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Version finale

33rd Legislature, 1st Session
(December 16, 1985 au March 8, 1988)

Wednesday, June 11, 1986 - Vol. 29 N° 12

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi 58 - Loi sur l'admissibilité à l'enseignement en anglais de certains enfants


Journal des débats

 

(Onze heures trente-trois minutes)

Le Président (M. Thérien): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance ouverte. Je demanderais au secrétaire de faire part des remplacements, s'il y a lieu.

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Cusano (Viau) remplace M. Bradet (Charlevoix).

Le Président (M. Thérien): Je rappelle donc le mandat... Pardon? M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Je voudrais indiquer le remplacement de Mme Vermette (Marie-Victorin), qui sera probablement des nôtres après que la commission parlementaire étudiant la Loi modifiant la Loi sur la sécurité dans les sports aura terminé ses travaux. D'après l'information qu'on a du leader du gouvernement - mais ce sont des choses qu'on ne contrôle pas - cela pourrait être assez court. Je voudrais la faire remplacer par M. Boulerice (Saint-Jacques), mais tout dépendant de la longueur des travaux. En termes clairs, ce que je demande encore une fois - et je voudrais avoir la compréhension des ministériels - c'est qu'à partir du moment où il y a des travaux qui exigent que des membres de la commission soient ailleurs, qu'il y ait consentement pour avoir une personne qui remplace Mme la députée de Marie-Victorin, mais pour des moments dont j'ignore la durée, jusqu'à ce soir.

Le Président (M. Thérien): Est-ce qu'il y a consentement?

M. Cusano: Oui, M. le Président. II y a consentement, encore pour faire preuve de notre esprit très libéral.

M. Gendron: Un esprit très libéral pour la demande que je vous ai faite. Ailleurs, j'ai des problèmes parfois. Mais pour ce que je vous demande, je reconnais votre esprit libéral.

Le Président (M. Thérien): M. le député d'Abitibi-Ouest, la demande était sur le remplacement.

Je rappelle le mandat de la commission qui est de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 58, Loi sur l'admissibilité à l'enseignement en anglais de certains enfants.

Décision du président relativement au droit de parole

Aux membres de la commission, avant de reprendre nos travaux ce matin, j'aimerais faire part d'une décision concernant une question de règlement qui a été soulevée hier soir, juste avant l'ajournement de la séance. Alors que je m'apprêtais à mettre aux voix une motion de sous-amendement, le député de Verchères m'a signalé qu'il désirait intervenir après les votes, sur les motions de sous-amendement, d'amendement et sur la motion présentée en vertu de l'article 244. Je lui ai alors signalé que le député de Viau m'avait demandé la parole et que cette demande avait été faite il y a au moins une heure et qu'elle avait été répétée depuis ce temps. J'ai sorti, tel que souhaité, les minutes, les galées.

En vertu de l'article 33 de notre règlement, le député qui désire faire une intervention doit se lever et demander la parole au président. Cette règle s'applique également aux travaux des commissions, mais la pratique qui s'est développée au cours des ans veut que le député n'ait pas à se lever en commission pour demander la parole. De façon générale, la demande d'un temps de parole en commission se fait de façon très informelle. Cependant, comme l'ont mentionné les députés de l'Opposition, il est bien évident que le président ne peut pas inscrire la demande d'un député plusieurs heures à l'avance.

Comme le précisait le président de la commission du budget et de l'administration dans une décision rendue le 12 avril 1984, le choix d'accorder la parole à tel ou tel député relève de l'entière discrétion du président qui devra néanmoins distribuer des droits de parole en toute équité. De plus, M. Arthur Beauchesne, dans son traité de jurisprudence parlementaire, écrit à la page 99 que l'ordre des interventions est laissé entièrement à la discrétion de l'Orateur qu'est le président.

Les députés ministériels ont invoqué le principe d'alternance pour motiver le fait que la parole devait être accordée au député de Viau. Dans le cas présent, cependant, je vois mal comment cette règle pourrait être appliquée, puisque l'alternance veut que l'on accorde la parole à un député en faveur d'une motion et ensuite à un député qui s'y

oppose. Puisque la commission n'étudie présentement aucune motion, je ne peux pas déterminer qui est pour et qui est contre.

Considérant le fait qu'en commission, la demande au président d'un droit de parole se fait habituellement de façon informelle, considérant le fait que le président doit accorder les droits de parole en toute équité pour tous les membres de cette commission et qu'il est le seul juge à cet effet, considérant le fait que depuis le début de nos travaux, les députés de l'Opposition ont eu l'occasion de présenter une motion préliminaire ainsi que plusieurs motions d'amendement et de sous-amendements, considérant le fait que le député de Viau m'a demandé la parole à plusieurs reprises, y compris quelques minutes avant que le député de Verchères fasse sa propre demande - je l'ai même signalé au député d'Abitibi-Ouest lorsque nous nous étions entretenus quelques instants avant son intention j'estime donc qu'en toute équité, le député de Viau peut maintenant prendre la parole.

Je cède maintenant la parole au député de Viau.

M. Cusano: Je vous remercie, M. le Président.

Nous avons écouté depuis le début des travaux de cette commission, venant de l'autre côté des arguments sur le fait qu'ils désiraient entendre certains organismes. Je dois interpréter les gestes qui ont été posés comme justement une obstruction systématique de la part de l'Opposition.

M. Jolivet: M. le Président, une question de règlement.

Le Président (M. Thérien): M. le député de...

M. Jolivet: Comment, en vertu du règlement, le député peut-il interpréter nos actions et le faire de cette façon? II n'a pas le droit d'insinuer quoi que ce soit pour le travail que nous avons fait comme Opposition. Je n'accepte pas qu'il insinue des choses qui n'ont pas exactement la teneur qu'il dit.

Le Président (M. Thérien): Donc, M. le député de...

M. Cusano: M. le Président, je vais retirer mes propos.

Le Président (M. Thérien): M. le député de Viau, je vous inviterais à avoir des propos moins cyniques.

Motion proposant de procéder immédiatement à l'étude détaillée

M. William Cusano

M. Cusano: C'est bien! Alors, M. le Président, pour ne pas retarder les travaux de la commission, j'aimerais à ce moment-ci présenter une motion. Elle se lit comme suit: Que l'on passe immédiatement à l'étude détaillée de l'article 1 et des articles suivants du projet de loi 58.

Le Président (M. Thérien): Oui. M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: M. le Président, je vous demande la parole sur la recevabilité de cette motion, à moins que vous ne vouliez prendre quelques minutes...

Le Président (M. Thérien): Je demanderais juste, au préalable, d'en avoir une copie et de prendre deux minutes pour l'examiner.

M. Gendron: En tout cas, je vais vous indiquer que je veux plaider sur la recevabilité de cette motion. Je suis prêt à vous laisser vos deux minutes. Vous me direz à quel moment vous serez prêt à me laisser le droit de parole et il me fera plaisir de l'exercer.

Le Président (M. Thérien): Â l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons maintenant reprendre nos travaux. Je céderai la parole au député d'Abitibi-Ouest. Avant, je voudrais dire que j'accepterai quelques faits pour expliquer et mieux comprendre la motion, mais qu'on ne s'éternisera pas là-dessus. M. le député d'Abitibi-Ouest.

Débat sur la recevabilité

M. François Gendron

M. Gendron: Je suis d'accord, je ne m'éterniserai pas. Je veux tout simplement vous indiquer...

M. Jolivet: Juste un instant!

M. Cusano: Je suis prêt à écouter le député d'Abitibi-Ouest, mais j'aurai aussi des commentaires à faire sur la recevabilité de la motion.

M. Gendron: D'accord. Je pense que la motion qui est présentée par le député de Viau à ce moment-ci est une motion irrecevable dans la pratique de nos travaux. Pourquoi j'ai cette prétention? C'est ce que je veux plaider sur l'irrecevabilité. Il est clair, pour n'importe qui a assisté à nos travaux, d'ailleurs, dans les premiers commentaires du député de Viau, lorsque vous l'avez rappelé à l'ordre, que c'était pour utiliser l'argument que, nous, nous aurions utilisé des motions pour faire une obstruction systématique à l'étude détaillée

de l'article 1 et du projet de loi. Donc, le but de la motion présentée par le député de Viau est on ne peut plus clair, c'est de limiter certains députés dans leur désir de voir la commission procéder à des consultations particulières et, en conséquence, il fait motion pour limiter le point de vue de l'Opposition de procéder à des consultations particulières.

C'est une motion tout à fait irrecevable, parce qu'elle tend à limiter le droit de parole, elle tend à limiter le droit d'expression dans l'exercice de nos fonctions. Pourtant, s'il y a un droit qui est largement reconnu en vertu de la pratique et de nos règlements, c'est bien celui de la libre expression du député et c'est un privilège du droit du député au sens juridique du terme de pouvoir s'exprimer le temps qu'il le désire. D'ailleurs, ce principe a été consacré tant par la Loi sur l'Assemblée nationale que par les règles de procédure, les usages et les coutumes. Le règlement ne prévoit - et je veux attirer votre attention là-dessus -aucunement le type de motion que le député de Viau vient de présenter. Dans le règlement, il n'y a aucun article qui stipule qu'on peut limiter le droit de parole d'un député et, si oui, et c'est là l'intention claire du député de Viau, il y a des dispositions précises dans le règlement pour aller dans le sens souhaité par le député de Viau, mais non pas par une motion, comme il vient de l'énoncer.

Si le député de Viau veut tout de suite utiliser l'article 251 du règlement, libre à lui de le faire, mais il faudrait qu'il présente une motion spécifique là-dessus disant: Nous, comme ministériels, on a décidé de limiter et de faire arrêter tout de suite la possibilité pour les membres de l'Opposition de continuer ce qui nous paraissait nécessaire, c'est-à-dire des motions pour des consultations particulières parce que nous sommes toujours convaincus que l'ensemble des motions que nous avons présentées pour procéder à des consultations particulières auraient au moins eu le mérite d'éclairer davantage le débat et la question, et il appartient à l'Opposition de décider à quel moment l'Opposition peut cesser le fait de tenir des consultations particulières.

Là, par la motion qui nous est présentée par le député de Viau, d'aucune façon on n'utilise un article prévu au règlement. On fait tout simplement motion pour limiter le droit de parole des membres de l'Opposition en procédant à l'étude détaillée du projet de loi. En conséquence, je pense que c'est une motion irrecevable et, nous, on pense que le seul moyen qui existe pour donner suite à l'intention manifestée par le député de Viau, c'est clairement la motion de clôture, et la motion de clôture est prévue à l'article 251. Si le député de Viau veut imposer à ce moment-ci une motion de clôture, qu'il le fasse directement, mais je pense qu'il ne peut pas, à ce moment-ci, limiter le droit de parole et d'expression des membres de l'Opposition sur la nécessité d'entendre des consultations particulières. (11 h 45)

Le Président (M. Thérien): Je vais accorder le droit de parole en alternance sur la recevabilité de cette motion mais, comme je l'ai dit, je vais quand même limiter le nombre d'intervenants. M. le député de Viau.

M. William Cusano

M. Cusano: Pour tenter de vous éclairer, M. le Président, je voudrais vous référer à une décision qui a été rendue en décembre 1984 par un président de commission, M. Leduc (Fabre). Je pense que le contexte était un peu similaire aux travaux de cette commission. La motion avait été présentée par M. Leduc (Fabre) pour qu'on passe immédiatement à l'étude de l'article 1 et des articles suivants du projet de loi en question. Le président de cette commission, M. Tremblay - je corrige ce que j'ai dit tout à l'heure, la motion a été faîte par M. Leduc et la décision rendue par le président, M. Tremblay - disait ce qui suit. Je vous la lis pour vous permettre d'en prendre connaissance: "Messieurs, la commission est libre de ses travaux, elle peut décider majoritairement de procéder immédiatement à l'article 1 ou elle pourrait décider de ne pas procéder immédiatement à l'étude du projet article par article. Dans ce sens, je pense que la proposition du député de Fabre est recevable." Merci.

Le Président (M. Thérien): Je vais maintenant céder la parole au député de La-violette.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Votre décision de permettre des interventions sur la recevabilité en les limitant, je la trouve très sage, en passant. On pourra passer à la motion comme telle à la suite de nos représentations. J'aimerais savoir, si vous limitez le nombre d'intervenants, quel est le temps dont je peux disposer.

Le Président (M. Thérien): Un maximum de cinq ou six minutes.

M. Jolivet: Cinq minutes? Parfait. Il y a, dans le règlement, des articles prévus aux fins d'entendre des gens en consultations particulières, l'article 244. Il est évident que l'article 244 permet à tout membre de l'Opposition d'essayer de convaincre les ministériels par l'intermédiaire de rencontres particulières, d'invitations particulières devant cette commission; le règlement le

prévoit comme tel. S'il le prévoit comme tel, il est évident que j'ai, comme membre de l'Opposition, le loisir de faire toutes les représentations qui s'imposent. Si le gouvernement décide de refuser chacune des motions que je fais, malgré toutes les représentations faites par l'Opposition, libre à lui de le faire, mais est-ce qu'il peut interdire, au moyen de la motion qui est devant nous, la possibilité de présenter des motions? Je pense que non. Le règlement est clair, il dit: Avant de commencer l'étude détaillée du projet de loi, il peut y avoir des motions qui ont pour but que des gens puissent être consultés. La commission est libre et c'est par vote majoritaire que ses décisions se prennent.

Jusqu'à maintenant, nous avons essayé de faire comprendre au gouvernement qu'il aurait intérêt à faire entendre des gens; pour le moment, il ne le désire pas, puisque l'ensemble de nos motions ont été battues: motions d'amendement, de sous-amendement ou principale. Comme le disait mon collègue, le leader adjoint de l'Opposition et député d'Abitibi-Ouest, le leader du gouvernement en Chambre peut présenter une motion qui a pour but de restreindre la discussion ici, à cette commission. Libre à ce gouvernement d'en prendre la décision mais pas ici, en commission. Ce n'est pas parce que des décisions ont été rendues dans le passé, à la suite de représentations que l'Opposition avait décriées à l'époque, alors que le député de Viau et les autres étaient membres de l'Opposition, que l'on doit aujourd'hui imposer ce qui a été imposé alors, semblerait-il, d'après ce qu'il nous a dit tout a l'heure.

D'un autre côté, cet article 251 permet des représentations de part et d'autre et indique pourquoi c'est une mauvaise décision de l'utiliser. Si on le fait quand même, le gouvernement portera le poids de cette décision. Il est évident que le président lui-même ne peut pas restreindre le débat plus que le règlement le permet. Le président d'une commission ne peut en aucune façon restreindre un débat, pas plus, je pense, les moyens que vous voulez utiliser pour nous empêcher de parler, de mettre un bâillon que l'article 251 du règlement certifie comme étant très clair.

D'un autre côté, un argument que je voudrais apporter et qui permet peut-être à la partie ministérielle de réviser sa position, c'est ce qui s'est passé à l'Assemblée nationale et ici à cette même Assemblée lors d'une rencontre que nous avons eue sur le projet de loi 30 qui abroge la commission scolaire du Nouveau-Québec. Nous avions profité des vérifications que nous avions faites pour demander à M. le ministre une consultation particulière. Nous l'avons demandé au président de la commission qui siège actuellement comme membre de la commission et qui avait accepté notre posi- tion; les deux leaders ont discuté de la question et finalement le leader en Chambre a proposé, alors que nous en étions à l'étape de l'adoption du principe, de revenir entre la première et la deuxième lecture pour entendre la commission scolaire de Joutel-Matagami. Le résultat - et c'est ce que je veux bien faire comprendre - à savoir pourquoi nous avons proposé plusieurs motions pour entendre des gens qui ont de près ou de loin une connaissance pleine et entière dans certains cas et partielle dans d'autres mais connaissant quand même l'ensemble du dossier des "illégaux", amènerait peut-être un éclairage qui permettrait à cette commission de mieux étudier l'ensemble du projet de loi article par article de façon détaillée comme le prévoit le règlement.

 l'époque, le ministre avait accepté dans le cas de la commission scolaire de Joutel-Matagami. Le résultat c'est que le ministre a compris; il pourra se vanter, il a le droit de le faire, qu'il est un homme libéral, un homme capable de prendre les idées des autres, de les intégrer et d'en faire un nouveau projet de loi. De notre côté, on pourrait dire comme membres de l'Opposition, et ce serait normal, que grâce à l'intervention que nous avons faite, nous avons permis au ministre de réviser sa position, d'arriver avec un nouveau projet de loi réimprimé. Nous étions d'accord et on le sera encore pour lui permettre de le déposer sans avoir un débat à n'en plus finir sur le projet de loi 30, parce qu'il avait compris.

Nos motions étaient dans ce sens et l'article 244 nous permet de faire des motions pour les convaincre, pour prendre le temps qu'il faut pour convaincre le parti ministériel qui semble avoir la tête dure sur ce point-là, malgré toutes les interventions que nous avons faites. Dans ce sens-là j'aimerais que vous déclariez irrecevable la motion du député de Viau. Dans l'hypothèse où vous accepteriez la proposition nous allons, comme membres du Parlement, accepter votre décision, qu'elle fasse notre affaire ou pas mais en l'acceptant nous continuerons quand même à prendre les moyens que nous avons comme Opposition pour faire comprendre à la population que nous ne voulons en aucune façon du projet de loi 58.

Le Président (M. Thérien): Je rappelle juste aux membres de la commission que c'est à ma discrétion que j'accorde un droit de parole sur la recevabilité ou pas, ce n'est pas sur la motion.

Je cède maintenant la parole au ministre de l'Éducation et député d'Argenteuil.

M. Claude Ryan M. Ryan: M. le Président je veux

plaider pour la recevabilité évidente à mon sens de la motion. Je suis étonné de voir que l'Opposition essaie encore de gagner du temps en cherchant à s'attarder sur ce point particulier. Le précédent qu'a cité le député de Viau est assez éloquent. Il l'est d'autant plus pour moi que j'étais assis, à l'époque, du même côté que les représentants du Parti québécois sont aujourd'hui et que j'ai soutenu à l'époque la thèse qu'ils défendent aujourd'hui. C'était un cheminement assez semblable. Je me souviens très bien que le président de la commission, qui était M. Tremblay, ancien député de Chambly, avait tranché la question très nettement dans le sens qu'a rappelé tantôt le député de Viau. Il n'a pas permis un débat interminable. Tout cela tient dans trois pages de compte rendu des débats de l'Assemblée nationale.

Vous constaterez que selon son habitude le député d'Argenteuil avait été clair mais bref mais, dans ce cas-là, malheureusement peu convaincant. Le président avait rendu une décision contraire aux intérêts que nous croyions évidents de l'Opposition et nous avions accepté la décision, comme c'est notre devoir de le faire, sans discussion. Nous sommes passés immédiatement après la décision du président à l'étude du projet de loi du temps article par article. C'est tout ce que demande la proposition du député de Viau, à ma connaissance.

Maintenant, je voudrais rappeler une chose. Comme il y aura des tendances à crier au martyr à mesure que le caractère dilatoire de la position adoptée par les députés de l'autre côté va se manifester avec plus de clarté, je pense qu'il n'est pas mauvais de rappeler qu'au début des travaux de cette commission, nous n'étions pas obligés d'endurer, endurer au sens tout à fait positif du terme...

Une voix: ...

M. Ryan: ...d'accepter, nous n'étions pas obligés d'accepter le débat prolongé que nous avons eu ensemble. L'article 247 de notre règlement dit ceci: "Lorsque le principe d'un projet de loi a été adopté sans débat, chaque membre de la commission peut, au début de ses travaux, s'exprimer sur son principe et sa teneur générale." À ce moment-là, on nous a demandé: Avez-vous objection à ce qu'il y ait des déclarations générales? Nous avons dit, dans notre esprit libéral, même si nous n'y étions aucunement tenus par le règlement, bien au contraire, mais croyant à la bonne foi de l'Opposition, à son désir de faire avancer les travaux parlementaires: Nous allons consentir à ce que chacun exprime librement ses opinions et à ce qu'on fasse un très bon tour de table.

Une voix: Quel article?

M. Ryan: C'est l'article 247, M. le Président. Nous avons consenti. Par conséquent, nous sommes d'autant plus justifiés à ce moment-ci, après trois journées complètes de débat sur des motions dilatoires qui découlent directement du libéralisme dont nous avons fait preuve au début de nos travaux, de demander en tout bon sens, en tout réalisme, en tout souci de bien servir nos concitoyens, que la commission aborde enfin l'article 1 du projet de loi. C'est ce que dit la motion du député de Viau et je crois qu'elle est recevable.

Le Président (M. Thérien): Je donnerai maintenant la parole au député de Verchères.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: M. le Président, en droit, un mauvais jugement ne fait pas nécessairement jurisprudence. Ce n'est pas parce qu'un président aurait erré dans une décision qu'automatiquement, ce jugement s'inscrit dans la jurisprudence et doit faire que, dorénavant, telle est la ligne de conduite que nous devons adopter.

Le Président (M. Thérien): Jugement Tremblay.

M, Charbonneau: Pardon?

Le Président (M. Thérien): Vous faites allusion au jugement Tremblay.

M. Charbonneau: Exactement. Je le dis d'autant plus qu'à la face même - je vous invite à relire les débats qui ont eu lieu à ce moment-là - il n'y a à peu près pas eu d'argumentation présentée avant que la décision du président Tremblay soit rendue.

D'autre part, si on accepte le principe, on pourrait le pousser jusqu'à l'absurde, c'est-à-dire qu'à ce moment-ci, avant qu'on entreprenne l'étude détaillée en commençant par l'article 1, si jamais vous rendiez une décision dans le sens de l'amendement du député de Viau, cela pourrait vouloir dire que, dorénavant, n'importe quel député ministériel demande la parole le premier et immédiatement présente une motion du type de celle du député de Viau, ce qui aurait pour effet de priver les membres de la commission...

M. Tremblay (Rimouski): Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Thérien): M. le député de Rimouski.

M. Tremblay (Rimouski): La pertinence des propos n'est pas là.

Une voix: Voyons donc!

M. Tremblay (Rimouski): Nous n'avons pas a discuter de la décision que vous avez rendue. Nous avons à discuter de la recevabilité d'un amendement.

Le Président (M. Thérien): M. le député de Rirnouski, le député de Verchères ne discute pas la décision que j'ai rendue au préalable. Il est en train d'orienter la décision que je rendrai tout à l'heure.

M. Charbonneau: Je vous invite à suivre, M. le député. Donc, je répète mon argument: Si vous acceptiez les prétentions du député de Viau, cela pourrait vouloir dire que, dorénavant, les députés ministériels pourraient empêcher toute discussion, toute demande en commission parlementaire, avant l'étude détaillée d'un projet de loi, d'entendre des personnes et des organismes. Je crois qu'il y a une procédure qui doit être suivie. Il y a un droit reconnu dans le règlement qui donne à l'Opposition, quelle qu'elle soit, le pouvoir de faire différentes motions pour entendre des personnes et des organismes avant l'étude détaillée. (12 heures)

De deux choses l'une: ou on accepte ces demandes ou on les refuse. Quand elles sont épuisées, on passe à l'article. Quand elles ne sont pas épuisées, il n'y a qu'une façon d'empêcher l'Opposition de poursuivre ses demandes, c'est d'invoquer l'article qu'a signalé mon collègue d'Abitibi-Ouest. Je crois que M. le député d'Abitibi-Ouest a mentionné l'article 251. Je crois que cet article s'applique à la Chambre et aux commissions.

Autrement dit, si le parti ministériel veut mettre fin aux demandes de l'Opposition qui se font dans un moment particulier, c'est-à-dire avant l'étude détaillée, dans une période prévue à cet effet, il faut qu'il utilise l'article prévu au règlement et nécessaire à cette fin. Je répète mon argument et je vous invite à vérifier ce que cela pourrait avoir comme conséquence de donner raison au député de Viau; autrement, cela pourrait vouloir dire que dorénavant on empêcherait n'importe quelle opposition de présenter... Il ne suffirait que de présenter cette motion au départ, en étant plus rapide que l'autre pour demander la parole, pour que cela ne soit plus possible de présenter des demandes d'audition d'organismes ou de personnes et cela va complètement à l'encontre de l'esprit et de la lettre du règlement.

Le Président (M. Thérien): Je vais reconnaître maintenant Mme la députée de Groulx.

Mme Madeleine Bleau

Mme Bleau: M. le Président, je crois que la motion du député de Viau est recevable. J'y vois deux raisons principales. Depuis vendredi, on est assis ici à la commission de l'éducation pour étudier le projet de loi 58, article par article. C'était très important qu'on puisse le faire. Hélas! Nous n'avons même pas regardé un seul article depuis trois jours. L'Opposition, systématiquement, nous présente motion sur motion en vue de retarder l'étude du projet de loi. Deuxièmement, la session s'achève et il y a d'autres projets de loi à étudier qui sont très importants. Pour ces deux raisons, j'aimerais qu'on déclare recevable la motion du député de Viau.

Le Président (M. Thérien): Je prendrai comme dernière intervention, étant donné que ma discrétion est allée aussi loin que de donner la parole à tous les membres de l'Opposition, celle de Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je plaide contre la motion qui a été présentée. En pratique, elle est irrecevable. Ce que l'Opposition tente de faire par la motion qui est actuellement à l'étude, c'est d'essayer d'amener ce gouvernement, le ministre de l'Éducation et cette commission, à entendre différentes personnes liées directement à la question qui est examinée ici. Vouloir, à ce moment-ci, empêcher cette démarche, limiter ces débats, il me semble que c'est ne pas tenir compte de la pratique antérieure et de l'argumentation et de la défense que faisait le présent gouvernement alors qu'il était dans l'opposition. Ce qui me fait répéter ce que je disais hier, il semble qu'on soit tout à fait à l'aise de tenir deux discours: un discours lorsqu'on est dans l'opposition sur la vertu de certaines réglementations et un discours lorsqu'on est au pouvoir.

À présent, M. le Président, au sujet de la recevabilité de cette motion, a mon avis elle est irrecevable. Elle tente de limiter le droit de parole, le droit de s'exprimer dans l'exercice de nos fonctions. Je dirais que c'est quasiment le seul droit de l'Opposition. Lorsqu'on tente de bâillonner l'Opposition, alors qu'on sait qu'on a une majorité écrasante, je n'en vois vraiment pas l'intérêt, juste en matière de démocratie. Alors, M. le Président, je voterai contre cette motion.

Le Président (M. Thérien): Je vais donc suspendre les travaux pour cinq minutes. Je rendrai ma décision par la suite.

(Suspension de la séance à 12 h 5)

(Reprise à 12 h 17)

Le Président (M. Thérien): À l'ordre,

s'il vous plaît!

La commission reprend ses travaux. J'inviterais les gens à reprendre leur siège, s'il vous plaît!

En ce qui a trait à la décision relative à la recevabilité ou non de la motion, voici ma décision. Ayant pris connaissance du précédent qu'on mentionnait tantôt, soit une motion presque identique présentée le 5 décembre 1984, je vous lirai deux passages et j'interviendrai par la suite sur l'article 251.

Le président d'alors, M. Tremblay, nous disait, le 5 décembre 1984: "Messieurs, la commission est libre de ses travaux. Elle peut décider majoritairement de procéder immédiatement à l'article 1 ou elle pourrait décider de ne pas procéder immédiatement à l'étude article par article. Dans ce sens, je pense que la proposition du député de Fabre est recevable. Maintenant, il y aura lieu, lors du débat, de convaincre les membres de la commission qu'il ne faut pas adopter cette résolution, puisqu'il y a une autre proposition sur la table que vous voudriez déposer".

Par la suite, le même président Tremblay disait: "À mon point de vue, puisque la commission, je le répète, est maîtresse de ses travaux, il peut venir une motion visant à entreprendre une étude ou même à dire: On passe à l'article 25 immédiatement. La commission pourrait décider cela. Elle pourrait décider: On commence à l'article 60 ou à l'article 70. Dans ce sens-là, mon rôle à moi est de recevoir cette proposition et de faire en sorte qu'elle puisse être débattue".

Maintenant, il appartient aux membres de la commission de convaincre leurs collègues qu'il n'est pas opportun de commencer immédiatement l'étude de l'article 1, ce qui a trait à la motion identique présentée le 5 décembre 1984. Quant à l'article 251 évoqué par le député d'Abitibi-Ouest et le député de Verchères, cet article a pour objectif de clore les débats. La motion présentée par le député de Viau n'est pas de clore les débats, mais plutôt de passer à une autre étape de l'étude de la loi.

En ce qui a trait à ce qu'a évoqué le député de Verchères quant au droit de parole, à savoir si c'est le premier qui s'est manifesté qui l'obtient, je tiens à lui dire que cela dépend beaucoup du contexte. Dans le contexte actuel, je pense, ma première décision a été d'accorder le droit de parole au député de Viau, car cettte même décision a été rendue le 5 décembre 1984, presque à la fin de la première journée de débat. Je tiens à vous rappeler que nous sommes sur les débats depuis trois jours, 17 heures 55 minutes, et je pense que l'Opposition a eu tout le temps d'apporter des sous-amendements et des amendements.

Donc, à titre de conclusion, je trouve recevable cette motion présentée par le député de Viau. Nous allons maintenant débattre cette motion.

M. Jolivet: Avant de débattre, compte tenu de votre décision que nous allons respecter, j'aurais une question de directive. D'après ce que vous venez de dire, j'ai bien compris qu'une fois que la motion aura été débattue... Ne préjugeons pas du résultat, peu importe le résultat. Cela veut dire que, dans le même contexte, après avoir regardé l'ensemble des motions que nous avons proposées à partir de ma motion principale -c'était la première motion, il ne faut pas oublier cela - à côté de cette première motion, vous avez jugé bon de donner le droit de parole au député de Viau, comme étant l'alternance. Dois-je comprendre que vous me reconnaîtrez ensuite, en alternance, sur cette motion, une fois que la décision aura été prise sur la motion en discussion?

Le Président (M. Thérien): M. le député de Laviolette, j'ai dit dans mon premier jugement que ce n'était pas la coutume de demander la parole longtemps d'avance. Je tiendrai pour acquis que vous l'avez demandée et en toute équité, comme on en a parlé, on verra après cette motion débattue.

M. Jolivet: Merci.

Le Président (M. Thérien): Tel que les règles le stipulent, M. le député de Viau.

Débat sur la motion M. William Cusano

M. Cusano: Merci. Je crois qu'en votant pour cette motion que j'ai présentée, on sera des deux côtés de cette table, mieux éclairés, pas par une "flash-Hght", mais plutôt par une personne qui connaît très bien son dossier, M. le député d'Argenteuil, ministre de l'Éducation. J'ai bien dit: Pas par une "flash-light". Les discours qui ont été tenus jusqu'à maintenant par l'Opposition portaient justement sur la convocation de certains groupes, pour leur demander de venir ici et témoigner sur certains aspects. Je suis convaincu, premièrement, que le ministre de l'Éducation possède très bien le dossier. Il pourrait répondre à toutes les questions précises et à toutes les inquiétudes que l'Opposition peut avoir. Aussi, je dois dire, d'après mon expérience parlementaire, que normalement, lorsqu'il y a des groupes qui veulent se faire entendre, ils ont l'habitude d'écrire aux membres de la commission et même à la commission même. À ma connaissance, on n'a rien reçu à cet effet, soit que des groupes voulaient se faire

entendre.

Je pense que pour le bon fonctionnement de cette commission, on doit procéder à l'étude des articles. Je crois que toutes les interrogations... Justement, je vous en cite une, celle particulièrement de la députée de Chicoutimi. Elle était préoccupée par le recommencement d'un tel système. Je pense que le ministre doit être en mesure d'expliquer exactement, à l'article 11 du projet de loi, les mesures qui sont prises et les moyens que lui, en tant que ministre, entend prendre. Alors, sans plus d'argumentation, je pense qu'on a eu beaucoup de questions qui ont été posées. Le ministre est en possession du dossier et il pourra répondre à toutes les interventions des députés de l'Opposition. Merci.

Le Président (M. Thérien): Merci, M. le député de Viau. Je donne maintenant la parole au député de Laviolette.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Comme responsable de l'Opposition, critique du ministre de l'Éducation au niveau primaire et secondaire, j'ai donc, comme vous me le dites, la période de trente minutes pour essayer de convaincre, encore une dernière fois avant l'adoption de cette motion, les gens de l'opposition.

J'ai écouté avec attention le peu d'arguments apportés par le député de Viau, qui, sait dit en passant, était membre du comité Rondeau, membre politique que le ministre avait délégué pour lui donner, à partir d'un mandat bien spécifique, une réponse aussi, à mon avis, très spécifique sur un sujet, vous allez bien le comprendre, aussi très spécifique. Le député de Viau a peut-être dépassé sa pensée. Je ne veux lui imputer aucun motif. Il a dit: Nous ne vouions pas être éclairés à cette commission par des "flash-light". J'ai donc dû comprendre que fort probablement, il voulait qu'on soit éclairé par un "spotlight". Le problème que j'ai c'est: est-ce que le ministre est le "spotlight" nécessaire?

Le Président (M. Thérien): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Je crois comprendre que l'on considère tous les gens que nous avons demandés, incluant M. Rondeau, que je considérerais maintenant comme une "flashlight"... Je m'excuse, je n'ai pas dérangé.

Une voix: Parlez pas d'une veilleuse.

Le Président (M. Thérien): S'il vous plaît! Ce n'est surtout pas aux membres qui sont hors commission à faire des commentaires.

M. Jolivet: Donc, je vais utiliser mes trente minutes de façon plus précise si on continue à m'interrompre de cette façon.

Le Président (M. Thérien): S'il vous plaîtl

M. Jolivet: Peut-être que je ne prendrai pas trente minutes si on cesse de m'interrompre.

M. Khelfa: M. le Président, c'est le leader de l'Opposition qui dérange.

Une voix: II n'a pas dit un mot.

Le Président (M. Thérien): M. le député de Richelieu, ce n'est pas un point de règlement. Nous allons continuer. On demanderait à tous ceux qui sont là de garder le respect de ceux qui parlent. M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Comme ce sont, dans bien des cas, de jeunes députés, jeunes, non pas en âge, mais du point de vue de l'expérience en cette Assemblée nationale, je dois dire que le leader de l'Opposition, tout comme le leader du gouvernement, a des droits en vertu des règlements et que s'il est ici, le leader de l'Opposition y est de son plein droit.

Ce que j'étais en train de dire, c'est qu'on vient de me dire que M. Rondeau était une "flash-light", que les gens que nous avons convoqués à cette commission, la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec, c'était des "flash-lights". Quand nous avons invité le conseil scolaire de la Commission des écoles catholiques de Montréal, je dois donc comprendre de la part du député de Viau qui était même membre de cette commission scolaire, comme directeur d'école, en plus d'être membre du comité Rondeau, que ce sont des veilleuses, des petites lumières. Je regarde: on avait convoqué le Collège Dawson. Je pense que quand les gens liront nos écrits, ils seront très surpris, eux qui sont des gens de bonne connaissance, et des gens qui sont de bonne expérience, d'être traités de veilleuses. Me François Aquin, vous pouvez vous imaginer. Me François Aquin. Un homme aussi respectable, aussi respecté, connaissant vraiment l'ensemble du sujet pour avoir proposé au ministre, à l'époque, Camille Laurin, une façon de régler le problème des "illégaux".

Léon Dion. Vous vous imaginez une personne qui a été la conscience du Parti libéral, être une veilleuse. Imaginez-vous. Personnellement, j'en suis abasourdi, sidéré.

Charles Castonguay, le mathématicien qu'on connaît que vous nommez démographe, être une personne qui est une lumière après toutes les études qu'il a présentées comme

universitaire. Vous vous imaginez la poignée que m'a donnée le député de Viau pour essayer de vous convaincre que tout cela ensemble, petites veilleuses, une à côté de l'autre, aurait pu faire une lumière beaucoup plus grande que la simple lumière appelée "spotlight", qui est votre ministre de l'Éducation. Je pense que l'accumulation de chandelles dans le principe lumineux amène une luminosité - je n'en reviens pas - par rapport à une petite chose appelée "spotlight". (12 h 30)

M. Parent (Sauvé): Le député en arrière, c'est un "flood" et ce n'est pas un "floodlight".

M. Jolivet: Cela m'a tellement fait rire, la proposition du député de Viau, que je ne pouvais pas ne pas m'en servir. Pensons à l'Alliance de Montréal, à la CEQ, imaginez-vous, la PAPT. S'il fallait que je parle à M. Doby de la PACT...

Une voix: ...

M. Jolivet: Je l'ai connu. Quand on a dit qu'on inviterait la PACT, j'espérais qu'ayant vécu le problème, les gens de la PACT auraient demandé son éclairage pour répondre de la meilleure façon à l'ensemble des membres de cette commission. Imaginez-vousi le député de Viau, membre associé comme directeur d'école de la PACT et fort probablement encore en congé sans traitement, qui dénigre sa fédération et son organisme en le traitant de petite veilleuse. Moi, j'aimerais bien que vous regardiez le problème autrement, que vous examiniez cela autrement. Il a dit: On devrait faire comparaître le ministre... Ce n'était pas tout à fait de cette façon, mais j'ai cru comprendre que le ministre pourrait nous éclairer. Nous n'avons pas demandé au ministre de comparaître, nous avons dit: Vous allez répondre aux questions de votre projet de loi basé sur un rapport qui, lui, est partisan. Ce n'est pas comme demander à des gens qui n'ont aucune attache à ce projet de loi, autre que d'avoir exprimé leur opinion, de venir nous dire ce qu'ils ont à dire, si le projet de loi est bon ou mauvais, selon leur opinion. Je n'ai pas de préjugé sur leur opinion.

Quand je regarde tout cela bien honnêtement, je dois dire qu'on nous sert, en contrepartie de tous éléments, une personne: le ministre de l'Éducation. J'ai toujours considéré que dans cette personne, en même temps, il y avait deux personnages et je vais vous expliquer. D'abord, comme éditorialiste, c'est un homme moralisateur, capable de prendre le consensus des gens et de l'exprimer dans un écrit, noir sur blanc; en même temps, directeur du journal Le Devoir et, là, un peu plus autoritaire, un homme respecté, semblait-il, à l'époque, mais toujours autoritaire, faisant même autorité. Donc, à l'époque du Devoir, deux personnalités: autoritaire, comme directeur du Devoir, et moralisatrice et consensuelle, comme il l'a dit souvent, dans ses écrits. "Consensuelle" est un très beau mot français que le ministre emploie souventefois tout comme "circonvolution".

Une voix: "Circonvulatoire".

M. Jolivet: "Circonvulatoire". Le ministre pourra me corriger, mais je me souviens qu'en Chambre il avait utilisé un très beau mot. Il a par la suite été nommé député, chef de parti et puis à nouveau député et maintenant ministre. Ce personnage, dans l'Opposition, était, comme lorsqu'il était éditorialiste, moralisateur, capable de prendre les consensus et de les exprimer pour forcer, inviter le gouvernement à changer d'opinion. Nombre d'écrits pourraient être repris de ces commissions parlementaires interminables que nous avons vécues comme gouvernement à l'époque et, mot, comme président - le ministre s'en souvient - j'avais la même patience et, j'espère, la même sagesse que le président de séance actuel de prendre les meilleures décisions pour la bonne conduite de nos commissions.

Devenu ministre, ce n'est pas la même chose et vous l'avez vécu comme chef. Il n'était pas comme lorsqu'il était simple député, hein? Il avait une forme d'autorité plus forte, il contrôlait. Il connaissait tout, il nous l'a dit: J'ai vérifié, j'ai analysé, j'ai regardé et j'ai décidé. Maintenant que la décision est prise, je ne veux plus rien savoir des autres, c'est ma décision. Ce qu'on essaie de faire, c'est de le convaincre, de l'amener à corriger sa pensée.

Un exemple: II est arrivé comme ministre, tout dernièrement, et à partir de ce qu'il était, il a regardé, avec ses collaborateurs immédiats, les sous-ministres, le projet de loi 30. Je pense qu'il vaut même la peine de chercher la copie pour lire le titre exact afin de ne pas vous donner un mauvais titre: Projet de loi 30, Loi abrogeant la Loi concernant la Commission scolaire du Nouveau-Québec. M. le ministre présente ce projet de loi inoffensif, tout petit: quatre articles, le premier disant que la commission est abrogée; le dernier, le quatrième, disant à quel moment il entre en vigueur. Il y a deux articles entre les deux et je vais vous expliquer pourquoi je ramène cela - je suis pertinent et vous allez voir pourquoi.

Le Président (M. Thérien): M. le député, je veux vous rappeler que l'objet, c'est le projet de loi 58 mais non le projet de loi 30. Si cela mène à la pertinence, on

vous écoute.

M. Jolivet: Je dis simplement que ce pourquoi j'amène cette chose, c'est que nous proposons actuellement d'entendre des gens qui viendraient convaincre le ministre, le "spotlight" de la commission, de changer d'idée? Voire sur le principe même du projet de loi 58 dont je cherche encore le titre, car il y a peut-être des discussions sur le titre - on ne sait jamais ce qui peut se produire. Juste un instant! je vais le retrouver... Loi sur l'admissibilité à l'enseignement à l'anglais de certains enfants. Quand on regarde ça, on peut vous dire une chose bien importante, on peut vous dire que des gens auraient peut-être l'intention de le convaincre, comme on a réussi à le convaincre lors d'une consultation particulière qui a eu lieu sur le projet de loi 30, de changer son projet de loi. Les articles 2 et 3 de celui-ci montraient des problèmes, le ministre en a convenu avec nous. Mme la députée de Groulx était présente. Le président de la commission, qui est membre de la commission d'aujourd'hui était présent, le député d'Arthabaska, alors qu'il n'avait pas de "fan club", était présent, le député de Rimouski était présent...

M. Tremblay (Rimouski): Vous avez l'air d'en avoir un.

M. Jolivet: Non, non, je ne les connais pas, ce sont des gens qui sont venus assister à nos débats parce qu'ils trouvent qu'ils sont intéressants. Je dois vous dire que le projet de loi 30 a été effectivement corrigé. Il sera représenté à l'Assemblée nationale demain, réimprimé avec l'accord de l'Opposition, sans aucune obstruction. Pourquoi ne serait-il pas possible de faire la même chose avec le projet de loi 58? Pourquoi? C'est là que nous croyons que les autres petites lumières additionnées les unes aux autres pourraient nous être utiles. Je vous donne des exemples. Je donne exactement ce que disait le député -j'ai toujours de la difficulté à trouver son nom - de Sauvé: l'Association des commissions scolaires protestantes du Québec - quand il parlait de la commission scolaire protestante du Grand-Montréal, il m'avait corrigé et je l'avais remercié de l'avoir fait - pourquoi la commission scolaire protestante de Québec ne pourrait-elle pas être entendue et additionner sa petite chandelle, sa petite lumière? Pourquoi le Conseil scolaire de l'île de Montréal que nous n'avons pas encore invité ne pourrait-il pas venir? Pourquoi la commission scolaire Jérôme-LeRoyer qui a accepté des "illégaux" ne pourrait-elle pas venir devant cette Assemblée?

Je pourrais en ajouter. On pourrait parler de Sault-Saint-Louis, Sainte-Croix, Lake Shore - Mme la députée de Jacques-Cartier connaît très bien ce secteur

Baldwin-Cartier, Verdun. Pourquoi des commissions scolaires de Greater Quebec, Eastern Townships, Laurentian, Greenfield Park, Châteauguay Valley, Orrnstown, Lake Saint Louis-Châteauguay, le district de Bedford dans les Cantons de l'Est, South Shore, South Central, Richelieu Valley -j'expliquais au député de Richelieu que j'étais même un résident de longue date de la ville de Richelieu - ne pourrait-on pas en parler un peu, St. Lawrence, Eastern Quebec, Greater Hull, Northwestern Quebec, Pontiac?

Pour les cégeps, pourquoi la fédération n'aurait-elle pas été invitée pour ajouter sa petite chandelle à cet éclairage important?

Je pense que le député de Sauvé pourrait nous parler énormément, puisqu'il a été président de commission scolaire à la Commission des écoles catholiques de Montréal, du service régional des admissions de Montréal. Quel a été le rôle de cet organisme? Pourquoi ne pourrait-il pas venir donner son impression? À ce collège de Dawson, on aurait pu ajouter le collège de Vanier, le collège de Champlain, John Abbott. Pourquoi pas?

