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(Dix heures dix-sept minutes)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission de l'éducation reprend ses travaux en vue
d'entendre les organismes directement impliqués dans l'administration
scolaire qui veulent faire des représentations sur la qualité de
l'enseignement, la tâche et la sécurité d'emploi des
enseignants et enseignantes en regard de la situation actuelle du
Québec.
Les organismes invités aujourd'hui sont au nombre de dix.
D'abord, l'Association des cadres scolaires du Québec; Québec
Association of Protestant School Boards; la Fédération des
comités de parents de la province de Québec; le Conseil des
collèges; Québec Association of Catholic School Administrators;
en même temps, en sixième lieu, c'est l'Association des directeurs
généraux des commissions scolaires protestantes du Québec
et the Association of Protestant School Business Officials of Québec; en
septième lieu, Québec Association of School Administrators; en
huitième lieu, Québec Federation of Home and School Association;
en neuvième lieu, l'Association nationale des étudiants du
Québec et en dixième lieu, l'Institut canadien de
l'éducation des adultes. Ce sont les groupes que nous avons à
entendre au cours de notre journée de travail. Les travaux se
poursuivront jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20
heures à 24 heures.
Maintenant, on se souviendra que lorsque nous nous sommes
quittés, vendredi soir dernier, nous nous étions entendus pour
déterminer le temps de travail avant de commencer nos travaux. Je ne
sais pas s'il y a quelqu'un qui a quelque chose à dire sur le temps de
travail, en termes de temps à consacrer à chacun des organismes
à entendre.
M. le député d'Argenteuil, puisque c'était vous qui
aviez posé cette question vendredi dernier.
M. Ryan: J'ai eu une brève conversation, de
caractère privé, ce matin, avant l'adjoint parlementaire du
ministre de l'Éducation - je pense qu'on peut y faire allusion sans
indiscrétion, c'est M. Leduc -au cours de laquelle le
député de Fabre s'est enquis auprès de moi de la
manière dont nous concevrions que la journée pourrait se passer,
et même de la possibilité d'une extension des travaux
jusqu'à la journée de demain inclusivement. Je n'étais pas
en mesure de donner une réponse, parce que je pense qu'il faut voir un
petit peu comment les choses vont s'aligner aujourd'hui. Ma suggestion,
à ce moment-ci, serait la suivante: Que ce matin, nous
procédions, suivant la norme que vous aviez proposée vendredi
dernier, qui consiste à consacrer à chaque groupe une heure et
quart ou une heure et demie, et que pendant la suspension du déjeuner,
l'on puisse aviser après des consultations entre le gouvernement et
nous-mêmes pour voir comment le reste du temps pourra être
aménagé.
Le Président (M. Jolivet): Je retiens cette suggestion
comme étant notre moyen de travailler, ce matin. J'inviterais maintenant
l'Association des cadres scolaires du Québec à venir s'installer.
Quant à nous, nous ajusterons en conséquence, entre 13 h 15 et 13
h 30, selon les besoins. On pourra déterminer, avec les gens autour de
la table, le temps à être dévolu à chacun. Comme il
est actuellement entendu entre les gens, nous verrons, vers les 15 heures,
comment le reste de la journée se passera.
L'Association des cadres scolaires du Québec est
représentée par M. Bernard Myette. Je lui demande de nous
présenter ses collègues.
Association des cadres scolaires du
Québec
M. Myette (Bernard): M. le Président, à mon
extrême droite, M. André Pelletier, membre de la Commission
professionnelle des services du personnel, qui oeuvre dans une commission
scolaire de la région des Trois-Rivières. À ma droite, M.
Bruno Giard, premier vice-président de l'association, qui oeuvre dans
les services éducatifs dans une commission scolaire de la région
de l'Estrie. À mon extrême gauche, M. Vincent Tanguay,
président de la Commission professionnelle des services éducatifs
au secondaire, qui oeuvre dans une commission scolaire de la région de
Québec. À ma gauche, M. Michel Hamel, président de la
Commission professionnelle des services éducatifs au primaire, qui
oeuvre également dans une commission scolaire de la région de
Québec.
Le Président (M. Jolivet): Vous pouvez
maintenant commencer la lecture de votre mémoire.
M. Myette: M. le Président, mesdames et messieurs les
membres de la commission permanente de l'éducation, mesdames et
messieurs les députés, nous avons l'honneur de vous soumettre le
mémoire de l'Association des cadres scolaires du Québec en regard
du présent différend qui oppose l'État et ses
enseignants.
L'Association des cadres scolaires du Québec est une association
professionnelle d'administrateurs scolaires qui regroupe plus de 1800 membres
oeuvrant dans les commissions scolaires primaires et secondaires du
Québec.
Ces membres exercent, dans ces organismes scolaires, des fonctions de
gestion pédagogique et des fonctions de gestion administrative.
L'Association des cadres scolaires du Québec veut contribuer
activement à la recherche de solutions dans le présent
conflit.
Elle considère, en effet, que ceux qui, dans un contexte de
mission partagée, ont les premiers à organiser les services
éducatifs aux élèves de chaque région doivent
être présents jusqu'à terme comme conseillers tant sur le
fond que sur la forme.
C'est donc à titre d'organisme préoccupé du
développement ordonné du système d'éducation au
Québec, consciente également de l'importance que le
dénouement de la présente impasse est susceptible d'exercer sur
le fonctionnement et le climat général des écoles, sur la
qualité des services professionnels offerts aux élèves et
sur leur avenir que l'Association des cadres scolaires soumet ses avis et
opinions. Elle souhaite que ceux-ci pourront servir à favoriser une
meilleure compréhension des enjeux par le public
québécois. Nous anticipons également qu'au lendemain de
cette commission parlementaire, il y aura retour à une situation normale
dans les écoles.
La présentation de ce mémoire débutera par un bref
rappel historique des positions déjà prises par le gouvernement
et la Centrale de l'enseignement du Québec.
Par le gouvernement: Nous considérons important de rappeler que
la présente ronde de négociations s'est amorcée dans un
climat de tension constante entre le gouvernement du Québec, le
mouvement syndical en général et la Centrale de l'enseignement du
Québec en particulier. En effet, le gouvernement a jugé opportun,
voire légitime, d'adopter successivement la loi 68 et la loi 70 alors
que la négociation comme telle n'était, à toutes fins
utiles, même pas enclenchée. L'adoption de ces lois eut comme
conséquence immédiate de soustraire certains chapitres à
la libre négociation et de reporter l'exercice du droit de grève
en avril 1983. Par la suite, la loi 105, adoptée en décembre
1982, fixait les nouvelles conditions d'emploi et ce, même avant
l'expiration des actuelles conventions collectives qui étaient alors en
vigueur.
Par cette mesure, le gouvernement rendait inapplicable l'exercice du
droit de grève qu'il affirmait reconnaître aux syndiqués.
Ce rappel peut nous permettre de mieux saisir pourquoi les syndiqués
n'ont pu résister à l'exercice d'un recours à la
grève, même illégale. Il ne faudrait pas non plus faire
abstraction du projet de règles budgétaires soumis à la
consultation en janvier 1983. Ce projet de règles, au niveau de
l'enveloppe des enseignants, indiquait une récupération d'un
nombre d'enseignants correspondant à l'utilisation maximale des
possibilités découlant de l'application de la nouvelle convention
collective décrétée.
Nous croyons que cette consultation relative au projet de règles
budgétaires a entraîné un sentiment d'inquiétude
chez bon nombre d'administrateurs du réseau de l'éducation.
Du côté de la Centrale de l'enseignement du Québec:
D'autre part, la Centrale de l'enseignement du Québec avait acquis
l'habitude de faire des rondes de négociations un enchaînement de
gains successifs. Ceci pouvait se comprendre parce que jusqu'ici ces
négociations s'étaient toujours déroulées dans des
contextes politiques et économiques favorables. Qu'il suffise de nous
rappeler que 1976 correspondait à une fin de mandat du gouvernement
libéral et que 1980 correspondait à la période
préréférendaire. Sous ce rapport, nous considérons
que la Centrale de l'enseignement du Québec aurait dû comprendre
et accepter le fait que le contexte économique avait changé au
Québec.
Dans ce nouveau contexte, comment la Centrale de l'enseignement du
Québec était-elle justifiée de continuer à faire
des revendications d'ordre économique? Plusieurs de ses demandes nous
semblent démesurées et il en est ainsi du maintien du statu quo.
Voici pourquoi nous ne saurions, en tant qu'Association des cadres scolaires du
Québec, être d'accord avec le statu quo tel que demandé
jusqu'à ce jour par la Centrale de l'enseignement du Québec.
En guise de préambule, nous statuons qu'une convention collective
doit être et n'être qu'un recueil de règles qui
définissent les conditions de travail des salariés membres de son
unité d'accréditation. Dans ce contexte, c'est en mai 1980,
à la suite de la dernière ronde de négociations, que
l'Association des cadres scolaires du Québec a procédé
à une analyse systématique du processus de négociation et
du contenu de la dernière convention collective.
Les résultats de cette recherche déposés en
commission parlementaire à l'automne 1981 invitaient le gouvernement du
Québec à apporter une attention plus particulière aux
éléments suivants. Premier élément: un
régime pédagogique, cela ne se négocie pas, et dans ce
sens on doit assurer la primauté des régimes pédagogiques
sur les conventions collectives. À cette fin nous recommandions que
soient définis, a priori et antérieurement au début des
négociations, les objectifs québécois en matière
d'éducation scolaire de même que les grands moyens adéquats
à ceux-ci, notamment les régimes pédagogiques. Nous
complétions en disant que, par la suite, ceux-ci ne soient pas compromis
par les mécanismes de négociation ou par la force de pressions
concomitantes, mais que les conditions de travail des personnels soient
convenues dans la cohérence et dans le respect de ces régimes et
des objectifs qui les transcendent.
Deuxième élément. Des services à
l'élève, cela ne se négocie pas. On doit assurer la
primauté des services à l'élève. Nous étions
d'avis que la primauté des services à l'élève
pourrait être mieux assurée par une tâche globale
plutôt que par une tâche articulée en temps de
présence auprès des élèves pour des fins
d'enseignement, de surveillance, d'encadrement ou de récupération
et d'activités étudiantes. Cette préoccupation nous
réfère à la recommandation que nous faisions, à
savoir que, dans le but d'une meilleure utilisation des compétences
particulières de chaque enseignant, la convention collective globalise
les quanta de prestations des services des enseignants. Nous considérons
aussi que la présence des enseignants sur réquisition,
au-delà de la tâche d'enseignement, n'était pas de nature
à favoriser les échanges entre ces derniers, les autres
personnels de l'école et les élèves. (10 h 30)
À cette fin, nous recommandions que la convention collective
élimine la notion de disponibilité telle qu'elle était
définie et prévoie le retour à la notion d'une
véritable disponibilité d'une semaine normale de travail avec
présence obligatoire des enseignants.
Un autre facteur important est la capacité. Nous demandions
qu'une convention collective accorde au critère capacité
l'importance qu'il doit avoir dans l'affectation et la mutation du personnel
enseignant. Parmi les autres éléments qui faisaient l'objet de
nos préoccupations, nous avons voulu attacher une importance
particulière à la qualité des services professionnels
rendus par les enseignants. C'est à ce titre que nous faisions des
recommandations qui avaient pour effet d'éviter la supplantation
inconditionnelle, le "bumping", telle que vécue dans plusieurs
commissions scolaires. Ainsi, nous proposions que dans l'affectation des
enseignants la primauté soit accordée à la
compétence de ces derniers et nous recommandions à cet effet que
le regroupement des champs existant présentement par secteur dans la
convention des enseignants soit aboli aux fins de la déclaration des
surplus. Nous complétions en disant qu'afin de permettre une
organisation adéquate répondant au nouveau régime
pédagogique, particulièrement au niveau du premier cycle et de la
formation professionnelle courte du secondaire, nous recommandions que le champ
de titulariat, ou autre modèle, soit expressément prévu
dans la convention collective et ce, en sus des 37 champs déjà
prévus.
Il y a un autre élément qui fait qu'à notre avis le
statu quo n'est pas acceptable: C'est la sécurité d'emploi
assortie d'une mobilité géographique plus large. Nous
considérions, à ce moment, que l'encradrement trop étanche
et restrictif de la mobilité devait être
réévalué. Sans remettre en question la
sécurité d'emploi, cette dernière devait comporter des
conditions convenables et acceptables de mobilité. En ce sens, la
mobilité pouvait devenir une possibilité pour un enseignant de se
relocaliser dans un autre corps d'emploi et dans un autre secteur
d'activité et ce, à l'intérieur d'une région
économique qui ne se limite pas aux 50 kilomètres. Nous
recommandions que la commission scolaire joue son véritable rôle
d'employeur et qu'en ce sens elle puisse affecter un enseignant en
disponibilité à d'autres tâches que l'enseignement ou la
suppléance.
Les recommandations que nous présentions à l'époque
étaient les suivantes: Que la sécurité d'emploi consentie
demeure, mais qu'elle devienne assortie d'une mobilité
géographique plus large que celle définie dans les actuelles
conventions collectives et d'une mobilité intersectorielle dans les
différents réseaux des secteurs public et parapublic. Par
ailleurs, nous recommandions que les barrières définies par les
conventions collectives, relativement à l'utilisation du personnel en
sécurité d'emploi, soient sinon complètement
enlevées, du moins très abaissées afin de permettre aux
commissions scolaires, localement, de gérer adéquatement leurs
ressources humaines.
Finalement, en matière de statu quo au plan des règles de
formation de groupes. Plusieurs intervenants ont sensibilisé les membres
de cette commission pour que la moyenne d'élèves par groupe ne
s'applique pas s'il y a moins de dix groupes dans chacune des
catégories. Ils concluaient que la qualité de l'éducation
serait affectée par cette règle, surtout au secteur de
l'adaptation scolaire et de l'enseignement professionnel.
Nous voulons préciser ici que, si la
règle des moyennes peut ne pas s'appliquer, par contre, les
maximums par groupe s'appliquent et ce, toujours. Ces maximums
d'élèves par groupe ne sont supérieurs que de deux
élèves à la moyenne de chacune des catégories, ce
qui, pour l'association, n'affecte aucunement la qualité de
l'éducation. Nous avons annexé au présent document (annexe
3) un exemple de l'application de ces maximums et moyennes et, sur demande,
nous vous l'expliquerons.
Ces recommandations de l'Association des cadres scolaires du
Québec, déposées en octobre 1981 à la commission
parlementaire sur les négociations collectives dans les secteurs public
et parapublic, ont été faites dans un double but. D'une part,
elles visaient à garantir la réalisation des objectifs du plan
d'action pour lesquels un large consensus était né au
Québec. D'autre part, elles permettaient de reconnaître les
responsabilités des commissions scolaires dans leur rôle
d'employeurs et de répondants directs auprès de la population de
la qualité des services éducatifs sur leur territoire.
Il est à souligner également que nous demandions que les
conventions collectives devaient être expurgées de tout ratio, et
ce, pour la simple raison qu'une convention collective n'a pas à
déterminer le nombre de dispensateurs de services ou le nombre de
salariés membres de l'unité d'accréditation et, par le
fait même, le montant des cotisations syndicales.
Proposition du 10 février 1983. Depuis l'adoption du
décret de décembre 1982, fixant les conditions d'emploi des
syndiqués, l'intervention de notre association n'avait été
sollicitée ni directement ni indirectement. Toutefois, lors du
déclenchement des grèves de la fin janvier, nous avons
jugé impérieux de mettre tout en oeuvre pour favoriser un
règlement hâtif et satisfaisant de ce conflit, et ce, dans un
souci constant de vouloir assumer nos responsabilités en matière
d'éducation.
Dans un télégramme envoyé conjointement à M.
Camille Laurin, ministre de l'Éducation, et M. Yvon Charbonneau,
président de la Centrale de l'enseignement du Québec, le 31
janvier 1983, nous leur disions: "L'ACSQ pense qu'il existe des voies de
solution et prie instamment les parties à reprendre le dialogue. Le cas
échéant, l'ACSQ offre ses services en vue de faciliter les
discussions entre les deux parties."
Cette offre de service a été accueillie favorablement par
le ministère de l'Éducation. Les interventions de l'Association
des cadres scolaires du Québec ainsi que celles des autres partenaires
du réseau ont permis la préparation de la proposition du 10
février 1983 déposée par le gouvernement à la
Centrale de l'enseignement du Québec.
Dans un communiqué de presse émis le 11 février
1983, l'Association des cadres scolaires du Québec avait alors
invité les enseignants à analyser sérieusement cette
proposition en espérant qu'elle pouvait mettre fin au conflit.
À notre avis, cette proposition était acceptable parce
qu'elle permettait, entre autres, au niveau des classes du primaire, un
engagement gouvernemental qui leur confirmait un temps de présence de
l'élève égal à 24 heures en 1983-1984, 24 h 30 en
1984-1985 et 25 heures en 1985-1986. Elle garantissait de plus une tâche
moyenne par titulaire de 21 heures en 1983-1984, de 21 heures en 1984-1985 et
21 h 30 en 1985-1986. La combinaison de ces deux garanties assurait la
présence de spécialistes pour l'équivalent de trois heures
par semaine en 1983-1984 et de trois heures et demie par semaine en 1984-1985
et 1985-1986, ce qui constitue une amélioration de services par rapport
à l'entente précédente.
Dans les classes du secondaire, l'engagement gouvernemental proposait
pour les classes du secondaire un étalement de l'augmentation du temps
consacré à l'enseignement selon le modèle suivant: 21
périodes de 50 minutes en 1983-1984; 22 périodes de 50 minutes en
1984-1985 et 23 périodes de 50 minutes en 1985-1986 et ce, à
l'intérieur d'une charge globale et uniforme de 25 périodes de 50
minutes.
Une telle proposition avait pour avantage de permettre de valider par
simulation, au cours des prochaines années, si l'assignation d'une
tâche moyenne de 23 périodes de 50 minutes est réalisable,
sans toutefois diminuer la qualité des services éducatifs offerts
aux élèves dans les écoies.
Au plan de la sécurité d'emploi, l'engagement
gouvernemental permettait également d'éviter les mises en
disponibilité au primaire et assurait un plafond annuel de 5000 mises en
disponibilité au secondaire. Ces mêmes propositions - il est
important de le noter - étaient assorties d'une garantie de
rémunération à 100% du personnel mis en
disponibilité, conditionnellement à l'atteinte des nouveaux
seuils de résorption.
Au plan de la participation, l'engagement gouvernemental accroissait
enfin le nombre des éléments de consultation relatifs aux
fonctions et responsabilités des enseignants. Il permettait même,
dans certains cas, des arrangements locaux.
En somme, l'ensemble de la proposition gouvernementale répondait
en bonne partie aux préoccupations que les membres de l'Association des
cadres scolaires du Québec avaient exprimées dans leur avis
antérieur aux fins d'assurer la qualité des services
éducatifs aux élèves. Dans le contexte actuel de la crise
économique où il est requis que chaque membre de la
collectivité québécoise fasse un effort pour permettre un
redressement de la situation, l'Association
des cadres scolaires a donc jugé que cette dernière
proposition était acceptable parce qu'elle assurait premièrement
la primauté des régimes pédagogiques sur les contenus de
convention collective; deuxièmement, un niveau de services dans les
écoles acceptables, compte tenu des conditions économiques
actuelles; troisièmement, la possibilité de créer des
postes de titulaires au premier cycle du secondaire; quatrièmement, le
maintien du niveau de services pour les élèves en
difficulté d'adaptation et d'apprentissage.
Bien sûr, notre demande d'arrangements locaux au chapitre de
l'affectation et de la mutation n'est pas incluse dans ce dépôt,
mais nous escomptions que cette proposition ouvrirait le dialogue et
permettrait à la Centrale de l'enseignement du Québec de faire
des contre-propositions, mais tel ne fut pas le cas. Cependant, notre demande
à ce chapitre demeure et nous espérons que les parties
permettront d'inclure cette possibilité d'arrangements locaux, sur ce
chapitre, qui ne coûtent rien mais qui permettraient au milieu de se
doter de mécanismes qui lui soient propres.
En conclusion, l'Association des cadres scolaires du Québec
considère la proposition gouvernementale du 10 février comme
susceptible de maintenir à un niveau acceptable la qualité des
services éducatifs actuellement dispensés aux jeunes citoyens et
citoyennes du Québec. Pour la première fois, et nous tenons
à le resouligner, les éléments du régime
pédagogique ne sont pas assujettis à la négociation de la
convention des enseignants. Cependant, cette qualité des services
éducatifs offerts aux élèves ne sera garantie qu'à
la condition que les allocations de ressources correspondent aux besoins
d'organisation des écoles qui sont définis dans le régime
pédagogique du primaire et du secondaire et dans les politiques des
services complémentaires et personnels aux élèves. Si nous
croyons qu'une convention collective ne doit pas inclure le nombre de
dispensateurs de services, nous croyons par contre qu'il serait indécent
pour un gouvernement de se servir de cette porte ouverte pour réduire
à leur strict minimum les ressources d'enseignants allouées dans
les règles budgétaires.
C'est dans ce contexte que l'Association des cadres scolaires du
Québec a apporté de fortes réserves au projet de
règles déposé en consultation, en janvier 1983. Les
besoins d'encadrement, de récupération, de surveillance et
d'activités étudiantes des élèves doivent
être comblés qualitativement et quantitativement. À notre
avis, c'est une condition essentielle pour que l'école demeure apte
à répondre adéquatement de sa mission éducative et
puisse être considérée comme un véritable milieu de
vie, ce que l'on revendique depuis maintenant 20 ans.
En terminant, nous avons un certain nombre de recommandations à
faire aux parties à la négociation, ainsi qu'à cette
commission parlementaire. À la Centrale de l'enseignement du
Québec, nous demandons, au sortir de cette commission parlementaire,
d'amorcer une réflexion sérieuse ayant pour objectif un retour
à la négociation sur une base non coercitive telle que l'exigence
du statu quo. Nous lui demandons également de réfléchir
sur le droit des élèves aux services qu'ils sont en droit de
recevoir et, à cet effet, d'annuler tout mouvement de grève. (10
h 45)
Au gouvernement, nous demandons d'analyser sérieusement la
possibilité de la présence d'un observateur neutre à la
table de négociation. Cet observateur n'aurait de compte à rendre
qu'aux deux parties en présence à la table et permettrait
d'aérer le climat.
Finalement, nous recommandons à la commission parlementaire de
tout mettre en oeuvre pour que soit organisé dans les meilleurs
délais un sommet sur l'éducation nationale. Ce sommet
regrouperait l'ensemble des intervenants du réseau de l'éducation
et aurait comme mission de faire le point sur l'état de
l'éducation au Québec, tant sur ses aspects financiers,
structurels que sur les régimes pédagogiques et les politiques
qui en découlent, ainsi que sur l'organisation des écoles. C'est
là, à notre avis, l'endroit où les professionnels de
l'enseignement que sont les enseignants devraient discuter des régimes
pédagogiques et non pas dans les rondes de négociations.
Devant l'ampleur des problèmes qu'a connus ce réseau
depuis un mois et dans les 15 dernières années... Qu'il nous
suffise de compter le nombre de jours de grève qu'un élève
québécois a dû subir de 1968 à 1983,
c'est-à-dire sur un cycle normal d'école, de maternelle à
cégep III, nous ne pouvons faire autrement que de recommander que
l'Assemblée nationale amorce également dans les meilleurs
délais, une réflexion sur la mise en oeuvre au Québec
d'une véritable charte du droit au travail.
Les événements des derniers mois ont rendu encore plus
criantes les aberrations du système actuel de négociation. Force
nous est de constater qu'il existe au Québec des droits aux
organisations syndicales, des droits de faire la grève, des droits
contre les briseurs de grève, mais nous posons la question: Existe-t-il
véritablement un droit au travail qui assurerait un véritable
droit à l'éducation au Québec?
Qu'il suffise, en terminant, de nous rappeler que, lors de la
grève de 1972, ceux qui étaient contre la grève avaient le
droit d'être dispensés de faire la grève et qu'une loi
antibriseurs de grève les a rendus solidaires d'une grève
légale, mais qu'en 1983
les gens, dans un contexte de grève illégale, qui ne
voulaient pas faire la grève, ont du la faire.
Dans ce sens, on pourrait continuer et voilà pourquoi nous avons
cette préoccupation d'un véritable exercice du droit de travail
au Québec. Je vous remercie.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Avant de donner la
parole à M. le ministre, je dois faire rappel de la liste des membres
puisque je ne l'avais pas fait au début et qu'il restait quelques
ajustements.
Les membres de la commission sont: MM. Marquis (Matapédia),
Desbiens (Dubuc), Cusano (Viau), Beaumier (Nicolet), Mme Dougherty
(Jacques-Cartier), MM. Hains (Saint-Henri), Laurin (Bourget), Leduc (Fabre),
LeMay (Gaspé), Gauthier (Roberval), Ryan (Argenteuil).
Les intervenants sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie),
Bérubé (Matane), Dauphin (Marquette), Doyon
(Louis-Hébert), Parizeau (L'Assomption), Mmes Harel (Maisonneuve),
Lavoie-Roux (L'Acadie), MM. Paré (Shefford), Rochefort (Gouin) Rivest
(Jean-Talon). Le rapporteur de la commission est toujours M. Leduc (Fabre).
M. le ministre, vous avez la parole.
M. Laurin: M. le Président, je veux d'abord remercier
l'Association des cadres scolaires pour le mémoire qu'elle nous
présente aujourd'hui, qui est clair, concret et bien senti.
J'avais accordé une extrême attention aux recommandations
qui avaient été déposées à l'automne 1981
par l'Association des cadres scolaires sur notre régime de
négociation collective. Je pense d'ailleurs qu'elle s'est reconnue dans
les objectifs que posait l'offre gouvernementale lors du dépôt de
septembre. Je pense que, pour beaucoup de ses aspects, elle dérive en
droite ligne de ses recommandations.
Je pense qu'il faut effectivement accorder une grande attention aux
recommandations de l'Association des cadres scolaires du fait que ses membres
sont engagés quotidiennement dans la gestion pédagogique et
administrative des services éducatifs dans nos écoles du
Québec.
Ce qui m'intéresse particulièrement dans leur
mémoire d'aujourd'hui, c'est l'accent qu'ils mettent, et ils y
reviennent à deux ou trois reprises, sur la primauté que doivent
avoir les régimes pédagogiques sur les conventions collectives,
sur le fait qu'il ne doit y avoir aucune incompatibilité ou aucune
entrave entre ce que contiennent les régimes pédagogiques et les
conventions collectives. Par exemple, ils disent à la page 14: "Les
éléments du régime pédagogique ne doivent pas
être assujettis à la négociation de la convention des
enseignants." Ma première question, en fait, serait celle-là:
L'association pourrait-elle nous expliquer pourquoi elle insiste
tellement sur le fait que les régimes pédagogiques doivent primer
les conventions collectives? Deuxièmement - une sous-question qui
découle de celle-là - : Est-ce que le décret permettra,
selon eux, de mieux réaliser les objectifs du régime
pédagogique, particulièrement en ce qui a trait aux services
d'enseignement, d'encadrement, les services personnels et collectifs? Est-ce
que le décret permettra de mieux réaliser ces objectifs du
régime pédagogique que la convention collective de 1979-1982? Je
pourrais peut-être poser tout de suite ma deuxième question. Je
sais que l'Association des cadres s'intéresse d'une façon
particulière aux services que nos commissions scolaires consacrent
à l'enfance en difficulté. Je sais personnellement le rôle
important qu'ont joué les cadres scolaires dans la préparation et
la mise en oeuvre des politiques locales d'intégration des enfants en
difficulté.
Si vous avez suivi - et je sais que vous les avez suivis - les travaux
de la commission, vous êtes au courant que nous avons entendu des
opinions partagées à ce sujet. Je vous demanderais donc, si vous
pouviez éclairer les membres de la commission sur cette importante
question, sur le plan, encore une fois, concret de l'application?
Le Président (M. Jolivet): M. Myette.
M. Myette: Je vais demander à M. Tanguay de
répondre à la première question: Pourquoi les
régimes pédagogiques ne doivent-ils pas être assujettis
à la convention collective? Par la suite, je vais demander à M.
Giard de répondre à la deuxième question: Est-ce que les
décrets assureront les objectifs du régime pédagogique?
Nous nous partagerons la réponse sur la troisième question de
l'enfance en difficulté.
Le Président (M. Jolivet): M. Tanguay.
M. Tanguay (Vincent): Je vous remercie, M. le Président.
Si on se rappelle la convention collective en vigueur entre 1979 et 1982, elle
définissait la tâche d'enseignement d'un enseignant de 1000
minutes d'enseignement et de 100 minutes de période de
récupération, d'encadrement et de surveillance. À partir
de cette base, un directeur d'école pouvait établir quels
étaient les éléments qui devaient faire partie du projet
éducatif de l'école et établir, par exemple, quelles
étaient les clientèles qui avaient besoin de
récupération au sujet des apprentissages, qui avaient besoin de
services personnels, de services particuliers pour tous les
élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage. Si
la convention collective de 1982-1985 venait remettre en cause une
partie de ces éléments, c'est tout le projet
éducatif d'une école qui est une vague de fond - vous savez qu'un
projet éducatif ce n'est pas quelque chose qui s'implante le lendemain
du travail accompli entre les enseignants et la direction d'une école -
si, à tous les trois ans, on devait remettre en cause la qualité
et la quantité des services qui doivent être offerts aux
élèves au sujet des services personnels particuliers et
complémentaires, c'est de remettre en cause une partie du régime
pédagogique, d'une part. D'autre part, concernant l'enseignement, la
convention collective prévoyait les 1000 minutes, mais il était
aussi loisible à une école de donner un peu moins de 1000 minutes
à un enseignant dépendamment de la marge de manoeuvre qu'elle
avait pour donner des priorités à une ou l'autre partie du projet
éducatif.
Entre autres, on pouvait demander s'il y avait du monde en
disponibilité pour travailler à préparer du
matériel pour les professeurs qui faisaient de la
récupération. Si on devait définir, dans une convention
collective, le travail que devait faire ou que devrait faire du personnel en
disponibilité, cela entraverait en soi une partie du projet
éducatif d'une école. C'est pour cela qu'on dit que le
régime pédagogique ne doit jamais être touché
à l'intérieur d'une convention de travail qui doit stipuler le
nombre d'heures de travail, le salaire et les avantages sociaux des
employés et non pas la manière dont le travail doit se faire dans
une école.
Le Président (M. Jolivet): M. Giard.
M. Giard (Bruno): Merci, M. le Président. Je voudrais
revenir un peu sur la réponse de mon collègue pour dire aussi
qu'on a trouvé un élément important au niveau du
régime pédagogique. Il ne faut pas qu'on perpétue la
tradition qui existait depuis environ dix ans à savoir qu'à
chaque nouvelle convention, on devait modifier les temps d'enseignement pour
chacune des disciplines. Il nous apparaît que si, à un moment
donné, on a décidé que certaines matières devaient
être prioritaires, ce n'est pas à l'occasion d'une convention
collective qu'on devrait remettre en cause la priorité de ces
disciplines par rapport à d'autres. Dans le contexte actuel, le nouveau
régime pédagogique donne une importance
prépondérante au français et aux mathématiques et
c'est dans ce cadre qu'on revient souvent pour dire: La convention ou le
décret, servant de convention collective, nous permet de répartir
maintenant les temps à l'intérieur de l'école selon
l'importance relative qu'on a bien voulu attacher à chacune des
disciplines.
Quant à la deuxième question, comment le décret
peut-il mieux réaliser les objectifs du régime pédagogique
dans l'école en regard des services à l'élève?
J'aimerais revenir sur un certain nombre de choses dont une déclaration
ministérielle qui date du mois de novembre 1981, je crois, à
Saint-Exupéry, où le ministre de l'Éducation
définissait ce qu'était la tâche d'un enseignant ou d'une
enseignante. Dans ce modèle, on revenait souvent sur le fait que
dorénavant, l'enseignant et l'enseignante étaient les
professionnels de l'acte éducatif, donc, les gens qui, dans
l'école, établissaient une relation privilégiée
entre l'élève et l'adulte, quels que soient les adultes à
l'intérieur de l'école. Dans ce cadre, il est bien clair que
l'enseignement comme tel ou la fonction de l'enseignant dans l'école
prend plusieurs volets qu'elle n'avait pas auparavant et, à l'ère
de 1982, à l'ère du nouveau régime pédagogique, on
ne peut pas penser à un enseignant qui serait un dispensateur de cours.
Il est nécessairement un professionnel qui établit une relation
constante et privilégiée avec l'élève et dans
l'ensemble de son cheminement. Cela viendra nécessairement favoriser
l'existence et l'organisation à l'intérieur de l'école des
activités dites complémentaires à l'élève,
des activités qu'on pourrait désigner comme des services
personnels en ce sens que l'enseignant devra dorénavant avoir des
relations avec ses autres collègues qui ne sont pas des enseignants ou
qui sont des enseignants dans l'école puisque c'est lui qui devra
référer l'élève, pour des services personnels, vers
un conseiller d'orientation, vers un professionnel de la psychologie ou vers
d'autres professionnels.
Même chose au niveau des services complémentaires;
l'enseignant devrait normalement être la personne qui assiste les
élèves dans l'organisation de leurs activités à
l'intérieur de l'école et en plus, il est l'intervenant
privilégié en ce qui a trait aux activités
d'apprentissage.
Ce que nous disons dans notre mémoire, c'est qu'il nous
apparaît clair actuellement qu'une tâche globale permet une
souplesse qui est de nature à améliorer dans chacune des
écoles la relation élèves-adultes et c'est un point que
nous trouvons important.
Le Président (M. Jolivet): M. Myette.
M. Myette: Quant à la question concernant l'enfance en
difficulté et les politiques locales d'intégration, je voudrais
rappeler aux membres de cette commission que les politiques
d'intégration des élèves relèvent d'objectifs
véhiculés depuis fort longtemps concernant cette
intégration. Qu'il me suffise de vous rappeler les rapports et
études publiés depuis 1975 dont, entre autres, le rapport COPEX.
Il est à noter, entre autres - sans pointer personne - qu'on fait
état à grand renfort de publicité du rapport CETEES, mais
on n'a pas entendu un mot
jusqu'à maintenant sur le rapport COPEX, rapport
extrêmement important, qui soulignait qu'au Québec le corridor ou
couloir normal de la classe dite régulière s'était
rétréci pour permettre un grand nombre de portes sur le
côté pour sortir des enfants de la classe régulière
et en faire des classes spéciales avec toutes les définitions que
l'on connaît actuellement, les troubles légers, les troubles
graves, les perturbés affectifs, et j'en passe. (11 heures)
L'objectif de ces politiques d'intégration est de permettre
à l'enfant de vivre des situations les plus normales possible et, dans
ce sens, de les maintenir le plus longtemps possible dans la classe que l'on
dit régulière, donc de fermer ces portes multiples qu'on avait
ouvertes parce qu'on disait que c'étaient des enfants spéciaux.
D'ailleurs, le professeur Letendre de l'UQAM a fait une analyse de courbes sur
l'évolution des troubles légers d'apprentissage au Québec
et il en concluait qu'au rythme où on en trouvait, en l'an 2000, il y
aurait plus d'inadaptés que de réguliers dans nos écoles.
Les politiques d'intégration au Québec sont donc un retour
à une situation que l'on considère normale et qui était
devenue anormale.
En ce qui nous concerne, ces politiques - il y aura ici deux
témoins de deux régions fort différentes: l'Estrie et
Québec pour vous en faire part - à notre connaissance,
comprennent une première partie qu'on appelle le dépistage,
c'est-à-dire que c'est le départ, la connaissance de l'enfant et
cela se fait à partir de l'enseignant; c'est suivi des études de
cas qui impliquent l'ensemble des professionnels du réseau de
l'éducation, que ce soit l'enseignant, l'orthopédagogue, le
psychologue, le travailleur social, la direction de l'école et ce, afin
de prendre la meilleure décision pour l'enfant, soit de le maintenir
dans une classe spéciale ou de l'intégrer dans une classe
régulière, et finalement, la décision de l'intégrer
ou pas.
On a véhiculé que l'intégration avait pour l'effet
de diminuer le nombre d'enseignants. À notre connaissance, et nous en
témoignons, en aucun moment, les politiques d'intégration n'ont
diminué les ressources auprès des enfants. Cela n'a
été qu'un réaménagement des ressources, à
savoir qu'au lieu d'avoir des classes spéciales avec un titulaire, les
enfants intégrés dans la classe recevaient les services
d'orthopédagogues autant au service de l'enfant qu'au service du
titulaire, pour permettre un vécu le plus normal possible de l'enfant
dans la classe. Nous pouvons également témoigner que le projet de
règles de consultation déposé en janvier ne faisait
atteinte d'aucune façon aux ressources en adaptation scolaire; il
maintenait le même niveau de ressources d'enseignants en adaptation
scolaire que celui de l'an passé. Dans ce sens, nous insistons pour dire
que les politiques d'intégration n'ont pour objectif que le bien de
l'enfant et avec un réaménagement de ressources d'enseignants
pour permettre de l'atteindre. D'ailleurs, l'association publiait en mai
dernier une étude au Dr Laurin qui s'intitulait: Un enfant, un bien, un
service. Je demanderai à M. Vincent Tanguay de vous donner grosso modo
les grandes lignes de cette analyse.
Le Président (M. Jolivet): M. Tanguay.
M. Tanguay (Vincent): M. le Président, j'aimerais revenir
sur ce que M. Rousseau vous a présenté rapidement, lorsqu'il
était à la commission l'autre soir, et qui s'appelait: le
modèle en cascade. Vous vous en souvenez, il a dit: "II y a une
politique d'intégration qui a été développée
au ministère et qui respecte un modèle en cascade." J'aimerais
être un peu plus explicite sur la présentation qu'il a faite. Il
n'avait pas beaucoup de temps et il y avait plusieurs questions qui
fusaient.
Dans un premier temps, j'aimerais expliquer ce qu'est un modèle
en cascade, après cela parler de la politique locale dans une commission
scolaire et comment on peut répondre à: Un enfant, un besoin, un
service.
D'abord, le modèle en cascade part des enfants qui sont les moins
touchés sur le plan intellectuel, ce qu'on appelle habituellement les
troubles légers d'apprentissage; dans le jargon scolaire, on appelle
cela les TLA. L'autre soir, M. Parizeau en a parlé ici en disant que
tout le monde, un jour ou l'autre, a été TLA; on a eu un trouble
léger d'apprentissage, que ce soit en français, que ce soit en
mathématiques, que ce soit en éducation physique ou autre chose.
Ce que nous dit la politique, c'est que ces élèves doivent
être dans les classes et que c'est à l'enseignant de faire en
sorte que l'élève qui fait face à un trouble léger
d'apprentissage, à un moment donné de son cheminement scolaire,
puisse recevoir l'attention voulue de l'enseignant qui est dans sa classe
régulière. Avant la politique d'intégration, il y avait eu
des philosophies qui voulaient que cet enfant soit retiré de la classe
normale pour un bout de temps et, après cela, il réintègre
la classe normale. La politique fait faire un cran en disant que l'enfant qui
subit un trouble léger d'apprentissage doit être maintenu dans la
classe régulière.
Un cran plus bas: le trouble grave d'apprentissage. Qu'est-ce qu'est un
trouble grave d'apprentissage? Lors de l'entrée au secondaire, un
élève qui, dans les matières comme les sciences de la
nature, la formation de la personne, les sciences naturelles, les sciences
humaines, est régulier, c'est-à-dire qui suit l'ensemble des
élèves qui
sont dans sa classe, il n'y a pas de problème, mais un
élève qui a accumulé un retard d'à peu près
un an en français et en mathématiques, cet enfant, lorsqu'il
entrait au secondaire était mis dans une classe à part. On n'est
pas obligé d'aller très loin, c'était il y a seulement
deux ou trois ans.
Actuellement, avec la politique d'intégration, cet enfant est
dans une classe régulière. Ce qui peut arriver lorsque survient
le cas de plusieurs élèves en première secondaire, par
exemple, c'est qu'on va placer quatre enfants par classe pour quatre ou cinq
classes et on va le retirer de la classe de français,
c'est-à-dire six heures par semaines. À ce moment, il est
regroupé avec une dizaine d'élèves, de sorte qu'en
étant avec dix ou douze élèves et un enseignant six heures
par semaine, il est capable, dans sa première année au
secondaire, de reprendre les apprentissages de la sixième année
du primaire et de sa première année du secondaire, de sorte qu'on
peut dire que c'est un élève qui est intégré
à l'école. Si, en cours d'année, cet élève a
repris son souffle comme il faut, a repris sa vitesse de croisière
normale, il peut immédiatement intégrer une classe de
première secondaire. Mais, normalement, l'objectif c'est qu'en
deuxième, il suive l'enfant ou l'étudiant de deuxième
secondaire. C'est la même chose en mathématiques ou en anglais. Le
même processus peut être appliqué et on dit que c'est normal
qu'il suive l'autre élève ou son copain de première
secondaire.
Après cela, on a les déficients légers. Le
déficient léger est un enfant qui, à son arrivée au
secondaire, a à peu près la valeur au niveau des apprentissages -
d'une troisième ou d'une quatrième année primaire. C'est
bien sûr qu'il ne peut suivre un enfant du régulier. L'habitude,
avant la politique, était de faire des classes spéciales et
jamais, en aucune circonstance, les enfants de cette classe spéciale ne
pouvaient avoir des activités communes avec les enfants du
régulier.
De plus en plus, ce qui se vit dans une école, c'est que l'enfant
qui a un problème de déficience légère sera avec
ses copains de première secondaire dans une classe spéciale, mais
suivra les activités du midi, par exemple, le sport scolaire; il y a une
activité de ciné-club un après-midi, il peut participer
à cela en même temps; s'il y a une classe verte une
journée, au même titre qu'un élève de
première secondaire, il peut suivre ce que les autres font. De sorte que
cet enfant ne se sent pas retiré des activités des autres
élèves. On sait que souvent ces élèves ont autant
de facilité que n'importe quel élève à suivre des
cours d'éducation physique, d'arts plastiques. Qu'est-ce qui ferait que,
à court ou à moyen terme, ces étudiants ne pourraient pas
suivre les mêmes activités d'éducation physique, d'arts
plastiques, de musique que les élèves du secondaire
régulier?
À ce moment, on vient de faire subir un cran de plus ou de donner
la possibilité à un élève de monter d'une marche,
de participer aux activités des autres élèves et de ne pas
être mis à part dans l'école secondaire.
On pourrait continuer comme cela avec les déficients moyens. On
s'aperçoit que l'objectif de la politique d'intégration n'est pas
de faire en sorte que l'élève qui a un trouble d'apprentissage ou
un trouble d'adaptation intègre une classe régulière, mais
de lui donner une chance de monter d'une ou deux marches. C'est en ce sens
qu'on dit que c'est vraiment quand on arrive un petit peu plus loin, qu'on
parle de déviations multiples, d'un élève qui a, en plus
d'un trouble d'apprentissage et d'adaptation, une difficulté
sensorielle, que ce soit au niveau de l'ouïe, de la vision, ou au niveau
physique comme tel, qu'il s'agit de faire en sorte que cet élève
puisse aussi participer aux activités de l'école
régulière au même titre que les autres - même si
certaines activités ne lui sont pas possibles -de ne pas placer un
élève qui a une difficulté sensorielle à
l'extérieur des autres.
On a de plus en plus d'élèves qui ont des troubles
d'ouïe ou de vision, qui entrent dans nos écoles et je pense que
c'est normal, dans une école publique, que l'ensemble de la
communauté puisse participer aux activités qui se
déroulent dans cette école et de ne pas mettre des gens à
part parce qu'ils ont un trouble sensoriel ou une déficience mentale
légère.
C'est la politique d'intégration du ministère et la
politique qu'on essaie d'implanter dans nos commissions scolaires. La politique
d'une commission scolaire vise à définir quels sont les besoins
et quels sont les services qui doivent être rendus aux
élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage.
À ce titre, elle reconnaît que ce qu'est l'engagement d'une
commission scolaire relativement aux services qu'elle doit rendre à
cette clientèle et elle définit quels sont les intervenants.
À ce titre, par exemple, une commission scolaire peut dire qu'une
école a la responsabilité de se donner un comité de
travail avec des enseignants et avec la direction d'école et les
professionnels non-enseignants, pour définir de quelle façon,
dans une école, les services seront rendus et de quelle façon
dans une école, on devra accepter les différences qui peuvent
exister entre des enfants qui fréquentent l'école. C'est
là l'objectif d'une politique d'intégration. C'est à cette
fin que l'association publiait l'an dernier une étude sur Un enfant, un
service, un besoin pour faire en sorte que la politique
d'intégration
respecte vraiment les besoins qui peuvent être différents
d'un enfant à l'autre et les services qu'une commission et plus
particulièrement une école doivent rendre aux enfants en
difficulté d'adaptation et d'apprentissage.
M. le Président, j'ai été très long, je
m'excuse, mais je pense qu'il valait la peine de faire la chose.
M. Laurin: C'était très clair.
Le Président (M. Jolivet): M. Giard.
M. Giard: Si vous permettez, M. le Président, je voudrais
ajouter quelques éléments là-dessus pour distinguer entre
une politique en adaptation scolaire et une politique d'intégration des
élèves en adaptation scolaire. Je pense que mon collègue
Vincent a bien défini les deux. Je voudrais dire qu'actuellement,
lorsqu'on parle d'intégrer les élèves dans une politique
globale où on a dit comment on va le faire, pour qui on va le faire et
qui va le faire, on agrandit l'ensemble de la politique à
l'intégration, alors qu'une politique d'adaptation scolaire, c'est plus
large que cela. Actuellement, ce qui se passe dans les écoles, c'est que
selon les politiques généralement en cours, un
élève peut être d'abord intégré dans
l'école, ce qui est déjà une première phase de
l'intégration. On décide si on le met dans une école
spéciale ou bien si on le met dans une école
régulière. Vous savez comme moi qu'actuellement plusieurs
polyvalentes desservent les élèves d'à peu près
toutes les catégories à l'intérieur même des murs.
C'est la première étape de l'intégration. Je ne
décrirai pas le reste, mais successivement à cela, dans le
modèle en cascade, à ce moment, on pourra intégrer
l'élève pour un cours, pour deux cours ou pour l'ensemble des
cours. La vraie préoccupation, telle que nous l'analysons au niveau des
enseignants, ce n'est pas tellement au niveau de l'intégration des
élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, mais
c'est la présence ou l'absence des services complémentaires, par
rapport au fait qu'il y a des élèves qui sont
intégrés partiellement ou complètement dans des classes
régulières. À notre avis, si les politiques
budgétaires du ministère n'étaient pas cohérentes
avec le fait qu'on essaie de faire vivre à l'élève une vie
la plus normale possible en l'intégrant dans des classes
régulières, si ceci devait se révéler un moment
privilégié pour retirer les ressources normalement requises pour
que cet élève puisse progresser dans sa réhabilitation,
à ce moment, j'ai l'impression qu'on ferait vraiment fausse route. C'est
dans ce cadre qu'il est tout à fait justifié actuellement, de la
part des enseignants, d'avoir une très grande insécurité
par rapport au modèle qui sera retenu pour l'intégration de ces
élèves dans certains milieux.
Je pense qu'une déclaration ministérielle voulant que les
supports soient maintenus pour ces élèves, même
intégrés, serait de nature à résorber
considérablement cette inquiétude. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: Merci, M. le Président. Il m'a fait plaisir
d'écouter le mémoire de l'Association des cadres scolaires du
Québec. Pour qu'il n'y ait pas de malentendu, je pense qu'il y a
peut-être quelques précisions qui s'imposent. Votre organisme est
un organisme indépendant, mais il est composé de personnes qui,
au niveau de chaque commission scolaire, font partie de la fonction patronale.
C'est bien important de le souligner, pour qu'on sache les paramètres
dans lesquels on fonctionne. Ce n'est pas un reproche que je vous adresse,
encore une fois, mais cela nous aide à comprendre clairement la
portée de chacun des gestes qui sont posés, de chacune des choses
qui sont dites.
Deuxièmement, j'entendais le ministre de l'Éducation dire
tantôt qu'il avait veillé, avec un soin scrupuleux, à tenir
compte des vues que vous aviez exprimées à la commission
parlementaire qui avait siégé pour vous entendre en septembre
1981 sur les négociations collectives dans les secteurs public et
parapublic. Je voudrais au moins signaler qu'il y a certains
éléments des recommandations que vous faisiez alors qui n'ont pas
été retenus par le gouvernement, de toute évidence. Vous
insistiez, par exemple, sur l'importance de maintenir des
éléments significatifs de négociation au plan local, et
même sur l'importance de fournir aux commissions scolaires les moyens
nécessaires pour qu'elles puissent assumer cette responsabilité.
Évidemment, il n'en est absolument rien resté dans les
décrets et pas plus d'ailleurs que dans le cadre de règlement du
10 février. (11 h 15)
Deuxièmement, vous aviez proposé, si mes souvenirs sont
bons, que la fonction du comité national patronal soit
intégralement respectée, qu'elle soit plus clairement
définie que la dernière fois de manière à
empêcher l'espèce d'écrasement des commissions scolaires
par la partie gouvernementale. Mais si vous étiez présents
l'autre jour, quand les commissions scolaires ont témoigné, vous
auriez constaté que cette partie au moins de vos recommandations n'a pas
eu beaucoup de lendemains. J'espère que, d'ici la fin du processus, ce
sera mieux que ce qu'on a vu jusqu'à maintenant.
Je voudrais vous poser une petite question d'information, avant d'aller
plus
loin. Les décrets nous sont arrivés vers la
mi-décembre avec la loi 105. Est-ce que votre association a fait une
intervention d'abord sur le processus que le gouvernement avait
décidé de retenir? Deuxièmement, sur le contenu et sur les
conséquences des décrets? Est-ce qu'il y a eu des
déclarations faites par votre association au mois de décembre ou
au mois de janvier à ce sujet?
M. Myette: Avant de répondre directement à cette
question, je dois confirmer effectivement que l'Association des cadres
scolaires du Québec a revendiqué des négociations locales
et, d'ailleurs, elle les revendique toujours. Ce, au nom du véritable
employeur que sont les commissions scolaires, tout en reconnaissant par contre
que l'État devait déterminer la masse monétaire et les
grands paramètres du "normatif lourd", comme on l'appelle. À cet
effet, nous avions recommandé effectivement que le CPNCC soit
formé de trois parties et qu'une fois la question monétaire
déterminée, que le ministère de l'Éducation et la
Fédération des commissions scolaires soient les seuls
maîtres d'oeuvre dans la définition de tout ce qu'il y avait comme
incidence sur le contenu pédagogique.
En ce qui regarde les décrets de la mi-décembre, je dois
vous dire, pour vous situer dans la chronologie des événements,
qu'ils ont été adoptés à la fin de décembre,
donc, à la veille des vacances de Noël et que dès la
reprise, en janvier, nous ne sommes pas intervenus pour la simple raison que le
premier ministre de la province de Québec rencontrait les trois
centrales syndicales et tentait d'arriver à un aménagement avec
ces trois centrales. Cela n'a pas porté fruit. Les menaces de
grève dans l'ensemble de la fonction publique ont été
mises à exécution. Dès ce moment, à partir du fait
où il avait été impossible au premier ministre de
s'entendre avec les trois centrales et où les grèves
apparaissaient dans les secteurs public et parapublic, non pas strictement dans
le réseau de l'éducation, nous acheminions, tel que nous le
disons dans ce mémoire, dès le mois de janvier, un
télégramme au ministre de l'Éducation et au
président de la Centrale de l'enseignement du Québec pour
reprendre le dialogue et offrions nos services dans une espèce de
rôle de médiateur-observateur - on prendra le terme qu'il faut -
pour trouver des pistes qui nous semblaient possibles.
Ce que nous soulignons c'est que nous avons reçu, du
côté de la Centrale de l'enseignement du Québec, des
réponses à l'effet que le statu quo était l'exigence,
tandis qu'au ministère de l'Éducation, on nous a demandé
de préciser quelles étaient les pistes possibles. C'est dans ce
sens qu'il y a eu une semaine intensive de travail pour trouver des pistes qui
ont amené la proposition du 10 février.
M. Ryan: Sur la loi 111, est-ce que votre organisme a
exprimé des opinions? Je n'en trouve pas dans le mémoire.
M. Myette: Sur la loi 111, je dois vous dire que notre organisme
n'a pas émis d'opinion sauf qu'il vous soumet la réflexion
suivante. La rigueur des lois des institutions parlementaires n'a d'égal
que le nombre de citoyens qui violent les lois et du nombre de fois qu'ils le
font. C'est la seule réflexion que nous vous laissons, puisque nous
considérons que l'Assemblée nationale était le meilleur
juge en la situation pour édicter des lois correspondant à la
réflexion que nous vous faisons.
M. Ryan: Si vous me permettez une petite remarque, je pense que
vos interventions peuvent profiter à un éclairage technique
intéressant mais que ce serait se nourrir d'illusions que de penser que
vous soyez placés pour jouer une fonction médiatrice. Dans notre
système de relations du travail, M. Myette - je pense que vous le savez
comme moi - on a une base foncièrement bipolaire. Il y a deux parties:
la partie patronale et la partie syndicale. Surtout ceux qui sont dans
l'univers concerné par un conflit ou un litige sont d'un
côté ou de l'autre. Des personnes entre les deux, on peut en
trouver à l'extérieur à un moment donné et
j'espère que le ministre en trouvera aujourd'hui; il nous fera
aujourd'hui des annonces quant à une formule de conciliation quelconque.
Ce n'est pas minimiser ce que vous dites, c'est juste pour le situer dans une
perspective exacte qui évite d'engendrer des illusions. J'ai
terminé là-dessus pour l'instant.
Je voudrais vous poser une question sur un autre aspect. J'ai deux ou
trois questions à vous poser. J'ai remarqué que, dans votre
mémoire, vous semblez dire: Quant au régime pédagogique,
la négociation est en marche, c'est au-dessus ou quelque part, en tout
cas, en dehors de la négociation. J'ai cru comprendre que vous
réduisiez le champ de la négociation singulièrement en
parlant ce langage-là. J'aurais besoin de précisions
là-dessus, peut-être à partir d'un exemple concret.
Dans l'ancienne convention collective il existait, comme vous le savez,
des dispositions en ce qui touche le statut de l'enseignant, au chapitre 8 en
particulier, dans lesquelles on disait que toute une série de choses
étaient à la disposition de l'enseignant à titre
indicatif. Cela laissait de la marge pour l'initiative. Ce sont les articles
8-1.02 et suivants. Dans le décret, on remplace tous ces articles, on
les supprime autoritairement, unilatéralement d'un trait de plume et on
les remplace par un paragraphe qui dit: Les dispositions du présent
chapitre visent à faciliter
l'application des règlements du ministre concernant les
régimes pédagogiques et doivent être
interprétées en conséquence.
J'ai deux questions à vous poser là-dessus. D'abord,
est-ce que ces dispositions nuisaient véritablement?
Deuxièmement, dans les demandes qu'avaient présentées les
enseignants ou dans les conventions expirées, en dehors des questions
sur lesquelles il y a un accord de plus en plus général, comme le
décloisonnement de la tâche, la nécessité d'heures
de disponibilité plus nombreuses à l'école même, ce
sont des choses sur lesquelles... Quant au critère de capacité,
nous n'avons pas beaucoup de discussion à faire avec vous autres parce
que ce sont des points sur lesquels nous avons déjà
exprimé une opinion plutôt favorable, dès la fin de
novembre dernier.
Est-ce qu'il y a d'autres points qui faisaient conflit? J'ai
regardé le texte des régimes pédagogiques et il me semble
que plutôt que de séparer complètement ces
choses-là, comme semblent le suggérer certains passages de votre
mémoire, on doit chercher des harmonisations. Il me semble qu'une
négociation collective, d'où serait complètement
évacuée toute tentative de la part des syndicats d'attaquer un
petit peu le contenu de la tâche, serait une négociation qui irait
plutôt vers l'arrière que vers l'avant. Il me semble que toute
l'évolution de la négociation collective dans le monde
contemporain tend à faire en sorte que la négociation collective
ait une certaine prise sur le contenu du travail des salariés
syndiqués.
Si vous pouviez me donner des précisions sur ceci. Il y a une
certaine rigidité qui m'étonne un peu dans l'approche que vous
avez présentée. Il y a bien des bons points, j'aurais pu passer
une demi-heure à souligner les points positifs de votre mémoire
sur lesquels je suis d'accord, mais là-dessus j'aurais besoin
d'éclaircissement.
Le Président (M. Jolivet): M. Myette.
M. Myette: En guise de départ je vous soulignerais
l'annexe 18 de l'ancienne convention collective - et je peux vous en faire
lecture - où l'on dit: À la suite de discussions intervenues
à la table de négociation avec les représentants de la
Centrale de l'enseignement du Québec, la présente est pour vous
confirmer que la grille matières, énumération des
matières par degré ou par cycle au secondaire, sera
déterminée comme présentement par notre ministère,
mais l'établissement de la grille horaire, temps d'enseignement à
chaque matière, demeurera sous la juridiction de chacune des commissions
scolaires dans le cadre des objectifs pour chacun des programmes. En outre, les
enseignants ne se verront pas imposer les blocs de trois périodes de 50
minutes ou l'équivalent comme mode d'organisation, sous réserve
que la commission qui applique actuellement un bloc de trois périodes
pour certaines matières à l'intérieur de la grille horaire
puisse le conserver et que les commissions scolaires puissent l'implanter, de
même que... Je pourrais continuer, j'arrive presque à la fin. Ceci
était arbitrable. C'est une annexe qui était arbitrable et qui
venait influer directement sur le mode d'organisation des cours au
secondaire.
M. le député, vous pouvez ne pas partager notre point de
vue, mais nous disons qu'une telle chose n'est pas négociable. Lorsque
les conventions collectives vont jusqu'à fixer ou limiter les modes
d'organisation des temps d'enseignement, la préparation des
maquettes-cours, nous disons et soumettons que nous sommes rendus trop loin.
Quant aux dispositions dont vous faites appel, aux 812, 813, 814 et 815, quand
on dit que les guides pédagogiques sont à titre indicatif, nous
posons la question: Pourquoi en préparer si elles sont à titre
indicatif? Quant à 83, on dit que l'implantation des nouvelles
méthodes fait l'objet de consultations, cela va. Cela demeure, le 813
demeure parce que cela faisait partie des objets de consultation du
comité qu'on appelait au sujet de la commission scolaire, comité
de consultation, et que toutes ces dispositions du chapitre 4 ont
été reconduites intégralement dans la nouvelle convention
décrétée.
Quand on disait à 814, qu'à l'exception des examens
officiels, des tests et des examens ou tests de fin d'étape, ou de fin
d'année de la commission, les instruments de mesure d'apprentissage des
élèves sont mis à la disposition de l'enseignement
à titre indicatif, je vous pose la question. Quand on dit c'est à
titre indicatif, est-ce que les enseignants sont les seuls maîtres des
modèles d'évaluation, des titres d'évaluation, des quanta
d'évaluation, etc., des moments, etc.? Est-ce que vraiment
l'évaluation des élèves n'est que l'apanage des
professionnels de l'enseignement que sont les enseignants ou si des
professionnels, conseillers pédagogiques, des coordonnateurs
d'enseignement général, d'adaptation scolaire, de mesures
d'évaluation n'ont pas aussi leur mot à dire là-dedans?
Quand on dit que les bulletins du ministère sont à la disposition
à titre indicatif, finalement, qu'est-ce que cela donne de produire des
affaires si c'est tout à titre indicatif?
Maintenant, je dois vous dire que dans la nouvelle convention,
effectivement, on subordonne les tribunaux d'arbitrage à la seule
interprétation des régimes pédagogiques. Sans dire que
c'est allé trop loin, je vous dis peut-être que cela prenait cela
pour contrecarrer le mouvement qui s'était amorcé depuis quinze
ans où
finalement les seuls qui avaient des choses à dire en
matière de programme, en matière de bulletin, en matière
d'évaluation, ce n'étaient que les enseignants. Mon
collègue Vincent voudrait compléter là-dessus.
Le Président (M. Jolivet): M. Tanguay.
M. Tanguay: Juste une question. Qui doit répondre au plan
local de la qualité des services éducatifs aux
élèves? Est-ce que c'est le conseil des commissaires par la voix
de son administration ou bien si c'est l'enseignant directement?
M. Ryan: Je vous signale que la dernière convention avait
été signée par le gouvernement, la
Fédération des commissions scolaires et la CEQ. Ces clauses ont
dû être mises en connaissance de cause. Quand vous dites: Les
guides pédagogiques, il me semble qu'on aurait pu le mettre en
discussion. On aurait pu dire, à titre indicatif, j'espère que
vous ne voulez pas suggérer que c'est l'instrument dont on va se servir
pour chaque cours qu'on va donner dans les classes. J'espère que vous ne
voulez pas dire que cela va jusque là.
M. Myette: M. le député, ce que je voudrais vous
rappeler et peut-être que j'aurais dû le faire dès le
début, je voudrais vous remettre dans le contexte de l'ensemble du
mémoire. Nous disons que les professionnels de l'enseignement que sont
les enseignants doivent avoir voix au chapitre dans tous ces domaines, mais que
la place pour le faire ce n'est pas dans la négociation d'une convention
collective. Et c'est à cet effet que nous recommandons un sommet
national de l'éducation pour établir les modalités de
participation et de travail de tous les intervenants de l'éducation, et
non pas seulement les enseignants, de tous les intervenants pour établir
comment, à l'avenir, nous allons nous concerter, le ministère,
les commissions scolaires et les professionnels de l'enseignement que sont les
enseignants et les autres, comment nous allons établir ces guides, ces
régimes, etc. Nous ne voulons pas les exclure, mais nous disons: ce
n'est pas dans une négociation de convention collective qu'on
détermine ces choses.
M. Ryan: Je ne poserai plus de questions là-dessus parce
que votre position m'inspire de sérieuses réserves. On aura
l'occasion de les exprimer en d'autres temps, mais je pense que cela va
être bon qu'on y pense de part et d'autre parce que c'est une question
tout à fait fondamentale celle-là. Vous avez dit, à un
moment donné, dans votre mémoire que le projet de règle
budgétaire avait été une source d'inquiétude dans
les milieux scolaires, les règles ont été envoyées
à titre de projet vers la fin de décembre. J'ai trouvé
quelques lignes dans votre mémoire, au début, là-dessus et
ensuite dans les recommandations, vous ne revenez pas là-dessus, si mes
souvenirs sont bons. Quelles améliorations seraient souhaitables dans le
projet de règle budgétaire pour que vraiment elle s'harmonise de
manière efficace avec... Vous, votre position, si je comprends bien,
c'est le cadre de règlement du 10 février. Il n'y a rien qui
aille au-delà de cela dans ce que vous avez dit ce matin, si j'ai bien
compris. Cela va être ma deuxième question. Est-ce qu'il y a
encore des améliorations qui pourraient être recherchées
dans le cadre du règlement du 10 février et lesquelles? (11 h
30)
Le Président (M. Jolivet): M. Myette.
M. Myette: En ce qui concerne les règles, nous n'avons pas
de recommandations, mais nous disons à la fin, en conclusion, qu'il
serait quand même indécent, maintenant qu'il n'y a plus de ratios,
de limiter par les règles les ressources, ce qui pourrait diminuer la
qualité. Les règles de décembre, ce qu'on leur reprochait,
c'est surtout au niveau secondaire, face à une augmentation de la
productivité, de la tâche de 15%, d'avoir alloué une
ressource qui correspondait à environ 13% de réduction en
moyenne, n'allouant que 2% de taux de friction. Cela avait pour effet de
considérer un modèle à peu près global et avec peu
de jeu pour organiser les écoles. C'est dans ce sens que nous avons fait
une proposition tout en reconnaissant qu'il relevait de la décision
gouvernementale d'augmenter la productivité. Une fois la décision
prise, nous avons demandé un étalement pour justement nous
permettre de valider le taux de friction sur un P-3 ou sur 23 périodes
en 1985-1986. Est-ce 2%, le taux de friction? Est-ce 5%, le taux de friction?
Ce sont des choses à évaluer. C'est pour cette raison que nous
disons que l'étalement permettrait, en 1985-1986, de vérifier,
non pas par le vécu de 1983-1984, mais par simulation, quel serait ce
taux de friction, puisqu'on sait qu'il reste toujours des parties de
tâche et que les écoles polyvalentes de 1000 élèves,
par exemple, avec le choix d'options, peuvent entrer difficilement dans un
modèle théorique de 30 élèves par groupe, etc. Dans
ce sens, nous escomptons - et peut-être est-ce là la
différence, nous accordons la crédibilité au gouvernement
comme à tous les gouvernements - si ce taux de friction était
plus élevé de plus de 2%, que des analyses entraîneraient,
en 1985-1986, une allocation de ressources qui tiendrait compte de ces mesures,
tout en vous rappelant que le décret ou la convention
décrétée considère un maximum de périodes.
On ne dit pas que la moyenne est de 22 ou de 23. On dit:
C'est un maximum de... Il n'y a rien qui empêche d'aller à
une moyenne inférieure à la convention collective si, par
expérience, il se révélait que les taux de friction
étaient supérieurs à 2%.
Quant aux améliorations dans le décret, nous en avons
souligné une. Il nous apparaît que le chapitre 5.3 de l'affection
et de la mutation est un chapitre problématique. D'ailleurs, au point de
départ, l'association a toujours considéré et
considère que ce chapitre est le reflet du milieu. Compte tenu qu'il n'y
a pas d'argent d'impliqué là-dedans, que c'est une question de
savoir lequel des individus ou des enseignants ou enseignantes sera en
disponibilité ou ne sera pas réengagé, c'est donc une
question de mécanisme. Nous considérons que chaque coin du
Québec a ses particularités et c'est dans ce sens que nous avons,
à défaut de négociations locales, demandé des
arrangements locaux là-dessus. Quant aux autres chapitres, il peut y
avoir des améliorations techniques de détail ici et là,
mais le gros chapitre où il devrait y avoir des améliorations
est, pour nous, le chapitre de l'affectation et de la mutation, qui devrait
donner un cadre plus amélioré que même celui du 10
février et permettre des arrangements locaux.
M. Ryan: Seulement une question très brève. Vous me
répondrez par oui ou par non et cela va me satisfaire. Auriez-vous
préféré que ce domaine, l'affectation et la mutation,
reste dans le champ de la négociation collective locale ou si vous
êtes contents que ce soit passé dans l'ordre du décret,
pourvu qu'on garde une petite marge pour des arrangements locaux non
arbitrables, évidemment?
M. Myette: Nous devons vous dire en toute honnêteté
que, pour nous, c'est un champ de négociation locale.
M. Ryan: Merci.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Compte tenu du temps
qu'on s'était donné au départ, il resterait l'intervention
du député de Roberval et compte tenu de la souplesse qu'on m'a
accordée, je donnerais à Mme la députée de L'Acadie
la dernière partie de nos interventions, puisque 13 h 15 arriverait vers
38, mais il faut en même temps se rappeler que nous avons dix organismes.
Nous avons dix heures à notre disposition, ce qui implique qu'on devra
examiner la possibilité entre nous de dépasser minuit. M. le
député de Roberval.
M. Gauthier: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier
l'Association des cadres scolaires d'avoir présenté ce
mémoire et d'avoir attendu relativement longtemps pour être
entendue à cette commission. Pour bien situer le contexte de votre
témoignage, j'aimerais vérifier pour le bénéfice
des gens de la commission et de ceux qui nous écoutent qui sont ces
professionnels ou ces cadres que regroupe l'Association des cadres scolaires du
Québec. J'ai l'impression effectivement qu'elle regroupe l'ensemble des
cadres qui s'occupent de services financiers, de services administratifs, bref,
de spécialistes dans tous les domaines, y compris des cadres qui
s'occupent de direction d'enseignement et de vie étudiante dans les
commissions scolaires. Également, votre association, si ma
mémoire est fidèle, est divisée en grandes commissions
professionnelles qui s'occupent de chacun des secteurs d'activité.
Est-ce que ce que je vous dis est exact? Et, est-ce que le mémoire a
été, je pense qu'on peut en présumer,
préparé par la commission de l'enseignement, cet organisme qui
regroupe les cadres qui s'occupent de vie pédagogique et d'organisation
scolaire? Est-ce que c'est exact?
Le Président (M. Jolivet): M. Myette.
M. Myette: Effectivement, l'association regroupe tous les cadres
et gérants de toutes les fonctions autant pédagogiques
qu'administratives d'une commission scolaire, que ce soit de services dits
éducatifs, enseignement professionnel, adaptation scolaire, enseignement
général, mesures, évaluation et de toute la fonction
support, personnel, finances, équipement, transport, etc. et est
divisée en 16 commissions professionnelles représentant les 16
grandes fonctions de l'administration d'une commission scolaire. Le
mémoire qui vous est déposé est le résultat de la
concertation des avis de ces commissions professionnelles autant des services
éducatifs primaires, secondaires que des services personnels et autres
services à l'intérieur d'une commission scolaire.
M. Gauthier: Depuis les quelques jours que fonctionne cette
commission, on a pu noter, en tout cas particulièrement au moment du
témoignage des enseignants, que les préoccupations
soulevées étaient de trois ordres. Je pense qu'il y avait ce
qu'on peut appeler les exigences de base, la question de conserver l'emploi des
enseignants, tout le mécanisme de la sécurité pour leurs
membres; ce sont des exigences d'une corporation qui défend les
intérêts de ses travailleurs. Il y a un deuxième ordre de
préoccupation qu'avaient les enseignants et sur lequel porte
particulièrement votre mémoire; il s'agit de ces exigences pour
la qualité de la vie pédagogique. Il y avait également un
troisième ordre de préoccupation que j'ai pu noter:
c'étaient les exigences pour la qualité de la vie
professionnelle des enseignants. Mais revenons aux exigences de la CEQ
concernant la qualité de vie pédagogique. Elles regroupaient cinq
grandes préoccupations particulièrement: c'était d'abord
les heures de travail, l'augmentation de la tâche qu'on a essayé
de situer dans le contexte de l'organisation scolaire à venir. Les
directeurs généraux avaient ouvert une porte intéressante
à la fin de nos auditions vendredi dernier et je pense que vous venez de
confirmer cela. Les directeurs généraux des commissions scolaires
nous ont dit: "L'étalement de la tâche ne devrait pas
présenter de problème parce que cela nous permettra de
vérifier au fur et à mesure les problèmes qui se
poseront." Tout à l'heure, en réponse à une question du
député d'Argenteuil, je pense que vous avez confirmé cette
position; vous êtes totalement en accord avec cette position des
directeurs généraux, si je comprends bien.
Le Président (M. Jolivet): M. Myette.
M. Myette: Oui, effectivement, sur l'étalement.
M. Gauthier: D'accord. Il y avait une deuxième
préoccupation qui était celle du nombre d'élèves.
On nous a mis en lumière, à la commission, que le nombre
d'élèves par classe pourrait poser un problème parce que
la moyenne ne s'appliquait pas quand il y avait moins de dix groupes dans une
commission scolaire. Vous êtes les premiers, à ma connaissance,
qui apportez un éclairage nouveau là-dessus par le biais des
maximums de groupe. J'aimerais que vous m'expliquiez cela en quelques mots.
J'ai saisi difficilement cette approche dans votre mémoire.
M. Myette: Rapidement, on pourrait regarder l'annexe 3 du
mémoire. Comme vous le savez, les conventions collectives
prévoient, pour chacune des catégories d'élèves,
des moyennes et des maximums. Le maximum des catégories est de deux
élèves plus élevé que la moyenne. Alors, dans
l'exemple qu'on prend ici, on dit: "Une commission scolaire a une
clientèle de 33 élèves de déviations multiples au
primaire répartis dans quatre écoles, trois écoles avec
huit élèves et une école avec neuf élèves.
La convention 1979-1982 qui disait: Pour cette catégorie, maximum dix
élèves, moyenne huit élèves. L'application de la
convention 1979-1982 nécessitait cinq enseignants parce que nous
étions obligés, dans les écoles 1, 2, 3, de former un
groupe de huit élèves et, compte tenu de la restriction de la
moyenne à huit, dans l'autre école qui avait neuf
élèves, nous devions former deux groupes de cinq et quatre
élèves, ce qui nécessitait cinq enseignants.
Ce que la convention collective 1982-1985 fait, c'est que, compte tenu
que c'est le même maximum et la même moyenne, mais qu'il y a moins
de dix groupes et que la moyenne n'est pas nécessaire d'application,
elle permet dans l'école de neuf élèves de faire un seul
groupe et donc ne nécessite que quatre enseignants. C'est pour cela que
nous disons: Est-ce que la qualité était autant touchée
comme on l'a dit parce qu'il y a un groupe à neuf élèves
quand il y avait trois autres groupes de huit élèves et que, de
toute façon, le maximum, dans cet exemple, de dix ne peut pas être
dépassé sauf les conditions incluses dans la convention
collective?
M. Gauthier: J'aurais une autre question concernant les
spécialistes. À la page 12 de votre document, vous dites: "La
combinaison de ces deux garanties assurait la présence de
spécialistes pour l'équivalent de trois heures par semaine en
1983-1984 et de trois heures et demie par semaine en 1984-1985 et 1985-1986; ce
qui constitue une amélioration de services par rapport à
l'entente précédente." Comme on a eu quelques témoignages,
principalement de la CEQ qui disait plutôt le contraire, j'aimerais que
vous m'expliquiez cela. L'amélioration de la qualité, est-ce que
cela fait référence aux quelque six cents spécialistes de
plus dont le ministre a parlé à plusieurs reprises?
Le Président (M. Jolivet): M. Hamel.
M. Hamel (Michel): Nous vous signalons que c'est une
amélioration des services et non pas une amélioration de la
qualité. La nuance est de cet ordre. C'est plus de services,
c'est-à-dire qu'il va y avoir plus de possibilités d'organiser
des cours donnés par les spécialistes, ce qui ne fait pas
nécessairement la qualité parce que la qualité n'est pas
uniquement dépendante de la quantité de services qu'on
accorde.
M. Gauthier: D'accord. Une toute dernière question, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le
député.
M. Gauthier: On a vu également des gens parler de
différents modèles d'organisation pédagogique. Je sais que
vous êtes des spécialistes de ces modèles, vous essayez
d'en mettre au point qui soient le plus appropriés
régulièrement, je pense que c'est votre préoccupation
première.
Vous parlez du titulariat dans les deux premières années
du secondaire, à un moment donné, dans votre document. Je
voudrais savoir si vous avez fait, dans vos commissions scolaires respectives,
des
simulations sur ces modèles et s'il y a un modèle, selon
votre avis professionnel, qui serait nettement favorisé par le
décret ou qui serait à favoriser dans les prochaines
années. Et est-ce que cela apporte un changement par rapport à ce
qui existe actuellement?
