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Version finale

31st Legislature, 4th Session
(March 6, 1979 au June 18, 1980)

Thursday, June 5, 1980 - Vol. 21 N° 290

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits de la Commission des corporations professionnelles


Journal des débats

 

Etude des crédits de la Commission des corporations professionnelles

(Onze heures trente-cinq)

Le Président (M. Lacoste): A l'ordre, messieurs!

La commission permanente des corporations professionnelles est réunie pour étudier les crédits budgétaires de la commission des corporations professionnelles.

Les membres de cette commission, pour la séance d'aujourd'hui sont: M. Lacoste (Sainte-Anne) qui remplace M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes); M. Fallu (Terrebonne), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Rivest (Jean-Talon) qui remplace M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys); M. Martel (Richelieu), M. Morin (Sauvé), M. O'Gallagher (Robert Baldwin), M. O'Neill (Chauveau), M. Shaw (Pointe-Claire).

Les intervenants sont: M. Beauséjour (Iberville), M. Blank (Saint-Louis), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. Godin (Mercier), M. Lefebvre (Viau), M. Mercier (Berthier), M. Michaud (Laprairie), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier), M. Samson (Rouyn-Noranda).

Il y a maintenant lieu de nommer un rapporteur. Puis-je suggérer le député de Sherbrooke?

M. Morin (Sauvé): M. le Président, je suis d'avis que le député de Sherbrooke ferait cela magnifiquement.

Le Président (M. Lacoste): Le député de Sherbrooke sera donc le rapporteur.

M. Shaw: ... magnanimement.

Le Président (M. Lacoste): M. le ministre, pour vos commentaires généraux.

Remarques préliminaires M. Jacques-Yvan Morin

M. Morin (Sauvé): M. le Président, la commission permanente des corporations professionnelles siège aujourd'hui pour étudier les crédits de l'Office des professions du Québec dont le président, Me André Desgagné, se trouve à ma droite.

Si ces crédits apparaissent parmi ceux du ministère de l'Education, c'est pour des raisons d'ordre purement technique, car l'office n'est pas pour autant rattaché au ministère de l'Education. La raison en est "simplement que le premier ministre m'a confié la responsabilité de l'Office des professions, en plus de celle de l'Éducation.

De fait, l'office est un organisme autonome, créé par le Code des professions, le 6 juillet 1973. Il se compose de cinq membres nommés par le gouvernement et, comme je l'ai dit, Me Desgagné en est président, cela depuis maintenant trois ans.

Cet office est un organisme de surveillance dont la fonction principale consiste à veiller à ce que chaque corporation assure la protection du public, puisque, comme on le sait, la création du système des professions au Québec, la création de l'office également répondaient d'abord et avant tout à cette grande préoccupation d'ordre social: la protection du public. Pour remplir ce mandat, l'office dispose de pouvoirs administratifs et réglementaires, et peut, de sa propre initiative, faire des recommandations au gouvernement.

Permettez-moi d'énumérer brièvement ceux de ces pouvoirs qui sont les plus importants. Tout d'abord, l'office nomme, après consultation du Conseil interprofessionnel et des groupes socio-économiques, de deux à quatre administrateurs qui siègent au bureau de chaque corporation professionnelle. L'office publie, deux fois par année, les décisions rendues par les comités de discipline et le tribunal des professions qui coiffe l'ensemble. En second lieu, l'office doit non seulement s'assurer que chaque corporation adopte un ensemble de règlements régissant l'activité professionnelle, mais également il a le pouvoir d'établir à la place des corporations les règlements reliés directement à la protection et à la sécurité du public, comme dans le cas de la déontologie et de l'arbitrage des comptes, si les corporations refusent d'adopter des règlements dans les délais impartis. Troisièmement et enfin, l'office fait au gouvernement des recommandations qui touchent particulièrement les règlements des corporations professionnelles, les modifications apportées aux lois régissant ces corporations et la constitution de nouvelles corporations ou encore la fusion ou la dissolution des corporations existantes.

Si l'office et les administrateurs nommés par lui au bureau des corporations incarnent dans le système professionnel le principe de l'hétéroges-tion, les corporations professionnelles y représentent celui de l'autogestion. En effet, chaque corporation contrôle l'exercice de la profession par ses membres en vue d'assurer la protection du public et, bien sûr aussi, la défense de ses membres.

A cette fin, l'État a délégué aux corporations des pouvoirs importants. Par exemple, avant d'admettre un candidat à l'exercice de la profession, la corporation s'assure qu'il possède les qualifications requises. La corporation adopte des règlements relatifs à la conduite de ses membres, à la publicité permise, aux normes de tenue des dossiers et des cabinets de consultation. Enfin, elle contrôle l'intégrité de ses membres au moyen d'un comité de discipline.

En ce qui concerne le contrôle de la compétence des membres, chaque corporation est munie d'un comité d'inspection professionnelle. Ce comité voit à ce que les membres n'exécutent pas un travail pour lequel ils ne possèdent pas les connaissances ou les aptitudes requises. Chaque année, le comité réalise un programme général d'inspection dont sont informés tous les membres.

II peut également faire des inspections particulières si la chose devient nécessaire.

Chaque corporation organise également pour ses membres des stages de formation continue permettant de mettre périodiquement leurs connaissances au point, en collaboration avec les établissements d'enseignement, les syndicats et les employeurs.

Enfin, la corporation tient à jour une liste officielle de ses membres et veille à ce que personne n'exerce illégalement la profession ou n'utilise un titre réservé sans être membre de la corporation.

Le Conseil interprofessionnel du Québec, de son côté, est un organisme consultatif composé des présidents des 38 corporations professionnelles. Le Conseil interprofessionnel et l'office ne sont évidemment pas toujours du même avis, ce qui contribue à la dynamique du système et fournit au gouvernement l'occasion d'entendre différents points de vue avant de prendre une décision. Mais il arrive aussi que le Conseil interprofessionnel et l'office collaborent étroitement en vue de régler les problèmes épineux. Ce fut le cas, par exemple, de la tenue d'examens donnant accès à l'exercice de la denturologie, un problème qui a occupé de longs mois M. le Président lorsqu'il est arrivé à l'office. Nous avons maintenant réglé ce problème, je pense, d'une façon heureuse.

Aussi n'est-il pas question, contrairement à une suggestion déjà entendue en 1972 par le Collège des médecins et chirurgiens de la province de Québec, et reprise en février 1980 par la Corporation professionnelle des médecins, de rendre volontaire l'adhésion au Conseil interprofessionnel. Cet organisme a un rôle important à jouer à l'intérieur du système professionnel, notamment celui de faire entendre au gouvernement la voix des professionnels réunis. Et mieux que cela, M. le Président, si je puis me permettre de féliciter le Conseil interprofessionnel pour les résultats qu'il a obtenus récemment dans sa campagne en vue de mieux informer les étudiants ou les personnes intéressées à devenir membres des corporations.

J'ai eu l'occasion de présider au lancement de 38 brochures, une par corporation — M. le président de l'office était là également — qui ont été rédigées en collaboration et qui expliquent, à quiconque s'intéresse à chaque corporation, quelles sont les conditions d'admission à cette corporation, en quoi consiste exactement la profession, quels sont les prérequis, etc. 38 brochures admirablement bien faites et dont je veux féliciter très chaudement le Conseil interprofessionnel.

Permettez-moi de dire quelques mots des réalisations de l'office en 1979-1980. On ne parle pas suffisamment du travail opiniâtre de l'office, de son excellent travail, qui n'est pas très bien connu, malheureusement du grand public.

L'office a un rôle social essentiel dans la société québécoise, mais, malheureusement, il ne s'en vante guère. Il travaille peut-être un peu trop justement dans l'obscurité, se contentant le plus souvent de rencontrer les corporations, de faire des rapports au ministre, sortant à l'occasion en public, mais ne faisant pas toujours valoir autant qu'il le devrait ses réalisations qui sont très importantes pour la bonne marche de notre société.

Les membres de la commission parlementaire pourront prendre connaissance dans leur dossier des principales activités de l'office. Je souhaiterais, néanmoins, en mentionner quelques-unes parmi les plus importantes. (11 h 45)

D'abord, permettez-moi de rappeler certaines recommandations qui ont été faites par l'office. La première porte sur des modifications législatives à apporter au Code des professions de façon à y inclure des recours sinon semblables, du moins analogues à ceux que prévoit la Loi sur la protection du consommateur. On voit que le rôle social de l'office se manifeste dans ses propositions.

Très succinctement, l'office propose que les obligations du professionnel déjà définies dans les codes de déontologie le soient aussi dans le code. Que tout contrat de service puisse être révisé si les obligations imposées aux clients sont excessives. Qu'en cas de litige, l'établissement de la preuve devant les tribunaux soit facilité pour le client. Et, enfin, l'office propose que le professionnel ait l'obligation de fournir des garanties précises sur les biens vendus et que lui soit interdite toute représentation fausse ou trompeuse. L'office estime que l'inclusion de ces propositions dans le Code des professions contribuerait au maintien d'un équilibre satisfaisant entre les professionnels et leurs clients.

Un deuxième avis de l'office au ministre portait sur 21 demandes de constitution en corporation professionnelle. L'office recommande notamment l'intégration de quatre groupes à des corporations qui existent déjà. L'Institut des auditeurs publics accrédités pourrait être incorporé à l'Ordre des comptables agréés. La Guilde des comptables commerciaux pourrait l'être à la Corporation des comptables en administration industrielle, ce qu'on appelle les RIA. L'Association des puéricultrices du Québec pourrait être associée à la Corporation des infirmières et infirmiers auxiliaires. C'est même déjà fait dans ce cas. Oui, je pense que l'accord a été conclu.

Enfin, la Corporation des techniciens inhalo-thérapeutes du Québec; c'est un regroupement avec une corporation déjà existante du secteur des techniques de la santé qui serait proposé. Ou encore, cela deviendrait un élément d'une nouvelle corporation regroupant éventuellement tous les professionnels du secteur des techniques de la santé.

L'office recommande en outre le contrôle de trois groupes par réglementation ou par des lois autres que le code. Dans trois autres cas, l'office juge nécessaire de procéder à une analyse plus poussée avant de nous faire des recommandations. Quant aux onze autres groupes, l'office estime que la protection du public est déjà assurée par les contrôles existants.

Dans le secteur de la lunetterie, l'office a recommandé l'approbation du règlement autorisant les opticiens d'ordonnances à faire de la publicité sur les services offerts et sur les prix. Il a aussi

recommandé que le Code de déontologie des optométristes fasse obligation à ces derniers de remettre obligatoirement l'ordonnance au client sans qu'il n'ait à en faire la demande. Selon l'office, ces mesures devraient favoriser l'information et la liberté de choix des clients.

Au cours de l'année, l'office a publié une étude sur les compagnies de services professionnels, un mémoire sur la formation des professionnels qu'il avait soumis à la commission d'étude sur les universités ainsi que deux recueils de décisions disciplinaires. Enfin, il a publié une analyse de deux sondages qui visaient à évaluer les attentes, les besoins, les problèmes des usagers de services professionnels.

Sur la base des données recueillies par le sondage qu'il a effectué en collaboration avec l'organisme appelé CROP, l'office, qui avait fait de l'information publique l'un de ses objectifs prioritaires pour l'année 1979-1980, a réalisé une campagne d'information qui s'est déroulée du 4 février au 14 avril 1980. Au cours de cette période, quatre messages ont été diffusés sur les ondes de quelque soixante stations radiophoniques, six messages imprimés ont été publiés dans 33 quotidiens et hebdomadaires. Cette campagne visait à favoriser un meilleur dialogue entre le professionnel et son client et à renseigner un large public sur le système professionnel ainsi que sur les droits et recours des usagers de services professionnels. Parallèlement à cette campagne, une tournée d'information a été entreprise dans diverses villes du Québec. On voit que l'office ne chôme pas.

En matière de réglementation maintenant, il est à signaler qu'au 31 mars 1980 220 des 233 règlements devant être obligatoirement adoptés par les corporations professionnelles avaient été publiés dans la Gazette officielle du Québec avec avis d'approbation. Des treize règlements qui ne sont pas encore en vigueur, un a déjà été approuvé par décret, cinq ont été adoptés par l'office et transmis au gouvernement pour approbation et les sept autres feront l'objet d'un avis de l'office au cours de l'exercice qui vient.

