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(Quinze heures trente minutes)
Le Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il vous
plaît' Si vous voulez prendre place, s'il vous plaît!
Je constate maintenant que nous avons quorum pour cette commission. Je
déclare la commission ouverte. Le mandat de la commission est de
procéder à l'étude détaillée du projet de
loi 58, Loi sur l'admissibilité à l'enseignement en anglais de
certains enfants.
Est-ce qu'il y a des changements, M. le secrétaire?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Cusano
(Viau) remplace, pour la séance, Mme Bleau (Groulx).
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Viau remplace Mme Bleau, députée du comté de Groulx.
M. le député de Laviolette.
M. Jolivet: M. le Président, je pense qu'il y a un
changement, mais permettez-moi de le faire vérifier. M. le
député d'Abitibi-Ouest, qui est membre de la commission, devrait
nous apporter un changement possible, mais je le ferai savoir tout à
l'heure, si vous me le permettez.
Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Est-ce
qu'il y a consentement à ce que le député de Laviolette
nous donne tout à l'heure le nom d'un autre membre pour un remplacement,
compte tenu qu'il n'a pas les informations du député
d'Abitibi-Ouest?
M. Jolivet: En fait, ce qui arrive, c'est que nous avons un
membre à remplacer, mais je ne sais pas par qui. On a le droit de le
faire au début de la séance. Donc, je ne pense...
Une voix: II est encore au caucus.
Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a... S'il vous
plaît, M. le député d'Arthabaska. Est-ce qu'il y a
consentement? Consentement. Alors, vous reviendrez tantôt et je vous
reconnaîtrai à cet effet-là.
La parole est maintenant au ministre de l'Éducation, pour sa
conclusion sur les déclarations d'ouverture. M. le ministre, nous vous
écoutons en conclusion et vous avez une période de vingt
minutes.
Remarques préliminaires (suite) M. Claude Ryan
(réplique)
M. Ryan: M. le Président, je salue avec plaisir tous les
collègues de la commission. Il nous est très agréable de
les retrouver au lendemain de cette fin de semaine. Je suis sûr que tous,
ayant eu le loisir voulu pour réfléchir de nouveau à la
portée précise de ce projet de loi, reviendront avec des
dispositions plus propices, peut-être, à un traitement à la
fois lucide et rapide de chacune des dispositions de notre projet. En
conséquence, j'essaierai de résumer le plus brièvement
possible les impressions que m'a laissées l'échange de vues
très intéressant auquel nous nous sommes livrés ensemble
vendredi. Je crois que chacun a donné le fond de sa pensée dans
le respect de l'autre et avec toute la conviction dont il était capable,
sans injurier l'adversaire. Je pense que c'est un esprit excellent dont,
personnellement, je me réjouis sans arrière-pensée. Je
suis sûr que, si le même esprit demeure et si nous voulons
écouter la force de chaque argument, nous allons nous retrouver quelque
part.
J'ai noté à travers les interventions qu'il y avait de
nombreuses divergences, de nombreuses différences d'opinions sur des
points cruciaux. Je voudrais essayer de les résumer brièvement
pour souligner une fois de plus l'optique que nous préconisons du
côté du gouvernement devant le problème qui nous est
soumis, devant les problèmes plus larges auxquels l'Opposition voudrait
le raccrocher.
Tout d'abord, j'ai remarqué qu'il y a des différences
notables en ce qui touche l'approche au problème linguistique en
général. J'écoutais parler le député de
Verchères, l'autre jour, qui nous a tenu un langage un peu dans le
même esprit que celui que nous avait tenu à l'Assemblée
nationale le député de Lévis, un langage de
propriétaire qui dit à l'autre: Si vous venez chez moi, adoptez
mes habitudes, autrement, allez-vous en ailleurs. Nous autres, nous avons
plutôt une approche d'accueil. C'est l'approche de citoyens qui se
rendent compte qu'ils furent un jour eux-mêmes des immigrants, qui ne
savent pas ce que l'histoire nous réserve, qui sont très ouverts
aux grands mouvements de migration qui ont sans cesse caractérisé
l'histoire humaine et qui veulent en favoriser la réalisation dans
les conditions les plus respectueuses possible de la dignité de
l'être humain et de la fragilité avec laquelle il s'adapte aux
défis nouveaux qui surgissent dans son existence.
Je crois que, sur le problème linguistique, nous désirons
des deux côtés de la Chambre que le Québec soit une
société profondément marquée par son
caractère français et réussisse même à
affirmer davantage ce caractère dans toutes les facettes de sa vie
collective. Au chapitre des moyens qu'il convient d'employer pour
réaliser cet objectif, des divergences de vues importantes existent
entre nous qui permettent de comprendre que, lorsque arrive un problème
aigu comme celui auquel nous faisons face avec le présent projet de loi,
nous ne soyons pas de la même opinion. Je pense que notre approche est
sensiblement plus libérale, c'est-à-dire plus respectueuse de la
liberté des personnes, tandis que l'approche du Parti
québécois me semble plus encline à favoriser le recours
à la contrainte. Finalement, nous croyons que l'objectif doit être
fermement défini, mais que le chemin le plus sûr pour y parvenir
est encore celui de l'accueil et de la persuasion. Dans la mesure où
ceci demeure comme toile de fond, des divergences sont susceptibles de surgir
au chapitre de l'application.
Un deuxième sujet de désaccord entre nous gravite autour
de l'objet du présent projet de loi. L'Opposition voudrait en faire
prétexte à un débat général sur la politique
linguistique. Nous disons que c'est un projet à portée
très précise, à portée très limitée,
qui vise à apporter une solution à un problème très
précis qui a surgi au cours des dix dernières années,
tandis que l'Opposition voudrait y voir le premier pas vers une politique de
démantèlement de la loi 101 et d'autres programmes qui ont pu
être mis en oeuvre par le gouvernement précédent. Nous,
nous invitons l'Opposition, et je le fais de nouveau avec fermeté, mais
sans hargne, à reconnaître la portée circonscrite du projet
de loi et à ne pas chercher à faire dévier la discussion
sur d'autres sujets qui seront abordés en temps utile. À
l'automne, au plus tard, j'imagine, l'hiver prochain, nous avons clairement
laissé entendre que nous proposerions un certain nombre d'amendements
à la loi 101. Dans le domaine de l'éducation, il y en a un dont
nous vous avons fait part à plusieurs reprises, nous voulons mettre la
clause Canada dans la loi 101. Cela ne sera du nouveau pour personne. Nous
avions un projet de loi qui était prêt cette session, d'ailleurs.
Nous l'avons différé justement parce que nous ne voulions pas que
les questions de portée plus large soient confondues avec des questions
de portée plus limitée auxquelles nous avons décidé
de nous en tenir à l'occasion de la présente session. Par
conséquent, nous ne pouvons pas accepter que le débat
dévie sur tout l'ensemble de la politique linguistique, parce que nous
n'avons pas encore ouvert ce débat-la comme gouvernement. L'Opposition
est bien libre de nous talonner à ce sujet, mais nous ne pouvons pas
répondre parce que nous n'en sommes point rendus à cette
étape.
Un désaccord important existe entre nous en ce qui touche
l'origine du conflit. Du côté de l'Opposition, le terme que j'ai
entendu le plus souvent, c'est celui d'esprits mal disposés, de mauvais
esprits qui auraient dit: Nous n'en voulons pas de leur Québec
français et nous nous organisons pour empêcher que la loi soit
efficace. Nous invoquons des circonstances beaucoup plus nuancées,
beaucoup plus sensibles dans lesquelles la loi 101 fut introduite et surtout
dans lesquelles son application fut entreprise. Nous n'avons pas la même
appréciation quant à la situation qui existait à
l'origine. Je crois, sans vouloir médire, que plusieurs d'entre nous
avons été beaucoup plus proches de la situation que ne l'ont
été ceux que nous avons entendus du gouvernement. Plusieurs
d'entre nous l'ont vécu de manière directe, personnelle,
immédiate, tandis que du côté de l'Opposition j'ai
remarqué qu'on raisonnait beaucoup à partir de données
statistiques ou de données soi-disant objectives qui ne peuvent jamais
l'être totalement dans une situation comme celle-ci.
Divergence d'opinions au sujet de la responsabilité des parents.
Du côté de l'Opposition, des interventions que j'ai entendues
tendent vers l'expression d'un jugement sévère à l'endroit
des parents des enfants qui ont été en situation
d'illégalité à l'intérieur des écoles
anglaises. Objectivement, nous désapprouvons la décision qui fut
prise de désobéir à la loi. Nous l'avons écrit,
l'un ou l'autre, à maintes reprises. J'ai eu l'occasion de le dire
souvent au cours des dernières années. Nous désapprouvons
tout en comprenant les circonstances dans lesquelles ces gestes furent faits.
Je pense qu'on ne saurait faire de reproches à ces parents au chapitre
de l'intérêt pour l'éducation de leurs enfants, alors que
tant de parents abandonnent purement et simplement leurs enfants aux
autorités scolaires, alors qu'ils s'en désintéressent,
qu'ils reportent sur l'école le fardeau de toute la tâche. Ces
parents ont pris leur affaire en main. Ces parents ont pris des risques
considérables pour donner à leurs enfants l'éducation
qu'ils croyaient devoir leur donner. Je pense qu'on a tous proclamé, une
fois ou l'autre dans notre carrière, le principe du droit prioritaire
des parents en matière d'éducation des enfants, et cela
reste.
En principe, de manière générale, le droit des
parents d'enseigner la langue de leur choix à leurs enfants, c'est un
droit qui
est véritable. Il n'y a pas un gouvernement qui va oser aller se
mettre le nez - j'espère - dans une cuisine pour dire aux parents qu'un
enfant à un an, deux ans ou trois ans va parler telle langue
plutôt que telle autre. Il me semble que c'est la décision des
parents, exclusivement. Qu'ils aient voulu prolonger ce droit, qui leur
était reconnu sans aucune discussion jusque-là, jusqu'à la
classe de maternelle et ensuite de première année et de
deuxième, je pense qu'on doit essayer de le comprendre. Ce n'est pas une
pensée mauvaise. C'est ce que je voudrais faire comprendre à
l'Opposition, c'est une pensée qui est bonne en soi. Ils faisaient cela
dans un contexte où nous travaillons ensemble pour affirmer davantage le
caractère français du Québec. Il est arrivé un
heurt de bonnes intentions de part et d'autre. Des intentions mauvaises - je
l'ai dit ici - des voleurs, des malfaiteurs, des tueurs, des briseurs de
réputation, des faiseurs d'action que réprouve la loi, il n'y en
aura pas là-dedans. Ce sont des "law-abiding people" de manière
générale.
Il est arrivé un cas, une situation où il y a une certaine
connotation politique. Qu'on le veuille ou non, ce n'est pas un conflit comme
un autre. C'est un conflit où il y avait... Que de fois, dans des
conflits sociaux - je vais vous dire, M. le Président - depuis quarante
ans que je les suis... Que de fois, au lendemain d'un conflit âpre, on
voit la partie patronale dire: Là, ils ont violé la loi, ils ont
cassé une fenêtre tel jour. Cela ne marchera pas! Ils vont
rentrer, ils vont payer et ils vont aller devant les tribunaux pour cela. Que
de fois des gens pleins de compréhension ont dit: D'accord, vous avez
raison, mais, si vous voulez, on va retourner au travail demain et on va
effacer ces choses-là. On aura beau proclamer dans cette Chambre les
principes qu'on voudra, cela va se faire encore dans l'avenir. Quand arrivent
les guerres, c'est la même chose, on met fin aux guerres et on dit: On
recommence. Autrement, on pourrait se poursuivre les uns les autres devant
toutes sortes de tribunaux jusqu'à la fin des temps. C'est seulement
pour des crimes très graves que la prescription morale et politique sur
laquelle on s'entend généralement ne peut pas être
appliquée.
Là-dessus, je crois qu'il faut faire montre de
compréhension et ceux qui ont étudié l'histoire - c'est la
discipline que j'ai étudiée avec une affection
particulière - ont appris ce sens. Ils ont appris que toutes les formes
de légitimité ont commencé plus souvent qu'autrement,
quand elles sont collectives, dans la confusion ou dans le sang. Par
conséquent, personne n'a de leçon à faire aux autres d'une
manière absolument hautaine et pharisienne.
Concernant la responsabilité des parents, plus vite on peut les
ramener dans la loi, dans l'ordre, mieux c'est, je pense. Concernant celle des
administrateurs scolaires, on ne peut pas honnêtement mettre en
accusation les administrateurs scolaires en 1986 sans mettre en accusation en
même temps le gouvernement qui a eu autorité sur eux pendant neuf
ans. Chaque fois que vous accusez les anciens commissaires de la Commission des
écoles catholiques de Montréal, les administrateurs de cette
commission scolaire ou les cadres scolaires de Jérôme-Le Royer ou
de la Commission des écoles catholiques de Montréal, vous vous
accusez vous-mêmes. Vous aviez autorité sur eux, vous aviez tous
les pouvoirs. Si vous ne les aviez pas, vous pouviez les demander à
l'Assemblée nationale. Vous aviez tous les pouvoirs pour agir sur eux et
vous ne l'avez point fait. Je trouve assez inacceptable que l'on veuille
rouvrir ce dossier neuf ans après, alors qu'on a eu tout le temps voulu
à l'Assemblée nationale. Combien de fois vous a-t-on
relancés au sujet de ce problème, et jamais je n'ai entendu
d'affirmation comme celles que nous avons entendues depuis le début des
travaux de la commission. (15 h 45)
Je pense que c'est évident, le député de Viau l'a
dit l'autre jour, j'allais dire, avec une candeur impressionnante, comment les
choses s'étaient passées à sa connaissance, dans la mesure
où son expérience lui a donné accès à un
contact beaucoup plus direct avec la situation. C'était bien facile
d'enregistrer ces choses mais, comme il l'a souligné également,
il n'y a jamais eu de directive de donnée. L'autre jour, j'ai
demandé à l'ancien ministre de l'Éducation: Qu'est-ce que
vous avez fait avec les protestants? Vous aviez les noms. Les protestants vous
donnaient les noms à chaque année. Ils étaient dans vos
dossiers qui dormaient, vous n'avez jamais rien fait. Vous auriez pu
régler au moins ce qui était à votre portée.
Vous avez dit, l'autre jour, M. le député d'Abitibi-Ouest,
une phrase qui m'a bien impressionné: II fallait une solution globale.
C'est cela que nous apportons, justement! Vous avez dit qu'on ne pouvait pas
régler le problème par morceaux. Très bien! Si vous me
dites que c'est le point et que vous acceptiez qu'on le règle
globalement, tout d'un coup, on va être de bons amis et on va
régler le problème dans les prochaines 24 heures.
M. Jolivet: Pas de tape dans le dos!
M. Ryan: Pardon?
M. Jolivet: Pas de tape dans le dos!
Le Président (M. Bissonnet): M. le député,
vous n'avez pas la parole. M. le ministre, si vous voulez continuer.
M. Ryan: Merci. Alors, de ce côté, je pense que la
responsabilité des administrations scolaires... Je sais, parce que j'ai
causé souvent avec M. Rondeau de ce problème avant de lui
demander de s'en occuper, comment il a fait tout son possible comme directeur
général de la Commission des écoles catholiques de
Montréal pour l'amener à une solution, et combien cela a souvent
été difficile d'avoir toute la collaboration voulue de la part du
gouvernement québécois, comment c'était un problème
dans toutes les pièces... C'était peut-être impossible
à saisir dans l'immédiat, à ce moment-là. Je ne
pense pas qu'on y gagne à vouloir commencer à trouver a
posteriori des coupables. C'est toi qui étais là, toi, tu
étais là, on va commencer, on va suspendre tout le monde a
posteriori, rétroactivement sept, huit ou neuf ans après. Cela
n'a pas d'allure.
La situation des enfants est diversement appréciée de part
et d'autre. Vous dites: Ce n'est pas un problème. Ils continuent de
faire leurs études, ils vont s'en aller dans la vie, laissons-les comme
cela; laissons le problème mourir de sa belle mort. Cela revient
à cela, l'attitude que j'ai entendue. Il y en a un qui a dit: Prenons
des mesures administratives. S'il avait pu dire lesquelles, de manière
plus précise, peut-être qu'on aurait avancé plus dans la
discussion.
Mais, nous, nous apprécions très diversement la situation
des enfants, en nous disant: Voici, un certain nombre d'enfants -je vais parler
du nombre tantôt - ne reçoivent pas l'égalité de
traitement à laquelle ils ont droit dans le système
d'enseignement du Québec. Nous voulons qu'ils obtiennent
l'égalité de traitement et cela, le plus vite possible. Nous
voulons qu'ils obtiennent l'égalité de traitement en tenant
compte d'une situation impossible dans laquelle ils ont été
placés, certains d'entre eux, depuis sept, huit, neuf ans par des
décisions que d'autres ont prises. C'est en pensant à
régulariser - c'est le mot qui résume le mieux tout l'esprit du
projet de loi - pas amnistier, on n'a rien... On n'a aucune amnistie à
donner à ces enfants, ils ne sont pas coupables. Le dictionnaire le dit
d'ailleurs clairement - je pense que c'est le député d'Arthabaska
qui l'a rappelé, l'autre jour, dans son intervention - on déclare
une amnistie à l'intention de quelqu'un qui a été l'objet
d'une sentence. On dit: Tu as été condamné à la
peine capitale, tu vas être amnistié. Tu as été
condamné à un an de prison, tu vas être amnistié.
Ces enfants, comment allez-vous les amnistier? Il faudrait être joliment
pharisien. Je ne suis pas capable. Je veux régulariser leur situation
qui n'est pas conforme aux exigences de la loi, mais dont ils ne sont
aucunement responsables. C'est dans ce sens-là que j'ai toujours
refusé cette expression d'amnistie.
Je suis prêt à l'accepter aux fins de nos échanges
courants, je n'en fais un procès à personne. Si on veut
être rigoureux, je ne peux pas l'accepter, parce que cela ne correspond
pas à la réalité que je connais.
Nous sommes en désaccord sur les mesures à prendre pour
régler le problème. Vous trouvez que nous allons trop fort, trop
globalement, trop loin. Nous, nous trouvons que c'est la seule solution
possible. Nous avons examiné toutes les autres. Moi-même, j'avais
fait une série de propositions, dans un rapport que j'ai écrit
sur le sujet en 1983, qui eussent été applicables à ce
moment-là. Mais déjà, depuis trois ans, la situation avait
beaucoup évolué. Cela ne devenait plus possible d'adopter cette
approche. J'ai écouté les remarques qu'on avait à faire du
côté de l'Opposition. Les notes que j'ai pu retenir
là-dessus sont assez minces, parce qu'on n'avait pas grand-chose
à dire. On dit: C'est difficile. Si le député
d'Abitibi-Ouest veut préciser ce qu'il entendait par ces mesures
administratives dont il parlait, je pense qu'on va être disposé
à l'écouter. Jusqu'à maintenant, je n'ai pas entendu
grand-chose de ce point de vue.
Je termine avec un neuvième point sur lequel il y a des
différences d'approche de part et d'autre. Il s'agit des effets
probables de ce projet de loi. Vous nous dites: Vous ouvrez la porte, cela va
être terrible. On va vous demander cela à propos de ceci, à
propos de cela et à propos de cela. C'est toute la loi 101 qu'on remet
en cause et c'est tout l'ordre social. Nous vous disons: Évitons de
charroyer sur le dos de ces enfants - je regrette d'employer cette
expression-là - évitons de charroyer sur leur dos. Soyons
réalistes. Ramenons le problème à ses dimensions
véritables. Je pense que les effets du projet de loi seront des effets
de concorde, de paix et d'ordre beaucoup plus que les effets que l'on redoute
de l'autre côté. Je pense que si l'Assemblée nationale le
fait dans un esprit de concorde et de service public les effets qu'on redoute
de l'autre côté ne se produiront pas. Il ne peut pas y avoir de
logique parfaite dans la conduite des affaires humaines, je tiens à vous
le rappeler avec toute la sincérité dont je suis capable. On peut
se rapprocher de la logique, on peut être le plus consistant possible et
je pense que, de ce côté-ci, nous n'avons pas trop de
leçons à recevoir de l'autre côté, mais il faut
d'abord être humain et compréhensif. Je pense qu'à ce
moment-là on résout des problèmes. C'est la tâche
d'un gouvernement pas seulement de passer des lois, mais de résoudre des
problèmes également à l'intérieur des prescriptions
que définissent les lois. Lorsque la loi est insuffisante, on la modifie
ou on adopte une mesure législative spéciale, circonscrite,
à tel point précis. Ici, encore une fois, c'est une mesure
humaine, une
mesure de compréhension, de générosité, de
justice à l'endroit des enfants concernés, mesure aux effets
très circonscrits que nous n'entendons aucunement appliquer dans
d'autres situations ou à d'autres catégories de citoyens.
Pour terminer, je voudrais essayer de répondre brièvement
à certaines questions que m'avait posées l'autre jour la
députée de Chicoutimi. Elle m'avait demandé: Avez-vous des
précisions sur le nombre exact d'élèves illégaux?
Je ne peux pas vous donner un nombre exact aujourd'hui, mais nous approchons de
la vérité chaque jour davantage. Chaque jour nous confirme dans
l'impression que nous avions que le nombre ne sera pas très
élevé. Du côté des trois commissions scolaires
principales qui sont concernées, Jérôme-Le Royer, CECM et
Robert Baldwin-Cartier, le total va être d'à peu près 1050,
sur la foi des listes qu'on nous a remises, que les auteurs
présumés et leurs complices, si vous voulez qu'on retienne votre
vocabulaire pour une minute, nous ont remises il y a déjà une
couple de semaines. Il y en a à peu près entre 1000 et 1050
là-dessus.
Maintenant, pour les autres commissions scolaires, je voudrais que la
députée de Chicoutimi ne soit pas trop inquiète parce
qu'il n'y en a pratiquement pas. Il n'y a pratiquement pas d'autres commissions
scolaires catholiques. Du côté des commissions scolaires
protestantes, j'ai eu l'occasion, ce matin, pour d'autres raisons, de causer
avec les responsables de l'Association des commissions scolaires protestantes
du Québec. Nous avons déjà des données dans nos
rapports ici - je l'ai dit tantôt à l'intention du
député d'Abitibi-Ouest - qui nous permettaient de penser que cela
pouvait peut-être aller à 200, 300 ou 400. Nous ne le savions pas.
Mais, selon les renseignements qu'on m'a confirmés ce matin, cela va
être beaucoup moins que cela parce qu'on les compte par unité ici
ou là. Même à la Commission des écoles protestantes
du grand Montréal qui pourrait être une source majeure, je ne
crois pas qu'il y en ait plus d'une trentaine ou d'une quarantaine. Par
conséquent, c'est très circonscrit de ce
côté-là et je pense que les craintes qu'on avait
formulées sont des craintes qu'on est fondé de formuler quand on
n'a pas les renseignements. Mais je pense qu'à mesure que les
renseignements nous arrivent vous pouvez compter que cela va être
beaucoup plus circonscrit que vous ne l'aviez pensé et même
quelque peu en deçà de ce qu'avaient été nos
prévisions. Le nombre de commissions scolaires impliquées -je
réponds à votre question - il y a la commission scolaire Western
Quebec. Là, il y a un problème particulier parce qu'on en a entre
200 et 300. C'en est une où nous n'avons pas pu obtenir les
renseignements précis que nous avons demandés. C'est une des
seules à refuser de nous donner les renseignements. Mais d'après
les renseignements que nous possédons, par ailleurs, ce serait aux
environs de 200 à 300. Mais vous connaissez l'origine de ce
problème. Ce sont des jeunes qui ont commencé à
fréquenter les écoles anglaises grâce à des
subventions qui étaient versées par le Secrétariat
d'État à cette commission scolaire. C'est comme cela que le
problème a pris naissance. Le Secrétariat d'État ne
fournit plus les contributions depuis un an ou deux, je pense. Mais, là,
il y a cette situation.
À part cela, il y a une commission scolaire protestante chez moi
à Lachute, la Laurentian School Board. Je me rappelle, quand je suis
arrivé comme député, il y avait deux, trois, quatre, cinq
cas à régler. On les a réglés de la manière
la plus compréhensive possible et, s'il reste encore un ou deux cas dans
toute la commission scolaire, c'est à peu près tout. On a beau
faire le tour, on ne trouve pas grand-chose.
Vous m'aviez demandé le nombre d'élèves
illégaux n'ayant pas la citoyenneté canadienne. En ce qui touche
les parents, nous le disons dans le rapport Rondeau, je pense que c'est 91 %
des parents qui ont la citoyenneté canadienne. Ce sont donc presque
tous, par conséquent, des enfants de citoyens canadiens. Il peut arriver
que les autres le soient devenus depuis, parce que c'est une affaire qu'on peut
régler assez rapidement. Alors, on peut dire ut in pluribus? comme on le
disait autrefois: de manière très générale. Je le
répète pour les transcripteurs: c'est ut in pluribus. D'une
manière très générale, ce sont des enfants de
citoyens canadiens. Le nombre d'"illégaux" ayant terminé leurs
études, je ne l'ai point. Je ne l'ai point, je vais essayer de
l'avoir.
Au nombre des dérogations envisagées, les liens familiaux
(cousins) seront-ils pris en compte? Regardez, comme le projet de loi est
conçu, on va pouvoir en discuter quand on arrivera à cet article,
peut-être ce soir, à l'article 7. Je pense que c'est la commission
d'appel qui va établir une espèce de tradition de ce
côté, parce que le ministre ne pourra pas de lui-même
décider qui va se saisir de tel ou tel cas. Il va falloir que les
problèmes soient référés par la commission d'appel,
à moins qu'on ne fasse des changements là-dessus. Si vous avez
des amendements intéressants, on va peut-être être
appelés à réviser cela mais, suivant l'économie
actuelle du projet de loi, je ne pense pas que c'est un facteur qui va
être considéré. On verra les circonstances pratiques.
Encore une fois, c'est la commission d'appel qui devra prendre l'initiative de
porter un cas à l'attention du ministre. Le ministre ne pourra pas
décider, de sa propre initiative, qu'il se saisit d'un
cas et, à plus forte raison, qu'il agit sur ce cas. Je pense que
j'ai répondu aux questions que m'avait adressées la
députée de Chicoutimi, sauf à la question sur le nombre
d'"illégaux" ayant terminé leurs études et, si je puis
obtenir des données là-dessus, je vous les communiquerai
volontiers. Merci, M. le Président.
M. Jolivet: M. le Président...
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Laviolette.
M. Jolivet: Est-ce que le ministre me permettrait une
brève question?
Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a
consentement?
M. Ryan; Avec plaisir.
Le Président (M. Bissonnet): Consentement. M. le
député de Laviolette, vous avez la parole.
Motion proposant de tenir des
consultations particulières
avec M. Jean-Claude Rondeau
et certains organismes concernés
M. Jolivet: Est-ce que le ministre serait prêt à
entendre des gens, des groupes, ici à cette commission, avant qu'on
commence l'étude du projet de loi article par article? Si le ministre me
fait signe que non, j'aurais donc une motion, M. le Président, à
déposer et nous allons l'étudier en vertu de l'article 244. C'est
une proposition que je fais et qui se lit comme suit: Que la commission tienne,
avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi
58, Loi sur l'admissibilité à l'enseignement en anglais de
certains enfants, des consultations particulières quant à tous
les articles dudit projet et à cette fin elle entende M. Jean-Claude
Rondeau, la Commission des écoles catholiques de Montréal (CECM),
l'Alliance des professeurs de Montréal. Donc, c'est la motion que je
dépose, M. le Président, et que j'aimerais qu'on discute.
Le Président (M. Bissonnet): Votre motion est
écrite?
M. Jolivet: Oui, M. le Président. M. Gendron: M. le
Président...
Le Président (M. Bissonnet): Avant que je déclare
la motion recevable, vous voulez intervenir, M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: M. le Président, avant de statuer sur la
recevabilité de la motion, je voudrais juste vous poser deux questions.
J'aimerais savoir si les membres de cette commission sont d'accord pour
qu'à la séance de cet après-midi M. André
Boulerice, député de Saint-Jacques, puisse remplacer le
député de Verchères, qui est retenu en Chambre, en
débat de deuxième lecture sur le projet de loi concernant la
raffinerie de sucre. Je veux savoir si j'aurai le consentement, pour la
séance de cet après-midi, que le député de
Saint-Jacques remplace le député de Verchères, puisque le
député de Verchères ne peut pas être des
nôtres d'ici à 18 heures, compte tenu du débat de
deuxième lecture en Chambre.
M. Ryan: M. le Président, nous allons accepter pour cet
après-midi, mais j'avertis l'Opposition qu'à compter de
maintenant on va s'en tenir au règlement et on ne jouera pas à la
chaise musicale avec la composition de la commission.
Le Président (M. Bissonnet): II y a consentement pour que
le député de Saint-Jacques remplace le député de
Verchères à la session de cet après-midi. Quant à
la session de ce soir, si c'est nécessaire, il s'agira du
député de Verchères qui ne pourra, à ce
moment-là, être remplacé par aucun autre
député.
M. Boulerice: En vertu de quel règlement, M. le
Président? Dans une autre commission qui était celle de la
culture, à la minute où l'on annonçait qu'il y avait un
remplacement, le remplacement était valable aussi longtemps que le
remplacement avait lieu.
Le Président (M. Bissonnet): C'est-à-dire que,
lorsqu'il y a un remplacement au début d'une commission, M. le
député de Saint-Jacques - je ne sais pas s'il y a eu
consentement; je vous ai laissé parler mais je vais quand même
répondre à votre question - le remplacement a lieu pour la
journée. Cela, c'est la pratique courante et, sur consentement, il peut
arriver que le député qui est membre de la commission soit
remplacé pour une partie de la séance. À ce
moment-là, le député qui est membre peut revenir à
l'autre partie de la séance. Il y a eu consentement, aujourd'hui, pour
que vous puissiez remplacer le député de Verchères
jusqu'à 18 heures. Si la commission poursuit ses travaux à
compter de 20 heures si nécessaire, à ce moment-là, c'est
le député de Verchères qui sera membre de cette
commission. Malheureusement, vous pourrez assister à cette commission,
mais sans en être membre. (16 heures)
M. Boulerice: Vous présumez du retour du
député de Verchères, ce qui est une hypothèse,
effectivement.
Le Président (M. Bissonnet): Très bien. Alors, M.
le député de Laviolette, je déclare cette motion
recevable.
M. Jolivet: Merci.
Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a des membres
qui veulent intervenir sur la recevabilité maintenant que j'ai
accepté la motion?
M. Cusano: J'aurais seulement une question à poser au
député de...
Le Président (M. Bissonnet}: Laviolette.
M. Cusano: ...Laviolette, à savoir s'il aoublié quelques organismes dans sa motion.
M. Jolivet: Non.
M. Cusano: Vous n'en avez pas oublié un?
M. Jolivet: Non.
M. Gardner: Vous êtes sûr?
M. Cusano: Merci.
Le Président (M. Bissonnet): Je tiens à signaler
que, sur cette motion préliminaire, le député qui la
présente a un droit de parole de 30 minutes et que le ministre a 30
minutes également. Tout autre député a un droit de parole
de 10 minutes. M. le député de Laviolette.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, M. le Président. Donc, la proposition
que j'ai faite a pour but d'entendre différents organismes et une
personne en particulier, le responsable du rapport Rondeau.
Pour répondre à la question du député de
Viau en même temps, tenant compte du fait qu'il demande s'il y a des
personnes ou des organismes qui ont été oubliés, je dois
dire que si M. Rondeau était assis à la table là-bas pour
répondre à nos questions, comme c'est l'habitude, et qu'il
voulait se faire accompagner d'autres personnes, je n'aurais aucune objection.
Vous, comme membre du comité, vous pourriez être là-bas.
Vous savez très bien que les règlements de l'Assemblée
nationale ne nous permettent pas de vous assigner ou de vous convoquer à
une commission parlementaire, à moins que vous n'ayez pris la
décision personnelle de comparaître et de venir donner votre
propre version des faits. Vous pourriez le faire, à ce moment-là,
soit comme député de l'Assemblée nationale ayant
participé à un comité de travail qu'on a appelé
partisan, vu sa composition, ou encore, vous pourriez le faire à titre
d'ancien directeur d'école tout en sachant, comme vous l'avez
mentionné, que peut-être, à cette époque, des
raisons de santé vous ont tenu à l'extérieur du dossier
pour un bout de temps, mais non pour l'ensemble du projet. Il reste quand
même qu'il serait bon que cette commission entende les membres du
comité Rondeau.
À cet effet, nous avons donc proposé une motion qui a pour
but de faire entendre le principal artisan, le président de ce
comité. On pourrait lui poser des questions sur son document et lui
demander ce qu'il entendait par une partie du texte d'introduction qui dit
qu'un profond malaise avait été provoqué chez les
anglophones. Dans ce document, dans l'introduction, on dit: "Habitués
qu'ils étaient à jouir d'un statut enviable comme groupe
linguistique et culturel, les anglophones se voyaient soudain jeter à la
face leur statut précaire de minorité." On pourrait lui poser la
question suivante: Est-ce que, dans le contexte de cette petite partie de
l'introduction, il se pourrait que d'autres, à l'intérieur du
grand Canada dont vous faites si souvent mention, aient vécu cela, eux
aussi, puisqu'on est une minorité, comme francophones, dans le Canada et
qu'eux, il se trouve qu'ils sont la majorité? Quand ils arrivent au
Québec, il est fort possible de penser qu'effectivement ils sont une
minorité. "Ils se voyaient soudain jeter à la face leur statut
précaire de minorité." Là, on dit: "Les règles du
jeu se trouvaient donc modifiées, produisant ainsi dans les esprits - je
pense que cela vaut la peine de bien écouter parce que cela fait partie
de l'argumentation qu'on a tenue jusqu'à maintenant - un effet
rétroactif par rapport aux habitudes acquises de longue date ou à
l'idée que les anglophones ou les immigrants s'étaient faite du
Québec et du Canada." On pourrait se poser la question et on pourrait la
poser à M. Rondeau: Est-ce que ces règles du jeu étaient
changées pour des personnes arrivées après l'adoption de
la loi 101 et qui, pourtant, dans certains cas, sont devenues des
"illégaux" et non seulement des clandestins?
Oui, je le répète, on dit: "L'idée que les
anglophones ou les immigrants s'étaient faite du Québec et du
Canada." La question qu'il faudrait poser à M. Rondeau: Comment se
fait-il que des gens, qui sont arrivés au Canada, connaissant les
nouvelles règles du jeu du Québec, aient décidé de
passer outre à la loi? "Il n'est pas - comme le dit le rapport -
superflu de rappeler ce contexte pour saisir la genèse et le
développement de la question des élèves
illégalement admis à l'école anglaise. Ce rappel permet
également de comprendre pourquoi le problème persiste." Mais on
ne dit pas qu'il y a eu des gens qui ont collaboré d'une certaine
façon, que ce soient des parents, des administrateurs scolaires, des
commissaires
d'écoles. Ce sont des questions qu'on devrait poser à ceux
qui ont composé ce rapport, au président en particulier, lequel
fait la jonction de l'ensemble des personnes qui composent le
comité.
Il ne serait pas anormal non plus de poser des questions sur la
composition même du comité. On dit: Le comité était
composé de Michael Macchiagodena, directeur général
adjoint du secteur anglais à la Commission des écoles catholiques
de Montréal, de Gerald Brown, qui était le directeur des services
aux anglophones au ministère de l'Éducation, de William Cusano,
qui est le député de Viau - on le dit bien - de Jeff Polenz, qui
est un attaché politique au cabinet du ministre de l'Éducation,
secrétaire du groupe de travail, et de Jean-Claude Rondeau, conseiller
spécial auprès du ministre, président du groupe de
travail. On pourrait leur demander quelles ont été les actions
qu'ils ont menées à différents niveaux - incluant
même M. Rondeau, sans vouloir déprécier le travail qu'ils
ont fait au sein de ce comité, ni le travail qu'ils ont fait
précédemment - dans le passé et qui font qu'aujourd'hui on
se retrouve avec un problème qui n'a pas été résolu
pour différentes raisons. On aura l'occasion, en cours de route, de le
faire valoir.
