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Version finale

33rd Legislature, 1st Session
(December 16, 1985 au March 8, 1988)

Tuesday, September 23, 1986 - Vol. 29 N° 17

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale dans le but d'évaluer les orientations et le cadre de financement du réseau universitaire québécois


Journal des débats

 

(Dix heures vingt minutes)

Le Président (M. Parent, Sauvé): La commission parlementaire sur l'éducation continue ses travaux dans le cadre du mandat qui lui a été confié par l'Assemblée nationale à savoir de procéder à une consultation générale dans le but d'étudier les orientations et le cadre de financement du réseau universitaire québécois pour l'année 1987-1988 et pour les années ultérieures.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président, M. Parent (Bertrand) remplace ce matin M. Jolivet (Laviolette). Merci.

Le Président (M, Parent, Sauvé): M. le député de Bertrand. Est-ce qu'il y a d'autres remplacements?

Le Secrétaire: Non, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre.

M. Ryan: M. Després.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Després remplace d'une façon permanente. Cela a été annoncé au début de nos travaux en commission parlementaire.

Avant de débuter ce matin, je vais vous communiquer l'ordre du jour. À l'ouverture, dans quelques secondes, nous allons entendre l'Université du Québec à Hull, suivie de l'École nationale d'administration publique. Cet après-midi, à 15 heures, Télé-université et par la suite, l'Ordre des agronomes du Québec, l'Ordre des chimistes du Québec. À 20 heures, ce sera l'Ordre des ingénieurs du Québec.

Dès maintenant, nous accueillons l'Université du Québec à Hull, représentée par son recteur, M. Plamondon. M. Piamondon, nous vous souhaitons la bienvenue.

Université du Québec à Hull

M. Plamondon (Jacques): M. le Président, Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Nous vous remercions aussi d'avoir répondu à l'invitation de la commission et de nous avoir aussi fourni un mémoire de façon à éclairer les membres de cette commission sur vos préoccupations et de nous faire connaître aussi vos suggestions pour améliorer l'orientation de nos universités ainsi que leur cadre de financement.

Nous avons à notre disposition, M. Plamondon, environ 1 h 30 qui pourrait peut-être se répartir comme suit: quinze à dix-huit minutes de présentation verbale de votre part et, après, le reste du temps sera séparé à part égale entre les membres des deux formations politiques qui discuteront avec vous, qui vous poseront des questions qu'ils jugeront pertinentes.

De votre côté, si vous croyez utile de nous fournir d'autres renseignements que ceux qui apparaissent dans votre mémoire, sentez-vous bien à l'aise. Si jamais les questions ne vous paraissent pas claires, ne vous gênez pas d'intervenir, de demander aux députés ici de clarifier leurs questions. Nous n'avons qu'un seul objectif, c'est la recherche du plus grand nombre de renseignements possibles et de la meilleure qualité de renseignements.

M. Plamondon, si vous voulez bien nous présenter les gens qui vous accompagnent et, par la suite, commencer votre présentation.

M. Plamondon: Oui, M. le Président. Je voudrais vous mentionner que, au départ, je suis en fonction à titre de recteur à l'Université du Québec à Hull depuis le 1er mai 1986, de sorte que j'ai jugé très utile de me faire accompagner par un nombre assez grand de cadres supérieurs de manière à être mieux en mesure de vous traduire la réalité de l'Université du Québec à Hull.

On trouve ici à ma gauche, M. Paul Legris, vice-recteur à l'informatique et aux communications.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M.

Legris, bonjour!

M. Plamondon: M. Jean-Paul Legrand, adjoint au vice-recteur enseignement et recherche de l'Université du Québec à Hull; M. Luc Chaput, son secrétaire général; M. Raymond Ducharme, vice-recteur à l'administration et aux finances; et M. Raymond Bazinet, directeur du bureau des études institutionnelles.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Alors, les deux porte-parole officiels des formations politiques seront, dans l'ordre, le ministre de l'Éducation et, pour l'Opposition, la députée de Chicoutimi. M. Plamondon, nous vous écoutons.

M. Plamondon: M. le président, M. le ministre, Mmes et MM. les membres de la commission parlementaire. L'enseignement universitaire - je pense que plusieurs institutions voudront poser le problème en ces termes - constitue un investissement de société. Bien sûr, les principales raisons d'être de l'université sont ses missions traditionnelles de repousser les limites de la connaissance humaine, de permettre l'exploitation de certaines de ces connaissances, de former les adultes de demain en leur inculquant une discipline de travail, un souci de l'excellence, une méthode rigoureuse, et, aussi, de préparer les étudiants au marché du travail, non seulement en leur fournissant des connaissances techniques, mais aussi et surtout en favorisant chez eux la réflexion, la distanciation critique et leur capacité d'adaptation è des réalités changeantes dans notre monde moderne.

Investir dans les universités, cela va de soi pour les grandes nations modernes. Je pense que plusieurs exemples nous sont donnés de réflexions en profondeur qui sont faites dans des sociétés évoluées, et on peut le faire de deux façons. On peut le faire à la méthode britannique. En 1986, il y a eu la publication du rapport de la commission Jarratt où les prémisses sont assez claires. Je lis ici sur les études d'efficacité de la commission Jarratt: "La tâche consiste à faire adopter aux organismes publics une attitude à l'égard du "coût-efficacité" analogue à celle qui existe dans les entreprises privées qui remportent les plus brillants succès et qui reflète également la tradition de prudence dans la gestion des fonds publics qui est celle de la fonction publique." Modèle britannique, modèle plus contrôlé, moins autonomiste. Et, tradition américaine qui, en vertu de l'éclatement des formes d'universités, ont plutôt, depuis 1984, procédé par persuasion, par étude visant à créer des consensus. Or, les États-Unis ont ainsi étudié leur engagement vis-à-vis de la formation universitaire dans des rapports dont les titres sont éloquents, "To Strengthen Quality", "To Reclaim Legacy", "A Nation at Risk" et "Involvement in Learning". Ce sont toutes des études du National Institute of Education. On trouve là-dedans des réflexions fondamentales sur le rôle que les universités jouent, principalement dans leur mission de formation, Partout, pourtant, on fait apparaître qu'il est crucial de consentir des sacrifices pour assurer un système d'enseignement supérieur de qualité et on fait ressortir les coûts sociaux de ne pas le faire.

Au Québec, bien sûr, cette problématique actuelle passe par les travaux de votre commission; M. le ministre Ryan l'a voulu ainsi. En août 1986, il affirmait qu'il comptait profiter de la commission pour trouver une solution au problème du sous-financement, mais aussi aborder toutes les facettes de ta qualité de l'enseignement, de la gestion des universités et de leur financement. Dans ce contexte, il faut bien reconnaître que les attentes du milieu sont grandes à l'endroit des travaux de la commission. Les hommes et les femmes politiques souhaitent une solution de société, les universités insistent pour redevenir une priorité sociale, les étudiants et les professeurs veulent maintenir ou améliorer soit leurs conditions d'études, soit leurs conditions de travail.

L'Université du Québec à Hull ne fait pas exception. Elle veut sensibiliser les politiques à sa situation particulière. D'abord et d'entrée de jeu, il faut le dire, l'UQAH adhère aux propositions du mémoire UQ. À défaut de voir cela, bien sûr notre mémoire apparaît comme un mémoire tronqué, parce que le mandat de la commission était suffisamment clair pour que ceux qui se présentent devant vous sachent exactement les attentes que vous nourrissez à l'endroit de ceux qui présentaient des mémoires. Il faut donc faire apparaître d'entrée de jeu que l'Université du Québec à Hull endosse, appuie les principales recommandations qu'on trouve dans le mémoire commun de l'Université du Québec.

Qu'est-ce que cela veut dire principalement? Le financement adéquat des activités universitaires. Donc, mettre fin à l'ère des compressions. Je pense qu'elles ont redressé la situation au plan de l'efficacité, mais elles ont créé des coûts sociaux importants dans les universités. Une révision des bases ou, à tout le moins, une consolidation accompagnée de prise en considération de facteurs divers tels les cycles et les champs disciplinaires, la taille, l'éloignement, les coûts indirects de la recherche, etc. Et, surtout, des règles stables connues à l'avance et permettant la prévision, appliquées en s'appuyant sur des données sûres. Pour que les administrateurs dans les universités et les communautés universitaires puissent se comporter correctement vis-à-vis de leur développement, de leur planification, il faut qu'ils puissent s'appuyer sur des règles stables et avoir l'assurance qu'elles seront appliquées en s'appuyant sur des données sûres qui sont les mêmes pour tous.

Pourquoi l'Université du Québec à Hull appuie-t-elle avec autant de force le mémoire commun? Eh bien, c'est tout simplement en raison du passé récent des universités qui, à travers les ateliers Laurin

et la commission parlementaire de l'éducation et de la main-d'oeuvre d'octobre 1984, ont connu des compressions ou des prélèvements divers, y compris la loi 70 et le financement partiel de leurs nouveaux étudiants. Dans les universités, cela s'est traduit par des réponses que chacune a pu déterminer: coupures horizontales dans beaucoup de cas, négociations rigoureuses avec les personnels, fermeture de postes bien souvent et, parfois, des mises à pied. (10 h 30}

Les effets de tout cela dans les universités, si on veut être phénoménologique, c'est une certaine détérioration du climat de travail, de cette sérénité qui est utile pour la poursuite des fins de l'université. C'est aussi - on l'a constaté dans plusieurs endroits - une fuite des meilleurs cerveaux qui choisissent d'aller travailler dans d'autres provinces ou pour d'autres entreprises que les universités et, par conséquent, le risque d'un vieillissement prématuré des effectifs à cause de l'absence de relève, compte tenu des fermetures de postes nombreuses qui se faisaient au fur et à mesure des départs.

Voilà donc clairement expliquées les raisons de notre adhésion non équivoque aux propositions du mémoire de l'Université du Québec, un mémoire qui opte pour un financement qui garantisse une amélioration qualitative des activités universitaires.

Au-delà de cette adhésion, l'UQAH soumet son mémoire. Il est succinct parce qu'il vise à attirer l'attention sur une particularité fondamentale qui, déjà, est annoncée dans le mémoire commun de l'Université du Québec. L'Université du Québec à Hull est encore une université en émergence selon la formule du mémoire commun de l'Université du Québec. "Notre mémoire rappelle le contexte historique et sociopolitique de l'Université du Québec à Hull. Du point de vue historique, l'Université du Québec à Hull commence à zéro, sans héritage appréciable, dans des conditions adverses de financement, et prend de plein fouet les compressions budgétaires au moment où elle connaît une croissance moyenne de 10 % des effectifs étudiants par année. . .

Au plan sociopolitique, l'Université du Québec à Hull est située dans la troisième agglomération urbaine du Québec, tout près et faisant partie finalement du centre administratif canadien dans le milieu international représenté par Hull-Ottawa. II suffit d'y séjourner pour le constater. Moi qui viens d'une autre région, très rapidement, ce qui m'a frappé depuis mon arrivée, c'est la proximité des ambassades, de l'ACDl, enfin, des institutions internationales aux frontières de l'Ontario, donc, de la province la plus riche du Canada.

Que fait l'UQAH dans ce contexte historique et sociopolitique? Elle a développé ses programmes en parant au plus urgent. Si on regarde la programmation de l'UQAH, on trouvera plusieurs formations professionnelles: sciences comptables, sciences administratives, relations industrielles, les disciplines reliées au secteur de l'éducation, les arts plastiques, le travail social, le nursing, et tout cela pour offrir des créneaux intéressants aux jeunes de l'Outaouais.

On sait que 40 % des jeunes de l'Outaouais québécois fréquentent l'UQAH, qu'il y a fuite de 60 % d'entre eux quand ils poursuivent leurs études universitaires. L'UQAH, là où elle est présente, c'est-à-dire dans les domaines que j'ai énumérés, réussit bon an mal an à accaparer 81 % des jeunes de l'Outaouais qui la choisissent comme université en premier choix. Donc, là où nous sommes implantés, nous prétendons que nous répondons aux attentes des jeunes de l'Outaouais québécois.

Qu'a fait l'UQAH au-delà de cela? D'abord, elle a adopté un style de gestion rigoureux. Elle a été parcimonieuse dans l'allocation des ressources. Son contexte, à cet égard, l'a favorisée. Les chargés de cours de qualité sont nombreux dans la région où elle est implantée et, bien sûr, si on regarde les coûts de l'enseignement, l'UQAH offre une performance intéressante, favorisée par un contexte qui est tout à fait particulier.

Par ailleurs, elle a contrôlé sévèrement ses dépenses. Donc, allocation parcimonieuse des ressources, accompagnée d'un contrôle rigoureux des dépenses. Cela lui a permis de se constituer un patrimoine - je pense que c'est le mot qu'on a à dessein utilisé dans notre mémoire - un patrimoine fait de ressources humaines de qualité - je pense que le recrutement a été fait avec beaucoup de soin de la part de la communauté universitaire de l'Outaouais - et des ressources physiques appréciables. Je pense qu'on a accumulé des choses qui, auparavant, faisaient dramatiquement défaut dans l'Outaouais québécois parce que tout le monde, bien sûr, était porté à se retourner vers Ottawa pour trouver les services d'enseignement supérieur. Donc, il a fallu développer les ressources physiques. Maintenant, on a quelque chose entre les mains qui est important et impressionnant. Par ailleurs, le patrimoine est aussi constitué d'un surplus accumulé, chose rare dans le réseau des universités aujourd'hui, d'un surplus accumulé au prix de ce que j'ai indiqué, c'est-à-dire de cette gestion rigoureuse qui a eu cours à l'Université du Québec à Hull.

C'est avec, en quelque sorte, ce patrimoine et trois autres atouts qui sont importants pour nous: le poids démographique. La région de l'Outaouais est en expansion et elle réclame des services. II

y a des analogies à faire entre la situation des soins de santé dans l'Outaouais québécois et la situation de l'enseignement supérieur. On sait qu'on veut rapatrier la clientèle québécoise dans les hôpitaux de la région de l'Outaouais. On pourrait dire la même chose pour ce qui est de l'enseignement supérieur. Donc, la démographie qui est en expansion chez nous et avec un potentiel important.

De plus, le temps. L'Université du Québec à Hull est toute jeune, elle a peu de tradition mais le temps joue en sa faveur.

Finalement, l'équité vis-à-vis d'autres populations d'autres régions du Québec. C'est-à-dire, pourquoi les habitants de l'Outaouais québécois devraient-ils obtenir des services d'enseignement supérieur inférieurs ou de moindre qualité ou de moindre quantité que d'autres populations d'autres régions du Québec. Ce sont des choses qui jouent en faveur de l'UQAH.

Il faut donc, me semble-t-il, que les parlementaires et tous ceux qui touchent de près ou de loin au système de l'éducation reconnaissent l'UOAH comme une université en émergence. En contrepartie, l'Université du Québec à Hull planifiera systématiquement son développement selon les traditions de l'Université du Québec.

Au plan de la formation - je pense que le mémoire mentionne cela - nous souhaitons, bien sûr, un élargissement de la programmation de base. Donc, bien sûr, les secteurs professionnels ont été privilégiés. Maintenant, il faut peut-être ouvrir aussi à d'autres clientèles qui ne choisissent pas les filières professionnelles une programmation de base minimale. Un développement soigneusement mesuré des deuxième et troisième cycles et en recherche de sorte que, s'il fallait caractériser la position de l'Université du Québec à cet égard, il faudrait dire que nous résisterons, bien sûr, avec toute l'énergie dont nous sommes capables à des propositions qui limiteraient l'Université du Québec à Hull au 1er cycle. Cela consisterait, selon nous, à nous couper les ailes avant notre envol parce que, malheureusement, nous arrivons trop tard, mais nous réclamons - enfin c'est notre prétention - au nom d'une population nombreuse du Québec, d'une agglomération urbaine, comme on le rappelle dans le mémoire. Cela ne veut pas dire, par ailleurs, qu'il faille développer toute la gamme de la programmation ou encore des recherches dans tous les domaines. Pour ce faire, nous affirmons bien haut et bien clairement que nous sommes prêts à faire ce développement en concertation avec les autres constituantes du réseau UQ. Jusqu'à maintenant, les constituantes ont fait la preuve qu'elles pouvaient, de façon responsable, développer dans les secteurs d'excellence sans déborder trop largement les cadres de ce qui est requis pour éviter les dédoublements, en tenant compte aussi des autres universités du réseau québécois.

Nous faisons beaucoup d'exercices de simulation en essayant de tenir compte des endroits où les autres universités du réseau québécois sont engagées. Et aussi en dicussion - et nous ne refusons pas cela -avec les universités de la région de la capitale nationale: l'Université d'Ottawa, l'Université Saint-Paul et l'Université Carleton.

Au delà de cela, et c'est peut-être une nouvelle information, comme le président nous invitait à en faire au passage au début, qui n'est pas contenue dans notre mémoire, lorsque nous aurons une planification rigoureuse, c'est-à-dire un plan de développement qui pourra dire clairement à ceux qui veulent nous écouter nos intentions de développement, qu'on aura aménagé cela avec les intentions des autres pour éviter les dédoublements, il faudra aussi se pencher sur une question très importante pour l'Université du Québec à Hull, ses aménagements physiques, son campus. Pour quelqu'un qui vient d'une autre région et qui arrive en Outaouais, il est forcé de constater que les aménagements physiques de l'Université du Québec à Hull sont passablement défaillants. Enfin, c'est une université éclatée; c'est une université qui, chaque année, arrive difficilement à fournir les espaces pour accueillir une population étudiante qui est en expansion.

Considérant l'ensemble de ces éléments, nous prions M. le ministre et ces messieurs, dames, membres de la commission, de considérer que nos recommandations particulières, qui se résument à deux, viennent s'ajouter aux propositions dont la commission a été saisie par la Corporation centrale de l'Université du Québec et représentent bien les intérêts d'une université en émergence.

Les deux propositions sont: qu'on corrige les effets négatifs qui découlent du décalage entre l'arrivée des nouvelles clientèles universitaires et le versement des subventions correspondantes - vous comprendrez qu'on a eu à souffrir de cette règle - et qu'on accorde aussi des subventions de démarrage adéquates aux universités qui doivent faire un rattrapage important sur le plan de la programmation.

M. le Président, membres de la commission merci beaucoup de votre attention.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie beaucoup, M. le recteur, de la qualité de votre présentation. Je vous rappelle qu'il reste environ une heure et cinq à la disposition de la commission pour discuter avec les gens qui vous accompagnent ou avec vous, comme vous le jugerez à propos. À 11 h 35, j'aviserai le porte-parole

de l'Opposition et le ministre qu'ils auront chacun cinq minutes, à part égale, pour conclure.

J'invite le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science à prendre la parole. M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, nous sommes toujours heureux de nous retrouver sous votre houlette qui nous minute le temps d'une façon rigoureuse, avec des assouplissements -nous le souhaitons toujours - vers la fin.

Je voudrais tout d'abord saluer M. le recteur de l'Université du Québec à Hull et les personnes qui l'accompagnent et leur dire que je garde un très bon souvenir de la visite que j'ai faite à l'Université du Québec à Hull - je crois que c'était en février dernier - et profiter de l'occasion pour féliciter M. Plamondon de sa nomination au poste de recteur et de lui souhaiter un fructueux mandat. J'adresse également mes voeux de bon travail à tous les membres de la délégation.

Comme l'a dit M. Plamondon, l'Université du Québec est encore une université en émergence. Par conséquent, on ne peut pas l'apprécier ou la juger à l'aune des critères qui pourraient servir à apprécier une institution établie depuis longtemps. Nous comprenons très bien ça.

M. le recteur a fait allusion à de nombreux problèmes qui se posent dans la perspective d'un développement normal. Il a parlé de l'insuffisance des programmes qui sont offerts actuellement pour répondre aux besoins et aux attentes de la population de la région. Il a parlé également du caractère insatisfaisant des installations physiques que j'ai pu observer moi-même. Je pense que, avec le temps, il y aura sûrement des correctifs à apporter de côté.

Je voudrais, nonobstant ces conditions que nous connaissons, adresser des félicitations aux responsables de l'institution pour le travail accompli jusqu'à maintenant et signaler qu'en peu de temps, on a réussi dans plusieurs disciplines à tracer une place intéressante pour l'Université du Québec à Hull et surtout à ouvrir des voies qui pourront sans doute se prêter à des développements intéressants dans l'avenir.

M. le recteur a mentionné tantôt qu'il était solidaire avec les membres de sa délégation des recommandations présentées a la commission la semaine dernière par l'Université du Québec. Par conséquent, nous ne reviendrons pas sur cette partie de leur mémoire qui est très importante même si elle occupe une place limitée dans le texte qu'on nous a lu, je pense que c'est un élément dont nous devons tenir compte. (10 h 45)

À ce sujet, j'aurais peut-être une première question à vous adresser, M. le recteur. J'aimerais que vous nous disiez comment vous percevez le lien de l'Université du Québec è Hull avec le siège social de l'Université du Québec et son insertion dans le réseau que constitue l'Université du Québec, les avantages que vous en retirez, l'importance que vous attachez è ce lien ou que vous n'y attachez point. C'est votre réponse qui m'intéresse, je n'ai pas de jugement préalable là-dessus. J'aimerais que vous nous disiez ce que le siège social représente à vos yeux, et surtout la notion réseau, qu'est-ce que cela peut apporter, qu'est-ce que cela apporte déjà à l'Université du Québec à Hull?

M. Plamondon: Je suis relativement nouveau dans ce réseau. Anciennement, j'étais à l'Université de Sherbrooke donc, j'en ai une expérience encore toute récente. Cependant, ce que je constate à fréquenter les organismes mis sur pied par l'Université du Québec pour assumer la vie en réseau, je pense que ce sur quoi j'insisterais au premier chef, c'est sur le souci de la qualité qu'elle nous fait partager lorsqu'on est dans des constituantes qui sont de taille modeste.

C'est sûr qu'exceller dans le domaine de l'enseignement supérieur et dans la recherche, cela suppose un jeu, entre les pairs, d'autocritique, de stimulation, d'émulation et je pense que la corporation centrale a mis sur pied des occasions pour fouetter en quelque sorte des petites constituantes comme la nôtre, qui, autrement, seraient en vase clos et n'auraient pas suffisamment de ressources à l'interne pour, chaque fois, s'assurer de ce retour avec des yeux critiques sur la programmation qu'elles proposent, sur les activités qu'elles envisagent, qu'elles développent, etc.

Le siège social a très bien fait ce genre d'exercice. L'exemple le plus facile qui me vient en tête spontanément, c'est celui de la planification. Je pense qu'elle contraint, tous les trois ans, les universités du réseau à planifier leur développement de façon très visible, de le dire, d'en discuter le contenu avec les autres constituantes du réseau. Â cet égard, au sujet d'une plus grande qualité dans nos activités, compte tenu de nos petites tailles, et je parle principalement pour les constituantes à qui cette description correspond, le réseau joue ce rôle tout à fait essentiel.

Sur le plan de la concertation, à l'occasion des négociations collectives, je pense que c'est inutile de le mentionner, la preuve en a été faite dans les années récentes. Il y a eu concertation de la part du réseau, et moi qui étais à la CREPUQ, c'est-à-dire la Conférence des recteurs et principaux des universités du Québec et responsable des négociations au cours des ans, j'ai toujours admiré cela chez les gens du réseau de l'Université du Québec. La grande importance qu'ils mettaient à se

concerter autour d'objets comme la négociation. C'est un autre exemple.

Finalement, je pense que - et là tout le monde en convient dans le réseau, me semble-t-il - la corporation centrale nous donne aussi d'autres types de services qui consistent à des services communs, que ce soit pour les supports pédagogiques comme les bibliothèques, l'informatique ou encore des achats communs pour des avantages sociaux, le régime de retraite, etc.

Donc, on a donc trois volets où, depuis mon entrée en fonction, j'ai pu constater que ces services étaient fournis par la corporation centrale et appréciés de la part de ceux qui venaient des régions ou des constituantes.

M. Ryan: II y a une autre question qui me préoccupe. Vous parlez dans votre mémoire de la région immédiate de Hull et de l'Outaouais du côté du Québec et, en même temps, vous signalez que vous vous situez dans un ensemble démographique beaucoup plus large qui comprend également la population située de l'autre côté de la rivière. Justement, de l'autre côté, il y a deux universités importantes, deux grandes universités. Comment voyez-vous la situation de l'Université du Québec à Hull par rapport à ces deux universités? Quelle est la force d'attraction de ces deux institutions sur la clientèle en provenance de la région de Hull, la partie québécoise du grand territoire de la capitale nationale, et les perspectives d'avenir? En d'autres termes, vu la présence de ces deux institutions solidement établies de l'autre côté, dont l'une offre un bon nombre de services en langue française, est-ce que l'Université du Québec à Hull n'est pas vouée en quelque sorte à demeurer pendant longtemps une institution relativement mineure par rapport à ces deux institutions plus larges? Quelles sont les conséquences et les implications de cela?

M. Plamondon: M. le ministre, votre question est lourde et, bien sûr, ma réponse doit passer par des considérations d'ordre politique. Il est bien sûr que les parlementaires ici réunis et tous ceux qui sont associés au système d'éducation québécois auront l'occasion de se situer par rapport à cet important problème. Ce que j'ai dit dans ma présentation verbale, c'est que, là où nous sommes implantés, c'est-à-dire dans les filières professionnelles principalement que j'ai énumérées, nous contrôlons bien -passez-moi l'expression pour parler de choses semblables - notre marché, c'est-à-dire que 81 % des étudiants de l'Outaouais québécois qui viennent dans les programmes que nous dispensons viennent de préférence chez nous. Nous offrons les études en français. Vous avez dit qu'Ottawa offre beaucoup de services dans les deux langues.

Si on regarde les rapports qui ont paru concernant les services en français offerts aux francophones hors Québec, on mesure bien cependant les problèmes qui restent encore à résoudre à l'Université d'Ottawa et ailleurs. On suit dans les journaux ce débat qui est ouvert depuis que les francophones hors Québec ont tenu, par exemple, leur colloque national sur l'enseignement postsecondaire en langue française à l'extérieur du Québec, les 10, 11 et 12 mai 1985. Bien sûr, l'Université d'Ottawa est présente et offre des services en français dans plusieurs disciplines. Mais, dans plusieurs autres, particulièrement du côté des sciences appliquées, elle offre ses services en anglais. Nous pouvons prétendre, je pense, qu'elle est un puissant instrument d'assimilation et que les services que nous pourrions offrir, si on nous permettait de développer notre programmation, seraient de préférence choisis par les francophones de l'Outaouais québécois et, parfois aussi, par des francophones hors Québec qui, malgré tout, fréquentent nos programmes. Enfin, on voit le phénomène inverse, on voit des francophones hors Québec venir dans nos programmes. Peut-être la question des frais de scolarié joue-t-elle pour beaucoup, mais on se plaît à croire que c'est aussi en vertu de la bonne réputation de nos activités là où nous sommes implantés.

Avec ces institutions, bien sûr, il ne s'agit pas pour nous de refuser une concertation - c'est cela que j'ai essayé de dire dans la présentation - entre autres, dans le domaine de la recherche où, si jamais on voulait en faire des entreprises communes au niveau des 2e et 3e cycles, il pourrait être fort important de développer nos relations avec les universités de la capitale nationale.

On me souligne que j'aurais peut-être dû donner deux informations d'entrée de jeu, pour répondre à votre question. D'abord, l'Université de Carleton, on le sait, dispense tous ses services en anglais. Pour ce qui est des services à l'Université d'Ottawa, du côté des sciences, on estime que c'est à plus de 80 % en anglais et, en général, à plus de 70 % en anglais. D'autres cas particuliers: on peut souligner, par exemple, dans le secteur des sciences comptables, que notre université accueille plusieurs étudiants de l'Université d'Ottawa qui veulent se qualifier aux examens du CA et, par ailleurs, dans certains secteurs où nous sommes implantés -je pense que c'était une des missions primordiales de l'Université du Québec comme réseau au moment de sa formation -notre présence du côté des sciences de l'éducation et, bien sûr, le développement qu'on peut y faire parce que, l'éducation étant de compétence provinciale, il y a toutes les idées de qualification. On peut penser, par exemple, au PPMF que nous sommes les seuls à pouvoir donner aux

enseignants du Québec.

M. Ryan: J'ai regardé ia liste des programmes qui sont offerts par l'Université du Québec à Hull. Je pense que c'est dans l'annexe 4 de votre mémoire. Il y a un certain nombre de choses qui m'ont intéressé dans cette liste-là. D'abord, on voit les domaines où il y a une concentration plus grande des services offerts, par exemple, l'administration et les sciences comptables, les sciences sociales, le travail social, l'éducation, l'informatique. Je pense que ce sont peut-être les grands domaines de concentration de votre université. Je voudrais vous poser deux questions. D'abord, j'ai remarqué que sur la liste de programmes - il y en a une cinquantaine - il y en a pratiquement une trentaine qui sont des programmes de certificat. D'abord, je pense que c'est peut-être l'institution où l'importance relative des programmes de certificat est la plus élevée par rapport aux programmes de baccalauréat. Je pense que cela se reflète également dans la proportion des diplômes qui ont été décernés au cours de la dernière année. Je pense qu'il y a un nombre pas mal plus élevé de diplômes de certificat qui ont été décernés. Est-ce une orientation que vous entendez, avec le temps - je ne veux pas employer une expression biaisée - redresser ou modifier quelque peu?

M. Plamondon: Oui, sûrement. Je pense que les facteurs historiques que j'ai évoqués expliquent assez bien que l'Université du Québec à Hull ait voulu, d'abord, s'implanter et, bien sûr, répondre à des demandes qui lui venaient de la part d'adultes qui voulaient se perfectionner. Je pense que l'Université du Québec à Hull l'a bien fait. Au départ, la plupart de ses programmes étaient offerts et destinés à ces clientèles à temps partiel. Elle a desservi la région. Vous le savez, je pense que le mémoire montre aussi l'énergie considérable que l'Université du Québec à Hull a mise à desservir des centres, entre autres, Lachute avec le Centre multiservices, Maniwaki, on pourrait faire une énumération fort longue, et à dispenser ses programmes à temps partiel. L'heure est peut-être venue... Cela se sent dans la nouvelle configuration de nos clientèles, c'est en train de revirer, c'est-à-dire qu'il y a progressivement croissance de la fréquentation de nos programmes par des étudiants réguliers à temps plein, donc des jeunes qui s'inscrivent chez nous parce qu'ils viennent choisir de faire une formation de 1er cycle au départ. Je pense que notre mémoire qui annonce nos couleurs, soit développer la programmation de base, va dans ce sens-là. Ce n'est pas de développer de nouveaux certificats, mais bien d'implanter de nouveaux baccalauréats.

M. Ryan: Une brève question à propos de vos cours de certificat. Est-ce qu'il y a des consultations avec le cégep de l'Outaouais en ce qui touche les programmes qui seront offerts à la population ou si chaque institution s'en va de son côté sans consultation avec l'autre? Vous vous prodiguez pas mal dans les sous-régions, est-ce qu'il y a une concertation quelconque avec le cégep de l'Outaouais ou si vous marchez chacun de votre côté comme si l'autre n'existait à peu près pas? (11 heures)

M. Plamondon: Pour répondre clairement à la question concernant la concertation avec les institutions de la région, même si l'Université du Québec à Hull peut se vanter de certaines réalisations impressionnantes, je pense que la concertation a fait beaucoup défaut avec d'autres acteurs, y compris le cégep. Depuis l'été dernier, j'ai entrepris systématiquement de rencontrer certaines personnes, de rencontrer les forces du milieu en quelque sorte, pour tenter de mieux percevoir, mieux comprendre la problématique particulière de l'enseignement supérieur et être en mesure ensuite de nous insérer plus véritablement dans une réponse aux besoins qui nous sont à destination propre, c'est-à-dire où on est les seuls à pouvoir oeuvrer. Je pense que là-dessus, avec M. Fournier, le directeur général du cégep, on a jusqu'à maintenant franchi des étapes. Il y a eu des déclarations mutuelles d'intention et on veut une concertation plus grande entre les deux institutions.

M. Ryan: Je reviens sur la deuxième question que je voulais vous adresser, j'allais l'oublier. J'ai regardé la liste des programmes que vous offrez et il y a toutes sortes de choses, évidemment. Il y a l'administration, l'informatique, la formation pour l'enseignement des langues, etc. J'ai remarqué qu'il n'y a rien sur la religion. Il n'y a pas un programme sur la religion. Cela m'a surpris. Je ne sais pas si vous avez une explication à fournir à ce sujet. Je ne sais pas si c'est un domaine que vous déléguez complètement à l'Université Saint-Paul, de l'autre côté de la rivière, où une partie des cours se donne en latin. Cela peut être dangereux pour l'assimilation peut-être. Je ne sais pas si cela vous a frappé, M, le recteur. Je pose la question bien spontanément, mais cela m'a fait de la peine.

M. Plamondon: Je n'ai pas réponse à votre question, M. le ministre, bien sûr. Je pense que cela s'explique probablement par le contexte historique que j'ai pu essayer de camper dans le mémoire. On a paré au plus pressant. Quand on dit "élargissement de la programmation de base", on peut penser... Personnellement, vu ma formation philosophique, j'ai un intérêt plus particulier

à l'endroit de ces choses-là.

M. Ryan: Je vois que votre discipline n'est pas davantage représentée d'ailleurs.

M. Plamondon: Non. Maintenant, on pourrait imaginer des accords avec des institutions du côté de l'Outaouais ontarien parce que effectivement il y a là une présence de professeurs éminents qui pourraient rendre des services dans des disciplines comme celles qui sont absentes de la grille actuelle.

M. Ryan: Très bien. J'ai une autre question concernant le rayonnement de l'Université du Québec à Hull dans les sous-régions. À l'annexe 8, vous donnez une liste des programmes et des services offerts par l'Université du Québec à Hull dans les sous-régions. Vous en avez à Sainte-Adèle, à Valleyfield, à Lachute, à Saint-Jovite, jusqu'à Saint-Jérôme. Est-ce qu'il y a certains critères qui vous guident là-dessus? D'abord, j'aimerais savoir combien ces services-là coûtent à l'Université du Québec à Hull. Quel est le coût absolu et relatif, c'est-à-dire le coût absolu moins les revenus, que cela peut entraîner? Ce sont peut-être des choses qui s'autofinancent, je ne le sais point. Ce qui m'intéresse, c'est quand je vous vois rendu à Saint-Jovite, même à Lachute, sauf que c'est beaucoup plus proche de Montréal que de Hull - remarquez bien que je suis bien content que vous ayez certains services chez nous, à Lachute, je ne m'en plaindrai pas - et, comme ministre de l'Enseignement supérieur, je me pose la question: Est-ce qu'il y a une certaine concertation? Vous dites que vous faites partie d'un réseau.

M. Plamondon: Oui.

M. Ryan: L'Université du Québec à Montréal est aussi à Lachute et à Saint-Jérôme. Est-ce qu'il y a une concertation ou si chacun s'en va de son côté?

M. Plamondon: II y a une concertation très rigoureuse entre les gens de l'enseignement et de la recherche de Hull et ceux de l'Université du Québec à Montréal. Chaque fois que nous allons sur le territoire de l'Université du Québec à Montréal - à ce compte-là, on serait prêt à faire une concertation aussi avec d'autres institutions qui sont dans le réseau plus large des universités québécoises - chaque fois qu'on s'aventure sur un territoire comme ceux-là, c'est pour offrir des services que nous sommes les seuls à dispenser et qui sont en demande. Ces activités, on s'efforce de les rentabiliser au maximum. C'est pourquoi vous trouvez tout en bas du tableau en question les moyennes de fréquentation par groupe. À cet égard, nous réussissons, au moyen de la gestion rigoureuse dont j'ai parlé, c'est-à-dire d'une approche arborescente aux programmes de formation - utiliser lorsque c'est possible des cours à plusieurs destinations - nous réussissons, bon an mal an, à maintenir un rapport étudiants-groupes parmi les plus favorables des universités québécoises.

Ce qui nous assure, bien sûr, la situation que vous pouvez constater d'une performance au plan financier qui est particulièrement remarquable. Les frais de déplacement constituent des frais en sus; donc, ce sont des coûts qui sont liés à des frais de déplacement. Pour l'ensemble des frais de voyage par activité, on limite nos frais à 355 $ par activité dispensée à l'extérieur de Hull, en moyenne. On réussit, par ce moyen, et par le contrôle du nombre d'étudiants qui s'inscrivent dans les activités en question d'en faire des activités rentables tout en répondant è des besoins. Je pense que c'est de cela dont on s'assure au premier chef.

M. Ryan: J'ai de sérieuses réserves sur cette espèce de rayonnement presque épars. On a des institutions qui vont offrir des services à presque 200 milles de chez elles. J'ai bien de la misère à voir la rationalité qu'il peut y avoir là-dedans, je vous le dis bien simplement. Je ne vais pas plus loin pour l'instant. J'essaie de me renseigner.

Il y a une dernière question que je voudrais vous adresser et qui est capitale à mon point de vue: ce sont les projets de développement. Actuellement, la gamme de programmes offerts reste assez limitée. Il faut compléter cette gamme au niveau du baccalauréat pour commencer. Vous dites, au niveau du 2e et du 3e cycle, que vous vous opposeriez avec la dernière énergie à ce qu'on empêche l'Université du Québec à Hull de s'engager dans cette voie. Je pense que vous réalisez avec moi qu'on ne peut pas donner un blanc-seing complet non plus. C'est absolument impossible.

J'aimerais que vous nous indiquiez peut-être de manière plus précise les développements qui vous semblent hautement souhaitables à chaque niveau au cours des années à venir.

M. Plamondon: Pour répondre à cela, je pense qu'il faut d'abord parler de ce qui est déjà dans la marmite. Cela veut dire qu'on a fait des demandes, qu'on a adressé des dossiers, qui auront un grand succès ou pas -on est prêt à se soumettre à toute cette rigoureuse programmation qui passe par le Conseil des universités, qui entraîne un jugement de qualité sur les propositions que nous faisons. Bien sûr, notre proposition en termes d'enveloppe de démarrage va dans ce sens, c'est-à-dire qu'on le ferait à la pièce et pour chacun des programmes qu'on veut

implanter.

On voudrait pousser une pointe du côté des communications, pour le moment, de l'intelligence artificielle...

M. Ryan: De l'intelligence artificielle?

M. Plamondon: Oui, qui serait un sous-groupe de notre implication en informatique...

M. Ryan: L'informatique, oui.

M. Piamondon: Les sciences de la cognition. Ce sont là trois dossiers de premier cycle qui sont déjà en cours. On pense à une maîtrise du côté des relations industrielles. Si vous regardez où les relations industrielles sont offertes au Québec, vous constaterez qu'elles sont offertes dans trois institutions seulement. Chez nous il y a des relations industrielles. On pense que l'équipe est passablement compétitive avec celles des autres institutions. On pense qu'on devrait donner à ces gens de la voile, parce qu'il y a des retombées positives à avoir non pas une grande gamme d'activités aux 2e et 3e cycles et une grande gamme de recherche dans tous les secteurs, mais à avoir des équipes qui peuvent attirer des étudiants aux 2e et 3e cycles en raison de l'excellence de leurs travaux et qui peuvent, par conséquent, contribuer au plan de recherche de façon déterminée. C'est dans ce sens que nous demandons à être entendus et que nous disons: II ne faudrait pas nous couper les ailes avant notre envol. Il faut permettre à nos équipes d'excellence, dans les domaines soigneusement choisis, de développer des études plus avancées et de la recherche.

Maintenant, pour répondre plus complètement à votre question, je pense qu'il faudrait nous donner encore un an et demi, parce que c'est probablement la grande priorité du recteur présentement que d'entreprendre avec la communauté une planification tout à fait rigoureuse de ce qu'elle veut être et de pouvoir le déclarer assez hautement.

De façon générale, quand on est appelé à préciser des choses dans ce sens, bien sûr, on déclare contempler le domaine des sciences et des sciences appliquées en raison de la situation que je mentionnais au départ. Les jeunes de l'Outaouais québécois qui veulent faire des études dans ces secteurs, ou bien ils vont ailleurs au Québec, ou bien ils vont à Ottawa et plus probablement ils feront leurs études en anglais avec les risques d'assimilation que cela comporte. Peut-être qu'une présence plus résolue de l'Université du Québec à Hull dans ces secteurs est souhaitable. Maintenant, il faut étudier, je pense, l'opportunité de cela, le genre de programme que nous pourrions offrir et les coûts que cela implique pour savoir si, effectivement, on a les moyens au Québec de permettre à Hull de s'engager dans des secteurs comme cela. Mais nous sommes prêts à ce genre d'exercice rigoureux. C'est plutôt l'idée a priori que nous ne pourrons pas le faire qui nous déplaît. Nous voulons notre chance, faire la preuve que, effectivement, on peut rentabiliser des choses comme cela et le faire avec un bon degré d'excellence.

Le Président (M. Parent, Sauvé): On vous remercie, M. Plamondon. Je cède maintenant la parole au porte-parole officiel de l'Opposition en matière d'éducation, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. Plamondon, M. le recteur, messieurs, cela me fait plaisir de vous accueillir à cette commission. Je voudrais d'abord vous souhaiter le meilleur des succès dans votre nouvelle fonction, M. le recteur, et vous remercier d'avoir accepté l'invitation qui vous était faite de vous présenter en commission parlementaire. Vous avez su dans votre présentation faire ressortir l'importance indéniable de l'éducation et de l'enseignement universitaire, particulièrement dans le développement d'une communauté.

Je voudrais vous remercier de nous avoir permis une meilleure connaissance de votre université et de nous rappeler que, malgré la jeunesse de cette université, sa taille, vous connaissez déjà des succès importants. On mentionne, en pages 8 et 9 de votre mémoire en particulier les réussites assez exceptionnelles pour ne pas dire spectaculaires aux examens des corporations professionnelles des comptables de vos étudiants et le fait que l'Association canadienne des écoles de service social ait accrédité le baccalauréat en travail social chez vous. Je vous en félicite et je pense que cela témoigne de la capacité d'une université, en dépit de sa taille, d'exceller, mais, malheureusement, il semble persister des doutes dans l'esprit de trop de personnes.

Si vous permettez, il y a quelques questions que je voudrais poser pour apporter un meilleur éclairage à des questions qui vous ont été posées par le ministre de l'Éducation. J'aimerais mieux comprendre: Vous dites, par rapport au taux de rétention des étudiants de votre région, que c'est 40 % des étudiants qui s'inscrivent chez vous, sauf que le premier choix, ce 'serait 81 %. Est-ce que j'ai bien compris que, s'ils avaient le choix, à 81 % ils choisiraient d'aller à l'Université du Québec à Hull?

M. Plamondon: Les proportions c'étaient 81 % dans les secteurs où nous sommes présents.

Mme Blackburn: D'accord.

M. Plamondon: Autrement dît, un jeune de l'Outaouais qui sait que nous sommes présents en sciences comptables...

Mme Blackburn: II s'en va chez vous.

M. Plamondon: ...choisira, en premier choix, l'Université du Québec à Hull. Maintenant, compte tenu de la programmation déficiente, partielle que nous avons, c'est bien sûr que quelqu'un qui pense aller en sciences appliquées devra partir et c'est là que la proportion 40-60 vient jouer. Nous retenons dans l'Outaouais 40 % de la population susceptible de faire des études universitaires. Cela s'explique, bien sûr, par la programmation partielle que nous offrons. (11 h 15)

Mme Blackburn: J'ai constaté, M. le recteur, que vous étiez préoccupé des effets d'assimilation que pourrait constituer et que constitue certainement le fait que plusieurs des étudiants de votre région s'inscrivent dans des universités à Ottawa. Je dois dire que cela ne semble pas préoccuper davantage le ministre qui se dit que cela n'a peut-être pas plus d'effet d'assimilation que si on enseignait le latin. Il faudrait peut-être se demander si le latin a des effets d'assimiliation, sauf que les pays latins sont un peu loin de chez nous et que les dangers d'assimilation sont certainement moins grands. Mais on est fédéraliste ou on ne l'est pas, n'est-ce pas?

Par ailleurs, j'aimerais avoir des données sur le choix des étudiants de votre région, lorsqu'ils sont obligés, en raison de l'absence de programmes chez vous, de s'inscrire dans une autre université. Dans quelle proportion choisissent-ils Ottawa plutôt que d'autres universités de la région de Québec?

M. Plamondon: On me dit qu'environ 75 % choisiraient plutôt d'aller du côté de l'Outaouais ontarien dans les secteurs où ils sont présents, donc sciences et sciences appliquées. Plutôt que...

Mme Blackburn: ...d'aller à Montréal.

M. Plamondon: ...de quitter leur foyer, ils choisissent assez spontanément l'Université d'Ottawa, avec les conséquences que cela entraîne, c'est-à-dire, pour eux, bien sauvent de devoir étudier en anglais et de devoir défrayer des frais de scolarité plus élevés, compte tenu des circonstances que vous connaissez mieux que moi.

Mme Blackburn: J'ai une question touchant les programmes. J'ai pu constater, comme l'a fait précédemment le ministre, que vous aviez de nombreux programmes de certificats. Peut-on reconnaître les crédits ainsi acquis à l'intérieur d'un bac? Est-ce ainsi constitué, pour permettre cette facilité, de façon qu'un certificat puisse être une partie de bac?

La seconde chose, et il me semble que je n'ai pas retrouvé beaucoup de données là-dessus! les étudiants adultes chez vous. On sait que dans les sous-centres, probablement que ce sont tous ou en très grande majorité des étudiants adultes, mais dans vos programmes de certificats, est-ce qu'on retrouve une proportion égale d'adultes et de jeunes?

M. Plamondon: La réponse à la première question, c'est: Oui, autant que faire se peut. Pour ne pas créer de ghetto des certificats, nous tentons de permettre à un adulte qui vient chez nous pour acquérir un perfectionnement, se qualifier plus hautement, de s'inscrire à nos certificats et il peut éventuellement, s'il le désire et s'il persiste, parce qu'il y a une perdition importante en cours de route... Un baccalauréat, c'est quand même 90 crédits, c'est considérable pour quelqu'un sur le marché du travail - mais nous tentons, oui, de permettre des formations complètes au moyen des certificats.

Les certificats, selon une politique qui est recommandée entre autres par le réseau de l'Université du Québec, nous les destinons au premier chef aux adultes de telle sorte qu'on estime que 80 % des personnes fréquentent les certificats. Nous tentons, comme le Conseil des universités le souhaite, d'encourager les jeunes en cours de formation de s'inscrire plutôt à des programmes de baccalauréat et, donc, de poursuivre une formation qui est plus forte et plus méthodiquement constituée à l'intérieur d'un programme de 1er cycle de bon aloi.

Mme Blackburn: On a fait état dans la presse la semaine dernière, dans un journal de la région métropolitaine de Québec, du coût astronomique de la formation et de l'administration des universités en régions. Avez-vous des données comparatives du pourcentage de votre budget consacré à l'administration, à la gestion et de ce que coûte la formation chez vous? Évidemment, toute considération comparée de programmes...

M. Plamondon: À cet égard-là, je dois dire que l'Université du Québec à Hull, du moins dans les études du Conseil des universités, figure comme une université qui, en 1983-1984, entraînait des coûts d'administration passablement élevés. Je pense que cela a été un choix institutionnel de constituer une structure portante forte. Mais cette situation, compte tenu de la

croissance des populations étudiantes que nous connaissons, devrait aujourd'hui... Malheureusement, on n'a pas les données sous la main pour voir comment ce chiffre a varié, bien que nos données internes nous montrent qu'on se rapproche très considérablement de la moyenne des universités du Québec à cet égard. Donc, on a une structure portante qui a été mise sur pied mais qui n'a pas crû depuis, comme le démontre le mémoire, enfin, la vitesse d'accroissement de nos ressources par rapport à la croissance de nos populations étudiantes, de sorte que l'estimation que je ferais aujourd'hui, c'est que nous nous défendons bien à ce chapitre, et compte tenu de notre situation tout à fait exceptionnelle, comme le mémoire le mentionne.

Hull a toujours administré ces choses à l'intérieur des limites de son budget et même en dégageant une légère marge de manoeuvre pour des développements futurs. Je pense que l'editorial auquel vous faites allusion, si j'avais à porter un jugement dessus aujourd'hui, je dirais qu'il ne nous concerne pas. C'est-à-dire que nous croyons donner des services universitaires de qualité à des coûts qui sont comparativement favorables lorsqu'on considère l'ensemble des fonctions d'une université.

Mme Blackburn: J'ai également pris connaissance de la liste des programmes que vous offrez. Je n'ai pas vu de programme touchant le développement régional, comme je n'ai pas davantage vu, dans votre mémoire, de réelles politiques d'insertion dans le milieu et de services à la collectivité. Je dois dire que cela m'a étonnée.

Je sais que vous nous dites en page 18 de votre mémoire que "l'UQAH veut augmenter sa participation au développement de la région, tant par l'élargissement de sa programmation que par l'accroissement de ses services aux collectivités". Est-ce que c'est déjà inclus dans votre plan de développement et dans votre devis pédagogique, comme on dirait au niveau collégial?

M. Plamondon: À cet égard, je pense que tout notre mémoire, le mémoire commun de l'Université du Québec, nous campe bien en nous inscrivant sous le titre "université en émergence" plutôt qu'une "université en région". Je m'explique. Il suffit de séjourner à Hull pour bien voir que l'insertion de l'université dans le tissu urbain ne peut pas être calquée sur le mode d'insertion de l'Université du Québec à Chicoutimi dans son tissu urbain, celui de l'Université de Rimouski ou de l'Université de Sherbrooke d'où je viens.

Bien sûr, il faut que l'Université du Québec à Hull apprenne progressivement à s'intéresser à son milieu, développe des liens, par exemple, avec le cégep, et développe également le côté des services aux collectivités. Mais je pense que ce ne pourait pas être sur le modèle des universités dites en régions, tout simplement parce que l'Université du Québec à Hull, dans ce contexte, est une toute petite université entourée d'institutions de taille disproportionnée par rapport à ce qu'elle est.

Donc, bien sûr, et c'est pour ça que nous demeurons assez général sur le sujet, nous déployons des efforts pour nous mettre en contact avec les maires de la région et avec le cégep, pour rencontrer les hommes politiques, pour nous présenter dans les organismes du milieu. Mais nous ne croyons pas que notre vocation puisse être comprise de la même façon que celle de l'Université du Québec à Rimouski, de l'Université du Québec à Chicoutimi ou de l'Université de Sherbrooke pour ce qui est de notre insertion dans le milieu.

Donc, c'est important, il faut le faire, mais il faut trouver notre modèle à nous, compte tenu d'un contexte, d'une situation géopolitique décrit dans le mémoire, qui est différent et où il y a, entre autres, pour certains services universitaires, d'autres solutions, d'autres voies.

Maintenant, il ne faut pas croire par ailleurs que l'Université du Québec à Hull, à cet égard, n'a rien fait, au contraire. Je pense que le mémoire attire l'attention sur notre implication avec les personnes âgées, attire l'attention sur notre implication aussi grâce à notre centre d'étude pour les PME. Je pense que le directeur actuel, M. Collerette, fait énormément pour développer l'entrepreneurship dans la région de l'Outaouais.