Je n'avais pas l'intention de convoquer les individus dans ce sens: J'aurais pensé que le député de Viau, de lui-même, aurait dit: Je suis prêt à venir témoigner devant cette commission pour dire quel a été mon rôle dans le comité Rondeau. Â celui-là, on aurait pu ajouter Jeff Polenz, qui était secrétaire du groupe de travail mais attaché politique du ministre de l'Éducation. Pourquoi n'aurait-on pas pu demander à Gérald Brown, qui est directeur des services aux anglophones au ministère de l'Éducation, un homme qui a une bonne compétence, qui connaît l'ensemble du secteur, de nous dire ce qu'il en était de ce comité? M. Macchiagodena, le directeur général adjoint du secteur anglais de la CECM, vous vous souvenez? C'est l'une des parties importantes de notre argumentation quand on dit que le secteur anglais de la CECM, avec la PACT, les directeurs d'école associés à l'intérieur de la PACT... Pour ceux qui ne la connaissent pas, c'est la Provincial Association of Catholic Teachers. Enfin, je l'ai eu!

Il y a d'autres gens aussi qui sont intéressés par ce projet de loi. Le député de Viau dit: On n'a eu aucune demande. II n'y a personne qui s'est poussé dans le métro à Montréal pour nous dire qu'ils voulaient être entendus. Voyons donc! II y a des gens qui ont été en désaccord. À la CEQ, on en a fait mention. L'Alliance des professeurs de Montréal a dit: Cela n'a pas de bon sens, l'amnistie générale, sans au moins avoir les moyens de contraindre les individus à ne plus jamais recommencer et à s'intégrer dans le secteur francophone. Pourquoi n'aurait-on pas l'occasion de faire venir un groupe, tels le Mouvement Québec français, le Mouvement

national des Québécois, la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, qui est vraiment touchée par les problèmes qui existent actuellement dans l'ouest de Montréal, rue Sainte-Catherine? Pourquoi pas Alliance Québec, tant qu'à y être? Parmi les gens qui pourraient venir nous informer? Un autre organisme que le député de Viau doit certainement connaître: le Congrès national des Italo-Canadiens, région de Québec.

M. Cusano: J'en suis membre.

M. Jolivet: Bon, vous êtes membre de cela? Ces gens auraient pu nous donner un éclairage différent du vôtre. Cela ne veut pas dire que, parce qu'ils font partie de votre communauté, ils sont nécessairement d'accord avec vous. Peut-être qu'on aurait pu les entendre. Non, le député de Viau, dans la motion qu'il nous présente, dit: Non, non, on en a assez. On le sait, nous. On a tout décidé. Il n'est pas question qu'on en entende d'autres, même pas les gens de ma propre communauté.

L'Association des Portugais. J'ai jasé avec ces gens pour voir comment ils voyaient le problème, quelles solutions ils proposaient. La communauté hellénique de Montréal... Je pense qu'effectivement on aurait l'occasion dans les heures qui viennent de les convoquer, de demander au secrétaire de la commission de leur envoyer un télégramme et de faire un appel téléphonique additionnel pour s'assurer qu'ils ont été convoqués, leur donner le temps de se préparer et venir ici à cette assemblée, même si, déjà, les gens sont prêts à venir d'eux-mêmes, malgré le fait que le député de Viau dise: Voyons donc! Ces gens-là n'ont pas manifesté le désir d'être entendus. L'Alliance des professeurs de Montréal, la CEQ, qui a présenté des choses à son conseil général. Cela nous permettrait d'entendre vraiment leur opinion. Au lieu de l'avoir dans le bureau du cabinet du ministre, au lieu de l'avoir dans de petites réunions entre les gens de l'Opposition et... Nous, les membres de l'Opposition, les membres de la commission, on n'aurait pas le droit de les questionner? On n'a pas le droit de leur poser des questions nous permettant de nous éclairer avec leur petite chandelle? Voyons donc! Je dis que vis-à-vis de cela l'Opposition se sent un peu "bulldozée" par le gouvernement qui l'empêche d'être éclairée par une commission parlementaire publique. On pourra même inviter les caméras de télévision, comme on l'a déjà fait. Le ministre s'en souvient, j'étais président de cette assemblée, il y avait une rencontre télévisée avec la CEQ. Vous vous en souvenez? Une rencontre télévisée. Le ministre, qui était dans l'Opposition, a pu se permettre de passer tous les messages qu'il voulait à la population qui l'écoutait. Je sais que cette commission parlementaire a été très écoutée. Elle a eu un impact important. Pourquoi ne le permettrait-on pas au lieu de faire ce que le député de Viau nous propose, c'est-à-dire nous dire: Faites-nous confiance, nous, on connaît tout, nous sommes la voie, la vérité et la vie?

M. Gendron: C'est cela.

M. Jolivet: C'est un peu cela. On nous demande d'être un peu comme à l'époque des croisés dont la devise était: Prie, communie, sacrifie-toi, sois apôtre. Je pense que ce qu'on nous propose, c'est de le croire sur parole en disant: Moi, M. le ministre, je suis la voie, la vérité et la vie. On pourrait revenir aux premiers propos de notre commission parlementaire quand le ministre disait: De ma grandeur solennelle, voici ce que je vous propose et écoutez-nous. Mon fils, écoutez-nous!

Une voix: C'est cela.

M. Jolivet: Je pense qu'il y aurait d'autres gens dans le groupe des cadres scolaires - je n'ai pas parlé de la CSN, de la FTQ - les professionnels des commissions scolaires qui ont vraiment décrié la Commission des écoles catholiques de Montréal tout récemment sur sa façon d'agir. Je ne vous ferai pas mention des télégrammes, des télex qu'on a reçus aujourd'hui, je vous en fais grâce, mais je les ai ici. On parle de la commission de l'éducation et des problèmes qui existent actuellement et qui... Je vais même vous les sortir. Je les ai quelque part. Je les ai eus ce matin.

Une voix: II est difficile de les retrouver, n'est-ce pas? (12 h 45)

M. Jolivet: Non, non. Vous allez voir. Écoutez, je ne parle jamais à travers mon chapeau. J'ai les textes.

La CECS, qui est la Commission des enseignants des commissions scolaires, dénonce les abus des employeurs dans la détermination des surplus du personnel enseignant. Peut-être que si la PACT était venue avec les gens de l'Alliance - vous allez voir que c'est pertinent - on aurait posé des questions à cette association. Pourquoi a-t-elle fait le boycottage? L'a-t-elle fait pour préserver des postes d'enseignants? J'ai entendu un oui et je pense que c'est vrai ce qu'on me dit là. La CEQ aurait pu dire que c'est elle qui a perdu ces postes, dans le secteur francophone, postes prévus par la loi 101 que les gens respectaient.

Je pense que c'est important. La PACT aurait pu nous dire: Effectivement, en ayant 1600 élèves de plus dans le secteur

anglophone, on a pu préserver dix, quinze jobs. Mais pendant ce temps, les enseignants des niveaux primaire et secondaire du secteur francophone ont perdu ces jobs. On aurait pu poser la question à la PACT. Mais non. Les gens nous disent non. Et on aurait pu inviter les cadres scolaires, les directeurs généraux, pour voir ce qui s'est passé.

M. Rondeau qui a été directeur général de la CECM aurait pu nous dire, quand il a pris la relève, avant de quitter pour être un conseiller spécial du ministre, les difficultés qu'il a eues avec les décisions administratives prises par ia Commission des écoles catholiques de Montréal. On aurait pu inviter les directeurs d'écoles anglaises et on aurait pu dire au député de Viau: Vous êtes un ancien directeur d'une école anglaise qui est une très belle école d'ailleurs, Saint Rita d'Amos, à Montréal...

M. Cusano: Ce n'est pas Saint Rita d'Amos.

M. Jolivet: Non? Mais c'est Saint. Rita, d'abord.

M. Cusano: Sainte Rita. M. Jolivet: Sainte Rita.

Le Président (M. Thérien): Sainte Rita et Amos

M. Jolivet: Ah! Vous avez été à Sainte Rita et à Amos.

M. Cusano: Oui. Et à d'autres écoles aussi.

M. Jolivet: Ah bon! Celle-là, Amos, je la connais. D'accord. Donc Sainte Rita et Amos sont deux édifices différents l'un de l'autre, mais ce sont deux écoles anglaises de Montréal au niveau italophone. Non?

M. Cusano: Bien, c'est...

M. Jolivet: C'était pour les Italiens, non?

M. Cusano: Pardon?

M. Jolivet: Ce n'était pas...

Une voix: Ne parlez pas à travers votre chapeau!

M. Cusano: Non, les Italiens sont en Italie.

M. Jolivet: D'accord. Parfait. Donc, c'étaient les anglophones de Montréal. Le député est en train de nous redire la difficulté d'associer l'enfant en Italie et les parents au Québec.

Le Président (M. Thérien): Question de règlement, M. le ministre.

M. Ryan: Pour éviter toute confusion, j'ai l'impression que le député n'a pas bien compris ce qu'a dit le député de Viau, que les Italiens étaient en Italie.

M. Jolivet: Oui, oui, j'ai compris.

M. Ryan: Et qu'au Québec, ce sont tous des Québécois.

M. Jolivet: Oui, oui, oui. J'ai compris. J'ai parlé du secteur.

M. Ryan: Ah bon!

M. Jolivet: Je n'ai pas fait de distinction en disant ces choses. J'ai parlé du secteur, un secteur anglophone où les Italiens... C'est ce que j'ai posé comme question, à savoir si cela était dans un secteur où il y a beaucoup d'Italiens.

M. Cusano: Les Italiens sont...

M. Jolivet: Ils sont en Italie.

M. Cusano: ...dans des écoles en Italie.

M. Jolivet: Parfait. Ensuite, pour les autres intervenants, on aurait pu faire appel à la commission d'appel - on en a fait mention lors de nos motions - et au Bureau d'admissibilité à l'école anglaise. On aurait même pu demander l'avis du Conseil supérieur de l'éducation. Le ministre, qui est un homme soucieux des consultations, des vérifications et des consensus...

Une voix: Jadis.

M. Jolivet: Jadis? Oui, c'est vrai, jadis. Il pourrait peut-être nous parler du Conseil supérieur de l'éducation et l'inviter ici pour qu'il nous dise comment il a vu le problème. Il y a aussi le Conseil de la langue française. En fait, il y en a bien d'autres. Je pourrais en ajouter d'autres. J'en ai pris quelques-uns parmi tous les organismes qu'on aurait pu inviter à cette commission pour additionner leurs petites lumières, leurs petites chandelles et former vraiment une lumière très éclairante sur les travaux de notre commission avant, comme le prévoit l'article 244 du règlement, d'entreprendre l'étude article par article du projet de loi comme tel.

Mais qu'est-ce que je comprends? Je comprends que les gens qui sont en face de nous sont encore traumatisés par le non. Ils sont un comité du non. Non à la loi 58 pour consultation. Non à la loi 61 pour Radio-Québec; consultation particulière. Non à la loi qui est débattue à l'Assemblée nationale,

la loi 19. Non.

M. Gendron: Non merci.

M. Jolivet: Non merci. Je comprends le député d'Arthabaska. Selon l'expression bien québécoise, il est "strike". Il est directement "strike" sur le non. Non merci. Non merci, nous sommes la voie, la vérité et la vie. Nous connaissons tout. Nous n'avons pas besoin des éclairages des gens de l'extérieur.

Une voix: Le ministre de l'Éducation est "striké"!

M. Jolivet: Je vous pose une autre question qui est bien importante. C'est que moi, personnellement, vis-à-vis de cela, comme membre de l'Opposition quel est donc mon pouvoir si on est considéré comme des gens qui n'étudient rien, qui ne connaissent rien, qui n'ont pas la moindre idée? Tout à l'heure, des gens nous disaient que nous avions perdu du temps. On n'a pas perdu de temps. On a essayé de vous convaincre, mais vous êtes têtus. C'est cela le problème. On a essayé de vous convaincre. C'est sûr qu'on a pu passer jusqu'à maintenant 17,5 heures, maintenant près de 18 ou 19 heures à vous convaincre. On va essayer de le faire jusqu'à la limite permise par le règlement. Le président, dans sa sagesse, nous a permis de le faire en nous disant: Je vais examiner votre proposition et après cela, je déciderai. Je pense qu'il a pris des décisions éclairées à la suite de notre position et de la vôtre. Il a pris une décision que nous respectons.

Mais cela n'empêche pas que nous voulions encore vous convaincre. Il me reste peut-être encore cinq minutes pour vous convaincre. Je vais essayer de le faire parce que c'est important. Pas pour nous autres mais pour ce que le projet de loi 58 représente. Voici un bel exemple, et je vais être pertinent, à l'article 1 du projet de loi: La date de ce projet de loi c'est le 15 avril. Vous avez une copie? Passez-moi une copie. On dit: L'enfant qui, le 15 avril 1986, recevait l'enseignement en anglais au Québec dans une classe maternelle - attention maternelle - ou à l'école primaire ou secondaire sans y être admissible peut être admis à l'enseignement en anglais, aux conditions suivantes et on donne les conditions. Écoutez bien cela. Le ministre nous a dit qu'il y avait eu des formes de rétroactivité dans la loi 101 parce que la date d'inscription en vertu des demandes faites par les parents c'est au mois de mars de l'année qui précède l'année scolaire. Mais la date finale d'inscription, on s'en souvient, en vertu de l'ensemble des conventions collectives, c'est le 30 septembre. Dépassé le 30 septembre, si la commission scolaire accepte des gens elle n'est pas admissible aux subventions gouvernementales. Entre cela, elle est admissible.

Là cela crée des problèmes qu'on aurait pu vous expliquer: quelqu'un qui part du secteur public et qui s'en va au secteur privé et que le secteur privé, le 30 septembre au soir, le lendemain, le 1er octobre décide de retourner au secteur public, cela fait que le secteur public se retrouve avec des enfants sans aucune subvention gouvernementale pendant que le secteur privé, lui, profite de la subvention gouvernementale. Ce sont des problèmes qu'on aurait pu expliquer. Mais le 15 avril, cela veut dire quoi? Peut-être que l'Alliance des professeurs de Montréal aurait pu nous dire qu'ils sont contre cela. Cela n'a pas de bon sens.

Pourquoi la date arbitraire du 15 avril sinon pour amener, d'une certaine façon, dans les derniers moments de l'inscription, dans l'année qui vient, au mois de mars, des gens qui, profitant du fait que le Parti libéral avait été élu avec le but de s'engager à corriger le cas des "illégaux" se retrouvent à avoir transféré l'inscription à ce moment. Étes-vous capables de me prouver qu'il n'y en a pas eu, vous autres? Êtes-vous capables de me prouver que la loi qui est devant nous ne permettrait pas à des enfants de s'inscrire et d'être déjà inscrits sur la liste pour l'année prochaine et qui fait que la meilleure date pourrait plutôt être le 30 septembre 1985? Quelles sont les garanties que le chiffre de 1500 ou 1600 dont on parle n'est pas rendu à 2000 ou à 2500? Qui me donne ces garanties? II y a une dette électorale qui est en train de se payer - ce n'est pas moi qui le dis. Il y a du monde qui l'a dit - avec la date du 15 avril. À moins que le ministre...

Le Président (M. Thérien): M. le député de Laviolette, s'il vous plaît. Question de règlement, M. le député de Viau.

M. Jolivet: C'était trop bon, n'est-ce pas?

M. Cusano: Le député a cité l'article 1 et on ne parle pas d'inscription. On parle d'avoir reçu l'éducation. On dit "recevait l'éducation". On ne parle pas d'inscription.

Le Président (M. Thérien): M. le député de Viau, ce n'était pas une question de règlement.

M. Jolivet: Cela veut dire qu'il y a peut-être des gens qui reçoivent à ce moment. Moi j'espère qu'on va avoir de bonnes explications.

Le Président (M. Thérien): M. le député de Laviolette, je vous inviterais...

M. Jolivet: Ce que je veux dire...

Le Président (M. Thérien): S'il vous plaît, je ne permettrai pas de dialogue,

M. Jolivet: Non, non.

Le Président (M. Thérien): Il vous reste une minute pour conclure.

M. Jolivet: C'est ce que je suis en train de faire. Tout ce que j'ai voulu dire, c'est que l'accumulation de petites lumières qui auraient pu être ici, aurait formé un éclairage meilleur qu'un "spotlight" qui peut malheureusement manquer de lumière ou de batterie en cours de route. Merci.

Des voix: Bravo.

Le Président (M. Thérien): Étant donné que le droit d'intervention est de dix minutes, je reconnaîtrai le député de Sauvé au retour. Les travaux sont suspendus jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 55)

(Reprise à 15 h 18)

Le Président (M. Thérien): À l'ordre, s'il vous plaît!

Je déclare la séance ouverte. Je rappelle le mandat de cette commission à ces membres.

Une voix: M. le Président?

Le Président (M. Thérien): Oui, je vais tantôt... Est-ce qu'il y a une question de règlement.

Je rappelle donc le mandat. C'est de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 58. Loi sur l'admissibilité à l'enseignement en anglais de certains enfants.

Concernant les remplacements, je pense que le député de Saint-Jacques (M. Boulerice) remplace la députée de Marie-Victorin (Mme Vermette). C'est bien cela?

M. Boulerice: C'est bien cela, M. le Président.

Le Président (M. Thérien): Avec la souplesse...

M. Gendron: Avec la souplesse et pour la raison suivante toujours: le projet de loi qui est censé être appelé en commission parlementaire et qui requiert la présence de la députée de Marie-Victorin, je ne contrôle pas le moment où elle sera appelée en commission.

Le Président (M. Thérien): C'est l'un ou l'autre.

M. Gendron: C'est cela. M. Cusano: M. le Président. Le Président (M. Thérien): Oui.

M. Cusano: C'est seulement pour redire ce que j'ai dit ce matin. Il y a consentement de notre côté. Il n'y a aucun problème.

M. Gendron: Merci, M. le député de Viau.

Le Président (M. Thérien): Si on revient à la séance de ce matin, je vais attribuer la parole au député de Sauvé.

M. Marcel Parent

M. Parent (Sauvé): Merci, M. le Président. Je voudrais me prononcer sur la motion du député de Viau pour que cette commission parlementaire, qui siège depuis déjà près de vingt heures, commence l'étude de l'article 1 et l'étude de l'ensemble de la loi, article par article.

Je pense que c'est très légitime de la part du député de Viau de demander aux membres de cette commission parlementaire de faire leurs devoirs, de faire ce pourquoi ils ont été nommés à une commission parlementaire et à ce stade-ci, de faire ce pourquoi nous sommes ici, c'est-à-dire étudier le projet de loi 58 qui a pour objet de rendre admissibles certains étudiants à l'école anglaise.

M. le Président, depuis vendredi, nous discutons motions, amendements, sous-amendements, à savoir si nous devrions faire comparaître devant cette commission une foule d'organismes et d'individus. Je voudrais vous rappeler que l'objectif premier de cette commission parlementaire est d'étudier article par article le projet de loi 58 et non pas d'entendre différents organismes ou différents individus.

Si les membres de l'Opposition veulent écouter et aller se renseigner dans certains milieux, ils n'ont qu'à le faire. Nous, on a rencontré certains organismes. Par exemple, le 21 février, les députés ministériels rencontraient l'Alliance des professeurs de Montréal. L'Alliance des professeurs de Montréal voulait entretenir les députés ministériels sur les négociations et en même temps, leur faire connaître son point de vue et ses appréhensions concernant le projet de loi 58.

Par un bel après-midi du mois de février, les députés ministériels ne se sont pas sacrifiés, ils se sont fait un plaisir, ils se sont fait un devoir d'aller au devant de cette instance importante qu'est l'Alliance des professeurs de Montréal pour l'écouter et discuter avec elle des possibilités d'application, des effets et des répercussions

du projet de loi 58. Nous l'avons fait, nous. Comment se fait-il que l'alliance - vous êtes-vous interrogé, M. le Président - n'a pas contacté les députés de l'Opposition pour les entendre? L'alliance n'a jamais demandé non plus de venir se faire entendre ici en commission parlementaire. Eux, ils sont le porte-parole de l'alliance; l'alliance ne vous a même pas contacté, elle a contacté par contre les députés ministériels. Elle est venue nous rencontrer et nous faire part de ses inquiétudes. Je trouve que vous parlez au nom de l'alliance. Si elle avait été intéressée, elle aurait fait connaître au président de la commission son intérêt à venir comparaître ici. Si la CECM l'avait voulu, elle aurait fait la même chose. Si le comité Rondeau l'avait voulu, ce que vous appelez le comité Rondeau aurait vu le ministre et lui aurait dit: M. le ministre, pensez-vous qu'il est valable pour nous que nous venions ici comparaître devant cette commission parlementaire? Mais, non!

Par contre, je ne blâme pas l'Opposition, M. le Président... ils ont fait ce qu'ils croyaient honnête et juste de faire. Mais je veux leur faire remarquer que pour cela et en insistant lourdement ou en insistant fortement, ils ont agi de telle sorte que nous en sommes rendus aujourd'hui à la vingtième heure et que nous n'avons pas encore commencé l'ouvrage. Nous ne nous sommes pas encore penchés sur le métier pour lequel nous sommes ici réunis. Cela est difficilement acceptable de la part d'un organisme responsable comme la commission parlementaire sur l'éducation. Je pense qu'il y a un effort à faire. On s'est à peu près tout dit ce qu'on avait à se dire. Vous avez réalisé cela: le parti au pouvoir, le parti ministériel qui est, malheureusement pour vous et heureusement pour l'ensemble du Québec, majoritaire ici à cette table, vous a fait comprendre de différentes façons qu'il n'était pas question de faire venir ici en commission parlementaire quelque personne ou quelque organisme que ce soit, parce que nous avons la conviction que la loi 58 répond aux aspirations d'une grande partie de la population.

On nous a dit, pendant les débats à cette commission parlementaire: Les libéraux, vous allez payer une dette électorale! Mais non, on remplit un engagement électoral! Il y a une nuance. Dans notre programme électoral qui était public, on a dit: On va régler le cas des "illégaux". Aujourd'hui, on tâche de régler le cas des "illégaux". Contrairement à ce qui s'est dit ici, je n'ai jamais dit de l'Opposition qu'elle avait laissé pourrir le cas des "illégaux", je n'ai jamais dit que l'Opposition n'avait pas fait d'efforts. Par contre, ils n'ont pas fait les bons efforts. Ils n'avaient pas les bons moyens. Ils n'avaient pas les bons outils. Oui il y en avait un outil, c'était le projet de loi 58, mais ils l'ont refusé. Alors, qu'ils arrêtent aujourd'hui! Ils ont refusé d'utiliser un projet de loi similaire du temps ou ils étaient au pouvoir. Aujourd'hui, le parti qui est au pouvoir, lui, de par ses principes, de par son idéologie, de par son esprit libéral, de par sa grande compréhension, veut aider tout le monde, veut aider surtout une petite partie de la population qui a été déclarée marginale à un certain moment pour des raisons pour lesquelles vous n'êtes pas plus responsables que moi. C'est pour cela qu'il est temps que chacun commence immédiatement à étudier ce projet de loi.

Tout à l'heure, vous nous avez dit, pour tâcher de refuser la motion de mon collègue, le député de Viau, vous nous avez dit: II y avait d'autres moyens que d'arriver avec un avis de motion comme cela. Vous laissiez sous-entendre qu'on voulait vous empêcher de parler. Non, on ne veut pas vous empêcher de parler. Je ne laisse pas sous-entendre que vous avez sciemment étendu les débats, que vous avez sciemment retardé le début de l'étude. Je ne vous accuse pas de cela. Par contre, je suis sceptique lorsqu'un député de l'Opposition - je ne me souviens pas si c'est le député d'Abitibi-Ouest ou le député de Laviolette - nous a dit: II y avait d'autres moyens, il y avait un article qui vous permettait d'arrêter les débats, qui était le règlement de clôture. Mais non, M. le Président, le parti ministériel n'est pas prêt immédiatement à parler de règlement de clôture, parce qu'on a encore confiance en l'Opposition. On pense encore que l'Opposition va faire son devoir et qu'elle va commencer à travailler avec nous à étudier ce projet de loi article par article. M. le Président, je remets la parole à l'Opposition et j'attends ses réflexions.

Le Président (M. Thérien): Merci pour ce discours enflammé. M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. François Gendron

M. Gendron: M. le Président, un peu plus calmement que vient de le faire le député de Sauvé, je voudrais indiquer aux membres de cette commission, ainsi qu'à vous, d'ailleurs, qui nous y avez invités, puisque vous avez rendu une décision qu'on respecte - c'est vous qui avez la responsabilité de diriger nos travaux - en ce sens qu'il appartenait aux membres de la commission de convaincre les membres ministériels qui ont fait valoir la motion qui est sur la table qu'il était inopportun, non approprié pour le moment de passer tout de suite comme ils le prétendent, à l'article 1 tant que nous n'avons pas fini d'entendre nos consultations particulières.

Je voudrais juste faire un rappel de quelques événements et je reviendrai sur les

propos du député de Sauvé qui viennent d'être énoncés. Le député , de Viau, qui a présenté la motion, dans le fond - vous l'avez entendu comme nous - n'avait aucun, mais aucun argument pour justifier la présentation de sa motion, il l'a dit lui-même. Tout simplement, il nous a laissé voir qu'il était tanné de l'attitude de l'Opposition et puisque, vous, vous nous avez invités, vous nous avez dit qu'il nous appartenait de faire la preuve et d'essayer de convaincre les ministériels que, oui, il y avait lieu de poursuivre le débat en vous appuyant sur la décision d'un de nos anciens collègues qui présidait cette commission, je le cite au texte: "Maintenant, il y aurait lieu, lors du débat, de convaincre les membres de la commission qu'il ne faut pas adopter cette résolution, puisqu'il y a une autre proposition sur la table que vous voulez déposer." Je lisais ce sur quoi il s'était appuyé.

Le député de Viau a mentionné qu'il n'y avait personne qui avait demandé d'être entendu en consultation particulière et cela a été repris par le député de Sauvé. Je voudrais juste illustrer que c'est faux, que c'est inexact. C'est complètement faux. Que ces gens-là nous disent qu'ils ont rencontré les intervenants intéressés par cette question en février, alors que le comité Rondeau n'avait pas produit son rapport, que la décision du ministre de l'Éducation n'était pas prise, qu'on ne savait pas dans quel sens il irait... On pensait, nous autres, qu'il les rencontrait justement pour les écouter, les entendre. Ce n'est qu'après la production de son projet de loi qu'on se rend compte qu'il n'a tenu compte d'aucun argument qui lui a été soumis, puisque son idée était faite sur l'analyse du projet de loi: II n'y a pas d'autre solution, puisque j'ai trouvé la solution, et la solution, c'est l'amnistie pure et simple. On efface l'ardoise et on recommence.

On aurait eu beau, nous aussi, entendre les arguments qui ont été évoqués par l'alliance, la CEQ, tous les groupes qu'on a entendus, M. le Président, probablement qu'on aurait fait face au même point de vue qu'ils ont fait valoir et avec pas plus de capacité d'infléchir l'orientation déjà prise par le ministre de l'Éducation, à savoir qu'indépendamment des arguments qui lui ont été soumis dans le rapport du comité Rondeau, indépendamment des avantages et des inconvénients de chacune des solutions, puisque le mandat qu'ils ont reçu était d'amener ces gens-là à prendre une direction qui avait comme conséquence d'effacer complètement la problématique des "illégaux", c'est celle qui a été choisie par le ministre de l'Éducation. (15 h 30)

Au contraire de ce qui a été mentionné tout autant par le député de Sauvé que par le député de Viau, j'ai ici une lettre, j'ai ici également un communiqué de presse public, pas des convocations en catimini parce que, juste un aparté avant de les citer: je trouve curieux que des gens qui ont le souci et le respect des institutions parlementaires nous disent: Bien écoutez, toutes vos consultations particulières, vous aviez juste à les tenir. Personne vous empêchait de rencontrer ces intervenants. Vous avez raison, sauf que depuis quand fait-on ce type de consultations en dehors de ce que j'appelle les institutions parlementaires qui les régissent? Si nous avions tort, M. le Président, comment se fait-il qu'à l'intérieur même de notre règlement cela soit prévu très clairement? Et vous l'avez cité ce matin: Avant l'étude détaillée, la commission peut procéder à des consultations particulières. Ce n'est pas moi qui ai inventé cela. C'est dans notre règlement. Mais on peut procéder à des consultations particulières à quelle place et de quelle façon? À l'intérieur des institutions parlementaires qui nous régissent, soit l'Assemblée nationale ou dans les commissions parlementaires.

C'est exactement ce qu'on a voulu faire à l'intérieur des dispositions prévues dans notre règlement: procéder à des consultations particulières, mais au vu et au su de tout le monde, dans la confrontation positive de points de vue différents qui ont comme conséquence, en règle générale, de faire évoluer un débat; et non pas en privé. Je veux bien rencontrer l'alliance en privé. Si on a tous les deux le même point vue, à savoir que régler le problème des "illégaux" par une loi n'est pas la solution, la rencontre ne sera longue. La nécessité de discuter pendant des heures n'existe pas. Mais faire venir ces gens devant nous en commission parlementaire et être capable de confronter leurs points de vue avec la théorie de l'Opposition et celle des ministériels, cela est un débat démocratique qui peut faire progresser des idées et faire avancer des causes. C'est dans ce sens que nous voulions tenir des audiences particulières, afin que les gens viennent s'exprimer ici à l'intérieur de nos institutions parlementaires.

J'entendais le député de Sauvé dire: On n'a pas eu de demande. L'alliance n'a pas fait de demande. C'est complètement faux. Ici, dans un communiqué public, non pas privé: "Nous sommes disposés à discuter d'autres solutions que la nôtre." Eux, ils n'ont jamais prétendu qu'ils avaient le monopole de la vérité comme le ministre de l'Éducation. Ils ne disent pas qu'ils ont trouvé "la" solution. Le ministre de l'Éducation a trouvé qu'il n'y avait pas d'autres solutions que la sienne. C'est écrit comme cela: J'ai "la" solution à ce problème. L'alliance, qui a un peu plus de modestie, dit: Nous, on est d'accord pour discuter d'autre chose que notre solution. On ne l'appelle pas notre solution, on l'appelle une

des solutions. Et voilà ce qu'ils disent très concrètement - et j'aimerais ça avoir l'attention du député de Sauvé: "Nous sommes disposés à discuter de d'autres solutions - a déclaré la présidence de l'alliance - mais dans la mesure où celles-ci respectent les principes que nous mettrons de l'avant. Et nous réitérons - écoutez bien leur conclusion - notre volonté d'être associés -non pas d'être écartés - à toute discussion relative à ce dossier."

Que faisons-nous maintenant, M. le Président? Nous sommes en train de débattre un projet de loi qui ratifie une illégalité par une loi en disant: Ce n'est pas grave, on passe l'éponge et on efface l'ardoise. L'alliance nous dit: Écoutez, a toutes les phases et à toutes les étapes, on vous indique qu'on aimerait cela être dans le coup. Cela nous intéresse cette question et on voudrait en parler avec vous. On est très intéressés par cette question. M. le Président, c'est ce qu'ils nous disent. Si ce n'est pas là une demande! Ce n'est peut-être pas avec le même caractère formel qu'on est habitué de voir, comme une lettre officielle au président, parce qu'il n'y a pas juste cette formule. Lorsqu'une commission parlementaire a décidé de tenir des consultations particulières et de faire venir certains organismes, il se peut que ce soit à la demande des membres d'une commission parlementaire. C'est notre responsabilité d'avoir le meilleur éclairage possible. On a le droit de demander à ces gens de venir témoigner pour éclairer nos lanternes collectives. Pas si on est assis sur la vérité. C'est sûr qu'à ce moment-là, on ferme les livres. On sent très bien que c'est ce que les ministériels veulent faire. Le gouvernement veut fermer les livres sur cette question en disant: C'est assez, nous on a la vérité, peu importe qui on regarderait, peu importe qui on entendrait, nous on veut procéder. On veut procéder pour se fermer. On n'entendra pas un mot de ces gens, M. le Président. C'est cela qui est étonnant. Ils n'ont strictement rien à dire.

Ils veulent procéder, mais dans la voie, la vie, et la vérité du ministre de l'Éducation qui a trouvé l'unique et la seule solution. Pensez-vous qu'on va marcher dans cela, M. le Président? Non. Nous ne marcherons pas dans cela. C'est ce que je voulais signaler dans mon droit de parole. C'est une motion qui arrive d'une façon inopportune, à ce moment-ci, parce qu'il y a d'autres intervenants qu'on aurait aimé entendre. Il y a d'autres intervenants qui nous auraient donné un éclairage qui nous auraient permis de nous acquitter plus professionnellement de nos responsabilités. Dans ce sens-là, M. le Président, c'est pourquoi nous avons manifesté notre désaccord avec la proposition du député de Viau parce que nous étions en train d'essayer de vous convaincre de la nécessité d'entendre d'autres intervenants qui auraient effectivement donné plus d'éclairage, parce que ce sont des gens qui ont toujours été préoccupés par ces questions et qui se sont exprimés sur ces questions, question qui est fondamentale, parce qu'elle regarde, elle touche les droits linguistiques.

Motion d'amendement

En conséquence, M. le Président, avant de terminer, je ferai la motion suivante... J'amenderais la proposition du député de Viau en présentant l'amendement suivant, M. le Président: Que la motion du député de Viau soit modifiée en remplaçant les termes: "...de l'article 1 et des articles suivants du projet de loi 58" par les suivants: "...du projet de loi 58 en débutant par l'étude du titre du projet de loi. Je vous soumets respectueusement cet amendement.

Le Président (M. Thérien): Je vais prendre la question en délibéré.

(Suspension de la séance à 15 h 37)

(Reprise à 15 h 43)

Le Président (M. Thérien): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député de Rimouski, je vous ai comme intervenant possible dans l'avenir. Avant de rendre ma décision et dans le but d'être éclairé le mieux possible, j'aimerais qu'un intervenant du côté de l'Opposition et un intervenant du côté ministériel, s'ils le veulent bien, s'expriment sur la recevabilité de cet amendement de la motion. M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: M. le Président, comme je suis le parrain de l'amendement, je voudrais prendre quelques minutes pour exposer les motifs sur lesquels je me suis appuyé pour proposer cet amendement. Tout le monde sait qu'il n'y a à peu près aucun projet de loi qui a été déposé qui ne fait pas l'objet d'un titre particulier. Tous les projets de loi sont titrés. À partir du moment où, dans une décision antérieure, vous vous êtes appuyé sur la décision de notre ex-collègue, M. Tremblay, qui alléguait, comme président de commission, que la commission est maîtresse de ses travaux... Il appartient à chacune des commissions, dans le fond, de prendre les orientations qu'elle veut bien, comme commission, eu égard à la responsabilité qui lui a été dévolue par le leader du gouvernement de faire l'étude et l'analyse détaillées d'un projet de loi. Or, c'est absolument manifeste que le titre fait partie, sûrement, de l'étude détaillée d'un projet de loi. Je ne me souviens pas de commissions parle-

mentaires où on n'a pas discouru pendant quelques minutes sur le titre du projet de loi, à savoir s'il y avait des parlementaires qui avaient des opinions à émettre sur le titre du projet de loi. Je ne pense pas qu'un seul parlementaire, et sûrement pas plus vous, aurait un point de vue différent, à savoir que nous n'avons pas à apprécier et qu'on n'a pas la capacité réglementaire, en vertu de nos institutions, de discuter du titre d'un projet de loi. Je m'arrête là tout de suite parce que je pense que ce point est très bien fait et très bien établi en termes de jurisprudence.

Certains pourraient alléguer qu'il y a la question de l'ordonnancement de la conduite de nos travaux puisque, effectivement, dans certaines décisions rendues, il y a des commissions parlementaires qui ont traité de cette question à la fin de l'adoption de chacun des articles, mais d'autres l'ont traitée au début. Je me réfère là spécifiquement à la décision rendue par l'ex-président Tremblay, député de Chambly, dans laquelle il prétendait que, comme la commission est maîtresse de ses travaux, une motion peut venir visant à entreprendre l'étude d'un projet de loi à l'article 25 immédiatement. La commission pourrait suspendre certains articles, entreprendre l'étude d'autres articles qui ne sont pas nécessairement dans l'ordre présenté dans le projet de loi. Il en est de même du préambule puisqu'il y a certains projets de loi qui comportent un préambule. Tous les projets de loi comportent à tout le moins un titre. À partir du moment où le principe de la conduite des travaux d'une commission parlementaire a été très bien établi, M. le Président, je suis convaincu que, si un parlementaire membre d'une commission présente une motion afin que nous débutions nos travaux par l'étude du titre du projet de loi, cela fait partie intégrante de la conduite de nos travaux en commission. Toujours sur le principe d'être complètement maître de la façon de le faire, je pense que je pouvais m'appuyer sur ces précédents pour présenter l'amendement pour commencer l'étude de ce projet de loi par le titre.

Une autre raison qui est très importante et que j'aimerais que vous analysiez, c'est que, règle générale, pourquoi fait-on un titre à un projet de loi? C'est pour lui donner rapidement un cadre et un critère de référence. Il est clair que le titre d'un projet de loi permet à toutes sortes d'intervenants dans l'avenir, pour des recherches, pour des références, d'être capables de se référer rapidement à un titre de projet de loi et d'y trouver là, par le titre, la signification la plus globale possible des débats, des discussions et de la démarche qui ont entouré un projet de loi. Si un membre du côté ministériel peut proposer de commencer par l'article 1 parce que dans sa vision des choses il prétend que c'est là qu'il faut commencer, il est sûrement tout aussi normal de proposer, dans la vision d'un autre parlementaire, de commencer par le titre. En conséquence, c'est juste parce que je vous ai indiqué que c'était là notre préférence, mais il m'apparaît que c'est on ne peut plus clair que cette motion est parfaitement justifiée, justifiable et recevable puisqu'elle est conforme à nos traditions parlementaires et elle s'inscrit véritablement dans cette responsabilité parlementaire que nous avons à l'intérieur d'une commission de décider nous-mêmes de la façon d'aborder nos travaux. Merci.

Le Président (M. Thérien): Est-ce qu'il y a un député du côté ministériel? Oui, M. le député de Sauvé.

M. Parent (Sauvé): Une question de directive, M. le Président. Est-ce que nous sommes en discussion sur l'amendement? Vous avez une décision à rendre, n'est-ce pas?

Le Président (M. Thérien): Oui.

M. Parent (Sauvé): Alors, je vous laisse rendre votre décision.

Le Président (M. Thérien): Oui.

M. Parent (Sauvé): Par contre, je reprendrai la parole immédiatement après, avec votre permission.

M. Jolivet: Sur l'amendement?

Le Président (M. Thérien): Non, sur la recevabilité de l'amendement.

M. Jolivet: D'accord, mais je veux juste savoir... Comme le député de Sauvé a parlé, il n'aurait pas droit de parler si vous déclariez l'amendement irrecevable.

Le Président (M. Thérien): II m'a posé une question de règlement, à savoir si on était sur l'un ou l'autre des...

M. Jolivet: D'accord, parfait!

M. Parent (Sauvé): J'ai demandé si on était sur la discussion de l'amendement du député de... Je l'ai informé que je prendrais la parole après.

Décision du président

Le Président (M. Thérien): Justement, étant donné que je dois rendre ma décision, ma décision est la suivante: Étant donné qu'on parle de coutumes, si on se réfère au règlement de l'Assemblée législative, qui est quand même un livre qui date d'un bout de

temps, celui de Geoffrion, on retrouve en septièmement le titre. Si on se fie aussi à l'aide-mémoire qui est publié, qui n'est quand même pas de la jurisprudence, mais un aide-mémoire qui est publié pour l'étude des projets de loi publics - on le retrouve en treizième - la question qu'on pourrait se poser est la suivante: Est-ce que le titre, c'est un article? Quand même, vous avez cité tantôt la décision de M. Tremblay qui était ma citation préalablement à ma décision. Étant donné aussi que le titre vient chapeauter les discussions des différents articles des projets de loi, si ces articles sont amendés, cela viendrait changer possiblement le titre. Donc, me fiant à diverses considérations que je viens de nommer, étant donné que le titre n'est pas nécessairement un article et que le titre dans les coutumes et les habitudes est traité vers la fin par respect des amendements qui y sont apportés, je jugerai l'amendement irrecevable.

On continue donc la...

M. Gendron: Je désire vous poser une question de directive: Comment pouvez-vous - j'aimerais que cela soit analysé - prétendre qu'à partir du moment où le titre d'un projet de loi, règle générale, vient conférer le principe d'un projet de loi et que des amendements ne peuvent pas altérer le principe du projet de loi... Vous me suivez?

Le Président (M. Thérien): Non, je ne vous suis pas. Si vous voulez répéter.

M. Gendron: Vous avez évoqué dans votre décision le fait que le titre d'un projet de loi, en termes d'ordonnancement des travaux, n'arrive pas nécessairement au rang où on vient de le placer, nous, en alléguant qu'une des raisons logiques de procéder ainsi est qu'il se pourrait que les membres d'une commission modifient par certains amendements des articles du projet de loi et qu'en modifiant par des amendements des articles du projet de loi on soit obligé de modifier le titre du projet de loi.

Une voix: ...

M. Gendron: Voici la directive que je vous demande: À partir du moment où les amendements à un projet de loi étudié article par article ne peuvent pas modifier le principe adopté en deuxième lecture et que le titre d'un projet de loi doit refléter le principe du projet de loi et non pas l'article 7 ou l'article 5, par suite de modifications à un article, comment prétendre è l'obligation ou à la justification de modifier le titre d'un projet de loi? Je n'ai jamais vu cela. On modifierait le projet de loi à la suite de modification apportées en deuxième lecture au principe d'un projet de loi que je serais d'accord avec vous, mais nous sommes en commission parlementaire pour étudier article par article un projet de loi. L'ensemble des modifications qui pourraient être apportées à un article du projet de loi ne pourraient jamais contrevenir au principe même du projet de loi qui a déjà été adopté en deuxième lecture. Je ne suis pas capable de concilier sur quoi vous vous êtes appuyé dans votre argumentation pour soutenir la thèse que la logique de votre décision repose sur le fait qu'on étudie le titre du projet de loi après l'étude article par article sachant très bien que jamais dans l'étude article par article, nous ne pouvons contrevenir au principe qui a été adopté ou altérer le principe qui a été adopté en deuxième lecture. Là, je ne vous comprends pas.

Le Président (M. Thérien): De toute façon, pour répondre à votre première interrogation... Si je comprends bien, c'est dans le but de m'éclairer et non de contester ma décision surtout...

M. Gendron: Oui.

M. Jolivet: Surtout vous éclairer.

Le Président (M. Thérien): Oui. Je pense que, lorsqu'on modifie un titre, on ne modifie pas nécessairement le principe du projet de loi. Lorsque le titre est modifié au début de l'étude, on est obligé de se conformer dans cette étude aux principes des articles. Donc, il est préférable... La coutume dans cette enceinte est d'étudier article par article le projet de loi pour en modifier ensuite le titre, s'il y a lieu, par certains amendements auxquels les gens de l'Assemblée nationale et membres de la commission auront consenti.

Donc, j'ai jugé irrecevable l'amendement sur la motion.

M. Jolivet: Est-ce que je peux faire une nouvelle demande de directive, M. le Président?

Le Président (M. Thérien): Oui.

M. Jolivet: J'ai un peu de peine à suivre. Vous avez dit tout à l'heure que vous ne compreniez pas ce que le député d'Abitibi-Ouest disait.

Le Président (M. Thérien): Je lui ai demandé de répéter pour que je comprenne mieux.

M. Jolivet: D'accord. C'est aussi ce que je veux demander. Je ne veux pas plaider et mettre votre décision en cause. J'aurais aimé que vous la regardiez de plus près. Mon problème est le suivant. Vous prétendez au départ que le but de la motion qui est

réglementaire a pour effet de changer le titre. Ce n'était pas le but de notre motion. Le but était de discuter du projet de loi à partir du titre. Dans ce contexte, la commission étant reine et maîtresse de ses travaux et la motion étant présentée, il s'agît maintenant de discuter et de dire si les gens sont d'accord ou non. C'est à eux maintenant de nous convaincre qu'on ne doit pas commencer par le titre. Je ne vois pas en quoi l'argumentation que vous m'apportez est différente de celle que vous m'avez apportée ce matin pour accepter celle du député de Viau. C'est simplement ce que je ne comprends pas.

Le Président (M. Thérien): L'argumentation de cet après-midi n'est quand même pas différente. La question que j'ai mise en veilleuse était à savoir si, premièrement, le titre est un article. Si je me fie aussi à l'article 180: "Au besoin, la procédure est déterminée en tenant compte des précédents et usages de l'Assemblée", les précédents et usages de l'Assemblée sont d'étudier le titre à la fin de l'étude. Ce n'est pas une décision nouvelle, c'est une décision qu'on rencontre même dans les orientations suggérées.