Pourquoi n'a-t-on pas pris des gens d'autres groupes de la
société, soit de l'alliance de Montréal ou d'autres, qui
avaient aussi des choses à faire valoir? Ils auraient pu dire au
ministre, dans ce rapport: Écoutez, nous ne sommes pas d'accord avec
cette partie, nous aimerions mieux telle chose plutôt que telle autre.
Or, on pourrait... Ce groupe de travail avait le mandat, premièrement,
d'identifier, avec la collaboration des commissions scolaires, des enseignants,
des cadres d'école et des parents concernés, les diverses
catégories d'élèves impliqués dans le
problème. On pourrait leur poser la question. Eux demandaient la
collaboration. Est-ce que, dans le passé, le gouvernement
précédent n'avait pas justement demandé la collaboration
de ces personnes? Là, je reprends les propos de la Commission des
écoles catholiques de Montréal et on pourrait répondre
à une partie de la question du ministre: Est-ce qu'on ne pourrait pas
demander à M. Rondeau, ainsi qu'aux autres personnes qui composaient le
comité, comment il se fait qu'à l'époque l'actuel
député de Saint-Louis, qui était président de la
Commission scolaire régionale de Chambly, M. Chagnon, ait
décrié les moyens que prenait le gouvernement de l'époque
- là, il y avait une petite "game" politique, comme on pourrait
l'appeler - en voulant utiliser des pouvoirs que la loi lui donnait, mais que
lui, comme individu et comme président de commission scolaire
décriait en disant: Nous sommes un gouvernement local et, comme tel,
nous avons des responsabilités et ce n'est pas Québec, comme
gouvernement, comme ministère, qui va nous indiquer quoi prendre. C'est
exactement ce que disait le député; il était
également président de la Fédération des
commissions scolaires catholiques du Québec. On me dit que c'est un
ancien attaché politique de l'actuel ministre de l'Éducation, ou
du moins qu'il a eu à travailler avec lui, proche de lui, c'est ce qu'on
me souffle. M. Chagnon était, à l'époque, certainement une
personne qui vous a conseillé comme personne-ressource. M. Chagnon,
d'une façon ou d'une autre, était président de la
Commission scolaire régionale de Chambly, président de la
Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec. Il disait à l'époque: Nous sommes des
gouvernements locaux, nous avons nos responsabilités. S'il le faut, nous
prendrons même les injonctions qui s'imposent; que le gouvernement ne
vienne pas nous donner des ordres précis à ce sujet.
Donc, il y a des gens qui ont empêché que le gouvernement
puisse agir de façon à régler le problème à
l'époque et il a fallu même une enquête qui, vous vous en
souvenez et on en fait mention à l'intérieur du document qui nous
est présenté et j'y reviendrai tantôt... On dit: Le
contexte de Me François Aquin qui avait à présenter un
rapport au gouvernement. On a demandé la collaboration de tout le monde
et on ne l'a pas eue. Tant mieux si, dans un moyen de régler le
problème, le gouvernement a et obtient l'accord des gens!
Le deuxième mandat était d'identifier les mesures
législatives, administratives ou autres nécessaires à la
solution du problème. Qu'est-ce que demande, en fait, le ministre de
l'Éducation actuel? C'est que, compte tenu que vous n'aviez pas la
collaboration, comme ministère, de ces gens-là, vous auriez
dû utiliser les moyens législatifs pour les forcer à poser
des gestes. Ce que le ministre aurait voulu qu'on fasse, c'est de prendre des
moyens qui sont, à ce moment-là, considérés comme
étant des moyens législatifs coercitifs. On a essayé de
prendre des moyens de persuasion plutôt que de prendre les moyens de
matraque que le ministre aurait voulu qu'on prenne à ce
moment-là. On dit dans le texte: "Cette nouvelle tentative de solution
de la question des élèves illégalement admis à
l'école anglaise arrive presque cinq ans après l'enquête
Aquin." Quand il écrit dans le texte - et j'aimerais poser la question
à M. Rondeau -"cette nouvelle tentative", ne viendrait-il pas en
contradiction avec tout ce que j'ai entendu de l'autre côté en
disant qu'il n'y avait rien eu de fait à l'époque où
l'Opposition formait le gouvernement, que ces gens-là n'avaient fait
aucune tentative pour régler le problème? J'aimerais entendre M.
Rondeau et les gens, même M. le député de Viau, me
dire pourquoi ils ont écrit "cette nouvelle tentative de
solution". Cela sous-entend qu'il y en a déjà eu. S'il y a eu des
tentatives de solution, cela veut peut-être dire qu'elles n'ont pas
réussi, mais pourquoi? je reviendrai à la partie du mandat qui
dit: "Avec la collaboration des commissions scolaires, des enseignants, des
cadres d'école, des parents concernés, etc." Peut-être
pourrait-on montrer qu'effectivement nous n'avons pas eu cet accord normal
qu'on aurait dû avoir comme gouvernement pour aider à
régler le problème alors que des gens à l'intérieur
du système ont permis que les élèves illégaux,
clandestins, semi-clandestins - on peut les nommer comme ils sont maintenant
dénommés selon qu'ils ont eux-mêmes dit: J'étais un
"illégal", maintenant je veux devenir "légal"... On pourrait
savoir, à la suite du rapport Aquin, ceux qui ont suivi la partie qui
était le moyen d'inscrire à l'école française ceux
qui étaient illégalement inscrits à l'école
anglaise. Là, on se souvient que cela permettait d'intégrer ce
monde à l'école française selon les recommandations
faîtes par Me Aquin. On s'en souvient, Me Aquin avait recommandé
un programme dont les trois points les plus importants, d'après le
rapport Rondeau, étaient toujours les suivants: l'inscription des
élèves illégalement admis à l'école anglaise
à l'école française sur un mode
décentralisé, c'est-à-dire par le biais du contact avec
l'école française la plus proche du domicile;
deuxièmement, la mise sur pied d'équipes de pédagogues et
de psychologues pour évaluer et assister les élèves
concernés; troisièmement, la mise en route d'un programme
spécial d'accueil d'un an comportant, entre autres, des mesures
appropriées d'évaluation et de soutien pédagogique au plan
linguistique. À ce moment-là, il y a des gens qui se sont
inscrits à l'école française. Ils sont revenus dans le
droit chemin. Là, on dit: "M. Camille Laurin devait par la suite
accepter les recommandations de Me Aquin, dégager un montant de 3 600
000 $ pour le programme spécial et déclarer qu'aucune poursuite
ne sera instituée contre les parents et les responsables scolaires ayant
défié la loi."
On avait le choix à ce moment-là de voter une loi et de
dire: Vous avez défié la loi et vous êtes en infraction et
telle et telle chose va se passer. Ce n'est pas cela qu'on a fait. On a
essayé plutôt de persuader. On dit: À la fin de
décembre 1982, le bilan du programme pouvait s'établir comme
suit: l'opération accueil québécois permettait un
transfert aux écoles françaises de la Commission des
écoles catholiques de Montréal d'au plus une centaine
d'élèves illégalement admis à l'école
anglaise. Cependant, il indique que cela n'était pas enrayé. Mais
pourquoi cela n'était-il pas enrayé? Peut-être qu'on
pourrait poser la question puisqu'ils ont fait une enquête et une
vérification auprès du responsable, le président de cette
commission, M. Rondeau. On pourrait savoir pourquoi, puisqu'il semble y avoir
eu un contact bien précis à la Commission des écoles
catholiques de Montréal et à l'autre secteur, lui-même
ayant été, si je ne me trompe pas, directeur
général au moment où il a essayé, lui aussi,
semblerait-il, d'après ce que le ministre a dit tout à l'heure,
de permettre l'inscription à l'école française de ces
jeunes qui étaient illégalement admis à l'école
anglaise. (16 h 15)
Le rapport fait l'historique de la politique linguistique du
Québec, à partir de la loi 63, en disant: C'était,
à toutes fins utiles, la politique du libre choix de la langue
d'enseignement. On pourrait se poser la question, on pourrait la poser à
tous les gens qui ont vécu à ce moment, aux gens de l'alliance de
Montréal, puisqu'ils y étaient -des gens occupaient des postes
avec des noms différents à l'époque, mais ils
étaient là au moment de la loi 63 - aux gens de la Commission des
écoles catholiques de Montréal. On pourrait poser la question,
comme on a cru le comprendre la semaine dernière, aussi bien à la
députée de Jacques-Cartier, qui parle encore de libre choix comme
ce fut le cas avec un autre député qui n'est plus dans cette
Chambre et qui était de l'Union Nationale et qui proposait le libre
choix. Il avait même fondé un parti politique basé sur le
libre choix.
Je pourrais peut-être ajouter, à moins que cela n'ait
dépassé sa pensée, puisqu'il avait un fan club la semaine
dernière, vendredi, que j'ai cru comprendre que cela ne concordait pas
avec la pensée du ministre, ce que le député de Arthabaska
a dit. Je vais faire la rectification, à moins que vous ne vouliez la
faire plus tard, M. le député de Arthabaska. Jai cru comprendre
de la part du député de Arthabaska que si les gens
émigrent au Québec... Il semblait dire: En espérant qu'ils
apprennent le français, si possible. J'ai cru comprendre que le ministre
a tiqué un peu en Québécois, j'ai cru comprendre
qu'effectivement cela a dépassé sa pensée, mais là
il avait un fan club devant lui et c'est peut-être pour cela que cela a
dépassé sa pensée. Il ne faudrait pas revenir à ce
libre choix de la loi 63.
Quand on est arrivé à la loi 22... Là, on pourrait
poser la question parce que le texte est quand même intéressant,
on parlait de l'article 41 et de l'article 43, et on pourrait lui poser la
question sur l'imposition des tests. On disait: Ces tests doivent tenir compte
des niveaux d'enseignement, y compris la maternelle. Est-ce qu'ils ont
évalué l'ensemble de l'impact que cela avait dans les
recommandations qu'ils ont faites ensuite, sur le fait que cela divisait bien
plus les familles, car un enfant de la
maternelle qui ne réussissait pas son examen se retrouvait
à l'école française, celui qui réussissait se
trouvait à l'école anglaise. Cela divisait probablement davantage
qu'une des propositions qui est faite à l'effet d'accorder ce droit aux
enfants descendants de l'individu qui va avoir un nouveau droit et à ses
frères et soeurs. Je pense qu'on aurait beaucoup de questions à
poser et on aurait intérêt à l'avoir devant nous. Je vais
arrêter là parce que d'autres auront peut-être l'occasion de
revenir sur le sujet.
Je n'arrête pas cependant mes remarques sur l'ensemble de la
proposition. Je parlais de M. Rondeau; je vais parler maintenant de la
Commission des écoles catholiques de Montréal. La Commission des
écoles catholiques de Montréal aussi, on pourrait lui poser des
questions. Quel a été son travail, quelle a été son
implication pour empêcher justement ce que recherche le rapport Rondeau,
ce que recherchait le gouvernement de l'époque et le ministre de
l'époque, la collaboration des commissions scolaires? On pourrait
revenir sur une partie qui inquiète beaucoup de personnes et qui a lieu
actuellement; le passage des allophones aux institutions françaises
protestantes inquiète à l'intérieur du maraudage de la
Commission des écoles protestantes du grand Montréal. Cela a
amené, d'une certaine façon, même si c'est francophone, du
maraudage qui aurait eu lieu à l'époque, souvenez-vous en, entre
les gens des écoles catholiques de Montréal en ce qui concerne
les francophones et les écoles catholiques relevant de ce qu'on appelle
dans les syndicats la "Provincial Association of Catholic Teachers", et
l'autre, la "Provincial Association of Protestant Teachers" avec le "school
board" protestant. L'ensemble du maraudage a pu avoir lieu à cette
époque alors que des personnes étaient intéressées
à conserver pour certaines raisons, premièrement, question du
ratio d'étudiants, et aussi pour profiter du fait que des personnes
étaient en contestation de la loi 101...
On pourrait revoir un document du député d'Argenteuil de
1983, du 31 mai 1983, que j'ai relu avec beaucoup d'attention. Je l'ai lu, relu
et "rerelu" avec beaucoup d'attention. Ce qui m'a inquiété, c'est
que dans les éléments de solution, à la page 13 de son
document, le député d'Argenteuil disait ceci: "En toute
honnêteté, on doit convenir que l'illégalité dans
laquelle se sont placés des centaines de parents, d'éducateurs et
d'enfants n'a rien de commun avec les formes courantes de comportement
délinquant qu'on associe d'ordinaire avec le concept
d'illégalité. Les citoyens concernés sont d'honnêtes
gens." Personne, je pense, ne va en disconvenir, à savoir que ce sont
d'honnêtes gens. "Dans le reste de leurs activités, ils observent
la loi aussi fidèlement que quiconque. Cependant, dans le cas
précis qui nous occupe - là, on fait la distinction, qui est, je
ne devrais pas dire, casuistique ou d'autres termes, le ministre comprendra
très bien ce que je veux dire - ils étaient et demeurent
convaincus que la loi, par ses effets rétroactifs et souvent
arbitraires, avait créé à leur endroit une situation
d'injustice. En résistant à la loi, ils étaient convaincus
de défendre un principe et un droit."
Cela m'inquiète, parce que le ministre met cela dans son
document, en disant: Voici comment les gens ont réagi. J'espère
que le ministre ne pense pas qu'ils avaient raison de le faire. Je ne pense pas
qu'il ait dit cela jusqu'à maintenant. Qu'est-ce que cela veut dire?
Cela veut dire que moi, comme individu, dans une commission scolaire, comme
directeur d'école, comme président de commission scolaire, comme
cadre scolaire, comme parent ou comme étudiant, si cela ne fait pas mon
affaire, j'ai le droit d'y résister parce que j'ai le soupçon
dans ma tête que c'est une situation d'injustice. C'est grave d'en
arriver à ce raisonnement. "En résistant à la loi, ils
étaient convaincus de défendre un principe et un droit. Leur
conduite - il continue - quoique l'on en pense objectivement - il a bien fait
attention, j'ai bien compris ce qu'a dit le ministre à l'époque,
c'est pour cela que j'ai été précis dans ce que j'ai dit -
traduit chez eux non pas le désir de mal faire qu'on associe d'ordinaire
à la délinquance et au défi de la loi, mais des
convictions politiques profondes qu'a d'ailleurs longtemps avalisées la
tradition politique du Québec."
Cela veut dire que j'aurais, si je poursuis le raisonnement qui est
là, de bonnes raisons et de bonnes questions à poser, tant
à M. Rondeau qu'à la Commission des écoles catholiques de
Montréal: Est-ce que vous croyez que des décisions basées
sur une question politique, d'avoir été d'une certaine
façon en situation d'injustice, me permettent de me faire justice
moi-même? La réponse, elle va être: Non. Â partir de
cela, il y a donc des questions qu'on pourrait poser à l'une et à
l'autre des parties. Je pense qu'on pourrait peut-être découvrir,
à la fin de la course, pourquoi il y a eu des gens qui ont agi de
façon illégale et qui, comme le dit encore le texte du ministre,
alors qu'il était critique de l'Opposition, au mois de mai 1983,
à la page 29: "...si bien qu'aujourd'hui la société
québécoise compte un groupe de citoyens mécontents et
même franchement hostiles. À mon avis, ces personnes ne feront
plus jamais confiance à l'administration ni aux élus." Là,
la question qu'on peut peut-être poser vis-à-vis du rapport de M.
Rondeau, c'est dans la proposition d'amnistie: Est-ce qu'il n'y aurait pas des
gens qui, dans le contexte de l'amnistie de la loi 58, ne feront plus jamais
confiance à l'administration ni aux élus s'ils
s1 aperçoivent, à la fin, que parce qu'ils ont
respecté la loi, parce qu'ils ont accepté ce que la loi disait,
on considère aujourd'hui que ceux qui ont été
illégaux non seulement sont amnistiés, mais en plus de cela ils
obtiennent plus que ce que la loi 101 dit? Là, on pourrait leur poser la
question: Est-ce que ce ne serait pas plutôt parce que l'article 23 de la
constitution actuelle, en vertu des accords de 1982, ne leur donne pas des
pouvoirs plus forts que ce que pensaient même des gens, plus que
d'autres? C'est dans ce contexte qu'on aurait de bonnes questions à
poser à M. Rondeau et à la Commission des écoles
catholiques de Montréal.
Là, on pourrait aller à une autre partie, à savoir
les groupes syndicaux comme l'alliance de Montréal, ce qui est la
troisième partie de ma proposition. Les gens de l'Alliance des
professeurs de Montréal disent: Des professeurs s'opposent à la
possibilité d'amnistie pour les "illégaux" dans les écoles
anglaises. On dit: Rude mise en garde au ministre Ryan. L'alliance des
professeurs s'opposent à l'amnistie des élèves
illégaux. C'est dans le Soleil, dans un cas, et dans la Presse, dans
l'autre cas, du 25. On dit dans le texte: "Si le gouvernement s'engage plus
avant dans un processus politique inacceptable pour la majorité
francophone, il ne faudra pas s'étonner de voir resurgir la bataille
linguistique et le climat d'intolérance d'avant la loi 101 qui a
ramené la paix, a déclaré hier Mme Lorraine Pagé,
présidente du syndicat regroupant les enseignants francophones de la
CECM."
Le ministre semble surpris, lorsqu'on lui fait mention de ces choses,
qu'on le fasse à l'intérieur d'une politique globale de la
langue. Le ministre est-il en train de passer, morceau par morceau, des
changements à la loi 101? Peut-être pourrait-on poser la question
à Mme Pagé qui l'indique. Le ministre nous a indiqué tout
à l'heure en réplique qu'effectivement, dans son cas, il croyait
qu'il n'était pas temps de proposer une nouvelle loi qui amenderait la
loi 101 parce que cela aurait peut-être pour effet de cristaller le
débat autour d'une loi linguistique pour régler un
problème particulier. Mais voyons donc! Ce problème particulier
se situe à l'intérieur d'une mosaïque bien plus vaste, bien
plus grande que le seul fait de dire: Écoutez, cela fait assez longtemps
que cela dure et le monde semble prêt, d'après nos renseignements,
selon les lettres que j'ai reçues, à nous appuyer dans la
démarche et ils ne récidiveront pas plus tard. Est-ce que, pour
cela, on va corriger une partie de la loi 101 par l'intermédiaire d'une
loi particulière, qui est le projet de loi 58 et qui vient amnistier les
élèves illégaux?
On disait qu'on avait envoyé un télégramme au
ministre de l'Éducation et voici le style dans lequel s'était
écrit. Le télégramme disait ceci: "Nous ne croyons pas que
le Québec ait les moyens de se payer une nouvelle bataille linguistique,
mais nous n'hésiterons pas à l'amener si vous nous provoquez en
ce sens." C'est Mme Pagé, présidente de l'alliance de
Montréal, qui parle. Ces gens ont des raisons de le dire, de le penser.
C'est sûr que le député de Sauvé pourrait me dire:
Écoutez, nous connaissons l'alliance de Montréal. J'ai eu
à négocier souvent avec elle. Je sais comment elle fonctionne. Je
sais très bien qu'il pourrait me répliquer ces choses, mais je
pourrais lui répliquer, à l'inverse, qu'aussi les gens de
l'alliance connaissent la Commission des écoles catholiques de
Montréal, que ce soit à l'époque où c'était
Mme la députée de L'Acadie qui en était présidente
ou le député de Sauvé. J'ai eu l'occasion moi aussi, comme
président du syndicat, d'avoir souvent des discussions et de ne pas
toujours être d'accord avec les commissaires d'écoles.
Je pense que le député d'Arthabaska a eu le même
raisonnement que moi pour les lois 19 et 27, à l'époque où
il était dans l'enseignement comme moi - on s'en souvient - et de
différents gouvernements d'ailleurs, incluant la loi dont il nous a fait
mention devant son fan club, toujours, vendredi passé, la loi que nous
avons adoptée au printemps 1983. Dans le texte, on dit: C'est l'ancien
directeur général... Et c'est ici que je boucle la boucle, comme
on dit, pour finir mon intervention, il me reste encore quelques minutes...
Le Président (M. Bissonnet): Quand ce sera le temps de
conclure, je vous ferai signe.
M. Jolivet: Parfait, M. le Président, vous êtes bien
gentil.
Donc, c'est l'ancien directeur général de cette commission
scolaire, M. Jean-Claude Rondeau, qui a dirigé le comité de
travail mis sur pied par le ministre Claude Ryan afin de résoudre
l'épineux problème des élèves illégaux. On
dit aussi dans le texte que l'alliance des professeurs a déjà
défendu sa position devant ce comité. Que proposait devant ce
comité l'alliance de Montréal? J'aimerais qu'elle vienne me le
dire ici parce que c'est nous qui allons avoir les dernières
décisions à prendre comme administrateurs, comme
législateurs. C'est le syndicat. Je ne veux pas vous dire que je suis en
accord ou en désaccord avec elle, j'aimerais l'entendre pour prendre
ensuite une décision. Je pense qu'il faut bien s'entendre sur cette
chose, le syndicat proposait une amnistie conditionnelle: "Nous voulons bien
reconnaître les études accomplies par ces élèves, a
expliqué Mme Pagé, dit le communiqué de presse, mais sous
réserve qu'ils passent avec succès un examen écrit et oral
en français langue d'usage, et non langue seconde, avant de leur
décerner un certificat de fin d'études. De cette
façon, ils se conformeraient au moins è l'esprit de la loi 101.
L'Alliance s'opposait cependant à ce que le droit à
l'école anglaise s'étende aux frères, aux soeurs, aux
descendants des "illégaux". "Avec la clause Canada imposée par la
Cour suprême, il suffira qu'un parent ait étudié en anglais
n'importe où au Canada pour pouvoir inscrire son enfant dans une
école anglaise au Québec." (16 h 30)
Le ministre vient de répliquer à cela en disant qu'il a
l'intention de proposer un amendement à la loi 101 en ce sens-là.
Donc, Mme Pagé serait peut-être intéressée de
l'apprendre de la bouche du ministre en commission parlementaire et
peut-être de lui donner des arguments contre afin de le convaincre de ne
pas faire ces choses. Même si le ministre peut nous dire qu'il l'a
reçue lors de rencontres particulières, j'aimerais qu'elle le
dise devant nous ici pour que nous aussi, qui sommes des législateurs,
ayons l'occasion de l'entendre dire. La présidente disait toujours que
l'alliance recommandait de resserrer les règles du jeu avec des
sanctions fort dissuasives, soit la mise en tutelle de commissions scolaires et
le congédiement des administrateurs dérogeant aux règles.
Il est bien évident que le ministre m'a dit: Pourquoi ne l'avez-vous pas
fait quand vous étiez au gouvernement? C'est justement ce qu'expliquait
mon collègue - il aura certainement l'occasion de l'expliquer plus
à fond - pourquoi nous n'avons pas agi dans ce sens et pourquoi nous
avons plutôt utilisé la forme persuasive, malgré que des
administrateurs, des directeurs d'école, des parents aient
désiré, eux, devenir - prenons le terme récalcitrants.
Le Président (M. Bissonnet): Je vous prierais de conclure,
M. le député de Laviolette.
M. Jolivet: Je vais donc conclure en disant qu'il me ferait
grandement plaisir d'entendre ici le président du comité, M.
Rondeau, non plus en conversations privées comme celles que j'ai
l'occasion d'avoir avec lui sur certains autres sujets avec beaucoup de plaisir
et de déférence envers lui, mais de l'entendre dire de
façon à ce que cela soit colligé dans les minutes de cette
assemblée pour confronter ses dires avec la Commission des écoles
catholiques de Montréal et les gens de l'alliance de Montréal.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Sauvé.
M. Marcel Parent
M. Parent (Sauvé): M. le Président, je suis
très édifié de voir l'intérêt que le
député de Laviolette porte au président du comité
que l'on appelle le comité Rondeau. Je sais que c'est un homme de grande
valeur qui a été d'un soutien et d'une probité à
toute épreuve dans la préparation du rapport. Par contre, je ne
peux pas être d'accord avec la motion qui a été
présentée par le député de Laviolette, parce qu'il
n'a pas spécifié s'il voulait entendre M. Rondeau ou s'il voulait
entendre le président du comité Rondeau. S'il veut entendre M.
Rondeau, je pense qu'il n'y a aucun intérêt à entendre une
personne qui a travaillé à la Commission des écoles
catholiques de Montréal, qui en a été le directeur
général pendant un an et demi, alors que le problème des
"illégaux" existait déjà depuis beaucoup d'années
avant cela. S'il veut faire comparaître le président du
comité Rondeau... Vous admettrez que le comité Rondeau n'existe
pas. C'est l'appellation qu'on a donné au travail d'un fonctionnaire
politique qui a reçu le mandat de la part de son ministre de faire une
recherche, avec d'autres collaborateurs, sur une situation que nous avons tous
déplorée, celle des élèves dits illégaux,
pour tenter de conseiller le ministre dans ses décisions et dans ses
orientations face à ce problème.
Je n'éterniserai pas le débat parce que ce n'est
certainement pas mon rôle de l'éterniser et de faire qu'on en
parle longtemps. On ne peut pas, M. le Président, demander à un
fonctionnaire de venir répondre à la place du ministre. Le
fonctionnaire a avisé le ministre selon son mandat. Maintenant, la
responsabilité de l'application de ce rapport, de l'utilisation de ce
rapport dans la confection de la loi, relève du ministre et le ministre
en est le seul responsable. Je ne vois pas pourquoi on demanderait à M.
Rondeau de venir ici nous répéter ce que le député
de Laviolette semble avoir mémorisé puisqu'il nous a donné
pratiquement par coeur ou lu - je ne sais pas s'il l'a lu, mais je pense qu'il
l'a dit pratiquement par coeur - toutes les facettes de ce qui était
important et de ce qui ressortait du rapport Rondeau.
Ce rapport Rondeau, M. le Président, je le ferai remarquer au
député de Laviolette, n'a pas été
déposé à l'Assemblée nationale ni à la
commission parlementaire. Il a été remis, comme document de
travail, au ministre de l'Éducation qui l'avait commandé et il
revient au ministre de l'Éducation de venir défendre son projet
de loi. Si le ministre de l'Éducation veut aller chercher les
renseignements auprès de la personne qui a travaillé avec lui,
libre à lui d'aller le consulter, c'est son employé. Mais on ne
peut pas, ce n'est pas à vous de demander à M. Rondeau de venir
ici nous donner des
explications sur son rapport. Ces explications, il les doit seulement au
ministre. Connaissant la minutie du ministre et son intérêt pour
le détail, je suis convaincu que le ministre connaît tous les
détails et toutes les réponses qu'on peut poser à M.
Rondeau concernant ce projet de loi. Quant aux commissions parlementaires,
elles sont à l'intention des parlementaires et, lorsqu'on veut faire
comparaître des fonctionnaires ou des employés, cela prend
l'unanimité ou la majorité ou la double majorité de la
commission parlementaire. Le ministre n'aura pas peur de poser la question aux
gens du côté ministériel. Il va prendre ses
responsabilités et va répondre lui-même.
Quant à faire comparaître la présidente de
l'Alliance des professeurs de Montréal, je m'interroge sur le pourquoi
de la demande. C'est que Mme Pagé, nous l'avons rencontrée. Mme
Pagé a convoqué au début de l'hiver tous les
députés de la région de Montréal. Je ne sais pas si
elle avait convoqué les gens de l'Opposition, mais je sais qu'elle a
convoqué en tout cas, les gens du parti ministériel pour nous
faire connaître la position de l'alliance et l'orientation de l'alliance
face au projet de loi 58.
À ce moment, ce que Mme Pagé nous a dit, les restrictions
de Mme Pagé étaient que l'alliance n'était pas d'accord
que les élèves, automatiquement, soient certifiés avec
l'amnistie, reçoivent un certificat, sans passer des tests d'aptitudes.
Deuxièmement, ce que le député de Laviolette nous a dit
fidèlement, c'est qu'elle ne reconnaissait pas, qu'elle ne pouvait pas
admettre que les frères, les soeurs, enfin, puissent aussi jouir, je ne
dirais pas du même privilège, mais de la même situation que
l'on se propose d'appliquer aux élèves dits illégaux. Si
Mme Pagé nous avait présenté des arguments d'ordre
pédagogique, d'ordre de fonctionnement, d'ordre d'affrontement; mais
non, elle nous a donné la perception que les professeurs n'accepteraient
pas cela. C'est un argument politique. Je pense qu'on ne peut pas le retenir
ici. Le ministre ne peut pas, lui, retenir l'argument politique parce que les
représentants politiques d'un tel argument, c'est vous. Ce sont les gens
de l'Opposition. L'argumentation politique positive appartient aux gens qui ont
été élus. Normalement, je ne peux pas dire que je suis
d'accord avec la motion du député de Laviolette et je voterai
contre la motion du député de Laviolette.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Cusano: Jusqu'à 17 heures.
Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le
député de Viau. M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. François Gendron
M. Gendron: Évidemment, je vais être favorable
à la motion présentée par mon collègue, le
député de Laviolette, demandant que cette commission tienne,
avant d'entreprendre l'étude détaillée article par article
du projet de loi 58 concernant l'admissibilité à l'enseignement
en anglais de certains enfants dits "illégaux", des consultations
particulières, en particulier, en convoquant M. Jean-Claude Rondeau de
la Commission des écoles catholiques de Montréal ainsi que
l'Alliance des professeurs de Montréal. Je pense que le sujet que nous
avons à débattre est suffisamment important pour que nous
puissions entendre des organismes, des personnes peut-être, des
intervenants qui ont eu à s'exprimer publiquement sur la question des
"illégaux".
Quand mon collègue a suggéré d'entendre M.
Jean-Claude Rondeau, évidemment, c'est à titre de
président du comité Rondeau, et je pense qu'il avait raison de le
faire parce que, dans le rapport du comité Rondeau, ceux qui ont eu
l'occasion de l'analyser, on est en mesure de déceler quand même
plusieurs analyses, plusieurs recommandations, plusieurs hypothèses de
solution. II n'appartient pas à la formation que je représente ou
à l'Opposition de statuer et de déterminer sur quel motif le
ministre de l'Éducation s'est appuyé pour retenir la
recommandation qu'il a fait sienne. Le ministre de l'Éducation a le
droit, je pense, dans ses responsabilités, de présenter une
recommandation, une solution qui, d'après nous, n'en est pas une, mais,
nous, on a le droit d'interroger les autres éléments du rapport
Rondeau parce que, dans le rapport Rondeau, il y a plusieurs
possibilités qui ont été soulevées.
Dois-je vous rappeler pourquoi il est d'intérêt
d'interroger le rapport Rondeau? Contrairement à ce qu'a dit le
député de Sauvé, ce n'est parce qu'un document n'a pas
été déposé devant l'Assemblée nationale
qu'il n'est pas de notoriété publique. Il est clair qu'un
document, sur une question aussi importante que celle-là, devient
rapidement un document d'ordre public. Le rapport du président Rondeau
est un document d'ordre public puisqu'il a été largement
cité et commenté par la presse parlementaire, par toutes sortes
de personnes reliées à cette question qui étaient
intéressées à faire valoir leur point de vue et à
communiquer publiquement leur appréciation.
L'Alliance des professeurs de Montréal, si elle a pu commenter
à sa façon et, effectivement, présenter une recommandation
différente de celle retenue par le ministre de l'Éducation, c'est
parce qu'elle avait mis la main sur le rapport Rondeau, qu'elle l'avait
analysé et qu'elle l'avait regardé. À partir du moment
où elle a pensé que la
recommandation qui est faite par le comité Rondeau au ministre de
l'Éducation n'est pas celle qui devrait être retenue, elle s'est
exprimée publiquement et elle a fait connaître la position qu'elle
privilégie. J'y reviendrai tantôt.
Il en est de même d'autres intervenants à caractère
public, à caractère national, comme le Mouvement Québec
français qui a pris position comme c'était son droit de le faire
à la suite d'une question importante comme cela. C'est parce qu'il avait
mis la main sur le rapport Rondeau.
Donc, contrairement à ce qui a été affirmé,
je pense qu'il est d'intérêt public que le comité Rondeau
et son président puissent venir rencontrer les membres de la commission
parce qu'on aurait sûrement des questions intéressantes à
poser. Je voudrais vous donner, à titre d'exemple la page 21 du rapport
ou il est dit que l'amnistie générale est une solution politique.
Avant toute chose, il recommande une solution politique.
Cela a été mentionné que le président du
comité Rondeau, M. Jean-Claude Rondeau, a fait une recommandation au
ministre comme il lui avait été demandé, sauf qu'il
appartient à des parlementaires d'apprécier le caractère
politique d'une recommandation. Le comité Rondeau a reconnu que dans
cette approche il y avait des inconvénients et des avantages. Il est un
fait quand même un peu curieux. Dans la recommandation, on remarque que
le plus grand nombre d'inconvénients évoqués, comme par
hasard, concerne effectivement la solution préconisée par le
ministre de l'Éducation. C'est là qu'on retrouve, en tout cas en
termes énumératifs, la liste la plus longue
d'inconvénients.
Par exemple, on indique, comme inconvénient que cela peut
paraître comme une prime à la désobéissance. Cela
fait des semaines qu'on entend le ministre de l'Éducation nous dire
qu'il n'est pas question de voir là une prime à
l'illégalité. Il n'en demeure pas moins que, dans le propre
rapport de celui qui a reçu le mandat du ministre de l'Éducation
de regarder cela, il tient à nous rendre sensibles et à nous
indiquer qu'il avait une autre vision de la situation que je viens
d'évoquer. Il disait: Oui, il y a des individus, il y a des citoyens, il
y a des organismes au Québec qui vont y voir une espèce de prime
à la désobéissance. Il ajoutait que cela pourrait
même provoquer des réactions négatives chez ceux qui ont
obéi à la loi, sentiment d'avoir perdu en respectant la loi, et
ainsi de suite. J'aurai l'occasion d'y revenir, mais je voulais juste illustrer
que mon collègue, le député de Laviolette, était
parfaitement justifié de dire qu'il serait sûrement
d'intérêt public à ce moment-ci, et d'intérêt
pour les parlementaires, d'apprécier cette question.
Quand il a ajouté que la Commission des écoles catholiques
de Montréal devrait également être convoquée, je
pense qu'effectivement la Commission des écoles catholiques de
Montréal est très touchée par cette question parce que
c'est une commission scolaire très importante sur le territoire
montréalais qui a accepté de recevoir des "illégaux".
Même chose pour l'Alliance des professeurs de Montréal. L'Alliance
des professeurs de Montréal, je vous l'ai dit tantôt, a
réagi, en ce qui me concerne, très convenablement et a
préconisé une solution qui s'appelait l'amnistie conditionnelle,
mais ce serait une solution plus balisée.
Motion d'amendement proposant d'entendre la
FCSCQ
On voit là, M. le Président, très rapidement, quand
on s'en donne la peine, qu'il y aurait intérêt à ce que
nous puissions entendre différents intervenants dans ce qu'on appelle
les consultations particulières. Justement, parce qu'il y aurait
intérêt à ce que nous entendions toutes sortes d'organismes
sur une question aussi majeure et aussi importante, je voudrais à ce
moment-ci faire une motion d'amendement. La motion d'amendement se lirait comme
suit: La motion pour consultations particulières est amendée en
ajoutant à la fin de cette motion les termes suivants:
"Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec". J'indiquerai après la recevabilité de la motion
pourquoi je pense qu'il serait important et intéressant d'entendre la
Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec
sur une question aussi importante. Je vous soumets à ce moment-ci
l'amendement, M. le Président.
Le Président (M. Bissonnet): Alors, je considère
cette motion comme recevable. Sur l'amendement, je vous cède le droit de
parole, M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: M. le Président, avant de me céder le
droit de parole sur l'amendement, je voudrais quand même avoir une
précision.
Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le
député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Oui, M. le Président, je voudrais savoir le
partage du temps entre chacun des parlementaires intéressés
à débattre la proposition amendée? Est-ce que je dispose
d'un droit de parole de 30 minutes ou, comme la pratique le veut en commission,
d'un droit de parole de 20 minutes? Indépendamment de votre
décision, M. le Président, j'aurai effectivement à
plaider.
Le Président (M. Bissonnet): Mes chers collègues,
je vais suspendre pour trois minutes.
(Suspension de la séance à 16 h 46)
(Reprise à 16 h 48)
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Viau.
M. Cusano: II me semble avoir bien entendu le
député de Laviolette, tout à l'heure, lorsque j'ai fait le
commentaire afin de savoir s'il avait oublié des organismes dans sa
motion principale. Je voudrais rappeler à tout le monde qu'il a bien dit
non. Je comprends que la motion est présentée par l'autre
député.
