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(Dix heures dix minutes)
Le Président (M. Parent, Sauvé): La commission
parlementaire de l'éducation, dans le cadre du mandat qui lui a
été confié par l'Assemblée nationale,
procède actuellement à une consultation générale
dans le but d'étudier les orientations et le cadre de financement du
réseau universitaire québécois pour l'année
1987-1988 et pour les années ultérieures.
Avant de débuter ces auditions, pouvez-vous nous dire, M. le
secrétaire, s'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Non, M. le Président.
Le Président (M. Parent, Sauvé): S'il n'y a pas de
remplacements, la commission va débuter immédiatement ses
travaux. Ce matin, la commission accueille l'Université Concordia. Par
la suite, la commission accueillera l'Association des étudiants et
étudiantes de l'Université Concordia Inc., ainsi que
l'Association des professeurs à temps partiel de l'Université
Concordia. À 13 heures, la commission suspendra ses travaux pour les
reprendre à 15 heures avec d'autres invités.
Messieurs les représentants de l'Université Concordia,
nous vous souhaitons la bienvenue et vous remercions d'avoir répondu
à l'invitation de la commission de l'éducation.
La commission a prévu pour vous entendre une période de
temps qui devrait se terminer vers 11 h 30. La première partie sera
consacrée à l'exposé de votre sujet, à la lecture
ou à la synthèse de votre mémoire, comme vous le voudrez,
et le reste du temps sera réparti entre les deux formations politiques
à part égale pour un échange entre les membres de la
commission et les personnes qui vous accompagnent.
M. Kenniff, qui êtes le représentant et le porte-parole, je
vous demanderais de nous présenter les gens qui vous accompagnent et
ensuite je donnerai la parole au député de Laviolette qui vient
de la demander.
M. Kenniff (Patrick): Merci, M. le Président. À ma
gauche, le vice-recteur aux affaires académiques, M. Francis Whyte,
à ma droite, le vice-recteur aux services, M. Charles
Giguère.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Nous vous
souhaitons la bienvenue.
M. le député de Laviolette.
M. Jolivet: Compte tenu que vous venez de parler de l'heure, je
sais que nous recevrons trois organismes de 10 heures à 13 heures.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui.
M. Jolivet: Nous n'aurions pas d'objection à
dépasser 13 heures dans la mesure où on accorderait un peu plus
de temps, dans la largesse que vous avez d'ailleurs, à
l'Université Concordia parce que une heure et vingt minutes, c'est
serré.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Si j'ai
parlé de une heure et vingt minutes, c'est que, avant de débuter,
j'ai rencontré le porte-parole de l'Université Concordia qui m'a
dit qu'il ne lirait pas son mémoire, mais qu'il en ferait un bref
résumé. Naturellement, s'il manque 10 ou 15 minutes, je pense
bien que, pour aller chercher le renseignement pertinent et la bonne
information, on ne se limitera pas à une règle tellement rigide.
Je dois rappeler aux membres de cette commission que nous avons des
échéanciers à respecter et que, la nature humaine
étant ce qu'elle est, il vaut mieux que les membres de cette commission
soient en bonne santé et en bonne condition physique et mentale s'ils
veulent continuer leurs travaux jusqu'au 14 octobre prochain.
Sur ce, monsieur le porte-parole de l'Université Concordia, nous
vous écoutons.
Université Concordia
M. Kenniff: Merci, M. le Président. J'essaierai de
respecter les consignes de synthèse. Vous avez reçu le
mémoire de l'université. Je n'ai pas l'intention de vous en faire
la lecture, mais plutôt d'en faire un bref résumé, en
ajoutant un certain nombre de commentaires au passage.
La semaine dernière, au début de vos travaux, vous avez eu
l'occasion d'entendre la Conférence des recteurs et le Conseil des
universités qui vous ont, je pense, démontré dans quelle
situation de sous-financement se trouve le réseau universitaire
québécois par rapport aux autres provinces canadiennes, notamment
l'Ontario où la commission Bovey,
il y a un peu plus d'un an, avait pourtant identifié cette
province comme étant la moins généreuse parmi les
provinces du Canada.
Vous allez entendre aujourd'hui une présentation de
l'Université Concordia qui vient ici pour vous exposer que, dans ce
paysage plutôt triste qui est celui du financement des universités
québécoises, l'Université Concordia constitue l'arbre le
plus dégarni.
Les cinq dernières années ont été
marquées par des compressions, des prélèvements et des
modifications annuelles des règles budgétaires souvent en cours
d'exercice, parfois même après la fin de l'exercice, autant de
mesures et de politiques antiplanification et anticoncertation. On nous a
invités, par un certain nombre de politiques, à
privilégier le court terme et le calcul comptable. Or, notre
université a toujours refusé de sacrifier ses objectifs
pédagogiques à des considérations comptables, ses
objectifs à long terme à des politiques à courte vue, la
qualité de la formation à la course aux clientèles. Ainsi,
nous avons payé le prix d'être restés fidèles
à l'une de nos missions d'origine, c'est-à-dire de favoriser les
études à temps partiel sans céder à la tentation de
multiplier les programmes courts.
M. le Président, dans notre mémoire, nous avons
consacré une vingtaine de pages à un thème qui, je pense,
transcende le cas particulier de l'Université Concordia, c'est le
thème de l'importance de l'ensemble du réseau universitaire pour
la société québécoise. Je pense qu'il est facile
à démontrer que les universités contribuent sur plusieurs
plans, non seulement sur le plan économique, mais sur le plan culturel
et sur le plan social, à faire du Québec une
société développée. C'est à nos risques et
périls qu'on sacrifierait ce réseau, qu'on sacrifierait les
objectifs de ce réseau pour d'autres politiques qui sont à court
terme. Je pense que les dépenses qui sont effectuées dans le
réseau universitaire constituent davantage des investissements. Nous
avons cherché à démontrer comment cela est vrai et
indiqué que nous appuyons les recommandations du Conseil des
universités et celles de la Conférence des recteurs voulant que
le niveau général de ressources des universités soit
augmenté de différentes façons. Et il appartient au
gouvernement de déterminer, vu qu'il est le principal bailleur de fonds
des universités à l'heure actuelle, comment il entend
procéder à l'augmentation de cette enveloppe de ressources.
Cela étant dit, après avoir consacré cette partie
importante de notre mémoire è indiquer que le gouvernement se
doit, dans l'établissement de ses priorités d'ordre
général, de considérer le réseau universitaire
comme une priorité très importante, nous avons pensé
à examiner la situation particulière de l'Université
Concordia, d'abord, sa vocation d'université urbaine issue en 1974 de la
fusion de deux institutions beaucoup plus anciennes, l'Université Sir
George Williams et le Collège Loyola, université qui, à
ses débuts, était essentiellement une institution d'enseignement
au 1er cycle, mais qui avait tout de même également des programmes
de maîtrise et de doctorat, et de voir comment depuis douze ans
l'université s'est développée sur les trois plans de la
qualité de l'enseignement, de la recherche et du service â la
communauté. Je pense qu'avec une population étudiante de plus de
26 000, avec un éventail de programmes de 1er, de 2e et de 3e cycles,
nous avons une université dans tous les sens du terme.
En plus des informations qui sont fournies dans le mémoire et qui
tracent l'évolution de l'université sur ces trois plans, je
voudrais ajouter à votre intention, ce matin, un certain nombre de
renseignements qui sont apparus peut-être un peu plus récemment et
qui ne sont pas contenus dans le mémoire. Les étudiants de
l'Université de Montréal ont effectué un sondage sur la
perception qu'avaient les étudiants de la qualité de la formation
qu'ils recevaient dans nos universités. Alors que les manchettes
faisaient état du fait que l'Université McGill arrivait au
premier rang dans l'appréciation par les étudiants de la
qualité de l'enseignement qu'ils recevaient dans cet
établissement, il importe de souligner que l'Université Concordia
était au second rang, à 0,7 % de l'Université McGill. Je
pense que, malgré toutes les difficultés de financement et les
ressources que nous n'avons pas eues au cours des ans, cela indique que nous
sommes fidèles à ce que plusieurs disent de nous,
c'est-à-dire que nous avons fait plus avec beaucoup moins.
Depuis sa fondation, en 1974, l'Université Concordia a toujours
occupé le premier rang des universités québécoises
pour le taux de diplomation par rapport au nombre de professeurs
réguliers. Cette statistique est intéressante. Nous n'avons pas
de statistiques précises à l'heure actuelle sur le taux d'abandon
des étudiants. Je sais que c'est une question qui préoccupe les
membres de la commission, mais le fait que nous soyons au premier rang pour le
taux de la diplomation par rapport au nombre de professeurs réguliers
nous indique tout de même que le taux d'abandon demeure relativement
faible par rapport à d'autres établissements du
Québec.
Le troisième point sur la situation présente de Concordia:
en dépit des prophéties de malheur de la fin des années
soixante-dix, nos inscriptions ont continué de progresser tout au cours
des années quatre-vingt, c'est-à-dire de 7,7 % de 1981 à
1985-
1986. Pour ceux qui pensent que l'Université Concordia est
toujours une institution d'enseignement de 1er cycle depuis sa fondation, en
1974, le nombre d'inscriptions aux 2e et 3e cycles a progressé de 47
%.
Nous avons également développé la recherche, comme
nous l'indiquons dans le mémoire. Depuis notre fondation, on a
indiqué que les subventions de recherche de nos professeurs ont
passé de 1 300 000 $ en 1974-1975 à 8 800 000 $ en 1985-1986, ce
qui est une augmentation considérable. On profite de l'occasion pour
commenter la distinction qu'a voulu faire le Conseil des universités,
qui finalement est une distinction sans différence entre les
universités de recherche et les autres. L'Université Concordia a
quand même des centres d'excellence en matière de recherche. En
psychologie et en génie mécanique, par exemple, les subventions
annuelles de ces départements dépassent celles des mêmes
départements à l'Université McGill pourtant reconnue comme
la première université au Canada pour les subventions de
recherche par professeur régulier. Dans plusieurs autres
départements, comme le génie électrique, la chimie, la
biologie, les communications, la gestion et les transports, les subventions
dépassent largement la moyenne des autres universités du
Québec. Nous avons la plus forte concentration de recherche au
Québec dans le domaine des sciences appliquées, c'est 37,9 % de
notre enveloppe globale et, en sciences humaines, 20,9 % par rapport à
environ 9 % pour l'ensemble des universités du Québec.
Si on veut examiner le dossier de l'université au plan de la
recherche, on va s'apercevoir qu'on mérite le titre d'université
de recherche au même titre que d'autres institutions soeurs au
Québec.
Au plan de la présence dans !e milieu, l'Université
Concordia est une institution urbaine qui tire 91 % de sa clientèle de
la région montréalaise et est très présente dans
les domaines de la coopération entre les universités et dans le
domaine de la coopération entre les universités, d'une part, et
le secteur privé, d'autre part. Je signale -ce qui n'est pas dans le
mémoire - entre autres faits, que l'Université Concardia
était en 1983 l'instigatrice de la formation du forum
entreprises-universités qui réunit à l'échelle
canadienne les recteurs d'université et les chefs de direction de
plusieurs grandes sociétés.
Mon collègue, le vice-recteur Charles Giguère, a
été le premier directeur général du Centre de
recherche informatique de Montréal qui est un consortium composé
des quatre universités montréalaises et d'un certain nombre de
grandes sociétés et qui oeuvre dans le domaine de la recherche en
informatique. Les exemples sont multiples où nous avons collaboré
avec d'autres universités au plan de la recherche et, également,
au plan des programmes de 2e et 3e cycles. Évidemment, nous faisons
partie du groupe des universités montréalaises qui ont un
doctorat conjoint en administration. Nous sommes en train de mettre sur pied un
doctorat conjoint en communications et, fait unique à signaler au
Québec, nous avons tout récemment... Nous avions depuis toujours
un doctorat en religion et, quand l'Université du Québec à
Montréal a voulu créer un tel doctorat également, nous
avons offert d'ouvrir notre programme et d'en faire un programme conjoint avec
l'UQAM pour éviter la multiplication de ce genre de programme dans la
région montréalaise. Encore une fois, on peut dire que notre
dossier, dans ce domaine, est très positif.
Le mémoire continue à partir de la page 29 avec une partie
beaucoup plus sombre, qui traite de la vocation menacée de
l'Université Concordia essentiellement par, faut-il l'admettre,
l'insuffisance des ressources.
Depuis sa fondation en 1974, l'Université Concordia a souffert
d'un problème constant, chronique et structurel de sous-financement. Il
est admis dans toutes les études qui ont été
menées, tantôt par le ministère, tantôt par les
universités elles-mêmes, que l'Université Concordia se
trouvait en queue de peloton par rapport aux universités du
Québec. Que l'on modifie les méthodes de calcul, qu'on raffine
les paramètres et les variables parmi ce groupe d'universités
dont le financement est en deçà de la moyenne au Québec,
l'Université Concordia est toujours sur la liste. La liste peut changer
selon les méthodes de calcul, mais il y a une constante, c'est que
Concordia se trouve toujours sur. la liste.
Je pense que les raisons sont indiquées ou sont tracées,
du moins, dans le mémoire. On indique, à partir d'un certain
nombre d'études menées tantôt par le ministère,
tantôt par le Conseil des universités, que la situation
financière de l'Université Concordia mérite un
redressement.
On en discute depuis que je suis devenu recteur de l'université
en 1984, mais, jusqu'à maintenant, la situation ne s'est pas
améliorée. Les calculs varient sur le manque à gagner
annuel par rapport à la moyenne du Québec. Le chiffre le plus
modéré que j'ai vu était de l'ordre de 8 000 000 $. Le
chiffre le plus élevé que nous avons vu, c'était dans
l'étude du ministère de 1982 qui indiquait qu'il y avait une
différence d'au-delà de 20 000 000 $ sur le plan du financement
et cela répété sur une base annuelle.
Je dois souligner aux membres de la commission que chaque année
de retard à apporter un correctif à la situation de
l'Université Concordia constitue une perte qui ne sera jamais
récupérée. Si on veut
regarder d'autres indicateurs et d'autres données, je pense qu'on
peut noter que, par rapport aux universités du Québec, entre
1980-1981 et 1984-1985, Concordia a eu le taux de croissance des
dépenses le plus faible du réseau, c'est-à-dire 24 % au
cours de ces années, mais aussi le taux de croissance des revenus le
plus faible, à peine 16 %.
Ce qui est beaucoup plus significatif, c'est que l'écart entre le
taux d'augmentation des revenus et celui des dépenses était le
plus fort du réseau, 8 % de différence. En d'autres termes, la
courbe des revenus est demeurée relativement horizontale, la courbe des
dépenses a augmenté et le fossé s'est creusé entre
les deux et cela, malgré tous les efforts que nous avons menés
pour contenir les dépenses et malgré le fait que
l'université jouit d'une réputation bien méritée
d'être une institution, comme j'ai dit tout à l'heure, qui
administre bien avec très peu de ressources.
Je vous donne quelques statistiques qui ne sont pas contenues dans le
mémoire. J'ai des données depuis 1976 là-dessus; elles
sont à peu près semblables. Le nombre de professeurs
équivalence temps complet par rapport à chaque groupe de 1000
étudiants équivalence temps complet à l'Université
Concordia en 1982-1983 était de 44,7, alors que la moyenne du
Québec était de 62,3. Pour le personnel non enseignant - toujours
par rapport à chaque groupe de 1000 étudiants équivalence
temps complet - 77 à l'Université Concordia, 105 pour l'ensemble
du Québec. Alors, quand on parle de contenir et de diminuer nos
ressources, on part déjà d'une position qui est nettement en
deçà de la moyenne au Québec, tant pour le personnel
enseignant que pour le personnel non enseignant.
Si on poursuit dans le mémoire, une question très
importante que nous avons soulevée était sur te plan des
ressources matérielles également - j'ai parlé des
ressources humaines - et notamment de l'espace. L'an dernier, par rapport aux
normes établies par le ministère de l'Enseignement
supérieur, l'Université
Concordia avait un manque de 17 000 mètres carrés net
d'espace par rapport à ce qu'elle aurait dû avoir si les normes du
gouvernement étaient respectées. L'université est
éparpillée dans 71 locaux différents et cela peut donner
une idée de ce que l'on appelle à l'Université du
Québec l'éparpillement pavillonnaire. On est réparti sur
deux campus en deux noyaux séparés par sept kilomètres
l'un de l'autre et l'on doit maintenir une navette entre les deux campus pour
les étudiants et les professeurs qui doivent voyager, ce qui,
évidemment, n'est couvert par aucune subvention. (10 h 30)
Sur la question des espaces, on a souvent demandé au gouvernement
de nous permettre de louer des espaces additionnels jusqu'à la norme
autorisée par le gouvernement du Québec, sans dépasser la
norme, et que le gouvernement finance à 100 %. Depuis quelques
années, le gouvernement ne finance qu'à 80 % les nouvelles
locations à partir de sa norme, ce qui voudrait dire que l'on serait
obligé de couper davantage dans la base de financement si on voulait
tout simplement avoir ce à quoi on a droit en vertu des normes
gouvernementales. C'est un facteur d'importance et je me permets d'insister
là-dessus.
Évidemment, on parle beaucoup des universités en
régions, mais je voudrais vous parler de notre université dans la
région montréalaise. Une des hypothèques très
lourdes qui pèsent sur une université dont le campus principal se
trouve au centre-ville de Montréal, c'est le coût des locations.
On ne tient pas compte dans les calculs du gouvernement et dans les normes des
coûts additionnels causés par la nécessité de louer
des locaux au centre-ville de Montréal. Et comme l'Université
Concordia a la proportion la plus élevée parmi les
universités québécoises de locaux loués,
évidemment cela peut être beaucoup plus lourd sur nous que sur
d'autres.
Je pourrais ajouter d'autres éléments sur la question des
espaces. Je mentionne tout simplement qu'à l'heure actuelle, à la
bibliothèque de l'Université Concordia, les espaces sont en
deçà de la norme gouvernementale de 33 %. Mais, même
lorsque nous aurons réalisé les deux projets de construction de
bibliothèques qui sont présentement autorisés, nous serons
toujours 5 % sous la norme. Nous avons l'honneur d'être la seule
université, je pense, au Canada, dont les rayons de bibliothèque
à l'étage supérieur sont suspendus au plafond, parce que
le plancher ne peut pas supporter le poids des livres. On dit souvent, chez
nous, que si tous les professeurs et les étudiants rapportaient tous les
livres qui sont sortis en même temps, l'édifice
s'écroulerait. Ce sont des indications du genre de situation que nous
vivons quotidiennement.
Sur le plan des frais directs et indirects de la recherche
évoqués dans le mémoire, je me permets de résumer
cela de la façon suivante. Pour une université dont le budget de
base est aussi en deçà de la norme, il est beaucoup plus
difficile pour nous d'assumer à même notre budget de base les
coûts indirects de la recherche qui ne sont pas, par ailleurs,
financés par le gouvernement ou par un organisme subventionnaire. Donc,
les perspectives de développer la recherche sont lourdement
affectées à l'université par le manque d'espace et par le
manque de marge de manoeuvre dans le budget de base.
Nous avons également évoqué - je suis
sûr que c'est un sujet de discussion sur lequel nous allons
revenir - la situation déficitaire de l'Université Concordia qui
avait un déficit accumulé de l'ordre de 26 000 000 $ au 31 mai
1986. Ce que nous cherchons à démontrer dans le mémoire,
c'est que le déficit de l'Université Concordia résulte de
cette situation chronique et structurelle de sous-financement que vit
l'université depuis plusieurs années. Je vous demande de
considérer le déficit accumulé de l'université
comme étant une faible représentation des manques à gagner
successifs que nous avons eus depuis plusieurs années. C'est pour cette
raison que nous avons proposé au ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science, en mars dernier, un projet de
résorption du déficit accumulé que nous proposons de
nouveau devant la commission parlementaire et qui équivaudrait,
évidemment, à ce que l'université assume sur une
période de temps le capital du déficit accumulé et demande
au gouvernement d'en assumer les frais d'intérêt. Je pense que
c'est une proposition raisonnable compte tenu du fait que, pendant plusieurs
années, l'université a eu un manque à gagner annuel que je
pourrais chiffrer, si vous le voulez, mais qui est de beaucoup supérieur
au déficit accumulé actuel de l'université.
Nous avons, de notre côté, tout mis en oeuvre pour essayer
de contenir les dépenses, à part de décréter un
état général d'urgence et de demander le
congédiement de professeurs et de personnel de soutien et la fermeture
de programmes, ce qui aurait un effet extrêmement négatif sur
l'université. Une réduction de clientèle entraîne
également une réduction de subventions et nous nous engagerions
dans ce cas dans une spirale de décroissance
accélérée des subventions, ce qui menacerait l'existence
même de l'université. Mais, à part cette solution
draconienne que l'on doit écarter de prime abord, nous avons tout mis en
oeuvre, à partir d'un personnel enseignant et non enseignant
déjà nettement en deçà de la moyenne au
Québec, pour essayer de contenir les dépenses.
Cette année nous avons enlevé au-delà de 4 000 000
$ du budget des dépenses. Certaines de ces mesures sont d'une nature non
récurrente et ne pourront être répétées dans
une année ultérieure. Nous avons pensé démontrer
par là à cette commission la bonne foi de l'université et
son sérieux dans la gestion de ses affaires mais en vous indiquant que
l'université espère très fortement que cette commission
apportera et recommandera au gouvernement des solutions qui seront
adoptées et qui favoriseront le redressement d'une situation qui, dans
le cas de l'Université Concordia, a trop duré.
Les recommandations que nous faisons à la fin résument les
éléments de solution que nous trouvons un peu partout dans le
mémoire, qui consistent évidemment, ce n'est pas sorcier, en une
augmentation de l'enveloppe des revenus de l'université, d'une part, et,
d'autre part, en une solution apportée à la situation du
déficit accumulé de l'université.
Pour faire le parallèle avec d'autres institutions publiques qui
ont bénéficié d'une solution semblable l'an dernier, je
pense qu'on peut parler d'un premier problème qui est
l'hypothèque du passé, le déficit accumulé de
l'université, et d'un deuxième problème qui est celui de
l'avenir, le redressement des bases de financement. Advenant qu'il soit trop
difficile de trouver la formule magique qui redresse toutes les bases de
financement, nous avons suggéré dans notre mémoire en 1984
à cette même commission qu'un redressement ponctuel, dans le cas
de l'Université Concordia, soit apporté en attendant que la
formule magique de redressement des bases de financement soit trouvée.
Ces recommandations vont évidemment de pair avec une recommandation
très importante qui a été agréée, je pense,
par l'ensemble des universités, soit de mettre fin à la
période de compressions et de prélèvements qui a eu cours
pendant plusieurs années dans le réseau universitaire.
M. le Président, j'espère que je n'ai pas
été trop long. J'ai essayé de résumer et d'ajouter
des éléments d'information pour l'intelligence de la commission.
Mes collègues et moi sommes prêts à répondre
à toutes vos questions.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M.
Kenniff, nous vous remercions de la clarté de votre
exposé. Je veux vous féliciter aussi pour l'effort de
rationalisation des dépenses que vous avez fait à
l'Université Concordia. Ce n'était peut-être pas un effort
volontaire mais forcé. Vous avez quand même fait l'effort et je
pense que c'est très louable.
Nous allons maintenant débuter la période
d'échanges avec les membres de la commission. Je reconnais le ministre
de l'Enseignement supérieur et de la Science. M. le ministre.
M. Ryan: Merci, M. le Président. Je voudrais tout d'abord
m'excuser de mon retard. J'ai été retenu, pendant que M. Kenniff
faisait le résumé du mémoire de l'Université
Concordia, à une réunion d'un comité ministériel
où l'on discutait, nous en sommes toujours convaincus, de choses
très importantes. J'étais avec vous par la pensée. J'avais
bien hâte de vous rencontrer pour vous dire qu'il m'est toujours
agréable de reprendre contact avec l'Université Concordia dont
j'ai connu les origines à la fois dans sa composante Sir George Williams
et dans sa composante Loyola, deux institutions pour lesquelles j'ai eu
très tôt beaucoup de sympathie et avec lesquelles j'ai eu des
relations amicales pendant un nombre d'années que je n'ose point
identifier de crainte de vous faire peur.
L'Université Concordia, surtout dans sa composante Sir George
Williams, qui a été la composante principale, a joué un
rôle énorme dans le développement de l'éducation des
adultes au Québec. Elle a été vraiment un fer de lance qui
a permis de rendre les études, d'abord de niveau collégial et
ensuite de niveau universitaire, accessibles à des personnes qui
étaient obligées de travailler pour gagner leur vie. Pendant que
dans nos institutions de langue française nous nous en tenions à
des critères d'admission rigides qui parquaient des milliers de citoyens
dans des situations presque inextricables, du côté de Sir George
Williams on avait ouvert des avenues en empruntant ce qu'il y avait de mieux
à la tradition de libéralisme américain en matière
de démocratisation des études. Les résultats de cette
origine nous les trouvons aujourd'hui dans l'Université Concordia qui
est une de nos universités très importantes, où la
proportion des élèves adultes est sans doute très
élevée - je n'ai pas trouvé de chiffres là-dessus
dans le mémoire mais je pense que la proportion demeure très
élevée - et où, surtout, la flexibilité des
programmes offerts aux étudiants demeure la plus grande de toutes les
universités québécoises, à ma connaissance. Que
l'on ait réussi à servir cet idéal en même temps
qu'on ne versait pas dans la prolifération des cours de formation
courte, qu'on maintenait l'objectif d'un cheminement académique
conduisant vers la conquête d'un diplôme universitaire en bonne et
due forme, je pense que c'est une réalisation qu'il y a lieu de signaler
au début de cette rencontre.
Dans votre mémoire, M. Kenniff, vous avez souligné les
objectifs fondamentaux que nous devons avoir à l'esprit en examinant le
problème des universités. Vous avez parlé de la formation
initiale, de la formation de 2e et 3e cycle, de la formation continue, de la
recherche et aussi de service à la communauté. Je pense que ces
cinq pôles résument très bien les attentes que la
communauté doit avoir envers l'université et la perception que
celle-ci doit avoir d'elle-même et de son rôle au sein de la
société. Ces cinq points sont tout à fait acceptables en
ce qui me touche et je serai intéressé tantôt à
discuter des remarques que vous faites à propos de ces différents
points, s\ cela ne prend pas trop de temps.
Vous avez souligné des points et des secteurs dans lesquels
Concordia a atteint une excellence qui est très largement reconnue. Dans
des domaines comme le génie, l'informatique, la psychologie, la biologie
et la chimie, je pense que des réalisations remarquables sont au
crédit de Concordia et font l'envie de bien d'autres institutions; je
les souligne avec beaucoup de plaisir.
Vous êtes venus ce matin pour nous parler surtout des
problèmes de sous-financement des universités en
général et, de manière plus particulière, de
l'Université Concordia. J'ai bien remarqué les choses que vous
avez dites là-dessus, en particulier... Évidemment, on se fait
toujours un devoir de citer des propos qu'ont déjà tenus certains
membres de la commission en d'autres occasions. Il m'a été
donné personnellement de constater à maintes reprises
publiquement la situation de sous-financement qui a été faite
à l'Université Concordia par la méthode historique que
nous avons pratiquée au Québec. À quelques reprises
même le gouvernement précédent avait reconnu cette
situation, y avait apporté des correctifs partiels et a voulu apporter
un correctif plus important en 1984-1985 qui n'a pas pu se réaliser
à cause de la résistance que le projet annoncé avait
suscité dans les autres institutions et surtout à cause du fait
que le redressement que l'on voulait effectuer en faveur de Concordia, on
l'eût réalisé en aggravant le problème de
sous-financement des autres universités qui avaient également des
plaintes à formuler. Le problème est resté là et
nous l'avons aujourd'hui, avec les conséquences que vous signalez
justement sur la situation du corps professoral, sur la situation des
équipements, sur le volume des espaces dont dispose l'université
pour s'acquitter de sa mission et enfin sur le bilan même de
l'institution, lequel révèle actuellement un déficit de
plusieurs millions de dollars. Je pense que c'est de l'ordre de 17 000 000 $ si
mes souvenirs sont bons.
M. Kenniff: J'ai dit que c'est de l'ordre de 26 000 000 $
accumulés au 31 mai 1986.
M. Ryan: J'étais à 1985. Je ne sais pas quel a
été le déficit pour la dernière année.
Tout cela fait partie du dossier que la commission doit examiner. Je
voudrais peut-être vous poser quelques questions qui concernent plus
directement le problème du sous-financement parce que c'est le plus
grave. Vous dites que la charge d'enseignement, à l'Université
Concordia, serait de 17 % supérieure. Est-ce qu'elle est, dans les
autres universités du Québec... Il y a un renvoi entre
parenthèses. J'ai regardé à la fin du mémoire et je
n'ai pas trouvé. Les renvois ne sont pas dans le texte du mémoire
que j'ai eu. Est-ce que vous pourriez nous donner la source de cette
affirmation et, peut-être, nous fournir des explications
là-dessus? Cela porte évidemment sur la charge d'enseignement des
professeurs réguliers, je présume. Les chargés de cours
sont payés suivant des critères entièrement
différents. (10 h 45)
M. Kenniff: Sur la première question, l'origine de ces
renseignements, c'est la Conférence des recteurs, et je n'ai pas la page
exacte du mémoire où c'est cité. Je ne le trouve pas
à l'instant. Les citations se trouvent à la fin de chaque
section. C'est possible que la citation se trouve là. De toute
façon, c'est la Conférence des recteurs. Si vous me permettez
d'ajouter, pour M. le ministre, nous avons fait le calcul en 1985-1986 de la
charge moyenne de nos professeurs réguliers, qui s'établit
à l'heure actuelle à 5,3 cours par année,
c'est-à-dire au-delà de seize crédits. C'est pour cela que
nous sommes très à l'aise avec la recommandation du Conseil des
universités de ramener la moyenne des universités du
Québec à quatre cours par année, de le monter à
quatre cours par année. J'ai l'impression que, si, nous, on a 5,3 cours
par année, la situation ailleurs doit être différente.
M. Ryan: Je pense...
M. Kenniff: M. te ministre, je m'excuse. Votre deuxième
question, je ne l'ai pas entendue. Vous aviez une deuxième question sur
les chargés de cours?
M. Ryan: Non, c'était sur la charge d'enseignement des
professeurs réguliers. Maintenant, les données du Conseil des
universités là-dessus sont assez fragmentaires d'après ce
qu'il nous a été donné de constater en causant avec le
Conseil des universités. C'est pour cela que nous éprouvons le
besoin de pousser cette étude plus loin. Nous allons le faire
probablement de manière directe au ministère au cours des
prochaines semaines de manière à ne pas laisser s'accumuler
davantage de temps sur cette question. Nous aurons l'occasion de reprendre
contact avec vous à ce sujet. C'est un point que j'ai noté avec
beaucoup d'intérêt et qui répond à une
préoccupation qui est assez largement répandue au sein du
gouvernement et même dans d'autres milieux.
Au niveau de la formation initiale, au niveau du 1er cycle, est-ce qu'il
y a des problèmes particuliers qui se posent à
l'Université Concordia actuellement et qu'elle jugerait devoir porter
à l'attention de la commission à ce moment-ci?
M. Kenniff: Les problèmes sont considérables. Sur
la question de l'enseignement du 1er cycle, je l'ai signalé dans mes
remarques d'ouverture, nous sommes quand même assez fiers de
reconnaître que nos étudiants semblent presque aussi satisfaits de
la qualité de l'enseignement à l'Université Concordia que
les étudiants de McGill le sont de leur institution. Cependant, sur la
question des difficultés de 1er cycle, ces difficultés, je pense,
se traduisent, par exemple, par le ratio professeur-étudiants qui,
à l'Université Concordia, professeur
régulier-étudiants, est de 1-23 alors que nous avons
déploré la semaine dernière, dans cette même
commission, un ratio pour l'ensemble du Québec de 1-18 par rapport
à la moyenne canadienne de 1-16. Je pense que vous pouvez constater,
à ce moment, que l'Université Concordia contribue largement
à faire hausser ce ratio pour l'ensemble du Québec.
Cela indique évidemment que nos groupes d'étudiants sont
beaucoup plus grands. J'ai donné le chiffre tout à l'heure que
par 1000 étudiants équivalence temps complet, en 1982-1983,
dernière année à laquelle nous avons calculé ces
statistiques, nous avons 44,7 professeurs équivalence temps complet,
alors que la moyenne du Québec est de 62,3. Évidemment, cela se
reflète dans le ratio professeur-étudiants. Ce que j'essaie de
dire par là, c'est que nous avons toujours prétendu depuis la
fondation de l'université qu'il n'y avait pas suffisamment de
professeurs réguliers à Concordia par rapport à d'autres
institutions universitaires. Cela a un effet nuisible sur la qualité de
l'enseignement au 1er cycle. Deuxième problème au niveau du 1er
cycle, ce serait tes espaces. J'ai parlé d'un déficit par rapport
aux normes gouvernementales de 17 000 mètres carrés nets qui
existent à l'heure actuelle, je pense, et qui ne sera pas
éliminé tout à fait par la construction de nos projets de
bibliothèque, la question de la vétusté des
équipements de laboratoires, l'absence d'informatique et
d'équipement d'informatique. À l'heure actuelle, le nombre de
micro-ordinateurs par étudiant étant obligé de faire des
travaux sur ordinateur à l'Université Concordia, c'est de 1
à 40 alors que la norme suggérée c'est de 1 à 20.
Il y a des problèmes partout, M. le ministre.
M. Ryan: Je voudrais en venir au problème du financement.
Il y a trois points sur lesquels j'aimerais vous interroger. Il y a d'abord la
formule de financement qui a évidemment produit des résultats
inéquitables pour l'Université Concordia. Que proposez-vous pour
l'amélioration de cette formule? Quelle formule serait de nature
à donner justice à toutes les universités et aussi au
gouvernement?
M. Kenniff: M. le Président, en réponse au
ministre, vous savez comme moi qu'il y a plusieurs formules et des tentatives
de développement de formules depuis quelques années. Je ne
prétends pas avoir la formule magique ici, ce matin. Je pense quand
même qu'il y a un certain nombre de paramètres. Nous avons
toujours prétendu, sourire en coin peut-être, que, si on
appliquait à l'Université Concordia la moyenne du Québec
de la subvention par tête d'étudiant et par secteur
disciplinaire, par cycle ou sans distinction à l'égard des
cycles, une bonne partie des problèmes pour l'avenir serait
réglée. Nous avons fait un calcul dans un document que nous avons
donné au ministère, l'an dernier. Nous avons indiqué, par
exemple, pour l'année 1981-1982, que si nous avions la subvention par
étudiant qu'il y avait à l'Université de Montréal
cette même année, en appliquant ces chiffres aux secteurs
disciplinaires de l'Université Concordia, l'augmentation de notre
subvention aurait été, dans cette année, de l'ordre de 16
300 000 $. Alors, ce que nous disons c'est que, d'une part, une formule
basée sur le coût par étudiant, comme c'est le cas à
l'heure actuelle pour les clientèles additionnelles, appliquée
à l'ensemble de la population étudiante apporterait des
redressements importants.
Évidemment, il y a toute la question de la formule qui veut qu'on
finance sur la base des dépenses nettes, c'est-à-dire qu'on
défalque de la subvention gouvernementale tout ce qui est revenu
autonome; que ce soient des dons privés pour des fins de fonctionnement,
que ce soient des revenus de frais de scolarité. Comme c'est une formule
qui n'est pas en usage général dans les autres provinces
canadiennes, il faudra s'interroger sur son maintien au Québec. Par
ailleurs, la seule conclusion que je peux vous donner par rapport à la
formule actuelle, et je la donne avec beaucoup de force, c'est qu'il faut
l'éliminer. La base historique ne fait que nuire à
l'Université Concordia et, je pense, à plusieurs autres
universités du Québec. La formule historique est basée sur
une situation qui est devenue de plus en plus irréelle avec le temps et
nous souhaitons vivement qu'elle soit remplacée par une nouvelle
formule.
M. Whyte (Francis): M. le ministre, je pourrais peut-être
ajouter un autre point à cette réponse qui est, dans un sens,
vraie pour toutes les universités du Québec. Les
universités, ce sont des institutions avec des préoccupations
à long terme. Une université ne peut pas se tourner, changer
d'objectifs et changer de manière de faire du jour au lendemain. Quand
on accepte un étudiant, c'est un engagement de trois ans. Alors, quelle
que soit la nature de la formule de financement qui est éventuellement
proposée, ce qui est absolument important pour toutes les
universités, c'est que cela amène plus de stabilité de
financement dans le temps si on veut prévoir les besoins de la
société à l'avenir. Pour modifier les programmes et
orienter dans la mesure du possible la formation pour atteindre ces objectifs,
il faut qu'il y ait suffisamment de stabilisation dans le financement pour que
ce soit réalisable.
M. Ryan: Je peux vous assurer que nous avons dans nos cartons
actuellement de nombreux éléments d'une formule renouvelée
que nous vous soumettrons en temps utile, dès que nous aurons
terminé la présente étape. Je pense qu'il faut d'abord
terminer le niveau de financement des universités, ensuite on pourra
examiner les autres problèmes en collaboration avec les institutions
concernées et les autres milieux qui peuvent avoir quelque chose
à dire. Soyez assurés que le travail se poursuit au
ministère et que nous avons déjà beaucoup de
préparation qui est déjà faite à cet
égard.
Vous avez parlé du déficit de l'Université
Concordia. Je crois qu'il faut en dire un mot. Plusieurs institutions sont
venues témoigner devant la commission pour demander que les
déficits accumulés par les établissements soient pris en
charge par ces derniers et non pas par la collectivité. Dans votre
mémoire, vous demandez que ces déficits soient
étudiés sur une base de cas particuliers, que chaque cas soit
examiné à son mérite et que, le où le
déficit aurait été causé par des politiques de
sous-financement gouvernemental, une partie devrait être assumée
par le gouvernement. Est-ce que vous pourriez nous expliquer davantage votre
position sur ce sujet?
M. Kenniff: C'est une question très complexe. Nous n'avons
jamais voulu présenter une position qui visait à ce que le
gouvernement assume les déficits de tous les établissements,
quelles qu'en furent les causes.
Je pense que la position de l'Université Concordia, c'est
plutôt d'examiner chaque cas particulier. Nous avons toujours
affirmé que nous étions prêts è défendre
notre dossier au mérite. Prenons les calculs qui ont été
effectués par différents organismes. Le Conseil des
universités et le ministère ont des chiffres qui vont entre 8 000
000 $ et 20 000 000 $ de manque à gagner annuel pour une année de
base qui était 1981-1982. Ce chiffre a sans doute augmenté depuis
ces dernières années; il était inférieur pour les
années précédentes. Je ne prétends pas avoir des
chiffres scientifiques à un cent près, mais si on calcule
grossièrement le manque à gagner annuel de l'Université
Concordia depuis sa fondation, en prenant les chiffres les plus conservateurs:
8 X 12 font 96 000 000 $ de déficit accumulé de
l'université; cela est l'argent que l'Université Concordia n'a
pas eu parce qu'aucun gouvernement n'a voulu changer la formule. De cela,
j'enlève 26 000 000 $ qui est le déficit accumulé, il y a
toujours un manque de 70 000 000 $. De ces 70 000 000 $, je vais enlever les
ajustements ponctuels qui ont été réalisés en 1979,
en 1981 et en 1982. Là-dessus, je projette un montant de
6 000 000 $, ce serait un montant récurrent d'environ 30 000 000
$, il me reste toujours 40 000 000 $, j'enlève 5 000 000 $ pour les
compressions qu'on aurait dû faire si on avait eu des subventions plus
élevées, et j'arrive quand même à environ 30 000 000
$ que l'Université Concordia n'aurait pas eus au 31 mai 1986 parce
qu'elle n'est pas financée au même niveau que les autres.
M. le ministre, dans l'ensemble, nous prétendons que le
déficit accumulé de l'Université Concordia, c'est la
pointe de l'iceberg du sous-financement que nous avons vécu depuis douze
ans. Là-dedans, il y a des éléments d'information que je
voudrais ajouter pour l'intelligence de la commission sur des circonstances
particulières qui ont fait que des déficits ont été
créés vraiment hors de notre capacité de les
contrôler.
En 1983-1984, dans les règles budgétaires publiées
par le ministère, on avait proposé de modifier la base historique
de financement. Nous avons établi notre budget en conséquence.
Nous avons traversé l'année financière avec les
données qui étaient dans les règles budgétaires.
Or, dans les règles budgétaires révisées et
publiées à la fin de l'année, le gouvernement a
décidé d'abandonner l'ajustement de la base créant ainsi
un déficit de 4 000 000 $ d'un coup sec.
En 1984-1985, nous avons appliqué la sentence arbitrale qui a
décrété les salaires des professeurs dans leur
première convention collective. Loin de moi le fait d'argumenter que tes
professeurs sont trop payés, un rattrapage important a été
effectué par une sentence arbitrale, comme le Code du travail le
prévoit, qui permet, dans une première convention collective, que
les salaires soient établis par sentence arbitrale. Le syndicat a
prétendu, à ce moment-là, devant l'arbitre que la sentence
arbitrale serait exécutoire et que le gouvernement financerait le
montant quel qu'il soit. La sentence arbitrale a été
donnée et le gouvernement n'a pas financé. Par le fait
même, nous avons écopé, parce que c'était une
sentence arbitrale, à l'impact des lois 70, 105 et 111. C'était
un trou récurrent dans le budget de l'université d'au-delà
de 4 000 000 $. Comme j'ai dit, je ne prétends pas que c'était
excessif à l'endroit des professeurs, je pense qu'ils ont eu justice
à ce moment; mais, pour l'université, cela a été
une situation totalement hors de notre volonté.
On peut multiplier les exemples comme cela, M. le ministre, pour vous
indiquer qu'on a fait une gestion saine. Les chiffres démontrent qu'on a
beaucoup moins de ressources que d'autres universités. Le déficit
accumulé n'est que le reflet du sous-financement structurel et
chronique. Ce n'est que justice que de demander au gouvernement de
considérer la question de résorber le déficit en apportant
son aide.
(11 heures)
M. Ryan: Seulement un dernier point, il y en aurait beaucoup
d'autres évidemment, mais le temps nous fait défaut. Parmi les
sources possibles d'un redressement financier, vous parlez d'une hausse des
frais de scolarité. Vous dites que vous seriez favorables à une
hausse des frais de scolarité qui viserait à porter le niveau des
revenus tirés de cette source vers le niveau de la moyenne canadienne.
Là, vous énoncez un certain nombre de conditions auxquelles vous
seriez disposé à consentir à une mesure comme
celle-là. Pourriez-vous préciser votre position
là-dessus?
M. Kenniff: Sur la question des frais de scolarité, je
pense que le point essentiel qu'on voudrait faire valoir, c'est que
l'université demande, comme l'ensemble des universités du
Québec, une augmentation de l'enveloppe de ses ressources. Cette
enveloppe, à l'heure actuelle, est composée à 85 % et plus
de subventions gouvernementales, à 10 %, environ, de frais de
scolarité et d'autres sources.
Évidemment, la question de l'augmentation des frais de
scolarité, c'est une question qui doit être finalement
étudiée et décidée par le gouvernement, parce que
c'est lui qui a imposé le gel des frais de scolarité, il y a tout
près de vingt ans. Ce que nous disons, c'est que nous ne nous opposons
pas à une hausse de frais de scolarité pourvu,
premièrement, que cette hausse ne serve pas à réduire
davantage l'enveloppe de subventions et donc de faire un bilan zéro pour
les universités en cause. Deuxièmement - c'est très
important, parce qu'il y a un objectif d'accessibilité comme vous avez
dit vous-même, M. le ministre; notre université a toujours
été très attachée à l'objectif
d'accessibilité et voudrait le demeurer - c'est qu'il faut que l'aide
aux étudiants soit améliorée de façon substantielle
pour que toute personne qui a les compétences voulues pour faire des
études universitaires ne soit pas privée de faire ses
études.
Je pense que c'est le coeur de notre position. Mais nous ne nous
concentrons pas sur les frais de scolarité comme unique source de
revenu. Ce que nous disons, c'est que l'enveloppe globale des ressources doit
augmenter et je pense qu'à ce moment il faudrait que le gouvernement
considère quel sera le dosage de différentes sources de
revenu.
Si vous me permettez une dernière remarque, comme j'ai dit tout
à l'heure, c'est important de changer cette formule basée sur les
dépenses nettes qui fait que, si on augmente d'un côté, on
diminue de l'autre, parce que le résultat de cela, c'est un bilan
zéro.
Je pense que c'est une autre formule
de calcul, quitte à donner aux universités une certaine
balise pour les frais de scolarité et les frais afférents. Cela
permettra aux universités d'avoir plus de marge de manoeuvre et de
répondre à l'objectif d'autonomie que vous avez vous-même
énoncé, M. le ministre, dans vos remarques d'ouverture la semaine
dernière.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Kenniff.
Je reconnais maintenant le porte-parole officiel de l'Opposition en
matière d'enseignement supérieure et de sciences, la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président, M. le recteur et
messieurs. Cela me fait plaisir de vous voir ici à la commission
parlementaire; je ne doutais pas de votre venue, d'ailleurs. Lorsqu'on parle de
sous-financement dans les universités, je dois dire qu'on cite souvent
le cas de l'Université Concordia. J'allais dire, même si ce n'est
pas public, que ça faisait l'unanimité chez vos collègues
des autres universités.
Vous nous avez rappelé un certain nombre d'éléments
qui nous permettraient d'assurer à la fois la qualité et
l'accessibilité du réseau univesitaire du Québec en
insistant sur la nécessité de maintenir un haut niveau
d'accessibilité en même temps que de qualité si on voulait
être en mesure de relever le défi des prochaines années. Je
l'interprète peut-être de façon un peu libre, mais
ça m'a semblé être ça.
Il y a des questions sur lesquelles j'aurais aimé revenir, mais
je vais essayer d'y aller un peu par ordre, je ne veux pas dire d'importance,
mais de curiosité et peut-être que j'y reviendrai à la fin.
Vous abordez toute la question de la formation initiale et de la formation
générale. Je trouve que c'est quelque chose d'important quand on
pense à certaines interventions des étudiants. J'aurais voulu
avoir un peu d'information là-dessus. Vous parlez un peu d'encadrement.
On comprend que vous avez des clientèles diversifiées, donc
jeunes et adultes. Vous parlez de charge d'enseignement, et on y reviendra. Si
vous permettez, plutôt que de relire votre mémoire par mes
lunettes, je vais plutôt essayer de passer directement aux questions pour
voir un peu plus vos réactions sur certaines de ces questions.
On va revenir d'abord à l'encadrement. Je voudrais savoir comment
vos clientèles se partagent - parce qu'on n'a pas de données
là-dessus - entre jeunes et adultes, à temps partiel et à
temps complet.
M. Kenniff: Pour l'année universitaire 1984-1985, nous
avons, au 1er cycle, 52,5 % dans le groupe d'âge 20-24 ans; 18,4 % dans
le groupe de 25 à 29 ans, 8,9 % de 30 à 34 ans et 5,7 % de 35
à 39 ans et les autres... Bon!
Mme Blackburn: Alors donc, cela veut dire environ 48 % de votre
clientèle qui est considérée comme étant une
clientèle adulte.
M. Kenniff: Oui.
Mme Blackburn: Selon les critères que...
M. Kenniff: Si vous me le permettez, comme M. le ministre l'a
souligné, je dirai que nous avons des critères relativement
souples d'admission pour un étudiant que l'on qualifie d'adulte et la
définition d'adulte, c'est un étudiant qui a quitté ses
études depuis plus de 18 mois. Alors c'est relativement souple. Donc, il
y a des jeunes qui nous reviennent à l'état adulte, si vous
voulez. Le partage entre temps plein et temps partiel, c'est que, pour la
première fois en 1985-1986, nous avons eu un peu plus de 50 %
d'étudiants à temps plein. Avant, cela a toujours
été une majorité d'étudiants à temps
partiel. Donc, il y a à peu près 14 000 étudiants à
temps complet maintenant et environ 12 000 à temps partiel. Enfin...
Mme Blackburn: J'ai cru lire un peu entre les lignes de votre
mémoire que l'encadrement assuré aux étudiants à
temps partiel connaissait certaines déficiences, à cause de la
variété de vos clientèles. Vous l'abordez en page... Je
vais essayer de la retrouver. L'encadrement, en page 9 de votre mémoire.
C'est bref, mais j'aurais voulu mieux comprendre. Vous parlez d'encadrement
satisfaisant mais de clientèle diversifiée, et ensuite cela
revient. À votre avis, est-ce un encadrement satisfaisant et quelle que
soit la clientèle à temps plein ou à temps partiel?
J'aimerais que vous m'en parliez brièvement.
M. Kenniff: M. le Président, pour Mme la
députée de Chicoutimi, je dois dire qu'avec les statistiques que
l'on a fournies à la commission sur le nombre de professeurs et le
nombre d'employés de soutien que nous avons à l'université
on peut qualifier l'encadrement de façon générale de plus
léger par rapport à d'autres universités.
Sur la question de la charge d'enseignement au 1er cycle,
évidemment, nous avons une proportion très élevée
de chargés de cours. Il y a presque autant de chargés de cours
qu'il y a de professeurs réguliers, soit environ 700 dans les deux
catégories. Donc, une charge d'enseignement qui dépasse le tiers
de tous les cours donnés à l'université par des
chargés de cours. Quant à ce groupe de chargés de cours,
évidemment, on peut prétendre qu'ils sont moins disponibles pour
les étudiants que ne serait un professeur régulier qui
séjourne sur le campus cinq jours par semaine; cependant, c'est quand
même un groupe très diversifié et très riche.
Par
exemple, il y a beaucoup de chargés de cours à la
Faculté des beaux-arts qui sont des artistes en exercice, si vous
voulez; à la Faculté d'administration, il y a beaucoup de gens
tirés du milieu des affaires, du secteur privé, qui enseignent un
ou deux cours et qui apportent la richesse de leur expérience dans le
milieu des affaires à l'enseignement universitaire. Il y en a beaucoup
moins dans les domaines scientifiques, sciences pures, sciences
appliquées. À la Faculté des arts et des sciences, dans
l'enseignement aux études françaises, en anglais, par exemple, il
y a un grand nombre de chargés de cours ou des étudiants de 2e et
3e cycles ou des professeurs qui enseignent dans un autre milieu. Mais, ce que
je voulais vous dire, c'est que les chargés de cours apportent une
contribution importante à l'université, mais cela n'est pas le
même encadrement que celui fourni par un professeur régulier.
Mme Blackburn: Pour l'encadrement, de façon
générale, les services sont les mêmes chez vous, que l'on
soit à temps plein ou à temps partiel.
M. Kenniff: En ce qui a trait à l'administration, cela
n'est pas souligné dans notre mémoire, il y a une
intégration des programmes pédagogiques. Les étudiants
à temps partiel sont traités exactement de la même
façon que les étudiants à temps plein et, ce qui est le
plus important, l'administration est intégrée. Il n'y a pas une
administration séparée pour les étudiants à temps
partiel.
Mme Blackburn: Bien. Je voudrais revenir sur la charge
d'enseignement et peut-être un peu sur les chargés de cours. Au
sujet de la charge d'enseignement, vous nous dites - si je me souviens c'est en
page 38 -que la charge d'enseignement à Concordia serait de 17 %
supérieure à la moyenne universitaire au Québec et de 11 %
plus élevée qu'à l'université la suivant. C'est au
centre du paragraphe à la page 38. Ma question est la suivante. Vous
connaissez la proposition faite dans le rapport Gobeil, pour ne pas le nommer,
visant à augmenter de 50 % la charge d'enseignement des professeurs.