Tout récemment, nous entreprenions, avec le journal Le Droit, une expérience qui est analogue à celle qui a été menée par le Soleil ici, à Québec, pour la formation de projets d'entreprises. II y a donc un cours qui est publié par le Droit à toutes les semaines. On s'inscrit au cours en question, on présente des projets d'entreprise, il y a un concours qui est réservé à ceux qui s'inscrivent à l'activité en question. Il y a des gens qui se penchent là-dessus. Tout cela, c'est pour encourager l'entrepreneurship dans l'Outaouais. Nous travaillons là-dedans avec le ministère de l'Industrie et du Commerce. Je pourrais multiplier des exemples comme cela.

Donc, l'Université du Québec à Hull fait des choses, mais compte tenu du tissu urbain dans lequel elle s'insère ces choses sont sûrement moins visibles que dans d'autres régions tout simplement à cause de sa taille et de la conjoncture de l'Outaouais québécois.

Mme Blackburn: En page 12 de votre

mémoire, vous parlez de votre centre des PME, ce qui rejoint finalement un peu ce que vous m'expliquez. Est-ce que les étudiants sont utilisés ou est-ce qu'ils font partie un peu de votre démarche de collaboration avec la PME? Autrement dit, est-ce que cela constitue, en même temps qu'un centre de services aux PME, un centre de formation pour vas étudiants?

M. Plamondon: Oui. Le centre de PME tente, autant que possible, d'associer les étudiants à la démarche engagée avec les entreprises. Enfin, là où les PME sont le plus visibles pour le moment, je pense que c'est une vaste enquête sur les hommes d'affaires, les femmes d'affaires du Québec, le projet dont j'ai parlé tout à l'heure.

Il y a peut-être une précision que j'aurais dû vous donner quand vous avez parlé de services à la collective. Il faut voir que nous avons, indépendamment des activités que j'ai énumérées, un secteur des services à la collectivité dans leque! nous avons quand même des réalisations qui sont passablement intéressantes. Nous avons d'abord répondu à des besoins de formation non crédités qui nous ont été acheminés par le réseau des affaires sociales et par le réseau de l'éducation. II y a de multiples activités qui ont été organisées sur le mode de l'autofinancement pour répondre à ce genre de besoins.

Nous avons été aussi l'université qui a organisé des voyages d'études dans les pays étrangers sur des thématiques particulières, par exemple, un voyage en Californie sur les technologies nouvelles, ou encore un voyage en Allemagne, je pense, sur les soins de santé dispensés par les États modernes.

La formule continue d'être développée chez nous. Nous invitons des intervenants à s'inscrire à des activités que nous offrons. Le voyage est soigneusement planifié avec la contribution parfois d'universités, parfois d'institutions étrangères et les personnes vont sur le terrain vérifier des choses qui se font dans les milieux autres que les nôtres. Nous avons aussi développé, grâce à cela, des collaborations avec l'étranger, principalement, la France sur l'application pédagogique des ordinateurs et les nouvelles technologies.

Donc, notre service aux collectivités est passablement actif en surplus et en surcroît de ce que j'ai indiqué concernant notre implication institutionnelle dans des aventures, en quelque sorte, qui sont destinées à notre milieu. (11 h 30)

Mme Blackburn: Tout à l'heure, vous avez un peu abordé la question de la collaboration avec le cégep. C'était davantage touchant la formation et le chevauchement possible entre certains programmes de certificat et les programmes offerts par le collège. Est-ce que vous avez d autres types de collaboration? Est-ce que vous avez envisagé, par exemple, la mise en commun d'un certain nombre de services, l'utilisation - quoique, évidemment, ce ne soient pas nécessairement les mêmes collections - de la bibliothèque, la constitution d'équipes de recherche conjointes, un certain nombre d'activités qu'on commence à retrouver dans d'autres régions?

M. Plamondon: Je pense que la collaboration que j'aimerais... Enfin, il est peut-être tôt pour l'annoncer, parce que les démarches sont à peine entreprises, mais elles progressent à un bon rythme. Je pense que l'une des choses - et notre mémoire attire l'attention là-dessus - pour lesquelles nous pensons être excellents, c'est la gestion à l'aide des moyens informatiques. Je pense qu'on a développé une expertise particulière et on a soigneusement et volontairement mis beaucoup d'insistance là-dessus, de sorte que, pour quelqu'un comme moi qui venait de l'extérieur, c'est un peu comme Alice au pays des merveilles. Enfin, l'informatique est présente à l'UQAH et l'idée d'informatique "user friendly", de l'instrument amical, à Hull, je pense que c'est une réalité. Avec le cégep, présentement, nous sommes en pourparlers pour échanger et lui rendre des services du point de vue de l'informatisation de gestion. Je pense qu'on pourra progresser à ce rythme.

Nous le faisons avec le cégep, mais nous le faisons aussi avec d'autres constituantes du réseau. Nous sommes associés par des protocoles avec l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue et avec l'École de technologie supérieure pour développer le fichier étudiant et ce, grâce à des protocoles où nous mettons nos ressources au service d'autres d'institutions moyennant une contribution de leur part à ce développement que nous envisageons. Pour ce qui est des services de bibliothèque, nous avons, en raison de ce que j'ai indiqué d'entrée de jeu concernant notre mince héritage, à faire des efforts de récupération considérables. Maintenant, nous pouvons compter aussi sur des ressources importantes. Enfin, il faut réaliser que nos étudiants -bien sûr, on essaie de leur donner ce qui est requis pour poursuivre leurs études - ont accès à la Bibliothèque nationale, aux Archives nationales, à la bibliothèque municipale de Hull, à la bibliothèque du cégep, aux bibliothèques spécialisées dans les ministères. Nous avons accès à une foule de ressources qui nous permettraient de développer des domaines d'excellence si telle était la capacité de les développer.

Mme Blackburn: Une dernière petite question. Je note que, dans la liste des programmes que vous offrez, dans plusieurs

programmes dont quelques-uns de baccalauréat, vous n'admettez plus d'étudiants. Est-ce faute de demandes? À l'annexe 4, on lit: "Les admissions à ce programme sont présentement suspendues." Est-ce à dire que le programme n'est plus dispensé, ou s'il est contingenté?

M. Plamondon: Ces exemples sont ceux pour lesquels nous n'avions pas suffisamment de demandes d'admission pour maintenir les programmes. Compte tenu de notre politique de travailler à l'intérieur de nos enveloppes budgétaires, nous avons résolument écarté la possiblité de... L'exemple qu'on donne dans le texte, vous l'aurez remarqué, c'est le baccalauréat en sciences sociales. Nous avions la permission d'offrir le programme depuis trois ans. Nous l'offrons pour la première fois cette année, parce que nous voulions nous assurer que la clientèle étudiante soit suffisante pour que le programme s'offre avec une certaine efficacité, que nous consacrions des ressources pour desservir une population suffisamment nombreuse pour éviter de retrouver des cas difficiles où le professeur s'adresse à de tout petits groupes. L'Université du Québec à Hull tente de gérer les ressources académiques de façon rigoureuse et l'exemple vous est donné par l'annexe è laquelle vous faites allusion.

Mme Blackburn: Mais ne croyez-vous pas que ce souci de rationalisation, qui vous honore et dont, semble-t-il, ne se sont pas embarrassées toutes les universités, a des effets sur votre développement? Le fait que le programme n'est pas ouvert, faute de clientèle, cela ne permet pas non plus d'en attirer.

M. Plamondon: C'est vrai qu'il y a là un choix institutionnel, mais compte tenu du contexte que j'ai décrit dans le mémoire ce choix apparaît tout à fait rationnel. Compte tenu que nous avions à développer l'Université du Quéhec à Hull dans une période de restrictions budgétaires, des choix ont été faits. Comme on le dit dans le mémoire, les choix ont été rigoureux. Nous n'avons pas voulu tout faire, nous avons voulu bien faire ce que nous entreprenions. C'est de cette façon-là, finalement, que nous nous retrouvons maintenant avec une programmation qu'il faut élargir parce que nous n'avons pas répondu à tous les besoins, avec, cependant, des atouts considérables pour entreprendre ce développement que nous souhaitons.

Mme Blackburn: Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la députée. M. le député de Sherbrooke.

M. Hamel: Bonjour, M. le recteur. Je suis très heureux de vous revoir ici ce matin. Vous avez mentionné à la page 18 de votre mémoire que vous considériez comme essentiel de développer les activités universitaires de 2e et 3e cycles. Vous avez brièvement abordé le sujet tantôt, mais j'aimerais que vous approfondissiez davantage les secteurs vers lesquels vous souhaitez aller en 2e et 3e cycles. Est-ce qu'il y a d'autres établissements que l'Université d'Ottawa qui pourraient être mis à contribution dans ce développement?

M. Plamondon: Le développement en question a quand même commencé. Je pense que l'annexe 4 donne notre présence au niveau du 2e cycle. Nous offrons une maîtrise en éducation sous le chapeau du programme de l'Université du Québec à Rimouski. Nous offrons aussi une maîtrise en gestion de projets en collaboration avec les autres institutions qui sont associées à cette maîtrise au niveau du réseau. Donc, nous travaillons déjà en concertation avec les autres. Nous serons partie du doctorat en éducation réseau. Le démarrage serait en janvier 1987. Par ailleurs, nous avons déjà dans la marmite, comme je l'ai indiqué, un développement du côté des relations industrielles. Quand on parle de développement aux 2e et 3e cycles et en recherche, c'est dans ces termes-là qu'il faut nous entendre. Nous ne voulons pas tout faire, mais il se trouve que chez nous, par un développement qui a été voulu, on a des pointes d'excellence. L'exemple qui me vient spontanément en tête concerne les relations industrielles. De ce côté-là, nous pensons qu'il est bon pour l'ensemble de notre université qu'il se fasse des activités au 2e cycle et que nous attirions - nous avons les atouts pour le faire - des étudiants soucieux de pousser leurs études dans ce secteur-là, de s'associer à des recherches. Nous pensons que les ressources professorales qui sont là sont capables de grand rendement au plan de la recherche. Ce sont donc des initiatives comme cela que nous voulons protéger et pas de chèque en blanc pour faire du 2e cycle, du 3e cycle et de la recherche tous azimuts.

M, Hamel: Merci beaucoup.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le député. M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président. M. Plamondon, il me fait plaisir aussi de vous saluer, de même que vos collaborateurs. J'aimerais soulever deux points à ce stade-ci. D'abord votre mémoire m'a fait réaliser que la croissance de vos activités et la gestion que vous avez faite des enveloppes budgétaires qui vous étaient allouées semblent avoir porté fruit puisque,

en même temps, vous avez aussi géré, je pense, une décroissance de vos ressources. Dans votre présentation de départ, M. le recteur, vous avez mentionné qu'il faut mettre fin aux compressions. Vous avez allumé la lumière rouge en mentionnant trois points que je trouve très importants. Je suis sûr que le ministre en a pris bonne note. C'est le danger d'une détérioration du climat de travail. Je ne sais pas jusqu'à quel point chez vous, à l'Université du Québec à Hull, cela a pu se détériorer puisque vous avez augmenté la charge de travail, parce que vous avez dû gérer une croissance en diminuant le personnel. La fuite des cerveaux et l'absence de relève me semblent des facteurs importants et j'aimerais savoir, dans un premier temps, M. Plamondon, jusqu'à quel point ces deux secteurs sont affectés ou en danger de l'être puisque, jusqu'à présent, vous avez réussi à bien gérer le financement et à ne créer aucun déficit, ce qui n'est pas le cas, comme l'a mentionné ma collègue tantôt, de toutes les universités. De la façon dont vous l'avez fait jusqu'à maintenant, j'imagine que vous avez réussi une espèce de tour de force, mais où en est-on rendu et quelle marge de manoeuvre a-t-on par rapport au court terme, aux prochaines années?

M. Plamondon: Tout d'abord, je pense que, pour les choses dont on se déclare fiers dans le mémoire en termes de gestion, il faut rendre hommage aux collègues qui m'accompagnent et à l'équipe de direction qui a précédé puisque c'est sous leur responsabilité que cela a été fait. Bien sûr, toute l'entrée en matière que j'ai faite, c'était pour essayer de corriger l'effet qui pourrait découler d'une lecture rapide de notre mémoire et qui dirait: L'Université du Québec à Hull présente un mémoire tronqué qui n'aborde pas les grandes questions qui font l'objet des discussions à la commission parlementaire. J'ai voulu montrer que nous adhérions au mémoire du réseau et, en conséquence, nous n'avons pas jugé utile de répéter les grandes recommandations qu'on retrouvait dans le mémoire du réseau. Mais il n'en demeurait pas moins que notre position était solidaire de celle du réseau. J'ai essayé d'indiquer ce que je savais de la vie dans les universités en termes de climat, en termes de fuite des cerveaux. J'ai eu à faire face à ces choses-là dans mon ancien poste qui était celui de vice-recteur aux ressources humaines, à l'Université de Sherbrooke.

Cela dit, l'Université du Québec à Hull n'est pas dans la même situation. Lorsque je faisais mon allocution de rentrée cette année, j'accueillais dix nouveaux professeurs. Donc, nous recrutons. Nous pouvons le faire compte tenu que nous avons connu un développement. Il y a un renouvellement chez nous qui se fait.

Pour ce qui est du climat de travail, je pense qu'il est bon à Hull. Les gens sont portés à s'associer à leur université. Je sens, dans la communauté universitaire de l'Outaouais, que les gens sont désireux de connaître des développements. Ils sont enthousiastes. Ce sont des choses que je mentionnais et qui me venaient d'expériences antérieures. Ce n'est pas sûr que l'Université du Québec à Hull ne bénéficie pas maintenant des retombées positives de la rigueur avec laquelle elle a fait face à la crise et de la situation de développement qu'elle connaît depuis les dernières années. Je ne voudrais pas être amené à particulariser le diagnostic que je posais parce que je crois qu'il s'applique généralement; et Hull, en raison des caractères qui lui sont propres, fait un peu exception à la règle à ce titre. D'ailleurs, le mémoire montre d'abord que notre corps professoral est passablement jeune, qu'on réussit à le renouveler, que plusieurs d'entre eux acquièrent une formation plus grande. Enfin, cela progresse beaucoup, les doctorats chez nous. Les projets de développement sont là dans la communauté. À cet égard, on peut se vanter, à Hull, de connaître un climat qui est propice à un développement et je dois le dire. Mais nous faisons un peu exception dans les circonstances actuelles. (11 h 45)

M. Parent (Bertrand): Merci, M. le recteur. M, le Président, il y a un autre volet dont je vais traiter rapidement puisque notre temps s'écoule. Vous avez exploité certains créneaux fort intéressants au niveau de l'informatique, de l'informatique de gestion. J'aimerais davantage savoir, concernant votre centre des PME, de quelle façon vous avez réussi, à ce jour, à avoir la collaboration des gens du milieu. Disons que le milieu de la petite et moyenne entreprises, dans une région donnée, risque fort d'avoir besoin de beaucoup de collaboration de l'université et vice versa. Je pense que l'université en régions a peut-être beaucoup plus de chance d'avoir la participation et l'implication des gens du milieu.

À la page 12 de votre mémoire, vous faites mention très brièvement de votre centre des PME. J'aimerais savoir, jusqu'à maintenant, quel genre d'enveloppe budgétaire, en termes de pourcentage ou en chiffres absolus, vous y consacrez. Deuxièmement, en termes de ressources humaines, est-ce que vous avez la collaboration du ministère de l'Industrie et du Commerce? Vous avez souligné tantôt cette collaboration. J'aimerais savoir à quel niveau elle se situe. Troisièmement, j'aimerais savoir, M. le recteur, s'il a été envisagé dans l'Outaouais, à l'université chez vous - ou ci c'est envisageable si cela n'a pas été fait - la possibilité d'impliquer le

milieu des affaires, le milieu des dirigeants de PME pour constituer un fonds ou participer à la préparation d'un fonds qui permettrait, justement, en collaboration avec l'entreprise privée, de stimuler la nouvelle génération d'entrepreneurs. Dans le fond, ce que vous allez aider à bâtir, ce sont les entrepreneurs de demain pour en faire des meilleurs gestionnaires. Je pense que cette collaboration est importante. À ce niveau, j'aimerais savoir s'il y a eu des tentatives de faites. Si quelque part cela peut se faire, c'est certainement en régions et ce serait certainement beaucoup plus difficile directement è Montréal.

M. Plamondon: Oui. Ce sur quoi il faut beaucoup insister, c'est que, pour ce faire, il faut compter sur un appui résolu de nos professeurs impliqués dans le milieu. Tout n'a pas été fait à cet égard à l'Université du Québec à Hull. Je l'ai mentionné pour le cégep, mais cela s'appliquerait mutatis mutandis à d'autres secteurs de la vie économique. L'Université du Québec à Hull n'a pas toujours jeté toutes les antennes dans le milieu. Nous tentons présentement de corriger le tir à cet égard. Entre autres, M. Collerette, dont je parlais, qui est le nouveau directeur du centre des PME, a effectivement grâce à l'expérience dont j'ai parlé dans l'entreprise conjointe avec le Droit et le ministère de l'Industrie et du Commerce, tenté d'apprivoiser en quelque sorte les futurs entrepreneurs, de les intéresser à nos activités, de les rapprocher de l'université.

Maintenant, pour ce qui est du MICQ, je voyais récemment le directeur régional qui nous disait qu'avec notre centre des PME il y avait les bases d'une recherche de fond susceptible d'encourager les initiatives des jeunes entrepreneurs. Oui, à votre question, il y a, pour le moment, des discussions qui sont entreprises entre notre centre des PME et le ministère de l'Industrie et du Commerce pour essayer d'aller plus loin dans l'encouragement de l'entrepreneurship dans l'Outaouais. Maintenant, plus précisément, le budget consacré à notre centre serait de 200 000 $ dont 10 % viendraient de l'UQAH et 90 % de contrats divers. Donc, une implication de cette petite équipe est passablement importante.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Je reconnais maintenant Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci. M. le recteur, messieurs, permettez-moi, au nom de ma formation politique, de vous remercier pour votre excellente collaboration aux travaux de cette commission. Je pense que vous avez réussi à attirer notre attention, à tout le moins la mienne, sur deux questions qui m'apparaissent importantes: la nécessité de reconnaître votre université comme étant une université en émergence et l'importance du développement de votre université comme outil de développement de votre milieu, mais comme moyen, également, de contrer une assimilation de la communauté francophone à la majorité anglophone, en raison, évidemment, de la proximité.

Je dois dire que j'ai été étonnée, quasiment désolée de voir que les députés de votre région n'étaient pas plus représentés è cette commission. Il me semble qu'il aurait été important que ces gens qui, je pense, ont un mot à dire lorsqu'il s'agit du développement des universités, d'outils de développement dans leur région, soient ici pour entendre votre plaidoyer. Est-ce que cela illustre un manque d'intérêt à l'endroit de votre université, de leur université? Est-ce que ces derniers partagent l'avis du ministre de l'Enseignement supérieur à savoir que les dangers d'assimilation, d'une part, ne sont pas très importants et est-ce que le rôle que peut jouer votre université en matière de développement ne semble pas suffisant pour retenir leur attention?

Le ministre semble s'être préoccupé d'un certain nombre de questions, mais il s'est davantage préoccupé, je dirais, du fait que vous n'offriez pas de programme en religion. Si on compare cette question aux dangers d'assimilation qui menacent les francophones dans votre région, il me semble que ce n'est pas tout à fait du même ordre. Ce n'est pas un jugement irrespectueux à l'endroit de la religion, mais je me dis qu'il y a des questions qui ont un sens et une portée et il faut en mesurer les effets dans une discussion comme celle-ci.

J'espère qu'au terme de cette commission le ministre saura reconnaître que cette université constitue un outil de développement indispensable dans votre région, qu'elle constitue un moyen de contrer cette assimilation des francophones à la majorité anglophone et que des gestes en conséquence seront pris. C'est, à mon avis, la seule façon de récompenser, si vous me permettez le terme, les universités qui ont accepté de travailler et de gérer à l'intérieur des contraintes budgétaires. Faire le contraire, ce serait, à mon avis, récompenser celles qui, précisément, ne se sont pas embarrassées de ce genre de considérations et qui, aujourd'hui, pour cette raison peuvent poursuivre un développement et ont développé certains programmes. On sait qu'on ne pourra pas les leur enlever, je ne pense pas, non plus, que cela soit souhaitable. Mais je dirais que le fait d'avoir géré à l'intérieur de vos ressources, c'est tout à fait à votre honneur. Je pense que les règles d'allocation budgétaire devraient tenir compte de ce fait et vous permettre de poursuivre votre développement.

M. le recteur, messieurs, je vous remercie.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la députée. Pour le mot de la fin, M. te ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science.

M. Ryan: M. le Président, je ne voudrais pas commencer sans d'abord répondre à certains propos de la députée de Chicoutimi qui a cédé ce matin à deux penchants qu'on lui connaît bien: celui de citer des gens de travers et celui de faire de la politique partisane avec des choses dont nous sommes convenus que nous ne devrions point en faire.

J'ai adressé des questions aux représentants de l'Université du Québec à Hull parce que je les respecte. Ce sont des questions qui sont porteuses de vérité et une question n'est pas une opinion. Je pense que la députée devrait savoir cela depuis longtemps. On peut poser une question dure. Je pense que c'est la responsabilité de ceux qui comparaissent devant nous d'y répondre. C'est très facile de poser des questions qui flattent les gens dans le sens du poil, comme on l'a fait passablement du côté de l'Opposition depuis le début de la commission. Ce n'est pas la meilleure manière de faire avancer la connaissance de la réalité. Nous autres, nous avons une approche différente et nous en n'avons point peur.

La députée a parlé de l'absence des députés de la région. Je voudrais lui dire une chose: Ces députés, il y en a deux qui sont ministres et qui sont très pris par leurs travaux respectifs; il y en a un autre qui est en commission parlementaire ce matin et deux autres qui sont retenus par leurs travaux de comté. Je voudrais lui dire une chose: Les députés de cette région m'ont apporté beaucoup plus de dossiers depuis un an concernant l'éducation à tous les niveaux que les députés de votre région. On n'en dira pas davantage là-dessus. Je ne voudrais pas que vous profitiez de circonstances bien particulières pour laisser se créer des impressions qui ne reposent point sur des faits.

Je voudrais, M. le recteur de l'Université du Québec à Hull, que vous ne soyez point scandalisé par ces propos qui nous réveillent un peu, car l'essence de la vie parlementaire, c'est le débat. Ici, à la commission, nous faisons un peu exception parce que nous avons des invités tellement civilisés, nous essayons de nous mettre à leur hauteur. Il y a toute une autre partie de nous-mêmes qu'il suffit de réveiller pour qu'elle sorte de nouveau. J'ai bien apprécié l'apport que vous avez fourni à nos débats ce matin.

En terminant, je voudrais commenter brièvement les deux recommandations qui étaient à la fin de votre mémoire. Je ne vous ai point interrogé sur ces deux recommandations parce qu'elles me semblaient aller de soi venant de vous. Je pense que c'est vrai, ce que vous dites qu'une université qui est en croissance, alors que le montant des subventions est déterminé un an ou un an et demi après que les besoins sont là, pour faire face aux exigences de la clientèle. Il y a un problème là que nous allons essayer d'examiner de près à l'occasion de la révision de la formule de financement que nous allons faire parallèlement aux travaux de la commission ici. Vous pouvez être assurés que ce point est bien noté.

Vous demandez des subventions de démarrage pour les universités qui doivent faire un rattrapage important au plan de la programmation. Il y a déjà des politiques pour le lancement de nouveaux programmes qui existent, on peut toujours les étendre sur une période un peu plus longue. Vous demandez cela, à un moment donné, que ce soit étendu sur une période de quelques années. Ce sont des choses qui peuvent être examinées. Nous le ferons à la lumière des projets dont nous sommes déjà saisis et dont vous nous avez prévenu que vous alliez nous saisir. J'en avais demandé une liste ce matin et vous me l'avez fournie. Les voies dans lesquelles vous voulez vous engager sont extrêmement intéressantes, surtout au niveau du 2e cycle. Il y a des choses qui peuvent être envisagées sans qu'on aille tous azimuts, comme vous l'avez dit tantôt. De ce point de vue là, nous serons toujours prêts à discuter avec vous.

En terminant, il faut souligner l'importance d'une présence universitaire dans la région de l'Outaouais qui est une région -je m'excuse de terminer sur cette note - à laquelle le parti que nous représentons, du côté ministériel, a toujours accordé une importance beaucoup plus grande que le parti opposé, ainsi qu'en témoignent, d'ailleurs, les résultats électoraux.

Nous avons des carences dans certaines régions que nous reconnaissons, que nous essayons de combler, mais, dans cette région, nous avons eu une présence abondante au cours des dernières années, que nous entendons continuer. Je peux vous assurer qu'avec l'aide des députés de la région je veille soigneusement à ce que la population de votre région obtienne la part qui lui revient en matière d'enseignement primaire et secondaire, d'enseignement collégial et d'enseignement universitaire. Je vous remercie.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le recteur.

La commission permanente de l'éducation et ses membres vous disent merci. Nous suspendons nos travaux pour

quelques minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 58)

(Reprise à 12 h 3)

Le Président (M. Parent, Sauvé): La commission parlementaire de l'éducation reprend ses travaux et accueille comme invités les représentants de l'École nationale d'administration publique. Elle est représentée par M. Jocelyn Jacques, directeur général.

La commission a une heure pour vous entendre. Selon les ententes que vous avez prises avec le secrétaire de la commission, environ quinze minutes vont être consacrées à la présentation de votre mémoire et, après ça, il y aura une période de 45 minutes d'échanges entre les députés et les gens qui vous accompagnent.

M. Jacques, nous vous souhaitons la bienvenue. Je vous remercie, au nom des membres de la commission, d'avoir répondu à l'appel. Soyez bien à votre aise. Vous travaillez dans un cadre formel, mais on va tâcher de rendre les échanges les plus informels possible, tout en respectant nos règlements de façon à pouvoir échanger d'une manière franche pour que la commission puisse être sensibilisée à vos préoccupations et à vos suggestions concernant l'orientation et le financement du réseau universitaire québécois.

M. Jacques, si vous voulez nous présenter les gens qui vous accompagnent et enchaîner avec votre présentation.

ÉNAP

M. Jacques (Jocelyn): Merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais d'abord vous présenter, à ma droite, Mme Lise Monette qui est cadre au ministère des Affaires municipales, qui est une diplômée de l'ÊNAP et qui est présidente de l'Association des diplômés de l'ÊNAP et, à ma gauche, M. Roland Parenteau qui, je crois, est bien connu dans le monde universitaire en général, qui est le président fondateur de l'ÉNAP et qui est actuellement directeur adjoint de l'ÉNAP à Montréal.

J'aimerais souligner, en passant, que M. Parenteau a reçu dernièrement la médaille Vanier. Pour rafraîchir la mémoire de certains, la médaille Vanier est distribuée annuellement par le Gouverneur général du Canada à un administrateur public canadien qui s'est particulièrement illustré dans son champ, soit sur le plan de l'enseignement, soit sur le plan de la pratique. Dans le cas de M. Parenteau, les deux volets étaient couverts, étant donné qu'il a fait une longue carrière et d'enseignement et de pratique dans la fonction publique québécoise.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M.

Parenteau, soyez le bienvenu et recevez aussi les félicitations des membres de cette commission.

M. Jacques: Comme ceux qui nous ont précédés, M. le Président, et sans doute ceux qui nous suivront, nous sommes réellement heureux à l'ÉNAP de pouvoir témoigner au nom de notre institution, expliquer un peu plus nos modes de fonctionnement, ainsi que nos particularités.

L'ÉNAP est une institution jeune qui a à peine dix-sept ans et qui est encore en pleine évolution. C'est une institution également petite, mais, malgré tout, nous avons des clientèles fort variées, comme nous pourrons en témoigner tout à l'heure, et, de plus, nous sommes présents dans cinq villes au Québec.

Ces particularités font que, à la différence de certaines autres boîtes universitaires, nous n'avons pas souvent l'occasion de nous faire entendre des hautes autorités. Nous sommes, et nous le constatons parfois, malheureusement un peu méconnus dans certains secteurs, d'autant plus que, comme école d'administration publique, nous sommes parfois dans des situations un peu difficiles pour prendre position publiquement sur certains dossiers ou sur certaines approches. Cela fait que cette présence, ce matin, pour nous, est d'autant plus importante qu'elle nous sera un moyen de mieux nous présenter, de mieux expliquer ce qu'est l'ÉNAP et de présenter surtout ce que nous entrevoyons comme défis.

Mon exposé introductif sera bref. Je vise à donner le maximum de temps possible pour l'échange de propos. Cet exposé reprendra les grandes lignes du mémoire que nous avons déposé. Donc, il y aura trois parties et j'insisterai particulièrement sur la première et la troisième, soit les caractéristiques. Je vais passer plus rapidement sur les activités, étant donné qu'elles sont peut-être plus connues. J'attacherai passablement d'importance à ce que nous voyons comme étant nos enjeux au niveau de l'institution.

Caractéristiques de l'ÉNAP. La première, la plus fondamentale, celle qui nous particularise beaucoup auprès d'autres institutions semblables, c'est que notre domaine d'activité est consacré exclusivement à l'administration publique. Une précision ici parce que parfois selon les réflexions ou l'image que se font certaines personnes, nous sommes uniquement dévoués au secteur gouvernemental québécois; par gouvernement, on entend, évidemment, les ministères québécois. Je crois qu'il faut rappeler que nos activités et notre champ d'administration publique couvrent à la fois le provincial, le fédéral - nous avons des étudiants, des participants qui viennent du

fédéral également - le parapublic et c'est une part très importante de nos activités. Par parapublic, j'entends, évidemment, les réseaux de l'éducation, des affaires sociales. Nous avons comme clients également les administrations municipales, ainsi que les sociétés d'État. Je crois qu'il est important de préciser cela au départ pour bien décrire notre secteur d'activité.

Autre point sur lequel j'aimerais insister en parlant de cette première particularité, soit d'être consacré uniquement, exclusivement au champ d'administration publique, c'est que, fondamentalement, notre raison d'être vise continuellement - et vous comprendrez que c'est un défi quasi perpétuel - à augmenter le professionnalisme dans la gestion publique, à, je dirais - valoriser le plus possible, à bien camper le rôle de l'administrateur public et à contribuer à faire voir les différences qui existent par rapport à l'administration privée, parce que c'est un débat qui revient continuellement, souvent.

Je voudrais tout simplement rappeler là-dessus - c'est à la page 3 du mémoire -que l'encadrement légal dans lequel fonctionne l'administrateur public est très différent, que les paramètres sociaux dont on doit tenir compte en administration publique font que la complexité est plus grande, qu'il y a le poids des contraintes politiques et, finalement, qu'il y a cette interface parfois très créatrice lorsqu'elle est bien gérée entre le politique et l'administratif et qu'il y a une complexité très grande au niveau de l'appareillage. Pensez simplement - j'aurai peut-être l'occasion d'y revenir tout à l'heure - aux mécanismes de prise de décision dans le secteur public. De façon latente, nous essayons de cultiver, d'enrichir cet esprit, de développer au Québec ce qui existe déjà - mais ce n'est jamais terminé -la notion de commis de l'État, de serviteur public, de transparence. Voilà notre champ d'action et c'est là-dessus que nous oeuvrons quasi exclusivement, c'est le vaste champ de l'administration publique.

La deuxième principale caractéristique, c'est que nous sommes une école professionnelle. Il est important de le rappeler. Nous devons faire le mariage de la théorie et de la pratique, déboucher systématiquement sur le savoir-faire, les habiletés. C'est ce que nos étudiants demandent, c'est ce que nos participants aux sessions de perfectionnement demandent. Ici j'aimerais, encore une fois, apporter une précision: école professionnelle veut aussi dire que nous nous adressons exclusivement à des personnes déjà en poste. En fait, un de nos critères, c'est au moins cinq ans d'activité comme professionnel ou cadre dans les secteurs public ou parapublic. Donc, contrairement à une certaine image populaire qu'on veut parfois associer à l'ÉNAP - j'aimerais rassurer certaines personnes - nous ne contribuons pas à créer de nouveaux fonctionnaires; nous travaillons avec ceux qui sont déjà sur place et qui oeuvrent déjà dans le secteur public. Je croyais qu'il était important de le rappeler, parce que parfois, malheureusement, on entend toutes sortes de rumeurs.

La troisième caractéristique qui dépend de la deuxième, c'est que nous oeuvrons uniquement auprès des adultes. En fait, je crois que le mot clé ici - j'attire votre attention la-dessus - c'est que, généralement, le passage à l'ÉNAP pour ces gestionnaires des secteurs public et parapublic est une occasion de ressourcement, parfois de recyclage, mais, dans tous les cas, nous l'espérons, une occasion d'amélioration. C'est une spécificité importante, le fait d'avoir uniquement des adultes, parce que, même si beaucoup de facultés, d'écoles ou de départements accueillent aujourd'hui beaucoup d'adultes, il faut comprendre - c'est normal, c'est sain - que leur objectif demeure la formation de jeunes sortant des collèges et venant acquérir une première formation. Nous nous situons par la suite, une fois que l'individu est sur le marché du travail. Par exemple - je vais essayer d'expliciter ce que cela veut dire - un jeune cadre ou un jeune fonctionnaire, soit dans les réseaux ou ailleurs, entre dans l'appareil avec un bagage de connaissances en sociologie, en économique, peu importe, et, peu à peu, gravit des échelons, atteint des niveaux où il doit gérer des personnes et se sent un peu démuni. C'est à ce moment-là qu'il fait appel à nous. (12 h 15)

Une quatrième caractéristique que nous jugeons très importante, c'est que nous répondons à des besoins qui se veulent le plus spécifiques possible. Il y a un corollaire à cela. Souvent, et de plus en plus, je dois dire - j'aurai l'occasion d'y revenir tout à l'heure - le client en général, soit l'étudiant ou le participant aux sessions, a beaucoup à dire au sujet des objectifs, de la démarche et même, chose tabou parfois dans certains milieux, ils ont un mot à dire au niveau des mécanismes d'évaluation sur l'impact de certaines de nos activités. C'est une discipline très sévère à s'appliquer, une médecine parfois un peu amère, mais notre caractéristique fait que nous ne pouvons pas éviter cela et que chez nous c'est systématique. Donc, besoins spécifiques et adaptation, voilà le point majeur que nous voulions souligner.

Nous sommes également présents sur tout le territoire québécois, d'abord pour ce qui est de notre programme de maîtrise qui est offert un peu successivement dans certaines régions, de façon plus régulière à Montréal et à Hull, mais aussi, sans doute l'avez-vous remarqué dans certains des

tableaux, par le perfectionnement, ce qui fait qu'au cours des années nous avons, évidemment, développé une expertise très forte en administration publique. Nous sommes continuellement en contact avec des administrateurs publics à quelque niveau qu'ils soient. Donc, en termes de connaissances, d'expertise, de pouls, nous avons développé des choses très intéressantes. Cela fait que les régions en particulier - et vous l'avez sans doute remarqué, comme je le disais, dans un tableau - sont avides de ces connaissances et de cette expertise, et nous jugeons de notre devoir de leur rendre accessibles ces connaissances et cette expertise que nous avons développées. Cela fait que, tant pour ia maîtrise que pour beaucoup d'activités de perfectionnement, nous sommes systématiquement présents un peu partout au Québec.

Point important particulièrement pour cette commission-ci, nous sommes là aussi différents, nous sommes un établissement - à la page 6 - qui a un degré d'autofinancement important qui tourne autour de 60 %. Pourquoi? À la suite de politiques gouvernementales - et, de toute façon, nous sommes d'accord avec ces politiques, particulièrement au niveau du perfectionnement, de même pour la recherche - il avait été décidé dans les années 1974, 1975 et 1976 que l'ÉNAP devait viser à autofinancer le plus possible ses activités de perfectionnement. Étant donné que nous voulons répondre à des besoins ad hoc les plus précis possible, le gouvernement avait jugé, et nous sommes d'accord avec cela, qu'étant donné que ce sont assez souvent des investissements il faut que les coûts réels de ces activités soient assumés par les personnes qui en profitent. C'est un des facteurs majeurs qui font qu'aujourd'hui nous nous autofinançons à environ 60 % sur le budget global de l'ÉNAP. La subvention pour la maîtrise représente environ 30 % à 55 % des activités et du budget global de l'ÉNAP, C'est une particularité. Nous aurons sans doute l'occasion d'y revenir tout à l'heure, mais, pour nous, elle est importante, elle est particulière, elle a une foule de conséquences.

Nous essayons, au point 7, de mobiliser toutes les ressources du Québec. Je pense que je dois insister là-dessus. C'était dans l'esprit des fondateurs de l'ÉNAP d'essayer systématiquement d'éviter les dédoublements, ce qui fait que nous utilisons des personnes des autres universités. Hier, dans nos préparatifs, nous avons même lancé la boutade, et je crois qu'elle est vraie, que nous utilisons des personnes de toutes les universités du Québec. Il y en a peut-être seulement une qui nous échappe. Nous utilisons également de nombreux praticiens du secteur gouvernemental ou du parapublic et même beaucoup de praticiens de l'entreprise privée. Pourquoi? Non seulement pour minimiser certains coûts, mais pour profiter au maximum de cette richesse et de toutes ces ressources qui existent. C'est une politique systématique chez nous, nous essayons d'utiliser les ressources qui existent un peu partout.

Le deuxième volet de ma présentation -je vois que le temps passe très vite, malheureusement - voudrait vous rappeler brièvement certaines de nos activités majeures. Au niveau de la maîtrise, qui est un programme très important chez nous, j'aimerais souligner que c'est une réponse à des besoins individuels constants et, je dirais, en augmentation. Pourquoi dis-je "besoins individuels"? C'est que l'individu, particulièrement dans les grandes régions, que ce soit à Montréal, à Québec ou même à Hull, a un choix énorme. Il peut aller dans des programmes de MBA. Dans d'autres universités, il peut choisir d'autres programmes. Or, chez nous, nous constatons que notre programme, précisément à cause de ses particularités, de sa spécificité, attire de plus en plus de personnes. Vous avez sans doute remarqué qu'à la page 8 il y a un tableau qui fait état de la progression des demandes pour notre programme de maîtrise. C'est très fort, c'est très intéressant et vous aurez sans doute remarqué que nous choisissons en moyenne un candidat sur deux. J'ajouterais que celui ou celle qui est choisi, un sur deux, encore une fois, termine. Donc, c'est un programme qui, tout en étant accessible, est sélectif. Cela aussi a des conséquences. Nous y reviendrons tout à l'heure. Mais cela répond à des besoins individuels. L'individu, soit pour son organisation ou pour lui-même, désire s'inscrire à ce programme, en profiter et en faire profiter son organisation.

J'insisterai rapidement sur un point à la page 9. C'est différent du MBA. Parfois, il y a confusion ou, parfois, on voudrait qu'il y ait confusion. Â nos yeux, c'est très différent. J'ai expliqué tout à l'heure le contexte dans lequel l'administrateur public fonctionne. J'ajouterai qu'il y a des contenus très spécifiques. Sciences politiques, économie du secteur public, comptabilité publique, droit administratif, finances publiques, évaluation des politiques, prise de décision, voilà autant de sujets ou de thèmes qui ne sont pas traités ordinairement dans un programme de MBA. C'est un programme pour tout le secteur public, je le répète. Les participants, les étudiants viennent d'un peu partout, du fédéral, de l'étranger, des autres provinces, etc. C'est, finalement, une maîtrise qui est présente en régions. Je n'insisterai pas là-dessus; je pense l'avoir déjà indiqué.

Pour ce qui est du perfectionnement, je rappellerai encore une fois un point important. Il y a des chiffres qui vont peut-

être vous surprendre et, chaque fois que je les cite - encore une fois, c'est peu connu ou pas assez connu - beaucoup de personnes ont des surprises. Le perfectionnement, ce sont des activités plus courtes, plus ad hoc qu'un programme de maîtrise, qui répondent le plus possible à des besoins définis. Grosso modo, depuis quelques années, nous touchons 8000 à 9000 personnes au niveau du perfectionnement dans des activités très variées, très diversifiées et qui, le plus souvent et de plus en plus, sont définies conjointement avec les organisations.

C'est un tournant, une évolution majeure. À mesure que les ressources se raréfient, les organisations attachent de plus en plus d'importance au perfectionnement de leur personnel. Elles doivent donc être le plus sûres possible de l'impact des sommes d'argent qu'elles investissent. Chez nous, c'est majeur è tel point que les activités strictement individuelles, les activités que l'on offre, en général ou de base, correspondent actuellement à environ 20 % seulement de nos activités. Ce qui est en augmentation et ce, d'une façon très rapide, ce sont les programmes organisationnels où on doit s'asseoir avec les organisations, mieux définir leurs besoins et voir comment, par nos activités, on peut essayer de répondre à ces besoins. C'est cela qui est en croissance, qui est en évolution très rapide. Cela se veut donc une réponse adaptée à des besoins changeants et les besoins changent très vite.

À la page 13, vous avez sans doute été également frappés par la diversité des clients au perfectionnement, par leur nombre qui est très important et par leur provenance, y compris au niveau régional, et c'est ce qui apparaît à la page 14.

Une autre particularité - je terminerai là-dessus pour ce qui est du perfectionnement - c'est que ce sont des produits qui sont non seulement évolutifs, qui changent rapidement, mais ils sont très diversifiés. Il y a deux points majeurs qu'il faut retenir. D'abord, il y a les formats. Il y a une souplesse très grande dans la diversité des formats et vous comprendrez qu'avec des adultes, des personnes qui travaillent, nous devons être très innovateurs. Il y a le niveau des formats. Cela varie de deux jours ou une journée à des programmes de 30 jours échelonnés sur un an et deux ans, selon les disponibilités des personnes, des budgets des organisations, etc.

L'autre aspect sur lequel il faut insister: les lieux de diffusion sont également très diversifiés, très flexibles. Parfois, c'est chez nous, parfois, c'est dans les organisations, parfois dans des endroits ou locaux que nous louons. J'attire également votre attention sur les contacts que nous avons aussi avec beaucoup d'associations de toutes sortes. C'est à la page 15. Nous négocions des ententes et tout, et tout.

Au niveau de la recherche, il y a un facteur caché dans tout cela. Nous avons voulu présenter nos principaux secteurs de développement de la recherche, les principaux secteurs sur lesquels nous nous interrogeons, nous nous penchons. La face cachée dans tout cela, ce sont tous les projets d'intervention qui sont faits à l'ÉNAP. Il y a 882 gradués. Chaque gradué a fait un projet d'intervention. C'est l'équivalent d'une thèse, mais il y a une particularité. Habituellement, les thèses apparaissent dans les productions intellectuelles des universités. Chez nous, c'est moins connu parce que c'est différent d'une thèse. Qu'est-ce qu'un projet d'intervention? C'est un problème concret sur lequel un étudiant, avec l'aide d'un professeur et d'un tuteur de son organisation, se penche, essaie de contribuer à le résoudre et propose des recommandations à la fin. De cela, il y en a eu 882. C'est très varié, très général. Vous comprendrez qu'à la limite cela contribue énormément à notre expertise et à nos activités de recherche ou de contribution à la société. Cela n'apparaît pas dans les statistiques à cause des particularités d'un projet d'intervention qui n'est pas une thèse comme telle,

II y a, pour ce qui est de la recherche, évidemment, une insistance sur la fonction de connaissance du fonctionnement de l'appareil administratif. Nous avons énuméré là certaines contributions importantes. Il y a aussi une fonction d'évaluation, sur laquelle je reviendrai en conclusion. Cet équilibre est difficile pour l'ÉNAP, ce défi. Il faut être critique vis-à-vis de l'appareil, mais en même temps pas trop parce qu'on n'aime pas la critique parfois, malheureusement, dans nos sociétés et, particulièrement, vis-à-vis de certaines administrations. Mais, nous devons le faire. Il faut user parfois de beaucoup de stratégie et de différentes façons de remplir ce rôle.

Une fonction conseil en gestion qui prend de plus en plus d'importance. Une fonction de diffusion, ce sont toutes nos publications, les nombreux colloques, séminaires que nous avons chaque année, etc. J'attire votre attention sur une autre particularité qui fait l'envie de beaucoup de personnes. Nous retrouvons à l'ÉNAP, au CEPAQ, au centre d'étude, au centre de recherche, la mission gouvernementale, c'est-à-dire un groupe de hauts fonctionnaires qui sont détachés pendant un an, deux ans, chez nous pour contribuer aux enseignements, pour contribuer aux recherches et profiter, eux aussi, de ce séjour pour faire un certain recyclage ou renouvellement dans leur carrière. J'espère avoir l'occasion d'y revenir tout à l'heure parce que c'est une particularité, c'est une entente que nous avons avec le Conseil exécutif, entente qui

fait des jaloux à plusieurs endroits dans le monde, même si parfois on peut entendre d'autres choses concernant la mission gouvernementale.

Au niveau international, je dirais que, comme toute université, nous n'avons pas le choix, c'est-à-dire que nous devons être présents. Nous participons à la communauté universitaire. Cela contribue au rayonnement de nos ressources, cela contribue à adapter nos cours et de plus en plus le tout a des conséquences économiques pour le Québec. J'attire votre attention sur trois activités principales ou projets majeurs dont on a entendu parler.

J'en profite aussi pour peut-être rectifier certaines choses que j'ai entendues, parce que nous sommes très fiers de nos réalisations au niveau international, elles sont très bien cotées; les sources d'aide ou de financement sont très diversifiées, Banque mondiale, etc., Fonds monétaire, ONU, ACDI, programmes de l'UNESCO. Nos réalisations sont très appréciées, très bien vues. Malheureusement, nous entendons certaines remarques qui consistent à dire: L'ÉNAP fait de la concurrence au secteur privé là-dedans. J'aimerais préciser ceci: Lorsque nous sommes en concurrence dans ces secteurs -et cela a été le cas pour certains gros projets - je pense, entre autres, au Costa Rica où nous avons des programmes importants au niveau de l'aide, de la maîtrise et au Cameroun, où c'est la création d'un institut supérieur de management - nous sommes en concurrence, oui, mais avec d'autres universités et des universités anglophones. Dans le cas du Cameroun, c'est une université américaine. Dans le cas du Costa Rica, c'est une université ontarienne. (12 h 30)

II y a concurrence, oui, mais pas avec le privé parce que ce sont des secteurs, je le répète, le champ de l'administration publique, où nous avons réellement une expertise et notre statut fait que les gouvernements, les organismes internationaux nous confient certains mandats très particuliers d'aide à des gouvernements, ce qui se ferait plus difficilement avec certaines entreprises privées. Je tenais à le préciser parce que, malheureusement, j'ai entendu toutes sortes de remarques là-dessus dernièrement et cela ne m'a pas plu du tout.

Je termine avec les enjeux, rapidement. Nous avons voulu insister là-dessus, je dirais, un peu plus en conclusion pour différentes raisons, mais voici les enjeux tels que nous les voyons. Comme école professionnelle, il nous faut et rapidement contribuer encore plus au ressourcement et au recyclage des cadres en matière de gestion publique. Pourquoi? Vous le savez, je pense. Le contexte change rapidement, les conditions socio-économiques changent, les cadres qui sont habitués à certains modes de comportement, à certaines attitudes doivent se questionner et se réévaluer. Nous devons contribuer encore plus à cela.

Il nous faut, deuxièmement, c'est impératif, définir de nouveaux moyens de collaboration entre l'ÉNAP et l'ensemble de la fonction publique. Si, d'une part, notre arrimage a été, je dirais, plus facile, plus naturel, pour différentes raisons historiques sur lesquelles je ne veux pas revenir, avec les réseaux, cela a été plus difficile avec la fonction publique pour différentes raisons. Mais, il ne faut pas lâcher, il faut revenir à la charge là-dessus et soyez assurés qu'à l'ÉNAP nous voulons être innovateurs là-dedans. Et cela touche le troisième point: il faut par tous les moyens, par des stages, par des séjours, par des échanges de personnes, mettre l'expertise que nous avons acquise au cours des années, les spécialistes de l'ÉNAP, encore davantage à la disposition des organismes publics. Actuellement, je dirais que le "timing", entre guillemets - je m'excuse de l'expression - est meilleur que jamais, mais il n'est peut-être pas plus facile. Mais il nous faut insister là-dessus, trouver des nouvelles façons de mettre cette expertise à la disposition de l'appareil gouvernemental.

Il faut - je pense que tout le monde vous l'a dit et c'est particulièrement vrai chez nous - stimuler la recherche appliquée. Pourquoi? Parce que vous savez que nos institutions publiques actuellement sont remises en question, sont évaluées et il y a des remises en cause qui se font. Il faut contribuer en termes de solutions, de pistes, à cette démarche. Autre défi: accentuer la coopération universitaire avec l'ensemble des autres institutions. Nous le faisons déjà beaucoup et il nous faudra le faire étant donné les conditions des ressources. Accroître et stabiliser en même temps les revenus de l'ÉNAP; c'est la particularité sur laquelle nous pourrons revenir tout à l'heure.

M. le Président, comme conclusion, j'aimerais revenir sur un point et peut-être expliquer notre position. Vous avez sans doute constaté que nous avons mis peu d'emphase sur le financement comme tel. Pourquoi? J'espère que vous n'en concluez pas que nous sommes riches. Ce n'est pas le cas. Sauf que j'ai expliqué un peu que notre position d'école d'administration publique fait que sur de tels sujets nous sommes un peu mal à l'aise, à tout le moins, publiquement.

J'aimerais rappeler ceci, cependant: Si notre situation financière n'est pas catastrophique, c'est que nous avons dû poser des gestes énormes, il y a quelques années. Peut-être que les membres ne sont pas au courant, mais l'ÉNAP, dans les années 1981-1982, a mis de nombreuses personnes à pied. Par exemple, au perfectionnement, il y avait 41 postes remplis, 48 d'acceptés en principe

et, aujourd'hui, ils sont quinze à plein temps. Nous n'avons pas engagé de professeur à plein temps depuis six ans. Nous avons au-delà de 50 chargés de cours extérieurs à la maîtrise. Pardon! C'est 70 et plus, pour ce qui est du perfectionnement, et 30, 32 pour ce qui est de la maîtrise. Donc, si vous en concluez que nous sommes riches, que chez nous ce n'est pas un problème, c'est faux, sauf que nous sommes dans une situation particulière.

Nous avons préféré, par contre, mettre l'accent sur les problèmes qui nous paraissent de fond, qui préoccupent l'école et qui se situent tous - je vais vous les citer très rapidement - dans ce difficile équilibre dans lequel nous devons vivre qui est en même temps un défi: équilibre, contradiction peut-être entre, d'une part, servir l'administration publique, tout en sachant être autonomes et critiques. Ce n'est pas toujours facile. Satisfaire à la fois les attentes pratiques de l'administration publique - elles sont très grandes, énormes et pressantes, et on veut des solutions ou de l'aide rapide - et, en même temps, satisfaire les exigences académiques du monde universitaire, cela, je pense qu'il nous faut le garder. Suivre les courants du jour - Dieu sait qu'il y en a -tout en gardant le sens du fondamental et de l'essentiel, ainsi que de la qualité.