Deux règlements importants ont récemment été approuvés par le gouvernement, ceux relatifs à l'autorisation d'actes médicaux et infirmiers, il y a une dizaine de jours. Je tiens à signaler le travail réalisé par l'office dans ce dossier, ainsi que dans celui de l'autorisation d'actes dentaires qui sera prochainement parachevé. Si le gouvernement n'avait pas eu, à ses côtés, l'office, pour le conseiller dans ce dossier extrêmement délicat, nous n'aurions pu en venir aux solutions nuancées qui nous ont permis, finalement, de réconcilier l'Ordre des médecins, l'Ordre des infirmières et infirmiers et l'Ordre des infirmières et infirmiers auxiliaires. Le règlement qui a été rendu public semble, à l'heure actuelle, faire l'unanimité, grâce à la souplesse que nous avons d'ailleurs introduite dans ces dispositions.

En terminant, vous me permettrez d'évoquer quelques réalisations qui touchent la gestion interne de l'office, sur laquelle M. le président voudra peut-être s'étendre plus tard, surtout si on lui pose des questions. A la suite de l'adoption du projet de loi 20, l'office a complété le processus d'intégration de son personnel à la fonction publique. Tous les employés ont conservé leurs droits acquis et, comme indicateur du succès de cette démarche, il est à noter qu'aucun grief n'a été soulevé par les employés. On ne peut pas en dire autant de certains autres secteurs de l'administration publique.

Par ailleurs, le Conseil du trésor a confirmé l'autonomie de l'office en matière de gestion de personnel, en reconnaissant l'existence de sa direction de l'administration et du personnel. La direction, en collaboration avec les gestionnaires, a su appliquer avec diligence les nouvelles procédures prévues à la Loi sur la fonction publique.

Pour assurer le contrôle et le suivi budgétaire de ses opérations, l'office a mis sur pied un système de gestion informatisé pour ses programmes et ses unités administratives.

Voilà, M. le Président, très brièvement, les principales réalisations de l'office au cours du dernier exercice financier. A l'aide de votre dossier, vous pourrez d'ailleurs prendre connaissance des orientations, des priorités, pour l'année qui vient. Je mentionne simplement la tenue d'un colloque sur le titre réservé qui aura lieu dans quelques jours, colloque qui s'inscrit dans la démarche d'évaluation des divers modes de contrôle des professions effectués par l'office.

Après avoir exploré la situation telle qu'elle se présente au Québec, l'office a effectué une mission aux Etats-Unis, puis une autre en Angleterre et en Belgique.

Lors du colloque, plus d'une centaine d'invités représentant divers milieux font connaître à l'office leurs points de vue quant à l'efficacité du titre réservé, l'un des deux modes de contrôle prévus au Code des professions, avec le titre exclusif, comme vous le savez, messieurs.

J'en arrive maintenant aux crédits qui sont demandés et qui doivent être approuvés par la commission parlementaire, en vue de permettre à l'office de continuer à bien remplir ses obligations.

Les crédits de cette année seront de $2 354 500, en comparaison de $2 140 300 l'an dernier, ce qui constitue une augmentation de 10% exactement. On conviendra que c'est là fort raisonnable dans les circonstances actuelles et que l'office s'administre bien. Je tiens d'ailleurs à le dire au président et à reconnaître l'admirable travail de son équipe de direction. Cette augmentation résulte d'ailleurs de l'application stricte des règles édictées par le Conseil du trésor et, d'autre part, des prévisions de dépenses à des postes où l'office n'a pas le pouvoir d'effectuer de compressions, puisque celles-ci sont reliées aux obligations qui lui sont imposées par le Code des professions et par d'autres lois. A titre d'exemple, je signale la publication, imposée à l'office, des recueils des décisions disciplinaires, dont le coût augmente en fonction, naturellement, de l'accroissement du nombre de décisions et de la hausse des coûts de production.

Voilà, M. le Président. Nous sommes disposés, M. le président de l'office, mon adjoint parlementaire, M. Elie Fallu, et moi-même, à répondre à

toutes les questions que les membres de cette commission pourraient vouloir nous poser. Le président de l'office pourra également fournir tout renseignement complémentaire propre à intéresser les membres de la commission sur les travaux et sur les demandes de crédit dont je viens de faire état. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): Merci, M. le ministre. M. le député de Robert Baldwin.

M. John O'Gallagher

M. O'Gallagher: Merci, M. le Président. Je voudrais tout d'abord remercier le ministre d'avoir lu le rapport qu'on a en main depuis quelques semaines avant la campagne référendaire.

Nous, de l'Opposition, avons quelques commentaires à faire. Ensuite, nous aurons des questions plus précises à vous poser. Cependant, nous sommes tentés d'appuyer le Conseil interprofessionnel du Québec qui, le 31 janvier 1980, demandait au premier ministre la nomination d'un ministre responsable uniquement de l'application des lois professionnelles. Remarquez que nous sommes conscients que vous portez un chapeau très grand comme ministre de l'Éducation, que vous avez très peu de temps et qu'il serait presque impossible de consacrer plus de temps à cet Office des professions.

Pas beaucoup n'a été fait depuis l'an dernier lors des crédits de cet office. Je vais citer quelques cas. Sur les 21 demandes de formation de corporations, une seule décision a été prise. C'est votre projet de loi 98 qui est peut-être prématuré.

Deuxièmement, la révision du statut juridique des corporations à titre réservé n'a même pas été amorcée. Vous avez mentionné qu'un collogue serait annoncé dans quelques jours. Remarquez en passant que nous n'avons même pas reçu d'invitation à ce colloque extrêmement important. Cette question des corporations professionnelles à titre réservé ou "occupationnelle", si vous voulez, nous préoccupe beaucoup. Le ministre n'a même pas été disponible dans le cas de l'Institut des conseillers en administration. Il a refusé de rencontrer les gens de cet institut. Ensuite, plusieurs règlements professionnels ne sont pas approuvés. Je cite une compilation du Conseil interprofessionnel du Québec. Il indique que quinze règlements obligatoires dont sept cas de déontologie n'ont pas encore été adoptés six ans après l'entrée en vigueur des dispositions législatives pertinentes. Quant aux règlements facultatifs, environ 75 ont été présentés à l'office, certains depuis plus de deux ans, mais ils n'ont pas encore été approuvés.

Dans le cas de l'Ordre des ingénieurs du Québec, l'an dernier, c'était extrêmement remarquable, pendant les crédits, on a discuté de ce problème et le ministre, à cause d'un manque de temps, a prouvé qu'il ne connaissait pas tellement le dossier. L'Ordre des ingénieurs a fait un rapport extrêmement important sur ce sujet. Il démontre qu'en fait le ministre n'était pas très bien informé par son président de l'Office des professions.

Vous avez mentionné dans vos remarques, M. le ministre, qu'il y avait une collaboration étroite entre le Conseil interprofessionnel, l'Office des professions et votre ministère dans le cas d'une campagne d'information vis-à-vis des étudiants. Je vous félicite, mais on a vu aussi juste l'inverse de ce cas-là. On a eu des plaintes du Conseil interprofessionnel à propos d'une campagne publicitaire et de sondage où il n'y a pas eu de collaboration du tout de la part de l'Office des professions vis-à-vis du Conseil interprofessionnel. C'est tout le côté négatif, si vous voulez. Cependant, nous sommes prêts, avec joie, à féliciter le ministre pour son règlement concernant la délégation des actes médicaux. Je pense qu'il y a un consensus parmi les personnes. Cela a été une solution heureuse pour tout le monde.

Nous avons encore aujourd'hui le cas des CGA, des CA et des RIA. Nous avons eu, seulement depuis hier après-midi ou même hier soir, l'avis de l'Office des professions. On a eu, seulement depuis 9 heures, ce matin, l'opinion des CA. Nous n'avons pas encore eu l'opinion des RIA, ni du Conseil interprofessionnel. Cependant, on trouve qu'il y a là les éléments d'une solution à laquelle le ministre devrait s'appliquer immédiatement, vu que le fer est chaud, qui pourrait durer pour plusieurs années.

Enfin, le ministre peut-il nous dire s'il s'est fixé des objectifs précis pour l'année en cours?

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre. (12 heures)

M. Morin (Sauvé): M. le Président, est-ce que je puis, avant que M. Shaw ne prenne la parole ou M. le député...

Le Président (M. Bordeleau): II s'agit tout simplement de s'entendre.

M. Morin (Sauvé): Je pense qu'il convient que tous les membres de cette commission aient l'occasion de faire part de leurs remarques générales, et ensuite je pourrai peut-être répondre à tous, à la queue leu leu. D'ailleurs, j'imagine que certaines questions vont être évoquées par plusieurs députés.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Serge Fontaine

M. Fontaine: Merci, M. le Président. Très brièvement, même si on fait état de certaines choses qui traînent un peu en longueur, on doit quand même tirer la conclusion que l'organisme qui s'appelle l'Office des professions accomplit un travail considérable depuis quelques années. Dans plusieurs domaines, on a vu de l'avancement de ce côté, et à l'avantage des professions et à l'avantage des citoyens du Québec.

Il reste, bien sûr, certains problèmes. Je voudrais tout d'abord faire remarquer au ministre

que sur le budget qu'il nous annonce, de $2 354 500, nous n'avons pas de ventilation encore connue de ce budget. Si le ministre en a, j'aimerais bien qu'il puisse nous la faire parvenir pour pouvoir étudier plus en détail ce budget.

Je voudrais attirer l'attention du ministre sur deux principaux problèmes, qui ont d'ailleurs été invoqués dans son allocution, tout à l'heure. Premièrement, celui du rapport qui a été remis hier par l'Office des professions au ministre et dont nous avons reçu un exemplaire, hier soir — après avoir insisté pour le recevoir — qui concerne le problème de l'organisation des professions comptables. Je pense que le ministre et l'Office des professions, après un dialogue qui a quand même duré plusieurs années, puisque c'est depuis 1972 que ce problème existe, semblent vouloir proposer une solution qui serait, à ce qu'on me dit, dans la majorité des professions concernées, acceptable, à quelques exceptions et à quelques requêtes d'amendements près. Je pense que cela va dans le sens du meilleur intérêt de ces professions et des personnes qui ont besoin de faire affaires avec ces professions.

Il y a également un autre problème qui m'a été soulevé dans une lettre que j'ai reçue dernièrement de quelques optométristes de la région, concernant la publicité sur les prix des biens et des services professionnels, le règlement qui a été adopté par l'Office des professions là-dessus. Je ne peux pas donner d'opinion là-dessus. Selon les renseignements qu'on me donne, de la part des optométristes concernés, ceux-ci demandent une commission parlementaire pour faire entendre leur point de vue là-dessus. Ils croient que toute ouverture particulière sur les prix des biens et des services ophtalmologiques favorisera à coup sûr la pénétration des multinationales de l'optique au niveau de la vente au détail des prothèses et des orthèses ophtalmologiques, et ceci, au détriment des intérêts de la population québécoise et de la qualité des services professionnels. Si ce règlement a été adopté, il serait peut-être intéressant de connaître l'opinion de l'Office des professions sur ce sujet, et de donner l'occasion à ces gens de se faire entendre de façon publique et de façon ordonnée en commission parlementaire.

Je pense que, dans l'ensemble, on a pu voir que l'Office des professions fait un travail considérable. On doit féliciter, entre autres, le président de l'office qui exerce sa fonction avec beaucoup de qualités et beaucoup de capacité également. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le député de Nicolet-Yamaska. M. le député de Pointe-Claire, pour des commentaires généraux également.

M. William Frederic Shaw

M. Shaw: Oui, M. le Président. D'abord, j'admets que la fonction de l'Office des professions est très importante pour régler les différentes sortes de professions de notre province et protéger les droits des consommateurs.

Dans ce domaine, on peut dire que dans certaines de ses activités ces buts sont atteints, sauf que, de plus en plus, on voit un écart qui commence à se développer entre les professions, le conseil interprofessionnel, les ordres professionnels individuels et l'Office des professions qui commence à fonctionner de plus en plus sans accord avec les professions impliquées. On voit ça chez l'Ordre des optométristes; on voit ça certainement chez l'Ordre des dentistes et on voit ça avec les problèmes qui se développent entre les différentes professions comptables.