Le Président (M. Jolivet): M. Giard.
M. Giard: Si vous le permettez, M. le Président, je vais
reprendre une phrase sur chacun des cinq éléments. Au niveau de
la tâche d'enseignement, je pense qu'il est important qu'on
répète que nous n'avons jamais demandé une augmentation de
la tâche des enseignants. Nous nous accommodons et nous pensons que
l'organisation est possible avec un accroissement de la tâche des
enseignants.
Quant à l'étalement, je pense qu'il est nécessaire
de dire aussi que l'étalement ce n'est pas le Pérou. Parce que,
dans l'année qui vient, si la moyenne d'enseignement des enseignants est
1050 minutes, cela veut dire que sur une tâche de 1250, il y a 200
minutes qui peuvent être consacrées à des activités
autres que des services aux élèves d'une façon
générale. Il faut bien concevoir que, l'année suivante, si
la moyenne d'enseignement augmente de 50 minutes, c'est qu'on réduit les
services complémentaires de 50 minutes. Et, l'année
d'après, si on augmente encore, on réduit encore et comme,
globalement, le nombre de professeurs est diminué à
l'intérieur de chaque école, je pense qu'il faut concevoir qu'il
y a là un problème d'organisation. C'est la raison pour laquelle
nous demandons l'étalement dans un contexte comme cela qui permette aux
gens de s'habiliter à gérer cette décroissance
d'année en année.
Quant au troisième élément sur le nombre
d'élèves par groupe. Il est sûr que si, à un moment
donné, on ne réussissait pas, pour des raisons qu'on ignore
maintenant, mais qu'on expérimentera, dans les années futures,
à atteindre la charge maximale des enseignants, cela voudrait dire que
le seul moyen de compenser ceci, c'est d'augmenter le nombre
d'élèves par groupe pour pouvoir assumer les mêmes
enseignements avec le même personnel. (11 h 45)
À partir de là, il est sûr qu'on ne peut pas
augmenter de beaucoup le nombre d'élèves par groupe, mais il
pourrait arriver, dans un contexte ou dans des écoles données,
particulièrement des petites écoles - il y en a beaucoup au
Québec - qu'on ne puisse pas aller à la tâche maximale pour
les enseignants, ce qui va se traduire nécessairement par une
augmentation du nombre d'élèves dans la classe. Il faut dire
toutefois, à la décharge de ceci, que le nombre actuel
d'élèves par classe est de l'ordre de 26, 27 dans l'ensemble des
commissions scolaires, alors qu'on parle d'un maximum de 32 et qu'on parle
souvent dans le langage courant, de 30. Il est nécessaire de
répéter ces choses.
Mon collègue a parlé des spécialistes, alors je
passe ce sujet pour revenir finalement au modèle pédagogique. Ce
qui est important pour nous, c'est que chaque école se dote d'un projet
éducatif - il est urgent que chaque école le fasse - et à
l'intérieur de cela, il y a des modèles d'organisation qui
peuvent aller dans un sens ou dans l'autre. Je donne ceci à titre
d'exemple: Si dans un modèle donné, on voulait, à toutes
fins utiles, que l'insistance se fasse sur la qualité des appuis
pédagogiques, que chaque enseignant puisse donner à ses
élèves un choix varié de situations d'apprentissage, etc.,
il faudrait opter dans un sens où chaque enseignant aurait plus de
groupes d'élèves pour faire bénéficier plus
d'élèves de ces habiletés au plan pédagogique,
alors que dans un autre modèle, on privilégierait plutât
une relation intime entre l'enseignant et ses élèves. Il faudrait
penser qu'on pourrait diminuer sur la qualité de l'acte
péagogique comme tel pour se prévaloir davantage de la
qualité de la relation humaine, la relation d'éducation. À
ce moment, le modèle qu'on recommande, particulièrement au
premier cycle du secondaire, est un modèle de titulariat, tel que vous
le mentionniez tantôt.
Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je vais poser de courtes
questions pour avoir des réponses courtes, compte tenu du temps. Ma
première question: Est-ce que le fait que les élèves du
premier cycle de l'élémentaire, en 1985-1986, auront les
mêmes heures d'enseignement que des élèves de secondaire V,
vous paraît normal et souhaitable? Je sais qu'il y a le problème
des autobus, ne m'en parlez pas, mais cela devrait être secondaire par
rapport aux enfants.
Le Président (M. Jolivet): M. Hamel.
M. Hamel: Dans un contexte où les enfants auraient
uniquement des cours, si l'augmentation était uniquement pour assurer
à ces enfants des cours, je vous dirais que c'est anormal. Cependant, il
est prévu des services complémentaires, des services particuliers
et des services personnels aux élèves dans le régime
pédagogique. À mon sens, ce temps doit passer à ce type
d'activité et aussi aux activités étudiantes. On sait que
pour atteindre les objectifs qui sont prévus dans le régime
pédagogique, on peut donner des cours, mais il y a aussi des
activités étudiantes types, par exemple, des
visites au musée, des visites au parlement, etc., dans chacune
des matières, qui permettent un développement pour les
enfants.
Mme Lavoie-Roux: II ne faudrait quand même pas
exagérer, parce que les activités parapédagogiques de
visites au musée, à la cabane à sucre ou au parlement, ce
sont des sorties éducatives qui arrivent quelques fois par année,
X nombre de fois par année. Quand vous dites, si je comprends bien,
à la page 11, que l'engagement gouvernemental confirmait pour les
classes du primaire un temps de présence de l'élève
égal à 24 heures, 24 h 30 et 25 heures, pour vous, il se peut
qu'il y ait une activité extrascolaire qui soit rattachée aux
activités d'enseignement. Pour la majorité des jours de classe,
est-ce que cela veut dire que les enfants auront le même nombre d'heures
de temps d'enseignement que les élèves du secondaire V, ou enfin
le deuxième cycle du secondaire?
M. Hamel: Je vous ai parlé uniquement des activités
de sorties qui existent dans l'année, mais il y a aussi à
l'intérieur des écoles des activités de détente,
des activités qui ont lieu par exemple sur les patinoires
continuellement pendant l'hiver, qui se tiennent au niveau de l'école
même, sans aller très loin. Évidemment, ces
activités sont reliées aux activités des programmes. Si on
regarde au niveau des spécialités, on parle de trois heures de
spécialité, mais les matières comme l'éducation
physique, l'anglais et les arts dépassent de beaucoup, si on regarde le
régime pédagogique, les trois heures de spécialité,
ce qui fait qu'elles sont complétées par ce type
d'activité.
Mme Lavoie-Roux: De toute façon, déjà
à l'élémentaire, particulièrement au premier cycle,
même durant la classe, le professeur ne doit-il pas constamment
diversifier son activité entre justement des activités de
détente physique, se lever, chanter, etc., parce que le temps de
concentration des enfants est très très court. Il est
évident qu'en éducation physique, ils vont faire de
l'éducation physique, ils ne feront pas de la géographie. Est-ce
que ceci n'est pas déjà prévu pour maintenir justement
l'intérêt des enfants, leur concentration et qu'augmenter ce
nombre d'heures d'enseignement n'atteindra peut-être pas les objectifs
que l'on vise?
Le Président (M. Jolivet): M. Myette.
M. Myette: Ce que nous devons vous souligner ici est que la
question des 25 heures est une préoccupation au sein de l'association.
Notre réflexion est la suivante. Au deuxième cycle, on n'y voit
pas tant de problèmes puisque les enfants ont déjà connu
jusqu'à 1500 minutes et même 1575 minutes. Mais, au premier cycle,
on s'interroge. D'ailleurs, nous avons soumis nos interrogations, et surtout
pour ces élèves qu'on appelle "des régions
éloignées", ceux qui ont à faire quand même beaucoup
de transport. Maintenant, quand on soulève cela, on est confronté
avec le fait qu'on se dit: Peut-être que la solution est de revenir
à cette époque où le deuxième cycle était
sur un temps X de minutes et le premier cycle sur un temps restreint. Mais
là, on est confronté avec le problème, non pas du
transport en termes du nombre de véhicules, etc., mais plutôt avec
le problème que, même à cette époque, les enfants du
premier cycle devaient attendre à l'école - je ne parle pas des
milieux urbains où les enfants n'ont pas besoin d'autobus - dans les
milieux ruraux, comme je le disais, l'autobus du deuxième cycle pour
s'en retourner chez eux. Dire qu'il n'y a pas d'interrogation et que cela ne
nous paraît pas problématique, nous confirmons effectivement que,
pour le premier cycle, surtout en première année et en
deuxième année, on s'interroge à savoir si l'enfant doit
faire 1500 minutes. Je dois vous dire qu'on n'a pas la réponse à
cette question, mais que nous escomptons que la recherche et les discussions
qui ont été amorcées avec les officiers du
ministère se continueront.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que vous avez apporté une
demi-réponse, en ce sens qu'il faudra peut-être avoir de la
flexibilité entre une région urbaine et une région moins
urbaine, pour ne pas obliger à une règle générale
et rigide pour tout le monde. Je trouve cela vraiment étonnant à
ma connaissance, c'est-à-dire d'après les observations qui m'ont
été faites et ce qui a été vécu dans les
écoles, d'avoir cela exactement sur le même pied. On apporte
déjà des divergences dans l'enseignement, de toute façon,
pour faire cette différence entre les plus jeunes et les plus vieux.
Je voudrais revenir à la question soulevée par le
député de Roberval. Dans l'exemple que vous nous donnez, à
l'annexe 3, finalement, cela ne fait pas tellement de différence parce
qu'au lieu de huit, il y en aura seulement un, et de toute façon, on en
prévoyait dix. Mais si vous prenez ce qu'on appelle "les groupes
fermés", les groupes d'enfants très handicapés, dès
que vous êtes à 8, vous êtes avec des enfants qui,
normalement, vont peut-être être intégrés dans les
classes. Éventuellement, ils peuvent être l'objet de
l'intégration; pas nécessairement, mais ils peuvent l'être.
Mais si vous prenez des groupes où c'est 5 et 7, des enfants avec des
handicaps multiples, des enfants aveugles, enfin ce type d'enfants; si vous
prenez par exemple 20 enfants et que
vous avez la possibilité d'utiliser quatre groupes, cela fait 5
par groupe. Vous avez le droit de le faire. Mais si vous êtes
obligés d'observer la moyenne, à ce moment-là, vous
êtes obligés de faire trois groupes de 7 et de toujours utiliser
le maximum. Je pense que cela fait une énorme différence dans le
cas des enfants handicapés très sérieusement de toujours
être obligés d'utiliser le maximum parce que, justement, en
fonction de la contrainte dudit groupe, vous ne pouvez plus utiliser la
moyenne. Alors, votre modèle peut s'appliquer dans l'exemple que vous
apportez, mais je ne crois pas que ce soit exactement la même chose dans
tous les cas et les enfants peuvent sûrement en porter le fardeau, comme
les professeurs d'ailleurs, dans ces cas-là, parce que c'est un
enseignement difficile.
Le Président (M. Jolivet): M. Myette.
M. Myette: Ce que je dois vous dire là-dessus est qu'il
est évident qu'on peut, sur cette mesure, charrier et mettre cela au
pire. Maintenant, pourquoi disons-nous que c'est limité au maximum?
Parce que c'est une réalité. Deuxièmement, pourquoi ne
pensons-nous pas, dans votre exemple, qu'une commission scolaire irait au pire,
c'est-à-dire récupérer des enseignants? C'est que la
règle d'allocation déjà déposée en janvier
prévoyait le maintien des ressources en adaptation et compte tenu que,
règle générale, entre la consultation et la
réalité, il y en a toujours un peu plus, on ne voit pas pourquoi
cela irait à un peu moins cette année. Dans ce sens, pourquoi la
commission utiliserait-elle à outrance cette règle qui est dans
la convention collective pour sauver des enseignants? En d'autres mots, pour
nous, cette partie de la convention collective n'est pas pour permettre de
récupérer le plus grand nombre de profs possible, c'est pour
permettre de mieux gérer les cas d'exception qui étaient devenus
plus gérables.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais bien qu'on parle de la même
chose. Je ne remets pas en question l'intégration d'un bon nombre
d'enfants dans les classes régulières, je vous parle des enfants
sérieusement handicapés. Si vous dites: On ne veut pas se servir
de la convention ou des décrets pour faire cela, ne le mettez pas dans
les décrets et dans la convention. Je regrette, mais je pense que mon
exemple n'est pas plus charrié que le vôtre dans votre annexe.
Le Président (M. Jolivet): M. Giard.
M. Giard: Je voudrais faire un commentaire le plus objectif
possible. Dans une commission scolaire, disons de 20 000 élèves
environ, on risque de trouver probablement un groupe de demi-entendants ou de
demi-voyants pour le primaire et un groupe pour le secondaire qui sera
probablement de trois ou quatre élèves sur une commission
scolaire de 20 000 élèves.
Si je continue avec 5 et 6, ce sont des handicapés tellement
lourds qu'ils se retrouvent en quantité infime dans chacune des
commissions scolaires, à moins qu'on n'ait des établissements
spécialisés comme l'Institut Louis-Braille, etc. Je pense qu'on
risque d'utiliser des cas extrêmes pour en faire des exemples courants en
faisant une argumentation sur ces cas-là. D'une façon
générale, les élèves qu'on trouvera plus souvent
dans les polyvalentes ou dans l'ensemble des écoles seront des
élèves dont le nombre par groupe se situe autour de 12. Dans ce
cadre-là, on considérait que 2 par rapport à 12, 14, 16 ou
18, etc. Cela n'avait pas un impact majeur sur la qualité de
l'enseignement. Je ne nie pas les remarques que vous faites, mais
c'était vraiment l'esprit de notre intervention.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. Tanguay voudrait
ajouter quelque chose.
M. Tanguay: Oui, je voudrais ajouter quelque chose pour Mme la
députée de L'Acadie. Dans notre commission scolaire, nous avons
des services pour les déficients profonds que sont les autistiques. Je
ne sais pas si vous avez déjà entendu parler de cette
catégorie de clientèle. Ils sont effectivement touchés par
des maximums et des moyennes de 5 et de 7 élèves. Chez nous, nous
présentions à notre commission, depuis trois ou quatre
années, des demandes d'allocations supplémentaires. Les
enseignants voulaient qu'on présente une demande d'allocations
supplémentaires pour faire qu'on aurait 1 enseignant par 3
élèves parce que ce sont vraiment des élèves
durement touchés.
Lorsqu'on regarde le genre de services qu'on doit rendre à ce
type de clientèle, il faut reconnaître que les enseignants ne sont
pas les seuls intervenants auprès d'elle. L'enseignant a un travail
précis à faire. Une fois que son travail est fait, il y a des
tâches auprès des élèves qui sont lourdement
handicapés, des tâches de répétition qui doivent
être faites. Par exemple, leur montrer à manger, leur montrer
à s'habiller, leur montrer à aller porter leur linge, des
tâches de socialisation de travail avec deux élèves, de
sorte que le professeur ou l'enseignant fait du travail auprès des
élèves et que les exercices qui s'ensuivent doivent être
faits par des techniciens spécialisés, par exemple, qui sont du
personnel de soutien.
Il y a aussi que dans une classe comme celle-là gravite autour de
classes de déficients profonds le groupe de professionnels de
l'école. On sait très bien
que les professionnels d'une école travaillent beaucoup plus
auprès des élèves en adaptation scolaire que des
élèves réguliers, il ne faut pas se le cacher, à
part les conseillers d'orientation, par exemple, ou les animateurs de
pastorale. De sorte qu'auprès de ces clientèles, il y a toujours
un élève ou deux qui est appelé à sortir de la
classe durant les heures de fonctionnement régulières. C'est
assez rare que le groupe se retrouve effectivement à sept durant une
semaine parce qu'il y en a un qui ira voir l'orthophoniste, l'autre ira voir
l'orthopédagogue, l'autre ira voir un psychologue... Vu qu'il n'y a pas
beaucoup de ces classes-là, il reste que le nombre
d'élèves par classe et pour de l'enseignement comme tel arrive
rarement à sept parce que le technicien spécialisé viendra
aussi jouer son rôle dans la classe.
Mme Lavoie-Roux: Juste une petite remarque, M. le
Président. J'ai travaillé avec des enfants qui souffraient
d'autisme et des enfants prépsychotiques ou qui souffraient de
névrose sérieuse dans des centres de jour. Bien qu'il y ait peu
d'enfants qui souffrent d'autisme que c'est peut-être même
difficile d'en retrouver sept à l'intérieur d'un même
groupe, je ne souhaiterais à aucun professeur de se retrouver seul, ne
serait-ce que des demi-heure ici et là, si tel était le cas, avec
sept enfants qui souffrent d'autisme ou qui sont des enfants
prépsychotiques. (12 heures)
Le Président (M. Jolivet): Merci. Maintenant, M. le
député de Dubuc, m'a demandé la parole. Je la lui accorde,
mais simplement en vous disant que le problème que j'ai c'est le temps.
M. le député de Dubuc.
M. Desbiens: Une petite précision très rapide
à la suite de la question de mon collègue, le
député de Roberval, sur le régime de titulariat, dans le
cadre d'un modèle pédagogique possible. Tout simplement, pour que
ce soit rapide, c'était une des propositions que vous faisiez au
ministère de l'Éducation, est-ce que vous jugez que
l'introduction d'un champ titulariat ce serait utile, nécessaire,
indispensable pour une organisation?
Le Président (M. Jolivet): M. Giard.
M. Giard: Je voudrais confirmer à M. le
député que nous recevrions avec agrément l'existence d'un
nouveau champ qui s'appellerait titulariat au premier cycle du secondaire.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Au nom des membres de la
commission, je vous remercie. J'inviterais la Québec Association of
Protestant School Boards, représentée par
M. Aalders, à venir en avant et à présenter les
collègues qui l'accompagnent. Vous pouvez y aller, M. Aalders.
Québec Association of Protestant School
Boards
M. Aalders (Wayne): Merci, M. le Président. J'ai
l'honneur, en tant que vice-président de l'Association des commissions
scolaires protestantes du Québec, de venir vers vous aujourd'hui. Je
profite de l'occasion pour vous présenter immédiatement d'autres
personnes de notre équipe qui, après notre présentation,
apporteront leur collaboration à répondre aux questions qui se
poseront à ce moment. À mon extrême droite, M. William
Smith, porte-parole de CPNCP. Avant d'avoir une question là-dessus, le
CPNCP, ce n'est pas une compagnie de transport ni une compagnie de
communications, c'est le Comité patronal de négociation des
commissions pour protestants. L'équivalent de CPNCC pour les
catholiques. Ici, à ma droite, M. Peter Krause, membre du CPNCP.
À ma gauche, M. Robin Drake, président du CPNCP. M. Michael
George, membre du CPNCP, et M. David Wadsworth, directeur général
de notre commission scolaire du Québec.
Je pense qu'il serait loisible dès le début de cette
présentation à votre commission d'expliquer à vous et
à tous ceux qui nous écoutent pourquoi nous participons à
ces audiences. L'Association des commissions scolaires protestantes du
Québec participe, aujourd'hui, afin de rappeler d'une façon nette
et claire sa préoccupation pour une éducation de qualité.
Elle participe, aujourd'hui, dans le vif et sincère espoir que les
délibérations de cette commission parlementaire trouveront les
moyens de résoudre l'impasse actuelle dans le secteur de
l'éducation. Notre objectif est de présenter notre position et
les raisons pour lesquelles nous avons pris cette position. Nous ne sommes pas
ici simplement pour critiquer les autres parties dans ce conflit parce que la
confrontation, M. le Président, n'est pas une façon de
régler nos problèmes.
Au cours des dernières semaines, nous avons vécu une lutte
entre le gouvernement et les syndicats. Comme nous le savons, le gouvernement a
dû jouer un double rôle dans le déroulement des
événements qui nous ont menés là où nous
sommes aujourd'hui. D'une part, le gouvernement était le
négociateur face aux syndicats des enseignants. D'autre part, il
était le législateur. Dans son premier rôle de
négociateur, le gouvernement avait -et il l'a toujours - l'Association
des commissions scolaires protestantes du Québec comme partenaire dans
les négociations avec les enseignants protestants. Dans son
deuxième rôle de législateur, il agit seul et sans
partenaire. Tout en gardant notre
respect et notre loyauté envers notre partenaire
négociateur, nous déclarons deux choses très importantes:
la première, c'est que nous ne pouvions pas innocenter la grève
des enseignants que nous considérons comme illégale; la seconde,
c'est que nous ne pouvions admettre une loi qui enlève les droits de la
personne, une loi que nous trouvons inacceptable.
Puisque nous parlons de l'éducation, nous avons beaucoup entendu
parler du secteur public et je suis sûr que nous en entendrons parler
davantage. Mais je me permets de vous rappeler que ce sont les taxes des
individus et les taxes imposées au secteur privé qui remplissent
les coffres publics. Or, le secteur privé, j'en fais partie et je peux
vous dire qu'au cours des dernières années les investissements
des entreprises privées au Québec ont beaucoup diminué. Il
y a, bien sûr, plusieurs raisons pour cette baisse, mais nous nous devons
de souligner à la fois le contexte économique et les politiques
gouvernementales. Le chômage et les profits nettement réduits du
secteur privé ont suscité une diminution, une chute même
des revenus du gouvernement du Québec lesquels, à leur tour,
imposent donc une forte limite aux ressources financières prévues
pour faire face à nos obligations et réaliser nos
espérances dans le secteur de l'éducation.
Nous n'avons pas l'intention de répéter tous les chiffres
qui ont été donnés à cette commission, mais voici
quelques chiffres de Statistique Canada confirmés par le Québec
pour l'année 1982. Le nombre de banqueroutes personnelles au
Québec a été de 8868 et au Canada, de 30 643. Le nombre
d'entreprises en faillite au Québec a été de 4368 et au
Canada, de 10 765. Au Québec, le taux de chômage est très
élevé, soit 15,3% globalement, tandis que, pour les jeunes
travailleurs entre 19 et 25 ans, le pourcentage est de l'ordre de 26%.
Nous, les commissions scolaires protestantes, un des partenaires de la
partie patronale, sommes chargées de la bonne gestion de nos ressources
et sommes, en même temps, très conscientes de la
réalité économique. Le secteur de l'éducation se
trouve investi par des demandes venant de ceux qui n'ont pas le souci de se
comparer avec d'autres membres de notre société. Les
règlements concernant les salaires et les conditions de travail des
années soixante-dix ne sont plus valides car nous sommes en 1983 et les
règles du jeu ont changé. En tenant compte des restrictions
salariales imposées par les règles budgétaires et des
provisions pour la tâche des enseignants plus élevée
à l'extérieur du Québec, il est nécessaire
d'augmenter la tâche des enseignants au Québec dans le but
d'augmenter la productivité de tous ceux qui sont sur le marché
du travail. Nous sommes malheureusement poussés à croire
qu'aujourd'hui la position des syndicats et des enseignants et leurs
activités sont plutôt reliées au processus qu'au
défi des faits.
Avec votre permission M. le Président, je voudrais jeter un
rapide coup d'oeil sur les conditions de travail des enseignants au Canada.
C'est dans ce contexte économique et éducatif que nous avons cru
important de procéder à une comparaison de la situation qui
prévaut dans les juridictions scolaires des autres provinces
canadiennes. Bien que l'Association des commissions scolaires protestantes du
Québec soit consciente des problèmes financiers du gouvernement
et de la comparaison avec la réalité du secteur privé,
notre première perspective demeure celle d'un éducateur. Nous
avons pensé, il y a longtemps, que le système scolaire
québécois avait des problèmes beaucoup plus sérieux
que ceux des autres provinces à cause de la convention collective des
enseignants.
Nous ne voulons pas vous laisser avec l'impression que tous les
problèmes de notre système sont dus à la convention des
enseignants ou que tout va bien ailleurs. Néanmoins, avant le
début de cette ronde de négociations, nous désirions voir
si les conditions de travail des enseignants au Québec étaient
substantiellement différentes de celles qui prévalent ailleurs
et, si oui, quel effet cela avait, positif ou négatif, sur notre
système.
Au tout début des audiences de votre commission, nous avons eu
l'occasion d'entendre M. Jacques Girard, le sous-ministre, qui a mis en relief
les chiffres et les données concernant les conditions de travail
à l'extérieur du Québec. Nous nous contenterons donc de
faire une simple comparaison entre quelques éléments en vigueur
durant l'année scolaire 1981-1982 en Ontario et au Québec. Le
nombre de jours d'enseignement: en Ontario 185, au Québec 180. En ce qui
concerne l'horaire des élèves du secteur primaire: en Ontario,
1500 minutes par semaine et 1380 minutes par semaine au Québec; au
secteur secondaire: 1520 minutes par semaine en Ontario et 1500 minutes, au
Québec. Le temps moyen d'enseignement au secteur primaire: 23,5 heures
par semaine en Ontario et 20,5 heures par semaine au Québec. En ce qui
concerne le secondaire: 20,5 heures par semaine en Ontario et 16,6 heures par
semaine ici, chez nous. (12 h 15)
On constate donc qu'en 1981-1982 l'élève ontarien du
secteur primaire recevait 8,7% plus d'enseignement que l'élève
québécois et que l'élève du secondaire en recevait
1,3% de plus que l'élève québécois. Par contre,
l'enseignant ontarien au secondaire enseignait 23,5% plus que l'enseignant au
Québec et l'enseignant
ontarien au primaire enseignait 14,6% plus que l'enseignant
québécois. Ajoutons que les moyennes et les maxima par groupes
d'élèves sont les mêmes dans la nouvelle convention que
dans l'ancien contrat, à savoir 25 comme moyenne et 27 comme maximum
pour le premier cycle du primaire et 27 comme moyenne et 29 comme maximum pour
le deuxième cycle et, enfin, une moyenne de 30 et un maximum de 32 pour
les classes ordinaires du secondaire.
En Ontario, les enseignants sont présents à l'école
pour la durée de l'horaire des élèves, ainsi que pour la
surveillance avant et après cet horaire, tandis qu'au Québec les
enseignants ne sont disponibles que pour une partie de l'horaire. On peut donc
soutenir que les conditions de travail des enseignants au Québec
constituent une anomalie par rapport au reste du Canada.
Les conclusions de cette étude sont également
renforcées par les divers ateliers et congrès éducatifs
auxquels nos représentants ont assisté. Lorsque les
représentants de chacune des provinces se parlent de tel ou tel aspect
de la convention collective des enseignants, le Québec est toujours
l'exception; ce sont toujours les commissions scolaires
québécoises qui ont moins de flexibilité et plus
d'entraves dans l'administration qu'ailleurs. Il est temps de mettre fin
à ces exagérations, de stabiliser les conditions au
système scolaire et de concentrer nos efforts sur l'acte
pédagogique et les services complémentaires à offrir aux
élèves.
C'est dans cet esprit que nous abordons maintenant les
éléments de la nouvelle convention, dont le but est d'assurer une
plus grande flexibilité aux gestionnaires du système et
d'améliorer la qualité des services à la clientèle,
les élèves.
Premièrement, l'employeur doit avoir la prérogative
d'utiliser le personnel dans le but d'offrir les meilleurs services possible
aux étudiants. Généralement parlant, dans l'entreprise
privée, personne ne niera à l'employeur le droit d'utiliser son
personnel de la façon la plus efficace. De même, l'Association des
commissions scolaires protestantes du Québec maintient que la commission
scolaire a le droit d'évaluer les qualifications du personnel; de
déterminer les besoins et les objectifs de la commission; d'affecter son
personnel dans le but de fournir des services, tout en respectant les droits
des employés.
Une partie intégrante du système de gestion que notre
association a la pleine intention de maintenir, c'est le principe de consulter
les diverses sections de la communauté scolaire, y compris les syndicats
des enseignants.
Il serait important de bien souligner pourquoi notre association est
convaincue que nos commissions scolaires doivent retenir ces droits de base.
Pourquoi ces droits aux commissions scolaires? Parce qu'elles sont les
employeurs légaux; parce que les commissions scolaires sont, à
toutes fins, responsables des fonds publics; parce que la communauté
fait partie de la commission scolaire, tout comme le groupe élu, et que
cette commission a la responsabilité de fournir les meilleurs services
éducatifs possible aux étudiants; parce que le syndicat qui
représente les employés concernés n'est qu'un seul groupe
représentant une seule partie de la communauté. N'oublions pas
les parents, les contribuables, les comités d'école, etc.
La flexibilité est en vigueur dans toute entreprise aujourd'hui.
Nos écoles ne doivent pas être des exceptions. Une plus grande
souplesse dans la gérance de nos écoles nous permettra
l'utilisation maximale de nos ressources afin d'améliorer
l'éducation de nos enfants.
Deuxièmement, les employés doivent être
présents au lieu du travail durant les heures de travail. Il est normal
dans n'importe quelle entreprise que l'employé soit présent
pendant les heures de travail. Dans nos offres actuelles, nous exigeons que
l'enseignant soit présent à l'école 27 heures par semaine.
Cette réintroduction de la présence à l'école
permettra de revoir les sortes d'interactions qui ont manqué pendant les
dernières années: entre enseignants et enseignantes, entre
enseignants et élèves, entre enseignants et professionnels non
enseignants, entre enseignants et direction d'école, entre enseignants
et parents ou autres. Cela nous permettra également de
réintroduire un climat favorable dans le but de garder nos écoles
humanisées.
Troisièmement, l'employeur doit avoir la prérogative de
définir la tâche globale de l'enseignant dans le but d'offrir les
meilleurs services possible aux étudiants. Nous voulons revenir à
la notion d'une tâche globale au lieu d'une tâche
compartimentée telle qu'elle existait dans le contrat antérieur.
La tâche des enseignants comprenait alors un minutage infini et contenait
des limites sur le nombre de minutes d'enseignement proprement dit, le nombre
de minutes de surveillance, le nombre de minutes pour la
récupération et le nombre de minutes pour l'encadrement.
Un seul exemple vous montrera, j'en suis sûr, combien nous avions
les poings liés. Supposons que dans une école secondaire je
veuille offrir sept périodes de mathématiques par semaine et que
chaque période dure 50 minutes. Supposons que j'aie trois groupes
d'élèves à un certain niveau, trois fois sept
périodes de mathématiques nous donne 21 périodes par
semaine. Or, si j'avais été directeur de l'école sous
l'empire de l'ancien contrat, je n'aurais pas pu demander à un seul
enseignant d'accepter cette tâche, car ce contrat stipulait que le
maximum était de 20 périodes de 50 minutes par semaine. En
tant que gestionnaire des ressources humaines, je n'aurais pas eu la
flexibilité de lui faire faire cette 21e période, quitte à
lui donner moins de surveillance, disons.
C'est pourquoi nous voulons une tâche globale qui serait
déterminée par la convention collective, une tâche globale
qui comprendra tous les éléments pertinents, tels que la
récupération, l'enseignement proprement dit, l'encadrement et la
surveillance en rotation afin de nous permettre de gérer efficacement et
de fournir les meilleurs services possible à l'intérieur du cadre
de financement et des ressources humaines disponibles. Les besoins
spéciaux des étudiants doivent être prioritaires, ainsi que
les besoins des programmes et de l'organisation scolaire.
Quatrième point: les exigences d'un poste donné doivent
être une des composantes à être considérées
par la commission scolaire lors d'une déclaration de surplus. Le
mécanisme proposé pour la détermination du surplus de
personnel enseignant veut respecter la nuance délicate qui doit exister
entre les besoins précités et le droit de l'employé
d'être protégé des décisions arbitraires et sans
fondement. L'employeur doit respecter l'ancienneté de ses
employés tout en gardant suffisamment de souplesse dans le processus
pour offrir les services éducatifs qu'exige le système scolaire.
Autrement dit, nous voulons que la commission scolaire, comme employeur, puisse
effectuer un système d'éducation de qualité pour nos
enfants.
Notre but n'est pas de faire une déclaration de surplus sommaire,
mais de bien sélectionner les employés en tenant compte de leur
ancienneté et de leurs qualifications pour ainsi répondre aux
exigences des postes à combler. Il va sans dire que, dans chaque cas
où deux employés ou plus peuvent remplir le même poste,
c'est le plus ancien qui reste et qu'afin de protéger les droits de
l'individu, un mécanisme d'arbitrage est prévu.
Un autre facteur important est que notre système n'empêche
pas les enseignants d'accepter différentes affectations d'une
année à l'autre ni de changer leur affectation pour
répondre aux besoins particuliers de l'école et de ses
étudiants.
Pour résumer, la déclaration de surplus n'a jamais
été conçue comme un moyen de vider l'école des
enseignants incompétents, ni de baisser l'âge moyen des
enseignants dans une commission scolaire donnée. Le seul but est de
prévoir un moyen de réduire le nombre d'enseignants dans une
commission scolaire sans réduire la qualité des services aux
étudiants et ce, en tenant compte des moyens financiers mis à la
disposition de nos commissions scolaires.
Vous aurez sans doute constaté, M. le Président,
que nous n'avons nullement tenté aujourd'hui de faire une étude
profonde des conventions collectives telles qu'établies par la loi 105.
Nous demeurons disponibles, pendant la période des questions, pour vous
fournir tout autre détail. Il nous paraît loisible,
néanmoins, de souligner aux membres de votre commission, M. le
Président, aussi bien qu'aux enseignants et à la population en
général que la convention visant le secteur protestant contient,
entre autres: l'année de travail de 200 jours pour les enseignants; une
semaine de travail de 27 heures de présence à l'école dans
un cadre de 35 heures par semaine; le maintien des mêmes maximums par
groupe d'élèves que dans l'ancienne convention; une compensation
financière pour le dépassement des maximums; le maintien au
niveau de la commission scolaire des mêmes moyennes
d'élèves par groupe que dans l'ancien texte, lorsqu'il y a 10
groupes ou plus d'un même type d'élèves à la
commission scolaire; un système de déclaration de surplus qui
rendra de meilleurs services aux élèves que le processus de
l'ancienne convention; le maintien de dispositions favorables en ce qui
concerne les congés de maternité, de paternité et pour
l'adoption. (12 h 30)
Nous nous permettons de vous rappeler, M. le Président, et
à tous ceux qui nous écoutent, nos quatre objectifs de
première importance: l'employeur doit avoir la prérogative
d'utiliser le personnel dans le but d'offrir les meilleurs services possible
aux étudiants; les employés doivent être présents au
lieu du travail durant les heures de travail; l'employeur doit avoir la
prérogative de définir la tâche globale de l'enseignant
dans le but d'offrir les meilleurs services possible aux étudiants; les
exigences d'un poste donné doivent être une des composantes
à être considérées par la commission scolaire lors
d'une déclaration de surplus.
Nous avons signalé que, de temps en temps, deux rôles du
gouvernement s'avèrent incompatibles l'un à l'autre: le
gouvernement comme partenaire négociateur et !e gouvernement comme
législateur. Ce dernier obstrue le premier. Durant cette ronde de
négociations, certains aspects de la législation adoptée
ont eu une influence négative sur l'ambiance des
négociations.
Nous sommes convaincus que les enseignants au Québec se doivent
d'augmenter leur contribution au processus de l'éducation. Tel que nous
l'avons indiqué dans notre représentation, cette contribution
augmentée mettra les enseignants du Québec sur un pied
d'égalité avec leurs confrères à l'extérieur
du Québec et rendra leurs services plus rentables quant aux conditions
financières.
Pour nous, les prérogatives d'employeurs sont de première
importance afin de fournir
à nos enfants les meilleurs services possible. Or, la
qualité de ces services est liée directement aux décisions
prises à l'égard du personnel enseignant. Et puisque les
commissions scolaires sont l'autorité légitime au niveau local et
responsables pour les services éducationnels, il nous faut maintenir les
contrôles nécessaires pour exécuter notre mandat.
Finalement, M. le Président, nous voulons préciser que,
pendant les audiences de cette commission parlementaire de l'éducation,
l'Association des commissions scolaires protestantes du Québec a fait
des recommandations à notre partenaire en négociations, le
ministère de l'Éducation, dans le but de trouver les solutions
équitables au conflit actuel entre les comités patronaux et les
enseignants et enseignantes du Québec. Ce sont les offres patronales que
le ministre rendra probablement publiques plus tard au cours de la
journée.
Afin de respecter notre protocole de négociations avec le
ministère de l'Éducation, nous ne pouvons aujourd'hui annoncer
publiquement nos recommandations, mais nous pouvons dire que nous avons
proposé l'idée d'une tierce partie pour nous aider à
régler la présente impasse. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.
M. Laurin: M. le Président, je voudrais remercier
l'Association des commissions scolaires protestantes du Québec pour son
mémoire marqué au coin du réalisme, de la
responsabilité administrative et de l'efficacité de la gestion.
L'association nous a rappelé à bon droit le contexte
économique changé, beaucoup plus difficile que par le
passé, dans lequel se situe la présente négociation.
L'association nous a recommandé de tenir compte de la capacité de
payer des Québécois dans cette ronde de négociations
collectives, d'autant plus que la convention collective antérieure
comportait des avantages sur le plan de la tâche qui rendaient la
situation des enseignants québécois supérieure à
celle de tous les autres enseignants canadiens. À bon droit,
l'Association des commissions scolaires protestantes dit que même, s'il y
a lieu maintenant d'augmenter la productivité des enseignants, cette
augmentation de la productivité, en principe, ne devrait pas amener une
détérioration des services dans la mesure où elle se
situerait encore à un niveau comparativement avantageux ou égal
à celle qui prévaut dans les autres provinces canadiennes.
Je ne voudrais pas m'étendre sur ce sujet, je voudrais simplement
poser deux questions à l'Association des commissions scolaires
protestantes, une question sur un sujet qui n'a pas été
touché dans la présentation et un autre qui n'a été
que très brièvement évoqué. La première a
trait à la différence dans les décrets en ce qui concerne
la situation qui prévaudra dans le secteur catholique et celle qui
prévaudra dans le secteur protestant. Il y a, en effet, des
différences dans les décrets à cet égard.
Peut-être les membres de la commission parlementaire ne l'ont-ils pas
remarqué, peut-être l'ont-ils remarqué aussi, mais on n'a
pas eu l'occasion d'en faire état jusqu'ici: il y a des
différences entre les décrets qui s'appliquent aux enseignants du
secteur protestant et à ceux du secteur catholique. Ce souci de la
différence ou ce respect du droit à la différence
était important pour le gouvernement. Je voudrais vous demander ceci:
Pourquoi pensez-vous important de maintenir ces dispositions
particulières à l'endroit du réseau protestant?
Ma deuxième question porte sur l'évaluation des
personnels. De fait, vous êtes les premiers intervenants à faire
état de cette préoccupation des commissions scolaires pour
l'évaluation des personnels. Ma question serait donc la suivante: Le
décret vous donne-t-il davantage satisfaction à cet égard
que l'ancienne convention collective de 1979-1982?
Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.
M. Aalders: M. le Président, en ce qui concerne la
première question, nous avons toujours cru que notre système
était différent du système catholique. En ce sens, il faut
qu'il y ait des différences dans les conventions collectives et dans les
décrets. Je demanderai à M. Drake de répondre à la
première question.
Le Président (M. Jolivet): M. Drake.
M. Drake (Robin): M. le Président, pourquoi doit-il y
avoir des différences dans les décrets pour les commissions
scolaires protestantes? Il y a toutes sortes de raisons, mais à la base,
c'est un fait historique qui touche toutes sortes de choses dans notre
réseau. Nous vivons ici au Québec, mais nous vivons dans un
contexte d'Amérique du Nord avec nos partenaires de langue
française, ici au Québec. Nous sommes touchés beaucoup
plus, spécialement dans l'éducation, par les autres provinces du
Canada et les États-Unis pour les manuels scolaires, pour toutes sortes
de choses qui viennent de chez eux et par toute leur expérience.
Seulement un exemple d'une de ces différences, et je pense que c'est une
différence de base: dans le secteur catholique ici au Québec, si
on parle des classes combinées au primaire, cela veut dire deux
étapes dans une même année. Dans le secteur catholique,
c'est un minimum de classes. Dans notre secteur, c'est une vaste
majorité, malheureusement, diront certaines
personnes. Pourquoi la différence dans le secteur catholique? Les
directeurs d'école et les commissions scolaires ont décidé
de déménager les enfants d'une école à une autre
pour équilibrer le nombre d'enfants à un certain niveau. L'autre
raison, c'est qu'il y a plus de francophones ici au Québec que
d'anglophones. Leurs écoles, en général, sont beaucoup
plus proches. C'est beaucoup plus facile que dans notre secteur de transporter
les élèves d'une école à une autre.
Il y a un autre effet, pour la même chose, qui nous touche. Depuis
quinze ans, dans le secteur protestant, nous avons poursuivi l'idée que
l'enfant doit aller à son propre rythme pour son apprentissage, pour son
éducation. Cela veut dire que les enfants qui commencent leur
année scolaire en maternelle ou en première année peuvent
aller à des rythmes différents, tenant compte de leurs besoins.
Du moment où vous commencez, à l'école primaire, à
dire qu'un enfant avance à son propre rythme, il faut Tiettre les
classes ensemble, il faut détruire les barrières qui disent qu'il
faut un an pour compléter un an de scolarisation, que tous les enfants
de première année doivent être au même niveau en
deuxième année et ainsi de suite. Il y a des différences
semblables qui sont en partie historiques, en partie causées par la
situation dans laquelle on se trouve dans le contexte nord-américain. Ce
sont aussi, en partie, des différences... Je cherche un mot. Je
m'excuse, M. le Président. J'ai encore de la difficulté en
français. J'essaie de m'améliorer.
Une voix: Culturelles.
M. Drake: Culturelles. C'est le mot que je cherchais.
M. Aalders: En ce qui concerne la deuxième question, M. le
Président, je demanderai à M. Krause d'y répondre.
Le Président (M. Jolivet): M. Krause.
M. Krause (Peter): M. le Président, le ministre de
l'Éducation réfère sans doute au principe contenu dans
notre présentation, à savoir que l'employeur doit avoir la
prérogative d'utiliser le personnel dans le but d'offrir les meilleurs
services possible aux étudiants. Il est clair que c'est un principe
auquel nous tenons beaucoup et que nous avons pu exercer jusqu'à
maintenant, dans les conventions collectives qui ont existé dans le
secteur protestant, avec assez de souplesse et assez de succès en termes
du type de services qu'on a rendus à nos élèves jusqu'ici.
C'est peut-être relié un peu à la réponse qu'a
donnée M. Drake auparavant et c'est une flexibilité qu'on trouve
très importante. Je voudrais ajouter que, si on regarde, par exemple,
certaines conditions de la convention collective qui ont évolué
avec le temps, l'une d'entre elles est la détermination de surplus. On
voit que, dans la convention collective antérieure, on avait une
très grande ouverture en termes de détermination de ces surplus.
C'était un système où on créait un bassin
d'enseignants avec moins d'ancienneté et, après cela, la
commission scolaire tirait de ce bassin les enseignants dont elle avait besoin
pour donner les services dans ses écoles. Le décret actuel essaie
de respecter cette flexibilité qui existait dans les anciennes
conventions pour que les commissions scolaires puissent continuer à
donner un bon service aux étudiants dont elles ont la
responsabilité.
Le Président (M. Jolivet): Merci, M. le
député d'Argenteuil.
M. Ryan: Messieurs les délégués de la Quebec
Association of Protestant School Boards, we are happy to welcome you here this
morning for this exchange on the problems relating to the dispute between the
teachers of the Province of Québec, the Government and the school boards
of which you are an important part. We listened to your presentation with
interest and profit. There are a few questions which derive from your
presentation which we will be glad to address to you. (12 h 45)
II y a une première question que je voudrais vous poser. Elle se
rattache à une observation que vous avez faite à l'occasion de
contacts faits à l'extérieur du Québec. Vous dites, au
début de votre mémoire, qu'à l'occasion de congrès
où vous êtes allés à l'extérieur du
Québec ou de rencontres avec des collègues d'autres provinces,
vous avez constaté qu'en général les contraintes qui
pèsent sur la gestion du système d'enseignement sont beaucoup
plus lourdes au Québec que dans les autres provinces. Vous dites, entre
autres: "Lorsque les représentants de chacune des provinces se parlent
de tel ou tel aspect de la convention des enseignants, le Québec est
toujours l'exception. Ce sont toujours les commissions
québécoises qui ont moins de flexibilité et plus
d'entraves dans l'administration qu'ailleurs."
J'ai deux questions à ce sujet. Tout d'abord, pourriez-vous nous
donner un certain nombre d'exemples de ces contraintes plus lourdes au
Québec, en plus de celles qui sont mentionnées dans votre
mémoire? Vous avez donné quelques chiffres, dans votre
mémoire, sur les heures d'enseignement en particulier.
Deuxièmement, est-ce que vous ne faites pas la même constatation
en ce qui concerne la réglementation et les contrôles
exercés par le ministère de l'Éducation sur les
administrations locales? Pourriez-vous donner
aussi des exemples de cela?
Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.
M. Aalders: Pour la première question, M. le
Président, je demanderai à M. Smith de répondre; il est au
courant d'une étude qui a été faite dans toutes les
provinces.
Le Président (M. Jolivet): M. Smith.
M. Smith (William G.): Merci, M. le Président. En ce qui a
trait à la question des contraintes plus lourdes qui se trouvent dans
les conventions collectives des enseignants au Québec, je pense que les
exemples sont nombreux. On a juste à regarder l'entente 1979-1982 pour
voir le genre de minutage dont il était question dans la
présentation il y a quelques minutes. Les dispositions de la convention
précisent le nombre de minutes qui peuvent être affectées
à l'enseignement, le nombre de minutes qui sont limitées pour la
surveillance, les moyennes et les maxima de groupe pour différentes
catégories. Il y a aussi la question dont le représentant de
l'Association des cadres scolaires a parlé tantôt quant au
régime pédagogique et au type d'organisation qui est possible
dans l'école. On pourrait également référer aux
ententes locales qui existent en quantités industrielles au
Québec et qui contiennent de nombreuses clauses comme la consultation,
l'affectation et la répartition des fonctions et responsabilités
des enseignants.
Ces textes constituent en moyenne, si on prend la partie nationale avec
la partie locale, des ententes collectives de 200 à 300 pages. Quand on
regarde les conventions collectives à l'extérieur du
Québec, elles ont en moyenne une douzaine ou une quinzaine de pages et,
généralement parlant, se limitent à la description pure
des conditions de travail des enseignants, à savoir les échelles
de traitement, les processus de grief et le type de conditions qu'on trouve
normalement dans les conventions collectives du secteur privé. Les
clauses traitant de la description de la tâche d'un enseignant,
l'organisation pédagogique des écoles, etc., ne se trouvent pas,
généralement parlant, dans les conventions collectives à
l'extérieur du Québec.
Le Président (M. Jolivet): La deuxième partie, par
M. Aalders.
M. Aalders: En ce qui concerne la réglementation, si j'ai
bien compris votre question, M. le député d'Argenteuil, c'est
vrai qu'il y a plusieurs exigences de la part du ministère de
l'Éducation du Québec, comparé aux autres provinces. En ce
qui concerne la documentation concernant le personnel, il y a plusieurs
formules, plusieurs questionnaires qu'il faut remplir ici au Québec et
qu'on n'a pas à remplir dans les autres provinces. Ici, nous avons le
régime pédagogique qui est un autre projet, peut-être plus
spécifique au Québec que dans les autres provinces, qui exige
d'autres renseignements mais, dans l'ensemble, nous avons la tendance, comme
commission scolaire, à répondre à ces demandes et ce n'est
pas vraiment le problème le plus important que nous avons.
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: J'aurais deux observations, avant de passer à une
autre question. D'abord, je remarque que M. Smith, si je le reconnais bien, est
celui qui accompagnait les sous-ministres l'autre soir, quand ils sont venus
devant la commission ici. Je constate, par conséquent, qu'il y a des
relations de bon voisinage, d'association étroite entre, au moins, une
partie de votre délégation et le ministère. Je ne vous
fais pas grief; je souhaiterais seulement que le même esprit de
compagnonnage existe en relation avec la loi 101 et peut-être sur
d'autres sujets. Je pense qu'à ce moment il y aurait une harmonie encore
plus grande.
Cela étant dit, je vais vous apporter tantôt, M. Smith, si
mon collègue peut la retrouver, une convention collective de l'Ontario
qui a plus que douze pages. J'en ai examiné une ces jours-ci et cette
convention que j'ai examinée a au moins une bonne soixantaine de pages.
Elle traite à peu près des mêmes sujets que nos conventions
ici; elle n'est pas aussi détaillée encore, mais la tendance s'en
va de ce côté. Le syndicalisme s'est développé
à un rythme différent en Ontario. Je ne pense pas qu'on pourrait
laisser croire au public que là-bas ils marchent avec des petites
conventions de douze pages parce que c'est de moins en moins vrai. En tout cas,
je vous la montrerai tantôt et j'espère qu'on va me la retracer
avant la fin de la séance. Je pense qu'elle est un peu plus
détaillée que cela, maintenant, et qu'on y traite d'autres sujets
que de ceux que vous avez mentionnés.
Est-ce que j'ai bien compris? Vous dites: Au point de vue
contrôle, centralisation, réglementation, ce n'est pas tellement
différent au Québec d'ailleurs.
M. Aalders: On a plus d'exigences, M. le député, en
ce qui concerne la documentation surtout.
M. Ryan: C'est tout ce que vous avez à dire
là-dessus, vous?
M. Aalders: Oui.
M. Ryan: Très bien. Je pense qu'on va en entendre parler
en Chambre souvent. J'espère que ce sont les déclarations
que vous faites en général sur ce sujet et qui vont dans
le même sens.
Celle que j'ai ici, juste pour terminer mon intervention de
tantôt, c'est la convention du Conseil scolaire de Sudbury, qui compte
une quarantaine de pages. Je regarde les sujets qui y sont traités. Il y
en a toute une liste. Je ne veux pas les énumérer parce que ce
serait trop long, mais ce sont des sujets qui sont pas mal les mêmes que
ceux dont on traite dans nos conventions, avec, encore une fois, à
certains endroits des contraintes moindres, parce que ce n'est pas une
convention centralisée. Cela couvre uniquement le Conseil scolaire de la
région de Sudbury, mais cela traite pas mal de sujets, finalement.
Il y a une question qui m'est venue à l'esprit en vous
écoutant tantôt, parce que vous faisiez des comparaisons avec
l'entreprise privée. Vous dites: "Généralement parlant,
dans l'entreprise privée, personne ne niera à l'employeur le
droit d'utiliser son personnel de la façon la plus efficace". Je
voudrais simplement vous signaler à ce sujet que, dans les entreprises
d'une certaine taille, on a des conventions collectives qui précisent,
en général, avec beaucoup de clarté, les domaines que
doivent respecter les employeurs dans l'utilistion des ressources humaines de
l'entreprise. Si vous regardez les conventions collectives dans le domaine des
chemins de fer, dans le domaine de l'aviation, dans le domaine de l'imprimerie
et dans combien d'autres domaines, vous constaterez que les syndicats en
général veillent avec un soin jaloux à éviter que,
dans l'affectation des ressources, on ne fasse travailler des personnes dans
des domaines qui sont occupés par tel ou tel syndicat. Prenons
l'industrie de la construction, par exemple. Je pense que c'est une des
conséquences de la syndicalisation qu'elle entraîne certaines
contraintes que doit respecter l'employeur dans l'exercice de ce pouvoir
d'utilisation de son personnel que je reconnais, moi aussi.
Je ne voudrais pas qu'on ait l'impression qu'on pourrait se contenter de
régler ce problème dans deux lignes. En effet, si ces contraintes
se sont développées dans les entreprises d'une certaine taille,
il est assez compréhensible qu'on doive tenir compte d'un certain nombre
de contraintes également dans le secteur public et, en particulier, dans
le secteur de l'éducation. Qu'il faille aller moins loin qu'on est
allé jusqu'à maintenant dans certains cas, je pense que c'est un
domaine ouvert à la discussion. Ne conviendriez-vous pas avec moi que
deux lignes pour régler ce grand problème du pouvoir de
gérance dans le domaine de l'utilisation et de l'affectation des
ressources, c'est peut-être un peu court?
Le Président (M. Jolivet): M. Aalders et, ensuite, je
pense que M. Smith aurait quelque chose à ajouter.
M. Aalders: Pour répondre à la question de M. le
député, je suis d'accord jusqu'à un certain point que deux
lignes ne sont pas satisfaisantes pour régler ce problème. Il est
assez particulier. Mais j'aimerais souligner que, dans certaines entreprises
privées, il y a plusieurs secteurs qui ne sont pas encore
syndiqués.
Le Président (M. Jolivet): M. Smith.
M. Smith: Merci, M. le Président. D'abord, j'aimerais dire
que je suis d'accord avec M. le député d'Argenteuil qu'on ne
trouve pas, partout au Canada, des conventions collectives en éducation
de 12 pages. Je suis d'accord. Je pense que la règle est encore bonne et
elle vient d'être prouvée par l'exception citée par M. le
député. Je connais aussi la convention collective dont il
était question à Sudbury. Bien qu'elle contienne au-delà
de 12 pages, un certain nombre de pages sont là parce que la convention
collective existe dans les deux langues et que c'est imprimé dans le
même volume, tandis que la nôtre est en deux langues, mais elle est
imprimée en deux volumes. La convention collective de Sudbury est quand
même loin d'avoir la même portée que celle que nous trouvons
au Québec. Pour ma part, je serais très heureux de
l'échanger contre la nôtre n'importe quand.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le
député d'Argenteuil.
M. Ryan: Très bien. Je veux simplement préciser,
pour qu'il n'y ait pas de malentendu, qu'il y a 48 pages dans chaque langue. En
tout, cela fait 96 pages, si on prend votre barème. Vous pourrez le
vérifier ici.
Maintenant, dans le mémoire de l'association, il y a une remarque
que je ne peux pas passer sous silence. Je vais simplement faire un petit
commentaire là-dessus avant d'en venir à ma dernière
question. Vous parlez du syndicat, à un moment donné. Je pense
qu'il est important qu'on se rappelle la page pour qu'il n'y ait pas de
malentendu. On dit que le syndicat représente un groupe particulier, un
intérêt particulier et que la commission scolaire ou l'employeur
doit tenir compte de l'ensemble. Je pense qu'il est important qu'on retrace
exactement ce passage.
M. Aalders: À la page 6, M. le Président.
M. Ryan: Au bas de la page 6, oui: "Parce que le syndicat qui
représente les employés concernés n'est qu'un seul
groupe
représentant une seule partie de la communauté, car il ne
faut pas oublier, etc." Dans un sens, c'est vrai mais, dans un autre sens, je
pense que c'est incomplet. En l'occurrence, il s'agit du groupe de citoyens qui
fournit un travail professionnel indispensable au fonctionnement de cette
institution qui est l'école. Par conséquent, ce n'est pas un
groupe d'intérêt - un parmi 50 -qu'on aurait recensé dans
l'annuaire téléphonique de Bell Canada. Ce sont les personnes qui
ont été préparées professionnellement et qui
s'emploient professionnellement à fournir cette contribution
extrêmement importante pour la qualité et l'avenir de la
société qui est le travail de dispensation de l'enseignement aux
enfants.
Par conséquent, quand ils sont dans cette position
d'interlocuteurs avec la partie patronale, incluant le gouvernement et la
commission scolaire, en vertu de notre régime de relations du travail,
ils sont une partie égale. Ils ne sont pas un groupe parmi 50, ils sont
une partie égale. Il y a, d'un côté, vous, l'Association
des commissions scolaires protestantes, dont vous nous avez dit, loyalement
d'ailleurs, que vous faisiez cause commune avec le gouvernement dans une
très large mesure sur ces choses-là. Mais il ne faudrait pas se
méprendre sur la signification de notre régime de relations du
travail; ils sont une partie égale, soit l'autre partie, dans un
régime qui est essentiellement bipolaire, qui comprend deux pôles.
Je ne sais pas si on peut s'entendre là-dessus.
Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.
M. Aalders: Je demanderai à M. Krause de répondre
à cette question, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. Krause.
M. Krause: Je pense que ce que le député
d'Argenteuil est en train d'expliquer est une philosophie avec laquelle on est
assez d'accord. Quand cela arrive à une relation du travail entre
l'employeur et les enseignants, c'est vrai qu'ils sont une partie égale
et qu'on établit des communications en termes de cette relation
égale. Il ne faut pas oublier que ce qui est contenu dans les
conventions collectives concerne les conditions de travail et qu'en tant que
partie qui fait interaction dans les services d'éducation qui se donnent
dans le milieu scolaire, même si les syndicats sont experts en fourniture
de services, les premiers interlocuteurs, comme vous dites, ils ne sont quand
même qu'une des parties dont la commission scolaire porte la
responsabilité. Dans ce sens-là, il faut faire une
différence dans les relations entre les parties. (13 heures)
M. Ryan: Seulement une dernière question, si vous me le
permettez. Vous nous avez intrigués à la fin de votre
mémoire; vous avez éveillé notre curiosité sans la
satisfaire. Vous dites: "Pendant les audiences de cette commission
parlementaire de l'éducation, l'Association des commissions scolaires
protestantes du Québec a fait des recommandations à son
partenaire en négociations, le ministère de l'Éducation,
dans le but de trouver des solutions équitables au conflit actuel. Afin
de respecter notre protocole de négociations avec le ministère de
l'Éducation, nous ne pouvons aujourd'hui annoncer publiquement nos
recommandations, mais nous pouvons dire que nous avons proposé
l'idée d'une tierce partie." C'est très important. C'est
tellement important que je me demande si le ministre de l'Éducation
serait prêt à vous dispenser de la contrainte qui semble
découler de votre protocole avec lui et s'il vous autoriserait à
nous dire ce que vous lui avez recommandé.
Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.
M. Ryan: Cela nous intéresserait de voir si cela porte sur
des éléments des décrets ou quoi que ce soit. En tout cas,
cela m'intéresserait beaucoup de savoir ce que vous avez proposé
au ministre. Deuxièmement, j'aimerais savoir si vous avez proposé
des modalités pour cette idée d'intervention d'une tierce
partie.
Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.
M. Aalders: M. le Président, je ne veux pas ouvrir la
porte. Nous avons eu des communications, des rencontres avec le
ministère depuis la semaine dernière. Je demanderais au
président du CPNCP, M. Drake, de répondre à votre
première question.
Le Président (M. Jolivet): M. Drake.
M. Drake: II est pas mal vite! Notre ligne de conduite depuis le
début des négociations est de ne pas - je répète,
de ne pas - mélanger toutes les choses dans le même paquet. Si on
parle de la réforme scolaire, on ne parle pas des restrictions
financières, des budgets. On ne parle pas de la réforme scolaire,
si on parle de négociations. Nous avons eu un protocole avec le
ministère de l'Éducation et nous avons toujours vécu
à l'intérieur de celui-ci. On a des discussions avec nos
partenaires et on ne fait pas cela publiquement. Nous répétons
notre position, M. le Président: Nous ne sommes pas prêts
aujourd'hui, en ce moment, à aller plus loin que là où
nous sommes allés dans notre mémoire.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le
député de Fabre, en nous rappelant que nous avons, d'un commun
accord, accepté de continuer avec l'organisme qui est là pour lui
permettre de terminer avant d'aller manger. Il resterait sur la liste le
député de Fabre, la députée de Jacques-Cartier, le
député de Gaspé et le député de Viau. Je
leur demande de poser des questions brèves et qu'on ait, si possible,
des réponses brèves aussi de façon à terminer au
plus tard à 13 h 30. M. le député de Fabre.
M. Leduc (Fabre): Merci, M. le Président. Votre
mémoire reflète une préoccupation d'ordre
économique, mais qui est également - je pense qu'il faut le
souligner - d'ordre de qualité, la qualité qui touche à
l'éducation. À cet égard, vous voulez vous assurer que vos
enfants recevront les meilleurs services possible dans nos écoles. Vous
soulignez la nécessité de la présence obligatoire des
enseignants à l'école comme un des facteurs pouvant
améliorer la situation, la tâche globale également et la
nécessité de faire passer la capacité avant
l'ancienneté.
Votre mémoire insiste également grandement sur la
comparaison entre le Québec et les autres provinces, notamment
l'Ontario, quant au nombre de jours d'enseignement, l'horaire des
élèves et le temps moyen d'enseignement. On nous a, à
quelques reprises au cours de cette commission, présenté un
certain nombre d'inquiétudes quant à l'application des
décrets au chapitre de la tâche. Votre mémoire ne manifeste
pas d'inquiétudes. Vous soulignez la nécessité d'augmenter
la tâche pour arriver à un niveau comparable à ce qui se
fait dans les autres provinces canadiennes.
Ma question est en fonction de vos écoles: Pourquoi, exactement?
Je me pose la question. Vos écoles sont-elles, en moyenne, plus petites
que les écoles du côté francophone? Avez-vous de grosses
polyvalentes? Parce qu'on souligne que ces problèmes d'augmentation de
tâche pourraient toucher surtout les polyvalentes de 1000
élèves et plus. Ou, est-ce parce que vous avez
développé à l'intérieur de vos écoles
d'autres modèles d'organisation? J'aimerais savoir également si
vous avez exploré parce que vous mentionnez l'Ontario et les autres
provinces canadiennes - cette question des nouveaux modèles
d'organisation à l'intérieur de nos écoles et surtout de
nos écoles polyvalentes. Ce seraient mes premières questions.
Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.
M. Aalders: Je demanderai à M. Drake de répondre
à cette question, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. Drake.
M. Drake: M. le Président, notre organisation scolaire est
différente dans un certain sens et nous avons expérimenté
toutes sortes de grilles horaires, d'organisations scolaires au cours des
dernières années. Par exemple, il y a une couple de polyvalentes
- nous avons encore des polyvalentes à Québec et assez
d'élèves pour les fréquenter - où on divise le
premier et le deuxième cycles du secteur secondaire d'une façon
que ce soit presque une école séparée dans le même
édifice; il y a des choses de cet ordre. Concernant les grilles horaires
telles quelles, je demanderai à M. Smith, qui a travaillé avec M.
George, de continuer la réponse sur cette question
particulière.
Le Président (M. Jolivet): M. Smith.
M. Smith: Merci, M. le Président. En ce qui a trait
à la faisabilité du décret, notre analyse de la situation
ne nous porte pas à croire que les dispositions contenues au
décret poseront des problèmes sérieux aux administrateurs
scolaires. Il faut dire, bien sûr, M. le Président, qu'il faut
distinguer les problèmes d'ordre financier et les problèmes en
matière de relations du travail. Il est évident, selon certaines
des simulations qui ont été soumises, que certaines personnes ou
certains administrateurs craignent qu'il n'y ait pas suffisamment de ressources
pour permettre l'implantation d'une nouvelle convention de travail telle que
proposée dans les décrets. Je vous soumets respectueusement que
le niveau de ressources allouées est tout à fait un autre
problème. Avec les décrets eux-mêmes, l'augmentation de la
tâche moyenne des enseignants ne nuira pas à la forme
d'organisation dans les écoles.
Il est bien sûr qu'il existe différents modèles
d'organisation dont certains sont plus aptes à convenir à la
nouvelle convention de travail que d'autres. On se souvient tous des
années soixante-dix où nous avions, dans la majorité des
écoles secondaires au Québec, un horaire de 1575 minutes par
semaine où les élèves recevaient 35 périodes de 45
minutes par semaine, donc sept matières par jour. Les enseignants
faisaient cinq blocs sept. À cette époque, on avait une
tâche moyenne de 1125 minutes par semaine. Lorsque nous avons
changé la tâche moyenne des enseignants à 1000 minutes, ce
n'était pas simplement une question de dire: Bon, on réduira
à un certain nombre par enseignant pour la simple et bonne raison que
1000 minutes n'étaient pas un multiple de 45. Vous savez sans doute,
messieurs les membres de la commission, que cela provoquait un changement de
mode d'organisation scolaire pour atteindre une grille horaire de 1500 minutes
avec des
périodes de 50 minutes.
Cette fois-ci, ce que nous avons fait en termes de changement de moyenne
de temps d'enseignement, ce n'était pas un changement aussi mirobolant
mais simplement une augmentation du nombre de périodes de 50 minutes
durant lesquelles chaque professeur va enseigner. Il y a différents
modèles d'organisation qui, jumelés aux différentes
répartitions des grilles matières sont permissibles aux
commissions scolaires, permettent d'organiser les écoles sans
véritable problème.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Fabre.
M. Leduc (Fabre): Merci. Dernière question, M. le
Président, vous ne touchez pas à cette question dans votre
mémoire mais puisqu'on parle de comparaison entre le Québec et
l'Ontario en ce qui concerne les différentes dispositions des
conventions collectives, je veux vous demander si vous êtes au courant
des formules de sécurité d'emploi qui existent dans les autres
provinces canadiennes par rapport au Québec?
Le Président (M. Jolivet): M. Smith.
M. Smith: Merci, M. le Président. Nous ne connaissons pas
de forme de sécurité d'emploi dans les autres juridictions
scolaires qui soit comparable avec celle qu'on trouve ici au Québec.
Généralement, dans les différentes juridictions, lorsqu'il
y a un problème de diminution de la clientèle, ce qu'essaie de
faire le syndicat, c'est de renégocier un rapport
maître-élèves qui fera en sorte qu'il y aura moins
d'enseignants mis à la porte. Parce que, lorsqu'il y a une diminution de
la clientèle, les enseignants qui sont en surplus ne sont pas
gardés à l'emploi.
Dans les juridictions que j'ai visitées, il n'y a même pas
de formule qui prévoit une telle réduction ou ajustement du
rapport maître-élèves, mais plutôt des efforts pour
atténuer la compression d'effectifs dans une année donnée.
La seule autre chose qui est généralement observée, c'est
parfois les priorités d'emploi pour ceux qui se trouvent sans emploi
à la suite d'une diminution de la clientèle. Mais nulle part
existe-t-il un système qui prévoit le maintien avec traitement
des enseignants qui sont en surplus.
Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de
Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: Merci, M. le Président. D'abord, un petit
commentaire. Même si je partage les grands buts du décret qui est
d'augmenter la flexibilité de gérance des commissions scolaires
et d'augmenter la productivité des enseignants, je ne partage pas le
parallèle que vous avez fait entre l'école et l'entreprise.
Après tout, l'école n'est pas une entreprise et je crois que nous
avons déjà trop emprunté de l'entreprise. Tout ce
système de négociation entre adversaire est emprunté de
l'entreprise. Nous en avons trop pris de ce système, je crois.
Vous avez parlé des droits de gérance des commissions
scolaires. Je suis vraiment étonnée que nous n'ayez
mentionné nulle part, je crois, si je ne me trompe pas, les
règles budgétaires, parce que M. Smith a dit que c'est autre
chose. C'est peut-être autre chose, mais, sur le plan pratique, les
règles budgétaires sont vraiment la clé. Je crois qu'il
n'est pas possible de considérer l'impact des conventions collectives du
décret sans considérer en même temps l'impact des
règles budgétaires. Je crois que le danger devient de plus en
plus évident, ici au cours des auditions, que nous ayons un
décret qui, par sa flexibilité même, ouvre la porte
à des décisions arbitraires de la part du gouvernement qui
risquent de diminuer gravement les ressources financières.
La transférabilité est bonne, mais il faut avoir de
l'argent; autrement, c'est inutile. Autrement dit, on peut avoir les droits de
gérance, mais les droits de gérance pourraient être
gravement compromis sans le droit de recevoir des ressources
adéquates.
J'aimerais savoir d'abord si vous êtes satisfaits des
règles budgétaires proposées.
Le Président (M. Jolivet): ...excusez-moi.
Mme Dougherty: Sinon, quel est l'écart entre les
règles budgétaires proposées et la réalité
de vos besoins, selon le décret? Quels seront les secteurs
affectés? Par quels moyens, si les normes, les paramètres ne sont
pas établis dans la convention collective, comme les enseignants l'ont
toujours voulu, devons-nous garantir des ressources adéquates, des
ressources financières adéquates aux commissions scolaires? (13 h
15)
Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.
M. Aalders: Bon, si j'ai bien compris l'intervention de Mme la
députée, en ce qui concerne les négociations dans le
secteur privé et dans le secteur de l'éducation, il est vrai
qu'il y a une différence. On n'a pas dit qu'il n'y avait pas de
différence. Mais dans le secteur privé, nous avons normalement
deux parties qui négocient. Tout de suite là, il y a une
différence. Nous n'avons pas l'intention de dire que ce système
devrait fonctionner dans le secteur public. On a pris des décisions. Le
gouvernement et la population en général ont pris la
décision de
partager le système de négociation entre trois
parties.
En ce qui concerne les règles budgétaires, il est vrai que
nous avons mentionné dans notre mémoire, à la page 3,
qu'en "tenant compte des restrictions monétaires telles
qu'imposées par les règles budgétaires..." Nous sommes
très conscients des règles budgétaires en ce qui concerne
l'application des articles des décrets ou d'autres conventions
collectives. Il est bien sûr que cela ne permettra pas aux commissions
scolaires de faire des profits. Pour elles il y a deux possibilités
d'avoir de l'argent, soit par des taxes locales ou par des subventions du
gouvernement. Ce sont les deux seules sources de revenus pour les commissions
scolaires. Donc, avec la loi 57, le gouvernement nous enlève une partie
des revenus que nous pouvions obtenir en imposant des taxes à nos
contribuables.
Maintenant, en ce qui concerne directement votre question à
savoir si les règles budgétaires prévoient toutes les
possibilités, on n'a pas encore reçu de document final du
ministère qui nous dise que nous aurons des fonds adéquats pour
appliquer tout ce qui concerne les décrets et la loi 105.
Mme Dougherty: Donc, vous ne voyez pas de problème
important dans les règles budgétaires?
M. Aalders: Pour plus de détails, je demanderai à
M. Drake de répondre à cette question.
Le Président (M. Jolivet): M. Drake.
M. Drake: Oui, nous voyons des problèmes.
Des voix: Ah! Ah!
Mme Dougherty: J'aimerais approfondir la question. Tout à
l'heure, nous avons parlé, avec l'Association des cadres scolaires du
Québec, de l'enfance inadaptée. Le COPEX, dont j'étais
membre, mettait beaucoup d'accent sur l'importance d'avoir assez de ressources
pour les enfants inadaptés. Le Conseil supérieur de
l'éducation a suggéré, dans un de ses documents, qu'on
devrait établir dans la convention collective des normes de ressources
professionnelles pour assurer un niveau adéquat de ressources
professionnelles pour des enfants handicapés tel que recommandé
dans le rapport COPEX. Qu'est-ce que vous en pensez?
Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.
M. Aalders: M. le Président, je demanderai à M.
Krause de répondre à cette question et, à M. Drake par la
suite.
M. Krause: Si je comprends bien la question, M. le
Président, dans les décisions concernant les services pour
l'enfance inadaptée aux commissions scolaires, c'est certain qu'il y a
toujours un conflit entre ce qui est disponible en termes de fonds pour payer
pour les services et ce que la commission scolaire voudrait peut-être
donner comme services. Il faut certainement que la commission scolaire prenne
des décisions très sérieuses concernant cet aspect de
services.
Il est aussi certain que dans beaucoup de cas il y a peut-être des
écarts assez grands entre ce que voudrait la commission scolaire et ce
que le budget dont ladite commission scolaire dispose couvrirait comme
dépenses. C'est une décision de la commission scolaire qui est,
comme on l'a dit dans notre mémoire, l'agence responsable de la
dépense des fonds publics au niveau local; il faut donc qu'elle prenne
cette décision et la justifie devant la population qu'elle dessert.
Si je peux revenir au point que vous avez soulevé concernant la
question d'établir, dans les conventions collectives, des normes pour
garantir certains services pour l'enfance inadaptée dans les commissions
scolaires, c'est, encore là, une décision de discrétion,
si vous voulez. C'est peut-être une pensée reliée à
ce qui existait auparavant dans les conventions collectives, disons dans les
années soixante ou au commencement des années soixante-dix. Ce
qui existait dans la convention collective établissait les règles
budgétaires que la commission scolaire allait avoir pour donner les
services. Cela a disparu dans les dernières années. Même si
une norme d'engagement de personnels était dans une convention
collective, cela ne correspondait pas à ce qui était donné
en termes de budget pour dispenser ce service. Cela ne correspond pas
nécessairement à ce qu'il y a dans une convention collective et
ne garantit pas nécessairement que les services seront dispensés.
Mais, comme je l'ai dit auparavant, c'est vraiment la commission scolaire qui a
la responsabilité, localement, de prendre ses décisions et de
faire des choix en termes de ressources. Ces choix, c'est certain qu'ils seront
déterminés par les besoins exprimés par les
communautés desservies.
Le Président (M. Jolivet): M. Drake. Cela va? Cela va. M.
le député de Gaspé.
M. LeMay: Merci, M. le Président. Vous dites, à la
page 5 de votre mémoire: "Lorsque les représentants de chacune
des provinces se parlent de tel ou tel aspect de la convention, le
Québec est toujours l'exception. Ce sont toujours les commissions
scolaires qui ont moins de flexibilité et plus d'entraves dans
l'administration qu'ailleurs." Prétendez-vous par là que les
commissions
scolaires, ici au Québec, ont moins de latitude ou moins de
pouvoirs qu'ailleurs?
Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.
M. Aalders: Je donnerai un seul...
M. LeMay: Excusez-moi seulement un instant, je vais terminer.
Le Président (M. Jolivet): Excusez-moi, M. le
député de Gaspé.
M. LeMay: Par administration, parlez-vous seulement
d'administration financière ou est-ce ensemble?
M. Aalders: Pour la première partie de la question, M. le
député de Gaspé, vous vous rappelez très bien qu'en
1979, lorsqu'on a signé la convention collective qui vient de se
terminer, la sécurité d'emploi au Québec a fait les grands
titres de tous les journaux. C'est un aspect, c'est un exemple. Peut-être
que M. Smith peut vous donner d'autres exemples.
Le Président (M. Jolivet): Allez-y.
M. Smith: Je pense que les exemples que je pourrais donner sont
dans les réponses qu'on a données tantôt. Je peux seulement
dire que les aspects de la convention qui ont trait à la
sécurité d'emploi créent des problèmes en termes
d'embauche pour les commissions scolaires, en termes de flexibilité dans
le choix du personnel, en termes d'affectation interne et en termes de choix
des personnes venant de l'extérieur. Ces choses, combinées avec
ce que nous avons mentionné tout à l'heure, constituent les
principales entraves, si vous voulez, dans l'administration des commissions
scolaires.
Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.
M. Aalders: M. Krause a aussi un autre commentaire à
apporter là-dessus.
Le Président (M. Jolivet): M. Krause.