Autre défi chez nous, particulièrement important dans une école professionnelle: faire place à plusieurs disciplines, mais sans hégémonie d'aucune d'entre elles. Cette mission est difficile; par contre, elle nous emballe. Elle correspond à ce qui nous a été demandé par l'État québécois lors de notre création. Nous avons voulu cette rencontre un peu comme un exercice d'imputabilité, c'est-à-dire que vous avez sans doute remarqué que nous avons voulu rendre certains comptes par rapport au mandat qui avait été confié à cette institution, il y a une quinzaine d'années.

Je vous remercie beaucoup, M. le Président, de votre attention.

Le Président (M. Thérien): Je vous remercie à mon tour, M. le directeur général. Étant donné qu'il nous reste à peine 30 minutes, que chaque côté de la Chambre a moitié-moitié, c'est-à-dire 15 minutes d'un côté comme de l'autre, car nous ne pouvons reporter cela à cet après-midi puisqu'il y a déjà trois groupes à l'horaire, je passerai immédiatement la parole à M. le ministre et député d'Argenteuil.

M. Ryan: M. le directeur, M. Parenteau et Mme Monette, il me fait plaisir de vous saluer, de vous souhaiter la bienvenue parmi nous. II y a longtemps que je suis le travail de l'ÉNAP et je pense que cette institution a rendu et rend encore de grands services pour la formation de nos administrateurs publics. Vous avez signalé avec raison dans votre mémoire que le rôle de l'ÉNAP ne se borne pas à donner des cours internes pour les fonctionnaires; sa mission est beaucoup plus large que cela. Il est bien important que ce soit saisi clairement. C'est une institution dont les services ont grandement contribué à relever la qualité des administrateurs publics dans presque tous les grands secteurs de l'administration publique. Le secteur de l'éducation en particulier, qui m'intéresse davantage, a beaucoup bénéficié des services de l'ÉNAP.

L'un des seuls reproches que je ferais à l'ÉNAP, c'est que quelquefois on cherche à rejoindre nos responsables et on nous dit: Monsieur est absent aujourd'hui. Je demande: Où est-il? Il suit des cours à l'ÉNAP. Je demande quelquefois à parler à l'adjoint, on me répond: II suit des cours à l'ÉNAP. C'est arrivé dans une institution de mon comté l'autre jour et j'ai eu cette réponse-là deux fois. J'ai demandé le troisième - ce n'était pas une institution d'éducation, c'était une institution qui relève d'un autre ministère -et on m'a dit: Le troisième est en congé aujourd'hui. L'institution ne marchait pas fort, mais cela annonce bien pour l'avenir. C'est une blague que je fais pour montrer que les cours offerts par l'ÉNAP suscitent un vif intérêt à tous les échelons de l'administration publique et parapublique. Nous avons besoin de ce genre de service dans une société comme la nôtre où les secteurs public et parapublic ont connu un tel développement au cours des dernières années.

Vu que le temps est très bref, je voudrais toucher tout de suite certains problèmes qui doivent être abordés avec vous. Tout d'abord, au point de vue du financement, je pense qu'il est important de faire certaines distinctions dans ce qui a été dit. D'un côté, les programmes de perfectionnement s'autofinancent presque complètement, si j'ai bien compris. Évidemment, il y a une circonstance favorable: quand c'est une institution publique qui envoie l'un de ses administrateurs ou de ses cadres suivre des cours, en général, on va lui donner une subvention pour payer sa scolarité. Je pense qu'il y a plus de facilité de ce côté qu'il n'y en aurait dans d'autres. Je dis cela, parce que je ne voudrais pas qu'on soit tenté de reproduire le modèle de l'ÉNAP et de dire: Que les autres fassent tous la même chose. C'est beaucoup plus difficile dans d'autres secteurs de la société. Si je me trompe, vous me corrigerez, mais c'est une première impression que je voudrais livrer.

Deuxièmement, en ce qui touche le financement de vos étudiants réguliers, ceux qui sont au niveau de la maîtrise, je crois que j'ai bien compris que vous ne demandez pas d'augmentation considérable parce que,

d'après les chiffres que j'ai, les subventions que le gouvernement verse pour cette partie de votre fonctionnement sont même supérieures à la moyenne de ce qui est versé au Québec. J'ai des chiffres, je ne les mentionnerai pas publiquement pour l'instant parce que je ne voudrais pas créer une fausse impression au cas où il y aurait des erreurs ou des choses incomplètes, mais si vous avez une impression contraire, vous pouvez nous la dire, cela va nous aider. J'ai l'impression que, pour les étudiants réguliers, les subventions versées à l'ÉNAP sont supérieures, toutes proportions gardées, à celles qui sont versées dans l'ensemble du secteur universitaire au même niveau.

Cela me mène à une première question. Vous avez mentionné dans votre mémoire, M. Jacques, que vous souhaitiez pouvoir développer une collaboration avec toutes les universités. Maintenant, vous êtes attachés à une université en particulier, l'Université du Québec. Vous l'avez mentionné au tout début de votre mémoire sur un ton plutôt descriptif. Dans le reste du mémoire, il n'est pas beaucoup question de cette affiliation. Je voudrais que vous nous disiez qu'est-ce que ça vous rapporte, l'affiliation à l'Université du Québec. Deuxièmement, est-ce que ça gêne en quelque manière le développement de rapports de collaboration avec les autres universités, que vous dites souhaiter?

M. Jacques: Je vais répondre, en premier, à votre deuxième question. J'aimerais ajouter quelque chose à votre première, même si pour vous elle est déterminée. Qu'est-ce que l'appartenance au réseau de l'Université du Québec nous rapporte? Je pense que ça nous apporte beaucoup pour différentes raisons. Je pense l'avoir dit dans l'introduction: Nous sommes une jeune institution, une petite institution.

Je dois dire que le poids relatif de l'ÉNAP, si vous comparez ça à l'ensemble du réseau universitaire québécois, n'est pas majeur, et pour des raisons particulières. En plus, il y a certaines choses que nous ne pouvons pas faire, tant et si bien que l'appartenance au réseau pour nous fait que, étant membre de ce réseau important et dynamique, ça nous donne un genre de coussin ou de tampon, un genre de sécurité, si je peux dire. Je dirais que, dans le passé, n'eût été cette aide, l'ÉNAP aurait vécu des périodes très difficiles.

Donc, notre appartenance au réseau de l'UQ à cet égard comme jeune institution universitaire nous est très utile. Pour ce qui est des modes de collaboration, j'ai indiqué dans le mémoire que nous avons beaucoup de collaboration dans les régions avec les universités constituantes, que ce soit à Chicoutimi, à Hull ou à Trois-Rivières.

Nous avons également des programmes conjoints, un avec l'UQAM et l'INRS. Pour ce qui est des autres universités, il n'y a pas eu de projets concrets encore. Il y a parfois eu des discussions. C'est venu près, mais si ça n'a pas réussi, je ne voudrais blâmer personne,.. Ce n'est pas en raison de notre appartenance à l'UQ que certains dossiers ont pris plus de temps à aboutir que d'autres.

Je ne sais pas si cela répond à votre question, mais ce n'est pas un obstacle, au contraire. Mais il arrive qu'avec d'autres institutions les coopérations formelles sont plus rares. Sur le plan personnel ou individuel, c'est une autre histoire. M. Parenteau pourrait vous en parler particulièrement pour la région de Montréal. Nous utilisons systématiquement des professeurs des HEC. Même chose dans la région de Québec ou dans d'autres régions.

Sur le plan institutionnel, c'est un peu plus difficile; sur le plan personnel, ça va très bien. J'aimerais répéter que l'Université du Québec n'est pas réfractaire à ça, au contraire.

Pour ce qui est du montant de la subvention, je dirais que, grosso modo, je suis d'accord avec vous. C'est vrai que la subvention que nous recevons pour la maîtrise se compare avantageusement à d'autres. Je dirais que c'était plus vrai il y a quelques années. Cela l'est de moins en moins et il y a même des études qui se font actuellement, qui sont faites chez nous, parce que notre position fait que nous avons dû développer un système de prix de revient très poussé qui s'applique même à la maîtrise et nous avons donc des chiffres très précis.

Nous sommes même, dans certains cas, en bas de la moyenne, en se rappelant que nous oeuvrons strictement au niveau du 2e cycle. Nous n'avons pas de 1er cycle pour absorber les coûts de base ou de certains professeurs. Deuxièmement, nous sommes d'un niveau professionel et, partout, les études démontrent que les études de niveau profesionnel sont plus coûteuses. Troisièmement, nous sommes présents en régions également, ce qui occasionne des déplacements et tout. Quatrièmement, nous voulons offrir et nous offrons exactement le même programme partout, la même qualité de programme. Nous ne faisons pas de rabais pour les régions.

En tenant compte de cela, je suis, grosso modo, d'accord avec vous, M. Ryan. Nous n'avons pas è nous plaindre d'injustice à cet égard par rapport aux autres boîtes universitaires.

M. Ryan: Maintenant, vous avez mentionné dans votre mémoire que la clientèle se compose essentiellement de personnes qui sont déjà engagées dans leur carrière. Est-ce que, de ce point de vue, c'est une orientation que vous entendez

maintenir? Il n'y a pas de projet de développement dans d'autres directions?

M. Jacques: C'est une orientation que nous voulons maintenir. Étant une institution universitaire, si on regarde la question de ce côté, il y a deux pistes possibles: il y a celle - et il y a eu des discussions là-dessus d'aller vers un baccalauréat en administration publique. Cela a été systématiquement éliminé chez nous. J'aimerais que M. Parenteau complète là-dessus tout à l'heure un peu pour l'aspect historique, parce que c'est un point majeur chez nous. Pourquoi? Parce que nous avons décidé que la plus grande contribution que nous pouvions faire à l'administration publique se situait au niveau de personnes déjà en place, que les besoins étaient de cet ordre, qu'une école professionnelle ne peut pas aller au niveau du baccalauréat. Ce n'est pas notre rôle, notre mission; le gouvernement ne nous a pas créés pour cela. Cela changerait complètement les règles du jeu d'avoir des jeunes de 20, 21 et 22 ans chez nous pour un baccalauréat; cela irait très mal avec l'ensemble de nos activités, non pas parce, que ce n'est pas important, mais parce que nous jugeons que d'autres sont mieux équipés que nous pour le faire et que cela entre mieux dans leur fonction, leur rôle ou leur mission. (12 h 45)

L'autre piste, c'est, évidemment, le doctorat. Nous sommes en réflexion là-dessus depuis deux ou trois ans. Il y a différentes possibilités. Beaucoup d'hésitation de notre côté. Pourquoi? Un doctorat professionnel, c'est difficile parfois à imaginer, et on nous dit qu'au niveau du gouvernement - je parle de l'employeur gouvernement - ce n'est absolument pas une priorité; et même le simple fait que nous ayons dit qu'on discutait de cela a offusqué certaines personnes qui disaient: Qu'est-ce que l'ÉNAP fout avec un doctorat ou qu'est-ce qu'elle veut foutre avec un doctorat?

C'est très délicat. D'autant plus que les observations que nous avons faites, particulièrement aux États-Unis, démontrent que, pour un doctorat, il faut prendre carrément la voie de la recherche. Donc, ce serait un style Ph. D. qu'il faudrait plutôt que DPA. Ph. D. il y a un créneau là. Mais une des conséquences pour les autres professeurs en administration publique ou autre... Il y a un marché. Nous aurions passablement de ressources à consacrer à cela. Il faudrait le faire en conjonction avec d'autres universités, mais c'est imaginable. Sauf que nos gradués cadreraient difficilement avec cette approche, car, étant donné que la maîtrise est professionnelle, le débouché logique serait le doctorat professionnel en administration publique, et là on se pose des questions en termes d'utilité. La piste la plus raisonnable, la plus sûre serait du côté de la recherche, mais là nos étudiants, nos anciens sans doute nous feraient des reproches et diraient: Notre institution ne s'occupe pas de nous et elle développe un doctorat pour les autres. Donc, c'est discuté chez nous; c'est à l'état tout simplement de réflexion, et je ne sais pas encore ce qui va arriver. Mais du côté du baccalauréat, c'est clair, c'est éliminé.

M. Ryan: Juste une dernière question, M. le Président, qui demande une réponse très brève. La proportion des cours et des activités pédagogiques qui sont prises en charge par des professeurs réguliers, quelle est-elle?

M. Jacques: Elle est de l'ordre d'environ un peu plus de 50 %. Nous ne voulons pas, nous faisons l'impossible pour ne pas baisser en dessous de cela. Je dirais entre 50 % et 60 %, À la maîtrise, il y a environ 30 ou 32 chargés de cours. Ils représentent une charge d'environ 30 % ou 35 %. Je vous rappellerai que - je dois louer nos ressources là-dessus et il n'y a aucun privilège - les professeurs de l'ÉNAP se déplacent. Une fois par semestre, ils doivent aller en régions. Cela inclut Montréal, M. le ministre.

Le Président (M. Thérien): Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. Jacques, M. Parenteau, Mme Monette, cela me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue et de féliciter M. Parenteau pour la reconnaissance certainement méritée de votre contribution au développement et à la diffusion des connaissances en matière d'administration publique.

Si vous le permettez, je ne reviendrai pas sur votre mémoire. Il est relativement clair. Cependant, j'aimerais avoir vos commentaires sur certaines questions, peut-être pour mieux éclairer notre démarche. Vous nous dites - vous l'avez probablement un peu expliqué - que vous recevez des candidatures; c'est à la page 11 de votre mémoire. Vous nous dites recevoir des candidatures et en retenir à peu près 50 %. C'est parce que les personnes n'ont pas, soit l'expérience, soit la qualité? Qu'est-ce qui explique un écart aussi important entre les candidatures et les admissions?

M. Jacques: C'est un processus de sélection. C'est un mélange d'accessibilité, parce que nous sommes présents à plusieurs endroits, mais en même temps de sélection. Il y a, entre autres, examens de dossiers et rencontres préalables à l'acceptation des candidats et candidates. Les facteurs majeurs

qui jouent chez nous sont l'évaluation de ses supérieurs - parce que c'est une personne qui travaille - le dossier académique antérieur, car ce sont, la plupart du temps, des diplômés d'autres champs, diplômes qui remontent à quatre ou cinq ans. L'entrevue insiste beaucoup sur l'aspect motivation. Pourquoi? Parce qu'étant une école professionnelle il nous faut repérer les personnes qui veulent, qui désirent gérer. Ce n'est pas toujours facile de gérer dans le secteur public. Il faut trouver les personnes qui le désirent, qui veulent, qui sont prêtes à s'engager ou à poursuivre dans cette carrière et qui veulent des outils additionnels. C'est l'un des facteurs qui font que certaines personnes, à la suite de ces rencontres, soit se désistent ou se font dire par nous qu'elles ne sont pas nécessairement aptes à faire cela. Peut-être que Mme Monette pourrait compléter; elle a vécu le traumatisme.

Mme Monette (Lise): Oui, je pense que c'est important aussi d'assurer une certaine émulation entre les étudiants, parce que, lorsqu'il s'agit d'une maîtrise professionnelle, il reste que les étudiants doivent beaucoup travailler ensemble. C'est important d'assurer une représentativité complète de la part des régions et des secteurs de provenance. C'est ce qui peut expliquer que beaucoup de candidatures peuvent être rejetées pour différents motifs.

Mme Blackburn: Bien. Dans votre plan de développement en six points, j'aimerais revenir sur un point et peut-être vous interroger sur l'absence d'un autre. Au point 5, vous parlez "d'accentuer la coopération universitaire avec l'ensemble des autres institutions." Si je comprends, c'est essayer de briser, je dirais, certaines résistances dans les autres universités. Ai-je bien entendu?

M. Jacques: Pas nécessairement dans le sens de briser des résistances, mais je dirais que, de notre côté, surtout chez nous, nous faisons beaucoup de collaboration, particulièrement avec les constituantes de l'Université du Québec. Disons que, si on voulait "positiver" cela, il faudrait être plus "proactifs" à cet égard. Je dirais aussi que oui, peut-être briser certaines résistances, entre autres psychologiques, où chacun est un peu habitué à essayer de travailler dans son coin et à rayonner le plus possible, mais seul. De notre côté, nous avons du chemin à faire là-dessus. Il y a peut-être certaines barrières psychologiques qu'il faudra briser, mais cela se voulait très positif. Je pense avoir donné l'exemple du doctorat. Quand on l'imagine ou qu'on y pense, on pense immédiatement à le faire avec d'autres, que ce soit dans le réseau ou à l'extérieur du réseau. Je pense qu'il nous faudra, pour de nouveaux programmes, le faire systématique- ment à l'avenir parce que les ressources ne pourront pas suffire. Je pense simplement aux besoins de perfectionnement dans la fonction publique québécoise ou parapublique qui sont énormes. Il est clair que les ressources financières ne suffiront pas. Il faudra être très innovateurs pour s'allier différentes personnes ou différentes institutions.

Mme Blackburn: Vous faites largement état dans votre mémoire des services que vous rendez dans le cadre de ce que vous appelez les activités internationales de l'ÉNAP, sauf que, lorsque vous proposez un plan de développement, vous ne semblez pas favoriser le développement de ce secteur d'activité. Je vous signale juste un peu des échanges qu'on a eus à l'occasion de la quinzième assemblée annuelle de l'Association internationale des parlementaires de langue française. Comme on le sait, ces parlementaires nous viennent de plusieurs pays d'Afrique, de pays dits en développement. Ils déploraient précisément je ne dirais pas l'absence, mais la faiblesse de certains rapports ou la quantité de certains rapports des universités, des services éducatifs québécois, l'accès à certains programmes pour ces pays en voie de développement. Dans la même question, il y a au Québec ce qu'on appelle la Société d'exportation des ressources éducatives du Québec. Est-ce que vous avez des rapports avec cette société? Est-ce qu'à l'occasion on vous recommande comme étant une ressource utile dans certains cas?

M. Jacques: Pour ce qui est des orientations, vous avez noté avec une grande perspicacité que cela n'apparaît pas dans nos orientations prioritaire. Nous avons voulu nous situer, dans la conclusion, essentiellement au niveau du Québec, des secteurs public et parapublic, parce que nous jugeons que c'est là, que l'essentiel de notre mandat et les problèmes les plus urgents se trouvent.

Cela dit, nous sommes tous pris dans des contraintes de temps, etc. Que nous ne l'ayons pas inclus, cela ne veut pas dire que nous avons l'intention de ralentir ce développement qui est très intéressant, qui est qualitatif, qui est apprécié, encore une fois, partout. Tous les indices que nous avons là-dessus sont positifs. Je voudrais vous rassurer là-dessus. Notre intention n'est pas de modérer cela. Au contraire, c'est de continuer à assurer la plus grande qualité possible et d'assurer, à notre façon, le rayonnement du Québec et de ses institutions. Mais, pour des raisons d'espace, de temps et de priorité, nous ne l'avons pas indiqué dans le texte. Mais soyez rassurée là-dessus.

Pour ce qui est de la SEREQ - je crois que c'est l'institution à laquelle vous faisiez

allusion - nous avons eu des discussions avec aile, des contacts. Il y a eu des collaborations Informelles. Cela n'a jamais débouché sur des contrats ou autres, ou des ententes plus concrètes. Nous sommes au courant de l'existence de ce mécanisme et je crois que c'est tout simplement les circonstances qui ont fait que nous n'avons pas pu encore collaborer de façon plus concrète. Sans doute, cela viendra dans l'avenir.

Mme Blackburn: M. le Président, si vous me le permettez, je vais m'en aller sur un terrain relativement délicat qui touche, j'allais dire, l'image ou la perception que beaucoup ont ou entretiennent encore de l'ÉNAP. Vous en avez touché un mot tout à l'heure en disant qu'elle était en concurrence avec l'entreprise privée. On dit que c'est le Lavalin de l'éducation. Pour d'autres, c'est un refuge de "tablettes", si vous me le permettez, ce qui a probablement amené la recommandation de M. Gobeil sur l'avenir de l'ÉNAP. La presse du 19 septembre dernier nous rapportait les propos de M. Gobeil qui, si j'ai bien compris, était l'orateur invité lors de la collation des grades.

Je me faisais la réflexion que, comme école spécialisée en administration, peut-être aviez-vous eu l'occasion de faire remarquer à M. Gobeil, qui dit que, même si aucune de ses recommandations n'était retenue, cela aurait joué un rôle utile, que, généralement, on reconnaît en administration que les déclarations ou les attitudes qui ont comme effet de démobiliser le personnel, où qu'il soit, sont contreproductives. À mon avis, cela atteint un objectif qui, j'imagine, ne devait pas être le sien.

Les propos du ministre se sont faits rassurants, je pense, à votre égard. Il n'en demeure pas moins que ces propositions restent dans l'air et se trouvent à être encouragées dans un mémoire qu'on va voir, je pense, ce soir, le mémoire de la Chambre de commerce et d'industrie du Québec métropolitain. J'aimerais que vous commentiez la recommandation contenue dans le rapport Gobeil visant à modifier le mandat de l'ÉNAP et la seconde, l'autre qui nous vient, celle-là, je le disais, de la Chambre de commerce du Québec et qui recommande que vous soyez rattachés ou fusionnés - je n'ai pas très bien compris - à l'Université Laval. Cette recommandation s'appuie sur la recommandation de M. Gobeil.

M. Jacques: Voilà quatre sujets assez sensibles. Je vais répondre le plus clairement et le plus rapidement possible è ces quatre volets, si vous le permettez, M. le Président. Tout d'abord, oui, c'est vrai, j'ai entendu l'expression pour ce qui est du Lavalin universitaire québécois. Moi, je trouve cela positif parce que j'admire Lavalin à cause de ses réalisations mondiales et tout. Je ne sais pas exactement ce que cela veut dire.

(13 heures)

C'est sans doute relié à votre deuxième point, c'est-à-dire qu'on dit: Cela va en général, mais il y a beaucoup de "tablettes", entre guillemets à l'ÉNAP. D'abord, je dirais que chez nous, c'est une expression qu'on essaie d'éviter ou d'utiliser le moins possible. Malheureusement, dans la fonction publique comme dans l'entreprise privée, il y a parfois des phénomènes particuliers d'usure ou autres et, particulièrement dans l'administration publique, il y a une foule de raisons qui font qu'on peut devenir, à un moment donné, tablettes. J'utilise cette expression avec résistance mais disons qu'elle existe. Comme vous le savez, les raisons peuvent être multiples, circonstancielles et complètement hors du contrôle de la personne; malheureusement, c'est ce qui arrive le plus souvent.

Je dois dire que notre position sur cela est que, comme école professionnelle, nous favorisons au maximum l'utilisation des personnes ayant de l'expérience. Dans certains cas, si elles risquent d'avoir l'étiquette "tablette", comme directeur général et c'est la même chose qui existe chez mes collègues, nous sommes même "proactif" vis-à-vis de ces personnes. Nous suscitons leur séjour chez nous parce qu'en raison de leur expérience, en raison de leur contribution passée, elles ont beaucoup à nous apprendre et elles ont beaucoup à apprendre aux jeunes administrateurs, ne serait-ce que la façon d'éviter certaines déceptions profondes humaines et comment vivre avec cela. Chez nous, c'est très positif. Nous les utilisons abondamment dans des cours, dans des sessions et dans des missions à l'étranger. Je dois dire que, sauf des exceptions particulièrement rares, leurs performances sont incroyables. Je sais que parfois cela peut être agaçant et moi-même, cela me fâche parfois d'entendre de telles choses, mais je sais que cela existe. C'est une de nos missions d'essayer de combattre cela, d'utiliser ces personnes et d'ess8yer de les rendre le plus opérationnelles possible dans de nouveaux contextes. Mais, encore une fois, elles sont très performantes chez nous.

Pour ce qui est des recommandations du rapport Gobeil, voilà les deux derniers points de votre question. Je ne savais pas que la Chambre de commerce du Québec allait recommander cela, c'est nouveau. Par contre, pour ce qui fait référence aux intentions de l'Université Laval concernant l'ÉNAP, M. Parenteau pourra nous en parler, ce n'est pas récent. Cela remonte au début des années soixante où même l'Université Laval avait eu le mandat de fonder une institution semblable. On n'avait pas réussi à

s'entendre parce qu'il y avait des rivalités interdépartementales: administration, sciences sociales, etc. Même en 1972, à la Commission des études de l'Université Laval, l'Université Laval avait refusé une école professionnelle d'administration publique parce qu'elle n'avait pas la structure voulue pour la gérer et aussi en argumentant - c'est un document public, commission des études -qu'il n'était pas dans le rôle d'une institution comme l'Université Laval de répondre à des demandes ou à des commandites du gouvernement ou de l'administration et qu'elle n'était pas habilitée à le faire. Semble-t-il qu'elle a changé sur cela, mais on verra.

Pour ce qui est des recommandations comme telles du rapport Gobeil, je pense, que, comme dans tout débat, il y a des éléments positifs. C'est sain qu'il y ait une discussion sur cela. Je pense que l'objectif est atteint à cet égard. Chez nous, cela a eu beaucoup d'impact et il y a eu beaucoup de discussions. C'est un réveil parfois un peu désagréable, mais qui est bon sur le fond. Cependant, je ne partage pas certaines des recommandations concernant l'ÉNAP pour -très rapidement - quelques raisons. J'ai dit que notre position était difficile. On est en dehors de l'appareil et en même temps il faut être critique.

Le Président (M. Thérien): M. le directeur général, je dois vous arrêter. Je vais demander le consentement parce que le temps est dépassé. Afin de pouvoir continuer cinq minutes et que vous concluiez et qu'on laisse la parole aux deux côtés pour une ou deux minutes, est-ce qu'il y a consentement? M. le directeur général, excusez-moi. Je vous permets de conclure.

M. Jacques: Je termine très rapidement sur la recommandation du rapport. Ce serait une erreur parce que cela inclut...

Le Président (M. Thérien): Excusez-moi, M. le directeur.

M. Ryan: Une question de règlement. Je serais prêt volontiers à laisser tomber le temps qui nous est imparti à la fin de la rencontre pour que vous donniez cinq minutes de plus a M. Jacques pour compléter sa réponse; c'est très important, le point sur lequel il parle. Je ne voudrais être complice d'aucune décision qui semblerait vouloir restreindre le temps qui lui est donné pour cette question très importante. Par conséquent, j'abandonne mon petit laïus de la fin volontiers - si la députée de Chicoutimi veut faire la même chose - pour qu'on l'écoute jusqu'à 13 h 5.

Mme Blackburn: Sûrement. Je lui cède la parole si vous me laissez dire un mot, M. le Président.

M. Ryan: Pardon?

Mme Blackburn: Si vous me laissez une minute, M. le Président, je n'ai vraiment pas d'objection.

M. Ryan: Je vais devoir m'excuser dans deux minutes parce qu'il y a un déjeuner qui m'attend à 13 heures, avec un visiteur étranger. Il paraît qu'il faut être à l'heure.

Le Président (M. Thérien): Donc, vous avez un peu plus de temps pour conclure. On laissera une minute à la députée de Chicoutimi.

M. Ryan: Cela va.

M. Jacques: Je pense que sur le fond ce serait une erreur, pour une raison importante. Nous sommes à même de le constater un peu partout, pas seulement au Québec ou au Canada, mais à l'étranger. De vouloir inclure la dimension perfectionnement dans l'appareil, à court terme, cela pourrait aller, mais à moyen terme, c'est une erreur. Pourquoi? Parce que je ne connais pas de bureaucratie qui s'autocritique. C'est viscéral, ce n'est pas possible. Or, notre rôle est difficile, mais il est là et je crois qu'il est important pour le Québec: c'est non seulement de suggérer à l'appareil de nouvelles façons de faire, mais de l'amener à réfléchir sur son fonctionnement. Ce n'est pas toujours "louangeur", entre quillemets. Cela, un appareil ne peut pas le faire. Il peut le faire à court terme. On va expliquer le fonctionnement, mais cela risque de devenir rapidement du nombrilisme. C'est ce qui a été constaté partout dans le monde.

Cela dit, il y a des types de programmes qui, sans doute, se font mieux à l'intérieur de l'appareil. Nous sommes prêts, en tant qu'institution, à les négocier avec l'appareil.

L'autre volet majeur de la recommandation était de distribuer le programme de maîtrise à toutes les universités. Je pense que ce serait un gaspillage de ressources. Paradoxalement, semble-t-il, le raisonnement qui a amené cette recommandation était le suivant: il y a déjà assez de diplômés en administration publique au Québec. Je peux vous dire que je pense sincèrement que, si toutes les autres universités avaient aussi le droit de donner un diplôme de maîtrise en administration publique, il y en aurait beaucoup plus. Je ne comprends pas la base du raisonnement, là-dessus. J'ai peine à le suivre, mais on m'a dit que c'était le genre de rationnelle qui avait amené cette réponse.

Rapidement, voilà mes réactions. C'est positif, cela amène à s'interroger. Il y a une

ouverture que nous pouvons faire face à certains programmes qui devraient se faire à l'intérieur de l'appareil, je pense. Sur le fond, sur les deux autres volets, je pense que ce serait une erreur à long terme. Un appareil bureaucratique ne se critique pas, ne s'évalue pas et on ne peut pas lui demander de faire cela.

Pour l'autre point, je pense qu'il y aurait un gaspillage de ressources. Le Conseil des universités, en 1973, a recommandé que l'ÉNAP garde sa maîtrise et qu'elle soit la seule à la garder, précisément parce que les ressources qui font un alliage de la pratique et de la théorie, dans l'administration publique, sont très rares. On n'a pas les ressources qu'il faut. Je parle de maîtrise professionnelle. Si on a en tête un autre type de maîtrise, c'est une autre histoire.

Le Président (M. Thérien): Merci beaucoup. Donc, je céderai la parole à Mme la députée de Chicoutimi, pour une minute.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais vous rassurer. Mes propos ne voulaient remettre en question ni la qualité de votre enseignement ni sa pertinence. Pour avoir recommandé des employés qui étaient sous ma direction, à un moment donné, à la maîtrise chez vous, c'est que j'y crois. Effectivement, je pense que vous faites un travail fort utile.

Je ne voudrais pas, non plus, que mes propos soient mal compris car, avec vous, je partage le malaise qu'on a lorsqu'on utilise le terme "tablette". Cela ne voulait pas porter un jugement sur la qualité et la compétence de ces personnes. Je dirais même que c'est le contraire. Je trouve que c'est malheureux parce que c'est devenu péjoratif. Quand on utilise des personnes qui ont souvent une longue expérience de l'administration publique, qui ont besoin de prendre un recul pour une raison ou pour une autre, cela devrait être vu de façon très positive. C'est toujours la réflexion que je me suis faite lorsqu'on entendait ce genre de propos. Ici, je trouve important de corriger l'impression que j'aurais pu laisser par rapport à ces propos. Tout ce que je me disais, c'est que, avec les nombreux changements qu'on a connus dans la haute fonction publique depuis le 2 décembre dernier, vous allez certainement avoir bientôt une banque de ressources absolument inestimable. Vous êtes probablement les seuls à l'avoir aussi importante.

M. le Président, madame et messieurs, au nom de ma formation politique je voudrais vous remercier de votre contribution aux travaux de cette commission, souhaiter que vos propos soient entendus et qu'on permette effectivement à l'ÉNAP de développer au moins les six volets qu'elle a identifiés comme étant prioritaires, souhaiter que vous attachiez aussi une importance à la coopération et à la collaboration internationale. Je vous remercie.

Le Président (M. Thérien): Je céderai maintenant la parole au député de Sherbrooke.

M. Hamel: M. le directeur général, M. Parenteau, Mme Monette, je pense que votre contribution aujourd'hui nous a apporté des éléments fort valables. Vous pouvez être assurés que nous prenons bonne note à la fois de vos commentaires mais surtout de vos recommandations. Je pense, comme tous mes collègues, que l'ÉNAP est une réponse fort originale à notre milieu d'éducation et qu'elle est là pour rester. Merci et bonne journée.

Le Président (M. Thérien): C'est à mon tour de vous remercier de votre apport à la commission parlementaire en m'excusant de vous avoir coupés à l'occasion, étant donné que le temps est un ennemi très identifiable dans les commissions. Donc, la commission parlementaire suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 12)

(Reprise à 15 h 7)

Télé-université

Le Président (M. Parent, Sauvé): La commission parlementaire de l'éducation reprend ses travaux et accueille les représentants de Télé-université. Le porte-parole de l'organisme Télé-université est M. Jean-Guy Béliveau. M. Béliveau, bienvenue. Nous vous remercions beaucoup d'avoir accepté l'invitation de la commission parlementaire de l'éducation et d'être venus nous exprimer vos préoccupations et vos suggestions sur la façon d'améliorer le financement et l'orientation du réseau universitaire québécois.

Nous avons une heure à nous, environ, M. Béliveau pour discuter. C'est donc dire que nos travaux devront se terminer vers 16 heures environ. Je vous invite immédiatement à nous présenter les gens qui vous accompagnent et à nous faire l'exposé de votre mémoire. On m'a dit ici qu'il y avait eu une entente avec notre secrétaire pour une présentation d'environ quinze minutes, peut-être 18 ou 20 minutes si cela va plus loin. Ensuite, on débutera un dialogue avec les membres de la commission.

Encore une fois, M. Béliveau, bienvenue et sentez-vous bien à l'aise. Nous sommes ici pour travailler ensemble.

M. Béliveau (Jean-Guy): Je vous

remercie, M. le Président. Vous me permettrez de vous présenter les gens qui m'accompagnent. À ma droite immédiate, M. François Renauld, qui est le président de notre commission de la Télé-université; c'est un membre socio-économique qui est par ailleurs directeur général de la Corporation professionnelle des comptables en administration industrielle du Québec. À mon extrême droite, M. Guy Bertrand, vice-président aux communications de l'Université du Québec, corporation centrale; il représente notre lien avec la corporation centrale. À ma gauche immédiate, M. Roger Bédard, actuellement notre directeur de l'enseignement et de la recherche. À mon extrême gauche, M. Laurent Petit, directeur des affaires administratives et financières.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M.

Petit, bienvenue.

M. Béliveau: M'accompagnent aussi dans la salle quelques membres de notre commission de la Télé-université, car nous avons une réunion ce soir, après cette réunion-ci. Il nous fait plaisir de le souligner.

M. le Président, à votre invitation, je me permettrai de faire la présentation de la Télé-université en insistant sur un point particulier du mandat dévolu à cette commission, c'est-à-dire le volet qui traite des modes de concertation entre les établissements, particulièrement en ce qui a trait à la rationalisation des programmes offerts et à l'identification des champs d'enseignement et de recherche jugés prioritaires.

Dans ma présentation, je ne me référerai pas au résumé, mais plutôt au mémoire lui-même qui n'est pas tellement volumineux. Si vous voulez, je me permettrai de le feuilleter avec vous dans la présentation que je vais faire en mettant en évidence certains points qui pourraient éclairer la commission. Notre mémoire - je l'ai dit tantôt - insiste moins sur les problèmes financiers eux-mêmes, encore que nous avons des choses à dire et une certaine présentation à faire et aussi une certaine demande à la fin de notre rapport. Nous pourrons aussi répondre aux questions que vous pourrez nous poser.

C'est la bonne occasion, à la commission parlementaire, de présenter notre institution Télé-université, une des constituantes de l'Université du Québec, qui travaille à distance. On identifie assez souvent la Télé-université comme l'université de la télévision à cause du mot "télé" qui est dans notre titre. C'est une université qui travaille à distance, la télévision n'étant qu'un des médias utilisés pour véhiculer nos contenus éducatifs. J'ai pensé qu'il serait intéressant de considérer avec vous les principales caractéristiques d'un enseignement d'une institution qui travaille à distance et, par la suite, vous indiquer les réalisations de la Télé-université depuis les quatorze ans qu'elle existe maintenant et vous indiquer les pistes de développement qu'elle entend poursuivre, les nouvelles orientations qu'elle s'est données dans une contribution correcte à l'accessibilité universitaire et au développement des connaissances pour les adultes du Québec. Je vous réfère à la page 4 de notre document. J'aimerais vous en signaler certains extraits.

L'enseignement à distance possède les caractéristiques générales suivantes: une séparation de l'enseignant - personne ou organisation - et de l'étudiant; une facilitation de l'apprentissage de l'étudiant par la planification systématique des démarches d'enseignement et l'utilisation fréquente des médias; une conception et une production de matériaux d'apprentissage spécifiques pour servir de support premier aux études; une provision pour des communications bidirectionnelles; une possibilité de séminaires occasionnels et une organisation sur une base quasi industrielle de la production et de la distribution du matériel d'apprentissage de même que de l'administration du système de formation.

Une université de formation à distance, il en existe quelques-unes à travers le monde. Ce sont des organisations assez récentes qui datent d'une vingtaine d'années et qui ont été créées à la suite de la création en Angleterre de l'"open university" vers les années 1968-1969. Il existe, bien sûr, des cours par correspondance depuis la fin du XIXe siècle, ce n'est pas une institution récente. Des cours d'enseignement à distance avec auto-apprentissage assistés d'intervenants qui peuvent guider l'étudiant dans sa démarche, cela date plutôt de 1968-69. Il s'en est créé en Israël, il s'en est créé en Thaïlande, il s'en est créé dans beaucoup de pays en voie de développement. La Télé-université s'inscrit dans cette vague de création d'établissements et sa mise sur pied date de 1974.

Qu'est-ce qu'un enseignement de formation à distance peut faire? Vous avez aux pages 4 et 5 une certaine indication. D'abord, offrir des programmes de base de 1er cycle valables pour tous ceux qui sont empêchés, par manque de disponibilité en temps et en espace (éloignement, incapacité de sortir ou de bouger) ou par manque d'assurance (décrocheurs, personnes en quête de formation discrète). Ce type de formation de base peut se faire particulièrement par des programmes de baccalauréat général.

Une institution de formation à distance peut aussi offrir à des cohortes précises et nombreuses un cadre de formation qui corresponde à une vie professionnelle sans localisation fixe et qui se déroule selon des rythmes différents de ceux qui sont habituels

sur l'université campus. Elle peut aussi offrir à des cohortes homogènes des programmes d'études à suivre sans déplacer le groupe, eh le laissant dans son milieu et en assurant une formation uniforme d'un point à l'autre. Elle peut aussi rendre accessibles et disponibles à un plus grand nombre les ressources professorales de haut calibre. Elle peut aussi réaliser le recyclage d'un grand nombre de personnes dans des secteurs qui deviennent névralgiques ou prioritaires pour une société donnée, à un moment donné, surtout lorsque ce recyclage doit être fait dans des laps de temps courts. (15 h 15)

Elle peut aussi permettre une amélioration de la vie professionnelle dans les régions éloignées, hausser le niveau de service et faciliter l'accès à un perfectionnement adéquat pour les professionnels en milieu urbain assujettis à des horaires rigides. Les professionnels en divers domaines doivent, pour maintenir leur compétence, s'engager dans une mise à jour annuelle, que la plupart des ordres, corporations et associations tendent à rendre obligatoire. Enfin, dans un contexte de collaboration, une institution de formation à distance peut médiatiser des cours répétés à de nombreux groupes à de nombreuses reprises ou à de très grands groupes. Elle peut aussi finalement explorer les possibilités d'une formation partiellement différente, en mettant sur pied des banques d'information et d'apprentissage qui permettraient à l'étudiant de bâtir son cheminement avec l'aide d'un tuteur. De nombreuses expériences se poursuivent actuellement à travers le monde dans ce domaine et le Québec trouvera certainement son intérêt à y développer une compétence particulière. Voilà quelques possibilités d'exercice d'un établissement qui travaille à distance.

Comment la Télé-université, maintenant, a-t-elle réalisé certaines des possibilités qui sont permises par ce mode de formation? Vous avez dans les pages qui suivent un bilan de la Télé-université, un bref historique du développement de sa programmation. Je suis presque rendu à la page 12. Je dois accélérer parce que le temps passe rapidement et que je voudrais surtout insister sur nos orientations. La programmation que nous avons offert jusqu'à maintenant depuis 1974: un baccalauréat en enseignement secondaire en mathématiques -les gens se souviendront du programme PERMAMA qui visait à perfectionner les maîtres en mathématiques - un baccalauréat ès arts par cumul de certificats, baccalauréat en administration par cumul de certificats en petit nombre, c'est peut-être une cinquantaine de baccalauréats que nous avons distribués de la sorte par rapport à quelque 400 baccalauréats en mathématiques. Les certificats en mathématiques, en perfectionnement des maîtres en français, "Connaissance de l'homme et du milieu", notre programme CHEM, le certificat "Connaissance de l'homme en société", notre programme CHES, le certificat "Gestion prospective du travail", le certificat "Informatique appliquée à l'éducation". Nous offrons quelque 75 cours dans l'un ou l'autre de ces programmes, et nous implantons, à compter du 1er janvier, un nouveau programme de certificat en culture scientifique et technologique, et nous préparons un programme de baccalauréat général en communication pour une approbation par les instances dans les mois qui suivent.

Au sujet des étudiants que nous servons, vous avez un graphique à la page 15 qui révèle que, depuis 1974, notre courbe d'étudiants a été ascendante. Nous servons, depuis les années 1978-1979, quelque 22 000 à 29 000 personnes par année que nous rejoignons chaque année dans l'un ou l'autre des programmes décrits précédemment.

Nous avons distribué, depuis le début de notre fonctionnement, quelque 5274 diplômes de certificat ou de baccalauréat. Nos inscriptions se font pour la plupart à temps partiel; ce sont des étudiants inscrits à temps partiel. Notre population, vous en avez une description à la page 16: 29 % des étudiants ont moins de 30 ans; 40 % ont de 30 à 39 ans; 31 % ont plus de 40 ans; et près de 70 % des étudiants s'inscrivent chez nous à cause de notre formule pédagogique très particulière.

Quant à la satisfaction des étudiants, on vous réfère à une enquête de M. Roberge, du Conseil des universités, qui dit qu'il y a un taux de satisfaction assez élevé. L'avantage de notre mode de formation, c'est que les adultes peuvent demeurer dans leur milieu de travail. Ils n'ont pas à se déplacer; nous les rejoignons à domicile en leur faisant parvenir une documentation écrite, une documentation visuelle, une documentation audio et même une documentation de format ordinolingue avec l'utilisation des micro-ordinateurs. Ils peuvent aussi avoir accès à certains de nos cours en écoutant la télévision. Nous croyons que le fait de conserver les étudiants dans leur région, sans les forcer à se déplacer pour aller à un centre, procure des économies apréciables de temps, etc.

La trajectoire de notre développement. C'est surtout là-dessus que je voudrais insister et je vois que le temps passe très vite. Nous nous sommes donné récemment dix nouvelles orientations - je me raccrocherai directement aux modes de concertation entre les établissements quand je vais aborder les orientations - qui visent à mieux préciser, à mieux cerner le rôle de la Télé-université dans le système universitaire québécois. La première orientation que nous

nous sommes donnée à l'interne et que nous avons fait approuver à toutes les instances de l'Université du Québec, y compris à l'assemblée des gouverneurs, vise à développer une programmation de programmes longs - nous disons longs par rapport aux programmes de certificat que nous offrions surtout auparavant - de programmes de baccalauréat de type général. Nous croyons que la plupart des universités du Québec offrent beaucoup de programmes spécialisés. Il y a très peu de programmes de type général. Nous voulons développer ce type de formation, quelques baccalauréats généraux mais, pour l'instant, un diplôme collé sur notre axe de développement: l'information et la communication. Je reparlerai tout à l'heure de la forme particulière que devrait revêtir ce baccalauréat de type général.

Une deuxième orientation concerne les études avancées. Nous n'avons pas l'intention pour l'instant de développer des programmes de 2e ou de 3e cycle, mais nous offrons nos services aux universités de notre propre réseau, aux universités du Québec en général pour médiatiser un certain nombre d'activités de 2e cycle qu'elles pourraient offrir sur l'ensemble du territoire. Nous avons une expertise très fine dans la médiatisation de contenus et une expertise aussi très fine dans la logistique de la dispensation des cours à distance. Cette orientation dit que nous sommes prêts è la mettre au service de la communauté universitaire.

La troisième orientation porte sur le développement de la recherche. Si nous voulons être une université qui progresse, nous n'avons pas nécessairement besoin d'un 2e et d'un 3e cycle mais nous avons besoin de faire de la recherche pertinente à nos activités à l'éducation des adultes et à notre axe de développement. Nous avons l'intention de nous y consacrer.

La quatrième orientation parle d'offrir des cours de formation continue et sur mesure en misant au maximum sur la programmation et en visant la rentabilité. C'est un peu le programme d'aide aux corporations professionnelles qui ont des clientèles dispersées sur le territoire québécois et qui voudraient les rejoindre par un programme unique et faire de l'"updating" ou de l'"upgrading". C'est du perfectionnement qui est parfois crédité, parfois non crédité, qui n'appartient pas toujours è des programmes universitaires. Nous avons l'intention de nous en occuper.

La cinquième orientation porte sur les modes d'intervention à distance que nous avons l'intention d'assouplir. La définition parfaite d'une institution de formation à distance comporte une "disconnexion" dans le temps et dans l'espace. C'est la définition la plus pure de l'enseignement à distance.

Dans le développement de nos baccalauréats, nous avons l'intention de développer une formule nouvelle que nous pensons inédite au Québec qui verrait à offrir des programmes de baccalauréats et permettre à l'étudiant de poursuivre une partie de son activité de formation, peut-être le tiers, 30 % des activités, à l'université la plus proche de chez lui. L'étudiant pourrait s'inscrire à notre programme de formation générale et suivre une partie des activités sur un mode d'une façon campus. Il pourrait y avoir équivalences, quant è la mécanique universitaire pour régler le problème de ces équivalences, en assurant le suivi de la démarche chez nous. C'est un aspect original.

La Télé-université, la sixième orientation, veut développer une banque d'activités universitaires informatisées ou télématisées en misant sur sa programmation.

Quand j'ai parlé tantôt des possibilités de la formation à distance, la dernière possibilité était le développement des communications, de l'informatique, de la télématique, combinaison de la télévision et de l'informatique; cela permet de stocker -si vous me permettez l'expression - des contenus éducatifs pour que des étudiants dispersés sur le territoire puissent y avoir accès, soit par informatique, soit par télévision. Nous pensons développer à long terme cette orientation qui nous permettrait de développer certains cours qui nous appartiennent en propre et d'héberger dans notre banque de cours des contenus qui appartiennent à d'autres universités et les mettre au service de toute la population. C'est une optique de concertation et c'est une optique de collaboration.

Septièmement, la Télé-université exerce une certaine présence à l'extérieur du Québec pour son rayonnement et sa crédibilité ainsi que pour l'amélioration de son propre rendement. Nous sommes sollicités régulièrement par des organismes de l'extérieur du Québec, qui viennent au Québec et qui sont intéressés à nous rencontrer pour voir ce que nous faisons exactement à la Télé-université. Plusieurs pensent qu'on fait beaucoup de télévision. J'ai corrigé un peu cette impression tantôt. Nous avons des relations avec quelques pays qui sont intéressés à profiter de notre expertise, à échanger avec nous, même des contenus. On peut mentionner la Chine. On peut mentionner des relations avec le Costa Rica, des relations avec la Colombie, entre autres. Des gens sont intéressés à échanger avec nous sur le plan de l'expertise et sur le plan des contenus.

Enfin, la dernière orientation porte sur la collaboration active avec la future Société de formation à distance. Le rapport de la commission Jean, le rapport de la CEFA, la Commission d'étude sur la formation des

adultes, recommandait la création d'un centre de formation à distance, un CFD "transniveau". Par la suite, cela a été modifié en une institution de formation à distance pour le collégial et le secondaire. Peu importe la forme que cela prendra, la Télé-université est intéressée à collaborer avec cette institution de toutes les façons possibles.

Les pages qui suivent décrivent un peu plus notre axe de développement, information et communication, comme je l'ai dit tantôt, nos pôles de développement. Enfin, les pages 28, 29 et 30 parlent de nos ressources et de notre financement.

La Télé-université, c'est un budget de fonctionnement de 15 000 000 $. C'est un plan d'effectifs de 212 employés réguliers, d'environ 400 employés à temps partiel qui sont à la fois des gens qui peuvent être responsables de contenus, des médiatiseurs, des gens de l'audiovisuel, des gens de télématique ou des intervenants dans le milieu qui nous aident à encadrer nos étudiants sur le terrain.

La répartition de notre budget, vous l'avez aussi au bas de la page 28, se fait entre les différentes fonctions de conception, de production, d'encadrement, selon une ventilation qui nous est propre puisqu'on est une université à caractère un peu particulier. On vous ventile aussi notre plan d'effectifs: 19 cadres, 27 professeurs à temps plein bien qualifiés, un personnel pédagogique aussi bien qualifié qui appuie l'équipe de professeurs dans le développement de nos cours. Nous croyons que les coûts de la Télé-université, si l'on considère les dépenses de fonctionnement et les dépenses d'investissements, sont parmi les plus bas au Québec. Nous avons des édifices à Montréal et à Québec, mais nous n'avons pas de gros campus puisque nos étudiants travaillent à distance. Cependant, c'est un problème pour nous parce que nous n'avons pas accès à certaines enveloppes d'investissements auxquelles les universités ont droit. Les investissements sont répartis selon le personnel en place et selon aussi les clientèles. Comme nous n'avons pas d'étudiants à temps plein, mais des étudiants à temps partiel, nous n'avons pas accès à ces budgets d'investissements de sorte que nous sommes obligés de financer notre développement technologique qui chez nous est assez considérable à même notre budget de fonctionnement et cela nous pose problème. C'est ce que nous soulignons dans ce passage.

Finalement, en guise de conclusion, j'ai le goût de vous dire que ces orientations que je viens de développer ont été suivies d'un plan triennal de développement que l'assemblée des gouverneurs vient d'adopter qui va réaliser les orientations que je viens de vous développer. Ce plan de développement traduit la volonté très ferme de la

Télé-université de continuer à travailler dans sa spécificité qui est l'enseignement à distance, par des créneaux assez précis de programmation. On a parlé de baccalauréats généraux selon une nouvelle formule de campus à distance. Tout cela en concertation, en collaboration et en complémentarité avec le réseau universitaire québécois. (15 h 30)

J'ai le goût de terminer mon exposé qui est trop long, comme d'habitude, en vous disant que nous croyons que nous faisons du travail de qualité en rejoignant les étudiants dispersés sur l'étendue du territoire québécois. Nous croyons aussi que nous sommes une institution d'avenir. Nous présentons une formule alternative valable et l'avenir vient du développement sans cesse croissant des technologies de communication. Nous occupons ce terrain. Nous développons une expertise très fine et nous entendons poursuivre avec la collaboration de tous. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Thérien): Merci beaucoup de votre exposé. Je céderai maintenant la parole au ministre, le député d'Argenteuil.