Je me demande, M. le Président, si nous n'aurons pas besoin bientôt de convoquer une commission parlementaire pour examiner franchement, en profondeur, les actions de l'Office des professions qui, dans beaucoup de domaines, a agi totalement à rencontre des conseils qui ont été donnés par les professions intéressées. Par exemple, les actes élargis qui ont été donnés aux hygiénistes dentaires; cela a été appliqué par décret par l'Office des professions contrairement à tous les conseils de l'Ordre des dentistes et de la profession au complet. Avec tout le respect, le ministre a dit que le problème des denturologistes est réglé d'une façon positive, mais, à mon point de vue, comme membre de cette profession, ce n'est pas le consensus de notre profession.

Nous pouvons revenir à la question de mon collègue de Nicolet-Yamaska, à savoir les conséquences du changement des règlements concernant les annonces publicitaires pour les optométristes, qui peut changer singulièrement le profil de la pratique et le profil de revenu, ce qui, en fin de compte, peut affecter la qualité des services rendus par ces professionnels.

Alors, M. le Président, j'ai beaucoup de questions plus précises à poser après ces remarques, mais, pour terminer, il faut accepter le fait que l'Office des professions a une fonction très importante pour la population de notre province, mais je me demande si les activités de cet organisme ne commencent pas maintenant à s'éloigner des conseils qui sont donnés par les professions concernées.

M. Jean-Claude Rivest

M. Rivest: M. le ministre, si vous me le permettez...

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: ... je vais faire une courte intervention. Moi aussi, bien sûr, je m'associe à mes collègues pour témoigner au ministre et au président de l'Office des professions de la satisfaction générale, je pense, du public et des professionnels sur la manière dont l'Office des professions se charge des responsabilités qui lui sont conférées en vertu de la loi. La réforme des professions a été extrêmement difficile en 1973. J'ai eu l'occasion de voir récemment M. Castonguay qui se rappelle encore les longues et interminables séances auxquelles avait donné lieu le projet de loi origi-

nal. Je pense qu'il peut être certainement très fier de cette réforme importante pour l'ensemble de la société.

Il y a un aspect que je voudrais signaler ce matin, M. le ministre, à la lecture du document qui nous a été transmis. J'aimerais avoir une explication d'ordre général et, ensuite, je vais la traduire dans un cas précis, quitte à ce que, comme mes collègues, je revienne ultérieurement avec des questions plus particulières.

Il y a, dans le mandat général de l'Office des professions, une idée première qui est celle de la protection du public et il me semble, à la lecture des notes explicatives et de récentes décisions de la part de l'office, que l'on est en train de donner au public, consommateur de services professionnels, d'introduire la dimension peut-être trop forte ou de mettre un accent... enfin qui peut comporter certains risques de considérer le public comme étant un consommateur, c'est-à-dire de s'inspirer et de s'associer, dans certains domaines, des dispositions ou de la philosophie qu'on retrouve dans la Loi sur la protection du consommateur.

A cet égard-là, dans certaines professions, on tente, par divers règlements, de renforcer la notion de concurrence au niveau de la fourniture des biens et services inhérents ou conséquents à l'acte professionnel en tant que tel, ce qui implique souvent une dissociation de l'acte professionnel et de la dimension de traitement qui suit l'acte professionnel.

A cet égard, pour donner un exemple...

M. Morin (Sauvé): Vente aussi.

M. Rivest: Vente, exactement, oui. Je crains justement que... Il y a cet aspect-là, je ne veux pas le nier, mais quand même, entre autres, pour prendre un exemple très précis qui est celui des op-tométristes, en procédant de la sorte, à tort ou à raison, on se trouve à dissocier, dans l'acte professionnel, ce qui constitue la partie du diagnostic de celle du traitement. Je sais qu'actuellement, les optométristes... Mon collègue de Nicolet a souligné le projet, je pense qu'actuellement, c'est un projet de règlement qui aurait été transmis au gouvernement, je ne sais trop où est rendue la procédure... Au titre de la publicité, mon collègue a souligné les difficultés que cela pouvait entraîner au niveau des multinationales, etc., mais il y a peut-être aussi une dimension différente; c'est qu'à travers cette idée de vente ou cette partie commerciale qui existerait dans le domaine, par exemple, des optométristes et des opticiens d'ordonnances, on se trouve à régler d'une façon finale un conflit qui persiste entre les optométristes et les opticiens d'ordonnances. J'aurai des questions à poser tantôt.

Je voudrais d'abord que le ministre ou le président nous indique quelle est la philosophie de départ. Est-ce qu'on entend associer, finalement, dans ce domaine-là et dans d'autres probablement... Il pourrait y avoir celui de la pharmacie ou d'autres, où il y a des biens, finalement, qui sont vraiment des biens physiques qui s'inscrivent, comme dirait le ministre, dans la foulée de l'acte professionnel. Si on introduit trop fortement la dimension proprement du consommateur, c est-à-dire commerciale ou mercantile de la chose, à ce moment-là, on se trouve à dissocier et à oublier que le public qui s'adresse à un professionnel n'est pas nécessairement le même public que celui qui va acheter un bien dans une épicerie, le public consommateur.

Je trouve qu'il y a peut-être un danger d associer trop mécaniquement le public qui recourt à un service professionnel, même s'il doit acheter un bien, une prothèse ou quoi que ce soit, à simplement le public qui arrive là.

Je voudrais au moins qu'on me précise quelle est la philosophie sous-jacente. Est-ce qu'on adopte de plein gré la philosophie inhérente à la Loi sur la protection du consommateur, est-ce qu'on introduit cette dimension-là sans réserve aucune dans le domaine des professions? Cela m'apparaît une question assez fondamentale.

A ce titre-là, je voudrais signaler le problème particulier des optométristes et des opticiens d'ordonnances, où, quand même, depuis quatre ou cinq ans, sinon six ans, la Corporation des optométristes a tenté de définir un code de déontologie vis-à-vis des opticiens d'ordonnances au titre des prothèses. Or, on nous informe que l'office aurait mis de côté tout le travail de la Corporation des optométristes pour, d'autorité, transmettre au gouvernement un projet de règlement qui se trouverait à régler unilatéralement, au dire de ceux qui nous ont transmis l'information, le contentieux qui existe entre les opticiens d'ordonnances et les optométristes. (12 h 15)

On pourra revenir sur les modalités de cet aspect, mais, comme remarque générale, j'aimerais entendre le ministre ou le président de l'Office des professions pour nous faire la démarcation. Si on choisit cette voie-là, il serait peut-être beaucoup plus simple — je pense bien que ce n'est pas ce que le ministre ni l'office voudraient — à partir du moment où il y a un bien qui est attaché à l'accomplissement d'un acte professionnel, si on entend réglementer ce bien en vue de la protection du public selon les mêmes normes, la même philosophie, les mêmes critères que la Loi sur la protection du consommateur, qu'on le fasse ou qu'on le dise, mais, tant qu'on laisse cela dans le champ des professions, c'est sans doute parce que ces biens-là sont d'une nature particulière. Ils touchent à l'acte professionnel et les dissocier de l'acte professionnel ou du régime général des professions en tant que tel pour en faire simplement un objet de consommation, je trouve qu'il y a le danger de vider de son contenu l'acte professionnel.

Je vous ai donné l'exemple des optométristes, on y reviendra, le problème est sur la table, mais il pourrait y avoir d'autres professions qui soient en cause. Je pense, par exemple, très clairement aux pharmaciens, enfin, à tous les professionnels dont les actes... On me signalait même — je ne sais pas si c'est l'Office des professions ou l'Office

de la protection du consommateur — que maintenant on commençait à introduire cette notion de la concurrence au niveau du prix des services professionnels, par exemple, entre les avocats. Il me semble qu'il y a là un problème fondamental de philosophie et d'approche qu'il serait utile de clarifier. Si la commission me le permet, je reviendrai avec le cas particulier des optométristes et des opticiens d'ordonnances.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre. M. Jacques-Yvan Morin

M. Morin (Sauvé): A moins qu'il y ait des interventions de la part des autres collègues, M. le Président, j'ai tenté d'établir la liste des sujets qui ont été abordés et je vous proposerais d'en disposer de la manière suivante, de façon que chaque sujet puisse faire l'objet d'un échange le plus complet possible. D'abord, je traiterai de la question des professions comptables; ensuite, M. le président Desgagné traitera des 21 demandes d'incorporation professionnelle. Ensuite, je demanderai à mon adjoint parlementaire, M. Fallu, de traiter de la publicité des services professionnels, et en particulier de la question des optométristes. Ensuite, je reviendrai moi-même sur le cas de l'ETS et du sort des diplômés de cette école de niveau universitaire. Ensuite, M. Desgagné répondra à la question qui a été posée relativement à la ventilation des crédits de l'office. C'est une question plutôt administrative, je la lui référerai donc et ensuite nous aborderons la question des hygiénistes dentaires et de toute la question de savoir si l'office doit s'incliner automatiquement devant les revendications qui lui viennent des divers ordres, la question soulevée par M. le député de Pointe-Claire. On traitera enfin de toutes les autres questions qui pourraient être soulevées.

J'aborde donc le plus rapidement possible la question des professions comptables. Je suis heureux...

M. Shaw: M. le ministre, un instant. M. Morin (Sauvé): Oui, M. le député.

M. Shaw: Étant donné que cet après-midi j'ai d'autres obligations et que la question des hygiénistes dentaires et le décret qui va être imposé bientôt... Est-ce que cela a été déposé la semaine dernière ou cela va-t-il être déposé bientôt? Est-ce que nous pouvons nous arranger pour que votre ordre du jour soit changé pour que...

M. Morin (Sauvé): Je n'aurais pas d'objection, M. le Président, puisque le député devra nous quitter, de parler de cette question qui l'intéresse, même sur le plan professionnel.

Je voudrais dire, comme point de départ, que l'office n'a pas été créé pour s'incliner automatiquement devant tout ce que les professions peuvent proposer. L'office a été créé justement pour faire en sorte que les professions protègent le public et non pas seulement leurs membres. Donc, l'esprit du code n'est pas de créer un office bidon qui ne fait qu'entériner les propositions qui lui viennent des professions. A ce moment-là, je pense que le législateur n'aurait pas insisté pour créer l'Office des professions.

Dans le cas qui intéresse plus particulièrement M. le député de Pointe-Claire, je pense qu'on peut dire qu'effectivement l'office a fait de très grands efforts pour réconcilier au moins deux professions et une association, bien sûr, l'Ordre des dentistes, mais également la Corporation des hygiénistes dentaires et l'Association des assistants dentaires qui sont, en général, comme vous le savez, les assistants qu'on trouve dans les cabinets de dentistes.

Dans un cas, une profession à titre exclusif, dont font partie, en principe, des gens qui ont fait des études universitaires; dans l'autre cas, une profession à titre réservé, dont font partie des personnes qui ont fait des études de niveau collégial et enfin, dans le cas de l'association des assistants ou assistantes, il s'agit de personnes dont la formation peut être très diverse.

Donc, au départ, l'office ne se trouvait même pas devant une seule profession, mais devant deux professions ayant, il faut bien le reconnaître, des intérêts qui ne convergent pas sur tous les points. Je pense qu'on peut dire cela avec un certain euphémisme. En vertu de l'article 19 de la Loi sur les dentistes, le bureau de l'ordre doit adopter un règlement autorisant certaines classes de personnes, autres que les dentistes, à poser des actes qui font partie de l'exercice exclusif des dentistes.

C'est donc la loi constitutive de l'Ordre des dentistes qui fait une obligation, comme dans le cas des médecins et des infirmiers, problème que nous venons de régler, depuis quelques jours. En avril 1977, l'Ordre des dentistes a présenté un avant-projet de règlement qui a suscité des commentaires de la part de la Corporation des hygiénistes dentaires. Pour donner suite à des rencontres entre l'office et les parties impliquées, l'Ordre des dentistes a soumis, en juillet 1978, une nouvelle version remaniée de cet avant-projet et celui-ci représentait, il faut bien le dire, un net recul, par rapport à la version précédente, puisqu'il excluait la classe des hygiénistes dentaires.

En janvier 1979 — je me permets de faire ce rappel historique, pour bien poser le problème — l'office a soumis sa propre version du projet qui proposait une autorisation d'actes élargie pouvant être exécutés par la Corporation des hygiénistes dentaires, par les membres de cette corporation, autant dans les programmes de dispensation de services en santé communautaire qu'en cabinet dentaire.

L'ordre a maintenu ses positions et son projet a été publié dans la Gazette officielle du Québec, la deuxième partie, le 30 janvier 1980. Quels sont maintenant les intervenants dans ce dossier, dont il faut bien apprécier la complexité? D'ailleurs, je connais le député de Pointe-Claire, je pense qu'il connaît bien la question, puisqu'il est lui-même

membre de l'une des corporations intéressées et qu'il sait à quel point il peut être compliqué de réconcilier les intérêts des propositions des diverses corporations en cause.

