Il s'agit, en fait, de donner véritablement un droit
d'expression aux citoyens sur les questions qui influencent leur quotidien et
de créer, par le fait même, une alternative aux entreprises
traditionnelles de télévision. Les premières
expériences sont très positives en particulier sur le plan de la
participation populaire. Elles provoquent la création d'autres groupes
de télévision communautaire au Québec.
En 1973, devant l'intérêt manifesté des citoyens
québécois et également pour des raisons politiques
liées à la bataille sur la juridiction en matière de
câblodistribution, le ministère des Communications du
Québec crée le programme d'aide au développement des media
communautaires et permet ainsi aux réseaux de télévision
communautaire de se développer au fil des ans. De plus, les
télévisions communautaires se donnent en 1978 un organisme de
regroupement, de représentations et de services, le ROCC, qui devient
rapidement un interlocuteur priviligié dans le domaine des
communications communautaires. Parallèlement, d'autres formes de media
communautaires apparaissent et mettent de l'avant des objectifs similaires,
mais liés à un media différent: radio communautaire,
presse écrite, groupes de vidéo-animation.
Et malgré les batailles que nous avons dû livrer pour
survivre, nous croyons que les media communautaires et spécialement les
OCC utilisateurs du vidéo sur câble ont une entité et une
spécificité que plus personne ne peut nier.
Nous pouvons donc affirmer qu'en dix ans, malgré le peu d'ampleur
des moyens financiers mis à leur disposition, les media communautaires,
par leurs structures démocratiques et la qualité de leurs
productions, ont su s'implanter et participer véritablement au
développement de leur milieu respectif sur les plans social, culturel et
politique.
Une expertise à reconnaître. On va parler de nous un petit
peu. L'existence...
M. Rivest: Si vous saviez comme le gouvernement n'hésite
pas à parler de lui. C'est bien légitime, on va vous
entendre.
Mme Rheault: L'existence des télévisions
communautaires au Québec qui, depuis près de dix ans, travaillent
étroitement avec leur communauté a su prouver la viabilité
d'un projet social où le citoyen devient un acteur véritable dans
un processus d'accessibilité d'un medium de communication.
Cette expérience nouvelle vécue dans presque toutes les
régions du Québec s'est construite grâce aux
énergies de groupes de citoyens et a suscité l'espoir
d'organisations gérées par une communauté et travaillant
au bénéfice de cette même communauté. Un travail
énorme s'est accompli. Il a fallu d'abord sensibiliser une population
consommatrice de programmes télévisés, l'amener à
prendre place sur cet écran qu'elle mystifiait au bénéfice
d'une minorité qui voulait accaparer l'unidirectionnalité de
l'information. Puis, il a fallu se doter d'une structure organisa-tionnelle qui
verrait à la sauvegarde des intérêts de cette
majorité de citoyens, qui commençait à trouver place dans
ce secteur réservé des communications.
Il a fallu ensuite travailler à doter ces organismes d'une
infrastructure technique adéquate, former des gens tant au niveau de la
production que de l'animation et décupler des efforts pour entrouvrir
les portes d'institutions locales qui pouvaient mettre des ressources à
la disposition de ces organismes.
Les débuts de ces tentatives nouvelles peuvent être
qualifiés de tâtonnement, mais les groupes en sont arrivés
à dépasser maintenant l'expérimentation pour
maîtriser un fonctionnement rationnel et efficace au niveau
organisationnel. Les exigences se sont spécifiées. Des animateurs
et des réalisateurs sont au service de ces groupes. Des dossiers de
fonds tant nationaux que locaux ont pu être traités, des
programmations régulières et de plus en plus diversifiées
font l'objet de critiques pour tendre de plus en plus vers une qualité
recherchée et une amélioration quantitative et qualitative des
équipements techniques qui assurent un support nécessaire aux
productions générées par les organismes.
Les télévisions communautaires sont des participants
actifs dans les débats publics, politiques et sociaux qui concernent
leur localité. Elles représentent l'opinion de nombreux citoyens
qui ont enfin un moyen accessible pour exprimer leurs idées et faire
entendre leurs revendications.
Par une structure démocratique de participation, les organismes
communautaires de communication permettent à une large couche de la
population de prendre part aux décisions qui les concernent. Chaque
télévision communautaire locale est identifiée
auprès des citoyens et ceux-ci la reconnaissent comme un outil de
sensibilisation et de conscientisation sociale qui offre une alternative
différente comme media d'information.
Les organismes communautaires de communication, en plus de leur travail
interne, ont également accompli des tâches de relations publiques
et de représentation auprès des différentes
autorités relativement à l'élaboration, par le
ministère des Communications du Québec, des programmes d'aide aux
media communautaires et relativement à l'avant-projet de
réglementation relatif aux entreprises publiques de
câblodistribu-tion et au financement des organismes communautaires de
communication du Québec en octobre 1977.
De plus, des cours de formation technique ont été
créés par des gens impliqués dans ces organismes
communautaires, afin de répondre à des besoins
spécifiquement définis pour une clientèle et le personnel
directement attaché aux productions des organismes.
Il va sans dire que l'expérience de ces organisations constitue
une expertise incontestable en matière de communications communautaires
et c'est à ce titre que nous nous présentons en commission
parlementaire relativement aux lois no 4 et 5 concernant la programmation
éducative et la nouvelle loi régissant Radio-Québec.
Concernant la loi no 4, la programmation éducative: Notre
principale préoccupation porte sur les rôles dévolus aux
différentes entreprises en communication. Nous sommes heureux de
constater que les entreprises devront dorénavant se présenter
annuellement devant la Régie des services publics pour approbation de la
partie éducative des productions distribuées via le media qui
leur convient. Où nous achoppons, et cela, depuis de nombreuses
représentations, soit à titre individuel, local ou sectoriel,
c'est sur le support et, plus globalement, sur la volonté
gouvernementale d'assister non pas les efforts de production, mais plutôt
les volontés de support à la diffusion de documents
éducatifs. De plus, il est dit que la câblodistribution pourrait
avoir droit à ce support de l'État pour une programmation
éducative.
Vous n'êtes pas sans connaître la réalité de
la situation financière des câblodistributeurs pour savoir les
profits qu'ils obtiennent chaque année et le peu de ressources, tant
financières, matérielles et humaines qu'ils mettent localement
à la disposition des populations qu'ils desservent.
Nous avons connu, comme vous, l'époque où l'on admettait,
reconnaissait et même favorisait le rôle social du
câblodistributeur dans sa localité. L'expérience des dix
dernières années nous démontre clairement le manque
d'intérêt et le refus catégorique de cette
câblodistribution à investir dans ce service à la
collectivité. Il aura fallu connaître les déboires de plus
de la moitié des
télévisions communautaires au Québec qui sont
disparues, pour faire la preuve du manque de support et de simple collaboration
locale et pour confirmer cette fin de non-recevoir de la
câblodis-tribution.
Nous nous opposons donc sérieusement au fait que la
câblodistribution bénéficie en cette loi d'un support
quelconque de l'État pour daigner simplement inscrire dans sa
programmation quelques documents éducatifs.
Un autre aspect fait l'objet de notre position, conséquemment
à ce qui a été dit plus haut. La loi porte sur la
programmation éducative. Il devient impératif, à notre
avis, que l'État québécois se penche sérieusement
si ce n'est déjà fait et que la loi le confirme sur
le fait que de diffuser une programmation de quelque nature que ce soit
entraîne des coûts minimaux contrairement à la production
plus spécifiquement de type éducatif qui coûte une fortune.
Est-ce par choix réfléchi que l'État affirme son refus, ou
pour le moins sa contribution minime, par le biais du cinéma, entre
autres, de soutenir adéquatement les entreprises de production
éducative, mis à part Radio-Québec? (21 h 45)
II nous apparaît quelque peu invraisemblable que l'État,
d'une part, fasse autant de place à la diffusion et la
câblodistribution et si peu explicitement à la production
originale québécoise et que, d'autre part, il mette en place une
politique de développement des média communautaires.
Les caractères principaux de cette nouvelle politique qui doit
être rendue publique sous peu sont que les média communautaires
contribuent au développement de l'identité culturelle et de la
culture québécoise, qu'ils développent une programmation
qui favorise l'analyse publique des décisions qui concernent les enjeux
collectifs et qu'ils amplifient les concertations et les échanges entre
les agents de développement à l'intérieur des
localités et des régions, etc.
Malheureusement, ce projet de politique est accompagné d'un
programme d'aide dont voici les principales caractéristiques: des
budgets absolument dérisoires en regard d'un fonctionnement minimal des
média communautaires et de l'atteinte des objectifs proposés dans
la politique, un refus d'affirmer sans ambages la nécessité de
consolider les organismes qui existent déjà en sachant fort
pertinemment que de ce fait on maintient les média communautaires dans
un état de vivotement. On fait disparaître un à un les plus
faibles, donc les plus jeunes, et on empêche les plus forts de se
développer.
C'est donc à partir de ces considérations que nous
demandons à l'État québécois d'inscrire dans la loi
no 4 cette volonté explicite de soutenir la production originale
québécoise éducative, d'inscrire également la
possibilité pour les média communautaires de faire appel à
l'État pour soutenir leurs efforts de production de documents
éducatifs et enfin de retirer radicalement à l'industrie de
câblodistribution quelques droits dans le cadre de cette loi, puisque le
ROCC a toujours refusé que soit reconnu le rôle de producteur au
câ-blodistributeur.
Concernant la loi no 5 de Radio-Québec, loi modifiant la
structure de Radio-Québec, nous voudrions retenir deux principes
fondamentaux: d'abord, une véritable régionalisation de
Radio-Québec et, d'autre part, une expérimentation progressive de
cette opération. Même si la loi modifie substantiellement la
structure de Radio-Québec en incluant les comités
régionaux et une représentation régionale au sein du
conseil d'administration national, il n'en demeure pas moins que le processus
de régionalisation comporte des failles certaines, à savoir qu'il
répète des formules de participation connues qui, jusqu'à
maintenant, ont donné des résultats plus que médiocres en
termes de participation populaire, soit en amenant une élite
régionale à exercer véritablement le pouvoir ou en
laissant au conseil d'administration des pouvoirs suffisamment ténus
pour qu'ils deviennent insignifiants dans l'ensemble du processus de gestion
ou, même, en chassant des conseils d'administration des citoyens ou des
représentants de groupes de citoyens et que ce même processus
n'est aucunement orienté par des objectifs clairement
définis.
Faire une expérimentation en des milieux restreints et
différents de formules de complémentarité des ressources
mises en disponibilité dont on pourrait tirer par la suite des formules
plus générales et applicables à l'ensemble des
régions du Québec.
Nous croyons donc fermement que ces recommandations devraient être
acceptées d'emblée par le gouvernement du Québec, parce
qu'elles relèvent, à notre humble avis, d'une démarche
cohérente. Dans l'éventualité d'une
non-considération de sa part, le gouvernement devra envisager de trouver
réponses aux questions qui suivent:
Comment le gouvernement entend-il, à travers ses lois, en venir
à distinguer les notions de producteur et de diffuseur?
Comment le gouvernement entend-il reconnaître la valeur et assurer
la viabilité des media communautaires?
Quel statut le gouvernement entend-il donner aux
câblodistributeurs, particulièrement en ce qui a trait à ce
qu'il est convenu d'appeler les "nouveaux services"?
Comment le gouvernement du Québec entend-il éviter les
erreurs passées en termes de participation régionale plus ou
moins effective?
Comment le gouvernement entend-il éviter la disparition des
organismes communautaires de communications que se sont donnés des
citoyens d'une localité, compte tenu des expériences
passées dans d'autres secteurs?
Comment le gouvernement du Québec entend-il éviter
également les erreurs du passé lors d'une implantation
complète d'un réseau de télévision et de radio
éducatives alors que telle implantation de ces systèmes s'est
avérée particulièrement difficile, voire néfaste
dans des domaines comme l'éducation et les affaires sociales?
Et, enfin, comment le gouvernement du Québec entend-il, par cette
régionalisation de Radio-Québec, assurer l'explosion de
l'identité québécoi-
se et favoriser l'expression de cette culture québécoise
tant chérie?
Le Président (M. Jolivet): Compte tenu de l'heure et avant
même que débutent les questions, je demanderais le consentement
pour qu'on puisse dépasser l'heure limite de 22 heures, en
considérant qu'on révisera nos positions en cours de route?
M. Rivest: Est-ce que je comprends que c'est le dernier
groupe?
Le Président (M. Jolivet): C'est le dernier groupe.
M. Rivest: Est-ce que vous êtes de la région de
Québec ou de Montréal?
Mme Rheault: Pardon?
M. Rivest: Est-ce que vous êtes de la région de
Québec ou de Montréal?
M. Lafleur: Nous travaillons chacun dans des régions
différentes.
Mme Rheault: Je suis de Sherbrooke, Gérald est permanent,
il a donc son bureau à Québec, et Linda vient de
Lévis.
M. Lafleur: Nous représentons en fait un groupement
national qui a...
M. Rivest: Je sais, mais, normalement, on doit terminer à
dix heures et...
Mme Rheault: II n'y a pas de problème pour nous.
M. Rivest: Pour revenir, vous n'avez pas de problème.
Mme Rheault: Pour revenir en commission, on aimerait mieux que
ça se termine ce soir.
M. Rivest: Bon, c'est ça que je voulais vous entendre
dire, et le député de Taschereau également, j'en ai
l'impression.
Le Président (M. Jolivet): Ce que je vous pose comme
question c'est: Est-ce qu'il y a consentement pour qu'on dépasse l'heure
limite? Il y a consentement, d'après ce que je peux voir?
M. Le Moignan: Jusqu'à dix heures et demie.
Le Président (M. Jolivet): Donc, on peut donner comme
heure limite dix heures trente comme maximum. M. le ministre.
M. O'Neill: M. le Président, mes questions porteront sur
les points qui touchent plus directement les lois 4 et 5. Il y a certaines
remarques qui concernent plus directement le programme d'aide aux media
communautaires qui n'est pas encore rendu public, et, de toute façon,
sur lequel je retiendrais certaines remarques. J'aurais même des
commentaires à faire là-dessus, mais je m'en priverai, si vous
voulez.