M. Jolivet: Est-ce que je peux poser une question, M. le Président?

Le Président (M. Thérien): Oui, M. le député.

M. Jolivet: Si j'amenais, à la fin du débat - je pose une question - une motion pour discuter du titre, est-ce que vous l'accepteriez?

Le Président (M. Thérien): Vous me demandez cela au moment où le débat ne s'est pas fait.

M. Jolivet: Non, je vous pose une question. Dans n'importe quel projet de loi...

Le Président (M. Thérien): Oui.

M. Jolivet: ...si j'arrive à la fin, à la dernière motion, le président demande: Est-ce que vous acceptez le titre du projet de loi? Je vous dis: Je veux une motion pour changer le titre du projet de loi. Non, mais, écoutez, c'est une question de directive. J'ai le droit de poser ma question. C'est la question que je pose au président. Est-ce que, à ce moment-là, vous l'accepteriez?

Le Président (M. Thérien): Oui, je l'accepterais.

M. Jolivet: Bon, si vous l'acceptiez, pourquoi, nous qui voulons l'étudier en commençant, n'en avons-nous pas le droit? Si on a le droit de l'étudier à la fin, pourquoi n'avons-nous pas le droit de l'étudier au début? Comme c'est une motion que nous faisons; cette motion doit être débattue, débattons-la!

Le Président (M. Thérien): Je pense que ce sera la dernière réponse que je donnerai, car ma décision a été rendue. Ma décision était appuyée tout simplement sur la coutume et l'usage, comme je l'ai dit tantôt. La raison pourrait être à l'inverse aussi. Vous me demandez pourquoi on l'accepterait à la fin et qu'on ne l'accepterait pas au début? Présentement, je ne l'accepte pas au début, parce qu'on l'acceptera à la fin tout simplement.

M. Jolivet: On va contester cela quelque part.

M. Gendron: M. le Président, écoutez, si vous me le permettez, sur une question de directive très importante, il me semble que, comme président...

Le Président CM. Thérien): Oui, mais j'ai bien dit tantôt, dans mon argumentation, que le titre venait chapeauter s'il y avait des amendements possibles. C'est évident, ce que le député de Laviolette vient de dire. Il vient de me dire une situation où, possiblement, j'accepterais quelque chose. Quelles sont les raisons que je vous donne? II n'y a pas plus de raisons. La raison, je vous l'ai donnée. Je ne l'ai pas déclarée recevable tout simplement parce que, s'il y a des amendements qui viennent changer les articles, cela pourra possiblement changer le titre, et c'est la coutume d'étudier le titre è la fin.

M. Gendron: Est-ce que vous ne convenez pas M. le Président, que vous n'avez pas du tout statué sur la recevabilité? Juste une seconde. Vous l'avez dit dans vos propos, vous-même, à trois reprises.

Une voix: M. le Président.

M. Gendron: Juste une seconde. Vous avez statué sur l'opportunité de faire quelque chose avant ou après et - une seconde -vous nous le dites dans votre argumentation. C'est vous qui parle2, M. le Président, vous l'avez dit tantôt dans la justification de votre décision: J'ai toujours - et c'est vous qui parlez - pensé qu'il serait préférable que nous discutions de la question du titre d'un projet de loi à la fin plutôt qu'au début. C'est votre argumentation. À ce moment, quand vous faites cela, vous discutez de l'opportunité et non de la recevabilité. Comme président de cette séance, vous avez à recevoir et à juger de la recevabilité d'une motion et non de son caractère

d'opportunité.

Une voix: C'est cela. Sur la forme et non sur le fond.

Une voix: II brise la neutralité. Il n'est plus neutre.

M. Gendron: C'est très sérieux, très très sérieux.

M. Cusano: M. le Président.

Le Président (M. Thérien): M. le député de Viau. (16 heures)

M. Cusano: Excusez-moi, M. le Président. Si vous me permettez une petite remarque. L'Opposition est en train de faire indirectement ce qu'elle ne peut pas faire directement. Vous avez rendu votre décision et on se doit de la respecter.

M. Jolivet: Un président doit être neutre et ne pas entrer sur le fond de la question. Il est entré sur le fond de la question.

Le Président (M. Thérien): Je ne suis pas entré sur le fond de la question. J'ai tout simplement...

M. Jolivet: L'opportunité, c'est le fond.

Le Président (M. Thérien): L'opportunité...

M. Ryan: M. le Président, une question de règlement.

Le Président (M. Thérien): Oui, M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Je pense que le député de Laviolette vient de laisser tomber des propos qui sont complètement inacceptables de la part d'un député à la suite d'une décision rendue par le président. Je m'en scandalise.

M. Jolivet: M. le Président.

M. Ryan: M. le Président.

Le Président (M. Thérien): Oui.

M. Ryan: J'espère que le député de Laviolette va me laisser compléter mon intervention, à tout le moins. Si le député de Laviolette a des représentations à faire, il sait très bien ce qu'il a à faire, mais ce n'est pas l'endroit, ici, une fois que la décision a été rendue, pour faire ce qui a été fait tantôt.

M. Gendron: Sur la question de règlement, M. le Président, je voudrais juste vous indiquer que, pour nous, il n'est pas question de contester votre décision, sauf que, de tout temps, après qu'une décision a été rendue, si on n'est pas en mesure, comme parlementaires, de comprendre les motifs sur lesquels le président s'est appuyé, on a le droit non pas de contester sa décision, mais au moins d'avoir un éclairage qui nous permette de la comprendre, même si nous ne la partageons pas. Ce qu'on n'a pas le droit de contester, c'est une décision rendue. Il faut la prendre, autrement dit. Nous comprenons cela, M. le Président, sauf que ce que j'ai voulu faire valoir, c'est en termes de compréhension, puisque, dans vos propres propos pour argumenter sur ce que vous avez rendu comme décision, vous m'avez toujours parlé d'opportunité et non de recevabilité en disant: Moi, je pense que c'est plus opportun - vous m'avez même donné des arguments pour justifier votre décision - s'il advenait que dans l'échange on modifie des articles et qu'on soit obligé de changer le titre - c'est toujours vous qui parliez. Vous expliquez, quand vous utilisez cet argument, le caractère de non-opportunité, de commencer par le titre, selon vous.

Or, moi, j'ai toujours appris qu'un président de séance doit statuer sur la recevabilité d'une motion et non sur l'opportunité. Ce n'est pas de s'amuser; ce sont des questions fondamentales et vous connaissez le sens des mots. Nous, on a plaidé une motion et on est convaincu qu'elle est recevable. Vous nous dites non pour des motifs d'opportunité. Ce que vous me demandez de faire tout de suite, vous le ferez plus tard. C'est votre décision, M. le Président, et vous vous servez de cet argument pour rendre la décision que vous me dites sur la recevabilité. Comment voulez-vous que je comprenne quelque chose puisqu'elle ne porte que sur l'opportunité?

Je dis, M. le Président, vous n'avez pas exercé votre responsabilité comme président de séance de décider sur la recevabilité ou la non-recevabilité de ma motion. Que ma motion soit non recevable, je vais en convenir rapidement et on va passer à autre chose. Mais il faut que je sois capable de comprendre dans votre jugement sur quel motif vous vous êtes appuyé pour la juger non recevable. Dans toutes les explications que vous nous avez données, pas un mot sur la non-recevabilité. Beaucoup de mots et c'était votre droit d'utiliser ces mots mais je pense que c'est le mien d'essayer de comprendre. Tout le vocabulaire que vous avez utilisé dans votre décision portait sur des motifs de non-opportunité à ce moment-ci.

Donc, je me dis: Quand est-ce que je vais vous entendre sur la recevabilité, puisque c'est votre "job", c'est votre responsabilité et votre mandat? Il n'est pas

question de contester votre décision, mais si, comme président, vous êtes capable de vous appuyer tout autant sur la jurisprudence que sur des articles précis du règlement pour dire: M. Gendron, votre motion est carrément irrecevable en vertu de tel article du règlement, en vertu de tel élément de jurisprudence, je vais me rasseoir et je ne dirai plus un mot là-dessus et on va continuer les débats sur autre chose, parce qu'on va ratifier votre décision.

Mais, là, vous ne m'avez pas dit un mot sur la recevabilité. Vous m'avez parlé une couple de minutes sur la non opportunité à ce moment de faire ce que je suggérais qu'on fasse. Alors, il n'est pas question de contester votre décision. Mais, si je ne comprends pas les décisions que vous rendez, j'ai un problème comme parlementaire. C'est pourquoi je vous demande d'essayer de m'éclairer davantage.

M. Jolivet: Sur la question de règlement, M. le Président, simplement pour bien situer le problème. Je n'ai dit, en aucune façon, qu'une décision n'avait pas été rendue. Ce que je veux dire - c'est bien important, mon collègue l'a dit - c'est que peut-être vous devriez prendre quelques instants pour aller vérifier. Je vous pose la question: Si, immédiatement, on avait accepté, de part et d'autre, de commencer à discuter l'amendement, vous l'auriez présidé, premièrement.

Deuxièmement, vous dites que si on l'avait apporté à la fin - je pense que c'est Ça qui est important - vous l'auriez jugé recevable. Je vous pose la question. Et je me souviens, vous pouvez allez vérifier dans les livres. J'étais vice-président à cette époque-là. II y a eu un problème semblable. Le président dit: Je vous déclare dans le moment que la motion est recevable, mais je vous dis que je n'accepte pas qu'elle soit discutée maintenant, elle sera discutée plus tard. Est-ce cela que vous vouliez nous dire? C'est cela que je veux comprendre. Si vous me dites à moi: La motion, pour le moment, est recevable mais on ne peut en discuter pour le moment parce qu'elle doit venir à la fin ou au milieu plutôt qu'au début, ce serait différent pour moi. Mais vous me dites qu'elle est irrecevable. Si elle est irrecevable maintenant, elle va devenir, pour moi, irrecevable à la fin. Donc, ce n'est pas la recevabilité. Je voudrais que vous alliez vérifier. Si vous me dites qu'elle est recevable, vous avez le droit, comme président, de dire que nous ne la discuterons pas maintenant. Vous pourrez reporter votre décision de discussion à plus tard. C'est autre chose. Prenez le temps de réfléchir. On va vous le laisser. Mais je suis sûr que c'est ce que vous vouliez nous dire et ce que j'aimerais entendre.

Le Président (M. Thérien): Je vais y réfléchir, mais je vous signale que, lorsque vous m'avez posé cette question-là, je vous ai dit au départ que, le débat n'étant pas fait, je préférais ne pas vous répondre. C'est après que vous m'avez, je ne dirais pas acculé, c'est votre rôle de le faire... Mais je vais aller vérifier les articles de loi et je reviens.

M. Jolivet: Parfait. (Suspension de la séance à 16 h 7)

(Reprise à 16 h 14)

Le Président (M. Thérien): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons la séance. Ma décision est la suivante: La décision que j'ai rendue demeure la même. Je n'ai pas jugé sur l'opportunité, mais bien sur les règles et coutumes en vigueur. L'amendement à la motion présentée n'a pas été présenté au moment opportun pour les raisons que j'ai mentionnées. Elle est donc irrecevable. En vertu de l'article 41, la décision du président ne peut être discutée. Je donne donc la parole au député de Groulx.

M. Tremblay (Rimouski): Je vous avais informé que je demanderais la parole immédiatement après. Alors, je demande simplement le vote sur la motion du député de Viau s'il n'y a pas d'autres intervenants.

M. Jolivet: Excusez-moi, M. le Président, là je vais m'opposer à cela parce que le député a déjà parlé sur la motion et en conséquence il n'a pas le droit de demander...

Le Président (M. Thérien): J'ai d'ailleurs des noms d'indiqués.

M. Jolivet: Oui.

Le Président (M. Thérien): J'avais le député de Rimouski avant celui de Groulx, mais le député de Rimouski vient de faire son entrée. Je reconnais donc le député de Rimouski.

Reprise du débat sur la motion principale

M. Michel Tremblay

M. Tremblay (Rimouski): M. le Président, il me fait plaisir de vous faire connaître mon point de vue sur l'avis de motion présenté par le député de Viau. Vous comprendrez que je suis d'accord avec cet avis de motion, compte tenu du temps que nous avons déjà consacré à l'Opposition pour faire valoir son argumentation à faire entendre différents organismes. Nous avons

fait la consultation. Nous l'avons faite depuis de nombreux mois et vous avez eu neuf ans pour faire cette consultation. Vous avez même dépensé beaucoup d'argent, vous avez même 3 600 000 $ de dépensés par M. Aquin pour arriver à des résultats qui étaient tout de même à mon sens très faibles et cela n'a pas donné les résultats escomptés. Il faut bien comprendre que ce comité qui était présidé par M. Aquin a fait une consultation, et une large consultation. Nous avons fait une consultation aussi; M. Rondeau et son comité a consulté tout le monde, toutes les personnes ou tous les organismes impliqués par le cas de ces "illégaux". Je pense que nous avons fait la consultation et largement. Nous n'avons pas dit non à vos préoccupations à savoir d'entendre les représentants de la CEQ, les représentants de la CECM ou encore des cégeps. Nous n'avons pas refusé. Nous avons dit que ces gens-là ont eu la chance ou ont eu l'occasion d'être consultés antérieurement. Par conséquent nous n'avons pas de reproches à nous faire en vous refusant, à ce stade-ci, d'entendre encore une fois ces organismes venir parler sur le bien-fondé de la loi qui est présentement devant nous.

Nous avons, nous, du Parti libéral, présenté un projet de loi qui est le projet de loi 58 à l'intérieur duquel vous trouvez tous les arguments ou toutes les dispositions nécessaires pour régler un problème qui est latent, un problème qu'il faut régler une fois pour toutes. Vous avez devant vous un projet de loi qu'on vous demande d'étudier article par article de façon qu'on puisse avancer. Â ce moment-là, vous pourrez peut-être proposer des amendements et si, à nos yeux, ils sont recevables, nous pourrons les corriger. Cela n'est pas exclu. Mais de grâce, s'il vous plaît; essayez donc devant cette commission de faire vos devoirs, à savoir d'étudier article par article tous les règlements qui sont dans le projet de loi. Présentement, vous ne faîtes que retarder et vous ne faites pas votre devoir parce que vous ne voulez pas prendre connaissance des dispositions de la présente loi. Cette loi a été drôlement pensée. La consultation a été très large et nous sommes en mesure de vous la proposer parce qu'elle veut régler, une fois pour toutes, le problème des "illégaux".

J'entendais l'ex-ministre de l'Éducation, le député d'Abitibi-Ouest, dire: Laissez donc faire cela. Cela va peut-être se régler. Avec le temps, cela va se régler. En d'autres termes, laissez perdurer et laissez encore des "illégaux" entrer dans le système et jamais on ne réglera. Nous, du Parti libéral, ce qu'on veut, on veut absolument le régler une fois pour toutes et on ne veut plus en entendre parler. C'est pourquoi, M. le Président, il me fera plaisir d'appuyer la motion du député de Viau et je suis d'accord avec cette motion de façon qu'on puisse étudier article par article les dispositions du projet de loi 58. On pourra y apporter des amendements, s'il le faut, parce que nous connaissons cela, la consultation. On peut tenir compte des préoccupations de l'Opposition. Si elles sont justes et valables, à ce moment-là, vous pouvez être certain que nous apporterons des amendements, s'il y a lieu.

M. le Président, cela m'a fait plaisir de vous faire connaître mon point de vue là-dessus et je voterai pour la motion.

Le Président (M. Thérien): Je reconnais maintenant la députée de Chicoutimi.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. On a, il est vrai, entendu ici de tout. Mais ce qui surprend de la part des gens qui viennent tout juste d'être élus - six mois, c'est relativement court - c'est que déjà ils nous affirment du haut de leur pouvoir n'avoir besoin d'entendre personne ici, n'avoir besoin d'aucune consultation. On nous dit: De toute façon, vous n'aviez qu'à faire comme nous, on a consulté. Vous êtes partis avec une hypothèse et non pas un projet de loi, je présume, et vous avez rencontré quelques groupes, dont l'Alliance des professeurs de Montréal. Est-ce ce qu'on appelle une consultation au sens où, généralement, on l'entend en cette Chambre? Lorsqu'on parle d'une consultation ici, on parle généralement de quelque chose de beaucoup plus structuré, fait sur invitation, et le président, le député de Sauvé, président de cette commission le sait, puisqu'on procédera à une commission parlementaire à l'automne, au cours de laquelle il y aura effectivement consultation. Alors, ce n'est pas faute de savoir à quoi ça sert une consultation et comment ça se déroule, comment on procède et comment on fait une consultation. Qu'il vienne nous dire que sa consultation, la consultation qu'il a faite avec ses collègues ou les rencontres qu'ils ont faites à leurs bureaux, est suffisante pour déclarer aujourd'hui qu'ils ont fait le tour de la question et qu'ils ont trouvé la solution, je trouve cela un peu fort! Je dirais qu'autant on a dans ce projet de loi une attitude, je le répète, méprisante à l'endroit de ceux qui ont respecté la loi, autant, il me semble, on a une attitude méprisante à l'endroit de ceux qui voudraient être entendus. Il s'agit quand même d'une loi. Ce n'est pas une loi mineure qu'on est en train d'adopter là. On est en train, par législation, de blanchir des gens, d'amnistier des gens qui se sont placés dans l'illégalité pendant neuf ans. Et là, je ne parle pas juste des enfants. Je parle des personnes qui les ont aidés.

J'entendais hier le député de Viau nous

dire: Oui, le précédent gouvernement n'a-t-il pas blanchi les travailleurs de la CEG au lendemain d'une grève? Je me dis d'abord que ce n'est pas vraiment en son honneur que d'apporter cela et de comparer la situation des jeunes "illégaux" d'aujourd'hui à la désobéissance d'un syndicat. Tout d'abord, il me semble que ce n'est pas tout à fait du même ordre. Par ailleurs, le fait de lever les poursuites à l'endroit d'un membre d'un syndicat n'autorise jamais, mais jamais, ses enfants ou lui-même à recommencer l'acte. Cela ne lui confère pas de droits. Ce n'est pas parce qu'on a levé les poursuites à l'endroit d'une personne que ça autorisera son fils à commettre les mêmes méfaits. Il me semble donc que là on n'est pas tout à fait dans le même ordre d'idées.

Il serait important d'entendre ces personnes-là et de voir différents groupes. Le ministre de l'Éducation me disait, au cours d'une conversation, que peu de gens s'étaient élevés contre le fait qu'ils se trouvaient être pénalisés pour avoir obéi à la loi, à l'exception, me dit-il, cependant, d'un cadre d'une commission scolaire qui estime avoir été floué dans l'exercice et qui, furieux, dit: Moi, j'ai Tespecté la loi, je me retrouve avec moins d'élèves. J'estime que ces personnes-là devraient avoir les mêmes droits que ceux que vous allez reconnaître à ceux qui ont désobéi, qui ont résisté entre un et neuf ans.

Pour ces raisons-là, il me semble qu'il aurait été important qu'on entende, ici, différents groupes. Il me semble, au cours de ces échanges qui pour certains ont pu paraître longs, qu'on a déjà appris un certain nombre de choses que, peut-être, vous saviez déjà tous. Vous y avez tous réfléchi. Vous avez peut-être regardé ce problème-là sous tous ses angles. Cela n'était certainement pas le fait, d'abord de l'Opposition, non plus que du public en général. Le public n'est pas informé de ce que j'appellerais tous les dessous de cette affaire-là. D'ailleurs, le discours du gouvernement là-dessus a eu tendance à tromper la population et il continue comme dans la remarque du député de Rimouski qui nous dit: Vous avez eu neuf ans. Vous avez laissé pourir la situation. Eh bien! II ne fait pas état des tentatives extrêmement sérieuses qui ont été faites par le gouvernement en 1981, à la suite du dépôt du rapport de Me François Aquin. Je pense que le député de Sauvé est en mesure d'appuyer ma remarque, s'il y avait eu, dans certains milieux, la collaboration à laquelle on pouvait s'attendre, la proposition qui a été faite par le Dr Laurin, alors qu'il était ministre de l'Éducation, à la fin de 1981, aurait normalement dû résoudre tous ces problèmes-là. Il ne l'a pas fait pour deux raisons, parce qu'il y a eu une résistance organisée dans le milieu et, je le rappelle, la complicité était haute. Il ne l'a pas réussi non plus, il faut se le rappeler, parce qu'il n'avait pas, je dirais, dans ce dossier la crédibilité auprès des milieux anglophones dont jouit l'actuel ministre de l'Éducation. On peut même penser, M. le Président -c'est l'hypothèse qui a été avancée - que les propositions de solutions qui ont été avancées par Me Aquin auraient probablement trouvé une autre oreille aujourd'hui en reprenant quasiment les mêmes recommandations, parce que neuf ans ont passé et parce que la résistance commence à se fatiguer et aussi parce que ce gouvernement a un préjugé plus favorable, retrouve un préjugé plus favorable dans ces milieux.

Pour ces raisons, il me semble que couper court sous prétexte qu'on est tanné -parce que je me dis, dans le fond, si on est tanné, certainement que vous n'étiez pas ici au moment où il y a eu le long débat; on me parle de quelque 184 heures sur la loi 101. Il me semble que, comme parlementaires, je m'en excuse, mais c'est notre travail. Je rappellerai les remarques à cet effet du ministre de l'Éducation, alors qu'il était dans l'Opposition, il disait, je le répète: L'Opposition a comme devoir de mener une opposition implacable, rigoureuse, extrêmement sévère. Il disait: C'est vraiment la fonction et c'est la responsabilité d'une Opposition. Alors, ce que nous faisons ici aujourd'hui et ce qu'on a fait au cours des derniers jours, c'est essayer de vous amener à comprendre qu'on aurait tous intérêt à entendre des groupes ici. Le président de la commission, le député de Sauvé, devrait être de notre avis, d'autant plus qu'il a été témoin d'une décision qui a été prise par la commission d'entendre un groupe sur la loi 30, sur ce qu'on appelle la commission scolaire de Joutel-Matagami.

On a demandé de rencontrer un groupe et de tenir une audience là-dessus. On l'a fait et vous savez ce que cela a donné. Pour ceux et celles qui l'ignorent ici, c'était certainement utile, parce qu'il y a eu réécriture de la loi. Cela veut donc dire que ce ministre est également susceptible d'erreur, heureusement. C'est rassurant, des fois. Sauf que c'est rassurant dans la mesure où on peut, par le biais d'une consultation particulière, s'assurer qu'on met en place un train de consultations qui nous permette d'éviter l'erreur qui aurait été celle qu'on aurait commise à l'endroit de la commission scolaire de Joutel-Matagami, si jamais on avait accepté le projet de loi tel que déposé. Qu'est-ce qui a amené le ministre à le modifier? C'est vraiment à la suite de l'audition du directeur général et du président de la commission scolaire de Joutel-Matagami, d'où l'importance - malgré qu'on se trouve bien bon - d'entendre des personnes. Vous savez, c'est un projet de loi majeur, qui pourra au cours des années avoir une influence considérable à la fois sur notre projet - ce que j'appelle notre paysage

linguistique - de même que sur les attitudes des gens à vouloir ou non respecter les lois du Québec.

Motion proposant d'étudier l'opportunité d'intégrer un préambule au projet de loi

C'est la raison pour laquelle, M. le Président, je voudrais amender la motion du député de Viau. Je fais la proposition suivante: Que la motion du député de Viau soit modifiée en remplaçant les termes "de l'article 1 et des articles suivants du projet de loi 58" par les suivants: "en débutant l'étude par l'opportunité d'intégrer un préambule à ceprojet". Je dépose la motion d'amendement.

Une voix: Vous connaissez cela.

Mme Blackburn: "Nonobstant", vous êtes en train de le réintroduire, mes chers messieurs. Il n'y a pas de loi qui traîne quelque part dans nos cahiers dans laquelle on n'a pas trouvé utile de le remplacer.

Des voix: ...

Le Président (M. Thérien): S'il vous plaît! Vous l'avez déposée. Merci, Mme la députée. Je vais suspendre les travaux quelques instants.

M. Jolivet: Est-ce que je peux avoir, avant que vous ne preniez une décision finale, l'occasion de plaider sur la recevabilité, Parce que c'est ce que vous allez avoir à discuter?

Le Président (M. Thérien): J'ai l'habitude de demander de l'éclairage, comme vous avez pu le constater.

M. Jolivet: Merci.

Le Président (M. Thérien): Je demanderais aux intéressés de plaider dans le but d'avoir le meilleur éclairage possible et j'ajournerai pour prendre ma décision par la suite.

M. Jolivet: M. le Président, je pourrais commencer le premier. Excusez-moi, est-ce que la députée de Chicoutimi voudrait commencer?

M. Ryan: Est-ce qu'on pourrait en avoir des copies par courtoisie élémentaire?

Le Président (M. Thérien): M. le député de Laviolette, le délai pour les copies, est-ce que cela se fait rapidement?

M. Jolivet: Ah oui!

Le Président (M. Thérien): Oui. On va attendre la copie.

M. Jolivet: D'accord.

Une voix: On n'est pas pressé. (Suspension de la séance à 16 h 31)

(Reprise à 16 h 35)

Le Président (M. Thérien): À l'ordre! On est en train de distribuer la motion d'amendement présentée par la députée de Chicoutimi.

Une voix: ...recevable.

Débat sur la recevabilité

Le Président (M. Thérien): Sur la recevabilité. Juste dans le but d'éclairer la décision qu'on va prendre tantôt...

M. Jolivet: J'avais demandé la parole, M. le Président. Mais je vais...

Le Président (M. Thérien): Oui, c'est cela. J'allais justement demander si c'était la députée de Chicoutimi...

M. Jolivet: Oui, ce sera la députée qui commencera.

Mme Blackburn: M. le Président, je vais brièvement...

Le Président (M. Thérien): Je m'excuse, Mme la députée, on va attendre un petit peu. Voulez-vous prendre vos places, s'il vous plaît, ceux qui...

Une voix: On n'a pas le texte de l'amendement.

Le Président (M. Thérien): Oui.

M. Ryan: Ce serait bien utile de l'avoir, parce qu'il est assez déroutant.

Le Président (M. Thérien): II y en a qui ont eu des copies. Est-ce qu'on en avait suffisamment pour tous? On pourrait quand même commencer la première argumentation, parce que j'imagine que je vais en accepter quelques-unes. Mme la députée de Chicoutimi, s'il vous plaît.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Il me semble important - c'est l'objet de la motion que j'ai présentée - que cette loi soit précédée d'un préambule. Pour reprendre les paroles du ministre de l'Éducation au moment où il déposait sa loi, il nous disait:

Voilà une loi d'exception.

Effectivement, cela n'est pas la coutume dans nos traditions. Généralement, on ne se voit pas contraint d'adopter une loi qui a comme effet non seulement d'amnistier un certain nombre de personnes qui n'ont pas respecté une loi, mais qui a également comme effet de conférer un certain nombre de droits.

Dans cet esprit, il nous disait: Cette loi est exceptionnelle. Elle est exceptionnelle dans la mesure où non seulement elle vient amnistier mais, en plus, pour des gens qui se sont placés dans l'illégalité, cette loi vient conférer des droits. Il est dans la coutume, dans la tradition parlementaire, lorsqu'il s'agit de lois à caractère exceptionnel ou solennel - ici, c'est davantage exeptionnel que solennel, soit dit en passant - de bien cadrer le projet de loi, de bien expliquer pourquoi un Parlement est en train de prendre une telle mesure. Qu'est-ce qui justifie qu'on soit en train, comme parlementaires, d'adopter une loi qui aura tantôt comme effet non seulement d'amnistier des "illégaux", tant les personnes qui se trouvent dans les écoles que ceux qui les ont aidés à y rester, à s'y inscrire et à y demeurer pendant neuf ans, mais qui plus est vient leur accorder des droits?

II est important, M. le Président, dans ce préambule, quel que soit le lecteur tantôt, qu'il puisse bien camper la loi, qu'il puisse bien comprendre pourquoi on a pris cette mesure et qu'il puisse bien comprendre qu'elle est exceptionnelle, parce que, tantôt, il y a des gens qui vont réclamer parce qu'on a accordé des droits exceptionnels à des personnes qui s'étaient placées dans l'illégalité. Ils pourraient être amenés, tantôt, à réclamer les mêmes droits, parce qu'ils ont respecté la loi, ou les mêmes droits pour ceux qui ne sont plus dans les écoles. Alors, il me semble qu'il devient extrêment important, dans ce projet de loi, pour une meilleure compréhension, pour expliquer l'acte exceptionnel qu'on est en train de faire au moment où on s'apprête à adopter cette loi, qu'il y ait d'abord un préambule qui explique les raisons qui amènent ce Parlement à nous proposer et à adopter éventuellement ce projet de loi. Je ne voudrais pas aller beaucoup plus loin. Je pense que mes collègues pourront toujours y ajouter quelque chose.

Le Président (M, Thérien): Merci, Mme la députée. Je reconnais maintenant M. le ministre de l'Éducation et député d'Argenteuil.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, l'Opposition, comme elle le fait généralement depuis le début de la présente session, baigne dans l'improvisation. Elle est en train de sombrer dans la confusion et l'imprécision. Si la députée de Chicoutimi avait été sérieuse, elle aurait soumis un texte avec sa motion d'amendement et elle aurait dit: Voici, je veux qu'on modifie la proposition en décidant d'étudier en priorité les lignes suivantes que nous proposons d'introduire en guise de préambule.

Nous n'avons rien de cela. On veut qu'on débute par l'étude de l'opportunité d'intégrer un préambule à ce projet. C'est évidemment du non-être. Un non-être, c'est quelque chose qui ne nous dit absolument rien. Cela confirme le caractère dilatoire de tout ce qui a été entendu du point de vue de l'Opposition, du côté de l'Opposition, depuis le début de nos débats, il y a maintenant quatre jours, vendredi dernier.

Il serait absolument contre-indiqué d'accorder le moindre crédit à cette proposition d'amendement et, si la députée avait été sérieuse, il y a bien longtemps qu'elle aurait fait part de cette idée. C'est la dernière trouvaille mécanique qu'on a pu inventer pour essayer de retarder l'examen article par article du projet de loi. On a peur d'examiner le projet de loi article par article. Je n'ai jamais vu une crainte comme celle-là et on dirait qu'ils ont peur de cela comme de leur ombrage. Ce n'est pas compliqué. L'article 1 dit des choses très simples et on vous demande de dire ce que vous en pensez, si vous êtes pour ou contre, mais ce n'est pas avec vos simagrées et votre tournage autour que vous allez impressionner le moindre observateur sérieux. Je comprends très bien que le député de Laviolette se soit éclaté de rire en écoutant ces choses, parce qu'il sait très bien le caractère assez ridicule de ce qui se fait depuis le début de nos procédures et, en particulier, depuis le début de la présente journée.

La motion est bien simple et, d'ailleurs, comme on l'a dit à plusieurs reprises, le gouvernement a fait montre d'une courtoisie exceptionnelle, à laquelle il n'était pas du tout tenu par le règlement, en acceptant qu'un débat de caractère général se fasse avant l'étude article par article, parce que le mandat que vous avez reçu comme nous, c'est d'examiner le projet de loi article par article et vous refusez de vous acquitter du mandat que vous a donné la Chambre. C'est cela votre esprit démocratique. Pour que le Parlement fonctionne, il faut que les commissions, qui sont des créatures de la Chambre, qui sont des émanations de la Chambre et qui rendent compte à la Chambre, commencent par exécuter les volontés qu'a définies la Chambre dans l'attribution des mandats,

M. le Président, le mandat que nous avons, et je termine là-dessus, c'est le mandat d'étudier article par article. Nous

aurions pu l'imposer dès le début. Étant donné qu'il y avait eu débat de l'autre côté, nous avons accepté de faire exception à l'article 247 de notre règlement et nous l'avons fait par gentillesse et par respect de l'opinion de l'autre, mais là je voudrais que l'on sache clairement du côté de l'Opposition que l'on ne peut continuer à s'amuser et à jouer avec la démocratie comme on le fait. C'est de la caricature de la démocratie; c'est ce qui dénature la démocratie: le refus de faire face aux échéances et le refus de faire face aux questions véritables et essentielles. Si l'Opposition continue de faire cela, elle va se discréditer elle-même et je lui rappelle une chose: tout ce qui se passe ici sera connu dans les différents milieux du Québec, en particulier dans les communautés ethniques et, quand elles verront comment, du côté de l'Opposition, on a voulu jouer au football avec elles et se servir d'elles comme d'un ballon politique, elles vont amèrement le regretter et elles s'en souviendront très longtemps. Elles seront parfaitement justifiées de le faire.

L'Opposition a encore une chance de revenir à la raison, "to come back to its senses", comme on dit, de revenir au bon sens, et on ne l'oblige pas à voter comme le gouvernement; je pense que le bon sens le suggérerait fortement, mais chacun garde sa liberté. Il n'est pas question de...

M. Jolivet: M. le Président, ai-je le droit d'invoquer le règlement?

M. Ryan: Je conclus, M. le Président. M. Jolivet: Oui.

M. Ryan: M. le Président, je veux vous épargner toute décision marginale, je conclus en disant que c'est l'évidence même, cette proposition d'amendement m'apparaît complètement farfelue.

M. Jolivet: M. le Président, d'abord j'aimerais faire remarquer...

Le Président (M. Thérien): J'aimerais vous reconnaître d'abord, M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: D'accord, M. le Président, on ne jouera pas aux fous cependant, je voulais juste invoquer le règlement. J'accepte cela difficilement et rarement en commission parlementaire a-t-on vu pareils applaudissements comme on en a vu de l'autre côté. Mais je veux tout simplement dire que c'est normal. Si l'on avait des gens dans l'assistance, ils seraient amenés à applaudir de la même façon que vous autres et on aurait du désordre dans cette salle.

Le Président (M. Thérien): Si cela venait à se reproduire, j'avertirai. M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: D'accord. Je vous remercie beaucoup. Maintenant, on a entendu le ministre parler sur beaucoup de choses et j'aurai l'occasion d'y revenir, mais sur la recevabilité de l'amendement proposé par ma collègue, parce que c'est sur cela que vous allez avoir à porter jugement... M. le ministre dit qu'à cause d'une courtoisie de la partie ministérielle on a eu droit à des motions qui avaient comme caractère de faire en sorte de discuter de l'ensemble du projet de loi. Ce n'est pas la première fois -j'ai eu l'occasion de présider - que des commissions parlementaires pour faire une étude plus élaborée d'un projet de loi demandent de part et d'autre des interventions et acceptent que ces interventions aient lieu. Le président avait rendu une décision en ce sens-là que je trouvais tout à fait logique et conforme à la tradition. Mais, justement parce qu'on parlait de tradition dans la motion qui a été refusée tout à l'heure et qu'on ne veut pas parler de celle-là, je trouve qu'il y a quelque chose qui ne va pas. À un moment donné, la tradition devrait servir tout le monde de la même façon ou elle ne sert en aucune façon. Je vous dis que la tradition veut que cela ait existé.

Quand le ministre parle des mesures que nous avons prises pour montrer notre désaccord profond avec le projet de loi, je voudrais lui faire remarquer que sur le débat qui a eu lieu en cette assemblée, à la cinquième session de la 32e Législature, sur l'étude détaillée du projet de loi 3, il y a eu des motions pour entendre des organismes, comme on l'a fait. On n'a pas posé de questions, on l'a fait et qu'est-il arrivé comme décision? C'est celle que vous avez rendue ce matin. Au moment où cela a été rendu, immédiatement, on est allé vers l'étude détaillée, sauf que nous avons le droit de poser les conditions dans lesquelles ces études vont se faire. Nous avons proposé - ma collègue l'a fait - une motion qui a pour but... Je dis bien, les termes sont là, ils sont choisis. Sur la motion que vous allez devoir regarder comme recevable ou irrecevable, j'aimerais que vous portiez attention à cette argumentation que je vais apporter. C'est de faire motion pour commencer l'étude du projet de loi en regardant l'opportunité d'intégrer un préambule au projet de loi. Donc, l'opportunité d'intégrer un préambule au projet de loi, cela veut dire que... Si je regarde la décision que vous nous avez transmise au courant de la journée, elle dit: À mon point de vue, oui, puisque la commission, je le répète, est maîtresse de ses travaux, il peut venir une motion visant

à entreprendre une étude.

Je dois vous dire que, parce que le principe est là, qu'il est inscrit, la commission est reine et maîtresse de ses travaux. Cela veut dire qu'une motion qui est présentée et qui a pour but de commencer l'étude en présentant un préambule et en demandant l'opportunité d'au moins intégrer ce préambule fait totalement référence à cette décision qu'a rendue le président lors de cette commission parlementaire et qui a pour but, justement, de simplement amender, quand on regarde l'article des amendements, qui a pour but d'ajouter ou de retrancher des mots, mais qui n'a pas pour but de changer le sens.

Est-ce que la motion qui est présentée change le sens de la motion présentée par le député de Viau? Non. Elle vient ajouter un élément nouveau qui est d'étudier l'opportunité de mettre un préambule. Quand M. le ministre accuse ma collègue de présenter une motion qui est prématurée ou qui est mal préparée, qui est mal foutue, et qu'il nous envoie quasiment aux limbes en disant: Vous seriez mieux de retourner aux limbes, vous n'avez pas d'idée, je dois vous dire qu'il parlait, selon l'expression bien québécoise, à travers son chapeau. Effectivement, la motion ne dit pas: Nous voulons intégrer un préambule, mais nous voulons étudier l'opportunité d'intégrer un préambule. La preuve en est que, si jamais cette motion était jugée recevable, qu'elle était discutée et adoptée, nous avons un préambule à proposer qui se lit comme suit... Je veux juste vous montrer que cela n'est pas préparé à la sauvette et à la dernière minute, comme certains projets de loi l'ont été de la part des gens d'en face.

Le préambule se lirait comme suit: Le projet de loi 58, Loi sur l'admissibilité à l'enseignement en anglais de certains enfants, est modifié par l'insertion, après le titre, du préambule suivant: Attendu que depuis l'entrée en vigueur en 1977 de la Charte de la langue française certains élèves ont été admis à recevoir l'enseignement en langue anglaise et ce, en contravention avec les dispositions de celle-ci; attendu que le gouvernement du Québec a tenté sans succès au cours des années de mettre de l'avant diverses formules afin de favoriser l'inscription légale de ces élèves à l'enseignement en langue française; attendu que diverses déclarations et promesses ont suscité des attentes auprès des personnes visées rendant inapplicable l'application de toute formule favorisant le transfert de ces élèves au secteur francophone; attendu que seule une amnistie totale des gestes posés dans le passé peut permettre la régularisation du statut légal de ces élèves, le ministre de l'Éducation propose la loi suivante, articles 1, 2, 3, 4, 5 et 6.

Donc, on a un préambule de préparé, mais ce n'est pas de cela qu'on discute. On aura l'occasion, si vous acceptez notre motion et que vous permettez le préambule, de discuter de chacun des paragraphes du préambule. Je pense qu'effectivement M. le ministre, sur la question qui est ici, a mal lu la proposition de ma collègue. C'est sur l'opportunité d'intégrer un préambule à ce projet. Dans ce contexte, M. le Président, comme cette motion vient ajouter à la motion du député de Viau sans en changer le sens, tel que prévu par nos règlements, vous n'avez pas, à mon avis, d'autre possibilité que de déclarer recevable cet amendement.

Le Président (M. Thérien): Donc, étant donné que le temps est è la discrétion, je vais suspendre pour dix minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 51)

(Reprise à 17 h 9)

Le Président (M. Thérien}: À l'ordre, s'il vous plaît!

Décision du président

Nous reprenons la séance et je vais rendre mon jugement. Avant d'apporter mon jugement, j'aimerais lire la motion et l'amendement pour rappeler à tout le monde l'encadrement.

Le député de Viau a fait une motion pour que l'on passe immédiatement à l'étude détaillée de l'article 1 et des articles suivants du projet de loi 58. L'amendement à la motion proposé par la députée de Chicoutimi se lisait ainsi: "En remplacement des termes de l'article 1 du projet de loi 58 par les suivants: en débutant l'étude de l'opportunité d'intégrer un préambule à ce projet." Après vérification de certaines jurisprudences, certaines autres étant malheureusement inexistantes... À l'article 197, on peut lire: " Les amendements doivent concerner le même sujet que la motion et ne peuvent aller à rencontre de son principe. Ils ne visent qu'à retrancher, à ajouter ou à remplacer des mots." Donc, je juge l'amendement recevable, car cela ne va pas à l'encontre des principes de la motion principale. La motion vise donc à remplacer ou à ajouter des mots qui n'enlèvent aucunement l'esprit de la motion déposée par le député de Viau.

Je céderai la parole sur l'amendement à la motion à la députée de Chicoutimi.

Débat sur la motion d'amendement Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je vais tenter de vous convaincre de la

nécessité - si on ne peut le faire, à tout le moins de modifier la loi - de faire précéder l'article 1 d'un préambule.

Peut-être est-il utile ici, en guise d'information, de vous resituer dans le temps par rapport aux règles concernant ce genre de loi, par rapport aux traditions, à quel moment cela se fait, dans quelles circonstances et pourquoi.

Vous allez me permettre brièvement de faire un peu le tour de la situation et de vous expliquer pourquoi, à mon avis, on devrait retrouver dans le projet de loi 58 un tel préambule. Je disais tout à l'heure que le caractère... On retrouve un préambule dans deux types de loi: les lois à caractère exceptionnel, donc d'exception, qui dérogent aux règles générales et les lois à caractère solennel. Brièvement, pour se rappeler les lois à caractère solennel pour lesquelles on a un préambule, il y a la charte canadienne, par exemple, la Charte de la langue française, la déclaration des droits de la personne. Tous ces actes légaux sont précédés d'un préambule.

Je pense bien que cela devrait rappeler des choses aux députés libéraux. On sait l'attachement, Je souci et l'intérêt que porte l'actuel premier ministre à l'effet d'introduire un préambule à la charte canadienne et on se rappelle pourquoi. Les principales raisons évoquées par le premier ministre sont les suivantes: Un préambule permet au juriste qui a à porter un jugement en vertu de la charte de situer son action, de l'encadrer, de la comprendre et de l'interpréter. Les articles ne sont pas des articles de la loi, mais cependant le préambule a comme effet d'encadrer son interprétation. Or, le premier ministre du Québec nous dit: II serait suffisant qu'on introduise dans le préambule un texte tel: la reconnaissance du Québec comme société distincte. À son avis - je pense que c'est sûrement aussi votre avis - il doit avoir une connaissance suffisante de ces questions pour penser qu'il a raison, qu'avec le texte, le préambule de la charte canadienne ainsi libellé, les juristes devraient pouvoir mieux encadrer leur jugement. Peut-être effectivement éviterions-nous que la tour penche toujours du même côté. C'était tout simplement pour un peu camper la nécessité et le rôle que jouent les préambules dans des lois à caractère exceptionnel ou à caractère solennel.

On va parler maintenant des lois à caractère exceptionnel. Tout è l'heure, je faisais une remarque au ministre de l'Éducation. Je rappelle ici une loi qui a été adoptée en cette Chambre, c'est le chapitre 61, Loi concernant un jugement rendu par la Cour suprême du Canada le 13 décembre 1979 sur la langue de la législation et de la justice au Québec, sanctionnée le 14 décembre 1979. Il y avait le préambule qui suit et que je vous lis. "Considérant que, le 26 août 1977, l'Assemblée nationale du Québec adoptait la Charte de la langue française sanctionnée cette même date; "Considérant que le chapitre III de cette loi édicté que le français est la langue de la législation et de la justice au Québec; "Considérant que la Cour suprême du Canada dans un jugement rendu le 13 décembre 1979 dans la cause du Procureur général de la province du Québec c. Peter M. Blaikie et autres a déclaré ce chapitre inconstitutionnel; "Sa Majesté, de l'avis et du consentement de l'Assemblée nationale du Québec, décrète ce qui suit..."

Suivait le projet de loi. Il s'agissait là évidemment d'une modification importante et exceptionnelle.

Est-ce que la loi qu'on examine a un caractère suffisamment exceptionnel pour qu'il soit nécessaire d'y inclure un préambule? Je pense que si on devait en douter ou si on en doute encore, c'est probablement qu'on n'a pas écouté ce qui s'est dit à ce sujet en cette Chambre. Une loi qui vient non seulement amnistier des personnes qui se sont placées délibérément dans l'illégalité - je le rappelle, je ne parle pas des enfants qui sont actuellement dans les écoles - une loi qui vient amnistier des actes illégaux, une loi qui vient conférer à ceux qui ont désobéi à cette loi des droits qui ne seront pas reconnus à d'autres personnes, il me semble qu'une telle loi doit être précédée d'un préambule.