D'ailleurs, j'ajouterai — je pense qu'on a mentionné le rôle de la CIQ, tout à l'heure — que dans un cas comme celui-là qui oppose deux corporations ou davantage, la CIQ refuse, par principe, d'intervenir. Donc, nous ne pouvons pas nous fier sur les lumières de la CIQ dans ce dossier. L'office et le gouvernement devront, bien sûr, trancher. Les intervenants, c'est l'Ordre des dentistes qui regroupe actuellement, 2365 membres exerçant des actes exclusifs. Ensuite, la Corporation professionnelle des hygiénistes dentaires qui regroupe 616 membres jouissant d'un tire réservé.

L'Association des assistants dentaires, qui regroupe plusieurs centaines de membres, en majorité de sexe féminin, comme on le sait, ne peut être considérée, à notre avis, comme étant pleinement représentative de l'ensemble des assistants dentaires.

Enfin, il y a également le ministère des Affaires sociales du Québec, le ministère de l'Education, effectivement, puisque la formation de ces gens est en cause, les CEGEP, qui offrent le cours de technique en hygiène dentaire, John Abbott, Maisonneuve, Édouard-Montpetit, Sherbrooke, François-Xavier-Garneau, Trois-Rivières, Saint-Hyacinthe et Saint-Jérôme. On voit que les intervenants sont nombreux. Il y a plusieurs députés autour de cette table qui peuvent noter en passant que cela intéresse leur région. Je pense au député de Sherbrooke.

L'Ordre des dentistes cherche à autoriser indifféremment les hygiénistes dentaires et les assistantes dentaires à poser des actes dentaires, afin que les assistantes dentaires à l'emploi des cabinets de dentiste continuent d'exercer dans les mêmes conditions et à un coût inférieur à celui qui impliquerait l'engagement d'hygiénistes dentaires.

De son côté, la Corporation professionnelle des hygiénistes dentaires estime que la formation reçue par ses membres au niveau collégial, dans les CEGEP que j'ai mentionnés, les rendrait aptes à poser non seulement les actes prévus au projet de règlement fait par l'Ordre des dentistes, mais également d'autres actes que l'Ordre des dentistes refuse de leur déléguer.

Alors, les hygiénistes dentaires revendiquent un statut distinct de celui des assistantes dentaires parce que, évidemment, ils ont une formation qui peut être considérée comme supérieure. Le ministère des Affaires sociales et les maisons d'enseignement intéressées partagent d'ailleurs ce point de vue.

L'office, tout récemment, a proposé un projet de règlement qui, mis au point en concertation avec le ministère des Affaires sociales, permettrait aux membres de la Corporation des hygiénistes dentaires de poser en toute légalité des actes pour lesquels ils ont été formés et qui permettrait aussi aux assistants dentaires de poser de tels actes et de se former dans un délai, par exemple, d'un an.

En conséquence, en raison de l'absence de dispositions idoines dans la loi, des modifications législatives devront sans doute être apportées pour solutionner le problème juridique qui est soulevé par le fait que les étudiants doivent effectuer des travaux pratiques en cours de formation.

L'Ordre des dentistes serait d'accord avec l'office sur ce dernier point. D'ailleurs, l'article 38 de la Loi sur les dentistes dit ce qui suit: Sous réserve des droits et privilèges expressément accordés par la loi à d'autres professionnels, nul ne peut poser l'un des actes décrits aux articles 26 et 27 s'il n'est pas dentiste. Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux actes posés par les étudiants en art dentaire qui sont immatriculés, qui effectuent un stage de formation professionnelle, conformément à la présente loi et aux règlements du bureau. Ces dispositions ne s'appliquent pas non plus aux actes posés par des personnes agissant conformément au règlement édicté en vertu du paragraphe a) du premier alinéa de l'article 19 ou en vertu de l'article 20.

Je me résume. L'office a proposé que la délégation porte sur environ 26 actes. L'Ordre des dentistes qui, bien sûr, a le réflexe habituel d'au-toprotection, estime qu'on devrait limiter la délégation à douze actes. J'ai l'intention, au cours des semaines qui viennent, pendant l'été, dans la perspective d'un règlement assez rapide, de demander une dernière fois les commentaires des intéressés avant de prendre une décision. Il faudrait que ce soit assez rapidement. J'ai l'intention de communiquer ces jours-ci avec les intéressés. Je pense que le règlement de cette affaire ne devrait pas trop tarder parce que les professions intéressées m'ont fait valoir qu'il y avait intérêt à ce que ce soit tranché. Souvent, même si les professions s'opposent, elles font valoir qu'il vaut mieux un règlement qui tranche la question que de laisser traîner des situations qui ne rendent pas la vie facile dans la pratique quotidienne de l'art dentaire. (12 h 30)

M. le Président, voilà ce que j'avais à dire sur cette question. Peut-être que M. le député de Pointe-Claire aura un point de vue différent à faire valoir.

M. Shaw: Si je peux, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le député de Pointe-Claire.

M. Shaw: Premièrement, je veux dire au début que le besoin de déléguer des actes dentaires est un besoin réel dans la pratique moderne de la dentisterie. Il n'en est pas question. J'ai eu l'avantage, il y a quatre ans, de faire partie d'une délégation spéciale qui est allée à Londres, en Suisse, en Suède, en France et en Saskatchewan pour étudier des actes délégués et des systèmes qui appliquent ces actes délégués quotidiennement. Nous sommes allés, par exemple, visiter le système à Londres, au Local Authority Clinic, dans lequel il y a des auxiliaires dentaires spécifiquement entraînés pour faire des actes dentaires,

c'est-à-dire des plombages, de petites extractions aux enfants de moins de 18 ans. Nous avons fait des études d'efficacité de fonctionnement et même des expériences avec ceux qui sont responsables dans ces pays, l'Angleterre, la Suède, la France, etc.

Nous avons découvert des choses. Premièrement, oui, vous avez besoin de la profession d'hygiéniste dentaire. Les actes délégués à cette expertise doivent être de plus en plus élargis, sauf que nous ne voulons pas, je crois, à l'avantage de la population, du consommateur, de ce service, développer une forme de traitement dentaire qu'on appelle "five and dime dentistry". Cela veut dire un deuxième niveau de qualité de services. Si nous faisons la comparaison de la qualité de services offerts dans des centres comme les Local Authority Clinics, en Angleterre ou des Volktan-ward en Suède, on voit qu'en Suède, avec l'expérience d'un système de délégation à un niveau inférieur de celui de dentiste, l'expérience finale a démontré que c'est moins coûteux. C'est très important, parce qu'il y a là un "cost effect of study" qui doit être fait pour démontrer si la population peut être aussi bien servie par un niveau de services secondaires, si vous voulez, à un coût qui est au moins compétitif à celui du système normal. Après 22 ans d'expériences, en Suède, ils ont décidé de se tourner vers les dentistes, en formant plus de dentistes. Les dentistes qui sont dans les Volktanward maintenant qui remplacent les "dental nurses" qui étaient là avant sont plus efficaces et la qualité des services a été augmentée. On voit cela maintenant en Angleterre. C'est un choix du gouvernement, comme au Québec, d'avoir un service dentaire fait par les dentistes.

Dans notre système américain, premièrement, je peux constater que notre système est le meilleur au point de vue de la qualité des services et, deuxièmement, qu'il est le meilleur au point de vue des coûts. Nous avons fait la comparaison avec le système établi en Saskatchewan et nous avons démontré que le coût par service était quatre fois plus dispendieux fait par les "dental nurses" de Saskatchewan que par les dentistes des cabinets privés au Québec. Ces faits sont là. C'est pour cela que...

M. Morin (Sauvé): Ces chiffres sont de quelle année, M. le député?

M. Shaw: De 1974.

M. Morin (Sauvé): La situation a quelque peu changé depuis.

M. Shaw: Nous pouvons faire — cela pourrait être un de vos défis avant de prendre une décision finale — une comparaison des coûts par acte dans une clinique dentaire d'une école comme en Saskatchewan et dans une clinique privée à Québec pour vérifier si ce que j'ai dit est vrai. Je crois que c'est facilement démontrable que, premièrement, au point de vue de l'étude et de la formation, l'augmentation des hygiénistes dentaires qui sont dans les cliniques dentaires sera de 85% dans cinq ans. Ces coûts doivent être engagés. Deuxièmement, le fait est que le coût selon le rythme de services dans une journée et le nombre de patients qui sont dans les cliniques sont réellement inférieurs à ceux des cabinets privés de notre province. C'est un fait qui est très comparable.

A Londres maintenant, d'après nos observations, on a commencé à faire une commission d'étude pour essayer d'analyser si c'est plus efficace et moins dispendieux et à l'avantage du patient lui-même de prendre la mesure qui a été prise par la Suède de rétablir la qualité du service par un dentiste avec une formation totale, au lieu d'un service de seconde classe, parce que même acte par acte on constate que la qualité du service est aussi bonne avec un hygiéniste dentaire qu'avec un dentiste pour un patient, parce que ce ne sont pas seulement des plombages que les dentistes font, mais c'est aussi un traitement complet de la dentition. C'est pour cela que l'Ordre des dentistes a jugé que c'est plus raisonnable de procéder par étapes en donnant certains actes ou certains privilèges nouveaux aux hygiénistes dentaires.

C'est dans cet esprit que je vous présente cet argument. A mon avis, l'Ordre des dentistes a bien étudié la situation. Ce n'est pas pour protéger les dentistes que nous sommes en train d'agir, mais pour faire en sorte que la qualité du service n'ait pas deux paliers. Nous avons vu ce qui se passe maintenant en Nouvelle-Zélande. Nous savons ce qui se passe maintenant en Saskatchewan. Nous ne voulons pas suivre le même tracé ici, au Québec.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, je répondrai à la fois par une affirmation et une interrogation. Les actes que l'office propose de déléguer sont des actes de nature technique pour lesquels les hygiénistes dentaires ont reçu une formation. Ce n'est pas comme si les hygiénistes dentaires entendaient se substituer aux dentistes pour ce que vous appelez les soins de seconde ligne sans formation préalable.

M. Shaw: Ce n'est pas totalement vrai, monsieur.

M. Morin (Sauvé): Ils sont formés pour offrir des services de qualité, les services qu'on songe à confier aux hygiénistes dentaires. La question qui me vient à l'esprit, tandis que j'écoute le député, est la suivante: Est-ce qu'il pourrait être plus spécifique et nous dire quels sont les actes sur lesquels il a des doutes?

M. Shaw: Ce sont des actes qui sont, de fait, irréversibles, quelque chose comme un plombage. C'est vrai que les hygiénistes dentaires ont reçu une formation là-dedans. Ils reçoivent des indications sur la façon de poser un plombage, mais pas sur celle de faire la préparation. C'est une moitié. Si on fait une étude avec un dentiste qui laisse un

patient pour aller chez un autre patient pour que cet hygiéniste dentaire puisse poser le plombage, vous allez voir que cette duplication d'efforts n'a pas de bon sens. C'est aussi efficace que le dentiste reste avec le patient, qu'il fasse au complet le plombage et ne délègue pas ce rôle. Aussitôt que nous sommes prêts à déléguer la préparation et le plombage de la dent, nous pouvons peut-être aller vers cette direction, mais une moitié de la formation, ce n'est pas assez. C'est pour cela que nous sommes très craintifs que dans quelques situations, même si leur formation les prépare à plomber une dent, ce n'est pas adéquat pour préparer une dent pour le plombage. C'est un exemple. Les actes irréversibles, ce sont les seuls actes qui nous font peur.

M. Morin (Sauvé): Mais, M. le député, le principe de l'irréversibilité auquel vous vous référez est respecté dans le projet de règlement. Ce sont des représentations qui nous ont été faites, effectivement. Je crois que l'office a voulu respecter ce principe et que seuls les actes qui n'entraînent pas de conséquences irréversibles peuvent être délégués.

M. Shaw: Est-ce que le ministre est prêt à accepter un rendez-vous privé pour réexaminer les actes tels que délégués dans le règlement avant que sa décision finale soit prise?