Le seul que je ferai, c'est qu'à la page 6, quand vous parlez de
la question de la consolidation, je vous signale simplement qu'une formule que
nous essayons de trouver, c'est une formule de consolidation, mais pas une
formule qui favoriserait nécessairement les régions
déjà les mieux équipées par rapport à
d'autres. À un moment donné, en prenant simplement le
critère de consolidation, on risque de donner aux plus favorisés
et d'enlever définitivement aux plus pauvres.
Mais je reviens maintenant à ce qui touche directement les deux
projets de loi. Je pose la question suivante. Disons le cas d'un
câblodistributeur qui serait prêt à couvrir une
région qui n'est pas rejointe par Radio-Québec et qui diffuserait
des émissions éducatives de Radio-Québec. Cette diffusion
entraînerait un certain nombre de frais techniques, parce qu'il n'a pas
l'équipement complet qu'il faut, etc. Est-ce que vous trouveriez
acceptable l'idée que, pour cette part qu'il remplit, il puisse avoir
une subvention? Vous vous en prenez à la subvention à la
diffusion, c'est celle qui est inscrite dans la loi. Quant à la
subvention à la production, je vous signale qu'elle s'exerce
déjà. Celle que vous recevez à titre d'organe de diffusion
communautaire est une subvention à la production.
Le problème porte sur la partie qui n'est pas couverte, la
subvention à la diffusion. Je vous donne cet exemple de
câblodistributeur qui serait prêt à donner un coup de main
dans une région pour rejoindre des gens que ne rejoint pas actuellement
Radio-Québec. Est-ce que vous vous opposeriez, à ce
moment-là, à toute aide à ce câblodistributeur?
Remarquez qu'il s'agirait, de toute façon, d'une aide assez
minime.
M. Lafleur: Pas nécessairement, il s'agit de savoir de
quoi on parle. Je pense que le câblodistributeur, en soi, a un
rôle, essentiellement, selon notre optique, de transporteur public.
À ce titre, il doit, le plus possible, dans l'optique également
du gouvernement du Québec, assumer le transport dans une majorité
de régions. On le désigne précisément comme
transporteur public dans la mesure où, faisant des profits dans une
région qui est assez rentable comme Montréal ou Québec, on
lui dit: À partir de là, étendez votre réseau dans
des zones qui sont moins rentables, de sorte qu'on arrive, à un moment
donné, à couvrir l'ensemble du territoire
québécois.
Si on s'en tient à ce principe, on en reste au
phénomène de transport public. Je pense qu'il faut se maintenir
à ce niveau pour comprendre votre question. Maintenant, si vous me dites
qu'un transporteur québécois, appelé
câblodistributeur, veut transporter des programmes éducatifs dans
des régions très éloignées, à ce
moment-là, je distingue deux choses: Est-ce qu'il veut installer un
câble dans ces régions ou s'il veut faire de la pro-
grammation éducative? C'est très différent. S'il
veut établir un système de câblodistribution dans des
régions très éloignées, très bien, c'est son
rôle, personne ne l'en empêche. S'il veut faire de la programmation
éducative, c'est complètement autre chose et, à ce
moment-là, on lui dit: Non, ce n'est pas le rôle d'un transporteur
public de faire tel type d'entreprise.
M. O'Neill: Je vais poser ma question autrement. Il existe
à un endroit, votre câblodistribu-teur; on veut avoir, dans une
région, en différé, des émissions qui ont
déjà été produites par Radio-Québec. Il peut
rendre ce service. Est-ce que cela vous paraît absolument inacceptable
qu'à ce moment-là, il puisse avoir quelque appui? Parce qu'au
fond, il rend service. C'est simplement ça, ma question. Est-ce que cela
paraît, en principe, d'après vous, absolument inacceptable?
Mme Rheault: On peut s'en tenir au principe et on peut vite
s'entendre aussi. Mais en pratique, la câblodistribution est une
entreprise très rentable et pour nous, dans ce cas-là, il s'agit
d'un transporteur public et, au même titre que les autres, il n'y a pas
droit.
M. O'Neill: Alors, s'il décide qu'il ne transmet pas,
à ce moment-là?
Mme Rheault: Ce sont de ses affaires. Vous pouvez...
M. O'Neill: La population s'en passera. Le principe sera sauf,
mais les gens n'auront pas le programme.
Mme Rheault: C'est rentable pour lui de l'installer, M. O'Neill,
il a des abonnés en plus. Ce sont toujours les règles du jeu qui
se passent quand on parle de la câblodistribution.
M. O'Neill: Sans vouloir défendre les
câblodistributeurs, je voudrais quand même être juste et ne
pas les mettre tous au même niveau. Vous en avez aussi de petites
entreprises de câblodistribution, et vous en avez des plus
considérables. Tout le monde n'a pas la dimension de Câblevi-sion
national.
Mme Rheault: C'est vrai.
M. O'Neill: C'est cela. Vous voyez, concrètement, si on
pousse un principe jusqu'au bout, dans un cas comme celui-là, la
réponse serait non.
Mme Rheault: Si la porte est ouverte pour le Nord-Ouest
québécois, le national va entrer aussi.
M. O'Neill: Je ne comprends pas ce que vous voulez dire.
Mme Rheault: Si la porte est ouverte, dans le projet de loi, pour
un financement en regard de la programmation éducative, le national va
trouver une faille quelque part pour entrer.
M. O'Neill: Cela suppose une réglementation. Ce n'est pas
tiré en l'air au hasard. Vous vous imaginez bien, vous qui
déjà, constatez... Vous parlez d'un budget que vous appelez
dérisoire c'est quand même $1 million pour le
fonctionnement des media communautaires, cela suppose évidemment qu'il
ne s'agira pas. au départ du moins, de budget pléthorique. C'est
évident.
Il s'agit simplement de prévoir les cas... Je vais vous en donner
un autre. Le cas où vous avez les postes privés de radio qui,
à un moment donné, pourraient être appelés à
contribuer à la diffusion d'une programmation éducative
c'est exactement la même question ce qui aurait pour effet de
mieux servir la population et en même temps d'accroître la
qualité de ce qui est diffusé par ces postes de radio. C'est
simplement cela.
De dire qu'une loi permet une chose, ne veut pas dire qu'on s'en va tous
azimuts ou que, sous prétexte que c'est dans la loi, il va falloir
nécessairement l'appliquer telle quelle, immédiatement. C'est
tout à fait différent. Il s'agit de savoir si on se donne le
pouvoir de le faire. Se donner le pouvoir de faire une chose n'entraîne
pas le fait que, peu importent les raisons, peu importent les conditions, on
décide tout à coup de la mettre en application. C'est surtout de
la mettre en ordre. C'est pour cela que je vous demandais si vous poussez le
principe jusque-là, de façon absolue, si on se tient la porte
entièrement fermée, parce que c'est simplement une porte ouverte
que vous avez ici, dans le projet de loi. Ce n'est pas plus que cela.
Il est sûr qu'actuellement, pour ce qui est de
l'intérêt premier du ministère, du côté de
l'aide, elle va du côté de la production, elle va du
côté du travail des media communautaires, même si, comme
vous le signalez, ce n'est pas aussi vaste que ce que l'on veut, que ce que
l'on souhaiterait, tout le monde.
Je vais maintenant poser une question. Je reviendrai plus tard, pour
donner la parole à d'autres, et pour ne pas prendre trop de temps. Sur
le projet de loi 5, je vous avoue que j'ai une certaine difficulté
à saisir le contenu des remarques qu'il y a à la page 8, entre
autres... Je laisse passer les questions de la fin. Lorsque vous dites: "que ce
même processus n'est aucunement orienté par des objectifs
clairement définis vers une expérimentation des milieux
restreints et différents, de former des complémentarités
des ressources mises en disponibilité dont on pourrait tirer, par la
suite, des formules plus générales et applicables à
l'ensemble des régions du Québec", pourriez-vous m'illustrer ce
paragraphe par un exemple, une description plus concrète? Page huit,
dernier paragraphe. (22 heures)
M. Lafleur: Au fond, je vous répondrai plus globalement en
reprenant peut-être les deux premiers paragraphes, peut-être en
prenant le deuxième comme premier élément de discussion.
Ce qu'on veut signifier fondamentalement c'est qu'il a existé au
Québec un certain nombre d'expériences qui ont commencé
dans les années soixante dans le domaine de l'éducation, par
exemple, dans les années soixante-dix dans le domaine des affai-
res sociales, où on a voulu d'emblée établir un
certain nombre de réseaux. Dans un cas, c'était le réseau
éducationnel, dans l'autre, le réseau des affaires sociales. Au
lieu de procéder par une certaine forme de sagesse qui allait dans le
sens de l'expérimentation, on a voulu d'emblée créer un
certain nombre d'institutions tout à coup qui sont nées quasi
d'une génération spontanée et qu'on a vu apparaître
de-ci de-là rapidement au Québec. Je prends pour exemple les
CLSC, dès les années soixante-dix, à la suite du rapport
Castonguay-Nepveu.
Beaucoup de spécialistes et de gens avertis en matière de
santé on dit: Comment se fait-il que le gouvernement du Québec
dans les années soixante-dix n'a pas procédé dans le
domaine des CLSC à des expériences? Comment se fait-il que tout
à coup, en cinq, ou six ans, ou sept ans, on en arrive à
créer 80 CLSC sans jamais avoir tiré des leçons de ces
expériences à court ou moyen termes?
Ce que nous disons fondamentalement, c'est la même chose pour
Radio-Québec. Est-ce que nous allons reproduire ces erreurs-là?
Est-ce que nous allons reproduire les erreurs des polyvalentes? Est-ce que nous
allons reproduire les erreurs des cégeps? Est-ce que nous allons
reproduire les erreurs des CLSC? Est-ce que nous allons continuer constamment
d'établir des réseaux qui, implantés du jour au lendemain,
vont devenir tout à coup des éléphants blancs dont on ne
saura plus quoi faire et dont on devra se retirer tant bien que mal sans avoir
l'air de le faire véritablement?
Le sens du paragraphe 2, c'est un peu cela. C'est Radio-Québec
régional, très bien, mais est-ce qu'on n'a pas suffisamment de
difficultés actuellement à gérer, à "gestionner" de
façon, je dirais, correcte pour employer un euphémisme
Radio-Québec à Montréal et à Québec?
Est-ce qu'on n'a pas suffisamment de problèmes de programmation, de
participation des citoyens, pour au moins se poser la question et se dire:
Quels vont être véritablement les étapes d'implantation et
comment va-t-on véritablement les évaluer ces étapes? Le
danger que nous voyons, ce n'est pas un danger qui s'impose à nous de
façon imminente, évidemment, mais le danger que nous voyons,
c'est que, peu à peu s'installe un réseau dont finalement on
évalue plus ou moins le fonctionnement et qui tout à coup
devient, comme pour les polyvalentes, comme pour les cégeps, comme pour
les CLSC, des réseaux dont on ne sait plus quoi faire, dont on a
énormément de difficulté à gérer le
fonctionnement.
Ce que nous disons, c'est: Y a-t-il des mécanismes actuels
d'évaluation pour le fonctionnement de Radio-Québec à
Montréal et à Québec, mais principalement à
Montréal, puisque c'est là que la production a lieu
principalement? Y a-t-il mécanismes d'évaluation tels
qu'actuellement, on puisse dire: Oui, cette expérience est tellement
positive que nous allons en faire une expérience à
régionaliser, ou inversement: Est-ce que l'expérience
régionale est garante, de telle façon qu'elle va éviter
tous les maux qui sont dévolus actuel- lement à
Radio-Québec à Montréal? C'est ce danger qu'on a voulu
illustrer par le paragraphe 2.
M. O'Neill: J'ai un peu de difficulté à vous suivre
surtout quand vous me dites qu'on ne sait pas quoi faire des cégeps, des
polyvalentes et des CLSC. Enfin, on n'entrera pas dans ce débat.
Remarquez qu'on pourrait faire la preuve que, dans tel ou tel cas, cela n'a pas
été un succès, mais de là à dire qu'on ne
sait pas quoi faire ou que cela a mal tourné, c'est une autre question.
Iriez-vous jusqu'à dire que vous préféreriez, à
l'étape où nous sommes rendus, qu'on retarde la
régionalisation de Radio-Québec afin de faire cette
vérification dont vous parlez? Iriez-vous jusque là?
M. Lafleur: Non, je n'irais pas jusque là. J'irais
jusqu'à une démarche que j'appellerais prudente,
c'est-à-dire d'installer Radio-Québec dans des régions,
une ou deux, une démarche qu'on qualifie, à ma gauche
c'est paradoxal que ce soit à ma gauche, d'ailleurs
d'étapiste, c'est-à-dire...
Une voix: Une prudence de droite ou une prudence de gauche?
M. Lafleur: M. O'Neill, c'est-à-dire que, selon notre
optique, il serait convenable et peut-être intéressant
d'établir la régionalisation de Radio-Québec dans une ou
deux régions je termine et non pas de dire: Très
bien, dans une région ou deux, on va établir Radio-Québec;
dans trois ans, ce sera telle autre, dans quatre ans, ce sera telle autre,
etc., et de faire un plan à très long terme. Ce n'est pas cela.
Établissons Radio-Québec dans une ou deux régions et
donnons-nous des critères d'évaluation de ce
phénomène de régionalisation, de telle sorte que, dans
deux ou trois ans, on puisse véritablement évaluer
l'expérience et l'évaluer aussi en fonction des critères
qui sont: Comment le milieu a-t-il participé à la
régionalisation? Vous me parliez du succès plus ou moins
véritable ou plus ou moins réel des polyvalentes, des
cégeps, etc., mais je reprends seulement le thème de la
participation...
M. O'Neill: J'ai dit que peut-être on pourrait dire... Un
instant!
M. Lafleur: Je reprends simplement le thème de la
participation. Je ne sais pas si vous avez déjà assisté
à ce qu'on appelle la participation aux conseils d'administration des
hôpitaux, des CLSC, des polyvalentes, des comités d'école,
etc. Dans les hôpitaux, par exemple, il y a 100, 150 ou 200 personnes.