Chez vous elle est déjà plus élevée. Cela peut-il
nous amener à conclure qu'avec une charge d'enseignement plus
élevée vous réussissez à assurer un enseignement de
qualité comparable? C'est difficilement évaluable. Le
modèle chez vous pourrait, somme toute, sans pénaliser la
qualité de l'enseignement dans les universités, s'appliquer un
peu partout? Vous dites que vous avez 17 %... C'est un peu plus que cela que
recommande le rapport Gobeil, mais quand même!
M. Kenniff: Ce que le rapport Gobeil recommande, c'est
d'augmenter la charge d'enseignement de 50 % dans l'ensemble. Si la moyenne est
actuellement inférieure à 4, peut-être que 5,3, comme ce
l'était chez nous l'an dernier, représenterait à peu
près 50 %. Mais, là-dessus, je ne pense pas qu'on puisse
considérer que l'Université Concordia constitue
nécessairement un modèle idéal sur ce plan. Malgré
le fait qu'on ait multiplié par huit les subventions de recherche avec
le même personnel depuis 1974, il reste qu'une charge d'enseignement
supérieur a pour effet de diminuer le potentiel - je ne dis pas la
quantité - de développement de la recherche. Chez nous, la lourde
charge d'enseignement a été un facteur.
Deuxièmement, ce sont les espaces qui manquent pour
établir des laboratoires de recherche. Nous avons un Centre
d'études sur le bâtiment à la Faculté de
génie qui est logé dans des locaux loués avec de
l'équipement lourd de recherche. Pensez à ce que cela signifie
quand on vient pour renégocier un bail avec le propriétaire qui
dit: On va augmenter votre loyer; sinon, enlevez votre équipement. Ce
sont des problèmes extrêmement difficiles qu'on a à vivre
présentement.
À propos de la charge d'enseignement, d'un côté,
c'est normal pour nos professeurs de souhaiter une certaine parité avec
l'ensemble du réseau du Québec. Nos professeurs souhaitent
également avoir la possibilité de faire davantage de recherche.
Je pense que c'est légitime qu'ils aspirent à cela. À
l'heure actuelle, nous avons établi dans la convention collective qui
est en voie de renégociation - c'est pour cela que je surveille mes
remarques à ce stade-ci - que la charge de base du professeur est de six
cours par année et que, pour avoir une charge de quatre cours par
année, le professeur doit démontrer qu'il (ou elle) est productif
en recherche, et cette productivité est évaluée par le
département. Il y a eu un certain nombre de griefs sur la question et on
a été assez rigide sur l'évaluation de la
productivité qui doit être clairement démontrée. En
ce qui nous concerne, je pense que c'est un modèle qui permet
d'évaluer la productivité du professeur en recherche et de le
récompenser dans sa charge d'enseignement, dans une certaine mesure,
pour favoriser un développement accru de la recherche. Est-ce que c'est
le modèle idéal pour tout le monde? Cela, il faudrait y voir. Je
ne veux pas porter de jugement sur les conventions collectives des autres
universités.
Mme Blackburn: Vous ne nous avez pas parlé -
peut-être l'avez-vous fait - du vieillissement du corps professoral chez
vous. J'imagine que vous êtes moins affectés en raison de la
jeunesse réelle de votre université. J'aimerais un peu parler
des
chargés de cours. Il y a de plus en plus de chargés de
cours et, dans de plus en plus d'universités, on estime que 50 % de
l'enseignement serait donné par des chargés de cours. Par
ailleurs, il y a à la fois des étudiants et des professeurs et
également des administrateurs qui nous ont dit qu'il y avait un rapport
étroit entre la recherche et la qualité de l'enseignement. On
sait que les chargés de cours, à quelques exceptions près,
ne s'adonnent pas à la recherche, soit qu'ils travaillent à
l'extérieur, soit qu'ils ne bénéficient pas des conditions
pour en faire. Dans le fond, par rapport aux informations que vous avez
données tout à l'heure, je trouve qu'il y a un certain
enrichissement à aller chercher des professeurs à
l'extérieur du réseau qui ont des expériences de travail
variées; cela peut constituer un enrichissement certain. Je pense qu'il
ne faudrait pas tomber dans le discours inverse, à savoir qu'il faudrait
complètement vider l'université de tout ce monde. Ce serait une
fort mauvaise décision. Par ailleurs, est-ce qu'on a essayé
d'établir ce qui serait un ratio d'enseignement temps plein - temps
partiel qui nous permette de protéger à la fois la qualité
et la diversité?
M. Whyte: Je pense que la réalité à laquelle
vous vous référez est effectivement une réalité
assez complexe. Comme vous l'avez indiqué, c'est un peu difficile de
donner des réponses très tranchées sur cette question. Je
pourrais répondre à la première partie de votre question.
J'ai des statistiques ici pour l'année 1982-1983 où l'âge
moyen des professeurs chercheurs du réseau universitaire
québécois était de 42,9 ans alors qu'à Concordia,
pour la même année, l'âge moyen était de 44,3 ans.
(11 h 15)
Sur la question plus générale à propos des
chargés de cours, je pense que si on regarde le phénomène
de façon extrêmement globale, donc, avec toutes les nuances qu'une
telle affirmation comprend, la prolifération des chargés de cours
représente effectivement, dans une certaine mesure, un autre indice du
sous-financement du réseau entier. Il n'y a aucun doute que le nombre de
professeurs réguliers - c'est certainement vrai à Concordia et je
ne doute pas que ce soit vrai dans d'autres universités - est
insuffisant pour maintenir des ratios professeur-étudiants normalement
considérés comme étant indicatif d'un enseignement de
qualité. Cependant, je pense qu'il faut beaucoup nuancer cette
affirmation. Premièrement, si je prends l'exemple de Concordia, la
situation est très différente d'une faculté à une
autre, alors que nous avons, en termes de nombre de personnes,
légèrement plus... On a à peu près 730 professeurs
réguliers alors qu'on a 820 chargés de cours ou professeurs
à temps partiel, et le nombre d'heures d'enseignement donné par
des chargés de cours est légèrement inférieur
à 50 %.
Cependant, dans ce bloc de chargés de cours, vous avez
effectivement une proportion de personnes qui apportent un renouvellement
à l'enseignement. Ce n'est pas nécessairement un renouvellement
par le biais de la recherche, comme c'est compris pour un professeur
régulier à l'intérieur, mais c'est un renouvellement parce
que cette personne est à l'extérieur. Elle voit des
développements dans le secteur privé au sein de sa profession,
etc. Donc, son enseignement est renouvelé, si je peux m'exprimer
ainsi.
Je pense que le lien extrêmement important qu'on veut faire entre
la recherche et la qualité de l'enseignement s'applique, de prime abord,
aux professeurs réguliers à l'intérieur de l'institution.
Pour eux, qui sont professeurs de carrière, qui enseignent
régulièrement, c'est par la recherche qu'on arrive à ce
renouvellement de l'enseignement. Les chargés de cours peuvent atteindre
cela d'autres façons. II faut cependant admettre qu'il y a un certain
nombre de chargés de cours, surtout ceux qu'on pourrait identifier comme
étant là parce que les ressources ne permettaient pas d'avoir des
professeurs réguliers à leur place, où ce renouvellement
souhaité de l'enseignement peut ne pas avoir lieu. Je dirais que la
qualité de l'enseignement, à mon avis, est protégée
à ce moment-là uniquement par le climat intellectuel qui peut
entourer l'ensemble du programme de l'étudiant. On a souvent
interprété l'affirmation que la recherche et l'enseignement sont
étroitement liés, en voulant dire que tout professeur doit faire
de la recherche de pointe. Je pense que ce n'est pas vrai, et, d'ailleurs, les
statistiques démontrent que ce n'est pas ce qui se passe.
Il est très important qu'il y ait suffisamment de recherche dans
l'institution pour que ce climat se crée, pour que les professeurs dans
les départements sentent ce renouvellement des idées et ces
questions qui se posent. Au fond, je pense que c'est cela dans les programmes
réguliers qui protège la qualité de l'enseignement.
M. Giguère (Charles): Si je pouvais ajouter qu'en 1978
j'ai eu l'occasion de faire le tour de plusieurs écoles de génie
en France. La première école qu'on a visitée était
Ponts et Chaussées. La première question qu'on pose: Quel est le
nombre de professeurs à temps plein que vous avez?Zéro. Par contre, Ponts et Chaussées est reconnue comme
étant la meilleure école d'ingénierie en France. C'est un
honneur d'être invité à enseigner à temps partiel
à Ponts et Chaussées. Donc, ce sont tous des chercheurs de
qualité, de renommée qui
viennent y enseigner.
La question des professeurs à temps partiel par rapport aux
professeurs réguliers est complexe, c'est vrai. Nous avons, par exemple,
à notre Faculté de génie informatique, le directeur de la
recherche de CAE qui est professeur à temps partiel. M. Whyte disait
qu'il est bon de les avoir, il faut les avoir mais, si on le fait parce qu'on
est obligé, c'est une tout autre question.
Mme Blackburn: Peut-être pour essayer de mieux cerner - je
vois que le temps passe et j'ai plusieurs questions - toute la question du
financement, selon des études qu'on a eues sous la main, les
coûts... J'aurais trois questions. D'abord je voudrais connaître
l'impact estimé sur votre déficit des subventions de 1986-1987,
la fraction du budget consacrée à l'administration, aux
coûts administratifs, comparativement... Je sais qu'on a tenté de
faire ces comparaisons tout en ajoutant la nuance, que tout le monde
connaît, qu'il est difficile de faire des comparaisons entre les
universités parce qu'on n'impute pas toujours les mêmes
dépenses à ces postes.
Ensuite, comment associer... Vous avez parlé tout à
l'heure des règles d'allocation des ressources qui devaient tenir compte
d'un certain nombre d'indicateurs; cela paraît dans votre mémoire.
Ce sont d'abord les niveaux d'enseignement et ce que j'appelle le poids des
programmes. On dit qu'un programme en génie coûte plus cher qu'un
doctorat en religion. J'informe le ministre, qui n'était pas là
au moment où vous l'avez dit. Je suis sûre que cela l'aurait fort
intéressé. Il y a un doctorat conjoint en religion avec l'UQAM.
On peut penser qu'il y a des cours qui coûtent plus cher. Alors, un
certain nombre d'indicateurs... Je me dis: Comment obtenir ces indicateurs pour
établir des règles d'allocation qui soient les plus
équitables possible et, à la fois, protéger l'autonomie
que vous réclamez? Pour obtenir un certain nombre d'indicateurs, il me
semble qu'il va falloir entrer un peu dans les universités.
M. Kenniff: Voilà les questions. J'essaierai de
répondre rapidement. Comme le temps file...
D'abord, concernant l'impact des mesures gouvernementales
annoncées en avril dernier, pour le déficit 1986-1987, nous
avions déposé au conseil un budget qui ramenait le déficit
à 4 800 000 $. Évidemment, vous pouvez penser que 4 800 000 $,
c'est beaucoup d'argent; c'est vrai. Par rapport au déficit de
l'exercice précédent qui était de 10 000 000 $, c'est une
opération de taille. Cependant, les mesures annoncées par le
gouvernement après le dépôt de ce budget ont fait en sorte
que, si nous n'avions pas fait autre chose, le déficit aurait
grimpé au-delà de 9 000 000 $. L'impact sur le budget de
l'Université Concordia était de l'ordre de 4 000 000 $, à
ce moment-là. Ce que nous avons fait, cela a été de
prendre la décision que ce niveau était inacceptable. Tout niveau
de déficit, dans une certaine mesure, est inacceptable, mais nous avons
cherché quand même à faire l'opération qui consiste
à ramener le déficit à son niveau projeté
initialement. Pour faire cela, nous avons, malgré nous, dû
instaurer des frais de matériel pour les étudiants. Nous avons
dû suspendre les contributions de l'employeur au régime de
retraite, ce qui est une mesure qui sera non récurrente parce que c'est
évident que ce genre de mesure n'est possible que dans le cas où,
de façon ponctuelle, il y a un surplus actuariel dans le régime
de retraite. Nous avons également coupé un certain nombre de
dépenses. Nous avons pris des décisions en ce qui concerne les
postes vacants qui vont ramener le budget à environ 1 400 000 $.
Globalement, nous avons réussi à ramener le déficit
à un niveau de 4 800 000 $ à 5 000 000 $. Ce sont des mesures
qui, dans certains cas, ne pourront se répéter. Nous avons
également adopté un plan d'option de retraite anticipée
qui a été offert aux employés de l'université et
dont plusieurs ont profité. Évidemment, cela implique des
coûts non récurrents parce qu'il faut évidemment une prime
de séparation, et cela il faut l'assumer. On aurait souhaité, si
le gouvernement voulait favoriser la diminution de l'effectif, bien que nous
soyons déjà très diminués par rapport à
d'autres, qu'il accepte de financer ce coût non récurrent, mais,
hélas non, il faut l'assumer.
Sur le déficit de cette année, de 4 900 000 $, il y a tout
de même 3 300 000 $ de frais d'intérêt sur le déficit
accumulé, pour lesquels nous ne recevrons aucune subvention. Je pense
que cela démontre qu'un effort est fait, à l'Université
Concordia, pour rétablir un semblant d'équilibre financier.
Votre deuxième question porte sur la fraction du budget qui est
attribuée aux coûts administratifs. Vous avez raison de souligner
que chaque université attribue ces coûts suivant des formules
différentes. Chez nous, nous avons essayé d'être le plus
transparents possible sur ce plan en mettant, par exemple, les salaires des
administrateurs au compte de l'administration et non pas de leur faculté
d'origine. Essentiellement, je ne pourrais pas vous donner le pourcentage de la
fraction du budget consacrée aux coûts administratifs, sauf de
dire que c'est très bas par rapport aux universités
québécoises. Nous avons eu des discussions avec les membres du
Conseil des universités sur cette question parce qu'ils ont
avancé des chiffres qui ne se sont pas révélés tout
à fait exacts,
il y a quelques mois. Disons que - pour citer un chiffre - nous avons
établi que le coût administratif se chiffrait pour l'ensemble de
l'université à environ 520 $ par étudiant
équivalent temps complet. C'est, je pense, pour 1985-1986,
En ce qui a trait au poids des programmes, c'est évident que,
depuis quelques années, le gouvernement finance les clientèles
nouvelles suivant un coût estimé par étudiant par secteur
d'étude. Il y a, je pense, neuf secteurs d'étude pour le
réseau universitaire. Quand on compare les coûts aux
données de l'Université Concordia, on se rend compte que, dans la
plupart des secteurs, on se trouve ou bien avec les coûts les plus bas,
ou bien avec les coûts qui sont en deuxième place au bas de
l'échelle. De cette façon, on arrive à établir un
certain nombre de données. En tout cas, on peut en citer si vous voulez
par rapport à la moyenne. J'en prends un seul. Dans le secteur des
sciences pures, alors que la moyenne du Québec - et ce sont des chiffres
pour 1981-1982 qui ont été utilisés par le
ministère pour établir les chiffres pour les clientèles
additionnelles - la moyenne du Québec était de 4932 $ par
étudiant équivalent temps complet, c'était 4056 $ pour
l'Université Concordia.
J'en passe. Je pourrais vous en citer. Je réitère ce que
j'ai dit au ministre tout à l'heure, c'est que, si on avait une formule
qui tenait compte des secteurs d'étude et qui était
réaliste par rapport à la moyenne actuelle du Québec, on
réglerait un grand nombre de problèmes. Je ne pense pas que cela
porte atteinte nécessairement à l'autonomie de
l'université, sauf évidemment si le gouvernement s'avisait de
dire qu'on va établir des distinctions quant au secteur par rapport au
niveau de financement. Si on disait, comme on a dit depuis quelques
années, on va financer le secteur technologique, on ne financera pas le
secteur des sciences humaines, etc., si on poussait cela â un raffinement
extrême, je pense qu'il y aurait des dangers que les politiques
gouvernementales s'imposent dans le réseau universitaire au-delà
de ce qui est requis pour assurer une imputabilité raisonnable
vis-à-vis de la dépense de fonds publics.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Giguère,
pour un complément de réponse.
M. Giguère: Complément de réponse. Je
voudrais dire au départ que c'est à la mode aujourd'hui de
pousser les établissements publics à adopter les modèles
du secteur privé. Malheureusement, nous n'avons pas les moyens de le
faire. On n'a aucun contrôle sur nos revenus qui continuent toujours de
baisser. On n'a aucun contrôle sur plusieurs catégories de nos
dépenses. Je vous citerai seulement quelques exemples. Les taux horaires
des contractuels pour l'entretien des bâtiments sont fixés par
décret. Ceux-ci ont augmenté de 5,50 $ en 1981 à 9,65 $ en
1986. Le décret sur les agents de sécurité du 29 janvier
1986 accordait une augmentation de 20,8 % pour une période de deux ans.
On vient tout juste d'apprendre que les primes qu'on a à verser à
la CSST augmenteront de 22 %. Les montants autorisés pour les baux ainsi
que pour le maintien de nos cours sont fixés par le gouvernement. Les
dépenses sont largement déterminées par les fournisseurs
de locaux et d'énergie. Je suis un partisan de l'entreprise libre. Il
nous faut les moyens pour suivre les modèles du secteur
privé.
Mme Blackburn: Toujours sur le financement, j'ai deux questions
rapides. Oui, les questions sont rapides. Disons que cela appelle des
développements. Vous demandez, en invoquant le fait que vous avez
toujours été sous-financé, et je le rappelle, cela semble
faire l'unanimité, que le gouvernement participe au programme, au plan
de résorption de votre déficit. Par ailleurs, je vous dirais deux
choses, si vous me permettez. Vous demandez cela et vous n'avez pas de plan de
développement ou vous n'en faîtes pas état si vous en avez
un. La seconde chose, c'est qu'on pense à l'UQAM, et c'est toujours un
peu désagréable de se faire comparer, à l'UQAM qui aussi
souffre de sous-financement et qui quand même n'a pas de déficit.
On connaît la politique de l'UQ de façon générale
qui ne t'autorisait pas. Ils n'ont quand même pas le choix, eux. Ce
n'était pas le gouvernement qui les restreignait, c'était le
siège social. Quand même, cela nous amène, je pense,
légitimement à nous interroger sur la responsabilité de
l'État en matière de résorption des déficits. (11 h
30)
M. Kenniff: M. le Président, en réponse à la
députée de Chicoutimi, sur la question des plans de
développement, je pense qu'il y a une différence à faire
entre un plan et la planification. Il est vrai que l'Université
Concordia n'a pas de document de plan de développement à l'heure
actuelle. Depuis le début de son histoire, il n'a jamais
été question d'un développement mais beaucoup plus de
survie face aux contraintes qui lui étaient imposées. Il reste
tout de même que les grandes orientations de l'Université
Concordia sont clairement démontrées dans le mémoire que
nous avons soumis è la commission parlementaire. Nous avons des
organismes qui font enquête sur les données du marché pour
essayer de comprendre. Je suis, je pense, le seul recteur d'une
université québécoise à avoir établi - on
était les premiers - un comité consultatif aux recteurs sur les
grandes orientations de l'université composé de gens du secteur
privé et du secteur public, qui est un organisme
consultatif autre que le Conseil de l'université. Nous cherchons
à dégager les tendances du marché. Le sénat de
l'université se penche régulièrement sur l'orientation des
programmes académiques et nous avons fait des choix à travers les
exercices budgétaires qui ont été douloureux et qui
peuvent constituer - si on les réunit dans un cahier - ce qu'on pourrait
appeler un plan. Nous avons indiqué aux représentants du
gouvernement que s'ils veulent un cahier relié indiquant les
orientations de l'université, ils l'auront. Nous avons fait tout de
même un exercice de planification tout au cours de notre histoire.
Sur la deuxième question, je ne voudrais pas commenter
l'état de sous-financement de l'Université du Québec
à Montréal, c'est évident. C'est vrai que c'est de commune
renommée qu'il y a un problème là. Nous avons un ratio
professeur-étudiants à peu près semblable. Je croîs
qu'il y a des différences qu'il faut indiquer. Premièrement,
l'Université du Québec à Montréal a
été un gagnant net dans l'exercice que nous avons vécu
pendant plusieurs années de prélever à même les
budgets de base les sommes requises pour financer les clientèles
nouvelles. Une augmentation considérable de la clientèle à
l'UQAM a été financée à même les sommes
d'argent qui ont été retirées des budgets de base des
autres universités. Même si la clientèle de
l'Université Concordia a augmenté, elle a augmenté moins
rapidement qu'à l'UQAM, de sorte qu'on a été des perdants
nets dans l'exercice de prélèvement depuis 1981.
Un deuxième point, ce n'est peut-être pas un poids
énorme dans la balance, mais il reste tout de même que le
siège social de l'Université du Québec fournit à
l'UQAM des services administratifs qu'elle n'a pas à financer et que
nous avons à financer à l'Université Concordia. Ce n'est
pas un élément majeur mais c'est aussi un élément
dont il faut tenir compte en étudiant cette question.
Troisièmement, les deux universités ont un poids
différent dans les différents secteurs académiques. Par
exemple, à l'Université Concordia, nous avons une Faculté
de génie et d'informatique, ce qu'il n'y a pas à
l'Université du Québec à Montréal; nous avons
également un secteur très développé des sciences
pures, des sciences avec laboratoires comprenant la psychologie qui sont des
secteurs peu développés à l'UQAM. Ce sont des secteurs qui
coûtent très cher. D'ailleurs, au Québec, nous sommes
l'université avec la plus forte proportion d'étudiants dans les
secteurs scientifiques avec laboratoires, sciences pures et sciences
appliquées. Nous n'avons pas de faculté de médecine, mais
tout de même 33 % de nos étudiants sont dans les secteurs
scientifiques, tandis qu'à l'Université du
Québec à Montréal, les sciences humaines, les
sciences sociales, les sciences administratives sont les principaux secteurs
mais dont le coût administratif et académique est
inférieur.
Un dernier point. Comme l'a souligné M. le ministre, nous avons
choisi pour des raisons pédagogiques de ne pas nous précipiter
dans la multiplication des programmes courts, des programmes de certificats.
C'est pour des raisons pédagogiques. Si vous me permettez, comme disait
M. le ministre, nous avons été à l'origine de toute la
philosophie de la politique des études à temps partiel, non
seulement au Québec mais dans l'ensemble du Canada par
l'Université Sir George Williams. C'était des études
à temps partiel conduisant à des diplômes de 1er, de 2e et
de 3e cycles. Nous avons toujours voulu maintenir cette philosophie. Nous
prétendons que cela nous a coûté cher et nous avons quand
même la satisfaction d'avoir respecté nos orientations
pédagogiques depuis les origines.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Avant de
donner la parole pour les deux dernières interventions, je voudrais
profiter de l'occasion pour souligner la présence, parmi nous dans la
salle, du ministre de l'Éducation nationale de la République
Centre africaine, son Excellence M. Jean-Paul N'Goubande. M. le ministre
bienvenue. Je reconnais maintenant le député de Rimouski.
M. Tremblay (Rimouski): M. le recteur, dans votre exposé
du début, vous avez indiqué que toute réduction de
clientèle vous amènerait une diminution de financement. Cela
semble être une très grande préoccupation pour vous
nécessairement. Dans votre rapport à la page 53, vous dites: "Un
manque d'espace et de personnel enseignant conduisant à
l'impossibilité d'accroître suffisamment les inscriptions pour
compenser le sous-financement". Dans les rapports antérieurs des autres
universités, plusieurs semblaient mettre en doute la qualité du
recensement de la clientèle. Ma question est la suivante. Si on ouvre
toutes grandes les portes et qu'on admet les gens, plus on va augmenter la
clientèle, plus vous serez en mesure de donner les services ou si cela
ne viendra pas plutôt augmenter votre déficit?
M. Kenniff: M. le Président, en réponse au
député de Rimouski, nous ne proposons pas une formule visant
à accroître nos clientèles pour accroître nos
subventions. Voici ce que nous disons. Pendant la période où nous
avons financé des clientèles additionnelles par
prélèvements, toute université, y compris la nôtre,
devait chercher à accroître ses clientèles pour maintenir
son niveau de subvention. L'argent pour financer
les clientèles nouvelles était puisé dans les
budgets de base des universités, mis dans un fonds commun et
redistribué. On était comme sur une trame, on était en
course. Si on bloquait les inscriptions, on reculait, il fallait courir vers
l'avant pour rester en place. C'était une période très
difficile pour nous,
Nous disons qu'on ne chercherait pas nécessairement, comme
orientation de l'université, à accroître les
clientèles, sauf si c'est le seul moyen de régler les
problèmes de base. Nous avons un problème d'espace. On ne peut
pas loger plus d'étudiants. Si vous venez au pavillon Hall, n'importe
quel jour de la semaine, de 8 heures le matin à minuit, vous allez voir
des hordes d'étudiants qui montent et qui descendent les escaliers
roulants. C'est un édifice universitaire qui est utilisé
pleinement. Les étudiants sont assis dans les corridors. On a un
réel problème d'espace, on ne peut pas en admettre plus. On a eu
ce problème la semaine dernière. Pour un cours en système
informatique, on n'a pas réussi à obtenir un local pour faire
l'enseignement; on a été obligé de louer un local dans un
édifice voisin pour donner le cours, parce qu'il n'y avait aucune place
disponible dans l'horaire à l'université.
On ne cherche pas à augmenter les clientèles. On dit que
c'est un financement qui permet aux universités de faire des choix. Si
notre choix, c'est de maintenir les inscriptions à leur niveau actuel ou
même si le choix est de permettre un certain recul, qu'il n'y ait pas des
conséquences financières désastreuses pour
l'université. Actuellement, si on s'engage dans une spirale de
décroissance, ce sera la décroissance des revenus
également et on n'aura solutionné aucun problème pour
l'université.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Kenniff.
Je reconnais maintenant le vice-président de la commission de
l'éducation, le député de Laviolette.
M. Jolivet: Merci, M. le Président. C'est un commentaire
qui peut devenir une question et qui amènera peut-être un autre
commentaire ou une réponse.
Les années soixante-dix ont apporté une formule historique
de financement. Quand vous êtes arrivé en 1974, vous avez subi
cette formule de financement comme tout le monde, ce qui fait qu'avec les
ajustements qu'il y a eu en cours de route, il est apparu, dans bien des cas,
une formule qui amenait, dans certaines universités, un
sous-financement.
Comme le ministre nous l'a dit l'autre jour, concernant les
crédits, lui-même avait aussi fait des ponctions additionnelles
cette année et il y a eu des effets - vous en avez fait mention tout
à l'heure - sur votre financement. Comme le ministre aussi l'a
ajouté la semaine dernière, sur une promesse électorale
faite par le Parti libéral durant la campagne électorale, de ne
pas augmenter les frais de scolarité, mais de les geler, il nous a dit
que l'erreur qui avait été commise en faisant cette promesse
électorale ne demandait pas qu'une erreur additionnelle soit commise en
la perpétuant.
Dans ce contexte-là, nous avons devant nous un financement qu'il
a lui-même continué de la même façon que les
ministres antérieurs depuis les années soixante-dix. Il a
même ajouté des compressions budgétaires à la
demande du président du Conseil du trésor. S'il fallait suivre
les recommandations du rapport Gobeil, on irait encore plus loin. Dans ce
contexte-là, vous seriez probablement heureux que le ministre ne
perpétue pas l'erreur qu'il a commise au mois d'avril dernier. En
conséquence, il trouve une solution qui permet un meilleur financement
des universités - peut-être que différentes personnes, dont
les étudiants, auront d'autres occasions de nous le dire - sans,
cependant demander de corriger l'erreur qu'il a, dit-il, commise en campagne
électorale de demander le gel des frais de scolarité. C'est tout
simplement pour vous dire qu'effectivement, vous ne seriez pas en
désaccord si la formule de financement était changée et si
cette formule permettait un meilleur financement à la fois de votre
université et des autres universités.
M. Kenniff: M. le Président, je cherche dans ce
commentaire du député de Laviolette la question.
M. Jolivet: Je vous ai dit que c'était pour avoir un
commentaire et peut-être une réponse.
M. Kenniff: Le seul commentaire que je ferai, c'est que j'ai dit
tout à l'heure quel était l'objectif de l'Université
Concordia en comparaissant devant cette commission. C'est une augmentation de
l'enveloppe de ses ressources. Je pense qu'il y a des décisions
d'orientation politique à prendre de la part du gouvernement sur la
manière de procéder à cette augmentation.
Évidemment, j'invite la commission à faire des
recommandations au gouvernement dans ce sens. Une chose est claire: ce que nous
demandons, c'est la disparition de la formule historique - quand je suis
fatigué, j'ai tendance à l'appeler la formule hystérique -
de financement des universités et son remplacement par une formule
beaucoup plus adaptée à la réalité d'aujourd'hui de
nos universités.
Je pense que l'autre remarque contenue, si vous permettez, dans votre
intervention, c'était la perspective d'une application prochaine du
rapport Gobeil.
Toutes les universités vont s'accorder pour dire que nous vivons
une situation de crise réelle et que si le gouvernement s'avisait de
sabrer davantage dans l'aide qu'il apporte aux universités, cela
provoquerait une situation absolument catastrophique au sein de nos
universités.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci de votre
commentaire. Je reconnais maintenant la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je vois le temps
passer et je constate qu'il faudrait peut-être réaménager
notre horaire de manière à donner un peu plus de temps aux
universités. Il me restait de nombreuses questions. Il y en a
quelques-unes en particulier sur lesquelles j'aurais voulu vous entendre, dont
celle des frais de scolarité qu'on n'a pas abordée.
Il me semble qu'il y a toujours un discours un peu contradictoire entre
l'établissement de frais de scolarité et la
nécessité de hausser l'accessibilité. Je le rappelle pour
dire que je m'étonne toujours un peu que les recteurs des
établissements se soient engagés dans ces discussions, parce que
si on fait une comparaison avec les établissements du réseau des
Affaires sociales, il m'étonnerait qu'on puisse les amener à nous
parler de tarification des services. C'est dans cette perspective.
Il y a autre chose qui me préoccupe par rapport à toute la
question des frais de scolarité. On en parle peu ici. C'est
l'accès aux études pour les adultes dont, vous le savez - cela ne
doit pas être différent chez vous - la clientèle est
composée de 50 % à 60 % de femmes. Elles n'ont pas les
mêmes revenus. On le sait et je pense qu'on peut le répéter
ici en commission parlementaire. Cela risque peut-être d'être un
peu plus entendu.
On est en train de découvrir et de réaliser - cela se
comptabilise - qu'il y a de nouvelles catégories de pauvres: les femmes
et les enfants. Lorsqu'on sait que l'éducation, par ailleurs, c'est une
des meilleures façons d'augmenter son revenu, je trouve que ce serait
important qu'on examine les effets que pourraient avoir les frais de
scolarité sur ces clientèles.
Il y a toute la question des étudiants étrangers et des
frais de scolarité qui sont exigés de ceux-ci. J'aurais
aimé vous entendre là-dessus. Par ailleurs, le ministre dans sa
présentation tout à l'heure vous disait qu'avant d'établir
les règles d'allocation de l'enveloppe, il fallait établir le
niveau de l'enveloppe.
Je suis assez d'accord avec lui, mais je dis qu'il y a un
préalable à l'établissement du niveau de l'enveloppe. Ce
sont des décisions claires et précises sur les objectifs et la
mission des universités. Est-ce qu'on préserve
l'accessibilité? Est-ce qu'on veut s'assurer d'une meilleure
qualité? Est-ce qu'on veut développer le deuxième et le
troisième cycle?
Je pense qu'avant de parler de niveau d'enveloppe, il faut vraiment
qu'on soit clair là-dessus parce que, autrement, ça
m'apparaît difficile de passer à la seconde étape.
Messieurs, ça m'a fait plaisir de vous rencontrer. Au nom de ma
formation politique, je vous remercie. Je dois dire qu'à l'instar du
ministre de l'Éducation, j'ai beaucoup d'estime pour le travail que vous
faîtes et particulièrement à l'endroit de vos
clientèles, quelles qu'elles soient. Je connais un peu la composition de
votre clientèle. Cela m'a fait plaisir, et je vous remercie de votre
collaboration aux travaux de cette commission. (11 h 45)
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie,
Mme la députée de Chicoutimi. Je reconnais maintenant, comme
dernier intervenant, le ministre de l'Enseignement supérieur et de la
Science.
M. Ryan: Je vous remercie, M. le Président. Je remercie
l'Université Concordia des explications qu'elle nous a apportées
ce matin, en sus du mémoire très substantiel qu'elle nous avait
communiqué avant la rencontre de ce matin. Les explications qui ont
été données nous ont permis de mieux saisir
l'acuité des problèmes qui se posent à l'Université
Concordia en particulier et dans nos universités d'une manière
plus générale.
Je veux simplement faire une petite correction à ce que disait la
députée de Chicoutimi qui a assez souvent du mal à
m'interpréter. J'ai bien dit tantôt que l'on réviserait la
formule de financement quand on aurait établi une décision quant
au niveau de financement, pas quant au niveau de l'enveloppe parce que, s'il y
a d'autres sources de financement que les subventions gouvernementales,
l'enveloppe sera une chose bien différente de ce que cela serait s'il
n'y avait pas d'autres sources, si tout devait dépendre uniquement des
subventions gouvernementales. Alors, les décisions que nous prendrons
concernant le mode de distribution de subventions seront évidemment
conditionnées par la décision plus fondamentale sur le niveau de
financement qui devrait être jugé désirable pour le
système universitaire et sur les différentes sources de revenus
qui devraient être envisagées à cette fin.
Faisant allusion à la philosophie d'accessibilité qui a
été caractéristique à l'Université Concordia
depuis longtemps, la députée de Chicoutimi disait que nous
devrions préciser nos objectifs en matière de
développement universitaire avant de commencer à jouer sur les
critères de
partage des subventions. Je pense qu'il y a beaucoup de vrai
là-dedans. Je suis prêt à accepter une bonne part de ce que
la députée de Chicoutimi a dit là-dessus avec
peut-être la nuance suivante, et cela me permet de préciser un peu
ce que j'ai dit antérieurement à propos d'accessibilité.
Je ne pense pas qu'un gouvernement sérieux pourrait aller à tout
vent aujourd'hui, proclamant qu'il entend pratiquer une politique
d'accessibilité absolue à l'université. Le temps des
grandes proclamations absolues est fini au Québec. On en a fait trop
dans le passé sans toujours prévoir toutes les implications, non
seulement au point de vue des coûts, mais aussi au point de vue de
l'aménagement des structures administratives, publiques et
parapubliques.
Si mes souvenirs sont exacts, j'ai bien dit dans mon exposé
d'ouverture qu'une de nos responsabilités sera de concrétiser les
objectifs d'une politique d'accessibilité pour la prochaine
décennie, pour les prochaines années, je ne sais pas l'expression
que j'ai employée au juste. Il faut que nous nous fixions des cibles
peut-être beaucoup plus précises et que nous évitions de
nous enfermer dans des propositions de caractère absolu dont les
implications dépassent ensuite les ressources que nous avons. Cela a
été une des erreurs du Québec au cours des vingt
dernières années de souvent fixer des objectifs dont les
coûts à long terme allaient être supérieurs à
ses ressources réelles. C'est une des caractéristiques de
l'effort de redressement des politiques publiques que nous avons amorcé
ces dernières années. L'ancien gouvernement l'avait
commencé lui aussi parce qu'il se rendait compte que, lorsqu'on se
présente à la banque ou chez les fournisseurs de fonds, on a beau
avoir l'idéologie, la religion et la langue que l'on voudra, ils
regardent la capacité de payer. Ils disent "the bottom line", la ligne
au-delà de laquelle nous n'irons point est la suivante.
Il n'y a aucune société qui échappe à cela.
Cela nous a pris un certain nombre d'années pour nous en rendre compte.
Pourquoi? Parce qu'il y avait une marge de crédit qui avait
été accumulée pendant des années d'inaction qui
nous a permis d'étirer l'élastique pour ainsi dire, mais on s'est
rendu compte à un moment donné que l'élastique allait
casser, puis il a fallu en prendre un peu moins. C'est la règle qui
s'impose à nous pour les prochaines années. C'est pour cela que
je suis d'accord avec la députée de Chicoutimi, mais en ce qui
touche le présent gouvernement, il va s'employer à fixer des
objectifs d'accessibilité qui seront atteignables, compatibles avec les
ressources de notre société et qui par conséquent ne
seront pas tous azimuts. C'est aussi bien de le dire clairement maintenant, ils
ne seront pas tous azimuts. Ils vont être fixés en consultation
avec les milieux intéressés, mais on va cependant essayer de
faire en sorte que, comme je l'ai dit dans mon exposé d'ouverture,
l'université demeure accessible à ceux qui ont le talent pour se
rendre à ce niveau d'études, qui ont des dispositions de
personnalité et ce n'est pas nécessairement synonyme de talent.
Il y en a qui peuvent avoir énormément de talent et se sentir
mieux disposés pour des carrières pratiques qui n'exigent pas
qu'ils aillent jusqu'à l'université; il y en a beaucoup. Il y en
a qui peuvent préférer une formation de niveau secondaire ou
collégial au stade plus jeune de leur développement et, ensuite,
revenir à l'université plus tard. Il y a toutes sortes de
cheminements qui sont possibles aujourd'hui et pour lesquels nos politiques
doivent prévoir une certaine marge de flexibilité. Encore une
fois, cela ne doit pas être rendu impossible à ceux qui ont le
talent et, deuxièmement, à ceux qui ont la volonté de se
prendre en main.
L'accès à l'université doit être conçu
dans une perspective de responsabilité également pour ceux qui
ont la volonté de se prendre en main, d'abord au point de vue
académique. On ne va pas là pour traîner sur les bancs de
l'université indéfiniment. On ne va pas là seulement pour
faire des expériences et dire ensuite: Je m'en retourne chez moi, cela
ne faisait pas mon affaire. Il faut aller là avec une certaine
volonté d'arriver au terme. Je pense qu'il faut avoir aussi la
volonté de prendre en charge une partie de ce que cela coûte. Cela
ne peut pas être entièrement à la charge de la
société. C'est impensable, étant donné les
catégories de citoyens qui ont des besoins encore beaucoup plus aigus et
auxquels on doit apporter une réponse avec des ressources, encore une
fois, très limitées. Nous le savons, nous du gouvernement, parce
que nous travaillons actuellement sous la direction du ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu à un projet de
réforme de l'aide sociale. Il faut mesurer tout changement que nous
faisons, d'abord aux besoins des personnes concernées et,
deuxièmement, aux ressources dont diposent le gouvernement et la
communauté. Souvent, les idées généreuses que
chacun d'entre nous aurait viennent se heurter au contact de la
réalité qui nous oblige à y penser deux et trois fois.
C'est pour cela que, quelquefois, cela prend un peu plus de temps à
sortir; il faut qu'on mesure bien attentivement les liens de chaque chose qu'on
fait avec l'ensemble de l'appareil gouvernemental, l'ensemble de la
fiscalité, l'ensemble des finances publiques.
C'est dans cette perspective, M. le recteur de l'Université
Concordia, que nous prenons un peu de temps pour en venir à des
conclusions. Nous sommes au pouvoir depuis seulement neuf mois et je vous
assure que
nous travaillons très fort et de la manière la plus rapide
possible pour en venir â des conclusions satisfaisantes. Dans cette
perspective, la rencontre que nous avons eue avec vous et vos collègues,
ce matin, a été très utile et je vous en remercie.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M, le
ministre. M. Giguère, M. Whyte, M. Kenniff, merci beaucoup de vos
interventions. La commission suspend ses travaux pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 11 h 53)
(Reprise à 11 h 54)
Association des étudiants et étudiantes
de l'Université Concordia
Le Président (M. Parent (Sauvé): La commission
parlementaire de l'éducation reprend ses travaux et accueille
l'Association des étudiants et étudiantes de l'Université
Concordia.
M. Desrosiers (François): M. le Président, M. le
ministre, mesdames et messieurs de la commission, merci d'avoir accepté
de nous entendre ce matin. L'objectif de notre présence ici est de
démontrer que l'Université Concordia et le système
d'éducation universitaire ont besoin d'un meilleur financement qui doit
garantir l'accessibilité la plus grande possible, qui serait
basée sur la capacité d'apprendre et non pas sur celle de payer
des individus.
Nous avons décidé de venir ici car, selon nous, une
tendance existe dans différents milieux à vouloir déplacer
le fardeau financier de la crise des universités sur le dos des
étudiants. Selon nous, cette crise...
Le Président (M. Parent (Sauvé): M. le
président, je regrette. Pourriez-vous, s'il vous plaît! messieurs?
Merci.
On vous reconnaît, monsieur.
M. Desrosiers: Merci. Selon nous, la crise financière des
universités n'a pas été créée par les
étudiants et la solution ne doit donc pas venir principalement de la
part des étudiants.
Je vais vous exposer maintenant les grandes lignes de notre
mémoire. Pour nous, les universités doivent garder leur
caractère universel. Cela veut donc dire qu'une spécialisation et
une rationalisation des programmes iraient à l'encontre de cet objectif
social qui doit prédominer le futur du Québec.
Lorsqu'on parle de spécialisation et de rationalisation, on
introduit des conséquences et des variables dans le futur du
Québec qui doivent être évaluées très
sérieusement. La rationalisation des programmes et la
spécialisation à outrance défavorisent le
développement intellectuel des étudiants, car ceux-ci ne seraient
pas exposés à une gamme accrue de cours connexes ou de cours
qu'on appelle "facultatifs".
Si, selon certains, la rationalisation permettrait de réduire les
dépenses, elle permettrait aussi de réduire la
compréhension des interrelations sociales qui existent chez les
étudiants. Si on commence à parler de rationalisation, autant
parler d'instituts spécialisés d'éducation
supérieure et ne plus parler d'universités, car à ce
moment-là nous aurons enlevé le caractère universaliste
desdites universités.
Une rationalisation diminue aussi la mobilité qui peut exister
chez les étudiants et la possibilité de choisir des cours qui
sont è l'extérieur de leur spécialisation. Pour nous c'est
un avantage majeur que de permettre aux étudiants de pouvoir
étudier ou d'assister à des cours qui ne sont pas essentiellement
axés vers leur spécialisation. Un étudiant en
comptabilité profite tout autant d'un cours de philosophie qu'un
étudiant en philosophie peut profiter d'un cours de finance. Selon nous,
cela permet une vision plus globaliste des enjeux sociaux et cela permet un
développement des futurs cadres et dirigeants de la
société qui est beaucoup plus...
La dévalorisation du baccalauréat au premier cycle est
quelque chose qui est constaté depuis quelques années et qui,
selon nous, est une conséquence directe du sous-financement qui a
été introduit à partir de la fin des années
soixante-dix.
La formule de financement qui est la source principale des revenus pour
les universités est désuète. Qu'elle soit modifiée
chaque année n'en est qu'une preuve évidente. Le sous-financement
et la désuétude de la formule de financement ont des effets que
nous trouvons immédiats sur la qualité de l'éducation. De
plus en plus d'employeurs critiquent ouvertement et publiquement la mauvaise ou
la pauvre éducation de leurs nouveaux employés qui sont des
diplômés universitaires. Plusieurs disent que ces étudiants
ne peuvent communiquer d'une façon correcte, soit par écrit ou
verbalement, avec leurs nouveaux employeurs. Pour nous, cela est une
conséquence directe du sous-financement et empêche,
défavorise la création de nouveaux emplois et la venue de
nouvelles entreprises. Lorsqu'une nouvelle entreprise veut s'installer au
Québec, elle regarde le potentiel d'employés qu'elle peut avoir
et si le potentiel d'employés est "sous-éduqué" entre
guillemets - alors il y a un certain recul à installer cette nouvelle
entreprise au Québec. À long terme, un sous-financement de
l'éducation universitaire cause des problèmes de
développement économique pour
le Québec et on ne peut pas se le permettre dans la situation
où l'on est aujourd'hui.
Plusieurs ont fait des comparaisons entre le Québec et l'Ontario
en ce qui concerne l'accessibilité à l'éducation
supérieure. Selon nous, ces études sont quelque peu
biaisées lorsqu'on fait des comparaisons statistiques au lieu de faire
des comparaisons en chiffres réels. Il y a près de deux fois plus
d'étudiants à temps plein en Ontario qu'au Québec et ce
n'est sûrement pas parce qu'il y a deux fois plus de gens qui vivent en
Ontario. Nous expliquons ce phénomène par une tendance culturelle
qui existe en Ontario de pousser davantage vers des études
avancées, alors qu'au Québec, cette tradition n'existe pas. Ce
phénomène a été reconnu au milieu des années
soixante et a permis la commission parlementaire de 1967-1968 qui a, entre
autres choses, introduit le réseau des universités du
Québec.
Pour pallier cette différence d'accessibilité, nous avons
décidé d'investir, en tant que société, des sommes
énormes dans notre système d'éducation universitaire pour
rattraper le retard que nous avions accumulé au cours des ans.
Si, selon certains, notre taux de progression d'accessibilité
à l'université est le même que celui qui existe en Ontario,
cela ne veut pas dire que le niveau d'accessibilité est le même
chez nous ou en Ontario. Selon nous, il reste encore des efforts à faire
pour augmenter l'accessibilité aux études supérieures.
Donc, le gouvernement doit investir les sommes nécessaires dans le
réseau universitaire. Ce sont des décisions politiques qui sont
difficiles à prendre, mais qui doivent être prises, car c'est
l'avenir du Québec qui en dépend. On ne peut pas lésiner
quant à l'avenir du Québec pour des raisons de compressions
budgétaires à court terme.
Le sous-financement des universités a créé certains
phénomènes très récents, comme l'introduction de
frais afférents que nous appelons des frais indirects. Ces frais ont
servi à pallier les récentes compressions budgétaires chez
certaines universités. À l'Université Concordia, nos frais
indirects ont été introduits sous le nom de "frais de
matériel didactique ou académique", et ont pour objectif majeur
de réduire le déficit courant de l'université d'environ 1
200 000 $. Si ces sommes d'argent sont dirigées vers une
réduction des déficits et que ces déficits viennent des
frais de fonctionnement, alors pour nous cesdits frais de matériel
deviennent des frais de scolarité directs, mais appelés par un
autre nom.
On parle aussi dans notre mémoire de la gestion des ressources
humaines. Selon nous, le corps professoral, dans notre université du
moins a besoin d'être évalué et évalué par
les étudiants. Les étudiants sont dans une position
privilégiée pour reconnaître la capacité d'enseigner
de leurs professeurs car après environ quinze années
d'étude, on peut reconnaître assez facilement si un professeur est
capable d'enseigner ou s'il en est incapable. Si le professeur est incapable
d'enseigner adéquatement une matière quelconque, ce n'est pas
parce qu'il est ignorant de la matière, mais peut-être parce que
ledit professeur n'a pas reçu une éducation ou un enseignement
lui montrant comment enseigner.
Nous pensons que c'est adéquat de mettre sur pied un
système d'enseignement pour les professeurs qui, après avoir
été évalués par les étudiants, auraient
reçu une mauvaise évaluation de leur enseignement. Nous ne devons
pas faire la chasse aux sorcières, mais étant donné la
position budgétaire du gouvernement du Québec et que c'est le
gouvernement qui finance en majorité les universités, on ne peut
que demander ce qu'il y a de mieux de la part des personnes qui
reçoivent leurs salaires de cesdites subventions gouvernementales.
Nous croyons aussi que les chargés de cours ou les professeurs
à temps partiel ont des conditions de travail inhumaines. Qu'on leur
donne au moins six mois d'avis pour préparer un cours et ne permette pas
la situation qui existe aujourd'hui où certains professeurs
reçoivent deux semaines de préavis avant de commencer à
enseigner à l'université.
Six mois pour permettre aux professeurs de se préparer
adéquatement, et la qualité de l'enseignement qu'ils offriraient
à leurs étudiants serait maximisée. Deux semaines de
préavis ce n'est pas assez long pour permettre une préparation
adéquate de l'enseignant. Qui en souffre en fin de compte? Ce sont les
étudiants et, plus tard, la société
québécoise.
Pour passer au déficit universitaire, à
l'Université Concordia du moins, le déficit universitaire de
notre institution vient principalement, comme l'a exposé le Dr. Kenniff,
du sous-financement chronique de la part du gouvernement. Nous demandons au
gouvernement d'absorber le déficit de l'Université Concordia
selon une grille d'évaluation où le gouvernement
établirait quelle part du déficit vient d'un sous-financement
gouvernemental et quelle part vient d'une mauvaise gestion des fonds par
l'administration universitaire.
Dans notre cas, nous ne croyons pas que la portion de mauvaise gestion
soit trop impartante, étant donné notre réputation
d'université la plus efficiente au Québec. En ce qui concerne
l'aide financière, nous croyons qu'elle devrait être
changée presque radicalement et que l'accent doit être mis sur la
capacité d'apprendre des étudiants et non pas sur leur
capacité de payer leurs études à court terme. Que la
situation financière des parents soit prise en ligne de
compte pour évaluer la capacité de payer de
l'étudiant, pour nous c'est une philosophie aberrante. Nous trouvons que
l'accent doit être mis sur la capacité de payer de
l'étudiant et non pas la capacité de payer des parents car le
système actuel peut permettre une situation où un étudiant
de 35 ans ne vivant pas chez lui serait toujours considéré
à la charge de ses parents, ce que nous trouvons plutôt
illogique.
Le système d'aide financière doit aussi offrir une
accessibilité aux étudiants à temps partiel, car ce ne
sont pas tous les étudiants à temps partiel qui travaillent avec
des revenus de 30 000 $ par année. Il y a une bonne proportion d'entre
eux qui sont des étudiants qui étudieraient à temps plein
s'ils étaient capables de passer les critères
d'admissibilité au système d'aide financière tel qu'il
existe aujourd'hui. Donc, si l'on parle d'aide financière à
l'intérieur du cadre de cette commission, que l'on ne parle pas de
changer les modalités du système d'aide financière mais
qu'on parle de changer les critères ou la philosophie même de
l'aide financière.
En ce qui concerne les frais de scolarité comme source de revenus
pour les universités, nous considérons, à
l'Université Concordia, que passer la majeure partie du problème
du financement des universités sur le dos des étudiants n'est pas
une solution juste et humaine. Comme je l'ai mentionné au tout
début, ce ne sont pas les étudiants qui ont créé la
situation financière présente des universités. Alors on ne
doit pas demander aux étudiants de régler la majeure partie des
problèmes financiers des universités. Si le gouvernement
s'engage, si le gouvernement garantit qu'il y aura un financement public
supérieur à 25 000 000 $, selon l'avis du Conseil des
universités, si les professeurs sont assurés d'un meilleur
salaire, étant donné qu'à l'Université Concordia
ils ont une charge de cours supérieure aux autres professeurs
universitaires, si les professeurs à temps partiel reçoivent des
conditions de travail que nous appelons minimales, si le système d'aide
financière est réformé et permet une accessibilité
aux étudiants à temps partiel, s'il y a des fonds
débloqués pour permettre l'achat de matériel
nécessaire pour les étudiants et l'achat d'espace qui est
fondamentalement manquant à l'Université Concordia, alors,
à ce moment, nous, les étudiants de l'Université
Concordia, serions prêts à discuter d'une augmentation
modérée ou intelligente des frais de scolarité, car dans
la perspective du Conseil des universités dans son dernier avis, faire
passer sur le dos des étudiants environ 65 % à 70 % du fardeau
financier pour renflouer le système universitaire est tout à fait
aberrant. C'est illogique et c'est inacceptable pour nous.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Est-ce que vous
avez terminé?