M. Morin (Sauvé): Je préférerais d'abord, parce que je ne pense pas...

M. Shaw: Avec des représentants des hygiénistes dentaires, si vous voulez.

M. Morin (Sauvé): Vous voyez, l'Ordre des dentistes ne m'a pas fait parvenir de communication écrite. Avant que je voie les intéressés, j'aimerais bien qu'ils m'envoient vraiment un plaidoyer précis et, si c'est cela que le député me demande, je suis tout à fait prêt à recevoir le plaidoyer, mais vraiment technique et précis.

M. Shaw: D'accord.

M. Morin (Sauvé): Ensuite, on verra s'il y a lieu de les rencontrer.

M. Shaw: Le problème qui s'est présenté, c'est que l'Ordre des dentistes a été placé devant un décret qui était censé être un fait accompli. Si le ministre est prêt à réexaminer tous les faits et les précisions, je suis sûr que nous pourrons régler le problème.

M. Morin (Sauvé): Bon! Oui, écoutez, je suis persuadé qu'il doit y avoir moyen de régler ce problème. Si nous avons pu régler celui des médecins et des infirmiers, croyez-moi, il doit y avoir moyen de régler à peu près n'importe quel problème.

M. Shaw: Oui, je comprends.

M. Morin (Sauvé): Même celui des CGA. Il y avait deux problèmes. Je veux indiquer au député de Pointe-Claire, avant que nous quittions ce sujet pour passer à un ou deux autres qui sont également importants, qu'il s'agissait de savoir à qui déléguer. Premier problème. L'office nous recommande que ce soient les hygiénistes. Parce qu'il y a une corporation qui peut contrôler la qualité des actes, une corporation qui peut discipliner aussi ses membres, ce contrôle-là est très important, et aussi parce qu'ils reçoivent, comme je l'ai indiqué, la formation théorique et clinique nécessaire dans les collèges que j'ai mentionnés.

La deuxième question était: Quoi déléguer? Alors, l'ordre, comme je l'ai indiqué, était consentant à déléguer une douzaine d'actes. L'office, lui, porterait cela à 26, parce que, justement, il lui paraît que les hygiénistes ont la formation technique nécessaire pour effectuer ces actes. Mais, bien sûr, il y a des conditions. Je ne sais pas si le député de Pointe-Claire a eu le texte de l'office sous les yeux. Il ne l'a pas encore eu. Peut-être que, lorsqu'il l'aura sous les yeux, d'ici quelque temps, il constatera qu'il y a des conditions expresses qui ont été posées. D'abord, il y a des conditions de surveillance à distance ou immédiate selon l'acte, un peu comme dans le règlement de délégation des médecins et des infirmiers.

Si le député de Pointe-Claire veut bien faire savoir à ses collègues que je suis prêt à recevoir d'eux, mais rapidement, un avis écrit, motivé, technique, très précis, sur chaque acte, je suis prêt à le regarder, et rapidement.

M. Shaw: D'accord.

Demandes d'incorporation

M. Morin (Sauvé): M. le Président, je vais demander à M. le président de l'Office des professions de dire quelques mots sur la question des demandes d'incorporation qui nous sont parvenues en réponse à une question qui a été soulevée, je pense, par le député de Robert Baldwin.

Le Président (M. Bordeleau): M. le président, au nom du ministre.

M. Morin (Sauvé): II y a quatre ou cinq ans, s'étaient accumulées à l'office 38 demandes de reconnaissance de groupes divers sous le Code des professions. Or, c'est la responsabilité de l'office, comme l'a rappelé le ministre tout à l'heure dans sa déclaration liminaire, de décider de l'opportunité d'accéder à ces demandes ou de ne pas y accéder. (12 h 45)

L'office a délibéré là-dessus au cours des deux dernières années et a rendu un avis au ministre sur 21 de ces demandes. Il en reste donc dix-sept. Ces avis, le ministre en a résumé la teneur tantôt, il y a quatre groupes qui se voient non pas reconnaître le statut de corporation professionnelle, mais la possibilité de s'intégrer à une corporation professionnelle déjà existante. Il

semble que, à la faveur des contacts que nous avons avec les corporations professionnelles identifiées, l'opération peut être couronnée de succès.

Il y a trois autres groupes, par ailleurs, dont on dit qu'ils doivent être assujettis à un contrôle, mais non pas les contrôles prévus au Code des professions. Cela en fait donc sept. Il y a enfin trois groupes dont on a estimé qu'il fallait aller plus loin dans l'étude de leur dossier. Ce sont les conseillers sociaux, les psycho-éducateurs, les décorateurs-ensembliers. Il y en a onze dont nous avons refilé la demande aux calendes grecques en disant que les contrôles existants suffisaient dans leur cas. Pour vous donner un exemple, vous avez les biologistes, les architectes-paysagistes et ainsi de suite.

Ce qui a guidé l'office dans toute cette question, ce n'est évidemment pas ce que certains n'avouent pas, mais ce qu'ils recherchent, c'est-à-dire la reconnaissance d'un prestige. Ce qui a guidé l'office, c'est toujours le grand principe de savoir si le public sera mieux protégé en reconnaissant un groupe et en l'assujettissant au contrôle du code ou, au contraire, en le laissant ailleurs. C'est le grand principe qui nous a guidés.

Il y a déjà des critères dans la loi qui nous précisent comment s'exerce cette discrétion. Il y a aussi l'étude de l'office qui date de 1977 sur l'évolution du professionnalisme et là où nous avions énoncé des caractéristiques pouvant nous servir aussi à exercer cette discrétion. Il y a aussi un examen que nous avons ajouté à tout cela de la situation à l'étranger. Ce sont tous ces facteurs ou tous ces outils qui nous ont servi à décider des demandes qui nous étaient formulées.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Desgagné. M. le ministre, est-ce que vous voulez poursuivre avec les réponses aux questions qui ont été abordées tantôt?

Professions comptables

M. Morin (Sauvé): Oui, j'inviterais mon adjoint parlementaire, le député de Terrebonne... M. le Président, on me signale que la question des CGA est importante pour plusieurs membres de la commission parlementaire. Effectivement comme j'ai cru déceler dans leurs propos un certain appui pour l'avis qui vient de nous être communiqué par l'office, peut-être est-il bon qu'on s'en parle tout de suite, qu'on vide la question, ce qui, évidemment, serait de nature à me faciliter le travail pour les semaines qui viennent, alors qu'on pourrait mettre sur pied les règlements nécessaires, les faire approuver par le Conseil des ministres le plus rapidement possible et, enfin, régler ce problème qui traîne dans le paysage depuis longtemps.

Je ne vais pas faire un long exposé, mais simplement signaler que ce problème des professions, de la vérification comptable, n'est pas exclusif au Québec. L'Ontario avait exactement le même problème avec, je pense, également trois groupes en présence qui correspondent grosso modo à ceux que nous connaissons ici au Qué- bec. Justement, le 17 avril, il y a quelques semaines à peine, un comité ontarien le Professions' Committee, a déposé un rapport qui est très voisin de ce que propose l'Office des professions et qui, évidemment, nous encourage fortement, ou devrait nous encourager fortement à régler le problème de la réconciliation des intéressés avec une solution semblable à celle qu'il nous propose. Je vais la résumer, M. le Président. D'ailleurs, tout le monde, je pense, a maintenant entre les mains l'avis tout récent de l'Office des professions et il suffirait de se reporter aux pages 15 et suivantes pour trouver la solution proposée par l'office qui est celle de la création d'une commission des permis de vérificateurs. Je ne m'étends pas sur les diverses solutions que l'office aurait pu adopter. Il les a décrites, je pense, de façon très précise aux pages 13 et suivantes et j'en viens tout de suite à la solution proposée. Le problème est suffisamment connu pour que je n'aie pas à le décrire de nouveau. D'ailleurs, nous avons consacré une partie importante de l'étude des crédits l'an dernier justement à ce problème.

La solution proposée a pour objectif d'assurer la protection du public, mais surtout une certaine harmonie entre les divers intervenants dans le domaine des professions comptables, tout en respectant l'économie du système professionnel du Québec. On n'a donc pas voulu créer un organisme purement étatique qui aurait réglé les problèmes d'autorité, mais nous montrer respectueux de l'existence des corporations en présence. Cette solution consiste, d'une part, à permettre aux trois corporations professionnelles d'exercer chacune l'ensemble des responsabilités du contrôle du champ d'exercice exclusif et, d'autre part, à confier à une commission formée de représentants de chacune de ces corporations la tâche d'exercer le contrôle de l'admission à l'exercice dans ce champ.

M. le Président, comme le temps se fait court, je pense que je m'arrêterai là. Chacun a devant lui l'avis. J'aimerais mieux, plutôt que de faire un long exposé, avoir le sentiment des membres de la commission.

Le Président (M. Bordeleau): J'avais d'abord reconnu le député de Sainte-Anne.

M. Morin (Sauvé): Sur cette question, M. le député?

M. Lacoste: Sur cette question, M. le Président. Il y a plusieurs années déjà que je suis le dossier entre les CA, les CGA et les RIA. Il me semble que, comme les députés de Robert Baldwin et Nicolet-Yamaska, il y a un début de solution. L'Office des professions, je dois l'avouer, a très bien saisi le problème pour en arriver à une solution.

Voici ma première question sur ce sujet: De quelle façon le ministre, suite à cet avis de l'Office des professions, prévoit-il mettre en application cet avis? Par réglementation ou en amendant la loi?

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre ou M. le président de l'office.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, compte tenu de l'appui que j'ai cru sentir tout à l'heure autour de cette table, compte tenu aussi du fait que la Corporation des CGA, pour ne pas parler des autres, attend depuis longtemps une solution, j'ai l'intention de procéder assez rapidement, et je dirais même dans le courant de l'été, pour régler le problème. Il reste quelques étapes techniques à franchir. Il va falloir modifier certaines dispositions législatives qui sont incompatibles avec la solution que nous proposons, notamment dans la Loi des comptables agréés, l'article 29, la Loi sur la Commission municipale, la Loi sur les sociétés coopératives agricoles et la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit.

Donc, on le voit, techniquement, il y aura des règlements, il y aura de la législation. Aussitôt que sera terminée cette étude des crédits qui nous permet justement de tirer au clair l'avis de tout le monde autour de la table, nous allons procéder rapidement. Je puis l'affirmer au député de Sainte-Anne, il n'est pas de mon intention, maintenant qu'on a enfin un avis qui semble faire quasiment l'unanimité, de laisser traîner les choses.

Je vous signale que l'avis était sous lettre de transmission du 3 juin 1980 et que je l'ai reçu le 4 ou le 5 à mon bureau. Comme il n'y a pas de date sur l'avis, je voulais vous indiquer que c'était officiellement daté du 3 juin.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Sainte-Anne.

M. Lacoste: M. le Président, dans l'avis de l'Office des professions, à la page 20, concernant les dispositions particulières, dans le paragraphe a), on dit: Toute personne membre de l'Ordre des comptables agréés à la date de référence obtiendra un permis de vérification sans formalité.

Au paragraphe c) on dit que toute personne, qu'elle soit membre des corporations professionnelles des CGA ou des RIA, ou qu'elle ne soit pas membre d'une de ces deux corporations professionnelles, qui, à la date de référence, exercera, de la façon habituelle, dans le champ d'exercice exclusif, aura droit au permis de vérificateur si elle peut établir à la commission des permis de vérification qu'elle a exercé la vérification pendant au moins deux ans.

Je vois un certain problème de cette façon. On sait qu'actuellement les CGA, autant que les RIA ne peuvent faire la vérification. Si on demande deux ans pour un permis, je vois là un certain problème. J'aimerais que le président m'explique un peu plus le sens de ces deux paragraphes.

M. Morin (Sauvé): Je pense qu'il faudrait corriger. Vous me permettez, M. le ministre.

Simplement, je voudrais signaler que, dans le cas du premier paragraphe que vous avez signalé. c'est une question de droits acquis. Mais je vais demander au président de l'office de vous donner les détails techniques.

M. Lacoste: D'accord.

M. Morin (Sauvé): Quant au point c), je vous signale que la réponse, vous la trouvez dans une affirmation qui n'apparaît pas exacte dans votre propos. Les CGA, les RIA et même d'autres personnes peuvent, dans la situation actuelle, faire la vérification. C'est à l'article 29 de la Loi des comptables, des CA, qui permet précisément à toute personne d'exercer en vérification, dans le champ comptable, lorsqu'il s'agit de coopératives, de municipalités, etc. Ce n'est pas sans effet, l'article c) du projet de règlement, puisque des personnes, effectivement, sont dans le champ de la vérification sans être comptables au sens des trois corporations professionnelles.