Est-ce qu'on a déjà évalué la participation
véritable à l'intérieur de ce type d'institution? Je crois
qu'elle est nulle. Est-ce qu'on ne pourrait pas se donner des mécanismes
d'évaluation?
M. O'Neill: Est-ce qu'il aurait fallu retarder l'implantation des
hôpitaux tant qu'on n'aurait pas été assuré que
cette dite participation n'eût été un succès?
Mme Lavoie-Roux: Cela a été implanté et la
participation est venue ensuite.
M. O'Neill: Bon! Alors...
M. Lafleur: Exactement, madame l'a dit. Les hôpitaux
étant implantés, on a voulu y accoler un processus de
participation. C'est très différent. Maintenant, on suit le
processus inverse. Radio-Québec existe et maintenant, on veut
régionaliser. Si on veut régionaliser, il faut absolument se
donner des conditions ou plutôt des mécanismes d'évaluation
de cette participation, de telle sorte qu'on puisse dire, au bout de deux ou
trois ans, dans telle ou telle région, Bas-du-Fleuve, Abitibi: Oui, cela
a fonctionné avec les ressources du milieu, mais il y a eu telle faille
et comment est-ce qu'on va réévaluer? Ensuite, on enclenchera un
deuxième processus de régionalisation qui ira plus loin. Cela
nous semble une démarche relativement plus prudente que de dire: Oui,
c'est un instrument intéressant et on va régionaliser à
tout vent parce que le processus, en soi, est excellent.
M. O'Neill: Écoutez, j'ajoute simplement ceci
là-dessus. Il va de soi que nous supposons que la direction de
Radio-Quebec verra à une implantation prudente et progressive, mais je
pense que, jusqu'ici, vous êtes les seuls à nous dire qu'il y a un
danger que ça se fasse, au fond, trop vite, parce que
l'inquiétude est inverse. Il y a des gens qui disent: On a hâte de
voir si ça va être vrai, et ça ne se fera pas à la
course, c'est sûr. Mais, enfin, que ça se fasse, comme vous dites,
de façon progressive, de façon prudente, je suis tout à
fait d'accord là-dessus.
Maintenant, si j'ai bien compris, c'est le problème de votre
critère de participation. De quelle façon...
M. Lafleur: Cela me semble être la base de la
régionalisation, M. O'Neill.
M. O'Neill: Oui, mais de quelle façon cela va-t-il se
réaliser? Moi, je pense qu'il va falloir que Radio-Québec fasse
des vérifications étape par étape, mais je ne peux pas
vous dire d'avance que ce sera nécessairement aussi parfaitement
réussi que vous le souhaiteriez. Je me permets aussi d'ajouter qu'on
peut donner à ce mot "participation" quand même des significations
qui peuvent être assez variées. Il y a du plus ou du moins, selon
les opinions...
M. Lafleur: Oui, mais si...
M. O'Neill: ... quand on utilise un mot comme
celui-là.
M. Lafleur: D'accord. Mais s'il y a du plus et du moins et qu'on
parle de participation, il faudra donc convenir qu'à un moment
donné de l'expérience, on devra en faire une évaluation et
ce qu'on dit finalement, c'est: Quels sont les mécanismes actuels que le
gouvernement se donne pour arriver après quelques années
d'expérimentation, comme on le disait auparavant, dans une ou deux
régions, qui vont permettre d'évaluer... Si on ne sait même
pas à partir de quoi évaluer, parce que la participation est
tellement floue qu'on n'arrive pas à la définir, à ce
moment, on n'a qu'à le dire. Mais si la participation est quelque chose
de précis, on devra trouver des mécanismes pour
l'évaluer.
M. O'Neill: Radio-Québec peut avoir une idée
très précise de ce qu'est la participation, mais cette
idée très précise peut ne pas correspondre à
l'idée très précise que vous avez. Cela peut arriver.
M. Lafleur: Mais c'est fausser le problème, à mon
humble avis.
M. O'Neill: Je vous dis ça, ça peut...
M. Lafleur: C'est fausser le problème dans le sens qu'on
dit si Radio-Québec est régional, est-ce que c'est
Radio-Québec qui existe dans une région ou est-ce que c'est la
région qui fait Radio-Québec? Tout est là. Si vous voulez
que Radio-Québec existe dans une région comme une entité
propre, et qu'il est parachuté par le national, c'est très bien.
Mais si vous me dites: Radio-Québec doit être le reflet de sa
région, à ce moment, le problème ne se pose plus, puisque
Radio-Québec il ne s'agit pas de se demander si c'est
Radio-Québec qui a une vision de la participation ou si c'est la
région c'est régional, donc la région qui fait
Radio-Québec.
M. O'Neill: Si vous lisez le projet de loi sur la partie des
comités régionaux... Vous avez peut-être lu ce qui a
été rendu public au moment de la décision du Conseil des
ministres et de la régionalisation. Je ne sais pas si vous avez entendu
ce qu'a dit ici le président directeur général de
Radio-Québec. Ce qui est projeté actuellement, c'est quelque
chose qui est très loin d'un parachutage.
D'ailleurs, je ne vous oblige pas de partager cette opinion, mais c'est
vraiment de cette façon que beaucoup de gens qui sont ici ont
réagi devant le projet. Ils ont dit, à plusieurs reprises, qu'il
s'agit d'un effort réel et sérieux de régionalisation.
C'est simplement ça.
M. Lafleur: Mais, M. O'Neill, je n'ai jamais affirmé
ça. Je n'ai jamais affirmé qu'il s'agissait d'un parachutage. Je
dis simplement que si l'intention gouvernementale est de faire de
Radio-Québec un instrument véritable à l'intérieur
d'une région, il faudra se poser la question: Quels sont les
critères d'évaluation qui vont faire qu'au bout d'un an, deux ans
ou trois ans, on peut vérifier que Radio-Québec est le reflet de
cette région. Une fois que ces critères vont avoir
été mis de l'avant, à ce moment, on pourra dire: Oui,
agrandissons notre réseau, parce qu'on a atteint les objectifs
poursuivis. C'est simplement ce que je veux vous dire.
M. O'Neill: Est-ce que je vous interprète bien en disant
que finalement vous êtes d'accord avec
l'idée de régionalisation telle qu'affirmée dans le
projet de loi, mais que vous nous mettez en garde sur la façon dont
ça pourrait être réalisé; c'est bien ça?
M. Lafleur: Absolument, mais plus que ça. On vous dit:
Est-ce qu'il serait possible d'établir des critères précis
d'évaluation de la participation et du fait que Radio-Québec
appartient véritablement à la région?
M. O'Neill: 30 secondes pour une dernière question
très rapide. Vous avez insisté beaucoup sur les budgets
dérisoires qui sont accordés à des groupes comme les
vôtres. Quel est, à votre avis, le pourcentage que peut se
permettre, par rapport à un budget global de media communautaires, le
pourcentage de subventions que l'État peut se permettre sans donner
l'impression de porter atteinte à la liberté de ce media?
M. Lafleur: Porter atteinte à la liberté...
M. O'Neill: Oui. Croyez-vous qu'il doit y avoir un plafond
quelque part qui fait que ce media, pour bien manifester son autonomie, doit
aussi puiser à d'autres sources qu'une source de subventions
gouvernementales? Jusqu'où iriez-vous dans ce domaine-là? Vous
vous plaignez beaucoup, vous dites que ce sont des budgets dérisoires,
mais je voudrais savoir jusqu'où vous iriez.
Mme Rheault: Pour le regroupement, nous sommes quatorze groupes.
Il faut dire qu'il y a 75 demandes qui sont parvenues au ministère pour
les $550 000 l'année dernière. Cette année on nous dit $1
million à peu près, et il y aura sûrement autant de groupes
qui achemineront des demandes. Le plafond à l'automne 1977... Le ROCC a
mené une enquête pour connaître les besoins effectifs des
groupes des media communautaires et particulièrement des
télévisions communautaires et pour cerner la
réalité des media communautaires. On évaluait à 90%
la contribution de l'État, sans porter atteinte à l'autonomie. Je
pense que vous l'avez souligné aux personnes qui nous ont
précédés, qu'il n'y a pas vraiment d'insertion qui oriente
au niveau des objectifs ou de la vocation spécifique des media
communautaires. On l'apprécie. Il faut dire que nous avons toujours
préconisé un financement direct de la part de la
câbiodistribution locale où on mentionnait 10% alloué pour
leur production locale, que ce soit donné directement aux media
communautaires ou partagé entre les efforts du câblodistributeur
et le media communautaire.
On se rend compte dans plusieurs localités, combien l'argent ne
sert pas à la production locale, d'une part, et, d'autre part, combien
même il y a des réductions importantes. Les équipements, en
ce qui concerne Sherbrooke, sont finis, inutilisables pour permettre la simple
diffusion de documents. On s'en sert de toute façon parce qu'on n'a pas
d'autres moyens et c'est vraiment au gré de la câbiodistribution.
(22 h 15)
Donc, quand on affirme que l'État devrait financer, même
jusqu'à 90% du budget annuel d'un media communautaire comme une
télévision communautaire, c'est compte tenu que, dans un avenir
court, moyen ou long, la juridiction sur la câbiodistribution va
être obtenue pour le Québec et qu'il y aura une
réglementation ou un mécanisme qui prévoira ces 10%
rétribués aux media communautaires locaux.
C'est dans cette optique. Je fais le lien avec la politique, le projet
de politique de développement des media communautaires où on a
endossé globalement, parce qu'on le fait déjà, les grands
principes directeurs de cette politique, d'être des agents de
concertation régionaux, de favoriser l'expression et la participation
des citoyens aux décisions concernant les enjeux collectifs, de
favoriser l'expression de la culture québécoise et de
l'identité québécoise, on endosse ça, on le fait
déjà, et même de contribuer à la formation des
citoyens pour leur permettre de participer davantage à leurs moyens de
communication locaux.
On le fait déjà, mais avec des moyens du bord, comme on
dit. Quand on appelle ça dérisoire, c'est un budget, un
financement de $50 000 par rapport à un budget annuel qui nous
semblerait normal, minimal, juste pour maintenir un organisme pour Sherbrooke,
un budget annuel de $150 000 qui est une base. Or, on a un financement de $50
000. Ce sont les moyens réels du programme d'aide. Peut-être que
ça montera parce qu'il y a eu des augmentations de budget. Mais quand on
regarde ce qui est accordé à Radio-Québec, je comprends
que c'est un réseau d'État. Quand je pense aussi qu'on vit
au-dessus de nos moyens, je sais ça aussi. Mais j'estime qu'à un
moment donné, il y a des ajustements, il y a des indexations, il y a des
montants qui ne sont pas versés, qui devraient simplement traduire la
reconnaissance officielle de l'existence de ce secteur, qu'on appelle le
troisième secteur des communications.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Merci, M. le Président...
M. Bisaillon: C'est une question du ministre, il se
préparait à la poser.
M. Rivest: Le ministre est capable de poser ses propres
questions.
M. Bisaillon: M. le Président, question de
règlement. Et-ce qu'il n'y a pas possibilité pour un
député de demander à celui qui parle, qui interroge, la
possibilité de poser une question? Le ministre a posé une
question, il se préparait à poser une question additionnelle. Je
veux juste lui demander s'il voulait me laisser son tour, pour poser cette
question additionnelle.
M. Rivest: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jean-Talon, vous avez la parole.
M. Bisaillon: Vous avez peur.
M. Rivest: Je pense que c'est faire injure au ministre.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jean-Talon, vous avez la parole pour poser la question. Quant à l'autre,
ce n'est même pas une question.
M. Rivest: Est-ce que vous croyez que c'est faire injure au
ministre? C'est une question, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): C'est une question d'opinion
à laquelle nous ne sommes pas obligés de répondre.
M. Rivest: Je ne veux pas être désagréable
envers mon collègue. Je pense que je vais vous donner la permission de
poser votre question.
M. Bisaillon: Pardon?
M. Rivest: Je vais vous donner la permission de poser votre
question.
M. Bisaillon: Je ne voudrais pas vous faire injure. Je vous
remercie.
M. Rivest: Bienvenue.
M. Bisaillon: La seule précision que je voudrais vous
entendre dire, c'est que, dans la question du ministre, c'était de
savoir si vous ne vous sentiriez pas un peu moins d'autonomie dans vos
réalisations, si l'État finançait, avec un pourcentage
plus élevé. C'est dans ce sens-là que j'avais compris
à quel plafond...
Dans votre réponse, vous avez mentionné un budget de $50
000 alors que l'analyse des besoins financiers que vous pouvez
déterminer serait de l'ordre de $150 000. Dans cette différence
de $100 000 entre le montant dont vous disposez et le montant que vous jugeriez
nécessaire pour faire l'ensemble de vos activités, vous avez
donné une possibilité de revenu, c'est-à-dire...
Mme Lavoie-Roux: C'est long, votre question.
M. Rivest: Fournissez la réponse en même temps.
M. Bisaillon: J'ai écouté le député
de Jean-Talon et le député de L'Acadie et j'ai appris à
poser des questions qui donnaient en même temps la réponse. Je
continue dans le même sens.
M. Rivest: Qui s'instruit s'enrichit.
M. Bisaillon: II y a une différence de $100 000. Vous avez
donné une possibilité d'utilisation, de façon d'aller
chercher cet argent, en utilisant les 10% que les câblodistributeurs
devraient normalement utiliser à de la production locale. Est-ce que,
pour vous, il y a d'autres possibilités d'aller chercher des fonds? Et
ces autres possibilités sont-elles dans le cadre actuel du
fonctionnement des télévisions communautaires? Est-ce que ces
autres moyens sont possibles? Et si ces autres moyens n'étaient pas
possibles, est-ce que le fait que l'État comble la différence ne
vous lierait pas davantage les mains que vous les avez actuellement?
Mme Rheault: Nous avons des structures de participation qui
s'appellent des assemblées générales.
Une voix: C'est cela, je n'étais pas au courant.
Mme Rheault: Elles sont décisionnelles quant aux budgets
acceptés chaque année, quant aux programmes d'activités.
Il faut se mettre cela dans la tête en partant. L'ingérence
gouvernementale peut toujours devenir possible, mais il y aurait des
débats longs et pénibles de part et d'autre.