M. Desrosiers: J'ai terminé.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, je vous
remercie beaucoup. Vous avez commencé très rapidement et je n'ai
pas eu le temps de vous souhaiter la bienvenue et de vous remercier d'avoir
répondu à l'invitation de la commission parlementaire sur
l'éducation et de venir nous aider dans notre recherche pour trouver des
solutions en ce qui a trait à l'orientation et au financement du
réseau universitaire québécois. Je veux aussi vous
féliciter de la façon dont vous avez présenté votre
mémoire et de la façon intelligente dont vous l'avez
synthétisé en touchant tous les points et en laissant le plus
grand laps de temps possible aux membres de la commission pour vous interroger
et aussi pour le courage que vous avez eu. Ce n'est pas facile de
préparer un mémoire comme le vôtre et de venir en
commission parlementaire, dans un cadre formel, dans un Parlement comme ici,
défendre une cause. Je crois que l'on doit vous féliciter.
La commission a prévu consacrer environ une heure. Nous avons
commencé vers 11 h 48 ou 11 h 47. Nous prévoyons terminer
à 13 heures. Votre mémoire étant présenté,
nous allons maintenant procéder à une période
d'échange de propos avec les membres de la commission. Le temps sera
réparti à part égale entre les deux formations politiques.
Nous débutons avec le ministre de l'Enseignement supérieur et de
la Science. M. le ministre. (12 h 15)
M. Ryan: M. le Président, je suis très heureux de
l'occasion qui nous est fournie de causer avec les représentants de
l'Association des étudiants et étudiantes de l'Université
Concordia.
Le mémoire qu'on nous a présenté ce matin est
intitulée "Justice pour tous". C'est l'objectif que nous devons
poursuivre ensemble: Justice pour tous les citoyens, y compris des
étudiants de l'université. Et pour tous, sans exception, parce
que autrement ce n'est pas une vraie justice. j'ai pris connaissance de votre
mémoire avec beaucoup d'intérêt, un mémoire
substantiel, long. Les pages sont bien remplies; on ne peut pas vous reprocher
de gaspiller l'espace. Les marges sont étroites et vous commencez en
haut de la page et vous finissez très bas. Vous avez fait une
utilisation judicieuse de la ressource naturelle qu'est le papier.
Ce que j'ai bien apprécié en lisant votre mémoire,
et à certains moments j'étais porté à me rebeller,
je me disais: Ils vont trop fort et, après cela, je lisais la page
suivante et l'autre qui venait plus loin et je
trouvais qu'il y avait des éléments de nuance et de
modération même qui témoignaient d'un effort de recherche
très sérieux. Dans ce sens-là, je peux vous dire que les
critiques, quand elles sont dures, on n'a pas de raison de s'en plaindre,
surtout quand elles sont suivies de recommandations qui témoignent d'une
démarche sincère et honnête pour essayer de proposer des
solutions. C'est l'esprit que j'ai trouvé dans votre mémoire, M.
le président, et je vous le dis en toute simplicité.
Il serait trop long de vouloir résumer votre mémoire, vous
l'avez fait vous-même. Je vais m'en tenir à ce moment-ci à
vous adresser quelques questions sur des points qui m'apparaissent centraux
dans la présentation que vous nous avez faite.
Je voudrais tout d'abord exclure du champ de la discussion de ce matin
le projet POET que vous nous avez soumis, non pas parce qu'il ne fait pas
partie du champ de la discussion, au contraire, et si vous voulez en parler,
sentez-vous entièrement libre, mais vous n'avez pas insisté outre
mesure vous-même ce matin. C'est un programme qui n'a pas de
possibilité d'être appliqué à court terme en ce qui
touche le gouvernement, parce que c'est un programme qui, peut-être sur
une base de dix ans, pourrait offrir beaucoup d'intérêt, mais
à court terme il aggraverait les problèmes de liquidité du
président du Conseil du trésor au lieu de les améliorer.
Je ne crois pas qu'on puisse envisager une perspective comme celle-là.
Mais il y a des éléments intéressants dans ce programme.
Je peux vous assurer que nous en faisans une étude au ministère
de l'Enseignement supérieur et dès que nous aurons
complété nos études à ce sujet, nous aurons
l'occasion d'en parler avec vous autres. Ce n'est pas une perspective que nous
excluons, loin de là.
D'ailleurs, comme vous le signalez dans votre mémoire, la
commission Bovey dans son rapport sur le financement des universités
ontariennes a retenu certaines suggestions qui vont dans le sens de votre
mémoire - cela ne va pas aussi loin - et elle les avait retenues en
s'appuyant, si mes souvenirs sont bons, sur des recommandations de la Ontario
Federation of Labour.
La Ontario Federation Labour s'est prononcée assez
étonnamment en faveur d'une hausse des frais de scolarité pour
les universités ontariennes. Elle a dit: II faudrait qu'on envisage un
système de remboursement, un ajustement du système d'aide
financière et des ajustements au système de remboursement
éventuel qui tiendrait compte des différentes classes de revenus
en signalant, par exemple, que pour un diplômé d'université
qui fera 100 000 $ ou 200 000 $ par année, il devrait y avoir un niveau
de remboursement plus élevé que pour celui qui va aller enseigner
la sociologie ou l'histoire au niveau secondaire et dont le revenu va
être beaucoup plus limité. Il y avait des choses
intéressantes à examiner de ce côté. Nous les
examinerons au cours des prochains mois. Nous allons continuer de les examiner,
mais je vous dis honnêtement, pour les sujets d'intérêt plus
immédiat que nous avons, le reste de vos recommandations va retenir
davantage notre attention, y compris évidemment les recommandations que
vous faites sur les ajustements à apporter au régime de l'aide
financière.
Il y en a un qu'on doit exclure - je vais commencer par ce point si vous
me permettez - dans l'immédiat. C'est l'universalisation du statut
d'autonome pour l'étudiant. En principe, je pense que tout le monde
autour de la table serait favorable à ça. Vous avez parfaitement
raison de souligner que quand une personne est habilitée à voter,
elle devrait également être considérée comme
autonome dans le reste de son fonctionnement. Mais les études de
coûts que nous faisons au ministère sur les implications
financières d'une telle mesure nous inclinent à croire que le
coût éventuel pourrait être de l'ordre de 600 000 000 $
à 800 000 000 $.
Évidemment, nous ne sommes pas capables d'envisager des
coûts comme ceux-là dans l'avenir prévisible. Par
conséquent, j'aime mieux vous dire tout de suite qu'il n'est pas
question de passer à une mesure comme celle-là. Mais les autres
mesures, les ajustements plus ponctuels proposés dans votre
mémoire, nous sommes très intéressés à les
examiner avec vous. Je pense qu'on ne pourra pas les passer un après
l'autre ce matin, ce serait trop long, mais je peux vous dire que
là-dessus, n'importe quand, nous serons à votre disposition pour
en discuter d'une manière approfondie. Vous n'aurez qu'à faire
signe au responsable de notre ministère, par l'intermédiaire de
mon chef de cabinet, M. André Portier, et nous nous ferons un plaisir
d'organiser des rencontres qui permettront d'aller au fond de vos propositions
et qui nous permettront aussi de vous indiquer les implications que nous y
voyons et les possibilités d'action surtout qui pourraient être
envisagées.
Dans vos recommandations plus à court terme, vous dites vers le
début de votre mémoire que vous recommandez un investissement
immédiat de 160 000 000 $ dans les universités. Je pense que
c'est vers la page 12 ou 13. Mais vous ne donnez pas de précisions sur
ce que serait le contenu de cet investissement, les objets précis. Je ne
sais pas si vous pourriez nous donner des précisions sur cette
recommandation que vous faites dans votre mémoire. C'est au bas de la
page 14.
M. Desrosiers: Cette recommandation a été faite
dans la perspective de l'avis du
Conseil des universités qui date du mois de décembre, qui
recommandait un investissement d'environ 156 000 000 $ dans le système
universitaire québécois d'une façon immédiate.
Selon nous, c'était une recommandation qui avait beaucoup de poids et
qui était intelligente et qui a été changée
à la suite de l'avis qui a suivi, au mois de juillet, du Conseil des
universités et qui recommandait un investissement d'environ 100 000 000
$ dans le réseau universitaire québécois.
Selon nous, les coupures budgétaires qui ont existé depuis
1979 jusqu'à aujourd'hui ont créé un taux financier qui
est plus élevé que ce montant de 160 000 000 $ qui serait
minimalement requis pour retrouver la situation financière qui existait
en 1979 mais faite présentement, aujourd'hui. Donc, pour nous, c'est un
minimum de voir au moins 160 000 000 $ investis dans le système
universitaire québécois.
M. Ryan: Très bien. Cela me satisfait; j'ai la source de
votre recommandation. Comme nous en avons déjà discuté
avec le Conseil des universités et que nous étudions de
près, avec beaucoup d'attention, les suggestions qui émanent du
Conseil des universités, je peux vous assurer que, dans le même
esprit, votre recommandation sera étudiée sérieusement. Il
y avait l'étalement de ce montant qui n'était pas parfaitement
clair dans le texte du Conseil des universités, comme vous l'aurez
peut-être remarqué vous-même. Il faudra en discuter de
manière plus précise.
Encore une fois, on va l'étudier, mais je ne peux pas prendre
d'engagement de le faire, parce que ça ne dépend pas uniquement
de celui qui vous parle. Cela dépend du gouvernement tout entier qui
doit prendre ses décisions dans la perspective de ses autres obligations
qui sont très onéreuses. Mais, de toute manière, comptez
que ça va être étudié sérieusement.
Vous parlez des frais de scolarité d'une manière
extrêmement responsable, je pense bien. Vous dites que, à la
rigueur - je pense que nous ne sommes pas loin d'être à la
rigueur; nous faisons l'examen complet de toutes les possibilités - vous
seriez prêts à consentir à une hausse des frais de
scolarité, à condition qu'elle soit de caractère
raisonnable, comme vous le dites et à condition qu'elle soit assortie de
toute une série de mesures visant à l'amélioration de la
situation de nos universités.
Je n'ai pas besoin de vous dire que les mesures que vous proposez - je
pense que c'est à la page 24 de votre mémoire, il y en a toute
une série: Que les professeurs de l'Université Concordia soient
compensés pour la charge de travail supérieur qu'ils assument;
que les professeurs à temps partiel deviennent soit professeurs à
temps plein, soit soumis à des conditions de travail
améliorées, avec un meilleur salaire, etc.; qu'ils aient des
bureaux à l'intérieur de l'université; que le personnel de
soutien reçoive des compensations pour enrayer l'effet des coupures des
cinq dernières années, etc.; que le système des frais
afférents soit aboli.
Je crois bien que la recommandation que vous faites est d'aligner
l'augmentation des frais de scolarité sur l'augmentation du salaire
minimum depuis 1977. Vous dites: Cela équivaut à peu près
à 45 %. D'après vos calculs, cela donnerait un revenu brut de 30
000 000 $. Je mentionne ces chiffres parce qu'ils sont dans votre
mémoire. J'apprécie au plus haut point l'effort que vous avez
fait pour chiffrer ces choses-là. Vous dites qu'il faudrait partager
cela: une partie pour améliorer l'aide financière; une partie
pour améliorer le financement des universités. Mon point est le
suivant. Supposons que l'on partage cela en deux parts égales pour les
fins de la discussion, 15 000 000 $ pour l'amélioration de l'aide
financière, 15 000 000 $ pour l'amélioration du financement des
universités, on ne va pas chercher grand-chose. Je me demande, au point
de vue politique, si cela vaudrait la peine d'encourir toutes les critiques de
l'Opposition et de toutes sortes de milieux pour aller chercher finalement une
somme de 15 000 000 $.
Je ne sais pas ce que vous en pensez. Par exemple, si vous aviez
ajusté l'augmentation à l'évolution du coût de la
vie pendant la même période de 1977 à nos jours, vous
arriveriez à un pourcentage plus près de celui que proposait le
Conseil des universités. Je vous pose la question.
M. Desrosiers: M. le Président, pour répondre
à M. le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement
supérieur et de la Science, je dirai que la perspective dans laquelle on
a amené cette hypothèse de travail, car c'est une
hypothèse de travail, semblait, selon nous, très rationnelle.
Pourquoi le salaire minimum, tout d'abord? C'est que le salaire minimum
représente pour beaucoup d'étudiants le salaire qu'ils peuvent
espérer avoir pendant leur période d'emploi estival lorsqu'ils ou
elles décrochent un emploi. Ensuite, la question de la décision
politique, à savoir si cela en vaut la peine à cause des
problèmes que cela peut causer à l'intérieur du milieu
universitaire et du côté de l'Opposition, pour nous, n'est pas une
question de fond. Ce qu'il reste à déterminer, c'est de savoir
jusqu'à quel point les étudiants sont responsables de la
situation financière des universités d'aujourd'hui. Selon nous,
ils n'en sont pas responsables, mais alors là vraiment pas beaucoup, et
notre proposition dans cet état de choses se trouve presque radicale ou
extrémiste, étant donné
votre connaissance du milieu étudiant.
M. Ryan: Très bien. J'apprécie
énormément la démarche qui est décrite dans votre
mémoire. Je comprends cela. Je vous soulève seulement cette
difficulté du point de vue de ceux qui auront à prendre des
décisions éventuellement. Je note quand même la position de
principe qui est adoptée dans votre mémoire et qui doit
être signalée avec beaucoup de respect.
Il y a un autre point qui m'intéresse dans ce que vous avez
signalé, c'est le problème de la permanence et de
l'évaluation des professeurs. Il y a des passages extrêmement
intéressants dans votre mémoire sur ce sujet. D'abord, vous nous
rappelez qu'il existe déjà des formes d'évaluation des
professeurs, mais il ne faut pas penser que l'on part de zéro de ce
côté-là. Il y a beaucoup de modalités qui sont
déjà en vigueur dans plusieurs universités, dont la
vôtre, mais vous trouvez que l'on devrait aller plus loin et que l'on
devrait pondérer peut-être autrement les critères
d'appréciation. Allez-vous jusqu'à dire que l'on devrait remettre
la permanence en question? Je n'ai pas saisi clairement jusqu'où vous
allez à propos de la permanence.
M. Desrosiers: En ce qui concerne la permanence des professeurs,
je m'excuse, j'étais occupé à parler à ma
consoeur.
M. Ryan: Je voudrais que vous nous expliquiez un peu votre
situation sur l'évaluation des professeurs, puis l'impact que pourraient
avoir les propositions que vous faites sur le régime des
permanences.
M. Desrosiers: Pour nous, le régime de permanence est
introduit pour permettre une liberté d'expression et une liberté
de travail aux professeurs. Cette philosophie de la permanence doit être
conservée. Mais, selon nous, il existe quand même certains cas
où un professeur peut "se cacher" - entre guillemets - derrière
sa permanence pour ne pas avoir à justifier un enseignement de
qualité envers ses étudiants. (12 h 30)
Selon nous, il est important que les étudiants reçoivent
un enseignement de qualité maximum à cause, surtout, des
sacrifices économiques qu'ils font durant leurs études à
l'université. Nous croyons qu'il est possible d'introduire un
système d'évaluation des professeurs de la part des
étudiants en conservant le principe de base de la permanence des
professeurs qui est de les protéger de toute influence externe qui
pourrait leur faire dire des choses qu'eux ne pensent pas pouvoir dire durant
leur cours.
M. Ryan: Je vous remercie. Je vous dirai en toute
simplicité que j'incline à penser dans la même ligne que
vous. Je pense qu'avant de chambarder le principe de la permanence, il faudrait
voir toutes les implications d'une décision contraire. Moi, j'incline
plutôt vers le maintien de ce principe. D'autre part, je pense qu'il
faut, dans la pratique, introduire des choses plus sérieuses au point de
vue de l'évaluation, en particulier la participation des
étudiants au processus. De ce point de vue, les propositions que vous
faites nous intéressent au plus haut point.
Une dernière question. Vous proposez que le gouvernement verse ce
que vous appelez un dédommagement rétroactif à
l'Université Concordia pour les problèmes de sous-financement des
années passées, je pense. Est-ce que vous proposez que ce soit
applicable à toutes les universités qui ont des déficits,
y compris les universités qui, sans avoir de déficit, ont
souffert de sous-financement mais ont pris des décisions qui
évitaient d'en venir à un déficit?
M. Desrosiers: Oui, M. le ministre, pour nous, c'est une solution
qui doit être appliquée à toutes les universités,
qu'elles aient des déficits budgétaires ou non. Nous avons
introduit une grille d'analyse qui devrait être appliquée par le
gouvernement pour déterminer quelle part du déficit universitaire
vient d'un sous-financement gouvernemental et quelle part vient d'une mauvaise
gestion des fonds gouvernementaux. On doit reconnaître que chaque
université est distincte, a une mission différente et une
façon différente d'administrer ses fonds. Pour nous, de
l'Université Concordia, il est évident que la plus grosse partie
du déficit de notre institution vient d'un sous-financement
gouvernemental et qu'une certaine portion dans le passé, il y a
peut-être quatre ou cinq ans, peut être expliquée par une
mauvaise gestion des fonds gouvernementaux. Nous savons que dans d'autres
institutions la situation est différente et que dans le système
du réseau de l'Université du Québec il n'y a presque pas
de déficit budgétaire, car le réseau a
décidé d'appliquer des coupures d'une façon
différente plutôt que de subir des déficits, pour conserver
un certain niveau de qualité et de service. Donc, il semble que la
solution doit être appliquée selon la spécificité de
l'institution et que soit déterminée quelle part vient d'un
sous-financement gouvernemental et quelle part vient d'une mauvaise gestion des
fonds.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M.
Desrosiers. J'en profite aussi pour souligner la présence de Mme Takacs,
de M. White et de M. Wheeland. Je reconnais maintenant la porte-parole
officielle de l'Opposition en matière d'éducation, Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord
vous souhaiter la bienvenue et vous dire que cela nous fait toujours plaisir de
recevoir les étudiants, parce que, finalement, les universités
trouvent leur raison d'être en fonction des clientèles que
constituent les étudiants. Malheureusement, on a souvent tendance ou
souvent l'impression que ce n'est pas toujours considéré comme
cela devrait l'être. Alors, de vous avoir ici, cela me fait plaisir et je
dois dire que j'ai été agréablement surprise par votre
mémoire. Cela ne se veut pas un jugement trop sévère
à l'endroit des étudiants, mais j'ai, à d'autres
occasions, lu des mémoires qui nous venaient des associations
étudiantes et qui étaient davantage tournés vers
eux-mêmes et pour eux-mêmes alors que ce que vous nous
présentez, c'est un mémoire qui fait montre de beaucoup
d'ouverture d'esprit. Les préoccupations que vous avez, de même
que les solutions que vous suggérez, démontrent un esprit
d'ouverture ainsi qu'une bonne compréhension des enjeux que constituent
actuellement les questions qui font l'objet des débats de cette
commission.
J'ai été agréablement surprise, je le
répète, de la place que vous avez faite aux étudiants
adultes, aux étudiants étrangers, aux difficultés
qu'éprouve votre administration par rapport au sous-financement,
à la situation des chargés de cours, à l'orientation de
l'éducation et du développement des programmes qui ne devraient
pas se faire exclusivement en fonction des besoins immédiats mais
davantage pour assurer une formation plus fondamentale, plus solide. Pour ces
raisons, je dois vous féliciter et vous dire que j'en ai
apprécié la lecture.
Vous abordez la question dans votre mémoire... Je voudrais quand
même passer assez rapidement aux questions pour qu'on ait le temps de
vous entendre expliquer ou donner un éclairage additionnel sur les
propositions que vous avancez. Quant à l'accessibilité, vous
parlez des étudiants à temps partiel et de l'impact d'une hausse
des frais de scolarité. On sait que chez vous, c'est 50 % de la
clientèle qui sont des étudiants à temps partiel. En quoi
estimez-vous qu'une hausse des frais de scolarité aurait des effets sur
l'accessibilité?
On a vu le sondage qui a été rendu public il y a deux
semaines, je pense. En fait, il y en a eu deux de rendus publics: un qui
émanait des étudiants de l'Université de Montréal
et un d'une compagnie de sondage canadienne de Winnipeg. Finalement, à
notre grand étonnement, les conclusions convergeaient, parce que c'est
76 % des Canadiens qui seraient contre un dégel des frais de
scolarité - une hausse des frais de scolarité parce que cela ne
se présente pas de la même façon ailleurs - et ici c'est 77
%. Le ministre nous dit qu'il ne fait pas confiance aux sondages, même
s'ils sont scientifiques. Il préfère les petits carnets avec des
notes et des observations sur le quotidien. Je trouve que la démarche
peut être intéressante, mais sa validité scientifique ne
résiste pas à une longue analyse.
Je voudrais savoir si vous avez des informations plus
particulières par rapport aux effets d'un dégel des frais de
scolarité sur les étudiants adultes. Ensuite, je reviendrai sur
ce que pourrait être une consultation préalable à
l'établissement des frais de scolarité.
M. Desrosiers: M. le Président, pour répondre
à la question de Mme la députée, chez nous, comme vous
l'avez mentionné, il y a une population étudiante qui se divise
à peu près en parts égales d'étudiants à
temps plein et à temps partiel. Quant à savoir si une hausse des
frais de scolarité aurait un impact sur le niveau d'accessibilité
des étudiants à l'université, pour nous la question est
évidente, il y aurait un impact quelconque. Quant à la grandeur
de l'impact, cela reste toujours à déterminer, et, selon nous,
l'étude qui a été subventionnée ou
commanditée par la FAECUM reste quand même valide.
Si, au cours des années soixante, le gouvernement et la
population québécoise avaient accepté un certain niveau de
frais de scolarité pour permettre un rattrapage qui était
exigé de la part de la population québécoise face aux
autres provinces pour l'éducation supérieure, il reste que le
même argument est toujours valide aujourd'hui. Si les frais de
scolarité sont restés gelés pendant une période de
17 années jusqu'à tout récemment, c'était pour une
raison bien simple. Il fallait conserver et toujours augmenter cette
accessibilité à tous les niveaux socio-économiques. C'est
une philosophie qui avait été comprise en 1967-1968. Nous
trouvons quelque peu bizarre de voir que cette philosophie est maintenant
incomprise par plusieurs intervenants lorsqu'ils ne croient pas qu'il y aurait
un impact quelconque sur l'accessibilité en augmentant les frais de
scolarité. Les frais de scolarité représentent une
barrière économique pour bien des individus qui viennent de
couches socio-économiques différentes ou moins
privilégiées que la majorité des étudiants qui
fréquentent l'université. L'université reste toujours
fréquentée par des étudiants qui viennent en grande
majorité des classes moyenne supérieure et supérieure de
la population québécoise.
Il faut toujours essayer de garantir une accessibilité
équitable à toutes les couches socio-économiques, car pour
nous, la capacité d'apprendre n'est pas en relation avec la
capacité de payer des frais de scolarité plus
élevés. Si, pour contredire ce que M. Jean-Guy Dubuc
disait la semaine dernière, soit que "seulement les meilleurs
resteront", selon nous, seulement les meilleurs qui ont la capacité de
payer pourront rester. Ceux qui sont intelligents et qui ont la capacité
d'apprendre et qui sont capables de décrocher un baccalauréat
valide et de se joindre à la société
québécoise d'une façon intelligente, d'une façon
qui permettrait une augmentation de notre situation économique, alors
nous ne leur mettons pas des bâtons dans les roues en augmentant leurs
frais de scolarité. Rendons-leur la chose le plus facile possible en
maintenant les frais de scolarité à un niveau qui soit
intelligent, qui soit adéquat, qui soit modéré, et qui
représente une compréhension de la part de la
société québécoise aux problèmes de ces
étudiants.
Dans cette perspective de financement à court terme et à
long terme et des décisions qui doivent être prises en
conséquence, pour nous, POET doit être considérée
par cette commission d'une façon immédiate. La commission doit se
pencher sur notre proposition POET, car cela représente une solution
créative à une forme de financement et d'aide financière
pour les étudiants. Nous avions compris que cette commission recherchait
des solutions intelligentes et créatives aux problèmes des
universités et nous avons décidé d'en proposer
quelques-unes. Donc, nous demandons que la commission se penche
sérieusement sur la validité de notre recommandation POET.
Mme Blackburn: Sur toute cette question de
l'accessibilité, je pense que c'est le premier mémoire - il me
reste quelques mémoires à lire, mais je ne l'ai pas
retrouvé dans aucun mémoire - qui touche l'accessibilité.
Vous dites, à la page 14 de votre mémoire, en situant bien la
question, que, finalement, le problème de la représentation ou de
la sous-représentation du milieu moyen et à revenu moyen faible
à l'université, c'est beaucoup plus tôt et c'est aussi
culturel. Vous proposez quelques mesures qui viseraient davantage l'information
et la sensibilisation et qui devraient être adressées aux
étudiants des niveaux collégial et secondaire. C'est un programme
intéressant auquel je me suis particulièrement
intéressée parce que je me dis qu'effectivement, au Québec
l'écart demeure encore important par rapport à la scolarisation
en Ontario avec des conditions plus favorables. Je pense que cela devrait
parler et cela ne semble pas parler de façon égale à tout
le monde. Si on a comme objectif de hausser l'accessibilité, il faut
prendre un certain nombre de mesures et je suis d'accord avec vous qu'un
certain nombre de mesures devraient commencer par une sensibilisation et une
information destinées à des clientèles beaucoup plus
jeunes. Est-ce que vous avez pensé aller plus loin et suggérer ce
que pourrait être un programme de sensibilisation? Quelles
modalités cela pourrait-il prendre?
M. Desrosiers: Nous n'avons pas formulé formellement un
mode d'introduction d'un tel programme, mais nous croyons qu'un tel programme
devrait être incorporé à l'intérieur des
institutions universitaires et que cela devrait être une des tâches
ou un des services qu'offre l'université que de démystifier ce
qu'est une université au niveau collégial universitaire. Il
semble que de cette façon, on peut remédier à certains
problèmes de représentativité socio-économique
à l'université, si l'université va sur le terrain chercher
les étudiants où ils sont en leur démontrant que
l'université est accessible à ceux qui sont capables d'apprendre
et non pas à ceux qui sont capables de payer. Il y a beaucoup de monde
encore, pour reprendre vos termes - et lorsque vous parlez, on vous entend -
qui croit que l'université, c'est ouvert seulement aux personnes qui
sont capables de payer. C'est une différence culturelle qui existe entre
le milieu anglophone, qui a une tradition d'études avancées plus
poussée, qui est plus longue, et le milieu francophone qui, jusqu'au
début des années soixante, avait seulement certaines voies
d'accès à l'éducation supérieure. (12 h 45)
On reconnaît ce phénomène culturel et on parle
d'introduire un programme pour peut-être changer un peu la direction de
ce phénomène culturel pour permettre d'avoir un niveau
d'accessibilité de toutes les couches socio-économiques au
Québec qui soit à peu près la même chose qu'il peut
y avoir en Ontario.
Mme Blackburn: Dans votre mémoire, toujours sur cette
question des frais afférents de scolarité, vous avez au moins un
reproche et je dirais un doute. Un reproche parce qu'on impose des frais
afférents sans véritable consultation. "On impose ces frais
afférents alors que notre contrat est déjà signé
avec l'université, c'est-à-dire qu'on a déjà fait
une demande d'admission et reçu une réponse." Par ailleurs, vous
dites en page 21: "Nous devons avouer notre désenchantement quant
à la validité de la commission lorsque le gouvernement, en
permettant l'imposition de frais afférents, nous donne une bonne
indication de la direction de ces débats." Voudriez-vous
détailler ou dire tout simplement que selon vous - parce que
j'apprécie votre démarche, la qualité de votre rapport -
une remarque comme cela signifie que vous n'avez pas confiance aux
résultats des travaux de cette commission.
M. Desrosiers: Ce commentaire a été
énoncé à la suite justement de l'imposition et de la
façon dont ont été imposés et acceptés les
frais afférents de la part du gouvernement. Selon nous, lorsque nous
avons démontré précédemment que les revenus
générés par les frais afférents allaient aller en
majorité pour payer une partie du déficit courant de
l'université, on n'appelle pas cela des frais de matériel
didactique ou académique quelconque, ce sont des revenus qui sont
levés pour compenser certaines dépenses de fonctionnement. Les
dépenses de fonctionnement d'une université, selon les
critères gouvernementaux, viennent d'abord de subventions
gouvernementales, de frais de scolarité en majorité. Si les
étudiants, à l'intérieur de frais afférents ou de
frais indirects, paient plus de frais de fonctionnement, ce sont des frais de
scolarité réels et ils doivent être appelés par ce
nom.
Donc, lorsqu'on voit que, quelques mois avant le début de la
commission parlementaire qui doit réviser le financement et les sources
de revenus des universités, on permet l'introduction d'une nouvelle
source de revenus qui, selon les critères gouvernementaux, devrait
être illégale, on se dit: Les dés sont pipés quelque
peu. Il y a déjà une certaine indication de la direction des
recommandations qui vont sortir. Lorsque le Conseil des universités,
depuis environ un an, demande une augmentation des frais de scolarité et
que la promesse du Parti libéral de conserver le gel des frais de
scolarité pendant quatre ans a été quelque peu
malmenée depuis ce temps, cela nous indique qu'il y a déjà
un mouvement qui existe quant à savoir s'il y aura ou non un
dégel des frais de scolarité. Le fait d'avoir des frais
afférents, que nous appelons des frais de scolarité indirects
présents indique déjà qu'il y a une certaine
décision qui a été prise quant à faire participer
d'une façon supérieure les étudiants au financement des
universités. C'est juste une conclusion qui est là avec les
choses qui ont été mises en place.
Mme Blackburn: Vous proposez, advenant l'hypothèse
où il y aurait effectivement le gel des frais de scolarité, une
formule d'augmentation qui serait basée sur l'augmentation du revenu
minimum. Est-ce que vous avez examiné l'hypothèse qui a
été avancée par des jeunes touchant
l'impôt-éducation de 1,5 % une fois leurs études
terminées?
M. Desrosiers: M. le Président, je vais amorcer la
réponse et mon confrère Peter va la développer un peu
plus. Effectivement, nous avons été agréablement surpris
de voir que le caucus des jeunes péquistes est arrivé avec une
telle proposition, la semaine dernière. Nous avons été
agréablement surpris, parce qu'à l'Université Concordia
nous avions déjà développé un programme, qu'on
appelle POET, il y a au moins un an avant la mise sur place de ce que les
jeunes péquistes ont annoncé la semaine dernière. Donc,
pour nous, on avait déjà considéré l'introduction
d'un système de taxation quelconque pour générer des
revenus additionnels pour les universités. Ce n'était pas quelque
chose de nouveau. On reconnaissait une similarité dans le principe et
des différences dans l'application. Les différences dans
l'application vont être expliquées par Peter.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M.
Wheeland.
M. Wheeland (Peter): C'est vrai que la proposition POET est
vraiment semblable à celle qui a été adoptée par la
Commission Jeunesse du Parti québécois. Sauf que, par rapport
à la section qui est, au moins pour moi, la plus importante dans POET,
c'est un changement majeur dans le régime de prêt-bourse, pour
qu'il devienne un régime de bourse seulement et non pas de prêt.
Cette portion de POET a été oubliée ou ignorée par
la Commission Jeunesse du Parti québécois. Je crois aussi que
c'est important qu'il y ait un lien entre le nombre des années où
on doit payer les taxes et le nombre d'années d'études au
secondaire. Sinon si tu étudies trois ans à l'université
ou si tu étudies six ans à l'université et que tu paies
exactement les mêmes taxes pour la même période de temps. Ce
n'est pas un système qui est vraiment égal, parce qu'il y a
certaines personnes qui peuvent bénéficier d'une éducation
presque permanente, plus longue que la durée normale. Alors, c'est
vraiment seulement les étudiants qui étudient trois ans qui vont
payer en fin de compte plus que les autres. Je m'excuse si mon français
n'est pas toujours très clair, ce n'est pas ma langue maternelle.
Donc, à partir de cette proposition ou de ce que nous avons
essayé de dire aujourd'hui concernant POET - c'est la même chose
pour la proposition du caucus des jeunes du Parti québécois - on
pense que c'est le temps d'étudier un tel type d'idée, mais il
faut approcher le projet lentement pour s'assurer que le résultat final
d'une telle réforme soit en rapport avec le principe de
l'accessibilité et un système d'éducation accessible
à toutes les couches sociales.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela va? Je
reconnais maintenant le député de Rousseau.
M. Thérien: Merci, M. le Président. Dans votre
document, vous faites trois
grandes réflexions: premièrement, vous contestez les frais
de scolarité, à juste titre; deuxièmement, vous faites
porter la réflexion sur la permanence des enseignants et,
troisièmement, vous souhaitez une meilleure gestion; vous utilisez
même les termes "gestion obscure des universités". Ma question est
simple: Avez-vous envisagé un processsus? Par quoi eommence-t-on?
Pensez-vous que cela doive se faire de façon simultanée, la
question des frais de scolarité, celle de la réflexion sur la
permanence et celle de la gestion?
M. Desrosiers: Je crois que l'un des buts fondamentaux de la
commission est, justement, de travailler sur tous les fronts à la fois
et, donc, d'approcher chacun des points que vous avez relevés
conjointement avec les autres. Je vous ferai remarquer qu'on considère
les frais de scolarité comme étant une source de revenus possible
et qu'il ne faut pas quand même mettre l'emphase sur une augmentation des
frais de scolarité, ce qui semble être la tendance
générale.
Les frais de scolarité peuvent être augmentés si le
gouvernement garantit et démontre qu'il y aura une amélioration
de la qualité des services offerts aux étudiants et pas seulement
à partir de revenus provenant des étudiants. Si ce sont seulement
les revenus de frais de scolarité additionnels qui vont changer la
qualité de l'éducation que les étudiants recevront
à l'université, alors c'est une certaine façon de dire que
la crise financière des universités a été
créée par des étudiants et, donc, qu'ils doivent payer.
Nous sommes tout à fait en désaccord avec cette position.
Nous savons pertinemment qu'il y a de plus en plus de pression pour
faire augmenter les frais de scolarité et que c'est presque un fait
accompli, mais nous voulons garantir que l'augmentation des frais de
scolarité, possiblement, sera humaine et plus en accord avec la
situation économique que vivent les étudiants chaque jour.
En ce qui concerne la gestion des universités et la permanence
des professeurs, le tout doit être fait maintenant; c'est une situation
de crise, on ne peut plus attendre. Il y a différentes variables qui
affectent la qualité de l'éducation et toutes ces variables
doivent être approchées en même temps. On ne peut pas
retarder l'une pour travailler sur l'autre. Il faut voir tous les aspects
maintenant parce que, peut-être, dans deux ou trois ans, on va être
trop derrière les autres provinces pour rester à un niveau
compétitif. Il faut le faire maintenant et on n'a pas le choix. Il faut
faire les sacrifices nécessaires et prendre les décisions
nécessaires.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M.
Desrosiers. Je reconnais maintenant la députée de
Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: M. Desrosiers, j'aimerais vous féliciter
pour la qualité de votre mémoire. Je crois que c'est un des
meilleurs mémoires que nous ayons reçus. Je suis très
heureuse que vous ayez soulevé la question des étudiants
étrangers, surtout l'impact négatif des frais de scolarité
excessifs, malgré l'enrichissement considérable que cette
population représente pour notre société.
Il n'est pas largement reconnu peut-être, ici, au Québec
que les ententes qui existent entre le Québec et les pays francophones
n'existent pas pour les étudiants des pays anglophones. Donc, la
situation dans les universités anglophones est tout à fait
différente de celle des universités francophones. C'est une
discrimination qui existe depuis longtemps et qui mérite, je crois,
notre attention.
J'aimerais vous demander si vous avez des chiffres sur cette population
ou une idée générale du nombre d'étudiants
étrangers à Concordia. Deuxièmement, quel est leur statut
financier? Est-ce qu'il y en a quelques-uns qui sont subventionnés par
leur pays d'origine? Troisièmement, quel est leur statut en
général en ce qui concerne leur droit au travail? Vous avez
mentionné ce problème dans votre mémoire, mais est-ce que
ça s'applique à tous les étudiants étrangers et
est-ce qu'il y en a quelques-uns qui ont le droit de travailler?
M. Desrosiers: L'effet des frais de scolarité
différents pour les étudiants étrangers a eu un impact
considérable sur la population globale de ces étudiants à
l'Université Concordia. En 1978, nous avions environ 2000
étudiants que nous appelons des étudiants étrangers. En
1985-1986, le niveau était descendu à 863 étudiants. Vous
pouvez remarquer que les frais de scolarité ont un impact ou un effet
direct sur l'accessibilité à l'éducation universitaire.
Nous admettons que le cas des étudiants étrangers est un cas
extrême, mais il n'empêche que le principe s'applique à tous
les niveaux d'augmentation de frais de scolarité, selon nous.
En ce qui concerne les ententes avec les pays francophones, nous avons
remarqué il y a déjà plusieurs années
qu'effectivement il y avait une forme de discrimination non mentionnée
à l'égard des pays de langue anglophone. Nous n'avons jamais su
ou entendu la raison pour laquelle cette situation existait, mais nous
reconnaissions que cela avait un impact néfaste sur les étudiants
étrangers qui voulaient venir étudier à
l'Université Concordia. Nous considérons que l'apport de ces
étudiants est un bénéfice qui doit être
conservé et surtout encouragé de nos jours, étant
donné la perspective internationale que semblent
développer les différents pays et provinces.
Si l'on met des bâtons dans les roues ou que l'on empêche
des relations amicales entre les différents pays, on ne peut que se
créer des problèmes pour l'avenir dans d'autres domaines,
économiques, culturels ou commerciaux. Nous croyons qu'il devrait
être reconnu comme fondamental que le milieu de l'éducation
favorise la venue d'étudiants étrangers, car ceux-ci
amènent avec eux leurs bagages culturels et possiblement des ententes
économiques, culturelles et commerciales pour plus tard. Ils devraient
aussi recevoir un permis d'emploi temporaire pour la période où
ils sont au Québec, car ces étudiants, devant payer des frais de
scolarité astronomiques, en plus de payer des frais de subsistance, des
frais de loyer et des frais de vêtements, doivent être capables de
se garantir un certain revenu. Ce ne sont pas tous les étudiants
étrangers qui ont des familles capables de leur garantir des revenus
adéquats pour leur période d'études et certains d'entre
eux - nous avons certains cas - mangent des biscuits à la semaine longue
et du macaroni en boîte Kraft, pour ne pas le mentionner, à
longueur d'année. Cela ne devrait pas être des contraintes que
l'on impose à des étudiants en leur demandant de payer des frais
de scolarité élevés et en ne leur donnant pas l'occasion
d'avoir un revenu. Les étudiants étrangers sont aussi capables
que n'importe quelle autre personne que je connaisse de remplir un emploi d'une
façon intelligente et, si ces étudiants sont motivés
à demeurer au Québec et à continuer des études de
2e et 3e cycles, cela crée de la recherche, cela crée des
chercheurs. Cela crée aussi une diversification de la recherche et de la
compréhension de cette recherche et le Québec ne peut qu'en
bénéficier globalement.
Dans cette perspective, nous espérons qu'il soit possible de
permettre aux étudiants étrangers de gagner leur vie au
Québec sans avoir à sacrifier leur santé.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie,
M. Desrosiers. Et avec le consentement de la porte-parole officielle de
l'Opposition de dépasser 13 heures, je vais lui reconnaître une
dernière intervention.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je voudrais vous
remercier, au nom de ma formation politique, de votre participation aux travaux
de cette commission. Tant votre mémoire que les réponses que vous
avez données à nos questions nous apportent un éclairage
intéressant aux travaux de cette commission et peut-être
obligeront les aînés à une plus longue réflexion
avant de passer à l'action. Je pense plus particulièrement au
dégel des frais de scolarité.
Dans votre mémoire, vous avez échappé à ce
que je disais tout à l'heure, à ce penchant facile de
défendre exclusivement vos intérêts et d'acheter toutes les
propositions qui ont comme effet de réduire les activités ou les
conditions des autres groupes; je pense en particulier aux professeurs.
À nouveau, je voudrais vous en féliciter.
Vous avez parlé de deux choses sur lesquelles il me semble qu'il
serait intéressant qu'on puisse réfléchir et, si vous
aviez des réflexions à nous communiquer après
là-dessus, je serais intéressée à les recevoir.
Vous tenez pour acquis, je pense bien, c'est ce que vous nous avez dit, que les
frais de scolarité, c'est pour ainsi dire un fait accompli. Donc, vous
dites: Essayons de réduire au minimum les effets négatifs en
proposant une formule comme celle que vous nous proposez.
Connaissant le souci que vous avez touchant toute cette question de
l'accessibilité des milieux moins favorisés aux études
supérieures, est-ce que vous pensez qu'advenant un dégel des
frais de scolarité une partie des sommes - un pourcentage à
déterminer - ainsi recueillies pourrait être consacrée
à des programmes de sensibilisation destinés à ces
clientèles? Si vous aviez une réflexion là-dessus, je
serais intéressée que vous me la communiquiez.
Par ailleurs, quant à vos remarques touchant la situation des
étudiants étrangers, je pense que votre recteur tout à
l'heure aurait souhaité pouvoir aborder cette question, parce que c'est
arrivé à la toute fin de la présentation. Je pense que
vous avez répondu à une partie de la problématique
là-dessus. Il en demeure une. Je pense que ce qui était
proposé comme formule, c'était des accords de
réciprocité avec les autres pays. Donc, cela demandait l'accord
du pays pour recevoir des étudiants étrangers dans nos
universités.
Cette formule a un désavantage important, parce que, connaissant
la situation démocratique, en partie non démocratique, de
certains pays, cela limite l'accès des étudiants étrangers
à nos universités dans ce sens que seuls ceux qui sont
agréés par leur gouvernement y auraient droit ou y auraient
accès. C'est pourquoi il faut vraiment revoir, je pense, toute cette
question des frais de scolarité aux étudiants étrangers.
Je partage votre opinion, en ce sens que c'est un enrichissement certain de nos
programmes et, au plan économique, cela a des retombées non
négligeables.
Pour la qualité de votre présentation, votre
présence ici et l'effort que vous avez mis dans la rédaction de
votre mémoire, je vous remercie.
Le Président (M- Parent, Sauvé): Merci, Mme la
députée. M. le ministre de l'Enseignement supérieur et de
la Science.
M. Ryan: Je pense bien qu'il est trop tard pour vouloir reprendre
la discussion sur les questions de fond qui ont été
abordées jusqu'à maintenant. Je vais agir très
brièvement.
Je veux vous remercier de cette discussion que nous avons eue ensemble.
Je voudrais vous dire seulement une chose. À un moment donné,
vous mentionnez dans votre mémoire que tout cela se déroule
à portes closes dans les bureaux du ministère. Je pense que votre
présence ici, aujourd'hui, est la contradiction de cette affirmation. Au
contraire, le débat se poursuit bien ouvertement dans un climat
d'accueil envers tous les points de vue qui peuvent être exprimés.
Je pense que vous avez été complètement libres d'exprimer
vos points de vue. On va continuer à les discuter. Je ne voudrais pas
que vous pensiez que c'est l'esprit dans lequel on travaille, parce qu'on ne
vous aurait pas invités ici.
Cela m'a fait bien plaisir et, encore une fois, je vous remercie
infiniment. J'espère que le gouvernement va continuer à
travailler dans une atmosphère la plus ouverte possible. Je maintiens
l'affirmation que le député de Laviolette m'attribuait justement.
Il disait que j'aurais dit - et je crois l'avoir dit - que si on a pu à
une occasion ou l'autre faire une erreur, mieux vaut la reconnaître
franchement et rapidement que de la perpétuer, surtout d'en
perpétuer les effets mauvais. Je lui rappelle que son ancien chef nous
disait souvent en Chambre, quand nous étions en face de certaines
contradictions, qu'il y avait seulement les imbéciles qui ne changeaient
jamais d'opinion. De ce côté-là, je suis sûr que
l'Opposition commence, devant des interventions éclairantes comme la
vôtre, à se poser certaines questions, et cela va être
très bon pour tout le monde. Merci beaucoup.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le
ministre. Madame, messieurs, nous vous remercions. La commission permanente de
l'éducation suspend ses travaux jusqu'à 15 heures alors qu'elle
entendra l'Association des professeurs (es) à temps partiel de
l'Université Concordia.
(Suspension de la séance à 13 h 7)
(Reprise à 15 h 7)
Le Président (M. Parent, Sauvé): Si vous voulez
prendre place, nous débutons dans quelques secondes. La commission
parlementaire de l'éducation, dans le cadre du mandat qui lui a
été confié, à savoir de tenir une consultation
générale sur les orientations et le cadre de financement des
universités québécoises, reprend ses travaux.
Nous accueillons cet après-midi les représentants de
l'Association des professeurs (es) à temps partiel de
l'Université Concordia. D'abord, je veux m'excuser auprès de ces
personnes que nous devions accueillir avant l'heure du dîner.
Malheureusement, la commission a pris un peu de retard.
Alors, nous avons une heure à consacrer aux représentants
de l'association des professeurs. Si vous voulez bien, M. le porte-parole, nous
présenter la personne qui vous accompagne et enchaîner.
Association des professeurs (es)
à temps partiel de l'Université
Concordia
M. Lavigne (Jean-François): Oui, M. le Président.
J'aimerais vous présenter la présidente de l'Association des
professeurs à temps partiel de l'Université Concordia, Mme Susan
Murray.
Le Président (M. Parent, Sauvé):
Madame, bonjour.
M. Lavigne: Je suis Jean-François Lavigne. Je suis
moi-même trésorier de l'association.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M.
Lavigne, soyez le bienvenu, et, encore une fois, sentez-vous bien
è votre aise. C'est une consultation formelle, dans un cadre formel,
devrais-je dire, mais qu'on voudrait voir le plus informel possible à
l'intérieur de nos règlements, de façon que nous puissions
discuter franchement, è la recherche de solutions. Nous vous
écoutons.
M. Lavigne: Merci, M. le Président. Je vais essayer de
dire à la commission, rapidement, quelle est la nature de notre
association. C'est une association qui a été fondée
è l'automne 1985. Elle est née d'un groupe d'enseignants qui
avaient à coeur la qualité de l'enseignement et les conditions
faites à leurs pairs au sein de l'Université Concordia. CUPFA
n'est pas un syndicat, c'est une association de promotion des enseignants et
des enseignantes à temps partiel. Deuxièmement, j'aimerais
attirer votre attention sur deux erreurs qui se sont glissées dans notre
texte. La première est en page 2, ligne 11. On devrait y lire: "Au
moment où les cours dispensés par des enseignants à temps
partiel atteignent 50 % et plus de tout l'enseignement de 1er cycle dans
plusieurs universités au Québec...
Le Président (M. Parent, Sauvé):
Pouvez-vous nous situer un peu è la page 2?
M. Lavigne: "...les conditions, etc." La page 2, ligne 11.
Le Président (M. Parent, Sauvé): La ligne 11,
pardon, très bien. Oui, cela va.
M. Lavigne: On devrait y lire: "...tout l'enseignement de 1er
cycle dans plusieurs universités au Québec." Une autre erreur
s'est glissée à la page 4, ligne 3.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui.
M. Lavigne: "Cela signifie qu'il y a beaucoup plus de femmes qui
enseignent à temps partiel que de femmes enseignant à temps
plein." Voilà.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui. La
correction, c'est quoi?
M. Lavigne: Pardon? La correction, c'est le "plus" qui est
absent...
Le Président (M. Parent, Sauvé):
D'accord, très bien.
M. Lavigne: ...et qui me semble important dans cette
phrase-là.
J'aimerais essayer de situer tout d'abord la position des travailleurs
à temps partiel sur le plan de l'emploi en général. On
sait qu'il y a une augmentation rapide de la proportion de travailleurs qui
travaillent à temps partiel, qui travaillent sur des contrats courts,
donc, depuis quelques années au Québec. De 7 % de l'ensemble des
travailleurs en 1975, la proportion des gens à temps partiel a
augmenté à 12,1 % en 1982 et cette proportion est en train de
croître rapidement actuellement.
Les conditions de travail des employés à temps partiel
sont assez typiques. C'est, en général, de bas salaires, peu ou
pas de sécurité d'emploi et, généralement, pas
d'avantages sociaux, c'est-à-dire qu'on essaie toujours d'inclure le
moins possible d'avantages à l'intérieur des contrats courts, ce
qui a pour résultat d'en priver ces employés.
Dans le contexte d'un ralentissement économique prolongé,
le recours au travail à temps partiel peut permettre aux corporations de
l'entreprise privée de maintenir leur marge de profit en ajustant le
personnel aux lois du marché. Les universités, quant à
elles, faisant face aux mêmes pressions économiques, ont de plus
en plus recours aux mêmes méthodes. Les enseignants à temps
partiel jouent donc, croyons-nous, un rôle primordial dans le maintien
à flot des universités québécoises. Cependant, en
ayant recours aux professeurs à temps partiel, les universités
procèdent à des changements fondamentaux dans leurs structures
d'emploi et aussi dans leur rôle en tant qu'institutions d'enseignement,
c'est-à-dire, par voie de conséquence, dans la qualité de
l'enseignement qu'elles dispensent.
Il y a donc, en plus des enseignants à temps plein, du personnel
de soutien et d'une hiérarchie administrative, une quatrième
catégorie qu'on distingue très rarement, mais qui occupe une part
importante et croissante de la structure, les enseignants à temps
partiel. Chaque jour nous amène des articles dans les journaux où
on peut lire: Les professeurs, les professeurs, les professeurs. Il n'y aque très rarement des nuances dissociant les professeurs qui sont
assurés de la permanence de ceux qui sont engagés sur des
contrats courts. Alors, l'une des premières démystifications
qu'on doit faire quand on s'attache à la question de l'enseignement
universitaire, c'est de départager les deux groupes. Ces deux groupes
ont bien des choses en commun, cela va sans dire.
Nous croyons que la dépendance accrue des universités face
aux professeurs à temps partiel est une solution improvisée. Nous
croyons que c'est une solution à courte vue face è un
problème de financement qui est un problème à long
terme.
En novembre 1985, nous avons envoyé un questionnaire aux quelque
800 professeurs à temps partiel de l'université portant sur leurs
conditions de travail pour essayer de connaître un peu les conditions
dans lesquelles nos membres travaillent. Alors, sur 150 questionnaires
retournés, on a pu dresser un tableau, somme toute assez sombre, de la
situation actuelle des enseignants à temps partiel à
l'Université Concordia. Parmi les problèmes mentionnés, il
y avait des problèmes de nature humaine certainement: l'isolation,
l'insécurité face au réengagement, la pauvreté dans
bien des cas, le manque de représentation à tous les
échelons de l'université, le manque d'espace et, ensuite, une
certaine marginalisation face aux autres groupes de la communauté
universitaire. Je passerai sous silence, pour le moment, les différences
d'ordre salarial pour y revenir par la suite.
Alors, au moment où les cours dispensés par des
enseignants à temps partiel atteignent 50 % et plus chez nous à
Concordia et aussi dans plusieurs autres universités
québécoises, quoique la moyenne provinciale soit
inférieure à ce chiffre, les conditions de travail et salariales
extrêmement difficiles faites aux professeurs à temps partiel ne
peuvent qu'avoir un effet néfaste sur eux-mêmes, la
génération montante des professeurs, sur les étudiants et,
donc, sur la qualité de l'éducation, en général.