M. Jolivet: II y a plus de choses dans deux têtes que dans
une.
M. Cusano: En tout cas, on a bien compris, de ce
côté-ci, que, lorsque le député de Laviolette
parlait, il parlait au nom de sa formation politique.
Le Président (M. Bissonnet): Mesdames et messieurs les
membres de la commission, en ce qui a trait à la demande du
député d'Abitibi-Ouest, s'agissant d'un amendement que j'ai
trouvé recevable, vous avez 30 minutes en tant que proposeur de cet
amendement et les autres membres de cette commission ont un droit de parole de
10 minutes. La parole est à vous, M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Ryan: Combien de temps alloue-t-on pour la réplique du
gouvernement?
Le Président (M. Bissonnet): Vous avez droit à 30
minutes vous aussi. Vous êtes rendu à 60.
M. Gendron: D'abord, merci, M. le Président, de votre
sagesse en déclarant recevable cette motion d'amendement tel qu'il est
courant dans nos pratiques parlementaires. Effectivement, je dispose, à
ce moment-ci, d'un droit de parole de 30 minutes sur l'amendement. Pourquoi,
est-ce que je pense qu'il y a lieu d'ajouter...
Le Président (M. Bissonnet): Je veux vous rappeler qu'il
vous reste deux minutes sur la motion principale.
M. Gendron: On aura l'occasion de revenir là-dessus, M. le
Président. À mains que je ne fasse erreur - aussi bien clarifier
cela tout de suite - après avoir accepté la recevabilité
de la motion de mon collègue le député de Laviolette, vous
avez mentionné que le proposeur avait 30 minutes, que le ministre avait
30 minutes et que l'ensemble des autres intervenants avait 20 minutes parce
qu'il...
Le Président (M. Bissonnet): Dix minutes. J'ai dit dix
minutes parce que c'est une motion de forme.
M. Gendron On le plaidera au moment où cela se produira
parce que j'aurais à mettre en preuve...
M. Ryan: M. le Président, la décision est
rendue.
M. Gendron: Non, elle n'est pas rendue, M. le ministre de
l'Éducation; la décision ne peut pas être rendue puisque,
de toute façon, il me reste deux minutes de temps de parole.
Après que j'aurai épuisé mon temps de parole on aura
l'occasion de plaider, mais sur la base d'une jurisprudence établie
récemment dans une autre commission.
Le Président (M. Bissonnet): On va revenir à votre
amendement. Prenez vos 30 minutes, on y verra en temps et lieu.
M. Gendron: C'est exact. Parfait, M. le Président. Je
dispose, à partir de ce moment-ci, de 30 minutes sur la motion
d'amendement que j'ai proposée a savoir qu'il serait très
intéressant d'entendre la Fédération des commissions
scolaires catholiques du Québec. Contrairement à ce que j'ai
senti de l'autre côté de la table, M. le Président, j'y
tiens et je trouve que c'est un argument qui se défend très
facilement parce que la Fédération des commissions scolaires
catholiques du Québec a d'abord comme mandat de regrouper l'ensemble des
commissions scolaires du Québec. C'est l'organisme chapeau qui a
toujours eu à orienter les principales politiques des diverses
commissions scolaires du Québec. Dans ce sens, la
Fédération des commissions scolaires du Québec est
sûrement intéressée par la question que nous
débattons puisque c'est d'abord une question reliée à
l'éducation. Que je sache, la Fédération des commissions
scolaires catholiques du Québec a toujours montré un
intérêt certain pour les questions éducatives puisqu'elle a
pour mandat de regrouper l'ensemble des commissions scolaires qui ont comme
mission, en vertu de leur loi constitutive, de s'occuper des questions
éducatives qui regardent l'ensemble des jeunes du Québec.
La deuxième raison pour laquelle il y aurait lieu
également d'entendre la Fédération des commissions
scolaires catholiques du Québec est qu'il s'agit, dans ce que nous
discutons, d'un principe fondamental. Je pense qu'à partir du moment
où un Parlement s'est exprimé dans une loi -
je fais là référence à la loi 101, loi qui a
été longuement et largement débattue dans nos institutions
parlementaires, que cela soit à l'Assemblée nationale même
ou en commission parlementaire, on a passé de très longues et de
très nombreuses heures à discuter d'une loi que nous croyions
très importante, la loi 101 - pour faire du Québec un
Québec français, puisque la majorité francophone a le
droit, croyons-nous, en cette terre d'Amérique de pouvoir s'exprimer
dans sa langue maternelle, dans la langue de la majorité, y compris pour
les institutions et pour les individus, on ne peut pas
inconsidérément passer des heures et des heures à discuter
d'un projet de loi voté par un Parlement légitimement élu.
Je crois que personne n'a contesté la légitimité du
Parlement en 1977. Que des citoyens, des jeunes, peu importe le motif et peu
importe qu'on nous dise: Écoutez, ces jeunes n'y sont pour rien... Je
suis d'accord que ces jeunes n'y sont pour rien. J'en ai, des jeunes, et je
dois régulièrement répondre de leurs gestes et de leurs
actes. C'est ce qu'on appelle des parents responsables. Lorsqu'on a affaire
à des parents responsables, jusqu'à l'âge de la
majorité ils doivent répondre des gestes posés par leurs
jeunes.
En conséquence, je pense qu'à partir du moment où
des institutions scolaires, où des parents ont incité, peu
importent les motifs et peu importe la façon dont ils l'ont fait, des
jeunes à défier une loi légitimement adoptée par le
Parlement, cela commence à être sérieux comme principe
d'adopter une autre loi et de dire: Le même Parlement, dans une autre
législation...
Je pense avoir invoqué un point très important en
deuxième lecture. Je crois que poser le geste législatif dans une
seconde loi pour dire: Écoutez, quand vous avez défié la
loi, lorsque vous avez contourné la loi, encore là peu importent
les motifs qui vous ont guidés, ce n'est pas grave, car, au nom d'un
principe humanitaire, au nom d'un geste de bonté ou de grandeur
d'âme on va amnistier tous ces gens qui ont contourné la loi 101,
c'est entacher un principe démocratique qui touche sûrement des
institutions et, en termes d'intérêt, des institutions qui ont la
préoccupation de regrouper l'ensemble des commissions scolaires du
Québec, qui ont comme mandat premier d'offrir à des jeunes, par
leur responsabilité, un enseignement adéquat et de
qualité.
Dans la responsabilité éducative, il y a sûrement
une dimension quant à l'observance des lois et des règlements
d'un Parlement légitimement élu. Je pourrais citer, à
titre d'exemple, le cas de ma propre épouse qui enseigne actuellement
l'éducation économique et d'autres matières. Quand on
enseigne l'éducation économique, on enseigne un peu les principes
économiques dans lesquels une société est appelée
à évoluer. Donc, vous donnez des orientations, vous donnez des
principes de développement économique.
Si c'est vrai pour l'économie, c'est vrai sûrement aussi
pour le respect de nos lois. Il y a déjà eu un cours
intitulé éducation civique, au Québec. L'éducation
civique, au Québec, c'était une responsabilité des
commissions scolaires. Les commissions scolaires ont la responsabilité
d'éduquer les jeunes pour leur permettre de faire face, avec la
meilleure préparation possible et avec le meilleur équilibre
possible, à la capacité de se comporter comme des citoyens et des
citoyennes qui ont reçu une éducation de qualité.
C'est le mandat de l'ensemble des commissions scolaires. La
fédération des commissions scolaires qui regroupe ces
institutions est sûrement intéressée à venir donner
son point de vue à des parlementaires. Si la fédération,
elle, n'était pas intéressée à venir dire à
des parlementaires son point de vue là-dessus, moi, comme parlementaire,
je suis intéressé à avoir le point de vue de la
Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec
sur une question aussi fondamentale, aussi importante, concernant cette
espèce de loi d'amnistie générale où on dit: Peu
importent les considérations selon lesquelles il y a des enfants qui ont
décidé de contourner une loi, le législateur parle et
décide, dans une loi, de leur donner l'amnistie totale,
générale, sans nuance, indépendamment de certaines
considérations majoritairement identifiées à la
collectivité québécoise, indépendamment du respect
de nos institutions, du respect d'une loi aussi fondamentale, aussi importante
que la loi 101 sur le fait français.
Je pense que la Fédération des commissions scolaires
catholiques du Québec n'a pas le droit de ne pas s'acquitter de sa
responsabilité sociale à ce moment-ci et de venir nous informer
et nous dire comment elle, comme institution chapeau, institution
fédérée, regroupant l'ensemble des commissions scolaires
catholiques du Québec, en particulier, M. le Président, lorsqu'il
y en a au moins trois très importantes qui sont membres de la
Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec... On me donnait l'information tantôt, sur les 1500
à 1600 élèves illégaux il y en a plus de 1000 qui
proviennent de trois commissions scolaires qui s'appellent: la commission
scolaire Baldwin-Cartier, la CECM et la commission scolaire
Jérôme-Le Royer. Les commissions scolaires Baldwin-Cartier et
Jérôme-Le Royer sont membres de la Fédération des
commissions scolaires catholiques du Québec. La CECM ne s'est que tout
récemment retirée de la Fédération des commissions
scolaires catholiques du Québec. Pendant longtemps la commission la
plus importante, celle qui avait toujours la capacité
d'infléchir le plus les orientations de la Fédération des
commissions scolaires catholiques du Québec, c'était la plus
grosse commission scolaire catholique du Québec, soit la CECM. C'est
tellement vrai ce que je vous dis qu'une des raisons pour lesquelles la CECM a
décidé effectivement de se retirer de la fédération
- j'ai bien dit une des raisons - c'est parce qu'elle voulait avoir une
influence plus importante en étant elle-même autonome pour
être capable d'orienter davantage des décisions prises, soit par
le ministère de l'Éducation, infléchir ou influencer des
décisions du ministère de l'Éducation, du ministre de
l'Éducation ou toute autre question reliée à ces
problèmes-là.
Je pense que la fédération aurait sûrement un point
de vue à nous exprimer concernant l'attitude de trois de ses commissions
scolaires importantes qui comptaient au-delà de 1000 enfants
illégaux dans le dossier. C'est aussi un organisme représentatif.
La Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec, combien de fois, M. le Président, lorsqu'on a eu à
débattre de questions importantes concernant des orientations
fondamentales pour l'avenir et la société de demain, mais
toujours reliées à l'éducation, a toujours cru, utile,
nécessaire de s'exprimer par mémoire. J'ai eu l'occasion
d'être ministre délégué à
l'Aménagement et au Développement régional et je me
rappelle que sur des questions de décentralisation, sur des questions
d'aménagement du territoire, sur des questions aussi importantes que
l'aménagement, entre autres, de tout le bassin hydrographique de
Montréal, concernant le projet Archipel lorsque j'étais
également responsable de ce dossier, la Fédération des
commissions scolaires catholiques du Québec régulièrement
me faisait parvenir des avis contenant son point de vue comme entité,
comme organisme représentatif majeur, important dans une
société québécoise qui constamment a le souci du
respect des institutions et a recours à des intervenants aussi
importants pour venir éclairer, bonifier notre réflexion,
augmenter notre capacité d'avoir des opinions arrêtées sur
tout, ce qui est souvent très ardu, et être en mesure d'identifier
toutes sortes de situations dans l'évolution d'une
société. Il me semble que c'est utile, c'est requis, c'est
important de temps à autre de pouvoir s'appuyer sur des organismes
d'envergure comme la Fédération des commissions scolaires
catholiques du Québec. (17 heures)
Donc, c'est un organisme très représentatif, c'est un
organisme qui a, par le biais de ses structures, des opinions très
diversifiées dans tout le Québec. La Fédération des
commissions scolaires catholiques du Québec est implantée dans
toutes les régions du Québec et, en ce sens, elle peut avoir un
point de vue vraiment décentralisé, un point de vue
déconcentré. Il est important que nous ayons, sur des questions
aussi fondamentales que celles dont nous discutons, un point de vue qui
déborde le noeud du problème. J'ai reconnu et je
reconnaîtrai au cours de tout ce débat que toute la question des
élèves illégaux est un problème davantage
présent dans le bassin montréalais. C'est un problème
qu'on retrouve davantage dans la région métropolitaine; il est
également important, mais à un niveau moindre, dans la
région de l'Outaouais.
La question soulevée par le projet de loi, on aura l'occasion
d'en discuter un peu plus tard, lors de l'adoption du projet de loi, mais il y
a également une question de principe qui doit toucher chacun et chacune
des Québécois et des Québécoises et qui doit
également toucher les institutions québécoises. Il est de
tradition, lorsqu'un projet de loi vient modifier sensiblement une conduite
historique, une conduite traditionnelle... Je n'ai pas beaucoup
d'expérience, mais cela fait quand même dix ans et, a ma
connaissance, c'est la première fois que, dans une loi, on demande
à un Parlement de poser un geste législatif pour venir
atténuer le comportement de citoyens qui ont obvié, qui ont
défié un autre acte législatif, soit les dispositions de
la loi 101 concernant le droit d'admissibilité à l'école
française ou à l'école anglaise.
La Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec est également un organisme qui, de tout temps, s'est
exprimé concernant les grands volets de la réforme scolaire. Dans
la réforme scolaire, un des volets importants était toute la
question linguistique. Quand on a l'intention, comme législateur, de
passer à la création ou à la formation de commissions
scolaires sur une base linguistique plutôt que confessionnelle et qu'une
fédération comme celle des commissions scolaires catholiques du
Québec prend le temps de parcourir tout le Québec, de
dépenser beaucoup d'argent pour s'assurer que le point de vue qu'elle
émettra à savoir si, à ce moment-ci, le fait d'avoir des
commissions scolaires à caractère plus linguistique serait
davantage conforme à notre réalité
québécoise, à savoir si cela serait plus opportun, c'est
parce que cette question l'intéresse, la motive au plus haut point, et
elle pense qu'il est opportun et pertinent pour elle de s'exprimer
là-dessus.
Dans ce sens, je pense qu'il est très important de convoquer un
organisme de cette envergure, un organisme présent dans toutes les
régions du Québec afin qu'il puisse nous éclairer sur des
dispositions précises, soit du rapport Rondeau ou des articles que nous
pourrions reprendre un par un dans le
projet de loi 58 concernant les élèves illégaux, en
particulier lorsque le comité Rondeau y va de principes aussi importants
que celui-là. J'en cite seulement quelques-uns.
Un des inconvénients dans la solution privilégiée
par le ministre de l'Éducation, selon le président du
comité Rondeau, c'est qu'elle pourrait apparaître comme une prime
à la désobéissance. Est-ce que quelqu'un, comme
parlementaire, pourrait me faire accroire que lorsqu'on émet un tel
point de vue, à savoir que cela peut apparaître comme une prime
à la désobéissance... Est-ce qu'on ne conviendra pas
là qu'il s'agit d'un principe éducatif où sûrement
une fédération qui regroupe des commissions scolaires qui ont
comme mandat, comme je l'ai mentionné tantôt, d'offrir la
meilleure éducation passible à nos jeunes peut avoir un point de
vue à exprimer? Dans ce sens, ce serait peut-être éclairant
d'avoir son point de vue, sachant qu'elle est représentée dans
toutes les régions du Québec. Elle viendrait nous dire qu'elle
partage ou ne partage pas ce point de vue. On devrait se rendre compte qu'une
fois, c'est le comité Rondeau qui y va de certaines nuances sur la
proposition retenue par le ministre de l'Éducation et qu'une autre fois,
c'est la Commission des écoles catholiques de Montréal qui nous
dit qu'elle a de fortes réticences à ce que ce soit une amnistie
générale, sans nuance, "coast to coast".
Même chose quant à l'Alliance des professeurs de
Montréal qui s'est exprimée et qui nous a dit qu'elle pense que
c'est une solution qui va créer plus de problèmes qu'elle ne va
en régler, car il est impensable de ne pas mettre certaines conditions
à l'amnistie. Qu'est-ce qui nous dit, M. le Président, que la
fédération des commissions scolaires n'aurait pas exactement les
mêmes réserves à émettre? Qu'est-ce qui nous dit que
la fédération des commissions scolaires ne serait pas d'accord,
elle aussi, pour dire qu'il est dangereux qu'une telle solution provoque des
réactions négatives chez ceux qui ont obéi à la
loi? En ce sens, il me semble que cela élargirait drôlement la
possibilité, en ce qui nous concerne, d'essayer de faire valoir au
ministre de l'Éducation que, même s'il prétend avoir
trouvé la solution comme il l'a mentionné, nous croyons que c'est
une solution très dangereuse pour toutes sortes de raisons. Dangeureuse,
car je ne crois pas qu'à ce moment-ci il y ait lieu de relancer au
Québec une sorte de débat de tripes très important sur
tout l'irrespect de la majorité francophone.
C'est un peu ce qu'on sent, M. le Président, depuis plusieurs
mois, cette espèce de laxisme désordonné où de plus
en plus, on est presque d'accord pour réduire et affaiblir constamment
la valeur législative, la portée de la loi 101 qui, avec ses
faiblesses, bien sûr, avait eu au moins le mérite de faire taire
un tant soit peu ce qu'on a appelé durant plusieurs années ces
batailles et ces conflits que nous avons vécus, en particulier dans les
gros bassins de population où habitent des populations d'origine plus
cosmopolite, plus universelle et où la présence d'allophones et
de communautés autres est très significative et très
importante. Pour nous, il n'est pas question de ne pas être très
ouvert aux communautés linguistiques autres, mais on veut que la
majorité francophone puisse continuer, à s'assurer que le fait
français est bien vivant, bien dynamique, bien exprimé et bien
balisé pour éviter les difficultés qu'on a connues avec la
loi 22 et avec toutes sortes d'autres lois qui ont créé des
conflits sociaux sans précédent.
Si j'ai présenté l'amendement pour entendre la
Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec, c'est que je sais cette fédération très
près des questions linguistiques, je sais cette fédération
très touchée par la question qui est la nôtre, celle des
"illégaux", et je sais qu'elle a également sous sa
responsabilité des commissions scolaires qui n'ont peut-être pas
pris les mesures administratives requises pour s'assurer d'un plus grand
respect de la loi 101.
On aura beau me dire, comme cela a été mentionné,
que certaines négligences ont été laissées dans ce
dossier par les anciens dirigeants du Québec, cela ne change pas ta
nécessité, si l'on veut que ces questions se règlent,
d'avoir la collaboration la plus étroite de la fédération
des commissions scolaires qui a toujours eu cette capacité critique et
cette autorité morale d'ordonner. Et règle générale
les ordonnances, si vous me permettez l'expression, de la
Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec
ont toujours été suivies par ses membres, par les commissions
scolaires membres de la fédération des commissions scolaires.
Dans ce sens, j'aimerais que la fédération puisse nous
donner plus de précisions et plus de détails sur les gestes
concrets qu'elle a posés lorsque, semaine après semaine, des
irrégularités lui étaient signifiées par l'un ou
l'autre de ses commettants. Quand la CECM acceptait de recevoir dans ses rangs
des élèves illégaux, j'aimerais être capable de
poser des questions précises au président de la
fédération des commissions scolaires du Québec et lui
demander comment il se fait qu'il n'a pas eu une certaine sensibilité
à ce fait et qu'il ne lui a pas été possible de
questionner les dirigeants de la CECM sur le fait que la
fédération des commissions scolaires du Québec semblait
non préoccupée et insensible à ce que certains de ses
membres obvient, contournent ou dévient une loi du Québec
aussi majeure et importante que la loi 101.
Je pense qu'il serait également intéressant de demander
à la Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec si elle pense que l'une ou l'autre de ses commissions scolaires
n'aurait pas été en mesure, administrativement... Parce qu'il y a
d'autres personnes qui ont préconisé, dans ce dossier, des
solutions administratives. Quand l'Alliance des professeurs de Montréal
présentait une solution et que le président du comité
Rondeau disait: II s'agit là d'une solution qui offre un
règlement humanitaire... Ce n'est pas celui qui vous parie qui dit cela,
c'est le président du comité Rondeau. Il disait: La solution
préconisée par l'Alliance des professeurs de Montréal, M.
le Président, est une solution respectueuse de l'esprit de la loi 101.
Cela signifie qu'ils ont découvert dans cette loi un esprit linguistique
important pour la majorité francophone québécoise.
J'aimerais qu'une fédération, dont une de ses parties et membres
s'appelle la CECM et un corps encore plus décentralisé toujours
membre de la CECM, celui de l'Alliance des professeurs de Montréal, ait
ce point de vue là, à savoir qu'il y avait là un respect
de la loi 101. Quel est le point de vue de la Fédération des
commissions scolaires catholiques du Québec sur cette question?
Même chose pour toute la question soulevée par le comité
Rondeau, lorsqu'il prétend qu'un des avantages de la proposition de
l'Alliance des professeurs de Montréal, c'est une solution qui pourrait
safisfaire les milieux nationalistes québécois.
Je pense que la Fédération des commissions scolaires
catholiques du Québec, regroupant l'ensemble des commissions scolaires,
elle, pourrait être intéressée à donner son point de
vue sur cette dimension de la satisfaction qui est requise dans certains cas,
que les milieux nationalistes québécois, par leurs institutions,
puissent avoir une certaine satisfaction. Je ne l'ai pas ici, mais je pourrais
illustrer que je ne parle sûrement pas à travers mon chapeau
puisqu'on avait dans nos coupures de journaux la présidente ou le
directeur général de la commission scolaire de l'Outaouais,
excusez-moi, le conseil des commissaires de la commission scolaire
Outaouais-Hull... Je voudrais vous citer deux ou trois lignes, M. le
Président de la commission. Cela est très pertinent à la
nécessité que la fédération puisse venir donner son
point de vue sur cela. Est-elle d'accord que certaines de ses commissions
scolaires, de par leur structure parleuse qui s'appelle le conseil des
commissaires, s'expriment sur une question importante comme
celle-là?
À la réunion du 7 mai 1986, le conseil des commissaires de
la commission scolaire Outaouais-Hull, à l'unanimité, s'est
prononcé contre votre intention, M. le ministre, de passer
l'éponge sur le cas des "illégaux" de la commission scolaire
protestante de Western-Québec et du réseau anglais de la CECM. Le
conseil des commissaires de la commission scolaire Outaouais-Hull a dit: Nous
sommes contre le fait que vous effaciez l'ardoise d'un seul geste. Leur geste,
en parlant des "illégaux", M. le ministre, et ils s'adressaient à
vous, en est un de mépris envers la majorité culturelle
québécoise. Les amnistier, c'est sanctionner leur mépris,
c'est s'en faire le complice. Non seulement on les absout, mais on les
encourage à récidiver. Le précédent comporte un
danger dont on ne peut que soupçonner l'ampleur. Tout groupe qui
désire contrevenir à une loi pourrait désormais le faire
dans l'impunité, moyennant qu'il soit suffisamment puissant ou influent
économiquement. Ce précédent, M. le ministre, c'est un
couteau à deux tranchants. En refusant de s'intégrer à la
majorité québécoise, les dissidents s'isolent et par le
fait même risquent d'alimenter les préjugés qui ont cours
à leur égard. Nous savons tous l'avantage de connaître les
gens, de s'en rapprocher, d'apprécier leur culture; c'est une richesse
dont il faut se prévaloir.
Or, M. le ministre, c'est un cadeau de Grec que vous faites aux
Québécois. Vous mettez en péril tous les efforts de
rapprochement interculturel fondés sur une équité
linguistique. Votre rôle de ministre de l'Education exige de faire tout
en votre pouvoir pour promouvoir la fierté de notre culture, de la
solidifier, de l'enrichir. J'arrête là, je voulais juste illustrer
par un exemple. J'ai cité un conseil des commissaires. Il y en a
sûrement d'autres au Québec qui, sur une question aussi
importante, seraient très intéressés à faire valoir
leur point de vue. Comme nous n'avons pas l'intention de convoquer les quelque
180 commissions scolaires du Québec, j'avais pensé qu'il serait
peut-être plus logique et que cela permettrait de gagner du temps de
convoquer la fédération des commissions scolaires qui est
l'organisme représentatif de l'ensemble des commissions scolaires
catholiques du Québec. C'est l'organisme qui les regroupe sous sa
férule et qui pourrait, comme elle l'a si bien fait dans d'autres
dossiers, les consulter. (17 h 15)
Quand il a été question de se prononcer sur la loi 40, sur
la loi 3, sur l'ensemble des modifications apportées à nos lois
éducatives, que ce soit la Loi sur l'instruction publique ou d'autres,
la fédération des commissions scolaires a toujours trouvé
la capacité, les moyens et les outils administratifs et financiers pour
s'assurer de pouvoir conduire les consultations les plus larges possibles afin
d'avoir un mémoire qui éclaire davantage les dirigeants de
l'État québécois et qu'elle puisse effectivement leur
offrir son éclairage
sur des questions importantes comme celles que nous débattons.
Dans ce sens, si on pouvait avoir pendant une couple d'heures la
présence des gens de la Fédération des commissions
scolaires catholiques du Québec, il serait possible pour chacun des
parlementaires non pas d'avoir la prétention d'avoir le point de vue de
leurs dirigeants actuels, mais d'avoir directement leur point vue et savoir ce
qu'ils pensent d'une amnistie générale, sans condition. Je pense
que ce serait intéressant d'avoir leur point de vue, compte tenu de ce
que j'ai essayé de faire valoir depuis le début. Ce sont des
organismes qui ont une grande notoriété, une grande
crédibilité, qui ont toujours été
représentatifs des questions éducatives. Dans ce sens, je pense
qu'il y aurait lieu de les entendre sur cette question.
J'aimerais faire valoir aussi, M. le Président, que la
Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec, en s'exprimant sur une question aussi importante que celle que
nous avons à débattre cet après-midi, donnerait quand
même une indication à ses organismes membres. Ce serait
probablement motivant pour les commissions scolaires du Québec de voir
leur fédération s'exprimer sur une question aussi importante. Je
ne connais à peu près personne, M. le Président, qui
oeuvre dans le monde de l'éducation au Québec à titre de
commissaire, de directeur d'école, de parent, de professeur, de
conseiller spécial, de PNE - personnel non enseignant - qui n'ait pas
son opinion sur la question que nous débattons actuellement. Comme il
n'y a aucune société qui ait des mécanismes aussi
démocratiques que celui de pouvoir inviter, chaque fois qu'on
débat de questions importantes, l'ensemble des citoyens et des
citoyennes du Québec, il n'y a rien de mieux, M. le Président,
que de le faire par l'entremise des structures existantes. Or, il y a une
structure qui existe, elle est là, elle a comme mandat de regrouper
l'ensemble des commissions scolaires catholiques du Québec. Je pense que
les commissions scolaires seraient sûrement d'accord pour que la
Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec
puisse s'exprimer sur cette question au nom de ses membres que sont les
commissions scolaires catholiques du Québec, plutôt que de penser
qu'il est possible d'aménager nos institutions parlementaires pour que,
chaque fois qu'une question importante est débattue, nous puissions
multiplier les individus dans chacun des organismes du Québec pour des
consultations particulières.
Si on a volontairement titré notre amendement, à savoir
qu'il était important de tenir des consultations particulières,
et si j'ai voulu bonifier l'amendement proposé par mon collègue,
le député de Laviolette, c'est parce qu'on estime que, sur cette
question vitale, capitale pour l'avenir de nos institutions
démocratiques, il faut que le plus possible d'intervenants
touchés, intéressés par ces questions puissent venir nous
donner directement leur point de vue, qu'on puisse les questionner sur ce
qu'ils pensent et non avoir la prétention que, d'avance, comme
législateurs, puisqu'on a trouvé la solution, il est inutile de
les consulter et que, rapidement, on efface l'ardoise et qu'on passe à
autre chose.
M. le Président, je conclus. Je pense que c'est une question trop
importante, trop majeure pour qu'on ne se donne pas le temps de faire venir les
représentants de ces institutions intéressées par une
question aussi majeure et aussi importante et qu'on puisse avoir directement,
comme parlementaires, leur point de vue.
Le Président (M. Bissonnet): M. le ministre de
l'Éducation.
M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, j'ai écouté avec
intérêt l'intervention du député d'Abitibi-Ouest.
L'intérêt soudain qu'il manifeste pour un examen en profondeur du
problème des élèves illégalement présents
dans les écoles anglaises aurait plus de chances de nous impressionner
s'il était de date moins récente et s'il s'était
manifesté de manière plus explicite au cours des neuf
années pendant lesquelles le député d'Abitibi-Ouest a
siégé sur les banquettes ministérielles et a titre de
membre du gouvernement précédent, et, qui plus est, à
titre de ministre de l'Éducation. Je ne me souviens pas que le
député, lorsqu'il était ministre de l'Éducation,
ait jamais manifesté d'intérêt à faire
comparaître la fédération des commissions scolaires ou
d'autres organismes devant la commission parlementaire de l'éducation du
temps pour examiner en profondeur le problème des élèves
illégalement présents dans des écoles anglaises. Je ne me
souviens pas qu'on ait jamais eu de manifestation d'intention dans ce
sens-là de la part du groupe qui forme présentement l'Opposition.
Au contraire, j'ai entendu, ces derniers jours, plusieurs intervenants de
l'Opposition nous dire, froidement - je m'en excuse auprès du
député de Laviolette qui n'aime pas ce mot - et de manière
implacable, qu'il n'y avait pas de problème urgent, qu'il n'y avait pas
de problème particulier et que, finalement, ces jeunes s'en tiraient
apparemment assez bien. On pouvait laisser continuer les choses jusqu'à
temps qu'on ait procédé à toutes les
délibérations interminables qu'on vaudrait nous proposer à
ce moment-ci.
Je ne le sais pas, mais un groupe sérieux, s'il voulait apporter
un amendement, aurait dit: On propose une liste de trois
organismes, il est très important de les entendre. Mais qu'on ait
besoin d'un amendement pour penser à la Fédération des
commissions scolaires catholiques du Québec, quel mépris pour
cette fédération! Il me semble qu'elle aurait dû être
assez importante pour figurer dans la première proposition qui a
été faite. Je vais faire rapport à ladite
fédération, je vais lui dire le peu d'estime dans laquelle
l'Opposition la tient. Il a fallu que les députés de l'Opposition
pensent à un amendement! D'après ce qu'on a vu, cela a
demandé de longues délibérations; ils ne pouvaient pas
penser è cela spontanément.
Si le député d'Abitibi-Ouest pouvait se faire reprocher de
ne point connaître cette fédération, ce serait encore moins
grave; on aurait dit: II est en train d'apprendre, mais il le sait très
bien. Cela a pris deux mouvements. Là, il y en a plusieurs qui ont
été oubliés, cela va prendre trois, quatre, cinq
mouvements. C'est beaucoup de gymnastique pour un groupe qui était
censé diriger les affaires scolaires durant les dernières
années. Dieu soit loué de nous avoir délivré de
tant d'hésitations et de lenteur! Vous aurez tout le temps voulu pour
penser à des amendements nombreux, si cela vous prend autant de
délibérations et de réflexions pour en ajouter un à
la fois.
En ce qui touche le gouvernement, je dois vous dire clairement que nous
sommes en face d'une situation qui est pratique, qui est imminemment
concrète, qui fait appel à l'action et non pas aux
délibérations et aux études. Si le député
d'Abitibi-Ouest, de même que ses collègues, est
intéressé, éventuellement, à faire une étude
spécialisée, de niveau doctoral, de tout le problème des
élèves illégalement présents dans les écoles
anglaises, nous pourrons lui suggérer des sources nombreuses
d'information, il y en a beaucoup qu'il a oubliées.
Mais là, on n'est pas ici pour faire une thèse ou une
recherche sur les élèves illégaux, on est ici pour
apporter une solution à un problème que le gouvernement
précédent a laissé pourrir pendant neuf ans. Je serais
très heureux que l'un ou l'autre des membres de l'Opposition
décide d'entreprendre une étude en profondeur, mais il va nous
faire grâce d'utiliser cet endroit-ci pour la faire. Je pense que vous
aurez tout le loisir voulu, il y a la liberté de recherche dans notre
pays. J'encourage fortement le ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science... Si l'un des députés qui font
partie de l'Opposition veut nous présenter une demande, même de
collaboration à notre ministère, à des fins de recherche
de ce côté, nous le ferons volontiers. Mais on n'est pas
élu député pour faire des recherches sur le dos des
contribuables, surtout sur le dos des enfants qui sont pris dans cette
situation. On est élu député pour trouver des solutions
concrètes.
Alors, nous refusons avec grande fermeté de nous laisser
entraîner dans le sillon que voudrait nous proposer l'Opposition parce
que c'est le sillon de l'impuissance, qui a été tellement
caractéristique de l'action et de la performance du gouvernement dans le
dossier des élèves illégaux. C'est justement la voie que
nous avons décidé de quitter parce que nous en avions honte pour
le Québec. Nous étions gênés, comme
Québécois, de tant d'impuissance, pas de la loi 101, pas des
bonnes intentions de l'ancien gouvernement en matière linguistique, car,
de manière générale, nous étions plutôt
d'accord avec lui, mais nous étions gênés de son manque de
flexibilité devant une situation qu'il a créée de toutes
pièces par sa rigidité et, ensuite, de son impuissance.
Après avoir été prêt à monter sur toutes les
barricades pour imposer un régime dont nous l'avions prévenu
qu'il devait être appliqué avec souplesse, voici tout à
coup qu'il est l'impuissance incarnée et qu'il ne peut plus rien faire.
Après avoir possédé toutes les certitudes, au moment de
l'adoption et de la mise en oeuvre initiale de la loi 101, le voilà qui
est installé dans l'incertitude et l'impuissance la plus totale. Neuf
ans d'impuissance! Ce n'est pas une étude de plus qui va régler
votre problème. Je pense que cela va prendre autre chose que ça.
Cela va prendre un exemple d'action concrète. Cela va prendre un exemple
d'action résolue, déterminée, précise,
immédiate qui nous permettra de passer à autre chose. Je pense
bien que c'est le fond du problème. On y est au fond du
problème.
Vous parliez d'autres organismes. Ils ont tous eu l'occasion d'exprimer
leur opinion. L'Alliance des professeurs de Montréal a été
rencontrée par le comité Rondeau. Ils ont eu l'occasion
d'échanger des vues avec le comité Rondeau. Vous voulez faire
venir M. Rondeau ici. C'est parfaitement farfelu. M. Rondeau a fait un travail,
selon la conclusion qui avait été adoptée par le ministre
de l'Éducation, soit qu'il fallait régler ce
problème-là pour l'automne 1986, cela était
décidé. J'ai demandé à mes proches collaborateurs,
qui étaient au courant du problème, de s'adjoindre quelques
autres collaborateurs également très bien au courant du
problème et de nous dire ce qu'il fallait faire pour qu'on agisse en vue
de l'année 1986-1987. C'est dans ce contexte-là qu'ils ont
travaillé. Ils m'ont fait un rapport.
Je n'étais pas obligé de publier ce rapport-là.
J'aurais très bien pu le classer comme document interne qui a
été préparé pour le bon usage du ministre et
susceptible d'être publié plus tard, quand on aurait
décidé qu'il n'y avait plus aucune espèce de danger pour
l'intérêt général. Mais, au contraire, dans un
esprit d'ouverture, j'ai publié le rapport dans les quelques jours
qui
ont suivi la remise comme on avait fait. Exemple de transparence. Il y a
bien d'autres documents que j'ai retrouvés dans les archives du
ministère de l'Éducation qui n'avaient jamais été
rendus publics, et qui étaient d'intérêt public. Au lieu de
m'asseoir... J'aurais bien pu dire: C'est un rapport interne, c'est un rapport
technique, pas de problème, on va le donner. C'est ma réflexion
qui est dans ce rapport-là, autant que celle du comité Rondeau,
et je l'endosse totalement. Surtout dans ses conclusions. Il y a des lignes,
ici et là, si j'avais rédigé le rapport moi-même,
que j'aurais rédigées avec mon style propre. C'est
évident. Mais, de manière générale, j'ai
endossé ce rapport-là et j'en ai transcrit la conclusion
principale dans le projet de loi que nous avons.
Le rapport nous dit clairement qu'il n'y a pas d'autres solutions. On
les a toutes examinées. Ils ont même poussé l'ouverture
jusqu'à dresser un bilan du pour et du contre de chaque solution.