M. Bisaillon: Est-ce que je pourrais vous indiquer qu'il y a des
précédents? Est-ce que je pourrais vous indiquer, par exemple,
qu'il y a des groupes qui étaient totalement financés par
l'État? Prenons par exemple les ACEF, on a contrôlé ou
tenté de contrôler ces organisations en coupant leurs subventions.
Est-ce que ce n'est pas un moyen, à un moment donné, de faire
prendre des orientations à un organisme sans nécessairement les
imposer?
M. Lafleur: Évidemment, mais oui, sauf qu'il y a deux
types de gouvernement et il s'agit de savoir de quel type vous êtes. Il y
a un type de gouvernement qui dit: Nous allons donner des subventions à
ceux qui obéissent aux principes qui correspondent à nos
visions...
Mme Lavoie-Roux: Le gouvernement actuel.
M. Lafleur: Je n'ai rien dit de tel, je n'ai rien contredit de
tel non plus, mais enfin, il y a un type de gouvernement qui pourrait dire
pour éviter ce type d'intervention Voici, nous allons
donner les subventions à tel type d'organisme, un organisme qui a, par
exemple, une assemblée générale où les gens
décident entre eux de défendre tel type d'intérêt,
par exemple, pas nécessairement des intérêts partisans,
évidemment, mais la défense des consommateurs, comme vous le
souligniez, la défense de moyens de communication qui appartiennent aux
citoyens, etc. Nous allons donner à ces regroupements des montants dans
la mesure où ils vont correspondre à des principes que nous
allons leur imposer. Cela, c'est un type de gouvernement.
L'autre type de gouvernement, c'est de dire: Nous faisons confiance,
fondamentalement, aux citoyens dans la défense d'intérêts.
Évidemment, il
ne s'agit pas de financer des partis politiques, il ne s'agit pas de
financer sa propre destruction, il s'agit de financer des mécanismes de
participation à l'intérieur de domaines tels que la consommation,
les télévisions communautaires ou les media communautaires en
général, l'éducation populaire, etc., et nous allons faire
suffisamment confiance aux citoyens pour leur dire que leur assemblée
générale va décider de l'utilisation effective des fonds
qui seront attribués.
Cela dépend. Est-ce qu'on fait partie d'un gouvernement qui veut
contrôler les montants qu'il donne par rapport à des
décisions d'une assemblée générale de citoyens qui,
normalement, doivent savoir, compte tenu d'objectifs généraux
évidemment, quoi en faire, ou est-ce qu'on va tellement contrôler
une situation qu'on va en arriver à donner des fonds uniquement à
ceux qui vont travailler dans un sens partisan ou non, mais quasi dans le sens
explicite de nos intérêts? Jusqu'à maintenant, il ne semble
pas évident...
Mme Rheault: Qu'il y a une volonté dans ce
sens-là.
M. Lafleur: ... qu'on ait des programmes pour les media
communautaires qui veulent véritablement orienter les media
communautaires dans des voies très précises, dans le sens
on le dit d'amener les enjeux collectifs sur la place publique, de
développer des problématiques au niveau des acteurs dans une
société donnée, comment ils interviennent les uns les
autres. Faites-les parler l'un après l'autre, l'un avec l'autre, etc.,
et, essayez de montrer à la population quels sont véritablement
ces enjeux collectifs. À ce moment, cela ne semble pas de
l'intervention, de l'interventionnisme, mais l'assemblée
générale demeure quand même souveraine en disant: C'est tel
domaine qui nous intéresse, c'est tel autre, etc. Cela nous semblait
sain comme processus démocratique.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jean-Talon. Oui?
Mme Roy: Je voudrais seulement ajouter quelque chose à une
autre partie de la question, qui était la différence entre les
$50 000 et les $150 000. C'est bien sûr qu'on n'atteint pas les $150 000.
Dans le cas du centre vidéo populaire sur la rive sud à
Lévis, on a peut-être des besoins de $100 000. Quand on
évalue cela, on se dit: On va aller chercher le plus de places possible
où il existe des subventions. Bien sûr qu'on va aux programmes
d'aide, c'est notre plus grosse source de subventions pour l'année.
Ensuite, on va voir à l'éducation populaire, l'éducation
des adultes. Ensuite, on va voir au fédéral, on va voir au
Conseil des arts, on va voir où on peut avoir la possibilité de
survivre pendant l'année. On a des projets. C'était d'ailleurs
inscrit dans le projet de politique de faire des media communautaires un
troisième secteur des communications. C'est possible quand on a l'argent
pour le faire et quand un CA, des membres bénévoles et des
permanents ne passent pas leur temps et ne dépensent pas leurs
énergies à courir des subventions. Pendant ce temps, il n'y a pas
de production qui se fait. Il y a un développement qui doit se faire
aussi. On n'a pas le temps ni l'énergie pour aller aussi loin qu'on le
voudrait et atteindre les objectifs qu'on voudrait atteindre, parce qu'on perd
notre temps à demander des subventions. Je pense que c'est une
étape qu'il faudrait... C'est quelque chose qu'il faudrait arrêter
de faire pour se pencher vraiment sur le travail qu'on a à faire pour
notre communauté.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Le ministre a passé, pour des raisons
évidentes, assez rapidement sur les éléments que vous
portez à notre connaissance, les éléments du programme de
développement des media communautaires. Est-ce que vous avez
été consultés comme tel dans l'élaboration de ce
programme? Oui?
Mme Rheault: Oui.
M. Lafleur: On peut dire qu'il y a deux types de réponses.
Vous nous demandez: Est-ce que vous avez été consultés?
Nous ne saurions répondre que oui.
M. Rivest: L'autre type, c'est: Est-ce que vous êtes
d'accord sur les orientations présentes du ministère?
M. Lafleur: Les orientations doivent venir sous peu à
l'intérieur d'une politique générale de
développement des media communautaires et d'un programme d'aide au
développement des media communautaires, les deux documents
n'étant pas, que je sache, encore parus. Par ailleurs, cette
consultation, un peu comme la consultation de ce soir, nous semble un peu, je
dirais, difficile pour des groupes...
M. Rivest: Dirigée.
M. Lafleur: ... communautaires, au sens où nous sommes
très heureux d'être consultés et nous en remercions le
gouvernement. Je pense que c'est un effort de démocratie qui est
essentiel. Par ailleurs, on l'a déjà souligné pour le
programme d'aide et la politique, il nous semble que les délais dans
lesquels on semble, à certains moments, nous enfermer, nous font penser,
nous font croire que le gouvernement considère que nous avons
l'organisation sous-jacente qui nous permet de produire en quelques jours ou en
quelques semaines des documents de fond qui peuvent facilement être
produits par des fonctionnaires, par exemple, la politique de
développement des media communautaires qu'on n'a pas pris de temps
à mettre sur pied. Cela a pris six ou sept mois.
Par ailleurs, nous, on nous demande en deux semaines de venir produire
un document sur la
régionalisation de Radio-Québec en disant: De toute
façon, vous êtes prêts. Il n'y a pas de problème.
Allez-y, on attend votre document. C'est ça qui va nous influencer.
Une voix: Oui.
M. Lafleur: II y a un danger à ce niveau-là, mais
je reviens avec le principe que nous sommes heureux d'être
consultés, mais, sur la manière, peut-être qu'il y aurait
lieu d'inventer des processus qui soient un peu plus démocratiques...
Non, je retire le mot, je dirais qui soient un peu plus près...
M. Rivest: Raisonnables...
M. Lafleur: ... de la dynamique des groupes communautaires.
M. Rivest: On va vous aider d'ailleurs aux projets de loi 4 et 5
et vous verrez qu'il n'y aura pas de précipitation.
M. Lafleur: Si je peux conclure rapidement, parce qu'il reste
deux minutes, une conclusion générale, si je peux me permettre,
M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui. M. Lafleur: Ce sera
très rapide.
Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou d'une
autre, à 22 h 30, je vais demander...
Mme Lavoie-Roux: On peut continuer jusqu'à minuit.
Le Président (M. Jolivet): ... s'il y a poursuite...
M. Lafleur: Enfin, moi, je voudrais faire simplement une
conclusion selon laquelle je ne voudrais absolument pas que l'intervention qui
a été faite ce soir par le regroupement apparaisse comme une
intervention négative. Il me semble évident qu'en commission
parlementaire et, encore là, c'est un peu le jeu de la
démocratie ce n'est pas l'occasion, ni le lieu pour glorifier un
gouvernement de ses projets de loi, de ses réalisations passées,
ni de dire que ses réalisations futures seront extraordinaires. Cela ne
me semble pas être le lieu.
M. Rivest: Non, à qui le dites-vous! Mme Rheault:
À tout le monde.
M. Lafleur: Je le dis à tout le monde,
évidemment.
Mme Rheault: À qui veut l'entendre.
M. Lafleur: Ce que je veux dire, c'est que, globalement, je pense
bien que nous n'avons pas à porter et nous ne portons pas de jugements
globaux sur l'ensemble du gouvernement actuel, de ses interventions
législatives, etc., ce n'est pas notre rôle.
D'autre part, il y a certains éléments positifs dans les
projets de loi 4 et 5 que nous n'avons peut-être pas soulignés,
soit parce qu'il nous semblait que ces éléments devraient
être approuvés généralement par les partis
d'Opposition et par le parti ministériel, de sorte que nous avons... (22
h 30)
M. Bisaillon: Je ne le connaissais pas.
M. Lafleur: ... voulu insister principalement sur les
éléments qui nous semblaient un peu différents de ce que
nous souhaitions voir dans la réglementation. Donc, quand on dit que le
gouvernement a amené une programmation éducative, une
définition de la programmation éducative, nous disons:
Très bien. Lorsqu'on parle, par exemple, d'une représentation des
régions à l'intérieur de Radio-Québec au niveau
national, nous disons: Très bien. Lorsqu'on parle, par exemple, d'une
certaine représentation à l'intérieur des conseils
d'administration dans les régions pour Radio-Québec, une
représentation régionale, nous disons: Très bien.
Là où nous accrochons, c'est sur les points qu'on a essayé
de souligner dans notre mémoire dans la perspective
précisément où une commission parlementaire devrait,
à notre humble avis, être le lieu de discussion des points qui
sont un peu plus litigieux et qui méritent d'être discutés
par les députés de l'Opposition et par les députés
ministériels.
M. Rivest: Oui.
Mme Lavoie-Roux: C'est dans ces conditions, ce sera de cette
façon...
Le Président (M. Jolivet): Mme le député de
l'Acadie...
M. Rivest: C'est dans ce sens que, globalement, ce que vous
dites, en tant que media communautaires, c'est que certains des objectifs sont
évidemment... tout le monde peut les endosser selon ses propres
convictions et quand elles sont exprimées de façon très
générale, c'est très difficile de les critiquer, mais, au
fond, vous laissez entendre globalement, surtout par cet aspect et cette
insistance que vous avez mise au niveau des moyens qu'on accorde pour votre
production proprement dite, par rapport au fait de vous considérer
simplement comme un élément de diffusion, que sur les objectifs,
en regard des objectifs, quels que soient leur mérite ou leur
démérite, c'est que le gouvernement n'a pas vis-à-vis de
media tels que vous les moyens de sa politique, c'est ça que vous voulez
indiquer, les moyens financiers.
Mme Rheault: Mais le gouvernement, quel qu'il soit, au pouvoir
n'aurait pas plus le moyen.
M. Rivest: Mais, ce que vous voulez, c'est que vous avez
signifié de façon très concrète les diffi-
cultés pratiques dans lesquelles vous allez vous situer,
continuer, au fond, de vous situer, quelles que soient les orientations de base
que la législation que l'Assemblée nationale ou que le
gouvernement ou peu importe, et, comme vous le dites, n'importe quel
gouvernement peut vous donner, c'est ça, quand vous insistez tellement
sur le caractère dérisoire des budgets de production.
M. Lafleur: Ce qu'il est important de voir, c'est
évidemment... on peut se situer dans une optique partisane, avoir un
certain point de vue, comme vous pouvez en avoir un, comme les
ministériels peuvent en avoir un, nous, nous ne nous situons pas dans
cette optique-là. Ce que nous disons, c'est que, quels que soient les
gouvernements qui ont été en place depuis une dizaine
d'années, il y a toujours eu des politiques qui ont favorisé
jusqu'à un certain point les groupes communautaires et les regroupements
de citoyens et d'autres qui les ont fondamentalement défavorisés.
Notre position actuellement est de dire que nous allons toujours appuyer les
gouvernements qui vont favoriser cette autonomie des groupes de citoyens qui
défendent des intérêts, comme on le mentionnait tout
à l'heure. Pas des intérêts partisans, c'est
évident, des intérêts de l'ordre de la défense du
consommateur, de l'ordre des média communautaires, de l'ordre de
l'éducation populaire. Notre rôle à nous chacun
à son rôle, je ne conteste pas le vôtre et j'espère
que vous ne contestez pas le mien est de défendre ce point de vue
selon lequel un gouvernement, s'il ne veut pas arriver à bâtir un
État où les citoyens deviendront de simples machines où,
finalement, ils n'auront plus rien à faire, si ce n'est obéir aux
lois et se laisser bercer par le ronronnement de la machine gouvernementale. Si
nous voulons aller au-delà de ça, nous serons obligés
d'encourager les gouvernements seront obligés d'encourager
les organisations de citoyens. Pour notre part, nous ne pouvons dire autre
chose que: Vive les gouvernements qui encouragent ce type d'initiatives. Plus
un gouvernement va favoriser la prise en charge du citoyen, des citoyens et de
leur devenir, plus nous allons être près de ces
gouvernements-là; plus on va les décourager, plus nous allons en
être loin. C'est notre perspective de base.
M. Rivest: Oui, c'est ce que...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: J'admire la façon et la vivacité que
vous employez à défendre une cause qui vous est chère. Je
ne veux pas faire de répétition et poser de questions, d'ailleurs
vous en avez souligné dans votre mémoire. Vous représentez
quatorze groupes; j'aimerais savoir combien il y a d'organismes communautaires
de communications au Québec. Êtes-vous au courant? En dehors des
quatorze, combien y a-t-il de groupes comme le vôtre?