M. Krause: Oui, M. le Président. Si je comprends bien la
question, vous dites que les règles administratives ou
budgétaires donneront des contraintes aux commissions scolaires.
M. LeMay: Non, quand vous parlez d'entrave dans l'administration,
qu'entendez-vous par "administration"? Est-ce uniquement au plan
budgétaire ou simplement au niveau de l'application de la convention
collective que le ministère ne vous donne pas suffisamment de
latitude?
M. Krause: Dans le contexte de cette présentation ou de ce
mémoire, cela concerne les contraintes qui sont établies dans les
conventions collectives, mais il est clair qu'il y a aussi d'autres
contraintes; on est toujours en discussion avec le ministère pour
essayer d'amoindrir ces problèmes.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Merci, M. le Président. Ma première
question s'adresse à M. Smith. Dans un des documents qu'il a
déposés à cette commission parlementaire où il est
censé avoir fait le tour de huit commissions scolaires dans toute la
province, après le dépôt de ce document, j'ai eu l'occasion
de communiquer avec une de ces commissions scolaires - c'est une commission
scolaire de Colombie britannique - au sujet de toute cette question de la
sécurité d'emploi ou de la mise en disponibilité dont on
parle beaucoup ici au Québec. N'est-il pas vrai que, dans ces
commissions scolaires en dehors de la province de Québec, la mise en
disponibilité que l'on connaît au Québec est
compensée par des salaires supérieurs à ceux du
Québec? Je vous donne un exemple. D'après mes renseignements, si
on parle de la catégorie 18, en Colombie britannique, on parle d'un
salaire de 41 944 $, tandis qu'ici au Québec on ne parlerait, avec
l'application du décret, que d'un salaire de 28 954 $.
Le Président (M. Jolivet): M. Smith.
M. Smith: M. le Président, d'abord, en guise de
réplique à la question de M. le député de Viau,
l'étude que nous avons faite dans tout le Canada ne concernait que les
conditions de travail des enseignants et ne portait pas sur la
rémunération. Cet aspect de l'étude a été
fait par d'autres personnes dans d'autres équipes. Donc, je ne suis pas
en mesure de vous dire si la comparaison avec cette commission scolaire dans
telle catégorie est exacte ou non. Tout ce que je peux vous dire, c'est
que les échelles de traitement que j'ai observées et les
résultats de d'autres études que j'ai vues me portent à
conclure que les échelles de traitement en vigueur au Québec sont
comparables à celles généralement observées au
Canada. Bien sûr, il y a des juridictions scolaires où c'est plus
élevé dans telle ou telle catégorie, comme la contraire
est vrai. Ce que nous avons remarqué dans plusieurs juridictions en
Ontario, le nombre d'échelons qui sont cités comme étant
inférieurs à ceux observés au Québec, ceci n'est
vrai que dans les basses catégories. Plus vous montez sur les grilles
salariales, plus il y a d'échelons. Selon que vous faites la comparaison
échelle par échelle, cela vous donne des résultats
différents.
M. Cusano: J'ai insisté il y a deux ou trois jours pour
qu'on dépose tous vos documents pour qu'on puisse vraiment
s'éclairer. Je crois que jusqu'à maintenant, les documents n'ont
pas été déposés. Lorsque vous parlez de la question
du nombre de minutes que les enseignants doivent passer en classe ou au travail
dans les autres provinces, je remarque que vous n'avez pas parlé non
plus de toute l'aide supplémentaire qui est donnée à des
enseignants comme Teacher's aid, par exemple, mais on en discutera un peu plus
tard.
Ma question sera courte à cause du temps. Vous dites aux pages 8
et 9 que vous voulez garder une très grande souplesse pour offrir les
services éducatifs qu'exige un système scolaire. Je pense que
tout le monde est d'accord avec cela. Un peu plus loin vous dites que vous
tiendrez compte de l'ancienneté et de la qualification des enseignants,
pourriez-vous m'expliquer ce que vous voulez dire par qualification? Dans mon
esprit, ce mot est très clair, on parle de diplôme ou
d'expérience dans un certain domaine, mais lorsque vous parlez de
souplesse, voulez-vous dire aussi la supervision et l'évaluation de
l'acte pédagogique du professeur?
Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.
M. Aalders: Je demanderai à M. Robin Drake de
répondre.
Le Président (M. Jolivet): M. Drake.
M. Drake: Je pense que la question posée est: Est-ce que
c'est la compétence de l'enseignant qui entre la ligne de compte? La
réponse est non.
M. Cusano: Ce n'est pas la compétence.
M. Drake: Ce n'est pas la compétence en tant que
capacité de l'enseignant. Par exemple, deux enseignants avec la
même expérience, avec les mêmes qualifications, les
mêmes diplômes, qui ont rempli le même type de fonctions
durant les deux dernières années, ce n'est pas une question de
compétence, à notre connaissance.
M. Cusano: À votre connaissance, il n'y aura pas
d'évaluation de l'acte pédagogique?
M. Drake: On fait toujours l'évaluation de l'acte
pédagogique dans nos écoles.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Au nom des membres de la
commission, je vous remercie donc et, à la reprise de 15 heures, nous
recevrons la Fédération des comités de parents de la
province de Québec, représentée par M. Jean Pontbriand,
président.
Je suspends les travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 31)
(Reprise de la séance à 15 h 12)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission élue permanente de l'éducation continue ses
travaux, aux fins d'entendre les organismes directement impliqués dans
l'administration scolaire, qui veulent faire des représentations sur la
qualité de l'enseignement, la tâche et la sécurité
d'emploi des enseignants et enseignantes, en regard de la situation actuelle au
Québec.
Je tiens à vous informer de deux choses avant de commencer: II y
a d'abord dépôt du mémoire présenté aux
membres de la commission parlementaire de l'éducation par l'école
Madeleine Bergeron, de Sainte-Foy. C'est donc un groupe d'enseignants de
l'école Madeleine Bergeron qui présente le document.
Ensuite, pour les besoins de notre horaire d'aujourd'hui, je tiens
à vous informer que la Quebec Association of Catholic School
Administrators m'a fait parvenir à l'heure du dîner un
télégramme disant qu'elle ne pourra pas être
présente aujourd'hui. Je ferai donc distribuer le
télégramme à chacun des membres de la commission, ce qui
veut donc dire que sur les dix groupes, on aura, avec les deux
déjà entendus, sept groupes qui auront à témoigner
devant nous aujourd'hui.
J'inviterais la Fédération des comités de parents
de la province de Québec, représentée par M. Jean
Pontbriand, président, à bien vouloir s'asseoir à la
table.
Pendant que la Fédération des comités de parents
vient s'installer, je tiens, au nom des membres de la commission, compte tenu
des débats qu'il y a eu la semaine dernière, à nous
excuser auprès d'elle de l'avoir retardée à aujourd'hui,
en sachant ce que cela peut lui causer comme problèmes. Les membres de
la commission - vous avez eu l'occasion de le voir vendredi dernier - ont
travaillé d'arrache-pied pour essayer de faire en sorte que leur horaire
soit respecté. Malheureusement, dans votre cas, il a fallu vous reporter
à nouveau. On s'en excuse, au nom des membres de la commission.
M. Pontbriand, vous avez la parole.
Fédération des comités de
parents
M. Pontbriand (Jean): M. le Président, j'aimerais vous
présenter les membres qui sont présents avec moi cet
après-midi. À ma gauche, Mme Marie-Rose Bouillon, qui est
responsable de l'information au niveau du comité exécutif
de la fédération; Mme Marie-Alice Lupien, qui est
vice-présidente de la fédération et, à ma droite,
Mme Lucille Bérubé, qui est directrice générale de
la fédération.
J'aimerais excuser mes autres collègues du comité
exécutif qui devaient être présents avec nous cet
après-midi, qui étaient présents vendredi, mais qui ont
dû malheureusement retourner à leur travail, ne pouvant se
permettre de perdre une journée de travail supplémentaire, comme
nous sommes tous des bénévoles.
M. le Président, nous sommes parmi vous pour vous
présenter, au nom de la Fédération des comités de
parents, nos impressions, nos réactions et nos attentes face au conflit
actuel, conflit qui a des incidences majeures sur l'éducation de nos
enfants, pour vous dire également notre sentiment d'inquiétude
devant ce conflit qui nous déchire et nous emprisonne. Qui nous
déchire parce qu'il est difficile d'y voir clair et parce que les
parents sont sollicités sur le plan émotif puisque ce sont leurs
enfants qui sont en cause et qu'ils risquent, soit de manquer leur année
scolaire, soit d'être démotivés et de quitter
l'école prématurément sans parler, évidemment, des
idéologies qui peuvent leur être inculquées durant le temps
qu'ils sont en classe pendant la durée de ce conflit. Conflit qui nous
emprisonne également sous une toile pesante tissée de mots, de
chiffres, de diktats quasi incompréhensibles au commun des mortels et
accessibles seulement à une intelligentsia spécialiste en
relations du travail et qui a, malheureusement, par la conséquence de
ses décisions, presque, par les temps qui courent, un droit de vie ou de
mort sur la population, si l'on songe, par exemple, aux hôpitaux ou aux
conséquences sur l'avenir de nos enfants.
Qui peut actuellement faire la différence entre la
démagogie et la vérité dans toute l'information, dans
toute la publicité qui nous est destinée? On sollicite fortement,
depuis quelques semaines, les parents à prendre position et appuyer une
des parties dans cette lutte que se livrent deux géants qui, de toute
évidence, se retrouvent actuellement dans une impasse. Les parents
sollicités doivent donc choisir émotivement entre le bien
immédiat de leurs enfants dans une classe avec un professeur et la
perspective qu'on leur fait entrevoir qu'ils peuvent perdre les quelques
services qu'ils ont à l'école et l'appui à ses
représentants qui forment le gouvernement élu
démocratiquement et ses projets. Les parents doivent également
faire un choix entre des actions démesurées de part et d'autre,
c'est-à-dire la grève illégale, d'une part, et une loi
très dure qui va jusqu'à suspendre certains droits prévus
dans la Charte des droits et libertés de la personne, d'autre part.
Nous tenterons donc de vous faire part, dans un premier temps, des
réactions et des attentes des parents exprimées avant que ne se
produisent les offensives publicitaires des dernières semaines qui
amènent actuellement beaucoup de réactions émotives, dans
un deuxième temps, de vous exposer nos actions des dernières
semaines et, en conclusion, quelques recommandations.
Notre intervention tient compte actuellement des orientations et des
résolutions des congrès et assemblées
générales de la fédération des années
passées.
Mme Bouillon (Marie-Rose): Sur l'expérience des parents,
les comités d'école et de parents ont longuement observé
et étudié, depuis 1977, notamment lors de la consultation sur le
livre vert et les règlements sur le régime pédagogique, le
fonctionnement de notre système scolaire. Ils ont, lors de ces
consultations, livré au gouvernement leurs attentes sur l'école,
attentes qu'on a retrouvées dans la politique gouvernementale,
l'École québécoise, énoncé de politique et
plan d'action.
Plus récemment, les membres des comités d'école et
de parents ont étudié le document gouvernemental: l'École,
une école communautaire et responsable. En congrès, au mois de
décembre dernier, ici même à Québec, ces parents ont
mis en commun leur réflexion sur le type d'école qu'ils veulent
pour leurs enfants.
Or, tout au long des années depuis 1972, année où
les comités d'école et de parents ont vu le jour, on retrouve une
constante dans leurs revendications et c'est cette constante que j'aimerais
vous rapporter ici, avec ses conséquences.
Les attentes des parents en regard du projet éducatif, en regard
du rôle de l'école, en regard des valeurs recherchées
à l'intérieur de l'école.
En regard du projet éducatif: Cette constante s'est en partie
matérialisée par la formulation de la notion de projet
éducatif. Nous voulons réaliser, dans chacune des écoles
du Québec, un projet éducatif qui soit le fruit de la
collaboration des divers agents d'éducation afin d'obtenir une
école répondant aux attentes et aux besoins de son milieu tout en
tenant compte des finalités et des objectifs de l'éducation
scolaire au Québec.
Le rôle de l'école: L'école doit, par son
organisation pédagogique et ses démarches éducatives,
aider à la formation de l'individu et du citoyen. L'école, comme
prolongement de la famille, est le lieu d'enseignement et d'instruction
où on apprend, comme lieu d'éducation, à devenir une
personne autonome, et comme lieu d'insertion sociale, à être un
citoyen responsable.
Les valeurs recherchées par les parents:
L'éducation scolaire au Québec se réclame des
valeurs intellectuelles comme - ceci est tiré de l'École
québécoise, énoncé de politique et plan d'action -
le sens du travail méthodique, patient, ordonné, rigoureux qui
caractérise depuis toujours l'effort intellectuel; un jugement critique
sur l'homme et la société qui devient de plus en plus
nécessaire dans une société où coexistent tant de
courants idéologiques; une recherche constante de la
vérité, garantie d'honnêteté intellectuelle et
d'authenticité.
L'éducation scolaire du Québec se réclame de
valeurs affectives comme l'aptitude à aimer et à être
aimé, l'aptitude à communiquer son expérience sans
négliger ou sous-estimer l'univers des émotions et des sentiments
personnels, l'ouverture sur le monde, sur les personnes et sur les choses en
vue d'en découvrir la valeur et la diversité.
L'éducation scolaire au Québec se réclame de
valeurs sociales et culturelles comme le sens démocratique, lequel se
déploie graduellement dans la connaissance des institutions et des
hommes, dans l'apprentissage de ses droits de citoyen, la reconnaissance des
aspirations collectives véhiculées par les coutumes et les lois.
Elle contribue à la compréhension et à l'acceptation de
l'évolution des normes et des règles.
L'éducation scolaire au Québec se réclame de
valeurs morales comme le respect de la vie, garantie indispensable de
l'épanouissement humain, le respect de soi et d'autrui, fondement de
l'établissement des rapports de justice dans la société,
le respect du milieu et de l'environnement, l'autonomie et la
responsabilité, valeurs fondamentales dans le développement de la
personnalité.
Mme Lupien (Marie-Alice): Nous continuons avec les attentes des
parents en ce qui a trait à l'objectif des conditions de travail. Ces
finalités, ces objectifs, nous voulons pouvoir les réaliser. Dans
ce but, l'assemblée générale de la
Fédération des comités de parents de la province de
Québec avait demandé que les paramètres dans
l'établissement des conditions de travail pour les personnels des
commissions scolaires respectent les objectifs québécois en
éducation tels qu'ils apparaissent dans l'École
québécoise, énoncé de politique et plan
d'action.
Au niveau de la tâche. Les parents ont, de plus, constaté
que l'évolution des conventions collectives rendait de plus en plus
codifiée la tâche de l'enseignant en l'encadrant de telle sorte
qu'il n'y avait plus de marge de manoeuvre pour donner aux élèves
les services, l'encadrement et l'attention nécessaires. Tâche
rendue encore plus rigide par un temps de présence toujours
diminué. Les parents ont réclamé de façon de plus
en plus pressante que la tâche soit plus globale, moins
spécialisée et moins minutée, afin de répondre
davantage aux besoins des étudiants et aux besoins de l'école. Il
y a cependant un aspect de la tâche qu'il serait important d'aborder,
c'est celui de son contenu et de la formation des enseignants pour la bien
remplir.
Trop souvent, les enseignants doivent préparer des syllabus de
cours, des plans d'étude, du matériel didactique, des instruments
d'évaluation, en l'absence de guides pédagogiques, de manuels
scolaires, etc. Les enseignants ne sont pas nécessairement formés
pour ce faire. Il y aurait peut-être lieu de faire en sorte que
l'enseignant puisse utiliser son temps de présence à
l'école à enseigner et à aider de façon directe
l'étudiant, et avoir droit à des services de soutien
adéquats pour lui permettre de bien jouer son rôle.
On mentionne très souvent le coût élevé du
système. Est-ce que le fait de demander aux enseignants de faire un
travail pour lequel ils ne sont pas nécessairement
préparés n'amène pas un coût inutile au
système? Ces travaux ne pourraient-ils pas être faits à
moindre coût?
J'aimerais rappeler à cette commission que le gouvernement avait,
en décembre 1972, par l'arrêté en conseil no 3811-72,
déterminé les conditions de travail des enseignants à
l'emploi des commissions scolaires. Or, l'article 7: ou du chapitre 8 de ce
décret, tenant lieu de convention collective, prévoyait la mise
sur pied d'une commission d'étude dont le mandat était de
proposer des méthodes et des systèmes pouvant permettre une
utilisation optimale des ressources humaines affectées au système
scolaire. Cette commission a déposé son rapport en mars 1975 et
recommandait de continuer les travaux d'analyse de l'emploi d'enseignant
amorcés par la commission tout en faisant un certain nombre de
recommandations pour humaniser et rationaliser la tâche de l'enseignant.
N'y aurait-il pas lieu de revoir et de poursuivre cette étude?
Les attentes des parents en regard de la capacité: Les parents
n'ont jamais compris comment il se faisait qu'un professeur de mécanique
pouvait en venir à enseigner le français ou les
mathématiques sans avoir la compétence. Ils réclament
depuis longtemps un système où la capacité d'enseigner une
matière et la compétence soient le principal critère
d'affectation à un poste et non uniquement l'ancienneté. Le
"bumping" a été dénoncé et a fait l'objet de
nombreuses revendications de la part des parents.
Affectation: La loi reconnaissant la possibilité d'avoir un
projet éducatif dans une école, il est donc important que
l'école puisse recevoir des personnels aptes et désireux de
fonctionner dans un tel projet éducatif. Les parents désirent
donc que les
mécanismes d'affectation du personnel dans les écoles
prévoient la possibilité pour l'école de se doter d'un
personnel en fonction de son projet éducatif ou de ses besoins
spécifiques.
M. Pontbriand: M. le Président, la
fédération avait demandé dans des recommandations
antérieures que des modifications à la loi du travail soient
apportées afin d'améliorer le processus des négociations.
Nous demandions, entre autres, à ce moment-là que le conseil
d'information puisse jouer pleinement son rôle et qu'un
représentant de la fédération puisse y siéger afin
d'avoir toute l'information sur les enjeux et le déroulement de la
négociation. Ce conseil fut malheureusement aboli l'an dernier et aucune
des parties n'a senti le besoin d'informer ni d'impliquer la
fédération et les comités de parents ainsi que les
associations d'étudiants dans le nouveau processus jusqu'à tout
récemment. La fédération a suivi le dossier de
l'extérieur en observant une attitude de neutralité entre les
protagonistes et ce, tant que les enfants n'ont pas été
impliqués dans le conflit. Cependant, le 26 janvier, devant ce qui
semblait, à la lueur des informations que nous avions, une impasse, la
fédération recommandait aux parties de recourir à une
médiation extraordinaire afin d'éviter la grève et tenter
de régler le conflit. En même temps, la fédération
demandait au gouvernement de créer, dès que le conflit serait
terminé, une commission royale d'enquête afin de trouver d'autres
mécanismes de négociation dans le secteur public pour remplacer
ceux que nous connaissons actuellement et qui se révèlent, une
fois de plus, complètement inadéquats.
Le -28 janvier, la grève était déclenchée
et, les enfants étant mis en cause, nous ne pouvions plus demeurer
silencieux. C'est pourquoi nous acceptions de nous joindre au groupe des
présidents des organismes du réseau à une réunion
du 4 février dernier afin de trouver un moyen de résoudre cette
impasse en analysant un cadre de règlement susceptible de diminuer les
rigueurs du décret, de dénouer l'imbroglio et de permettre un
retour en classe des enseignants afin que les étudiants puissent
recevoir les cours et les services auxquels ils ont droit. Cette proposition
fut, comme vous le savez, rejetée. Le 15 février, avant le
dépôt de la loi 111, les présidents d'organismes se
réunissaient de nouveau et renouvelaient aux parties une proposition
dans laquelle ils les invitaient à négocier avant qu'il y ait loi
et ils offraient également leurs services pour assurer, si possible, une
certaine médiation. Nous avons également dénoncé
publiquement l'Alliance des enseignants de Montréal qui décidait
de donner à nos enfants des cours selon ses vues sur la situation des
négociations, sur le contenu des décrets et des lois et ce, sans
s'assurer de l'accord des comités d'école et des comités
de parents et malgré le fait que Mme Gagnon, vice-présidente de
la CEQ, lors d'une rencontre que nous avons eue le 28 janvier dernier entre le
comité exécutif et des représentants de la Centrale de
l'enseignement nous assurait que la CEQ n'utiliserait pas les étudiants
et les laisserait en dehors du conflit. (15 h 30)
Le réaménagement du cadre de règlement. Ce
réaménagement proposé nous semblait acceptable en regard
des services offerts à nos enfants. Il nous garantissait les services
existants et même l'ajout de spécialistes à
l'élémentaire. Il garantissait pour les enseignants du secondaire
qu'il n'y aurait pas plus de 5000 mises en disponibilité au 15 octobre
de chaque année, un étalement de l'augmentation de la tâche
de 12 minutes par jour ainsi qu'une amélioration de la
sécurité d'emploi. Plusieurs points du normatif étaient
également améliorés. Ces nouveaux aménagements
permettaient, croyons-nous, d'administrer plus facilement ces nouvelles
conditions de travail pour le mieux-être de notre système
d'éducation et de nos enfants. Les clauses de ce
réaménagement devraient, quant à nous, de toute
façon être intégrées au décret.
Comme parents, nous nous interrogeons sérieusement sur
l'école publique comme outil de préparation de nos enfants quand
nous regardons le climat qui y prévaut. Nous déplorons que les
apprentissages à l'école publique ne soient pas toujours de la
qualité que nous sommes en droit d'attendre et nous croyons comprendre
l'engouement de certains parents pour l'école privée. Un des
principaux arguments de ces parents est le fait qu'il n'y ait pas de
grève dans le secteur privé. Lorsqu'ils considèrent le
temps perdu à cause de la période des négociations et des
grèves, ils ont, je pense, complètement raison. Si on mesure sur
les trois ans des conventions - on fait un peu de démagogie à
notre tour - la période où il y a un bon climat de travail dans
l'école, il y a de quoi être bouleversé. Aux dires de
nombreux enseignants, l'année des négociations est
néfaste, le climat est tendu et les relations dans l'école
n'existent à peu près pas. Cette situation amène une
baisse notable de la qualité de l'enseignement. L'année suivante
il faut colmater les relations entre tous les agents et replâtrer le
climat de l'école pour permettre d'avoir une bonne année scolaire
la troisième année. En somme, 180 jours de classe profitables en
trois ans. Il y a, je pense, de quoi se désespérer de
l'école publique.
On parle souvent de droits acquis. Les syndicats n'ont que cette
expression à la bouche. Or, chacun définit ces droits acquis
à partir de son monde. Car, comme le dit le philosophe Basile:
"Tout homme transporte avec lui le centre du paysage."
Nous constatons qu'il existe plusieurs droits acquis dans le domaine de
l'éducation. Il y a, bien sûr, le droit au travail, le droit
d'arrêt du travail, de grève, qui sont des conditions sine qua non
du monde du travail. Il y a encore le droit à l'enseignement, le droit
à l'apprentissage, à la connaissance, le droit
d'accès à la science et à l'information, le droit
à la qualité de l'enseignement, le droit d'accès aux
hautes sphères de l'esprit et, également, le droit au devenir.
Or, parmi ces droits acquis, le droit à l'enseignement est prioritaire
pour nous et plus ancien que les droits syndicaux. Les parents tiennent
à ce que ce droit des enfants soit respecté.
Le droit d'association est reconnu dans la charte des droits et
libertés. C'est donc un droit acquis pour les parents et les
étudiants de se regrouper et de faire connaître leurs attentes et
ce, non pas seulement devant une commission parlementaire quand la situation
est rendue dans une impasse. Il serait important que, dans l'avenir, parents et
étudiants puissent être considérés comme partie
impliquée dans le processus de négociation en tant que premiers
intéressés en fournissant, comme parents, l'élément
essentiel du système scolaire, soit les enfants, et en payant de nos
deniers le maintien de la structure. Les étudiants sont également
intéressés au premier chef, car c'est de leur vécu et de
leur avenir dont il est question.
Lorsque nous analysons l'évolution des négociations des
conditions de travail des enseignants, nous constatons toujours la même
insatisfaction. Je relève une phrase que le Dr François Cloutier,
prononçait lors du discours de la rentrée en 1973: "Il faut bien
l'admettre, les enseignants, dans leur ensemble, paraissent
désenchantés et malheureux. Certaines déclarations
syndicales évoquent des conditions de travail inhumaines et
présentent la société québécoise comme une
société d'oppression."
Nous avons changé de gouvernement, nous sommes dix ans plus tard
et nous avons droit aux mêmes discours de la part des syndicats.
Pourtant, il est difficilement acceptable que l'une des professions les mieux
considérées à l'heure actuelle dans son ensemble se
rebelle à ce point et refuse les règles démocratiques de
notre société.
Il y a là un important et urgent besoin d'examiner toute cette
situation de la tâche et des mécanismes de négociation des
conventions collectives afin de revaloriser l'école publique; sinon, la
solution sera peut-être de favoriser la généralisation de
l'école privée, car les parents se refusent de faire payer la
note des inconséquences patronales et syndicales à un tiers
complètement étranger au conflit: nos enfants.
Nous avons ensemble un nouveau contrat social à préparer,
contrat social qui pourra être caractérisé dans nos milieux
par la réalisation d'un projet éducatif d'école, qui
permettra l'évolution ou l'émergence d'un nouveau projet de notre
société québécoise. Il faura cependant, pour y
arriver, éliminer l'esprit corporatiste qui existe si fort actuellement
et qui empêche l'évolution de notre société. Il
faudra arriver à ce que les corporations cessent de se croire le centre
du paysage et qu'elles acceptent de le partager avec les autres groupes de la
société dont font partie les parents et les étudiants qui
ont leur mot à dire et entendent bien le faire. Merci.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre, s'il
vous plaît!
M. Laurin: M. le Président, je veux remercier
profondément la Fédération des comités de parents
de la province de Québec pour le mémoire qu'elle nous a
présenté. Ce mémoire a des caractéristiques
particulières. Il m'a fait penser, à plusieurs égards,
à celui que nous présentaient, il y a deux jours, le Regroupement
des associations étudiantes et la Fédération des
associations étudiantes collégiales. Ce n'est peut-être pas
étonnant parce que ces deux mémoires se situent du point de vue
de l'usager et peuvent apporter un éclairage sur l'utilisation des
services en vue de l'atteinte des objectifs qu'ont les usagers.
D'autre part - une autre analogie - ces réflexions viennent de
participants au processus d'éducation puisque l'étudiant est
participant, à part entière, au processus qui est destiné
à faire de lui un être libre, autonome, responsable, instruit.
Mais, en même temps, les parents aussi, de la même façon,
participent depuis une dizaine d'années à la vie de
l'école. Les lois leur ont donné une présence plus grande,
un rôle plus important. Ce rôle, ils l'ont parfaitement
assumé depuis une dizaine d'années. Ils sont, je crois, en mesure
de nous faire connaître, de leur point de vue de participants, non
seulement le climat qui prévaut dans les écoles, mais les
progrès, en même temps que les lacunes de notre système
d'éducation. Ce rôle n'est pas facile à assumer par la
Fédération des comités de parents du Québec parce
que, même si les lois leur ont donné une présence plus
grande, elles ne leur ont pas encore donné les moyens de s'organiser
pour pouvoir le remplir et, en particulier, les moyens financiers. Depuis dix
ans, nous sommes obligés de recourir à toutes sortes
d'expédients pour leur assurer le soutien nécessaire à
l'oganisation de leurs activités. Le problème n'est pas
réglé. Il faudra sûrement, dans l'avenir, trouver un moyen
statutaire, non sujet à l'arbitraire, qui puisse leur assurer non
seulement leur autonomie
dans l'exercice de leurs fonctions, mais en même temps
l'efficacité qui doit être également la leur pour organiser
leurs activités.
Ce que je remarque aussi, et qui me fait bien plaisir dans ce
mémoire c'est que, pour la première fois depuis que siège
cette commission, nous entendons parler des attentes de la population et
particulièrement des parents en ce qui a trait au système
d'éducation, particulièrement des attentes des parents en ce qui
concerne les valeurs que doit véhiculer notre système scolaire et
qui doivent présider à l'organisation pédagogique et
à l'organisation de l'école. Je suis heureux d'entendre parler
des valeurs intellectuelles, des valeurs affectives, des valeurs morales qui
doivent imprégner la vie de l'école, l'environnement
éducatif et l'organisation même de l'enseignement. Je pense que
c'est là un impératif que nous ne devrions jamais oublier.
Même si nous n'en parlons, hélas, pas assez souvent, nous devrions
tout mettre en oeuvre pour que ces impératifs, marqués au coin
des valeurs, puissent se réaliser concrètement dans toutes les
actions que nous menons, aussi bien sur le plan des politiques que sur le plan
de l'organisation scolaire.
Je remarque aussi que la Fédération des comités de
parents du Québec met beaucoup l'accent sur le projet éducatif et
que c'est à l'aune de ce projet éducatif qu'elle juge les
conventions collectives de 1979-1982, autant que les décrets qui font
l'objet de nos discussions à l'heure actuelle. Ce serait là ma
première question: Jusqu'à quel point, au-delà des
considérations que vous nous faites dans votre mémoire,
croyez-vous que les conventions collectives de 1979-1982 ne constituaient pas
le meilleur des moyens pour promouvoir ou réaliser ce projet
éducatif?
J'aurais aussi une deuxième question à vous poser, et
celle-là porte sur l'avenir. Vous avez beaucoup critiqué le
régime de négociation qui nous régit à l'heure
actuelle. Vous parlez de l'instabilité profonde que font subir à
notre système scolaire le processus de négociation actuel et les
grèves nombreuses qui l'ont marqué. Vous faites valoir aussi que,
dans tout prochain régime de négociation, il faudra impliquer
davantage les usagers, c'est-à-dire les étudiants et les parents.
J'aimerais savoir de vous si vous pouvez nous expliquer cela davantage afin
d'éclairer notre lanterne pour les mois qui viennent, puisque vous
semblez penser, comme beaucoup d'autres, que c'est tout de suite après
cette ronde de négociation qu'il faudra réfléchir ensemble
en vue d'adopter le plus rapidement possible un meilleur régime de
négociation que celui qui est le nôtre à l'heure
actuelle.
Le Président (M. Jolivet): M.
Pontbriand.
M. Pontbriand: Au niveau des conventions collectives que nous
avons connues par le passé, un peu comme nous l'avons relevé dans
notre mémoire, il y a quand même la présence des
enseignants à l'école qui était limitée surtout au
temps d'enseignement, la tâche, le "bumping" qui étaient, quant
à nous, les principaux inconvénients au fait d'établir
dans nos écoles des projets éducatifs. Je pense que, si on veut
préparer avec nos partenaires un projet éducatif qui tienne
compte des attentes et des besoins du milieu, il faut avoir
nécessairement le temps de s'asseoir ensemble et de réviser ce
qui existe afin d'en arriver à proposer des modalités
différentes d'application et de faire en sorte que l'école
réponde à ces besoins. On sait fort bien qu'une école de
la région du Bas-Saint-Laurent ou de la Gaspésie et une
école de Montréal, c'est complètement différent.
Elles ont des attentes et des besoins différents.
La tâche, étant minutée, codifiée, souvent,
le temps qu'on retrouvait au secondaire et qui était
réservé à l'encadrement nous paraissait dans bien des cas
nullement utilisé, étant trop marginal pour être
appliqué de façon efficace au perfectionnement ou au recyclage de
nos étudiants ou à un encadrement précis. Il y a
également la notion de "bumping" dont on a fait état, qu'on
trouvait réellement aberrante dans certaines circonstances, qui ne
permettait pas d'avoir accès à des services de qualité
dans nos écoles. (15 h 45)
Je pense que la principale difficulté résidait dans
l'absence de disponibilité souvent, des enseignants à
l'extérieur du temps requis pour l'enseignement, ce qui rendait
difficiles les rencontres entre les parents et les enseignants à
l'extérieur de l'école.
Nous avions, pour les prochaines négociations, fait l'an dernier
des recommandations au ministère du Travail et au gouvernement pour
modifier les règles du jeu. Ces recommandations visaient à faire
en sorte que, dans un premier temps, l'Assemblée nationale soit
responsable de déterminer les grands paramètres financiers et les
objectifs, également, de ces négociations, tout en tenant compte
des objectifs québécois en matière d'éducation.
Le deuxième principe est qu'on a souvent décrié la
tâche du gouvernement comme négociateur et partie à la
négociation, qui le mettait dans un état de juge et partie. Nous
recommandions qu'une fois que l'Assemblée nationale aurait, à la
suite d'audiences publiques en commission parlementaire, approuvé les
grands paramètres de la négociation celle-ci
s'effectue par la Federation des commissions scolaires et les syndicats
afin de laisser le gouvernement au-dessus du processus de négociation
et, également, de faire en sorte que les enjeux de la négociation
soient clairement connus de la population. Nous voulions qu'on connaisse au
départ les implications, tant sur le plan pédagogique que sur le
plan financier, des modifications à la masse monétaire ou aux
objectifs que le gouvernement se fixe dans cet esprit-là.
C'étaient les grands paramètres en ce qui concerne le
processus de négociation. Il y avait également des
recommandations plus précises quant aux modalités, mais ce sont
les principes. Il y avait également certains resserrements au niveau des
droits de grève et de lock-out; il s'agissait de faire en sorte que les
droits de grève et de lock-out ne soient permis qu'avec l'assentiment de
la majorité des membres d'une association syndicale reconnue et non pas
seulement à la majorité des membres présents, afin que les
décisions prises par une association syndicale soient réellement
le reflet de la majorité des gens de son milieu.
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: Merci, M. le Président. Il nous fait plaisir,
à nous aussi, d'entendre le point de vue de la Fédération
des comités de parents. Nous avons écouté la lecture de
votre mémoire, M. Pontbriand, Mme Bérubé et mesdames, avec
beaucoup d'intérêt.
Il y a, évidemment, un certain nombre de questions qui
découlent de cette audition que nous avons faite et je vous les adresse
bien simplement. D'abord, la Fédération des comités de
parents est un organisme qui regroupe des comités de parents qui sont
formés dans chaque commission scolaire. Il y a les comités
d'école qui sont regroupés en comités de parents au niveau
de la commission scolaire. Ensuite, est-ce que vous avez un regroupement au
niveau régional, au niveau des grandes régions du
Québec?
M. Pontbriand: Un groupement régional pour répondre
aux besoins de chacune des régions et la fédération est
dirigée par un conseil d'administration formé de deux
représentants de chacune des régions, plus un comité
exécutif de six membres élus par l'assemblée
générale.
M. Ryan: Très bien. J'entendais tantôt le ministre
dire qu'il espère pouvoir un jour proposer des formes de financement de
votre organisme qui garantiraient une certaine stabilité,
peut-être aussi une autonomie plus grande. Est-ce que je dois comprendre
de ce qu'a dit le ministre - cela fait quand même six ou sept ans que le
gouvernement actuel est responsable de cela - que, pour l'heure, les revenus de
la fédération viennent à peu près essentiellement
du gouvernement sous forme de subventions discrétionnaires? Et est-ce
que je pourrais avoir l'ordre de grandeur pour la présente année,
par exemple?
M. Pontbriand: Principalement, la fédération est
subventionnée par le gouvernement, tout comme le sont, d'ailleurs, la
Fédération des commissions scolaires et bon nombre d'autres
organismes. La seule différence est que le financement vient directement
et ne passe pas par les commissions scolaires avant de revenir en bas.
M. Ryan: II n'y a aucune disposition statutaire dans nos lois
à ce sujet-là.
M. Pontbriand: Non.
M. Ryan: Cela veut dire que c'est le gouvernement, chaque
année, qui, suivant son bon plaisir ou la manière dont il
interprète ses disponibilités, verse une subvention à
votre fédération qui est de l'ordre, pour la présente
année, de combien?
M. Pontbriand: D'environ 500 000 $.
M. Ryan: Est-ce que la fédération recueille
d'autres revenus à part cela?
M. Pontbriand: La fédération reçoit, quand
même, une participation de ses membres qui est d'environ 150 000 $, qui
vient des comités de parents et également de ses publications, de
ses abonnements aux journaux et autres.
M. Ryan: Bien. Vous disiez dans votre mémoire...
M. Pontbriand: Malheureusement ils n'ont jamais eu des budgets en
bas pour leur permettre de financer le fonctionnement d'une
fédération. C'est à peine s'ils ont les moyens pour
fonctionner chez eux, souvent avec de maigres revenus.
M. Ryan: C'est une remarque que je me permets avant de passer
à une question. Je pense que c'est important de situer chaque chose dans
son contexte exact. Ce qui me frappe à propos du fonctionnement des
comités d'école, c'est que, en général, la
participation des parents aux réunions où sont choisis les
membres des comités d'école n'est pas très
considérable. Concernant les écoles primaires, c'est un peu
mieux. Concernant les écoles secondaires, il y a des faiblesses
extraordinaires. Je pense que vous en conviendrez comme moi. On me disait, dans
ma région, à propos d'une école secondaire regroupant 2800
élèves, qu'à la
réunion où a été formé le
comité d'école il y avait à peu près 28 parents. Je
ne prétends pas que ce soit le plus bas, mais j'ai l'impression que la
participation concernant surtout les polyvalentes doit être pas mal
inférieure à 5%.
M. Pontbriand: Remarquez que, dans un premier temps, des
études ont démontré que la participation aux
élections scolaires est à peu près équivalente
à la participation aux élections des comités
d'école. Cependant, j'aimerais quand même ajouter que, dans la
majorité des cas, lorsque l'élection au comité
d'école se fait, le directeur d'école envoie une convocation aux
parents souvent la veille ou l'avant-veille pour les inviter à
l'élection du comité d'écoie. Il y a, à ce moment,
les gens qui se sentent engagés, qui veulent s'impliquer et qui vont y
participer. On fait rarement de la publicité. Je remarquais
dernièrement sur l'île de Montréal, je pense, une intense
campagne d'information sur les prochaines élections scolaires. Nous
n'avons pas les moyens de nous payer de la publicité pour donner de
l'information aux gens sur les élections des comités
d'école.
Les gens qui vont participer aux élections des comités
d'école sont convaincus et on retrouve quand même, au niveau du
Québec, près de 40 000 à 50 000 parents qui s'impliquent
dans l'ensemble des comités d'école. Si un parti politique
désirait se lancer dans une élection sans faire aucune
publicité ou si vous, comme député, lors de la prochaine
élection, vous décidiez de rester chez vous et d'attendre le jour
de l'élection, d'attendre le résultat, je ne pense pas
qu'à ce moment vous seriez réélu. C'est à peu
près la même situation que nous vivons dans nos comités
d'école. On reçoit, la veille, un avis de l'élection.
C'est sûr que ce sont les gens disponibles et qui y croient qui vont y
participer, parce que souvent, la majorité des gens n'en ont pas entendu
parler auparavant. Il y a toute une question d'information, de publicité
qu'on pourrait remettre en cause dans tout cela.
Y aller pour une élection comme telle, cela peut être peu
intéressant pour l'ensemble des gens. Si on avait autre chose pour
inciter les gens à participer, peut-être qu'on retrouverait une
meilleure participation des gens, une meilleure implication de l'ensemble de la
population. Mais les gens au niveau des comités d'école, par
contre, lorsqu'ils s'engagent, travaillent à plusieurs assemblées
par mois pour parvenir à réaliser quelque chose dans
l'école.
M. Ryan: Est-ce que la Fédération des
comités de parents, avant les événements de la fin de
janvier et de la première moitié de février, avait fait
une étude du contenu des décrets et avait pris une position
là-dessus?
M. Pontbriand: Non. Nous avons, d'ailleurs, reçu le
contenu du décret qu'à la fin de janvier et, comme je l'ai dit
tantôt, nous avons été très peu favorisés par
l'information au niveau de ce qui s'est passé. Les documents
étaient difficilement accessibles et nous n'avons pas pris position
parce que, pour nous, c'est à l'Assemblée nationale et aux gens
qui nous représentent pour administrer la province de prendre les
décisions. Si les décisions que l'Assemblée nationale
prend ne satisfont pas la population, nous estimons que ce sera lors des
élections que nous aurons à prendre position sur ce qui nous a
plu ou nous a déplu au niveau du mandat de nos dirigeants.
M. Ryan: Ce qui m'étonne un peu, c'est que vous n'ayiez
pas eu le temps de vous renseigner sur les décrets et, le 4
février, vous avez eu le temps de prendre position sur les
améliorations.
M. Pontbriand: Lorsque nous nous sommes rencontrés avec
les autres organismes, on n'a eu d'autre choix que de prendre les
bouchées doubles et d'analyser quand même les impacts qui
concernaient les services directs à nos enfants et les services qu'on va
retrouver dans l'école. Les questions salariales et la question des
assurances, tous les autres points nous intéressent d'une façon
très secondaire. Ce que nous recherchions, c'était de faire en
sorte que les enseignants puissent retourner à l'école, que les
services adéquats puissent être assurés à nos
enfants. C'est la solution que nous recherchions.
M. Ryan: Maintenant, un mémoire comme celui que vous
présentez, aujourd'hui,
M. Pontbriand, est-ce que cela a été approuvé par
chacune des fédérations régionales?
M. Pontbriand: Non. M. Ryan: Non.
M. Pontbriand: Je l'ai dit tantôt, il provient de mandats
que les assemblées générales et les congrès des
dernières années nous ont donnés. Il n'a pas
été approuvé parce que dans le court délai dont
nous avons bénéficié, il a été impossible de
consulter nos comités de parents. C'est un délai qui est beaucoup
trop court. D'ailleurs, le ministre de l'Éducation commence à
connaître les délais de consultation dont nous avons besoin. Pour
être capables de rejoindre l'ensemble de nos membres, cela prend
plusieurs mois de délai. C'est pour cette raison que le mémoire
est fait, non en fonction de la situation actuelle, mais basé uniquement
sur les mandats que nous avions reçus lors des derniers congrès
et assemblées générales. Les recommandations ont
été
faites dans un climat serein et non pas dans un climat d'affrontement ou
d'érnotivité.
M. Ryan: Ici, à la commission, la semaine dernière,
l'Association des comités de parents de la région 03 - c'est la
région de Québec - a présenté un mémoire, et
la position alors exposée est assez différente de celle que vous
exposez dans le vôtre. Je ne sais pas si vous êtes au courant de ce
mémoire.
M. Pontbriand: Je suis au courant du mémoire. Je ne suis
pas d'accord avec vous quand vous dites qu'elle est différente. Elle
donne un avis sur des points techniques du décret, points auxquels nous
n'avons pas touché dans notre mémoire et sur lesquels,
d'ailleurs, nous ne voulions pas nous prononcer, parce qu'on ne voulait pas
s'interroger ou donner un avis sur l'aspect technique des négociations.
Pour nous, il était important d'exprimer ce que les parents nous ont
demandé, ce qu'ils voudraient avoir comme système
d'éducation et de vous exprimer quels sont les objectifs que nous
visons. Je pense que c'est aux techniciens de répondre aux attentes des
parents.
M. Ryan: En tout cas, je m'excuse de diverger de vues avec vous,
parce que je trouve que les remarques de l'Association des comités de
parents de la région 03 sont précises et même, dans
l'ensemble, plus précises que celles qu'on trouve dans votre
mémoire. Elles s'adressent à des points bien identifiés,
nettement identifiés qui découlent directement des
décrets. Cela m'étonne d'entendre ce que vous dites. Je le
signale bien simplement, d'ailleurs. Savez-vous ce qui m'embarrasse
là-dedans? La notion de parents, c'est extrêmement
compliqué et je pense à une chose: les administrateurs sont des
parents, les syndiqués sont des parents, pour la plupart
également, pas seulement les syndiqués de l'enseignement, mais
également les syndiqués qui travaillent dans d'autres secteurs de
la société. Je ne le sais pas, mais, pour parler au nom de tous
les parents du Québec, il me semble que cela doit prendre des moyens de
vérification et de tamisage extraordinaires que vous ne semblez pas
avoir encore mis au point à ce moment-ci de votre évolution. Je
ne fais pas une critique. Je fais une constatation. Il me semble que cela doit
être très difficile. J'ai de la difficulté à
accepter que la notion de parents soit appropriée seulement par un
groupe. Voilà ce que je veux dire.
M. Pontbriand: Je suis bien d'accord avec vous, le terme
"parents" a été galvaudé depuis plusieurs années
dans la population. Je pense qu'il faut regarder en fonction des rôles
que les gens jouent et non pas en fonction du terme "parents". Je suis bien
d'accord avec vous. Nos représentants ont des membres de comités
d'école et des membres de comités de parents qui nous ont, au
cours des dernières années, fait part de leurs attentes. Nous
avons, d'ailleurs, étudié au mois de décembre dernier
certains aspects de la vie de l'école en procédant à
l'étude du document gouvernemental sur la restructuration scolaire.
À la lecture des réponses des participants à ce
congrès, comme je vous le disais, à la lecture également
des recommandations et des orientations qui ont été prises par
les dernières assemblées générales, c'est ce qui me
permet de vous dire que le mémoire reflète l'opinion et les
attentes des gens en ce qui concerne les objectifs d'éducation.
Quant au mémoire de la région 03 qui est le fait,
peut-être, de gens plus spécialisés et qui ont
peut-être des craintes beaucoup plus précises dans un domaine, je
pense que c'est à vous de les interroger si vous en avez l'occasion ou
de leur demander un supplément d'information, si vous le désirez.
Mais nous n'avons pas voulu nous engager, parce qu'au niveau du comité
exécutif nous nous interrogions sur la portée des recommandations
que des représentants de la région 03 faisaient et nous n'avons
pas cru bon de donner un avis sur leur avis à eux. Pour nous, il
était important d'exprimer ce que les membres des comités
d'école -pour ne pas employer le mot "parents" - ont exprimé au
cours des dernières années sur l'éducation et sur leurs
attentes. (16 heures)
M. Ryan: Deux dernières questions: Vous êtes
allés, le 4 février, à une réunion de ce que vous
appelez les présidents des organismes du réseau. Cela veut dire
les présidents de la Fédération des commissions scolaires,
de la Fédération des cégeps, des commissions scolaires
protestantes, etc. C'est cela?
M. Pontbriand: C'est exact.
M. Ryan: Vous êtes allés à cette
réunion et vous vous êtes solidarisés avec ce groupe dans
l'appui que vous avez donné au cadre de règlement du 10
février.
M. Pontbriand: C'est exact.
M. Ryan: Maintenant, est-ce que vous avez pris contact avec la
partie syndicale à quelque stade que ce soit du conflit, depuis la fin
de janvier, depuis que vous avez commencé à vous
intéresser à cela pour vrai? Est-ce que vous avez pris contact
avec la partie syndicale pour avoir son point de vue?
M. Pontbriand: On a rencontré la CEQ à la fin de
janvier pour avoir ses opinions sur le conflit. D'ailleurs, la CEQ avait
demandé à nous rencontrer, ce que nous avons fait; nous
avons passé plusieurs heures à discuter de différents
points avec elle.
M. Ryan: Ensuite, vous êtes allés à la
réunion du 4 février et vous avez trouvé que, pour jouer
le rôle de médiation dont vous parlez à la page suivante,
vous étiez mieux de pencher plutôt du côté du
gouvernement. Est-ce que je me trompe?
M. Pontbriand: Ce n'était pas de pencher du
côté du gouvernement, sauf que celui-ci est quand même le
représentant de la population, ce sont nos représentants et nous
estimions qu'il était important de faire en sorte de débloquer le
dossier et que, dans la situation, il était peut-être le mieux
placé pour essayer de faire une offre à la CEQ pour ouvrir le
débat.
M. Ryan: Quand vous dites que les parents auront une place dans
le processus de négociation dans l'avenir, qu'est-ce que vous voulez
dire?
M. Pontbriand: Je n'ai pas compris.
M. Ryan: Quand vous suggérez que les parents aient une
place dans le processus de négociation dans l'avenir, quelle forme cela
pourrait-il prendre?
M. Pontbriand: Remarquez que, dans les recommandations que nous
avions faites l'an passé, nous aurions aimé que le conseil
d'information qui devait exister puisse jouer son rôle et qu'on puisse y
avoir un représentant qui soit en mesure de suivre ce qui se passe; dans
les futures négociations, je pense qu'il y a des choses qu'il faudrait
entrevoir. Il faudra réévaluer l'ensemble de la situation,
continuer nos études et, par la suite...
Le Président (M. Jolivet): Merci. Avant de passer la
parole au député de Fabre et adjoint parlementaire au ministre de
l'Éducation, je ferai distribuer aux membres de la commission un
document qui est un télex envoyé par le collège John
Abbott, pour votre information. M. le député de Fabre.
M. Leduc (Fabre): M. le Président, je voudrais commencer
par féliciter la fédération pour la qualité du
mémoire qu'elle nous présente. Je pense que le mémoire
reflète bien les préoccupations de l'ensemble des parents. Je
dois aussi ajouter que les questions et les commentaires du
député d'Argenteuil me laissent perplexe. Ces questions et ces
commentaires - en tout cas dans mon esprit - semblent plutôt
dévaloriser le rôle que joue la Fédération des
comités de parents et aussi le rôle des parents à
l'intérieur des comités d'école et des comités de
parents. C'est assez curieux que le député d'Argenteuil n'ait pas
posé ce genre de questions, par exemple, à l'Association des
cadres scolaires ou à la Fédération des commissions
scolaires. Pourquoi n'a-t-il par demandé à ces gens s'ils avaient
également consulté leurs associations locales, les commissions
scolaires locales? Pourquoi ces questions n'ont-elles pas été
posées et pourquoi ces questions vous sont-elles posées à
vous? Enfin, cela soulève quand même des doutes sur la
façon dont le député d'Argenteuil envisage le rôle
que vous jouez au sein de la société
québécoise.
J'aurais une question précise à vous poser, une question
que vous ne touchez pas dans votre mémoire; cela concerne la
présence des enfants à l'école. On sait que, dans le
décret, on prévoit une augmentation du temps de présence
des enfants à l'école, c'est-à-dire une proposition qui
ferait passer le temps de présence de 23 heures à 25 heures.
J'aimerais savoir ce que vous en pensez et comment vous réagissez devant
cette proposition?
Le Président (M. Jolivet): M.
Pontbriand.
M. Pontbriand: Nous sommes favorables dans l'ensemble à
une augmentation du temps de présence des enfants à
l'école, à la condition cependant que ce temps soit
utilisé adéquatement, qu'on ne l'utilise pas pour des choses qui
ne seraient pas pertinentes à l'éducation. Je pense que c'est
intéressant, parce que cela pourrait permettre d'explorer un certain
nombre de sujets, d'explorer certains programmes qui ne sont pas
peut-être pas suffisamment vus aujourd'hui. Nos parents, lors de la
consultation sur le programme de formation personnelle et sociale ont
déploré le peu de temps qu'on semblait vouloir accorder à
ce nouveau programme dans l'avenir. On parlait, au secondaire, de cinq heures
par année. C'était très minime comme temps. Je pense qu'il
y a, quant aux nouveaux programmes qui s'en viennent, la possibilité
d'envisager une meilleure répartition du temps en fonction des
programmes qui vont être disponibles, comme également
peut-être l'occasion d'avoir accès à davantage de
spécialistes sur certaines matières. Cela peut être la
musique, cela peut être les arts plastiques, l'éducation physique.
On s'est fortement plaint, au cours des dernières années, du fait
que le temps d'enseignement, le temps de présence des enfants à
l'école diminuait de plus en plus. Si l'on se reporte à notre
jeunesse ou au temps où on allait à l'école, le temps de
présence était beaucoup plus long et nous n'en sommes pas morts.
Il y a peut-être une certaine nostalgie de la part des parents
également quant à cela. En plus
de la nostalgie, je pense qu'une utilisation très
intéressante peut être faite de l'augmentation de la
présence des enfants à l'école.
M. Leduc (Fabre): Je vous remercie.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: Merci, M. le Président. Je veux souhaiter la
bienvenue, comme l'ont fait mes collègues, aux représentants de
la fédération. Leur mémoire attire notre attention sur un
certain nombre de points. Le député de Fabre a passé en
revue un certain nombre de questions qui ont été posées
par le député d'Argenteuil, invitant un jugement critique sur le
fondement de ces questions. Je pense que les questions qui sont posées
ici par nous, parlementaires, à cette commission parlementaire visent
à éclairer la situation.
La Fédération des comités de parents nous
présente un mémoire, et force nous est, très
objectivement, de reconnaître que, grosso modo ou dans plusieurs de ses
points importants, on retrouve une répétition du discours
ministériel, du discours gouvernemental.
Il est étonnant qu'on ne retrouve à peu près pas
dans le mémoire qui nous est soumis une critique, de quelque nature
qu'elle soit, envers le gouvernement. Je ne suis pas prêt à croire
que les fautes soient nécessairement toutes d'un côté. Je
crois que la Fédération des comités de parents a le droit
de choisir une version plutôt qu'une autre. Cependant, en agissant de la
sorte, elle peut à un moment donné nous permettre à nous,
parlementaires, de nous poser un certain nombre de questions. Par exemple, la
Fédération des comités de parents déclare -elle le
dit clairement dans son mémoire -qu'elle aurait souhaité ne pas
voir utiliser les enfants dans la publicité ou les efforts que font les
enseignants pour convaincre la population du bien-fondé de leurs
revendications. J'aurais aimé - cela aurait rétabli un certain
équilibre - à titre d'exemple, que la Fédération
des comités de parents nous indique d'une façon aussi claire, au
sujet des actes récents du gouvernement en ce qui concerne une
publication faite à 400 000 exemplaires, qui a été
distribuée par courrier de première classe, qu'elle avait des
réserves de nature sérieuse en ce qui concerne cette utilisation
des fonds publics qui était de nature à prôner une version
tronquée - c'est le moins qu'on puisse dire -des faits. Cependant, force
m'est de constater le silence de la fédération à ce
sujet.
J'aurais aimé aussi que la fédération nous dise sa
façon de penser en ce qui concerne la loi 111 et l'article 28 en
particulier. En entendant parler le président Pontbriand, une grande
justification de ses prises de position, c'est que le gouvernement en a ainsi
décidé et qu'à partir de là - si on continue son
raisonnement - la cause défendue par le président serait la bonne
cause. Si c'était aussi clair que cela nous n'aurions pas eu besoin de
nous réunir ici aujourd'hui. C'est devant ces inquiétudes que le
député d'Argenteuil comme moi-même sommes appelés
à nous poser un certain nombre de questions.
Le député d'Argenteuil s'est informé en ce qui
concerne le financement de la fédération. On lui a donné
comme réponse qu'elle était financée en très grande
partie par des subventions discrétionnaires du gouvernement d'environ
500 000 $. On faisait un rapport avec la façon dont est financée
la Fédération des commissions scolaires par exemple. Je pense
qu'il faut quand même signaler que, pour ce qui est de la
Fédération des commissions scolaires, elle est financée
selon des règles budgétaires précises qui sont bien
connues: tant par élève. Il n'y a rien de discrétionnaire
là-dedans. Quand le montant est augmenté, cela fait l'objet de
discussions. Cela fait l'objet de négociations. La
Fédération des commissions scolaires doit établir ses
besoins, l'augmentation de ses coûts et c'est après qu'on
établit le montant de 1,50 $ ou de 1,75 $ - je ne sais trop ce qu'il est
actuellement - par élève. Je ne pense pas que l'on puisse
assimiler totalement les deux formes de financement. Je pense que
c'était couper un peu court à nos inquiétudes que de dire
que nous sommes dans une situation similaire à celle de la
Fédération des commissions scolaires. Ce n'est pas le cas. Je
veux le signaler.
Je suis étonné aussi de voir la façon pratiquement
- pour employer un mot exagéré - "cavalière" avec laquelle
on met de côté les inquiétudes de l'Association des
comités de parents de la région 03. Il est vrai qu'ils nous ont
remis un document très court mais qui pose des questions fondamentales
et qui se rapporte à des questions précises sur les
décrets et sur la proposition de règlement du 10 février.
Étant donné que le président, M. Pontbriand, nous dit
qu'il connaissait ce mémoire, j'aurais aimé qu'il nous dise si sa
fédération ou lui-même partage de quelque façon que
ce soit une certaine inquiétude quant à la disparition des ratios
qui présidaient à l'allocation des effectifs enseignants aux
commissions scolaires. Je lis le mémoire de l'Association des
comités de parents de la région 03: "En effet, le décret
prévoit que le nombre d'enseignants sera déterminé
à partir des normes de constitution des groupes, à savoir les
maxima et les moyennes, ainsi que de la nouvelle tâche des enseignants.
Ce mode d'allocation des ressources ne tient compte
ni du vécu des commissions scolaires ni des services dont elles
se sont dotées depuis plusieurs années; personnes ressources,
orthopédagogues, psychoéducateurs." "Loin d'être farfelue,
cette hypothèse -l'hypothèse à laquelle on
réfère que ces services seraient assujettis aux décisions
administratives de nature strictement budgétaire la plupart du temps -
nous semble des plus plausibles dans le contexte des restrictions
budgétaires actuel." Ce sont là des inquiétudes qui nous
sont transmises par des comités de parents de la région de
Québec, région qui englobe mon comté. Je n'ai pas entendu
la Fédération des commissions scolaires exprimer une
inquiétude sur les effets possiblement néfastes des
décrets. Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes! C'est
à partir de là qu'une trop grande similitude entre la
Fédération des comités de parents du Québec et le
discours ministériel nous amène peut-être à mettre
tout cela en sourdine.
Je pense que force nous est de constater, ici à cette table, en
commission parlementaire, qu'au cours des quatre jours -nous sommes en train de
terminer la quatrième journée - il y a eu une disproportion
considérable entre le point de vue des syndiqués, des enseignants
et le point de vue de l'autre partie. Le député d'Argenteuil
signalait que nos relations de travail sont basées sur une
bipolarisation. Nous en sommes - je ne sais pas - peut-être à la
50e ou à la 60e heure de session et je serais
curieux, à partir des sous-ministres qui ont comparu devant nous ainsi
que tous les organismes, de faire le total d'un pôle, soit le pôle
patronal vis-à-vis du pôle syndical. Mon idée n'est pas de
dire que la partie syndicale a raison ou a tort. Je ne prends pas position mais
je signale l'espèce de disparité entre la possibilité
qu'une partie, qu'un pôle... (16 h 15)
Dans une discussion comme celle-là, il y a deux pôles. Un
pôle, qui est le pôle patronal, a eu l'occasion par
différents organismes de faire valoir tous les aspects à partir
des comparaisons avec l'Ontario, à partir des restrictions
budgétaires, à partir de la situation économique, à
partir des exigences pédagogiques, tout cela sous l'éclairage,
sous les "spotlights" la plupart du temps patronal. Je ne peux que
déplorer, M. le Président, qu'un organisme qui, normalement -
c'était l'espoir que j'avais au début - aurait dû se situer
entre les deux, qui aurait dû dire: nous pensons que du côté
syndical les choses sont vues de telle façon, il y a telle chose qui
n'est pas, à notre avis, acceptable et de l'autre côté, le
discours gouvernemental, le discours ministériel est aussi
déficient, a aussi des lacunes... C'est un rôle que j'aurais
aimé... qui aurait pu établir un équilibre qui, force
m'est de constater, a été rompu; j'aurais aimé que ce
rôle-là soit joué par la fédération des
comités de parents. Cela n'a pas été, c'est un fait.
Je vois que le président aimerait peut-être que je pose des
questions, sauf que les questions que j'aurais vont amener des réponses
que je connais dans la plupart des cas déjà. Dans les
circonstances, je ne peux que dire: peut-être que la
Fédération des comités de parents aurait contribué
d'une façon plus positive - parce que c'est pour cela qu'on est ici -
à une tentative de règlement du conflit qu'en prenant une
position qui, clairement, s'identifie à celle du gouvernement - la
fédération a parfaitement le droit de faire cela, ce n'est pas ce
que je veux mettre en cause - mais je pense qu'en agissant de la sorte, elle a
pris une position qui n'amène pas nécessairement un
règlement plus rapide du problème auquel on a à faire
face.
Si je réfère au mémoire de la
fédération, on y retrouve un certain nombre d'affirmations. Je
vais poser la question au président. On y dit par exemple en ce qui
concerne la capacité des enseignants que les parents n'ont jamais
compris comment il se faisait qu'un professeur de mécanique pouvait en
venir à enseigner le français ou les mathématiques sans en
avoir la compétence. C'est une affirmation qui m'apparaît grosse.
J'aimerais que le président, M. Pontbriand, m'informe dans quelles
commissions scolaires, dans les circonstances ou peut-être avec les
statistiques dont il peut disposer quand ces choses-là se sont
produites. Il affirme aussi dans le mémoire que les enseignants ne sont
pas les mieux placés pour préparer, élaborer les syllabus
de cours, les plans d'étude du matériel didactique, des
instruments d'évaluation en l'absence de guide pédagogique et de
manuels scolaires. J'aimerais savoir de sa part qui, à son avis, devrait
jouer ce rôle-là. Qui voit-il sinon les enseignants qui ont suivi
des cours de pédagogie? Est-ce que dans son idée c'est le
ministère qui doit faire cela? Comment cela se passe-t-il? Qui doit le
faire, s'il déclare que les enseignants ne sont pas les mieux
placés pour cela? Ce sont les deux questions qui me viennent à
l'idée. Je les pose en invitant le président à nous
éclairer sur ces points particuliers de son mémoire, tout en
restant un peu sceptique sur le fait que globalement la
Fédération des comités de parents n'ait pas trouvé
beaucoup à redire à la position gouvernementale en aucune
circonstance.
Le Président (M. Jolivet): M.
Pontbriand.
M. Pontbriand: Je trouve un peu étonnante, M. le
député de Louis-Hébert, votre affirmation quant aux
orientations de
la fédération. Je trouve étonnant qu'un
député de l'Opposition s'étonne que le gouvernement
réponde aux attentes de la population. Quant à nous, les
objectifs que le gouvernement a suivis en ce qui touche la tâche, la
globalisation et ce qui touche également un certain nombre d'objectifs
sont des objectifs que nous avions exprimés non pas depuis la
dernière semaine, non pas depuis le dernier mois mais depuis plusieurs
années et avant même que le gouvernement actuel soit au pouvoir,
sous le gouvernement de M. Bourassa. Ce n'est quand même pas nouveau. En
ce qui concerne les orientations que la fédération et les
comités de parents ont prises, elles ont toujours été les
mêmes depuis que nous existons. Nous en parlons dans le mémoire,
nous avons la même orientation depuis 1972.
Étonnant également, quant à moi, de voir qu'on ait
des informations un peu erronées en ce qui touche le fonctionnement.
J'ai mentionné tantôt que nous étions financés par
le gouvernement comme les commissions scolaires le sont. Les commissions
scolaires ne font pas l'objet de règles budgétaires
précises de la part du gouvernement. Ce sont les commissions scolaires
réunies en assemblée au sein de leur fédération,
qui est un organisme reconnu par une loi privée et non pas par la Loi
sur l'instruction publique, qui déterminent le per capita
élève qu'elles devront payer à leur
fédération, comme elles ont également
décidé, il n'y a pas si longtemps, de payer une cotisation
spéciale pour certaines fins. Les commissions scolaires sont
entièrement autonomes, comme elles sont libres d'adhérer à
leur fédération et de payer une cotisation à leur
fédération.
À ma connaissance, les commissions scolaires sont
subventionnées à près de 97% par le gouvernement et ce
sont les mêmes sommes qui servent au fonctionnement de leur
fédération. Quant à nous, elles viennent du même
gouvernement, ce sont les mêmes contribuables qui défraient les
subventions que nous recevons, même si elles n'ont pas fait l'objet de
questions statutaires, pas plus que les cotisations que les commissions
scolaires paient à leur fédération.
Quant à la loi 111, nous n'avons pas à porter de jugement,
mais je vous ferai remarquer que, dans notre mémoire, nous avons quand
même mentionné que c'était une loi très dure. Vous
pouvez retrouver à la page 3 ce qui touche cela. J'ai dit tantôt
que nous sommes là pour représenter les intérêts des
parents, nous ne sommes pas un parti politique. Nous ne sommes pas
intéressés à faire le départage entre l'Opposition,
le gouvernement ou la CEQ. Pour nous, il était important de vous
indiquer les attentes des parents, attentes qui ont été
validées par des assemblées générales et des
congrès passés.
Ce que nous vous mentionnons aujourd'hui a fait l'objet de
résolutions. Chacune de nos régions est quand même
autonome, a droit à sa dissidence et a droit de faire entendre ce
qu'elle a à dire. Si elle a des inquiétudes, il est parfaitement
normal qu'elle puisse les exprimer à cette commission, ce qu'elle a
fait, mais ce n'est pas pour nous une obligation d'endosser ou de porter un
jugement sur tout ce que nos comités de parents peuvent penser et
écrire. Nous avons eu des consultations auparavant pour
déterminer les orientations à prendre et c'est de ces
orientations que nous vous avons fait part.
Quant à la question de la capacité, je n'ai pas de
chiffres, je n'ai pas d'exemples précis. Cependant, dans les conventions
collectives précédentes où il n'était question que
d'ancienneté, vous pourriez retrouver, je pense, dans toutes les
commissions scolaires, des situations où cela s'est produit.
Quant au soutien dont nous parlons dans notre mémoire, nous
disons que les enseignants ne sont peut-être pas les gens les mieux
préparés pour élaborer des programmes, des plans de cours,
du matériel didactique et que cela pourrait être fait par d'autres
intervenants. La situation nous est arrivée, au cours des années;
la politique était que le ministère de l'Éducation
préparait des plans-cadres, des programmes-cadres. Chacune des
commissions scolaires devait préparer, à l'intérieur de
cela, ses programmes institutionnels et chaque école devait
également préparer ses plans de cours. Ce sont les enseignants
qui devaient, finalement, élaborer les programmes, le matériel
didactique, les outils et les instruments d'évaluation. Nous pensons
qu'il serait peut-être important que d'autres personnes puissent jouer ce
rôle, de faire en sorte que l'enseignant puisse jouer réellement
son rôle d'éducation, d'avoir une relation directe avec
l'étudiant et qu'il puisse bénéficier d'un soutien
adéquat.
Un exemple que j'aimerais vous donner et qui n'est pas nouveau: La
commission d'étude, qui avait fait, entre 1972 et 1975, dans le cadre
d'un décret, une étude sur les enseignants, avait constaté
que dans une école, aux États-Unis, il y avait possibilité
pour les enseignants d'administrer tous les jours aux étudiants des
tests diagnostics, tests qui étaient remis le soir à
l'informatique, traités, et le lendemain l'enseignant avait le
résultat de ces tests. Il n'était pas obligé de faire la
correction. Elle était faite le soir ou la nuit par des services
adéquats. Est-ce qu'on ne pourrait pas regarder, surtout avec
l'implantation de l'informatique dans toutes nos écoles, la
possibilité d'utiliser l'informatique pour soulager l'enseignant d'un
certain nombre de tâches?
Actuellement, on est en train
d'introduire dans nos écoles toute cette dimension de
l'informatique. On introduit les appareils, on demande aux enseignants
d'enseigner cela. Est-ce qu'ils ont le soutien? Est-ce qu'ils devront
préparer les programmes d'enseignement, les plans d'étude? Est-ce
qu'ils devront également préparer tous les programmes
d'informatique dont ils auront besoin pour faire leur cours? Je pense qu'il y a
un certain nombre de choses, un certain nombre d'outils, d'instruments qui
pourraient être fabriqués soit par la commission scolaire, par
l'école, par le ministère, je ne sais pas, mais qui pourraient le
soulager. On se plaint qu'on a beaucoup de personnel en disponibilité.
Est-ce qu'on ne pourrait pas utiliser ces personnes pour assurer ce soutien aux
enseignants, faire en sorte qu'ils jouent un rôle, qu'ils aient une
présence efficace durant toute la journée auprès de leurs
étudiants? C'est ce que nous visons par ces recommandations.
Le Président (M. Jolivet): Avant d'accorder la parole aux
deux dernières personnes, vu qu'on a une heure et quart
déjà de passée, je tiens à dire qu'on va prolonger
d'environ une quinzaine de minutes. Mme la députée de L'Acadie et
M. le député de Matapédia. Mme la
députée.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je me passe de
commentaires généraux parce que là, je trouve qu'il y en a
eu assez de faits. Je vais passer à des questions précises. Vous
êtes des parents, quelle est votre réaction, comme parents,
à l'allongement du temps d'enseignement pour les élèves du
premier cycle de l'élémentaire qui désormais auront le
même temps d'enseignement que les élèves du secondaire V?
Je prends les deux extrêmes, alors, mettez même le secondaire III,
si vous voulez, d'enfants beaucoup plus vieux qu'ils ne le sont
eux-mêmes. Est-ce que vous avez réfléchi à cela?
Le Président (M. Jolivet): M.
Pontbriand.
M. Pontbriand: En principe, les réactions que nous avons,
les parents sont favorables à ce que l'enfant puisse aller à
l'école, et n'ont pas d'inconvénient, ne voient pas qu'une
vingtaine de minutes de plus à l'école par jour va causer un
préjudice aux enfants. Au contraire, je pense qu'ils peuvent recevoir
durant ce temps, un enseignement, un apprentissage qui peut être des plus
intéressants.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous avez discuté de cette
question, non pas avec la CEQ, mais avec des enseignants qui enseignent au
premier cycle de l'élémentaire?
M. Pontbriand: Concernant la présence des enfants?
Mme Lavoie-Roux: La présence, c'est une chose, mais du
point de vue de l'allongement du temps d'enseignement à des enfants de
six et sept ans, c'est-à-dire de les mettre sur le même pied que
des enfants de quatorze, quinze et seize ans?
M. Pontbriand: Nous avions, en vue de la commission parlementaire
qui devait avoir lieu sur le sujet, consulté nos comités
d'écoles et dans l'ensemble, les gens nous ont répondu qu'ils
étaient favorables au prolongement de la période de
présence des enfants à l'école.
Mme Lavoie-Roux: L'avez-vous discuté avec les enseignants
eux-mêmes parce que les enseignants, c'est quand même eux qui ont
les enfants qui doivent justement leur fournir ces services?
M. Pontbriand: Moi, personnellement, non, parce que je suis dans
un comité d'école secondaire, mais je vous dis que la
consultation a été faite auprès de tous les comités
d'école et dans les comités d'école, les gens en ont
sûrement discuté parce qu'il y a des enseignants qui
siègent aux comités d'école et ils en ont sûrement
discuté avec les enseignants avant de faire des recommandations de cet
ordre.
Mme Lavoie-Roux: Là ce serait...
M. Pontbriand: D'ailleurs, ce n'est que depuis 1976 que le temps
de présence a été diminué. Auparavant, avant 1976,
le temps de présence à l'école était le même
que celui proposé actuellement. (16 h 30)
Mme Lavoie-Roux: On en a discuté, hier, et il y en avait
moins au deuxième cycle qu'au premier cycle. Finalement, on a
rapproché les deux à cause des problèmes de transport,
mais je ne crois pas que les enfants aient eu, - peut-être au temps
jadis, je l'ignore - autant de temps, de minutes d'enseignement à
l'élémentaire, premier cycle qu'au secondaire, deuxième
cycle.
M. Pontbriand: Ce que je sais, c'est qu'avant 1976 c'était
la même chose que ce qui est proposé actuellement. Il y a
peut-être une différence entre les écoles, mais...
Mme Lavoie-Roux: Avant 1976, il y avait 23 heures et non 25
heures. Bon! De toute façon, on n'est pas pour perdre du temps.
C'était seulement pour avoir votre réaction. Vous n'y voyez pas
d'inconvénient?
M. Pontbriand: Non.
Mme Lavoie-Roux: La deuxième question a trait à la
page... - je m'excuse -13 de votre rapport, au premier paragraphe. Vous parlez
du droit au travail, du droit à l'arrêt de travail, mais vous
dites que les enfants ont aussi le droit à l'enseignement, à
l'apprentissage, à la connaissance, à l'accès à la
science et à l'information. Je ne saurais être plus d'accord avec
vous, mais cela suscite une question dans mon esprit. Laissons de
côté pour le moment ce que les gens appellent les instances
syndicales et que les gens sont peut-être prêts à
discréditer trop rapidement, comme on a vu, entre autres, le ministre de
l'Éducation le faire l'autre soir, mais il reste une chose, vous
êtes ceux qui côtoyez, normalement, le plus les enseignants, mis
à part vos enfants, évidemment. Pouvez-vous nous dire si,
d'après l'expérience que vous avez eue avec les enseignants de
vos enfants, les enseignants remplissent leur tâche avec
compétence et dévouement? La raison pour laquelle je vous pose
cette question, c'est parce qu'à l'heure actuelle, les enseignants en
prennent un peu pour leur rhume et, demain, vous devrez - et d'ailleurs
aujourd'hui même parce que vos enfants sont en classe - travailler
quotidiennement avec les enseignants. Quel est le jugement que vous porteriez
sur la qualité de l'enseignement que les enseignants prodiguent à
vos enfants?
M. Pontbriand: Vous voulez dire normalement ou actuellement?
Mme Lavoie-Roux: Je vous demande...
M. Pontbriand: Dans l'ensemble, les enseignants donnent quand
même un bon service. Il y a de bons enseignants et, dans la
majorité des cas, les enseignants remplissent leurs fonctions et
accomplissent leur travail de façon adéquate. C'est
évident.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que...
M. Pontbriand: Comme dans toutes les couches de la
société, on retrouve du bon et du mauvais.
Mme Lavoie-Roux: Oui. Réalisez-vous qu'aujourd'hui la
tâche de l'enseignant est une tâche - mettons de côté
les minutes et les heures - qui est devenue de plus en plus difficile, compte
tenu de l'évolution sociale, de l'évolution familiale, si je puis
dire, du fait, par exemple, que vous avez tout près de 40% - et
là, le ministère de l'Éducation pourrait rectifier mes
données, mais c'est à peu près de cet ordre - d'enfants
qui viennent de familles monoparentales, qui sont exposés à plus
de stress et que la tâche de l'enseignant devient une tâche de plus
en plus difficile? Et je mets de côté les minutes et les
demi-heures. Ce n'est pas ce dont je parle.