En effet, si on ne cadre pas parfaitement cette loi, si on n'explique pas sommairement, dans un court préambule, les raisons qui justifient que ce Parlement adopte cette loi d'exception, on pourrait faire une interprétation tantôt qui dépasse largement les vues et les objectifs de ce projet de loi et de cette loi.

Le préambule, pour cette raison, m'apparaît non seulement utile, mais, à mon humble avis, indispensable. Il faut bien qu'on comprenne que le préambule de cette loi devrait permettre à tout juriste, si jamais il y avait une demande d'un citoyen du Québec de se prévaloir des droits reconnus aux personnes qui sont là, de comprendre cette loi dans son contexte. Le contexte, on nous l'a rappelé, c'est qu'au lendemain de l'adoption de la loi 101 plusieurs jeunes - on estime qu'à l'époque ils étaient entre 200 000 et 300 000 - allophones qui, aux termes de la loi, n'auraient pas eu le droit de fréquenter les écoles anglaises y sont demeurés. Il est peut-être important de rappeler qu'ils n'y sont pas demeurés exclusivement parce qu'ils avaient la volonté d'y demeurer, ils y sont demeurés avec la complicité active d'un certain nombre de personnes, ils y sont demeurés avec la complicité des directeurs d'école, ils y sont

demeurés avec la complicité des professeurs, ils y sont demeurés avec des complicités -on l'a vu hier dans les propos tenus par la PACT - qui se situaient un peu partout au Canada, et aussi haut...

Mme Bleau: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Thérien): Question de règlement, Mme la députée de Groulx.

Mme Bleau: J'aime beaucoup entendre les propos de Mme la députée de Chicoutimi à chaque occasion, mais elle est en dehors du sujet complètement dans le moment. On parle seulement de votre projet de préambule. Je pense que vous n'avez pas besoin de nous répéter tout ce qu'on sait déjà. Pourquoi voulez-vous mettre un préambule? C'est seulement cela.

M. Gendron: Sur la question de règlement, M. le Président. D'abord, ce n'est manifestement pas une question de règlement.

Le Président (M. Thérien): Elle parlait de la pertinence.

M. Gendron: Je sais. Je veux justement vous indiquer que, sur la pertinence, il doit être sûrement difficile pour la députée de Groulx de prétendre que les propos de ma collègue ne sont pas pertinents. Justement, il n'est pas pertinent de parler sur le préambule, lequel a été explicité très succinctement par mon collègue, le député de Laviolette. Donc, elle ne connaît pas le préambule qu'on pense qu'il devrait y avoir dans le projet de loi. Prétendre qu'il n'est pas pertinent d'en parler, je pense que c'est inopportun à ce moment-ci, M. le Président.

Le Président (M. Thérien): De toute façon, je...

Mme Bleau: Question de règlement, monsieur. Si je l'ai bien appris, un préambule, ce sont quelques lignes qui...

Le Président (M. Thérien): Non. Je pense que l'amendement à la motion...

Mme Bleau: On ne pourrait pas tout mettre cela?

Le Président (M. Thérien): Mme la députée, l'amendement à la motion a été reconnu comme étant recevable et le débat porte sur la pertinence d'avoir un préambule et ce que peut comporter ce préambule. Donc, allez-y, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Je vous remercie.

M. Boulerice: Je voudrais venir à la rescousse de ma collègue qui se demandait ce que c'était un préambule.

Le Président (M. Thérien): Non, non. Je pense que c'est inutile. Pour le moment, votre collègue n'a pas besoin que vous vous portiez à sa rescousse. En temps opportun, vous viendrez à sa rescousse.

Une voix: On lui fait confiance à votre collègue.

Mme Blackburn: M. le Président. Peut-être brièvement, pour un peu expliquer parce que je crois à la bonne foi de la députée de Groulx, ce que je suis en train d'essayer de faire, c'est de bien situer les raisons qui me font penser qu'on doit introduire un préambule et pour bien se rappeler tou9 ensemble pourquoi, aujourd'hui, on se retrouve dans cette situation et pourquoi on est en train d'adopter une législation qui vise à corriger cette situation.

Je dis donc et je disais donc que ces jeunes se retrouvent dans des écoles au lendemain de l'adoption de la loi 101 alors que normalement, ils n'y auraient pas droit. Ils s'y retrouvent parce qu'on a organisé de façon délibérée la désobéissance. On a organisé la désobéissance non pas exclusivement pour servir les intérêts de ces jeunes qui se retrouvaient dans les écoles. Il m'arrive de penser que cet intérêt n'était vraiment pas au premier chef des préoccupations de ceux et celles qui ont organisé la désobéissance.

Souvent, on a organisé la désobéissance parce que - on le sentait tantôt - de l'avis même de la députée de Jacques-Cartier, une étude les a amenés à constater qu'aux termes de la loi les effets seraient les suivants: dans sa commission scolaire, dix ans plus tard, il ne resterait que le tiers des élèves qu'on y retrouve actuellement. D'où, nous dit-elle, des conséquences sur les administrateurs et sur les professeurs. Doit-on comprendre de l'intervention de la députée de Jacques-Cartier que les gens qui ont organisé la résistance, qui ont même fait des levées de fonds et des collectes auprès des professeurs à travers le Canada, n'avaient pas nécessairement en vue de protéger les intérêts des jeunes? On a davantage tendance à penser qu'ils étaient inquiets par rapport à leur propre avenir professionnel.

Il est important de rappeler ces choses. Il est important de bien situer brièvement le cadre général de cette loi. Il ne s'agit pas que cette loi vienne reconnaître de fait que ces élèves se retrouvent dans l'école. Non, on vient reconnaître de droit... Une loi qui confère des droits è la suite d'un acte d'illégalité, vous admettrez avec moi que c'est une loi à caractère particulièrement

exceptionnel. S'il n'y a pas un minimum de préambule pour nous expliquer dans quelles circonstances on a pu, dans un Parlement, adopter une telle loi, je trouve cela préoccupant. Ne serait-ce que dans dix, quinze, vingt ou cinquante ans, quand on voudra se rappeler un peu l'histoire et qu'on regardera ce projet de loi 58 que vous avez en main pour se demander dans quelles circonstances on a pu imaginer ou obliger un Parlement à adopter une loi qui non seulement vient amnistier des personnes qui se sont placées délibérément en situation d'illégalité mais encore, confère à ces personnes des droits qui ne seront pas reconnus à ceux qui ont respecté la loi; des droits qui ne seront pas reconnus à ceux qui ont terminé leurs études et qui ne sont plus dans le réseau...

Par rapport à cette dernière dimension, est-ce que tantôt on reconnaîtra les droits de ceux qui ont terminé leurs études? Par l'évaluation qui a été faite hier, on estime qu'il y en aurait environ 2000; 2000 élèves qui sont sortis du réseau, c'est 3500 au total avec les 1500 qui sont actuellement dans les écoles. Donc, on peut estimer qu'il y en a 2000 qui ne sont plus dans le réseau. Il n'y a rien qui nous assure que les 2000 personnes qui ont terminé leurs études dans les écoles anglaises et ce, illégalement, ne viendront pas tantôt, en s'appuyant sur la loi 58, réclamer les mêmes droits et les mêmes privilèges que la loi confère à ceux qui y sont actuellement.

Si on vient me dire que ce ne sont pas des motifs suffisants, des motifs d'une importance suffisante pour justifier qu'on encadre mieux et qu'on explique dans un court préambule avec trois ou quatre "attendu", cinq peut-être, à la fois pour limiter la portée de cette loi et l'expliquer, il me semble que c'est mal comprendre le rôle que doit jouer ce genre de loi à caractère tout à fait spécial; je le rappelle, caractère spécial qui a été souligné et sur lequel le ministre de l'Éducation a attiré notre attention.

Que pourrait contenir un tel préambule? Tout à l'heure, le ministre de l'Éducation nous a accusé, m'a accusée, - parce que c'est moi qui ai apporté la motion d'amendement - de faire de l'improvisation. Il me disait: Si cela avait été sérieux, vous auriez déposé votre projet. Non seulement avons-nous un projet en main, mais j'estime que c'est une amélioration considérable que d'ajouter un préambule à ce projet de loi.

Comment, dans le futur, expliquer la portée de cette loi? Comment, dans le futur, pour de futurs législateurs, pour des causes qu'on aurait éventuellement à entendre, comprendre le sens de cette loi? Comment comprendre sa portée? Il me semble que les membres de ce gouvernement devraient être les premiers à souscrire à cette motion d'amendement, ne serait-ce, je le rappelle, que pour reconnaître en cela la valeur qu'attache à ce genre de préambule leur chef et premier ministre.

Le premier ministre a bien compris -et c'est ce qu'il défend avec la dernière des énergies - qu'il ne s'agit pas de mettre un nombre X d'exceptions à l'intérieur d'une loi. Il s'agit de se donner un préambule qui assure une lecture à la loi, qui encadre cette lecture. Il serait peut-être important dans ce préambule qu'il y ait un rappel, pas très long, mais un rappel des raisons qui amènent le Parlement à accepter un tel projet de loi. Par exemple, qu'on puisse rappeler dans quelles circonstances et, brièvement, pour quels motifs on a retrouvé - cela s'est perpétué pendant neuf ans - des enfants dans les écoles anglaises alors qu'en vertu de la loi 101, ils n'auraient pas été admissibles.

Il serait important de se rappeler et de rappeler le caractère exceptionnel de cette loi, puisqu'elle confère à des enfants des droits que ces derniers n'auraient même pas en vertu de l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés. Il faut se rappeler que la loi qu'on est en train d'examiner ici et qui sera possiblement - je ne sens pas qu'il y ait une volonté du gouvernement de céder là-dessus - adoptée avant la fin de la session, fait une brèche importante dans la loi 101. Non seulement va-t-elle plus loin que la loi 101, mais elle va encore plus loin que ce qu'autorise l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés. (17 h 30)

Dans ce sens, je me dis que la députée de Jacques-Cartier doit se réjouir de cette situation, puisqu'elle nous disait, ici, - cela ne cesse pas de me préoccuper - que la situation de ces enfants était pénible et qu'elle l'était aussi pour les parents. Elle s'exprimait en ces termes: J'estime, j'estimais et je penserais et je pense toujours que les choix des parents en matière d'éducation des enfants doivent toujours être primordiaux. Si je comprends bien la députée de Jacques-Cartier, cela s'appelle le libre choix de la langue d'enseignement. Le moment où elle nous fait cette remarque au cours de sa présentation - c'est vendredi si ma mémoire est fidèle - vient immédiatement après qu'elle nous ait raconté un événement qu'elle avait vécu alors que les parents lui imputaient la responsabilité du fait que leurs enfants ne pouvaient plus fréquenter l'école anglaise. Elle trouvait cette situation déplorable, puisqu'elle nous dit: Les choix des parents en matière d'éducation doivent être primordiaux. Cela veut donc dire - si j'ai bien compris la députée de Jacques-Cartier - qu'elle favorise et est toujours pour le libre choix de la langue d'enseignement. J'aurais aimé ici entendre un peu des gens du parti ministériel

réagir à cette affirmation. Qu'on nous dise que la situation a quelque chose de rassurant, je trouve cela particulièrement préoccupant quand on pense qu'il y a encore des personnes dans ce Parlement qui estiment que la loi 101 en matière de langue d'enseignement, même si depuis l'adoption de la Charte canadienne des droits et libertés on tient compte de la clause Canada, va encore trop loin et qui voudraient revenir au libre choix, je trouve cette situation particulièrement préoccupante!

À présent, dans ce préambule, comme il serait important de resituer brièvement les événements qui ont mené à la situation, il pourrait être également important de rappeler, comme vous nous l'avez dit ici, qu'il n'y avait pas d'autre façon de résoudre ce problème. Vous nous avez dit ici: Le gouvernement précédent a laissé pourrir la situation, comme si ce gouvernement était responsable du fait que les enfants étaient dans les écoles anglaises alors qu'ils n'y avaient pas droit. On a oublié de dire qu'ils y étaient avec la complicité - je le rappelle - d'un certain nombre de personnes. De l'avis même de l'Association des professeurs anglo-catholiques, il ne fallait pas trop s'inquiéter; ça ne posait pas de problèmes parce que, de toute façon, ces enfants, une fois leurs classes terminées, auraient accès aux études collégiales, non seulement au Québec mais également dans les neuf provinces canadiennes, et ce évidemment avec le consentement des neuf ministres canadiens de l'Éducation. Entendre cela et ne pas être préoccupés de la confiance que le ministre actuel de l'Éducation semble vouloir mettre dans la bonne volonté de ces personnes, ne pas laisser le Québec prendre sa place, il y a là quelque chose d'inquiétant. Entendre cela et ne pas être préoccupés du fait qu'on ne veuille pas accorder, au Québec, les mêmes droits linguistiques à des commissions scolaires pour les francophones, alors qu'on sait que c'est reconnu dans les autres provinces canadiennes, entendre cela, il me semble, y avoir de quoi être préoccupés.

Il serait important effectivement qu'on rappelle que cette loi a un caractère exceptionnel et qu'on se voit contraint de l'adopter parce que, comme nous dit le ministre, il n'y avait pas d'autre solution. Les autres solutions qui, contrairement à ce qui a été dit ici, ont été proposées par le gouvernement précédent, je le rappelle, non seulement le ministre de l'Éducation, le Dr Camille Laurin, a-t-il consenti un budget de 3 600 000 $ pour aider à l'intégration des jeunes dans les écoles françaises, mais en plus le ministre Laurin assurait les personnes qui avaient été acteurs ou complices de ce geste de désobéissance - appelez-les comme vous voulez - celles qui avaient organisé la résistance, il les avaient assurées qu'il n'y aurait pas de poursuite. Donc, l'équivalent de ce que. reconnaît ce projet de loi, et cette offre a été faite à la fin de l'année 1981. On connaît les résultats, la résistance a continué de s'organiser, d'autant plus que, pour certains, il faut se l'avouer, c'était encore payant.

Alors, il est important de se rappeler qu'il y a eu des tentatives - cela donne un éclairage bien meilleur au caractère exceptionnel de cette loi - pour corriger cette situation, mais ces tentatives n'ont pas porté de fruits. Cela veut donc dire qu'il faut adopter une loi à caractère exceptionnel. Celle que vous nous proposez, vous estimez que c'est la seule capable de le faire. Alors, si telle est la situation, cela s'explique mieux. Il semble que, dans le préambule, avant de passer à une loi qui a comme effet de récompenser la désobéissance, de donner une prime à la désobéissance, pour bien faire comprendre aux futurs lecteurs que c'était une nécessité, il serait intéressant qu'on rappelle qu'il y a eu des tentatives de faites qui n'ont pas porté fruits. C'est ce que pourrait contenir un préambule.

Qu'est-ce que pourrait contenir un préambule? On pourrait rappeler, pour le bénéfice du lecteur, pour celui qui aura éventuellement à faire une interprétation en vertu de cette loi, pour un juriste, il serait important de rappeler que les personnes qui ont été abusées... Je n'utilise pas un terme qui m'est propre, je prends une déclaration qui nous vient de la communauté italienne de la région de Montréal qui reconnaît avoir été abusée. Je le rappelle ici. C'est un article de la Presse du 29 septembre 1981. Je lis: Selon les organismes concernés, les parents d'enfants inscrits dans les écoles anglaises en violation de la loi 101 ont été abusés à la fois par certains éléments de la communauté italienne et par les Anglo-Saxons. Mais on ne doit pas pour autant pénaliser les élèves, prétendent-ils. Ce n'est pas moi qui l'invente, je ne reprends que ce qui a été déclaré par ces personnes.

Il me semble qu'il serait important, pour bien comprendre que la responsabilité n'incombe pas exclusivement aux personnes qui se sont placées dans cette situation d'illégalité, particulièrement les parents et les enfants, je pense qu'il serait important de rappeler dans ce préambule que c'est en vertu de pressions et de promesses qui ont été faites par des groupes autres.

Située ainsi, la loi, qui, pour autant, m'apparaît aller beaucoup trop loin, demeure, à mon avis, inacceptable parce qu'elle confère à des personnes, je le rappelle, qui se sont placées dans l'illégalité des droits qu'on ne reconnaîtra pas aux autres. Il me semble que la situer dans le cadre d'un préambule, au moins pour les générations futures, pourrait un peu faire comprendre comment un Parlement a pu

adopter une loi qui vient récompenser et sanctionner la désobéissance.

Il serait également important, disais-je, dans le prémbule d'introduire un "attendu"qui limite la portée de cette loi. Je suis toujours préoccupée par ces personnes qui tantôt, et de bon droit, pourraient réclamer en allant en cour qu'on leur reconnaisse les mêmes droits que les élèves qu'on s'apprête aujourd'hui à amnistier. Les 2000 élèves qui ont fréquenté illégalement les écoles anglaises et qui en sont sortis tout à l'heure voudront probablement aussi - et cela ne m'étonnerait pas - réclamer le même droit pour leurs enfants. Il me semble qu'un préambule qui vient limiter et circonscrire un peu ce projet de loi aurait le mérite de nous rassurer.

À présent, qu'en est-il de ceux et celles qui ont obéi à la loi? Comme je le rappelais tout à l'heure au ministre de l'Éducation, celui-ci me disait: II n'y a effectivement pas eu beaucoup de personnes qui se sont manifestées pour dénoncer le fait qu'elles se trouvent pénalisées parce que, ayant respecté la loi, elles n'auront pas ce droit de choisir leur langue d'enseignement. J'ai quand même eu un cadre d'une commission scolaire qui a fait une telle représentation.

M. le Président, je conclus. Ce que je veux dire par rapport à ce préambule, c'est: Non seulement faudrait-il que l'on puisse la circonscrire par rapport aux personnes qui ont poursuivi leurs études en anglais et qui ne sont plus dans les écoles, mais encore faudrait-il pouvoir penser à ceux et celles qui pourraient réclamer les mêmes droits, même si elles ont respecté la loi. Là-dessus, j'espère avoir convaincu cette Assemblée que l'introduction d'un préambule à cette loi à caractère tout à fait exceptionnel est non seulement souhaitable, mais de mon avis indispensable. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Thérien): II y a deux questions de règlement. Je vais passer la parole à Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Ce n'est pas une question de règlement, M. le Président. J'aimerais dire deux mots pour rétablir les faits de la situation...

Le Président (M. Thérien): Si vous me le permettez, je vais passer à une question de règlement, puis je vous donnerai le droit de parole auquel le parti ministériel a droit.

M. Tremblay (Rimouski): J'ai une question à poser à la députée de Chicoutimi, à savoir si elle est d'accord pour ajouter l'attendu suivant: Attendu l'échec du Parti québécois de pouvoir régler antérieurement...

Le Président (M. Thérien): M. le député, il faut qu'il y ait consentement. Est-ce une question de règlement? Voulez-vous poser une question à la députée de Chicoutimi?

M. Tremblay (Rimouski): Je vais poser une question à la députée de Chicoutimi, si elle y consent...

Le Président (M. Thérien): Elle n'y consent pas. Donc, je vais passer la parole pour dix minutes, si elle le veut bien, è la députée de Jacques-Cartier.

Mme Joan Dougherty

Mme Dougherty: M. le Président, je ne veux pas dix minutes, je veux deux minutes. La députée de Chicoutimi a longuement parlé de son interprétation de ce que j'ai dit lors de l'ouverture de cette commission. Selon la députée de Chicoutimi, j'ai appuyé le choix de la langue de l'éducation des parents. Ce n'est pas du tout ce que j'ai dit, j'ai dit que j'ai toujours respecté les voeux des parents comme étant quelque chose de primordial. Ce que je veux dire et ce que j'ai dit lors de mon intervention, c'est que ce que les parents réclamaient à l'époque du débat sur la loi 101 et qu'ils réclament encore aujourd'hui, c'est une éducation bilingue, ce n'est pas du tout une éducation anglaise ou une éducation française; le choix est faux. Ce que les immigrants réclament, les immigrants dont j'ai parlé, surtout les Grecs dont j'ai parlé dans l'histoire que j'ai racontée au PSBGM, c'est une éducation bilingue, peut-être en grec, trilingue pour reconnaître leur propre culture et leur propre langue. Je n'ai pas parlé du libre choix et l'interprétation de la députée de Chicoutimi de ce que j'ai dit est tout à fait fausse. (17 h 45)

M. Jolivet: M. le Président. Compte tenu de l'intervention, est-ce que je peux avoir le droit de parole, s'il vous plaît?

Le Président (M. Thérien): Je vais vous l'accorder.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. La motion devant nous, présentée par la députée de Chicoutimi, vise à introduire un amendement qui a pour but de procéder a l'étude du projet de loi par l'insertion possible d'un préambule.

Donc, la question posée par la motion présentée par ma collègue a pour but de savoir si les membres de cette commission sont prêts à ajouter un préambule au projet de loi 58, lequel pourrait faire l'objet d'une discussion par les membres de cette commission. Comme le député de Rimouski a

tenté de le faire, il n'y aurait aucune difficulté à ce qu'il propose un amendement au préambule, mais il faudrait d'abord que ce préambule soit accepté, en fait, non pas que le préambule soit accepté, mais qu'on accepte de discuter du préambule.

J'ai bien aimé l'intervention du député de Rimouski, intervention qui a cependant avorté, car la députée de Chicoutimi n'était pas prête à répondre à sa question, n'ayant pas devant elle, d'aucune façon, un préambule sur lequel elle pouvait porter son attention. Donc, si le député de Rimouski voulait faire cette motion, lorsque les gens d'en face auront accepté la motion de Mme la députée de Chicoutimi, nous serons en mesure de présenter un préambule auquel il pourra ajouter un autre paragraphe de son cru.

Pour ce faire, faut-il encore que nous ayons la capacité légale de le dicter ce fameux préambule. Comment ce préambule pourrait-il être placé dans le projet de loi? Quels sont les éléments qu'il pourrait contenir? Ma collègue en a fait mention et j'aimerais y revenir pour que vous vous prépariez déjà à en ajouter d'autres, si vous voulez en ajouter, ou à en modifier, si vous le voulez. Puisqu'on aura l'occasion de se revoir ici pendant un bon bout de temps, les galées vous seront donc utiles. Elles vous permettront d'aller chercher la transcription des débats de la commission et, à partir d'elle, de pouvoir l'amender.

On pourrait aussi faire mieux que cela. Au lieu de vous dire: Attendez donc à demain matin d'avoir la transcription, on pourrait, si vous l'acceptiez, vous présenter le préambule, suspendre durant quelques instants à l'heure du souper, et, ensuite y apporter les amendements que vous jugeriez à propos. Pour bien vous le situer, le préambule que nous aimerions voir inclus dans le projet de loi est basé sur quatre attendus.

Nous croyons que le préambule doit faire l'objet d'un historique pour que les gens comprennent bien pourquoi la loi est adoptée. 11 est évident que, légalement, on ne se fie pas, pour porter un jugement, sur un préambule. Les juges et les avocats vont se fier aux articles du projet de loi. Le préambule, cependant, s'il indique une volonté d'un gouvernement d'avoir adopté une telle loi, n'a pas effet de loi. Mais, si les articles de la loi allaient è ('encontre du préambule, peut-être pourrait-on considérer que les articles du projet de loi sont contraires à ce qu'on pensait et totalement contraires à la pensée qu'avait le gouvernement qui adopte ce projet de loi.

Un des attendus que nous aimerions voir - et je pense que c'est logique - se lirait comme suit: Attendu que, depuis l'entrée en vigueur, en 1977 - donc on pourrait même ajouter comme amendement le 26 août 1977, puisque, effectivement, cela a été le 26 août 1977, et, comme je l'expliquais, trois jours après ma fête - de la Charte de la langue française, certains élèves ont été admis à recevoir l'enseignement en langue anglaise et ce, en contravention avec les dispositions de celle-ci." Quelqu'un, s'il le voulait, pourrait apporter un amendement disant: ont été admis, à la suite d'un système organisé de collaboration par les directeurs d'école, dont faisait partie le député de Viau et par les dirigeants de la commission scolaire dont faisait partie le député de Sauvé. On pourrait en ajouter énormément.

Une voix: Oui.

M. Jolivet: Mais, pour ce faire, faudrait-il encore que l'amendement soit adopté. Le deuxième attendu qu'on pourrait voir installé se lirait comme suit: Attendu que le gouvernement du Québec a tenté sans succès au cours des années de mettre de l'avant diverses formules afin de favoriser l'inscription légale de ces élèves à l'enseignement de la langue française. Là, on pourrait parler du rapport Aquin. Quelqu'un pourrait parler de la tentative faite par Me Aquin dans le rapport. D'autres pourraient dire qu'une nouvelle tentative... Ils pourraient dire: Attendu que cette nouvelle tentative a pour but de... En fait, on pourrait ajouter énormément d'amendements.

Mme Bleau: Ce sont tous les noms des enfants "illégaux" que j'aimerais voir dans cela.

M. Jolivet: Mais pour ce faire, il faudrait que le député de Viau, qui semble en connaître plus que nous, nous fournisse les noms. Que la commission scolaire... Le député de Sauvé qui était président de la commission scolaire devait certainement en connaître, à l'époque, des noms. Il nous fait signe de la tête que non. Mais certainement que des officiers à l'intérieur de la commission scolaire... Si le président de la Commission scolaire des écoles catholiques de Montréal, à l'époque, ne connaît pas les "illégaux", cela m'inquiète un peu. Il y a certainement des noms qu'il connaît. Il a fallu qu'il y ait une enquête. Si les directeurs d'écoles ont refusé, c'est que lui, comme président...

M. Parent (Sauvé): Question de privilège.

M. Jolivet: II n'y a pas de question de privilège en commission parlementaire, M. le Président.

Vous prendrez votre droit de parole après. Je continue donc.

M. Parent (Sauvé): M. le Président, ce n'est pas lui qui est président.

M. Jolivet: Mais effectivement, il n'a pas droit à des questions de privilège en commission parlementaire.

M. Parent (Sauvé): C'est à lui à le dire.

Le Président (M. Thérien): S'il vous plaît!

M. Parent (Sauvé): M. le Président, je m'adresse à vous pour une question de privilège...

Le Président (M. Thérien): Je pense que... Question de règlement ou question de...

M. Jolivet: Privilège.

M. Parent (Sauvé): Je pourrais invoquer le règlement, mais c'est le privilège que je veux invoquer, M. le Président.

M. Jolivet: Mais il n'y en a pas en commission parlementaire.

M. Parent (Sauvé): M. le Président va me répondre.

Le Président (M. Thérien): Disons que c'est une question de règlement privilégié.

M. Jolivet: Je m'excuse, M. le Président, j'aurai l'occasion... Non, non, on ne le fait pas et le président n'a pas le droit de donner indirectement ce qui n'est pas permis directement. Dans le règlement, il n'y a pas de question de privilège en commission parlementaire.

Le Président (M. Thérien): Le député de Sauvé a indiqué qu'il pouvait signaler une question de règlement. Est-ce que c'est une question de règlement?

M, Parent (Sauvé): Étant donné, M. le Président, que je n'ai pas droit à une question de privilège, après l'énoncé du député de Laviolette, j'utiliserai mon droit de parole pour rectifier certaines choses. Merci, M. le Président.

M. Jolivet: Parfait.

M. Parent (Sauvé): M. le député de Laviolette, je vous écoute.

Le Président (M. Thérien): Toutefois, j'inviterais tous les parlementaires au calme, car H reste quand même huit minutes.

M. Jolivet: Je suis très calme, M. le Président. La seule chose, c'est que je suis très respectueux des droits des autres. J'accepte vos décisions et je voudrais qu'on fasse la même chose pour moi.

Ce que je voulais juste dire, c'est que si le gouvernement, à l'époque, n'a pas pu demander aux commissions scolaires de faire des gestes - là, le deuxième attendu est la -c'est parce que des gens avaient refusé de le faire. Si le président de la commission scolaire de l'époque ne connaît pas les noms, c'est parce que des gens ont refusé de lui en fournir. Il y a eu des tentatives de la Commission scolaire des écoles catholiques de Montréal de demander les noms et comme président, il ne les a pas eus. Mais quelles ont été les sanctions qu'il a prises auprès des directeurs d'écoles, des cadres scolaires, des enseignants qui ne lui ont pas fourni les noms? Aucune. Je reprends la question du ministre quand il demandait au ministre de l'Éducation d'alors: Quels sont les moyens que vous avez pris, M. le député d'Abitibi-Ouest, quand vous étiez ministre de l'Éducation? Le député a dit: Aucun autre que celui de la persuasion. Donc, les deux sont équivalents. À ce moment-là, au lieu de vouloir tirer des roches à tout le monde, on devait regarder dans notre miroir à nous pour éviter qu'il soit cassé.

Comme troisième possibilité on pourrait avoir: Attendu que diverses déclarations et promesses ont suscité des attentes de la part des personnes visées. On pourrait dire: Promesses en 1981, lors de l'élection du 13 avril 1981; promesses faites pendant la campagne électorale de 1985, et là, on aurait raison de parler, après cela, de ce qu'on a dit un peu dans les journaux: Les libéraux remplissent des promesses électorales, c'est donc un engagement qu'ils ont pris, comme ils disaient. Peu importe qu'ils en prennent, mais ils sont en train de donner exactement, par la loi, le résultat de leurs promesses. Et là il faudrait peut-être demander au député de Rimouski s'il va tenir sa promesse de 150 000 000 $ sur la route entre Rivière-du-Loup et Rimouski. En fait, je pense que...

Des voix: Ce n'est pas pertinent.

M. Jolivet: Ce n'est pas pertinent, d'accord.

Le Président (M. Thérien): J'allais signaler, M. le député de Laviolette, la non-pertinence du dernier propos.

M. Jolivet: D'accord, alors je me plie à votre décision, M. le Président. Je n'en n'ai pas parlé.

Donc, on dit: Rendant inapplicable l'application de toute formule favorisant le transfert de ces élèves au secteur francophone. Il y a des promesses qui ont

été faites et cela a pour but de passer outre à la loi 101 et même d'en donner plus. En vertu de l'article 23 de la charte canadienne, qui est devant nous, on en donne plus par la loi, parce qu'on va permettre une utilisation plus forte de l'article 23 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique amendé par la loi constitutionnelle de 1982.

Il me reste une minute. Donc, en dernier: Attendu que seule une amnistie totale des gestes posés dans le passé peut permettre la régularisation du statut illégal de ces élèves, le ministre propose le projet de loi. Même si le ministre n'aime pas le mot amnistie, même le rapport Rondeau en parle, même le député de Viau, même Jean-Claude Rondeau, son propre spécialiste des choses, en parlent, ils parlent d'amnistie. C'est bien de valeur, le ministre n'accepte pas le terme, mais il est là. Il serait bon que les gens sachent que la loi a pour but d'amnistier tous ceux qui ont été illégaux et qu'en conséquence il n'y a plus de pénalité pour personne. Au contraire, ce sont des droits plus forts qu'à ceux qui ont obéi à la loi qu'on leur donne. C'est dans ce sens que j'appuie avec beaucoup d'intensité la proposition importante posée et présentée par ma collègue de Chicoutimi. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Thérien): Donc pour les quelques minutes qui restent, je reconnaitrai le député de Sauvé.

M. Marcel Parent

M. Parent (Sauvé): M. le Président, le député veut seulement faire une mise au point. C'est sur ce que le député de Sauvé a déclaré, ici, à la première séance de cette commission parlementaire quand on avait laissé sous-entendre qu'au moment où il était commissaire d'école et président à une certaine époque de la commission scolaire catholique de Montréal, il était au courant qu'il y avait des "illégaux". Il est vrai que comme n'importe quel citoyen, j'étais conscient qu'il existait des "illégaux", mais je peux sur mon honneur de député vous dire que je n'en ai jamais connu aucun, je ne pourrais jamais en identifier un. Quand on affirme qu'il est incroyable de penser que le président de la CÉCM ne puisse pas connaître au moins un "illégal", je pense qu'il faut être conscient dans quel milieu social et de la CECM... Je vais répéter ici, pour le bénéfice de tout le monde, que la CECM est la plus grosse commission scolaire francophone catholique en Amérique du Nord avec 185 000 élèves.

Une voix: Nommez-les.

M. Parent (Sauvé): Comment voulez-vous que le président s'il n'est pas stupide...

J'ai su, j'ai toujours su que le problème existait, même avant d'être commissaire d'écoles. Je pense à la situation dans laquelle il était tenu; l'administration scolaire de Montréal et des autres commissions scolaires de ce moment-là a été bien décrite par différents membres de l'Opposition. Il serait injuste, je pense - je ne me sens pas plus visé qu'un autre, il y en a eu d'autres présidents de la CECM, il y en a encore un, il y en a eu un avant moi; lors du rapport Aquin, ce n'est pas moi qui présidait la CECM; après cela, je l'ai été pendant exactement une période d'un an, jour pour jour - Je me porte ici à la défense des administrateurs scolaires de Montréal. Entre 1977 et aujourd'hui, je n'étais pas là, j'ai été là quatre ans en tout et c'est beaucoup plus grand. Il était pratiquement impossible pour eux de contrôler cette situation.

C'est la mise au point que je voulais faire, je ne voulais pas en faire une guerre, mais je trouvais malheureux qu'on laisse planer l'impression que l'on connaissait les "illégaux", qu'on pouvait les identifier et que l'on pouvait facilement remédier à la situation. C'était beaucoup plus complexe qu'on a pu le laisser entendre.

Je veux enchaîner, vu qu'il me reste quelques minutes, M. le Président, sur la question du préambule. Je pense qu'on ne peut pas admettre que l'on puisse amener un préambule à l'article, et ce avant l'étude de l'article 1 dans ce projet de loi. Ce n'est pas une question technique, c'est une question de bon sens. C'est une question de logique. Cela paraît si visible que ce sont des motifs dilatoires pour essayer de retarder l'adoption de ce projet de loi. J'ai cru, au début, lorsqu'on a commencé à faire des motions pour faire entendre des personnes, pour faire entendre des organismes, que l'on essayait réellement de trouver un moyen pour améliorer ce projet de loi - d'ailleurs, c'est le rôle de l'Opposition de trouver des moyens...

M. Boulerice: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Thérien): M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: Quel est le temps normalement attribué pour...

Le Président (M. Thérien): Dix minutes. M. Boulerice: Dix minutes!

Le Président (M. Thérien): Dix minutes par intervenant.

M. Boulerice: Cela fait que cela va me priver hors de tout doute de mon droit. Donc!

M. Parent (Sauvé): Je regrette, M. le Président, mais...

Le Président (M, Thérien): Ce n'est pas une question de règlement, excusez.

M. Parent (Sauvé): On a beaucoup retardé l'adoption du projet de loi, mais il ne faudrait quand même pas que l'on retarde, que l'on me coupe mon temps d'intervention, j'y ai droit. J'ai l'impression que c'est ce que le député de Saint-Jacques essaie de faire actuellement: C'est de bonne guerre, je lui reconnais ce droit, il l'exerce d'une façon tempérée et pondérée, mais il l'excerce quand même.

M. le Président, iI me reste encore au moins trente secondes pour vous dire qu'il est temps de mettre un terme à ces amendements, à ces motions, à ces sous-amendements et de commencer à étudier d'une façon sérieuse l'article 1 d'un projet de loi qui n'en comporte quand même pas beaucoup.

Une voix: Fini les folies!

M. Boulerice: M. le Président.

M. Parent (Sauvé): Sur ce, M. le Président, étant donné qu'il est 18 heures, je vous demande d'ajourner.

Le Président (M. Thérien): Excusez-moi, M. le député de Sauvé. Il y a une question de règlement. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Comme nous devons ajourner à 18 heures, M. le Président, il serait intéressant que le député de Sauvé puisse poursuivre à 20 heures.

M. Boulerice: Qu'il puisse poursuivre après.

M. Parent (Sauvé): M. le Président, c'est mon privilège d'utiliser dix minutes, comme c'est mon privilège de ne pas les utiliser. Je verrai à 20 heures.

Le Président (M. Thérien): Je suspends ces travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise à 20 h 13)

Le Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il vous plaît! Chers collègues, veuillez prendre place. Veuillez prendre place, MM. les députés ministériels, s'il vous plaît. Je constate qu'il y a quorum pour poursuivre les travaux de la commission de l'éducation. Je rappelle le mandat reçu de l'Assemblée nationale qui est de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 58, Loi sur l'admissibilité à l'enseignement en anglais de certains enfants. Est-ce que quelqu'un a demandé la parole sur l'amendement de la députée de Chicoutimi? M. le député de Verchères.

M. Parent (Sauvé): M. le Président. Le Président (M. Bissonnet): Oui.

M. Parent (Sauvé): Lors de la suspension de nos travaux, à 18 heures, j'avais la parole et je n'avais pas épuisé les dix minutes auxquelles le règlement me donne droit comme réplique à la proposition d'amendement...

M. Charbonneau: Question de règlement, M. le Président.

M. Parent (Sauvé): ...qui nous a été présenté par...

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: M. le Président, avant que le député de Sauvé entreprenne son propos, je voudrais vous demander si l'on pourrait avoir le consentement... Le député de Laviolette ne peut pas être ici ce soir et le député de Terrebonne...

Le Président (M. Bissonnet): Ce n'est pas une question de règlement.

M. Charbonneau: Je comprends, mais...

Le Président (M. Bissonnet): Le député de Sauvé me pose une question de règlement sur l'intervention qu'il a faite avant la suspension de cette séance. Je vous reconnaîtrai a cet effet avant que l'on recommence les travaux.

M. Charbonneau: Parfait! Merci, M. le Président.

M. Parent (Sauvé): M. le Président, comme je le disais, étant donné que j'avais la parole au moment de la suspension des débats, à 18 heures pile, et que la députée de Chicoutimi avait exprimé le désir que je continue à argumenter sur son amendement à la motion du député de Viau, je vais quand même céder mon droit de parole à l'Opposition parce que je suis convaincu, M. le Président, que les commissions parlementaires sont encore l'endroit privilégié, pour l'Opposition, pour critiquer les projets de loi afin de les bonifier.

Le Président (M. Bissonnet): Très bien, M. le député.

M. Parent (Sauvé): Je leur fais encore confiance et je n'y laisserai pas mon droit de parole.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Verchères, vous avez une question à poser au président.

M. Charbonneau: Oui. M. le Président, je voudrais vous demander si nous pourrions avoir le consentement pour que le député de Terrebonne remplace le député de Laviolette, ce soir, parce que le député de Laviolette ne pourra pas être ici.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a ie consentement des membres de cette commission? M. le député de Viau.

M. Cusano: M. le Président, toujours dans notre esprit très libéral et connaissant le député de Terrebonne, je suis sûr que ses interventions seront excellentes, d'ici à minuit. Alors, je donne mon consentement.

Le Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il vous plaît! Est-ce qu'il y a consentement? Il y a consentement. M. le député de Terrebonne remplace le député de Laviolette. Nous vous souhaitons la bienvenue, M. le député.

M. Biais: Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): La parole est au député de...

M. Charbonneau: II y a une mutinerie, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a un député qui veut intervenir? M. le député d'Arthabaska.

M. Gardner: J'avais demandé d'intervenir, mais je pense qu'on est assez informé. Je pense qu'on pourrait passer au vote sur l'amendement. Je demande donc le vote.

M. Boulerice: Je m'excuse, M. le Président, j'avais demandé mon temps d'intervention. Mais, comme nous arrivions à 18 heures, le président a ajourné, m'assurant que j'aurais, au retour...

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Terrebonne, s'il vous plaît! Nous n'avons qu'une seule réunion, je m'excuse. Comme le député de Saint-Jacques a demandé la parole au président qui présidait avant 18 heures, selon ce qu'il me dit et je le crois de bonne foi, alors je vais lui accorder la parole; vous aurez la parole quand le député de Saint-Jacques aura terminé.

M. Gardner: J'avais demandé la parole avant le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: Je m'excuse, M. le Président...

Le Président (M. Bissonnet): Je ne pourrais pas vous dire...

M. Boulerice: ...si vous parlez de bonne foi - vous le savez car nous nous connaissons depuis de nombreuses années...

Le Président (M. Bissonnet): Non, vous êtes tous les deux de bonne foi.

M. Boulerice: Ah! Il y a des fois que c'est à des degrés divers et, quant à mon degré, vous le connaissez depuis de nombreuses années.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Saint-Jacques, je vous donne la parole.

M. Boulerice: M. le Président, je vous en remercie.

Le Président (M. Bissonnet): Votre temps commence déjà.

M. Boulerice: Voilà, 29 minutes 56 secondes.

Le Président (M. Bissonnet): Vous avez dix minutes.

M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, il va de soi que je vais appuyer... Il va de soi que je vais appuyer... M. le Président, je pense que vous m'avez accordé dix minutes, mais il y a une perturbation très nette!

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Saint-Jacques, vous avez raison. MM. les membres de la députation ministérielle, je vous demanderais d'écouter religieusement le député de Saint-Jacques dans son intervention sur le projet d'amendement de la députée de Chicoutimi. M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Rimouski, s'il vous plaît!

M. Boulerice: M. le Président, il va de soi que j'appuie l'amendement qui est proposé par ma collègue, la députée de Chicoutimi, quant à l'inclusion au projet de

loi qui nous est présenté par l'ancien chef du Parti libéral, l'actuel ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science, le député d'Argenteuil...

Il va de soi que rien n'est plus justifiable que de mettre un préambule. D'ailleurs, si je consulte le dictionnaire, "préambule", du latin "praeambulus", qui vient d'ailleurs de "praeambulare", c'est-à-dire marcher devant, c'est-à-dire: "Ce dont on fait précéder un texte de loi pour en exposer les motifs, les buts." Donc, il s'agit d'un préalable à la loi. Pour le "préalable" -je consulte, d'ailleurs, un dictionnaire que vous ne pouvez rejeter, il s'agit du "Petit Robert"...

M. Parent (Sauvé): J'aurais préféré le grand!

M. Boulerice: ...et quant à "petit", je suis certain de ne pas me tromper - on dit bien: "Qui a lieu, se fait ou se dit avant autre chose, dans une suite de faits liés entre eux."

Donc, il est tout à fait normal que nous y ajoutions un préambule, puisque si le titre de la loi comme tel a son importance, parce que c'est justement une partie importante de la loi, c'est la partie qui est la plus visible pour le juriste, pour le chercheur, pour les intervenants spécialisés, pour les citoyens, c'est également la référence écrite qu'on retrouve automatiquement dans les index, des status refondus et des recueils annuels de la loi, par contre, le préambule situe bien le contexte et l'esprit dans lequel on a établi et l'on veut bien appliquer cette loi. À cet égard, ma collègue, Mme la députée de Chicoutimi, a donné des exemples on ne peut plus éloquents sur des lois fondamentales qui ont un préambule. Elle vous faisait d'ailleurs remarquer à juste titre que l'actuel chef du Parti libéral, le député de Saint-Laurent, l'ancien député de Bertrand, a demandé que des droits fondamentaux pour le Québec soient inscrits dans un préambule, qui est le préambule de la charte canadienne, celle de 1982, qui a été adoptée par le Parlement canadien sous l'inspiration du gouvernement libérai fédéral de l'époque.

Donc, je verrais très mal venu un gouvernement issu du même parti que ce parti fédéral rejeter cette offre de préambule sur lequel nous aurons d'ailleurs une motion très précise à vous présenter tantôt. Un préambule permet de bien placer la loi dans son contexte. Le ministre, dans un mouvement d'humeur inhabituel, nous a dit tantôt que nous étions pour baigner dans l'imprécision; je lui dis que nous allions présenter, après l'adoption du préambule, un texte très précis de préambule. Cela m'amène à lui dire qu'il y a utilité de placer dans son contexte une loi aussi fondamentale que celle-là par un préambule, parce qu'au danger de baigner dans l'imprécision, il existe un autre péril qui serait celui de nager dans la précipitation, comme malheureusement il le fait, et dans une loi aussi fondamentale que celle-là et une loi qui est aussi une loi d'exception. Ciel! que l'actuel député d'Argenteuil, lorsqu'il professait un autre métier, l'a souvent écrit que dans les lois d'exception, on devait pratiquer une réserve, une retenue exemplaire et que l'on devait bien situer ce qui s'en est fait.