Mme Roy: Je peux répondre pour les radios. Je sais qu'il
existe actuellement quatre ou cinq groupes officiels de radios communautaires
qui fonctionnent. Pour ce qui est des journaux, je suis moins au courant. Mais
je sais qu'il en existe quelques-uns, à peine le même nombre. Pour
ce qui est des groupes vidéos, il y a en ce moment trois groupes dans la
région de Québec, un dans la région de Shawinigan et un
autre dans la région de Montréal. C'est tout ce que je sais. Il y
a bien sûr aussi des groupes qui sont en formation et qui n'ont pas
d'existence légale comme telle, mais dont l'existence va devenir
légale dans un certain temps.
M. Le Moignan: Est-ce que vous parlez des groupes de
télévision communautaire en même temps?
Mme Roy: Les groupes de télévision communautaire,
c'est nous autres, les 14 groupes qu'on représente.
M. Le Moignan: Je suis curieux, est-ce que vous
représentez... quand vous allez vers l'est, vous avez Montréal,
Québec...
Mme Roy: On représente Matane, Mont-Joli,
Rivière-du-Loup...
M. Le Moignan: Grande Rivière, non,
télévision communautaire de Grande Rivière?
Mme Roy: Grande Rivière, il n'y a pas de groupe de
télévision.
Mme Rheault: ... démarré à
Grande-Rivière, il y a eu un groupe à Grande Rivière,
mais...
M. Le Moignan: Un groupe qui fonctionne toujours très
bien, mais qui n'a pas d'aide du gouvernement, par exemple?
Mme Rheault: Oui, c'est ça et qui ne fait pas partie de
notre groupement.
M. Le Moignan: Ils ne font pas partie de votre groupement.
J'ai cru comprendre que d'après un examen fait par un jury
je ne conteste pas du tout on a dit qu'on ne répondait pas aux
normes d'une véritable télévision communautaire,
éducative. Je crois que...
M. O'Neill: II y a plusieurs groupes à qui c'est
arrivé, peut-être ce groupe. De mémoire, je ne peux pas
dire s'il fait partie des groupes qui auraient fait des demandes et à
qui on aurait refusé la subvention, mais c'est arrivé, oui. Le
jury fait un choix...
M. Le Moignan: J'ai vu les conditions.
M. O'Neill: ... et, lorsqu'il y a des groupes qui correspondent
bien aux critères, évidemment ils
sont préférés à d'autres. C'est pour
ça qu'il y a un jury d'ailleurs.
M. Le Moignan: Je ne conteste pas la décision du jury. Il
y a un groupe qui fonctionne et qui fait appel, dans le moment, à la
générosité du public pour l'aider.
Mme Rheault: Le ROCC a été l'un des premiers
regroupements au niveau provincial, d'un type de media communautaire que sont
les télévisions. Actuellement, les radios sont en train de se
structurer. À la presse écrite, il n'y a aucun regroupement qui
existe. Au niveau de la vidéo-animation, il y a un regroupement
régional qui est la région de Québec, mais tous les media
communautaires ne sont pas tenus de faire partie de regroupements provinciaux
qui offrent des avantages et qui offrent aussi des inconvénients.
M. Le Moignan: Mais vous avez invité ces
télévisions communautaires...
Mme Rheault: Oui, tous les groupes de télévision
communautaire sont invités à nous contacter et à se
joindre à nous.
M. Lafleur: Pour compléter la réponse, si vous
permettez, dans le document de politique de développement des media
communautaires qui nous a été soumis par le ministère des
Communications en janvier dernier, on nous disait qu'il y avait eu
effectivement 75 demandes de groupes de media communautaires qui avaient
été acheminées au ministère des Communications l'an
dernier. Évidemment, il s'agit de groupes qui, d'une part, sont en
implantation, donc qui ne sont pas nécessairement en fonctionnement
actuellement, mais il reste que, potentiellement, il y a à peu
près 75 groupes dont à peu près 14 groupes de radios
communautaires qui sont à la phase d'implantation et qui pourraient voir
le jour sous peu, ainsi qu'un certain nombre de groupes de
télévisions communautaires.
En termes de demandes adressées au ministère des
Communications par le biais du programme d'aide au développement des
media communautaires, il s'agit d'une demande de l'ordre de 75 groupes l'an
dernier.
M. Le Moignan: C'est donc dire que, si le gouvernement devait
subventionner les 75 groupes, cela pourrait représenter une somme assez
importante.
M. Lafleur: Si on en vient à la question du financement,
l'expression que vous employez "somme importante", comme vous le savez, demeure
toujours assez relative. Si on faisait simplement suivre deux courbes
parallèles entre le développement de Radio-Québec et le
développement des media communautaires et si on les maintenait
parallèlement, je pense que ce serait relativement intéressant
pour les media communautaires, parce que, en dix ans, et j'en suis convaincu,
vous le savez, en dollars 1979, on dépensera, selon le rapport Rocher,
à moins d'avis contraire du ministre, $84 millions pour
Radio-Québec.
Si on permettait simplement la courbe des media communautaires, faisons
le parallèle, $22 millions cette année pour Radio-Québec,
à peine $1 million pour les media communautaires. Maintenons ce
parallèle pendant dix ans, à ce moment-là, on pourra
peut-être parler des sommes considérables, mais elles seront
considérables davantage pour Radio-Québec qu'elles le seront pour
les media communautaires.
M. Le Moignan: Dans vos programmes, quand il s'agit de
programmation éducative, est-ce que vous contribuez, est-ce que vous
avez des ententes ou est-ce que vous prévoyez avoir des ententes avec le
gouvernement pour établir un véritable moyen de programmation
éducative, au véritable sens du mot, tel que la loi l'entend et
tel que vous le comprenez?
Mme Rheault: Dans la plupart des cas de télévision
communautaire, il existe différents types d'émissions et la
majorité de la programmation est de type éducatif, au sens
entendu généralement.
Il y a des collaborations avec les maisons d'enseignement. Il y a aussi
des contributions. Linda, tantôt, faisait l'énumération des
autres sources de financement aux portes desquelles six mois par année
on frappe pour avoir du financement. On a omis de dire qu'on allait aussi au
ministère de l'Éducation pour toute la partie éducation
populaire, qui est, dans plusieurs media communautaires, une partie importante
des activités, soit la préparation de la production et les
retombées de cette production-là.
Il y a toute une activité entourant une émission comme
telle que nous caractérisons d'éducative parce qu'elle voit
à ce que le message ou l'objectif visé par cette
émission-là soit reçu, discuté, et qu'il porte un
"feedback" qui peut générer dans une autre émission
à l'occasion d'une autre émission, etc. C'est un roulis continuel
de sorte que les coûts de production dans les media communautaires ne
sont pas élevés par rapport à d'autres secteurs de
production, d'autres entreprises de production à cause des budgets, mais
on ne fonctionne pas douze mois par année et on n'a pas des gens
payés comme au niveau professionnel non plus.
M. Le Moignan: Une dernière question. Vous avez
parlé des éléphants blancs. Vous avez fait des
comparaisons avec les hôpitaux, avec les CLSC où on avait
établi tout un réseau. Maintenant, vous suggérez au
gouvernement d'être très prudent dans l'implantation de
Radio-Québec dans les régions. Vous parlez d'une ou deux stations
d'ici deux ou trois ans. Avez-vous des préférences? Non.
Une voix: Oui.
M. Lafleur: Vous parlez concernant les régions ou la
région?
M. Le Moignan: Non, vous avez parlé de peut-être une
ou deux régions d'ici deux ou trois ans pour ne pas procéder de
façon trop rapide.
M. Lafleur: Vous nous demandez une préférence sur
une région?
M. Le Moignan: Non, je ne vous demande pas de répondre
à cela de façon...
M. Lafleur: D'accord.
M. Le Moignan: Mais, avec votre raisonnement, que j'approuve
évidemment jusqu'à un certain point de vue, si
Radio-Québec veut s'implanter et, comme le ministre nous a dit que
l'opinion contraire aussi c'est que la plupart des régions demandent
l'implantation rapide de Radio-Québec, beaucoup de groupes sont venus
l'an dernier et veulent son implantation dans les régions, avoir
Radio-Québec, être desservis par Radio-Québec, si on suit
votre ligne de pensée, cela pourrait prendre peut-être dix ans
avant que Radio-Québec soit implanté...
M. Lafleur: Absolument mais à partir du moment où
on instaure un processus de régionalisation, à mon sens,
nécessairement, chacun va vouloir être le premier à avoir
la régionalisation chez lui, évidemment. Le réflexe
gouvernemental, donc politique, c'est de dire: Implantons partout en même
temps pour satisfaire chacun.
M. Le Moignan: Mais le gouvernement n'a pas l'habitude de
gâter toutes les régions le même jour, la même
année non plus. (22 h 45)
M. Rivest: Non, vous faites erreur, il ne fait jamais cela. Je ne
pense pas que le gouvernement...
M. Lafleur: Non, ce que je veux dire, c'est qu'il y a un danger,
lorsqu'on dit que nous allons régionaliser, que chaque région
dise: C'est chez nous que vous devriez venir en premier lieu. Il peut y avoir
un réflexe gouvernemental qui dise...
M. Rivest: Un réflexe.
M. Lafleur: ... une attitude ou une volonté
gouvernementale qui fasse en sorte qu'on veuille implanter partout à la
fois pour satisfaire chacun et ne pas créer d'insatisfaction, mais il
s'agit de voir si on demeure prudents ou bien si on est davantage politiques
dans la mesure où il y a une opposition entre les deux
quelquefois, cela arrive. Si on veut être davantage prudents que
politiques, à ce moment, on se dit: On n'accédera pas au voeu de
l'ensemble des régions en même temps, compte tenu de tout ce qui
s'est passé auparavant, de toutes les erreurs qu'on a connues et qui ont
créé tant d'éléphants blancs, comme M. le
député de soulignait. Je crois que tout le monde le demande sans
doute. Maintenant, parce que tout le monde le demande, est-ce qu'on va
répon- dre à tout le monde en même temps, en disant oui
à tout le monde. J'espère que non. On dit: Non, surtout pas.
Répondons lentement. Disons oui à certains et disons oui dans
quelques années à d'autres.
M. Le Moignan: Le mot de la fin. Vous avez mentionné, je
crois, $84 millions que cela pourrait coûter pour l'implantation de la
radio, pour la régionalisation.
M. Lafleur: Ce sont les chiffres du rapport Rocher, oui.
M. Le Moignan: Oui. À ce moment, supposons qu'on atteigne
les quelque $80 millions, de votre côté, quel pourcentage cela
va-t-il représenter en même temps que ces quelque $80 millions
vont augmenter. Qu'est-ce que vous allez recevoir? Vous ne le savez pas.
M. Lafleur: Je pense qu'on a déjà répondu
relativement à cette question, au sens où il y a deux types de
gouvernement, comme on l'a dit. Ou bien, il y a un type de gouvernement qui
favorise effectivement les entreprises populaires et les regroupements de
citoyens. À ce moment, on peut imaginer que la courbe d'augmentation des
coûts de Radio-Québec va être parallèle à
celle de l'augmentation des coûts des groupes de media communautaires, ou
bien, on va avoir affaire à des gouvernements parce qu'on se reporte
dans dix ans je dis des gouvernements, mais on ne sait jamais, je le dis
au cas où, mais enfin, on pourrait dire un gouvernement, je ne sais pas
de toute façon, à un ou à des gouvernements, qui
vont au contraire faire en sorte que ces courbes ne soient pas
parallèles. Ce que nous disons, c'est: Si véritablement, les
gouvernements ou le gouvernement actuel et les gouvernements futurs veulent
maintenir véritablement les organisations de citoyens, ils devront
maintenir également les deux courbes de façon relativement
parallèle, de sorte que si on se reporte à un rapport...
Actuellement, c'est $20 000 000 contre $1 000 000. Si on maintenait ces courbes
de façon parallèle, on en arriverait à des chiffres qui
pourraient être, pour les media communautaires, relativement
intéressants. Sinon on aura eu affaire à des gouvernements qui
auront favorisé les entreprises d'État par rapport aux
entreprises ou aux groupes de citoyens.
M. Le Moignan: Merci.
Le Président (M. Jolivet): Toujours sur le même
consentement quant au dépassement de l'heure, Mme le
député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Moi, je voudrais
remercier d'une façon toute particulière les porte-parole du
Regroupement des organismes communautaires de communication du Québec.
Je suis plus habituée de vous reconnaître comme la
télévision communautaire. C'est un grand titre auquel...
Je pense que dans votre mémoire vous soulevez des questions
intéressantes et, lors de la discussion, je pense aussi que vous
apportez des points de vue qui n'ont pas été soulevés
jusqu'ici.
Je ne sais pas si vous étiez ici, hier, lors de la
présentation des autres mémoires?
Une voix: Non.
Mme Lavoie-Roux: Non. Plusieurs de vos réflexions
correspondent à certaines inquiétudes que j'avais et que j'ai
exprimées hier. Le rôle d'un organisme quand il se présente
en commission parlementaire, est de faire valoir ce qui lui paraît
être des lacunes ou des préoccupations, et vous êtes un des
quelques groupes qui l'aient fait. Il y en a d'autres qui ont encensé le
gouvernement et je pense que ce n'est pas le rôle d'une commission
parlementaire. Je trouve ça très bon.
Il y a également cette préoccupation que vous avez
à l'égard des groupes communautaires et de leur rôle dans
chacune des régions. Hier a été soulevée la
question de la composition des conseils d'administration, je pense, qu'on
appelle, des conseils régionaux. Un groupe peut-être deux,
mais un, en tout cas a soulevé cette inquiétude qu'il
avait que, dans la composition de ce conseil d'administration, peut-être
pas de mauvaise foi du tout je ne veux imputer aucun mauvais motif au
gouvernement mais que, suivant les circonstances, on puisse justement
enlever la voix des représentants des groupes de citoyens ou des
groupes... on les désigne sous le nom de populaire, des groupes
populaires. Pour ma part, je rejoins votre inquiétude selon laquelle on
va se retrouver avec des conseils régionaux... Il ne faut pas oublier
que de ces conseils régionaux, toutes les nominations devront être
approuvées par le lieutenant-gouverneur en conseil.