Ces effets se manifestent principalement où les professeurs à
temps partiel enseignent, c'est-à-dire au niveau du 1er cycle.
La thèse que nous défendons, c'est que le 1er cycle est
stratégiquement important pour toutes les études universitaires
et que, s'il y a là un laisser-aller dans la qualité de
l'éducation, c'est toute la chaîne qui s'ensuit. Donc, nous
voyons un lien direct entre les conditions d'emploi des gens qui enseignent au
1er cycle et qui sont, pour la moitié, des gens a temps partiel, et la
qualité de l'éducation. Nous demandons donc à la
commission de se pencher sur la condition des professeurs à temps
partiel en gardant à l'esprit ces quelques considérations.
Parmi les mythes qui entourent la condition d'enseignant à temps
partiel, il y a, bien sûr, celui de l'emploi réel de ces
gens-là. Beaucoup de personnes disent - et je pense que c'est monnaie
courante de l'entendre dire - que les gens qui enseignent â temps partiel
vont chercher là-dedans une masse salariale supplémentaire et
disposent d'un autre emploi. D'après l'information qu'on a recueillie
parmi les gens qui enseignent à temps partiel à Concordia, cela
nous semble complètement faux. La plupart des gens qui enseignent
à temps partiel enseignent suffisamment à temps partiel pour
s'assurer un salaire minimum. Ils n'ont pas le temps, ni l'énergie et
c'est très difficile pour eux de travailler à l'extérieur
de l'université. Ironiquement, plusieurs enseignants à temps
partiel ont des charges de cours combinées résultant de leur
emploi dans plusieurs départements qui équivalent ou qui
dépassent celles de certains enseignants à temps plein.
Une autre question particulièrement d'actualité, c'est que
plusieurs enseignants à temps partiel sont des femmes. En
général, il y a beaucoup plus d'enseignantes à temps
partiel que d'enseignants à temps partiel. On observe le
phénomène inverse chez les professeurs à temps plein. Par
exemple, durant la période 1981-1983, il y avait six fois plus de
professeurs à temps plein masculins que féminins. Donc, cela vous
donne une idée de la composition des enseignants à temps partiel,
en général. Il est certain que ce n'est pas un groupe
homogène. Il y a effectivement des gens qui viennent de l'industrie pour
donner un cours du soir. Il y a des gens qui sont à temps plein, des
enseignants à temps partiel qui donnent plusieurs cours et qui font
là une carrière dans l'enseignement. À défaut de
pouvoir être engagés à temps plein, ils le font à
temps partiel.
Nous allons parler maintenant un peu de la tâche. À
Concordia, environ 50 % de l'enseignement de 1er cycle est fait par des
enseignants à temps partiel. C'est un chiffre approximatif et, quant
à nous, assez exorbitant. Souvent, tes enseignants à temps
partiel ont à faire un travail additionnel de supervision et
d'administration, quoiqu'on ne leur reconnaisse pas, dans leur contrat
d'engagement, l'obligation de faire ce travail. La structure est faite de telle
manière que les départements desquels dépendent les
enseignants à temps partiel exigent souvent des tâches
reliées à la supervision des assistants de recherche, des
étudiants gradués, etc., qui deviennent donc des tâches
supplémentaires, extérieures au contrat, pour lesquelles tes
enseignants à temps partiel ne reçoivent pas de
rémunération. Il y a plusieurs de ces tâches
additionnelles; nous y reviendrons,
II y a un autre problème particulièrement criant
concernant les contrats d'engagement des enseignants à temps partiel, il
s'agit de la durée des contrats. Certains enseignants sont
engagés la veille de leur premier cours pour une durée de trois
mois, c'est-à-dire un trimestre. Parfois, on les engage pour la
durée des deux trimestres académiques. On leur demande parfois,
à court terme, de préparer un nouveau cours qui n'a jamais
été donné et, donc, pour lequel il n'existe pas de
contenu, sans aucune rémunération supplémentaire. On leur
fait comprendre que, s'ils ne procèdent pas à une
préparation suffisante, le contrat pourrait ne pas leur être
accordé tout simplement, ce qui revient à les inviter à le
faire en subsistant d'une autre manière à leurs besoins.
Pour ce qui est de l'intégration des enseignants à temps
partiel à la structure universitaire en général, on peut
dire qu'il y a la question de l'isolement qui vient du fait que ces
gens-là ne viennent généralement à
l'intérieur de la structure que pour enseigner parce qu'ils sont
rarement invités à participer à la vie
départementale ou à la vie facultaire. Néanmoins, à
Concordia, nous avons fait récemment un peu de progrès de ce
côté-là. Nous avons maintenant deux représentants au
conseil de la Faculté des arts et des sciences, ce qui est un
précédent pour nous. Nous espérons travailler à
avoir des représentants aux quatre conseils de facultés, de
même qu'au niveau des départements.
Il est assez rare, c'est même l'exception, qu'on consulte
l'enseignant à temps partiel sur le contenu des cours qu'il doit
dispenser. Il n'y a donc pas là de place pour l'exercice des
affinités personnelles ou des compétences personnelles. Quand je
parle de compétence, j'aimerais attirer votre attention sur le fait que
tout le processus d'engagement des professeurs à temps partiel est fait
par des individus, les chefs de département, qui n'ont à
répondre que devant le doyen de leur faculté. C'est donc un
processus qui ne se fait pas par le biais de comités, de la façon
consacrée dans le milieu universitaire, ce qui veut dire que nous avons
des cas, par exemple, où une enseignante va être remerciée
de ses services après douze années d'enseignement à temps
partiel, sans raison, sans motivation sérieuse, tout simplement parce
que la personne responsable de l'engagement en aura décidé
ainsi.
Les conséquences de , ces conditions d'engagement sur la
qualité de l'éducation sont nombreuses. Les contrats courts
amènent évidemment des préparations hâtives, des
remises de syllabus tardives, des commandes de manuels tardives aussi. Souvent,
les premières semaines du trimestre doivent être
improvisées parce que le professeur n'a pas été
avisé ou n'a reçu son contrat qu'après la première
séance de cours. C'est pourquoi nous recommandons, à la fin du
mémoire, que le contrat minimal d'engagement d'une personne à
temps partiel soit de douze mois dans le cas d'une personne qui enseignerait
durant deux semestres.
Si je regarde maintenant du côté des différences
salariales, toutes proportions gardées, le salaire d'un enseignant
à temps partiel est beaucoup plus bas que celui d'un enseignant à
temps plein pour la même tâche. C'est un fait qui résulte,
premièrement, du fait que les universités gèrent
elles-mêmes l'enseignement à temps partiel et n'ont pas à
en répondre au gouvernement. Ce sont les universités qui
planifient les budgets alors que, par exemple, les salaires des professeurs
à temps plein ont été fixés par décret, ce
qui est une problématique totalement différente dans
l'établissement des salaires.
J'aimerais ouvrir une petite parenthèse pour dire que nous avons
reçu de l'administration - qui, nous le reconnaissons, essaie de nous
offrir des conditions acceptables malgré les très difficiles
situations financières que l'université a dû traverser
depuis au moins les cinq dernières années - en janvier dernier un
"mémo" nous disant que les enseignants à temps partiel allaient
recevoir 5 % d'augmentation cette année, ce qui semble faramineux compte
tenu du fait que dans le secteur public cela semblerait beaucoup. Cette
augmentation a été simplement abolie à la fin
d'août, faute de fonds. J'ajouterais à cela que la dernière
augmentation faite aux enseignants à temps partiel remonte à
1982. C'était une augmentation de 2 %. Depuis ce temps-là, les
gages sont restés fixes. Cela vous donne un peu l'idée de la
diminution progressive, par rapport au coût de la vie, du salaire
accordé à ces gens-là.
Parlons bénéfices maintenant. Il y a des aspects des
contrats d'engagement qui sont assez discutables. Par exemple, en cas de
maladie, les enseignants à temps partiel engagés sur des contrats
doivent payer eux-mêmes, de leur poche, un substitut ou reporter leurs
cours à une date ultérieure. Le report est souvent très
difficile parce qu'on ne peut pas se permettre d'empiler des sessions
additionnelles à la fin du trimestre. En cas de maladie
prolongée, les conséquences personnelles de ces conditions
peuvent être assez dramatiques. Une bonne santé reste, en fait, la
seule alternative au bien-être social dans certains cas, parce que
l'enseignant peut perdre sa source de revenu, il peut être obligé
de débourser pour compenser son absence. En plus, il perd sa place dans
l'ordre. Il y a une espèce d'ordre tacite présent à
l'intérieur des départements. On accorde une priorité
d'engagement à ceux qui ont pratiqué à l'intérieur
du département depuis un certain nombre d'années, tout cela
n'étant pas réglementé.
Question budget d'enseignement: si je regarde l'ensemble de la situation
financière de Concordia - je me permets de mentionner encore que les
professeurs à temps partiel à l'Université Concordia
assument 50 % de l'enseignement au 1er cycle - en ce moment moins de 6 % de
tout le budget de l'université sont affectés aux salaires des
professeurs à temps partiel. Avec 6 % du budget de l'Université
Concordia, les professeurs à temps partiel assument la moitié de
l'enseignement de 1er cycle. Je pense que c'est un fait assez édifiant.
J'aimerais bien que la commission réfléchisse aux
conséquences à long terme de cette particularité.
Si on regarde maintenant le problème de l'espace, je pense que
l'administration de l'université vous a bien expliqué dans quelle
situation critique l'Université Concordia se trouve actuellement. Nous
parlerons pour les enseignants à temps partiel. Disons qu'en
général les enseignants à temps partiel ne jouissent
d'aucun espace personnel. Cela rend très difficile toute consultation
individuelle avec les étudiants. Souvent, les consultations avec les
étudiants doivent se faire à l'arrière de salles de classe
vides ou même à la cafétéria.
La distribution de charge de cours. La pratique à
l'Université Concordia, comme dans bien d'autres universités
québécoises, est la suivante. L'ensemble des cours de programmes
est attribué aux enseignants à temps plein et les cours qui sont
en sus des capacités d'enseignement, de la tâche prévisible
des enseignants à temps plein, sont attribués aux enseignants
à temps partiel. Il y a plusieurs conséquences à ce fait.
D'abord, comme je le disais, on ne se soucie que très peu de
l'affinité ou de la compétence des professeurs à temps
partiel pour enseigner tel cours. Ensuite, il est pratiquement impossible de
consolider un cours, parce que vous ne savez jamais, d'une année
à l'autre, ce que vous allez enseigner. On reconnaît dans le
milieu que, pour roder un cours universitaire, cela prend au moins trois ans
afin d'être capable d'en tirer le maximum et que les étudiants en
retirent aussi le maximum. S'il faut improviser tous les deux trimestres un
nouveau contenu de cours ou s'adapter à un syllabus qui nous est
imposé de l'extérieur, dans lequel on n'a eu
absolument rien à dire, on ne peut consolider l'enseignement.
Donc, les étudiants ont à vivre avec une situation qui est
difficile et les professeurs ont à s'y adapter, à faire le lien
entre les conditions de travail que nous trouvons très difficilement
acceptables et la réalité de la salle de cours. C'est ce que
j'entends par ballottage. Quand on parle de ballottage des enseignants d'un
cours à l'autre, c'est de cela qu'il s'agit.
Malgré tout, il y a des retombées positives au
système de l'enseignement à temps partiel. D'abord, c'est
certainement un système qui permet aux universités de garder leur
vitesse de croisière, d'offrir des programmes relativement
étoffés, tout en ayant une croissance de leurs coûts
reliés à l'enseignement modeste ou contrôlé, je
devrais dire. En général, les professeurs à temps partiel
sont très motivés, parce qu'ils ont tout à prouver. Ils
veulent se tailler une place. Ils veulent se tailler une carrière au
sein des universités. Ils ont un défi personnel à relever.
Ils essaient de le faire le mieux possible, compte tenu des conditions qui leur
sont faites.
Parlons des correctifs à apporter à cette situation dont
j'ai essayé de vous donner quelques aspects; il y en aurait tant
à dire si on entrait dans les détails. Je pense que le
mémoire est assez étoffé d'exemples concrets. Pour en
venir à résoudre certains de ces problèmes à court
terme et d'autres peut-être sur une base échelonnée, nous
recommandons, tout d'abord, qu'il y ait plus de volonté de la part du
gouvernement de connaître les conditions faites aux enseignants à
temps partiel. À cela, je dois dire que nous sommes très heureux
d'avoir été invités par la commission. Nous aimerions voir
de la part de la commission une volonté de situer toute la question de
l'enseignement à temps partiel à l'intérieur du contexte
de l'enseignement de 1er cycle. Qu'on arrête de nous mettre dans le
même sac que les autres groupes d'enseignants. Qu'on voie quels sont les
problèmes spécifiques aux professeurs que Susan et moi
représentons. (15 h 30)
Cela pourrait se faire par le biais d'une enquête ou le
ministère pourrait agir directement pour colliger les informations
nécessaires sur la condition des enseignants à temps partiel.
Nous ne disposons pas des appareils de recherche qui seraient
nécessaires pour donner à la commission un compte rendu plus
étoffé des conditions actuelles d'enseignement pour les
chargés de cours.
La deuxième recommandation que nous aimerions faire à la
commission est au niveau des inégalités salariales. C'est
là, finalement, que les enseignants à temps partiel paient le
plus le prix de la différence de statut qu'on leur fait.
Là-dessus, je suis prêt à admettre qu'une des raisons pour
lesquelles la différence de statut est si forte, c'est que les
enseignants è temps partiel ne sont pas mobilisés jusqu'à
présent, n'ont pas essayé de faire valoir leurs revendications
d'une façon globale. Les années se sont écoulées.
On n'en parle pas tellement, des enseignants à temps partiel. Au niveau
des inégalités salariales, ce que nous aimerions voir, c'est que,
quand on demande à un professeur d'enseigner un cours, on devrait
reconnaître sa compétence professionnelle d'enseignant. On devrait
donc le payer proportionnellement è sa charge de cours. S'il est
à temps partiel, c'est évident qu'il gagnera moins, mais pas pour
faire le même travail. Il gagnera moins parce qu'il enseignera moins.
Parmi les tâches impayées dont j'ai parlé tout
à l'heure, on trouve, évidemment, la participation à
l'élaboration du curriculum, ta supervision, la planification, la
préparation, l'entraînement, la correction. Toutes ces
tâches qui sont situées à l'extérieur des contrats
d'enseignement devraient être reconnues comme nécessaires è
l'accomplissement de la tâche d'enseignement. Puisqu'on nous le demande
de toute façon dans les faits, qu'on nous le reconnaisse officiellement
et qu'on nous verse donc soit une allocation ô l'intérieur du
contrat, soit un dédommagement extérieur au contrat qui compense
dans une certaine mesure pour ces tâches additionnelles dont on ne tient
pas compte généralement dans l'octroi des masses salariales. Il y
a, évidemment, des questions qui relèvent de la gestion interne
des universités et il y a d'autres questions qui relèvent plus
d'une volonté du gouvernement de voir s'améliorer la situation
globale des enseignants à temps partiel.
J'aimerais en terminant, pour qu'on puisse en débattre plus
longuement, dire que notre association endosse pleinement les lignes
directrices de l'Association canadienne des professeurs d'universités,
la CAUT qui, en quelques points, place le débat là où nous
croyons qu'il devrait se trouver. En page 14, vous trouverez ces
éléments, je les mentionnerai brièvement. La CAUT
recommande que tes mêmes garanties de liberté académique et
de non-discrimination des professeurs à temps plein soient
données aux professeurs à temps partiel; que l'accès
à tous les services de soutien de l'université soit le même
pour les enseignants à temps partiel. Pourquoi faut-il qu'un enseignant
à temps partiel se voie dire qu'il doit payer de sa poche pour ses
photocopies, qu'il ne peut pas utiliser les services de secrétariat
alors qu'il accomplit la même tâche qu'un professeur à temps
plein, toutes proportions gardées?
De même, au niveau des avantages sociaux, la CAUT recommande que
les
enseignants à temps partiel y aient accès sur une base
proportionnelle. Nous sommes bien conscients que cela implique des coûts.
Nous voulons simplement dénoncer la situation actuelle qui veut qu'un
enseignant puisse travailler pendant vingt ans à temps partiel et se
retirer sans aucun fonds de retraite puisque l'université n'en souscrit
pas au nom de ses enseignants à temps partiel.
En terminant, je mentionnerai brièvement que nous aimerions aussi
qu'au niveau universitaire - et nous travaillons très fort pour que ce
soit aussi aux niveaux facultaire et départemental - les enseignants
à temps partiel aient accès à une procédure de
grief, qu'il y ait donc une gestion plus rationnelle des ressources humaines en
ce qui a trait aux enseignants à temps partiel. Sur cela, je termine mon
exposé et je vous invite à me poser les questions qui pourraient
vous éclairer.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci beaucoup, M.
Lavigne, de votre exposé. Je dois quand même vous rappeler quelque
chose. Lorsque vous avez accepté et qu'on a accepté de vous
entendre en commission parlementaire, en fin de compte, c'était pour le
plus grand bien de la cause. On vous avait quand même fait
connaître les règles du jeu et, dans un télégramme
qui vous était adressé, le 17 septembre dernier, le
secrétaire vous informait qu'on avait environ quinze minutes pour votre
exposé. Il faut tenir pour acquis que votre mémoire avait
été lu par les autres membres de la commission. Ce que je trouve
malheureux, c'est qu'il y a un échange très enrichissant qui
pourrait découler d'une rencontre comme la vôtre et nous sommes
limités à peine à 30 ou 35 minutes. J'inviterais les gens
à poser des questions brèves et des questions pertinentes de
façon qu'on puisse aller chercher le plus d'information possible.
Mme la députée de Jacques-Cartier, adjointe parlementaire
au ministre de l'Éducation.
Mme Dougherty: Merci, M. le Président. Au nom du ministre,
j'aimerais remercier l'Association des professeurs(es) à temps partiel
de l'Université Concordia pour son mémoire. J'aimerais vous dire
que le ministre s'excuse de son absence à cause de
délibérations importantes au Conseil des ministres cet
après-midi. Il sera ici plus tard. Pardon?
Le Président (M. Parent, Sauvé): Allez, madame.
M. Jolivet: C'est sur les frais de scolarité?
Mme Dougherty: Pas sur les frais de scolarité. On discute
des frais de scolarité ici.
M. Jolivet: Ah bon!
Mme Dougherty: Ce matin, nous avons beaucoup parlé de vous
et de votre situation, et, cet après-midi, c'est à votre tour de
parler de vous-mêmes. Nous avons appris ce matin que votre
présence à l'Université Concordia constitue une des
spécificités importantes qui différencient Concordia par
rapport aux autres universités. Comme vous l'avez souligné dans
votre mémoire, les enseignants à temps partiel jouent donc un
râle primordial dans le maintien à flot des universités
québécoises.
Votre mémoire est axé surtout sur la réalité
de votre vécu au sein de l'Université Concordia. Vous avez
dessiné un portrait assez noir de vos conditions de travail - je
n'aimerais pas répéter ces conditions - le manque d'avantages
sociaux, les bas salaires, aucune sécurité d'emploi, isolement,
etc. Ce matin, malgré tout cela, on a parlé d'un avantage; vous
apportez aux étudiants un certain enrichissement parce que vos
expériences à l'extérieur de l'université sont
différentes de celles des professeurs à temps plein à
l'intérieur. On n'a pas parlé de cet avantage, mais je crois
qu'en raison de votre présence l'Université Concordia est capable
d'une certaine souplesse et est sensibilisée aux besoins de la
communauté pour laquelle l'Université Concordia est
renommée.
Dans votre mémoire, vous avez dit à plusieurs reprises que
votre situation avait un impact négatif sur la qualité de
l'éducation, mais vous en avez parlé très peu
effectivement. J'aimerais que vous précisiez cet impact négatif
sur la qualité de l'éducation. Quels sont les impacts
négatifs pour les étudiants? Si ma mémoire est bonne, les
étudiants n'ont pas mentionné cet aspect ce matin.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M.
Lavigne.
M. Lavigne: D'abord, M. le Président, j'aimerais dire
qu'il est certain que l'enseignement à l'université s'enrichit de
contacts avec l'extérieur. À l'Université Concordia, c'est
particulièrement vrai parce que beaucoup de gens sont impliqués
dans le milieu. De plus, comme association, nous ne défendons pas tous
les professeurs à temps partiel de la même façon.
C'est-à-dire qu'il y a des groupes de professeurs à temps partiel
qui ont besoin d'être défendus plus que d'autres. Cela vient du
fait qu'il y a des différences départementales et facultaires
très importantes: dans certains départements, les conditions sont
meilleures que dans d'autres. C'est donc dire que dans certains
départements les conditions sont pires.
L'ensemble des commentaires que j'ai
faits vise donc à sensibiliser la commission à une
série de contradictions présentes dans le régime
d'engagement des professeurs à temps partiel. J'ai mentionné
quelques conséquences néfastes sur la qualité de
l'éducation; j'ai parlé de la durée des contrats, des
délais que l'on donne aux professeurs, du ballottement des professeurs
d'un cours à l'autre qui les empêche de consolider leur
enseignement, donc qui a une conséquence directe sur les
étudiants, parce qu'un cours qui n'est pas rodé, que l'on
enseigne pour la première fois, n'est jamais d'aussi bonne
qualité qu'un cours que l'on enseigne depuis trois ans. Enseigner depuis
trois ans le même cours, c'est une rareté pour un professeur
à temps partiel. Souvent, vous avez enseigné d'une année
à l'autre deux sections totalement différentes, parfois des cours
nouveaux. Alors, il y a beaucoup d'improvisation à ce niveau.
D'autres conséquences pratiques des conditions de travail des
enseignants à temps partiel sur la qualité de l'éducation.
J'ai parlé de la possibilité pour l'étudiant de rencontrer
son professeur dans des conditions acceptables. À toutes fins utiles,
l'absence d'espace personnel chez les enseignants à temps partiel
résulte en des contacts très difficiles avec les
étudiants. Je pourrais continuer longtemps comme cela. Je ne sais pas si
je réponds à votre question.
Mme Dougherty: Ce seraient plutôt l'improvisation et le
manque de stabilité, le manque de continuité, etc., qui
influencent la qualité de l'éducation pour les étudiants,
selon votre analyse.
M. Lavigne: II y a un problème global de prise en compte
des enseignants è temps partiel dans la planification des services
d'enseignement. Je pense que l'université donne des services
d'enseignement au même titre qu'une entreprise donne d'autres genres de
services.
Si on considérait les enseignants à temps partiel non pas
comme des bouche-trous, mais plutôt comme des êtres humains, des
professionnels de l'enseignement dévoués à ce qu'ils font,
on leur donnerait l'occasion de se prononcer sur le contenu des cours qu'ils
enseignent, on leur donnerait aussi le loisir de se prononcer sur les horaires.
On a des enseignants qui finissent à 22 h 30 et qui enseignent encore
à 8 h 30 le lendemain matin, parce que tout cela résulte d'un
horaire qu'on a comblé en dernière minute, une fois la
tâche d'enseignement à temps plein établie.
Mme Dougherty: Alors, quels sont les problèmes
réels que vous avez soulevés qui relèvent de la
responsabilité de l'administration de l'université qui est
responsable de la gestion interne par rapport aux problèmes qui
relèvent des responsabilités gouvernementales,
c'est-à-dire le financement de l'université? J'ai de la
difficulté à les démêler, parce qu'il me semble
qu'il y a plusieurs problèmes qui relèvent de l'université
même. (15 h 45)
M. Lavigne: Cependant, il était nécessaire de
brosser un tableau d'ensemble des problèmes et des conditions de
travail. Cela dit, je pense que les problèmes d'ordre financier sont
peut-être plus spécialement du ressort du gouvernement dans
l'immédiat, alors que les problèmes de gestion des ressources
humaines, les problèmes d'ordre pédagogique sont plus du ressort
de l'université. D'une façon très concrète, comment
se fait-il qu'on puisse donner la moitié des cours, donc engager le
personnel nécessaire dans une université pour donner la
moitié des cours, sans qu'il y ait de ligne directrice issue du
ministère de l'Éducation et que les universités aient la
pleine responsabilité de faire ce qu'elles veulent avec ce groupe
d'enseignants, alors qu'on daigne pour l'autre groupe établir au niveau
ministériel toute une série de normes?
J'aimerais faire une courte parenthèse pour dire que la
croissance rapide de l'enseignement à temps partiel a un peu
débordé les prévisions à un certain moment, au
début des années quatre-vingt, et qu'on se retrouve dans un
univers très peu réglementé. Il y a tout à faire
dans ce domaine, je pense.
Mme Dougherty: En ce qui concerne la situation ailleurs - c'est
évident que cette situation existe dans d'autres universités
ailleurs - the Canadian Association of University Teachers s'est penchée
sur ce problème et vous avez inclus quelques-unes de ses recommandations
à la fin dans une annexe. Est-ce qu'il y a des universités
ailleurs qui ont réussi à régler ce problème?
D'abord, est-ce qu'il y a une situation parallèle à celle que
vous vivez à Concordia et comment a-t-on réglé le
problème?
M. Lavigne: Mon Dieu, régler le problème, je pense
c'est un voeu qu'on ne peut que faire actuellement. Je ne pense pas qu'il y ait
de solution permanente à ce problème. Il y a des
universités québécoises où les chargés de
cours ou les professeurs à temps partiel, selon le nom qu'on leur donne,
se sont regroupés au sein de syndicats. Cela n'a pas
résulté en une solution universelle à tous les
problèmes. Il y a beaucoup de travail à faire au niveau local.
C'est l'un des buts de notre association. Les lignes directrices de
l'Association canadienne des professeurs d'universités nous semblent un
encadrement raisonnable des conditions d'enseignement des professeurs à
temps partiel. Il est certain que ce sont des principes. D'ici là, il y
a beaucoup
d'adaptation qui doit être faite. Alors, je ne pourrais pas vous
répondre qu'il existe quelque part une université qui nous sert
actuellement de modèle. Nous luttons face à nos conditions
locales et à nos problèmes locaux de la meilleure façon.
C'est tout ce qu'on peut faire pour le moment.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Lavigne.
Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Monsieur, madame,
cela me fait plaisir de vous accueillir. Je pense qu'il y a un deuxième
groupe de chargés de cours de l'Université de Rimouski qui
viendra faire des représentations devant nous. Je ne reprendrai pas les
principaux éléments de votre mémoire. Je pense que vous
nous avez dressé un tableau relativement complet et, je dirais,
relativement sombre des conditions de travail des professeurs à temps
partiel ou de ce qu'on appelle les chargés de cours. Vous avez
souligné un fait qui ne semble pas avoir retenu l'attention, mais qui me
préoccupe toujours lorsqu'on examine les questions de travail à
temps partiel, c'est la représentation des femmes dans ces secteurs. Je
disais ce matin que, selon des études américaines, on constate
qu'il y a deux nouvelles classes de pauvreté, ce sont les femmes et les
enfants. C'est directement associé, parce que, évidemment, les
femmes étant dans cette condition et responsables de famille dans
plusieurs cas, cela nous prépare un avenir plutôt sombre.
J'ai deux questions. D'abord, Mme la députée de
Jacques-Cartier, je pense qu'il faut faire une distinction entre engager des
professeurs à temps partiel pour aller chercher expressément une
expertise particulière dans un domaine donné, comme cela se fait
dans certaines grandes institutions françaises, de même qu'ici, et
en faire une politique. Ici, ce qui nous concerne par rapport aux conditions
qui sont faites aux gens qui travaillent à temps partiel, c'est que,
souvent, cette politique veut tout simplement avoir un personnel qui permette
de boucler le budget de l'université - je pense qu'il faut faire
attention lorsqu'on examine ce genre de question - et que les conditions de
travail telles que vous nous les avez présentées aient des effets
sur la qualité de l'enseignement, cela m'apparaît
indéniable. On ne peut pas demander à des gens de préparer
à la dernière minute des cours tout à fait au point. Et,
sans contact avec leurs collègues, c'est encore plus difficile.
Je n'irai pas plus loin que cela mais il y a deux questions qui me... On
dit que quatre cours c'est l'équivalent temps complet pour des
professeurs qui ont leur permanence parce qu'on estime qu'à quatre cours
c'est 50 % à l'enseignement, 35 % à la recherche et 15 % à
l'encadrement, à l'administration. Si on voulait évaluer ce que
valent vos services, à ce moment-là on dirait, si je me base sur
ces 50 %, c'est 50 % du salaire d'un prof qui entre à
l'université pour la première année. J'essayais d'avoir
une base. C'est difficile à évaluer tel que
présenté mais on sait que c'est entre 9000 $ et 12 000 $ à
quatre cours parce que selon les facultés c'est variable.
M. Lavigne: Je ne suis pas certain d'avoir bien compris votre
question. Il y a en effet une norme qui limite le nombre de crédits
qu'un enseignant à temps partiel peut donner à l'intérieur
d'une année académique. Le nombre est de douze
crédits.
Mme Blackburn: Oui, je pense que c'est trois ou quatre.
M. Lavigne: On limite le nombre probablement pour qu'il n'y ait
pas de situation contradictoire où les enseignants à temps
partiel enseigneraient autant et plus, dans un même département,
que des enseignants à temps plein, pour la moitié du salaire.
Mme Blackburn: Par rapport à la tâche globale d'un
professeur régulier, les quatre cours - parce que c'est le maximum,
c'est la limite - que vous offrez, cela représente quelle portion de la
tâche d'un professeur à temps complet?
M. Lavigne: II existe plusieurs façons de calculer cela.
Il est certain que si on prend en compte les professeurs qui sont en
année sabbatique, ce qui est estimé à un professeur sur
sept durant chaque année académique, les professeurs à
temps plein enseignent moins de cours que l'ensemble des professeurs à
temps partiel. Au niveau de la comparaison des crédits enseignés,
un professeur à temps plein enseigne généralement 18
crédits mais il y a toute la procédure de réduction de la
charge de cours pour entreprendre des recherches. Donc, cette proportion
normale de 18 crédits par professeur à temps plein est souvent
réduite pour fins de recherche ou d'administration, c'est-à-dire
de contribution à la gestion des départements.
Mme Blackburn: Cela va. Je comprends votre réponse parce
que j'avais oublié que chez vous c'étaient six cours pour * les
professeurs et non pas quatre.
Deux brèves questions. Vous dites dans votre texte en page 3:
"D'autres, une minorité si l'on se fie à nos données,
détiennent un emploi rémunéré à temps plein
à l'extérieur de l'université en plus de la charge de
cours." Avez-vous des données plus précises sur cette
question?
M. Lavigne: Je n'ai pas de chiffres mais on a posé cette
question dans le questionnaire qu'on a distribué à tous les
enseignants à temps partiel. Ils étaient rares ceux qui se
réclamaient de travailler à temps plein à
l'extérieur de l'université.
Mme Blackburn: Qui faisaient double emploi.
M. Lavigne: Souvent ils étaient engagés pour deux
cours, donc c'était leur base principale de subsistance.
Mme Blackburn: Dans vos recommandations - je ne voudrais pas
porter de jugement sur la valeur, parce que cela me semble quasiment des
conditions généralement reconnues dans la société;
cependant, vous comprendrez que cela relève davantage de
l'administration que de la présente commission - à la page 14, la
12e recommandation, droits des enseignantes, commission parlementaire sur la
condition des enseignants - j'imagine que cela concerne aussi les enseignantes
- à temps partiel. Cela concerne davantage les travaux de cette
commission. Je pense que le ministre pourrait probablement là-dessus,
comme il l'a fait pour un groupe de professeurs la semaine dernière,
imaginer une façon de recueillir des données qui nous
permettraient d'avoir, par rapport à cette question des professeurs
à temps partiel, des chargés de cours, une vision un peu plus
d'ensemble de ce qui se fait dans nos différentes universités et
des conditions qui leur permettraient d'assurer un enseignement de
qualité. Si le ministre veut simplement prêter attention une
petite minute, je l'inviterais à examiner la recommandation 12. Sans
penser nécessairement à une commission parlementaire, quoique
cela pourrait être fort intéressant, on pourrait certainement
penser à un groupe de travail qui nous permettrait de faire la
lumière sur cette question, de proposer ou d'avoir une idée de ce
que devrait être un minimum d'encadrement et de conditions de travail
pour ces employés.
Le temps file. Je vous remercie.
Le Président (M. Parent, Sauvé): C'est encore
à vous pour conclure, madame.
Mme Blackburn: Bien. Je veux vous remercier. Je pense que la
balle est dans le camp du ministre et je ne pourrais pas répondre
à sa place, mais je veux simplement vous dire que je suis
particulièrement préoccupée de l'ampleur que ce
phénomène a prise dans plusieurs universités è
l'occasion du développement des jeunes universités et,
évidemment, encouragé, si on peut parler ainsi, par les
compressions budgétaires. La grande question qui se pose, c'est: Si
c'est une bonne chose, quelles sont les conditions qui permettraient de
préserver la qualité de l'enseignement? La deuxième
question à laquelle il faudra répondre, c'est: Dans quelle
proportion est-ce souhaitable, que l'enseignement soit dispensé à
40 %, 50 % ou 60 %? Je pense que c'est essayer d'établir ce qui serait
à peu près une norme acceptable. Je sais que cela a
déjà été établi par rapport à ce que
devait constituer le minimum de professeurs à temps complet,
réguliers, mais dire qu'on a fait cette démarche et cette
réflexion par rapport à l'ensemble des universités du
Québec pour avoir un portrait un peu plus juste, je ne connais pas
d'étude là-dessus.
Je trouverais cela intéressant, puisque cette commission a comme
responsabilité, comme mandat, d'examiner à la fois les
orientations et le financement. Quand on parle d'orientations, j'imagine qu'on
s'intéresse aussi à la qualité.
Je vous remercie infiniment de votre participation aux travaux de cette
commission et soyez assurés que, pour nous, par rapport au portrait que
vous avez dressé des conditions qui étaient les vôtres,
cela pourra certainement en faire réfléchir plusieurs et nous
amener à chercher des solutions. Je vous remercie.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, madame.
Je reconnais maintenant le ministre de l'Enseignement
supérÀeur et de la Science pour le mot de la fin.
M. Ryan: Je voudrais tout d'abord m'excuser d'avoir dû
m'absenter pour assister à une réunion du Cabinet tantôt.
Cela m'a empêché d'être présent pour la
présentation de votre mémoire, mais j'en avais pris connaissance
avant la réunion de cet après-midi, évidemment. J'ai pris
bonne note des conditions que vous décrivez dans le mémoire de
même que des recommandations que vous y formulez.
Nous ne sommes pas en mesure pour l'instant de tirer de conclusions. Le
volume d'activités que les chargés de cours représentent
dans nos institutions d'enseignement universitaire est très
élevé dans plusieurs cas. À Concordia, vous autres, vous
dites que c'est 50 %. L'université nous disait ce matin que
c'était autour de 33 % du total des cours. On vérifiera cela de
plus près, mais c'est sûrement quelque part entre 33 % et 50 %.
C'est déjà une proportion considérable qui entraîne
des conséquences pour vous, pour la formation qui est donnée aux
étudiants également à toutes sortes de points de vue. Je
pense que nous avons intérêt à examiner ces
conséquences de près, de même que les problèmes qui
ont été soumis à notre attention dans votre
mémoire.
À l'occasion de l'étude que nous ferons sur la tâche
d'enseignement des professeurs
réguliers, nous trouverons le moyen de faire une étude sur
le volet que vous avez porté à notre attention aujourd'hui. Je ne
connais pas pour l'instant les modalités précises que cet examen
revêtira, mais il me fait plaisir de dire à la
députée de Chicoutimi que nous allons examiner ce volet du
problème avec attention au cours des prochaines semaines et nous
comptons sur votre collaboration.
Une chose que je remarquais dans votre mémoire: vous avez fait
une enquête. Je pense qu'il y a quelque 800 professeurs à temps
partiel, chargés de cours plutôt, et professeurs à temps
partiel, à Concordia. II y en a seulement 150 qui ont répondu
à votre consultation. Il va falloir qu'on ait des indications assez
claires sur la situation de l'ensemble et cela prendra sans doute des
renseignements plus complets. Je pense que ce que vous avez donné
reflète un portrait qui nous interpelle et auquel nous devons nous
intéresser. Je vous remercie infiniment. Le volet que vous avez
présenté est très important non seulement pour Concordia,
mais pour l'ensemble des universités aussi. On ne peut pas jouer
l'autruche toujours. Ce problème, je pense qu'il nous est posé et
il faut l'examiner. Je vous remercie.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le
ministre. Merci, Mme la députée, M. Lavigne, Mme Murray. La
commission parlementaire sur l'éducation suspend ses travaux pour
quelques minutes et dans quelques minutes nous allons entendre - un instant -le
National Union of Sir George Williams University's Employees.
(Suspension de la séance à 16 h 2)
(Reprise à 16 h 3)
Le Président (M. Parent, Sauvé): S'il vous
plaît, veuillez prendre place. La commission permanente de
l'éducation reprend ses travaux et accueille le National Union of Sir
George Williams University's Employees qui a comme porte-parole Mme Claire
Delisle.
Mme Delisle, nous vous souhaitons la bienvenue et nous vous remercions
d'avoir répondu à l'invitation de la commission parlementaire sur
l'éducation.
La commission a prévu de vous entendre durant une heure. C'est
donc dire que vers 17 heures, nous suspendrons pour entendre un autre groupe.
La période de temps est divisée comme suit: vous avez environ 15
minutes pour faire votre présentation et après cela suivra une
période d'échange de propos de 45 minutes environ avec les
membres de la commission.
Mme Delisle, si vous voulez nous présenter la personne qui vous
accompagne et commencer votre présentation. NUSGWUE
Mme Delisle (Claire): J'aimerais présenter M. Peter
Randell, qui est mon confrère siégeant au comité de
négociations présentement.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M.
Randell, bonjour. Allez, madame.
Mme Delisle: M. le Président, M. le ministre, mesdames et
messieurs les délégués de la commission, je tiens è
vous remercier au nom de tous les membres de notre syndicat des employés
de soutien de l'Université Concordia de l'occasion de nous faire
entendre. S'il n'y a pas d'objection, je vais passer à la lecture du
mémoire.
Nous sommes un petit syndicat d'employés de soutien de la
bibliothèque à l'Université Concordia, campus George
Williams. NUSGWUE est affilié depuis 1970, et nous avons
témoigné des grands changements dans l'éducation
universitaire. Notre inquiétude pour l'avenir des universités au
Québec reflète l'accroissement d'un consensus
général, mais aussi nous avons une perspective
particulière. Nous voulons profiter de l'occasion pour expliquer notre
point de vue et présenter un cas qui, peut-être, n'est pas
toujours pris en considération par ceux qui décident du destin et
de la direction de l'enseignement supérieur dans cette province.
Le National Union of Sir George Williams University's Employees (CSN)
représente 105 employés de soutien de la bibliothèque qui
travaillent dans trois édifices au centre-ville. Ceux-ci sont la
bibliothèque des sciences et génie, la bibliothèque Norris
qui comprend un service de prêts, un département de
référence, de publications gouvernementales, de prêts entre
bibliothèques, un département de matériaux non
imprimés, les services techniques qui comprennent les
départements de catalogage et d'acquisition. Nos classes d'emploi sont
variées quant aux responsabilités et comprennent des
surveillants, des secrétaires, des bibliotechniciens, des
spécialistes en publications gouvernementales et en matériaux non
imprimés, et des commis, etc.
Nous croyons que la bibliothèque est une partie essentielle de la
structure universitaire, qui joue un rôle central de support dans le
processus d'éducation. Par conséquent, depuis presque deux
décennies, nous avons observé et participé à la
dynamique de l'éducation au Québec.
Il y a eu un progrès au cours des années, dans le sens que
le peuple québécois a eu l'opportunité de poursuivre une
éducation supérieure. Malheureusement, depuis peu, ce
progrès est menacé. Ces
menaces s'attaquent à la fois aux étudiants et à
ceux qui rendent les services à la clientèle. C'est dans ce
contexte qu'on s'adresse à vous.
Les employés de soutien de la bibliothèque à
Concordia n'ont peut-être pas reçu la reconnaissance qu'ils
méritent, c'est-à-dire, pas dans un sens positif. C'est
regrettable que, dans un climat syndical, une situation de confrontation soit
presque toujours obligatoire. Cette situation va à l'encontre des
principes de coopération entre la gérance et les travailleuses et
les travailleurs, l'enrichissement de travail et la productivité. Il
nous apparaît que si on est régi par une convention collective,
cela doit créer la stabilité, augmenter la qualité de
travail et améliorer les communications. Malheureusement, ce n'est pas
toujours le cas.
Les conditions de travail qui se détériorent, les
délais pour combler les postes vacants qui, de plus en plus, sont
prolongés et les augmentations des charges de travail contribuent au
stress pour les gens concernés.
Nous croyons que cette situation est directement reliée au
sous-octroi des subventions depuis des années à
l'Université Concordia.
Depuis des années, le nombre d'étudiants augmente au
même rythme que les subventions du per capita diminuent. Cette situation
est grave et amoindrit le râle que l'université doit jouer dans
notre société, c'est-à-dire de fournir une
éducation universelle et accessible à tous. Par
conséquent, la bibliothèque, qui a la responsabilité de
fournir les services à la communauté universitaire, en souffre
plus.
Il devient difficile d'offrir le meilleur service possible à une
clientèle toujours exigeante, c'est-à-dire les étudiants,
les professeurs et le public, en faisant face à des coupures
budgétaires de plus en plus sévères. Tout le
système fonctionne sous une très grande pression. Faire son
possible au travail devient frustrant quand on est toujours assujettis à
des subventions incertaines et aux conséquences que cela
entraîne.
Nous sommes au courant de la situation économique globale dans
laquelle se trouve le gouvernement. Cependant, nous rejetons l'implantation des
solutions à court terme pour les problèmes à long terme.
Aussi, nous ne sommes pas du tout d'accord avec les coupures de salaire
imposées par - le gouvernement précédent. Faut-il dire que
cela ne fait rien de bon pour le moral des employés de soutien de savoir
qu'il est impossible pour eux de se maintenir avec le coût de la vie?
Nous sommes d'accord avec les études et les recommandations du
Conseil des universités qui soulignent clairement la menace
qu'entraîne le sous-octroi imposé aux universités. Offrir
la meilleure éducation possible avec les meilleures facilités et
équipements possible est d'une suprême importance pour garantir
aux futures générations qu'elles seront capables d'être sur
un pied d'égalité avec le monde entier sur les bases
intellectuelles, techniques et spécialisées.
L'avis du Conseil des universités au ministre sur les
orientations du financement universitaire recommandait fortement des
changements immédiats à la méthode de subventionner les
universités québécoises. Toutefois, nous avons certaines
réserves à propos d'une hausse des frais de scolarité et
du réaménagement du système de prêts et bourses. On
court le risque de rendre les universités accessibles seulement à
l'élite qui a les moyens de payer.
Un des domaines les plus importants qui ne devrait pas être
négligé est celui des nouvelles technologies. C'est absolument
nécessaire d'obtenir suffisamment de subventions pour assurer non
seulement l'entretien de l'équipement mais aussi l'acquisition de
nouveau matériel logiciel. Au cours des années, à la
bibliothèque, nous avons acquis des systèmes automatisés
et des matériaux lisibles à la machine. Cependant, il nous en
faut plus, étant donné que le changement pour un système
d'entreposage et récupération d'information est dynamique.
On peut peut-être supposer qu'avec le "bureau du futur" et le
rôle que jouent de plus en plus les appareils modernes qui
allègent le travail, une organisation aurait besoin de moins
d'employés pour fonctionner avec la même efficacité. Mais,
quand on examine les statistiques du service à la clientèle
durant les cinq dernières années, on s'aperçoit qu'il y a
eu une augmentation dans presque tous les départements de la
bibliothèque quant aux services dispensés au public, ce qui a eu
un effet de balance, l'un élimine l'autre. Nous avons besoin d'au moins
du même nombre d'employés ainsi que des améliorations
technologiques pour demeurer au même niveau d'efficacité et de
compétence dans lequel nous nous trouvons maintenant.
Les récentes études démographiques nous donnent une
idée de la population probable des universités dans le futur.
Également, le nombre d'étudiants admis sur une base adulte qui
entrent ou retournent aux études augmente d'année en
année. Le portrait démographique changeant des clients des
universités doit être pris en considération quand on parle
d'organisation et de financement pour le futur. L'Université Concordia a
toujours été au premier rang dans l'attraction de ce type de
clientèle. Alors, afin de fournir un service supérieur, nous
devons maintenir un ratio d'employés/technologies optimal.
Bien sûr, la direction de la bibliothèque, étant
forcée par les autorités de l'université, a, durant les
dernières années, employé des pratiques un peu douteuses
quant au niveau de la main-d'oeuvre. Beaucoup d'employés à temps
partiel ont été embauchés au salaire minimum pour faire un
travail équivalent au travail des employés à temps plein.
Cette situation a eu pour effet de retarder ou même d'empêcher
l'affectation de plusieurs postes vacants dans les secteurs technique et
public. Il y a eu un laps de temps inexcusable avant que les postes
temporairement vacants, à cause de congés de maternité ou
d'autres congés autorisés, soient comblés. Nous
commençons à craindre que la direction ne soit pas vraiment
intéressée à fournir le meilleur service possible pendant
qu'elle décime systématiquement notre main-d'oeuvre. Maintenir un
niveau de consistance quant aux services rendus est très difficile dans
ces circonstances. Ceci est le résultat regrettable de coupures
sévères.
Il nous paraît qu'on s'est servi de nous comme émissaires
pour cette partie du déficit. De plus, ces pratiques de la direction
nous ont forcés à soumettre un nombre immodéré de
procédures de griefs et d'arbitrage. Inutile de dire que ceci
n'encourage ni des relations de travail décentes, ni un climat de
travail productif.
Nous espérons que le nouvel édifice de la
bibliothèque qui nous est promis sur le campus Sir George Williams va
enfin résoudre la plupart des problèmes de l'édifice
principal, c'est-à-dire le manque chronique d'espace pour étudier
et pour loger la collection, des facilités trop étendues, une
atmosphère de travail affreuse dans les édifices Norris et
Schuchat. Malheureusement, nous avons même des réserves quant
à ladite situation. La planification du nouvel édifice
procède très lentement pour une variété de raisons
qui nous restent mystérieuses. Oui, mystérieuses, parce qu'on ne
nous a pas inclus à aucun des comités de planification. Cette
situation nous est inacceptable, parce que nous croyons être bien
équipés pour fournir des recommandations concrètes et
réelles pour le fonctionnement de la nouvelle bibliothèque,
étant donné notre expérience de jour en jour dans le
service. Quand on s'attend à travailler là un jour, il est
frustrant de demeurer en dehors de toute planification. Il nous semblerait
plutôt raisonnable d'utiliser toutes les expertises possibles avant que
les problèmes se soulèvent.
Nous espérons avoir touché plusieurs domaines
d'intérêt dans cette présentation. Dans le panorama
macro-économique et sociopolitique d'éducation au Québec,
nous jouons un rôle important.
C'est peut-être difficile de réaliser que nous sommes
concernés par l'effet des politiques gouvernementales sur la
société en général et non pas seulement sur notre
petit groupe. En effet, nous croyons fortement que notre intérêt
reflète les intérêts de la population
québécoise. La promotion et l'entretien du meilleur climat de
travail possible afin de fournir un service optimal au plus large spectrum de
notre société, les futures générations en
bénéficieront et récompenseront la nation.
Nous voulons déposer les recommandations suivantes: Augmenter les
subventions dans toutes les universités au Québec et surtout
Concordia; négocier de bonne foi avec les syndicats dans le secteur
public; promouvoir la qualité des services et du travail; alléger
le déficit budgétaire; améliorer les ratios entre
étudiants et professeurs; implanter des stratégies à long
terme; atteindre un équilibre entre les travailleurs, les travailleuses
et la technologie et permettre aux universités de se maintenir avec les
améliorations technologiques. (16 h 15)
Alors, j'aimerais souligner que le plus gros problème que l'on a
est que l'on n'a pas comblé les postes vacants pendant la période
1985-1986. Alors, notre syndicat, qui comptait 108 employés, a
maintenant 12 postes de coupés, je crois, et ceci est inexcusable. C'est
une situation qu'on ne peut pas tolérer; les charges de travail ont
augmenté quelque chose de rare, puis il y a aussi d'autres
problèmes quant au manque chronique d'espace. On se répète
un peu parce qu'on est la quatrième organisation de l'Université
Concordia qui présente un mémoire, mais je vais tout de
même le répéter: Le manque d'espace est affreux, ainsi que
les postes vacants. Merci.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci beaucoup,
madame. Maintenant, nous allons procéder à la période
d'échange de points de vue. Je reconnais le ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science, M. le député d'Argenteuil.
M. Ryan: Mme Delisle, il me fait plaisir de vous rencontrer,
ainsi que celui qui vous accompagne et dont le nom m'échappe.
Une voix: M. Randell.
M. Ryan: Très bien. Il me fait plaisir de vous rencontrer.
Je suis bien content que vous soyez venus rencontrer la commission parce que
nous voulons que tous ceux qui oeuvrent dans le milieu universitaire aient la
chance de dire leur mot à l'occasion des audiences de la commission.
Dans le message que j'avais livré à la commission et à nos
concitoyens au début de nos travaux, j'avais bien dit que nous envoyions
nos salutations à tous les membres de la communauté
universitaire, y compris les employés de soutien. Par
conséquent, soyez bien chez vous avec nous. "You belong", comme on
dit.
Vous nous avez particulièrement parlé dans votre
mémoire de la situation de la bibliothèque et des
conséquences qui ont découlé des politiques des
dernières années pour la catégorie de travailleurs que
vous représentez. Le problème que vous soulevez est assez
général. Il n'existe pas seulement à l'Université
Concordia, il existe maintenant dans les municipalités, dans la fonction
publique, dans le système d'enseignement aux autres niveaux,
collégial, secondaire et primaire, il existe aussi dans les
hôpitaux et dans les services sociaux. En gros, ce qui est arrivé,
d'après moi, c'est que, pendant un certain nombre d'années, on y
est allé très libéralement avec les conventions
collectives, surtout au chapitre de la sécurité d'emploi. On
avait donné aux travailleurs des garanties qui avec le temps se sont
révélées trop fortes pour ce que nos institutions
pouvaient porter. Depuis quelques années - il n'y a pas eu de directive
d'émise; cela a commencé avec le gouvernement
précédent et cela continue dans une certaine mesure sous le
gouvernement actuel - il y a tendance à resserrer. Les services public
et parapublic sont enclins à engager de moins en moins de permanents.
Ils procèdent de plus en plus par l'engagement de travailleurs
occasionnels, de travailleurs surnuméraires, de travailleurs à
temps partiel, etc. On l'a vu dans le secteur de l'enseignement, il y a une
multiplication des chargés de cours et des professeurs à temps
partiel. Dans les hôpitaux, on s'aperçoit que des engagements de
nouveau personnel infirmier ou de nouveau personnel de soutien, il ne s'en fait
pratiquement pas sur une base permanente. Il y a un roulement de personnel
beaucoup plus élevé que ce que l'on voyait autrefois.