M. Pontbriand: Je pense qu'elle est difficile, mais non pas
à cause de cet aspect uniquement. Je vais reprendre ce que j'ai
déjà dit devant le Conseil supérieur de l'éducation
et qui a soulevé l'ire de bon nombre de personnes. Je vais quand
même vous le répéter. Il y a une difficulté qui est
inhérente à la profession d'enseignant. Un enseignant va entrer
à l'école à l'âge de cinq ans et il n'en ressort
pas. Il va à l'école primaire, secondaire et à
l'université et, quand il a fini son cours, il retourne à
l'école. Quel apprentissage a-t-il fait du milieu extérieur
à l'école? Il n'a appris qu'à fonctionner en fonction
d'apprentissages, en fonction quasi de dogmes et il continue à
évoluer dans ce même d'esprit. Ce n'est pas un jugement
négatif vis-à-vis des enseignants. C'est tout simplement, quand
on regarde la situation, un état de fait. Je pense que la
difficulté que les enseignants peuvent avoir, c'est de concevoir
justement, un peu comme vous le disiez tantôt, le fait qu'il puisse y
avoir des situations de parents qui vont être seuls, mais
également tout ce qui entoure la vie de l'école, la vie des gens
qui vivent dans le quartier, des gens qui vivent dans le commerce et dans
l'industrie, qui ont une vie complètement différente et
complètement inconnue des gens de l'enseignement. C'est cette
difficulté qui, souvent, fait en sorte qu'on a comme parents une
réticence à être acceptés parce qu'on vit dans deux
mondes différents. C'est souvent cette barrière qui est assez
infranchissable. C'est pour cela que pour nous, il est important qu'il puisse y
avoir dans nos écoles des projets éducatifs afin que
l'école puisse s'ouvrir davantage sur son milieu, éliminer cette
barrière entre les dogmes et la vie de pratique qu'on retrouve dans nos
écoles. Pour cela, il faut que les gens puissent arriver à se
parler. Il est important pour nous que le projet éducatif
réunisse les principaux intervenants du milieu pour faire en sorte qu'on
puisse arriver à être sur la même longueur d'onde sur le
type de société qu'on veut. Les enseignants sont
idéalistes de par leur formation, mais entre l'idéal, qui est
très beau - et il faut en avoir si on veut évoluer - et la vie de
tous les jours, il y a quand même une marge. Il est important que les
enseignants puissent comprendre les difficultés que les enfants peuvent
vivre quotidiennement dans leur milieu. Cette différence crée
cette barrière, mais je pense qu'on peut y parvenir et qu'avec de la
bonne volonté - nous sommes peut-être idéalistes aussi d'y
croire - on peut réussir à bâtir un projet éducatif
qui fera en sorte d'asseoir tout le monde à une même table pour
pouvoir s'entendre sur les valeurs qu'on veut véhiculer dans
l'école et le type de société, finalement, qu'on veut
retrouver
au Québec.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'ai juste un dernier
commentaire. Je suis un peu surprise que M. Pontbriand fasse ce cloisonnement
entre l'enseignant qui enseigne à des enfants et l'enseignant qui est
parent qui, lui aussi, est confronté aux mêmes difficultés
tant dans sa vie personnelle, dans sa vie familiale que dans sa vie dans la
communauté. Vous semblez considérer les enseignants comme un
monde à part qui aurait perdu contact avec les problèmes de notre
société. Cela m'étonne un peu. En fait, la question que je
vous posais était: Est-ce que les difficultés de l'enseignant
aujourd'hui ne sont pas accrues en fonction de toutes les difficultés
sociales, économiques, d'ordre familial, auxquelles la
société en général est exposée? Merci.
M. Pontbriand: C'est évident. Je pense que les
difficultés qu'on vit actuellement tant sur le plan d'une
négociation des conventions collectives découlent de cette
orientation ou de ce cloisonnement entre l'école et la
société.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Matapédia.
M. Marquis: M. le Président, je voudrais demander à
M. Pontbriand quelques précisions en reprenant les interventions de
certains de mes collègues de l'Opposition. D'abord, le
député d'Argenteuil a eu des doutes sur votre
représentativité comme parents. Est-ce que je me trompe en disant
que vous représentez les parents ordinaires, c'est-à-dire pas des
parents qui sont des administrateurs scolaires, qui sont des commissaires
d'école ou qui sont des députés? Il est vrai que nous
sommes tous parents, même il y a de ces parents qui sont ministres ou
tout cela; là, il peut y avoir plus de dangers de conflit
d'intérêts. Est-ce que vous avez la prétention de
représenter en très grande majorité l'ensemble des parents
autres que ceux qui sont touchés par le système
d'éducation? C'est ma première question.
Deuxièmement, à ma connaissance, vous n'avez pas
répondu à une observation du député de
Louis-Hébert qui mettait en parallèle les gestes de certains
enseignants de l'Alliance ou d'ailleurs au Québec qui se servent des
périodes de cours pour donner aux enfants ce que vous appelez des vues
des syndicats sur la situation des négociations. M. le
député de Louis-Hébert a mis cela en parallèle avec
le journal qui a provoqué beaucoup de remue-ménage vendredi soir
dernier ici et qui était adressé aux parents et aux enseignants,
mais surtout aux enseignants, et non pas directement aux enfants dans les
écoles. Je dis bien que ce sont certains professeurs, c'est sans doute
loin de la majorité, qui se sont servis des cours pour passer leur
message dans les circonstances. C'est ma deuxième observation que
j'aimerais que vous précisiez.
Troisièmement, vous avez dit à la commission que vous
êtes un président de comité d'école secondaire. Or,
dans le document qui a été déposé à la
commission venant du comité d'école ou de l'Association des
comités d'école de la région 03, on parle de la
tâche au secondaire. Est-ce que d'après l'expérience que
vous pouvez avoir d'une école secondaire, quand on propose aux
enseignants d'augmenter la tâche de 20 heures à 21 heures, pour la
première année du décret ou de la convention, à 22
heures par la suite et à 23 heures, pour la dernière
année, est-ce que cette augmentation est vraiment une charge surhumaine
pour un enseignant? Si ce n'est pas une tâche surhumaine, est-ce une
augmentation de tâche qui peut être acceptée et
assumée par des enseignants sans mettre en danger la qualité de
l'enseignement et sans non plus mettre en danger les contacts des enseignants
avec leurs étudiants? J'ai fait à peu près tout ce qu'il
était possible de faire dans une commission scolaire, d'enseignant
à l'élémentaire et au secondaire jusqu'à cadre
scolaire, principal adjoint d'école et tout le reste: professionnel,
coordonnateur de l'enseignement secondaire. Comme je suis député,
ma parole peut être mise en doute; alors j'aimerais que, vu que vous
êtes dans le milieu - cela fait six ans que je suis député
- vous nous disiez: Est-ce que, pour un parent président d'un
comité d'école secondaire, vous jugez que c'est inhumain de
demander à des enseignants de donner un peu plus de temps à
l'enseignement afin de régler certains problèmes d'ordre
financier? À ce moment-là, cela demande que tous et chacun, y
compris les enseignants, fassent leur part. Trouvez-vous que c'est
inhumain?
Le Président (M. Jolivet): M.
Pontbriand.
M. Pontbriand: En ce qui concerne la représentation de la
fédération, nous regroupons, comme cela a été
mentionné plus tôt, les comités de parents qui sont
formés des comités d'école au niveau de chacune des
écoles et qui sont formés de parents ordinaires qui peuvent
également provenir du monde de l'enseignement, parce qu'il y a quand
même des enseignants aux comités d'école, aux
comités de parents. On en retrouve même au niveau de la
fédération qui regroupe des gens de toutes les couches de la
société et de tous les métiers, professions et autres et
également de tous les partis politiques.
Quant aux publications dont on a fait état, je peux vous dire que
je ne les ai pas
vues. J'ai su, hier, qu'il s'était passé un
événement. Cependant, nous avons siégé à la
fédération toute la fin de semaine en conseil exécutif.
Nous n'en avons pas pris connaissance. À ma connaissance, ce n'est pas
rendu dans les écoles. Si elle est envoyée - je ne sais pas
quelle est la distribution qui est faite de ce document -aux enfants, nous
allons réagir, si elle est envoyée aux parents, je pense que les
parents sont assez adultes pour être capables de juger du
bien-fondé d'une publication gouvernementale.
Quant à l'augmentation de la tâche, je vous ai dit, dans un
premier temps, que c'est quand même un sujet technique dont nous ne
voulions pas traiter. Personnellement, je pense que c'est un
réaménagement de la fonction d'enseignant qui peut amener des
modifications quant au rôle que l'enseignant devra jouer au secondaire.
Est-ce qu'une heure de plus de travail par semaine va amener une surcharge
énorme? Je pense qu'on pourra l'essayer. Si c'est trop dur, on pourra y
revenir lors des prochaines conventions collectives. De toute façon, en
premier lieu, cela découle d'une orientation gouvernementale quant
à des choix financiers. Sur ce, comme j'ai dit tantôt, le
gouvernement étant là, c'est par les résultats que nous
jugerons, lorsque arriveront les élections. Si les choix gouvernementaux
n'ont pas été adéquats, j'ai l'impression que la
population jugera en conséquence et prendra ses décisions
à ce moment. Je ne pense pas - je vous le dis personnellement - que cela
amène une surcharge si énorme. Pour moi, c'est davantage dans le
sens d'une réorganisation de la tâche telle qu'elle est
formulée actuellement.
M. Marquis: Une toute dernière question. Au sujet des
grilles horaires, êtes-vous au courant - on parle évidemment de 20
périodes de 50 minutes ou de 21, 22 et 23 périodes de 50 minutes
- qu'il y a un certain nombre d'écoles secondaires qui ont des
périodes de plus de 50 minutes - cela peut aller jusqu'à 55, 60
minutes, et je connais même des cas de 75 minutes - de sorte que cela a
comme conséquence de permettre aux enseignants de rencontrer moins
d'élèves qu'avec des périodes de 50 minutes et même
de 45 minutes - cela a déjà existé. Dans l'école
où vous êtes, est-ce qu'ils sont à 50 minutes ou si cela
varie? (16 h 45)
M. Pontbriand: Chez nous, ce sont des 50 minutes. Effectivement,
on retrouve des périodes bien différentes selon les commissions
scolaires. On a déjà eu chez nous des périodes de 35
minutes. Quand on voulait les imposer, on les justifiait pleinement. Si on veut
imposer 75 minutes, on va trouver le moyen de les justifier. C'est à
l'organisation locale, c'est à chaque comité de parents de
s'impliquer dans sa commission scolaire et de faire en sorte que cela
réponde le mieux possible à une meilleure qualité de
l'enseignement. Je ne pense pas que ce soit nécessairement le nombre de
minutes d'une période qui va faire en sorte que cela ait un effet sur la
qualité de l'enseignement. C'est davantage l'aménagement de ce
temps qui peut être en cause.
Le Président (M. Jolivet): Au nom des membres de la
commission, nous remercions M. Pontbriand et ses collègues de leur
mémoire.
Documentation distribuée par le ministre de
l'Éducation
Pendant que j'invite le Conseil des collèges,
représenté par Mme Jeanne Blackburn, à venir s'installer
et à nous présenter les personnes qui l'accompagne, je dois vous
faire part d'une lettre que j'ai reçue le 7 mars de la part du ministre
de l'Éducation. Les membres de la commission recevront l'ensemble de la
documentation et seront heureux d'apprendre le texte suivant: "Depuis le
début des travaux de la commission parlementaire, plusieurs affirmations
concernant les ressources financières et les effectifs ont
été faites. Il me paraît nécessaire de
rétablir certains faits et de déposer quelques documents
concernant l'allocation des ressources aux commissions scolaires et l'impact
des conditions de travail applicables à compter de l'année
1983-1984. "Je vous prie d'agréer, M. le Président, l'expression
de mes sentiments les meilleurs. Le ministre de l'Éducation."
Vous avez une série de documents qui vous seront
distribués. Ils concernent les règles budgétaires pour
l'année 1983-1984 et les dispositions constituant des conventions
collectives. M. le ministre.
M. Laurin: Dans les documents additionnels, M. le
Président, il y a une lettre que nous adressons à M. Maurice
Brunet, directeur général de la CECM à Montréal,
sur le document qu'avait déposé ici M. Rodrigue Dubé, le
président de l'Alliance des professeurs, et qui portait sur une
simulation possible de la répartition des effectifs dans la
région est de l'île de Montréal. Il y a aussi des
éléments de réponse au mémoire sur l'impact des
décrets présenté par un collectif de l'École
polyvalente de Charlesbourg, qui a été déposé ici
également à cette commission; des commentaires sur ce qui nous a
été dit d'une pareille simulation effectuée à la
Commission scolaire Jean-Talon; des commentaires sur un document dont on a fait
état ici, sur la répartition des effectifs à la
Polyvalente de
Charlesbourg, à l'école Jeanne-Mance à
Montréal, ainsi que sur les huit écoles de la Commission scolaire
régionale de Tilly.
Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, est-ce que vous me
permettez une question au ministre?
Le Président (M. Jolivet): Oui, Mme la
députée.
Mme Lavoie-Roux: Apparemment, il y a quelque chose sur les
règles budgétaires. Est-ce que ce sont les règles
budgétaires qui sont maintenant les règles budgétaires
officielles ou si ce sont celles qui sont encore en consultation?
M. Laurin: Oui, elles sont encore en consultation.
Mme Lavoie-Roux: Deuxième question. Quand les simulations
ont été faites, on a cru comprendre qu'elles ont
été faites à partir des décrets. Les rectifications
que vous apportez sont-elles faites à partir des simulations des
décrets ou à partir du réaménagement du 11
février?
M. Laurin: L'analyse que nous faisons tient compte des deux
situations.
Mme Lavoie-Roux: Des deux situations, d'accord.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Mme Blackburn, s'il vous
plaît, veuillez nous présenter vos collègues.
Auditions (suite) Conseil des collèges
Mme Blackburn (Jeanne): M. le Président, à ma
gauche, M. Lucien Lelièvre, secrétaire du conseil. Tout de suite
à côté de moi, M. Claude Fortier, président de la
commission de l'évaluation au Conseil des collèges et M. Claude
Simard, président de la commission de l'enseignement professionnel du
Conseil des collèges.
Le Président (M. Jolivet): Allez-y.
Mme Blackburn: M. le Président, mesdames, messieurs, c'est
avec plaisir que le Conseil des collèges a accepté l'invitation
qui nous a été faite par le leader parlementaire de nous
présenter devant cette commission. Le conseil se réjouit de la
tenue de cette commission parlementaire qui, en permettant aux parties de
présenter publiquement leurs propositions favorisant ainsi la recherche
de solutions à la présente crise, permettra également au
public québécois de se faire une opinion plus juste de l'enjeu
des présents débats.
Le conseil aurait aimé vous présenter ici des propositions
plus formelles sur les questions qui sont soumises à l'examen de cette
commission, d'abord, convoquée mardi pour mercredi, et vous connaissez
la suite.
Le temps qui nous fut alors imparti ne nous permettait pas de le faire.
Je soumettrai donc aujourd'hui à votre attention les quelques
réflexions du conseil sur ces questions et deux recommandations qui, si
elles étaient suivies, pourraient favoriser le dénouement de la
crise. J'espère que mon propos permettra d'éclairer quelque peu
le débat et pourra contribuer à l'effort qui est fait de trouver
des solutions à la crise que nous vivons en éducation.
La dégradation du climat de travail qui s'installe actuellement
dans les collèges publics et qui s'amplifiera avec la menace constante
d'une grève générale illégale et illimitée,
et avec la loi 111 qui en est le corollaire, sera telle que ce climat sera
à lui seul un facteur qui compromettra gravement la qualité de
l'enseignement. Il faut donc tout mettre en oeuvre pour empêcher que se
développe un tel climat.
Au-delà de la commission parlementaire actuelle qui permet au
gouvernement et à la partie syndicale d'exposer et de justifier leur
position respective, il doit y avoir aussitôt une reprise
immédiate des discussions entre les deux parties, de façon
à chercher le terrain d'entente le plus étendu qu'il est permis
d'espérer dans les circonstances. Seule, en effet, une reprise des
discussions peut permettre de dénouer l'impasse actuelle et créer
un climat de travail propice à la qualité de l'enseignement.
Le Conseil des collèges a déjà indiqué dans
une prise de position antérieure quelles conditions préalables
devaient être réalisées pour que ces discussions et
échanges aient une certaine chance de succès. Selon le conseil,
le contexte actuel comporte certains éléments importants qui
risquent particulièrement d'entraver l'efficacité des
discussions. Le conseil pense en effet que le spectre que représente la
double menace de la grève générale et de la loi 111 ne
favorise pas un climat propice à des échanges fructueux.
Aussi, considérant qu'il est du devoir de chacune des parties en
présence, tant du gouvernement que de l'instance syndicale, de tout
mettre en oeuvre pour créer un climat qui favorise l'efficacité
des discussions, le Conseil des collèges, réuni en
assemblée le vendredi 25 février dernier, adoptait à
l'unanimité une résolution invitant la Centrale de l'enseignement
du Québec et la Fédération nationale des enseignants et
enseignantes du Québec à renoncer immédiatement à
leur mandat de grève et recommandant au gouvernement d'abroger en
même temps la loi 111. Le conseil est composé de
représentants issus du monde de l'enseignement, du monde
collégial. À cette réunion assistaient des professeurs, un
représentant de la FTQ qui est à la table de négociation
actuellement. Il représente le personnel de soutien dans les
collèges.
Sur cette invitation qui était faite à la fois à la
Centrale de l'enseignement et aux syndicats de même qu'au gouvernement,
un télégramme a été adressé aux parties.
À ce jour, nous n'avons reçu de réponse ni du
gouvernement, ni des instances syndicales. Le Conseil des collèges
était conscient, au moment où il adressait cette invitation - il
l'est encore aujourd'hui - de l'envergure de la demande adressée tant
à l'instance syndicale qu'au gouvernement, de l'envergure
peut-être plus grande encore de la demande adressée au
gouvernement. Mais malgré ce que peut exiger de l'une et l'autre partie
une réponse positive à cette double demande - surtout, nous le
répétons, de la part du gouvernement - le conseil n'hésite
pas à renouveler aujourd'hui cette invitation à l'instance
syndicale de renoncer à son mandat de grève et au gouvernement
d'abroger sa loi 111.
Si le Conseil des collèges renouvelle aujourd'hui sa prise de
position précédente, c'est que, autant il est convaincu que les
discussions sont la seule issue à l'impasse actuelle, autant il est
convaincu que la double menace constante d'une grève illégale
illimitée et de l'application de la loi 111 engendre un climat
psychologique, émotif et social qui rend a priori stériles toutes
les discussions sur les conditions de travail des enseignants.
La levée de cette double menace est donc, de l'avis du Conseil
des collèges, un préalable à la reprise d'échanges
efficaces et un indice de la volonté réelle du gouvernement et de
l'instance syndicale de chercher un terrain d'entente.
Le conseil a également indiqué une autre condition
à l'utilité de ces discussions qui devraient, selon nous,
reprendre au terme de cette commission, une condition qui, cette fois, n'est
plus un préalable aux discussions, mais une garantie d'une information
objective à l'endroit du public québécois. Cette autre
condition est celle de la présence d'un observateur neutre à ces
discussions, observateur qui assurerait une information quotidienne au public
sur les diverses propositions amenées par l'une et l'autre partie.
Cet observateur n'aurait pas à porter personnellement un jugement
sur les propositions des parties. Il n'aurait qu'à transmettre une
information factuelle dont l'objectivité ne saurait être mise en
cause. Il serait assisté dans ses fonctions par deux conseillers
techniques qui l'aideraient à comprendre et à vulgariser des
dossiers complexes et à caractère souvent technique.
Cette recommandation du conseil se fonde sur le principe du droit du
public à une information objective. Nous estimons en effet qu'en raison
des enjeux du présent débat, c'est son droit le plus fondamental,
puisqu'il s'agit de la qualité de l'éducation, de
l'intégrité de la démocratie, de la transparence de ses
institutions, sans parler de son droit de regard quant à l'utilisation
qui est faite d'une part importante de ses impôts.
Cette recommandation veut corriger une situation que nous avons
été à même de constater, c'est-à-dire une
grande confusion dans l'opinion publique. Au cours des derniers mois, j'ai eu
l'occasion de rencontrer de nombreuses personnes: parents, élèves
du réseau collégial, contribuables, enseignants. Ces personnes se
disent perdues devant la masse d'informations souvent contradictoires qui les
inondent quotidiennement. Devant l'absence d'information objective, neutre, le
public a l'impression d'être leurré, non seulement lorsqu'il y a
éclatement, comme c'est le cas aujourd'hui, mais également
lorsqu'il y a entente entre ces mêmes parties. S'il y a affrontement, on
l'informe largement; s'il y a entente, on le tient dans l'ignorance, ce qui
l'amène à croire que cette entente s'est faite à ses
dépens et qu'il aura à en payer la note.
La confusion, disais-je, qui est celle de la plupart des citoyens du
Québec sur la question qui nous préoccupe aujourd'hui n'est pas
nouvelle en pareille circonstance. Le rapport de la commission d'étude
et de consultation sur la révision du régime de
négociations, dans les secteurs public et parapublic, plus connu sous le
nom de rapport Martin Bouchard, déposé en février 1978,
faisait sensiblement les mêmes constatations. Il proposait
différentes mesures susceptibles d'assurer une information plus
adéquate du public, entre autres, la publication, par le juge en chef du
Tribunal du travail, du dossier complet des offres et des demandes des
parties.
On me dira qu'en la circonstance, il n'y a pas eu véritablement
négociations, donc pas vraiment de choses à déposer, mais
ce dont on ne peut douter, c'est qu'il y a confusion dans l'opinion publique.
Aussi, le conseil réitère-t-il sa recommandation de nommer un
observateur à ces débats. C'est par un tel intermédiaire,
croyons-nous, que le public québécois pourra se faire une opinion
juste sur les intérêts en cause qui touchent, d'une façon
ou d'une autre, ses intérêts propres.
On peut penser qu'un effet non négligeable de cette mesure,
c'est-à-dire la présence d'un observateur qui, quotidiennement,
informerait la population sur les propositions des parties, qui les oblige donc
à rendre leurs propositions publiques,
permettrait au public de juger, puisque c'est ce à quoi on
l'invite, et obligerait également les parties à faire
connaître publiquement leurs propositions.
Nous avons sûrement au Québec plusieurs personnes qui
auraient les qualités requises pour occuper ces fonctions d'observateur.
À titre de suggestion, le conseil pense que le président de la
Commission d'accès à l'information pourrait jouer ce rôle.
Il est vrai que cette fonction n'est que marginalement partie du mandat de
cette commission. Cependant, le conseil estime que dans l'avenir cette
responsabilité pourrait être incluse dans le mandat de cette
commission. Je parle de la Commission d'accès à
l'information.
Les échos que nos avons reçus de cette dernière
suggestion, tant du gouvernement que de l'instance syndicale, semblent
favoriser la nomination d'un observateur conciliateur. Tout en admettant que
cette proposition offre une voie de solution intéressante, le conseil
pense que la présence de l'observateur informateur s'impose
toujours.
Échanges spécifiques au niveau collégial. Avant
d'aborder la question plus spécifique des conséquences sur
l'enseignement collégial de la loi 105, je voudrais attirer votre
attention sur le caractère particulier du réseau collégial
et la nécessité de réserver une place spécifique
aux porte-parole de ce réseau.
Le réseau collégial constitue un niveau d'enseignement
post-obligatoire et, en raison de ses caractéristiques, distinct des
autres niveaux primaire et secondaire. La nature spécifique des
programmes d'enseignement du collégial, les différences
juridiques entre les conseils d'administration des collèges et les
commissions scolaires locales et régionales, ainsi que le
caractère particulier de leurs liens réciproques avec le
ministère de l'Éducation, les conditions de travail nettement
différentes entre les enseignants du collégial et ceux des
réseaux primaire et secondaire, voilà autant
d'éléments qui caractérisent le réseau
collégial, justifiant à eux seuls, à l'intérieur de
la reprise générale des discussions, une place spécifique
pour les porte-parole de ce même réseau. (17 heures)
La loi 105 et la situation faite aux enseignants. Je veux regrouper
autour de ces trois points principaux les réflexions du Conseil des
collèges sur les conditions qui seront celles des enseignants s'ils
avaient à vivre avec l'ensemble des clauses de la loi 105. Ces
réflexions, pensons-nous, pourraient contribuer à alimenter les
discussions que, selon notre hypothèse optimiste, les parties en
présence ne manqueront pas d'avoir à la suite de la
présente commission parlementaire. Ces trois points sont les suivants:
la charge d'enseignement, la sécurité d'emploi et les clauses
normatives.
La charge d'enseignement. Le gouvernement, avec la loi 105, veut
augmenter la productivité des enseignants. Différentes mesures
sont prises: élargissement de la plage horaire, assouplissement des
heures de disponibilité des enseignants. Nous ne croyons pas que ces
premières mesures puissent entraîner des inconvénients
sérieux aux conditions de travail des enseignants ou encore nuire
à la qualité de l'enseignement. C'est le changement de la formule
de calcul du nombre d'enseignants du réseau collégial qui
constitue, et de très loin, la principale cause de cette augmentation
souhaitée de la productivité.
La formule qui permettra, selon la loi 105, de calculer le nombre
d'enseignants dans le réseau collégial est la suivante: le nombre
d'étudiants - on en compte un peu plus de 132 000 - divisé par
15. S'ajoutent au nombre ainsi obtenu 150 enseignants à temps complet.
L'ajout de ces 150 enseignants viendrait corriger certains aspects
discriminatoires à l'endroit de certains collèges,
généralement les plus petits, de même qu'à l'endroit
de certains programmes.
S'ajouteraient également encore 150 enseignants,
équivalent temps complet, qui seraient consacrés à la
recherche, au perfectionnement et à l'encadrement. Le conseil se
réjouit de cette dernière mesure qui répond à une
demande que ce dernier faisait à l'occasion de deux avis qu'il
présentait au ministre de l'Éducation, l'un portant sur la
recherche scientifique dans les collèges et l'autre sur la
création de centres spécialisés dans les cégeps. Le
Conseil des collèges recommandait alors que les prochaines ententes de
travail des personnels des collèges comportent des dispositions
permettant des activités de recherche. Avec l'allocation de 150
enseignants, équivalent temps complet, affectés tant à ces
travaux de recherche que d'encadrement et de perfectionnement, cela serait fait
et c'est une mesure qui répond à un souhait formulé par le
conseil.
La tâche d'enseignement. Revenons au sujet principal de ce point
qui est celui de la productivité. Par l'application de la loi 105, la
tâche de l'enseignant du réseau collégial en 1985 serait la
même que celle de l'enseignant de ce réseau pour les années
1967 à 1976, c'est-à-dire une moyenne générale d'un
enseignant pour quinze élèves. Cependant, on peut penser que des
variations dues à l'orientation des étudiants: plus
d'étudiants s'inscrivent en enseignement professionnel, environ 4%, des
variations également dans le poids de certains programmes peuvent
légèrement alourdir les chiffres mentionnés plus haut.
Aussi, la commission de l'enseignement professionnel du Conseil des
collèges s'inquiète-t-elle de la
situation qui pourrait être faite à ces enseignements et
souhaite que les règles d'allocation des professeurs dans les programmes
professionnels tiennent véritablement compte du caractère
particulièrement exigeant de certains cours qui demandent un ratio
maître-élèves plus bas.
Cela étant dit et ces réserves faites, on peut dire que la
tâche des enseignants sera sensiblement la même qu'en 1976. Il n'en
demeure pas moins que ces derniers verront leur tâche moyenne augmenter
dans la plupart des cas de 10% à 15%. Il ne s'agit quand même pas
d'une augmentation minime. Loin de là. C'est au contraire une
augmentation considérable. On ne peut que regretter que le gouvernement
ne puisse maintenir pour les prochaines années les charges actuelles de
travail des enseignants et on comprend les réactions négatives
des enseignants. On n'accepte pas de gaieté de coeur de voir se
dégrader ses conditions de travail.
Cela se traduira-t-il par une dégradation équivalente de
la qualité de l'enseignement? Le conseil n'est pas en mesure de
l'affirmer. Toutefois, on peut penser que les enseignants de 1975-1976
donnaient un enseignement valable pour une charge d'enseignement à poids
à peu près égal à celle des enseignants de 1985. Il
faut ajouter que, par rapport à cette équipe qu'on avait dans les
collèges en 1975-1976, l'équipe que nous avons actuellement dans
nos cégeps est mieux rodée, est plus compétente et a plus
d'expérience. De même, comparée aux collèges des
autres provinces canadiennes et à ceux de certains États
américains, il semblerait que la charge d'enseignement de l'enseignant
québécois du collégial, après la loi 105, ne soit
pas disproportionnée. Le conseil a pu, par une visite que sa commission
de l'enseignement professionnel faisait au collège Algonquin, à
Ottawa, établir certaines comparaisons qui viennent confimer celles
avancées par le ministère de l'Éducation. La charge de
l'enseignant en 1985 se compare donc avantageusement à celle de ses
collègues de l'Ontario et devrait nous permettre de dispenser un
enseignement de qualité. Mais permettez-moi ici une parenthèse.
On s'est beaucoup plu ici à faire des comparaisons,
particulièrement avec la province voisine, sur la tâche
d'enseignement. J'ajouterai deux autres éléments de comparaison
qui frappent par les écarts constatés. En Ontario, les pouvoirs
sont très décentralisés et les négociations se font
localement. La convention de travail des enseignants pour un collège qui
emploie environ 650 enseignants tient dans une trentaine de pages." Pour
poursuivre, on peut penser qu'une part importante des problèmes que le
Québec connaît dans ses rapports avec les enseignants soit le fait
d'une trop grande centralisation des négociations et à ses
conséquences, c'est-à-dire une convention de travail qui veut
régler dans ses moindres détails les activités de ces
derniers.
Revenons à la charge de travail. Donc, à cette question
à savoir si la loi 105, y incluant les modifications apportées
par ce que l'on a appelé le cadre de règlement, permet de
dispenser un enseignement de qualité, le conseil ne peut vraiment pas
avoir une position plus tranchée que celle que je viens de vous
communiquer. Le contexte économique actuel impose à tous de
résilier plusieurs de leurs conditions de travail. C'est une
augmentation de productivité de 13,5% que le gouvernement demande aux
enseignants du réseau collégial québécois. C'est
beaucoup, mais les données que nous avons actuellement ne nous
permettent pas de conclure que cette augmentation de la charge portera atteinte
à la qualité des services offerts aux étudiants. Pour le
Conseil des collèges, c'est ce dernier point qui doit demeurer
l'objectif premier à atteindre. Sur cette question de la tâche, le
conseil entend demeurer vigilant et entend suivre avec attention les
changements qui interviendront dans les charges d'enseignant à la suite
de l'application de la loi 105. Si après une certaine
expérimentation il s'ensuivait des conséquences négatives
pour la qualité de l'enseignement, les collèges
n'hésiteront pas à revenir sur ce sujet au cours de la prochaine
année scolaire.
Quelques mots sur le climat actuel de travail dans les collèges.
Le Conseil des collèges estime que c'est autant, sinon plus, la
manière d'effectuer le changement que le changement lui-même qui
est lié à la qualité de l'enseignement. En effet, bien que
l'effort demandé aux enseignants soit considérable, on peut
penser que la plupart d'entre eux comprennent que l'État ne puisse
maintenir leurs conditions actuelles de travail. Ce qu'ils admettent moins,
c'est les raisons que l'on invoque et la manière de le faire. Devant
l'absence de véritables négociations, une opinion publique
défavorable qui voit dans l'enseignant un individu
privilégié qui tire avantage de sa situation pour en faire le
minimum, plus préoccupé de protéger des acquis que
soucieux de la qualité de l'enseignement, l'enseignant, par les lois 105
et 111 se sent en plus tiraillé entre ses devoirs de citoyens, ses
convictions et l'appartenance à son groupe. Cet enseignant se sent
bafoué et méprisé. Une enseignante me disait: L'image de
l'enseignant de cégep, c'est l'image du pire. Alors que l'on
s'apprête à demander plus d'efforts à nos enseignants,
l'engagement et la motivation deviennent des moteurs nécessaires si l'on
veut maintenir une bonne qualité d'enseignement. Malheureusement, la
campagne de dévalorisation de l'enseignant que l'attitude
gouvernementale n'a pas
atténuée n'est pas faite pour créer un climat qui
favorise le dynamisme et l'engagement.
Le climat d'affrontement, les rapports de plus en plus tendus, voire la
division entre les enseignants et enseignantes d'un même collège,
entre ces derniers et les administrateurs créeront une situation qui,
à elle seule, contribuera plus que l'augmentation de la tâche
à la détérioration de l'enseignement si cette situation
devait se poursuivre. Le conseil estime donc que si cette situation se
poursuivait, la démobilisation des enseignants sera telle qu'on pourra
alors craindre pour la qualité de l'enseignement. Je le
répète, la dégradation du climat de travail qui s'installe
dans les collèges est telle que ce climat risque de provoquer la
détérioration de la qualité de l'enseignement. Aussi, tout
doit-il être mis en oeuvre pour mettre fin à la présente
situation et une façon de le faire est de reprendre le dialogue.
On doit également tout mettre en oeuvre pour éviter la
répétition de scénarios semblables. En effet, au lendemain
de la présente crise, on ne pourra, au Québec, faire
l'économie d'une réflexion sur les modes de négociation
des ententes de travail dans le secteur public. On devra examiner en profondeur
les relations du travail entre le gouvernement et ses employés. Le
conseil entend contribuer à ces réflexions et souhaite qu'elles
s'amorcent dès la fin du présent conflit; cela nous semble
impérieux. Nous nous devons de tout mettre en oeuvre pour éviter
la répétition de scénarios semblables, de telles
situations qui ne discréditent pas seulement les enseignements, mais
risquent également de discréditer et les institutions et les
établissements.
Une question qui préoccupe le conseil par rapport à
l'augmentation de la tâche, c'est les mises en disponibilité. En
augmentant la tâche pour une clientèle constante, on a
nécessairement moins de postes. Des estimations varient selon qu'elles
nous viennent du gouvernement ou des instances syndicales. On parle de 800 et
peut-être même de 1500 enseignants mis en disponibilité.
Dans un cas comme dans l'autre, c'est trop parce qu'il s'agit de
carrières humaines, de carrières d'hommes et de femmes qui ont
consacré temps, énergie et argent.
De plus, il ne faut pas oublier que la majorité de ces personnes
possède une formation qui rend difficile, voire impossible,
l'intégration dans d'autres secteurs d'activité. Bac en
français, en histoire, en géographie, en mathématiques, on
admettra que les possibilités d'emploi sont plutôt limitées
en dehors des maisons d'enseignement. Aussi, on comprendra que cette question
préoccupe profondément le conseil pour les raisons
énoncées plus haut, mais surtout parce que ces mises en
disponibilité toucheront davantage les jeunes qui, comme on le sait,
font plus que tout autre groupe les frais de la présente crise et parce
que ces jeunes professeurs plus dynamiques, plus créatifs et souvent
plus scolarisés, représentent notre meilleure garantie contre
l'anémie qui menace tout corps privé de sang neuf.
Comment alors, si l'on estime que l'augmentation de la tâche est
acceptable, donc que l'on a moins besoin d'enseignants, permettre aux
enseignants mis en disponibilité de retrouver leur place dans le
réseau? Comment pouvons-nous offrir à nos jeunes
diplômés universitaires quelque espoir de voir leurs connaissances
mises à profit, leur permettant ainsi de conserver et de
développer leurs habiletés? Comment alors conserver dans le
réseau collégial le plus grand nombre d'enseignants pour un
nombre plus limité de postes, car il s'agit bien de cela?
La première mesure qui suggère d'étaler sur trois
ans l'augmentation de la tâche aura le double avantage de graduer
l'augmentation de la charge d'enseignement la rendant ainsi, croyons-nous,
moins pénible et de conserver dans le réseau plus d'enseignants
pour les deux prochaines années. L'augmentation prévisible de la
clientèle étudiante à l'automne 1983 - on parle de quelque
1000 étudiants de plus -aura aussi cet effet.
Par ailleurs, d'autres mesures pourraient être envisagées.
On fait état ici, à cette table, de plusieurs mesures qui avaient
déjà possiblement été envisagées;
peut-être qu'il y aura répétition, mais je les soumets
quand même à votre attention. On peut penser à
l'enseignement à temps partiel sur une base volontaire. Probablement que
plusieurs enseignants qui ont déjà quelque 25 ou 30 ans de
travail accepteraient, sur une base volontaire, de travailler à temps
partiel en s'assurant, évidemment, que leur permanence est
assurée et qu'ils ont droit aux avantages sociaux. On peut penser
également au congé d'une année sans solde, mais
payé sur une période de cinq ans. Je pense que cela a
été examiné dans le cas des secteurs primaire et
secondaire. On peut penser au travail partagé d'un enseignant entre le
cégep et un autre employeur ou, encore, le cégep et
l'université ou l'entreprise privée.
Il y a aussi la négociation de primes de séparation; le
congé de recyclage payé à 80% pour les personnes mises en
disponibilité sur une base de deux ans et, au terme de ce congé,
ce pourrait être la rupture du lien d'emploi; la négociation de la
retraite anticipée; un programme intensif de formation en informatique.
On n'aurait pas à prendre nécessairement les personnes mises en
disponibilité, elles pourraient remplacer celles qui ont une charge
d'enseignement. On pourrait prendre l'exemple du programme français qui
prévoit une formation intensive
dispensée au ratio X de professeurs pendant une année et
ces professeurs ont la responsabilité, l'année suivante,
d'assurer la formation de leurs collègues. Cela pourrait se faire sur
deux ans. On pourrait même penser de libérer les enseignants qui
suivent des cours de perfectionnement de leurs collègues,
l'équivalent de 10% de leur tâche, ce qui nous permettrait
à nouveau de libérer quelques postes.
Mon intention n'était pas ici d'épuiser toutes les
possibilités qui peuvent être envisagées. Ces mesures et
quelques autres, que des discussions franches permettront de mettre à
jour si l'imagination est présente à la table, pourront apporter
des correctifs aux effets négatifs des mises en disponibilité.
Avec davantage d'imagination - dans ce cas, elle devient imperative - il serait
possible de faire une place, même minime, dans le corps professoral du
collégial pour les jeunes diplômés universitaires. Car, je
le répète, c'est la sclérose qui guette le corps
professoral, à brève échéance, s'il n'est pas
régulièrement régénéré par des
éléments jeunes. Vous avez là une autre raison qui
justifie le Conseil des collèges à demander aux deux parties de
reprendre leurs discussions.
Quelques mots sur les clauses normatives: Dans une convention
collective, les clauses normatives sont habituellement assez nombreuses. Les
conventions collectives d'enseignants n'échappent pas à cette
règle, loin de là. Il ne saurait donc être question ici
pour le conseil de donner une opinion sur les nombreux changements introduits
dans ces clauses par la loi 105. L'ensemble de ces changements se
caractérise, cependant, par une reprise en main du droit de
gérance par les administrateurs des collèges. Sur cet ensemble de
changements, je désire rappeler la position générale tenue
par le conseil dans un avis qu'il adressait au ministre de l'Éducation
en novembre 1982 sur l'établissement de politiques d'évaluation.
Le conseil disait alors: "Favorable à l'autonomie des collèges,
le conseil est également favorable à l'autonomie
départementale la plus large possible, mais comme dans le cas des
collèges qui doivent posséder une autonomie en continuité
avec le réseau et le ministère, les départements doivent
également avoir une autonomie en continuité avec les autres
départements et avec le collège institution. Pour que l'autonomie
départementale soit telle, il faut qu'elle soit moins dépendante
de l'idéologie du pouvoir et de la stratégie d'affrontement
patronale-syndicale, comme cela a été le cas jusqu'ici par le
biais des négociations des conventions collectives. Il faudrait qu'elle
soit davantage animée et alimentée par une réflexion sur
la qualité de l'enseignement et sur les exigences de cette
qualité, qui passe par l'autonomie départementale." Faire passer
par l'autonomie départementale l'autonomie des départements et
par les exigences de la qualité de l'enseignement est la seule
manière, la seule façon d'asseoir fermement et durablement
l'autonomie locale des départements.
Le Conseil des collèges évalue que c'est dans cette
perspective que devra dans l'avenir être discuté le partage des
responsabilités à l'intérieur des collèges. Pour le
conseil, cet avenir, c'est tout de suite, avec la reprise des discussions entre
le gouvernement et les représentants patronaux et syndicaux du
réseau collégial.
Voilà quelques-uns des points sur lesquels des discussions
pourraient avoir lieu entre les parties. À eux seuls, ces points
méritent une reprise des discussions. D'autres points ont
été signalés par d'autres intervenants à cette
tribune, qui augmenteront, si possible, la pertinence de ces discussions. Nous
espérons que ces échanges se feront rapidement, de manière
à mettre fin à ce climat de tension et d'affrontement qui,
à lui seul, je le répète, est plus nuisible que toutes les
mesures visant à accroître la productivité.
Voilà, j'ai indiqué ce qui, selon le conseil, constituait
les conditions préalables à une reprise efficace des discussions.
Ces conditions exigent beaucoup des deux parties, mais elles l'exigent de gens
qui, tant du côté gouvernemental que du côté
syndical, font partie de la génération la plus
privilégiée de l'histoire récente du Québec. Des
conditions qui exigent trop? Je ne le crois pas, puisqu'il s'agit de la
qualité de la formation de la génération qui, dans
quelques années à peine, sera à notre place. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): Merci, Mme Blackburn.
M. le ministre.
M. Laurin: M. le Président, je remercie le Conseil des
collèges pour la qualité de sa réflexion et aussi pour la
qualité des efforts qu'il a faits pour nous suggérer, à
toutes les parties en cause, des moyens pour dénouer l'impasse qui nous
confronte à l'heure actuelle. Je n'ai pas besoin de vous dire -vous y
avez fait allusion vous-même - toute l'attention que nous avons
apportée à vos diverses suggestions. J'espère bien qu'il
sera possible d'y donner une suite formelle dans les heures qui viennent. Notre
but est le même que celui dont vous faites état,
c'est-à-dire la reprise immédiate des discussions, tentative
également pour trouver le plus large terrain d'entente possible afin
d'en arriver à un règlement négocié.
Vous avez suggéré la formule d'un observateur informateur.
D'autres ont suggéré la formule d'un observateur conciliateur. Je
pense qu'il y a du mérite aux deux suggestions. Il nous reste
évidemment à
choisir l'une ou l'autre, ou un panachage des deux. C'est ce à
quoi nous nous employons actuellement. Encore une fois, j'espère bien
pouvoir être en mesure d'annoncer le résultat de notre
réflexion dans les heures qui viennent.
La qualité de votre réflexion s'étend aussi
à l'analyse que vous avez faite et des anciennes conventions
collectives, et du décret qui en tiendra lieu désormais. J'ai
bien apprécié vos longues remarques, mais toutes pertinentes, sur
la charge d'enseignement, l'augmentation de la tâche. Je note la
distinction nécessaire que vous faites entre les conditions de travail,
qui peuvent être allégées ou alourdies, et l'effet,
l'impact qu'elles peuvent avoir dans l'un ou l'autre cas sur la qualité
de l'enseignement. Bien sûr qu'il y a un lien, une liaison entre les
deux, mais, pour la clarté de la discussion, il importe quand même
de les distinguer. On ne peut sûrement pas établir une
équivalence, une équation automatique entre l'un et l'autre
facteur.
Vous avez noté aussi que la formule d'allocation que nous avons
retenue pour le nombre de professeurs est conforme aux deux avis que vous nous
aviez fait tenir, dont l'un sur la recherche et l'autre sur les centres
spécialisés. C'est vous dire incidemment toute l'attention que
nous portons aux avis que vous nous fournissez régulièrement.
C'est vous dire aussi toute l'attention que nous y portons en raison justement
de la sagesse qui les inspire.
Au terme de votre analyse, vous dites que cette augmentation de la
tâche ne vous paraît pas disproportionnée, mais vous nous
mettez en garde cependant sur les réflexions additionnelles que pourrait
requérir l'augmentation du nombre d'options qui sont dispensées
dans nos collèges, en attirant notre attention sur cette diversification
d'options professionnelles et sur les exigences qu'elles peuvent poser quant
à la répartition des allocations de professeurs. Je vous suis
parfaitement dans cette réflexion. Je sais qu'il n'est pas toujours
possible de déterminer à l'avance quelles seront les exigences
qui résulteront de l'introduction d'une nouvelle discipline, d'une
nouvelle option, ainsi que du contingentement de certaines autres. Mais c'est
dire là aussi à quel point il est nécessaire de ne pas
s'enfermer dans un carcan, dans une formule trop rigide et d'adopter des
formules qui soient assez souples, assez flexibles pour nous permettre les
ajustements nécessaires en cours de route. Nous partageons
entièrement votre préoccupation et la recherche de formules qui
assureront une meilleure réponse à nos besoins en même
temps que cette mise en place de mécanismes qui nous permettront d'y
arriver.
Vous avez aussi touché à loisir le problème de la
sécurité d'emploi. Là aussi, je suis bien d'accord avec
vos objectifs qui sont d'assurer à ce corps d'emploi très
spécialisé que constituent les professeurs de collège et
leur difficulté à trouver dans d'autres secteurs des tâches
qui correspondent à la formation qu'ils ont reçue... Je souscris
également d'emblée à votre autre objectif qui est de
régénérer périodiquement le corps professoral afin
de permettre l'adjonction, l'addition d'éléments plus jeunes au
profit du dynamisme, justement, de l'enseignement. Je suis d'accord avec vos
objectifs. Quant aux modalités, elles devront être le fruit d'une
recherche commune entre les principaux intéressés,
c'est-à-dire les syndicats d'enseignants et également les
institutions et le ministère. Déjà l'aménagement du
10 février constitue un début de réponse à cet
égard par l'étalement qu'il permet.
L'augmentation de la clientèle aidera aussi à
régler une partie du problème. Pour le reste, nous avons
suggéré - et vous y avez fait allusion - un certain nombre de
mesures additionnelles: l'enseignement à temps partiel, le travail
partagé entre deux employeurs, le cégep et un autre - pourquoi
pas l'université? - les congés sabbatiques, les primes de
séparation, les congés de recyclage, la retraite
anticipée, la formation intensive dans de nouvelles disciplines qui vont
requérir très bientôt notre attention comme, par exemple,
la formation intensive dans les divers domaines reliés à
l'informatique. Nous en sommes, mais justement nous voudrions pouvoir discuter
de ces diverses mesures avec les intéressés eux-mêmes.
Quant aux clauses normatives, nous avons tenté, là aussi,
d'apporter toute la considération nécessaire à votre avis
de novembre 1982. Vos remarques d'aujourd'hui sur l'autonomie
départementale sont très intéressantes à cet
égard. Je pense qu'elles ajoutent à l'avis que vous nous avez
fait parvenir en novembre 1982. Vous tentez de relier d'une part deux
principes, l'autonomie des établissements que vous avez
recommandée et l'autonomie départementale qui vous paraît
un élément important du dynamisme des collèges. J'en suis
également. Je pense qu'il faut trouver un moyen d'harmoniser ces deux
impératifs. La difficulté commence lorsqu'on essaie de trouver
des formules qui nous permettront d'y arriver. Je n'ai pas tout à fait
saisi tous les éléments de votre réflexion. Je vois bien
que vous tentez de préserver le principe de l'autonomie
départementale mais en lien, en continuité avec l'autonomie de
l'institution telle qu'elle se manifeste par son conseil d'administration.
J'avoue qu'à cet égard, je suis un peu resté sur mon
appétit et j'aurais fortement le goût de vous demander de
continuer à réfléchir tout haut pour notre
bénéfice puisque nous pourrons profiter très
bientôt de votre réflexion pour cette reprise des
négociations que j'espère prochaine.
Le Président (M. Desbiens): Mme
Blackburn.
Mme Blackburn: Pour répondre, et peut-être tenter de
le faire assez brièvement, à la question du ministre de
l'Éducation à savoir comment on conçoit pouvoir laisser la
plus grande autonomie possible au département tout en maintenant son
lien avec l'institution, j'ajouterais la recommandation qui suivait à
cet effet, c'est que le conseil recommandait alors au gouvernement de... Je
vais revoir textuellement la recommandation: "Le Conseil des collèges
recommande au ministre de l'Éducation de prendre toutes les mesures
nécessaires pour que disparaissent des prochaines conventions
collectives des enseignants les différentes clauses qui autorisent des
activités départementales en dehors de l'autorité des
collèges." On avait ité en mesure de constater qu'il était
difficile de parler d'implantation d'une politique institutionnelle
d'évaluation et, en même temps, de parler de tâches ou
d'activités réservées exclusivement à un
département. Vous voyez un peu le discours. Vous avez une institution
qui est responsable des activités qui se déroulent à
l'intérieur de l'établissement et vous n'avez, par rapport
à certaines activités dans le département, aucune
responsabilité, aucun droit de regard de l'institution elle-même.
Il nous semble indispensable qu'il y ait ce lien dans les activités
entre le département et l'institution. (17 h 30)
Comme on l'a dit un peu tout à l'heure, le conseil souhaiterait
voir les départements davantage animés par une réflexion
sur la qualité de l'enseignement, sur les exigences de cette
qualité plus que des départements davantage animés trop
souvent, pour ne pas dire tout le temps, par une idéologie du pouvoir,
une idéologie d'affrontement patronal-syndical, un peu sur le
modèle de l'entreprise privée, ce qui ne nous semble pas
favoriser le développement d'une dynamique intéressante dans les
départements.
Si le conseil dit cela, c'est qu'il estime que l'autonomie s'acquiert,
se défend et se justifie dans la mesure où la personne,
l'institution, le groupe, le département de la circonstance lui permet
de s'acquitter des tâches qui lui sont confiées de façon
excellente. C'est là-dessus qu'on doit fonder l'autonomie et, pour cela,
la préoccupation doit être la qualité de
l'enseignement.
On pense également que, par rapport à l'articulation
même entre un collège et son département, il y a des
activités, ne serait-ce que la coordination d'orientation,
d'organisation et de planification qui nécessitent et qui imposent des
liens entre l'institution et le département.
C'est un peu ce qui avait amené le conseil à dire qu'il
faudrait rétablir ces liens entre le département et l'institution
tout en reconnaissant que, dans la mesure du possible, et plus souvent
qu'autrement, on doit tenter de rapprocher la compétence professionnelle
de la compétence juridique, n'oubliant pas que les professeurs sont les
spécialistes de l'éducation dans un collège.
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: Mme Blackburn, j'ai été très
sensible à l'intérêt que vous exprimez dans votre
mémoire pour la situation concrète créée dans les
institutions collégiales par les événements des derniers
mois.
J'ai remarqué que certains groupes sont venus discuter avec nous
et nous ont tenu un langage strictement objectif comme si on pouvait vraiment,
dans une enceinte comme celle-ci, se prononcer froidement sur la question de
savoir si une heure de plus ou une heure de moins est bonne ou mauvaise en soi.
Comme vous l'avez signalé, l'accumulation de tout ce qui s'est produit
depuis quelques mois a créé un climat très mauvais dans un
grand nombre de collèges. Je ne saurais dire dans tous, mais les
échos que j'ai eus m'informent que, dans un grand nombre de
collèges, la situation, au point de vue humain, est très
difficile et, par conséquent, fort peu propice au maintien d'un
enseignement de qualité.
Est-ce que cela dépend de l'augmentation de la tâche?
Est-ce que cela dépend des perspectives de mise en disponibilité?
Est-ce que cela dépend des changements qui seront faits dans la relation
entre le département et l'institution? Je pense qu'il serait difficile
de le dire de manière certaine et mathématique, mais il y a un
ensemble de circonstances qui créent une situation mauvaise à
laquelle tout le monde, je pense, a le devoir de remédier.
Quand j'entendais le ministre vous répondre tantôt, il me
faisait penser à ces personnages de la littérature anglaise, ce
personnage qui avait deux noms. Le jour il s'appelait Dr JeKyll et le soir
c'était M. Hyde. Il avait, le jour, un comportement extrêmement
agréable, extrêmement accueillant et, le soir, on le retrouvait
sous un autre aspect. Des fois, on a cette impression-là avec le
ministre de l'Éducation. Vendredi dernier, on le retrouvait comme auteur
putatif d'un document pamphlétaire qui n'ajoute pas grand-chose à
la création de ce climat dont vous souhaitez voir l'avènement en
vue de nous conduire à un règlement.
Les propos qu'il tenait tantôt, j'y aurais
souscrit volontiers, je les aurais prononcés moi-même et
ils ne me créent pas de difficulté. Je me dis que si on avait
abordé toute la négociation, toutes les étapes dans cet
esprit-là, je pense qu'on en serait peut-être rendu aujourd'hui
à un point plus avancé.
M. Laurin: Des deux côtés.
M. Ryan: Des deux côtés. Volontiers, j'ajoute cette
nuance, il n'y a pas de problèmes là-dedans.
Maintenant, dans votre mémoire, vous soulevez un certain nombre
de thèmes qui m'intéressent. À propos du climat, d'abord.
J'ai l'impression qu'au niveau des cégeps, c'est peut-être
là que cela pourrait être le plus difficile si on ne trouve pas un
règlement négocié. Le cégep est une institution qui
évolue à un niveau différent, qui fait moins partie d'un
grand ensemble beaucoup plus mécanisé ou uniforme. Je pense que
les possibilités de difficultés, dans un certain nombre
d'institutions, pourraient être très grandes. Je n'ai pas
grand-chose à vous demander d'ajouter là-dessus parce que je ne
voudrais pas que vous disiez la même chose que moi. Cela ne donnerait
absolument rien. Je vais vous dire que je suis de votre opinion quant à
la nécessité de chercher une forme de règlement qui va
d'abord viser le rétablissement d'un climat propice à un travail
d'éducation adulte à ce niveau qui vous intéresse.
Maintenant, une question qui devrait peut-être être
soulevée tout de suite, c'est l'affaire de l'autonomie du
département. Là-dessus, je vous avoue que je n'ai pas lu les
notes que vous avez soumises au ministre, en novembre dernier. Je n'ai pas
très bien compris. Est-ce que vous êtes favorable à ce qui
est dans le décret là-dessus ou si vous avez des réserves?
Vous disiez, je pense, que les dispositions des anciennes conventions
collectives doivent être modifiées. Là on les a
modifiées de manière assez radicale. Est-ce que vous approuvez
tout cela?
Deuxièmement, toujours dans le même ordre d'idées,
les renseignements que j'obtenais étaient à peu près ceci:
En soi, le système de fonctionnement des départements
soulève de nombreuses difficultés sur le plan des principes si on
veut qu'il y ait cette relation département, institution dont vous
parlez pour que l'institution forme quand même un tout avec son style, sa
personnalité; il y a là un problème. On me disait que
malgré les questions qui se posent au niveau des principes, dans la
pratique, dans un grand nombre d'endroits, on était arrivé
à une relation fort convenable de ce côté. On ajoute qu'en
faisant les changements qu'on projette par le mécanisme des
décrets, on risque de faire reculer toute la patente. Je voudrais savoir
comment vous envisagez ce point.
Le Président (M. Jolivet): Mme
Blackburn.
Mme Blackburn: Pour répondre à la question du
député d'Argenteuil, il y a différents points. Vous me
demandez si les modifications qui ont été apportées au
département se rapprochent de la recommandation que faisait le conseil.
Je dis: Oui. Pour bien comprendre ce que cela signifie, il y avait une douzaine
de points prévus, ou d'articles de la convention de travail des
enseignants, entre autres l'évaluation, une réévaluation
des notes de l'étudiant sur lesquels il y avait les professeurs du
département, y compris le professeur concerné. Pour cette
révision de notes, l'étudiant ne pouvait pas faire appel au
collège qui pourtant recommande au ministère, au ministre, de
décerner les DEC. Donc, pour cette matière en particulier, pour
cet élément en particulier, il y. a une nécessité
de rétablir des liens entre l'institution qui a une
responsabilité l'institution dans laquelle s'est inscrit un
étudiant - et le département.
Est-ce que vous parlez de la qualité des rapports qui
étaient et du travail...
M. Ryan: Si vous voulez me permettre de vous interrompre, juste
une petite minute. Sur le département, est-ce que vous allez y
revenir?
Mme Blackburn: J'entendais passer la parole au président
de la commission de l'évaluation qui a plus longuement
réfléchi sur ces questions.
Les collèges ont été souvent perturbés par
des conflits comme celui que l'on connaît actuellement. Leur courte
histoire -quelque quinze ans - a été régulièrement
perturbée par ce genre de conflit. Depuis la dernière convention
de travail, il s'était établi, dans les collèges, un
climat de travail relativement intéressant. Je profite de la tribune qui
m'est offerte pour dire qu'il en va des collèges et de l'opinion qu'on
en a, un peu comme celle qu'on a à l'endroit des professeurs des
cégeps. C'est largement en deçà de ce qui s'y fait.
Malheureusement, un petit sondage maison, une petite enquête personnelle
m'a permis de constater que les personnes qui avaient
généralement une opinion défavorable à l'endroit
des cégeps, c'étaient trop souvent des personnes qui, d'abord, ne
l'avaient pas fréquenté, ensuite, elles avaient une information,
une connaissance des cégeps plus par ouï-dire. Chaque fois que je
m'adressais à des gens qui avaient collaboré avec des
professeurs, avec des départements ou avec des collèges, ils
estimaient qu'on s'est donné là au Québec
un réseau dynamique, intéressant et qui fait un excellent
travail. Je trouvais que c'était utile de rappeler cela parce que,
chaque fois qu'il y a une convention ou chaque fois qu'il y a un conflit,
chaque fois que les étudiants débraient, on s'apprête
chaque fois à faire le procès des collèges. J'estime qu'il
y avait une mise au point à faire là-dessus.
On a eu tendance aussi à faire le procès des enseignants
pour les mêmes raisons. Je profite à nouveau de la tribune qui
m'est offerte pour dire - et c'est l'avis également des directeurs
généraux - que les enseignants des cégeps, il est vrai,
pour une tâche relativement moins lourde que celle des autres provinces
canadiennes, font un excellent travail, et les étudiants vous l'ont dit
à cette table. Ils sont souvent et dans la plupart des cas très
disponibles et on les considère comme supercompétents. Je
trouvais utile de rappeler ces deux choses.
Le présent conflit risque-t-il de détériorer la
qualité de l'enseignement ou la dynamique qui s'était
installée depuis quelques années dans les départements? Je
le répète, ma conviction est que si on ne donne pas l'occasion
aux enseignants de dire oui, on peut être prêt à accepter
une augmentation de la tâche, mais on n'est pas prêt à ce
qu'on nous dévalorise publiquement. Je pense bien que c'est ce qu'on a
besoin de faire, c'est-à-dire rétablir des contacts avec les
enseignants, avec les collèges qui leur permettent de penser qu'on les
considère à leur juste valeur. On doit dire aussi que les
collèges ont fini par développer une résistance telle
qu'ils se remettent chaque fois sur leurs pieds, mais il ne faudrait pas trop
en abuser.
Par rapport aux départements et les activités...
M. Ryan: Si vous voulez me permettre seulement une petite
interruption, j'ai un voisin ici qui est malcommode, parce qu'il me donne
seulement 20 minutes pour vous interroger et, si vous prenez 20 minutes pour la
première partie de la question - j'en aurais trois ou quatre autres - je
vais être obligé de faire des sacrifices énormes.
Mme Blackburn: Je ferais un bon député.
M. Ryan: Cela ne me fait rien, mais je livrerai mes questions
à la presse.
Mme Blackburn: Bien, M. le Président. Sur le
département, j'allais précisément passer la parole
à M. Fortier qui est président de la commission de
l'évaluation.
M. Ryan: Oui.
Le Président (M. Jolivet): M. Fortier.
M. Fortier (Claude): L'angle sous lequel la commission de
l'évaluation a été amenée en contact avec cette
question du partage de l'autonomie des départements et de l'autonomie de
l'institution, c'est l'angle de la responsabilité ou, si on veut, de
l'exigence faite aux collèges de se donner des politiques
institutionnelles d'évaluation. Ce qu'on a pu constater - et je tiens
à préciser, cependant, qu'on n'a pas été en contact
personnel avec l'ensemble des établissements, mais avec une quarantaine
et une trentaine d'établissements publics - c'est que les
mécanismes de jonction qui permettraient d'assurer un lien vital entre
la vie des unités départementales, des unités
professionnelles que sont les départements et l'institution avec sa
responsabilité, sont mal ajustés actuellement, de sorte que,
lorsqu'on parle de la responsabilité de l'institution face aux usagers,
face aux contribuables et face au gouvernement et qu'on souhaite que cette
responsabilité soit assumée par le biais de politiques
institutionnelles, c'est là qu'on rencontre la difficulté qu'on a
soulevée. Il nous paraît que parler de politiques
institutionnelles, cela permet, si on a une acception positive du terme
"politique", de trouver justement un lieu d'harmonisation entre ces
responsabilités, parce qu'il nous semble que, dans une politique, on
devrait trouver comme un des facteurs ou des éléments importants
en commun justement le partage des responsabilités entre l'unité
professionnelle et l'institution. Si on parle de partage des
responsabilités à l'intérieur d'un établissement,
on pense que c'est par le biais d'une politique qui doit être
préparée, dont les éléments doivent être
préparés par l'entente entre les départements, d'une part,
et la direction pédagogique, de l'autre.
M. Ryan: Si je comprends bien, vous êtes favorable aux
changements qui sont incorporés dans le décret.
M. Fortier (Claude): Sur le premier point, la révision des
notes, il nous semble qu'il doit y avoir un lien institutionnel entre la
responsabilité du département et l'institution sur ce plan. Sur
le deuxième, la question du plan de travail et du rapport
d'activité, je crois savoir que dans la convention, c'était
confié jusqu'à présent à l'assemblée
départementale, dans la liste des articles qui n'était pas dite
sous l'autorité du collège.
M. Ryan: Et sur le rôle et le statut du coordonnateur de
département, il y a des changements très importants, est-ce que
vous favorisez tout cela?
M. Fortier (Claude): Si je parle au nom de la commission,
à travers les réflexions de la commission, il nous semble que
c'est un
moyen efficace pour assurer ce lien entre la vie départementale
et la vie de l'institution, mais par le biais d'une politique qui soit le fait
de règles du jeu établies avec l'ensemble de la
communauté, comme cela a pu se faire à certains endroits.
M. Ryan: Vous ne trouvez pas que cela aurait peut-être
été meilleur si on avait essayé d'en obtenir un peu moins
par le biais de la négociation plutôt que de chercher à
tout l'imposer par le biais d'un décret? Je pense au climat dont parlait
Mme Blackburn. On peut bien s'apitoyer sur un climat, mais si on approuve les
moyens qui ont conduit à la création de ce climat, je ne sais pas
si on contribue autant à l'amélioration des choses.
M. Fortier (Claude): Ce que je veux dire, c'est que dans certains
établissements, on a réussi, mais en y mettant le temps, à
se donner soit un projet, soit un début de politique; dans d'autres
endroits, une véritable politique d'évaluation, tout au moins en
ce qui touche l'évaluation des apprentissages. Je pense qu'il y a des
conditions de fonctionnement à l'interne qui sont très
importantes à cet égard.
M. Ryan: J'ai l'impression que le coordonnateur - on introduit un
changement profond - deviendra beaucoup plus à bien des égards un
mandataire de l'autorité de l'institution alors que, jusqu'à
maintenant, il tenait la plus grande partie de son autorité de
l'adhésion de ses collègues. Il me semble que pour la vie
collégiale et universitaire, cela est assez important que la personne
ait l'adhésion profonde de ses collègues. Il me semble qu'on
n'attend pas tellement une autorité directe et omniprésente d'un
responsable de département qu'un rôle de coordination et
même d'animation, sans trop d'extension.
M. Fortier (Claude): Je crois que vous faites par le fait
même référence à la façon dont sera
conçue, je dirais, de part et d'autre, la signification du terme "rendre
des comptes" à l'institution de la vie départementale. Je pense
que la tradition est trop bien implantée pour souhaiter qu'elle soit
modifiée, celle qui veut que le chef de département soit vraiment
celui qui peut témoigner de ce qui se passe comme vitalité
à l'intérieur d'un département. Je pense que
là-dessus, il y a des avantages à maintenir le rôle positif
que le chef de département pouvait avoir. Cependant, de quelle
façon peut-on définir le lien de responsabilité ou de
reddition de comptes, si l'on veut, du département par rapport à
l'établissement? Il me semble qu'il y a par rapport à la
situation récente qui s'était créée dans les trois
ou quatre dernières années une certaine dose de réflexion
qu'il faudra aménager concrètement dans les milieux. Je crois que
c'est vous qui faisiez référence à des pratiques qui sont
plus ou moins formelles et qui ont permis de trouver des voies
d'aménagement. Il me semble que de vouloir établir un lien de
responsabilité, un lien de continuité entre la vie
départementale et l'institution peut aussi tirer parti des innovations
ou des situations concrètes qu'on a pu créer dans le
récent passé à cet égard.
M. Ryan: II a été question la semaine
dernière d'une clause dans le décret qui a trait à la
période qu'un enseignant doit franchir avant d'avoir accès
à la permanence. Jusqu'à maintenant, c'était deux ans.
Avec le décret, ce sera porté à deux ans et dix ou onze
mois, si mes impressions sont correctes. Ne trouvez-vous pas que c'est de
nature à contribuer à ce que vous disiez vouloir éviter
tantôt, l'éloignement des jeunes? N'est-ce pas de nature à
en décourager un beaucoup plus grand nombre? Avez-vous une idée
du nombre d'enseignants qui peuvent être frappés par une mesure
comme celle-là, si elle allait s'appliquer?
Mme Blackburn: Je pense que cette mesure, si j'ai bien compris,
voulait corriger certains abus qui existaient dans la convention
précécente, qui étaient de l'ordre suivant: Vous aviez des
professeurs qui étaient engagés, ils avaient une tâche
complète, par exemple pour remplacer quelqu'un qui était en
congé sabbatique de deux ans, ou un an, deux professeurs, deux
années consécutives. Cela donnait à votre nouveau
professeur, qui n'avait pas sa permanence, deux tâches d'enseignement
complet pour deux ans; malgré qu'on savait d'avance que ces postes
seraient déjà occupés au terme de l'année, il
pouvait acquérir sa permanence. On voulait corriger cela. Le temps
requis pour obtenir sa permanence dans les établissements universitaires
est considérablement plus long, parce qu'il y a toute une période
d'évaluation. Est-ce que cela contribuera, et dans quelle mesure,
à créer une certaine insécurité? Je ne saurais vous
le dire.
M. Ryan: Une dernière question. Si on s'appuie sur les
données des trois ou quatre dernières années, on constate
qu'il y a eu une augmentation de la clientèle étudiante dans les
cégeps d'à peu près 4% ou 5% par année. On peut
présumer qu'il y aura encore une augmentation du même ordre au
cours des deux ou trois prochaines années, c'est-à-dire au cours
de la période qui sera couverte par les décrets actuels dont nous
espérons qu'ils deviendront des conventions collectives à la
suite des négociations avec les parties. S'il y a cette perspective, ne
trouvez-vous pas qu'on aurait intérêt à chercher
peut-être à étaler un petit peu la solution qu'envisage
le gouvernement? D'ailleurs, je crois que, dans le cadre de
règlement du mois de février, c'était prévu. Je me
disais ceci un peu naïvement peut-être: Si la clientèle doit
augmenter de 5% par année, si on augmentait la tâche
d'enseignement beaucoup moins qu'on ne le fait, par exemple 5% - on va à
20% dans bien des cas actuellement - il me semble que cela donnerait une marge
qui permettrait d'éviter de mettre sur le pavé ou de mettre en
disponibilité de 1000 à 1200 enseignants. Je me dis que quant
à les payer à 80%, s'ils sont en disponibilité, mieux vaut
peut-être les garder pendant un an ou deux à temps plein, quitte
ensuite à en ajouter moins après cela et à prévoir
le fonctionnement de tous ces mécanismes d'aborption dont vous avez
parlé, qui sont très intéressants également. Je ne
sais pas si, dans le cas des cégeps - si le ministre voulait commenter
là-dessus, cela m'intéresserait au plus haut point - il n'y a pas
une marge de souplesse qui pourrait être trouvée dans ces
perspectives des deux ou trois prochaines années au point de vue de la
clientèle, qui permettrait de régler avec plus d'humanité
ce problème d'une meilleure adéquation entre la tâche au
bout de la ligne et les possibilités financières du
Québec.
Le Président (M. Jolivet): Mme
Blackburn.
Mme Blackburn: II me semblerait un peu difficile de vous dire...
Ce que nous avons envisagé, c'est probablement plus au stade des tables
de négociation que nous pourrions en examiner la possibilité,
s'il y a des coûts à envisager advenant tel ou tel choix... Il est
certain et évidemment cela devient un peu plus délicat, parce que
c'est une réflexion plus personnelle que j'ai faite dans un cercle plus
restreint qu'on peut penser, par exemple, que l'étalement qui a
été envisagé sur trois ans, que cette formule est
extrêmement intéressante et va permettre de contrer ou de rendre
moins difficiles, moins durs les effets des mises en disponibilité. Mais
on pourrait penser qu'après deux ans, si la situation économique
se révélait meilleure ou s'il devenait évident par exemple
qu'on ait des difficultés considérables par rapport à
certains programmes, il faudrait pouvoir réviser cette situation
après deux ans. Vous savez, trois ans c'est beaucoup, quoique
j'hésite à vous dire que c'est beaucoup parce que c'est peu
finalement; une fois que vous avez une certaine stabilité, ces trois ans
sont quasiment un minimum. Si vous laissez en suspens certaines clauses qui
laissent penser qu'on peut négocier quelque chose après deux ans,
vous gardez un climat de négociation qui rend difficile l'acquisition
d'une certaine stabilité, d'un climat un peu plus stable dans les
collèges. Là-dessus, je n'ai pas de réflexion.
Probablement que le ministre de l'Éducation serait plus à
même que moi de répondre à votre interrogation.
M. Ryan: Je veux seulement ajouter une précision. Je ne
dis pas que j'adhère au principe de l'augmentation de 15% de la
tâche. Je ne voudrais pas que le ministre parte avec cette impression.
C'est une hypothèse d'étalement que j'ai faite. Il me semble que
le taux d'accroissement éventuel de la tâche devrait être
négocié. Si on s'entendait que sur les trois ans, cela devrait
être 8% ou 10% ou 12% - je ne sais pas -et qu'ensuite, on décide
de l'étaler ensemble... Vu les perspectives d'augmentation relative de
besoins qui se posent, il me semble qu'il y a un espace qu'on pourrait utiliser
pour la recherche de solutions plus acceptables.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Avant d'accorder la
parole au député de Fabre et adjoint parlementaire du ministre de
l'Éducation, comme il y a deux personnes qui m'en ont fait la demande,
le député de Fabre et Mme la députée de L'Acadie,
on pourrait terminer avec l'organisme en présence et dépasser 18
heures de quelques instants.
Mme Lavoie-Roux: Très bien.
Le Président (M. Jolivet): Parfait! M. le
député de Fabre.
M. Leduc (Fabre): Merci, M. le Président. J'aurais
quelques questions. La première a trait à ce que vous avez dit
lorsque vous avez parlé de la charge. Vous avez parlé de
l'assouplissement de la plage horaire. Vous avez mentionné simplement
qu'il y avait un assouplissement. Mais vous n'avez pas mentionné s'il y
avait des avantages qui accompagnaient cet assouplissement. On sait que cette
plage horaire passerait de 8 heures à 18 heures, je crois, à
celle de 8 heures à 23 heures. Présentement, je crois que la
plage est de 8 heures à 18 heures dans l'ensemble des cégeps; on
passerait de 8 heures à 23 heures. Les syndicats, entre autres, ont
exprimé un certain nombre d'inquiétudes par rapport à cet
assouplissement. Une crainte qui est exprimée est celle de voir
l'enseignement régulier déborder au-delà de 18 heures.
Est-ce que vous partagez ces craintes? Est-ce que vous avez une
réflexion à ce sujet?
Mme Blackburn: La souplesse qui a été
apportée dans la plage horaire ne nous semble pas, du moins à
première vue, devoir avoir des conséquences défavorables
sur la qualité de l'enseignement non plus que sur la qualité de
vie des enseignants. On m'a informée de certaines mesures qui
permettraient, par exemple, de prévoir des temps de
disponibilité à l'enseignant lui permettant de ne pas
détériorer complètement sa qualité de vie. Par
exemple, lui demander d'être présent deux heures le matin et deux
heures avant minuit, cela semblerait excessif.
Si je me place exclusivement dans la perspective des étudiants,
ce qui me semble tout à fait tomber sous le sens c'est que les
collèges tenteront d'organiser tous les cours des étudiants
à l'intérieur de la période de 8 heures à 18 heures
qu'on connaît actuellement. Je pense bien que personne ne va sciemment
s'arranger pour qu'un étudiant se retrouve avec un cours à 22
heures - un étudiant de l'enseignement régulier - d'autant plus
que les périodes du soir sont largement occupées par les
adultes.
Par ailleurs, cela permettra à des étudiants à
l'enseignement régulier d'aller se chercher un cours aussi le soir. Cela
pourra entrer dans sa grille. On sait que, dans les universités, cela
est fréquent. Les étudiants à l'enseignement
régulier à temps complet se retrouvent avec une grille assez
variable. Vous avez des cours de 8 heures à 22 heures. Cela ne serait
pas souhaitable que tous les cours soient organisés comme cela,
indistinctement que le jeune soit en collège I ou en collège III.
Je ne pense pas que cela soit voulu par les collèges. On n'est pas
particulièrement préoccupé des effets négatifs.
Cela peut avoir un avantage, cependant. Cela permettra à des
collèges d'accueillir un peu plus d'étudiants. Vous savez qu'il y
avait un problème d'accessibilité, surtout dans la région
de Montréal, l'an passé. On peut penser que
l'élargissement de la plage horaire va permettre d'accueillir les
étudiants qu'on a dû laisser aux portes, l'an passé.
M. Leduc (Fabre): Merci. Ma deuxième question a trait
à la tâche. Plusieurs chiffres sont avancés au sujet de
cette tâche moyenne qui sera augmentée. Le député
d'Argenteuil a lancé le chiffre de 20%. Vous avez parlé d'une
tâche moyenne augmentée de 10% à 15% et j'ai vu 25% dans
une publicité syndicale. Sur quoi vous basez-vous pour avancer le
chiffre de 10% à 15%? Est-ce que vous avez eu l'occasion de faire une
étude qui tient compte, entre autres, qu'au collège il y a des
cours dits académiques, surtout à l'enseignement
général, et il y a des cours professionnels, professionnels
lourds, entre autres, où il y a peu d'étudiants? Pouvez-vous nous
préciser votre pensée à ce sujet?
Mme Blackburn: Les chiffres par rapport à l'augmentation
moyenne qui était variable de 10% à 15% nous ont
été fournis par le ministère et semblent, en tout cas au
premier examen, relativement réalistes si on pense que l'augmentation de
la tâche est de 13,5%. On devra tenir compte du caractère plus
exigeant de certains cours, ce qui fait que cela nous semble assez
réaliste.