L'Opposition s'est laissée prendre à un piège pourtant
élémentaire. Ce n'est pas parce qu'il y a sept
inconvénients et cinq avantages d'un côté, neuf
inconvénients ou huit avantages de l'autre que c'est cela qui va
arrêter notre décision. Il peut arriver que les sept
inconvénients soient complètement oblitérés par un
seul avantage qu'on aurait pu trouver de l'autre côté. On aurait
pu m'énumérer dix inconvévients. Il y avait un avantage.
Cela règle le problème de manière humanitaire, de
manière réaliste, efficace, totale et sans danger de
reproduction, de répétition. Je dirais que cet avantage-là
vaut, à lui seul, vingt-cinq inconvénients. Ce n'est pas une
balance numérique qu'on doit chercher ici. Je pense que c'est un
jugement de fond. J'interprète l'exercice qui a été fait
dans le rapport Rondeau, cet exercice consistant à
énumérer des inconvénients et des avantages à
côté de chaque solution, comme une espèce de
démarche qui a été faite publiquement. Ce sont des gens
qui ont fait cette démarche de manière transparente. Ils ont dit:
On vous donne cela pour que vous puissiez nous accompagner le plus possible,
mais il ne faut pas oublier, au bout de cette démarche-là, qu'ils
arrivent à la conclusion qui est celle qui est dans le projet de loi. On
ne veut pas refaire cet exercice-là cinquante fois.
Je pense que la commission aura tout le temps voulu pour exprimer ses
opinions, soulever tous les aspects qu'elle voudra soulever à propos de
chaque article du projet de loi. Au stade où nous en sommes, nous
concluons qu'après neuf ans de palabres, neuf ans d'impuissance
gouvernementale et neuf ans d'insistance de la part du Parti libéral du
Québec, il faut qu'on apporte une solution humaine et efficace a ce
problème-là. Nous avons en main tous les éléments
d'information et de réflexion dont nous pourrions avoir besoin. Il
s'agit qu'au lieu de laisser fonctionner machinalement notre machine à
parler respective nous fassions fonctionner un peu plus la partie
supérieure, qui est celle de la réflexion, celle de la
délibération, laquelle, lorsqu'elle est bien conduite, nous
amène aux conclusions. (17 h 30)
Je pense que la première partie a été faite
amplement et je ne crois pas que nous aurions aucun avantage à pousser
plus loin l'exploration dans des avenues latérales. Il faut aller de
l'avant et non pas de côté ou en arrière. C'est la
meilleure façon que nous pourrons emprunter pour résoudre le
problème et passer à autre chose dans le meilleur esprit
possible. Par conséquent, je dois me déclarer foncièrement
opposé à l'amendement qui nous a été
présenté par le député d'Abitibi-Ouest parce que je
trouve qu'il s'agit, de toute évidence, d'une mesure dilatoire, d'une
tactique dilatoire de la part d'une formation politique qui essaie d'abrier son
impuissance passée et son indécision présente dans les
questions que nous discutons sous le couvert d'un débat interminable. Je
pense que l'article de M. Leclerc du Devoir, que j'ai cité l'autre jour,
sur l'espèce d'état d'impuissance auquel en est réduit le
parti qui forme l'Opposition n'a pas du tout été résolu
par les échos que nous avons eus. Les délibérations qui
ont eu lieu en fin de semaine vont peut-être aider à entrevoir un
peu plus les échéances. Pour le moment, ils sont dans un
même état de confusion et d'impuissance et nous avons opté
pour la voie de l'action.
Le Président (M. Bissonnet): Mme la députée
de Chicoutimi.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: M. le Président, comme vous le comprenez
sans doute, mon intervention favorise l'amendement à la motion,
amendement présenté par mon collègue, le
député d'Abitibi-Ouest, afin qu'on entende ici, entre autres
organismes, la Fédération des commissions scolaires catholiques.
La loi qui nous est présentée vient faire une brèche
extrêmement importante dans la loi 101. Elle vient accorder une amnistie
à des gens qui, de façon délibérée,
consciente et informée, ont décidé de défier une
loi. C'est une loi qui a pour effet non seulement d'amnistier des personnes,
mais également d'accorder en prime des droits qui seront refusés
à tous les autres nouveaux Québécois allophones, des
droits qui seront refusés à ceux qui ont respecté la loi.
C'est une loi qui vient mépriser non seulement ces personnes, mais qui
se fait également au mépris d'une loi adoptée ici, en
Chambre, et au mépris de la majorité. Cette loi est
méprisante à notre
endroit parce qu'elle confirme le fait que, si vous résistez
assez longtemps, vous finirez par gagner selon qui vous appuie. Que l'on
vienne, comme cela, modifier une loi, sans entendre un certain nombre de
groupes qui, généralement, ici, dans cette Chambre, en commission
parlementaire, se voient reconnaître à la fois le droit et une
certaine crédibilité pour venir discuter de différents
projets de loi, de différentes motions, de différentes
modifications qu'on veut apporter, on estime qu'il est important de les
entendre.
Alors qu'on est en train, aujourd'hui, de prendre une décision
importante là-dessus, le ministre vient nous dire qu'on n'est pas ici
pour faire une étude en profondeur des "illégaux" et il invite
les parlementaires ici réunis à faire une thèse de
doctorat. Je ne partage pas l'avis du ministre de l'Éducation pour une
raison fort simple. Comme le dit si bien mon collègue de l'Outaouais,
lorsque notre ministre de l'Éducation a examiné une question,
s'il voit la solution, il ne dit pas: J'ai trouvé une solution. Il dit:
J'ai trouvé la solution; au-delà de cela, il n'y a rien qui
puisse être meilleur que ce que j'ai imaginé comme devant
être la solution.
Si je n'avais pas autant de respect pour M. Rondeau, président du
comité, je dirais que probablement, comme nous l'a dit le ministre, en
dépit des consultations qu'a menées le comité
présidé par M. Rondeau, on aurait pu écrire les
mêmes recommandations. On aurait même pu penser que ces
recommandations ont été dictées par le ministre de
l'Éducation. Je n'irai pas jusqu'à dire que les consultations et
la composition du comité étaient probablement choisies à
la condition qu'elles endossent bien les orientations et les voeux du ministre
et qu'elles ne viennent que confirmer ses orientations.
Quand le ministre vient nous dire: Écoutez! Si on a besoin d'une
étude en profondeur, qu'on la fasse ailleurs, qu'on la fasse sous la
direction d'un directeur de doctorat, dans le cadre d'études de
doctorat, je réponds que, si lui, avec toutes ses connaissances, pense
qu'il a la solution, l'unique solution, la seule capable de régler de
façon respectueuse la situation des "illégaux", ce n'est pas mon
avis. Il me semble important, en cette circonstance, qu'on puisse entendre les
organismes, qu'on puisse entendre la fédération des commissions
scolaires. C'est un organisme respecté et je vois ici un
ex-président de commission scolaire. Il y en avait d'autres aussi, telle
la députée de Jacques-Cartier. Il y a d'autres commissaires qui,
je le sais, ont un respect très grand pour la fédération
des commissions scolaires. Il me semble, en l'occurrence, que de se faire dire
par le ministre de l'Éducation qu'on n'a pas ici, en commission,
à entendre des organismes sous prétexte que, lui, il a la
réponse, je voudrais lui dire que moi, j'en aurais le goût et
j'imagine qu'on pourrait avoir un éclairage important et utile si on
pouvait entendre aussi cet organisme.
On n'a pas été élus effectivement pour faire de la
recherche, pour reprendre ce que disait le ministre de l'Éducation.
Cependant, comme élus, on a la responsabilité de s'assurer que
nos décisions, prises ici, le seront dans l'intérêt du plus
grand nombre, qu'elles protégeront ce qu'on a appelé nos acquis,
particulièrement en matière linguistique. Pour ce faire, moi,
j'ai besoin d'entendre des organismes et un organisme comme la
fédération des commissions scolaires, il m'apparaît non
seulement utile, pertinent, mais je dirais indispensable qu'il soit entendu
ici, pour qu'il puisse nous dire comment il reçoit le projet de loi.
Comme fédération qui a une vision d'ensemble sur la province de
Québec et qui réunit les différentes commissions scolaires
catholiques, qu'elle puisse nous dire si le projet de loi qui est
présenté ici aujourd'hui n'aura pas tantôt comme effet dans
différentes commissions scolaires d'encourager une certaine
désobéissance à d'autres lois ou à d'autres
réglementations?
Quand on permet, quand on sanctionne, quand on bénit la
désobéissance, quand tout à coup la
désobéissance devient payante, il me semble qu'il serait
intéressant d'entendre la fédération des commissions
scolaires là-dessus, sur les effets que cela aura non seulement sur les
commissions scolaires, mais sur les différents enseignants; sur les
effets que cela aura aussi ou que cela pourrait avoir tantôt sur cette
mentalité qu'on pourrait créer, à savoir que c'est payant
de désobéir; sur les effets que cela a quand des dirigeants de
commission scolaire permettent, année après année, la
désobéissance; sur les effets que cela a sur une certaine
mentalité par rapport à la qualité de
l'éducation.
Je vous dis qu'entre autres effets négatifs la
désobéissance s'est faite dans des écoles et, pendant neuf
ans, on a appris aux jeunes que la désobéissance, cela pouvait
être payant. C'est cela que je trouve pénible. On nous a dit qu'il
y en a 1500, le ministre nous a dit la semaine dernière, à cette
commission parlementaire, qu'il y en avait peut-être 4 000 ou 5 000 les
premières années qui s'étaient inscrits, mais qu'on ne
voit plus finalement dans les registres parce qu'ils sont passés
à travers le système. Cela veut dire qu'au Québec
actuellement, si j'ai bien compris le ministre, ce dont il s'agit, ce n'est pas
de quelque 1500 élèves ou un peu moins, comme le disait
tantôt le ministre, mais cela pourrait être entre 5 000 et 6 000,
de l'aveu même du ministre en commission parlementaire la semaine
dernière. Sur une question impliquant un si grand nombre
d'élèves dans nos écoles et
ayant impliqué un si grand nombre d'administrateurs scolaires, de
professeurs, d'enseignants, de commissions scolaires, il est important
d'entendre, entre autres organismes, la fédération des
commissions scolaires.
La fédération des commissions scolaires, je pense que tous
ici lui reconnaîtront cela, a pour tâche, entre autres
responsabilités qu'on lui a confiées au fil du temps, d'avoir
cette vision d'ensemble sur, je dirais, le devenir de nos commissions
scolaires: le rôle, les fonctions de ce gouvernement local. D'ailleurs,
on sait qu'au cours des années et, particulièrement, à
l'occasion de l'adoption de la loi 3, la fédération des
commissions scolaires s'est portée à la défense des
commissions scolaires et, je pense, avec raison, en rappelant au gouvernement
qu'il s'agit là d'un gouvernement local qui a des pouvoirs et qui a
aussi des responsabilités. J'aimerais entendre la
fédération des commissions scolaires nous dire comment elle juge
le fait que ces commissions scolaires, gouvernements locaux, ne se sont pas
davantage préoccupées de prendre leurs responsabilités
lorsqu'il s'est agi de l'application de la loi 101.
M. le Président, en conclusion, il m'apparaît important
d'ajouter que je trouve un peu disgracieux le propos du ministre de
l'Éducation lorsqu'il nous dit: On n'est pas ici pour faire des
études et que le fait d'entendre la fédération des
commissions scolaires, ce n'est pas plus important que d'entendre d'autres
organismes. Il se refuse à entrer dans ce qu'il appelle le sillon de
l'impuissance du précédent gouvernement et de l'Opposition
actuelle. S'il appelle le sillon de l'impuissance le désir qu'on a,
avant de procéder à l'adoption de cette loi, d'entendre les
groupes principalement concernés par ce projet de loi, j'appelle cela du
respect. J'appelle cela du respect et une certaine humilité qui fait
qu'on ne pense pas que, parce qu'on on a inventé ou proposé une
solution, il s'agit de "la" solution, indépendamment de ce que tous les
autres groupes pourraient penser. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que la motion
d'amendement est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Bissonnet): Aucun autre intervenant ne
m'a demandé la parole. Je tiens à aviser ceux qui veulent parler
de me faire signe.
M. Boulerice: Je vous fais signe, M. le Président.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Saint-Jacques.
M. Boulerice: Voulez-vous me rappeler, M. le Président, le
nombre de minutes auquel j'ai droit?
Le Président (M. Bissonnet): Dix minutes.
M. André Boulerice
M. Boulerice: Dix minutes, c'est bien court, mais je vais les
utiliser à bon escient. Je vais me permettre, au départ, M. le
Président, de corriger une information que voulait donner un membre de
la commission au sujet d'une lettre de l'alliance des professeurs demandant
à rencontrer un député de ma formation politique. Nous
n'avons reçu aucune lettre de cette nature de la part de l'alliance des
professeurs. Vous comprendrez que j'attache beaucoup d'importance à la
correspondance que pourrait m'adresser l'alliance des professeurs, puisque son
siège social est situé dans mon comté,
II va de soi que je vais appuyer l'amendement à la motion
principale proposé par mon collègue, le député
d'Abitibi-Ouest, à savoir de recevoir la Fédération des
commissions scolaires catholiques du Québec. Il a été dit,
et je pense qu'il est bon de le rappeler, que c'est effectivement un
regroupement qui, dans le domaine de l'éducation au Québec, a
toujours participé aux grands débats et qui ne s'est même
pas gêné pour orienter les grands débats qui se sont
toujours faits dans le domaine de l'éducation au Québec.
Dans le cas précis qui nous intéresse, il s'agirait de lui
demander son opinion quant à un projet de loi qui est
présenté par le ministre de l'Éducation et qui a pour
effet d'amnistier, peu importe le vocabulaire qu'on emploie, les
élèves en situation illégale à la Commission des
écoles catholiques de Montréal, une commission scolaire
d'ailleurs qui n'appartient plus, pour des raisons qu'on ne précisera
pas mais qui sont bien connues, à la Fédération des
commissions scolaires catholiques du Québec. Il m'apparaîtrait
important qu'on l'entende pour l'excellente raison qu'elle représente
l'ensemble des commissions scolaires régionales du Québec, les
commissions scolaires primaires du Québec tout comme les commissions
scolaires intégrées du Québec.
On pourrait peut-être nous expliquer comment il se fait qu'a
prévalu une situation, dans une commission scolaire qui s'appelle la
CECM et dans une autre qui s'appelle Jérôme-Le Royer, où on
entendait un président et un directeur général avouer
naïvement, candidement ou d'une autre façon que le langage
parlementaire m'oblige à ne pas présenter, qu'ils
n'étaient pas au courant de la situation, qu'ils ne savaient pas ce qui
se passait dans leur commission scolaire. La
Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec pourrait facilement parler d'autres commissions scolaires, et je
vais me permettre de vous en citer quelques-unes qui, en termes de bassins de
population, n'ont peut-être pas autant, mais ont un nombre tout aussi
respectable... Il y a la Commission scolaire régionale de Chambly qui
administre des classes d'accueil, qui est située sur la rive sud de
Montréal où il y a une immigration, d'ailleurs une immigration
tout à fait évidente, puisqu'il existe sur la rive sud des
entreprises, des commerces et des industries qui forcent à une certaine
immigration en provenance de pays étrangers.
Il y a une commission scolaire, ce qui m'étonne, contrairement
aux deux commissions scolaires qu'on a nommées tantôt, où
le directeur général actuel et le directeur général
précédent étaient très au fait et très au
courant de ce qui se passait dans les écoles de langue anglaise quant
à l'administration de la loi 101. Pour ce qui est du président -
on a l'honneur de le voir siéger dans ce Parlement, aujourd'hui,
à titre de député de Saint-Louis - il n'a jamais dit ou
n'a jamais admis qu'il n'était pas au courant de ce qui se passait dans
sa commission scolaire quant à l'application de la loi 101, pour la
bonne et excellente raison que, dans ces commissions scolaires - je vais me
borner à celle-là seulement, je pourrais vous parler de Chomedey,
de Laval, d'Honoré-Mercier, une commission scolaire
intégrée, je pourrais vous parler de commissions scolaires
élémentaires primaires qui sont Jacques-Cartier, Repentigny, etc.
-les administrations scolaires, les administrations générales,
les administrations scolaires, c'est-à-dire celles des écoles,
les enseignants ont bien respecté les prescriptions qui étaient
contenues à la loi 101, qui étaient à la Charte de la
langue française, notamment les chapitres relatifs à la langue
d'enseignement et à l'admission a l'école anglaise.
Donc, ce serait important que la Fédération des
commissions scolaires catholiques du Québec puisse nous apporter son
point de vue quant è l'administration de cette loi. Comment se fait-il
qu'une telle situation se soit créée à la Commission des
écoles catholiques de Montréal et à la commission scolaire
Jérôme-Le Royer? Est-ce que cela relève uniquement du
silence ou bien de la complicité? Quant à moi, ma position est
très claire; je pense qu'il s'agit là d'une complicité
qui, fort heureusement, n'a pas existé dans les autres commissions
scolaires que je vous ai énumérées, parce qu'il y avait
là à la fois des administrateurs, des officiers et des
élus - j'insiste sur le mot "élus" parce que tous se sont
glorifiés d'être des gouvernements locaux et un gouvernement local
est composé de gens responsables... Ces gens ont été
respectueux des lois . promulguées par l'Assemblée nationale du
Québec.
Le ministre de l'Éducation nous dit qu'il porte un profond
intérêt à la question, j'en suis heureux. Mais
l'intérêt qu'il porte lui fait donner des dividendes à
l'illégalité, ce qui, à mon point de vue, m'apparaît
totalement inacceptable. Il dit qu'il est à la recherche d'une situation
humanitaire. À ce moment-là, veut-il présumer que de
fréquenter l'école française, comme cela a
été fait pour la quasi-totalité des enfants qui ont
réclamé l'école anglaise sur la rive sud de
Montréal, qui, par décision du Bureau d'admissibilité
à l'enseignement en anglais -à qui je rends hommage d'ailleurs
pour l'extrême qualité des services qu'ils ont rendus... Est-ce
que le ministre, à ce moment-là, est capable de dire que nous
avons traité ces enfants de façon inhumaine en les envoyant
à l'école française? C'est, je pense, la question qu'il
faut se poser.
Cela m'étonne chez un homme à qui on avait reconnu
d'immenses qualités de dialogue et d'échange. Cela
m'étonne que cet homme en vienne maintenant à prétendre
que la solution qu'il avait trouvée n'est pas qu'une solution, mais
qu'elle est "la" solution, iI nous avait pourtant habitué à
d'autres comportements lorsqu'il était éditorialiste dans un
journal connu, où une solution qu'il avançait était
toujours extrêmement nuancée en fin de paragraphe. Sauf que les
temps changent et il faut croire que ses comportements sont
modifiés.
Donc, la possibilité d'entendre la Fédération des
commissions scolaires catholiques du Québec serait, à mon point
de vue, un apport extrêmement précieux pour ce qui est de
l'adoption de ce projet de loi. D'ailleurs, la Fédération des
commissions scolaires catholiques du Québec pourrait réfuter
l'allégation à savoir que le gouvernement précédent
n'a rien fait. Le gouvernement précédent a fait, a agi. Il y a eu
une commission formée par Me François Aquin, pour qui tout le
monde a énormément de respect, mais, à l'issue des travaux
et des recommandations présentées par Me Aquin, il s'est
continué une obstination de la part des parents, un mépris des
lois du Québec de la part des parents et s'est poursuivie la
complicité d'administrateurs et d'officiers de cette institution, qui
est la Commission des écoles catholiques de Montréal, la
commission scolaire Jérôme-Le Royer, qui, encore là, je le
répète, sont des gouvernements locaux. Cela est d'autant plus
étonnant, M. le Président, qu'il existe des lois au Québec
qui disent que, dans d'autres domaines, lorsque des parents ou des individus
incitent des mineurs à poser des gestes illégaux ou à
vivre des situations illégales, ils sont, de par la loi, obligés
de soumettre ces cas au Comité de la protection de la jeunesse.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Saint-Jacques, il vous reste 30 secondes.
M. Boulerice: Alors, dans les 30 secondes qui me restent, M. le
Président, je vais tout simplement porter appel. J'aurais aimé
pouvoir aller plus à fond en 28 secondes - mon chronomètre le dit
- j'aurais aimé aller plus è fond, mais je pense que je vais
revenir a cette commission. J'espère que je n'assisterai pas, de la part
du ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, au
même mépris arrogant qui a été constaté
envers le ministre des Communications, M. French, à qui l'on a
proposé d'entendre les intervenants au sujet de Radio-Québec et
qui a balayé des groupes et des individus qui, dans notre
société, sont loin d'être des deux de pique, comme j'ai
employé l'expression. Ce sont des gens responsables ayant une expertise
et capables d'éclairer une discussion et, surtout, nous amener à
formuler une solution juste pour tout le monde. Juste pour le monde, cela
sous-entend que cela se fait dans le respect des lois qui existent au
Québec. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Bissonnet): Compte tenu qu'il est 17 h
53, et que vous avez dix minutes pour parler, Mme la députée de
Marie-Victorin, je vais suspendre cette séance à 20 heures et je
reconnaîtrai, dès le départ de cette assemblée,
à 20 heures, la députée de Marie-Victorin. Je suspends les
travaux de cette commision jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 17 h 53)
(Reprise à 20 h 16)
Le Président (M. Bissonnet): Mes chers
collègues...
Une voix: Des menaces!
Le Président (M. Bissonnet): ...j'espère que vous
avez tous bien soupé, pris un bon repas. Nous reprenons l'étude
du projet de loi 58. Je rappelle aux membres de cette commission le mandat qui
nous a été donné par l'Assemblée nationale de
procéder à l'étude détaillée du projet de
loi 58, Loi sur l'admissibilité à l'enseignement en anglais de
certains enfants. Je cède la parole à la députée de
Marie-Victorin pour une période de dix minutes.
M. Jolivet: Avant, M. le Président, est-ce que vous me
permettriez de poser une question? Il n'y a pas eu de demande afin que la
députée de Groulx, qui a été remplacée
aujourd'hui, à la séance de cet après-midi, soit là
ce soir. Je suis d'accord pour qu'elle puisse participer à cette
commission pleinement et entièrement.
Le Président (M. Bissonnet): II n'y a pas eu de demande
à cette fin.
M. Ryan: M. le Président, vous aimez les participations
nombreuses.
Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
M. Jolivet: Non, mais on veut que tout le monde puisse
parler.
M. Cusano: Cela va.
Une voix: Qu'est-ce qui va?
Le Président (M. Bissonnet): Je ne comprends pas, la. M.
Cusano, vous avez remplacé Mme la députée de Groulx
à 15 heures.
M. Cusano: Je vais remplacer Mme la députée de
Jacques-Cartier si cela ne vous dérange pas.
Le Président (M. Bissonnet): Bon. Est-ce qu'il y a
consentement?
M. Gendron: Je n'ai pas d'objection, mais il faudrait regarder la
possibilité de permettre à M. Boulerice d'intervenir tant que M.
Charbonneau ne pourra pas revenir. Comme je vous l'avais dit ce midi - et M. le
ministre de l'Éducation était d'accord - je croyais que le
député de Verchères pourrait être des nôtres
dès le début de la séance en soirée. Ce n'est pas
possible à cause du débat de deuxième lecture...
Une voix: Le député de Verchères.
M. Gendron: Oui. C'est ce que j'ai dit.
Une voix: D'accord.
Le Président (M. Bissonnet): Si je comprends bien, il y a
consentement pour que le député de Saint-Jacques soit membre de
la commission et lorsque le député de Verchères arrivera,
il remplacera de facto le député de Saint-Jacques. D'autre part,
du côté ministériel, Mme Bleau reprend son siège
comme membre de cette commission et il y a consentement de la part de
l'Assemblée pour que M. Cusano, député de Viau, remplace
Mme Dougherty, députée de Jacques-Cartier.
Une voix: C'est parfait.
Le Président (M. Bissonnet): Mme
Vernnette, députée de Marie-Victorin, la parole est
à vous pour dix minutes.
Mme Cécile Vermette
Mme Vermette: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir
de prendre la parole et de soulever certains points qui font que j'irai dans le
sens de la motion que mon collègue a présentée avant la
fin des travaux, cet après-midi. Je trouve tout à fait pertinente
cette motion qui a été présentée afin qu'on puisse
entendre la Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec en commission parlementaire et ce, pour des raisons vraiment
importantes. Cette fédération des commissions scolaires
représente l'ensemble des commissions scolaires et je pense qu'elle est
en mesure de faire le point en ce qui concerne les agissements de ses
commissions scolaires et de vraiment brosser le tableau de leur situation et de
leur vécu.
D'ailleurs, cet après-midi, M. le ministre de l'Education disait
que nous nous attardions très peu au vécu des gens et que nous
étions très théoriques dans nos argumentations. Je pense
que, finalement, si on ne voulait pas que nous soyons aussi théoriques,
il aurait peut-être été important que nous puissions aller
chercher, justement, les témoignages de certaines personnes
concernées par le problème qui nous auraient parlé de leur
vécu, comment, d'une part, les gens qui ont été les plus
lésés - à mon avis, ce sont les gens qui ont
respecté la loi - ont vécu le projet de règlement et
quelles en sont les conséquences pour eux, compte tenu qu'ils ont
vraiment respecté l'obligation qu'on leur faisait d'envoyer leurs
enfants à l'école française. Peut-être que ces gens
devraient intenter un recours collectif compte tenu de l'actuelle situation; on
n'a pas soulevé le fait. Peut-être que ces gens auraient pu nous
présenter, en commission parlementaire, des motifs assez importants qui
nous démontreraient qu'ils pourraient aller jusqu'au recours
collectif.
J'aurais aussi aimé connaître le vécu de toutes les
autres personnes qui ont échappé au système, ces gens qui,
justement, n'ont pas pu avoir la reconnaissance, mais qui ont été
obligés de s'impliquer dans le système et qui sont maintenant sur
le marché actif du travail; qu'en est-il arrivé? Est-ce qu'on
devra leur retrouver leurs droits d'une façon rétroactive? Je
pense qu'on aurait pu aussi savoir comment ces gens se sentent et comment ils
ont vécu leur situation. Ils se sont impliqués dans le
système, donc, ces gens, à mon avis, auraient été
une source d'information fort intéressante. Il aurait été
intéressant aussi de comprendre les raisons qui font que les commissions
scolaires, les déviantes, les délinquantes, n'ont pas pu faire
valoir leur pouvoir auprès de leur directeur? Quels étaient les
motifs qui faisaient qu'ils n'ont pas pu justement voir à ce que l'on
puisse mettre en application la loi telle qu'elle était?
Cela aurait été intéressant pour nous. Nous aurions
peut-être pu avoir des arguments différents. Nous aurions
peut-être sorti des arguments que nous aurions pu apporter au cours de
nos déclarations précédentes. Mais j'ose croire que cela
aurait été difficile, en ce qui me concerne, parce qu'il y avait
un point très important. Le point le plus important, à mon avis,
c'est le respect; c'est le plus fondamental. Tantôt, on a parlé du
respect des droits des parents, le droit de choisir pour son enfant la langue
d'enseignement. Cela faisait partie des droits, des prérogatives en tant
que famille, en fin de compte. On m'a toujours dit que des droits
sous-tendaient aussi des obligations et des devoirs. Je pense que le devoir le
plus ultime, au-delà des considérations personnelles, c'est le
devoir collectif. Je pense que respecter une collectivité, une
majorité dans son ensemble, cela prime sur les droits individuels.
J'aurais aimé entendre des propos de cette nature, à savoir ce
qui est le plus important, des droits collectifs ou des droits individuels.
J'aurais aimé aussi savoir, quelles sont les réponses que les
commissions scolaires auraient eu à nous donner en ce qui concerne leurs
commissions scolaires délinquantes. Non, il nous est impossible pour le
moment d'avoir davantage de documentation, si pertinente soit-elle, pour
éclairer les orientations à long terme qu'auront les
conséquences du projet de loi qui nous est présenté
actuellement.
Les commissions scolaires, par le biais de la fédération,
ont une mission sociale à remplir. Toute mission sociale,
habituellement, se base sur une action. C'est important de connaître les
orientations et sur quoi se base cette action. Jusqu'où peut-on aller?
Je pense que ce sont des interrogations légitimes que nous pouvons avoir
en tête. Nous aimerions probablement tous ici présents - du moins
de notre côté -aller beaucoup plus en profondeur pour
vérifier si de la clause Québec on ne passerait pas à la
clause Canada pour tout d'un coup se retrouver avec le libre choix. Je pense
que ce sont des interrogations légitimes que nous avons à nous
poser et que nous aurions pu aller vérifier auprès des gens bien
en place qui doivent, justement, administrer des lois. S'ils sont en place,
s'ils sont en poste, c'est parce qu'on leur a reconnu des qualités
d'administrateurs et de gens de rigueur. À mon avis, quand on est des
administrateurs et des gens de rigueur, on a aussi comme mission de faire
appliquer les lois qui reposent sur notre juridiction, cela fait partie de nos
devoirs, cela fait partie de nos obligations aussi. Pour les gens
qui ont légiféré ou qui représentent une
partie de la population, c'est important aussi d'avoir à rendre des
comptes. Il ne faut pas regarder dans un sens, mais toujours dans deux sens:
des droits, des devoirs, des obligations.
À mon avis, la commission parlementaire est un lieu qui permet
justement de faire le point et d'arriver à mettre en lumière les
droits, les obligations et les devoirs. C'est impossible parce qu'on a
trouvé la solution qui devrait être la solution étanche
è l'ensemble des gens qui pourraient représenter justement ceux
qui sont concernés par le projet de loi. Je trouve que c'est vraiment
fermer la porte très facilement à tout un monde à
écouter. Cela me fait penser un peu à Radio-Québec "Un
monde à regarder", on ferme la porte comme on peut fermer la porte
à un monde à écouter.
Il aurait été souhaitable qu'on puisse entendre l'urgence
se manifester, si urgence, vraiment, il y avait. Lorsque je vois la
façon dont le projet de loi 58 a été déposé,
avec quelle hâte il a été déposé et lorsque
je vois le refus de tenir une commission parlementaire, M. le Président,
je suis obligée de constater l'absence de profondeur de la part de ce
gouvernement et le non-respect de ce que nous sommes.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Laviolette.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, M. le Président. Je suis très
heureux de participer à la discussion sur cet amendement malgré
le fait que j'aie dit que j'avais espéré avoir mis sur la liste
beaucoup de gens. Mon collègue a fait une proposition très
intéressante que j'avais effectivement oubliée. Je vais vous
donner un exemple pour expliquer pourquoi je trouve cela très
intéressant. Il n'y a pas tellement longtemps... M. le ministre, les
membres et même le président de la commission qui est avec moi
è titre de vice-président au comité directeur vont se le
rappeler, je ne parle pas de vous, M. le député, mais de celui de
Sauvé, le président de la commission...
Le Président (M. Bissonnet}: II est toujours
président de la commission.
M. Jolivet: II est toujours président de la commission,
mais il n'est pas président de la séance, pour le moment. Je dois
vous dire...
Une voix: C'est un homme chanceux.
M. Jolivet: ...pourquoi j'en fais mention, c'est relativement au
projet de loi 30, Loi abrogeant la Loi concernant la commission scolaire du
Nouveau-Québec. Je dois vous dire qu'effectivement je suis heureux parce
que cette commission parlementaire, qui était une consultation
particulière, ne devait normalement pas avoir lieu. C'est un petit
projet de quatre ou cinq articles et, finalement, à suite de demandes de
la part de la commission scolaire... Le président de la commission et
moi en avons discuté, on en a parlé avec le secrétaire de
la commission qui avait reçu l'ensemble des demandes et nous avons
formulé une demande conjointe à M. le ministre, le
président de la commission ayant fait une demande au ministre,
moi-même ayant rencontré le ministre et lui en ayant parlé.
Ensuite, nos leaders ont discuté de la possibilité de revenir en
Chambre, parce qu'on était déjà à l'étape de
l'adoption du principe. Nous avons fait une motion non annoncée à
l'Assemblée nationale demandant une consultation particulière.
Donc, à ce moment-là, il fallait abroger la décision qui
avait été prise, revenir en consultation particulière, et,
effectivement, elle a eu lieu. (20 h 30)
Cette commission scolaire, compte tenu de sa grosseur et des
difficultés qu'elle a de donner de l'argumentation sans au moins une
consultation, même si elle est capable de le faire, a consulté la
Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec
qui lui a fourni un conseiller juridique pour justement venir faire la
consultation particulière, ici, en cette Assemblée. Après
cette consultation particulière, je suis sûr que le ministre nous
a dit qu'il prendrait les décisions qui s'imposeraient et
qu'effectivement, si la consultation particulière n'avait pas eu lieu,
nous n'aurions jamais pu savoir qu'il y avait des problèmes qu'il
fallait régler. Et le ministre conscientisé à ces choses
est capable de prendre des décisions pour faire les changements qui
s'imposent et va certainement nous présenter, en vertu des
règlements de l'Assemblée nationale ou d'une autre façon,
un nouveau projet de loi, soit par amendement ou par réimpression.
Nous de l'Opposition, conjointement avec le président de la
commission, avons fait cette demande de rencontrer la Commission des
écoles catholiques de Montréal, comme il est prévu dans ma
motion principale, et è côté de cela la
Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec
tel que proposé en amendement par mon collègue d'Abitibi-Ouest,
de telle sorte que, finalement, on pourrait, comme il a été fait
lors de ce projet de loi, essayer de faire comprendre au ministre certaines
choses qui sont décrites dans le rapport Rondeau et qui sont aussi dans
les choses habituelles des commissions scolaires.
Je vais donner deux exemples. Il y a
d'abord les tests d'équivalence. La Fédération des
commissions scolaires catholiques du Québec - et j'ai eu l'occasion
lorsque j'étais président du syndicat de le voir - a souvent
appuyé les commissions scolaires dans des domaines qui concernait non
seulement la commission scolaire elle-même, mais l'ensemble des
commissions scolaires. L'exemple dont je veux faire mention, c'est la question
des tests d'équivalence. J'ai mentionné au début de cette
commission, dans les remarques préliminaires, qu'il y avait des moyens
qui pouvaient être utilisés et qui, fort probablement, l'ont
été. En conséquence, la fédération des
commissions scolaires aurait pu nous expliquer que ce sont des choses qui sont
faites et qu'il y aurait peut-être moyen, par d'autres amendements
à la Loi sur l'instruction publique, d'éviter ces situations dans
l'avenir. Il reste que, comme on le voit dans toute société, ce
sont des gens qui utilisent des moyens légaux, d'une certaine
façon. Dans d'autres cas, ils utilisent l'absence de rigueur d'une loi.
Il y a toujours des gens qui essaient de trouver les moyens de faire valoir
leur point, et cela, à l'intérieur des lois existantes, de telle
sorte qu'on aurait pu connaître l'impact de ces tests
d'équivalence sur l'augmentation du nombre d'élèves dans
les écoles anglaises. On aurait pu, au regard du rapport Rondeau, poser
des questions sur les chiffres qui apparaissent à la page 11, no 63, qui
traitent de la loi 22 et de la loi 101, et connaître de façon plus
précise le cheminement qui a été fait. En 1969-1970, dans
la langue d'enseignement, il y avait 84 % d'élèves dans le
secteur francophone et 15,6 % dans le secteur anglophone. Après la loi
63, il est arrivé un phénomène qui fait que, de 84,4 %, on
est tombé à 84 % dans le secteur francophone, alors qu'on est
monté à 16 % du côté du secteur anglophone. La loi
22 est arrivée et elle a fait passer de 84.4 % à 83,4 %
l'achalandage dans le secteur francophone et de 15,6 % à 16,6 % celui du
secteur anglophone.
On aurait pu poser des questions sur ce cheminement, pour arriver en
1982-1983, avec l'adoption de la loi 101, à des chiffres qui parlent
d'une augmentation du secteur francophone - remarquez-le bien - à 87,5 %
et d'une diminution du secteur anglophone à 12.5 %. Au moment où
on se parle, en 1985-1986, il y a une augmentation du secteur francophone
à 88,84 % et du secteur anglophone à 11,6 %. Finalement, il y
avait un phénomène qui était normal. La loi 101 avait
amené le secteur des immigrants a entrer dans le secteur francophone et
à faire en sorte que le secteur anglophone continue à vivre avec
les gens qui y étaient déjà et qui y ont droit en vertu
à la fois de la lot 101 et des avantages créés par la
décision constitutionnelle canadienne et les décisions des
tribunaux permettant de continuer dans le secteur dans lequel ils
étaient déjà intégrés.