M. Ryan: M. Béliveau, MM. les membres de la délégation de Télé-université, il me fait bien plaisir de vous rencontrer. On entend parler depuis de nombreuses années du travail qui s'accomplit par Télé-université. Je crois qu'en ce qui me touche c'est la première rencontre que j'ai avec vous autres. Je voudrais souligner que j'apprécie cette occasion qui nous est fournie d'échanger sur les problèmes qui sont à la base de votre travail. Je pense que le principe même de l'enseignement à distance par le moyen de la télévision est très sain parce qu'il y a une partie de l'activité éducative qui doit reposer sur le recours aux grands moyens de communication. Au Québec, la question que nous devons nous poser, c'est celle qui découle de la multiplicité des interventions que nous faisons dans ce domaine et de la multiplicité des canaux que nous empruntons. Il y a quelques années, nous avions fondé Radio-Québec. C'était supposé être pour la télévision éducative. Cela a été beaucoup de choses en plus de cela. Il y a des institutions qui ont elles-mêmes leur installation de télévision éducative par le moyen du câble, qui est considéré comme un prolongement normal de leur activité.

Je vous dirais franchement qu'en prenant connaissance de tout le déploiement qu'a connu votre organisme j'ai été un petit peu étonné. Je ne pensais pas que cela avait pris ces proportions, surtout au point de vue budgétaire.

Je vais vous poser quelques questions qui expriment mon étonnement et mon désir

d'en connaître davantage, bien simplement. Je vois, entre autres, que la clientèle à la Télé-université, comme vous le mentionnez par les statistiques données à la page 13 de votre mémoire, a pu s'élever en tout, au cours des années qui sont touchées dans le tableau que vous donnez de 1973-1974 à 1985-1986, autour de 225 000 personnes qui auraient été touchées par Télé-université pendant toutes ces années. En gros, cela peut varier un petit peu, mais je pense qu'on n'est pas loin du compte. Je vois que pendant la même période vous avez décerné à peu près 5200 diplômes, soit de niveau certificat, soit de niveau baccalauréat. Est-ce que vous avez la proportion des diplômes de niveau certificat que vous avez décernés pendant cette période et la proportion des diplômes de niveau baccalauréat?

M. Béliveau: Oui, si vous me permettez. J'ai donné une ventilation rapide tantôt. Nos programmes de baccalauréat, si l'on considère le programme PERMAMA, le baccalauréat en mathématiques, c'est de l'ordre de 332 baccalauréats; certificat CHEM, qui a été l'un de nos gros programmes de certificat, au-delà de 4200 diplômés; et baccalauréat par cumul de certificats, il s'agit d'une cinquantaine.

Maintenant, vous avez mentionné les 225 000 étudiants que nous avons rejoints. En fait c'est peut-être environ 100 000 étudiants différents, parce qu'ils reviennent d'une session à l'autre, vous pensez bien -nous l'espérons d'ailleurs - ils reviennent d'une session à l'autre. On peut penser à peu près à 100 000 chrétiens québécois que nous aurions rejoints par notre mode, et un certain nombre de dossiers sont encore actifs. Nous avons 5274 diplômés sur les 100 000 étudiants différents environ que nous aurions rejoints. Nos chiffres de diplômation, même dans des certificats, se rapprochent de notre propre réseau. On a diplômé notre cent millième étudiant à l'Université du Québec récemment. Nous représentons à peu près 5 % des ressources de notre réseau. On a à peu près 5000 diplômés. Ce sont des chiffres très gros, non raffinés que je vous donne. C'est seulement pour donner un ordre de grandeur non raffiné.

J'aimerais aussi peut-être dire un mot... Vous avez cité tantôt Radio-Québec qui diffusait des activités qui avaient une mission éducative. Radio-Québec n'avait pas la mission de décerner des diplômes. Nous avons une mission de décerner des diplômes et une accréditation qui est sanctionnée par notre réseau, l'Université du Québec, le conseil des études et l'assemblée des gouverneurs. Nous sommes à l'intérieur de ces choses-là.

Quant à l'utilisation des technologies à des fins éducatives, j'aimerais aussi vous signaler que nous avons mis nous-mêmes sur pied, en collaboration avec les universités du Québec, un canal qui s'appelle CANAL, justement (Corporation pour l'avancement des nouvelles applications des langages) qui invite d'autres universités du Québec à utiliser aussi la télévision à des fins éducatives. Nous ne voulons pas partager en exclusivité notre expertise. Nous sommes prêts à ce que d'autres universités s'en servent aussi. Nous la développons de façon particulière.

M. Ryan: Cela complète la réponse? J'aurais une autre question à vous poser dans le même ordre de préoccupations. Avez-vous des études sur le taux de persévérance des personnes qui s'inscrivent aux cours de Téléuniversité?

M. Béliveau: Oui, il y a eu de la recherche institutionnelle sur le taux de persévérance et le taux d'abandon. Ce sont des chiffres qui méritent toute une série de pondérations. Cela dépend de ce que l'on considère par "abandon" et par "persévérance". Est-ce à l'inscription? Est-ce à l'admission? Est-ce avant l'examen? Est-ce après l'examen? Il y a une série de considérations et je préférerais peut-être, si vous vouliez avoir des détails, passer la parole à mon collègue de l'enseignement et de la recherche sur ce taux. Je peux vous dire que lorsqu'on parle de taux d'abandon, chez nous, c'est à la fois dans le programme et dans le cours. Il y a une dimension un peu particulière. Je ne sais pas si M. Bédard veut ajouter sur cela?

M. Bédard (Roger): Oui, le taux de persévérance, on ne peut chercher à le situer par rapport au nombre de diplômés parce que dans le cours de l'évolution de la Téléuniversité, à plusieurs reprises, nous avons offert des cours qui étaient complets en eux-mêmes et pour lesquels les étudiants se sont inscrits d'abord et avant tout en vue de parfaire leur formation à l'intérieur d'un cours ou de quelques cours. En conséquence, la diplomation ne peut être prise comme référence. Par contre, si l'on parle d'abandon, à ce moment le taux d'abandon doit être pris en compte en particulier à la lumière d'universités comparables. Je parle d'abandon dans les cours, parce que dans les universités à distance, en général, les taux d'abandon sont comptabilisés sur la base des cours et ils se situent à environ 30 % si on ne tient pas compte des abandons autorisés, c'est-à-dire des personnes qui vont . tout simplement chercher à voir si un cours convient à leurs attentes ou non et qui l'abandonnent de façon autorisée, c'est-à-dire avec un remboursement à l'intérieur de la période autorisée. Je ne sais pas si cela vous convient comme réponse, M. le ministre?

M. Ryan: Je n'ai pas trouvé cela

lumineux, pour être franc avec vous. J'aimerais que vous me donniez plus d'explications. Vous avez fait des recherches sur cela. S'il y avait des rapports que vous aviez à nous communiquer, cela m'intéresserait vivement.

M. Bédard: Je me suis abstenu effectivement de donner des chiffres extrêmement précis parce que je ne les ai pas en mémoire. Plutôt que de les avancer sans vérification, à votre invitation on vous fera parvenir sur cela des données numériques.

M. Ryan: Très bien. Je vais vous dire grosso modo que je me fais une équation que je sais très superficielle et je la lance seulement pour alimenter un peu la conversation. Je faisais des calculs rapides, disons que vous avez 28 000 inscriptions cette année, avec un budget de 15 000 000 $, cela veut dire que, pour chaque inscription qui est là, cela coûte au-dessus de 500 $. Il faut savoir si cela rapporte, il faut savoir si les personnes s'inscrivent, prennent une émission et, ensuite, ne continuent pas. Si le taux de persévérance est de deux ou trois leçons, cela commence à être cher. Si le taux de persévérance est très élevé, à ce moment-là c'est intéressant, mais cela devient une donnée cardinale dans l'examen de cette question. Il va falloir qu'on ait des précisions. Oui.

M. Béliveau: Oui, M. le Président. M. le ministre, si vous le permettez, il faut considérer aussi que beaucoup d'étudiants s'inscrivent chez nous, suivent quelques activités et réintègrent aussi parfois le circuit universitaire plus traditionnel. Je vous donne un exemple bien connu: plus de 50 % de nos clientèles sont des femmes. Dans notre histoire à la Télé-université, cela a souvent été ainsi; cela variait entre 50 % et 60 %. Les femmes au foyer, à l'âge de 35-40 ans, après avoir élevé une famille, désirent réintégrer le marché du travail, ont besoin de formation, hésitent souvent à réintégrer le circuit traditionnel des universités parce que leur activité des dix, quinze dernières années n'a pas toujours été très enrichissante intellectuellement. Assez souvent, ces personnes s'inscrivent à la Télé-université, elles suivent un cours ou deux et, par la suite, sur preuve de leur succès, de leur compétence, réintègrent assez souvent le circuit plus traditionnel. Elles ont acquis une confiance à ce moment-là. On est un facteur d'accessibilité au réseau universitaire plus traditionnel.

M. Ryan: Je vais vous poser une autre question dans la même ligne de préoccupation. Pour accepter une personne qui veut s'inscrire, quelles exigences mettez- vous? Mettez-vous des exigences? Y a-t-il une vérification des antécédents de cette personne? Y a-t-il un processus d'établissement d'équivalences pour les acquis soit académiques soit "expérentiels"?

M. Béliveau: Nos normes d'admission sont les mêmes que celles du réseau de l'Université du Québec. Nous partageons le régime des études de l'Université du Québec. Comme il s'agit de clientèles à temps partiel, nous avons les exigences que l'étudiant possède un diplôme d'études collégiales - c'est la même exigence que toutes les autres universités - ou encore 22 ans d'âge et l'expérience suffisante. Ce sont nos critères d'admission et d'inscription.

M. Ryan: Pour toute la période depuis le début de la Télé-université, il y a eu 5274 diplômés; pour 1985-1986, combien y en a-t-il eu au niveau du certificat et au niveau du baccalauréat?

M. Béliveau: Je ne les ai pas en tête actuellement; avez-vous cela ici? En 1984-1985, notre taux de diplomation - vous comprendrez - varie d'année en année chez nous. Dans une université campus, je le répète, vous avez une bonne partie de la clientèle qui est du 1er cycle et une cohorte qui entre en 1ère année, qui fait sa 2e, sa 3e et qui est remplacée par une nouvelle cohorte. Il y a un processus de suivi des études beaucoup plus régulier que dans la formation à distance avec les adultes. Notre diplomation varie beaucoup selon les époques. En 1984-1985, le nombre de diplômés était assez faible, il était plutôt d'environ 150 diplômés, baccalauréats ou certificats; 11 baccalauréats par cumul et, pour le reste, des certificats. L'année précédente, nous avions diplômé 976 étudiants; l'année précédente, 1089; l'année précédente, 574. C'est l'étudiant qui décide de l'intensité avec laquelle il veut poursuivre ses études. Nous ne pouvons pas le "coerciter" dans une obligation de poursuivre plus d'activités qu'il ne le veut par semaine, par mois ou par année. (15 h 45)

M. Ryan: Si vous pouviez m'adresser des chiffres là-dessus, je l'apprécierais beaucoup, mais je ne veux pas vous ennuyer davantage avec ces questions. Mais si vous pouviez m'adresser des chiffres là-dessus, de même que des données sur toute enquête ou étude qui aurait été faite sur le taux de persévérance en particulier dans les expériences que propose la Télé-université, cela me rendrait bien service. D'accord?

M. Béliveau: M. le Président, si vous me le permettez, je dirai que nous avons développé certains documents pour la visite du Conseil des universités. Le Conseil des

universités doit nous visiter dans le courant de l'automne pour répondre à une demande de lettres patentes. Alors nous avons colligé certains chiffres pour cette visite; nous pourrons en mettre certains à votre disposition.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Béliveau. Je vais seulement vous faire remarquer une chose. Les documents que vous vous êtes engagé à faire parvenir au ministre, le président de la commission aimerait beaucoup que vous en fassiez parvenir quelques exemplaires au secrétaire de la commission pour une meilleure connaissance des faits des membres de cette commission.

Je reconnais maintenant le porte-parole officiel en matière d'éducation du parti de l'Opposition, la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le directeur général, messieurs, il me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue et j'ai plaisir à vous voir là également. Je dois dire que lorsque j'entends parler de la Télé-université cela a pour moi certaines références. Je pense en particulier à TVEC. Autant je partage la curiosité du ministre pour savoir si effectivement cela mène à des études diplômées, autant il me semble me souvenir que le mandat n'était pas nécessairement d'amener les gens à la diplômation, mais davantage de les qualifier par quelques cours dont ils ont besoin, des cours d'appoint, et généralement, à moins d'avoir des contraintes physiques réelles, ils s'en vont dans les réseaux. Je dois dire que je suis un peu étonnée de cette analyse exclusivement en fonction de la diplômation, parce que je n'ai jamais compris que le mandat de la Télé-université était surtout dans cette perspective.

Le ministre me dit que le budget est dans cette perspective. Tout dépend de l'intérêt que l'on accorde à la formation, et particulièrement celle des adultes qui n'ont pas eu l'occasion d'y aller. Je sais, comme vous le savez tous, qu'il y a de 50 % à 60 % des clientèles qui sont des femmes. Alors, vous disiez tout à l'heure que l'expérience n'a pas toujours été très enrichissante. Je dirais qu'elle est davantage pas socialement reconnue. C'est autre chose.

Les frais de scolarité sont les mêmes que dans le réseau, bien. Pouvez-vous nous dire si, selon vous, dans le cas où il y aurait un dégel des frais de scolarité, cela aurait des effets sur le niveau d'inscription, donc sur l'accessibilité?

M. Béliveau: Cela en aurait certainement sur l'accessibilité, mais dans quelle mesure? Nous n'avons pas de chiffres. Il n'y a pas d'enquêtes de faites à ce sujet. Il n'y a pas beaucoup de publications non plus.

Nous pensons que cela peut affecter l'accessibilité et, pour nos clientèles, dans la mesure où 50 % de notre clientèle sont des femmes au foyer, cela peut diminuer leur accessibilité. Certainement. Dans quelle mesure? Je ne le sais pas. Je n'ai pas de réponse.

Mme Blackburn: Vous dites que l'avenir, et c'est ce que j'ai longtemps cru... L'enseignement à distance, particulièrement dans un pays comme le nôtre où les distances sont effectivement grandes, est appelé à un avenir extrêmement prometteur. Vous rejoignez une clientèle importante. Mais, selon vous, est-ce que cela a la même ferveur qu'au moment où on a commencé à le penser avec TVEC? Est-ce que cela a toujours aussi la même pertinence? Vous allez me dire oui, parce que l'on connaît le taux de diplômation chez vous, le taux de scolarisation, mais, étant donné qu'il y a quand même plus de Québécois et de Québécoises qui ont accès au réseau régulier, est-ce que cela conserve la même importance qu'au moment où on l'a créée?

M. Béliveau: Vous vous attendez un peu à ma réponse. Je pense que oui.

Mme Blackburn: Oui.

M. Béliveau: Pourquoi, maintenant?

Mme Blackburn: En le démontrant, oui.

M. Béliveau: À cause des clientèles que nous rejoignons. Je l'ai dit tout à l'heure, nous offrons une formule pédagogique très particulière. Je le répète, on a beaucoup l'idée de la télévision en tête, mais la Télé-université, c'est beaucoup plus que cela.

Mme Blackburn: Oui.

M. Béliveau: Nous fournissons à nos étudiants une documentation pédagogique qui comprend des contenus éducatifs, un guide de l'étudiant et d'autre matériel d'appoint. Nous rejoignons l'étudiant dans son propre foyer, dans son propre milieu où il peut apprendre à son propre rythme sans contrainte. Je donnais l'exemple de la dame au foyer qui voulait réintégrer le circuit des études universitaires. Elle seule sait combien de temps cela lui a pris pour une leçon particulière; cela peut lui prendre deux jours, deux semaines ou cinq minutes. Il y aura toujours un besoin de cela. Nous rejoignons aussi des clientèles de prisonniers, des clientèles captives, qui n'ont pas accès aux études traditionnelles; c'est quand même un autre type de rééducation. Nous rejoignons des clientèles qui ne veulent pas, pour des raisons psychologiques ou sociologiques - il y en aura toujours - fréquenter les bancs de

l'université. Nous avons des gens d'un certain âge qui n'acceptent pas facilement d'être jugés par des pairs. Quand vous retournez sur les bancs de l'école à 35 ou 40 ans, vous êtes évalué continuellement tous les jours en face à face dans votre relation avec le professeur. Il y a des gens qui ne tiennent pas nécessairement à faire cela. Il y a des gens qui peuvent être situés face à l'université et ne pas y avoir accès, parce qu'ils travaillent le jour ou pour différentes autres raisons. Il y aura toujours de ces besoins. J'ai dit tout à l'heure qu'avec le développement des technologies, surtout de la technologie du micro-ordinateur - cela a connu une vague; cela a baissé un peu; cela va se réajuster - à partir du moment où nos jeunes... Ma génération a été moins familiarisée avec l'utilisation des technologies éducatives ou autres, mais nos jeunes sont familiers avec l'utilisation des différents jeux vidéo, des différents systèmes informatiques. Ils ont appris, comme on dit, à "pitonner" à des fins plutôt ludiques, mais la conversion à des fins éducatives va se faire très rapidement et je pense qu'eux vont avoir accès... Il faut penser aussi en fonction de l'avenir -c'est ce que je disais - on est une institution d'avenir dans ce domaine.

Concernant la comparaison que donnait Mme la députée en parlant de notre taux de diplômation, j'aimerais y revenir, si vous permettez, juste un instant. Si on veut comparer le taux de diplomation de la Téléuniversité, il ne faudrait pas le comparer avec une université traditionnelle mais plutôt avec les facultés d'éducation permanente des mêmes universités et je pense qu'on arriverait à des taux de diplomation comparables. En tout cas, c'est l'hypothèse que je fais.

Mme Blackburn: Vous possédez, de votre aveu même, une expertise en matière de formation à distance relativement importante de même qu'un matériel didactique important. Vous avez fait état tout à l'heure de sollicitations qui vous venaient de la part de pays en développement. Est-ce que cela pourrait être une façon de rentabiliser un peu - si vous me permettez l'expression - ce que vous posssédez comme expertise? Quels sont vos rapports avec la société d'exportation SEREQ?

M. Béliveau: À la première partie de votre question, je dirais qu'à la suite de l'adoption de nos nouvelles orientations qui doivent valoir pour une dizaine d'années, à la suite de la mise sur pied de l'orientation qui parlait de coopération avec l'extérieur nous avons créé une structure légère de bureau de coopération avec l'extérieur qui visait une fin de rentabilité: apport de fonds nouveaux, rentabiliser au maximum les produits éducatifs que nous avons développés. C'est l'un des buts que nous confions à ce bureau. Nous pensons que... Il faut faire attention, cependant, dans l'exportation de nos produits éducatifs. Ces produits ont une teinte culturelle et ne sont pas toujours exportables dans d'autres pays.

Mme Blackburn: D'accord.

M. Béliveau: Mais certains cours plus neutres peuvent être exportés. D'ailleurs, nous avons travaillé en collaboration avec l'ÉNAP à initier certains cadres de Costa Rica à l'informatique. IL y a une expertise. Maintenant, cela prend un certain temps. Avant de percer dans ce domaine de coopération avec l'extérieur, cela prend des relations suivies, une occasion, de part et d'autre, de faire des échanges. Le bureau est mis sur pied depuis seulement un an mais nous travaillons très fort dans ce sens-là.

Quant à la deuxième partie de votre question concernant nos relations avec SEREQ, elles n'ont pas été très très lourdes récemment, mais nous avons déjà eu l'occasion de travailler et d'échanger des vues avec SEREQ sur... D'ailleurs, avant que nous ne mettions sur pied notre propre bureau de coopération avec l'extérieur, nous avons eu des relations avec SEREQ pour qu'elle puisse annoncer à l'extérieur certains de nos produits. Nous avons participé soit a des expositions ou à des congrès en collaboration avec SEREQ dans le passé.

Mme Blackburn: Une dernière brève question, quoique je sais que cela pourrait appeler de plus longs développements. Je dois dire que vous n'êtes peut-être pas le groupe auquel on devrait poser ces questions-là, mais quant à la Société de formation à distance - vous y avez certainement réfléchi au moment où cela s'est fait - il m'aurait semblé pertinent qu'on n'en fasse qu'une qui comprenne tous les niveaux de formation du secondaire à l'université. Est-ce que vous y avez réfléchi ou si cela vous semble peu réaliste?

M. Béliveau: Je vous donnerai une position plus personnelle qu'une position très institutionnelle sur le sujet, si vous me le permettez. Je n'ai pas de mandat officiel pour traiter de cette question. La Société de formation à distance, les trois niveaux, cela peut se faire, cela doit se faire dans certains pays, ailleurs. J'y vois une difficulté à cause de l'appartenance des trois niveaux différents, trois commissions d'études, de programmes différents, etc. La cohabitation de différents niveaux d'enseignement peut présenter des difficultés, à mon avis. Il y aurait cependant intérêt au niveau de la mise en commun des services de logistique, des services de production, des services

d'édition; il y a des avantages de ce côté-là. Notre position était de collaborer avec cette société qui se destinait beaucoup plus aux niveaux collégial et secondaire en faisant des projets de mise en commun de certaines expertises. Nous avons des services d'édition, des professionnels pédagogiques. C'est une expertise assez fine. On l'a développée pendant quatorze ans chez nous, on ne fait que cela de la formation à distance. On est prêt à mettre une partie de notre expertise, en conservant toujours notre niveau universitaire, bien sûr - on veut continuer è se développer au niveau universitaire - mais nous sommes ouverts à des échanges de vues, à des études de mise en commun, à des projets, moyennant, évidemment, un financement additionnel, parce que nous avons à peine les ressources pour développer notre propre programmation. Nous sommes prêts à travailler en étroite collaboration avec les autres niveaux.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. M. le député d'Arthabaska.

M. Gardner: Merci, M. le Président. Je m'aperçois que je suis un des persévérants puisque j'ai obtenu deux certificats de Télé-université, CHEM et CHES.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je pensais que vous vouliez me dire que vous aviez obtenu le droit de parole.

M. Gardner: Par le fait même, je pense que je suis en mesure de constater la valeur des cours qui sont donnés à Télé-université. Ma question se rapporte justement aux cours de formation générale. Je sais qu'en plus des crédits que je suis allé chercher qui m'ont donné un certain salaire dans l'enseignement dans le temps je suis allé chercher une formation générale qui m'a peut-être, au déplaisir de l'Opposition, amené ici à l'Assemblée nationale. Cela dit, ma question concerne justement les cours. Il y a certains cours qui sont faciles, vous en conviendrez, et d'autres qui sont plus difficiles. Est-ce qu'à certains cours vous n'êtes pas gênés de mettre le qualificatif "universitaire"? Je pense entre autres à certains cours de français ou de psychologie. (16 heures)

M. Béliveau: Nous avons fait référence un peu plus à la qualité de nos activités. Ce que je peux dire le plus simplement, une réponse facile et simple, c'est que nos contenus éducatifs sont visibles. On a une transparence institutionnelle. Nos cours sont disponibles à chacun d'entre vous è l'heure actuelle. Vous pouvez voir, pour un cours en particulier, ce qu'on enseigne là-dedans. Nos leçons sont fabriquées d'avance. Les quinze leçons du cours de trois crédits sont là. Le guide de l'étudiant est là. C'est une question de transparence qui nous amène à apporter beaucoup de soin à ta qualité et à l'excellence de nos contenus. C'est la première réponse.

Cela dit, il se peut que dans notre programmation nous ayons des contenus qui soient plus faciles que d'autres. Il y a certaines matières qui s'y prêtent plus que d'autres. Nous en sommes conscients et dans notre plan triennal de cette année nous avons des objectifs de révision de tous nos contenus. Il y a plus ou moins 75 cours par session qui sont offerts à nos étudiants. Nous avons des plans de révision de nos contenus pour les mettre à jour. On peut en échapper un ou l'autre, mais il s'en échappe aussi dans les autres institutions de tout niveau dans tout le Québec. Quand nous on se trompe, c'est beaucoup plus visible. Je peux vous dire qu'on a une équipe de professeurs et de professionnels très compétents qui assurent et assument la qualité de nos contenus. On est très préoccupés par cette dimension.

M. Gardner: En additionnelle, M. le Président, si vous me le permettez... Oui, je suppose. M. le ministre disait tout à l'heure que cela coûtait cher. Est-ce que ce ne serait pas plutôt la présentation matérielle des cours? J'ai trouvé que certains cours étaient présentés d'une façon extraordinairement chère, c'est-a-dire que c'était très bien présenté. Cela aurait pu être sur des feuilles 8 1/2 sur 11. Est-ce que vous comprenez ma question?

M. Béliveau: Oui.

M. Gardner: Ils sont tous dans ma bibliothèque chez moi. Quand on disait tout à l'heure que c'était visible, c'était cela.

M. Béliveau: Je peux vous dire, quant à la qualité de nos produits, la qualité de la présentation...

M. Gardner: La présentation.

M. Béliveau: ...la qualité de l'édition et la qualité de la présentation, on n'a pas eu le choix ces dernières années. Les restrictions budgétaires nous ont amenés à ne pas couper sur le nombre de pages nécessairement, mais a diminuer sur la présentation. Le prix de nos produits a aussi diminué. On a été obligé de le diminuer d'autant.

Cela dit, il faut se préoccuper d'offrir le meilleur produit éducatif à meilleur prix. On n'a pas le choix avec les restrictions budgétaires qu'on a connues, mais on y a été forcés même si on ne l'a pas voulu. On y a été forcés. Cependant, il faudrait regarder aussi les aspects... Il y a d'autres aspects éducatifs rattachés à la qualité de ce produit. L'étudiant reçoit notre ensemble de

cours chez lui- On ne peut pas lui envoyer deux ou trois feuilles de papier sans aucune stratégie. II faut qu'il y ait un certain attrait à cela: l'édition pédagogique attrayante, stimulante. L'étudiant est en situation d'auto-apprentissage. Il est chez lui et il est en contact avec un de nos intervenants de façon périodique pour son encadrement. Si on lui envoie seulement deux ou trois feuilles de papier, le rendement risque de baisser encore plus. Si le produit est fait de façon stimulante avec un graphique attrayant, on pense que cela peut... Probablement que nos experts en technologie éducative doivent avoir des mots savants pour expliquer ce procédé, mais il y a quelque chose qu'il faut quand même garder en mémoire.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Béliveau. Je reconnais maintenant M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Merci, M. le Président. J'ai eu l'occasion, quand j'étais permanent syndical, de travailler à la mise sur pied de ce programme qu'on a appelé PERMAFRA, Perfectionnement des maîtres en français, avec la commission scolaire et l'Université du Québec à Trois-Rivières, puisque je négociais de l'autre côté de la clôture à ce moment-là. S'il y a un programme qui a...

Une voix: Vous êtes toujours de l'autre côté.

M. Jolivet: On me dit que je suis toujours de l'autre côté pour le moment.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Jolivet: Je dois vous dire que s'il y a un programme qui a attiré une clientèle importante chez les professeurs, lors de la mise sur pied de ces programmes qui étaient obligatoires et autorisés par le ministère au niveau secondaire, c'est bien ce programme-là. Il ne faut pas oublier qu'il y a des gens qui sont dans un milieu de travail et qui sont aussi dans des régions éloignées. Je le sais, je représente un comté nordique. En Haute-Maurice, quand il faut recruter des gens et qu'on réussit à les convaincre de suivre un cours ou de s'embarquer dans un processus les menant à un certificat, il ne faut pas non plus, d'aucune fçon, selon l'expression qu'on a chez nous, les écoeurer au départ. Il faut donc leur donner la chance d'avoir quelque chose entre les mains qui leur permette d'aller plus loin ensuite. PERMAFRA a été un des moyens. Il est évident que dans ces programmes, comme le ministère apportait ces changements de programmes, il a aussi au niveau de l'éducation placé de l'argent additionnel. J'aimerais savoir dans l'ensemble de vos certificats qui ont été donnés ou qui sont en marche si, en plus du financement normal prévu par les discussions que vous avez avec l'Université du Québec, il y a des sommes additionnelles qui vous sont données. D'où viennent-elles et qu'est-ce que cela vous permet de faire de plus?

M. Béliveau: Je vais faire une première réponse et je vais regarder en même temps mon directeur des affaires administratives et financières. À ma connaissance, pour le développement de notre programmation régulière, nous n'avons pas accès à d'autre financement pour le développement de cours. Cependant, avec notre nouvelle structure et l'orientation sur le perfectionnement - nous n'en avons pas â l'heure actuelle - nous avons des projets dans la machine, des discussions avec certaines associations pour du perfectionnement ad hoc, un certain nombre d'activités pas nécessairement créditées, pour répondre à des besoins situés sur tout le territoire. Mais cela, c'est de l'adhocité.

Dans notre programmation régulière, la première réponse que je ferais, c'est non. C'est toujours bon.

M. Jolivet: Même dans le programme, à l'époque, du PERMAMA et PERMAFRA, du perfectionnement des maîtres en mathématiques?

M. Béliveau: La connaissance que j'en ai, c'est un peu avant moi, cela, et je vais me référer aux ressources plus anciennes de la Télé-université. La Télé-université a fonctionné par mandats précis de l'assemblée des gouverneurs. On a reçu un mandat de former la population du Québec à la coopération. On a reçu des budgets. On a développé une programmation et on a rendu l'activité. On ne pouvait pas compter facilement la diplômation là-dedans, non plus, quand on parle de diplomation. On a reçu un mandat de former les maîtres en mathématiques. C'est PERMAMA. Il y a eu des budgets qui ont été consacrés à cela par le ministère de l'Éducation, je pense, à l'époque. On me dit toujours oui. On a fait le projet. PERMAFRA, cela a été la même chose.

Maintenant, c'étaient des mandats gouvernementaux. On pourrait encore en donner. Il pourrait y avoir des décisions gouvernementales de nous confier un mandat précis avec un financement précis pour former, comme on dit en français, un "crash program" dans telle ou telle affaire si c'est une priorité du Québec. Les institutions de formation à distance dans le monde ont été créées presque toutes - je dis presque toutes pour être prudent - sur décisions gouvernementales. La Télé-université a été créée par l'Université du Québec, une des universités.

Les autres universités sont créées par décision gouvernementale pour répondre à de grands problèmes de formation dans la communauté.

Pour répondre à votre question encore plus précisément, nous avons reçu des budgets ad hoc pour développer des produits ad hoc. Maintenant que nous avons des programmations un peu plus régulières, un peu plus universitaires selon les standards, nous fonctionnons selon les règles normales de fonctionnement.

M. Jolivet: Pour faire une comparaison qui est toujours boiteuse, vous êtes le REXFOR de l'enseignement.

M. Béliveau: Je ne le sais pas.

M. Jolivet: Une dernière question. Dans l'hypothèse où le ministre de l'Éducation accepterait et mettrait en place la proposition du rapport Gobeil visant à faire disparaître le siège social de l'Université du Québec, cela vous placerait comment à l'intérieur de ce phénomène qui pourrait se produire? Compte tenu que vous n'êtes pas une constituante, que vous êtes une direction générale, cela veut dire quoi pour vous autres si jamais cela arrivait?

M. Béliveau: Si vous pouvez m'aider à fournir la réponse, cela m'aiderait. Je n'ai pas la réponse magique. Nous sommes une unité rattachée à la corporation centrale de l'Université du Québec. Qu'est-ce qui arriverait si la corporation centrale était abolie? Est-ce que l'Université du Québec continuerait à fonctionner comme système quand même? On serait rattaché où dans le système de l'Université du Québec, si tant est qu'il peut fonctionner sans une corporation centrale qui l'anime? Je serais porté à croire que ce n'est pas possible d'avoir un système qui fonctionne sans cela. Je ne réponds pas à votre question.

M. Jolivet: Tout simplement un petit commentaire en disant que tout ce que j'espère, c'est que les questions du ministre n'ont pas eu pour effet de se trouver des raisons pour faire disparaître aussi la Téléuniversité.

M. Béliveau: J'en serais malheureux, croyez-moi.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Votre commentaire étant dit, M. le député de Laviolette, je reconnais Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: M. le Président, si je comprends bien, j'ai cinq minutes. Je vais me permettre une dernière question, ensuite un bref commentaire de conclusion. Pour me permettre, à moi et probablement aux membres de cette commission, de cerner un peu l'avenir de la Télé-université, vous avez sans doute suivi l'évolution des expériences, à la fois en Angleterre, en Finlande et dans certains pays nordiques qui ont des expériences relativement avancées dans ces domaines. Comment cela évolue-t-il?

M. Béliveau: Je ne suis pas un expert très fin de ces expériences. Je peux vous dire que l"'open university", celle dont moi, j'ai entendu parler le plus, continue à se développer. Elle était partie d'une programmation assez réduite et maintenant on offre une programmation universitaire absolument complète. Il y a moyen de faire un cours d'ingénieur, il y a moyen de faire des cours de droit à distance, par la télévision ou autrement. On peut faire des sciences à distance avec des laboratoires qu'on envoie à domicile, en obligeant aussi l'étudiant à fréquenter de temps à autre un campus. Cela se développe dans toutes les programmations.

Maintenant, il y a des institutions à distance, à travers le monde. Je pense rapidement à la Thaïlande, à la Corée qui ont des centaines de milliers d'étudiants. Ce n'est pas possible. On utilise beaucoup la télévision, à ce moment. Le principal média, c'est la télévision pour un nombre de formations très diverses. Encore plus près de nous, je regardais dans le journal de cette semaine, l'Université Laval, un de nos collègues à Québec qui annonçait que la Faculté de médecine aurait des cours magistraux de plus en plus remplacés par l'auto-apprentissage. Cela, c'est l'Université Laval, en médecine. On a médiatisé les activités de formation en médecine; ce n'est pas loin de ce que l'on fait, mais on n'est pas en médecine, vous pensez bien. Même les institutions qui sont plus dans un format traditionnel utilisent ces moyens. Alors, de là l'avenir dont je parlais tantôt.

Mme Blackburn: Bien, on pourrait longuement échanger, sauf que le temps imparti est terminé ou presque. Je voudrais, M. le directeur général, messieurs, vous remercier au nom de ma formation politique d'avoir participé aux débats de cette commission.

Je dois dire qu'avec l'ÉNAP ce matin vous êtes vraiment les seuls qu'on a entendus nous parler, je dirais, exclusivement de l'éducation des adultes. S'il y a darrs ce débat un grand absent, ce sont vraiment les étudiants adultes. Je dois dire que cela me préoccupe parce que je sais que vos clientèles, comme vous nous l'avez rappelé, sont majoritairement formées de femmes et souvent de femmes à la maison pour lesquelles c'est le seul moyen de s'équiper un, peu pour retourner sur le marché du travail.

À présent, je dois dire que cela me préoccupe parce que le ministre, contrairement à son habitude, il me semble qu'il n'a pas manifesté beaucoup d'intérêt à l'endroit des étudiants adultes inscrits dans nos universités, un peu là pour s'inquiéter du coût de leur formation, ce qui est légitime puisqu'on parle de financement. Mais je trouve que c'est préoccupant. Je dois dire que dans ses nominations récentes il y avait peu de femmes; j'imagine, j'espère qu'il n'a pas le même préjugé a l'endroit des clientèles inscrites dans les universités.

M. le directeur général, messieurs, je vous remercie et je souhaite que la Télé-université puisse avoir encore plus d'expansion parce que j'ai toujours cru - et votre dernière citation en référence à la Faculté de médecine de l'Université Laval nous le démontre - que l'avenir était beaucoup dans cette direction. Il ne faudrait pas que, par des gestes malheureux, on vienne restreindre le développement de la Télé-université et qu'on réalise dans dix ans que c'est là-dedans qu'on aurait dû investir. Je vous remercie.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie, Mme la députée de Chicoutimi. Je reconnais maintenant le député d'Argenteuil, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.

M. Ryan: Je voudrais pour commencer faire une petite mise au point pour mettre un peu de vie dans nos débats. Mme la députée de Chicoutimi, selon son habitude malheureuse, a mal interprété. Je pense que tout le monde sait que du côté du gouvernement nous nous intéressons vivement à la formation des adultes à tous les niveaux: secondaire, professionnel, collégial, universitaire. Mais nous avons le devoir de nous demander, quand nous sommes en face de services offerts à la population adulte, quel est le contenu véritable, quelle est la portée véritable, quelle est l'efficacité véritable? C'est notre devoir. C'est pour cela que nous sommes en commission. Ce n'est pas pour faire des compliments aux gens qui nous visitent, cela c'est trop facile. Je pense qu'on est là pour poser de vraies questions. C'est ce qu'on essaie de faire en toute simplicité. On essaie d'être compris. Je pense qu'on a été bien compris. On pose ces questions parce que, justement, on s'intéresse véritablement à l'éducation des adultes, parce qu'on veut qu'ils en aient pour leur argent, on veut qu'il y en ait pour l'argent des contribuables également, et on va continuer cet examen.

Je pense que, de l'échange que nous avons eu, il y a un certain nombre de questions qui se dégagent, qui vont demander peut-être des réponses plus complètes et plus approfondies au cours des semaines à venir.

J'apprécierais beaucoup qu'une documentation plus abondante fût portée à la connaissance des membres de la commission. Évidemment, nous de notre côté, il y a peut-être eu une certaine négligence de la part - je dirais -des parlementaires et du gouvernement jusqu'à maintenant. Peut-être que nous n'avons pas porté è ce service que vous rendez toute l'attention qui eût été souhaitable. C'est très bon qu'on ait eu l'occasion d'établir ce contact publiquement. Il faudra le continuer. Je maintiens qu'on a un devoir de rationalité qui nous oblige à revoir dans une perspective d'ensemble tout ce que nous faisons comme recours à la télévision et à d'autres moyens de communication pour favoriser la diffusion de la formation de niveau universitaire. Je crois que la télévision est un des moyens dont on dispose. Il y en a beaucoup d'autres. Ma collègue, la députée de Jacques-Cartier, si elle avait eu le temps, nous aurait parlé de choses dont elle a entendu parler ailleurs dans le continent, les recours beaucoup plus abondants au vidéo, par exemple, qui permettent d'aller encore plus loin dans l'assouplissement de la pédagogie à l'intention des adultes et qui donnent une flexibilité encore beaucoup plus grande. Il y a une foule de choses, en tout cas, qu'on doit regarder. C'est sûr que c'est un des moyens dont nous disposons qui a une valeur incontestable. Il s'agit de voir si l'usage que nous en faisons est celui qui répond le mieux à nos besoins et à notre potentiel. Dans cette perspective on va continuer à discuter avec vous avec grand plaisir. Je vous remercie beaucoup de nous avoir donné ces renseignements.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, M. Béliveau, nous vous remercions beaucoup encore une fois de l'exposé que vous nous avez donné. La commission de l'éducation suspend ses travaux pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 17)

(Reprise à 16 h 18)

Le Président (M. Parent, Sauvé):

Madame et messieurs les députés, si vous voulez prendre place, la commission permanente de l'éducation va reprendre ses travaux dans quelques minutes tout au plus.

Messieurs les députés, madame, la commission permanente de l'éducation poursuit ses travaux dans le cadre du mandat qui nous a été confié par l'Assemblée nationale, à savoir de tenir une consultation générale sur les orientations et le cadre de financement du réseau universitaire québécois pour 1987-1988 et pour les années ultérieures.

Ordre des agronomes du Québec

La commission permanente de l'éducation qui est réunie actuellement reçoit l'Ordre des agronomes du Québec, représenté par M. Paul Laguë. M. Laguë, bienvenue. On vous remercie d'avoir répondu à l'invitation de la commission parlementaire. J'apprécierais beaucoup que vous nous présentiez la personne qui vous accompagne et que vous nous fassiez votre exposé.

La commission dispose d'environ une heure pour entendre votre organisme. On me dit que vous pouvez nous brosser un aperçu de votre mémoire, de votre intervention dans environ quinze minutes. Pendant une période de 15 à 18 minutes, vous nous ferez votre présentation et le reste de la période de temps sera consacré à un échange entre les députés de la formation ministérielle et de la formation de l'Opposition. M. Laguë.

M. Laguë (Paul): M. le Président, il me fait plaisir d'être en présence ici, à ma droite, de M. Jean-Marc Bélanger.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M.

Bélanger.

M. Laguë: M. Jean-Marc Bélanger est un membre actif au sein de l'ordre. Il a déjà exercé les fonctions de président du comité des examinateurs, il a été vice-président de l'ordre pendant deux ans et président pendant deux ans. M. Alphonse Lapointe, notre directeur général, était censé venir, mais d'autres circonstances l'ont retenu.

M. le Président, mesdames et messieurs les membres de la commission, l'Ordre des agronomes du Québec remercie la commission de l'éducation de lui fournir l'occasion d'exprimer son avis concernant les orientations et le cadre de financement des facultés qui dispensent l'enseignement agronomique. Il y a deux facultés d'agriculture au Québec, il y a la Faculté des sciences de l'agriculture et de l'alimentation de l'Université Laval et la Faculté d'agriculture de l'Université McGill située au Macdonald College.

Notre mémoire présente davantage nos vues sur les orientations plutôt que les modalités de financement même du réseau universitaire. Nous avons tenu pour acquis que les organismes intéressés se chargeraient de leurs responsabilités sur ce dernier aspect. Nos remarques sont basées sur l'expérience que nous tirons par l'examen des candidats à l'admission è l'exercice de la profession et par le dialogue avec nos membres en milieu professionnel.

En premier lieu, vous allez voir que je vais lire le mémoire en tirant certaines parties et en les commentant. Mais nous allons développer passablement le principe fondamental parce qu'il est crucial, je crois, au fondement même du mémoire.

Parce que la clientèle des facultés d'agriculture se destine, en majorité, à l'exercice d'une profession au champ d'exercice exclusif, le financement de ces facultés ne doit pas être évalué selon les paramètres utilisés pour déterminer le niveau des subventions d'autres facultés dont les programmes ne donnent pas ouverture au permis d'exercice d'une telle profession.

Quel est donc le raisonnement sous-jacent au principe fondamental? La formation offerte dans une faculté d'agriculture est basée sur des sciences fondamentales et sur leur application à une activité spécifique. Il faut donc que la faculté possède, d'une part, des ressources humaines suffisantes en nombre et en qualité pour assurer une formation de base adéquate au 1er cycle et, d'autre part, des équipements et des moyens de formation qui permettent une véritable initiation à l'exercice de la profession. En conséquence, le mémoire est divisé en trois parties; les besoins de l'agriculture et de l'industrie agro-alimentaire; le niveau des subventions aux facultés d'agriculture et son impact sur leur développement; et les particularités de l'enseignement et de la recherche agronomiques en ce qui a trait à la concertation et à la rationalisation des programmes.

Les besoins de l'agriculture et du secteur agro-alimentaire. Nous allons donner une vue d'ensemble du secteur. La production de 1985 a été évaluée à 3 066 000 000 $ et a fourni environ 85 500 emplois au secteur primaire. Sur le plan social, elle regroupe l'élément le plus stable de la population. L'agriculture québécoise se distingue par son efficacité et son dynamisme dans l'intégration continuelle des innovations scientifiques et techniques. Cette performance est due, en grande majorité, au travail des professionnels qui s'adonnent à cette activité.

Si l'on considère l'ensemble du secteur agro-alimentaire, incluant les produits primaires et transformés, la valeur de la production en 1985 est de 13 000 000 000 $ dont 1 175 000 000 $ fut exporté; il fournit de l'emploi à 135 000 personnes, sans compter le commerce et les services connexes. Malgré l'importance de cette activité économique, le Québec doit compter sur l'apport de la recherche et de l'enseignement agronomique pour hausser son niveau de productivité. Pour demeurer concurrentielle, offrir à la population des aliments de qualité et accroître sa production, l'agriculture québécoise a besoin de professionnels ayant une formation, à la fois théorique et pratique, acquise dans des institutions munies de tous les équipements requis à cette fin, tels les laboratoires, les serres, les fermes, les champs de culture, les parcelles d'essais ainsi que les animaux. Sans ces instruments

pédagogiques essentiels, la formation ne permet pas au futur agronome de bien maîtriser les connaissances dans son secteur d'activités professionnelles, ni de porter des jugements critiques fiables. Le choix de cette approche s'inspire d'une attitude réaliste, qui se fonde sur la place de l'université dans la société québécoise. Le financement des universités oblige, en effet, à nous interroger sur la fonction d'enseignement, qui intéresse le plus grand nombre de personnes et exige le plus sur le plan matériel.

Nous croyons que le choix des priorités doit s'effectuer en tenant compte des besoins du milieu. Or, il est évident que ces besoins évoluent et que le mode de financement actuel, conçu en période de croissance, ne devrait plus s'appliquer de façon identique en période de restriction budgétaire et de plafonnement des effectifs. Le financement des universités fondé sur un objectif d'accessibilité détermine l'attribution des subventions selon des paramètres largement quantitatifs. La part de la subvention de développement, établie selon le nombre d'étudiants inscrits, risque d'entraîner des diminutions brusques de budget, qui ne permettent plus de subvenir aux besoins à court terme.

L'Ordre des agronomes entreprenait, il y a quelques années, une étude de la situation qui nous a permis de constater certaines lacunes dans la formation des futurs agronomes et un certain déséquilibre entre l'offre et la demande d'agronomes dans plusieurs secteurs d'emplois traditionnels. Par contre, on constate une pénurie de professionnels bien formés pour répondre aux besoins de plusieurs secteurs nouveaux. C'est pourquoi il nous apparaît extrêmement important et urgent que les facultés d'agriculture obtiennent les moyens nécessaires pour effectuer les ajustements requis, afin que les agronomes continuent d'assumer pleinement leur rôle au service de l'agriculture et de l'industrie agroalimentaire, donc de la société québécoise elle-même.

De toute évidence, les employeurs souhaitent que l'université prépare des professionnels capables d'innover et de faire progresser l'agriculture et l'industrie agroalimentaire. Dans un avenir où les ressources financières s'annoncent peu abondantes, il faut donc poser la question de la priorité que les universités acceptent de donner à la recherche et à l'enseignement, deux fonctions qui, avec tes services à là collectivité, constituent la mission de nos deux facultés d'agriculture. Dans la poursuite de leur mission, les facultés de l'agriculture peuvent compter sur la collaboration entière de notre corporation professionnelle.

De tous les services à la collectivité, l'extension de l'enseignement demeure le plus important et le plus nécessaire. En effet, aucune autre institution d'enseignement ne peut prendre en charge la formation continue des professionnels de l'agriculture. Sans doute parce qu'elles ne disposent pas des ressources requises à cette fin, nos deux facultés de l'agriculture ne peuvent pas répondre aux besoins des agronomes désireux de maintenir leurs connaissances è jour pour atteindre et maintenir les meilleures performances au niveau professionnel.

L'Ordre des agronomes souhaite qu'on leur donne les moyens nécessaires pour accorder à l'extension une plus grande attention, de façon à permettre à la corporation professionnelle d'assumer, en tout temps, ses responsabilités touchant la qualité de l'exercice professionnel.

Si nous nous tournons maintenant vers le niveau des subventions et son impact sur le taux de développement, nous nous rendons compte que, soumises à de nouvelles contraintes au niveau des budgets d'investissement, les facultés d'agriculture sont actuellement aux prises avec de graves problèmes de développement. Malgré les exigences du virage technologique, elles ne disposent pas des ressources suffisantes pour répondre à l'ensemble des besoins de l'agriculture, de l'industrie agro-alimentaire et de la société québécoise. À cause de cette situation, les facultés d'agriculture risquent de perdre le contrôle de leur développement au cours des prochaines années. L'Ordre des agronomes du Québec s'inquiète de cette perspective et veut, par son intervention d'aujourd'hui devant cette commission parlementaire, éviter de se voir dans l'obligation de pénaliser les futurs candidats et candidates dans l'exercice de leur profession en ne leur reconnaissant pas une formation adéquate.

Si nous nous tournons maintenant vers quelques statistiques significatives, nous voyons que l'Ontario augmente de plus de 6 % en 1966-1987 ses subventions aux universités, cela sans augmentation de clientèle. Le Québec réduit de 3,5 % l'enveloppe des subventions de fonctionnement de l'année précédente malgré une augmentation prévue de 4,7 % de la clientèle. Si nous nous tournons vers les tableaux en pages 9, 10 et 11, on voit l'évolution dans le temps du nombre d'étudiants et du nombre de professeurs ainsi que les ressources financières qui y sont attachées. Si nous comparons les trois facultés de Laval, McGill et Guelph, en Ontario, nous nous rendons compte que les étudiants aux trois cycles du baccalauréat, de la maîtrise et du doctorat, soit à Laval, soit à McGill, forment un total de quelque 2000 étudiants pour ces trois catégories d'étudiants et ces deux facultés. En Ontario, nous avons environ 2313 étudiants pour le même nombre. C'est la somme des

baccalauréats, des maîtrises et des doctorats. Nous avons environ 150 professeurs dans les deux facultés d'agriculture du Québec, mais cela couvre tous les programmes académiques qui sont donnés à l'intérieur des facultés, qui peuvent être assez différents de ce qui se donne à Guelph. L'Université de Guelph a à son service 115 professeurs. Si on regarde, en 1985-1986, les dernières statistiques du rapport, nous nous rendons compte qu'à Laval et à McGill, aux trois niveaux d'études, nous sommes passés à 2714. Je vous ai dit tout à l'heure qu'on en avait 2087 en 1982-1983; il y a donc une augmentation d'environ 35 % de la clientèle, alors que Guelph est passée de 2313 à 1909. Cette diminution observée à Guelph en agriculture est une diminution caractéristique du continent nord-américain qui n'a pas encore frappé le Québec. Le nombre de professeurs est demeuré sensiblement le même pour les deux institutions, alors que Guelph a eu une augmentation assez importante, même avec une diminution des effectifs.

Si nous regardons maintenant à la page 11 le financement de ces facultés d'agriculture, nous voyons que l'Université Laval et l'Université McGill, entre 1981-1982 et 1984-1985, ont eu très peu de variations positives malgré les augmentations que nous avons vues. L'Ontario, toutefois, est passée de 9 000 000 $ à 11 502 000 $ pour la même période. Si nous faisons le total des Universités Laval et McGill, la contribution du Québec à l'enseignement dans les facultés d'agriculture, nous avons environ 13 000 000 $ fournis par le Québec.

À partir des statistiques que nous avons vues, quelles sont les hypothèses qui pourraient apporter une utilisation plus efficace des ressources mises à la disposition des facultés d'agriculture? Il y a peut-être deux hypothèses que nous pourrions considérer. Une première pourrait peut-être s'appeler la meilleure coordination de complémentarité dans les programmes d'études; une deuxième pourrait s'appeler le recoupement des facultés. Nous ne toucherons pas particulièrement au recoupement des facultés; vous avez l'exposé. Je vais quand même passer un peu plus de temps sur la complémentarié dans les programmes d'une faculté à l'autre. (16 h 30)

II n'est pas facile de passer et de recouper les programmes dans les sciences agronomiques parce que même si l'hypothèse peut sembler intéressante, son appréciation pose de sérieux problèmes aux étudiants qui se destinent à l'exercice d'une profession exigeant une formation générale très diversifiée et basée sur l'expérimentation de tous les principes des lois et des procédés qui forment la science agronomique, où il faut toucher tant les domaines des plantes que les domaines des productions animales, les domaines de protection et d'utilisation des sols, la gestion des entreprises soit agricoles ou para-agricoles, tout le domaine de la transformation et de la mise en marché des denrées alimentaires.