Là-dessus, le ministère serait certainement mieux
armé que moi pour donner ces informations, mais ce qui nous a
été dit c'est que les paramètres permettant de fixer la
tâche d'enseignement qui était conventionnée, ne le serait
plus par les décrets. Mais cela ferait partie d'une entente à
intervenir entre la Fédération des cégeps et le
ministère, qui établirait la règle d'allocation des
enseignants, règle qui tiendrait compte des paramètres
antérieurs. Autrement dit, ce qu'on avait dans les collèges, en
1976, c'était une situation où vous aviez, quel que soit le
caractère des programmes qui étaient dispensés dans un
cégep, un ratio 1-15. Cela ne tenait pas compte des programmes
particulièrement lourds et je pense, pour ne pas le nommer, à
celui de l'aéronautique, à Chicoutimi, où le ratio est 1-1
pour un instructeur de vol. Cela causait des difficultés
considérables à certains programmes d'enseignement professionnel.
(18 heures)
Ce qui se propose, nous dit-on, c'est une formule qui tiendrait compte
des paramètres actuels, sauf que ce ne serait pas conventionné et
ce serait une entente à intervenir par règlement entre la
Fédération des cégeps et le ministère de
l'Éducation.
Si telle est la situation, la situation qui serait faite dans les
collèges serait moins pénible pour les enseignements
professionels qu'elle ne l'était en 1976. À savoir si cela
représenterait 10%, 15% ou 25%, je pense que ce sont les gens qui
établiront les calculs qui seraient plus à même... C'est
plus technique et je n'ai jamais pensé vraiment que c'était de la
responsabilité du conseil d'y descendre.
M. Leduc (Fabre): Une dernière question. Je reviens au
département. Vous visez un lien de continuité entre le
département et le collège, un lien de responsabilité aussi
qui, à votre sens, n'est pas assez précis, n'est pas assez
développé dans la situation actuelle. Est-ce que vous êtes
en mesure de faire des comparaisons avec les universités, parce que je
pense que le département du collège se rapproche beaucoup plus du
département de l'université que du département de
l'école secondaire? Est-ce que vous avez examiné cette situation?
Est-ce qu'on peut faire des comparaisons?
Mme Blackburn: On a fait des comparaisons et pour cela le
président de la commission a visité différents types
d'établissements dans les affaires publiques et, en particulier, dans
les universités. M.
Fortier.
Le Président (M. Jolivet): M. Fortier.
M. Fortier (Claude): Peut-être que le point le plus
repérable de cette comparaison, c'est le statut du chef de
département ou du responsable du département. La situation n'est
pas la même dans toute les universités. Si on prend, par exemple,
l'Université du Québec et l'Université de Montréal,
je pense qu'il y a une différence de statut. Ce qu'on trouve, par
comparaison avec ce qui se passe au niveau collégial, c'est que le
responsable du département est sûrement en liaison avec les
instances responsables de l'université comme institution. Quel que soit,
encore une fois, le statut précis du chef de département, qui est
tantôt un syndiqué dégagé d'enseignement,
tantôt... je pense qu'il y a d'autres formules qui sont en vigueur. Ce
qui nous est apparu, à un examen sommaire, je dois dire, c'est qu'il y
avait là des modalités qui, en plus de s'appuyer sur une
tradition dont les collèges ne peuvent jouir à cause de leur
longueur de vie par rapport à celle des universités, en plus de
s'appuyer sur cette tradition, il y avait des mécanismes qui
permettaient une continuité plus évidente, mécanismes
mieux rodés que ceux qu'on trouve au collégial par rapport
à cette question précise.
M. Leduc (Fabre): Juste une sous-question. Du point de vue de
l'évaluation et du point de vue des rapports, des programmes du
département au collège, est-ce que cela existe à
l'université? Est-ce que cela existe dans les universités que
vous avez vues, ce rapport du point de vue de l'évaluation et ce rapport
des programmes à transmettre à l'institution?
M. Fortier (Claude): Je peux dire que du point de vue de
l'évaluation il y a dans certaines universités des
mécanismes qui sont assez exigeants et très
détaillés, sinon dans les statuts, du moins dans les
règlements mêmes de l'université. Je ne saurais faire
cependant la comparaison entre toutes les universités à cet
égard et le niveau collégial.
En ce qui concerne la situation de l'évaluation au niveau
collégial, je pense qu'on peut dire à cet égard qu'on n'a
pas encore mis au point ou trouvé les formules qui permettraient de
satisfaire tout le monde. C'est le moins qu'on puisse dire. Ce qui a
été mis de l'avant et ce qui est testé actuellement, si on
veut, cela a été l'exigence faite aux collèges de se
donner des politiques en matière d'évaluation où pourrait
se négocier, ou s'harmoniser un partage entre la responsabilité
que doit avoir l'instance, l'unité départementale et
l'institution elle-même.
Une voix: Merci.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais d'abord dire sincèrement au
Conseil des collèges combien je trouve que son mémoire a
été plus nuancé et plus sensible au noeud de la crise que
les enseignants et le monde de l'enseignement traversent. Je ne
m'étendrai pas là-dessus.
Je voudrais vous demander: Est-ce que vous pourriez ventiler, on parle
beaucoup d'augmentation du nombre d'élèves dans les
collèges, le pourcentage qui est dû à l'augmentation des
adultes aux cours réguliers, le pourcentage qui est dû à
l'augmentation possible du passage du secondaire au cégep,
c'est-à-dire une augmentation des élèves venant du
secondaire au cégep? Et finalement, quelle est l'augmentation qui est
due au nombre d'élèves qui font une cinquième session pour
les deux dernières années?
Le Président (M. Jolivet): Madame Blackburn.
Mme Blackburn: M. le Président, je vais essayer rapidement
mais probablement que je vais faire appel au président de la commission
de l'enseignement professionnel pour me rappeler le mémoire parce que
là, je vois le tableau mais...
Mme Lavoie-Roux: Excusez-moi, M. le Président, pour ne pas
vous obliger à trop d'efforts de mémoire, je serais satisfaite si
vous pouviez nous donner ces chiffres-là, si ce n'est pas à ce
moment-ci sinon plus tard dans la soirée parce que ça me semble
important au point de vue de ce qu'on appelle l'augmentation du nombre
d'étudiants au cégep et peut-être de certaines politiques
d'encadrement. Je pense que cela a une implication quant aux politiques
mêmes que les collèges devraient avoir vis-à-vis des
différents types de clientèle. Si vous ne le savez pas
précisément, si vous me les donniez dans la soirée,
ça me satisferait pleinement.
Vous vous inquiétez quant à la répercussion sur
l'enseignement professionnel de la réduction du nombre de professeurs,
c'est-à-dire le genre - je ne sais si on peut parler de ballottage -
d'équilibre qu'on pourrait essayer de faire dans les cégeps.
Est-ce que ça pourrait amener éventuellement que les
collèges sacrifient ou contingentent davantage certaines options
professionnelles?
Mme Blackburn: Je peux vous dire que vous touchez là une
des inquiétudes, sûrement, du président de la commission
de
l'enseignement professionnel parce que, vous savez, il y a des
enseignements professionnels qui ne permettent pas de dépasser un
certain ratio pas seulement forcément en raison du caractère
même du type d'enseignement, mais souventefois à cause des locaux,
des laboratoires. On ne pourra pas demander à ces professeurs d'avoir un
ratio plus de 1-8. Je ne saurais pas vous dire vraiment si cela risque d'avoir
des conséquences sur le contingentement de certains programmes
professionnels. Une chose est certaine, c'est que le conseil est
particulièrement préoccupé de toute la question des
contingentements dans certains programmes qu'on dit de techniques de pointe.
Là-dessus, on a fait des recommandations au ministre l'invitant à
élargir le plus possible les programmes les plus prometteurs
d'emploi.
Est-ce que ce nouveau calcul risque d'avoir des conséquences pour
le contingentement? Je ne vois pas. Je ne pense pas que cela se fasse ainsi.
Cependant, ce que cela peut avoir comme conséquence, si vous alourdissez
trop la tâche d'un enseignant dans les programmes professionnels, cela
rend l'enseignement difficile, à cause des conditions, à cause du
caractère même ou du type de cours qu'il a à dispenser.
Cela peut être plus délicat.
Mme Lavoie-Roux: Le ministre a semblé sensible à ce
problème que vous avez soulevé. Vous dites, je ne l'ai pas sous
les yeux: Nous allons suivre cela de près et nous ne nous gênerons
pas dans la prochaine année, si on perçoit des difficultés
particulières, d'intervenir. Est-ce qu'à ce moment, le ministre
serait prêt à modifier les règles en cours de décret
ou de convention, parce qu'il reste qu'en fin de compte, c'est comme cela que
cela se résume?
Ma dernière question: Pouvez-vous me dire si les frais encourus
par la mise en disponibilité des professeurs sont totalement
assumés, que ce soit à 80%, à 50%, par le ministère
de l'Éducation ou s'il y en a une partie qui doit être
assumée à l'intérieur de votre budget global?
Mme Blackburn: Toute cette question comprend l'aspect le plus
technique. Pour cela, je passerai la parole à M. Lelièvre. Je
pense qu'il est plus informé du mode de partage des frais.
Le Président (M. Jolivet): M. Lelièvre.
M. Lelièvre (Lucien): Je vais tenter de répondre
à la question. Je ne suis pas assuré d'être beaucoup plus
informé que Mme la présidente. Ce que je peux dire avec
certitude, c'est que les frais occasionnés par les mises en
disponibilité sont assumés par le budget du gouvernement et ne
sont pas imputés à des postes budgétaires autres que celui
de l'enseignement. Maintenant, est-ce qu'à l'intérieur des
enveloppes budgétaires gouvernementales, l'imputation des coûts
des mises en disponibilité est comptabilisée du côté
de l'enseignement ou du côté des coûts de convention? Je ne
saurais le dire, mais le collège reçoit une subvention qui lui
permet d'envisager les coûts des mises en disponibilité locales.
Je ne sais pas si cette information générale répond
à votre question, mais c'est la totalité de ma science sur le
sujet.
Mme Lavoie-Roux: Oui. Est-ce que vous avez, comme au secondaire,
un régime - si je peux m'exprimer ainsi - de suppléance dans
lequel ces gens...
M. Lelièvre: Non.
Mme Lavoie-Roux: Non, vous n'avez pas cela.
M. Lelièvre: II n'y a pas cela au collégial.
Mme Lavoie-Roux: Ah! Cela n'existe pas quoi!
M. Lelièvre: Non.
Mme Lavoie-Roux: Alors, merci.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Si ces documents
additionnels doivent être envoyés à la commission, il
s'agirait de les donner au secrétariat des commissions pour qu'on puisse
en faire la distribution. On vous remercie au nom des membres de la commission.
Je tiens à vous inviter à revenir ici après la suspension,
à 20 heures, de même que l'Association des directeurs
généraux des commissions scolaires protestantes du Québec
et l'Association of Protestant School Business Officials of Québec. Oui,
M. le député de Fabre.
M. Leduc (Fabre): J'aurais une suggestion à faire. J'ai
appris que la Québec Federation of Home and School Associations serait
prête à se faire entendre assez rapidement immédiatement
après les prochains. On m'a dit que cela compléterait ce que la
Fédération des comités de parents a déjà
exprimé. C'est un voeu que la Québec Federation of Home and
School Associations fait et nous sommes d'accord.
Le Président (M. Jolivet): Cependant, je serais
tenté de vous suggérer ceci, au lieu de m'inciter à les
inviter. Malheureusement, mon rôle n'est pas de les inviter, mon
rôle est d'inviter ceux qui sont en 6e position; ils ont, eux aussi, des
droits et des choses à
faire. Les gens en 7e position étaient prévus et ils ont
peut-être autre chose à faire ce soir. Je pense que le groupe de
la Québec Federation aurait peut-être intérêt
à consulter les deux autres et à nous dire s'il y a entente, ce
soir, à 20 heures. Mais mon rôle, mon devoir est d'appeler les
gens en 6e position en premier lieu. Donc, il peut y avoir une rencontre
après la suspension.
(Suspension de la séance à 18 h 13)
(Reprise de la séance à 20 h 09)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît:
La commission permanente de l'éducation reprend ses travaux aux
fins d'entendre les organismes directement impliqués dans
l'administration scolaire qui veulent faire des représentations sur la
qualité de l'enseignement, la tâche et la sécurité
d'emploi des enseignants et enseignantes en regard de la situation actuelle au
Québec.
Au moment où nous nous sommes quittés, nous avions
invité deux organismes à venir se présenter devant nous,
mais je pense que le leader a quelque chose à ajouter avant de
commencer. Allez, M. le leader.
M. Bertrand: Merci, M. le Président. Je voudrais
simplement indiquer, pour le bénéfice de nos collègues de
la commission, que, quelle que soit l'heure ce soir... En d'autres mots, si
cela se termine à minuit, tant mieux!
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le leader, je
pense que votre micro ne fonctionne pas.
M. Bertrand: Cela me fait penser au conseil national de la fin de
semaine. Le micro de droite ne fonctionnait pas.
Le Président (M. Jolivet): Allez.
M. Bertrand: Je voudrais simplement faire remarquer, M. le
Président, pour le bénéfice de nos collègues
parlementaires et aussi des groupes qui se présentent devant nous, que
la commission parlementaire ne siégera pas demain. Donc, c'est à
nous, entre nous, de décider comment nous organisons nos travaux ce
soir. Est-ce que nous terminons à minuit? Sinon, est-ce que nous
acceptons de dépasser minuit, jusqu'à minuit et demi, une heure?
Sachant qu'il y a encore trois ou quatre intervenants qui veulent se faire
entendre, je crois...
Une voix: Cinq.
M. Bertrand: Cinq intervenants. Je crois qu'effectivement nous
pouvons arriver à faire tout ce travail et je sollicite donc la
collaboration de tous les parlementaires pour que nous y parvenions dès
ce soir.
Le Président (M. Jolivet): M. le..., j'allais dire le chef
de l'Opposition. M. le député d'Argenteuil.
M. Bertrand: Argenteuil, M. le Président.
M. Ryan: Vous me faites souffrir, M. le Président. Le
comté d'Argenteuil, il va falloir qu'on vous amène visiter cela
une bonne journée. Vous allez voir que c'est le plus beau comté
de la province.
M. Bertrand: C'est sur l'autoroute, n'est-ce pas?
M. Ryan: Quand elle sera faite. Cela fait longtemps que vous la
promettez.
M. Bertrand: Pas moi, je n'ai rien promis.
M. Ryan: Le gouvernement dont vous faites partie. M. le
Président, j'ai écouté le leader du gouvernement. Nous
n'avons pas d'objection à faire tout ce qui est humainement possible
pour entendre ce soir les groupes qui sont ici, qu'il reste à entendre.
Maintenant, il y a seulement une chose que je souhaiterais qu'on puisse garder
en suspens. Le ministre a dit que la commission ne pourrait pas siéger
demain parce que le gouvernement a ses priorités qu'on peut comprendre.
Mais il avait été question, au début, de réentendre
les deux parties principales au différend, le gouvernement et,
éventuellement, j'avais compris ou j'aurais souhaité les
partenaires de la partie patronale, d'un côté et, de l'autre, la
partie syndicale. Maintenant, tout dépend de ce qu'on va nous annoncer.
C'est évident que, si le gouvernement allait nous faire savoir qu'un
processus de médiation ou de conciliation s'engage de manière
sérieuse, à ce moment, je pense bien que la commission aura fait
le gros du travail qui était attendu d'elle. Il sera toujours possible
pour elle de revenir à la charge si les choses tournaient autrement
qu'on ne le souhaiterait alors. Mais cette réserve étant faite,
je comprends très bien ce qui a été dit par le ministre.
Je pense que, de ce côté-ci, on va collaborer ce soir à ce
que le travail se fasse dans le même esprit d'application et de
collaboration envers nos visiteurs que celui qui a été
manifesté jusqu'à maintenant.
Le Président (M. Jolivet): Avant d'accorder la parole au
ministre pour l'ordre du jour, le député de Viau aurait quelque
chose à ajouter.
M. Cusano: Oui, M. le Président, c'est que d'après
l'ordre du jour, The Québec Association of Catholic Schools
Administrators était censée être ici aujourd'hui. Je
crois qu'elle nous a fait parvenir un télégramme. Auriez-vous
l'obligeance de dévoiler le contenu de ce télégramme non
seulement aux membres de la commission parlementaire, mais aussi aux
témoins qui se présenteront dans quelques instants?
Le Président (M. Jolivet): Je ne l'avais pas fait puisque
qu'on avait dit au départ que les organismes qui ne se
présentaient pas pouvaient faire en sorte que les documents soient
acheminés au secrétariat des commissions. Je n'en avais pas fait
mention, mais si vous me le demandez je vais le faire: "La Québec
Association of Catholic Schools Administrators, organisme qui regroupe les
directeurs et directrices adjoints et adjointes des écoles primaires et
secondaires anglo-catholiques du Québec, remercie la commission
parlementaire de l'éducation de l'invitation de s'adresser à la
commission. Compte tenu que notre association était convoquée
pour le vendredi 4 mars, nous étions déçus que, à
cause de l'horaire très chargé de la commission, ils vous a fallu
remettre notre audience à une date ultérieure. "Cependant, notre
présence au salon rouge le vendredi 4 mars nous a permis de suivre avec
grand intérêt et d'écouter attentivement les interventions
des divers organismes. Nous constatons que tous les éléments
majeurs auxquels on désirait s'adresser furent abordés par
plusieurs des intervenants. Nous croyons que cela ne sera qu'une perte de temps
pour la commission de nous entendre répéter les mêmes
propos. Pour cette raison, nous nous excusons de ne pas nous présenter
devant la commission et nous vous sommes très reconnaissants de
l'occasion que vous nous avez offerte. "Nous voulons souligner à la
commission les points suivants: Premièrement, depuis quelques
années, les changements majeurs dans notre système
d'éducation public ont pour effet d'empêcher la planification et
de créer un climat d'instabilité. Nous espérons que
l'avenir nous réserve une période de calme et de stabilité
pour qu'on puisse jouir d'un climat propice à la gestion de nos
écoles pour le bien des élèves. "Nous constatons que, dans
le conflit actuel avec les enseignants, le procédé du
gouvernement d'agir par décrets détruit le moral de nos
enseignants. Nous souhaiterions la révocation de la loi 111 et nous
souhaiterions que les négociations reprennent en présence d'une
tierce partie. La tâche d'animation auprès des enseignants qui
sera nécessaire après la fin de ce conflit provoque beaucoup
d'appré- hension parmi nos membres. (20 h 15) "Troisièmement,
nous recommandons que le régime de négociations dans le secteur
public soit modifié pour que les parties puissent résoudre leurs
divergences sans avoir recours aux grèves et aux décrets.
À cette fin, nous demandons qu'aux commissions scolaires soient
accordés plus de pouvoirs dans ce dossier et que le rôle du
gouvernement doit être limité à définir le cadre
financier que la société québécoise peut se
permettre d'investir dans l'éducation. "Nous demandons que le
gouvernement agisse selon nos recommandations afin d'assurer la fin des
conflits qui perturbent l'école publique depuis de longues
années. "Le président par intérim, Québec
Association of Catholic School Administrators, Léonard Tynan".
M. le ministre de l'Éducation.
Conciliation entre les parties M. Camille
Laurin
M. Laurin: M. le Président, à la suite des
observations et recommandations que nous ont faites de nombreux groupes,
organismes ou personnes, je puis vous annoncer que le gouvernement a retenu le
principe de la conciliation entre les parties. Au moment où je vous
parle, les discussions se poursuivent avec la CEQ en particulier sur les
modalités selon lesquelles ce processus de conciliation devrait se
poursuivre. Par exemple, le mandat des conciliateurs, malgré que le mot
"conciliation" indique que nous allons nous conformer à l'esprit du Code
du travail, donc le mandat du groupe de conciliation, le nombre des
conciliateurs, deux ou trois, le mandat qui serait donné à ces
conciliateurs, la liste des sujets qui seraient abordés pendant
l'étape de la conciliation, la durée de l'époque de
conciliation. Je puis dire que les discussions sont assez fructueuses pour
qu'une conclusion puisse être atteinte ce soir. Je m'engagerais demain,
lors de la reprise des travaux de l'Assemblée nationale, non seulement
à faire le point sur le sujet, mais à annoncer les conclusions
auxquelles nous sommes parvenus par le biais d'une déclaration
ministérielle.
Quant à la FNEEQ, il est prévu que cette étape de
la conciliation, ces mécanismes de la conciliation lui seront
également offerts si elle le juge à propos, malgré que les
discussions que nous avons avec la FNEEQ en ce moment laissent plutôt
entendre que la FNEEQ, ayant reçu un nouveau mandat dimanche,
préférerait pour le moment une reprise des négociations
directes, qu'elle croit possible et pouvant mener à un règlement
négocié.
L'essentiel est quand même acquis, le
gouvernement retient le principe de la négociation. On discute en
ce moment des modalités. Les pourparlers, les discussions sont en cours
avec nos partenaires de la CEQ. Une discussion finale quant aux
modalités devrait être acquise au cours de la soirée. Je la
communiquerai au nom du gouvernement dans tous ses éléments lors
de la reprise de nos travaux demain.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le
député d'Argenteuil, sur cette question.
M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, je suis content de constater que
la démarche du gouvernement continue d'aller dans le sens qui avait
été annoncé par le ministre vendredi soir. Par
conséquent, le bon côté semble graduellement prendre le
dessus sur le côté moins agréable qu'on avait
constaté à l'occasion de la loi 105 et de la loi 111. Nous nous
en réjouissons, du côté de l'Opposition, pour de nombreuses
raisons. D'abord, parce qu'on semble vouloir revenir à l'esprit de notre
législation du travail. J'ai bien remarqué que le ministre a
parlé de conciliation, au sens de notre droit du travail; c'est
très important parce qu'on aurait pu trouver un terme vague, un terme
fuyant qui aurait caché une volonté plus ou moins vague de
simplement donner les apparences d'un désir de solution. Si on va
à la conciliation proprement dite, au sens que définissent nos
lois du travail, je pense que c'est un progrès certain dont le
mérite revient d'abord aux organismes qui se sont
présentés devant la commission avec une patience et une
pertinence exemplaire depuis le début de ces travaux. Il s'est fait un
travail remarquable et c'est impossible qu'on participe à un travail
comme celui-là sans qu'un certain travail de rapprochement des coeurs ne
se produise de part et d'autre, surtout chez ceux qui sont immédiatement
concernés. Je constate ce cheminement avec beaucoup de satisfaction.
J'ose espérer que dans le mandat qui sera donné aux conciliateurs
éventuels, parce qu'il semble qu'il y en aura plus d'un, d'après
ce que le ministre vient de dire, on laissera une certaine marge de souplesse
pour permettre qu'un travail de conciliation véritable se fasse.
Nous aurons l'occasion d'en parler demain à l'Assemblée
nationale quand nous connaîtrons la décision de manière
plus précise, mais comme elle n'est pas encore prise, je me permets
d'insister beaucoup pour qu'on laisse la marge de souplesse nécessaire
pour permettre d'en arriver à un règlement et pour permettre que
la démarche soit vraiment fructueuse. Quant au reste, il me semble
n'avoir pas d'autres commentaires à faire pour le moment. Je pense qu'un
des devoirs de l'Opposition quand une situation semble s'acheminer vers une
amélioration, c'est d'éviter de compliquer les choses et
d'éviter d'ajouter toutes sortes d'éléments qui
risqueraient d'embrouiller la situation. Par conséquent, nous
enregistrons ces propos du ministre avec intérêt. Nous serions
très heureux que, dès ce soir, avant la fin de nos travaux, nous
ayons d'autres précisions, mais si cela doit venir à
l'Assemblée nationale demain, je pense que c'est un excellent forum pour
la communication d'une décision comme celle-là.
Le Président (M. Jolivet): Merci. J'invite donc
l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires
protestantes du Québec et Association of Protestant School Business
Officials of Québec, à se présenter devant nous. Je
demanderais à M. James Fissell - à moins que ce soit une autre
personne - de nous présenter ses collègues.
Auditions (suite)
Association des directeurs généraux des
commissions scolaires protestantes
M. Fox (Marcel): M. Marcel Fox.
Le Président (M. Jolivet): M. Marcel Fox.
M. Fox: Oui, directeur général de la Commission des
écoles protestantes du grand Montréal et M. Bill Pennefather,
directeur général de la commission scolaire Eastern
Québec. Nous représentons l'Association des directeurs
généraux des commissions scolaires protestantes du
Québec.
Le Président (M. Jolivet): Et les autres personnes qui
vous accompagnent. Madame.
Mme McGlasham (Phyllis): Je suis Phyllis McGlasham,
présidente de l'Association des administrateurs scolaires du
Québec. J'ai avec moi M. Ron Fava, vice-président et M. Keath
Farquharson, directeur exécutif.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. Fox.
M. Fox: Comme vous ne pouvez pas siéger après
minuit, je serai aussi bref que possible afin que vous puissiez terminer avant
minuit.
M. le Président, mesdames, messieurs, une fois de plus, il y a
une crise en éducation au Québec. Depuis 1964, le Québec a
subi des crises en éducation d'année en année. Il n'y a
rien de neuf en cela. Ce qui est neuf cette fois-ci, c'est qu'on a
constitué une commission parlementaire spéciale qui doit s'en
occuper à sa façon.
Merci d'avoir invité l'Association des directeurs
généraux des commissions scolaires protestantes du Québec
à venir présenter l'opinion de ses membres devant vous. Nous
avons d'abord hésité à le faire, mais compte tenu que les
directeurs généraux occupent une position clé au sein du
système scolaire et une position cible entre la partie patronale et la
partie syndicale, nous avons estimé que notre contribution pourrait
être de quelque valeur et nous nous sommes fait un devoir de
comparaître. C'est en tant qu'administrateurs que nous allons parler.
Nous ne représentons ni le ministère de l'Éducation ni les
commissions scolaires. Nous nous représentons nous-mêmes. Nous
tenons à le préciser pour certaines raisons.
La crise actuelle, comme toutes les autres crises que nous avons
vécues au fil des ans, ne nous facilite guère la tâche.
Notre souci premier est que l'enseignement se donne aux élèves
dans la salle de classe. Ceci est primordial, tout le reste est secondaire.
Nous sommes tenus, selon les exigences du ministère de
l'Éducation, à nous assurer que la durée de l'année
scolaire prescrite soit respectée, et nous avons une obligation envers
les parents à exiger qu'à la salle de classe il se dispense un
enseignement de qualité.
Un tel enseignement est avant tout tributaire d'une atmosphère
scolaire, saine et harmonieuse. Il dépend de l'assiduité des
élèves d'une part, et surtout du dévouement à la
tâche, de la compétence dans la matière, et de la science
pédagogique de l'enseignant d'autre part. Tout le reste est accessoire,
quoi qu'en dise ou quoi qu'on veuille affirmer et prétendre.
Pour des raisons de force majeure dues à des mesquineries
d'interprétation diverses à des chicanes de négociation,
à des querelles politiques et autres, entre adultes, l'année
scolaire des élèves se trouve menacée et les
élèves eux-mêmes deviennent les innocentes victimes d'une
situation de fait entièrement indépendante de leur volonté
directe ou indirecte et de celle de leurs parents.
Ce n'est pas la première fois que cela arrive. Nous le savons
tous. Faut-il à tout prix qu'une telle situation se répète
sans cesse de période de négociations en période de
négociations? Il devient criminel, à notre avis, de continuer
à tolérer que cela se perpétue. Un changement de
méthode s'impose. Établissons une fois pour toutes un contrat de
travail de base équitable et agissons en conséquence pour le
respecter et l'appliquer. Si des changements s'imposent, qu'on s'évertue
alors à les réaliser, au fur et à mesure, sans pour autant
interrompre les cours des élèves.
Sûrement dans une société civilisée comme la
nôtre, il existe des personnes de bonne volonté de part et
d'autre, compétentes dans leur domaine qui pourront être
mandatées à trouver des solutions aux problèmes qui se
posent. Travaillant tout le long sur un contrat ouvert, et à force de
discussions et de délibérations au cours de rencontres mutuelles,
une telle équipe sera capable de trouver des réponses
adéquates et équitables.
Abandonnons le modèle archaïque actuel qui veut que les
questions de relations du travail se règlent par la confrontation et
aboutissent à des conflits. Ce modèle de règlement de
compte peut, à la rigueur, se justifier dans le monde industriel
où les seuls antagonistes sont les patrons d'une part, et les ouvriers
de l'autre. De leur affrontement mutuel il résulte en fin de compte
qu'un manque de production d'une denrée amorphe quelconque.
Dans le secteur public de l'enseignement par contre, tout affrontement
de ce genre fait des victimes, innocentes victimes, les élèves,
dont l'avenir scolaire peut être affecté d'une façon
adverse. Il est temps qu'on y réfléchisse et qu'on agisse en
conséquence.
Selon les directeurs généraux, le décret tel qu'il
se présente répond du point de vue charge de travail et
présence à l'école de l'enseignant, aux besoins
impératifs de l'heure. Les 1500 minutes d'enseignement par semaine au
primaire sont indispensables si un enseignement varié de valeur doit se
dispenser. Ceci est d'autant plus nécessaire dans le secteur protestant
pour permettre aux divers cours de langue seconde de s'épanouir et de
porter fruits.
Dans le secondaire, les nouvelles exigences imposées par le
régime pédagogique demandent, elles aussi, ce que les heures
d'enseignement augmentent et surtout que la présence des enseignants
à l'école soit réelle afin de permettre qu'il existe
à nouveau, comme par le passé, un contact plus direct, plus
étroit et plus productif entre le maître et l'élève.
Cet état de fait, à lui seul, à savoir ces contacts plus
rapprochés, peut contribuer dans une très grande mesure à
humaniser l'environnement éducatif des écoles pour le plus grand
bien de tous.
Comme administrateurs généraux responsables de toutes les
catégories de personnels à l'emploi des commissions scolaires,
nous déplorons fortement que le décret soit tellement
discriminatoire envers les enseignants en ce qui concerne les dispositions
relatives à la sécurité d'emploi. Pourquoi cette
différence aux dépens des enseignants, et à l'avantage
encore des autres catégories de personnels? Le gouvernement peut-il la
justifier? Dans ce cas, il faudra qu'on donne des explications très
nettes, claires et précises, sans équivoque. Dans le cas
contraire, si la justification ne peut se faire, alors, il faudra prendre les
mesures requises pour rectifier
au mieux la situation en essayant de remettre tous les employés
sur un pied d'égalité. Il ne s'agit en somme que d'une simple
question de justice élémentaire. (20 h 30)
Il est à se demander, aussi, si la crise actuelle aurait pu
être évitée. C'est une question qu'on se pose toujours en
temps de crise. De même, il est évident que dans toute crise il
existe toujours des torts de part et d'autre. La réticence initiale des
enseignants à vouloir se mettre à table pour négocier
ouvertement et raisonnablement, compte tenu surtout du contexte
général de la situation économique actuelle, n'est pas
justifiable. Comme administrateurs du bien public, les directeurs
généraux ne peuvent pas non plus approuver de quelque
façon que ce soit la grève illégale à laquelle les
enseignants se sont adonnés sous prétexte d'avoir eu à
subir des provocations intolérables. L'attitude rigide adoptée
par les enseignants, surtout dès l'amorce des pourparlers initiaux, pour
ne pas les appeler négociations, laissait présager une fois de
plus qu'une confrontation était inévitable.
De leur côté, le gouvernement et le ministère de
l'Éducation portent eux aussi de graves responsabilités, surtout
et avant tout en ce qui concerne les bouleversements au sein du secteur de
l'éducation. Nous n'hésitons pas à affirmer que personne
n'a semé le plus la confusion dans le milieu de l'éducation que
le ministère de l'Éducation lui-même. Il est en effet
difficile d'imaginer qu'un service du gouvernement puisse songer à mener
de front trois campagnes d'envergure sans pour autant disposer vraiment de
toutes les ressources nécessaires à cette fin. Comment peut-on se
permettre d'entreprendre une restructuration massive et radicale de tout le
système scolaire, d'une part, et essayer d'implanter, d'une façon
progressive certes, mais néanmoins dans un domaine fort étendu,
un nouveau régime pédagogique de grande portée, d'autre
part, alors qu'il faut en même temps mener des négociations d'un
nouveau contrat collectif? Une telle stratégie peut être
qualifiée de fort douteuse pour le moins, car l'envergure
phénoménale des entreprises envisagées sape à elle
seule toutes les énergies qu'il fallait déployer pour les mener
à bonne fin et taxe à outrance les ressources disponibles, sans
parler pour autant des résistances que la nature de ces entreprises n'a
pas manqué de susciter.
Face à la résistance des enseignants à conclure une
entente à l'amiable, le gouvernement n'a pas hésité
à employer les grands moyens. Une fois de plus, fidèle à
son habitude acquise de régner plutôt par force de loi que par
force de persuasion, le gouvernement a adopté loi sur loi, dont la
dernière, la loi 111, promulguée pour assurer le retour au
travail des enseignants, dépasse quelque peu les bornes par sa
sévérité à outrance.
Comme administrateurs, les directeurs généraux sont les
premiers à reconnaître que les contrats en vigueur
protègent les enseignants à tel point qu'il est fort difficile,
très onéreux et parfois impossible, sinon inutile, de vouloir
envisager des sanctions efficaces contre eux. Pour briser ce carcan protecteur,
il faut avoir recours à de fortes mesures pour pouvoir appliquer des
sanctions. Mais il y a sanction et sanction. En général, il est
reconnu que la loi 111 est trop sévère, d'une part, et, d'autre
part, qu'elle s'attaque à la dignité humaine. Elle offusque et
effraie. Il faudra sérieusement songer à l'amender sous certains
rapports.
Les lois et décrets en vigueur imposent aux directeurs
généraux des obligations qu'ils se doivent d'assumer. Il est donc
nécessaire, sinon impératif, que dans les meilleurs
délais, ils sachent clairement à quoi s'en tenir. Il est bon de
discuter et de chercher à trouver des solutions, mais, du point de vue
du moment, la commission parlementaire actuelle est fort mal placée. Les
directeurs généraux doivent respecter dès maintenant les
obligations contractuelles qui ne peuvent attendre, à moins de mettre en
danger l'année scolaire 1983-1984. Ces obligations concernent le
transfert du personnel, l'affectation du personnel, l'établissement des
programmes d'études pour 1983-1984, la mise en disponibilité.
Pour nous, le décret est en vigueur et de rigueur. Il impose des
délais qu'il faut respecter et nous agissons en conséquence car
nous connaissons les répercussions qu'un manque d'obtempérer de
notre part entraînera, à long terme. En effet, si les syndicats,
de leur propre initiative, choisissent par exemple d'ignorer la loi, pour des
raisons spécifiques, ils ne tolèrent jamais, et en aucun cas, que
l'administration enfreigne une quelconque règle ou exigence du contrat
en vigueur, aussi minime que cette infraction soit. Une simple erreur de
procédure de notre part ou une simple omission de date limite
imposée est tout de suite sujette à sanction car elle
entraîne ipso facto un dépôt de grief. Les directeurs
généraux sont conscients de cette intransigeance des syndicats et
connaissent les conséquences néfastes qui peuvent en
résulter pour les commissions scolaires. Ils se plient, de ce fait, aux
exigences. La programmation est en cours et en cette période
d'année, tout changement majeur envisagé ou suggéré
peut avoir des répercussions fort malencontreuses sur l'année
scolaire à venir. Il faut essayer d'éviter l'anarchie et le
désordre. Cela peut se faire et la bonne volonté que la
commission parlementaire semble déjà avoir engendrée de
part et d'autre peut contribuer à sauvegarder l'année scolaire en
cours.
Les directeurs généraux implorent les enseignants de
renoncer à reprendre la grève et de rester en classe
jusqu'à la fin de l'année scolaire. Ils implorent les
représentants syndicaux à se montrer raisonnables et se
déclarer prêts à discuter sur les modalités de
règlement possibles. Ils implorent le gouvernement de se montrer
conciliant, de se résigner à amender certains passages de la loi
no 111 et d'étudier de près et de concert avec les
représentants syndicaux les points litigieux qui demandent à
être réglés.
Il serait peut-être bon aussi que, de part et d'autre, on
s'inspire de l'étude du Conseil supérieur de l'éducation
sur l'impact du décret sur le système scolaire, dont la
publication est prévue pour la fin mars. Il pourrait en résulter
des améliorations sensibles pour les années à venir. Il
nous faut la paix en classe. Faisons tout en notre pouvoir pour la faire
régner. Merci.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.
M. Laurin: M. le Président, je voudrais remercier
très sincèrement les directeurs généraux des
commissions scolaires protestantes du Québec pour leur
mémoire.
Ils jouent dans les commissions scolaires protestantes un rôle
analogue - c'est-à-dire un rôle cible, un rôle clé -
à celui que jouent les directeurs généraux des commissions
scolaires catholiques. Je ne veux pas reprendre les remarques que je faisais
à cette occasion. II est donc très important d'accorder une
très grande attention à ce qu'ils viennent nous dire ce soir.
Je crois remarquer que ce mémoire se situe sous le signe de
l'urgence des solutions à apporter. Je pense que M. Fox nous a
très bien expliqué les contraintes auxquelles les directeurs
généraux et les commissions scolaires sont soumis et à
quel point il est important, surtout face à cette intransigeance
syndicale dont il a parlé et qui est sans pitié, à quel
point il est important d'aider les directeurs généraux à
voir clair dans les actions qu'ils doivent poser et à prendre les
décisions qui s'imposent.
C'est bien la raison, d'ailleurs, pour laquelle nous voulons reprendre,
dans les plus brefs délais, les négociations avec les syndicats.
Et c'est pourquoi il est important aussi de les mener à terme, dans les
plus brefs délais possible. Nous sommes au début de mars et je
sais, en effet, qu'on ne saurait guère dépasser la fin de ce mois
avant de connaître clairement les décisions qu'il y a à
prendre. Et je peux assurer M. Fox que nous ferons l'impossible pour en arriver
à poser ces mesures, surtout pour en arriver aux conclusions heureuses
que nous en espérons.
Je note au passage que les directeurs généraux approuvent
que nous fassions passer de 23 à 25 heures la durée de
présence des élèves au cours primaire. Je connaissais
évidemment une des raisons fondamentales pour lesquelles les directeurs
généraux des commissions scolaires protestantes avaient cette
opinion, comme, par exemple, un meilleur enseignement de la langue seconde. Je
pense que l'enseignement des spécialités, de toutes les
spécialités, et un meilleur apprentissage des sciences
fondamentales nous imposent d'aller dans cette voie.
Je suis heureux de noter que les directeurs généraux
veulent, souhaitent que la présence des enseignants soit davantage
effective auprès des élèves et que cette présence
soit plus longue que celle qui existe actuellement. La raison principale que
les directeurs généraux nous donnent est au fond la même
que celle que la Fédération des commissions scolaires
protestantes nous donnait il y a quelques heures, c'est-à-dire
l'établissement d'une meilleure relation éducative entre
enseignants et enseignés, relation éducative davantage
humanisée et qui tienne compte de tous les besoins des
élèves, non plus seulement de leurs besoins intellectuels, de
leurs besoins d'apprentissage, mais également des besoins qui tiennent
à ce que nous avons affaire à des personnalités en
formation qui ont besoin d'un apport constant, riche et soutenu de la part des
adultes, les enseignants, qui ont décidé de se donner à
leur éducation. Je pense que nous pouvons être facilement d'accord
avec ces raisons.
J'ai noté aussi le plaidoyer vigoureux et chaleureux en
même temps que nous font les directeurs généraux lorsqu'ils
nous demandent de modifier en profondeur le régime actuel des
négociations. Je suis bien d'accord avec eux lorsqu'ils disent qu'il est
temps de substituer à cette confrontation, qui semble la marque de
commerce de notre régime de négociations, une méthode de
négociation qui nous permette d'une façon permanente, mais dans
un esprit différent, d'améliorer notre système
d'éducation. C'est peut-être là que se situerait la seule
question que je voudrais poser: Vous dites que si des changements s'imposent,
qu'on s'évertue à les réaliser au fur et à mesure
sans pour autant interrompre les cours des élèves. Est-ce que
cela veut dire que vous suggéreriez au gouvernement, dans ce nouveau
régime de négociations, d'interdire les grèves ou d'en
aménager la durée, ou même l'existence, selon des
mécanismes nouveaux?
Le Président (M. Jolivet): M. Fox.
M. Fox: Je n'irai pas aussi loin que de dire que vous devriez
supprimer le droit de grève. C'est une question politique dont le
gouvernement devra décider. Je crois que si nous avions un contrat
ouvert, au lieu d'avoir
ces corridas régulières de négociations où
tout le monde s'en va de Montréal à Québec, de
Québec à Montréal, remplit les hôtels et discute
jusqu'aux heures creuses du matin, si nous avions pendant toute la
période de l'année une équipe d'experts de part et d'autre
qui travaille ensemble sur des points cruciaux... (20 h 45)
S'il n'y a pas entente sur ces points cruciaux, il se pourrait bien
qu'il y ait, à un moment donné, une menace de grève ou
deux, mais au moins, vous voyez ce que je veux dire, il n'y aurait pas cette
répétition qui est devenue presque chronique. Tous les trois ans,
on peut s'attendre qu'il y ait une grève quelconque d'une durée
plus ou moins longue ou plus ou moins courte. J'aimerais qu'on évite
ceci. Par exemple, dans la politique administrative et salariale du
gouvernement, vous avez avec vos administrateurs des discussions au fur et
à mesure que les problèmes se posent; vous avez des discussions
pour l'amélioration des conditions de travail. Non pas qu'elles aient
été couronnées de succès récemmment, parce
qu'ils étaient les seuls à avoir subi une baisse de salaire, mais
enfin cela se verra parce que quand même, entre le gouvernement et les
administrateurs, il existe une certaine entente tacite où l'on peut, au
cours de comités de concertation, discuter des conditions de
travail.
Je crois que cela pourrait très bien se faire avec les
enseignants aussi parce que, justement, un des grands torts est le fait qu'il y
a toujours des victimes quand il y a des conflits. On évite à
tout prix des conflits en en discutant honnêtement ensemble entre gens de
bonne volonté qui sont comptétents dans ce domaine-là.
M. Laurin: Il reste, M. Fox, ce que vous avez dit dans votre
mémoire, qu'il ne faudrait jamais que les cours soient interrompus.
Étant donné qu'il faut qu'une porte soit ouverte ou
fermée, j'aimerais savoir ce que vous aviez dans la tête à
cet égard? Même si la question du droit de grève est une
question politique, est-ce qu'il y a quand même des suggestions qu'un
organisme comme le vôtre pourrait nous faire à cet
égard?
M. Fox: J'ai quelque peu confiance en la nature humaine et je
crois que si les discussions se font de façon régulière et
qu'elles se font au fur et à mesure sur certains points, au lieu de se
faire sur l'ensemble d'un nouveau contrat, on pourrait éviter d'avoir ce
grand achalandage d'articles à étudier et ainsi de suite. De ce
point de vue-là, sur beaucoup de points, il y aura tellement d'ententes
et de compréhension mutuelle qu'on pourra très bien éviter
une grève. Quand cela se fait comme cela, c'est moins qu'un front commun
qui se réunit, ce sont des groupes plus petits qui discutent de
questions plus précises qui peuvent très bien être mises,
à un moment donné, en conciliation devant une troisième
personne. Je crois qu'on éviterait ce "show-down" entre les deux
parties.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le
député d'Argenteuil.
M. Ryan: M. le Président, le mémoire de
l'Association des directeurs généraux des écoles
protestantes nous a été présenté avec vigueur et
clarté par M. Fox, qui est le directeur général des
écoles protestantes de l'agglomération montréalaise. Je
l'ai écouté avec d'autant plus de plaisir qu'il m'arrive assez
souvent de recourir à lui pour obtenir des informations, qu'il me
fournit d'ailleurs toujours avec une efficacité exemplaire.
Nous n'avons pas les mêmes opinions sur tous les sujets,
nécessairement, mais je suis toujours heureux de pouvoir recourir
à la collaboration de M. Fox et de ses collègues, qu'il m'arrive
de rencontrer de temps à autres, d'ailleurs, à des
réunions ou à propos de problèmes qui nous
intéressent en commun.
En général, je pense qu'il y a un très bon climat.
Parfois la presse ne donne pas cette impression. Si on se fiait seulement aux
articles qui paraissent, dans la Gazette par exemple, on serait sous
l'impression, parfois, qu'il y a un état de guerre perpétuel
entre le monde anglo-protestant de l'éducation et le ministère de
l'Éducation et peut-être même le reste du Québec.
En fait, il y a des démarches qui ont été faites
qui donnent cette impression-là aussi parfois, mais je pense qu'il y a
quand même un certain nombre de points sur lesquels, dans la vie
quotidienne, il existe une collaboration qui n'est pas négligeable. Je
suis heureux de le souligner aujourd'hui, du moins en ce qui me concerne.
Je voudrais ajouter à ceci que dans les remarques que vous avez
faites, le ministre a eu un petit glissement freudien, peut-être. Il a
noté surtout les remarques que vous avez faite à propos de la
rigidité des syndicats. Il a semblé oublier les remarques
semblables que vous avez faites à propos de la rigidité
gouvernementale. Je sais que c'est un oubli parce que connaissant...
M. Bertrand: ...
M. Ryan: Vous m'obligez toujours à faire des choses
désagréables. Je note bien que vous avez, en bons administrateurs
prudents du secteur public que vous êtes, veillé à
distribuer les torts des deux côtés, de manière à
pouvoir continuer de parler avec les deux côtés demain. Il n'y a
pas de problème là-dessus, je pense que tout le
monde convient, à mesure que nous avançons, qu'il y a des
redressements d'attitude qui s'imposent de part et d'autre. Quand on est
plongé dans un conflit comme celui-là, c'est impossible que tous
les torts soient du même côté. Je suis content de voir qu'on
s'en va vers cette attitude qui servira sans doute à préparer un
règlement.
Vous avez parlé de la loi 105 et de la loi 111. À cet
égard, j'ai trouvé que votre jugement n'est peut-être pas
assez sévère. Vous dites que la loi 111 dépasse quelque
peu les bornes. Dans notre jugement, à nous, c'est beaucoup; pas
seulement quelque peu, c'est beaucoup. C'est sans doute ce que vous vouliez
dire, mais on le complétera volontiers puisqu'on n'a pas les mêmes
contraintes psychologiques.
M. Fox: Je dis quand même, M. Ryan, qu'elle effraie et
qu'elle offusque.
M. Ryan: Je retiendrai surtout cet extrait. J'avais
été frappé par l'extrait précédent.
Vous dites ensuite qu'il faudrait sérieusement songer à
l'amender sous certains rapports. J'espère qu'on arrivera avant
longtemps à un stade où on pourra l'effacer de nos statuts. Si on
pouvait l'effacer complètement des statuts du Québec, je pense
que ce serait une chose encore bien plus intéressante pour tout le
monde. En tout cas, c'est un des objectifs que nous poursuivons du
côté de l'Opposition. Nous ne voudrions pas que cette loi reste
dans nos statuts de peur qu'elle serve d'inspiration à d'autres
gouvernements un jour. Tout ce qu'on peut faire pour favoriser un
règlement peut peut-être, en même temps, favoriser
parallèlement un semblable dénouement qui nous resituerait dans
la vraie tradition des relations du travail que nous avons au Québec,
qui a été une tradition de résolution de conflits
difficiles par le recours aux moyens démocratiques de la
négociation et de la persuasion.
Il y a une chose que vous avez dite qui nous intéresse vivement.
Vous trouvez que le ministère de l'Éducation en prend trop. Vous
avez évoqué les trois grandes opérations qui
caractérisent la présente année. Il y a l'instauration du
nouveau régime pédagogique au primaire et au secondaire. Il y
avait la négociation collective qui était un immense rendez-vous
cette année. Il y avait en plus le projet de restructuration
scolaire.
Est-ce que vous ne trouvez pas, étant donné les
traumatismes que nous avons vécus ensemble ces derniers mois,
étant donné que la présente année scolaire est
quand même très avancée, qu'il faut consacrer beaucoup
d'énergie à préparer administrativement la prochaine
année en fonction des échéances que vous avez
mentionnées et qui sont très prochaines, que si le débat
du fond sur cette question était reporté à une autre
saison, cela nous permettrait d'avoir toutes les énergies voulues pour
faire face au défi immédiat que posent à la fois la
solution du problème du travail qui n'est pas réglée
encore et la mise en place, dans les meilleures conditions possible, du
régime pédagogique?
Au sujet du régime pédagogique, j'aimerais que vous nous
donniez quelques précisions sur la manière dont cela se
présente du côté protestant. Du côté
catholique, nous avons déjà certains éléments, ce
n'est pas complet; mais du côté protestant, j'entends souvent
dire, par exemple, que les nouveaux programmes ont été
conçus surtout dans une mentalité souvent étrangère
à la mentalité anglo-protestante. J'entends dire qu'ils ont
été rédigés souvent uniquement en français,
que les traductions anglaises tardent à venir et que, dans bien des cas,
ce sont des traductions plutôt que de l'adaptation véritable. Je
voudrais que vous me disiez, au point de vue des guides pédagogiques qui
doivent être les premiers instruments à la disposition des
administrateurs et des éducateurs pour préparer les changements,
où vous en êtes. À la lumière de tout cela, comment
voyez-vous l'autre défi qui nous a beaucoup occupés au cours de
l'automne, sur lequel, heureusement, le ministre a fait le silence depuis un
certain temps?
Le Président (M. Jolivet): M. Fox.
M. Fox: M. le député d'Argenteuil, comme vous avez
dit que nous ne sommes pas toujours d'accord, je ne vous apprendrai rien de
neuf en disant que le ministre de l'Éducation et moi-même ne
sommes pas toujours d'accord non plus. Ma femme et moi ne sommes pas toujours
d'accord non plus. Cela fait de nombreuses années que nous demeurons
ensemble. De bonnes divergences d'opinions font de bonnes relations
parallèles et de bonnes relations réciproques.
En ce qui concerne le régime pédagogique, dans le secteur
protestant, je ne dirai pas que les traductions sont en retard parce que la
Commission des écoles protestantes de l'agglomération de
Montréal a le contrat de les traduire et nous avons traduit presque tous
les programmes. C'est un contrat que nous avons avec le ministère de
l'Éducation parce que, comme vous l'avez dit, c'est une de nos
objections. La préparation des programmes a été faite
entièrement en français et nous sommes obligés de traduire
ces programmes du français à l'anglais. Les programmes devaient
d'abord être traduits par des services extérieurs. Cela ne
fonctionnait pas très bien. Quand on nous a demandé si nous
étions intéressés à prendre le contrat, nous
n'avons pas hésité à le faire parce que,
justement, au lieu de les traduire tout simplement et bêtement,
nous pouvons aussi les adapter. Avec le contrôle du service du
ministère qui est très bon, excellent, nos rapports, de ce point
de vue, sont excellents et nous avons réussi à en traduire la
majorité. Je crois que presque les deux tiers sont maintenant traduits
en anglais. Je crois que le ministère a des difficultés à
les faire imprimer, mais c'est son problème, ce n'est pas le
nôtre. Avec les guides pédagogiques, nous allons sans doute suivre
le même procédé.
Je vous le dis franchement, nous avons accepté de traduire ces
programmes non pas parce que nous sommes d'accord qu'il faille les traduire.
J'aurais préféré qu'on puisse les créer
nous-mêmes, même s'il est mieux d'avoir la main dans la pâte
que de ne pas voir le pétrin.
M. Ryan: C'est une question qui m'était
suggérée. Est-ce qu'il vous aurait donné un contrat pour
traduire le journal qu'on a reçu vendredi?
Des voix: Ah!
M. Fox: Non. Nos contrats sont des contrats
pédagogiques.
Le Président (M. Jolivet): D'autres questions?
M. Ryan: Oui, j'ai une autre question, M. le Président.
L'explication sur les échéances auxquelles vous devez faire face
prochainement, vous mentionnez cela au bas de la page 6 de votre
mémoire.
M. Fox: Oui.
M. Ryan: Vous dites que les directeurs généraux
doivent respecter dès maintenant les obligations contractuelles qui ne
peuvent attendre à moins de mettre en danger l'année scolaire
1983-1984 à venir, les obligations concernant le transfert du personnel,
l'affectation du personnel, l'établissement des programmes
d'études pour la prochaine année, la mise en
disponibilité. Pourriez-vous expliquer un peu dans quel cadre de
contraintes vous évoluez et les exigences que vous poseriez au
gouvernement au point de vue de ces échéances?
M. Fox: Ce sont mes voisins de gauche qui me harcèlent
sans cesse, c'est-à-dire les directeurs d'école, les principaux,
qui veulent savoir comment programmer, quel genre de programmes, l'emploi du
temps qu'on pourra utiliser. Pour nous, ce serait le décret. Donc, nous
étudions la question de la programmation de 6-7 ou 7-6,
c'est-à-dire six périodes en sept jours ou sept périodes
en six jours. Déjà, il y a controverse à ce sujet.
L'administration préfère le 6-7 et, naturellement, quand
l'administration préfère le 6-7, les enseignants
préfèrent le 7-6. La question est à l'étude.
Maintenant, vous parlez et on parle d'introduire progressivement le
temps d'enseignement. Au lieu d'avoir 23 heures, ce sera 21, 22, 23. Là,
de nouveau, vous nous donnez un casse-tête parce qu'il faudra, au cours
des trois prochaines années, chaque fois, reprogrammer les
écoles. Nous faisons cela maintenant avant avril de façon que
nous sachions quels sont les enseignants à déclarer en
disponibilité, en surplus, quels sont les enseignants qu'il faudra
affecter à d'autres écoles et quels sont les enseignants qui
voudront demander un transfert. Ceci se fait en mars, avant avril. Ceci se fait
pour différentes raisons; après, les délais du contrat
sont tels que ce n'est plus valable. Si vous n'avez pas prévenu avant le
1er avril, le contrat dit qu'à telle date ce doit être
réglé. (21 heures)
M. Ryan: Cela veut dire qu'il faut que vous connaissiez sans
faute, d'ici la fin de mars, les grandes lignes du régime contractuel
qui vous régira l'an prochain.
M. Fox: Naturellement, nous allons programmer le décret
tel qu'il existe. La charge de travail ne sera pas supérieure. Il est
toujours mieux de pouvoir apporter des améliorations. En somme, si vous
avez fait des réserves pour acheter une Cadillac et que vous achetez une
Volkswagen, vous avez de l'argent de trop. Si vous avez fait des
réserves pour acheter une Volkswagen et que vous achetez une Cadillac,
vous êtes en dette. C'est ce que nous avons fait, c'est une façon
pragmatique de voir les choses.
M. Ryan: Juste un dernier point. Je pense que vous n'avez pas
répondu à la première partie de ma première
question sur le programme de restructuration scolaire. Je vous ai
demandé si vous croyez opportun que le gouvernement procède
dès ce printemps à la présentation ou à l'adoption
d'un projet de loi là-dessus ou si vous croyez qu'il serait
préférable d'attendre au moins une autre saison.
M. Fox: Accepter trois campagnes de cette envergure de front,
c'est sans doute mon entraînement militaire qui me dit que cela n'ira
pas. Tu déploies trop de forces et tu es en position de faiblesse sur
les trois positions. La première chose à régler cette
année, c'est la question des négociations. La deuxième
question à régler, c'est le régime pédagogique et
l'implantation du régime pédagogique qui se fera progressivement.
Il n'y a même pas d'objection majeure contre certains points du
régime pédagogique, mais il y a des questions de fond qu'il
faudra
étudier. Sans doute que mes collègues du côté
catholique vous l'auront dit, les directeurs généraux; s'ils ne
l'ont pas fait, ils auraient du le faire. Dans certains cas, les fonds ne sont
pas assez disponibles pour commencer à se procurer tout le
matériel nécessaire pour le régime pédagogique.
Donc, il faudrait, là aussi, voir à une implantation progressive
et la restructuration sera pour plus tard. Si vous voulez transformer une
maison, vous n'allez pas enlever toutes les cloisons parce qu'elle risque de
s'écrouler.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Gaspé.
M. LeMay: Oui, M. le Président. Je sais que le temps
s'écoule vite, M. Fox, et je ne voudrais pas poser des questions sur le
fond de votre mémoire. Je suis d'accord sur beaucoup de points, mais je
dois vous avouer mon ignorance: je ne savais pas que votre organisme existait
avant cette commission parlementaire.
M. Fox: Vous savez, nous sommes tellement bons! C'est comme les
bons élèves.
Les principaux ne connaissent jamais leurs bons
élèves.
M. LeMay: J'aimerais quand même avoir des renseignements.
Combien d'organismes représentez-vous ou combien de directeurs
généraux? Ce serait peut-être plus juste. C'est une
association de directeurs généraux?
M. Fox: Ce sont les directeurs généraux des
commissions scolaires protestantes. Nous n'avons pas la quantité, mais
nous avons la qualité; il y en a 25, en tout.
M. LeMay: Est-ce que la Gaspesia School Board est de votre
juridiction?
M. Fox: Oui.
M. LeMay: Alors, j'en connais un!
M. Fox: Oui, vous en connaissez un.
M. LeMay: II y a une chose que je comprends difficilement et vous
en parliez d'ailleurs tout à l'heure. Comment se fait-il qu'il existe
deux associations de directeurs généraux? Pour moi, des enfants
qui vont à l'école, cela veut dire des professeurs, des
directeurs, des directeurs généraux; ils vont tous à
l'école, qu'ils soient protestants ou catholiques. Pour les
mathématiques, qu'ils soient protestants ou catholiques, deux et deux
font quatre; pour moi, c'est la même chose. Pourquoi deux associations?
Je comprends difficilement cela.
M. Fox: C'est une longue tradition.
Dans le temps, nous étions membres de la PAPT. Cela vous
surprendra peut-être, mais la PAPT comprenait tout le monde: les
directeurs et tout le monde. Et puis, peu à peu, cela s'est
divisé. Beaucoup de nos membres sont aussi membres de l'ADIGECS. Moi je
suis membre de l'ADIGECS. Je ne sais pas si M. Pennefather... Non, mais
certains de nos collègues sont membres de l'ADIGECS. Vous avez deux
systèmes scolaires au Québec et de ce fait nous avons certains
problèmes qui sont différents et que nous discutons ensemble
entre nous. Il y a de très bons rapports avec l'ADIGECS. Nous sommes
vraiment une organisation locale de la QUASA, Quebec Association of School
administrators. Nous payons notre cotisation à la QUASA et nous formons
un petit abcès sur le côté; nous payons aussi une petite
cotisation pour nous maintenir et nous nous réunissons une fois par mois
pour discuter de nos problèmes spécifiques.
M. LeMay: Est-ce qu'il vous arrive souvent de faire front commun
avec les directeurs généraux des commissions scolaires
catholiques?
M. Fox: Oui, cela fait deux ans même que je suis membre de
l'exécutif de l'ADIGECS. C'était un de mes rêves de voir
une amalgamation des deux associations, mais il y a encore eu des
hésitations. Cela viendra avec le temps.
M. LeMay: Merci.
Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de
Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: Merci, M. le Président. M. Fox, à la
page 4, vous avez dit: "Nous déplorons fortement par contre que le
décret soit tellement discriminatoire envers les enseignants en ce qui
concerne les dispositions relatives a la sécurité d'emploi".
Pouvez-vous expliquer cette affirmation?
M. Fox: Écoutez, ce qu'il faudrait voir, c'est que comme
directeurs généraux nous sommes responsables de tout le
personnel, de toutes les catégories de personnel. Nous avons à
gérer maintenant une catégorie de personnel qui
bénéficie encore de la sécurité d'emploi à
100% alors que pour les enseignants, vous avez maintenant les 80% qui seront
payés à la première année de mise en
disponibilité, puis 50% et 50%. Je parle du décret. Si ce qu'on a
dit en février se matérialise, ce sera 80%, 80% puis 50%. Donc,
il y a une différence alors que d'autres catégories de personnel
ont encore leur sécurité à 100%. Maintenant, il se peut
très bien que le ministère...
Mme Dougherty: Voudriez-vous préciser
les catégories de personnel qui vont profiter de 100%?
M. Fox: Les professionnels non enseignants, le personnel de
soutien et ainsi de suite.
Mme Dougherty: À la page 3, vous avez parlé des
programmes de langue seconde dans les écoles protestantes et vous avez
dit qu'il faut avoir les 1500 minutes pour avoir un programme adéquat.
Est-ce que le décret présente des problèmes pour vos
programmes de langue seconde, qui sont relativement intensifs? Est-ce que le
décret vous donne assez de latitude pour l'épanouissement des
programmes pour répondre aux attentes des parents?
M. Fox: J'aimerais revenir là-dessus. Cela fait trois ans
ou quatre ans même que nous avons fait la demande pour avoir 1500 minutes
de façon à pouvoir intensifier l'enseignement du français.
On nous a dit: Vous pouvez le faire chez vous et il faudra que vous trouviez
les moyens de le faire par vous-mêmes. Donc, ce qui n'était pas
possible. Avec le décret, nous aurons les 1500 minutes de disponibles et
je crois que nous pourrons très bien aménager les cours et
répondre aux besoins des parents avec le décret.
Mme Dougherty: Sur le plan des ressources et sur le plan de
l'organisation?
M. Fox: Là c'est autre chose. J'aimerais vous dire, d'une
part, qu'en ce qui concerne l'enseignement du français langue seconde
nous n'aurons pas de problème. En ce qui concerne l'enseignement de
l'anglais langue seconde, il y a une certaine controverse qui existe entre nous
et le ministère de l'Éducation, à savoir que nous n'avons
pas le droit d'enseigner l'anglais langue seconde avant la quatrième
année. Or, depuis plus d'un quart de siècle, il était
notre habitude, dans le secteur franco-protestant, d'enseigner l'anglais de la
maternelle jusqu'au secondaire V, tout comme nous enseignions le
français de la maternelle au secondaire V dans le secteur anglais. Donc,
je crois que ceci sera le sujet d'une comparution en cour. Je ne sais pas
quelle sera la décision. C'est un des points de désaccord entre
M. le ministre et nous. Mais ce n'est pas le décret, c'est le
régime pédagogique qui impose cela, qui nous empêche
d'enseigner l'anglais langue seconde à la...
En ce qui concerne les frais, il faudra naturellement s'adapter aux
règles budgétaires, mais je ne crois pas, d'une part, à
moins que... Introduire le programme est coûteux, parce qu'il nous faut
nous procurer de nouveaux livres et ainsi de suite, mais à long terme,
le programme de langue seconde intensive n'est pas plus coûteux qu'un
autre programme.
Mme Dougherty: J'ai d'autres questions. En ce qui concerne
l'enfance inadaptée, chaque fois qu'on a soulevé la question de
l'enfance inadaptée ici pendant ces auditions, les représentants
patronaux ont admis qu'il pourrait y avoir des problèmes, mais ils ont
fait allusion en même temps à la possibilité de
régler ces problèmes par le truchement des exceptions et non pas
par le truchement de normes fixées dans la convention. Quelle est votre
opinion là-dessus?
M. Fox: Je savais que j'allais avoir une question sur l'enfance
inadaptée de votre part, parce que je vous connais déjà
depuis notre association à la Commission des écoles protestantes
dans le temps. Cela nous cause quelques problèmes. Nous sommes en train
d'étudier une politique sur l'enfance inadaptée pour savoir
exactement comment nous allons adapter la nouvelle politique à
l'existence des programmes que nous avons maintenant. Je crois qu'il y aura
certains problèmes. Je ne peux pas encore dire exactement,
préciser la nature de ces problèmes, mais la situation sera moins
bonne qu'elle ne l'a été jusqu'à maintenant, il n'y a
aucun doute là-dessus, et ceci est dû en bonne partie à des
restrictions financières plutôt qu'à des restrictions
pédagogiques et autres.
Mme Dougherty: Une autre très courte question. Le
décret mettra-t-il une certaine pression sur les commissions scolaires
pour qu'elles ferment des écoles? Aura-t-il un impact sur la fermeture
des écoles? Y aura-t-il une tendance à regrouper les enfants,
surtout au niveau secondaire, pour appliquer le décret?
M. Fox: Je ne crois pas que ce décret fasse autant de
différence chez nous qu'il en fera, par exemple, à la CECM, sans
doute, et je vais vous dire pourquoi. Dans notre secteur, qui s'étend
sur toute l'île de Montréal, il y a déjà un certain
regroupement qui s'est fait au cours des années. De ce fait, je ne crois
pas que le décret nous impose beaucoup de changements dans ce domaine.
Je ne le pense pas.
Mme Dougherty: D'accord. Une dernière question. À
votre avis, M. Fox, quelle est l'inquiétude la plus aiguë des
enseignants, le point le plus litigieux pour les enseignants?
M. Fox: Je crois que M. Pennefather et moi sommes d'accord que ce
serait la question de la sécurité d'emploi.
M. Pennefather (Bill): C'est le nombre
des enseignants en surplus à cause de l'augmentation de la charge
de travail. (21 h 15)
M. Fox: Je vais vous dire franchement que beaucoup d'enseignants
ne sont pas tellement contre une charge de travail plus grande. Vous savez, il
y a encore un grand nombre d'enseignants qui se donnent à la tâche
et qui ne rechignent pas sur leur temps. La sécurité d'emploi et
la mise en disponibilité sont vraiment des cas de traumatisme pour
certains enseignants. Mrs McGlashan et moi avions des controverses à ce
sujet. Elle pense du point de vue humain, avec son coeur, et je n'ai qu'une
pompe à bicyclette, je regarde cela du point de vue administratif et je
dis qu'on doit envisager ces problèmes. Le traumatisme que l'enseignant
éprouve n'est pas plus grand que celui que l'employé de Ford
éprouve quand il est mis en disponibilité. Mais je sais que c'est
là le plus grand souci des enseignants.
Mme Dougherty: À cet égard, croyez-vous que les
mesures proposées par le gouvernement offrent des possibilités
positives?
M. Fox: Écoutez, vous le savez, Mme Dougherty, et j'ai
l'ai déjà dit, j'estime que, s'il y a un problème et qu'on
l'explique d'une façon claire, nette et précise et qu'on donne
tous les faits, on peut arriver à trouver une solution. J'estime qu'on a
déjà fait un pas en avant puisque le ministère a
soi-disant offert 80%, 80% et 50%. Il y a encore une différence; si elle
ne peut pas être changée, alors elle devra au moins être
clairement expliquée. Je suis d'avis qu'il ne devrait pas exister de
position discriminatoire. Dans cette position discriminatoire, il n'y a que
deux solutions, soit d'adapter les enseignants aux autres ou bien d'adapter les
autres aux enseignants et nous donner les explications nécessaires. Je
sais que l'explication est financière, mais pourquoi devrait-elle
être plus forte du côté des enseignants que du
côté des professionnels et du côté des
employés de soutien, cela est à voir.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Fabre et adjoint parlementaire au ministre de l'Éducation.
M. Leduc (Fabre): L'un des objectifs recherchés dans les
décrets, c'est l'harmonisation entre les régimes
pédagogiques et les conditions de travail des enseignants. J'aimerais
avoir votre opinion à cet égard sur certaines dispositions dans
les décrets concernant, par exemple, la tâche globale qui est
proposée, le temps de présence des enfants au secteur primaire
qui est augmenté et la présence obligatoire des enseignants.
Le Président (M. Jolivet): M. Fox.
M. Fox: Je crois que je l'ai souligné dans notre
mémoire. J'estime que la présence des enseignants, une
présence plus intensive et plus régulière des enseignants
surtout au secondaire - parce que vous n'avez pas ce problème au secteur
primaire -la relation entre les enseignants du primaire et leurs
élèves est très étroite et c'est le secteur
primaire qui travaille vraiment beaucoup et est à la tête de ce...
Mais, au secteur secondaire, il y a eu vraiment une
détérioration, au cours des dernières années, dans
la relation des élèves avec les enseignants et surtout par manque
de présence. Beaucoup d'élèves se plaignent en disant:
J'aimerais lui parler, mais il n'est jamais là - d'accord? - ou
j'aimerais lui parler à elle et elle n'est jamais là. Je ne veux
pas faire de discrimination.
Le Président (M. Jolivet): M. le député.
M. Leduc (Fabre): Je voudrais juste ajouter un commentaire. Vous
vous dites d'accord avec l'esprit et le contenu des régimes
pédagogiques, avec la nécessité d'harmoniser le
régime pédagogique et les conditions de travail...
M. Fox: ...pas tout à fait dans tout, nous avons des
réserves sur le cours d'histoire, nous avons des réserves... Mais
enfin, en général, nous estimons que l'idéal de l'objectif
du régime pédagogique est bon.
M. Leduc (Fabre): D'accord. Un simple commentaire. À la
page 5, je vous trouve très sévère quand vous notez que le
ministère de l'Éducation est le grand responsable des
bouleversements dans le secteur de l'éducation. Vous l'accusez
même d'être un semeur de confusion. Vous vous dites d'accord
déjà avec deux de ses mesures: La nécessité de
l'harmonisation entre les régimes pédagogiques et les conditions
de travail et, d'autre part, il faut souligner, quant à la
restructuration, que ce n'est qu'un projet annoncé, qu'il ne s'agit que
d'un énoncé de politique et qu'il n'y a absolument rien qui soit
en cours d'organisation ou d'implantation à l'heure actuelle. Donc, je
trouve votre commentaire d'une sévérité vraiment
inexplicable et injustifiable.
M. Fox: Je ne veux pas le justifier. Je vous dirai en toute
sincérité que vous ne devez pas oublier que vous parlez du
secteur protestant. Aucun secteur n'a été plus touché par
la façon dont la restructuration a été annoncée,
par une année d'incertitude: II y avait des fuites d'ici, de là,
en plus des exigences de la loi 101 - mon Dieu, vous nous l'avez fait dire -
d'après laquelle tout
le monde doit parler français, les transferts, les promotions,
les mutations et les...
Le Président (M. Jolivet): Les affectations.
M. Fox: ...les affectations doivent se faire seulement si vous
parlez le français et, maintenant on vous dit: Nous allons enlever les
commissions scolaires, nous allons transformer le tout. Cela a
créé un impact, cela a démoralisé beaucoup le
personnel. Moi, comme directeur général à la commission
des écoles protestantes, il a fallu que j'aie des rencontres avec le
personnel de soutien, le personnel professionnel et le personnel cadre, de
façon à leur expliquer quelle est la position de la commission
scolaire et quel est son avenir. Je ne suis pas prophète mais je leur ai
dit:... Il faudrait d'abord regarder le problème en face. Mais cela les
a beaucoup affectés.
N'oubliez pas que le régime pédagogique, la
restructuration, le décret, tout cela est lié. Parce que vous ne
pouvez pas avoir un régime pédagogique sain si vous n'avez pas
des enseignants capables ou qui veulent l'implanter, car la clef du
régime pédagogique ce n'est pas le manuel, ce n'est pas le
programme, ce n'est pas le programme cadre, le guide, c'est l'enseignant.
Vous ne vous rendez pas compte combien la question de la restructuration
a affecté - en plus de toutes les exigences qui tombent sur notre
secteur protestant - le personnel. C'est pour cela que je parlais
peut-être un peu dur, mais je vous dis franchement que j'exprime - M.
Pennefather va me soutenir - l'opinion de mes collègues qui m'ont dit de
vous présenter cela très clairement.
M. Leduc (Fabre): Je vous remercie.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Au nom des membres de la
commission je vous remercie. J'ai cru comprendre que le Québec
Association of School Administrators était en même temps avec vous
et qu'en conséquence les deux groupes... À moins que Madame ait
quelque chose à exprimer. Mme McGlashan.
Québec Association of School
Administrators
Mme McGlashan (Phyllis): Merci. Notre association
représente plus de 500 cadres scolaires et cadres de services des
commissions scolaires protestantes du Québec. L'association
apprécie la possibilité que lui offre la commission parlementaire
d'exprimer son avis sur la crise que traverse actuellement l'éducation
dont le ministère de l'Éducation et les syndicats d'enseignants
sont les principaux acteurs.
Pendant près d'un mois, nos élèves n'ont pas eu de
classe. La raison: la grève des enseignants. Pourquoi? parce que le
ministère et les syndicats n'ont pu s'entendre. D'une part, le
ministère de l'Éducation qui, se basant sur les conditions
économiques actuelles, ne peut voir d'autre choix que de
décréter les conditions de travail des enseignants dans le cadre
des ressources financières disponibles; d'autre part, les enseignants
qui ne peuvent comprendre pourquoi ce sont eux qui subissent le traitement le
plus dur de tout le secteur public et de tout le secteur parapublic. Même
si certains secteurs ont subi des pertes de salaire, aucun ne s'est vu priver
de sa sécurité d'emploi.
En tant qu'association, l'AASQ n'a pas été invitée
à fournir des éléments dans la préparation de la
loi 105, de l'offre du 10 février ou de la loi 111. Nos contacts n'ont
eu lieu qu'avec les enseignants à leurs lieux de travail dans les
écoles, plutôt qu'avec les syndicats aux tables de
négociation. En tant qu'administrateurs, notre souci majeur est d'offrir
à nos élèves la meilleure éducation possible.
L'éducation dépend de l'interaction entre élèves et
enseignants dans un milieu propice à l'apprentissage. Ce milieu peut
être altéré si ceux et celles qui dispensent l'enseignement
sont abattus par les décrets qu'ils jugent totalement négatifs,
décrets qui coupent les salaires, accroissent la tâche et
suppriment la sécurité d'emploi.
Si l'on ajoute à tout ce qui précède les
dispositions de la loi 111, il y a un sérieux problème
évident. Nous avons toujours prôné une communication
significative qui permettrait de résoudre les problèmes.
Comme administrateurs, nous sommes entièrement d'accord pour une
présence accrue des enseignants à l'école. Si
l'éducation est le résultat de l'interaction entre
élèves et enseignants, la présence accrue de ces derniers
ne peut avoir que des effets positifs. Il fut un temps où les
écoles surpeuplées n'offraient aux enseignants aucun endroit
où préparer leurs cours et corriger les devoirs. Cas conditions
de surpeuplement sont quasi inexistantes de nos jours.
Il est aussi fort difficile de convaincre les élèves du
secondaire de se présenter avant le début des classes quand ils
constatent que quelques enseignants arrivent à l'école
après le début des classes ou qu'ils s'en vont avant la fin des
classes. Une présence accrue des enseignants contribuerait sans doute
à l'amélioration qualitative de l'éducation.
