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Version finale

32e législature, 3e session
(9 novembre 1981 au 10 mars 1983)

Le lundi 7 mars 1983 - Vol. 26 N° 251

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Audition de personnes et d'organismes sur les causes du conflit scolaire dans le secteur de l'éducation


Journal des débats

 

(Dix heures dix-sept minutes)

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission de l'éducation reprend ses travaux en vue d'entendre les organismes directement impliqués dans l'administration scolaire qui veulent faire des représentations sur la qualité de l'enseignement, la tâche et la sécurité d'emploi des enseignants et enseignantes en regard de la situation actuelle du Québec.

Les organismes invités aujourd'hui sont au nombre de dix. D'abord, l'Association des cadres scolaires du Québec; Québec Association of Protestant School Boards; la Fédération des comités de parents de la province de Québec; le Conseil des collèges; Québec Association of Catholic School Administrators; en même temps, en sixième lieu, c'est l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires protestantes du Québec et the Association of Protestant School Business Officials of Québec; en septième lieu, Québec Association of School Administrators; en huitième lieu, Québec Federation of Home and School Association; en neuvième lieu, l'Association nationale des étudiants du Québec et en dixième lieu, l'Institut canadien de l'éducation des adultes. Ce sont les groupes que nous avons à entendre au cours de notre journée de travail. Les travaux se poursuivront jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures.

Maintenant, on se souviendra que lorsque nous nous sommes quittés, vendredi soir dernier, nous nous étions entendus pour déterminer le temps de travail avant de commencer nos travaux. Je ne sais pas s'il y a quelqu'un qui a quelque chose à dire sur le temps de travail, en termes de temps à consacrer à chacun des organismes à entendre.

M. le député d'Argenteuil, puisque c'était vous qui aviez posé cette question vendredi dernier.

M. Ryan: J'ai eu une brève conversation, de caractère privé, ce matin, avant l'adjoint parlementaire du ministre de l'Éducation - je pense qu'on peut y faire allusion sans indiscrétion, c'est M. Leduc -au cours de laquelle le député de Fabre s'est enquis auprès de moi de la manière dont nous concevrions que la journée pourrait se passer, et même de la possibilité d'une extension des travaux jusqu'à la journée de demain inclusivement. Je n'étais pas en mesure de donner une réponse, parce que je pense qu'il faut voir un petit peu comment les choses vont s'aligner aujourd'hui. Ma suggestion, à ce moment-ci, serait la suivante: Que ce matin, nous procédions, suivant la norme que vous aviez proposée vendredi dernier, qui consiste à consacrer à chaque groupe une heure et quart ou une heure et demie, et que pendant la suspension du déjeuner, l'on puisse aviser après des consultations entre le gouvernement et nous-mêmes pour voir comment le reste du temps pourra être aménagé.

Le Président (M. Jolivet): Je retiens cette suggestion comme étant notre moyen de travailler, ce matin. J'inviterais maintenant l'Association des cadres scolaires du Québec à venir s'installer. Quant à nous, nous ajusterons en conséquence, entre 13 h 15 et 13 h 30, selon les besoins. On pourra déterminer, avec les gens autour de la table, le temps à être dévolu à chacun. Comme il est actuellement entendu entre les gens, nous verrons, vers les 15 heures, comment le reste de la journée se passera.

L'Association des cadres scolaires du Québec est représentée par M. Bernard Myette. Je lui demande de nous présenter ses collègues.

Association des cadres scolaires du Québec

M. Myette (Bernard): M. le Président, à mon extrême droite, M. André Pelletier, membre de la Commission professionnelle des services du personnel, qui oeuvre dans une commission scolaire de la région des Trois-Rivières. À ma droite, M. Bruno Giard, premier vice-président de l'association, qui oeuvre dans les services éducatifs dans une commission scolaire de la région de l'Estrie. À mon extrême gauche, M. Vincent Tanguay, président de la Commission professionnelle des services éducatifs au secondaire, qui oeuvre dans une commission scolaire de la région de Québec. À ma gauche, M. Michel Hamel, président de la Commission professionnelle des services éducatifs au primaire, qui oeuvre également dans une commission scolaire de la région de Québec.

Le Président (M. Jolivet): Vous pouvez

maintenant commencer la lecture de votre mémoire.

M. Myette: M. le Président, mesdames et messieurs les membres de la commission permanente de l'éducation, mesdames et messieurs les députés, nous avons l'honneur de vous soumettre le mémoire de l'Association des cadres scolaires du Québec en regard du présent différend qui oppose l'État et ses enseignants.

L'Association des cadres scolaires du Québec est une association professionnelle d'administrateurs scolaires qui regroupe plus de 1800 membres oeuvrant dans les commissions scolaires primaires et secondaires du Québec.

Ces membres exercent, dans ces organismes scolaires, des fonctions de gestion pédagogique et des fonctions de gestion administrative.

L'Association des cadres scolaires du Québec veut contribuer activement à la recherche de solutions dans le présent conflit.

Elle considère, en effet, que ceux qui, dans un contexte de mission partagée, ont les premiers à organiser les services éducatifs aux élèves de chaque région doivent être présents jusqu'à terme comme conseillers tant sur le fond que sur la forme.

C'est donc à titre d'organisme préoccupé du développement ordonné du système d'éducation au Québec, consciente également de l'importance que le dénouement de la présente impasse est susceptible d'exercer sur le fonctionnement et le climat général des écoles, sur la qualité des services professionnels offerts aux élèves et sur leur avenir que l'Association des cadres scolaires soumet ses avis et opinions. Elle souhaite que ceux-ci pourront servir à favoriser une meilleure compréhension des enjeux par le public québécois. Nous anticipons également qu'au lendemain de cette commission parlementaire, il y aura retour à une situation normale dans les écoles.

La présentation de ce mémoire débutera par un bref rappel historique des positions déjà prises par le gouvernement et la Centrale de l'enseignement du Québec.

Par le gouvernement: Nous considérons important de rappeler que la présente ronde de négociations s'est amorcée dans un climat de tension constante entre le gouvernement du Québec, le mouvement syndical en général et la Centrale de l'enseignement du Québec en particulier. En effet, le gouvernement a jugé opportun, voire légitime, d'adopter successivement la loi 68 et la loi 70 alors que la négociation comme telle n'était, à toutes fins utiles, même pas enclenchée. L'adoption de ces lois eut comme conséquence immédiate de soustraire certains chapitres à la libre négociation et de reporter l'exercice du droit de grève en avril 1983. Par la suite, la loi 105, adoptée en décembre 1982, fixait les nouvelles conditions d'emploi et ce, même avant l'expiration des actuelles conventions collectives qui étaient alors en vigueur.

Par cette mesure, le gouvernement rendait inapplicable l'exercice du droit de grève qu'il affirmait reconnaître aux syndiqués. Ce rappel peut nous permettre de mieux saisir pourquoi les syndiqués n'ont pu résister à l'exercice d'un recours à la grève, même illégale. Il ne faudrait pas non plus faire abstraction du projet de règles budgétaires soumis à la consultation en janvier 1983. Ce projet de règles, au niveau de l'enveloppe des enseignants, indiquait une récupération d'un nombre d'enseignants correspondant à l'utilisation maximale des possibilités découlant de l'application de la nouvelle convention collective décrétée.

Nous croyons que cette consultation relative au projet de règles budgétaires a entraîné un sentiment d'inquiétude chez bon nombre d'administrateurs du réseau de l'éducation.

Du côté de la Centrale de l'enseignement du Québec: D'autre part, la Centrale de l'enseignement du Québec avait acquis l'habitude de faire des rondes de négociations un enchaînement de gains successifs. Ceci pouvait se comprendre parce que jusqu'ici ces négociations s'étaient toujours déroulées dans des contextes politiques et économiques favorables. Qu'il suffise de nous rappeler que 1976 correspondait à une fin de mandat du gouvernement libéral et que 1980 correspondait à la période préréférendaire. Sous ce rapport, nous considérons que la Centrale de l'enseignement du Québec aurait dû comprendre et accepter le fait que le contexte économique avait changé au Québec.

Dans ce nouveau contexte, comment la Centrale de l'enseignement du Québec était-elle justifiée de continuer à faire des revendications d'ordre économique? Plusieurs de ses demandes nous semblent démesurées et il en est ainsi du maintien du statu quo. Voici pourquoi nous ne saurions, en tant qu'Association des cadres scolaires du Québec, être d'accord avec le statu quo tel que demandé jusqu'à ce jour par la Centrale de l'enseignement du Québec.

En guise de préambule, nous statuons qu'une convention collective doit être et n'être qu'un recueil de règles qui définissent les conditions de travail des salariés membres de son unité d'accréditation. Dans ce contexte, c'est en mai 1980, à la suite de la dernière ronde de négociations, que l'Association des cadres scolaires du Québec a procédé à une analyse systématique du processus de négociation et du contenu de la dernière convention collective.

Les résultats de cette recherche déposés en commission parlementaire à l'automne 1981 invitaient le gouvernement du Québec à apporter une attention plus particulière aux éléments suivants. Premier élément: un régime pédagogique, cela ne se négocie pas, et dans ce sens on doit assurer la primauté des régimes pédagogiques sur les conventions collectives. À cette fin nous recommandions que soient définis, a priori et antérieurement au début des négociations, les objectifs québécois en matière d'éducation scolaire de même que les grands moyens adéquats à ceux-ci, notamment les régimes pédagogiques. Nous complétions en disant que, par la suite, ceux-ci ne soient pas compromis par les mécanismes de négociation ou par la force de pressions concomitantes, mais que les conditions de travail des personnels soient convenues dans la cohérence et dans le respect de ces régimes et des objectifs qui les transcendent.

Deuxième élément. Des services à l'élève, cela ne se négocie pas. On doit assurer la primauté des services à l'élève. Nous étions d'avis que la primauté des services à l'élève pourrait être mieux assurée par une tâche globale plutôt que par une tâche articulée en temps de présence auprès des élèves pour des fins d'enseignement, de surveillance, d'encadrement ou de récupération et d'activités étudiantes. Cette préoccupation nous réfère à la recommandation que nous faisions, à savoir que, dans le but d'une meilleure utilisation des compétences particulières de chaque enseignant, la convention collective globalise les quanta de prestations des services des enseignants. Nous considérons aussi que la présence des enseignants sur réquisition, au-delà de la tâche d'enseignement, n'était pas de nature à favoriser les échanges entre ces derniers, les autres personnels de l'école et les élèves. (10 h 30)

À cette fin, nous recommandions que la convention collective élimine la notion de disponibilité telle qu'elle était définie et prévoie le retour à la notion d'une véritable disponibilité d'une semaine normale de travail avec présence obligatoire des enseignants.

Un autre facteur important est la capacité. Nous demandions qu'une convention collective accorde au critère capacité l'importance qu'il doit avoir dans l'affectation et la mutation du personnel enseignant. Parmi les autres éléments qui faisaient l'objet de nos préoccupations, nous avons voulu attacher une importance particulière à la qualité des services professionnels rendus par les enseignants. C'est à ce titre que nous faisions des recommandations qui avaient pour effet d'éviter la supplantation inconditionnelle, le "bumping", telle que vécue dans plusieurs commissions scolaires. Ainsi, nous proposions que dans l'affectation des enseignants la primauté soit accordée à la compétence de ces derniers et nous recommandions à cet effet que le regroupement des champs existant présentement par secteur dans la convention des enseignants soit aboli aux fins de la déclaration des surplus. Nous complétions en disant qu'afin de permettre une organisation adéquate répondant au nouveau régime pédagogique, particulièrement au niveau du premier cycle et de la formation professionnelle courte du secondaire, nous recommandions que le champ de titulariat, ou autre modèle, soit expressément prévu dans la convention collective et ce, en sus des 37 champs déjà prévus.

Il y a un autre élément qui fait qu'à notre avis le statu quo n'est pas acceptable: C'est la sécurité d'emploi assortie d'une mobilité géographique plus large. Nous considérions, à ce moment, que l'encradrement trop étanche et restrictif de la mobilité devait être réévalué. Sans remettre en question la sécurité d'emploi, cette dernière devait comporter des conditions convenables et acceptables de mobilité. En ce sens, la mobilité pouvait devenir une possibilité pour un enseignant de se relocaliser dans un autre corps d'emploi et dans un autre secteur d'activité et ce, à l'intérieur d'une région économique qui ne se limite pas aux 50 kilomètres. Nous recommandions que la commission scolaire joue son véritable rôle d'employeur et qu'en ce sens elle puisse affecter un enseignant en disponibilité à d'autres tâches que l'enseignement ou la suppléance.

Les recommandations que nous présentions à l'époque étaient les suivantes: Que la sécurité d'emploi consentie demeure, mais qu'elle devienne assortie d'une mobilité géographique plus large que celle définie dans les actuelles conventions collectives et d'une mobilité intersectorielle dans les différents réseaux des secteurs public et parapublic. Par ailleurs, nous recommandions que les barrières définies par les conventions collectives, relativement à l'utilisation du personnel en sécurité d'emploi, soient sinon complètement enlevées, du moins très abaissées afin de permettre aux commissions scolaires, localement, de gérer adéquatement leurs ressources humaines.

Finalement, en matière de statu quo au plan des règles de formation de groupes. Plusieurs intervenants ont sensibilisé les membres de cette commission pour que la moyenne d'élèves par groupe ne s'applique pas s'il y a moins de dix groupes dans chacune des catégories. Ils concluaient que la qualité de l'éducation serait affectée par cette règle, surtout au secteur de l'adaptation scolaire et de l'enseignement professionnel.

Nous voulons préciser ici que, si la

règle des moyennes peut ne pas s'appliquer, par contre, les maximums par groupe s'appliquent et ce, toujours. Ces maximums d'élèves par groupe ne sont supérieurs que de deux élèves à la moyenne de chacune des catégories, ce qui, pour l'association, n'affecte aucunement la qualité de l'éducation. Nous avons annexé au présent document (annexe 3) un exemple de l'application de ces maximums et moyennes et, sur demande, nous vous l'expliquerons.

Ces recommandations de l'Association des cadres scolaires du Québec, déposées en octobre 1981 à la commission parlementaire sur les négociations collectives dans les secteurs public et parapublic, ont été faites dans un double but. D'une part, elles visaient à garantir la réalisation des objectifs du plan d'action pour lesquels un large consensus était né au Québec. D'autre part, elles permettaient de reconnaître les responsabilités des commissions scolaires dans leur rôle d'employeurs et de répondants directs auprès de la population de la qualité des services éducatifs sur leur territoire.

Il est à souligner également que nous demandions que les conventions collectives devaient être expurgées de tout ratio, et ce, pour la simple raison qu'une convention collective n'a pas à déterminer le nombre de dispensateurs de services ou le nombre de salariés membres de l'unité d'accréditation et, par le fait même, le montant des cotisations syndicales.

Proposition du 10 février 1983. Depuis l'adoption du décret de décembre 1982, fixant les conditions d'emploi des syndiqués, l'intervention de notre association n'avait été sollicitée ni directement ni indirectement. Toutefois, lors du déclenchement des grèves de la fin janvier, nous avons jugé impérieux de mettre tout en oeuvre pour favoriser un règlement hâtif et satisfaisant de ce conflit, et ce, dans un souci constant de vouloir assumer nos responsabilités en matière d'éducation.

Dans un télégramme envoyé conjointement à M. Camille Laurin, ministre de l'Éducation, et M. Yvon Charbonneau, président de la Centrale de l'enseignement du Québec, le 31 janvier 1983, nous leur disions: "L'ACSQ pense qu'il existe des voies de solution et prie instamment les parties à reprendre le dialogue. Le cas échéant, l'ACSQ offre ses services en vue de faciliter les discussions entre les deux parties."

Cette offre de service a été accueillie favorablement par le ministère de l'Éducation. Les interventions de l'Association des cadres scolaires du Québec ainsi que celles des autres partenaires du réseau ont permis la préparation de la proposition du 10 février 1983 déposée par le gouvernement à la Centrale de l'enseignement du Québec.

Dans un communiqué de presse émis le 11 février 1983, l'Association des cadres scolaires du Québec avait alors invité les enseignants à analyser sérieusement cette proposition en espérant qu'elle pouvait mettre fin au conflit.

À notre avis, cette proposition était acceptable parce qu'elle permettait, entre autres, au niveau des classes du primaire, un engagement gouvernemental qui leur confirmait un temps de présence de l'élève égal à 24 heures en 1983-1984, 24 h 30 en 1984-1985 et 25 heures en 1985-1986. Elle garantissait de plus une tâche moyenne par titulaire de 21 heures en 1983-1984, de 21 heures en 1984-1985 et 21 h 30 en 1985-1986. La combinaison de ces deux garanties assurait la présence de spécialistes pour l'équivalent de trois heures par semaine en 1983-1984 et de trois heures et demie par semaine en 1984-1985 et 1985-1986, ce qui constitue une amélioration de services par rapport à l'entente précédente.

Dans les classes du secondaire, l'engagement gouvernemental proposait pour les classes du secondaire un étalement de l'augmentation du temps consacré à l'enseignement selon le modèle suivant: 21 périodes de 50 minutes en 1983-1984; 22 périodes de 50 minutes en 1984-1985 et 23 périodes de 50 minutes en 1985-1986 et ce, à l'intérieur d'une charge globale et uniforme de 25 périodes de 50 minutes.

Une telle proposition avait pour avantage de permettre de valider par simulation, au cours des prochaines années, si l'assignation d'une tâche moyenne de 23 périodes de 50 minutes est réalisable, sans toutefois diminuer la qualité des services éducatifs offerts aux élèves dans les écoies.

Au plan de la sécurité d'emploi, l'engagement gouvernemental permettait également d'éviter les mises en disponibilité au primaire et assurait un plafond annuel de 5000 mises en disponibilité au secondaire. Ces mêmes propositions - il est important de le noter - étaient assorties d'une garantie de rémunération à 100% du personnel mis en disponibilité, conditionnellement à l'atteinte des nouveaux seuils de résorption.

Au plan de la participation, l'engagement gouvernemental accroissait enfin le nombre des éléments de consultation relatifs aux fonctions et responsabilités des enseignants. Il permettait même, dans certains cas, des arrangements locaux.

En somme, l'ensemble de la proposition gouvernementale répondait en bonne partie aux préoccupations que les membres de l'Association des cadres scolaires du Québec avaient exprimées dans leur avis antérieur aux fins d'assurer la qualité des services éducatifs aux élèves. Dans le contexte actuel de la crise économique où il est requis que chaque membre de la collectivité québécoise fasse un effort pour permettre un redressement de la situation, l'Association

des cadres scolaires a donc jugé que cette dernière proposition était acceptable parce qu'elle assurait premièrement la primauté des régimes pédagogiques sur les contenus de convention collective; deuxièmement, un niveau de services dans les écoles acceptables, compte tenu des conditions économiques actuelles; troisièmement, la possibilité de créer des postes de titulaires au premier cycle du secondaire; quatrièmement, le maintien du niveau de services pour les élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage.

Bien sûr, notre demande d'arrangements locaux au chapitre de l'affectation et de la mutation n'est pas incluse dans ce dépôt, mais nous escomptions que cette proposition ouvrirait le dialogue et permettrait à la Centrale de l'enseignement du Québec de faire des contre-propositions, mais tel ne fut pas le cas. Cependant, notre demande à ce chapitre demeure et nous espérons que les parties permettront d'inclure cette possibilité d'arrangements locaux, sur ce chapitre, qui ne coûtent rien mais qui permettraient au milieu de se doter de mécanismes qui lui soient propres.

En conclusion, l'Association des cadres scolaires du Québec considère la proposition gouvernementale du 10 février comme susceptible de maintenir à un niveau acceptable la qualité des services éducatifs actuellement dispensés aux jeunes citoyens et citoyennes du Québec. Pour la première fois, et nous tenons à le resouligner, les éléments du régime pédagogique ne sont pas assujettis à la négociation de la convention des enseignants. Cependant, cette qualité des services éducatifs offerts aux élèves ne sera garantie qu'à la condition que les allocations de ressources correspondent aux besoins d'organisation des écoles qui sont définis dans le régime pédagogique du primaire et du secondaire et dans les politiques des services complémentaires et personnels aux élèves. Si nous croyons qu'une convention collective ne doit pas inclure le nombre de dispensateurs de services, nous croyons par contre qu'il serait indécent pour un gouvernement de se servir de cette porte ouverte pour réduire à leur strict minimum les ressources d'enseignants allouées dans les règles budgétaires.

C'est dans ce contexte que l'Association des cadres scolaires du Québec a apporté de fortes réserves au projet de règles déposé en consultation, en janvier 1983. Les besoins d'encadrement, de récupération, de surveillance et d'activités étudiantes des élèves doivent être comblés qualitativement et quantitativement. À notre avis, c'est une condition essentielle pour que l'école demeure apte à répondre adéquatement de sa mission éducative et puisse être considérée comme un véritable milieu de vie, ce que l'on revendique depuis maintenant 20 ans.

En terminant, nous avons un certain nombre de recommandations à faire aux parties à la négociation, ainsi qu'à cette commission parlementaire. À la Centrale de l'enseignement du Québec, nous demandons, au sortir de cette commission parlementaire, d'amorcer une réflexion sérieuse ayant pour objectif un retour à la négociation sur une base non coercitive telle que l'exigence du statu quo. Nous lui demandons également de réfléchir sur le droit des élèves aux services qu'ils sont en droit de recevoir et, à cet effet, d'annuler tout mouvement de grève. (10 h 45)

Au gouvernement, nous demandons d'analyser sérieusement la possibilité de la présence d'un observateur neutre à la table de négociation. Cet observateur n'aurait de compte à rendre qu'aux deux parties en présence à la table et permettrait d'aérer le climat.

Finalement, nous recommandons à la commission parlementaire de tout mettre en oeuvre pour que soit organisé dans les meilleurs délais un sommet sur l'éducation nationale. Ce sommet regrouperait l'ensemble des intervenants du réseau de l'éducation et aurait comme mission de faire le point sur l'état de l'éducation au Québec, tant sur ses aspects financiers, structurels que sur les régimes pédagogiques et les politiques qui en découlent, ainsi que sur l'organisation des écoles. C'est là, à notre avis, l'endroit où les professionnels de l'enseignement que sont les enseignants devraient discuter des régimes pédagogiques et non pas dans les rondes de négociations.

Devant l'ampleur des problèmes qu'a connus ce réseau depuis un mois et dans les 15 dernières années... Qu'il nous suffise de compter le nombre de jours de grève qu'un élève québécois a dû subir de 1968 à 1983, c'est-à-dire sur un cycle normal d'école, de maternelle à cégep III, nous ne pouvons faire autrement que de recommander que l'Assemblée nationale amorce également dans les meilleurs délais, une réflexion sur la mise en oeuvre au Québec d'une véritable charte du droit au travail.

Les événements des derniers mois ont rendu encore plus criantes les aberrations du système actuel de négociation. Force nous est de constater qu'il existe au Québec des droits aux organisations syndicales, des droits de faire la grève, des droits contre les briseurs de grève, mais nous posons la question: Existe-t-il véritablement un droit au travail qui assurerait un véritable droit à l'éducation au Québec?

Qu'il suffise, en terminant, de nous rappeler que, lors de la grève de 1972, ceux qui étaient contre la grève avaient le droit d'être dispensés de faire la grève et qu'une loi antibriseurs de grève les a rendus solidaires d'une grève légale, mais qu'en 1983

les gens, dans un contexte de grève illégale, qui ne voulaient pas faire la grève, ont du la faire.

Dans ce sens, on pourrait continuer et voilà pourquoi nous avons cette préoccupation d'un véritable exercice du droit de travail au Québec. Je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Avant de donner la parole à M. le ministre, je dois faire rappel de la liste des membres puisque je ne l'avais pas fait au début et qu'il restait quelques ajustements.

Les membres de la commission sont: MM. Marquis (Matapédia), Desbiens (Dubuc), Cusano (Viau), Beaumier (Nicolet), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), MM. Hains (Saint-Henri), Laurin (Bourget), Leduc (Fabre), LeMay (Gaspé), Gauthier (Roberval), Ryan (Argenteuil).

Les intervenants sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), Bérubé (Matane), Dauphin (Marquette), Doyon (Louis-Hébert), Parizeau (L'Assomption), Mmes Harel (Maisonneuve), Lavoie-Roux (L'Acadie), MM. Paré (Shefford), Rochefort (Gouin) Rivest (Jean-Talon). Le rapporteur de la commission est toujours M. Leduc (Fabre).

M. le ministre, vous avez la parole.

M. Laurin: M. le Président, je veux d'abord remercier l'Association des cadres scolaires pour le mémoire qu'elle nous présente aujourd'hui, qui est clair, concret et bien senti.

J'avais accordé une extrême attention aux recommandations qui avaient été déposées à l'automne 1981 par l'Association des cadres scolaires sur notre régime de négociation collective. Je pense d'ailleurs qu'elle s'est reconnue dans les objectifs que posait l'offre gouvernementale lors du dépôt de septembre. Je pense que, pour beaucoup de ses aspects, elle dérive en droite ligne de ses recommandations.

Je pense qu'il faut effectivement accorder une grande attention aux recommandations de l'Association des cadres scolaires du fait que ses membres sont engagés quotidiennement dans la gestion pédagogique et administrative des services éducatifs dans nos écoles du Québec.

Ce qui m'intéresse particulièrement dans leur mémoire d'aujourd'hui, c'est l'accent qu'ils mettent, et ils y reviennent à deux ou trois reprises, sur la primauté que doivent avoir les régimes pédagogiques sur les conventions collectives, sur le fait qu'il ne doit y avoir aucune incompatibilité ou aucune entrave entre ce que contiennent les régimes pédagogiques et les conventions collectives. Par exemple, ils disent à la page 14: "Les éléments du régime pédagogique ne doivent pas être assujettis à la négociation de la convention des enseignants." Ma première question, en fait, serait celle-là:

L'association pourrait-elle nous expliquer pourquoi elle insiste tellement sur le fait que les régimes pédagogiques doivent primer les conventions collectives? Deuxièmement - une sous-question qui découle de celle-là - : Est-ce que le décret permettra, selon eux, de mieux réaliser les objectifs du régime pédagogique, particulièrement en ce qui a trait aux services d'enseignement, d'encadrement, les services personnels et collectifs? Est-ce que le décret permettra de mieux réaliser ces objectifs du régime pédagogique que la convention collective de 1979-1982? Je pourrais peut-être poser tout de suite ma deuxième question. Je sais que l'Association des cadres s'intéresse d'une façon particulière aux services que nos commissions scolaires consacrent à l'enfance en difficulté. Je sais personnellement le rôle important qu'ont joué les cadres scolaires dans la préparation et la mise en oeuvre des politiques locales d'intégration des enfants en difficulté.

Si vous avez suivi - et je sais que vous les avez suivis - les travaux de la commission, vous êtes au courant que nous avons entendu des opinions partagées à ce sujet. Je vous demanderais donc, si vous pouviez éclairer les membres de la commission sur cette importante question, sur le plan, encore une fois, concret de l'application?

Le Président (M. Jolivet): M. Myette.

M. Myette: Je vais demander à M. Tanguay de répondre à la première question: Pourquoi les régimes pédagogiques ne doivent-ils pas être assujettis à la convention collective? Par la suite, je vais demander à M. Giard de répondre à la deuxième question: Est-ce que les décrets assureront les objectifs du régime pédagogique? Nous nous partagerons la réponse sur la troisième question de l'enfance en difficulté.

Le Président (M. Jolivet): M. Tanguay.

M. Tanguay (Vincent): Je vous remercie, M. le Président. Si on se rappelle la convention collective en vigueur entre 1979 et 1982, elle définissait la tâche d'enseignement d'un enseignant de 1000 minutes d'enseignement et de 100 minutes de période de récupération, d'encadrement et de surveillance. À partir de cette base, un directeur d'école pouvait établir quels étaient les éléments qui devaient faire partie du projet éducatif de l'école et établir, par exemple, quelles étaient les clientèles qui avaient besoin de récupération au sujet des apprentissages, qui avaient besoin de services personnels, de services particuliers pour tous les élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage. Si la convention collective de 1982-1985 venait remettre en cause une

partie de ces éléments, c'est tout le projet éducatif d'une école qui est une vague de fond - vous savez qu'un projet éducatif ce n'est pas quelque chose qui s'implante le lendemain du travail accompli entre les enseignants et la direction d'une école - si, à tous les trois ans, on devait remettre en cause la qualité et la quantité des services qui doivent être offerts aux élèves au sujet des services personnels particuliers et complémentaires, c'est de remettre en cause une partie du régime pédagogique, d'une part. D'autre part, concernant l'enseignement, la convention collective prévoyait les 1000 minutes, mais il était aussi loisible à une école de donner un peu moins de 1000 minutes à un enseignant dépendamment de la marge de manoeuvre qu'elle avait pour donner des priorités à une ou l'autre partie du projet éducatif.

Entre autres, on pouvait demander s'il y avait du monde en disponibilité pour travailler à préparer du matériel pour les professeurs qui faisaient de la récupération. Si on devait définir, dans une convention collective, le travail que devait faire ou que devrait faire du personnel en disponibilité, cela entraverait en soi une partie du projet éducatif d'une école. C'est pour cela qu'on dit que le régime pédagogique ne doit jamais être touché à l'intérieur d'une convention de travail qui doit stipuler le nombre d'heures de travail, le salaire et les avantages sociaux des employés et non pas la manière dont le travail doit se faire dans une école.

Le Président (M. Jolivet): M. Giard.

M. Giard (Bruno): Merci, M. le Président. Je voudrais revenir un peu sur la réponse de mon collègue pour dire aussi qu'on a trouvé un élément important au niveau du régime pédagogique. Il ne faut pas qu'on perpétue la tradition qui existait depuis environ dix ans à savoir qu'à chaque nouvelle convention, on devait modifier les temps d'enseignement pour chacune des disciplines. Il nous apparaît que si, à un moment donné, on a décidé que certaines matières devaient être prioritaires, ce n'est pas à l'occasion d'une convention collective qu'on devrait remettre en cause la priorité de ces disciplines par rapport à d'autres. Dans le contexte actuel, le nouveau régime pédagogique donne une importance prépondérante au français et aux mathématiques et c'est dans ce cadre qu'on revient souvent pour dire: La convention ou le décret, servant de convention collective, nous permet de répartir maintenant les temps à l'intérieur de l'école selon l'importance relative qu'on a bien voulu attacher à chacune des disciplines.

Quant à la deuxième question, comment le décret peut-il mieux réaliser les objectifs du régime pédagogique dans l'école en regard des services à l'élève? J'aimerais revenir sur un certain nombre de choses dont une déclaration ministérielle qui date du mois de novembre 1981, je crois, à Saint-Exupéry, où le ministre de l'Éducation définissait ce qu'était la tâche d'un enseignant ou d'une enseignante. Dans ce modèle, on revenait souvent sur le fait que dorénavant, l'enseignant et l'enseignante étaient les professionnels de l'acte éducatif, donc, les gens qui, dans l'école, établissaient une relation privilégiée entre l'élève et l'adulte, quels que soient les adultes à l'intérieur de l'école. Dans ce cadre, il est bien clair que l'enseignement comme tel ou la fonction de l'enseignant dans l'école prend plusieurs volets qu'elle n'avait pas auparavant et, à l'ère de 1982, à l'ère du nouveau régime pédagogique, on ne peut pas penser à un enseignant qui serait un dispensateur de cours. Il est nécessairement un professionnel qui établit une relation constante et privilégiée avec l'élève et dans l'ensemble de son cheminement. Cela viendra nécessairement favoriser l'existence et l'organisation à l'intérieur de l'école des activités dites complémentaires à l'élève, des activités qu'on pourrait désigner comme des services personnels en ce sens que l'enseignant devra dorénavant avoir des relations avec ses autres collègues qui ne sont pas des enseignants ou qui sont des enseignants dans l'école puisque c'est lui qui devra référer l'élève, pour des services personnels, vers un conseiller d'orientation, vers un professionnel de la psychologie ou vers d'autres professionnels.

Même chose au niveau des services complémentaires; l'enseignant devrait normalement être la personne qui assiste les élèves dans l'organisation de leurs activités à l'intérieur de l'école et en plus, il est l'intervenant privilégié en ce qui a trait aux activités d'apprentissage.

Ce que nous disons dans notre mémoire, c'est qu'il nous apparaît clair actuellement qu'une tâche globale permet une souplesse qui est de nature à améliorer dans chacune des écoles la relation élèves-adultes et c'est un point que nous trouvons important.

Le Président (M. Jolivet): M. Myette.

M. Myette: Quant à la question concernant l'enfance en difficulté et les politiques locales d'intégration, je voudrais rappeler aux membres de cette commission que les politiques d'intégration des élèves relèvent d'objectifs véhiculés depuis fort longtemps concernant cette intégration. Qu'il me suffise de vous rappeler les rapports et études publiés depuis 1975 dont, entre autres, le rapport COPEX. Il est à noter, entre autres - sans pointer personne - qu'on fait état à grand renfort de publicité du rapport CETEES, mais on n'a pas entendu un mot

jusqu'à maintenant sur le rapport COPEX, rapport extrêmement important, qui soulignait qu'au Québec le corridor ou couloir normal de la classe dite régulière s'était rétréci pour permettre un grand nombre de portes sur le côté pour sortir des enfants de la classe régulière et en faire des classes spéciales avec toutes les définitions que l'on connaît actuellement, les troubles légers, les troubles graves, les perturbés affectifs, et j'en passe. (11 heures)

L'objectif de ces politiques d'intégration est de permettre à l'enfant de vivre des situations les plus normales possible et, dans ce sens, de les maintenir le plus longtemps possible dans la classe que l'on dit régulière, donc de fermer ces portes multiples qu'on avait ouvertes parce qu'on disait que c'étaient des enfants spéciaux. D'ailleurs, le professeur Letendre de l'UQAM a fait une analyse de courbes sur l'évolution des troubles légers d'apprentissage au Québec et il en concluait qu'au rythme où on en trouvait, en l'an 2000, il y aurait plus d'inadaptés que de réguliers dans nos écoles. Les politiques d'intégration au Québec sont donc un retour à une situation que l'on considère normale et qui était devenue anormale.

En ce qui nous concerne, ces politiques - il y aura ici deux témoins de deux régions fort différentes: l'Estrie et Québec pour vous en faire part - à notre connaissance, comprennent une première partie qu'on appelle le dépistage, c'est-à-dire que c'est le départ, la connaissance de l'enfant et cela se fait à partir de l'enseignant; c'est suivi des études de cas qui impliquent l'ensemble des professionnels du réseau de l'éducation, que ce soit l'enseignant, l'orthopédagogue, le psychologue, le travailleur social, la direction de l'école et ce, afin de prendre la meilleure décision pour l'enfant, soit de le maintenir dans une classe spéciale ou de l'intégrer dans une classe régulière, et finalement, la décision de l'intégrer ou pas.

On a véhiculé que l'intégration avait pour l'effet de diminuer le nombre d'enseignants. À notre connaissance, et nous en témoignons, en aucun moment, les politiques d'intégration n'ont diminué les ressources auprès des enfants. Cela n'a été qu'un réaménagement des ressources, à savoir qu'au lieu d'avoir des classes spéciales avec un titulaire, les enfants intégrés dans la classe recevaient les services d'orthopédagogues autant au service de l'enfant qu'au service du titulaire, pour permettre un vécu le plus normal possible de l'enfant dans la classe. Nous pouvons également témoigner que le projet de règles de consultation déposé en janvier ne faisait atteinte d'aucune façon aux ressources en adaptation scolaire; il maintenait le même niveau de ressources d'enseignants en adaptation scolaire que celui de l'an passé. Dans ce sens, nous insistons pour dire que les politiques d'intégration n'ont pour objectif que le bien de l'enfant et avec un réaménagement de ressources d'enseignants pour permettre de l'atteindre. D'ailleurs, l'association publiait en mai dernier une étude au Dr Laurin qui s'intitulait: Un enfant, un bien, un service. Je demanderai à M. Vincent Tanguay de vous donner grosso modo les grandes lignes de cette analyse.

Le Président (M. Jolivet): M. Tanguay.

M. Tanguay (Vincent): M. le Président, j'aimerais revenir sur ce que M. Rousseau vous a présenté rapidement, lorsqu'il était à la commission l'autre soir, et qui s'appelait: le modèle en cascade. Vous vous en souvenez, il a dit: "II y a une politique d'intégration qui a été développée au ministère et qui respecte un modèle en cascade." J'aimerais être un peu plus explicite sur la présentation qu'il a faite. Il n'avait pas beaucoup de temps et il y avait plusieurs questions qui fusaient.

Dans un premier temps, j'aimerais expliquer ce qu'est un modèle en cascade, après cela parler de la politique locale dans une commission scolaire et comment on peut répondre à: Un enfant, un besoin, un service.

D'abord, le modèle en cascade part des enfants qui sont les moins touchés sur le plan intellectuel, ce qu'on appelle habituellement les troubles légers d'apprentissage; dans le jargon scolaire, on appelle cela les TLA. L'autre soir, M. Parizeau en a parlé ici en disant que tout le monde, un jour ou l'autre, a été TLA; on a eu un trouble léger d'apprentissage, que ce soit en français, que ce soit en mathématiques, que ce soit en éducation physique ou autre chose. Ce que nous dit la politique, c'est que ces élèves doivent être dans les classes et que c'est à l'enseignant de faire en sorte que l'élève qui fait face à un trouble léger d'apprentissage, à un moment donné de son cheminement scolaire, puisse recevoir l'attention voulue de l'enseignant qui est dans sa classe régulière. Avant la politique d'intégration, il y avait eu des philosophies qui voulaient que cet enfant soit retiré de la classe normale pour un bout de temps et, après cela, il réintègre la classe normale. La politique fait faire un cran en disant que l'enfant qui subit un trouble léger d'apprentissage doit être maintenu dans la classe régulière.

Un cran plus bas: le trouble grave d'apprentissage. Qu'est-ce qu'est un trouble grave d'apprentissage? Lors de l'entrée au secondaire, un élève qui, dans les matières comme les sciences de la nature, la formation de la personne, les sciences naturelles, les sciences humaines, est régulier, c'est-à-dire qui suit l'ensemble des élèves qui

sont dans sa classe, il n'y a pas de problème, mais un élève qui a accumulé un retard d'à peu près un an en français et en mathématiques, cet enfant, lorsqu'il entrait au secondaire était mis dans une classe à part. On n'est pas obligé d'aller très loin, c'était il y a seulement deux ou trois ans.

Actuellement, avec la politique d'intégration, cet enfant est dans une classe régulière. Ce qui peut arriver lorsque survient le cas de plusieurs élèves en première secondaire, par exemple, c'est qu'on va placer quatre enfants par classe pour quatre ou cinq classes et on va le retirer de la classe de français, c'est-à-dire six heures par semaines. À ce moment, il est regroupé avec une dizaine d'élèves, de sorte qu'en étant avec dix ou douze élèves et un enseignant six heures par semaine, il est capable, dans sa première année au secondaire, de reprendre les apprentissages de la sixième année du primaire et de sa première année du secondaire, de sorte qu'on peut dire que c'est un élève qui est intégré à l'école. Si, en cours d'année, cet élève a repris son souffle comme il faut, a repris sa vitesse de croisière normale, il peut immédiatement intégrer une classe de première secondaire. Mais, normalement, l'objectif c'est qu'en deuxième, il suive l'enfant ou l'étudiant de deuxième secondaire. C'est la même chose en mathématiques ou en anglais. Le même processus peut être appliqué et on dit que c'est normal qu'il suive l'autre élève ou son copain de première secondaire.

Après cela, on a les déficients légers. Le déficient léger est un enfant qui, à son arrivée au secondaire, a à peu près la valeur au niveau des apprentissages - d'une troisième ou d'une quatrième année primaire. C'est bien sûr qu'il ne peut suivre un enfant du régulier. L'habitude, avant la politique, était de faire des classes spéciales et jamais, en aucune circonstance, les enfants de cette classe spéciale ne pouvaient avoir des activités communes avec les enfants du régulier.

De plus en plus, ce qui se vit dans une école, c'est que l'enfant qui a un problème de déficience légère sera avec ses copains de première secondaire dans une classe spéciale, mais suivra les activités du midi, par exemple, le sport scolaire; il y a une activité de ciné-club un après-midi, il peut participer à cela en même temps; s'il y a une classe verte une journée, au même titre qu'un élève de première secondaire, il peut suivre ce que les autres font. De sorte que cet enfant ne se sent pas retiré des activités des autres élèves. On sait que souvent ces élèves ont autant de facilité que n'importe quel élève à suivre des cours d'éducation physique, d'arts plastiques. Qu'est-ce qui ferait que, à court ou à moyen terme, ces étudiants ne pourraient pas suivre les mêmes activités d'éducation physique, d'arts plastiques, de musique que les élèves du secondaire régulier?

À ce moment, on vient de faire subir un cran de plus ou de donner la possibilité à un élève de monter d'une marche, de participer aux activités des autres élèves et de ne pas être mis à part dans l'école secondaire.

On pourrait continuer comme cela avec les déficients moyens. On s'aperçoit que l'objectif de la politique d'intégration n'est pas de faire en sorte que l'élève qui a un trouble d'apprentissage ou un trouble d'adaptation intègre une classe régulière, mais de lui donner une chance de monter d'une ou deux marches. C'est en ce sens qu'on dit que c'est vraiment quand on arrive un petit peu plus loin, qu'on parle de déviations multiples, d'un élève qui a, en plus d'un trouble d'apprentissage et d'adaptation, une difficulté sensorielle, que ce soit au niveau de l'ouïe, de la vision, ou au niveau physique comme tel, qu'il s'agit de faire en sorte que cet élève puisse aussi participer aux activités de l'école régulière au même titre que les autres - même si certaines activités ne lui sont pas possibles -de ne pas placer un élève qui a une difficulté sensorielle à l'extérieur des autres.

On a de plus en plus d'élèves qui ont des troubles d'ouïe ou de vision, qui entrent dans nos écoles et je pense que c'est normal, dans une école publique, que l'ensemble de la communauté puisse participer aux activités qui se déroulent dans cette école et de ne pas mettre des gens à part parce qu'ils ont un trouble sensoriel ou une déficience mentale légère.

C'est la politique d'intégration du ministère et la politique qu'on essaie d'implanter dans nos commissions scolaires. La politique d'une commission scolaire vise à définir quels sont les besoins et quels sont les services qui doivent être rendus aux élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage. À ce titre, elle reconnaît que ce qu'est l'engagement d'une commission scolaire relativement aux services qu'elle doit rendre à cette clientèle et elle définit quels sont les intervenants.

À ce titre, par exemple, une commission scolaire peut dire qu'une école a la responsabilité de se donner un comité de travail avec des enseignants et avec la direction d'école et les professionnels non-enseignants, pour définir de quelle façon, dans une école, les services seront rendus et de quelle façon dans une école, on devra accepter les différences qui peuvent exister entre des enfants qui fréquentent l'école. C'est là l'objectif d'une politique d'intégration. C'est à cette fin que l'association publiait l'an dernier une étude sur Un enfant, un service, un besoin pour faire en sorte que la politique d'intégration

respecte vraiment les besoins qui peuvent être différents d'un enfant à l'autre et les services qu'une commission et plus particulièrement une école doivent rendre aux enfants en difficulté d'adaptation et d'apprentissage.

M. le Président, j'ai été très long, je m'excuse, mais je pense qu'il valait la peine de faire la chose.

M. Laurin: C'était très clair.

Le Président (M. Jolivet): M. Giard.

M. Giard: Si vous permettez, M. le Président, je voudrais ajouter quelques éléments là-dessus pour distinguer entre une politique en adaptation scolaire et une politique d'intégration des élèves en adaptation scolaire. Je pense que mon collègue Vincent a bien défini les deux. Je voudrais dire qu'actuellement, lorsqu'on parle d'intégrer les élèves dans une politique globale où on a dit comment on va le faire, pour qui on va le faire et qui va le faire, on agrandit l'ensemble de la politique à l'intégration, alors qu'une politique d'adaptation scolaire, c'est plus large que cela. Actuellement, ce qui se passe dans les écoles, c'est que selon les politiques généralement en cours, un élève peut être d'abord intégré dans l'école, ce qui est déjà une première phase de l'intégration. On décide si on le met dans une école spéciale ou bien si on le met dans une école régulière. Vous savez comme moi qu'actuellement plusieurs polyvalentes desservent les élèves d'à peu près toutes les catégories à l'intérieur même des murs. C'est la première étape de l'intégration. Je ne décrirai pas le reste, mais successivement à cela, dans le modèle en cascade, à ce moment, on pourra intégrer l'élève pour un cours, pour deux cours ou pour l'ensemble des cours. La vraie préoccupation, telle que nous l'analysons au niveau des enseignants, ce n'est pas tellement au niveau de l'intégration des élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, mais c'est la présence ou l'absence des services complémentaires, par rapport au fait qu'il y a des élèves qui sont intégrés partiellement ou complètement dans des classes régulières. À notre avis, si les politiques budgétaires du ministère n'étaient pas cohérentes avec le fait qu'on essaie de faire vivre à l'élève une vie la plus normale possible en l'intégrant dans des classes régulières, si ceci devait se révéler un moment privilégié pour retirer les ressources normalement requises pour que cet élève puisse progresser dans sa réhabilitation, à ce moment, j'ai l'impression qu'on ferait vraiment fausse route. C'est dans ce cadre qu'il est tout à fait justifié actuellement, de la part des enseignants, d'avoir une très grande insécurité par rapport au modèle qui sera retenu pour l'intégration de ces élèves dans certains milieux.

Je pense qu'une déclaration ministérielle voulant que les supports soient maintenus pour ces élèves, même intégrés, serait de nature à résorber considérablement cette inquiétude. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Merci, M. le Président. Il m'a fait plaisir d'écouter le mémoire de l'Association des cadres scolaires du Québec. Pour qu'il n'y ait pas de malentendu, je pense qu'il y a peut-être quelques précisions qui s'imposent. Votre organisme est un organisme indépendant, mais il est composé de personnes qui, au niveau de chaque commission scolaire, font partie de la fonction patronale. C'est bien important de le souligner, pour qu'on sache les paramètres dans lesquels on fonctionne. Ce n'est pas un reproche que je vous adresse, encore une fois, mais cela nous aide à comprendre clairement la portée de chacun des gestes qui sont posés, de chacune des choses qui sont dites.

Deuxièmement, j'entendais le ministre de l'Éducation dire tantôt qu'il avait veillé, avec un soin scrupuleux, à tenir compte des vues que vous aviez exprimées à la commission parlementaire qui avait siégé pour vous entendre en septembre 1981 sur les négociations collectives dans les secteurs public et parapublic. Je voudrais au moins signaler qu'il y a certains éléments des recommandations que vous faisiez alors qui n'ont pas été retenus par le gouvernement, de toute évidence. Vous insistiez, par exemple, sur l'importance de maintenir des éléments significatifs de négociation au plan local, et même sur l'importance de fournir aux commissions scolaires les moyens nécessaires pour qu'elles puissent assumer cette responsabilité. Évidemment, il n'en est absolument rien resté dans les décrets et pas plus d'ailleurs que dans le cadre de règlement du 10 février. (11 h 15)

Deuxièmement, vous aviez proposé, si mes souvenirs sont bons, que la fonction du comité national patronal soit intégralement respectée, qu'elle soit plus clairement définie que la dernière fois de manière à empêcher l'espèce d'écrasement des commissions scolaires par la partie gouvernementale. Mais si vous étiez présents l'autre jour, quand les commissions scolaires ont témoigné, vous auriez constaté que cette partie au moins de vos recommandations n'a pas eu beaucoup de lendemains. J'espère que, d'ici la fin du processus, ce sera mieux que ce qu'on a vu jusqu'à maintenant.

Je voudrais vous poser une petite question d'information, avant d'aller plus

loin. Les décrets nous sont arrivés vers la mi-décembre avec la loi 105. Est-ce que votre association a fait une intervention d'abord sur le processus que le gouvernement avait décidé de retenir? Deuxièmement, sur le contenu et sur les conséquences des décrets? Est-ce qu'il y a eu des déclarations faites par votre association au mois de décembre ou au mois de janvier à ce sujet?

M. Myette: Avant de répondre directement à cette question, je dois confirmer effectivement que l'Association des cadres scolaires du Québec a revendiqué des négociations locales et, d'ailleurs, elle les revendique toujours. Ce, au nom du véritable employeur que sont les commissions scolaires, tout en reconnaissant par contre que l'État devait déterminer la masse monétaire et les grands paramètres du "normatif lourd", comme on l'appelle. À cet effet, nous avions recommandé effectivement que le CPNCC soit formé de trois parties et qu'une fois la question monétaire déterminée, que le ministère de l'Éducation et la Fédération des commissions scolaires soient les seuls maîtres d'oeuvre dans la définition de tout ce qu'il y avait comme incidence sur le contenu pédagogique.

En ce qui regarde les décrets de la mi-décembre, je dois vous dire, pour vous situer dans la chronologie des événements, qu'ils ont été adoptés à la fin de décembre, donc, à la veille des vacances de Noël et que dès la reprise, en janvier, nous ne sommes pas intervenus pour la simple raison que le premier ministre de la province de Québec rencontrait les trois centrales syndicales et tentait d'arriver à un aménagement avec ces trois centrales. Cela n'a pas porté fruit. Les menaces de grève dans l'ensemble de la fonction publique ont été mises à exécution. Dès ce moment, à partir du fait où il avait été impossible au premier ministre de s'entendre avec les trois centrales et où les grèves apparaissaient dans les secteurs public et parapublic, non pas strictement dans le réseau de l'éducation, nous acheminions, tel que nous le disons dans ce mémoire, dès le mois de janvier, un télégramme au ministre de l'Éducation et au président de la Centrale de l'enseignement du Québec pour reprendre le dialogue et offrions nos services dans une espèce de rôle de médiateur-observateur - on prendra le terme qu'il faut - pour trouver des pistes qui nous semblaient possibles.

Ce que nous soulignons c'est que nous avons reçu, du côté de la Centrale de l'enseignement du Québec, des réponses à l'effet que le statu quo était l'exigence, tandis qu'au ministère de l'Éducation, on nous a demandé de préciser quelles étaient les pistes possibles. C'est dans ce sens qu'il y a eu une semaine intensive de travail pour trouver des pistes qui ont amené la proposition du 10 février.

M. Ryan: Sur la loi 111, est-ce que votre organisme a exprimé des opinions? Je n'en trouve pas dans le mémoire.

M. Myette: Sur la loi 111, je dois vous dire que notre organisme n'a pas émis d'opinion sauf qu'il vous soumet la réflexion suivante. La rigueur des lois des institutions parlementaires n'a d'égal que le nombre de citoyens qui violent les lois et du nombre de fois qu'ils le font. C'est la seule réflexion que nous vous laissons, puisque nous considérons que l'Assemblée nationale était le meilleur juge en la situation pour édicter des lois correspondant à la réflexion que nous vous faisons.

M. Ryan: Si vous me permettez une petite remarque, je pense que vos interventions peuvent profiter à un éclairage technique intéressant mais que ce serait se nourrir d'illusions que de penser que vous soyez placés pour jouer une fonction médiatrice. Dans notre système de relations du travail, M. Myette - je pense que vous le savez comme moi - on a une base foncièrement bipolaire. Il y a deux parties: la partie patronale et la partie syndicale. Surtout ceux qui sont dans l'univers concerné par un conflit ou un litige sont d'un côté ou de l'autre. Des personnes entre les deux, on peut en trouver à l'extérieur à un moment donné et j'espère que le ministre en trouvera aujourd'hui; il nous fera aujourd'hui des annonces quant à une formule de conciliation quelconque. Ce n'est pas minimiser ce que vous dites, c'est juste pour le situer dans une perspective exacte qui évite d'engendrer des illusions. J'ai terminé là-dessus pour l'instant.

Je voudrais vous poser une question sur un autre aspect. J'ai deux ou trois questions à vous poser. J'ai remarqué que, dans votre mémoire, vous semblez dire: Quant au régime pédagogique, la négociation est en marche, c'est au-dessus ou quelque part, en tout cas, en dehors de la négociation. J'ai cru comprendre que vous réduisiez le champ de la négociation singulièrement en parlant ce langage-là. J'aurais besoin de précisions là-dessus, peut-être à partir d'un exemple concret.

Dans l'ancienne convention collective il existait, comme vous le savez, des dispositions en ce qui touche le statut de l'enseignant, au chapitre 8 en particulier, dans lesquelles on disait que toute une série de choses étaient à la disposition de l'enseignant à titre indicatif. Cela laissait de la marge pour l'initiative. Ce sont les articles 8-1.02 et suivants. Dans le décret, on remplace tous ces articles, on les supprime autoritairement, unilatéralement d'un trait de plume et on les remplace par un paragraphe qui dit: Les dispositions du présent chapitre visent à faciliter

l'application des règlements du ministre concernant les régimes pédagogiques et doivent être interprétées en conséquence.

J'ai deux questions à vous poser là-dessus. D'abord, est-ce que ces dispositions nuisaient véritablement? Deuxièmement, dans les demandes qu'avaient présentées les enseignants ou dans les conventions expirées, en dehors des questions sur lesquelles il y a un accord de plus en plus général, comme le décloisonnement de la tâche, la nécessité d'heures de disponibilité plus nombreuses à l'école même, ce sont des choses sur lesquelles... Quant au critère de capacité, nous n'avons pas beaucoup de discussion à faire avec vous autres parce que ce sont des points sur lesquels nous avons déjà exprimé une opinion plutôt favorable, dès la fin de novembre dernier.

Est-ce qu'il y a d'autres points qui faisaient conflit? J'ai regardé le texte des régimes pédagogiques et il me semble que plutôt que de séparer complètement ces choses-là, comme semblent le suggérer certains passages de votre mémoire, on doit chercher des harmonisations. Il me semble qu'une négociation collective, d'où serait complètement évacuée toute tentative de la part des syndicats d'attaquer un petit peu le contenu de la tâche, serait une négociation qui irait plutôt vers l'arrière que vers l'avant. Il me semble que toute l'évolution de la négociation collective dans le monde contemporain tend à faire en sorte que la négociation collective ait une certaine prise sur le contenu du travail des salariés syndiqués.

Si vous pouviez me donner des précisions sur ceci. Il y a une certaine rigidité qui m'étonne un peu dans l'approche que vous avez présentée. Il y a bien des bons points, j'aurais pu passer une demi-heure à souligner les points positifs de votre mémoire sur lesquels je suis d'accord, mais là-dessus j'aurais besoin d'éclaircissement.

Le Président (M. Jolivet): M. Myette.

M. Myette: En guise de départ je vous soulignerais l'annexe 18 de l'ancienne convention collective - et je peux vous en faire lecture - où l'on dit: À la suite de discussions intervenues à la table de négociation avec les représentants de la Centrale de l'enseignement du Québec, la présente est pour vous confirmer que la grille matières, énumération des matières par degré ou par cycle au secondaire, sera déterminée comme présentement par notre ministère, mais l'établissement de la grille horaire, temps d'enseignement à chaque matière, demeurera sous la juridiction de chacune des commissions scolaires dans le cadre des objectifs pour chacun des programmes. En outre, les enseignants ne se verront pas imposer les blocs de trois périodes de 50 minutes ou l'équivalent comme mode d'organisation, sous réserve que la commission qui applique actuellement un bloc de trois périodes pour certaines matières à l'intérieur de la grille horaire puisse le conserver et que les commissions scolaires puissent l'implanter, de même que... Je pourrais continuer, j'arrive presque à la fin. Ceci était arbitrable. C'est une annexe qui était arbitrable et qui venait influer directement sur le mode d'organisation des cours au secondaire.

M. le député, vous pouvez ne pas partager notre point de vue, mais nous disons qu'une telle chose n'est pas négociable. Lorsque les conventions collectives vont jusqu'à fixer ou limiter les modes d'organisation des temps d'enseignement, la préparation des maquettes-cours, nous disons et soumettons que nous sommes rendus trop loin. Quant aux dispositions dont vous faites appel, aux 812, 813, 814 et 815, quand on dit que les guides pédagogiques sont à titre indicatif, nous posons la question: Pourquoi en préparer si elles sont à titre indicatif? Quant à 83, on dit que l'implantation des nouvelles méthodes fait l'objet de consultations, cela va. Cela demeure, le 813 demeure parce que cela faisait partie des objets de consultation du comité qu'on appelait au sujet de la commission scolaire, comité de consultation, et que toutes ces dispositions du chapitre 4 ont été reconduites intégralement dans la nouvelle convention décrétée.

Quand on disait à 814, qu'à l'exception des examens officiels, des tests et des examens ou tests de fin d'étape, ou de fin d'année de la commission, les instruments de mesure d'apprentissage des élèves sont mis à la disposition de l'enseignement à titre indicatif, je vous pose la question. Quand on dit c'est à titre indicatif, est-ce que les enseignants sont les seuls maîtres des modèles d'évaluation, des titres d'évaluation, des quanta d'évaluation, etc., des moments, etc.? Est-ce que vraiment l'évaluation des élèves n'est que l'apanage des professionnels de l'enseignement que sont les enseignants ou si des professionnels, conseillers pédagogiques, des coordonnateurs d'enseignement général, d'adaptation scolaire, de mesures d'évaluation n'ont pas aussi leur mot à dire là-dedans? Quand on dit que les bulletins du ministère sont à la disposition à titre indicatif, finalement, qu'est-ce que cela donne de produire des affaires si c'est tout à titre indicatif?

Maintenant, je dois vous dire que dans la nouvelle convention, effectivement, on subordonne les tribunaux d'arbitrage à la seule interprétation des régimes pédagogiques. Sans dire que c'est allé trop loin, je vous dis peut-être que cela prenait cela pour contrecarrer le mouvement qui s'était amorcé depuis quinze ans où

finalement les seuls qui avaient des choses à dire en matière de programme, en matière de bulletin, en matière d'évaluation, ce n'étaient que les enseignants. Mon collègue Vincent voudrait compléter là-dessus.

Le Président (M. Jolivet): M. Tanguay.

M. Tanguay: Juste une question. Qui doit répondre au plan local de la qualité des services éducatifs aux élèves? Est-ce que c'est le conseil des commissaires par la voix de son administration ou bien si c'est l'enseignant directement?

M. Ryan: Je vous signale que la dernière convention avait été signée par le gouvernement, la Fédération des commissions scolaires et la CEQ. Ces clauses ont dû être mises en connaissance de cause. Quand vous dites: Les guides pédagogiques, il me semble qu'on aurait pu le mettre en discussion. On aurait pu dire, à titre indicatif, j'espère que vous ne voulez pas suggérer que c'est l'instrument dont on va se servir pour chaque cours qu'on va donner dans les classes. J'espère que vous ne voulez pas dire que cela va jusque là.

M. Myette: M. le député, ce que je voudrais vous rappeler et peut-être que j'aurais dû le faire dès le début, je voudrais vous remettre dans le contexte de l'ensemble du mémoire. Nous disons que les professionnels de l'enseignement que sont les enseignants doivent avoir voix au chapitre dans tous ces domaines, mais que la place pour le faire ce n'est pas dans la négociation d'une convention collective. Et c'est à cet effet que nous recommandons un sommet national de l'éducation pour établir les modalités de participation et de travail de tous les intervenants de l'éducation, et non pas seulement les enseignants, de tous les intervenants pour établir comment, à l'avenir, nous allons nous concerter, le ministère, les commissions scolaires et les professionnels de l'enseignement que sont les enseignants et les autres, comment nous allons établir ces guides, ces régimes, etc. Nous ne voulons pas les exclure, mais nous disons: ce n'est pas dans une négociation de convention collective qu'on détermine ces choses.

M. Ryan: Je ne poserai plus de questions là-dessus parce que votre position m'inspire de sérieuses réserves. On aura l'occasion de les exprimer en d'autres temps, mais je pense que cela va être bon qu'on y pense de part et d'autre parce que c'est une question tout à fait fondamentale celle-là. Vous avez dit, à un moment donné, dans votre mémoire que le projet de règle budgétaire avait été une source d'inquiétude dans les milieux scolaires, les règles ont été envoyées à titre de projet vers la fin de décembre. J'ai trouvé quelques lignes dans votre mémoire, au début, là-dessus et ensuite dans les recommandations, vous ne revenez pas là-dessus, si mes souvenirs sont bons. Quelles améliorations seraient souhaitables dans le projet de règle budgétaire pour que vraiment elle s'harmonise de manière efficace avec... Vous, votre position, si je comprends bien, c'est le cadre de règlement du 10 février. Il n'y a rien qui aille au-delà de cela dans ce que vous avez dit ce matin, si j'ai bien compris. Cela va être ma deuxième question. Est-ce qu'il y a encore des améliorations qui pourraient être recherchées dans le cadre du règlement du 10 février et lesquelles? (11 h 30)

Le Président (M. Jolivet): M. Myette.

M. Myette: En ce qui concerne les règles, nous n'avons pas de recommandations, mais nous disons à la fin, en conclusion, qu'il serait quand même indécent, maintenant qu'il n'y a plus de ratios, de limiter par les règles les ressources, ce qui pourrait diminuer la qualité. Les règles de décembre, ce qu'on leur reprochait, c'est surtout au niveau secondaire, face à une augmentation de la productivité, de la tâche de 15%, d'avoir alloué une ressource qui correspondait à environ 13% de réduction en moyenne, n'allouant que 2% de taux de friction. Cela avait pour effet de considérer un modèle à peu près global et avec peu de jeu pour organiser les écoles. C'est dans ce sens que nous avons fait une proposition tout en reconnaissant qu'il relevait de la décision gouvernementale d'augmenter la productivité. Une fois la décision prise, nous avons demandé un étalement pour justement nous permettre de valider le taux de friction sur un P-3 ou sur 23 périodes en 1985-1986. Est-ce 2%, le taux de friction? Est-ce 5%, le taux de friction? Ce sont des choses à évaluer. C'est pour cette raison que nous disons que l'étalement permettrait, en 1985-1986, de vérifier, non pas par le vécu de 1983-1984, mais par simulation, quel serait ce taux de friction, puisqu'on sait qu'il reste toujours des parties de tâche et que les écoles polyvalentes de 1000 élèves, par exemple, avec le choix d'options, peuvent entrer difficilement dans un modèle théorique de 30 élèves par groupe, etc. Dans ce sens, nous escomptons - et peut-être est-ce là la différence, nous accordons la crédibilité au gouvernement comme à tous les gouvernements - si ce taux de friction était plus élevé de plus de 2%, que des analyses entraîneraient, en 1985-1986, une allocation de ressources qui tiendrait compte de ces mesures, tout en vous rappelant que le décret ou la convention décrétée considère un maximum de périodes. On ne dit pas que la moyenne est de 22 ou de 23. On dit:

C'est un maximum de... Il n'y a rien qui empêche d'aller à une moyenne inférieure à la convention collective si, par expérience, il se révélait que les taux de friction étaient supérieurs à 2%.

Quant aux améliorations dans le décret, nous en avons souligné une. Il nous apparaît que le chapitre 5.3 de l'affection et de la mutation est un chapitre problématique. D'ailleurs, au point de départ, l'association a toujours considéré et considère que ce chapitre est le reflet du milieu. Compte tenu qu'il n'y a pas d'argent d'impliqué là-dedans, que c'est une question de savoir lequel des individus ou des enseignants ou enseignantes sera en disponibilité ou ne sera pas réengagé, c'est donc une question de mécanisme. Nous considérons que chaque coin du Québec a ses particularités et c'est dans ce sens que nous avons, à défaut de négociations locales, demandé des arrangements locaux là-dessus. Quant aux autres chapitres, il peut y avoir des améliorations techniques de détail ici et là, mais le gros chapitre où il devrait y avoir des améliorations est, pour nous, le chapitre de l'affectation et de la mutation, qui devrait donner un cadre plus amélioré que même celui du 10 février et permettre des arrangements locaux.

M. Ryan: Seulement une question très brève. Vous me répondrez par oui ou par non et cela va me satisfaire. Auriez-vous préféré que ce domaine, l'affectation et la mutation, reste dans le champ de la négociation collective locale ou si vous êtes contents que ce soit passé dans l'ordre du décret, pourvu qu'on garde une petite marge pour des arrangements locaux non arbitrables, évidemment?

M. Myette: Nous devons vous dire en toute honnêteté que, pour nous, c'est un champ de négociation locale.

M. Ryan: Merci.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Compte tenu du temps qu'on s'était donné au départ, il resterait l'intervention du député de Roberval et compte tenu de la souplesse qu'on m'a accordée, je donnerais à Mme la députée de L'Acadie la dernière partie de nos interventions, puisque 13 h 15 arriverait vers 38, mais il faut en même temps se rappeler que nous avons dix organismes. Nous avons dix heures à notre disposition, ce qui implique qu'on devra examiner la possibilité entre nous de dépasser minuit. M. le député de Roberval.

M. Gauthier: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier l'Association des cadres scolaires d'avoir présenté ce mémoire et d'avoir attendu relativement longtemps pour être entendue à cette commission. Pour bien situer le contexte de votre témoignage, j'aimerais vérifier pour le bénéfice des gens de la commission et de ceux qui nous écoutent qui sont ces professionnels ou ces cadres que regroupe l'Association des cadres scolaires du Québec. J'ai l'impression effectivement qu'elle regroupe l'ensemble des cadres qui s'occupent de services financiers, de services administratifs, bref, de spécialistes dans tous les domaines, y compris des cadres qui s'occupent de direction d'enseignement et de vie étudiante dans les commissions scolaires. Également, votre association, si ma mémoire est fidèle, est divisée en grandes commissions professionnelles qui s'occupent de chacun des secteurs d'activité. Est-ce que ce que je vous dis est exact? Et, est-ce que le mémoire a été, je pense qu'on peut en présumer, préparé par la commission de l'enseignement, cet organisme qui regroupe les cadres qui s'occupent de vie pédagogique et d'organisation scolaire? Est-ce que c'est exact?

Le Président (M. Jolivet): M. Myette.

M. Myette: Effectivement, l'association regroupe tous les cadres et gérants de toutes les fonctions autant pédagogiques qu'administratives d'une commission scolaire, que ce soit de services dits éducatifs, enseignement professionnel, adaptation scolaire, enseignement général, mesures, évaluation et de toute la fonction support, personnel, finances, équipement, transport, etc. et est divisée en 16 commissions professionnelles représentant les 16 grandes fonctions de l'administration d'une commission scolaire. Le mémoire qui vous est déposé est le résultat de la concertation des avis de ces commissions professionnelles autant des services éducatifs primaires, secondaires que des services personnels et autres services à l'intérieur d'une commission scolaire.

M. Gauthier: Depuis les quelques jours que fonctionne cette commission, on a pu noter, en tout cas particulièrement au moment du témoignage des enseignants, que les préoccupations soulevées étaient de trois ordres. Je pense qu'il y avait ce qu'on peut appeler les exigences de base, la question de conserver l'emploi des enseignants, tout le mécanisme de la sécurité pour leurs membres; ce sont des exigences d'une corporation qui défend les intérêts de ses travailleurs. Il y a un deuxième ordre de préoccupation qu'avaient les enseignants et sur lequel porte particulièrement votre mémoire; il s'agit de ces exigences pour la qualité de la vie pédagogique. Il y avait également un troisième ordre de préoccupation que j'ai pu noter: c'étaient les exigences pour la qualité de la vie

professionnelle des enseignants. Mais revenons aux exigences de la CEQ concernant la qualité de vie pédagogique. Elles regroupaient cinq grandes préoccupations particulièrement: c'était d'abord les heures de travail, l'augmentation de la tâche qu'on a essayé de situer dans le contexte de l'organisation scolaire à venir. Les directeurs généraux avaient ouvert une porte intéressante à la fin de nos auditions vendredi dernier et je pense que vous venez de confirmer cela. Les directeurs généraux des commissions scolaires nous ont dit: "L'étalement de la tâche ne devrait pas présenter de problème parce que cela nous permettra de vérifier au fur et à mesure les problèmes qui se poseront." Tout à l'heure, en réponse à une question du député d'Argenteuil, je pense que vous avez confirmé cette position; vous êtes totalement en accord avec cette position des directeurs généraux, si je comprends bien.

Le Président (M. Jolivet): M. Myette.

M. Myette: Oui, effectivement, sur l'étalement.

M. Gauthier: D'accord. Il y avait une deuxième préoccupation qui était celle du nombre d'élèves. On nous a mis en lumière, à la commission, que le nombre d'élèves par classe pourrait poser un problème parce que la moyenne ne s'appliquait pas quand il y avait moins de dix groupes dans une commission scolaire. Vous êtes les premiers, à ma connaissance, qui apportez un éclairage nouveau là-dessus par le biais des maximums de groupe. J'aimerais que vous m'expliquiez cela en quelques mots. J'ai saisi difficilement cette approche dans votre mémoire.

M. Myette: Rapidement, on pourrait regarder l'annexe 3 du mémoire. Comme vous le savez, les conventions collectives prévoient, pour chacune des catégories d'élèves, des moyennes et des maximums. Le maximum des catégories est de deux élèves plus élevé que la moyenne. Alors, dans l'exemple qu'on prend ici, on dit: "Une commission scolaire a une clientèle de 33 élèves de déviations multiples au primaire répartis dans quatre écoles, trois écoles avec huit élèves et une école avec neuf élèves. La convention 1979-1982 qui disait: Pour cette catégorie, maximum dix élèves, moyenne huit élèves. L'application de la convention 1979-1982 nécessitait cinq enseignants parce que nous étions obligés, dans les écoles 1, 2, 3, de former un groupe de huit élèves et, compte tenu de la restriction de la moyenne à huit, dans l'autre école qui avait neuf élèves, nous devions former deux groupes de cinq et quatre élèves, ce qui nécessitait cinq enseignants.

Ce que la convention collective 1982-1985 fait, c'est que, compte tenu que c'est le même maximum et la même moyenne, mais qu'il y a moins de dix groupes et que la moyenne n'est pas nécessaire d'application, elle permet dans l'école de neuf élèves de faire un seul groupe et donc ne nécessite que quatre enseignants. C'est pour cela que nous disons: Est-ce que la qualité était autant touchée comme on l'a dit parce qu'il y a un groupe à neuf élèves quand il y avait trois autres groupes de huit élèves et que, de toute façon, le maximum, dans cet exemple, de dix ne peut pas être dépassé sauf les conditions incluses dans la convention collective?

M. Gauthier: J'aurais une autre question concernant les spécialistes. À la page 12 de votre document, vous dites: "La combinaison de ces deux garanties assurait la présence de spécialistes pour l'équivalent de trois heures par semaine en 1983-1984 et de trois heures et demie par semaine en 1984-1985 et 1985-1986; ce qui constitue une amélioration de services par rapport à l'entente précédente." Comme on a eu quelques témoignages, principalement de la CEQ qui disait plutôt le contraire, j'aimerais que vous m'expliquiez cela. L'amélioration de la qualité, est-ce que cela fait référence aux quelque six cents spécialistes de plus dont le ministre a parlé à plusieurs reprises?

Le Président (M. Jolivet): M. Hamel.

M. Hamel (Michel): Nous vous signalons que c'est une amélioration des services et non pas une amélioration de la qualité. La nuance est de cet ordre. C'est plus de services, c'est-à-dire qu'il va y avoir plus de possibilités d'organiser des cours donnés par les spécialistes, ce qui ne fait pas nécessairement la qualité parce que la qualité n'est pas uniquement dépendante de la quantité de services qu'on accorde.

M. Gauthier: D'accord. Une toute dernière question, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député.

M. Gauthier: On a vu également des gens parler de différents modèles d'organisation pédagogique. Je sais que vous êtes des spécialistes de ces modèles, vous essayez d'en mettre au point qui soient le plus appropriés régulièrement, je pense que c'est votre préoccupation première.

