Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
Etude des crédits de la Commission des
corporations professionnelles
(Onze heures trente-cinq)
Le Président (M. Lacoste): A l'ordre, messieurs!
La commission permanente des corporations professionnelles est
réunie pour étudier les crédits budgétaires de la
commission des corporations professionnelles.
Les membres de cette commission, pour la séance d'aujourd'hui
sont: M. Lacoste (Sainte-Anne) qui remplace M. de Bellefeuille
(Deux-Montagnes); M. Fallu (Terrebonne), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M.
Gosselin (Sherbrooke), M. Rivest (Jean-Talon) qui remplace M. Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys); M. Martel (Richelieu), M. Morin (Sauvé), M.
O'Gallagher (Robert Baldwin), M. O'Neill (Chauveau), M. Shaw
(Pointe-Claire).
Les intervenants sont: M. Beauséjour (Iberville), M. Blank
(Saint-Louis), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. Godin (Mercier), M. Lefebvre
(Viau), M. Mercier (Berthier), M. Michaud (Laprairie), M. Saint-Germain
(Jacques-Cartier), M. Samson (Rouyn-Noranda).
Il y a maintenant lieu de nommer un rapporteur. Puis-je suggérer
le député de Sherbrooke?
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je suis d'avis
que le député de Sherbrooke ferait cela magnifiquement.
Le Président (M. Lacoste): Le député de
Sherbrooke sera donc le rapporteur.
M. Shaw: ... magnanimement.
Le Président (M. Lacoste): M. le ministre, pour vos
commentaires généraux.
Remarques préliminaires M. Jacques-Yvan
Morin
M. Morin (Sauvé): M. le Président, la commission
permanente des corporations professionnelles siège aujourd'hui pour
étudier les crédits de l'Office des professions du Québec
dont le président, Me André Desgagné, se trouve à
ma droite.
Si ces crédits apparaissent parmi ceux du ministère de
l'Education, c'est pour des raisons d'ordre purement technique, car l'office
n'est pas pour autant rattaché au ministère de l'Education. La
raison en est "simplement que le premier ministre m'a confié la
responsabilité de l'Office des professions, en plus de celle de
l'Éducation.
De fait, l'office est un organisme autonome, créé par le
Code des professions, le 6 juillet 1973. Il se compose de cinq membres
nommés par le gouvernement et, comme je l'ai dit, Me Desgagné en
est président, cela depuis maintenant trois ans.
Cet office est un organisme de surveillance dont la fonction principale
consiste à veiller à ce que chaque corporation assure la
protection du public, puisque, comme on le sait, la création du
système des professions au Québec, la création de l'office
également répondaient d'abord et avant tout à cette grande
préoccupation d'ordre social: la protection du public. Pour remplir ce
mandat, l'office dispose de pouvoirs administratifs et réglementaires,
et peut, de sa propre initiative, faire des recommandations au
gouvernement.
Permettez-moi d'énumérer brièvement ceux de ces
pouvoirs qui sont les plus importants. Tout d'abord, l'office nomme,
après consultation du Conseil interprofessionnel et des groupes
socio-économiques, de deux à quatre administrateurs qui
siègent au bureau de chaque corporation professionnelle. L'office
publie, deux fois par année, les décisions rendues par les
comités de discipline et le tribunal des professions qui coiffe
l'ensemble. En second lieu, l'office doit non seulement s'assurer que chaque
corporation adopte un ensemble de règlements régissant
l'activité professionnelle, mais également il a le pouvoir
d'établir à la place des corporations les règlements
reliés directement à la protection et à la
sécurité du public, comme dans le cas de la déontologie et
de l'arbitrage des comptes, si les corporations refusent d'adopter des
règlements dans les délais impartis. Troisièmement et
enfin, l'office fait au gouvernement des recommandations qui touchent
particulièrement les règlements des corporations
professionnelles, les modifications apportées aux lois régissant
ces corporations et la constitution de nouvelles corporations ou encore la
fusion ou la dissolution des corporations existantes.
Si l'office et les administrateurs nommés par lui au bureau des
corporations incarnent dans le système professionnel le principe de
l'hétéroges-tion, les corporations professionnelles y
représentent celui de l'autogestion. En effet, chaque corporation
contrôle l'exercice de la profession par ses membres en vue d'assurer la
protection du public et, bien sûr aussi, la défense de ses
membres.
A cette fin, l'État a délégué aux
corporations des pouvoirs importants. Par exemple, avant d'admettre un candidat
à l'exercice de la profession, la corporation s'assure qu'il
possède les qualifications requises. La corporation adopte des
règlements relatifs à la conduite de ses membres, à la
publicité permise, aux normes de tenue des dossiers et des cabinets de
consultation. Enfin, elle contrôle l'intégrité de ses
membres au moyen d'un comité de discipline.
En ce qui concerne le contrôle de la compétence des
membres, chaque corporation est munie d'un comité d'inspection
professionnelle. Ce comité voit à ce que les membres
n'exécutent pas un travail pour lequel ils ne possèdent pas les
connaissances ou les aptitudes requises. Chaque année, le comité
réalise un programme général d'inspection dont sont
informés tous les membres.
II peut également faire des inspections particulières si
la chose devient nécessaire.
Chaque corporation organise également pour ses membres des stages
de formation continue permettant de mettre périodiquement leurs
connaissances au point, en collaboration avec les établissements
d'enseignement, les syndicats et les employeurs.
Enfin, la corporation tient à jour une liste officielle de ses
membres et veille à ce que personne n'exerce illégalement la
profession ou n'utilise un titre réservé sans être membre
de la corporation.
Le Conseil interprofessionnel du Québec, de son
côté, est un organisme consultatif composé des
présidents des 38 corporations professionnelles. Le Conseil
interprofessionnel et l'office ne sont évidemment pas toujours du
même avis, ce qui contribue à la dynamique du système et
fournit au gouvernement l'occasion d'entendre différents points de vue
avant de prendre une décision. Mais il arrive aussi que le Conseil
interprofessionnel et l'office collaborent étroitement en vue de
régler les problèmes épineux. Ce fut le cas, par exemple,
de la tenue d'examens donnant accès à l'exercice de la
denturologie, un problème qui a occupé de longs mois M. le
Président lorsqu'il est arrivé à l'office. Nous avons
maintenant réglé ce problème, je pense, d'une façon
heureuse.
Aussi n'est-il pas question, contrairement à une suggestion
déjà entendue en 1972 par le Collège des médecins
et chirurgiens de la province de Québec, et reprise en février
1980 par la Corporation professionnelle des médecins, de rendre
volontaire l'adhésion au Conseil interprofessionnel. Cet organisme a un
rôle important à jouer à l'intérieur du
système professionnel, notamment celui de faire entendre au gouvernement
la voix des professionnels réunis. Et mieux que cela, M. le
Président, si je puis me permettre de féliciter le Conseil
interprofessionnel pour les résultats qu'il a obtenus récemment
dans sa campagne en vue de mieux informer les étudiants ou les personnes
intéressées à devenir membres des corporations.
J'ai eu l'occasion de présider au lancement de 38 brochures, une
par corporation M. le président de l'office était
là également qui ont été
rédigées en collaboration et qui expliquent, à quiconque
s'intéresse à chaque corporation, quelles sont les conditions
d'admission à cette corporation, en quoi consiste exactement la
profession, quels sont les prérequis, etc. 38 brochures admirablement
bien faites et dont je veux féliciter très chaudement le Conseil
interprofessionnel.
Permettez-moi de dire quelques mots des réalisations de l'office
en 1979-1980. On ne parle pas suffisamment du travail opiniâtre de
l'office, de son excellent travail, qui n'est pas très bien connu,
malheureusement du grand public.
L'office a un rôle social essentiel dans la société
québécoise, mais, malheureusement, il ne s'en vante guère.
Il travaille peut-être un peu trop justement dans l'obscurité, se
contentant le plus souvent de rencontrer les corporations, de faire des
rapports au ministre, sortant à l'occasion en public, mais ne faisant
pas toujours valoir autant qu'il le devrait ses réalisations qui sont
très importantes pour la bonne marche de notre
société.
Les membres de la commission parlementaire pourront prendre connaissance
dans leur dossier des principales activités de l'office. Je
souhaiterais, néanmoins, en mentionner quelques-unes parmi les plus
importantes. (11 h 45)
D'abord, permettez-moi de rappeler certaines recommandations qui ont
été faites par l'office. La première porte sur des
modifications législatives à apporter au Code des professions de
façon à y inclure des recours sinon semblables, du moins
analogues à ceux que prévoit la Loi sur la protection du
consommateur. On voit que le rôle social de l'office se manifeste dans
ses propositions.
Très succinctement, l'office propose que les obligations du
professionnel déjà définies dans les codes de
déontologie le soient aussi dans le code. Que tout contrat de service
puisse être révisé si les obligations imposées aux
clients sont excessives. Qu'en cas de litige, l'établissement de la
preuve devant les tribunaux soit facilité pour le client. Et, enfin,
l'office propose que le professionnel ait l'obligation de fournir des garanties
précises sur les biens vendus et que lui soit interdite toute
représentation fausse ou trompeuse. L'office estime que l'inclusion de
ces propositions dans le Code des professions contribuerait au maintien d'un
équilibre satisfaisant entre les professionnels et leurs clients.
Un deuxième avis de l'office au ministre portait sur 21 demandes
de constitution en corporation professionnelle. L'office recommande notamment
l'intégration de quatre groupes à des corporations qui existent
déjà. L'Institut des auditeurs publics accrédités
pourrait être incorporé à l'Ordre des comptables
agréés. La Guilde des comptables commerciaux pourrait
l'être à la Corporation des comptables en administration
industrielle, ce qu'on appelle les RIA. L'Association des puéricultrices
du Québec pourrait être associée à la Corporation
des infirmières et infirmiers auxiliaires. C'est même
déjà fait dans ce cas. Oui, je pense que l'accord a
été conclu.
Enfin, la Corporation des techniciens inhalo-thérapeutes du
Québec; c'est un regroupement avec une corporation déjà
existante du secteur des techniques de la santé qui serait
proposé. Ou encore, cela deviendrait un élément d'une
nouvelle corporation regroupant éventuellement tous les professionnels
du secteur des techniques de la santé.
L'office recommande en outre le contrôle de trois groupes par
réglementation ou par des lois autres que le code. Dans trois autres
cas, l'office juge nécessaire de procéder à une analyse
plus poussée avant de nous faire des recommandations. Quant aux onze
autres groupes, l'office estime que la protection du public est
déjà assurée par les contrôles existants.
Dans le secteur de la lunetterie, l'office a recommandé
l'approbation du règlement autorisant les opticiens d'ordonnances
à faire de la publicité sur les services offerts et sur les prix.
Il a aussi
recommandé que le Code de déontologie des
optométristes fasse obligation à ces derniers de remettre
obligatoirement l'ordonnance au client sans qu'il n'ait à en faire la
demande. Selon l'office, ces mesures devraient favoriser l'information et la
liberté de choix des clients.
Au cours de l'année, l'office a publié une étude
sur les compagnies de services professionnels, un mémoire sur la
formation des professionnels qu'il avait soumis à la commission
d'étude sur les universités ainsi que deux recueils de
décisions disciplinaires. Enfin, il a publié une analyse de deux
sondages qui visaient à évaluer les attentes, les besoins, les
problèmes des usagers de services professionnels.
Sur la base des données recueillies par le sondage qu'il a
effectué en collaboration avec l'organisme appelé CROP, l'office,
qui avait fait de l'information publique l'un de ses objectifs prioritaires
pour l'année 1979-1980, a réalisé une campagne
d'information qui s'est déroulée du 4 février au 14 avril
1980. Au cours de cette période, quatre messages ont été
diffusés sur les ondes de quelque soixante stations radiophoniques, six
messages imprimés ont été publiés dans 33
quotidiens et hebdomadaires. Cette campagne visait à favoriser un
meilleur dialogue entre le professionnel et son client et à renseigner
un large public sur le système professionnel ainsi que sur les droits et
recours des usagers de services professionnels. Parallèlement à
cette campagne, une tournée d'information a été entreprise
dans diverses villes du Québec. On voit que l'office ne chôme
pas.
En matière de réglementation maintenant, il est à
signaler qu'au 31 mars 1980 220 des 233 règlements devant être
obligatoirement adoptés par les corporations professionnelles avaient
été publiés dans la Gazette officielle du Québec
avec avis d'approbation. Des treize règlements qui ne sont pas encore en
vigueur, un a déjà été approuvé par
décret, cinq ont été adoptés par l'office et
transmis au gouvernement pour approbation et les sept autres feront l'objet
d'un avis de l'office au cours de l'exercice qui vient.