M. Lacoste: J'étais au courant de cela au niveau des coopératives et des municipalités. Mais le champ était quand même très restreint. Déjà, il faut qu'un CGA ou un RIA s'ouvre un bureau de comptable. C'est quand même très restreint au niveau d'une clientèle. Il ne pouvait même pas faire de vérification, comme dans les garderies, dans les organismes publics, comme dans les garderies, pour ne nommer que celles-là. Il peut arriver qu'il y ait une difficulté, parce que le comptable serait très limité dans ses possibilités de faire la vérification des comptes.

M. Morin (Sauvé): Oui, mais le problème que nous avions n'était pas d'élargir le champ de l'article 29, c'était de reconnaître ceux qui avaient profité de l'article 29 pour les fins de l'entente à intervenir. Voilà le problème que nous avions.

Evidemment, on peut déplorer le fait que l'article 29 limite, mais il reste qu'il fallait faire la place à ceux qui profitaient aussi de l'article 29.

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Si vous me le permettez, c'est bien sûr que la loi permet actuellement à des CGA de faire la vérification comptable dans certains domaines, par exemple, dans les commissions scolaires. Mais étant donné que cet exercice a été restreint par la loi, il n'y a pas beaucoup de comptables, comme le disait le député de Sainte-Anne, qui ont pu faire leur exercice exclusif de la profession dans le domaine de la vérification. Ce qui fait que, même s'ils ont des droits acquis, reconnus dans la loi, si on applique la solution que vous proposez, ils ne pourront pas bénéficier de ces droits acquis comme pourront le faire les comptables agréés. Étant donné qu'on pourrait leur reconnaître des droits acquis, on pourrait leur permettre de les exercer sur une certaine période de temps. On pourrait donner comme exemple deux ans. On va leur donner un permis de vérification pour une période de deux ans, parce qu'ils

ont ce droit acquis reconnu dans la loi et, au bout de deux ans, le comptable, le CGA ou le RIA qui n'aura pas exercé cette profession de vérificateur se verra retirer son permis. A ce moment-là, cela pourrait permettre à ceux qui avaient le droit acquis de faire de la vérification comptable dans certains domaines, mais qui ne l'ont pas fait à cause des circonstances, d'exercer ce droit acquis et d'exercer la profession. (13 heures)

M. Morin (Sauvé): Me permettez-vous de prendre la parole, M. le Président?

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Desgagné.

M. Morin (Sauvé): Je comprends la difficulté. Je vous signale que la Corporation des CA nous avait proposé une formule semblable, dans sa logique, de permis temporaires en faveur de ceux qui voulaient se faire la main en vérification; mais, pendant tout ce temps-là, ces personnes étaient assujetties à l'inspection professionnelle des CA, etc.

Nous avons laissé, en somme, cette partie de problème à la commission qui est tripartite, comme vous le savez. Nous lui avons, cependant, imposé l'obligation de tenir compte de cette situation qui tient à la formation des personnes. Vous en avez un exemple. La formule se trouve à la page 21, deuxième alinéa de d), où l'on dit qu'une fois que la commission aura établi les normes qui définissent les conditions d'accès au permis de vérificateur la commission devra tenir compte de toute expérience, de toute formation pertinente acquise, de sorte que la place est faite pour cette partie de la population comptable. Mais on ne va pas aussi loin que les CA, parce qu'on a dit: C'est peut-être la commission qui est mieux placée pour apprécier la chose dans le concret.

M. Fontaine: Si vous me permettez d'ajouter quelque chose, également dans le paragraphe c) de la page 21, vous mentionnez dans la dernière phrase qu'il va falloir que la personne prouve qu'elle a exercé la vérification pendant au moins deux ans.

M. Morin (Sauvé): Pardon?

M. Fontaine: Pendant au moins deux ans.

M. Morin (Sauvé): Je parle du deuxième alinéa du paragraphe d), M. le député.

M. Fontaine: Oui, d'accord, mais je vous réfère au paragraphe c) où on dit: "Toute personne, qu'elle soit membre des corporations professionnelles des CGA et des RIA ou qu'elle ne soit pas membre de l'une de ces deux corporations professionnelles, qui, à la date de référence, exercera, de façon habituelle, dans le champ d'exercice exclusif, aura le droit au permis de vérificateur si elle peut établir à la commission des permis de vérificateur qu'elle a exercé la vérification pendant au moins deux ans." Cela nous ramène au problème que je vous expliquais tantôt. Il y a des gens, par exemple, les RIA et les CGA, qui ont le droit acquis d'exercer de la vérification...

M. Morin (Sauvé): Mais qui ne l'ont pas exercé.

M. Fontaine: ... mais qui ne l'ont pas exercé à cause des circonstances actuelles. Si on met cela dans le règlement qu'ils vont devoir prouver qu'ils ont exercé depuis deux ans, il n'y a pas grand monde qui va l'avoir.

M. Morin (Sauvé): Remarquez qu'il y a parité de situation à cet égard avec les CA qui ont peut-être leur permis de vérificateur parce qu'ils ont le droit acquis en vertu de leur loi. S'ils veulent revenir de facto à la vérification, ils sont tenus, en vertu du paragraphe a), de justifier à nouveau qu'ils ont la compétence en vérification. Il y a une parité de situation en quelque sorte pour les CA comme pour les CGA.

M. Fontaine: Oui, mais les CA vont pouvoir le prouver automatiquement, parce que la plupart en ont déjà fait.

M. Morin (Sauvé): Non, parce que l'ordre devra réglementer les conditions dans lesquelles un CA, qui, pourtant, détient un permis de vérificateur, parce qu'on ne peut pas le lui enlever, pourra revenir à la vérification, alors qu'il n'en fait pas de facto. On l'a dit au paragraphe a). C'est là que l'on voit une certaine parité de situation.

M. Fontaine: Parce qu'il y a peut-être des CA qui auront fait de la vérification en signant des rapports qui auront été préparés par des CGA.

Le Président (M. Bordeleau): Avant de continuer, messieurs, je voudrais vous souligner qu'il est passé 13 heures; si on veut continuer, maintenant, il faudrait avoir le consentement des membres pour tenter peut-être de terminer le programme 9.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, je pense qu'on devrait au moins passer au travers de cette question des trois professions comptables, si c'était possible, parce que je sais que ça tient beaucoup de monde à coeur. Pour ma part, je suis tout à fait disposé à continuer, peut-être pas indéfiniment, parce que la faim va finir par nous tenailler, mais au moins à essayer de finir cet aspect-là des choses avant l'adoption du programme.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, sur consentement, on continue. M. le député de Robert Baldwin?

M. O'Gallagher: Je n'ai pas grand-chose à dire sur la question des professions comptables, mais je pense que vous avez en main l'élément

d'une solution... D'ailleurs, le même problème s'est posé en Ontario où ces gens ont proposé une solution un peu semblable à celle que l'office a proposée.

Je sais que l'office a tout le talent et le mandat de chercher une solution avec les trois corporations impliquées, mais il pourrait peut-être trouver une manière d'assouplir les mesures de transition, toujours en gardant comme but ou mandat principal la protection du public. J'espère que vous allez vous pencher là-dessus dans les prochains mois et trouver une solution finale à ce problème.

M. Morin (Sauvé): C'est bien notre intention, M. le député. Dans cet esprit, je suis tout à fait prêt à réfléchir à ce que le député de Nicolet-Yamaska nous a dit.

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le député de Sainte-Anne?

M. Lacoste: Si j'ai bien compris le président de l'Office des professions, toujours aux pages 20 et 21, le CGA ou le RIA... Disons que ça fait un an que la personne fait de la vérification. Elle pourrait toujours, selon le paragraphe d)... cependant, toute expérience et toute forme pertinente acquises par la personne qui exerçait dans le champ d'exercice exclusif, toujours la commission formée de représentants des trois associations de comptables... Par ce paragraphe d), elle pourrait toujours demander d'être reconnue pour la vérification. Est-ce que c'est bien ça?

M. Morin (Sauvé): C'est-à-dire qu'il pourrait voir allégées les conditions d'examen, par exemple, et ainsi de suite, compte tenu de l'expérience que la personne aurait acquise, de la formation qu'elle aurait.

Remarquez que l'article 29 n'est pas un article qui aura profité uniquement aux membres des corporations comptables, il profite à tout le monde. C'est un article ouvert en quelque sorte. Il y a une grande distinction. Il y a des personnes qui peuvent venir de tous les horizons.

M. Lacoste: D'accord.

Le Président (M. Bordeleau): Ça va?

Des Voix: Oui, ça va.

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Est-ce qu'il va y avoir d'autres consultations avec les corporations professionnelles concernées avant l'adoption du règlement?

M. Morin (Sauvé): Oui, je pense que je vais faire un dernier tour de piste. Je le fais toujours d'ailleurs. Évidemment, cela peut se traduire de plusieurs façons. Comme les trois professions intéressées ont reçu l'avis, probablement hier ou aujourd'hui, je pense qu'elles vont réagir. Je vais attendre un certain temps. Je n'attendrai pas des mois. Mais si elles me font parvenir leur réflexion, leur point de vue rapidement, alors je m'engage à en tenir compte. D'ailleurs, nous avons toujours agi de cette façon, l'office et moi-même.

M. Fontaine: M. le Président, pour ma part, je serais enclin à accepter la proposition faite par l'Office des professions du Québec. Tout dépend, bien sûr, de la façon dont elle va être interprétée. Si elle est interprétée par la commission de façon restrictive, cela va être plus difficile d'application. Tandis que si elle est interprétée de façon assez large... Quant à savoir s'il y a eu vérification ou non ou quelle est l'expérience dans le domaine, je pense que ce serait une solution acceptable.

Si jamais le ministre décidait de présenter un projet de loi d'ici au 20 mai... il pourrait certainement avoir le consentement de l'Union Nationale, afin que le projet de loi... Pardon! Le 20 juin... C'est une date qui me restera longtemps dans la mémoire...

M. Morin (Sauvé): On voit que cela vous a obsédé...

Des Voix: Nous aussi d'ailleurs.

Des Voix: C'est une date obsessionnelle...

M. Rivest: Peut-être aussi complexe...

M. Fontaine: J'espère qu'elle va être aussi bien comprise de la population.

M. Rivest: J'espère qu'il va y avoir un oui là-dessus.

M. Morin (Sauvé): J'espère quelle ne recevra pas une réponse négative. Le député...

M. Rivest: Non, non, un oui...

M. Fontaine: C'est un non qui voulait dire oui. D'ailleurs, j'ai remarqué que le ministre tantôt, dans son allocution, a parlé de sondage. J'étais bien heureux de voir qu'il avait utilisé CROP pour faire ce sondage. Cela donne plus de crédibilité...

Le Président (M. Bordeleau): Si vous permettez, nous pourrions peut-être revenir à la pertinence du programme 9.

M. Morin (Sauvé): Quoique j'ai I impression que toutes les sociétés de sondage vont devoir revoir leur procédure.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, peut-être voulez-vous continuer, M. le ministre ou on ajournerait immédiatement, sans terminer le programme no 9.

M. Rivest: Qu'est-ce qu'il nous reste à voir? Si on pouvait continuer, peut-être que s'il y en a simplement pour une demi-heure.

M. Morin (Sauvé): Écoutez, il nous restait la ventilation des crédits. Cela peut être fait assez rapidement. Il nous restait la question de la protection du consommateur, des optométristes que j'allais demander à mon adjoint parlementaire de traiter.

M. Rivest: Moi, ça va être assez court là-dessus.

M. Morin (Sauvé): Et il restait encore l'ETS; à vrai dire, il n'y a pas grand-chose à dire en ce moment puisque la négociation continue un peu entre les intéressés. Si vous le désirez, je n'ai pas d'objection, M. le Président, sauf qu'évidemment, à 15 heures, nous devons reprendre les crédits de l'Education. Je ne voudrais pas...

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, il ne faudrait pas non plus oublier notre personnel de soutien, il va peut-être avoir faim aussi.

M. Fontaine: On pourrait continuer jusqu'à une heure trente si on en a besoin.

M. Morin (Sauvé): Bien, je veux bien en convenir. Laquelle des deux questions vous intéresse le plus, messieurs? La ventilation des crédits ou la question de la concurrence et de la publicité?

M. Rivest: On va réfléchir.

M. Fontaine: La ventilation, je me suis aperçu qu'on l'avait.

M. Morin (Sauvé): Oui, vous l'avez, vous l'avez effectivement.

M. Rivest: Quel est le problème là-dessus — je m'excuse — sur la ventilation des crédits, qui est-ce qui a soulevé le...? Ah! M. le député de Nicolet?