Ceux qui sont chargés des fonctions de gestion ont senti le
besoin d'avoir une plus grande mobilité dans la gestion de ces grands
ensembles public et parapublic. De la manière dont nous étions
partis, nous allions tout droit vers un corporatisme étouffant. Il a
fallu élargir les voies et, comme il n'y avait pas beaucoup de
possibilités, c'est celle-là qui a été prise. C'est
malheureux, car dans bien des cas cela entraîne des décisions
regrettables, cela empêche aussi des choix rationnels.
Il va falloir qu'un changement d'atmosphère se produise, surtout
dans les rapports entre syndicats et employeurs. Vous le dites au début
de votre mémoire, d'ailleurs, qu'il faudrait que ces choses puissent
être discutées dans un climat d'ouverture, de collaboration. Je
pense qu'il va falloir créer ce climat de part et d'autre. Il y a des
responsabilités de part et d'autre, mais je pense que, sous-jacent
à tout ce que vous avez évoqué dans votre mémoire,
il y a ce phénomène qu'on constate qui est à l'oeuvre dans
plusieurs secteurs de l'administration publique et parapublique et, à
plus forte raison, évidemment, dans le secteur privé. On a perdu
de bons travailleurs avec cela. Il y en a beaucoup qu'on laisse à la
porte pendant des années. Je rencontre toutes les semaines plusieurs
travailleurs, soit dans le secteur de l'éducation, soit dans le secteur
de la santé et des services sociaux, soit dans celui de la fonction
publique qu'on engage pendant un certain temps, qu'on renvoie chez eux, qu'on
fait revenir ensuite, qu'on renvoie chez eux, qu'on fait revenir. On joue avec
eux pendant des années sans qu'ils puissent jamais avoir accès
à la permanence. Arrive un point où cela n'a pas de bon sens. Je
pense qu'on va être obligé de s'examiner là-dessus; il y a
des pratiques qui sont allées trop loin. On avait eu un excès
dans un certain sens pendant des années. Là, on dirait qu'on a un
retour du balancier qui entraîne des excès dans l'autre sens. En
tout cas, vous nous avez posé le problème. Je voudrais au moins
que vous sachiez que nous en sommes conscients et que nous allons l'examiner
avec les universités en particulier pour voir comment il se pose
à ce niveau et ce que les universités pourraient faire pour
alléger les conséquences du problème.
En ce qui touche la bibliothèque que vous avez discutée de
manière particulière dans votre intervention, je voudrais tout
d'abord rappeler que, sous le gouvernement précédent, le ministre
qui m'a précédé - il ne m'a pas
précédé; il avait été remplacé par M.
Rodrigue, je m'excuse, il est passé vite celui-là, j'étais
porté à l'oublier, mais il m'est revenu à temps - M.
Bérubé...
Une voix: ...
M. Ryan: Non, c'était M. Bérubé qui
était allé, je crois que c'est à l'été de
1985, faire l'annonce de l'octroi d'une autorisation pour construire la
nouvelle bibliothèque, projet qui traînait dans l'air depuis
longtemps. Évidemment, la décision fut annoncée à
ce moment-là, mais les décisions n'étaient pas prises pour
l'année 1986-1987. Quand nous sommes arrivés au pouvoir, c'est
l'un des points dont j'ai été saisi et nous avons
décidé de retenir dans la programmation quinquennale 1986-1991 le
projet de bibliothèque à l'Université Concordia, qui est
un projet considérable. Nous avons fait part de cette décision
aux autorités de l'université. Il y a des provisions plutôt
faibles qui sont dans le budget d'immobilisation de 1986-1987 parce que, comme
vous semblez le soupçonner dans votre mémoire, il faut d'abord
tracer des plans. On leur a dit de nous présenter des plans
précis. Ils ont constaté, quand on est arrivé là,
qu'il y avait encore du travail à
faire et je crois qu'ils travaillent sur ces plans actuellement, qu'ils
doivent nous soumettre au moment de leur choix. Dans ces cas, je n'ai pas
besoin de vous dire qu'on ne court pas après les établissements.
S'ils sont en retard, cela nous épargne un peu d'argent; on ne court
après eux, pour être franc avec vous. Pardon?
M. Jolivet: Vous ne faites pas cela? Vous devriez.
M. Ryan: Ha! Ha! Ha! À la veille d'une élection,
les gouvernements sont tentés de faire cela, comme vous le savez. Mais,
au lendemain d'une élection, on regarde les choses d'une manière
plus rationnelle. On liquide les engagements qui nous ont été
laissés. Il faut mettre de l'ordre dans tout cela.
Le Président (M. Parent, Sauvé): S'il vous
plaît, messieurs! S'il vous plaît, M. le ministre!
M. Ryan: II faut mettre de l'ordre dans . tout cela.
M. Jolivet: Oui, oui, dans vos promesses.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le
député de Laviolette, s'il vous plaît! Je reconnais le
ministre de l'Éducation.
M. Jolivet: On gagne des élections avec des promesses de
ce côté-là.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le
député de Laviolette, je vous fais remarquer que la parole est au
ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.
M. Jolivet: Merci. Je m'excuse, je me suis laissé
emporter.
M. Ryan: J'ai remarqué que vous aimeriez être
consulté à propos des plans d'aménagement qui sont
présentement en voie de définition. Je pense que c'est une
requête qui est fort raisonnable. J'ose espérer que les
autorités de l'université voudront la recevoir. Je ne sais pas si
vous l'avez déjà présentée comme telle aux
autorités de l'université. Je n'ai pas à leur donner de
directives en matière de relations du travail; c'est à elles de
diriger leur établissement. Mais, je n'ai pas d'hésitation
à reconnaître publiquement que la demande que vous faites d'avoir
l'occasion de présenter vos projets, ou votre façon de voir
l'aménagement de cette bibliothèque, aurait tout
intérêt à être entendue sous des modalités,
sous des formes qui doivent être arrêtées, je pense, par les
autorités de l'université. C'est ma réponse à la
question que vous posez dans votre document. Je constate avec vous qu'il y a
eu, en contrepartie d'une demande accrue de services qui s'explique facilement,
une diminution dans la qualité et le volume des services offerts. Ce
n'est pas le cas seulement chez vous; c'est assez général dans
tout le Québec. Toutes les institutions que j'ai rencontrées
m'ont parlé de ce problème-là. On essaie de trouver des
moyens, en ajustant le niveau de financement, qui permettront d'élargir
un peu les possibilités de ce côté mais c'est un
problème réel que vous avez souligné, je pense, à
fort juste titre.
Je voudrais que vous nous donniez peut-être des explications - ce
sera la question que je voudrais vous adresser et si mes confrères ont
d'autres questions ils pourront le faire volontiers - sur les services de
bibliothèque, les politiques de personnel. Comment cela affecte-t-il le
service offert aux étudiants et aux professeurs en matière de
bibliothèque? J'aimerais que vous nous expliquiez ce que vous avez
constaté par le fait que vous êtes dans ce secteur-là
principalement.
M. Randell (Peter): Premièrement je veux souligner qu'au
centre-ville, au campus George Williams, il y a trois établissements.
Cela est compris dans un barème de onze rues au centre-ville. De ces
trois établissements de huit étages, il y en a trois qui ne sont
pas accessibles aux étudiants ni aux professeurs. Donc, pour aller
chercher des livres dont les étudiants et les professeurs ont besoin
pour leurs recherches, si on coupe des postes à chaque année et
qu'en même temps il y a plus de monde dans les bibliothèques,
depuis les dernières cinq années, la présence dans les
bibliothèques est montée de 125 %... On a perdu huit postes, on
en a perdu encore deux et il y en a une couple en arbitrage. Avec toutes ces
coupures de postes, avec ta possibilité qu'on ne peut pas acheter tous
les livres dont on a besoin, on veut offrir des services d'éducation de
qualité au niveau de l'université. D'un côté, les
demandes, les questions, les exigences montent; mais d'un autre
côté, cela descend et les gens qui y travaillent sont tous
démoralisés. Us pensent que ni le gouvernement ni
l'université ne considèrent la profondeur de leurs plaintes
contre le système. On voudrait bien aider l'université à
faire quelque chose pour donner l'éducation qu'on devrait donner, mais
de la façon dont le système fonctionne maintenant, on n'a rien
inclus dans les décisions qui affectent la qualité des services
et les politiques de la bibliothèque. On doit recevoir toutes les
plaintes et les travaux qui existent dans la bibliothèque
même.
En même temps à la bibliothèque de sciences et
génie, comme l'a dit ce matin
M. Kenniff, la présence a augmenté de 33 % durant les
dernières quatre années. On avait coupé quatre postes
à cette bibliothèque. Il fallait déménager des
livres chaque été parce qu'il ne reste qu'à peu
près un pouce et demi sur chaque rayon de toute la bibliothèque.
On a des livres par terre, on n'a plus de place. Quand on parvient à
mettre les livres en ordre, cela commence à être la fin de la
bibliothèque. Tous les étudiants qui ont besoin de livres ne
peuvent même pas les trouver, parce qu'il n'y a pas de place. Pour les
gens qui travaillent là à longueur de journée ils restent
d'un côté du comptoir et disent: On s'excuse, on ne peut pas faire
grand-chose. On n'aime pas cela, plus que vous autres, mais cela nous laisse
dans une position intenable. Ce n'est pas raisonnable non plus.
Le Président (M. Parent (Sauvé): Merci. Je
reconnais maintenant la députée de Chicoutimi, porte-parole de
l'Opposition en matière d'éducation supérieure. Mme la
députée.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Bonjour madame et
monsieur. Je voudrais vous remercier d'avoir répondu à notre
invitation et d'être venus porter à notre attention la situation
qui est vôtre à votre bibliothèque en particulier.
J'aurais eu tendance à nuancer un peu les propos du ministre
lorsqu'il justifie le besoin plus grand de mobilité dans le personnel
pour expliquer l'accroissement du recours à l'engagement d'occasionnels
ou de temps partiel, mais ce serait trop simple s'il ne s'agissait que de cela.
 cela se sont certainement ajoutées les compressions
budgétaires et je pense qu'il faut le comprendre. C'est en vue de faire
des économies qu'on se retrouve devant la situation qui est la
vôtre.
Je dois dire que, pour une part de vos recommandations, cela
relève beaucoup -vous nous l'avez dit ainsi que les personnes qui vous
ont précédés - de la gestion interne. Vous comprendrez que
sur ces questions, je n'aurais pas le goût de vous interroger. (16 h
30)
Cependant, je vois que vous êtes aussi sensibilisés
à d'autres questions qui dépassent largement exclusivement vos
conditions de travail et qui touchent le niveau de subvention et, je dirais, la
qualité des services offerts aux clientèles, ainsi que toute la
question de l'accessibilité, c'est-à-dire des frais de
scolarité, une hausse des frais de scolarité, et ce que cela
pourrait avoir comme conséquence sur l'accessibilité. Vous allez
jusqu'à dire que cela pourrait réserver l'université
à l'élite qui a le moyen de payer pour y aller. On voit que votre
préoccupation dépasse les cadres exclusifs de votre travail.
J'aimerais savoir, mais c'est probablement à votre recteur que
j'aurais dû poser la question, s'il y a, par rapport à
l'utilisation des universités... Sur l'île de Montréal, je
sais qu'il y a des services de mise en commun, de rationalisation des services,
et donc la possibilité pour vos étudiants d'aller chercher des
volumes dans les bibliothèques des autres universités. On sait
qu'à Montréal - vous avez McGill, vous avez Montréal, vous
avez l'UQAM - dans les grandes universités, il doit y avoir
déjà un nombre de volumes assez important. Dans une
volonté d'une plus grande rationalisation des ressources, n'y aurait-il
pas avantage à un moment donné de spécialiser certaines
bibliothèques?
M. Randell: C'est une question qu'on n'a pas su poser et qu'on
n'a pas posée à nos membres non plus. On est venu ici pour
représenter nos membres dans des conditions - comme je l'ai dit avant -
où, à présent, ce n'est quasiment plus tenable pour nous
autres. À la suite de ce que vous avez dit en rapport avec les autres
universités, etc., selon les statistiques qu'on a devant nous, on laisse
des étudiants en maîtrise, en deuxième cycle, des autres
universités du Québec venir chez nous prendre des livres,
utiliser nos services. Depuis 1981 jusqu'à maintenant, il y a eu une
augmentation de 221 % des étudiants des autres universités qui
sont venus chez nous pour avoir des équipements, comme je l'ai dit, et
tout ce qu'on a à offrir comme services. Quand de nouveaux
étudiants viennent chez nous pour le premier semestre, vu qu'on est une
université qui possède quatre bibliothèques, deux à
Loyola et deux au centre-ville, ils nous posent la question: Où est
située la meilleure bibliothèque? Au centre-ville ou à
Loyola? Nous, il faudrait quasiment dire que c'est à McGill; que ce
n'est pas chez nous, Je connais assez la misère de tout ce qu'on a
dît dans le mémoire. En réponse à la question que
vous avez posée, comme je l'ai dit, on n'a jamais étudié
cette question. C'est notre situation à l'Université Concordia
qui nous amène à venir ici.
Mme Blackburn: Je dois dire que je vous comprends et je comprends
que vous ayez voulu porter cette situation à l'attention des membres de
la commission. Je laisserai à mon collègue, le
député de Laviolette, s'il le souhaite, les prochaînes
interventions.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Est-ce qu'il y a
d'autres interventions du côté ministériel?
Je reconnais le député de Laviolette.
M. Jolivet: Merci, M. le Président. Je
partage l'inquiétude de ma collègue sur la façon
dont le ministre a parlé du changement qui est survenu dans l'histoire,
tout récemment en particulier, du personnel à temps plein par
rapport au personnel è temps partiel et occasionnel, et il faut encore
commencer à partager temps partiel et occasionnel...
Mme Delisle: On partage l'inquiétude aussi.
M. Jolivet: Un des exemples typiques de cela, c'est l'utilisation
que l'on fait des gens qui sont précisément occasionnels ou
temporaires. Il y a des temporaires quasiment permanents et il y a des
permanents qui ont aussi d'autres difficultés à un autre niveau.
Prenons l'exemple typique des temporaires permanents. C'est ce qui s'est
produit, à l'arrivée du gouvernement en place, avec les
professionnels du gouvernement du Québec dont la négociation avec
l'ancien gouvernement était réglée en partie, mais dont il
restait encore des points à régler. Tous ceux qui pendant cinq,
dix et parfois même quinze ans étaient rappelés à
tous les ans, sans avoir aucune forme de sécurité, sans avoir
aucune autre forme d'avantages sociaux, se retrouvent du jour au lendemain sur
le carreau. On en a dans l'ensemble du territoire du Québec. On a
profité de cela pour évacuer une série de fonctionnaires
ou de professionnels qui n'étaient pas à ce moment essentiels,
d'après le gouvernement nouvellement élu. Sauf que ces gens se
retrouvent sur le marché du travail actuellement à la recherche
d'un emploi et non pas à un travail permis.
Deuxièmement, quand vous parlez du nombre. Au début de
votre mémoire vous en faites mention, vous parlez du nombre. On est 105.
Je dois vous dire que provenant d'un secteur de région
éloignée, un des plus grands comtés au Québec qui
compte des municipalités comme Clova ou Lac-Edouard, de 100 ou de 400
personnes, je sais de quoi vous parlez et je sais aussi que pour un homme ou
une femme politique, la tentation de les oublier en disant: II y a une plus
grosse concentration à La Tuque ou è Grand-Mère, je vais
m'occuper d'eux autres. C'est justement par l'inverse que j'agis toujours. Je
pense que vous avez raison de vous inquiéter aussi à ce sujet en
disant: Est-ce qu'on peut être considéré comme les parents
pauvres. Ce matin on nous faisait mention que certains planchers étaient
tellement peu solides qu'on accrochait au plafond, si j'ai bien compris, les
rayons de bibliothèque. Là, ça m'a fait penser un peu aux
jardins de Babylone, mais un peu plus pesant. Je comprends aussi, à ce
moment, votre inquiétude. Je vous remercie d'être venus
l'exprimer. J'aimerais vous entendre quand même davantage sur les
conditions de travail que vous avez à vivre à temps partiel,
comme occasionnel et comme difficulté que vous avez au niveau de vos
volumes.
Mme Delisle: On aimerait partager la réponse.
Premièrement, moi aussi, je partage l'inquiétude à propos
de ce que M. le ministre Ryan vient de dire. Si la qualité du service
n'était pas en question, peut-être que je serais prête
à écouter cela. Mais la qualité du service s'est
détériorée énormément au cours des
dernières années et cela tombe toujours sur le dos des
employés de soutien et des étudiants, des professeurs aussi.
C'est toujours nous qui en souffrons. À propos du genre
d'employés qu'on a, dans notre syndicat, ce sont des employés
permanents et des employés temporaires. On a deux catégories
d'employés. Mais ce qui est arrivé durant les deux
dernières années, parce qu'on n'a pas comblé les postes
parce qu'on nous a dit qu'il y avait eu un gel d'effectifs, on a
embauché des étudiants qui sont payés 4 $ l'heure, et
s'ils travaillent au-dessus de 400 heures, 4,20 $, je crois.
Je n'ai pas besoin de vous rappeler l'intervention de François
tout à l'heure qui était préoccupé à propos
de la hausse des frais de scolarité. Nous travaillons ensemble avec ces
gens qui sont en train de faire notre travail à nous, qui sont
payés 4 $ l'heure, ce qui est deux fois moins de ce qu'on reçoit
comme salaire.
Ces étudiants crèvent de faim. Je vous l'assure. Ce n'est
pas parce que des étudiants d'université demeurent chez eux avec
maman et papa et ont besoin d'assez d'argent pour sortir en fin de semaine...
Ces étudiants doivent payer le loyer, doivent payer leurs comptes. Nous
autres, on travaille juste à côté d'eux et cela crée
un stress énorme parce qu'on témoigne de l'injustice qui se passe
de deux façons. D'une façon, ce sont des postes à temps
complet qui devraient être comblés par des permanents, ou au moins
des temporaires qui ont plus de droits parce que les employés à
temps partiel ne sont pas syndiqués, d'une manière. Aussi, d'une
autre manière, on voit ces gens travailler aussi fort que nous et amener
40 $, 50 $ par semaine chez eux. C'est une situation inacceptable pour
nous,
M. Randell: Juste pour ajouter quelque chose à ce que
Claire vient de dire. C'est qu'avec une situation qui existe comme cela, vous
pouvez vous imaginer qu'après quelques semaines de temps partiel, ils
essaient de trouver d'autres travaux qui paient plus, évidemment. Donc,
cela nous laisse avec la situation que, toutes les quelques semaines, il faut
réembaucher du monde, entraîner tout ce monde et essayer de le
garder, pour qu'il fasse les travaux comme il faut, et là, après
quelques semaines, il va trouver un autre travail qui paie plus. Là,
nous autres, on
reste toujours avec la même situation où la qualité
du service ne vaut quasiment plus rien. C'est une situation, comme je l'ai dit,
qui, après quatre ans maintenant de coupures de budget, de coupures de
salaires en 1981-1982, de postes qui restent vacants, qui ne sont pas
comblés, diminue le moral du monde et la qualité des services et
on est pris avec la situation qu'on connaît aujourd'hui.
M. Jolivet: Au risque que le ministre vous reprenne comme il l'a
fait avec le rassemblement des étudiants et dire que vous n'avez pas de
statistiques pour le prouver, malgré le fait qu'hier soir, la Chambre de
commerce et d'industrie du Québec métropolitain nous a dit aussi
sans avoir aucune autre forme de statistique ou d'information, sans que le
ministre les rabroue à ce moment-là, je vous pose la question.
Aux pages 3 et 4, vous faites mention de ce que disait ma collègue:
"Toutefois, nous avons certaines réserves à propos de
l'implantation d'une hausse des frais de scolarité et leréaménagement du système des prêts et bourses"
tel qu'on le connaît actuellement où on transfert plus aux
prêts qu'aux bourses. La tendance est amorcée dans ce sens. "On
court toujours le risque de mettre les universités seulement à la
disposition de l'élite qui a les moyens de payer pour ses
études". Je vous pose la question. Vous ne vous basez peut-être
pas sur une étude approfondie, sur une recherche fouillée, mais
vous avez quand même l'occasion de voir ces jeunes qui viennent à
vos bibliothèques et de corroborer ce que vous avez écrit dans le
texte. Est-ce que vous pouvez m'expliquer quels sont les dangers qu'une hausse
des frais de scolarité, même avec le réaménagement
du service des prêts et bourses, aurait sur la capacité pour des
jeunes de continuer leurs études et par le fait même, dans
certains cas, de les obliger à arrêter? Je vous parlerais
probablement de la même façon que je le fais quand je rencontre
ces jeunes dans mon bureau et qu'ils me disent: II me manque 200 $, 300 $ parce
qu'on me refuse des prêts et bourses en fin de compte et mon père
ne peut pas me le payer. Je n'irai pas à l'université si je ne
peux pas me trouver un emploi en plus. J'aimerais connaître votre opinion
là-dessus.
M. Randell: Pour les employés à temps partiel,
comme je l'ai dit, il y a trois édifices distincts au centre-ville. Pour
les employés qui travaillent à temps partiel à la
bibliothèque où je travaille, c'est-à-dire la
bibliothèque des sciences et génie, je sais que probablement neuf
sur dix, s'il y a hausse de frais de scolarité, n'iront plus à
l'école. Ils devient rester chez eux pendant deux, trois ans pour
ramasser de l'argent. À ce moment-ci, ils peuvent garder leur tête
juste un peu au-dessus du niveau de l'eau. À cette question et è
toutes les autres à propos des frais de scolarité, les recherches
sur les impôts des corporations, toutes ces choses-là, on ne les a
pas amenées avec nous. Donc, sur ce point, on ne peut répondre
tout à fait.
M. Jolivet: D'accord, je vous remercie.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie.
S'il n'y a pas d'autres interventions, je demanderais à la
députée de Chicoutimi de conclure.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. En lisant votre
mémoire et en vous écoutant, je réalise que la meilleure
façon de bien saisir ce que veut dire la détérioration de
la qualité des services, c'est de l'entendre exprimer par, je dirais,
des gens qui travaillent beaucoup plus à la base. En ce sens, je trouve
importante votre présence ici en commission parlementaire. Vous nous
permettez de mieux saisir les rapports qu'il y a entre la
détérioration des conditions de vie de ceux qui dispensent les
services et la détérioration de la qualité de la
formation.
Au cours des travaux de cette commission, tous ont attiré notre
attention sur les conditions qui se détériorent de plus en plus
dans les universités; d'une situation précaire qui était
reconnue et dénoncée par l'actuel ministre de l'Éducation
alors qu'il était dans l'Opposition, d'une situation précaire
qu'il trouvait apocalyptique qu'on a tenté de redresser en 1985-1986. On
se retrouve devant une situation encore beaucoup plus précaire puisque
le Conseil des universités estimait que les dernières
compressions s'élevaient à environ 34 000 000 $. Alors, c'est
pour vous dire que la situation est encore plus précaire qu'elle ne
l'était l'an passé.
Il est certain qu'une commission parlementaire peut rendre l'attente
d'un redressement un peu moins longue, moins pénible, mais pour autant
cela ne rend pas pour le moment vos conditions de travail plus favorables ou
plus équitables. Vous avoir entendus nous permet, je dirais,
d'arrêter de flotter à des niveaux où finalement on
travaille souvent un peu dans l'abstrait pour voir dans le concret ce que cela
veut dire dans un service.
Au nom des collègues de ma formation politique, je voudrais vous
remercier et vous remercier aussi pour votre contribution aux travaux de cette
commission. (16 h 45)
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la
députée. M. le ministre de l'Enseignement supérieur et de
la Science.
M. Ryan: II me reste à vous remercier de la discussion que
nous avons eue qui a été malheureusement brève. Comme vous
le
savez, nous avons une grande quantité d'organismes à
rencontrer. Il faut que l'horaire suive inexorablement son cours. Je crois
qu'on a dit l'essentiel. Ce que j'ai mentionné tantôt à
propos de la tendance de l'emploi dans le secteur public ces dernières
années ce n'était pas une thèse que je faisais, c'est une
constatation que j'ai faite. Elle est à la portée de tout le
monde, de tous ceux qui veulent regarder. Il y a une chose que je voudrais vous
dire bien simplement. J'ajoute un point. Cela n'améliore pas les choses,
de mon point de vue. Un des facteurs qui ont contribué à ce
développement, cela a été aussi le fait qu'un certain
nombre qui jouissaient de la permanence étaient assis sur un coussin et
un peu paresseusement. Cela a contribué à provoquer la
réaction contraire.
Il y a une chose que les événements des trois ou quatre
dernières années nous enseignent, c'est que nous devons tous
être sur un pied de vigilance et que nous devons nous rendre compte que
la concurrence était à notre porte. Il y en a beaucoup qui ne la
voyaient pas, mais elle est entrée dans nos murs maintenant. Autant le
secteur public que le secteur privé doivent se battre les flancs
littéralement pour avancer plus vite et servir plus efficacement et de
manière plus économique. C'est un ensemble de contraintes qui
pèsent très fort sur les entreprises du secteur privé et
de plus en plus sur les services du secteur public également. Là,
ce n'est même pas une question de doctrine ou de théorie; c'est
une question de fait. En fin de compte, on arrive à un point où
les gens ne veulent plus payer de taxes, ne veulent plus prêter d'argent
à l'État s'il ne resserre pas sa discipline. Je ne nie pas la
validité de ce que vous dites, mais c'est une constatation de
caractère général que je faisais et qui devait être
faite à un stade ou l'autre des travaux de cette commission. Comme je
vous le disais aussi, si on peut trouver un équilibre plus
satisfaisant... Il y a une question d'équilibre dans cela aussi. En tout
cas, on va le chercher avec tout le zèle nécessaire. Ce que vous
avez dit pour les services auxiliaires ou les services de soutien à
l'Université Concordia, on va le retenir et on apprécie beaucoup
que vous soyez venus nous le dire vous-mêmes. Merci.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci beaucoup,
Mme Delisle et M. Randell. La commission parlementaire de l'éducation
suspend temporairement ses travaux.
(Suspension de la séance à 16 h 49)
(Reprise à 16 h 52)
Le Président (M. Parent, Sauvé): La commission
permanente de l'éducation poursuivra ses travaux dans quelques minutes,
mesdames et messieurs les députés
La commission permanente de l'éducation reprend sa consultation
générale sur les orientations et le cadre de financement du
réseau universitaire québécois pour l'année
1987-1988 et pour les années ultérieures.
La commission parlementaire accueille actuellement l'École de
technologie supérieure. Le porte-parole du groupe sera M. Alain Soucy,
qui en est le directeur général. M. Soucy, bienvenue chez nous
à cette commission parlementaire et merci beaucoup d'avoir
répandu à l'invitation de la commission pour venir nous aider et
fournir un éclairage nouveau ou supplémentaire en ce qui regarde
l'orientation et le financement du réseau des universités du
Québec.
M. Soucy, la commission a environ une heure à consacrer à
l'écoute de votre mémoire et aux discussions. Nous vous invitons
à nous présenter les gens qui vous accompagnent et à
amorcer immédiatement avec nous la discussion par la présentation
ou la lecture de votre mémoire. M. Soucy.
École de technologie supérieure
M. Soucy (Alain): Merci, M. le Président, je voudrais tout
d'abord, comme vous l'avez demandé, présenter M. Jocelyn Gagnon,
qui est le secrétaire général de l'école...
Le Président (M. Parent, Sauvé):
Monsieur, bonjour.
M. Soucy: ...qui m'accompagne. M. Georges Piedboeuf, le directeur
de l'enseignement et de la recherche.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M.
Piedboeuf.
M. Soucy: M. Marcel Hébert, directeur des communications
et de la recherche institutionnelle et M. Daniel Gagnier, président de
l'Association des diplômés de l'École de technologie
supérieure.
Également, nous avons ici présents, et il me fait plaisir
de le souligner, deux représentants de nos étudiants, nous
montrant par là qu'il y a une bonne relation entre l'administration de
l'école et ses étudiants, en la personne de Mme Janick Gauthier,
présidente de l'Association des étudiants, et de M. Carol Boivin,
qui est en même temps membre du conseil d'administration de
l'école et du conseil des études de l'Université du
Québec.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Alors,
mesdames et messieurs, bienvenue. À mon tour, je vous présente
les porte-parole
officiels de cette commission parlementaire: le ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science, pour le côté
ministériel, et Mme la députée de Chicoutimi, porte-parole
en matière d'éducation, de science et d'enseignement
supérieur, pour le côté de l'Opposition. Alors, M. le
président, nous vous écoutons.
M. Soucy: Merci, M. le Président. Qu'il me soit tout
d'abord permis d'exprimer à l'endroit de cette commission toute
l'appréciation de la part de l'École de technologie
supérieure d'être reçue à cette audience afin d'y
présenter son point de vue sur la problématique du financement
universitaire. Nous tenterons également de mettre en lumière les
particularités qui caractérisent la mission de l'ETS dans la
perspective d'une meilleure compréhension des problèmes
spécifiques que nous voulons porter à votre attention.
La mission de l'ETS. Constituante de l'Université du
Québec, l'ETS est un établissement universitaire à
vocation spécialisée dont la mission est axée
principalement sur les besoins industriels du Québec en regard de la
technologie. Elle fut créée le 6 mars 1974 par un
arrêté en conseil par suite de nombreuses études du Conseil
supérieur de l'éducation, de l'Opération sciences
appliquées et du Conseil des universités.
Les lettres patentes de l'ETS énoncent de façon
précise les missions et les mandats spécialisés
confiés à l'école ainsi que son rôle dans le
réseau universitaire québécois. Ses mandats touchent
l'enseignement supérieur et la recherche appliquée dans tous les
domaines liés à la technologie et à l'ingénierie
d'application.
C'est donc la technologie avec ses méthodes, ses
procédés et ses utilisations pratiques dans l'industrie, le
commerce et les services publics qui constitue le mandat général
et spécifique de l'ETS. Cela, sans restreindre l'étendue de ses
activités d'enseignement et de recherche dans tout le Québec
d'où découle sa mission provinciale pouvant s'étendre
à toutes les régions du Québec.
Les principales caractéristiques de l'ETS peuvent être
résumées ainsi: Après une douzaine d'opérations,
d'expériences et d'insertions dans la réalité
universitaire et industrielle du Québec, l'ETS apparaît comme le
seul établissement universitaire québécois à
vocation exclusivement axée sur la technologie et offrant des programmes
conduisant au grade de bachelier en technologie. Au Canada, nous partageons ce
privilège avec l'Institut Ryerson de Toronto.
Les milieux industriels sont très liés à l'ETS. Ils
contribuent de multiples façons à la réalisation de sa
mission, soit au conseil d'administration, è la commission des
études et au comité consultatif des programmes. On compte en
somme présentement plus d'une cinquantaine de représentants. Ces
programmes de baccalauréat et de certificat en technologie visent
à former des professionnels compétents sur le plan de la
réalisation et de la gestion des projets d'ingénierie et sur le
plan de la direction et du contrôle des opérations de production
industrielle ou de construction.
Les programmes de baccalauréat ont un contenu technologique
appliqué auquel s'intègrent des composantes en administration, en
science et en communication.
L'ETS a opté dès le début pour l'enseignement
coopératif obligatoire. Elle organise donc pour ses étudiants des
stages dans l'industrie qui leur permettent d'obtenir une formation pratique
complémentaire et de bien s'insérer dans le marché du
travail.
Les programmes de l'ÉTS sont les seuls à avoir
été créés principalement en fonction des acquis et
des besoins de formation des technologues issus des programmes
collégiaux dans le domaine des techniques physiques. Les professeurs de
l'ETS possèdent des qualifications et une formation de premier ordre
combinées à une bonne expérience de travail en milieu
industriel. On compte actuellement que, pour l'ensemble des professeurs, la
moyenne d'expérience industrielle est d'environ huit années. La
recherche effectuée par les professeurs de l'ETS est avant tout de type
appliqué et orientée vers les besoins industriels; elle vise
principalement le transfert technologique vers la PME.
Je voudrais maintenant souligner l'importance de la formation
particulière dispensée aux bacheliers en technologie. Même
si elle en est le complément indispensable, la formation offerte aux
étudiants de l'ETS diffère de celle qui est offerte dans les
écoles traditionnelles de génie au Québec non pas
tellement par la nature des sujets qui y sont abordés, mais par leurs
contenus qui se veulent plus appliqués et par une approche
pédagogique cherchant à mettre constamment l'étudiant en
situation de fait. C'est pour cette raison que la majorité de ses
enseignements comporte une composante avec travaux pratiques et laboratoire, en
plus de l'obligation pour l'étudiant d'être confronté
è la réalité du milieu de travail à l'occasion de
deux stages de formation en industrie.
Concernant les contenus, les programmes du baccalauréat visent
à donner une formation technologique très avancée tout en
fournissant à l'étudiant une connaissance de base et des actifs
plus généraux lui assurant une capacité d'adaptation aux
fonctions stratégiques qu'il occupera dans l'industrie. C'est ainsi que
sa formation scientifique est approfondie, que sa
formation technologique de base reçue au cégep
professionnel est complétée dans le sens des méthodes
quantitatives afin que l'étudiant puisse évaluer, calculer,
contrôler les diverses techniques qu'il utilise et en développer
de nouvelles. Des cours de formation administrative permettent à
l'étudiant de situer, de comprendre et d'aborder les problèmes
humains et administratifs reliés aux fonctions de direction et de
gérance au sein des entreprises.
Enfin, des cours de concentration technologique rendent le
diplômé apte à remplir les fonctions dans une branche
spécialisée des sciences de l'ingénierie en réponse
aux besoins spécifiques des entreprises québécoises et de
la région à laquelle il se destine. Notons que ces programmes ont
été conçus et mis à jour périodiquement en
étroite collaboration avec le milieu industriel dans la perspective de
combler un besoin complémentaire à celui du génie
traditionnel de nature plus théorique. C'est ainsi que les
diplômés de l'ETS sont fort bien accueillis dans l'industrie qui
reconnaît en eux des professionnels et des cadres compétents aptes
à répondre aux nombreux problèmes pratiques que pose la
rentabilité d'une entreprise de production. (17 heures)
De l'avis de nombreux experts dans le domaine, les programmes de l'ETS
se comparent avantageusement aux meilleurs programmes américains
d'"engineering technology". Les modifications qui viennent d'être
apportées à nos programmes qui passent de 72 à 90
crédits les rendent encore plus attrayants et, sur le plan des normes
canadiennes relatives à la durée des études de
baccalauréat universitaire, certainement indiscutables.
La situation des réalisations de l'ETS à ce jour.
Malgré les progrès réalisés par l'ETS au cours des
dernières années après l'acquisition de son statut
permanent en 1979, alors que le nombre de ses étudiants a plus que
doublé passant de quelque 500 étudiants inscrits en 1979 à
plus de 1200 étudiants à l'automne 1986, dont environ 700
étudiants à temps complet, l'école demeure une institution
de petite taille dont les services de soutien à l'enseignement et
à la recherche, et les services d'encadrement sont loin d'être
adéquats.
Si la qualité du corps professoral se compare très bien
avec celle des professeurs d'institutions à vocation semblable, il reste
que le nombre de ces professeurs est nettement insuffisant. Le ratio
étudiants-professeur dépasse 28 alors que la norme acceptable
pour une faculté de génie serait de 16 selon une récente
étude sur la formation en génie au Canada qui était
dédiée au Conseil des sciences.
La progression du pourcentage de cours offerts par des chargés de
cours nous inquiète également. Il dépasse le 57 % en
1985-1986 à l'ETS. Par ailleurs, malgré la diversité des
cours que nous devons offrir en technologie, l'école a réussi
à maintenir un ratio d'étudiants par cours qui se compare
avantageusement avec les performances de l'ensemble du réseau
universitaire. Il atteint 27,5 % en 1986-1987.
En ce qui a trait aux diplômés, plus de 1000
diplômés de l'ETS sont maintenant sur le marché du travail.
Une relance effectuée au cours de l'été 1984 auprès
de nos diplômés a démontré que 97 d'entre eux
avaient trouvé un travail professionnel ou de cadre, pour la plupart,
correspondant à leur formation, à leurs aspirations et à
des salaires comparables à ceux des ingénieurs. Ce succès
est dû pour une bonne part à notre système
coopératif de stages et de placement qui a organisé
jusqu'à maintenant plus de 2000 stages dans diverses industries du
Québec.
Sur le plan de la recherche, les activités en sont encore
à leur tout début et leur développement pose plusieurs
problèmes en l'absence d'un 2e cycle universitaire à
l'école. On note toutefois une progression significative au cours des
trois dernières années. Nul doute que l'approche que l'ETS
privilégie en s'associant au projet de recherche et de
développement en liaison avec l'industrie donnera bientôt
d'intéressants résultats. La récente création du
CEP et du laboratoire CQIP en matériel de transport en sont des exemples
probants.
Afin de bien remplir sa mission consistant à offrir des
enseignements universitaires en technologie dans tout le Québec,
l'école possède un atout de première valeur en faisant
partie du vaste réseau de l'Université du Québec auquel
elle est fière d'appartenir d'ailleurs.
Comme premier jalon, l'ETS a étendu à la ville de
Québec une partie de ses enseignements à l'hiver 1985 et elle y
offre présentement, en plus de la première année de trois
de ses programmes, un programme complet en électricité à
une soixantaine d'étudiants.
Des études sont présentement en cours pour évaluer
de semblables extensions dans la région de Rimouski en collaboration
avec l'UQAR et éventuellement dans la région de Hull avec
l'UQAH.
Les priorités de développement. Les réalisations de
l'école que je viens d'énumérer sont encore loin de
satisfaire les objectifs de ceux qui ont pensé et voulu l'ETS. Les
besoins de notre industrie sont amplifiés aujourd'hui par
l'accélération du virage technologique et par le support qu'il
faut apporter aux petites et moyennes entreprises qui constituent une part de
plus en plus significative dans la structure industrielle du Québec.
Dans un récent rapport du Conseil des universités pour
l'étude sectorielle du génie, publié en avril 1985, on
dit: "Une comparaison avec les Nord-Américains permet de constater que
le Québec suit assez bien les tendances observées en ce qui
concerne le nombre d'ingénieurs proprement dit par rapport à la
population. Il n'en est pas de même en technologie du génie, alors
que la proportion de ces diplômés dans ta population est beaucoup
plus faible au Québec. Compte tenu de la formation particulière
des diplômés en technologie du génie, orientés vers
les applications du génie, il constitue une ressource assez importante
dans le domaine industriel. II faut donc prévoir une demande de plus en
plus forte à mesure que se résorberont les difficultés qui
les ont empêchés d'occuper la place qui leur revient sur le
marché du travail.
En plus d'apporter une attention particulière à
l'amélioration de ses programmes existants, à la qualité
des enseignements ainsi qu'à l'encadrement des étudiants,
l'école envisage la mise en place d'activités nouvelles dont les
priorités à retenir sont: l'ouverture au deuxième cycle
universitaire par l'approbation d'une maîtrise en technologie
spécifique à l'ETS, par la collaboration avec d'autres
institutions dans le cadre de maîtrise conjointe ou d'une concentration
technique dans une maîtrise existante; deuxièmement, l'ouverture
à de nouvelles clientèles, en particulier celle du cégep
général, par des ententes avec certains cégeps afin
d'offrir à ceux qui désirent suivre la filière
technologique un programme intensif d'intégration; troisièmement,
la mise au point de nouveaux programmes de premier cycle afin de
répondre aux besoins de plus en plus diversifiés que commande le
développement technologique des industries. On envisage ainsi le champ
prometteur des bio-industries dont les cadres techniques devant en assumer la
production rentable restent à être formés; enfin,
l'extension en régions du type d'enseignement dispensé par l'ETS
dans la perspective d'une harmonisation avec les besoins particuliers à
chaque région et en collaboration avec les autres institutions
universitaires qui y sont implantées.
Pour réaliser ces objectifs, évidemment il y a des
conditions de réalisation que nous avons abondamment décrites
dans le mémoire et dont je voudrais vous en faire un court sommaire.
D'abord, en ce qui concerne la formule de financement des budgets de
fonctionnement, l'École de technologie a été assujettie
aux mêmes règles de financement que les autres
établissements du réseau universitaire sans que soit
établie préalablement une base de financement tenant compte de
particularités importantes pour rectifier la situation. Il y aurait lieu
d'apporter les trois correctifs suivants.
D'abord, considérer le facteur taille dans la base de
financement.
Deuxièmement, apporter un correctif dans la base de financement
pour corriger la situation créée en 1982-1983 et 1983-1984. Je
vous rappelle qu'à cette époque de croissance importante pour
l'ETS où le nombre d'étudiants a presque doublé, c'est
à ce moment-là que le financement des clientèles
supplémentaires a été financé à 30 %, ce qui
représentait pour nous è peu près 20 % du coût
réel. Au moment, donc, où nous avons connu une croissance, nous
avons intégré dans notre base de financement une proportion
extrêmement faible du coût réel de ces étudiants.
Cela a créé, si vous voulez, une certaine injustice que je dirais
conjoncturelle, mais qu'il faudrait revoir et corriger, puisque nous avons
à assumer ce manque à gagner d'une façon
récurrente.
Troisièmement, financer de façon particulière les
clientèles nouvelles découlant de nouvelles activités.
L'ETS est un jeune établissement universitaire créé pour
répondre à des besoins de formation professionnelle prioritaires
pour le renouveau technologique du Québec. Son développement est
loin d'être encore complété et plusieurs activités
et programmes nouveaux sont en voie d'élaboration, comme je vous l'ai
cité précédemment.
Si, d'une part, nous sommes disposés à nous accommoder des
formules utilisées pour le financement des variations de
clientèle dans les programmes existants, il lui est, d'autre part,
impossible de se satisfaire de ces formules pour financer les clientèles
nouvelles découlant de la mise en place d'activités
nouvelles.
À cet égard, l'école est d'avis que la formule
utilisée pour le financement de ces clientèles nouvelles
découlant d'activités nouvelles doit être
élaborée à partir de paramètres spécifiques
qui prennent mieux en considération les coûts réels de
développement.
Finalement, le financement des équipements de laboratoire.
L'historique de ce dossier a été abondamment décrit dans
notre mémoire à l'article 5.2. Rappelons qu'à ce jour,
l'école n'a reçu que 912 000 $ sur les 5 400 000 $ qu'elle
réclame. Ce sont des besoins que nous avons d'abord exprimés au
tout début lorsque nous avions environ 400 étudiants
équivalent à temps complet et dont nous avons
réitéré la demande lorsque ce nombre d'étudiants a
doublé chez nous, ce qui a fait porter le budget au double. Nous avons,
de plus, fait une étude très exhaustive de chaque appareil,
chaque appareil vis-à-vis de chaque table dans chaque laboratoire, en
fonction d'un nombre d'étudiants avec un taux d'utilisation, une
étude qui nous a quand même pris plusieurs mois. On constate
aujourd'hui, à cause du système des investissements et des plans
quinquennaux
d'investissement qui sont, semble-t-it, assez lourds à
administrer, que nous nous trouvons dans la situation où nos
laboratoires, pourtant spacieux parce que nous venons d'aménager dans de
nouveaux locaux qui nous conviennent, disons-le - de ce point de vue, nous
sommes très satisfaits de la collaboration que nous avons eue du
ministère - restent, quand même, pour le moment, partiellement
vides et on ne peut pas réellement accomplir notre tiche de formation
avec laboratoire, ce qui est le propre même de l'enseignement en
technologie. Il y a donc là un correctif à apporter dans les plus
brefs délais.
Finalement, !e point de la reconnaissance professionnelle. À la
période des questions, je pense que M. Gagnier pourra donner aussi son
point de vue à ce niveau. Rappelons que l'évolution des
clientèles de l'école a toujours été liée
à ce dossier de la reconnaissance qui a eu un impact au moment des
grands débats avec l'Ordre des ingénieurs. Aujourd'hui, nous nous
sentons quand même dans une position un peu plus confortable avec
l'adoption, en décembre 1984, de l'amendement à l'article 5
à la Loi sur les ingénieurs. Mais il n'a pas eu l'impact qu'il
aurait dû avoir. C'est une première mesure, si vous voulez, qui
permettait à nos diplômés d'être au moins sur le plan
légal à l'abri. Donc, c'est une solution à court
terme.
Pour nous, il nous apparaît qu'à la suite de cet amendement
il y aurait lieu d'examiner de très près la création d'une
corporation ad hoc à titre réservé et à exercice
partagé dans un champ de pratique évocateur regroupant les
bacheliers en technologie de l'ETS et leurs équivalents. Cela nous
apparaît être la solution susceptible d'avoir un impact positif et
de relancer la croissance et l'intérêt des étudiants au
niveau de la formation à l'ETS. La création d'une telle
corporation a été demandée par l'Association des
diplômés de l'École de technologie supérieure. La
direction de l'ETS appuie fortement cette demande, sans préjudice
toutefois à l'appel, compte tenu de l'importance déterminante que
revêt la solution de la question de la reconnaissance professionnelle du
bachelier en technologie pour le développement futur de l'école
et, surtout, du milieu technologique québécois.
Je vous remercie, mesdames et messieurs les membres de la commission de
l'éducation, de votre excellente attention. M. le Président, nous
sommes prêts maintenant à répondre aux questions.
Le Président (M. Thérien): Merci beaucoup, M.
Soucy. Justement, dans le but d'aller plus rapidement vers les questions, je
passerai maintenant la parole au député d'Argenteuil et
ministre.
M. Ryan: Merci. Je vous salue avec plaisir, messieurs de
l'École de technologie supérieure. Il y a déjà un
certain temps que nous projetions de nous rencontrer. Nous avons une rencontre
publique aujourd'hui, j'en suis très heureux. Elle sera suivie,
dès que les circonstances et le programme le permettront, d'une
rencontre privée où on pourra aborder les problèmes d'une
manière encore plus approfondie.
J'ai été témoin de l'origine de votre école.
Je l'ai vue non seulement au berceau, mais dans le sein de ceux qui l'ont
enfantée pendant de nombreuses années. M. Gérard Letendre,
un des principaux promoteurs, était un de mes vieux amis et que de fois
il est venu me voir au Devoir pour me parler de son projet dont j'avais,
d'ailleurs, vu l'équivalent, avant même la fondation, dans ces
écoles supérieures de formation de métiers qu'on avait en
France. J'étais allé en visiter moi-même. Le projet m'avait
intéressé particulièrement parce que j'avais vu en action
en France des écoles comme la vôtre qui ne préparaient pas
directement à la profession de génie civil, mais qui
préparaient des techniciens pour le travail en industrie, pour des
fonctions beaucoup plus concrètes souvent que la formation
générale qui se donnait dans les écoles de génie.
J'avais suivi avec beaucoup d'intérêt toutes les démarches
qui ont précédé la fondation de l'école et votre
premier directeur était un vieil ami aussi que j'avais connu dans les
mouvements de jeunes autrefois, Nous avons cheminé ensemble pendant des
années. J'ai pu suivre les progrès de l'école avec non
moins d'intérêt.
Je pense qu'il y a une place pour une institution comme la vôtre
dont vous définissez très bien l'objectif dans le mémoire
que vous nous avez présenté. Je pense que c'est important de le
rappeler: sa mission principale est de "former les spécialistes dans les
méthodes et procédés d'application des connaissances
scientifiques et technologiques au service de l'industrie, du commerce et des
services publics." L'école s'est bien acquittée de son mandat
jusqu'à maintenant. Je pense que des perspectives intéressantes
s'ouvrent pour l'avenir. Elle est maintenant installée, comme vous
l'avez dit verbalement. Je pense que ce n'était pas dans le
mémoire - à moins que je ne l'aie lu de travers - ou très
cursivement mentionné. Il y a une installation beaucoup plus
intéressante que celle que vous aviez auparavant. Il reste à
compléter au point de vue des laboratoires, comme vous le dites. Il y a
des carences considérables qu'il faudrait évaluer de très
près. Une première démarche a été faite par
le gouvernement l'an dernier mais cela répondait de manière
partielle aux besoins que vous aviez fait valoir. (17 h 15)
Je pense que c'est important qu'on souligne, pour les
députés et nos concitoyens, le type d'études que vous
mettez à la disposition de vos clientèles. Ce sont des
études très coûteuses. C'est important qu'on s'en rende
compte aussi. Il faut voir le côté positif de l'effort qui se fait
au Québec pour l'enseignement supérieur.
Je faisais des calculs rapides tantôt. Savez-vous que, pour un
élève qui est a l'École de technologie supérieure,
les subventions pour l'année 1985-1986, cela va chercher à peu
près 9600 $ par étudiant équivalence temps complet. Si on
prend l'ensemble des revenus de l'école, le coût de chaque
étudiant est à peu près de 10 400 $. Je comparais avec
l'École polytechnique où on a quand même l'enseignement des
2e et 3e cycles sur une base assez élaborée. On a plus de 1000
étudiants inscrits aux 2e et 3e cycles. Le coût moyen par
étudiant est de 11 340 $. Il y a une différence de 900 $
seulement. La valeur des subventions gouvernementales est de 7864 $,
c'est-à-dire 1800 $ de moins parce qu'il y a d'autres sources de revenus
à l'École polytechnique qui sont importantes, que vous autres
n'avez pas eu le temps de développer encore.
Je ne vous en fais pas de reproche, au contraire, je comprends
très bien les circonstances. Je veux souligner ce fait, pour en venir
à une deuxième considération que je vous livre bien
simplement. J'ai suivi dans les journaux, il y a quelque temps, le début
de polémique qui avait semblé devoir s'élever au sujet de
l'implantation de l'École de technologie supérieure à
Québec. Je crois que ces choses avaient peut-être
été discutées avec mon prédécesseur ou mes
prédédesseurs parce qu'ils se succédaient vers la fin
à un rythme assez rapide, mais elles n'ont pas été
discutées avec moi.
Là, je vous entends parler de projets de développement
à Rimouski. Je pense que vous avez mentionné un autre endroit.
Est-ce que c'est Trois-Rivières ou Hull?
M. Soucy: Hull.
M. Ryan: Hull. Il faudrait faire attention. Je vous dis cela bien
simplement. D'ailleurs, je ne peux pas vous faire de reproche parce que vous
m'avez invité autant comme autant. Il n'y a pas eu de manque de votre
côté. Là, il faut que nous nous voyions avant longtemps.
J'aimerais que nous fassions le point sur toutes ces choses parce qu'il nous
faut mesurer les implications en coûts au cours des dix, quinze
prochaines années. Je pense que c'est bien important qu'on voie ce
point.
Je ferais une remarque de même nature à propos des
développements de 2e cycle. Je vois que vous annoncez ces
développements pour un avenir rapproché. Je pense que c'est
important qu'on en parle. D'un point de vue strictement légal, pour
l'implantation è Québec, il n'y avait pas d'obligation parce que
c'est un peu le phénomène que je soulignais à propos des
institutions privées. Une institution privée a un certificat ou
un statut qui l'habilite à toucher des subventions et après cela
elle peut se développer. C'était permis ces dernières
années, il n'y avait pas de problème. Mais quelqu'un veut fonder
une institution, lui on lui disait: On ne peut pas parce qu'on est
limité, on n'a pas d'argent, et tout cela. Il y en a qui voyaient leurs
subventions augmenter considérablement pendant cette période de
vaches maigres qui valait seulement pour ceux qui étaient en dehors de
la cour et non pas pour ceux qui étaient en dedans.