Vous parlez du titulariat dans les deux premières années du secondaire, à un moment donné, dans votre document. Je voudrais savoir si vous avez fait, dans vos commissions scolaires respectives, des

simulations sur ces modèles et s'il y a un modèle, selon votre avis professionnel, qui serait nettement favorisé par le décret ou qui serait à favoriser dans les prochaines années. Et est-ce que cela apporte un changement par rapport à ce qui existe actuellement?

Le Président (M. Jolivet): M. Giard.

M. Giard: Si vous le permettez, M. le Président, je vais reprendre une phrase sur chacun des cinq éléments. Au niveau de la tâche d'enseignement, je pense qu'il est important qu'on répète que nous n'avons jamais demandé une augmentation de la tâche des enseignants. Nous nous accommodons et nous pensons que l'organisation est possible avec un accroissement de la tâche des enseignants.

Quant à l'étalement, je pense qu'il est nécessaire de dire aussi que l'étalement ce n'est pas le Pérou. Parce que, dans l'année qui vient, si la moyenne d'enseignement des enseignants est 1050 minutes, cela veut dire que sur une tâche de 1250, il y a 200 minutes qui peuvent être consacrées à des activités autres que des services aux élèves d'une façon générale. Il faut bien concevoir que, l'année suivante, si la moyenne d'enseignement augmente de 50 minutes, c'est qu'on réduit les services complémentaires de 50 minutes. Et, l'année d'après, si on augmente encore, on réduit encore et comme, globalement, le nombre de professeurs est diminué à l'intérieur de chaque école, je pense qu'il faut concevoir qu'il y a là un problème d'organisation. C'est la raison pour laquelle nous demandons l'étalement dans un contexte comme cela qui permette aux gens de s'habiliter à gérer cette décroissance d'année en année.

Quant au troisième élément sur le nombre d'élèves par groupe. Il est sûr que si, à un moment donné, on ne réussissait pas, pour des raisons qu'on ignore maintenant, mais qu'on expérimentera, dans les années futures, à atteindre la charge maximale des enseignants, cela voudrait dire que le seul moyen de compenser ceci, c'est d'augmenter le nombre d'élèves par groupe pour pouvoir assumer les mêmes enseignements avec le même personnel. (11 h 45)

À partir de là, il est sûr qu'on ne peut pas augmenter de beaucoup le nombre d'élèves par groupe, mais il pourrait arriver, dans un contexte ou dans des écoles données, particulièrement des petites écoles - il y en a beaucoup au Québec - qu'on ne puisse pas aller à la tâche maximale pour les enseignants, ce qui va se traduire nécessairement par une augmentation du nombre d'élèves dans la classe. Il faut dire toutefois, à la décharge de ceci, que le nombre actuel d'élèves par classe est de l'ordre de 26, 27 dans l'ensemble des commissions scolaires, alors qu'on parle d'un maximum de 32 et qu'on parle souvent dans le langage courant, de 30. Il est nécessaire de répéter ces choses.

Mon collègue a parlé des spécialistes, alors je passe ce sujet pour revenir finalement au modèle pédagogique. Ce qui est important pour nous, c'est que chaque école se dote d'un projet éducatif - il est urgent que chaque école le fasse - et à l'intérieur de cela, il y a des modèles d'organisation qui peuvent aller dans un sens ou dans l'autre. Je donne ceci à titre d'exemple: Si dans un modèle donné, on voulait, à toutes fins utiles, que l'insistance se fasse sur la qualité des appuis pédagogiques, que chaque enseignant puisse donner à ses élèves un choix varié de situations d'apprentissage, etc., il faudrait opter dans un sens où chaque enseignant aurait plus de groupes d'élèves pour faire bénéficier plus d'élèves de ces habiletés au plan pédagogique, alors que dans un autre modèle, on privilégierait plutât une relation intime entre l'enseignant et ses élèves. Il faudrait penser qu'on pourrait diminuer sur la qualité de l'acte péagogique comme tel pour se prévaloir davantage de la qualité de la relation humaine, la relation d'éducation. À ce moment, le modèle qu'on recommande, particulièrement au premier cycle du secondaire, est un modèle de titulariat, tel que vous le mentionniez tantôt.

Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je vais poser de courtes questions pour avoir des réponses courtes, compte tenu du temps. Ma première question: Est-ce que le fait que les élèves du premier cycle de l'élémentaire, en 1985-1986, auront les mêmes heures d'enseignement que des élèves de secondaire V, vous paraît normal et souhaitable? Je sais qu'il y a le problème des autobus, ne m'en parlez pas, mais cela devrait être secondaire par rapport aux enfants.

Le Président (M. Jolivet): M. Hamel.

M. Hamel: Dans un contexte où les enfants auraient uniquement des cours, si l'augmentation était uniquement pour assurer à ces enfants des cours, je vous dirais que c'est anormal. Cependant, il est prévu des services complémentaires, des services particuliers et des services personnels aux élèves dans le régime pédagogique. À mon sens, ce temps doit passer à ce type d'activité et aussi aux activités étudiantes. On sait que pour atteindre les objectifs qui sont prévus dans le régime pédagogique, on peut donner des cours, mais il y a aussi des activités étudiantes types, par exemple, des

visites au musée, des visites au parlement, etc., dans chacune des matières, qui permettent un développement pour les enfants.

Mme Lavoie-Roux: II ne faudrait quand même pas exagérer, parce que les activités parapédagogiques de visites au musée, à la cabane à sucre ou au parlement, ce sont des sorties éducatives qui arrivent quelques fois par année, X nombre de fois par année. Quand vous dites, si je comprends bien, à la page 11, que l'engagement gouvernemental confirmait pour les classes du primaire un temps de présence de l'élève égal à 24 heures, 24 h 30 et 25 heures, pour vous, il se peut qu'il y ait une activité extrascolaire qui soit rattachée aux activités d'enseignement. Pour la majorité des jours de classe, est-ce que cela veut dire que les enfants auront le même nombre d'heures de temps d'enseignement que les élèves du secondaire V, ou enfin le deuxième cycle du secondaire?

M. Hamel: Je vous ai parlé uniquement des activités de sorties qui existent dans l'année, mais il y a aussi à l'intérieur des écoles des activités de détente, des activités qui ont lieu par exemple sur les patinoires continuellement pendant l'hiver, qui se tiennent au niveau de l'école même, sans aller très loin. Évidemment, ces activités sont reliées aux activités des programmes. Si on regarde au niveau des spécialités, on parle de trois heures de spécialité, mais les matières comme l'éducation physique, l'anglais et les arts dépassent de beaucoup, si on regarde le régime pédagogique, les trois heures de spécialité, ce qui fait qu'elles sont complétées par ce type d'activité.

Mme Lavoie-Roux: De toute façon, déjà à l'élémentaire, particulièrement au premier cycle, même durant la classe, le professeur ne doit-il pas constamment diversifier son activité entre justement des activités de détente physique, se lever, chanter, etc., parce que le temps de concentration des enfants est très très court. Il est évident qu'en éducation physique, ils vont faire de l'éducation physique, ils ne feront pas de la géographie. Est-ce que ceci n'est pas déjà prévu pour maintenir justement l'intérêt des enfants, leur concentration et qu'augmenter ce nombre d'heures d'enseignement n'atteindra peut-être pas les objectifs que l'on vise?

Le Président (M. Jolivet): M. Myette.

M. Myette: Ce que nous devons vous souligner ici est que la question des 25 heures est une préoccupation au sein de l'association. Notre réflexion est la suivante. Au deuxième cycle, on n'y voit pas tant de problèmes puisque les enfants ont déjà connu jusqu'à 1500 minutes et même 1575 minutes. Mais, au premier cycle, on s'interroge. D'ailleurs, nous avons soumis nos interrogations, et surtout pour ces élèves qu'on appelle "des régions éloignées", ceux qui ont à faire quand même beaucoup de transport. Maintenant, quand on soulève cela, on est confronté avec le fait qu'on se dit: Peut-être que la solution est de revenir à cette époque où le deuxième cycle était sur un temps X de minutes et le premier cycle sur un temps restreint. Mais là, on est confronté avec le problème, non pas du transport en termes du nombre de véhicules, etc., mais plutôt avec le problème que, même à cette époque, les enfants du premier cycle devaient attendre à l'école - je ne parle pas des milieux urbains où les enfants n'ont pas besoin d'autobus - dans les milieux ruraux, comme je le disais, l'autobus du deuxième cycle pour s'en retourner chez eux. Dire qu'il n'y a pas d'interrogation et que cela ne nous paraît pas problématique, nous confirmons effectivement que, pour le premier cycle, surtout en première année et en deuxième année, on s'interroge à savoir si l'enfant doit faire 1500 minutes. Je dois vous dire qu'on n'a pas la réponse à cette question, mais que nous escomptons que la recherche et les discussions qui ont été amorcées avec les officiers du ministère se continueront.

Mme Lavoie-Roux: Je pense que vous avez apporté une demi-réponse, en ce sens qu'il faudra peut-être avoir de la flexibilité entre une région urbaine et une région moins urbaine, pour ne pas obliger à une règle générale et rigide pour tout le monde. Je trouve cela vraiment étonnant à ma connaissance, c'est-à-dire d'après les observations qui m'ont été faites et ce qui a été vécu dans les écoles, d'avoir cela exactement sur le même pied. On apporte déjà des divergences dans l'enseignement, de toute façon, pour faire cette différence entre les plus jeunes et les plus vieux.

Je voudrais revenir à la question soulevée par le député de Roberval. Dans l'exemple que vous nous donnez, à l'annexe 3, finalement, cela ne fait pas tellement de différence parce qu'au lieu de huit, il y en aura seulement un, et de toute façon, on en prévoyait dix. Mais si vous prenez ce qu'on appelle "les groupes fermés", les groupes d'enfants très handicapés, dès que vous êtes à 8, vous êtes avec des enfants qui, normalement, vont peut-être être intégrés dans les classes. Éventuellement, ils peuvent être l'objet de l'intégration; pas nécessairement, mais ils peuvent l'être. Mais si vous prenez des groupes où c'est 5 et 7, des enfants avec des handicaps multiples, des enfants aveugles, enfin ce type d'enfants; si vous prenez par exemple 20 enfants et que

vous avez la possibilité d'utiliser quatre groupes, cela fait 5 par groupe. Vous avez le droit de le faire. Mais si vous êtes obligés d'observer la moyenne, à ce moment-là, vous êtes obligés de faire trois groupes de 7 et de toujours utiliser le maximum. Je pense que cela fait une énorme différence dans le cas des enfants handicapés très sérieusement de toujours être obligés d'utiliser le maximum parce que, justement, en fonction de la contrainte dudit groupe, vous ne pouvez plus utiliser la moyenne. Alors, votre modèle peut s'appliquer dans l'exemple que vous apportez, mais je ne crois pas que ce soit exactement la même chose dans tous les cas et les enfants peuvent sûrement en porter le fardeau, comme les professeurs d'ailleurs, dans ces cas-là, parce que c'est un enseignement difficile.

Le Président (M. Jolivet): M. Myette.

M. Myette: Ce que je dois vous dire là-dessus est qu'il est évident qu'on peut, sur cette mesure, charrier et mettre cela au pire. Maintenant, pourquoi disons-nous que c'est limité au maximum? Parce que c'est une réalité. Deuxièmement, pourquoi ne pensons-nous pas, dans votre exemple, qu'une commission scolaire irait au pire, c'est-à-dire récupérer des enseignants? C'est que la règle d'allocation déjà déposée en janvier prévoyait le maintien des ressources en adaptation et compte tenu que, règle générale, entre la consultation et la réalité, il y en a toujours un peu plus, on ne voit pas pourquoi cela irait à un peu moins cette année. Dans ce sens, pourquoi la commission utiliserait-elle à outrance cette règle qui est dans la convention collective pour sauver des enseignants? En d'autres mots, pour nous, cette partie de la convention collective n'est pas pour permettre de récupérer le plus grand nombre de profs possible, c'est pour permettre de mieux gérer les cas d'exception qui étaient devenus plus gérables.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais bien qu'on parle de la même chose. Je ne remets pas en question l'intégration d'un bon nombre d'enfants dans les classes régulières, je vous parle des enfants sérieusement handicapés. Si vous dites: On ne veut pas se servir de la convention ou des décrets pour faire cela, ne le mettez pas dans les décrets et dans la convention. Je regrette, mais je pense que mon exemple n'est pas plus charrié que le vôtre dans votre annexe.

Le Président (M. Jolivet): M. Giard.

M. Giard: Je voudrais faire un commentaire le plus objectif possible. Dans une commission scolaire, disons de 20 000 élèves environ, on risque de trouver probablement un groupe de demi-entendants ou de demi-voyants pour le primaire et un groupe pour le secondaire qui sera probablement de trois ou quatre élèves sur une commission scolaire de 20 000 élèves.

Si je continue avec 5 et 6, ce sont des handicapés tellement lourds qu'ils se retrouvent en quantité infime dans chacune des commissions scolaires, à moins qu'on n'ait des établissements spécialisés comme l'Institut Louis-Braille, etc. Je pense qu'on risque d'utiliser des cas extrêmes pour en faire des exemples courants en faisant une argumentation sur ces cas-là. D'une façon générale, les élèves qu'on trouvera plus souvent dans les polyvalentes ou dans l'ensemble des écoles seront des élèves dont le nombre par groupe se situe autour de 12. Dans ce cadre-là, on considérait que 2 par rapport à 12, 14, 16 ou 18, etc. Cela n'avait pas un impact majeur sur la qualité de l'enseignement. Je ne nie pas les remarques que vous faites, mais c'était vraiment l'esprit de notre intervention.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. Tanguay voudrait ajouter quelque chose.

M. Tanguay: Oui, je voudrais ajouter quelque chose pour Mme la députée de L'Acadie. Dans notre commission scolaire, nous avons des services pour les déficients profonds que sont les autistiques. Je ne sais pas si vous avez déjà entendu parler de cette catégorie de clientèle. Ils sont effectivement touchés par des maximums et des moyennes de 5 et de 7 élèves. Chez nous, nous présentions à notre commission, depuis trois ou quatre années, des demandes d'allocations supplémentaires. Les enseignants voulaient qu'on présente une demande d'allocations supplémentaires pour faire qu'on aurait 1 enseignant par 3 élèves parce que ce sont vraiment des élèves durement touchés.

Lorsqu'on regarde le genre de services qu'on doit rendre à ce type de clientèle, il faut reconnaître que les enseignants ne sont pas les seuls intervenants auprès d'elle. L'enseignant a un travail précis à faire. Une fois que son travail est fait, il y a des tâches auprès des élèves qui sont lourdement handicapés, des tâches de répétition qui doivent être faites. Par exemple, leur montrer à manger, leur montrer à s'habiller, leur montrer à aller porter leur linge, des tâches de socialisation de travail avec deux élèves, de sorte que le professeur ou l'enseignant fait du travail auprès des élèves et que les exercices qui s'ensuivent doivent être faits par des techniciens spécialisés, par exemple, qui sont du personnel de soutien.

Il y a aussi que dans une classe comme celle-là gravite autour de classes de déficients profonds le groupe de professionnels de l'école. On sait très bien

que les professionnels d'une école travaillent beaucoup plus auprès des élèves en adaptation scolaire que des élèves réguliers, il ne faut pas se le cacher, à part les conseillers d'orientation, par exemple, ou les animateurs de pastorale. De sorte qu'auprès de ces clientèles, il y a toujours un élève ou deux qui est appelé à sortir de la classe durant les heures de fonctionnement régulières. C'est assez rare que le groupe se retrouve effectivement à sept durant une semaine parce qu'il y en a un qui ira voir l'orthophoniste, l'autre ira voir l'orthopédagogue, l'autre ira voir un psychologue... Vu qu'il n'y a pas beaucoup de ces classes-là, il reste que le nombre d'élèves par classe et pour de l'enseignement comme tel arrive rarement à sept parce que le technicien spécialisé viendra aussi jouer son rôle dans la classe.

Mme Lavoie-Roux: Juste une petite remarque, M. le Président. J'ai travaillé avec des enfants qui souffraient d'autisme et des enfants prépsychotiques ou qui souffraient de névrose sérieuse dans des centres de jour. Bien qu'il y ait peu d'enfants qui souffrent d'autisme que c'est peut-être même difficile d'en retrouver sept à l'intérieur d'un même groupe, je ne souhaiterais à aucun professeur de se retrouver seul, ne serait-ce que des demi-heure ici et là, si tel était le cas, avec sept enfants qui souffrent d'autisme ou qui sont des enfants prépsychotiques. (12 heures)

Le Président (M. Jolivet): Merci. Maintenant, M. le député de Dubuc, m'a demandé la parole. Je la lui accorde, mais simplement en vous disant que le problème que j'ai c'est le temps. M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: Une petite précision très rapide à la suite de la question de mon collègue, le député de Roberval, sur le régime de titulariat, dans le cadre d'un modèle pédagogique possible. Tout simplement, pour que ce soit rapide, c'était une des propositions que vous faisiez au ministère de l'Éducation, est-ce que vous jugez que l'introduction d'un champ titulariat ce serait utile, nécessaire, indispensable pour une organisation?

Le Président (M. Jolivet): M. Giard.

M. Giard: Je voudrais confirmer à M. le député que nous recevrions avec agrément l'existence d'un nouveau champ qui s'appellerait titulariat au premier cycle du secondaire.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Au nom des membres de la commission, je vous remercie. J'inviterais la Québec Association of Protestant School Boards, représentée par

M. Aalders, à venir en avant et à présenter les collègues qui l'accompagnent. Vous pouvez y aller, M. Aalders.

Québec Association of Protestant School Boards

M. Aalders (Wayne): Merci, M. le Président. J'ai l'honneur, en tant que vice-président de l'Association des commissions scolaires protestantes du Québec, de venir vers vous aujourd'hui. Je profite de l'occasion pour vous présenter immédiatement d'autres personnes de notre équipe qui, après notre présentation, apporteront leur collaboration à répondre aux questions qui se poseront à ce moment. À mon extrême droite, M. William Smith, porte-parole de CPNCP. Avant d'avoir une question là-dessus, le CPNCP, ce n'est pas une compagnie de transport ni une compagnie de communications, c'est le Comité patronal de négociation des commissions pour protestants. L'équivalent de CPNCC pour les catholiques. Ici, à ma droite, M. Peter Krause, membre du CPNCP. À ma gauche, M. Robin Drake, président du CPNCP. M. Michael George, membre du CPNCP, et M. David Wadsworth, directeur général de notre commission scolaire du Québec.

Je pense qu'il serait loisible dès le début de cette présentation à votre commission d'expliquer à vous et à tous ceux qui nous écoutent pourquoi nous participons à ces audiences. L'Association des commissions scolaires protestantes du Québec participe, aujourd'hui, afin de rappeler d'une façon nette et claire sa préoccupation pour une éducation de qualité. Elle participe, aujourd'hui, dans le vif et sincère espoir que les délibérations de cette commission parlementaire trouveront les moyens de résoudre l'impasse actuelle dans le secteur de l'éducation. Notre objectif est de présenter notre position et les raisons pour lesquelles nous avons pris cette position. Nous ne sommes pas ici simplement pour critiquer les autres parties dans ce conflit parce que la confrontation, M. le Président, n'est pas une façon de régler nos problèmes.

Au cours des dernières semaines, nous avons vécu une lutte entre le gouvernement et les syndicats. Comme nous le savons, le gouvernement a dû jouer un double rôle dans le déroulement des événements qui nous ont menés là où nous sommes aujourd'hui. D'une part, le gouvernement était le négociateur face aux syndicats des enseignants. D'autre part, il était le législateur. Dans son premier rôle de négociateur, le gouvernement avait -et il l'a toujours - l'Association des commissions scolaires protestantes du Québec comme partenaire dans les négociations avec les enseignants protestants. Dans son deuxième rôle de législateur, il agit seul et sans partenaire. Tout en gardant notre

respect et notre loyauté envers notre partenaire négociateur, nous déclarons deux choses très importantes: la première, c'est que nous ne pouvions pas innocenter la grève des enseignants que nous considérons comme illégale; la seconde, c'est que nous ne pouvions admettre une loi qui enlève les droits de la personne, une loi que nous trouvons inacceptable.

Puisque nous parlons de l'éducation, nous avons beaucoup entendu parler du secteur public et je suis sûr que nous en entendrons parler davantage. Mais je me permets de vous rappeler que ce sont les taxes des individus et les taxes imposées au secteur privé qui remplissent les coffres publics. Or, le secteur privé, j'en fais partie et je peux vous dire qu'au cours des dernières années les investissements des entreprises privées au Québec ont beaucoup diminué. Il y a, bien sûr, plusieurs raisons pour cette baisse, mais nous nous devons de souligner à la fois le contexte économique et les politiques gouvernementales. Le chômage et les profits nettement réduits du secteur privé ont suscité une diminution, une chute même des revenus du gouvernement du Québec lesquels, à leur tour, imposent donc une forte limite aux ressources financières prévues pour faire face à nos obligations et réaliser nos espérances dans le secteur de l'éducation.

Nous n'avons pas l'intention de répéter tous les chiffres qui ont été donnés à cette commission, mais voici quelques chiffres de Statistique Canada confirmés par le Québec pour l'année 1982. Le nombre de banqueroutes personnelles au Québec a été de 8868 et au Canada, de 30 643. Le nombre d'entreprises en faillite au Québec a été de 4368 et au Canada, de 10 765. Au Québec, le taux de chômage est très élevé, soit 15,3% globalement, tandis que, pour les jeunes travailleurs entre 19 et 25 ans, le pourcentage est de l'ordre de 26%.

Nous, les commissions scolaires protestantes, un des partenaires de la partie patronale, sommes chargées de la bonne gestion de nos ressources et sommes, en même temps, très conscientes de la réalité économique. Le secteur de l'éducation se trouve investi par des demandes venant de ceux qui n'ont pas le souci de se comparer avec d'autres membres de notre société. Les règlements concernant les salaires et les conditions de travail des années soixante-dix ne sont plus valides car nous sommes en 1983 et les règles du jeu ont changé. En tenant compte des restrictions salariales imposées par les règles budgétaires et des provisions pour la tâche des enseignants plus élevée à l'extérieur du Québec, il est nécessaire d'augmenter la tâche des enseignants au Québec dans le but d'augmenter la productivité de tous ceux qui sont sur le marché du travail. Nous sommes malheureusement poussés à croire qu'aujourd'hui la position des syndicats et des enseignants et leurs activités sont plutôt reliées au processus qu'au défi des faits.

Avec votre permission M. le Président, je voudrais jeter un rapide coup d'oeil sur les conditions de travail des enseignants au Canada. C'est dans ce contexte économique et éducatif que nous avons cru important de procéder à une comparaison de la situation qui prévaut dans les juridictions scolaires des autres provinces canadiennes. Bien que l'Association des commissions scolaires protestantes du Québec soit consciente des problèmes financiers du gouvernement et de la comparaison avec la réalité du secteur privé, notre première perspective demeure celle d'un éducateur. Nous avons pensé, il y a longtemps, que le système scolaire québécois avait des problèmes beaucoup plus sérieux que ceux des autres provinces à cause de la convention collective des enseignants.

Nous ne voulons pas vous laisser avec l'impression que tous les problèmes de notre système sont dus à la convention des enseignants ou que tout va bien ailleurs. Néanmoins, avant le début de cette ronde de négociations, nous désirions voir si les conditions de travail des enseignants au Québec étaient substantiellement différentes de celles qui prévalent ailleurs et, si oui, quel effet cela avait, positif ou négatif, sur notre système.

Au tout début des audiences de votre commission, nous avons eu l'occasion d'entendre M. Jacques Girard, le sous-ministre, qui a mis en relief les chiffres et les données concernant les conditions de travail à l'extérieur du Québec. Nous nous contenterons donc de faire une simple comparaison entre quelques éléments en vigueur durant l'année scolaire 1981-1982 en Ontario et au Québec. Le nombre de jours d'enseignement: en Ontario 185, au Québec 180. En ce qui concerne l'horaire des élèves du secteur primaire: en Ontario, 1500 minutes par semaine et 1380 minutes par semaine au Québec; au secteur secondaire: 1520 minutes par semaine en Ontario et 1500 minutes, au Québec. Le temps moyen d'enseignement au secteur primaire: 23,5 heures par semaine en Ontario et 20,5 heures par semaine au Québec. En ce qui concerne le secondaire: 20,5 heures par semaine en Ontario et 16,6 heures par semaine ici, chez nous. (12 h 15)

On constate donc qu'en 1981-1982 l'élève ontarien du secteur primaire recevait 8,7% plus d'enseignement que l'élève québécois et que l'élève du secondaire en recevait 1,3% de plus que l'élève québécois. Par contre, l'enseignant ontarien au secondaire enseignait 23,5% plus que l'enseignant au Québec et l'enseignant

ontarien au primaire enseignait 14,6% plus que l'enseignant québécois. Ajoutons que les moyennes et les maxima par groupes d'élèves sont les mêmes dans la nouvelle convention que dans l'ancien contrat, à savoir 25 comme moyenne et 27 comme maximum pour le premier cycle du primaire et 27 comme moyenne et 29 comme maximum pour le deuxième cycle et, enfin, une moyenne de 30 et un maximum de 32 pour les classes ordinaires du secondaire.

En Ontario, les enseignants sont présents à l'école pour la durée de l'horaire des élèves, ainsi que pour la surveillance avant et après cet horaire, tandis qu'au Québec les enseignants ne sont disponibles que pour une partie de l'horaire. On peut donc soutenir que les conditions de travail des enseignants au Québec constituent une anomalie par rapport au reste du Canada.

Les conclusions de cette étude sont également renforcées par les divers ateliers et congrès éducatifs auxquels nos représentants ont assisté. Lorsque les représentants de chacune des provinces se parlent de tel ou tel aspect de la convention collective des enseignants, le Québec est toujours l'exception; ce sont toujours les commissions scolaires québécoises qui ont moins de flexibilité et plus d'entraves dans l'administration qu'ailleurs. Il est temps de mettre fin à ces exagérations, de stabiliser les conditions au système scolaire et de concentrer nos efforts sur l'acte pédagogique et les services complémentaires à offrir aux élèves.

C'est dans cet esprit que nous abordons maintenant les éléments de la nouvelle convention, dont le but est d'assurer une plus grande flexibilité aux gestionnaires du système et d'améliorer la qualité des services à la clientèle, les élèves.

Premièrement, l'employeur doit avoir la prérogative d'utiliser le personnel dans le but d'offrir les meilleurs services possible aux étudiants. Généralement parlant, dans l'entreprise privée, personne ne niera à l'employeur le droit d'utiliser son personnel de la façon la plus efficace. De même, l'Association des commissions scolaires protestantes du Québec maintient que la commission scolaire a le droit d'évaluer les qualifications du personnel; de déterminer les besoins et les objectifs de la commission; d'affecter son personnel dans le but de fournir des services, tout en respectant les droits des employés.

Une partie intégrante du système de gestion que notre association a la pleine intention de maintenir, c'est le principe de consulter les diverses sections de la communauté scolaire, y compris les syndicats des enseignants.

Il serait important de bien souligner pourquoi notre association est convaincue que nos commissions scolaires doivent retenir ces droits de base. Pourquoi ces droits aux commissions scolaires? Parce qu'elles sont les employeurs légaux; parce que les commissions scolaires sont, à toutes fins, responsables des fonds publics; parce que la communauté fait partie de la commission scolaire, tout comme le groupe élu, et que cette commission a la responsabilité de fournir les meilleurs services éducatifs possible aux étudiants; parce que le syndicat qui représente les employés concernés n'est qu'un seul groupe représentant une seule partie de la communauté. N'oublions pas les parents, les contribuables, les comités d'école, etc.

La flexibilité est en vigueur dans toute entreprise aujourd'hui. Nos écoles ne doivent pas être des exceptions. Une plus grande souplesse dans la gérance de nos écoles nous permettra l'utilisation maximale de nos ressources afin d'améliorer l'éducation de nos enfants.

Deuxièmement, les employés doivent être présents au lieu du travail durant les heures de travail. Il est normal dans n'importe quelle entreprise que l'employé soit présent pendant les heures de travail. Dans nos offres actuelles, nous exigeons que l'enseignant soit présent à l'école 27 heures par semaine. Cette réintroduction de la présence à l'école permettra de revoir les sortes d'interactions qui ont manqué pendant les dernières années: entre enseignants et enseignantes, entre enseignants et élèves, entre enseignants et professionnels non enseignants, entre enseignants et direction d'école, entre enseignants et parents ou autres. Cela nous permettra également de réintroduire un climat favorable dans le but de garder nos écoles humanisées.

Troisièmement, l'employeur doit avoir la prérogative de définir la tâche globale de l'enseignant dans le but d'offrir les meilleurs services possible aux étudiants. Nous voulons revenir à la notion d'une tâche globale au lieu d'une tâche compartimentée telle qu'elle existait dans le contrat antérieur. La tâche des enseignants comprenait alors un minutage infini et contenait des limites sur le nombre de minutes d'enseignement proprement dit, le nombre de minutes de surveillance, le nombre de minutes pour la récupération et le nombre de minutes pour l'encadrement.

Un seul exemple vous montrera, j'en suis sûr, combien nous avions les poings liés. Supposons que dans une école secondaire je veuille offrir sept périodes de mathématiques par semaine et que chaque période dure 50 minutes. Supposons que j'aie trois groupes d'élèves à un certain niveau, trois fois sept périodes de mathématiques nous donne 21 périodes par semaine. Or, si j'avais été directeur de l'école sous l'empire de l'ancien contrat, je n'aurais pas pu demander à un seul enseignant d'accepter cette tâche, car ce contrat stipulait que le maximum était de 20 périodes de 50 minutes par semaine. En

tant que gestionnaire des ressources humaines, je n'aurais pas eu la flexibilité de lui faire faire cette 21e période, quitte à lui donner moins de surveillance, disons.

C'est pourquoi nous voulons une tâche globale qui serait déterminée par la convention collective, une tâche globale qui comprendra tous les éléments pertinents, tels que la récupération, l'enseignement proprement dit, l'encadrement et la surveillance en rotation afin de nous permettre de gérer efficacement et de fournir les meilleurs services possible à l'intérieur du cadre de financement et des ressources humaines disponibles. Les besoins spéciaux des étudiants doivent être prioritaires, ainsi que les besoins des programmes et de l'organisation scolaire.

Quatrième point: les exigences d'un poste donné doivent être une des composantes à être considérées par la commission scolaire lors d'une déclaration de surplus. Le mécanisme proposé pour la détermination du surplus de personnel enseignant veut respecter la nuance délicate qui doit exister entre les besoins précités et le droit de l'employé d'être protégé des décisions arbitraires et sans fondement. L'employeur doit respecter l'ancienneté de ses employés tout en gardant suffisamment de souplesse dans le processus pour offrir les services éducatifs qu'exige le système scolaire. Autrement dit, nous voulons que la commission scolaire, comme employeur, puisse effectuer un système d'éducation de qualité pour nos enfants.

Notre but n'est pas de faire une déclaration de surplus sommaire, mais de bien sélectionner les employés en tenant compte de leur ancienneté et de leurs qualifications pour ainsi répondre aux exigences des postes à combler. Il va sans dire que, dans chaque cas où deux employés ou plus peuvent remplir le même poste, c'est le plus ancien qui reste et qu'afin de protéger les droits de l'individu, un mécanisme d'arbitrage est prévu.

Un autre facteur important est que notre système n'empêche pas les enseignants d'accepter différentes affectations d'une année à l'autre ni de changer leur affectation pour répondre aux besoins particuliers de l'école et de ses étudiants.

Pour résumer, la déclaration de surplus n'a jamais été conçue comme un moyen de vider l'école des enseignants incompétents, ni de baisser l'âge moyen des enseignants dans une commission scolaire donnée. Le seul but est de prévoir un moyen de réduire le nombre d'enseignants dans une commission scolaire sans réduire la qualité des services aux étudiants et ce, en tenant compte des moyens financiers mis à la disposition de nos commissions scolaires.

Vous aurez sans doute constaté, M. le Président, que nous n'avons nullement tenté aujourd'hui de faire une étude profonde des conventions collectives telles qu'établies par la loi 105. Nous demeurons disponibles, pendant la période des questions, pour vous fournir tout autre détail. Il nous paraît loisible, néanmoins, de souligner aux membres de votre commission, M. le Président, aussi bien qu'aux enseignants et à la population en général que la convention visant le secteur protestant contient, entre autres: l'année de travail de 200 jours pour les enseignants; une semaine de travail de 27 heures de présence à l'école dans un cadre de 35 heures par semaine; le maintien des mêmes maximums par groupe d'élèves que dans l'ancienne convention; une compensation financière pour le dépassement des maximums; le maintien au niveau de la commission scolaire des mêmes moyennes d'élèves par groupe que dans l'ancien texte, lorsqu'il y a 10 groupes ou plus d'un même type d'élèves à la commission scolaire; un système de déclaration de surplus qui rendra de meilleurs services aux élèves que le processus de l'ancienne convention; le maintien de dispositions favorables en ce qui concerne les congés de maternité, de paternité et pour l'adoption. (12 h 30)

Nous nous permettons de vous rappeler, M. le Président, et à tous ceux qui nous écoutent, nos quatre objectifs de première importance: l'employeur doit avoir la prérogative d'utiliser le personnel dans le but d'offrir les meilleurs services possible aux étudiants; les employés doivent être présents au lieu du travail durant les heures de travail; l'employeur doit avoir la prérogative de définir la tâche globale de l'enseignant dans le but d'offrir les meilleurs services possible aux étudiants; les exigences d'un poste donné doivent être une des composantes à être considérées par la commission scolaire lors d'une déclaration de surplus.

Nous avons signalé que, de temps en temps, deux rôles du gouvernement s'avèrent incompatibles l'un à l'autre: le gouvernement comme partenaire négociateur et !e gouvernement comme législateur. Ce dernier obstrue le premier. Durant cette ronde de négociations, certains aspects de la législation adoptée ont eu une influence négative sur l'ambiance des négociations.

Nous sommes convaincus que les enseignants au Québec se doivent d'augmenter leur contribution au processus de l'éducation. Tel que nous l'avons indiqué dans notre représentation, cette contribution augmentée mettra les enseignants du Québec sur un pied d'égalité avec leurs confrères à l'extérieur du Québec et rendra leurs services plus rentables quant aux conditions financières.

Pour nous, les prérogatives d'employeurs sont de première importance afin de fournir

à nos enfants les meilleurs services possible. Or, la qualité de ces services est liée directement aux décisions prises à l'égard du personnel enseignant. Et puisque les commissions scolaires sont l'autorité légitime au niveau local et responsables pour les services éducationnels, il nous faut maintenir les contrôles nécessaires pour exécuter notre mandat.

Finalement, M. le Président, nous voulons préciser que, pendant les audiences de cette commission parlementaire de l'éducation, l'Association des commissions scolaires protestantes du Québec a fait des recommandations à notre partenaire en négociations, le ministère de l'Éducation, dans le but de trouver les solutions équitables au conflit actuel entre les comités patronaux et les enseignants et enseignantes du Québec. Ce sont les offres patronales que le ministre rendra probablement publiques plus tard au cours de la journée.

Afin de respecter notre protocole de négociations avec le ministère de l'Éducation, nous ne pouvons aujourd'hui annoncer publiquement nos recommandations, mais nous pouvons dire que nous avons proposé l'idée d'une tierce partie pour nous aider à régler la présente impasse. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.

M. Laurin: M. le Président, je voudrais remercier l'Association des commissions scolaires protestantes du Québec pour son mémoire marqué au coin du réalisme, de la responsabilité administrative et de l'efficacité de la gestion. L'association nous a rappelé à bon droit le contexte économique changé, beaucoup plus difficile que par le passé, dans lequel se situe la présente négociation. L'association nous a recommandé de tenir compte de la capacité de payer des Québécois dans cette ronde de négociations collectives, d'autant plus que la convention collective antérieure comportait des avantages sur le plan de la tâche qui rendaient la situation des enseignants québécois supérieure à celle de tous les autres enseignants canadiens. À bon droit, l'Association des commissions scolaires protestantes dit que même, s'il y a lieu maintenant d'augmenter la productivité des enseignants, cette augmentation de la productivité, en principe, ne devrait pas amener une détérioration des services dans la mesure où elle se situerait encore à un niveau comparativement avantageux ou égal à celle qui prévaut dans les autres provinces canadiennes.

Je ne voudrais pas m'étendre sur ce sujet, je voudrais simplement poser deux questions à l'Association des commissions scolaires protestantes, une question sur un sujet qui n'a pas été touché dans la présentation et un autre qui n'a été que très brièvement évoqué. La première a trait à la différence dans les décrets en ce qui concerne la situation qui prévaudra dans le secteur catholique et celle qui prévaudra dans le secteur protestant. Il y a, en effet, des différences dans les décrets à cet égard. Peut-être les membres de la commission parlementaire ne l'ont-ils pas remarqué, peut-être l'ont-ils remarqué aussi, mais on n'a pas eu l'occasion d'en faire état jusqu'ici: il y a des différences entre les décrets qui s'appliquent aux enseignants du secteur protestant et à ceux du secteur catholique. Ce souci de la différence ou ce respect du droit à la différence était important pour le gouvernement. Je voudrais vous demander ceci: Pourquoi pensez-vous important de maintenir ces dispositions particulières à l'endroit du réseau protestant?

Ma deuxième question porte sur l'évaluation des personnels. De fait, vous êtes les premiers intervenants à faire état de cette préoccupation des commissions scolaires pour l'évaluation des personnels. Ma question serait donc la suivante: Le décret vous donne-t-il davantage satisfaction à cet égard que l'ancienne convention collective de 1979-1982?

Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.

M. Aalders: M. le Président, en ce qui concerne la première question, nous avons toujours cru que notre système était différent du système catholique. En ce sens, il faut qu'il y ait des différences dans les conventions collectives et dans les décrets. Je demanderai à M. Drake de répondre à la première question.

Le Président (M. Jolivet): M. Drake.

M. Drake (Robin): M. le Président, pourquoi doit-il y avoir des différences dans les décrets pour les commissions scolaires protestantes? Il y a toutes sortes de raisons, mais à la base, c'est un fait historique qui touche toutes sortes de choses dans notre réseau. Nous vivons ici au Québec, mais nous vivons dans un contexte d'Amérique du Nord avec nos partenaires de langue française, ici au Québec. Nous sommes touchés beaucoup plus, spécialement dans l'éducation, par les autres provinces du Canada et les États-Unis pour les manuels scolaires, pour toutes sortes de choses qui viennent de chez eux et par toute leur expérience. Seulement un exemple d'une de ces différences, et je pense que c'est une différence de base: dans le secteur catholique ici au Québec, si on parle des classes combinées au primaire, cela veut dire deux étapes dans une même année. Dans le secteur catholique, c'est un minimum de classes. Dans notre secteur, c'est une vaste majorité, malheureusement, diront certaines

personnes. Pourquoi la différence dans le secteur catholique? Les directeurs d'école et les commissions scolaires ont décidé de déménager les enfants d'une école à une autre pour équilibrer le nombre d'enfants à un certain niveau. L'autre raison, c'est qu'il y a plus de francophones ici au Québec que d'anglophones. Leurs écoles, en général, sont beaucoup plus proches. C'est beaucoup plus facile que dans notre secteur de transporter les élèves d'une école à une autre.

Il y a un autre effet, pour la même chose, qui nous touche. Depuis quinze ans, dans le secteur protestant, nous avons poursuivi l'idée que l'enfant doit aller à son propre rythme pour son apprentissage, pour son éducation. Cela veut dire que les enfants qui commencent leur année scolaire en maternelle ou en première année peuvent aller à des rythmes différents, tenant compte de leurs besoins. Du moment où vous commencez, à l'école primaire, à dire qu'un enfant avance à son propre rythme, il faut Tiettre les classes ensemble, il faut détruire les barrières qui disent qu'il faut un an pour compléter un an de scolarisation, que tous les enfants de première année doivent être au même niveau en deuxième année et ainsi de suite. Il y a des différences semblables qui sont en partie historiques, en partie causées par la situation dans laquelle on se trouve dans le contexte nord-américain. Ce sont aussi, en partie, des différences... Je cherche un mot. Je m'excuse, M. le Président. J'ai encore de la difficulté en français. J'essaie de m'améliorer.

Une voix: Culturelles.

M. Drake: Culturelles. C'est le mot que je cherchais.

M. Aalders: En ce qui concerne la deuxième question, M. le Président, je demanderai à M. Krause d'y répondre.

Le Président (M. Jolivet): M. Krause.

M. Krause (Peter): M. le Président, le ministre de l'Éducation réfère sans doute au principe contenu dans notre présentation, à savoir que l'employeur doit avoir la prérogative d'utiliser le personnel dans le but d'offrir les meilleurs services possible aux étudiants. Il est clair que c'est un principe auquel nous tenons beaucoup et que nous avons pu exercer jusqu'à maintenant, dans les conventions collectives qui ont existé dans le secteur protestant, avec assez de souplesse et assez de succès en termes du type de services qu'on a rendus à nos élèves jusqu'ici. C'est peut-être relié un peu à la réponse qu'a donnée M. Drake auparavant et c'est une flexibilité qu'on trouve très importante. Je voudrais ajouter que, si on regarde, par exemple, certaines conditions de la convention collective qui ont évolué avec le temps, l'une d'entre elles est la détermination de surplus. On voit que, dans la convention collective antérieure, on avait une très grande ouverture en termes de détermination de ces surplus. C'était un système où on créait un bassin d'enseignants avec moins d'ancienneté et, après cela, la commission scolaire tirait de ce bassin les enseignants dont elle avait besoin pour donner les services dans ses écoles. Le décret actuel essaie de respecter cette flexibilité qui existait dans les anciennes conventions pour que les commissions scolaires puissent continuer à donner un bon service aux étudiants dont elles ont la responsabilité.

Le Président (M. Jolivet): Merci, M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Messieurs les délégués de la Quebec Association of Protestant School Boards, we are happy to welcome you here this morning for this exchange on the problems relating to the dispute between the teachers of the Province of Québec, the Government and the school boards of which you are an important part. We listened to your presentation with interest and profit. There are a few questions which derive from your presentation which we will be glad to address to you. (12 h 45)

II y a une première question que je voudrais vous poser. Elle se rattache à une observation que vous avez faite à l'occasion de contacts faits à l'extérieur du Québec. Vous dites, au début de votre mémoire, qu'à l'occasion de congrès où vous êtes allés à l'extérieur du Québec ou de rencontres avec des collègues d'autres provinces, vous avez constaté qu'en général les contraintes qui pèsent sur la gestion du système d'enseignement sont beaucoup plus lourdes au Québec que dans les autres provinces. Vous dites, entre autres: "Lorsque les représentants de chacune des provinces se parlent de tel ou tel aspect de la convention des enseignants, le Québec est toujours l'exception. Ce sont toujours les commissions québécoises qui ont moins de flexibilité et plus d'entraves dans l'administration qu'ailleurs."

J'ai deux questions à ce sujet. Tout d'abord, pourriez-vous nous donner un certain nombre d'exemples de ces contraintes plus lourdes au Québec, en plus de celles qui sont mentionnées dans votre mémoire? Vous avez donné quelques chiffres, dans votre mémoire, sur les heures d'enseignement en particulier. Deuxièmement, est-ce que vous ne faites pas la même constatation en ce qui concerne la réglementation et les contrôles exercés par le ministère de l'Éducation sur les administrations locales? Pourriez-vous donner

aussi des exemples de cela?

Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.

M. Aalders: Pour la première question, M. le Président, je demanderai à M. Smith de répondre; il est au courant d'une étude qui a été faite dans toutes les provinces.

Le Président (M. Jolivet): M. Smith.

M. Smith (William G.): Merci, M. le Président. En ce qui a trait à la question des contraintes plus lourdes qui se trouvent dans les conventions collectives des enseignants au Québec, je pense que les exemples sont nombreux. On a juste à regarder l'entente 1979-1982 pour voir le genre de minutage dont il était question dans la présentation il y a quelques minutes. Les dispositions de la convention précisent le nombre de minutes qui peuvent être affectées à l'enseignement, le nombre de minutes qui sont limitées pour la surveillance, les moyennes et les maxima de groupe pour différentes catégories. Il y a aussi la question dont le représentant de l'Association des cadres scolaires a parlé tantôt quant au régime pédagogique et au type d'organisation qui est possible dans l'école. On pourrait également référer aux ententes locales qui existent en quantités industrielles au Québec et qui contiennent de nombreuses clauses comme la consultation, l'affectation et la répartition des fonctions et responsabilités des enseignants.

Ces textes constituent en moyenne, si on prend la partie nationale avec la partie locale, des ententes collectives de 200 à 300 pages. Quand on regarde les conventions collectives à l'extérieur du Québec, elles ont en moyenne une douzaine ou une quinzaine de pages et, généralement parlant, se limitent à la description pure des conditions de travail des enseignants, à savoir les échelles de traitement, les processus de grief et le type de conditions qu'on trouve normalement dans les conventions collectives du secteur privé. Les clauses traitant de la description de la tâche d'un enseignant, l'organisation pédagogique des écoles, etc., ne se trouvent pas, généralement parlant, dans les conventions collectives à l'extérieur du Québec.

Le Président (M. Jolivet): La deuxième partie, par M. Aalders.

M. Aalders: En ce qui concerne la réglementation, si j'ai bien compris votre question, M. le député d'Argenteuil, c'est vrai qu'il y a plusieurs exigences de la part du ministère de l'Éducation du Québec, comparé aux autres provinces. En ce qui concerne la documentation concernant le personnel, il y a plusieurs formules, plusieurs questionnaires qu'il faut remplir ici au Québec et qu'on n'a pas à remplir dans les autres provinces. Ici, nous avons le régime pédagogique qui est un autre projet, peut-être plus spécifique au Québec que dans les autres provinces, qui exige d'autres renseignements mais, dans l'ensemble, nous avons la tendance, comme commission scolaire, à répondre à ces demandes et ce n'est pas vraiment le problème le plus important que nous avons.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: J'aurais deux observations, avant de passer à une autre question. D'abord, je remarque que M. Smith, si je le reconnais bien, est celui qui accompagnait les sous-ministres l'autre soir, quand ils sont venus devant la commission ici. Je constate, par conséquent, qu'il y a des relations de bon voisinage, d'association étroite entre, au moins, une partie de votre délégation et le ministère. Je ne vous fais pas grief; je souhaiterais seulement que le même esprit de compagnonnage existe en relation avec la loi 101 et peut-être sur d'autres sujets. Je pense qu'à ce moment il y aurait une harmonie encore plus grande.

Cela étant dit, je vais vous apporter tantôt, M. Smith, si mon collègue peut la retrouver, une convention collective de l'Ontario qui a plus que douze pages. J'en ai examiné une ces jours-ci et cette convention que j'ai examinée a au moins une bonne soixantaine de pages. Elle traite à peu près des mêmes sujets que nos conventions ici; elle n'est pas aussi détaillée encore, mais la tendance s'en va de ce côté. Le syndicalisme s'est développé à un rythme différent en Ontario. Je ne pense pas qu'on pourrait laisser croire au public que là-bas ils marchent avec des petites conventions de douze pages parce que c'est de moins en moins vrai. En tout cas, je vous la montrerai tantôt et j'espère qu'on va me la retracer avant la fin de la séance. Je pense qu'elle est un peu plus détaillée que cela, maintenant, et qu'on y traite d'autres sujets que de ceux que vous avez mentionnés.

Est-ce que j'ai bien compris? Vous dites: Au point de vue contrôle, centralisation, réglementation, ce n'est pas tellement différent au Québec d'ailleurs.

M. Aalders: On a plus d'exigences, M. le député, en ce qui concerne la documentation surtout.

M. Ryan: C'est tout ce que vous avez à dire là-dessus, vous?

M. Aalders: Oui.

M. Ryan: Très bien. Je pense qu'on va en entendre parler en Chambre souvent. J'espère que ce sont les déclarations

que vous faites en général sur ce sujet et qui vont dans le même sens.

Celle que j'ai ici, juste pour terminer mon intervention de tantôt, c'est la convention du Conseil scolaire de Sudbury, qui compte une quarantaine de pages. Je regarde les sujets qui y sont traités. Il y en a toute une liste. Je ne veux pas les énumérer parce que ce serait trop long, mais ce sont des sujets qui sont pas mal les mêmes que ceux dont on traite dans nos conventions, avec, encore une fois, à certains endroits des contraintes moindres, parce que ce n'est pas une convention centralisée. Cela couvre uniquement le Conseil scolaire de la région de Sudbury, mais cela traite pas mal de sujets, finalement.

Il y a une question qui m'est venue à l'esprit en vous écoutant tantôt, parce que vous faisiez des comparaisons avec l'entreprise privée. Vous dites: "Généralement parlant, dans l'entreprise privée, personne ne niera à l'employeur le droit d'utiliser son personnel de la façon la plus efficace". Je voudrais simplement vous signaler à ce sujet que, dans les entreprises d'une certaine taille, on a des conventions collectives qui précisent, en général, avec beaucoup de clarté, les domaines que doivent respecter les employeurs dans l'utilistion des ressources humaines de l'entreprise. Si vous regardez les conventions collectives dans le domaine des chemins de fer, dans le domaine de l'aviation, dans le domaine de l'imprimerie et dans combien d'autres domaines, vous constaterez que les syndicats en général veillent avec un soin jaloux à éviter que, dans l'affectation des ressources, on ne fasse travailler des personnes dans des domaines qui sont occupés par tel ou tel syndicat. Prenons l'industrie de la construction, par exemple. Je pense que c'est une des conséquences de la syndicalisation qu'elle entraîne certaines contraintes que doit respecter l'employeur dans l'exercice de ce pouvoir d'utilisation de son personnel que je reconnais, moi aussi.

Je ne voudrais pas qu'on ait l'impression qu'on pourrait se contenter de régler ce problème dans deux lignes. En effet, si ces contraintes se sont développées dans les entreprises d'une certaine taille, il est assez compréhensible qu'on doive tenir compte d'un certain nombre de contraintes également dans le secteur public et, en particulier, dans le secteur de l'éducation. Qu'il faille aller moins loin qu'on est allé jusqu'à maintenant dans certains cas, je pense que c'est un domaine ouvert à la discussion. Ne conviendriez-vous pas avec moi que deux lignes pour régler ce grand problème du pouvoir de gérance dans le domaine de l'utilisation et de l'affectation des ressources, c'est peut-être un peu court?

Le Président (M. Jolivet): M. Aalders et, ensuite, je pense que M. Smith aurait quelque chose à ajouter.

M. Aalders: Pour répondre à la question de M. le député, je suis d'accord jusqu'à un certain point que deux lignes ne sont pas satisfaisantes pour régler ce problème. Il est assez particulier. Mais j'aimerais souligner que, dans certaines entreprises privées, il y a plusieurs secteurs qui ne sont pas encore syndiqués.

Le Président (M. Jolivet): M. Smith.

M. Smith: Merci, M. le Président. D'abord, j'aimerais dire que je suis d'accord avec M. le député d'Argenteuil qu'on ne trouve pas, partout au Canada, des conventions collectives en éducation de 12 pages. Je suis d'accord. Je pense que la règle est encore bonne et elle vient d'être prouvée par l'exception citée par M. le député. Je connais aussi la convention collective dont il était question à Sudbury. Bien qu'elle contienne au-delà de 12 pages, un certain nombre de pages sont là parce que la convention collective existe dans les deux langues et que c'est imprimé dans le même volume, tandis que la nôtre est en deux langues, mais elle est imprimée en deux volumes. La convention collective de Sudbury est quand même loin d'avoir la même portée que celle que nous trouvons au Québec. Pour ma part, je serais très heureux de l'échanger contre la nôtre n'importe quand.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Très bien. Je veux simplement préciser, pour qu'il n'y ait pas de malentendu, qu'il y a 48 pages dans chaque langue. En tout, cela fait 96 pages, si on prend votre barème. Vous pourrez le vérifier ici.

Maintenant, dans le mémoire de l'association, il y a une remarque que je ne peux pas passer sous silence. Je vais simplement faire un petit commentaire là-dessus avant d'en venir à ma dernière question. Vous parlez du syndicat, à un moment donné. Je pense qu'il est important qu'on se rappelle la page pour qu'il n'y ait pas de malentendu. On dit que le syndicat représente un groupe particulier, un intérêt particulier et que la commission scolaire ou l'employeur doit tenir compte de l'ensemble. Je pense qu'il est important qu'on retrace exactement ce passage.

M. Aalders: À la page 6, M. le Président.

M. Ryan: Au bas de la page 6, oui: "Parce que le syndicat qui représente les employés concernés n'est qu'un seul groupe

représentant une seule partie de la communauté, car il ne faut pas oublier, etc." Dans un sens, c'est vrai mais, dans un autre sens, je pense que c'est incomplet. En l'occurrence, il s'agit du groupe de citoyens qui fournit un travail professionnel indispensable au fonctionnement de cette institution qui est l'école. Par conséquent, ce n'est pas un groupe d'intérêt - un parmi 50 -qu'on aurait recensé dans l'annuaire téléphonique de Bell Canada. Ce sont les personnes qui ont été préparées professionnellement et qui s'emploient professionnellement à fournir cette contribution extrêmement importante pour la qualité et l'avenir de la société qui est le travail de dispensation de l'enseignement aux enfants.

Par conséquent, quand ils sont dans cette position d'interlocuteurs avec la partie patronale, incluant le gouvernement et la commission scolaire, en vertu de notre régime de relations du travail, ils sont une partie égale. Ils ne sont pas un groupe parmi 50, ils sont une partie égale. Il y a, d'un côté, vous, l'Association des commissions scolaires protestantes, dont vous nous avez dit, loyalement d'ailleurs, que vous faisiez cause commune avec le gouvernement dans une très large mesure sur ces choses-là. Mais il ne faudrait pas se méprendre sur la signification de notre régime de relations du travail; ils sont une partie égale, soit l'autre partie, dans un régime qui est essentiellement bipolaire, qui comprend deux pôles. Je ne sais pas si on peut s'entendre là-dessus.

Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.

M. Aalders: Je demanderai à M. Krause de répondre à cette question, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. Krause.

M. Krause: Je pense que ce que le député d'Argenteuil est en train d'expliquer est une philosophie avec laquelle on est assez d'accord. Quand cela arrive à une relation du travail entre l'employeur et les enseignants, c'est vrai qu'ils sont une partie égale et qu'on établit des communications en termes de cette relation égale. Il ne faut pas oublier que ce qui est contenu dans les conventions collectives concerne les conditions de travail et qu'en tant que partie qui fait interaction dans les services d'éducation qui se donnent dans le milieu scolaire, même si les syndicats sont experts en fourniture de services, les premiers interlocuteurs, comme vous dites, ils ne sont quand même qu'une des parties dont la commission scolaire porte la responsabilité. Dans ce sens-là, il faut faire une différence dans les relations entre les parties. (13 heures)

M. Ryan: Seulement une dernière question, si vous me le permettez. Vous nous avez intrigués à la fin de votre mémoire; vous avez éveillé notre curiosité sans la satisfaire. Vous dites: "Pendant les audiences de cette commission parlementaire de l'éducation, l'Association des commissions scolaires protestantes du Québec a fait des recommandations à son partenaire en négociations, le ministère de l'Éducation, dans le but de trouver des solutions équitables au conflit actuel. Afin de respecter notre protocole de négociations avec le ministère de l'Éducation, nous ne pouvons aujourd'hui annoncer publiquement nos recommandations, mais nous pouvons dire que nous avons proposé l'idée d'une tierce partie." C'est très important. C'est tellement important que je me demande si le ministre de l'Éducation serait prêt à vous dispenser de la contrainte qui semble découler de votre protocole avec lui et s'il vous autoriserait à nous dire ce que vous lui avez recommandé.

Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.

M. Ryan: Cela nous intéresserait de voir si cela porte sur des éléments des décrets ou quoi que ce soit. En tout cas, cela m'intéresserait beaucoup de savoir ce que vous avez proposé au ministre. Deuxièmement, j'aimerais savoir si vous avez proposé des modalités pour cette idée d'intervention d'une tierce partie.

Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.

M. Aalders: M. le Président, je ne veux pas ouvrir la porte. Nous avons eu des communications, des rencontres avec le ministère depuis la semaine dernière. Je demanderais au président du CPNCP, M. Drake, de répondre à votre première question.

Le Président (M. Jolivet): M. Drake.

M. Drake: II est pas mal vite! Notre ligne de conduite depuis le début des négociations est de ne pas - je répète, de ne pas - mélanger toutes les choses dans le même paquet. Si on parle de la réforme scolaire, on ne parle pas des restrictions financières, des budgets. On ne parle pas de la réforme scolaire, si on parle de négociations. Nous avons eu un protocole avec le ministère de l'Éducation et nous avons toujours vécu à l'intérieur de celui-ci. On a des discussions avec nos partenaires et on ne fait pas cela publiquement. Nous répétons notre position, M. le Président: Nous ne sommes pas prêts aujourd'hui, en ce moment, à aller plus loin que là où nous sommes allés dans notre mémoire.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le député de Fabre, en nous rappelant que nous avons, d'un commun accord, accepté de continuer avec l'organisme qui est là pour lui permettre de terminer avant d'aller manger. Il resterait sur la liste le député de Fabre, la députée de Jacques-Cartier, le député de Gaspé et le député de Viau. Je leur demande de poser des questions brèves et qu'on ait, si possible, des réponses brèves aussi de façon à terminer au plus tard à 13 h 30. M. le député de Fabre.

M. Leduc (Fabre): Merci, M. le Président. Votre mémoire reflète une préoccupation d'ordre économique, mais qui est également - je pense qu'il faut le souligner - d'ordre de qualité, la qualité qui touche à l'éducation. À cet égard, vous voulez vous assurer que vos enfants recevront les meilleurs services possible dans nos écoles. Vous soulignez la nécessité de la présence obligatoire des enseignants à l'école comme un des facteurs pouvant améliorer la situation, la tâche globale également et la nécessité de faire passer la capacité avant l'ancienneté.

Votre mémoire insiste également grandement sur la comparaison entre le Québec et les autres provinces, notamment l'Ontario, quant au nombre de jours d'enseignement, l'horaire des élèves et le temps moyen d'enseignement. On nous a, à quelques reprises au cours de cette commission, présenté un certain nombre d'inquiétudes quant à l'application des décrets au chapitre de la tâche. Votre mémoire ne manifeste pas d'inquiétudes. Vous soulignez la nécessité d'augmenter la tâche pour arriver à un niveau comparable à ce qui se fait dans les autres provinces canadiennes.

Ma question est en fonction de vos écoles: Pourquoi, exactement? Je me pose la question. Vos écoles sont-elles, en moyenne, plus petites que les écoles du côté francophone? Avez-vous de grosses polyvalentes? Parce qu'on souligne que ces problèmes d'augmentation de tâche pourraient toucher surtout les polyvalentes de 1000 élèves et plus. Ou, est-ce parce que vous avez développé à l'intérieur de vos écoles d'autres modèles d'organisation? J'aimerais savoir également si vous avez exploré parce que vous mentionnez l'Ontario et les autres provinces canadiennes - cette question des nouveaux modèles d'organisation à l'intérieur de nos écoles et surtout de nos écoles polyvalentes. Ce seraient mes premières questions.

Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.

M. Aalders: Je demanderai à M. Drake de répondre à cette question, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. Drake.

M. Drake: M. le Président, notre organisation scolaire est différente dans un certain sens et nous avons expérimenté toutes sortes de grilles horaires, d'organisations scolaires au cours des dernières années. Par exemple, il y a une couple de polyvalentes - nous avons encore des polyvalentes à Québec et assez d'élèves pour les fréquenter - où on divise le premier et le deuxième cycles du secteur secondaire d'une façon que ce soit presque une école séparée dans le même édifice; il y a des choses de cet ordre. Concernant les grilles horaires telles quelles, je demanderai à M. Smith, qui a travaillé avec M. George, de continuer la réponse sur cette question particulière.

Le Président (M. Jolivet): M. Smith.

M. Smith: Merci, M. le Président. En ce qui a trait à la faisabilité du décret, notre analyse de la situation ne nous porte pas à croire que les dispositions contenues au décret poseront des problèmes sérieux aux administrateurs scolaires. Il faut dire, bien sûr, M. le Président, qu'il faut distinguer les problèmes d'ordre financier et les problèmes en matière de relations du travail. Il est évident, selon certaines des simulations qui ont été soumises, que certaines personnes ou certains administrateurs craignent qu'il n'y ait pas suffisamment de ressources pour permettre l'implantation d'une nouvelle convention de travail telle que proposée dans les décrets. Je vous soumets respectueusement que le niveau de ressources allouées est tout à fait un autre problème. Avec les décrets eux-mêmes, l'augmentation de la tâche moyenne des enseignants ne nuira pas à la forme d'organisation dans les écoles.

Il est bien sûr qu'il existe différents modèles d'organisation dont certains sont plus aptes à convenir à la nouvelle convention de travail que d'autres. On se souvient tous des années soixante-dix où nous avions, dans la majorité des écoles secondaires au Québec, un horaire de 1575 minutes par semaine où les élèves recevaient 35 périodes de 45 minutes par semaine, donc sept matières par jour. Les enseignants faisaient cinq blocs sept. À cette époque, on avait une tâche moyenne de 1125 minutes par semaine. Lorsque nous avons changé la tâche moyenne des enseignants à 1000 minutes, ce n'était pas simplement une question de dire: Bon, on réduira à un certain nombre par enseignant pour la simple et bonne raison que 1000 minutes n'étaient pas un multiple de 45. Vous savez sans doute, messieurs les membres de la commission, que cela provoquait un changement de mode d'organisation scolaire pour atteindre une grille horaire de 1500 minutes avec des

périodes de 50 minutes.

Cette fois-ci, ce que nous avons fait en termes de changement de moyenne de temps d'enseignement, ce n'était pas un changement aussi mirobolant mais simplement une augmentation du nombre de périodes de 50 minutes durant lesquelles chaque professeur va enseigner. Il y a différents modèles d'organisation qui, jumelés aux différentes répartitions des grilles matières sont permissibles aux commissions scolaires, permettent d'organiser les écoles sans véritable problème.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Fabre.

M. Leduc (Fabre): Merci. Dernière question, M. le Président, vous ne touchez pas à cette question dans votre mémoire mais puisqu'on parle de comparaison entre le Québec et l'Ontario en ce qui concerne les différentes dispositions des conventions collectives, je veux vous demander si vous êtes au courant des formules de sécurité d'emploi qui existent dans les autres provinces canadiennes par rapport au Québec?

Le Président (M. Jolivet): M. Smith.

M. Smith: Merci, M. le Président. Nous ne connaissons pas de forme de sécurité d'emploi dans les autres juridictions scolaires qui soit comparable avec celle qu'on trouve ici au Québec. Généralement, dans les différentes juridictions, lorsqu'il y a un problème de diminution de la clientèle, ce qu'essaie de faire le syndicat, c'est de renégocier un rapport maître-élèves qui fera en sorte qu'il y aura moins d'enseignants mis à la porte. Parce que, lorsqu'il y a une diminution de la clientèle, les enseignants qui sont en surplus ne sont pas gardés à l'emploi.

Dans les juridictions que j'ai visitées, il n'y a même pas de formule qui prévoit une telle réduction ou ajustement du rapport maître-élèves, mais plutôt des efforts pour atténuer la compression d'effectifs dans une année donnée. La seule autre chose qui est généralement observée, c'est parfois les priorités d'emploi pour ceux qui se trouvent sans emploi à la suite d'une diminution de la clientèle. Mais nulle part existe-t-il un système qui prévoit le maintien avec traitement des enseignants qui sont en surplus.

Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Merci, M. le Président. D'abord, un petit commentaire. Même si je partage les grands buts du décret qui est d'augmenter la flexibilité de gérance des commissions scolaires et d'augmenter la productivité des enseignants, je ne partage pas le parallèle que vous avez fait entre l'école et l'entreprise. Après tout, l'école n'est pas une entreprise et je crois que nous avons déjà trop emprunté de l'entreprise. Tout ce système de négociation entre adversaire est emprunté de l'entreprise. Nous en avons trop pris de ce système, je crois.

Vous avez parlé des droits de gérance des commissions scolaires. Je suis vraiment étonnée que nous n'ayez mentionné nulle part, je crois, si je ne me trompe pas, les règles budgétaires, parce que M. Smith a dit que c'est autre chose. C'est peut-être autre chose, mais, sur le plan pratique, les règles budgétaires sont vraiment la clé. Je crois qu'il n'est pas possible de considérer l'impact des conventions collectives du décret sans considérer en même temps l'impact des règles budgétaires. Je crois que le danger devient de plus en plus évident, ici au cours des auditions, que nous ayons un décret qui, par sa flexibilité même, ouvre la porte à des décisions arbitraires de la part du gouvernement qui risquent de diminuer gravement les ressources financières.

La transférabilité est bonne, mais il faut avoir de l'argent; autrement, c'est inutile. Autrement dit, on peut avoir les droits de gérance, mais les droits de gérance pourraient être gravement compromis sans le droit de recevoir des ressources adéquates.

J'aimerais savoir d'abord si vous êtes satisfaits des règles budgétaires proposées.

Le Président (M. Jolivet): ...excusez-moi.

Mme Dougherty: Sinon, quel est l'écart entre les règles budgétaires proposées et la réalité de vos besoins, selon le décret? Quels seront les secteurs affectés? Par quels moyens, si les normes, les paramètres ne sont pas établis dans la convention collective, comme les enseignants l'ont toujours voulu, devons-nous garantir des ressources adéquates, des ressources financières adéquates aux commissions scolaires? (13 h 15)

Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.

M. Aalders: Bon, si j'ai bien compris l'intervention de Mme la députée, en ce qui concerne les négociations dans le secteur privé et dans le secteur de l'éducation, il est vrai qu'il y a une différence. On n'a pas dit qu'il n'y avait pas de différence. Mais dans le secteur privé, nous avons normalement deux parties qui négocient. Tout de suite là, il y a une différence. Nous n'avons pas l'intention de dire que ce système devrait fonctionner dans le secteur public. On a pris des décisions. Le gouvernement et la population en général ont pris la décision de

partager le système de négociation entre trois parties.

En ce qui concerne les règles budgétaires, il est vrai que nous avons mentionné dans notre mémoire, à la page 3, qu'en "tenant compte des restrictions monétaires telles qu'imposées par les règles budgétaires..." Nous sommes très conscients des règles budgétaires en ce qui concerne l'application des articles des décrets ou d'autres conventions collectives. Il est bien sûr que cela ne permettra pas aux commissions scolaires de faire des profits. Pour elles il y a deux possibilités d'avoir de l'argent, soit par des taxes locales ou par des subventions du gouvernement. Ce sont les deux seules sources de revenus pour les commissions scolaires. Donc, avec la loi 57, le gouvernement nous enlève une partie des revenus que nous pouvions obtenir en imposant des taxes à nos contribuables.

Maintenant, en ce qui concerne directement votre question à savoir si les règles budgétaires prévoient toutes les possibilités, on n'a pas encore reçu de document final du ministère qui nous dise que nous aurons des fonds adéquats pour appliquer tout ce qui concerne les décrets et la loi 105.

Mme Dougherty: Donc, vous ne voyez pas de problème important dans les règles budgétaires?

M. Aalders: Pour plus de détails, je demanderai à M. Drake de répondre à cette question.

Le Président (M. Jolivet): M. Drake.

M. Drake: Oui, nous voyons des problèmes.

Des voix: Ah! Ah!

Mme Dougherty: J'aimerais approfondir la question. Tout à l'heure, nous avons parlé, avec l'Association des cadres scolaires du Québec, de l'enfance inadaptée. Le COPEX, dont j'étais membre, mettait beaucoup d'accent sur l'importance d'avoir assez de ressources pour les enfants inadaptés. Le Conseil supérieur de l'éducation a suggéré, dans un de ses documents, qu'on devrait établir dans la convention collective des normes de ressources professionnelles pour assurer un niveau adéquat de ressources professionnelles pour des enfants handicapés tel que recommandé dans le rapport COPEX. Qu'est-ce que vous en pensez?

Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.

M. Aalders: M. le Président, je demanderai à M. Krause de répondre à cette question et, à M. Drake par la suite.

M. Krause: Si je comprends bien la question, M. le Président, dans les décisions concernant les services pour l'enfance inadaptée aux commissions scolaires, c'est certain qu'il y a toujours un conflit entre ce qui est disponible en termes de fonds pour payer pour les services et ce que la commission scolaire voudrait peut-être donner comme services. Il faut certainement que la commission scolaire prenne des décisions très sérieuses concernant cet aspect de services.

Il est aussi certain que dans beaucoup de cas il y a peut-être des écarts assez grands entre ce que voudrait la commission scolaire et ce que le budget dont ladite commission scolaire dispose couvrirait comme dépenses. C'est une décision de la commission scolaire qui est, comme on l'a dit dans notre mémoire, l'agence responsable de la dépense des fonds publics au niveau local; il faut donc qu'elle prenne cette décision et la justifie devant la population qu'elle dessert.

Si je peux revenir au point que vous avez soulevé concernant la question d'établir, dans les conventions collectives, des normes pour garantir certains services pour l'enfance inadaptée dans les commissions scolaires, c'est, encore là, une décision de discrétion, si vous voulez. C'est peut-être une pensée reliée à ce qui existait auparavant dans les conventions collectives, disons dans les années soixante ou au commencement des années soixante-dix. Ce qui existait dans la convention collective établissait les règles budgétaires que la commission scolaire allait avoir pour donner les services. Cela a disparu dans les dernières années. Même si une norme d'engagement de personnels était dans une convention collective, cela ne correspondait pas à ce qui était donné en termes de budget pour dispenser ce service. Cela ne correspond pas nécessairement à ce qu'il y a dans une convention collective et ne garantit pas nécessairement que les services seront dispensés. Mais, comme je l'ai dit auparavant, c'est vraiment la commission scolaire qui a la responsabilité, localement, de prendre ses décisions et de faire des choix en termes de ressources. Ces choix, c'est certain qu'ils seront déterminés par les besoins exprimés par les communautés desservies.

Le Président (M. Jolivet): M. Drake. Cela va? Cela va. M. le député de Gaspé.

M. LeMay: Merci, M. le Président. Vous dites, à la page 5 de votre mémoire: "Lorsque les représentants de chacune des provinces se parlent de tel ou tel aspect de la convention, le Québec est toujours l'exception. Ce sont toujours les commissions scolaires qui ont moins de flexibilité et plus d'entraves dans l'administration qu'ailleurs." Prétendez-vous par là que les commissions

scolaires, ici au Québec, ont moins de latitude ou moins de pouvoirs qu'ailleurs?

Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.

M. Aalders: Je donnerai un seul...

M. LeMay: Excusez-moi seulement un instant, je vais terminer.

Le Président (M. Jolivet): Excusez-moi, M. le député de Gaspé.

M. LeMay: Par administration, parlez-vous seulement d'administration financière ou est-ce ensemble?

M. Aalders: Pour la première partie de la question, M. le député de Gaspé, vous vous rappelez très bien qu'en 1979, lorsqu'on a signé la convention collective qui vient de se terminer, la sécurité d'emploi au Québec a fait les grands titres de tous les journaux. C'est un aspect, c'est un exemple. Peut-être que M. Smith peut vous donner d'autres exemples.

Le Président (M. Jolivet): Allez-y.

M. Smith: Je pense que les exemples que je pourrais donner sont dans les réponses qu'on a données tantôt. Je peux seulement dire que les aspects de la convention qui ont trait à la sécurité d'emploi créent des problèmes en termes d'embauche pour les commissions scolaires, en termes de flexibilité dans le choix du personnel, en termes d'affectation interne et en termes de choix des personnes venant de l'extérieur. Ces choses, combinées avec ce que nous avons mentionné tout à l'heure, constituent les principales entraves, si vous voulez, dans l'administration des commissions scolaires.

Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.

M. Aalders: M. Krause a aussi un autre commentaire à apporter là-dessus.

Le Président (M. Jolivet): M. Krause.