Deux règlements importants ont récemment été
approuvés par le gouvernement, ceux relatifs à l'autorisation
d'actes médicaux et infirmiers, il y a une dizaine de jours. Je tiens
à signaler le travail réalisé par l'office dans ce
dossier, ainsi que dans celui de l'autorisation d'actes dentaires qui sera
prochainement parachevé. Si le gouvernement n'avait pas eu, à ses
côtés, l'office, pour le conseiller dans ce dossier
extrêmement délicat, nous n'aurions pu en venir aux solutions
nuancées qui nous ont permis, finalement, de réconcilier l'Ordre
des médecins, l'Ordre des infirmières et infirmiers et l'Ordre
des infirmières et infirmiers auxiliaires. Le règlement qui a
été rendu public semble, à l'heure actuelle, faire
l'unanimité, grâce à la souplesse que nous avons d'ailleurs
introduite dans ces dispositions.
En terminant, vous me permettrez d'évoquer quelques
réalisations qui touchent la gestion interne de l'office, sur laquelle
M. le président voudra peut-être s'étendre plus tard,
surtout si on lui pose des questions. A la suite de l'adoption du projet de loi
20, l'office a complété le processus d'intégration de son
personnel à la fonction publique. Tous les employés ont
conservé leurs droits acquis et, comme indicateur du succès de
cette démarche, il est à noter qu'aucun grief n'a
été soulevé par les employés. On ne peut pas en
dire autant de certains autres secteurs de l'administration publique.
Par ailleurs, le Conseil du trésor a confirmé l'autonomie
de l'office en matière de gestion de personnel, en reconnaissant
l'existence de sa direction de l'administration et du personnel. La direction,
en collaboration avec les gestionnaires, a su appliquer avec diligence les
nouvelles procédures prévues à la Loi sur la fonction
publique.
Pour assurer le contrôle et le suivi budgétaire de ses
opérations, l'office a mis sur pied un système de gestion
informatisé pour ses programmes et ses unités
administratives.
Voilà, M. le Président, très brièvement, les
principales réalisations de l'office au cours du dernier exercice
financier. A l'aide de votre dossier, vous pourrez d'ailleurs prendre
connaissance des orientations, des priorités, pour l'année qui
vient. Je mentionne simplement la tenue d'un colloque sur le titre
réservé qui aura lieu dans quelques jours, colloque qui s'inscrit
dans la démarche d'évaluation des divers modes de contrôle
des professions effectués par l'office.
Après avoir exploré la situation telle qu'elle se
présente au Québec, l'office a effectué une mission aux
Etats-Unis, puis une autre en Angleterre et en Belgique.
Lors du colloque, plus d'une centaine d'invités
représentant divers milieux font connaître à l'office leurs
points de vue quant à l'efficacité du titre
réservé, l'un des deux modes de contrôle prévus au
Code des professions, avec le titre exclusif, comme vous le savez,
messieurs.
J'en arrive maintenant aux crédits qui sont demandés et
qui doivent être approuvés par la commission parlementaire, en vue
de permettre à l'office de continuer à bien remplir ses
obligations.
Les crédits de cette année seront de $2 354 500, en
comparaison de $2 140 300 l'an dernier, ce qui constitue une augmentation de
10% exactement. On conviendra que c'est là fort raisonnable dans les
circonstances actuelles et que l'office s'administre bien. Je tiens d'ailleurs
à le dire au président et à reconnaître l'admirable
travail de son équipe de direction. Cette augmentation résulte
d'ailleurs de l'application stricte des règles édictées
par le Conseil du trésor et, d'autre part, des prévisions de
dépenses à des postes où l'office n'a pas le pouvoir
d'effectuer de compressions, puisque celles-ci sont reliées aux
obligations qui lui sont imposées par le Code des professions et par
d'autres lois. A titre d'exemple, je signale la publication, imposée
à l'office, des recueils des décisions disciplinaires, dont le
coût augmente en fonction, naturellement, de l'accroissement du nombre de
décisions et de la hausse des coûts de production.
Voilà, M. le Président. Nous sommes disposés, M. le
président de l'office, mon adjoint parlementaire, M. Elie Fallu, et
moi-même, à répondre à
toutes les questions que les membres de cette commission pourraient
vouloir nous poser. Le président de l'office pourra également
fournir tout renseignement complémentaire propre à
intéresser les membres de la commission sur les travaux et sur les
demandes de crédit dont je viens de faire état. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Lacoste): Merci, M. le ministre. M. le
député de Robert Baldwin.
M. John O'Gallagher
M. O'Gallagher: Merci, M. le Président. Je voudrais tout
d'abord remercier le ministre d'avoir lu le rapport qu'on a en main depuis
quelques semaines avant la campagne référendaire.
Nous, de l'Opposition, avons quelques commentaires à faire.
Ensuite, nous aurons des questions plus précises à vous poser.
Cependant, nous sommes tentés d'appuyer le Conseil interprofessionnel du
Québec qui, le 31 janvier 1980, demandait au premier ministre la
nomination d'un ministre responsable uniquement de l'application des lois
professionnelles. Remarquez que nous sommes conscients que vous portez un
chapeau très grand comme ministre de l'Éducation, que vous avez
très peu de temps et qu'il serait presque impossible de consacrer plus
de temps à cet Office des professions.
Pas beaucoup n'a été fait depuis l'an dernier lors des
crédits de cet office. Je vais citer quelques cas. Sur les 21 demandes
de formation de corporations, une seule décision a été
prise. C'est votre projet de loi 98 qui est peut-être
prématuré.
Deuxièmement, la révision du statut juridique des
corporations à titre réservé n'a même pas
été amorcée. Vous avez mentionné qu'un collogue
serait annoncé dans quelques jours. Remarquez en passant que nous
n'avons même pas reçu d'invitation à ce colloque
extrêmement important. Cette question des corporations professionnelles
à titre réservé ou "occupationnelle", si vous voulez, nous
préoccupe beaucoup. Le ministre n'a même pas été
disponible dans le cas de l'Institut des conseillers en administration. Il a
refusé de rencontrer les gens de cet institut. Ensuite, plusieurs
règlements professionnels ne sont pas approuvés. Je cite une
compilation du Conseil interprofessionnel du Québec. Il indique que
quinze règlements obligatoires dont sept cas de déontologie n'ont
pas encore été adoptés six ans après
l'entrée en vigueur des dispositions législatives pertinentes.
Quant aux règlements facultatifs, environ 75 ont été
présentés à l'office, certains depuis plus de deux ans,
mais ils n'ont pas encore été approuvés.
Dans le cas de l'Ordre des ingénieurs du Québec, l'an
dernier, c'était extrêmement remarquable, pendant les
crédits, on a discuté de ce problème et le ministre,
à cause d'un manque de temps, a prouvé qu'il ne connaissait pas
tellement le dossier. L'Ordre des ingénieurs a fait un rapport
extrêmement important sur ce sujet. Il démontre qu'en fait le
ministre n'était pas très bien informé par son
président de l'Office des professions.
Vous avez mentionné dans vos remarques, M. le ministre, qu'il y
avait une collaboration étroite entre le Conseil interprofessionnel,
l'Office des professions et votre ministère dans le cas d'une campagne
d'information vis-à-vis des étudiants. Je vous félicite,
mais on a vu aussi juste l'inverse de ce cas-là. On a eu des plaintes du
Conseil interprofessionnel à propos d'une campagne publicitaire et de
sondage où il n'y a pas eu de collaboration du tout de la part de
l'Office des professions vis-à-vis du Conseil interprofessionnel. C'est
tout le côté négatif, si vous voulez. Cependant, nous
sommes prêts, avec joie, à féliciter le ministre pour son
règlement concernant la délégation des actes
médicaux. Je pense qu'il y a un consensus parmi les personnes. Cela a
été une solution heureuse pour tout le monde.
Nous avons encore aujourd'hui le cas des CGA, des CA et des RIA. Nous
avons eu, seulement depuis hier après-midi ou même hier soir,
l'avis de l'Office des professions. On a eu, seulement depuis 9 heures, ce
matin, l'opinion des CA. Nous n'avons pas encore eu l'opinion des RIA, ni du
Conseil interprofessionnel. Cependant, on trouve qu'il y a là les
éléments d'une solution à laquelle le ministre devrait
s'appliquer immédiatement, vu que le fer est chaud, qui pourrait durer
pour plusieurs années.
Enfin, le ministre peut-il nous dire s'il s'est fixé des
objectifs précis pour l'année en cours?
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre. (12
heures)
M. Morin (Sauvé): M. le Président, est-ce que je
puis, avant que M. Shaw ne prenne la parole ou M. le
député...
Le Président (M. Bordeleau): II s'agit tout simplement de
s'entendre.
M. Morin (Sauvé): Je pense qu'il convient que tous les
membres de cette commission aient l'occasion de faire part de leurs remarques
générales, et ensuite je pourrai peut-être répondre
à tous, à la queue leu leu. D'ailleurs, j'imagine que certaines
questions vont être évoquées par plusieurs
députés.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Serge Fontaine
M. Fontaine: Merci, M. le Président. Très
brièvement, même si on fait état de certaines choses qui
traînent un peu en longueur, on doit quand même tirer la conclusion
que l'organisme qui s'appelle l'Office des professions accomplit un travail
considérable depuis quelques années. Dans plusieurs domaines, on
a vu de l'avancement de ce côté, et à l'avantage des
professions et à l'avantage des citoyens du Québec.
Il reste, bien sûr, certains problèmes. Je voudrais tout
d'abord faire remarquer au ministre
que sur le budget qu'il nous annonce, de $2 354 500, nous n'avons pas de
ventilation encore connue de ce budget. Si le ministre en a, j'aimerais bien
qu'il puisse nous la faire parvenir pour pouvoir étudier plus en
détail ce budget.
Je voudrais attirer l'attention du ministre sur deux principaux
problèmes, qui ont d'ailleurs été invoqués dans son
allocution, tout à l'heure. Premièrement, celui du rapport qui a
été remis hier par l'Office des professions au ministre et dont
nous avons reçu un exemplaire, hier soir après avoir
insisté pour le recevoir qui concerne le problème de
l'organisation des professions comptables. Je pense que le ministre et l'Office
des professions, après un dialogue qui a quand même duré
plusieurs années, puisque c'est depuis 1972 que ce problème
existe, semblent vouloir proposer une solution qui serait, à ce qu'on me
dit, dans la majorité des professions concernées, acceptable,
à quelques exceptions et à quelques requêtes d'amendements
près. Je pense que cela va dans le sens du meilleur intérêt
de ces professions et des personnes qui ont besoin de faire affaires avec ces
professions.
Il y a également un autre problème qui m'a
été soulevé dans une lettre que j'ai reçue
dernièrement de quelques optométristes de la région,
concernant la publicité sur les prix des biens et des services
professionnels, le règlement qui a été adopté par
l'Office des professions là-dessus. Je ne peux pas donner d'opinion
là-dessus. Selon les renseignements qu'on me donne, de la part des
optométristes concernés, ceux-ci demandent une commission
parlementaire pour faire entendre leur point de vue là-dessus. Ils
croient que toute ouverture particulière sur les prix des biens et des
services ophtalmologiques favorisera à coup sûr la
pénétration des multinationales de l'optique au niveau de la
vente au détail des prothèses et des orthèses
ophtalmologiques, et ceci, au détriment des intérêts de la
population québécoise et de la qualité des services
professionnels. Si ce règlement a été adopté, il
serait peut-être intéressant de connaître l'opinion de
l'Office des professions sur ce sujet, et de donner l'occasion à ces
gens de se faire entendre de façon publique et de façon
ordonnée en commission parlementaire.
Je pense que, dans l'ensemble, on a pu voir que l'Office des professions
fait un travail considérable. On doit féliciter, entre autres, le
président de l'office qui exerce sa fonction avec beaucoup de
qualités et beaucoup de capacité également. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le
député de Nicolet-Yamaska. M. le député de
Pointe-Claire, pour des commentaires généraux
également.
M. William Frederic Shaw
M. Shaw: Oui, M. le Président. D'abord, j'admets que la
fonction de l'Office des professions est très importante pour
régler les différentes sortes de professions de notre province et
protéger les droits des consommateurs.
Dans ce domaine, on peut dire que dans certaines de ses activités
ces buts sont atteints, sauf que, de plus en plus, on voit un écart qui
commence à se développer entre les professions, le conseil
interprofessionnel, les ordres professionnels individuels et l'Office des
professions qui commence à fonctionner de plus en plus sans accord avec
les professions impliquées. On voit ça chez l'Ordre des
optométristes; on voit ça certainement chez l'Ordre des dentistes
et on voit ça avec les problèmes qui se développent entre
les différentes professions comptables.
Je me demande, M. le Président, si nous n'aurons pas besoin
bientôt de convoquer une commission parlementaire pour examiner
franchement, en profondeur, les actions de l'Office des professions qui, dans
beaucoup de domaines, a agi totalement à rencontre des conseils qui ont
été donnés par les professions intéressées.