Alors, je pense que c'est très différent, par exemple, du
fonctionnement des télévisions communautaires qui existent
à travers tout le Québec. Je peux vous assurer que
là-dessus, du côté de l'Opposition officielle, quoique
j'aie remarqué que le ministre s'était montré assez
sympathique aux revendications qui avaient été faites dans ce
sens, en tout cas, nous, de l'Opposition officielle, ça nous semble
extrêmement important. Il ne faudrait pas récupérer la
population à partir de conseils d'administration qui, finalement, auront
été formés sous l'égide très formelle du
gouvernement.
Il y a une inquiétude que je sens de votre part. Enfin, c'est
peut-être une mauvaise perception, alors, je voudrais que vous me
corrigiez, mais elle m'apparaît exprimée en page 9. Je voudrais
revenir sur les points de votre conclusion, parce que, dans le fond, ils
reprennent sous une autre forme plusieurs des préoccupations
exprimées antérieurement. Normalement, c'est le rôle d'une
conclusion. Alors, ça va peut-être permettre de cerner davantage
les points que je veux soulever avec vous.
Comment le gouvernement entend-il reconnaître la valeur et assurer
la viabilité des media communautaires? Vous l'avez exprimé de
différen- tes façons. Est-ce que je me trompe en disant que vous
attendez avec une certaine impatience le dépôt de la politique de
développement des media communautaires?
Deuxièmement, vous dites dans votre question ici: Comment va-t-il
assurer la viabilité des média communautaires. Vous avez
établi ce parallèle ou, enfin, ces deux courbes parallèles
de développement qui assuraient que le développement ou la
régionalisation de Radio-Québec ne se faisait pas au
détriment de la télévision communautaire. Vous ne l'avez
pas exprimé. Est-ce qu'il existe également chez vous la
préoccupation que, selon le hasard de circonstances ou la façon
dont les choses se présenteront, dans certaines régions vous
soyez avalés par Radio-Québec? C'est peut-être votre
façon de l'exprimer quand vous parlez de la viabilité des media
communautaires. Est-ce qu'il y a chez vous cette inquiétude?
Vous êtes venus nous porter un message. Vous dites: On veut bien
que Radio-Québec se développe au plan régional, mais on ne
veut pas qu'il se développe au détriment de la
télévision communautaire qui elle, a une vocation ou un
rôle qui nous apparaît essentiel dans une communauté, du
point de vue d'une véritable démocratisation, du point de vue
d'une non récupération des citoyens par l'État. Quel que
soit l'État ou le gouvernement, cela m'importe peu, je le pose vraiment
au niveau des principes.
Mme Roy: C'est exactement ça. Je pense que lorsqu'on parle
dans le document d'une expertise à reconnaître, c'est tout un
travail d'animation dans nos localités, de collaboration, d'avoir
construit les documents, d'avoir fait des comités, d'avoir bâti
une télévision en collaboration avec des citoyens qui sont
impliqués concrètement à bâtir cette
télévision-là. On a une existence propre,
spécifique, qui est différente de celle de Radio-Québec.
On se considère comme près des citoyens, on considère
avoir mis des mécanismes en place pour que la participation des citoyens
soit effective à travers des media communautaires qu'on
représente. Je pense qu'on veut maintenir et développer cela.
C'est en ces termes-là qu'on a peur que les budgets qui seront
alloués à Radio-Québec rendent moins importants les
budgets à des media communautaires qui veulent se développer, non
pas simplement survivre.
Il y a des choses qui sont faites, mais il y en a encore plus qui
pourraient se faire. C'est sûr que quand on reste ouvert sept ou huit
mois par année plutôt que douze, ce n'est pas parce qu'il n'y a
pas de chose à faire, ce n'est pas que les citoyens n'ont plus de
sujets, de documents, de dossiers à développer, c'est parce qu'il
n'y a plus de sommes pour payer des personnes qui puissent les aider à
faire ces documents-là. Il n'y a pas de personne ressource, il n'y a
plus d'animateur en place pour ça. C'est ça qu'on voulait
dire.
M. Lafleur: Je voudrais ajouter un complément. Quand vous
nous dites: Est-ce que vous avez des craintes par rapport à la politique
qui va
être déposée et par rapport au nouveau programme
d'aide au développement des media communautaires, je répondrais,
encore là, sous deux aspects. Le premier aspect, oui, mais c'est un
aspect purement égoïste au sens où on a un peu peur que les
sommes consacrées aux media communautaires soient, on a employé
le mot "dérisoires" et ça nous semble être une crainte qui
risque de se matérialiser très bientôt, mais je voudrais
aller un peu plus loin que ça. Souvent, j'ai l'impression qu'on se
présente en commission parlementaire soit pour encenser le gouvernement,
d'une part, comme vous l'avez si bien mentionné, soit pour revendiquer
des choses.
Je voudrais tenter d'aller un peu plus loin. Je dis le premier aspect,
oui, nous avons peur et oui, il est possible qu'il y ait des coupures d'argent.
Ce serait un peu catastrophique pour nous, mais, au-delà de ça,
nous avons suggéré, à l'intérieur d'un
mémoire que nous avons fait parvenir au ministère des
Communications, au mois de mars dernier qui a été
discuté d'ailleurs entre des fonctionnaires du ministère et le
regroupement lui-même nous avons suggéré un
comité d'étude qui regrouperait précisément les
media communautaires et le ministère des Communications pour essayer
d'établir ce qu'on appelle un plan de développement. Or, ce plan
de développement, entre autres, devrait normalement étudier les
relations possibles, potentielles entre l'ORTQ et les media communautaires. Je
le dis d'autant plus librement que ça nous semble être une
initiative gratuite de notre part, au sens où encore là, on
pourrait fonctionner plus ou moins à côté, en essayant de
gruger les sommes d'argent de l'ORTQ et vice versa.
Je pense que c'est une initiative qui vise essentiellement à
regarder les liens potentiels entre l'ORTQ et les media communautaires et
à établir les meilleures collaborations possibles, de sorte que,
précisément, ces sommes d'argent qui viennent de la poche des
contribuables soient utilisées de la meilleure façon
possible.
Donc, il y a un danger que même si on établit une courbe
parallèle de dépenses entre l'ORTQ et les media communautaires,
cette courbe se traduise au niveau des activités, ce qui, à notre
avis, ne serait pas idéal, parce qu'il existe à certains moments
des possibilités de collaboration qui sont extrêmement
intéressantes et qui ont déjà été
expérimentées dans certaines régions du Québec,
dont à Sherbrooke particulièrement.
On se dit, oui la politique est un danger au niveau de la
dépense, au niveau des sommes d'argent, mais oui, la politique est aussi
un danger dans la mesure où elle ne reconnaîtra pas le principe de
ces comités d'étude qui devront, à court terme, d'ici six,
huit ou dix mois, aboutir à des recommandations spécifiques par
rapport à des modes de collaboration potentielle entre l'ORTQ et les
media communautaires. Ce qui est dangereux, dans le fond, c'est qu'on peut nous
dire facilement, on ne nous le dit pas encore, mais on peut nous le dire
facilement: Oui, mais on est des fonctionnaires du ministère des
Communications et on n'a pas de communications directes je veux di- re
au niveau des media communautaires, les fonctionnaires responsables avec
les gens de l'ORTQ. À l'ORTQ, on va nous dire la même chose. On
n'a pas nécessairement de liens avec les gens des media communautaires,
alors, on ne se parlera pas.
Comme on nous dit à l'éducation: Écoutez, le
programme d'éducation populaire regarde les télévisions
communautaires, mais les liens sont plus ou moins flous. Finalement, si on veut
véritablement arriver à utiliser de façon maximale
l'argent du public, il faut fondamentalement en arriver à une
concertation de l'ensemble de cet argent, à savoir d'une part l'argent
qui va à l'éducation populaire, l'argent qui va à l'ORTQ,
l'argent qui va aux media communautaires pour faire la meilleure utilisation
possible de ce qui nous vient des fonds publics. (23 heures)
Notre crainte fondamentale, c'est que ce comité avorte.
Jusqu'à maintenant, on se dit que cela va fonctionner,
espérons-le. Mais il faudrait véritablement qu'il y ait un effort
de fait pour réunir à une même table tous ces intervenants
et qu'on en arrive à développer une amorce de politique des
communications au Québec, ne serait-ce qu'au niveau éducatif, une
politique de communication au niveau éducatif et au niveau
communautaire. Ce serait déjà une amorce qui serait
extrêmement intéressante.
Le Président (M. Jolivet): Avant de continuer, compte tenu
qu'il est 23 heures, j'aimerais savoir s'il y a toujours consentement pour
qu'on continue. Est-ce qu'on se limite encore dans le temps ou continue-t-on
jusqu'à l'épuisement des questions de Mme le
député?
M. Rivest: Je pense que le député de Sainte-Marie a
également des questions. Avez-vous encore des questions, M. le
député?
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. Je veux juste
savoir si on a le consentement pour continuer. Vers 23 h 15?
Mme Lavoie-Roux: J'en aurais pour plus longtemps que cela, sans
cela, je vais continuer seule avec eux.
M. Bisaillon: Vous n'avez droit qu'à 20 minutes.
Prenez-les. Continuez.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. Je comprends, Mme
le député, que vous avez beaucoup de questions. Je tiens...
Mme Lavoie-Roux: Je trouve cela intéressant.
Le Président (M. Jolivet): Je conçois aussi la
même chose, mais, comme président...
Mme Lavoie-Roux: Vous n'avez qu'à vous conformer à
la volonté de la commission.
Le Président (M. Jolivet): C'est cela. On me demande de
considérer 23 h 15, avec réévaluation vers 23 h 15.
M. Rivest: Qui vous le demande?
M. O'Neill: Moi, je propose 23 h 15, mais enfin...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Rivest: II n'est pas tout seul à la commission.
Le Président (M. Jolivet): Cela me prend le consentement
pour continuer plus tard que 23 heures. En conséquence, je dois
simplement vous dire que cela fait deux jours que nous siégeons à
cette commission et je ne pense pas avoir, à aucun moment, brimé
qui que ce soit. On a continué un peu plus tard que prévu hier
soir également. Comme vous en faisiez mention, Mme le
député, hier, c'est la même chose pour d'autres ainsi que
pour moi-même, nous avons des réunions demain matin à huit
heures, alors, nous aimerions en arriver à une conclusion le plus
rapidement possible.
Mme Lavoie-Roux: Je vais faire ce que je peux en commission
parlementaire et pour le reste j'irai vous parler.
Pouvez-vous me dire, si je vous comprends bien, s'il y a eu un
comité de formé pour étudier une politique de
collaboration entre l'ORTQ et la télévision communautaire ou
est-ce un souhait que vous exprimez?
Mme Rheault: C'est une des recommandations que nous avons faites
dans notre mémoire en mars, que soit créé un comité
conjoint sur...
Mme Lavoie-Roux: Cela n'existe pas dans le moment.
Mme Rheault: Actuellement, non, la politique n'est même pas
lancée.
Mme Lavoie-Roux: Je me demande si M. le ministre consentirait,
sans nous donner une date précise, à nous dire dans quel
délai il pense que cette politique de développement de la
télévision communautaire pourra être rendue publique?
M. O'Neill: Cela ne devrait pas tarder...
Mme Lavoie-Roux: Je pourrais attendre l'étude article par
article, mais, comme ils sont ici, cela peut les intéresser.
M. O'Neill: ... M. le Président, il y a déjà
eu la révision d'un premier texte qui nous a été
proposé. On l'a retourné au comité avec des
corrections...
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. O'Neill: ... parce qu'il y avait des choses sur lesquelles on
n'était pas d'accord. Nous avons corrigé certaines choses, par
exemple, la place qu'on voulait accorder, entre autres, aux media des
représentants des groupes ethniques et certains autres points et
également les barèmes de répartition de subventions. Il y
avait des points où, quant à moi, de toute façon, je
n'étais pas convaincu que ce qui était proposé
était nécessairement ce qu'il y avait de meilleur et on est en
train de vous préparer une autre version qui doit vous parvenir
très bientôt. J'attends le texte. Ce n'est pas... J'ose dire que
c'est une question de quelques semaines, s'il n'y a pas de retard à
l'intérieur de l'appareil.
Mme Rheault: On nous l'a annoncé pour le 4 ou le 11
juin.
Mme Lavoie-Roux: Vous pensez que non?
M. O'Neill: Pour ce que est du comité, cela n'a pas
été refusé. Cela n'a pas été refusé,
le comité, mais dans mon idée c'est qu'il fallait d'abord
régler le cas de Radio-Québec et, ensuite, qu'on se pose la
question parce que la question que vous nous avez posée tout à
l'heure elle nous est aussi posée partout en région à
savoir ce qui arrive de la télé communautaire par rapport
à Radio-Québec, quel genre de collaboration pourrait
s'établir entre les deux. Maintenant, je vous signale aussi que dans un
comité comme celui-là il y a également d'autres voix qu'il
faudrait entendre, parce qu'en région... Je pense par exemple aux
conseils régionaux de la culture, des groupes comme ceux-là qui
auraient sûrement des choses à nous dire là-dessus.
Mme Rheault: Oui, nous avons proposé trois types de
comités.
Mme Lavoie-Roux: Si je comprends bien la réponse du
ministre c'est que cette politique pourrait être rendue publique au cours
de l'été. Est-ce que je m'abuse?
M. O'Neill: Oui. Pour se donner un délai suffisant et pour
ne pas se faire dire que c'est venu plus tard que prévu, au cours de
l'été, oui.
Mme Lavoie-Roux: II pourrait y avoir une...
M. O'Neill: J'aurais même voulu que ce soit avant.
Mme Lavoie-Roux: Oui, tout le monde le souhaite. Mais, on
pourrait espérer que cette politique soit déposée au cours
de l'été.
M. O'Neill: Oui, je dois dire, M. le Président, que c'est
d'autant plus nécesaire qu'il y a des gens qui attendent, qui veulent
savoir exactement quels sont les critères qui inspireront, par exemple,
le jury dans ses décisions. Eux sont drôlement
intéressés parce qu'il y a des questions d'argent. Pour
eux, c'est leur budget, finalement, une partie de leur budget qui est en jeu.