M. Krause: Oui, M. le Président. Si je comprends bien la question, vous dites que les règles administratives ou budgétaires donneront des contraintes aux commissions scolaires.

M. LeMay: Non, quand vous parlez d'entrave dans l'administration, qu'entendez-vous par "administration"? Est-ce uniquement au plan budgétaire ou simplement au niveau de l'application de la convention collective que le ministère ne vous donne pas suffisamment de latitude?

M. Krause: Dans le contexte de cette présentation ou de ce mémoire, cela concerne les contraintes qui sont établies dans les conventions collectives, mais il est clair qu'il y a aussi d'autres contraintes; on est toujours en discussion avec le ministère pour essayer d'amoindrir ces problèmes.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Viau.

M. Cusano: Merci, M. le Président. Ma première question s'adresse à M. Smith. Dans un des documents qu'il a déposés à cette commission parlementaire où il est censé avoir fait le tour de huit commissions scolaires dans toute la province, après le dépôt de ce document, j'ai eu l'occasion de communiquer avec une de ces commissions scolaires - c'est une commission scolaire de Colombie britannique - au sujet de toute cette question de la sécurité d'emploi ou de la mise en disponibilité dont on parle beaucoup ici au Québec. N'est-il pas vrai que, dans ces commissions scolaires en dehors de la province de Québec, la mise en disponibilité que l'on connaît au Québec est compensée par des salaires supérieurs à ceux du Québec? Je vous donne un exemple. D'après mes renseignements, si on parle de la catégorie 18, en Colombie britannique, on parle d'un salaire de 41 944 $, tandis qu'ici au Québec on ne parlerait, avec l'application du décret, que d'un salaire de 28 954 $.

Le Président (M. Jolivet): M. Smith.

M. Smith: M. le Président, d'abord, en guise de réplique à la question de M. le député de Viau, l'étude que nous avons faite dans tout le Canada ne concernait que les conditions de travail des enseignants et ne portait pas sur la rémunération. Cet aspect de l'étude a été fait par d'autres personnes dans d'autres équipes. Donc, je ne suis pas en mesure de vous dire si la comparaison avec cette commission scolaire dans telle catégorie est exacte ou non. Tout ce que je peux vous dire, c'est que les échelles de traitement que j'ai observées et les résultats de d'autres études que j'ai vues me portent à conclure que les échelles de traitement en vigueur au Québec sont comparables à celles généralement observées au Canada. Bien sûr, il y a des juridictions scolaires où c'est plus élevé dans telle ou telle catégorie, comme la contraire est vrai. Ce que nous avons remarqué dans plusieurs juridictions en Ontario, le nombre d'échelons qui sont cités comme étant inférieurs à ceux observés au Québec, ceci n'est vrai que dans les basses catégories. Plus vous montez sur les grilles salariales, plus il y a d'échelons. Selon que vous faites la comparaison échelle par échelle, cela vous donne des résultats différents.

M. Cusano: J'ai insisté il y a deux ou trois jours pour qu'on dépose tous vos documents pour qu'on puisse vraiment s'éclairer. Je crois que jusqu'à maintenant, les documents n'ont pas été déposés. Lorsque vous parlez de la question du nombre de minutes que les enseignants doivent passer en classe ou au travail dans les autres provinces, je remarque que vous n'avez pas parlé non plus de toute l'aide supplémentaire qui est donnée à des enseignants comme Teacher's aid, par exemple, mais on en discutera un peu plus tard.

Ma question sera courte à cause du temps. Vous dites aux pages 8 et 9 que vous voulez garder une très grande souplesse pour offrir les services éducatifs qu'exige un système scolaire. Je pense que tout le monde est d'accord avec cela. Un peu plus loin vous dites que vous tiendrez compte de l'ancienneté et de la qualification des enseignants, pourriez-vous m'expliquer ce que vous voulez dire par qualification? Dans mon esprit, ce mot est très clair, on parle de diplôme ou d'expérience dans un certain domaine, mais lorsque vous parlez de souplesse, voulez-vous dire aussi la supervision et l'évaluation de l'acte pédagogique du professeur?

Le Président (M. Jolivet): M. Aalders.

M. Aalders: Je demanderai à M. Robin Drake de répondre.

Le Président (M. Jolivet): M. Drake.

M. Drake: Je pense que la question posée est: Est-ce que c'est la compétence de l'enseignant qui entre la ligne de compte? La réponse est non.

M. Cusano: Ce n'est pas la compétence.

M. Drake: Ce n'est pas la compétence en tant que capacité de l'enseignant. Par exemple, deux enseignants avec la même expérience, avec les mêmes qualifications, les mêmes diplômes, qui ont rempli le même type de fonctions durant les deux dernières années, ce n'est pas une question de compétence, à notre connaissance.

M. Cusano: À votre connaissance, il n'y aura pas d'évaluation de l'acte pédagogique?

M. Drake: On fait toujours l'évaluation de l'acte pédagogique dans nos écoles.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Au nom des membres de la commission, je vous remercie donc et, à la reprise de 15 heures, nous recevrons la Fédération des comités de parents de la province de Québec, représentée par M. Jean Pontbriand, président.

Je suspends les travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 31)

(Reprise de la séance à 15 h 12)

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission élue permanente de l'éducation continue ses travaux, aux fins d'entendre les organismes directement impliqués dans l'administration scolaire, qui veulent faire des représentations sur la qualité de l'enseignement, la tâche et la sécurité d'emploi des enseignants et enseignantes, en regard de la situation actuelle au Québec.

Je tiens à vous informer de deux choses avant de commencer: II y a d'abord dépôt du mémoire présenté aux membres de la commission parlementaire de l'éducation par l'école Madeleine Bergeron, de Sainte-Foy. C'est donc un groupe d'enseignants de l'école Madeleine Bergeron qui présente le document.

Ensuite, pour les besoins de notre horaire d'aujourd'hui, je tiens à vous informer que la Quebec Association of Catholic School Administrators m'a fait parvenir à l'heure du dîner un télégramme disant qu'elle ne pourra pas être présente aujourd'hui. Je ferai donc distribuer le télégramme à chacun des membres de la commission, ce qui veut donc dire que sur les dix groupes, on aura, avec les deux déjà entendus, sept groupes qui auront à témoigner devant nous aujourd'hui.

J'inviterais la Fédération des comités de parents de la province de Québec, représentée par M. Jean Pontbriand, président, à bien vouloir s'asseoir à la table.

Pendant que la Fédération des comités de parents vient s'installer, je tiens, au nom des membres de la commission, compte tenu des débats qu'il y a eu la semaine dernière, à nous excuser auprès d'elle de l'avoir retardée à aujourd'hui, en sachant ce que cela peut lui causer comme problèmes. Les membres de la commission - vous avez eu l'occasion de le voir vendredi dernier - ont travaillé d'arrache-pied pour essayer de faire en sorte que leur horaire soit respecté. Malheureusement, dans votre cas, il a fallu vous reporter à nouveau. On s'en excuse, au nom des membres de la commission.

M. Pontbriand, vous avez la parole.

Fédération des comités de parents

M. Pontbriand (Jean): M. le Président, j'aimerais vous présenter les membres qui sont présents avec moi cet après-midi. À ma gauche, Mme Marie-Rose Bouillon, qui est

responsable de l'information au niveau du comité exécutif de la fédération; Mme Marie-Alice Lupien, qui est vice-présidente de la fédération et, à ma droite, Mme Lucille Bérubé, qui est directrice générale de la fédération.

J'aimerais excuser mes autres collègues du comité exécutif qui devaient être présents avec nous cet après-midi, qui étaient présents vendredi, mais qui ont dû malheureusement retourner à leur travail, ne pouvant se permettre de perdre une journée de travail supplémentaire, comme nous sommes tous des bénévoles.

M. le Président, nous sommes parmi vous pour vous présenter, au nom de la Fédération des comités de parents, nos impressions, nos réactions et nos attentes face au conflit actuel, conflit qui a des incidences majeures sur l'éducation de nos enfants, pour vous dire également notre sentiment d'inquiétude devant ce conflit qui nous déchire et nous emprisonne. Qui nous déchire parce qu'il est difficile d'y voir clair et parce que les parents sont sollicités sur le plan émotif puisque ce sont leurs enfants qui sont en cause et qu'ils risquent, soit de manquer leur année scolaire, soit d'être démotivés et de quitter l'école prématurément sans parler, évidemment, des idéologies qui peuvent leur être inculquées durant le temps qu'ils sont en classe pendant la durée de ce conflit. Conflit qui nous emprisonne également sous une toile pesante tissée de mots, de chiffres, de diktats quasi incompréhensibles au commun des mortels et accessibles seulement à une intelligentsia spécialiste en relations du travail et qui a, malheureusement, par la conséquence de ses décisions, presque, par les temps qui courent, un droit de vie ou de mort sur la population, si l'on songe, par exemple, aux hôpitaux ou aux conséquences sur l'avenir de nos enfants.

Qui peut actuellement faire la différence entre la démagogie et la vérité dans toute l'information, dans toute la publicité qui nous est destinée? On sollicite fortement, depuis quelques semaines, les parents à prendre position et appuyer une des parties dans cette lutte que se livrent deux géants qui, de toute évidence, se retrouvent actuellement dans une impasse. Les parents sollicités doivent donc choisir émotivement entre le bien immédiat de leurs enfants dans une classe avec un professeur et la perspective qu'on leur fait entrevoir qu'ils peuvent perdre les quelques services qu'ils ont à l'école et l'appui à ses représentants qui forment le gouvernement élu démocratiquement et ses projets. Les parents doivent également faire un choix entre des actions démesurées de part et d'autre, c'est-à-dire la grève illégale, d'une part, et une loi très dure qui va jusqu'à suspendre certains droits prévus dans la Charte des droits et libertés de la personne, d'autre part.

Nous tenterons donc de vous faire part, dans un premier temps, des réactions et des attentes des parents exprimées avant que ne se produisent les offensives publicitaires des dernières semaines qui amènent actuellement beaucoup de réactions émotives, dans un deuxième temps, de vous exposer nos actions des dernières semaines et, en conclusion, quelques recommandations.

Notre intervention tient compte actuellement des orientations et des résolutions des congrès et assemblées générales de la fédération des années passées.

Mme Bouillon (Marie-Rose): Sur l'expérience des parents, les comités d'école et de parents ont longuement observé et étudié, depuis 1977, notamment lors de la consultation sur le livre vert et les règlements sur le régime pédagogique, le fonctionnement de notre système scolaire. Ils ont, lors de ces consultations, livré au gouvernement leurs attentes sur l'école, attentes qu'on a retrouvées dans la politique gouvernementale, l'École québécoise, énoncé de politique et plan d'action.

Plus récemment, les membres des comités d'école et de parents ont étudié le document gouvernemental: l'École, une école communautaire et responsable. En congrès, au mois de décembre dernier, ici même à Québec, ces parents ont mis en commun leur réflexion sur le type d'école qu'ils veulent pour leurs enfants.

Or, tout au long des années depuis 1972, année où les comités d'école et de parents ont vu le jour, on retrouve une constante dans leurs revendications et c'est cette constante que j'aimerais vous rapporter ici, avec ses conséquences.

Les attentes des parents en regard du projet éducatif, en regard du rôle de l'école, en regard des valeurs recherchées à l'intérieur de l'école.

En regard du projet éducatif: Cette constante s'est en partie matérialisée par la formulation de la notion de projet éducatif. Nous voulons réaliser, dans chacune des écoles du Québec, un projet éducatif qui soit le fruit de la collaboration des divers agents d'éducation afin d'obtenir une école répondant aux attentes et aux besoins de son milieu tout en tenant compte des finalités et des objectifs de l'éducation scolaire au Québec.

Le rôle de l'école: L'école doit, par son organisation pédagogique et ses démarches éducatives, aider à la formation de l'individu et du citoyen. L'école, comme prolongement de la famille, est le lieu d'enseignement et d'instruction où on apprend, comme lieu d'éducation, à devenir une personne autonome, et comme lieu d'insertion sociale, à être un citoyen responsable.

Les valeurs recherchées par les parents:

L'éducation scolaire au Québec se réclame des valeurs intellectuelles comme - ceci est tiré de l'École québécoise, énoncé de politique et plan d'action - le sens du travail méthodique, patient, ordonné, rigoureux qui caractérise depuis toujours l'effort intellectuel; un jugement critique sur l'homme et la société qui devient de plus en plus nécessaire dans une société où coexistent tant de courants idéologiques; une recherche constante de la vérité, garantie d'honnêteté intellectuelle et d'authenticité.

L'éducation scolaire du Québec se réclame de valeurs affectives comme l'aptitude à aimer et à être aimé, l'aptitude à communiquer son expérience sans négliger ou sous-estimer l'univers des émotions et des sentiments personnels, l'ouverture sur le monde, sur les personnes et sur les choses en vue d'en découvrir la valeur et la diversité.

L'éducation scolaire au Québec se réclame de valeurs sociales et culturelles comme le sens démocratique, lequel se déploie graduellement dans la connaissance des institutions et des hommes, dans l'apprentissage de ses droits de citoyen, la reconnaissance des aspirations collectives véhiculées par les coutumes et les lois. Elle contribue à la compréhension et à l'acceptation de l'évolution des normes et des règles.

L'éducation scolaire au Québec se réclame de valeurs morales comme le respect de la vie, garantie indispensable de l'épanouissement humain, le respect de soi et d'autrui, fondement de l'établissement des rapports de justice dans la société, le respect du milieu et de l'environnement, l'autonomie et la responsabilité, valeurs fondamentales dans le développement de la personnalité.

Mme Lupien (Marie-Alice): Nous continuons avec les attentes des parents en ce qui a trait à l'objectif des conditions de travail. Ces finalités, ces objectifs, nous voulons pouvoir les réaliser. Dans ce but, l'assemblée générale de la Fédération des comités de parents de la province de Québec avait demandé que les paramètres dans l'établissement des conditions de travail pour les personnels des commissions scolaires respectent les objectifs québécois en éducation tels qu'ils apparaissent dans l'École québécoise, énoncé de politique et plan d'action.

Au niveau de la tâche. Les parents ont, de plus, constaté que l'évolution des conventions collectives rendait de plus en plus codifiée la tâche de l'enseignant en l'encadrant de telle sorte qu'il n'y avait plus de marge de manoeuvre pour donner aux élèves les services, l'encadrement et l'attention nécessaires. Tâche rendue encore plus rigide par un temps de présence toujours diminué. Les parents ont réclamé de façon de plus en plus pressante que la tâche soit plus globale, moins spécialisée et moins minutée, afin de répondre davantage aux besoins des étudiants et aux besoins de l'école. Il y a cependant un aspect de la tâche qu'il serait important d'aborder, c'est celui de son contenu et de la formation des enseignants pour la bien remplir.

Trop souvent, les enseignants doivent préparer des syllabus de cours, des plans d'étude, du matériel didactique, des instruments d'évaluation, en l'absence de guides pédagogiques, de manuels scolaires, etc. Les enseignants ne sont pas nécessairement formés pour ce faire. Il y aurait peut-être lieu de faire en sorte que l'enseignant puisse utiliser son temps de présence à l'école à enseigner et à aider de façon directe l'étudiant, et avoir droit à des services de soutien adéquats pour lui permettre de bien jouer son rôle.

On mentionne très souvent le coût élevé du système. Est-ce que le fait de demander aux enseignants de faire un travail pour lequel ils ne sont pas nécessairement préparés n'amène pas un coût inutile au système? Ces travaux ne pourraient-ils pas être faits à moindre coût?

J'aimerais rappeler à cette commission que le gouvernement avait, en décembre 1972, par l'arrêté en conseil no 3811-72, déterminé les conditions de travail des enseignants à l'emploi des commissions scolaires. Or, l'article 7: ou du chapitre 8 de ce décret, tenant lieu de convention collective, prévoyait la mise sur pied d'une commission d'étude dont le mandat était de proposer des méthodes et des systèmes pouvant permettre une utilisation optimale des ressources humaines affectées au système scolaire. Cette commission a déposé son rapport en mars 1975 et recommandait de continuer les travaux d'analyse de l'emploi d'enseignant amorcés par la commission tout en faisant un certain nombre de recommandations pour humaniser et rationaliser la tâche de l'enseignant. N'y aurait-il pas lieu de revoir et de poursuivre cette étude?

Les attentes des parents en regard de la capacité: Les parents n'ont jamais compris comment il se faisait qu'un professeur de mécanique pouvait en venir à enseigner le français ou les mathématiques sans avoir la compétence. Ils réclament depuis longtemps un système où la capacité d'enseigner une matière et la compétence soient le principal critère d'affectation à un poste et non uniquement l'ancienneté. Le "bumping" a été dénoncé et a fait l'objet de nombreuses revendications de la part des parents.

Affectation: La loi reconnaissant la possibilité d'avoir un projet éducatif dans une école, il est donc important que l'école puisse recevoir des personnels aptes et désireux de fonctionner dans un tel projet éducatif. Les parents désirent donc que les

mécanismes d'affectation du personnel dans les écoles prévoient la possibilité pour l'école de se doter d'un personnel en fonction de son projet éducatif ou de ses besoins spécifiques.

M. Pontbriand: M. le Président, la fédération avait demandé dans des recommandations antérieures que des modifications à la loi du travail soient apportées afin d'améliorer le processus des négociations. Nous demandions, entre autres, à ce moment-là que le conseil d'information puisse jouer pleinement son rôle et qu'un représentant de la fédération puisse y siéger afin d'avoir toute l'information sur les enjeux et le déroulement de la négociation. Ce conseil fut malheureusement aboli l'an dernier et aucune des parties n'a senti le besoin d'informer ni d'impliquer la fédération et les comités de parents ainsi que les associations d'étudiants dans le nouveau processus jusqu'à tout récemment. La fédération a suivi le dossier de l'extérieur en observant une attitude de neutralité entre les protagonistes et ce, tant que les enfants n'ont pas été impliqués dans le conflit. Cependant, le 26 janvier, devant ce qui semblait, à la lueur des informations que nous avions, une impasse, la fédération recommandait aux parties de recourir à une médiation extraordinaire afin d'éviter la grève et tenter de régler le conflit. En même temps, la fédération demandait au gouvernement de créer, dès que le conflit serait terminé, une commission royale d'enquête afin de trouver d'autres mécanismes de négociation dans le secteur public pour remplacer ceux que nous connaissons actuellement et qui se révèlent, une fois de plus, complètement inadéquats.

Le -28 janvier, la grève était déclenchée et, les enfants étant mis en cause, nous ne pouvions plus demeurer silencieux. C'est pourquoi nous acceptions de nous joindre au groupe des présidents des organismes du réseau à une réunion du 4 février dernier afin de trouver un moyen de résoudre cette impasse en analysant un cadre de règlement susceptible de diminuer les rigueurs du décret, de dénouer l'imbroglio et de permettre un retour en classe des enseignants afin que les étudiants puissent recevoir les cours et les services auxquels ils ont droit. Cette proposition fut, comme vous le savez, rejetée. Le 15 février, avant le dépôt de la loi 111, les présidents d'organismes se réunissaient de nouveau et renouvelaient aux parties une proposition dans laquelle ils les invitaient à négocier avant qu'il y ait loi et ils offraient également leurs services pour assurer, si possible, une certaine médiation. Nous avons également dénoncé publiquement l'Alliance des enseignants de Montréal qui décidait de donner à nos enfants des cours selon ses vues sur la situation des négociations, sur le contenu des décrets et des lois et ce, sans s'assurer de l'accord des comités d'école et des comités de parents et malgré le fait que Mme Gagnon, vice-présidente de la CEQ, lors d'une rencontre que nous avons eue le 28 janvier dernier entre le comité exécutif et des représentants de la Centrale de l'enseignement nous assurait que la CEQ n'utiliserait pas les étudiants et les laisserait en dehors du conflit. (15 h 30)

Le réaménagement du cadre de règlement. Ce réaménagement proposé nous semblait acceptable en regard des services offerts à nos enfants. Il nous garantissait les services existants et même l'ajout de spécialistes à l'élémentaire. Il garantissait pour les enseignants du secondaire qu'il n'y aurait pas plus de 5000 mises en disponibilité au 15 octobre de chaque année, un étalement de l'augmentation de la tâche de 12 minutes par jour ainsi qu'une amélioration de la sécurité d'emploi. Plusieurs points du normatif étaient également améliorés. Ces nouveaux aménagements permettaient, croyons-nous, d'administrer plus facilement ces nouvelles conditions de travail pour le mieux-être de notre système d'éducation et de nos enfants. Les clauses de ce réaménagement devraient, quant à nous, de toute façon être intégrées au décret.

Comme parents, nous nous interrogeons sérieusement sur l'école publique comme outil de préparation de nos enfants quand nous regardons le climat qui y prévaut. Nous déplorons que les apprentissages à l'école publique ne soient pas toujours de la qualité que nous sommes en droit d'attendre et nous croyons comprendre l'engouement de certains parents pour l'école privée. Un des principaux arguments de ces parents est le fait qu'il n'y ait pas de grève dans le secteur privé. Lorsqu'ils considèrent le temps perdu à cause de la période des négociations et des grèves, ils ont, je pense, complètement raison. Si on mesure sur les trois ans des conventions - on fait un peu de démagogie à notre tour - la période où il y a un bon climat de travail dans l'école, il y a de quoi être bouleversé. Aux dires de nombreux enseignants, l'année des négociations est néfaste, le climat est tendu et les relations dans l'école n'existent à peu près pas. Cette situation amène une baisse notable de la qualité de l'enseignement. L'année suivante il faut colmater les relations entre tous les agents et replâtrer le climat de l'école pour permettre d'avoir une bonne année scolaire la troisième année. En somme, 180 jours de classe profitables en trois ans. Il y a, je pense, de quoi se désespérer de l'école publique.

On parle souvent de droits acquis. Les syndicats n'ont que cette expression à la bouche. Or, chacun définit ces droits acquis

à partir de son monde. Car, comme le dit le philosophe Basile: "Tout homme transporte avec lui le centre du paysage."

Nous constatons qu'il existe plusieurs droits acquis dans le domaine de l'éducation. Il y a, bien sûr, le droit au travail, le droit d'arrêt du travail, de grève, qui sont des conditions sine qua non du monde du travail. Il y a encore le droit à l'enseignement, le droit à l'apprentissage, à la connaissance, le droit d'accès à la science et à l'information, le droit à la qualité de l'enseignement, le droit d'accès aux hautes sphères de l'esprit et, également, le droit au devenir. Or, parmi ces droits acquis, le droit à l'enseignement est prioritaire pour nous et plus ancien que les droits syndicaux. Les parents tiennent à ce que ce droit des enfants soit respecté.

Le droit d'association est reconnu dans la charte des droits et libertés. C'est donc un droit acquis pour les parents et les étudiants de se regrouper et de faire connaître leurs attentes et ce, non pas seulement devant une commission parlementaire quand la situation est rendue dans une impasse. Il serait important que, dans l'avenir, parents et étudiants puissent être considérés comme partie impliquée dans le processus de négociation en tant que premiers intéressés en fournissant, comme parents, l'élément essentiel du système scolaire, soit les enfants, et en payant de nos deniers le maintien de la structure. Les étudiants sont également intéressés au premier chef, car c'est de leur vécu et de leur avenir dont il est question.

Lorsque nous analysons l'évolution des négociations des conditions de travail des enseignants, nous constatons toujours la même insatisfaction. Je relève une phrase que le Dr François Cloutier, prononçait lors du discours de la rentrée en 1973: "Il faut bien l'admettre, les enseignants, dans leur ensemble, paraissent désenchantés et malheureux. Certaines déclarations syndicales évoquent des conditions de travail inhumaines et présentent la société québécoise comme une société d'oppression."

Nous avons changé de gouvernement, nous sommes dix ans plus tard et nous avons droit aux mêmes discours de la part des syndicats. Pourtant, il est difficilement acceptable que l'une des professions les mieux considérées à l'heure actuelle dans son ensemble se rebelle à ce point et refuse les règles démocratiques de notre société.

Il y a là un important et urgent besoin d'examiner toute cette situation de la tâche et des mécanismes de négociation des conventions collectives afin de revaloriser l'école publique; sinon, la solution sera peut-être de favoriser la généralisation de l'école privée, car les parents se refusent de faire payer la note des inconséquences patronales et syndicales à un tiers complètement étranger au conflit: nos enfants.

Nous avons ensemble un nouveau contrat social à préparer, contrat social qui pourra être caractérisé dans nos milieux par la réalisation d'un projet éducatif d'école, qui permettra l'évolution ou l'émergence d'un nouveau projet de notre société québécoise. Il faura cependant, pour y arriver, éliminer l'esprit corporatiste qui existe si fort actuellement et qui empêche l'évolution de notre société. Il faudra arriver à ce que les corporations cessent de se croire le centre du paysage et qu'elles acceptent de le partager avec les autres groupes de la société dont font partie les parents et les étudiants qui ont leur mot à dire et entendent bien le faire. Merci.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre, s'il vous plaît!

M. Laurin: M. le Président, je veux remercier profondément la Fédération des comités de parents de la province de Québec pour le mémoire qu'elle nous a présenté. Ce mémoire a des caractéristiques particulières. Il m'a fait penser, à plusieurs égards, à celui que nous présentaient, il y a deux jours, le Regroupement des associations étudiantes et la Fédération des associations étudiantes collégiales. Ce n'est peut-être pas étonnant parce que ces deux mémoires se situent du point de vue de l'usager et peuvent apporter un éclairage sur l'utilisation des services en vue de l'atteinte des objectifs qu'ont les usagers.

D'autre part - une autre analogie - ces réflexions viennent de participants au processus d'éducation puisque l'étudiant est participant, à part entière, au processus qui est destiné à faire de lui un être libre, autonome, responsable, instruit. Mais, en même temps, les parents aussi, de la même façon, participent depuis une dizaine d'années à la vie de l'école. Les lois leur ont donné une présence plus grande, un rôle plus important. Ce rôle, ils l'ont parfaitement assumé depuis une dizaine d'années. Ils sont, je crois, en mesure de nous faire connaître, de leur point de vue de participants, non seulement le climat qui prévaut dans les écoles, mais les progrès, en même temps que les lacunes de notre système d'éducation. Ce rôle n'est pas facile à assumer par la Fédération des comités de parents du Québec parce que, même si les lois leur ont donné une présence plus grande, elles ne leur ont pas encore donné les moyens de s'organiser pour pouvoir le remplir et, en particulier, les moyens financiers. Depuis dix ans, nous sommes obligés de recourir à toutes sortes d'expédients pour leur assurer le soutien nécessaire à l'oganisation de leurs activités. Le problème n'est pas réglé. Il faudra sûrement, dans l'avenir, trouver un moyen statutaire, non sujet à l'arbitraire, qui puisse leur assurer non seulement leur autonomie

dans l'exercice de leurs fonctions, mais en même temps l'efficacité qui doit être également la leur pour organiser leurs activités.

Ce que je remarque aussi, et qui me fait bien plaisir dans ce mémoire c'est que, pour la première fois depuis que siège cette commission, nous entendons parler des attentes de la population et particulièrement des parents en ce qui a trait au système d'éducation, particulièrement des attentes des parents en ce qui concerne les valeurs que doit véhiculer notre système scolaire et qui doivent présider à l'organisation pédagogique et à l'organisation de l'école. Je suis heureux d'entendre parler des valeurs intellectuelles, des valeurs affectives, des valeurs morales qui doivent imprégner la vie de l'école, l'environnement éducatif et l'organisation même de l'enseignement. Je pense que c'est là un impératif que nous ne devrions jamais oublier. Même si nous n'en parlons, hélas, pas assez souvent, nous devrions tout mettre en oeuvre pour que ces impératifs, marqués au coin des valeurs, puissent se réaliser concrètement dans toutes les actions que nous menons, aussi bien sur le plan des politiques que sur le plan de l'organisation scolaire.

Je remarque aussi que la Fédération des comités de parents du Québec met beaucoup l'accent sur le projet éducatif et que c'est à l'aune de ce projet éducatif qu'elle juge les conventions collectives de 1979-1982, autant que les décrets qui font l'objet de nos discussions à l'heure actuelle. Ce serait là ma première question: Jusqu'à quel point, au-delà des considérations que vous nous faites dans votre mémoire, croyez-vous que les conventions collectives de 1979-1982 ne constituaient pas le meilleur des moyens pour promouvoir ou réaliser ce projet éducatif?

J'aurais aussi une deuxième question à vous poser, et celle-là porte sur l'avenir. Vous avez beaucoup critiqué le régime de négociation qui nous régit à l'heure actuelle. Vous parlez de l'instabilité profonde que font subir à notre système scolaire le processus de négociation actuel et les grèves nombreuses qui l'ont marqué. Vous faites valoir aussi que, dans tout prochain régime de négociation, il faudra impliquer davantage les usagers, c'est-à-dire les étudiants et les parents. J'aimerais savoir de vous si vous pouvez nous expliquer cela davantage afin d'éclairer notre lanterne pour les mois qui viennent, puisque vous semblez penser, comme beaucoup d'autres, que c'est tout de suite après cette ronde de négociation qu'il faudra réfléchir ensemble en vue d'adopter le plus rapidement possible un meilleur régime de négociation que celui qui est le nôtre à l'heure actuelle.

Le Président (M. Jolivet): M.

Pontbriand.

M. Pontbriand: Au niveau des conventions collectives que nous avons connues par le passé, un peu comme nous l'avons relevé dans notre mémoire, il y a quand même la présence des enseignants à l'école qui était limitée surtout au temps d'enseignement, la tâche, le "bumping" qui étaient, quant à nous, les principaux inconvénients au fait d'établir dans nos écoles des projets éducatifs. Je pense que, si on veut préparer avec nos partenaires un projet éducatif qui tienne compte des attentes et des besoins du milieu, il faut avoir nécessairement le temps de s'asseoir ensemble et de réviser ce qui existe afin d'en arriver à proposer des modalités différentes d'application et de faire en sorte que l'école réponde à ces besoins. On sait fort bien qu'une école de la région du Bas-Saint-Laurent ou de la Gaspésie et une école de Montréal, c'est complètement différent. Elles ont des attentes et des besoins différents.

La tâche, étant minutée, codifiée, souvent, le temps qu'on retrouvait au secondaire et qui était réservé à l'encadrement nous paraissait dans bien des cas nullement utilisé, étant trop marginal pour être appliqué de façon efficace au perfectionnement ou au recyclage de nos étudiants ou à un encadrement précis. Il y a également la notion de "bumping" dont on a fait état, qu'on trouvait réellement aberrante dans certaines circonstances, qui ne permettait pas d'avoir accès à des services de qualité dans nos écoles. (15 h 45)

Je pense que la principale difficulté résidait dans l'absence de disponibilité souvent, des enseignants à l'extérieur du temps requis pour l'enseignement, ce qui rendait difficiles les rencontres entre les parents et les enseignants à l'extérieur de l'école.

Nous avions, pour les prochaines négociations, fait l'an dernier des recommandations au ministère du Travail et au gouvernement pour modifier les règles du jeu. Ces recommandations visaient à faire en sorte que, dans un premier temps, l'Assemblée nationale soit responsable de déterminer les grands paramètres financiers et les objectifs, également, de ces négociations, tout en tenant compte des objectifs québécois en matière d'éducation.

Le deuxième principe est qu'on a souvent décrié la tâche du gouvernement comme négociateur et partie à la négociation, qui le mettait dans un état de juge et partie. Nous recommandions qu'une fois que l'Assemblée nationale aurait, à la suite d'audiences publiques en commission parlementaire, approuvé les grands paramètres de la négociation celle-ci

s'effectue par la Federation des commissions scolaires et les syndicats afin de laisser le gouvernement au-dessus du processus de négociation et, également, de faire en sorte que les enjeux de la négociation soient clairement connus de la population. Nous voulions qu'on connaisse au départ les implications, tant sur le plan pédagogique que sur le plan financier, des modifications à la masse monétaire ou aux objectifs que le gouvernement se fixe dans cet esprit-là.

C'étaient les grands paramètres en ce qui concerne le processus de négociation. Il y avait également des recommandations plus précises quant aux modalités, mais ce sont les principes. Il y avait également certains resserrements au niveau des droits de grève et de lock-out; il s'agissait de faire en sorte que les droits de grève et de lock-out ne soient permis qu'avec l'assentiment de la majorité des membres d'une association syndicale reconnue et non pas seulement à la majorité des membres présents, afin que les décisions prises par une association syndicale soient réellement le reflet de la majorité des gens de son milieu.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Merci, M. le Président. Il nous fait plaisir, à nous aussi, d'entendre le point de vue de la Fédération des comités de parents. Nous avons écouté la lecture de votre mémoire, M. Pontbriand, Mme Bérubé et mesdames, avec beaucoup d'intérêt.

Il y a, évidemment, un certain nombre de questions qui découlent de cette audition que nous avons faite et je vous les adresse bien simplement. D'abord, la Fédération des comités de parents est un organisme qui regroupe des comités de parents qui sont formés dans chaque commission scolaire. Il y a les comités d'école qui sont regroupés en comités de parents au niveau de la commission scolaire. Ensuite, est-ce que vous avez un regroupement au niveau régional, au niveau des grandes régions du Québec?

M. Pontbriand: Un groupement régional pour répondre aux besoins de chacune des régions et la fédération est dirigée par un conseil d'administration formé de deux représentants de chacune des régions, plus un comité exécutif de six membres élus par l'assemblée générale.

M. Ryan: Très bien. J'entendais tantôt le ministre dire qu'il espère pouvoir un jour proposer des formes de financement de votre organisme qui garantiraient une certaine stabilité, peut-être aussi une autonomie plus grande. Est-ce que je dois comprendre de ce qu'a dit le ministre - cela fait quand même six ou sept ans que le gouvernement actuel est responsable de cela - que, pour l'heure, les revenus de la fédération viennent à peu près essentiellement du gouvernement sous forme de subventions discrétionnaires? Et est-ce que je pourrais avoir l'ordre de grandeur pour la présente année, par exemple?

M. Pontbriand: Principalement, la fédération est subventionnée par le gouvernement, tout comme le sont, d'ailleurs, la Fédération des commissions scolaires et bon nombre d'autres organismes. La seule différence est que le financement vient directement et ne passe pas par les commissions scolaires avant de revenir en bas.

M. Ryan: II n'y a aucune disposition statutaire dans nos lois à ce sujet-là.

M. Pontbriand: Non.

M. Ryan: Cela veut dire que c'est le gouvernement, chaque année, qui, suivant son bon plaisir ou la manière dont il interprète ses disponibilités, verse une subvention à votre fédération qui est de l'ordre, pour la présente année, de combien?

M. Pontbriand: D'environ 500 000 $.

M. Ryan: Est-ce que la fédération recueille d'autres revenus à part cela?

M. Pontbriand: La fédération reçoit, quand même, une participation de ses membres qui est d'environ 150 000 $, qui vient des comités de parents et également de ses publications, de ses abonnements aux journaux et autres.

M. Ryan: Bien. Vous disiez dans votre mémoire...

M. Pontbriand: Malheureusement ils n'ont jamais eu des budgets en bas pour leur permettre de financer le fonctionnement d'une fédération. C'est à peine s'ils ont les moyens pour fonctionner chez eux, souvent avec de maigres revenus.

M. Ryan: C'est une remarque que je me permets avant de passer à une question. Je pense que c'est important de situer chaque chose dans son contexte exact. Ce qui me frappe à propos du fonctionnement des comités d'école, c'est que, en général, la participation des parents aux réunions où sont choisis les membres des comités d'école n'est pas très considérable. Concernant les écoles primaires, c'est un peu mieux. Concernant les écoles secondaires, il y a des faiblesses extraordinaires. Je pense que vous en conviendrez comme moi. On me disait, dans ma région, à propos d'une école secondaire regroupant 2800 élèves, qu'à la

réunion où a été formé le comité d'école il y avait à peu près 28 parents. Je ne prétends pas que ce soit le plus bas, mais j'ai l'impression que la participation concernant surtout les polyvalentes doit être pas mal inférieure à 5%.

M. Pontbriand: Remarquez que, dans un premier temps, des études ont démontré que la participation aux élections scolaires est à peu près équivalente à la participation aux élections des comités d'école. Cependant, j'aimerais quand même ajouter que, dans la majorité des cas, lorsque l'élection au comité d'école se fait, le directeur d'école envoie une convocation aux parents souvent la veille ou l'avant-veille pour les inviter à l'élection du comité d'écoie. Il y a, à ce moment, les gens qui se sentent engagés, qui veulent s'impliquer et qui vont y participer. On fait rarement de la publicité. Je remarquais dernièrement sur l'île de Montréal, je pense, une intense campagne d'information sur les prochaines élections scolaires. Nous n'avons pas les moyens de nous payer de la publicité pour donner de l'information aux gens sur les élections des comités d'école.

Les gens qui vont participer aux élections des comités d'école sont convaincus et on retrouve quand même, au niveau du Québec, près de 40 000 à 50 000 parents qui s'impliquent dans l'ensemble des comités d'école. Si un parti politique désirait se lancer dans une élection sans faire aucune publicité ou si vous, comme député, lors de la prochaine élection, vous décidiez de rester chez vous et d'attendre le jour de l'élection, d'attendre le résultat, je ne pense pas qu'à ce moment vous seriez réélu. C'est à peu près la même situation que nous vivons dans nos comités d'école. On reçoit, la veille, un avis de l'élection. C'est sûr que ce sont les gens disponibles et qui y croient qui vont y participer, parce que souvent, la majorité des gens n'en ont pas entendu parler auparavant. Il y a toute une question d'information, de publicité qu'on pourrait remettre en cause dans tout cela.

Y aller pour une élection comme telle, cela peut être peu intéressant pour l'ensemble des gens. Si on avait autre chose pour inciter les gens à participer, peut-être qu'on retrouverait une meilleure participation des gens, une meilleure implication de l'ensemble de la population. Mais les gens au niveau des comités d'école, par contre, lorsqu'ils s'engagent, travaillent à plusieurs assemblées par mois pour parvenir à réaliser quelque chose dans l'école.

M. Ryan: Est-ce que la Fédération des comités de parents, avant les événements de la fin de janvier et de la première moitié de février, avait fait une étude du contenu des décrets et avait pris une position là-dessus?

M. Pontbriand: Non. Nous avons, d'ailleurs, reçu le contenu du décret qu'à la fin de janvier et, comme je l'ai dit tantôt, nous avons été très peu favorisés par l'information au niveau de ce qui s'est passé. Les documents étaient difficilement accessibles et nous n'avons pas pris position parce que, pour nous, c'est à l'Assemblée nationale et aux gens qui nous représentent pour administrer la province de prendre les décisions. Si les décisions que l'Assemblée nationale prend ne satisfont pas la population, nous estimons que ce sera lors des élections que nous aurons à prendre position sur ce qui nous a plu ou nous a déplu au niveau du mandat de nos dirigeants.

M. Ryan: Ce qui m'étonne un peu, c'est que vous n'ayiez pas eu le temps de vous renseigner sur les décrets et, le 4 février, vous avez eu le temps de prendre position sur les améliorations.

M. Pontbriand: Lorsque nous nous sommes rencontrés avec les autres organismes, on n'a eu d'autre choix que de prendre les bouchées doubles et d'analyser quand même les impacts qui concernaient les services directs à nos enfants et les services qu'on va retrouver dans l'école. Les questions salariales et la question des assurances, tous les autres points nous intéressent d'une façon très secondaire. Ce que nous recherchions, c'était de faire en sorte que les enseignants puissent retourner à l'école, que les services adéquats puissent être assurés à nos enfants. C'est la solution que nous recherchions.

M. Ryan: Maintenant, un mémoire comme celui que vous présentez, aujourd'hui,

M. Pontbriand, est-ce que cela a été approuvé par chacune des fédérations régionales?

M. Pontbriand: Non. M. Ryan: Non.

M. Pontbriand: Je l'ai dit tantôt, il provient de mandats que les assemblées générales et les congrès des dernières années nous ont donnés. Il n'a pas été approuvé parce que dans le court délai dont nous avons bénéficié, il a été impossible de consulter nos comités de parents. C'est un délai qui est beaucoup trop court. D'ailleurs, le ministre de l'Éducation commence à connaître les délais de consultation dont nous avons besoin. Pour être capables de rejoindre l'ensemble de nos membres, cela prend plusieurs mois de délai. C'est pour cette raison que le mémoire est fait, non en fonction de la situation actuelle, mais basé uniquement sur les mandats que nous avions reçus lors des derniers congrès et assemblées générales. Les recommandations ont été

faites dans un climat serein et non pas dans un climat d'affrontement ou d'érnotivité.

M. Ryan: Ici, à la commission, la semaine dernière, l'Association des comités de parents de la région 03 - c'est la région de Québec - a présenté un mémoire, et la position alors exposée est assez différente de celle que vous exposez dans le vôtre. Je ne sais pas si vous êtes au courant de ce mémoire.

M. Pontbriand: Je suis au courant du mémoire. Je ne suis pas d'accord avec vous quand vous dites qu'elle est différente. Elle donne un avis sur des points techniques du décret, points auxquels nous n'avons pas touché dans notre mémoire et sur lesquels, d'ailleurs, nous ne voulions pas nous prononcer, parce qu'on ne voulait pas s'interroger ou donner un avis sur l'aspect technique des négociations. Pour nous, il était important d'exprimer ce que les parents nous ont demandé, ce qu'ils voudraient avoir comme système d'éducation et de vous exprimer quels sont les objectifs que nous visons. Je pense que c'est aux techniciens de répondre aux attentes des parents.

M. Ryan: En tout cas, je m'excuse de diverger de vues avec vous, parce que je trouve que les remarques de l'Association des comités de parents de la région 03 sont précises et même, dans l'ensemble, plus précises que celles qu'on trouve dans votre mémoire. Elles s'adressent à des points bien identifiés, nettement identifiés qui découlent directement des décrets. Cela m'étonne d'entendre ce que vous dites. Je le signale bien simplement, d'ailleurs. Savez-vous ce qui m'embarrasse là-dedans? La notion de parents, c'est extrêmement compliqué et je pense à une chose: les administrateurs sont des parents, les syndiqués sont des parents, pour la plupart également, pas seulement les syndiqués de l'enseignement, mais également les syndiqués qui travaillent dans d'autres secteurs de la société. Je ne le sais pas, mais, pour parler au nom de tous les parents du Québec, il me semble que cela doit prendre des moyens de vérification et de tamisage extraordinaires que vous ne semblez pas avoir encore mis au point à ce moment-ci de votre évolution. Je ne fais pas une critique. Je fais une constatation. Il me semble que cela doit être très difficile. J'ai de la difficulté à accepter que la notion de parents soit appropriée seulement par un groupe. Voilà ce que je veux dire.

M. Pontbriand: Je suis bien d'accord avec vous, le terme "parents" a été galvaudé depuis plusieurs années dans la population. Je pense qu'il faut regarder en fonction des rôles que les gens jouent et non pas en fonction du terme "parents". Je suis bien d'accord avec vous. Nos représentants ont des membres de comités d'école et des membres de comités de parents qui nous ont, au cours des dernières années, fait part de leurs attentes. Nous avons, d'ailleurs, étudié au mois de décembre dernier certains aspects de la vie de l'école en procédant à l'étude du document gouvernemental sur la restructuration scolaire. À la lecture des réponses des participants à ce congrès, comme je vous le disais, à la lecture également des recommandations et des orientations qui ont été prises par les dernières assemblées générales, c'est ce qui me permet de vous dire que le mémoire reflète l'opinion et les attentes des gens en ce qui concerne les objectifs d'éducation.

Quant au mémoire de la région 03 qui est le fait, peut-être, de gens plus spécialisés et qui ont peut-être des craintes beaucoup plus précises dans un domaine, je pense que c'est à vous de les interroger si vous en avez l'occasion ou de leur demander un supplément d'information, si vous le désirez. Mais nous n'avons pas voulu nous engager, parce qu'au niveau du comité exécutif nous nous interrogions sur la portée des recommandations que des représentants de la région 03 faisaient et nous n'avons pas cru bon de donner un avis sur leur avis à eux. Pour nous, il était important d'exprimer ce que les membres des comités d'école -pour ne pas employer le mot "parents" - ont exprimé au cours des dernières années sur l'éducation et sur leurs attentes. (16 heures)

M. Ryan: Deux dernières questions: Vous êtes allés, le 4 février, à une réunion de ce que vous appelez les présidents des organismes du réseau. Cela veut dire les présidents de la Fédération des commissions scolaires, de la Fédération des cégeps, des commissions scolaires protestantes, etc. C'est cela?

M. Pontbriand: C'est exact.

M. Ryan: Vous êtes allés à cette réunion et vous vous êtes solidarisés avec ce groupe dans l'appui que vous avez donné au cadre de règlement du 10 février.

M. Pontbriand: C'est exact.

M. Ryan: Maintenant, est-ce que vous avez pris contact avec la partie syndicale à quelque stade que ce soit du conflit, depuis la fin de janvier, depuis que vous avez commencé à vous intéresser à cela pour vrai? Est-ce que vous avez pris contact avec la partie syndicale pour avoir son point de vue?

M. Pontbriand: On a rencontré la CEQ à la fin de janvier pour avoir ses opinions sur le conflit. D'ailleurs, la CEQ avait

demandé à nous rencontrer, ce que nous avons fait; nous avons passé plusieurs heures à discuter de différents points avec elle.

M. Ryan: Ensuite, vous êtes allés à la réunion du 4 février et vous avez trouvé que, pour jouer le rôle de médiation dont vous parlez à la page suivante, vous étiez mieux de pencher plutôt du côté du gouvernement. Est-ce que je me trompe?

M. Pontbriand: Ce n'était pas de pencher du côté du gouvernement, sauf que celui-ci est quand même le représentant de la population, ce sont nos représentants et nous estimions qu'il était important de faire en sorte de débloquer le dossier et que, dans la situation, il était peut-être le mieux placé pour essayer de faire une offre à la CEQ pour ouvrir le débat.

M. Ryan: Quand vous dites que les parents auront une place dans le processus de négociation dans l'avenir, qu'est-ce que vous voulez dire?

M. Pontbriand: Je n'ai pas compris.

M. Ryan: Quand vous suggérez que les parents aient une place dans le processus de négociation dans l'avenir, quelle forme cela pourrait-il prendre?

M. Pontbriand: Remarquez que, dans les recommandations que nous avions faites l'an passé, nous aurions aimé que le conseil d'information qui devait exister puisse jouer son rôle et qu'on puisse y avoir un représentant qui soit en mesure de suivre ce qui se passe; dans les futures négociations, je pense qu'il y a des choses qu'il faudrait entrevoir. Il faudra réévaluer l'ensemble de la situation, continuer nos études et, par la suite...

Le Président (M. Jolivet): Merci. Avant de passer la parole au député de Fabre et adjoint parlementaire au ministre de l'Éducation, je ferai distribuer aux membres de la commission un document qui est un télex envoyé par le collège John Abbott, pour votre information. M. le député de Fabre.

M. Leduc (Fabre): M. le Président, je voudrais commencer par féliciter la fédération pour la qualité du mémoire qu'elle nous présente. Je pense que le mémoire reflète bien les préoccupations de l'ensemble des parents. Je dois aussi ajouter que les questions et les commentaires du député d'Argenteuil me laissent perplexe. Ces questions et ces commentaires - en tout cas dans mon esprit - semblent plutôt dévaloriser le rôle que joue la Fédération des comités de parents et aussi le rôle des parents à l'intérieur des comités d'école et des comités de parents. C'est assez curieux que le député d'Argenteuil n'ait pas posé ce genre de questions, par exemple, à l'Association des cadres scolaires ou à la Fédération des commissions scolaires. Pourquoi n'a-t-il par demandé à ces gens s'ils avaient également consulté leurs associations locales, les commissions scolaires locales? Pourquoi ces questions n'ont-elles pas été posées et pourquoi ces questions vous sont-elles posées à vous? Enfin, cela soulève quand même des doutes sur la façon dont le député d'Argenteuil envisage le rôle que vous jouez au sein de la société québécoise.

J'aurais une question précise à vous poser, une question que vous ne touchez pas dans votre mémoire; cela concerne la présence des enfants à l'école. On sait que, dans le décret, on prévoit une augmentation du temps de présence des enfants à l'école, c'est-à-dire une proposition qui ferait passer le temps de présence de 23 heures à 25 heures. J'aimerais savoir ce que vous en pensez et comment vous réagissez devant cette proposition?

Le Président (M. Jolivet): M.

Pontbriand.

M. Pontbriand: Nous sommes favorables dans l'ensemble à une augmentation du temps de présence des enfants à l'école, à la condition cependant que ce temps soit utilisé adéquatement, qu'on ne l'utilise pas pour des choses qui ne seraient pas pertinentes à l'éducation. Je pense que c'est intéressant, parce que cela pourrait permettre d'explorer un certain nombre de sujets, d'explorer certains programmes qui ne sont pas peut-être pas suffisamment vus aujourd'hui. Nos parents, lors de la consultation sur le programme de formation personnelle et sociale ont déploré le peu de temps qu'on semblait vouloir accorder à ce nouveau programme dans l'avenir. On parlait, au secondaire, de cinq heures par année. C'était très minime comme temps. Je pense qu'il y a, quant aux nouveaux programmes qui s'en viennent, la possibilité d'envisager une meilleure répartition du temps en fonction des programmes qui vont être disponibles, comme également peut-être l'occasion d'avoir accès à davantage de spécialistes sur certaines matières. Cela peut être la musique, cela peut être les arts plastiques, l'éducation physique. On s'est fortement plaint, au cours des dernières années, du fait que le temps d'enseignement, le temps de présence des enfants à l'école diminuait de plus en plus. Si l'on se reporte à notre jeunesse ou au temps où on allait à l'école, le temps de présence était beaucoup plus long et nous n'en sommes pas morts. Il y a peut-être une certaine nostalgie de la part des parents également quant à cela. En plus

de la nostalgie, je pense qu'une utilisation très intéressante peut être faite de l'augmentation de la présence des enfants à l'école.

M. Leduc (Fabre): Je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Louis-Hébert.

M. Doyon: Merci, M. le Président. Je veux souhaiter la bienvenue, comme l'ont fait mes collègues, aux représentants de la fédération. Leur mémoire attire notre attention sur un certain nombre de points. Le député de Fabre a passé en revue un certain nombre de questions qui ont été posées par le député d'Argenteuil, invitant un jugement critique sur le fondement de ces questions. Je pense que les questions qui sont posées ici par nous, parlementaires, à cette commission parlementaire visent à éclairer la situation.

La Fédération des comités de parents nous présente un mémoire, et force nous est, très objectivement, de reconnaître que, grosso modo ou dans plusieurs de ses points importants, on retrouve une répétition du discours ministériel, du discours gouvernemental.

Il est étonnant qu'on ne retrouve à peu près pas dans le mémoire qui nous est soumis une critique, de quelque nature qu'elle soit, envers le gouvernement. Je ne suis pas prêt à croire que les fautes soient nécessairement toutes d'un côté. Je crois que la Fédération des comités de parents a le droit de choisir une version plutôt qu'une autre. Cependant, en agissant de la sorte, elle peut à un moment donné nous permettre à nous, parlementaires, de nous poser un certain nombre de questions. Par exemple, la Fédération des comités de parents déclare -elle le dit clairement dans son mémoire -qu'elle aurait souhaité ne pas voir utiliser les enfants dans la publicité ou les efforts que font les enseignants pour convaincre la population du bien-fondé de leurs revendications. J'aurais aimé - cela aurait rétabli un certain équilibre - à titre d'exemple, que la Fédération des comités de parents nous indique d'une façon aussi claire, au sujet des actes récents du gouvernement en ce qui concerne une publication faite à 400 000 exemplaires, qui a été distribuée par courrier de première classe, qu'elle avait des réserves de nature sérieuse en ce qui concerne cette utilisation des fonds publics qui était de nature à prôner une version tronquée - c'est le moins qu'on puisse dire -des faits. Cependant, force m'est de constater le silence de la fédération à ce sujet.

J'aurais aimé aussi que la fédération nous dise sa façon de penser en ce qui concerne la loi 111 et l'article 28 en particulier. En entendant parler le président Pontbriand, une grande justification de ses prises de position, c'est que le gouvernement en a ainsi décidé et qu'à partir de là - si on continue son raisonnement - la cause défendue par le président serait la bonne cause. Si c'était aussi clair que cela nous n'aurions pas eu besoin de nous réunir ici aujourd'hui. C'est devant ces inquiétudes que le député d'Argenteuil comme moi-même sommes appelés à nous poser un certain nombre de questions.

Le député d'Argenteuil s'est informé en ce qui concerne le financement de la fédération. On lui a donné comme réponse qu'elle était financée en très grande partie par des subventions discrétionnaires du gouvernement d'environ 500 000 $. On faisait un rapport avec la façon dont est financée la Fédération des commissions scolaires par exemple. Je pense qu'il faut quand même signaler que, pour ce qui est de la Fédération des commissions scolaires, elle est financée selon des règles budgétaires précises qui sont bien connues: tant par élève. Il n'y a rien de discrétionnaire là-dedans. Quand le montant est augmenté, cela fait l'objet de discussions. Cela fait l'objet de négociations. La Fédération des commissions scolaires doit établir ses besoins, l'augmentation de ses coûts et c'est après qu'on établit le montant de 1,50 $ ou de 1,75 $ - je ne sais trop ce qu'il est actuellement - par élève. Je ne pense pas que l'on puisse assimiler totalement les deux formes de financement. Je pense que c'était couper un peu court à nos inquiétudes que de dire que nous sommes dans une situation similaire à celle de la Fédération des commissions scolaires. Ce n'est pas le cas. Je veux le signaler.

Je suis étonné aussi de voir la façon pratiquement - pour employer un mot exagéré - "cavalière" avec laquelle on met de côté les inquiétudes de l'Association des comités de parents de la région 03. Il est vrai qu'ils nous ont remis un document très court mais qui pose des questions fondamentales et qui se rapporte à des questions précises sur les décrets et sur la proposition de règlement du 10 février. Étant donné que le président, M. Pontbriand, nous dit qu'il connaissait ce mémoire, j'aurais aimé qu'il nous dise si sa fédération ou lui-même partage de quelque façon que ce soit une certaine inquiétude quant à la disparition des ratios qui présidaient à l'allocation des effectifs enseignants aux commissions scolaires. Je lis le mémoire de l'Association des comités de parents de la région 03: "En effet, le décret prévoit que le nombre d'enseignants sera déterminé à partir des normes de constitution des groupes, à savoir les maxima et les moyennes, ainsi que de la nouvelle tâche des enseignants. Ce mode d'allocation des ressources ne tient compte

ni du vécu des commissions scolaires ni des services dont elles se sont dotées depuis plusieurs années; personnes ressources, orthopédagogues, psychoéducateurs." "Loin d'être farfelue, cette hypothèse -l'hypothèse à laquelle on réfère que ces services seraient assujettis aux décisions administratives de nature strictement budgétaire la plupart du temps - nous semble des plus plausibles dans le contexte des restrictions budgétaires actuel." Ce sont là des inquiétudes qui nous sont transmises par des comités de parents de la région de Québec, région qui englobe mon comté. Je n'ai pas entendu la Fédération des commissions scolaires exprimer une inquiétude sur les effets possiblement néfastes des décrets. Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes! C'est à partir de là qu'une trop grande similitude entre la Fédération des comités de parents du Québec et le discours ministériel nous amène peut-être à mettre tout cela en sourdine.

Je pense que force nous est de constater, ici à cette table, en commission parlementaire, qu'au cours des quatre jours -nous sommes en train de terminer la quatrième journée - il y a eu une disproportion considérable entre le point de vue des syndiqués, des enseignants et le point de vue de l'autre partie. Le député d'Argenteuil signalait que nos relations de travail sont basées sur une bipolarisation. Nous en sommes - je ne sais pas - peut-être à la 50e ou à la 60e heure de session et je serais curieux, à partir des sous-ministres qui ont comparu devant nous ainsi que tous les organismes, de faire le total d'un pôle, soit le pôle patronal vis-à-vis du pôle syndical. Mon idée n'est pas de dire que la partie syndicale a raison ou a tort. Je ne prends pas position mais je signale l'espèce de disparité entre la possibilité qu'une partie, qu'un pôle... (16 h 15)

Dans une discussion comme celle-là, il y a deux pôles. Un pôle, qui est le pôle patronal, a eu l'occasion par différents organismes de faire valoir tous les aspects à partir des comparaisons avec l'Ontario, à partir des restrictions budgétaires, à partir de la situation économique, à partir des exigences pédagogiques, tout cela sous l'éclairage, sous les "spotlights" la plupart du temps patronal. Je ne peux que déplorer, M. le Président, qu'un organisme qui, normalement - c'était l'espoir que j'avais au début - aurait dû se situer entre les deux, qui aurait dû dire: nous pensons que du côté syndical les choses sont vues de telle façon, il y a telle chose qui n'est pas, à notre avis, acceptable et de l'autre côté, le discours gouvernemental, le discours ministériel est aussi déficient, a aussi des lacunes... C'est un rôle que j'aurais aimé... qui aurait pu établir un équilibre qui, force m'est de constater, a été rompu; j'aurais aimé que ce rôle-là soit joué par la fédération des comités de parents. Cela n'a pas été, c'est un fait.

Je vois que le président aimerait peut-être que je pose des questions, sauf que les questions que j'aurais vont amener des réponses que je connais dans la plupart des cas déjà. Dans les circonstances, je ne peux que dire: peut-être que la Fédération des comités de parents aurait contribué d'une façon plus positive - parce que c'est pour cela qu'on est ici - à une tentative de règlement du conflit qu'en prenant une position qui, clairement, s'identifie à celle du gouvernement - la fédération a parfaitement le droit de faire cela, ce n'est pas ce que je veux mettre en cause - mais je pense qu'en agissant de la sorte, elle a pris une position qui n'amène pas nécessairement un règlement plus rapide du problème auquel on a à faire face.

Si je réfère au mémoire de la fédération, on y retrouve un certain nombre d'affirmations. Je vais poser la question au président. On y dit par exemple en ce qui concerne la capacité des enseignants que les parents n'ont jamais compris comment il se faisait qu'un professeur de mécanique pouvait en venir à enseigner le français ou les mathématiques sans en avoir la compétence. C'est une affirmation qui m'apparaît grosse. J'aimerais que le président, M. Pontbriand, m'informe dans quelles commissions scolaires, dans les circonstances ou peut-être avec les statistiques dont il peut disposer quand ces choses-là se sont produites. Il affirme aussi dans le mémoire que les enseignants ne sont pas les mieux placés pour préparer, élaborer les syllabus de cours, les plans d'étude du matériel didactique, des instruments d'évaluation en l'absence de guide pédagogique et de manuels scolaires. J'aimerais savoir de sa part qui, à son avis, devrait jouer ce rôle-là. Qui voit-il sinon les enseignants qui ont suivi des cours de pédagogie? Est-ce que dans son idée c'est le ministère qui doit faire cela? Comment cela se passe-t-il? Qui doit le faire, s'il déclare que les enseignants ne sont pas les mieux placés pour cela? Ce sont les deux questions qui me viennent à l'idée. Je les pose en invitant le président à nous éclairer sur ces points particuliers de son mémoire, tout en restant un peu sceptique sur le fait que globalement la Fédération des comités de parents n'ait pas trouvé beaucoup à redire à la position gouvernementale en aucune circonstance.

Le Président (M. Jolivet): M.

Pontbriand.

M. Pontbriand: Je trouve un peu étonnante, M. le député de Louis-Hébert, votre affirmation quant aux orientations de

la fédération. Je trouve étonnant qu'un député de l'Opposition s'étonne que le gouvernement réponde aux attentes de la population. Quant à nous, les objectifs que le gouvernement a suivis en ce qui touche la tâche, la globalisation et ce qui touche également un certain nombre d'objectifs sont des objectifs que nous avions exprimés non pas depuis la dernière semaine, non pas depuis le dernier mois mais depuis plusieurs années et avant même que le gouvernement actuel soit au pouvoir, sous le gouvernement de M. Bourassa. Ce n'est quand même pas nouveau. En ce qui concerne les orientations que la fédération et les comités de parents ont prises, elles ont toujours été les mêmes depuis que nous existons. Nous en parlons dans le mémoire, nous avons la même orientation depuis 1972.

Étonnant également, quant à moi, de voir qu'on ait des informations un peu erronées en ce qui touche le fonctionnement. J'ai mentionné tantôt que nous étions financés par le gouvernement comme les commissions scolaires le sont. Les commissions scolaires ne font pas l'objet de règles budgétaires précises de la part du gouvernement. Ce sont les commissions scolaires réunies en assemblée au sein de leur fédération, qui est un organisme reconnu par une loi privée et non pas par la Loi sur l'instruction publique, qui déterminent le per capita élève qu'elles devront payer à leur fédération, comme elles ont également décidé, il n'y a pas si longtemps, de payer une cotisation spéciale pour certaines fins. Les commissions scolaires sont entièrement autonomes, comme elles sont libres d'adhérer à leur fédération et de payer une cotisation à leur fédération.

À ma connaissance, les commissions scolaires sont subventionnées à près de 97% par le gouvernement et ce sont les mêmes sommes qui servent au fonctionnement de leur fédération. Quant à nous, elles viennent du même gouvernement, ce sont les mêmes contribuables qui défraient les subventions que nous recevons, même si elles n'ont pas fait l'objet de questions statutaires, pas plus que les cotisations que les commissions scolaires paient à leur fédération.

Quant à la loi 111, nous n'avons pas à porter de jugement, mais je vous ferai remarquer que, dans notre mémoire, nous avons quand même mentionné que c'était une loi très dure. Vous pouvez retrouver à la page 3 ce qui touche cela. J'ai dit tantôt que nous sommes là pour représenter les intérêts des parents, nous ne sommes pas un parti politique. Nous ne sommes pas intéressés à faire le départage entre l'Opposition, le gouvernement ou la CEQ. Pour nous, il était important de vous indiquer les attentes des parents, attentes qui ont été validées par des assemblées générales et des congrès passés.

Ce que nous vous mentionnons aujourd'hui a fait l'objet de résolutions. Chacune de nos régions est quand même autonome, a droit à sa dissidence et a droit de faire entendre ce qu'elle a à dire. Si elle a des inquiétudes, il est parfaitement normal qu'elle puisse les exprimer à cette commission, ce qu'elle a fait, mais ce n'est pas pour nous une obligation d'endosser ou de porter un jugement sur tout ce que nos comités de parents peuvent penser et écrire. Nous avons eu des consultations auparavant pour déterminer les orientations à prendre et c'est de ces orientations que nous vous avons fait part.

Quant à la question de la capacité, je n'ai pas de chiffres, je n'ai pas d'exemples précis. Cependant, dans les conventions collectives précédentes où il n'était question que d'ancienneté, vous pourriez retrouver, je pense, dans toutes les commissions scolaires, des situations où cela s'est produit.

Quant au soutien dont nous parlons dans notre mémoire, nous disons que les enseignants ne sont peut-être pas les gens les mieux préparés pour élaborer des programmes, des plans de cours, du matériel didactique et que cela pourrait être fait par d'autres intervenants. La situation nous est arrivée, au cours des années; la politique était que le ministère de l'Éducation préparait des plans-cadres, des programmes-cadres. Chacune des commissions scolaires devait préparer, à l'intérieur de cela, ses programmes institutionnels et chaque école devait également préparer ses plans de cours. Ce sont les enseignants qui devaient, finalement, élaborer les programmes, le matériel didactique, les outils et les instruments d'évaluation. Nous pensons qu'il serait peut-être important que d'autres personnes puissent jouer ce rôle, de faire en sorte que l'enseignant puisse jouer réellement son rôle d'éducation, d'avoir une relation directe avec l'étudiant et qu'il puisse bénéficier d'un soutien adéquat.

Un exemple que j'aimerais vous donner et qui n'est pas nouveau: La commission d'étude, qui avait fait, entre 1972 et 1975, dans le cadre d'un décret, une étude sur les enseignants, avait constaté que dans une école, aux États-Unis, il y avait possibilité pour les enseignants d'administrer tous les jours aux étudiants des tests diagnostics, tests qui étaient remis le soir à l'informatique, traités, et le lendemain l'enseignant avait le résultat de ces tests. Il n'était pas obligé de faire la correction. Elle était faite le soir ou la nuit par des services adéquats. Est-ce qu'on ne pourrait pas regarder, surtout avec l'implantation de l'informatique dans toutes nos écoles, la possibilité d'utiliser l'informatique pour soulager l'enseignant d'un certain nombre de tâches?

Actuellement, on est en train

d'introduire dans nos écoles toute cette dimension de l'informatique. On introduit les appareils, on demande aux enseignants d'enseigner cela. Est-ce qu'ils ont le soutien? Est-ce qu'ils devront préparer les programmes d'enseignement, les plans d'étude? Est-ce qu'ils devront également préparer tous les programmes d'informatique dont ils auront besoin pour faire leur cours? Je pense qu'il y a un certain nombre de choses, un certain nombre d'outils, d'instruments qui pourraient être fabriqués soit par la commission scolaire, par l'école, par le ministère, je ne sais pas, mais qui pourraient le soulager. On se plaint qu'on a beaucoup de personnel en disponibilité. Est-ce qu'on ne pourrait pas utiliser ces personnes pour assurer ce soutien aux enseignants, faire en sorte qu'ils jouent un rôle, qu'ils aient une présence efficace durant toute la journée auprès de leurs étudiants? C'est ce que nous visons par ces recommandations.

Le Président (M. Jolivet): Avant d'accorder la parole aux deux dernières personnes, vu qu'on a une heure et quart déjà de passée, je tiens à dire qu'on va prolonger d'environ une quinzaine de minutes. Mme la députée de L'Acadie et M. le député de Matapédia. Mme la députée.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je me passe de commentaires généraux parce que là, je trouve qu'il y en a eu assez de faits. Je vais passer à des questions précises. Vous êtes des parents, quelle est votre réaction, comme parents, à l'allongement du temps d'enseignement pour les élèves du premier cycle de l'élémentaire qui désormais auront le même temps d'enseignement que les élèves du secondaire V? Je prends les deux extrêmes, alors, mettez même le secondaire III, si vous voulez, d'enfants beaucoup plus vieux qu'ils ne le sont eux-mêmes. Est-ce que vous avez réfléchi à cela?

Le Président (M. Jolivet): M.

Pontbriand.

M. Pontbriand: En principe, les réactions que nous avons, les parents sont favorables à ce que l'enfant puisse aller à l'école, et n'ont pas d'inconvénient, ne voient pas qu'une vingtaine de minutes de plus à l'école par jour va causer un préjudice aux enfants. Au contraire, je pense qu'ils peuvent recevoir durant ce temps, un enseignement, un apprentissage qui peut être des plus intéressants.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous avez discuté de cette question, non pas avec la CEQ, mais avec des enseignants qui enseignent au premier cycle de l'élémentaire?

M. Pontbriand: Concernant la présence des enfants?

Mme Lavoie-Roux: La présence, c'est une chose, mais du point de vue de l'allongement du temps d'enseignement à des enfants de six et sept ans, c'est-à-dire de les mettre sur le même pied que des enfants de quatorze, quinze et seize ans?

M. Pontbriand: Nous avions, en vue de la commission parlementaire qui devait avoir lieu sur le sujet, consulté nos comités d'écoles et dans l'ensemble, les gens nous ont répondu qu'ils étaient favorables au prolongement de la période de présence des enfants à l'école.

Mme Lavoie-Roux: L'avez-vous discuté avec les enseignants eux-mêmes parce que les enseignants, c'est quand même eux qui ont les enfants qui doivent justement leur fournir ces services?

M. Pontbriand: Moi, personnellement, non, parce que je suis dans un comité d'école secondaire, mais je vous dis que la consultation a été faite auprès de tous les comités d'école et dans les comités d'école, les gens en ont sûrement discuté parce qu'il y a des enseignants qui siègent aux comités d'école et ils en ont sûrement discuté avec les enseignants avant de faire des recommandations de cet ordre.

Mme Lavoie-Roux: Là ce serait...

M. Pontbriand: D'ailleurs, ce n'est que depuis 1976 que le temps de présence a été diminué. Auparavant, avant 1976, le temps de présence à l'école était le même que celui proposé actuellement. (16 h 30)

Mme Lavoie-Roux: On en a discuté, hier, et il y en avait moins au deuxième cycle qu'au premier cycle. Finalement, on a rapproché les deux à cause des problèmes de transport, mais je ne crois pas que les enfants aient eu, - peut-être au temps jadis, je l'ignore - autant de temps, de minutes d'enseignement à l'élémentaire, premier cycle qu'au secondaire, deuxième cycle.

M. Pontbriand: Ce que je sais, c'est qu'avant 1976 c'était la même chose que ce qui est proposé actuellement. Il y a peut-être une différence entre les écoles, mais...

Mme Lavoie-Roux: Avant 1976, il y avait 23 heures et non 25 heures. Bon! De toute façon, on n'est pas pour perdre du temps. C'était seulement pour avoir votre réaction. Vous n'y voyez pas d'inconvénient?

M. Pontbriand: Non.

Mme Lavoie-Roux: La deuxième question a trait à la page... - je m'excuse -13 de votre rapport, au premier paragraphe. Vous parlez du droit au travail, du droit à l'arrêt de travail, mais vous dites que les enfants ont aussi le droit à l'enseignement, à l'apprentissage, à la connaissance, à l'accès à la science et à l'information. Je ne saurais être plus d'accord avec vous, mais cela suscite une question dans mon esprit. Laissons de côté pour le moment ce que les gens appellent les instances syndicales et que les gens sont peut-être prêts à discréditer trop rapidement, comme on a vu, entre autres, le ministre de l'Éducation le faire l'autre soir, mais il reste une chose, vous êtes ceux qui côtoyez, normalement, le plus les enseignants, mis à part vos enfants, évidemment. Pouvez-vous nous dire si, d'après l'expérience que vous avez eue avec les enseignants de vos enfants, les enseignants remplissent leur tâche avec compétence et dévouement? La raison pour laquelle je vous pose cette question, c'est parce qu'à l'heure actuelle, les enseignants en prennent un peu pour leur rhume et, demain, vous devrez - et d'ailleurs aujourd'hui même parce que vos enfants sont en classe - travailler quotidiennement avec les enseignants. Quel est le jugement que vous porteriez sur la qualité de l'enseignement que les enseignants prodiguent à vos enfants?

M. Pontbriand: Vous voulez dire normalement ou actuellement?

Mme Lavoie-Roux: Je vous demande...

M. Pontbriand: Dans l'ensemble, les enseignants donnent quand même un bon service. Il y a de bons enseignants et, dans la majorité des cas, les enseignants remplissent leurs fonctions et accomplissent leur travail de façon adéquate. C'est évident.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que...

M. Pontbriand: Comme dans toutes les couches de la société, on retrouve du bon et du mauvais.

Mme Lavoie-Roux: Oui. Réalisez-vous qu'aujourd'hui la tâche de l'enseignant est une tâche - mettons de côté les minutes et les heures - qui est devenue de plus en plus difficile, compte tenu de l'évolution sociale, de l'évolution familiale, si je puis dire, du fait, par exemple, que vous avez tout près de 40% - et là, le ministère de l'Éducation pourrait rectifier mes données, mais c'est à peu près de cet ordre - d'enfants qui viennent de familles monoparentales, qui sont exposés à plus de stress et que la tâche de l'enseignant devient une tâche de plus en plus difficile? Et je mets de côté les minutes et les demi-heures. Ce n'est pas ce dont je parle.