Par exemple, les actes élargis qui ont été donnés
aux hygiénistes dentaires; cela a été appliqué par
décret par l'Office des professions contrairement à tous les
conseils de l'Ordre des dentistes et de la profession au complet. Avec tout le
respect, le ministre a dit que le problème des denturologistes est
réglé d'une façon positive, mais, à mon point de
vue, comme membre de cette profession, ce n'est pas le consensus de notre
profession.
Nous pouvons revenir à la question de mon collègue de
Nicolet-Yamaska, à savoir les conséquences du changement des
règlements concernant les annonces publicitaires pour les
optométristes, qui peut changer singulièrement le profil de la
pratique et le profil de revenu, ce qui, en fin de compte, peut affecter la
qualité des services rendus par ces professionnels.
Alors, M. le Président, j'ai beaucoup de questions plus
précises à poser après ces remarques, mais, pour terminer,
il faut accepter le fait que l'Office des professions a une fonction
très importante pour la population de notre province, mais je me demande
si les activités de cet organisme ne commencent pas maintenant à
s'éloigner des conseils qui sont donnés par les professions
concernées.
M. Jean-Claude Rivest
M. Rivest: M. le ministre, si vous me le permettez...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Jean-Talon.
M. Rivest: ... je vais faire une courte intervention. Moi aussi,
bien sûr, je m'associe à mes collègues pour
témoigner au ministre et au président de l'Office des professions
de la satisfaction générale, je pense, du public et des
professionnels sur la manière dont l'Office des professions se charge
des responsabilités qui lui sont conférées en vertu de la
loi. La réforme des professions a été extrêmement
difficile en 1973. J'ai eu l'occasion de voir récemment M. Castonguay
qui se rappelle encore les longues et interminables séances auxquelles
avait donné lieu le projet de loi origi-
nal. Je pense qu'il peut être certainement très fier de
cette réforme importante pour l'ensemble de la
société.
Il y a un aspect que je voudrais signaler ce matin, M. le ministre,
à la lecture du document qui nous a été transmis.
J'aimerais avoir une explication d'ordre général et, ensuite, je
vais la traduire dans un cas précis, quitte à ce que, comme mes
collègues, je revienne ultérieurement avec des questions plus
particulières.
Il y a, dans le mandat général de l'Office des
professions, une idée première qui est celle de la protection du
public et il me semble, à la lecture des notes explicatives et de
récentes décisions de la part de l'office, que l'on est en train
de donner au public, consommateur de services professionnels, d'introduire la
dimension peut-être trop forte ou de mettre un accent... enfin qui peut
comporter certains risques de considérer le public comme étant un
consommateur, c'est-à-dire de s'inspirer et de s'associer, dans certains
domaines, des dispositions ou de la philosophie qu'on retrouve dans la Loi sur
la protection du consommateur.
A cet égard-là, dans certaines professions, on tente, par
divers règlements, de renforcer la notion de concurrence au niveau de la
fourniture des biens et services inhérents ou conséquents
à l'acte professionnel en tant que tel, ce qui implique souvent une
dissociation de l'acte professionnel et de la dimension de traitement qui suit
l'acte professionnel.
A cet égard, pour donner un exemple...
M. Morin (Sauvé): Vente aussi.
M. Rivest: Vente, exactement, oui. Je crains justement que... Il
y a cet aspect-là, je ne veux pas le nier, mais quand même, entre
autres, pour prendre un exemple très précis qui est celui des
op-tométristes, en procédant de la sorte, à tort ou
à raison, on se trouve à dissocier, dans l'acte professionnel, ce
qui constitue la partie du diagnostic de celle du traitement. Je sais
qu'actuellement, les optométristes... Mon collègue de Nicolet a
souligné le projet, je pense qu'actuellement, c'est un projet de
règlement qui aurait été transmis au gouvernement, je ne
sais trop où est rendue la procédure... Au titre de la
publicité, mon collègue a souligné les difficultés
que cela pouvait entraîner au niveau des multinationales, etc., mais il y
a peut-être aussi une dimension différente; c'est qu'à
travers cette idée de vente ou cette partie commerciale qui existerait
dans le domaine, par exemple, des optométristes et des opticiens
d'ordonnances, on se trouve à régler d'une façon finale un
conflit qui persiste entre les optométristes et les opticiens
d'ordonnances. J'aurai des questions à poser tantôt.
Je voudrais d'abord que le ministre ou le président nous indique
quelle est la philosophie de départ. Est-ce qu'on entend associer,
finalement, dans ce domaine-là et dans d'autres probablement... Il
pourrait y avoir celui de la pharmacie ou d'autres, où il y a des biens,
finalement, qui sont vraiment des biens physiques qui s'inscrivent, comme
dirait le ministre, dans la foulée de l'acte professionnel. Si on
introduit trop fortement la dimension proprement du consommateur, c
est-à-dire commerciale ou mercantile de la chose, à ce
moment-là, on se trouve à dissocier et à oublier que le
public qui s'adresse à un professionnel n'est pas nécessairement
le même public que celui qui va acheter un bien dans une épicerie,
le public consommateur.
Je trouve qu'il y a peut-être un danger d associer trop
mécaniquement le public qui recourt à un service professionnel,
même s'il doit acheter un bien, une prothèse ou quoi que ce soit,
à simplement le public qui arrive là.
Je voudrais au moins qu'on me précise quelle est la philosophie
sous-jacente. Est-ce qu'on adopte de plein gré la philosophie
inhérente à la Loi sur la protection du consommateur, est-ce
qu'on introduit cette dimension-là sans réserve aucune dans le
domaine des professions? Cela m'apparaît une question assez
fondamentale.
A ce titre-là, je voudrais signaler le problème
particulier des optométristes et des opticiens d'ordonnances, où,
quand même, depuis quatre ou cinq ans, sinon six ans, la Corporation des
optométristes a tenté de définir un code de
déontologie vis-à-vis des opticiens d'ordonnances au titre des
prothèses. Or, on nous informe que l'office aurait mis de
côté tout le travail de la Corporation des optométristes
pour, d'autorité, transmettre au gouvernement un projet de
règlement qui se trouverait à régler
unilatéralement, au dire de ceux qui nous ont transmis l'information, le
contentieux qui existe entre les opticiens d'ordonnances et les
optométristes. (12 h 15)
On pourra revenir sur les modalités de cet aspect, mais, comme
remarque générale, j'aimerais entendre le ministre ou le
président de l'Office des professions pour nous faire la
démarcation. Si on choisit cette voie-là, il serait
peut-être beaucoup plus simple je pense bien que ce n'est pas ce
que le ministre ni l'office voudraient à partir du moment
où il y a un bien qui est attaché à l'accomplissement d'un
acte professionnel, si on entend réglementer ce bien en vue de la
protection du public selon les mêmes normes, la même philosophie,
les mêmes critères que la Loi sur la protection du consommateur,
qu'on le fasse ou qu'on le dise, mais, tant qu'on laisse cela dans le champ des
professions, c'est sans doute parce que ces biens-là sont d'une nature
particulière. Ils touchent à l'acte professionnel et les
dissocier de l'acte professionnel ou du régime général des
professions en tant que tel pour en faire simplement un objet de consommation,
je trouve qu'il y a le danger de vider de son contenu l'acte professionnel.
Je vous ai donné l'exemple des optométristes, on y
reviendra, le problème est sur la table, mais il pourrait y avoir
d'autres professions qui soient en cause. Je pense, par exemple, très
clairement aux pharmaciens, enfin, à tous les professionnels dont les
actes... On me signalait même je ne sais pas si c'est l'Office des
professions ou l'Office
de la protection du consommateur que maintenant on
commençait à introduire cette notion de la concurrence au niveau
du prix des services professionnels, par exemple, entre les avocats. Il me
semble qu'il y a là un problème fondamental de philosophie et
d'approche qu'il serait utile de clarifier. Si la commission me le permet, je
reviendrai avec le cas particulier des optométristes et des opticiens
d'ordonnances.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre. M.
Jacques-Yvan Morin
M. Morin (Sauvé): A moins qu'il y ait des interventions de
la part des autres collègues, M. le Président, j'ai tenté
d'établir la liste des sujets qui ont été abordés
et je vous proposerais d'en disposer de la manière suivante, de
façon que chaque sujet puisse faire l'objet d'un échange le plus
complet possible. D'abord, je traiterai de la question des professions
comptables; ensuite, M. le président Desgagné traitera des 21
demandes d'incorporation professionnelle. Ensuite, je demanderai à mon
adjoint parlementaire, M. Fallu, de traiter de la publicité des services
professionnels, et en particulier de la question des optométristes.
Ensuite, je reviendrai moi-même sur le cas de l'ETS et du sort des
diplômés de cette école de niveau universitaire. Ensuite,
M. Desgagné répondra à la question qui a été
posée relativement à la ventilation des crédits de
l'office. C'est une question plutôt administrative, je la lui
référerai donc et ensuite nous aborderons la question des
hygiénistes dentaires et de toute la question de savoir si l'office doit
s'incliner automatiquement devant les revendications qui lui viennent des
divers ordres, la question soulevée par M. le député de
Pointe-Claire. On traitera enfin de toutes les autres questions qui pourraient
être soulevées.
J'aborde donc le plus rapidement possible la question des professions
comptables. Je suis heureux...
M. Shaw: M. le ministre, un instant. M. Morin (Sauvé):
Oui, M. le député.
M. Shaw: Étant donné que cet après-midi j'ai
d'autres obligations et que la question des hygiénistes dentaires et le
décret qui va être imposé bientôt... Est-ce que cela
a été déposé la semaine dernière ou cela
va-t-il être déposé bientôt? Est-ce que nous pouvons
nous arranger pour que votre ordre du jour soit changé pour que...
M. Morin (Sauvé): Je n'aurais pas d'objection, M. le
Président, puisque le député devra nous quitter, de parler
de cette question qui l'intéresse, même sur le plan
professionnel.
Je voudrais dire, comme point de départ, que l'office n'a pas
été créé pour s'incliner automatiquement devant
tout ce que les professions peuvent proposer. L'office a été
créé justement pour faire en sorte que les professions
protègent le public et non pas seulement leurs membres. Donc, l'esprit
du code n'est pas de créer un office bidon qui ne fait
qu'entériner les propositions qui lui viennent des professions. A ce
moment-là, je pense que le législateur n'aurait pas
insisté pour créer l'Office des professions.
Dans le cas qui intéresse plus particulièrement M. le
député de Pointe-Claire, je pense qu'on peut dire
qu'effectivement l'office a fait de très grands efforts pour
réconcilier au moins deux professions et une association, bien
sûr, l'Ordre des dentistes, mais également la Corporation des
hygiénistes dentaires et l'Association des assistants dentaires qui
sont, en général, comme vous le savez, les assistants qu'on
trouve dans les cabinets de dentistes.
Dans un cas, une profession à titre exclusif, dont font partie,
en principe, des gens qui ont fait des études universitaires; dans
l'autre cas, une profession à titre réservé, dont font
partie des personnes qui ont fait des études de niveau collégial
et enfin, dans le cas de l'association des assistants ou assistantes, il s'agit
de personnes dont la formation peut être très diverse.
Donc, au départ, l'office ne se trouvait même pas devant
une seule profession, mais devant deux professions ayant, il faut bien le
reconnaître, des intérêts qui ne convergent pas sur tous les
points. Je pense qu'on peut dire cela avec un certain euphémisme. En
vertu de l'article 19 de la Loi sur les dentistes, le bureau de l'ordre doit
adopter un règlement autorisant certaines classes de personnes, autres
que les dentistes, à poser des actes qui font partie de l'exercice
exclusif des dentistes.
C'est donc la loi constitutive de l'Ordre des dentistes qui fait une
obligation, comme dans le cas des médecins et des infirmiers,
problème que nous venons de régler, depuis quelques jours. En
avril 1977, l'Ordre des dentistes a présenté un avant-projet de
règlement qui a suscité des commentaires de la part de la
Corporation des hygiénistes dentaires. Pour donner suite à des
rencontres entre l'office et les parties impliquées, l'Ordre des
dentistes a soumis, en juillet 1978, une nouvelle version remaniée de
cet avant-projet et celui-ci représentait, il faut bien le dire, un net
recul, par rapport à la version précédente, puisqu'il
excluait la classe des hygiénistes dentaires.
En janvier 1979 je me permets de faire ce rappel historique, pour
bien poser le problème l'office a soumis sa propre version du
projet qui proposait une autorisation d'actes élargie pouvant être
exécutés par la Corporation des hygiénistes dentaires, par
les membres de cette corporation, autant dans les programmes de dispensation de
services en santé communautaire qu'en cabinet dentaire.
L'ordre a maintenu ses positions et son projet a été
publié dans la Gazette officielle du Québec, la deuxième
partie, le 30 janvier 1980. Quels sont maintenant les intervenants dans ce
dossier, dont il faut bien apprécier la complexité? D'ailleurs,
je connais le député de Pointe-Claire, je pense qu'il
connaît bien la question, puisqu'il est lui-même
membre de l'une des corporations intéressées et qu'il sait
à quel point il peut être compliqué de réconcilier
les intérêts des propositions des diverses corporations en
cause.