La plus grande souplesse dont bénéficieront les
administrateurs en matière d'affectation et de mutation permettra
d'offrir des programmes répondant mieux aux besoins des
élèves. Une éducation de qualité ne dépend
pas uniquement de l'ancienneté de l'enseignant. Le nombre moyen
d'élèves par
classe établi par la commission permet également plus de
souplesse pour répondre aux besoins des élèves. Cependant,
il ne fait aucun doute que bien qu'il n'existe aucune définition absolue
du nombre d'élèves par classe, plus grand est ce nombre, moins
l'enseignant pourra consacrer de temps à chaque élève pris
individuellement.
Il existe des solutions novatrices permettant de réduire le
surplus de personnel, tels que les postes partagés, le plan de quatre
ans sur cinq, la retraite anticipée. S'il était possible de
réduire même davantage le surplus de personnel, nos
élèves ne seraient pas privés des services de certains
excellents enseignants, lesquels pourraient assumer leur rôle à
temps plein. (21 h 30)
Comme administrateurs, nous espérons que l'argent accumulé
à la suite des arrêts de travail reviendra à l'endroit
où il serait le plus utile: dans la salle de classe. C'est là que
se vit la qualité de l'éducation que nous prônons tous.
C'est dans la salle de classe qu'il va falloir une longue période de
paix et de stabilité pour se remettre du désordre des derniers
mois et de ses séquelles.
Nous avons préparé quelques questions que M. Fava veut
maintenant vous présenter.
M. Fava (Ron): M. le Président, j'ai le plaisir
d'expliciter certains points soulevés par notre président. Dans
les quelques minutes disponibles, j'aimerais être très clair sur
notre position dans le débat actuel. Mlle McGlashan a mentionné
que notre souci, comme administrateurs, est d'offrir à nos
élèves la meilleure éducation possible, une
éducation de qualité. Face à la situation que nous vivons
maintenant, nous avons le désir de vous poser quatre questions
pertinentes, auxquelles, nous l'espérons, la commission parlementaire
pourra trouver des réponses qui permettront une solution amicale de
cette situation. La loi 105 a créé une atmosphère, dans le
secteur de l'éducation, qui était déplorable du point de
vue des enseignants et enseignantes. Ceci a imposé plusieurs contraintes
à la vie de l'école. Cette loi a eu clairement l'effet de laisser
en question la qualité de l'enseignement dans les classes et dans les
écoles de notre province.
Les deux points majeurs qui font partie du conflit actuel sont la
sécurité d'emploi et les conditions de travail. Vu que la
sécurité d'emploi est perçue comme un droit acquis, notre
première question est: Si la sécurité d'emploi est un
droit acquis, n'est-ce pas une façon d'entrer en négociation sans
enlever une partie fondamentale de l'entente 1979-1982 signée entre le
ministère de l'Éducation et les syndicats? Avec la loi 105, nous
avons vécu dans un climat qui se détériore de jour en
jour. Durant les semaines des décrets, la vie fraternelle dans les
écoles a subi un autre coup désastreux: la loi 111, avec toutes
ses implications qui sont perçues comme injustes. Encore un autre coup
contre la qualité de l'enseignement dans nos écoles.
La deuxième question: Peut-on penser à amender certains
articles de la loi 111 pour améliorer le climat et l'ambiance
négatifs dans lesquels nous vivons actuellement dans notre secteur? Nous
croyons que le Conseil supérieur de l'éducation est maintenant en
train de rédiger un rapport concernant les effets des décrets sur
la qualité de l'éducation dans notre province.
La troisième question: Est-ce possible de penser ou de demander
que le ministère propose un délai à l'impasse que l'on vit
pour recevoir les recommandations et formuler un plan d'action basé sur
cette consultation? L'Association des administrateurs scolaires du
Québec est convaincue qu'il est impossible de donner un enseignement
valable dans le présent contexte.
Notre dernière question est la plus importante: Sans un contrat
proprement négocié, d'après les critères du Code du
travail, est-ce possible de demander aux enseignants et enseignantes de
retourner en classe dans un climat qui favorise la qualité de
l'éducation, voulue et si nécessaire pour nos étudiants
qui sont, après tout, notre raison d'être?
Mme McGlashan: En conclusion, l'Association des administrateurs
scolaires du Québec souhaite ardemment que la présente impasse
soit résolue dans les plus brefs délais, qu'il nous soit
accordé suffisamment de temps pour rétablir un climat de
confiance dans le secteur scolaire public avant de songer à y introduire
de nouvelles mesures ou de nouveaux changements. Merci.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.
M. Laurin: I want to thank, first, the Association for the good
brief they have presented to us. It is true that some of the remarks made
resemble, in many ways, those presented by other groups. It is no surprising,
because the administrators of the protestant sector have similar problems to
those of administrators in the other sectors. But just the same, there is a
difference in emphasis, in accent that is very useful for us to understand.
Je note, au passage, que les cadres anglophones protestants sont aussi
d'accord pour une présence accrue de l'enseignant dans les classes,
qu'ils sont d'accord, aussi, pour l'introduction du critère de la
capacité pour la mutation et l'affectation des enseignants, qui
viendrait diminuer les inconvénients de l'application automatique ou
exclusive du critère de l'ancienneté.
Je remarque, cependant, qu'ils
partagent les préoccupations des directeurs
généraux sur un certain nombre de problèmes dont, par
exemple, la loi 111 et la loi 105. Sur la loi 111, il est bien évident
que le gouvernement n'aurait pas de plus grande satisfaction que de ne pas
avoir à l'appliquer et même à la rappeler dès que la
certitude sera acquise que la menace d'une grève qui se poursuivrait
n'existe plus. Il est bien évident que, le cas échéant,
votre satisfaction rejoindrait la nôtre.
Quant au rapport du Conseil supérieur de l'éducation, nous
ne savons pas quand il nous parviendra. J'aimerais bien qu'il nous parvienne le
plus tôt possible afin que nous puissions éclairer nos
négociations à la lumière des exposés ou
conclusions qui y seraient contenus. Mais je me rappelle, cependant, ce que M.
Fox nous a dit tout à l'heure, c'est qu'il y a des contraintes
maintenant qui deviennent de plus en plus pressantes. Des décisions
doivent être prises. Il conviendra d'être le plus sage possible,
tout en étant le plus rapide possible pour en arriver à un
règlement négocié, car il est important d'avoir des
règles du jeu très claires et d'avoir des conclusions dans le
plus bref délai si nous voulons que la prochaine année scolaire
puisse se préparer comme elle se doit le plus tôt possible.
Vous partagez aussi avec les directeurs généraux une
inquiétude, une préoccupation en ce qui concerne la
sécurité d'emploi. Je suis bien d'accord avec vous qu'il est
toujours difficile de remettre en question ce que l'on peut appeler des droits
acquis. Il reste qu'en période de conjoncture difficile -pour ne pas
dire de crise - il arrive que certains groupes, certains organismes sont
obligés de consentir à une révision de ce qu'on appelle
les droits acquis en fonction d'autres impératifs, en fonction d'autres
facteurs comme celui d'ajuster la dispensation des services à la
capacité de payer de la collectivité ou, dans le secteur
privé, à la rentabilité de l'entreprise, au maintien
même des emplois. C'est malheureusement ce que groupes, organismes et
même sociétés sont parfois obligés de faire.
Il reste, cependant, que le droit à la sécurité
d'emploi n'est pas aboli par les décrets. Il est maintenu, mais son
financement est diminué, ce qui n'est quand même pas tout à
fait la même chose. Même l'aménagement du cadre de
règlement prévoit que le financement de la sécurité
d'emploi sera maintenant plus élevé que ce que prévoyaient
les décrets, en décembre. Il est même prévu que, si
nous avions la collaboration de tous pour l'application des mesures qui
pourraient faciliter une meilleure utilisation des personnels de
l'enseignement, ce financement de la sécurité d'emploi pourrait
même atteindre ce qu'il était auparavant. Quant aux raisons pour
lesquelles il a paru opportun de diminuer le financement de la
sécurité d'emploi, je pense qu'elles nous sont maintenant assez
bien connues. Je pense que la première raison, c'est la baisse des
clientèles qui se poursuit depuis 10 ans et, d'une façon plus
concrète encore, le clivage ou l'écart qui s'est agrandi entre le
nombre d'enfants ou d'étudiants dans le secteur scolaire, nombre qui a
diminué de beaucoup, et le nombre des enseignants ou des autres
personnels, qui, lui, a diminué beaucoup moins.
On peut, peut-être, se permettre cet écart, ce clivage en
période de prospérité, mais en période difficile,
pour ne pas dire en période de crise, il est peut-être plus
difficile de justifier cet écart surtout quand il a pour
conséquence de mettre en danger l'existence ou le développement
d'autres programmes qui s'avèrent particulièrement importants en
période de crise par exemple, les programmes de soutien aux entreprises
ou aux chômeurs, ou le maintien et le développement de programmes
d'assistance que la conjoncture impose ou des programmes de création
d'emplois ou des programmes de développement dans des secteurs
importants pour le progrès d'une société, comme
l'application du virage technologique.
Il existe donc des raisons, des impératifs qui peuvent expliquer
certaines décisions douloureuses qui sont prises ou qui doivent
être prises. Il reste que je reconnais le caractère difficile
d'une mesure comme celle qui est prévue aux décrets pour la
sécurité d'emploi. J'aimerais vous demander si, outre toutes les
mesures prévues aux décrets ou en dehors des décrets, vous
auriez des suggestions à nous faire soit pour atténuer ce
problème ou soit pour le régler autrement que ce qui est
actuellement prévu.
Le Président (M. Jolivet): Mme
McGlashan.
Mme McGlashan: I am thinking of the school where I work and the
fact that we will have 15 fewer teachers in the building next year will mean
that if the task is increased the classes will be covered but we will have
fewer people who will be on duty throughout the school. And there are still,
let us say, 21 entrances and exits to the building. We will probably loose one
of three people who might be coaching the basket-ball team. We have many people
on our staff who are involved in the extra curricular activities and, if these
students or these teachers are removed from our staff, the other teachers
cannot pick up any more than they are doing already. So the students are going
to suffer to that extent as well. So if there is some way in which the number
of staff members can be maintained plus relieving the teachers of the fact that
they
are no longer going to be able to do the task that they are doing, in
other words reducing the surplus, I think this will go a long way to resolving
the problem.
M. Laurin: My question was: Do you have any more suggestions or
more appropriate remedies than the one we have at the moment?
Le Président (M. Jolivet): M. Fava.
M. Fava: M. le Président, dans la commission scolaire
où je suis directeur d'école depuis les deux ou trois
dernières années, tous les professeurs qui étaient mis en
disponibilité ont eu une tâche complète. On leur a
donné des classes, on leur a donné du travail. Je pense que les
enseignants craignent, avec les 80% et les 50%, qu'une fois mis en
disponibilité ils n'auront pas de travail. D'une manière, il
s'agit de dire: Si vous êtes mis en disponibilité, vous allez
avoir une tâche éducative à compléter durant
l'année scolaire. (21 h 45)
Le Président (M. Jolivet): Cela va? M. le
député d'Argenteuil.
M. Ryan: Quant à la même préoccupation, Mme
McGlashan, M. Fava et les autres, pensez-vous que les différentes
formules de résorption des enseignants mis en disponibilité
peuvent contribuer à atténuer le problème? Est-ce que vous
avez examiné les possibilités d'application de ces
différentes mesures? Lesquelles vous paraissent les plus aptes à
produire des résultats intéressants? Y a-t-il d'autres formules
qui devraient être envisagées en plus de celles qui ont
été proposées?
Le Président (M. Jolivet): Mme
McGlashan.
Mme McGlashan: I am not certain how many of these. I mentioned
that these were interesting ways of trying to reduce the surplus. I have not
any definite suggestions as for other ways in which the surplus might be
reduced at the present moment, but I am certain that discussions with the
teachers will produce other ways of reducing the surplus when the discussions
are resumed.
Le Président (M. Jolivet): D'autres questions?
M. Ryan: Oui, j'aurais une autre question. Là-dessus, y
a-t-il autre chose? Cela va? As I said before, our aim on this side of the
table is not only to improve upon Bill 111 in any of its provisions, but to see
to it that it is eventually deleted from our Statute Books because we would not
like to keep this law in our Statute Books for fear that it might serve as an
inspiration for this Government, in the future, or other governments which we
are dreaming of for the near future. I think it is a goal towards which we can
work and I was glad to hear the Minister suggest that even the present
Government would not be against the concept of eventually wiping out this
legislation if a satisfactory settlement can be arrived at. I deeply
appreciated your insistance upon the concept that a negotiated solution is
probably the only way to make sure that the central element in the entire
educational system, the teacher, will be in the position to work with all the
dedication, with all the enthusiasm that is expected of him if the system is
going to work effectively. So I think this emphasis, which you put on this
absolutely cardinal dimension of the whole problem is extremely important and
deeply appreciated on both sides of this table.
I wish to express... Two bodies we have heard, as I suggested this
morning, are rather biased on the management's side concerning the fundamental
issues. I would not like any misunderstanding to arise among us on this
respect, but I think it was presented. Your views were presented in a very
constructive and serene spirit and because of that, I think they are a very
fine contribution to our common search and I thank you very much for them.
Mme McGlashan: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de
Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: I have just one question for you. It is about the
role that was imposed by law in Bill 111, the role of policeman that was
imposed on the school boards and consequently, on the administrators to act as
policeman in imposing the sanctions in relation both to the Labour Code and to
Bill 111. I would just like to hear some comments about that and the effect it
has on your relationship with your teachers?
Le Président (M. Jolivet): Mme
McGlashan.
Mme McGlashan: Fortunately, I should say there was no necessity
in the school in which I work for administrators to play the role of policemen.
We have not, at the present time, departed from our usual role as
administrators of the school but we have not performed any of the actions of
policemen so that problem has not arisen in relation to the teachers.
Mme Dougherty: Maybe Mr Fox would like to comment, but the threat
is there, the obligation is there in law. I just wondered what an impact it
has?
M. Fox: II est naturel que, dans ce cas-là, pour la
commission scolaire, si les enseignants n'ont pas travaillé, ils ne
seront pas payés. Ceci est clair, net, ordinaire. En ce qui concerne les
sanctions, je ne crois pas qu'il soit du devoir de la commission scolaire
d'appliquer des sanctions. C'est du devoir du législateur qui a
voté la loi de prendre les mesures nécessaires pour que cette loi
s'applique.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Je remercie donc les
deux organismes de s'être présentés devant la commission.
J'inviterais la Quebec Federation of Home and School Associations à se
présenter devant nous.
Pendant que ces personnes se placent, je dois vous dire que, à la
demande de la députée de Maisonneuve, un premier document, qui
concerne la différence dans la hausse des clientèles du secteur
privé et du secteur public, ainsi que les principales statistiques de
l'enseignement privé subventionné, va vous être
distribué. En deuxième lieu, une autre étude avait
été demandée par Mme la députée de
Maisonneuve, ayant trait aux coûts relatifs au double système
d'enseignement de la langue seconde, ainsi qu'à l'intégration
linguistique, qui avaient un effet sur les dépenses par étudiant
au Québec par rapport à l'Ontario. Cette étude n'existe
pas au ministère de l'Éducation, donc elle ne pourra pas
être produite tel que demandé par la députée de
Maisonneuve.
M. Ryan: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: ...puisque vous en êtes à ce chapitre des
données qui avaient été demandées au
ministère de l'Éducation, pourrais-je vous rappeler que j'avais
demandé un rapport aussi substantiel que possible sur les coûts
comparés de l'administration des ministères de l'Éducation
au Québec et en Ontario?
Le Président (M. Jolivet): Nous allons faire faire les
démarches par le secrétaire des commissions pour savoir où
en est rendue cette demande.
Je demanderais à M. Owen Buckingham de nous présenter les
deux personnes qui l'accompagnent et de commencer la lecture de son
document.
Quebec Federation of Home and School
Associations
M. Buckingham (Owen): M. le Président, c'est Mme Sylvia
Rankin et M. John Gilmore.
The Quebec Federation of Home and School Associations welcomes the
opportunity to speak before this Parliamentary commission tonight. As the
majority of our members are English we will be presenting our statement in
French and English. We are here to express the concerns of parents whose
"vested interest" is the child and the quality of education to which he or she
is entitled.
Mme Rankin (Sylvia): The Quebec Federation of Home and School
Associations est heureuse d'avoir l'occasion ce soir de se présenter
devant cette commission parlementaire sur l'éducation. Par respect pour
la dualité de cette province, nous présenterons notre
mémoire en français et en anglais. Nous sommes ici pour exprimer
les inquiétudes des parents dont les "droits acquis" sont l'enfant,
ainsi que la qualité de l'éducation à laquelle cet enfant
a droit. Nous tenons à nous identifier et à nous placer dans le
cadre du système d'éducation.
Home and School est le lien entre les principaux partenaires
impliqués dans l'éducation de nos enfants: le parent et
l'enseignant. Voilà la raison fondamentale de cet organisme, mais sa
portée s'étend au-delà de ces limites puisqu'il vise
à informer les parents et les enseignants dans le domaine de
l'éducation et du développement de l'enfant. Ainsi, les parents
peuvent aider à déterminer intelligemment la qualité de
l'éducation que les enfants recevront au foyer, à l'école
et dans la communauté.
La Quebec Federation of Home and School Associations est un organisme
indépendant de parents, fondé en 1944 et incorporé par
lettres patentes en 1959. Celles-ci ont établi officiellement dans la
province des associations locales dans les écoles françaises et
les écoles anglaises du secteur protestant. L'adhérence à
notre organisation est volontaire. Nous avons des associations locales dans les
écoles, des membres associés qui sont des familles à
l'extérieur des écoles protestantes - les associés
s'intéressent à l'éducation et appuient nos buts - et,
enfin, des membres affiliés tels que comités d'école,
commissions scolaires, etc. Les Home and School et les comités
d'école s'entendent très bien et travaillent ensemble dans nos
écoles.
La Quebec Federation of Home and School Associations appartient aussi
à la Fédération canadienne des associations
foyer-école et parents-maîtres et a des liens avec d'autres
organisations à l'extérieur du Québec, telle l'Association
parents-maîtres
de l'État de New York. Home and School a toujours
été très active dans le domaine de l'éducation et
cela, bien avant l'établissement du ministère de
l'Éducation, mais encore plus depuis l'établissement du
ministère. Home and School s'est impliquée dans les diverses
étapes du développement éducationnel où nous avons
essayé d'aider à former une opinion publique favorable à
la réforme et à l'avancement de l'éducation de
l'enfant.
Depuis ses débuts, l'éducation protestante au
Québec a été caractérisée par le maintien
des relations étroites entre l'école, les parents et la
communauté locale. Historiquement, ces relations ont été
parrainées par l'entremise des commissions scolaires, des Home and
School, des visites libres et par le contact des enseignants avec les parents
par l'entremise des élèves. Les éducateurs protestants ont
alors cherché à travailler étroitement avec les parents.
Les Home and School envoient des parents au conseil pédagogique de
APEP-APEC. Nous avons aussi des liens avec le comité des services
pédagogiques protestant du ministère de l'Éducation et
avec le sous-ministre adjoint, dont le poste n'a toujours pas été
comblé. Nous avons aussi des liens avec plusieurs autres associations
dont l'énumération serait trop longue à faire ce soir.
From the telegram received from the Ministry, we were requested to
respond to the following three topics: teacher workload, job security and
quality education as they apply to the present situation. Quebec Federation of
Home and School Associations wishes to make it clear at the outset that our
membership has not been polled on this present dispute between the teachers and
the Government. We have not compiled a document of statistics nor prepared a
brief on how to solve the problems existing between the two parties involved.
Rather, we are here representing parents who spend a great deal of time
volunteering their services in the school itself. Our mandate as volunteers is
to support the school system for the benefit of the children. These volunteers
work closely with the teaching personnel and principals. The have expressed
concerns about the relationship between teacher workload and quality
education.
Dans notre télégramme du 6 février 1983 au premier
ministre du Québec, nous avons dit: "Nous sommes très inquiets de
constater une augmentation des heures d'enseignement sans une augmentation
parallèle des heures de présence de l'élève
à l'école (par semaine). Cet état de choses conduit
à une réduction des services pédagogiques où les
élèves auront moins d'accès à l'attention
individualisée des enseignants. De plus, il y aurait un retranchement
des services personnels aux élèves".
M. Buckingham: We are very concerned about the increase in class
size. For example, in a typical secondary school with a staff of 75 teachers:
the present teaching average is 1000 minutes and by the decree would go up 15%
to 1150 minutes, an increase of 150 minutes per teacher, per week. By division
alone, this would show that, for every seven and a half teachers, one teacher
would have to be released. Without a change in pupil population, this school
with 75 teachers would have to operate with 65 teachers. This reduction of 10
teachers will have to be handled in one or two ways or a combination of the
two: remove some of the special classes with low numbers, certain options,
optional subjects or raise the size of all regular classes and retain small
special classes. Neither of the above will be maintained or improve quality
education. (22 heures)
The loss of 10 teachers in a school cannot be compared to the loss of 10
employees in an industrial plant. We have been told that a reduction in the
number of teachers at the school level is necessary to cut costs. What has the
Minister done since 1976 to reduce costs within the central offices of the
Ministry itself?
Also, it is our understanding that a maximum class size can be exceeded
and that teacher will be compensated. The compensation for the teacher putting
extra money in his or her pocket does not guarantee quality education but the
children in that class, as the increased number of students means the teacher
has less time for each individual student, for correcting, for giving
him any extra help and all the normal functions of a teacher undertakes in the
job.
When we come to job security, this is a difficult one for a volunteer
organization. We are not professionals. This is a difficult area for an
association representing, as we do, so many different families with varying
degrees of job security or the lack thereof. For this reason, it has been
impossible for us to reach a consensus whereby we could suggest the way to
resolve this issue. One question which parents have asked us is: Why does the
80% - 50% formula for surplus apply to the elementary and secondary levels and
not to other sections of the public sector?
Parents have accepted that there will be reductions in staff due to a
natural decline in pupil population, but they are boggled at the fact of such a
horrendous number of teachers declared surplus in one year. They translate this
in terms of quality education: a drastic reduction in special services or a
major increase in class size.
Mme Rankin: We have applied the term "quality education" in
relation to the work load and job security topics, but we have not as yet given
a precise meaning to the word "quality" in quality education.
The Oxford Dictionary defines the word "quality" as the degree of
excellence a thing possesses. Quality in education is excellence where it
favours the child and his individual development academically, socially and
spiritually. The price we pay to achieve that quality of education in all
levels of his or her schooling is an investment in the future of Québec
and of Canada. Quality education is the major concern of the parents in this
discussion.
Quality education cannot be bargained for or negotiated in a framework
of confrontation. There must be something inherently wrong in the school system
when the two parties in this dispute, the government - employer and the
teacher-employee, cannot agree on what is best for quality education.
This is likened to the parent who has a sick child but he cannot
diagnose the source of his illness. The doctor dismisses the parent's fears as
unfounded, but the parent has a gut feeling that he is right. The child is sick
and on further examination in a hospital finds his fears are substantiated. The
prognosis for recovery is not good. There is little hope for a cure.
In the present employer-employee situation, the parent knows there is a
sickness, he cannot diagnose it, the doctor has told him his fears are
unfounded, but after further study and countless second opinions, the parent's
fears about quality education being maintained and/or improved are
substantiated. The prognosis for recovery is not good. The parent is helpless
in his search for a cure.
We believe that quality education for the students can be achieved only
in a climate of social peace and stability. The environment, the school, must
be a happy one in which to learn.
Dans le télégramme du 16 février 1983 que nous
avons adressé au premier ministre, M. Lévesque, nous avons
déclaré: "Nous sommes contre l'imposition d'un règlement
par décret, ce qui n'encourage d'aucune façon la paix et la
stabilité dans l'école." Encore, le 1er mars 1983,
dans un télégramme adressé au premier ministre, M.
Lévesque, nous avons déclaré: "L'imposition d'un
règlement par décret n'encourage pas un climat favorable à
l'éducation." Nous exigeons que le gouvernement annule les lois 105 et
111 et se remette à la table des négociations et à
défaut d'une entente négociée, que les deux parties
acceptent la médiation et/ou l'arbitrage afin de résoudre cette
question".
Learning must take place in a climate of social peace and stability. All
of the conditions related to teachers' work must create an atmosphere whereby
teachers are teaching and students are learning.
M. Buckingham: Law 111 has created an atmosphere of social unrest
for the teachers, the parents and the students. The recent document received
from the ministry "Auxiliary Services for Pupils - A Policy Statement, a
document for consultation, page 24, states: "Finally, the existence of a guide
for the Quebec Charter on Human Rights and Freedoms must be noted. The guide,
published in 1981, was written for the benefit of the pupils. It is expected to
have a definite effect on the role and place of pupils in the school."
Therefore, it is expected that teachers will be responsible for teaching
the values of the Québec Charter of Human Rights as part of the
auxiliary services provisions. As parents, we feel it is very difficult for
teachers to do this when they hardly can fulfil this purpose while their own
rights are denied.
At a recent public meeting of parents in Montreal, the President of the
Central Students' Council of the Protestant School Boards of Greater
Montréal remarked: "What the students learned by example from the
passage of Law 111 was a poor lesson in government". The scope of Law 111
suggests that parents, as natural persons may be implicated as well, thus
creating social unrest within the home. The child is emotionally caught up in
this tangled web. This is particularly true in families where parents, as
volunteers, are a vital part of the support system in the schools.
Mme Rankin: Dans son télégramme du 1er mars au
premier ministre, M. Lévesque, la Quebec Federation of Home and School
Associations déclara: "La suspension des droits et libertés de la
personne décrétée par la loi 111 ne peut être
acceptée par une société libre et
démocratique".
Quality education involves a curricula which has a content suited to
meet the needs of all levels of intellectual ability: the slow learner, the
child with learning disabilities, the average student as well as the gifted and
talented. The new curricula or "régimes pédagogiques" were
imposed by decree. Grave concerns about its content and methods of
implementation are topics of very serious discussion among school committees
and Home and School Associations.
Clause 8-1.02 of the Law 105 decree states: "The provisions of this
chapter are to facilitate the application of the Minister's regulations
concerning the "régimes pédagogiques" and must be interpreted as
such". This chapter refers to workload and
working conditions to which we have already spoken. Curricula at the
Ministry of Education level removes the responsibility for curricula to be
developed at the local level of the school board, where the needs and
aspirations of the community are known.
Lastly, quality education is threatened by the impending legislation on
school reorganization. We need not detail our concerns at this time. Suffice it
to say that, when the Minister of Education attented our fall conference on
October 16, 1982, our membership throughout the province told him that the
proposed reform plan is unacceptable to our community. Our brief on The Quebec
School - A Responsible Force in the Community to the sub-committee of the
Superior Council of Education deals with the threat to quality education
inherent in this plan.
M. Buckingham: These three major projects, the new curricula, the
teacher-government negotiations and the proposed school reform plan, are linked
and interwoven in such a way as to create a new social order for Québec.
It is not a social order acceptable to the membership which Québec
Federation of Home and School Associations represents. Is it any wonder that
parents feel disillusioned and frustrated in their attempts to find a solution
to problems in education?
Most parents in Home and School Associations view the issue of quality
education being played out in a game-like fashion. Are the children merely
pawns in this game called quality education? Can we be optimistic and trust the
Government and teachers will reach a collective agreement which will bring
peace and stability to our schools? Can we hope that once this settlement is
reached that 1986 will not be the same thing over again? Is there a future for
quality education in Quebec if all parties involved continue on with the same
methods of negotiation?
Finally, the burden of responsibility for resolving the issue of teacher
negotiations rests with both parties. Once again we urge that there be a fair
and negotiated collective agreement. We would support mediation or binding
arbitration to bring this situation to a satisfactory conclusion.
Quebec Federation of Home and School Associations makes this plea on
behalf of quality education for the school children of Quebec and for the
future well-being of this province.
Mme Rankin: Enfin, il incombe aux deux parties de résoudre
la question des négociations sur l'enseignement. Une fois de plus, nous
exigeons qu'il y ait une entente collective négociée et
équitable. Nous soutenons le moyen de la médiation ou de
l'arbitrage afin de résoudre cette question d'une façon
satisfaisante. La Quebec Federation of Home and School Associations fait cet
appel pour la qualité de l'éducation dispensée aux
élèves du Québec, ainsi que pour le futur bien-être
de la province.
M. Buckingham: Merci, messieurs.
Le Président (M. Jolivet): Avant de donner la parole au
ministre, je voudrais dire au député d'Argenteuil, concernant les
coûts comparés encourus au Québec et en Ontario pour la
gestion et le fonctionnement des ministères de l'Éducation,
abstraction faite des transferts aux commissions scolaires, aux
collèges, aux institutions privées, aux universités et
organismes extérieurs au gouvernement, qu'il n'y a aucune étude
au-delà de ce qui a déjà été
déposé sur la question. Cependant, une étude est en cours
présentement et le ministère nous dit qu'il sera en mesure de
vous en faire parvenir les résultats dans quelques semaines.
Mme la députée de L'Acadie.
M. Ryan: Je parlerai après Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Non, allez, faites. Si c'est en relation avec
ceci, je parlerai après.
M. Ryan: C'est en relation avec ceci, oui.
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: Je n'accepte pas qu'on reporte cela de quelques
semaines. Je trouve que c'est un peu exagéré. On pourrait au
moins, extraire des documents budgétaires présentés
à l'Assemblée nationale ici et à l'Assemblée
législative de l'Ontario à l'occasion du dernier budget les
principales données pour qu'on ait une première vue, quitte
à ce qu'on mette une note en bas disant que l'étude devrait
être complétée. Il me semble que ce serait assez curieux
qu'on veuille nous faire croire qu'on n'a pas ces données. C'est la
principale province voisine. C'est la province dont le gouvernement a
invoqué constamment l'exemple et les données depuis que les
travaux de la commission sont en cours et même avant. Il me semble que ce
serait un aveu de faiblesse extrêmement lamentable de la part du
gouvernement que de dire qu'il ne peut pas nous fournir des données
aussi simples que celles-ci d'ici demain ou après-demain, quitte
à ce qu'on les complète plus tard encore. Je peux difficilement
accepter de vous exprimer quelque satisfaction que ce soit devant une
réponse aussi évasive.
Le Président (M. Jolivet): Je refais
donc votre message, encore une fois. Mme Lavoie-Roux:
Monsieur...
Le Président (M. Jolivet): Oui, Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Pour ne pas se laisser distraire par la suite,
puisque nous en sommes à rendre compte de rapports qui ont
été demandés, est-ce que ce serait possible d'obtenir du
gouvernement une copie de tous les textes de la publicité
gouvernementale qui ont été produits à la radio et
à la télévision durant tout ce conflit ou cette
période de négociations - appelons-la comme on voudra - avec le
monde de l'enseignement?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Laurin: Je pense que, pour ce qui est de la radio et de la
télévision, c'est le Conseil du trésor qui devrait
être saisi de cette demande, parce qu'il en était responsable.
Quant à la publicité dont le ministère de
l'Éducation a été plus immédiatement responsable,
il ne s'agit que de publicité écrite. Je pense que c'est
très facile de la réunir et de vous la faire parvenir.
Mme Lavoie-Roux: Celle-là, je l'ai. C'est celle à
la radio et à la télévision.
M. Laurin: Pour celle-là, je pense que la demande devrait
être faite au Conseil du trésor, parce que nous n'avions aucune
responsabilité en la matière.
Le Président (M. Jolivet): Donc, en votre nom, je vais
transmettre votre demande au secrétariat des commissions qui fera les
démarches nécessaires.
Mme Lavoie-Roux: Espérons que cela ne prendra pas...
M. Laurin: On me dit qu'elle pourrait être disponible.
Mme Lavoie-Roux: Rapidement?
M. Laurin: Oui.
Mme Lavoie-Roux: Je l'apprécierais.
Le Président (M. Jolivet): Sur le mémoire de la
Quebec Federation of Home and School Associations, M. le ministre. (22 h
15)
M. Laurin: Yes, I want to thank very much the Quebec Federation
of Home and School Associations, an organization devoted to the liaison between
parents and teachers for many years. I will have two questions to ask. The
first: When you wrote your brief, particularly when you discussed the problem
of the teachers, work load and in the example you gave, did you take into
consideration the frame of agreement that was presented on February 10th'. If
you take Bill 105 as it was adopted in December and the framework which was
presented on February 10th, we arrive at different figures for the three
consecutive years. So, I wanted to know if, in this discussion of the teachers,
work load, you took into consideration Bill 105 only or if you did take into
consideration the combined effect of Bill 105 and the framework of February
10th.
M. Buckingham: When we talked to the parents concerning this, we
had to make the assumption that right now, there has been no agreement on the
offer. Therefore, from the parents' point of view, it would seem that the
decree would come into effect. We have explained to the parents that if the
decree comes into effect, the figure I have given is 15%. If the offer comes
into effect, it is basically about one third of that, over three years. We have
mentioned that, that point has been made to our parent group, but from a parent
group point of view of volunteers, we have to make the assumption that until an
agreement is made, parents feel that the decree is what is going to take place
next year. That is what they are worried about.
M. Laurin: So you did not take...
M. Buckingham: As a volunteer group, at the association, we do
not have the time, we are reporting the feelings of our parent group rather
than giving any answers.
M. Laurin: So, the extrapolations you made come directly from
Bill 105 as it was adopted.
M. Buckingham: That is right.
M. Laurin: You tell me that you had neither the time nor probably
the expertise to come to very definite figures on the impact, on the effect of
the frame of agreement concerning the teachers' work load.
M. Buckingham: No, what I said is that we explained it to them
both ways. If the offer was accepted the way it is there, it would go up by 50
minutes, 50 minutes and 50 minutes, therefore, one third of the time... If we
talking 15% - we are talking about 100 teachers in the secondary schools - the
way we explained it to the parents is: Under the decree, the 100 teachers will
be reduced to 85. We also explained that if the
offer was accepted, the 100 would not be reduced to 85, it would be
reduced over a period of three years by approximately one third. It was
explained to the parents that way.
M. Laurin: Regarding Bill 111, you speak at length about the
possible effects of this law on the morale, on the climate in the schools, but
I am a little surprised that you did not mention the other side of the
argument, for example, how this law came to be adopted, why, in what
conditions. Do you agree with the illegal character of the strike? Do you agree
that such a strike doubly illegal did jeopardize and did threaten the academic
year of the students and threaten to suspend really the right of the children
to have education, according to the Charter of Human Rights? You did not
discuss the possible conflict between a fundamental right in the Charter of
Human Rights, the right to education and the right to strike, the right to
associate and the other rights of the Charter. I am surprised that you alluded
only to one side of the question and not to the other side.
M. Buckingham: We were not alluding to one side of the question
or the other side, we were alluding to one clause. We are pointing out, in Bill
111, the biggest objection our parents have expressed to us is the one clause
which takes away the rights of people under the Québec Charter of Human
Rights. That is what we have alluded to in our brief.
As far as condoning an illegal strike, we would have to move back
further into Bill 70, what caused the illegal strike. Our parents want their
children back in school. They probably would not condone an indefinite illegal
strike. We have not polled our parents to find out if they agree to the type of
strike that has been going on. What we do know is that the way we reported it
in the one aspect of that Bill 111, that aspect is what our parents have
objected to the most.
M. Laurin: Do you not think that if this question is important -
and it is - we have to consider this question not in abstracto, but in a
continuum that goes from its initial stages from the beginning to the end which
we may all be deploring together? But to do justice to the facts and to the
parties concerned, do you not think that we have to take into account all the
factors that have been contributing to a degradation of the situation?
Le Président (M. Jolivet): M.
Buckingham.
M. Buckingham: If a legislation was required or is required to
bring the teachers back from an "illegal strike" - in quotation marks - if
legislation was required...
M. Laurin: Why do you say "quotation marks"?
M. Buckingham: Because I am calling it an illegal strike.
M. Laurin: Is it because you have some doubts that it was
illegal?
M. Buckingham: No. It is an illegal strike. That has been
established that they are out on an illegal strike. If legislation was
required, my parents group do not feel legislation as strong as Bill 111 was
required to put them back in the classroom. It did not put them back in the
classroom to start with. It put them back in the classroom two or three days
probably after. So the parents group that we represent feels that a decree or
legislation may have been needed to send teachers back in the classroom, but a
bill such as Bill 111 was not needed.
M. Laurin: OK.
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: Oui, avec plaisir, M. le Président. Je voudrais,
tout d'abord, dire aux dirigeants de la Quebec Federation of Home and School
Associations, qui sont ici, qu'il nous fait plaisir de les recevoir dans le
contexte de ce mandat qu'accomplit la commission de l'éducation. Le
"Home and School Movement" accomplit au Québec, depuis
déjà très longtemps, un travail dont il m'a
été donné de prendre connaissance à maintes
reprises dans le passé. J'ai eu l'occasion d'avoir des rencontres avec
votre association, soit au plan local, soit au plan de tout le Québec,
à différentes occasions. J'ai toujours constaté que vos
associations reflétaient un intérêt très actif des
parents pour le travail de l'école et qu'elles avaient en retour
réussi à établir, avec l'école, des liens de
collaboration qui sont apparus excellents.
Je voudrais vous poser une première question pour nous aider
à mieux comprendre le système de relations dans lequel vous
évoluez. How do you relate to school committees, to parents committees
and to the Federation of Parents Committee which we heard this afternoon? Is
there any relationship at all at each level? How does it work?
Mme Rankin: At each level? So, we start with the school
committees?
M. Ryan: Yes.
Mme Rankin: On a local level, the Home and School and the School
Committees work very closely together. In some instances, the members of the
school committee are the same members as the Home and School Associations.
Their meetings are held jointly, which simplifies things for the
administration. It means that they do not have to go to two meetings when one
will suffice. We have an excellent rapport with our regional parents committee.
We have no problems on a regional basis. I think on a provincial basis, there
are continuing differences of opinion, not necessarily between us but between
individual parent committees and the central FCPPQ. On the West Island of
Montreal, the regional parents committee has cautioned Mr Pontbriand that he
does not speak on their behalf on several occasions, that several of the
assumptions that he makes are not necessarily those of the people in our
sector.
As far, as I said, on a local basis we get along extremely well, on a
regional basis we get along extremely well. On a provincial basis is there
much..?
M. Buckingham: On a provincial basis, the Quebec Federation of
Home and School Associations is not involved with the FCPPQ. The thing that we
find is happening is that many local school committees will receive from Mr
Pontbriand's group a statement of policy which they have never seen or heard of
and there are a number of schools both on the French and English side now in
the process of writing letters back saying they have never heard of this
statement and how did he make it?
When it comes to the provincial section, our association is strictly a
volunteer association. So, as a volunteer association, we are not in any way
connected with that group. At the local level, as Mrs Rankin said, is where we
have good cooperation as a home and school and school committee. Local and
school board levels.
M. Ryan: There is great interaction, to say the least, at the
local level?
Mme Rankin: Absolutely.
M. Buckingham: Both in the school and with the school board.
M. Ryan: Merci. And are there really different roles for the
local Home and School Associations and the school committee or if the two
interact in such a way that, to all practical ends, they are the same entity
with different functions or different faces?
Mme Rankin: They are two not totally different entities. The Home
and School
Associations can do many things that a school committee cannot do. We
are an independent organization. We can, for instance, purchase items for the
school, we can make our voice heard in very many different areas. We are not
legislated into being, we are a group that has decided over the years that we
wished to exist and have existed for many years. In fact, the first Home and
School Association started in MacDonald High School, I believe, in the year
1919. So, this is not exactly a new group on the scene. This is a group that
has been there for a long time.
M. Ryan: I am glad Mr Trudeau is not here to listen to you
because I had an argument with him about 25 years ago in which, as a faithful
disciple of law that he was, he suggested you cannot exist if you are not
legislated into being.
Mme Rankin: ...legislated into being and my parents I do not know
if anything was passed there but...
M. Ryan: I had agreed with him on that particular point as was
going to happen quite frequently afterwards. I am glad to hear that. There is
just a point here. Did you receive any grants from the Government for your
operations?
Mme Rankin: As a matter of fact, I have made a note of that since
that question had arisen before, shall we say. The biggest part of our budget
consists of membership fees from our members. Each member is charged 6 $ a
year. Of that, 1 $ goes to the local association and 5 $ go to the provincial
association. From those 5 $ they are mailed a newspaper, which is very
informative, three times a year.
M. Buckingham: Or more in this situation.
Mme Rankin: Or more. Yes, depending on the situation, we work on
an average of three or four times a year.
We have applied for grants from the Ministry and approximately one third
of our budget comes from the provincial government. Our total budget is
approximately 50 000 $. It is not a large budget. We hire one full-time person,
that is the secretary and the person who is absolutely indispensable to the
organization. The rest of the work is done on a volunteer basis by people going
down to the office and running off things or typing things or typing things or
mailing or whatever has to be done. (22 h 30)
M. Buckingham: Our grant over the last three years - and we must
apply each year
as a volunteer group, we apply to the Government for a grant to help us
operate as a volunteer group - has been in the... vicinity of 18 000 $ over the
last three years to operate our association. We represent about 7000 to 8000
families across the Province of Québec.
M. Ryan: 70 000?
M. Buckingham: No. 7000 to 8000 families.
M. Ryan: Merci.
Mme Rankin: We would like to represent 78 000.
M. Ryan: Two sub-questions. First, do you feel that if you were
ever to depend on Government subsidies to the extent - let us say 90% or 85% of
your revenues - you would be just as free to criticize Government's initiatives
or programs? Do you feel freer?
M. Buckingham: If I had to depend on that amount of money to run
my organization, I would quit first. I would rather our association was as
independent as possible. The reason we apply for a grant is basically for the
grant that covers our office expenses and it does not cover our office
expenses. We feel that we are an independent group because the amount of money
we are applying for is not what is required to run our association. If we are
applying for an amount of money and it was a large sum, I have a feeling there
would be pressure in some ways and I would rather not be in that position. We
do not want to be financed by a Government group.
M. Ryan: O.K. Now you referred in your brief to the vacancy which
has existed in the Department of Education for over six or eight months now,
since Dr Spiller's resignation. Would you elaborate on the consequences of the
present situation and how and when do you think it could be resolved.
M. Buckingham: We would hope that someone would be appointed to
replace Dr Spiller, that is our first move. Dr Spiller represented, by
definition - was the associate deputy-Minister, Protestant but in a sense
represented the English community not just the Protestant community, when he
came to Government. Much of the information we needed to know of how to handle
things, how to work things and who to apply to if we needed money etc. This was
all done through Mr Spiller; he did not get the grants for us but Mr Spiller
was a big help to us in what to do, he was a very strong supporter of
Home and Schools. This probably came from the days when he was a
principal in the Montreal system and as a principal there, was very active in
the Home and School Associations.
M. Ryan: Vous rappelez-vous pourquoi M. Spiller a quitté
son poste?
M. Buckingham: My opinion in why he left his job and what he has
spoken to us about is because he could not agree with what is going on at the
present moment.
M. Ryan: With him being out of the Department now, do you feel
there is sufficient English representation in the Ministry at the moment?
M. Buckingham: We do not. We think we need someone in the
Ministry.
M. Ryan: How does that appear to you? How is it manisfested in
practice? Do you mean that when they prepare programs for instance or work on
future polices there is not sufficient English presence within the Department
to work on things at the very inception of projets and at the different stages
of their development?
M. Buckingham: Assuming that the "régime
pédagogique" is coming through as law and the curriculums are being
produced at the Government level, the Ministry level, then it would be to the
benefit of the English people to have somebody that was from the English
community, and was an educator, somehow involved at high level of
Government.
M. Ryan: Merci. Just one further question. You say in your brief
that trying to promote three major projects at the same time the current round
of bargaining with the Teachers' Unions, the restructuring scheme of Dr Laurin
and thirdly, the implantation of the new "régime pédagogique" is
a bit too much for what the system can swallow. Could you explain how this
appears to you as parents who are closely following school activities?
Mme Rankin: If I speak on behalf of parents, it is strictly off
the top of my head at this point because we have not polled the parents as I
said, on a lot of these issues. However, on reorganization, we have had several
information meetings, we have had various schoolboard representatives. We have
had Mr. Spiller discussing this on a school level.
We feel that the reorganization procedure to us is somewhat similar to
deciding that you are going to put in a fireplace in your basement and, in
order to
do that, you have to knock down the first and the second stories before
you have got enough room to bring in the bricks. It seems a rather
retrogressive way of doing things if reform is needed within the school system,
I am not saying it is perfect; I do not know any human being who is perfect.
So, it would be very difficult to build any education system which is perfect
to all concerned. If reform is required, it should be done by the people in the
community who know exactly what kinds of reforms they need. Many programs have
been instigated from a parent request, for instance, the French immersion
programs when parents, in conjunction with the schoolboards and in conjunction
with teachers and administrators, decided what they wanted to do was to promote
the learning of the French language and to start the children in immersion
projects.
This was something that was done at the parent level and it filtered up
instead of something that started at the Ministerial level and filtered
down.
M. Ryan: Just one last question. You seem to suggest in one
passage of your brief that programs should be worked out at the local original
level. Does that mean that you would be opposed to common programs for the
whole of the province or if that is seen in a complementary perspective?
M. Buckingham: I think it is between a common program and common
guides. In other words, I do not think we have any objection that the goals,
the aims and minimum objectives for programs should not be the same all over
the province. But what we would object to is when the program is made so tight
that there is no flexibility to it. We can bring you two examples. One example
we have used when Doctor Laurin was speaking to our group in Montreal; the one
example is the sex education course that was developed by the Baldwin-Cartier
School Commission. With the help of its parents, with the help of its teachers,
all of the objectives of the Ministry's program was followed. There was not one
objective that they were not following in that program. Yet, they were not
allowed to use it. They had to use the one that came down from Québec.
That is the type of thing that we would worry about. There is no objection to
the objectives and the goals being similar and the minimum standards being
similar. There has to be some flexibility for the areas in. What you do in the
Lake Shore might be quite different to what you would do in the Eastern
Townships, Western Québec. I am talking English schools right now.
M. Ryan: I suggest like you added the example you mentioned there
is a very interesting one. I followed this thing, not as closely as I would
have wanted to but I was apprised of the contents of the program which had been
worked out at Baldwin-Cartier and I profoundly deplore that this program was
refused by the Ministry on the grounds that they had to follow a uniform
program. I am glad that you brought out that example, I think it is a very good
illustration of what we are all trying to achieve, a greater measure of real
responsibility at other levels than the Provincial Government.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Fabre et adjoint parlementaire, M. le ministre de l'Éducation.
M. Leduc (Fabre): On the decrees. Do you think there are some
elements in the decrees that could ameliorate the situation, the quality of
education in the schools? I am thinking of the presence of children in the
primary schools, for example.
M. Buckingham: In the primary level, in our brief here we
mentioned that the thing that worried us was that when you had a change in
teacher time and no change in the student time then you create a problem of
surplus. In the primary level, the position that has been put in is that the
change in teacher time and pupil time is parallel. It does not matter if we go
up in one year, two years or three years, from 1380 minutes for the children to
1500, you are going up 120 minutes. If you are going up from 1200 teaching
minutes for the teacher to 1320, you are going up 120 minutes. It is parallel,
therefore, there is not the large surplus created. There still will be a
surplus created because when you increase the time in a day, the specialist
time does not quite match mathematically. So you may have some problems in time
tabling which is something that is out of the parents' hands. That is in the
hands of the school officials. So, at the elementary level, the change in time
is not as much of a problem as it would be at the high school level.
Another factor is that we were, a number of years ago, on a 1500-minute
day in the elementary school and we were on that time for years and years. It
was by a ministerial decree that we went to 1380 minutes. I think that would
have been during the time of the Liberal Government, prior to this Government.
We went to 1380 minutes, which is different at the elementary level to every
other province. The 1500 minutes at the elementary level is not quite the same
as the time at the secondary level.
M. Leduc (Fabre): Do you not think that it is time to work on new
models of organization for the secondary level, as it is
done in Ontario schools?
Mr. Buckingham: What would you mean by "As it is done in Ontario
schools"?
M. Leduc (Fabre): What I know is that the teachers have about the
same time of teaching and they have the problems that you mentioned. So, the
idea is to bring the teachers in Québec to the same level as they are in
Ontario. They must have some models of organization in Ontario, since they have
a certain quality of education.
Mr. Buckingham: If you increase that amount of time all at once,
basically, you change your whole pattern. The other factor, if you look at the
Ontario system, is that you are looking at two sections of the secondary
school. One section of the secondary school, the grades 7, 8 and 9 pattern, the
junior section of their school system is very much patterned on our elementary
level. The high school section, which goes from grades 10, 11, 12 to 13, is
patterned on our high school pattern, or our high school is different then. You
cannot picture the Ontario system parallel to the Québec system as long
as you think of one system that controls up to grade 11, and one system that
controls the next two years, cegep, 12 and 13. In the Ontario system, one
system will control up to grade 13. When that happens, it is a very different
setup for your times for teaching, etc.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Merci, M. le Président. J'ai seulement une
question de clarification.
You mentioned in your brief that your organization is one of parents
that volunteer and work in the schools. For the sake of the members around this
table, could you tell us what kind of services your organization provides?
Mr. Buckingham: One of the things that can happen at the
elementary level, you have your school committee, you have your home and
school. The home and school group is a group that you would call your volunteer
support group. They are all volunteers. Two things happen. One of the things
that they do - it is not the only thing they do - is fund raising. Usually, the
fund raising would be for things that we want in that school that would not fit
into the budget norms. For instance, in the budgetary norms, you could not have
a video set purchased for your school but it is a very interesting educational
tool. That is one of the things. Another part of the volunteer program that
they do as service for the school: most elementary school libraries are run by
parent volunteers which are home and schoolers. We would not have a library in
many of the protestant schools if it was not for volunteers, from the parents'
side, and those are the home and schoolers. (22 h 45)
This does not mean that those are the only two functions. Many of them
work with class teachers, etc. They are also in many of the systems, because of
our close liaison with our school committees, when something comes down from
the government that has to be reacted to and the consultation process that
comes through the school committee. Most of those committees have at least one
or two représentants on that Home and School for a different view point
on that brief. Those would be three topics now, I can tell you others.
Mme Rankin: At the highschool level, I am fortunate, I have three
children, one in elementary, one in secondary, one in cegep. So it is pretty
well covered all the way down the line. At the high school level Home and
School equally does the fund raising because at high school level it is more
important. You have schools of approximately 1500 students and it seems to be
the volunteer aspect of parents wears off once you children get past elementary
school. You say: boy, they are finally out of the house now I can do something
more interesting!
At the high school level, it is a fund raising group, it is a support
group. There are people who are involved, for instance, in music programs, if
there is somebody who needs transportation to and from any kind of tournaments
or programs - you name it, it is always Home and School that get a call to say:
Could you provide this or could you provide that? They were also instrumental
in starting up the Community offices within the high schools. Driver education,
- thank you, I keep forgetting all these... There are so many things that Home
and School does. I do not know if you are aware of the committee offices that
are in place and quite a few are for high schools. Those are offices where you
have one, two or three people who deal with community needs. You deal with all
kinds of situations where you invite senior citizens in to tea at Christmas
time - where we send a lot of students to volunteer with various organizations,
with disabled and physically or mentally handicapped adults. We have some of
our students who go out once or twice a week on a volunteer fasis to help them
out. We have students who volunteer with autistics and children who have all
kinds of difficulties. We invite students from a school like John F. Kennedy
which is specifically geared towards handicapped students. They come to school
for various concerts. It is all organized through the community office and
through the different groups.
M. Cusano: You must be congratulated, because I know a lot of the
work that your group has done, congratulated because you have done so much with
so little government help. Thank you.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Est-ce que Mme la
députée de Jacques-Cartier veut intervenir?
Mme Dougherty: I do not have any questions for you, but I want,
first, just to make a couple of comments. First of all, I would like to
congratulate you on your brief. It is straight from the heart. It is a very
sensitive brief. I think you have put your finger on a great many important
points in this dispute. I like very much your comments, your concerns about the
lesson that has been conveyed to students in relation to human rights, because
I think there is a lesson, a very sad lesson that has been conveyed which we
should not forget. But also, I think that your points about the quality of
education and how the situation that we find ourselves in each time with
negotiations really seems to lose sight totally of quality and it becomes a
game of power where everybody justifies their demands on a basis of quality,
but very often, it becomes a game rather than a really honest concern for
quality. And it seems to me that much of what you have said in your brief is
really a plea to get back to the reality of solving so many of these problems
at the local level where everybody can honestly talk about quality and reduce
the confrontation that happens when we have this sort of Common Front situation
at the provincial level, which falsifies the whole debate. I want to thank you
very very much. I think it is a superb brief. In the time that you had to put
it together, you are all the more to be congratulated. Thank you.
M. Buckingham: And we still have to drive back home tonight.
Le Président (M. Jolivet): Merci. J'invite maintenant
l'Association nationale des étudiants du Québec à se
présenter devant nous. Cette association est représentée
par M. Guy Bédard. Je lui demanderai, s'il est accompagné, de
nous présenter les personnes qui l'accompagnent.
Association nationale des étudiants du
Québec
M. Beaudoin (Jacques): Merci, M. le Président. Je voudrais
d'abord faire une petite rectification. M. Guy Bédard devait être
le porte-parole officiel de notre association dans la mesure où on avait
été invité à comparaître mercredi.
Maintenant, on a pu dégager la porte-parole officielle, Mme Johanne
Muzzo, qui est secrétaire à l'information au conseil
exécutif de l'ANEQ. C'est elle qui va faire la lecture du
mémoire. Mon nom est Jacques Beaudoin. Je suis conseiller pour le
conseil exécutif de l'ANEQ en ce qui concerne le dossier qui nous
intéresse. Nous accompagne aussi M. Robert Beauregard, qui est un
représentant du Mouvement des étudiants et des étudiantes
chrétiens du Québec, qui a bien voulu s'associer à nous
pour la présentation de ce mémoire.
Le Président (M. Jolivet): Vous avez la parole,
madame.
Mme Muzzo (Johanne): Premièrement, je voudrais m'excuser
pour les fautes de français qu'il y a dans le texte. Ce n'est pas qu'on
ne sache pas écrire, mais il y a eu des problèmes lors de la
dactylographie du texte. Je voudrais aussi m'excuser auprès des femmes
syndiquées du Québec parce que notre document ne comprend pas une
partie s'intitulant "Décrets et femmes", par manque de temps de
recherche, etc.
Permettez-nous d'abord de vous présenter notre association,
l'Association nationale des étudiants et des étudiantes du
Québec, fondée il y a maintenant huit ans. Elle regroupe
aujourd'hui une vingtaine d'associations étudiantes dont 16 au
collégial et 4 à l'université. Ce qui signifie un
"membership" total de plus 110 000 étudiants et étudiantes.
Le mandat principal de l'ANEQ est de défendre les
intérêts matériels, moraux et culturels de ses membres.
À cette fin, nous intervenons en particulier sur les grandes questions
concernant le développement et l'avenir de l'éducation au
Québec. C'est dans ce cadre que nous participons à la
présente commission parlementaire.
Soyons clairs dès le début. Nous sommes ici pour faire
connaître le point de vue de nos membres en ce qui concerne le conflit
qui oppose actuellement le gouvernement du Québec aux enseignants et
enseignantes. Mais, toutefois, nous n'avons aucune illusion quant au fait que
la commission parlementaire puisse permettre d'entrevoir un règlement du
différend.
Aujourd'hui, alors que les enseignants et enseignantes
considèrent légitimement que leurs négociations avec le
gouvernement ne sont pas terminées et que les décrets
découlant de la loi 105 ne peuvent aucunement tenir lieu de convention
collective, l'ANEQ entend blâmer le gouvernement du Parti
québécois, et lui seul, pour la dégradation de la
situation dans l'éducation. Le pourrissement des relations entre lui et
ses employés découle directement des positions indignes qu'il
a
prises à l'égard de ceux et celles qui s'occupent d'une
des principales richesses collectives que le peuple québécois ne
se soit jamais données, le système d'éducation.
La rupture des négociations décrétée par le
ministre Laurin, vendredi dernier, au profit de la convocation de cette
commission parlementaire, à propos de laquelle à peu près
tout le monde a émis des doutes sérieux quant à son
efficacité, ne constitue que le dernier d'une série de gestes
posés depuis le début des négociations et même
avant, visant à provoquer l'affrontement avec les travailleurs et
travailleuses des secteurs public et parapublic et à profiter d'une
conjoncture favorable, savoir l'appui anticipé de l'opinion publique,
elle-même créée par une intense et savante campagne de
propagande de la part du gouvernement, pour mettre au pas les syndicats et
imposer des reculs inacceptables à l'ensemble des travailleurs et
travailleuses, aux classes populaires et aussi, il faut bien le dire, au
système d'éducation lui-même.
Faisons donc un bref retour en arrière. Début 1982: On
commence par lancer une vaste campagne de propagande. "Les employés et
employées du secteur public sont privilégiés, dit-on. Ils
et elles jouissent de privilèges exorbitants en regard des
employés du secteur privé." On se base sur des études
contestables et contestées pour créer un mythe que propageront
des éditorialistes, des ministres et des députés, des
patrons du secteur privé, des financiers et des banquiers. Au printemps
1982, l'opération "propagande" recevra une mise en scène
soignée, celle du grand Sommet économique de Québec,
auquel on conviera les grands partenaires sociaux, patronat, institutions
financières et entreprises de la coopération, d'un
côté; centrales syndicales, groupes autonomes de travailleurs et
consommateurs de l'autre, le gouvernement se plaçant au centre, en
arbitre impartial, il va sans dire. On pourrait noter à ce propos que
les plus démunis de notre société au nom desquels le
gouvernement a, par la suite, proposé ces demandes aux syndicats du
secteur public -les jeunes, les chômeurs et les chômeuses, les
bénéficiaires de l'aide sociale, les étudiants et
étudiantes, etc. - n'ont toutefois pu y trouver leur place.
La mise en scène est cependant organisée de telle
façon qu'elle privilégie le discours gouvernemental à
propos de ses difficultés budgétaires. Largement appuyé
par le patronat, qui en profitera pour mettre aussi l'accent sur le retour
à la libre entreprise et le rétrécissement des appareils
d'État, c'est-à-dire, en fait, sur la diminution des services
publics, le gouvernement consolidera le mythe d'une fonction publique trop
grasse en même temps qu'il dévoilera qu'à défaut
d'un changement quelconque, le déficit budgétaire deviendra trop
élevé. C'est le fameux trou de 700 000 000 $ qu'il faudra combler
d'une façon ou d'une autre. Par hasard, il s'agit du montant des
augmentations salariales que doivent toucher en juillet les syndiqués du
secteur public en vertu des dispositions des conventions collectives
négociées et signées en 1979-1980. De là à
conclure que ce sont les employés du secteur public qui devront faire
leur part pour assumer le fardeau de la crise des finances publiques, il n'y a
qu'un pas, et le gouvernement aura tôt fait de le franchir.
Au sommet, les centrales syndicales refuseront, avec raison, de
s'embarquer sur ce terrain où le gouvernement Lévesque veut les
mener. En revanche, on y dépose une étude rappelant que si le
gouvernement avait le courage de ramener les taux d'imposition aux entreprises
au niveau où ils étaient en 1971, sous le régime Bourassa,
le fameux trou dans le budget du ministre Parizeau serait automatiquement
comblé. Mais le gouvernement ne reprendra évidemment pas à
son compte cette suggestion.
Après la tenue du sommet, le gouvernement lance une nouvelle
étape: celle de la réouverture des contrats de travail
antérieurement signés par lui aussi bien que par les syndicats du
secteur public. Il ne demandera alors rien de moins que de modifier les
conditions de rémunération de ses travailleurs et travailleuses
dûment négociées sous la menace de les casser
lui-même par une loi spéciale si les syndicats ne se montrent pas
conciliants.
Les syndicats s'opposeront, bien sûr, à ce chantage mais
manifesteront à ce moment une ouverture sans précédent: on
se déclare prêt à négocier tout de suite les
nouvelles conventions et on accepte même qu'elles prennent effet avant la
fin des conventions en vigueur (le 31 décembre), ce qui constitue une
importante concession et une preuve de bonne foi évidente. Le
gouvernement refusera de saisir cette perche.
Le président du Conseil du trésor déclare qu'il ne
veut pas se prêter à ce qu'il appelle "le jeu stérile de la
négociation" alors que les coffres sont à sec. Ensuite, on passe
aux actes. Lois spéciales par-dessus lois spéciales, il s'agira
maintenant d'enlever aux syndicats leur droit de négocier.
La loi 68, concernant les régimes de retraite du secteur public,
modifie unilatéralement les régimes qui, jusqu'à
maintenant, faisaient l'objet d'une entente entre l'État et les
centrales syndicales. On diminue la contribution patronale et on réduit
l'indexation des prestations.
La loi 72, concernant certains services essentiels, modifie, toujours
unilatéralement, les corridors déjà restreints de
l'exercice du droit de grève.
La loi 70, mieux connue, impose d'autorité les concessions
salariales que les syndicats avaient refusées. On coupe chez les
syndiqués mais pas chez les policiers, ni chez les juges, ni chez
les négociateurs patronaux, ni chez les médecins et dentistes, et
encore moins chez les députés.
Entre-temps, le ministre des Finances dépose son budget dans
lequel il fixe de façon précise le cadre des dépenses
salariales dont on ne voudra plus bouger par la suite.
Après un été où aucun débloquage ne
se produit, des compromis importants sont déposés par le
côté syndical. On offre, ce qui constitue une concession
importante et une avenue intéressante pour le gouvernement, un gel des
salaires pour la première année de la convention collective et
d'importantes réductions des demandes pour les deux suivantes, quelque
chose comme 1 000 000 000 $ sur trois ans. Le gouvernement réplique: II
n'y a rien là. La vie est belle, poursuit le ministre
Bérubé. Les négociations sont, à toutes fins
utiles, rompues.
Début décembre, une nouvelle loi spéciale est
adoptée, la loi 105, dans les circonstances pour le moins
antidémocratiques que l'on sait - les députés doivent
étudier 80 000 pages de décrets en quelques jours - qui autorise
109 décrets tenant lieu de convention collective pour les trois
prochaines années. Il n'y a pourtant pas encore de grève de la
part des syndicats, mais le gouvernement Lévesque procède quand
même.
La suite des événements nous permettra de confirmer notre
intuition sur la non-volonté de négocier de la part du
gouvernement. De nouvelles ouvertures sont faites par les syndicats. Par
exemple, l'Alliance des professeurs de Montréal propose d'accepter la
réduction salariale en échange de la création d'un fonds
de création d'emplois. Le gouvernement réplique par de nouvelles
menaces alors que les syndicats, dans l'impossibilité d'utiliser
d'autres moyens, se voient contraints de déclencher la grève. (23
heures)
On réussira par le chantage et la répression à
déstabiliser quelque peu le front commun et les syndicats du secteur
public. Certains syndicats surseoiront à la grève, mais aucun
d'entre eux ne se montrera satisfait du contenu des décrets, même
adoucis. Les enseignants et enseignantes maintiendront malgré tout leur
grève et le gouvernement tentera d'y mettre un point final en adoptant
la loi 111, la loi spéciale la plus antidémocratique de
l'histoire du Québec, sur laquelle assez de commentaires ont
été faits pour qu'il ne nous soit pas nécessaire de nous y
attarder.
Le bilan de ces événements devait être fait. Nous
devons en conclure que le gouvernement Lévesque a fait la preuve de son
autoritarisme. Il a refusé de négocier depuis le début et
a montré qu'il ne savait gouverner que par décrets et lois
spéciales au-dessus de la population.
Le gouvernement a aussi fait la preuve de son hypocrisie. Il a
donné d'une main pour reprendre de l'autre en déchirant sa
signature. Il a prétendu, pour justifier ses attaques contre les
syndiqués du secteur public, qu'il voulait se porter à la
défense des plus démunis, alors que les faits de la vie montrent
qu'il n'en est rien. Nous reviendrons sur ce point plus tard.
Finalement, le gouvernement Lévesque a également fait la
preuve de son antidémocratisme en bafouant et en foulant aux pieds de la
lettre la Charte des droits et libertés de la personne que la
société québécoise s'est donnée.
C'est pour ces raisons que nos associations affiliées ont tenu le
gouvernement entièrement responsable de la situation actuelle qui, nous
en convenons, est désastreuse, et ont appuyé solidairement les
syndicats du secteur public qui ont mené et mènent la bataille
pour défendre leurs, droits.
Des arguments et prétentions auxquels on ne peut croire. Les
députés du parti ministériel nous opposeront
sûrement que notre point de vue ne tient pas compte du problème de
fond qui aurait poussé le gouvernement à agir de cette
façon: la nécessité de régler la crise des finances
publiques.
Bien que nous n'ayons pas à notre disposition toute la brochette
de spécialistes et d'économistes que le gouvernement
possède, qu'il nous soit permis de douter de la pertinence des choix de
politiques fiscales que le gouvernement a posés. Un déficit n'est
ni bon ni mauvais en soi, tout dépend de l'utilisation qui est faite de
l'argent dépensé, et tout dépend aussi si les
dépenses du gouvernement s'inscrivent dans le cadre d'un plan de relance
économique sérieux et véritable dans le but de stimuler
l'économie et contrer la récession, ce qui ne semble pas
être le cas actuellement, bien au contraire. Le ministre
fédéral des Finances, M. Marc Lalonde, a annoncé son
intention d'augmenter le déficit budgétaire du gouvernement
d'Ottawa afin d'aider à la relance économique. On ne peut
pourtant pas dire que M. Marc Lalonde soit particulièrement
prosyndicaliste.
D'autres choix de politiques fiscales et budgétaires auraient
été possibles. Les centrales syndicales en avaient justement
proposé de tout aussi valables lors du Sommet de Québec au
printemps de 1982.
Le gouvernement Lévesque prétend prendre la défense
des plus démunis de notre société pour s'attaquer aux
acquis de ces grands privilégiés que sont les travailleurs et les
travailleuses des secteurs public et parapublic. Dans ce cas, pourra-t-il nous
dire comment la récupération salariale déjà
entamée vient actuellement en aide à ces
plus démunis? Que fait le gouvernement Lévesque pour aider
les jeunes aux prises avec le chômage et la délinquance comme
seule perspective d'avenir? Que fait le gouvernement Lévesque pour
soulager la situation de ces jeunes assistés sociaux qui doivent
subsister avec 144 $ par mois actuellement? Que fait le gouvernement
Lévesque pour les étudiants et les étudiantes aux prises
avec un régime de prêts et bourses totalement déficient qui
pousse même certains et certaines d'entre eux et elles à se marier
pour y être admissibles? Qu'on nous fasse part d'une véritable
politique de création d'emplois pour les jeunes immédiatement
s'il en existe une!
Objectivement, les prétentions du gouvernement nous laissent
froids et froides. Nous pensons que le gouvernement cherche à nous
détourner de l'analyse des vrais problèmes et des vraies
solutions en jouant à la défense des plus démunis contre
les privilégiés. On doit dire qu'on s'est habitué avec le
temps à cette tactique du gouvernement. En 1978, quand les
étudiants et les étudiantes étaient en grève pour
l'amélioration de leurs conditions de vie et d'étude
désastreuses, le ministre de l'Éducation, M. Jacques-Yvan Morin,
déclarait: "Les temps sont durs pour les étudiants comme pour
toute la population, mais la situation financière des étudiants
est nettement supérieure à celle d'un jeune chômeur
d'âge collégial qui doit se contenter d'un maigre 92 $ par mois
pour subvenir à ses besoins." À l'époque, nous
étions donc les privilégiés. Aujourd'hui, le même
gouvernement se porte à notre défense pour nous protéger
des syndiqués privilégiés qui nous prendraient en
otage...
En fait, si un groupe ou un intervenant dans le débat actuel a su
véritablement s'attarder au sort des défavorisés, il
s'agit bien du mouvement syndical qui, comme l'Alliance des professeurs de
Montréal, a su proposer des alternatives et des compromis qui
permettront d'améliorer le bien-être général de la
population.
Les décrets auront des conséquences désastreuses.
Outre la façon avec laquelle le gouvernement du Québec a
jusqu'à maintenant considéré les syndiqués des
secteurs public et parapublic, ce sont les raisons justifiant cette attitude
répressive qui nous apparaissent encore plus inacceptables. Pour le
secteur de l'enseignement auquel nous nous sentons particulièrement
concernés, la détérioration de la qualité de
l'éducation entraînée par l'application des décrets
est inacceptable pour une majorité d'étudiants et
d'étudiantes du Québec.
On combat le chômage en faisant des mises à pied.
Concernant les réductions des salaires de ses employés, le
gouvernement tente ainsi de combler son déficit budgétaire; ce
qu'il oublie de signifier, c'est qu'en sabrant dans les salaires de ses
employés, il ne récupère finalement que 30% de ce qui
était son objectif initial. Une simple soustraction des pertes de
revenus, de la perte d'impôt sur le revenu ainsi que des taxes indirectes
entraînées par les réductions salariales et une addition
des dépenses supplémentaires du gouvernement occasionnées
par l'augmentation du chômage et des dépenses d'aide sociale nous
indiquent qu'il ne récupérera finalement que 200 000 000 $
à partir des coupures salariales de 641 000 000 $ qu'il a
effectuées.
D'après l'économiste James Pottier de l'Université
Laval, en coupant dans les salaires, le gouvernement créera 38 000
chômeurs et chômeuses de plus au Québec, étant
donné que la baisse des salaires entraînera une baisse d'environ
300 000 000 $ dans la consommation de biens et services: cela signifie une
nouvelle baisse de la production. Avec un effet multiplicateur de 1,8,
l'économiste en arrive au chiffre de 38 000 nouveaux sans-emploi.
Devant le peu de perspectives d'emplois pour les étudiants et
étudiantes et la jeunesse en général, il est difficile de
croire au discours gouvernemental qui prétend que ses coupures nous
viendront en aide. 38 000 chômeurs et chômeuses de plus n'aideront
en rien à créer les emplois dont les étudiants et
étudiantes ont besoin.
La qualité de l'éducation est menacée. À
l'heure des coupures massives de postes chez les professionnels, les
employés de soutien et les enseignants et enseignantes, c'est la
qualité et la quantité de services qui diminueront. Le fait de
fermer des bibliothèques plus tôt restreindra l'accès
à ce service pour la communauté étudiante. Ce sont ceux et
celles qui n'ont pas à leur disposition une bibliothèque
personnelle et des ressources nécessaires qui seront
défavorisés.
Aux enseignants et enseignantes, le gouvernement québécois
impose une augmentation de 25% de la tâche qui entraînera une
diminution des effectifs dans le corps professoral. Déjà, nous
avons de la difficulté à rencontrer les professeurs pour fins de
consultation. Avec cette baisse de disponibilité, nous pouvons dire
adieu aux rencontres hors classe. Le seul travail que les enseignants et
enseignantes seront en mesure d'effectuer en dehors de la présence aux
cours sera la recherche et la préparation nécessaires pour donner
les cours. On aura donc plus souvent des cours magistraux qui ne permettent pas
aux étudiants et étudiantes rencontrant un certain nombre de
difficultés de suivre adéquatement le cheminement
pédagogique.
En plus, le ratio maître-élèves est aboli par les
décrets. Le danger qui nous guette sera que nous aurons à faire
face à
des classes surchargées et à un manque de temps pour
échanger des expériences et nos connaissances. Ces conditions
réduiront les possibilités pour les étudiants et
étudiantes de s'affirmer et de prendre en main une part du contenu
pédagogique et des méthodes d'enseignement.
Le gouvernement québécois s'assure aussi une plus grande
mobilité des employés de l'État dans l'éducation
pour permettre une réalisation plus facile de ses projets de
contre-réforme. L'application des mesures inscrites dans le projet de
règlement des études collégiales concernant la
création de nouveaux diplômes déqualifiés
était freinée par la sécurité collective de
l'emploi. L'application des décrets permettra la réalisation de
ces projets gouvernementaux rejetés par les étudiants et
étudiantes. Pour nous, c'est la déqualification de l'enseignement
qui pointe à l'horizon.
En effet, l'application de ces différentes mesures aura comme
conséquence l'aliénation des cours de formation
générale pour la majorité à partir de la fin du
secondaire V, les cours de niveau collégial de français,
philosophie, économie, sociologie, etc. La surspécialisation
résultant de ces transformations rendra notre formation
dépendante de notre futur milieu de travail. En ce sens, il sera moins
facile de nous adapter à des milieux de travail différents. La
mobilité des futurs travailleurs et travailleuses que nous sommes
disparaîtra à vue d'oeil. Il ne restera, pour la majorité,
que le choix d'aller acquérir un diplôme de perfectionnement ou de
reclassement. Notre force de négociation avec les employeurs sera
amoindrie. Ce sont les conditions générales de travail et les
salaires qui tendront à diminuer. La déqualification de
l'enseignement signifie cette perspective d'avenir pour la jeunesse
québécoise.
Bien sûr, les travailleurs et travailleuses de l'enseignement
défendent les intérêts qui leur sont propres. Certains
voient dans leur lutte des relents de corporatisme. Mais lorsqu'on y regarde de
plus près, la disparition de la sécurité d'emploi ne peut
avoir comme conséquence que la diminution de la qualité de
l'enseignement et des services. Les premiers à en souffrir seront les
étudiants et étudiantes québécois.
Plus encore, on peut déjà se douter que les
étudiants et étudiantes en provenance des milieux populaires et
ouvriers assumeront très majoritairement les effets de ces
modifications. D'une part, ces groupes sociaux auront à subir durement
les coupures de services. La sélection scolaire ne se produit pas
uniquement parce que certains ou certaines manquent d'argent pour poursuivre
leurs études mais aussi par le manque de ressources intellectuelles
à la disposition des groupes défavorisés. Il est
démontré que, par exemple, les étudiants et
étudiantes de ces milieux ont grandement besoin de la
disponibilité professorale pour atteindre la réussite.
L'augmentation de la tâche des enseignants et enseignantes
entraînera probablement une augmentation du taux d'échec. D'autre
part, la formation professionnelle étant réservée
majoritairement à ces secteurs de la population, la
déqualification des diplômes ou ce qui en restera, les concernera
en tout premier lieu.
Seulement 29% des jeunes ont accès au cégep. 9% des
enfants des couches les plus défavorisées de cette
société sont à l'université, comparativement
à 44% pour ceux et celles des milieux plus aisés. Il ne nous
apparaît pas que "l'école des décrets" améliorera la
situation; elle l'accentuera plutôt.
Il s'agit donc, par l'entremise des décrets, d'une remise en
question du droit à l'éducation. Non seulement on ne vise pas une
meilleure accessibilité à l'enseignement supérieur, mais
on crée les conditions pour une régression générale
de celle-ci et de sa qualité. En l'occurrence, ce sont nos
intérêts spécifiques d'étudiants et
d'étudiantes qui sont touchés. Si les syndicats de l'enseignement
défendent d'abord leurs conventions collectives, on ne peut affirmer
qu'il y a là des intérêts corporatistes. En dehors des
motivations personnelles de ces employés de l'État qui les
portent à mener la lutte contre les décrets, c'est le maintien du
droit à l'éducation et à sa qualité actuelle que
nous considérons comme minimal et nécessaire à toute
société pour lequel les enseignants et enseignantes se battent.