M. Pontbriand: Je pense qu'elle est difficile, mais non pas à cause de cet aspect uniquement. Je vais reprendre ce que j'ai déjà dit devant le Conseil supérieur de l'éducation et qui a soulevé l'ire de bon nombre de personnes. Je vais quand même vous le répéter. Il y a une difficulté qui est inhérente à la profession d'enseignant. Un enseignant va entrer à l'école à l'âge de cinq ans et il n'en ressort pas. Il va à l'école primaire, secondaire et à l'université et, quand il a fini son cours, il retourne à l'école. Quel apprentissage a-t-il fait du milieu extérieur à l'école? Il n'a appris qu'à fonctionner en fonction d'apprentissages, en fonction quasi de dogmes et il continue à évoluer dans ce même d'esprit. Ce n'est pas un jugement négatif vis-à-vis des enseignants. C'est tout simplement, quand on regarde la situation, un état de fait. Je pense que la difficulté que les enseignants peuvent avoir, c'est de concevoir justement, un peu comme vous le disiez tantôt, le fait qu'il puisse y avoir des situations de parents qui vont être seuls, mais également tout ce qui entoure la vie de l'école, la vie des gens qui vivent dans le quartier, des gens qui vivent dans le commerce et dans l'industrie, qui ont une vie complètement différente et complètement inconnue des gens de l'enseignement. C'est cette difficulté qui, souvent, fait en sorte qu'on a comme parents une réticence à être acceptés parce qu'on vit dans deux mondes différents. C'est souvent cette barrière qui est assez infranchissable. C'est pour cela que pour nous, il est important qu'il puisse y avoir dans nos écoles des projets éducatifs afin que l'école puisse s'ouvrir davantage sur son milieu, éliminer cette barrière entre les dogmes et la vie de pratique qu'on retrouve dans nos écoles. Pour cela, il faut que les gens puissent arriver à se parler. Il est important pour nous que le projet éducatif réunisse les principaux intervenants du milieu pour faire en sorte qu'on puisse arriver à être sur la même longueur d'onde sur le type de société qu'on veut. Les enseignants sont idéalistes de par leur formation, mais entre l'idéal, qui est très beau - et il faut en avoir si on veut évoluer - et la vie de tous les jours, il y a quand même une marge. Il est important que les enseignants puissent comprendre les difficultés que les enfants peuvent vivre quotidiennement dans leur milieu. Cette différence crée cette barrière, mais je pense qu'on peut y parvenir et qu'avec de la bonne volonté - nous sommes peut-être idéalistes aussi d'y croire - on peut réussir à bâtir un projet éducatif qui fera en sorte d'asseoir tout le monde à une même table pour pouvoir s'entendre sur les valeurs qu'on veut véhiculer dans l'école et le type de société, finalement, qu'on veut retrouver

au Québec.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'ai juste un dernier commentaire. Je suis un peu surprise que M. Pontbriand fasse ce cloisonnement entre l'enseignant qui enseigne à des enfants et l'enseignant qui est parent qui, lui aussi, est confronté aux mêmes difficultés tant dans sa vie personnelle, dans sa vie familiale que dans sa vie dans la communauté. Vous semblez considérer les enseignants comme un monde à part qui aurait perdu contact avec les problèmes de notre société. Cela m'étonne un peu. En fait, la question que je vous posais était: Est-ce que les difficultés de l'enseignant aujourd'hui ne sont pas accrues en fonction de toutes les difficultés sociales, économiques, d'ordre familial, auxquelles la société en général est exposée? Merci.

M. Pontbriand: C'est évident. Je pense que les difficultés qu'on vit actuellement tant sur le plan d'une négociation des conventions collectives découlent de cette orientation ou de ce cloisonnement entre l'école et la société.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Matapédia.

M. Marquis: M. le Président, je voudrais demander à M. Pontbriand quelques précisions en reprenant les interventions de certains de mes collègues de l'Opposition. D'abord, le député d'Argenteuil a eu des doutes sur votre représentativité comme parents. Est-ce que je me trompe en disant que vous représentez les parents ordinaires, c'est-à-dire pas des parents qui sont des administrateurs scolaires, qui sont des commissaires d'école ou qui sont des députés? Il est vrai que nous sommes tous parents, même il y a de ces parents qui sont ministres ou tout cela; là, il peut y avoir plus de dangers de conflit d'intérêts. Est-ce que vous avez la prétention de représenter en très grande majorité l'ensemble des parents autres que ceux qui sont touchés par le système d'éducation? C'est ma première question.

Deuxièmement, à ma connaissance, vous n'avez pas répondu à une observation du député de Louis-Hébert qui mettait en parallèle les gestes de certains enseignants de l'Alliance ou d'ailleurs au Québec qui se servent des périodes de cours pour donner aux enfants ce que vous appelez des vues des syndicats sur la situation des négociations. M. le député de Louis-Hébert a mis cela en parallèle avec le journal qui a provoqué beaucoup de remue-ménage vendredi soir dernier ici et qui était adressé aux parents et aux enseignants, mais surtout aux enseignants, et non pas directement aux enfants dans les écoles. Je dis bien que ce sont certains professeurs, c'est sans doute loin de la majorité, qui se sont servis des cours pour passer leur message dans les circonstances. C'est ma deuxième observation que j'aimerais que vous précisiez.

Troisièmement, vous avez dit à la commission que vous êtes un président de comité d'école secondaire. Or, dans le document qui a été déposé à la commission venant du comité d'école ou de l'Association des comités d'école de la région 03, on parle de la tâche au secondaire. Est-ce que d'après l'expérience que vous pouvez avoir d'une école secondaire, quand on propose aux enseignants d'augmenter la tâche de 20 heures à 21 heures, pour la première année du décret ou de la convention, à 22 heures par la suite et à 23 heures, pour la dernière année, est-ce que cette augmentation est vraiment une charge surhumaine pour un enseignant? Si ce n'est pas une tâche surhumaine, est-ce une augmentation de tâche qui peut être acceptée et assumée par des enseignants sans mettre en danger la qualité de l'enseignement et sans non plus mettre en danger les contacts des enseignants avec leurs étudiants? J'ai fait à peu près tout ce qu'il était possible de faire dans une commission scolaire, d'enseignant à l'élémentaire et au secondaire jusqu'à cadre scolaire, principal adjoint d'école et tout le reste: professionnel, coordonnateur de l'enseignement secondaire. Comme je suis député, ma parole peut être mise en doute; alors j'aimerais que, vu que vous êtes dans le milieu - cela fait six ans que je suis député - vous nous disiez: Est-ce que, pour un parent président d'un comité d'école secondaire, vous jugez que c'est inhumain de demander à des enseignants de donner un peu plus de temps à l'enseignement afin de régler certains problèmes d'ordre financier? À ce moment-là, cela demande que tous et chacun, y compris les enseignants, fassent leur part. Trouvez-vous que c'est inhumain?

Le Président (M. Jolivet): M.

Pontbriand.

M. Pontbriand: En ce qui concerne la représentation de la fédération, nous regroupons, comme cela a été mentionné plus tôt, les comités de parents qui sont formés des comités d'école au niveau de chacune des écoles et qui sont formés de parents ordinaires qui peuvent également provenir du monde de l'enseignement, parce qu'il y a quand même des enseignants aux comités d'école, aux comités de parents. On en retrouve même au niveau de la fédération qui regroupe des gens de toutes les couches de la société et de tous les métiers, professions et autres et également de tous les partis politiques.

Quant aux publications dont on a fait état, je peux vous dire que je ne les ai pas

vues. J'ai su, hier, qu'il s'était passé un événement. Cependant, nous avons siégé à la fédération toute la fin de semaine en conseil exécutif. Nous n'en avons pas pris connaissance. À ma connaissance, ce n'est pas rendu dans les écoles. Si elle est envoyée - je ne sais pas quelle est la distribution qui est faite de ce document -aux enfants, nous allons réagir, si elle est envoyée aux parents, je pense que les parents sont assez adultes pour être capables de juger du bien-fondé d'une publication gouvernementale.

Quant à l'augmentation de la tâche, je vous ai dit, dans un premier temps, que c'est quand même un sujet technique dont nous ne voulions pas traiter. Personnellement, je pense que c'est un réaménagement de la fonction d'enseignant qui peut amener des modifications quant au rôle que l'enseignant devra jouer au secondaire. Est-ce qu'une heure de plus de travail par semaine va amener une surcharge énorme? Je pense qu'on pourra l'essayer. Si c'est trop dur, on pourra y revenir lors des prochaines conventions collectives. De toute façon, en premier lieu, cela découle d'une orientation gouvernementale quant à des choix financiers. Sur ce, comme j'ai dit tantôt, le gouvernement étant là, c'est par les résultats que nous jugerons, lorsque arriveront les élections. Si les choix gouvernementaux n'ont pas été adéquats, j'ai l'impression que la population jugera en conséquence et prendra ses décisions à ce moment. Je ne pense pas - je vous le dis personnellement - que cela amène une surcharge si énorme. Pour moi, c'est davantage dans le sens d'une réorganisation de la tâche telle qu'elle est formulée actuellement.

M. Marquis: Une toute dernière question. Au sujet des grilles horaires, êtes-vous au courant - on parle évidemment de 20 périodes de 50 minutes ou de 21, 22 et 23 périodes de 50 minutes - qu'il y a un certain nombre d'écoles secondaires qui ont des périodes de plus de 50 minutes - cela peut aller jusqu'à 55, 60 minutes, et je connais même des cas de 75 minutes - de sorte que cela a comme conséquence de permettre aux enseignants de rencontrer moins d'élèves qu'avec des périodes de 50 minutes et même de 45 minutes - cela a déjà existé. Dans l'école où vous êtes, est-ce qu'ils sont à 50 minutes ou si cela varie? (16 h 45)

M. Pontbriand: Chez nous, ce sont des 50 minutes. Effectivement, on retrouve des périodes bien différentes selon les commissions scolaires. On a déjà eu chez nous des périodes de 35 minutes. Quand on voulait les imposer, on les justifiait pleinement. Si on veut imposer 75 minutes, on va trouver le moyen de les justifier. C'est à l'organisation locale, c'est à chaque comité de parents de s'impliquer dans sa commission scolaire et de faire en sorte que cela réponde le mieux possible à une meilleure qualité de l'enseignement. Je ne pense pas que ce soit nécessairement le nombre de minutes d'une période qui va faire en sorte que cela ait un effet sur la qualité de l'enseignement. C'est davantage l'aménagement de ce temps qui peut être en cause.

Le Président (M. Jolivet): Au nom des membres de la commission, nous remercions M. Pontbriand et ses collègues de leur mémoire.

Documentation distribuée par le ministre de l'Éducation

Pendant que j'invite le Conseil des collèges, représenté par Mme Jeanne Blackburn, à venir s'installer et à nous présenter les personnes qui l'accompagne, je dois vous faire part d'une lettre que j'ai reçue le 7 mars de la part du ministre de l'Éducation. Les membres de la commission recevront l'ensemble de la documentation et seront heureux d'apprendre le texte suivant: "Depuis le début des travaux de la commission parlementaire, plusieurs affirmations concernant les ressources financières et les effectifs ont été faites. Il me paraît nécessaire de rétablir certains faits et de déposer quelques documents concernant l'allocation des ressources aux commissions scolaires et l'impact des conditions de travail applicables à compter de l'année 1983-1984. "Je vous prie d'agréer, M. le Président, l'expression de mes sentiments les meilleurs. Le ministre de l'Éducation."

Vous avez une série de documents qui vous seront distribués. Ils concernent les règles budgétaires pour l'année 1983-1984 et les dispositions constituant des conventions collectives. M. le ministre.

M. Laurin: Dans les documents additionnels, M. le Président, il y a une lettre que nous adressons à M. Maurice Brunet, directeur général de la CECM à Montréal, sur le document qu'avait déposé ici M. Rodrigue Dubé, le président de l'Alliance des professeurs, et qui portait sur une simulation possible de la répartition des effectifs dans la région est de l'île de Montréal. Il y a aussi des éléments de réponse au mémoire sur l'impact des décrets présenté par un collectif de l'École polyvalente de Charlesbourg, qui a été déposé ici également à cette commission; des commentaires sur ce qui nous a été dit d'une pareille simulation effectuée à la Commission scolaire Jean-Talon; des commentaires sur un document dont on a fait état ici, sur la répartition des effectifs à la Polyvalente de

Charlesbourg, à l'école Jeanne-Mance à Montréal, ainsi que sur les huit écoles de la Commission scolaire régionale de Tilly.

Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, est-ce que vous me permettez une question au ministre?

Le Président (M. Jolivet): Oui, Mme la députée.

Mme Lavoie-Roux: Apparemment, il y a quelque chose sur les règles budgétaires. Est-ce que ce sont les règles budgétaires qui sont maintenant les règles budgétaires officielles ou si ce sont celles qui sont encore en consultation?

M. Laurin: Oui, elles sont encore en consultation.

Mme Lavoie-Roux: Deuxième question. Quand les simulations ont été faites, on a cru comprendre qu'elles ont été faites à partir des décrets. Les rectifications que vous apportez sont-elles faites à partir des simulations des décrets ou à partir du réaménagement du 11 février?

M. Laurin: L'analyse que nous faisons tient compte des deux situations.

Mme Lavoie-Roux: Des deux situations, d'accord.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Mme Blackburn, s'il vous plaît, veuillez nous présenter vos collègues.

Auditions (suite) Conseil des collèges

Mme Blackburn (Jeanne): M. le Président, à ma gauche, M. Lucien Lelièvre, secrétaire du conseil. Tout de suite à côté de moi, M. Claude Fortier, président de la commission de l'évaluation au Conseil des collèges et M. Claude Simard, président de la commission de l'enseignement professionnel du Conseil des collèges.

Le Président (M. Jolivet): Allez-y.

Mme Blackburn: M. le Président, mesdames, messieurs, c'est avec plaisir que le Conseil des collèges a accepté l'invitation qui nous a été faite par le leader parlementaire de nous présenter devant cette commission. Le conseil se réjouit de la tenue de cette commission parlementaire qui, en permettant aux parties de présenter publiquement leurs propositions favorisant ainsi la recherche de solutions à la présente crise, permettra également au public québécois de se faire une opinion plus juste de l'enjeu des présents débats.

Le conseil aurait aimé vous présenter ici des propositions plus formelles sur les questions qui sont soumises à l'examen de cette commission, d'abord, convoquée mardi pour mercredi, et vous connaissez la suite.

Le temps qui nous fut alors imparti ne nous permettait pas de le faire. Je soumettrai donc aujourd'hui à votre attention les quelques réflexions du conseil sur ces questions et deux recommandations qui, si elles étaient suivies, pourraient favoriser le dénouement de la crise. J'espère que mon propos permettra d'éclairer quelque peu le débat et pourra contribuer à l'effort qui est fait de trouver des solutions à la crise que nous vivons en éducation.

La dégradation du climat de travail qui s'installe actuellement dans les collèges publics et qui s'amplifiera avec la menace constante d'une grève générale illégale et illimitée, et avec la loi 111 qui en est le corollaire, sera telle que ce climat sera à lui seul un facteur qui compromettra gravement la qualité de l'enseignement. Il faut donc tout mettre en oeuvre pour empêcher que se développe un tel climat.

Au-delà de la commission parlementaire actuelle qui permet au gouvernement et à la partie syndicale d'exposer et de justifier leur position respective, il doit y avoir aussitôt une reprise immédiate des discussions entre les deux parties, de façon à chercher le terrain d'entente le plus étendu qu'il est permis d'espérer dans les circonstances. Seule, en effet, une reprise des discussions peut permettre de dénouer l'impasse actuelle et créer un climat de travail propice à la qualité de l'enseignement.

Le Conseil des collèges a déjà indiqué dans une prise de position antérieure quelles conditions préalables devaient être réalisées pour que ces discussions et échanges aient une certaine chance de succès. Selon le conseil, le contexte actuel comporte certains éléments importants qui risquent particulièrement d'entraver l'efficacité des discussions. Le conseil pense en effet que le spectre que représente la double menace de la grève générale et de la loi 111 ne favorise pas un climat propice à des échanges fructueux.

Aussi, considérant qu'il est du devoir de chacune des parties en présence, tant du gouvernement que de l'instance syndicale, de tout mettre en oeuvre pour créer un climat qui favorise l'efficacité des discussions, le Conseil des collèges, réuni en assemblée le vendredi 25 février dernier, adoptait à l'unanimité une résolution invitant la Centrale de l'enseignement du Québec et la Fédération nationale des enseignants et enseignantes du Québec à renoncer immédiatement à leur mandat de grève et recommandant au gouvernement d'abroger en

même temps la loi 111. Le conseil est composé de représentants issus du monde de l'enseignement, du monde collégial. À cette réunion assistaient des professeurs, un représentant de la FTQ qui est à la table de négociation actuellement. Il représente le personnel de soutien dans les collèges.

Sur cette invitation qui était faite à la fois à la Centrale de l'enseignement et aux syndicats de même qu'au gouvernement, un télégramme a été adressé aux parties. À ce jour, nous n'avons reçu de réponse ni du gouvernement, ni des instances syndicales. Le Conseil des collèges était conscient, au moment où il adressait cette invitation - il l'est encore aujourd'hui - de l'envergure de la demande adressée tant à l'instance syndicale qu'au gouvernement, de l'envergure peut-être plus grande encore de la demande adressée au gouvernement. Mais malgré ce que peut exiger de l'une et l'autre partie une réponse positive à cette double demande - surtout, nous le répétons, de la part du gouvernement - le conseil n'hésite pas à renouveler aujourd'hui cette invitation à l'instance syndicale de renoncer à son mandat de grève et au gouvernement d'abroger sa loi 111.

Si le Conseil des collèges renouvelle aujourd'hui sa prise de position précédente, c'est que, autant il est convaincu que les discussions sont la seule issue à l'impasse actuelle, autant il est convaincu que la double menace constante d'une grève illégale illimitée et de l'application de la loi 111 engendre un climat psychologique, émotif et social qui rend a priori stériles toutes les discussions sur les conditions de travail des enseignants.

La levée de cette double menace est donc, de l'avis du Conseil des collèges, un préalable à la reprise d'échanges efficaces et un indice de la volonté réelle du gouvernement et de l'instance syndicale de chercher un terrain d'entente.

Le conseil a également indiqué une autre condition à l'utilité de ces discussions qui devraient, selon nous, reprendre au terme de cette commission, une condition qui, cette fois, n'est plus un préalable aux discussions, mais une garantie d'une information objective à l'endroit du public québécois. Cette autre condition est celle de la présence d'un observateur neutre à ces discussions, observateur qui assurerait une information quotidienne au public sur les diverses propositions amenées par l'une et l'autre partie.

Cet observateur n'aurait pas à porter personnellement un jugement sur les propositions des parties. Il n'aurait qu'à transmettre une information factuelle dont l'objectivité ne saurait être mise en cause. Il serait assisté dans ses fonctions par deux conseillers techniques qui l'aideraient à comprendre et à vulgariser des dossiers complexes et à caractère souvent technique.

Cette recommandation du conseil se fonde sur le principe du droit du public à une information objective. Nous estimons en effet qu'en raison des enjeux du présent débat, c'est son droit le plus fondamental, puisqu'il s'agit de la qualité de l'éducation, de l'intégrité de la démocratie, de la transparence de ses institutions, sans parler de son droit de regard quant à l'utilisation qui est faite d'une part importante de ses impôts.

Cette recommandation veut corriger une situation que nous avons été à même de constater, c'est-à-dire une grande confusion dans l'opinion publique. Au cours des derniers mois, j'ai eu l'occasion de rencontrer de nombreuses personnes: parents, élèves du réseau collégial, contribuables, enseignants. Ces personnes se disent perdues devant la masse d'informations souvent contradictoires qui les inondent quotidiennement. Devant l'absence d'information objective, neutre, le public a l'impression d'être leurré, non seulement lorsqu'il y a éclatement, comme c'est le cas aujourd'hui, mais également lorsqu'il y a entente entre ces mêmes parties. S'il y a affrontement, on l'informe largement; s'il y a entente, on le tient dans l'ignorance, ce qui l'amène à croire que cette entente s'est faite à ses dépens et qu'il aura à en payer la note.

La confusion, disais-je, qui est celle de la plupart des citoyens du Québec sur la question qui nous préoccupe aujourd'hui n'est pas nouvelle en pareille circonstance. Le rapport de la commission d'étude et de consultation sur la révision du régime de négociations, dans les secteurs public et parapublic, plus connu sous le nom de rapport Martin Bouchard, déposé en février 1978, faisait sensiblement les mêmes constatations. Il proposait différentes mesures susceptibles d'assurer une information plus adéquate du public, entre autres, la publication, par le juge en chef du Tribunal du travail, du dossier complet des offres et des demandes des parties.

On me dira qu'en la circonstance, il n'y a pas eu véritablement négociations, donc pas vraiment de choses à déposer, mais ce dont on ne peut douter, c'est qu'il y a confusion dans l'opinion publique. Aussi, le conseil réitère-t-il sa recommandation de nommer un observateur à ces débats. C'est par un tel intermédiaire, croyons-nous, que le public québécois pourra se faire une opinion juste sur les intérêts en cause qui touchent, d'une façon ou d'une autre, ses intérêts propres.

On peut penser qu'un effet non négligeable de cette mesure, c'est-à-dire la présence d'un observateur qui, quotidiennement, informerait la population sur les propositions des parties, qui les oblige donc à rendre leurs propositions publiques,

permettrait au public de juger, puisque c'est ce à quoi on l'invite, et obligerait également les parties à faire connaître publiquement leurs propositions.

Nous avons sûrement au Québec plusieurs personnes qui auraient les qualités requises pour occuper ces fonctions d'observateur. À titre de suggestion, le conseil pense que le président de la Commission d'accès à l'information pourrait jouer ce rôle. Il est vrai que cette fonction n'est que marginalement partie du mandat de cette commission. Cependant, le conseil estime que dans l'avenir cette responsabilité pourrait être incluse dans le mandat de cette commission. Je parle de la Commission d'accès à l'information.

Les échos que nos avons reçus de cette dernière suggestion, tant du gouvernement que de l'instance syndicale, semblent favoriser la nomination d'un observateur conciliateur. Tout en admettant que cette proposition offre une voie de solution intéressante, le conseil pense que la présence de l'observateur informateur s'impose toujours.

Échanges spécifiques au niveau collégial. Avant d'aborder la question plus spécifique des conséquences sur l'enseignement collégial de la loi 105, je voudrais attirer votre attention sur le caractère particulier du réseau collégial et la nécessité de réserver une place spécifique aux porte-parole de ce réseau.

Le réseau collégial constitue un niveau d'enseignement post-obligatoire et, en raison de ses caractéristiques, distinct des autres niveaux primaire et secondaire. La nature spécifique des programmes d'enseignement du collégial, les différences juridiques entre les conseils d'administration des collèges et les commissions scolaires locales et régionales, ainsi que le caractère particulier de leurs liens réciproques avec le ministère de l'Éducation, les conditions de travail nettement différentes entre les enseignants du collégial et ceux des réseaux primaire et secondaire, voilà autant d'éléments qui caractérisent le réseau collégial, justifiant à eux seuls, à l'intérieur de la reprise générale des discussions, une place spécifique pour les porte-parole de ce même réseau. (17 heures)

La loi 105 et la situation faite aux enseignants. Je veux regrouper autour de ces trois points principaux les réflexions du Conseil des collèges sur les conditions qui seront celles des enseignants s'ils avaient à vivre avec l'ensemble des clauses de la loi 105. Ces réflexions, pensons-nous, pourraient contribuer à alimenter les discussions que, selon notre hypothèse optimiste, les parties en présence ne manqueront pas d'avoir à la suite de la présente commission parlementaire. Ces trois points sont les suivants: la charge d'enseignement, la sécurité d'emploi et les clauses normatives.

La charge d'enseignement. Le gouvernement, avec la loi 105, veut augmenter la productivité des enseignants. Différentes mesures sont prises: élargissement de la plage horaire, assouplissement des heures de disponibilité des enseignants. Nous ne croyons pas que ces premières mesures puissent entraîner des inconvénients sérieux aux conditions de travail des enseignants ou encore nuire à la qualité de l'enseignement. C'est le changement de la formule de calcul du nombre d'enseignants du réseau collégial qui constitue, et de très loin, la principale cause de cette augmentation souhaitée de la productivité.

La formule qui permettra, selon la loi 105, de calculer le nombre d'enseignants dans le réseau collégial est la suivante: le nombre d'étudiants - on en compte un peu plus de 132 000 - divisé par 15. S'ajoutent au nombre ainsi obtenu 150 enseignants à temps complet. L'ajout de ces 150 enseignants viendrait corriger certains aspects discriminatoires à l'endroit de certains collèges, généralement les plus petits, de même qu'à l'endroit de certains programmes.

S'ajouteraient également encore 150 enseignants, équivalent temps complet, qui seraient consacrés à la recherche, au perfectionnement et à l'encadrement. Le conseil se réjouit de cette dernière mesure qui répond à une demande que ce dernier faisait à l'occasion de deux avis qu'il présentait au ministre de l'Éducation, l'un portant sur la recherche scientifique dans les collèges et l'autre sur la création de centres spécialisés dans les cégeps. Le Conseil des collèges recommandait alors que les prochaines ententes de travail des personnels des collèges comportent des dispositions permettant des activités de recherche. Avec l'allocation de 150 enseignants, équivalent temps complet, affectés tant à ces travaux de recherche que d'encadrement et de perfectionnement, cela serait fait et c'est une mesure qui répond à un souhait formulé par le conseil.

La tâche d'enseignement. Revenons au sujet principal de ce point qui est celui de la productivité. Par l'application de la loi 105, la tâche de l'enseignant du réseau collégial en 1985 serait la même que celle de l'enseignant de ce réseau pour les années 1967 à 1976, c'est-à-dire une moyenne générale d'un enseignant pour quinze élèves. Cependant, on peut penser que des variations dues à l'orientation des étudiants: plus d'étudiants s'inscrivent en enseignement professionnel, environ 4%, des variations également dans le poids de certains programmes peuvent légèrement alourdir les chiffres mentionnés plus haut. Aussi, la commission de l'enseignement professionnel du Conseil des collèges s'inquiète-t-elle de la

situation qui pourrait être faite à ces enseignements et souhaite que les règles d'allocation des professeurs dans les programmes professionnels tiennent véritablement compte du caractère particulièrement exigeant de certains cours qui demandent un ratio maître-élèves plus bas.

Cela étant dit et ces réserves faites, on peut dire que la tâche des enseignants sera sensiblement la même qu'en 1976. Il n'en demeure pas moins que ces derniers verront leur tâche moyenne augmenter dans la plupart des cas de 10% à 15%. Il ne s'agit quand même pas d'une augmentation minime. Loin de là. C'est au contraire une augmentation considérable. On ne peut que regretter que le gouvernement ne puisse maintenir pour les prochaines années les charges actuelles de travail des enseignants et on comprend les réactions négatives des enseignants. On n'accepte pas de gaieté de coeur de voir se dégrader ses conditions de travail.

Cela se traduira-t-il par une dégradation équivalente de la qualité de l'enseignement? Le conseil n'est pas en mesure de l'affirmer. Toutefois, on peut penser que les enseignants de 1975-1976 donnaient un enseignement valable pour une charge d'enseignement à poids à peu près égal à celle des enseignants de 1985. Il faut ajouter que, par rapport à cette équipe qu'on avait dans les collèges en 1975-1976, l'équipe que nous avons actuellement dans nos cégeps est mieux rodée, est plus compétente et a plus d'expérience. De même, comparée aux collèges des autres provinces canadiennes et à ceux de certains États américains, il semblerait que la charge d'enseignement de l'enseignant québécois du collégial, après la loi 105, ne soit pas disproportionnée. Le conseil a pu, par une visite que sa commission de l'enseignement professionnel faisait au collège Algonquin, à Ottawa, établir certaines comparaisons qui viennent confimer celles avancées par le ministère de l'Éducation. La charge de l'enseignant en 1985 se compare donc avantageusement à celle de ses collègues de l'Ontario et devrait nous permettre de dispenser un enseignement de qualité. Mais permettez-moi ici une parenthèse. On s'est beaucoup plu ici à faire des comparaisons, particulièrement avec la province voisine, sur la tâche d'enseignement. J'ajouterai deux autres éléments de comparaison qui frappent par les écarts constatés. En Ontario, les pouvoirs sont très décentralisés et les négociations se font localement. La convention de travail des enseignants pour un collège qui emploie environ 650 enseignants tient dans une trentaine de pages." Pour poursuivre, on peut penser qu'une part importante des problèmes que le Québec connaît dans ses rapports avec les enseignants soit le fait d'une trop grande centralisation des négociations et à ses conséquences, c'est-à-dire une convention de travail qui veut régler dans ses moindres détails les activités de ces derniers.

Revenons à la charge de travail. Donc, à cette question à savoir si la loi 105, y incluant les modifications apportées par ce que l'on a appelé le cadre de règlement, permet de dispenser un enseignement de qualité, le conseil ne peut vraiment pas avoir une position plus tranchée que celle que je viens de vous communiquer. Le contexte économique actuel impose à tous de résilier plusieurs de leurs conditions de travail. C'est une augmentation de productivité de 13,5% que le gouvernement demande aux enseignants du réseau collégial québécois. C'est beaucoup, mais les données que nous avons actuellement ne nous permettent pas de conclure que cette augmentation de la charge portera atteinte à la qualité des services offerts aux étudiants. Pour le Conseil des collèges, c'est ce dernier point qui doit demeurer l'objectif premier à atteindre. Sur cette question de la tâche, le conseil entend demeurer vigilant et entend suivre avec attention les changements qui interviendront dans les charges d'enseignant à la suite de l'application de la loi 105. Si après une certaine expérimentation il s'ensuivait des conséquences négatives pour la qualité de l'enseignement, les collèges n'hésiteront pas à revenir sur ce sujet au cours de la prochaine année scolaire.

Quelques mots sur le climat actuel de travail dans les collèges. Le Conseil des collèges estime que c'est autant, sinon plus, la manière d'effectuer le changement que le changement lui-même qui est lié à la qualité de l'enseignement. En effet, bien que l'effort demandé aux enseignants soit considérable, on peut penser que la plupart d'entre eux comprennent que l'État ne puisse maintenir leurs conditions actuelles de travail. Ce qu'ils admettent moins, c'est les raisons que l'on invoque et la manière de le faire. Devant l'absence de véritables négociations, une opinion publique défavorable qui voit dans l'enseignant un individu privilégié qui tire avantage de sa situation pour en faire le minimum, plus préoccupé de protéger des acquis que soucieux de la qualité de l'enseignement, l'enseignant, par les lois 105 et 111 se sent en plus tiraillé entre ses devoirs de citoyens, ses convictions et l'appartenance à son groupe. Cet enseignant se sent bafoué et méprisé. Une enseignante me disait: L'image de l'enseignant de cégep, c'est l'image du pire. Alors que l'on s'apprête à demander plus d'efforts à nos enseignants, l'engagement et la motivation deviennent des moteurs nécessaires si l'on veut maintenir une bonne qualité d'enseignement. Malheureusement, la campagne de dévalorisation de l'enseignant que l'attitude gouvernementale n'a pas

atténuée n'est pas faite pour créer un climat qui favorise le dynamisme et l'engagement.

Le climat d'affrontement, les rapports de plus en plus tendus, voire la division entre les enseignants et enseignantes d'un même collège, entre ces derniers et les administrateurs créeront une situation qui, à elle seule, contribuera plus que l'augmentation de la tâche à la détérioration de l'enseignement si cette situation devait se poursuivre. Le conseil estime donc que si cette situation se poursuivait, la démobilisation des enseignants sera telle qu'on pourra alors craindre pour la qualité de l'enseignement. Je le répète, la dégradation du climat de travail qui s'installe dans les collèges est telle que ce climat risque de provoquer la détérioration de la qualité de l'enseignement. Aussi, tout doit-il être mis en oeuvre pour mettre fin à la présente situation et une façon de le faire est de reprendre le dialogue.

On doit également tout mettre en oeuvre pour éviter la répétition de scénarios semblables. En effet, au lendemain de la présente crise, on ne pourra, au Québec, faire l'économie d'une réflexion sur les modes de négociation des ententes de travail dans le secteur public. On devra examiner en profondeur les relations du travail entre le gouvernement et ses employés. Le conseil entend contribuer à ces réflexions et souhaite qu'elles s'amorcent dès la fin du présent conflit; cela nous semble impérieux. Nous nous devons de tout mettre en oeuvre pour éviter la répétition de scénarios semblables, de telles situations qui ne discréditent pas seulement les enseignements, mais risquent également de discréditer et les institutions et les établissements.

Une question qui préoccupe le conseil par rapport à l'augmentation de la tâche, c'est les mises en disponibilité. En augmentant la tâche pour une clientèle constante, on a nécessairement moins de postes. Des estimations varient selon qu'elles nous viennent du gouvernement ou des instances syndicales. On parle de 800 et peut-être même de 1500 enseignants mis en disponibilité. Dans un cas comme dans l'autre, c'est trop parce qu'il s'agit de carrières humaines, de carrières d'hommes et de femmes qui ont consacré temps, énergie et argent.

De plus, il ne faut pas oublier que la majorité de ces personnes possède une formation qui rend difficile, voire impossible, l'intégration dans d'autres secteurs d'activité. Bac en français, en histoire, en géographie, en mathématiques, on admettra que les possibilités d'emploi sont plutôt limitées en dehors des maisons d'enseignement. Aussi, on comprendra que cette question préoccupe profondément le conseil pour les raisons énoncées plus haut, mais surtout parce que ces mises en disponibilité toucheront davantage les jeunes qui, comme on le sait, font plus que tout autre groupe les frais de la présente crise et parce que ces jeunes professeurs plus dynamiques, plus créatifs et souvent plus scolarisés, représentent notre meilleure garantie contre l'anémie qui menace tout corps privé de sang neuf.

Comment alors, si l'on estime que l'augmentation de la tâche est acceptable, donc que l'on a moins besoin d'enseignants, permettre aux enseignants mis en disponibilité de retrouver leur place dans le réseau? Comment pouvons-nous offrir à nos jeunes diplômés universitaires quelque espoir de voir leurs connaissances mises à profit, leur permettant ainsi de conserver et de développer leurs habiletés? Comment alors conserver dans le réseau collégial le plus grand nombre d'enseignants pour un nombre plus limité de postes, car il s'agit bien de cela?

La première mesure qui suggère d'étaler sur trois ans l'augmentation de la tâche aura le double avantage de graduer l'augmentation de la charge d'enseignement la rendant ainsi, croyons-nous, moins pénible et de conserver dans le réseau plus d'enseignants pour les deux prochaines années. L'augmentation prévisible de la clientèle étudiante à l'automne 1983 - on parle de quelque 1000 étudiants de plus -aura aussi cet effet.

Par ailleurs, d'autres mesures pourraient être envisagées. On fait état ici, à cette table, de plusieurs mesures qui avaient déjà possiblement été envisagées; peut-être qu'il y aura répétition, mais je les soumets quand même à votre attention. On peut penser à l'enseignement à temps partiel sur une base volontaire. Probablement que plusieurs enseignants qui ont déjà quelque 25 ou 30 ans de travail accepteraient, sur une base volontaire, de travailler à temps partiel en s'assurant, évidemment, que leur permanence est assurée et qu'ils ont droit aux avantages sociaux. On peut penser également au congé d'une année sans solde, mais payé sur une période de cinq ans. Je pense que cela a été examiné dans le cas des secteurs primaire et secondaire. On peut penser au travail partagé d'un enseignant entre le cégep et un autre employeur ou, encore, le cégep et l'université ou l'entreprise privée.

Il y a aussi la négociation de primes de séparation; le congé de recyclage payé à 80% pour les personnes mises en disponibilité sur une base de deux ans et, au terme de ce congé, ce pourrait être la rupture du lien d'emploi; la négociation de la retraite anticipée; un programme intensif de formation en informatique. On n'aurait pas à prendre nécessairement les personnes mises en disponibilité, elles pourraient remplacer celles qui ont une charge d'enseignement. On pourrait prendre l'exemple du programme français qui prévoit une formation intensive

dispensée au ratio X de professeurs pendant une année et ces professeurs ont la responsabilité, l'année suivante, d'assurer la formation de leurs collègues. Cela pourrait se faire sur deux ans. On pourrait même penser de libérer les enseignants qui suivent des cours de perfectionnement de leurs collègues, l'équivalent de 10% de leur tâche, ce qui nous permettrait à nouveau de libérer quelques postes.

Mon intention n'était pas ici d'épuiser toutes les possibilités qui peuvent être envisagées. Ces mesures et quelques autres, que des discussions franches permettront de mettre à jour si l'imagination est présente à la table, pourront apporter des correctifs aux effets négatifs des mises en disponibilité. Avec davantage d'imagination - dans ce cas, elle devient imperative - il serait possible de faire une place, même minime, dans le corps professoral du collégial pour les jeunes diplômés universitaires. Car, je le répète, c'est la sclérose qui guette le corps professoral, à brève échéance, s'il n'est pas régulièrement régénéré par des éléments jeunes. Vous avez là une autre raison qui justifie le Conseil des collèges à demander aux deux parties de reprendre leurs discussions.

Quelques mots sur les clauses normatives: Dans une convention collective, les clauses normatives sont habituellement assez nombreuses. Les conventions collectives d'enseignants n'échappent pas à cette règle, loin de là. Il ne saurait donc être question ici pour le conseil de donner une opinion sur les nombreux changements introduits dans ces clauses par la loi 105. L'ensemble de ces changements se caractérise, cependant, par une reprise en main du droit de gérance par les administrateurs des collèges. Sur cet ensemble de changements, je désire rappeler la position générale tenue par le conseil dans un avis qu'il adressait au ministre de l'Éducation en novembre 1982 sur l'établissement de politiques d'évaluation. Le conseil disait alors: "Favorable à l'autonomie des collèges, le conseil est également favorable à l'autonomie départementale la plus large possible, mais comme dans le cas des collèges qui doivent posséder une autonomie en continuité avec le réseau et le ministère, les départements doivent également avoir une autonomie en continuité avec les autres départements et avec le collège institution. Pour que l'autonomie départementale soit telle, il faut qu'elle soit moins dépendante de l'idéologie du pouvoir et de la stratégie d'affrontement patronale-syndicale, comme cela a été le cas jusqu'ici par le biais des négociations des conventions collectives. Il faudrait qu'elle soit davantage animée et alimentée par une réflexion sur la qualité de l'enseignement et sur les exigences de cette qualité, qui passe par l'autonomie départementale." Faire passer par l'autonomie départementale l'autonomie des départements et par les exigences de la qualité de l'enseignement est la seule manière, la seule façon d'asseoir fermement et durablement l'autonomie locale des départements.

Le Conseil des collèges évalue que c'est dans cette perspective que devra dans l'avenir être discuté le partage des responsabilités à l'intérieur des collèges. Pour le conseil, cet avenir, c'est tout de suite, avec la reprise des discussions entre le gouvernement et les représentants patronaux et syndicaux du réseau collégial.

Voilà quelques-uns des points sur lesquels des discussions pourraient avoir lieu entre les parties. À eux seuls, ces points méritent une reprise des discussions. D'autres points ont été signalés par d'autres intervenants à cette tribune, qui augmenteront, si possible, la pertinence de ces discussions. Nous espérons que ces échanges se feront rapidement, de manière à mettre fin à ce climat de tension et d'affrontement qui, à lui seul, je le répète, est plus nuisible que toutes les mesures visant à accroître la productivité.

Voilà, j'ai indiqué ce qui, selon le conseil, constituait les conditions préalables à une reprise efficace des discussions. Ces conditions exigent beaucoup des deux parties, mais elles l'exigent de gens qui, tant du côté gouvernemental que du côté syndical, font partie de la génération la plus privilégiée de l'histoire récente du Québec. Des conditions qui exigent trop? Je ne le crois pas, puisqu'il s'agit de la qualité de la formation de la génération qui, dans quelques années à peine, sera à notre place. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Merci, Mme Blackburn.

M. le ministre.

M. Laurin: M. le Président, je remercie le Conseil des collèges pour la qualité de sa réflexion et aussi pour la qualité des efforts qu'il a faits pour nous suggérer, à toutes les parties en cause, des moyens pour dénouer l'impasse qui nous confronte à l'heure actuelle. Je n'ai pas besoin de vous dire -vous y avez fait allusion vous-même - toute l'attention que nous avons apportée à vos diverses suggestions. J'espère bien qu'il sera possible d'y donner une suite formelle dans les heures qui viennent. Notre but est le même que celui dont vous faites état, c'est-à-dire la reprise immédiate des discussions, tentative également pour trouver le plus large terrain d'entente possible afin d'en arriver à un règlement négocié.

Vous avez suggéré la formule d'un observateur informateur. D'autres ont suggéré la formule d'un observateur conciliateur. Je pense qu'il y a du mérite aux deux suggestions. Il nous reste évidemment à

choisir l'une ou l'autre, ou un panachage des deux. C'est ce à quoi nous nous employons actuellement. Encore une fois, j'espère bien pouvoir être en mesure d'annoncer le résultat de notre réflexion dans les heures qui viennent.

La qualité de votre réflexion s'étend aussi à l'analyse que vous avez faite et des anciennes conventions collectives, et du décret qui en tiendra lieu désormais. J'ai bien apprécié vos longues remarques, mais toutes pertinentes, sur la charge d'enseignement, l'augmentation de la tâche. Je note la distinction nécessaire que vous faites entre les conditions de travail, qui peuvent être allégées ou alourdies, et l'effet, l'impact qu'elles peuvent avoir dans l'un ou l'autre cas sur la qualité de l'enseignement. Bien sûr qu'il y a un lien, une liaison entre les deux, mais, pour la clarté de la discussion, il importe quand même de les distinguer. On ne peut sûrement pas établir une équivalence, une équation automatique entre l'un et l'autre facteur.

Vous avez noté aussi que la formule d'allocation que nous avons retenue pour le nombre de professeurs est conforme aux deux avis que vous nous aviez fait tenir, dont l'un sur la recherche et l'autre sur les centres spécialisés. C'est vous dire incidemment toute l'attention que nous portons aux avis que vous nous fournissez régulièrement. C'est vous dire aussi toute l'attention que nous y portons en raison justement de la sagesse qui les inspire.

Au terme de votre analyse, vous dites que cette augmentation de la tâche ne vous paraît pas disproportionnée, mais vous nous mettez en garde cependant sur les réflexions additionnelles que pourrait requérir l'augmentation du nombre d'options qui sont dispensées dans nos collèges, en attirant notre attention sur cette diversification d'options professionnelles et sur les exigences qu'elles peuvent poser quant à la répartition des allocations de professeurs. Je vous suis parfaitement dans cette réflexion. Je sais qu'il n'est pas toujours possible de déterminer à l'avance quelles seront les exigences qui résulteront de l'introduction d'une nouvelle discipline, d'une nouvelle option, ainsi que du contingentement de certaines autres. Mais c'est dire là aussi à quel point il est nécessaire de ne pas s'enfermer dans un carcan, dans une formule trop rigide et d'adopter des formules qui soient assez souples, assez flexibles pour nous permettre les ajustements nécessaires en cours de route. Nous partageons entièrement votre préoccupation et la recherche de formules qui assureront une meilleure réponse à nos besoins en même temps que cette mise en place de mécanismes qui nous permettront d'y arriver.

Vous avez aussi touché à loisir le problème de la sécurité d'emploi. Là aussi, je suis bien d'accord avec vos objectifs qui sont d'assurer à ce corps d'emploi très spécialisé que constituent les professeurs de collège et leur difficulté à trouver dans d'autres secteurs des tâches qui correspondent à la formation qu'ils ont reçue... Je souscris également d'emblée à votre autre objectif qui est de régénérer périodiquement le corps professoral afin de permettre l'adjonction, l'addition d'éléments plus jeunes au profit du dynamisme, justement, de l'enseignement. Je suis d'accord avec vos objectifs. Quant aux modalités, elles devront être le fruit d'une recherche commune entre les principaux intéressés, c'est-à-dire les syndicats d'enseignants et également les institutions et le ministère. Déjà l'aménagement du 10 février constitue un début de réponse à cet égard par l'étalement qu'il permet.

L'augmentation de la clientèle aidera aussi à régler une partie du problème. Pour le reste, nous avons suggéré - et vous y avez fait allusion - un certain nombre de mesures additionnelles: l'enseignement à temps partiel, le travail partagé entre deux employeurs, le cégep et un autre - pourquoi pas l'université? - les congés sabbatiques, les primes de séparation, les congés de recyclage, la retraite anticipée, la formation intensive dans de nouvelles disciplines qui vont requérir très bientôt notre attention comme, par exemple, la formation intensive dans les divers domaines reliés à l'informatique. Nous en sommes, mais justement nous voudrions pouvoir discuter de ces diverses mesures avec les intéressés eux-mêmes.

Quant aux clauses normatives, nous avons tenté, là aussi, d'apporter toute la considération nécessaire à votre avis de novembre 1982. Vos remarques d'aujourd'hui sur l'autonomie départementale sont très intéressantes à cet égard. Je pense qu'elles ajoutent à l'avis que vous nous avez fait parvenir en novembre 1982. Vous tentez de relier d'une part deux principes, l'autonomie des établissements que vous avez recommandée et l'autonomie départementale qui vous paraît un élément important du dynamisme des collèges. J'en suis également. Je pense qu'il faut trouver un moyen d'harmoniser ces deux impératifs. La difficulté commence lorsqu'on essaie de trouver des formules qui nous permettront d'y arriver. Je n'ai pas tout à fait saisi tous les éléments de votre réflexion. Je vois bien que vous tentez de préserver le principe de l'autonomie départementale mais en lien, en continuité avec l'autonomie de l'institution telle qu'elle se manifeste par son conseil d'administration. J'avoue qu'à cet égard, je suis un peu resté sur mon appétit et j'aurais fortement le goût de vous demander de continuer à réfléchir tout haut pour notre bénéfice puisque nous pourrons profiter très

bientôt de votre réflexion pour cette reprise des négociations que j'espère prochaine.

Le Président (M. Desbiens): Mme

Blackburn.

Mme Blackburn: Pour répondre, et peut-être tenter de le faire assez brièvement, à la question du ministre de l'Éducation à savoir comment on conçoit pouvoir laisser la plus grande autonomie possible au département tout en maintenant son lien avec l'institution, j'ajouterais la recommandation qui suivait à cet effet, c'est que le conseil recommandait alors au gouvernement de... Je vais revoir textuellement la recommandation: "Le Conseil des collèges recommande au ministre de l'Éducation de prendre toutes les mesures nécessaires pour que disparaissent des prochaines conventions collectives des enseignants les différentes clauses qui autorisent des activités départementales en dehors de l'autorité des collèges." On avait ité en mesure de constater qu'il était difficile de parler d'implantation d'une politique institutionnelle d'évaluation et, en même temps, de parler de tâches ou d'activités réservées exclusivement à un département. Vous voyez un peu le discours. Vous avez une institution qui est responsable des activités qui se déroulent à l'intérieur de l'établissement et vous n'avez, par rapport à certaines activités dans le département, aucune responsabilité, aucun droit de regard de l'institution elle-même. Il nous semble indispensable qu'il y ait ce lien dans les activités entre le département et l'institution. (17 h 30)

Comme on l'a dit un peu tout à l'heure, le conseil souhaiterait voir les départements davantage animés par une réflexion sur la qualité de l'enseignement, sur les exigences de cette qualité plus que des départements davantage animés trop souvent, pour ne pas dire tout le temps, par une idéologie du pouvoir, une idéologie d'affrontement patronal-syndical, un peu sur le modèle de l'entreprise privée, ce qui ne nous semble pas favoriser le développement d'une dynamique intéressante dans les départements.

Si le conseil dit cela, c'est qu'il estime que l'autonomie s'acquiert, se défend et se justifie dans la mesure où la personne, l'institution, le groupe, le département de la circonstance lui permet de s'acquitter des tâches qui lui sont confiées de façon excellente. C'est là-dessus qu'on doit fonder l'autonomie et, pour cela, la préoccupation doit être la qualité de l'enseignement.

On pense également que, par rapport à l'articulation même entre un collège et son département, il y a des activités, ne serait-ce que la coordination d'orientation, d'organisation et de planification qui nécessitent et qui imposent des liens entre l'institution et le département.

C'est un peu ce qui avait amené le conseil à dire qu'il faudrait rétablir ces liens entre le département et l'institution tout en reconnaissant que, dans la mesure du possible, et plus souvent qu'autrement, on doit tenter de rapprocher la compétence professionnelle de la compétence juridique, n'oubliant pas que les professeurs sont les spécialistes de l'éducation dans un collège.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Mme Blackburn, j'ai été très sensible à l'intérêt que vous exprimez dans votre mémoire pour la situation concrète créée dans les institutions collégiales par les événements des derniers mois.

J'ai remarqué que certains groupes sont venus discuter avec nous et nous ont tenu un langage strictement objectif comme si on pouvait vraiment, dans une enceinte comme celle-ci, se prononcer froidement sur la question de savoir si une heure de plus ou une heure de moins est bonne ou mauvaise en soi. Comme vous l'avez signalé, l'accumulation de tout ce qui s'est produit depuis quelques mois a créé un climat très mauvais dans un grand nombre de collèges. Je ne saurais dire dans tous, mais les échos que j'ai eus m'informent que, dans un grand nombre de collèges, la situation, au point de vue humain, est très difficile et, par conséquent, fort peu propice au maintien d'un enseignement de qualité.

Est-ce que cela dépend de l'augmentation de la tâche? Est-ce que cela dépend des perspectives de mise en disponibilité? Est-ce que cela dépend des changements qui seront faits dans la relation entre le département et l'institution? Je pense qu'il serait difficile de le dire de manière certaine et mathématique, mais il y a un ensemble de circonstances qui créent une situation mauvaise à laquelle tout le monde, je pense, a le devoir de remédier.

Quand j'entendais le ministre vous répondre tantôt, il me faisait penser à ces personnages de la littérature anglaise, ce personnage qui avait deux noms. Le jour il s'appelait Dr JeKyll et le soir c'était M. Hyde. Il avait, le jour, un comportement extrêmement agréable, extrêmement accueillant et, le soir, on le retrouvait sous un autre aspect. Des fois, on a cette impression-là avec le ministre de l'Éducation. Vendredi dernier, on le retrouvait comme auteur putatif d'un document pamphlétaire qui n'ajoute pas grand-chose à la création de ce climat dont vous souhaitez voir l'avènement en vue de nous conduire à un règlement.

Les propos qu'il tenait tantôt, j'y aurais

souscrit volontiers, je les aurais prononcés moi-même et ils ne me créent pas de difficulté. Je me dis que si on avait abordé toute la négociation, toutes les étapes dans cet esprit-là, je pense qu'on en serait peut-être rendu aujourd'hui à un point plus avancé.

M. Laurin: Des deux côtés.

M. Ryan: Des deux côtés. Volontiers, j'ajoute cette nuance, il n'y a pas de problèmes là-dedans.

Maintenant, dans votre mémoire, vous soulevez un certain nombre de thèmes qui m'intéressent. À propos du climat, d'abord. J'ai l'impression qu'au niveau des cégeps, c'est peut-être là que cela pourrait être le plus difficile si on ne trouve pas un règlement négocié. Le cégep est une institution qui évolue à un niveau différent, qui fait moins partie d'un grand ensemble beaucoup plus mécanisé ou uniforme. Je pense que les possibilités de difficultés, dans un certain nombre d'institutions, pourraient être très grandes. Je n'ai pas grand-chose à vous demander d'ajouter là-dessus parce que je ne voudrais pas que vous disiez la même chose que moi. Cela ne donnerait absolument rien. Je vais vous dire que je suis de votre opinion quant à la nécessité de chercher une forme de règlement qui va d'abord viser le rétablissement d'un climat propice à un travail d'éducation adulte à ce niveau qui vous intéresse.

Maintenant, une question qui devrait peut-être être soulevée tout de suite, c'est l'affaire de l'autonomie du département. Là-dessus, je vous avoue que je n'ai pas lu les notes que vous avez soumises au ministre, en novembre dernier. Je n'ai pas très bien compris. Est-ce que vous êtes favorable à ce qui est dans le décret là-dessus ou si vous avez des réserves? Vous disiez, je pense, que les dispositions des anciennes conventions collectives doivent être modifiées. Là on les a modifiées de manière assez radicale. Est-ce que vous approuvez tout cela?

Deuxièmement, toujours dans le même ordre d'idées, les renseignements que j'obtenais étaient à peu près ceci: En soi, le système de fonctionnement des départements soulève de nombreuses difficultés sur le plan des principes si on veut qu'il y ait cette relation département, institution dont vous parlez pour que l'institution forme quand même un tout avec son style, sa personnalité; il y a là un problème. On me disait que malgré les questions qui se posent au niveau des principes, dans la pratique, dans un grand nombre d'endroits, on était arrivé à une relation fort convenable de ce côté. On ajoute qu'en faisant les changements qu'on projette par le mécanisme des décrets, on risque de faire reculer toute la patente. Je voudrais savoir comment vous envisagez ce point.

Le Président (M. Jolivet): Mme

Blackburn.

Mme Blackburn: Pour répondre à la question du député d'Argenteuil, il y a différents points. Vous me demandez si les modifications qui ont été apportées au département se rapprochent de la recommandation que faisait le conseil. Je dis: Oui. Pour bien comprendre ce que cela signifie, il y avait une douzaine de points prévus, ou d'articles de la convention de travail des enseignants, entre autres l'évaluation, une réévaluation des notes de l'étudiant sur lesquels il y avait les professeurs du département, y compris le professeur concerné. Pour cette révision de notes, l'étudiant ne pouvait pas faire appel au collège qui pourtant recommande au ministère, au ministre, de décerner les DEC. Donc, pour cette matière en particulier, pour cet élément en particulier, il y. a une nécessité de rétablir des liens entre l'institution qui a une responsabilité l'institution dans laquelle s'est inscrit un étudiant - et le département.

Est-ce que vous parlez de la qualité des rapports qui étaient et du travail...

M. Ryan: Si vous voulez me permettre de vous interrompre, juste une petite minute. Sur le département, est-ce que vous allez y revenir?

Mme Blackburn: J'entendais passer la parole au président de la commission de l'évaluation qui a plus longuement réfléchi sur ces questions.

Les collèges ont été souvent perturbés par des conflits comme celui que l'on connaît actuellement. Leur courte histoire -quelque quinze ans - a été régulièrement perturbée par ce genre de conflit. Depuis la dernière convention de travail, il s'était établi, dans les collèges, un climat de travail relativement intéressant. Je profite de la tribune qui m'est offerte pour dire qu'il en va des collèges et de l'opinion qu'on en a, un peu comme celle qu'on a à l'endroit des professeurs des cégeps. C'est largement en deçà de ce qui s'y fait. Malheureusement, un petit sondage maison, une petite enquête personnelle m'a permis de constater que les personnes qui avaient généralement une opinion défavorable à l'endroit des cégeps, c'étaient trop souvent des personnes qui, d'abord, ne l'avaient pas fréquenté, ensuite, elles avaient une information, une connaissance des cégeps plus par ouï-dire. Chaque fois que je m'adressais à des gens qui avaient collaboré avec des professeurs, avec des départements ou avec des collèges, ils estimaient qu'on s'est donné là au Québec

un réseau dynamique, intéressant et qui fait un excellent travail. Je trouvais que c'était utile de rappeler cela parce que, chaque fois qu'il y a une convention ou chaque fois qu'il y a un conflit, chaque fois que les étudiants débraient, on s'apprête chaque fois à faire le procès des collèges. J'estime qu'il y avait une mise au point à faire là-dessus.

On a eu tendance aussi à faire le procès des enseignants pour les mêmes raisons. Je profite à nouveau de la tribune qui m'est offerte pour dire - et c'est l'avis également des directeurs généraux - que les enseignants des cégeps, il est vrai, pour une tâche relativement moins lourde que celle des autres provinces canadiennes, font un excellent travail, et les étudiants vous l'ont dit à cette table. Ils sont souvent et dans la plupart des cas très disponibles et on les considère comme supercompétents. Je trouvais utile de rappeler ces deux choses.

Le présent conflit risque-t-il de détériorer la qualité de l'enseignement ou la dynamique qui s'était installée depuis quelques années dans les départements? Je le répète, ma conviction est que si on ne donne pas l'occasion aux enseignants de dire oui, on peut être prêt à accepter une augmentation de la tâche, mais on n'est pas prêt à ce qu'on nous dévalorise publiquement. Je pense bien que c'est ce qu'on a besoin de faire, c'est-à-dire rétablir des contacts avec les enseignants, avec les collèges qui leur permettent de penser qu'on les considère à leur juste valeur. On doit dire aussi que les collèges ont fini par développer une résistance telle qu'ils se remettent chaque fois sur leurs pieds, mais il ne faudrait pas trop en abuser.

Par rapport aux départements et les activités...

M. Ryan: Si vous voulez me permettre seulement une petite interruption, j'ai un voisin ici qui est malcommode, parce qu'il me donne seulement 20 minutes pour vous interroger et, si vous prenez 20 minutes pour la première partie de la question - j'en aurais trois ou quatre autres - je vais être obligé de faire des sacrifices énormes.

Mme Blackburn: Je ferais un bon député.

M. Ryan: Cela ne me fait rien, mais je livrerai mes questions à la presse.

Mme Blackburn: Bien, M. le Président. Sur le département, j'allais précisément passer la parole à M. Fortier qui est président de la commission de l'évaluation.

M. Ryan: Oui.

Le Président (M. Jolivet): M. Fortier.

M. Fortier (Claude): L'angle sous lequel la commission de l'évaluation a été amenée en contact avec cette question du partage de l'autonomie des départements et de l'autonomie de l'institution, c'est l'angle de la responsabilité ou, si on veut, de l'exigence faite aux collèges de se donner des politiques institutionnelles d'évaluation. Ce qu'on a pu constater - et je tiens à préciser, cependant, qu'on n'a pas été en contact personnel avec l'ensemble des établissements, mais avec une quarantaine et une trentaine d'établissements publics - c'est que les mécanismes de jonction qui permettraient d'assurer un lien vital entre la vie des unités départementales, des unités professionnelles que sont les départements et l'institution avec sa responsabilité, sont mal ajustés actuellement, de sorte que, lorsqu'on parle de la responsabilité de l'institution face aux usagers, face aux contribuables et face au gouvernement et qu'on souhaite que cette responsabilité soit assumée par le biais de politiques institutionnelles, c'est là qu'on rencontre la difficulté qu'on a soulevée. Il nous paraît que parler de politiques institutionnelles, cela permet, si on a une acception positive du terme "politique", de trouver justement un lieu d'harmonisation entre ces responsabilités, parce qu'il nous semble que, dans une politique, on devrait trouver comme un des facteurs ou des éléments importants en commun justement le partage des responsabilités entre l'unité professionnelle et l'institution. Si on parle de partage des responsabilités à l'intérieur d'un établissement, on pense que c'est par le biais d'une politique qui doit être préparée, dont les éléments doivent être préparés par l'entente entre les départements, d'une part, et la direction pédagogique, de l'autre.

M. Ryan: Si je comprends bien, vous êtes favorable aux changements qui sont incorporés dans le décret.

M. Fortier (Claude): Sur le premier point, la révision des notes, il nous semble qu'il doit y avoir un lien institutionnel entre la responsabilité du département et l'institution sur ce plan. Sur le deuxième, la question du plan de travail et du rapport d'activité, je crois savoir que dans la convention, c'était confié jusqu'à présent à l'assemblée départementale, dans la liste des articles qui n'était pas dite sous l'autorité du collège.

M. Ryan: Et sur le rôle et le statut du coordonnateur de département, il y a des changements très importants, est-ce que vous favorisez tout cela?

M. Fortier (Claude): Si je parle au nom de la commission, à travers les réflexions de la commission, il nous semble que c'est un

moyen efficace pour assurer ce lien entre la vie départementale et la vie de l'institution, mais par le biais d'une politique qui soit le fait de règles du jeu établies avec l'ensemble de la communauté, comme cela a pu se faire à certains endroits.

M. Ryan: Vous ne trouvez pas que cela aurait peut-être été meilleur si on avait essayé d'en obtenir un peu moins par le biais de la négociation plutôt que de chercher à tout l'imposer par le biais d'un décret? Je pense au climat dont parlait Mme Blackburn. On peut bien s'apitoyer sur un climat, mais si on approuve les moyens qui ont conduit à la création de ce climat, je ne sais pas si on contribue autant à l'amélioration des choses.

M. Fortier (Claude): Ce que je veux dire, c'est que dans certains établissements, on a réussi, mais en y mettant le temps, à se donner soit un projet, soit un début de politique; dans d'autres endroits, une véritable politique d'évaluation, tout au moins en ce qui touche l'évaluation des apprentissages. Je pense qu'il y a des conditions de fonctionnement à l'interne qui sont très importantes à cet égard.

M. Ryan: J'ai l'impression que le coordonnateur - on introduit un changement profond - deviendra beaucoup plus à bien des égards un mandataire de l'autorité de l'institution alors que, jusqu'à maintenant, il tenait la plus grande partie de son autorité de l'adhésion de ses collègues. Il me semble que pour la vie collégiale et universitaire, cela est assez important que la personne ait l'adhésion profonde de ses collègues. Il me semble qu'on n'attend pas tellement une autorité directe et omniprésente d'un responsable de département qu'un rôle de coordination et même d'animation, sans trop d'extension.

M. Fortier (Claude): Je crois que vous faites par le fait même référence à la façon dont sera conçue, je dirais, de part et d'autre, la signification du terme "rendre des comptes" à l'institution de la vie départementale. Je pense que la tradition est trop bien implantée pour souhaiter qu'elle soit modifiée, celle qui veut que le chef de département soit vraiment celui qui peut témoigner de ce qui se passe comme vitalité à l'intérieur d'un département. Je pense que là-dessus, il y a des avantages à maintenir le rôle positif que le chef de département pouvait avoir. Cependant, de quelle façon peut-on définir le lien de responsabilité ou de reddition de comptes, si l'on veut, du département par rapport à l'établissement? Il me semble qu'il y a par rapport à la situation récente qui s'était créée dans les trois ou quatre dernières années une certaine dose de réflexion qu'il faudra aménager concrètement dans les milieux. Je crois que c'est vous qui faisiez référence à des pratiques qui sont plus ou moins formelles et qui ont permis de trouver des voies d'aménagement. Il me semble que de vouloir établir un lien de responsabilité, un lien de continuité entre la vie départementale et l'institution peut aussi tirer parti des innovations ou des situations concrètes qu'on a pu créer dans le récent passé à cet égard.

M. Ryan: II a été question la semaine dernière d'une clause dans le décret qui a trait à la période qu'un enseignant doit franchir avant d'avoir accès à la permanence. Jusqu'à maintenant, c'était deux ans. Avec le décret, ce sera porté à deux ans et dix ou onze mois, si mes impressions sont correctes. Ne trouvez-vous pas que c'est de nature à contribuer à ce que vous disiez vouloir éviter tantôt, l'éloignement des jeunes? N'est-ce pas de nature à en décourager un beaucoup plus grand nombre? Avez-vous une idée du nombre d'enseignants qui peuvent être frappés par une mesure comme celle-là, si elle allait s'appliquer?

Mme Blackburn: Je pense que cette mesure, si j'ai bien compris, voulait corriger certains abus qui existaient dans la convention précécente, qui étaient de l'ordre suivant: Vous aviez des professeurs qui étaient engagés, ils avaient une tâche complète, par exemple pour remplacer quelqu'un qui était en congé sabbatique de deux ans, ou un an, deux professeurs, deux années consécutives. Cela donnait à votre nouveau professeur, qui n'avait pas sa permanence, deux tâches d'enseignement complet pour deux ans; malgré qu'on savait d'avance que ces postes seraient déjà occupés au terme de l'année, il pouvait acquérir sa permanence. On voulait corriger cela. Le temps requis pour obtenir sa permanence dans les établissements universitaires est considérablement plus long, parce qu'il y a toute une période d'évaluation. Est-ce que cela contribuera, et dans quelle mesure, à créer une certaine insécurité? Je ne saurais vous le dire.

M. Ryan: Une dernière question. Si on s'appuie sur les données des trois ou quatre dernières années, on constate qu'il y a eu une augmentation de la clientèle étudiante dans les cégeps d'à peu près 4% ou 5% par année. On peut présumer qu'il y aura encore une augmentation du même ordre au cours des deux ou trois prochaines années, c'est-à-dire au cours de la période qui sera couverte par les décrets actuels dont nous espérons qu'ils deviendront des conventions collectives à la suite des négociations avec les parties. S'il y a cette perspective, ne trouvez-vous pas qu'on aurait intérêt à chercher peut-être à étaler un petit peu la solution qu'envisage

le gouvernement? D'ailleurs, je crois que, dans le cadre de règlement du mois de février, c'était prévu. Je me disais ceci un peu naïvement peut-être: Si la clientèle doit augmenter de 5% par année, si on augmentait la tâche d'enseignement beaucoup moins qu'on ne le fait, par exemple 5% - on va à 20% dans bien des cas actuellement - il me semble que cela donnerait une marge qui permettrait d'éviter de mettre sur le pavé ou de mettre en disponibilité de 1000 à 1200 enseignants. Je me dis que quant à les payer à 80%, s'ils sont en disponibilité, mieux vaut peut-être les garder pendant un an ou deux à temps plein, quitte ensuite à en ajouter moins après cela et à prévoir le fonctionnement de tous ces mécanismes d'aborption dont vous avez parlé, qui sont très intéressants également. Je ne sais pas si, dans le cas des cégeps - si le ministre voulait commenter là-dessus, cela m'intéresserait au plus haut point - il n'y a pas une marge de souplesse qui pourrait être trouvée dans ces perspectives des deux ou trois prochaines années au point de vue de la clientèle, qui permettrait de régler avec plus d'humanité ce problème d'une meilleure adéquation entre la tâche au bout de la ligne et les possibilités financières du Québec.

Le Président (M. Jolivet): Mme

Blackburn.

Mme Blackburn: II me semblerait un peu difficile de vous dire... Ce que nous avons envisagé, c'est probablement plus au stade des tables de négociation que nous pourrions en examiner la possibilité, s'il y a des coûts à envisager advenant tel ou tel choix... Il est certain et évidemment cela devient un peu plus délicat, parce que c'est une réflexion plus personnelle que j'ai faite dans un cercle plus restreint qu'on peut penser, par exemple, que l'étalement qui a été envisagé sur trois ans, que cette formule est extrêmement intéressante et va permettre de contrer ou de rendre moins difficiles, moins durs les effets des mises en disponibilité. Mais on pourrait penser qu'après deux ans, si la situation économique se révélait meilleure ou s'il devenait évident par exemple qu'on ait des difficultés considérables par rapport à certains programmes, il faudrait pouvoir réviser cette situation après deux ans. Vous savez, trois ans c'est beaucoup, quoique j'hésite à vous dire que c'est beaucoup parce que c'est peu finalement; une fois que vous avez une certaine stabilité, ces trois ans sont quasiment un minimum. Si vous laissez en suspens certaines clauses qui laissent penser qu'on peut négocier quelque chose après deux ans, vous gardez un climat de négociation qui rend difficile l'acquisition d'une certaine stabilité, d'un climat un peu plus stable dans les collèges. Là-dessus, je n'ai pas de réflexion. Probablement que le ministre de l'Éducation serait plus à même que moi de répondre à votre interrogation.

M. Ryan: Je veux seulement ajouter une précision. Je ne dis pas que j'adhère au principe de l'augmentation de 15% de la tâche. Je ne voudrais pas que le ministre parte avec cette impression. C'est une hypothèse d'étalement que j'ai faite. Il me semble que le taux d'accroissement éventuel de la tâche devrait être négocié. Si on s'entendait que sur les trois ans, cela devrait être 8% ou 10% ou 12% - je ne sais pas -et qu'ensuite, on décide de l'étaler ensemble... Vu les perspectives d'augmentation relative de besoins qui se posent, il me semble qu'il y a un espace qu'on pourrait utiliser pour la recherche de solutions plus acceptables.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Avant d'accorder la parole au député de Fabre et adjoint parlementaire du ministre de l'Éducation, comme il y a deux personnes qui m'en ont fait la demande, le député de Fabre et Mme la députée de L'Acadie, on pourrait terminer avec l'organisme en présence et dépasser 18 heures de quelques instants.

Mme Lavoie-Roux: Très bien.

Le Président (M. Jolivet): Parfait! M. le député de Fabre.

M. Leduc (Fabre): Merci, M. le Président. J'aurais quelques questions. La première a trait à ce que vous avez dit lorsque vous avez parlé de la charge. Vous avez parlé de l'assouplissement de la plage horaire. Vous avez mentionné simplement qu'il y avait un assouplissement. Mais vous n'avez pas mentionné s'il y avait des avantages qui accompagnaient cet assouplissement. On sait que cette plage horaire passerait de 8 heures à 18 heures, je crois, à celle de 8 heures à 23 heures. Présentement, je crois que la plage est de 8 heures à 18 heures dans l'ensemble des cégeps; on passerait de 8 heures à 23 heures. Les syndicats, entre autres, ont exprimé un certain nombre d'inquiétudes par rapport à cet assouplissement. Une crainte qui est exprimée est celle de voir l'enseignement régulier déborder au-delà de 18 heures. Est-ce que vous partagez ces craintes? Est-ce que vous avez une réflexion à ce sujet?

Mme Blackburn: La souplesse qui a été apportée dans la plage horaire ne nous semble pas, du moins à première vue, devoir avoir des conséquences défavorables sur la qualité de l'enseignement non plus que sur la qualité de vie des enseignants. On m'a informée de certaines mesures qui

permettraient, par exemple, de prévoir des temps de disponibilité à l'enseignant lui permettant de ne pas détériorer complètement sa qualité de vie. Par exemple, lui demander d'être présent deux heures le matin et deux heures avant minuit, cela semblerait excessif.

Si je me place exclusivement dans la perspective des étudiants, ce qui me semble tout à fait tomber sous le sens c'est que les collèges tenteront d'organiser tous les cours des étudiants à l'intérieur de la période de 8 heures à 18 heures qu'on connaît actuellement. Je pense bien que personne ne va sciemment s'arranger pour qu'un étudiant se retrouve avec un cours à 22 heures - un étudiant de l'enseignement régulier - d'autant plus que les périodes du soir sont largement occupées par les adultes.

Par ailleurs, cela permettra à des étudiants à l'enseignement régulier d'aller se chercher un cours aussi le soir. Cela pourra entrer dans sa grille. On sait que, dans les universités, cela est fréquent. Les étudiants à l'enseignement régulier à temps complet se retrouvent avec une grille assez variable. Vous avez des cours de 8 heures à 22 heures. Cela ne serait pas souhaitable que tous les cours soient organisés comme cela, indistinctement que le jeune soit en collège I ou en collège III. Je ne pense pas que cela soit voulu par les collèges. On n'est pas particulièrement préoccupé des effets négatifs. Cela peut avoir un avantage, cependant. Cela permettra à des collèges d'accueillir un peu plus d'étudiants. Vous savez qu'il y avait un problème d'accessibilité, surtout dans la région de Montréal, l'an passé. On peut penser que l'élargissement de la plage horaire va permettre d'accueillir les étudiants qu'on a dû laisser aux portes, l'an passé.

M. Leduc (Fabre): Merci. Ma deuxième question a trait à la tâche. Plusieurs chiffres sont avancés au sujet de cette tâche moyenne qui sera augmentée. Le député d'Argenteuil a lancé le chiffre de 20%. Vous avez parlé d'une tâche moyenne augmentée de 10% à 15% et j'ai vu 25% dans une publicité syndicale. Sur quoi vous basez-vous pour avancer le chiffre de 10% à 15%? Est-ce que vous avez eu l'occasion de faire une étude qui tient compte, entre autres, qu'au collège il y a des cours dits académiques, surtout à l'enseignement général, et il y a des cours professionnels, professionnels lourds, entre autres, où il y a peu d'étudiants? Pouvez-vous nous préciser votre pensée à ce sujet?

Mme Blackburn: Les chiffres par rapport à l'augmentation moyenne qui était variable de 10% à 15% nous ont été fournis par le ministère et semblent, en tout cas au premier examen, relativement réalistes si on pense que l'augmentation de la tâche est de 13,5%. On devra tenir compte du caractère plus exigeant de certains cours, ce qui fait que cela nous semble assez réaliste.