Alors nous, nous essayons de procéder le plus vite possible. Je dirais
que c'est déjà tard un peu, actuellement, mais, enfin, je vous
avoue qu'on a fait le plus vite.
Mme Lavoie-Roux: Ils ne connaissent pas encore leur budget.
M. O'Neill: Dans le moment, non.
Mme Lavoie-Roux: Ce que je demandais, c'était la politique
de développement dans le sens d'une période de deux ans, trois
ans.
M. O'Neill: II y a deux parties. Il y a la politique
générale, le développement, le principe de consultation et
il y a une partie, dans le texte, qui porte précisément sur les
critères relatifs à l'attribution des subventions.
Mme Lavoie-Roux: Cela, c'est peut-être mieux de ne pas
attendre à la fin de l'été, M. le ministre. Ce
n'était pas dans ce contexte-là. Je pensais qu'ils savaient quels
étaient les montants qui leur seraient alloués pour les
années à venir.
Je voudrais revenir aux participants à la commission. Vous avez
exprimé des inquiétudes et je les partage quant
à la nécessité qu'il y ait des critères
d'évaluation sérieux au fur et à mesure de l'implantation
de Radio-Québec dans les différentes régions et qu'on ne
parte pas dans une aventure qu'il faille généraliser avant qu'on
ait examiné exactement ce qui se passe, les objectifs qu'on
s'était fixés, dans quelle mesure on les a atteints.
J'aimerais vous poser une question : Quels sont vos critères
propres d'évaluation pour votre télévision communautaire?
Je pense que nécessairement, cela varie d'une région à
l'autre. Est-ce qu'ils existent pour chacune des télévisions
communautaires des diverses régions de la province?
Mme Roy: Je peux répondre que cela fonctionne
démocratiquement en assemblée générale. Chaque
année, il y a des mandats qui sont donnés
précisément par les membres au conseil d'administration
élu. Je peux vous donner des exemples de mandat. Par exemple, une
année, la priorité peut être mise sur la participation des
gens à des comités de programmation, à un comité de
programmation. Il y a souvent aussi des priorités mises sur la formation
des citoyens. Il y a toujours des priorités à la recherche de
financement stable et adéquat par rapport aux objectifs. Cela revient
toujours. Chaque année, aussi, est une étape de
développement parce que les télévisions communautaires
fonctionnent depuis un certain nombre d'années, selon le nombre
d'années où la télévision communautaire est rendue
dans son développement, il y a des années d'implantation et des
années de consolidation. Suivant le développement de la
télévision communautaire, ils se donnent les mandats
précis qu'ils vont faire pour cette année-là, et qui vont
rencontrer les objectifs visés. Je ne sais pas si cela répond
assez.
M. Lavoie-Roux: Oui. Est-ce que ce serait possible, j'imagine que
ces évaluations, enfin, il y a des procès-verbaux, est-ce que ces
évaluations sont écrites à partir de certains...
Mme Roy: Oui.
Mme Lavoie-Roux: ... peut-être pas pour l'ensemble des
télévisions communautaires, mais je serais
intéressée, personnellement à recevoir...
Mme Roy: Vous voulez dire pour l'année?
Mme Lavoie-Roux: Pour l'année ou pour l'année
dernière, à recevoir un modèle du genre
d'évaluation que vous faites dans une télévision
communautaire.
Mme Rheault: À chaque année, à l'occasion de
la présentation de la demande d'aide au programme d'aide des media
communautaires, on fournit un rapport d'évaluation et cela doit
être dans les dossiers au ministère.
Mme Lavoie-Roux: Bon! Je vais m'informer.
M. Rivest: Ce serait plus simple que vous nous l'envoyiez!
Mme Rheault: Allez faire un tour.
Mme Lavoie-Roux: Voulez-vous ajouter quelque chose?
M. Lafleur: Pour compléter, rapidement. Dans le fond, la
question que vous posez, je la trouve extrêmement intéressante
dans la mesure où elle soulève un point qui peut nous permettre,
je crois, de mettre le doigt sur une des différences fondamentales qui
existent entre un organisme comme Radio-Québec, par exemple, et les
media communautaires au sens où, évidemment, la programmation
d'un organisme comme l'ORTQ, qu'il soit régionalisé ou non, mais
à supposer qu'il ne le soit pas, prenons l'ORTQ, Radio-Québec
à Moniréal, sa programmation étant même
déterminée par un nombre très limité de personnes
qui sont des spécialistes de la programmation.
Les sujets qui sont traités sont des sujets qui sont
également déterminés par un nombre restreint de personnes
qui, encore là, sont spécialistes de la programmation qui les
transmettent à des spécialistes de la production, etc., mais sans
que l'intervention véritable du public n'entre en cause. La
différence fondamentale avec les media communautaires, enfin pas la
différence fondamentale mais je dirais l'une des différences
fondamentales, c'est précisément le fait qu'à partir d'une
localité donnée...
Mme Lavoie-Roux: Ils ont leur mot à dire dans
l'évaluation?
M. Lafleur: Non seulement ils ont leur mot à dire, mais ce
sont eux fondamentalement qui, à l'intérieur d'une
assemblée générale vont déterminer des orientations
générales et qui vont avoir un comité de programmation
qui, lui, de façon plus précise, va déterminer au jour le
jour, chaque semaine, ou chaque mois, une programmation qui va
véritablement correspondre le plus possible aux intérêts du
milieu. Ces gens sont redevables devant l'assemblée
générale composée des citoyens de cette
localité.
Vous saisissez sans cloute la nuance fondamentale qui existe et
même si on pense à Radio-Québec régional de la
façon dont c'est conçu dans le projet de loi c'est pour
cela qu'on insiste tant sur l'aspect expérimentation on a des
risques, on court des risques que le processus Radio-Canada ou
Radio-Québec Montréal se reproduise, à savoir que ce ne
soit pas véritablement les gens de la région qui soient
décisionnels dans le sens de la programmation et de la production, alors
que nous, jusqu'à maintenant, avons vécu un ensemble
d'expériences qui vont véritablement dans le sens d'une prise en
charge de la programmation et de la production par les citoyens. Cela va
jusqu'à la production effective par des citoyens de leurs
émissions, au sens de cameramen, preneurs de son, intervieweurs et j'en
passe.
Mme Rheault: À Radio-Québec, il existe une formule
"feedback" des émissions, après l'émission, il y a un
"feedback"; on peut téléphoner, donner nos impressions, alors que
nous c'est avant même de commencer à faire une émission,
qu'on va consulter des gens, qu'on associe des gens avec des comités de
ressources sur les sujets traités. Il y a aussi un comité de
programmation...
Mme Lavoie-Roux: Une autre question, parce que je vais quand
même être obligée de me conformer au règlement. Vous
vous êtes dits d'accord en page 6 avec les objectifs qu'on vous a soumis,
au moins pour discussion du contenu de la programmation.
Je reviens au deuxième: "Qu'il développe une programmation
qui favorise l'analyse publique des décisions qui concernent les enjeux
collectifs." Je vous ai entendu dire tout à l'heure, j'ai
été fort intéressée de vous entendre dire que dans
vos programmations, même quand vous abordez des sujets d'ordre politique
ou d'ordre économique, vous ne le faisiez pas d'une façon
partisane et c'était extrêmement important pour vous. Vous
n'étiez pas là pour faire la promotion d'un parti politique.
C'est formulé de cette façon: Qu'il développe une
programmation qui favorise l'analyse publique des décisions qui
concernent les enjeux collectifs. Les décisions à ce moment-ci...
On ne se racontera pas d'histoire. Quand on parle des enjeux collectifs, on
parle évidemment... Vous avez fait allusion tout à l'heure au
référendum, etc. Est-ce que dans le moment, les décisions
ne sont pas prises par un gouvernement, qui c'est le gouvernement qui
est là, demain ça pourra être un autre, hier c'était
un autre...
Une voix: ...
Mme Lavoie-Roux: Enfin, on pourrait entrer dans un autre sujet.
Je trouve que ce n'est pas tellement qu'il y a discussion sur les enjeux
collectifs, mais il y a analyse publique des décisions, alors que les
décisions sont prises à l'heure actuelle par un gouvernement ou
par un parti qui forme le gouvernement.
M. Lafleur: D'une part, vous avez sûrement noté que
ce texte n'est pas de nous. On l'a puisé dans la politique de
développement des media communautaires. D'autre part, il est clairement
expliqué dans la politique, à moins d'avis contraire, mais je
crois qu'il est clairement explicité que, précisément
quant à l'analyse publique des décisions qui concernent les
enjeux collectifs, il y a lieu, pour les media communautaires, de donner droit
de parole aux parties intéressées, donc aux différentes
parties qui seraient intéressées au débat et qui auraient
quelque chose à dire pour, contre, qui seraient neutres, etc. Donc, il y
a une espèce d'honnêteté de base, je pense, dans les
intentions gouvernementales à ce niveau. On nous dit que
véritablement vous devez donner le droit de parole à l'ensemble
des intervenants sur une question donnée.
Votre question précise est: Pourquoi cela porte-t-il sur les
décisions plutôt que sur les enjeux comme tels? J'avoue que cette
question, personnellement, je ne me la suis jamais posée. À mon
sens, effectivement, il s'agit de donner la parole aux gens sur les enjeux
collectifs et non pas sur les décisions en fait, ce qui nous
intéresse, ce sont les enjeux de leur donner un droit de parole
équivalent selon les options et de permettre à chaque partie de
s'exprimer. Je pense que c'est l'orientation générale des
télévisions communautaires. Donc, que chacun s'exprime sur les
enjeux collectifs. Pourquoi avons-nous inséré à
l'intérieur de ce texte-là "décisions sûres"?
Là, je vais vous référer à l'auteur du texte ou
à celui qui a accepté que ce texte soit produit. Je ne sais pas.
(23 h 15)
Mme Rheault:... qu'on en a c'est au niveau du processus
décisionnel et c'est ce que nous endossons. C'est
l'interprétation que nous en faisons.
Mme Lavoie-Roux: Je poserai la question au ministre à
l'occasion de l'étude article par article. Une dernière question.
D'abord, il faudrait que vous m'informiez. Quand il y avait les programmes de
Multi-Media dans certaines régions du Québec, est-ce qu'ils
étaient retransmis par la câblodistribution ou par la
télévision communautaire?
Mme Roy: Je n'ai pas connu l'expérience de Multi-Media,
mais je pense qu'il y a peut-être une chose que vous avez mal comprise.
La télévision communautaire diffuse sur câble. Il y a aussi
une autre chose que les télévisions communautaires font je
ne dirais pas pour toutes, parce que dans certaines régions, par
exemple, la région est câblée à 85%, c'est une autre
situation, mais dans
beaucoup de régions où le câblodistributeur a des
abonnés câblés à environ 40%, 50%, 60%, il y a aussi
un travail d'animation qui se fait, un travail de diffusion en circuit
fermé, c'est-à-dire que les gens assistent, dans leur salon ou
ailleurs, à la production. Pour ce qui est de Multi-Media...
Mme Rheault: On m'informe que les moyens de diffusion
étaient multiples.
M. Lafleur: Y compris, à certains moments, TVA, au minimum
le canal 10.
Mme Lavoie-Roux: Mais à l'occasion, la
télévision communautaire a pu être utilisée à
cette fin.
Mme Rheault: Oui.
Mme Lavoie-Roux: Mais vous n'avez pas eu
d'expérience...
Mme Roy: Cela s'est passé pour Laval. Il y a eu des
expériences avec Multi-Media et ils ont diffusé, à
l'occasion, sur le câble. Ils ont sûrement fait aussi de la
vidéo-animation qu'on appelle en circuit fermé mais
pour les autres moyens, je ne connais pas.
Mme Lavoie-Roux: Une dernière question. Sur la
télévision éducative, vous vous préoccupez des
besoins des citoyens en regard de la consommation, par exemple, en regard
peut-être de l'interprétation de certains services
gouvernementaux, etc. Est-ce que, à l'extérieur de ceci, vous
avez été capable d'identifier, pour vos régions il
y a une dame qui vient de la région de Sherbrooke, une de Lévis,
je pense un programme d'éducation plus formel qui correspond
à un besoin précis de vos régions ou si vous n'entrez
jamais dans des programmes d'éducation plus formels pour répondre
à un besoin?
L'exemple qui me vient toujours à l'esprit, parce qu'il me
préoccupe beaucoup, ce sont les analphabètes. Il doit y en avoir
dans la région de Sherbrooke, comme dans la région de
Montréal ou la région de Québec. À ce
moment-là, il s'agirait probablement d'une télévision
éducative plus formelle ou dans le sens plus traditionnel du mot. Est-ce
qu'il y a des expériences dans ce sens qui sont faites par vos
télévisions communautaires respectives? Soit sur ce sujet ou sur
d'autres, ayant pour cible un groupe particulier, une clientèle
particulière?
Mme Rheault: À ma connaissance, non pas de façon
formelle comme vous l'explicitez avec les analphabètes ou d'autres
groupes. Par ailleurs, il y a des...
Mme Lavoie-Roux: II y a 200 000 analphabètes au
Québec.
Mme Rheault: Oui, et j'ai déjà aussi
participé à des programmes formels de formation
d'analphabètes, mais il existe des collaborations comme les media
communautaires, la télévision communautaire à l'occasion
de formation de citoyens, l'utilisation des communications peut faire une
demande dans une régionale pour donner cela dans le cadre de
l'éducation des adultes. Cela s'inscrit dans un programme formel, mais
c'est de l'initiative populaire, si je peux dire.
Mme Lavoie-Roux: Ma dernière question... Oui. Touchant
l'éducation en milieu défavorisé, il y en a aussi dans
chaque région. Je suis sûre qu'il y en a dans la région de
Lévis, Sherbrooke et Québec. Une des initiatives qui a
été prise, ce sont les maternelles maison. Est-ce que vous n'avez
jamais transposé dans vos télévisions communautaires
respectives, cette expérience de la maternelle maison en y amenant les
acteurs qui, au lieu d'être dans leur cuisine seraient dans votre studio?