La recherche d'un plan opérationnel ne doit pas avoir pour but d'homogénéiser un système mais plutôt de refléter la situation et la diversité de chacune des facultés et de baser leur développement sur autre chose que le seul nombre d'étudiants. L'augmentation constante des clientèles depuis plusieurs années constitue déjà, à notre avis, une raison suffisante de procéder à une telle planification. Les facultés d'agriculture n'auraient plus besoin de diversifier leurs activités dans le but d'augmenter leur clientèle et leurs sources de financement.

Nous soulignons l'importance de la relation de collaboration qui doit exister entre l'université et la corporation professionnelle pour ajuster les connaissances et les qualités des étudiants aux besoins professionnels.

L'OAQ, nous pouvons le dire, maintient de bonnes relations avec les facultés d'agriculture et veut intensifier son action afin qu'elles obtiennent les ressources nécessaires pour obtenir leurs fonctions selon les besoins de la profession et de la collectivité qu'elle doit servir.

En 1982 et 1983, l'Ordre des agronomes a réalisé une analyse des programmes et l'évaluation des cours en relation avec la pratique de la profession. Cet exercice a permis d'élaborer des normes qui pourraient servir de référence et d'indication de la valeur de tel ou tel cours dans la formation du futur professionnel. Notre comité de travail a constaté, par exemple, que certains programmes n'ont aucune pertinence pour la formation d'un futur agronome tandis que les besoins ne justifient pas le maintien de certains autres programmes ou cours dans deux facultés d'agriculture. Le Québec, en effet, ne semble pas avoir les moyens de supporter financièrement une telle situation.

Regardons plus brièvement ta gestion des ressources et des programmes aux 1er, 2e et 3e cycles. L'introduction de nouveaux cours et la modification des programmes d'enseignement au premier cycle est un long processus qui retarde le développement des facultés d'agriculture et leur adaptation aux besoins actuels et futurs de la collectivité. L'OAQ se préoccupe de cette situation. Nous avons fait une enquête auprès de 150 des employeurs au début de 1986 afin de mieux percevoir les besoins actuels et futurs de l'agriculture. À notre avis, les programmes de formation doivent viser à développer les habilités caractéristiques de l'agronome et à stimuler sa capacité d'innover, sa polyvalence, ses aptitudes de communication et de vulgarisation. Cela exige des

programmes bien intégrés comprenant les cours, les travaux pratiques et les stages requis pour initier le ou la future agronome à l'exercice de sa profession, selon l'esprit même du Code des professions, de la Loi sur les agronomes et du Code de déontologie. Cependant, il importe de maintenir un juste équilibre entre une formation de base générale et une spécialisation hâtive ou trop directement orientée vers le marché du travail.

Les exigences de formation perçues par notre corporation professionnelle pourraient augmenter d'un à deux semestres la durée des études du 1er cycle et requérir des moyens financiers appropriés. Simultanément, il faudrait resserrer la concertation avec les cégeps et les instituts de technologie agricole afin que l'étudiant qui se destine à la profession d'agronome puisse acquérir, au niveau collégial, une quinzaine de crédits lui permettant d'être exempté de certains cours à l'université. Cette articulation collège-université, en plus de développer des relations de confiance nécessaire, contribuerait au développement des programmes de formation universitaire tout en facilitant dans les facultés d'agriculture une rationalisation des ressources humaines et matérielles, selon leur mission propre.

Quant aux deuxième et troisième cycles, l'enseignement constitue une priorité à laquelle les facultés d'agriculture doivent consacrer un budget annuel important. Malheureusement, depuis quelques années, ce budget est demeuré stable et, en certains cas, fut même réduit, malgré l'augmentation du nombre d'étudiants inscrits. Durant cette même période, d'autres facultés ont obtenu des fonds pour développer de nouveaux programmes et améliorer leurs équipements scientifiques alors que les deux facultés d'agriculture se voyaient dans l'obligation de se limiter à leurs activités traditionnelles.

La recherche bénéficie, en d'autres provinces, d'un budget substantiel mais au Québec il n'y a pas de financement de base à cette fin. Par conséquent, nos facultés d'agriculture sont privées des fonds nécessaires pour le développement rationnel des infrastructures requises. L'Ordre des agronomes déplore une telle situation et souhaite que la recherche et l'enseignement supérieur disposent des ressources indispensables à l'innovation scientifique dans plusieurs secteurs où l'agriculture et l'industrie agro-alimentaire du Québec peuvent être au premier rang et contribuer à l'essor économique et à une meilleure qualité de vie tant à la protection du milieu biologique qu'à la production d'aliments de haute qualité pour l'ensemble des Québécois.

C'est pourquoi nous recommandons que le financement des activités de la recherche et de la formation aux 2e et 3e cycles soit calculé en fonction des besoins réels et en tenant compte du nombre de trimestres requis pour l'expérimentation agro-alimentaire, basée sur les saisons de croissance des végétaux, les cycles de reproduction et de production des animaux de ferme. Nous proposons également, d'une part, qu'une infrastructure de recherche financièrement stable soit instituée afin d'inciter le secteur public à contribuer à la recherche universitaire et, d'autre part, que des bourses d'études soient créées pour les étudiants des 2e et 3e cycles qui seraient appelés à prendre des cours de pointe en sciences fondamentales dans d'autres institutions durant leur stage de formation.

Nous passons maintenant à la conclusion, au bas de la page 20. Le Québec jouit d'une position stratégique avantageuse dans l'échiquier mondial de la production agro-alimentaire. Malgré sa situation nordique, le climat y favorise une agriculture très diversifiée qui doit se compléter par une industrie de transformation dynamique et innovatrice. Ces deux conditions sont essentielles pour permettre au Québec d'avoir accès aux marchés d'exportation. Cet essor économique est impossible sans l'apport de la recherche et de l'enseignement universitaire. Si le financement de base n'augmente pas, les facultés d'agriculture ne pourront pas accepter de nouveaux programmes et certains programmes actuels devront même être coupés. Dans une telle perspective, nous sommes loin de l'innovation scientifique et du développement technologique sur lesquels s'appuie le progrès de la production agroalimentaire. Même si, globalement, les montants versés par le gouvernement du Canada à la recherche et au développement augmentent légèrement en 1986-1987, notre pays y consacre une très faible proportion comparativement à ce qui se passe dans d'autres pays comme la France ou le Japon. Il est donc important que le Québec mette tout en oeuvre pour corriger cette situation, prenne les mesures nécessaires.

Je vais lire brièvement les trois conclusions que nous tirons à la page 23. Pour que nos deux facultés d'agriculture puissent assumer leurs fonctions, l'Ordre des agronomes recommande que le financement de ces deux facultés, dont la clientèle se destine en majorité à l'exercice d'une profession, soit évalué en tenant compte de leur mission et des besoins de la profession. Cette mission consiste principalement à former des agronomes et des chercheurs pour le développement de l'agriculture et de l'industrie agro-alimentaire, deux secteurs majeurs de l'économie québécoise.

Nous recommandons que la recherche et l'enseignement aux 2e et 3e cycles disposent des ressources indispensables à l'innovation scientifique, dans plusieurs secteurs où l'agriculture et l'industrie agro-alimentaire du Québec doivent être concurrentielles pour

contribuer à l'essor économique et à une meilleure qualité de vie. De plus, nous recommandons que les facultés d'agriculture soient dotées d'une infrastructure adéquate afin de favoriser la formation la plus complète possible aux trois cycles des études, de faciliter les recherches et de stimuler la contribution financière du secteur privé. Enfin, nous recommandons que le programme de financement permette aux facultés d'agriculture d'assumer pleinement leur rôle dans la formation continue des agronomes afin de maintenir la qualité des services professionnels. Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci beaucoup, M. Laguë. Est-ce qu'il y a des interventions? M. le ministre.

M. Ryan: Oui, M. le Président. J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt le résumé que M. Laguë a présenté du mémoire de l'Ordre des agronomes. Le mémoire porte ultimement sur l'agriculture, sujet extrêmement important pour de nombreux députés parmi nous qui représentons des circonscriptions à forte composition agricole. Il y en a plusieurs autour de la table. Le député de Laviolette est de l'autre côté. Il y a mes collègues d'Arthabaska, de Rousseau et moi-même. Dans mon comté d'Argenteuil, il y a une partie rurale qui est très intéressante et fort importante aussi. Franchement, je pense qu'on a un privilège spécial. Quand on représente une circonscription qui comprend les deux éléments, je pense qu'on comprend mieux ce qu'est le Québec. Je ne veux pas faire de reproche à mes collègues qui représentent des circonscriptions uniquement urbaines, mais j'ai appris beaucoup personnellement...

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre, soyez le bienvenu en ville quand même.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Ryan: M. le député de Sauvé, on vous plaint.

C'est évident que, dans le fonctionnement de notre agriculture, l'agronome occupe une place de choix. L'agronome est un homme respecté, une femme respectée aussi - il y a de plus en plus de femmes dans la profession agronomique - non seulement comme fonctionnaire, mais également comme militant social ou comme propriétaire exploitant souvent. Je pense que les agronomes apportent une contribution absolument indispensable au développement de notre industrie agricole.

Le mémoire que vous avez présenté porte spécialement sur la formation de spécialistes en agriculture au niveau universitaire. Vous avez souligné des problèmes très réels qui sont nés des politiques des dernières années. Je remarque avec plaisir, par ailleurs, que le nombre des inscriptions à l'Université Laval, en particulier, a connu une progression intéressante au cours des dernières années, en particulier en 1985-1986. J'ai hâte de voir les chiffres pour 1986-1987. À l'Université McGill, je suis étonné également de constater qu'on a connu aussi une augmentation. Je pense que c'est bon signe. Je pense que ces deux facultés, malgré les difficultés que vous soulevez dans votre mémoire, sont des écoles hautement et justement réputées. C'est sûr qu'une politique universitaire digne de ce nom devra tenir compte de manière spéciale de leur rôle dans notre société et de leurs besoins.

Dans le mémoire que vous présentez -je dois en venir à des questions qui découlent de votre présentation dans toute la mesure du possible il y a un certain nombre de points que je voudrais discuter avec vous. Tout d'abord, je remarque qu'au Québec nous avons deux écoles universitaires d'agriculture, tandis qu'en Ontario, province plus grande, province qui a une économie agricole importante également, on en a seulement une, avec une concentration beaucoup plus forte de ressources enseignantes et de ressources de recherche. Je pense que vous avez mentionné - je ne sais pas si c'est dans votre mémoire ou dans votre présentation - qu'à Guelph on a un total de 120 à 125 professeurs, tandis que nous autres, ici, nous en avons 79 dans une de nos deux écoles, 83 dans l'autre. Vous dites qu'il doit y avoir complémentarité entre ces deux écoles. À un moment donné, vous passez rapidement sur la question: Est-ce qu'une fusion serait souhaitable ou non? J'ai l'impression que vous ne prenez pas de position sur ce point.

J'aimerais que vous nous disiez: Est-ce que ce serait mieux que nous en ayons une ou deux écoles universitaires d'agriculture au Québec? Deuxièmement, dans l'hypothèse où votre réponse serait négative, quel genre de complémentarité ou de coordination voyez-vous dans le développement de ces deux écoles?

M. Laguë: M. le ministre, votre première question, je vais être obligé de la traiter d'une façon tout à fait théorique. Il est évident que, dans une province comme la nôtre, avec la classe de producteurs que nous avons et la capacité d'employeurs que nous avons, il serait préférable, en théorie, d'avoir seulement une faculté d'agriculture parce que vous avez seulement une infrastructure à soutenir et à maintenir. Même si vous aviez un nombre plus grand de professeurs à l'intérieur, vous avez une diversification de l'enseignement qui peut s'y faire pour couvrir des secteurs que nous voudrions voir couverts

et qui présentement ne peuvent pas l'être à cause du financement qui nous est accordé. Il est évident qu'au Québec il y a d'autres problèmes de rattachés a cette question. Je crois qu'il est en dehors de l'ordre de les résoudre. Je ne crois pas qu'il appartienne à l'ordre de formuler une opinion à cet effet. Je crois que la décision repose entre les mains du gouvernement.

Quant à la complémentarité des programmes, en théorie, c'est très facile à faire sur papier au niveau du 1er cycle. Mais où cela devient très difficile, c'est lorsqu'on veut que chaque professionnel reçoive les sciences sous-jacentes à l'agriculture nécessaires dans sa formation. À ce moment, vous vous rendez compte que, même si vous vous orientez, par exemple, en phytologie (la production des plantes et leur traitement), il vous reste quand même une certaine somme de connaissances que vous allez être obligé d'aller chercher dans d'autres secteurs agronomiques. À ce moment, les professeurs devront être sur place aussi pour pouvoir les enseigner, à moins qu'il n'y ait un autre moyen de faire voyager les professeurs d'un endroit à l'autre, ce qui est assez peu probable à cause des distances.

C'est un peu ce qu'on vous dit. En théorie, la complémentarité dans des programmes pourrait peut-être se faire au point de vue du 1er cycle, mais en pratique cela devient très difficile. Cela va.

M. Ryan: Très bien. Vous dites, un peu plus loin dans votre mémoire, qu'il y a plusieurs programmes présentement offerts dans les deux facultés qui n'ont pas leur raison d'être. Vous dites cela en toutes lettres à la page 16 de votre mémoire.

M. Laguë: M. le ministre, ce n'est peut-être pas ce que nous disons directement. Nous disons que certains programmes n'ont aucune pertinence pour la formation d'un futur agronome. Je ne dis pas qu'ils n'ont pas leur raison d'être. C'est pour cela. Il y a une différence entre les deux. Les facultés d'agriculture enseignent des matières autres ou forment des diplômés dans d'autres secteurs que l'agronomie même. C'est ce que nous voulons dire. (16 h 45)

M. Ryan: Regardez, vous continuez, vous dites: Les besoins ne justifient pas le maintien de certains autres programmes ou cours dans deux facultés d'agriculture. Le Québec n'a pas les moyens de supporter financièrement une telle situation. Moi, ce que je vous demande, c'est: Pourriez-vous nous donner des exemples de cela?

M. Laguë: Là, nous tombons dans le détail, si vous voulez. Lorsqu'on parle de certains autres programmes ou cours, il y a des programmes qui sont rattachés, peut- être, je ne sais pas, à des niveaux de certificat. Même, M. le ministre, vous allez recevoir possiblement une résolution de l'Ordre des agronomes qui demande que toute une série de diplômes qui sont donnés dans une des facultés d'agriculture ne donnent plus droit à l'ouverture à la profession. Ce n'est pas parce que les programmes ne sont pas désirables, c'est parce que le contenu des programmes n'est pas désirable. Vous êtes dans un secteur qui est peut-être trop loin, de la façon qu'il est présenté, pour être maintenu tel quel. Il faut bien tenir en mémoire aussi qu'il y a peut-être une formation à l'intérieur de ces programmes qui peut être complémentaire, si vous voulez, et que nous recherchons chez l'agronome.

M. Ryan: Maintenant, j'aimerais que vous nous disiez un mot. J'étais intéressé par les chiffres que contenait votre mémoire sur les ressources mises à la disposition de nos écoles d'agriculture comparativement à celles dont disposent les écoles d'agriculture d'autres provinces. Je pense que ce sont les chiffres inscrits à la page 11, tableau 5. Vous dites: La faculté d'agriculture - je vais prendre les plus grosses - de Guelph a touché, par étudiant, en 1984-1985, 11 502 $; l'École d'agriculture de l'Université d'Alberta, 10 580 $...

M. Laguë: Ce n'est pas par étudiant, M. le ministre, excusez-moi. Cela, c'est le financement global en millions.

M. Ryan: Oui, c'est vrai. C'est encore plus prononcé, peut-être. Québec, Laval, 7 512 000 $. Oui, cela change les choses, je m'excuse, parce qu'à ce moment-là, Québec, Laval et McGill, cela fait 13 000 000 $ et Guelph a 11 000 000 $. Cela fait une différence intéressante. C'est très important. Je m'excuse, je m'étais mépris en regardant ce tableau l'autre jour. Il faudrait ajouter probablement Saint-Hyacinthe; nous avons une école de médecine vétérinaire distincte au Québec, ce n'est pas le cas dans les autres provinces, je crois. C'est à Guelph, en Ontario.

M. Laguë: Pour les besoins de la cause, ici ce que vous avez au tableau 5, c'est seulement les facultés d'agriculture; ce ne sont pas les facultés de médecine vétérinaire.

M. Ryan: Très bien. Avez-vous fait le calcul par étudiant, équivalence temps complet?

M. Laguë: Malheureusement, non.

M. Ryan: II faudrait qu'on fasse cela pour avoir une bonne idée. Avec des chiffres absolus, c'est bien difficile de tirer des

conclusions. Si vous pouvez le faire de votre côté, nous allons le faire de notre côté. Ce qui m'avait intéressé, c'est que ce sont des données qui émanent de l'assemblée annuelle des doyens et principaux des facultés et collèges d'agriculture et de médecine vétérinaire du Canada. Si vous pouviez vérifier cela de près, peut-être compléter l'information que vous apportez à la commission là-dessus... Si vous nous établissez bien clairement un écart important avec les sommes mises à la disposition de nos écoles agricoles universitaires par étudiant, équivalence temps complet, je pense qu'on aura une meilleure base de comparaison que ces chiffres bruts.

M. Laguë: Vous voulez l'avoir au niveau bachelier, 2e et 3e cycles?

M. Ryan: Très bien, oui. Maintenant, vous autres les praticiens, votre point de vue nous intéresse spécialement parce que vous êtes les praticiens, vous êtes dans le champ. Vous travaillez soit auprès des agriculteurs, soit auprès des entreprises agricoles, soit auprès des coopératives, soit au service du gouvernement, évidemment, provincial ou fédéral. Vous dites qu'il y a eu une détérioration importante dans l'âge des professeurs, dans la qualité des équipements et dans les activités de caractère pratique qui sont offertes aux étudiants comme partie de leur programme de formation. J'aimerais que vous nous donniez un petit peu d'explications là-dessus, peut-être à partir d'exemples concrets, sans vouloir faire de tort à aucune institution. Évidemment, je pense que c'est important que nous sachions ce qu'il y a derrière cela.

M. Laguë: Ce qu'il y a derrière cela, si vous regardez présentement ce qui arrive au sein des facultés, c'est que le corps professoral veillit. Les seuls remplacements que vous pouvez faire, c'est à cause des départs, et même les départs actuellement dans les facultés ne sont pas entièrement comblés. Même ici, à l'intérieur des facultés, il faut faire attention, comme je vous l'ai mentionné. Le nombre de professeurs que nous vous donnons, il faudrait les recenser d'une autre façon et c'est très difficile. Les enseignants qui sont à l'intérieur et qui sont manifestés ici au tableau enseignent aussi dans des programmes qui ne sont pas du ressort agronomique. C'est lorsque nous allons directement vers le côté agronomique que nous nous rendons compte que l'augmentation du corps professoral ne répond pas aux besoins.

Quant à la question de l'équipement, il y a une désuétude. Les facultés, des fois, se sont donné des missions un peu différentes qui ne touchent peut-être pas des secteurs strictement agronomiques et elles ont investi les maigres ressources qu'elles recevaient pour l'équipement dans ces secteurs plutôt que de les placer directement dans notre domaine.

M. Ryan: Je vous écoute et je regarde à Laval, en 1984-1985, il y avait 70 professeurs d'après les données que vous nous présentez. En 1985-1986, il y en avait 79. Donc, là il y a eu quand même une augmentation importante.

M. Laguë:: Oui.

M. Ryan: À McGill ils sont passés de 79 à 83.

M. Laguë: À McGill - je vous donne l'exemple parce que je le connais peut-être davantage - vous avez tout le secteur de la diététique qui est enseigné à la faculté d'agriculture. C'est un secteur qui n'est pas agronomique. Alors, il y atoute une série de professeurs qui s'adonnent strictement à la diététique et c'est un secteur qui s'est développé. Peut-être que les statistiques sont fausses un peu mais c'est le mieux qu'on pouvait faire pour l'instant.

M. Ryan: Une dernière question, si vous me le permettez. Vous demandez qu'une collaboration et une concertation plus poussées s'établissent entre tes cégeps, les instituts de technologie agricole et les facultés d'agriculture. Pourriez-vous nous expliquer un peu ce que vous entendez? À quels besoins cela viendrait-il répondre et comment cela pourrait-il se réaliser?

M. Laguë: En tant que professionnels nous nous rendons compte que la formation de l'agronome, présentement, n'est pas complète, c'est-à-dire les aspects de la communication écrite, de la communication orale et de l'interrelation avec le client. L'agronome est une personne qui doit agir avec du personnel. Si nous calculons que la personne doit suivre tous les cours qui lui sont enseignés dans une période de quatre ans, par exemple, et que nous nous rendons compte que la personne ne peut pas prendre tous les cours dont elle a besoin, il y a une autre façon de le faire, c'est de regarder beaucoup plus sérieusement ce qui se passe au cégep et peut-être qu'on pourrait diriger nos cégepiens à prendre des cours plus spécifiques. Pour donner un exemple bien pratique, nous nous sommes rendu compte dernièrement depuis deux ans environ que les étudiants au cégep prennent des cours d'économie, chose qu'ils ne faisaient pas il y a quelques années. Alors, en prenant des cours d'économie de base au cégep, cela les libère des cours d'économie qu'on les obligeait de prendre. Donc, l'étudiant peut avancer davantage. C'est dans ce sens que je

le verrais. Si on pouvait réduire, si vous voulez, le nombre de cours de base dans les sciences fondamentales: la chimie, la physique etc., et les donner au cégep, cela nous libérerait et on pourrait terminer nos études dans le temps prescrit. Mon collègue aui-ait quelques mots à rajouter, si vous me le permettez.

M. Bélanger (Jean-Marc): M. le ministre, pour compléter la réponse je voudrais souligner une petite anomalie qui existe entre les deux facultés qui, en principe, accordent un baccalauréat de même niveau. En ce qui concerne l'Université Laval, et pour des raisons, j'imagine, qui sont justifiées, on exige un cours de quatre ans ou de 120 crédits alors qu'à l'Université McGill, pour des étudiants qui proviennent du même circuit en principe, des cégeps, on a un cours de trois ans qui demande 90 crédits. En pratique c'est que l'Université McGill reconnaît les cours de sciences de base qui ont été donnés dans les cégeps alors qu'à l'Université Laval, historiquement, j'imagine, en 1962 ou en 1965, on a peut-être dit: II y a des problèmes d'ajustement dans l'enseignement. Mais on se pose des questions. Est-ce que cela existe encore aujourd'hui alors qu'on a évolué dans les cégeps en termes d'enseignement des sciences de base et des sciences dites humaines, comme le président l'a mentionné tout à l'heure? C'est peut-être cet aspect qu'il faudrait essayer de regarder, à savoir comment peuvent être ajustés un peu plus les programmes pour libérer certaines fonctions professorales en première ou deuxième année dans les sciences de base.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Bélanger. Je reconnais maintenant le porte-parole officiel de l'Opposition en matière d'enseignement supérieur, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Bonjour, M. Laguë et M. Bélanger. Il me fait plaisir de vous avoir ici. Comme vous avez fait une présentation assez exhaustive de votre mémoire, je n'y reviendrai pas si vous permettez, de manière à laisser un peu plus de temps aux questions parce qu'elles sont nombreuses. Avant de passer aux autres questions, je n'ai pas très bien compris la réponse à la question du ministre, probablement que j'étais distraite. Quand vous dites: une meilleure collaboration des cégeps, est-ce que c'est pour les programmes professionnels ou le DEC général? Ou si vous dites qu'il faudrait reconnaître certains cours du DEC général?

M. Laguë: Non. Les exigences pour entrer dans les facultés d'agriculture sont les deux programmes qui y mènent. Vous avez le programme des sciences pures et appliquées ou les sciences de la santé. Cela serait à ce moment-là, si vous permettez, de dire aux personnes qui se dirigeraient vers la faculté d'agriculture qu'il y a peut-être certains choix de cours qu'elles pourraient faire à l'intérieur de leur programme plutôt que d'autres cours.

Mme Blackburn: Mais vous ne voyez pas, par exemple, qu'avec les diplômés de l'ITA, de différents départements dans les collèges... Il ne s'est pas établi de voie de passage du DEC professionnel vers les facultés?

M. Laguë: Non, au contraire, il y a une voie de passage qui se fait.

Mme Blackburn: D'accord. M. Laguë: Oui.

Mme Blackburn: D'accord. Vous avez soulevé tout à l'heure toute la question des avantages qu'on pourait tirer d'une fusion des deux facultés. Je dois vous dire que vous comprenez pourquoi on a deux facultés, c'est parce qu'on a un double réseau. Je me faisais la réflexion dans mon intérieur, j'imagine que ce n'est pas demain matin que le ministre va décider de fermer la faculté de l'Université McGill.

Une voix: Ce serait surprenant.

Mme Blackburn: Ce serait une façon de rationaliser. Je n'ai pas très bien compris dans votre texte. D'abord, vous faîtes état -les chiffres sont là pour le démontrer - de l'importance de la qualité de la formation et de la formation des agronomes en tout ce qui constitue le développement de l'agriculture et de l'agro-alimentaire qui sont des secteurs d'économie fort importants -vous nous le rappelez bien - au Canada et au Québec.

Par ailleurs, vous avez parlé de ce qui m'a semblé être une ouverture à ce que pourrait être un contingentement additionnel. Je retrouve cela aux pages 4 et 14. J'aimerais avoir un peu de précision là-dessus.

M. Laguë: J'aimerais avoir des précisions sur votre question. Demandez-vous si c'est l'ordre...

Mme Blackburn: Vous me semblez favoriser un contingentement plus grand qu'il ne l'est actuellement parce que j'imagine que ces facultés sont contingentées?

M. Laguë: Ces facultés ne sont pas contingentées...

Mme Blackburn: Pas du tout?

M. Laguë: ...présentement. Elles sont sur le même pied que les autres. Elles sont à la course à l'inscription parce qu'elles sont financées exactement sur le même pied.

Mme Blackburn: D'accord. Elles sont contingentées par les capacités d'accueil, finalement.

M. Laguë: Pas du tout. Si vous avez des salles de cours, par exemple, qui peuvent recevoir 300 étudiants, on va trouver une salle plus grande pour placer les 400 étudiants qui peuvent venir; si vous avez trois sections de laboratoire, vous allez en faire quatre ou cinq.

Mme Blackburn: Bien. Ma question demeure: Favorisez-vous un contingentement?

M. Laguë: L'Ordre des agronomes se pose des questions sérieuses sur le nombre de diplômés qui peuvent en découler. Si vous voulez avoir les plus récentes statistiques, disons que dans le domaine strictement agronomique il y a environ 220 diplômés, si ma mémoire est fidèle, par année; environ 160 de ces diplômés se joignent aux rangs de l'Ordre des agronomes. Lors d'une dernière enquête que nous avons faite auprès des jeunes agronomes qui sont déjà entrés au sein de l'ordre, il y a environ de 13 % à 15 % de chômage.

Mme Blackburn: Combien de temps après la fin des études?

M. Laguë: Disons que...

Mme Blackburn: C'est important.

M. Laguë: ...c'étaient des gens au sein de l'ordre et en bas de cinq ans de pratique. Les gens au-dessus de cinq ans de pratique sont normalement en poste, ou ils auront quitté les rangs de l'ordre. Il y a quand même des frais de cotisation, alors les gens ne sont pas intéressés à payer des cotisations tout le temps s'ils ne trouvent pas un emploi.

Mme Blackburn: Ce serait parmi les facultés où le taux de chômage est le plus élevé?

M. Laguë: Je ne dirais pas cela.

Mme Blackburn: À part les sciences humaines, je pense.

M, Laguë: Je ne suis pas en mesure... Mme Blackburn: D'accord.

M. Laguë: Je vous donne les chiffres que nous avons. (17 heures)

Mme Blackburn: Ce serait bon de vérifier cela.

À présent, vous faites une proposition et là je suis un peu étonnée parce que vous dites qu'à la faculté de McGill c'est 90 crédits, à Laval, c'est 120 crédits, et vous ne semblez pas faire de distinction dans votre recommandation quand vous dites qu'il faudrait peut-être augmenter de deux semestres. J'ai deux questions, en fait, c'est trois questions: La première: N'y a-t-il pas de critères d'admission à l'ordre qui généralement établissent la durée des études? Avez-vous des examens d'entrée?

M. Laguë: Nous avons des examens d'entrée. Il y a des critères d'admission à l'ordre, mais qui ne sont pas basés sur la durée des études. Les critères d'admission sont basées sur le contenu des cours que les candidats et candidates auront eus, la formation reçue. Autrement dit, ce que l'on vous dit, à ce moment-là, c'est que, dans une des facultés, vous avez peut-être plus de sciences que nous appelons fondamentales qui sont requises au préalable à l'acquisition des connaissances agronomiques. Alors, la question a été soulevée par mon collègue tantôt; la question demeure, et ce n'est pas à moi de régler la question. Est-ce que les étudiants d'une des deux facultés reverraient une partie des cours déjà vus au cégep?C'est possible. Dans les deux facultés, le nombre de cours que l'on pourrait dire et définir comme agronomiques sont à peu près les mêmes.

Mme Blackburn: Ma question était: Y a-t-il des examens d'admission à l'ordre?

M. Laguë: Oui, il y a des examens d'admission à l'ordre.

Mme Blackburn: Alors, sur quelle base proposez-vous l'augmentation de la durée du baccalauréat d'un ou deux semestres?

M. Laguë: Présentement, il faut ouvrir et prolonger la durée du cours. On ne voit pas assez de cours en communication orale et écrite; on ne voit pas assez de cours en gestion. L'agronome est un gestionnaire; cela n'est plus une personne qui va simplement travailler auprès du producteur isolé. Alors ce sont des cours de développement de personnalité aussi que nous verrions. Ce sont des cours en sciences réellement de type humain que nous voudrions voir inclus. Alors donc, à ce moment-là, pour pouvoir donner ces crédits additionnels, il faut faire de la place. Il se peut que le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science dise que, dans le cadre que nous avons, nous

allons garder la même durée de cours. Â ce moment-là si c'est la même durée de cours, que pouvons-nous changer?

Mme Blackburn: Avez-vous estimé le coût de votre recommandation?

M. Laguë: Non, parce que je n'ai pas les chiffres, j'en suis incapable.

Mme Blackburn: II y a un tableau qui a retenu mon attention, et c'est celui de la distribution des étudiants Laval-McGilI. Ce que l'on constate entre Laval et McGilI, cela confirme de façon très claire ce que l'on voit de façon générale dans l'ensemble des programmes de formation au niveau universitaire. C'est-à-dire que, pour 60 % de la clientèle, l'Université Laval forme 50 %, un peu plus, au 2e cycle et 50 % au 3e cycle, alors que, pour 40 % - vous avez cela au tableau 10 - de la clientèle on voit que la formation aux 2e et 3e cycles est donnée à 50 % à l'Université McGill. Cela confirme les données indiquant que la scolarisation des 2e et 3e cycles est beaucoup plus avancée dans les universités anglophones au Québec qu'elle l'est dans les universités francophones. Ici, c'est moins apparent, cela donne à peu près 10 %, mais, dans certaines facultés, il y a des chiffres qui nous prouvent que c'est 40 % des doctorats qui sont détenus par des étudiants anglophones quand on sait que c'est à peu près 20 % de la clientèle.

Ce tableau est assez intéressant et il mérite qu'on s'y arrête.

M. Laguë: J'aimerais faire une correction. Il ne faudrait pas penser que c'est parce qu'il y a peut-être plus de personnes inscrites au doctorat à l'Université McGill que ce sont des anglophones; cela n'est pas le cas.

Mme Blackburn: Non, c'est juste. L'inverse aussi est vrai.

M. Laguë: Oui.

Mme Blackburn: Je vais revenir sur deux questions. Il y en a une qui touche, j'allais dire, la responsabilité respective de l'ordre et de l'université, lorque vous abordez toute la question de la formation continue, en page 6. Je m'excuse d'avoir sauté un peu; habituellement, j'ai plus de... Quand vous parlez de formation continue, je présume que c'est ce qu'on appelle l'éducation des adultes ou la mise à jour des connaissances, ce genre de vocabulaire. Comment partagez-vous la responsabilité en matière de formation de vos membres entre l'Ordre des agronomes et l'université?

M. Laguë: La responsabilité de l'ordre n'est pas de faire la formation des membres. La responsabilité de l'ordre est de vérifier la formation des membres. L'ordre est chargé, s'il veut être conséquent avec lui-même, d'organiser des cours de formation continue. C'est à ce moment-là qu'il devient difficile de te faire. Ce n'est pas parce que la volonté des universitaires n'est pas là. On fait quelques cours de formation continue, mais l'horaire des cours, évidemment, est déterminé pour convenir aux professeurs d'université, ce qui devient très difficile peut-être pour les agronomes qui veulent aller suivre des cours. Nous avons un problème. Il demeure qu'il y a plusieurs secteurs et que, dans la formation continue, il y a deux aspects auxquels il faut bien penser et qu'il faut bien développer. Il y a l'aspect de mise à jour des connaissances techniques, mais il y a aussi le développement du professionnalisme qui est un autre angle qu'il faut voir. C'est cet ensemble que nous voulons essayer de pousser davantage et aller dans des points assez raffinés. Tous les professeurs dans les facultés d'agriculture au Québec sont des enseignants, Vous n'avez pas le réseau que vous avez dans les universités d'Ontario, par exemple à Guelph, où il y a plusieurs personnes qui sont rattachées strictement à l'extension. Elles sont rattachées à l'intérieur des facultés d'agriculture; elles y travaillent. Ce sont des doctorats, des maîtrises qui peuvent aussi dispenser de l'enseignement en formation continue. Nous n'avons pas ce loisir au Québec, mais l'ordre y attache quand même une importance. Nous voulions le souligner dans le mémoire, c'est ce que nous avons fait.

Mme Blackburn: En page 19 de votre mémoire, vous abordez un peu toute la question du financement et la contribution du privé. Vous l'attachez particulièrement à ta recherche en disant que la contribution privée à la recherche agricole du Québec est relativement faible et que cette anomalie doit être corrigée. Je partage cette lecture; c'est l'industrie qui bénéficie directement des résultats de la recherche réalisée dans les facultés d'agriculture ou en collaboration avec elles. Je dois dire que cela me plaît bien, parce que je dirais que c'est la première fois que, de façon aussi directe, on nous dit qu'il n'y a pas seulement tes étudiants qui tirent des avantages de la formation universitaire mais que les entreprises également en tirent des bénéfices réels et que cela leur assure une performance, une productivité plus importante. Est-ce qu'on peut, en poussant la logique, dire qu'étant donné qu'elles en tirent des avantages les entreprises privées devraient aussi en payer un peu les coûts de fonctionnement? Est-ce qu'on peut envisager ce que j'appellerais un impôt éducation pour

les entreprises? On sait qu'actuellement, au Québec, l'imposition des entreprises est de 2,6 % plus basse qu'en Ontario. On se plaît souvent à se comparer avec eux, on va le faire, dans ce cas-ci, c'est avantageux. Alors, est-ce que c'est envisageable, et, par exemple, devrait-on aller jusqu'à dire que cet impôt devrait davantage servir à la recherche et au développement?

M. Laguë: Je crois que vous abordez un point qui est très important, Mme la députée.

Mme Blackburn: L'industrie.

M. Laguë: II est essentiel que, pour attirer la contribution de l'industrie, celle-ci ne soit pas obligée de payer la base même de l'infrastructure. L'industrie s'attendrait à avoir des résultats, quand même, de ses investissements. Ce que je veux dire, c'est que ce serait quelque chose qui serait en collaboration du côté gouvernemental et du côté industriel. Lorsqu'on regarde nos facultés d'agriculture, la base de recherche qui est là actuellement est entièrement sur des contrats de recherche, des subventions, une base très instable sur laquelle vous ne pouvez pas attirer beaucoup de recherche industrielle à long terme. C'est cet angle-là qu'il faudrait vérifier. Je serais d'accord que l'industrie se penche davantage là-dessus. Nous avons une entreprise au Québec qui a un chiffre d'affaires très élevé, la Coopérative fédérée du Québec, qui a une ferme de recherche à l'extérieur de la province parce qu'elle est amalgamée avec des coopératives des États-Unis. Nous avons, chez Canada Packers, Shur-Gain, au Québec, qui vient d'ouvrir une nouvelle ferme de recherche en Ontario. Il y a des contrats et des chances inoufes qui nous passent sous le nez, si vous me permettez l'expression, parce que dans les facultés nous n'avons pas l'infrastructure nécessaire stable pour entreprendre ces contrats.

Mme Blackburn: Cet impôt aux entreprises ne serait pas une façon de stabiliser précisément le développement de la recherche, de donner cette stabilité qui permet, finalement, d'avoir...

M. Laguë: Si les industries sont consentantes et ne critiquent pas trop le gouvernement, ce sera sûrement une bonne formule.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Parent (Sauvé): Merci. Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Merci. Dans votre mémoire vous avez déploré certaines lacunes dans la formation universitaire des futurs agronomes. Vous avez parlé de pénurie et de mauvaise gestion des ressources, de manque de pertinence, de retard dans l'adaptation des programmes et des moyens de formation aux besoins du secteur agricole, etc. Par ailleurs, j'ai eu l'occasion de parler à certains administrateurs à Macdonald College. Ils déplorent le fait que les fruits de leurs connaissances et de leurs recherches ne sont pas diffusés ni exploités par le monde agricole. Comment expliquez-vous ces divergences de points de vue? Je crois que pour les gens avec lesquels j'ai parlé à Macdonald College le gros problème est ce manque de liens entre l'université et le monde agricole.

M. Laguë: C'est peut-être une conséquence, si vous voulez, d'une politique à long terme, des conditions du système de l'extension organisé au Québec comparativement à d'autres États où un certain nombre de personnes des ministères de l'Agriculture seraient rattachées directement aux universités. On a alors un échange très fructueux parce que la personne qui est à l'université en extension fait un enseignement minime mais c'est elle qui prendra en charge les agronomes pour leur fournir une formation continue dans le champ. À ce moment-là, les problèmes qui proviennent du champ peuvent être ramenés à la faculté. Ces personnes, en étant dans le milieu universitaire, peuvent connaître les résultats qui en ressortent et les appliquer.

D'un autre côté il faut aller prudemment pour dire que les résultats des recherches universitaires, lorsqu'elles ne sont pas appliquées par les producteurs... Le producteur est quand même un homme responsable de ses finances. Ce que vous faites dans un laboratoire n'est pas nécessairement applicable sur une grande échelle. Il y a une étape cruciale de mise à jour à un moment donné de la nouvelle technologie qui doit se faire aussi. Le laboratoire des universités ne peut pas le faire. Il y a une étape critique entre les deux qui doit être franchie. C'est un peu sous cet angle-là qu'il faut envisager les problèmes.

Mme Dougherty: Ce n'est pas un manque de pertinence dont vous avez parlé.

M. Laguë: Le manque de pertinence des programmes?

Mme Dougherty: Oui.

M. Laguë: Non.

Mme Dougherty: D'accord. Merci.

M. Laguë: II faut bien faire attention

dans la pertinence des programmes. Il y a des programmes dans les facultés d'agriculture qui sont extrêmement pertinents à la formation de l'agronome mais il y en a d'autres qui le sont beaucoup moins. Il faut voir tout cet éventail lorsqu'on parle de la pertinence des programmes.

Le Président (M. Parent (Sauvé): Merci. M. le député de Laviolette. (17 h 15)

M. Jolivet: Merci, M. le Président. À la page 17 je reviens à la question de ma collègue de Chicoutimi. Vous faites mention d'augmenter d'un ou de deux semestres la durée des études du 1er cycle du baccalauréat. On parlait tout à l'heure de 90 crédits dans une faculté et de 120 dans l'autre alors que normalement un baccalauréat comprend environ 90 crédits. C'est rare que cela dépasse cela, sauf exception. Si on ajoute un ou deux semestres, cela veut dire qu'on ajoute des crédits. Ma collègue avait posé la question: Laquelle des deux? S'il y en une qui est à 90 et l'autre à 120, il y a certainement quelque chose qui ne va pas entre les deux. Qu'est-ce qui se passe?

M. Laguë: Je vais revenir exactement à ce que j'ai dit antérieurement, si vous me le permettez, sur la formation agronomique. Telle qu'elle est présentement, le jeune étudiant ou la jeune étudiante diplômé de l'une ou l'autre faculté a le même nombre de cours de sciences agronomiques, les cours qu'on appelle de type agronomique. La différence est dans le cours qu'ils vont avoir dans les sciences fondamentales ou les prérequis, pourrait-on les appeler, à ces cours-là. Lorsque nous parlons d'un ajout d'un à deux semestres à la durée des études, ce sera dans les deux facultés. Il faut trouver le moyen d'insérer des cours additionnels, et pas nécessairement dans les sciences agronomiques. Il y a certains aspects qu'il faudra voir. La protection de l'environnement, par exemple, je pense, est un domaine qui touche très rapidement l'agriculture. Nos agronomes profiteraient de cours plus poussés là-dedans. J'ai touché les autres sciences aussi, les sciences humaines et les sciences du développement de la personnalité, communications orales et écrites. Ce sont des ajouts que nous faisons aux cours actuels. Il faudrait que cela aille dans les deux facultés. Vous avez la solution: vous étendez le cours ou vous enlevez une partie du matériel de base. Mais il faut voir le matériel de base. Vous le voyez à quel niveau?

M. Jolivet: Quand vous faites une recommandation d'un à deux semestres, cela veut dire de 15 à 30 crédits, soit quasiment une année complète, selon qu'on aille à deux ou à un semestre. Je me souviens d'avoir eu cette discussion à l'Université du Québec à Trois-Rivières, alors que j'étais au module du baccalauréat pour l'enseignement primaire, où on voulait ajouter 30 crédits pour augmenter à 120 crédits. Ce sont des coûts additionnels pour l'individu. Ce sont des coûts pour l'ensemble de la société, s'il y a des prêts et bourses. Ce sont des choses qui coûtent énormément cher au bout de la course.

De l'autre côté, est-ce qu'on ne devrait pas plutôt réexaminer l'ensemble du programme des deux facultés et, ensuite, vérifier s'il y a des cours qui sont dispensés au niveau universitaire qui ne devraient pas être dispensés au cégep, en prérequis, plutôt que d'en ajouter au bout de la course, pour une personne qui s'en va sur le marché du travail avant d'aller, si elle le désire, à la maîtrise ou au doctorat?

M. Laguë: Je pense que vous lisez bien ce que cela dit. On dit bien que cela pourrait augmenter. On ne dit pas que cela doit augmenter. Cela pourrait augmenter. Donc, il y a des modalités et, même, on en liste un peu ici. Quant aux propositions que nous faisons, lorsqu'on dit "les exigences de formation perçues par notre corporation", ce n'est pas quelque chose que l'agronome va inventer. C'est un besoin qui provient des utilisateurs des services d'agronome. C'est quelque chose qui a une bonne base et à laquelle il faudra se référer et trouver une solution.

M. Jolivet: Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. Laguë, M. Bélanger, je voudrais, au nom de ma formation politique, vous remercier de votre participation aux travaux de cette commission. Voir les universités un peu par le biais des ordres et de leurs diplômés, je trouve que cela donne une perspective intéressante et sûrement enrichissante à la commission.

J'ai été sensible aux remarques que vous m'avez faites touchant le taux de chômage qui est relativement élevé chez les diplômés de ces facultés. Vous nous invitez, à ce moment-là, à envisager le contingentement. Vous savez, la réflexion que je me fais lorsqu'on fait une telle proposition, c'est: Un étudiant qui sort de la faculté des sciences sociales et qui ne travaille pas ou un étudiant qui sort d'une faculté d'agronomie et qui ne travaille pas, sur quelle base est-ce qu'on évalue ou contingente au Québec? Dans un domaine comme le vôtre, vous savez, c'est appelé à un développement, à moins que le libre-échange ne vienne changer les règles du jeu.

Pour le moment, ce n'est pas là-dessus qu'on va commencer à établir la pertinence du contingentement. Dans un domaine où les besoins devraient être très grands et aller croissants, je trouve que c'est important qu'on continue à former dans ce secteur en souhaitant, évidemment, que le chômage se résorbe partout.

Je voudrais simplement dire ici que, souvent, chacune des facultés pourrait dire la même chose pour, finalement, déverser les étudiants qui ne pourraient pas avoir accès aux facultés contingentées dans les sciences sociales. Je me dis: Je ne suis pas certaine que ce soit cela qui équiperait le mieux notre jeunesse, une fois passée la crise économique, pour relever le défi économique des prochaines années. Je voulais juste porter cela à votre attention parce que c'est souvent la conclusion à laquelle on en vient sans avoir un peu l'ensemble de cette question. Je vous remercie infiniment de votre participation. Il m'a fait plaisir de vous rencontrer.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, madame. Je reconnais maintenant le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science, M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Merci. Très brièvement. La rencontre a été très profitable, je vous en remercie. La rencontre avec les membres d'une profession, je pense que c'est un volet important de l'examen que nous faisons du fonctionnement de nos universités. Je pense que vous êtes le premier ordre professionnel à nous rencontrer. Il y en a d'autres qui s'en viennent. On accueillera toujours avec beaucoup d'intérêt vos représentations, d'autant plus que, comme vous le savez, le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science est en même temps le ministre responsable de l'application des lois professionnelles. Je pense que, si tous les gouvernements ont fait le même partage des responsabilités depuis de nombreuses années au Québec, c'est parce qu'ils étaient conscients des liens très immédiats qui existent entre la formation donnée dans les universités et les exigences de nos professions et de notre société à l'endroit des membres des professions libérales.

C'est pour cela que je voudrais que vous vous sentiez tout à fait associés à la recherche que nous faisons ensemble d'un meilleur niveau de financement et d'une vision plus claire des orientations de nos universités au cours des prochaines années. Il y a des points sur lesquels j'ai trouvé votre mémoire peut-être un peu flottant. Je sais que ce ne sont pas des questions faciles, je vous comprends. Il y a chez vous des diplômés de l'autre école, en particulier; ce sont des choses qu'on ne peut pas trancher facilement dans un organisme comme le vôtre.

J'ai pris note de tous les problèmes que vous avez soulevés. Il y a certains problèmes qui ne connaîtront sûrement pas de solution à court terme, mais je pense qu'ils ont été posés d'une manière responsable.

Si vous avez d'autres éléments à nous communiquer, nous serons très heureux de les recevoir. Merci beaucoup.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le ministre. M. Lagüe, M. Bélanger, au nom des membres de la commission, je vous remercie pour la qualité de votre présentation. La commission parlementaire sur l'éducation suspend ses travaux pour les reprendre à 17 h 30 en accueillant l'Ordre des chimistes du Québec.

(Suspension de la séance à 17 h 23)

(Reprise à 17 h 33)

Le Président (M. Parent, Sauvé):

J'invite les députés, le ministre et tout le monde à prendre place. La commission permanente de l'éducation va recommencer ses travaux dans quelques minutes.

La commission permanente de l'éducation qui a reçu de l'Assemblée nationale le mandat de procéder à une consultation populaire sur les orientations et le cadre de financement du réseau universitaire québécois pour l'année 1987-1988 reprend ses travaux et accueille l'Ordre des chimistes du Québec; son porte-parole est M. Richer.

M. Richer, nous vous souhaitons la plus cordiale bienvenue et nous vous remercions d'avoir répondu à l'invitation de la commission permanente de l'éducation de venir nous rencontrer.

Ordre des chimistes du Québec

M. Richer (Jean-Claude): M. le Président, mesdames, messieurs de la commission, je voudrais, au nom de l'Ordre des chimistes, vous remercier de nous avoir invités à venir présenter notre mémoire et à venir causer avec vous des recommandations qui y sont présentées.

Je voudrais aussi vous présenter les excuses de notre président, qui représenterait le milieu médical ou biomédical, qui est absent à cette période-ci de l'année.

Autour de moi, il y a, à mon extrême droite, M. Réal Laliberté, directeur administratif et secrétaire de l'Ordre des chimistes; M. Yvon Pépin, qui a agi comme président du comité des examinateurs de l'ordre et qui est vice-doyen de la Faculté des sciences à l'Université du Québec à Montréal; M. Patrice Bélanger, trésorier de l'Ordre des chimistes et chercheur senior à

la maison Merck Frosst à Montréal, et M.

Gérard Pelletier, membre du bureau de l'ordre et professeur à l'Université de Sherbrooke.

Le Président (M. Parent, Sauvé):

Messieurs, bienvenue. La commission a une heure à consacrer à l'audition de votre mémoire et aux échanges de vues qui vont avoir lieu entre vous et ses membres. J'ai obtenu le consentement des deux côtés... Non, je n'ai pas obtenu le consentement des deux côtés, j'ai obtenu le consentement de l'Opposition. Est-ce que j'ai celui du côté ministériel pour que nous puissions aller jusqu'à 18 h 30 pour ne pas obliger ces gens à revenir après le souper? Alors, il y a consentement.

Nous continuerons à vous écouter pendant une heure, c'est donc dire qu'à 18 h 20 exactement, je donnerai la parole au porte-parole officiel de l'Opposition pour une conclusion et je ferai la même chose auprès du ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science de façon que nous puissions terminer nos travaux à 18 h 30. M. Richer, nous vous écoutons.

M. Richer: Merci, M. le Président. Je vais essayer d'être bref pour ne pas abuser de votre patience. La présentation que vous fait l'ordre, aujourd'hui, se situe dans le cadre de son rôle de protection du public. L'ordre est conscient que les chimistes ont à remplir une fonction clé dans la plupart des secteurs d'activité de notre société. Ceci est vrai tant au niveau de l'éducation que de la santé et de l'industrie. L'ordre tient à rappeler, ici, que les chimistes contribuent en donnant un support professionnel essentiel à l'ensemble de notre industrie tant au niveau des matières premières, de la production, de l'assurance et du contrôle de la qualité que de l'environnement. L'ordre représente plus de 2000 membres qui oeuvrent dans plus de 500 industries, centres de recherche, maisons d'enseignement, milieux hospitaliers.

Soucieux de la qualité de vie des Québécois et de la qualité de leur environnement, l'ordre suit de près les difficultés qu'éprouvent les universités à l'heure actuelle. L'intervention de l'ordre se justifie par le fait que les universités donnent les enseignements théoriques et pratiques requis pour la pratique de la chimie.