Là-dessus, le ministère serait certainement mieux armé que moi pour donner ces informations, mais ce qui nous a été dit c'est que les paramètres permettant de fixer la tâche d'enseignement qui était conventionnée, ne le serait plus par les décrets. Mais cela ferait partie d'une entente à intervenir entre la Fédération des cégeps et le ministère, qui établirait la règle d'allocation des enseignants, règle qui tiendrait compte des paramètres antérieurs. Autrement dit, ce qu'on avait dans les collèges, en 1976, c'était une situation où vous aviez, quel que soit le caractère des programmes qui étaient dispensés dans un cégep, un ratio 1-15. Cela ne tenait pas compte des programmes particulièrement lourds et je pense, pour ne pas le nommer, à celui de l'aéronautique, à Chicoutimi, où le ratio est 1-1 pour un instructeur de vol. Cela causait des difficultés considérables à certains programmes d'enseignement professionnel. (18 heures)

Ce qui se propose, nous dit-on, c'est une formule qui tiendrait compte des paramètres actuels, sauf que ce ne serait pas conventionné et ce serait une entente à intervenir par règlement entre la Fédération des cégeps et le ministère de l'Éducation.

Si telle est la situation, la situation qui serait faite dans les collèges serait moins pénible pour les enseignements professionels qu'elle ne l'était en 1976. À savoir si cela représenterait 10%, 15% ou 25%, je pense que ce sont les gens qui établiront les calculs qui seraient plus à même... C'est plus technique et je n'ai jamais pensé vraiment que c'était de la responsabilité du conseil d'y descendre.

M. Leduc (Fabre): Une dernière question. Je reviens au département. Vous visez un lien de continuité entre le département et le collège, un lien de responsabilité aussi qui, à votre sens, n'est pas assez précis, n'est pas assez développé dans la situation actuelle. Est-ce que vous êtes en mesure de faire des comparaisons avec les universités, parce que je pense que le département du collège se rapproche beaucoup plus du département de l'université que du département de l'école secondaire? Est-ce que vous avez examiné cette situation? Est-ce qu'on peut faire des comparaisons?

Mme Blackburn: On a fait des comparaisons et pour cela le président de la commission a visité différents types d'établissements dans les affaires publiques et, en particulier, dans les universités. M.

Fortier.

Le Président (M. Jolivet): M. Fortier.

M. Fortier (Claude): Peut-être que le point le plus repérable de cette comparaison, c'est le statut du chef de département ou du responsable du département. La situation n'est pas la même dans toute les universités. Si on prend, par exemple, l'Université du Québec et l'Université de Montréal, je pense qu'il y a une différence de statut. Ce qu'on trouve, par comparaison avec ce qui se passe au niveau collégial, c'est que le responsable du département est sûrement en liaison avec les instances responsables de l'université comme institution. Quel que soit, encore une fois, le statut précis du chef de département, qui est tantôt un syndiqué dégagé d'enseignement, tantôt... je pense qu'il y a d'autres formules qui sont en vigueur. Ce qui nous est apparu, à un examen sommaire, je dois dire, c'est qu'il y avait là des modalités qui, en plus de s'appuyer sur une tradition dont les collèges ne peuvent jouir à cause de leur longueur de vie par rapport à celle des universités, en plus de s'appuyer sur cette tradition, il y avait des mécanismes qui permettaient une continuité plus évidente, mécanismes mieux rodés que ceux qu'on trouve au collégial par rapport à cette question précise.

M. Leduc (Fabre): Juste une sous-question. Du point de vue de l'évaluation et du point de vue des rapports, des programmes du département au collège, est-ce que cela existe à l'université? Est-ce que cela existe dans les universités que vous avez vues, ce rapport du point de vue de l'évaluation et ce rapport des programmes à transmettre à l'institution?

M. Fortier (Claude): Je peux dire que du point de vue de l'évaluation il y a dans certaines universités des mécanismes qui sont assez exigeants et très détaillés, sinon dans les statuts, du moins dans les règlements mêmes de l'université. Je ne saurais faire cependant la comparaison entre toutes les universités à cet égard et le niveau collégial.

En ce qui concerne la situation de l'évaluation au niveau collégial, je pense qu'on peut dire à cet égard qu'on n'a pas encore mis au point ou trouvé les formules qui permettraient de satisfaire tout le monde. C'est le moins qu'on puisse dire. Ce qui a été mis de l'avant et ce qui est testé actuellement, si on veut, cela a été l'exigence faite aux collèges de se donner des politiques en matière d'évaluation où pourrait se négocier, ou s'harmoniser un partage entre la responsabilité que doit avoir l'instance, l'unité départementale et l'institution elle-même.

Une voix: Merci.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais d'abord dire sincèrement au Conseil des collèges combien je trouve que son mémoire a été plus nuancé et plus sensible au noeud de la crise que les enseignants et le monde de l'enseignement traversent. Je ne m'étendrai pas là-dessus.

Je voudrais vous demander: Est-ce que vous pourriez ventiler, on parle beaucoup d'augmentation du nombre d'élèves dans les collèges, le pourcentage qui est dû à l'augmentation des adultes aux cours réguliers, le pourcentage qui est dû à l'augmentation possible du passage du secondaire au cégep, c'est-à-dire une augmentation des élèves venant du secondaire au cégep? Et finalement, quelle est l'augmentation qui est due au nombre d'élèves qui font une cinquième session pour les deux dernières années?

Le Président (M. Jolivet): Madame Blackburn.

Mme Blackburn: M. le Président, je vais essayer rapidement mais probablement que je vais faire appel au président de la commission de l'enseignement professionnel pour me rappeler le mémoire parce que là, je vois le tableau mais...

Mme Lavoie-Roux: Excusez-moi, M. le Président, pour ne pas vous obliger à trop d'efforts de mémoire, je serais satisfaite si vous pouviez nous donner ces chiffres-là, si ce n'est pas à ce moment-ci sinon plus tard dans la soirée parce que ça me semble important au point de vue de ce qu'on appelle l'augmentation du nombre d'étudiants au cégep et peut-être de certaines politiques d'encadrement. Je pense que cela a une implication quant aux politiques mêmes que les collèges devraient avoir vis-à-vis des différents types de clientèle. Si vous ne le savez pas précisément, si vous me les donniez dans la soirée, ça me satisferait pleinement.

Vous vous inquiétez quant à la répercussion sur l'enseignement professionnel de la réduction du nombre de professeurs, c'est-à-dire le genre - je ne sais si on peut parler de ballottage - d'équilibre qu'on pourrait essayer de faire dans les cégeps. Est-ce que ça pourrait amener éventuellement que les collèges sacrifient ou contingentent davantage certaines options professionnelles?

Mme Blackburn: Je peux vous dire que vous touchez là une des inquiétudes, sûrement, du président de la commission de

l'enseignement professionnel parce que, vous savez, il y a des enseignements professionnels qui ne permettent pas de dépasser un certain ratio pas seulement forcément en raison du caractère même du type d'enseignement, mais souventefois à cause des locaux, des laboratoires. On ne pourra pas demander à ces professeurs d'avoir un ratio plus de 1-8. Je ne saurais pas vous dire vraiment si cela risque d'avoir des conséquences sur le contingentement de certains programmes professionnels. Une chose est certaine, c'est que le conseil est particulièrement préoccupé de toute la question des contingentements dans certains programmes qu'on dit de techniques de pointe. Là-dessus, on a fait des recommandations au ministre l'invitant à élargir le plus possible les programmes les plus prometteurs d'emploi.

Est-ce que ce nouveau calcul risque d'avoir des conséquences pour le contingentement? Je ne vois pas. Je ne pense pas que cela se fasse ainsi. Cependant, ce que cela peut avoir comme conséquence, si vous alourdissez trop la tâche d'un enseignant dans les programmes professionnels, cela rend l'enseignement difficile, à cause des conditions, à cause du caractère même ou du type de cours qu'il a à dispenser. Cela peut être plus délicat.

Mme Lavoie-Roux: Le ministre a semblé sensible à ce problème que vous avez soulevé. Vous dites, je ne l'ai pas sous les yeux: Nous allons suivre cela de près et nous ne nous gênerons pas dans la prochaine année, si on perçoit des difficultés particulières, d'intervenir. Est-ce qu'à ce moment, le ministre serait prêt à modifier les règles en cours de décret ou de convention, parce qu'il reste qu'en fin de compte, c'est comme cela que cela se résume?

Ma dernière question: Pouvez-vous me dire si les frais encourus par la mise en disponibilité des professeurs sont totalement assumés, que ce soit à 80%, à 50%, par le ministère de l'Éducation ou s'il y en a une partie qui doit être assumée à l'intérieur de votre budget global?

Mme Blackburn: Toute cette question comprend l'aspect le plus technique. Pour cela, je passerai la parole à M. Lelièvre. Je pense qu'il est plus informé du mode de partage des frais.

Le Président (M. Jolivet): M. Lelièvre.

M. Lelièvre (Lucien): Je vais tenter de répondre à la question. Je ne suis pas assuré d'être beaucoup plus informé que Mme la présidente. Ce que je peux dire avec certitude, c'est que les frais occasionnés par les mises en disponibilité sont assumés par le budget du gouvernement et ne sont pas imputés à des postes budgétaires autres que celui de l'enseignement. Maintenant, est-ce qu'à l'intérieur des enveloppes budgétaires gouvernementales, l'imputation des coûts des mises en disponibilité est comptabilisée du côté de l'enseignement ou du côté des coûts de convention? Je ne saurais le dire, mais le collège reçoit une subvention qui lui permet d'envisager les coûts des mises en disponibilité locales. Je ne sais pas si cette information générale répond à votre question, mais c'est la totalité de ma science sur le sujet.

Mme Lavoie-Roux: Oui. Est-ce que vous avez, comme au secondaire, un régime - si je peux m'exprimer ainsi - de suppléance dans lequel ces gens...

M. Lelièvre: Non.

Mme Lavoie-Roux: Non, vous n'avez pas cela.

M. Lelièvre: II n'y a pas cela au collégial.

Mme Lavoie-Roux: Ah! Cela n'existe pas quoi!

M. Lelièvre: Non.

Mme Lavoie-Roux: Alors, merci.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Si ces documents additionnels doivent être envoyés à la commission, il s'agirait de les donner au secrétariat des commissions pour qu'on puisse en faire la distribution. On vous remercie au nom des membres de la commission. Je tiens à vous inviter à revenir ici après la suspension, à 20 heures, de même que l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires protestantes du Québec et l'Association of Protestant School Business Officials of Québec. Oui, M. le député de Fabre.

M. Leduc (Fabre): J'aurais une suggestion à faire. J'ai appris que la Québec Federation of Home and School Associations serait prête à se faire entendre assez rapidement immédiatement après les prochains. On m'a dit que cela compléterait ce que la Fédération des comités de parents a déjà exprimé. C'est un voeu que la Québec Federation of Home and School Associations fait et nous sommes d'accord.

Le Président (M. Jolivet): Cependant, je serais tenté de vous suggérer ceci, au lieu de m'inciter à les inviter. Malheureusement, mon rôle n'est pas de les inviter, mon rôle est d'inviter ceux qui sont en 6e position; ils ont, eux aussi, des droits et des choses à

faire. Les gens en 7e position étaient prévus et ils ont peut-être autre chose à faire ce soir. Je pense que le groupe de la Québec Federation aurait peut-être intérêt à consulter les deux autres et à nous dire s'il y a entente, ce soir, à 20 heures. Mais mon rôle, mon devoir est d'appeler les gens en 6e position en premier lieu. Donc, il peut y avoir une rencontre après la suspension.

(Suspension de la séance à 18 h 13)

(Reprise de la séance à 20 h 09)

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît:

La commission permanente de l'éducation reprend ses travaux aux fins d'entendre les organismes directement impliqués dans l'administration scolaire qui veulent faire des représentations sur la qualité de l'enseignement, la tâche et la sécurité d'emploi des enseignants et enseignantes en regard de la situation actuelle au Québec.

Au moment où nous nous sommes quittés, nous avions invité deux organismes à venir se présenter devant nous, mais je pense que le leader a quelque chose à ajouter avant de commencer. Allez, M. le leader.

M. Bertrand: Merci, M. le Président. Je voudrais simplement indiquer, pour le bénéfice de nos collègues de la commission, que, quelle que soit l'heure ce soir... En d'autres mots, si cela se termine à minuit, tant mieux!

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le leader, je pense que votre micro ne fonctionne pas.

M. Bertrand: Cela me fait penser au conseil national de la fin de semaine. Le micro de droite ne fonctionnait pas.

Le Président (M. Jolivet): Allez.

M. Bertrand: Je voudrais simplement faire remarquer, M. le Président, pour le bénéfice de nos collègues parlementaires et aussi des groupes qui se présentent devant nous, que la commission parlementaire ne siégera pas demain. Donc, c'est à nous, entre nous, de décider comment nous organisons nos travaux ce soir. Est-ce que nous terminons à minuit? Sinon, est-ce que nous acceptons de dépasser minuit, jusqu'à minuit et demi, une heure? Sachant qu'il y a encore trois ou quatre intervenants qui veulent se faire entendre, je crois...

Une voix: Cinq.

M. Bertrand: Cinq intervenants. Je crois qu'effectivement nous pouvons arriver à faire tout ce travail et je sollicite donc la collaboration de tous les parlementaires pour que nous y parvenions dès ce soir.

Le Président (M. Jolivet): M. le..., j'allais dire le chef de l'Opposition. M. le député d'Argenteuil.

M. Bertrand: Argenteuil, M. le Président.

M. Ryan: Vous me faites souffrir, M. le Président. Le comté d'Argenteuil, il va falloir qu'on vous amène visiter cela une bonne journée. Vous allez voir que c'est le plus beau comté de la province.

M. Bertrand: C'est sur l'autoroute, n'est-ce pas?

M. Ryan: Quand elle sera faite. Cela fait longtemps que vous la promettez.

M. Bertrand: Pas moi, je n'ai rien promis.

M. Ryan: Le gouvernement dont vous faites partie. M. le Président, j'ai écouté le leader du gouvernement. Nous n'avons pas d'objection à faire tout ce qui est humainement possible pour entendre ce soir les groupes qui sont ici, qu'il reste à entendre. Maintenant, il y a seulement une chose que je souhaiterais qu'on puisse garder en suspens. Le ministre a dit que la commission ne pourrait pas siéger demain parce que le gouvernement a ses priorités qu'on peut comprendre. Mais il avait été question, au début, de réentendre les deux parties principales au différend, le gouvernement et, éventuellement, j'avais compris ou j'aurais souhaité les partenaires de la partie patronale, d'un côté et, de l'autre, la partie syndicale. Maintenant, tout dépend de ce qu'on va nous annoncer. C'est évident que, si le gouvernement allait nous faire savoir qu'un processus de médiation ou de conciliation s'engage de manière sérieuse, à ce moment, je pense bien que la commission aura fait le gros du travail qui était attendu d'elle. Il sera toujours possible pour elle de revenir à la charge si les choses tournaient autrement qu'on ne le souhaiterait alors. Mais cette réserve étant faite, je comprends très bien ce qui a été dit par le ministre. Je pense que, de ce côté-ci, on va collaborer ce soir à ce que le travail se fasse dans le même esprit d'application et de collaboration envers nos visiteurs que celui qui a été manifesté jusqu'à maintenant.

Le Président (M. Jolivet): Avant d'accorder la parole au ministre pour l'ordre du jour, le député de Viau aurait quelque chose à ajouter.

M. Cusano: Oui, M. le Président, c'est que d'après l'ordre du jour, The Québec Association of Catholic Schools

Administrators était censée être ici aujourd'hui. Je crois qu'elle nous a fait parvenir un télégramme. Auriez-vous l'obligeance de dévoiler le contenu de ce télégramme non seulement aux membres de la commission parlementaire, mais aussi aux témoins qui se présenteront dans quelques instants?

Le Président (M. Jolivet): Je ne l'avais pas fait puisque qu'on avait dit au départ que les organismes qui ne se présentaient pas pouvaient faire en sorte que les documents soient acheminés au secrétariat des commissions. Je n'en avais pas fait mention, mais si vous me le demandez je vais le faire: "La Québec Association of Catholic Schools Administrators, organisme qui regroupe les directeurs et directrices adjoints et adjointes des écoles primaires et secondaires anglo-catholiques du Québec, remercie la commission parlementaire de l'éducation de l'invitation de s'adresser à la commission. Compte tenu que notre association était convoquée pour le vendredi 4 mars, nous étions déçus que, à cause de l'horaire très chargé de la commission, ils vous a fallu remettre notre audience à une date ultérieure. "Cependant, notre présence au salon rouge le vendredi 4 mars nous a permis de suivre avec grand intérêt et d'écouter attentivement les interventions des divers organismes. Nous constatons que tous les éléments majeurs auxquels on désirait s'adresser furent abordés par plusieurs des intervenants. Nous croyons que cela ne sera qu'une perte de temps pour la commission de nous entendre répéter les mêmes propos. Pour cette raison, nous nous excusons de ne pas nous présenter devant la commission et nous vous sommes très reconnaissants de l'occasion que vous nous avez offerte. "Nous voulons souligner à la commission les points suivants: Premièrement, depuis quelques années, les changements majeurs dans notre système d'éducation public ont pour effet d'empêcher la planification et de créer un climat d'instabilité. Nous espérons que l'avenir nous réserve une période de calme et de stabilité pour qu'on puisse jouir d'un climat propice à la gestion de nos écoles pour le bien des élèves. "Nous constatons que, dans le conflit actuel avec les enseignants, le procédé du gouvernement d'agir par décrets détruit le moral de nos enseignants. Nous souhaiterions la révocation de la loi 111 et nous souhaiterions que les négociations reprennent en présence d'une tierce partie. La tâche d'animation auprès des enseignants qui sera nécessaire après la fin de ce conflit provoque beaucoup d'appré- hension parmi nos membres. (20 h 15) "Troisièmement, nous recommandons que le régime de négociations dans le secteur public soit modifié pour que les parties puissent résoudre leurs divergences sans avoir recours aux grèves et aux décrets. À cette fin, nous demandons qu'aux commissions scolaires soient accordés plus de pouvoirs dans ce dossier et que le rôle du gouvernement doit être limité à définir le cadre financier que la société québécoise peut se permettre d'investir dans l'éducation. "Nous demandons que le gouvernement agisse selon nos recommandations afin d'assurer la fin des conflits qui perturbent l'école publique depuis de longues années. "Le président par intérim, Québec Association of Catholic School Administrators, Léonard Tynan".

M. le ministre de l'Éducation.

Conciliation entre les parties M. Camille Laurin

M. Laurin: M. le Président, à la suite des observations et recommandations que nous ont faites de nombreux groupes, organismes ou personnes, je puis vous annoncer que le gouvernement a retenu le principe de la conciliation entre les parties. Au moment où je vous parle, les discussions se poursuivent avec la CEQ en particulier sur les modalités selon lesquelles ce processus de conciliation devrait se poursuivre. Par exemple, le mandat des conciliateurs, malgré que le mot "conciliation" indique que nous allons nous conformer à l'esprit du Code du travail, donc le mandat du groupe de conciliation, le nombre des conciliateurs, deux ou trois, le mandat qui serait donné à ces conciliateurs, la liste des sujets qui seraient abordés pendant l'étape de la conciliation, la durée de l'époque de conciliation. Je puis dire que les discussions sont assez fructueuses pour qu'une conclusion puisse être atteinte ce soir. Je m'engagerais demain, lors de la reprise des travaux de l'Assemblée nationale, non seulement à faire le point sur le sujet, mais à annoncer les conclusions auxquelles nous sommes parvenus par le biais d'une déclaration ministérielle.

Quant à la FNEEQ, il est prévu que cette étape de la conciliation, ces mécanismes de la conciliation lui seront également offerts si elle le juge à propos, malgré que les discussions que nous avons avec la FNEEQ en ce moment laissent plutôt entendre que la FNEEQ, ayant reçu un nouveau mandat dimanche, préférerait pour le moment une reprise des négociations directes, qu'elle croit possible et pouvant mener à un règlement négocié.

L'essentiel est quand même acquis, le

gouvernement retient le principe de la négociation. On discute en ce moment des modalités. Les pourparlers, les discussions sont en cours avec nos partenaires de la CEQ. Une discussion finale quant aux modalités devrait être acquise au cours de la soirée. Je la communiquerai au nom du gouvernement dans tous ses éléments lors de la reprise de nos travaux demain.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le député d'Argenteuil, sur cette question.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, je suis content de constater que la démarche du gouvernement continue d'aller dans le sens qui avait été annoncé par le ministre vendredi soir. Par conséquent, le bon côté semble graduellement prendre le dessus sur le côté moins agréable qu'on avait constaté à l'occasion de la loi 105 et de la loi 111. Nous nous en réjouissons, du côté de l'Opposition, pour de nombreuses raisons. D'abord, parce qu'on semble vouloir revenir à l'esprit de notre législation du travail. J'ai bien remarqué que le ministre a parlé de conciliation, au sens de notre droit du travail; c'est très important parce qu'on aurait pu trouver un terme vague, un terme fuyant qui aurait caché une volonté plus ou moins vague de simplement donner les apparences d'un désir de solution. Si on va à la conciliation proprement dite, au sens que définissent nos lois du travail, je pense que c'est un progrès certain dont le mérite revient d'abord aux organismes qui se sont présentés devant la commission avec une patience et une pertinence exemplaire depuis le début de ces travaux. Il s'est fait un travail remarquable et c'est impossible qu'on participe à un travail comme celui-là sans qu'un certain travail de rapprochement des coeurs ne se produise de part et d'autre, surtout chez ceux qui sont immédiatement concernés. Je constate ce cheminement avec beaucoup de satisfaction. J'ose espérer que dans le mandat qui sera donné aux conciliateurs éventuels, parce qu'il semble qu'il y en aura plus d'un, d'après ce que le ministre vient de dire, on laissera une certaine marge de souplesse pour permettre qu'un travail de conciliation véritable se fasse.

Nous aurons l'occasion d'en parler demain à l'Assemblée nationale quand nous connaîtrons la décision de manière plus précise, mais comme elle n'est pas encore prise, je me permets d'insister beaucoup pour qu'on laisse la marge de souplesse nécessaire pour permettre d'en arriver à un règlement et pour permettre que la démarche soit vraiment fructueuse. Quant au reste, il me semble n'avoir pas d'autres commentaires à faire pour le moment. Je pense qu'un des devoirs de l'Opposition quand une situation semble s'acheminer vers une amélioration, c'est d'éviter de compliquer les choses et d'éviter d'ajouter toutes sortes d'éléments qui risqueraient d'embrouiller la situation. Par conséquent, nous enregistrons ces propos du ministre avec intérêt. Nous serions très heureux que, dès ce soir, avant la fin de nos travaux, nous ayons d'autres précisions, mais si cela doit venir à l'Assemblée nationale demain, je pense que c'est un excellent forum pour la communication d'une décision comme celle-là.

Le Président (M. Jolivet): Merci. J'invite donc l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires protestantes du Québec et Association of Protestant School Business Officials of Québec, à se présenter devant nous. Je demanderais à M. James Fissell - à moins que ce soit une autre personne - de nous présenter ses collègues.

Auditions (suite)

Association des directeurs généraux des commissions scolaires protestantes

M. Fox (Marcel): M. Marcel Fox.

Le Président (M. Jolivet): M. Marcel Fox.

M. Fox: Oui, directeur général de la Commission des écoles protestantes du grand Montréal et M. Bill Pennefather, directeur général de la commission scolaire Eastern Québec. Nous représentons l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires protestantes du Québec.

Le Président (M. Jolivet): Et les autres personnes qui vous accompagnent. Madame.

Mme McGlasham (Phyllis): Je suis Phyllis McGlasham, présidente de l'Association des administrateurs scolaires du Québec. J'ai avec moi M. Ron Fava, vice-président et M. Keath Farquharson, directeur exécutif.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. Fox.

M. Fox: Comme vous ne pouvez pas siéger après minuit, je serai aussi bref que possible afin que vous puissiez terminer avant minuit.

M. le Président, mesdames, messieurs, une fois de plus, il y a une crise en éducation au Québec. Depuis 1964, le Québec a subi des crises en éducation d'année en année. Il n'y a rien de neuf en cela. Ce qui est neuf cette fois-ci, c'est qu'on a constitué une commission parlementaire spéciale qui doit s'en occuper à sa façon.

Merci d'avoir invité l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires protestantes du Québec à venir présenter l'opinion de ses membres devant vous. Nous avons d'abord hésité à le faire, mais compte tenu que les directeurs généraux occupent une position clé au sein du système scolaire et une position cible entre la partie patronale et la partie syndicale, nous avons estimé que notre contribution pourrait être de quelque valeur et nous nous sommes fait un devoir de comparaître. C'est en tant qu'administrateurs que nous allons parler. Nous ne représentons ni le ministère de l'Éducation ni les commissions scolaires. Nous nous représentons nous-mêmes. Nous tenons à le préciser pour certaines raisons.

La crise actuelle, comme toutes les autres crises que nous avons vécues au fil des ans, ne nous facilite guère la tâche. Notre souci premier est que l'enseignement se donne aux élèves dans la salle de classe. Ceci est primordial, tout le reste est secondaire. Nous sommes tenus, selon les exigences du ministère de l'Éducation, à nous assurer que la durée de l'année scolaire prescrite soit respectée, et nous avons une obligation envers les parents à exiger qu'à la salle de classe il se dispense un enseignement de qualité.

Un tel enseignement est avant tout tributaire d'une atmosphère scolaire, saine et harmonieuse. Il dépend de l'assiduité des élèves d'une part, et surtout du dévouement à la tâche, de la compétence dans la matière, et de la science pédagogique de l'enseignant d'autre part. Tout le reste est accessoire, quoi qu'en dise ou quoi qu'on veuille affirmer et prétendre.

Pour des raisons de force majeure dues à des mesquineries d'interprétation diverses à des chicanes de négociation, à des querelles politiques et autres, entre adultes, l'année scolaire des élèves se trouve menacée et les élèves eux-mêmes deviennent les innocentes victimes d'une situation de fait entièrement indépendante de leur volonté directe ou indirecte et de celle de leurs parents.

Ce n'est pas la première fois que cela arrive. Nous le savons tous. Faut-il à tout prix qu'une telle situation se répète sans cesse de période de négociations en période de négociations? Il devient criminel, à notre avis, de continuer à tolérer que cela se perpétue. Un changement de méthode s'impose. Établissons une fois pour toutes un contrat de travail de base équitable et agissons en conséquence pour le respecter et l'appliquer. Si des changements s'imposent, qu'on s'évertue alors à les réaliser, au fur et à mesure, sans pour autant interrompre les cours des élèves.

Sûrement dans une société civilisée comme la nôtre, il existe des personnes de bonne volonté de part et d'autre, compétentes dans leur domaine qui pourront être mandatées à trouver des solutions aux problèmes qui se posent. Travaillant tout le long sur un contrat ouvert, et à force de discussions et de délibérations au cours de rencontres mutuelles, une telle équipe sera capable de trouver des réponses adéquates et équitables.

Abandonnons le modèle archaïque actuel qui veut que les questions de relations du travail se règlent par la confrontation et aboutissent à des conflits. Ce modèle de règlement de compte peut, à la rigueur, se justifier dans le monde industriel où les seuls antagonistes sont les patrons d'une part, et les ouvriers de l'autre. De leur affrontement mutuel il résulte en fin de compte qu'un manque de production d'une denrée amorphe quelconque.

Dans le secteur public de l'enseignement par contre, tout affrontement de ce genre fait des victimes, innocentes victimes, les élèves, dont l'avenir scolaire peut être affecté d'une façon adverse. Il est temps qu'on y réfléchisse et qu'on agisse en conséquence.

Selon les directeurs généraux, le décret tel qu'il se présente répond du point de vue charge de travail et présence à l'école de l'enseignant, aux besoins impératifs de l'heure. Les 1500 minutes d'enseignement par semaine au primaire sont indispensables si un enseignement varié de valeur doit se dispenser. Ceci est d'autant plus nécessaire dans le secteur protestant pour permettre aux divers cours de langue seconde de s'épanouir et de porter fruits.

Dans le secondaire, les nouvelles exigences imposées par le régime pédagogique demandent, elles aussi, ce que les heures d'enseignement augmentent et surtout que la présence des enseignants à l'école soit réelle afin de permettre qu'il existe à nouveau, comme par le passé, un contact plus direct, plus étroit et plus productif entre le maître et l'élève. Cet état de fait, à lui seul, à savoir ces contacts plus rapprochés, peut contribuer dans une très grande mesure à humaniser l'environnement éducatif des écoles pour le plus grand bien de tous.

Comme administrateurs généraux responsables de toutes les catégories de personnels à l'emploi des commissions scolaires, nous déplorons fortement que le décret soit tellement discriminatoire envers les enseignants en ce qui concerne les dispositions relatives à la sécurité d'emploi. Pourquoi cette différence aux dépens des enseignants, et à l'avantage encore des autres catégories de personnels? Le gouvernement peut-il la justifier? Dans ce cas, il faudra qu'on donne des explications très nettes, claires et précises, sans équivoque. Dans le cas contraire, si la justification ne peut se faire, alors, il faudra prendre les mesures requises pour rectifier

au mieux la situation en essayant de remettre tous les employés sur un pied d'égalité. Il ne s'agit en somme que d'une simple question de justice élémentaire. (20 h 30)

Il est à se demander, aussi, si la crise actuelle aurait pu être évitée. C'est une question qu'on se pose toujours en temps de crise. De même, il est évident que dans toute crise il existe toujours des torts de part et d'autre. La réticence initiale des enseignants à vouloir se mettre à table pour négocier ouvertement et raisonnablement, compte tenu surtout du contexte général de la situation économique actuelle, n'est pas justifiable. Comme administrateurs du bien public, les directeurs généraux ne peuvent pas non plus approuver de quelque façon que ce soit la grève illégale à laquelle les enseignants se sont adonnés sous prétexte d'avoir eu à subir des provocations intolérables. L'attitude rigide adoptée par les enseignants, surtout dès l'amorce des pourparlers initiaux, pour ne pas les appeler négociations, laissait présager une fois de plus qu'une confrontation était inévitable.

De leur côté, le gouvernement et le ministère de l'Éducation portent eux aussi de graves responsabilités, surtout et avant tout en ce qui concerne les bouleversements au sein du secteur de l'éducation. Nous n'hésitons pas à affirmer que personne n'a semé le plus la confusion dans le milieu de l'éducation que le ministère de l'Éducation lui-même. Il est en effet difficile d'imaginer qu'un service du gouvernement puisse songer à mener de front trois campagnes d'envergure sans pour autant disposer vraiment de toutes les ressources nécessaires à cette fin. Comment peut-on se permettre d'entreprendre une restructuration massive et radicale de tout le système scolaire, d'une part, et essayer d'implanter, d'une façon progressive certes, mais néanmoins dans un domaine fort étendu, un nouveau régime pédagogique de grande portée, d'autre part, alors qu'il faut en même temps mener des négociations d'un nouveau contrat collectif? Une telle stratégie peut être qualifiée de fort douteuse pour le moins, car l'envergure phénoménale des entreprises envisagées sape à elle seule toutes les énergies qu'il fallait déployer pour les mener à bonne fin et taxe à outrance les ressources disponibles, sans parler pour autant des résistances que la nature de ces entreprises n'a pas manqué de susciter.

Face à la résistance des enseignants à conclure une entente à l'amiable, le gouvernement n'a pas hésité à employer les grands moyens. Une fois de plus, fidèle à son habitude acquise de régner plutôt par force de loi que par force de persuasion, le gouvernement a adopté loi sur loi, dont la dernière, la loi 111, promulguée pour assurer le retour au travail des enseignants, dépasse quelque peu les bornes par sa sévérité à outrance.

Comme administrateurs, les directeurs généraux sont les premiers à reconnaître que les contrats en vigueur protègent les enseignants à tel point qu'il est fort difficile, très onéreux et parfois impossible, sinon inutile, de vouloir envisager des sanctions efficaces contre eux. Pour briser ce carcan protecteur, il faut avoir recours à de fortes mesures pour pouvoir appliquer des sanctions. Mais il y a sanction et sanction. En général, il est reconnu que la loi 111 est trop sévère, d'une part, et, d'autre part, qu'elle s'attaque à la dignité humaine. Elle offusque et effraie. Il faudra sérieusement songer à l'amender sous certains rapports.

Les lois et décrets en vigueur imposent aux directeurs généraux des obligations qu'ils se doivent d'assumer. Il est donc nécessaire, sinon impératif, que dans les meilleurs délais, ils sachent clairement à quoi s'en tenir. Il est bon de discuter et de chercher à trouver des solutions, mais, du point de vue du moment, la commission parlementaire actuelle est fort mal placée. Les directeurs généraux doivent respecter dès maintenant les obligations contractuelles qui ne peuvent attendre, à moins de mettre en danger l'année scolaire 1983-1984. Ces obligations concernent le transfert du personnel, l'affectation du personnel, l'établissement des programmes d'études pour 1983-1984, la mise en disponibilité.

Pour nous, le décret est en vigueur et de rigueur. Il impose des délais qu'il faut respecter et nous agissons en conséquence car nous connaissons les répercussions qu'un manque d'obtempérer de notre part entraînera, à long terme. En effet, si les syndicats, de leur propre initiative, choisissent par exemple d'ignorer la loi, pour des raisons spécifiques, ils ne tolèrent jamais, et en aucun cas, que l'administration enfreigne une quelconque règle ou exigence du contrat en vigueur, aussi minime que cette infraction soit. Une simple erreur de procédure de notre part ou une simple omission de date limite imposée est tout de suite sujette à sanction car elle entraîne ipso facto un dépôt de grief. Les directeurs généraux sont conscients de cette intransigeance des syndicats et connaissent les conséquences néfastes qui peuvent en résulter pour les commissions scolaires. Ils se plient, de ce fait, aux exigences. La programmation est en cours et en cette période d'année, tout changement majeur envisagé ou suggéré peut avoir des répercussions fort malencontreuses sur l'année scolaire à venir. Il faut essayer d'éviter l'anarchie et le désordre. Cela peut se faire et la bonne volonté que la commission parlementaire semble déjà avoir engendrée de part et d'autre peut contribuer à sauvegarder l'année scolaire en cours.

Les directeurs généraux implorent les enseignants de renoncer à reprendre la grève et de rester en classe jusqu'à la fin de l'année scolaire. Ils implorent les représentants syndicaux à se montrer raisonnables et se déclarer prêts à discuter sur les modalités de règlement possibles. Ils implorent le gouvernement de se montrer conciliant, de se résigner à amender certains passages de la loi no 111 et d'étudier de près et de concert avec les représentants syndicaux les points litigieux qui demandent à être réglés.

Il serait peut-être bon aussi que, de part et d'autre, on s'inspire de l'étude du Conseil supérieur de l'éducation sur l'impact du décret sur le système scolaire, dont la publication est prévue pour la fin mars. Il pourrait en résulter des améliorations sensibles pour les années à venir. Il nous faut la paix en classe. Faisons tout en notre pouvoir pour la faire régner. Merci.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.

M. Laurin: M. le Président, je voudrais remercier très sincèrement les directeurs généraux des commissions scolaires protestantes du Québec pour leur mémoire.

Ils jouent dans les commissions scolaires protestantes un rôle analogue - c'est-à-dire un rôle cible, un rôle clé - à celui que jouent les directeurs généraux des commissions scolaires catholiques. Je ne veux pas reprendre les remarques que je faisais à cette occasion. II est donc très important d'accorder une très grande attention à ce qu'ils viennent nous dire ce soir.

Je crois remarquer que ce mémoire se situe sous le signe de l'urgence des solutions à apporter. Je pense que M. Fox nous a très bien expliqué les contraintes auxquelles les directeurs généraux et les commissions scolaires sont soumis et à quel point il est important, surtout face à cette intransigeance syndicale dont il a parlé et qui est sans pitié, à quel point il est important d'aider les directeurs généraux à voir clair dans les actions qu'ils doivent poser et à prendre les décisions qui s'imposent.

C'est bien la raison, d'ailleurs, pour laquelle nous voulons reprendre, dans les plus brefs délais, les négociations avec les syndicats. Et c'est pourquoi il est important aussi de les mener à terme, dans les plus brefs délais possible. Nous sommes au début de mars et je sais, en effet, qu'on ne saurait guère dépasser la fin de ce mois avant de connaître clairement les décisions qu'il y a à prendre. Et je peux assurer M. Fox que nous ferons l'impossible pour en arriver à poser ces mesures, surtout pour en arriver aux conclusions heureuses que nous en espérons.

Je note au passage que les directeurs généraux approuvent que nous fassions passer de 23 à 25 heures la durée de présence des élèves au cours primaire. Je connaissais évidemment une des raisons fondamentales pour lesquelles les directeurs généraux des commissions scolaires protestantes avaient cette opinion, comme, par exemple, un meilleur enseignement de la langue seconde. Je pense que l'enseignement des spécialités, de toutes les spécialités, et un meilleur apprentissage des sciences fondamentales nous imposent d'aller dans cette voie.

Je suis heureux de noter que les directeurs généraux veulent, souhaitent que la présence des enseignants soit davantage effective auprès des élèves et que cette présence soit plus longue que celle qui existe actuellement. La raison principale que les directeurs généraux nous donnent est au fond la même que celle que la Fédération des commissions scolaires protestantes nous donnait il y a quelques heures, c'est-à-dire l'établissement d'une meilleure relation éducative entre enseignants et enseignés, relation éducative davantage humanisée et qui tienne compte de tous les besoins des élèves, non plus seulement de leurs besoins intellectuels, de leurs besoins d'apprentissage, mais également des besoins qui tiennent à ce que nous avons affaire à des personnalités en formation qui ont besoin d'un apport constant, riche et soutenu de la part des adultes, les enseignants, qui ont décidé de se donner à leur éducation. Je pense que nous pouvons être facilement d'accord avec ces raisons.

J'ai noté aussi le plaidoyer vigoureux et chaleureux en même temps que nous font les directeurs généraux lorsqu'ils nous demandent de modifier en profondeur le régime actuel des négociations. Je suis bien d'accord avec eux lorsqu'ils disent qu'il est temps de substituer à cette confrontation, qui semble la marque de commerce de notre régime de négociations, une méthode de négociation qui nous permette d'une façon permanente, mais dans un esprit différent, d'améliorer notre système d'éducation. C'est peut-être là que se situerait la seule question que je voudrais poser: Vous dites que si des changements s'imposent, qu'on s'évertue à les réaliser au fur et à mesure sans pour autant interrompre les cours des élèves. Est-ce que cela veut dire que vous suggéreriez au gouvernement, dans ce nouveau régime de négociations, d'interdire les grèves ou d'en aménager la durée, ou même l'existence, selon des mécanismes nouveaux?

Le Président (M. Jolivet): M. Fox.

M. Fox: Je n'irai pas aussi loin que de dire que vous devriez supprimer le droit de grève. C'est une question politique dont le gouvernement devra décider. Je crois que si nous avions un contrat ouvert, au lieu d'avoir

ces corridas régulières de négociations où tout le monde s'en va de Montréal à Québec, de Québec à Montréal, remplit les hôtels et discute jusqu'aux heures creuses du matin, si nous avions pendant toute la période de l'année une équipe d'experts de part et d'autre qui travaille ensemble sur des points cruciaux... (20 h 45)

S'il n'y a pas entente sur ces points cruciaux, il se pourrait bien qu'il y ait, à un moment donné, une menace de grève ou deux, mais au moins, vous voyez ce que je veux dire, il n'y aurait pas cette répétition qui est devenue presque chronique. Tous les trois ans, on peut s'attendre qu'il y ait une grève quelconque d'une durée plus ou moins longue ou plus ou moins courte. J'aimerais qu'on évite ceci. Par exemple, dans la politique administrative et salariale du gouvernement, vous avez avec vos administrateurs des discussions au fur et à mesure que les problèmes se posent; vous avez des discussions pour l'amélioration des conditions de travail. Non pas qu'elles aient été couronnées de succès récemmment, parce qu'ils étaient les seuls à avoir subi une baisse de salaire, mais enfin cela se verra parce que quand même, entre le gouvernement et les administrateurs, il existe une certaine entente tacite où l'on peut, au cours de comités de concertation, discuter des conditions de travail.

Je crois que cela pourrait très bien se faire avec les enseignants aussi parce que, justement, un des grands torts est le fait qu'il y a toujours des victimes quand il y a des conflits. On évite à tout prix des conflits en en discutant honnêtement ensemble entre gens de bonne volonté qui sont comptétents dans ce domaine-là.

M. Laurin: Il reste, M. Fox, ce que vous avez dit dans votre mémoire, qu'il ne faudrait jamais que les cours soient interrompus. Étant donné qu'il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée, j'aimerais savoir ce que vous aviez dans la tête à cet égard? Même si la question du droit de grève est une question politique, est-ce qu'il y a quand même des suggestions qu'un organisme comme le vôtre pourrait nous faire à cet égard?

M. Fox: J'ai quelque peu confiance en la nature humaine et je crois que si les discussions se font de façon régulière et qu'elles se font au fur et à mesure sur certains points, au lieu de se faire sur l'ensemble d'un nouveau contrat, on pourrait éviter d'avoir ce grand achalandage d'articles à étudier et ainsi de suite. De ce point de vue-là, sur beaucoup de points, il y aura tellement d'ententes et de compréhension mutuelle qu'on pourra très bien éviter une grève. Quand cela se fait comme cela, c'est moins qu'un front commun qui se réunit, ce sont des groupes plus petits qui discutent de questions plus précises qui peuvent très bien être mises, à un moment donné, en conciliation devant une troisième personne. Je crois qu'on éviterait ce "show-down" entre les deux parties.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: M. le Président, le mémoire de l'Association des directeurs généraux des écoles protestantes nous a été présenté avec vigueur et clarté par M. Fox, qui est le directeur général des écoles protestantes de l'agglomération montréalaise. Je l'ai écouté avec d'autant plus de plaisir qu'il m'arrive assez souvent de recourir à lui pour obtenir des informations, qu'il me fournit d'ailleurs toujours avec une efficacité exemplaire.

Nous n'avons pas les mêmes opinions sur tous les sujets, nécessairement, mais je suis toujours heureux de pouvoir recourir à la collaboration de M. Fox et de ses collègues, qu'il m'arrive de rencontrer de temps à autres, d'ailleurs, à des réunions ou à propos de problèmes qui nous intéressent en commun.

En général, je pense qu'il y a un très bon climat. Parfois la presse ne donne pas cette impression. Si on se fiait seulement aux articles qui paraissent, dans la Gazette par exemple, on serait sous l'impression, parfois, qu'il y a un état de guerre perpétuel entre le monde anglo-protestant de l'éducation et le ministère de l'Éducation et peut-être même le reste du Québec.

En fait, il y a des démarches qui ont été faites qui donnent cette impression-là aussi parfois, mais je pense qu'il y a quand même un certain nombre de points sur lesquels, dans la vie quotidienne, il existe une collaboration qui n'est pas négligeable. Je suis heureux de le souligner aujourd'hui, du moins en ce qui me concerne.

Je voudrais ajouter à ceci que dans les remarques que vous avez faites, le ministre a eu un petit glissement freudien, peut-être. Il a noté surtout les remarques que vous avez faite à propos de la rigidité des syndicats. Il a semblé oublier les remarques semblables que vous avez faites à propos de la rigidité gouvernementale. Je sais que c'est un oubli parce que connaissant...

M. Bertrand: ...

M. Ryan: Vous m'obligez toujours à faire des choses désagréables. Je note bien que vous avez, en bons administrateurs prudents du secteur public que vous êtes, veillé à distribuer les torts des deux côtés, de manière à pouvoir continuer de parler avec les deux côtés demain. Il n'y a pas de problème là-dessus, je pense que tout le

monde convient, à mesure que nous avançons, qu'il y a des redressements d'attitude qui s'imposent de part et d'autre. Quand on est plongé dans un conflit comme celui-là, c'est impossible que tous les torts soient du même côté. Je suis content de voir qu'on s'en va vers cette attitude qui servira sans doute à préparer un règlement.

Vous avez parlé de la loi 105 et de la loi 111. À cet égard, j'ai trouvé que votre jugement n'est peut-être pas assez sévère. Vous dites que la loi 111 dépasse quelque peu les bornes. Dans notre jugement, à nous, c'est beaucoup; pas seulement quelque peu, c'est beaucoup. C'est sans doute ce que vous vouliez dire, mais on le complétera volontiers puisqu'on n'a pas les mêmes contraintes psychologiques.

M. Fox: Je dis quand même, M. Ryan, qu'elle effraie et qu'elle offusque.

M. Ryan: Je retiendrai surtout cet extrait. J'avais été frappé par l'extrait précédent.

Vous dites ensuite qu'il faudrait sérieusement songer à l'amender sous certains rapports. J'espère qu'on arrivera avant longtemps à un stade où on pourra l'effacer de nos statuts. Si on pouvait l'effacer complètement des statuts du Québec, je pense que ce serait une chose encore bien plus intéressante pour tout le monde. En tout cas, c'est un des objectifs que nous poursuivons du côté de l'Opposition. Nous ne voudrions pas que cette loi reste dans nos statuts de peur qu'elle serve d'inspiration à d'autres gouvernements un jour. Tout ce qu'on peut faire pour favoriser un règlement peut peut-être, en même temps, favoriser parallèlement un semblable dénouement qui nous resituerait dans la vraie tradition des relations du travail que nous avons au Québec, qui a été une tradition de résolution de conflits difficiles par le recours aux moyens démocratiques de la négociation et de la persuasion.

Il y a une chose que vous avez dite qui nous intéresse vivement. Vous trouvez que le ministère de l'Éducation en prend trop. Vous avez évoqué les trois grandes opérations qui caractérisent la présente année. Il y a l'instauration du nouveau régime pédagogique au primaire et au secondaire. Il y avait la négociation collective qui était un immense rendez-vous cette année. Il y avait en plus le projet de restructuration scolaire.

Est-ce que vous ne trouvez pas, étant donné les traumatismes que nous avons vécus ensemble ces derniers mois, étant donné que la présente année scolaire est quand même très avancée, qu'il faut consacrer beaucoup d'énergie à préparer administrativement la prochaine année en fonction des échéances que vous avez mentionnées et qui sont très prochaines, que si le débat du fond sur cette question était reporté à une autre saison, cela nous permettrait d'avoir toutes les énergies voulues pour faire face au défi immédiat que posent à la fois la solution du problème du travail qui n'est pas réglée encore et la mise en place, dans les meilleures conditions possible, du régime pédagogique?

Au sujet du régime pédagogique, j'aimerais que vous nous donniez quelques précisions sur la manière dont cela se présente du côté protestant. Du côté catholique, nous avons déjà certains éléments, ce n'est pas complet; mais du côté protestant, j'entends souvent dire, par exemple, que les nouveaux programmes ont été conçus surtout dans une mentalité souvent étrangère à la mentalité anglo-protestante. J'entends dire qu'ils ont été rédigés souvent uniquement en français, que les traductions anglaises tardent à venir et que, dans bien des cas, ce sont des traductions plutôt que de l'adaptation véritable. Je voudrais que vous me disiez, au point de vue des guides pédagogiques qui doivent être les premiers instruments à la disposition des administrateurs et des éducateurs pour préparer les changements, où vous en êtes. À la lumière de tout cela, comment voyez-vous l'autre défi qui nous a beaucoup occupés au cours de l'automne, sur lequel, heureusement, le ministre a fait le silence depuis un certain temps?

Le Président (M. Jolivet): M. Fox.

M. Fox: M. le député d'Argenteuil, comme vous avez dit que nous ne sommes pas toujours d'accord, je ne vous apprendrai rien de neuf en disant que le ministre de l'Éducation et moi-même ne sommes pas toujours d'accord non plus. Ma femme et moi ne sommes pas toujours d'accord non plus. Cela fait de nombreuses années que nous demeurons ensemble. De bonnes divergences d'opinions font de bonnes relations parallèles et de bonnes relations réciproques.

En ce qui concerne le régime pédagogique, dans le secteur protestant, je ne dirai pas que les traductions sont en retard parce que la Commission des écoles protestantes de l'agglomération de Montréal a le contrat de les traduire et nous avons traduit presque tous les programmes. C'est un contrat que nous avons avec le ministère de l'Éducation parce que, comme vous l'avez dit, c'est une de nos objections. La préparation des programmes a été faite entièrement en français et nous sommes obligés de traduire ces programmes du français à l'anglais. Les programmes devaient d'abord être traduits par des services extérieurs. Cela ne fonctionnait pas très bien. Quand on nous a demandé si nous étions intéressés à prendre le contrat, nous n'avons pas hésité à le faire parce que,

justement, au lieu de les traduire tout simplement et bêtement, nous pouvons aussi les adapter. Avec le contrôle du service du ministère qui est très bon, excellent, nos rapports, de ce point de vue, sont excellents et nous avons réussi à en traduire la majorité. Je crois que presque les deux tiers sont maintenant traduits en anglais. Je crois que le ministère a des difficultés à les faire imprimer, mais c'est son problème, ce n'est pas le nôtre. Avec les guides pédagogiques, nous allons sans doute suivre le même procédé.

Je vous le dis franchement, nous avons accepté de traduire ces programmes non pas parce que nous sommes d'accord qu'il faille les traduire. J'aurais préféré qu'on puisse les créer nous-mêmes, même s'il est mieux d'avoir la main dans la pâte que de ne pas voir le pétrin.

M. Ryan: C'est une question qui m'était suggérée. Est-ce qu'il vous aurait donné un contrat pour traduire le journal qu'on a reçu vendredi?

Des voix: Ah!

M. Fox: Non. Nos contrats sont des contrats pédagogiques.

Le Président (M. Jolivet): D'autres questions?

M. Ryan: Oui, j'ai une autre question, M. le Président. L'explication sur les échéances auxquelles vous devez faire face prochainement, vous mentionnez cela au bas de la page 6 de votre mémoire.

M. Fox: Oui.

M. Ryan: Vous dites que les directeurs généraux doivent respecter dès maintenant les obligations contractuelles qui ne peuvent attendre à moins de mettre en danger l'année scolaire 1983-1984 à venir, les obligations concernant le transfert du personnel, l'affectation du personnel, l'établissement des programmes d'études pour la prochaine année, la mise en disponibilité. Pourriez-vous expliquer un peu dans quel cadre de contraintes vous évoluez et les exigences que vous poseriez au gouvernement au point de vue de ces échéances?

M. Fox: Ce sont mes voisins de gauche qui me harcèlent sans cesse, c'est-à-dire les directeurs d'école, les principaux, qui veulent savoir comment programmer, quel genre de programmes, l'emploi du temps qu'on pourra utiliser. Pour nous, ce serait le décret. Donc, nous étudions la question de la programmation de 6-7 ou 7-6, c'est-à-dire six périodes en sept jours ou sept périodes en six jours. Déjà, il y a controverse à ce sujet.

L'administration préfère le 6-7 et, naturellement, quand l'administration préfère le 6-7, les enseignants préfèrent le 7-6. La question est à l'étude.

Maintenant, vous parlez et on parle d'introduire progressivement le temps d'enseignement. Au lieu d'avoir 23 heures, ce sera 21, 22, 23. Là, de nouveau, vous nous donnez un casse-tête parce qu'il faudra, au cours des trois prochaines années, chaque fois, reprogrammer les écoles. Nous faisons cela maintenant avant avril de façon que nous sachions quels sont les enseignants à déclarer en disponibilité, en surplus, quels sont les enseignants qu'il faudra affecter à d'autres écoles et quels sont les enseignants qui voudront demander un transfert. Ceci se fait en mars, avant avril. Ceci se fait pour différentes raisons; après, les délais du contrat sont tels que ce n'est plus valable. Si vous n'avez pas prévenu avant le 1er avril, le contrat dit qu'à telle date ce doit être réglé. (21 heures)

M. Ryan: Cela veut dire qu'il faut que vous connaissiez sans faute, d'ici la fin de mars, les grandes lignes du régime contractuel qui vous régira l'an prochain.

M. Fox: Naturellement, nous allons programmer le décret tel qu'il existe. La charge de travail ne sera pas supérieure. Il est toujours mieux de pouvoir apporter des améliorations. En somme, si vous avez fait des réserves pour acheter une Cadillac et que vous achetez une Volkswagen, vous avez de l'argent de trop. Si vous avez fait des réserves pour acheter une Volkswagen et que vous achetez une Cadillac, vous êtes en dette. C'est ce que nous avons fait, c'est une façon pragmatique de voir les choses.

M. Ryan: Juste un dernier point. Je pense que vous n'avez pas répondu à la première partie de ma première question sur le programme de restructuration scolaire. Je vous ai demandé si vous croyez opportun que le gouvernement procède dès ce printemps à la présentation ou à l'adoption d'un projet de loi là-dessus ou si vous croyez qu'il serait préférable d'attendre au moins une autre saison.

M. Fox: Accepter trois campagnes de cette envergure de front, c'est sans doute mon entraînement militaire qui me dit que cela n'ira pas. Tu déploies trop de forces et tu es en position de faiblesse sur les trois positions. La première chose à régler cette année, c'est la question des négociations. La deuxième question à régler, c'est le régime pédagogique et l'implantation du régime pédagogique qui se fera progressivement. Il n'y a même pas d'objection majeure contre certains points du régime pédagogique, mais il y a des questions de fond qu'il faudra

étudier. Sans doute que mes collègues du côté catholique vous l'auront dit, les directeurs généraux; s'ils ne l'ont pas fait, ils auraient du le faire. Dans certains cas, les fonds ne sont pas assez disponibles pour commencer à se procurer tout le matériel nécessaire pour le régime pédagogique. Donc, il faudrait, là aussi, voir à une implantation progressive et la restructuration sera pour plus tard. Si vous voulez transformer une maison, vous n'allez pas enlever toutes les cloisons parce qu'elle risque de s'écrouler.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gaspé.

M. LeMay: Oui, M. le Président. Je sais que le temps s'écoule vite, M. Fox, et je ne voudrais pas poser des questions sur le fond de votre mémoire. Je suis d'accord sur beaucoup de points, mais je dois vous avouer mon ignorance: je ne savais pas que votre organisme existait avant cette commission parlementaire.

M. Fox: Vous savez, nous sommes tellement bons! C'est comme les bons élèves.

Les principaux ne connaissent jamais leurs bons élèves.

M. LeMay: J'aimerais quand même avoir des renseignements. Combien d'organismes représentez-vous ou combien de directeurs généraux? Ce serait peut-être plus juste. C'est une association de directeurs généraux?

M. Fox: Ce sont les directeurs généraux des commissions scolaires protestantes. Nous n'avons pas la quantité, mais nous avons la qualité; il y en a 25, en tout.

M. LeMay: Est-ce que la Gaspesia School Board est de votre juridiction?

M. Fox: Oui.

M. LeMay: Alors, j'en connais un!

M. Fox: Oui, vous en connaissez un.

M. LeMay: II y a une chose que je comprends difficilement et vous en parliez d'ailleurs tout à l'heure. Comment se fait-il qu'il existe deux associations de directeurs généraux? Pour moi, des enfants qui vont à l'école, cela veut dire des professeurs, des directeurs, des directeurs généraux; ils vont tous à l'école, qu'ils soient protestants ou catholiques. Pour les mathématiques, qu'ils soient protestants ou catholiques, deux et deux font quatre; pour moi, c'est la même chose. Pourquoi deux associations? Je comprends difficilement cela.

M. Fox: C'est une longue tradition.

Dans le temps, nous étions membres de la PAPT. Cela vous surprendra peut-être, mais la PAPT comprenait tout le monde: les directeurs et tout le monde. Et puis, peu à peu, cela s'est divisé. Beaucoup de nos membres sont aussi membres de l'ADIGECS. Moi je suis membre de l'ADIGECS. Je ne sais pas si M. Pennefather... Non, mais certains de nos collègues sont membres de l'ADIGECS. Vous avez deux systèmes scolaires au Québec et de ce fait nous avons certains problèmes qui sont différents et que nous discutons ensemble entre nous. Il y a de très bons rapports avec l'ADIGECS. Nous sommes vraiment une organisation locale de la QUASA, Quebec Association of School administrators. Nous payons notre cotisation à la QUASA et nous formons un petit abcès sur le côté; nous payons aussi une petite cotisation pour nous maintenir et nous nous réunissons une fois par mois pour discuter de nos problèmes spécifiques.

M. LeMay: Est-ce qu'il vous arrive souvent de faire front commun avec les directeurs généraux des commissions scolaires catholiques?

M. Fox: Oui, cela fait deux ans même que je suis membre de l'exécutif de l'ADIGECS. C'était un de mes rêves de voir une amalgamation des deux associations, mais il y a encore eu des hésitations. Cela viendra avec le temps.

M. LeMay: Merci.

Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Merci, M. le Président. M. Fox, à la page 4, vous avez dit: "Nous déplorons fortement par contre que le décret soit tellement discriminatoire envers les enseignants en ce qui concerne les dispositions relatives a la sécurité d'emploi". Pouvez-vous expliquer cette affirmation?

M. Fox: Écoutez, ce qu'il faudrait voir, c'est que comme directeurs généraux nous sommes responsables de tout le personnel, de toutes les catégories de personnel. Nous avons à gérer maintenant une catégorie de personnel qui bénéficie encore de la sécurité d'emploi à 100% alors que pour les enseignants, vous avez maintenant les 80% qui seront payés à la première année de mise en disponibilité, puis 50% et 50%. Je parle du décret. Si ce qu'on a dit en février se matérialise, ce sera 80%, 80% puis 50%. Donc, il y a une différence alors que d'autres catégories de personnel ont encore leur sécurité à 100%. Maintenant, il se peut très bien que le ministère...

Mme Dougherty: Voudriez-vous préciser

les catégories de personnel qui vont profiter de 100%?

M. Fox: Les professionnels non enseignants, le personnel de soutien et ainsi de suite.

Mme Dougherty: À la page 3, vous avez parlé des programmes de langue seconde dans les écoles protestantes et vous avez dit qu'il faut avoir les 1500 minutes pour avoir un programme adéquat. Est-ce que le décret présente des problèmes pour vos programmes de langue seconde, qui sont relativement intensifs? Est-ce que le décret vous donne assez de latitude pour l'épanouissement des programmes pour répondre aux attentes des parents?

M. Fox: J'aimerais revenir là-dessus. Cela fait trois ans ou quatre ans même que nous avons fait la demande pour avoir 1500 minutes de façon à pouvoir intensifier l'enseignement du français. On nous a dit: Vous pouvez le faire chez vous et il faudra que vous trouviez les moyens de le faire par vous-mêmes. Donc, ce qui n'était pas possible. Avec le décret, nous aurons les 1500 minutes de disponibles et je crois que nous pourrons très bien aménager les cours et répondre aux besoins des parents avec le décret.

Mme Dougherty: Sur le plan des ressources et sur le plan de l'organisation?

M. Fox: Là c'est autre chose. J'aimerais vous dire, d'une part, qu'en ce qui concerne l'enseignement du français langue seconde nous n'aurons pas de problème. En ce qui concerne l'enseignement de l'anglais langue seconde, il y a une certaine controverse qui existe entre nous et le ministère de l'Éducation, à savoir que nous n'avons pas le droit d'enseigner l'anglais langue seconde avant la quatrième année. Or, depuis plus d'un quart de siècle, il était notre habitude, dans le secteur franco-protestant, d'enseigner l'anglais de la maternelle jusqu'au secondaire V, tout comme nous enseignions le français de la maternelle au secondaire V dans le secteur anglais. Donc, je crois que ceci sera le sujet d'une comparution en cour. Je ne sais pas quelle sera la décision. C'est un des points de désaccord entre M. le ministre et nous. Mais ce n'est pas le décret, c'est le régime pédagogique qui impose cela, qui nous empêche d'enseigner l'anglais langue seconde à la...

En ce qui concerne les frais, il faudra naturellement s'adapter aux règles budgétaires, mais je ne crois pas, d'une part, à moins que... Introduire le programme est coûteux, parce qu'il nous faut nous procurer de nouveaux livres et ainsi de suite, mais à long terme, le programme de langue seconde intensive n'est pas plus coûteux qu'un autre programme.

Mme Dougherty: J'ai d'autres questions. En ce qui concerne l'enfance inadaptée, chaque fois qu'on a soulevé la question de l'enfance inadaptée ici pendant ces auditions, les représentants patronaux ont admis qu'il pourrait y avoir des problèmes, mais ils ont fait allusion en même temps à la possibilité de régler ces problèmes par le truchement des exceptions et non pas par le truchement de normes fixées dans la convention. Quelle est votre opinion là-dessus?

M. Fox: Je savais que j'allais avoir une question sur l'enfance inadaptée de votre part, parce que je vous connais déjà depuis notre association à la Commission des écoles protestantes dans le temps. Cela nous cause quelques problèmes. Nous sommes en train d'étudier une politique sur l'enfance inadaptée pour savoir exactement comment nous allons adapter la nouvelle politique à l'existence des programmes que nous avons maintenant. Je crois qu'il y aura certains problèmes. Je ne peux pas encore dire exactement, préciser la nature de ces problèmes, mais la situation sera moins bonne qu'elle ne l'a été jusqu'à maintenant, il n'y a aucun doute là-dessus, et ceci est dû en bonne partie à des restrictions financières plutôt qu'à des restrictions pédagogiques et autres.

Mme Dougherty: Une autre très courte question. Le décret mettra-t-il une certaine pression sur les commissions scolaires pour qu'elles ferment des écoles? Aura-t-il un impact sur la fermeture des écoles? Y aura-t-il une tendance à regrouper les enfants, surtout au niveau secondaire, pour appliquer le décret?

M. Fox: Je ne crois pas que ce décret fasse autant de différence chez nous qu'il en fera, par exemple, à la CECM, sans doute, et je vais vous dire pourquoi. Dans notre secteur, qui s'étend sur toute l'île de Montréal, il y a déjà un certain regroupement qui s'est fait au cours des années. De ce fait, je ne crois pas que le décret nous impose beaucoup de changements dans ce domaine. Je ne le pense pas.

Mme Dougherty: D'accord. Une dernière question. À votre avis, M. Fox, quelle est l'inquiétude la plus aiguë des enseignants, le point le plus litigieux pour les enseignants?

M. Fox: Je crois que M. Pennefather et moi sommes d'accord que ce serait la question de la sécurité d'emploi.

M. Pennefather (Bill): C'est le nombre

des enseignants en surplus à cause de l'augmentation de la charge de travail. (21 h 15)

M. Fox: Je vais vous dire franchement que beaucoup d'enseignants ne sont pas tellement contre une charge de travail plus grande. Vous savez, il y a encore un grand nombre d'enseignants qui se donnent à la tâche et qui ne rechignent pas sur leur temps. La sécurité d'emploi et la mise en disponibilité sont vraiment des cas de traumatisme pour certains enseignants. Mrs McGlashan et moi avions des controverses à ce sujet. Elle pense du point de vue humain, avec son coeur, et je n'ai qu'une pompe à bicyclette, je regarde cela du point de vue administratif et je dis qu'on doit envisager ces problèmes. Le traumatisme que l'enseignant éprouve n'est pas plus grand que celui que l'employé de Ford éprouve quand il est mis en disponibilité. Mais je sais que c'est là le plus grand souci des enseignants.

Mme Dougherty: À cet égard, croyez-vous que les mesures proposées par le gouvernement offrent des possibilités positives?

M. Fox: Écoutez, vous le savez, Mme Dougherty, et j'ai l'ai déjà dit, j'estime que, s'il y a un problème et qu'on l'explique d'une façon claire, nette et précise et qu'on donne tous les faits, on peut arriver à trouver une solution. J'estime qu'on a déjà fait un pas en avant puisque le ministère a soi-disant offert 80%, 80% et 50%. Il y a encore une différence; si elle ne peut pas être changée, alors elle devra au moins être clairement expliquée. Je suis d'avis qu'il ne devrait pas exister de position discriminatoire. Dans cette position discriminatoire, il n'y a que deux solutions, soit d'adapter les enseignants aux autres ou bien d'adapter les autres aux enseignants et nous donner les explications nécessaires. Je sais que l'explication est financière, mais pourquoi devrait-elle être plus forte du côté des enseignants que du côté des professionnels et du côté des employés de soutien, cela est à voir.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Fabre et adjoint parlementaire au ministre de l'Éducation.

M. Leduc (Fabre): L'un des objectifs recherchés dans les décrets, c'est l'harmonisation entre les régimes pédagogiques et les conditions de travail des enseignants. J'aimerais avoir votre opinion à cet égard sur certaines dispositions dans les décrets concernant, par exemple, la tâche globale qui est proposée, le temps de présence des enfants au secteur primaire qui est augmenté et la présence obligatoire des enseignants.

Le Président (M. Jolivet): M. Fox.

M. Fox: Je crois que je l'ai souligné dans notre mémoire. J'estime que la présence des enseignants, une présence plus intensive et plus régulière des enseignants surtout au secondaire - parce que vous n'avez pas ce problème au secteur primaire -la relation entre les enseignants du primaire et leurs élèves est très étroite et c'est le secteur primaire qui travaille vraiment beaucoup et est à la tête de ce... Mais, au secteur secondaire, il y a eu vraiment une détérioration, au cours des dernières années, dans la relation des élèves avec les enseignants et surtout par manque de présence. Beaucoup d'élèves se plaignent en disant: J'aimerais lui parler, mais il n'est jamais là - d'accord? - ou j'aimerais lui parler à elle et elle n'est jamais là. Je ne veux pas faire de discrimination.

Le Président (M. Jolivet): M. le député.

M. Leduc (Fabre): Je voudrais juste ajouter un commentaire. Vous vous dites d'accord avec l'esprit et le contenu des régimes pédagogiques, avec la nécessité d'harmoniser le régime pédagogique et les conditions de travail...

M. Fox: ...pas tout à fait dans tout, nous avons des réserves sur le cours d'histoire, nous avons des réserves... Mais enfin, en général, nous estimons que l'idéal de l'objectif du régime pédagogique est bon.

M. Leduc (Fabre): D'accord. Un simple commentaire. À la page 5, je vous trouve très sévère quand vous notez que le ministère de l'Éducation est le grand responsable des bouleversements dans le secteur de l'éducation. Vous l'accusez même d'être un semeur de confusion. Vous vous dites d'accord déjà avec deux de ses mesures: La nécessité de l'harmonisation entre les régimes pédagogiques et les conditions de travail et, d'autre part, il faut souligner, quant à la restructuration, que ce n'est qu'un projet annoncé, qu'il ne s'agit que d'un énoncé de politique et qu'il n'y a absolument rien qui soit en cours d'organisation ou d'implantation à l'heure actuelle. Donc, je trouve votre commentaire d'une sévérité vraiment inexplicable et injustifiable.

M. Fox: Je ne veux pas le justifier. Je vous dirai en toute sincérité que vous ne devez pas oublier que vous parlez du secteur protestant. Aucun secteur n'a été plus touché par la façon dont la restructuration a été annoncée, par une année d'incertitude: II y avait des fuites d'ici, de là, en plus des exigences de la loi 101 - mon Dieu, vous nous l'avez fait dire - d'après laquelle tout

le monde doit parler français, les transferts, les promotions, les mutations et les...

Le Président (M. Jolivet): Les affectations.

M. Fox: ...les affectations doivent se faire seulement si vous parlez le français et, maintenant on vous dit: Nous allons enlever les commissions scolaires, nous allons transformer le tout. Cela a créé un impact, cela a démoralisé beaucoup le personnel. Moi, comme directeur général à la commission des écoles protestantes, il a fallu que j'aie des rencontres avec le personnel de soutien, le personnel professionnel et le personnel cadre, de façon à leur expliquer quelle est la position de la commission scolaire et quel est son avenir. Je ne suis pas prophète mais je leur ai dit:... Il faudrait d'abord regarder le problème en face. Mais cela les a beaucoup affectés.

N'oubliez pas que le régime pédagogique, la restructuration, le décret, tout cela est lié. Parce que vous ne pouvez pas avoir un régime pédagogique sain si vous n'avez pas des enseignants capables ou qui veulent l'implanter, car la clef du régime pédagogique ce n'est pas le manuel, ce n'est pas le programme, ce n'est pas le programme cadre, le guide, c'est l'enseignant.

Vous ne vous rendez pas compte combien la question de la restructuration a affecté - en plus de toutes les exigences qui tombent sur notre secteur protestant - le personnel. C'est pour cela que je parlais peut-être un peu dur, mais je vous dis franchement que j'exprime - M. Pennefather va me soutenir - l'opinion de mes collègues qui m'ont dit de vous présenter cela très clairement.

M. Leduc (Fabre): Je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Au nom des membres de la commission je vous remercie. J'ai cru comprendre que le Québec Association of School Administrators était en même temps avec vous et qu'en conséquence les deux groupes... À moins que Madame ait quelque chose à exprimer. Mme McGlashan.

Québec Association of School Administrators

Mme McGlashan (Phyllis): Merci. Notre association représente plus de 500 cadres scolaires et cadres de services des commissions scolaires protestantes du Québec. L'association apprécie la possibilité que lui offre la commission parlementaire d'exprimer son avis sur la crise que traverse actuellement l'éducation dont le ministère de l'Éducation et les syndicats d'enseignants sont les principaux acteurs.

Pendant près d'un mois, nos élèves n'ont pas eu de classe. La raison: la grève des enseignants. Pourquoi? parce que le ministère et les syndicats n'ont pu s'entendre. D'une part, le ministère de l'Éducation qui, se basant sur les conditions économiques actuelles, ne peut voir d'autre choix que de décréter les conditions de travail des enseignants dans le cadre des ressources financières disponibles; d'autre part, les enseignants qui ne peuvent comprendre pourquoi ce sont eux qui subissent le traitement le plus dur de tout le secteur public et de tout le secteur parapublic. Même si certains secteurs ont subi des pertes de salaire, aucun ne s'est vu priver de sa sécurité d'emploi.

En tant qu'association, l'AASQ n'a pas été invitée à fournir des éléments dans la préparation de la loi 105, de l'offre du 10 février ou de la loi 111. Nos contacts n'ont eu lieu qu'avec les enseignants à leurs lieux de travail dans les écoles, plutôt qu'avec les syndicats aux tables de négociation. En tant qu'administrateurs, notre souci majeur est d'offrir à nos élèves la meilleure éducation possible. L'éducation dépend de l'interaction entre élèves et enseignants dans un milieu propice à l'apprentissage. Ce milieu peut être altéré si ceux et celles qui dispensent l'enseignement sont abattus par les décrets qu'ils jugent totalement négatifs, décrets qui coupent les salaires, accroissent la tâche et suppriment la sécurité d'emploi.

Si l'on ajoute à tout ce qui précède les dispositions de la loi 111, il y a un sérieux problème évident. Nous avons toujours prôné une communication significative qui permettrait de résoudre les problèmes.

Comme administrateurs, nous sommes entièrement d'accord pour une présence accrue des enseignants à l'école. Si l'éducation est le résultat de l'interaction entre élèves et enseignants, la présence accrue de ces derniers ne peut avoir que des effets positifs. Il fut un temps où les écoles surpeuplées n'offraient aux enseignants aucun endroit où préparer leurs cours et corriger les devoirs. Cas conditions de surpeuplement sont quasi inexistantes de nos jours.

Il est aussi fort difficile de convaincre les élèves du secondaire de se présenter avant le début des classes quand ils constatent que quelques enseignants arrivent à l'école après le début des classes ou qu'ils s'en vont avant la fin des classes. Une présence accrue des enseignants contribuerait sans doute à l'amélioration qualitative de l'éducation.

La plus grande souplesse dont bénéficieront les administrateurs en matière d'affectation et de mutation permettra d'offrir des programmes répondant mieux aux besoins des élèves. Une éducation de qualité ne dépend pas uniquement de l'ancienneté de l'enseignant. Le nombre moyen d'élèves par

classe établi par la commission permet également plus de souplesse pour répondre aux besoins des élèves. Cependant, il ne fait aucun doute que bien qu'il n'existe aucune définition absolue du nombre d'élèves par classe, plus grand est ce nombre, moins l'enseignant pourra consacrer de temps à chaque élève pris individuellement.