D'ailleurs, j'ajouterai je pense qu'on a mentionné le
rôle de la CIQ, tout à l'heure que dans un cas comme
celui-là qui oppose deux corporations ou davantage, la CIQ refuse, par
principe, d'intervenir. Donc, nous ne pouvons pas nous fier sur les
lumières de la CIQ dans ce dossier. L'office et le gouvernement devront,
bien sûr, trancher. Les intervenants, c'est l'Ordre des dentistes qui
regroupe actuellement, 2365 membres exerçant des actes exclusifs.
Ensuite, la Corporation professionnelle des hygiénistes dentaires qui
regroupe 616 membres jouissant d'un tire réservé.
L'Association des assistants dentaires, qui regroupe plusieurs centaines
de membres, en majorité de sexe féminin, comme on le sait, ne
peut être considérée, à notre avis, comme
étant pleinement représentative de l'ensemble des assistants
dentaires.
Enfin, il y a également le ministère des Affaires sociales
du Québec, le ministère de l'Education, effectivement, puisque la
formation de ces gens est en cause, les CEGEP, qui offrent le cours de
technique en hygiène dentaire, John Abbott, Maisonneuve,
Édouard-Montpetit, Sherbrooke, François-Xavier-Garneau,
Trois-Rivières, Saint-Hyacinthe et Saint-Jérôme. On voit
que les intervenants sont nombreux. Il y a plusieurs députés
autour de cette table qui peuvent noter en passant que cela intéresse
leur région. Je pense au député de Sherbrooke.
L'Ordre des dentistes cherche à autoriser indifféremment
les hygiénistes dentaires et les assistantes dentaires à poser
des actes dentaires, afin que les assistantes dentaires à l'emploi des
cabinets de dentiste continuent d'exercer dans les mêmes conditions et
à un coût inférieur à celui qui impliquerait
l'engagement d'hygiénistes dentaires.
De son côté, la Corporation professionnelle des
hygiénistes dentaires estime que la formation reçue par ses
membres au niveau collégial, dans les CEGEP que j'ai mentionnés,
les rendrait aptes à poser non seulement les actes prévus au
projet de règlement fait par l'Ordre des dentistes, mais
également d'autres actes que l'Ordre des dentistes refuse de leur
déléguer.
Alors, les hygiénistes dentaires revendiquent un statut distinct
de celui des assistantes dentaires parce que, évidemment, ils ont une
formation qui peut être considérée comme supérieure.
Le ministère des Affaires sociales et les maisons d'enseignement
intéressées partagent d'ailleurs ce point de vue.
L'office, tout récemment, a proposé un projet de
règlement qui, mis au point en concertation avec le ministère des
Affaires sociales, permettrait aux membres de la Corporation des
hygiénistes dentaires de poser en toute légalité des actes
pour lesquels ils ont été formés et qui permettrait aussi
aux assistants dentaires de poser de tels actes et de se former dans un
délai, par exemple, d'un an.
En conséquence, en raison de l'absence de dispositions idoines
dans la loi, des modifications législatives devront sans doute
être apportées pour solutionner le problème juridique qui
est soulevé par le fait que les étudiants doivent effectuer des
travaux pratiques en cours de formation.
L'Ordre des dentistes serait d'accord avec l'office sur ce dernier
point. D'ailleurs, l'article 38 de la Loi sur les dentistes dit ce qui suit:
Sous réserve des droits et privilèges expressément
accordés par la loi à d'autres professionnels, nul ne peut poser
l'un des actes décrits aux articles 26 et 27 s'il n'est pas dentiste.
Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux actes
posés par les étudiants en art dentaire qui sont
immatriculés, qui effectuent un stage de formation professionnelle,
conformément à la présente loi et aux règlements du
bureau. Ces dispositions ne s'appliquent pas non plus aux actes posés
par des personnes agissant conformément au règlement
édicté en vertu du paragraphe a) du premier alinéa de
l'article 19 ou en vertu de l'article 20.
Je me résume. L'office a proposé que la
délégation porte sur environ 26 actes. L'Ordre des dentistes qui,
bien sûr, a le réflexe habituel d'au-toprotection, estime qu'on
devrait limiter la délégation à douze actes. J'ai
l'intention, au cours des semaines qui viennent, pendant l'été,
dans la perspective d'un règlement assez rapide, de demander une
dernière fois les commentaires des intéressés avant de
prendre une décision. Il faudrait que ce soit assez rapidement. J'ai
l'intention de communiquer ces jours-ci avec les intéressés. Je
pense que le règlement de cette affaire ne devrait pas trop tarder parce
que les professions intéressées m'ont fait valoir qu'il y avait
intérêt à ce que ce soit tranché. Souvent,
même si les professions s'opposent, elles font valoir qu'il vaut mieux un
règlement qui tranche la question que de laisser traîner des
situations qui ne rendent pas la vie facile dans la pratique quotidienne de
l'art dentaire. (12 h 30)
M. le Président, voilà ce que j'avais à dire sur
cette question. Peut-être que M. le député de Pointe-Claire
aura un point de vue différent à faire valoir.
M. Shaw: Si je peux, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Pointe-Claire.
M. Shaw: Premièrement, je veux dire au début que le
besoin de déléguer des actes dentaires est un besoin réel
dans la pratique moderne de la dentisterie. Il n'en est pas question. J'ai eu
l'avantage, il y a quatre ans, de faire partie d'une délégation
spéciale qui est allée à Londres, en Suisse, en
Suède, en France et en Saskatchewan pour étudier des actes
délégués et des systèmes qui appliquent ces actes
délégués quotidiennement. Nous sommes allés, par
exemple, visiter le système à Londres, au Local Authority Clinic,
dans lequel il y a des auxiliaires dentaires spécifiquement
entraînés pour faire des actes dentaires,
c'est-à-dire des plombages, de petites extractions aux enfants de
moins de 18 ans. Nous avons fait des études d'efficacité de
fonctionnement et même des expériences avec ceux qui sont
responsables dans ces pays, l'Angleterre, la Suède, la France, etc.
Nous avons découvert des choses. Premièrement, oui, vous
avez besoin de la profession d'hygiéniste dentaire. Les actes
délégués à cette expertise doivent être de
plus en plus élargis, sauf que nous ne voulons pas, je crois, à
l'avantage de la population, du consommateur, de ce service, développer
une forme de traitement dentaire qu'on appelle "five and dime dentistry". Cela
veut dire un deuxième niveau de qualité de services. Si nous
faisons la comparaison de la qualité de services offerts dans des
centres comme les Local Authority Clinics, en Angleterre ou des Volktan-ward en
Suède, on voit qu'en Suède, avec l'expérience d'un
système de délégation à un niveau inférieur
de celui de dentiste, l'expérience finale a démontré que
c'est moins coûteux. C'est très important, parce qu'il y a
là un "cost effect of study" qui doit être fait pour
démontrer si la population peut être aussi bien servie par un
niveau de services secondaires, si vous voulez, à un coût qui est
au moins compétitif à celui du système normal.
Après 22 ans d'expériences, en Suède, ils ont
décidé de se tourner vers les dentistes, en formant plus de
dentistes. Les dentistes qui sont dans les Volktanward maintenant qui
remplacent les "dental nurses" qui étaient là avant sont plus
efficaces et la qualité des services a été
augmentée. On voit cela maintenant en Angleterre. C'est un choix du
gouvernement, comme au Québec, d'avoir un service dentaire fait par les
dentistes.
Dans notre système américain, premièrement, je peux
constater que notre système est le meilleur au point de vue de la
qualité des services et, deuxièmement, qu'il est le meilleur au
point de vue des coûts. Nous avons fait la comparaison avec le
système établi en Saskatchewan et nous avons
démontré que le coût par service était quatre fois
plus dispendieux fait par les "dental nurses" de Saskatchewan que par les
dentistes des cabinets privés au Québec. Ces faits sont
là. C'est pour cela que...
M. Morin (Sauvé): Ces chiffres sont de quelle
année, M. le député?
M. Shaw: De 1974.
M. Morin (Sauvé): La situation a quelque peu changé
depuis.
M. Shaw: Nous pouvons faire cela pourrait être un de
vos défis avant de prendre une décision finale une
comparaison des coûts par acte dans une clinique dentaire d'une
école comme en Saskatchewan et dans une clinique privée à
Québec pour vérifier si ce que j'ai dit est vrai. Je crois que
c'est facilement démontrable que, premièrement, au point de vue
de l'étude et de la formation, l'augmentation des hygiénistes
dentaires qui sont dans les cliniques dentaires sera de 85% dans cinq ans. Ces
coûts doivent être engagés. Deuxièmement, le fait est
que le coût selon le rythme de services dans une journée et le
nombre de patients qui sont dans les cliniques sont réellement
inférieurs à ceux des cabinets privés de notre province.
C'est un fait qui est très comparable.
A Londres maintenant, d'après nos observations, on a
commencé à faire une commission d'étude pour essayer
d'analyser si c'est plus efficace et moins dispendieux et à l'avantage
du patient lui-même de prendre la mesure qui a été prise
par la Suède de rétablir la qualité du service par un
dentiste avec une formation totale, au lieu d'un service de seconde classe,
parce que même acte par acte on constate que la qualité du service
est aussi bonne avec un hygiéniste dentaire qu'avec un dentiste pour un
patient, parce que ce ne sont pas seulement des plombages que les dentistes
font, mais c'est aussi un traitement complet de la dentition. C'est pour cela
que l'Ordre des dentistes a jugé que c'est plus raisonnable de
procéder par étapes en donnant certains actes ou certains
privilèges nouveaux aux hygiénistes dentaires.
C'est dans cet esprit que je vous présente cet argument. A mon
avis, l'Ordre des dentistes a bien étudié la situation. Ce n'est
pas pour protéger les dentistes que nous sommes en train d'agir, mais
pour faire en sorte que la qualité du service n'ait pas deux paliers.
Nous avons vu ce qui se passe maintenant en Nouvelle-Zélande. Nous
savons ce qui se passe maintenant en Saskatchewan. Nous ne voulons pas suivre
le même tracé ici, au Québec.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je
répondrai à la fois par une affirmation et une interrogation. Les
actes que l'office propose de déléguer sont des actes de nature
technique pour lesquels les hygiénistes dentaires ont reçu une
formation. Ce n'est pas comme si les hygiénistes dentaires entendaient
se substituer aux dentistes pour ce que vous appelez les soins de seconde ligne
sans formation préalable.
M. Shaw: Ce n'est pas totalement vrai, monsieur.
M. Morin (Sauvé): Ils sont formés pour offrir des
services de qualité, les services qu'on songe à confier aux
hygiénistes dentaires. La question qui me vient à l'esprit,
tandis que j'écoute le député, est la suivante: Est-ce
qu'il pourrait être plus spécifique et nous dire quels sont les
actes sur lesquels il a des doutes?
M. Shaw: Ce sont des actes qui sont, de fait,
irréversibles, quelque chose comme un plombage. C'est vrai que les
hygiénistes dentaires ont reçu une formation là-dedans.
Ils reçoivent des indications sur la façon de poser un plombage,
mais pas sur celle de faire la préparation. C'est une moitié. Si
on fait une étude avec un dentiste qui laisse un
patient pour aller chez un autre patient pour que cet hygiéniste
dentaire puisse poser le plombage, vous allez voir que cette duplication
d'efforts n'a pas de bon sens. C'est aussi efficace que le dentiste reste avec
le patient, qu'il fasse au complet le plombage et ne délègue pas
ce rôle. Aussitôt que nous sommes prêts à
déléguer la préparation et le plombage de la dent, nous
pouvons peut-être aller vers cette direction, mais une moitié de
la formation, ce n'est pas assez. C'est pour cela que nous sommes très
craintifs que dans quelques situations, même si leur formation les
prépare à plomber une dent, ce n'est pas adéquat pour
préparer une dent pour le plombage. C'est un exemple. Les actes
irréversibles, ce sont les seuls actes qui nous font peur.
M. Morin (Sauvé): Mais, M. le député, le
principe de l'irréversibilité auquel vous vous
référez est respecté dans le projet de règlement.
Ce sont des représentations qui nous ont été faites,
effectivement. Je crois que l'office a voulu respecter ce principe et que seuls
les actes qui n'entraînent pas de conséquences
irréversibles peuvent être délégués.
M. Shaw: Est-ce que le ministre est prêt à accepter
un rendez-vous privé pour réexaminer les actes tels que
délégués dans le règlement avant que sa
décision finale soit prise?
M. Morin (Sauvé): Je préférerais d'abord,
parce que je ne pense pas...
M. Shaw: Avec des représentants des hygiénistes
dentaires, si vous voulez.
M. Morin (Sauvé): Vous voyez, l'Ordre des dentistes ne m'a
pas fait parvenir de communication écrite. Avant que je voie les
intéressés, j'aimerais bien qu'ils m'envoient vraiment un
plaidoyer précis et, si c'est cela que le député me
demande, je suis tout à fait prêt à recevoir le plaidoyer,
mais vraiment technique et précis.