Vous autres, vous êtes dans le secteur public, c'est
différent. Vous êtes rattachés à l'Université
du Québec. Vous êtes déjà soumis à une
planification qui est assez rigoureuse, je le reconnais très bien. Je
pense qu'en fin de compte il est important... On n'a pas eu l'occasion de le
faire jusqu'à maintenant avec l'Université du Québec dans
son ensemble, encore une fois pas parce qu'ils n'ont pas voulu, mais parce que
nous sommes un gouvernement relativement nouveau encore et que
l'échéancier ne nous a pas permis de faire cette
opération. Récemment, mon chef de cabinet est allé
participer à une journée de planification avec la Commission de
planification de l'Université du Québec. Il a trouvé cela
très intéressant. Il a sans doute été question de
vos problèmes, au cours de cette journée. On n'a pas eu le temps
d'en discuter en détail encore. Cela s'est passé la semaine
dernière.
Je termine cette partie de mon intervention en soulignant ce point. Le
travail qui se fait à l'École de technologie supérieure
est excellent. Je crois que la qualité du travail est attestée en
grande partie par la facilité avec laquelle les diplômés de
l'École de technologie supérieure trouvent des
débouchés sur le marché du travail. C'est un
critère qui, en fin de compte, ne trompe pas beaucoup. De ce point de
vue, votre place est déjà taillée d'une manière
remarquable. J'aimerais que vous nous donniez des précisions -
tantôt, si vous en avez - sur la longueur moyenne de la période de
chômage pour vos diplômés. Cela m'intéresserait.
Qu'il y en ait qui cherchent pendant un certain temps, c'est toujours
pénible, mais ce n'est pas la fin du monde.
J'aimerais que vous me donniez des précisions sur cela. Autant
j'apprécie le travail qui se fait et autant vous pouvez compter que,
moi, je suis intéressé, comme ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science, à promouvoir cette voie de formation
supérieure, autant j'aimerais, pour les développements à
venir, que nous ayons l'occasion d'en parler très près et que
ce
soit vu avec toute la rigueur nécessaire pendant que c'est le
temps, c'est-à-dire avant qu'on ait le pied dans l'eau et qu'il faille
mettre le deuxième.
Un autre point sur lequel vous vous attendez légitimement
à un commentaire de ma part, c'est le problème de la
reconnaissance professionnelle de vos diplômés. Il y a un
problème qui traîne dans le paysage depuis plusieurs années
maintenant. Le gouvernement précédent avait apporté une
solution. Il avait décidé que les diplômés de votre
école auraient droit d'être admis à l'intérieur de
l'Ordre des ingénieurs. Je crois qu'il avait dit qu'il pourrait y avoir
deux listes et ils auraient été reconnus comme ingénieurs,
comme membres de l'Ordre des ingénieurs. Cela a été
contesté devant les tribunaux et cela a fait des procédures
continues. Hier soir, l'Ordre des ingénieurs est venu nous rencontrer.
Les porte-parole m'ont parlé du problème également. De
part et d'autre, je crois qu'on souhaite bien un déblocage. Je vais vous
dire une chose. Là, je n'ai pas eu le temps jusqu'à maintenant de
reprendre ce dossier que nous avions examiné à maintes reprises
quand nous étions dans l'Opposition, mais nous allons le reprendre avant
longtemps, dès que nous aurons tiré des conclusions qui
s'imposent de l'étude sur le financement des universités. C'est
un problème qui va recevoir une attention prioritaire de ma part.
Évidemment, cela veut dire que nous établirons un dialogue avec
vous et avec les membres de l'Ordre des ingénieurs.
Je disais, hier soir, aux membres de l'Ordre des ingénieurs que
ma disponibilité sera d'autant plus fervente que je trouverai de part et
d'autre un esprit d'honnête composition. Il n'y a pas de doctrine absolue
dans cela qui donne tous les droits à un et qui fait de l'autre un
partenaire de troisième ou de quatrième classe. Je pense qu'on va
se rencontrer, on va se retrouver dans un esprit de dialogue. J'ai bonne
confiance que nous pourrons trouver une solution au problème sans
attendre que ce soit rendu jusqu'en Cour suprême et qu'on soit pris avec
des jugements de cour qui nous lieraient peut-être pour des
générations. Nous sommes très attentifs à ce
problème. Soyez assurés que dans un avenir pas trop
éloigné, nous aurons l'occasion d'en parler d'une manière
constructive.
Je crois avoir dit l'essentiel pour l'instant. Si vous vouiez
réagir à ce que j'ai dit. Je ne le formule pas sous forme de
question mais j'ai dit des choses assez... et qui nous engagent de part et
d'autre un peu. J'aimerais que vous réagissiez et que vous me disiez
comment vous voyez ces choses. Si vous trouvez que c'est trop rigide. Soyez
bien à l'aise, on est ici pour discuter. Encore une fois, comptez sur ma
profonde sympathie pour le travail de fond qui s'accomplit à
l'école.
Le Président (M. Thérien): M. Soucy.
M. Soucy: M. le Président, je vous remercie de ces bons
mots, M. le ministre. Je constate votre intérêt pour
l'école, et je pense que vous en avez une bonne compréhension
pour, peut-être, l'avoir suivie même de loin. Je dois dire que,
peut-être sur certains points, j'aimerais apporter quelques
réactions et demander, d'ailleurs, à ceux qui m'accompagnent, de
rn'apporter leur aide. En premier lieu, au niveau des études très
coûteuses auxquelles vous faites allusion, à l'ETS, il est vrai
que ces études sont plus coûteuses que ce qu'on peut trouver dans
d'autres secteurs, comme celui des sciences humaines, compte tenu de la
dimension de la technologie et des équipements que nous devons avoir
pour le faire. Mais si on fait une analyse plus serrée de ces
coûts, on en arrive à trouver quand même qu'ils restent
comparables et même raisonnables à l'intérieur du
réseau universitaire.
Je ne sais pas si M. Hébert pourrait ajouter quelques chiffres
à ce sujet, décomposer les chiffres que vous avez donnés
en coût par étudiant équivalent à temps complet.
M. Hébert (Marcel E.): Oui. Si on fait une
décomposition tout d'abord en considérant l'enseignement d'une
part et l'administration et le personnel de soutien d'autre part, il y a ceci
de particulier que l'École de technologie, pour ce qui est de
l'enseignement, a un coût per capita - on parlait de Polytechnique
tantôt - très comparable à celui de Polytechnique et de
beaucoup inférieur au coût per capita dans les autres
universités dans le secteur des sciences appliquées. Donc,
à cet égard, il n'y a aucun problème. Toutefois, au niveau
de l'administration, c'est une question de fait que si on fait une comparaison
par rapport à l'ensemble des universités, nous sommes
supérieurs, mais à un moment donné nous avons fait une
courbe de régression où on considérait la taille - cela a
été soulevé dans notre rapport - et si on tient compte de
la taille, il nous apparaît que c'est très comparable.
M. Ryan: Je soulevais ce problème-là tantôt,
l'implantation ailleurs, parce qu'il faut tenir compte de cela
également. La taille va être petite si vous vous implantez
ailleurs et ces frais vont être proportionnellement beaucoup plus
élevés. Il faut regarder cela comme il faut. J'admets ce que vous
dites, je pense que cela saute aux yeux.
M. Soucy: Évidemment, si vous me permettez, M. le
ministre, quand nous
parlons de développement à Rimouski et à Hull, nous
envisageons cela dans une perspective d'étude actuellement. Nous
comptons bien réaliser cela à l'intérieur des structures
universitaires déjà existantes, où là il y aura des
effets d'échelle. Il est sûr qu'à Rimouski, cela se fera en
étroite collaboration avec l'UQAR et à Hull avec l'UQAH dans le
cadre du réseau à ce moment-ci. Donc là il y a
certainement, à l'intérieur de ces structures, des effets
d'échelle qui feront que les coûts supplémentaires ne
seront pas aussi énormes. C'est dans cette perspective que nous voyons
l'extension de l'enseignement de l'école.
Concernant la prudence que vous avez manifestée à
l'ouverture du 2e cycle, je peux comprendre qu'il y a encore du
développement à faire à l'école au niveau du 1er
cycle, mais il reste quand même qu'un établissement universitaire
comme le nôtre, qui est en technologie, ne doit pas être
déconnecté de ce qui se passe en recherche et en
développement et que, à cet effet, il doit avoir ses propres
activités de recherche. Ces activités de recherche, comme vous le
savez, dans la structure universitaire sont toujours supportées par des
programmes de 2e cycle. Les règles de jeu sont ainsi faites qu'il est
très difficile de faire autrement.
Cela ne veut pas dire qu'on ne peut pas faire de la recherche de type
industriel où on a des attachés de recherche et des
chargés de recherche, mais il reste quand même que cet aspect nous
apparaît très important pour que les professeurs puissent, en
même temps qu'ils font de la recherche, former aussi des chercheurs de
type appliqué. C'est un prolongement naturel à une vocation
universitaire.
Nous voulons toutefois là-dessus y aller aussi prudemment. Nous
envisageons justement - je le disais tout à l'heure - de regarder
l'extension de maîtrises existantes, de les partager avec d'autres dans
des secteurs qui sont près de nous. Je pense à
l'Université du Québec à Trois-Rivières, par
exemple, dans le secteur manufacturier; je pense également, du
côté de la gestion, à la maîtrise en gestion de
projets, concernant la construction, des choses comme cela. Donc, il y a des
possibilités d'extension et de collaboration.
Il y a un point que vous avez soulevé que je constate concernant
la facilité d'accès au marché du travail. Vous avez
parfaitement raison de le souligner. Vous avez demandé quelques
précisions à cet effet. Je pourrais vous répondre parce
que - peut-être qu'il n'y a pas beaucoup d'universités qui font
cela - nous faisons de la relance auprès de nos diplômés
d'une façon assez systématique à tous les deux ans. Au
dernier exercice, qui date de 1984, nous avions comme résultat que 72 %
des diplômés n'ont éprouvé aucune difficulté
ou peu de difficulté à obtenir leur premier emploi tout de suite
après leur diplômation. Le délai, pour 75 % des
diplômés à trouver leur premier emploi, a été
de moins de trois mois. Au niveau du premier emploi, 65 % d'entre eux
étaient donc satisfaits, parce qu'ils avaient des emplois de
professionnels ou de cadres, ce qui correspondait à leur formation,
finalement, et après cela une progression se fait dans le temps. (17 h
30)
Ce sont les chiffres que nous avons qui nous font penser que le
délai n'est pas considérable, mais on pourrait, d'après un
mémoire que nous avons et qui est plus complet que celui-ci, vous donner
une information beaucoup plus fine. Si cela vous intéresse, on vous la
fera certainement parvenir.
M. Ryan: J'ai une autre question. Sur le terrain, vos
diplômés font-ils souvent face à des frottements avec des
membres de l'Ordre des ingénieurs, au point de vue du partage des
tâches, des rôles respectifs à l'intérieur d'une
entreprise ou sur un chantier, par exemple? Est-ce que la délimitation
des rôles se fait assez facilement ou s'il y a des
difficultés?
M. Soucy: J'ai l'impression que cela se fait assez bien partout
où il n'y a pas ce type de syndicat d'ingénieurs où on a
un peu fermé le champ de pratique par des structures internes. Mais
même là, au niveau du travail en tout cas, l'harmonisation se fait
relativement bien. Peut-être que M. Gagnier, qui est un
diplômé, pourrait vous donner plus de précisions à
cet effet,
M. Gagnier (Daniel): Dans l'ensemble, les diplômés
en technologie de l'ETS se placent très bien dans l'industrie, font
régulièrement le travail d'ingénieurs. Le problème
qui se pose en réalité, ce n'est pas nécessairement un
frottement, mais c'est plutôt lorsque vient le temps de signer ou de
prendre la responsabilité d'un projet ou une étude. Souvent,
certains fonctionnaires ou des gens à l'intérieur de l'industrie
et même du gouvernement du Québec bloquent systématiquement
tout ce qui n'est pas signé par un membre de l'Ordre des
ingénieurs du Québec, même si ce n'est pas toujours
demandé spécifiquement par la loi. Dernièrement, on a
commencé à offrir un service d'aide juridique pour les
diplômés; cela fait environ une semaine et demie qu'on a
officiellement sorti ce service et on a déjà deux cas de
diplômés qui ont eu des problèmes avec des fonctionnaires
de la ville de Laval, entre autres, et avec deux ministères du
gouvernement du Québec, et qui ont été bloqués.
M. Ryan: Est-ce qu'il y a des cas, à
votre connaissance, où ce serait vous qui feriez le travail et
l'ingénieur serait seulement amené à mettre sa
signature*?
M. Gagnier: Dans quelques cas dans l'industrie, lorsque des
employés qui sont bacheliers en technologie font un travail, selon la
structure de l'industrie, ils peuvent être supervisés par un
membre de l'Ordre des ingénieurs du Québec et, parfois, c'est
même l'inverse, ce sont les bacheliers en technologie qui supervisent le
travail d'un ingénieur. Mais le problème devient aigu lorsque,
pour des petites entreprises, il n'y a pas d'ingénieur. Parfois, ce sont
les bacheliers en technologie qui sont obligés de payer de leur poche un
ingénieur pour simplement contresigner, sans rajouter un point è
leur travail, ce qu'ils ont fait ou encore les municipalités sont
obligées de passer par voie de règlement pour essayer de trouver
une manière de faire passer les projets préparés par un
bachelier en technologie, et c'est toujours la même procédure
où un ingénieur contresigne finalement un travail sans rien
modifier.
M. Ryan: M. Soucy, j'ai cru comprendre que votre désir, au
point de vue de l'organisation professionnelle, serait d'évoluer vers un
ordre professionnel à titre réservé qui serait, par
conséquent, complètement autonome vis-à-vis de l'Ordre des
ingénieurs, Ai-je bien compris?
M. Gagnier: L'objectif premier des diplômés serait
d'être capables d'offrir nos services sans contrainte. Nous pensons que,
pour les entreprises publiques, parapubliques et privées, et pour la
société en général, présentement, cela pose
des problèmes. Nous croyons qu'il y a deux solutions possibles pour
régler ce problème. Ce serait, premièrement,
l'intégration à l'Ordre des ingénieurs du Québec
comme ingénieurs, comme, d'ailleurs, le stipule le décret du
gouvernement du Québec de 1981 qui est contesté en Cour d'appel
présentement. Ou, s'il s'avère que cette position soit trop
problématique et engendre trop de débats publics, on aimerait
bien essayer de négocier quand même une entente. On est
prêts à envisager la formation d'une nouvelle corporation
professionnelle qui nous serait propre, avec un champ d'exercice partagé
avec les ingénieurs et un titre exclusif.
Le Président (M. Thérien): Merci, M. le ministre.
J'inviterais maintenant la porte-parole officielle de l'Opposition en
matière d'éducation, Mme la députée de Chicoutimi,
à prendre la parole.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le directeur
général, messieurs, cela me fait plaisir de vous accueillir
à cette commission parlementaire et de vous souhaiter la bienvenue au
nom de ma formation politique.
J'ai lu attentivement votre mémoire et j'ai écouté
votre présentation. De façon générale, j'essaie
d'accorder plus de temps aux questions qu'aux commentaires. Je
préfère avoir vos réactions plutôt que de commenter
votre mémoire. Tout à l'heure, en présentant ses
commentaires, le ministre, selon son habitude, n'a pu s'empêcher de
glisser une petite remarque partisane pour justifier un trou de mémoire
en invoquant le fait que les ministres du gouvernement précédent
changeaient souvent, ce qui fait qu'il ne se rappelait plus si c'était
M. Bérubé ou M. Rodrigue. Je lui ferais remarquer qu'il a
certainement fait face suffisamment longtemps à M. Bérubé
pour retenir un peu ses méthodes de travail, puisque je l'ai vu avec sa
calculatrice tout à î'heure.
Cela m'amène à la question suivante, parce que, quand on
fait ce genre de calcul, il y a quelque chose qui sonne chez moi. Quand on
essaie d'évaluer le coût de l'éducation exclusivement par
le nombre d'élèves et le budget - ce qu'on a fait tout à
l'heure et qui donne un certain éclairage -il me semble que cela ne
tient pas compte du taux de diplômation et ce qui est important, c'est le
taux de diplomation. Ce qu'il faut savoir, c'est ce que nous coûtent dans
l'ensemble du système les étudiants qu'on a menés à
terme. Cela doit tenir compte, par exemple, du taux d'abandon et du taux
d'échec, parce que, selon que vous ayez un taux d'abandon et
d'échec élevé... Je pense que, dans certaines
facultés, cela va jusqu'à 50 %; je dirais même plus, il y a
un certain temps, entre les étudiants inscrits en première et
ceux qu'on diplômait, il en restait 25 %. Donc, on peut penser
qu'à ce moment-là tous les coûts de formation, ceux de la
première année, celui de la deuxième, avec l'attrition
qu'il y a eu, sont là sans vraiment rapporter, dans le sens qu'on n'a
pas de diplômés. Ma question est la suivante: Quel est le taux
d'abandon et d'échec chez vous?
M. Soucy: Nous avons des chiffres globaux, si vous voulez,
là-dessus. Je pense qu'il faut peut-être faire une petite
distinction. Â l'École de technologie, comme je vous l'ai
expliqué, nos étudiants sont en forte proportion - je dirais 45 %
- à temps partiel. Il faut comprendre aussi que nos étudiants
proviennent du cégep professionnel; donc, ils ont un DEC les rendant
aptes au marché du travail. Or, il arrive que beaucoup de nos
étudiants commencent des études, les abandonnent temporairement
pour aller faire un travail rémunérateur, parce que la
conjoncture économique a fait que la demande est très forte et on
leur fait une
offre qu'ils ne peuvent pas refuser, pour revenir ensuite à
l'école finaliser leur enseignement et étudier à temps
partiel, dans certains cas. De sorte qu'il est assez difficile pour nous de
suivre chaque étudiant à la trace et de dire quel a
été le taux de diplomation de ce type d'individus. Toutefois, on
peut dire qu'en moyenne 50 % de nos étudiants terminent leurs
études de baccalauréat.
Mme Blackburn: Quel pourcentage?
M. Soucy: En moyenne, c'est 50 % de ceux qui sont à temps
complet. Ceux qui sont à temps partiel, dans les certificats, car nous
avons aussi des certificats... Plusieurs étudiants prennent d'abord un
certificat et, ensuite, transfèrent au programme de baccalauréat,
parce qu'il y a des affinités. Nous avons tenu à garder ces
affinités entre nos programmes de certificat et nos programmes de
baccalauréat. Donc, il est possible à quelqu'un qui commence par
un certificat de continuer dans un programme du baccalauréat en ayant un
certain nombre de crédits pour les cours qu'il a suivis et qui sont les
mêmes que ceux du baccalauréat. Voilà en gros le taux de
promotion si on le regarde d'une façon purement statistique. Mais, comme
je l'ai dit, chez nous, il faut tenir compte de cette particularité du
va-et-vient de nos étudiants entre le marché du travail et les
études.
Mme Blackburn: D'accord. Pour les étudiants à temps
complet, c'est 50 %?
M. Soucy: Oui.
Mme Blackburn: Bien. Cela m'amène à une question
que j'ai l'intention de poser aussi ailleurs. On parle beaucoup dans plusieurs
mémoires des règles d'allocation des ressources en disant que
cela a entraîné ce qu'ils appellent une course aux
clientèles par une publicité plus agressive et que sais-je
encore! Par ailleurs, je suis toujours étonnée car, si la
clientèle, et la clientèle stable encore plus, jouait un
rôle dans l'allocation des ressources, pourquoi les universités ne
se sont-elles pas davantage préoccupées des abandons?
C'était une clientèle qui était déjà dans la
boîte, qui était déjà reconnue dans les
règles d'allocation des ressources alors que les clientèles
nouvelles étaient financées, comme on le sait, à 50 % avec
18 mois de retard. Je suis étonnée un peu qu'on n'ait pas compris
et saisi cela plus rapidement pour porter une attention plus
particulière à l'encadrement de manière à conserver
des clientèles. Je n'ai pas eu connaissance qu'il y ait eu beaucoup
d'études faites sur ce phénomène-là, à la
fois pour le comprendre et pour l'endiguer un peu.
M. Hébert: M. le Président, le seul commentaire que
je pourrais ajouter est celui-ci. Effectivement je ne connais pas
d'étude sérieuse à cet égard. Nous avons fait une
étude à l'École de technologie supérieure pour
essayer de séparer la clientèle à temps partiel du temps
complet. Nous avons constaté que les étudiants à temps
partiel qui quittent l'école ne quittent pas parce qu'ils ne sont pas
capables de suivre le cours. Ils avaient une moyenne de réussite bien
au-delà du seuil requis pour continuer leurs études. Nous avons
mesuré cela au niveau de la clientèle à temps partiel.
Nous ne l'avons pas fait pour celle à temps complet.
Mme Blackburn: Bien. Je vais aborder une tout autre question,
celle de la charge d'enseignement. Chez vous, 57 % de l'enseignement seraient
assurés par des chargés de cours. Selon vous, est-ce que cela a
des conséquences ou des effets sur la qualité de l'enseignement?
Quelle est la charge d'enseignement chez vous? Est-ce qu'elle se compare
à celle des professeurs des universités, c'est-à-dire
quatre cours? Comment serait reçue, chez vous, une proposition, si tant
est que ce soit quatre cours, du rapport Gobeil visant à hausser de 50 %
la charge d'enseignement?
M. Soucy: Je vais, si vous me le permettez, peut-être
répondre à la deuxième partie de votre question tout
d'abord et demander ensuite à M. Piedboeuf de répondre d'une
façon un peu plus particulière sur les effets des chargés
de cours sur la qualité de l'enseignement. Au niveau de la charge de
cours de nos professeurs, nous venons, en fait, de terminer la
négociation d'une première convention collective avec eux. Je
dois dire qu'à l'École de technologie supérieure, comme
ailleurs dans le réseau de l'Université du Québec, nos
professeurs ont douze crédits de charge de cours. Il faut bien
comprendre aussi que 80 % des cours ont un contenu de laboratoire qui dure
trois heures. Ce contenu de laboratoire, le professeur en est
entièrement responsable. Nous avons voulu le rendre responsable dans la
convention collective, en tout cas.
Nous avons également à y ajouter, a cause de notre
système coopératif, le tutorat des stagiaires. Chaque professeur
est tenu d'encadrer treize stagiaires ou étudiants en stage, ce qui
l'amène à aller dans l'industrie visiter l'étudiant,
à examiner le travail qu'il y fait en partie, à évaluer
son rapport de stage, à évaluer aussi les travaux qu'il peut
avoir réalisés durant cette période.
Donc, il y a cette particularité à l'école
où l'encadrement des étudiants par les professeurs est
peut-être assez important. Comme je le disais tantôt, ce sont des
cours que j'appellerais assez lourds en termes de
crédits puisqu'il y a beaucoup d'heures de laboratoire qui y sont
associées en plus des cours magistraux.
S'ajoutent à cela, évidemment, comme partout ailleurs, les
services à la communauté et la charge de la recherche. Chez nous,
du côté de la charge de la recherche, comme c'est de la recherche
appliquée, on peut ajouter une composante de liaisons, qui n'est quand
même pas négligeable, avec les entreprises, liaisons qui naissent,
d'ailleurs, bien souvent de la présence du professeur qui va visiter
l'entreprise, voir ses stagiaires et qui, en même temps, établit
des contacts. Il naît de là des besoins et, à ce
moment-là, un certain nombre de projets appliqués qui sont
très intéressants.
Là-dessus, si on veut faire des comparaisons strictement en
termes de crédits, il faudrait regarder un peu, en tout cas chez nous,
l'importance que prend l'encadrement en ce qui concerne les laboratoires et le
tutorat des stagiaires.
Voilà, en gros, ma réponse en ce qui concerne la charge.
Maintenant, quel est l'effet de nos chargés de cours sur la
qualité de l'enseignement? M. Piedboeuf pourrait y répondre. (17
h 45)
M. Piedboeuf (Georges): D'une façon
générale, je crois que les chargés de cours donnent chez
nous un très bon enseignement qui est, dans les grandes lignes,
comparable avec celui que peut donner le professeur régulier. Quand on
dit, dans les dernières statistiques, que 57 % des enseignements sont
donnés par des chargés de cours, c'est 57 % des cours-groupes.
Cela veut dire qu'essentiellement, chez nous, ce sont les cours de
mathématiques et les cours de sciences humaines et administratives qui
sont donnés par des chargés de cours. Ces cours étant ce
qu'on appelle les cours relevant du tronc commun et qui s'adressent
généralement à toutes les spécialités
peuvent se répéter cinq, six, sept ou huit fois par session. En
réalité, ce sont surtout ces cours-là qu'ils donnent, les
cours technologiques étant, en grande majorité -notre objectif
étant de 75 % pour les cours technologiques - assurés par des
professeurs réguliers.
Pour ce qui est de la qualité, globalement, dans l'ensemble, nos
chargés de cours font un bon travail. Je dirais, d'ailleurs, que la
majorité, c'est presque des chargés de cours permanents, certains
étant chargés de cours depuis le début de l'école.
On a déjà pensé à intégrer certaines choses,
mais nos ressources ne nous ont pas permis de porter notre corps professoral
à un niveau suffisant pour pouvoir intégrer, par exemple, des
professeurs de mathématiques, ce qui avait déjà
été envisagé à un moment. Pour ce faire, il nous
faudrait des ressources supplé- mentaires pour pouvoir les faire passer,
disons, au cadre de professeurs réguliers.
Mme Blackburn: Vous parlez de liens avec l'industrie. Il me
semble que vous parlez également d'un Centre d'expérimentation en
productique. Est-ce que vous pourriez développer cela? Est-ce qu'on peut
parler d'un autofinancement et d'une rentabilisation dans ces secteurs? Est-ce
que vous avez d'autres projets en vue?
M. Soucy: M. le Président, à ce sujet, c'est une
création récente et je dois dire que nous avons dû,
à cause de cette commission parlementaire, remettre la première
réunion du conseil d'administration qui devait avoir lieu ce matin. Le
CEP, le Centre d'expérimentation en productique, a été
conçu comme une structure mise sur pied à l'intérieur des
cadres de l'université, mais avec la collaboration de l'industrie. Nous
avons donc demandé à cet égard que l'industrie
elle-même crée et, jusqu'à un certain point, dirige les
destinées de l'évolution de ce centre à l'intérieur
des structures mêmes de l'école, évidemment, avec notre
présence et notre collaboration, dans une perspective d'y
réaliser des projets qui l'intéresse, elle, et non pas des
projets qu'on pourrait faire comme cela simplement par
intérêt.
Jusqu'à maintenant, je pense que la réponse est
excellente. Nous en sommes, évidemment, au tout début. Dans un
premier temps, ce centre va surtout se concentrer sur les activités de
ce que j'appellerais le laboratoire CQIP sur le matériel de transport,
qui est en gestation et qui vient d'être créé, pour lequel,
d'ailleurs, nous avons eu une approbation officielle. Il reste à
finaliser les dernières étapes de mise en place. Ce laboratoire
va porter, justement, sur quelque chose que je trouve, moi, extrêmement
intéressant et nouveau comme approche; il s'agit, en somme, d'utiliser
la grande entreprise qui a de l'expertise en technologie, comme General Motors,
Bombardier, Pratt & Whitney, Canadair et bien d'autres et à
l'intérieur de la structure universitaire que nous mettons en place et
en collaboration aussi avec d'autres universités et les cégeps,
de faire un transfert technologique vers la sous-traitance de ces entreprises,
si vous voulez, vers les PME, afin d'obtenir des objectifs de
rentabilité en termes d'inventaire zéro, par exemple, et
défaut zéro.
Cela intéresse vivement ces entreprises. Cela implique non
seulement de l'équipement, du transfert d'équipement, des choses
comme cela, cela implique de la formation, cela implique de
l'entraînement sur place, de la démonstration de façon de
faire et aussi des études d'impact que les nouvelles technologies
peuvent entraîner. À ce sujet,
dans le cadre de notre projet, c'est l'Université du
Québec à Montréal qui s'occupe de cet aspect des impacts
sur la main-d'oeuvre et sur les aspects économiques de l'entreprise. Si
vous vouliez plus de détails, M, Hébert, qui a piloté ce
projet, pourrait certainement développer davantage,
M. Hébert: Peut-être la seule remarque additionnelle
que j'ajouterais, c'est qu'au-delà des grandes entreprises, dans ce
concept d'utiliser les grandes pour aller aux petites dans le concept de la
sous-traitance, nous avons pensé aussi - et à cet égard on
rejoint les mêmes idées que le CQIP - concerter les efforts des
divers intervenants du milieu de l'éducation, en particulier, les
universités et les cégeps. Dans le cas particulier de ce
laboratoire CQIP, nous avons trois établissements de niveau
universitaire, l'École polytechnique, le département des sciences
administratives de l'UQAM et l'École de technologie supérieure.
Nous avons aussi, dans un concept régional, cette fois, trois
cégeps, l'École d'aéronautique de la rive sud du
cégep Saint-Hubert, l'Institut CAO-FAO du cégep Vanier, qui est
en plein centre de Montréal, et, au nord de Montréal, nous avons
le cégep Saint-Laurent.
Nous avons établi une entente qui spécifie le râle
de chacun. Cela fait partie intégrante de l'entente. Nous sommes rendus
au stade d'avoir des projets. Les grosses entreprises ont identifié des
petites entreprises. Les projets sont en train d'être finalisés au
point de vue du concept de sorte que ce que nous voulons, c'est que cela soit
la grosse entreprise et la petite, à l'intérieur des programmes
existants de subventions gouvernementales pour le développement
technologique, qui aillent faire des demandes de subventions. Mais, à ce
moment-là, dans leur demande, elles pourront tenir compte de toutes les
ressources universitaires ou des ressources des collèges qui pourront
être mises à leur disposition et prévoir les
dépenses en conséquence.
Évidemment, cela pose un problème, c'est qu'il y a une
infrastructure et nous sommes au stade de discuter, avec les grosses
entreprises, une forme de contribution à l'infrastructure des trois
premières années, étant entendu que nous voudrions que
chacun des projets s'autofinance dans la mesure du possible.
Mme Blackburn: Une dernière question en ce qui me
concerne. Vous êtes, comme école, rattachés à
l'Université du Québec. Vous connaissez sans doute la
recommandation du rapport Gobeil qui veut abolir le siège social.
Qu'est-ce que cela veut dire pour une école comme la vôtre?
M. Soucy: J'ai dit quelque part que, suivant les perspectives que
nous entrevoyons de développement de l'école, faire partie du
réseau de l'Université du Québec, nous en étions
très fiers et, en même temps, nous trouvions là un avantage
important pour réaliser notre mission à l'échelle du
Québec.
Je dois dire aussi que, à cause de notre petite taille, nous
trouvons bien utiles les services mis en commun par l'université, par le
réseau, en somme, et par le siège social de l'Université
du Québec. Il y a certainement beaucoup de problèmes que nous
aurions eu de la difficulté à résoudre, si vous voulez, ou
qu'on aurait résolus quand même, mais à de très gros
coûts, si nous avions été obligés d'engager
tantôt des professionnels, tantôt des conseillers pour nous aider,
parce qu'on n'a pas nécessairement la capacité d'avoir des gens
à temps plein pour régler certains problèmes. Donc, on va
chercher, dans ce réseau et dans les ressources du siège social,
toute l'expertise nécessaire pour appuyer notre action et
réussir, finalement, à remplir notre mandat et à passer
à travers des problèmes assez difficiles comme celui des
négociations collectives, et j'en passe.
Pour nous qui sommes une organisation de petite taille, nous trouvons
d'une très grande utilité le réseau de l'Université
du Québec. D'une part, on y trouve aussi des collaborations. On y trouve
également des prolongements que nous ne pouvons pas avoir parce qu'on
n'a pas cette dimension polydisciplinaire d'une grande université. On
peut aller rechercher là des complémentarités,
créer à l'intérieur de ce réseau des liens qui font
que l'École de technologie supérieure ne se trouve pas
complètement isolée, si vous voulez, d'un contexte universitaire
qui se veut quand même beaucoup plus polyvalent que simplement la
technologie, moins enfermé, si vous voulez, à ce moment dans la
problématique de notre mission particulière. Donc, je l'ai
déjà dit, si le réseau ou le siège social
n'existait pas, il faudrait l'inventer. Nous serions là les premiers
initiateurs d'une organisation comme celle-là. Si on devait y toucher,
nous ferions des efforts pour créer quelque chose d'équivalent
certainement quelque part, à un moment donné. Merci.
Le Président (M. Thérien): Avant de passer la
parole à la députée de Marie-Victorin qui l'avait
demandée, je céderai la parole à M. le ministre qui a un
message un peu spécial.
M. Ryan: Je voudrais seulement m'excuser de devoir partir
maintenant. J'ai promis d'aller faire une émission de radio à 18
heures sur le thème des travaux de la commission. C'est un prolongement
qui m'apparaît utile dans les circonstances. Je pense que vous allez
comprendre cela facilement. Je vous adresse mes remerciements.
Ma collègue, la députée de Jacques-Cartier,
complétera tantôt quand ce sera mon tour. Merci beaucoup.
Le Président (M. Thérien): Donc, nous revenons avec
la députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: Comme perspective d'avenir, vous répondez
réellement à la réalité du développement
économique du Québec par le rôle que vous jouez. Compte
tenu du contexte actuel chez les étudiants, c'est-à-dire de la
difficulté à trouver du travail, vous répondez encore
grandement à cette autre mission puisque la plupart de vos
étudiants trouvent de l'emploi. J'imagine qu'ils doivent avoir des
salaires assez décents. Quelle est la moyenne de salaire pour la plupart
de vos jeunes diplômés? En termes aussi d'échelles
progressives, cela se situe où?
M. Soucy: En moyenne, les salaires que nos diplômés
gagnent se comparent à ceux des ingénieurs des autres
facultés plus traditionnelles de génie. J'ai des chiffres ici qui
montrent depuis 1976-1977 la progression des salaires, c'est-à-dire
à partir de l'année de diplômation. Par exemple, un
étudiant en 1983-1984 était embauché aux alentours de 25
000 $; celui qui est diplômé en 1976-1977, soit huit ans plus
tôt, son salaire se situe aux alentours de 36 000 $. Nous avons des
statistiques sur cela. Nous avons l'impression que ces salaires se comparent
avantageusement à ceux des ingénieurs.
Mme Vermette: Cela m'amène à poser une autre
question. Sur le nombre de vos admissions, combien y a-t-il de femmes par
rapport à la moyenne des hommes et quels sont les critères
d'évaluation en ce qui concerne, justement, l'égalité des
chances entre les femmes et les hommes?
M. Soucy: Excusez-moi?
Mme Vermette: En ce qui concerne l'accessibilité aux
études pour les femmes et hommes.
M. Soucy: II n'y a pas de limite chez nous à
l'accès de la part de femmes ou d'hommes. La limite vient plus de la
nature de la clientèle que nous recrutons du cégep professionnel.
On se rend compte que les étudiants de ce secteur sont en plus grande
majorité de sexe masculin et qu'il y a moins de diplômés
féminins. Ainsi, il est presque normal, puisque nous recrutons
actuellement exclusivement dans ce secteur, que la gent masculine soit beaucoup
plus importante que la représentation féminine au sein des
étudiants. Cela ne nous empêche pas de dire que celles qui
viennent sont d'excellente qualité, puisque le président des
étudiants est justement une étudiante. On déplore un peu
la faible attirance des femmes pour notre type d'enseignement. On a
récemment demandé de regarder cela et de voir s'il n'y aurait pas
de correctif à apporter. Il y a certainement un enseignement qui peut
convenir aux deux.
Le Président (M. Thérien): Merci beaucoup. Je
demanderais le consentement, étant donné qu'il est 18 heures,
pour qu'on dépasse de quelques minutes. J'ai le consentement des deux
côtés pour qu'on puisse conclure. Je cède la parole
à Mme la députée de Chicoutimi pour la conclusion.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Au nom de ma
formation politique, je dois vous dire merci de votre participation à
cette commission parlementaire. Cependant -peut-être pourrez-vous me
fournir tantôt les réponses - vous n'avez que partiellement
répondu à la question de ma collègue, la
députée de Marie-Victorin. Vous ne nous avez pas dit combien il y
avait de filles effectivement chez vous. C'est probablement un peu gênant
et je vous comprends. (18 heures)
Une voix: C'est quarante-cinq.
Mme Blackburn: Sur?
M. Piedboeuf: Sur 1200 et quelques étudiants. Ce n'est pas
beaucoup.
Mme Blackburn: Je comprends la gêne. Ma question, parce
qu'on aurait pu ajouter cela comme question, c'est! Est-ce que vous avez une
politique d'information destinée aux filles? Je dois vous dire que cette
réflexion m'est venue tout à l'heure lorsque j'ai regardé
votre cahier qui est, comme outil de promotion, bien fait, intéressant
et dans lequel on ne voit que des hommes. On a vu tout à l'heure un coin
qui ressemblait à peu à une cafétéria et je me suis
dit que, si c'était une cafétéria, en arrière du
comptoir, on devait peut-être retrouver des femmes. Cela pour dire que,
dans des secteurs d'activités et de formation comme le vôtre, il y
a des salaires intéressants et il serait extrêmement important
qu'on retrouve plus de filles, plus de femmes, parce que -personne, je pense
bien, ne pourra nier cela - elles seront de plus en plus souvent chefs de
famille. Il me semble que, quant à votre école et à ses
facultés, je dirais, plus prometteuses d'avenir, il devrait y avoir des
incitations ou des façons, une promotion, une sensibilisation qui
devraient être davantage adressées aux jeunes filles dans les
collèges.
J'ai eu plaisir à vous entendre malgré que je pense que le
ministre ait jeté tantôt un peu une douche froide sur vos projets
d'expansion. Cela m'amenait à une autre question, mais on pourra
toujours y répondre
tantôt. J'imagine que votre plan de développement avait
été un peu vu par l'UQ; cependant, je pense que ce n'est pas tout
à fait fermé. J'espère que vous trouverez ailleurs
davantage de dynamisme par rapport au défi qui va vous être
posé en regard de votre développement. Je vous remercie
infiniment de votre participation à cette commission.
Le Président (M. Thérien): Merci. Maintenant, du
côté ministériel, je passerai la parole è l'adjointe
parlementaire en matière d'éducation, Mme la
députée de Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: Merci, M. le Président-Avant de terminer,
j'ai une question. Il s'agit de votre avenir. Il me semble que vous rendez un
service très important afin de faciliter notre capacité de nous
adapter au développement technologique. Et comme les besoins de
formation, mais surtout de perfectionnement risquent d'augmenter de plus en
plus, j'aimerais vous demander ce que vous prévoyez pour l'avenir de
votre école. Quelles sont les orientations que vous
privilégieriez?
M. Soucy: Si vous me le permettez, M. le Président, je
vais répondre à cette question. Effectivement, nous avons mis sur
pied, il y a deux ans, un service de perfectionnement axé sur des
formations sur mesure vers l'industrie. En 1985-1986, nous avions neuf
activités dont deux séminaires qui nous ont donné quand
même des revenus en frais de scolarité de l'ordre de 73 000 $ avec
une centaine de participants.
En 1986-1987, nous avons 25 activités dont 16 séminaires
et nous espérons atteindre environ 250 participants. Pour nous, c'est
une partie importante - je n'en ai pas parlé dans mon mémoire; on
en a parlé un peu, mais disons que je n'ai pas développé
ce point -et, si vous voulez, on pourrait vous remettre...
Une voix: Cela a été remis.
M. Soucy: Cela a été remis. ...un petit exemplaire
de notre programme de perfectionnement qui est actuellement
véhiculé et qui est offert à la fois à
Montréal et dans la région de Québec actuellement. En
matière de perfectionnement, voilà actuellement nos
activités, donc, ce que nous appelons le perfectionnement
complémentaire au programme de baccalauréat et de certificat qui
donne des unités universitaires d'éducation continue, ce qu'on
appelle les CEU.
Mme Dougherty: Est-ce que la demande excède votre
capacité de répondre, à l'heure actuelle?
M. Soucy: À l'heure actuelle, je dirais peut-être
que l'offre est assez importante parce que nous ne sommes pas les seuls
à faire ce type d'offre. Il y a aussi...
Mme Dougherty: Qui sont vos principaux compétiteurs, si on
peut utiliser ce terme?
M. Soucy: II y a des compétiteurs universitaires,
évidemment. L'Université McGill quand même a un très
fort programme d'enseignement et de perfectionnement; Polytechnique,
également, dans des secteurs techniques et il y a aussi beaucoup
d'entreprises privées qui font ce type de perfectionnement. Cela nous
étonne et cela ne nous étonne pas, mais avec l'avantage qu'ont eu
récemment les cégeps de pouvoir s'équiper d'une
façon peut-être un peu plus intéressante que les
universités par des programmes spéciaux, les cégeps ont pu
offrir, grâce à des équipements modernes plus
sophistiqués, des cours de perfectionnement en CAO-FAO, par exemple, en
dessin assisté par ordinateur, etc., de sorte qu'il y a là aussi
une certaine compétition qui existe et qui n'existait pas il y a
quelques années.
Le Président (M. Thérien): J'inviterais Mme la
députée à conclure.
Mme Dougherty: Merci infiniment d'être venus et de nous
avoir informés sur les activités de votre école.
Personnellement, j'ai appris beaucoup et on va suivre votre progrès et
vos activités avec beaucoup d'intérêt à l'avenir.
Merci d'être venus.
Mme Blackburn: M. le Président... Le Président
(M. Thérien): Avant de... Mme Blackburn: ...en
conclusion...
Le Président (M. Thérien): Avec la
permission...
Mme Blackburn: ...avec votre permission. Tout à l'heure,
le directeur général nous disait que les filles inscrites
à son école étaient performantes, ce dont je ne doute pas.
À cet égard, vous me permettez certainement en votre nom,
mesdames et messieurs, d'adresser mes compliments et mes félicitations
à la présidente de l'association des étudiants et
étudiantes de l'école. 45 sur 1200 et que cela soit une fille, on
n'avait pas à faire plus de démonstration de la compétence
des filles.
Le Président (M. Thérien): Je me joins à Mme
la députée pour vous féliciter, madame.
Mme Blackburn: J'en doute un peu.
Le Président (M. Thérien): Au nom de la commission,
je veux personnellement vous remercier, tous les représentants de
l'École de technologie supérieure. Comme vous avez pu le
remarquer, les conclusions étaient de forme interrogative. Donc,
c'était très intéressant et il y aurait sûrement du
temps qui aurait été nécessaire pour élaborer
davantage. Merci beaucoup encore une fois.
La commission suspend ses débats jusqu'à 20 heures, alors
qu'elle accueillera les représentants de l'École
polytechnique.
(Suspension de la séance à 18 h 8)
(Reprise à 20 h 12)
Le Président (M. Thérien): À l'ordre, s'il
vous plaît!
La commission parlementaire de l'éducation reprend ses travaux.
Je voudrais rappeler aux parlementaires le mandat de la commission qui est de
procéder à une consultation générale dans le but
d'étudier les orientations et le cadre de financement du réseau
universitaire québécois pour l'année 1987-1988 et pour les
années ultérieures.
Cela nous fait plaisir d'accueillir les représentants de
l'École polytechnique de Montréal et en même temps de
signaler la présence d'un auditeur libre et objectif, le
député d'Outremont, ministre délégué
à la Privatisation.
Je demanderais à M. le président de nous présenter
ses collaborateurs et je vous indique que nous avons une heure (il est 20 h 10,
donc on aura jusqu'à 21 h 10). Comme on l'a manifesté, vous avez
à peu près 15 à 20 minutes, selon votre bon gré, on
est assez souple là-dessus, pour après passer à la
période de questions qui est partagée moitié-moitié
entre la partie ministérielle et la partie de l'Opposition. Donc, M. le
président, vous avez la parole.
École polytechnique de Montréal
M. Bouthillette (Roland): M. le Président, mesdames et
messieurs les ministres et députés, il nous fait plaisir de vous
présenter notre mémoire. Je suis chef de la
délégation de l'École polytechnique. Mon nom est Roland
Bouthillette. Je suis président et principal de l'école. Je me
suis fait accompagner de deux jeunes hommes: à ma droite le directeur de
l'école, diplômé en 1960 de l'École polytechnique
qui a fait beaucoup de chemin depuis ce temps-là, et M. Jean Baulne,
président de l'Association des diplômés de l'École
polytechnique. Je vous souligne tout de suite que l'École polytechnique
compte 10 000 diplômés. C'est donc au nom de tout un groupe
d'étudiants, qui est de l'ordre actuellement de 5000, et de 10 000 de
nos diplômés que nous vous adressons ce mémoire.
Si vous me le permettez je vais passer la parole au directeur de
l'école, qui très activement a participé avec beaucoup de
soin à la rédaction du mémoire.
Le Président (M. Thérien): Merci. Donc, cela nous
fait plaisir de vous accueillir. La parole est à vous, M.
Doré.
M. Doré (Roland): M. le Président, M. le ministre
de l'Enseignement supérieur et de la Science, messieurs les ministres,
mesdames et messieurs les députés, c'est en qualité de
professeur actif en recherche et en enseignement et de directeur de
l'école que je me présente devant vous. J'ai compris qu'une
lecture exhaustive du mémoire n'était peut-être pas la
forme d'intervention idéale ce soir, compte tenu que vous avez eu
à subir probablement de très nombreuses lectures. Je vais essayer
de résumer les points les plus importants de notre mémoire.
Pour ce qui est de l'importance de la formation scientifique et
technologique, je crois que ce n'est pas nécessaire de reprendre les
arguments de plusieurs groupes qui ont noté que l'avenir de notre
province et l'avenir de notre pays au point de vue économique
était certainement lié à l'industrie des connaissances.
Les ingénieurs, bien sûr, se retrouvent aux confins ou au
carrefour de ces développements technologiques.
Laissez-moi illustrer mon propos par une anecdote. J'étais, l'an
passé, à Ottawa, assis à la table d'un chef d'entreprise
de haute technologie qui me disait: M. Doré, ce qui me cause le plus de
souci lorsque je vois mes employés quitter l'usine, le soir, entre 5 et
7 heures, c'est toujours la peur de ne pas les voir revenir le lendemain, parce
que mon unique capital et le capital le plus impartant pour mon entreprise, ce
sont ces personnes qui contribuent à l'avancement de ma compagnie. Cela
tout simplement pour renforcer cette thèse que les connaissances sont
aujourd'hui capitales dans le développement d'une nation.
Ce qu'est l'École polytechnique? L'école est actuellement
la plus importante parmi les 32 facultés et écoles
d'ingénieurs au Canada, il y en a 7 au Québec. Bien sûr,
l'École polytechnique est celle qui compte le plus d'étudiants au
premier cycle et le plus d'étudiants aux deuxième et
troisième cycles. Elle se situe au Canada au premier rang pour le nombre
d'étudiants au premier cycle et au deuxième rang pour le nombre
d'étudiants à la maîtrise et au doctorat. Enfin,
l'école compte 4000 étudiants au premier cycle, près de
1000 étudiants à la maîtrise et au doctorat, 1000
étudiants à l'éducation permanente et un peu plus de
1100 ingénieurs qui suivent les cours de perfectionnement
intensifs. Donc, nous comptons environ 7200 étudiants de toutes
catégories. Nous avons 750 employés dont 210 professeurs. Les
dépenses de l'école s'établissent à environ 60 000
000 $ par année et le gouvernement en finance 40 000 000 $. Je crois que
ce sont des chiffres importants.
Le sous-financement de l'École polytechnique - sans faire une
liste qui devient fastidieuse à écouter - s'est traduit par une
réduction de 39 % du coût de formation par étudiant entre
1978-1979 et 1985-1986. Je dois dire que les compressions que nous avons subies
au début de cette période ont eu des effets
bénéfiques sur la gestion de l'École polytechnique. Mais
les compressions que nous subissons depuis les quelques dernières
années font des torts que je vais essayer de démontrer au cours
de ce mémoire. Ce sont des torts au niveau de la qualité des
services que nous pouvons offrir à nos étudiants. Donc, une
période qui a été bénéfique parce que nous
avons pris conscience de l'importance de l'argent, je crois, c'est important de
le reconnaître. Nous avons actuellement atteint des limites dangereuses.
Bien sûr, nous avons eu une diminution sensible des dépenses en
équipements, j'y reviendrai tout à l'heure. Nous avons des
problèmes d'espace. Nous avons en chantier sur la table à dessin
un projet d'agrandissement qui pourra régler une partie de ces
problèmes d'espace.
Nous avons un rapport étudiants-professeur qui est beaucoup plus
élevé que toutes les normes proposées pour les
écoles d'ingénieurs. Nous avons actuellement un facteur de 22,5
étudiants par professeur, sans appliquer de facteur de
pondération pour les étudiants de maîtrise et de doctorat.
Je répète que nous avons à l'école 1000
étudiants à la maîtrise et au doctorat.
Bien sûr nous avons des problèmes de vieillissement du
corps professoral et un problème pour maintenir des infrastructures de
services: bibliothèque, atelier et secrétariat surtout.
Permettez-moi d'ouvrir une parenthèse pour résumer une
partie des propos de l'annexe - je suis en page A-2 de l'annexe -pour vous
parler de l'état de nos laboratoires. Après les espaces, le
problème le plus aigu de l'École polytechnique est un
problème d'équipements scientifiques et d'espaces de
laboratoires. Nous disons dans cette annexe que nos laboratoires sont devenus,
pour plusieurs d'entre eux, des musées. Vous pourrez peut-être
trouver le mot fort mais c'est effectivement le cas. Nos étudiants vont
faire actuellement des laboratoires dans les cégeps. Nous n'avons pas
d'objection majeure à ce que nos étudiants fassent des travaux,
des laboratoires dans les cégeps. Lorsque cela se multiplie et lorsqu'on
doit déplacer des groupes de 240 étudiants par année,
comme le groupe de génie mécanique, pour aller dans les
cégeps, on doit le faire sur plusieurs journées, et il y a une
quantité énorme d'énergie qui est perdue dans de tels
échanges avec les cégeps.
Pour illustrer aussi nos problèmes d'équipement, nous
notons - page A-3 de l'annexe - que certains de nos professeurs en recherche
doivent faire ou ont fait l'acquisition d'équipements que les
cégeps considèrent désuets. Ce n'est pas pour vous dire
que les cégeps sont suréquipés. Non, les cégeps ne
sont pas suréquipés. Mais lorsque nous sommes obligés, de
façon importante, de nous servir des équipements des
cégeps, je crois que cela dénote une situation peut-être
pas catastrophique, mais du moins très difficile pour l'École
polytechnique.
Nos locaux sont utilisés le plus possible 365 jours par
année, 24 heures par jour. Nos locaux sont ouverts 24 heures par jour.
Notre centre de calcul est utilisé aussi 24 heures par jour et 365 jours
par année. C'est tout simplement pour vous souligner que nous essayons
d'utiliser nos équipements au maximum.
Les doyens de l'ingénierie du Canada forment un groupe
très actif et très uni. Nous faisons des enquêtes
annuellement pour savoir de quelle façon nous sommes pourvus au point de
vue de budget de fonctionnement et de budget d'équipement. Des
études qui ont été faites par ce comité des doyens
de l'ingénierie du Canada montrent que les ressources mises à la
disposition des facultés d'ingénierie du Québec - je ne
parle pas uniquement des polytechniques; je parle pour l'ensemble des
facultés du Québec; les polytechniques se trouvent dans cette
moyenne - les ressources mises à la disposition de ces
facultés-écoles, sont bien en deçà de la moyenne
nationale. Elles sont en deçà des ressources mises à la
disposition des facultés de l'Ontario qui ne sont pas très bien
pourvues elles non plus. Je ne veux pas insister parce qu'il y a d'autres
institutions universitaires, entre autres, le Conseil des universités
qui ont fait de telles comparaisons.