L'accès à l'enseignement est un préalable à la
formation d'individus en mesure d'offrir de nouvelles solutions aux niveaux
technique, politique, culturel, etc., aux problèmes que l'on vit.
Les droits démocratiques sont aussi remis en question. S'il est
vrai que nos conditions d'étude et le droit à l'éducation
sont remis en cause à travers les décrets, les enjeux politiques
et syndicaux ne sont pas de moindre importance. Avant les grandes luttes des
travailleurs et travailleuses des secteurs public et parapublic, à
l'ère du duplessisme, cette société comportait toutes les
caractéristiques d'un régime antidémocratique et
autoritaire. Pierre Elliott Trudeau déclarait à l'époque:
"On verra par là à quel point les moeurs politiques au
Québec sont éloignées de l'esprit démocratique.
Comme je l'écrivais la semaine dernière, il règne au
Québec une hostilité à l'encontre de la liberté
politique. J'ai décrit le viol des libertés d'opposition; et
l'opposition en dehors du Parlement est encore plus sauvagement
attaquée: voir les projets de loi Picard, Guindon, Desmarais".
Le gouvernement de l'Union Nationale
nia le droit d'association (lois antisyndicales), brima la
liberté de parole (lois du cadenas) et fit matraquer sauvagement des
contestataires par la police provinciale. Il fallait un mouvement d'envergure
pour assurer les libertés les plus élémentaires.
L'obtention de certains droits démocratiques bouleversa la
mentalité et les moeurs de tout le Québec. Point n'est besoin
d'expliquer la nécessité du droit d'opinion et d'expression. Par
contre, le droit d'association est souvent le seul moyen pour le simple citoyen
de pouvoir s'exprimer face à des groupes, cartels et individus (les
Steinberg, Provigo, Paul Desmarais, etc.,) dont la force économique les
place dans une situation privilégiée face au pouvoir politique.
Deuxièmement, le droit de grève, même si son exercice ne
fait pas toujours plaisir, constitue souvent le seul et dernier recours
garantissant la liberté d'opinion et d'expression.
L'adoption de la loi 111, par l'abolition des libertés
fondamentales (suspension de la Charte des droits et libertés de la
personne et de certains articles de la charte contenue dans la constitution
canadienne) et l'application de mesures extrêmement coercitives et ce,
pour une durée de trois ans, nous ramène aux pires moments du
régime Duplessis.
Si le gouvernement remet en cause les libertés d'expression, par
l'entremise du droit d'association (abolition de la formule Rand, perception
des cotisations syndicales à la source) et de grève - la
législation peut rendre la grève illégale - pour les
syndicats de l'enseignement, il devient hasardeux de croire que les
associations étudiantes, déjà aux prises avec les
problèmes de non-reconnaissance de la part du gouvernement, seront
épargnées à plus ou moins long terme.
Déjà, plusieurs associations étudiantes ont perdu
le droit à une cotisation étudiante directe à la source.
C'est le cas au cégep de Maisonneuve, de Saint-Jean-sur-Richelieu, du
Vieux-Montréal, etc. Dans l'ensemble du Québec, les associations
étudiantes sont menacées des mêmes mesures. Faudra-t-il
s'empêcher d'avoir un regard critique sur le gouvernement pour conserver
ce qui constitue nos moyens de s'organiser? En ce sens, les menaces d'abolition
de la formule Rand ne présagent rien de bon pour les étudiants et
étudiantes et leurs associations.
Les étudiants et étudiantes ont pris position. En
décembre dernier, les étudiants et étudiantes des
cégeps et des universités ont constaté, avec toute la
population du Québec, que le gouvernement Lévesque, avec
l'adoption de la loi 105, était le plus autoritaire et le plus
anti-démocratique de tous les gouvernements du Canada et qu'il
était résolu à miser sur l'iniquité, la
répression, les lois spéciales et les décrets pour,
soi-disant, faire face à la crise économique, plutôt que de
satisfaire nos besoins et ceux des travailleurs et travailleuses. Depuis ce
temps, on n'a pu que constater un accroissement de ces attitudes de la part du
gouvernement.
Le gouvernement aurait bien voulu que les étudiants et
étudiantes, à l'instar de certains comités de malades dans
les hôpitaux, prennent son parti à lui contre les syndicats, mais
ce ne fut pas le cas. Nos associations affiliées se sont
prononcées contre la position gouvernementale et pour la
solidarité avec les travailleurs et travailleuses des secteurs public et
parapublic. Les étudiantes et étudiants membres de l'ANEQ ont
participé aux lignes de piquetage et aux manifestations
organisées par les syndicats. À l'Université du
Québec à Montréal, les étudiants et
étudiantes ont paralysé les activités de
l'université pendant trois jours en appui au front commun.
Les associations étudiantes non membres de l'ANEQ, comme celles
des cégeps de Saint-Jérôme, de l'Outaouais, de Limoilou,
à Québec, ont également posé des gestes en appui au
front commun. La Fédération des associations étudiantes du
campus de l'Université de Montréal, membre du RAEU, est
même allée jusqu'à demander la démission du
gouvernement péquiste, à la suite de l'adoption de la loi
111.
M. Beaudoin: Finalement, pour terminer...
Le Président (M. Desbiens): Oui. (23 h 15)
M. Beaudoin: vous aurez constaté que le mémoire qui
vous a été lu avait été écrit en fonction de
la journée d'ouverture de la commission parlementaire. Donc, il ne l'a
pas été nécessairement en fonction de ce qui s'est dit, de
ce qui a été entendu et de ce qui a pu se dérouler aussi
depuis mercredi dernier. À ce moment-là, on avait quatre
recommandations à formuler à la commission parlementaire. Je vais
les soumettre pour que vous puissiez en tenir compte. La première
était le retrait de la loi 111, considérant la volonté
populaire qui a été exprimée concernant cette loi, dans la
mesure aussi où on pouvait anticiper la poursuite de la trêve de
la part des syndicats, en tout cas, ce qui a pu être confirmé
selon les développements qui se sont produits à la commission
parlementaire. Si on se place du côté de l'objectif du
gouvernement qui était de mettre fin à la grève avec cette
loi, s'il n'y en a plus et s'il n'y a plus de menace, à court terme, il
n'y a pas de raison pour qu'une loi qui allait aussi loin soit encore en
vigueur.
La deuxième recommandation qu'on faisait était que le
gouvernement et les syndicats reprennent les négociations dans le cadre
moral du régime de relations du
travail qu'on connaît et qui a été en vigueur - si
on peut dire - avant l'adoption des différentes loi spéciales qui
ont été apportées par le gouvernement. Sans dire que cela
prenait nécessairement l'abrogation de toutes ces lois avant de
recommencer à négocier de bonne foi, on pouvait penser qu'une des
seules façons de s'en sortir devait être de reprendre les
négociations en faisant abstraction du fait que ces lois sont là
et en négociant dans le cadre de ce qui a toujours existé.
La troisième recommandation était que, aussi dans cette
mesure, le droit de grève tel que reconnu par le Code du travail, dans
le corridor dans lequel il peut s'exercer actuellement, soit respecté
et, finalement, qu'on mette de côté, pour le temps des
négociations, pour le temps que la commission parlementaire se tienne et
pour le temps que les négociations se tiennent aussi, la campagne qu'on
considère être de propagande qui a été faite contre
les travailleurs et travailleuses des secteurs public et parapublic par le
gouvernement.
On aurait dit, si on avait témoigné mercredi, que dans ces
conditions, on était persuadé que les syndicats impliqués
accepteraient de prolonger la trêve et de lever le mot d'ordre de
grève prévue pour le 14 mars qui est une situation - comme on l'a
mentionné - qui ne nous fait pas plaisir en temps que telle. On pensait
que dans les conditions d'une reprise des négociations de bonne foi, il
y avait moyen que cette trêve soit prolongée. De toute
façon, je pense aussi que certains événements, qui se sont
produits en commission parlementaire, l'ont démontré avec le plus
récent compromis qui a été fait par la CEQ, et
l'acceptation par le ministre Laurin de la présence d'un observateur
conciliateur à la table des négociations quand cela reprendra.
C'était pour compléter, pour faire cette mise au point.
Mme Muzzo: Avant de commencer les commentaires et questions, si
vous pourriez permettre une ou deux minutes au Mouvement des étudiants
et étudiantes chrétiens du Québec de se présenter,
étant donné que l'ANEQ l'a fait.
Le Président (M. Desbiens): M.
Beauregard.
M. Beauregard (Robert): Le Mouvement d'étudiants et
étudiantes chrétiens du Québec est un mouvement qui
regroupe des militants étudiants engagés dans les cégeps
et les universités qui, à la lumière de l'option pour les
pauvres dans les évangiles, tente de travailler à la
transformation de l'école pour qu'elle corresponde plus aux
intérêts des plus démunis dans la société.
Cela fait onze ans que le MEECQ existe.
On est d'accord avec l'analyse que l'ANEQ fait de la situation et c'est
pourquoi on l'endosse complètement et on est venu ici exprimer cet
accord avec l'ANEQ sur cette situation.
Le Président (M. Desbiens): Merci. M. le ministre.
M. Laurin: Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire
à vos collègues de la Fédération des associations
étudiantes du collégial et au Rassemblement des associations
étudiantes universitaires, je suis heureux de voir que votre organisme
s'implique dans la discussion des grands problèmes qui nous confrontent
et particulièrement les problèmes de l'éducation.
Votre mémoire nous indique que vous prenez parti
entièrement et absolument pour les enseignants dans le présent
conflit. Bien sûr, cela est votre droit, mais ceci colore votre
mémoire. Nous y voyons une relation ainsi qu'une conception
unilatérales des événements ainsi que des enjeux du
conflit. Il est bien évident que, par la suite, votre discours qui
m'apparaît abstrait, doctrinaire, complètement
décroché de la réalité, ne tient pas compte, par
exemple, de la gravité, de l'ampleur, de la crise économique qui
frappe actuellement la société québécoise.
Je ne vois pas beaucoup de place aussi dans votre discours pour le
partage, les entreprises concrètes de solidarité avec les autres
groupes de la société, de même que je n'y vois guère
de pari sur l'avenir. Ceci dit, je voudrais laisser à mon
collègue de Fabre le soin de poser les questions qu'appelle votre
mémoire.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Fabre.
M. Leduc (Fabre): Merci, M. le Président. Ma
première question a trait à la représentativité de
l'ANEQ. Vous mentionnez dans votre mémoire que vous avez un membership
total de plus de 110 000 étudiants. Vous dites aussi que vous regroupez
16 associations de niveau collégial et 4 de niveau universitaire. Je
voudrais simplement vous poser un certain nombre de questions là-dessus
parce que ce ne sont pas les informations que nous possédons.
Ce que nous avons comme information c'est que pour les cégeps
dont vous parlez -il s'agit de 14 cégeps - sur les 14 il y a un
cégep qui est dissident, il y a un cégep qui a une injonction
contre les professeurs, il y a un cégep qui a refusé de prendre
position et il y a trois cégeps dont vous parlez qui sont
désaffiliés de l'ANEQ. Il reste donc huit cégeps.
Quant aux universités dont vous parlez, d'après les
renseignements que nous avons, il y a une université qui est membre de
votre
organisme; les autres universités sont partiellement membres et
il y a deux universités qui doivent avoir un référendum
d'affiliation, selon nos informations cette semaine. Donc on peut
raisonnablement se poser des questions sur les 110 000 étudiants que
vous représentez.
J'aimerais savoir aussi quels sont vos sources de financement.
Troisième question. J'aimerais savoir qu'est-ce que vous
présentez pour la jeunesse québécoise comme projet
politique et social. Quels sont les projets que vous avez mis de l'avant, par
exemple, cette année pour mobiliser la jeunesse québécoise
en dehors, bien sûr, des revendications dont vous faites part dans votre
mémoire?
Le Président (M. Desbiens): M.
Beaudoin.
M. Beaudoin: Je vais répondre à la première
question concernant la représentativité. En tout cas en ce qui
nous concerne, les informations à l'heure actuelle sont qu'il y a 16
associations étudiantes collégiales qui sont effectivement
membres de l'ANEQ. Il y a quatre universités. Il s'agit de l'Association
fédérative des étudiants et des étudiantes de
l'Université de Sherbrooke, qui regroupe environ 65% des
étudiants et étudiantes de l'Université de Sherbrooke,
l'Association générale des étudiants et des
étudiantes de l'Université du Québec à
Montréal; l'Association générale des étudiants et
étudiantes de l'Université du Québec à Chicoutimi,
ainsi que la McGill Students Society, qui depuis deux semaines a
adhéré à l'ANEQ, qui est notre vingtième membre et
qui a fait gonfler aussi le chiffre de notre membership total de 80 000
à 110 000 étudiants et étudiantes. Ce qui a pu
peut-être fausser les informations que vous aviez, parce que l'instance
décisionnelle suprême de l'association a adopté
l'adhésion à l'ANEQ il y a environ deux semaines.
Quant aux autres possibilités d'adhésion que vous avez
mentionnées, il s'agit de l'Université Concordia, qui tient
actuellement jusqu'à jeudi un référendum d'affiliation,
alors on ne peut pas anticiper le résultat.
Pour ce qui est des cégeps, il y en a 16 actuellement qui sont
membres, dont la majorité nous ont donné ce mandat.
M. Leduc (Fabre): II n'y a pas de cégep
désaffilié?
M. Beaudoin: Depuis 1975, mon Dieu, il y a eu des affiliations,
des désaffiliations. Vous savez sans doute que le mouvement
étudiant est un mouvement où il y a un perpétuel
renouvellement puis beaucoup de changements d'année en année, ne
serait-ce qu'à cause du taux de roulement des étudiants et des
étudiantes dans les cégeps et les universités. On pourrait
faire l'histoire du mouvement étudiant mais effectivement, depuis 1975,
il y a eu beaucoup de changements. Ce que je peux vous dire, c'est qu'en date
d'aujourd'hui, à l'heure actuelle, il y a 16 associations
étudiantes de niveau collégial qui sont membres. On pourra
éventuellement vous fournir la liste et la déposer au
secrétariat des commissions.
Mme Muzzo: II y a effectivement, par contre, l'Association
étudiante du cégep d'Ahuntsic qui s'est désaffiliée
la semaine dernière, si je ne me trompe pas.
M. Leduc (Fabre): II y a Saint-Laurent, qui est en dissidence;
Lionel-Groulx, qui a une injonction contre les professeurs; Saint-Hyacinthe,
qui refuse de prendre position, Ahuntsic, Vieux-Montréal et
Lévis-Lauzon, qui sont désaffiliés.
Quant à vos sources de financement est-ce que vous pouvez nous
donner des détails?
Mme Muzzo: On va revenir après sur la
représentativité. Sources de financement. Il y a une subvention
du gouvernement qui a été de 45 000 $ cette année. Les
associations étudiantes prennent entente avec l'Association nationale
des étudiants du Québec, si elles n'ont pas les moyens financiers
de payer 1 $ par étudiant et par étudiante de leur association.
Maintenant, il y a des associations là-dedans qui ne peuvent pas payer
de cotisations parce qu'elles ne sont pas reconnues par l'association
nationale, malgré des pressions depuis plusieurs années de
mouvements d'étudiants et d'étudiantes pour se faire
reconnaître. Cela explique, d'une part, un certain manque de financement
de ces associations locales où on demande simplement 10 $ en
contribution symbolique afin que ces associations étudiantes
adhèrent à l'ANEQ.
M. Leduc (Fabre): Est-ce que vous recevez un financement de la
CEQ?
Mme Muzzo: Non.
M. Leduc (Fabre): Aucun?
Mme Muzzo: Non. On a reçu des prêts. C'est tout.
M. Leduc (Fabre): En 1975? De quel ordre?
Mme Muzzo: En 1975, pour aider à lancer l'association.
M. Leduc (Fabre): D'accord. On a vraiment l'impression - je suis
un peu forcé de poser la question - compte tenu que votre mémoire
me semble un écho de ce qu'on a
déjà entendu; il me semble plutôt une défense
des intérêts de la CEQ. J'aurais beaucoup d'autres questions
à poser. J'y reviendrai peut-être, M. le Président, si j'en
ai le temps. Je veux laisser, à mon collègue de Roberval, la
possibilité de poser des questions également.
Le Président (M. Desbiens): Mlle Muzzo?
Mme Muzzo: Mme Muzzo, oui.
Le Président (M. Desbiens): Madame.
Mme Muzzo: II y avait une question sur un projet politique et
social. Est-ce que la question tient toujours ou préférez-vous y
revenir?
M. Leduc (Fabre): Oui, oui.
Mme Muzzo: D'accord. L'ANEQ, depuis sa création, tente de
mettre sur pied un projet d'école. Malheureusement, à cause des
innombrables attaques que le gouvernement effectue contre le mouvement
étudiant, que ce soit dans le régime des prêts et bourses,
que ce soit dans les régimes pédagogiques comme tels qui sont
attaqués, on n'a pas eu le temps, malgré les huit années
de notre existence, de monter un projet éducatif. Heureusement, on va
palier à ce manque parce que pour la prochaine session, il y a un
congrès d'orientation de l'ANEQ qui se prépare, depuis septembre
dernier, sur un projet d'école. À ce moment-là, on va
pouvoir beaucoup plus répondre à la question à savoir quel
est le projet d'école de l'ANEQ?
M. Leduc (Fabre): Depuis combien de temps existez-vous?
Mme Muzzo: Depuis huit ans. Le 22 mars, nous aurons huit ans.
M. Leduc (Fabre): Et vous n'avez pas autre chose à nous
dire sur vos projets politiques et sociaux?
Mme Muzzo: On s'est toujours embarqué dans des projets
avec des groupes populaires par exemple. On va participer à la grande
marche pour l'emploi, par exemple, organisée par des centrales, par la
Jeunesse ouvrière chrétienne, etc. C'est un mandat de
congrès de participer à pareille activité. On participe
également à la préparation d'une marche des jeunes pour
les problèmes spécifiques des jeunes. On a déjà
participé au Sommet populaire de Montréal sur les questions
pédagogiques. On donne notre appui aux assistés sociaux, aux
regroupements de locataires, aux garderies. En fait, on ne peut pas bâtir
seuls le projet social. On tient à le bâtir avec tout le monde,
avec les groupes populaires, avec les syndicats, avec les démunis et
cela prend du temps. On a huit ans d'existence et simplement former une
association, la consolider, cela prend déjà une bonne partie de
notre temps.
M. Leduc (Fabre): Merci.
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: Je voudrais poser une question au représentant du
Mouvement des étudiants et des étudiantes chrétiens qui
est ici. Vous avez dit que vous accordiez votre adhésion à
l'analyse qui a été présentée des
événements des derniers mois et de la ligne suivie par le
gouvernement, au nom de l'option que votre mouvement fait pour les
démunis, pour les pauvres, pour ceux qui ont le plus besoin en somme du
soutien de la communauté. J'aimerais que vous nous expliquiez comment
vous conciliez cette option avec le discours qui a servi de base à
l'option du gouvernement? Le gouvernement nous dit qu'il sera obligé
d'aller chercher des choses chez les enseignants parce qu'ils étaient
mieux traités que d'autres catégories de travailleurs dans la
société, parce qu'ils ont bénéficié de
contrats qui étaient très avantageux pour eux; et le gouvernement
nous dit qu'il veut ramener les choses à une mesure plus juste afin
d'avoir plus de ressources justement pour les démunis. Comment
répondez-vous à cette question?
Le Président (M. Desbiens): M.
Beauregard. (23 h 30)
M. Beauregard: Oui. Pour nous, ce n'est pas parce que le
gouvernement affirme qu'il coupe les salaires des enseignants pour en donner
aux plus démunis, ce n'est pas parce qu'il le dit qu'il va le faire,
d'une part. On constate que les budgets sociaux n'ont pas augmenté
considérablement. Au contraire, on sabre à grands coups dans ces
budgets. Même si le gouvernement dit que ce n'est pas pour jouer à
Robin des Bois qu'il coupe, ce n'est pas cela qu'il fait. Les coupures aux
enseignants ne vont pas directement dans la poche des plus démunis. Au
contraire, on remarque que des subventions de plus en plus importantes vont au
secteur des pâtes et papiers, à tous les secteurs et aux
entreprises. Pour nous, les plus favorisés de la société
ne sont pas nécessairement les employés des secteurs public et
parapublic. Il y a peut-être d'autres secteurs beaucoup plus
favorisés. Ce serait plutôt une classe moyenne qu'on vise
actuellement. La classe très favorisée n'est absolument pas
visée par les attaques du gouvernement, au contraire. C'est par une
politique de taxation des profits des très hauts salariés que
l'on aurait
pu amener une justice sociale plus grande, une équité plus
grande et favoriser les plus démunis.
Ce n'est absolument pas le cas. Au contraire, la taxation des profits
des entreprises a été diminuée de beaucoup, depuis 1971,
comme on le dit dans le mémoire. Nous considérons que,
finalement, le gouvernement a de beaux discours sur ce sujet sauf que sa
pratique en est très éloignée. Il vise la classe moyenne
alors qu'il devrait viser ceux qui sont vraiment plus favorisés pour
donner vraiment aux plus pauvres. Mais, actuellement, on assiste à une
dissolution de la classe moyenne qui favorise les gens déjà plus
favorisés. L'exercice que le gouvernement fait en ce moment n'aidera pas
du tout les plus défavorisés.
M. Ryan: Si j'ai bien compris, vous considérez que les
mesures prises par le gouvernement vont entraîner un affaiblissement de
l'enseignement public et auront des conséquences sérieuses pour
les jeunes qui ont droit à l'éducation?
M. Beauregard: C'est clair. En plus d'éliminer la classe
moyenne plutôt que de s'attaquer aux surplus des riches, on sabre dans
les budgets sociaux et il est évident que ce sont toujours les plus
défavorisés de la société qui sont tributaires des
budgets sociaux. Dans l'éducation, comme il est exposé dans le
mémoire, ce sont les plus défavorisés de la jeunesse qui
vont avoir à subir les réaménagements des décrets,
la baisse de la qualité de l'enseignement.
M. Ryan: Est-ce que je peux demander si la position de votre
association est encore celle que vous aviez préparée au
début des travaux de la commission: les quatre recommandations?
Peut-être qu'on peut les prendre une à une: retrait de la loi 111,
je pense que cela reste votre position, à moins que je ne me trompe?
M. Beauregard: Oui.
M. Ryan: Peut-être pourriez-vous dire où vous en
êtes ce soir sur chacun de ces quatre points?
M. Beauregard: D'accord.
Le Président (M. Desbiens): M.
Beaudoin.
M. Beaudoin: Merci.
M. Ryan: Voulez-vous nous dire comment vous est apparu le
cheminement du travail de la commission? Est-ce qu'il s'oriente vers cela ou
s'il s'est éloigné des objectifs que vous entrevoyez?
M. Beaudoin: D'accord. L'objectif qu'on visait, c'était
une reprise des négociations dans un cadre assez propice à la
poursuite de la trêve, c'était la levée du mot d'ordre de
grève pour le 14 mars. Cela passait par le retrait de la loi 111.
D'après nous, cette mesure devrait être mise en application
immédiatement bien que nous soyons bien conscients qu'il y ait une
possibilité, si tout le monde est de bonne foi, de continuer à
travailler même si elle est là. Pour que les conditions soient les
plus propices à un règlement dans les jours ou dans les semaines
qui viennent, la loi 111 devrait être retirée.
Notre deuxième recommandation, c'était textuellement: "Que
le gouvernement accepte de négocier avec ses employés dans le
cadre du régime des relations du travail qui était en vigueur
avant l'adoption des lois 68, 70, 72, 105 et 111..." dans la mesure où
cette dernière serait abrogée pour le moment. En disant cela,
cela pouvait être compris comme étant l'abrogation
immédiate de ces lois, mais cela pouvait vouloir dire aussi que, dans la
mesure où tout le monde est prêt à faire des ouvertures, on
va se mettre à négocier dans l'esprit du Code du travail et du
régime de relations du travail. Ce n'est pas pour rien qu'elle a
été formulée comme cela et qu'on disait de la faire dans
le cadre moral du régime de relations du travail qui était en
vigueur. On pense que cette disposition -on ne parle pas de recommandation
technique mais on parle plutôt de mettre en place une disposition morale
pour les deux parties -doit encore tenir.
Quant au droit de grève, tel que reconnu par le Code du travail,
il est bien évident que, dans la mesure où on maintient pour le
moment la loi 70 en particulier et la loi 105 qui ont entraîné des
modifications à l'exercice du droit de grève, cela ne tient pas
comme tel. Et que le gouvernement cesse sa campagne de propagande contre les
travailleurs et les travailleuses des secteurs public et parapublic, cela nous
apparaît encore comme un élément essentiel au
règlement du conflit.
Maintenant sur ce sujet, quelle évaluation peut-on faire des
travaux de la commission parlementaire? Je pense qu'on a constaté, on a
pris bonne note et on a apprécié l'attitude de compromis que la
CEQ a adoptée ici en mettant clairement sur la table les concessions
salariales et celles sur les modifications des régimes de retraite, tel
que cela a été présenté. Cela circulait dans les
airs, tout le monde entendait dire que la CEQ était prête à
faire des concessions sur cette question, mais cela a été
posé clairement sur la table comme un élément dont on
avait disposé de sorte qu'on pouvait pratiquement repartir les
négociations à neuf sur ce qui restait dans la mesure où
le gouvernement était de bonne foi. Je pense
qu'on a pu apprécier cela positivement, comme on a pu
apprécier aussi le fait qu'on ait voulu reprendre les
négociations avec la présence d'un observateur-conciliateur dont
le statut n'est pas encore tout à fait défini. Mais le ministre
Laurin nous a confirmé tantôt que cela se ferait dans l'esprit de
ce qui est déjà prévu comme mesures de conciliation au
Code du travail. On pense que c'est une mesure susceptible d'aider au
rapprochement quant au conflit qui nous concerne.
Maintenant, ce qu'on a moins apprécié et qui n'est pas
dans le cadre comme tel des travaux de la commission parlementaire, bien
sûr, c'est le fameux journal qui a été distribué
vendredi. Juste à voir les réactions que les syndicats ont eues
par rapport à cela nous confirme le fait que ce n'était pas une
mesure nécessaire, que cela ne faisait que jeter de l'huile sur le feu
et ne pouvait finalement avoir comme conséquence que de faire en sorte
que la CEQ soit moins disposée à reprendre les
négociations dans les jours qui viennent, dans un esprit de
régler au plus vite. Disons qu'on ne peut pas faire abstraction de cet
événement dans le bilan des travaux de la commission
parlementaire et on pense que, finalement, c'est une tache noire qui reste.
M. Ryan: Est-ce que vous avez suivi les travaux de la commission
parlementaire depuis le début ou si vous étiez ici seulement au
début et ce soir?
M. Beaudoin: On les a suivis, pour l'essentiel, du début
jusqu'à la fin, sauf exception, c'est-à-dire qu'il y a eu au
moins une représentation ici mercredi, jeudi et une bonne partie de la
journée vendredi et également aujourd'hui, depuis la fin de
l'après-midi.
M. Ryan: Dans l'ensemble trouvez-vous que les organismes ont
été reçus convenablement?
M. Beaudoin: Oui. En tout cas, nous considérons avoir
été reçus convenablement et je pense qu'il n'y a pas eu de
problème comme tel à ce sujet. Je pense que tout le monde peut
bien se rendre compte que cela a été très long, que cela
s'est terminé tard et que ce n'était pas nécessairement
les meilleures conditions pour un débat sain, sauf que cela s'explique
aussi par l'ampleur des questions qui avaient à être
abordées.
M. Ryan: Vous avez dû remarquer que les opinions
étaient extrêmement partagées, qu'il y avait des opinions
qui allaient dans un sens et d'autres, dans l'autre. Ce sera ma dernière
question, d'ailleurs: Quand on vous dit - encore une fois, je mets ceci un peu
entre parenthèses, parce que les études sur lesquelles s'appuient
certains pour faire ces affirmations restent à vérifier dans la
plupart des cas - que certaines catégories de travailleurs au
Québec jouissent de conditions assez supérieures à celles
qui sont données à des travailleurs comparables dans d'autres
sociétés parfois plus riches que le Québec -la comparaison
avec l'Ontario est l'une des plus fréquemment évoquées de
ce côté -qu'est-ce que vous dites, dans l'optique toujours
d'option préférentielle pour les pauvres et les
privilégiés? Comment réagissez-vous à cela?
Le Président (M. Desbiens): M.
Beauregard.
M. Beauregard: Peut-être que l'Ontario est une
société plus riche, mais elle n'est pas nécessairement
plus égalitaire. Nous ne croyons pas que ce soit à la mesure de
ce qui se passe en Ontario qu'on doit gérer ce qui se passe au
Québec.
M. Beaudoin: Toutes ces analyses ne sont pas
nécessairement concluantes. Par exemple, il y a eu une comparaison qui a
été faite par la CEQ, qu'on pouvait considérer comme
étant tout aussi valable quant aux salaires, avec d'autres groupes
d'enseignants au Canada anglais. Je pense que tout cela reste à analyser
et à discuter sans qu'on puisse en tirer de conclusion
arrêtée. Je pense qu'on ne peut pas, non plus, regarder le
résultat de ces analyses sans tenir compte, justement, du contexte et du
type de société dans lequel ces conditions sont en vigueur. C'est
peut-être ce qu'il y a de plus important sur ces comparaisons qui restent
à faire, jusqu'à maintenant, à notre avis.
Il y a des députés et aussi des membres de la commission
parlementaire qui ont évoqué qu'on ne peut pas, par exemple,
comparer platement le salaire d'un enseignant au Québec ou le salaire
d'un enseignant en Ontario ou comparer, par exemple, le coût pour
maintenir un enfant à l'école pendant un an au Québec et
en Ontario sans tenir compte des différences bien simples de
société qui sont le quadruple réseau scolaire au
Québec, les subventions aux collèges privés. On a
parlé aussi du ratio cadre-étudiants qui est une donnée
qu'on devrait cerner et dont il faudrait tenir compte par rapport à
l'ensemble. Ce sont toutes des choses qui n'ont pas encore été
faites, je pense, et qui ne nous permettent pas de tirer des conclusions
arrêtées sur les données qui ont été
présentées.
M. Ryan: Merci.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Roberval.
M. Gauthier: Merci, M. le Président. Comme on m'a
déjà reproché de ne pas intervenir suffisamment à
certains moments à la commission parlementaire, je ne manquerai pas de
poser quelques questions à nos invités. Il y a quand même
des choses dans le mémoire qui revêtent un intérêt
certain. Mais il y a des choses qui font sursauter et il y a des choses
également, je pense, qui relèvent à tout le moins d'un
certain pessimisme.
À titre d'exemple, au début du mémoire, vous vous
présentiez, madame, à la commission parlementaire en disant que
l'ANEQ exprimait des doutes plus que sérieux sur la valeur de la
commission parlementaire. J'avais l'intention de vous demander un peu comment
vous pouviez expliquer un pessimisme aussi évident en début de
mémoire. Cependant, je vois que cela ne tient probablement plus parce
qu'on a dit tout à l'heure que le mémoire avait été
écrit au début de la commission et qu'il n'avait pas
été ajusté en fonction du déroulement des
événements. C'est donc dire, j'imagine, que vous reconnaissez par
le fait même que la commission parlementaire a fait évoluer la
situation puisque cela aurait pris un ajustement du mémoire pour le
rendre conforme à une présentation aussi tardive. Si vous avez
des commentaires, vous pourrez les noter et commenter après, si vous le
désirez.
Vous avez également mentionné dans le mémoire que
le gouvernement avait tout fait pour conserver le mythe d'une fonction publique
trop grasse. J'aimerais avoir quelques détails là-dessus parce
qu'il me semble qu'il est généralement reconnu dans les chiffres
qu'on connaît et dans les échanges qu'on a avec nos
électeurs ou avec les citoyens en général que les chiffres
de progression de la fonction publique, particulièrement dans les
années 1974, 1975, 1976, ont augmenté considérablement. Si
ma mémoire est fidèle, c'est d'environ 100 000 personnes,
à peu de chose près. Il me semble bien qu'il y a eu là une
augmentation assez considérable.
Également, puisqu'on parle des enseignants plus
particulièrement, le nombre d'enseignants depuis quelques années
a baissé de 2,9% ou 3% environ, avec une baisse de clientèle
quand même plus substantielle. Il ne m'apparaît pas, au moment
où on se parle, que la fonction publique soit si maigre que cela. Il me
semble que la fonction publique se porte assez bien. Ce gouvernement, depuis
quelques années, a limité la croissance de la fonction publique.
Je pensais que c'était un jugement que vous portiez. Quant à
savoir si la fonction publique était relativement maigre ou bien
portante, à votre point de vue, vous pourrez me commenter cela
tout à l'heure.
Vous avez parlé également - c'est une remarque que je veux
vous faire - de ramener le niveau de taxation des entreprises à celui de
1971. Je pense bien que sur la taxation des entreprises, il est bon de savoir
que, évidemment, tout ce problème de la taxation se fait dans un
marché concurrentiel. On ne peut indûment taxer ou détaxer
une entreprise ou les citoyens, peu importe, sans que cela ait des influences
déterminantes sur les marchés face aux concurrents. Vous savez
que les entreprises québécoises sont en concurrence avec des
entreprises américaines, des entreprises japonaises, des entreprises
canadiennes, ontariennes, etc. Évidemment, on ne peut pas faire fluctuer
indûment le taux de taxation d'une entreprise sans risquer de changer
d'une façon qui peut être dramatique sa position sur le
marché de la concurrence. (23 h 45)
Alors, il y a quand même une mise en garde qu'on peut faire
là-dessus. On ne l'abordera pas dans ce débat, mais je pense
qu'il convient d'être prudent dans ce secteur. Je n'ai,
évidemment, pas les chiffres pour faire la démonstration
pratique, mais je pense que c'est le genre d'affirmation sur lequel il ne faut
pas insister trop, à moins d'avoir des exemples très probants que
les entreprises du Québec sont beaucoup moins taxées que celles
d'ailleurs et qu'elles pourraient supporter des charges fiscales bien
supérieures.
Également, vous avez dit dans votre mémoire - j'aimerais
avoir votre explication là-dessus, si vous voulez en prendre note -que
les travailleurs du secteur public seraient les seuls à supporter la
crise économique. Tout de même, il faut voir, dans un comté
comme le comté de Roberval que j'ai l'honneur de représenter, les
travailleurs forestiers, les scieries, la construction, les commerçants,
les hommes d'affaires, les employés de magasin; ce sont des gens qui
sont touchés on ne peut plus durement par la crise économique. Je
pourrais vous citer des exemples dans mon comté où dans des
paroisses de moins de 2000 personnes, environ 100 familles ne peuvent plus
compter, tout d'un coup, que sur l'aide sociale, après avoir fait un an
de chômage parce que la scierie était fermée. Il faut
nuancer quand on dit que les travailleurs du secteur public sont les seuls
à supporter la crise. Il y a tout de même une baisse de la
richesse collective qu'on ne peut nier et qui est d'environ 6%. Alors, s'il y a
une baisse de la richesse collective de 6%, je ne pense pas que, parmi les
travailleurs des secteurs public ou parapublic, il y en ait un seul qui ait
perdu au niveau salarial; au contraire, il a eu une augmentation, même
minime, sur le salaire de l'an passé. Il faudrait voir les chiffres
à ce sujet.
Également, vous avez dit dans votre mémoire - et je dois
le relever - que le
gouvernement n'a rien fait pour les plus démunis. Je voudrais
corriger un peu cette affirmation en disant que le gouvernement a investi tout
récemment, pour faire face justement à ce chômage aigu,
quelque 160 000 000 $, si ma mémoire est exacte, dans des programmes de
création d'emplois, temporaires, hélas, pour la plupart. Mais je
pense que ce sont 160 000 000 $ qui ont été investis pour les
plus démunis. La compréhension que j'ai de quelqu'un qui ne
travaille pas est qu'il est plus démuni que celui qui travaille,
à mon point de vue. Peut-être que vous avez d'autres exemples pour
démontrer cette affirmation, mais il m'apparaît que c'est un
jugement bien sommaire.
Vous dites également que le gouvernement a bafoué la
Charte des droits et libertés de la personne par l'article 28 de la loi
111. Je voudrais vous demander: À votre point de vue, quel droit est le
plus fondamental, le droit à la grève ou le droit à
l'éducation? J'aimerais que vous m'expliquiez dans quel ordre vous
placez ces droits, parce qu'ils sont inclus tous les deux dans la Charte des
droits et libertés de la personne.
Vous avez également cité le ministre fédéral
des Finances qui disait qu'il allait augmenter son déficit pour venir en
aide aux plus démunis. Je vous ferai remarquer qu'en regardant les
chiffres ce n'est peut-être pas l'exemple à donner de ce temps-ci.
Avec un déficit de près de 30 000 000 000 $, qui a
multiplié par 300% les prévisions du début de
l'année, je m'inquiéterais de citer un pareil exemple. Si le
Québec faisait comme le ministre fédéral des Finances
actuel et multipliait le déficit prévu par 300%, cela voudrait
dire qu'on se ramasserait avec un déficit de 9 000 000 000 $.
Évidemment, avec 9 000 000 000 $, on réglerait bien des
problèmes, sauf que c'est peut-être vous, les jeunes, qui auriez
des problèmes dans quelques années, parce que, lorsqu'on
emprunte, en général, il faut rembourser.
J'aurais bien d'autres commentaires, M. le Président. Combien de
temps me reste-t-il? Il me reste cinq ou dix minutes?
Le Président (M. Desbiens): Vous avez utilisé huit
minutes de votre temps.
M. Gauthier: Alors, je peux me permettre encore quelques minutes.
Vous avez dit également une chose qui est très inexacte,
c'est-à-dire que le gouvernement, en sabrant dans le salaire de ses
employés, crée du chômage. Il faut bien comprendre que
c'est là une notion qui est dangereuse à véhiculer. Si le
gouvernement retirait effectivement de l'économie les quelques centaines
de millions qui constituent, si on veut, la demande d'accroissement de
productivité des employés des secteurs public et parapublic et
également les restrictions de l'augmentation de salaire, si le
gouvernement retirait cet argent tout bonnement pour placer ces montants dans
des coffres quelque part, évidemment, cela créerait du
chômage. Ce qu'il faut comprendre, c'est qu'un gouvernement étant
un répartiteur de la richesse doit, pour consacrer des sommes d'argent
à une certaine quantité de personnes, les prendre ailleurs. Le
gouvernement déplace des sommes d'argent. La question est de savoir:
Est-ce que le gouvernement, en refusant de déplacer des sommes d'argent
provenant d'autres secteurs, d'autres travailleurs, d'entreprises
privées, de magasins, de tout ce que vous voudrez, vers le secteur
public crée du chômage? C'est une question à laquelle
j'aimerais que vous m'apportiez une réponse.
Également, vous avez mentionné que vous aviez de la
difficulté à rencontrer les professeurs actuellement. Je pense
que vous représentez les étudiants de cégeps et
d'universités. J'imagine que vos professeurs ne sont peut-être pas
très fiers de vous au moment où on se parle, parce qu'avec une
charge de travail d'environ douze ou quinze heures au collège et quelque
six heures de cours à l'université avec des travaux de recherche,
cela va de soi qu'il s'agit là de conditions de travail qui ne sont pas
exceptionnelles, c'est bien normal, mais qui sont tout de même
intéressantes et qui doivent permettre un contact
maître-élève relativement suivi. Si tel n'est pas le cas,
évidemment, je me pose des questions. En demandant un accroissement de
charge de deux heures par semaine aux cégeps et dans les
collèges, évidemment, cela serait problématique.
D'ailleurs, quand ils ont comparu ici, les enseignants de cégep nous ont
expliqué qu'ils passaient beaucoup de temps à l'encadrement,
à la préparation, à l'animation des étudiants; je
ne sais pas exactement dans quelle proportion. J'aimerais savoir quelle
proportion du temps devrait être consacrée, selon vous, à
l'enseignement pour que vos professeurs aient le temps de vous rencontrer.
Est-ce que, finalement, ce n'est pas un jugement un peu sommaire que vous avez
porté envers vos enseignants? Ceux que je connais, en
général, sont assez disponibles, du moins dans ma
région.
Enfin, vous avez dit que la loi 105 faisait du gouvernement du
Québec le plus autoritaire et le plus antidémocratique au Canada.
Je vous demande simplement de répondre à la question suivante:
Est-ce que vous savez de quelle façon l'ouverture des conventions
collectives s'est faite en Ontario et au gouvernement fédéral?
Est-ce que vous savez de quelle façon les taux de salaires en pleine
convention ont été changés par ces autres gouvernements?
Peut-être, si vous avez cette information, pourriez-vous m'expliquer
comment vous pouvez concevoir
qu'un gouvernement qui ouvre unilatéralement, sans aucune
discussion, sans aucun avertissement, les conventions collectives en cours, qui
impose 6% et 5% d'augmentation de salaire et referme les conventions au moment
où il est prêt à le faire, est plus démocratique que
le gouvernement du Québec dans la discussion et le débat qu'il a
entrepris avec ses employés, même si, dans le cas de la CEQ en
particulier et de la Fédération nationale des étudiants,
ce débat ne s'est pas soldé nécessairement pas un
succès. Je voudrais que vous m'expliquiez en quoi c'est plus
démocratique de décider d'ouvrir les conventions tout seul, de
fixer les taux tout seul et de refermer tout seul ces conventions que le
débat qui s'est passé au Québec et qui a permis à
la plupart des syndicats, finalement, au moins de faire entendre leurs points
de vue et de suggérer certains aménagements à
l'intérieur de ce cadre qui est, c'est vrai, défavorable, mais
dans lequel tout de même ils ont pu se faire entendre.
Je pense que vous avez suffisamment de questions et mon temps doit
achever. Avant que le président me rappelle à l'ordre, j'aimerais
que vous répondiez à quelques-unes de ces questions. S'il me
restait du temps, M. le Président, j'en aurais encore quelques-unes,
mais je vais me limiter.
Le Président (M. Desbiens): Cela me surprendrait fort, M.
le député de Roberval. M. Beaudoin.
M. Beaudoin: M. le Président, rapidement, concernant votre
premier commentaire à propos de l'évaluation qu'on avait faite de
la possibilité pour cette commission parlementaire d'aider à un
règlement du conflit, il faut bien voir qu'on mentionnait qu'on
n'était pas les seuls à le dire; effectivement, il y a bien des
gens qui avaient émis des doutes sur le fait qu'une simple commission
parlementaire puisse modifier le cours des choses. Je pense qu'effectivement -
on l'a écrit, on l'a dit et on le répète - dans le cadre
de la convocation uniquement d'une commission parlementaire, il n'y aurait pas
grand-chose nécessairement qui pouvait aider le rapprochement des deux
parties. Je pense que, quand l'idée de la commission parlementaire est
venue sur la table, elle venait du président du Conseil supérieur
de l'éducation et était attachée à la proposition
d'une médiation, d'une conciliation ou dans le but d'introduire un autre
élément dans le débat qui pouvait finalement aider
à un règlement, à faire la part des choses. C'est dans ce
cadre qu'on a pu dire qu'on ne pensait pas que la commission parlementaire on
le dit encore - pouvait régler le problème.
Il a fallu que la commission parlementaire se tienne pour que le
ministre accepte la médiation, la conciliation ou la tierce partie. Si
cela a pris une commission parlementaire pour en arriver à ça,
peut-être qu'on aurait pu gagner un peu de temps. Il y a
déjà un mois, cinq semaines, six semaines, beaucoup de groupes de
pression ou certains groupes intéressés par la négociation
demandaient l'installation d'une médiation ou d'une conciliation
quelconque. Si on l'avait acceptée, si on était embarqué
dans ce processus, peut-être qu'il n'y aurait même pas eu lieu de
tenir cette commission parlementaire.
Concernant la dernière question à propos des comparaisons
qu'on a pu faire avec les autres gouvernements au Canada, si le gouvernement
avait imposé des augmentations de salaires de 6% et 5% à ses
employés, je pense qu'on n'en serait pas rendu là. Il a
été question de beaucoup plus que ça. On est tout à
fait prêt à qualifier les attaques que les autres gouvernements
ont faites quant à la réouverture des conventions collectives,
particulièrement en Ontario et dans la fonction publique
fédérale. C'étaient des attaques antidémocratiques.
Je pense qu'on peut les qualifier différemment dans la mesure où,
au moins, on se contentait seulement de la récupération salariale
qui n'était pas si accentuée que dans le cas qui nous concerne
actuellement. Je ne pense pas que, dans ces secteurs-là, on en ait
profité pour remettre en question des acquis syndicaux, puis pour le
faire quasiment exprès pour provoquer les syndicats sur des questions
qui n'avaient même pas d'incidence budgétaire. Je fais
référence ici, par exemple, à l'autonomie
départementale au niveau des cégeps. Je ne pense pas qu'au niveau
des autres gouvernements - fédéral et ontarien - on en ait
profité pour remettre en question un tas de pratiques et d'acquis qui
étaient courants, à l'occasion de ces modifications qui ont
été faites au traitement des employés de la fonction
publique.
Le Président (M. Desbiens): Mme
Muzzo.
Mme Muzzo: Si on parle de la baisse des enseignants et des
enseignantes, on parle aussi de la baisse de la clientèle et l'on
considère que, par rapport à ça, il y a comme du gras;
sauf que, si on considère les chiffres, il y a seulement 29% des jeunes
venant des secteurs primaire et secondaire qui atteignent le cégep. Ce
n'est pas du gras. Si on regarde une étude du Conseil supérieur
de l'éducation, seulement 50% des étudiants et étudiantes
du secondaire réussissent à avoir leur DEC. Il y a un
problème quelque part, puis ce n'est pas en coupant qu'on va le
régler.
Beaucoup de jeunes sont obligés
d'abandonner leurs études parce qu'ils ne sont pas admissibles
à un régime de prêts et bourses. Ce n'est pas parce qu'on
habite chez ses parent qu'on n'a pas à payer pension, parce qu'eux aussi
ont de la misère à joindre les deux bouts. Il y a souvent des
problèmes familiaux qui font qu'on doit quitter la maison; ça ne
nous donne pas d'argent. Il y a beaucoup d'étudiants et
d'étudiantes qui doivent vivre avec 3000 $ et même moins par
année. Pourtant, en 1978, c'était nous qui étions
considérés comme des privilégiés.
Ensuite, on n'a pas dit que la crise économique touchait
seulement les travailleurs et travailleuses des secteurs public et parapublic.
On a dit qu'on s'en prenait pratiquement seulement à eux surtout pour
subir les conséquences de la crise économique, à savoir
qu'eux et elles doivent se serrer la ceinture.
Le gouvernement propose des alternatives à la jeunesse: il va
donner une couple de centaine de milliers de dollars pour subventionner le
Sommet québécois de la jeunesse; en tout cas, c'est un projet qui
est sur la table. Pourtant, il y a des groupes de jeunes qui existent en ce
moment, des groupes qui s'occupent des jeunes, comme les services 15-20, les
18-30, l'Association pour la défense des droits sociaux, le Bureau de
consultation-jeunesse qui auraient besoin de subventions. Le Bureau de
consultation-jeunesse voulait mettre sur pied des cliniques dans les
cégeps où on aurait parlé de planification des naissances,
des moyens contraceptifs, des dangers du syndrome du choc toxique des tampons
pour les filles menstruées, etc. Ce sont des services qui n'existent pas
dans les cégeps. Pourtant, si on a l'âge de procréer, on
doit savoir comment ne pas procréer. Pourtant, vous donnez de l'argent
à un organisme qui se veut le porte-parole de la jeunesse et les groupes
existant déjà, qui ont fait leurs preuves chez la jeunesse, ne
sont pratiquement pas consultés. On parle déjà d'un
secrétariat d'État à la jeunesse. Est-ce que ces groupes
ont été consultés à savoir quels devraient
être les objectifs de ce secrétariat d'État? Est-ce qu'il
devrait y avoir un secrétariat d'État, etc? (minuit)
Ensuite, le droit de grève par rapport au droit à
l'éducation. Ce que vous me dites, c'est de choisir entre un droit de
grève, qui, en ce moment, a privé les étudiants et les
étudiantes de l'enseignement, et le droit à l'éducation.
Sauf que par les coupures que vous faites, par les programmes
pédagogiques que vous mettez sur pied, vous mettez beaucoup plus en
danger le droit à l'éducation en ce moment qu'une grève de
quelques semaines des enseignants et des enseignantes pour conserver
minimaiement des conditions de travail et d'enseignement.
Quand on parle, par exemple, du ratio maître-élèves,
je ne sais pas si vous avez déjà été dans une
classe où il y a 40 étudiants et étudiantes. Ce n'est pas
"écoutable"! Ce n'est pas "enseignable"! C'est là qu'on voit
qu'il va y avoir une séparation de ceux qui sont plus intelligents, qui
prennent plus rapidement les renseignements par rapport à d'autres qui
auraient besoin d'un peu plus d'aide. Quand on parle aussi de ces classes, on
dit au professeur de donner des cours magistraux parce que, dans ces
conditions, par exemple, de 40 élèves dans une classe, c'est
pratiquement la seule façon d'enseigner.
Quand on parle de la disponibilité des professeurs, on dit qu'ils
enseignent seulement 12 heures, etc., sauf que les professeurs doivent se
mettre à jour au niveau des livres. Ils doivent faire de la recherche,
par exemple, quand ils veulent présenter des vidéos. Ils doivent
se mettre à la recherche de certains films ou de certaines diapositives,
ce qui demande un temps de recherche qui n'est pas nécessairement
considéré quand on fait du 9 à 5 dans un bureau, par
exemple. Souvent, il faut qu'ils aillent faire des recherches pendant la fin de
semaine ou après leurs heures de travail, etc. Il faut tenir compte de
cela.
Quand on disait, par exemple, que déjà on avait de la
difficulté à voir des professeurs, ce n'est pas qu'ils ne sont
pas disponibles, mais, à un moment donné, quand on a une classe
de 30, 40 élèves et que chaque étudiant et
étudiante aurait besoin d'aller voir le professeur pendant une heure ou
deux, évidemment, il y a un manque de temps.
Le Président (M. Desbiens): Je vous remercie.
M. Gauthier: Une toute dernière, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): Vous avez déjà
dépassé les 20 minutes.
M. Gauthier: C'est parce que je n'ai pas eu ma réponse
concernant le droit le plus fondamental.
M. Ryan: On ne peut pas consentir.
Le Président (M. Desbiens): II n'y a pas de
consentement.
M. Gauthier: Vous ne pouvez pas consentir?
Le Président (M. Desbiens): II n'y a pas de consentement
de l'autre côté.
M. Ryan: II y a encore un autre
organisme à entendre. Il faut être réaliste.
M. Gauthier: Je suis très réaliste. Je vous
demandais la permission.
Le Président (M. Desbiens): Je dois donner le droit de
parole au député de Marquette. Pour équilibrer des deux
côtés, vous auriez 18 minutes.
Mme Lavoie-Roux: Pourriez-vous me laisser trois minutes?
M. Dauphin: Oui, je vous en laisserai. Merci, M. le
Président. Je ne crois pas effectivement avoir ambitionné sur le
temps qui m'a été dévolu depuis le début de nos
travaux à cette commission parlementaire. Contrairement au
député de Fabre et adjoint parlementaire du ministre de
l'Éducation, je ne tenterai pas par mes questions de vous
discréditer. Tout le monde sait actuellement que le parti qu'il
représente n'est pas le symbole de l'unité au moment où on
se parle. Je suis d'accord sur un point que vous avez apporté dans vos
explications supplémentaires, à savoir que le gouvernement, en
pleine commission parlementaire, n'a pas nécessairement contribué
à la réconciliation que nous avons tous voulue, du moins de ce
côté-ci de la table, par le tract qui a été
distribué vendredi dernier.
J'aurais seulement deux questions à vous poser, car je sais que
certains collègues, de mon côté, ont d'autres questions
à vous poser. Je sais également que nous avons droit à 18
minutes, d'après les paroles du président. La semaine
dernière, il y a un groupe qui est venu faire des représentations
devant cette commission. Il s'agit de la Coalition étudiante pour la
défense des usagers de l'éducation regroupant le RAEU et la
FAECQ. Contrairement à votre mémoire, l'essentiel de leur
mémoire portait surtout sur la défense des droits des usagers. Je
comprends, dans votre mémoire, que vous avez une position quand
même assez claire - c'est-à-dire, disons-le franchement, contre
l'attitude du gouvernement - à laquelle je souscris en partie, je le dis
en passant, sur l'approche de toutes les négociations que nous avons
eues jusqu'à maintenant.
Ma première question est la suivante. Vous parlez de l'attitude
du gouvernement, des supposées négociations qu'il y a eu et, dans
votre raisonnement, effectivement, c'est le gouvernement qui a eu la mauvaise
attitude. J'aimerais vous demander, dans un premier temps, pour quelles raisons
vous n'avez pas accordé plus de temps, si vous me permettez
l'expression, aux usagers, aux premières victimes du conflit. Nonobstant
le fait que ce soit la partie patronale ou syndicale qui ait tort, si vous
voulez, il y a le risque de perdre l'année scolaire, de recommencer
l'année ou ces choses-là.
Dans un deuxième temps, vous avez fait mention du projet de
règlement des études collégiales, des associations
étudiantes, de la cotisation étudiante, de la perception du
gouvernement et du ministre de l'Education, des directives qui sont
jugées illégales par leurs conseillers juridiques. À mon
point de vue, au niveau de la survie des associations étudiantes, au
risque d'engager qui que ce soit, la seule façon de survivre
effectivement, c'est de permettre la cotisation à la source, et de
façon obligatoire.
Un autre groupe a proposé, au niveau du prêt, une
commission indépendante neutre. Le ministre dit qu'il veut consulter les
étudiants avant de mettre en application son projet de règlement
des études collégiales.
J'aimerais également, dans un deuxième temps, avoir votre
avis là-dessus. Avant que le ministre fasse quoi que ce soit de
façon unilatérale, ce qui caractérise un peu son
gouvernement depuis plusieurs mois, seriez-vous d'accord, au niveau des
études collégiales, qu'une commission indépendante ait
lieu avant que le ministre bâillonne qui que ce soit au niveau de ce
programme?
Le Président (M. Jolivet): Mme Muzzo.
Mme Muzzo: Merci. Qu'on n'ait pas accordé plus de temps
pour les droits des étudiants et des étudiantes, je pense que
l'optique de beaucoup d'étudiants et d'étudiantes membres de
l'ANEQ c'est qu'ils et elles ne sont pas simplement des étudiants et des
étudiantes, mais des citoyens et des citoyennes. Il y en a qui sont
syndiqués, il y en a d'autres qui sont mère monoparentale, ou
père monoparental. Ils sont affectés par la vie politique, la vie
sociale du Québec; c'est à ce niveau-là qu'on a le plus
tenté de montrer comment, en attaquant aussi durement les
syndiqués des secteurs public et parapublic, cela ne favorise aucunement
de l'aide à ces personnes-là.
Quand on dit qu'on est contre la loi 105, on protège les droits
des étudiants et des étudiantes parce que déjà pour
plusieurs c'est minimal, les conditions d'études que l'on a
actuellement. C'est en dénonçant la loi 105, en disant pourquoi
on la dénonce, qu'on protège directement les droits de nos
membres.
M. Beaudoin: Concernant la suggestion qui a été
faite d'une commission indépendante qui pourrait étudier les
implications du projet de règlement des études
collégiales, si ce projet venait sur la table, on consulterait nos
membres, puis on verrait ce que l'on envisagerait par rapport à
ça. De prime abord, je pense qu'on serait bien disposé à y
participer et à donner notre
concours à la tenue d'une commission comme celle-là.
Maintenant, on n'a pas été avisés d'un projet qui irait
clairement dans ce sens. On n'est pas en mesure de prendre position.
Éventuellement, on consultera nos membres; c'est toujours ce que l'on
fait de notre côté avant de prendre position.
Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Ce sera très court, M. le
Président. J'ai deux petites mises au point a la suite des interventions
du député de Roberval. Le député de Roberval a
tenté de justifier la loi 70 ou les lois spéciales du
gouvernement en disant que l'Ontario avait fait pire puisque
unilatéralement on avait accordé une augmentation de 6% et de 5%
aux travailleurs du secteur public de l'Ontario pour ensuite refermer la
convention. Je pense que le député de Roberval ne voulait
certainement pas induire l'Assemblée en erreur, c'est probablement qu'il
est mal informé. Comme il y a beaucoup de gens qui nous écoutent,
je pense que c'est peut-être important de replacer les choses d'une
façon plus exacte.
Le gouvernement de l'Ontario n'a pas fait de récupération,
c'est-à-dire aller chercher chez ses employés de l'argent
déjà gagné, ce que le gouvernement actuel a fait. Il n'a
pas, non plus, gelé les salaires puisqu'il les augmente de 6% et de 5%
pour deux années consécutives. Une autre chose extrêmement
importante, c'est que le reste de la convention collective des gens de
l'Ontario demeure négociable, les salaires mis à part. Je pense
qu'il y a là une importante différence.
La deuxième chose porte sur une autre remarque qu'il a faite.
Vous avez soulevé le fait que l'application de la loi 111 mettait de
côté une partie de la Charte des droits et libertés de la
personne. Il vous a répondu à cette question: Est-ce que c'est le
droit de grève qui doit avoir priorité sur le droit à
l'éducation? Je pense que c'est une question qui pourrait faire l'objet
d'un débat intéressant en soi. Toute la population, de toutes les
tendances, blâme le gouvernement d'avoir, soi-disant pour établir
le droit à l'éducation et arrêter les grèves
illégales, mis à l'écart la Charte des droits et
libertés de la personne. Ceci n'était pas nécessaire pour
que les gens retournent au travail, parce qu'il y avait des sanctions
extrêmement sévères dans cette loi qui n'ont pas encore
été appliquées. Il n'y avait nulle nécessité
de suspendre la Charte des droits et libertés de la personne. Il ne faut
pas essayer de confondre les choses.
On pourrait faire un débat à savoir si le droit de
grève a priorité sur le droit à l'éducation ou vice
versa. On pourrait le faire ce débat. Mais la question fondamentale est
de savoir si, pour permettre aux enfants d'avoir leur droit à
l'éducation, par exemple, il faut suspendre dans une de ses parties la
Charte des droits et libertés de la personne. Je pense que c'est le fond
du problème. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Est-ce qu'il y a des
gens qui veulent réagir? Non? M. le député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: Merci, M. le Président. Très
brièvement, toujours à l'intérieur des 18 minutes qui nous
sont allouées. La présentation qui nous a été faite
par les représentants de l'ANEQ me fait retenir essentiellement une
chose qui, d'une manière extrêmement regrettable, ne semble pas
être retenue par nos collègues d'en face. C'est qu'il y a une
inquiétude profonde de la part des étudiants et des
étudiantes. Ils se posent de très sérieuses questions sur
les conséquences des actes qui sont posés aujourd'hui pour
demain, pour leur avenir. Je pense que cette conclusion s'impose
d'elle-même. On doit reconnaître avec eux, très
sincèrement, que l'inquiétude qu'ils ont n'est pas
égoïste. C'est une inquiétude qui se préoccupe des
autres. C'est une inquiétude généreuse de nature. C'est
l'essence de la jeunesse d'être ainsi. Je leur en sais gré et je
leur rends hommage pour une telle attitude. Il est facile de prendre une
attitude rébarbative et de tenter de démolir, par un certain
nombre de questions insidieuses, une présentation. C'est facile, sauf
qu'il faut aller plus loin. Je pense que c'est notre devoir d'aller
au-delà des mots, au-delà des paragraphes et au-delà des
pages qui nous sont présentés pour voir l'inspiration qu'il y a
derrière tout cela.
Mon opinion très sincère est que c'est une
préoccupation essentiellement de générosité, une
préoccupation qui vise à faciliter les choses pour ceux pour qui
les choses sont les plus difficiles. À partir de là, nous serions
bien malvenus de faire un accueil semblable à celui que j'ai cru sentir
de la part du député de Roberval à la présentation
des jeunes de l'ANEQ qui sont devant nous et qui ont attendu longtemps avant
d'être entendus par cette commission.
Je pense que l'on doit retenir de tout cela qu'on ne peut pas se servir
d'une crise économique ou purement budgétaire - ce qui me semble
beaucoup plus exact dans le cas du gouvernement péquiste actuellement
pour mettre en danger des acquis, l'avenir des jeunes. Je pense que c'est une
préoccupation que nous devrions avoir et que les représentants de
l'ANEQ, ainsi que ceux de l'Association des jeunes étudiants et
étudiantes chrétiens ont actuellement. (0 h 15)
La présentation qu'ils ont faite découle
de ce genre d'inquiétude qui consiste à se mettre à
la place des autres et à réfléchir tout haut sur ce qui
amène cette société qui est la nôtre à poser
des gestes qui peuvent avoir des conséquences considérables pour
l'avenir. Je ne pense pas qu'on puisse leur en tenir rigueur, loin de
là. Je pense qu'on doit leur rendre hommage d'avoir fait cela. Ce sont
les remarques que je voulais faire à l'intérieur des trois
minutes qui m'étaient accordées.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Le député
de Nicolet.
M. Beaumier: Par respect pour les jeunes, je me permets de ne pas
être d'accord sur tout. J'aimerais parler un peu de la
réalité. La réalité est à peu près la
suivante en ce qui concerne du moins le secteur de l'emploi. Si vous
étiez député -et à l'âge que vous avez, vous
avez des chances d'y parvenir éventuellement - vous verriez quatre
genres d'emplois. Les gens viendraient vous voir. Vous auriez des gens qui sont
du secteur privé; ceux qui n'ont pas perdu leur emploi dans le secteur
privé, tant mieux. Vous auriez environ 335 000 personnes des secteurs
public et parapublic qui ont des conditions salariales qu'on peut juger,
honnêtement, décentes et qui, en même temps, ont une chose
qu'on appelle la sécurité d'emploi que n'a pas le secteur
privé. Vous auriez aussi environ 450 000 chômeurs et environ 500
000 personnes bénéficiant de prestations d'aide sociale dont une
bonne part sont de vos collègues. Cela veut dire qu'il y a des dangers
actuellement que vous le voyiez ou non - d'une marginalisation pratiquement
chronique de centaines de milliers de vos concitoyens et de vos concitoyennes.
C'est cela, la réalité.
Si vous n'appréciez pas le discours que vous appelez la
propagande gouvernementale, j'aimerais porter à votre attention, et vous
le laisser après si vous le voulez, un texte de M. Edmond Maire, qui est
secrétaire général de la centrale socialiste en France, la
CFDT, qui regroupe plus d'un million de membres. Voici ce qu'il dit, à
l'encontre complètement de ce que vient de dire le député
de Louis-Hébert en ce qui concerne les droits acquis. Je cite: "En ce
moment -c'est M. Maire qui parle - nous disons qu'en période de crise on
ne peut pas faire n'importe quoi. Ce qu'il faut, c'est d'abord s'occuper de
ceux qui en ont le plus besoin dans notre pays - faites les traductions qu'il
faut - et ceux qui en ont le plus besoin, ce sont les salariés de
petites entreprises où il n'y a pas de syndicat, les chômeurs,
ceux qui sont au salaire minimum, plusieurs millions de salariés, mais
qui ne se retrouvent nulle part et qui ne sont pas dans les grands syndicats,
hélas." M. Maire ajoute: "Nous voulons la rigueur pour protéger
ceux qui en ont le plus besoin, même s'il faut effectivement modifier un
peu les acquis des secteurs les mieux protégés. C'est ce qu'on
appelle une politique de nouvelle solidarité face à la crise, qui
nous semble vraiment tout à fait nécessaire." Il continue:
"Alors, nous proposons une nouvelle solidarité. Nous proposons des
thèmes revendicatifs qui ne correspondent pas d'abord aux sentiments,
à l'opinion de nos syndiqués, mais à l'opinion des
non-syndiqués."
J'aurais une demande à vous faire, toujours dans le même
respect du fait que nous ne sommes pas d'accord, pour l'instant; cela peut
progresser. Dans votre document -et je ne retiens que cette partie - à
la page 8, vous dites: "L'accès à l'enseignement -vous y avez
vous-mêmes eu profondément accès - est un préalable
à la formation d'individus en mesure d'offrir de nouvelles solutions aux
niveaux technique, politique, culturel, etc., aux problèmes que l'on
vit." Vous m'avez donné une bonne nouvelle tantôt, c'est que vous
avez l'intention, si j'ai bien compris, d'avoir une maison de
l'éducation.
M. Beaudoin: Ce n'est qu'un projet d'école en lien avec un
projet de société nouvelle.
M. Beaumier: Est-ce qu'il serait possible de vous suggérer
de profiter de cette maison pour faire une réflexion et proposer
à tous les Québécois et à toutes les
Québécoises quelque chose de positif, d'articulé et qui
pourrait servir de projet de société autour duquel on pourrait
certainement très bien discuter? Cela dit, je vous souhaite bonne chance
et je vous remercie.
Le Président (M. Jolivet): M.
Beauregard.
M. Beauregard: J'aimerais répondre au député
de Nicolet en même temps qu'à celui de Roberval à propos de
la solidarité nécessaire dans une société pour
citer M. Maire de la CFDT. On est parfaitement d'accord avec le discours que
vous avez tenu. Le problème avec le Parti québécois, c'est
qu'il a un discours et une pratique qui diffèrent, un discours
social-démocrate avec une pratique de droite ou d'extrême droite.
On est parfaitement d'accord qu'il faille aider les plus démunis en
sabrant, s'il le faut, chez les mieux nantis, sauf que vous visez mal quand
vous visez les secteurs public et parapublic en tant que les mieux nantis de la
société. Il y en a de beaucoup mieux nantis.
Le député de Roberval parlait de la proposition qu'on a
faite de revoir la politique de taxation. Il disait que cela était
impossible dans une situation concurrentielle.
Ce qu'il a dit, finalement, c'est que nous étions une
société dépendante; cela, on le sait depuis longtemps. Il
parle de son comté de Roberval où beaucoup de scieries ferment et
où il y a beaucoup de chômage; on est conscient de cela, sauf
qu'il faut voir pourquoi cela se produit actuellement, comment cela se produit,
quelle est la mécanique de cela. On a beau constater des choses, mais si
on apporte des remèdes sans avoir saisi la mécanique de ce qui se
passe, on apporte des cataplasmes et des faux remèdes. S'il y a des
scieries qui ferment, c'est à cause de la crise, mais ce ne sont pas
toutes les entreprises qui sont en crise. Actuellement la CIP et la Consol sont
en train de racheter toutes les scieries en faillite dans le comté du
député de Roberval et ailleurs au Québec. Cela veut dire
que, lorsque la situation va repartir, ce sont des compagnies qui seront
drôlement mieux nanties et qui auront des avantages sérieux.
On est dans une période de crise, donc de concentration du
capital. Il y a des gens qui en profitent, c'est certain et c'est ce
monde-là qu'il faut viser dans la politique de taxation. Pour reprendre
les mots de M. Lévesque, je n'embarquerai pas dans la tuyauterie pour
déterminer ce que serait la politique de taxation qui viserait les mieux
nantis, mais il faudrait cerner qui sont les mieux nantis. Ce sont eux qu'on
doit viser pour aider les plus démunis. Ce sont eux qui en profitent
actuellement et qui en sortiront dix fois plus gros, les déjà
plus gros, les Des Marais avec Consol qui vont avoir acheté toutes les
scieries. Les scieries comptaient pour beaucoup dans les PME au Québec.
Des scieries PME, il n'y en aura plus au Québec. Ce seront les
papetières qui contrôleront le sciage. Ce sont des choses comme
celles-là qui se passent en ce moment et qui nous font dire que le
gouvernement vise mal ses cibles. Il a un discours social-démocrate,
mais il vise très mal. Les mieux nantis ne sont pas dans les secteurs
public et parapublic.
De plus, il ajoutait qu'il était faux de dire que couper dans les
secteurs public et parapublic allait créer du chômage parce que
tout ce qu'on faisait était de réaménager les sommes. Il a
dit que ce serait vrai si on mettait cela dans un coffre. Qu'est-ce qu'on va
faire? On ne le mettra pas dans un coffre au Québec, on va l'envoyer
dans des coffres aux États-Unis. Cela servira à rembourser les
dettes du Québec. Pourtant, dans les années cinquante, quand il
s'est agi d'ouvrir les coffres des banques américaines pour relancer
l'économie, les banques étaient là. Cela n'a pas
créé de crise. Les déficits budgétaires
étaient bons, ils relançaient l'économie. Pourquoi cela
était-il bon dans les années cinquante et que là, parce
qu'il y a une crise du système financier, les banques ont besoin de cet
argent-là et demandent à
M. Parizeau de leur envoyer leur argent, de couper dans les secteurs
public et parapublic que vous avez engraissés pendant les années
cinquante, soixante, soixante-dix, et disent: Ramenez-nous notre argent. Le
gouvernement qui est dépendant, c'est bien connu, joue le jeu. C'est le
jeu, évidemment, de toutes les sociétés occidentales
actuelles. Ce n'est pas parce que c'est le jeu de toutes les
sociétés occidentales qu'on est obligé d'être
béat devant cela et de n'avoir aucune compréhension de cela. Ce
n'est pas en visant les secteurs public et parapublic qu'on réglera ce
problème-là, c'est certain.
Le Président (M. Jolivet): M. Beaudoin.
M. Beaudoin: Merci M. le Président. Très,
très rapidement, le député de Nicolet, dans la
référence qu'il faisait au discours de M. Edmond Maire, a
identifié deux secteurs où, finalement, en temps de crise, on
devait faire porter les efforts pour aider les plus démunis. Il
identifiait, premièrement, le secteur privé au sens
général. Pour lui relancer la balle, finalement, je pourrais
mentionner que l'attitude que le gouvernement a eue envers ses propres
employés est en train de servir, a servi et servira d'exemple pour les
employés et les syndiqués du secteur privé qui doivent
subir durement la crise. Je mentionnerai seulement deux petits exemples:
l'Association des entrepreneurs en construction du Québec qui a
demandé aux syndicats, suivant l'exemple en cela du gouvernement, de
rouvrir les conventions collectives et de ne pas verser les augmentations qui
étaient dues aux employés. Il y aussi le cas d'une compagnie
à Montréal, Firestone, où la même situation se
produit. On doit donner une augmentation de 10% l'été prochain
aux employés et les propriétaires de la compagnie - prenant
exemple sur le gouvernement - disent: Le gouvernement le fait, pourquoi ne le
ferions-nous pas, demandent aux syndicats de rouvrir les conventions de
façon que les signatures ne soient pas respectées. On ne serait,
d'ailleurs, par étonné que, dans la même logique, le
gouvernement légifère pour aider ces compagnies-là
à procéder unilatéralement puisqu'elles ne peuvent pas le
faire elles-mêmes car elles ne sont pas juge et partie en même
temps.
On a aussi identifié comme cible d'action la syndicalisation des
petites et moyennes entreprises. Quand appliquerez-vous votre promesse
électorale de 1976, et même d'avant, de réformer le Code du
travail et d'instaurer la syndicalisation multipatronale qui, selon la plupart
des études sérieuses, serait la meilleure façon d'aider
à la syndicalisation des petites et moyennes entreprises, là
où c'est difficile quand il s'agit de petits restaurants de trois ou
quatre employés? Encore une fois, c'est là
qu'on voit la différence entre le discours et la
réalité. On va attaquer les employés du secteur public et
on ne défend pas ces pauvres employés du secteur privé des
petites et moyennes entreprises qui ne peuvent pas se syndiquer. Cela fait
déjà sept ans que les travailleurs et les travailleuses qui vous
ont élus attendent que vous appliquiez vos promesses relatives à
la réforme du Code du travail et à la syndicalisation
multipatronale. Je pense que vous avez su procéder plus vite avec les
employés du secteur public qu'avec l'application de vos promesses
électorales.
La dernière chose, vous voulez discuter avec nous d'un projet de
société. On s'engage dans cette direction et on est bien
intéressé à le faire. On espère seulement que cette
discussion pourra se faire sans qu'il y ait... On ne remet pas en question le
fait que vous formiez le gouvernement et que vous représentiez X nombre
de personnes. On n'est sûrement pas prêt à discuter avec
vous après les accusations non fondées qui ont été
faites par le député de Fabre au début relativement
à notre "membership". Il y a eu des faussetés. On a parlé
du Vieux-Montréal, de Saint-Laurent, des associations qui
s'étaient dissociées ou désaffiliées de l'ANEQ ou
qui étaient dissidentes. C'est totalement faux. On pourrait en temps en
lieu faire la preuve que cela n'est pas vrai. Les informations circulent
peut-être difficilement. Dans des conditions comme celles-là, on
trouve, effectivement, difficile de faire un débat sur un projet de
société conjoint quand on nous salit de cette façon.
Le Président (M. Jolivet): Merci. J'inviterais l'autre
organisme qui reste, l'Institut canadien de l'éducation des adultes,
à venir se présenter à l'avant. L'institut canadien est
représenté par M. Paul Bélanger. Je lui demande de venir
s'installer et, en même temps, de nous présenter ses deux
acolytes, ses deux collègues.
Institut canadien de l'éducation des
adultes
M. Bélanger (Paul): Je vais d'abord vous présenter
celui dont je suis l'acolyte, M. Pierre Couture et M. Richard Nantel.
M. Couture (Pierre): Je regrette l'absence du président,
M. Guy Bourgault. Justement, j'avais à présenter M. Richard
Nantel qui est chargé de projets à l'Institut canadien de
l'éducation des adultes. Avant cela, je vous ferais remarquer que
l'éducation des adultes est en dernier et cela est sûrement
significatif. Rapidement, l'Institut canadien de l'éducation des adultes
s'occupe de la défense des intérêts des usagers en
éducation des adultes dans les commissions scolaires, dans les
collèges, dans les universités, dans les organismes voués
à l'éducation des adultes et même dans les syndicats,
l'UPA, la CSN, la FTQ et la CEQ. L'Institut canadien de l'éducation des
adultes veut promouvoir différentes expériences et surtout des
expériences nouvelles liées aux usagers de l'éducation des
adultes. Il s'occupe plus particulièrement de la défense de la
spécificité de celle-ci dans une perspective des besoins des
usagers. Quand on parle de spécificité, cela est lié
à l'apprentissage, à l'enseignement, à l'organisation
administrative et pédagogique de l'éducation des adultes.