Donc, on aurait pu poser à la fédération des
commissions scolaires j'espère qu'on aura l'occasion de le faire -les
questions qui s'imposaient et, là, peut-être même permettre
à la fédération des commissions scolaires du Québec
d'avoir, accompagnant la fédération, le député de
Saint-Louis qui était, à l'époque, le président de
la Commission scolaire régionale de Chambly, mais qui était aussi
le président de la Fédération des commissions scolaires
catholiques du Québec. Je ne vois pas pourquoi ce personnage-là,
qui actuellement est député, n'aurait pas pu, de lui-même,
accompagner la Fédération des commissions scolaires catholiques
du Québec et dire pourquoi, à l'époque, il a voulu...
Là, on aurait pu poser les questions qui s'imposaient. Je pense qu'on a
encore l'occasion de le faire, si on accepte l'amendement et la proposition
principale, d'arriver à le questionner et à lui dire quels
étaient les pouvoirs que possédait le ministre pour forcer une
commission scolaire récalcitrante ou une fédération qui
donnait des renseignements... Les conseillers juridiques vont aider les
commissions scolaires à défendre leur point de vue, c'est normal;
ce n'est pas anormal, ces choses. Â ce moment-là, le
député de Saint-Louis aurait pu nous expliquer pourquoi, à
l'époque, il avait suivi les recommandations des conseillers juridiques
et contesté, à la fois d'une façon directe et indirecte,
la loi 101, permettant à des gens qui n'avaient pas le droit
légal de s'inscrire au secteur anglophone de le faire quand
même.
Là, on aurait peut-être découvert qu'il y avait un
réseau de gens qui, croyant qu'il y avait moyen, politiquement, comme il
est dit dans certains articles, de contester la loi 101, l'avaient fait. J'ai
dit qu'il serait malheureux qu'on utilise les rangs, les positions qu'on avait
pour amener une sorte de complicité dans les actes et faire en sorte que
les gens en arrivent à dire: II y a une injustice politique, alors je me
fous de la loi, je passe à côté de la loi et je
décide que, pour moi, c'est ça, et si je crie assez fort,
à un moment donné, il y aura peut-être quelqu'un qui va
m'écouter. Sauf que les gens, si on regarde cela, on aurait pu
comprendre et la fédération aurait pu nous expliquer le
phénomène qui s'est passé après le rapport de Me
Aquin qui avait permis l'intégration de certains élèves.
Je termine là-dessus. Cela nous aurait probablement dit aussi que le
rapport de Me Aquin avait amené les gens à s'intégrer,
mais d'autres ont continué à résister et on connaît
aujourd'hui les résultats. D'une façon ou d'une autre,
j'espère que les collègues de l'autre côté
interviendront. J'aurais aimé entendre le député
d'Arthabaska, malgré qu'il
n'ait pas de fan club ici ce soir, nous expliquer...
Le Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure, s'il
vous plaît, M. le député.
M. Jolivet: ...pourquoi il est pour ou il est contre.
Le Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure, M.
le député.
M. Jolivet: Je termine en l'invitant à prendre la
parole.
Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a d'autres
députés qui veulent intervenir sur cet amendement? Vous m'aviez
demandé la parole avant, Mme la députée.
Mme Blackburn: Je pensais que mon tour était passé,
je réalise que...
Le Président (M. Bissonnet): C'est pour cela. Je voulais
vous dire que vous aviez utilisé votre temps.
Mme Blackburn: D'accord.
Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que la motion
d'amendement est adoptée?
M. Ryan: Rejeté. M. Cusano: Oui.
Le Président (M. Bissonnet): Rejeté sur
division.
Nous passons à la motion principale. Mme la députée
de Chicoutimi.
Reprise du débat sur la motion
principale
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Vous comprendrez
que je vais appuyer la motion présentée par mon collègue,
le député de Laviolette, visant à entendre la CECM, M.
Rondeau, non pas comme ex-directeur de la CECM - il a été
directeur général de la CECM - mais comme celui ayant
présidé le comité formé par le ministre de
l'Éducation, de même que l'Alliance des professeurs de
Montréal. La CECM, c'est relativement facile à comprendre. C'est,
parmi les commissions scolaires impliquées dans le dossier qui nous
concerne, celle qui, à notre connaissance, aurait encore aujourd'hui,
dans ses murs, le plus grand nombre d'élèves inscrits
illégalement dans des écoles anglaises. À présent,
il faut quand même reconnaître que la CECM aussi, au cours des
années, depuis 1977, a fait montre d'un très grand esprit de
collaboration, sauf qu'on doit constater aujourd'hui que, pour une raison ou
pour une autre, elle n'a pas réussi à régler ou à
résoudre, è l'intérieur de ses propres murs, ce
problème des "illégaux". On nous dit: C'est peut-être parce
qu'ils n'avaient pas le pouvoir de le faire et que c'était au
gouvernement de faire appliquer ses lois. Il s'agirait peut-être de se
rappeler, comme le faisait tantôt mon collègue de Laviolette, ce
dont on parle à la CECM...
M. Ryan: Est-ce que j'ai compris que vous avez dit que laCECM avait fait montre de collaboration depuis 1977?
Mme Blackburnn: M. le Président, est-ce que je peux
poursuivre et répondre aux questions après?
Le Président (M. Bissonnet): Ce n'est pas une question de
règlement, M. le ministre.
M. Ryan: Je m'excuse, je vous ai mal compris, c'est tout ce que
je demande.
Le Président (M. Bissonnet): Vous pourrez, M. le ministre,
poser une question avec la permission de la députée lorsqu'elle
aura terminé son intervention. Je cède la parole à la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Très bien.
M. Cusano: ...maintenant, M. le Président, si la
députée consent, si le ministre n'a pas bien compris.
Le Président (M. Bissonnet): Je m'excuse, M. le
député de Viau, dans notre règlement, il y a un article
qui permet à tout député d'intervenir après
l'intervention d'un autre député pour lui demander si le
député peut répondre à sa question et je reconnais
immédiatement Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Je dis donc la CECM parce c'est encore a la CECM
qu'on retrouve le plus grand nombre d'"illégaux"; selon les informations
que j'ai, c'est de l'ordre de 823. Est-ce que les efforts qui ont
été faits...? Est-ce qu'on a vraiment fait montre dans ce dossier
d'une capacité de pouvoir régler les cas chez eux, sans une
intervention du gouvernement? Comme gouvernement local, cette commission - le
ministre nous a souvent apporté cette argumentation indiquant qu'il ne
fallait pas se substituer aux commissions scolaires puisqu'il s'agissait
là de gouvernements locaux - n'avait-elle pas en main les pouvoirs et
les moyens pour résoudre le cas des "illégaux" chez elle? Est-ce
qu'elle manquait de cette autorité légale et morale pour le
faire? Il est important ici
qu'on puisse les entendre, qu'on puisse également entendre M,
Rondeau, non pas comme président, non pas comme exdirecteur
général de la CECM, mais comme président de ce
comité. Il faut reconnaître à ce rapport, comme je l'ai
déjà souligné, de grandes qualités,
particulièrement une analyse des hypothèses de solution
relativement très honnête et qui présente à la fois
les avantages et les inconvénients de façon sérieuse,
froide, lucide. Il est important qu'on puisse entendre ici M. Rondeau, Par
ailleurs, j'aimerais également qu'on entende l'Alliance des professeurs
de Montréal et pour une raison fort simple: ne serait-ce que pour que le
ministre puisse nous dire pourquoi, malgré les avantages
considérables que proposait la formule avancée par l'Alliance des
professeurs de Montréal, il n'a pas cru utile de retenir ses
recommandations.
Il est peut-être important de rappeler brièvement ces
recommandations que l'on retrouve à la page 23 du rapport Rondeau, dans
les avantages: Une solution humanitaire: c'est ce que le ministre voulait
à tout prix et, là, je le comprends et le suis, pas
jusqu'où il va, cependant. Une solution respectueuse de l'esprit de
là loi 101: le ministre semble moins respectueux; donc, cela
n'était pas pour lui un avantage. Une solution qui pourrait satisfaire
les milieux nationalistes québécois: ce qui est ici avancé
comme un avantage n'a certainement pas été
considéré par le ministre comme étant un avantage. S'il y
avait avantage, l'inconvénient majeur serait de susciter une opposition
majeure chez plusieurs groupes de pression anglophones.
On comprend tout de suite qu'à choisir entre une hypothèse
de solution qui offre des garanties - elle est humanitaire, elle est
respectueuse de la loi et elle pourrait satisfaire les milieux nationalistes -
et les inconvénients d'une batterie de tests, de la difficulté de
l'appliquer pour 1986 et, je dirais, de l'argument majeur de l'opposition de
plusieurs groupes de pression anglophones, le ministre a choisi. J'aimerais que
le ministre puisse, M. le Président, à cette table et dans cette
commission parlementaire nous expliquer et expliquer à l'Alliance des
professeurs de Montréal les raisons de son choix. Cependant, il me
semble important d'entendre aussi d'autres groupes et le ministre se refuse,
avec les députés ministériels, à entendre la
Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec. (20 h 45)
Motion d'amendement proposant d'entendre M.
Français Aquin
M. le Président, j'entends déposer une motion d'amendement
à la motion proposant des consultations particulières. Cette
motion serait la suivante: Je souhaiterais d'abord qu'on entende Me
François Aquin. Autant il m'apparaît important d'entendre M.
Rondeau en raison du rôle qu'il a joué dans l'examen des
différentes hypothèses de solution, autant il me semblerait
important d'entendre ici Me François Aquin. Je propose donc la motion
suivante et je désire amender ainsi la motion pour consultations
particulières: Que la motion pour consultations particulières
soit amendée en ajoutant à la fin de cette motion les termes
suivants: "Me François Aquin".
Le Président (M. Bissonnet): M. le secrétaire,
est-ce que vous pouvez aller chercher la motion? Messieurs, à l'ordre,
s'il vous plaît! Compte tenu que c'est une motion de forme, je
déclare cette motion recevable. Mme la députée de
Chicoutimi, vous avez 30 minutes pour nous parler de cet amendement.
Mme Blackburn: Bien. Cela irait mieux si j'étais debout,
M. le Président, mais il n'y a pas de problème. Il me semble
relativement facile de justifier l'amendement que je viens de faire à la
motion...
Le Président (M. Bissonnet): En tant que président,
j'ai déclaré l'amendement recevable et je n'ai pas à me
prononcer. Vous avez la parole, Mme la députée.
Mme Blackburn: Je vous remercie, M. le Président. J'allais
dire, d'abord pour répondre aux collègues ou aux amis d'en face,
qu'il serait facile de justifier l'amendement que je viens de faire à la
motion présentée par mon collègue de Laviolette. Pourquoi
me semblerait-il utile d'entendre ici, à cette commission parlementaire,
Me François Aquin? D'abord, je dirais pour ses qualités
personnelles. Me François Aquin est, de l'avis de tous, un grand
juriste. Sa réputation n'est pas à faire. Il ne s'agit pas, M. le
Président, de quelqu'un qu'on aurait choisi pour ses qualités
partisanes. On ne l'a pas choisi...
Une voix: Quelle candeur!
Le Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il vous
plaît! Mme la députée, vous pouvez poursuivre votre
intervention.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. On ne l'a pas
choisi comme a été choisi, je dirais, M. Rondeau. Malgré
tout le respect que j'ai pour M. Rondeau, on peut penser qu'il était
dans une situation relativement délicate lorsqu'il s'agit de son
ministre, du ministre dont il fait partie du cabinet, duquel il reçoit
sa rémunération de même que ses mandats. Il me semble qu'il
aurait été particulièrement difficile et délicat
pour M. Rondeau de faire une proposition au ministre de l'Éducation qui
n'irait pas dans
le sens où le ministre l'avait déjà
arrêté et désigné, même en campagne
électorale. M. Rondeau, je pense, et je l'ai
répété, est certainement un homme très
intègre. Il répondait à un mandat, c'est-à-dire de
justifier la décision et les orientations qui avaient déjà
été arrêtées par le ministre de l'Éducation.
Il ne s'agissait pas pour lui, en toute liberté et en toute autonomie,
de présenter un rapport qui aurait pu retenir l'essentiel des
recommandations ou des solutions qu'il estimait, comme ex-directeur
général de la CECM, être les plus pertinentes et les plus
respectueuses des efforts que lui-même avait certainement fournis
à un moment donné, respectueuses également à
l'endroit des communautés, des personnes, des professeurs et des
commissions scolaires qui avaient respecté la loi.
Me Aquin est, je pense, de l'avis de tous, un grand juriste. C'est
également un humaniste. Il a le sens de l'équité. Il a
été soucieux, également, dans son approche, d'offrir des
solutions qui respectent les personnes. Mais qui plus est, dans sa
démarche de cueillette d'information, il a été très
respectueux des personnes et très sensible aux traumatismes que pourrait
causer sa démarche. Me Aquin a, tout au long de sa démarche,
informé à la fois les clientèles, à la fois les
administrateurs et un peu le public de façon générale, sur
les objets de sa démarche et il a pris soin de bien indiquer qu'il
n'arrivait pas devant la commission scolaire, non plus qu'auprès des
clientèles, comme un inquisiteur. Il se voulait collaborateur à
la recherche d'une solution que - on le savait à l'époque
puisqu'il a été mandaté en 1981 - on n'avait pas
réussi à trouver par le biais de démarches qui avaient
été faites par différentes commissions scolaires. Je pense
que les qualités personnelles de Me Aquin, son ouverture, le respect
dont il a fait preuve à l'endroit des personnes au moment où il a
procédé à l'enquête qu'on lui avait confiée,
son souci réitéré à plusieurs reprises de ne pas
traumatiser des personnes qui semble-t-il, de son aveu, semblaient l'être
déjà passablement... Pour ces raisons M. le Président, il
semblerait important qu'on entende une autre voix ici, qu'on entende d'autres
personnes, et il me semble que Me Aquin pourrait être entendu. Il
pourrait éclairer non seulement l'Opposition, mais je me dis que
malgré l'éclairage et toutes les qualités qu'on
reconnaît au ministre de l'Éducation, homme d'église,
disions-nous tout à l'heure, il semble que l'éclairage des autres
pourrait ne pas sembler superflu.
Me Aquin s'est vu confier un mandat en septembre 1981 par le ministre de
l'Éducation de l'époque, le Dr Camille Laurin. Pour bien
comprendre jusqu'à quel point le mandat qui a été
confié à cette personne en 1981 est proche du mandat qui a
été confié à M. Rondeau tout récemment, il
est peut-être important de rappeler les grandes lignes de son mandat de
même que de donner quelques explications sur l'atmosphère ou le
climat qu'on voulait créer au moment où on a confié
à Me Aquin ce mandat. L'essentiel du mandat se retrouve ici. Il se lit
de la façon suivante: "En conformité de l'article de la Loi sur
l'instruction publique, je vous délègue - on parle de Me Aquin -
par la présente les pouvoirs de faire enquête sur l'administration
ou le fonctionnement de la Commission des écoles catholiques de
Montréal en ce qui concerne la fréquentation illégale des
écoles anglaises par des élèves non admissibles à
l'enseignement en anglais. Le rapport que vous me produirez devra notamment
proposer les mesures pour faciliter - faciliter, pas contraindre - l'accueil
aux écoles françaises des élèves visés, de
même que toute autre recommandation ayant pour but de faire respecter la
loi. Je compte que vous procéderez sans délai et qu'un rapport me
sera soumis à brève échéance."
Pour s'assurer que ce mandat confié à Me Aquin ne serait
pas perçu comme un mandat d'enquête qui permettrait à Me
Aquin de convoquer des gens, de les amener par force de loi, le gouvernement a
par la suite rendu applicables à l'enquêteur les dispositions des
articles 16 et 17 de la Loi sur les commissions d'enquête. À
pouvoirs égaux, l'enquête ministérielle se distingue
toutefois de la commission d'enquête en ce qu'elle est
généralement ponctuelle, souple, orientée vers une action
rapide. Le commencement d'une année scolaire, d'ailleurs, accentuait ici
cette dernière caractéristique. Dans ce même rapport on lit
par ailleurs: "N'ont pas été utilisés les pouvoirs et les
privilèges conférés qui permettent d'assigner des
témoins, de les assermenter et, le cas échéant, de les
contraindre de répondre ou de produire des documents." Ainsi, comme le
souhaitait Me Aquin, la collaboration des intervenants a-t-elle
été plus ouverte, plus éclairante dans l'optique de la
recherche entreprise.
Vous comprendrez, ceux qui ont été les collaborateurs ou
les témoins de la démarche de Me Aquin, qu'il ne s'agissait pas
d'aller contraindre les gens à témoigner, il ne s'agissait pas
que d'agiter des épouvantails en les menaçant de poursuites, en
les obligeant à venir témoigner. Me Aquin était
très sensible au climat d'insécurité et de peur qui
régnait, peut-être pas tant dans les écoles,
peut-être pas tant chez les enseignants ou chez les directeurs de ces
écoles, mais chez les parents. Me Aquin, de l'avis de tous, au moment
où il a déposé son rapport et fait ses recommandations, a
été fort respecté. Respectueux des personnes, il a fait un
travail, je pense, de grande qualité qui visait à la fois
à assurer à ces personnes
un traitement équitable qui leur permette de trouver solution
à leur problème sans pour autant leur imposer des
inconvénients majeurs dont elles devraient porter les
conséquences leur vie durant.
Me Aquin déposait son rapport en octobre ou début
novembre. Cela a été fait avec diligence et je dirais que cela
constitue une des qualités de la démarche. Plutôt que de
prolonger et de faire durer dans le temps, pendant des semaines et des
semaines, et même des mois, donc, d'avoir comme conséquence
d'exercer des pressions sur ces personnes, il a voulu, è la demande
d'ailleurs du ministre de l'Éducation, procéder avec
efficacité et diligence. Me Aquin faisait un certain nombre de
recommandations qu'il est ici important de rappeler afin qu'ensemble on se
rappelle d'abord une chose: qu'il est faux de prétendre que ce
gouvernement n'a jamais rien fait pour essayer de régler ce
problème. Encore aujourd'hui, le ministre de l'Éducation nous
disait - pourtant, c'est un homme qu'on ne pourrait pas soupçonner de ne
pas dire que la vérité - qu'on a laissé pourrir - en
parlant du Parti québécois - cette situation pendant neuf ans.
Jamais il ne faisait allusion - je ne l'ai pas entendu une seule fois -
à cette tentative extrêmement sérieuse que d'apporter des
solutions au problème qui avait cours, particulièrement à
la CECM. Le ministre, il me semble, fait de la démagogie lorsqu'il
clame, à tous les vents et à tous venants, que le gouvernement du
Parti québécois ne s'est jamais soucié des
élèves illégaux, non plus qu'il n'a jamais fait de
démarches pour résoudre ce problème. Des fois, je me dis
que, si on n'avait pas l'impression d'être en train d'avoir une
espèce de dialogue de sourds, il y a quelques députés de
la partie ministérielle qui auraient peut-être compris qu'un jour,
quelque part, en septembre 1981, le Dr Laurin avait fait une tentative plus
qu'honnête, très généreuse, je dirais, très
ouverte afin de résoudre ce problème. Je pense qu'il n'y a pas
une seule personne du côté ministériel qui ait fait une
intervention en Chambre et qui ne soit pas venue nous dire qu'on n'avait rien
fait. J'appelle cela au moins... C'est très loin de la
vérité, parce que, semble-t-il qu'en termes parlementaires il y a
des choses qu'on ne peut pas dire, mais il n'y a pas pour autant des choses
qu'on n'est pas en mesure de penser. Je pense que, même chez vous, il y a
des gens qui sont en train de dire qu'on n'a pas dit toute la
vérité, quand on pense aux efforts qui ont été
faits par le gouvernement précédent.
Il est peut-être important de rappeler, pour leur qualité,
les recommandations qui étaient contenues dans le rapport Aquin. Cela
nous permettrait, si on pouvait entendre Me Aquin ici, de faire un
parallèle, au plan de la qualité des solutions proposées,
entre celles qui étaient proposées par Me Aquin et celles qui
nous sont aujourd'hui proposées par le ministre de l'Éducation,
à la lumière des recommandations et des commentaires fournis par
le rapport Rondeau.
La première recommandation, on l'a qualifiée d'action
suggérée: L'action suggérée sous forme de
recommandations au ministre de l'Éducation du Québec comprend un
train de mesures politiques, administratives et éducationnelles qui
visent à assurer avec sérénité le transfert au
secteur français des élèves qui, sans autorisation,
fréquentaient l'école anglaise de la CECM. Il n'a pas dit "avec
un traumatisme"; il n'a pas dit "en faisant perdre une année
d'études"; il n'a pas dit "en poursuivant les gens, en mettant la police
dans l'école"; il a dit "avec sérénité". (21 h
00)
M. Ryan: II disait cela, mais il faisait le contraire.
Mme Blackburn: II serait peut-être important, à la
suite de la remarque du ministre de l'Éducation et député
d'Argenteuil, qu'on entende effectivement Me Aquin là-dessus et qu'il
puisse se défendre.
M. Jolivet: C'est ça.
Mme Blackburn: La deuxième recommandation disait que, pour
bien encadrer l'action suggérée, il avait établi un
certain nombre de critères. L'action projetée, disait-il, doit
être éclairée et tenir compte des divers
éléments probables: la méconnaissance des parents
concernés à l'égard de la réalité
québécoise... Vous ne nous avez rien appris en nous disant que
les parents étaient peut-être ignorants de ta
réalité québécoise, sauf que ceux qui les
invitaient, les incitaient à désobéir à la loi,
eux, étaient connaissants. Leur peur, disait-il encore, des
représailles judiciaires, voire policières - je parle toujours
des critères qui devaient guider l'action suggérée
l'appréhension d'un inconnu dramatisé que constitue
malheureusement l'école française...
M. Jolivet: M. le Président, pourrais-je demander... Quand
j'ai eu, moi, à intervenir ou d'autres, il n'y a personne qui nous a
dérangés et ce n'est pas parce que c'est une femme qui parle
qu'on devrait la déranger.
Le Président (M. Thérien): Vous faites bien de
signaler cela. Je rappelle le député de Viau à l'ordre,
s'il vous plaît! Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Merci, madame.
J'apprécie le commentaire de la députée de Groulx.
Le Président (M. Thérien): Nous ne l'avons
malheureusement pas entendu.
Mme Blackburn: Elle demande un peu de respect à l'endroit
des femmes de la part de ses collègues.
Une voix: On en a du respect pour la femme aussi.
Le Président (M. Thérien): Je pense qu'on n'est pas
à la période des jugements, Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je poursuis. Encore
dans les critères qui devaient guider l'action: De plus, la mise en
oeuvre de toutes les ressources devra être assurée et garantir
que, sauf des cas exceptionnels, le transfert à l'école
française s'opère sans retard académique. Il ne s'agissait
pas de prendre des mesures qui auraient comme effet de pénaliser les
enfants. Il s'agissait d'être respectueux des enfants qui
n'étaient pas, somme toute, on le reconnaît, responsables, de
même que de ne pas ajouter au traumatisme des parents. On sait tous que,
quand on voit nos enfants prendre du retard à l'école, c'est
inquiétant. C'est certainement plus inquiétant lorsque vous
êtes nouvellement arrivés dans un pays. C'était aussi le
souci de Me Aquin, de s'assurer que le transfert à l'école
française s'effectue sans retard académique.
Il ajoutait: II faudra que cela se fasse avec une bonne campagne
d'information. Il faut recommander le lancement, à brève
échéance, par les médias appropriés et les moyens
spécifiques, d'une intensive campagne d'information auprès des
communautés culturelles concernées. Ainsi, les milieux en
question connaîtront-ils l'ensemble des mesures d'accueil offertes, la
volonté gouvernementale qui les a adoptées ainsi que les risques
académiques et pédagogiques que courent ou ne courent pas ces
élèves. Par ailleurs, cela m'apparaît majeur à
l'illustration du désir de Me Aquin de trouver des solutions qui
à la fois soient équitables et ne pénalisent pas autrement
les personnes, quand il ajoutait: Bien que le sujet ressortisse aux
prérogatives politiques de l'État, nous prenons quand même
la liberté de faire une recommandation qui, à notre sens, est
essentielle. Nous recommandons, en effet, que le gouvernement du Québec
renonce à toute procédure et prenne l'engagement de ne pas
entreprendre de poursuites judiciaires contre les parents qui, dans les
délais impartis, auront décidé de transférer dans
les écoles françaises leurs enfants qui ne sont pas admissibles a
l'enseignement en anglais.
Suivaient un certain nombre de mesures concernant les inscriptions, les
délais, l'évaluation des connaissances, la durée du projet
et l'objectif. Celui-ci était: Le projet a pour objectif concret de
permettre à ces élèves, dès le début de
l'année 1983, de suivre l'enseignement en français et de passer
des examens en français. En matière de mesures administratives,
Me Aquin faisait le commentaire suivant: Le projet proposé ne
nécessite, à notre sens, aucune modification réglementaire
et peut faire l'objet d'une résolution ou d'une mesure
ministérielle ad hoc justifiée par le caractère
exceptionnel et transitoire de l'opération.
Il me semble important de rappeler l'esprit qui avait
présidé à cette enquête, le souci pour le
précédent gouvernement de trouver des solutions, mais
également de bien souligner l'esprit de souplesse, le souci
d'équité dont a fait preuve Me Aquin à ce moment.
Dans le rapport de M. Rondeau concernant les recommandations faites par
Me Aquin, il fait comme il a fait d'ailleurs pour toutes les hypothèses
de solution avancées: il présente les avantages et il
présente un commentaire. Il commente brièvement ce qu'a
donné cette opération dans les écoles de la CECM. D'abord,
il faut rappeler que les recommandations de Me Aquin, recommandations qui
étaient presque en totalité acceptées par le ministre de
l'Éducation, le Dr Laurin, se résumaient brièvement
à trois recommandations: inscription à l'école
française des élèves illégalement admis a
l'école anglaise, selon un mode décentralisé,
c'est-à-dire par le contact avec l'école française la plus
proche du domicile; la mise sur pied d'équipes de pédagogues et
de psychologues pour évaluer et assister les élèves
concernés - il ne s'agissait pas de mesures pour pénaliser et
effrayer tout le monde, on souhaitait même mettre à leur
disposition des équipes de pédagogues et de psychologues - et la
mise en route d'un programme spécial d'accueil d'un an comportant, entre
autres, des mesures appropriées d'évaluation et de soutien
pédagogique au plan linguistique. Le ministre de l'Éducation
annonçait même qu'il dégageait un budget de 3 600 000 $
pour le programme spécial et déclarait qu'aucune poursuite ne
serait instituée contre les parents et les responsables scolaires ayant
défié la loi.
Le commentaire que l'on retrouve dans le rapport Rondeau est le suivant:
À la fin de décembre 1982 - Ils avaient une année pour
s'inscrire dans cette démarche d'insertion dans les écoles
françaises - le bilan du programme pouvait s'établir comme suit:
l'opération accueil québécois se soldait par le transfert
aux écoles françaises de la CECM d'au plus une centaine
d'élèves illégalement admis à l'école
anglaise. Le système des élèves illégalement admis
à l'école anglaise n'était pas enrayé; il est
toujours là en 1983. La question qu'il serait intéressant de
poser à Me Aquin - il connaît passablement le sujet, il a une
expérience intéressante - c'est: Pourquoi un résultat
aussi faible? Pourquoi les différents professeurs, commissions
scolaires, directeurs d'école n'ont-ils pas prévenu et
informé les parents des possibilités qui leur étaient
offertes? Pourquoi, après plus d'une année, le programme avait-il
si peu de succès? On pourrait peut-être lui demander et se
demander ensemble qui avait intérêt à ce que perdure la
situation? Qui avait intérêt à ce que s'inscrivent encore
et toujours dans nos commissions scolaires, dans nos écoles, des enfants
qui non seulement au sens de la loi 101, mais également en vertu de
l'article 23 de la charte canadienne... Comment se fait-il que ce programme
n'ait pas obtenu un meilleur accueil? Quel était l'intérêt
de ces gens? Quelles étaient les personnes, quels étaient les
groupes qui pouvaient retirer un intérêt de la présence de
ces "illégaux" dans les écoles?
Vendredi, au moment où la députée de
Jacques-Cartier a pris la parole à cette commission, il me semble
qu'elle nous a donné un début d'explication. Je vous lis donc,
d'après la transcription des débats de la commission
parlementaire, le propos tenu par la députée de Jacques-Cartier:
En 1977, nous avions constaté que, dix ans plus tard -j'ouvre la
parenthèse: ils ont pris le temps de constater cela alors qu'ils
n'avaient pas eu le temps de mettre les mesures en place pour savoir qui avait
droit ou non à l'école anglaise - il n'y aurait plus qu'un tiers
des enfants admissibles à l'école anglaise, en vertu de la loi
101, disait-elle. Les autres seraient dans les écoles françaises.
Nous étions donc en face - elle parle en son nom comme au nom,
j'imagine, des enseignants, des professeurs et des administrateurs -d'une
évolution forcée qui aurait un énorme impact sur notre
corps professoral, nos administrateurs et nos parents.
C'est ce qui explique pourquoi la mesure n'a pas eu plus d'effets, au
moment où Me Aquin a fait son rapport, qui a été
endossé par le ministre Laurin, c'est que le corps professoral dans les
commissions scolaires et dans les écoles anglaises serait réduit.
Vraisemblablement, comme il y aurait diminution des élèves, il y
aurait également diminution des administrateurs. Je pense que la
députée de Jacques-Cartier nous donne ici, en partie, une
explication du peu de succès qu'a connu le rapport Aquin. Il serait
important qu'on entende Me Aquin là-dessus, pour voir si, lui aussi, a
eu cette même perception au moment où il a procédé
à son enquête.
Me Aquin nous dit, et je l'ai souligné tout à l'heure,
être étonné et qu'il n'était pas assuré que
les allophones nouvellement arrivés au pays étaient bien
conscients de la situation linguistique au Québec. Par ailleurs, dans un
communiqué de presse lors d'une entrevue qu'il a accordée
à la Presse au même moment, il dit: "Je suis étonné
de l'espèce de peur qui existe dans ces milieux-là." N'y a-t-il
pas lieu de se demander, finalement, devant ces gens qui possèdent peu
ou pas du tout ni la langue anglaise ni la langue française, qui
arrivent en pays inconnu, quelles sont les raisons qui les ont incités
à inscrire leurs enfants dans les écoles anglaises? J'ai
posé la question, tantôt, è savoir qui avait
intérêt à les y maintenir.
Je pense - là-dessus, le témoignage de Me Aquin pourrait
être éclairant - que les allophones ont été pris en
otages par certains groupes de pression anglophones. On a
délibérément maintenu chez ces personnes, qui avaient peu
de connaissances de nos coutumes, de nos traditions et de notre
législation, la peur qu'on les poursuive si jamais elles acceptaient de
reconnaître le fait qu'elles avaient fréquenté
illégalement les écoles. Les allophones ont été
pris en otages par certains groupes de pression qui, faute d'accepter ou de
vouloir se mettre aux premières lignes du débat, y ont
envoyé les allophones. Il serait important d'entendre, là-dessus,
le témoignage de Me Aquin.
Le ministre de l'Éducation se pose en modèle humaniste,
magnanime, cornpréhensif, dit-il. Je pense que la démarche de Me
Aquin témoigne de ces qualités. S'il se les reconnaît,
peut-être pourrait-il également les reconnaître à
quelques autres. En fait, il m'accuse d'être froide et implacable. Je
dirais qu'on pourrait lui attribuer les mêmes qualificatifs quand on sait
avec quelle attitude que je n'oserais pas qualifier il a, au cours des derniers
mois, renié des engagements qu'il avait pris à l'endroit d'une
clientèle jeune également: les étudiants
bénéficiaires de l'aide financière. (21 h 15)
M. le Président, je suis très heureuse de savoir que le
député de Viau serait très heureux d'entendre Me Aquin.
C'est un voeu que je partage avec lui et je propose donc un amendement à
la motion principale pour que l'on puisse...
M. Cusano: On ne m'a jamais consulté, madame.
Mme Blackburn: ...entendre en cette commission parlementaire Me
Aquin. Je vous remercie.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Saint-Jacques.
M. André Boulerice
M. Boulerice: M. le Président, je vous remercie de me
céder la parole. Il va de soi que j'appuie l'amendement proposé
par ma collègue pour entendre - si le ministre m'entend bien - Me
François Aquin. Sans vouloir privilégier qui que ce soit ou
quelque
organisme que ce soit, s'il y a quelqu'un que la commission aurait
avantage à écouter pour bien des raisons, une des
premières étant la compétence de l'homme, c'est Me Aquin.
M. le ministre connaît très bien Me Aquin depuis de nombreuses
années et il connaît ses qualifications. Je ne suis pas en train
de valoriser les diplômes, mais Me Aquin a acquis des connaissances
universitaires qui sont sans doute très importantes. En plus des
connaissances, ce qui fait la valeur d'un homme, c'est sa réputation,
n'est-ce pas, M. le Président? Me Aquin jouit au Québec d'une
réputation exemplaire et je me souviens même d'avoir
déjà lu presque une exaltation de la réputation et des
qualifications de Me Aquin par un éditorialiste, un directeur du Devoir
d'ailleurs. Donc, Me Aquin devrait être entendu.
Ce qui nous permettrait aussi encore là de motiver sa
présence, c'est que Me Aquin possède à mon point de vue
les mêmes qualités que cet ancien directeur de journal et
maintenant ministre de l'Éducation, qui sont d'être un homme de
dialogue, un homme de consensus, un homme à la recherche de solutions
équitables, mais toujours dans le respect - dans son cas, c'est
prévisible, puisqu'il est avocat de formation - des lois établies
au Québec. Donc, quant à moi, à moins qu'il ne
décide d'en porter l'odieux -ce qui est encore là son droit - je
ne vois aucune raison pour laquelle le ministre refuserait d'entendre une
opinion aussi éclairée que celle de Me Aquin.
Vous le savez et d'ailleurs on l'a abondamment cité, enfin pour
ceux de mes collègues qui interviennent à cette commission, Me
Aquin connaît bien le dossier. Il avait été mandaté
justement pour ses qualités par l'ancien gouvernement pour faire cette
étude à la CECM. Il a proposé des solutions. Il serait
peut-être intéressant de lui demander ce que, le 9 juin 1986, il
en pense par rapport au moment où il a étudié la question.
Il a aussi fait des recommandations. Il pourrait effectivement apporter un
éclairage que sans doute le ministre apprécierait sur la solution
qu'il préconise et qu'il a traduit dans une législation. Je sais
que le ministre, dans un mouvement d'humeur que je ne lui connaissais pas, a
traité tantôt nos amendements de mesures dilatoires. Dans le sujet
qui nous préoccupe, j'espère qu'il n'ira pas jusqu'à dire
que les propos de Me Aquin seraient des propos de dilettante. Je pense que Me
Aquîn... Je m'excuse, M. le ministre...
M. Ryan: Une question de règlement, M. le
Président. On m'avait prévenu que le député de
Saint-Jacques avait de l'esprit. J'attendais qu'il se manifeste, je viens d'en
voir une légère étincelle. Je voulais le signaler.
Le Président (M. Bissonnet): Ce n'est pas une question de
règlement, M. le ministre. M. le député de Saint-Jacques,
vous avez toujours la parole.
M. Boulerice: M. le Président.
M. Gendron: Un instant, une question de règlement, M. le
Président. Je vous suggérerais que les annotations
particulières du ministre de l'Éducation se fassent à la
fin des exposés. On sera toujours heureux d'entendre ses commentaires
sur l'esprit de mes collègues, mais à la fin de leur
exposé.
Mme Blackburn: Oui. Car c'est difficile d'avoir de l'esprit et en
même temps de les écouter parler.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député
d'Abitibi-Ouest, j'ai statué que ce n'était pas une question de
règlement et j'ai remis la parole au député de
Saint-Jacques. Il a toujours la parole.
M. Gendron: Puis-je vous rappeler que pour une fois que vous
statuez que ce n'est pas une question de règlement...