M. Morin (Sauvé): M. le député de Nicolet-Yamaska désirait avoir des détails.

M. Fontaine: C'est parce que je ne l'avais pas eue et je me suis aperçu qu'elle était là.

M. Rivest: Bon, réglé.

Optométristes, opticiens et ophtalmologistes

M. Morin (Sauvé): Ecoutez, dans ce cas, la seule question importante qui reste, c'est celle de la concurrence, de la protection des consommateurs par la voie de la publicité et, notamment, le cas des optométristes. Si vous voulez, je donnerais la parole à l'adjoint parlementaire pour qu'il nous brosse un tableau rapide et qu'ensuite on puisse passer à la discussion.

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Terrebonne.

M. Fallu: M. le Président, des questions fondamentales sont soulevées à ce moment-ci à propos des optométristes, opticiens d'ordonnances et ophtalmologistes. La protection du consommateur doit se faire, dans le domaine des professions, de deux façons, en l'occurrence. C'est-à-dire l'assurance des soins de qualité d'une part, et ça, c'est chacun des ordres qui voit à assurer cette qualité des soins. D'autre part, il y a la question des prix, puisque sont liés à la pratique d'une profession des objets. On voit le cas dans les pharmacies, on voit le cas également chez les opticiens d'ordonnances ou chez les optométristes.

Ici, en fait, il y a trois problèmes qui, concrètement, sont soulevés: celui de la publicité, celui des ordonnances et celui qu'il est convenu d'appeler, entre les diverses professions, les contrats de service, c'est-à-dire le problème relatif à l'assurance des lentilles cornéennes. Si on voulait prendre le problème de très haut, comme le député de Jean-Talon a voulu le faire tout à l'heure, je crois que c'est de remettre en cause fondamentalement le problème des services monnayables d'appareils de quelque nature que ce soit, prothèses de toute nature et médicaments par rapport aux professions.

On doit admettre au départ qu'est lié à l'exercice des professions l'ensemble du prolongement professionnel qui doit être contrôlé par la profession. Donc, on vient de réduire le propos à des méthodologies, soit publicité pour les médicaments, publicité pour les prothèses de quelque nature que ce soit. C'est donc dans ce cadre quand même plus restreint que se place la problématique concrète.

J'allais dire, pour ce qui a trait aux optométristes et opticiens d'ordonnances comme les ophtalmologistes, qu'on assiste d'abord à un problème économique relié à une situation québécoise. Il est un fait qu'il y a peu de production de telles prothèses, ici dans le territoire. On assiste donc à de l'importation massive et à de la fixation des prix qui sont en dehors souvent même de la volonté des premiers manipulateurs, à savoir les optométristes et opticiens d'ordonnances.

Un premier problème est soulevé, celui de l'importation des prothèses. D'ailleurs, je crois qu'il faudrait peut-être, au ministère de l'Industrie et du Commerce, réfléchir à ce problème en songeant à voir, notamment, au niveau des quantités, s'il n'y a pas lieu de créer de nouvelles filières ou de mieux contrôler — évidemment, c'est peut-être dans les débats constitutionnels — les importations. (13 h 15)

Concrètement, le problème se pose devant la publicité, devant l'ordonnance et devant le contrat de service. Les principaux intervenants, pour ce qui a trait à la publicité, sont effectivement les optométristes et opticiens d'ordonnances. Déjà, deux règlements avaient été déposés à la Gazette officielle, soit le 28 décembre 1977 et, ensuite, une troisième version, en décembre 1979. On sait que l'Ordre des optométristes a réagi très défavora-

blement et a demandé au ministre responsable d'examiner personnellement ce dossier en se refusant à toute nouvelle discussion avec l'office. Donc, c'est un problème qui est devenu un problème politique, et il faut effectivement le trancher bientôt.

Quant à la forme et au contenu des ordonnances des optométristes, il y a un problème technique qui se pose, celui de la forme et celui de la remise en main au client. L'attitude des optométristes est, je dirais, un peu ambiguë parce qu'on a cru voir des consignes que se seraient passées les optométristes entre eux.

Toutefois, il semble à peu près évident que, actuellement, c'est-à-dire depuis quelques semaines, pour ne pas dire quelques jours, que, pour le moins, l'optométriste remet l'ordonnance au client en autant qu'il en fait la demande avant l'examen. Donc, il y a des attitudes un peu corporatistes là-dedans et, effectivement, il faudra trancher par le biais d'une réglementation.

Quant au contrat d'assurance, il y a préalablement un problème, également, dans la lentille cornéenne: c'est l'ordonnance elle-même faite ou non à l'intention de l'opticien. Il y a donc des tensions entre les deux corporations. Le problème le plus crucial, c'est celui de l'assurance elle-même. On sait qu'il y a deux types d'assurance: il y a l'assurance qui est donnée à titre personnel, pour ainsi dire, par l'opticien ou l'optométriste, et il y a également tout le problème de l'assurance proposée par les compagnies d'assurances. A ce moment-là, cela relèverait éventuellement du bureau d'assurance pour le contrôle du contrat d'assurance et pour son application.

On voit que la protection du consommateur est, dans ces domaines, concrètement menacée, il faut le dire, dans la situation actuelle.

Je ne ferai pas le relevé complet de tous les intervenants, des positions réciproques. Toutefois, je veux bien indiquer que le problème se concrétise dans l'examen par rapport, notamment, à la prothèse — c'est essentiellement cela — problème auquel on doit ajouter la question du contrat. Qu'est-ce qui a été fait par le gouvernement et qu'est-ce qu'on entend faire à partir de maintenant? D'abord, la publicité. Il y a une orientation qui a été prise par l'office vers une certaine libéralisation. D'ailleurs, dans la pratique— on sait que cela cause des problèmes sur le terrain — les opticiens d'ordonnances appliquent d'ores et déjà, par anticipation, évidemment, les positions préconisées par leur ordre en matière de publicité, et certains d'entre eux vont même déjà au-delà. L'ordre presse l'office de recommander au gouvernement d'approuver ce règlement qu'il propose lui-même. Quant à l'office — je ne voudrais pas parler au nom du président — de son côté, il s'est prononcé publiquement à maintes reprises en faveur d'une libéralisation des règles de publicité. La recommandation de l'office, d'ailleurs, est maintenant déposée auprès du ministre. Dans le sens de la protection du consommateur, je crois que nous devons nous orienter de ce côté.

Quant à la remise de l'ordonnance, il faut donc la voir dans le cadre de la libre concurrence, au fond, d'une part, et avec la connotation de la libre concurrence, d'autre part, c'est-à-dire la protection du consommateur par rapport au prix de revient.

Puisqu'il n'y a pas encore de "castonguette", sauf pour certaines classes de la société qui ont été favorisées par des lois sociales, du moins pour certaines parties de ces prothèses, lentilles et non pas lunettes comme telles, actuellement aucune disposition expresse dans les textes législatifs ou réglementaires qui touchent l'exercice des deux professions qui sont en cause n'impose à l'optométriste l'obligation de remettre une ordonnance à son patient et encore moins une ordonnance décrite dans des formes définies. L'office, pour ce faire, a recommandé l'approbation, dans les codes de déontologie, d'un article faisant obligation à l'optométriste de remettre l'ordonnance sans même la demande expresse du client. Le gouvernement devra donc bientôt se prononcer sur cette libre concurrence.

Quant au contrat de service, il faut préalablement régler le problème de la répartition des juridictions entre optométristes, opticiens d'ordonnances et ophtalmologistes, en l'occurrence, puisque eux aussi peuvent prescrire. Il faut d'abord savoir qui peut faire quoi vraiment et c'est seulement après que les règlements seront bien précisés qu'il y aura lieu d'agir dans la pratique, c'est-à-dire la pratique administrative, soit par voie réglementaire ou autrement, et, par exemple, créer l'obligation pour l'un ou l'autre de ceux-là d'indiquer séparément le coût et l'étendue de l'assurance sur le relevé des honoraires pour favoriser, par exemple, la concurrence entre les compagnies d'assurances.

Le député de Nicolet-Yamaska a demandé à ce propos, tout à l'heure, s'il y avait lieu de tenir une commission parlementaire. Je crois que le moment n'est pas venu de répondre directement à sa question puisque l'office et le gouvernement ont d'abord une responsabilité — notamment le gouvernement, en l'occurrence sur certains de ces dossiers — notamment de trancher, faire une proposition qui soit ferme, comme on en a une maintenant devant nous à propos des CA, CGA, RIA. Et, suite aux réactions, suite probablement aux rencontres des divers intéressés avec le ministre lui-même, il faudra voir s'il y a lieu, suite à l'ensemble de ces interventions, d'évaluer la nécessité de la tenue d'une commission parlementaire.

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Un bref commentaire. L'aspect du prix des objets qui se situent dans le prolongement de l'acte médical. On sait que l'un des problèmes majeurs dans ce titre, c'est la question, par exemple, des prothèses, tout cela dans le domaine des optométristes, mais dans la question des médicaments, le prix des médicaments.

Je sais que le premier ministre actuel, il y a quelques années, avait soulevé ce problème-là. Alors, je ne l'ai pas suivi, mais c'est un problème important dont une des dimensions, c'est justement le fort taux d'importation que le Québec fait de ce type de produit. En tout cas, c'est un problème extrêmement complexe. Je ne pense pas que le problème de prix en tant que tel des médicaments ou des prothèses puisse être réglé dans le cadre de la loi des professions ou de l'organisation professionnelle. Je pense que bien d'autres mesures pourraient éventuellement être prises, mais d'une façon "ancillaire", bien sûr, au titre de la protection du consommateur, lorsque j'ai souligné ça. C'est le premier aspect.

Le deuxième aspect, est-ce que c'est un projet de règlement ou...? C'est un projet ou un règlement?

M. Morin (Sauvé): A l'heure actuelle?

M. Rivest: Oui, je parle de ce que vous avez annoncé dans votre communiqué de presse, M. le président, le 27 mai.

M. Morin (Sauvé): Bien sûr, ce n'est qu'un projet. Tant que ce n'est pas adopté par le Conseil des ministres, ce n'est pas un règlement.

M. Rivest: Alors, très bien. Comme l'a signalé le député de Terrebonne, l'adjoint parlementaire du ministre, je pense que, substantiellement — j'ai le mémoire des optométristes — les opto-métristes craignent, surtout au titre de la délégation de l'ordonnance, que ce projet de règlement en arrive à décider d'autorité d'une façon quasi définitive du contentieux qui existe entre les optométristes et les opticiens d'ordonnances sur la délimitation de l'acte professionnel de l'un par rapport à l'autre. Les optométristes prétendent, à tort ou à raison, que le diagnostic qu'ils posent lorsqu'on va chez un optométriste et que la prothèse qui s'ensuit, la vente, non seulement la vente, mais les traitements, les problèmes que ça peut occasionner subséquemment, l'ajustement, etc., cela se situe dans le diagnostic et le traitement. Je ne sais pas quel est l'avis de l'office. Il me semble que ce que j'ai cru comprendre, de la part des propos de l'adjoint parlementaire, c'est qu'avant d'aller plus loin avec ce projet de règlement, le gouvernement, ou l'Office des professions devra émettre un avis ferme sur la délimitation du champ d'opération. Il y en a trois. Il y a aussi les ophtalmologistes qui, indirectement, sont peut-être dans le dossier, mais surtout les optométristes et les opticiens d'ordonnances. C'est un des dossiers qui restent au niveau de la délimitation.

Remarquez que, au moment de la loi 250, ce problème existait. Il n'a jamais été réglé, à ma connaissance. Si j'ai l'assurance ou si la commission a l'assurance aujourd'hui que, ce projet étant là, on a pris connaissance de la réaction des optométristes — je n'ai pas pris connaissance de la réaction des opticiens d'ordonnances; je ne sais pas si elle existe — il faudrait qu'on puisse avoir l'assurance du ministre ou de l'adjoint parlementaire, ou du président, comme, je pense, c'est la pratique — le ministre l'a indiqué tantôt — que vous avez enregistré les réactions au projet de règlement et, surtout, l'assurance que vous allez émettre un avis ferme, après toute la consultation, l'analyse du dossier, sur la délimitation du champ professionnel de l'une ou l'autre des professions. Pour l'instant, on ne peut peut-être pas aller plus loin, parce qu'il y a encore beaucoup de travail à faire. La seule chose que je vous indique, c'est que la réaction des optométristes, à la lecture de leur mémoire, apparaît extrêmement vigoureuse. Ils indiquent très clairement dans leur mémoire qu'il s'agit d'un geste extrêmement important pour l'avenir même de la profession de l'optométrie.