Est-ce que vous avez pensé à ce type d'expérience ou
à d'autres plus spécifiques s'adressant aux milieux
défavorisés?
Mme Roy: Pour ce qui est du centre vidéo populaire, on n'a
pas touché ces problèmes précis, on n'a quand même
pas couvert tous les dossiers. Les genres de dossiers qu'on fait, on les fait
avec la collaboration des groupes concernés. Ce groupe, s'il existe,
dans ma région il n'en existe pas, à ma connaissance,
peut-être individuellement mais pas en groupe. On a fait des dossiers,
par exemple, avec les familles monoparentales qui ont un problème
spécifique au niveau économique, qui sont économiquement
défavorisées. Elles nous ont demandé de montrer à
la population le moyen d'organisation qu'elles se sont donné. Elles se
sont donné un jardin communautaire durant l'été. Ce moyen,
économiquement, est très important pour elles. Elles nous ont
demandé de montrer à la population comment elles s'étaient
organisées et comment c'est possible pour des gens
défavorisés de s'organiser par leurs propres moyens.
Il y a d'autres expériences aussi, d'autres témoignages
comme ceux-là qui peuvent être illustrés dans une
télévision communautaire, mais c'est toujours en collaboration
avec les groupes qu'on le fait.
Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie. Je m'excuse de m'être
éloignée du sujet qui nous préoccupait ce soir, mais ce
n'est pas souvent qu'on a l'occasion de rencontrer des représentants de
la télévision communautaire. Je peux vous assurer que, pour ma
part, je pense avoir saisi le message que vous êtes venus porter ici. Non
seulement à l'occasion des projets de loi 4 et 5, mais à
l'occasion d'études ultérieures de budget, etc., nous essaierons,
du côté de l'Opposition officielle en tous les cas, de nous
rappeler la mission toute particulière que vous accomplissez dans vos
milieux respectifs. Je vous remercie.
Le Président (M. Jolivet): Avez-vous quelque chose pour
conclure?
M. O'Neill: Je veux tout simplement souligner, M. le
Président, que j'apprécie le mémoire qui
nous a été présenté. J'en retiens autant les
critiques que les approbations, parce qu'il faut être très
attentif aux critiques que l'on formule. Je me réjouis aussi du fait que
sur beaucoup de points, comme vous l'avez souligné vous-même, vous
êtes d'accord, tout comme j'apprécie le fait que dans le cas de
mémoires antérieurs des gens aient exprimé leur accord.
Tout cela peut s'expliquer d'ailleurs de deux façons:
Premièrement, il y a eu tellement d'études et de consultations
qui ont précédé qu'on a fini par trouver la formule.
Surtout dans le cas de Radio-Québec, de la programmation
éducative, il semble bien que la formule sans être parfaite soit
celle qui a beaucoup de chance de connaître du succès.
Je retiens l'inquiétude que vous avez exprimée concernant
le lien entre les organismes communautaires et Radio-Québec. Vous vous
êtes inquiétés aussi concernant le climat dans lequel
s'effectuera la régionalisation. Je dirais que c'est un message que je
transmets à Radio-Québec. Là-dessus, je dois vous dire que
je fais énormément confiance à la direction actuelle de
Radio-Québec et à l'esprit qui l'inspire dans cette
opération de régionalisation.
Vous nous avez demandé aussi de réévaluer la
politique d'aide à la diffusion, surtout concernant les
câblpdistributeurs. Le moins que l'on puisse dire, c'est que vous nous
demandez qu'au moins il y ait des normes suffisamment rigides qui soient
formulées dans l'application de cette politique d'aide. Que ce soit
quelque chose qui ne soit pas trop flou, qui soit, au contraire, suffisamment
précis pour que cela atteigne les objectifs que nous voulons
atteindre.
Je tiens à vous remercier encore une fois, compte tenu du bref
laps de temps dont vous disposiez pour faire ce travail. C'est vrai que vous
n'aviez pas tout ce soutien technique de toutes sortes dont disposent les
fonctionnaires au sein d'un ministère. Dans ce bref laps de temps, je
pense qu'on peut dire que vous avez fait un excellent travail. Je tiens
à vous remercier pour votre collaboration.
M. Lafleur: Je veux simplement conclure en disant, au nom de mes
collègues, que cela nous a fait plaisir de rencontrer la commission
parlementaire. Évidemment, l'essentiel du message que nous avions
à communiquer, il ne s'agirait pas de le résumer ici, cela a
été une discussion assez longue. L'essence de notre message est
contenu dans les documents que nous avons produits et dans les discussions que
nous avons eues avec vous. Je pense qu'on peut conclure que de notre part cela
a été un grand plaisir de vous rencontrer.
Le Président (M. Jolivet): Le travail de la commission est
terminé. Avant d'ajourner sine die, je rappellerai au rapporteur de la
commission qu'il aura à faire rapport à l'Assemblée
nationale demain. Merci.
Fin de la séance à 23 h 25
ANNEXE A
L'ASSOCIATION DES RÉALISATEURS de
Radio-Québec
Mémoire à la commission parlementaire
touchant les projets de loi no 4 et no 5, présentés par M. Louis
O'Neill, ministre des Communications
Monsieur le ministre,
Lors de la dernière commission parlementaire en mai 1978,
l'Association des réalisateurs de Radio-Québec avait
manifesté qu'une volonté politique de la part du présent
gouvernement puisse être amorcée à partir des
recommandations du rapport Rocher et des interventions de la direction de
Radio-Québec, suivies de celles des syndicats des employés.
Nous sommes aujourd'hui en présence du projet de loi no 4, loi
sur la programmation éducative et du projet de loi no 5, loi modifiant
la Loi de l'Office de Radio-Télédiffusion du Québec.
Nous aimerions attirer votre attention, en premier lieu, sur le projet
de loi no 4:
Sans en contester l'intention, nous croyons qu'il est de notre devoir,
à titre de représentants de l'Association des
Réalisateurs, de vous mettre en garde quant aux demandes
éventuelles des diffuseurs privés. Ces derniers, sous
prétexte de vouloir inscrire à leur programmation commerciale un
certain pourcentage d'émissions, dites éducatives, risqueraient
d'entrer en contradiction avec les objectifs et le contenu des émissions
éducatives.
Quant à la loi no 5, nous sommes heureux d'y voir un changement
de nom; il répond légalement à une entreprise autonome qui
se veut être aussi à l'abri de toute partisanerie politique.
Nous souhaitons que la Société de
Radio-Télévision du Québec puisse voir le jour où
nous aurons un réseau de radio et de télévision dont la
programmation sera conjuguée de façon à permettre la
retransmission d'émissions simultanées dans le domaine des
affaires publiques, des arts et des lettres.
Nous nous permettons de vous signaler un danger quant à la
volonté d'installer dans les régions des centres de production de
télévision éducative. Avant même d'y consentir, ne
faudrait-il pas s'assurer des valeurs professionnelles régionales? Il
est souhaitable que les régions s'expriment librement, nous en
convenons; mais il faut éviter l'amateurisme technique et avoir les
mêmes exigences normatives que nous nous imposons ici à la
maison-mère.
Nous savons aussi que les stations de câblodiffuseurs ouvrent
toutes grandes leurs portes à divers organismes ethniques, à des
mouvements socio-culturels, aux syndicats et à une multitude de gens qui
se donnent comme mission de vouloir instruire la population. Ce genre de
télévision qui présente à la fois un aspect
commercial et communautaire a sa raison d'être et trouve bien sa place
pour s'exprimer librement; le danger serait de voir ces organismes envahir les
centres régionaux de production de la Société de
Radio-Télévision éducative du Québec,
poussés par l'appât des subventions du gouvernement, et de ce fait
le risque de tomber dans la facilité.
Nous demandons donc au gouvernement du Québec de bien vouloir
faire respecter dans les régions les normes professionnelles des
artisans de la création visuelle et technique reconnue au sein de
Radio-Québec.
Les aventures audio-visuelles et l'apprentissage des métiers
devraient se faire dans nos écoles reconnues par le ministère de
l'Education.
La radio et la télévision éducative du
Québec se doit d'être professionnelle et concurrentielle,
même si elle se veut alternative sur le plan de la cote d'écoute.
Elle devra de plus en plus tenter de se surpasser sur le plan de la
créativité. Ne sommes-nous pas à l'époque des
échanges sur le plan national et international? Est-ce que la commandite
de prestige frappera à notre porte pour épouser nos valeurs
culturelles et y contribuer?
Nous vous remercions de votre obligeante attention et espérons
que nos remarques seront prises en considération. De notre
côté, nous veillerons à faire respecter notre code
d'éthique.
Le Conseil exécutif de l'Association des Réalisateurs de
Radio-Québec représenté par Guy Leduc, président et
Jean-Louis Béland, administrateur
ANNEXE B
Mémoire de l'Union des Artistes relativement
à l'étude du projet
de loi no 4 "Loi sur la programmation
éducative"
et du projet de loi no 5 "Loi modifiant la Loi de
l'Office
de Radio-Télédiffusion du
Québec".
Il est désormais admis que la télévision nous
influence tous, individuellement et collectivement. La preuve n'est plus
à faire et les querelles qu'on lui cherche depuis ses débuts en
témoignent.
Nous ne pouvons que nous réjouir du fait que la
télévision éducative puisse bientôt prendre un
nouvel essor grâce à la loi présentement à
l'étude. Une télévision franche, curieuse et qui s'attarde
en profondeur à nous présenter les différents aspects de
notre culture et de celle des autres peuples, sans avoir pour but premier une
rentabilité commerciale qui tenterait pour des motifs cupides et
aveugles, de flatter notre paresse intellectuelle, une télévision
véritablement éducative ne peut dès lors que soulever
l'appui et l'enthousiasme de tous puisqu'elle utiliserait à ses fins les
plus élevées, un médium qui pour important qu'il soit, se
fait souvent porteur de médiocrité, nivellant son contenu par le
bas pour mieux se prétendre accessible à tous.
Autant il est souhaitable que dans les années à venir, la
télévision privée prenne conscience de ses
responsabilités publiques, en s'éloignant d'une commercialisation
souvent outrée; autant il importe à une télévision
éducative d'être au dessus de toute démagogie, de toute
complaisance. La mission éducative se doit d'être attrayante plus
qu'inutilement austère et rébarbative. Elle doit, il nous semble,
tout en revalorisant les caractéristiques d'une région,
s'inscrire dans un courant culturel global et faire en sorte qu'une
émission dite régionale qui porterait par exemple sur les
peintres naïfs du Saguenay, Lac-St-Jean, devienne par la qualité du
traitement d'intérêt égal pour tous les
Québécois et, pourquoi pas, intéressante pour les pays
étrangers.
Plusieurs expériences antérieures, à
Radio-Québec même, nous ont démontré qu'il ne suffit
pas de braquer les caméras sur une "compétence" quelconque
faisant étalage comme en salle de cours, de son érudition
personnelle, pour que cette forme d'éducation soit valable et
efficace.
Nous en arrivons donc à vouloir parler de certains
critères de qualité. On ne peut légiférer sur la
qualité sans risquer mille aberrations. Notre but n'est pas non plus de
vous y encourager, mais plutôt de vous inciter à tenir compte dans
l'établissement de vos priorités d'une certaine logique
inhérente aux politiques antérieures.
Depuis le rapport Parent, nous avons vu se multiplier les écoles
d'art dramatique, les spécialisations universitaires en animation
culturelle, en loisirs, en techniques audio-visuelles sans pour autant voir le
marché du travail correspondant, grandir au même rythme.
Ainsi nombre de jeunes qui ont maintenant la trentaine ont quitté
leurs régions (Cantons de l'Est, Mauricie, Gaspésie, Saguenay)
pour Montréal afin d'y gagner leur vie. Ils y ont acquis pour plusieurs,
à coups d'expérience multiples, une compétence
éprouvée.
Il nous apparaît donc normal que dans l'éventualité
d'une loi qui permettrait aux régions de produire des émissions,
les différents postes ainsi créés soient accessibles
à tous les Québécois et que la compétence seule
soit le critère d'appoint. Cette ouverture serait donc conforme et
conséquente aux politiques gouvernementales en matière
d'éducation depuis au moins une décennie et le moyen idéal
d'assurer aux productions régionales, une qualité valable.
Notre but n'est pas non plus d'écarter les compétences
régionales de débouchés intéressants, nous voulons
plutôt encourager un heureux mariage des deux, afin de rapprocher les
régions les unes des autres, de créer par ces échanges, un
flux culturel, un véritable réseau. Si chacune des régions
se replie sur elle-même, nous ne verrons alors que des tentatives
malhabiles d'apprentissage, ce sera donc répéter pour chacune des
régions, les débuts de Radio-Québec, recommencer
l'expérience aux dépens des spectateurs. Et ce chauvinisme
"régionaliste" ne pourra que desservir les régions et le
Québec tout entier.
Gardons en mémoire que le Québécois moyen a l'oeil
averti et qu'il en a vu des émissions! Pour l'intéresser aux
produits régionaux, il faudra lui faire la preuve de
l'intérêt.
Evitons que les postes régionaux deviennent les
châteaux-forts d'un chauvinisme de mauvais aloi, mais plutôt les
premiers jalons dans l'établissement d'un réseau qui nous unisse,
tout au moins nous rapproche.
Dans la mesure où il sera possible pour un artiste
québécois d'exercer partout au Québec son métier,
nous ferons en sorte que bien des initiatives culturelles en découlent.
Il n'est pas utopique de croire, que le fait de retrouver à Chicoutimi,
Matane, Trois-Rivières des groupes d'artistes travaillant dans des
productions télévisuelles locales, qu'ils soient tentés de
monter des productions théâtrales, des ateliers, des cours.
Pour l'instant, nous avons voulu attirer votre attention sur un des
aspects les plus ambigus de la régionalisation.
Soyez assurés, messieurs, que nous sommes à
l'entière disposition des membres directement concernés par ce
projet et qu'il nous serait d'un vif plaisir de pouvoir nous entretenir plus
longuement et en détail sur les points que nous n'avons fait que
soulever aujourd'hui.
Bonfield Marcoux, 1er vice-président.