C'est vrai que dans un autre mouvement d'humeur, il a parlé de caricature de la démocratie. Mais il faut bien faire attention; il est important d'avoir un préambule dans une loi qui, à mon point de vue, récompense l'illégalité, bafoue le droit et ridiculise la justice. Dans cet autre mouvement intempestif que je ne lui connaissais pas, - Mais il faut croire qu'à la lumière de cette commission et qu'au "spot" qu'on y a ajouté, paraît-il, précédemment, la vraie lumière se fait et le vrai visage se présente devant nous - il est allé jusqu'à des menaces en disant: Vous verrez! Les communautés ethniques vont lire cela. Eh bien, permettez-moi de vous dire que j'ai bien hâte en effet que les communautés ethniques lisent à la fois la transcription des séances de cette commission et surtout le préambule. Je n'aurai aucune gêne. Tout au contraire, j'aurai même beaucoup de fierté et un très grand plaisir à présenter cela aux communautés latino-américaines du comté de Saint-Jacques, celles du Chili, du Pérou, de la Bolivie, du Salvador, elles qui ont été tellement respectueuses de la loi 101, qui ont inscrit leurs enfants à l'école française et qui ne se sont pas laissés guider par une main illégale qui les incitait à transgresser les lois fondamentales de ce pays. Comme j'aurai d'ailleurs beaucoup de plaisir à montrer le préambule que nous allons adopter, mais pour la loi c'est bien entendu, j'ai bien peur qu'elle va être adoptée, à montrer cela également aux communautés vietnamiennes, cambodgiennes, et enfin à ces communautés indo-chinoises qui habitent le comté de Saint-Jacques et qui, elles aussi d'ailleurs depuis des siècles, ont toujours pratiqué un respect de l'autorité et des lois. Je serai très à l'aise de présenter le préambule et la loi qui sera adoptée à ces gens-là pour bien leur faire comprendre qu'il y a maintenant deux catégories de citoyens au Québec: ceux qui transgressent les lois, ceux qui prêchent l'innocence. On a vu dans certains procès célèbres aux alentours des années quarante-cinq des gens qui disaient: Je n'étais pas au courant. Je ne savais pas. Ces gens-là vont être intéressés de connaître qu'il existe dans ce pays deux catégories de citoyens: des gens qui appliquent les lois, les respectent, ont pour le législateur et pour

l'Assemblée nationale le respect qu'ils méritent et d'autres qui ne le font pas, d'autres qui d'ailleurs vivent dans la plus grande impunité. Je me permets de citer à nouveau ce que Mme la députée de Jacques-Cartier disait en commission - c'est pratique les transcriptions - : "En 1977, nous avions constaté que dix ans plus tard il n'y aurait plus qu'un tiers des enfants admissibles à l'école anglaise en vertu de la loi 101. Les autres seraient dans les écoles françaises. Nous étions donc en face d'une évolution forcée qui aurait un énorme impact sur notre corps professoral, nos administrateurs et sur tous nos parents, etc." On comprend très bien quels étaient les motifs qui ont poussé des gens non seulement à pratiquer l'illégalité, mais en plus à inciter à l'illégalité dans ce pays.

Quand ils auront eux-mêmes voté des lois, parce que cela fait quand même une décennie qu'ils n'en ont pas voté au Québec - et Dieu nous préserve, nous sommes encore comme cela - j'ai bien hâte de voir, si quelqu'un les incite à l'illégalité, ce qu'ils feront. Sauf que, comme il n'est pas question pour nous de sanctionner cette illégalité, le minimum que l'on espère obtenir est un préambule à la loi qui va permettre d'expliciter qu'il ne s'agit pas d'une loi de récompense de l'illégalité, mais qu'il s'agit bien d'une loi que le Parlement du Québec va voter parce qu'il a eu des engagements électoraux manifestes et qu'on connaît également tout le poids et la puissance du lobby West Island dans ce parti gouvernemental.

Il s'agit pour nous, dans ce préambule, de bien expliciter qu'il s'agit non pas d'un projet de loi unique, mais d'un projet de loi qui, de nouveau, conséquemment à ce qu'on appellerait en bon québécois "la belle job de bras" qu'a faite le gouvernement libéral de Trudeau, vient encore une fois charcuter cette Charte de la langue française que le Québec s'était donnée au mois d'août 1977. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député d'Arthabaska.

Motion de mise aux voix immédiate

M. Gardner: Oui, M. le Président, je suis très heureux que le député de Saint-Jacques ait pu parler avant moi. Il me manquait beaucoup de choses avant que je puisse voter. Comme je suis très renseigné, et je pense que de ce côté-ci on est très renseigné sur la chose, j'aimerais qu'on passe au vote, selon l'article 202, sur l'amendement de la députée de Chicoutimi sur la motion du député de Viau.

M. Blais: M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que c'est sur...

M. Blais: Concernant l'article 202, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Avant de vous céder la parole, M. le député de Terrebonne, je vais vous permettre quand même... Je suis prêt à prendre position, à indiquer à la commission quelle décision je prendrai à la suite de la demande du député d'Arthabaska, mais j'aimerais quand même vous entendre avant de prendre ma décision.

M. le député de Terrebonne.

M. Blais: M. le Président, l'article 202 se lit comme suit: "Si aucun amendement n'est proposé è une motion, tout député qui a la parole peut proposer qu'elle soit immédiatement mise aux voix". M. le Président, je ne voudrais pas que la mise aux voix soit demandée parce que j'ai un sous-amendement à apporter à l'amendement que nous discutons. Je ne voudrais pas que vous demandiez la mise aux voix.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'un député... du côté ministériel?

M. Cusano: Non, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Je vais permettre une deuxième remarque sur la recevabilité de la demande de vote du député d'Arthabaska.

M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: M. le Président, nous avons ici un amendement sur une proposition principale qui a été présentée par, je crois, le député de Viau. Il y a eu quelques interventions de notre côté sur l'amendement que nous avons présenté. J'aurais pu comprendre la proposition du député d'Arthabaska s'il s'agissait d'une motion de l'Opposition, mais c'est une motion qui a été présentée par le parti ministériel.

Je pense, sincèrement, que, à l'égard de la tradition - vous conviendrez avec moi que c'est un guide important pour l'ensemble des membres de la commission - on n'invoque pas la question préalable si rapidement dans une discussion. (20 h 30)

J'ai été, M. le Président, témoin du début de la présentation de la motion principale du député de Viau et je crois que le temps qui s'est écoulé, d'abord sur la discussion de la motion principale et par la suite sur l'amendement qui a été présenté de notre côté, n'est pas suffisant pour que, selon notre tradition et les règles parlementaires, elle soit recevable à ce moment-ci. M. le Président, elle est d'autant plus inacceptable, cette proposition, qu'elle arrive

au moment où nous apprenons qu'à l'Assemblée nationale, le gouvernement vient de déposer une motion de clôture de nos travaux et qu'on veut nous bâillonner alors qu'il nous reste quelques heures ce soir. Je pense que le minimum que le côté ministériel devrait faire à ce moment-ci, c'est de ne pas nous empêcher de parler sur une motion qui est d'ailleurs présentée par lui-même.

Je reviendrai probablement un peu plus tard tantôt, mais j'ai devant mot, les propos que mon bon ami le ministre de l'Éducation tenait, le 9 février 1984, au sujet d'une motion de censure.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Verchères, veuillez vous en tenir à la recevabilité selon l'article 202. Si vous avez des propos à tenir à l'Assemblée nationale, vous le ferez en temps et lieu.

M. Charbonneau: C'est pour cela, M. le Président, que j'ai invoqué cette question en vous disant que j'y reviendrais un peu plus tard ce soir.

Sur la recevabilité, je crois qu'il y a un guide important et .probablement le guide le plus important: on ne peut pas poser la question préalable avant une certaine période. Je crois qu'il n'y a pas eu plusieurs amendements, il n'y en a eu à ma connaissance qu'un seul. M. le Président, je suis un membre en règle de cette commission et je n'ai même pas eu l'occasion d'intervenir sur l'amendement. Je ne vois pas comment je serais privé de mon droit de parole sur cet amendement parce qu'à un moment donné le député d'Arthabaska, je ne sais pas trop pourquoi, est pressé d'en finir et veut nous mettre le bâillon. Un bâillon demain, M. le Président, cela va suffire, mais, ce soir, je pense qu'on pourrait donner au moins à chacun des membres de la commission l'occasion d'intervenir.

Le Président (M. Bissonnet): Je vous remercie beaucoup, M. le député de Verchères. Vous m'avez demandé la parole, Mme la députée de Chicoutimi, mais je veux prendre ma décision. Si vous voulez intervenir, je peux quand même vous entendre.

Mme Blackburn: Si vous êtes en train de nous dire, M. le Président, qu'elle va être favorable, je n'aurai pas besoin de parler.

Le Président (M. Bissonnet): Je ne vous ai pas dit du tout la teneur de ma décision, mais je tiens à vous dire que je peux rendre ma décision de façon très facile et je vous permets d'intervenir.

Mme Blackburn: D'accord, si vous permettez. Brièvement, M. le Président, je voudrais juste rappeler l'article 203. "Le Président peut d'office rejeter une telle motion, s'il estime que le débat sur la motion de fond ne s'est pas indûment prolongé..."

À la suite des propos, des commentaires et des remarques faites par le député de Verchères, la motion d'amendement a été déposée à 17 h 15 précisément parce que c'est moi qui l'ai faite et on a eu, tout juste avec les interventions des députés ministériels, 45 minutes d'intervention et un quinze minutes additionnel.

Je ne pense pas que sur une motion aussi importante...

Il s'agit de l'opportunité d'introduire un préambule à la loi, c'est là une question d'une extrême importance. Il me semble, M. le Président, que compte tenu de l'importance du sous-amendement, on ne peut pas considérer que le débat se soit indûment prolongé.

Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, mes chers membres de la commission...

M. Charbonneau: M. le Président, est-ce que je pourrais ajouter un élément là-dessus?

Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, je vais vous le permettre, mais je suis prêt à rendre ma décision depuis très longtemps.

M. Charbonneau: M. le Président, selon la jurisprudence, le Président peut accepter une telle motion dans la mesure où il considérerait que les débats se sont prolongés indûment. Comment les débats peuvent-ils s'être prolongés indûment alors que tous les membres de la commission n'ont même pas pu s'exprimer sur l'amendement en discussion?

M. Gardner: M. le Président, est-ce que moi aussi je pourrais ajouter? M. le Président, je ne veux pas bâillonner l'Opposition, au contraire. Ce que je veux, c'est qu'on passe au premier article et qu'on commence à étudier ce "mosus" de projet de loi qu'on veut adopter. J'ai hâte qu'on commence. Ce n'est pas parce que je ne veux pas qu'ils parlent.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, la présidence rend la décision suivante sur la demande de mise aux voix faite par le député d'Arthabaska: La présidence doit, compte tenu du libellé de l'article 202, interpréter de façon restrictive le texte de cet article. Le texte de cet article se lit comme suit: "Si aucun amendement n'est proposé à une motion..." Comme il y a une

motion principale et que nous en sommes à un amendement, il est impossible à quelque député que ce soit de demander le vote lorsqu'il y a un amendement à une motion. J'en fais une interprétation restrictive, mais je pense que le règlement devrait être modifié à cet égard. C'est une suggestion que je fais à ceux qui étudieront les règles de procédure dans l'avenir. S'il y a une restriction, à savoir qu'on ne fait pas de mise aux voix pour un amendement et qu'on peut en faire une pour une motion, à ce moment-là, il n'y a pas d'égalité entre les deux. Je pense que la motion principale est aussi importante qu'une motion d'amendement. On peut le faire sur une motion principale, alors qu'on ne peut pas sur une motion d'amendement. Quant à l'article 203, s'il s'agissait d'une motion, le président aurait le loisir de la recevoir ou non, compte tenu des débats qu'il y aurait eu à ce moment-là.

La parole est au député du comté de Verchères.

M. Charbonneau: Merci, M. le Président.

Mme Blackburn: C'était au député de Terrebonne.

Le Président (M. Bissonnet): Le député de Verchères. Quant à vous, M. le député de Terrebonne, je pourrai vous reconnaître s'il y a consentement, car le député que vous remplacez a déjà utilisé son droit de parole sur l'amendement. M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: M. le Président, d'abord, je sais qu'on ne doit pas remercier la présidence parce qu'elle ne fait qu'appliquer le règlement, mais je crois que vous avez rendu une sage décision. Je suis d'accord avec le député d'Arthabaska, il s'agit d'une décision à la Salomon qui vous honore, M. le Président.

Reprise du débat sur la motion d'amendement

Le Président (M. Bissonnet): Messieurs, s'il vous plaît! Le député de Verchères a la parole et je lui demande de continuer son intervention. Je demande au député d'Arthabaska de ne pas nuire à l'intervention brillante du député de Verchères.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: Je vous remercie doublement, M. le Président, pour vos propos fort judicieux, en toute humilité d'ailleurs. L'amendement qui est devant nous a comme objectif de proposer que nous puissions ajouter, avant de passer à l'étude article par article, un préambule au texte du projet de loi. Plusieurs personnes, sans doute les députés, les ministériels, pourraient nous dire: Écoutez, la procédure législative qui est en vigueur au Québec depuis un certain nombre d'années a eu tendance à réduire l'utilisation des préambules, parce que sans doute abusait-on à une certaine époque de l'utilisation des préambules et qu'il y avait confusion également dans leur valeur législative. Il n'était pas toujours évident que les interprétations qu'on faisait des textes de loi donnaient justice aux préambules que les législateurs avaient voulu introduire. Parfois même, à moins que je ne me trompe, on tendait à trouver des contradictions entre le préambule et les textes législatifs.

Cependant, cette motion est importante parce que la pratique législative n'a pas complètement écarté l'introduction des préambules dans nos textes de loi. En fait, l'utilisation de préambules a été conservée dans des cas particuliers, exceptionnels. Je crois qu'il s'agit d'un de ces cas car il concerne une des lois les plus importantes que nous ayons au Québec, c'est-à-dire la Charte de la langue française. Je crois qu'il est normal, qu'il est même souhaitable qu'un projet de loi comme celui qui est présenté par le gouvernement puisse être suffisamment compris et interprété. À cet égard, il paraît important et sans doute probablement essentiel que l'on puisse retrouver dans le texte de loi un préambule qui donne plus de sens aux articles que l'on va adopter et que l'on va retrouver, de toute façon, dans le texte de loi, quelle que soit notre volonté, semble-t-il. Je crois que les citoyens du Québec et l'histoire de ce projet de loi nous obligent d'une certaine façon à accepter qu'il faille donner suffisamment d'explications et situer le mieux possible le texte législatif. Quoi de mieux pour le faire que le préambule même du projet de loi?

Mon collègue de Saint-Jacques, homme lettré s'il en est, nous a cité le Petit Robert. Même si cela en a fait sourire quelques-uns, je crois qu'il y avait néanmoins dans la définition même... M. le Président, ne me faites pas rire. Il y avait dans la définition même du préambule l'explication et la justification de l'introduction d'un préambule.

D'ailleurs, quand on enseigne des textes aux enfants à l'école et quand on leur donne un sujet à composer, on leur recommande généralement de faire un préambule pour situer un peu le problème, pour que les gens voient bien finalement l'ensemble de la problématique résumé, "contexte" - un autre mot que le député d'Arthabaska voudra sans doute vérifier - afin que l'on puisse évaluer la suite. Or, quand on regarde le texte du projet de loi qui nous est présenté par le ministre de l'Éducation, le ministre lui-même, qui a toujours affectionné les

explications, les points sur les "i", reconnaîtra que ce n'est pas dans le texte des articles qu'il nous présente que le citoyen, profane devant des lois, va pouvoir se retrouver. Il y a des textes qui amendent d'autres textes de loi, etc. Quand on lit cela, M. le Président, on s'y retrouve assez difficilement. Le minimum serait qu'on ait au moins quelque chose qui serait utile au profane, c'est-à-dire un préambule dans le projet de loi qui situe les intentions du gouvernement, qui exprime le contexte dans lequel se situe le projet de loi et donne un sens à des articles qui vont paraître assez rébarbatifs pour le commun des mortels, finalement. Ils ne sont pas avocats ni législateurs depuis de nombreuses années. Je suis même convaincu que le député d'Arthabaska ou que la députée de Groulx, qui sont des nouveaux députés - je ne dirai pas des jeunes députés - encore pleins de vigueur d'ailleurs...

Une voix: ...

M. Charbonneau: Oh! Madame, je n'ai point osé aborder ce sujet délicat! (20 h 45)

Enfin, je suis convaincu que ces nouveaux députés, en regardant le projet de loi du ministre de l'Éducation, n'y ont rien compris. Il a fallu des explications du ministre au caucus sans doute pour comprendre la portée du projet de loi et toute son importance à ses yeux. Souvent j'ai entendu le député d'Argenteuil dire qu'il se méfie des légistes et des avocats. Je le sais parce qu'il nous l'a dit souvent. Je le comprends d'autant mieux que je ne suis pas avocat non plus. Il aurait préféré dans son for intérieur, lui qui a une formation journalistique et qui est habitué de livrer l'essentiel aux gens et de leur donner finalement les moyens de comprendre un texte et de bien le rendre... J'ai souvent entendu le député d'Argenteuil qui déplorait que l'on ne puisse pas trouver un vocabulaire plus clair, plus précis et plus limpide dans nos textes législatifs. On a beau chaque fois déplorer cette situation et on a beau changer de gouvernement, on se rend compte que les légistes demeurent si les législateurs changent parfois et on se retrouve toujours avec des textes de loi relativement nébuleux, bons pour les avocasseries, mais difficilement compréhensibles pour le commun des mortels.

Le Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure, M. le député.

M. Charbonneau: M. le Président, ma conclusion est que je crois que la motion qui nous est présentée est une motion qui vise à clarifier le projet de loi, les intentions du ministre de l'Éducation et du gouvernement et qui vise à situer ce projet de loi pour que l'ensemble de nos concitoyens et que les historiens également qui liront nos lois et ce projet de loi, qui deviendra sans doute une loi, malgré notre opposition farouche, aient au moins le nécessaire pour bien l'interpréter et bien la situer dans son contexte. Je crois que nos collègues ministériels devraient reconnaître que notre amendement ne fait qu'enrichir la proposition du député de Viau qui va nous permettre d'aborder l'étude article par article d'une façon plus éclairée. Merci, M. le Président.

M. Gardner: M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député d'Arthabaska, oui, je vous écoute.

M. Gardner: Si vous me le permettez et si le député de Verchères me permet une question...

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Verchères, permettez-vous que votre collègue, le député d'Arthabaska, vous pose une question?

M. Charbonneau: Bien sûr.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député d'Arthabaska, vous pouvez procéder.

M. Gardner: Merci, M. le Président. Le député de Verchères a insinué que, parce que je suis un jeune député, je n'aurais peut-être pas compris le texte de la loi. Qu'est-ce qu'il faut que je fasse pour lui prouver que j'ai bel et bien compris le titre, la loi et que je suis en mesure comme député d'un comté du Québec de voter sur cette loi?

M. Charbonneau: M. le Président, je crois que le député d'Arthabaska a ma! compris. Ce que j'ai dit, c'est que, lorsque le projet de loi lui a été présenté pour la première fois... Aujourd'hui, je ne doute point qu'il comprend les tenants et aboutissants de ce projet de loi, mais par expérience - et je ne demande même pas au député d'Arthabaska de me répondre - je gagerais beaucoup si j'étais très fortuné que le député d'Arthabaska à la première lecture n'avait pas saisi toute la portée du projet de loi et que les explications sans doute très savantes et très élaborées du ministre de l'Éducation au caucus de son parti lui ont permis de mieux le saisir. Il n'a qu'à lire le texte du projet de loi pour humblement reconnaître que c'est un projet de loi qui, comme tous les projets de loi, souvent, quand on les regarde, est fait pour les avocats, ce n'est pas fait pour le monde ordinaire.

Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!

M. Ryan: Tout le monde apprécie l'effort de gymnastique apparemment intellectuel qui vient de nous être présenté. Les résultats sont loin d'être concluants.

Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!

M. Claude Ryan

M. Ryan: Tout d'abord, je dois dire au député de Verchères, violant ainsi un secret d'office, que je n'ai pas eu besoin de fournir de longues explications aux membres du caucus ministériel pour qu'ils saisissent rapidement et sans difficulté la portée du projet de loi 58. Il suffit de bonne volonté et d'ouverture d'esprit, mais j'admets que, dans les circonstances où nous sommes, ce sont deux qualités qu'il est très périlleux d'exiger de l'Opposition.

Par conséquent, je vais rassurer le député de Verchères sur ce point-ià. Il eût été tout à fait superflu de fournir des explications infinitésimales, parce que la chose était claire. Cela me rappelle un reproche que l'on adressait hier au député de Viau, ou plutôt aujourd'hui, d'une manière tout à fait injustifiée, à mon point de vue. On lui reprochait d'avoir été bref quand il a justifié la motion qu'il a déposée pour nous inviter à aborder l'article 1. Un vieux principe de logique que vous connaissez bien, c'est que les choses les plus difficiles a démontrer sont les choses évidentes. C'est tellement vrai que le grand saint Thomas d'Aquin, lorsqu'il était saisi d'un problème de la nature de celui que nous avait créé de toutes pièces l'Opposition, avait coutume de répondre, à la suite du non moins grand Aristote, par deux mots: Evidentia patet, cela saute aux yeux pour tout esprit intelligent, traduction libre. La vrai traduction, évidemment, serait: Cela saute aux yeux par l'évidence même; cela s'impose par l'évidence. Je pense que c'était là le problème qu'éprouvait le député de Viau. S'il avait voulu être verbeux comme on l'a été de l'autre côté depuis plusieurs jours, je pense qu'il eût pu s'étendre à l'infini. Il y aurait diverses considérations, mais le plus fort de l'affaire: Evidentia patet. Je pense qu'on va très bien se rappeler cela.

Un autre point que je voudrais souligner à l'attention du député de Verchères et de ses collègues, c'est que le gouvernement précédent a adopté plusieurs lois très importantes. Il a adopté la loi 3 sur la réforme des structures de l'enseignement. À ma souvenance, il n'y a pas de préambule dans la loi 3. Vous n'en avez jamais demandé. C'est une loi bien plus importante que celle que nous discutons maintenant. Il n'y avait pas de préambule. La Loi régissant le financement des partis politiques, une autre loi très importante, ne contient pas de préambule, à ma connaissance. Le Code de la route est une loi très importante qui nous a été présentée par le gouvernement précédent, une nouvelle Lot sur la santé et la sécurité du travail...

M. Cusano: Oui, la loi 42 avec tous les articles et tous les principes.

M. Ryan: C'est la loi qui a nécessité le travail le plus long en commission parlementaire. Combien d'heures? 140?

M. Cusano: 158.

M. Ryan: 158 heures? Elle n'avait pas de préambule non plus. C'est un chose qui est tombée en désuétude, je pense que le député de Verchères l'a mentionné dans ses remarques. Les derniers souvenirs que nous avons de tels préambules, je pense, remontent à la Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation. Pardon? Il y en a eu quelques autres après? Peut-être, mais, en tout cas, c'est tellement peu signifiant qu'on ne se le rappelle pas. Faites le bilan de toutes les lois qui ont été adoptées. Dieu sait s'il y avait des sermoneux et des disserteurs, de l'autre côté, dans l'ancien gouvernement. Je n'ai pas besoin de les nommer, vous les connaissez comme moi. Si cela avait été une chose le moindrement pertinente, le moindrement "relevant", comme on dit en anglais, c'est sûr qu'ils y auraient pensé parce que, chaque fois qu'ils pouvaient mettre une page où il y a plus de mots que d'idées, ils se spécialisaient là-dedans. Je pense que la cause est entendue. L'idée est peut-être généreuse, dans la meilleure des hypothèses, mais la preuve et les fondements sont tellement ténus que cela nous fait penser à l'histoire du roi Canut.

M. Charbonneau: M. le Président, est-ce que le député pourrait éclairer ma lanterne d'inculte? Je ne connais pas cette histoire.

Le Président (M. Bissonnet): Avez-vous terminé votre intervention?

M. Ryan: Je peux la donner au député, M. le Président.

M. Boulerice: Saint-Canut, c'est dans son comté.

M. Ryan: Cela va prendre seulement une minute.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que vous avez terminé votre intervention, M. le ministre?

M. Ryan: Ce roi dont je parle, c'est un roi qui avait des vêtements tellement minces que, à un moment donné, il s'est aperçu qu'il

n'en avait pas.

M. Boulerice: Saint-Canut, c'est dans le comté d'Argenteuit, à ma mémoire.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Terrebonne.

M. Blais: J'aimerais intervenir sur cette motion...

Le Président (M. Bissonnet): Vous aimeriez intervenir?

M. Blais: ...mais avec la permission de M. le ministre.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement, M. le ministre?

M. Ryan: Volontiers.

Le Président (M. Bissonnet): Volontiers?

M. Ryan: Volontiers, pour un bon ami de Terrebonne, que ne ferait-on point?

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Terrebonne, je constate qu'il y a consentement. Vous avez un droit de parole de dix minutes sur l'amendement.

M. Yves Blais

M. Blais: M. le Président, je suis excessivement heureux de la compréhension du ministre. Je crois beaucoup qu'il se doit d'avoir un préambule à cette loi. Ce préambule, Mme la députée de Jacques-Cartier, devrait être basé sur la grandeur et la tolérance du peuple québécois. Ce serait une base qui ne serait pas écrite, mais les paroles la sous-tendraient dans ce préambule. Ce préambule porterait sur les devoirs de la majorité et sur ceux de la minorité du Québec, ainsi que sur leurs droits réciproques. Donc, dans ce préambule, nous aurions les devoirs et les droits de la majorité, ainsi que les devoirs et les droits d'une minorité. Dans cette charte, j'insisterais sur les devoirs de la minorité devant la majorité. Ceci devrait, dans cette loi, être enchâssé, comme la Charte des droits et libertés est enchâssée dans la constitution canadienne. La Charte des droits et libertés dans la constitution canadienne est une chose a laquelle vous tenez comme à la prunelle de vos yeux; vous trouvez cela important. Eh bien, dans l'éducation, les droits et les devoirs des minorités et des majorités, c'est une chose qui devrait tenir au coeur, à l'âme et à l'intellect de chaque être, comme les droits et libertés de la personne dans une charte constitutionnelle. C'est très simple; on pourrait en parler durant très longtemps. Mais je n'ai que dix minutes. Je vais essayer d'être le plus bref possible. Certainement que je ne serai pas complet; la chose est trop importante pour être complet, sur un sujet aussi vaste, dans dix petites minutes.

Cependant, parlons des droits principaux. Premièrement, chaque groupe a droit a ses institutions éducatives, autant le groupe majoritaire que le groupe minoritaire. Deuxièmement, chacun des deux groupes a droit à un appui financier de l'État québécois; il a droit à ses institutions comme majorité; il a droit à ses institutions comme minorité. Dans chacun des deux cas, ces institutions devraient être financées par l'État. Je pense que cela devrait entrer en préambule dans une loi sur l'éducation aussi importante que celle-là.

Voyons les devoirs maintenant. Chacun des groupes doit veiller à l'épanouissement culturel de son groupe par l'éducation; deuxièmement, ils doivent favoriser la plus grande qualité possible de l'éducation et, troisièmement - c'est sur ce point que j'aimerais insister durant les quelques minutes - chacun des groupes doit respecter l'autre. Ceci veut dire que le groupe majoritaire doit respecter le groupe minoritaire, mais que l'inverse est aussi vrai, que le groupe minoritaire doit respecter le groupe majoritaire et ceci, dans un préambule, devrait être la base de tout système éducatif le moindrement rationnel. Sachant pertinemment que le peuple du Québec, à grande majorité francophone, est cité à travers le monde comme le peuple qui a le plus de tolérance pour sa minorité, c'est là, dans ce préambule, qu'on pourrait une autre fois l'écrire, le voter et en être fier.

J'ai dit et je le répète: Je fais partie de ce groupe majoritaire. Je fais partie du groupe qui constitue 81 % de la population du Québec. Ce groupe, je l'aime, je l'adore et je le défends. Je l'aime davantage au Québec, parce que c'est un groupe qui respecte, sous tous les volets, toutes les facettes de la vie, la minorité qui cohabite avec lui sur ce territoire. C'est pour cela que je suis fier de mon groupe.

Je voudrais, sous toutes les facettes aussi, être fier de la minorité. Je voudrais que sous toutes les facettes la minorité respecte le groupe majoritaire dont je fais partie. Devant ce projet de loi 58, ce serait très bon d'indiquer que la minorité, si elle veut que la majorité continue à la respecter, respecte cette majorité. Ce projet de loi, après en avoir étudié le préambule, serait automatiquement rejeté, article par article, par tous les gens autour de cette table. On voterait avec joie et tout de go ce préambule; c'est sûr. Mais, seulement, ce projet de loi est fait parce que justement la minorité ne respecte pas la majorité. Un groupe minoritaire de la minorité ne respecte pas la majorité. Est-ce que c'est clair? Un

groupe minoritaire de la minorité ne respecte pas la majorité au Québec. C'est pour cela que l'on fait ce projet de loi. Si on mettait un préambule pour faire comprendre à la minorité qu'elle se doit de respecter la majorité, comme la majorité dont je fais partie respecte la minorité, ce projet de loi ne pourrait plus être là. C'est donc un préambule d'une importance capitale. Cela se tient très bien. Je peux le répéter en anglais, si vous voulez mieux le comprendre. (21 heures)

Je fais partie d'une majorité qui est la majorité francophone. Cette majorité francophone respecte, sous toutes ses facettes, la minorité anglophone du Québec; et, si le groupe dont je fais partie ne respectait pas cette minorité, je démissionnerais. Moi, faisant partie d'une majorité, je respecte la minorité, mais je demanderais tout simplement à la minorité d'en faire autant envers la majorité dont je fais partie. Donc, de respecter nos lois, etc. C'est tout ce que je demande. Cette loi est faite parce que la minorité n'a pas voulu respecter la loi faite par la majorité. C'est pour cela qu'on en arrive à ce dilemme. Ceux qui ont respecté la loi ne sont pas concernés par ce projet de loi 58.

M. le Président, il faudrait absolument enchâsser en préambule dans ce projet de loi, par la grandeur et la tolérance de son contenu, cette noblesse qui habite le coeur de la majorité québécoise qui respecte... Je ne sais pas combien il me reste de temps, M. le Président?

M. Gendron: En masse.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que Mme la secrétaire peut me l'indiquer pour le député? Vous avez trois minutes.

M. Blais: Merci. Je voulais seulement savoir comment conclure.

Tout simplement, ce préambule devrait être là. Mme la députée de Jacques-Cartier, je vous vois sourire. Vous qui avez toujours prôné le libre choix indépendamment des droits de la majorité, j'aimerais beaucoup que vous m'écoutassiez. J'aimerais beaucoup que vous ouvriez votre ouïe et que vous me regardiez de vos yeux. J'aimerais beaucoup qu'ensemble, après cette commission, nous dansions une farandole de bonne entente. Mme la députée de Jacques-Cartier, au nom de la grandeur d'âme du peuple québécois, au nom de cette tolérance réciproque que nous demandons, vu que nous, majoritaires, nous avons ce respect intrinsèque de la minorité, je suis persuadé que vous allez me dire oui. J'aimerais que vous, de votre côté, qui faites partie de la minorité, vous demandiez aux vôtres de respecter la majorité dont je fais partie, comme moi je demande aux miens de respecter la minorité dont vous êtes.

Ce préambule devrait enchâsser cela dans ce projet de loi et nous serions heureux après, tous ensemble, que nous venions de n'importe quelle partie du monde. Moi, je viens de la France. Ce n'est pas ma faute. C'est un accident de naissance. J'habite maintenant le Québec. Il y en a d'autres, comme accident de naissance, qui viennent d'Italie, d'autres qui viennent probablement d'Angleterre ou d'autres de "Ketchupville". M. Hains, je ne sais pas d'où vous venez? Je ne sais pas si ce pays existe, du moins le pays de la tomate.

Des voix: Ha! Ha!

M. Blais: Je ne sais d'où il vient. Chacun de nous vient d'un pays...

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Saint-Henri.

M. Hains: Question de règlement, M. le Président.

Des voix: Allez-y! Allez-y!

M. Hains: Je ne parle pas souvent, M. le député, mais je trouve que ce soir vous êtes complètement irrespectueux. Vous ne respectez pas ma minorité... de mon nom. J'en suis tout à fait insulté. Je vous demande de retirer votre "Ketchupville".

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Terrebonne, je vous demande de retirer les paroles que vous avez dites à l'endroit de notre collègue de Saint-Henri.

M. Blais: Je m'excuse. Je croyais que la ville de "Ketchupville" existait. Je le retire, M. le Président. Mais, vu que vous dites "ma minorité", j'aimerais que vous retiriez ma... Non, laissez faire!

Je veux que cette tolérance paraisse dans le préambule du projet de loi au nom de ce respect réciproque que nous devons avoir.

M. le Président, sur cela je vous remercie, ainsi que le groupe de la majorité, d'avoir écouté le groupe minoritaire parlementaire dont je fais partie.

M. Parent (Sauvé): Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Question de règlement, M. le député de Sauvé.

M. Parent (Sauvé): C'est une directive que je veux avoir, M. le Président. Au moment où on va danser la farandole, est-ce que je peux choisir à qui je vais donner la main?

M. Gardner: M. le Président, j'aurais une question...

Le Président (M. Bissonnet): M. le député d'Arthabaska.

M. Gardner: J'aurais une question à poser au député de Terrebonne, s'il ne part pas.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Terrebonne, est-ce que vous permettez à votre collègue député d'Arthabaska de vous poser une brève question?

M. Blais: Avec grand plaisir.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député d'Arthabaska.

M. Gardner: Merci, M. le Président. Comment le député de Terrebonne peut-il concilier les belles phrases qu'il vient de dire avec les phrases de son chef qui sont citées dans le Soleil...

M. Blais: Quel chef?

M. Gardner: De votre chef.

M. Blais: Quel chef et de quelle époque?

M. Gardner: Votre chef actuel. M. Blais: Actuel?

M. Gardner: Oui, M. Pierre Marc Johnson.

M. Blais: D'accord.

M. Parent (Sauvé): Un des deux.

M. Gardner: II est cité et cela ne date pas de longtemps. Il a souligné qu'il faudrait s'attaquer à détruire les mythes de l'immigrant, voleur de "job" ou de la dénatalité, fin du chômage. Et il continue. M Johnson a souligné aussi que son parti se devait d'être plus accueillant encore à l'endroit des communautés culturelles. Comment conciliez-vous ces paroles de votre chef et les paroles que vous venez de dire, que vous êtes très accueillant, alors que votre chef vous dit d'être plus accueillant? Il disait cela aux membres du Parti québécois lors de votre conseil national.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Avec plaisir. Vous savez, monsieur, même la douceur dans votre question aurait pu être encore plus tendre. Je ne peux pas vous qualifier d'être un homme qui m'attaquiez et qui êtes...

M. Gardner: Je ne vous attaque pas, je vous pose la question.

M. Blais: Vous ne m'attaquez pas du tout, mais vous pourriez être encore plus doux dans votre présentation et, nous, nous sommes très doux devant les étrangers qui arrivent, mais cette douceur peut toujours être améliorée. Voilà ma réponse.

Le Président (M. Bissonnet): Merci. M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Boulerice: On est accueillant envers ceux qui respectent les lois.

M. Gendron: Oui, M. le Président. J'ai la parole, je voudrais l'utiliser et le faire sérieusement, parce que, si ma collègue, la députée de Chicoutimi, a présenté un amendement à la motion du député de Viau, c'est que nous sommes convaincus qu'un projet de loi...

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Sauvé! M. le député d'Abitibi-Ouest ne peut pas poursuivre.

M. François Gendron

M. Gendron: Nous sommes convaincus qu'un projet de loi de cette importance, de cette nature, mérite d'être précédé d'un préambule parce que, normalement, un préambule à un projet de loi permet de le "contexter", cela permet de lui donner un caractère d'une très grande particularité. Cela a été reconnu par d'autres et c'est cela qui est un peu étonnant de tomber dans la bouffonnerie comme on est obligé de le faire parce qu'on a affaire à un gouvernement complètement irrespectueux de la démocratie, et. j'aurai l'occasion d'y revenir tantôt. On demande è des gens de poursuivre en commission parlementaire alors qu'on sait qu'on a une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Pire que cela, on a carrément une motion de bâillon, une motion de clôture après quelque 20 heures de débat, quand on sait que ces gens-là dans l'Opposition nous ont fait faire des 145, des 135 heures -j'aurai l'occasion de revenir là-dessus - c'est carrément irrespectueux de la démocratie. C'est un peu avec amertume que je vais poursuivre mes propos sur l'amendement proposé par ma collègue, la députée de Chicoutimi. Si on avait une once de respect pour les institutions, on aurait mis fin immédiatement à la commission parlementaire. Cela ne fait pas sérieux, quand on sait qu'il y a une motion de clôture, de bâillon, de demander aux gens de la commission de continuer, comme si de rien n'était. C'est du jamais vu.

Aujourd'hui, on propose comme amendement qu'il y ait un préambule, parce qu'il

s'agit d'un projet de loi qui, pour la première fois, sanctionne l'illégalité, d'une part, et, d'autre part, va consacrer le principe dorénavant par loi - c'est cela qui est grave - que l'illégalité peut être source de droit. Je ne suis pas avocat, mais je n'ai jamais accepté cela et je n'accepterai jamais que l'illégalité puisse être source de droit. Quand on procède par voie législative et qu'on demande de sanctionner l'illégalité, peu importent les motifs, par un projet de loi, il me semble qu'à tout le moins, si on avait encore un peu de respect pour les institutions démocratiques, on accepterait d'emblée de faire précéder ce projet de loi d'un préambule pour l'expliquer dans le futur. Un texte de loi, cela sert aux archivistes, à toutes sortes d'historiens, à toutes sortes de personnes qui, un jour, voudront "recontexter" un événement, voudront refaire, non pas les débats, mais refaire complètement l'historique d'une question de fond, d'une question d'envergure, d'une question majeure.

Le dictionnaire, ce n'est pas moi qui l'ai inventé, a été on ne peut plus clair. Qu'est-ce que la définition d'un préambule? C'est ce dont on fait précéder un texte de loi. Est-ce que la loi qu'on a à débattre en deuxième lecture, ici, en commission parlementaire, est un projet de loi? Bien sûr. Tout le monde va convenir que la loi 58 est un projet de loi. Deuxièmement, dans la définition, on dit: C'est ce dont on fait précéder un texte de loi pour en exposer les motifs, les buts. Est-ce que vous ne pensez pas, M. le Président, que si un projet de loi mérite un tant soit peu d'être on ne peut plus explicite pour l'histoire, pour la postérité sur les buts et les objectifs qu'il poursuit en sanctionnant l'illégalité... Si des historiens vont vouloir se référer à des projets de loi dans le futur, il serait important qu'ils aient un peu plus d'éclairage que des notes explicatives. Règle générale, la portée et le sens d'un préambule, c'est justement quand il s'agit de donner à une loi un caractère exceptionnel. Cela fait dix ans que je vis dans cette Chambre et on n'a pas abusé comme gouvernement des préambules.

On disait: La Loi sur la santé et la sécurité du travail, il n'y a pas de préambule. Je ne le dirai pas comment je le pense, mais je n'en reviens pas qu'on porte un jugement comme cela. Ce n'est pas une loi de même nature. Des lois à portée administrative, des lois - un instant, je n'ai pas fini ma phrase - pour régulariser des secteurs, des lois d'orientation, cela n'a pas le caractère d'une loi exceptionnelle qui, pour la première fois, dit a l'ensemble du Québec et à la face du Québec: Le Parlement, quand il a adopté l'autre loi, il a fait une erreur. Il a fait une erreur parce qu'il aurait dû prévoir des dispositions pour les gens qui contournent la loi. Ce n'est pas grave. Mon raisonnement doit être vrai et je le répète pour ceux qui, de temps en temps, se donnent la peine d'écouter: Comment se fait-il que l'Alliance et la CEQ demandent que, si on est capable de voter une loi pour amnistier les "illégaux", pourquoi on ne le fait pas pour ceux qui ont défié la loi 111, la loi 70 et une série d'autres lois? Le geste est exactement le même, M. le Président. Une loi adoptée par le Parlement a été défiée, a été contournée; on s'est systématiquement organisé pour défier ces lois, et l'Alliance et la CEQ ont vu cela. Ils ont dit: Écoutez, si on peut amnistier les "illégaux", pourquoi vous ne nous amnistiez pas? Nous, on a posé le même geste. On a défié une loi du Parlement.

Si, au moins, on avait la décence dans un préambule d'expliquer le contexte. Moi, je trouve qu'il n'y a pas d'explication quand on veut effacer l'ardoise, à moins qu'on ait une dette à payer, à moins d'avoir pris un engagement complètement irresponsable, en dehors des principes démocratiques d'un Parlement. Malgré tout cela, on persiste à croire que la vérité appartient a un seul homme parce qu'il a reçu un mandat. Il est la voie, la vérité, la vie, j'ai eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises. Du haut de sa personne, il va demander aux autres d'être gentils, ouverts, d'avoir une générosité sans pareil alors qu'il nous demande de continuer à discourir sur un projet de loi quand son propre gouvernement vient de décider au Conseil des ministres de nous bâillonner, d'adopter une motion de clôture. Continuez, causez mes lapins, il n'y a pas de problème. Nous, on légifère indépendamment de la démocratie, indépendamment des us et coutumes de ce Parlement.

On essaie de leur faire comprendre le bon sens, la logique d'un préambule à une loi d'exception comme celle-là et on a tombé, on a versé dans la bouffonnerie, dans la loufoquerie parce que ces gens-là, cela ne les intéresse pas de discuter sérieusement d'un projet de loi. Ils n'ont rien dit d'intéressant sur le projet de loi. C'est le silence total. Quand c'est plus léger, ils ont le goût de participer, ils ont le goût de s'impliquer dans la conversation.

M. le Président, un projet de loi qui confère des sources de droit au niveau de l'illégalité, c'est inacceptable. Si vous aviez le courage d'expliquer votre geste - c'est le vôtre, ce n'est pas le nôtre, c'est vous qui avez décidé de sanctionner l'illégalité - et si c'était expliqué par un préambule, à ce moment-là cela conférerait ce caractère d'exceptionnalité, ce caractère de particularité très grande. Il n'y a que des grandes lois, des grandes causes à caractère très universel qui ont été précédées d'un préambule. Également, dans le dictionnaire on ajoute: Un préambule c'est de faire un exposé d'intentions préalable à un écrit. Pensez-vous que le projet de loi que nous

discutons ne mériterait pas de faire l'objet d'un exposé préalable d'intentions parce qu'il y a effectivement beaucoup d'intentions dans ce projet de loi, M. le Président? Les intentions ne sont pas toujours louables. En ce qui nous concerne, nous pensons que ce sont des intentions absolument inqualifiables, qui auraient au moins le mérite d'être inscrites dans un préambule pour l'histoire.

Ce n'est pas par l'article 1 qui dit que c'est le 15 avril plutôt que telle date qu'on va trouver le contexte historique dans lequel s'est inscrit ce projet de loi. Ce n'est sûrement pas à l'article 8 où on donne un pouvoir discrétionnaire au ministre de l'Éducation qu'on va comprendre le contexte de ce projet de loi. Si on se donnait la peine de rédiger un préambule en bonne et due forme, peut-être que ceux qui se référeront à ce projet de loi à l'avenir auront au moins l'explication, pas plus légitime et satisfaisante, parce que sanctionner l'illégalité par un préambule ou ailleurs c'est le même résultat, M. le Président... Au moins, cela aurait le mérite de donner le contexte, de donner un peu plus d'éléments d'analyse, d'éléments d'intentions, comme dit la définition pour être capable de porter un jugement et d'analyser Un peu plus ce qui aurait bien pu guider ce gouvernement pour adopter une loi sans précédent qui va sûrement marquer l'histoire parce que c'est la première fois qu'un Parlement se détruit lui-même. (21 h 15)

Le Président (M. Bissonnet): Voulez-vous conclure, M. le député?

M. Gendron: C'est ce que cela veut dire, adopter une loi pour dire: Celle qu'on a adoptée, ce n'était pas la bonne. Moi, je n'ai jamais vu cela. C'est une renonciation de droits.

Le Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député, si vous voulez conclure.

M. Gendron: Oui, en conclusion. Je pense qu'un préambule qui expliquerait que leur intention c'était de légiférer pour récompenser la désobéissance, ce serait important d'avoir cela dans nos documents officiels historiques. C'est pourquoi je vais appuyer la motion d'amendement proposée par ma collègue, la députée de Chicoutimi.

M. Cusano: M. le Président, le vote, s'il vous plaît!

Le Président (M. Bissonnet): En n'ayant pas d'autres interventions qui me sont demandées sur l'amendement, est-ce que la motion d'amendement est adoptée?