M. Shaw: D'accord.
M. Morin (Sauvé): Ensuite, on verra s'il y a lieu de les
rencontrer.
M. Shaw: Le problème qui s'est présenté,
c'est que l'Ordre des dentistes a été placé devant un
décret qui était censé être un fait accompli. Si le
ministre est prêt à réexaminer tous les faits et les
précisions, je suis sûr que nous pourrons régler le
problème.
M. Morin (Sauvé): Bon! Oui, écoutez, je suis
persuadé qu'il doit y avoir moyen de régler ce problème.
Si nous avons pu régler celui des médecins et des infirmiers,
croyez-moi, il doit y avoir moyen de régler à peu près
n'importe quel problème.
M. Shaw: Oui, je comprends.
M. Morin (Sauvé): Même celui des CGA. Il y avait
deux problèmes. Je veux indiquer au député de
Pointe-Claire, avant que nous quittions ce sujet pour passer à un ou
deux autres qui sont également importants, qu'il s'agissait de savoir
à qui déléguer. Premier problème. L'office nous
recommande que ce soient les hygiénistes. Parce qu'il y a une
corporation qui peut contrôler la qualité des actes, une
corporation qui peut discipliner aussi ses membres, ce contrôle-là
est très important, et aussi parce qu'ils reçoivent, comme je
l'ai indiqué, la formation théorique et clinique
nécessaire dans les collèges que j'ai mentionnés.
La deuxième question était: Quoi déléguer?
Alors, l'ordre, comme je l'ai indiqué, était consentant à
déléguer une douzaine d'actes. L'office, lui, porterait cela
à 26, parce que, justement, il lui paraît que les
hygiénistes ont la formation technique nécessaire pour effectuer
ces actes. Mais, bien sûr, il y a des conditions. Je ne sais pas si le
député de Pointe-Claire a eu le texte de l'office sous les yeux.
Il ne l'a pas encore eu. Peut-être que, lorsqu'il l'aura sous les yeux,
d'ici quelque temps, il constatera qu'il y a des conditions expresses qui ont
été posées. D'abord, il y a des conditions de surveillance
à distance ou immédiate selon l'acte, un peu comme dans le
règlement de délégation des médecins et des
infirmiers.
Si le député de Pointe-Claire veut bien faire savoir
à ses collègues que je suis prêt à recevoir d'eux,
mais rapidement, un avis écrit, motivé, technique, très
précis, sur chaque acte, je suis prêt à le regarder, et
rapidement.
M. Shaw: D'accord.
Demandes d'incorporation
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je vais demander
à M. le président de l'Office des professions de dire quelques
mots sur la question des demandes d'incorporation qui nous sont parvenues en
réponse à une question qui a été soulevée,
je pense, par le député de Robert Baldwin.
Le Président (M. Bordeleau): M. le président, au
nom du ministre.
M. Morin (Sauvé): II y a quatre ou cinq ans,
s'étaient accumulées à l'office 38 demandes de
reconnaissance de groupes divers sous le Code des professions. Or, c'est la
responsabilité de l'office, comme l'a rappelé le ministre tout
à l'heure dans sa déclaration liminaire, de décider de
l'opportunité d'accéder à ces demandes ou de ne pas y
accéder. (12 h 45)
L'office a délibéré là-dessus au cours des
deux dernières années et a rendu un avis au ministre sur 21 de
ces demandes. Il en reste donc dix-sept. Ces avis, le ministre en a
résumé la teneur tantôt, il y a quatre groupes qui se
voient non pas reconnaître le statut de corporation professionnelle, mais
la possibilité de s'intégrer à une corporation
professionnelle déjà existante. Il
semble que, à la faveur des contacts que nous avons avec les
corporations professionnelles identifiées, l'opération peut
être couronnée de succès.
Il y a trois autres groupes, par ailleurs, dont on dit qu'ils doivent
être assujettis à un contrôle, mais non pas les
contrôles prévus au Code des professions. Cela en fait donc sept.
Il y a enfin trois groupes dont on a estimé qu'il fallait aller plus
loin dans l'étude de leur dossier. Ce sont les conseillers sociaux, les
psycho-éducateurs, les décorateurs-ensembliers. Il y en a onze
dont nous avons refilé la demande aux calendes grecques en disant que
les contrôles existants suffisaient dans leur cas. Pour vous donner un
exemple, vous avez les biologistes, les architectes-paysagistes et ainsi de
suite.
Ce qui a guidé l'office dans toute cette question, ce n'est
évidemment pas ce que certains n'avouent pas, mais ce qu'ils
recherchent, c'est-à-dire la reconnaissance d'un prestige. Ce qui a
guidé l'office, c'est toujours le grand principe de savoir si le public
sera mieux protégé en reconnaissant un groupe et en
l'assujettissant au contrôle du code ou, au contraire, en le laissant
ailleurs. C'est le grand principe qui nous a guidés.
Il y a déjà des critères dans la loi qui nous
précisent comment s'exerce cette discrétion. Il y a aussi
l'étude de l'office qui date de 1977 sur l'évolution du
professionnalisme et là où nous avions énoncé des
caractéristiques pouvant nous servir aussi à exercer cette
discrétion. Il y a aussi un examen que nous avons ajouté à
tout cela de la situation à l'étranger. Ce sont tous ces facteurs
ou tous ces outils qui nous ont servi à décider des demandes qui
nous étaient formulées.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Desgagné. M.
le ministre, est-ce que vous voulez poursuivre avec les réponses aux
questions qui ont été abordées tantôt?
Professions comptables
M. Morin (Sauvé): Oui, j'inviterais mon adjoint
parlementaire, le député de Terrebonne... M. le Président,
on me signale que la question des CGA est importante pour plusieurs membres de
la commission parlementaire. Effectivement comme j'ai cru déceler dans
leurs propos un certain appui pour l'avis qui vient de nous être
communiqué par l'office, peut-être est-il bon qu'on s'en parle
tout de suite, qu'on vide la question, ce qui, évidemment, serait de
nature à me faciliter le travail pour les semaines qui viennent, alors
qu'on pourrait mettre sur pied les règlements nécessaires, les
faire approuver par le Conseil des ministres le plus rapidement possible et,
enfin, régler ce problème qui traîne dans le paysage depuis
longtemps.
Je ne vais pas faire un long exposé, mais simplement signaler que
ce problème des professions, de la vérification comptable, n'est
pas exclusif au Québec. L'Ontario avait exactement le même
problème avec, je pense, également trois groupes en
présence qui correspondent grosso modo à ceux que nous
connaissons ici au Qué- bec. Justement, le 17 avril, il y a quelques
semaines à peine, un comité ontarien le Professions' Committee, a
déposé un rapport qui est très voisin de ce que propose
l'Office des professions et qui, évidemment, nous encourage fortement,
ou devrait nous encourager fortement à régler le problème
de la réconciliation des intéressés avec une solution
semblable à celle qu'il nous propose. Je vais la résumer, M. le
Président. D'ailleurs, tout le monde, je pense, a maintenant entre les
mains l'avis tout récent de l'Office des professions et il suffirait de
se reporter aux pages 15 et suivantes pour trouver la solution proposée
par l'office qui est celle de la création d'une commission des permis de
vérificateurs. Je ne m'étends pas sur les diverses solutions que
l'office aurait pu adopter. Il les a décrites, je pense, de façon
très précise aux pages 13 et suivantes et j'en viens tout de
suite à la solution proposée. Le problème est suffisamment
connu pour que je n'aie pas à le décrire de nouveau. D'ailleurs,
nous avons consacré une partie importante de l'étude des
crédits l'an dernier justement à ce problème.
La solution proposée a pour objectif d'assurer la protection du
public, mais surtout une certaine harmonie entre les divers intervenants dans
le domaine des professions comptables, tout en respectant l'économie du
système professionnel du Québec. On n'a donc pas voulu
créer un organisme purement étatique qui aurait
réglé les problèmes d'autorité, mais nous montrer
respectueux de l'existence des corporations en présence. Cette solution
consiste, d'une part, à permettre aux trois corporations
professionnelles d'exercer chacune l'ensemble des responsabilités du
contrôle du champ d'exercice exclusif et, d'autre part, à confier
à une commission formée de représentants de chacune de ces
corporations la tâche d'exercer le contrôle de l'admission à
l'exercice dans ce champ.
M. le Président, comme le temps se fait court, je pense que je
m'arrêterai là. Chacun a devant lui l'avis. J'aimerais mieux,
plutôt que de faire un long exposé, avoir le sentiment des membres
de la commission.
Le Président (M. Bordeleau): J'avais d'abord reconnu le
député de Sainte-Anne.
M. Morin (Sauvé): Sur cette question, M. le
député?
M. Lacoste: Sur cette question, M. le Président. Il y a
plusieurs années déjà que je suis le dossier entre les CA,
les CGA et les RIA. Il me semble que, comme les députés de Robert
Baldwin et Nicolet-Yamaska, il y a un début de solution. L'Office des
professions, je dois l'avouer, a très bien saisi le problème pour
en arriver à une solution.
Voici ma première question sur ce sujet: De quelle façon
le ministre, suite à cet avis de l'Office des professions,
prévoit-il mettre en application cet avis? Par réglementation ou
en amendant la loi?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre ou M. le
président de l'office.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, compte tenu de
l'appui que j'ai cru sentir tout à l'heure autour de cette table, compte
tenu aussi du fait que la Corporation des CGA, pour ne pas parler des autres,
attend depuis longtemps une solution, j'ai l'intention de procéder assez
rapidement, et je dirais même dans le courant de l'été,
pour régler le problème. Il reste quelques étapes
techniques à franchir. Il va falloir modifier certaines dispositions
législatives qui sont incompatibles avec la solution que nous proposons,
notamment dans la Loi des comptables agréés, l'article 29, la Loi
sur la Commission municipale, la Loi sur les sociétés
coopératives agricoles et la Loi sur les caisses d'épargne et de
crédit.
Donc, on le voit, techniquement, il y aura des règlements, il y
aura de la législation. Aussitôt que sera terminée cette
étude des crédits qui nous permet justement de tirer au clair
l'avis de tout le monde autour de la table, nous allons procéder
rapidement. Je puis l'affirmer au député de Sainte-Anne, il n'est
pas de mon intention, maintenant qu'on a enfin un avis qui semble faire
quasiment l'unanimité, de laisser traîner les choses.
Je vous signale que l'avis était sous lettre de transmission du 3
juin 1980 et que je l'ai reçu le 4 ou le 5 à mon bureau. Comme il
n'y a pas de date sur l'avis, je voulais vous indiquer que c'était
officiellement daté du 3 juin.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Lacoste: M. le Président, dans l'avis de l'Office des
professions, à la page 20, concernant les dispositions
particulières, dans le paragraphe a), on dit: Toute personne membre de
l'Ordre des comptables agréés à la date de
référence obtiendra un permis de vérification sans
formalité.
Au paragraphe c) on dit que toute personne, qu'elle soit membre des
corporations professionnelles des CGA ou des RIA, ou qu'elle ne soit pas membre
d'une de ces deux corporations professionnelles, qui, à la date de
référence, exercera, de la façon habituelle, dans le champ
d'exercice exclusif, aura droit au permis de vérificateur si elle peut
établir à la commission des permis de vérification qu'elle
a exercé la vérification pendant au moins deux ans.
Je vois un certain problème de cette façon. On sait
qu'actuellement les CGA, autant que les RIA ne peuvent faire la
vérification. Si on demande deux ans pour un permis, je vois là
un certain problème. J'aimerais que le président m'explique un
peu plus le sens de ces deux paragraphes.
M. Morin (Sauvé): Je pense qu'il faudrait corriger. Vous
me permettez, M. le ministre.
Simplement, je voudrais signaler que, dans le cas du premier paragraphe
que vous avez signalé. c'est une question de droits acquis. Mais je vais
demander au président de l'office de vous donner les détails
techniques.
M. Lacoste: D'accord.
M. Morin (Sauvé): Quant au point c), je vous signale que
la réponse, vous la trouvez dans une affirmation qui n'apparaît
pas exacte dans votre propos. Les CGA, les RIA et même d'autres personnes
peuvent, dans la situation actuelle, faire la vérification. C'est
à l'article 29 de la Loi des comptables, des CA, qui permet
précisément à toute personne d'exercer en
vérification, dans le champ comptable, lorsqu'il s'agit de
coopératives, de municipalités, etc. Ce n'est pas sans effet,
l'article c) du projet de règlement, puisque des personnes,
effectivement, sont dans le champ de la vérification sans être
comptables au sens des trois corporations professionnelles.