Quant à la question de prix, ce que j'avais souligné au départ, sur les objets qui se situent dans le prolongement de l'acte professionnel, je souhaiterais peut-être que l'Office des professions émette un avis général là-dessus, mais en sachant bien que ce problème est beaucoup plus complexe et qu'il doit être envisagé dans bien d'autres perspectives que la seule perspective inhérente à la Loi sur les corporations professionnelles. Qu'on pense aux pharmaciens, etc.

Pour me résumer, je veux dire que le projet de règlement est là. D'après ce que j'ai cru comprendre des propos du ministre et de l'adjoint parlementaire, le gouvernement devra, avec l'office, bien sûr, émettre un avis sur le règlement du contentieux existant entre les professions. Par la suite, on arrivera avec un projet de règlement et on fera rapport le plus tôt possible. C'est cela?

Le Président (M. Lacoste): M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): Plus exactement, c'est bien l'office qui va nous soumettre un avis au gouvernement...

M. Rivest: Oui, un projet.

M. Morin (Sauvé): ... et c'est le gouvernement qui adoptera le règlement en conséquence. Je dis en conséquence; c'est compte tenu de l'avis qui lui sera parvenu et compte tenu, bien sûr, des représentations qui lui seront faites par les intéressés, par les professions intéressées.

Je pense que M. le président de l'office avait quelques mots à ajouter.

Oui, c'est exact de dire que le problème ici, en partie, se situe ou s'inscrit dans le problème d'un conflit de frontières, en quelque sorte, entre ces deux corporations.

On sait que lorsque le Code des professions a été élaboré, on a réglé ces problèmes de façon assez absolue en formant des corporations qui livraient la prothèse, et la corporation qui fournissait le service, et on en a fait deux champs bien distincts.

Ce n'est pas la solution qui a été retenue ici. La solution qui a été retenue ici est, au contraire, de rendre commun aux deux corporations le

champ de livraison de la prothèse, ce qui est une cause de conflit. Mais c'est le législateur qui nous a laissé ce problème et je ne pense pas que ce soit au niveau réglementaire qu'on va le régler. Les corporations professionnelles, vous l'avez bien perçu, ont essayé de régler ce problème, les optométristes surtout, en voulant évacuer les opticiens de la livraison de la prothèse et en refusant la livraison de l'ordonnance; c'est ce qu'ils faisaient, au fond.

Nous disons par le règlement: Ce n'est pas ce problème qu'on va régler; on va laisser aux opticiens la juridiction qu'ils ont, donc ils partagent avec les optométristes le champ de la prothèse. Par le règlement, on ne fait que trancher autrement que voulaient le faire les optométristes et on refuse de trancher le litige que le législateur a voulu laisser tel quel, c'est-à-dire une concurrence entre opticiens et optométristes, dans la mesure où il s'agit de livrer la prothèse. Le règlement n'a pour effet que de dire aux optométristes: Vous n'êtes pas les seuls à pouvoir livrer la prothèse; fournissez l'ordonnance et le client choisira ou chez vous, ou chez l'opticien; et nous sommes fidèles à la législation, à ce moment-là.

Évidemment, il faut déplaire. Je sais qu'on déplaît, mais on n'a pas le choix, on est obligé d'appliquer la loi telle qu'elle est.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce qu'il y a consentement pour poursuivre?

M. Rivest: Oui, juste un dernier... Sauf que je comprends exactement la subtilité de l'office à ce titre et je pense que, juridiquement, l'interprétation de l'office m'apparaît juste. Le problème qui arrive, c'est que les optométristes prétendent que cela remet en cause tout le problème de la délimitation du champ professionnel de l'optométrie et des opticiens d'ordonnances, dans le sens que la personne qui se rend chez l'optométriste va prendre l'ordonnance et va aller faire du "shopping" pour sa prothèse. Les optométristes prétendent, au niveau de leur profession, qu'ils doivent — vous connaissez cette prétention — garder un regard sur la prothèse elle-même, sur son ajustement, sur les problèmes que cela peut poser. Ils prétendent que l'opticien d'ordonnances qui n'a pas fait l'examen — enfin, c'est la prétention des optométristes — ne peut pas poser un diagnostic valable pour ajuster la prothèse. (13 h 30)

C'est tout le problème de fond. Et c'est là la prétention des optométristes. Juridiquement, vous vous situez dans un bon cadre. Je pense que vous faites une interprétation juste de la loi, mais le problème vient de ce que les optométristes pensent que cela remet en cause leur champ professionnel.

M. Morin (Sauvé): Chaque profession défend, évidemment, avec acharnement ses frontières, ses intérêts. Et chaque fois qu'il y a deux professions en cause, il faut arbitrer. La façon de le faire n'est pas toujours de trancher dans l'abstrait. D'autant que, dans un domaine comme celui-là, c'est fort difficile puisqu'il y a chevauchement. Et quelquefois, la seule façon, c'est de trancher par le biais des aspects concrets de la chose. Enfin, ce problème-là, M. le Président, va être mûri et longuement étudié avant que le gouvernement ne le tranche, je puis en donner l'assurance. Mais il est temps de trancher aussi. Cela ne peut pas durer indéfiniment non plus.

M. Rivest: J'ai essayé de me faire un allié du député de Richelieu en m'associant d'une façon peut-être très analogique au problème des médicaments, mais je n'ai pas réussi.

M. Martel: Disons que je vous voyais venir de loin.

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Juste une brève question. J'ai soulevé tout à l'heure la question des multinationales qui intervenaient là-dedans. On n'a pas répondu à ma question. Est-ce que vous avez des commentaires?

M. Fallu: J'ai évoqué tout à l'heure le problème. Nous en sommes très conscients. D'ailleurs, en pharmacopée, on trouve toute une série de produits de synthèse qui pourraient fort bien être développés ici dans de petites PME.

M. Martel: L'industrie pharmaceutique au Québec, ce sont des investissements de l'ordre de plusieurs milliards de dollars. Il faudrait avoir un système complet d'assurances-médicaments avant de songer à contrôler ses prix et à établir une industrie pharmaceutique vraiment québécoise.

M. Fallu: Souvent, il y a ce qu'on appelle la troisième ligne américaine qui arrive en dumping au Québec.

M. Martel: Bien, il y a les multinationales.

M. Fontaine: Ma question portait particulièrement sur les optométristes. Je vous ai lu tout à l'heure le paragraphe d'une lettre que je recevais d'un optométriste qui nous dit: "Nous croyons que toute ouverture particulière sur les prix des biens et des services ophtalmologiques favorisera à coup sûr la pénétration des multinationales de l'optique au niveau de la vente en détail des prothèses et des orthèses ophtalmologiques ".

Qu'est-ce que vous avez à répondre à cela?

M. Fallu: II peut arriver facilement qu'autant un opticien d'ordonnances qu'un optométriste se laissent embrigader dans des réseaux de distribution multinationale. Il n'y a aucune garantie à ce niveau-là.

Etant donné que le produit lui-même est essentiellement d'importation, on subit déjà les contrecoups. Ce que les optométristes craignent,

c'est l'installation, par les multinationales, de réseaux de Laura Secord de vendeurs de lunettes, c'est-à-dire d'opticiens d'ordonnances. Je caricature volontiers ici, parce que c'est un peu le reproche. Ils n'ont peut-être pas tort, sauf qu'il y a un problème de nature économique et non pas professionnelle, à ce moment-là, puisqu'il s'agit d'objets à vendre.

J'ai émis, tout à l'heure, l'opinion que la meilleure méthode de concurrence des prix là-dedans serait peut-être de développer les filières québécoises. Je n'en ai pas la conviction, mais c'est pour le moins une hypothèse que j'émets, parce que j'ai cru saisir en regardant quelquefois le dossier d'un peu plus près que, par rapport aux prix absolument faramineux qu'on exige de ces prothèses, n'importe quelle PME au Québec, bien assistée d'un réseau d'optométristes et d'opticiens qui voudraient se regrouper, comme certains pharmaciens l'ont fait, pour produire eux-mêmes certains produits pharmaceutiques — je connais, tout près de chez moi, une industrie qui repose essentiellement sur la propriété, l'appartenance d'un groupe de pharmaciens — s'il pouvait y avoir le même mouvement, assisté peut-être par l'un ou l'autre des mécanismes de l'Etat, elle pourrait peut-être concurrencer la multinationale et, en conséquence, abaisser les prix.

Ce serait sans doute à regarder de très près. Je m'y engage dans les mois qui viennent...

M. Fontaine: II est quasiment trop tard. Vous achevez votre mandat...

M. Rivest: Vous n'avez rien fait pendant quatre ans...

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que le programme 9 est adopté?

M. Morin (Sauvé): Toujours aussi subtil, le député de Jean-Talon. Toujours aussi fin.

M. O'Gallagher: Je sais que le temps passe rapidement, mais...

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Robert Baldwin.

M. O'Gallagher: Nous avions plusieurs questions à poser. Je pourrais résumer cela en trois questions: une au ministre et deux au président de l'Office des professions du Québec.

D'abord, la première question: Est-ce que le ministre prévoit des pièces législatives autres que les amendements pour les besoins des comptables?

M. Morin (Sauvé): Oui. Il n'est pas impossible que vienne, à l'automne, un projet d'ordre technique destiné à faciliter le travail de l'office. Ensuite, un projet qui, lui, serait beaucoup moins technique comporterait des dispositions de fond, dans le sens de ce que nous avons indiqué pour la protection des consommateurs. Mais ces projets n'ont pas encore franchi le Conseil des ministres, donc, je ne peux pas annoncer quand ils seront déposés, ni quand nous les présenterons en deuxième lecture.

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Robert Baldwin.

M. O'Gallagher: Une première question relativement à l'Office des professions. L'office procè-de-t-il présentement à une enquête concernant l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec?

M. Morin (Sauvé): Ce qui est arrivé, c'est qu'à la suite de la hausse de cotisation, la deuxième hausse en deux ans de l'Ordre des infirmières et infirmiers, nous avons reçu des représentations de la part, d'abord, de certains membres, et même de certains groupes de membres. Ce que nous avons fait, nous avons accusé réception, évidemment, de leur demande d'intervention et nous avons dit que nous allions évaluer la situation, tel que le code nous en fait obligation. Nous le faisons, non pas en faisant enquête au sens péjoratif du terme, mais en analysant les états financiers de l'ordre, et aussi en contactant l'ordre pour obtenir des renseignements supplémentaires, s'il en faut.

M. O'Gallagher: Ma dernière question. Où en est rendu l'office dans sa réflexion sur l'utilisation du double titre par l'Etat employeur? C'est le cas de plusieurs ministères qui emploient d'autres mots pour dire la même chose, pour éviter l'utilisation du nom professionnel.

M. Morin (Sauvé): Vous faites allusion au titre réservé...

M. O'Gallagher: Oui, oui.

M. Morin (Sauvé): ... qui vient en concurrence avec les titres qui ne sont pas réservés et dans le même champ. C'est bien cela?

Tout à l'heure, le ministre, dans son discours préliminaire, vous parlait d'un colloque sur les titres réservés. Cela s'inscrit dans cette étude que nous poursuivons, qui n'est pas facile, à savoir comment consolider le titre réservé en dépit du fait qu'on ne réserve pas un champ, comment assurer que le monopole du titre corresponde à quelque chose de valable. Le colloque du 12 et 13 juin auquel nous avons invité — ce n'est pas un colloque ouvert— les professions', les employeurs, des gens qui ne sont pas des professions, aussi, est limité à une participation d'environ 150 personnes. Si vous voulez venir, nous vous inviterons. Ce colloque est fait sur cette base. Nous avons l'intention, précisément, de recueillir, à l'occasion de ce colloque, des données qui nous permettront de tirer au clair la question que vous posez et qui tenaille l'office depuis le début.

M. O'Gallagher: Très bien. M. le Président, je suis prêt à adopter les crédits pour ce ministère.

Le Président (M. Lacoste): Donc, le programme 9 est adopté?

M. O'Gallagher: Adopté.

M. Morin (Sauvé): Très volontiers, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): Le programme 9 est adopté. La commission parlementaire des corporations professionnelles ajourne ses travaux sine die.

Fin de la séance à 13 h 39

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