Il existe des solutions novatrices permettant de réduire le surplus de personnel, tels que les postes partagés, le plan de quatre ans sur cinq, la retraite anticipée. S'il était possible de réduire même davantage le surplus de personnel, nos élèves ne seraient pas privés des services de certains excellents enseignants, lesquels pourraient assumer leur rôle à temps plein. (21 h 30)

Comme administrateurs, nous espérons que l'argent accumulé à la suite des arrêts de travail reviendra à l'endroit où il serait le plus utile: dans la salle de classe. C'est là que se vit la qualité de l'éducation que nous prônons tous. C'est dans la salle de classe qu'il va falloir une longue période de paix et de stabilité pour se remettre du désordre des derniers mois et de ses séquelles.

Nous avons préparé quelques questions que M. Fava veut maintenant vous présenter.

M. Fava (Ron): M. le Président, j'ai le plaisir d'expliciter certains points soulevés par notre président. Dans les quelques minutes disponibles, j'aimerais être très clair sur notre position dans le débat actuel. Mlle McGlashan a mentionné que notre souci, comme administrateurs, est d'offrir à nos élèves la meilleure éducation possible, une éducation de qualité. Face à la situation que nous vivons maintenant, nous avons le désir de vous poser quatre questions pertinentes, auxquelles, nous l'espérons, la commission parlementaire pourra trouver des réponses qui permettront une solution amicale de cette situation. La loi 105 a créé une atmosphère, dans le secteur de l'éducation, qui était déplorable du point de vue des enseignants et enseignantes. Ceci a imposé plusieurs contraintes à la vie de l'école. Cette loi a eu clairement l'effet de laisser en question la qualité de l'enseignement dans les classes et dans les écoles de notre province.

Les deux points majeurs qui font partie du conflit actuel sont la sécurité d'emploi et les conditions de travail. Vu que la sécurité d'emploi est perçue comme un droit acquis, notre première question est: Si la sécurité d'emploi est un droit acquis, n'est-ce pas une façon d'entrer en négociation sans enlever une partie fondamentale de l'entente 1979-1982 signée entre le ministère de l'Éducation et les syndicats? Avec la loi 105, nous avons vécu dans un climat qui se détériore de jour en jour. Durant les semaines des décrets, la vie fraternelle dans les écoles a subi un autre coup désastreux: la loi 111, avec toutes ses implications qui sont perçues comme injustes. Encore un autre coup contre la qualité de l'enseignement dans nos écoles.

La deuxième question: Peut-on penser à amender certains articles de la loi 111 pour améliorer le climat et l'ambiance négatifs dans lesquels nous vivons actuellement dans notre secteur? Nous croyons que le Conseil supérieur de l'éducation est maintenant en train de rédiger un rapport concernant les effets des décrets sur la qualité de l'éducation dans notre province.

La troisième question: Est-ce possible de penser ou de demander que le ministère propose un délai à l'impasse que l'on vit pour recevoir les recommandations et formuler un plan d'action basé sur cette consultation? L'Association des administrateurs scolaires du Québec est convaincue qu'il est impossible de donner un enseignement valable dans le présent contexte.

Notre dernière question est la plus importante: Sans un contrat proprement négocié, d'après les critères du Code du travail, est-ce possible de demander aux enseignants et enseignantes de retourner en classe dans un climat qui favorise la qualité de l'éducation, voulue et si nécessaire pour nos étudiants qui sont, après tout, notre raison d'être?

Mme McGlashan: En conclusion, l'Association des administrateurs scolaires du Québec souhaite ardemment que la présente impasse soit résolue dans les plus brefs délais, qu'il nous soit accordé suffisamment de temps pour rétablir un climat de confiance dans le secteur scolaire public avant de songer à y introduire de nouvelles mesures ou de nouveaux changements. Merci.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.

M. Laurin: I want to thank, first, the Association for the good brief they have presented to us. It is true that some of the remarks made resemble, in many ways, those presented by other groups. It is no surprising, because the administrators of the protestant sector have similar problems to those of administrators in the other sectors. But just the same, there is a difference in emphasis, in accent that is very useful for us to understand.

Je note, au passage, que les cadres anglophones protestants sont aussi d'accord pour une présence accrue de l'enseignant dans les classes, qu'ils sont d'accord, aussi, pour l'introduction du critère de la capacité pour la mutation et l'affectation des enseignants, qui viendrait diminuer les inconvénients de l'application automatique ou exclusive du critère de l'ancienneté.

Je remarque, cependant, qu'ils

partagent les préoccupations des directeurs généraux sur un certain nombre de problèmes dont, par exemple, la loi 111 et la loi 105. Sur la loi 111, il est bien évident que le gouvernement n'aurait pas de plus grande satisfaction que de ne pas avoir à l'appliquer et même à la rappeler dès que la certitude sera acquise que la menace d'une grève qui se poursuivrait n'existe plus. Il est bien évident que, le cas échéant, votre satisfaction rejoindrait la nôtre.

Quant au rapport du Conseil supérieur de l'éducation, nous ne savons pas quand il nous parviendra. J'aimerais bien qu'il nous parvienne le plus tôt possible afin que nous puissions éclairer nos négociations à la lumière des exposés ou conclusions qui y seraient contenus. Mais je me rappelle, cependant, ce que M. Fox nous a dit tout à l'heure, c'est qu'il y a des contraintes maintenant qui deviennent de plus en plus pressantes. Des décisions doivent être prises. Il conviendra d'être le plus sage possible, tout en étant le plus rapide possible pour en arriver à un règlement négocié, car il est important d'avoir des règles du jeu très claires et d'avoir des conclusions dans le plus bref délai si nous voulons que la prochaine année scolaire puisse se préparer comme elle se doit le plus tôt possible.

Vous partagez aussi avec les directeurs généraux une inquiétude, une préoccupation en ce qui concerne la sécurité d'emploi. Je suis bien d'accord avec vous qu'il est toujours difficile de remettre en question ce que l'on peut appeler des droits acquis. Il reste qu'en période de conjoncture difficile -pour ne pas dire de crise - il arrive que certains groupes, certains organismes sont obligés de consentir à une révision de ce qu'on appelle les droits acquis en fonction d'autres impératifs, en fonction d'autres facteurs comme celui d'ajuster la dispensation des services à la capacité de payer de la collectivité ou, dans le secteur privé, à la rentabilité de l'entreprise, au maintien même des emplois. C'est malheureusement ce que groupes, organismes et même sociétés sont parfois obligés de faire.

Il reste, cependant, que le droit à la sécurité d'emploi n'est pas aboli par les décrets. Il est maintenu, mais son financement est diminué, ce qui n'est quand même pas tout à fait la même chose. Même l'aménagement du cadre de règlement prévoit que le financement de la sécurité d'emploi sera maintenant plus élevé que ce que prévoyaient les décrets, en décembre. Il est même prévu que, si nous avions la collaboration de tous pour l'application des mesures qui pourraient faciliter une meilleure utilisation des personnels de l'enseignement, ce financement de la sécurité d'emploi pourrait même atteindre ce qu'il était auparavant. Quant aux raisons pour lesquelles il a paru opportun de diminuer le financement de la sécurité d'emploi, je pense qu'elles nous sont maintenant assez bien connues. Je pense que la première raison, c'est la baisse des clientèles qui se poursuit depuis 10 ans et, d'une façon plus concrète encore, le clivage ou l'écart qui s'est agrandi entre le nombre d'enfants ou d'étudiants dans le secteur scolaire, nombre qui a diminué de beaucoup, et le nombre des enseignants ou des autres personnels, qui, lui, a diminué beaucoup moins.

On peut, peut-être, se permettre cet écart, ce clivage en période de prospérité, mais en période difficile, pour ne pas dire en période de crise, il est peut-être plus difficile de justifier cet écart surtout quand il a pour conséquence de mettre en danger l'existence ou le développement d'autres programmes qui s'avèrent particulièrement importants en période de crise par exemple, les programmes de soutien aux entreprises ou aux chômeurs, ou le maintien et le développement de programmes d'assistance que la conjoncture impose ou des programmes de création d'emplois ou des programmes de développement dans des secteurs importants pour le progrès d'une société, comme l'application du virage technologique.

Il existe donc des raisons, des impératifs qui peuvent expliquer certaines décisions douloureuses qui sont prises ou qui doivent être prises. Il reste que je reconnais le caractère difficile d'une mesure comme celle qui est prévue aux décrets pour la sécurité d'emploi. J'aimerais vous demander si, outre toutes les mesures prévues aux décrets ou en dehors des décrets, vous auriez des suggestions à nous faire soit pour atténuer ce problème ou soit pour le régler autrement que ce qui est actuellement prévu.

Le Président (M. Jolivet): Mme

McGlashan.

Mme McGlashan: I am thinking of the school where I work and the fact that we will have 15 fewer teachers in the building next year will mean that if the task is increased the classes will be covered but we will have fewer people who will be on duty throughout the school. And there are still, let us say, 21 entrances and exits to the building. We will probably loose one of three people who might be coaching the basket-ball team. We have many people on our staff who are involved in the extra curricular activities and, if these students or these teachers are removed from our staff, the other teachers cannot pick up any more than they are doing already. So the students are going to suffer to that extent as well. So if there is some way in which the number of staff members can be maintained plus relieving the teachers of the fact that they

are no longer going to be able to do the task that they are doing, in other words reducing the surplus, I think this will go a long way to resolving the problem.

M. Laurin: My question was: Do you have any more suggestions or more appropriate remedies than the one we have at the moment?

Le Président (M. Jolivet): M. Fava.

M. Fava: M. le Président, dans la commission scolaire où je suis directeur d'école depuis les deux ou trois dernières années, tous les professeurs qui étaient mis en disponibilité ont eu une tâche complète. On leur a donné des classes, on leur a donné du travail. Je pense que les enseignants craignent, avec les 80% et les 50%, qu'une fois mis en disponibilité ils n'auront pas de travail. D'une manière, il s'agit de dire: Si vous êtes mis en disponibilité, vous allez avoir une tâche éducative à compléter durant l'année scolaire. (21 h 45)

Le Président (M. Jolivet): Cela va? M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Quant à la même préoccupation, Mme McGlashan, M. Fava et les autres, pensez-vous que les différentes formules de résorption des enseignants mis en disponibilité peuvent contribuer à atténuer le problème? Est-ce que vous avez examiné les possibilités d'application de ces différentes mesures? Lesquelles vous paraissent les plus aptes à produire des résultats intéressants? Y a-t-il d'autres formules qui devraient être envisagées en plus de celles qui ont été proposées?

Le Président (M. Jolivet): Mme

McGlashan.

Mme McGlashan: I am not certain how many of these. I mentioned that these were interesting ways of trying to reduce the surplus. I have not any definite suggestions as for other ways in which the surplus might be reduced at the present moment, but I am certain that discussions with the teachers will produce other ways of reducing the surplus when the discussions are resumed.

Le Président (M. Jolivet): D'autres questions?

M. Ryan: Oui, j'aurais une autre question. Là-dessus, y a-t-il autre chose? Cela va? As I said before, our aim on this side of the table is not only to improve upon Bill 111 in any of its provisions, but to see to it that it is eventually deleted from our Statute Books because we would not like to keep this law in our Statute Books for fear that it might serve as an inspiration for this Government, in the future, or other governments which we are dreaming of for the near future. I think it is a goal towards which we can work and I was glad to hear the Minister suggest that even the present Government would not be against the concept of eventually wiping out this legislation if a satisfactory settlement can be arrived at. I deeply appreciated your insistance upon the concept that a negotiated solution is probably the only way to make sure that the central element in the entire educational system, the teacher, will be in the position to work with all the dedication, with all the enthusiasm that is expected of him if the system is going to work effectively. So I think this emphasis, which you put on this absolutely cardinal dimension of the whole problem is extremely important and deeply appreciated on both sides of this table.

I wish to express... Two bodies we have heard, as I suggested this morning, are rather biased on the management's side concerning the fundamental issues. I would not like any misunderstanding to arise among us on this respect, but I think it was presented. Your views were presented in a very constructive and serene spirit and because of that, I think they are a very fine contribution to our common search and I thank you very much for them.

Mme McGlashan: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: I have just one question for you. It is about the role that was imposed by law in Bill 111, the role of policeman that was imposed on the school boards and consequently, on the administrators to act as policeman in imposing the sanctions in relation both to the Labour Code and to Bill 111. I would just like to hear some comments about that and the effect it has on your relationship with your teachers?

Le Président (M. Jolivet): Mme

McGlashan.

Mme McGlashan: Fortunately, I should say there was no necessity in the school in which I work for administrators to play the role of policemen. We have not, at the present time, departed from our usual role as administrators of the school but we have not performed any of the actions of policemen so that problem has not arisen in relation to the teachers.

Mme Dougherty: Maybe Mr Fox would like to comment, but the threat is there, the obligation is there in law. I just wondered what an impact it has?

M. Fox: II est naturel que, dans ce cas-là, pour la commission scolaire, si les enseignants n'ont pas travaillé, ils ne seront pas payés. Ceci est clair, net, ordinaire. En ce qui concerne les sanctions, je ne crois pas qu'il soit du devoir de la commission scolaire d'appliquer des sanctions. C'est du devoir du législateur qui a voté la loi de prendre les mesures nécessaires pour que cette loi s'applique.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Je remercie donc les deux organismes de s'être présentés devant la commission. J'inviterais la Quebec Federation of Home and School Associations à se présenter devant nous.

Pendant que ces personnes se placent, je dois vous dire que, à la demande de la députée de Maisonneuve, un premier document, qui concerne la différence dans la hausse des clientèles du secteur privé et du secteur public, ainsi que les principales statistiques de l'enseignement privé subventionné, va vous être distribué. En deuxième lieu, une autre étude avait été demandée par Mme la députée de Maisonneuve, ayant trait aux coûts relatifs au double système d'enseignement de la langue seconde, ainsi qu'à l'intégration linguistique, qui avaient un effet sur les dépenses par étudiant au Québec par rapport à l'Ontario. Cette étude n'existe pas au ministère de l'Éducation, donc elle ne pourra pas être produite tel que demandé par la députée de Maisonneuve.

M. Ryan: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: ...puisque vous en êtes à ce chapitre des données qui avaient été demandées au ministère de l'Éducation, pourrais-je vous rappeler que j'avais demandé un rapport aussi substantiel que possible sur les coûts comparés de l'administration des ministères de l'Éducation au Québec et en Ontario?

Le Président (M. Jolivet): Nous allons faire faire les démarches par le secrétaire des commissions pour savoir où en est rendue cette demande.

Je demanderais à M. Owen Buckingham de nous présenter les deux personnes qui l'accompagnent et de commencer la lecture de son document.

Quebec Federation of Home and School Associations

M. Buckingham (Owen): M. le Président, c'est Mme Sylvia Rankin et M. John Gilmore.

The Quebec Federation of Home and School Associations welcomes the opportunity to speak before this Parliamentary commission tonight. As the majority of our members are English we will be presenting our statement in French and English. We are here to express the concerns of parents whose "vested interest" is the child and the quality of education to which he or she is entitled.

Mme Rankin (Sylvia): The Quebec Federation of Home and School Associations est heureuse d'avoir l'occasion ce soir de se présenter devant cette commission parlementaire sur l'éducation. Par respect pour la dualité de cette province, nous présenterons notre mémoire en français et en anglais. Nous sommes ici pour exprimer les inquiétudes des parents dont les "droits acquis" sont l'enfant, ainsi que la qualité de l'éducation à laquelle cet enfant a droit. Nous tenons à nous identifier et à nous placer dans le cadre du système d'éducation.

Home and School est le lien entre les principaux partenaires impliqués dans l'éducation de nos enfants: le parent et l'enseignant. Voilà la raison fondamentale de cet organisme, mais sa portée s'étend au-delà de ces limites puisqu'il vise à informer les parents et les enseignants dans le domaine de l'éducation et du développement de l'enfant. Ainsi, les parents peuvent aider à déterminer intelligemment la qualité de l'éducation que les enfants recevront au foyer, à l'école et dans la communauté.

La Quebec Federation of Home and School Associations est un organisme indépendant de parents, fondé en 1944 et incorporé par lettres patentes en 1959. Celles-ci ont établi officiellement dans la province des associations locales dans les écoles françaises et les écoles anglaises du secteur protestant. L'adhérence à notre organisation est volontaire. Nous avons des associations locales dans les écoles, des membres associés qui sont des familles à l'extérieur des écoles protestantes - les associés s'intéressent à l'éducation et appuient nos buts - et, enfin, des membres affiliés tels que comités d'école, commissions scolaires, etc. Les Home and School et les comités d'école s'entendent très bien et travaillent ensemble dans nos écoles.

La Quebec Federation of Home and School Associations appartient aussi à la Fédération canadienne des associations foyer-école et parents-maîtres et a des liens avec d'autres organisations à l'extérieur du Québec, telle l'Association parents-maîtres

de l'État de New York. Home and School a toujours été très active dans le domaine de l'éducation et cela, bien avant l'établissement du ministère de l'Éducation, mais encore plus depuis l'établissement du ministère. Home and School s'est impliquée dans les diverses étapes du développement éducationnel où nous avons essayé d'aider à former une opinion publique favorable à la réforme et à l'avancement de l'éducation de l'enfant.

Depuis ses débuts, l'éducation protestante au Québec a été caractérisée par le maintien des relations étroites entre l'école, les parents et la communauté locale. Historiquement, ces relations ont été parrainées par l'entremise des commissions scolaires, des Home and School, des visites libres et par le contact des enseignants avec les parents par l'entremise des élèves. Les éducateurs protestants ont alors cherché à travailler étroitement avec les parents. Les Home and School envoient des parents au conseil pédagogique de APEP-APEC. Nous avons aussi des liens avec le comité des services pédagogiques protestant du ministère de l'Éducation et avec le sous-ministre adjoint, dont le poste n'a toujours pas été comblé. Nous avons aussi des liens avec plusieurs autres associations dont l'énumération serait trop longue à faire ce soir.

From the telegram received from the Ministry, we were requested to respond to the following three topics: teacher workload, job security and quality education as they apply to the present situation. Quebec Federation of Home and School Associations wishes to make it clear at the outset that our membership has not been polled on this present dispute between the teachers and the Government. We have not compiled a document of statistics nor prepared a brief on how to solve the problems existing between the two parties involved. Rather, we are here representing parents who spend a great deal of time volunteering their services in the school itself. Our mandate as volunteers is to support the school system for the benefit of the children. These volunteers work closely with the teaching personnel and principals. The have expressed concerns about the relationship between teacher workload and quality education.

Dans notre télégramme du 6 février 1983 au premier ministre du Québec, nous avons dit: "Nous sommes très inquiets de constater une augmentation des heures d'enseignement sans une augmentation parallèle des heures de présence de l'élève à l'école (par semaine). Cet état de choses conduit à une réduction des services pédagogiques où les élèves auront moins d'accès à l'attention individualisée des enseignants. De plus, il y aurait un retranchement des services personnels aux élèves".

M. Buckingham: We are very concerned about the increase in class size. For example, in a typical secondary school with a staff of 75 teachers: the present teaching average is 1000 minutes and by the decree would go up 15% to 1150 minutes, an increase of 150 minutes per teacher, per week. By division alone, this would show that, for every seven and a half teachers, one teacher would have to be released. Without a change in pupil population, this school with 75 teachers would have to operate with 65 teachers. This reduction of 10 teachers will have to be handled in one or two ways or a combination of the two: remove some of the special classes with low numbers, certain options, optional subjects or raise the size of all regular classes and retain small special classes. Neither of the above will be maintained or improve quality education. (22 heures)

The loss of 10 teachers in a school cannot be compared to the loss of 10 employees in an industrial plant. We have been told that a reduction in the number of teachers at the school level is necessary to cut costs. What has the Minister done since 1976 to reduce costs within the central offices of the Ministry itself?

Also, it is our understanding that a maximum class size can be exceeded and that teacher will be compensated. The compensation for the teacher putting extra money in his or her pocket does not guarantee quality education but the children in that class, as the increased number of students means the teacher has less time for each individual student, for correcting, for giving him any extra help and all the normal functions of a teacher undertakes in the job.

When we come to job security, this is a difficult one for a volunteer organization. We are not professionals. This is a difficult area for an association representing, as we do, so many different families with varying degrees of job security or the lack thereof. For this reason, it has been impossible for us to reach a consensus whereby we could suggest the way to resolve this issue. One question which parents have asked us is: Why does the 80% - 50% formula for surplus apply to the elementary and secondary levels and not to other sections of the public sector?

Parents have accepted that there will be reductions in staff due to a natural decline in pupil population, but they are boggled at the fact of such a horrendous number of teachers declared surplus in one year. They translate this in terms of quality education: a drastic reduction in special services or a major increase in class size.

Mme Rankin: We have applied the term "quality education" in relation to the work load and job security topics, but we have not as yet given a precise meaning to the word "quality" in quality education.

The Oxford Dictionary defines the word "quality" as the degree of excellence a thing possesses. Quality in education is excellence where it favours the child and his individual development academically, socially and spiritually. The price we pay to achieve that quality of education in all levels of his or her schooling is an investment in the future of Québec and of Canada. Quality education is the major concern of the parents in this discussion.

Quality education cannot be bargained for or negotiated in a framework of confrontation. There must be something inherently wrong in the school system when the two parties in this dispute, the government - employer and the teacher-employee, cannot agree on what is best for quality education.

This is likened to the parent who has a sick child but he cannot diagnose the source of his illness. The doctor dismisses the parent's fears as unfounded, but the parent has a gut feeling that he is right. The child is sick and on further examination in a hospital finds his fears are substantiated. The prognosis for recovery is not good. There is little hope for a cure.

In the present employer-employee situation, the parent knows there is a sickness, he cannot diagnose it, the doctor has told him his fears are unfounded, but after further study and countless second opinions, the parent's fears about quality education being maintained and/or improved are substantiated. The prognosis for recovery is not good. The parent is helpless in his search for a cure.

We believe that quality education for the students can be achieved only in a climate of social peace and stability. The environment, the school, must be a happy one in which to learn.

Dans le télégramme du 16 février 1983 que nous avons adressé au premier ministre, M. Lévesque, nous avons déclaré: "Nous sommes contre l'imposition d'un règlement par décret, ce qui n'encourage d'aucune façon la paix et la stabilité dans l'école." Encore, le 1er mars 1983, dans un télégramme adressé au premier ministre, M. Lévesque, nous avons déclaré: "L'imposition d'un règlement par décret n'encourage pas un climat favorable à l'éducation." Nous exigeons que le gouvernement annule les lois 105 et 111 et se remette à la table des négociations et à défaut d'une entente négociée, que les deux parties acceptent la médiation et/ou l'arbitrage afin de résoudre cette question".

Learning must take place in a climate of social peace and stability. All of the conditions related to teachers' work must create an atmosphere whereby teachers are teaching and students are learning.

M. Buckingham: Law 111 has created an atmosphere of social unrest for the teachers, the parents and the students. The recent document received from the ministry "Auxiliary Services for Pupils - A Policy Statement, a document for consultation, page 24, states: "Finally, the existence of a guide for the Quebec Charter on Human Rights and Freedoms must be noted. The guide, published in 1981, was written for the benefit of the pupils. It is expected to have a definite effect on the role and place of pupils in the school."

Therefore, it is expected that teachers will be responsible for teaching the values of the Québec Charter of Human Rights as part of the auxiliary services provisions. As parents, we feel it is very difficult for teachers to do this when they hardly can fulfil this purpose while their own rights are denied.

At a recent public meeting of parents in Montreal, the President of the Central Students' Council of the Protestant School Boards of Greater Montréal remarked: "What the students learned by example from the passage of Law 111 was a poor lesson in government". The scope of Law 111 suggests that parents, as natural persons may be implicated as well, thus creating social unrest within the home. The child is emotionally caught up in this tangled web. This is particularly true in families where parents, as volunteers, are a vital part of the support system in the schools.

Mme Rankin: Dans son télégramme du 1er mars au premier ministre, M. Lévesque, la Quebec Federation of Home and School Associations déclara: "La suspension des droits et libertés de la personne décrétée par la loi 111 ne peut être acceptée par une société libre et démocratique".

Quality education involves a curricula which has a content suited to meet the needs of all levels of intellectual ability: the slow learner, the child with learning disabilities, the average student as well as the gifted and talented. The new curricula or "régimes pédagogiques" were imposed by decree. Grave concerns about its content and methods of implementation are topics of very serious discussion among school committees and Home and School Associations.

Clause 8-1.02 of the Law 105 decree states: "The provisions of this chapter are to facilitate the application of the Minister's regulations concerning the "régimes pédagogiques" and must be interpreted as such". This chapter refers to workload and

working conditions to which we have already spoken. Curricula at the Ministry of Education level removes the responsibility for curricula to be developed at the local level of the school board, where the needs and aspirations of the community are known.

Lastly, quality education is threatened by the impending legislation on school reorganization. We need not detail our concerns at this time. Suffice it to say that, when the Minister of Education attented our fall conference on October 16, 1982, our membership throughout the province told him that the proposed reform plan is unacceptable to our community. Our brief on The Quebec School - A Responsible Force in the Community to the sub-committee of the Superior Council of Education deals with the threat to quality education inherent in this plan.

M. Buckingham: These three major projects, the new curricula, the teacher-government negotiations and the proposed school reform plan, are linked and interwoven in such a way as to create a new social order for Québec. It is not a social order acceptable to the membership which Québec Federation of Home and School Associations represents. Is it any wonder that parents feel disillusioned and frustrated in their attempts to find a solution to problems in education?

Most parents in Home and School Associations view the issue of quality education being played out in a game-like fashion. Are the children merely pawns in this game called quality education? Can we be optimistic and trust the Government and teachers will reach a collective agreement which will bring peace and stability to our schools? Can we hope that once this settlement is reached that 1986 will not be the same thing over again? Is there a future for quality education in Quebec if all parties involved continue on with the same methods of negotiation?

Finally, the burden of responsibility for resolving the issue of teacher negotiations rests with both parties. Once again we urge that there be a fair and negotiated collective agreement. We would support mediation or binding arbitration to bring this situation to a satisfactory conclusion.

Quebec Federation of Home and School Associations makes this plea on behalf of quality education for the school children of Quebec and for the future well-being of this province.

Mme Rankin: Enfin, il incombe aux deux parties de résoudre la question des négociations sur l'enseignement. Une fois de plus, nous exigeons qu'il y ait une entente collective négociée et équitable. Nous soutenons le moyen de la médiation ou de l'arbitrage afin de résoudre cette question d'une façon satisfaisante. La Quebec Federation of Home and School Associations fait cet appel pour la qualité de l'éducation dispensée aux élèves du Québec, ainsi que pour le futur bien-être de la province.

M. Buckingham: Merci, messieurs.

Le Président (M. Jolivet): Avant de donner la parole au ministre, je voudrais dire au député d'Argenteuil, concernant les coûts comparés encourus au Québec et en Ontario pour la gestion et le fonctionnement des ministères de l'Éducation, abstraction faite des transferts aux commissions scolaires, aux collèges, aux institutions privées, aux universités et organismes extérieurs au gouvernement, qu'il n'y a aucune étude au-delà de ce qui a déjà été déposé sur la question. Cependant, une étude est en cours présentement et le ministère nous dit qu'il sera en mesure de vous en faire parvenir les résultats dans quelques semaines.

Mme la députée de L'Acadie.

M. Ryan: Je parlerai après Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Non, allez, faites. Si c'est en relation avec ceci, je parlerai après.

M. Ryan: C'est en relation avec ceci, oui.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Je n'accepte pas qu'on reporte cela de quelques semaines. Je trouve que c'est un peu exagéré. On pourrait au moins, extraire des documents budgétaires présentés à l'Assemblée nationale ici et à l'Assemblée législative de l'Ontario à l'occasion du dernier budget les principales données pour qu'on ait une première vue, quitte à ce qu'on mette une note en bas disant que l'étude devrait être complétée. Il me semble que ce serait assez curieux qu'on veuille nous faire croire qu'on n'a pas ces données. C'est la principale province voisine. C'est la province dont le gouvernement a invoqué constamment l'exemple et les données depuis que les travaux de la commission sont en cours et même avant. Il me semble que ce serait un aveu de faiblesse extrêmement lamentable de la part du gouvernement que de dire qu'il ne peut pas nous fournir des données aussi simples que celles-ci d'ici demain ou après-demain, quitte à ce qu'on les complète plus tard encore. Je peux difficilement accepter de vous exprimer quelque satisfaction que ce soit devant une réponse aussi évasive.

Le Président (M. Jolivet): Je refais

donc votre message, encore une fois. Mme Lavoie-Roux: Monsieur...

Le Président (M. Jolivet): Oui, Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Pour ne pas se laisser distraire par la suite, puisque nous en sommes à rendre compte de rapports qui ont été demandés, est-ce que ce serait possible d'obtenir du gouvernement une copie de tous les textes de la publicité gouvernementale qui ont été produits à la radio et à la télévision durant tout ce conflit ou cette période de négociations - appelons-la comme on voudra - avec le monde de l'enseignement?

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Laurin: Je pense que, pour ce qui est de la radio et de la télévision, c'est le Conseil du trésor qui devrait être saisi de cette demande, parce qu'il en était responsable. Quant à la publicité dont le ministère de l'Éducation a été plus immédiatement responsable, il ne s'agit que de publicité écrite. Je pense que c'est très facile de la réunir et de vous la faire parvenir.

Mme Lavoie-Roux: Celle-là, je l'ai. C'est celle à la radio et à la télévision.

M. Laurin: Pour celle-là, je pense que la demande devrait être faite au Conseil du trésor, parce que nous n'avions aucune responsabilité en la matière.

Le Président (M. Jolivet): Donc, en votre nom, je vais transmettre votre demande au secrétariat des commissions qui fera les démarches nécessaires.

Mme Lavoie-Roux: Espérons que cela ne prendra pas...

M. Laurin: On me dit qu'elle pourrait être disponible.

Mme Lavoie-Roux: Rapidement?

M. Laurin: Oui.

Mme Lavoie-Roux: Je l'apprécierais.

Le Président (M. Jolivet): Sur le mémoire de la Quebec Federation of Home and School Associations, M. le ministre. (22 h 15)

M. Laurin: Yes, I want to thank very much the Quebec Federation of Home and School Associations, an organization devoted to the liaison between parents and teachers for many years. I will have two questions to ask. The first: When you wrote your brief, particularly when you discussed the problem of the teachers, work load and in the example you gave, did you take into consideration the frame of agreement that was presented on February 10th'. If you take Bill 105 as it was adopted in December and the framework which was presented on February 10th, we arrive at different figures for the three consecutive years. So, I wanted to know if, in this discussion of the teachers, work load, you took into consideration Bill 105 only or if you did take into consideration the combined effect of Bill 105 and the framework of February 10th.

M. Buckingham: When we talked to the parents concerning this, we had to make the assumption that right now, there has been no agreement on the offer. Therefore, from the parents' point of view, it would seem that the decree would come into effect. We have explained to the parents that if the decree comes into effect, the figure I have given is 15%. If the offer comes into effect, it is basically about one third of that, over three years. We have mentioned that, that point has been made to our parent group, but from a parent group point of view of volunteers, we have to make the assumption that until an agreement is made, parents feel that the decree is what is going to take place next year. That is what they are worried about.

M. Laurin: So you did not take...

M. Buckingham: As a volunteer group, at the association, we do not have the time, we are reporting the feelings of our parent group rather than giving any answers.

M. Laurin: So, the extrapolations you made come directly from Bill 105 as it was adopted.

M. Buckingham: That is right.

M. Laurin: You tell me that you had neither the time nor probably the expertise to come to very definite figures on the impact, on the effect of the frame of agreement concerning the teachers' work load.

M. Buckingham: No, what I said is that we explained it to them both ways. If the offer was accepted the way it is there, it would go up by 50 minutes, 50 minutes and 50 minutes, therefore, one third of the time... If we talking 15% - we are talking about 100 teachers in the secondary schools - the way we explained it to the parents is: Under the decree, the 100 teachers will be reduced to 85. We also explained that if the

offer was accepted, the 100 would not be reduced to 85, it would be reduced over a period of three years by approximately one third. It was explained to the parents that way.

M. Laurin: Regarding Bill 111, you speak at length about the possible effects of this law on the morale, on the climate in the schools, but I am a little surprised that you did not mention the other side of the argument, for example, how this law came to be adopted, why, in what conditions. Do you agree with the illegal character of the strike? Do you agree that such a strike doubly illegal did jeopardize and did threaten the academic year of the students and threaten to suspend really the right of the children to have education, according to the Charter of Human Rights? You did not discuss the possible conflict between a fundamental right in the Charter of Human Rights, the right to education and the right to strike, the right to associate and the other rights of the Charter. I am surprised that you alluded only to one side of the question and not to the other side.

M. Buckingham: We were not alluding to one side of the question or the other side, we were alluding to one clause. We are pointing out, in Bill 111, the biggest objection our parents have expressed to us is the one clause which takes away the rights of people under the Québec Charter of Human Rights. That is what we have alluded to in our brief.

As far as condoning an illegal strike, we would have to move back further into Bill 70, what caused the illegal strike. Our parents want their children back in school. They probably would not condone an indefinite illegal strike. We have not polled our parents to find out if they agree to the type of strike that has been going on. What we do know is that the way we reported it in the one aspect of that Bill 111, that aspect is what our parents have objected to the most.

M. Laurin: Do you not think that if this question is important - and it is - we have to consider this question not in abstracto, but in a continuum that goes from its initial stages from the beginning to the end which we may all be deploring together? But to do justice to the facts and to the parties concerned, do you not think that we have to take into account all the factors that have been contributing to a degradation of the situation?

Le Président (M. Jolivet): M.

Buckingham.

M. Buckingham: If a legislation was required or is required to bring the teachers back from an "illegal strike" - in quotation marks - if legislation was required...

M. Laurin: Why do you say "quotation marks"?

M. Buckingham: Because I am calling it an illegal strike.

M. Laurin: Is it because you have some doubts that it was illegal?

M. Buckingham: No. It is an illegal strike. That has been established that they are out on an illegal strike. If legislation was required, my parents group do not feel legislation as strong as Bill 111 was required to put them back in the classroom. It did not put them back in the classroom to start with. It put them back in the classroom two or three days probably after. So the parents group that we represent feels that a decree or legislation may have been needed to send teachers back in the classroom, but a bill such as Bill 111 was not needed.

M. Laurin: OK.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Oui, avec plaisir, M. le Président. Je voudrais, tout d'abord, dire aux dirigeants de la Quebec Federation of Home and School Associations, qui sont ici, qu'il nous fait plaisir de les recevoir dans le contexte de ce mandat qu'accomplit la commission de l'éducation. Le "Home and School Movement" accomplit au Québec, depuis déjà très longtemps, un travail dont il m'a été donné de prendre connaissance à maintes reprises dans le passé. J'ai eu l'occasion d'avoir des rencontres avec votre association, soit au plan local, soit au plan de tout le Québec, à différentes occasions. J'ai toujours constaté que vos associations reflétaient un intérêt très actif des parents pour le travail de l'école et qu'elles avaient en retour réussi à établir, avec l'école, des liens de collaboration qui sont apparus excellents.

Je voudrais vous poser une première question pour nous aider à mieux comprendre le système de relations dans lequel vous évoluez. How do you relate to school committees, to parents committees and to the Federation of Parents Committee which we heard this afternoon? Is there any relationship at all at each level? How does it work?

Mme Rankin: At each level? So, we start with the school committees?

M. Ryan: Yes.

Mme Rankin: On a local level, the Home and School and the School Committees work very closely together. In some instances, the members of the school committee are the same members as the Home and School Associations. Their meetings are held jointly, which simplifies things for the administration. It means that they do not have to go to two meetings when one will suffice. We have an excellent rapport with our regional parents committee. We have no problems on a regional basis. I think on a provincial basis, there are continuing differences of opinion, not necessarily between us but between individual parent committees and the central FCPPQ. On the West Island of Montreal, the regional parents committee has cautioned Mr Pontbriand that he does not speak on their behalf on several occasions, that several of the assumptions that he makes are not necessarily those of the people in our sector.

As far, as I said, on a local basis we get along extremely well, on a regional basis we get along extremely well. On a provincial basis is there much..?

M. Buckingham: On a provincial basis, the Quebec Federation of Home and School Associations is not involved with the FCPPQ. The thing that we find is happening is that many local school committees will receive from Mr Pontbriand's group a statement of policy which they have never seen or heard of and there are a number of schools both on the French and English side now in the process of writing letters back saying they have never heard of this statement and how did he make it?

When it comes to the provincial section, our association is strictly a volunteer association. So, as a volunteer association, we are not in any way connected with that group. At the local level, as Mrs Rankin said, is where we have good cooperation as a home and school and school committee. Local and school board levels.

M. Ryan: There is great interaction, to say the least, at the local level?

Mme Rankin: Absolutely.

M. Buckingham: Both in the school and with the school board.

M. Ryan: Merci. And are there really different roles for the local Home and School Associations and the school committee or if the two interact in such a way that, to all practical ends, they are the same entity with different functions or different faces?

Mme Rankin: They are two not totally different entities. The Home and School

Associations can do many things that a school committee cannot do. We are an independent organization. We can, for instance, purchase items for the school, we can make our voice heard in very many different areas. We are not legislated into being, we are a group that has decided over the years that we wished to exist and have existed for many years. In fact, the first Home and School Association started in MacDonald High School, I believe, in the year 1919. So, this is not exactly a new group on the scene. This is a group that has been there for a long time.

M. Ryan: I am glad Mr Trudeau is not here to listen to you because I had an argument with him about 25 years ago in which, as a faithful disciple of law that he was, he suggested you cannot exist if you are not legislated into being.

Mme Rankin: ...legislated into being and my parents I do not know if anything was passed there but...

M. Ryan: I had agreed with him on that particular point as was going to happen quite frequently afterwards. I am glad to hear that. There is just a point here. Did you receive any grants from the Government for your operations?

Mme Rankin: As a matter of fact, I have made a note of that since that question had arisen before, shall we say. The biggest part of our budget consists of membership fees from our members. Each member is charged 6 $ a year. Of that, 1 $ goes to the local association and 5 $ go to the provincial association. From those 5 $ they are mailed a newspaper, which is very informative, three times a year.

M. Buckingham: Or more in this situation.

Mme Rankin: Or more. Yes, depending on the situation, we work on an average of three or four times a year.

We have applied for grants from the Ministry and approximately one third of our budget comes from the provincial government. Our total budget is approximately 50 000 $. It is not a large budget. We hire one full-time person, that is the secretary and the person who is absolutely indispensable to the organization. The rest of the work is done on a volunteer basis by people going down to the office and running off things or typing things or typing things or mailing or whatever has to be done. (22 h 30)

M. Buckingham: Our grant over the last three years - and we must apply each year

as a volunteer group, we apply to the Government for a grant to help us operate as a volunteer group - has been in the... vicinity of 18 000 $ over the last three years to operate our association. We represent about 7000 to 8000 families across the Province of Québec.

M. Ryan: 70 000?

M. Buckingham: No. 7000 to 8000 families.

M. Ryan: Merci.

Mme Rankin: We would like to represent 78 000.

M. Ryan: Two sub-questions. First, do you feel that if you were ever to depend on Government subsidies to the extent - let us say 90% or 85% of your revenues - you would be just as free to criticize Government's initiatives or programs? Do you feel freer?

M. Buckingham: If I had to depend on that amount of money to run my organization, I would quit first. I would rather our association was as independent as possible. The reason we apply for a grant is basically for the grant that covers our office expenses and it does not cover our office expenses. We feel that we are an independent group because the amount of money we are applying for is not what is required to run our association. If we are applying for an amount of money and it was a large sum, I have a feeling there would be pressure in some ways and I would rather not be in that position. We do not want to be financed by a Government group.

M. Ryan: O.K. Now you referred in your brief to the vacancy which has existed in the Department of Education for over six or eight months now, since Dr Spiller's resignation. Would you elaborate on the consequences of the present situation and how and when do you think it could be resolved.

M. Buckingham: We would hope that someone would be appointed to replace Dr Spiller, that is our first move. Dr Spiller represented, by definition - was the associate deputy-Minister, Protestant but in a sense represented the English community not just the Protestant community, when he came to Government. Much of the information we needed to know of how to handle things, how to work things and who to apply to if we needed money etc. This was all done through Mr Spiller; he did not get the grants for us but Mr Spiller was a big help to us in what to do, he was a very strong supporter of

Home and Schools. This probably came from the days when he was a principal in the Montreal system and as a principal there, was very active in the Home and School Associations.

M. Ryan: Vous rappelez-vous pourquoi M. Spiller a quitté son poste?

M. Buckingham: My opinion in why he left his job and what he has spoken to us about is because he could not agree with what is going on at the present moment.

M. Ryan: With him being out of the Department now, do you feel there is sufficient English representation in the Ministry at the moment?

M. Buckingham: We do not. We think we need someone in the Ministry.

M. Ryan: How does that appear to you? How is it manisfested in practice? Do you mean that when they prepare programs for instance or work on future polices there is not sufficient English presence within the Department to work on things at the very inception of projets and at the different stages of their development?

M. Buckingham: Assuming that the "régime pédagogique" is coming through as law and the curriculums are being produced at the Government level, the Ministry level, then it would be to the benefit of the English people to have somebody that was from the English community, and was an educator, somehow involved at high level of Government.

M. Ryan: Merci. Just one further question. You say in your brief that trying to promote three major projects at the same time the current round of bargaining with the Teachers' Unions, the restructuring scheme of Dr Laurin and thirdly, the implantation of the new "régime pédagogique" is a bit too much for what the system can swallow. Could you explain how this appears to you as parents who are closely following school activities?

Mme Rankin: If I speak on behalf of parents, it is strictly off the top of my head at this point because we have not polled the parents as I said, on a lot of these issues. However, on reorganization, we have had several information meetings, we have had various schoolboard representatives. We have had Mr. Spiller discussing this on a school level.

We feel that the reorganization procedure to us is somewhat similar to deciding that you are going to put in a fireplace in your basement and, in order to

do that, you have to knock down the first and the second stories before you have got enough room to bring in the bricks. It seems a rather retrogressive way of doing things if reform is needed within the school system, I am not saying it is perfect; I do not know any human being who is perfect. So, it would be very difficult to build any education system which is perfect to all concerned. If reform is required, it should be done by the people in the community who know exactly what kinds of reforms they need. Many programs have been instigated from a parent request, for instance, the French immersion programs when parents, in conjunction with the schoolboards and in conjunction with teachers and administrators, decided what they wanted to do was to promote the learning of the French language and to start the children in immersion projects.

This was something that was done at the parent level and it filtered up instead of something that started at the Ministerial level and filtered down.

M. Ryan: Just one last question. You seem to suggest in one passage of your brief that programs should be worked out at the local original level. Does that mean that you would be opposed to common programs for the whole of the province or if that is seen in a complementary perspective?

M. Buckingham: I think it is between a common program and common guides. In other words, I do not think we have any objection that the goals, the aims and minimum objectives for programs should not be the same all over the province. But what we would object to is when the program is made so tight that there is no flexibility to it. We can bring you two examples. One example we have used when Doctor Laurin was speaking to our group in Montreal; the one example is the sex education course that was developed by the Baldwin-Cartier School Commission. With the help of its parents, with the help of its teachers, all of the objectives of the Ministry's program was followed. There was not one objective that they were not following in that program. Yet, they were not allowed to use it. They had to use the one that came down from Québec. That is the type of thing that we would worry about. There is no objection to the objectives and the goals being similar and the minimum standards being similar. There has to be some flexibility for the areas in. What you do in the Lake Shore might be quite different to what you would do in the Eastern Townships, Western Québec. I am talking English schools right now.

M. Ryan: I suggest like you added the example you mentioned there is a very interesting one. I followed this thing, not as closely as I would have wanted to but I was apprised of the contents of the program which had been worked out at Baldwin-Cartier and I profoundly deplore that this program was refused by the Ministry on the grounds that they had to follow a uniform program. I am glad that you brought out that example, I think it is a very good illustration of what we are all trying to achieve, a greater measure of real responsibility at other levels than the Provincial Government.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Fabre et adjoint parlementaire, M. le ministre de l'Éducation.

M. Leduc (Fabre): On the decrees. Do you think there are some elements in the decrees that could ameliorate the situation, the quality of education in the schools? I am thinking of the presence of children in the primary schools, for example.

M. Buckingham: In the primary level, in our brief here we mentioned that the thing that worried us was that when you had a change in teacher time and no change in the student time then you create a problem of surplus. In the primary level, the position that has been put in is that the change in teacher time and pupil time is parallel. It does not matter if we go up in one year, two years or three years, from 1380 minutes for the children to 1500, you are going up 120 minutes. If you are going up from 1200 teaching minutes for the teacher to 1320, you are going up 120 minutes. It is parallel, therefore, there is not the large surplus created. There still will be a surplus created because when you increase the time in a day, the specialist time does not quite match mathematically. So you may have some problems in time tabling which is something that is out of the parents' hands. That is in the hands of the school officials. So, at the elementary level, the change in time is not as much of a problem as it would be at the high school level.

Another factor is that we were, a number of years ago, on a 1500-minute day in the elementary school and we were on that time for years and years. It was by a ministerial decree that we went to 1380 minutes. I think that would have been during the time of the Liberal Government, prior to this Government. We went to 1380 minutes, which is different at the elementary level to every other province. The 1500 minutes at the elementary level is not quite the same as the time at the secondary level.

M. Leduc (Fabre): Do you not think that it is time to work on new models of organization for the secondary level, as it is

done in Ontario schools?

Mr. Buckingham: What would you mean by "As it is done in Ontario schools"?

M. Leduc (Fabre): What I know is that the teachers have about the same time of teaching and they have the problems that you mentioned. So, the idea is to bring the teachers in Québec to the same level as they are in Ontario. They must have some models of organization in Ontario, since they have a certain quality of education.

Mr. Buckingham: If you increase that amount of time all at once, basically, you change your whole pattern. The other factor, if you look at the Ontario system, is that you are looking at two sections of the secondary school. One section of the secondary school, the grades 7, 8 and 9 pattern, the junior section of their school system is very much patterned on our elementary level. The high school section, which goes from grades 10, 11, 12 to 13, is patterned on our high school pattern, or our high school is different then. You cannot picture the Ontario system parallel to the Québec system as long as you think of one system that controls up to grade 11, and one system that controls the next two years, cegep, 12 and 13. In the Ontario system, one system will control up to grade 13. When that happens, it is a very different setup for your times for teaching, etc.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Viau.

M. Cusano: Merci, M. le Président. J'ai seulement une question de clarification.

You mentioned in your brief that your organization is one of parents that volunteer and work in the schools. For the sake of the members around this table, could you tell us what kind of services your organization provides?

Mr. Buckingham: One of the things that can happen at the elementary level, you have your school committee, you have your home and school. The home and school group is a group that you would call your volunteer support group. They are all volunteers. Two things happen. One of the things that they do - it is not the only thing they do - is fund raising. Usually, the fund raising would be for things that we want in that school that would not fit into the budget norms. For instance, in the budgetary norms, you could not have a video set purchased for your school but it is a very interesting educational tool. That is one of the things. Another part of the volunteer program that they do as service for the school: most elementary school libraries are run by parent volunteers which are home and schoolers. We would not have a library in many of the protestant schools if it was not for volunteers, from the parents' side, and those are the home and schoolers. (22 h 45)

This does not mean that those are the only two functions. Many of them work with class teachers, etc. They are also in many of the systems, because of our close liaison with our school committees, when something comes down from the government that has to be reacted to and the consultation process that comes through the school committee. Most of those committees have at least one or two représentants on that Home and School for a different view point on that brief. Those would be three topics now, I can tell you others.

Mme Rankin: At the highschool level, I am fortunate, I have three children, one in elementary, one in secondary, one in cegep. So it is pretty well covered all the way down the line. At the high school level Home and School equally does the fund raising because at high school level it is more important. You have schools of approximately 1500 students and it seems to be the volunteer aspect of parents wears off once you children get past elementary school. You say: boy, they are finally out of the house now I can do something more interesting!

At the high school level, it is a fund raising group, it is a support group. There are people who are involved, for instance, in music programs, if there is somebody who needs transportation to and from any kind of tournaments or programs - you name it, it is always Home and School that get a call to say: Could you provide this or could you provide that? They were also instrumental in starting up the Community offices within the high schools. Driver education, - thank you, I keep forgetting all these... There are so many things that Home and School does. I do not know if you are aware of the committee offices that are in place and quite a few are for high schools. Those are offices where you have one, two or three people who deal with community needs. You deal with all kinds of situations where you invite senior citizens in to tea at Christmas time - where we send a lot of students to volunteer with various organizations, with disabled and physically or mentally handicapped adults. We have some of our students who go out once or twice a week on a volunteer fasis to help them out. We have students who volunteer with autistics and children who have all kinds of difficulties. We invite students from a school like John F. Kennedy which is specifically geared towards handicapped students. They come to school for various concerts. It is all organized through the community office and

through the different groups.

M. Cusano: You must be congratulated, because I know a lot of the work that your group has done, congratulated because you have done so much with so little government help. Thank you.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Est-ce que Mme la députée de Jacques-Cartier veut intervenir?

Mme Dougherty: I do not have any questions for you, but I want, first, just to make a couple of comments. First of all, I would like to congratulate you on your brief. It is straight from the heart. It is a very sensitive brief. I think you have put your finger on a great many important points in this dispute. I like very much your comments, your concerns about the lesson that has been conveyed to students in relation to human rights, because I think there is a lesson, a very sad lesson that has been conveyed which we should not forget. But also, I think that your points about the quality of education and how the situation that we find ourselves in each time with negotiations really seems to lose sight totally of quality and it becomes a game of power where everybody justifies their demands on a basis of quality, but very often, it becomes a game rather than a really honest concern for quality. And it seems to me that much of what you have said in your brief is really a plea to get back to the reality of solving so many of these problems at the local level where everybody can honestly talk about quality and reduce the confrontation that happens when we have this sort of Common Front situation at the provincial level, which falsifies the whole debate. I want to thank you very very much. I think it is a superb brief. In the time that you had to put it together, you are all the more to be congratulated. Thank you.

M. Buckingham: And we still have to drive back home tonight.

Le Président (M. Jolivet): Merci. J'invite maintenant l'Association nationale des étudiants du Québec à se présenter devant nous. Cette association est représentée par M. Guy Bédard. Je lui demanderai, s'il est accompagné, de nous présenter les personnes qui l'accompagnent.

Association nationale des étudiants du Québec

M. Beaudoin (Jacques): Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord faire une petite rectification. M. Guy Bédard devait être le porte-parole officiel de notre association dans la mesure où on avait été invité à comparaître mercredi. Maintenant, on a pu dégager la porte-parole officielle, Mme Johanne Muzzo, qui est secrétaire à l'information au conseil exécutif de l'ANEQ. C'est elle qui va faire la lecture du mémoire. Mon nom est Jacques Beaudoin. Je suis conseiller pour le conseil exécutif de l'ANEQ en ce qui concerne le dossier qui nous intéresse. Nous accompagne aussi M. Robert Beauregard, qui est un représentant du Mouvement des étudiants et des étudiantes chrétiens du Québec, qui a bien voulu s'associer à nous pour la présentation de ce mémoire.

Le Président (M. Jolivet): Vous avez la parole, madame.

Mme Muzzo (Johanne): Premièrement, je voudrais m'excuser pour les fautes de français qu'il y a dans le texte. Ce n'est pas qu'on ne sache pas écrire, mais il y a eu des problèmes lors de la dactylographie du texte. Je voudrais aussi m'excuser auprès des femmes syndiquées du Québec parce que notre document ne comprend pas une partie s'intitulant "Décrets et femmes", par manque de temps de recherche, etc.

Permettez-nous d'abord de vous présenter notre association, l'Association nationale des étudiants et des étudiantes du Québec, fondée il y a maintenant huit ans. Elle regroupe aujourd'hui une vingtaine d'associations étudiantes dont 16 au collégial et 4 à l'université. Ce qui signifie un "membership" total de plus 110 000 étudiants et étudiantes.

Le mandat principal de l'ANEQ est de défendre les intérêts matériels, moraux et culturels de ses membres. À cette fin, nous intervenons en particulier sur les grandes questions concernant le développement et l'avenir de l'éducation au Québec. C'est dans ce cadre que nous participons à la présente commission parlementaire.

Soyons clairs dès le début. Nous sommes ici pour faire connaître le point de vue de nos membres en ce qui concerne le conflit qui oppose actuellement le gouvernement du Québec aux enseignants et enseignantes. Mais, toutefois, nous n'avons aucune illusion quant au fait que la commission parlementaire puisse permettre d'entrevoir un règlement du différend.

Aujourd'hui, alors que les enseignants et enseignantes considèrent légitimement que leurs négociations avec le gouvernement ne sont pas terminées et que les décrets découlant de la loi 105 ne peuvent aucunement tenir lieu de convention collective, l'ANEQ entend blâmer le gouvernement du Parti québécois, et lui seul, pour la dégradation de la situation dans l'éducation. Le pourrissement des relations entre lui et ses employés découle directement des positions indignes qu'il a

prises à l'égard de ceux et celles qui s'occupent d'une des principales richesses collectives que le peuple québécois ne se soit jamais données, le système d'éducation.

La rupture des négociations décrétée par le ministre Laurin, vendredi dernier, au profit de la convocation de cette commission parlementaire, à propos de laquelle à peu près tout le monde a émis des doutes sérieux quant à son efficacité, ne constitue que le dernier d'une série de gestes posés depuis le début des négociations et même avant, visant à provoquer l'affrontement avec les travailleurs et travailleuses des secteurs public et parapublic et à profiter d'une conjoncture favorable, savoir l'appui anticipé de l'opinion publique, elle-même créée par une intense et savante campagne de propagande de la part du gouvernement, pour mettre au pas les syndicats et imposer des reculs inacceptables à l'ensemble des travailleurs et travailleuses, aux classes populaires et aussi, il faut bien le dire, au système d'éducation lui-même.

Faisons donc un bref retour en arrière. Début 1982: On commence par lancer une vaste campagne de propagande. "Les employés et employées du secteur public sont privilégiés, dit-on. Ils et elles jouissent de privilèges exorbitants en regard des employés du secteur privé." On se base sur des études contestables et contestées pour créer un mythe que propageront des éditorialistes, des ministres et des députés, des patrons du secteur privé, des financiers et des banquiers. Au printemps 1982, l'opération "propagande" recevra une mise en scène soignée, celle du grand Sommet économique de Québec, auquel on conviera les grands partenaires sociaux, patronat, institutions financières et entreprises de la coopération, d'un côté; centrales syndicales, groupes autonomes de travailleurs et consommateurs de l'autre, le gouvernement se plaçant au centre, en arbitre impartial, il va sans dire. On pourrait noter à ce propos que les plus démunis de notre société au nom desquels le gouvernement a, par la suite, proposé ces demandes aux syndicats du secteur public -les jeunes, les chômeurs et les chômeuses, les bénéficiaires de l'aide sociale, les étudiants et étudiantes, etc. - n'ont toutefois pu y trouver leur place.

La mise en scène est cependant organisée de telle façon qu'elle privilégie le discours gouvernemental à propos de ses difficultés budgétaires. Largement appuyé par le patronat, qui en profitera pour mettre aussi l'accent sur le retour à la libre entreprise et le rétrécissement des appareils d'État, c'est-à-dire, en fait, sur la diminution des services publics, le gouvernement consolidera le mythe d'une fonction publique trop grasse en même temps qu'il dévoilera qu'à défaut d'un changement quelconque, le déficit budgétaire deviendra trop élevé. C'est le fameux trou de 700 000 000 $ qu'il faudra combler d'une façon ou d'une autre. Par hasard, il s'agit du montant des augmentations salariales que doivent toucher en juillet les syndiqués du secteur public en vertu des dispositions des conventions collectives négociées et signées en 1979-1980. De là à conclure que ce sont les employés du secteur public qui devront faire leur part pour assumer le fardeau de la crise des finances publiques, il n'y a qu'un pas, et le gouvernement aura tôt fait de le franchir.

Au sommet, les centrales syndicales refuseront, avec raison, de s'embarquer sur ce terrain où le gouvernement Lévesque veut les mener. En revanche, on y dépose une étude rappelant que si le gouvernement avait le courage de ramener les taux d'imposition aux entreprises au niveau où ils étaient en 1971, sous le régime Bourassa, le fameux trou dans le budget du ministre Parizeau serait automatiquement comblé. Mais le gouvernement ne reprendra évidemment pas à son compte cette suggestion.

Après la tenue du sommet, le gouvernement lance une nouvelle étape: celle de la réouverture des contrats de travail antérieurement signés par lui aussi bien que par les syndicats du secteur public. Il ne demandera alors rien de moins que de modifier les conditions de rémunération de ses travailleurs et travailleuses dûment négociées sous la menace de les casser lui-même par une loi spéciale si les syndicats ne se montrent pas conciliants.

Les syndicats s'opposeront, bien sûr, à ce chantage mais manifesteront à ce moment une ouverture sans précédent: on se déclare prêt à négocier tout de suite les nouvelles conventions et on accepte même qu'elles prennent effet avant la fin des conventions en vigueur (le 31 décembre), ce qui constitue une importante concession et une preuve de bonne foi évidente. Le gouvernement refusera de saisir cette perche.

Le président du Conseil du trésor déclare qu'il ne veut pas se prêter à ce qu'il appelle "le jeu stérile de la négociation" alors que les coffres sont à sec. Ensuite, on passe aux actes. Lois spéciales par-dessus lois spéciales, il s'agira maintenant d'enlever aux syndicats leur droit de négocier.

La loi 68, concernant les régimes de retraite du secteur public, modifie unilatéralement les régimes qui, jusqu'à maintenant, faisaient l'objet d'une entente entre l'État et les centrales syndicales. On diminue la contribution patronale et on réduit l'indexation des prestations.

La loi 72, concernant certains services essentiels, modifie, toujours unilatéralement, les corridors déjà restreints de l'exercice du droit de grève.

La loi 70, mieux connue, impose d'autorité les concessions salariales que les syndicats avaient refusées. On coupe chez les

syndiqués mais pas chez les policiers, ni chez les juges, ni chez les négociateurs patronaux, ni chez les médecins et dentistes, et encore moins chez les députés.

Entre-temps, le ministre des Finances dépose son budget dans lequel il fixe de façon précise le cadre des dépenses salariales dont on ne voudra plus bouger par la suite.

Après un été où aucun débloquage ne se produit, des compromis importants sont déposés par le côté syndical. On offre, ce qui constitue une concession importante et une avenue intéressante pour le gouvernement, un gel des salaires pour la première année de la convention collective et d'importantes réductions des demandes pour les deux suivantes, quelque chose comme 1 000 000 000 $ sur trois ans. Le gouvernement réplique: II n'y a rien là. La vie est belle, poursuit le ministre Bérubé. Les négociations sont, à toutes fins utiles, rompues.

Début décembre, une nouvelle loi spéciale est adoptée, la loi 105, dans les circonstances pour le moins antidémocratiques que l'on sait - les députés doivent étudier 80 000 pages de décrets en quelques jours - qui autorise 109 décrets tenant lieu de convention collective pour les trois prochaines années. Il n'y a pourtant pas encore de grève de la part des syndicats, mais le gouvernement Lévesque procède quand même.

La suite des événements nous permettra de confirmer notre intuition sur la non-volonté de négocier de la part du gouvernement. De nouvelles ouvertures sont faites par les syndicats. Par exemple, l'Alliance des professeurs de Montréal propose d'accepter la réduction salariale en échange de la création d'un fonds de création d'emplois. Le gouvernement réplique par de nouvelles menaces alors que les syndicats, dans l'impossibilité d'utiliser d'autres moyens, se voient contraints de déclencher la grève. (23 heures)

On réussira par le chantage et la répression à déstabiliser quelque peu le front commun et les syndicats du secteur public. Certains syndicats surseoiront à la grève, mais aucun d'entre eux ne se montrera satisfait du contenu des décrets, même adoucis. Les enseignants et enseignantes maintiendront malgré tout leur grève et le gouvernement tentera d'y mettre un point final en adoptant la loi 111, la loi spéciale la plus antidémocratique de l'histoire du Québec, sur laquelle assez de commentaires ont été faits pour qu'il ne nous soit pas nécessaire de nous y attarder.

Le bilan de ces événements devait être fait. Nous devons en conclure que le gouvernement Lévesque a fait la preuve de son autoritarisme. Il a refusé de négocier depuis le début et a montré qu'il ne savait gouverner que par décrets et lois spéciales au-dessus de la population.

Le gouvernement a aussi fait la preuve de son hypocrisie. Il a donné d'une main pour reprendre de l'autre en déchirant sa signature. Il a prétendu, pour justifier ses attaques contre les syndiqués du secteur public, qu'il voulait se porter à la défense des plus démunis, alors que les faits de la vie montrent qu'il n'en est rien. Nous reviendrons sur ce point plus tard.

Finalement, le gouvernement Lévesque a également fait la preuve de son antidémocratisme en bafouant et en foulant aux pieds de la lettre la Charte des droits et libertés de la personne que la société québécoise s'est donnée.

C'est pour ces raisons que nos associations affiliées ont tenu le gouvernement entièrement responsable de la situation actuelle qui, nous en convenons, est désastreuse, et ont appuyé solidairement les syndicats du secteur public qui ont mené et mènent la bataille pour défendre leurs, droits.

Des arguments et prétentions auxquels on ne peut croire. Les députés du parti ministériel nous opposeront sûrement que notre point de vue ne tient pas compte du problème de fond qui aurait poussé le gouvernement à agir de cette façon: la nécessité de régler la crise des finances publiques.

Bien que nous n'ayons pas à notre disposition toute la brochette de spécialistes et d'économistes que le gouvernement possède, qu'il nous soit permis de douter de la pertinence des choix de politiques fiscales que le gouvernement a posés. Un déficit n'est ni bon ni mauvais en soi, tout dépend de l'utilisation qui est faite de l'argent dépensé, et tout dépend aussi si les dépenses du gouvernement s'inscrivent dans le cadre d'un plan de relance économique sérieux et véritable dans le but de stimuler l'économie et contrer la récession, ce qui ne semble pas être le cas actuellement, bien au contraire. Le ministre fédéral des Finances, M. Marc Lalonde, a annoncé son intention d'augmenter le déficit budgétaire du gouvernement d'Ottawa afin d'aider à la relance économique. On ne peut pourtant pas dire que M. Marc Lalonde soit particulièrement prosyndicaliste.

D'autres choix de politiques fiscales et budgétaires auraient été possibles. Les centrales syndicales en avaient justement proposé de tout aussi valables lors du Sommet de Québec au printemps de 1982.

Le gouvernement Lévesque prétend prendre la défense des plus démunis de notre société pour s'attaquer aux acquis de ces grands privilégiés que sont les travailleurs et les travailleuses des secteurs public et parapublic. Dans ce cas, pourra-t-il nous dire comment la récupération salariale déjà entamée vient actuellement en aide à ces

plus démunis? Que fait le gouvernement Lévesque pour aider les jeunes aux prises avec le chômage et la délinquance comme seule perspective d'avenir? Que fait le gouvernement Lévesque pour soulager la situation de ces jeunes assistés sociaux qui doivent subsister avec 144 $ par mois actuellement? Que fait le gouvernement Lévesque pour les étudiants et les étudiantes aux prises avec un régime de prêts et bourses totalement déficient qui pousse même certains et certaines d'entre eux et elles à se marier pour y être admissibles? Qu'on nous fasse part d'une véritable politique de création d'emplois pour les jeunes immédiatement s'il en existe une!

Objectivement, les prétentions du gouvernement nous laissent froids et froides. Nous pensons que le gouvernement cherche à nous détourner de l'analyse des vrais problèmes et des vraies solutions en jouant à la défense des plus démunis contre les privilégiés. On doit dire qu'on s'est habitué avec le temps à cette tactique du gouvernement. En 1978, quand les étudiants et les étudiantes étaient en grève pour l'amélioration de leurs conditions de vie et d'étude désastreuses, le ministre de l'Éducation, M. Jacques-Yvan Morin, déclarait: "Les temps sont durs pour les étudiants comme pour toute la population, mais la situation financière des étudiants est nettement supérieure à celle d'un jeune chômeur d'âge collégial qui doit se contenter d'un maigre 92 $ par mois pour subvenir à ses besoins." À l'époque, nous étions donc les privilégiés. Aujourd'hui, le même gouvernement se porte à notre défense pour nous protéger des syndiqués privilégiés qui nous prendraient en otage...

En fait, si un groupe ou un intervenant dans le débat actuel a su véritablement s'attarder au sort des défavorisés, il s'agit bien du mouvement syndical qui, comme l'Alliance des professeurs de Montréal, a su proposer des alternatives et des compromis qui permettront d'améliorer le bien-être général de la population.

Les décrets auront des conséquences désastreuses. Outre la façon avec laquelle le gouvernement du Québec a jusqu'à maintenant considéré les syndiqués des secteurs public et parapublic, ce sont les raisons justifiant cette attitude répressive qui nous apparaissent encore plus inacceptables. Pour le secteur de l'enseignement auquel nous nous sentons particulièrement concernés, la détérioration de la qualité de l'éducation entraînée par l'application des décrets est inacceptable pour une majorité d'étudiants et d'étudiantes du Québec.

On combat le chômage en faisant des mises à pied. Concernant les réductions des salaires de ses employés, le gouvernement tente ainsi de combler son déficit budgétaire; ce qu'il oublie de signifier, c'est qu'en sabrant dans les salaires de ses employés, il ne récupère finalement que 30% de ce qui était son objectif initial. Une simple soustraction des pertes de revenus, de la perte d'impôt sur le revenu ainsi que des taxes indirectes entraînées par les réductions salariales et une addition des dépenses supplémentaires du gouvernement occasionnées par l'augmentation du chômage et des dépenses d'aide sociale nous indiquent qu'il ne récupérera finalement que 200 000 000 $ à partir des coupures salariales de 641 000 000 $ qu'il a effectuées.

D'après l'économiste James Pottier de l'Université Laval, en coupant dans les salaires, le gouvernement créera 38 000 chômeurs et chômeuses de plus au Québec, étant donné que la baisse des salaires entraînera une baisse d'environ 300 000 000 $ dans la consommation de biens et services: cela signifie une nouvelle baisse de la production. Avec un effet multiplicateur de 1,8, l'économiste en arrive au chiffre de 38 000 nouveaux sans-emploi.

Devant le peu de perspectives d'emplois pour les étudiants et étudiantes et la jeunesse en général, il est difficile de croire au discours gouvernemental qui prétend que ses coupures nous viendront en aide. 38 000 chômeurs et chômeuses de plus n'aideront en rien à créer les emplois dont les étudiants et étudiantes ont besoin.

La qualité de l'éducation est menacée. À l'heure des coupures massives de postes chez les professionnels, les employés de soutien et les enseignants et enseignantes, c'est la qualité et la quantité de services qui diminueront. Le fait de fermer des bibliothèques plus tôt restreindra l'accès à ce service pour la communauté étudiante. Ce sont ceux et celles qui n'ont pas à leur disposition une bibliothèque personnelle et des ressources nécessaires qui seront défavorisés.

Aux enseignants et enseignantes, le gouvernement québécois impose une augmentation de 25% de la tâche qui entraînera une diminution des effectifs dans le corps professoral. Déjà, nous avons de la difficulté à rencontrer les professeurs pour fins de consultation. Avec cette baisse de disponibilité, nous pouvons dire adieu aux rencontres hors classe. Le seul travail que les enseignants et enseignantes seront en mesure d'effectuer en dehors de la présence aux cours sera la recherche et la préparation nécessaires pour donner les cours. On aura donc plus souvent des cours magistraux qui ne permettent pas aux étudiants et étudiantes rencontrant un certain nombre de difficultés de suivre adéquatement le cheminement pédagogique.

En plus, le ratio maître-élèves est aboli par les décrets. Le danger qui nous guette sera que nous aurons à faire face à

des classes surchargées et à un manque de temps pour échanger des expériences et nos connaissances. Ces conditions réduiront les possibilités pour les étudiants et étudiantes de s'affirmer et de prendre en main une part du contenu pédagogique et des méthodes d'enseignement.

Le gouvernement québécois s'assure aussi une plus grande mobilité des employés de l'État dans l'éducation pour permettre une réalisation plus facile de ses projets de contre-réforme. L'application des mesures inscrites dans le projet de règlement des études collégiales concernant la création de nouveaux diplômes déqualifiés était freinée par la sécurité collective de l'emploi. L'application des décrets permettra la réalisation de ces projets gouvernementaux rejetés par les étudiants et étudiantes. Pour nous, c'est la déqualification de l'enseignement qui pointe à l'horizon.

En effet, l'application de ces différentes mesures aura comme conséquence l'aliénation des cours de formation générale pour la majorité à partir de la fin du secondaire V, les cours de niveau collégial de français, philosophie, économie, sociologie, etc. La surspécialisation résultant de ces transformations rendra notre formation dépendante de notre futur milieu de travail. En ce sens, il sera moins facile de nous adapter à des milieux de travail différents. La mobilité des futurs travailleurs et travailleuses que nous sommes disparaîtra à vue d'oeil. Il ne restera, pour la majorité, que le choix d'aller acquérir un diplôme de perfectionnement ou de reclassement. Notre force de négociation avec les employeurs sera amoindrie. Ce sont les conditions générales de travail et les salaires qui tendront à diminuer. La déqualification de l'enseignement signifie cette perspective d'avenir pour la jeunesse québécoise.

Bien sûr, les travailleurs et travailleuses de l'enseignement défendent les intérêts qui leur sont propres. Certains voient dans leur lutte des relents de corporatisme. Mais lorsqu'on y regarde de plus près, la disparition de la sécurité d'emploi ne peut avoir comme conséquence que la diminution de la qualité de l'enseignement et des services. Les premiers à en souffrir seront les étudiants et étudiantes québécois.

Plus encore, on peut déjà se douter que les étudiants et étudiantes en provenance des milieux populaires et ouvriers assumeront très majoritairement les effets de ces modifications. D'une part, ces groupes sociaux auront à subir durement les coupures de services. La sélection scolaire ne se produit pas uniquement parce que certains ou certaines manquent d'argent pour poursuivre leurs études mais aussi par le manque de ressources intellectuelles à la disposition des groupes défavorisés. Il est démontré que, par exemple, les étudiants et étudiantes de ces milieux ont grandement besoin de la disponibilité professorale pour atteindre la réussite. L'augmentation de la tâche des enseignants et enseignantes entraînera probablement une augmentation du taux d'échec. D'autre part, la formation professionnelle étant réservée majoritairement à ces secteurs de la population, la déqualification des diplômes ou ce qui en restera, les concernera en tout premier lieu.

Seulement 29% des jeunes ont accès au cégep. 9% des enfants des couches les plus défavorisées de cette société sont à l'université, comparativement à 44% pour ceux et celles des milieux plus aisés. Il ne nous apparaît pas que "l'école des décrets" améliorera la situation; elle l'accentuera plutôt.

Il s'agit donc, par l'entremise des décrets, d'une remise en question du droit à l'éducation. Non seulement on ne vise pas une meilleure accessibilité à l'enseignement supérieur, mais on crée les conditions pour une régression générale de celle-ci et de sa qualité. En l'occurrence, ce sont nos intérêts spécifiques d'étudiants et d'étudiantes qui sont touchés. Si les syndicats de l'enseignement défendent d'abord leurs conventions collectives, on ne peut affirmer qu'il y a là des intérêts corporatistes. En dehors des motivations personnelles de ces employés de l'État qui les portent à mener la lutte contre les décrets, c'est le maintien du droit à l'éducation et à sa qualité actuelle que nous considérons comme minimal et nécessaire à toute société pour lequel les enseignants et enseignantes se battent. L'accès à l'enseignement est un préalable à la formation d'individus en mesure d'offrir de nouvelles solutions aux niveaux technique, politique, culturel, etc., aux problèmes que l'on vit.