M. Lacoste: J'étais au courant de cela au niveau des
coopératives et des municipalités. Mais le champ était
quand même très restreint. Déjà, il faut qu'un CGA
ou un RIA s'ouvre un bureau de comptable. C'est quand même très
restreint au niveau d'une clientèle. Il ne pouvait même pas faire
de vérification, comme dans les garderies, dans les organismes publics,
comme dans les garderies, pour ne nommer que celles-là. Il peut arriver
qu'il y ait une difficulté, parce que le comptable serait très
limité dans ses possibilités de faire la vérification des
comptes.
M. Morin (Sauvé): Oui, mais le problème que nous
avions n'était pas d'élargir le champ de l'article 29,
c'était de reconnaître ceux qui avaient profité de
l'article 29 pour les fins de l'entente à intervenir. Voilà le
problème que nous avions.
Evidemment, on peut déplorer le fait que l'article 29 limite,
mais il reste qu'il fallait faire la place à ceux qui profitaient aussi
de l'article 29.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Si vous me le permettez, c'est bien sûr que la
loi permet actuellement à des CGA de faire la vérification
comptable dans certains domaines, par exemple, dans les commissions scolaires.
Mais étant donné que cet exercice a été restreint
par la loi, il n'y a pas beaucoup de comptables, comme le disait le
député de Sainte-Anne, qui ont pu faire leur exercice exclusif de
la profession dans le domaine de la vérification. Ce qui fait que,
même s'ils ont des droits acquis, reconnus dans la loi, si on applique la
solution que vous proposez, ils ne pourront pas bénéficier de ces
droits acquis comme pourront le faire les comptables agréés.
Étant donné qu'on pourrait leur reconnaître des droits
acquis, on pourrait leur permettre de les exercer sur une certaine
période de temps. On pourrait donner comme exemple deux ans. On va leur
donner un permis de vérification pour une période de deux ans,
parce qu'ils
ont ce droit acquis reconnu dans la loi et, au bout de deux ans, le
comptable, le CGA ou le RIA qui n'aura pas exercé cette profession de
vérificateur se verra retirer son permis. A ce moment-là, cela
pourrait permettre à ceux qui avaient le droit acquis de faire de la
vérification comptable dans certains domaines, mais qui ne l'ont pas
fait à cause des circonstances, d'exercer ce droit acquis et d'exercer
la profession. (13 heures)
M. Morin (Sauvé): Me permettez-vous de prendre la parole,
M. le Président?
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Desgagné.
M. Morin (Sauvé): Je comprends la difficulté. Je
vous signale que la Corporation des CA nous avait proposé une formule
semblable, dans sa logique, de permis temporaires en faveur de ceux qui
voulaient se faire la main en vérification; mais, pendant tout ce
temps-là, ces personnes étaient assujetties à l'inspection
professionnelle des CA, etc.
Nous avons laissé, en somme, cette partie de problème
à la commission qui est tripartite, comme vous le savez. Nous lui avons,
cependant, imposé l'obligation de tenir compte de cette situation qui
tient à la formation des personnes. Vous en avez un exemple. La formule
se trouve à la page 21, deuxième alinéa de d), où
l'on dit qu'une fois que la commission aura établi les normes qui
définissent les conditions d'accès au permis de
vérificateur la commission devra tenir compte de toute
expérience, de toute formation pertinente acquise, de sorte que la place
est faite pour cette partie de la population comptable. Mais on ne va pas aussi
loin que les CA, parce qu'on a dit: C'est peut-être la commission qui est
mieux placée pour apprécier la chose dans le concret.
M. Fontaine: Si vous me permettez d'ajouter quelque chose,
également dans le paragraphe c) de la page 21, vous mentionnez dans la
dernière phrase qu'il va falloir que la personne prouve qu'elle a
exercé la vérification pendant au moins deux ans.
M. Morin (Sauvé): Pardon?
M. Fontaine: Pendant au moins deux ans.
M. Morin (Sauvé): Je parle du deuxième
alinéa du paragraphe d), M. le député.
M. Fontaine: Oui, d'accord, mais je vous réfère au
paragraphe c) où on dit: "Toute personne, qu'elle soit membre des
corporations professionnelles des CGA et des RIA ou qu'elle ne soit pas membre
de l'une de ces deux corporations professionnelles, qui, à la date de
référence, exercera, de façon habituelle, dans le champ
d'exercice exclusif, aura le droit au permis de vérificateur si elle
peut établir à la commission des permis de vérificateur
qu'elle a exercé la vérification pendant au moins deux ans." Cela
nous ramène au problème que je vous expliquais tantôt. Il y
a des gens, par exemple, les RIA et les CGA, qui ont le droit acquis d'exercer
de la vérification...
M. Morin (Sauvé): Mais qui ne l'ont pas exercé.
M. Fontaine: ... mais qui ne l'ont pas exercé à
cause des circonstances actuelles. Si on met cela dans le règlement
qu'ils vont devoir prouver qu'ils ont exercé depuis deux ans, il n'y a
pas grand monde qui va l'avoir.
M. Morin (Sauvé): Remarquez qu'il y a parité de
situation à cet égard avec les CA qui ont peut-être leur
permis de vérificateur parce qu'ils ont le droit acquis en vertu de leur
loi. S'ils veulent revenir de facto à la vérification, ils sont
tenus, en vertu du paragraphe a), de justifier à nouveau qu'ils ont la
compétence en vérification. Il y a une parité de situation
en quelque sorte pour les CA comme pour les CGA.
M. Fontaine: Oui, mais les CA vont pouvoir le prouver
automatiquement, parce que la plupart en ont déjà fait.
M. Morin (Sauvé): Non, parce que l'ordre devra
réglementer les conditions dans lesquelles un CA, qui, pourtant,
détient un permis de vérificateur, parce qu'on ne peut pas le lui
enlever, pourra revenir à la vérification, alors qu'il n'en fait
pas de facto. On l'a dit au paragraphe a). C'est là que l'on voit une
certaine parité de situation.
M. Fontaine: Parce qu'il y a peut-être des CA qui auront
fait de la vérification en signant des rapports qui auront
été préparés par des CGA.
Le Président (M. Bordeleau): Avant de continuer,
messieurs, je voudrais vous souligner qu'il est passé 13 heures; si on
veut continuer, maintenant, il faudrait avoir le consentement des membres pour
tenter peut-être de terminer le programme 9.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je pense qu'on
devrait au moins passer au travers de cette question des trois professions
comptables, si c'était possible, parce que je sais que ça tient
beaucoup de monde à coeur. Pour ma part, je suis tout à fait
disposé à continuer, peut-être pas indéfiniment,
parce que la faim va finir par nous tenailler, mais au moins à essayer
de finir cet aspect-là des choses avant l'adoption du programme.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, sur consentement, on
continue. M. le député de Robert Baldwin?
M. O'Gallagher: Je n'ai pas grand-chose à dire sur la
question des professions comptables, mais je pense que vous avez en main
l'élément
d'une solution... D'ailleurs, le même problème s'est
posé en Ontario où ces gens ont proposé une solution un
peu semblable à celle que l'office a proposée.
Je sais que l'office a tout le talent et le mandat de chercher une
solution avec les trois corporations impliquées, mais il pourrait
peut-être trouver une manière d'assouplir les mesures de
transition, toujours en gardant comme but ou mandat principal la protection du
public. J'espère que vous allez vous pencher là-dessus dans les
prochains mois et trouver une solution finale à ce problème.
M. Morin (Sauvé): C'est bien notre intention, M. le
député. Dans cet esprit, je suis tout à fait prêt
à réfléchir à ce que le député de
Nicolet-Yamaska nous a dit.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Sainte-Anne?
M. Lacoste: Si j'ai bien compris le président de l'Office
des professions, toujours aux pages 20 et 21, le CGA ou le RIA... Disons que
ça fait un an que la personne fait de la vérification. Elle
pourrait toujours, selon le paragraphe d)... cependant, toute expérience
et toute forme pertinente acquises par la personne qui exerçait dans le
champ d'exercice exclusif, toujours la commission formée de
représentants des trois associations de comptables... Par ce paragraphe
d), elle pourrait toujours demander d'être reconnue pour la
vérification. Est-ce que c'est bien ça?
M. Morin (Sauvé): C'est-à-dire qu'il pourrait voir
allégées les conditions d'examen, par exemple, et ainsi de suite,
compte tenu de l'expérience que la personne aurait acquise, de la
formation qu'elle aurait.
Remarquez que l'article 29 n'est pas un article qui aura profité
uniquement aux membres des corporations comptables, il profite à tout le
monde. C'est un article ouvert en quelque sorte. Il y a une grande distinction.
Il y a des personnes qui peuvent venir de tous les horizons.
M. Lacoste: D'accord.
Le Président (M. Bordeleau): Ça va?
Des Voix: Oui, ça va.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Est-ce qu'il va y avoir d'autres consultations avec
les corporations professionnelles concernées avant l'adoption du
règlement?
M. Morin (Sauvé): Oui, je pense que je vais faire un
dernier tour de piste. Je le fais toujours d'ailleurs. Évidemment, cela
peut se traduire de plusieurs façons. Comme les trois professions
intéressées ont reçu l'avis, probablement hier ou
aujourd'hui, je pense qu'elles vont réagir. Je vais attendre un certain
temps. Je n'attendrai pas des mois. Mais si elles me font parvenir leur
réflexion, leur point de vue rapidement, alors je m'engage à en
tenir compte. D'ailleurs, nous avons toujours agi de cette façon,
l'office et moi-même.
M. Fontaine: M. le Président, pour ma part, je serais
enclin à accepter la proposition faite par l'Office des professions du
Québec. Tout dépend, bien sûr, de la façon dont elle
va être interprétée. Si elle est interprétée
par la commission de façon restrictive, cela va être plus
difficile d'application. Tandis que si elle est interprétée de
façon assez large... Quant à savoir s'il y a eu
vérification ou non ou quelle est l'expérience dans le domaine,
je pense que ce serait une solution acceptable.
Si jamais le ministre décidait de présenter un projet de
loi d'ici au 20 mai... il pourrait certainement avoir le consentement de
l'Union Nationale, afin que le projet de loi... Pardon! Le 20 juin... C'est une
date qui me restera longtemps dans la mémoire...
M. Morin (Sauvé): On voit que cela vous a
obsédé...
Des Voix: Nous aussi d'ailleurs.
Des Voix: C'est une date obsessionnelle...
M. Rivest: Peut-être aussi complexe...
M. Fontaine: J'espère qu'elle va être aussi bien
comprise de la population.
M. Rivest: J'espère qu'il va y avoir un oui
là-dessus.
M. Morin (Sauvé): J'espère quelle ne recevra pas
une réponse négative. Le député...
M. Rivest: Non, non, un oui...
M. Fontaine: C'est un non qui voulait dire oui. D'ailleurs, j'ai
remarqué que le ministre tantôt, dans son allocution, a
parlé de sondage. J'étais bien heureux de voir qu'il avait
utilisé CROP pour faire ce sondage. Cela donne plus de
crédibilité...
Le Président (M. Bordeleau): Si vous permettez, nous
pourrions peut-être revenir à la pertinence du programme 9.
M. Morin (Sauvé): Quoique j'ai I impression que toutes les
sociétés de sondage vont devoir revoir leur procédure.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, peut-être
voulez-vous continuer, M. le ministre ou on ajournerait immédiatement,
sans terminer le programme no 9.
M. Rivest: Qu'est-ce qu'il nous reste à voir? Si on
pouvait continuer, peut-être que s'il y en a simplement pour une
demi-heure.
M. Morin (Sauvé): Écoutez, il nous restait la
ventilation des crédits. Cela peut être fait assez rapidement. Il
nous restait la question de la protection du consommateur, des
optométristes que j'allais demander à mon adjoint parlementaire
de traiter.
M. Rivest: Moi, ça va être assez court
là-dessus.
M. Morin (Sauvé): Et il restait encore l'ETS; à
vrai dire, il n'y a pas grand-chose à dire en ce moment puisque la
négociation continue un peu entre les intéressés. Si vous
le désirez, je n'ai pas d'objection, M. le Président, sauf
qu'évidemment, à 15 heures, nous devons reprendre les
crédits de l'Education. Je ne voudrais pas...
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, il ne
faudrait pas non plus oublier notre personnel de soutien, il va peut-être
avoir faim aussi.
M. Fontaine: On pourrait continuer jusqu'à une heure
trente si on en a besoin.
M. Morin (Sauvé): Bien, je veux bien en convenir. Laquelle
des deux questions vous intéresse le plus, messieurs? La ventilation des
crédits ou la question de la concurrence et de la publicité?
M. Rivest: On va réfléchir.
M. Fontaine: La ventilation, je me suis aperçu qu'on
l'avait.
M. Morin (Sauvé): Oui, vous l'avez, vous l'avez
effectivement.
M. Rivest: Quel est le problème là-dessus je
m'excuse sur la ventilation des crédits, qui est-ce qui a
soulevé le...? Ah! M. le député de Nicolet?
M. Morin (Sauvé): M. le député de
Nicolet-Yamaska désirait avoir des détails.