M. Ryan: L'humour est tellement rare de l'autre côté
que, quand il se produit, il faut le signaler.
M. Jolivet: Surtout pas les tapes dans le dos.
Le Président (M. Bissonnet}: M. le ministre, je tiens
à vous dire que, personnellement, en humour je m'y connais. M. le
député de Saint-Jacques.
M. Boulerice: M. le Président, la meilleure façon
pour que le ministre ne reprenne plus de telles paroles serait pour moi de le
rassurer, de lui dire que je lui ferai preuve durant les trois prochaines
années de cet esprit qu'il apprécie tellement. À la mesure
où il appréciera mon esprit, j'ose espérer qu'il sera
compréhensif, par contre, vis-à-vis de mes propos et que
l'échange ne sera pas à sens unique. Il n'est pas reconnu pour
être un homme d'échange à sens unique. Je l'ai dit
tantôt, c'est un homme de dialogue, un homme d'ouverture, un homme de
rigueur. C'est pour cela que, de nouveau, je l'invite à rencontrer un
vis-à-vis en termes de rigueur, en termes de compétence, en
termes de connaissance du dossier scolaire, notamment à propos de la
question de ce qu'on a convenu d'appeler les "illégaux", en l'occurrence
Me François Aquin.
Je n'ai malheureusement pas de chronomètre et vous ne m'indiquez
rien
quant à mon temps de parole. Une question de règlement, M.
le Président. Est-ce que notre règlement permet au ministre
d'interrompre fréquemment là-dessus et d'avoir de tels propos? Je
l'ai bien entendu dire que s'il regarde c'est parce qu'il n'a pas, qu'il ne
sait pas quoi dire, je le dirais que je sais quoi dire. Je sais ce que
j'aimerais lui dire.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Saint-Jacques, s'il vous plaît.
M. Ryan: Montrez-le! Dites-le!
M. Boulerice: Je vais vous le dire. J'avais beaucoup de respect
pour vous, vous l'avez perdu le soir du 20 mai 1980 et le deuxième
soir...
Le Président (M. Bissonnet): Sur la pertinence du sujet,
M. le député de Saint-Jacques.
M. Boulerice: ... où vous avez déposé votre
loi 58, vous avez perdu ce qui vous restait.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Saint-Jacques, sur la pertinence.
M. Boulerice: Je vais, M. le Président...
Le Président (M. Bissonnet): Je m'excuse, mais je tiens
à vous dire que je vais surveiller davantage pour qu'il y ait une
discipline très sévère ici. Vous avez toujours la
parole.
M. Boulerice: J'aurai la même impertinence que lui; s'il
veut continuer dans cette voie, il va trouver son maître, M. le
Président.
Le Président (M. Bissonnet): Continuez votre propos, M. le
député.
M. Boulerice: Je vous disais que Me Aquin connaît le
dossier. Il le connaît aussi bien que le ministre. Il a...
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Saint-Jacques, la parole est à vous.
M. Boulerice: Je vous remercie, M. le Président. Je
comprends vos moments d'impatience. Je sais que c'est difficile de "manager"
à votre droite.
Le Président (M. Bissonnet): La pertinence du sujet, pas
de commentaire, continuez votre exposé.
M. Boulerice: Donc, Me Aquin connaît bien le dossier, Me
Aquin a des qualités que tantôt je reconnaissais à
quelqu'un d'autre, sauf que j'ai maintenant certaines réserves. Cela ne
m'empêche pas de continuer à maintenir ma position quant à
l'amendement proposé par ma collègue et à favoriser
l'audition par cette commission de Me Aquin relativement au dossier des
élèves illégaux à la CECM, à la commission
JérÔme-Le Royer et, surtout, de pouvoir bénéficier
de l'expertise qu'il a su acquérir durant l'enquête - puisqu'il
faut parler d'enquête, il s'agit d'une irrégularité de la
part de la CECM, le mot n'est pas exagéré - et de faire profiter
à la commission probablement d'autres avenues et d'autres solutions
préconisées qui seraient différentes de celles que le
ministre de l'Éducation nous présente actuellement. Ce n'est pas
"la" solution, mais une parmi les seules solutions envisageables dans ce
dossier. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Bissonnet): M. le ministre de
l'Éducation.
M. Ryan: M. le Président, je vais renoncer à mon
droit de parole; n'ayant rien à dire pour l'instant, je
préfère ne pas le dire.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Laviolette.
M. Jolivet: Merci, M. le Président. J'espère que le
ministre ne laisse pas tomber son droit de parole parce qu'il l'a
utilisé pendant que mon collègue parlait.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Laviolette, veuillez...
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Je dois vous dire que la raison pour laquelle je suis
d'accord avec la proposition de ma collègue, la députée de
Chicoutimi, pour faire comparaître, ici, Me François Aquin, c'est
parce que j'avais des questions à lui poser en particulier sur les pages
5, 6, 7 et 8 de son rapport. J'aurai l'occasion de vous dire pourquoi. Je pense
que cela tient compte, justement, des argumentations que nous avons
apportées comme Opposition et qu'il mérite de bien étayer
et de bien montrer.
On disait dans le rapport qu'il y en avait 1200 à 1600 qui
fréquentaient sans autorisation les écoles anglaises de la CECM.
C'est d'abord la première constatation. On dit aussi que cette
estimation - je crois que le ministre était d'accord avec cela lorsqu'il
faisait son rapport de 1983 - faisait la quasi-unanimité des
intervenants et que cela se conciliait de façon bien directe avec les
résultats d'investigations antérieures. Je tiens à vous
faire remarquer que cette recherche
a été faite après l'élection du Parti
québécois en 1981. Je pense qu'il faut bien la situer: le rapport
est daté du 2 novembre 1981 et la proposition de mandat a
été faite le 18 septembre 1981. En la situant comme il faut, vous
allez voir pourquoi, effectivement, je tiens ce langage.
On disait que la clientèle globale du secteur anglais de la CECM
et que sa proportion au regard de sa clientèle était très
significative, mais on ajoutait qu'on ne retrouvait pas cette proportion dans
les autres commissions scolaires catholiques de la région
métropolitaine. Donc cela, c'était confiné en particulier
sur un point à la CECM. Là, on disait qu'il y avait divers
facteurs qui étaient historiquement placés pour amener ces
clientèles vers les écoles de la CECM dont, notamment, la
composition de la clientèle globale de la Commission des écoles
catholiques de Montréal et la situation ou la proximité
géographique de ces clientèles particulières.
Me Aquin nous parle de cela, et j'aimerais le questionner sur la
déclaration des principaux - retenez bien cela - et des enseignants
anglophones, en 1977, qui disaient qu'ils ne refuseraient pas, dans les
classes, des enfants dont les parents veulent qu'ils reçoivent
l'enseignement en anglais. Je pense que cela fait partie de l'ensemble de
l'argumentation que nous apportons voulant qu'il y ait eu collusion, qu'il y
ait eu complicité de certaines personnes en haut. Comme le disait ma
collègue de Chicoutimi, c'était de haut que venait l'exemple.
Malheureusement, au sujet de la loi 58, c'est de haut que vient l'exemple.
Quant au secteur protestant, l'option du Bureau des écoles
protestantes du grand Montréal pour des contestations judiciaires
ouvertes a permis, avec le prononcé final des jugements, le
dénouement du conflit et le transfert à des écoles
françaises des élèves inadmissibles à
l'enseignement anglais. Vous avez deux façons d'agir: secteur anglophone
catholique et secteur anglophone protestant. Vous remarquez que c'est
historiquement la façon dont cela se produit aussi. Les protestants, une
fois que la contestation est faite, une fois qu'ils ont aperçu qu'il n'y
avait pas de lueur d'espoir, ont conseillé à leurs enfants,
à leurs parents d'aller à l'école française. Dans
le secteur catholique, on a continué la guérilla.
Là, on disait que, parmi les élèves qui
fréquentent ainsi les écoles anglaises de la CECM, il y aurait
peu d'enfants dont les parents viennent d'autres provinces canadiennes. En
fait, la très grande majorité de ces élèves se
composeraient surtout d'enfants de culture italienne et, pour le reste,
d'enfants d'autres cultures, notamment portugaise et grecque. Notre
argumentation, celle qui est dans le rapport Rondeau est là, et
j'aimerais questionner Me François Aquin sur ce qu'il avait
constaté à cette époque par rapport à ce qu'on
constate actuellement.
Voici ce qu'il donne dans son texte: "Quant aux parents de ces
élèves - on parle toujours du secteur anglophone catholique en
particulier - il n'est pas aisé de discerner les raisons qui les ont
amenés à agir de cette façon." Là, on fait
écho aux griefs qu'ils invoqueraient à l'égard de la loi
101, la revendication de la clause Canada et la dénonciation de ce que
certains désignent comme des effets rétroactifs de la loi. Si on
va au bas de la page, il y a une note: La loi aurait un effet rétroactif
en ce qu'elle soumet à l'enseignement en français les enfants de
couples immigrants qui entrent à l'école depuis la loi - pas
n'importe quand, mais depuis la loi - mais dont les parents auraient
opté ici pour la culture anglaise avant 1977. De plus, le fait que le
cousin ou la cousine plus âgé fréquente déjà
l'école anglaise semblerait être considéré... (21 h
30)
Encore une fois, il faut connaître la façon dont les gens
venant d'autres milieux fonctionnent. Je répète: De plus, le fait
que le cousin ou la cousine plus âgé fréquente
déjà l'école anglaise semblerait être
considéré comme un droit acquis dans le contexte de ces familles
latino-méditerranéennes dont la taille réelle
dépasse souvent celle de la famille mononucléaire
nord-américaine. Il faut donc comprendre les parents qui avaient une
façon de voir la famille autrement que la nôtre et c'est normal:
ils sont dans un secteur du monde où on considère que la famille
s'étend aux cousins, aux cousines, à tout le monde autour, alors
que pour nous cela est plus confiné à une famille
mononucléaire nord-américaine.
J'aurais aimé poser des questions à Me Aquin sur la
façon dont il a perçu ce problème. On y dit: Toute loi
crée des ressacs. Si l'on peut comprendre ces points de vue, il est
impossible en revanche de conclure à quelque effet rétroactif de
la loi 101. J'aurais aimé que le ministre fasse valoir son point disant
que la loi avait... Et il m'a dit: J'ai tout dernièrement reconnu cette
chose, que les gens, compte tenu de la loi votée au mois d'août
1977, on s'en souvient, le 27 août 1977, quatre jours après ma
fête... C'était un beau cadeau. À côté de
cela... Avoir su cela on l'aurait votée avant, peut-être, ou en
tout cas... C'est le "filibuster" qu'avaient fait les libéraux à
l'époque qui ne nous avait pas permis cela et le règlement
était bien différent de celui d'aujourd'hui.
Le Président (M. Bissonnet): La pertinence, M. le
député.
M. Jolivet: Mais c'est tout simplement
pour vous dire qu'effectivement le ministre disait que la loi avait un
effet rétroactif parce que les gens avaient inscrit leur enfant au mois
de mars en vertu de la loi en espérant que leur enfant au mois de
septembre irait à l'école. Je dois vous dire que j'aurais
aimé poser des questions à Me Aquin sur le
phénomène normal, soit que la date finale d'inscription à
l'école, en vertu de la loi et des conventions collectives, est le 30
septembre. On aura d'autres questions à poser et les questions qu'on
aura à poser concerneront ce que le ministre a proposé dans la
loi: le 15 avril plutôt que le 30 septembre 1985.
Ensuite, on irait à la Charte de la langue française:
Informés des limites du mandat de cette recherche, plusieurs
intervenants se sont quand même exprimés sur la loi 101.
C'était leur droit. Il s'en est dégagé une
unanimité sur les difficultés considérables qu'implique
l'adoption d'une loi linguistique. Dans cette dernière perspective, dit
Me Aquin, la loi 101 s'avère, dans son ensemble, une réussite.
Les critiques reçues ne semblent porter en effet que sur la
revendication de la clause Canada et la question des prétendus effets
rétroactifs. Sur le même sujet, il n'est pas sûr que la
population soit suffisamment informée de l'article 86 de la loi - et
là, on parle de la possibilité de réciprocité d'une
province à l'autre avec le Québec. Or, quant aux effets
rétroactifs antérieurement décrits, on peut très
bien comprendre qu'une loi puisse causer des mécontentements, voire des
frustations; ceci n'implique aucunement pour autant qu'elle comporte des effets
rétroactifs.
Je vais aller à la dernière partie de mon argumentation et
pour laquelle j'aurais aimé que Me Aquin nous donne ce qu'il avait
reçu comme résultat de la vérification qu'il a faite, et
c'est ceci. De plus... Et là, souvenez-vous, je le répète,
cela s'est passé après l'élection du Parti
québécois en 1981 mais, entre 1977 et 1981, il y avait des
espoirs qui avaient été lancés dans la communauté
anglophone et on disait ceci: De plus, les espoirs de changer la loi sont
tenaces. Certains milieux misaient beaucoup sur la victoire du Parti
libéral dont le programme, pourtant, se bornait - et le ministre actuel
était chef de ce parti à ce moment-là - à
régulariser dans un esprit humanitaire le cas des enfants qui
fréquentent les écoles anglaises, même s'ils n'y sont pas
légalement inscrits. Le 16 septembre dernier - en parlant de 1981 - une
proposition était présentée au conseil de la Commission
des écoles catholiques de Montréal invoquant de nouveau l'effet
rétroactif des critères d'admissibilité stipulés
à l'article 73 pour les résidents du Québec. On
réclame à l'occasion une amnistie totale qui, en
réalité, constituerait à la fois un pardon et le
privilège pour ces enfants de demeurer à l'école anglaise.
Sans doute...
Le Président (M. Bissonnet): M. le député,
si vous voulez conclure, s'il vous plaît!
M. Jolivet: Oui, parfait. Sans doute voudrait-on étendre
ce privilège aux frères et aux soeurs cadets. Donc, cette formule
impliquait elle aussi une modification à la loi. J'aurais aimé
exactement, en terminant, poser des questions sur les faits suivants: les
incertitudes, les doutes et les faux espoirs en ce domaine aggravent le
problème au lieu de le résoudre. Peut-être que, si le Parti
libéral avait à cette époque pris d'autres positions que
celles qu'il a prises pour l'élection de 1981, le problème serait
réglé aujourd'hui et on n'aurait pas eu la partie négative
qu'on a connue depuis ce temps-là et les difficultés de
régler ce problème autrement que par une amnistie totale que nous
constestons à ce moment-ci.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. François Gendron
M. Gendron: Oui, M. te Président. Je veux appuyer la
motion qui a été présentée selon laquelle il serait
sûrement pertinent d'entendre Me Français Aquin pour une multitude
de raisons. Je vais essayer de résumer les principales. Je pense que M.
Aquin a toujours été préoccupé par les questions
linguistiques. C'est, comme cela a été mentionné par
d'aucuns, un éminent juriste, avec des qualités professionnelles
que personne n'a mises en doute, et il a toujours manifesté une
préoccupation très importante pour ces questions-là.
Une autre raison pour laquelle je pense que Me Aquin devrait être
des nôtres à cette commission, c'est au moins pour
atténuer, sinon contredire complètement l'argumentation
mensongère qui a été constamment
répétée par les ministériels lors du débat
de deuxième lecture et reprise par le ministre de l'Éducation
à plusieurs reprises selon laquelle aucun geste de quelque nature que ce
soit n'avait été posé, que l'ancienne administration avait
tout simplement laissé pourrir le problème et qu'il n'y avait pas
eu de volonté, d'aucune nature. Certains ont parlé de
volonté politique, d'autres de volonté administrative, mais je
pense qu'il faut résumer en disant qu'il n'y avait pas de
volonté, du moins, d'essayer de régler le problème. Or, si
Me Aquin était des nôtres, il pourrait dire qu'au moins en
septembre 1981 il recevait un mandat précis, spécifique, du
ministre de l'Éducation de faire toute la lumière, autant que
possible, sur le problème et de proposer, selon le mandat libellé
par le ministre de l'Éducation d'alors, M. Camille
Laurin, des mesures capables de redresser la situation. Effectivement,
Me Aquin a exécuté le mandat que lui a confié le ministre
de l'Éducation d'alors et il déposait la même année,
en novembre 1981, son rapport.
Je voudrais juste prendre une minute ou deux pour vous dire que certains
ont peut-être été étonnés de voir que, dans
le rapport de Me Aquin, la plupart des recommandations étaient de nature
administrative - j'y reviendrai dans quelques minutes - plutôt que
législative ou légaliste. J'ai l'impression que Me Aquin s'est
acquitté tout simplement du mandat qu'il avait reçu, du mandat
qui était le sien, et je voudrais vous en citer une phrase. C'est le
ministre Laurin qui lui écrit en lui disant: "Me Aquin, le rapport que
vous me produirez devra notamment proposer des mesures pour faciliter l'accueil
aux écoles françaises des élèves visés." Je
pense que c'est important de relater cela. D'ores et déjà,
qu'est-ce que cela dénote? Cela dénote que le ministre de
l'Éducation, tout autant à cette époque qu'aujourd'hui...
Même si je n'étais pas ministre de l'Éducation,
j'étais membre du gouvernement et nous avions évoqué
à plusieurs reprises dans les échanges que nous avions la
possibilité de poser nous aussi le geste facile qu'est l'amnistie
totale, sans condition. C'est pourquoi, dans la préparation du mandat de
Me Aquin, le Conseil des ministres avait convenu que ce n'était pas une
solution que nous devions privilégier. C'est pourquoi le ministre de
l'Éducation a formellement balisé, précisé le
mandat de Me Aquin en disant: Nous voulons que vous regardiez le
problème et que vous trouviez des solutions, mais n'arrivez pas avec la
trouvaille du siècle, qui est celle du ministre de l'Éducation
d'aujourd'hui, la trouvaille du siècle étant l'amnistie totale,
on efface l'ardoise. Je pense que c'est important que le ministre le
spécifie dans son mandat en disant que, pour nous -comme gouvernement,
en tout cas - ce n'était pas une solution envisagée et que nous
ne la regarderions même pas s'il nous arrivait avec cette magnifique
solution miraculeuse: on bénit tout le monde, on amnistie et c'est
réglé, on tourne la page.
Donc, Me Aquin s'est mis au travail et il a été
obligé de produire des solutions qui commandaient, je le reconnais, une
collaboration plus grande des intervenants scolaires, des milieux scolaires
qui, dans le temps, je le reconnais également, étaient plus
longues, offraient moins de garanties, d'expédition, de rapidité.
Quand on tourne la page, qu'on efface l'ardoise, c'est un geste rapide, j'en
conviens, mais ce n'est que plusieurs années après qu'on peut en
évaluer les conséquences, justement, à cause de son
caractère de très grande expédition.
Au rapport de Me Aquin - si nous avions l'occasion de l'entendre - et
c'est pourquoi nous pensons qu'une personne aussi intéressée que
lui, aussi intègre que lui, de même calibre que Me Aquin... Il
viendrait nous dire que, dans son rapport, lorsqu'il a suggéré
différentes mesures, il a d'abord parlé de la nature de l'action
recommandée. Et tout de suite, la nature de l'action recommandée,
sous forme de recommandations au ministre comprenant un certain train de
mesures dites politiques, administratives et éducationnelles, avaient
toutes le même but, soit d'assurer avec sérénité le
transfert au secteur français des élèves qui, sans aucune
autorisation, fréquentaient illégalement l'école anglaise
de la CECM.
C'est la volonté politique de l'État de régler ce
problème d'exception et d'en acquitter aussi le principal coût
financier qui rend possible l'action suggérée. Quant aux
critères de l'action, Me Aquin disait que l'action projetée
devait être éclairée et tenir compte de divers
éléments probables. Je pense qu'il avait raison. Il avait raison
de dire qu'il fallait tenir compte de toutes sortes d'éléments
contextuels à la situation et un des éléments contextuels
disait ceci: Méconnaissance des parents concernés à
l'égard de la réalité québécoise. Je trouve
que cela illustre quelqu'un qui connaît effectivement ces
questions-là et qui avait une bonne perception de la
réalité en bassin plus cosmopolite. C'est le cas de la ville de
Montréal et des banlieues. "Leur peur des représailles
judiciaires, voire policières, et l'appréhension d'un inconnu
dramatisé que constitue, malheureusement, l'école
française." Contrairement au discours mensonger qu'on a entendu en
deuxième lecture: Nous étions des insensibles, des froids. On a
entendu cela. Quant à Mme la députée de Chicoutimi,
combien le ministre de l'Éducation trouvait son discours décharnu
et absent de perspectives humanitaires, disait-il. Alors qu'à plusieurs
reprises elle-même est revenue sur les considérations, au
contraire, très humanitaires, très objectives, contenues dans le
rapport Aquin qui nous demandait de tenir compte non seulement de la nature de
l'action recommandée, mais des critères dans l'action future.
Et dans les critères mentionnés, il y a toute la dimension
humanitaire, toute la dimension conjoncturelle ou la psychose qui a
entouré les suites de l'adoption de la loi 101 par une communauté
qui n'avait pas à vivre ces contraintes parce que personne ici
n'acceptera pas le fait qu'une loi, par définition, cela contraint des
gens, cela contraint des citoyens. C'est le propre d'une loi de baliser, de
préciser un cadre. Donc, par définition, c'est contraignant pour
certaines catégories de personnes, certains individus pour toutes sortes
de raisons.
Me Aquin était conscient de cette réalité et il
voulait que nous en tenions
compte dans le règlement administratif de ce problème
d'envergure. Il ajoutait: "Après une évaluation adéquate,
un grand nombre de ces élèves seront sans doute acheminés
vers le secteur de l'accueil tandis que les autres pourrait être
directement inscrits au secteur français, quitte à leur procurer
le soutien linguistique approprié." Cela existe, une solution comme
celle-là; le ministre n'a jamais voulu regarder cela. Comment se fait-il
que nous, en Abitibi-Témiscamingue, imaginez, il y en a qui avaient la
prétention qu'il fallait apprendre l'anglais. Certains avaient fait leur
secondaire, d'autres leur primaire, complètement en français,
dans des écoles è 100 % francophones. Et, à un moment
donné, les parents disaient: Pour la première année de son
secondaire, mon jeune ira soit à Subdury, à Timmins, à
Kirkland Lake ou à North Bay. Comment cela se fait-il qu'aux
francophones, eux, on leur demande de s'adapter à la
réalité anglophone. On ne s'est pas toujours posé la
question: Comment sera-t-il accueilli? Aura-t-il des classes transitoires ou
des classes d'accueil? Souvent, en Abitibi-Témiscamingue, on se disait:
On veut qu'il apprenne l'anglais. Les jeunes ont souvent une capacité
d'adaptation probablement plus grande que la nôtre. Il s'agit d'en avoir
pour s'en rendre compte. Souvent, ces jeunes allaient à Timmins,
Kirkland Lake, Kapuskasing, et ils apprenaient l'anglais.
J'entends: C'est un choix personnel. Je comprends. Tout comme cela a
été un choix personnel de leurs parents de dire: Au diable la loi
101, au diable une législation adoptée par un Parlement largement
démocratique et tout cela. Vous allez dévier. Vous allez
contourner cette loi et même d'une façon illégale nous
allons vous inscrire à l'école anglaise. Cela aussi, c'est un
choix libre. C'est un choix libre des parents. Je l'ai expliqué
tantôt qu'il y avait un contexte psychologique, mais cela n'altère
pas le principe d'une décision "mature", libre d'un adulte
responsable.
Oui, M. le Président, il me reste quelques minutes avant de
conclure... (21 h 45)
Le Président (M. Bissonnet): II vous reste... La
conclusion maintenant.
M. Gendron: Trente secondes. Je pense que, si on avait l'occasion
d'entendre Me Aquin qui s'est penché pendant quelques mois sur ces
questions, compte tenu également de sa très grande
compétence dans le domaine linguistique, il pourrait nous
éclairer. Pourquoi n'a-t-it pas privilégié une solution
à caractère un peu abusif dans les circonstances, la solution
universelle d'effacer l'ardoise, comme si le problème allait être
réglé, indépendamment de nos législations, de notre
passé?
Je conclus, M. le Président, en disant que c'est une solution
qu'on n'accepte pas et ce n'est pas parce qu'on n'avait pas trouvé les
boutons à quatre trous, on y avait pensé à l'amnistie
totale, mais on l'a refusée par choix, pas parce que le problème
ne nous était pas sympathique. Dans ce sens, M. le
Président...
Le Président (M. Bissonnet): On est toujours sur la
pertinence de la motion d'amendement, M. le député.
M. Gendron: ...j'aurai l'occasion de revenir.
Le Président (M. Bissonnet): M. le ministre.
M. Ryan: Est-ce que je pourrais poser une question au
député d'Abitibi-Ouest, s'il vous plaît, M. le
Président?
Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que M. le
député consent à ce que le ministre de l'Éducation
lui pose une question, qui doit être très brève et la
réponse également très brève?
M. Gendron: Bien sûr.
Le Président (M. Bissonnet): M. le ministre de
l'Éducation.
M. Ryan: Comme le rapport Aquin remonte à 1981,
c'est-à-dire à il y a cinq ans, le député aurait-il
eu connaissance de quelque apport nouveau de Me Aquin à la recherche sur
ce problème depuis 1981?
M. Gendron: À ma connaissance, non. M. Ryan: Merci.
C'est tout.
M. Gendron: Un instant! À ma connaissance, non. Vous avez
le droit, vous... Je ne vous ai pas interpellé dans votre question.
Le Président (M. Bissonnet): Si vous voulez
compléter votre réponse.
M. Gendron: La réponse va être courte. À ma
connaissance, non, et c'est normal. Il avait reçu un mandat, il a
déposé un rapport qui a été remis entre les mains
d'un ministre. Il appartenait au gouvernement d'y donner suite et non à
Me Aquin. Je ne ferai pas comme vous, porter un jugement sur ce que Me Aquin
aurait fait postérieurement à cela. Il s'est acquitté de
son mandat et c'est comme cela qu'on fonctionne quand on agit sur mandat.
Une voix: On a le résultat.
Le Président (M. Bissonnet): M. le ministre de
l'Éducation.
M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, je veux rne servir de mon droit
de parole. Je pense que le député a fourni lui-même la
réponse implicite à sa question. Me Aquin avait été
chargé d'un mandat par le gouvernement, il s'en est acquitté
honorablement, avec les résultats que nous connaissons. Après, on
l'a vu passer à d'autres activités et on n'a plus jamais entendu
dire qu'il ait eu un intérêt spécial pour ce
problème. Le député est incapable de retracer la moindre
déclaration qu'il aurait faite là-dessus s'il avait eu, pour le
problème, la passion personnelle...
M. Gendron: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Bissonnet): Question de
règlement.
M. Gendron; Je n'ai jamais mentionné que j'étais
incapable de retracer aucune déclaration, j'ai dit carrément
qu'il n'existe pas d'autre déclaration de Me Aquin parce qu'il s'est
acquitté de son mandat. II avait terminé sa
responsabilité.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député
d'Abitibi-Ouest, ce n'est pas une question de règlement, c'est une
question d'interprétation. M. le ministre, vous avez la parole.
M. Gendron: II dit que j'ai dit.
M. Ryan: Je suis bien tolérant pour les interruptions, M.
le Président. Soyez bien à l'aise dans mon cas, je les permets
généralement.
Le Président (M. Bissonnet): II n'y a pas de question de
privilège en commission. Il y a des questions de règlement, mais,
quand ce ne sont pas des questions de règlement, cela n'en sont pas.
Vous avez toujours la parole, M. le ministre.
M. Ryan: Merci. Je pense qu'on doit considérer, comme le
député d'Abitibi-Ouest, que Me Aquin avait reçu un mandat
en 1981, qu'il s'en est acquitté en produisant le rapport qu'on lui
avait demandé. Depuis ce temps, à la connaissance commune de
tous, y compris le député d'Abitibi-Ouest, il n'a rien fait de
particulier qui justifie qu'on l'invite, de manière spéciale,
à se faire entendre devant cette commission.
Comme la réflexion et la recherche ont continué de
progresser sur ce problème depuis cinq ans, je pense que mieux vaut nous
en tenir aux données d'aujourd'hui que d'essayer de faire un travail
encyclopédique qui conviendrait beaucoup plus à une étude
de type universitaire ou désintéressée qu'à la
recherche d'une solution pratique, concrète et applicable maintenant
qu'il est de notre devoir de rechercher. Par conséquent, je dois
m'inscrire en faux contre cette motion que je qualifie, sans hésiter, de
dilatoire.
Le Président (M. Bissonnet): Mme la députée
de Marie-Victorin.
Mme Cécile Vermette
Mme Vermette: Merci, M. le Président. Je me joins à
la motion qui a été déposée par mon
collègue. Comme tous ceux qui m'ont précédée
tantôt, moi aussi, il m'aurait été agréable et plus
qu'agréable d'entendre Me Aquin. Cela m'aurait permis d'approndir
davantage les connaissances en ce qui concerne le projet d'amendement qui nous
concerne ce soir, d'entendre Me François Aquin. Plus d'un a fait
état des qualités remarquables que l'on pouvait retrouver chez Me
Aquin et qui lui sont toujours reconnues, d'ailleurs. Plus d'un a fait
référence à ses lectures pour ses qualités et sa
rigueur intellectuelle.
On a fait état tantôt de ses qualités de brillant
juriste ainsi que de ses qualités de grand humaniste, mais qui plus est
de son esprit d'accueil parce que cet homme, lorsqu'il avait commencé
justement le mandat qu'on lui avait donné, l'avait entrepris dans un
esprit d'accueil. Pour lui, il était préférable justement
de faciliter l'accuei! de ces enfants au système francophone. Je trouve
beaucoup plus naturel un processus d'accueil qu'une loi qui, du jour au
lendemain, fait comme s'il ne s'était jamais rien passé.
L'accueil, quant à moi, permettait à ces enfants justement
de ne pas être montrés du doigt. Cela permettait è ces
enfants de revenir et de participer pleinement à la collectivité
et permettait de faire d'eux des citoyens à part entière. Peu
importe actuellement le moyen que l'on prendra avec cette loi, il en demeurera
toujours qui seront, dans l'esprit de plusieurs gens maintenant, des
"illégaux". Il aurait fallu continuer dans cet esprit qu'avait entrepris
Me Aquin, cet esprit d'accueil qui permettait un processsus naturel
d'intégration de ces enfants à la majorité de la
collectivité francophone québécoise.
Cet homme préférait aussi, dans son approche, faire
confiance aux méthodes pédagogiques. Il faudrait pratiquement
louanger cet homme pour avoir fait confiance aux méthodes
pédagogiques d'une haute efficacité telles qu'il les
reconnaissait au bureau d'accueil de la CECM. Effectivement, je pense que cela
démontre un esprit d'ouverture, un esprit d'humaniste et, même
plus, un esprit capable de faire confiance aux gens en présence et qui
peuvent faire valoir leurs capacités pédagogiques et
justement de faire valoir qu'il est important de mettre en oeuvre des
moyens connus pour favoriser l'intégration de ces gens, sans pour autant
faire un débat qui cause beaucoup plus de traumatismes que d'autres
moyens beaucoup plus naturels, comme les moyens d'accueil.
Cet homme, Me Aquin, était aussi d'une grande
compréhension. Je l'ai dit tantôt. C'était un homme
à l'esprit accueillant. Face aux parents, dont certains peur à
cause des pressions qu'on leur faisait subir pour toutes sortes de raisons et,
notamment, par certains enseignants du PAPT, je comprends très bien dans
quel état de panique certains parents ont pu réagir, mais Me
Aquin, connaissant justement l'état de ces gens, a entrepris
lui-même des rencontres avec eux pour leur permettre de livrer librement
le fond de leur pensée. Je pense qu'une telle attitude démontre
déjà l'esprit de grandeur, de générosité de
Me Aquin, dont ont fait état plusieurs de mes collègues. Certes,
une telle démarche est beaucoup plus lente, mais beaucoup plus
sûre parce que beaucoup plus naturelle et faite beaucoup plus dans le
respect des individus que l'on consulte.
Cet homme a aussi fait appel à la collaboration. Cet homme a
plutôt recherché des consensus. Il a travaillé avec les
différents intervenants en vue de trouver des solutions d'accueil sans
préjudice aux jeunes et en sachant respecter la loi. Je pense que ces
deux aspects étaient fort importants et demeureront des
éléments aussi à ne pas oublier. Bien sûr, des
enfants ont été victimes de préjudice de la part de
parents téméraires, de parents qui quelquefois, parce qu'ils ne
connaissaient pas la culture québécoise et le système
québécois pour des raisons que l'on ne peut toujours identifier,
mais tout de même qui se traduisent par le fait que ces gens ont suivi
des attitudes qui ont fait de leurs enfants des "illégaux".
Avec la campagne d'information que Me Aquin a mis de l'avant, plus d'un
a été sensibilisé parmi ces parents et plus d'un a
répondu à l'appel qu'on lui faisait. Le processus étant
enclenché, il aurait fallu davantage accentuer cette démarche
plutôt que d'aller dans le sens du projet de loi, qu'aujourd'hui, on nous
demande de sanctionner, sans tenir compte de tout l'aspect de
l'illégalité. Parce qu'il y a eu faute, qu'on le veuille ou pas,
il y avait une loi qui était en bonne et due forme et, certaines
personnes, pour des raisons qui leur étaient personnelles, pour des
motifs qui leur étaient personnels, pour des choix qui leur
étaient personnels, ont décidé de dévier
consciemment, dans la plupart des cas, et quelquefois sous la pression de
différents organismes et sous la pression de différents autres
partenaires de la société.
Il aurait été intéressant de pouvoir écouter
Me Aquin en commission parlementaire, cet homme qui avait travaillé avec
les différents groupes du milieu de l'éducation, cet homme qui
avait pu arriver à établir certains consensus. Il aurait
été intéressant de vérifier avec lui les obstacles
les plus fondamentaux qu'il avait pu rester tout au cours de son mandat.
Pour l'ensemble des gens, de la population et pour notre avantage
à nous, les parlementaires, il aurait été important que
l'on puisse entendre Me Aquin, que l'on puisse regarder le projet de loi non
pas en cercle fermé, mais, au contraire, dans un esprit de recherche, de
coopération et d'entretien avec les différents intervenants.
Le Président (M. Bissonnet): Mme la députée
de Groulx.
Mme Bleau: Ce ne sera pas long, une petite minute. Depuis une
heure - un peu plus, je pense - que l'on parle de Me Aquin et du rapport de Me
Aquin. Il a été fait en 1961, alors, les années suivantes,
je demande à M. le député d'Abitibi-Ouest - j'ai eu une
journée assez fatigante - s'il y a quelque chose qui s'est fait au point
de vue d'appliquer certaines des recommandations du rapport Aquin. Avez-vous
fait quelque chose à ce propos?
M. Gendron: ...une question?
Le Président (M. Bissonnet): Non, je m'excuse, mais le
temps du député d'Abitibi-Ouest a été
consommé et à moins qu'il n'y ait consentement pour
déroger aux règles de cette commission...
Une voix: Oh non!
Le Président (M. Bissonnet): Et, sur ce, je suspends la
séance, et nous reprendrons après le vote qui aura lieu a
l'Assemblée nationale.
(Suspension de la séance à 22 heures)
(Reprise à 22 h 19)
Le Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission de l'éducation reprend l'étude
détaillée du projet de loi 58. Je rappelle toujours à la
reprise après chaque ajournement ou suspension, que nous étudions
la Loi sur l'admissibilité à l'enseignement en anglais de
certains enfants et la parole était à la députée de
Groulx. Si je me souviens bien, elle avait posé une question au
député d'Abitibi-Ouest. Est-ce qu'il y a consentement pour que le
député d'Abitibi-Ouest puisse répondre à la
question ou à l'interrogation de Mme la députée de
Groulx?
M. Jolivet: Quant à nous, il n'y a pas de
problème.
M. Cusano: II y a consentement.
Le Président (M. Bissonnet): II y a consentement en
étant très bref, M. le député.
M. Cusano: Justement, en s'assurant qu'il va être aussi
bref que la question.
Le Président (M. Bissonnet): Je sais très bien que
le député d'Abitibi-Ouest sera très bref dans sa
réponse. M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Oui, il n'y a aucun problème, M. le
Président, c'est parce que mon collègue voulait avoir un
document. Je répondrai è la députée de Groulx
à la question posée: Est-ce qu'il y a eu certaines suites qui ont
été données au rapport Aquin. C'est ça votre
question?