Les droits démocratiques sont aussi remis en question. S'il est vrai que nos conditions d'étude et le droit à l'éducation sont remis en cause à travers les décrets, les enjeux politiques et syndicaux ne sont pas de moindre importance. Avant les grandes luttes des travailleurs et travailleuses des secteurs public et parapublic, à l'ère du duplessisme, cette société comportait toutes les caractéristiques d'un régime antidémocratique et autoritaire. Pierre Elliott Trudeau déclarait à l'époque: "On verra par là à quel point les moeurs politiques au Québec sont éloignées de l'esprit démocratique. Comme je l'écrivais la semaine dernière, il règne au Québec une hostilité à l'encontre de la liberté politique. J'ai décrit le viol des libertés d'opposition; et l'opposition en dehors du Parlement est encore plus sauvagement attaquée: voir les projets de loi Picard, Guindon, Desmarais".

Le gouvernement de l'Union Nationale

nia le droit d'association (lois antisyndicales), brima la liberté de parole (lois du cadenas) et fit matraquer sauvagement des contestataires par la police provinciale. Il fallait un mouvement d'envergure pour assurer les libertés les plus élémentaires.

L'obtention de certains droits démocratiques bouleversa la mentalité et les moeurs de tout le Québec. Point n'est besoin d'expliquer la nécessité du droit d'opinion et d'expression. Par contre, le droit d'association est souvent le seul moyen pour le simple citoyen de pouvoir s'exprimer face à des groupes, cartels et individus (les Steinberg, Provigo, Paul Desmarais, etc.,) dont la force économique les place dans une situation privilégiée face au pouvoir politique. Deuxièmement, le droit de grève, même si son exercice ne fait pas toujours plaisir, constitue souvent le seul et dernier recours garantissant la liberté d'opinion et d'expression.

L'adoption de la loi 111, par l'abolition des libertés fondamentales (suspension de la Charte des droits et libertés de la personne et de certains articles de la charte contenue dans la constitution canadienne) et l'application de mesures extrêmement coercitives et ce, pour une durée de trois ans, nous ramène aux pires moments du régime Duplessis.

Si le gouvernement remet en cause les libertés d'expression, par l'entremise du droit d'association (abolition de la formule Rand, perception des cotisations syndicales à la source) et de grève - la législation peut rendre la grève illégale - pour les syndicats de l'enseignement, il devient hasardeux de croire que les associations étudiantes, déjà aux prises avec les problèmes de non-reconnaissance de la part du gouvernement, seront épargnées à plus ou moins long terme.

Déjà, plusieurs associations étudiantes ont perdu le droit à une cotisation étudiante directe à la source. C'est le cas au cégep de Maisonneuve, de Saint-Jean-sur-Richelieu, du Vieux-Montréal, etc. Dans l'ensemble du Québec, les associations étudiantes sont menacées des mêmes mesures. Faudra-t-il s'empêcher d'avoir un regard critique sur le gouvernement pour conserver ce qui constitue nos moyens de s'organiser? En ce sens, les menaces d'abolition de la formule Rand ne présagent rien de bon pour les étudiants et étudiantes et leurs associations.

Les étudiants et étudiantes ont pris position. En décembre dernier, les étudiants et étudiantes des cégeps et des universités ont constaté, avec toute la population du Québec, que le gouvernement Lévesque, avec l'adoption de la loi 105, était le plus autoritaire et le plus anti-démocratique de tous les gouvernements du Canada et qu'il était résolu à miser sur l'iniquité, la répression, les lois spéciales et les décrets pour, soi-disant, faire face à la crise économique, plutôt que de satisfaire nos besoins et ceux des travailleurs et travailleuses. Depuis ce temps, on n'a pu que constater un accroissement de ces attitudes de la part du gouvernement.

Le gouvernement aurait bien voulu que les étudiants et étudiantes, à l'instar de certains comités de malades dans les hôpitaux, prennent son parti à lui contre les syndicats, mais ce ne fut pas le cas. Nos associations affiliées se sont prononcées contre la position gouvernementale et pour la solidarité avec les travailleurs et travailleuses des secteurs public et parapublic. Les étudiantes et étudiants membres de l'ANEQ ont participé aux lignes de piquetage et aux manifestations organisées par les syndicats. À l'Université du Québec à Montréal, les étudiants et étudiantes ont paralysé les activités de l'université pendant trois jours en appui au front commun.

Les associations étudiantes non membres de l'ANEQ, comme celles des cégeps de Saint-Jérôme, de l'Outaouais, de Limoilou, à Québec, ont également posé des gestes en appui au front commun. La Fédération des associations étudiantes du campus de l'Université de Montréal, membre du RAEU, est même allée jusqu'à demander la démission du gouvernement péquiste, à la suite de l'adoption de la loi 111.

M. Beaudoin: Finalement, pour terminer...

Le Président (M. Desbiens): Oui. (23 h 15)

M. Beaudoin: vous aurez constaté que le mémoire qui vous a été lu avait été écrit en fonction de la journée d'ouverture de la commission parlementaire. Donc, il ne l'a pas été nécessairement en fonction de ce qui s'est dit, de ce qui a été entendu et de ce qui a pu se dérouler aussi depuis mercredi dernier. À ce moment-là, on avait quatre recommandations à formuler à la commission parlementaire. Je vais les soumettre pour que vous puissiez en tenir compte. La première était le retrait de la loi 111, considérant la volonté populaire qui a été exprimée concernant cette loi, dans la mesure aussi où on pouvait anticiper la poursuite de la trêve de la part des syndicats, en tout cas, ce qui a pu être confirmé selon les développements qui se sont produits à la commission parlementaire. Si on se place du côté de l'objectif du gouvernement qui était de mettre fin à la grève avec cette loi, s'il n'y en a plus et s'il n'y a plus de menace, à court terme, il n'y a pas de raison pour qu'une loi qui allait aussi loin soit encore en vigueur.

La deuxième recommandation qu'on faisait était que le gouvernement et les syndicats reprennent les négociations dans le cadre moral du régime de relations du

travail qu'on connaît et qui a été en vigueur - si on peut dire - avant l'adoption des différentes loi spéciales qui ont été apportées par le gouvernement. Sans dire que cela prenait nécessairement l'abrogation de toutes ces lois avant de recommencer à négocier de bonne foi, on pouvait penser qu'une des seules façons de s'en sortir devait être de reprendre les négociations en faisant abstraction du fait que ces lois sont là et en négociant dans le cadre de ce qui a toujours existé.

La troisième recommandation était que, aussi dans cette mesure, le droit de grève tel que reconnu par le Code du travail, dans le corridor dans lequel il peut s'exercer actuellement, soit respecté et, finalement, qu'on mette de côté, pour le temps des négociations, pour le temps que la commission parlementaire se tienne et pour le temps que les négociations se tiennent aussi, la campagne qu'on considère être de propagande qui a été faite contre les travailleurs et travailleuses des secteurs public et parapublic par le gouvernement.

On aurait dit, si on avait témoigné mercredi, que dans ces conditions, on était persuadé que les syndicats impliqués accepteraient de prolonger la trêve et de lever le mot d'ordre de grève prévue pour le 14 mars qui est une situation - comme on l'a mentionné - qui ne nous fait pas plaisir en temps que telle. On pensait que dans les conditions d'une reprise des négociations de bonne foi, il y avait moyen que cette trêve soit prolongée. De toute façon, je pense aussi que certains événements, qui se sont produits en commission parlementaire, l'ont démontré avec le plus récent compromis qui a été fait par la CEQ, et l'acceptation par le ministre Laurin de la présence d'un observateur conciliateur à la table des négociations quand cela reprendra. C'était pour compléter, pour faire cette mise au point.

Mme Muzzo: Avant de commencer les commentaires et questions, si vous pourriez permettre une ou deux minutes au Mouvement des étudiants et étudiantes chrétiens du Québec de se présenter, étant donné que l'ANEQ l'a fait.

Le Président (M. Desbiens): M.

Beauregard.

M. Beauregard (Robert): Le Mouvement d'étudiants et étudiantes chrétiens du Québec est un mouvement qui regroupe des militants étudiants engagés dans les cégeps et les universités qui, à la lumière de l'option pour les pauvres dans les évangiles, tente de travailler à la transformation de l'école pour qu'elle corresponde plus aux intérêts des plus démunis dans la société. Cela fait onze ans que le MEECQ existe.

On est d'accord avec l'analyse que l'ANEQ fait de la situation et c'est pourquoi on l'endosse complètement et on est venu ici exprimer cet accord avec l'ANEQ sur cette situation.

Le Président (M. Desbiens): Merci. M. le ministre.

M. Laurin: Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire à vos collègues de la Fédération des associations étudiantes du collégial et au Rassemblement des associations étudiantes universitaires, je suis heureux de voir que votre organisme s'implique dans la discussion des grands problèmes qui nous confrontent et particulièrement les problèmes de l'éducation.

Votre mémoire nous indique que vous prenez parti entièrement et absolument pour les enseignants dans le présent conflit. Bien sûr, cela est votre droit, mais ceci colore votre mémoire. Nous y voyons une relation ainsi qu'une conception unilatérales des événements ainsi que des enjeux du conflit. Il est bien évident que, par la suite, votre discours qui m'apparaît abstrait, doctrinaire, complètement décroché de la réalité, ne tient pas compte, par exemple, de la gravité, de l'ampleur, de la crise économique qui frappe actuellement la société québécoise.

Je ne vois pas beaucoup de place aussi dans votre discours pour le partage, les entreprises concrètes de solidarité avec les autres groupes de la société, de même que je n'y vois guère de pari sur l'avenir. Ceci dit, je voudrais laisser à mon collègue de Fabre le soin de poser les questions qu'appelle votre mémoire.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Fabre.

M. Leduc (Fabre): Merci, M. le Président. Ma première question a trait à la représentativité de l'ANEQ. Vous mentionnez dans votre mémoire que vous avez un membership total de plus de 110 000 étudiants. Vous dites aussi que vous regroupez 16 associations de niveau collégial et 4 de niveau universitaire. Je voudrais simplement vous poser un certain nombre de questions là-dessus parce que ce ne sont pas les informations que nous possédons.

Ce que nous avons comme information c'est que pour les cégeps dont vous parlez -il s'agit de 14 cégeps - sur les 14 il y a un cégep qui est dissident, il y a un cégep qui a une injonction contre les professeurs, il y a un cégep qui a refusé de prendre position et il y a trois cégeps dont vous parlez qui sont désaffiliés de l'ANEQ. Il reste donc huit cégeps.

Quant aux universités dont vous parlez, d'après les renseignements que nous avons, il y a une université qui est membre de votre

organisme; les autres universités sont partiellement membres et il y a deux universités qui doivent avoir un référendum d'affiliation, selon nos informations cette semaine. Donc on peut raisonnablement se poser des questions sur les 110 000 étudiants que vous représentez.

J'aimerais savoir aussi quels sont vos sources de financement.

Troisième question. J'aimerais savoir qu'est-ce que vous présentez pour la jeunesse québécoise comme projet politique et social. Quels sont les projets que vous avez mis de l'avant, par exemple, cette année pour mobiliser la jeunesse québécoise en dehors, bien sûr, des revendications dont vous faites part dans votre mémoire?

Le Président (M. Desbiens): M.

Beaudoin.

M. Beaudoin: Je vais répondre à la première question concernant la représentativité. En tout cas en ce qui nous concerne, les informations à l'heure actuelle sont qu'il y a 16 associations étudiantes collégiales qui sont effectivement membres de l'ANEQ. Il y a quatre universités. Il s'agit de l'Association fédérative des étudiants et des étudiantes de l'Université de Sherbrooke, qui regroupe environ 65% des étudiants et étudiantes de l'Université de Sherbrooke, l'Association générale des étudiants et des étudiantes de l'Université du Québec à Montréal; l'Association générale des étudiants et étudiantes de l'Université du Québec à Chicoutimi, ainsi que la McGill Students Society, qui depuis deux semaines a adhéré à l'ANEQ, qui est notre vingtième membre et qui a fait gonfler aussi le chiffre de notre membership total de 80 000 à 110 000 étudiants et étudiantes. Ce qui a pu peut-être fausser les informations que vous aviez, parce que l'instance décisionnelle suprême de l'association a adopté l'adhésion à l'ANEQ il y a environ deux semaines.

Quant aux autres possibilités d'adhésion que vous avez mentionnées, il s'agit de l'Université Concordia, qui tient actuellement jusqu'à jeudi un référendum d'affiliation, alors on ne peut pas anticiper le résultat.

Pour ce qui est des cégeps, il y en a 16 actuellement qui sont membres, dont la majorité nous ont donné ce mandat.

M. Leduc (Fabre): II n'y a pas de cégep désaffilié?

M. Beaudoin: Depuis 1975, mon Dieu, il y a eu des affiliations, des désaffiliations. Vous savez sans doute que le mouvement étudiant est un mouvement où il y a un perpétuel renouvellement puis beaucoup de changements d'année en année, ne serait-ce qu'à cause du taux de roulement des étudiants et des étudiantes dans les cégeps et les universités. On pourrait faire l'histoire du mouvement étudiant mais effectivement, depuis 1975, il y a eu beaucoup de changements. Ce que je peux vous dire, c'est qu'en date d'aujourd'hui, à l'heure actuelle, il y a 16 associations étudiantes de niveau collégial qui sont membres. On pourra éventuellement vous fournir la liste et la déposer au secrétariat des commissions.

Mme Muzzo: II y a effectivement, par contre, l'Association étudiante du cégep d'Ahuntsic qui s'est désaffiliée la semaine dernière, si je ne me trompe pas.

M. Leduc (Fabre): II y a Saint-Laurent, qui est en dissidence; Lionel-Groulx, qui a une injonction contre les professeurs; Saint-Hyacinthe, qui refuse de prendre position, Ahuntsic, Vieux-Montréal et Lévis-Lauzon, qui sont désaffiliés.

Quant à vos sources de financement est-ce que vous pouvez nous donner des détails?

Mme Muzzo: On va revenir après sur la représentativité. Sources de financement. Il y a une subvention du gouvernement qui a été de 45 000 $ cette année. Les associations étudiantes prennent entente avec l'Association nationale des étudiants du Québec, si elles n'ont pas les moyens financiers de payer 1 $ par étudiant et par étudiante de leur association. Maintenant, il y a des associations là-dedans qui ne peuvent pas payer de cotisations parce qu'elles ne sont pas reconnues par l'association nationale, malgré des pressions depuis plusieurs années de mouvements d'étudiants et d'étudiantes pour se faire reconnaître. Cela explique, d'une part, un certain manque de financement de ces associations locales où on demande simplement 10 $ en contribution symbolique afin que ces associations étudiantes adhèrent à l'ANEQ.

M. Leduc (Fabre): Est-ce que vous recevez un financement de la CEQ?

Mme Muzzo: Non.

M. Leduc (Fabre): Aucun?

Mme Muzzo: Non. On a reçu des prêts. C'est tout.

M. Leduc (Fabre): En 1975? De quel ordre?

Mme Muzzo: En 1975, pour aider à lancer l'association.

M. Leduc (Fabre): D'accord. On a vraiment l'impression - je suis un peu forcé de poser la question - compte tenu que votre mémoire me semble un écho de ce qu'on a

déjà entendu; il me semble plutôt une défense des intérêts de la CEQ. J'aurais beaucoup d'autres questions à poser. J'y reviendrai peut-être, M. le Président, si j'en ai le temps. Je veux laisser, à mon collègue de Roberval, la possibilité de poser des questions également.

Le Président (M. Desbiens): Mlle Muzzo?

Mme Muzzo: Mme Muzzo, oui.

Le Président (M. Desbiens): Madame.

Mme Muzzo: II y avait une question sur un projet politique et social. Est-ce que la question tient toujours ou préférez-vous y revenir?

M. Leduc (Fabre): Oui, oui.

Mme Muzzo: D'accord. L'ANEQ, depuis sa création, tente de mettre sur pied un projet d'école. Malheureusement, à cause des innombrables attaques que le gouvernement effectue contre le mouvement étudiant, que ce soit dans le régime des prêts et bourses, que ce soit dans les régimes pédagogiques comme tels qui sont attaqués, on n'a pas eu le temps, malgré les huit années de notre existence, de monter un projet éducatif. Heureusement, on va palier à ce manque parce que pour la prochaine session, il y a un congrès d'orientation de l'ANEQ qui se prépare, depuis septembre dernier, sur un projet d'école. À ce moment-là, on va pouvoir beaucoup plus répondre à la question à savoir quel est le projet d'école de l'ANEQ?

M. Leduc (Fabre): Depuis combien de temps existez-vous?

Mme Muzzo: Depuis huit ans. Le 22 mars, nous aurons huit ans.

M. Leduc (Fabre): Et vous n'avez pas autre chose à nous dire sur vos projets politiques et sociaux?

Mme Muzzo: On s'est toujours embarqué dans des projets avec des groupes populaires par exemple. On va participer à la grande marche pour l'emploi, par exemple, organisée par des centrales, par la Jeunesse ouvrière chrétienne, etc. C'est un mandat de congrès de participer à pareille activité. On participe également à la préparation d'une marche des jeunes pour les problèmes spécifiques des jeunes. On a déjà participé au Sommet populaire de Montréal sur les questions pédagogiques. On donne notre appui aux assistés sociaux, aux regroupements de locataires, aux garderies. En fait, on ne peut pas bâtir seuls le projet social. On tient à le bâtir avec tout le monde, avec les groupes populaires, avec les syndicats, avec les démunis et cela prend du temps. On a huit ans d'existence et simplement former une association, la consolider, cela prend déjà une bonne partie de notre temps.

M. Leduc (Fabre): Merci.

Le Président (M. Desbiens): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Je voudrais poser une question au représentant du Mouvement des étudiants et des étudiantes chrétiens qui est ici. Vous avez dit que vous accordiez votre adhésion à l'analyse qui a été présentée des événements des derniers mois et de la ligne suivie par le gouvernement, au nom de l'option que votre mouvement fait pour les démunis, pour les pauvres, pour ceux qui ont le plus besoin en somme du soutien de la communauté. J'aimerais que vous nous expliquiez comment vous conciliez cette option avec le discours qui a servi de base à l'option du gouvernement? Le gouvernement nous dit qu'il sera obligé d'aller chercher des choses chez les enseignants parce qu'ils étaient mieux traités que d'autres catégories de travailleurs dans la société, parce qu'ils ont bénéficié de contrats qui étaient très avantageux pour eux; et le gouvernement nous dit qu'il veut ramener les choses à une mesure plus juste afin d'avoir plus de ressources justement pour les démunis. Comment répondez-vous à cette question?

Le Président (M. Desbiens): M.

Beauregard. (23 h 30)

M. Beauregard: Oui. Pour nous, ce n'est pas parce que le gouvernement affirme qu'il coupe les salaires des enseignants pour en donner aux plus démunis, ce n'est pas parce qu'il le dit qu'il va le faire, d'une part. On constate que les budgets sociaux n'ont pas augmenté considérablement. Au contraire, on sabre à grands coups dans ces budgets. Même si le gouvernement dit que ce n'est pas pour jouer à Robin des Bois qu'il coupe, ce n'est pas cela qu'il fait. Les coupures aux enseignants ne vont pas directement dans la poche des plus démunis. Au contraire, on remarque que des subventions de plus en plus importantes vont au secteur des pâtes et papiers, à tous les secteurs et aux entreprises. Pour nous, les plus favorisés de la société ne sont pas nécessairement les employés des secteurs public et parapublic. Il y a peut-être d'autres secteurs beaucoup plus favorisés. Ce serait plutôt une classe moyenne qu'on vise actuellement. La classe très favorisée n'est absolument pas visée par les attaques du gouvernement, au contraire. C'est par une politique de taxation des profits des très hauts salariés que l'on aurait

pu amener une justice sociale plus grande, une équité plus grande et favoriser les plus démunis.

Ce n'est absolument pas le cas. Au contraire, la taxation des profits des entreprises a été diminuée de beaucoup, depuis 1971, comme on le dit dans le mémoire. Nous considérons que, finalement, le gouvernement a de beaux discours sur ce sujet sauf que sa pratique en est très éloignée. Il vise la classe moyenne alors qu'il devrait viser ceux qui sont vraiment plus favorisés pour donner vraiment aux plus pauvres. Mais, actuellement, on assiste à une dissolution de la classe moyenne qui favorise les gens déjà plus favorisés. L'exercice que le gouvernement fait en ce moment n'aidera pas du tout les plus défavorisés.

M. Ryan: Si j'ai bien compris, vous considérez que les mesures prises par le gouvernement vont entraîner un affaiblissement de l'enseignement public et auront des conséquences sérieuses pour les jeunes qui ont droit à l'éducation?

M. Beauregard: C'est clair. En plus d'éliminer la classe moyenne plutôt que de s'attaquer aux surplus des riches, on sabre dans les budgets sociaux et il est évident que ce sont toujours les plus défavorisés de la société qui sont tributaires des budgets sociaux. Dans l'éducation, comme il est exposé dans le mémoire, ce sont les plus défavorisés de la jeunesse qui vont avoir à subir les réaménagements des décrets, la baisse de la qualité de l'enseignement.

M. Ryan: Est-ce que je peux demander si la position de votre association est encore celle que vous aviez préparée au début des travaux de la commission: les quatre recommandations? Peut-être qu'on peut les prendre une à une: retrait de la loi 111, je pense que cela reste votre position, à moins que je ne me trompe?

M. Beauregard: Oui.

M. Ryan: Peut-être pourriez-vous dire où vous en êtes ce soir sur chacun de ces quatre points?

M. Beauregard: D'accord.

Le Président (M. Desbiens): M.

Beaudoin.

M. Beaudoin: Merci.

M. Ryan: Voulez-vous nous dire comment vous est apparu le cheminement du travail de la commission? Est-ce qu'il s'oriente vers cela ou s'il s'est éloigné des objectifs que vous entrevoyez?

M. Beaudoin: D'accord. L'objectif qu'on visait, c'était une reprise des négociations dans un cadre assez propice à la poursuite de la trêve, c'était la levée du mot d'ordre de grève pour le 14 mars. Cela passait par le retrait de la loi 111. D'après nous, cette mesure devrait être mise en application immédiatement bien que nous soyons bien conscients qu'il y ait une possibilité, si tout le monde est de bonne foi, de continuer à travailler même si elle est là. Pour que les conditions soient les plus propices à un règlement dans les jours ou dans les semaines qui viennent, la loi 111 devrait être retirée.

Notre deuxième recommandation, c'était textuellement: "Que le gouvernement accepte de négocier avec ses employés dans le cadre du régime des relations du travail qui était en vigueur avant l'adoption des lois 68, 70, 72, 105 et 111..." dans la mesure où cette dernière serait abrogée pour le moment. En disant cela, cela pouvait être compris comme étant l'abrogation immédiate de ces lois, mais cela pouvait vouloir dire aussi que, dans la mesure où tout le monde est prêt à faire des ouvertures, on va se mettre à négocier dans l'esprit du Code du travail et du régime de relations du travail. Ce n'est pas pour rien qu'elle a été formulée comme cela et qu'on disait de la faire dans le cadre moral du régime de relations du travail qui était en vigueur. On pense que cette disposition -on ne parle pas de recommandation technique mais on parle plutôt de mettre en place une disposition morale pour les deux parties -doit encore tenir.

Quant au droit de grève, tel que reconnu par le Code du travail, il est bien évident que, dans la mesure où on maintient pour le moment la loi 70 en particulier et la loi 105 qui ont entraîné des modifications à l'exercice du droit de grève, cela ne tient pas comme tel. Et que le gouvernement cesse sa campagne de propagande contre les travailleurs et les travailleuses des secteurs public et parapublic, cela nous apparaît encore comme un élément essentiel au règlement du conflit.

Maintenant sur ce sujet, quelle évaluation peut-on faire des travaux de la commission parlementaire? Je pense qu'on a constaté, on a pris bonne note et on a apprécié l'attitude de compromis que la CEQ a adoptée ici en mettant clairement sur la table les concessions salariales et celles sur les modifications des régimes de retraite, tel que cela a été présenté. Cela circulait dans les airs, tout le monde entendait dire que la CEQ était prête à faire des concessions sur cette question, mais cela a été posé clairement sur la table comme un élément dont on avait disposé de sorte qu'on pouvait pratiquement repartir les négociations à neuf sur ce qui restait dans la mesure où le gouvernement était de bonne foi. Je pense

qu'on a pu apprécier cela positivement, comme on a pu apprécier aussi le fait qu'on ait voulu reprendre les négociations avec la présence d'un observateur-conciliateur dont le statut n'est pas encore tout à fait défini. Mais le ministre Laurin nous a confirmé tantôt que cela se ferait dans l'esprit de ce qui est déjà prévu comme mesures de conciliation au Code du travail. On pense que c'est une mesure susceptible d'aider au rapprochement quant au conflit qui nous concerne.

Maintenant, ce qu'on a moins apprécié et qui n'est pas dans le cadre comme tel des travaux de la commission parlementaire, bien sûr, c'est le fameux journal qui a été distribué vendredi. Juste à voir les réactions que les syndicats ont eues par rapport à cela nous confirme le fait que ce n'était pas une mesure nécessaire, que cela ne faisait que jeter de l'huile sur le feu et ne pouvait finalement avoir comme conséquence que de faire en sorte que la CEQ soit moins disposée à reprendre les négociations dans les jours qui viennent, dans un esprit de régler au plus vite. Disons qu'on ne peut pas faire abstraction de cet événement dans le bilan des travaux de la commission parlementaire et on pense que, finalement, c'est une tache noire qui reste.

M. Ryan: Est-ce que vous avez suivi les travaux de la commission parlementaire depuis le début ou si vous étiez ici seulement au début et ce soir?

M. Beaudoin: On les a suivis, pour l'essentiel, du début jusqu'à la fin, sauf exception, c'est-à-dire qu'il y a eu au moins une représentation ici mercredi, jeudi et une bonne partie de la journée vendredi et également aujourd'hui, depuis la fin de l'après-midi.

M. Ryan: Dans l'ensemble trouvez-vous que les organismes ont été reçus convenablement?

M. Beaudoin: Oui. En tout cas, nous considérons avoir été reçus convenablement et je pense qu'il n'y a pas eu de problème comme tel à ce sujet. Je pense que tout le monde peut bien se rendre compte que cela a été très long, que cela s'est terminé tard et que ce n'était pas nécessairement les meilleures conditions pour un débat sain, sauf que cela s'explique aussi par l'ampleur des questions qui avaient à être abordées.

M. Ryan: Vous avez dû remarquer que les opinions étaient extrêmement partagées, qu'il y avait des opinions qui allaient dans un sens et d'autres, dans l'autre. Ce sera ma dernière question, d'ailleurs: Quand on vous dit - encore une fois, je mets ceci un peu entre parenthèses, parce que les études sur lesquelles s'appuient certains pour faire ces affirmations restent à vérifier dans la plupart des cas - que certaines catégories de travailleurs au Québec jouissent de conditions assez supérieures à celles qui sont données à des travailleurs comparables dans d'autres sociétés parfois plus riches que le Québec -la comparaison avec l'Ontario est l'une des plus fréquemment évoquées de ce côté -qu'est-ce que vous dites, dans l'optique toujours d'option préférentielle pour les pauvres et les privilégiés? Comment réagissez-vous à cela?

Le Président (M. Desbiens): M.

Beauregard.

M. Beauregard: Peut-être que l'Ontario est une société plus riche, mais elle n'est pas nécessairement plus égalitaire. Nous ne croyons pas que ce soit à la mesure de ce qui se passe en Ontario qu'on doit gérer ce qui se passe au Québec.

M. Beaudoin: Toutes ces analyses ne sont pas nécessairement concluantes. Par exemple, il y a eu une comparaison qui a été faite par la CEQ, qu'on pouvait considérer comme étant tout aussi valable quant aux salaires, avec d'autres groupes d'enseignants au Canada anglais. Je pense que tout cela reste à analyser et à discuter sans qu'on puisse en tirer de conclusion arrêtée. Je pense qu'on ne peut pas, non plus, regarder le résultat de ces analyses sans tenir compte, justement, du contexte et du type de société dans lequel ces conditions sont en vigueur. C'est peut-être ce qu'il y a de plus important sur ces comparaisons qui restent à faire, jusqu'à maintenant, à notre avis.

Il y a des députés et aussi des membres de la commission parlementaire qui ont évoqué qu'on ne peut pas, par exemple, comparer platement le salaire d'un enseignant au Québec ou le salaire d'un enseignant en Ontario ou comparer, par exemple, le coût pour maintenir un enfant à l'école pendant un an au Québec et en Ontario sans tenir compte des différences bien simples de société qui sont le quadruple réseau scolaire au Québec, les subventions aux collèges privés. On a parlé aussi du ratio cadre-étudiants qui est une donnée qu'on devrait cerner et dont il faudrait tenir compte par rapport à l'ensemble. Ce sont toutes des choses qui n'ont pas encore été faites, je pense, et qui ne nous permettent pas de tirer des conclusions arrêtées sur les données qui ont été présentées.

M. Ryan: Merci.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Roberval.

M. Gauthier: Merci, M. le Président. Comme on m'a déjà reproché de ne pas intervenir suffisamment à certains moments à la commission parlementaire, je ne manquerai pas de poser quelques questions à nos invités. Il y a quand même des choses dans le mémoire qui revêtent un intérêt certain. Mais il y a des choses qui font sursauter et il y a des choses également, je pense, qui relèvent à tout le moins d'un certain pessimisme.

À titre d'exemple, au début du mémoire, vous vous présentiez, madame, à la commission parlementaire en disant que l'ANEQ exprimait des doutes plus que sérieux sur la valeur de la commission parlementaire. J'avais l'intention de vous demander un peu comment vous pouviez expliquer un pessimisme aussi évident en début de mémoire. Cependant, je vois que cela ne tient probablement plus parce qu'on a dit tout à l'heure que le mémoire avait été écrit au début de la commission et qu'il n'avait pas été ajusté en fonction du déroulement des événements. C'est donc dire, j'imagine, que vous reconnaissez par le fait même que la commission parlementaire a fait évoluer la situation puisque cela aurait pris un ajustement du mémoire pour le rendre conforme à une présentation aussi tardive. Si vous avez des commentaires, vous pourrez les noter et commenter après, si vous le désirez.

Vous avez également mentionné dans le mémoire que le gouvernement avait tout fait pour conserver le mythe d'une fonction publique trop grasse. J'aimerais avoir quelques détails là-dessus parce qu'il me semble qu'il est généralement reconnu dans les chiffres qu'on connaît et dans les échanges qu'on a avec nos électeurs ou avec les citoyens en général que les chiffres de progression de la fonction publique, particulièrement dans les années 1974, 1975, 1976, ont augmenté considérablement. Si ma mémoire est fidèle, c'est d'environ 100 000 personnes, à peu de chose près. Il me semble bien qu'il y a eu là une augmentation assez considérable.

Également, puisqu'on parle des enseignants plus particulièrement, le nombre d'enseignants depuis quelques années a baissé de 2,9% ou 3% environ, avec une baisse de clientèle quand même plus substantielle. Il ne m'apparaît pas, au moment où on se parle, que la fonction publique soit si maigre que cela. Il me semble que la fonction publique se porte assez bien. Ce gouvernement, depuis quelques années, a limité la croissance de la fonction publique. Je pensais que c'était un jugement que vous portiez. Quant à savoir si la fonction publique était relativement maigre ou bien portante, à votre point de vue, vous pourrez me commenter cela tout à l'heure.

Vous avez parlé également - c'est une remarque que je veux vous faire - de ramener le niveau de taxation des entreprises à celui de 1971. Je pense bien que sur la taxation des entreprises, il est bon de savoir que, évidemment, tout ce problème de la taxation se fait dans un marché concurrentiel. On ne peut indûment taxer ou détaxer une entreprise ou les citoyens, peu importe, sans que cela ait des influences déterminantes sur les marchés face aux concurrents. Vous savez que les entreprises québécoises sont en concurrence avec des entreprises américaines, des entreprises japonaises, des entreprises canadiennes, ontariennes, etc. Évidemment, on ne peut pas faire fluctuer indûment le taux de taxation d'une entreprise sans risquer de changer d'une façon qui peut être dramatique sa position sur le marché de la concurrence. (23 h 45)

Alors, il y a quand même une mise en garde qu'on peut faire là-dessus. On ne l'abordera pas dans ce débat, mais je pense qu'il convient d'être prudent dans ce secteur. Je n'ai, évidemment, pas les chiffres pour faire la démonstration pratique, mais je pense que c'est le genre d'affirmation sur lequel il ne faut pas insister trop, à moins d'avoir des exemples très probants que les entreprises du Québec sont beaucoup moins taxées que celles d'ailleurs et qu'elles pourraient supporter des charges fiscales bien supérieures.

Également, vous avez dit dans votre mémoire - j'aimerais avoir votre explication là-dessus, si vous voulez en prendre note -que les travailleurs du secteur public seraient les seuls à supporter la crise économique. Tout de même, il faut voir, dans un comté comme le comté de Roberval que j'ai l'honneur de représenter, les travailleurs forestiers, les scieries, la construction, les commerçants, les hommes d'affaires, les employés de magasin; ce sont des gens qui sont touchés on ne peut plus durement par la crise économique. Je pourrais vous citer des exemples dans mon comté où dans des paroisses de moins de 2000 personnes, environ 100 familles ne peuvent plus compter, tout d'un coup, que sur l'aide sociale, après avoir fait un an de chômage parce que la scierie était fermée. Il faut nuancer quand on dit que les travailleurs du secteur public sont les seuls à supporter la crise. Il y a tout de même une baisse de la richesse collective qu'on ne peut nier et qui est d'environ 6%. Alors, s'il y a une baisse de la richesse collective de 6%, je ne pense pas que, parmi les travailleurs des secteurs public ou parapublic, il y en ait un seul qui ait perdu au niveau salarial; au contraire, il a eu une augmentation, même minime, sur le salaire de l'an passé. Il faudrait voir les chiffres à ce sujet.

Également, vous avez dit dans votre mémoire - et je dois le relever - que le

gouvernement n'a rien fait pour les plus démunis. Je voudrais corriger un peu cette affirmation en disant que le gouvernement a investi tout récemment, pour faire face justement à ce chômage aigu, quelque 160 000 000 $, si ma mémoire est exacte, dans des programmes de création d'emplois, temporaires, hélas, pour la plupart. Mais je pense que ce sont 160 000 000 $ qui ont été investis pour les plus démunis. La compréhension que j'ai de quelqu'un qui ne travaille pas est qu'il est plus démuni que celui qui travaille, à mon point de vue. Peut-être que vous avez d'autres exemples pour démontrer cette affirmation, mais il m'apparaît que c'est un jugement bien sommaire.

Vous dites également que le gouvernement a bafoué la Charte des droits et libertés de la personne par l'article 28 de la loi 111. Je voudrais vous demander: À votre point de vue, quel droit est le plus fondamental, le droit à la grève ou le droit à l'éducation? J'aimerais que vous m'expliquiez dans quel ordre vous placez ces droits, parce qu'ils sont inclus tous les deux dans la Charte des droits et libertés de la personne.

Vous avez également cité le ministre fédéral des Finances qui disait qu'il allait augmenter son déficit pour venir en aide aux plus démunis. Je vous ferai remarquer qu'en regardant les chiffres ce n'est peut-être pas l'exemple à donner de ce temps-ci. Avec un déficit de près de 30 000 000 000 $, qui a multiplié par 300% les prévisions du début de l'année, je m'inquiéterais de citer un pareil exemple. Si le Québec faisait comme le ministre fédéral des Finances actuel et multipliait le déficit prévu par 300%, cela voudrait dire qu'on se ramasserait avec un déficit de 9 000 000 000 $. Évidemment, avec 9 000 000 000 $, on réglerait bien des problèmes, sauf que c'est peut-être vous, les jeunes, qui auriez des problèmes dans quelques années, parce que, lorsqu'on emprunte, en général, il faut rembourser.

J'aurais bien d'autres commentaires, M. le Président. Combien de temps me reste-t-il? Il me reste cinq ou dix minutes?

Le Président (M. Desbiens): Vous avez utilisé huit minutes de votre temps.

M. Gauthier: Alors, je peux me permettre encore quelques minutes. Vous avez dit également une chose qui est très inexacte, c'est-à-dire que le gouvernement, en sabrant dans le salaire de ses employés, crée du chômage. Il faut bien comprendre que c'est là une notion qui est dangereuse à véhiculer. Si le gouvernement retirait effectivement de l'économie les quelques centaines de millions qui constituent, si on veut, la demande d'accroissement de productivité des employés des secteurs public et parapublic et également les restrictions de l'augmentation de salaire, si le gouvernement retirait cet argent tout bonnement pour placer ces montants dans des coffres quelque part, évidemment, cela créerait du chômage. Ce qu'il faut comprendre, c'est qu'un gouvernement étant un répartiteur de la richesse doit, pour consacrer des sommes d'argent à une certaine quantité de personnes, les prendre ailleurs. Le gouvernement déplace des sommes d'argent. La question est de savoir: Est-ce que le gouvernement, en refusant de déplacer des sommes d'argent provenant d'autres secteurs, d'autres travailleurs, d'entreprises privées, de magasins, de tout ce que vous voudrez, vers le secteur public crée du chômage? C'est une question à laquelle j'aimerais que vous m'apportiez une réponse.

Également, vous avez mentionné que vous aviez de la difficulté à rencontrer les professeurs actuellement. Je pense que vous représentez les étudiants de cégeps et d'universités. J'imagine que vos professeurs ne sont peut-être pas très fiers de vous au moment où on se parle, parce qu'avec une charge de travail d'environ douze ou quinze heures au collège et quelque six heures de cours à l'université avec des travaux de recherche, cela va de soi qu'il s'agit là de conditions de travail qui ne sont pas exceptionnelles, c'est bien normal, mais qui sont tout de même intéressantes et qui doivent permettre un contact maître-élève relativement suivi. Si tel n'est pas le cas, évidemment, je me pose des questions. En demandant un accroissement de charge de deux heures par semaine aux cégeps et dans les collèges, évidemment, cela serait problématique. D'ailleurs, quand ils ont comparu ici, les enseignants de cégep nous ont expliqué qu'ils passaient beaucoup de temps à l'encadrement, à la préparation, à l'animation des étudiants; je ne sais pas exactement dans quelle proportion. J'aimerais savoir quelle proportion du temps devrait être consacrée, selon vous, à l'enseignement pour que vos professeurs aient le temps de vous rencontrer. Est-ce que, finalement, ce n'est pas un jugement un peu sommaire que vous avez porté envers vos enseignants? Ceux que je connais, en général, sont assez disponibles, du moins dans ma région.

Enfin, vous avez dit que la loi 105 faisait du gouvernement du Québec le plus autoritaire et le plus antidémocratique au Canada. Je vous demande simplement de répondre à la question suivante: Est-ce que vous savez de quelle façon l'ouverture des conventions collectives s'est faite en Ontario et au gouvernement fédéral? Est-ce que vous savez de quelle façon les taux de salaires en pleine convention ont été changés par ces autres gouvernements? Peut-être, si vous avez cette information, pourriez-vous m'expliquer comment vous pouvez concevoir

qu'un gouvernement qui ouvre unilatéralement, sans aucune discussion, sans aucun avertissement, les conventions collectives en cours, qui impose 6% et 5% d'augmentation de salaire et referme les conventions au moment où il est prêt à le faire, est plus démocratique que le gouvernement du Québec dans la discussion et le débat qu'il a entrepris avec ses employés, même si, dans le cas de la CEQ en particulier et de la Fédération nationale des étudiants, ce débat ne s'est pas soldé nécessairement pas un succès. Je voudrais que vous m'expliquiez en quoi c'est plus démocratique de décider d'ouvrir les conventions tout seul, de fixer les taux tout seul et de refermer tout seul ces conventions que le débat qui s'est passé au Québec et qui a permis à la plupart des syndicats, finalement, au moins de faire entendre leurs points de vue et de suggérer certains aménagements à l'intérieur de ce cadre qui est, c'est vrai, défavorable, mais dans lequel tout de même ils ont pu se faire entendre.

Je pense que vous avez suffisamment de questions et mon temps doit achever. Avant que le président me rappelle à l'ordre, j'aimerais que vous répondiez à quelques-unes de ces questions. S'il me restait du temps, M. le Président, j'en aurais encore quelques-unes, mais je vais me limiter.

Le Président (M. Desbiens): Cela me surprendrait fort, M. le député de Roberval. M. Beaudoin.

M. Beaudoin: M. le Président, rapidement, concernant votre premier commentaire à propos de l'évaluation qu'on avait faite de la possibilité pour cette commission parlementaire d'aider à un règlement du conflit, il faut bien voir qu'on mentionnait qu'on n'était pas les seuls à le dire; effectivement, il y a bien des gens qui avaient émis des doutes sur le fait qu'une simple commission parlementaire puisse modifier le cours des choses. Je pense qu'effectivement - on l'a écrit, on l'a dit et on le répète - dans le cadre de la convocation uniquement d'une commission parlementaire, il n'y aurait pas grand-chose nécessairement qui pouvait aider le rapprochement des deux parties. Je pense que, quand l'idée de la commission parlementaire est venue sur la table, elle venait du président du Conseil supérieur de l'éducation et était attachée à la proposition d'une médiation, d'une conciliation ou dans le but d'introduire un autre élément dans le débat qui pouvait finalement aider à un règlement, à faire la part des choses. C'est dans ce cadre qu'on a pu dire qu'on ne pensait pas que la commission parlementaire on le dit encore - pouvait régler le problème.

Il a fallu que la commission parlementaire se tienne pour que le ministre accepte la médiation, la conciliation ou la tierce partie. Si cela a pris une commission parlementaire pour en arriver à ça, peut-être qu'on aurait pu gagner un peu de temps. Il y a déjà un mois, cinq semaines, six semaines, beaucoup de groupes de pression ou certains groupes intéressés par la négociation demandaient l'installation d'une médiation ou d'une conciliation quelconque. Si on l'avait acceptée, si on était embarqué dans ce processus, peut-être qu'il n'y aurait même pas eu lieu de tenir cette commission parlementaire.

Concernant la dernière question à propos des comparaisons qu'on a pu faire avec les autres gouvernements au Canada, si le gouvernement avait imposé des augmentations de salaires de 6% et 5% à ses employés, je pense qu'on n'en serait pas rendu là. Il a été question de beaucoup plus que ça. On est tout à fait prêt à qualifier les attaques que les autres gouvernements ont faites quant à la réouverture des conventions collectives, particulièrement en Ontario et dans la fonction publique fédérale. C'étaient des attaques antidémocratiques. Je pense qu'on peut les qualifier différemment dans la mesure où, au moins, on se contentait seulement de la récupération salariale qui n'était pas si accentuée que dans le cas qui nous concerne actuellement. Je ne pense pas que, dans ces secteurs-là, on en ait profité pour remettre en question des acquis syndicaux, puis pour le faire quasiment exprès pour provoquer les syndicats sur des questions qui n'avaient même pas d'incidence budgétaire. Je fais référence ici, par exemple, à l'autonomie départementale au niveau des cégeps. Je ne pense pas qu'au niveau des autres gouvernements - fédéral et ontarien - on en ait profité pour remettre en question un tas de pratiques et d'acquis qui étaient courants, à l'occasion de ces modifications qui ont été faites au traitement des employés de la fonction publique.

Le Président (M. Desbiens): Mme

Muzzo.

Mme Muzzo: Si on parle de la baisse des enseignants et des enseignantes, on parle aussi de la baisse de la clientèle et l'on considère que, par rapport à ça, il y a comme du gras; sauf que, si on considère les chiffres, il y a seulement 29% des jeunes venant des secteurs primaire et secondaire qui atteignent le cégep. Ce n'est pas du gras. Si on regarde une étude du Conseil supérieur de l'éducation, seulement 50% des étudiants et étudiantes du secondaire réussissent à avoir leur DEC. Il y a un problème quelque part, puis ce n'est pas en coupant qu'on va le régler.

Beaucoup de jeunes sont obligés

d'abandonner leurs études parce qu'ils ne sont pas admissibles à un régime de prêts et bourses. Ce n'est pas parce qu'on habite chez ses parent qu'on n'a pas à payer pension, parce qu'eux aussi ont de la misère à joindre les deux bouts. Il y a souvent des problèmes familiaux qui font qu'on doit quitter la maison; ça ne nous donne pas d'argent. Il y a beaucoup d'étudiants et d'étudiantes qui doivent vivre avec 3000 $ et même moins par année. Pourtant, en 1978, c'était nous qui étions considérés comme des privilégiés.

Ensuite, on n'a pas dit que la crise économique touchait seulement les travailleurs et travailleuses des secteurs public et parapublic. On a dit qu'on s'en prenait pratiquement seulement à eux surtout pour subir les conséquences de la crise économique, à savoir qu'eux et elles doivent se serrer la ceinture.

Le gouvernement propose des alternatives à la jeunesse: il va donner une couple de centaine de milliers de dollars pour subventionner le Sommet québécois de la jeunesse; en tout cas, c'est un projet qui est sur la table. Pourtant, il y a des groupes de jeunes qui existent en ce moment, des groupes qui s'occupent des jeunes, comme les services 15-20, les 18-30, l'Association pour la défense des droits sociaux, le Bureau de consultation-jeunesse qui auraient besoin de subventions. Le Bureau de consultation-jeunesse voulait mettre sur pied des cliniques dans les cégeps où on aurait parlé de planification des naissances, des moyens contraceptifs, des dangers du syndrome du choc toxique des tampons pour les filles menstruées, etc. Ce sont des services qui n'existent pas dans les cégeps. Pourtant, si on a l'âge de procréer, on doit savoir comment ne pas procréer. Pourtant, vous donnez de l'argent à un organisme qui se veut le porte-parole de la jeunesse et les groupes existant déjà, qui ont fait leurs preuves chez la jeunesse, ne sont pratiquement pas consultés. On parle déjà d'un secrétariat d'État à la jeunesse. Est-ce que ces groupes ont été consultés à savoir quels devraient être les objectifs de ce secrétariat d'État? Est-ce qu'il devrait y avoir un secrétariat d'État, etc? (minuit)

Ensuite, le droit de grève par rapport au droit à l'éducation. Ce que vous me dites, c'est de choisir entre un droit de grève, qui, en ce moment, a privé les étudiants et les étudiantes de l'enseignement, et le droit à l'éducation. Sauf que par les coupures que vous faites, par les programmes pédagogiques que vous mettez sur pied, vous mettez beaucoup plus en danger le droit à l'éducation en ce moment qu'une grève de quelques semaines des enseignants et des enseignantes pour conserver minimaiement des conditions de travail et d'enseignement.

Quand on parle, par exemple, du ratio maître-élèves, je ne sais pas si vous avez déjà été dans une classe où il y a 40 étudiants et étudiantes. Ce n'est pas "écoutable"! Ce n'est pas "enseignable"! C'est là qu'on voit qu'il va y avoir une séparation de ceux qui sont plus intelligents, qui prennent plus rapidement les renseignements par rapport à d'autres qui auraient besoin d'un peu plus d'aide. Quand on parle aussi de ces classes, on dit au professeur de donner des cours magistraux parce que, dans ces conditions, par exemple, de 40 élèves dans une classe, c'est pratiquement la seule façon d'enseigner.

Quand on parle de la disponibilité des professeurs, on dit qu'ils enseignent seulement 12 heures, etc., sauf que les professeurs doivent se mettre à jour au niveau des livres. Ils doivent faire de la recherche, par exemple, quand ils veulent présenter des vidéos. Ils doivent se mettre à la recherche de certains films ou de certaines diapositives, ce qui demande un temps de recherche qui n'est pas nécessairement considéré quand on fait du 9 à 5 dans un bureau, par exemple. Souvent, il faut qu'ils aillent faire des recherches pendant la fin de semaine ou après leurs heures de travail, etc. Il faut tenir compte de cela.

Quand on disait, par exemple, que déjà on avait de la difficulté à voir des professeurs, ce n'est pas qu'ils ne sont pas disponibles, mais, à un moment donné, quand on a une classe de 30, 40 élèves et que chaque étudiant et étudiante aurait besoin d'aller voir le professeur pendant une heure ou deux, évidemment, il y a un manque de temps.

Le Président (M. Desbiens): Je vous remercie.

M. Gauthier: Une toute dernière, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Vous avez déjà dépassé les 20 minutes.

M. Gauthier: C'est parce que je n'ai pas eu ma réponse concernant le droit le plus fondamental.

M. Ryan: On ne peut pas consentir.

Le Président (M. Desbiens): II n'y a pas de consentement.

M. Gauthier: Vous ne pouvez pas consentir?

Le Président (M. Desbiens): II n'y a pas de consentement de l'autre côté.

M. Ryan: II y a encore un autre

organisme à entendre. Il faut être réaliste.

M. Gauthier: Je suis très réaliste. Je vous demandais la permission.

Le Président (M. Desbiens): Je dois donner le droit de parole au député de Marquette. Pour équilibrer des deux côtés, vous auriez 18 minutes.

Mme Lavoie-Roux: Pourriez-vous me laisser trois minutes?

M. Dauphin: Oui, je vous en laisserai. Merci, M. le Président. Je ne crois pas effectivement avoir ambitionné sur le temps qui m'a été dévolu depuis le début de nos travaux à cette commission parlementaire. Contrairement au député de Fabre et adjoint parlementaire du ministre de l'Éducation, je ne tenterai pas par mes questions de vous discréditer. Tout le monde sait actuellement que le parti qu'il représente n'est pas le symbole de l'unité au moment où on se parle. Je suis d'accord sur un point que vous avez apporté dans vos explications supplémentaires, à savoir que le gouvernement, en pleine commission parlementaire, n'a pas nécessairement contribué à la réconciliation que nous avons tous voulue, du moins de ce côté-ci de la table, par le tract qui a été distribué vendredi dernier.

J'aurais seulement deux questions à vous poser, car je sais que certains collègues, de mon côté, ont d'autres questions à vous poser. Je sais également que nous avons droit à 18 minutes, d'après les paroles du président. La semaine dernière, il y a un groupe qui est venu faire des représentations devant cette commission. Il s'agit de la Coalition étudiante pour la défense des usagers de l'éducation regroupant le RAEU et la FAECQ. Contrairement à votre mémoire, l'essentiel de leur mémoire portait surtout sur la défense des droits des usagers. Je comprends, dans votre mémoire, que vous avez une position quand même assez claire - c'est-à-dire, disons-le franchement, contre l'attitude du gouvernement - à laquelle je souscris en partie, je le dis en passant, sur l'approche de toutes les négociations que nous avons eues jusqu'à maintenant.

Ma première question est la suivante. Vous parlez de l'attitude du gouvernement, des supposées négociations qu'il y a eu et, dans votre raisonnement, effectivement, c'est le gouvernement qui a eu la mauvaise attitude. J'aimerais vous demander, dans un premier temps, pour quelles raisons vous n'avez pas accordé plus de temps, si vous me permettez l'expression, aux usagers, aux premières victimes du conflit. Nonobstant le fait que ce soit la partie patronale ou syndicale qui ait tort, si vous voulez, il y a le risque de perdre l'année scolaire, de recommencer l'année ou ces choses-là.

Dans un deuxième temps, vous avez fait mention du projet de règlement des études collégiales, des associations étudiantes, de la cotisation étudiante, de la perception du gouvernement et du ministre de l'Education, des directives qui sont jugées illégales par leurs conseillers juridiques. À mon point de vue, au niveau de la survie des associations étudiantes, au risque d'engager qui que ce soit, la seule façon de survivre effectivement, c'est de permettre la cotisation à la source, et de façon obligatoire.

Un autre groupe a proposé, au niveau du prêt, une commission indépendante neutre. Le ministre dit qu'il veut consulter les étudiants avant de mettre en application son projet de règlement des études collégiales.

J'aimerais également, dans un deuxième temps, avoir votre avis là-dessus. Avant que le ministre fasse quoi que ce soit de façon unilatérale, ce qui caractérise un peu son gouvernement depuis plusieurs mois, seriez-vous d'accord, au niveau des études collégiales, qu'une commission indépendante ait lieu avant que le ministre bâillonne qui que ce soit au niveau de ce programme?

Le Président (M. Jolivet): Mme Muzzo.

Mme Muzzo: Merci. Qu'on n'ait pas accordé plus de temps pour les droits des étudiants et des étudiantes, je pense que l'optique de beaucoup d'étudiants et d'étudiantes membres de l'ANEQ c'est qu'ils et elles ne sont pas simplement des étudiants et des étudiantes, mais des citoyens et des citoyennes. Il y en a qui sont syndiqués, il y en a d'autres qui sont mère monoparentale, ou père monoparental. Ils sont affectés par la vie politique, la vie sociale du Québec; c'est à ce niveau-là qu'on a le plus tenté de montrer comment, en attaquant aussi durement les syndiqués des secteurs public et parapublic, cela ne favorise aucunement de l'aide à ces personnes-là.

Quand on dit qu'on est contre la loi 105, on protège les droits des étudiants et des étudiantes parce que déjà pour plusieurs c'est minimal, les conditions d'études que l'on a actuellement. C'est en dénonçant la loi 105, en disant pourquoi on la dénonce, qu'on protège directement les droits de nos membres.

M. Beaudoin: Concernant la suggestion qui a été faite d'une commission indépendante qui pourrait étudier les implications du projet de règlement des études collégiales, si ce projet venait sur la table, on consulterait nos membres, puis on verrait ce que l'on envisagerait par rapport à ça. De prime abord, je pense qu'on serait bien disposé à y participer et à donner notre

concours à la tenue d'une commission comme celle-là. Maintenant, on n'a pas été avisés d'un projet qui irait clairement dans ce sens. On n'est pas en mesure de prendre position. Éventuellement, on consultera nos membres; c'est toujours ce que l'on fait de notre côté avant de prendre position.

Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Ce sera très court, M. le Président. J'ai deux petites mises au point a la suite des interventions du député de Roberval. Le député de Roberval a tenté de justifier la loi 70 ou les lois spéciales du gouvernement en disant que l'Ontario avait fait pire puisque unilatéralement on avait accordé une augmentation de 6% et de 5% aux travailleurs du secteur public de l'Ontario pour ensuite refermer la convention. Je pense que le député de Roberval ne voulait certainement pas induire l'Assemblée en erreur, c'est probablement qu'il est mal informé. Comme il y a beaucoup de gens qui nous écoutent, je pense que c'est peut-être important de replacer les choses d'une façon plus exacte.

Le gouvernement de l'Ontario n'a pas fait de récupération, c'est-à-dire aller chercher chez ses employés de l'argent déjà gagné, ce que le gouvernement actuel a fait. Il n'a pas, non plus, gelé les salaires puisqu'il les augmente de 6% et de 5% pour deux années consécutives. Une autre chose extrêmement importante, c'est que le reste de la convention collective des gens de l'Ontario demeure négociable, les salaires mis à part. Je pense qu'il y a là une importante différence.

La deuxième chose porte sur une autre remarque qu'il a faite. Vous avez soulevé le fait que l'application de la loi 111 mettait de côté une partie de la Charte des droits et libertés de la personne. Il vous a répondu à cette question: Est-ce que c'est le droit de grève qui doit avoir priorité sur le droit à l'éducation? Je pense que c'est une question qui pourrait faire l'objet d'un débat intéressant en soi. Toute la population, de toutes les tendances, blâme le gouvernement d'avoir, soi-disant pour établir le droit à l'éducation et arrêter les grèves illégales, mis à l'écart la Charte des droits et libertés de la personne. Ceci n'était pas nécessaire pour que les gens retournent au travail, parce qu'il y avait des sanctions extrêmement sévères dans cette loi qui n'ont pas encore été appliquées. Il n'y avait nulle nécessité de suspendre la Charte des droits et libertés de la personne. Il ne faut pas essayer de confondre les choses.

On pourrait faire un débat à savoir si le droit de grève a priorité sur le droit à l'éducation ou vice versa. On pourrait le faire ce débat. Mais la question fondamentale est de savoir si, pour permettre aux enfants d'avoir leur droit à l'éducation, par exemple, il faut suspendre dans une de ses parties la Charte des droits et libertés de la personne. Je pense que c'est le fond du problème. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Est-ce qu'il y a des gens qui veulent réagir? Non? M. le député de Louis-Hébert.

M. Doyon: Merci, M. le Président. Très brièvement, toujours à l'intérieur des 18 minutes qui nous sont allouées. La présentation qui nous a été faite par les représentants de l'ANEQ me fait retenir essentiellement une chose qui, d'une manière extrêmement regrettable, ne semble pas être retenue par nos collègues d'en face. C'est qu'il y a une inquiétude profonde de la part des étudiants et des étudiantes. Ils se posent de très sérieuses questions sur les conséquences des actes qui sont posés aujourd'hui pour demain, pour leur avenir. Je pense que cette conclusion s'impose d'elle-même. On doit reconnaître avec eux, très sincèrement, que l'inquiétude qu'ils ont n'est pas égoïste. C'est une inquiétude qui se préoccupe des autres. C'est une inquiétude généreuse de nature. C'est l'essence de la jeunesse d'être ainsi. Je leur en sais gré et je leur rends hommage pour une telle attitude. Il est facile de prendre une attitude rébarbative et de tenter de démolir, par un certain nombre de questions insidieuses, une présentation. C'est facile, sauf qu'il faut aller plus loin. Je pense que c'est notre devoir d'aller au-delà des mots, au-delà des paragraphes et au-delà des pages qui nous sont présentés pour voir l'inspiration qu'il y a derrière tout cela.

Mon opinion très sincère est que c'est une préoccupation essentiellement de générosité, une préoccupation qui vise à faciliter les choses pour ceux pour qui les choses sont les plus difficiles. À partir de là, nous serions bien malvenus de faire un accueil semblable à celui que j'ai cru sentir de la part du député de Roberval à la présentation des jeunes de l'ANEQ qui sont devant nous et qui ont attendu longtemps avant d'être entendus par cette commission.

Je pense que l'on doit retenir de tout cela qu'on ne peut pas se servir d'une crise économique ou purement budgétaire - ce qui me semble beaucoup plus exact dans le cas du gouvernement péquiste actuellement pour mettre en danger des acquis, l'avenir des jeunes. Je pense que c'est une préoccupation que nous devrions avoir et que les représentants de l'ANEQ, ainsi que ceux de l'Association des jeunes étudiants et étudiantes chrétiens ont actuellement. (0 h 15)

La présentation qu'ils ont faite découle

de ce genre d'inquiétude qui consiste à se mettre à la place des autres et à réfléchir tout haut sur ce qui amène cette société qui est la nôtre à poser des gestes qui peuvent avoir des conséquences considérables pour l'avenir. Je ne pense pas qu'on puisse leur en tenir rigueur, loin de là. Je pense qu'on doit leur rendre hommage d'avoir fait cela. Ce sont les remarques que je voulais faire à l'intérieur des trois minutes qui m'étaient accordées.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Le député de Nicolet.

M. Beaumier: Par respect pour les jeunes, je me permets de ne pas être d'accord sur tout. J'aimerais parler un peu de la réalité. La réalité est à peu près la suivante en ce qui concerne du moins le secteur de l'emploi. Si vous étiez député -et à l'âge que vous avez, vous avez des chances d'y parvenir éventuellement - vous verriez quatre genres d'emplois. Les gens viendraient vous voir. Vous auriez des gens qui sont du secteur privé; ceux qui n'ont pas perdu leur emploi dans le secteur privé, tant mieux. Vous auriez environ 335 000 personnes des secteurs public et parapublic qui ont des conditions salariales qu'on peut juger, honnêtement, décentes et qui, en même temps, ont une chose qu'on appelle la sécurité d'emploi que n'a pas le secteur privé. Vous auriez aussi environ 450 000 chômeurs et environ 500 000 personnes bénéficiant de prestations d'aide sociale dont une bonne part sont de vos collègues. Cela veut dire qu'il y a des dangers actuellement que vous le voyiez ou non - d'une marginalisation pratiquement chronique de centaines de milliers de vos concitoyens et de vos concitoyennes. C'est cela, la réalité.

Si vous n'appréciez pas le discours que vous appelez la propagande gouvernementale, j'aimerais porter à votre attention, et vous le laisser après si vous le voulez, un texte de M. Edmond Maire, qui est secrétaire général de la centrale socialiste en France, la CFDT, qui regroupe plus d'un million de membres. Voici ce qu'il dit, à l'encontre complètement de ce que vient de dire le député de Louis-Hébert en ce qui concerne les droits acquis. Je cite: "En ce moment -c'est M. Maire qui parle - nous disons qu'en période de crise on ne peut pas faire n'importe quoi. Ce qu'il faut, c'est d'abord s'occuper de ceux qui en ont le plus besoin dans notre pays - faites les traductions qu'il faut - et ceux qui en ont le plus besoin, ce sont les salariés de petites entreprises où il n'y a pas de syndicat, les chômeurs, ceux qui sont au salaire minimum, plusieurs millions de salariés, mais qui ne se retrouvent nulle part et qui ne sont pas dans les grands syndicats, hélas." M. Maire ajoute: "Nous voulons la rigueur pour protéger ceux qui en ont le plus besoin, même s'il faut effectivement modifier un peu les acquis des secteurs les mieux protégés. C'est ce qu'on appelle une politique de nouvelle solidarité face à la crise, qui nous semble vraiment tout à fait nécessaire." Il continue: "Alors, nous proposons une nouvelle solidarité. Nous proposons des thèmes revendicatifs qui ne correspondent pas d'abord aux sentiments, à l'opinion de nos syndiqués, mais à l'opinion des non-syndiqués."

J'aurais une demande à vous faire, toujours dans le même respect du fait que nous ne sommes pas d'accord, pour l'instant; cela peut progresser. Dans votre document -et je ne retiens que cette partie - à la page 8, vous dites: "L'accès à l'enseignement -vous y avez vous-mêmes eu profondément accès - est un préalable à la formation d'individus en mesure d'offrir de nouvelles solutions aux niveaux technique, politique, culturel, etc., aux problèmes que l'on vit." Vous m'avez donné une bonne nouvelle tantôt, c'est que vous avez l'intention, si j'ai bien compris, d'avoir une maison de l'éducation.

M. Beaudoin: Ce n'est qu'un projet d'école en lien avec un projet de société nouvelle.

M. Beaumier: Est-ce qu'il serait possible de vous suggérer de profiter de cette maison pour faire une réflexion et proposer à tous les Québécois et à toutes les Québécoises quelque chose de positif, d'articulé et qui pourrait servir de projet de société autour duquel on pourrait certainement très bien discuter? Cela dit, je vous souhaite bonne chance et je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): M.

Beauregard.

M. Beauregard: J'aimerais répondre au député de Nicolet en même temps qu'à celui de Roberval à propos de la solidarité nécessaire dans une société pour citer M. Maire de la CFDT. On est parfaitement d'accord avec le discours que vous avez tenu. Le problème avec le Parti québécois, c'est qu'il a un discours et une pratique qui diffèrent, un discours social-démocrate avec une pratique de droite ou d'extrême droite. On est parfaitement d'accord qu'il faille aider les plus démunis en sabrant, s'il le faut, chez les mieux nantis, sauf que vous visez mal quand vous visez les secteurs public et parapublic en tant que les mieux nantis de la société. Il y en a de beaucoup mieux nantis.

Le député de Roberval parlait de la proposition qu'on a faite de revoir la politique de taxation. Il disait que cela était impossible dans une situation concurrentielle.

Ce qu'il a dit, finalement, c'est que nous étions une société dépendante; cela, on le sait depuis longtemps. Il parle de son comté de Roberval où beaucoup de scieries ferment et où il y a beaucoup de chômage; on est conscient de cela, sauf qu'il faut voir pourquoi cela se produit actuellement, comment cela se produit, quelle est la mécanique de cela. On a beau constater des choses, mais si on apporte des remèdes sans avoir saisi la mécanique de ce qui se passe, on apporte des cataplasmes et des faux remèdes. S'il y a des scieries qui ferment, c'est à cause de la crise, mais ce ne sont pas toutes les entreprises qui sont en crise. Actuellement la CIP et la Consol sont en train de racheter toutes les scieries en faillite dans le comté du député de Roberval et ailleurs au Québec. Cela veut dire que, lorsque la situation va repartir, ce sont des compagnies qui seront drôlement mieux nanties et qui auront des avantages sérieux.

On est dans une période de crise, donc de concentration du capital. Il y a des gens qui en profitent, c'est certain et c'est ce monde-là qu'il faut viser dans la politique de taxation. Pour reprendre les mots de M. Lévesque, je n'embarquerai pas dans la tuyauterie pour déterminer ce que serait la politique de taxation qui viserait les mieux nantis, mais il faudrait cerner qui sont les mieux nantis. Ce sont eux qu'on doit viser pour aider les plus démunis. Ce sont eux qui en profitent actuellement et qui en sortiront dix fois plus gros, les déjà plus gros, les Des Marais avec Consol qui vont avoir acheté toutes les scieries. Les scieries comptaient pour beaucoup dans les PME au Québec. Des scieries PME, il n'y en aura plus au Québec. Ce seront les papetières qui contrôleront le sciage. Ce sont des choses comme celles-là qui se passent en ce moment et qui nous font dire que le gouvernement vise mal ses cibles. Il a un discours social-démocrate, mais il vise très mal. Les mieux nantis ne sont pas dans les secteurs public et parapublic.

De plus, il ajoutait qu'il était faux de dire que couper dans les secteurs public et parapublic allait créer du chômage parce que tout ce qu'on faisait était de réaménager les sommes. Il a dit que ce serait vrai si on mettait cela dans un coffre. Qu'est-ce qu'on va faire? On ne le mettra pas dans un coffre au Québec, on va l'envoyer dans des coffres aux États-Unis. Cela servira à rembourser les dettes du Québec. Pourtant, dans les années cinquante, quand il s'est agi d'ouvrir les coffres des banques américaines pour relancer l'économie, les banques étaient là. Cela n'a pas créé de crise. Les déficits budgétaires étaient bons, ils relançaient l'économie. Pourquoi cela était-il bon dans les années cinquante et que là, parce qu'il y a une crise du système financier, les banques ont besoin de cet argent-là et demandent à

M. Parizeau de leur envoyer leur argent, de couper dans les secteurs public et parapublic que vous avez engraissés pendant les années cinquante, soixante, soixante-dix, et disent: Ramenez-nous notre argent. Le gouvernement qui est dépendant, c'est bien connu, joue le jeu. C'est le jeu, évidemment, de toutes les sociétés occidentales actuelles. Ce n'est pas parce que c'est le jeu de toutes les sociétés occidentales qu'on est obligé d'être béat devant cela et de n'avoir aucune compréhension de cela. Ce n'est pas en visant les secteurs public et parapublic qu'on réglera ce problème-là, c'est certain.

Le Président (M. Jolivet): M. Beaudoin.

M. Beaudoin: Merci M. le Président. Très, très rapidement, le député de Nicolet, dans la référence qu'il faisait au discours de M. Edmond Maire, a identifié deux secteurs où, finalement, en temps de crise, on devait faire porter les efforts pour aider les plus démunis. Il identifiait, premièrement, le secteur privé au sens général. Pour lui relancer la balle, finalement, je pourrais mentionner que l'attitude que le gouvernement a eue envers ses propres employés est en train de servir, a servi et servira d'exemple pour les employés et les syndiqués du secteur privé qui doivent subir durement la crise. Je mentionnerai seulement deux petits exemples: l'Association des entrepreneurs en construction du Québec qui a demandé aux syndicats, suivant l'exemple en cela du gouvernement, de rouvrir les conventions collectives et de ne pas verser les augmentations qui étaient dues aux employés. Il y aussi le cas d'une compagnie à Montréal, Firestone, où la même situation se produit. On doit donner une augmentation de 10% l'été prochain aux employés et les propriétaires de la compagnie - prenant exemple sur le gouvernement - disent: Le gouvernement le fait, pourquoi ne le ferions-nous pas, demandent aux syndicats de rouvrir les conventions de façon que les signatures ne soient pas respectées. On ne serait, d'ailleurs, par étonné que, dans la même logique, le gouvernement légifère pour aider ces compagnies-là à procéder unilatéralement puisqu'elles ne peuvent pas le faire elles-mêmes car elles ne sont pas juge et partie en même temps.

On a aussi identifié comme cible d'action la syndicalisation des petites et moyennes entreprises. Quand appliquerez-vous votre promesse électorale de 1976, et même d'avant, de réformer le Code du travail et d'instaurer la syndicalisation multipatronale qui, selon la plupart des études sérieuses, serait la meilleure façon d'aider à la syndicalisation des petites et moyennes entreprises, là où c'est difficile quand il s'agit de petits restaurants de trois ou quatre employés? Encore une fois, c'est là

qu'on voit la différence entre le discours et la réalité. On va attaquer les employés du secteur public et on ne défend pas ces pauvres employés du secteur privé des petites et moyennes entreprises qui ne peuvent pas se syndiquer. Cela fait déjà sept ans que les travailleurs et les travailleuses qui vous ont élus attendent que vous appliquiez vos promesses relatives à la réforme du Code du travail et à la syndicalisation multipatronale. Je pense que vous avez su procéder plus vite avec les employés du secteur public qu'avec l'application de vos promesses électorales.

La dernière chose, vous voulez discuter avec nous d'un projet de société. On s'engage dans cette direction et on est bien intéressé à le faire. On espère seulement que cette discussion pourra se faire sans qu'il y ait... On ne remet pas en question le fait que vous formiez le gouvernement et que vous représentiez X nombre de personnes. On n'est sûrement pas prêt à discuter avec vous après les accusations non fondées qui ont été faites par le député de Fabre au début relativement à notre "membership". Il y a eu des faussetés. On a parlé du Vieux-Montréal, de Saint-Laurent, des associations qui s'étaient dissociées ou désaffiliées de l'ANEQ ou qui étaient dissidentes. C'est totalement faux. On pourrait en temps en lieu faire la preuve que cela n'est pas vrai. Les informations circulent peut-être difficilement. Dans des conditions comme celles-là, on trouve, effectivement, difficile de faire un débat sur un projet de société conjoint quand on nous salit de cette façon.

Le Président (M. Jolivet): Merci. J'inviterais l'autre organisme qui reste, l'Institut canadien de l'éducation des adultes, à venir se présenter à l'avant. L'institut canadien est représenté par M. Paul Bélanger. Je lui demande de venir s'installer et, en même temps, de nous présenter ses deux acolytes, ses deux collègues.

Institut canadien de l'éducation des adultes

M. Bélanger (Paul): Je vais d'abord vous présenter celui dont je suis l'acolyte, M. Pierre Couture et M. Richard Nantel.

M. Couture (Pierre): Je regrette l'absence du président, M. Guy Bourgault. Justement, j'avais à présenter M. Richard Nantel qui est chargé de projets à l'Institut canadien de l'éducation des adultes. Avant cela, je vous ferais remarquer que l'éducation des adultes est en dernier et cela est sûrement significatif. Rapidement, l'Institut canadien de l'éducation des adultes s'occupe de la défense des intérêts des usagers en éducation des adultes dans les commissions scolaires, dans les collèges, dans les universités, dans les organismes voués à l'éducation des adultes et même dans les syndicats, l'UPA, la CSN, la FTQ et la CEQ. L'Institut canadien de l'éducation des adultes veut promouvoir différentes expériences et surtout des expériences nouvelles liées aux usagers de l'éducation des adultes. Il s'occupe plus particulièrement de la défense de la spécificité de celle-ci dans une perspective des besoins des usagers. Quand on parle de spécificité, cela est lié à l'apprentissage, à l'enseignement, à l'organisation administrative et pédagogique de l'éducation des adultes.