M. Cusano: Rejeté.

M. Boulerice: Vote nominal, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): J'ai très bien compris, M. le député de Saint-Jacques, L'appel nominal est demandé par le député d'Abitibi-Ouest. Je demanderais au secrétaire de faire l'appel des membres de cette commission.

Le Secrétaire: Mme Blackburn (Chicoutimi)?

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que vous voulez relire l'amendement? Je vais le relire.

Il est proposé par la députée de Chicoutimi que la motion du député de Viau soit modifiée en remplaçant les termes "de l'article 1 et des articles suivants du projet de loi 58" par les suivants: "...du projet de loi 58 en débutant par l'étude de l'opportunité d'intégrer un préambule à ce projet".

M. le secrétaire, si vous voulez faire l'appel des membres de cette commission.

Le Secrétaire: Mme Blackburn (Chicoutimi)?

Mme Blackburn: Pour.

Le Secrétaire: M. Gendron (Abitibi-Ouest)?

M. Gendron: Pour.

Le Secrétaire: M. Blais (Terrebonne)?

Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, lorsqu'il y a un vote, aucun commentaire.

M. Blais: Pour.

Le Secrétaire: M. Boulerice (Saint-Jacques)?

M. Boulerice: Pour.

Le Secrétaire: Mme Bleau (Groulx)?

Mme Bleau: Contre.

Le Secrétaire: M. Cusano (Viau)?

M. Cusano: Contre.

Le Secrétaire: Mme Cardinal (Châteauguay)?

Mme Cardinal: Contre.

Le Secrétaire: Mme Dougherty (Jacques-Cartier)?

Mme Dougherty: Contre.

Le Secrétaire: M. Gardner (Arthabaska)?

M. Gardner: Contre.

Le Secrétaire: M. Hains (Saint-Henri)?

M. Hains Contre.

Le Secrétaire: M. Parent (Sauvé)?

M. Parent (Sauvé): Contre.

Le Secrétaire: M. Tremblay (Rirnouski)?

M. Tremblay (Rimouski): Contre.

Le Secrétaire: M. Ryan (Argenteuil)?

M. Ryan: Contre.

Le Président (M. Bissonnet): La motion est rejetée par 9 voix contre 4. Nous en sommes maintenant à la motion principale, la motion du député de Viau. Est-ce qu'il y a des personnes qui veulent intervenir sur cette motion?

Reprise du débat sur la motion principale

M. Boulerice: Est-ce que vous auriez la gentillesse, M. le Président, de me la relire pour que je puisse bien m'en imprégner?

Le Président (M. Bissonnet): Nous allons relire la motion. M. le secrétaire, pourriez-vous nous dire qui n'a pas parlé sur cette motion?

Le Secrétaire: M. Boulerice et M. Charbonneau.

Le Président (M. Bissonnet): Bon. La motion se lit comme ceci: Le député de Viau fait motion pour "que l'on passe immédiatement à l'étude détaillée de l'article 1 et des articles suivants du projet de loi 58". M. le député de Saint-Jacques, vous avez la parole puisque vous l'avez demandée.

M. André Boulerice

M. Boulerice: Je n'avais pas vu la petite lumière rouge allumée. Là, cela m'indique effectivement...

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'elle est maintenant allumée?

M. Boulerice: Elle est maintenant allumée, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Parfait.

M. Boulerice: C'est vrai que cela va s'éteindre un jour, cette lumière rouge, mais je vais quand même...

Le Président (M. Bissonnet): Alors, si vous voulez parler de la motion principale, M. le député.

M. Boulerice: ...en profiter. M. le Président, il est un peu décevant au départ de voir qu'on ait refusé d'entendre des intervenants à cette commission.

M. Cusano: M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Viau.

M. Cusano: S'il vous plaît, la pertinence.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Saint-Jacques, si vous voulez parler de la motion pour passer à l'étude des articles 1 et suivants de la loi.

M. Boulerice: M. le Président, comment M. le député de Viau peut-il présumer de la pertinence quand il n'y avait que quatre mots de dits dans une phrase?

Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: Alors, je vous demanderais d'être un petit peu plus patient.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Saint-Jacques, c'est le privilège du député de Viau; il a fait sa motion et c'est à lui de décider s'il a à parler plus longtemps qu'il ne l'a fait. M. le député de Saint-Jacques, vous avez la parole sur la motion principale.

M. Gendron: Une question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Oui, une question de règlement, M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Je veux juste vous signaler que le député de Saint-Jacques n'a pas évoqué que le député de Viau n'avait pas parlé longuement sur sa motion. Quand vous l'avez repris pour des propos hors d'ordre, il a simplement mentionné: comment le député de Viau peut-il prétexter que je suis hors d'ordre dans le sens non pertinent par rapport à votre motion, en parlant au député de Viau alors qu'il avait quatre mots de dits, lui, comme intervenant.

M. Cusano: Je peux même les répéter, M. le Président.

M. Gendron: Mais il me semble que c'est une nuance importante.

Le Président (M. Bissonnet): J'ai peut-être mal compris le sens de son intervention, M. le député. M. le député de Saint-Jacques, si vous voulez poursuivre.

M. Boulerice: Je repars à 20, M. le Président, parce que les tactiques de l'autre bord sont évidentes. 11 s'agit de ne pas nous laisser parler. Il m'apparaît important que l'on parle de cette loi article par article. Je vous disais qu'il m'apparaît important, puisque c'est probablement la seule alternative qu'il nous reste actuellement, vu que le gouvernement, la partie ministérielle et surtout le ministre responsable s'est complètement refusé à recevoir à cette commission tout groupe, tout individu, tout organisme qui aurait pu nous apporter un certain éclairage quant aux motifs de la loi et même des modifications à la loi.

Cela m'apparaît d'autant plus étonnant que c'est une pratique qu'a respectée d'une façon très éloquente le gouvernement précédent. Quand l'Opposition, face à loi 101, a une crise...

M. Parent (Sauvé): M. le Président, question au règlement. M. le Président, on est en train d'étudier la motion du député de Viau qui demande que l'on passe immédiatement à l'étude de l'article 1. Actuellement, le député de Saint-Jacques est en train de faire le procès d'un amendement et de sous-amendements qui ont déjà été battus. Écoutez, on ne peut pas revenir sur la pertinence d'écouter ou de ne pas écouter des gens. On est en train de discuter sur la pertinence de passer à l'article 1 et qu'on s'en tienne à cela.

M. Boulerice: M. le Président.

M. Gendron: M. le Président, il est évident que dans l'argumentation le député de Saint-Jacques a tout à fait le loisir de se servir des éléments que nous avons vécus à cette commission pour dire que justement, nous, on n'était pas prêt à passer à l'article 1. Il me semble que c'est on ne peut plus pertinent. Quand on prend la peine d'amender et de sous-amender, il me semble que c'est faire la preuve que, de ce côté de la Chambre, il est évident que nous pensions pouvoir poursuivre les considérations particulières.

Il est en train d'illustrer que, parce qu'on a fait toutes ces étapes, on ne peut pas être d'accord avec la motion présentée par le député de Viau, de commencer tout suite à l'article 1. Si on avait été d'accord, on n'aurait pas présenté des amendements et des sous-amendements. Il s'en sert comme exemple pour illustrer ses propos et c'est tout à fait pertinent.

Le Président (M. Hamel): M. te député de Saint-Jacques, si vous voulez continuer, s'il vous plaît!

M. Parent (Sauvé): Ma question de règlement, M. le Président, j'y tiens encore et je ne cherche pas de problème. Le député de Saint-Jacques n'est absolument pas pertinent en ce qui regarde la motion.

M. Blais: Une question de règlement, M. le Président.

M. Parent (Sauvé): II passe a côté complètement. Il fait une argumentation sur des choses qui sont votées.

M. Gendron: M. le Président.

M. Parent (Sauvé): C'est malheureux. Je comprends très bien le député d'Abitibi-Ouest. Il dit: Écoutez, cela nous prend des exemples. Il dit: II faut revenir sur... C'est fini, M. le député d'Abitibi-Ouest, je regrette.

M. Gendron: M. le Président, un instant! Sur la question de règlement.

M. Parent (Sauvé): On a voté et vous avez perdu. Allez-vous faire un débat? Je serais prêt.

Le Président (M. Hamel): M. le député de Sauvé, avez-vous terminé?

M. Gendron: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Président (M. Hamel): M. le député de Saint-Jacques, s'il vous plaît, si vous voulez reprendre dans le sens de la pertinence du débat actuel.

M. Boulerice: Elle était pertinente. Je remarque une courtoisie de surface dont fait preuve le député de Sauvé, mais sur le plan de la tolérance je pense que la surface est très mince. Je pense que mon propos est extrêmement pertinent. Je suis contre l'étude point par point et je vous dis que je suis contre l'étude point par point, M. le Président, immédiatement, parce que je privilégiais, au départ, qu'il y ait des auditions à cette commission, que le gouvernement actuel, que nos amis d'en face... C'est l'expression consacrée. Je ne dirais pas que je partage ce sentiment.

Une voix: C'est réciproque.

M. Boulerice: Vous m'en voyez ravi, parce que je pratique la seule chose qui vous reste dans votre programme et qui est

l'équité. Je suis contre l'étude immédiate article par article, parce que je favorise une attitude différente qui est l'attitude adoptée par le gouvernement précédent. Je vous disais: Lorsque l'Opposition d'alors...

M. Cusano: Donnez-nous des exemples,

M. Boulerice: ...réclamait sur la loi 101, après une crise d'urticaire aiguë où elle voyait des irritants partout dans la loi 101, la Charte de la langue française, eh bien nous avons tenu audience. J'ai eu d'ailleurs le plaisir de croiser le fer avec l'ancien chef de l'Opposition et maintenant ministre de l'Éducation. Nous avons eu là un exemple de tolérance de la part du gouvernement qui, dans une loi aussi fondamentale... Je me permets d'ajouter que le projet de loi que le ministre dépose n'est pas un amendement à une loi quelconque, c'est une loi qui vient amender la seule loi au Québec qui porte le titre de Charte de la langue française.

Quand on dit que mon propos est impertinent, je dirai que ce qui est impertinent - et je vous prierais de le répéter au député de Sauvé - c'est de refuser d'entendre les gens. Nous avons invité des gens à participer à une commission parlementaire qui a duré je ne sais combien d'heures; si je parle de la commission sur la loi 40 à l'époque, 166 heures, si je pense aux amendements sur la loi 101, cela a pris cinq semaines d'audience. On a écouté tout le monde; on a même écouté des groupes qui sont venus spontanément, après votre demande de participer, dans le plus grand respect des propos qu'ils pouvaient tenir. Alors que l'on agisse comme cela, cela me révolte. Mais il semble que ce soit une règle très fixe qu'a décidé de se donner le parti ministériel, puisqu'en commission parlementaire sur les communica- tions le ministre a refusé avec le même mépris des audiences...

Le Président (M. Hamel): S'il vous plaît, la pertinence!

M. Boulerice: ...et le plaisir d'entendre des intervenants sérieux du milieu. Et Dieu seul sait qu'on n'avait pas suggéré des deux de pique, M. le Président. On avait suggéré des organismes et des individus qui, dans ce pays, sont reconnus pour leur engagement social, leur engagement culturel, leur engagement politique, leur engagement économique, des organismes qui ont fait preuve jusqu'à maintenant d'une grande pertinence dans leurs propos, des organismes prestigieux: la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, 140 ans au service de la nation...

Le Président (M. Hamel): S'il vous plaît! Si vous voulez...

M. Boulerice: Alors, M. le Président, on assiste au même mépris que le ministre des Communications a eu, mais il y aura par contre une commission parlementaire sur l'alimentation des porcins ou des animaux, je ne sais trop quoi.

Le Président (M. Hamel): S'il vous plaît, la pertinence!

M. Boulerice: Pour cela, on juge bon d'avoir une commission parlementaire. Mais sur un droit fondamental qui est la Charte de la langue française, sur l'amnistie des élèves, des parents, des administrateurs scolaires et des dirigeants de commission scolaire qui ont bafoué la première loi du Québec - elle s'appelle la loi 101, mais elle devait s'appeler la loi 1 - on ne trouve pas pertinent d'écouter des gens, d'entendre leurs propos. Nous, par contre, on n'a pas hésité à ouvrir nos livres, à ouvrir les portes et à mettre les caméras de télévision. C'était télédiffusé, M. le Président, par la radiotélévision de l'Assemblée nationale. De l'autre côté, par exemple, c'est non. Mais il y en aura effectivement une sur l'alimentation de je ne sais trop quel animal. Comprenez que je ne peux pas accepter cela. Je ne pense pas que ce soit le type de démocratie que j'aie le goût de vivre pendant les quatre prochaines années au Québec quand, sur des sujets d'importance, on refuse quelque commission parlementaire que ce soit où l'on puisse entendre des individus. On ferme des villes comme Schefferville, mais on refuse une commission pour écouter les gens. On nous dit qu'on a consulté le maire. Je suis bien d'accord qu'on ait consulté le maire. Mais ce n'est pas le maire qui fait la ville, M. le Président... (21 h 30)

Le Président (M. Hamel): Le débat sur la ville de Schefferville, M. le député de Saint-Jacques, est d'un autre domaine.

M. Boulerice: ...ce sont les citoyens. Oui, M. le Président.

Le Président (M. Hamel): Si vous voulez revenir à notre sujet.

M. Boulerice: Alors, M. le Président...

M. Blais: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Hamel): Oui, M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Merci. La pertinence du sujet permet certainement à quelqu'un de faire une analogie, fût-elle de quinze ou de trente secondes. Quand même! On n'est pas pour toujours dire éducation, école, professeur. On

a le droit de faire des comparaisons. Il fait une comparaison entre le bâillon sur le débat sur Scheffer ville et celui que vous voulez nous mettre ici. Quand même! La langue française n'a pas que quatre mots: loi 58, élève, professeur et commission scolaire. H faut au moins laisser aller un peu.

Le Président (M. Hamel): M. le député de Saint-Jacques, si vous voulez poursuivre, s'il vous plaît!

M. Boulerice: J'étais contre et je suis toujours contre, M. le Président, l'étude article par article parce que je crois encore fondamentalement qu'il nous faut entendre des gens qui, dans ce pays, ont des mots à dire sur une modification importante de la loi 101. On s'empresse, on va avec précipitation régler le cas des "illégaux" et de gens qui ont incité à l'illégalité, quand il y aurait des choses bien plus importantes à régler si le ministre voulait faire diligence. S'il voulait faire diligence, la première chose qu'il ferait, ce serait de s'arranger pour que la minorité franco-québécoise au Canada ait des garanties égales à la minorité anglo-québécoise au Québec, parce qu'en vertu de l'article 23, paragraphe 3, alinéa b de la Loi constitutionnelle de 1982 promulguée par le gouvernement fédéral libéral de l'époque, les Anglo-Québécois ont des droits constitutionnels afin de recevoir un enseignement en anglais dans des commissions scolaires de langue anglaise. Or, la minorité franco-québécoise n'a aucune garantie équivalente.

S'il y avait précipitation, ce serait bien de corriger des choses comme celles-là qui ont été faites par un gouvernement frère du gouvernement actuel et non pas de régler, comme il se produit actuellement, une situation qui - entre parenthèses - s'amenuise de jour en jour. Dieu seul sait que la situation de ces "illégaux", n'a surtout pas jusqu'à maintenant fait verser de sang, ne m'a pas fait verser de larmes. On sait pertinemment que plusieurs d'entre eux sont déjà à l'université, s'ils ne sont pas déjà sur le marché du travail. Qu'ils sont déjà au niveau secondaire. Donc, on aurait besoin avant de regarder article par article... Pardon?

Le Président (M. Hamel): M. le député de Saint-Jacques, il vous reste 40 secondes.

M. Boulerice: II me reste beaucoup plus que 30 secondes, si je calcule...

Le Président (M. Hamel): Je vous ai déjà signalé qu'il vous restait une minute.

M. Boulerice: ...les interruptions discourtoises qui sont venues de l'autre côté.

M. Parent (Sauvé): Je vous ferai remarquer, M. le Président, que le député de Saint-Jacques n'est pas autorisé à contester une décision du président. Je pense que le temps est enregistré par le technicien prêté par l'Assemblée nationale et la période exacte de temps est déterminée par ce technicien de l'Assemblée nationale. Je comprends que le député de Saint-Jacques voudrait avoir beaucoup plus de temps, qu'il est très volubile et qu'il est même très intéressant, mais cela n'excuse pas...

Le Président (M. Hamel): II vous reste environ une minute. À l'ordre, s'il vous plaît! Il vous reste une minute, M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: M. le Président, je ne pensais jamais que 2 décembre pourrait être synonyme de totalitarisme au Québec. Je m'en rends bien compte, mais cela se fait au vu et au su de la population et cela se répercutera.

M. Ryan: M. le Président.

Le Président (M. Hamel): M. le ministre de l'Éducation a demandé la parole.

M. Claude Ryan

M. Ryan: J'aimerais, comme vient de le mentionner le député, que nos discussions soient télévisées parce que nos concitoyens pourraient se rendre compte du peu de sérieux de l'Opposition. Nous venons d'en avoir encore un exemple avec l'invervention du député. Sérieusement, vous venez nous dire, après 22 ou 23 heures de délibérations de la commission jusqu'à maintenant, que nous ne sommes pas prêts à aborder l'article 1, alors que la nature même du mandat qui nous a été donné par l'Assemblée nationale nous invite à l'examen article par article du projet de loi. Et si on ne commence pas par l'article 1, que va-t-on faire?

M. Boulerice: Comme proposé tantôt, M. le Président...

M. Ryan: Non, non. Regardez, cela fait quatre jours que vous tournez autour du pot, comme on dit. Les gens vous observent. Nous disons que vous avez le droit d'avoir une opinion différente de celle du gouvernement. Nous respectons ce droit, nous respectons votre opinion, nous respectons vos personnes et nous respectons votre parti, mais nous ne pouvons pas respecter la manière dont vous vous comportez, manière peu sérieuse et très peu édifiante pour la démocratie. La démocratie postule que l'Opposition doit avoir ses droits, mais que la majorité doit gouverner. Si on suivait jusqu'au bout la logique dans laquelle vous vous êtes embarqués, où est-ce qu'elle nous conduirait?

M. Gendron: M. le Président, question de règlement.

M. Ryan: Et, M. le Président...

M. Gendron: Un instant! Question de règlement.

M. Ryan: Très bien.

M. Gendron: Je ne veux pas être déplaisant auprès du ministre de l'Education, mais j'aimerais que, comme président, vous nous indiquiez en vertu de quoi le ministre de l'Éducation parle actuellement. Je ne l'ai pas entendu prononcer une question de règlement.

M. Ryan: C'est mon droit de parole.

M. Gendron: C'est votre droit de parole?

Le Président (M. Hamel): C'est son droit de parole en vertu...

M. Gendron: C'est cela, c'est ce que je veux que le président nous dise. Donc, M. le ministre est en train d'exercer son droit de parole sur la motion principale du député de Viau. Est-ce bien cela?

Le Président (M. Hamel): Absolument, exactement.

M. Gendron: Parfait!

Le Président (M. Hamel): Selon la règle de l'alternance, c'est au tour du ministre de l'Éducation.

M. Gendron: Oui, il a le droit de parole.

M. Ryan: Evidentia patet. Une voix: Ah! Ah! Ah!

Le Président (M. Hamel): M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: M. le Président, je pense que, lorsqu'on n'est même pas prêt à aborder le premier article d'un projet de loi, on montre qu'on n'est pas sérieux dans son opposition. Vous avez mentionné d'autres exemples sur lesquels j'aurais quelques précisions à apporter. On a parlé de la loi 40. Le projet de loi 40 a donné lieu à des audiences publiques. C'était un projet entièrement différent de celui dont nous discutons ici. Ce projet visait à une réorganisation fondamentale des structures scolaires au Québec. Nous avons tenu des audiences pendant 166 heures, si mes souvenirs sont bons. À la fin, le gouvernement précédent, représenté par votre parti, avait mis la clôture d'une manière assez brutale, hélas!

Deuxièmement, les audiences avaient ensuite fait la preuve que le projet de loi 40 était indéfendable. Le gouvernement a été obligé de le récrire. Il a présenté le projet de loi 3. Nous avons abordé le projet de loi 3 en commission parlementaire. Savez-vous qu'après une douzaine d'heures de travaux le gouvernement a mis le bâillon sur un projet qui comportait 655 articles? Après une douzaine d'heures, il y a mis le bâillon. Savez-vous à quel numéro l'Opposition était rendue, malgré les mauvais comportements qu'on nous avait imputés à ce moment-là?Nous étions rendus à l'article 23 ou 24, et les premiers articles étaient des articles fondamentaux. Nous avions quand même progressé. J'ajoute, pour l'éclairage du député d'Abitibi-Ouest, que le soir où il s'est produit la même chose que ce soir nous avons siégé jusqu'à minuit et nous avons continué à progresser. Dans les trois ou quatre heures qu'il restait, nous avions progressé sur quelques articles additionnels. Nous étions bien plus avancés que vous ne l'êtes après quatre jours et demi de "niaisage".

Je vous invite, il reste encore deux heures et demie, si vous êtes prêts à faire un bon "sprint", je pense qu'on pourrait passer à travers ces articles - c'est environ dix articles que comporte le projet de loi -rapidement. Si vous ne le voulez pas et si vous vous entêtez dans vos tactiques d'obstruction, je pense que la volonté de la majorité devra s'exprimer par les moyens que lui confère notre règlement.

Par conséquent, je trouve la proposition du député de Viau de bon sens élémentaire, de réalisme absolument indéniable et je l'appuie avec toute la fermeté dont je suis capable.

Le Président (M. Hamel): Avez-vous terminé, M. le ministre? Merci, M. le ministre. Oui? Je reconnais maintenant le député de Verchères.

M. Gendron: Un instant, M. le Président! J'aimerais qu'on permette au député de Terrebonne de prendre ses dix minutes sur l'amendement, bien sûr, si on a le consentement des membres ministériels. Le député de Terrebonne n'a pas eu l'occasion de s'exprimer sur la motion principale du député de Viau qui est sur la table.

M. Ryan: Sur l'amendement, il n'en est pas question.

M. Gendron: Pas sur l'amendement, c'est fini, il a parlé. Sur la motion principale du député de Viau.

Mme Bleau: Je m'excuse, M. Ryan...

M. Boulerice: Excusez-vous auprès de la présidence, madame.

Le Président (M. Hamel): Une seconde, madame, s'il vous plaît!

M. Blais Avec la permission de M. le ministre, M. le Président, je demande mon droit de parole.

Mme Bleau: ...

Le Président (M. Hamel): Mme la députée de Groulx, s'il vous plaît, si vous voulez attendre une seconde, je demandais de ce côté-ci s'il y avait consentement.

M. Cusanœ M. le Président.

Le Président (M. Hamel): M. le député de Viau.

M. Cusano: Je crois qu'on a consenti en ce sens que le député de Terrebonne remplace le député de Joliette...

Une voix: Laviolette.

M. Cusano: Laviolette. On pourra vérifier, mais il me semble que le député de Laviolette s'est déjà exprimé sur la motion.

M. Gendron: C'est exact, M. le Président, c'est pourquoi je demandais le consentement des ministériels parce que le député de Terrebonne n'a pas parlé sur la motion principale. J'ai demandé au président s'il voulait demander aux ministériels le consentement unanime. Si nous l'avons... C'est votre décision que j'attends. Si nous ne l'avons pas, je suis d'accord.

Le Président (M. Hamel): M. le député d'Abitibi-Ouest...

M. Cusano: C'est clair, c'est non.

Le Président (M. Hamel): ... c'est clair, on n'a pas le consentement de la partie ministérielle...

M. Gendron: Merci.

Le Président (M. Hamel): ... donc, je reconnaîtrais M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: M. le Président...

M. Blais M. le Président, une question de règlement.

Le Président (M. Hamel): Un instant, s'il vous plaît, une question de règlement. M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Je remercie quand même les membres du gouvernement. Ce sera un autre bâillon à votre crédit de ne pas me donner mon droit de parole sur la motion principale.

Le Président (M. Hamel): M. le député de Verchères, s'il vous plaît!

M. Ryan: M. le Président, une question de règlement.

Le Président (M. Hamel): Une question derèglement, M. le ministre.

M. Ryan: Le député n'avait pas le droit de parole. Nous avons consenti de nombreuses exceptions au règlement depuis cinq jours. Présentement, à deux heures de la fin, nous allons suivre le règlement sans plus. Pour les résultats que cela a donné, vous ne méritez pas autre chose.

Le Président (M. Hamel): M. le député de Verchères, s'il vous plaît! M. le député de Verchères, vous avez la parole.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: M. le Président, si je ne connaissais pas le ministre de l'Éducation, son air m'impressionnerait beaucoup, mais comme je le connais bien... Je sais qu'il a le don et cette capacité de se choquer ou d'avoir un faciès très dramatique alors que, dans le fond, il sait que tout est relatif dans le parlementarisme britannique et qu'il faut prendre cela avec souvent un peu d'humour et de détente.

Mais néanmoins la proposition du député de Viau qui est devant nous, c'est une proposition qui, pour nous, à ce moment-ci, est inacceptable. Je crois que plusieurs de mes collègues ont eu l'occasion de le dire et je l'ai dit à l'Assemblée nationale dans mon intervention en deuxième lecture, je l'ai dit dans mes remarques préliminaires, ce projet de loi n'est pas un projet de loi mineur. C'est un projet de loi important. D'ailleurs, la façon même dont les médias d'information ont traité ce projet de loi, témoigne de l'importance qu'il a pour notre société.

À cet égard, il n'y a pas beaucoup de précédents à l'Assemblée nationale où un projet de loi de cette importance à l'égard des principes... M. le Président, l'importance d'un projet de loi ne se mesure pas au nombre d'articles. Tantôt, j'entendais le ministre de l'Éducation, très sérieusement, nous rappeler un projet de loi qui avait quelque 600 articles et c'était épouvantable, on était rendu au 23°, mais l'Opposition du temps était une brillante Opposition, l'Opposition libérale, parce qu'elle avait passé beaucoup de temps sur des articles majeurs. Sur des articles majeurs, alors qu'il y avait eu une consultation à ce moment et

alors qu'on avait pris le temps nécessaire pour entendre des organismes et les individus. Si le ministre de l'Éducation veut nous faire la leçon, je pourrais poursuivre dans ce que j'avais commencé tantôt, lui rappeler que le 9 février 1984, alors que la commission parlementaire faisait face à la même décision gouvernementale qui nous attend actuellement, c'est-à-dire un bâillon pour mettre fin à l'étude du projet de loi et pour nous ramener à l'Assemblée nationale, à ce moment, le député d'Argenteuil, ministre de l'Éducation aujourd'hui, avait fait tout un plat alors qu'on avait entendu des organismes. On en avait entendu une quantité incroyable, d'autant plus incroyable si on la compare avec le nombre de personnes qu'on a entendues ici, c'est-à-dire personne.

Présentement, ce qu'on a demandé, c'est d'entendre un certain nombre d'organismes. Pour la compréhension des gens qui nous écoutent, ceux qui sont ici dans la salle et ceux qui nous liront pour la postérité par le Journal des débats, je vais vous rappeler, M. le député de Viau, les organismes qu'on a demandé à entendre. Aucun de ces organismes n'est un organisme farfelu, aucun de ces organismes ne peut être considéré comme un organisme qui n'est pas concerné par le projet de loi qui est devant nous. La Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec, l'Association des commissions scolaires protestantes du Québec, le Conseil scolaire du l'île de Montréal...

Une voix: M. le Président, question de règlement.

M. Cusano: II me semble que j'ai entendu le même discours par un autre député.

M. Charbonneau: Non, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Si vous voulez poursuivre, M. le député.

M. Charbonneau: Si vous l'avez entendu, entendez-le encore une fois parce vous n'avez pas l'air d'avoir compris. Les organismes comme la Commission des écoles catholiques de Montréal qu'a présidée pendant un certain temps le député de Sauvé, qui nous a avoué qu'il y avait des "illégaux" dans sa commission scolaire du temps qu'il était président et qui nous a avoué candidement qu'il ne savait pas où étaient les "illégaux". Il y en avait dans sa commission scolaire, mais il ne savait pas où ils étaient. On aurait aimé entendre la Commission des écoles catholiques de Montréal, la commission scolaire Jérôme-Le Royer et les autres commissions scolaires de l'île de Montréal. M. le Président, je pourrais faire la liste, j'évite cela au député de Viau qui les connaît aussi bien que moi. On aurait aimé entendre les commissions scolaires hors de Montréal qui sont concernées; dans l'Outaouais il y a un certain nombre de commissions scolaires qui sont concernées par le problème des "illégaux". Pourquoi ne pas accepter de les entendre nous expliquer les problèmes qu'elles vivent et peut-être aussi les solutions qu'elles trouvent, la façon dont on se prend pour contourner la loi depuis un certain nombre d'années et peut-être expliquer, comment dans une société où les valeurs de démocratie et de respect de la loi sont mises sur un piédestal chaque fois qu'on a la chance de le faire, comment on a toléré et encouragé du côté du Parti libéral l'illégalité pendant des années? Cela serait intéressant d'entendre des gens nous expliquer comment ils ont contourné la loi et comment, finalement, ils ont été encouragés par des discours libéraux et des attitudes du Parti libéral qui leur donnaient bonne conscience et, entre autres, qui leur disaient: Attendez qu'on reprenne le pouvoir et on va régler votre problème.

La Fédération des cégeps, le collège Dawson que la députée de Chicoutimi voulait entendre, elle qui a été pendant un certain temps, plusieurs années, présidente du Conseil des collèges du Québec et qui nous a expliqué comment, contrairement aux prétentions du gouvernement, on pouvait aller à l'école, au collège, même si on n'a pas de diplôme d'études secondaires et qu'on est un "illégal", alors que le gouvernement prétend qu'il a un drame actuellement, qu'il y a une urgence à adopter ce projet de loi. Pourquoi y aurait-il une urgence? Imaginez-vous, c'est parce que ces pauvres enfants n'ont pas de diplôme d'études secondaires et ne sont pas capables de poursuivre leurs études! Ce qui est complètement faux. C'est cela, la réalité.

On voulait entendre des collèges et on nous dit non. On nous dit que ce n'est pas pertinent, on nous dit qu'on est trop pressé, alors que des commentateurs sérieux du côté francophone comme du côté anglophone ont fait la démonstration qu'il n'y a pas de caractère d'urgence, qu'il y a juste une dette électorale que le Parti libéral doit rembourser. Une dette qui, d'ailleurs, a permis à ce parti d'encourager l'illégalité pendant plusieurs années. On voulait entendre François Aquin, on voulait entendre Jean-Claude Rondeau. Est-ce que c'est épouvantable de vouloir entendre Jean-Claude Rondeau? C'est le fonctionnaire que le ministre a engagé à son cabinet politique pour faire le rapport sur lequel le ministre de l'Éducation nous dit qu'il s'est appuyé totalement. Le ministre de l'Éducation nous a même dit qu'il avait une opinion avant ce rapport et que, voyant le rapport qui lui a été présenté par M. Rondeau qui est ici en

arrière, il avait changé d'opinion.

J'aurais aimé entendre M. Rondeau donner aux membres de la commission toutes les explications en long et en large qu'il a données au ministre de l'Éducation. On n'a pas eu la chance de faire cela ici, à cette commission. On voulait entendre M. Castonguay, un des démographes les plus réputés, mathématicien, qui nous a expliqué, il y a è peine une semaine, que, contrairement à ce que les gens pensent au Québec, la loi 101 n'a pas eu l'effet qu'on avait voulu en ce qui concerne l'attraction des nouveaux arrivants et que la langue anglaise au Québec continue d'avoir trois fois plus de force d'attraction que le français auprès des immigrants et des nouveaux arrivants. On a devant nous un projet de loi qui, justement, s'adresse aux nouveaux arrivants, s'adresse à leurs enfants, à des nouveaux immigrants qui ont choisi, après quelques années au Québec, l'illégalité encouragée par le Parti libéral qui forme le gouvernement aujoud'hui. On ne veut pas entendre des gens comme M. Rondeau qui a fait un rapport sur la situation, non plus qu'on ne veut entendre François Aquin qui, avant M. Rondeau, lui aussi a mis de nombreuses heures à étudier le problème et à faire des recommandations. De nombreuses heures. Je pense que ces gens, dans un cas comme dans l'autre, ont fait un travail sérieux. On n'est pas obligé de partager d'un côté comme de l'autre leurs conclusions mais ce qui était clair et ce qui est clair c'est que ce sont des gens qui sont au coeur des solutions et du débat actuel. Un débat important, un débat fondamental parce qu'on s'adresse à des principes et on voudrait nous faire la morale et nous dire qu'à cause de l'Opposition cela fait trois jours qu'on perd notre temps ici? Cela fait trois jours qu'on vous dit de faire venir du monde qui est au coeur du débat. Du monde qui est concerné. C'est important de le faire. On ne comprend pas que le gouvernement ne comprenne pas. On va venir se faire faire la leçon ici ce soir lorsque de l'autre côté il y a une motion pour clôturer nos travaux, pour nous empêcher de continuer? M. le Président, cela n'a pas de bon sens. Je ne comprends pas l'attitude du gouvernement, du Parti libéral. Je ne comprends pas non plus l'entêtement du député de Viau à présenter sa motion puisque, lorsqu'il était principal d'école, lui-même nous a raconté qu'il y avait des "illégaux" dans les classes de son école.

Le Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure, M. le député.

M. Charbonneau: M. le Président, nous n'acceptons pas de ce côté la proposition du député de Viau. On pense qu'il aurait été important d'entendre un certain nombre d'autres personnes. D'ailleurs, on ne comprend pas comment cela se fait que la vice première-ministre responsable de l'application de la loi 101, n'ait pas daigné se présenter une seule fois devant la commission. C'est la raison pour laquelle je vais faire une proposition d'amendement à la proposition du député de Viau.

Motion proposant que la

vice-première ministre participe

aux travaux de la commission

M. le Président, je fais motion pour que la motion du député de Viau soit modifiée en ajoutant à la fin les termes: "et que la députée de Chornedey, vice première-ministre et ministre responsable des organismes relevant de la Charte de la langue française, participe à nos travaux et qu'à cette fin un droit de parole lui soit accordé sans droit de vote", puisqu'elle n'est pas membre permanente de la commission parlementaire.

Voilà, M. le Président, la motion d'amendement.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que vous pourriez me transmettre le tout par écrit?

M. Charbonneau: Cela me fera plaisir de vous le transmettre, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Motion écrite. Je vais suspendre cette séance pour cinq minutes.

(Suspension de la séance à 21 h 50)

(Reprise à 21 h 58)

Le Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il vous plaît!

Tous les membres de la commission, messieurs, mesdames... Je m'excuse, Mme la députée de Chicoutimi.

Une voix: Le député de Terrebonne nous dérange.

Le Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre vos places, s'il vous plaît!

Alors, sur la motion d'amendement, en conformité de l'article 197, je déclare recevable cet amendement et je cède la parole au député de Verchères. Je tiens à lui souligner qu'il a 30 minutes pour intervenir sur cette motion.

M. Boulerice: II va nous gronder encore.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Verchères.

M. Jean-Pierre Charbonneau M. Charbonneau: Merci, M. le Prési-

dent. Cela va, madame?

M. le Président, étant donné que la députée de Jacques-Cartier vient de me donner le feu vert après vous, je ne veux pas hésiter, je vais y aller.

M. le Président, j'ai fait motion pour que la vice-première ministre et ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française soit devant nous. J'ai dit, juste avant de présenter cette motion, que nous trouvions assez curieux, ou pour le moins déplacé, que la vice-première ministre n'ait pas daigné nous honorer de sa présence à une seule occasion depuis les travaux de cette commission.

M. le Président, nous avons devant nous un projet de loi qui affecte au coeur même de son identité la Charte de la langue française. Ce projet de loi touche la langue d'enseignement. Or, c'est exactement cela, M. le député, vous l'avez dit, c'est le vif du sujet. La Charte de la langue française a été faite, entre autres, pour faire en sorte que dorénavant, au Québec, nous parlions français et que les nouveaux arrivants s'intégrent à la communauté francophone.

M. le Président, dans la mesure où le projet de loi qui est devant nous va, d'une certaine façon, confirmer qu'on a eu raison de prendre à la légère ce message de la population du Québec, je crois que le minimum qu'on puisse faire à cette commission est de demander à la vice-première ministre et à la ministre responsable de la politique linguistique de ce gouvernement de venir devant nous s'expliquer et nous indiquer un peu, M. le Président, quelle est la politique du gouvernement dans le domaine linguistique. Peut-être serions-nous un peu plus enclins à croire certains membres du gouvernement, le ministre de l'Éducation en tête, quand ils nous disent que ce projet de loi, somme toute, est mineur, pour régler le cas d'un certain nombre d'élèves et que cela ne remet pas en cause la francisation du Québec et la volonté des Québécois de faire du Québec une terre francophone.

Mais le problème, M. le Président, c'est qu'on a un un projet de loi qui nous est présenté, comme je l'ai dit à quelques reprises, par un gouvernement qui, depuis qu'il est en fonction, pose des gestes qui sont, chacun d'entre eux, des messages aux communautés ethniques du Québec, dans le sens que le gouvernement n'a pas de politique linguistique et qu'il n'est pas attaché à la francisation du Québec. Pour lui, ce n'est pas un sujet majeur. Ce n'est pas une préoccupation fondamentale. Ce n'est pas une question d'intérêt national primordial. C'est un sujet d'importance mineure. Même est-ce un sujet d'importance tout court pour le gouvernement? On voudrait que, de ce côté-ci de l'Assemblée nationale, de ce côté-ci de la Chambre, on laisse passer ce projet de loi sans faire d'obstruction, sans faire une bataille rangée et sans qu'on demande des explications au gouvernement.

Le parti qui forme aujourd'hui le gouvernement a encouragé, pendant qu'il était dans l'Opposition, l'illégalité. Ce parti, depuis qu'il est au pouvoir, è l'égard de la question linguistique, continue d'encourager l'illégalité. Il continue d'encourager l'illégalité à l'égard de la langue d'enseignement, parce qu'à ce qu'on sache la langue d'enseignement, celle de la Charte de la langue française, n'a pas été modifiée. Le projet de loi qui est devant nous ne l'a pas modifiée. Ce gouvernement a encouragé et continue à encourager l'illégalité à l'égard de la langue d'affichage, également. Son attitude est autant de messages à un certain nombre de personnes au Québec, de commerçants, entre autres, de la région de Montréal, de l'île de Montréal et de la région de l'Outaouais, dans le sens suivant: Vous savez. Allez-y! Le gouvernement n'a pas l'intention de sévir. Vous pouvez contrevenir aux dispositions de l'affichage, vous pouvez afficher en anglais uniquement si vous le voulez; le gouvernement, dans le fond, ne vous poursuivra pas. Le gouvernement va vous amnistier en temps et lieu. Le gouvernement ne tient pas à la francisation du Québec. Le gouvernement considère que ce Québec devrait être comme l'Ontario, une province bilingue. C'est cela, dans le for intérieur de beaucoup de députés libéraux, la position qui devrait être la politique du gouvernement du Québec et de l'État québécois.

Ils n'ont pas le courage de le dire. La députée de Jacques-Cartier, dans son for intérieur, ce qu'elle souhaite et ce qu'elle désire, ce qu'elle réclame, c'est un Québec bilingue, officiellement bilingue, tout ce qui est de plus bilingue dans toutes ses manifestations extérieures. C'est ça que l'on réclame, et l'on ne voudrait pas qu'on remette en question la politique linguistique au moment où on fait un débat sur la langue. On voudrait nous faire croire que ce projet de loi est un petit projet de loi mineur, qui ne mérite pas l'intérêt et l'attention de la vice-première ministre responsable de la langue française, de la Charte de la langue française. On voudrait nous faire croire que ce petit projet ne mérite pas l'intérêt et l'attention du premier ministre, également, qui, pourtant, à une émission de radio, s'est mis les deux pieds dans le plat quand il a livré le fond de sa pensée alors que les micros étaient encore ouverts et que l'enregistreuse continuait de fonctionner. Il a dit à son bon ami Pierre Bourgault: Bien, écoute, Pierre, c'est un sacré casse-tête, la langue. Je suis "poigné" avec cela. Sans doute, un peu plus tard,

quand ils étaient dans l'ascenceur et que son bon ami le reconduisait à la porte, il a dû ajouter: Je suis "poigné" avec des gens dans mon caucus qui veulent un Québec bilingue, qui ont beaucoup d'influence dans mon caucus, à qui je dois probablement une bonne partie de ma majorité ministérielle et qui ont été pendant dix ans dans l'Opposition parce qu'eux ont des comtés sûrs et qui étaient fortement représentés dans la quarantaine de députés de l'équipe libérale de l'Opposition. Je ne peux pas faire autrement que de tenir compte de leur opinion, de leur volonté et des espoirs qu'ils entretiennent depuis tant d'années.

À cet égard, M. le Président, ce qu'on pense, c'est que le premier ministre et la vice-première ministre, doivent venir à cette commission, au minimum la vice-première ministre parce que c'est elle qui est responsable de l'application de la Charte de la langue française, nous dire quelle est maintenant la politique linguistique officielle du gouvernement libéral du Québec, Bourrassa II, du gouvernement Bourrassa version II, M. le Président. Quelle est la politique de ce gouvernement en matière linguistique? Pourquoi l'Opposition officielle, l'Opposition du Parti québécois accepterait-elle de bonne grâce le projet de loi qui nous est présenté par le ministre de l'Éducation? Pourquoi? Pourquoi l'accepterait-on alors qu'on n'a même pas de balises claires à l'égard des intentions du gouvernement en matière linguistique? On ne sait pas où le gouvernement veut aller. On s'en doute et on craint...

Une voix: Nous autres, on le sait.

M. Charbonneau: Vous n'avez pas l'air de le savoir, M. le Président, et, si vous le savez et si c'est dans le sens qu'on appréhende, vous allez nous donner encore plus d'énergie pour faire la bataille rangée qu'on vous livre depuis quelques jours. M. le Président, cette bataille rangée est au coeur de nos engagements politiques. Il n'y a probablement aucun d'entre nous de ce côté-ci de la table qui serait en politique avec autant de passion et d'intérêt si cette question n'était pas au coeur de nos engagements comme parti politique et comme Québécois.

M. le Président, on voudrait que l'on fasse au ministre de l'Éducation un tapis rouge de facilité pour adopter ce projet de loi, qu'on ne fasse aucune obstruction, qu'on ne lui demande d'entendre personne, qu'on bâcle l'adoption de ce projet de loi en deux temps, trois mouvements, qu'on se contente de prendre la parole du ministre sans entendre les conseillers qui lui ont fait un rapport détaillé, sans entendre les commissions scolaires qui sont partie prenante depuis des années à ce système d'illégalité et de désobéissance civile, sans entendre les gens qui ont fait des études sur la situation linguistique du Québec.

M. le Président, trouvez-vous cela normal? Est-ce normal? M. le Président, si j'étais le moindrement vicieux, le moindrement vicieux, je vous rappellerais certains de vos propres discours - il n'y a pas si longtemps, vous n'êtes pas tellement vieux -je vous rappellerais vos propres discours, M. le Président, qui vous feraient rougir -maintenant une couleur qui vous va mieux qu'à une certaine époque - et je suis convaincu, M. le Président, que, cette rougeur, vous ne l'aimeriez pas tellement. Des discours qui ressemblaient étrangement à ceux que je tiens ce soir, qui étaient des discours de conviction autour de la Charte de la langue française, de l'importance de cette charte, de l'importance aussi de donner des messages clairs à l'ensemble de la population du Québec et en particulier de donner des messages clairs aux nouveaux Québécois, aux nouveaux concitoyens et concitoyennes qui arrivent ici et qui choisissent de faire leur vie ici. Nous voulons que ces gens comprennent que c'est en français que cela se passe. C'était le message de la loi 101. Le problème, M. le Président, c'est que le projet de loi qui est devant nous affaiblit ce message, tout comme les comportements que j'ai dénoncés et que je vais continuer de dénoncer parce qu'ils sont tellement aberrants, comportements qui, M. le Président, sont également autant de messages d'une absence de volonté du gouvernement libéral de faire du Québec une terre française, de protéger aussi le sol québécois et la patrie québécoise et de lui conserver ce caractère français. On est 5 % en Amérique du Nord. Est-ce trop demander que, quelles que soient les formations politiques au Québec, au moins, on s'entende sur le problème que nous aurons toujours et que nous avons toujours eu de la situation délicate de notre langue et de notre identité culturelle et nationale parce que c'est cela, une nation? C'est un groupe humain qui a une culture, une langue propre, des valeurs, des traditions, des moeurs. C'est cela, M. le Président, un peuple et c'est ce que nous sommes au Québec, très majoritairement. Le seul endroit au monde où on est majoritaire, c'est au Québec. Non seulement c'est le seul endroit au monde où on est majoritaire, mais nous sommes, M. le Président, et nous existons dans un territoire continental où on est en minorité et très fortement en minorité.