Mme Bleau: Oui, s'il y a eu des suites après, si vous avez
fait quelque chose pour régler la situation de ces
enfants-là.
M. Gendron: C'est en plein ce que je dis. Votre question
était: Est-ce qu'il y a eu des suites au rapport Aquin. Réponse:
oui, puisque numériquement parlant d'ailleurs, si les
ministériels avaient écouté les arguments de l'Opposition,
le Bureau de l'admissibilité à l'enseignement en anglais, dans le
document interne, reconnaissait qu'effectivement, après le rapport
Aquin, un certain nombre, quelques mois après, ont
réintégré l'école française,
conformément aux dispositions de la loi 101 et le chiffre que nous
avons, c'est 200. Par la suite, également, après certaines
recommandations du rapport Aquin, dans les discussions qu'on a eues avec
certaines commissions scolaires pour les inviter à resserrer les
modalités administratives et éviter que la porte soit ouverte, un
certain nombre d'"illégaux" ont rejoint les rangs de la majorité.
Dans ce sens-là, c'est sûr puisqu'il y a eu régression du
nombre à la suite du rapport Aquin. Donc, il y a des dispositions
administratives qui ont permis que le nombre diminue.
Est-ce que le problème a été réglé
complètement? La réponse est non. On a eu l'occasion de lire dans
le discours qu'il en restait encore, mais quand vous posez la question: Est-ce
que le rapport Aquin a permis de donner des suites positives à ce
problème-là, la réponse est oui.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Est-ce que la députée de Marie-Victorin
me permettrait une question?
Mme Vermette: Oui.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Viau, si je comprends bien, c'est...
Une voix: Vous n'êtes pas obligée, madame.
Le Président (M. Bissonnet): Mme la députée
de Marie-Victorin n'est pas la personne qui vient de faire son
énoncé.
Une voix: Oui.
Le Président (M. Bissonnet): Non. Mme la
députée de Groulx est intervenue. Est-ce que Mme la
députée de Marie-Victorin consent à ce que le
député de Viau lui pose une question, à la suite de son
intervention?
M. Boulerice: Pour une fois qu'il pose des questions,
laissez-le.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Saint-Jacques, vous n'avez pas la parole et je vous reconnaîtrai lorsque
vous me demanderez la parole, en temps et lieu. Alors, vous permettez cette
question, Mme la députée de Marie-Victorin?
Mme Vermette: Oui.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Viau, vous avez la parole.
M. Cusano: Après avoir entendu la députée de
Marie-Victorin parler de Me Aquin - elle semble le connaître intimement,
elle semble avoir suivi les travaux de Me Aquin de façon précise
- est-ce que je pourrais lui demander à quels parents elle faisait
allusion et quand Me Aquin les a-t-il rencontrés?
Mme Vermette: À l'intérieur de son mandat.
M. Cusano: Je pourrais...
Le Président (M. Bissonnet): La question a
été posée à la députée de
Marie-Victorin.
M. Cusano: A l'intérieur de son mandat, je pourrais dire,
Mme la députée, que...
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Viau, je ne permettrai pas...
M. Cusano: Dans ce cas-là, je demande le droit de parole,
M. le Président.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Viau, je vous ai permis de poser une question avec le consentement de la
députée de Marie-Victorin. Je ne permettrai pas un débat,
parce que ce n'est pas la
place ici.
M. Cusano: Mais j'ai le droit d'intervenir sur la motion?
Le Président (M. Bissonnet): Vous voulez intervenir? M. le
député de Viau, vous avez la parole.
M. Cusano: Je serai très bref. Je ne prendrai pas vingt
minutes, je ne prendrai pas dix minutes, c'est seulement pour informer la
députée de Marie-Victorin.
Le Président (M. Bissonnet): Je dois vous informer, M. le
député de Viau, que vous n'avez que dix minutes.
M. Cusano: C'est bien. Je tenais simplement à informer la
députée de Marie-Victorin que Me Aquin avait été
invité à rencontrer les parents en question et que Me Aquin avait
refusé de les rencontrer.
Une voix: Ah! ah!
Le Président (M. Bissonnet): Vous avez terminé, M.
le député de Viau?
Est-ce que la motion d'amendement... M. le député de
Saint-Jacques.
M. Boulerice: M. le Président, j'aimerais, si vous me le
permettez, intervenir sur la motion principale.
Le Président (M. Bissonnet): La motion d'amendement ou la
motion principale?
M. Boulerice: La motion principale?
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Saint-Jacques, je m'excuse de vous interrompre. Nous sommes actuellement sur
l'amendement proposé par la députée de...
Une voix: De Chicoutimi.
Le Président (M. Bissonnet): ...de Chicoutimi. Si vous
voulez intervenir sur l'amendement, je vous donnerai la parole, mais si vous
voulez parler sur la motion, ce n'est pas le temps.
Des voix: On demande le vote. M. Cusano: M. le
Président...
M. Boulerice: J'ai déjà parlé, M. le
Président, pour votre information, sur l'amendement et je
désirerais parler lorsque nous en serons à la motion.
Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que la motion est
adoptée?
Le vote est demandé. M. le secrétaire, si vous voulez
faire l'appel nominatif.
M. Cusano: Vous voulez le vote nominal?
M. Jolivet: C'est vous qui l'avez demandé.
Le Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Y a-t-il quelqu'un qui demande un vote nominatif?
L'amendement est-il adopté?
M. Cusano: Rejeté.
Le Président (M. Bissonnet): Je déclare
l'amendement rejeté.
Reprise du débat sur la motion
principale
Nous en sommes maintenant à la motion principale et, si je
comprends bien, M. le député de Saint-Jacques, vous voulez
intervenir sur cette motion?
M. André Boulerice
M. Boulerice: M. le Président, avec votre permission,
j'interviendrai sur la motion principale présentée par mon
collègue député de Laviolette à l'effet
d'accueillir en commission M. Rondeau, auteur du rapport, la Commission des
écoles catholiques de Montréal et l'Alliance des professeurs de
Montréal. Quant à l'Alliance des professeurs de Montréal
puisqu'il faut commencer par cet organisme et, de toute évidence, parce
qu'on l'a lu, qu'une solution a été proposée par
l'Alliance des professeurs de Montréal en février 1986.
L'Alliance des professeurs de Montréal appuyait la position sur sept
principes qui étaient la légitimité de la loi 101, qui a
apporté la paix scolaire et qui a évité l'arbitraire, ce
qui s'avère d'ailleurs fort généreux en remplaçant
la clause Québec par la clause Canada.
Les parents des élèves illégalement admis à
l'école anglaise parce qu'ils refusent le fait français au
Québec n'ont pas à être félicités ni à
se faire donner raison post facto. La solution ne doit pas être une prime
à la désobéissance. Donc, l'Alliance des professeurs de
Montréal, qui a toujours été très fortement
préoccupée par ces questions, par les questions de
l'éducation et les questions linguistiques à l'intérieur
de la Commission des écoles catholiques de Montréal, je pense,
mériterait d'être écoutée en commission pour nous
faire valoir, d'une part, sa position quant aux principes qu'ils acceptent dans
le projet de loi soumis par le ministre et, deuxièmement, nous commenter
les raisons qui leur font rejeter certaines
dispositions contenues à l'intérieur du projet de loi 58.
Je crois que rien de solide, de constructif, de permanent n'est possible
à la Commission des écoles catholiques de Montréal sans un
débat - un débat de fond comme celui qu'on a sur la loi 58 - sans
une discussion avec la participation, et, surtout, la collaboration de
l'Alliance des professeurs de Montréal. Cela m'apparaît tout
indiqué qu'on puisse les entendre.
Quant au deuxième intervenant, le deuxième groupe que mon
collègue le député de Lafontaine souhaitait entendre,
c'était la Commission des écoles catholiques de
Montréal.
Le Président (M. Bissonnet): Laviolette, M. le
député.
M. Boulerice: J'ai dit Laviolette?
Le Président (M. Bissonnet): Lafontaine ce n'est pas M. le
député, c'est un autre.
M. Boulerice: Je me suis trompé de fable.
On ne se cachera pas, on ne se mettra pas la tête dans le sable,
une bonne partie du problème que l'on vit actuellement origine de la
Commission des écoles catholiques de Montréal qui, si elle ne l'a
pas pratiquée, a toléré l'illégalité face
aux lois proclamées par un Parlement souverain. Il serait
intéressant de connaître les façons, les pratiques
administratives qui existaient à la CECM, les mécanismes de
contrôle qui existaient à la CECM. Peut-être pourra-t-on
nous expliquer quelles étaient les relations -comme on dit en jargon
d'administration, "staff and line" - qui pouvaient exister entre une direction
générale qui se disait incapable de connaître et de savoir
ce qui se faisait dans ses écoles et notamment dans ses écoles
anglaises... Je pense qu'il y aurait avantage à écouter la CECM
nous donner son point de vue là-dessus. Comment en est-on arrivé
à une situation comme celle-là et comment verrait-elle un
règlement de la question?
Je serais profondément déçu que le ministre refuse
d'entendre la CECM, puisque de très nombreuses fois, lorsqu'il y a eu
des élections scolaires à Montréal, on a vu le ministre de
l'Éducation actuel, qui était à l'époque le
directeur du journal Le Devoir, présent au dévoilement des
résultats de l'élection des commissaires scolaires. On l'a
même vu fraterniser ouvertement - ce qui est légitime - avec
certains commissaires scolaires qui avaient un parti pris idéologique en
ce qui concernait la CECM. Donc, je verrais très mal que le ministre
refuse d'entendre des gens que - il n'y a pas si longtemps - il
considérait non pas comme des amis mais comme des interlocuteurs
privilégiés, pour sa part.
(22 h 30)
Quant à M. Rondeau, il faisait partie de cette structure qu'on
appelle la Commission des écoles catholiques de Montréal. Il est
maintenant - me dit-on -fonctionnaire politique à l'intérieur du
cabinet de M. Ryan, ce qui ne le prive pas d'intelligence. Ce qui, surtout, ne
doit pas le priver de sa faculté d'expression qui est garantie,
d'ailleurs, dans nos droits. Je pense qu'il y aurait intérêt pour
la commission à entendre M. Rondeau, è lui poser certaines
questions. Il y a des hypothèses qui ont été
amenées à l'intérieur du document. M. Rondeau a... Si on
refuse d'écouter M. Aquin, qui est allé au fond de la question,
qui a rencontré les gens, qui a discuté avec les gens, M. Rondeau
semble avoir eu le même privilège de rencontrer les parents, les
enfants, les administrateurs scolaires, les cadres scolaires. Je pense qu'il y
aurait avantage pour cette commission quand viendra pour elle le moment
d'adopter cette loi, d'avoir entendu les tenants et aboutissants, toute sa
réflexion, et ce qui l'a motivé à présenter le
document qu'il fait avec les hypothèses de solutions, qui est la
solution de l'amnistie générale, accueil à l'école
française, la solution politique balisée, c'est-à-dire
l'amnistie conditionnelle, la solution pour contrer l'effet rétroactif
de la loi 101, la solution du concept de la famille élargie.
Vous savez qu'entre ce que les mots réussissent à dire et
à sous-entendre dans un paragraphe, il y a une grande différence
entre le débat, le dialogue qu'il peut y avoir eu entre les personnes
qu'il a rencontrées et, finalement, la formulation retenue dans un
document. Tout cela apporte, c'est bien entendu, des nuances entre ce que je
vous dis, M. le Président, de vive voix dans une discussion et le texte
où je collige les propos que nous avons échangés. Je ne
vous dirai pas qu'il y a trahison de texte en vertu du vieux proverbe qui dit:
Traduttore, traditore. Vous comprenez très bien ce propos.
Le Président (M. Bissonnet): Vous pariez latin?
M. Boulerice: Non, je parle la deuxième langue de votre
comté, l'italien.
Une voix: ...
M. Boulerice: Vous m'en voyez ravi. Donc, je pense qu'il y aurait
avantage, effectivement, à rencontrer M. Rondeau de façon que, de
vive voix, il puisse nous expliquer, si vous voulez, dans un certain sens,
l'arrière-scène du document qui nous est présenté,
et qu'il puisse après cela répondre à certaines questions
que l'Opposition aimerait lui poser. Rien ne nous indique que ces questions ne
nous porteront pas,
peut-être, à modifier certaines positions qu'on a, ne
facilitera pas une compréhension que le ministre nous reproche de ne pas
avoir. À ce moment-là, le ministre peut-il se priver d'une chance
qui s'offre à lui, puisque nous lui offrons de recevoir une information
de M. Rondeau, de dialoguer, d'avoir une lecture peut-être
différente de celle que nous lisons et...
Le Président (M. Bissonnet): II vous reste 33
secondes.
Motion d'amendement proposant d'accueillir le BAEA et
la commission d'appel
M. Boulerice: ...33 secondes. Alors, M. le Président,
j'appuie cette motion et je vous annonce que je dépose une autre motion
d'amendement pour consultation populaire. Elle se lit comme suit, M. le
Président...
Le Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député, vous avez toujours la parole.
M. Boulerice: Elle se lit comme suit: La motion pour consultation
particulière est amendée en ajoutant à la fin de cette
motion les termes suivants: bureau d'admissibilité è
l'école anglaise et commission d'appel. Je la dépose, M. le
Président.
Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Je
vais suspendre pour trois minutes avant de déclarer la
recevabilité ou l'irrecevabilité de cette motion.
(Suspension de la séance à 22 h 36)
(Reprise à 22 h 42)
Le Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Mes chers collègues, la commission reprend l'étude du
projet de loi 58. J'ai bien reçu la motion d'amendement du
député de Saint-Jacques, mais, en vertu de l'article 193, aux
fins de rendre la proposition d'amendement conforme à la loi qui
justifie le Bureau d'admissibilité à l'enseignement en anglais et
à la commission d'appel, je demanderais au député de
Saint-Jacques d'ajouter dans sa motion: "en vertu de l'admission à
l'école anglaise, conformément à la loi".
M. Boulerice: C'est cela. Notamment à l'article 83 qui y
fait explicitement mention.
Le Président (M. Bissonnet): Je déclare cet
amendement recevable. Je vais le lire pour les membres de cette commission.
S'il vous plaît, M. le ministre. Il s'agit d'amender la motion principale
afin d'ajouter è la fin des trois organismes qui sont proposés
dans la motion principale: "Les membres du bureau d'admissibilité
à l'école anglaise et les membres de la commission d'appel en
vertu de l'admission à l'école anglaise, conformément
à l'article 83 de la loi".
M. le député, vous avez la parole sur cet amendement qui
est recevable. M. le député de Saint-Jacques.
M. Boulerice: Voulez-vous m'indiquer de combien de temps je
dispose, M. le Président?
Le Président (M. Bissonnet): Vous avez, M. le
député de Saint-Jacques, jusqu'à 11 h 14.
M. Boulerice: Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Bissonnet): Si c'est
nécessaire.
M. Boulerice: En tout premier lieu, j'aimerais préciser,
de façon qu'il n'y ait pas de malentendu, que cet amendement-là
n'est pas un oubli de mon collègue du comté de Laviolette qui
porte effectivement aux deux organismes auxquels j'ai fait
référence dans mon amendement beaucoup d'intérêt et
surtout beaucoup de respect. Mais mon collègue de Laviolette sait fort
bien que j'ai étroitement collaboré avec ces deux
organismes-là et il m'a laissé le plaisir, je dirais même
le privilège, d'avoir l'honneur de présenter cet
amendement-là, puisqu'il m'apparaît important, il m'apparaît
même très important pour cette commission d'entendre ces deux
organismes.
À l'article 75 de la loi actuelle, on lit bien: "Le ministre de
l'Éducation peut conférer à des personnes qu'il
désigne le pouvoir de vérifier l'admissibilité des enfants
à l'enseignement en anglais et de statuer à ce
sujet-là."
À l'article 76: "Les personnes désignées par le
ministre de l'Éducation en vertu de l'article 75 peuvent vérifier
l'admissibilité des enfants à l'enseignement primaire en anglais,
même si ces enfants reçoivent déjà ou sont sur le
point de recevoir l'enseignement en français".
Donc, il y a déjà, dans la loi, une personne
désignée de prévue et cette personne
désignée est le directeur du bureau d'admissibilité
à l'école anglaise qu'on appelle communément BAEA, qui est
un organisme qui a feu et lieu dans les bureaux du ministère de
l'Éducation sur la rue Fullum à Montréal. J'ai
demandé d'ajouter dans mon amendement, M. le Président, la
commission d'appel puisque la personne désignée par le ministre
peut rendre une décision, mais qu'en
bonne démocratie - celle que l'on vit au Québec - il y a
un droit d'appel et je vous lis l'article 83, car il m'apparaît
intéressant. "Une commission d'appel est instituée pour entendre
l'appel prévu à l'article 82. Cette commission est formée
de trois membres nommés par le gouvernement après consultation
des associations ou des organisations les plus représentatives des
parents, des enseignants, des commissions scolaires, des administrateurs
scolaires et des groupes socio-économiques. Les décisions de
cette commission sont sans appel."
L'article 83.1 qui vient renchérir dit que la commission a tous
les pouvoirs nécessaires à l'exercice de sa juridiction. Elle
peut rendre toute ordonnance qu'elle estime propre à sauvegarder les
droits des parties et décider de toute question de fait ou de droit.
Et l'article 83.2 dit que l'appel est formé et entendu selon les
procédures et les règles de preuve prescrites par
règlement du gouvernement.
Et, dans les cas d'immunité, à l'article 83.3, l'exercice
des fonctions que leur confère la présente loi, les membres de la
commission sont investis des immunités prévues aux articles 16 et
17 de la Loi sur les commissions d'enquête, chapitre C-37.
Donc, on voit très bien que si le législateur a pris soin
d'inclure, dans la loi qu'il a promulguée le 27 août 1977, deux
organismes comme ceux-ci, c'est-à-dire le Bureau d'admissibilité
à l'enseignement en anglais et la commission d'appel, c'est qu'il
entendait leur voir jouer un rôle prédominant quant aux
modalités d'application de la loi 101 et également quant,
à la surveillance de l'application de la loi pour ce qui est du BAEA. Il
avait prévu également une commission d'appel, sachant que nulle
loi n'est parfaite - cela tout le monde le sait -et que, par conséquent,
certains cas frontières, ce qu'on a appelé tantôt zones
grises, pouvaient se situer et qu'il était important que lorsqu'il y
avait une décision qui pouvait être raisonnablement jugée
arbitraire par les parents, parce que ce sont toujours les parents, n'est-ce
pas, ce sont toujours les parents qui demandent l'admission à
l'école anglaise, ce ne sont jamais les enfants... Quand on a 18 ans,
selon la loi, on peut demander ipso facto d'aller à l'école
anglaise. On pourrait même le demander au niveau primaire et ce serait
accepté, parce qu'on est adulte à 18 ans et plus et que la loi
101 ne s'applique pas. Donc, la commission d'appel était justement
prévue pour les parents des enfants qui font la demande.
Je le répète: Ce ne sont pas les enfants eux-mêmes
qui demandent leur admission à l'école anglaise, mais bien leurs
parents. Si les parents sentent cette décision qu'ils ont prise de faire
l'admission de leur enfant à l'école anglaise, en espérant
qu'elle a été faite en consultant l'enfant, comme de bons parents
devraient le faire normalement, à mon point de vue, pour une question
aussi importante, cela me paraît assumer cette parenté. Enfin,
personnellement, je l'exercerais et il semble que dans l'ensemble, la
majorité des parents le font.
Il y a donc une commission d'appel qui est également
appelée à jouer un rôle très important. D'ailleurs,
son rôle est important au point que le législateur l'a bien
souligné à l'article 83: "...a tous les pouvoirs
nécessaires à l'exercice de sa juridiction". À l'article
83.3, on dit: "Pour l'exercice des fonctions que leur confère la
présente loi, les membres de la commission sont investis des
immunités prévues aux articles 16 et 17 de la Loi sur les
commissions d'enquête". Je pense que ces articles donnent la juste mesure
de l'importance que le législateur conférait à ces deux -
appelons-les comme ceci - organismes prévus dans la loi 101.
Ayant situé ces deux organismes par rapport à l'actuelle
loi 101, la raison qui, forcément, motive mon amendement est que le
projet de loi 58 que nous présente le député d'Argenteuil
et qui s'intitule Loi sur l'admissibilité à l'enseignement en
anglais de certains enfants - donc, une loi d'exception -fait
référence, dans plusieurs articles, à ce bureau
d'admissibilité et à cette commission d'appel, notamment à
l'article 3: "Avant le 31 août 1986, la commission scolaire qui a
reçu une demande visée à l'article 1 transmet à une
personne désignée par le ministre de l'Éducation - donc,
une personne désignée par le ministre de l'Education, c'est
toujours le Bureau d'admissibilité à l'enseignement en anglais -
en vertu de l'article 75 - vous voyez que je ne m'étais pas
trompé quant à l'identification de l'article - de la Charte de la
langue française - les documents suivants: l'original de la demande
d'admission; une attestation de la date de la réception de la demande;
un rapport sur la conformité aux règlements et aux programmes
d'études du contenu de l'enseignement reçu." Voilà.
Le ministre y fait de nouveau référence à l'article
4. Ce qui impose nécessairement une présence du BAEA dans le
processus d'admission que veut amener le député d'Argenteuil par
son projet de loi 58, à l'article 4: "La personne désignée
- toujours le Bureau d'admissibilité à l'enseignement en anglais
- doit, avant le 30 septembre 1986, vérifier l'admissibilité de
l'enfant a l'enseignement en anglais, statuer à ce sujet et aviser par
écrit les parents et la commission scolaire de sa décision."
Le ministre continue de faire référence, dans son projet
de loi, au bureau d'admissibilité, à l'article 5, en disant: "La
commission scolaire inscrit à l'enseignement en anglais l'enfant
déclaré admissible et à
l'enseignement en français celui dont l'admissibilité
à l'enseignement en anglais a été refusée." Donc,
par déduction logique, on sait que c'est le Bureau
d'admissibilité à l'enseignement en anglais qui donne ce
certificat d'admissibilité qu'on est habitué de recevoir et que
le bureau nous envoyait lorsque, dans certaines commissions scolaires, on
administrait la loi.
Quant à la commission d'appel, le ministre semble vouloir la
maintenir, puisqu'il ajoute à l'article 85 le point suivant, ce qui
n'existait pas dans la loi actuelle. L'article 85 parle de séjour
temporaire au Québec: "Les personnes qui séjournent au
Québec de façon temporaire ou leurs enfants peuvent être
soustraits par le ministre de l'Éducation à l'application du
présent chapitre dans la mesure où le gouvernement le prescrit
par le règlement." On connaît le règlement. Cela ne devait
pas être deux séjours consécutifs de plus de trois ans;
donc, pour un total de six ans. Exemption: "Ce règlement prévoit
les cas, les conditions ou les circonstances où certaines personnes,
catégories de personnes ou leurs enfants peuvent être
exemptés, la période pendant laquelle l'exemption peut être
accordée de même que les modalités suivant lesquelles elle
peut être demandée ou renouvelée." Si ma mémoire est
fidèle, lorsque j'appliquais la loi, cela faisait
référence à des représentants de pays
étrangers séjournant au Québec. Mais, là, le
député d'Argenteuil et ministre de l'Éducation et ministre
de l'Enseignement supérieur et de la Science ajoute un second paragraphe
à l'article 85: "5ur recommandation de la commission d'appel, le
ministre de l'Éducation peut, pour des motifs graves d'ordre familial ou
humanitaire, déclarer admissible à recevoir l'enseignement en
anglais un enfant qu'une personne désignée conformément
à l'article 75 et la commission d'appel n'ont pas déclaré
admissible parce qu'il ne satisfait pas aux conditions prévues au
présent chapitre. "Le ministre de l'Éducation indique dans le
rapport prévu à l'article 4 de la Loi sur le ministère de
l'Éducation (L.R.Q., chapitre M-15) le nombre d'enfants
déclarés admissibles à recevoir l'enseignement en anglais
en vertu du présent article et les motifs qu'il a retenus pour les
déclarer admissibles."
M. le Président, autrefois, par dérogation du ministre,
certains enfants recevaient l'enseignement en langue anglaise lorsque l'on
prouvait è l'aide de spécialistes, c'est-à-dire ces
professionnels à l'emploi des commissions scolaires et des
écoles, que l'enfant souffrait de certains handicaps intellectuels comme
la déficience mentale, certains troubles de comportement,
c'est-à-dire une mésadaptation socio-affective. Sur la foi du
jugement exercé par le professionnel, la demande était
présentée au bureau d'admissibilité, lequel, avec la
même sympathie que les professionnels avaient témoignée
lors de l'étude du dossier, donnait une réponse dans des
délais, à mon point de vue, raisonnables, puisque j'ai eu
l'occasion de soumettre plusieurs cas au bureau d'admissibilité à
l'école anglaise, à l'époque où j'exerçais
ce métier. C'était pour eux relativement facile de donner raison
à l'enfant, parce qu'il m'apparaissait que les critères
étaient quand même très précis. Mais, là, le
ministre dit: "...pour des motifs graves d'ordre familial ou humanitaire..."
Cela m'apparaît un couloir énorme, sans aucune balise,
extrêmement difficile à préciser et je pense qu'on va
être appelé à partir d'une réglementation, je
présume, pour décrire ces motifs graves d'ordre familial ou
humanitaire. II va devoir y avoir une réglementation émise par le
ministre. Cela m'apparaît souhaitable si on veut avoir une bonne
connaissance de ce que le ministre entend par "humanitaire" et "motif grave
d'ordre familial". (23 heures)
J'espère que cela viendra, mais j'ai des exemples du contraire
devant moi. Cela ne semble pas être le mot d'ordre à
l'intérieur du gouvernement actuel de réglementer. On parle
plutôt de déréglementation. On a même d'ailleurs, je
crois bien, nommé un ministre responsable de la
déréglementation. Je ne demande encore dans quelle mesure on va
consentir à donner une réglementation qui va venir
préciser "humanitaire" ou "motif grave d'ordre familial" ou est-ce que
cela sera selon les humeurs ou les inspirations du ministre actuel ou de tout
ministre actuel. Cela m'apparaît dangereux pour les principes
démocratiques qu'on a toujours défendus.
Si la situation devait être telle, c'est la commission d'appel qui
devrait trancher. Je pense que le paragraphe 85.1, dans son libellé,
avec ce qu'il peut sous-entendre de directives, de réglementation, de
décret ministériel, mérite absolument qu'on ait un rapport
d'expertise de l'organisme qui est prévu dans la loi et qui, depuis
près de dix ans, effectue des enquêtes, rend des décisions
avec le personnel compétent et surtout intègre qu'on lui
connaît.
Je ne pense pas qu'on puisse se prononcer sur l'article 85.1 quant
à moi, sans avoir, absolument l'expertise de la commission d'appel et
également du Bureau d'admissibilité à l'enseignement en
anglais. Quand je vous parle de leur crédibilité, eh bienï
leur crédibilité vient d'une part - je vous l'ai dit au
départ - de la compétence des gens qui forment ce Bureau
d'admissibilité à l'enseignement en anglais et cette commission
d'appel...
M. Ryan: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Bissonnet): Question
de règlement, M. le ministre de l'Éducation.
M. Ryan: L'intervenant pourrait-il parler plus près du
microphone. Nous n'entendons pratiquement rien ici.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Saint-Jacques, pour la bonne compréhension des travaux de cette
commission, si vous voulez vous rapprocher du microphone.
M. Boulerice: Je voulais, d'une façon subtile, souligner
au ministre que je vis avec lui le même problème. Notre
répartiteur en est témoin. En début de commission, je lui
ai demandé d'augmenter le volume lorsque le ministre parlait, parce
qu'il parlait tellement loin du micro que j'avais un peu de difficulté
à l'entendre moi aussi.
Le Président (M. Bissonnet): Peut-être, si vous le
rapprochiez un petit peu. Je ne sais pas si...
M. Boulerice: Non, c'est malheureusement impossible.
Le Président (M. Bissonnet): Alors, avancez-vous.
M. Boulerice: Alors, nous allons consentir mutuellement, M. le
ministre, certains efforts de rapprochement, du moins au microphone... Quant au
micro "phone11...
Des voix: Ha! Ha! Ha! Quel humourl
M. Jolivet: II y a divers moyens d'attirer l'attention du
ministre.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Saint-Jacques, nous vous attendons toujours. Cela va très bien
maintenant.
M. Boulerice: Donc, je disais - je sais, on me vole
délibérément mon temps, M. le Président.
M. Ryan: M. le Président, je ne voulais pas lui tendre un
piège. Je n'avais aucune intention du genre de celle qu'il veut me
prêter.
Le Président (M. Bissonnet): Nous retournons à la
pertinence du débat, avec le député de Saint-Jacques.
M. Boulerice: II semble que j'ai bien piqué où je
voulais piquer. Ce vieux "tintin" est donc vrai: Qui s'y frotte, s'y pique.
M. le Président, je vous disais que la commission d'appel et le
Bureau d'admissibilité à l'enseignement en anglais ont leur
crédibilité, d'une part, par la qualité des personnes qui
y travaillent et leur compétence et, deuxièmement, par
l'extraordinaire expertise qu'ils ont de ces dossiers. Cela fait quand
même tout près de dix ans qu'ils administrent cette loi. À
part les élèves que l'on qualifie d'"illégaux" ou de non
autorisés, rarement ai-je entendu des propos défavorables quant
à la façon dont le bureau d'admissibilité à
l'école anglaise et la commission d'appel se sont acquittés des
charges qui leur sont dévolues à l'intérieur de la
loi.
Je n'ai pas besoin de vous dire que, dans les régions
administratives du Québec, il existe des tables de concertation des
commissions scolaires: commission scolaire primaire, commission scalaire
secondaire, commission scolaire intégrée, et, de mémoire,
quant à la rive sud de Montréal où j'ai eu le plaisir de
travailler, jamais n'ai-je entendu un commentaire ou un rapport
défavorable quant à la façon dont la commission d'appel et
surtout le Bureau d'admissibilité à l'enseignement en anglais se
sont acquittés de leurs fonctions.
Ils ont une expertise qu'il est même difficile de qualifier
tellement elle est de qualité, puisque, depuis dix ans, elle se fait
à la satisfaction des administrateurs scolaires, elle se fait à
la satisfaction des parents. Le nombre de plaintes déposées en
commission d'appel, si ma mémoire est fidèle, et je pense que
l'actuel ministre ou l'ancien ministre pourrait me donner des chiffres,
m'apparaît relativement bas quant au nombre total de demandes d'admission
à l'école anglaise qui ont été
présentées au Québec depuis l'adoption de la Charte de la
langue française et des chapitres qui concernent l'enseignement.
Donc, de nouveau, je verrais très mal, puisqu'il s'agit de ses
propres créatures, que le ministre refuse de considérer la
présence du bureau d'admissibilité à l'école
anglaise et de la commission d'appel à cette commission pour mieux nous
éclairer sur les conséquences probables, prévisibles, des
modifications qu'il apporte à la loi 101 avec son projet de loi 58.
Cela m'apparaît d'autant plus important que le bureau
d'admissibilité a déjà eu - et c'était garant de
l'efficacité du travail qui a été fait, et mon Dieu! que
certains organismes ont l'art de bien savoir où puiser leur personnel -
jusqu'à un certain temps, comme directeur, un ancien journaliste d'un
quotidien québécois très connu de la rue Saint-Sacrement,
qui était M. Jean-Pierre Proulx, qui est d'ailleurs retourné
à ce journal, fort satisfait de son expérience au bureau
d'admissibilité et avec les remerciements empressés, je me
rappelle, du ministre d'alors, pour se préoccuper encore de questions
scolaires, mais cette fois-ci à un autre niveau. Le bureau
d'admissibilité s'est donné, heureusement, et quelle veine pour
ce bureau, un deuxième directeur qui a
bien suivi le chemin tracé par le premier et qui a maintenu les
hauts standards d'excellence, de qualité, de rapidité,
d'impartialité, de probité que l'on connaissait au Bureau
d'admissibilité à l'enseignement en anglais. C'est dommage, j'ai
fait mon amendement, mais j'aurais pu dire: Le Bureau d'admissibilité
à l'enseignement en anglais incluant le directeur actuel et l'ancien
directeur. Je suis persuadé que le ministre n'aurait pas
hésité à accueillir un de ses anciens collaborateurs.
Je sais qu'il n'a quand même pas ce chauvinisme de croire que
"Hors du Devoir, point de salut", qu'il va quand même consentir à
écouter l'actuel directeur du Bureau d'admissibilité à
l'enseignement en anglais, même s'il ne vient pas de ce journal national
et prestigieux que j'ai mentionné tantôt.
M. le Président, pour conclure, je pense que le ministre est bien
inspiré d'adopter une attitude différente et je dirais même
contraire et ce serait heureux que son attitude soit contraire à celle,
malheureusement, de ses collègues du Conseil des ministres. J'ai eu le
déplaisir d'assister à la commission parlementaire de la culture
relativement au dossier de Radio-Québec Dieu sait que l'Opposition a
présenté avec le plus grand sérieux des motions pour appel
en commission de nombreux organismes, des organismes qui, au Québec, ont
toujours joué des rôles importants dans les domaines les
concernant, des organismes représentatifs du milieu, des organismes
où agissent, pensent et réfléchissent des personnes
très profondément engagées dans l'évolution
sociale, l'évolution culturelle, l'évolution politique,
même l'évolution économique au Québec.
Malheureusement, son collègue des Communications a eu l'attitude que je
qualifie de méprisante, de considérer ces gens, comme dit cette
expression populaire du comté de Saint-Jacques, comme des "deux de
pique" et non pas leur reconnaître le sérieux qu'ils
méritent, puisque ce sont des groupes, des individus, des associations
qui ont fait preuve de leur sérieux.
Je souhaiterais, M. le Président, que le ministre adopte une
attitude contraire, mais cette attitude contraire, en définitive, serait
une attitude qui lui est coutumière, c'est-à-dire une attitude
d'ouverture, de dialogue et même de confrontation, puisqu'on sait que
c'est un homme qui a toujours aimé confronter les idées, les
siennes avec celles des autres...
Le Président (M. Thérien): J'inviterais le
député de Saint-Jacques à conclure.
M. Boulerice: ...44 secondes, 43, 42, vous me permettrez. Donc,
j'ose espérer, M. le Président, que M. le ministre prendra en
considération les remarques que j'ai adressées a l'appui de
l'amendement que j'ai proposé. Je vous remercie.
Le Président (M. Thérien): Merci. Je donne la
parole maintenant au député de Laviolette.
M. Jolivet: II n'y a personne de l'autre côté qui
veut intervenir?
Le Président (M. Thérien): Personne n'en a
manifesté le désir.
M. Jolivet: C'est parce que je voulais simplement permettre
l'alternance.
M. Ryan: Est-ce que j'ai compris que le député de
Laviolette voulait présenter un amendement?
M. Jolivet: Non. Je voulais parler sur l'amendement. J'ai
simplement dit: Est-ce qu'il y a quelqu'un qui veut parler de l'autre
côté, parce que je voulais savoir si l'alternance jouait? On me
dit que non.
Le Président (M. Thérien): M. le
député de Saint-Jacques.
M. Boulerice: M. le Président, est-ce que M. le ministre
pourrait se rapprocher du micro, s'il ne veut pas se rapprocher de moi? J'ai eu
encore une fois beaucoup de difficulté à l'entendre.
Le Président (M. Thérien): Je pense que
M. le ministre jugera à propos de se rapprocher ou pas du micro.
M. le député de Laviolette.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, M. le Président. C'est avec plaisir que
je veux intervenir sur l'amendement de mon collègue de Saint-Jacques
même s'il ne m'avait pas averti de l'amendement qu'il avait l'intention
de présenter. Je le comprends très bien puisqu'il a eu...
M. Cusano: On voit que le député est très
bien organisé, M. le Président.
Le Président (M. Thérien): Non, vous ne voulez pas
la parole.
M. Jolivet: Non, il y a eu tellement... Moi, je ne suis pas
pressé.
Le Président (M. Thérien): Non. (23 h 15)
M. Jolivet: Non, du tout. C'est simplement que le
député a eu à travailler énormément dans son
comté dans le contexte des demandes au Bureau de l'admissibilité
à l'enseignement en anglais ainsi qu'à la
commission d'appel. Je voudrais faire référence, ici...