Quels sont les efforts que l'École polytechnique a faits pour
essayer de s'adapter à cette situation? Une chose très
importante, c'est qu'on a pu établir un régime qui n'est pas un
régime d'équilibre budgétaire. Nous sommes en
régime de déficit annuel, mais nous n'avons pas de déficit
accumulé à l'École polytechnique, et ce, grâce
à l'appui du personnel de l'école et des étudiants. Les
étudiants ont accepté des conditions de vie à
l'École polytechnique que des étudiants d'autres institutions
n'auraient peut-être pas acceptées. Maintenant, le groupe qui a le
plus contribué à cet état de quasi-équilibre, c'est
le corps professoral qui
a accepté des augmentations de tâche assez
appréciables, et j'ai ici des documents que je pourrais déposer
et que nous pourrions discuter lors de ta période des questions.
J'ai parlé tout à l'heure de l'utilisation maximale des
locaux. Nous avons aboli des postes, offert des programmes de
préretraite. Nous avons davantage fait appel à des chargés
de cours. Nous avons demandé à nos professeurs de diriger plus
d'étudiants de 2e et 3e cycles.
Maintenant, pour ce qui est de la diversification des sources de
financement, bien sûr, nous avons fait appel à l'industrie. Nous
sommes peut-être - l'École polytechnique - placés dans une
situation privilégiée par rapport aux autres institutions
universitaires du fait que, de par nos activités, nous
intéressons a priori plus les industries. Nous sommes une institution
monolithique. Nous ne touchons que l'ingénierie et, bien sûr, les
industries se rapprochent de nous comme nous essayons de nous rapprocher
d'elles. Les nouveaux programmes de spécialisation ou des nouvelles
orientations que nous avons créés au cours des cinq
dernières années ont été, dans la plupart des cas,
créés grâce à un appui direct des industries. Donc,
elles ont mis de l'argent dans le démarrage des programmes. Ou nous
l'avons fait en collaboration avec d'autres universités ou nous avons
mis ces deux moyens ensemble. Un exemple, c'est la création d'un
programme de maîtrise avec McGill et Concordia qui est supporté en
partie par les compagnies d'aviation dans la région de Montréal.
Nous essayons aussi de profiter de notre capacité de donner certains
services aux industries pour négocier des contrats. Ce n'est pas, au
point de vue du volume un chiffre d'affaires très important. C'est quand
même 3 000 000 $ par année. Ces opérations s'autofinancent
malgré le fait que d'autres groupes disent que ça ne
s'autofinance pas, mais vous allez en entendre parler ce soir de toute
façon.
Nous avons aussi essayé d'avoir des dons. Nous notons dans notre
mémoire que nous avons pu avoir 6 000 000 $ de dons d'équipement
au cours des trois dernières années. Ceci s'est fait grâce
au travail d'approche des professeurs de l'école qui avaient des
contacts avec les entreprises et qui savaient que peut-être certaines de
ces entreprises pouvaient donner des logiciels ou faire des dons
d'équipement à l'école. La direction de l'école, ce
n'est qu'en dernier recours que nous avons mis notre grain de sel, si vous
voulez, pour approcher les présidents de compagnie ou les personnes
clés de façon à finaliser ces dons.
Le programme de coopération internationale est quand même
un programme très impartant à l'école. Nous sommes
présents de façon importante au Sénégal. Nous avons
mis sur pied l'École polytechnique de Thiès.
C'est un projet qui date de 1973. Nous étions cet
après-midi, M. Bouthillette et moi, avec le ministre de
l'Éducation du Sénégal qui nous soulignait l'importance de
ce projet particulier pour le développement économique de son
pays.
La rationalisation des activités. Je vous ai mentionné
tout à l'heure les interactions que l'école a eues avec d'autres
universités. Nous avons des projets de collaboration pour mettre sur
pied des programmes d'enseignement avec plusieurs universités dont
l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, entre
autres, pour faire démarrer une première année
d'ingénierie. Nous avons fait la même chose, il y a vingt ans - je
regarde Mme Blackburn - à l'Université du Québec à
Chicoutimi pour instaurer le programme d'ingénierie là-bas. Nous
sommes très ouverts à ces collaborations.
Il vaut la peine de noter, je crois, que pour toutes les subventions de
recherche d'actions structurantes - l'école est impliquée dans
neuf ou dix actions structurantes - nous avons fait la recherche en
collaboration avec d'autres universités.
Conséquences du sous-financement. En fait ce qu'on veut dire,
c'est que malgré tous les efforts que nous avons faits pour chercher du
financement et trouver du financement additionnel à l'extérieur,
pour diversifier, pour utiliser au maximum nos ressources internes et pour
rationaliser nos activités en collaborant avec d'autres
universités, nous croyons que l'École polytechnique est rendue au
bout de son rouleau et qu'il n'est plus possible de demander plus à
notre personnel ou d'avoir, si vous voulez, un rendement de beaucoup accru pour
ce qui est des collaborations avec d'autres ou du financement provenant
d'autres sources.
Maintenant, nous avons proposé certains éléments de
solution au problème de financement en page 11. Les trois
premières suggestions ou propositions on les a entendues de la bouche du
Conseil des universités, donc nous les appuyons. Par contre, je crois
qu'il vaudrait la peine d'exposer les vues de l'École polytechnique pour
ce qui est de l'accroissement des populations et le financement de
l'accroissement de ces populations. Nous croyons que l'État du
Québec fait face à un dilemme qui est celui de donner un plus
grande accessibilité à l'université tout en se voyant
contraint de limiter son apport financier. C'est réellement un dilemme.
Si l'État du Québec décide de continuer sa politique
d'accessibilité universelle aux universités, je crois qu'il devra
faire face à des obligations dont une augmentation du financement des
universités. Donc, bien sûr que les sources de financement peuvent
provenir du gouvernement et peut-être d'autres sources. Nous pouvons
essayer et je crois qu'il est possible
encore d'avoir un financement accru provenant des entreprises, mais
quand même on a très bien exploité ce filon.
La question des frais de scolarité, en page 14. Nous disons que
nous sommes favorables à l'augmentation des frais de scolarité
mais à certaines conditions. Il est certain qu'une solution qui serait
une injection importante de fonds de l'État pourrait limiter
l'augmentation de ces frais de scolarité à un niveau assez
raisonnable. Nous disons que nous sommes prêts encore à collaborer
avec les autres universités pour le développement de nouvelles
activités et nous répétons dans le mémoire - et je
le dis encore aujourd'hui - notre volonté de faire cela. (20 h 30)
Une certaine rationalisation. L'étude sectorielle sur le
génie nous a indiqué certaines pistes et nous avons
déjà assuré le ministre de l'Enseignement supérieur
et de la Science que nous étions pour faire notre travail de
rationalisation et nous le ferons.
Un dernier point, celui du financement des frais indirects de la
recherche. On en a parlé. Pour l'École polytechnique c'est un
élément très important des problèmes de financement
que nous avons actuellement. Bien sûr que plus les universités
acceptent -je dis acceptent parce que maintenant, lorsque nous acceptons ou
lorsqu'on nous fait une offre de subvention de recherche, nous
réfléchissons si on doit l'accepter ou ne pas l'accepter. Nous ne
pourrions plus actuellement prendre une autre équipe structurante
à l'École polytechnique, parce que malgré le fait que le
financement de ce programme soit généreux, cela coûte quand
même à l'École polytechnique des montants assez
importants.
En terminant, je voulais tout simplement dire que nous avons en main des
documents que nous pourrions déposer et discuter si vous le voulez et
qui touchent les charges d'enseignement des professeurs de l'École
polytechnique et des chargés d'enseignement. Nous avons des chiffres de
1976-1977 et jusqu'à cette année. Nous avons des chiffres et des
données sur le relevé des charges d'enseignement; comment cela se
fait à l'école; depuis quand nous faisons cela; sur les
coûts d'administration, sur la politique relative à
l'évaluation de l'enseignement. Je sais que pour les étudiants
c'est un sujet très important et pour nous aussi d'ailleurs. Nous avons
des données que nous pourrions transmettre verbalement sur la
réussite dans les cours, Mme Blackburn, sur le taux de diplômation
ainsi que sur le contingentement que nous faisons à l'admission à
l'École polytechnique. Voici, M. le Président.
Le Président (M. Thérien): Vous pouvez faire le
dépôt; j'accepte le dépôt des documents.
On est en train de distribuer le document que M. le directeur vient de
déposer. Vous voulez continuer votre exposé ou on passe à
la période de questions?
M. Doré: J'ai terminé.
Le Président (M. Thérien): Merci beaucoup, M.
Doré, de votre exposé qui a été fort
intéressant. Pourrait-on en passer un au ministre et un aux
représentants de l'Opposition?
M. Ryan: M. le Président.
Le Président (M. Thérien): Je donne donc la parole
au ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.
M. Ryan: M. le Président, je ne veux pas retarder nos
travaux, mais je serais bien tenté de consacrer quelques minutes
à examiner ce tableau sur la charge moyenne d'enseignement des
professeurs dans chacun des départements de l'École
polytechnique. On va le faire à mesure qu'on avance. Ce sont des
renseignements qui répondent évidemment à des
inquiétudes ou des interrogations maintes fois formulées depuis
le début de nos travaux. Je suis bien content que vous nous ayez
apporté cela de votre propre initiative; je l'apprécie
beaucoup.
Je voudrais signaler que c'est un grand plaisir pour la commission
parlementaire de l'éducation et pour les membres de l'équipe
ministérielle en particulier de rencontrer ce soir les
représentants de l'École polytechnique de Montréal. Je
voudrais signaler la présence parmi nous ce soir dans l'équipe
ministérielle de M. Pierre Fortier, député d'Outremont et
ministre d'État ou délégué...?
M. Fortier: Délégué à la
Privatisation.
M. Ryan: ...délégué aux Finances et, en
particulier, à la Privatisation, maintenant aux institutions
financières.
M. Jolivet: C'est M. Gobeil qu'on aurait aimé avoir.
Le Président (M. Thérien): M. le
député de Laviolette, vous n'avez pas la parole.
M. Ryan: J'espère que ces choses qui sont tout è
fait hors d'ordre ne sont pas enregistrées, M. le Président.
Le Président (M, Thérien): ...se fier au droit de
parole respectif.
M. Ryan: II me fait plaisir de souligner la présence parmi
nous des représentants de l'École polytechnique en raison de la
grande importance que la profession qu'ils
représentent et à laquelle ils préparent occupe
dans notre vie collective et représente pour notre avenir collectif.
Déjà, la profession d'ingénieur joue un rôle capital
dans le développement de notre économie, dans le
développement de nos entreprises, de nos grandes infrastructures
publiques, de notre culture scientifique et technologique. L'École
polytechnique, dans ce développement de la profession d'ingénieur
que nous avons connue au Québec depuis le début du siècle
a joué un rôle de leader que nous reconnaissons tous volontiers.
Vous le soulignez à juste titre dans votre mémoire. Vous
êtes l'école de génie la plus importante au Canada en ce
qui touche les activités de premier cycle et le rayonnement
international. Vous venez au deuxième rang, tout de suite après
l'Université de Toronto, pour le développement du deuxième
et du troisième cycle qui ont connu un développement remarquable
chez vous au cours des dernières années. Cela vaut la peine de le
signaler. Vous avez des choses importantes à nous dire, puis nous allons
les accueillir avec beaucoup d'intérêt.
Une autre chose qu'il m'intéresse de signaler à ce
moment-ci, c'est la diversification de ces sources de revenus à laquelle
l'École polytechnique a procédé au cours des
dernières années. J'examinais les chiffres que nous avons
à notre disposition et je constate que sur des revenus totaux pour
l'année 1985-1986 de 47 000 000 $, un bon 12 000 000 $ venaient de
source extérieure, étaient venus s'ajouter aux revenus en
provenance des subventions gouvernementales et des frais de scolarité et
d'inscription. Cela veut dire un peu plus de 25 % du total. Cela vaut la peine
de le signaler. Une partie a consisté en des subventions du gouvernement
du Canada et d'organismes fédéraux; une autre partie a
consisté en des dons de l'entreprise privée et une autre partie
en des ventes de services ou produits à l'extérieur. Cela vaut la
peine de le signaler.
Je voudrais profiter de cet aspect de votre présentation pour
signaler un point qui a peut-être été mal compris et
corriger une impression erronée qui a pu se dégager de choses
dites antérieurement, non pas par nous mais par des personnes qui sont
venues, puis on n'avait pas évidemment eu le temps de tout reprendre. Il
y en a qui ont laissé entendre ceci: On irait bien chercher des revenus
à l'extérieur, mais ils nous déduisent cela pour les fins
de subvention, il n'y a pas d'incitation. Je regrette de dire, ce soir, que
cela n'est pas vrai. Si une université ou une institution comme
l'École polytechnique va chercher des revenus à
l'extérieur sous forme de dons ou de contrats de travail ou autre, cela
n'est pas déductible pour les fins de subvention. Sa subvention n'est
pas affectée par cela.
Mme Blackburn: ...non plus. M. Ryan: Pardon?
Mme Blackburn: Les frais afférents non plus.
M. Ryan: Non. Les frais d'inscription et les frais de
scolarité sont déductibles, les frais de matériel... Les
frais afférents, Mme la députée de Chîcoutimi, cela
comprend les frais d'inscription, dans ma définition; mais les
définitions varient tellement d'un mois à l'autre que celle-ci
n'est pas la seule bonne, j'en conviens volontiers.
Mme Blackburn: Mais cela vous l'appréciez...
M. Ryan: Par conséquent, les revenus en provenance des
frais de scolarité et des frais d'inscription sont déductibles.
Cela mérite d'être souligné d'une manière
spéciale. M. Doré a semblé laisser entendre qu'on avait
peut-être un peu épuisé un potentiel de ce
côté-là; nous refusons de le croire. Nous croyons que
certaines entreprises pourraient doubler à elles seules le montant des
revenus qui vous sont fournis de ce côté-là, mais ce sont
les entreprises qui prennent leurs décisions. Il y a déjà
des pas de faits et je m'en réjouis.
Je voudrais en venir maintenant à un thème majeur de votre
mémoire. Évidemment, c'est la partie qui traite des
conséquences du financement. Vous avez souligné ces
conséquences. Cela vaut la peine de le rappeler. Les revenus par
étudiant qui constituent l'ensemble des recettes de l'école n'ont
pas connu la progression qu'il eût fallu pour faire face aux
dépenses accrues. En fait, les coûts de formation ont
considérablement diminué au cours de la - on va le dire
très bientôt - dernière décennie. Il y a eu une
chute marquée. Le coût de formation d'un étudiant en
1978-1979 était de 7500 $ et, en dollars constants, en 1985-1986, il
était, selon vos données, de 4600 $.
Vous avez parlé du phénomène des
équipements. Nous en avons parlé à plusieurs reprises. Il
y a eu certaines mesures qui ont été prises pour favoriser la
modernisation des équipements mais c'est très insuffisant. Pour
faire face à la situation que vous signalez, je pense pouvoir vous
assurer que nous en prenons note. Vous nous signalez l'augmentation du rapport
étudiants-professeur - je présume, évidemment, que c'est
étudiants et professeurs réguliers. Je crois comprendre qu'il y a
eu une augmentation dans la partie de l'enseignement qui est confiée
à des chargés de cours. On pourra avoir des précisions
là-dessus tout à l'heure, évidemment. Il faut tenir compte
de cela quand on discute du rapport étudiants-professeur, à mon
humble point de
vue.
Vous parlez de la détérioration du service de la
bibliothèque, du service d'informatique, etc. Surtout pour une
école comme la vôtre qui doit être à la fine pointe
du progrès technologique, je pense que cela a peut-être plus de
signification que dans d'autres facultés. II y a des facultés
où on a moins besoin de l'intelligence artificielle. Ce n'est pas
diminuer le recours que vous faites à l'intelligence réelle que
de signaler cela, mais, dans votre cas, je pense que les deux doivent
être intimement mariées pour l'efficacité de la formation
en vue des défis d'aujourd'hui. Ce sont des points que nous
enregistrons. Ils ont été abondamment évoqués
depuis le début des audiences de la commission. Je ne m'attarderai pas,
parce que je pense que nous avons le matériel qu'il nous faut sur ces
points pour nous faire une opinion. Vous avez ajouté des
éléments à la fin de votre mémoire sur les
équipements en particulier que j'ai notés également.
Je voudrais pour la partie qui me reste pour certaines questions en
venir aux éléments de solution que vous proposez à la page
11 de votre mémoire qui me semble être la page la plus importante.
Tout d'abord, les deux premières recommandations ne retiendront pas mon
attention, parce que je pense qu'elles vont faire partie de l'ensemble des
recommandations qui nous sont présentées. Vous demandez la
cessation des compressions. M. le député d'Outremont et ministre
délégué aux Finances a souligné qu'il était
délégué aux Finances. On espère qu'il transmettra
ce message à notre collègue commun, le ministre des Finances,
évidemment, pour demander l'indexation annuelle des budgets pour tenir
compte de l'inflation. Cela va dans la même catégorie.
Dans la troisième recommandation, vous demandez la
révision des règles de financement et de recensement des
populations étudiantes. En ce qui regarde le recensement, je pense qu'on
a déjà fait la discussion là-dessus ensemble au niveau des
recteurs et principaux d'université et des gens du ministère. Je
pense que nous sommes convenus qu'à compter de l'an prochain nous allons
passer au système RECU qui répond de manière
générale aux attentes des universités. Il y a encore
quelques retouches à faire, mais je pense que de ce côté
vous pouvez compter que le nouveau système de recensement des
clientèles sera en vigueur pour l'année prochaine. On a dû
suspendre l'entrée en vigueur du système pour des raisons que M.
Doré connaît très bien, parce que nous étions
ensemble à une réunion où ce fut discuté. Je pense
que l'année prochaine on va pouvoir fonctionner.
La révision des règles de financement, j'aimerais vous
demander, en ce qui touche l'École polytechnique, est-ce que, dans le
système actuel de calcul des subventions, il y a des choses qui
devraient être corrigées pour mieux répondre à vos
besoins? 11 y a déjà des retouches qui ont été
faîtes ces dernières années. Je constatais cet
après-midi, en révisant nos chiffres, que la subvention moyenne
par étudiant pour l'école est à peu près de 7500 $.
Cela comprend autant le premier cycle que les autres. C'est la moyenne: 7500 $
ou 7400 $ si j'ai bien compté. Si vous pouviez m'indiquer les points
dans les règles de financement qui demanderaient d'être
retouchés pour répondre a votre réalité, cela nous
rendrait service. (20 h 45)
M. Doré: M. le ministre, en fait l'École
polytechnique n'a pas de point spécifique à souligner quant
à la question de redéfinir les règles de financement. Je
crois que par équité pour d'autres institutions universitaires...
Je peux vous dire qu'on a fait les calculs et on ne sera pas gagnants dans une
révision des règles. Je crois que sur une base
d'équité il faut que ces règles soient
révisées mais pour nous, cela ne nous servira pas.
M. Ryan: Très bien. Je suis bien content de le savoir, on
va regarder ailleurs, on va essayer de vous plumer le moins possible.
M. Doré: C'est évident. En fait, on ne sortira pas
gagnants, probablement, mais peut-être pas perdants. Disons que c'est par
équité pour les autres qu'il faut faire cela.
M. Ryan: Je l'apprécie beaucoup, évidemment.
Ensuite, vous proposez le contrôle de l'accroissement des populations
étudiantes selon l'augmentation réelle du support financier
accordé par l'État aux universités. Pourriez-vous
préciser un petit peu votre pensée là-dessus, nous dire
quel a été le rythme d'augmentation - le mouvement des
inscriptions - ces dernières années, disons depuis cinq ans chez
vous?
M. Doré: Nous admettrons en première année
cette année, de toute provenance, environ 1000 étudiants. Nous en
avons admis, il y a trois ans, 1100 et les deux autres années, l'an
passé et l'année précédente, environ 1050. Nous
admettons moins d'étudiants en première année parce que
notre taux de rétention est meilleur. Il s'accroît actuellement
parce que nous admettons de meilleurs étudiants. Nous avons eu, cette
année, 2300 demandes d'admission et nous avons admis en fait à
l'automne 755 nouveaux étudiants provenant de ces 2300 dossiers qui
étaient tous acceptables. Il s'agit là de l'accroissement des
populations à Polytechnique. Nous avons eu un très gros
accroissement entre l'automne 1982 et l'automne 1985 à cause du fait que
nous
avons, en 1982, augmenté notre admission, de 850 qu'elle
était en 1981, à 1100 en 1982. Cet accroissement de 250
étudiants est un accroissement qui se cumule au cours des quatre
années de notre cours, ce qui fait, grosso modo, une augmentation
équivalente de 1000 étudiants sur les quatre années. C'est
comme un escalier, il faut faire l'intégrale de cela.
Ce que nous voulons dire par le point 4, M. le ministre, c'est
qu'actuellement les universités ne peuvent plus financer l'accroissement
des populations. Donc, s'il n'y a pas de revenus additionnels ou de subventions
additionnelles qui nous proviennent de l'État ou d'autres sources -on
parle de subventions assurées; bien sûr les frais de
scolarité peuvent entrer là-dedans -on l'a dit tout à
l'heure, è ce moment-là on est mieux de geler les populations
parce que, actuellement, on attaque la qualité et attaquer la
qualité... Les ingénieurs du Québec sont actuellement dans
une position très appréciée au Québec, au Canada et
dans tout le monde. Nous avons un impact assez important sur notre
économie à nous, et pas seulement sur notre économie mais
sur l'économie d'autres pays où le Québec est
présent par son corps d'ingénieurs. Nous pouvons avoir cet impact
parce que les ingénieurs québécois sont reconnus comme
étant des ingénieurs de qualité. Si on touche cette
qualité-la, M. le ministre, ce seront les ingénieurs des autres
provinces qui iront sur les marchés internationaux. Cela est
réellement trancher dans le vif.
M. Ryan: Très bien. Je passe à une autre question
parce que le temps est assez bref. Vous demandez, en sixième lieu, la
rationalisation des activités dans le réseau universitaire
québécois. Vous vous dites disposés à collaborer en
particulier à la mise en oeuvre des recommandations du Conseil des
universités consécutives è l'étude qui a
été faite sur les études de génie au Québec.
Est-ce que vous pouvez me dire s'il y a déjà un certain nombre de
ces recommandations qui ont été exécutées ou si on
est encore à pied d'oeuvre là-dedans? Il y a plusieurs
recommandations assez importantes. On demande à telle école de se
délester progressivement de telle spécialité et à
telle autre de faire ceci. Du côté de l'École polytechnique
est-ce qu'il y a des actions qui ont été engagées pour
aller dans le sens d'une mise en vigueur des recommandations du Conseil des
universités?
M. Doré: Oui, M. le ministre. Pour les deuxième et
troisième cycles nous avons réduit le nombre de
spécialités offertes au niveau de la maîtrise. Nous avons
facilité le passage de la maîtrise au doctorat de façon
à réduire la durée des études. Au premier cycle,
lorsqu'on parle de programmes spécifiques qui ont été
identifiés dans le document, on parlait plus spécialement du
génie minier, du génie géologique, mais, dans le rapport
que le conseil vous a envoyé, on laissait cela un peu de
côté. On disait: Cela reviendra plus tard, lorsqu'on
étudiera la géologie, le génie géologique et le
génie métallurgique. Nous avons eu des discussions avec
l'Université McGill de façon à rationaliser les
activités en génie minier. Il y a actuellement trois
départements de génie minier au Québec. Il y en a un
à Laval, un à l'Université McGill et un à
l'École polytechnique, et il y a un peu d'activités en
génie minier à l'Université du Québec à
Chicoutimi. Il y a l'équivalent de trois programmes miniers au
Québec. C'est trop.
Je peux vous dire que l'École polytechnique considère que
le statu quo pour son programme de génie minier est inacceptable. Ce
n'est pas une solution que nous allons proposer. Nous ne voulons pas le statu
quo. Il faut absolument rationaliser et la façon la plus facile de le
faire, c'est de le faire avec l'Université McGill pour n'avoir qu'un
seul programme. On est encore au stade des discussions exploratoires avec
l'Université McGill quand même. Cela ferait deux programmes et
demi de génie minier au Québec. Il y a peut-être d'autres
solutions envisageables qui permettraient un regroupement encore plus important
des actions en génie minier au Québec.
M. Ryan: Par exempte?
M. Doré: Je crois que la même conclusion pourrait
être tirée pour les activités de génie
géologique et de géologie parce que là, la diversification
est encore plus grande, parce que génie géologique et
géologie, cela s'apparente quand même. II y a des cours communs,
il y a des activités communes et la diversité est encore plus
grande. Le Conseil des universités a jugé bon de retarder ses
recommandations sur ce sujet, mais nous allons collaborer lorsque cela
viendra.
M. Ryan: Très bien. Une dernière question. J'ai
noté qu'au chapitre des sources de financement, vous dites que vous
favoriseriez l'augmentation des frais de scolarité à deux
conditions: à condition que des ajustements proportionnels soient faits
au régime de l'aide financière aux étudiants et,
deuxièmement, à condition que les revenus devant découler
d'une hausse des frais de scolarité restent aux universités et ne
servent pas à combler des diminutions de la source que constituent les
subventions gouvernementales. Pourriez-vous expliquer un peu votre point de vue
sur ce sujet?
M. Doré: Écoutez, M. le ministre! Je crois que si
l'État taxe ses étudiants pour
mettre l'argent dans les coffres de l'État, je ne peux pas voir
comment l'État du Québec pourrait faire cela actuellement. Les
étudiants sont quand même le groupe le plus démuni su point
de vue revenus; il faut comprendre cela. Les étudiants ne sont pas des
gens qui gagnent des salaires douze mois par année. Ils peuvent avoir un
salaire d'été, quelques-uns, pas quelque-uns, la majorité
d'entre eux, ceux de polytechnique. Certains autres ont des travaux
d'été pendant deux ou trois mois. Exiger des frais de
scolarité pour réduire la contribution de l'État, je
trouve que c'est... Je ne veux pas qualifier cette pensée-là.
Le Président (M. Thérien): Merci, M. le ministre.
Je cède maintenant la parole à l'Opposition, à Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M, le
président, M. le directeur général, monsieur, il me fait
plaisir de vous accueillir à cette commission parlementaire. J'ai lu
votre mémoire avec beaucoup d'intérêt et, comme vous le
savez probablement, on a parlé beaucoup de génie ces deux
journées puisque, hier, on rencontrait les représentants de
l'Ordre des ingénieurs qui nous ont longuement parlé de la
situation de l'enseignement dans les différentes écoles de
génie.
Vous constituez, je pense qu'on le reconnaît tous, par les
étudiants que vous formez, la main-d'oeuvre compétente que vous
formez, un élément majeur de notre développement
économique et le rôle que vous jouez à l'étranger en
matière de dévelopement fait de vous des ambassadeurs fort
estimés. D'ailleurs, j'en profite pour le souligner, vos mérites
sont reconnus non seulement ici, mais, m'a-t-on dit, également à
l'étranger, puisque ces messieurs ont reçu une décoration
du ministre de l'Éducation du Sénégal pour, j'allais dire,
bons services rendus en matière de développement dans son pays.
Je voudrais vous féliciter, messieurs, et vous dire qu'on partage
l'appréciation qui est faite de votre participation.
Je n'ai pas le goût de revenir sur chacun des
éléments de votre mémoire que je trouve, par ailleurs,
fort intéressant, fort important. Je préfère laisser plus
de temps aux questions. Si vous le permettez, sans tarder, je voudrais
commencer tout de suite. Vous nous avez distribué tout à l'heure
des tableaux qui font état de la charge d'enseignement des professeurs
chez vous, et on voit qu'en 1985-1986, c'était 5,3 cours par
année. Vous nous faites aussi état des chargés de cours.
On y reviendra tantôt. Dans le rapport Gobeil, on recommande de hausser
de 50 % la charge d'enseignement et, par ailleurs, on insiste - et cela a
été beaucoup le discours qu'on a entendu; on l'entend moins cette
semaine, mais la semaine dernière beaucoup - sur la
nécessité d'une modulation de la tâche. J'ai cru comprendre
que, chez vous, c'était déjà chose faite et qu'il pouvait
y avoir des variations très importantes selon l'intérêt
qu'on manifestait pour la recherche.
Voulez-vous nous en parler et donner des détails un peu sur cette
question et voir quelle serait la réaction à une hausse de la
charge qui nous hante. Je disais, la semaine dernière, qu'à cette
commission, on voyait planer l'ombre de M. Gobeil. Là, il nous a
envoyé une partie de son ombre, mais on aurait
préféré avoir l'original. Écoutez, je voulais juste
voir si c'était possible chez vous, si c'était applicable et
comment ce serait reçu par vos professeurs?
M. Bouthillette: J'aimerais dire quelques mots avant de passer la
parole au directeur de l'école qui connaît peut-être plus
certains détails que moi. Je me permets de vous mentionner que j'ai
été professeur à temps plein à Polytechnique dans
les années 1948 à 1958. Cela date, mais un professeur, c'est
toujours un professeur d'université, et ils ont aujourd'hui les
mêmes problèmes que nous avions autrefois, multipliés par
un facteur de pondération qui n'est pas négligeable.
Quand on vous dit - je ne réponds qu'à une partie de votre
question, remarquez bien; je laisse à M. Doré le soin de terminer
-que des professeurs ont dix heures de cours par semaine, cela n'a pas l'air
très imposant. Mais je puis vous assurer que cela l'est
énormément. Cela me fait un peu penser, si vous me permettiez une
comparaison qui est toujours boiteuse, mais quand même, si on jugeait le
travail des députés et des ministres par le temps qu'ils passent
en Chambre, là on ferait des erreurs graves, n'est-ce pas? C'est un peu
comme cela pour les professeurs. Un professeur qui donne une heure de cours
doit passer une heure de préparation au minimum s'il a
déjà donné son cours plusieurs fois, plusieurs
années. S'il n'a pas donné son cours pendant plusieurs
années, si c'est un nouveau cours, il doit au moins dépenser
quatre, cinq, six et je puis vous dire que j'ai déjà passé
- je n'étais peut-être pas très brillant - dix heures par
heure de cours à donner autrefois.
En plus de cela, le professeur doit aussi consacrer du temps à la
correction, à l'encadrement des étudiants. Un bon professeur ou
du moins un professeur qui s'intéresse à ses étudiants
devrait pouvoir les recevoir dans son bureau. Tout cela fait que dix heures,
c'est beaucoup plus que 35 ou 40 heures par semaine, et de loin. Je n'ai pas
parlé de recherche. Je voulais au moins mentionner cette chose avec un
accent un peu particulier, celui qui date de quelques années, mais qui
est encore vrai. Je cède la parole à M. Doré.
M. Doré: On pourrait ajouter aussi l'encadrement des
étudiants des 2e et 3e cycles. Nous avons 1000 étudiants dont 600
poursuivent des travaux de mémoire de maîtrise ou de doctorat
à temps plein pour la plupart d'entre eux. Cela veut dire que chaque
professeur d'école actif en recherche - on en a 130 environ actifs en
recherche sur les 210 - a accroché à lui environ cinq
étudiants de maîtrise et de doctorat, et ceux-là, je vous
garantis qu'ils ne vous laissent pas aller. Lorsqu'ils doivent vous voir, ils
s'arrangent pour vous voir, et cela ajoute encore. (21 heures)
Effectivement, à l'école, nous avons pu moduler la
tâche des professeurs pour la simple raison que nous leur avons
expliqué la situation dans laquelle nous étions. Maintenant, nous
sommes une petite boîte: 210 professeurs. Moi, je les connais tous. Je
sais ce qu'ils font tous. Une fois par année, je rencontre leur
directeur de département et je revois les dossiers de tous les
professeurs. Les professeurs sont d'ailleurs payés en partie... Une
partie de leur salaire fait suite à une évaluation annuelle.
Lorsque nous leur avons exposé la situation, on a dit:
Écoutez, nous sommes dans une situation impossible et il y a une seule
façon de pouvoir progresser, parce que dans une école
d'ingénieurs, si on ne progresse pas, on régresse. Il y a de
nouvelles technologies, il y a de nouveaux domaines et il faut que les gens
prennent plus de charges de façon qu'on puisse dégager certains
professeurs pour attaquer ces nouveaux domaines. Les professeurs l'ont fait de
bonne grâce, parce que nous leur avons expliqué la situation
continuellement.
Deux, trois fois par année, je regroupe le corps professoral pour
lui expliquer la situation de l'école, quels sont nos plans de
développement. C'est une gestion familiale, parce qu'on est un petit
groupe. C'est là un très gros avantage de l'École
polytechnique. Je peux vous dire qu'il y a beaucoup de facultés
d'ingénierie au Canada qui nous envient. On est la seule avec ce
régime. Beaucoup nous envient, parce qu'on peut bouger plus vite que les
autres.
Mme Blackburn: Donc, faire des économies de ce
côté-là vous semblerait difficile.
Je vais revenir sur la question des autres sources de financement.
L'Ordre des ingénieurs, hier, faisait état de la contribution
économique extrêmement importante des ingénieurs et
particulièrement des ingénieurs-conseils, leur renommée,
et l'apport également au développement économique par le
biais de contrats obtenus à l'étranger dont les produits sont
achetés en partie, ici, au Québec. C'est par milliards,
finalement, ces revenus, ces activités économiques.
Cela m'amène à dire qu'il n'y a pas que les
étudiants qui tirent avantage d'une formation de niveau universitaire et
de la polytechnique, mais également les entreprises tirent un avantage
économique indéniable par la présence de
diplômés dans leur bureau. Si on prend pour base que les
étudiants retirent des avantages de leur formation, donc ils devraient
payer davantage pour cette formation. II me semble que le jugement ou le
raisonnement devrait également s'appliquer aux entreprises.
Dans votre mémoire, vous recommandez davantage des incitatifs
fiscaux. Si je comprends bien le rôle d'un incitatif fiscal, c'est que
vous avez une déduction d'impôts relative à votre
contribution. Donc, d'une façon ou d'une autre, on vient chercher cela
dans les coffres de l'État - on peut s'entendre là-dessus? - par
de l'impôt qui ne rentre pas. C'est quand même une subvention
déguisée. Cela m'étonne toujours un peu quand on sait
qu'ils en tirent des avantages certains et pour avoir leur contribution, on
veut un peu acheter leur contribution. Je me demandais si on pouvait envisager,
étant donné, ici, que la fiscalité est un peu plus basse
pour les entreprises qu'en Ontario... parce qu'on se place comparativement
à l'Ontario - on sait qu'elle est de 2,6 % en deçà de
celle de l'Ontario - est-ce qu'on pourrait penser pour les entreprises à
un impôt pour l'éducation dont on pourrait voir l'utilisation
quelque part, 1 % par exemple?
Je ne sais pas si c'est dans votre mémoire, mais on dit que dans
certains pays cela existe. Je connais la situation en France. C'est 2 %, je
pense, et c'est particulièrement pour la formation de la main-d'oeuvre.
Si les entreprises ne l'investissent pas dans la formation de la main-d'oeuvre,
elles le retournent en impôt. Est-ce qu'on pourrait imaginer quelque
chose d'équivalent?
M. Bouthillette: Permettez-vous, madame, de donner la parole
à M. Jean Baulne qui, en plus d'être président de
l'Association des diplômés, est dans l'industrie pour la compagnie
Trane. Je pense qu'il pourra nous donner un son de cloche
intéressant.
M. Baulne (Jean): Merci, M. Bouthillette. M. le Président,
madame, évidemment je pense qu'il y a toujours possibilité
d'avoir recours aux entreprises pour récolter des fonds sous forme
d'impôt ou de taxe spéciale. Je pense que c'est au gouvernement de
décider si c'est souhaitable. Pour ma part, je pense que c'est
sûrement une avenue à étudier et à évaluer.
Je voudrais plutôt faire valoir l'aspect de rechercher des fonds chez les
industriels d'une façon plus volontaire. Hier, j'écoutais
la présentation de la Chambre de commerce de la ville de
Québec devant la commission et j'ai été assez
impressionné par l'enthousiasme des gens d'affaires de Québec
vis-à-vis de l'Université Laval. Je vous assure que les
diplômés de Polytechnique ont le même enthousiasme
vis-à-vis de l'Université de Montréal et
spécifiquement l'École polytechnique. Les gens d'affaires sont
conscients de plus en plus de leur rôle vis-à-vis de
l'université et je peux vous l'assurer pour avoir eu à demander
de l'aide de ces entreprises pour aider l'École polytechnique, par
exemple, lors de la campagne de souscription. Vous savez que cela a
été un succès et les gens d'affaires ont bien
répondu. Je crois que la façon idéale ce serait de
s'assurer que les universités ont une qualité telle que les
entreprises seraient fières d'être reconnues comme parrains un peu
de ces universités et aussi de payer pour les services disponibles aux
universités. Encore pour noter l'intérêt qu'ont les
diplômés de Polytechnique vis-à-vis de l'École
polytechnique, à la prochaine assemblée annuelle de l'Association
des diplômés de l'École polytechnique le colloque sera tenu
sous le thème de "Les services disponibles à l'industrie à
Polytechnique". Alors, il y a évidemment une possibilité
d'impôt mais j'aimerais davantage que les incitations soient volontaires.
Je crois que l'École polytechnique fait maintenant des efforts et la
réponse est de plus en plus généreuse.
Mme Blackburn: Si vous me permettez. Vous dites - et je trouve
cela très adroit -c'est au gouvernement de décider d'un nouvel
impôt, ce avec quoi je suis assez d'accord. Pourtant, lorsqu'il s'agit de
nouveaux frais de scolarité, ce qui s'appellerait de la tarification de
services, on semble plus prêts à indiquer la voie au ministre, et
c'est un Impôt.
M. Doré: Mme Blackburn, ce n'est pas l'Association des
diplômés qui a proposé cela, c'est l'école.
Mme Blackburn: C'est juste, là je m'excuse.
Écoutez, je ne voudrais pas que vous me répondiez sur cela, on
pourra toujours se revoir. Je vois que le temps coule et le président me
donne des coups de pied sous la table. Je voudrais revenir à deux
questions qui m'apparaissent importantes. Au début de votre
mémoire, vous dites, ce que je partage d'emblée, que finalement
la connaissance ou le savoir va jouer dans le développement
économique le rôle que jouaient antérieurement le capital
et les ressources premières - c'est ce dont j'essaie de les convaincre
depuis le début de la commission, donc je le partage tout à fait
- et la plupart des pays qui ont réfléchi à ces questions
arrivent à la conclusion qu'il faut hausser te niveau de
scolarité de la population, mais à tous les niveaux; il ne s'agit
pas de le faire uniquement à l'université, on sait que les choix
se font beaucoup plus tôt, mais quand même. Alors, les frais de
scolarité pourraient avoir - et vraisemblablement il serait surprenant
qu'il n'y en ait pas - des effets sur l'accessibilité. Vous le rappeliez
tout à l'heure, les étudiants, ce ne sont quand même pas
les citoyens les plus fortunés actuellement. Souvent on dit, les frais
de scolarité sont plus hauts ailleurs, cela devrait avoir les
mêmes effets. Moi, je ne pense pas qu'on puisse raisonner comme cela. Ils
étaient plus bas et cela n'a pas eu les mêmes effets sur la
scolarisation. C'est un raisonnement que je n'arrive pas à suivre. Si,
donc, on doit augmenter la scolarité pour devenir plus
compétitif, je me dis que toutes les mesures qui pourraient avoir comme
effet de restreindre l'accessibilité devraient être
envisagées avec beaucoup de prudence.
Permettez, parce qu'on a dît beaucoup de choses sur cela, je ne
voudrais pas y revenir, mais il y a quand même quelque chose qui me
préoccupe. Là, cela ne paraît pas dans votre mémoire
mais j'en ai souvent entendu parler concernant l'École polytechnique.
C'est le taux d'abandon. Sur une cohorte de 1000 étudiants, après
quatre ans, il vous en reste combien? Le ministre, cet après-midi,
calculait, je dirais, le coût de revient d'un finissant dans une
école. Alors je me dis que, pour le calculer, ce n'est pas le nombre
d'étudiants inscrits qu'il faudrait calculer. C'est beaucoup plus ou les
crédits ou les diplômés parce que, selon les rumeurs,
l'évaluation est telle qu'on ne contingente pas l'entrée, mais on
finit par contingenter la sortie.
M. Doré: J'étais présent lors de la
première journée des audiences de la commission et je savais que
les gens de la commission étaient intéressés à
cette question, alors j'ai fait faire une étude particulière sur
les 2955 étudiants qui se trouvaient dans notre système de 1978
à 1981. Le taux de diplomation, pour ceux qui sont entrés
à l'école entre 1978 et 1981, a été de 66 %. Parmi
ceux qui ne sont pas diplômés, environ la moitié - un peu
moins -ont abandonné tout en étant dans la position de
poursuivre; c'était donc leur choix. Il y en a un peu plus de la
moitié, soit 34 %, qui ont échoué. Cela est sur la
diplomation. Je peux aussi vous fournir de données sur la
réussite dans les cours. La question qui a été
soulevée par M. le ministre lors de la première journée,
je crois, c'est la réussite dans les cours à tous les niveaux:
1re année, 2e année, 3e année. J'ai des données
là-dessus aussi. À l'École polytechnique, pour ce qui est
des cours suivis par les étudiants de
1er cycle à l'hiver 86, donc l'hiver dernier, en 1re
année, il y a eu 71,2 % de réussite. Là je parle des
cours, je ne parle pas des étudiants. Supposons qu'un étudiant
suivait cinq cours et qu'an fait cela pour la somme des étudiants, il y
a eu 71,2 % de réussite; pour les cours de 2e année: 86,7 %; en
3e année: 90,3 % et pour les cours de 4e années: 92,1 %.
Dans les non-réussites, il y a des abandons dans la
période permise d'abandon. Cela veut dire que l'étudiant, avant
la cinquième semaine de cours, peut abandonner les cours. En 1re
année, c'est près de 5 % et, après, 3 % et 2 %.
Maintenant, ce ne sont pas réellement des gens qui n'ont pas
réussi, ce sont des gens qui ont abandonné. Vous voyez que le
taux d'échec dans les cours en 1re année se situerait autour de
23 %, 24 % et, après, c'est beaucoup moindre. Le taux d'échec
réel à la dernière année est de 3,3 % parce qu'il y
a 1,3 % d'abandons et 3,3 % de cours incomplets. C'est-à-dire, par
exemple que pour un projet d'étude en dernière d'année, si
l'étudiant n'a pas terminé à la fin de son trimestre, on
lui donne 2, 3 ou 4 semaines de plus pour terminer, mais en fait ce n'est pas
un abandon et ce n'est pas un échec.
Mme Blackburn: On doit le reconnaître, les chiffres nous
montrent une performance intéressante et très comparable avec
d'autres secteurs d'activité. Si je m'intéresse à toute la
question des abandons, c'est qu'il me semble qu'on n'a pas beaucoup agi sur ce
phénomène dans les universités et il me semble que cela
aurait été rentable de le faire, à deux titres: à
cause des personnes évidemment et à cause du financement
également. Les nouvelles clientèles ne sont pas financées
au même régime que les clientèles de l'année
précédente. Alors les universités auraient eu avantage
è conserver le plus possible leurs clientèles.
M. Doré: Je peux vous dire, Mme Blackburn, pour ce qui est
de... Excusez-moi, je n'ai pas le droit de vous appeler Mme Blackburn, n'est-ce
pas?
Mme Blackburn: Vous en avez le droit, ce sont eux qui n'en ont
pas le droit.
M. Doré: Effectivement, l'École polytechnique avait
un taux de rétention beaucoup plus faible il y a 25 ans que maintenant,
beaucoup plus faible il y a 15 ans que maintenant et beaucoup plus faible il y
a 10 ans que maintenant, donc nous avons travaillé de façon
à accroître notre taux de rétention parce que
c'était la politique de l'école d'être très
sévère en 1re année. Maintenant - d'ailleurs Mme Fortin
m'avait souligné ce problème de l'école à quelques
occasions - nous travaillons è essayer d'augmenter le taux de
réussite des étudiants et il y a un phénomène
nouveau. C'est que la qualité de nos étudiants à
l'entrée s'améliore beaucoup, ce qui nous aide dans notre taux de
rétention. (21 h 15)
Mme Blackburn: Cela fait mentir le préjugé
défavorable qu'on a à l'endroit de la formation dispensée
par les collèges.
M. Doré: J'ai toujours dit que la formation dans les
collèges était excellente.
Mme Blackburn: Je profitais de l'occasion, vous savez.
M. Doré: Elle est bonne, mais il y a moyen de
l'améliorer, comme il y a moyen d'améliorer ce que l'on fait
à l'université.
Mme Blackburn: Vous avez une politique d'évaluation de
l'enseignement, politique qui a été adaptée, si je
comprends bien, au conseil académique le 24 février. J'ai une
petite question: Avez-vous également un plan de développement? Et
à même cette question, parce qu'il me refuse le droit d'en poser
une autre...
Le Président (M. Thérien): Je voudrais simplement,
Mme la députée, que l'on respecte la convention qui était
de dépasser, mais je voudrais quand même dire que je n'ai pas
utilisé mes pieds, comme vous l'avez signalé tantôt.
Mme Blackburn: Non.
Le Président (M. Thérien): Mme la
députée, si vous voulez...
Mme Blackburn: Merci. On va revenir au plan de
développement. Dans votre mémoire, en parlant de la
résorption du déficit, vous dîtes ce que plusieurs
partagent, soit que cela serait comme récompenser une gestion qui n'a
pas été respectueuse des contraintes. Donc l'État n'a pas
à contribuer à un plan de résorption des déficits.
Je voudrais seulement vous dire que vous savez que l'université
mère prétend le contraire, mais vous allez nous parler de votre
plan de développement.
M. Doré: Nous avons effectivement un plan de
développement qui a été élaboré en 1982-1983
et qui a été appliqué en 1983 pour la période
1983-1988, un plan de développement qui n'était pas très
ambitieux, c'est-à-dire que nous n'avions que trois objectifs à
poursuivre et nous travaillons actuellement à un autre plan de
développement triennal qui devrait être accepté ou revu par
notre conseil d'administration à sa réunion de novembre
prochain.
Alors donc, nous avons un plan de
développement actuellement en vigueur, celui de 1983, et nous
travaillons sur un deuxième plan qui devrait être en vigueur au
début de 1987.
Mme Blackburn: Le temps passe. On me donne cinq minutes pour
conclure. Avec l'autorisation du président, je voudrais vous saluer et
je laisserai mes cinq minutes à mon collègue... Non? Bien. Alors,
on aura sûrement l'occasion, et si vous êtes disponible, cela me
fera plaisir de poursuivre l'échange de points de vue pour apporter un
peu plus d'éclairage sur d'autres points.
Je vous remercie au nom de mes collègues de votre participation
aux travaux de cette commission et je suis assurée d'avance que les
propos que vous avez tenus, particulièrement touchant l'importance de
l'enseignement supérieur dans le développement économique,
compte tenu de la présence privilégiée que l'on a ce soir,
devraient trouver des oreilles attentives. Or, messieurs, je vous remercie.
Le Président (M. Thérien): Merci, Mme la
députée de Chicoutimi, de bien comprendre la contrainte de temps
et de la respecter surtout. Je céderai maintenant la parole au parti
ministériel, au ministre de l'Enseignement supérieur et de la
Science, pour la conclusion.
M. Ryan: M. le Président, si vous me le permettez,
j'aimerais céder la parole à mon collègue, M. Fortier, que
j'aimerais bien entendre à l'occasion de cette rencontre très
agréable que nous avons eue avec vous.
Le Président (M. Thérien): Donc, pour la conclusion
on passera au ministre...
M. Fortier: Je crois que cela prend l'accord des membres de
l'Opposition. S'ils ont l'amabilité de m'accorder le droit de parole,
cela me fera plaisir.
M. Jolivet: Mon collègue n'a pas pu l'avoir de la part du
président tout à l'heure, de la même façon, je suis
prêt à vous l'accorder.
M. Fortier: Cela me fait plaisir, M. le député.
Le Président (M. Thérien): Je voudrais seulement
faire remarquer que c'est faux que j'ai refusé le droit de parole. On
s'est consulté à savoir que Mme la députée de
Chicoutimi prenait le temps. M. le ministre délégué
à la Privatisation.
M. Gendron: Vous avez raison; c'est vrai que tout s'est
passé comme cela. On donne la parole...
Le Président (M. Thérien): Merci beaucoup.
M. Fortier: M. le Président, je remercie le ministre de
l'Enseignement supérieur de me céder son droit de parole. Ceux
qui me connaissent savent tout l'intérêt que j'ai pour ce dossier,
étant moi-même diplômé de polytechnique et en plus
député d'Outremont, circonscription dans laquelle se trouve
l'École polytechnique. Au cours de mes années dans l'Opposition,
j'ai également toujours porté une attention très attentive
non seulement au rayonnement de Polytechnique, mais à la place qu'elle
occupe au Québec et aux politiques de l'éducation qui pouvaient
influencer son devenir et son action.
Vous nous avez parlé bien sûr et nous avez rappelé
à juste titre que les ingénieurs oeuvrent dans le domaine
économique, que le Québec, se trouve non seulement en concurrence
les autres provinces, puisque vous avez évoqué des statistiques
qui faisaient état des comparaisons avec les autres provinces
canadiennes, mais, à juste titre, vous avez rappelé que, dans le
domaine de l'économie et dans le domaine technologique surtout, nous
sommes en concurrence internationale. S'il est vrai que les
diplômés de l'École polytechnique ont pu rayonner dans le
passé, c'est justement à cause de cette formation qu'ils ont
reçue, de leur détermination, bien sûr, mais de la
qualité de l'enseignement qu'ils avaient reçue. Je vois que c'est
une donnée du problème qu'il est extrêmement important de
rappeler à toute la population puisque, trop souvent, on ne
reconnaît pas l'importance des universités et l'importance d'une
école comme Polytechnique pour le mieux-être - et j'insiste
là-dessus - non pas seulement des ingénieurs, mais de toute la
population du Québec, que l'on doive tenir compte du fait que
l'ingénieur qui anime très souvent le développement
économique, que ce soit dans le domaine de la forêt, dans le
domaine industriel, dans le domaine technologique, a donc un impact au point de
vue de création d'emplois dans toutes les régions du
Québec et pour tout le Québec dans son ensemble avec d'autres
acteurs économiques, bien sûr, et ils sont nombreux au
Québec.
Vous nous avez parlé du rayonnement de ces diplômés
- même l'Opposition y faisait allusion - du rayonnement de l'École
polytechnique au Sénégal et ailleurs, le rayonnement de ses
professeurs, le rayonnement des étudiants. J'aimerais le souligner, il
faut rappeler que, l'an dernier ou il y a deux ans, ce sont les
étudiants de Polytechnique qui ont pris l'initiative, grâce
è leur coopérative, de mettre sur pied ce programme d'utilisation
des ordinateurs, qui remporte un succès extraordinaire au Québec.
Mais vous nous avez rappelé - et j'aimerais le rappeler à
l'Opposition, vous l'avez dit
très diplomatiquement - que si les coupures au début
avaient été bénéfiques pour rappeler à tous
et chacun des gestionnaires universitaires que l'argent n'était pas
facile à gagner, il fallait que les gouvernants aillent le chercher dans
la poche des électeurs, des contribuables. Vous nous avez rappelé
que, depuis quelques années déjà et depuis trop
d'années, ces coupures ont eu un impact extrêmement important et
pourraient avoir dans l'avenir un impact important sur la qualité de
l'enseignement que vous prodiguez.