M. Fontaine: C'est parce que je ne l'avais pas eue et je me suis
aperçu qu'elle était là.
M. Rivest: Bon, réglé.
Optométristes, opticiens et
ophtalmologistes
M. Morin (Sauvé): Ecoutez, dans ce cas, la seule question
importante qui reste, c'est celle de la concurrence, de la protection des
consommateurs par la voie de la publicité et, notamment, le cas des
optométristes. Si vous voulez, je donnerais la parole à l'adjoint
parlementaire pour qu'il nous brosse un tableau rapide et qu'ensuite on puisse
passer à la discussion.
Le Président (M. Lacoste): M. le député de
Terrebonne.
M. Fallu: M. le Président, des questions fondamentales
sont soulevées à ce moment-ci à propos des
optométristes, opticiens d'ordonnances et ophtalmologistes. La
protection du consommateur doit se faire, dans le domaine des professions, de
deux façons, en l'occurrence. C'est-à-dire l'assurance des soins
de qualité d'une part, et ça, c'est chacun des ordres qui voit
à assurer cette qualité des soins. D'autre part, il y a la
question des prix, puisque sont liés à la pratique d'une
profession des objets. On voit le cas dans les pharmacies, on voit le cas
également chez les opticiens d'ordonnances ou chez les
optométristes.
Ici, en fait, il y a trois problèmes qui, concrètement,
sont soulevés: celui de la publicité, celui des ordonnances et
celui qu'il est convenu d'appeler, entre les diverses professions, les contrats
de service, c'est-à-dire le problème relatif à l'assurance
des lentilles cornéennes. Si on voulait prendre le problème de
très haut, comme le député de Jean-Talon a voulu le faire
tout à l'heure, je crois que c'est de remettre en cause fondamentalement
le problème des services monnayables d'appareils de quelque nature que
ce soit, prothèses de toute nature et médicaments par rapport aux
professions.
On doit admettre au départ qu'est lié à l'exercice
des professions l'ensemble du prolongement professionnel qui doit être
contrôlé par la profession. Donc, on vient de réduire le
propos à des méthodologies, soit publicité pour les
médicaments, publicité pour les prothèses de quelque
nature que ce soit. C'est donc dans ce cadre quand même plus restreint
que se place la problématique concrète.
J'allais dire, pour ce qui a trait aux optométristes et opticiens
d'ordonnances comme les ophtalmologistes, qu'on assiste d'abord à un
problème économique relié à une situation
québécoise. Il est un fait qu'il y a peu de production de telles
prothèses, ici dans le territoire. On assiste donc à de
l'importation massive et à de la fixation des prix qui sont en dehors
souvent même de la volonté des premiers manipulateurs, à
savoir les optométristes et opticiens d'ordonnances.
Un premier problème est soulevé, celui de l'importation
des prothèses. D'ailleurs, je crois qu'il faudrait peut-être, au
ministère de l'Industrie et du Commerce, réfléchir
à ce problème en songeant à voir, notamment, au niveau des
quantités, s'il n'y a pas lieu de créer de nouvelles
filières ou de mieux contrôler évidemment, c'est
peut-être dans les débats constitutionnels les
importations. (13 h 15)
Concrètement, le problème se pose devant la
publicité, devant l'ordonnance et devant le contrat de service. Les
principaux intervenants, pour ce qui a trait à la publicité, sont
effectivement les optométristes et opticiens d'ordonnances.
Déjà, deux règlements avaient été
déposés à la Gazette officielle, soit le 28
décembre 1977 et, ensuite, une troisième version, en
décembre 1979. On sait que l'Ordre des optométristes a
réagi très défavora-
blement et a demandé au ministre responsable d'examiner
personnellement ce dossier en se refusant à toute nouvelle discussion
avec l'office. Donc, c'est un problème qui est devenu un problème
politique, et il faut effectivement le trancher bientôt.
Quant à la forme et au contenu des ordonnances des
optométristes, il y a un problème technique qui se pose, celui de
la forme et celui de la remise en main au client. L'attitude des
optométristes est, je dirais, un peu ambiguë parce qu'on a cru voir
des consignes que se seraient passées les optométristes entre
eux.
Toutefois, il semble à peu près évident que,
actuellement, c'est-à-dire depuis quelques semaines, pour ne pas dire
quelques jours, que, pour le moins, l'optométriste remet l'ordonnance au
client en autant qu'il en fait la demande avant l'examen. Donc, il y a des
attitudes un peu corporatistes là-dedans et, effectivement, il faudra
trancher par le biais d'une réglementation.
Quant au contrat d'assurance, il y a préalablement un
problème, également, dans la lentille cornéenne: c'est
l'ordonnance elle-même faite ou non à l'intention de l'opticien.
Il y a donc des tensions entre les deux corporations. Le problème le
plus crucial, c'est celui de l'assurance elle-même. On sait qu'il y a
deux types d'assurance: il y a l'assurance qui est donnée à titre
personnel, pour ainsi dire, par l'opticien ou l'optométriste, et il y a
également tout le problème de l'assurance proposée par les
compagnies d'assurances. A ce moment-là, cela relèverait
éventuellement du bureau d'assurance pour le contrôle du contrat
d'assurance et pour son application.
On voit que la protection du consommateur est, dans ces domaines,
concrètement menacée, il faut le dire, dans la situation
actuelle.
Je ne ferai pas le relevé complet de tous les intervenants, des
positions réciproques. Toutefois, je veux bien indiquer que le
problème se concrétise dans l'examen par rapport, notamment,
à la prothèse c'est essentiellement cela
problème auquel on doit ajouter la question du contrat. Qu'est-ce qui a
été fait par le gouvernement et qu'est-ce qu'on entend faire
à partir de maintenant? D'abord, la publicité. Il y a une
orientation qui a été prise par l'office vers une certaine
libéralisation. D'ailleurs, dans la pratique on sait que cela
cause des problèmes sur le terrain les opticiens d'ordonnances
appliquent d'ores et déjà, par anticipation, évidemment,
les positions préconisées par leur ordre en matière de
publicité, et certains d'entre eux vont même déjà
au-delà. L'ordre presse l'office de recommander au gouvernement
d'approuver ce règlement qu'il propose lui-même. Quant à
l'office je ne voudrais pas parler au nom du président de
son côté, il s'est prononcé publiquement à maintes
reprises en faveur d'une libéralisation des règles de
publicité. La recommandation de l'office, d'ailleurs, est maintenant
déposée auprès du ministre. Dans le sens de la protection
du consommateur, je crois que nous devons nous orienter de ce
côté.
Quant à la remise de l'ordonnance, il faut donc la voir dans le
cadre de la libre concurrence, au fond, d'une part, et avec la connotation de
la libre concurrence, d'autre part, c'est-à-dire la protection du
consommateur par rapport au prix de revient.
Puisqu'il n'y a pas encore de "castonguette", sauf pour certaines
classes de la société qui ont été favorisées
par des lois sociales, du moins pour certaines parties de ces prothèses,
lentilles et non pas lunettes comme telles, actuellement aucune disposition
expresse dans les textes législatifs ou réglementaires qui
touchent l'exercice des deux professions qui sont en cause n'impose à
l'optométriste l'obligation de remettre une ordonnance à son
patient et encore moins une ordonnance décrite dans des formes
définies. L'office, pour ce faire, a recommandé l'approbation,
dans les codes de déontologie, d'un article faisant obligation à
l'optométriste de remettre l'ordonnance sans même la demande
expresse du client. Le gouvernement devra donc bientôt se prononcer sur
cette libre concurrence.
Quant au contrat de service, il faut préalablement régler
le problème de la répartition des juridictions entre
optométristes, opticiens d'ordonnances et ophtalmologistes, en
l'occurrence, puisque eux aussi peuvent prescrire. Il faut d'abord savoir qui
peut faire quoi vraiment et c'est seulement après que les
règlements seront bien précisés qu'il y aura lieu d'agir
dans la pratique, c'est-à-dire la pratique administrative, soit par voie
réglementaire ou autrement, et, par exemple, créer l'obligation
pour l'un ou l'autre de ceux-là d'indiquer séparément le
coût et l'étendue de l'assurance sur le relevé des
honoraires pour favoriser, par exemple, la concurrence entre les compagnies
d'assurances.
Le député de Nicolet-Yamaska a demandé à ce
propos, tout à l'heure, s'il y avait lieu de tenir une commission
parlementaire. Je crois que le moment n'est pas venu de répondre
directement à sa question puisque l'office et le gouvernement ont
d'abord une responsabilité notamment le gouvernement, en
l'occurrence sur certains de ces dossiers notamment de trancher, faire
une proposition qui soit ferme, comme on en a une maintenant devant nous
à propos des CA, CGA, RIA. Et, suite aux réactions, suite
probablement aux rencontres des divers intéressés avec le
ministre lui-même, il faudra voir s'il y a lieu, suite à
l'ensemble de ces interventions, d'évaluer la nécessité de
la tenue d'une commission parlementaire.
Le Président (M. Lacoste): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Un bref commentaire. L'aspect du prix des objets qui
se situent dans le prolongement de l'acte médical. On sait que l'un des
problèmes majeurs dans ce titre, c'est la question, par exemple, des
prothèses, tout cela dans le domaine des optométristes, mais dans
la question des médicaments, le prix des médicaments.
Je sais que le premier ministre actuel, il y a quelques années,
avait soulevé ce problème-là. Alors, je ne l'ai pas suivi,
mais c'est un problème important dont une des dimensions, c'est
justement le fort taux d'importation que le Québec fait de ce type de
produit. En tout cas, c'est un problème extrêmement complexe. Je
ne pense pas que le problème de prix en tant que tel des
médicaments ou des prothèses puisse être
réglé dans le cadre de la loi des professions ou de
l'organisation professionnelle. Je pense que bien d'autres mesures pourraient
éventuellement être prises, mais d'une façon "ancillaire",
bien sûr, au titre de la protection du consommateur, lorsque j'ai
souligné ça. C'est le premier aspect.
Le deuxième aspect, est-ce que c'est un projet de
règlement ou...? C'est un projet ou un règlement?
M. Morin (Sauvé): A l'heure actuelle?
M. Rivest: Oui, je parle de ce que vous avez annoncé dans
votre communiqué de presse, M. le président, le 27 mai.
M. Morin (Sauvé): Bien sûr, ce n'est qu'un projet.
Tant que ce n'est pas adopté par le Conseil des ministres, ce n'est pas
un règlement.
M. Rivest: Alors, très bien. Comme l'a signalé le
député de Terrebonne, l'adjoint parlementaire du ministre, je
pense que, substantiellement j'ai le mémoire des
optométristes les opto-métristes craignent, surtout au
titre de la délégation de l'ordonnance, que ce projet de
règlement en arrive à décider d'autorité d'une
façon quasi définitive du contentieux qui existe entre les
optométristes et les opticiens d'ordonnances sur la délimitation
de l'acte professionnel de l'un par rapport à l'autre. Les
optométristes prétendent, à tort ou à raison, que
le diagnostic qu'ils posent lorsqu'on va chez un optométriste et que la
prothèse qui s'ensuit, la vente, non seulement la vente, mais les
traitements, les problèmes que ça peut occasionner
subséquemment, l'ajustement, etc., cela se situe dans le diagnostic et
le traitement. Je ne sais pas quel est l'avis de l'office. Il me semble que ce
que j'ai cru comprendre, de la part des propos de l'adjoint parlementaire,
c'est qu'avant d'aller plus loin avec ce projet de règlement, le
gouvernement, ou l'Office des professions devra émettre un avis ferme
sur la délimitation du champ d'opération. Il y en a trois. Il y a
aussi les ophtalmologistes qui, indirectement, sont peut-être dans le
dossier, mais surtout les optométristes et les opticiens d'ordonnances.
C'est un des dossiers qui restent au niveau de la délimitation.
Remarquez que, au moment de la loi 250, ce problème existait. Il
n'a jamais été réglé, à ma connaissance. Si
j'ai l'assurance ou si la commission a l'assurance aujourd'hui que, ce projet
étant là, on a pris connaissance de la réaction des
optométristes je n'ai pas pris connaissance de la réaction
des opticiens d'ordonnances; je ne sais pas si elle existe il faudrait
qu'on puisse avoir l'assurance du ministre ou de l'adjoint parlementaire, ou du
président, comme, je pense, c'est la pratique le ministre l'a
indiqué tantôt que vous avez enregistré les
réactions au projet de règlement et, surtout, l'assurance que
vous allez émettre un avis ferme, après toute la consultation,
l'analyse du dossier, sur la délimitation du champ professionnel de
l'une ou l'autre des professions. Pour l'instant, on ne peut peut-être
pas aller plus loin, parce qu'il y a encore beaucoup de travail à faire.
La seule chose que je vous indique, c'est que la réaction des
optométristes, à la lecture de leur mémoire,
apparaît extrêmement vigoureuse. Ils indiquent très
clairement dans leur mémoire qu'il s'agit d'un geste extrêmement
important pour l'avenir même de la profession de l'optométrie.