Plus de 100 organismes sont représentés et autant de
membres. Notre principale action dans le passé a été
d'être un des principaux instigateurs de la Commission d'étude sur
la formation des adultes. M. Bélanger présentera le point de vue
de l'institut sur l'impact des décrets en retard de l'éducation
des adultes. Il me fera plaisir, avec Paul et Richard, de répondre
à vos questions. (0 h 30)
M. Bélanger (Paul): L'éducation des adultes est une
nouvelle fois menacée. L'annonce ce soir de la conciliation est une
nouvelle fort positive. Elle offre probablement un cadre pour que soit
traité de façon efficace le problème qu'on soulève.
On ne le soulève pas pour le plaisir de le soulever; on le
soulève pour y trouver une solution.
Non seulement l'avenir de l'éducation des adultes a-t-il
été sérieusement hypothéqué par les
multiples coupures budgétaires faites depuis 1960, mais son existence
même est maintenant directement menacée par le décret. En
effet, si le décret et les clauses visées devaient être
appliqués tels quels, le réseau public de l'éducation des
adultes se verrait priver, pratiquement du jour au lendemain, de 70% de son
effectif; autant dire que la grande majorité de ceux et de celles qui se
sont consacrés à ce secteur depuis les 15 dernières
années se verrait purement et simplement éliminée.
Avant d'expliquer comment on en arrive là, permettez-moi de faire
quelques rappels. De tout temps, les enseignants et enseignantes de
l'éducation des adultes ont été embauchés surtout
à la leçon. C'est encore le cas aujourd'hui. Comme on peut le
constater en jetant un coup d'oeil au tableau à la fin du document -
tableau no 1 - à l'éducation des adultes, le personnel
rétribué à la leçon représente 96% du total,
ce qui est une amélioration, il faut le dire, c'était 98% il y a
deux ans, mais c'est encore énorme. Avant les coupures de 1981, ils
étaient au nombre de 11 544. Aujourd'hui, on en compte moins de 9000.
Ils et elles remplissent une tâche équivalente à celle de
1900 enseignants à temps plein. Or, ces formatrices et formateurs
d'adultes risquent tout simplement de disparaître du réseau public
d'éducation des adultes si on applique
les clauses 5-3.28 et 5-3.29 qui permettraient dorénavant
d'assigner à la formation des adultes les milliers d'enseignantes et
d'enseignants mis en disponibilité. Je vous fais grâce de lire ces
clauses à l'heure où on est.
Selon les estimations mêmes les plus conservatrices du nombre des
personnes touchées par ces mises en disponibilité il est possible
de prévoir que l'application de ces deux clauses "bumping"
équivaudra à tuer purement et simplement la
spécificité du secteur de l'éducation des adultes. Aucun
des trois secteurs de l'éducation des adultes ne sera
épargné, c'est-à-dire la formation professionnelle des
adultes, la formation générale et l'éducation populaire.
Toutefois, dans certains champs de l'éducation populaire, étant
donné le contenu particulier de ces champs, il serait possible
d'invoquer la clause de capacité, bien que cette clause ne soit pas
impérative pour les mises en disponibilité. Cela pourrait
permettre de sauver du naufrage général un certain nombre
d'enseignantes et d'enseignants.
En tenant compte de la répartition du personnel enseignant selon
les trois secteurs, on peut donc estimer, à notre avis et comme nous
l'avons dit plus haut, qu'un minimum de 70% des 9000 enseignantes et
enseignants à la leçon seront ainsi mis au rancart, soit 6300
personnes expérimentées et entraînées à
travailler avec des adultes. L'accroissement de la tâche des enseignantes
et enseignants de 15%, c'est-à-dire le passage de 720 à 840
heures/année, aura pour effet additionnel de diminuer le nombre de
postes offerts à temps plein (perte possible de 55 postes) à
l'éducation des adultes. Par effet d'entraînement, cette mesure va
aussi accroître l'hécatombe dans le camp des professeurs à
la leçon puisque chaque transfuge supplémentaire - les mises en
disponibilité passant ou pouvant passer à l'éducation des
adultes - qui passera du secteur régulier à l'éducation
des adultes occupera non seulement un poste à temps plein mais encore un
poste à temps plein, plus 15%. Bien sûr, il faudrait soustraire
les 80%. Ainsi, on va aller grignoter encore plus ce qui restera aux
enseignantes et enseignants spécialisés dans l'enseignement des
adultes et embauchés à la leçon comme tâche de
formation.
Si on applique le décret, donc, les conséquences en
éducation des adultes sont claires. Quel gaspillage d'investissement
pédagogique aussi bien que financier! Quel gaspillage de monde aussi ce
serait! Nul ne peut nier la réalité de cette possible
catastrophe. Une seule question demeure en suspens: Quelle en sera l'ampleur?
6350 personnes ou plus? Nous avons fait, quant à nous, des estimations
que nous considérons conservatrices. En effet, n'oublions pas que nombre
de personnes engagées à temps plein ne possèdent pas de
permanence. Évidemment, il ne s'agit pas de la majorité, c'est
vrai. En outre, notre analyse ne tient pas compte de ce qui va se passer au
niveau collégial où l'on embauche présentement quelque 40
formateurs et formatrices d'adultes à temps plein et près de 6000
à la leçon. On pourrait aussi se demander quel sera l'avenir de
l'emsemble du personnel spécialisé non enseignant des services
d'éducation des adultes des deux niveaux. Enfin, faire intervenir le
pourcentage de cours à la leçon donnés par du personnel
d'enseignant régulier - il y en avait 22% il y a un an ou deux; ce
chiffre diminue d'année en année - ne pourrait modifier quant
à nous sensiblement les chiffres précédents, du fait qu'au
cours des trois dernières années cette pratique est devenue de
moins en moins fréquente.
Pour en terminer avec les conséquences anticipées de
l'application du décret quant au sort du personnel enseignant à
l'éducation des adultes, rappelons que le décret ne comporte
aucune clause financière compensatoire pour ses 6000 formateurs et
formatrices d'adultes qu'on mettrait ainsi au rancart.
Si on se place maintenant à un autre niveau, l'application du
décret aurait pour effet, nous semble-t-il, de remettre en cause quinze
années de travail difficile de pionniers pour créer un
réseau public d'éducation des adultes. Dans les faits, le
décret nie la spécificité de ce secteur de
l'éducation. Or, la reconnaissance de la spécificité de
l'éducation des adultes est une des recommandations majeures de la
Commission d'étude sur la formation des adultes, la commission Jean, qui
remettait il y a plus d'un an son rapport au gouvernement. Les commissaires le
rappelaient encore avec insistance dans leur déclaration publique du 25
février et nous citons: "Cette reconnaissance organisationnelle de la
spécificité de l'éducation des adultes est primordiale
dans la mise en place d'une philosophie de l'éducation permanente apte
à faire place à des clientèles, des contenus et des modes
d'apprentissage variés et diversifiés." En cela, la CEFA
confirmait 20 ans plus tard les conclusions du rapport Ryan de 1964. Cette
spécificité est aussi - il faut bien le dire - inscrite dans le
décret lui-même qui fait état en 8-2.01 et 11-10.02 de deux
tâches spécifiquement distinctes entre l'éducation des
jeunes et l'éducation des adultes. Il est extrêmement
éclairant de lire en particulier les sous-paragraphes 02, 3, 4, 5, 6 et
7, où on décrit vraiment en quoi l'éducation des adultes
est différente de l'enseignement régulier. Au point même
qu'on pourrait se demander s'il n'est pas contradictoire, d'une part, de
proposer des transferts d'enseignantes et d'enseignants et, d'autre part,
d'apporter une distinction
spécifique entre les deux tâches d'éducation.
Il est à tout le moins curieux de constater que le décret
reconnaît une spécificité de fonction et a, tout à
la fois, pour conséquence de la nier dans les faits. Le caractère
spécifique de l'éducation des adultes se constate
déjà dans la définition des tâches et dans les
pratiques éducatives; elle se traduit aussi dans le régime
pédagogique et dans la multiplicité des stratégies
éducatives dans ce secteur: formation créditée, formation
sur mesure, éducation populaire, service à la
collectivité. À personne ne viendrait l'idée que
l'alphabétisation d'un adulte puisse être assimilée comme
situation d'apprentissage à l'enseignement de l'écriture en Ire
année du primaire. Spécificité structurelle enfin: ces
services de l'éducation des adultes, tout en étant
enracinés dans le milieu scolaire, sont constitués en
unités différenciées.
Ce réseau de quelque 70 services de l'éducation des
adultes dans les commissions scolaires et de 40 dans les cégeps
constitue une création québécoise originale qui a
prouvé son efficacité et qui est, de surcroît,
enviée par plusieurs pays industrialisés. Il n'y a pas lieu ici,
tout au moins, de s'enligner sur l'Ontario. L'OCDE, l'UNESCO et le Conseil
international de l'éducation des adultes ont tous reconnu la
qualité de cette expérience québécoise.
Le décret est plus qu'un décret tenant lieu de convention.
Il est dans les faits, pour nous, le cheval de Troie d'une politique
d'éducation des adultes contraire à celle prônée par
la commission Jean, laquelle commission a encore été
entérinée en fin de semaine par les délégués
du Parti québécois, et même à ce qui s'est
développé au Québec depuis 1964.
L'éducation des adultes avait déjà reçu de
durs coups, via les fameuses coupures de 1981, coupures au montant de 33 000
000 $... Résultat: les inscriptions aux cours sont passées de 562
000 en 1979-1980 à 302 000 deux ans plus tard, soit une baisse tragique
de 54%. On retrouve les données en annexe.
Il faut bien que le public sache que le secteur le plus touché
par les coupures ces dernières années était, comme par
hasard, le plus mal protégé syndicalement, donc le plus
vulnérable. L'importance des coupures s'explique en effet par la
faiblesse des conventions collectives en éducation des adultes. On a
constaté le même phénomène récemment en
Angleterre. Les coupures ont d'abord saigné l'éducation des
adultes, dont le personnel, embauché très majoritairement
à la leçon, n'avait aucune protection syndicale lui permettant de
préserver ses emplois et, par là, le service public dont il
était le moteur.
Il y a là un autre cas où on voit qu'il n'y a pas cette
contradiction entre syndicalisme et qualité d'éducation.
Déjà, les suites à donner aux recommandations de la CEFA
ont été dangereusement compromises par l'accord
Ottawa-Québec sur la formation de la main-d'oeuvre, accord signé
en octobre 1982, et cela pour les trois prochaines années.
Notons ici, par exemple, d'une part, le non-rapatriement de l'ensemble
de l'éducation des adultes au Québec que recommandait la CEFA et,
d'autre part, le choix de politiques en formation professionnelle contraire
à celui proposé par la CEFA, c'est-à-dire
l'entérinement de l'orientation de formation professionnelle du
gouvernement fédéral.
Si l'on ajoute aux effets de cet accord ceux résultant des
coupures de 1981, coupures demeurées sans correctif, on comprendra le
piètre état où se trouve l'éducation des adultes au
moment où lui tombe dessus un décret qui risque de l'achever
définitivement. Et pourtant, dans le contexte actuel de crise
économique et de changements technologiques, il est urgent plus que
jamais de fournir aux adultes du Québec des possibilités de se
préparer et de se former efficacement.
Alors que la France mise sur l'éducation continue comme outil de
requalification, le Québec laisserait-il disparaître son
réseau et sa haute compétence en formation des adultes? On ne
peut y croire. Affronter le virage technologique sans un outil efficace de
requalification ou de réorientation de la population adulte,
c'est-à-dire sans disposer d'un système cohérent
d'éducation des adultes, cela ne peut conduire qu'à un
dérapage spectaculaire.
Au nom des 100 organismes membres de l'ICEA, des individus membres, des
dizaines de milliers d'usagers et d'usagères qui se sont produits devant
la commission Jean, au nom du réseau public d'éducation des
adultes et ici, tant du côté syndical que du côté des
directions de services de l'éducation des adultes, l'ICEA demande
solennellement au gouvernement de se remettre en mémoire les motifs qui
l'ont amené lui-même comme gouvernement à mettre sur pied
cette commission, ce que l'ICEA avait souligné comme fait très
positif à l'époque, et de revoir les dispositions du
décret qui risquent d'entraîner des conséquences tragiques
pour les adultes au Québec. Faute de quoi on assisterait à la
mise en place, en douce, d'une politique inavouée et dangereuse
d'éducation des adultes qui compromettrait non seulement la venue des
mesures annoncées par le ministre Camille Laurin pour mai prochain, mais
aussi l'héritage de deux décennies d'un travail collectif qui,
amorcé dès 1960, commençait à peine à
rapporter des fruits.
Il faudrait, en particulier, songer à ces dizaines de milliers de
femmes qui ont cru à
la possibilité d'accéder à tout moment à une
éducation susceptible de combler leurs besoins spécifiques de
formation. Faudra-t-il leur annoncer que tout cela n'a été qu'un
leurre, tout au moins en ce qui concerne leur génération?
Qui aurait cru, en 1980, lors de la création de la CEFA,
création appuyée publiquement par le monde de l'éducation
des adultes et l'ICEA, qu'il faudrait se battre dès l'année
suivante contre des coupures du tiers des budgets et qu'on se retrouverait
aujourd'hui, en 1983, en commission parlementaire non pour continuer à
bâtir l'éducation des adultes, mais pour lancer un cri d'alarme
afin d'éviter la mort par noyade de ce secteur clé d'un
système moderne d'éducation?
L'ICEA croit qu'il s'agit là d'une erreur tragique mais veut
espérer que tout n'est pas perdu. Le gouvernement se doit - et le peut -
dès maintenant, fort de la commission Jean qu'il a créée,
de redresser la situation afin d'aller dans le sens du développement
économique et de la démocratisation qu'il dit vouloir
promouvoir.
Il ne faudrait pas, non plus, oublier qu'ici il est en même temps
question de l'avenir des jeunes, dans la mesure où certains d'entre eux
ne pourront bénéficier d'une formation initiale adéquate
et qu'on doit pouvoir leur garantir une seconde chance.
Aux dires du livre blanc sur la formation professionnelle des jeunes,
33% de ceux-ci sortent des écoles sans diplôme secondaire. Ainsi,
au lieu d'étrangler le système éducatif, ne vaudrait-il
pas mieux lui donner les moyens d'innover, de mettre sur pied des projets
spéciaux afin de récupérer toute une partie de la jeunesse
abandonnée à elle-même?
Le "drop-out" d'aujourd'hui sera-t-il un futur exclu de
l'éducation des adultes? Ces jeunes adultes sous-scolarisés ne
pourront s'inscrire ultérieurement à des programmes de formation
continue que si l'on prend des mesures permettant d'organiser efficacement le
recrutement et le rattrapage, mesures qui, une fois au niveau adulte,
deviennent extrêmement coûteuses. Détériorer les
conditions de la formation initiale, ne pas soutenir suffisamment
l'enseignement des jeunes en milieu moins favorisé, c'est aussi porter
atteinte à la capacité de l'éducation des adultes de jouer
son rôle dans le développement continu du potentiel humain. (0 h
45)
Bien sûr, et c'est vrai, il en coûterait à
l'État quelques dizaines de millions de dollars pour surseoir à
sa décision de transfert du personnel enseignant et pour maintenir les
emplois dans l'éducation des adultes, même aux conditions
précaires actuellement offertes, les 6000 employés à la
leçon. Mais il nous semble que l'éducation des adultes a
déjà trop souffert. Rappelons-nous la coupure de 33 000 000 $.
Elle arrive à peine actuellement à survivre. Ce réseau
public d'éducation des adultes, il nous semble qu'on n'a pas le droit de
faire disparaître ce qui en reste. Ce qui en reste, c'est-à-dire
ces 9000 chargés de cours qui travaillent depuis cinq, dix et quinze
ans, permettra, en d'autres conjonctures, de reprendre une croissance, il est
vrai, momentanément interrompue. Sinon cela reviendrait à jeter
littéralement par la fenêtre le milliard de dollars investi dans
le domaine de l'éducation des adultes depuis 1967.
Un réseau efficace et accessible d'éducation des adultes
n'est ni un luxe, ni un objet de consommation. C'est un des outils les plus
importants pour aider la population adulte à se sortir de la crise et
tout spécialement les individus les plus touchés, les moins
scolarisés. Pourquoi refuser que l'école développe en son
sein un secteur spécifique, capable de la faire servir à la
population qui la finance, c'est-à-dire aux contribuables?
L'éducation des adultes dont l'accessibilité et
l'efficacité sont liées à la reconnaissance de sa
spécificité est le complément nécessaire de toute
politique de développement économique et de création
d'emplois. À moins de vouloir tourner le dos à ces politiques, il
faut soutenir l'existence du réseau public d'éducation des
adultes et le maintenir au moins dans son état actuel. Merci.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.
M. Laurin: M. le Président, j'ai déjà eu
l'occasion de rencontrer à plusieurs reprises l'ICEA. C'est toujours
extrêmement intéressant d'entendre ce qu'ils ont à nous
dire. Ils nous rappellent à chaque reprise l'importance de
développer l'éducation des adultes et ils nous font, comme ce
soir, un plaidoyer ferme et chaleureux pour son développement.
Évidemment, ils ont tout à fait raison.
Cependant, je ne parviens pas à partager la lecture que fait
l'ICEA des décrets en rapport avec le développement de
l'éducation des adultes. Je ne parviens pas non plus à partager
leur pessimisme, même si j'admets que la situation difficile dans
laquelle nous vivons, particulièrement depuis deux ans, a
arrêté en bonne partie le développement de l'effort que
nous avions consenti depuis quelques années. Je ne parviens quand
même pas à partager des craintes que je trouve
exagérées.
On a encore évoqué, ce soir, le problème des
compressions ou des coupures à l'éducation des adultes. Avant de
dire mes commentaires là-dessus, je voudrais malgré tout rappeler
quelques faits. Par exemple,
l'année 1981-1982 fut celle où les compressions à
l'éducation des adultes furent les plus sévères. Il y eut
effectivement dans ce secteur des coupures qui firent que le budget global
passa de 149 00D 000 $ en 1980-1981 à 145 000 000 $ en 1981-1982. Mais,
cependant, en 1982-1983, avec un budget de 160 000 000 $ ou environ, nous avons
repris un taux de croissance significatif que nous allons tenter de
protéger par tous les moyens.
Je vous rappelle que nous avons été les premiers à
regretter cette situation et que nous avons quand même tout fait pour
essayer d'atténuer les effets de ces compressions en protégeant
ce qui nous a semblé l'essentiel. C'est ainsi que les secteurs de la
formation professionnelle et générale à temps plein et
à temps partiel furent les plus protégés. Cela veut dire
qu'il y eut dans ces secteurs moins de diminutions de clientèles. Le
secteur de l'éducation populaire autonome fut, pour sa part, soustrait
aux coupures. C'est tout le secteur des activités socioculturelles qui a
été le plus durement touché. Nous le reconnaissons et nous
le regrettons. Cependant, pour sauvegarder, en période de crise,
l'essentiel, il nous a semblé que nous devions cesser temporairement des
subventions à un certain nombre de cours, malgré leur
utilité ou l'intérêt qu'ils ont pour de nombreuses
personnes. Quelques exemples pour l'illustrer... Dans le secteur de
l'alimentation: initiation à la gastronomie, glaçage de
gâteaux, comment faire des réceptions, etc. Dans le secteur de la
santé physique et mentale: le yoga, le Tai-Chi, le jogging, etc. Dans le
secteur du développement de la personnalité: charme et maintien,
maquillage et coiffure, etc.
Ces cours ne sont donc plus subventionnés. Mais ils peuvent
toujours être accessibles dans la mesure où ils sont
autofinancés. Cependant, d'autres secteurs de la formation
socioculturelle n'ont pas été affectés par les
compressions et ce sont particulièrement les cours dans les secteurs
famille, parents-école, consommation, économie et gestion,
condition féminine, retraite, pré-retraite, droits sociaux,
environnement, etc. Et aussi, nous avons tenté de diminuer la partie des
subventions qui allait aux frais de gestion afin d'en divertir une plus grande
part pour le financement des activités elles-mêmes.
Encore une fois, nous ne nions pas que nous ayons dû faire des
compressions. Mais je pense que cela était inévitable. On sait en
effet, et je l'ai répété à plusieurs reprises
depuis quelques mois et encore une fois lors de cette commission parlementaire,
que la crise nous a forcés à faire des compressions dans tous les
secteurs, dans toutes les missions du gouvernement: mission sociale, mission
administrative, mission culturelle. Il le fallait pour mille et une raisons sur
lesquelles je n'ai pas l'intention de revenir ce soir. Et quand nous savons que
le budget de 6 500 000 000 $ de l'éducation sert, à 85% et plus,
à financer les salaires du personnel, salaires qui sont
protégés par des conventions collectives!
Il reste que c'est dans la partie restante, c'est-à-dire 12% ou
13% qu'il nous faut faire les compressions. Et c'est la raison pour laquelle
nous avons dû effectuer ces compressions dans l'éducation des
adultes, dans certains services éducatifs des collèges ou des
commissions scolaires, aux bibliothèques, au personnel de soutien, aux
professionnels non enseignants, aux programmes spéciaux pour les milieux
économiquement faibles et ainsi de suite. Évidemment, nous
savions qu'un jour on arriverait à renégocier les conventions
collectives et c'est la raison pour laquelle il nous a paru absolument
nécessaire de diminuer le coût de système que comportaient
les négociations collectives actuelles, coût de système
qui, comme vous le savez, augmentait de 17% par année. Espérant
que si nous parvenions à assainir les bases salariales, à les
réajuster en fonction des ressources de la collectivité, nous
pourrions, justement, consacrer une partie plus grande de l'enveloppe
budgétaire à ces autres services non protégés. Et
nous pensons d'ailleurs qu'avec les décrets, avec les ajustements que
nous connaissons maintenant au plan des salaires, de l'augmentation des
salaires, au plan des pensions, nous en arriverons à pouvoir consacrer
une partie beaucoup plus importante de nos budgets de l'éducation aux
secteurs autres que le paiement et le financement des salaires.
Donc, l'un des buts de l'opération que nous menons actuellement
par rapport aux conventions collectives, c'est justement de développer
une marge de manoeuvre beaucoup plus grande pour le financement des autres
programmes. C'est la raison pour laquelle nous espérons ne pas nous
contenter, sinon cette année, du moins l'an prochain, de cette reprise
de l'augmentation des crédits affectés à
l'éducation des adultes, mais nous espérons être en mesure
de faire, à cet égard, tout l'effort financier requis pour un
développement de l'éducation des adultes qui va dans le sens de
la visée que nous avions quand nous avons créé cette
commission et que nous avons maintenant, pendant que nous étudions le
rapport de la CEFA. Donc, c'est précisément pour pouvoir assurer
des lendemains plus heureux à l'éducation des adultes que nous
menons l'opération actuelle. Négativement, je pourrais dire une
autre chose aussi. Si les décrets amenaient un maintien ou même un
développement de la protection accordée aux salaires des
personnels syndiqués, il nous faudrait non seulement continuer les
compressions, mais il
nous faudrait supprimer, éliminer complètement plusieurs
programmes, plusieurs services éducatifs.
Votre deuxième inquiétude, c'est l'effet possible des
décrets sur le personnel enseignant à l'éducation des
adultes. Je sais que la commission Jean propose dans son rapport le maintien
d'un noyau stable de formateurs réguliers plein temps à
l'éducation des adultes. Je vous rappelle - je rappelle au public aussi
- qu'en 1981-1982, ce noyau stable était constitué de 387
formateurs d'adultes dans les commissions scolaires. À la suite des
décrets, nous entendons augmenter ce nombre de 70 formateurs d'adultes
plein temps. Je suis d'accord avec vous qu'un des effets des décrets
sera une utilisation plus grande des enseignants mis en disponibilité
à l'enseignement régulier. Il est donc exact que plusieurs des
9000 éducateurs à la leçon, à l'éducation
des adultes que vous avez mentionnés en 1981-1982, seront
remplacés par des enseignants du régulier mis en
disponibilité.
Cela nous amène à poser des questions. Qui sont
actuellement ces formateurs à la leçon? La très grande
majorité enseigne moins de 727 heures, ce qui veut dire qu'ils peuvent
être considérés comme des gens qui touchent des revenus
d'appoint à l'éducation des adultes et que même pour un bon
nombre d'entre eux, c'est un deuxième emploi. En effet, sur les 9375
enseignants aux adultes que nous comptons encore dans les commissions
scolaires, 8794 ont enseigné moins de 720 heures en 1981-1982.
L'autre question qu'on peut se poser: Est-ce qu'il est tellement
impossible d'envisager que des enseignants mis en disponibilité peuvent
enseigner aux adultes parmi les autres tâches qu'ils sont appelés
à remplir à côté de la suppléance, des
prêts de services, de toutes les autres mesures que nous avons
envisagées pour une meilleure utilisation des personnels mis en
disponibilité puisqu'il nous faut les payer? Si on donne une
réponse positive à cette question, il est possible que les mis en
disponibilité enseignent à l'éducation des adultes. Encore
mieux, si nous les y préparons par des cours de perfectionnement ou de
recyclage, quel est le scandale à utiliser ces enseignants
réguliers mis en disponibilité pour l'éducation des
adultes? C'est une question que je vous pose sur laquelle je reviendrai
d'ailleurs à la fin.
Votre autre inquiétude, c'est celle qui porte sur l'effet des
décrets sur la spécificité de l'éducation des
adultes. Voilà un mot important, mais qui est susceptible quand
même de variations ou de degrés. On peut parler de
spécificité organisationnelle. On peut parler de
spécificité pédagogique. Je suis d'accord que
l'éducation des adultes comporte effectivement un caractère
spécifique. D'ailleurs, dans l'étude que nous faisons
actuellement, le rapport de la commission Jean, dans les divers comités
que nous avons constitués et qui me remettront bientôt leur
rapport, cet accent sur la spécificité est bien
sauvegardé. Qu'il s'agisse de la formation professionnelle, de la
formation de base, de l'éducation populaire, de la formation des
personnels, des clientèles cibles, du type de formation
privilégiée, nous entendons conserver cette
spécificité. De la même façon, il n'est aucunement
question d'abolir les 69 commissions d'éducation des adultes que nous
comptons actuellement dans les commissions scolaires.
Cependant, c'est un souci bien légitime de vouloir harmoniser le
travail de ces services d'éducation aux adultes avec les autres
services, de même que d'harmoniser leurs services avec ceux qui existent
dans les milieux non institutionnels. Je suis donc d'accord avec vous pour
conserver la spécificité à l'éducation aux adultes,
mais là aussi, je vous poserais la question suivante: Peut-on quand
même développer cette spécificité à
l'intérieur des cadres de notre système d'éducation, d'une
part, et deuxièmement, par l'utilisation de toutes les ressources
financières, techniques et humaines déjà existantes? C'est
la raison, en tout cas, pour laquelle je ne parviens pas à partager tout
votre pessimisme sur le sort qui sera réservé à
l'éducation des adultes et particulièrement à
l'intérieur des décrets. (1 heure)
Je reviens donc à mes deux questions. La première que je
vous poserais est la suivante: Croyez-vous qu'il soit possible d'habiliter par
des programmes de recyclage ou de perfectionnement le personnel de
l'enseignement régulier mis en disponibilité pour qu'il puisse
dispenser une éducation aux adultes d'une façon valable dans les
années qui viennent? Deuxièmement, croyez-vous que
l'éducation des adultes puisse exister et se développer sans
marginalité, tout en conservant sa spécificité à
l'intérieur de notre système d'éducation?
Le Président (M. Jolivet): M. Bélanger.
M. Bélanger (Paul): Oui. D'abord, je pense que l'ICEA et
tout le monde de l'éducation des adultes - les usagers et les
usagères - vont être contents d'apprendre -et je ne dis pas cela
avec sarcasme, au contraire - qu'on reconnaît, je pense, clairement la
spécificité de l'éducation des adultes. C'est un virage
important par rapport aux bruits qui courent actuellement dans le réseau
de l'éducation des adultes.
M. Laurin: Cela ne correspond pas du tout à mes
convictions.
M. Bélanger (Paul): C'est ce que je
remarque et ce dont je vais me rappeler pour les mois à venir,
parce que c'est une question importante. Est-il possible de recycler des gens
à l'éducation des adultes? Bien sûr, mais l'enjeu premier
n'est pas là, M. le Président. L'enjeu premier est le fait
qu'actuellement, au Québec, à la leçon, bien sûr,
dans des conditions très précaires, il y a 9000 personnes qui
enseignent le soir dont -d'après les statistiques que j'ai et je n'ai
que les statistiques de la CECM là-dessus, mais la division de gestion
de votre ministère nous dit que c'est représentatif de l'ensemble
du Québec - 70% se donnent un revenu par ce moyen de plus de 8000 $ par
année. Ce n'est donc pas un deuxième emploi pour ces gens. C'est
vrai que, pour certains, c'est un deuxième emploi, mais ce n'est pas un
deuxième emploi pour ces gens. Or, ces gens se sont formés pour
travailler avec des adultes, pour avoir une approche pédagogique
adéquate avec des adultes et cela, depuis cinq, dix et même quinze
ans. L'enjeu principal est là, c'est-à-dire que le décret
l'ayant voulu ou non - l'important, ce sont les faits - aura pour effet, au
moyen de cette clause qui permet aux gens de passer à l'éducation
des adultes, de faire basculer en dehors du réseau public de
l'éducation, de gaspiller toute cette expertise qu'on a
développée pendant plusieurs années. Bien sûr, c'est
possible de recycler et de perfectionner des gens qui, à l'enseignement
des jeunes, peuvent passer aux adultes, bien que l'éducation des
adultes, c'est différent. Le problème n'est pas là. Le
problème est que pour régler un problème, on en cause un
autre. En d'autres termes, pour faire de l'éducation des adultes le
déversoir de l'éducation des jeunes en surplus, dit-on, on
liquide toute l'expertise qu'on a acquise à l'éducation des
adultes. C'est là qu'est le problème principal. Pour
épargner quelques millions, on va perdre - je l'ai calculé, les
budgets à l'éducation des adultes au Québec se chiffrent,
depuis un certain nombre d'années, à plus de 1 000 000 000
$...
M. Laurin: Ce ne serait vrai, M. Bélanger, que si votre
projection de 6000 enseignants à la leçon était juste. Il
n'est pas du tout sûr que cette projection soit juste quand on
considère que dans les mesures qui ont été prévues
pour les mises en disponibilité, tellement de tâches sont
prévues pour les mises en disponibilité qu'il est très
possible que nous ayons besoin de beaucoup plus de professeurs à la
leçon que votre projection de 6000 ne le laisse supposer.
M. Bélanger (Paul): M. le ministre, je peux me permettre
de vous contredire sur les chiffres là-dessus. 6000 professeurs à
la leçon, cela équivaut à peu près à 1500 ou
2000. On ne se précipitera pas sur des détails, mais cela
équivaut entre 1200 et 1500 à temps plein, selon le quotient que
votre ministère a développé de 4,8 ou 4,6 à la
direction de la gestion de la DGEA. Donc, s'il y avait à peine 1200
mises en disponibilité qui seraient transférées de
l'éducation aux adultes d'un coup, flacl ce sont 6000 personnes - je me
suis peut-être mal exprimé tantôt, parce qu'elles sont
précisément à la leçon et ne complètent pas
des tâches, vous l'avez dit tantôt avec raison qui seraient
liquidées automatiquement. C'est le premier problème.
La deuxième question, c'est quant à la
spécificité de l'éducation des adultes. Cela
m'apparaît d'une évidence première - vous l'avez reconnu -
mais je pense qu'il est important de rappeler certaines choses. Supposons par
exemple que les députés veulent se donner une formation en
économie pour mieux comprendre les problèmes d'emploi. Si vous
cognez à la porte d'un service de l'éducation des adultes, est-ce
que vous vous inscrirez immédiatement en mathématiques 414 ou en
économie 415 ou en gestion de l'économie 614? Non. D'abord, vous
allez dans une service de l'éducation des adultes pour faire
reconnaître toute l'expérience que vous avez déjà -
et vous en avez beaucoup - le vécu que vous avez par rapport à
l'économie et on essaiera de penser à une programmation
spéciale, à des approches spéciales etc. C'est une tout
autre démarche qu'on retrouve d'ailleurs dans le décret de
façon assez intéressante puisque, lorsqu'on décrit la
tâche de l'enseignement à l'éducation des adultes dans le
décret, on fait appel précisément à toute cette
spécificité de ce type d'intervention éducative. Pour
cela, qu'on le veuille ou non, cela prend des gens qui peuvent travailler avec
des adultes et qui ont l'expertise; tout le monde peut arriver à cela,
on ne pense pas que c'est là une fonction sacrée qui
nécessite je ne sais quelle investiture, mais on a déjà
ces gens formés, pourquoi les gaspiller? C'est là qu'est la
question de fond.
Pour terminer, je dirais que la commission Jean, dans plusieurs de ses
recommandations, et en particulier dans la recommandation 287-288, parlait de
ce possible perfectionnement de mise en disponibilité vers
l'éducation des adultes, mais on rappelait deux choses avec justesse.
C'est qu'il fallait que cela vienne d'abord après avoir assuré
aux gens qui ont bâti l'éducation des adultes le maintien de
l'emploi, aussi précaire qu'il soit, et, deuxièmement, qu'on
accorde à ces gens des conditions un peu plus correctes finalement.
Merci.
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: Merci, M. le Président. Je
voudrais juste faire une petite vérification avant de commencer,
si vous me donniez juste une seconde. Vous avez fait allusion, M.
Bélanger - peut-être que vous pourrez me le dire sans que je sois
obligé de retrouver ma source - que dans le décret on
définit la fonction de l'éducateur d'adultes d'une manière
très convenable. Cela est à l'article 11-10.02. Est-ce que vous
avez noté une correspondance entre cet article et ce qu'il y avait dans
la convention antérieure ou si c'est nouveau?
M. Bélanger (Paul): Je n'ai pas pu vérifier, mais
je l'ai fait oralement et on m'a dit que cela existait dans la convention
antérieure, mais je n'ai pas pu vérifier.
M. Ryan: Justement, je pense que, si c'est bon, c'est
probablement parce qu'ils n'ont pas joué dedans.
M. Bélanger (Paul): Pardon?
M. Ryan: Si c'est bon, c'est probablement parce que le
gouvernement n'a pas joué là-dedans, par distraction ou
autrement; c'est probablement parce qu'il l'a laissé comme il
était. Cela est une petite remarque introductive que je veux faire, mais
je veux faire porter mes remarques sur des aspects plus fondamentaux.
Tout d'abord, il y a deux choses que je voudrais souligner au
départ: le caractère très sévère du
diagnostic qui est porté par l'Institut canadien de l'éducation
des adultes sur les décrets et leurs conséquences
éventuelles, de même que sur les reculs qu'a subis
l'éducation des adultes depuis deux ou trois ans. Deuxièmement,
le caractère solennel de l'appel qui est fait au gouvernement par
l'organisme mandaté pour parler au nom de tous les services, toutes les
associations, toutes les institutions engagées dans l'éducation
des adultes, chez nous, de reconsidérer la politique à laquelle
les décrets ouvrent la porte en matière d'éducation des
adultes. Je pense que ce sont deux choses qu'il faut garder absolument comme
toile de fond et qui permettent de comprendre davantage la
responsabilité qui incombe au gouvernement en ce moment.
Je suis particulièrement intéressé à faire
quelques commentaires sur le mémoire parce que, comme on l'a
bienveillamment rappelé dans le texte lui-même du document qui
vient d'être lu, j'ai été associé personnellement au
développement de l'éducation des adultes dans notre milieu il y a
déjà un quart de siècle. Cela ne me rajeunit pas, mais je
suis fier quand même de constater que ma foi dans la raison d'être
et dans les objectifs de l'éducation des adultes n'a jamais
dévié ni diminué au cours des années. Je suis fier
de constater qu'on se rappelle de manière très
intéressante le travail qui avait été fait par un
comité dont j'avais eu l'honneur d'assumer la présidence en
1964.
Je me rappelle qu'à cette époque, l'objectif du
comité nous était venu un jour - je ne veux scandaliser personne
du côté du gouvernement parce que je m'aperçois qu'il
glisse vers la droite depuis quelque temps -qu'on avait rencontré une
délégation de l'Union soviétique qui était venue au
Québec... Je ne veux pas faire peur à Mme Dougherty non plus...
On avait causé avec eux d'éducation des adultes et ils m'avaient
dit: On a établi, nous, comme objectif de base, que tout le monde en
URSS, d'ici une génération, devra avoir accédé
à un niveau de formation au moins secondaire ou l'équivalent. Et
tout le monde devra avoir accès à cette formation dans des
conditions de gratuité générale.
C'est un objectif que nous avions épousé pour notre
comité. Nous l'avons inscrit dans le rapport que nous avons
publié à l'époque. Je pense qu'il a été
retenu par un grand nombre de personnes, parfois même par les
gouvernements parce qu'il y a des progrès considérables qui se
sont faits au cours des années qui ont suivi. On avait inscrit cela
comme objectif de base. Cela ne voulait pas dire que tout le monde devrait se
promener avec un diplôme de douzième année ou de
onzième année secondaire, mais que tout le monde devrait avoir la
chance d'accéder à une formation équivalente à ce
qu'une personne qui a fait des études secondaires complètes doit
avoir.
Dieu sait que nous sommes encore très loin de là
aujourd'hui même parmi ceux qui s'en vont dans le réseau
secondaire. On l'a rappelé tantôt, il y en a environ 35% qui ne se
rendent pas jusqu'au bout, qui sont déversés sur le marché
du travail et, beaucoup plus fréquemment, sur le marché du
chômage. Par conséquent, ils auront de grands besoins de
supplément de formation s'ils veulent arriver à se situer d'une
manière compétitive sur le marché du travail et, je dirais
même, sur le marché de la participation tout court, autant
familiale que civique, qu'économique ou professionnelle.
Je rappelle au gouvernement actuel que, de ce côté, il nous
a fait subir des retards importants. Dans la politique qui avait
été élaborée jusqu'à ces toutes
dernières années, l'accès à la formation secondaire
était gratuit ou à peu près. Maintenant, vous le savez, il
y a des cours qui coûtent très cher. Pour avoir certains cours, au
secondaire, il faut payer 40 $, 50 $, 60 $. Ce sont des résultats des
politiques qui ont été instaurées depuis quelques
années. Nous, je m'en souviens, nous avions eu un long débat
à la commission que j'avais présidée sur la question de
savoir si cela devrait . être gratuit au niveau secondaire et nous avions
conclu que c'était
impératif que ce soit gratuit, laissant les autres niveaux
à la libre détermination en fonction de toutes les circonstances
qui pouvaient exister. Cela reste un objectif. Le caractère distinctif
de l'éducation des adultes est inscrit dans sa nature même. On
peut bien vouloir l'intégrer complètement dans le système
régulier d'enseignement, mais c'est impossible. Dès qu'on
commence à travailler avec des adultes, on se rend compte qu'ils ont
à satisfaire des besoins fondamentalement différents.
Une autre chose que nous avions préconisée, c'était
le développement préférentiel d'un réseau public
d'éducation des adultes. Nous trouvions qu'il fallait favoriser
l'initiative privée de toutes les manières possibles dans ce
secteur, qui est varié par nature, mais qu'il fallait, comme armature de
base, un solide développement du côté public. Nous avions
mis l'accent à ce moment sur la création de services
d'éducation des adultes dans les commissions scolaires.
Une chose qui a été faite, entre parenthèses, par
des gouvernements qui se sont succédé depuis une vingtaine
d'années -c'est au moins cela de pris - c'est un réseau solide -
on va y revenir tantôt - de services d'éducation des adultes
à travers les commissions scolaires qui, au moment où cette
première étude fut faite, n'existait point.
Ensuite, plus récemment, on a créé la commission
Jean qui a publié, l'an dernier, un rapport volumineux où j'ai
été content de retrouver, formulés dans les termes de
l'époque où nous sommes maintenant, les objectifs fondamentaux
qui avaient été entrevus à l'époque. Encore une
fois, formulés dans des termes différents, mais j'étais
particulièrement content de trouver cet objectif qui viserait à
assurer à tout adulte une formation de base équivalant à
treize années de formation gratuite. Dieu sait qu'on s'est encore une
fois éloigné de cet objectif. On voulait que l'objectif d'une
formation de base soit accepté comme un des objectifs fondamentaux de la
société québécoise. Je ne m'étendrai pas
davantage là-dessus. Il y a une foule d'autres choses, mais ce que je
constate, c'est que nous attendons depuis des mois les décisions que
doit prendre le gouvernement à ce sujet. (1 h 15)
Je suis content de constater que le ministre nous annonce, pour un
avenir pas trop éloigné, une politique en matière
d'éducation des adultes. C'est absolument capital. Regardez le
problème dont on parle à propos des 5, 3, et 28. Comme c'est
formulé, M. le ministre - là, je pense qu'on peut parler des
décrets parce que dans le cadre d'un règlement, il n'y avait rien
sur l'éducation des adultes, à ma connaissance, qui soit de
nature à corriger les appréhensions qu'on nourrit à ce
chapitre-ci -comme c'est formulé, cela ouvre la porte à n'importe
quoi. S'il y a une politique précise d'éducation des adultes qui
définit des exigences, qui fournit une sorte de cadre d'orientation, qui
soit d'ailleurs traduite aussi dans les règles budgétaires
éventuellement, on pourrait peut-être arriver à
interpréter ces clauses différemment. Mais comme elles sont
formulées ici, cela ouvre la porte à presque n'importe quoi.
Je suis convaincu qu'il faut qu'on ait plus d'éducateurs
d'adultes permanents. Moi-même, j'avais souscrit à une demande de
la CEQ à ce sujet, en me disant: Nous avons 95% des enseignants aux
adultes qui sont des gens qui travaillent soit à temps partiel, soit
d'une manière incomplète là-dedans. Si on avait une
proportion un peu plus élevée qui était à temps
complet, je pense que ce serait bon pour structurer davantage ce secteur. C'est
évident que la grande majorité des éducateurs d'adultes
devront demeurer des personnes qui sont soit engagées ailleurs ou ne
sont pas en mesure pour une raison ou pour une autre, de faire un travail
à temps complet, mais qui ont une compétence qu'elles sont
intéressées, à mettre au service de l'éducation des
adultes. Si on devait arriver à une espèce de "bumping"
d'envergure pour remplacer celui qu'on a connu auparavant dans ce secteur-ci,
je pense que ce serait vraiment désastreux. Il faut que le gouvernement
donne des assurances de ce côté-là. Je suis très
heureux de l'intervention de l'Institut canadien de l'éducation des
adultes à ce sujet, parce que je n'avais pas saisi moi-même,
malgré l'intérêt que je porte à ce secteur, tous les
dangers possibles, les clauses du décret comme elles se
présentent actuellement.
J'avais déjà également signalé à
l'attention du ministre, et j'espère qu'on s'en souviendra, lors de la
phase de reprise des négociations qui se dessine maintenant, le
problème de la rémunération des éducateurs à
temps partiel dans le secteur de l'éducation des adultes. Le
décret, de ce point de vue, leur inflige des conditions inacceptables.
Ainsi que je vous l'ai déjà signalé, M. le ministre, les
travailleurs à temps partiel qui sont dans le secteur des affaires
sociales feront l'objet d'un redressement par rapport à ce qui avait
été inscrit dans les décrets, en vertu du cadre de
règlement qui avait été accepté à la fin de
janvier. J'espère qu'on transcrira ce même principe dans le
secteur de l'éducation des adultes.
Vous mentionniez qu'il y a un grand nombre d'éducateurs d'adultes
qui travaillent déjà le jour, mais les statistiques que j'indique
sont de 30% à 35%, que les autres ne sont pas de cette
catégorie-là. J'ai reçu ces représentations de ce
côté, auxquelles
j'éprouve le devoir de faire écho encore ce soir. Je pense
que la rémunération qu'on va leur accorder doit être
l'objet d'une attention spéciale et ne peut pas répondre
exactement et mathématiquement aux mêmes critères que vous
employez pour les enseignants à temps plein. Je pense qu'il y a
matière à une exploration très importante de ce
côté-ci et j'espère qu'on va traiter ce problème
comme il faut.
Je voudrais faire une suggestion au ministre et peut-être demander
l'avis de l'Institut canadien d'éducation des adultes à ce sujet.
Il me semble qu'il serait très important, dès que le gouvernement
rendra public son livre blanc ou son projet de politique en matière
d'éducation des adultes, que la commission parlementaire de
l'éducation soit consultée pour en discuter à fond, en
présence de tous ceux qui auront des représentations à
faire. Je pense qu'on inaugure peut-être ici une approche de bien des
secteurs qui demandent à être revus à fond. Après la
commission Jean, il n'est pas question de recommencer des audiences et des
pérégrinations à travers tout le Québec, mais il me
semble qu'il serait important, avant qu'on aille trop loin et qu'on se trouve
en face d'un projet de loi, un domaine extrêmement délicat pour
les fins de la loi, que la commission parlementaire ait la chance de se pencher
pendant peut-être quelques jours sur les problèmes du secteur.
Vous avez dit tantôt, M. Couture, que l'éducation des
adultes passait toujours la dernière. Je pense qu'on peut dire que vous
passez en dernier ce soir, mais qu'au point de vue de contenu c'est loin
d'être le dernier; le mémoire qu'on a entendu c'est l'un des plus
importants. Je pense que s'il y avait moyen d'avoir une commission
parlementaire pour aller plus à fond dans un avenir prochain, ce serait
excellent pour remettre le problème sur la carte puis peut-être
aider le ministre à persévérer dans la manifestation de ce
bon côté de son être dont on a vu quelques exemples ce
soir.
Deux ou trois questions et j'aurai terminé. Je pense qu'à
cette heure-ci tout le monde se rend compte qu'on ne peut pas s'engager dans le
débat de fond qu'on voudrait, cela va venir plus tard. Je pense que la
cloche d'alarme a été sonnée avec vigueur.
Tout d'abord, qu'est-ce que vous pensez de cela l'idée d'une
commission parlementaire, avant longtemps, pour compléter le travail
considérable accompli par la commission Jean, et celui qui se fait
présentement au ministère.
Deuxièmement, vous avez dit - cela m'intéresse puis
j'aurais besoin de précisions là-dessus - que l'accord
Ottawa-Québec sur la formation des adultes, la formation
professionnelle, accuse un recul à divers point de vue. J'aimerais que
vous nous disiez à quel point de vue exactement cela représente
un recul pour le Québec. Évidemment on voulait tous que ça
revienne intégralement au Québec. Le gouvernement
fédéral ne veut pas actuellement. On ne peut pas en faire un
reproche au gouvernement du Québec actuellement parce que ça se
fait à deux puis si l'autre ne veut pas, même s'il est bien
intentionné, il ne peut pas faire grand chose.
J'aimerais que vous me disiez, dans son contenu, dans quoi cet accord
est de nature à faire reculer l'éducation des adultes ou à
la compromettre.
Alors deux questions par conséquent: premièrement, la
commission parlementaire sur l'éducation des adultes,
deuxièmement, l'accord Ottawa-Québec.
Le Président (M. Jolivet): M. Bélanger.
M. Bélanger (Paul): Pour ce qui est de la commission
parlementaire c'est effectivement important qu'il y ait lors du
dépôt du livre bianc un mécanisme par lequel - non pas pour
reprendre tout le débat - les usagers, les usagères et les
intervenants comme on les appelle, les organismes d'éducation des
adultes et les autres, puissent intervenir. Cela m'apparaît
extrêmement important parce que l'enjeu n'est pas seulement important en
termes de fond, en termes de besoins des adultes, mais il est aussi important
en ce sens qu'il n'est pas assez connu.
Des esprits simplistes dans l'éducation -il en existe dans la
gestion quotidienne de l'éducation - pensent que parce que c'est
l'éducation c'est tout pareil; donc c'est juste d'ajouter un rang de
bancs en arrière de chaque classe et voilà le problème est
réglé. Avec ça on règle peut-être certains
problèmes de gestion au niveau des jeunes, on le règle sur le dos
de l'éducation des adultes. On ne règle pas l'éducation
des adultes.
Je me permettrai une remarque par rapport à ce qu'on a dit
tantôt: qu'il fallait sauver de l'argent du côté des jeunes
pour le consacrer à l'éducation des adultes. L'analyse qu'on fait
de la situation et qu'on fait le plus rigoureusement possible avec les
données qu'on a nous conduit à des conclusions contraires;
c'est-à-dire que l'argent pour l'éducation des adultes il n'y en
a pas plus, il y en a moins. Les coupures ne touchent pas simplement le
crémage sur le gâteau ou les autres exemples que le ministre a
donnés avec humour. Je pense que la situation n'est pas si humoristique
que cela, elle est plutôt tragique. Les baisses concernent, on le voit en
annexe - je ne vous donnerai pas tous les tableaux, ce serait trop long - tant
la formation générale que la formation professionnelle.
On pourrait même aller un peu plus
loin. La question se pose de savoir si, par le fait d'envoyer des gens
mis en disponibilité de jour dispenser le soir la formation
achetée par le fédéral, on ne serait pas en train - la
question se pose, je ne conclus pas je pose la question - de faire financer les
mises en disponibilité par le fédéral. En tout cas la
question se pose. Ce qui, en passant, constituerait une deuxième
génération de coupures pour l'éducation des adultes.
Quant aux accords Québec-Ottawa sur le contenu même de la
formation, je pense qu'on pourrait demander à Richard Nantel de le
résumer brièvement.
Le Président (M. Jolivet): M. Nantel.
M. Nantel (Richard): Très, très rapidement M. Ryan.
L'hypothèse de base qui soutient en fait ou qui sous-tend le programme
fédéral de formation qui a été modifié cet
été par la loi C-115 et qui a été
entériné par l'accord Canada-Québec part de
l'hypothèse que le problème no 1, au Canada, est une
pénurie de main-d'oeuvre spécialisée pour répondre
à certains manques de travailleurs et de travailleuses
spécialisés sur le marché du travail, alors que de notre
côté, on a l'impression - on n'a pas besoin d'insister longuement
pour être d'accord là-dessus - que le problème principal
est peut-être les 1 400 000 chômeurs et chômeuses au Canada
et les quelques centaines de milliers d'assistés sociaux. Donc, les
programmes de formation qui devraient être mis de l'avant devraient
s'adresser à ces personnes et c'est ce que ne fait pas l'accord
Canada-Québec.
Plus en détail, l'accord Canada-Québec oriente donc ses
investissements vers des programmes spécialisés d'un degré
post-secondaire, qui s'adressent à des clientèles
déjà relativement scolarisées et, par le fait même,
diminuent ses investissements ou les investissements gouvernementaux dans les
programmes de formation générale qui s'adressent aux personnes
qui n'ont pas justement atteint cette formation du secondaire dont vous parliez
tout à l'heure ou l'équivalent du secondaire. Les investissements
sont également réduits pour les programmes de formation
professionnelle qui n'entrent pas dans le cadre de ce qu'on a
déterminé être les pénuries d'emploi
constatées au Canada.
Ce sont, selon nous, les deux principales faiblesses de l'accord
Canada-Québec. C'est dans ce sens que nous prétendons que cela ne
correspond pas aux objectifs de la population québécoise et
particulièrement de ceux et celles qui ont été
consultés par l'ICEA, dans les coalitions auxquelles nous avons
participé ces dernières années.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Fabre et adjoint parlementaire au ministre de l'Éducation.
M. Leduc (Fabre): Merci, M. le Président. Je voudrais
d'abord vous remercier très sincèrement d'être ici et de
nous sensibiliser comme vous le faites à l'importance de
l'éducation des adultes dans notre société. Je partage
entièrement certaines phrases que vous avez écrites dans votre
mémoire, les objectifs que vous accordez à l'éducation des
adultes, quand vous dites que c'est un des outils les plus importants pour
aider la population adulte à se sortir de la crise et tout
spécialement les individus les plus touchés, les moins
scolarisés.
Pour aujourd'hui et pour l'avenir, le secteur de l'éducation des
adultes est un des secteurs les plus importants. Il faut regretter, comme vous
le dites si bien aussi, que l'État du Québec n'ait pas fait plus
jusqu'à maintenant pour le développement de l'éducation
des adultes. Je pense qu'il y a quand même de l'espoir pour l'avenir,
compte tenu du rapport Jean, compte tenu de la volonté gouvernementale
aussi de lui accorder l'importance qu'il mérite.
Je voudrais revenir sur une question, celle des enseignants à
l'éducation des adultes. Je m'interroge sur le pessimisme que vous
manifestez devant la situation que créent les décrets.
Première question: Quel genre de contacts avez-vous avec les
institutions comme les commissions scolaires, les écoles, les
collèges? Comment établissez-vous ces contacts? Autrement dit,
comment contrôlez-vous votre information?
Le Président (M. Jolivet): M. Bélanger.
M. Bélanger (Paul): D'abord, cela me permet de
décrire comment l'institut fonctionne par rapport aux commissions
scolaires uniquement, parce qu'il est tard et que c'est la même chose
pour les deux autres niveaux dans le secteur public. D'abord, il y a un certain
nombre de services de l'éducation des adultes membres de l'ICEA, donc
qui participent à toutes les instances. Au CA de l'ICEA par exemple, il
y a dix sièges réservés au secteur public de
l'éducation des adultes, six sièges réservés aux
organismes socio-économiques, etc. Dans nos travaux, TREAQ par exemple,
qui est le regroupement des directeurs d'éducation aux adultes, est
présent et délègue quelqu'un à notre table
d'analyse des politiques d'éducation des adultes. Dans les consultations
qu'on fait, non seulement il y a une délégation de cette table,
mais on retrouve aussi les autres intervenants de l'éducation des
adultes, l'Association des personnels non enseignants à
l'éducation des adultes, etc. et aussi dans les travaux de consultation
qu'on a faits.
(1 h 30)
Ce qu'il faut ajouter à ce sujet, c'est qu'en plus du travail
précis de l'ICEA, on a organisé, depuis maintenant quatre ans,
une vaste coalition sur l'éducation des adultes, d'abord sur les
coupures - le ministre Laurin s'en rappellera - et aussi d'une façon
plus actuelle, sur les suites de la commission Jean, cette commission que le
Parti québécois vient d'entériner de nouveau en fin de
semaine, je le répète, c'est important, malgré les bruits
qui courent dans les officines gouvernementales à savoir qu'on veut
plutôt prendre une autre option sur l'éducation des adultes. On a
mis sur pied une vaste coalition qui regroupe l'AFEAS, la
Fédération des femmes du Québec, l'Action de travail des
femmes, toute une série de groupes de femmes qui regroupent des
organismes d'éducation des adultes, TREAQ et compagnie, qui regroupent
des syndicats d'éducation des adultes, qui regroupent des groupes
populaires, qui regroupent des organismes d'animation, etc.
L'ICEA est essentiellement un organisme de concertation volontaire,
biaisé sur l'éducation des adultes, fortement biaisé sur
l'éducation des adultes, mais biaisé dans une perspective
d'usagers. Et, pour une femme qui frappe à la porte d'un service
d'éducation des adultes, ne lui demandez pas d'aller s'asseoir avec les
autres, suivre les mêmes cours que les autres. Cela n'a aucune
espèce de sens. Vouloir faire des économies par là, c'est
se fouter du besoin de formation des femmes. Je suis sûr que ce n'est pas
ce que le gouvernement veut faire et donc, j'espère que ce n'est pas
cela qu'il fera.
M. Leduc (Fabre): Finalement, vous laissez croire qu'il existe
une grande stabilité dans le personnel chargé de cours à
l'éducation des adultes?
M. Bélanger (Paul): Non.
M. Leduc (Fabre): Non? On a plutôt l'impression que c'est
une rotation, que c'est un personnel assez mobile.
M. Bélanger (Paul): Non, ce n'est pas exact.
M. Leduc (Fabre): En tout cas, les informations que j'ai...
M. Bélanger (Paul): On a peu d'information à ce
sujet. Les meilleures informations sont peut-être, à
l'éducation des adultes, la CECM qui recueille de longues séries
de statistiques, depuis un certain nombre d'années, pour suivre les
individus de plus près. Si j'allais dire oui à votre question,
c'est que je pensais à ces 3000 formateurs du soir qui sont partis du
champ de l'éducation des adultes en raison des coupures. Pour les
autres, je pense qu'on peut dire, sans se tromper, qu'il y a une très
forte stabilité. Ce monde-là, depuis cinq ans, dix ans, est
là. Et la preuve, c'est que, quand les coupures se sont faites, il y a
eu plusieurs rencontres à travers le Québec où cela a
été constaté. Et de la même façon, vous allez
voir dans le rapport de la CEFA qu'on constate la même chose: c'est qu'il
y a une tradition de l'éducation des adultes. Même si ces
gens-là sont hélas des travailleuses - surtout des travailleuses
- et des travailleurs à temps partiel, il y a une forte tradition.
Là où il y a une rotation un peu plus grande, c'est
peut-être dans certains programmes spéciaux et là,
peut-être qu'on peut donner l'exemple du glaçage sur le
gâteau de tantôt, mais c'est précisément là
peut-être qu'il y a moins de stabilité. C'est marginal, c'est
affreusement marginal.
M. Leduc (Fabre): Merci.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Merci, M. le Président. Compte tenu du fait
qu'il est 1 h 35 du matin, je n'entrerai pas dans un long préambule.
Ce sont les commentaires du ministre qui m'amènent à poser
une question à M. Bélanger. Lorsque le ministre semblait trouver
un peu amusant d'avoir sabré allègrement dans le secteur de
l'éducation populaire, ce discours il l'a déjà tenu aux
dernières études de crédit à savoir qu'à
cette période-là, non seulement parlait-il du "crémage" du
gâteau, mais il parlait aussi de cours de macramé, de couture,
ainsi de suite. Cela démontre un peu son manque de connaissance à
savoir comment inciter des gens qui ont laissé le réseau scolaire
depuis longtemps, comment les inciter à suivre par la suite des cours de
formation générale ou de formation professionnelle. Je ne vous
demande pas de statistiques précises, M. Bélanger, mais
pourriez-vous nous dire, de mémoire, quel pourcentage des gens qui
étaient justement dans ces cours de "crémage" de gâteau, de
macramé, de yoga, de couture ou autres, se dirigeaient par après
vers des cours de formation professionnelle?
En d'autres mots, d'après ma connaissance et mon
expérience dans le domaine de l'éducation des adultes, c'est que
ces cours-là étaient une méthode pour inciter les gens et
pour leur démontrer qu'il était possible, même s'ils
avaient quitté l'école depuis longtemps, de reprendre des cours.
Est-ce que vous avez un commentaire sur ce sujet?
Le Président (M. Jolivet): M. Bélanger.
M. Bélanger (Paul): Brièvement, il faut dire
d'abord que ces cours, qu'on appelle loisirs culturels, depuis un certain
nombre d'années devaient s'autofinancer selon les règles de la
DGEA. On a prétendu à certains égards qu'il s'agissait
là de gaspillage; ces cours-là devaient s'autofinancer et on les
qualifiait de loisirs culturels. La plupart de ces cours ont maintenant
été transférés dans les activités de loisirs
culturels des municipalités, à tort ou à raison. Bien
sûr, il y a des exceptions, ce qui permet à certaines personnes de
les soulever pour montrer une certaine forme d'argumentation mais cela est tout
à fait marginal.
Les cours qu'on avait maintenus en priorité depuis un certain
nombre d'années étaient des cours prioritaires. Par exemple,
relations parents-enfants, gestion du budget familial, etc., qui étaient
des cours qui étaient pratiquement gratuits. Il y avait un faible
coût d'inscription mais ces cours ont maintenant des frais d'inscription
très élevés. Même les analphabètes
actuellement au Québec doivent payer 15 $ les 30 heures pour se former.
C'est vraiment inacceptable. Si la baisse d'activité n'est que de 45%,
c'est parce que les hommes et les femmes adultes sous-scolarisés ont,
par ce qu'ils ont sorti de leur poche, compensé la perte de budget. Si
ce genre d'activité s'est maintenu c'est parce qu'en plus des fonds
publics qui sont maintenus en partie de l'autre côté les usagers
paient maintenant 300% de plus de frais de scolarité qu'autrefois. C'est
ce qui explique que le volume ne s'est pas complètement effondré
dans le secteur socioculturel.
M. Cusano: Merci.
Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: C'est presque un hasard que vous soyez les
derniers et que ce soit aujourd'hui, le 8 mars, la journée des femmes et
qu'on discute de l'éducation des adultes. Je vais vous poser une seule
question. Pourriez-vous me dire, si vous l'avez, la proportion d'hommes et de
femmes dans votre tableau no 2, la formation éducative et
socioculturelle?
M. Bélanger (Paul): De mémoire, majoritairement, le
socioculturel, ce sont des femmes. Majoritairement. Les deux tiers.
Une voix: Elle voulait vous prendre en défaut.
Mme Lavoie-Roux: Non, non, ce n'était pas pour vous
prendre en défaut, c'est pour prendre le ministre en défaut. Je
savais la réponse. Dans ce sens-là j'appuie fortement le point de
vue qui a été émis par mon collègue de Viau. Au
niveau du cégep, je pense qu'on trouverait là une proportion plus
grande de femmes qui reviennent mais ce sont des femmes qui sont
déjà motivées, qui ont eu plus de chance en
général au point de départ. Mais, quand vous tombez dans
l'éducation populaire, c'est la seule façon dont vous allez
pouvoir remotiver - les hommes aussi, mais particulièrement les femmes -
celles qui sont restées à la maison longtemps. Je pense que de
traiter cela comme des cours de fantaisie ou des cours de luxe ou des cours
insignifiants c'est se tromper fondamentalement sur les buts de
l'éducation des adultes et cet effort de rescolarisation et de mise
à jour de ces personnes-là. C'est pour cela que je pense qu'il
faut prendre les gens par le biais ou par la chose qui peut les
intéresser. Dans ce sens-là, je pense que le ministre traite
peut-être cela un peu légèrement.
Pour terminer, je lui ferai une taquinerie. Vous savez que les cours de
yoga, pour certains, c'est aussi bon qu'un psychiatre!
Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de
Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: Merci. Est-ce que l'accord Ottawa-Québec
qui a été mentionné par M. Ryan est le National Training
Act? J'avais l'impression qu'on pouvait exploiter cela. Vous avez dit que cela
ne répond pas aux besoins du Québec. Voudriez-vous
répéter les raisons pour lesquelles...
Le Président (M. Jolivet): M. Nantel.
M. Nantel: Principalement, madame, parce qu'au niveau des
formations privilégiées par le National Training Act et
endossées par l'accord Canada-Québec on se trouve à
privilégier des types de formation qui ne répondent qu'à
des besoins minoritaires, au sein de la population québécoise,
qui sont quand même légitimes. On n'a jamais prétendu que
ces besoins n'étaient pas légitimes. Les besoins de formation
dans des secteurs de technologies nouvelles, par exemple, de niveau
collégial, sont effectivement nécessaires, mais comme, au
fédéral comme au provincial, c'est souvent dans un processus de
vases communicants qu'on favorise un programme au détriment d'autres
programmes, les conséquences sont ainsi pour ce qui est du National
Training Act. Je disais tout à l'heure qu'à cause du même
phénomène, en privilégiant ce type de formation dont j'ai
parlé, on défavorise des types de formation
générale qui permettaient, il y a quelques années,
à au moins 20 000 personnes, principalement des femmes au Québec,
de s'inscrire dans des programmes de formation générale de niveau
secondaire et
permettaient également à au moins autant de personnes au
Québec, sinon davantage, de s'inscrire dans des programmes de formation
professionnelle de niveau secondaire également.
Ces deux types de formation, maintenant, vont être
défavorisés au profit d'un type de formation de niveau plus
élevé, ce qui, en soi, n'est pas mauvais. Ce que nous aurions
souhaité, c'est que l'ensemble des besoins de formation de la population
soit considéré par cette nouvelle politique.
M. Bélanger (Paul): En fait... Mme Dougherty:
Oui...
M. Bélanger (Paul): En fait, il y avait deux
scénarios possibles pour l'orientation de la formation professionnelle
des adultes. Celui que le gouvernement du Québec a produit à
travers la commission Jean et celui de la commission fédérale
Allmand qui a abouti dans la loi nationale sur la formation. Par les accords
Québec-Ottawa, qui figent la façon dont vont être
alloués les fonds de formation professionnelle pour les trois prochaines
années, on se trouve à figer ces fonds dans le sens de la
commission Allmand, ce qui est une option possible mais qui n'était pas
l'option, mais pas du tout d'ailleurs - on n'en a pas le temps ce soir mais
c'est facile de le démontrer - de la commission Jean. On se trouve
à enfermer cette partie de l'éducation des adultes dans une
camisole de force qui n'est pas celle de la commission Jean. Dans ce sens on
comprend qu'il fallait peut-être signer un accord, mais peut-être
que le contenu aurait pu permettre de laisser plus de place pour
débattre ensuite la question à la CEFA.
Mme Dougherty: Je crois que c'est une question très
importante. J'ai eu l'occasion de recevoir une lettre de M. Axworthy, il y a
quelques jours, sur un autre sujet. Il y mentionnait qu'il était
étonné d'avoir reçu très peu de demandes de la
province de Québec concernant le National Training Act par rapport aux
autres provinces. Il a mentionné quelques programmes en Ontario. C'est
tout ce que je sais là-dessus. Mais si les critères ne
répondent pas aux besoins du Québec, on va les changer. Je crois
que c'est quelque chose de très important pour nous.
Dernière question. Avez-vous des chiffres sur le nombre de "drop
outs" qui ont profité de l'éducation des adultes?
M. Bélanger (Paul): Quand on analyse le niveau de
scolarité des clientèles, on s'aperçoit que les seuls
programmes qui, dans l'histoire de l'éducation des adultes, ont
recruté des clientèles qu'on identifie, quant à leur
niveau de scolarité, aux "drop outs" ont été, avec des
exceptions, surtout les programmes de formation à temps plein, soit
professionnelle soit générale. Ce sont les deux programmes qui
ont fait quand même un long chemin au Québec, qui recrutaient les
clientèles ayant en moyenne moins de 10 années de
scolarité ou moins de 11 années de scolarité.
Malheureusement, la nouvelle orientation du gouvernement
fédéral ne donne plus la priorité à ces programmes.
Il ne les coupe pas complètement, mais il ne leur donne plus la
priorité alors que, et j'y reviens, la CEFA en faisait une
priorité. C'est-à-dire qu'on ne sortira pas du marasme actuel
où près de 1 000 000 de personnes n'arrivent pas à
retrouver un emploi si on ne peut donner à cette population cette
formation de base - pour prendre le langage de la commission Jean -
nécessaire pour ensuite passer à une formation
professionnelle.
Mme Dougherty: Merci.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Au nom des membres de la
commission, je vous remercie de votre témoignage et j'inviterai d'abord,
pour clore l'ensemble de ces réunions de la commission de
l'éducation... Oui, Mme la députée de L'Acadie. (1 h
45)
Mme Lavoie-Roux: Vu que ce seront les mots de la fin, est-ce
qu'avec le consentement de la commission on me permettrait de prendre trois
minutes pour faire part d'un mémoire qui a été
déposé ici à la commission et sur lequel je m'étais
engagée à faire des représentations? Je ne vous ferai pas
de longues représentations. Est-ce que tout le monde est d'accord,
d'abord? C'est simplement le rapport qui a été
présenté par l'école Madeleine Bergeron, de Sainte-Foy,
qui rejoint aussi une demande qui avait été faite par
l'école Victor-Doré, non seulement de la part des enseignants,
mais aussi de la part des parents, dans lequel on fait part que l'entente qui
faisait partie de la convention 1979-1982 - il y avait une annexe dans cette
entente - n'est plus partie intégrante du décret 1983-1985 et on
s'inquiète du rapport maître-élèves qui serait
appliqué et qui obligerait, en tout cas au moment où nous en
sommes, les enseignants à servir un nombre beaucoup plus grand
d'enfants. Il faut toujours s'entendre parce qu'on est dans une
clientèle très spécialisée. On peut passer de
quatre à sept ou de quatre à huit, c'est considérable.
Je sais que le ministre de l'Éducation nous a dit, à un
moment ou l'autre, quand on parlait de l'enfance exceptionnelle: On est en
pourparlers avec chacune de ces écoles particulières. Si je
reviens à la charge, c'est que je trouve que ce n'était
peut-être pas un engagement tellement précis, sauf de revoir
cela avec eux. Je veux vraiment me faire leur porte-parole pour indiquer
d'abord que, d'une part, il s'agit d'enfants dont le nombre en institution
diminue, mais dont la lourdeur des handicaps grandit et qu'avant de penser
à augmenter possiblement un ratio ou ce qu'on appelle maintenant un
rapport maître-élèves pour ce type d'enfants, il faudrait y
songer très sérieusement. J'aimerais que le ministre de
l'Éducation, à l'égard de ces clientèles
particulières - il y a deux écoles qui ont fait des
représentations, deux institutions, il y en a peut-être d'autres
-nous dise ce qu'il envisage pour ces types d'écoles qui sont des
écoles très particulières. C'est la seule
représentation que je voulais faire.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le
député d'Argenteuil, le mot de la fin.
Conclusions M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, vous postulez que demain les
négociations pourront reprendre sous le signe encourageant de la
formation d'une commission de conciliation dont nous connaîtrons alors la
forme. J'espère que vous avez raison. Si cette perspective ne devait pas
se réaliser, peut-être la commission devra-t-elle se réunir
de nouveau. Par conséquent, j'hésite à tirer quelque
conclusion. Je vais le faire de manière extrêmement sommaire.
Le Président (M. Jolivet): Pour les séances
actuelles.
M. Ryan: Je voudrais, tout d'abord, vous remercier,
vous-même et ceux qui vous ont assisté dans la tâche que
vous avez eue de présider les travaux de la commission. Vous l'avez fait
d'une manière cordiale, correcte, équitable et je pense que vous
avez précieusement contribué au bon travail accompli par la
commission. Je voudrais remercier le ministre également de sa
participation très assidue, exemplaire à ce point de vue, aussi
de n'avoir, en aucune manière, embarrassé la commission ou
alourdi son travail, de ne pas avoir cherché à dominer ces
travaux, d'avoir été présent comme nous. Je pense que
c'était Mr. Hyde.
Une voix: Et le Dr JeKyll.
M. Ryan: J'espère que non, on va l'entretenir. Je lui dois
des félicitations. Je le fais honnêtement et en toute
amitié également parce que nous nous connaissons depuis
très longtemps. Je pense que c'est un bon signe et qu'il faut que cela
continue. Je remercie mes collègues de la députation, du
côté ministériel et du côté libéral. Je
pense qu'il y a eu un taux d'assiduité aux travaux de la commission qui
a été magnifique. De notre côté, je pense que la
présence a été très élevée; je m'en
réjouis à tous points de vue.
En ce qui touche les résultats de la commission, je suis bien
content qu'on ne sorte pas avec des conclusions claires. Ce n'était pas
l'objet de la commission. On l'avait signalé dès le début,
d'ailleurs, que la commission ne devait pas se transposer en un organisme de
médiation ou de conciliation. C'était un organisme exploratoire
qui allait chercher des avenues possibles de rapprochement. Je pense que
l'esprit dans lequel la commission a fonctionné, qui était
foncièrement un esprit de recherche, un esprit d'incertitude de bon
aloi, de désir d'apprendre, était déjà un
élément extrêmement important en soi.
Nous sortons avec des points d'interrogation nombreux. Il fallait en
planter plusieurs dans la tête du ministre et de ses collègues du
côté ministériel qui ont le devoir de l'appuyer, quoi qu'il
fasse, du moins publiquement. Je pense que nous sortons tous avec des points
d'interrogation plus nombreux que nous en avions avant. Nous avons entendu des
points de vue qui n'étaient pas nécessairement conformes à
ceux que nous avions au départ. Je pense que tout cela est de
l'excellent matériel pour la commission de conciliation qui sera
vraisemblablement formée pour les parties engagées
immédiatement dans la négociation. Je pense qu'à la suite
de cette expérience que nous avons faite nous serons mieux en mesure
comme députés de suivre de très près le
déroulement des négociations et d'intervenir de nouveau chaque
fois que nous le jugerons nécessaire à partir de notre point de
vue, soit ministériel, soit d'Opposition.
Par conséquent, je pense que cela a été une
expérience consciencieuse. Il n'y a pas eu de farces. Il n'y a pas eu de
gaspillage de temps, finalement. Le seul regret qu'on peut émettre,
c'est d'avoir été obligés de passer trop vite avec chaque
organisme. Cela ouvrait des mondes, comme le dernier que nous avons vu ce soir,
l'Institut canadien d'éducation des adultes. C'est, évidemment,
une matière pour deux, trois ou quatre jours et il a fallu faire cela
dans l'espace d'une heure et demie. Mais je pense que c'est autant de
possibilités qui restent là pour l'avenir. J'espère bien
que le gouvernement voudra faciliter ce genre de travail dans l'avenir.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.
M. Camille Laurin
M. Laurin: Je tiens de mon côté, M. le
Président, à vous exprimer mes
remerciements, ainsi qu'aux membres de la commission. Nous avons
siégé pendant plusieurs jours. Nous avons entendu plusieurs
mémoires. Je pense que ces mémoires ont suscité, de la
part des membres de la commission, beaucoup de temps, d'efforts, d'attention et
de patience. Je pense que cela témoigne de leur intérêt
pour la cause de l'éducation. Pour reprendre les mots du
député d'Argenteuil, je pense que le sujet est tellement
passionnant que nous pourrions passer toute la nuit à écouter
parler d'éducation. Mais je pense, en tout cas, que les mémoires
que nous avons entendus, les commentaires et les questions auxquels ils ont
donné lieu ont contribué à éclairer la population,
d'abord sur les enjeux de l'éducation en tant que tels, et aussi sur les
enjeux du présent conflit. Ils ont permis à la population de se
faire une meilleure idée des aspects majeurs du problème et
peut-être aussi des pistes de solution qui doivent être
envisagées. Je pense que les travaux de cette commission ont pu non
seulement éclairer les esprits, mais aussi fournir une base sur laquelle
nous pourrons édifier maintenant les étapes qui suivent et qui,
dans mon esprit en tout cas et selon mon espoir, devraient aboutir à un
règlement négocié.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Oui?
Mme Lavoie-Roux: Cela a-t-il éclairé le
ministre?
Le Président (M. Jolivet): On verra. Quant à moi,
je remercie tous les membres de la commission, ainsi que l'équipe
technique qui nous soutient, la télédiffusion des débats,
le journal des Débats et le secrétariat des commissions. Je pense
que notre travail est terminé pour le moment, en espérant que,
justement, notre travail est fini aussi pour longtemps. Merci.
(Fin de la séance à 1 h 55)