On ne voudrait pas, M. le Président, que l'on fasse la bataille que l'on fait. On ne voudrait pas aujourd'hui entendre la vice-première ministre, elle qui est, avec le premier ministre du Québec, l'autorité suprême, majeure du gouvernement à l'égard de la politique linguistique.

Je remercie le député, M. le Président, de m'entretenir, de m'aider finalement à développer mon argumentation, mais je peux le rassurer. La passion qui m'anime à l'égard de la question linguistique et de la question nationale - je pourrais me passer de ses soufflements - je peux lui garantir que je l'aurais des semaines durant avec autant de conviction que j'en mets pour essayer de convaincre, si c'est possible de le faire, les députés libéraux de l'importance et de la valeur de la motion d'amendement que je présente.

M. le Président, cette motion que je présente, c'est la dernière chance que le gouvernement a de donner des explications plus complètes que celles que le ministre de l'Éducation nous a données. C'est d'autant plus la dernière chance qu'on vient de nous informer que nous avons au-dessus de notre tête une épée de Damoclès qui va tomber demain et qui va nous empêcher de poursuivre l'étude complète et détaillée du projet de loi 58. On voudrait, avant l'adoption de ce projet de loi, nous empêcher d'entendre le gouvernement sur l'ensemble de ses orientations à l'égard de la question linguistique. Cela n'a aucun bon sens. Cela n'a strictement aucun bon sens. On pourrait penser que, finalement, toute la parlotte que l'on fait, tous les propos que l'on tient ici ne sont simplement que des propos qui sont tenus dans le cadre d'une tactique parlementaire. M. le Président, on ne se cache pas qu'actuellement, on mène une bataille rangée contre le gouvernement et on utilise tous les moyens qui sont à notre disposition pour empêcher le projet de loi d'être adopté et pour amener le gouvernement à la raison. Néanmoins, dans les arguments qu'on utilise, dans les motions qu'on a présentées et qu'on présente actuellement, aucune de ces motions n'est une motion sans valeur avec le projet de loi qui est devant nous. Aucune de ces motions ne peut être qualifiée de motion mineure, sans signification, sans valeur, sans rapport avec le projet de loi.

Au contraire, nous avons pris la précaution et nous nous sommes faits un point d'honneur, M. le Président, de présenter des motions d'amendement, des motions principales, des motions de sous-amendements qui toutes, les unes comme les autres, étaient non seulement pertinentes, mais fondées à l'égard de la stricte morale politique. (22 h 15)

Je sais que le ministre de l'Éducation affectionne ce genre de discours, ce genre de propos, lui qui a une haute moralité et pour qui la chose politique est sérieuse, importante et fondamentale. Comment penser que le ministre de l'Éducation accepte de bâillonner l'Opposition sur un projet de loi aussi fondamental sans qu'on ait eu l'occasion d'entendre un seul organisme concerné, sans qu'on ait eu l'occasion d'entendre même les conseillers qui lui ont fait le rapport qu'il nous a présenté, qu'on a maintenant avec nous, sans qu'on ait eu la possibilité de faire ce que lui a fait, c'est-à-dire aller plus loin dans la discussion avec l'auteur ou les auteurs du rapport?

Je ne peux comprendre que le ministre de l'Éducation va voter, va parler demain, de l'autre côté, en nous empêchant d'entendre la vice-première ministre et en nous empêchant de savoir du gouvernement quelle est sa politique linguistique. A quoi doit-on s'attendre après avoir adopté le projet de loi 58 en matière linguistique? Qu'est-ce qui va nous arriver, de ce gouvernement? Quel autre projet de loi va nous arriver à l'égard de la Charte de la langue française? Mme la députée de Groulx vient de me dire: Rien. Si c'était vrai, si on avait la certitude que c'est vrai... Ce qu'on pense, c'est qu'à l'automne on va nous arriver avec un autre projet de loi, celui-là, pour modifier la Charte de la langue française à l'égard de l'affichage.

Bientôt, on nous introduira d'autres modifications pour introduire la clause Canada, pour modifier encore une fois la Charte de la langue française à l'égard de la politique sur la langue d'enseignement et la députée de Groulx, naîve sans doute, parce que nouvelle même à l'intérieur du Parti libéral...

Mme Bleau: Cela fait vingt ans que je fais de la politique!

M. Charbonneau: Naïve... Malheureusement, je ne peux pas voir comment on peut qualifier autrement la députée de Groulx qui vient de nous dire qu'après ce projet de loi il n'y aura rien d'autre. Voyons donc! On n'a qu'à relire les déclarations de ses collègues députés et de ses collègues ministres pour savoir qu'il y a au moins deux autres projets de loi qui nous pendent au bout du nez et qui vont tomber, à un moment donné, de cette chaire gouvernementale qu'est le Parti libéral au pouvoir, version II, du gouvernement Bourassa. Et on va nous arriver avec d'autres projets de loi en matière linguistique.

Ce qu'on veut, c'est une idée claire de la politique linguistique globale. Quelle est l'orientation du Parti libéral? Qu'est-ce qui nous attend au cours des prochaines années comme Québécois et Québécoises en matière linguistique? On ne veut pas une politique linguistique livrée au compte-gouttes, selon les sondages et en laissant les Québécois croire qu'il n'y a pas de problème à l'égard de la francisation. Je ne suis pas surpris que les gens nous disent dans les sondages qu'ils seraient prêts maintenant à revenir à des situations qui existaient avant la loi 101. Les gens, au Québec, ont l'impression qu'il n'y a

plus de problème et que la sécurité de la langue française est assurée. C'est la raison pour laquelle on voulait entendre des spécialistes, pour savoir si c'est si vrai que cela et pour savoir si cette situation de dangerosité è l'égard de notre langue...

Une voix: Ce n'est pas français, dangerosité.

M. Charbonneau: Oui, c'est français.

Une voix: Non, cherche dans le dictionnaire.

M. Charbonneau: ... pour savoir si cette situation de dangerosité qui affecte, selon notre prétention, notre langue au Québec, la langue principale, la langue officielle, si cette situation justifie que le gouvernement nous présente le projet de loi qu'il nous présente et si cette situation justifie le gouvernement de nous arriver, dans quelques mois, avec d'autres projets de loi en matière linguistique.

Je pense que la motion que je vous ai présentée et qui a été acceptée, non seulement doit être Teçue pour discussion, mais elle doit être reçue par le gouvernement avec ouverture d'esprit, avec compréhension, avec la conviction du côté ministériel qu'il est normal que l'on donne des explications à l'ensemble des Québécois en le faisant publiquement, è l'occasion d'une commission parlementaire où le gouvernement, la vice-première ministre pourra nous donner plus d'éléments d'information sur les intentions du gouvernement.

M. le Président, je pense que cette demande, je le rappelle... Je voudrais demander à la députée de Groulx de ne pas trop me perturber. Quand il est 22 h 20 et que l'on fait la bataille que l'on fait, qui est difficile, il faut avoir un minimum de concentration. Une bonne tactique, qu'elle a rapidement comprise, la députée de Groulx, c'est d'essayer de déconcentrer ses vis-à-vis mais mes dix années d'expérience vont jouer en ma faveur et ne permettront pas à la députée de Groulx d'arriver à me déconcentrer suffisamment pour ne pas lui dire qu'elle est maintenant, elle qui se vantait d'être dans le Parti libéral et de faire de la politique depuis 20 ans, qu'elle est dans un parti qui a encouragé l'illégalité et qui continue de l'encourager à l'égard de la langue d'affichage.

Je voudrais que le ministre de l'Éducation soit assis à son siège pour que je lui rappelle que les interventions de la députée de Jacques-Cartier dans son comté, dans les comtés du West Island de Montréal ont eu comme résultat clair et net de donner des messages pendant des années et des années aux gens qui étaient tentés d'emprunter l'illégalité. Écoutez il n'y a pas de problème, allez-y! Contournez la loi. Quand on sera au pouvoir on va vous amnistier.

M. Ryan: Question de règlement.

Le Président (M. Thérien): M. le député de Verchères, question de règlement.

M. Ryan: Je ne pense pas qu'il soit dans les moeurs de cette Assemblée de laisser se propager des actes de dénigrement collectif. Je suis sûr que le député de Verchères sera de mon avis qu'il attaque toute une collectivité, le West Island. J'ai des nouvelles pour lui. Les "illégaux", c'est beaucoup plus dans le Nord-Est de Montréal que dans le West Island. D'accord?

Le Président (M. Thérien): M. le député, je voudrais...

M. Charbonneau: M. le Président, c'est la raison pour laquelle... Et le ministre...

M. Ryan: Vous autres, vous ne savez pas où ils sont, vous avez été neuf ans et vous n'avez jamais été capables de les trouver.

M. Charbonneau: J'ai déjà été dans le West Island et je passe régulièrement par le West Island pour aller même plus loin vers l'Outaouais où réside ma belle-famille.

M. le Président, le ministre, par sa brève intervention, vient de nous confirmer que nous avions raison de demander aux commissions scolaires du West Island de venir devant nous, peut-être pour nous expliquer que le problème était moins grave dans leur commission scolaire. Oui. Mais encore aurait-il fallu que nous les entendions, ces commissions scolaires et ces représentants du West Island.

M. Ryan: On peut tout vous dire ça.

M. Charbonneau: Oui, mais je préfère que les principaux intéressés viennent nous le dire eux-mêmes. Le député d'Argenteuil, alors que j'étais un peu plus jeune, que j'avais moins d'expérience, alors qu'il avait devant lui un jeune homme encore relativement vert sur bien des sujets, lui a appris à se méfier. C'est le député d'Argenteuil qui m'a appris à me méfier, lui qui a corrigé de nombreux de mes textes, avec lequel j'ai dû négocier, parfois à la virgule près, pour que mes articles puissent être publiés le plus intégralement possible dans le Devoir. Il me faisait souvent le reproche: Sur tel élément vous n'avez pas assez vérifié. Vous auriez dû aller aux sources plus que ça. Je reprenais mon papier, je retournais faire mes devoirs de jeune journaliste.

Aujourd'hui ce qu'on dit au ministre,

c'est qu'il se comporte comme le député de Verchères lorsqu'il était jeune journaliste, c'est-à-dire pas toujours en allant faire toutes les vérifications qui s'imposent. C'est pour ça qu'on voulait, au cours des derniers jours, lui offrir l'occasion d'entendre toutes les questions de la bouche des principaux intéressés.

Je voudrais faire un dernier appel au ministre de l'Éducation. Il a le pouvoir politique actuellement de faire en sorte que nous puissions entendre la vice-première ministre et responsable de la Charte de la langue française. J'ai de la suite dans les idées, vous voyez, je ne perds pas mon fil. Ah! je ne l'avais pas oublié. Je ne l'avais d'autant moins oublié, M. le Président, que je sais l'influence qu'a le député d'Argenteuil dans le gouvernement. Peut-être pas autant qu'il aurait voulu en avoir mais il lui en reste encore suffisamment...

Une voix: N'en mets pas plus que le client en demandel

M. Charbonneau: ...pour convaincre la vice-première ministre de se joindre à nous. Si elle acceptait, peut-être serions-nous tentés de lui donner le droit de vote que la motion ne lui donne pas. Peut-être qu'un de mes collègues serait prêt à faire un amendement à ma proposition pour lui donner le droit de vote, M. le Président. Mais ce que nous voulons surtout lui donner, c'est le droit de parole autour de cette table. Nous voulons lui donner l'occasion, et je le redis très sérieusement au ministre de l'Éducation, elle qui parle au nom du premier ministre, elle qui est responsable de la Charte de la langue française, de nous dire où s'en va le gouvernement en matière linguistique. Nous voulons lui donner l'occasion de nous situer dans son contexte d'intentions politiques le projet de loi 58. Nous voulons lui donner l'occasion de nous donner des assurances ou encore de confirmer nos doutes, nos craintes. Je ne crois pas que cette demande soit exagérée. Je le crois d'autant moins que le ministre de l'Éducation a usé de son influence pour que ses collègues refusent toutes les demandes que nous avons présentées jusqu'à maintenant. Si le ministre avait été le moindrement sérieux, s'il avait relu les discours qu'il nous tenait lorsqu'il était dans l'Opposition... Je me rappelle le faciès que le député d'Argenteuil avait lorsqu'il nous faisait la morale, lorsqu'il était de ce côté-ci. Il avait à peu près le même faciès que tout à l'heure lorsqu'il s'est laissé aller à l'un de ses penchants naturels qui est d'embarquer avec passion dans la discussion. Je me rappelle de ce faciès moralisateur qui...

Une voix: Purpurin!

M. Charbonneau: ...faisait la leçon au gouvernement et qui disait: Écoutez, c'est complètement inacceptable. Inacceptable! Et le député, avec la mimique qu'on lui connaît bien, disait: C'est complètement inacceptable et je vais défendre cela avec toute la vigueur que je puis avoir, toute la vigueur et c'est même-Des voix: Bravo! Bravo!

M. Charbonneau: M. le Président, je vais vous lire la phrase que le député d'Argenteuil nous livrait...

Une voix: ...

M. Charbonneau: Je n'en demandais pas tant du côté ministériel.

M. Ryan: Non, mais...

M. Charbonneau: Je demande au ministre de m'écouter, parce que je vais le citer au texte: Nous allons contester cette motion vigoureusement, même genre de motion que nous avons de l'autre côté, au salon bleu, qui nous attend demain, M. le Président.

M. le Président, vous me faites signe qu'il me reste uniquement deux minutes. C'est dommage. Je crois que j'aurais encore besoin d'au moins une autre demi-heure.

Une voix: Ah non!

M. Charbonneau: Une autre demi-heure...

Des voix: Hal Ha!

M. Charbonneau: ...pour rappeler au député d'Argenteuil, moralisateur s'il en est un... Je n'ai rien contre la morale ni contre ceux qui la font ou qui l'invoquent. Mais, en politique, non seulement faut-il être moralisateur, mais il faut être moral lorsqu'on se trouve en position d'agir avec le pouvoir. Je demande simplement au ministre de l'Éducation de relire sa prose, de relire ses interventions, de se rappeler le contexte dans lequel il les faisait, la passion qu'il mettait pour les présenter et les défendre, les arguments qu'il invoquait. Je suis convaincu que, dans son for intérieur, de deux choses l'une, ou le député d'Argenteuil jouait habilement la comédie - ce qui m'étonnerait fort - ou bien...

Le Président (M. Thérien): M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: Je vais conclure, M. le Président.

Le Président (M. Thérien): J'ai

mentionné deux minutes et non cinq.

M. Charbonneau: II ne m'en reste presque plus, si je comprends bien.

Le Président (M. Thérien): C'est cela. (22 h 30)

M. Charbonneau: Donc, je conclus en disant: Le député d'Argenteuil, ministre de l'Éducation, en faisant cet exercice, j'en suis convaincu, aura mal à sa conscience et, peut-être saura-t-il trouver dans cette conscience suffisamment d'énergie pour se motiver lui-même d'abord, puis motiver ses collègues d'accepter la motion tout plein de bon sens que je lui présente, pour laquelle je plaide depuis maintenant 30 minutes et pour laquelle je pourrais plaider encore très longtemps si le règlement me le permettait. M. le Président, merci.

Le Président (M. Thérien): Je céderai maintenant la parole au député de Sauvé.

M. Parent (Sauvé): Une question de directive, M. le Président. Étant donné l'envolée grandiloquente du député de Verchères, je serais prêt à lui céder mon dix minutes s'il veut continuer. Si c'est permis, M. le Président, généreusement je vais offrir au député de Verchères qu'il utilise mon temps de dix minutes et je m'abstiendrai d'intervenir.

M. Charbonneau: Est-ce une offre que je ne peux pas refuser?

M. Parent (Sauvé): On n'est pas dans la pègre, nous autres.

Le Président (M. Thérien): Je reconnais maintenant le député de Terrebonne.

Une voix: Ah! mon Dieu. M. Yves Blais

M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Appelez-moi député de Terrebonne et non "mon Dieu". Comme tout le monde.

M. le Président, cette motion devant nous... Mais avant, j'aurais tout simplement une petite remarque à faire sur certaines remarques du ministre de l'Éducation qui nous accuse d'être peu sérieux, en invoquant que nous voulons recevoir des gens ici, que nous voulons faire éclairer la commission tout entière par des spécialistes, et qui dit être immédiatement prêt à passer à l'article 1.

Nous ne sommes pas, nous, en fait, pour ce projet de loi. C'est pour cela que si vous nous demandez de faire complètement volte-face, laissez-nous au moins inviter des gens qui pourraient plaider en faveur de cet article 1 que vous voulez tellement étudier. Peut-être des spécialistes venant, accepterions-nous de passer à l'article 1. C'est parce que nous sommes sérieux, justement, que nous demandons que des gens viennent ici, des spécialistes, soit de la commission scolaire soit d'ailleurs.

Nous réclamons Mme la vice-première ministre qui, dans les circonstances, pourrait être un atout formidable pour nous éclairer. Autant j'ai confiance à la qualité intellectuelle du ministre de l'Éducation, jusqu'à preuve du contraire, j'ai une grande confiance envers la vice-première ministre. Comme cette confiance existe, j'aimerais bien qu'elle vienne à cette commission nous éclairer, parce qu'on a beaucoup de questions à lui poser. C'est une personne pour laquelle vous ne me direz pas qu'elle ne prend pas ses responsabilités. Je reconnais cette dame comme une femme très intelligente; on m'accuse souvent, à l'Opposition, de parler des grandes qualités des gens au pouvoir ou du temps où ils étaient dans l'Opposition. Je le fais comme cela parce que j'y crois. Cette dame, la vice-première ministre, que je respecte intellectuellement et qui prend ses responsabilités, à cause de ces deux choses, j'aimerais qu'elle vienne ici pour nous dire - avec ces deux grandes qualités que nous lui reconnaissons - si, vis-à-vis le Conseil de la langue française qui est sous sa juridiction, qui dépend de son autorité, elle approuve ou désapprouve les positions que le Conseil de la langue française prend devant l'amnistie des "illégaux", amnistie que nous nous apprêterions à faire si nous tombions immédiatement à l'article 1. Comme c'est elle, Mme la vice-première ministre qui est responsable du Conseil de la langue française, on sait que le président du Conseil de la langue française, M. Jean Martucci considère mauvaise l'idée proposée par le comité Rondeau et endossée par le ministre de l'Éducation voulant que l'on accorde l'amnistie aux élèves illégaux et clandestins. Comme Mme la députée de Chomedey est la supérieure de ce M. Jean Martucci, président du Conseil de la langue française, j'aimerais bien voir si elle approuve ce que cet homme dit ou si elle le désapprouve. Quand un Parlement ou un gouvernement nomme des gens pour conseiller le gouvernement sur la langue française, c'est que, normalement, on croit à l'honnêteté intellectuelle de ces gens que l'on nomme comme conseillers.

Le Conseil de la langue française est certainement un conseil qui a sa place au Québec et les avis que le Conseil de la langue française donne autant au gouvernement et à l'Opposition qu'à l'ensemble de la population, ce sont des conseils qui doivent être écoutés et pris au sérieux.

Comme la vice-première ministre est la supérieure immédiate des gens du Conseil de la langue française, j'aimerais qu'elle vienne

nous dire si elle partage ce que le Conseil de la langue française nous dit au sujet du projet de loi qu'on est sur le point d'étudier. Cela prend là toute l'importance. Voyez l'importance de la demande de recevoir Mme la vice-première ministre.

Deuxièmement, le comité de travail Rondeau mis sur pied par le ministre de l'Éducation, M. Claude Ryan, suggère d'accorder aux "illégaux", à leurs frères et soeurs et descendants, le droit de fréquenter l'école anglaise. Le président nous dit: Je suis assez gêné. Le président du Conseil de la langue française est celui qui conseille le gouvernement sur les actes qu'il a à poser, actes qui concernent la langue française. Cette loi que nous faisons regarde, je crois, la langue française.

Donc, la vice-première ministre étant la supérieure du Conseil de la langue française, est-ce qu'elle se sentirait aussi gênée? Son absence de cette commission, son absence remarquée d'ailleurs, ne signifierait-elle pas - excusez-moi, j'espère que les gens qui écrivent cela en bas... - que cette dame est gênée de cette loi ou devant cette loi, ou qu'elle est prise entre l'arbre et l'écorce? Le comité qui lui conseille ses agissements devant la langue française et la loi que le ministre de l'Education met devant elle, il y a incompatibilité entre les deux parties avec qui elle travaille. Prise entre deux feux, la solidarité ministérielle et son autorité devant le Conseil de la langue française qui lui dit qu'elle ne devrait pas approuver ce projet de loi, cela la met dans une situation qui expliquerait son absence devant cette commission. Ou, par solidarité ministérielle, elle n'ose pas venir nous dire ici qu'elle est contre, qu'elle est plutôt en faveur des conseils que lui dictent ceux qui ont été nommés spécifiquement par le gouvernement pour conseiller ledit gouvernement dans ses agissements.

M. Martucci dit: Je suis assez gêné que les descendants des "illégaux" profitent aussi de l'amnistie accordée. On descend toujours de quelqu'un. Je me pique à dire que je remonte des Français. J'aime mieux remonter de quelqu'un que de descendre. C'est entendu que cela fait plus noble. On dit: Vaut mieux remonter d'un forgeron que de descendre d'un roi. Je sais cela. Je pense que c'est même Victor Hugo qui, il était environ 7 h 10 un matin, s'est levé et a dit! Je ne suis pas invité à la cour parce que je ne descends pas d'un noble, ni d'un baron, ni d'une baronne, mais je suis heureux d'être dans ma cour et de remonter d'un forgeron. Vous voyez, c'est beaucoup plus noble parfois de remonter que de descendre de quelqu'un. C'est terrible, on remonte tous de quelqu'un quand on veut et on vient tous de l'extérieur. Je disais tantôt: Je viens de France, d'autres viennent... Cela fait longtemps que je suis arrivé. Il y en a qui viennent, cela ne fait pas longtemps qu'ils sont arrivés. Le peuple québécois est tellement accueillant que beaucoup de ces nouveaux arrivés sont déjà députés. Je ne sais pas si je m'en allais en Hollande, ou en Angleterre, ou en Italie et si, dix ou quinze jours après...

Le Président (M. Thérien): Je vous inviterais, M. le député, à conclure, s'il vous plaît!

M. Blais: ...je serais élu député. Je ne sais pas.

Le Président (M. Thérien): M. te député de Terrebonne, il vous reste une minute, je vous inviterais à conclure.

M. Blais: Juste une minute?

Le Président (M. Thérien): Oui. Vous avez un droit de parole de dix minutes.

M. Blais: C'est que le temps passe vite. Il ne me reste qu'une minute!

Une voix: M. le Président.

Le Président (M. Thérien): Est-ce que c'est une question de règlement?

M. Khelfa: Oui, M. le Président. J'aimerais que le député de, je ne sais pas quel comté il est...

M. Blais: Terrebonne.

M. Khelfa: Terrebonne, j'espère que la terre est bonne chez vous. J'espère que vous pouvez expliquer ce que vous venez de dire, l'insinuation que vous avez mentionnée pour...

Le Président (M. Thérien): M. le député de Richelieu...

M. Khelfa: C'est une question de privilège.

Le Président (M. Thérien): ...ce n'est pas une question de règlement.

M. Khelfa: II n'y en a pas. Merci.

Le Président (M. Thérien): M. le député de Terrebonne.

M. Blais: M. le Président, j'espère que personne a pris cela comme une insinuation malveillante. Je dis tout simplement que le peuple québécois est très accueillant et que, après quelques années ici, quelqu'un peut même être élu député par une majorité dans un comté. N'est-ce pas une preuve évidente que nous sommes loin de la xénophobie que vous me prêtez en m'attribuant une

insinuation? Je ne veux pas. Je dis que nous remontons tous de quelqu'un et que nous ne descendons de personne. Je ne voudrais pas qu'on descende les paroles que j'ai dites, mais qu'on les remonte au niveau où je voulais que vous les comprissiez. Je vous remercie beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Thérien): Merci, M. le député de Terrebonne. Du côté des ministériels, est-ce que quelqu'un a l'intention de s'exprimer? Non. Je reconnais maintenant le député de Saint-Jacques pour dix minutes.

M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, je suis heureux que mon collègue de Verchères ait parlé avant moi puisqu'il a une connaissance de notre interlocuteur principal que, malheureusement, je n'ai pas, mais qui va par contre me servir de guide sans aucun doute dans les échanges futurs que j'aurai avec lui.

Entendu que je me suis laissé prendre moi aussi au piège des yeux méchants du doigt accusateur, de la phrase assassine qu'il sait pratiquer avec un art consommé, un verbe très haut d'ailleurs. Le ministre auquel je fais allusion et cela, c'est un premier ministre qui le disait: II n'y a qu'un ministre et c'est le premier ministre. Bien entendu, il ne faut quand même pas rêver en couleur. Même si on a de la naïveté, Mme la députée de Groulx, j'ai toujours dit qu'il fallait conserver un peu de naïveté sinon on risquait de devenir complètement vicieux.

Donc, sans garder de la naïveté, M. le Président, je sais que le premier ministre ne viendra pas...

Le Président (M. Thérien): M. le député de Saint-Jacques, s'il vous plaît, je vous inviterais, si possible, à parler de la pertinence de l'amendement plutôt que de parler des autres...

M. Boulerice: Si vous m'aviez laissé continuer, M. le Président...

Le Président (M. Thérien): Je vais vous laisser continuer, mais je vous mets en garde. M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: ...vous auriez vu que, de toute évidence, j'étais, M. le Président, dans la pertinence parce que je disais: Je n'ai pas la naïveté de croire que le principal responsable, le premier ministre, viendra. Il préfère faire ses déclarations par cassette, sauf que j'appuie cette proposition en ce sens de faire venir la vice-première ministre. Nonobstant le respect craintif que veut m'inculquer le ministre de l'Éducation avec -comme je le disais - son oeil méchant, son doigt accusateur, sa phrase assassine, son verbe haut, il n'est responsable que d'un seul volet de la loi, M. le Président. Il y a bien d'autres volets de la loi qui existent, la langue des tribunaux, la langue de l'administration, la langue de la législation et tout, la langue du travail, la langue de l'affichage. Cette partie que nous étudions ce soir n'est qu'une partie d'un tout qui s'appelle la charte.

Il aurait été normal pour nous d'entendre la vice-première ministre, principale responsable de la Charte de la langue française, venir en quelque sorte nous donner des garanties et peut-être même des espoirs. Parce que cette loi, comprenez notre inquiétude, c'est la première loi du Québec. Sans vouloir amplifier, mais tout en étant quand même près de la vérité, c'est notre Magna Carta, cette Charte de la langue française au Québec. (22 h 45)

J'aurais aimé, dans des perspectives générales, puisque nous sommes au particulier avec celle-là, avant de considérer la particulière, pouvoir aborder, avec la ministre responsable de l'application de la Charte de langue française des perspectives générales qui sont les suivantes: Est-ce que, dans le cadre de l'État canadien qui reconnaît l'égalité formelle des langues anglaise et française, il convient de promouvoir le principe suivant - et le ministre m'écoute attentivement, j'en suis certain - que le français doit, dans les faits, acquérir au Québec le même statut juridique, économique et sociologique que l'anglais dans le reste du Canada? De promouvoir l'égalité des droits et des chances pour l'unilingue français au Québec comme pour l'unilingue anglais au Canada? De promouvoir la reconnaissance, par les lois fédérales et québécoises, que les francophones québécois constituent une minorité linguistique qui a le droit, y compris par des droits linguistiques constitutionnels, d'être protégée comme telle dans le cadre canadien et nord-américain, compte tenu, d'ailleurs, de notre fragilité démographique?

J'aurais aimé l'entendre avancer le principe que la minorité franco-québécoise doit recevoir, au Canada, au moins les mêmes garanties constitutionnelles que les autres minorités francophones dans le monde, à l'exemple de la Belgique et de la Suisse. Avant de regarder le particulier, peut-être m'aurait-elle permis de voir dans quelle mesure elle va promouvoir une révision des lois québécoises et canadiennes en général et ceci, en faveur d'un usage exclusif ou non du français au Québec et sa volonté d'intervenir sur tout projet de loi ou sur toute entente internationale ou le statut de la langue française est en cause et bien d'autres perspectives générales dont la dernière, d'ailleurs, de faire prévaloir que les droits

linguistiques des Franco-Québécois ne sont pas contradictoires par rapport aux droits individuels traditionnels, que, au contraire, ceux-ci doivent pouvoir être utilisés pour la défense des usagers du français. Par contre, les droits linguistiques des Franco-Québécois doivent avoir un statut spécial par rapport à la charte québécoise des droits et libertés, tout comme les droits linguistiques des Anglo-Québécois ont un statut spécial par rapport aux droits individuels, dans la charte canadienne des droits.

C'est malheureux, je n'aie pas autant de temps que mon collègue, je n'ai pas les trente minutes, à moins qu'un de mes collègues ne m'en sorte. Je suis également, M. le Président, de cette génération de Québécois qui commencent à en avoir ras le bol d'être accusés d'à peu près tous les maux parce que, dans ce propre pays, après avoir vécu des années de mépris, on s'est finalement donné une loi qui protège notre langue, on s'est donné des droits et on demande qu'ils soient respectés. On nous traite d'à peu près n'importe quoi. Mon collègue, député de Richelieu, a failli tomber dans l'excès de traiter de raciste... J'aimerais vous donner, M. le député de Richelieu, un petit cours d'histoire.

Ce fut, dans le Parlement du Québec, le premier Parlement de type britannique, que fut élu un Québécois de religion juive et le Gouverneur général anglais de l'époque l'a fait destituer trois fois parce qu'il ne voulait pas de député juif dans le Parlement québécois qui est un Parlement de type britannique. C'est grâce à l'obstination de ces bons "canayens" pure laine de Trois-Rivières que Samuel Hart a pu finalement siéger au Parlement québécois. II y a d'ailleurs une plaque qui nous le rappelle. Alors, quant à la tolérance des Québécois face aux étrangers, on va repasser avant de me faire des leçons là-dessus, monsieur. Ma famille, d'ailleurs, en est également un autre exemple éloquent. D'ailleurs, nos deux familles politiques accueillent - n'est-ce-pas? - des Johnson. C'est une autre preuve que cette chose-là peut être. Ce que je n'accepte pas, par contre, M. le Président, c'est quand je vois que les gens qu'on accueille ici viennent transgresser les lois que nous nous sommes données. Je lis Rodolfo Amedeo qui était le président de l'Association italienne des travailleurs immigrés et familles qui disait: La communauté anglaise, mais aussi les notables de la communauté italienne locale, nous ont manipulés. On encourageait les parents à défier la loi, prétendant que tout changerait avec les libéraux au pouvoir. Mais la réélection du Parti québécois est venue brouiller les cartes. C'était pour 1981. Là, on est en train de retasser les cartes peut-être en les descendant. Je m'excuse, oui?

M. Cusano: Est-ce que je peux vous demander le nom de la personne que vous avez citée. Je ne vous ai pas entendu.

M. Boulerice: Rodolpho Amedeo. M. Cusano: D'accord.

Le Président (M. Thérien): Je vous demanderais de conclure, M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: D'accord. Je conclus, M. le Président, en disant que, nonbostant le respect que j'ai pour le ministre, amusé de retrouver quelquefois des comportements de ce bon vieux préfet de discipline, avec qui j'ai conservé d'excellentes relations en ma période de collège, qui me réprimandait de la même façon, j'aimerais entendre la vice-première ministre responsable de l'application de cette entité qui est la Charte de la langue française et, avant qu'on aille dans le particulier, comme je vous le disais, qu'elle nous indique, de façon précise, quelles sont les orientations générales que ce gouvernement entend imprégner - peu importe le terme, à 22 h 25 - à cette Charte de la langue française au Québec.

Vous devez comprendre la méfiance que nous avons de vouloir traiter un sujet comme celui-là à la pièce. Si vous deviez aller...

Le Président (M. Thérien): M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: Je termine, M. le Président...

Le Président (M. Thérien): C'est la deuxième reprise.

M. Boulerice: ...à votre invitation. Le Président (M. Thérien): Oui, oui.

M. Boulerice: Si vous deviez aller à un affaiblissement de la charte, je vous rappelle que déjà, en si peu de mois, en six mois d'élection, trois fois le peuple s'est retrouvé aux portes du Parlement, et il reviendra, M. le Président.

Le Président (M. Thérien): Merci de votre complaisance à conclure. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. À la suite de mon collègue de Saint-Jacques, je vais appuyer la motion d'amendement présentée par le député de Verchères à savoir que la vice-première ministre et ministre responsable des organismes de surveillance de la loi 101, comme députée de

Chornedey, participe à cette commission.

En effet, le parti ministériel s'est refusé, de façon systématique, à entendre quelque organisme que ce soit. J'ai eu l'occasion de le dire à quelques reprises, mais il semble important de le rappeler devant la menace de clôture des travaux de cette commission, qu'au moment où cette commission étudiait une loi, en février 1984, mes collègues ont rappelé quelques remarques plutôt sévères de la part du ministre qui reprochait au gouvernement de bâillonner cette commission parlementaire qui, au moment où elle a mis fin à ses travaux, avait siégé exactement 166 heures.

Mais, écoutez bien ce qui s'était passé. Il dit: II y a plusieurs jours que se succèdent ici les organismes qu'il a été obligé de convoquer parce qu'on a fait des pressions de toutes sortes. II a accepté - il parle du gouvernement - d'entendre pendant une semaine. Il a choisi à peu près tout ce qu'il pouvait trouver de favorable dans les quatre premières semaines. Ce qu'on lit ici, finalement, c'est que c'est cinq semaines au cours desquelles cette commission a pu, sur un projet de loi, entendre des groupes.

Le ministre, un peu plus loin, nous dit - et je trouve cela intéressant, il était alors critique: Franchement, il n'y a pas eu une commission parlementaire qui a fonctionné aussi bien que celle-ci depuis des années. Toutefois, ils en voulaient davantage. Ils convoquaient à nouveau d'autres organismes et, non contents de cela, ils voulaient s'assurer que tout le monde intervienne durant ses 20 minutes sur chacune des présentations, ce qui, à un moment donné, a forcé le gouvernement à proposer une motion de clôture des travaux.

Les propos qu'il tenait alors étaient d'une extrême sévérité. C'était important. Je me rappelle avoir lu un extrait du Journal des débats dans lequel le ministre de l'Éducation d'alors, M. Bérubé, disait ceci en commentant les propos tenus par le critique de l'Opposition: "On pourrait trouver cela drôle à entendre, un tel discours dévastateur, si l'actuel député d'Argenteuil pensait être dans l'Opposition pendant 500 ans. On comprendra que tantôt, il n'aura pas l'occasion qu'on lui serve les propos qu'il est en train, aujourd'hui, de nous servir."

Je me permets de rappeler la nature des propos que le ministre a tenus à différentes commissions parlementaires et à celle-ci, pour faire un parallèle entre ce qu'il disait là, après cinq semaines d'audience sur un projet de loi, et le discours qu'il nous tient ici: "Encore une fois, je l'affirme avec toute la vigueur possible, cette motion d'ajournement prématurée - remarquons, cinq semaines d'audience - est profondément arbitraire, autoritaire, injustifiée, antidémocratique et contraire aux règles les plus élémentaires de la courtoisie, ni plus ni moins. Mais nous sommes absolument dégoûtés de ce genre de procédure." Voilà les propos qui étaient tenus par l'actuel ministre de l'Éducation alors qu'il était dans l'Opposition.

Il me semble - j'ai eu l'occasion de le dire - qu'on a deux hommes: celui qui parle lorsqu'il est dans l'Opposition et celui qui, une fois qu'il a le pouvoir, décide qu'il est le seul maître à bord et que des conseils, il n'en a besoin de personne. D'ailleurs, on entend souvent dans son propos: Je n'ai pas de leçon à recevoir de personne. Évidemment, même pas de ceux qui pourraient venir apporter un certain éclairage sur ce projet de loi. Pourtant, on lui a démontré ici, en cette commission, qu'un certain éclairage pouvait être intéressant, puisqu'on est en train - le gouvernement, le ministre - de faire réécrire le projet de loi 30 sur la commission scolaire Joutel-Matagami.

Il serait important qu'on entende ici la députée de Chomedey, Mme Bacon, parce qu'elle est responsable des organismes de surveillance de la Charte de la langue française, la loi 101. Modifier la loi 101, adopter le projet de loi 58, c'est ce qu'on appelle une pièce législative majeure au Québec. Faire cela sans aucune forme de consultation, sauf un comité de travail ou des rencontres privées, ce n'est pas ce que j'appellerais de la transparence; et le faire à ce moment-ci, c'est inquiétant. Je vais essayer de l'exprimer, peut-être pour la troisième, quatrième ou cinquième fois, je ne le sais plus. Mais pour comprendre ce que le projet de loi 58 peut vouloir dire, il faut le situer dans le contexte de ce que j'appellerais le paysage linguistique d'aujourd'hui.

Qu'est-ce qu'on a aujourd'hui? D'abord, depuis l'élection de ce gouvernement, une mollesse évidente quant aux poursuites à l'endroit des contrevenants dans l'affichage, mollesse évidente et laisser-faire. Qu'est-ce qu'on a? La vice-première ministre et ministre responsable des organismes de surveillance de la Charte de la langue française nous annonce qu'elle va restructurer ces organismes en vue d'une plus grande rationalisation. On ne sait pas où on s'en va avec cela! On ne connaît pas ce qui va être fait avec ces organismes! On ne sait pas la nature du mandat qui va leur être confié. Comme on est en train de voir ce qui se passe avec la Commission des droits de la personne et le Comité de la protection de la jeunesse, on peut être inquiet.

Qu'est-ce qui se passe dans notre paysage linguistique? La loi 58. Qu'est-ce qui se passe? Là, je ne l'invente pas, c'est un article qui est signé par Michel David et qui paraissait dans le Soleil du 31 mai dernier: "Le relâchement atteint les usines, la francisation marque le pas". Il disait: "Après

une réelle amélioration de la situation du français dans les entreprises québécoises à la fin des années soixante-dix, un véritable relâchement est en train de s'installer dans nos usines. Et la venue d'un gouvernement qui ne cache pas sa tiédeur à l'endroit de la loi 101 semble avoir accentué cette tendance."

Michel David brosse un tableau inquiétant de la situation. C'est cela, le paysage linguistique d'aujourd'hui. Et la loi qu'on s'apprête à adopter s'inscrit à l'intérieur de ce paysage linguistique. (23 heures)

Pour continuer, la ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration répondait aujourd'hui à une question du député de Mercier qui l'interrogeait è savoir si on s'était assuré que les femmes immigrantes auraient accès à des cours de français, selon les engagements pris par ce gouvernement. C'est demandé et c'est réclamé par ces femmes. Il faut comprendre que souvent elles arrivent ici ne parlant ni l'anglais, ni le français. Comme de préférence elles vont être obligées de s'inscrire, selon les termes de la loi, dans les écoles françaises, ce qu'elles exigent et ce qu'elles demandent donc, ce sont des cours de français. On sait que le gouvernement fédéral, sans prévenir, a décidé qu'elles n'avaient plus accès aux programmes de COFI. Alors, toutes les femmes immigrantes qui sont parrainées soit par leur conjoint soit par leur famille n'ont plus accès aux cours de français. Il me semble que pour un gouvernement un peu soucieux d'accueillir et de recevoir dans la communauté francophone ces femmes immigrantes, il serait extrêmement important de leur offrir des cours de français. Non, on a un petit cours dans une garderie, nous dit-on, qui va permettre d'en accueillir quelques-unes. Voilà tout le programme!

Un dernier élément qui n'est probablement pas majeur à l'intérieur d'une politique de la langue. Cependant le ministre doit savoir de quoi je parle: on a aboli un programme d'aide à l'édition scientifique en français. C'est cela le paysage linguistique actuel.

Ainsi, on s'inquiète de voir adopter sans aucune consultation un projet de loi de cette importance, sans que les personnes aient pu, ici et de façon publique devant la presse, au vu et au su de tous, être entendues sur la perception qu'elles avaient des effets qu'aurait l'adoption de ce projet de loi. Quand on s'apprête à adopter ce projet de loi sans faire aucune consultation, il me semble que le moins qu'on puisse faire, ce serait d'entendre la ministre députée de Chomedey, responsable des organismes d'application de la Charte de la langue française.

M. le Président, je conclus sur cela.

Face à certains membres du côté ministériel et sans vouloir prendre de tels propos à à légère, je trouve cela extrêmement inquiétant. Inquiétant parce que, si c'est comme cela qu'ils entendent traiter de toutes les questions linguistiques au Québec, dans trois ans, le paysage va être beau! Merci, M. le Président.

Le Président (M. Thérien): Je reconnais maintenant le député d'Argenteuil, ministre de l'Éducation.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, je voudrais rappeler à la députée de Chicoutimi que l'objet du projet de loi 58, c'est la régularisation du statut des élèves qui sont à l'école anglaise sans y être autorisés en vertu de la loi 101 et non pas la politique linguistique générale du gouvernement. C'est pourquoi la proposition, visant à faire venir ici, à la toute dernière heure, comme si le feu était à la maison, la vice-première ministre qui est en charge de l'application de la Charte de la langue française sauf le chapitre sur la langue d'enseignement, m'apparaît impertinente et injustifiée.

À ce moment, nous avons eu un certain nombre de discussions sur le fond. Je voudrais simplement faire quelques corrections dans les souvenirs qu'a voulu évoquer la députée de Chicoutimi. Si elle voulait se donner la peine de lire au complet les comptes rendus, je vois qu'elle a fait un travail louable pour se familiariser avec les travaux antérieurs des commissions, mais elle a probablement sauté des pages, parce que des choses lui échappent.

Quand il y a eu la commission sur le projet de loi 40, la députée parlait tantôt comme si on avait invité du côté de l'Opposition une quantité d'organismes et que nous n'étions jamais satisfaits. J'ai des nouvelles pour la députée: c'est le gouvernement qui invite les organismes qui viennent témoigner devant une commission, ce n'est pas l'Opposition. Tous les organismes qui avaient été invités autour du projet de loi 40 l'avaient été par le gouvernement. Ce qui est arrivé de disgracieux à la fin des travaux, c'est qu'il y avait un soir - je me souviens très bien - les représentants de la commission scolaire régionale de l'Estrie - le député de Sherbrooke se souviendra sans doute de cet incident - qui avait été convoquée par le ministre et par le Secrétariat de la commission sur l'instruction du gouvernement. Ils se sont fait dire au moment où ils allaient se présenter à la table que c'était fini. Ils sont partis furieux, parce qu'ils étaient venus de Sherbrooke et attendaient depuis deux ou trois jours pour comparaître. On leur a dit: C'est fini, on en a assez. Le ministre est suffisamment

instruit. C'est cela qui est arrivé. Je ne voudrais pas que Mme la députée de Chicoutimi continue à se nourrir de faux souvenirs. Cela est l'histoire véridique.

À propos du projet de loi 3, une chose pourrait être intéressante pour l'Opposition. On était rendu à un stade où on avait déjà fait toute l'étape du projet de loi 40. Il y avait une nouvelle version qui sortait. II n'était pas question de recommencer les audiences à partir de zéro. Alors, nous avons dit au gouvernement: II faudrait quand même entendre un certain nombre d'organismes, les plus importants. Nous avons négocié, le gouvernement et l'Opposition, et nous nous sommes entendus sur une liste, finalement. Si Cela n'avait été d'un bris de parole de la part du gouvernement, à ce moment, la liste aurait été établie, mais il a changé le cours des choses un certain midi où le ministre ne s'entendait pas avec le député qui était porte-parole du groupe ministériel. Cela a engendré des complications. Mais, si cela n'avait pas été de ça, nous aurions établi une liste avec le gouvernement, qui était limitée. Cela comportait une douzaine d'organismes en tout. Nous savions et acceptions très bien qu'à ce stade de tout le travail il ne pouvait pas être question de recommencer le travail à zéro. Mais les organismes...

Mme Blackburn: Après cinq semaines d'audiences?