Depuis des années, les universités et l'ordre travaillent de concert pour garantir une formation de base de trois ans, au niveau du baccalauréat, de qualité nécessaire et suffisante pour assurer une protection minimale au public. Cette qualité minimale existe aujourd'hui; on ne saurait toutefois en abaisser le niveau. Il s'agit de la préserver. L'ordre veut s'assurer que le financement des universités soit tel que les universités du

Québec soient à l'avenir en mesure de préserver cette qualité minimale. La qualité minimale, pour votre information, a été définie en termes de nombre de crédits de chimie qui doivent être acquis par les futurs candidats. Il n'est pas question ici d'augmenter, à cause de l'informatique ou d'autre chose, le nombre d'années qui serait nécessaire. Il y a une norme minimale de chimie qui doit être connue. Si les gens veulent faire de la formation personnelle, ils peuvent le faire, mais on ne demande pas à ce point d'avoir plus d'années d'études.

Dans le cadre des préparatifs pour cette commission, on a fait un certain nombre de relevés et, si l'on se fonde sur les taux d'encadrement et de diplômation au Québec, on se rend compte que ces taux dans les universités du Québec sont les plus élevés au Canada et dépassent même ceux de l'Ontario. L'enseignement universitaire en chimie est donc performant et productif. En revanche, la situation de la recherche et des études supérieures est précaire. Le Québec ne fait pas très bonne figure: au plan canadien, il est en dessous de la moyenne et il accuse un retard considérable par rapport à l'Ontario.

Malgré les apparences où on a un système qui est productif et performant, l'acquis est fragile et vulnérable. La petite taille des départements de chimie au Québec est peu propice aux actions d'envergure, aux concentrations rentables et aux changements rapides d'orientation nécessaires à l'heure du virage technologique. On demande beaucoup aux professeurs de chimie et de biochimie. Ils répondent à l'appel avec une grande disponibilité et une présence indéniable. II faut donner les moyens à des professeurs bien formés de continuer à produire en quantité et en qualité et de produire rapidement.

Deux points sont toutefois à surveiller: 1- La chimie est une discipline expérimentale hautement informatisée. L'apprentissage des techniques se fait au laboratoire. Par un financement adéquat, l'État se doit de maintenir ces laboratoires et l'équipement servant à l'enseignement et aux recherches en bon état et de les moderniser régulièrement. Les besoins décelés par le Conseil des universités sont réels. Si les départements de chimie réussissent à assurer aujourd'hui un encadrement de qualité, la situation ne sera plus la même demain, si l'équipement n'est pas mis à jour et en particulier informatisé. La qualité de la protection du public et de l'environnement et l'activité de l'industrie québécoise sur la chimie, tant du côté de la recherche et du développement que de celui du contrôle de la qualité, dépendent de la formation reçue dans les universités et de l'effort financier qui sera fait aujourd'hui. 2- La qualité de l'enseignement et de

la recherche est affaire de concentration et de continuité. Le financement et surtout les modes de financement doivent permettre à l'avenir d'atteindre la masse critique, en combinant les ressources humaines et les ressources matérielles, nécessaire à un bon fonctionnement et à la rentabilisation des ressources. La masse critique tient compte de plusieurs facteurs, entre autres des ressources humaines, des ressources physiques et de l'étendue des champs d'études. Le financement et les modes de financement doivent être judicieusement adaptés pour assurer la symbiose de ces deux types de ressources et le financement soigneusement dosé pour atteindre rapidement la masse critique. Il faut planifier les ressources tant humaines que matérielles de manière à assurer la continuité de l'oeuvre. Ici aussi les modes de financement doivent être trouvés pour ne prendre aucun retard et le financement assuré par des mesures transitoires s'il le faut. Un système de qualité et performant n'a besoin que de mesures légères pour se maintenir en bon état de fonctionnement. L'important, c'est de le reconnaître et de les prendre. Pour la chimie, dans les années à venir, comme la productivité est bonne, il faudra faire porter les mesures visant à améliorer le système du côté de la recherche et de l'équipement.

Pour ce qui est des recommandations, dans le but de maintenir les acquis en matière d'enseignement et de recherche dans les départements de chimie et de biochimie des universités du Québec, et d'assurer aux étudiants une formation minimale appropriée aux responsabiltés qu'ils devront assumer pour le bénéfice du public, 1) considérant l'importance de la dimension expérimentale de la chimie dans la formation d'un chimiste, l'Ordre des chimistes recommande d'assurer le financement et d'adapter les modalités de financement pour tenir à jour les équipements dans les laboratoires de chimie et de biochimie, pour les moderniser régulièrement et pour informatiser toute approche expérimentale dans les délais les plus courts; 2) considérant l'importance de maintenir au cours des prochaines années un corps professoral de qualité et en nombre suffisant, l'Ordre des chimistes du Québec recommande d'assurer le financement et d'adapter les modalités de financement pour préparer dès maintenant la relève et pour renouveler le corps professoral progressivement selon un plan qui tiendra compte de l'infrastructure nécessaire tant en ressources humaines qu'en équipement.

M. le Président, voilà le résumé que je voulais vous présenter. Je peux répondre avec mes collègues è toutes les questions que vous voudrez bien nous poser.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Nous vous remercions, M. Richer. Je reconnais maintenant, comme premier interlocuteur, le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science. M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, je voudrais féliciter M. Richer de sa concision exemplaire qui nous permet d'aborder sans autre préambule la période - hélas, trop brève - qui nous est impartie pour la discussion avec les représentants de l'Ordre des chimistes.

Je veux vous dire qu'il est très agréable de vous rencontrer pour une raison que je donnais tantôt aux représentants de l'Ordre des agronomes. Il nous fait éminemment plaisir de rencontrer ceux qui sont appelés à appliquer dans le champ, dans les différents secteurs d'activité, les grands éléments de la formation reçue à l'université dans leurs disciplines respectives.

On peut constater à la lecture de votre mémoire que vous soulevez en peu de pages des problèmes très importants. Je me souviens qu'il y a quelques années, lorsque j'avais recommencé à m'intéresser aux problèmes des universités, j'étais allé faire une visite à l'Université de Montréal et j'avais rencontré des professeurs du département de chimie qui m'avaient dit - cela remonte à trois ans environ - combien déjà à ce moment-là il s'était produit un vieillissement des équipements, un resserrement des conditions générales de travail qui rendaient très inquiétantes les perspectives d'avenir.

Depuis ce temps, les améliorations n'ont pas été très considérables, mais je pense que c'est l'un des buts de la commission de rendre non seulement le gouvernement, mais la députation et tous nos concitoyens plus conscients des problèmes qui se posent de ce côté-là. Il faut que nos concitoyens se rendent compte que ce sont leurs jeunes et leur propre famille qui sont affectés directement ou indirectement parce que, si l'un des membres de la famille choisit d'aller étudier la chimie et qu'on ne soit pas en mesure de lui donner une formation de premier ordre, les répercussions à long terme pour le Québec sont énormes. Vous êtes venus le souligner avec beaucoup d'autres. Je veux vous remercier du devoir civique dont vous vous acquittez en nous communiquant vos observations de ce côté-là. (17 h 45)

Tout n'est pas négatif dans le tableau que vous dressez. J'ai remarqué à la page 4 en particulier - il faudrait peut-être qu'on s'y arrête un peu - qu'en ce qui touche le taux d'encadrement - c'est le rapport étudiants-professeur - et le taux de diplomation la situation du Québec n'est pas trop mauvaise, elle est même avantageuse par rapport à celle de l'Ontario à beaucoup d'égards. Il y a un point qui fait défaut, c'est le taux d'encadrement au niveau de la

maîtrise. Là on constate qu'il y a un gros trou. Je ne sais pas comment vous pouvez l'expliquer, mais on peut l'observer en regardant les statistiques de près: il y a beaucoup plus d'étudiants par professeur au Québec pour la maîtrise qu'il n'y en a en Ontario. C'est 1,27 % par rapport à 0,76 %. Est-ce que le tableau est fidèle à la réalité que vous connaissez?

M. Richer: Oui, le tableau est fidèle à la réalité. Il y a peut-être une explication à cela, c'est que, chez les Anglo-Saxons, il y a souvent une habitude d'inscrire directement les étudiants au Ph. D. plutôt que de les inscrire en maîtrise. Pour des Anglo-Saxons, une maîtrise, c'est souvent un Ph. D. manqué, alors que, dans le système des universités francophones, les maîtrises, c'est une étape normale vers l'obtention d'un Ph. D.

M. Ryan: Une autre question. Vous constatez que nous avons au Québec neuf départements de chimie dans nos universités et quatre départements de biochimie et vous parlez ailleurs de la nécessité d'un certain niveau, d'une certaine masse critique de ressources humaines qui doivent être réunies dans un même lieu ou dans un même établissement pour assurer un minimum de qualité dans le travail autant de recherche que d'enseignement. Pourriez-vous nous dire ce que vous pensez de la situation actuelle?Est-ce une bonne chose de continuer comme cela? Devons-nous continuer de développer tous ces départements et peut-être d'autres que l'on voudra proposer de créer dans d'autres universités qui n'en ont point actuellement ou si une certaine concentration devrait être recherchée au cours des années à venir?

M. Richer: Le comité qui était chargé de rédiger ce mémoire a examiné la question, mais n'a pas jugé approprié de recommander de coupures. Je croîs que, compte tenu des ressources restreintes, il faudrait réfléchir longuement avant d'en créer des nouveaux. Si on prend les cas en périphérie comme l'Université du Québec à Rimouski, avec un nombre restreint de personnes, mais une orientation vers l'océanographie, on peut considérer qu'avec une orientation restreinte la masse critique pour cette orientation restreinte soit présente. L'Université du Québec à Chicoutimi est bien implantée dans son milieu. Les gens de l'université là-bas travaillent tant avec les gens de l'Alcan que les autres industries de la région et je pense que, malgré le fait que le département soit petit, on ne recommande pas à ce point-ci de coupures.

M. Ryan: Vous ne recommandez pas de coupures, mais vous voulez que, s'il est question de nouveaux départements, on y pense bien comme il faut avant de les permettre.

Vous parlez de la loi qui a été adoptée il y aquelques années en vertu de laquelle un professeur qui atteint ce qui était autrefois l'âge convenu de la retraite, soit 65 ans, peut continuer au-delà de 65 ans, ce qui, évidemment, ralentit le processus de renouvellement du corps enseignant. D'abord, est-ce que vous observez qu'il y a beaucoup de professeurs qui persévèrent au-delà de 65 ans? Deuxièmement, est-ce que l'Ordre des chimistes a une position là-dessus ou si c'est simplement une observation plutôt marginale que vous avez faite dans votre mémoire?

M. Richer: Ce n'est pas marginal. Je pense qu'il y a là-dedans des libertés qu'on dit fondamentales, mais, une fois qu'on accepte cette liberté fondamentale de choisir le moment de sa retraite, cela signifie que les départements dans lesquels travaillent ces chimistes ne peuvent pas planifier à l'avance quels seront les besoins. Les gens, aujourd'hui, ont tendance à monnayer le fait qu'ils ne sont pas obligés de partir pour obtenir des avantages supplémentaires et les départements n'ont pas la possibilité de faire de la planification. Je pense que c'est une position claire, nette, précise sur laquelle on ne voudrait pas revenir.

M. Ryan: Très bien. Je vais me limiter à cela pour tout de suite. On reviendra tout à l'heure, au besoin.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le président, messieurs, cela me fait plaisir de vous recevoir ici. Quand les professionnels viennent nous parler des universités, soit comme professeurs ou comme professionnels en dehors du réseau, cela nous donne un éclairage et cela situe la question dans une perspective intéressante et enrichissante pour la commission. Cependant, vous me permettrez de toucher un certain nombre de points; M. le ministre en a soulevé quelques-uns. Moi, je voudrais revenir sur, j'allais dire, une affirmation que vous faites en page 2 de votre mémoire. Vous parlez de l'inertie du système universitaire en soulignant que la recherche scientifique stagne. Vous dites que cela date de quinze ans: "La recherche scientifique est stagnante depuis quinze ans dans le réseau universitaire; il faut lui donner vie." Il ne me semble pas y avoir de rapport entre le dynamisme en recherche et les ressources financières. Il y a quinze ans, je ne dirais pas que c'était l'âge d'or du réseau, mais il y avait quand même plus de sous dans le

réseau, et pourtant on n'avait vraisemblablement, selon votre analyse, pas beaucoup plus de résultats en recherche, particulièrement dans vos départements. Voudriez-vous m'expliquer un peu?

M. Richer: Une partie de cela vient du rapport sur la conjoncture scientifique et technologique du Conseil des sciences, mais, ayant vécu cette période-là, les années soixante ont été des années de grande croissance. Au début des années soixante-dix, le réseau québécois était complet. La commission Lamontagne sur la science et la technologie à Ottawa a commencé à réfléchir et à vouloir orienter la recherche vers les problèmes de la société, et les crédits, même si on a eu l'impression qu'ils augmentaient, ont plafonné rapidement au début des années soixante-dix. Je pense que, même s'il y a eu des résultats qui sont sortis depuis, on peut pratiquement dire que depuis le début des années soixante-dix la recherche a atteint un point de stagnation au Québec. Je crois que l'Université de Sherbrooke et l'Université du Québec à Montréal auraient peut-être des choses à ajouter là-dessus. Mon collègue était quand même directeur de son département pendant ces années-là. Il a peut-être des points à vous ajouter directement.

M. Pelletier (Gérard): Si vous le permettez, M. le Président, il me ferait plaisir d'intervenir ici sur cette question et d'apporter un complément d'information. Le rapport sur la conjoncture scientifique et technologique du Québec, comme il est mentionné, est un rapport global. Il ne différencie pas toujours toutes les disciplines scientifiques. Il se peut fort bien que toutes les conclusions, aussi draconiennes qu'elles semblent être, ne s'appliquent pas intégralement à la chimie. Mais, comme le vice-président le mentionnait tantôt, si on prend les fonds que nous avons à notre disposition en dollars constants, je pense qu'on pourrait voir qu'un certain plafonnement s'est fait au cours des dernières années.

En somme, on a bien souvent l'impression qu'on fait plus aujourd'hui avec peut-être moins qu'on n'avait il y a quelques années. Je pense qu'il est très important de regarder tout ce problème dans un contexte de développement très rapide dans les années soixante qui, je pense, a été le résultat de toute une prise de conscience de la société québécoise pour le développement technologique. Les universités se sont développées très rapidement, mais il faut bien reconnaître que, depuis quelques années, depuis une dizaine d'années, on se maintient à peu près au même niveau. On peut le voir dans les universités d'après le nombre d'étudiants inscrits aux différents diplômes de maîtrise et de doctorat. Je pense que cela se maintient à un niveau à peu près constant. On n'a pas continué, en fait, l'envolée initiale qui était très bénéfique, je crois. C'est dans ce sens-là qu'il faut voir les phrases qui sont ici.

Mme Blackburn: Monsieur.

M. Pépin (Yvon): À l'Université du Québec à Montréal, on a été heureux, lors de la création de l'université, de bénéficier de montants d'argent importants pour créer le département de chimie. Effectivement, on a établi une infrastructure qui satisfaisait les besoins au début des années soixante-dix. Passé ces quelques années, les montants d'argent sont devenus extrêmement rares et on a vécu sur nos acquis pendant toutes les années soixante-dix. Autrement dit, l'enseignement était basé sur ce qu'on avait acheté. Cela s'est matérialisé par une stagnation parce que, durant les années soixante-dix, il y a eu énormément de développement de nouveaux appareils: miniaturisation des appareils, informatisation des appareils. Nous étions toujours avec nos appareils des années soixante. Cela nous a perturbés beaucoup. Depuis les années quatre-vingt, on a réussi, à cause de la croissance importante de l'Université du Québec, à avoir de nouveaux montants d'argent pour acheter quelques nouveaux appareils. Là encore, on arrive très difficilement à renouveler le parc des appareils. Je pense que c'est une situation qu'on rencontre dans toutes les universités.

Cela revient à dire que l'enseignement, quoiqu'il s'est fait quand même avec une certaine qualité, en ce moment est rendu à la limite et on a besoin de renouveler les appareils. On a besoin de renouveler non seulement les appareils, mais, à cause de la clientèle étudiante, les fournitures qui accompagnent l'enseignement pratique dans les laboratoires. C'est une chose de desservir 20 ou 30 étudiants dans une période de laboratoire, mais quand vous êtes rendu à cinq groupes qui utilisent le même matériel, il finit par se briser. Il faut avoir de l'argent de fonctionnement pour pouvoir continuer. Le fonctionnement, dans les universités, est une chose importante. On sait que l'argent dans le fonctionnement en ce moment est passablement bien contrôlé. Donc, si on veut maintenir une certaine qualité de la formation, il va falloir aussi penser non pas seulement à l'investissement, mais aussi au fonctionnement.

Mme Blackburn: Vous faites, dans votre mémoire, une démonstration qui m'apparaît assez parlante, si je peux m'exprimer ainsi, du rapport qu'il y a entre la taille, il m'a semblé, de vos départements et la recherche. La réponse que vous faisiez tout à l'heure me laissait penser que ce que vous

privilégiez comme orientation, c'est d'axer la recherche dans des petits départements, dans les secteurs plus spécialisés. Vous pariiez d'océanographie. Je vous dirais: Est-ce que cela peut se démontrer aussi pour les autres?Est-ce qu'on pourrait sur cette base maintenir les départements existants ou hausser si possible notre contribution, le montant des subventions obtenues?

J'avais une autre question. Toujours sur cette question, en page 7, les huit départements au-dessus de la moyenne reçoivent 54 % des subventions. Le pourcentage des demandes est de 98,5 %. Autrement dit, vous faites la démonstration qu'il y a un rapport assez étroit entre la taille, la masse critique et la capacité d'avoir des subventions de recherche, le dynamisme du département, donc. (18 heures)

M. Richer: C'est certain qu'à la lecture de ce rapport la conclusion que l'on peut tirer est que l'argent attire l'argent. Les groupes qui sont déjà bien organisés vont avoir plus de facilité à avoir de l'argent que les groupes qui sont plus petits parce qu'ils ont un rayonnement plus grand, ils sont plus connus et ils peuvent attirer plus d'étudiants. Il y a une autre chose qu'il faut aussi remarquer pour les petits départements de l'Université du Québec, entre autres. C'est qu'il y a des départements qui n'ont pas d'études doctorales et qui ne peuvent pas attirer les gens. Ce n'est donc pas un plaidoyer pour créer des programmes de doctorat, mais il est évident que plus on a un département qui est gros plus on peut attirer de gens. Parce que les universités, à cause des cégeps, ont perdu 25 % de leurs professeurs, on a 25 % moins de gens.

On ne l'a pas mis dans le mémoire, on n'a pas voulu faire de choses particulières, mais je peux vous le dire: Uniquement à cause de la différence dans le nombre de professeurs, pour le supplément de professeurs qu'il y a dans le département de chimie à l'Université de Toronto, le plus grand au Canada, ils reçoivent plus d'argent en fonds de recherche pour ces gens-là que tout le département de chimie de l'Université de Montréal. À quelques centaines de milliers de dollars près même McGill pourrait être battue par Toronto, juste pour les gens qui viennent en supplément.

Il faut réaliser que les départements de chimie des universités québécoises, à cause de notre système qu'on ne remet pas en question - et non pas en position comme il est indiqué quelque part dans le texte - soit l'existence des cégeps, ont une taille qui est petite et qui les rend fragiles. La chimie est une science expérimentale. Ce n'est pas les sciences sociales, cela prend de l'équipement. Même si ce n'est que du petit équipement pour les étudiants "sous-gradués", cela prend de l'équipement et, lorsqu'on parle de modalités de financement, il faudrait que les modalités de financement qui sortiront de votre commission ou d'ailleurs puissent tenir compte du fait qu'il y a des départements qui ne sont pas comme les autres. Les départements de chimie, comme ceux des gens qui nous ont précédés tout à l'heure, les agronomes, doivent faire de l'expérimentation que n'ont pas à faire les gens en sciences sociales, en études anciennes, en études françaises ou anglaises, ce que vous voudrez. Mais il n'y a pas d'appareillage petit pour les étudiants "sous-gradués" et gros pour les étudiants au niveau supérieur. Il faut en tenir compte dans les modalités de financement. Ce n'est pas qu'une question de financement, c'est une question de modalité de financement à l'intérieur des universités.

Mme Blackburn: Une autre question. Tout è l'heure, le ministre vous l'a posée sauf que, par distraction, je n'ai pas saisi toute la réponse. Est-ce que le décret touchant l'âge de la retraite a une influence importante? Est-ce que vous avez des données sur l'âge moyen du corps professoral en chimie et biochimie?

M. Richer: L'âge moyen des départements de chimie augmente pratiquement de un par année parce qu'on n'a pas de personnes nouvelles. Le décret a une influence néfaste sur la planification des départements parce qu'on ne peut pas planifier. Les gens ne sont pas obligés de partir à la retraite et, s'ils ne sont pas obligés de partir à la retraite, le directeur de département ne peut pas dire à son doyen ou à son recteur qu'il faudrait peut-être commencer à penser à Untel parce qu'on ne sait pas si Untel va partir dans deux ans, dans trois ans, dans cinq ans ou dans sept ans.

Mme Blackburn: Mais est-ce que c'est un phénomène important actuellement? Est-ce qu'il y a plusieurs professeurs qui choisissent de rester au travail? Je n'ai pas encore eu de données réelles qui m'ont démontré que cela avait eu des effets réels dans le réseau universitaire qu'il y en ait un qui a 65 ans qui reste.

M. Richer: Cela n'en a pas encore beaucoup parce que les gens du bloc des années soixante - moi, j'ai été engagé le 1er septembre 1960, donc je fais partie de cette bande-là - ne sont pas encore arrivés à l'âge de la retraite, mais ils vont y arriver bientôt. Comme le directeur ne sait pas quand on va partir - je peux le traîner pendant au moins six ans encore - ce n'est pas comme cela qu'on fait de la planification et, s'il n'y a pas de planification, c'est

certain qu'il va y avoir du gaspillage.

Mme Blackburn: L'âge moyen, est-ce que vous l'avez?

M. Richer: Je...

Mme Blackburn: Vous ne l'avez pas?

M. Richer: Mais on peut vous le trouver.

M. Pépin: On pourrait peut-être compléter sur cela, si vous le permettez, madame. Chez nous, on a un professeur qui est rendu à 66 ans et qui est toujours directeur du module de chimie. Donc, il y en a au moins un à l'Université du Québec è Montréal qui a dépassé l'âge de la retraite.

Lorsqu'on parle de planifier la retraite de certains professeurs, il y a des moyens de planification qui existent, soit par l'engagement de professeurs substituts parce que parfois des professeurs sont dégagés pour des tâches administratives. À ce moment-là, on leur permet d'engager des professeurs substituts. On peut planifier d'engager des professeurs substituts pendant deux, trois, quatre ans, en se disant: On va pouvoir l'évaluer et, si jamais il est très bon, on pourra s'en servir pour remplacer. On a des périodes d'évaluation comme celles-ci. Il y a aussi des régimes d'engagement de professeurs boursiers ou de professeurs chercheurs du conseil national de recherches en santé, en sciences et génie du Canada qui nous permettent d'avoir des professeurs pendant trois ans à cinq ans, dont le salaire et des subventions de recherche sont disponibles pour les universités. À ce moment-là, on peut, encore là, engager des jeunes, leur permettre d'oeuvrer à l'université, de prendre de l'expérience et ensuite, lorsqu'un professeur prend sa retraite, ces jeunes remplacent les professeurs qui prennent leur retraite. Mais, après trois à cinq ans, si l'autre professeur décide de ne pas prendre sa retraite, on est obligé de mettre dehors le jeune et, à ce moment-là, on perd un acquis qu'on avait formé, dont on était sûr et, deux ans après, on engage sur diplôme au lieu de sur expérience vécue. Donc, c'est ce genre de planification qui devient très difficile à long terme.

Mme Blackburn: Une dernière question qui est délicate et qui a un rapport avec la précédente. On prétend qu'il y a un rapport entre âge et productivité en recherche. Généralement, on admet qu'en sciences humaines l'âge a moins d'importance et je dirais même qu'un âge plus avancé donne une perspective plus globale de certains problèmes, ce qui fait que généralement à cet âge vous êtes plus productif alors qu'en sciences exactes c'est, semble-t-il, quand vous êtes plus jeune que les découvertes les plus importantes et les plus intéressantes se font. Je fais un rapport entre cela et le vieillissement du corps professoral particulièrement chez vous. Cela se passe peut-être de commentaires, remarquez, mais j'aimerais quand même avoir là-dessus votre idée. Peut-être que j'erre complètement.

Une voix: Est-ce que vous avez un commentaire?

M. Pépin: Chez nous, le corps professoral a vieilli aussi d'un an par année. Au total dans l'université, il arrive parfois que les corps professoraux vieillissent seulement d'une demi-année par année. C'est la magie des chiffres lorsqu'on parle de grands nombres plutôt que d'individus. Farce à part, l'équipe qui a été engagée en 1969 à l'UQAM était la même équipe qu'on avait en 1980 sans aucun professeur supplémentaire. Donc, elle avait vraiment vieilli d'un an par année pendant dix à douze ans. J'ai oublié votre question. Je suis parti sur une parenthèse rapidement?

M. Richer: C'est vrai que les jeunes qui finissent leur doctorat - non pas le 3e cycle, mais un vrai Ph.D. - et qui font des études postdoctorales sont tout feu tout flamme, mais ils sont peut-être dans un milieu très pointu. Des professeurs qui ont un âge plus mûr vont peut-être avoir moins de flamme pour un domaine pointu et avoir une expérience qui va faire qu'ils vont pouvoir faire des choses des plus utiles pour la société, peut-être encore plus utiles parce qu'ils vont avoir vécu des problèmes de la société et vont essayer d'y répondre.

Mme Blackburn: Donc...

M. Pelletier: Si vous me le permettez, j'aimerais faire un commentaire à ce sujet. Je pense que cette question est très complexe. Évidemment, on la regarde sous l'angle de la recherche seulement. Quand on regarde le travail d'un professeur d'université, bien sûr, la recherche joue un rôle fondamental, mais le professeur doit aussi faire de l'enseignement et de l'administration.

Au cours de leur carrière, tous les professeurs ne peuvent exceller dans les trois domaines: recherche, enseignement et administration. Certains vont plutôt exceller du côté recherche et d'autres, peut-être avec un peu plus de maturité, excelleront dans d'autres domaines, dans l'enseignement. Les professeurs d'expérience sont un très grand atout dans un département de chimie et l'expérience de l'administration est également extrêmement importante.

Quant à la recherche, vous avez raison,

madame, la plupart des études faites dans ce domaine - je me souviens d'en avoir vu plusieurs - tendent à démontrer qu'il y a un âge relativement plus jeune en sciences où l'on frappe le maximum de la productivité, bien que plusieurs chercheurs restent très productifs assez longtemps.

Quand on parle également de renouveler, il faut penser que la science de la chimie évolue très rapidement, surtout du point de vue technologique et du point de vue technique. Souvent, un professeur va continuer avec des techniques avec lesquelles il est très familier; il est très utile, bien souvent, de faire entrer des jeunes qui maîtrisent peut-être les toutes nouvelles techniques, bien que les autres professeurs le peuvent aussi. Mais les jeunes professeurs d'un département apportent souvent de nouvelles idées et de nouvelles techniques dont ils peuvent faire bénéficier l'ensemble. Je pense, à ce moment, qu'il faut regarder l'équipe d'un département de façon globale.

Mme Blackburn: En fait, ma question voulait vérifier s'il y avait un rapport entre la productivité en recherche de nos équipes et le vieillissement du corps professoral. C'était tout.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela va?

Mme Blackburn: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le député de Sherbrooke.

M. Hamel: M. le Président, ma question déborde un peu le cadre strict de la chimie proprement dite. Je pense qu'elle a un intérêt certain. J'aimerais avoir l'opinion ou les commentaires de l'Ordre des chimistes quant au rôle que devraient jouer les corporations professionnelles dans le développement de l'ensemble de la recherche. Qu'est-ce que vous auriez à nous signaler?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Est-ce que vous vous sentez en mesure d'éclairer la commission?

M. Richer: Les ordres professionnels sont là, au départ, pour protéger le public. Donc, il y a des gens qui, d'un point de vue très restreint, diraient: Les ordres ont peu de choses à faire là-dedans. Les chimistes n'ont pas pris la chose d'une façon trop restreinte et, lorsque des problèmes ont surgi avec l'industrie pharmaceutique è Montréal, la fermeture des laboratoires de recherche Ayerst, l'ordre a fait les représentations qui s'imposaient ou qu'il croyait qui s'imposaient à l'époque. Il a été fort heureux de voir que les démarches ont abouti a la création de Bio-Méga et au recasement pratiquement in toto de l'équipe qui était unique au Canada et qu'il aurait été assez malheureux de voir disparaître dans la nature.

On espère bien que Bio-Méga donnera les résultats qu'on en attend, mais, à ce point de vue, on est en attente avec toutes les autres parties pour voir les résultats qui pourront en ressortir. Je pense que, dans cela, l'ordre joue un rôle certain - ce n'est pas son rôle - parce qu'on croit qu'à long terme c'est pour le bénéfice du public.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Est-ce que cela répond à votre question? M. le député de Laviolette. (18 h 15)

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Ma question va dans le prolongement de la sagesse dont faisait mention le ministre tout à l'heure, à savoir que les premiers ministres avaient toujours joint l'Office des professions avec le ministre responsable de l'Éducation, de la Science et de la Technologie qui est maintenant le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science. Vous êtes un ordre qui participe à des commissions parlementaires, vous donnez vos opinions, vous surveillez. Dans là foulée du rapport Gobeil où on propose la disparition de l'Office des professions, quelle est votre réaction?

M. Richer: M. le Président, on ne se défilera pas! Il y a plusieurs ordres qui ont quelquefois eu des difficultés avec l'Office des professions et à qui cela plairait peut-être de voir disparaître l'Office des professions. Je dois vous dire que les chimistes ont toujours eu de bonnes relations avec les gens de l'Office des professions, que je dois voir des gens de l'Office des professions demain après-midi et que, si on doit faire disparaître l'Office des professions pour le remplacer par un groupe de gens aussi nombreux et liés directement au ministère de l'Enseignement supérieur, on va avoir échangé quatre trente sous pour une piastre et on n'aura pas avancé grand-chose. Â ce point-ci, je sais que tout est enregistré, mais je me mets la tête sur le billot et je dis: Je vais attendre pour voir ce que vous allez nous offrir en retour, si vous voulez l'enlever.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci.

M. Ryan: Est-ce l'avis de la profession tout entière ou votre avis?

M. Richer: Vous savez, le commun des chimistes qui n'a pas affaire avec l'Office des professions se doute à peine que cela existe, mais les gens du bureau et du comité administratif qui ont affaire avec l'office peuvent un peu répondre parce que les autres ne savent même pas que cela existe.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Richer. Je reconnais maintenant la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Merci. Je trouve que votre mémoire dit quelque chose d'extrêmement important. C'est la meilleure preuve que nous avons jusqu'à présent de l'importance du phénomène de la masse critique. C'est une des conditions, évidemment, essentielles de l'excellence de l'enseignement et de la recherche. Comme vous l'avez dit dans votre mémoire, je crois que le succès appelle le succès. Le Conseil des universités a souligné ce phénomène, mais nous en avons maintenant la preuve au moins dans votre domaine qui est la chimie.

Dans ce contexte, vous avez soulevé l'impact négatif de l'existence des cégeps, qui a privé les universités de 20 % à 25 % des professeurs. Pourquoi n'avez-vous pas poursuivi cette argumentation jusqu'à sa conclusion logique? À la page 10, vous avez simplement souligné la nécessité de protéger la fragilité de nos équipes, en chimie en particulier; vous avez dit: "Pour protéger l'acquis et pour remédier en partie aux inconvénients de notre système, il faut prendre des mesures particulières." Alors, lesquelles? Quelles mesures particulières doit-on prendre pour protéger cette vulnérabilité dont vous parlez?

M. Richer: À la première question, à savoir pourquoi on n'a pas poursuivi notre raisonnement jusqu'à son ultime conclusion, c'est à cause de quelque chose que vous connaissez très bien, ce fut une décision politique de ne pas pousser le...

Mme Dougherty: Ce fut une décision politique, mais étant donné son impact négatif.

M. Richer: Ce fut une décision politique de notre part de ne pas le pousser plus loin.

Mme Dougherty: Je comprends.

M. Richer: Parce que si on l'avait poussé plus loin, toute la discussion aurait tourné autour de cela et le reste aurait été oublié. Donc, pour l'instant, on essaie de mettre l'accent sur la façon de sauvegarder les acquis, de ne pas diminuer le financement de façon telle que l'on soit obligé de couper encore des professeurs et d'avoir un taux de diplomation qui soit vraiment plus élevé que partout au Canada et un taux d'encadrement qui soit deux fois plus élevé que partout au Canada. Je pense qu'il est important que l'on ait un financement pour les départements de chimie qui soit à un niveau tel que l'on ne descende pas en dessous de la norme actuelle. On voudrait que dans le financement des universités il y ait des modalités telles que les départements de chimie soient sauvegardés. Les départements de sciences, je vous l'ai dit tout à l'heure, ce ne sont pas les sciences sociales. Il faudrait que la chimie, dans les modalités de financement, ait des conditions de financement qui lui soient particulières. Ce sont là les choses particulières, qu'il y ait des modalités de financement particulières. Il ne s'agit pas de dire: C'est tant par tête de pipe et les départements de chimie sont traités comme le département de sciences sociales. Ce n'est pas ta même chose. C'est la démonstration qu'on a essayé de vous faire aujourd'hui: les départements de chimie ne sont pas des départements comme les autres.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci pour votre intervention. S'il n'y a pas d'autres interventions, je demanderais à la députée de Chicoutimi de conclure.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le président, messieurs, il m'a fait plaisir de vous entendre apporter un éclairage sur les situations et les difficultés vécues particulièrement par les départements de chimie dans les universités. Je dois dire que j'avais compris qu'il était difficile pour vous d'aller un peu plus loin. Cependant, je me dis que ces questions, ce n'est pas exclusivement politique. Aller aux conclusions à la suite de la démonstration que vous avez faite en utilisant exclusivement comme critère la masse critique, cela m'apparaît toujours un peu inquiétant. Je me faisais la réflexion, en écoutant la députée de Jacques-Cartier, qu'il faudrait quasiment, si on parle de masse critique de développement, que l'on déménage tous à New York, car la masse critique, en Amérique du Nord, ressemble beaucoup plus à cela. Cela fait qu'il y a d'autres critères qui doivent être pris en compte lorsqu'on détermine la pertinence de préserver ou de conserver certains départements.

Je vous remercie. C'était le commentaire que je voulais faire là-dessus. J'ai apprécié votre présentation et les informations contenues dans votre mémoire. Au nom de ma formation politique, je vous en remercie et je vous souhaite une bonne fin de journée.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Je reconnais maintenant le ministre de l'Éducation et de la Science.

M. Ryan: Votre présence devant la commission aura contribué à nous rendre plus conscients de l'importance de nos départements de chimie dans les universités du Québec. Vous pouvez être assurés que nous considérons que c'est un élément absolument

essentiel dans cet accent sur la formation scientifique qui doit être diffusée par les universités.

Je trouve que la demande que vous formulez en vue d'une reconnaissance plus particulière des besoins des départements de chimie en matière de politique de financement universitaire n'est pas clairement établie. Il faudrait que vous alliez plus loin là-dedans. On va nous dire cela en provenance de chaque faculté, de chaque département. Je ne détesterais pas que vous nous apportiez un complément d'information surtout sur le problème des équipements. Dans la plupart des mémoires que nous recevons, il y a quelques paragraphes très intéressants consacrés à la désuétude des équipements. Il nous faudrait peut-être des choses encore plus concrètes. J'aimerais que vous nous donniez des précisions beaucoup plus concrètes là-dessus. Si vous pouviez envoyer un petit addendum à votre mémoire, ce serait très utile pour la commission et pour le ministre en particulier.

Sur le reste, vous posez des questions auxquelles vous avez décidé, politiquement, de ne pas répondre. Vous nous adressez des questions fondamentales - ma collègue de Jacques-Cartier en a soulevé une couple qui sont très difficiles - qui, je pense bien, ne pourront pas recevoir de réponse à court terme. Ce sont des questions qui sont inscrites dans la réalité. Je pense que vous nous avez conduits à ces questions. Nous avons essayé de les formuler de manière un peu plus explicite, mais cela ne veut pas dire que nous avons les réponses. Nous les cherchons avec vous et si jamais il y a des compléments d'opinion ou d'information que vous voulez nous communiquer, soit dans le cadre des travaux de la commission, soit une fois que la commission aura terminé, parce que le ministère restera sans doute en place sous une forme ou sous une autre, vous serez les bienvenus. Je vous remercie infiniment. Cela a été très agréable de causer avec vous. Je pense que vous avez contribué à nous sensibiliser à une dimension importante du problème du financement et de l'orientation de nos universités.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, merci, M. le ministre, merci, Mme la députée de Chicoutimi. M. Richer, nous vous remercions et nous vous félicitons aussi pour la qualité de votre intervention. La commission parlementaire de l'éducation suspend ses travaux jusqu'à 20 heures alors qu'elle entendra l'Ordre des ingénieurs.

(Suspension de la séance à 18 h 26)

(Reprise à 20 h 5)

Le Président (M. Parent, Sauvé): La commission reprend ses travaux et accueille ce soir l'Ordre des ingénieurs du Québec. Je vous rappelle que la commission parlementaire siège dans le cadre d'une demande de l'Assemblée nationale de tenir une consultation générale sur les orientations et le cadre de financement du réseau universitaire québécois pour l'année 1987-1988 et les années ultérieures.

M. Douville, qui êtes le porte-parole de l'Ordre des ingénieurs du Québec, nous vous souhaitons la bienvenue. La commission prévoit consacrer une heure à discuter avec les gens de votre organisation, heure qui pourrait être répartie comme suits 15 à 20 minutes vous seront laissées pour exposer l'objet de votre intervention ou, si c'est plus court, vous arrêterez quand bon vous semblera. Je vous informe aussi que les députés qui sont ici ont pris connaissance de votre mémoire et connaissent déjà l'orientation de votre intervention. La dernière partie sera répartie également entre les deux formations politiques et les députés formant cette commission discuteront avec vous, vous poseront des questions. Vous serez libre d'ajouter des choses qui ne paraissent pas dans votre mémoire. De toute façon, comme je le dis souvent aux autres, c'est une consultation formelle mais qu'on veut la plus informelle possible tout en demeurant à l'intérieur de nos règlements. M. Douville, si vous voulez présenter les gens qui vous accompagnent et procéder à la présentation de votre sujet.

Ordre des ingénieurs du Québec

M. Douville (Gilles): Je vous remercie, M. le Président. On va s'efforcer de respecter vos règles du jeu et vos règlements. M. le Président, distingués membres de la commission, bonsoir. Mon nom est Gilles Douville. Je suis ingénieur et président de l'Ordre des ingénieurs du Québec. Permettez-moi tout d'abord de vous présenter les membres de notre délégation. À ma droite, M. Robert Girard, ingénieur, secrétaire adjoint de l'ordre et directeur de l'admission et de l'enregistrement; à sa droite, M. Jacques Soucy, ingénieur, secrétaire de l'ordre et directeur général; à sa droite, Mme Nancy Smith, administrateur, représentante du public nommée par l'Office des professions, qui enseigne l'anthropologie à l'Université Laval. À ma gauche, M. Jacques Filteau, directeur des communications Jacques est ingénieux mais n'est pas encore ingénieur - à sa gauche, M. Jean-Yves Poliquin, ingénieur, administrateur. Également présents avec nous ce soir, M. Jacques Roy, ingénieur, président de notre comité sur la législation, et M. Jean Roy, vice-président de notre régionale ici, à Québec.

M. le Président, nous sommes reconnaissants pour l'invitation que vous nous

avez faite de présenter nos opinions à la commission de l'éducation sur l'étude des orientations et du cadre de financement des universités. L'Ordre des ingénieurs, comme vous le savez sans doute, compte 28 000 membres et les lettres patentes qui ont créé la Corporation des ingénieurs professionnels du Québec, nom sous lequel l'ordre fut d'abord connu, ont été émises en 1920. La Loi sur les ingénieurs qui régit toutes les activités de la profession au Québec oblige toute personne qui veut exercer la profession à en porter le titre et à être membre de l'ordre. De fait, au Québec, un ingénieur est un membre de l'ordre. C'est donc toute la profession qui est regroupée dans l'ordre.

À l'intérieur des cadres de la Loi sur les ingénieurs, l'ordre s'est donné une mission qui est de promouvoir et d'assurer la qualité des services rendus è la société par les ingénieurs individuellement et collectivement en tant que membres d'un corps professionnel et de favoriser l'épanouissement professionnel et personnel de ses membres.

C'est en réalisant sa mission que l'ordre entend assurer la protection du public tel que l'exige la Loi sur les ingénieurs. On exige donc beaucoup de l'ingénieur qui doit pratiquer sa profession selon les règles de l'art et pour qu'il puisse répondre adéquatement à toutes ces exigences pour assurer l'excellence des services qu'il rend à la société, la qualité de sa formation académique doit être prioritaire. Elle est la base même qui lui permettra de bien fonctionner comme ingénieur.

Depuis plusieurs années, l'Ordre des ingénieurs collabore très étroitement avec le milieu universitaire quant à la formation des futurs ingénieurs. Le comité tripartite de l'ordre, composé des doyens de sept facultés et écoles de génie du Québec, des représentants des étudiants et de l'ordre se réunit régulièrement et se penche sur des sujets d'intérêt communs à l'ordre et aux universités, entre autres la qualité de la formation des futurs ingénieurs, le placement des jeunes diplômés et particulièrement, depuis quelques années, sur l'insuffisance de financement des écoles de génie, sans pour autant pouvoir malheureusement apporter ou suggérer des solutions concrètes à ce problème auquel nous ont sensibilisés les doyens des écoles de génie.

Quant è la formation académique des étudiants en génie, nous apportons une aide technique et financière substantielle au Bureau canadien d'accréditation des programmes d'ingénierie qui est un comité permanent du Conseil canadien des ingénieurs dont nous faisons partie. Ce bureau vise à maintenir des standards très élevés des programmes d'ingénierie. Pour sa part, le comité permanent de développement professionnel de l'ordre s'occupe activement de la formation continue des membres à partir du moment où ils quittent l'université.

En 1984, l'ordre présentait aux autorités gouvernementales un mémoire dans lequel il exprimait ses inquiétudes vis-à-vis de la formation des ingénieurs du Québec. Notre intervention d'aujourd'hui se situe sensiblement dans la même orientation mais les préoccupations que nous avions fait valoir à l'époque se sont accentuées, si l'on se réfère au budget par étudiant temps plein qui n'a cessé de décroître au Québec depuis 1980 alors que la moyenne nationale s'est accrue à compter de 1983 après avoir régressé en 1981 et 1982.

M. le Président, vous aurez sans doute remarqué que notre mémoire ne contient pas de recommandations spécifiques. Nous nous sommes plutôt efforcés de colliger un certain nombre de données pertinentes qui nous semblaient significatives et importantes. Cet effort de synthèse traduit notre volonté d'apporter une contribution positive dans l'évolution du dossier et un appui des plus fermes à toutes les voix autorisées qui réclament un financement plus adéquat de nos institutions universitaires.

Nous sommes bien conscients que les choix politiques de l'heure auront de très lourdes conséquences sur les générations à venir. Comme nous avons à coeur de transmettre à nos fils et à nos filles un héritage de qualité, nous croyons qu'il ne faut pas laisser la situation se dégrader davantage. Il faut investir dans l'éducation car il s'agit là d'un investissement non seulement nécessaire, mais aussi des plus rentables.

Nous sommes aussi conscients que l'État n'a pas des ressources illimitées. En fait, les ressources de l'État sont, à la limite, les nôtres. Nous comprenons donc fort bien qu'il y ait des choix douloureux à faire, mais couper dans l'éducation ne serait pas simplement douloureux; ce serait, à notre avis, désastreux. Donc, nous pensons qu'il faut investir davantage. Personnellement, comme parent, j'accepterais volontiers de subir une hausse des frais de scolarité pour mes enfants pour autant que l'État n'oublie pas de faire sa juste part.

Avec votre permission, M. le Président, je laisserai maintenant à mon collègue de droite, M. Robert Girard, secrétaire adjoint et directeur du service d'admission et d'enregistrement, le soin de vous communiquer l'essentiel de notre mémoire. Je vous remercie.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M,

Girard.

M. Girard (Robert): M. le Président, mesdames et messieurs, permettez-moi de vous donner très brièvement le sommaire des principaux points de notre mémoire, tant celui d'octobre 1984 que le complément que

nous lui avons ajouté en juillet dernier.

Le premier point que je voudrais traiter avec vous est celui du rapport étudiants-professeur. Depuis cinq ans, l'augmentation du nombre d'étudiants dans nos facultés de génie se situe à environ 5 % avec comme conséquence qu'en 1980 le rapport étudiants-professeur était de moins de 18 et qu'en 1986 il atteint 23 étudiants par professeur. Les experts en la matière nous disent que ce rapport devrait être de 8 à 16 dans les facultés où il se fait de la recherche et de l'enseignement, ce qui est le cas dans nos facultés de génie. Si nous acceptons un ratio de 12, c'est donc dire que le ratio actuel est pratiquement deux fois trop élevé. De tous les facteurs qui influent sur la qualité de l'enseignement, le plus important est ce ratio étudiants-professeur, à cause de l'attention personnelle qui doit être portée aux étudiants, de l'encadrement des travaux de laboratoire et de la résolution de problèmes pratiques que les étudiants peuvent avoir.

Le deuxième point touche le personnel enseignant. Les coupures budgétaires des dernières années n'ont pas permis ou très peu l'engagement de jeunes professeurs, de sorte qu'actuellement 70 % des professeurs ont plus de 40 ans et 6 % ont plus de 60 ans. Comme il n'y a pas d'apport de jeunes professeurs, l'âge moyen du corps professoral augmente d'une année à chaque année. Il n'y a pas de relève suffisante de prévue, de sorte que dans dix ou quinze ans plusieurs universités auront un problème sérieux lorsque ces professeurs prendront leur retraite. Il y a donc un urgent besoin de rajeunir le corps professoral.

Un point important aussi pour nos étudiants concerne les laboratoires. Nos futurs ingénieurs font des études en sciences appliquées. Qui dit sciences appliquées, bien sûr, parle de laboratoires. Les problèmes touchant les laboratoires sont de deux ordres. Tout d'abord un problème d'espace. La moyenne canadienne est de 5,3 mètres carrés par étudiant. La moyenne au Québec est de 4,3 mètres carrés par étudiant. C'est donc un mètre carré qui fait défaut dans nos facultés. Or, il y a près de 10 000 étudiants au Québec en génie, ce qui veut dire que c'est 10 000 mètres carrés qui manquent en espace de laboratoires au Québec. Ce manque nous a été signalé, entre autres, par les doyens des facultés de génie.

Quant à l'équipement, il est malheureusement désuet. Des budgets additionnels sont nécessaires pour l'entretien et la réparation de l'équipement actuel, pour remplacer l'équipement par du nouvel équipement plus moderne, pour permettre de nouvelles expériences au fur et à mesure que la technologie évolue et pour la recherche des deuxième et troisième cycles. Nos préoccupations, quant à l'espace insuffisant et à l'équipement désuet, sont également partagées par le Bureau canadien d'accréditation des programmes d'ingénierie, qui le soulignait dans son rapport annuel 1983-1984. Permettez-moi de vous citer une remarque de M. Georges E. Pake, vice-président de Xérox, qui a laissé entendre que les chercheurs scientifiques et les ingénieurs sortant en ce moment des universités pour se joindre au personnel des laboratoires de recherche industrielle connaissent des problèmes analogues à ceux rencontrés par une personne venant d'un pays moins développé et qui va travailler dans un pays technologiquement avancé.

Puisque nous en sommes à la recherche, permettez-moi d'attirer votre attention sur ce sujet. La qualité de l'enseignement universitaire est éminemment tributaire de la recherche. La qualité de l'enseignement profite de la recherche. Lorsqu'il se fait de la recherche intéressante, elle attire des chercheurs compétents qui, eux, communiqueront leurs découvertes aux étudiants, et c'est un dynamisme qui s'installe. Il est aussi important que notre recherche ne soit pas à la remorque des autres mais que nous puissions faire une recherche qui nous soit originale. Pour cela, des laboratoires bien équipés sont nécessaires, des bibliothèques également bien garnies sont nécessaires; et on sait qu'à cause des coupures budgétaires, des réductions ont dû être effectuées par les universités tant dans les abonnements à des périodiques scientifiques qu'à des achats de livres.

Selon les chiffres qui nous sont fournis par les doyens des facultés d'ingénierie du Canada, le budget moyen par étudiant s'établit comme suit pour le Québec: En 1980, il était de 5950 $ par année par étudiant; en 1986, il est de 4400 $ par année par étudiant. C'est donc une diminution constante de 26 % entre 1980 et 1986. La moyenne canadienne, quant à elle, est de 4700 $ par année par étudiant, ce qui représente 6,8 % de plus qu'au Québec. Nous croyons que le budget devrait être à tout le moins égal à la moyenne canadienne. Si nous voulons atteindre l'excellence, il devrait certainement dépasser cette moyenne.

Je voudrais aussi attirer votre attention sur l'apport du génie-conseil à l'économie québécoise. Nous avons à peine effleuré ce sujet dans notre mémoire de 1984. L'apport du génie-conseil se situe à deux niveaux: tout d'abord, des revenus d'honoraires, puis les retombées économiques des différents projets confiés è nos bureaux.

Quant aux revenus d'honoraires pour 1984, ils sont estimés au Canada à 2 100 000 000 $ dont 25 % pour le Québec ou 530 000 000 $. De ces 530 000 000 $, les revenus d'exportation se chiffrent à environ 85 000 000 $.

Mais, plus important encore que les

revenus d'honoraires sont les retombées économiques des projets pilotés par nos firmes d'ingénieurs-conseils, En effet, 50 % de la valeur des projets comportent des matériaux et des équipements. En 1984, 5 000 000 000 $ de projets ont été pilotés par nos sociétés d'ingénieurs-conseils. C'est donc 2 500 000 000 $ d'équipements et de matériaux qui ont été produits au Québec et qui sont évalués à 1 500 000 000 $.

La raison pour laquelle nous mentionnons ces chiffres, c'est pour montrer l'importance de l'économie du génie-conseil au Québec. C'est une industrie à succès. Elle est due très certainement à la compétence de ses ingénieurs, donc à la qualité de leur formation. 71 % des ingénieurs québécois oeuvrant pour les sociétés d'ingénieurs-conseils ont été formés dans nos universités québécoises.

C'est donc une qualité à maintenir et à améliorer, pour maintenir notre position concurrentielle face à une concurrence internationale féroce. Cette formation ne peut se faire qu'à l'université.

En conclusion, les facultés de génie ont un urgent besoin de fonds additionnels. Nous n'avons pas voulu donner de chiffres, tel que l'a souligné notre président. Des gens beaucoup plus compétents que nous l'ont fait. Nous pensons au Conseil des universités et aux doyens des facultés de génie. Le mode de financement est à revoir, y compris les frais de scolarité.