Quant à la question de prix, ce que j'avais souligné au
départ, sur les objets qui se situent dans le prolongement de l'acte
professionnel, je souhaiterais peut-être que l'Office des professions
émette un avis général là-dessus, mais en sachant
bien que ce problème est beaucoup plus complexe et qu'il doit être
envisagé dans bien d'autres perspectives que la seule perspective
inhérente à la Loi sur les corporations professionnelles. Qu'on
pense aux pharmaciens, etc.
Pour me résumer, je veux dire que le projet de règlement
est là. D'après ce que j'ai cru comprendre des propos du ministre
et de l'adjoint parlementaire, le gouvernement devra, avec l'office, bien
sûr, émettre un avis sur le règlement du contentieux
existant entre les professions. Par la suite, on arrivera avec un projet de
règlement et on fera rapport le plus tôt possible. C'est cela?
Le Président (M. Lacoste): M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): Plus exactement, c'est bien l'office qui
va nous soumettre un avis au gouvernement...
M. Rivest: Oui, un projet.
M. Morin (Sauvé): ... et c'est le gouvernement qui
adoptera le règlement en conséquence. Je dis en
conséquence; c'est compte tenu de l'avis qui lui sera parvenu et compte
tenu, bien sûr, des représentations qui lui seront faites par les
intéressés, par les professions intéressées.
Je pense que M. le président de l'office avait quelques mots
à ajouter.
Oui, c'est exact de dire que le problème ici, en partie, se situe
ou s'inscrit dans le problème d'un conflit de frontières, en
quelque sorte, entre ces deux corporations.
On sait que lorsque le Code des professions a été
élaboré, on a réglé ces problèmes de
façon assez absolue en formant des corporations qui livraient la
prothèse, et la corporation qui fournissait le service, et on en a fait
deux champs bien distincts.
Ce n'est pas la solution qui a été retenue ici. La
solution qui a été retenue ici est, au contraire, de rendre
commun aux deux corporations le
champ de livraison de la prothèse, ce qui est une cause de
conflit. Mais c'est le législateur qui nous a laissé ce
problème et je ne pense pas que ce soit au niveau réglementaire
qu'on va le régler. Les corporations professionnelles, vous l'avez bien
perçu, ont essayé de régler ce problème, les
optométristes surtout, en voulant évacuer les opticiens de la
livraison de la prothèse et en refusant la livraison de l'ordonnance;
c'est ce qu'ils faisaient, au fond.
Nous disons par le règlement: Ce n'est pas ce problème
qu'on va régler; on va laisser aux opticiens la juridiction qu'ils ont,
donc ils partagent avec les optométristes le champ de la
prothèse. Par le règlement, on ne fait que trancher autrement que
voulaient le faire les optométristes et on refuse de trancher le litige
que le législateur a voulu laisser tel quel, c'est-à-dire une
concurrence entre opticiens et optométristes, dans la mesure où
il s'agit de livrer la prothèse. Le règlement n'a pour effet que
de dire aux optométristes: Vous n'êtes pas les seuls à
pouvoir livrer la prothèse; fournissez l'ordonnance et le client
choisira ou chez vous, ou chez l'opticien; et nous sommes fidèles
à la législation, à ce moment-là.
Évidemment, il faut déplaire. Je sais qu'on
déplaît, mais on n'a pas le choix, on est obligé
d'appliquer la loi telle qu'elle est.
Le Président (M. Lacoste): Est-ce qu'il y a consentement
pour poursuivre?
M. Rivest: Oui, juste un dernier... Sauf que je comprends
exactement la subtilité de l'office à ce titre et je pense que,
juridiquement, l'interprétation de l'office m'apparaît juste. Le
problème qui arrive, c'est que les optométristes
prétendent que cela remet en cause tout le problème de la
délimitation du champ professionnel de l'optométrie et des
opticiens d'ordonnances, dans le sens que la personne qui se rend chez
l'optométriste va prendre l'ordonnance et va aller faire du "shopping"
pour sa prothèse. Les optométristes prétendent, au niveau
de leur profession, qu'ils doivent vous connaissez cette
prétention garder un regard sur la prothèse
elle-même, sur son ajustement, sur les problèmes que cela peut
poser. Ils prétendent que l'opticien d'ordonnances qui n'a pas fait
l'examen enfin, c'est la prétention des optométristes
ne peut pas poser un diagnostic valable pour ajuster la prothèse.
(13 h 30)
C'est tout le problème de fond. Et c'est là la
prétention des optométristes. Juridiquement, vous vous situez
dans un bon cadre. Je pense que vous faites une interprétation juste de
la loi, mais le problème vient de ce que les optométristes
pensent que cela remet en cause leur champ professionnel.
M. Morin (Sauvé): Chaque profession défend,
évidemment, avec acharnement ses frontières, ses
intérêts. Et chaque fois qu'il y a deux professions en cause, il
faut arbitrer. La façon de le faire n'est pas toujours de trancher dans
l'abstrait. D'autant que, dans un domaine comme celui-là, c'est fort
difficile puisqu'il y a chevauchement. Et quelquefois, la seule façon,
c'est de trancher par le biais des aspects concrets de la chose. Enfin, ce
problème-là, M. le Président, va être mûri et
longuement étudié avant que le gouvernement ne le tranche, je
puis en donner l'assurance. Mais il est temps de trancher aussi. Cela ne peut
pas durer indéfiniment non plus.
M. Rivest: J'ai essayé de me faire un allié du
député de Richelieu en m'associant d'une façon
peut-être très analogique au problème des
médicaments, mais je n'ai pas réussi.
M. Martel: Disons que je vous voyais venir de loin.
Le Président (M. Lacoste): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Juste une brève question. J'ai soulevé
tout à l'heure la question des multinationales qui intervenaient
là-dedans. On n'a pas répondu à ma question. Est-ce que
vous avez des commentaires?
M. Fallu: J'ai évoqué tout à l'heure le
problème. Nous en sommes très conscients. D'ailleurs, en
pharmacopée, on trouve toute une série de produits de
synthèse qui pourraient fort bien être développés
ici dans de petites PME.
M. Martel: L'industrie pharmaceutique au Québec, ce sont
des investissements de l'ordre de plusieurs milliards de dollars. Il faudrait
avoir un système complet d'assurances-médicaments avant de songer
à contrôler ses prix et à établir une industrie
pharmaceutique vraiment québécoise.
M. Fallu: Souvent, il y a ce qu'on appelle la troisième
ligne américaine qui arrive en dumping au Québec.
M. Martel: Bien, il y a les multinationales.
M. Fontaine: Ma question portait particulièrement sur les
optométristes. Je vous ai lu tout à l'heure le paragraphe d'une
lettre que je recevais d'un optométriste qui nous dit: "Nous croyons que
toute ouverture particulière sur les prix des biens et des services
ophtalmologiques favorisera à coup sûr la
pénétration des multinationales de l'optique au niveau de la
vente en détail des prothèses et des orthèses
ophtalmologiques ".
Qu'est-ce que vous avez à répondre à cela?
M. Fallu: II peut arriver facilement qu'autant un opticien
d'ordonnances qu'un optométriste se laissent embrigader dans des
réseaux de distribution multinationale. Il n'y a aucune garantie
à ce niveau-là.
Etant donné que le produit lui-même est essentiellement
d'importation, on subit déjà les contrecoups. Ce que les
optométristes craignent,
c'est l'installation, par les multinationales, de réseaux de
Laura Secord de vendeurs de lunettes, c'est-à-dire d'opticiens
d'ordonnances. Je caricature volontiers ici, parce que c'est un peu le
reproche. Ils n'ont peut-être pas tort, sauf qu'il y a un problème
de nature économique et non pas professionnelle, à ce
moment-là, puisqu'il s'agit d'objets à vendre.
J'ai émis, tout à l'heure, l'opinion que la meilleure
méthode de concurrence des prix là-dedans serait peut-être
de développer les filières québécoises. Je n'en ai
pas la conviction, mais c'est pour le moins une hypothèse que
j'émets, parce que j'ai cru saisir en regardant quelquefois le dossier
d'un peu plus près que, par rapport aux prix absolument faramineux qu'on
exige de ces prothèses, n'importe quelle PME au Québec, bien
assistée d'un réseau d'optométristes et d'opticiens qui
voudraient se regrouper, comme certains pharmaciens l'ont fait, pour produire
eux-mêmes certains produits pharmaceutiques je connais, tout
près de chez moi, une industrie qui repose essentiellement sur la
propriété, l'appartenance d'un groupe de pharmaciens s'il
pouvait y avoir le même mouvement, assisté peut-être par
l'un ou l'autre des mécanismes de l'Etat, elle pourrait peut-être
concurrencer la multinationale et, en conséquence, abaisser les
prix.
Ce serait sans doute à regarder de très près. Je
m'y engage dans les mois qui viennent...
M. Fontaine: II est quasiment trop tard. Vous achevez votre
mandat...
M. Rivest: Vous n'avez rien fait pendant quatre ans...
Le Président (M. Lacoste): Est-ce que le programme 9 est
adopté?
M. Morin (Sauvé): Toujours aussi subtil, le
député de Jean-Talon. Toujours aussi fin.
M. O'Gallagher: Je sais que le temps passe rapidement,
mais...
Le Président (M. Lacoste): M. le député de
Robert Baldwin.
M. O'Gallagher: Nous avions plusieurs questions à poser.
Je pourrais résumer cela en trois questions: une au ministre et deux au
président de l'Office des professions du Québec.
D'abord, la première question: Est-ce que le ministre
prévoit des pièces législatives autres que les amendements
pour les besoins des comptables?
M. Morin (Sauvé): Oui. Il n'est pas impossible que vienne,
à l'automne, un projet d'ordre technique destiné à
faciliter le travail de l'office. Ensuite, un projet qui, lui, serait beaucoup
moins technique comporterait des dispositions de fond, dans le sens de ce que
nous avons indiqué pour la protection des consommateurs. Mais ces
projets n'ont pas encore franchi le Conseil des ministres, donc, je ne peux pas
annoncer quand ils seront déposés, ni quand nous les
présenterons en deuxième lecture.
Le Président (M. Lacoste): M. le député de
Robert Baldwin.
M. O'Gallagher: Une première question relativement
à l'Office des professions. L'office procè-de-t-il
présentement à une enquête concernant l'Ordre des
infirmières et infirmiers du Québec?
M. Morin (Sauvé): Ce qui est arrivé, c'est
qu'à la suite de la hausse de cotisation, la deuxième hausse en
deux ans de l'Ordre des infirmières et infirmiers, nous avons
reçu des représentations de la part, d'abord, de certains
membres, et même de certains groupes de membres. Ce que nous avons fait,
nous avons accusé réception, évidemment, de leur demande
d'intervention et nous avons dit que nous allions évaluer la situation,
tel que le code nous en fait obligation. Nous le faisons, non pas en faisant
enquête au sens péjoratif du terme, mais en analysant les
états financiers de l'ordre, et aussi en contactant l'ordre pour obtenir
des renseignements supplémentaires, s'il en faut.
M. O'Gallagher: Ma dernière question. Où en est
rendu l'office dans sa réflexion sur l'utilisation du double titre par
l'Etat employeur? C'est le cas de plusieurs ministères qui emploient
d'autres mots pour dire la même chose, pour éviter l'utilisation
du nom professionnel.
M. Morin (Sauvé): Vous faites allusion au titre
réservé...
M. O'Gallagher: Oui, oui.
M. Morin (Sauvé): ... qui vient en concurrence avec les
titres qui ne sont pas réservés et dans le même champ.
C'est bien cela?
Tout à l'heure, le ministre, dans son discours
préliminaire, vous parlait d'un colloque sur les titres
réservés. Cela s'inscrit dans cette étude que nous
poursuivons, qui n'est pas facile, à savoir comment consolider le titre
réservé en dépit du fait qu'on ne réserve pas un
champ, comment assurer que le monopole du titre corresponde à quelque
chose de valable. Le colloque du 12 et 13 juin auquel nous avons invité
ce n'est pas un colloque ouvert les professions', les employeurs,
des gens qui ne sont pas des professions, aussi, est limité à une
participation d'environ 150 personnes. Si vous voulez venir, nous vous
inviterons. Ce colloque est fait sur cette base. Nous avons l'intention,
précisément, de recueillir, à l'occasion de ce colloque,
des données qui nous permettront de tirer au clair la question que vous
posez et qui tenaille l'office depuis le début.
M. O'Gallagher: Très bien. M. le Président, je suis
prêt à adopter les crédits pour ce ministère.
Le Président (M. Lacoste): Donc, le programme 9 est
adopté?
M. O'Gallagher: Adopté.
M. Morin (Sauvé): Très volontiers, M. le
Président.
Le Président (M. Lacoste): Le programme 9 est
adopté. La commission parlementaire des corporations professionnelles
ajourne ses travaux sine die.
Fin de la séance à 13 h 39