M. Ryan: Non, c'est une autre commission, celle-là, madame. II y a eu deux commissions. Il y a eu celle sur le projet de loi 40 et ensuite, il y a eu celle sur le projet de loi 3. Celle sur le projet de loi 40, cela a été au début de l'année 1985, si mes souvenirs sont bons, et même 1984. Je crois que celle sur le projet de loi 3, cela a été au mois de décembre 1984, la même année. Il s'est écoulé au moins dix mois entre les deux. On n'a pas demandé de tout recommencer, cela ne tenait pas debout. On s'est entendu. Si le gouvernement avait été fidèle à ce qui avait été discuté, il n'y aurait eu aucune complication à ce point de vue et les choses auraient marché. Mais le gouvernement voulait imposer à l'Opposition... C'était un projet de loi de 655 articles que le ministre lui-même n'était pas capable d'expliquer, pauvre lui; il était nouveau dans le domaine de l'instruction publique. On lui demandait des explications, il était toujours obligé de se faire souffler les réponses par les fonctionnaires. On lui avait dit: Tu ne peux pas nous faire étudier cela en trois ou quatre jours, cela n'a pas de bon sens. Le député de Terrebonne était là, il s'en souvient très bien. On lui avait dit: Cela va prendre au moins deux, trois ou quatre semaines pour étudier un projet de loi de 655 articles. Mais, téméraire comme il était, esprit géométrique par excellence, il a décidé qu'il fallait que ce soit étudié en trois ou quatre jours. Vous vous souvenez de ce ministre. Il a adopté son projet de loi; on l'avait averti que ce n'était pas conforme à la constitution du Canada. Il nous a dit: Vous ne connaissez rien là-dedans, vous. Nous, on connaît cela. Finalement, les tribunaux nous ont malheureusement donné raison. Aujourd'hui, on a une belle loi qui nous a fait perdre un temps énorme et qui est sur les tablettes. On a décidé nous-mêmes, il y a deux semaines, qu'elle deviendrait en vigueur quand on déciderait de l'appliquer. C'est le résultat de toute l'opération qui a été faite dans le temps.

Nous, nous faisons un travail sérieux. Nous avons vérifié notre loi sous toutes les coutures. D'ailleurs, vous n'avez pas été capables de la mettre en doute au point de vue légal et constitutionnel. Vous savez très bien qu'au point de vue légal et constitutionnel, c'est une loi qui se tient et qui se tient fort, à part cela. Il n'y a pas de couture qui craque là-dedans. Vous trouvez peut-être même que c'est trop fort, trop serré. Les choses se tiennent très bien. C'est pour cela qu'on n'a pas besoin de préambule. Franchement, la députée de Chomedey, qui est vice-première ministre, va être très heureuse, j'en suis convaincu, de témoigner devant une commission parlementaire à l'automne, quand le gouvernement présentera son programme d'ajustement de la politique linguistique dans les différents secteurs. Je pense qu'elle va être très heureuse de le faire. Mais il a été décidé pour ce printemps que nous agissions sur le problème le plus urgent, celui qui demandait une solution immédiate, et que le reste serait reporté à plus tard. Par conséquent, donner suite à la demande de l'Opposition serait anticiper sur les événements et agir prématurément. Il n'y a pas de mauvaise volonté là-dedans de notre côté. Je pense que Mme Bacon sera extrêment heureuse de venir en temps utile devant la commission appropriée. Je ne sais pas si ce sera celle-ci ou une autre. Mais, devant cette commission, le ministre qui a été chargé par le gouvernement de faire le travail, c'est le ministre de l'Éducation, comme cela découle de la responsabilité qui lui a été donnée de l'application de la loi 101 dans son chapitre sur la langue d'enseignement.

Cela résume toute l'affaire et je pense que pour l'Opposition, finir par cette proposition... Si vous aviez au moins commencé par cette proposition, si vous aviez dit, au tout début: On voudrait avoir une vue d'ensemble, peut-être que c'est une chose qui aurait pu être considérée, mais, à ce stade tardif, rendu à 23 heures et après cinq jours de débat, je pense que c'est la plus belle preuve du caractère improvisé de la démarche que vous faites. Vous trouvez

une nouvelle idée toutes les deux heures à peu près pour embarrasser le gouvernement et retarder...

M. Blais: Vous êtes...

Le Président (M. Thérien): Avez-vous une question de règlement, M. le député de Terrebonne, sur la pertinence?

M. Blais: Sur la pertinence.

M. Ryan: Oui, très bien, mats, là, je suis exactement sur la question, par exemple...

Le Président (M. Thérien): C'est cela. Je pense qu'il pariait justement de l'amendement.

M. Ryan: Mais, si le président voulait me dire que j'ai terminé mon temps de parole, je pense que je serais obligé de m'incliner.

Le Président (M. Thérien): II vous reste une minute, si vous voulez conclure.

M. Ryan: Merci. Ma conclusion est bien simple. Au point où nous en sommes, j'implore de nouveau, comme je le ferai jusqu'à minuit, l'Opposition d'accepter de se mettre à l'étude du projet de loi. Je suis sûr qu'avec toutes les explications qu'elle a cueillies par la bande, je suis sûr que par-delà l'effort dilatoire, louable mais perdu, malheureusement, qu'elle poursuit depuis quelques jours, il lui est arrivé d'écouter quelques-unes des choses qui ont été dites et de comprendre beaucoup mieux qu'elle n'affecte de le faire la portée véritable de ce projet de loi. Je lui dis encore une fois qu'on va le faire jusqu'à la fin parce que c'est notre devoir. Si elle voulait se mettre à table, comme on le dit, et aborder l'article 1 qui est bien simple...

Le premier mot de cette loi a été mis là à dessein, c'est le mot "l'enfant". Dans tout ce qu'on a entendu ce soir, il n'est plus question des enfants et ce sont des enfants qui sont concernés par cette loi. Nous vous l'avons dit au tout début et nous vous le répétons maintenant, ce n'est pas la Charte de la langue française, ce n'est pas Mme la présidente de la Société Saint-Jean-Baptiste, ce n'est pas le président de la ligue de ceci ou de cela, ce n'est pas M. Léon Dion, ce n'est pas le mathématicien Charles Castonguay, c'est cet enfant qui est dans une école dans des circonstances extrêmement pénibles...

Le Président (M. Thérien): M. le ministre...

M. Ryan: ...dont il n'est pas responsable et c'est en pensant à lui, et à personne d'autre, que nous présentons ce projet de loi pour régulariser une situation et pouvoir ensuite, tous ensemble, nous mettre à l'application exemplaire de la Charte de la langue française dans son chapitre qui traite de la langue d'enseignement, pas d'autres choses.

Le Président (M. Thérien): Merci. Je céderai maintenant la parole à M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. François Gendron

M. Gendron: Oui, M. le Président, très simplement, je vais être plus court que prévu.

Une voix: Ah! Cela se ramollit.

M. Gendron: Non, ça ne se ramollit pas mais à entendre à peu près toujours la même explication, je voulais simplement dire que je suis complètement d'accord avec la motion d'amendement, que la ministre responsable de la langue française, à titre de députée de Chomedey, puisse participer à nos travaux et qu'à cette fin un droit de parole lui soit accordé. J'appuie l'amendement et je ne voudrais qu'ajouter deux choses sur l'amendement. Contrairement à ce qui a été affirmé par le ministre de l'Éducation et même si nous ne comprenons rien, même si on saute des pages, qu'on ne dit rien d'intelligible, que c'est uniquement l'improvisation qui nous guide, nous sommes habitués de recevoir des leçons du haut de sa personne, toujours moralisateur... Nous ne savons rien faire, nous ne sommes pas capables de nous acquitter de notre mandat d'Opposition responsable.

Ce que je veux dire, contrairement à ce qu'il a affirmé, c'est que nous pensions que la responsable des questions linguistiques était sûrement concernée par une loi qui, à tout le moins, est très connexe, près de toutes les questions concernant la langue. À partir du moment où ces gens ont défié une disposition de la loi 101, il me semble que c'est on ne peut plus clair que la ministre responsable aurait pu au moins venir nous dire: Oui, c'est vrai, on n'a pas de politique linguistique, oui, c'est vrai, on est en train de regarder cela, oui, c'est vrai, cela pose un problème au premier ministre.

Je veux m'arrêter quant à l'amendement et dire: C'est certain que quand on a un seul discours, de ce côté-ci, c'est de l'improvisation, de l'autre côté, c'est la rigueur dans l'illégalité, c'est très difficile, M. le Président, de se faire entendre et de se faire comprendre. Dans ces conditions, je n'ai pas à exercer mon droit de parole plus longuement sur l'amendement et je pose la question préalable sur l'amendement. J'ai

posé la question préalable.

M. Ryan: Est-ce qu'on peut demander une suspension, M. le Président? Une petite suspension?

Le Président (M. Thérien): Oui, cinq minutes.

(Suspension de la séance à 23 h 15)

(Reprise à 23 h 19)

Le Président (M. Thérien): À l'ordre, s'il vous plaît! Voici le jugement. Je le juge irrecevable en vertu de l'article 202: "Si aucun amendement n'est proposé à une motion, tout député qui a la parole peut proposer qu'elle soit immédiatement mise aux voix. Cette motion ne peut être amendée." Donc, je demanderais au député s'il veut compléter son intervention. Sinon, je le mets aux voix immédiatement.

M. Gendron: Je veux que vous le mettiez aux voix immédiatement. Je ne veux pas compléter mon intervention. C'est vous qui présidez le débat, ce n'est pas moi.

Le Président (M. Thérien): Parfait. Donc, je mets aux voix immédiatement l'amendement. Est-ce que l'amendement est accepté ou rejeté?

M. Gendron: Rejeté.

Le Président (M. Thérien): Un vote nominal est... Non. Est rejeté.

M. Gendron: Rejeté.

Une voix: Un vote nominal a été demandé, M. le Président.

Le Président (M. Thérien): Non, non, non. J'ai demandé préalablement si c'était accepté ou rejeté. Maintenant...

M. Cusano: M. le Président, on aimerait avoir le vote nominal, s'il vous plaîtï On a le droit.

Le Président (M. Thérien): Le vote nominal est demandé, M. le secrétaire.

C'est cela. En fait, on souhaitait que la vice-première ministre vienne en commission parlementaire. M. le secrétaire.

Le Secrétaire: Mme Blackburn (Chicoutimi?

Mme Blackburn: Pour.

Le Secrétaire: M. Gendron (Abitibi-Ouest)?

M. Gendron: Pour.

Le Secrétaire: M. Blais (Terrebonne)?

M. Blais: Pour.

Le Secrétaire: M. Boulerice (Saint-Jacques)?

M. Boulerice: Pour.

Le Président (M. Thérien): Est-ce qu'il y aconsentement pour que M. Charbonneau ait...

Des voix: Non. Des voix: Oui. Le Président (M. Thérien): Oui.

Le Secrétaire: M. Charbonneau (Verchè-res)?

M. Charbonneau: Pour.

Le Secrétaire: Mme Bleau (Groulx)?

Mme Bleau: Contre.

Le Secrétaire: M. Cusano (Viau)?

M. Cusano: Contre.

Le Secrétaire: Mme Cardinal (Château-guay)?

Mme Cardinal: Contre.

Le Secrétaire: Mme Dougherty (Jacques-Cartier)?

Mme Dougherty: Contre.

Le Secrétaire: M. Gardner (Arthabaska)?

M. Gardner: Contre.

Le Secrétaire: M. Hamel (Sherbrooke)?

M. Hamel: Contre.

Le Secrétaire: M. Khelfa (Richelieu)?

M. Khelfa: Contre.

Le Secrétaire: M. Parent (Sauvé)?

M. Parent (Sauvé): Contre.

Le Secrétaire: M. Thérien (Rousseau)?

M. Thérien: Contre.

Le Secrétaire: M. Tremblay (Rimouski)?

M. Tremblay (Rimouski): Contre. Le Secrétaire: M. Ryan (Argenteuil)? M. Ryan: Contre.

Le Président (M. Thérien): Donc, l'amendement est rejeté par 11 voix contre 5. Nous sommes maintenant sur la proposition principale du député de Viau. Je pense qu'il y a des gens qui souhaiteraient intervenir du côté ministériel sur la proposition. Est-ce qu'il y a des gens qui veulent intervenir? Il n'y apersonne qui veut intervenir? Oui.

M. Ryan: II y en a plusieurs.

Le Président (M. Thérien): Je voudrais qu'on... Est-ce que le député d'Arthabaska souhaite intervenir sur la proposition principale?

M. Gardner: Peut-être pas tout de suite parce que mes papiers sont tous là. Mais est-ce qu'on peut revenir après? Non?

Le Président (M. Thérien): Non.

M. Gendron: On n'a pas d'autre droit de parole. La question préalable sur la motion principale.

Une voix; C'est cela.

M. Gendron: On n'a pas d'autre intervenant à faire entendre sur la motion principale.

Le Président (M. Thérien): S'il n'y a pas d'intervention...

M. Gardner: D'accord. Moi je suis prêt à voter, de toute façon.

Le Président (M. Thérien): ...j'appellerais le vote. Est-ce que la proposition du député de Viau est acceptée ou rejetée?

Une voix: Acceptée, bien oui.

Le Président (M. Thérien): Je demande si la motion est acceptée ou rejetée.

M. Charbonneau: Vote enregistré, M. le Président.

M. Ryan: Acceptée par l'Opposition.

Une voix: Acceptée.

Une voix: On commence cet article-là?

M. Ryan: C'est de valeur, ils sont cinq jours en retard.

Le Président (M. Thérien): Adopté. Nous commençons le débat de l'article 1.

Une voix: On recommencel

M. Cusano: Je répète, M. le Président. M. le Président.

Le Président (M. Thérien): Oui.

M. Cusano: Je veux seulement répéter qu'il ne fallait pas avoir une boule de crystal pour deviner la suite.

Étude détaillée

Le Président (M. Thérien): S'il vous plaît, à l'heure tardive. J'appelle l'article 1 du projet de loi.

M. Ryan: L'article 1. Je pense que j'avais demandé la parole.

Le Président (M. Thérien): Oui, M. le ministre.

M. Ryan: Si vous voulez bien me l'accorder pour que j'en explique... Pardon?

M. Gendron: Un instant, M. le ministre, je m'excuse auprès de vous. Est-ce que le président peut indiquer - puisqu'il est de coutume quand l'article 1 est appelé que vous le demandiez à l'intervenant - si le ministre de l'Éducation va, dans son droit de parole, s'exprimer sur la totalité de l'article 1 ou s'il va parler spécifiquement sur l'alinéa 1 de l'article 1? Entend-il également s'exprimer sur le paragraphe 1 de l'article 1 et le paragraphe 2 ou s'il veut faire une présentation dans son droit de parole de l'ensemble de l'article 1? C'est la coutume normalement. Le président indique de quelle façon le parti ministériel a l'intention de présenter son droit de parole sur l'article 1. J'aimerais que le ministre puisse préciser s'il y va de ces nuances qui sont habituellement requises en commission ou s'il parle globalement sur l'ensemble de l'article 1?

Le Président (M. Thérien): M. le ministre, je n'ai pas le goût de répéter ce qu'a dit le député d'Abitibi-Ouest, mais je pense qu'il avait raison. Je demanderais au ministre s'il a l'idée d'intervenir sur la globalité ou article par article?

M. Ryan: Sur la globalité et sur chacun des trois alinéas.

Le Président (M. Thérien): M. le ministre.

M. Gendron: J'ai compris.

Le Président (M. Thérien): Oui? Est-ce

que vous avez compris?

M. Ryan: M. le Président, j'entends intervenir sur l'ensemble de l'article 1 et j'expliquerai également chacun des alinéas comme il convient à un bon professeur.

Le Président (M. Thérien): M. le ministre.

M. Ryan: Alors, le but de l'article 1 est celui même du projet de loi. Il s'agit de permettre qu'un enfant qui, à la date du 15 avril 1986, recevait de fait l'enseignement en anglais au Québec dans une classe maternelle ou à l'école primaire ou secondaire, sans y être admissible en vertu de la Charte de la langue française, puisse être admis de manière régulière à cet enseignement qu'il recevait déjà, c'est-à-dire qu'il puisse voir son statut déjà existant, à toutes fins utiles, dans certains cas depuis sept ou huit ans et même neuf ans, normalisé, régularisé. Il ne s'agit pas de prendre des enfants dans des écoles françaises et de les transférer dans des écoles anglaises, sous prétexte que leurs parents auraient des vues capricieuses ou voudraient changer le cours des choses. Il s'agit d'enfants qui ont été parqués dans des écoles anglaises, en grande partie par l'impuissance et l'inaction du gouvernement précédent.

Nous ne créons pas cette situation, nous en héritons. Nous ne créons pas l'illégalité, nous voulons y mettre fin. L'illégalité est là, dans la situation que nous a transmise le gouvernement précédent. Quand j'entends des députés de l'Opposition feindre de se scandaliser, je m'en étonne profondément, parce qu'ils ont baigné dans l'illégalité. Ce sont eux qui sont responsables de cette situation comme gouvernement. Ils avaient la responsabilité d'y mettre fin; ils avaient la majorité à l'Assemblée nationale; ils avaient la plénitude des pouvoirs exécutifs comme gouvernement; ils avaient tout ce qu'il fallait pour régler cette situation. Ils ont été indifférents. Ils l'ont prise avec le bout de la pôle, comme disait naguère un ancien premier ministre péquiste. Ils n'ont pas voulu y toucher, parce que cela ne les intéressait pas trop. C'est cela qu'était la situation.

Nous, devant le problème... D'abord, nous avions été saisis du problème bien avant d'être au pouvoir. Il ne fallait pas être un phénix pour en être saisi, il suffisait de lire les journaux. Puis quand il y avait un article qui vous racontait une situation, il suffisait d'aller voir ce qui en était. Il est arrivé à plusieurs d'entre nous d'aller se mettre le nez sur le problème, bien avant que nous soyons au pouvoir. Nous avons pu constater de visu, concrètement, avec nos yeux, la situation véritable qui était faite à ces enfants et nous avons pu conclure, il y a longtemps, que cela ne pouvait être enduré, que cela ne pouvait pas continuer et que cela ne pouvait pas se régler seulement par des phrases pieuses. Cela prenait des gestes concrets. Alors, que faisons-nous? Nous disons que ces enfants, dont je donnerai un peu l'idée quant au nombre tantôt, pourront être admis à l'enseignement en anglais aux conditions suivantes:

Premièrement, le contenu de l'enseignement qu'ils ont reçu devra être conforme aux règlements et aux programmes d'études édictés ou approuvés par le ministre de l'Éducation ou le gouvernement. Nous ne voudrions pour rien au monde donner la moindre consécration à des études frelatées. Nous voulons régulariser des études qui ont été faites en conformité avec les programmes d'études et les règlements édictés ou approuvés par le gouvernement ou par le ministre de l'Éducation. Par conséquent, nous ne voulons pas créer de privilèges spéciaux. Ouvrons-nous les yeux une minute; ces enfants ont fait leurs études tout comme les autres dans les écoles où ils sont placés. Ils ont suivi les cours. Même je crois que le député de Viau nous a dit que dans certains cas ils ne savaient même pas eux-mêmes qu'ils étaient des élèves "illégaux". Dans d'autres cas, ils le savaient très bien. Je sais que cela fait sourire le député de Saint-Jacques, mais moi, cela m'a fait pleurer. Cela m'a vraiment impressionné. Je me suis dit que je n'avais pas le droit d'être complice d'une situation comme celle-là et de la laisser se perpétuer. C'est aussi simple que cela. Alors, ils ont suivi des études sérieuses au même titre que les autres... (23 h 30)

II y a une chose que je voudrais préciser. Je pense qu'elle n'est pas comprise du côté de l'Opposition, même si ces gens étaient responsables de cette situation lorsqu'ils étaient au pouvoir. Le gouvernement précédent avait vraiment créé l'opinion que le statut fait à ces enfants n'entraînait pas d'autre conséquence que la suppression des subventions. On semblait dire: On va gagner de l'argent avec ces enfants, on ne paie rien pour eux, on serait bien fous de s'en faire, qu'ils restent là. Si leurs parents veulent les laisser là, dans ces conditions, qu'ils restent là. Cela a été votre attitude. Pire que cela, vous nous avez dit à maintes reprises, depuis le début du débat, que vous aimeriez que cela continue. Vous nous avez dit: II n'y a pas de nécessité, il n'y a pas d'urgence, il n'y a pas de motif impérieux.

Une voix: S'ils ne sont pas contents...

M. Ryan: S'ils ne sont pas contents, qu'ils foutent le camp ailleurs! C'est cela, votre attitude. Nous disons, s'ils ont fait

leurs études sérieusement, s'ils ont appris les mêmes choses que des condisciples qui ont accès à un statut régulier, on va leur donner le même statut. On aurait infiniment préféré qu'ils aillent à l'école française et nous allons prendre toutes les mesures pour que ceux de l'avenir ne soient pas parqués dans une telle situation. Je regrette que le député de Verchères ne soit pas ici, mais avec toute la vigueur dont je suis capable, si les sanctions prévues à un article ultérieur du projet de loi ne devaient pas être suffisantes à notre jugement, nous verrions à les rendre encore plus lourdes au besoin. Il faut que la loi 101 soit appliquée, il faut qu'elle soit respectée par tout le monde, mais pas sur le dos de ces enfants. Cela, c'est "another matter", c'est une autre question. Il y a un héritage qui est là et il faut en disposer. Je vous assure que, pour l'avenir, c'est notre conviction.

L'autre condition que nous établissons n'est pas compliquée. Nous disons que les parents de cet enfant devront, avant le 15 juillet 1986, avoir soumis une demande d'admission à une commission scolaire ayant compétence sur le territoire où ils résident. On ne veut pas que cela se prolonge indéfiniment, on n'ouvre pas une digue illimitée, n'oubliez pas cela, on dit: II faudra que vous veniez vous présenter avant le 15 juillet 1986. Avec les retards qui sont survenus, je me demande si le 15 juillet ne devrait pas devenir le 31 juillet. On en décidera au cours des prochains jours.

De toute façon, c'est à l'été 1986 que cela se passe, c'est à l'été 1986 que cela se règle. Cela ne traînera pas au-delà de l'été 1986. Celui qui nous arriverait le 31 octobre 1986 avec une demande de régularisation se fera dire: Ta date, c'était le 15 juillet ou le 31 juillet et, à moins que ce ne soit pour des motifs graves et exceptionnels d'ordre humanitaire ou familial qui auraient pu être portés à l'attention du ministre de l'Éducation par la commission d'appel, le ministre de l'Éducation n'aura pas le droit de se saisir du cas de son voisin, de son cousin ou des enfants de ses amis et de dire: J'ai regardé cela, je vous donne un petit permis en-dessous de la table. Il faudra que le dossier lui soit envoyé sur initiative de la commission d'appel, accompagné d'une recommandation précise demandant qu'il y ait une décision spéciale dans ce cas-là.

Quand nous arriverons à cet article, si le temps nous en est donné, je pense que nos amis comprendront facilement le bien-fondé d'une clause comme celle-là dont j'avais déjà souligné la nécessité dès le rapport de l'étude que j'avais fait sur la question des enfants illégaux, en 1983. Je pense que cela résume l'article 1. Pourquoi a-t-on choisi le 15 avril 1986?

Une voix: II s'inscrit le 15 juillet 1986...

M. Ryan: Pardon? Ce sera la date de vérification. Il faudra qu'on fasse la preuve que l'enfant était présent à l'école le 15 avril 1986. Nous avons choisi cette date pour deux raisons. D'abord, il fallait choisir une date assez éloignée de la date où serait déposé puis adopté le projet de loi pour éviter que des gens se disent: J'ai encore deux semaines, mais je vais essayer de m'aboucher avec une école quelque part pour y faire entrer mon enfant. On a déposé le projet de loi le 15 mai en mettant un mois auparavant. On tenait compte de toutes les situations qui avaient pu exister. Nous avions l'assurance qu'entre le 30 septembre - c'est la date qui sert de base pour déterminer les subventions auxquelles la commission scolaire aura droit - et le 15 avril, les effectifs scolaires n'ont pratiquement pas changé. II était plus facile de prendre une date plus rapprochée, parce que cela peut tenir compte de certains cas particuliers qu'on n'aura pas voulu voir s'accumuler, dû à des changements, des déménagements, des mortalités, des maladies parfois, des classes spéciales, des choses comme celles-là. On s'est dit: Cela va permettre de tenir compte de ces cas-là, vu que nous avions comme objet de régler complètement le problème.

Il fallait prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter qu'il reste des résidus - parce qu'il n'y a rien de pire qu'un résidu dans une situation comme celle-là - parce que si nous avions laissé un résidu, il y avait danger qu'il forme des petits à son tour. Il ne fallait pas que cette possibilité existe. C'est pour cela que le 15 avril nous est apparu comme la date la plus vraisemblable. Si nous avions pu étudier le projet de loi dans des circonstances normales, je pense que c'est une date qui aurait pu très bien se discuter: le 15 avril, le 1er avril, le 15 mars, il n'y a rien de biblique là-dedans, il n'y a rien de sacré. Je pense bien que c'est un jugement pratique qui est posé qui est fort discutable, très relatif aussi. Pour les raisons que j'ai mentionnées, le 15 avril nous est apparu meilleur comme date, assez éloigné de la date de dépôt et d'adoption du projet de loi et assez proche, également, pour que les vérifications soient relativement plus faciles et surtout qu'on puisse tenir compte de tous les accidents ou développements qui ont pu se produire au cours de l'année scolaire qui fait quand même partie de l'histoire de ces enfants-là.

On m'a demandé à plusieurs reprises pendant les discussions que nous avons eues combien cela implique d'enfants. Je crois devoir répéter ce que j'ai déjà dit, à savoir que des enfants "illégaux" - entre guillemets, parce qu'à mon point de vue, cela reste plutôt obscur au point de vue légal - dans trois des commissions scolaires pour

catholiques qui sont principalement concernées, il y en a à peu près 1000. Cela va chercher entre 950 et 1000 dont à peu près 780, si mes souvenirs sont bons, à la Commission des écoles catholiques de Montréal. Nous en mettons quelques centaines au plus pour les autres commissions scolaires. Les autres commissions scolaires catholiques, il n'y a pratiquement rien. Les commissions scolaires protestantes, je dois dire à leur crédit qu'une fois qu'elles se furent rendu compte que le gouvernement n'accepterait pas de faire de compromis avec elles sur la question des subventions à ces enfants, décidèrent en dedans d'un an, après le commencement du phénomène, de revenir à la légalité, de se soumettre à la loi.

On a dit bien des choses au sujet de certains propos qui avaient été attribués, je pense, par erreur ou par mauvaise interprétation, à la députée de Jacques-Cartier. On doit reconnaître qu'à ce moment-là, elle jouait un rôle très important au sein de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal, et qu'avec ce respect profond de la loi qui la caractérise, elle a insisté pour que la commission scolaire protestante se situe en pleine légalité et a pu, heureusement, compter sur les collaborations dont elle avait besoin pour que ce projet se réalise. La situation ne s'est pas présentée de la même manière dans les commissions scolaires pour catholiques dont nous parlons. C'est un fait d'histoire. On peut bien refaire l'histoire et dire: Ces fameux parents, ces fameux directeurs, ces fameux professeurs, ces fameux cadres, ces fameux commissaires... On a eu neuf ans pour faire cela. Le temps des procès d'intention est terminé. Je pense que c'est le temps du recommencement aujourd'hui. C'est cela le sens profond de la loi.

Disons que dans les commissions scolaires pour protestants, si ce n'était du phénomène de Western Québec dont j'ai déjà parlé, je pense que le contingent serait d'au plus 200 - j'aurai les chiffres définitifs ces jours-ci - d'après les relevés que nous avons au ministère. Je pense que le ministre de l'Éducation d'avant décembre dernier, le député d'Abitibi-Ouest, se souvient très bien que, par les rapports que nous exigeons des commissions scolaires, nous avons toutes les précisions nécessaires au sujet des contingents d'élèves. Dans le cas des commissions scolaires protestantes, nous possédons, avec une précision presque mathématique, le nombre d'effectifs soi-disant illégaux qu'elles ont dans leurs murs. On m'assurait, ces jours derniers - j'ai vérifié auprès du secrétariat de l'Association des commissions scolaires protestantes - qu'il n'y aurait pas de changement dans ce nombre par rapport à ceux qui sont déjà sur nos listes. Tant mieux!

Il reste le cas de Western Québec; c'est un cas un peu plus difficile, mais que nous allons aborder de front aussi, que je déplore profondément. Je comprends la réaction de la commission scolaire pour catholiques de Hull, qui ayant vécu ce problème de plus près, a plus de difficultés à comprendre ce qui se passe. Il faut qu'elle comprenne que c'est une solution que nous abordons pour l'ensemble du Québec et qu'on ne peut pas commencer à faire un régime d'exception pour un district en particulier, mais c'est celui qui, personnellement, me paraît le plus épineux par rapport à la perspective où nous nous situons. C'est malheureusement une situation qui découle, d'après les renseignements que j'ai obtenus, de la politique du gouvernement fédéral, pas celui d'aujourd'hui, mais l'ancien. Il avait pris sur lui de verser des subventions à cette commission scolaire pour lui permettre d'accueillir dans ses murs des enfants qui n'auraient pas eu le droit d'y être suivant les dispositions de la loi 101.

Je pense que le gouvernement fédéral a agi là-dedans en croyant se faire l'interprète, il s'arrogeait le pouvoir d'être l'interprète de facto de la Charte canadienne des droits et libertés. Il aurait dû laisser cela aux tribunaux et ne pas se mettre le nez là-dedans. Ce qu'il y a de plus odieux, c'est qu'après avoir versé des subventions pendant deux ou trois ans il a décidé de les retirer ensuite. Ces enfants sont parqués dans ces écoles. Ce n'est pas leur faute, eux non plus. J'espère qu'il y en a un certain nombre qui ont été réorientés du côté des écoles françaises, avec le libre consentement de leurs parents. On ne peut pas les exclure d'une mesure comme celle-ci, s'il devait y en avoir qui vont se présenter, mais je ne suis pas en mesure de fournir un rapport. C'est le seul point sur lequel nous n'avons pas un portrait très précis de la situation à laquelle nous faisons face.

Je pense que ces explications résument très bien la portée de l'article 1 du projet de loi. C'est un article qui est concis. Je pense qu'il donne tout ce qui doit se trouver dans cet article, sans rien dire de plus. Je n'ai pas autre chose à ajouter là-dessus, sinon pour souhaiter qu'il soit adopté dans les meilleurs délais par notre commission.

Le Président (M. Thérien): Donc, je reconnais le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: M. le Président, je pense que le moment où on a l'occasion d'aborder l'article 1 du projet de loi concernant l'admissibilité à l'enseignement en anglais de certains enfants, est également celui, comme le ministre de l'Éducation a eu l'occasion de le faire, d'expliquer pourquoi le ministre de l'Éducation a la prétention, comme il l'a dit à plusieurs reprises, que le temps était venu

de rendre admissibles des jeunes, des "illégaux" qui, peu importe leur niveau d'étude, qu'ils soient à la maternelle, au primaire ou au secondaire, puisqu'on prend la peine d'indiquer à l'article 1 "sans y être admissibles"... Le projet de loi a comme objectif de rendre dorénavant admissibles ces jeunes à l'enseignement en anglais comme s'ils avaient procédé correctement et qu'il n'y avait pas eu un cadre différent de celui que nous connaissons.

Le ministre de l'Éducation, comme cela a été son habitude depuis les 25 heures, en portant des jugements sur notre attitude, notre discours, en disant que nous voudrions que cela continue, que cela ne nous a jamais intéressés, que tout ce qui était important pour nous, c'était d'épargner des piastres, a même ajouté: Le temps des procès est terminé, le temps de prêter des intentions est terminé. (23 h 45)

Je voudrais tout simplement rappeler que, depuis le début de l'étude de ce projet de loi, si on a voulu par des motions préliminaires prévues à nos règlements entendre différents intervenants sur cette question, c'est qu'il y a d'autres intervenants au Québec qui ont, effectivement, fa prétention qu'on peut vouloir, tout comme le ministre de l'Éducation, régler le problème dit des "illégaux" sans nécessairement procéder par voie législative, qui ont - pour tous ceux qui ont écrit là-dessus, qui ne partagent pas le point de vue du ministre de l'Éducation et de la majorité ministérielle -la prétention que c'est quand même odieux pour un Parlement, de sanctionner par voie législative l'irrespect d'une loi adoptée par un Parlement dûment autorisé.

Je veux bien qu'on nous fasse la morale sur les jeunes qui ont eu à subir cette étiquette d'"illégaux". On sait nous aussi qu'ils ont fait leurs études. On sait nous aussi qu'ils ont suivi des cours, c'est évident, M. le Président. C'est cela le problème qu'on discute depuis vingt-cinq heures. Ils ont suivi des cours ailleurs que là où le contexte législatif le leur permettait.

On a eu droit à des explications sur le fait que, d'aucune façon, il ne fallait être revanchards ou vindicatifs envers ces jeunes. Ils n'est pas question de pénaliser les jeunes. N'importe qui dans une société démocratique sait que lorsqu'on procède dans un contexte d'illégalité, il y a des contraintes. Pour des gens qui ont défié une législation peu importe sur les conseils de qui - on a eu l'occasion de l'illustrer - que ce soit des administrateurs scolaires qui les ont encouragés, que ce soit une association de professeurs comme PACT qui a fait le tour du Canada pour amasser des fonds pour contester non seulement sur le plan juridique, mais organiser ce qu'on appelle une résistance systématique, on dit, à ce moment, que le défi à une loi, peu importe par qui il est posé, doit s'exercer quand même dans un contexte minimum de contraintes.

Par les diverses motions qu'on a voulu présenter pour entendre les intervenants, que ce soit l'Alliance des professeurs de Montréal, que ce soit la CEQ, le Mouvement Québec français, peu importe, des opinions d'individus dans la société, un conseil de commissaires dans la région de l'Outaouais, tous disent qu'il faut régler le problème, mais que pour régler celui-ci, il n'y a pas qu'une seule voie et ce n'est pas uniquement la voie tracée par celui qui nous a indiqué qu'il avait trouvé la solution, compte tenu de son expérience, compte tenu de l'analyse qu'il a faite de cette question par son comité politique partisan, en disant: La solution, c'est l'amnistie totale, générale, sans nuance.

J'ai déjà indiqué en deuxième lecture et également dans les débats, que d'autres ont préconisé une solution non seulement pour régulariser ceux qui sont sortis du système, mais également pour fermer l'entonnoir, parce qu'on ne se met pas un bandeau sur les yeux aujourd'hui en ce sens que le problème n'est pas réel. M. le ministre nous disait au tout début de ses explications sur l'article 1: On n'encourage pas l'illégalité. Il y a une situation de fait que des gens sont placés dans une situation d'illégalité.

On le reconnaît. Si notre raisonnement était si erroné, comment se fait-il qu'il y en a d'autres qui pensent qu'en procédant par voie législative, la conséquence peut être que dorénavant, à des lois où le motif des contrevenants pourrait être invoqué par rapport à la légitimité de la législation comme les lois 70, 105, 111... J'ai déjà indiqué qu'il y a des gens qui pensent que ces lois étaient illégitimes, souvent encouragées par les gens qui aujourd'hui forment le gouvernement actuel, qui étaient dans l'Opposition et qui tenaient ce discours, que c'étaient des lois irrespectueuses, que c'était des lois qui pouvaient être défiées parce qu'elles étaient illégitimes. Elles étaient légales, mais illégitimes.

On ne peut pas avoir un système parlementaire de sanction législative de deux ordres. Quand cela fait notre affaire, on peut contourner, défier des législations, ce n'est pas grave, à un moment donné il y aura un gouvernement qui a des dettes envers ces personnes et il sanctionnera l'illégalité, il effacera l'ardoise.

À l'article 1, le ministre de l'Éducation nous dit: Je veux dorénavant présumer que l'admissibilité de ces jeunes est correcte et conforme au régime du Québec, selon les condition suivantes: au paragraphe 1, on indique quelques balises; même chose au paragraphe 2. Mais sur le principe, le

résultat est toujours le même: c'est que le ministre de l'Éducation - comme il l'a répété à plusieurs reprises, parce que la question des "illégaux" l'a impressionné, dit-il - veut mettre fin à cette situation par voie législative en disant: On efface complètement l'ardoise.

J'ai eu beau être très attentif. Je croyais qu'il profiterait de l'article 1 pour exposer davantage certaines considérations qui nous paraissent absolument inacceptables et inopportunes. Je voudrais seulement dire à titre d'exemple: On a beau se forcer, se triturer les méninges, il n'y a personne de ce côté-ci de la table - accompagné d'autres, ils sont plus nombreux qu'on pense, qui peut comprendre, entre autres, la logique qui peut comprendre, entre autres, la logique de fixer comme date le 15 avril 1986 dans ce projet de loi.

Je n'ai sûrement pas - je l'ai dit à plusieurs reprises - l'expérience du ministre de l'Éducation mais j'en ai assez, pour avoir enseigné pendant une dizaine d'années, pour connaître ce milieu et le connaître très bien - parce que j'ai encore plusieurs amis dans le monde de l'éducation et j'ai également plusieurs parents dans ce milieu - pour savoir que la date de référence qui a toujours prévalu pour à peu près n'importe quelle situation a toujours été le 30 septembre, soit au début de l'année scolaire. S'il n'y avait pas de motif caché, s'il n'y avait pas des raisons que la raison ignore jusqu'ici, pour essayer de justifier le 15 avril, on aurait beau regarder cela dans tous les sens: L'Alliance des professeurs de Montréal, en plus d'être en désaccord, dit: II y a quand même des dispositions du projet de loi 58 qui sont complètement aberrantes, complètement inacceptables et inquiétantes. Par hasard, elle en cite une et c'est précisément celle sur laquelle je suis en train de discourir. L'Alliance des professeurs de Montréal dit: On aurait pu s'attendre que seuls les "illégaux" au 30 septembre 1985 - on peut être en désaccord mais, au pire, à supposer qu'après avoir exprimé largement notre désaccord, on réussisse nous aussi à finir par comprendre que même si cela n'a pas de bon sens d'effacer l'ardoise, on s'attendrait au moins à ce que la date sur l'ardoise soit celle qui est de commune renommée, de commune référence, qui est ce qu'on appelle la date normale d'inscription pour les élèves.

L'alliance des professeurs dit ceci: Nous aurions pu nous attendre que seuls les "illégaux" au 30 septembre 1985, selon la date de référence normale pour l'inscription des élèves depuis probablement des millénaires... Ce n'est pas le 15 avril 1986. Le ministre de l'Éducation englobe, ce faisant, ceux qui auront interprété... Ce n'est pas une prétention de celui qui vous parle. C'est une réalité. En mettant cette date, ce qu'on veut faire carrément, pour tous ceux qui l'ont interprété ainsi, c'est qu'avec les libéraux au pouvoir, enfin pour eux, il n'est pas grave de continuer à défier une loi, parce qu'on va régler cela en effaçant l'ardoise. En conséquence, il est fort probable que nous avions un phénomène qui s'éteignait, qui diminuait, contrairement encore là aux mensonges évoqués par le ministre de l'Éducation qui disait que nous souhaitions, nous, que cela continue. On n'a jamais souhaité que cela continue.

Les gens concernés que j'ai entendus là-dessus, y compris celui qui vous parle, ont dit que le phénomène était en régression, qu'il n'avait plus l'ampleur qu'il avait déjà connue. Dans ce sens-là, la mesure à préconiser ne nécessitait sûrement pas l'envergure qu'on lui donne par voie législative. Je répète que ce point de vue est partagé par plusieurs personnes. Quand on regarde la date choisie, la présidente de l'Alliance des professeurs de Montréal disait: Le choix du 15 avril est totalement arbitraire. Quelquefois, dans ses moments de franchise, parce qu'il lui arrive d'en avoir, le ministre de l'Éducation nous l'a d'ailleurs confirmé tantôt - je veux bien que les perroquets répètent autre chose - mais il nous a dit carrément: J'ai dit cela, parce que c'était la date qui nous apparaissait la plus vraisemblable. Je le cite textuellement. On a choisi une date qui devait être un peu loin de l'acceptation du projet de loi. C'est encore cité textuellement: Donc, à peu près le 15 avril ou le 15 mars, cela a du bon sens, parce que cela va être adopté probablement vers la fin de la session.

Mais, par rapport à des critères de référence généralement admis dans un système qu'il connaît bien, il y a quand même du monde qui s'attendait que la date se rapproche de celle qui est presque universellement reconnue comme une date à laquelle nous pouvons effectuer des références dites normales.

L'alliance s'inquiète au plus haut point des pouvoirs que le ministre s'arroge en décidant arbitrairement que ce sera le 15 avril plutôt qu'une autre date. Tout en étant contre l'amnistie, on aurait pu au moins présumer qu'on commencerait cette situation d'effacer l'ardoise à une date de référence où, habituellement, c'est là que les inscriptions se font.

Au moment où on se parle, est-ce un temps fort d'inscription dans les écoles soit anglaises ou françaises? Tout le monde convient que non. Ce n'est pas un temps fort d'inscription dans les écoles. Après le début de l'année scolaire, tout ce qui peut arriver, ce sont des situations particulières ou spécifiques qu'il aurait pu régler par le pouvoir discrétionnaire dont il s'arroge à un article subséquent.

Les articles 7 et 8, on aurait pu les voir un jour, si on n'avait pas une motion de

clôture sur la tête. Si on n'avait pas une menace de bâillon, on aurait pu regarder ça. On aurait pu prendre le temps de regarder ça. Là, on aurait vu que le ministre se donne un pouvoir discrétionnaire pour régler les cas frontières ou les cas limites, comme un déménagement urgent pour toutes sortes de situations.

Mais même pas cela! En plus du pouvoir discrétionnaire qu'il se donne, d'une façon arbitraire, il dit: Je veux couvrir tous ceux qu'on aurait encouragés à s'embarquer dans l'illégalité et je vais leur donner plus que ce qu'il y avait déjà sur le tableau de bord. Pour être certain qu'effacer l'ardoise signifie encore plus, on va en ajouter. Si on est dans l'erreur, si nos motifs ne sont pas bons, qu'il nous dise exactement quelle est sa motivation à choisir cette date.

Comment se fait-il qu'on serait les seuls, M. le Président, à comprendre de travers ce qui a été bien compris par tous ceux qui s'opposent à l'amnistie sans nuance? Tous ceux qui s'opposent à l'amnistie sans nuance ont vu exactement la même chose que nous. Cela n'a pas de bon sens cette date, parce que, d'aucune façon, on ne peut y trouver une once de rationnel; d'aucune façon, on ne peut y trouver quelque chose de logique, de palpable qui nous permettrait de dire: Nous, cela ne répond pas à nos objectifs, mais on est capable d'expliquer cela. On est capable de se promener à l'intérieur du Québec, de rencontrer des institutions scolaires, de rencontrer des gens qui auraient un autre point de vue, mais qui pourraient comprendre qu'il y a une logique dans le choix de cette date.

On s'est fait accuser faussement lorsqu'on a porté le jugement que pour n'importe quelle récompense à l'illégalité, îl y a un prix à payer et qu'il y aurait peut-être là une dette électorale pour certains. On s'est fait crier toutes sortes de noms -on est habitué - toutes sortes de jugements, parce que je vous l'ai dit tantôt, nous, on saute des pages, on ne comprend rien, on ne dit rien d'intelligible et c'est l'improvisation qui nous guide.

Mais pour des gens qui sont guidés par l'improvisation, on peut, de temps en temps, suivre les traces de d'autres qui ne sont pas des parlementaires, qui sont des citoyens et des citoyennes à statut corporatif ou à statut individuel. C'est drôle, ils ont exactement le même point de vue que nous là-dessus!

Motion proposant de remplacer "le 15 avril 1986"

par "le 30 septembre 1985"

Dans ce sens, M. le Président, sur le premier paragraphe de l'article 1, je voudrais déposer a ce moment un amendement que je vous lis tout de suite - nous, nous pensons que c'est un amendement majeur et important. L'amendement qu'on veut au moins proposer à l'article 1, M. le Président, est le suivant: L'article 1 du projet de loi 58, qui s'intitule: "Loi sur l'admissibilité à l'enseignement en anglais de certains enfants", est modifié, au paragraphe 1, par le remplacement à la première ligne des mots "le 15 avril 1986" par les mots le "30 septembre 1985".

Le Président (M. Thérien): M. le député, je vais prendre l'amendement en délibéré et je vais ajourner les travaux sine die.

(Fin de la séance à minuit)

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