Nous sommes d'accord avec la suggestion de l'École polytechnique qui suggère d'augmenter les frais de scolarité, à condition que ce soit accompagné d'une bonification du système de prêts et bourses pour ne pas nuire à l'accessibilité des étudiants à l'université. Nous n'avons pas le choix. L'avenir du Québec comme nation industrielle se joue. L'évolution technologique n'arrêtera pas pour nous donner le temps de souffler.

Permettez-moi, en terminant, de citer des extraits d'une allocution de M. David G. Vice, président de Northern Telecom, allocution prononcée lors du Congrès canadien sur l'éducation en génie, à Waterloo, au printemps de 1986. Je cite: "Privés d'un enseignement du génie de haute qualité, de compétence technique et de formation spécialisée, nous ne pourrons nous maintenir au niveau international d'excellence et nos entreprises nationales ne pourront se mesurer à la concurrence étrangère. Le maintien et le progrès de notre position parmi les pays industrialisés dépendent de l'état de la formation de nos ingénieurs. L'amélioration de l'enseignement du génie est une des tâches les plus importantes qui confronteront notre pays au cours de la prochaine décennie."

Mesdames, messieurs, je vous remercie de votre bienveillante attention.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela termine votre exposé?

M. Girard: Oui, monsieur.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Avant le début de la période d'échange d'opinions avec les membres de la commission, je voudrais vous présenter d'abord le ministre de l'Éducation, M. le député d'Argenteuil, qui est aussi ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science et le porte-parole officiel du côté ministériel, ainsi que Mme la députée de Chicoutirni qui est la porte-parole officielle de l'Opposition en matière d'éducation supérieure. M. le ministre.

M. Ryan: Merci, M. le Président. En me présentant, vous avez oublié de mentionner une caractéristique du rôle qui m'a été confié dans le gouvernement et qui est particulièrement pertinente pour la rencontre que nous avons ce soir avec l'Ordre des ingénieurs. Modestement soumis, je suis également ministre responsable de l'application des lois professionnelles. C'est un autre titre qui ajoute au plaisir que j'ai de vous rencontrer ce soir avec mes collègues de la commission parlementaire.

J'ai de très bons rapports avec nos corporations professionnelles. La qualité de bons rapports, je pense que c'est de commencer par le respect mutuel. Vous savez d'expérience que le gouvernement actuel a beaucoup de respect pour nos corporations professionnelles vu qu'elles dirigent elles-mêmes leurs affaires dans le respect du bien général, et il est prêt à faciliter leur travail par tous les moyens raisonnables. Nous avons eu de nombreux problèmes à discuter avec les corporations professionnelles. Il y en a quelques-uns qui sont encore en suspens, y compris un qui vous intéresse particulièrement. Nous le résoudrons dans le dialogue et la consultation. J'espère toujours que vous trouverez vous-mêmes les moyens de résoudre ces problèmes car ce sont des problèmes qui affectent deux professions parentes ou voisines, mais qui ont des difficultés pour se comprendre.

Dans l'ensemble, je pense qu'on peut dire que nous avons, au Québec, une des structures professionnelles les plus originales, les plus solidement enracinées dans notre tradition et notre caractère propre, parce qu'il y a dans notre tradition professionnelle, à la fois de l'européen et du nord-américain. Le mélange des deux que nous avons est, à mon point de vue, très intéressant et il faut le préserver avec beaucoup de soin, parce que c'est une partie de notre héritage distinctif qui nous aide à rester nous-mêmes en Amérique du Nord tout en participant aux grands courants de la vie économique et sociale de l'Amérique du Nord.

Nous sommes intéressés à rencontrer les représentants des ingénieurs, parce que le sujet que nous discutons a une très grande importance pour vous et vous pouvez nous apporter un éclairage intéressant. Il y en a plusieurs qui s'imaginent que s'intéresser au financement des universités, c'est s'intéresser à un problème abstrait, un problème qui est éloigné de la réalité concrète et qui n'intéresse que les intellectuels. Je pense que votre présence ici nous rappelle que ce n'est pas cela. C'est un problème éminemment concret qui a de très grandes incidences pour notre avenir même économique. C'est ce que j'ai peut-être le plus apprécié dans le mémoire que vous nous avez soumis. C'est ce lien que vous soulignez fortement entre la qualité du travail qui se fait dans nos universités et la qualité de notre avenir économique. Vous le dites bien clairement -je ne me souviens pas à quel endroit - je pense que c'est à la page 8 de votre mémoire. On n'y insistera point trop parce que je pense que c'est le thème qui me paraît le plus important de tous ceux que nous discutons à cette commission. La qualité de notre avenir économique, la qualité de notre avenir politique, social, culturel dépend de l'effort que nous serons prêts à consentir pour l'éducation et, en particulier, pour la formation universitaire.

Dans le secteur du génie, nos ingénieurs québécois, vous l'avez signalé dans votre mémoire, jouent un rôle très important non seulement au Québec mais au Canada et sur la scène internationale. Je pense que c'est un des secteurs où le génie propre du Québec a fait la plus grande pénétration à l'extérieur de nos murs ces dernières années. Je pense que nous en sommes tous très fiers. Cela aussi est une raison qui nous incite à être très heureux de la rencontre que nous avons ce soir.

Je constate d'autre part que le message que vous nous apportez est un message moins optimiste que ce qu'on pourrait attendre d'un groupe d'hommes pratiques comme vous l'êtes. Vous nous rappelez une situation qui s'est créée ces dernières années et dont les chiffres suivants sont la plus belle illustration. Quand vous dites qu'en 1980, le Québec se situait dans un rapport de 113,4 % par rapport au Canada comme moyenne de dépenses par étudiant en génie tandis qu'en 1986, il était à 93,6 %, ce sont des pourcentages que j'ai tirés moi-même à partir des mêmes chiffres que vous. Je pense qu'on ne se contredira pas. Comme vous le dites, pendant cette période, l'effort que nous faisons pour nos étudiants en génie a connu une baisse de 26 %.

La première question que je serais appelé à vous poser, c'est: Est-ce que vous pensez qu'il y avait du dégraissage à faire dans ce secteur, parce que 26 %, c'est en dollars constants, évidemment, on essaie d'enlever tout ce qui est apparence? Est-ce qu'il en resterait encore? Pourriez-vous donner quelques illustrations, s'il y a lieu? (20 h 30)

M. Douville: M. le ministre, si vous me le permettez, avant de passer la parole à mon collègue, je voudrais vous signifier, relativement au problème que vous avez soulevé tout à l'heure, qu'il y a une volonté de l'Ordre des ingénieurs d'apporter une contribution très positive à la recherche d'une solution équitable, une solution de société pour tout le monde là-dedans. Vous avez souligné aussi que c'est un problème concret. Je ne vous cache pas que nous avons eu de la misère à mettre des poignées après le problème. La qualité de l'enseignement est difficilement quantifiable. Par contre, je pense que la qualité de notre avenir économique est plus facilement quantifiable. Si vous me permettez j'ajouterais, M. le Président, que dans notre mémoire il serait peut-être intéressant qu'on regarde les coûts qu'on facture à nos étudiants étrangers qui, lorsqu'ils retournent chez eux, deviennent de bons ambassadeurs pour le Québec et ce sont des fournisseurs d'emplois pour le Québec. Vous ne trouvez peut-être pas notre message optimiste, mais ce qu'on souhaite et ce qu'on annonce toujours à nos membres, ce à quoi on incite nos membres, c'est de tomber en mât d'action et non en mât de réaction, de la même façon que je vous disais tout à l'heure qu'on a une volonté d'apporter une contribution positive à la solution du problème auquel vous faisiez référence tout à l'heure.

Maintenant, si vous le permettez, M. le Président, je passerai la parole à M. Girard qui est en mesure d'y répondre.

M. Girard: M. le Président, c'est difficile pour nous de nous prononcer à savoir s'il y avait nécessité ou non de dégraissage. Ce qu'on sait - ce sont des documents consultés qu'on cite dans notre mémoire - de nos rencontres avec les doyens, c'est qu'ils sont un peu aux abois actuellement. Je pense qu'il s'est fait des efforts considérables pour rationaliser. L'étude du Conseil des universités, l'étude sectorielle sur le génie fournit de nombreuses données à ce sujet. Je pense qu'on est certainement rendus à la limite de ce que les universités pouvaient faire. Le témoignage, entre autres, en est l'accroissement considérable du ratio étudiants par professeur. Je pense que c'est un signe de ces difficultés que vivent actuellement les universités, en particulier nos facultés de génie.

M. Douville: Est-ce que le règlement me permet d'ajouter quelque chose, M. le Président? Nous avons posé la question aux

doyens à savoir si tous les efforts de rationalisation ont été faits. Est-ce qu'on avait une bonne allocation de ressources dans les universités? Et la réponse qu'on a eue d'eux lors de nos rencontres, c'est de nous dire qu'on a vraiment fait tous les efforts. Si on a des idées à nous soumettre, on est prêt à les recevoir. Je me fais un peu leur porte-parole, mais c'est ce qu'on nous a dit.

M. Ryan: Dites-moi donc une chose. Dans les conseils de direction de nos écoles de génie, est-ce que l'Ordre des ingénieurs est invité à désigner des représentants?

M, Douville: De façon régulière, M. le ministre. De façon régulière, l'Ordre des ingénieurs est invité à désigner des représentants. Si vous me permettez, je vais le vérifier. Au niveau des cégeps, oui, mais au niveau des universités, M. le directeur général? Non? Je corrige. Excusez-moi, pas au niveau des universités.

M. Ryan: À l'École polytechnique à Montréal, vous devez être appelés à désigner un membre ou deux au conseil d'administration, j'imagine.

M. Douville: M. Soucy pourrait répondre à votre question.

M. Soucy (Jacques): Par exemple, au conseil d'administration de l'École polytechnique, nous avons une ex-présidente de l'ordre, comme question de fait la première présidente féminine d'une corporation professionnelle dans tout le Canada, Danielle Zaikoff, qui a été nommée tout récemment au conseil d'administration.

M. Ryan: Sur le problème des équipements, j'ai bien apprécié les éléments que vous présentez dans votre mémoire. Je pense que vous décrivez très bien les différentes facettes de ce problème. On prend note des remarques que vous avez faites et je pense qu'elles nous seront très utiles pour ta préparation des recommandations que nous devrons faire en temps utile.

Une autre chose m'intéresse. Vous dites, à la page 9, que des choix difficiles devront être faits et une liste de besoins prioritaires devra être établie. On a entendu beaucoup de propos comme ceux-là au cours des derniers jours, mais on aime toujours essayer d'aller un peu plus loin et savoir ce que les gens veulent dire quand ils tiennent un langage comme celui-là. Je ne sais pas si vous auriez des précisions à apporter là-dessus. Tantôt quand vous parliez, M. le président ou M. le secrétaire général, je ne me souviens pas lequel des deux, des frais de scolarité, vous avez dit: Nous serions prêts à ce qu'il y ait une augmentation des frais de scolarité moyennant certaines conditions. Je pense que les conditions que vous posez sont les mêmes que celles que l'École polytechnique pose dans son mémoire: qu'il y ait une compensation au chapitre de l'aide financière aux étudiants et, deuxièmement, que les sommes qui découleront de cette augmentation aillent aux universités et non pas dans les coffres du Trésor. J'ai cru comprendre que c'étaient les deux conditions qui se dégagaient du mémoire de l'École polytechnique. Vous avez parlé de cela tantôt, et je crois qu'il n'en est pas question dans le mémoire. Pourriez-vous nous dire un petit peu pourquoi vous en venez à cette conclusion et comment vous voyez cette question-là? Est-ce qu'il y a d'autres sources de revenu qui pourraient être explorées pour les universités? On sait qu'il y a des bureaux d'ingénieurs qui semblent être très riches. Est-ce que vous trouvez qu'ils font tous leur part pour le financement de nos écoles de génie?

M. Douville: Si on posait la question aux bureaux d'ingénieurs je ne suis pas certain, M. le Président, qu'ils nous diraient qu'ils sont très riches. Si vous me permettez, M. le Président, je passerai la parole à mon collègue de droite.

M. Girard: On a vu des suggestions à l'effet de tripler instantanément les frais de scolarité. Pour en avoir discuté avec les collègues, on ne pense pas que ce soit une façon très réaliste de résoudre le problème. On pourrait peut-être penser à une augmentation graduelle des frais de scolarité pour que les étudiants puissent voir venir un peu les mauvais coups. Nous n'avions pas été aussi spécifiques dans notre mémoire, vous avez raison, mais nous trouvons que la suggestion de l'École polytechnique est tout à fait pertinente.

C'est clair que les étudiants doivent fournir une part additionnelle à leur éducation. Pour nous, cela apparaît évident puisque les frais de scolarité sont gelés depuis 20 ans, à ce qu'on peut lire. Il y a certainement un effort à faire. Par contre, l'accessibilité à l'université est aussi très importante. Les étudiants en génie ne sont pas tous des fils de familles fortunées. Je pense que cet aspect de l'accessibilité doit aussi être considéré.

M. Ryan: Pour terminer, parce que le temps est bref, est-ce qu'il y a un taux de chômage important chez les jeunes diplômés en génie à l'heure actuelle?

M. Girard: En général le taux de chômage chez les ingénieurs est de l'ordre de 3 %, autant qu'on puisse voir. Chez les jeunes diplômés il est plus élevé que cela. Cependant nous n'avons pas de chiffres à vous donner actuellement mais nous sentons

bien que l'embauche des jeunes diplômés est difficile actuellement et l'a été depuis quelques années. À notre dernière réunion l'an dernier, les doyens nous ont dit que 90 % des jeunes diplômés environ s'étaient trouvé du travail après six mois de recherche. L'embauche des jeunes diplômés est difficile, c'est sûr.

M. Ryan: Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je reconnais maintenant Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Bonsoir, monsieur le président, messieurs, madame. Je ne commenterai pas votre mémoire, que je trouve excellent et qui fait une place importante au rôle que joue l'université dans le développement économique et social d'une communauté. Comme je préfère vous entendre plutôt que m'entendre vous réexpliquer votre mémoire, je vais passer tout de suite aux questions.

Je voudrais vous comprendre un petit peu. Vous parlez beaucoup, vous faites état de la désuétude "des laboratoires. Je pense que vous avez fait une démonstration assez claire. Par ailleurs, cela me préoccupe toujours quand on soulève cette question de garder dans nos universités ou dans nos collèges des équipements qui sont à la fine pointe de la technologie. Vous me direz que ce n'est peut-être pas le cas, et vous allez me reciter le vice-président de Xérox, en page 4, mais est-ce qu'on peut envisager que l'État aura le moyen d'avoir toujours des équipements è la fine pointe de la technologie? Est-ce qu'il n'y a pas une telle chose que la responsabilité de l'entreprise d'adapter les ressources humaines à ces équipements? La même question se pose toujours dans les collèges et elle se pose régulièrement dans les universités. On nous cite souvent l'exemple des universités européennes qui fonctionnent avec des laboratoires qui sont, pour ne pas le dire, complètement dépassés. Il ne semble pas que cela ait des effets réels sur la compétence des diplômés. Je vous le dis comme cela parce que cela m'a toujours... Je me dis que c'est impensable, avec la vitesse actuelle de changement, qu'on puisse penser ou envisager avoir les moyens de suivre cela.

M. Douville: Je vous remercie, Mme la députée de Chicoutimi, pour l'évaluation que vous faites de notre rapport. On l'apprécie.

Vous posez la question, vous suggérez la réponse. Pour vous répondre rapidement, oui. Nous sommes d'accord avec vous. Je pense qu'il y a une complicité nécessaire et obligatoire entre les entreprises, l'université et les ordres professionnels. C'est un fait, je le disais dans ma présentation préalable, l'État n'a pas des ressources illimitées et je pense que nous devons composer ensemble. Ce que je dis, ce n'est pas ajouté à ce que vous avez suggéré. Nous sommes d'accord avec l'élément de réponse que vous nous avez suggéré.

Mme Blackburn: À la page 6 de votre mémoire - j'essaie de me retrouver - vous avez un chapitre intitulé: "L'industrie et les facultés de génie". Vous parlez de recommandations qui ont été faites dans votre premier mémoire. J'y reviens, parce qu'il a fallu passer les deux. C'est à la page 6 de votre premier mémoire. En avril 1983, le Conseil canadien des ingénieurs tenait une conférence sur la formation de l'ingénieur au cours de laquelle il faisait un certain nombre de recommandations qui s'adressaient aux entreprises et à l'industrie en particulier. Il les invitait à investir dans les facultés, parce que vous estimiez qu'elles en tiraient des avantages, donc qu'elles devraient aussi un peu payer. Est-ce que vous avez eu des retombées de cela? Qu'est-ce que cela a donné?

M. Douville: Peut-être que mes prédécesseurs seront en meilleure position que moi pour répondre à votre question. M. Soucy ou M. Girard.

M. Girard: Des efforts ont été faits, par exemple, en génie aéronautique où des étudiants de polytechnique vont suivre des cours à Canadair. Il y a eu des collaborations qui se sont faîtes. On a noté, è l'ordre, que ces collaborations ont été des succès lorsqu'elles ont porté sur des problèmes très spécifiques comme le génie aéronautique au Québec. Je dois avouer que peu de chose a été fait. Certaines industries nous ont dit qu'une façon qui les inciterait è faire appel aux universités pour résoudre certains problèmes qu'elles ont, ce serait de les associer dans des projets de recherche. Une chose qu'elles nous ont dite, ce qui semble se passer aux États-Unis, c'est qu'elles ont des dégrèvements d'impôt pour l'équipement qu'elles fournissent, prêtent ou donnent aux universités. Nous savons que certains travaux d'université sont faits avec des équipements de laboratoire ou de recherche qui existent dans l'industrie. Il y a certainement des choses à développer de ce côté-là, mais je dois vous dire que, pour autant que nous le sachions, il y a peu, finalement, qui se fait. Il y aurait certainement des choses à faire de ce côté-là.

Mme Blackburn: Vous invoquez d'abord une difficulté qu'on connaît. Les universités sont en difficulté financière. Vous dites aussi que les étudiants tirent des avantages de la formation universitaire, donc ils devraient payer davantage des frais de scolarité. Je

voudrais dire une chose. Lorsqu'on limite la question aux frais de scolarité en disant: Ils n'ont pas été augmentés depuis 20 ans, ce qui est vrai, c'est qu'on ne prend pas en compte tout ce qui, par ailleurs, a augmenté aussi depuis 20 ans. Ce n'est pas vrai de dire que les ingénieurs qui ont été formés il y a 20 ans, et qui payaient 500 $ de frais de scolarité... C'est assez surprenant qu'on voie les jeunes d'aujourd'hui ne pas payer davantage, sauf qu'on sait qu'aujourd'hui, ce qui coûtait 1200 $ ou 1500 $, ou 2000 $, 2200 $ dans le temps, c'est d'environ 5000 $ à 6000 $. Je veux dire que ce n'est pas vrai de penser qu'il n'y a pas eu d'augmentation et que cette augmentation en raison de l'augmentation du coût de la vie n'a pas d'effet considérable sur l'endettement des jeunes en particulier venant des milieux les moins favorisés. (20 h 45)

De ce préalable, en disant ils en tirent des avantages donc aussi ils devraient peut-être continuer davantage compte tenu de la situation économique, on pourrait peut-être retourner la question où le ministre tantôt a commencé à aborder cette question étant donné particulièrement que les bureaux de génie-conseil sont généralement en bonne santé au Québec, et on s'en réjouit. J'ai déjà lu là-dessus un tableau qui présentait votre situation par rapport à l'ensemble canadien et nord-américain, et c'était réjouissant, je dois dire. Il me semblait qu'on devait lire là à la fois beaucoup de dynamisme et une bonne compétence des ingénieurs. Par ailleurs, étant donné que vous en tirez des avantages nombreux et que sur le plan économique, vous l'avez cité dans votre rapport, il y a des retombées économiques réelles. Est-ce qu'il ne serait pas aussi équitable que ces entreprises participent au financement des universités?

M. Douville: Une bonne question. J'aurais peut-être besoin encore une fois de l'aide de mes collègues. Je ne connais pas à fond le dossier du financement des universités. C'est bien sûr que les coûts qui sont facturés aux étudiants, ce n'est pas leur seule source de revenu. Ils tirent aussi des subventions très importantes du gouvernement. À ce moment, j'imagine que les entreprises contribuent indirectement au financement des universités par le biais des taxes qu'elles paient. Je ne sais pas si mes collègues auraient plus de précisions à apporter.

Mme Blackburn: Les entreprises sont aussi subventionnées. Je pourrais peut-être poser la question ailleurs. Je voudrais juste revenir sur les frais de scolarité. Il me semble toujours qu'on tient un discours contradictoire, et je m'explique. Tous les mémoires, je dirais quasiment sans exception, font état de l'importance du développement de l'éducation pour assurer te développement économique. On reconnaît qu'il faut augmenter la scolarisation, et ce, à tous les niveaux. On dit: Bon, compte tenu de la situation économique, dégelons les frais de scolarité pour s'assurer que cela n'ait pas d'effet ou de conséquence sur l'accessibilité. Améliorons l'aide financière aux étudiants-Rien ne nous prouve d'abord que cela n'aura pas d'effet sur l'accessibilité. Et au mieux, cette situation va juste nous permettre de conserver la situation actuelle. On n'est même pas sûr, mais de toute façon au mieux. Cela n'incitera sûrement pas plus à la fréquentation, alors qu'on reconnaît qu'il faudrait l'augmenter. C'est toujours ce discours qui me dérange un peu.

La seconde chose... Je vais arrêter là parce que j'ai perdu l'idée... Je trouve qu'on ne peut pas défendre un régime qui va conserver le statu quo en matière d'accessibilité à l'université, si cela avait cet effet, et, en même temps, réclamer de relever le niveau de scolarité. Ensuite, je trouve que les intervenants prennent un risque très grand quand ils recommandent l'augmentation des frais de scolarité. Actuellement, et selon les règles qu'on a, c'est que les frais de scolarité, il y a une ponction équivalente qui est faite. Là-dessus, on n'a pas eu d'engagement formel de la part du ministre â ce sujet, indiquant que le dégel des frais de scolarité viendrait s'ajouter à l'enveloppe actuelle. On n'a rien là-dessus. Je suis toujours un peu... Cette question me préoccupe.

Le ministre nous disait: Vous savez -c'était rapporté par un journal, la Presse -peut-être que les frais de scolarité, de toute façon, il fallait vraiment envisager de revenir sur des promesses parce que, lorsqu'on fait des promesses et qu'on fait une erreur, il serait irresponsable de perpétuer l'erreur. Moi, je dis que l'irresponsabilité, cela a peut-être été de faire des promesses qu'on ne pouvait pas tenir.

Une voix: Ah, c'est vrai!

Mme Blackburn: Dans ce sens-là, je me dis qu'on ne peut pas tenir tous ces discours en même temps. Il y a quelque chose qui va contredire le discours. Que quelqu'un m'explique qu'à la fois on va augmenter les frais de scolarité et améliorer les bourses -cela va nous donner à peu près la situation actuelle - sans se demander comment on va augmenter l'accessibilité qui est réclamée par tous.

Une voix: Merci.

M. Douville: Mme la députée, j'ai peut-être mal saisi le lien que vous faites entre

l'accessibilité et le fait de relever le niveau de scolarité. Cela ne m'apparaît pas inconciliable en soi. Je pense que tout le monde - peut-être que vous pourriez m'apporter un peu plus de précision s'entend à dire que les problèmes qu'on a à solutionner, les défis qu'on a à relever aujourd'hui sont de plus en plus complexes dans notre société. C'est vrai pour les ingénieurs, c'est vrai pour les comptables, c'est vrai pour toutes les professions et même dans bien des métiers. C'est dans ce sens-là que nous on dit qu'il faut maintenir de hauts standards de qualité dans l'enseignement. C'est vraiment préparer les gens qui vont nous suivre à leur faire face et à les relever, ces défis. Cela nous apparaît extrêmement important. Je pense que dans le passé, on a peut-être eu des décisions faciles à prendre. Je pense qu'on leur laisse, à ceux qui vont nous suivre, un bel héritage mais en même temps aussi on leur laisse une belle hypothèque. Je pense que les défis qu'ils auront à relever de concilier tout cela, ce ne sera pas facile. Je pense que cela va nous prendre des jeunes qui vont être très formés pour être capables de se prendre -en main. C'est cela qui nous incite, nous, à nous battre très fortement pour le maintien d'un haut standard de qualité dans te domaine de l'éducation.

Maintenant, peut-être que je ne réponds pas à votre question, Mme la députée, mais je n'ai pas très bien saisi le lien que vous avez fait...

Mme Blackburn: Alors, je vais me reprendre. On connaît le taux de scolarité actuel au Québec. Les chiffres là-dessus, il faut un peu les décomposer pour comprendre, concernant les inscriptions au niveau du bac au Québec, particulièrement chez les francophones, qu'on est encore très en deçà de ce qui se fait en Ontario.

Ici, en commission parlementaire, tout le monde dit: II faut augmenter l'accessibilité. Je pense que cela fait l'unanimité, à moins que quelqu'un me dise que c'est le contingentement... J'ai cru comprendre que dans le rapport Gobeil, ce n'était pas évacué, qu'une des façons de faire des économies, c'était peut-être de réduire le nombre de la clientèle, de l'inviter à la table, finalement.

Ce que je veux dire, c'est que si c'est effectivement vrai qu'il faut absolument qu'on maintienne de hauts standards de qualité, je suis d'accord avec vous, en même temps il va falloir essayer de relever le niveau de scolarité. D'accord?

M. Douville: Très bien.

Mme Blackburn: Comment pensez-vous que la hausse des frais de scolarité constitue un incitatif, parce qu'il faudrait qu'on me dise que cela va constituer un incitatif si on veut à la fois rejoindre ces deux objectifs sans aller chercher des sous ailleurs que dans les poches des étudiants?

M. Douville: Je ne crois pas que la hausse des frais de scolarité - c'est une réponse personnelle que je vous donne - va avoir un impact majeur sur l'accessibilité. C'est mon opinion personnelle. Si vous avez cru percevoir dans notre rapport, Mme la députée, qu'on a sous-estimé ce volet, dites-le-nous, on va retourner faire nos devoirs. On ne vise pas à diminuer l'accessibilité d'aucune façon. On ne vise pas à contingenter d'aucune façon. Au contraire, on fait un lien entre le développement des affaires, entre la capacité de nos gens à s'affirmer sur le plan national et sur le plan international. On dit: Ils seront mieux préparés non seulement à affronter des défis, mais ils seront mieux préparés aussi à faire affaire et à faire leurs preuves sur le plan international et sur le plan national.

Mme Blackburn: Vous avez... Je suis en train de perdre mes questions... Je n'ai plus le temps? Mais on a encore le temps pour ces messieurs? Écoutez, j'y reviendrai durant mes cinq minutes de la fin.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Merci, M. le Président. Dans le secteur médical, on a surmonté le problème de l'espace et surtout celui de l'équipement en utilisant les hôpitaux comme lieu privilégié de formation. Je me demande depuis longtemps pourquoi le modèle de formation médicale n'était pas généralisé dans d'autres secteurs. Avez-vous examiné la possibilité d'adopter ce modèle médical dans votre secteur, celui du génie? Ce modèle pourrait peut-être donner une meilleure formation et, en même temps, aider à surmonter le problème de l'espace dont vous avez parlé dans votre mémoire, ainsi que la nécessité du renouvellement de l'équipement.

M. Girard: Si vous le permettez, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M.

Girard.

M. Girard: J'ai mentionné tantôt que certains efforts ont été déployés de ce côté. Quand je pense, par exemple, aux étudiants de polytechnique qui suivent certains cours chez Canadair, il faut bien comprendre que, lorsque des centaines d'étudiants passent chaque jour et même le soir maintenant dans les universités, dans les différents laboratoires très spécialisés, avec des travaux à faire, j'imagine - c'est peut-être possible -

que ce doit être très difficile de prendre des étudiants et de les envoyer dans les industries un peu à n'importe quelle heure du jour et de la nuit pour faire ces travaux.

Il y a possiblement des choses à explorer, mais cela ne m'apparaît pas très facile. Il y a aussi des laboratoires très spécialisés. Je pense, par exemple, en génie civil, au laboratoire d'hydraulique où on a besoin de grands canaux d'amenée d'eau ou de turbines, etc. Très souvent, ces équipements ne sont pas disponibles dans l'entreprise privée. J'imagine que les doyens seraient plus en mesure que moi de répondre à cette question, mais il y a certainement des problèmes pratiques très difficiles à résoudre, quoique, encore une fois, il y a sûrement un effort à faire de ce côté.

Je sais que, dans les facultés de génie, on explore des avenues de ce côté, mais les doyens seraient certainement plus en mesure que nous de répondre à cette question, quant au côté pratique de cette suggestion.

Mme Dougherty: Le problème n'est pas unique au Québec. Le problème de l'espace et la nécessité de renouveler l'équipement. Avez-vous examiné la situation ailleurs, en Europe par exemple? Qu'est-ce qui se passe en Europe?

M. Girard: Les documents que nous avons, en particulier le rapport du Conseil des sciences du Canada ne fait état que de la situation qui prévaut au Canada, et cette situation semble, malheureusement, généralisée pour l'ensemble du Canada. Le rapport "La formation en génie au Canada: faits et chiffres" que nous avons cité abondamment dans notre mémoire nous a servi surtout à bâtir ce mémoire et nous n'avons pas actuellement de chiffres relatifs aux pays européens.

Encore une fois, les chiffres que nous avons semblent malheureusement se rapporter à l'ensemble du Canada.

Le Président (M. Parent, Sauvé): On vous remercie de votre réponse. Je reconnais maintenant le député de Laviolette.

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Une petite question à la suite de ce que vous demandait ma collègue de Chicoutimi tout à l'heure eu égard à la qualité de l'enseignement, pour permettre une meilleure qualité de la main-d'oeuvre qui suivra ensuite, eu égard aussi au fait qu'on parle d'accessibilité. Le ministre, la semaine dernière - on va adoucir nos termes, mais je pense qu'on peut le prendre comme tel -rabrouait vertement presque les jeunes étudiants qui n'ont pas les capacités et les moyens de faire les enquêtes que le ministre voulait les inciter à faire, semblerait-il, en leur disant: Vous passez vingt heures par semaine dans les classes. Vous êtes capables de nous amener des exemples de telle ou telle choses. Faites donc une enquête et amenez-moi donc cela. (21 heures)

Vous avez dit - peut-être avez-vous pris vos réserves à ce moment-là: Je réponds en mon nom personnel. Actuellement, personne n'a été capable de faire la preuve, ni à moi ni à d'autres, que l'augmentation des frais de scolarité proposée, du double, du triple ou du quadruple dans certains cas, n'aura pas d'effet sur l'accessibilité. Il y a des gens qui, la semaine dernière - mercredi soir passé - ont peut-être eu le courage de dire: Nous, c'est clair, notre position, au primaire et au secondaire, est la suivante. Commençons à prendre les doués et les moins doués et, quand on arrivera au niveau universitaire, donnons des subventions, de l'aide, des prêts et des bourses à des doués et les autres, laissons-les de côté. C'est à peu près cela qu'ils disaient, en gros.

Vous venez de me dire: Nous voulons l'accessibilité pour tout le monde. Nous voulons une qualité de l'enseignement. Il faut qu'il y ait du monde qui paie. Faisons payer les jeunes. Vous ne me donnez pas la preuve que cela a un effet sur l'accessibilité. Dans la mesure où le jeune ingénieur dont on parlait tout à l'heure - je pense que c'est M. Girard qui parlait de cela - qui ne vient pas nécessairement d'une famille aisée - ou vous-même aussi, M. le président - qui vient d'autres secteurs... Si on ne met pas, à côté d'une augmentation hypothétique des frais de scolarité, un renouvellement quant à l'aide des prêts et bourses, non pas de la façon dont on le présente actuellement en disant: On va donner plus de prêts et moins de bourses parce qu'on va l'endetter pour plus tard... Vis-à-vis de tout cela, personne ne me garantit que s'il y avait une augmentation des frais de scolarité il y aurait, en contrepartie, des conditions telles. Le ministre ne nous a pas donné les garanties, il nous dit: On n'a pas pris de décision encore, on examine. Il reste quand même que personne ne m'a dit qu'on ne fera pas ce que l'on fait actuellement. Si on a des revenus autonomes, on diminue d'autant les subventions. En conséquence, les universités n'auront pas d'autres montants d'argent que ceux qu'elles ont actuellement, mais on fera payer une clientèle qui s'appelle les étudiants au risque de ne garantir en aucune façon la capacité d'entrer à l'université et la possibilité d'entrer à l'université.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le député de Laviolette, on vous invite à conclure.

M. Jolivet: Je vous pose la question, M. le président: Sur quoi vous basez-vous pour me dire que l'augmentation des frais de

scolarité, même du double, n'aura pas d'effet sur l'accessibilité à l'université?

M. Douville: Merci, M. le député de Laviolette. Vous me demandez sur quoi je me base. Je vous ai dit au départ que c'était une opinion personnelle qu'il faut plus percevoir comme étant un voeu. J'espère que les agents de décision qui auront à se prononcer vont souhaiter ou vont rechercher cette accessibilité que vous semblez défendre. Personnellement, je ne suis pas issu d'une famille aisée, au contraire. Je suis issu d'une famille qui n'était pas aisée du tout. J'ai eu la possibilité de faire un cours universitaire et je souhaite que ce soit possible aussi pour tout le monde. Je vous dis que je n'en ai pas la preuve, ni dans un sens, ni dans l'autre. Je ne peux pas vous démontrer, c'est bien évident, que le fait d'augmenter les frais de scolarité va affecter l'accessibilité et que cela va favoriser le contingentement; je ne le crois pas. C'est une opinion strictement personnelle et prenez-la comme un voeu.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président.

M. le président, je dois vous dire que cela m'a fait plaisir de vous entendre. À l'occasion, il nous arrive de pousser peut-être un peu fort. Je me dis: Si ce n'est pas ici qu'on cherche et qu'on trouve les réponses à certaines questions, ce n'est pas quand ce sera terminé qu'on aura l'occasion de le faire. Si on semble aborder cette question avec une telle sévérité à l'endroit de ceux qui la suggèrent, c'est qu'il me semble que, trop facilement, on a tenu pour acquis que cette question était la seule voie et que cela n'aurait pas d'effet sur l'accessibilité.

Je dois dire que la représentation sociologique dans les facultés de génie est généralement intéressante. On a eu des études là-dessus, je connais un peu la provenance des étudiants et des étudiantes. C'est parmi ce que l'on appelle les facultés lourdes ou prometteuses que la représentation sociologique est la plus équilibrée, si je peux me permettre cette remarque,

À présent, je dois vous dire que cela m'a fait plaisir de vous avoir parmi nous. Le ministre, tantôt, disait qu'il était également responsable des corporations professionnelles. Je suis également critique à ce dossier. J'apprécie votre présence, parce que cela nous permet de voir le développement des universités sous un autre angle. Votre mémoire est, sur plusieurs points, très pragmatique, ce qui rend bien le caractère de votre corporation. J'aimerais peut-être cependant, juste avant de terminer - parce que nous, on est proche de cette question, donc, on lit à peu près tout ce qui sort là- dessus - vous dire qu'il y a deux sondages -c'est ce que je voulais vous dire tout à l'heure et que je cherchais - l'un mené par les étudiants qui concluait que cela aurait des effets sur l'accessibilité, l'autre, scientifique, canadien celui-là, qui demandait à tous les Canadiens, selon un échantillonnage, s'ils étaient favorables â l'augmentation des frais de scolarité. Dans tout le Canada, 76 % étaient défavorables et, au Québec, 77 %. Ce n'étaient pas les étudiants qui parlaient. Dans ce sens, c'est assez impressionnant. En tout cas, cela dépasse beaucoup ce que je pensais. Je n'imaginais pas un tel résultat pour un sondage pancanadien. C'est vous dire deux choses, à la fois l'importance que les Québécois et les Canadiens attachent à la nécessité de relever le niveau de scolarité. On peut penser aussi qu'ils estiment que c'est un service qui devrait être davantage offert par l'État et que, si la scolarité a des effets sur la capacité de relever l'économie, cela doit être pris en charge par l'État ou, comme je le disais tout à l'heure, par les entreprises.

Cela m'a fait plaisir. Au nom de ma formation politique, je vous remercie de votre contribution aux travaux de cette commission.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.

M. Ryan: J'écoutais la députée de Chicoutimi se référer à des sondages.

M. Jolivet: Ha! Ha! Ha!

Le Président (M. Parent, Sauvé): S'il vous plaît, M. le député de Laviolette! M. le ministre.

Mme Blackburn: Des petites enquêtes...

M. Ryan: Tout dépend évidemment de la question qui est posée. Chaque fois que vous demandez aux citoyens s'ils veulent une augmentation des taxes, ils vont répondre non.

Une voix: C'est cela.

M. Ryan: On n'a pas besoin de payer bien cher pour savoir cela. On n'a qu'à circuler dans un comté rural et on se le fait dire tous les jours. Le vrai problème qui se pose, c'est qu'il faudrait demander aux citoyens: Si vous avez à choisir entre l'augmentation des taxes pour tout le monde pour mieux financer les universités et une augmentation de la contribution de ceux qui vont en bénéficier le plus, de la formation universitaire, qu'est-ce que vous choisiriez?Cela peut être intéressant pour ceux qui

forment leurs convictions à partir des sondages. Moi, cela ne me suffirait pas, même cela. Mais, au moins, j'aurais une indication de fait plus instructive, plus utile. Cela m'étonne que la députée de Chicoutimi succombe à de tels mirages. Cela me fait même de la peine.

Mme Blackburn: Pourtant, vous avez été élu sur des sondages.

M. Ryan: Je regrette infiniment, noua avons été élus sur vos erreurs.

Des voix: Ha! ha! Ha!

Le Président (M. Parent, Sauvé): S'il vous plaît, messieurs, à l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre, si vous voulez conclure.

M. Jolivet: C'est fort un peu.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le député de Laviolette, vous parlez souvent.

M. Ryan: M. le Président, je tiens à dire pour nos invités que si mes collègues n'interviennent pas davantage, c'est parce que nous avons eu la courtoisie de décider au début des travaux que le temps serait réparti à 50-50. Nous n'étions pas obligés de faire cela. Nous l'avons fait par souci démocratique, pour que la participation soit égale des deux côtés. Il n'y a aucun règlement qui nous y obligeait.

M. Jolivet: ...

M. Ryan: On aurait pu s'en tenir au règlement qui donnait la parole à chaque député à tour de rôle et, comme nous sommes plus nombreux, nous aurions eu souvent plus de chance. Nous avons préféré aimablement faire avec vous une entente que nous allons respecter jusqu'à la fin.

J'en reviens au sujet qui nous intéresse. J'ai entendu et Mme la députée de Chicoutimi et M. le député de Laviolette dire, à propos du conflit entre l'accessibilité et les frais de scolarité, qu'il n'y avait eu aucun élément de preuve d'apporté. Moi, je ne fais l'apologie d'aucune thèse pour l'instant, parce que nous sommes à l'écoute, comme je l'ai dit à maintes reprises, nous explorons toutes les possibilités, quoi qu'en pense l'Opposition. Mais, je pense qu'on a apporté des arguments. On a dit: Si vous voulez une preuve, on ne peut pas vous apporter de preuve ici d'une chose qui n'est pas faite. Quand vous posez une question: Si on faisait ceci, qu'est-ce qui arriverait ensuite? Comme on ne sait pas si on va le faire, on ne peut pas savoir ce qui arriverait après, c'est évident. Mais, il y a une chose que vous pouvez aller vérifier. On peut même vous aider. Vous n'avez qu'à acheter un billet pour Toronto et à aller voir en

Ontario où cela existe depuis des années: le taux de fréquentation est encore plus élevé qu'au Québec et le taux de diplomation l'est bien davantage. Dans l'ensemble du Canada, la moyenne des frais de scolarité est de deux à trois fois ce qu'elle est au Québec et le taux de fréquentation est à l'égal de celui du Québec, même si on fait une distinction entre la fréquentation pour des cours de certificat et la fréquentation pour des programmes qui conduisent à un diplôme universitaire complet. À ce moment-là c'est plus élevé qu'au Québec, malgré ce fait-là. Je crois que c'est un élément de preuve qui n'est pas négligeable.

Je pense qu'on ne part pas du déluge là-dedans. Les États-Unis ne sont quand même pas un pays tellement éloigné. Je comprends que pour certains, c'est assez éloigné, mais pour nous, ce n'est pas loin. Aux États-Unis, les frais de scolarité sont considéralement plus élevés, mais le taux de fréquentation universitaire est plus élevé qu'au Canada. Je ne sais pas. Je comprends qu'il faudrait tenir compte de la richesse relative du Québec. Les provinces de l'Atlantique sont plus pauvres que le Québec et les frais de scolarité y sont plus élevés. Oui, mais la différence entre le taux de fréquentation, je ne l'ai pas, je ne veux pas m'aventurer là-dessus, on regardera cela et on aura amplement le temps d'en discuter, on n'a pas besoin d'embarrasser nos invités avec nos querelles. Par conséquent, je pense que c'est une question qu'il faut regarder avec un esprit impartial. Je pense que c'est ce que nos invités ont fait. Ils sont venus nous dire essentiellement deux choses. Il faut plus de ressources pour nos universités et, parmi les moyens que vous devez envisager, il y a celui-là. Ils n'ont pas dit qu'il n'y a que celui-là, et faites cela et pas autre chose. Je pense que si on peut l'éviter, si on trouve d'autres moyens, ils vont être bien contents eux aussi. En tout cas, on prend note de vos suggestions, y compris celles-là et nous allons regarder le tout avec toute l'impartialité que vous êtes justifiés d'attendre de nous. Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, M. Douville, la commission parlementaire sur l'éducation vous remercie d'avoir répondu à son invitation. Nous suspendons nos travaux pour quelques minutes, puis nous entendrons le prochain groupe qui est composé des représentants de la Chambre de commerce et d'industrie du Québec métropolitain.

(Suspension de la séance à 21 h 13)

(Reprise à 21 h 17)

Le Président (M. Parent, Sauvé): La commission reprend ses travaux. Nous

accueillons les représentants de la Chambre de commerce et d'industrie du Québec métropolitain, dont le porte-parole est M. Reinhardt. Nous vous souhaitons la bienvenue au nom des membres de la commission. Nous voulons aussi vous remercier d'avoir répondu à l'invitation de la commission pour venir nous aider dans nos travaux.

La commission consacrera environ une heure à entendre votre mémoire et à discuter avec vous. C'est donc dire que nous commençons à 21 h 15 et que nous devrions terminer vers 22 h 15 ou 22 h 20 au plus tard.

Si vous voulez nous présenter les gens qui vous accompagnent et enchaîner avec la présentation de votre mémoire.

CCIQM

M. Reinhardt (Paul-Émile): M. le Président, il nous fait plaisir d'être ici. Je suis le président de la Chambre de commerce et d'industrie du Québec métropolitain. À ma droite M. Jacques Desmeules, président du conseil de la même chambre, et, à ma gauche, M. Talbot, vice-.président exécutif et directeur général de la même chambre.

Le Président (M. Parent, Sauvé):

Bienvenue.

M. Reinhardt: M. le Président, dans un premier temps, vous nous permettrez de présenter, en quelques traits, la Chambre de commerce et d'industrie du Québec métropolitain.

Notre chambre de commerce, par le nombre d'adhérents et la variété des secteurs économiques représentés, constitue l'association d'affaires la plus importante et la plus représentative de la région de Québec. Elle dénombre plus de 2500 adhérents et regroupe, entre autres, la presque totalité des entreprises de la région, oeuvrant à l'échelle provinciale et nationale. La chambre couvre aussi bien la rive sud que la rive nord et plus de 65 % de ses membres sont situés en dehors des limites territoriales de la ville de Québec.

Le conseil d'administration est composé de 25 administrateurs élus en tenant compte des secteurs économiques et des catégories d'entreprises. En plus des administrateurs élus, le conseil comprend des représentants de groupements et d'associations sectoriels, notamment des représentants de chambres de commerce locales et associations d'affaires de la ville.

En tant que porte-parole de la communauté des affaires de notre région et agent de développement économique, la chambre maintient et participe à des groupes de travail dans des secteurs névralgiques pour la région. C'est ainsi que la chambre s'est associée étroitement avec l'Université Laval, l'INRS, le CRIQ, le CRDV et la Société Inter-Port pour constituer un groupe d'action pour l'avancement technologique et industriel de la région de Québec, connu sous le nom de GATIQ, afin de promouvoir la région comme centre de recherche et d'implantation d'entreprises de haute technologie.

Dans ce document, nous nous proposons d'exprimer notre conviction profonde que l'avenir de la société québécoise exige de consacrer les ressources requises pour maintenir nos universités à l'avant-garde du progrès; de soumettre quelques recommandations qui, dans une perspective d'accroissement de la présence universitaire, permettraient une meilleure utilisation des ressources disponibles en même temps qu'une répartition plus équitable du fardeau; de rappeler la relation féconde et dynamique qui existe entre l'Université Laval et la région de Québec, tout en soulignant l'opportunité de raffermir cette relation au moment où notre région doit prendre un virage essentiel vers l'avenir.

Même si notre chambre de commerce est prompte à reconnaître la nécessité de contraindre et même de réduire les dépenses de l'État, il lui apparaît tout aussi fondamental que ce virage de l'État soit planifié et engagé de manière judicieuse si on veut éviter de compromettre l'avenir du Québec. Il nous apparaît fondamental que l'on cherche ainsi à contraindre les dépenses pour mieux privilégier les investissements. Il nous apparaît plus sage, enfin, de parler de réallocation des ressources pour les rendre plus productives. C'est dans cette perspective que toute la question du financement des universités doit, à notre avis, être approfondie.

Avant de parler du nécessaire langage des économies, des choix budgétaires à faire, il faut être conscients que le Québec doit largement son progrès à ses universités. Dans une économie de plus en plus ouverte, de plus en plus concurrentielle, le Québec va devoir plus que jamais compter sur ses universités pour être en mesure, par la formation des ressources humaines, par la recherche constante de l'innovation, de conquérir sa part de la prospérité et de s'affirmer comme société.

C'est cette interrelation étroite entre formation des ressources humaines, innovation et prospérité qui faisait dire à M. David Vice, président de la compagnie Northern Telecom: "L'éducation constitue la toute première priorité. Tout le reste devient secondaire si on tient à notre avenir."

En même temps que se multiplient les témoignages sur cette interrelation névralgique de la formation des ressources

humaines, de l'innovation et de ia prospérité et que le développement technologique et la recherche scientifique viennent accroître et soutenir la concurrence entre les entreprises, entre les sociétés, le système d'enseignement supérieur québécois nous apparaît évoluer dans une situation de crise.

Au 31 mai 1985, le déficit global des universités atteignait 48 000 000 $. Pour l'exercice 1985-1986, l'ensemble des établissements envisagent d'encourir un déficit qui pourrait atteindre 33 000 000 $. Le déficit total accumulé serait alors porté à quelque 80 000 000 $, selon l'information publiée dans le Soleil du 16 janvier 1986. Évidemment, la situation se présente différemment selon les établissements.

Un examen de cette situation à l'Université Laval par rapport aux autres universités vient alimenter notre inquiétude de voir notre système universitaire s'enliser. C'est ainsi que le Conseil des universités nous informe que, comparativement à l'Ontario, le Québec accuse un manque de ressources de 10 % ou de 100 000 000 $.

Cette comparaison n'en prend que plus de justification à la lumière de l'opinion émise par la commission Bovey qui a jugé, en 1984, que le réseau universitaire ontarien, déjà mieux soutenu en termes de ressources que le réseau québécois, souffrait aussi, au plan des comparaisons, de sérieuses carences. L'Université de Waterloo, considérée comme un centre canadien d'excellence en informatique et en mathématiques, dispose de 5100 $ canadiens par étudiant. L'Université du Michigan reçoit l'équivalent de 9100 $ canadiens par étudiant, Harvard en reçoit 27 200 $ et le Massachusset Institute of Technology 22 400 $.

En 1981, une étude américaine portant sur le ratio étudiants-professeur, intitulée "The costs of Higher Education", établit que ce rapport ne devrait pas excéder 15 pour 1. Dans les écoles canadiennes d'administration, on retrouve 37 étudiants par professeur; dans les écoles d'ingénierie, le rapport est de 24 pour 1. Dans l'ensemble du réseau universitaire québécois, toutes les facultés comprises, ce rapport s'établit à 18,7 pour 1, soit la plus lourde charge par professeur au pays.

On pourrait ainsi continuer l'énumération des carences tant au plan des budgets de recherche et d'enseignement que des montants alloués a l'achat de volumes ou au renouvellement des appareils de recherche.

Ni le nombre d'étudiants par professeur, ni la détérioration de l'équipement, ni la moyenne d'âge des professeurs, ni aucun de ces facteurs ne permet à lui seul de mesurer la qualité de la formation universitaire. Néanmoins, la commission Bovey n'hésite pas à conclure qu'en Ontario, la base du maintien de la qualité se trouve compromise.

De son côté, la conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec ne craint pas d'affirmer que "la qualité de nos activités d'enseignement de recherche baisse".

Notre chambre de commerce soutient que la recherche universitaire est rentable. Elle reconnaît que la relance économique et industrielle passe par la recherche et qu'il est nécessaire de faire participer l'université aux aspects à long terme du développement technologique. La recherche constitue le principal lien entre le milieu des affaires et le milieu universitaire. Dans notre milieu, cependant, ce dialogue ne fait que commencer. Aux États-Unis, des organismes comme le MIT, Stanford et Carnegie-Mellon ont pris la tête du peloton. L'industrie et le gouvernement américains semblent plus conscients de la fécondité d'une étroite collaboration avec les universités.

Dans le passé, les pouvoirs publics canadiens ont compté largement sur la mise en valeur des richesses naturelles pour assurer la croissance du pays. Aujourd'hui, tout comme les autres pays industrialisés, nous devons encourager le développement des industries de haute technologie. Il faut introduire la technologie de pointe dans certains secteurs traditionnels comme les mines, le textile, etc. Les contraintes économiques devraient contribuer à rapprocher le milieu de l'enseignement, le milieu des affaires et le milieu gouvernemental.

Malgré son isolement linguistique relatif en Amérique du Nord, la société québécoise a décidé de relever le défi technologique. Pour ce faire, elle compte que ses universités sauront lui fournir les spécialistes francophones dont le Québec a plus que jamais un urgent besoin. Puisque le gouvernement du Québec rejoint ces objectifs prioritaires lorsqu'il reconnaît que notre avenir économique dépend de notre habileté à relever le défi technologique, il doit accroître sa participation au financement de l'enseignement supérieur et de la recherche et encourager les universités qui sont en mesure de jouer leur rôle d'agent de développement socio-économique.

Tout en plaidant l'importance d'accroître les ressources des universités pour permettre à notre société de se tenir dans le peloton de tête, nous sommes conscients que cet effort additionnel, accompli dans une période d'austérité budgétaire, doit être accompagné des préoccupations suivantes:

Une rationalisation plus rigoureuse que jamais du domaine universitaire. Au cours des dernières décennies, notre société a eu tendance à accroître les facultés et institutions d'enseignement au risque, par la dispersion de nos ressources, d'en diminuer la qualité.