J'aimerais que les gens viennent ici poser des questions sur le rapport
Rondeau, où, par exemple, à la page 15, il est fait mention des
certificats d'admissibilité en disant que, comme il s'agit
d'élèves non admissibles à l'enseignement en anglais, il
est donc intéressant de savoir que moins de la moitié d'entre eux
ont fait une demande pour obtenir leur certificat d'admissibilité,
c'est-à-dire 462, alors que 510 n'ont fait aucune demande et que 37
doivent être ignorés. Donc, on avait des questions à poser
à savoir pourquoi des gens considérés comme non
admissibles à l'enseignement en anglais n'ont pas profité du
droit qui leur était accordé par le Bureau d'admissibilité
à l'enseignement en anglais. On pourrait peut-être leur poser
cette question. J'aimerais, d'ailleurs, la leur poser.
Quant aux gens de la commission d'appel, on parle des recours et, dans
le rapport, il est dit que la proportion de ceux qui y ont eu recours est
encore plus faible. Seulement 237 ont fait appel, tandis que 713 l'ont
ignoré- Cinquante-neuf fiches doivent être mises de
côté.
Quand on regarde cela, on est donc en droit de se poser des questions
sur le fait que les moyens leur permettant d'être admissibles - s'il
était possible de le faire -ne sont pas utilisés. Dans le
rapport, à la page 16, on fait appel aux inconvénients de la loi
101 et des règlements afférents à cette loi. On dit que la
pratique du bureau d'admissibilité... Je pense que les gens de la
commission, le ministre, les gens qui ont travaillé au comité
Rondeau et tous ceux qui sont ici et qui ont à légiférer
auraient intérêt à savoir quelle politique avait le bureau
d'admissibilité et pourquoi les gens ne l'ont pas utilisé?
Il est dit que le bureau adopte une approche plus humaine. Cela fait
allusion au projet de loi; le ministre dit qu'il veut avoir une façon
plus humaine de traiter de l'ensemble du dossier des "illégaux", de
façon à tenir compte des réalités - dit le rapport
Rondeau - non prévues par la politique officielle. Donc, on croit
comprendre que c'est la politique de la loi 101.
Il y est donné des exemples. Et là, il serait
intéressant de connaître le point de vue des gens du Bureau
d'admissibilité à l'enseignement en anglais dans le cas du
nouveau conjoint. Il est dit que le Bureau d'admissibilité à
l'enseignement en anglais a toujours reconnu qu'en cas de remariage de l'un des
parents, le nouveau conjoint est considéré comme le parent de
l'enfant, même s'il n'y a pas d'adoption légale. Et que non
seulement le parent peut rendre ses propres enfants admissibles, mais il rend
également admissibles les enfants de son conjoint.
Pourquoi n'a-t-on pas profité des possibilités que le
bureau offrait?
Il est dit que le bureau reconnaît aussi comme parents les
responsables de foyers d'accueil lorsqu'ils ont la responsabilité
juridique. Je pense qu'il est bien important de savoir quelle sorte de
responsabilité on peut avoir à l'égard d'un enfant en
foyer d'accueil.
Vous savez très bien ce qu'est une famille d'accueil. Seulement
un exemple, ils vont venir ici pour dire à la ministre de la
Santé et des Services sociaux qu'ils ont un petit problème de
rétroactivité quand un montant d'argent était donné
pour les enfants mésadaptés. Ma collègue, la
députée de Marie-Victorin, responsable de ce dossier, pourrait
vous en parler longuement, mais ce n'est pas le propos de ce soir. Je veux
seulement vous faire mention, en cours de route, que ce sont des choses
attendues.
On parle du cas du tuteur, de la tutrice, ou l'un ou l'autre, le tuteur
ou la tutrice qui peut être considéré comme parent d'un
enfant à charge à la condition que les deux parents de l'enfant
soient décédés. Donc, ce sont des critères
d'admissibilité à l'école anglaise qui auraient pu
être utilisés et vérifiés pour voir si cela
concordait.
Il est question des études postsecondaires. L'alinéa c de
l'article 73 de la Charte de la langue française, la loi 101,
prévoit que seuls les frères et soeurs cadets des enfants qui,
lors de leur dernière année de scolarité au Québec
l'entrée en vigueur de la loi, recevaient l'enseignement en anglais au
niveau de la maternelle, du primaire ou du secondaire ont le droit de recevoir
l'enseignement en anglais. Il est dit que cela exclut les institutions de
niveau collégial ou universitaire. Donc, il aurait été
intéressant et cela serait intéressant d'avoir de la part du
bureau de l'admissibilité des renseignements concernant ces
façons de voir les choses. Un exemple d'humanité, quand on le
considère, c'est la possibilité, pour une personne qui arrive au
Québec avec comme dernière année, le secondaire V, de
pouvoir s'intégrer a l'école anglaise parce que, après
cela, on exclut les institutions de niveau collégial et universitaire.
Donc, la personne a le pouvoir de s'intégrer à ce niveau.
Je dois dire que ce sont des questions qu'il serait intéressant
de poser. La pratique qu'avait le bureau et qu'a le bureau veut que si le
frère ou la soeur aînée a, préablement à ses
études collégiales et universitaires, terminé ses
études secondaires en anglais au Québec, le cadet soit
déclaré par le fait admissible.
Quand on regarde ces interprétations, on trouve un
problème dont le ministre a beaucoup fait mention à
différentes occasions et qui pourrait être une partie de la
discussion. C'est le cas des écoles bilingues avant l'adoption de la
loi, là ou une personne
- on en faisait mention - de langue anglaise a décidé
d'aller à l'école pendant une seule année, admettons, pour
apprendre le français à l'école française, dans les
écoles bilingues. On voyait là une façon plus
serrée d'appliquer la loi 101, à ce moment-là; on voyait
justement, en termes d'interprétation et d'application, ce que pouvait
faire le bureau d'admissibilité à l'école anglaise.
D'autres décisions ont été prises pour des motifs
humanitaires dont fait souvent mention le ministre dans la loi actuelle. On dit
que le bureau d'admissibilité autorise les enfants en provenance d'un
pays où ils ont déjà commencé leurs études
en anglais, à la condition qu'ils soient rendus à la
dernière année d'études secondaires - ce que je disais
tout à l'heure - et d'autres enfants sont autorisés à
recevoir l'enseignement en anglais pendant la période où les
parents - en particulier des État-Unis d'où ils viennent en
majorité - règlent les procédures de séparation ou
de divorce.
Comme le dit le rapport, il est toutefois précisé que ces
derniers cas ne reçoivent plus la même réponse à
cause de l'introduction de la clause Canada qui, selon l'opinion du bureau,
risque de donner un droit permanent à ces enfants qui, autrement,
n'avaient pas ce droit. On voit là les problèmes qui surgissent
avec l'article 23 de la Loi constitutionnelle de 1982. La clause Canada peut
avoir des effets positifs mais elle peut aussi avoir des effets
négatifs. Il peut aussi y avoir, pour l'ensemble des gens qui composent
la majorité du secteur anglophone par rapport au secteur francophone,
des difficultés qui surgissent à ce moment-là. On parle de
l'application de la clause Canada. C'est vrai, je suis d'accord avec le rapport
Rondeau et j'aimerais connaître ce que les gens du bureau
d'admissibilité à l'école anglaise ont à dire sur
les problèmes qui se posent actuellement en ce qui concerne
l'application de cette clause. On en énumère quelques-uns.
Je pourrais dire qu'on ne trouve aucune disposition de la loi 101
donnant aux personnes désignées un mandat juridique pour
régler les demandes en vertu de la clause Canada. Depuis l'entrée
en vigueur même de la clause Canada, la pratique des personnes
désignées est de refuser les enfants d'un parent citoyen canadien
qui, à la date de leur entrée au Québec, ont
complété seulement la maternelle en anglais dans une autre
province. Cela devient une façon bien stricte d'appliquer l'article 23
de la Charte canadienne de 1982. Quant à la question de la
fréquentation d'écoles bilingues hors Québec, les
personnes désignées appliquent la même politique que pour
ces écoles au Québec et les demandes sont donc
refusées.
Je pourrais vous dire, en terminant -cela passe tellement vite - que le
rôle de la commission d'appel sur la langue d'enseignement, et c'est mon
dernier propos... Même la présidente de la commission d'appel
soulève plusieurs questions relativement au mandat et aux pratiques de
la commission. Je donne simplement deux exemples pour terminer parce que c'est
ce que le ministre a mentionné. Elle prétend que le gouvernement
doit modifier la loi 101 pour permettre à la commission d'appel
d'entendre les appels fondés sur la charte canadienne. Le ministre nous
a déjà annoncé qu'il présenterait à
l'automne des amendements qu'il ne peut pas présenter
immédiatement parce que... On dit, nous, qu'il les présente
à la pièce pour ne pas les présenter dans
l'ensemble...
Une voix: Non.
M. Jolivet: Non, ce n'est pas cela? On verra. Elle croit
également que la commission d'appel devrait avoir le droit d'entendre
les appels concernant l'application des articles 81 et 85 de la loi 101, droit
qui n'existe pas pour l'instant. Je pourrais continuer mais j'ajouterai
seulement qu'il serait très intéressant de rencontrer ces deux
groupes, de leur faire valoir l'ensemble des points et de leur poser les
questions qui s'imposent pour faire en sorte que la loi, sî jamais elle
était adoptée à cause de la majorité de l'autre
côté, le soit dans les meilleures conditions possibles.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Laviolette. Je cède maintenant la parole au
député d'Abitibi-Est... d'Abitibi-Ouest, excusez-moi.
M. Gendron: Je sais bien qu'il est 11 h 24, M. te
Président...
Le Président (M. Bissonnet): Oui, je m'excuse.
M. Gendron: ...mais c'est Abitibi-Ouest.
Le Président (M. Bissonnet): II a tout le temps voulu.
M. François Gendron
M. Gendron: Alors, effectivement, M. le Président, je vais
vous indiquer - et je pense que vous ne serez pas surpris - que je vais appuyer
la proposition faite par mon collègue de Saint-Jacques puisque
effectivement le bureau d'admission aux études anglaises est une
instance qui est touchée par la question que nous débattons.
D'ailleurs, encore là, je tiens à vous rappeler qu'en
deuxième lecture, à l'Assemblée nationale, lorsqu'on a eu
à discourir sur le principe du projet de loi amnistiant l'ensemble des
jeunes qu'on a indiqués comme étant des "illégaux",
j'avais
pris sur moi de vous faire connaître une note que j'avais
reçue comme ministre de l'Éducation, toujours pour des gens qui
n'ont rien fait dans ce dossier-là, en avril 1985. Pour des gens qui
étaient amorphes, insensibles au problème, j'avais reçu,
comme ministre de l'Éducation, une note de quelques pages du directeur
intérimaire du Bureau d'admissibilité à l'enseignement en
anglais, M. Paul Fortier, de la direction générale de
Montréal, à la suite d'une demande que je lui avais faite comme
ministre de me donner sa version des faits, à savoir, est-ce que lui,
comme directeur intérimaire du bureau avait une perception historique de
ce dossier.
J'ai eu l'occasion, lors du débat en deuxième lecture,
d'indiquer que, non seulement, il m'avait fait une note historique, mais qu'il
y était également allé de certains commentaires sur la
proposition de règlement qu'on avait faite aux divers intervenants
scolaires, bien sûr, proposition de règlement qui avait toujours
l'avantage de respecter le principe de la loi 101, de respecter le fait
français et également d'envisager plutôt le volet de la
reconnaissance d'études secondaires par des tests d'équivalence.
Je voudrais juste vous rappeler la conclusion - cela va être la
troisième fois que je le fais - du bureau d'admissibilité,
où on me disait ceci: "Précisions, en conclusion, que cette
contre-proposition faite verbalement à la Commission des écoles
catholiques de Montréal est demeurée lettre morte, puisque
l'objectif premier du secteur anglophone de la CECM est de pouvoir augmenter le
nombre d'élèves fréquentant son secteur et non
nécessairement de solutionner le problème desdits enfants".
Desdits enfants, pas des dix, mais des enfants concernés.
Je ne suis pas sûr, à voir tout l'intérêt que
vous portez à cette question-là, puisque votre
intérêt c'est de blanchir l'ardoise, si on règle le
problème, je doute que vous ayez compris que lui, au moins, comme
directeur du service, prétendait qu'il y a quand même un
problème majeur. Vous apporterez les solutions administratives que vous
voudrez, si on n'a pas la collaboration des concernés... Vu que leur
premier objectif était d'abord de montrer un nombre
d'élèves plus élevé que d'essayer de
régulariser la situation des "illégaux", au moins, cela illustre,
et je pense que c'est dans ce sens-là que mon collègue, le
député de Saint-Jacques a voulu faire la proposition, que si on
pouvait avoir devant nous le bureau - pas tellement le bureau comme les
membres, parce que ce serait plus les membres qui seraient en mesure de nous
éclairer - les membres du bureau d'admissibilité aux
études en anglais, on serait probablement capable de leur poser des
questions d'abord sur la perception qu'ils avaient du problème,
également sur le jugement, quand même assez sévère,
qu'ils portaient à savoir que les commissions scolaires anglophones
étaient davantage intéressées à grossir leur nombre
d'étudiants qu'à qu'essayer de trouver des solutions, ou
carrément nous indiquer ce qu'on a senti dans ce dossier-là.
C'est qu'ils attendaient qu'un gouvernement peut-être plus lié
avec le secteur anglophone soit en mesure d'offrir une proposition où on
efface l'ardoise.
J'aurais aimé cela pouvoir les interroger là-dessus et
leur demander quelle sorte d'engagement, quelle sorte de relation ils avaient
avec différents amis libéraux intéressés à
la question. Il y a plus que cela également. Mon collègue de
Laviolette a eu l'occasion d'illustrer certains problèmes sur lesquels
le bureau d'admissibilité s'interrogeait, se penchait
régulièrement. Vu qu'en dix minutes, il est difficile d'aller
très rapidement et de couvrir l'ensemble des activités que le
bureau couvrait, je voudrais juste donner, pendant les quelques minutes qui me
restent, quelques éléments sur lesquels, moi aussi, j'aurais
aimé les interroger. (23 h 30)
Le bureau d'admissibilité a toujours prétendu que la
vérification de la langue d'enseignement des parents causait des
problèmes, qu'il était très difficile pour eux de faire
une vérification de la langue d'enseignement des parents, parce que,
disait-il, il est difficile de vérifier la langue d'enseignement
d'écoles de pays étrangers, en dehors de l'Angleterre et des
États-Unis. Il prétendait que des enquêtes conduites avec
la coopération des ambassades et des consulats amènent - et on
lit cela dans le rapport Rondeau - à refuser comme faux environ 50 % des
documents produits. Ce n'est pas une mince affaire. Ce n'est pas une mince
affaire que de nous dire que la capacité pour un bureau de
vérifier ces choses, quand on sait qu'il y a une multitude de pays, il y
a une multitude de lieux d'origine, tant de différents allophones qui
proviennent de tous les pays du monde et qui effectivement sont tentés
en arrivant en cette terre québécoise de prendre la tendance qui
s'était manifestée, particulièrement en 1978, 1979, 1960,
d'aller plus facilement à l'école anglaise, indépendamment
de leur droit.
Quand des hauts fonctionnaires nous disent que même si le bureau
avait comme responsabilité de s'assurer de vérifier la langue
d'enseignement des écoles des pays étrangers, que, en dehors des
États-Unis et de l'Angleterre, si on considère l'ensemble des
États-Unis comme étant un seul État, même si je
reconnais qu'il y en a plusieurs, dans tous les autres pays étrangers,
même des enquêtes conduites avec quand même des degrés
de coopération importants, quand on va jusqu'au niveau des ambassades
pour avoir
une coopération de vérification et que le résultat
est: Je suis obligé de vous dire - et c'est toujours le bureau
d'admissibilité qui parle - que je ne suis pas capable, dans 50 % des
documents produits, d'attester qu'il s'agit bel et bien là d'une langue
d'enseignement des parents qui serait anglophone, ce qui leur permettrait
d'être inscrits à l'école anglaise..!
Je voyais le député de Viau me faire des signes. On abeau dire: écoutez, c'est cela la réalité. Justement,
c'est pour cela qu'on voudrait avoir le bureau ici. On voudrait questionner le
bureau d'admissibilité pour lui dire: est-ce que ce fait-là est
connu de vous depuis longtemps? Depuis que vous existez, est-ce que toutes les
mesures ont été prises pour essayer de raffermir ou de resserrer
les critères sur lesquels vous vous appuyez, ou les rendre plus
extensibles, si c'était cela la problématique? Je pense que,
lorsque, avec 50 % des documents produits, la conclusion, c'est qu'il faut les
refuser comme faux, il n'y a personne d'entre nous qui ne conviendrait pas
qu'il y avait un problème. Il y avait un problème important pour
le bureau d'admissibilité. Ce sont des éléments qui sont
passés très rapidement dans le rapport Rondeau. Je ne blâme
pas le comité Rondeau de passer rapidement là-dessus. Il ne
pouvait pas être le spécialiste de toutes les questions, d'autant
plus qu'il y avait un bureau spécial pour vérifier
l'admissibilité aux études anglaises. Il fallait lui donner les
outils, les moyens pour s'assurer que ces vérifications soient
concluantes.
Un autre aspect qui a été évoqué par mon
collègue, mais très rapidement, c'est toute la question des
attestations de naissance. À ma connaissance, mon collègue n'a
pas eu l'occasion de l'évoquer. La question des attestations de
naissance. D'abord, le "Life birth certificate", ce certificat est émis
par l'hôpital où l'enfant est né et inclus le nom des
parents. Selon les témoignages entendus par le groupe de travail, il est
très difficile pour les parents d'obtenir ce certificat. On demande en
conséquence que ce document soit remplacé par une simple
déclaration de naissance...
Oui, M. le Président, ce ne sera pas long. D'autres commissions
scolaires font état de la difficulté pour plusieurs immigrants de
faire accepter par le bureau d'admissibilité aux études en
anglais les documents acceptés ailleurs comme attestations de naissance.
Je pense que ce serait intéressant de questionner le bureau
là-dessus, puisque, effectivement, on porte le jugement qu'il avait
développé ses propres critères d'analyse et que, dans
certains cas de documents acceptés généralement ailleurs
comme étant des attestations officielles de naissance, le bureau
d'admissibilité aux études en anglais, lui, pour des raisons que
j'ignore - on n'a pas cela dans le rapport -avait décidé, je ne
dis pas qu'il avait raison ou tort, je dis juste qu'il nous dit que, pour ses
critères, il avait décidé, lui, de ne pas
reconnaître certains documents qui étaient acceptés
ailleurs comme étant des documents qui attestaient des naissances.
Puisqu'il me reste à peine trente secondes, je voudrais quand
même dire deux mots également du rôle de la Commission
d'appel sur la langue d'enseignement. Quand mon collègue a
décidé de relier dans cette demande de convocation, à la
fois le bureau d'admissibilité aux études en anglais et la
commission d'appel, c'est parce que ces intervenants devaient travailler en
étroite collaboration, et, dans ce sens, il m'ap-paraissait logique, il
m'apparaît toujours logique, M. le Président, que nous devrions
avoir cette occasion d'interroger le bureau d'admissibilité et son
instance d'appel dans les cas où les intervenants concernés
prétendaient que les demandes d'appel au bureau d'admissibilité
n'étaient pas concluantes, ne donnaient pas des résultats
positifs. J'aimerais savoir pour quels motifs la commission d'appel a rarement
donné suite à des demandes d'admissibilité au bureau des
études en anglais. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Thérien): Merci, M. le
député d'Abitibi-Ouest. Je passe maintenant la parole à la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. J'ai l'impression
que la règle de l'alternance...
Le Président (M. Thérien): Étant
donné, Mme la députée, que je n'ai pas eu de demande, je
vous passe la parole.
Mme Blackburn: Je vous remercie.
Le Président (M. Thérien): M. le
député de Laviolette, vous n'avez pas la parole.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Je vous remercie, M. le Président. Je vais,
comme vous vous en doutez bien, appuyer la motion d'amendement de mon
collègue et député de Saint-Jacques afin qu'on entende ici
à cette commission le Bureau d'admissibilité à
l'enseignement en anglais de même que la commission d'appel.
Il me semble que si les députés et amis d'en face, les
députés ministériels, avaient effectivement comme souci de
s'assurer que la décision qu'on prend et qu'on s'apprête à
prendre avec le projet de loi qui nous est soumis serve au mieux les
Intérêts à la fois des jeunes inscrits illégalement
dans les écoles et les intérêts des Québécois
de façon générale, ils seraient comme nous
intéressés à entendre la commission d'appel de
même
-414 que le Bureau d'admissibilité è l'enseignement
en anglais.
Ces organismes ont été rattachés à
l'application de la loi pour déterminer qui avait droit à
l'enseignement en anglais. Il me semble qu'il serait intéressant de les
entendre, ne serait-ce que pour comprendre comment ils ont vécu cette
impression d'impuissance vis-à-vis du fait que de façon assez
massive on s'inscrivait dans les écoles anglaises sans même
demander de certificat d'admissibilité, comment on se sent
méprisé, comment on peut se sentir inutile alors que le rapport
Rondeau nous dit que moins de la moitié des illégaux
recensés en vertu de ce rapport ont fait une telle demande au Bureau
d'admissibilité à l'enseignement en anglais. Il serait
peut-être intéressant de les entendre pour savoir comment ils ont
vécu cela, comment ils réagissent à cette situation pour
qu'ils nous disent comment ils ont informé la population et
particulièrement ces clientèles de l'existence d'un tel
bureau.
Il serait important également de connaître les impressions
de la commission d'appel puisque là, sur les 1013 cas recensés,
59 fiches ont dû être mises de côté. Il n'y a que 237
parents qui ont eu recours à !a commission d'appel, 237 sur 1013. On ne
connaît pas la situation des autres, je le rappelle, comme on ne
connaît pas véritablement le nombre précis et exact
d'enfants touchés par le projet de loi qu'on veut faire adopter
bientôt.
Il serait important d'entendre la commission d'appel et le bureau
d'admissibilité, parce que, autant on a reproché à ce
gouvernement de façon générale de faire preuve de
sévérité, de rigueur dans l'application de la loi, d'un
manque de générosité, d'un manque d'humanisme, autant le
rapport Rondeau nous dit, en parlant de cette commission et de la pratique du
bureau d'admissibilité et je cite: "II arrive souvent que ce bureau
adopte une approche plus humaine de façon à tenir compte des
réalités non prévues à la politique officielle". Il
ne s'agissait pas d'une attitude restrictive, très proche de la lettre
de la loi, mais c'était une politique du bureau d'admissibilité
qui était beaucoup plus généreuse, plus ouverte et plus
humaine. Malgré tout, ce bureau se voit boudé par plus de la
moitié des "illégaux" inscrits à l'école. Il serait
intéressant de les entendre, comme le rappelaient tantôt mes
collègues, le député de Laviolette d'abord et le
député d'Abitibi-Ouest ensuite. Il serait intéressant de
les entendre non seulement sur les solutions qu'ils ont apportées, sur
l'ouverture d'esprit dont ils ont fait preuve, mais il serait également
intéressant de les entendre sur ce que le rapport Rondeau appelle les
problèmes d'interprétation et d'application. Il serait
intéressant de savoir jusqu'où on pourrait aller comme
gouvernement, jusqu'où on pourrait élargir
l'interprétation de manière à rendre les règles
d'admissibilité de ce bureau un peu plus généreuses, un
peu plus larges. Il me semble qu'un tel éclairage
bénéficierait non seulement à l'Opposition mais
également aux membres du parti ministériel et à la
population de façon générale, parce que, trop souvent dans
le population - et vous le savez - on a encore aujourd'hui l'image que la loi
101 était inéquitable, injuste et extrêmement
contraignante.
Il faut savoir, par rapport à l'application de cette loi, par
rapport à la souplesse dont ont fait preuve les organismes
chargés de veiller à l'application de cette loi, qu'ils l'ont
fait généralement de façon généreuse et
très ouverte; non pas de façon inhumaine, comme on les en a
accusés souvent. Pour la population qui est à l'extérieur
du débat et qui ne fait que lire des déclarations tantôt
fracassantes, pour ne pas dire choquantes, de l'Opposition d'alors, de
même que de certains organismes de pression dans les milieux anglophones,
on a l'impression que c'était extrêmement strict, rigoureux et que
cela manquait d'ouverture.
Parmi les choses sur lesquelles j'aimerais entendre des
représentants du bureau d'admissibilité et de la commission
d'appel, on nous dit qu'une des difficultés que pose
l'interprétation de la loi 101 depuis la reconnaissance de l'article 23
de la charte canadienne, c'est le fait que ledit article ne reconnaisse, pour
fins de calcul de fréquentation de l'école anglaise, que
l'enseignement reçu au primaire et au secondaire et non au
préscolaire. D'ailleurs, le rapport conclut qu'il faudrait inclure le
préscolaire dans le calcul de ces années de fréquentation
de l'école anglaise.
Personnellement, cette recommandation me pose une interrogation. Je me
demande si, demain ou au cours des prochaines années - ce qui semble
être courant et accepté dans les autres pays d'Europe - on
admettait et on ouvrait des garderies, donc, à partir de deux ans, deux
ans et demi, l'enfant est admis dans ces garderies. À compter de trois
ans, il fréquente régulièrement, comme nos enfants
d'aujourd'hui, la maternelle. Est-ce à dire qu'il faudrait aussi inclure
les années passées en garderie dans celles qui font partie du
calcul des années d'admissibilité nécessaires à
l'admission à l'école anglaise?
Également, il y a toute la question, comme le soulignait le
député d'Abitibi-Ouest, des écoles dites bilingues. Enfin,
en ce qui concerne le rôle de la Commission d'appel sur la langue
d'enseignement, le rapport nous dit: "La présidente de la commission
d'appel soulève plusieurs questions relativement au mandat et aux
pratiques de la commission". Il me semble que vous auriez autant
intérêt que nous à entendre les représentants de
cette
commission pour savoir comment, à l'avenir, on pourrait
améliorer, bonifier sa démarche. Quelles seraient les
modifications qui permettraient plus de souplesse dans l'application de ces
règles? Ils pourraient également nous dire s'il serait important,
avant d'adopter le projet de loi 58, que le ministre procède aux
modifications qu'il entend apporter à la loi 101. Le ministre nous dit:
On ne veut pas tout confondre ensemble, à la fois la loi 101 et les
"illégaux". Comme si l'un n'était pas déjà dans
l'autre et que s'il n'y avait pas de loi 101, il n'y aurait pas
d"'illégaux" au sens où la loi 101 l'entend. Alors, il me semble,
M. le Président, qu'en abordant la loi 58 on touche et on altère
profondément le sens de la loi 101. (23 h 45)
Quand le ministre nous dit: Cela n'est pas immédiatement que je
veux y toucher pour inclure la clause Canada, la question qui se pose est la
suivante: Si, dans la loi 101, on introduit la clause Canada, cela veut dire
que les "illégaux" que l'on veut aujourd'hui amnistier seraient
inacceptables en vertu de l'article 23 de la charte canadienne. Il ne s'agit
pas ici d'enfants qui, majoritairement, ont reçu un enseignement
primaire et secondaire en anglais, il s'agit d'allophones qui ne parlent
souvent ni l'une ni l'autre langue. Donc, en vertu de l'article 23 de la charte
canadienne, ils seraient inadmissibles. Cela justifie et explique
peut-être la raison pour laquelle le ministre ne veut pas procéder
immédiatement aux amendements à la loi 101.
M. le Président, je conclus en rappelant que j'appuie la
proposition d'amendement présentée par mon collègue de
Saint-Jacques et qu'il serait dans l'intérêt de cette commission,
tant du côté du gouvernement que du côté de
l'Opposition, d'entendre le bureau d'admission, de même que la commission
d'appel. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Bissonnet): M. le ministre de
l'Éducation.
M. Claude Ryan
M. Ryan: J'ai écouté ces plaidoyers et je
m'étais plaint d'une certaine sécheresse dans les points de vue
entendus du côté de l'Opposition. Si on continue encore une couple
de jours on va verser dans les larmes du repentir, les larmes de la contrition,
sans doute, mais, en écoutant ces propos, je ne puis retenir un certain
sourire.
M. Boulerice: "Bonjour tristesse".
Le Président (M. Bissonnet): À l'ordre! M. le
député de Saint-Jacques, s'il vous plaît, vous n'avez pas
la parole.
Une voix: Le premier roman.
M. Ryan: Le prochain titre, ce sera "Bonjour tristesse",
justement.
M. Boulerice: Dans trois ans, M. le ministre.
M. Ryan: Je vous écoute exprimer votre
intérêt soudain à cette heure tardive pour les travaux de
la commission d'appel et du bureau d'admissibilité, je vous en
félicite. Je trouve que vous vous êtes réveillés
bien tard: II est minuit, Dr Schweitzer. La commission d'appel a publié
pendant des années un rapport annuel. Nos amis d'en face ont
commencé à en prendre connaissance ces jours derniers, cherchant
des munitions pour alimenter leur "filibuster", mais, avant cela, cela ne les
avait jamais intéressés. La meilleure preuve que l'on puisse en
donner est bien simple. C'est que, pendant des années, on a
trouvé dans les rapports annuels de la commission d'appel les
mêmes recommandations, parce que justement le gouvernement ne s'en
était pas occupé. Pardon?
Le Président (M. Bissonnet): Mme la députée
de Chicoutimi, s'il vous plaît, la parole est au ministre de
l'Éducation.
M. Ryan: Je vous dis cela en toute simplicité, le
gouvernement, c'était vous du Parti québécois, à
moins que je ne me trompe. Mme la députée de Chicoutimi a droit
à tous les égards dus aux membres nouveaux de cette
Assemblée. Elle n'était point du gouvernement ni de
l'Assemblée. Je n'ai jamais eu connaissance de résolutions en
provenance de l'association péquiste de Chicoutimi aux conseils
nationaux du PQ demandant qu'on donne suite aux recommandations de la
commission d'appel sur la langue d'enseignement. Je ne pense pas que
c'était le premier souci de votre association pendant ces années,
les années douces du pouvoir. Nous, nous les lisions et nous demandions
au gouvernement de s'en occuper et d'y donner suite. La commission d'appel a
perdu des membres très intéressants et très engagés
parce qu'ils s'étaient heurtés de très nombreuses fois
à des situations auxquelles la loi ne leur permettait pas d'apporter des
solutions que le bon sens et l'équité les plus
élémentaires eussent suggérées. C'est pourquoi, la
commission avait demandé que l'on fasse certaines modifications.
Cela, c'est pour la commission d'appel. Il est passablement tard pour
l'Opposition de faire une proposition comme celle-là. Nous avons fait
notre "homework", comme on dit, excusez cette expression, nos devoirs, et nous
les avons tous lus ces rapports. Le comité Rondeau a rencontré la
commission
d'appel; on a fait tout le travail. On sait ce que la commission d'appel
a à dire. On l'a invitée à donner son point de vue quand
c'était le temps. Je peux vous assurer que, quand j'étais dans
l'Opposition, je n'ai pas fait de "filibuster" pour demander que la commission
d'appel vienne. J'ai pris mes jambes et j'ai été la voir. On a vu
à se renseigner à la source.
En ce qui touche le bureau d'admissibilité, je crois que les
députés de l'Opposition, je veux être honnête envers
eux, ont lu le rapport Rondeau. C'est juste qu'ils l'ont lu plutôt
récemment, mais je pense qu'ils l'ont lu. Parfois, on se demande s'ils
ont sauté des pages parce qu'il y a des pages qui les ont davantage
retenus que d'autres. S'ils ont lu le rapport Rondeau, ils se seront rendu
compte que le comité Rondeau a rencontré le bureau
d'admissibilité.
Je me souviens, un jour, je suis entré dans la salle où
était réuni le comité, ce n'était pas une
commission royale, c'était un comité qui travaillait avec moi. Un
jour, j'étais à mon bureau à Montréal, j'ai
frappé à la porte, je leur ai demandé: Avez-vous objection
à ce que je vienne siéger avec vous? Ils ont dit: On en serait
très heureux. Ce jour-là, il y avait plusieurs
représentants du bureau d'admissibilité. Nous n'avons pas
seulement un établissement à Montréal, il y en a dans
quelques autres endroits du Québec également. Nous avons
siégé ensemble et j'ai appris des choses que je ne connaissais
point avec autant de précision. J'ai appris, en particulier, que "they
were bending the law", comme on dit. Quand on plie une tige, on la fait
chauffer et on la plie un peu pour ne pas l'avoir aussi raide. Je suis toujours
content de vous parler d'assouplissement. J'ai appris qu'ils étaient
obligés de plier la tige un peu parce que c'était trop raide.
Même, je pense qu'ils sont dans l'illégalité, si vous
voulez qu'on soit aussi rigide que vous l'avez été depuis
quelques jours.
Quoiqu'ils soient dans l'illégalité, ils n'ont pas besoin
de s'inquiéter de nous, parce qu'on va redresser la loi et les
règlements en temps utile. On ne peut pas tout faire en même
temps. C'est évident que si eux... Je vous donne un exemple, vous l'avez
lu dans le rapport Rondeau, sans doute. Ils vous disent: Quand des immigrants
arrivent de Hong Kong, d'après la loi, ils seraient obligés
d'envoyer leurs enfants à l'école anglaise. Ils
s'aperçoivent qu'il y en a qui sont rendus en quatrième et
cinquième année du secondaire...
Le Président (M. Bissonnet): M. le ministre, si vous
voulez parler dans le micro.
M. Ryan: Merci. Ils s'aperçoivent que les enfants sont
rendus en quatrième ou cinquième année de sencondaire, ils
disent: On va passer par dessus, on va les laisser aller à
l'école anglaise. C'est illégal. Quel scandalel Quel crime de
lèse-majesté contre l'avenir de la nation. Ces gens agissent avec
bon sens et réalisme. C'est la loi qui n'est pas correcte; ce n'est pas
eux, c'est la loi. Il faut viser à assouplir la loi quelque part.
Pensez-vous que je vais les renvoyer, demain matin, parce qu'ils agissent
ainsi? Au moins, je suis au courant. Je pense que mon
prédécesseur n'était même pas au courant. Il ne l'a
jamais laissé savoir. Cela n'a pas paru dans ses interventions
législatives.
Je vous dis que nous allons modifier cette situation de manière
que les actes administratifs de ce bureau soient vraiment en conformité
avec la loi et de manière que la loi soit en conformité avec les
réalités du temps et non pas simplement avec nos mythes à
nous. De ce point de vue, je ne pense pas que cela donnerait grand-chose,
étant donné l'indifférence à peu près totale
que le Parti québécois manifestait envers ces deux organismes au
cours des dernières années, de fournir aux représentants
du Parti québécois à cette commission l'occasion de
prolonger leur "filibuster" en entendant les deux organismes.
Je voudrais assurer, mes collègues de l'Opposition, que s'ils
veulent s'associer avec nous à un travail constructif de
perfectionnement de certains aspects de la loi 101 comme ceux que nous
discutons présentement, nous serons très heureux de recevoir ces
organismes en commission parlementaire, d'entendre leur version, mais dans un
contexte qui se prêtera à ce genre d'exercice et non dans le
contexte où nous sommes actuellement.
Je vous invite, encore une fois, à reconsidérer votre
position, à vous demander s'il ne serait pas préférable
que nous réglions rapidement ce problème qui traîne dans le
paysage depuis neuf ans pour être en mesure d'aborder enfin, dans un
esprit serein et constructif, orienté vers le bien
général, des problèmes comme ceux qui vous
intéressent à juste titre, mais dans un autre contexte.
C'est la réponse que nous sommes obligés de fournir
à la suggestion que vous avez faite, suggestion dont le
bien-fondé, en d'autres circonstances, pourrait être
extrêmement intéressant à examiner, mais qui nous
apparaît de nature plutôt dilatoire dans le contexte où nous
sommes présentement.
Le Président (M. Bissonnet): Mes chers collègues,
comme il est 11 h 55, et que la députée de Marie-Victorin m'a
demandé la parole, compte tenu qu'il ne reste que cinq minutes avant
d'ajourner cette séance, je me permets, avec votre permission,
d'ajourner cette séance sine die.
Une voix: Parfait, d'accord.
(Fin de la séance à 23 h 55)