Plus de 100 organismes sont représentés et autant de membres. Notre principale action dans le passé a été d'être un des principaux instigateurs de la Commission d'étude sur la formation des adultes. M. Bélanger présentera le point de vue de l'institut sur l'impact des décrets en retard de l'éducation des adultes. Il me fera plaisir, avec Paul et Richard, de répondre à vos questions. (0 h 30)

M. Bélanger (Paul): L'éducation des adultes est une nouvelle fois menacée. L'annonce ce soir de la conciliation est une nouvelle fort positive. Elle offre probablement un cadre pour que soit traité de façon efficace le problème qu'on soulève. On ne le soulève pas pour le plaisir de le soulever; on le soulève pour y trouver une solution.

Non seulement l'avenir de l'éducation des adultes a-t-il été sérieusement hypothéqué par les multiples coupures budgétaires faites depuis 1960, mais son existence même est maintenant directement menacée par le décret. En effet, si le décret et les clauses visées devaient être appliqués tels quels, le réseau public de l'éducation des adultes se verrait priver, pratiquement du jour au lendemain, de 70% de son effectif; autant dire que la grande majorité de ceux et de celles qui se sont consacrés à ce secteur depuis les 15 dernières années se verrait purement et simplement éliminée.

Avant d'expliquer comment on en arrive là, permettez-moi de faire quelques rappels. De tout temps, les enseignants et enseignantes de l'éducation des adultes ont été embauchés surtout à la leçon. C'est encore le cas aujourd'hui. Comme on peut le constater en jetant un coup d'oeil au tableau à la fin du document - tableau no 1 - à l'éducation des adultes, le personnel rétribué à la leçon représente 96% du total, ce qui est une amélioration, il faut le dire, c'était 98% il y a deux ans, mais c'est encore énorme. Avant les coupures de 1981, ils étaient au nombre de 11 544. Aujourd'hui, on en compte moins de 9000. Ils et elles remplissent une tâche équivalente à celle de 1900 enseignants à temps plein. Or, ces formatrices et formateurs d'adultes risquent tout simplement de disparaître du réseau public d'éducation des adultes si on applique

les clauses 5-3.28 et 5-3.29 qui permettraient dorénavant d'assigner à la formation des adultes les milliers d'enseignantes et d'enseignants mis en disponibilité. Je vous fais grâce de lire ces clauses à l'heure où on est.

Selon les estimations mêmes les plus conservatrices du nombre des personnes touchées par ces mises en disponibilité il est possible de prévoir que l'application de ces deux clauses "bumping" équivaudra à tuer purement et simplement la spécificité du secteur de l'éducation des adultes. Aucun des trois secteurs de l'éducation des adultes ne sera épargné, c'est-à-dire la formation professionnelle des adultes, la formation générale et l'éducation populaire. Toutefois, dans certains champs de l'éducation populaire, étant donné le contenu particulier de ces champs, il serait possible d'invoquer la clause de capacité, bien que cette clause ne soit pas impérative pour les mises en disponibilité. Cela pourrait permettre de sauver du naufrage général un certain nombre d'enseignantes et d'enseignants.

En tenant compte de la répartition du personnel enseignant selon les trois secteurs, on peut donc estimer, à notre avis et comme nous l'avons dit plus haut, qu'un minimum de 70% des 9000 enseignantes et enseignants à la leçon seront ainsi mis au rancart, soit 6300 personnes expérimentées et entraînées à travailler avec des adultes. L'accroissement de la tâche des enseignantes et enseignants de 15%, c'est-à-dire le passage de 720 à 840 heures/année, aura pour effet additionnel de diminuer le nombre de postes offerts à temps plein (perte possible de 55 postes) à l'éducation des adultes. Par effet d'entraînement, cette mesure va aussi accroître l'hécatombe dans le camp des professeurs à la leçon puisque chaque transfuge supplémentaire - les mises en disponibilité passant ou pouvant passer à l'éducation des adultes - qui passera du secteur régulier à l'éducation des adultes occupera non seulement un poste à temps plein mais encore un poste à temps plein, plus 15%. Bien sûr, il faudrait soustraire les 80%. Ainsi, on va aller grignoter encore plus ce qui restera aux enseignantes et enseignants spécialisés dans l'enseignement des adultes et embauchés à la leçon comme tâche de formation.

Si on applique le décret, donc, les conséquences en éducation des adultes sont claires. Quel gaspillage d'investissement pédagogique aussi bien que financier! Quel gaspillage de monde aussi ce serait! Nul ne peut nier la réalité de cette possible catastrophe. Une seule question demeure en suspens: Quelle en sera l'ampleur? 6350 personnes ou plus? Nous avons fait, quant à nous, des estimations que nous considérons conservatrices. En effet, n'oublions pas que nombre de personnes engagées à temps plein ne possèdent pas de permanence. Évidemment, il ne s'agit pas de la majorité, c'est vrai. En outre, notre analyse ne tient pas compte de ce qui va se passer au niveau collégial où l'on embauche présentement quelque 40 formateurs et formatrices d'adultes à temps plein et près de 6000 à la leçon. On pourrait aussi se demander quel sera l'avenir de l'emsemble du personnel spécialisé non enseignant des services d'éducation des adultes des deux niveaux. Enfin, faire intervenir le pourcentage de cours à la leçon donnés par du personnel d'enseignant régulier - il y en avait 22% il y a un an ou deux; ce chiffre diminue d'année en année - ne pourrait modifier quant à nous sensiblement les chiffres précédents, du fait qu'au cours des trois dernières années cette pratique est devenue de moins en moins fréquente.

Pour en terminer avec les conséquences anticipées de l'application du décret quant au sort du personnel enseignant à l'éducation des adultes, rappelons que le décret ne comporte aucune clause financière compensatoire pour ses 6000 formateurs et formatrices d'adultes qu'on mettrait ainsi au rancart.

Si on se place maintenant à un autre niveau, l'application du décret aurait pour effet, nous semble-t-il, de remettre en cause quinze années de travail difficile de pionniers pour créer un réseau public d'éducation des adultes. Dans les faits, le décret nie la spécificité de ce secteur de l'éducation. Or, la reconnaissance de la spécificité de l'éducation des adultes est une des recommandations majeures de la Commission d'étude sur la formation des adultes, la commission Jean, qui remettait il y a plus d'un an son rapport au gouvernement. Les commissaires le rappelaient encore avec insistance dans leur déclaration publique du 25 février et nous citons: "Cette reconnaissance organisationnelle de la spécificité de l'éducation des adultes est primordiale dans la mise en place d'une philosophie de l'éducation permanente apte à faire place à des clientèles, des contenus et des modes d'apprentissage variés et diversifiés." En cela, la CEFA confirmait 20 ans plus tard les conclusions du rapport Ryan de 1964. Cette spécificité est aussi - il faut bien le dire - inscrite dans le décret lui-même qui fait état en 8-2.01 et 11-10.02 de deux tâches spécifiquement distinctes entre l'éducation des jeunes et l'éducation des adultes. Il est extrêmement éclairant de lire en particulier les sous-paragraphes 02, 3, 4, 5, 6 et 7, où on décrit vraiment en quoi l'éducation des adultes est différente de l'enseignement régulier. Au point même qu'on pourrait se demander s'il n'est pas contradictoire, d'une part, de proposer des transferts d'enseignantes et d'enseignants et, d'autre part, d'apporter une distinction

spécifique entre les deux tâches d'éducation.

Il est à tout le moins curieux de constater que le décret reconnaît une spécificité de fonction et a, tout à la fois, pour conséquence de la nier dans les faits. Le caractère spécifique de l'éducation des adultes se constate déjà dans la définition des tâches et dans les pratiques éducatives; elle se traduit aussi dans le régime pédagogique et dans la multiplicité des stratégies éducatives dans ce secteur: formation créditée, formation sur mesure, éducation populaire, service à la collectivité. À personne ne viendrait l'idée que l'alphabétisation d'un adulte puisse être assimilée comme situation d'apprentissage à l'enseignement de l'écriture en Ire année du primaire. Spécificité structurelle enfin: ces services de l'éducation des adultes, tout en étant enracinés dans le milieu scolaire, sont constitués en unités différenciées.

Ce réseau de quelque 70 services de l'éducation des adultes dans les commissions scolaires et de 40 dans les cégeps constitue une création québécoise originale qui a prouvé son efficacité et qui est, de surcroît, enviée par plusieurs pays industrialisés. Il n'y a pas lieu ici, tout au moins, de s'enligner sur l'Ontario. L'OCDE, l'UNESCO et le Conseil international de l'éducation des adultes ont tous reconnu la qualité de cette expérience québécoise.

Le décret est plus qu'un décret tenant lieu de convention. Il est dans les faits, pour nous, le cheval de Troie d'une politique d'éducation des adultes contraire à celle prônée par la commission Jean, laquelle commission a encore été entérinée en fin de semaine par les délégués du Parti québécois, et même à ce qui s'est développé au Québec depuis 1964.

L'éducation des adultes avait déjà reçu de durs coups, via les fameuses coupures de 1981, coupures au montant de 33 000 000 $... Résultat: les inscriptions aux cours sont passées de 562 000 en 1979-1980 à 302 000 deux ans plus tard, soit une baisse tragique de 54%. On retrouve les données en annexe.

Il faut bien que le public sache que le secteur le plus touché par les coupures ces dernières années était, comme par hasard, le plus mal protégé syndicalement, donc le plus vulnérable. L'importance des coupures s'explique en effet par la faiblesse des conventions collectives en éducation des adultes. On a constaté le même phénomène récemment en Angleterre. Les coupures ont d'abord saigné l'éducation des adultes, dont le personnel, embauché très majoritairement à la leçon, n'avait aucune protection syndicale lui permettant de préserver ses emplois et, par là, le service public dont il était le moteur.

Il y a là un autre cas où on voit qu'il n'y a pas cette contradiction entre syndicalisme et qualité d'éducation. Déjà, les suites à donner aux recommandations de la CEFA ont été dangereusement compromises par l'accord Ottawa-Québec sur la formation de la main-d'oeuvre, accord signé en octobre 1982, et cela pour les trois prochaines années.

Notons ici, par exemple, d'une part, le non-rapatriement de l'ensemble de l'éducation des adultes au Québec que recommandait la CEFA et, d'autre part, le choix de politiques en formation professionnelle contraire à celui proposé par la CEFA, c'est-à-dire l'entérinement de l'orientation de formation professionnelle du gouvernement fédéral.

Si l'on ajoute aux effets de cet accord ceux résultant des coupures de 1981, coupures demeurées sans correctif, on comprendra le piètre état où se trouve l'éducation des adultes au moment où lui tombe dessus un décret qui risque de l'achever définitivement. Et pourtant, dans le contexte actuel de crise économique et de changements technologiques, il est urgent plus que jamais de fournir aux adultes du Québec des possibilités de se préparer et de se former efficacement.

Alors que la France mise sur l'éducation continue comme outil de requalification, le Québec laisserait-il disparaître son réseau et sa haute compétence en formation des adultes? On ne peut y croire. Affronter le virage technologique sans un outil efficace de requalification ou de réorientation de la population adulte, c'est-à-dire sans disposer d'un système cohérent d'éducation des adultes, cela ne peut conduire qu'à un dérapage spectaculaire.

Au nom des 100 organismes membres de l'ICEA, des individus membres, des dizaines de milliers d'usagers et d'usagères qui se sont produits devant la commission Jean, au nom du réseau public d'éducation des adultes et ici, tant du côté syndical que du côté des directions de services de l'éducation des adultes, l'ICEA demande solennellement au gouvernement de se remettre en mémoire les motifs qui l'ont amené lui-même comme gouvernement à mettre sur pied cette commission, ce que l'ICEA avait souligné comme fait très positif à l'époque, et de revoir les dispositions du décret qui risquent d'entraîner des conséquences tragiques pour les adultes au Québec. Faute de quoi on assisterait à la mise en place, en douce, d'une politique inavouée et dangereuse d'éducation des adultes qui compromettrait non seulement la venue des mesures annoncées par le ministre Camille Laurin pour mai prochain, mais aussi l'héritage de deux décennies d'un travail collectif qui, amorcé dès 1960, commençait à peine à rapporter des fruits.

Il faudrait, en particulier, songer à ces dizaines de milliers de femmes qui ont cru à

la possibilité d'accéder à tout moment à une éducation susceptible de combler leurs besoins spécifiques de formation. Faudra-t-il leur annoncer que tout cela n'a été qu'un leurre, tout au moins en ce qui concerne leur génération?

Qui aurait cru, en 1980, lors de la création de la CEFA, création appuyée publiquement par le monde de l'éducation des adultes et l'ICEA, qu'il faudrait se battre dès l'année suivante contre des coupures du tiers des budgets et qu'on se retrouverait aujourd'hui, en 1983, en commission parlementaire non pour continuer à bâtir l'éducation des adultes, mais pour lancer un cri d'alarme afin d'éviter la mort par noyade de ce secteur clé d'un système moderne d'éducation?

L'ICEA croit qu'il s'agit là d'une erreur tragique mais veut espérer que tout n'est pas perdu. Le gouvernement se doit - et le peut - dès maintenant, fort de la commission Jean qu'il a créée, de redresser la situation afin d'aller dans le sens du développement économique et de la démocratisation qu'il dit vouloir promouvoir.

Il ne faudrait pas, non plus, oublier qu'ici il est en même temps question de l'avenir des jeunes, dans la mesure où certains d'entre eux ne pourront bénéficier d'une formation initiale adéquate et qu'on doit pouvoir leur garantir une seconde chance.

Aux dires du livre blanc sur la formation professionnelle des jeunes, 33% de ceux-ci sortent des écoles sans diplôme secondaire. Ainsi, au lieu d'étrangler le système éducatif, ne vaudrait-il pas mieux lui donner les moyens d'innover, de mettre sur pied des projets spéciaux afin de récupérer toute une partie de la jeunesse abandonnée à elle-même?

Le "drop-out" d'aujourd'hui sera-t-il un futur exclu de l'éducation des adultes? Ces jeunes adultes sous-scolarisés ne pourront s'inscrire ultérieurement à des programmes de formation continue que si l'on prend des mesures permettant d'organiser efficacement le recrutement et le rattrapage, mesures qui, une fois au niveau adulte, deviennent extrêmement coûteuses. Détériorer les conditions de la formation initiale, ne pas soutenir suffisamment l'enseignement des jeunes en milieu moins favorisé, c'est aussi porter atteinte à la capacité de l'éducation des adultes de jouer son rôle dans le développement continu du potentiel humain. (0 h 45)

Bien sûr, et c'est vrai, il en coûterait à l'État quelques dizaines de millions de dollars pour surseoir à sa décision de transfert du personnel enseignant et pour maintenir les emplois dans l'éducation des adultes, même aux conditions précaires actuellement offertes, les 6000 employés à la leçon. Mais il nous semble que l'éducation des adultes a déjà trop souffert. Rappelons-nous la coupure de 33 000 000 $. Elle arrive à peine actuellement à survivre. Ce réseau public d'éducation des adultes, il nous semble qu'on n'a pas le droit de faire disparaître ce qui en reste. Ce qui en reste, c'est-à-dire ces 9000 chargés de cours qui travaillent depuis cinq, dix et quinze ans, permettra, en d'autres conjonctures, de reprendre une croissance, il est vrai, momentanément interrompue. Sinon cela reviendrait à jeter littéralement par la fenêtre le milliard de dollars investi dans le domaine de l'éducation des adultes depuis 1967.

Un réseau efficace et accessible d'éducation des adultes n'est ni un luxe, ni un objet de consommation. C'est un des outils les plus importants pour aider la population adulte à se sortir de la crise et tout spécialement les individus les plus touchés, les moins scolarisés. Pourquoi refuser que l'école développe en son sein un secteur spécifique, capable de la faire servir à la population qui la finance, c'est-à-dire aux contribuables?

L'éducation des adultes dont l'accessibilité et l'efficacité sont liées à la reconnaissance de sa spécificité est le complément nécessaire de toute politique de développement économique et de création d'emplois. À moins de vouloir tourner le dos à ces politiques, il faut soutenir l'existence du réseau public d'éducation des adultes et le maintenir au moins dans son état actuel. Merci.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.

M. Laurin: M. le Président, j'ai déjà eu l'occasion de rencontrer à plusieurs reprises l'ICEA. C'est toujours extrêmement intéressant d'entendre ce qu'ils ont à nous dire. Ils nous rappellent à chaque reprise l'importance de développer l'éducation des adultes et ils nous font, comme ce soir, un plaidoyer ferme et chaleureux pour son développement. Évidemment, ils ont tout à fait raison.

Cependant, je ne parviens pas à partager la lecture que fait l'ICEA des décrets en rapport avec le développement de l'éducation des adultes. Je ne parviens pas non plus à partager leur pessimisme, même si j'admets que la situation difficile dans laquelle nous vivons, particulièrement depuis deux ans, a arrêté en bonne partie le développement de l'effort que nous avions consenti depuis quelques années. Je ne parviens quand même pas à partager des craintes que je trouve exagérées.

On a encore évoqué, ce soir, le problème des compressions ou des coupures à l'éducation des adultes. Avant de dire mes commentaires là-dessus, je voudrais malgré tout rappeler quelques faits. Par exemple,

l'année 1981-1982 fut celle où les compressions à l'éducation des adultes furent les plus sévères. Il y eut effectivement dans ce secteur des coupures qui firent que le budget global passa de 149 00D 000 $ en 1980-1981 à 145 000 000 $ en 1981-1982. Mais, cependant, en 1982-1983, avec un budget de 160 000 000 $ ou environ, nous avons repris un taux de croissance significatif que nous allons tenter de protéger par tous les moyens.

Je vous rappelle que nous avons été les premiers à regretter cette situation et que nous avons quand même tout fait pour essayer d'atténuer les effets de ces compressions en protégeant ce qui nous a semblé l'essentiel. C'est ainsi que les secteurs de la formation professionnelle et générale à temps plein et à temps partiel furent les plus protégés. Cela veut dire qu'il y eut dans ces secteurs moins de diminutions de clientèles. Le secteur de l'éducation populaire autonome fut, pour sa part, soustrait aux coupures. C'est tout le secteur des activités socioculturelles qui a été le plus durement touché. Nous le reconnaissons et nous le regrettons. Cependant, pour sauvegarder, en période de crise, l'essentiel, il nous a semblé que nous devions cesser temporairement des subventions à un certain nombre de cours, malgré leur utilité ou l'intérêt qu'ils ont pour de nombreuses personnes. Quelques exemples pour l'illustrer... Dans le secteur de l'alimentation: initiation à la gastronomie, glaçage de gâteaux, comment faire des réceptions, etc. Dans le secteur de la santé physique et mentale: le yoga, le Tai-Chi, le jogging, etc. Dans le secteur du développement de la personnalité: charme et maintien, maquillage et coiffure, etc.

Ces cours ne sont donc plus subventionnés. Mais ils peuvent toujours être accessibles dans la mesure où ils sont autofinancés. Cependant, d'autres secteurs de la formation socioculturelle n'ont pas été affectés par les compressions et ce sont particulièrement les cours dans les secteurs famille, parents-école, consommation, économie et gestion, condition féminine, retraite, pré-retraite, droits sociaux, environnement, etc. Et aussi, nous avons tenté de diminuer la partie des subventions qui allait aux frais de gestion afin d'en divertir une plus grande part pour le financement des activités elles-mêmes.

Encore une fois, nous ne nions pas que nous ayons dû faire des compressions. Mais je pense que cela était inévitable. On sait en effet, et je l'ai répété à plusieurs reprises depuis quelques mois et encore une fois lors de cette commission parlementaire, que la crise nous a forcés à faire des compressions dans tous les secteurs, dans toutes les missions du gouvernement: mission sociale, mission administrative, mission culturelle. Il le fallait pour mille et une raisons sur lesquelles je n'ai pas l'intention de revenir ce soir. Et quand nous savons que le budget de 6 500 000 000 $ de l'éducation sert, à 85% et plus, à financer les salaires du personnel, salaires qui sont protégés par des conventions collectives!

Il reste que c'est dans la partie restante, c'est-à-dire 12% ou 13% qu'il nous faut faire les compressions. Et c'est la raison pour laquelle nous avons dû effectuer ces compressions dans l'éducation des adultes, dans certains services éducatifs des collèges ou des commissions scolaires, aux bibliothèques, au personnel de soutien, aux professionnels non enseignants, aux programmes spéciaux pour les milieux économiquement faibles et ainsi de suite. Évidemment, nous savions qu'un jour on arriverait à renégocier les conventions collectives et c'est la raison pour laquelle il nous a paru absolument nécessaire de diminuer le coût de système que comportaient les négociations collectives actuelles, coût de système qui, comme vous le savez, augmentait de 17% par année. Espérant que si nous parvenions à assainir les bases salariales, à les réajuster en fonction des ressources de la collectivité, nous pourrions, justement, consacrer une partie plus grande de l'enveloppe budgétaire à ces autres services non protégés. Et nous pensons d'ailleurs qu'avec les décrets, avec les ajustements que nous connaissons maintenant au plan des salaires, de l'augmentation des salaires, au plan des pensions, nous en arriverons à pouvoir consacrer une partie beaucoup plus importante de nos budgets de l'éducation aux secteurs autres que le paiement et le financement des salaires.

Donc, l'un des buts de l'opération que nous menons actuellement par rapport aux conventions collectives, c'est justement de développer une marge de manoeuvre beaucoup plus grande pour le financement des autres programmes. C'est la raison pour laquelle nous espérons ne pas nous contenter, sinon cette année, du moins l'an prochain, de cette reprise de l'augmentation des crédits affectés à l'éducation des adultes, mais nous espérons être en mesure de faire, à cet égard, tout l'effort financier requis pour un développement de l'éducation des adultes qui va dans le sens de la visée que nous avions quand nous avons créé cette commission et que nous avons maintenant, pendant que nous étudions le rapport de la CEFA. Donc, c'est précisément pour pouvoir assurer des lendemains plus heureux à l'éducation des adultes que nous menons l'opération actuelle. Négativement, je pourrais dire une autre chose aussi. Si les décrets amenaient un maintien ou même un développement de la protection accordée aux salaires des personnels syndiqués, il nous faudrait non seulement continuer les compressions, mais il

nous faudrait supprimer, éliminer complètement plusieurs programmes, plusieurs services éducatifs.

Votre deuxième inquiétude, c'est l'effet possible des décrets sur le personnel enseignant à l'éducation des adultes. Je sais que la commission Jean propose dans son rapport le maintien d'un noyau stable de formateurs réguliers plein temps à l'éducation des adultes. Je vous rappelle - je rappelle au public aussi - qu'en 1981-1982, ce noyau stable était constitué de 387 formateurs d'adultes dans les commissions scolaires. À la suite des décrets, nous entendons augmenter ce nombre de 70 formateurs d'adultes plein temps. Je suis d'accord avec vous qu'un des effets des décrets sera une utilisation plus grande des enseignants mis en disponibilité à l'enseignement régulier. Il est donc exact que plusieurs des 9000 éducateurs à la leçon, à l'éducation des adultes que vous avez mentionnés en 1981-1982, seront remplacés par des enseignants du régulier mis en disponibilité.

Cela nous amène à poser des questions. Qui sont actuellement ces formateurs à la leçon? La très grande majorité enseigne moins de 727 heures, ce qui veut dire qu'ils peuvent être considérés comme des gens qui touchent des revenus d'appoint à l'éducation des adultes et que même pour un bon nombre d'entre eux, c'est un deuxième emploi. En effet, sur les 9375 enseignants aux adultes que nous comptons encore dans les commissions scolaires, 8794 ont enseigné moins de 720 heures en 1981-1982.

L'autre question qu'on peut se poser: Est-ce qu'il est tellement impossible d'envisager que des enseignants mis en disponibilité peuvent enseigner aux adultes parmi les autres tâches qu'ils sont appelés à remplir à côté de la suppléance, des prêts de services, de toutes les autres mesures que nous avons envisagées pour une meilleure utilisation des personnels mis en disponibilité puisqu'il nous faut les payer? Si on donne une réponse positive à cette question, il est possible que les mis en disponibilité enseignent à l'éducation des adultes. Encore mieux, si nous les y préparons par des cours de perfectionnement ou de recyclage, quel est le scandale à utiliser ces enseignants réguliers mis en disponibilité pour l'éducation des adultes? C'est une question que je vous pose sur laquelle je reviendrai d'ailleurs à la fin.

Votre autre inquiétude, c'est celle qui porte sur l'effet des décrets sur la spécificité de l'éducation des adultes. Voilà un mot important, mais qui est susceptible quand même de variations ou de degrés. On peut parler de spécificité organisationnelle. On peut parler de spécificité pédagogique. Je suis d'accord que l'éducation des adultes comporte effectivement un caractère spécifique. D'ailleurs, dans l'étude que nous faisons actuellement, le rapport de la commission Jean, dans les divers comités que nous avons constitués et qui me remettront bientôt leur rapport, cet accent sur la spécificité est bien sauvegardé. Qu'il s'agisse de la formation professionnelle, de la formation de base, de l'éducation populaire, de la formation des personnels, des clientèles cibles, du type de formation privilégiée, nous entendons conserver cette spécificité. De la même façon, il n'est aucunement question d'abolir les 69 commissions d'éducation des adultes que nous comptons actuellement dans les commissions scolaires.

Cependant, c'est un souci bien légitime de vouloir harmoniser le travail de ces services d'éducation aux adultes avec les autres services, de même que d'harmoniser leurs services avec ceux qui existent dans les milieux non institutionnels. Je suis donc d'accord avec vous pour conserver la spécificité à l'éducation aux adultes, mais là aussi, je vous poserais la question suivante: Peut-on quand même développer cette spécificité à l'intérieur des cadres de notre système d'éducation, d'une part, et deuxièmement, par l'utilisation de toutes les ressources financières, techniques et humaines déjà existantes? C'est la raison, en tout cas, pour laquelle je ne parviens pas à partager tout votre pessimisme sur le sort qui sera réservé à l'éducation des adultes et particulièrement à l'intérieur des décrets. (1 heure)

Je reviens donc à mes deux questions. La première que je vous poserais est la suivante: Croyez-vous qu'il soit possible d'habiliter par des programmes de recyclage ou de perfectionnement le personnel de l'enseignement régulier mis en disponibilité pour qu'il puisse dispenser une éducation aux adultes d'une façon valable dans les années qui viennent? Deuxièmement, croyez-vous que l'éducation des adultes puisse exister et se développer sans marginalité, tout en conservant sa spécificité à l'intérieur de notre système d'éducation?

Le Président (M. Jolivet): M. Bélanger.

M. Bélanger (Paul): Oui. D'abord, je pense que l'ICEA et tout le monde de l'éducation des adultes - les usagers et les usagères - vont être contents d'apprendre -et je ne dis pas cela avec sarcasme, au contraire - qu'on reconnaît, je pense, clairement la spécificité de l'éducation des adultes. C'est un virage important par rapport aux bruits qui courent actuellement dans le réseau de l'éducation des adultes.

M. Laurin: Cela ne correspond pas du tout à mes convictions.

M. Bélanger (Paul): C'est ce que je

remarque et ce dont je vais me rappeler pour les mois à venir, parce que c'est une question importante. Est-il possible de recycler des gens à l'éducation des adultes? Bien sûr, mais l'enjeu premier n'est pas là, M. le Président. L'enjeu premier est le fait qu'actuellement, au Québec, à la leçon, bien sûr, dans des conditions très précaires, il y a 9000 personnes qui enseignent le soir dont -d'après les statistiques que j'ai et je n'ai que les statistiques de la CECM là-dessus, mais la division de gestion de votre ministère nous dit que c'est représentatif de l'ensemble du Québec - 70% se donnent un revenu par ce moyen de plus de 8000 $ par année. Ce n'est donc pas un deuxième emploi pour ces gens. C'est vrai que, pour certains, c'est un deuxième emploi, mais ce n'est pas un deuxième emploi pour ces gens. Or, ces gens se sont formés pour travailler avec des adultes, pour avoir une approche pédagogique adéquate avec des adultes et cela, depuis cinq, dix et même quinze ans. L'enjeu principal est là, c'est-à-dire que le décret l'ayant voulu ou non - l'important, ce sont les faits - aura pour effet, au moyen de cette clause qui permet aux gens de passer à l'éducation des adultes, de faire basculer en dehors du réseau public de l'éducation, de gaspiller toute cette expertise qu'on a développée pendant plusieurs années. Bien sûr, c'est possible de recycler et de perfectionner des gens qui, à l'enseignement des jeunes, peuvent passer aux adultes, bien que l'éducation des adultes, c'est différent. Le problème n'est pas là. Le problème est que pour régler un problème, on en cause un autre. En d'autres termes, pour faire de l'éducation des adultes le déversoir de l'éducation des jeunes en surplus, dit-on, on liquide toute l'expertise qu'on a acquise à l'éducation des adultes. C'est là qu'est le problème principal. Pour épargner quelques millions, on va perdre - je l'ai calculé, les budgets à l'éducation des adultes au Québec se chiffrent, depuis un certain nombre d'années, à plus de 1 000 000 000 $...

M. Laurin: Ce ne serait vrai, M. Bélanger, que si votre projection de 6000 enseignants à la leçon était juste. Il n'est pas du tout sûr que cette projection soit juste quand on considère que dans les mesures qui ont été prévues pour les mises en disponibilité, tellement de tâches sont prévues pour les mises en disponibilité qu'il est très possible que nous ayons besoin de beaucoup plus de professeurs à la leçon que votre projection de 6000 ne le laisse supposer.

M. Bélanger (Paul): M. le ministre, je peux me permettre de vous contredire sur les chiffres là-dessus. 6000 professeurs à la leçon, cela équivaut à peu près à 1500 ou 2000. On ne se précipitera pas sur des détails, mais cela équivaut entre 1200 et 1500 à temps plein, selon le quotient que votre ministère a développé de 4,8 ou 4,6 à la direction de la gestion de la DGEA. Donc, s'il y avait à peine 1200 mises en disponibilité qui seraient transférées de l'éducation aux adultes d'un coup, flacl ce sont 6000 personnes - je me suis peut-être mal exprimé tantôt, parce qu'elles sont précisément à la leçon et ne complètent pas des tâches, vous l'avez dit tantôt avec raison qui seraient liquidées automatiquement. C'est le premier problème.

La deuxième question, c'est quant à la spécificité de l'éducation des adultes. Cela m'apparaît d'une évidence première - vous l'avez reconnu - mais je pense qu'il est important de rappeler certaines choses. Supposons par exemple que les députés veulent se donner une formation en économie pour mieux comprendre les problèmes d'emploi. Si vous cognez à la porte d'un service de l'éducation des adultes, est-ce que vous vous inscrirez immédiatement en mathématiques 414 ou en économie 415 ou en gestion de l'économie 614? Non. D'abord, vous allez dans une service de l'éducation des adultes pour faire reconnaître toute l'expérience que vous avez déjà - et vous en avez beaucoup - le vécu que vous avez par rapport à l'économie et on essaiera de penser à une programmation spéciale, à des approches spéciales etc. C'est une tout autre démarche qu'on retrouve d'ailleurs dans le décret de façon assez intéressante puisque, lorsqu'on décrit la tâche de l'enseignement à l'éducation des adultes dans le décret, on fait appel précisément à toute cette spécificité de ce type d'intervention éducative. Pour cela, qu'on le veuille ou non, cela prend des gens qui peuvent travailler avec des adultes et qui ont l'expertise; tout le monde peut arriver à cela, on ne pense pas que c'est là une fonction sacrée qui nécessite je ne sais quelle investiture, mais on a déjà ces gens formés, pourquoi les gaspiller? C'est là qu'est la question de fond.

Pour terminer, je dirais que la commission Jean, dans plusieurs de ses recommandations, et en particulier dans la recommandation 287-288, parlait de ce possible perfectionnement de mise en disponibilité vers l'éducation des adultes, mais on rappelait deux choses avec justesse. C'est qu'il fallait que cela vienne d'abord après avoir assuré aux gens qui ont bâti l'éducation des adultes le maintien de l'emploi, aussi précaire qu'il soit, et, deuxièmement, qu'on accorde à ces gens des conditions un peu plus correctes finalement. Merci.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Merci, M. le Président. Je

voudrais juste faire une petite vérification avant de commencer, si vous me donniez juste une seconde. Vous avez fait allusion, M. Bélanger - peut-être que vous pourrez me le dire sans que je sois obligé de retrouver ma source - que dans le décret on définit la fonction de l'éducateur d'adultes d'une manière très convenable. Cela est à l'article 11-10.02. Est-ce que vous avez noté une correspondance entre cet article et ce qu'il y avait dans la convention antérieure ou si c'est nouveau?

M. Bélanger (Paul): Je n'ai pas pu vérifier, mais je l'ai fait oralement et on m'a dit que cela existait dans la convention antérieure, mais je n'ai pas pu vérifier.

M. Ryan: Justement, je pense que, si c'est bon, c'est probablement parce qu'ils n'ont pas joué dedans.

M. Bélanger (Paul): Pardon?

M. Ryan: Si c'est bon, c'est probablement parce que le gouvernement n'a pas joué là-dedans, par distraction ou autrement; c'est probablement parce qu'il l'a laissé comme il était. Cela est une petite remarque introductive que je veux faire, mais je veux faire porter mes remarques sur des aspects plus fondamentaux.

Tout d'abord, il y a deux choses que je voudrais souligner au départ: le caractère très sévère du diagnostic qui est porté par l'Institut canadien de l'éducation des adultes sur les décrets et leurs conséquences éventuelles, de même que sur les reculs qu'a subis l'éducation des adultes depuis deux ou trois ans. Deuxièmement, le caractère solennel de l'appel qui est fait au gouvernement par l'organisme mandaté pour parler au nom de tous les services, toutes les associations, toutes les institutions engagées dans l'éducation des adultes, chez nous, de reconsidérer la politique à laquelle les décrets ouvrent la porte en matière d'éducation des adultes. Je pense que ce sont deux choses qu'il faut garder absolument comme toile de fond et qui permettent de comprendre davantage la responsabilité qui incombe au gouvernement en ce moment.

Je suis particulièrement intéressé à faire quelques commentaires sur le mémoire parce que, comme on l'a bienveillamment rappelé dans le texte lui-même du document qui vient d'être lu, j'ai été associé personnellement au développement de l'éducation des adultes dans notre milieu il y a déjà un quart de siècle. Cela ne me rajeunit pas, mais je suis fier quand même de constater que ma foi dans la raison d'être et dans les objectifs de l'éducation des adultes n'a jamais dévié ni diminué au cours des années. Je suis fier de constater qu'on se rappelle de manière très intéressante le travail qui avait été fait par un comité dont j'avais eu l'honneur d'assumer la présidence en 1964.

Je me rappelle qu'à cette époque, l'objectif du comité nous était venu un jour - je ne veux scandaliser personne du côté du gouvernement parce que je m'aperçois qu'il glisse vers la droite depuis quelque temps -qu'on avait rencontré une délégation de l'Union soviétique qui était venue au Québec... Je ne veux pas faire peur à Mme Dougherty non plus... On avait causé avec eux d'éducation des adultes et ils m'avaient dit: On a établi, nous, comme objectif de base, que tout le monde en URSS, d'ici une génération, devra avoir accédé à un niveau de formation au moins secondaire ou l'équivalent. Et tout le monde devra avoir accès à cette formation dans des conditions de gratuité générale.

C'est un objectif que nous avions épousé pour notre comité. Nous l'avons inscrit dans le rapport que nous avons publié à l'époque. Je pense qu'il a été retenu par un grand nombre de personnes, parfois même par les gouvernements parce qu'il y a des progrès considérables qui se sont faits au cours des années qui ont suivi. On avait inscrit cela comme objectif de base. Cela ne voulait pas dire que tout le monde devrait se promener avec un diplôme de douzième année ou de onzième année secondaire, mais que tout le monde devrait avoir la chance d'accéder à une formation équivalente à ce qu'une personne qui a fait des études secondaires complètes doit avoir.

Dieu sait que nous sommes encore très loin de là aujourd'hui même parmi ceux qui s'en vont dans le réseau secondaire. On l'a rappelé tantôt, il y en a environ 35% qui ne se rendent pas jusqu'au bout, qui sont déversés sur le marché du travail et, beaucoup plus fréquemment, sur le marché du chômage. Par conséquent, ils auront de grands besoins de supplément de formation s'ils veulent arriver à se situer d'une manière compétitive sur le marché du travail et, je dirais même, sur le marché de la participation tout court, autant familiale que civique, qu'économique ou professionnelle.

Je rappelle au gouvernement actuel que, de ce côté, il nous a fait subir des retards importants. Dans la politique qui avait été élaborée jusqu'à ces toutes dernières années, l'accès à la formation secondaire était gratuit ou à peu près. Maintenant, vous le savez, il y a des cours qui coûtent très cher. Pour avoir certains cours, au secondaire, il faut payer 40 $, 50 $, 60 $. Ce sont des résultats des politiques qui ont été instaurées depuis quelques années. Nous, je m'en souviens, nous avions eu un long débat à la commission que j'avais présidée sur la question de savoir si cela devrait . être gratuit au niveau secondaire et nous avions conclu que c'était

impératif que ce soit gratuit, laissant les autres niveaux à la libre détermination en fonction de toutes les circonstances qui pouvaient exister. Cela reste un objectif. Le caractère distinctif de l'éducation des adultes est inscrit dans sa nature même. On peut bien vouloir l'intégrer complètement dans le système régulier d'enseignement, mais c'est impossible. Dès qu'on commence à travailler avec des adultes, on se rend compte qu'ils ont à satisfaire des besoins fondamentalement différents.

Une autre chose que nous avions préconisée, c'était le développement préférentiel d'un réseau public d'éducation des adultes. Nous trouvions qu'il fallait favoriser l'initiative privée de toutes les manières possibles dans ce secteur, qui est varié par nature, mais qu'il fallait, comme armature de base, un solide développement du côté public. Nous avions mis l'accent à ce moment sur la création de services d'éducation des adultes dans les commissions scolaires.

Une chose qui a été faite, entre parenthèses, par des gouvernements qui se sont succédé depuis une vingtaine d'années -c'est au moins cela de pris - c'est un réseau solide - on va y revenir tantôt - de services d'éducation des adultes à travers les commissions scolaires qui, au moment où cette première étude fut faite, n'existait point.

Ensuite, plus récemment, on a créé la commission Jean qui a publié, l'an dernier, un rapport volumineux où j'ai été content de retrouver, formulés dans les termes de l'époque où nous sommes maintenant, les objectifs fondamentaux qui avaient été entrevus à l'époque. Encore une fois, formulés dans des termes différents, mais j'étais particulièrement content de trouver cet objectif qui viserait à assurer à tout adulte une formation de base équivalant à treize années de formation gratuite. Dieu sait qu'on s'est encore une fois éloigné de cet objectif. On voulait que l'objectif d'une formation de base soit accepté comme un des objectifs fondamentaux de la société québécoise. Je ne m'étendrai pas davantage là-dessus. Il y a une foule d'autres choses, mais ce que je constate, c'est que nous attendons depuis des mois les décisions que doit prendre le gouvernement à ce sujet. (1 h 15)

Je suis content de constater que le ministre nous annonce, pour un avenir pas trop éloigné, une politique en matière d'éducation des adultes. C'est absolument capital. Regardez le problème dont on parle à propos des 5, 3, et 28. Comme c'est formulé, M. le ministre - là, je pense qu'on peut parler des décrets parce que dans le cadre d'un règlement, il n'y avait rien sur l'éducation des adultes, à ma connaissance, qui soit de nature à corriger les appréhensions qu'on nourrit à ce chapitre-ci -comme c'est formulé, cela ouvre la porte à n'importe quoi. S'il y a une politique précise d'éducation des adultes qui définit des exigences, qui fournit une sorte de cadre d'orientation, qui soit d'ailleurs traduite aussi dans les règles budgétaires éventuellement, on pourrait peut-être arriver à interpréter ces clauses différemment. Mais comme elles sont formulées ici, cela ouvre la porte à presque n'importe quoi.

Je suis convaincu qu'il faut qu'on ait plus d'éducateurs d'adultes permanents. Moi-même, j'avais souscrit à une demande de la CEQ à ce sujet, en me disant: Nous avons 95% des enseignants aux adultes qui sont des gens qui travaillent soit à temps partiel, soit d'une manière incomplète là-dedans. Si on avait une proportion un peu plus élevée qui était à temps complet, je pense que ce serait bon pour structurer davantage ce secteur. C'est évident que la grande majorité des éducateurs d'adultes devront demeurer des personnes qui sont soit engagées ailleurs ou ne sont pas en mesure pour une raison ou pour une autre, de faire un travail à temps complet, mais qui ont une compétence qu'elles sont intéressées, à mettre au service de l'éducation des adultes. Si on devait arriver à une espèce de "bumping" d'envergure pour remplacer celui qu'on a connu auparavant dans ce secteur-ci, je pense que ce serait vraiment désastreux. Il faut que le gouvernement donne des assurances de ce côté-là. Je suis très heureux de l'intervention de l'Institut canadien de l'éducation des adultes à ce sujet, parce que je n'avais pas saisi moi-même, malgré l'intérêt que je porte à ce secteur, tous les dangers possibles, les clauses du décret comme elles se présentent actuellement.

J'avais déjà également signalé à l'attention du ministre, et j'espère qu'on s'en souviendra, lors de la phase de reprise des négociations qui se dessine maintenant, le problème de la rémunération des éducateurs à temps partiel dans le secteur de l'éducation des adultes. Le décret, de ce point de vue, leur inflige des conditions inacceptables. Ainsi que je vous l'ai déjà signalé, M. le ministre, les travailleurs à temps partiel qui sont dans le secteur des affaires sociales feront l'objet d'un redressement par rapport à ce qui avait été inscrit dans les décrets, en vertu du cadre de règlement qui avait été accepté à la fin de janvier. J'espère qu'on transcrira ce même principe dans le secteur de l'éducation des adultes.

Vous mentionniez qu'il y a un grand nombre d'éducateurs d'adultes qui travaillent déjà le jour, mais les statistiques que j'indique sont de 30% à 35%, que les autres ne sont pas de cette catégorie-là. J'ai reçu ces représentations de ce côté, auxquelles

j'éprouve le devoir de faire écho encore ce soir. Je pense que la rémunération qu'on va leur accorder doit être l'objet d'une attention spéciale et ne peut pas répondre exactement et mathématiquement aux mêmes critères que vous employez pour les enseignants à temps plein. Je pense qu'il y a matière à une exploration très importante de ce côté-ci et j'espère qu'on va traiter ce problème comme il faut.

Je voudrais faire une suggestion au ministre et peut-être demander l'avis de l'Institut canadien d'éducation des adultes à ce sujet. Il me semble qu'il serait très important, dès que le gouvernement rendra public son livre blanc ou son projet de politique en matière d'éducation des adultes, que la commission parlementaire de l'éducation soit consultée pour en discuter à fond, en présence de tous ceux qui auront des représentations à faire. Je pense qu'on inaugure peut-être ici une approche de bien des secteurs qui demandent à être revus à fond. Après la commission Jean, il n'est pas question de recommencer des audiences et des pérégrinations à travers tout le Québec, mais il me semble qu'il serait important, avant qu'on aille trop loin et qu'on se trouve en face d'un projet de loi, un domaine extrêmement délicat pour les fins de la loi, que la commission parlementaire ait la chance de se pencher pendant peut-être quelques jours sur les problèmes du secteur.

Vous avez dit tantôt, M. Couture, que l'éducation des adultes passait toujours la dernière. Je pense qu'on peut dire que vous passez en dernier ce soir, mais qu'au point de vue de contenu c'est loin d'être le dernier; le mémoire qu'on a entendu c'est l'un des plus importants. Je pense que s'il y avait moyen d'avoir une commission parlementaire pour aller plus à fond dans un avenir prochain, ce serait excellent pour remettre le problème sur la carte puis peut-être aider le ministre à persévérer dans la manifestation de ce bon côté de son être dont on a vu quelques exemples ce soir.

Deux ou trois questions et j'aurai terminé. Je pense qu'à cette heure-ci tout le monde se rend compte qu'on ne peut pas s'engager dans le débat de fond qu'on voudrait, cela va venir plus tard. Je pense que la cloche d'alarme a été sonnée avec vigueur.

Tout d'abord, qu'est-ce que vous pensez de cela l'idée d'une commission parlementaire, avant longtemps, pour compléter le travail considérable accompli par la commission Jean, et celui qui se fait présentement au ministère.

Deuxièmement, vous avez dit - cela m'intéresse puis j'aurais besoin de précisions là-dessus - que l'accord Ottawa-Québec sur la formation des adultes, la formation professionnelle, accuse un recul à divers point de vue. J'aimerais que vous nous disiez à quel point de vue exactement cela représente un recul pour le Québec. Évidemment on voulait tous que ça revienne intégralement au Québec. Le gouvernement fédéral ne veut pas actuellement. On ne peut pas en faire un reproche au gouvernement du Québec actuellement parce que ça se fait à deux puis si l'autre ne veut pas, même s'il est bien intentionné, il ne peut pas faire grand chose.

J'aimerais que vous me disiez, dans son contenu, dans quoi cet accord est de nature à faire reculer l'éducation des adultes ou à la compromettre.

Alors deux questions par conséquent: premièrement, la commission parlementaire sur l'éducation des adultes, deuxièmement, l'accord Ottawa-Québec.

Le Président (M. Jolivet): M. Bélanger.

M. Bélanger (Paul): Pour ce qui est de la commission parlementaire c'est effectivement important qu'il y ait lors du dépôt du livre bianc un mécanisme par lequel - non pas pour reprendre tout le débat - les usagers, les usagères et les intervenants comme on les appelle, les organismes d'éducation des adultes et les autres, puissent intervenir. Cela m'apparaît extrêmement important parce que l'enjeu n'est pas seulement important en termes de fond, en termes de besoins des adultes, mais il est aussi important en ce sens qu'il n'est pas assez connu.

Des esprits simplistes dans l'éducation -il en existe dans la gestion quotidienne de l'éducation - pensent que parce que c'est l'éducation c'est tout pareil; donc c'est juste d'ajouter un rang de bancs en arrière de chaque classe et voilà le problème est réglé. Avec ça on règle peut-être certains problèmes de gestion au niveau des jeunes, on le règle sur le dos de l'éducation des adultes. On ne règle pas l'éducation des adultes.

Je me permettrai une remarque par rapport à ce qu'on a dit tantôt: qu'il fallait sauver de l'argent du côté des jeunes pour le consacrer à l'éducation des adultes. L'analyse qu'on fait de la situation et qu'on fait le plus rigoureusement possible avec les données qu'on a nous conduit à des conclusions contraires; c'est-à-dire que l'argent pour l'éducation des adultes il n'y en a pas plus, il y en a moins. Les coupures ne touchent pas simplement le crémage sur le gâteau ou les autres exemples que le ministre a donnés avec humour. Je pense que la situation n'est pas si humoristique que cela, elle est plutôt tragique. Les baisses concernent, on le voit en annexe - je ne vous donnerai pas tous les tableaux, ce serait trop long - tant la formation générale que la formation professionnelle.

On pourrait même aller un peu plus

loin. La question se pose de savoir si, par le fait d'envoyer des gens mis en disponibilité de jour dispenser le soir la formation achetée par le fédéral, on ne serait pas en train - la question se pose, je ne conclus pas je pose la question - de faire financer les mises en disponibilité par le fédéral. En tout cas la question se pose. Ce qui, en passant, constituerait une deuxième génération de coupures pour l'éducation des adultes.

Quant aux accords Québec-Ottawa sur le contenu même de la formation, je pense qu'on pourrait demander à Richard Nantel de le résumer brièvement.

Le Président (M. Jolivet): M. Nantel.

M. Nantel (Richard): Très, très rapidement M. Ryan. L'hypothèse de base qui soutient en fait ou qui sous-tend le programme fédéral de formation qui a été modifié cet été par la loi C-115 et qui a été entériné par l'accord Canada-Québec part de l'hypothèse que le problème no 1, au Canada, est une pénurie de main-d'oeuvre spécialisée pour répondre à certains manques de travailleurs et de travailleuses spécialisés sur le marché du travail, alors que de notre côté, on a l'impression - on n'a pas besoin d'insister longuement pour être d'accord là-dessus - que le problème principal est peut-être les 1 400 000 chômeurs et chômeuses au Canada et les quelques centaines de milliers d'assistés sociaux. Donc, les programmes de formation qui devraient être mis de l'avant devraient s'adresser à ces personnes et c'est ce que ne fait pas l'accord Canada-Québec.

Plus en détail, l'accord Canada-Québec oriente donc ses investissements vers des programmes spécialisés d'un degré post-secondaire, qui s'adressent à des clientèles déjà relativement scolarisées et, par le fait même, diminuent ses investissements ou les investissements gouvernementaux dans les programmes de formation générale qui s'adressent aux personnes qui n'ont pas justement atteint cette formation du secondaire dont vous parliez tout à l'heure ou l'équivalent du secondaire. Les investissements sont également réduits pour les programmes de formation professionnelle qui n'entrent pas dans le cadre de ce qu'on a déterminé être les pénuries d'emploi constatées au Canada.

Ce sont, selon nous, les deux principales faiblesses de l'accord Canada-Québec. C'est dans ce sens que nous prétendons que cela ne correspond pas aux objectifs de la population québécoise et particulièrement de ceux et celles qui ont été consultés par l'ICEA, dans les coalitions auxquelles nous avons participé ces dernières années.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Fabre et adjoint parlementaire au ministre de l'Éducation.

M. Leduc (Fabre): Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord vous remercier très sincèrement d'être ici et de nous sensibiliser comme vous le faites à l'importance de l'éducation des adultes dans notre société. Je partage entièrement certaines phrases que vous avez écrites dans votre mémoire, les objectifs que vous accordez à l'éducation des adultes, quand vous dites que c'est un des outils les plus importants pour aider la population adulte à se sortir de la crise et tout spécialement les individus les plus touchés, les moins scolarisés.

Pour aujourd'hui et pour l'avenir, le secteur de l'éducation des adultes est un des secteurs les plus importants. Il faut regretter, comme vous le dites si bien aussi, que l'État du Québec n'ait pas fait plus jusqu'à maintenant pour le développement de l'éducation des adultes. Je pense qu'il y a quand même de l'espoir pour l'avenir, compte tenu du rapport Jean, compte tenu de la volonté gouvernementale aussi de lui accorder l'importance qu'il mérite.

Je voudrais revenir sur une question, celle des enseignants à l'éducation des adultes. Je m'interroge sur le pessimisme que vous manifestez devant la situation que créent les décrets. Première question: Quel genre de contacts avez-vous avec les institutions comme les commissions scolaires, les écoles, les collèges? Comment établissez-vous ces contacts? Autrement dit, comment contrôlez-vous votre information?

Le Président (M. Jolivet): M. Bélanger.

M. Bélanger (Paul): D'abord, cela me permet de décrire comment l'institut fonctionne par rapport aux commissions scolaires uniquement, parce qu'il est tard et que c'est la même chose pour les deux autres niveaux dans le secteur public. D'abord, il y a un certain nombre de services de l'éducation des adultes membres de l'ICEA, donc qui participent à toutes les instances. Au CA de l'ICEA par exemple, il y a dix sièges réservés au secteur public de l'éducation des adultes, six sièges réservés aux organismes socio-économiques, etc. Dans nos travaux, TREAQ par exemple, qui est le regroupement des directeurs d'éducation aux adultes, est présent et délègue quelqu'un à notre table d'analyse des politiques d'éducation des adultes. Dans les consultations qu'on fait, non seulement il y a une délégation de cette table, mais on retrouve aussi les autres intervenants de l'éducation des adultes, l'Association des personnels non enseignants à l'éducation des adultes, etc. et aussi dans les travaux de consultation qu'on a faits.

(1 h 30)

Ce qu'il faut ajouter à ce sujet, c'est qu'en plus du travail précis de l'ICEA, on a organisé, depuis maintenant quatre ans, une vaste coalition sur l'éducation des adultes, d'abord sur les coupures - le ministre Laurin s'en rappellera - et aussi d'une façon plus actuelle, sur les suites de la commission Jean, cette commission que le Parti québécois vient d'entériner de nouveau en fin de semaine, je le répète, c'est important, malgré les bruits qui courent dans les officines gouvernementales à savoir qu'on veut plutôt prendre une autre option sur l'éducation des adultes. On a mis sur pied une vaste coalition qui regroupe l'AFEAS, la Fédération des femmes du Québec, l'Action de travail des femmes, toute une série de groupes de femmes qui regroupent des organismes d'éducation des adultes, TREAQ et compagnie, qui regroupent des syndicats d'éducation des adultes, qui regroupent des groupes populaires, qui regroupent des organismes d'animation, etc.

L'ICEA est essentiellement un organisme de concertation volontaire, biaisé sur l'éducation des adultes, fortement biaisé sur l'éducation des adultes, mais biaisé dans une perspective d'usagers. Et, pour une femme qui frappe à la porte d'un service d'éducation des adultes, ne lui demandez pas d'aller s'asseoir avec les autres, suivre les mêmes cours que les autres. Cela n'a aucune espèce de sens. Vouloir faire des économies par là, c'est se fouter du besoin de formation des femmes. Je suis sûr que ce n'est pas ce que le gouvernement veut faire et donc, j'espère que ce n'est pas cela qu'il fera.

M. Leduc (Fabre): Finalement, vous laissez croire qu'il existe une grande stabilité dans le personnel chargé de cours à l'éducation des adultes?

M. Bélanger (Paul): Non.

M. Leduc (Fabre): Non? On a plutôt l'impression que c'est une rotation, que c'est un personnel assez mobile.

M. Bélanger (Paul): Non, ce n'est pas exact.

M. Leduc (Fabre): En tout cas, les informations que j'ai...

M. Bélanger (Paul): On a peu d'information à ce sujet. Les meilleures informations sont peut-être, à l'éducation des adultes, la CECM qui recueille de longues séries de statistiques, depuis un certain nombre d'années, pour suivre les individus de plus près. Si j'allais dire oui à votre question, c'est que je pensais à ces 3000 formateurs du soir qui sont partis du champ de l'éducation des adultes en raison des coupures. Pour les autres, je pense qu'on peut dire, sans se tromper, qu'il y a une très forte stabilité. Ce monde-là, depuis cinq ans, dix ans, est là. Et la preuve, c'est que, quand les coupures se sont faites, il y a eu plusieurs rencontres à travers le Québec où cela a été constaté. Et de la même façon, vous allez voir dans le rapport de la CEFA qu'on constate la même chose: c'est qu'il y a une tradition de l'éducation des adultes. Même si ces gens-là sont hélas des travailleuses - surtout des travailleuses - et des travailleurs à temps partiel, il y a une forte tradition. Là où il y a une rotation un peu plus grande, c'est peut-être dans certains programmes spéciaux et là, peut-être qu'on peut donner l'exemple du glaçage sur le gâteau de tantôt, mais c'est précisément là peut-être qu'il y a moins de stabilité. C'est marginal, c'est affreusement marginal.

M. Leduc (Fabre): Merci.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Viau.

M. Cusano: Merci, M. le Président. Compte tenu du fait qu'il est 1 h 35 du matin, je n'entrerai pas dans un long préambule.

Ce sont les commentaires du ministre qui m'amènent à poser une question à M. Bélanger. Lorsque le ministre semblait trouver un peu amusant d'avoir sabré allègrement dans le secteur de l'éducation populaire, ce discours il l'a déjà tenu aux dernières études de crédit à savoir qu'à cette période-là, non seulement parlait-il du "crémage" du gâteau, mais il parlait aussi de cours de macramé, de couture, ainsi de suite. Cela démontre un peu son manque de connaissance à savoir comment inciter des gens qui ont laissé le réseau scolaire depuis longtemps, comment les inciter à suivre par la suite des cours de formation générale ou de formation professionnelle. Je ne vous demande pas de statistiques précises, M. Bélanger, mais pourriez-vous nous dire, de mémoire, quel pourcentage des gens qui étaient justement dans ces cours de "crémage" de gâteau, de macramé, de yoga, de couture ou autres, se dirigeaient par après vers des cours de formation professionnelle?

En d'autres mots, d'après ma connaissance et mon expérience dans le domaine de l'éducation des adultes, c'est que ces cours-là étaient une méthode pour inciter les gens et pour leur démontrer qu'il était possible, même s'ils avaient quitté l'école depuis longtemps, de reprendre des cours. Est-ce que vous avez un commentaire sur ce sujet?

Le Président (M. Jolivet): M. Bélanger.

M. Bélanger (Paul): Brièvement, il faut dire d'abord que ces cours, qu'on appelle loisirs culturels, depuis un certain nombre d'années devaient s'autofinancer selon les règles de la DGEA. On a prétendu à certains égards qu'il s'agissait là de gaspillage; ces cours-là devaient s'autofinancer et on les qualifiait de loisirs culturels. La plupart de ces cours ont maintenant été transférés dans les activités de loisirs culturels des municipalités, à tort ou à raison. Bien sûr, il y a des exceptions, ce qui permet à certaines personnes de les soulever pour montrer une certaine forme d'argumentation mais cela est tout à fait marginal.

Les cours qu'on avait maintenus en priorité depuis un certain nombre d'années étaient des cours prioritaires. Par exemple, relations parents-enfants, gestion du budget familial, etc., qui étaient des cours qui étaient pratiquement gratuits. Il y avait un faible coût d'inscription mais ces cours ont maintenant des frais d'inscription très élevés. Même les analphabètes actuellement au Québec doivent payer 15 $ les 30 heures pour se former. C'est vraiment inacceptable. Si la baisse d'activité n'est que de 45%, c'est parce que les hommes et les femmes adultes sous-scolarisés ont, par ce qu'ils ont sorti de leur poche, compensé la perte de budget. Si ce genre d'activité s'est maintenu c'est parce qu'en plus des fonds publics qui sont maintenus en partie de l'autre côté les usagers paient maintenant 300% de plus de frais de scolarité qu'autrefois. C'est ce qui explique que le volume ne s'est pas complètement effondré dans le secteur socioculturel.

M. Cusano: Merci.

Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: C'est presque un hasard que vous soyez les derniers et que ce soit aujourd'hui, le 8 mars, la journée des femmes et qu'on discute de l'éducation des adultes. Je vais vous poser une seule question. Pourriez-vous me dire, si vous l'avez, la proportion d'hommes et de femmes dans votre tableau no 2, la formation éducative et socioculturelle?

M. Bélanger (Paul): De mémoire, majoritairement, le socioculturel, ce sont des femmes. Majoritairement. Les deux tiers.

Une voix: Elle voulait vous prendre en défaut.

Mme Lavoie-Roux: Non, non, ce n'était pas pour vous prendre en défaut, c'est pour prendre le ministre en défaut. Je savais la réponse. Dans ce sens-là j'appuie fortement le point de vue qui a été émis par mon collègue de Viau. Au niveau du cégep, je pense qu'on trouverait là une proportion plus grande de femmes qui reviennent mais ce sont des femmes qui sont déjà motivées, qui ont eu plus de chance en général au point de départ. Mais, quand vous tombez dans l'éducation populaire, c'est la seule façon dont vous allez pouvoir remotiver - les hommes aussi, mais particulièrement les femmes - celles qui sont restées à la maison longtemps. Je pense que de traiter cela comme des cours de fantaisie ou des cours de luxe ou des cours insignifiants c'est se tromper fondamentalement sur les buts de l'éducation des adultes et cet effort de rescolarisation et de mise à jour de ces personnes-là. C'est pour cela que je pense qu'il faut prendre les gens par le biais ou par la chose qui peut les intéresser. Dans ce sens-là, je pense que le ministre traite peut-être cela un peu légèrement.

Pour terminer, je lui ferai une taquinerie. Vous savez que les cours de yoga, pour certains, c'est aussi bon qu'un psychiatre!

Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Merci. Est-ce que l'accord Ottawa-Québec qui a été mentionné par M. Ryan est le National Training Act? J'avais l'impression qu'on pouvait exploiter cela. Vous avez dit que cela ne répond pas aux besoins du Québec. Voudriez-vous répéter les raisons pour lesquelles...

Le Président (M. Jolivet): M. Nantel.

M. Nantel: Principalement, madame, parce qu'au niveau des formations privilégiées par le National Training Act et endossées par l'accord Canada-Québec on se trouve à privilégier des types de formation qui ne répondent qu'à des besoins minoritaires, au sein de la population québécoise, qui sont quand même légitimes. On n'a jamais prétendu que ces besoins n'étaient pas légitimes. Les besoins de formation dans des secteurs de technologies nouvelles, par exemple, de niveau collégial, sont effectivement nécessaires, mais comme, au fédéral comme au provincial, c'est souvent dans un processus de vases communicants qu'on favorise un programme au détriment d'autres programmes, les conséquences sont ainsi pour ce qui est du National Training Act. Je disais tout à l'heure qu'à cause du même phénomène, en privilégiant ce type de formation dont j'ai parlé, on défavorise des types de formation générale qui permettaient, il y a quelques années, à au moins 20 000 personnes, principalement des femmes au Québec, de s'inscrire dans des programmes de formation générale de niveau secondaire et

permettaient également à au moins autant de personnes au Québec, sinon davantage, de s'inscrire dans des programmes de formation professionnelle de niveau secondaire également.

Ces deux types de formation, maintenant, vont être défavorisés au profit d'un type de formation de niveau plus élevé, ce qui, en soi, n'est pas mauvais. Ce que nous aurions souhaité, c'est que l'ensemble des besoins de formation de la population soit considéré par cette nouvelle politique.

M. Bélanger (Paul): En fait... Mme Dougherty: Oui...

M. Bélanger (Paul): En fait, il y avait deux scénarios possibles pour l'orientation de la formation professionnelle des adultes. Celui que le gouvernement du Québec a produit à travers la commission Jean et celui de la commission fédérale Allmand qui a abouti dans la loi nationale sur la formation. Par les accords Québec-Ottawa, qui figent la façon dont vont être alloués les fonds de formation professionnelle pour les trois prochaines années, on se trouve à figer ces fonds dans le sens de la commission Allmand, ce qui est une option possible mais qui n'était pas l'option, mais pas du tout d'ailleurs - on n'en a pas le temps ce soir mais c'est facile de le démontrer - de la commission Jean. On se trouve à enfermer cette partie de l'éducation des adultes dans une camisole de force qui n'est pas celle de la commission Jean. Dans ce sens on comprend qu'il fallait peut-être signer un accord, mais peut-être que le contenu aurait pu permettre de laisser plus de place pour débattre ensuite la question à la CEFA.

Mme Dougherty: Je crois que c'est une question très importante. J'ai eu l'occasion de recevoir une lettre de M. Axworthy, il y a quelques jours, sur un autre sujet. Il y mentionnait qu'il était étonné d'avoir reçu très peu de demandes de la province de Québec concernant le National Training Act par rapport aux autres provinces. Il a mentionné quelques programmes en Ontario. C'est tout ce que je sais là-dessus. Mais si les critères ne répondent pas aux besoins du Québec, on va les changer. Je crois que c'est quelque chose de très important pour nous.

Dernière question. Avez-vous des chiffres sur le nombre de "drop outs" qui ont profité de l'éducation des adultes?

M. Bélanger (Paul): Quand on analyse le niveau de scolarité des clientèles, on s'aperçoit que les seuls programmes qui, dans l'histoire de l'éducation des adultes, ont recruté des clientèles qu'on identifie, quant à leur niveau de scolarité, aux "drop outs" ont été, avec des exceptions, surtout les programmes de formation à temps plein, soit professionnelle soit générale. Ce sont les deux programmes qui ont fait quand même un long chemin au Québec, qui recrutaient les clientèles ayant en moyenne moins de 10 années de scolarité ou moins de 11 années de scolarité.

Malheureusement, la nouvelle orientation du gouvernement fédéral ne donne plus la priorité à ces programmes. Il ne les coupe pas complètement, mais il ne leur donne plus la priorité alors que, et j'y reviens, la CEFA en faisait une priorité. C'est-à-dire qu'on ne sortira pas du marasme actuel où près de 1 000 000 de personnes n'arrivent pas à retrouver un emploi si on ne peut donner à cette population cette formation de base - pour prendre le langage de la commission Jean - nécessaire pour ensuite passer à une formation professionnelle.

Mme Dougherty: Merci.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Au nom des membres de la commission, je vous remercie de votre témoignage et j'inviterai d'abord, pour clore l'ensemble de ces réunions de la commission de l'éducation... Oui, Mme la députée de L'Acadie. (1 h 45)

Mme Lavoie-Roux: Vu que ce seront les mots de la fin, est-ce qu'avec le consentement de la commission on me permettrait de prendre trois minutes pour faire part d'un mémoire qui a été déposé ici à la commission et sur lequel je m'étais engagée à faire des représentations? Je ne vous ferai pas de longues représentations. Est-ce que tout le monde est d'accord, d'abord? C'est simplement le rapport qui a été présenté par l'école Madeleine Bergeron, de Sainte-Foy, qui rejoint aussi une demande qui avait été faite par l'école Victor-Doré, non seulement de la part des enseignants, mais aussi de la part des parents, dans lequel on fait part que l'entente qui faisait partie de la convention 1979-1982 - il y avait une annexe dans cette entente - n'est plus partie intégrante du décret 1983-1985 et on s'inquiète du rapport maître-élèves qui serait appliqué et qui obligerait, en tout cas au moment où nous en sommes, les enseignants à servir un nombre beaucoup plus grand d'enfants. Il faut toujours s'entendre parce qu'on est dans une clientèle très spécialisée. On peut passer de quatre à sept ou de quatre à huit, c'est considérable.

Je sais que le ministre de l'Éducation nous a dit, à un moment ou l'autre, quand on parlait de l'enfance exceptionnelle: On est en pourparlers avec chacune de ces écoles particulières. Si je reviens à la charge, c'est que je trouve que ce n'était peut-être pas un engagement tellement précis, sauf de revoir

cela avec eux. Je veux vraiment me faire leur porte-parole pour indiquer d'abord que, d'une part, il s'agit d'enfants dont le nombre en institution diminue, mais dont la lourdeur des handicaps grandit et qu'avant de penser à augmenter possiblement un ratio ou ce qu'on appelle maintenant un rapport maître-élèves pour ce type d'enfants, il faudrait y songer très sérieusement. J'aimerais que le ministre de l'Éducation, à l'égard de ces clientèles particulières - il y a deux écoles qui ont fait des représentations, deux institutions, il y en a peut-être d'autres -nous dise ce qu'il envisage pour ces types d'écoles qui sont des écoles très particulières. C'est la seule représentation que je voulais faire.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le député d'Argenteuil, le mot de la fin.

Conclusions M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, vous postulez que demain les négociations pourront reprendre sous le signe encourageant de la formation d'une commission de conciliation dont nous connaîtrons alors la forme. J'espère que vous avez raison. Si cette perspective ne devait pas se réaliser, peut-être la commission devra-t-elle se réunir de nouveau. Par conséquent, j'hésite à tirer quelque conclusion. Je vais le faire de manière extrêmement sommaire.

Le Président (M. Jolivet): Pour les séances actuelles.

M. Ryan: Je voudrais, tout d'abord, vous remercier, vous-même et ceux qui vous ont assisté dans la tâche que vous avez eue de présider les travaux de la commission. Vous l'avez fait d'une manière cordiale, correcte, équitable et je pense que vous avez précieusement contribué au bon travail accompli par la commission. Je voudrais remercier le ministre également de sa participation très assidue, exemplaire à ce point de vue, aussi de n'avoir, en aucune manière, embarrassé la commission ou alourdi son travail, de ne pas avoir cherché à dominer ces travaux, d'avoir été présent comme nous. Je pense que c'était Mr. Hyde.

Une voix: Et le Dr JeKyll.

M. Ryan: J'espère que non, on va l'entretenir. Je lui dois des félicitations. Je le fais honnêtement et en toute amitié également parce que nous nous connaissons depuis très longtemps. Je pense que c'est un bon signe et qu'il faut que cela continue. Je remercie mes collègues de la députation, du côté ministériel et du côté libéral. Je pense qu'il y a eu un taux d'assiduité aux travaux de la commission qui a été magnifique. De notre côté, je pense que la présence a été très élevée; je m'en réjouis à tous points de vue.

En ce qui touche les résultats de la commission, je suis bien content qu'on ne sorte pas avec des conclusions claires. Ce n'était pas l'objet de la commission. On l'avait signalé dès le début, d'ailleurs, que la commission ne devait pas se transposer en un organisme de médiation ou de conciliation. C'était un organisme exploratoire qui allait chercher des avenues possibles de rapprochement. Je pense que l'esprit dans lequel la commission a fonctionné, qui était foncièrement un esprit de recherche, un esprit d'incertitude de bon aloi, de désir d'apprendre, était déjà un élément extrêmement important en soi.

Nous sortons avec des points d'interrogation nombreux. Il fallait en planter plusieurs dans la tête du ministre et de ses collègues du côté ministériel qui ont le devoir de l'appuyer, quoi qu'il fasse, du moins publiquement. Je pense que nous sortons tous avec des points d'interrogation plus nombreux que nous en avions avant. Nous avons entendu des points de vue qui n'étaient pas nécessairement conformes à ceux que nous avions au départ. Je pense que tout cela est de l'excellent matériel pour la commission de conciliation qui sera vraisemblablement formée pour les parties engagées immédiatement dans la négociation. Je pense qu'à la suite de cette expérience que nous avons faite nous serons mieux en mesure comme députés de suivre de très près le déroulement des négociations et d'intervenir de nouveau chaque fois que nous le jugerons nécessaire à partir de notre point de vue, soit ministériel, soit d'Opposition.

Par conséquent, je pense que cela a été une expérience consciencieuse. Il n'y a pas eu de farces. Il n'y a pas eu de gaspillage de temps, finalement. Le seul regret qu'on peut émettre, c'est d'avoir été obligés de passer trop vite avec chaque organisme. Cela ouvrait des mondes, comme le dernier que nous avons vu ce soir, l'Institut canadien d'éducation des adultes. C'est, évidemment, une matière pour deux, trois ou quatre jours et il a fallu faire cela dans l'espace d'une heure et demie. Mais je pense que c'est autant de possibilités qui restent là pour l'avenir. J'espère bien que le gouvernement voudra faciliter ce genre de travail dans l'avenir.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.

M. Camille Laurin

M. Laurin: Je tiens de mon côté, M. le Président, à vous exprimer mes

remerciements, ainsi qu'aux membres de la commission. Nous avons siégé pendant plusieurs jours. Nous avons entendu plusieurs mémoires. Je pense que ces mémoires ont suscité, de la part des membres de la commission, beaucoup de temps, d'efforts, d'attention et de patience. Je pense que cela témoigne de leur intérêt pour la cause de l'éducation. Pour reprendre les mots du député d'Argenteuil, je pense que le sujet est tellement passionnant que nous pourrions passer toute la nuit à écouter parler d'éducation. Mais je pense, en tout cas, que les mémoires que nous avons entendus, les commentaires et les questions auxquels ils ont donné lieu ont contribué à éclairer la population, d'abord sur les enjeux de l'éducation en tant que tels, et aussi sur les enjeux du présent conflit. Ils ont permis à la population de se faire une meilleure idée des aspects majeurs du problème et peut-être aussi des pistes de solution qui doivent être envisagées. Je pense que les travaux de cette commission ont pu non seulement éclairer les esprits, mais aussi fournir une base sur laquelle nous pourrons édifier maintenant les étapes qui suivent et qui, dans mon esprit en tout cas et selon mon espoir, devraient aboutir à un règlement négocié.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Oui?

Mme Lavoie-Roux: Cela a-t-il éclairé le ministre?

Le Président (M. Jolivet): On verra. Quant à moi, je remercie tous les membres de la commission, ainsi que l'équipe technique qui nous soutient, la télédiffusion des débats, le journal des Débats et le secrétariat des commissions. Je pense que notre travail est terminé pour le moment, en espérant que, justement, notre travail est fini aussi pour longtemps. Merci.

(Fin de la séance à 1 h 55)

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