C'est ainsi que notre chambre de commerce est intervenue lors du sommet économique de 1983 pour protester contre la création d'une nouvelle faculté d'agronomie, en faisant valoir, entre autres, qu'aucun État américain ne supportait plus d'une faculté d'agronomie et qu'il fallait plutôt se soucier de renforcer la Faculté des sciences agronomiques de l'Université Laval pour qu'elle se hausse, en termes de professeurs, de laboratoires et d'équipements, au même niveau que celle de Guelph en Ontario.

II nous apparaît qu'une réflexion méthodique doit être faite pour, dans une perspective d'évolution, renforcer le système actuel en permettant à chaque université de miser sur les domaines où elle excelle déjà.

Un partage équitable de la responsabilité des coûts financiers. Sous ce rapport, si la société se doit, dans son propre intérêt, de soutenir adéquatement ces institutions de progrès que sont les universités, il est toutefois équitable que ceux qui retirent de la façon la plus immédiate et la plus importante les bénéfices de la formation et de la recherche en supportent aussi davantage les coûts et responsabilités.

Dans cette perspective, il nous apparaît tout à fait équitable et impératif que les frais de scolarité soient haussés au niveau de ce qui est exigé ailleurs.

En même temps que l'on poursuivra l'objectif d'améliorer le ratio étudiants-professeur, pour chercher à tendre à ce qui existe ailleurs, il y aurait lieu de réexaminer toutes les questions du nombre de cours que nos professeurs québécois doivent assumer. Certains documents, notamment le rapport du groupe de travail sur la révision des fonctions et des organisations gouvernementales, laissent entrevoir que les professeurs ontariens doivent assumer trots cours par semaine comparativement à deux cours par semaine par les professeurs des universités québécoises.

De même, considérant que les universités sont pour les entreprises des sources de compétence et d'innovation, il nous apparaît souhaitable de chercher à renforcer la relation université-entreprises, de chercher, à l'instar de ce qui se fait déjà ailleurs, à développer le "partnership", notamment par une fiscalité incitative, afin d'ouvrir à l'université l'accès à de nouvelles ressources; Le maintien d'une mobilité des ressources universitaires afin que les institutions puissent, au plan du personnel et de la recherche, se maintenir à la fine pointe en évitant, au nom de la sécurité d'emploi, le risque d'une sclérose. (21 h 30)

Sous ce dernier rapport, nous sommes d'avis que les relations du travail, dans le domaine universitaire comme dans le domaine public en général, ont mis davantage l'accent sur la sécurité du siège que sur la sécurité d'emploi. La concurrence est très vive pour toute la société et il nous apparaît fondamental que les universités, en renouvelant leur attitude et leur pratique dans le domaine des relations du travail, s'inscrivent dans cette mobilité nécessaire au développement.

L'État doit examiner la possibilité, dans certains domaines, de faire faire par les universités plutôt que de chercher à faire lui-même. C'est notamment le cas pour l'ÉNAP, qui devrait être confiée à l'Université Laval.

Toujours dans le but d'accroître la mobilité, le renouvellement des ressources humaines et techniques, il nous apparaît souhaitable d'apporter certaines modifications aux régimes de retraite. Si nos renseignements sont exacts, par suite du fait qu'un employeur ne peut plus obliger un employé à prendre sa retraite à 65 ans, certains demeurent en poste, accaparant ainsi des ressources budgétaires qui, dans l'intérêt de la communauté universitaire et de la société en général, devraient être réallouées à développer une relève.

Il est notoire qu'une partie du corps professoral et de recherche oeuvre a l'extérieur de l'université et en retire des bénéfices importants qui ne sont pas toujours partagés avec l'institution. Il y a lieu d'évaluer dans quelle mesure cette pratique avantage ou désavantage, notamment au plan budgétaire, les institutions et la société. Il y a d'autant plus là matière à interrogation que, de plus en plus, dans les sociétés privées les partenaires sociétaires doivent restituer à leur société les honoraires, jetons de présence, etc., perçus ailleurs.

Dans la recherche d'une solution à la crise budgétaire que vit l'État et que vivent les universités, au lieu de coupures générales, draconiennes, souvent arbitraires, l'État et les universités, conjointement, doivent assumer la responsabilité d'une approche à la fois judicieuse et rigoureuse qui cherche à privilégier les investissements sur l'avenir. Après ce réexamen, il sera plus facile de demander à l'ensemble de la société de consentir de nouveaux efforts.

Ici, j'aimerais passer la parole à notre président du conseil, M. Jacques Desmeules.

M. Desmeules (Jacques): M. le Président, cette deuxième partie, qui est brève, se voudrait un appui du milieu des affaires de la région métropolitaine de Québec à l'Université Laval.

En tant qu'organisme régional, voué à la promotion des intérêts de la région de Québec, il nous apparaît que votre commission constitue une occasion de plus pour faire valoir le rôle clé de l'Université Laval, ce rôle que l'université a exercé et est appelée de plus en plus à assumer au

plan du développement économique de la région de Québec et de tout l'Est du Québec.

L'Université Laval constitue un employeur important pour notre région. En 1984-1985, elle employait plus de 4000 personnes, dont 1414 professeurs et 2493 employés non permanents. L'impact multiplicateur de l'université au niveau des emplois créés dans les entreprises régionales est de deux. Ainsi, l'ensemble de toutes les dépenses d'une université, de ses employés et de ses étudiants, crée dans la région immédiate le double du nombre d'emplois qu'on dénombre à l'université même.

En tant qu'acheteur institutionnel, un établissement comme l'Université Laval contribue à l'existence et au développement de plusieurs entreprises régionales. En plus d'être une des principales entreprises de la région, il faut voir que l'Université Laval, par ses congrès et ses colloques, par sa réputation internationale, apporte une contribution considérable à l'essor de notre industrie touristique.

Au-delà de la présence bénéfique comme grande entreprise, il nous faut surtout percevoir que, par ses programmes de formation continue, par ses transferts de connaissances et par le flux annuel de nouveaux diplômés sur le marché du travail, l'Université Laval contribue à accroître la qualité et la productivité des entreprises de la région de Québec. Tout en exportant des services à toute la province et à tout le Canada au plan de la formation des ressources humaines, l'Université Laval, en réponse aux besoins du milieu où elle est implantée, a développé certaines spécificités dans l'ensemble du réseau universitaire québécois.

Ainsi, en partant du fait que la région de Québec est la capitale d'un pays forestier, que la région constitue la deuxième grande concentration de produits de la forêt au Canada, l'Université Laval a pris l'initiative de développer la Faculté de foresterie qui demeure la seule au Canada français. Ce sont les besoins immédiats de la région qui l'ont amenée à mettre sur pied la Faculté des sciences et de l'administration.

Grâce aux diverses activités qui lient l'université à son environnement, la diffusion du progrès et l'exploitation des idées nouvelles s'effectuent toujours plus rapidement dans une ville universitaire que dans des territoires dépourvus d'établissement de haut savoir. Une récente analyse comparative, effectuée par la revue Technopolis à travers le monde, témoigne que le premier élément-clé du succès d'une région dans le développement de centres de recherche, l'implantation d'entreprises de haute technologie est la présence sur son territoire d'une grande université dynamique.

La région de Québec est redevable à l'Université Laval d'avoir, au cours des dernières décennies, émergé comme la quatrième région la plus importante au Canada aux plans de la recherche et de la haute technologie. En plus d'avoir eu des effets induits sur l'implantation de centres de recherche au cours des dernières décennies, l'Université Laval, en permettant de maintenir dans la région une masse critique de cerveaux créateurs, a favorisé l'émergence de plusieurs petites entreprises de pointe qui, actuellement, oeuvrent avec succès sur des marchés internationaux.

Il faut que les citoyens de la région de Québec, aussi bien que l'État québécois, prennent conscience que la région de Québec, par suite du retrait du gouvernement comme principal employeur, est acculée à l'impérieuse nécessité d'ouvrir de nouvelles voies d'expansion, si elle veut éviter de devenir exportatrice de population et de main-d'oeuvre plutôt que de produits et de services.

Dans ce virage que la région doit prendre sur son avenir, l'une des voies prometteuses est celle de l'implantation de centres de recherche et de haute technologie. Cette voie est prometteuse à la condition de choisir des domaines d'excellence que notre université occupe déjà.

La région de Québec, grâce largement à l'Université Laval, a décidé de miser son avenir au plan de la recherche et de la haute technologie dans les secteurs suivants: dans le secteur de l'optique et du laser, secteur où l'Université Laval a déjà une présence dominante puisque la moitié des diplômés dans ce secteur d'avenir originent de Laval; dans le secteur des biotechnologies végétales, biomasse, en raison du fait que l'Université Laval possède deux facultés déjà renommées, soit une Faculté des sciences de l'agronomie et une Faculté des sciences de la foresterie qui, déjà, ont induit des centres de recherche dans ce secteur; dans le domaine de la nordicité, en partant du principe que le Canada, par suite de la réalité géographique, a dû inventer des outils, des équipements, bref générer constamment de l'innovation pour vivre et exploiter son pays.

En conclusion, M. le Président, la Chambre de commerce et d'industrie est consciente que les ressources de l'État aussi bien que du secteur privé sont comparativement plus limitées au Canada et au Québec qu'elles peuvent l'être dans d'autres grands pays industriels.

À partir de cette prise de conscience, il nous apparaît important, au lieu de disperser nos ressources, de les concentrer dans les domaines où nous pouvons exceller et, par voie de conséquence, être en mesure d'exporter.

Appelé à répartir les ressources disponibles entre les diverses régions de la

province, notamment entre Québec et Montréal, le gouvernement provincial doit prendre conscience que la région de Québec est en droit de s'attendre que l'État cherche méthodiquement à privilégier la région de Québec dans les domaines précités.

La chambre, par ses représentants, rend hommage à l'Université Laval et à son recteur. La région de Québec a pris conscience, en faisant l'inventaire de ses actifs, que l'Université Laval pouvait être une des grandes pierres angulaires de la relance de notre région dans toutes les sphères d'activité économique, notamment dans les domaines de la recherche et de la haute technologie.

En même temps, sous l'impulsion de son recteur, l'Université Laval a pris conscience qu'elle pouvait être un agent économique déterminant dans le progrès de la région. Cette prise de conscience a été d'ailleurs à l'origine du lancement de GATIQ, organisme mis sur pied pour mieux articuler et mobiliser les ressources universitaires et de la recherche avec celles de la communauté des affaires et de la collectivité régionale. Grâce à cette présence de l'Université Laval, GATIQ a pu revendiquer avec succès l'implantation d'un centre de recherche en optique et laser ainsi que d'un centre de valorisation de la bio-masse.

À la lumière de ce que déjà l'Université Laval a apporté à notre milieu, en prenant conscience de son potentiel considérable, il nous apparaît que l'une des plus belles contributions que le gouvernement du Québec peut faire à notre région, celle de Québec, est d'aider l'Université Laval à raffermir sa présence. Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): On vous remercie beaucoup, monsieur, de votre intervention. Maintenant, j'inviterais les représentants des deux partis politiques à prendre la parole. Je vous ferai remarquer qu'il nous reste environ 35 minutes. Le temps sera réparti également entre les deux formations politiques. J'ai une demande d'intervention de la part du ministre, de la part du député de Limoilou et de la part, naturellement, de la porte-parole officielle de l'Opposition.

Je reconnais immédiatement le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.

M. Ryan: M. le Président, il me fait grandement plaisir de rencontrer, ce soir, les représentants de la Chambre de commerce et d'industrie du Québec métropolitain et de saluer en particulier son directeur général, notre bon ami à tous, M. Pierre Talbot. Nous sommes contents de voir qu'il est revenu à la santé.

Pour commencer, je veux vous féliciter de l'intérêt que vous portez au problème des universités en général - c'était la première partie de votre mémoire - et, deuxièmement, de l'affection toute spéciale que traduit votre mémoire pour l'Université Laval, qui est l'université de la ville de Québec, de la région de Québec, où vous oeuvrez particulièrement. Je pense que votre sentiment d'attachement à l'Université Laval est bien justifié. Il vous conduit parfois même à n'être pas à 100 % objectifs peut-être, mais c'est à nous de faire la part des choses. C'est un enthousiasme qui est tout à fait défendable de la part d'une chambre de commerce régionale.

Je pense que vous nous rendez un fier service en exprimant l'intérêt des hommes d'affaires de la région de Québec pour le problème du financement universitaire. Vous faites un acte de civisme que nous apprécions en venant exprimer votre intérêt devant la commission parlementaire. Je crois que si vous pouvez poursuivre ce travail dans vos milieux respectifs, auprès de vos confrères et de vos consoeurs du monde des affaires, vous aiderez non seulement la commission, mais l'Assemblée nationale et le gouvernement à trouver des solutions appropriées à un problème dont vous avez souligné la réalité et l'acuité et sur lequel les données que vous nous présentez, de manière générale, recoupent celles que nous avons recueillies jusqu'à maintenant. Par conséquent, il n'y a pas lieu de faire de grands développements, de manière générale. Ce que vous dites au point de vue du financement universitaire reflète une réalité qu'à peu près tous les observateurs impartiaux ont constatée. Je pense que cela ajoute au dossier une pièce qui ne manque pas d'intérêt.

Je pense que c'est la première fois qu'une chambre de commerce vient témoigner devant la commission à l'occasion de cette série d'audiences. On voit souvent les chambres de commerce aux audiences des commissions parlementaires, mais dans le cadre de cette série d'audiences, c'est la première chambre de commerce qui vient témoigner et je voudrais vous dire que j'en suis très heureux.

Vous avez souligné spécialement l'impact des universités pour le développement économique. C'est un thème dont nous parlions tantôt avec l'Ordre des ingénieurs. Vous avez sans doute entendu les échanges d'opinions que nous avons eus là-dessus. Les propos que nous avons échangés avec l'Ordre des ingénieurs, je pense que nous pourrions les redire avec vous, mais ce n'est pas nécessaire parce qu'on se comprend là-dessus.

Ce qui est dit dans votre mémoire suscite l'adhésion générale des députés du côté ministériel, à tout le moins. C'est une situation où je serais un peu embarrassé d'être du côté de l'Opposition parce qu'il faut que vous trouviez des réserves; c'est votre rôle. Ce rôle, nous l'avons joué

pendant neuf ans. En même temps, ce sont des bonnes choses. C'est difficile de s'opposer à des bonnes choses même quand on est dans l'Opposition. Alors, je vous souhaite bonne chance.

J'ai une petite question peut-être. D'abord, je voudrais faire seulement une mise au point. Vous parlez de l'ÉNAP -l'École nationale d'administration publique -et vous dites: L'État québécois devrait faire faire au lieu de faire lui-même. Il y a peut-être une nuance qui a échappé au rédacteur du mémoire. Je ne veux pas l'attaquer personnellement parce que c'est un de mes bons amis. L'ÉNAP, ce n'est pas une institution, une créature directe du gouvernement du Québec. Moi-même, j'ai pensé cela pendant des années, mais je suis allé à l'école depuis quelques mois et j'ai appris que c'est une institution qui relève de l'Université du Québec. Par conséquent, si vous nous demandiez de dépouiller l'Université du Québec pour transférer cette institution à l'Université Laval, je vous dirais: Je vais faire au moins un examen attentif de la proposition. Ce n'est pas notre intention de commencer à dépouiller une université pour en enrichir ou pour en renforcer une autre. C'est une nuance particulière; je le comprends très bien. (21 h 45)

II y a une autre chose importante à signaler, c'est que l'École nationale d'administration publique nous en a fait l'illustration aujourd'hui, c'est qu'elle offre des services à des administrateurs publics recrutés dans toutes les régions du Québec, pas seulement dans la fonction publique provinciale, mais également dans les administrations municipales dans tout le réseau de l'éducation au Québec, dans tout le réseau de la santé et des affaires sociales. Il y a peut-être une certaine - je vais employer un grand mot, ce n'est pas parce que je veux avoir l'air prétentieux -conaturalité, certains liens d'affinité entre la mission de l'Université du Québec, la mission de l'École nationale d'administration publique; elles sont toutes deux à l'échelle du Québec, en somme. Ce n'est pas un sujet de querelle, c'est juste une précision. Si vous avez autre chose à dire là-dessus, vous pourrez nous dire pourquoi vous demandez cela. On va l'examiner, parce que c'est notre rôle de vous écouter.

Mais, la question que je voulais vous poser n'est pas de cet ordre. C'est è propos d'abord de la tâche d'enseignement des professeurs. Vous demandez qu'on réexamine la tâche d'enseignement des professeurs. Est-ce que vous voudriez signaler que, même dans votre université bien-aimée, à l'Université Laval, il pourrait peut-être y avoir des problèmes de ce côté?

M. Reinhardt: Je ne pense pas, M. le Président, que cela exclue l'Université Laval.

M. Ryan: Pour être sérieux, quel genre d'étude envisageriez-vous? Est-ce que vous demandez au ministère de faire cela? Est-ce qu'il y a une formule quelconque à laquelle vous avez pensé? Vous savez que ce n'est pas facile d'examiner ces choses. Nous avons des choses en vue, mais j'aimerais avoir votre éclairage aussi. Cela peut nous aider en vue de la décision que nous allons prendre à ce sujet, peut-être au cours des prochains jours.

M. Talbot (Pierre): Moi, je pense que cela devrait être un groupe, un "task force". Un groupe de travail pluridisciplinaire pourrait examiner cela et non pas une commission parlementaire. Il s'agit d'établir les faits, d'analyser, etc. Ce groupe pourrait faire rapport è la commission parlementaire.

M. Ryan: Ou au ministre. M. Talbot: Ou au ministre.

M. Ryan: Si la commission parlementaire a terminé son travail.

M. Talbot: C'est cela.

M. Ryan: C'est vrai. En tout cas, cela sera...

M. Talbot: Tout le monde s'interroge. Je pense qu'il faut approfondir cette question.

M. Ryan: C'est curieux, parce que votre idée rejoint un peu celle que j'étais en train de me former de mon côté. Je crois que, s'il y avait un groupe de travail sur ce sujet précis - nous pourrions constituer dans les meilleurs délais - cela pourrait être de nature à nous éclairer. Je suis heureux de rappeler qu'à ce sujet, la semaine dernière, avant que nous nous laissions, j'avais lancé une invitation à la Fédération des associations de professeurs d'université, et, dimanche, à Montréal, à l'occasion de l'inauguration d'un colloque international de l'Association des universités entièrement ou partiellement de langue française, j'ai eu l'occasion de rencontrer de nouveau le président de la FAPUQ. Il m'a dit qu'il avait accueilli cette suggestion avec beaucoup d'intérêt et qu'eux étaient disposés à collaborer à l'invitation qui leur avait été faite au nom du gouvernement. Cela se pourrait qu'au cours des prochains jours, si nous pouvons trouver le temps de mettre ces choses à point, nous procédions rapidement. C'est l'une des données dans le dossier que nous examinons, sur laquelle les éléments que nous avons recueillis jusqu'à maintenant ne sont pas complètement éclairants. Il faut

compléter. Par conséquent, votre suggestion va dans ce sens, et je vous en remercie.

À la fin, il y a juste une petite question. D'abord, vous soulignez les points où l'Université Laval excelle. Vous avez mentionné le secteur de la foresterie, le secteur de l'agriculture, le secteur des sciences de l'administration. Je pense que ce sont trois secteurs où, incontestablement, l'Université Laval occupe une position de leadership. Il y en a beaucoup d'autres aussi. Je sais que ce n'est pas du tout limitatif ou exclusif; c'est mentionné à titre d'exemple, mais je pense que ce sont trais très bons exemples de secteurs où l'Université Laval occupe une place de leadership tellement bien établie qu'il ne serait pas question de la lui ravir ou de la diminuer pour la donner à d'autres, par exemple. Je pense que, dans ce secteur, nous avons de très bons éléments.

Au point de vue de ia technologie, vous avez mentionné les travaux qui se font dans le domaine de l'optique et du laser. Vous savez que le ministère de l'Enseignement supérieur a contribué à la création d'un centre national d'excellence en optique qui gravite autour de l'Université Laval, financé conjointement par le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec. Maintenant, nous avons transféré cette responsabilité au ministère du Commerce extérieur et du Développement technologique, mais c'est une initiative à laquelle le gouvernement a été très heureux de collaborer. C'est une des premières choses que nous avons mises au point après le changement de gouvernement vers la fin de l'année dernière. Vous parlez des biotechnologies végétales. Vous savez que nous avons mis au point le Centre québécois de valorisation de la biomasse qui recrute une grosse partie de ses ressources humaines à l'Université Laval également. Ce centre est en train de mettre au point des projets très intéressants dont la plupart vont se réaliser par collaboration intime avec l'industrie. C'est un autre point que je suis bien content de souligner avec vous, l'excellence de l'apport de Laval dans notre présence au développement technologique.

Je pourrais continuer, mais je pense qu'il ne faut pas être trop long non plus. Ce sont de bons exemples. Je veux vous dire que chaque fois qu'il y aura dans cette région-ci une possibilité pour le gouvernement de faciliter le développement technologique par un renforcement des institutions d'enseignement supérieur, nous allons le faire. Mais le point que je veux mentionner, je m'excuse, parce qu'il me revient et j'allais l'oublier, c'est qu'en matière de cégeps il y avait des gros problèmes de développement qui traînaient dans la région depuis de nombreuses années. Vous savez que nous avons annoncé un plan d'investissement il y a à peu près trois mois maintenant, qui va permettre des développe- ments importants du côté du cégep de Limoilou, du côté de Charlesbourg, du côté du cégep de Sainte-Foy également. Ce sont tous des points qui vont contribuer au renforcement que vous souhaitez. Je voulais laisser à mon collègue, le député de Limoilou, la chance de vous poser une question ou deux tantôt. Je pense que je vais interrompre mon intervention ici pour ne pas être victime d'un emportement, d'un enthousiasme qui me ferait aller trop loin. Alors, je vous remercie infiniment encore une fois. Je vais laisser le reste du temps qui nous est imparti à mon collègue de Limoilou que je remercie d'être ici. Étant donné qu'il est de la région de Québec, cela va faire particulièrement plaisir à Mme la députée de Chicoutimi. Je comprends le Parti québécois qui n'a pas de député dans cette région-ci, parce que tous les problèmes que nous discutons n'auraient peut-être pas trouvé les solutions que souhaitait la région de Québec.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le ministre. Je reconnais maintenant Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le Président, messieurs, cela me fait plaisir de vous voir ici. Contrairement à ce que voulait bien tantôt laisser planer le ministre, à savoir que je devais m'opposer ê tous les mémoires qui étaient déposés ici, comme je suis dans l'Opposition - c'est peut-être sa conception du rôle de l'Opposition; il a quand même été là durant quelques années - je dois vous dire que j'ai trouvé votre mémoire intéressant â plusieurs titres. Je dirais que toute la partie dans laquelle vous faites la démonstration de l'importance du rôle que joue l'Université Laval par rapport au développement de votre milieu et parlez des retombées économiques de la présence de l'Université Laval dans le milieu, on pourrait l'appliquer à toutes les régions du Québec et je n'aurais certainement pas mieux dit. C'est présenté avec beaucoup d'intérêt et vous avez bien saisi l'importance d'une université. Dans ce sens, je vous dis bravo.

Le ministre nous dit que sa formation politique appuie la totalité du rapport. Je dois dire que j'aurais certaines réserves que je pourrai exprimer, mais il y a quand même des choses intéressantes. Le ministre n'a pas semblé intéressé par cela, mais cela m'intéresse. Je trouve que votre groupe d'action GATIQ est particulièrement intéressant comme initiative dans la région. Je sais que vous avez comme intérêt de développer des centres de recherche dans des secteurs de pointe. Est-ce que vous avez d'autres projets? Quelles sont les perspectives par rapport à ce groupe?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Al-

lez-y.

M. Talbot: Évidemment, le développement de centres de recherche était notre première préoccupation, mais la seconde, et peut-être la plus importante, est de faciliter le transfert technologique entre les universités et le milileu des affaires, de mettre en place un comptoir d'innovations technologiques. GATIQ est tout simplement un départ. Ce n'est pas un point d'arrivée. C'est une première au Canada de recherche de collaboration entre le secteur universitaire et le secteur des affaires. On met certainement l'accent, le cap sur le transfert technologique. De plus en plus, nous organisons d'ailleurs des rencontres où des chercheurs de l'université viennent exposer l'état des recherches pour que nos industriels puissent percevoir des occasions d'affaires et qu'on évite que certains brevets aillent finalement à l'étranger, ailleurs, comme on dit.

Deuxièmement, il y a aussi la technologie, l'innovation technologique qu'on peut aller chercher ailleurs, pas seulement dans nos universités. Et, encore là, l'université est une source de documentation exceptionnelle.

Mme Blackburn: Dans votre mémoire, je le rappelais tantôt, vous faites largement état des retombées économiques de la présence de l'Université Laval dans votre milieu. Vous attendez probablement ma question parce que je l'ai posée au groupe précédent. Du moment où les retombées économiques sont aussi importantes, je ne fais qu'en citer quelques-unes, que ce soit sur la capacité des entreprises à se développer, sur la contribution à l'industrie touristique, sur l'activité que suscitent les achats faits dans la région, la présence de personnel important, etc., je pense que cela contribue - là-dessus je suis tout à fait d'accord avec vous - au développement d'une région. Cependant, l'argument que vous apportez pour justifier une hausse des frais de scolarité repose sur le fait que les étudiants en tirent des avantages. Comme l'industrie, l'entreprise tire aussi des avantages de la présence d'universités en région, est-ce qu'elle ne devrait pas aussi contribuer financièrement à son développement?

La mesure que vous proposez consiste en un crédit d'impôt. Donc, payons-les pour qu'elles nous aident. En gros, cela peut ressembler à cela parce qu'un crédit d'impôt, cela veut dire que c'est autant d'argent qui ne rentre pas dans les coffres de l'État. Dans certains pays, il y a effectivement ce qu'ils appellent l'impôt d'éducation qui est prélevé dans les entreprises. Cela varie, il y en a pour la formation et d'autres pour le développement, mais cela va jusqu'à 2 %. Si cela a des avantages certains pour l'étudiant qui est formé dans les universités, cela en a d'indéniables par rapport aux entreprises. Donc, devraient-elles ou ne devraient-elles pas collaborer finalement pour assurer le développement de l'université?

M. Talbot: On affirme le principe que l'université doit collaborer, supporter des universités parce qu'elles sont les premières bénéficiaires. Quelles sont les modalités? C'est là qu'il faut examiner en profondeur toute cette question-là. Il y a évidemment les incitations fiscales qui sont un moyen important. On regarde ce qui se passe aux États-Unis où les relations entreprises-universités au plan de la recherche sont beaucoup plus fortes qu'ici et beaucoup plus intéressées. On cherche à établir des relations d'intérêts et pour l'université et pour l'entreprise. Ce n'est pas un mariage d'amour, c'est un mariage d'intérêt et il y a moyen, par des modalités, de renforcer cette relation.

Il y a aussi la formation des ressources humaines dans les entreprises. Cette relation est beaucoup plus forte aux États-Unis. Par exemple, Harvard, qui vit largement de cours fournis ou de services de formation fournis aux grandes entreprises, pas seulement la formation des étudiants mais sur place en milieu de travail. On n'a pas de réponse élaborée à cela, on affirme simplement un principe: il faut rechercher les modalités et les améliorer.

M. Desmeules: Je voudrais peut-être ajouter un commentaire. Vous êtes au courant également que l'entreprise commerciale et industrielle de la région fait des efforts. II y a actuellement une campagne de souscription de 25 000 000 $ pour venir en aide à l'Université Laval. Je pense que les entreprises de la région de Québec font leur effort dans ce sens-là aussi. (22 heures)

Mme Blackburn: Je dis toujours que c'est parce qu'on a eu l'occasion de lire beaucoup sur ces questions-là, mais généralement, à tort, on invoque la participation des industries américaines au financement des universités. Selon des chiffres qui apparaissent dans l'avis du Conseil de la science et de la technologie - je vous les donne - cela finirait par ressembler à ce qui se passe ici. Aux États-Unis - vous avez en partie raison, parce qu'il y a des universités spécialisées - elles vont chercher 10 % de leur financement là, mais vous en avez d'autres qui ne vont chercher absolument rien, ce qui fait qu'au total vous avez, en pourcentage pour le Québec, 3,3, en Ontario, 3,9, au Canada, 3,2 et aux États-Unis, 3,9. C'est l'estimation de la contribution des entreprises aux dépenses de recherche des

universités.

M. Talbot: II y a quelque chose de très sain aux États-Unis, c'est que les universités doivent concurrencer entre elles pour se gagner les faveurs de l'entreprise et il faut qu'elles soient très mobiles, qu'elles présentent et développent des services de qualité. On n'a peut-être pas assez développé cette relation industrie-université, cette concurrence, je dirais, entre les universités. Pendant longtemps, nos universités ont vécu dans une tour d'ivoire et, à cet égard, l'Université Laval a effectué un rapprochement considérable de son milieu; elle s'est rapprochée de son milieu depuis quelques années. Si on se reporte à il y a sept, huit ou dix ans, c'étaient réellement des tours d'ivoire. Le monde universitaire était isolé. Il faut poursuivre dans cette veine et amplifier ce rapprochement. Les universités vont y trouver un intérêt pécuniaire, pas seulement...

Mme Blackburn: Tout à l'heure, vous parliez des frais de scolarité pour donner aux universités les sommes d'argent qu'il leur manquait. À cet égard et sur plusieurs de ces recommandations, vous reprenez à votre compte les principales recommandations du rapport Gobeil. Sauf que, probablement à la différence du rapport Gobeil, vous insistez et vous comprenez l'importance d'une université sur la capacité d'une région de se développer. Je dirais que cela vous distingue et cela vous honore. Cependant, vous citez, je dois dire, comme quelques autres mémoires, une allocution de M. Vice, le président de Northern Telecom, et je me dis que, finalement, on va finir par demander copie de son texte. Si vous l'avez lu, pourriez-vous nous dire si M. Vice, en même temps qu'il - je vous cite - recommandait, déclarait... Je vais essayer de retrouver la citation. C'est...

Une voix: À la page 5.

Mme Blackburn: ...à la page 3: "L'éducation constitue la première priorité. Tout le reste devient secondaire si on tient à notre avenir." Est-ce que M. Vice recommandait l'augmentation des frais de scolarité? Dans la recommandation que vous faites, vous dites: "Les augmenter comme ils le sont ailleurs". Qu'est-ce que cela veut dire?

M. Talbot: II ne tombait pas dans le piège des modalités. Il défendait des principes, des objectifs. Sur les frais de scolarité, l'accessibilité des étudiants, évidemment... Aux États-Unis, non seulement les frais sont-ils plus élevés, mais l'étudiant, dans plusieurs cas, doit fournir la preuve qu'il a gagné une partie de ces frais. En somme, on met l'accent sur la responsabilité des individus. C'est un aspect qu'on ne peut pas négliger. Il n'y a pas seulement l'aspect, je dirais, pécuniaire. Il y a la responsabilité de chaque citoyen d'apporter à la société, de contribuer â la société. On demande cela à l'étudiant américain. Il paie plusieurs fois plus cher que le nôtre et il doit faire la preuve que ce n'est pas papa qui a fourni tout l'argent, mais qu'il en gagné une partie.

Mme Blackburn: Je vous dirai également que, dans certains autres pays, les diplômés sont obligés de donner cinq ans quasiment de leur temps, à un salaire minimum, pour l'État. Il y a différentes modalités.

Lorsqu'on aborde la question des frais de scolarité, on fait des comparaisons, à mon avis, qui sont très faciles et qui risquent finalement de nous amener à des conclusions qui ne sont pas justes. Il n'est pas vrai d'affirmer, parce que cela coûte plus cher aux États-Unis et en Ontario et qu'ils ont quand même un niveau de scolarité assez élevé, que cela aura les mêmes effets ici. On a une richesse collective plus basse -c'est connu - de 25 %. On a un taux de chômage plus élevé et j'ajouterais, si besoin était, qu'on a une tradition d'éducation plus faible. Comprenez bien qu'avec des frais de scolarité très bas et un régime d'aide financière aux étudiants qui se compare bien avec les autres provinces, on n'a même pas réussi à les rattraper. Il faut comprendre cette dynamique lorsqu'on s'engage sur le terrain des frais de scolarité: Dans les conditions les plus avantageuses, on n'a pas réussi à les rattraper.

M. Talbot: Quand même, dans des provinces plus pauvres que nous, les frais de scolarité sont supérieurs.

Mme Blackburn: Ils sont moins scolarisés. À présent, une petite question parce qu'on est le pour savoir un peu....

Le Président (M. Parent, Sauvé):

Madame, il y a des règles à respecter. Comme on est là pour savoir: j'ai dit que j'étais pour être souple, je vais être très souple, je vous rappelle que votre temps est écoulé depuis plusieurs minutes,

M. Reinhardt: M. le Président...

Mme Blackburn: Bien, je vous remercie, mais ne vous offensez pas. Ces messieurs vont certainement vouloir répondre à la question suivante.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Un instant, madame. Monsieur veut donner un complément de réponse.

M. Reinhardt: J'écoutais avec beaucoup d'intérêt la présentation qui a été faite par l'Ordre des ingénieurs tout à l'heure, et j'ai pris des notes mentales lorsqu'on a parlé de l'augmentation des frais de scolarité et de l'accessibilité à l'éducation. J'aimerais parler peut-être de moi-même à ce moment-ci, pour vous montrer comment l'accessibilité est possible dans toutes sortes de circonstances. J'ai dû, à un certain moment dans ma vie, quitter mes études universitaires pour une raison familiale. Heureusement, je vivais dans une région qui était près de l'Université d'Ottawa et j'ai pu faire un cours universitaire le soir. Je sais que cela existe dans certains milieux québécois, mais à ma connaissance, sauf à Concordia, les voies à des professions ou à des degrés supérieurs universitaires par les soirs sont très minimes.

C'est peut-être là qu'on pourrait augmenter l'accessibilité à des étudiants moins munis qui doivent travailler et gagner et faire leur cours en même temps. C'est une suggestion que j'avais à apporter.

Mme Blackburn: Je vous dirais que c'est quasiment déjà fait. Il y a 50 % de nos clientèles dans les universités qui sont des adultes.

M. Reinhardt: Souvent ce sont des étudiants adultes qui prennent des cours et qui suivent des cours, mais ces cours ne mènent pas nécessairement à un degré universitaire ou à une profession.

Mme Blackburn: Comme je ne veux pas complètement indisposer mon président, parce que j'ai encore à travailler avec lui pendant trois semaines, j'ai une question. Vous allez me dire, à la page 7, vous dites: "II vous apparaît tout à fait équitable et impératif que les frais de scolarité soient haussés au niveau de ce qui est exigé ailleurs." Cela veut dire quoi?

M. Reinhardt: Je pense qu'on pensait aux frais de scolarité de l'Ontario.

Mme Blackbum: Bien, merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Mme la députée de Chicoutimi, vous n'indisposez jamais votre président. Votre président a un rôle à jouer et il doit vous rappeler les règles établies. Par contre, j'ai dit au début de ces audiences publiques que je montrerais toute la souplesse possible pour atteindre le but recherché, d'aller chercher le renseignement. Sentez-vous bien à votre aise. M. le député de Limoilou.

M. Desmeules M. le Président...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui.

M. Desmeules: II y a simplement le rôle de l'intervention de l'État pour fixer les frais de scolarité. Est-ce qu'il y a moyen, à un certain moment, de penser qu'il peut y avoir un plancher mais que, si certaines facultés ou certaines universités veulent exiger peut-être plus par rapport à leur vocation, au rôle qu'elles ont à jouer, elles pourraient le faire.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le député de Limoilou.

M. Després: Je commençais à me sentir inquiet par le fait que la députée de Chicoutimi puisse accorder un peu de temps au député de Limoilou, un député de la région de Québec.

J'aimerais moi aussi vous féliciter de votre participation à la commission. Étant député de la région de Québec - comme disait M. le ministre, je pense qu'il n'y a pas beaucoup... c'est la première chambre de commerce qui passe ici à la commission - je vous félicite d'avoir participé à la commission et du travail que vous faites dans la région de Québec.

Dans le mémoire, vous dites qu'il faut accroître les ressources des universités. Quand vous parlez d'une approche équitable et judicieuse, vous développez trois thèmes. Le thème de la rationalisation plus rigoureuse que jamais du domaine universitaire. À la page 7, on parle d'un partage équitable de la responsabilité des coûts financiers, et en fin de compte, le thème du maintien d'une mobilité des ressources universitaires. Je ne sais pas si, pour vous, elles sont directement ou indirectement reliées dans la révision du financement universitaire. J'aimerais tout d'abord aborder, à la page 7, ce que vous dites, dans le premier paragraphe: II nous apparaît qu'une réflexion méthodique doit être faite pour, dans une perspective d'évolution, renforcer le système actuel en permettant à chaque université de miser sur les domaines où elle excelle déjà.

Selon vous, quelles formes cela pourrait-il prendre? Je veux en venir à ceci: Est-ce que cela veut dire que les universités devraient avoir des écoles ou des facultés de plus en plus spécialisées en laissant tomber un peu plus le secteur général, ou faut-il plutôt éviter le doublement entre les universités et des départements où ils sont de plus en plus spécialisés à travers le réseau universitaire? Est-ce qu'on veut tout simplement éviter le doublement et qu'on se spécialise, qu'on reconnaisse certaines universités où on laisse tomber un peu plus le secteur général?

M. Talbot: Je pense qu'au lieu d'avoir des universités qui veulent avoir toutes les facultés, c'est de chercher à les concentrer

le plus possible dans des domaines d'excellence. Exemple, Québec. Québec, son université devrait être en mesure d'exporter à tout le pays, à toute la province dans certains domaines, d'exporter son excellence et, versus Montréal, exporter à Québec dans certains domaines. On peut, entre les grandes universités, se répartir des domaines. D'ailleurs, on a eu des discussions avec les autorités à ce sujet.

Le plus bel exemple, la plus belle crise qu'on ait vécue, nous, cela a été la faculté d'agriculture. Toutes les autres provinces ont une seule faculté d'agriculture. Il y en a une par État américain, parce que c'est dispendieux de maintenir une faculté d'agriculture. On en a deux dans la province de Québec, on a failli en avoir trois, quand il suffisait de mettre quelques crédits additionnels pour que l'Université Laval, qui disposait déjà d'une excellente faculté d'agronomie, puisse se comparer à Guelph, Ontario. Cela prenait peut-être 500 000 $, 1 000 000 $, quelques professeurs de plus, quelques laboratoires de plus et on devenait comparable à Guelph qui était la plus grande université reconnue dans ce domaine aux États-Unis.

C'est le message qu'on veut dire. C'est la même chose dans le domaine de la foresterie. On a une faculté de foresterie à Québec, j'espère qu'on n'en verra pas surgir d'8utres et j'espère que pour renforcer nos universités, les centres de recherche vont tendre à s'implanter là où les universités ont des domaines d'excellence et qu'on va pouvoir renforcer automatiquement ce que j'appelle la masse critique des cerveaux dans une région dans un domaine. Et, encore là, l'optique et le laser, c'est le plus beau domaine. Pourquoi Laval est-il devenu excellent en optique et laser? Parce qu'elle avait un grand laboratoire de recherche militaire, Valcartier, qui a amené des chercheurs, chercheurs qui ont amené une chaire d'enseignement à Laval et Laval a développé une reconnaissance à travers le pays. Alors, si entre les régions on répartit et les domaines de la recherche et les domaines de formation des ressources humaines - parce que les chercheurs contribuent à la formation des ressources humaines, et vice versa - je pense qu'on aura fait un grand pas dans la rationalisation des ressources universitaires. Mais, il y a une concurrence qui s'amenuise peut-être, mais qui était très forte dans le passé.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci.

M. Després: M. le Président, je note avec beaucoup d'intérêt que votre revendication au sujet du dédoublement est le point de vue de plusieurs regroupements d'associations étudiantes qui revendiquent des gestes concrets relativement au doublement des spécialisations avant qu'on réinjecte de l'argent dans le réseau universitaire. (22 h 15)

J'aimerais vous demander, pour conclure, si vous ne croyez pas qu'une meilleure cohérence du réseau, comme vous venez de le dire, afin d'éliminer ce doublement, tel que vous le suggérez, pourrait à la fois nous permettre de surmonter à moyen terme, peut-être pas à court terme, une partie de la crise financière des universités, cela d'autant plus facilement que les étudiants pourraient peut-être plus facilement accepter cette augmentation des contributions au financement, et répondre à votre revendication au sujet des trop nombreux doublements de secteurs dans les domaines spécialisés comme vous le disiez tout à l'heure. On s'amuse, d'une université à l'autre, à créer des facultés et des spécialisations d'une région à l'autre.

Le Président (M. Parent, Sauvé):

Monsieur.

M. Talbot: C'est sûrement une préoccupation fondamentale à apporter dans toute cette rationalisation des ressources. Je pense que le Conseil des universités s'est penché sur cette question. Alors, il y a eu une amélioration dans cette concurrence terrible qui existait entre les universités il y a trois ou quatre ans. Il y a une amélioration, mais il y a encore sûrement du progrès à accomplir.

Quant au principe de l'ÉNAP, évidemment qu'à l'époque la chambre aurait souhaité que, primo, l'ÉNAP soit une faculté, une administration qui ne soit pas séparée pour l'État, qu'on cherche à intégrer administration publique et administration privée pour faciliter ce pas entre secteur privé et secteur public. De ce côté, peut-être est-ce l'expression d'une certaine déception du passé. Nous avions déjà une grande faculté d'administration qui était l'une des premières dans la province; elle logeait dans une capitale et elle était peut-être mieux placée que quiconque à l'époque pour assumer cette fonction. Il y a peut-être une autonomie de l'ÉNAP réelle, mais - et c'est le troisième point - il y a aussi une impression générale que l'ÉNAP est peut-être ou a peut-être été trop près de l'État. C'est la formule française. Elle a été discutée à l'époque, et nous continuons à la discuter. C'est pour cela qu'on la soulève tout simplement ici, quoique je doive reconnaître que l'ÉNAP a beaucoup plus d'ouverture vers les gens en général et se concentre moins au secteur public.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Je reconnais M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Je voudrais juste enchaîner

sur la dernière intervention de M. Talbot. Ce n'était pas ma question, car elle va venir un peu après. J'essaie de me souvenir dans l'histoire où la formation de l'École nationale d'administration publique, qui relève de l'Université du Québec, avait été refusée par l'Université Laval, selon certaines conditions à l'époque. Il ne faut pas oublier cela non plus dans l'histoire.

M. Talbot: C'est cela. C'est extrêmement malheureux, et on en a sûrement des remords.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Talbot: C'est malheureux quand on parle de l'excellence de la spécialisation.

M. Jolivet: En tout cas, ma mémoire ne fait pas défaut et le ministre me le confirme.

Le Président (M. Parent, Sauvé): S'il vous plaît, M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Ma question a trait à quelque chose qui m'a intéressé pendant nombre de mois l'an passé et qui continue à m'intéresser encore - M. Talbot, vous l'avez exprimé avec beaucoup de vivacité et d'amour dans votre présentation tout à l'heure - ce sont les centres de recherche. Il y a ici, avec la faculté de géodésie et de foresterie qui fêtait son soixante-quinzième anniversaire l'an dernier, un problème qui subsiste. On n'a pas encore les éléments de réponse. La question que je vous pose, je l'ai posée au ministre délégué aux Forêts hier, lors de l'étude des premiers mémoires avec les gens de l'Université Laval, concernant la forêt Montmorency.

La forêt Montmorency est problématique actuellement. C'est un joyau des Laurentides qui a été protégé de la tordeuse du bourgeon de l'épinette, donc c'est un beau coin important qui sert à la villégiature, mais aussi comme forêt expérimentale. Elle se voit actuellement acculée à certaines difficultés. On parle de fermer la partie qui concerne l'hôtellerie. Il reste quand même que c'est une étape si on ne bouge pas dans le dossier pour aller plus loin.

Comparativement à ce que vous dites pour l'ÉNAP, qui est la responsabilité de l'Université du Québec, cette fois-ci, c'est l'Université du Québec qui dit: Si l'Université Laval laisse tomber, je suis intéressée à la prendre. Effectivement, à l'Université du Québec à Trois-Rivières qui a un dossier sur l'ensemble des pâtes et papiers - et son brevet sur ce plan - nous nous retrouvons avec cela.

Il y a aussi un autre danger. L'université peut s'ouvrir au milieu, mais le milieu peut avoir des gourmandises. Une de ces gourmandises, vous la connaissez, c'est la compagnie Reed Paper, qui serait intéressée à avoir ce joyau. Le jour où elle va entrer là-dedans, c'est du bois de bonne qualité, du bois qui a été protégé... Dans ce sens, il serait malheureux qu'on laisse tomber la forêt Montmorency.

Je veux seulement avoir votre opinion comme gens du milieu qui voulez le développer, le conserver et vous assurer en même temps que les facultés aient les lieux nécessaires pour la recherche. Dans ce cas-là, elle est vivante, dans le milieu de la forêt Montmorency...

M. Talbot: Comme touriste dans la forêt Montmorency, de temps à autre, je peux vous dire que j'apprécie vraiment cet aspect de la forêt. Maintenant, sur le plan de la contribution à la recherche, j'hésiterais à évaluer si c'est une modalité que l'on doit privilégier ou si tout simplement l'université ne doit pas faire des ententes avec les entreprises pour étendre la recherche à toute la forêt. Est-ce qu'une forêt, dans un microclimat etc., offre des données que l'on peut extrapoler à toute la province? Je ne le sais pas. Je pense qu'il y a la raison budgétaire. Si l'université devait couper la forêt Montmorency pour des raisons strictement budgétaires, je ne vois pas pourquoi l'Université de Trois-Rivières viendrait chercher le morceau, puisqu'elle a le même problème financier. Est-ce qu'il y a d'autres raisons? C'est cela qu'il reste à évaluer. Est-ce que c'est une expérience valable sur le plan de la recherche?

M. Jolivet: Effectivement, comme ministre...

M. Talbot: Comme actif touristique, je peux vous dire que c'est extraordinaire.

M. Jolivet: ...délégué aux Forêts, l'année dernière... Une voix: ...

M. Jolivet: Oui, je peux accepter, je suis assez humble pour le laisser faire. Je veux quand même dire que j'ai participé à plusieurs discussions. Effectivement, elle est utile à la recherche. En même temps, pour répondre à propos des gens de l'Université du Québec qui viennent de ma région, Trois-Rivières, je peux vous dire qu'ils ont pris des choses à peu près semblables, un peu partout dans notre région, qui étaient en difficulté et qu'ils les ont remontées très vite malgré le fait qu'ils ont le même financier, mais ils n'ont pas les mêmes priorités. Dans ce contexte, s'il fallait que l'Université Laval laisser tomber la forêt Montmorency...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Si vous voulez conclure, M. le député.

M. Jolivet: ...je suis assuré que d'autres la prendraient. Mais ce n'est strictement pas votre but. Il faudrait absolument que Laval la conserve.

M. Talbot: ...recherche a été évaluée.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, monsieur. Je reconnais la députée de Chicoutimi pour une dernière intervention.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. J'ai apprécié votre présence, je le rappelle, et la préoccupation que vous avez touchant le développement de la région et le développement de l'université. Tout à l'heure, vous vous inquiétiez du doublement qui existe dans certains programmes dans les différentes universités et invoquiez la nécessité de procéder à une plus grande rationalisation. Vous citiez comme exemple l'existence au Québec de deux Facultés d'agronomie. Je ne vous apprendrai pas qu'au Québec, on double partout. On a une gamme complète ou quasi complète des programmes d'enseignement universitaire en anglais et en français. Quand vous dites que cela ne se passe pas comme cela ailleurs, je pense que vous le savez comme moi, ce n'est pas demain matin qu'on risque de voir cela dans les autres provinces canadiennes. Je me disais en vous écoutant que je voudrais bien voir le ministre qui déciderait de fermer quelques facultés à McGili, parce qu'on peut penser que, s'il y en a une en français et une en anglais, comme les francophones sont majoritaires, il y a comme une logique qui dit qu'il faudrait que cela ferme plutôt dans une université anglophone.

Je voudrais ajouter qu'autant je suis d'accord avec votre mémoire, autant il me semble toujours osé d'acheter sans trop de nuances des recommandations faites par un rapport dont il me semble évident que les membres ne possédaient pas l'expertise pour faire les recommandations qu'ils ont faites. Cela me paraît... Vous savez, vu de l'extérieur, quand on parte de la tâche des professeurs, du ratio maître-élèves, des frais de scolarité, quand on parle de fermeture de l'UQ et quand on essaie de faire cela de l'extérieur, c'est un peu comme si les gens qui sont... C'est comme si, moi, qui suis dans le réseau de l'éducation, j'allais décider ce qui est bon ou sain pour les entreprises. Je me faisais la réflexion que c'est quasiment faire appel à la méconnaissance des gens sur certains dossiers pour laisser parler leur coeur là-dessus...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Si vous voulez conclure, madame.

Mme Blackburn: ...à savoir si les recommandations de sages étaient vraiment sages. La plupart des recommandations que l'on retrouve là-dedans étaient le résultat de conversations de salon où, après un bon repas bien arrosé avec le scotch au salon, on réglait le sort du monde, y compris de toutes les institutions, et cela nous revenait. Mais personne ne nous appelait des sages dans le tempsl

Alors, je conclus là-dessus. Le député de Laviolette a lancé tout à l'heure ce qui m'a semblé être une invitation. Je pense qu'effectivement la forêt Montmorency... Vous savez, quand on s'est donné des équipements, avant de les bousiller, avant de décider qu'ils ne sont plus adéquats, il faut y regarder à deux fois, parce que cela coûte beaucoup plus cher de reconstruire. Comme je vous sais préoccupés par toutes ces questions, j'endosse l'invitation qui nous était faite par le député de Laviolette. Messieurs, au nom de ma formation politique, je vous remercie de votre contribution aux travaux de cette commission.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, madame. Je reconnais maintenant le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.

M. Ryan: M. le Président, comme à cette heure avancée les choses claires se disent brièvement, je vous remercie cordialement. Je vous remercie cordialement et nous prenons bonne note de tout ce que vous nous avez dit. Nous allons l'étudier attentivement. Cela s'inscrit dans le dossier général et je pense bien que les points sur lesquels votre présentation était plus solidement étayée vont être retenus. Les autres, qui reposaient sur une information plus incomplète, vont être vérifiés soigneusement, mais soyez sûrs qu'on apprécie la rencontre qu'on a eue avec vous et qu'on partage votre intérêt pour le développement de la région de Québec, en particulier par la vigueur de son université. Merci beaucoup.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le ministre. Merci, messieurs, de votre présence ici. La commission parlementaire de l'éducation ajourne ses travaux à demain matin, 10 heures, alors qu'elle accueillera l'Université Concordia.

(Fin de la séance à 22 h 27)

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