Ce que j'ai noté pour ma part, c'est le fait que les
diplômés, la direction, les professeurs et les étudiants,
durant ces dernières années, ont posé des gestes pour
améliorer votre situation. Mais, là, nous nous dites: On est
rendu au bout du rouleau, s'il vous plaît, faites quelque chose. La
direction a posé des gestes pour rationaliser les activités de
l'école, les professeurs ont accepté des tâches accrues en
acceptant même des gels de salaires, les étudiants acceptent
d'oeuvrer dans des conditions certainement difficiles et les
diplômés - le président des diplômés l'a
rappelé - ont contribué largement à la campagne de
financement. C'est donc dire que tous les acteurs autour de Polytechnique ont
posé des gestes concrets et on remarque le dynamisme de Polytechnique,
"l'esprit de Poly", comme on l'appelle. Depuis les nombreuses années
où je suis allé à Polytechnique et où M. Roland
Bouthillette a été mon professeur durant quelques années,
je crois que cela a été cette marque de commerce du dynamisme de
Polytechnique qui a joué. Je crois que les parlementaires ici
présents ont pris note de votre mémoire, des commentaires que
vous avez faits, et qu'ils vont réfléchir sur les données
que vous nous avez transmises et qui permettront, j'en suis sûr, au
ministre responsable de faire les recommandations pertinentes au Conseil des
ministres.
Le Président (M. Thérien): Merci beaucoup, M. le
ministre. C'est à mon tour de vous remercier, vous trois de
l'École polytechnique, d'avoir contribué aux travaux de la
commission parlementaire. Merci beaucoup.
Une voix: Merci.
Le Président (M. Thérien): Je vais donc suspendre
les débats pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 21 h 25)
(Reprise à 21 h 29)
Le Président (M. Thérien): À l'ordre, s'il
vous plaîtl J'inviterais les parlementaires à prendre place, ainsi
que les représentants de l'Association des étudiants de
Polytechnique Inc.
M. le président Gadbois, c'est avec plaisir que nous vous
accueillons, ce soir, pour contribuer aux travaux de la commission
parlementaire. Je vous laisse le soin de présenter les personnes qui
vous aideront dans cette présentation, tout en vous rappelant que vous
avez une heure. Il est 21 h 30, donc on mettra fin aux travaux à 22 h
30. Vous décidez librement du temps qui vous est alloué dans
votre présentation, tout en vous rappelant que c'est peut-être
très agréable d'avoir le plus de temps possible pour les
questions des parlementaires.
M. le président, la parole est à vous.
Association des étudiants de Polytechnique
Inc.
M. Gadbois (Alain): Je vous remercie, M. le Président. Je
veux vous présenter, tout d'abord, les gens qui sont à mes
côtés. Il s'agit de Christian Lecavalier, vice-président
à l'externe de notre association, et de Mario Cardinal qui a
contribué à l'élaboration de ce mémoire.
L'Association des étudiants de Polytechnique Inc., est
fière de vous apporter une vision très importante,
c'est-à-dire une vision étudiante. Nous allons apporter des
constatations, des attentes et formuler des recommandations face au financement
des universités. Notre société a besoin de
diplômés bien formés. Pour cela, elle doit compter sur des
structures. Au moment où on remet en question la contribution de chacune
des parties en jeu dans ces structures, il est bon de s'interroger. Tout le
monde s'accorde sur l'importance d'une qualité dans l'enseignement
supérieur. Il est bon que le rôle des gouvernements, des
administrations et des étudiants soit à redéfinir.
L'Association des étudiants de Polytechnique Inc., compte 3600
membres réguliers à temps plein. Elle a été
incorporée en 1963 et accréditée selon la loi 32.
L'Association des étudiants de Polytechnique Inc., a toujours
défendu le droit à un enseignement de qualité
supérieure et, pour cela, elle compte sur des militants qui agissent
à deux niveaux, c'est-à-dire au niveau de la vie étudiante
en général et au niveau de la pédagogie. La qualité
de leurs interventions nous pousse toujours vers des sommets plus
élevés.
Il est évident - le ministre l'a dit la semaine passée -
que, comme étudiants, nous évoluons dans le milieu, dans le
quotidien de l'école. Nous sommes d'avis que notre implication doit
être telle qu'elle révèle également un sens profond
de nos responsabilités sociales.
Nous sommes membres au niveau
national de deux associations étudiantes, c'est-à-dire le
RAEU qui vous a présenté son mémoire la semaine
passée et aussi la COFIQ, la Coalition des facultés
d'ingénierie du Québec dont nous sommes membres fondateurs. Nous
pouvons jouer, à l'intérieur de ces deux associations, un
rôle important au niveau national et au niveau du Québec.
L'association entretient avec les divers intervenants, dont
l'école que vous avez vue tantôt, des relations basées sur
la communication et la concertation. Le milieu dans lequel nous évoluons
nous incite à croire que la qualité d'une relation est fonction
du degré de communication qui existe entre les intervenants.
Nous ouvrons une petite parenthèse pour vous présenter les
acquis de notre association. L'association voit à la supervision de la
cafétéria à l'intérieur de l'école. Nous
sommes, d'ailleurs, les propriétaires de toutes les installations que
nous y retrouvons. Nous assurons un service complet de photocopie pour les
étudiants. Nous avons à coeur la qualité de l'enseignement
à l'intérieur de l'école, comme on l'a dit tantôt,
et nous avons produit une politique d'évaluation des enseignements
à l'intérieur de l'école, c'est-à-dire des
professeurs et des cours.
On n'a pas lésiné, comme on l'a dit tantôt, à
nous adapter au climat socio-économique de notre société
en faisant un achat regroupé de micro-ordinateurs. Nous mettons aussi
sur pied en ce moment - c'est un projet pilote - un projet qui s'appelle
Collaboration Projets de fin d'études, qui vise à relier les
étudiants de quatrième année, les étudiants
finissants, dans leurs projets de fin d'études, à l'industrie. On
essaie de faire en sorte que ces étudiants puissent faire leurs projets
de fin d'études durant l'été avec ces mêmes
industries. Je pense que le rapprochement étudiant-industrie profitera
à l'école.
On ne peut pas passer sous silence un des acquis des membres de
l'association, c'est-à-dire leur coopérative étudiante.
COOPOLY est, en fait, la plus grande coopérative étudiante au
Canada. En effet, elle a un chiffre d'affaires d'au-delà de 10 000 000 $
et c'est la première à avoir une succursale en dehors des murs de
l'école.
Ces exemples visent à vous démontrer une chose: dans nos
implications, nous pouvons faire oeuvre de bons gestionnaires.
Nos axes de développement en tant qu'association
étudiante, c'est concertation avec le milieu et aussi implication dans
la qualité de l'enseignement. Concertation avec qui? En premier lieu,
avec l'administration. Je pense qu'il est bon qu'on puisse faire savoir nos
attentes réciproques et, à cet égard, notre mémoire
ne le fait peut-être pas ressortir, mais je crois qu'il y a une bonne
concertation avec l'administration. Il est bon de le souligner ici.
Concertation aussi avec les associations universitaires en dehors de
Polytechnique. À cet égard, nous essayons de viser
l'homogénéité de nos recommandations et aussi de faire
profiter nos expériences réciproques. Enfin, concertation avec
l'entreprise et les industries en général. Notre rôle en
tant qu'ingénieurs-étudiants est de voir à ce que notre
formation corresponde aux besoins de la société et aux besoins du
marché du travail.
Nous avons pris en main la qualité de notre éducation et,
pour ce faire, nous avons, à l'intérieur de l'association, une
structure qu'on appelle la régie à l'éducation. Il y a
au-delà de dix membres qui se réunissent au minimum à
toutes les deux semaines pour revoir des points précis de la
pédagogie à l'intérieur de l'école. Notre
concertation avec le milieu et notre implication dans l'enseignement n'ont de
sens que si les étudiants s'impliquent dans toutes les structures
décisionnelles de l'école.
En déposant son mémoire, l'Association des
étudiants de Polytechnique désire apporter la position de ses
membres face au financement des universités et face au financement de
Polytechnique. Je croîs que nous faisons preuve de professionnalisme dans
ce que nous entreprenons. Je crois également que nous faisons preuve de
professionnalisme dans notre implication au niveau pédagogique.
Cependant, l'école nous refuse toujours une présence dans son
conseil d'administration. N'ayant alors pas participé aux débats
qui entourent les chiffres, nous nous avouons limités dans l'analyse de
la gestion que nous faisons de l'école.
Comme vous le savez très bien, on s'est vu imposer une
augmentation du prix à payer pour notre enseignement, alors que cet
enseignement ne vaudra sûrement pas plus cher que l'année
passée. Ces frais sont de 40 $. L'école emboîte ainsi le
pas à d'autres universités qui ont fait de même. Le
ministre de l'Éducation a pris la décision de permettre aux
universités de venir puiser de l'argent dans nos poches sans nous
consulter. La mauvaise gestion du réseau universitaire est un fait connu
de l'association. Accorder aux universités le droit de puiser de
nouveaux fonds sans exiger d'elles un assainissement de leur mode de gestion,
c'est accepter passivement cet état. Le gouvernement nous oblige
à investir de l'argent dans des entreprises que l'on sait mal
gérées et déficitaires. Le fait est d'autant plus
inacceptable que l'école a profité de la saison estivale pour
imposer de tels frais. L'association s'est vue reléguée aux
oubliettes lors des discussions précédant une telle
imposition.
Nous sommes d'avis que ces frais, ces 40 $ ne serviront pas, comme on
nous l'a affirmé, à des services, mais bien plus à
réduire un déficit de fonctionnement
général. Nous nous doutons que ces faits sont connus de vous et
aussi de l'école puisque vous savez très bien qu'il serait
à peu près impossible de vérifier l'attribution
réelle de ces sommes dans l'exercice financier de l'école. Une
saine gestion est indissociable de la qualité de l'enseignement. Les
événements nous montrent que la présence de l'association
est jugée indésirable dans la structure décisionnelle de
l'école. Nous nous interrogeons alors sur le rôle que cette
dernière nous réserve lors des discussions futures qui porteront
sur l'amélioration de la qualité de l'enseignement.
Dans la situation actuelle, l'Association des étudiants de
Polytechnique se prononce contre l'imposition de tels frais et
recommande...
M. Lecavalier (Christian): ...que le gouvernement prenne des
mesures à court terme visant à empêcher l'imposition de
frais de scolarité détournés par les
universités.
M. Gadbois: Les universités ont actuellement un
déficit accumulé de plus de 80 000 000 $. Qu'est-ce qui a pu
causer cela? Peut-être une mauvaise gestion des universités et
aussi un apport financier mal orchestré de la part du gouvernement.
Il semble impossible aux universités de connaître avec
précision la contribution gouvernementale même quelques mois
après l'adoption des budgets, entre autres, pour l'école. Il en
résulte une instabilité budgétaire. Il en résulte
également une mauvaise planification qui, finalement, on le voit, sera
ressentie par les étudiants sur leur enseignement. Dans ce sens,
l'Association des étudiants de Polytechnique recommande...
M. Cardinal (Mario): ...que le gouvernement instaure une formule
de financement universitaire qui soit stable au cours des ans et sur la base de
laquelle les universités devraient établir un plan de gestion
à moyen terme.
M. Gadbois: L'association tient à vous souligner aussi
qu'une clarification seule de la formule de financement ne serait pas
suffisante. Il est acquis que des efforts devront être apportés
dans le but d'assurer la venue de nouveaux fonds.
Il est possible aujourd'hui d'identifier certaines universités
qui ont accumulé déficit sur déficit et d'autres qui ont
réussi à maintenir un équilibre financier.
Il serait inacceptable, selon nous, que le gouvernement comble le
déficit des universités comme il l'a fait pour les
hôpitaux. Cela cautionnerait les déficits et les raisons qui les
ont engendrés et rendrait caducs les efforts faits par les autres.
Les universités présentant un déficit devront
préparer un plan de redressement à moyen terme. Cela exigera des
efforts pour qu'elles se tirent de ce marasme. À ce niveau,
l'Association des étudiants de Polytechnique recommande...
M. Lecavalier: ...que le gouvernement ne comble pas le
déficit accumulé des institutions universitaires.
M. Cardinal: ...que le gouvernement exige de la part des
institutions universitaires présentant un déficit accumulé
l'élaboration et l'application d'un plan de redressement financier.
M. Gadbois: Une situation financière est fonction de la
qualité de la gestion et de la quantité des fonds qui sont
alloués. Avant de penser à de nouveaux fonds, il est bon de voir
à une gestion plus serrée des universités. Une des choses
qui touchent particulièrement les étudiants dans leur quotidien -
d'accord, et cela, on a pris notre petit carnet pour le noter - c'est le
personnel. Or, le personnel nous touche de très près puisque nous
le côtoyons tous les jours, M. Ryan.
L'école procède annuellement à l'attribution de
bourses basées sur le mérite, comme M. Doré vous l'a dit
tantôt. Nous encourageons de telles pratiques et nous regrettons qu'aucun
étudiant ne participe à leur attribution. Du côté de
l'association, nous avons mis sur pied une politique d'évaluation des
professeurs qui a été adoptée en conseil d'administration.
Cette politique est une première au Québec et nous souhaitons
voir les autres institutions emboîter le pas dans cette direction.
Cependant, cette évaluation n'a de sens que si des outils sont
mis en place pour inciter le professeur à s'améliorer. Dans ce
sens, la permanence des professeurs telle que nous la connaissons en ce moment
ne permet pas de recours direct en cas d'insatisfaction
répétée.
Compte tenu du fait que l'évaluation des professeurs n'a de sens
que si ceux-ci ne peuvent se réfugier sous leur qualité de
permanents, l'Association des étudiants de Polytechnique vous
recommande...
M. Lecavalier: ...que soit instaurée, parallèlement
à une évaluation continue des professeurs, une permanence
modifiée de ceux-ci qui permettrait des mesures correctives en cas de
diminution de la qualité de leur travail.
M. Gadbois: Une telle proposition, croyons-nous, permettrait de
hausser la qualité de l'enseignement à l'intérieur de
l'école. Le RAEU propose, d'ailleurs, quelque chose de fort original et
de très intéressant à ce sujet. Après que le
professeur aurait
passé sa période de probation, il se verrait attribuer un
contrat d'une durée de sept ans. À la fin du contrat de sept ans,
une évaluation serait faite de son travail, c'est-à-dire son
enseignement, la qualité de sa recherche, la qualité de sa
contribution au sein de l'école, la qualité de sa contribution
à l'extérieur, son rayonnement en général.
Si ce travail est jugé satisfaisant, bravo, un nouveau contrat de
sept ans lui est accordé. Cependant, s'il est jugé
insatisfaisant, un nouveau contrat de trois ans lui est fourni dans lequel des
points précis devraient être apportés pour qu'il
s'améliore. Au bout des trois ans, si cette amélioration est
jugée insatisfaisante, bien, on s'excuse, il serait remercié de
ses services. Si, par contre, il s'est amélioré, un nouveau
contrat de sept ans lui serait attribué.
D'autre part, la convention collective liant la corporation de
l'École polytechnique de Montréal et le syndicat des professeurs
propose des augmentations annuelles très substantielles pour un
professeur évoluant au sein de l'école: entre 4 % et 15 % par an,
selon l'échelon. Au moment où l'on impose des augmentations aux
étudiants en invoquant des difficultés financières,
l'école semble être très généreuse envers ses
professeurs.
Du côté des techniciens, aucune politique
d'évaluation n'est appliquée. De plus, aucun programme
structuré de formation n'est prévu pour aider ceux-ci à
faire face au virage technologique. Une bonne politique d'évaluation,
appuyée par des programmes de formation adéquats,
amènerait une augmentation du rendement dans cette catégorie
d'employés et sûrement une meilleure gestion des fonds.
Au sujet du personnel-cadre, des employés de bureau et des
employés de soutien, encore ici, aucune politique d'évaluation
n'est fournie par l'école sur ces employés.
La provenance de nouveaux fonds. Nous allons vous présenter la
provenance de nouveaux fonds selon deux secteurs: le secteur entreprise et le
secteur étudiant. Au niveau du secteur entreprise, l'École
polytechnique de Montréal abrite un centre de développement
technologique qu'on appelle communément le CDT. Le mandat de ce centre
est de promouvoir le développement technologique et les contacts avec
l'industrie afin d'assurer le transfert technologique. L'association estime que
la rentabilisation du CDT devrait être atteinte à court terme.
L'école favorise, d'autre part, la demande de brevets pour les
découvertes de ses chercheurs. Nous savons que, dans le cas de
rentabilité commerciale, la plupart des inputs d'argent vont à
ses chercheurs et aux professeurs. Aucune autre entreprise que le secteur
universitaire, à notre avis, n'offre un tel privilège à
ses employés. L'école ne devrait pas remettre ces fonds aux
propres chercheurs, mais plutôt dans le secteur de la recherche. Cela
permettrait de rentabiliser le CDT. (21 h 45)
D'autre part, le gouvernement devrait favoriser la création
d'incitatifs fiscaux pour intéresser les entreprises à investir
dans les universités. Cependant, pour attirer les industries en plus
grand nombre, les universités ont encore ici intérêt
à assainir leur gestion.
Du côté fédéral. Le Conseil de recherche en
sciences naturelles et en génie du Canada devrait augmenter sa
participation au développement et au financement des infrastructures
matérielles et surtout administratives de recherche.
Au sujet des secteurs étudiants qui nous intéressent et
qui intéressent surtout les gens qui sont derrière nous, entre
autres, l'association constate que, malgré le gel des frais de
scolarité depuis 1968, la contribution des étudiants n'a
cessé d'augmenter. Beaucoup de services jadis gratuits sont maintenant
payants. Mentionnons les nombreux frais de photocopie qu'on nous impose au
début de chaque cours, mentionnons les nombreux frais d'administration
que la coordination des programmes nous impose. De plus, en augmentant la
population étudiante depuis quelques années au 1er cycle, il
s'ensuivit un engorgement massif du centre de calcul. Le centre de calcul,
c'est névralgique pour nos études. Au moment où tout le
monde parlait de virage technologique, nous, avec la formation de la Coalition
des facultés d'ingénierie (COFIQ), on effectuait un achat
regroupé de micro-ordinateurs qui permettaient de diminuer la pression
au centre de calcul et, finalement, de diminuer les investissements que
l'école aurait dû y faire pour augmenter sa capacité.
Je pense qu'ici on peut vous dire qu'en 1968 les étudiants
devaient acheter une règle à calcul. M. Fortier a dû faire
son cours avec une règle à calcul. Vers la fin des années
quatre-vingt, on devait acheter une calculatrice et, maintenant, en 1986, plus
du tiers des étudiants paieront 2000 $ pour un micro-ordinateur. On est
loin de la règle à calcul! L'association est d'avis que, si une
augmentation de la contribution étudiante avait lieu, qu'elle soit
appelée frais de scolarité, frais afférents ou frais
d'inscription ou tout autre synonyme, elle devrait s'effectuer en tenant compte
des trois conditions suivantes:...
M. Cardinal: ...que la participation à toutes les
structures décisionnelles soit acquise par les étudiants.
M. Lecavalier: ...que la hausse en question ne soit pas une
augmentation
déguisée de taxes, en ce sens que pas un seul cent de
cette augmentation ne soit retenu par le gouvernement, mais bien que la
totalité de cette somme soit versée à l'institution
universitaire.
M. Cardinal: ...que ces fonds ne servent pas à combler les
déficits des universités, mais bien à améliorer la
qualité des services et de l'enseignement,
M. Gadbois: Pour l'association il est essentiel qu'une hausse des
frais de scolarité soit accompagnée d'une réforme des
prêts et bourses. Cette dernière, cependant, devra faire l'objet
de discussions ultérieures. Le postulat de base qui nous amenait
à vous présenter ce mémoire est qu'en tant que partenaires
dans nos universités les étudiants ont la responsabilité
de voir à la saine gestion de leurs universités. Cette
dernière est, nous l'avons souligné, directement liée
à la qualité de notre éducation. À l'École
polytechnique nous sommes confrontés à un refus du conseil
d'administration d'accepter des représentants étudiants. En
conséquence, nous recommandons...
M. Lecavalier: ...que le droit à la participation
étudiante dans les conseils d'administration des institutions
universitaires soit accordé dans chacune d'entre elles.
M. Gadbois: Nous avons apporté, en déposant ce
mémoire, des recommandations qu'on sait opérationnelles et
réalistes. Que ce soit au niveau du redressement financier, que ce soit
au niveau de l'apport de nouveaux fonds ou du resserrement de la gestion ou
encore de la participation aux structures par les étudiants, toutes ces
recommandations visent un même but. C'est, d'ailleurs, le but de tous les
gens réunis ici, soit de permettre aux universités d'atteindre
des sommets d'excellence à la mesure de nos aspirations.
Le Président (M. Thérien): Je vous remercie, M.
Gadbois. Je veux surtout vous dire que, comme dernier exposé de la
journée, on avait besoin peut-être de ce dynamisme, de cette
énergie, au moins de ce discours direct. Sans préambule, je
donnerai la parole au parti gouvernemental, au ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science.
M. Ryan: Je suis sûr que le député
d'Abitibi-Ouest connaît nos usages. Il en a profité longtemps de
ce côté-ci de la table quand il était au pouvoir. Il n'y a
pas de discussion.
M. Gendron: M. le Président, le député
d'Abitibi-Ouest veut tout simplement dire qu'il n'a pas dit un mot, qu'il n'a
interpellé personne. Il a écouté attentivement. Alors, je
ne vois pas pourquoi votre remarque.
M. Ryan: Cela avait l'air d'un regard menaçant à
l'endroit du président. Cela nous inquiétait.
M. Gendron: Est-ce que la fatigue vous atteint à ce point,
M. le ministre de l'Éducation, pour voir dans mon regard quelque chose
de menaçant? Ce n'est pas votre habitude!
M. Ryan: C'est cela qui m'étonnaît. Maintenant, je
suis complètement rassuré.
Le Président (M. Thérien): Je voudrais juste vous
ramener au débat et aussi rappeler que c'est à M. le
ministre.
M. Ryan: Messieurs les étudiants de Polytechnique, nous
avons écouté avec beaucoup d'intérêt les
représentations que nous apportait votre mémoire et, de la
manière très vivante, digne des grandes cérémonies
liturgiques de la semaine sainte dont vous nous avez fait la lecture à
trois voix, vous nous avez gardés dans un état d'attention qui
nous aura aidés à mieux comprendre vos recommandations.
Je voudrais saluer d'abord l'expérience de travail pratique que
vous nous avez décrite au début de votre présentation. Le
travail que fait votre association dans l'administration de certains services
qui s'adressent aux étudiants, et dans d'autres formes
d'activités qu'elle gère avec succès est extrêmement
intéressant. Je souligne avec plaisir l'expérience que vous avez
faite en matière d'acquisition de micro-ordinateurs pour les
étudiants de sciences et de génie; cela a été
étendu à des étudiants d'autres secteurs. Nous avons
d'autres demandes qui sont à l'étude. Également, je pense
que c'est un précédent qui était extrêmement
intéressant. Je voudrais souligner, sans faire la moindre once de
partisanerie, que vous avez réussi à faire une proposition qui
aura coûté beaucoup moins cher que celle que le gouvernement avait
épousée assez rapidement un certain soir, à Paris, pour
l'ensemble du système scolaire, l'ancien gouvernement
évidemment.
Les micro-ordinateurs dont vous faites l'acquisition sont acquis
à un prix qui est d'environ 40 % inférieur à celui qu'on a
payé pour l'introduction de micro-ordinateurs dans le système
scolaire en vertu du fameux plan de développement des ordinateurs dans
les écoles. Je vous en félicite. Je croîs que n'importe qui
qui serait allé sur le marché un peu aurait pu trouver des choses
équivalentes; vous en avez fait la preuve, d'ailleurs.
II y a des jugements dans votre mémoire qui sont
sévères. J'ai remarqué que
cela réjouissait nos amis de l'Opposition. Vous avez dit que nous
aurions imposé sans vous consulter des frais accrus pour l'acquisition
de matériel didactique, pédagogique ou autre. Il est vrai que la
décision a été prise au début de
l'été et nous avions eu les représentations d'à peu
près tout le monde à ce moment-là. Nous ' avons
gardé cette augmentation dans des bornes tellement raisonnables que tout
le monde convient que c'était à peine une entrée en
matière, quelles que soient les décisions qui devront être
prises. C'est un signal qu'il fallait faire quelque chose. C'est comme cela que
je l'ai pris, mais c'était très limité et, dans une bonne
mesure, la hausse qui a été instituée vient,
peut-être pas chez vous, mais dans plusieurs cas, combler des coûts
qui étaient déjà encourus de toute manière, en
partie ou en tout. J'enregistre quand même la critique. Elle a
été formulée de bonne foi et directement; je l'enregistre,
je ne peux pas dire avec plaisir, mais avec intérêt.
Il y a un autre point. Vous dites, à un moment donné: On
demande aux étudiants d'investir dans leur formation. C'est exactement
cela, c'est très bon. On leur demande d'investir pour une partie des
coûts, pas tous les coûts. Jusqu'à maintenant, les frais de
matériel qu'on a institués, c'est 100 % sur le coût
véritable. Vous savez combien cela coûte pour un étudiant
de Polytechnique, je l'ai dît cet après-midi? Cela coûte 11
300 $ par année, par tête. Cela comprend les revenus qui viennent
d'autres sources que le gouvernement, mais si on prend seulement le
gouvernement, c'est 7500 $ par année. Alors, 100 $ sur 7500 $, je pense
qu'on n'a pas étouffé la victime, comme je l'ai dit dans le
temps. Une petite piqûre, un petit coup d'acupuncture, pas par surprise
non plus, parce que cela avait été discuté tout le
printemps, M. le député de Laviotette, vous le savez très
bien. Mais, quand même, on enregistre ces critiques. Il est bon qu'elles
soient formulées et on vous sait gré d'être venus les
porter là où elles doivent être communiquées
c'est-à-dire au parlement. C'est le processus démocratique
à son meilleur. Vous ne me verrez pas choqué de cela, au
contraire.
J'ai bien apprécié les remarques que vous faites. Je
voudrais commenter les recommandations que vous présentez, parce
qu'elles ont été préparées de manière si
soigneuse que je pense que cela vaut la peine de les commenter l'une
après l'autre, brièvement. Comme cela, vous saurez à quoi
vous en tenir sur la pensée du ministre responsable au sein du
gouvernement. Cela ne veut pas dire que sur tous les points cela vous donne la
position finale du gouvernement. On va discuter de cela avec les
collègues, évidemment. Je peux faire vite.
Recommandation no 1. "Que le gouvernement prenne des mesures à
court terme visant à empêcher l'imposition de frais de
scolarité détournés par les universités." Oui,
à condition que cela n'embrasse pas les frais de matériel pour
l'année 1986-1987. Vous pouvez être assurés que c'est une
chose que j'ai dite aux recteurs quand je les ai rencontrés - M.
Doré était présent quand nous avons discuté de
cette chose-là au début de juillet - que je ne voulais pas qu'on
institue des frais détournés de scolarité accrus. Il y
avait ce cas-là dont nous avons décidé pour l'année
1986-1987 et j'ai bien insisté que toute forme de frais
détournés de scolarité qui seraient augmentés ne
serait pas acceptable par le gouvernement pour fins de
déductibilité pour les subventions. Votre remarque est
soigneusement notée. Vous pouvez compter qu'on en tient compte.
Recommandation no 2. "Que le gouvernement instaure une formule de
financement universitaire qui soit stable au cours des ans et sur la base de
laquelle les universités devraient établir un plan de gestion
à moyen terme." Alors, nous espérons fortement que la nouvelle
formule de financement procurera ces résultats de stabilité dont
vous parlez. C'est nécessaire. On nous a fait la démonstration,
à plusieurs reprises depuis le début des travaux de la
commission, que par sa nature même la mission confiée aux
universités exige qu'elles puissent prendre leurs décisions dans
un certain contexte de stabilité, de continuité. Par exemple, un
étudiant entre à l'université, il va en sortir trois,
quatre ou cinq ans plus tard. Il faut que l'université puisse prendre
des décisions sur une échelle de temps comparable; autrement, il
y a trop de danger que des changements se produisent en cours de route et
viennent affecter le contrat initial. C'est un point très pertinent. Je
vous remercie de l'avoir signalé et on va faire notre gros possible pour
produire une formule de financement qui tiendra compte de ces
recommandations.
Recommandation no 3. "Que le gouvernement ne comble pas le
déficit accumulé des institutions universitaires." Je prends
votre recommandation en considération, mais il y a des cas particuliers.
On va être obligé de faire un examen cas par cas. Je ne serais pas
capable de décider ou de recommander au gouvernement sur une base
uniforme de dire: Qu'ils s'arrangent avec leurs problèmes; ils ont fait
des déficits, cela finit là. D'autres nous ont dit qu'ils ont des
déficits accumulés, que c'était attribuable en partie
à des décisions prises pas seulement par eux, mais par d'autres
également. Nous allons être obligés d'examiner le
problème cas par cas, mais le principe de base, c'est celui que vous
dites. On ne veut pas absoudre les erreurs ou les fautes de présomption
qui auraient été commises par des gens qui se seraient dit:
C'est le gouvernement, il s'arrangera avec cela éventuellement.
De ce point de vue là, c'est un sain principe de gestion que vous
évoquez, puis on le regarde avec intérêt.
Recommandation no 4. Vous demandez que le gouvernement exige des
institutions déficitaires un plan de redressement financier. Cela va de
soi. Cela a été déjà indiqué à
plusieurs institutions. Vous pouvez être assurés que cela sera un
des éléments du contrat.
Je continue. Que soit instaurée une permanence modifiée
des professeurs parallèlement à une évaluation continue de
ceux-ci. Je vais vous demander des explications là-dessus. J'ai lu le
texte de la politique d'évaluation qui a été
approuvée par le conseil d'administration de l'école en mars, il
y a des choses extrêmement intéressantes là-dedans. Ces
choses vont se faire non pas par imposition du gouvernement, parce que nous
respectons le principe de l'autonomie des universités, mais je dirais
par le principe des vases communicants et la persuasion. Je suis sûr que
nous allons avoir des bonnes séances de travail avec les
universités au cours des mois à venir pour les inciter à
adopter des politiques d'évaluation plus vigoureuses. II va falloir que
chacune prenne ses responsabilités, mette au point des politiques qui
soient réalistes, tienne compte du point de vue des étudiants
dans chaque institution, mais il n'est pas question que le gouvernement aille
leur imposer un plan uniforme. Mais l'idée que vous émettez est
formidable et je voudrais vous féliciter, car, d'après ce que
j'ai compris, la politique d'évaluation a été
influencée en bonne partie par les représentations que vous avez
faîtes. Franchement, il y a quelque chose de très
intéressant là-dedans. Vous pouvez être sûrs que je
vais me servir de mon pouvoir de parole pour traiter de cette question avec les
institutions d'enseignement universitaires.
Vous demandez la participation aux structures décisionnelles pour
les étudiants. Il n'y a pas d'objection de principe de la part du
gouvernement. Il y a une institution qui relève plus directement du
gouvernement et qui est sa création, c'est l'Université du
Québec. Au conseil d'administration de l'Université du
Québec, il y a des représentants étudiants; j'ai
signé la nomination de deux représentants, il y a quelque temps,
qui avaient été proposés. (22 heures)
Je sers de "rubber-stamp" là-dedans, entre vous et moi, mais
j'essaie de faire cela le plus élégamment possible. J'aimerais
mieux avoir un petit mot à dire des fois, mais là des
procédures sont instituées et moi, je suis au bout de la ligne et
on me dit: Sors ta plume et marche! Alors, j'ai signé. Je pense que
c'est bon qu'on ait là une représentation. Maintenant,
l'École polytechnique est une corporation distincte. J'aurais voulu
interroger la direction de l'école sur ce point, mais j'ai
oublié. Maintenant, ses représentants écoutent en
arrière, mais je leur transmets la question quand même. C'est un
point qui mérite d'être étudié. Je n'en fais pas de
recommandation formelle, mais moi, je n'ai pas d'objection à cela. "Que
la hausse en question ne soit pas une augmentation déguisée..."
La hausse des frais de scolarité. Je vous félicite de votre
ouverture d'esprit. Vous regardez ce problème - j'allais dire en hommes
et en femmes réalistes, mais il y a seulement trois hommes à la
table - avec un esprit réaliste. Vous mettez des conditions
précises, si jamais il devait y avoir une hausse. Ces conditions que
vous évoquez ont déjà été mentionnées
par d'autres personnes, je n'insiste point. Mais j'ai noté ce point-ci
avec beaucoup d'intérêt. Je n'entends pas me servir de vous pour
dire: Tout le monde est pour cela. Pas du tout. C'est une opinion qui vient
s'ajouter à celles que nous entendons; il y en a qui sont pour, il y en
a qui sont contre. Nous continuons notre cheminement, mais vous nous apportez
un élément de réflexion précieux.
Je pense que j'ai terminé l'examen de vos conditions. J'aimerais
peut-être que... Oui, c'est fini?
Le Président (M. Thérien): Je dois vous
arrêter. Selon les règles, j'ai besoin du consentement des deux
côtés pour continuer jusqu'à 22 h 30 pour respecter le
temps qu'on avait alloué à l'association étudiante. Est-ce
que j'ai le consentement?
Des voix: Consentement.
Le Président (M. Thérien): M. le ministre.
M. Ryan: Moi, j'ai pratiquement terminé, M. le
Président. Est-ce qu'il nous reste du temps de ce
côté-ci?
Le Président (M. Thérien): II vous reste cinq
minutes.
M. Ryan: On va les garder pour tantôt.
Le Président (M. Thérien): II vous reste dix
minutes; cinq minutes dans la première phase...
M. Ryan: C'est ce que j'ai compris. On va les garder pour
tantôt. On va laisser parler nos amis d'en face.
Le Président (M. Thérien): Parfait! Je cède
maintenant la parole à la porte-parole officielle de l'Opposition en
matière d'éducation, Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs.
Cela nous fait plaisir de vous voir ici. Je crois que c'est
particulièrement intéressant de voir les administrateurs, les
employés, les représentants des chambres de commerce, mais
spécialement les clientèles, les étudiants. Je dois dire
que j'ai lu avec beaucoup d'intérêt votre mémoire. J'ai
souligné qu'à la fois vous étudiez dans des conditions qui
vous permettent d'aller chercher une bonne expérience et que vous avez -
je pense à vos projets de fin d'études - par le biais de votre
coopérative l'occasion d'apprendre les principes de gestion. Je pense
bien qu'il n'y a pas beaucoup de personnes ici, à part le directeur de
l'école, qui gèrent des budgets de 10 000 000 $. C'est assez
impressionnant. Vous faites également preuve d'ouverture à
l'endroit des autres étudiants. Je trouve que c'est intéressant
dans la mesure où on ne reste pas enfermé sur soi-même. Je
dirais que, dans l'ensemble, c'est un mémoire que je trouve fort
intéressant.
Vous aurez remarqué que le ministre de l'Éducation ne peut
jamais, mais jamais faire un commentaire - il ne peut pas s'en empêcher -
sans glisser une remarque partisane et quelquefois mesquine. Quand on ne
partage pas son opinion, c'est qu'on l'a mai cité, on l'a mal
interprété, on a mal compris, on a mal calculé. Cependant,
je voudrais lui dire que cela m'arrîve de savoir compter et, sur sa
remarque touchant l'achat des ordinateurs à Paris qui était fait
aux frais de l'État, je lui dirai que ce gouvernement...
M. Ryan: Gaspillage!
Mme Blackburn: ...qui n'achète pas aux frais de
l'État...
M. Ryan: Gaspillagel
Mme Blackburn: ...mais dans la seule prochaine année, aura
taxé les étudiants de 24 000 000 $ en réduisant les
bourses et tantôt de 70 000 000 $ en imposant des frais de
scolarité. Dans une seule année, ce sera donc 100 000 000 $ en
1987-1988, si le projet se réalise, qu'on sera allé chercher dans
les poches des étudiants, et c'est récurrent.
M. Jolivet: Ce n'est pas une autoroute à Rimouski.
Mme Blackburn: Ce n'est pas tout à fait comme les achats
de micro-ordinateurs.
Je trouvais intéressante l'idée que vous avez eue à
la suite de la recommandation du ministre de faire des observations et de les
noter dans votre petit carnet noir, sauf que je me dis qu'autant cela peut
être intéressant, autant il ne faudrait peut-être pas le
suivre trop loin là-dedans, parce qu'à un moment donné
vous allez vous transformer en petits enquêteurs dénonciateurs de
vos professeurs. Il y a déjà ceux qui sont dans les affaires
sociales, il ne faudrait pas tomber dans ce défaut-là.
M. Jolivet: Les boubou-macoutes.
Mme Blackburn: J'ai tendance à croire plus que lui aux
sondages scientifiques, malgré tout l'intérêt que peuvent
avoir ces observations.
Si vous me le permettez, j'avais quelques questions qui touchent
à la fois vos projets de fin d'études... Vous parlez de gestion
qui devrait être plus serrée et vous invitez aussi à une
réforme de l'aide financière aux étudiants.
Essentiellement, j'aimerais vous entendre sur ces trois points. Vous pourriez
peut-être (n'expliquer un peu en quoi consistent vos projets de
collaboration, vos projets de fin d'études avec les entreprises, la
durée, etc. Cela a certainement des objectifs pédagogiques,
peut-être l'équivalent de stages. J'aimerais que vous m'en parliez
un peu.
M. Gadbois: D'accord. À ce sujet, ce sont des
étudiants du département de génie chimique qui ont mis sur
pied cet été, en collaboration aussi, il faut le souligner, avec
l'école qui a fourni certains montants... Les étudiants ont
à faire un projet de fin d'études qui vaut trois ou six
crédits, selon le cas, en fin d'année, en quatrième
année. On a toujours déploré que, pour ces projets de fin
d'études, des fois, les sujets choisis étaient
déconnectés de la société, des vrais
problèmes. Or, on a décidé de se prendre en main et
d'aller voir directement là où on peut trouver de vraies
solutions, c'est-à-dire dans les industries, là où la
plupart de nos étudiants vont aller travailler. Le projet de fin
d'études vise donc à aller voir l'industrie, à aller faire
une enquête auprès de toutes les industries en génie
chimique qui pourraient nous présenter des projets de fin
d'études. Ce seraient des questions qu'on pourrait résoudre
durant l'été. Cela durerait quatre mois, ce serait
rémunéré comme un travail et cela permettrait d'aller
chercher les trois crédits de projet de fin d'études.
Évidemment, des professeurs suivraient la démarche de
l'étudiant pour qu'il ne se perde pas dans des dédales. Je pense
que cela est profitable pour tout le monde. Tout le monde y voit un
intérêt certain. C'est encore un projet pilote. On a
déjà des industries - deux cas en particulier - qui seraient
prêtes à collaborer l'année prochaine. Cela débutera
l'année prochaine. On a fait la mise en structure. Et on aimerait que
cela débouche davantage encore sur tous les autres départements.
Je pense qu'au niveau de la PME, qui est notre force au Québec, cela
pourrait être une collaboration fort utile des
étudiants de l'École polytechnique à la
société.
Mme Blackburn: Vos professeurs reçoivent favorablement
cette initiative? Est-ce accepté par l'école? Est-ce que cela a
passé différentes étapes?
M. Gadbois: Oui, je pense qu'il n'y a pas de problème.
Mme Blackbum: Je dis bravo. En pages 8 et 11 de votre
mémoire, vous parlez de mauvaise gestion. C'est 11 sûrement:
"...ac-créditerait la piètre gestion... Que le gouvernement..."
Un instant! Je vais revenir, c'était sur mon autre... Page 9. J'aimerais
que vous m'expliquiez dans quel sens on peut parler de mauvaise gestion et
proposer des gestions plus serrées des fonds.
M. Gadbois: Lorsqu'on parle de mauvaise gestion, d'une part il
est bon de reconnaître que l'École polytechnique - on va parler de
cela en premier - a quand même fait des efforts dans sa gestion.
Lorsqu'on parle de mauvaise gestion, on parle, d'une part, de planification.
Gestion est synonyme, entre autres, de planification. On l'a dit la semaine
dernière à cette commission. Lorsqu'on ne sait même pas
l'attribution réelle des sommes qui nous serons données lorsqu'on
prépare un budget, on peut parler de mauvaise gestion. Quand on parle de
n'être même pas capable d'évaluer correctement ses
employés... Chez les techniciens, il y a des employés qui n'ont
pas été évalués depuis douze ans. Ce sont des
situations bien claires. Or, dans ce domaine, on peut parler de mauvaise
gestion. Ce sont des exemples comme cela qu'on peut vous apporter qui, pour
nous, parlent de mauvaise gestion. Je pense qu'à l'intérieur de
l'École polytechnique on a quand même réussi à
garder un équilibre financier, mais je pense que d'autres associations
universitaires vous présenteront - c'est le cas de l'Université
de Montréal - des exemples vraiment criants de mauvaise gestion. Dans
d'autres cas, on a dilapidé certains fonds publics, et cela est
inacceptable pour nous.
Mme Blackburn: Cela me semble toujours un peu de gros jugements,
si ce ne sont pas des accusations.
M. Gadbois: Oui, on peut apporter aussi... Lorsqu'on parle de
mauvaise gestion, lorsqu'on fait des coupures à gauche et à
droite dans les budgets qui sont alloués aux universités, on peut
se demander pourquoi. Lorsqu'on veut reconnaître la qualité d'un
enseignement et qu'on fait des coupures dans le système universitaire,
on peut dire qu'effectivement il y a une difficulté à planifier,
donc à gérer. Je suis content que le ministre Ryan nous dise
qu'il y aura une clarification de la formule de gestion. On espère que
ce ne sera pas dans le sens des promesses électorales qui sont
difficiles à tenir en ce moment. J'espère que les recommandations
- M, Ryan semble favorable à nos six recommandations - seront suivies.
J'espère que ce ne sera pas des promesses électorales, parce
qu'on est tannés comme étudiants d'entendre des promesses
électorales qui ne sont pas suivies. Je pense que c'est une des choses.
On ne veut pas que cette commission serve à justifier une hausse des
frais de scolarité. Si c'est cela que la commission veut rechercher, on
est contre. Ce dont on parle quand on parle de gestion, qu'il y a des choses
à faire dans ce domaine, c'est qu'on peut aller chercher des fonds
ailleurs. Finalement, si tout le monde fait des efforts dans le système
universitaire, on serait un peu ridicule de dire: Non, on ne fera pas d'effort.
Le ministre a dit tantôt qu'on était des personnes responsables,
qu'on entrevoyait une certaine hausse. On dira non à une hausse si c'est
la seule contribution qui est faite au niveau des universités.
Cependant, si on voit réellement qu'il y a des efforts qui sont
envisagés dans différents domaines, entre autres dans les
recommandations et à la suite de la commission, à ce
moment-là on peut parler d'efforts. Ces efforts, il y a des gens qui ont
dit que cela pourrait aller au triple, au quintuple, etc. Si on est capable de
me dire que, du jour au lendemain, on va tripler la qualité de
l'enseignement, on est prêt à tripler nos frais de
scolarité, mais j'en doute fortement. Si on parle du double, nous aussi
on en doute. Si on veut dire qu'il y aura un effort dans les
universités, on est prêt à faire le nôtre, mais
è la mesure de celui qui sera fait par chacun des autres
intervenants.
Mme Blackburn: La hausse des frais de scolarité, vous
l'avez indiqué, est reliée à une amélioration de
l'aide financière. Quel genre d'amélioration souhaiteriez-vous
à l'aide financière?
M. Lecavalier: Premièrement, couper dans les sommes qui
sont allouées au système d'aide financière, c'est une
chose à éviter. Une des première réformes c'est
qu'au moins l'enveloppe soit stable et aille en augmentant. Pour nous, ce
serait important. Entre autres, une des modifications importantes à
être envisagées, ce serait dans la partie... L'enveloppe
allouée à un étudiant est calculée,
premièrement, sur la base des revenus de ses parents et des revenus
qu'il gagne pendant l'été, etc. Il y a de nombreux
étudiants dont les parents ont des revenus assez importants grâce
auxquels ils pourraient, selon le calcul de leur aide financière,
subvenir aux besoins de ces étudiants. L'application du règlement
est très
stricte à cet égard. Par exemple, si les parents de
l'étudiant gagnent un certain montant d'argent, il ne peut recevoir
aucune aide, peu importe ses besoins réels, que ses parents veuillent ou
ne veuillent pas contribuer ou que lui-même veuille ou ne veuille pas
recevoir de l'argent de ses parents, selon la situation. C'est un exemple de
mesures d'assouplissement de ces règles qui seraient très
bienvenues chez les étudiants.
Mme Blackburn: Je vous remercie.
M. Cardinal: Si vous me le permettez. La première
journée de la commission parlementaire, le Conseil des
universités proposait de doubler les frais de scolarité mais en
liant cela à un réajustement des prêts et bourses. Les
étudiants de Polytechnique, à la suite des coupures en mai, ont
des doutes à savoir si l'on va vraiment réajuster en partant. On
parle de doublement des frais de scolarité. Il y a une chose que je
pense qu'on semble vouloir dire aux gens, à la société:
Écoutez, les étudiants ce sont des gens qui sont irresponsables,
ce sont des étudiants qui ne veulent pas payer. Je m'excuse, mais on a
des chiffres ici comme quoi, juste au niveau du micro-ordinateur qu'on
achète, on fait économiser à l'École polytechnique
en investissement, au niveau de l'informatique, 50 000 000 $. Ce sont des
chiffres des années 1981-1982, aujourd'hui on ne sait pas combien ce
serait.
Pour chaque étudiant, cela revient à une augmentation de
frais de scolarité de 200 $ par année. C'est sûr et certain
que ce ne sont pas tous les étudiants qui ont acheté un
micro-ordinateur, mais si on le répartit sur tous les
étudiants... Il y a un autre facteur dont il faut tenir compte. Par
exemple, à l'École polytechnique, il y a 2000 étudiants
sur 3600 qui sont bénéficiaires de prêts, certains aussi de
prêts et bourses. Quand on nous dit qu'on est des gens
privilégiés, moi je vous dis: On sera privilégiés
plus tard. Pour l'instant, on a déjà fait notre grosse part. Si
on nous double pardessus cela... En plus de cela, on a de sérieux doutes
qu'on va avoir des bourses adéquates. Le sondage de la FAECUM le prouve,
l'accessibilité va être beaucoup touchée. Au niveau de
Polytechnique, ce serait 482 étudiants qui quitteraient l'école.
C'est un pensez-y bien. (22 h 15)
M. Gadbois: Mme Blackburn, je pense qu'au niveau des prêts
et bourses c'est très complexe. Nous, ce qu'on veut faire ici c'est
parler de la gestion des universités avant même de parler des
prêts et bourses. C'est pour cela qu'on dit clairement dans notre
mémoire: On va en reparler. Si M. Ryan nous invite à ce niveau,
nous serions très heureux d'y participer, mais c'est une question
très complexe. On ne veut pas tomber dans le piège de passer
toute la commission à ce niveau. Merci.
Mme Blackburn: Je vous remercie.
Le Président (M. Thérien): Si on va par alternance,
je passerai la parole au député de Limoilou pour un maximum de
cinq minutes.
M. Després: Vous dites dans votre mémoire que vous
avez déposé une nouvelle politique d'évaluation des
professeurs qui a été adoptée au conseil d'administration.
 la page 11, vous dites aussi: "Cette évaluation n'a de sens que
si des outils sont mis en place pour inciter le professeur à
s'améliorer." Dans votre recommandation no 5, vous dites: "Que soit
instaurée parallèlement à une évaluation continue
des professeurs une permanence modifiée de ceux-ci qui permettrait des
mesures correctives en cas de diminution de la qualité de leur travail."
Vous voulez dire quoi? J'aimerais savoir ce que vous pensez de la permanence
des professeurs. Cette "permanence modifiée", c'est quoi exactement?
M. Gadbois: Très bien. Je pense qu'il y a un point
d'éclaircissement à ce niveau et je suis heureux que vous me
posiez la question. On n'est pas contre la permanence des professeurs. Ce qu'on
propose, c'est une permanence modifiée. En se promenant dans
l'école, en voyant des enseignants qui parfois... Dans l'ensemble,
l'enseignement est de très bonne qualité; on a des professeurs
à l'intérieur de l'école qui ont vraiment une bonne
expérience et qui savent nous en faire profiter. Cependant, il y a
quelques cas, des cas qui sont minoritaires. Franchement, on ne sait pas
pourquoi ils sont là. Le travail qu'ils effectuent en face de nous,
c'est très déplorable.
Un professeur qui est plus ou moins bon dans son enseignement et aussi
plus ou moins bon dans sa recherche est souvent plus ou moins bien
accepté auprès de ses confrères. Lorsqu'on parle
d'évaluation, c'est très bien, on va évaluer les
professeurs. Si le professeur reçoit une évaluation
négative et il se dit: "Tabarnouche", j'ai ma permanence, je peux rester
là. Parfait. En ce moment, il faut des fautes très graves pour
limoger un professeur. D'accord? À ce niveau, cela vise des professeurs
qui sont médiocres. Les professeurs qui sont moyens et excellents ne
seront jamais touchés par ces mesures. Ils vont avoir leur contrat de
sept ans en sept ans. Cependant, les professeurs dont le travail est
jugé très insatisfaisant, cela sera une dent pour venir leur
dire: Améliorez-vous, sinon vous ne continuerez plus, grâce
à votre permanence, à subsister à l'intérieur
de
l'école. On vise les professeurs qui font un mauvais travail.
Nous on parle de qualité d'enseignement.
M. Doré, dans certaines conversations qu'on a pu avoir, juge la
qualité de son école par la qualité de ses
employés, la qualité de ses professeurs, entre autres. Nous
aussi, c'est vrai, on le dit: L'école a vraiment des professeurs de
qualité. Cependant, il y en a qui ne le sont pas. On veut donner des
dents à des mesures, finalement, à une évaluation qui
serait négative. C'est un peu comme quand on adopte une loi, il faut
quand même qu'il y ait certaines mesures pour voir à ce que cette
loi soit appliquée. C'est le but de la recommandation.
M. Després: De quelle façon va-t-on faire pour
savoir si on est insatisfait d'un professeur? D'après quelle
évaluation et qui va faire cette évaluation?
M. Gadbois: Entre autres, l'évaluation qu'on propose, est
une évaluation des enseignements. Je pense que si on regarde dans les
entreprises en ce moment, si on regarde dans les grandes entreprises, il y a
des mécanismes d'évaluation. Présentement, il y a de la
recherche à faire de ce côté, et je crois que c'est un bon
point de vue que vous amenez, à savoir comment, au niveau de la
recherche, on fait pour évaluer un professeur. Je pense qu'au bout de
sept ans -c'est la mesure - on voit un peu ce que le professeur peut faire dans
sa recherche. On lui laisse une certaine liberté malgré tout,
mais s'il ne produit rien on le sait et son travail est jugé
insatisfaisant. Il y aura des mécanismes à mettre en jeu.
Présentement, c'est le directeur qui, avec d'autres gens, évalue
le travail des professeurs. Cela se fait selon son bon jugement. Au bout de
cela, on lui accorde des bourses. Je pense qu'il y a des mécanismes plus
sérieux qu'on peut mettre en oeuvre à ce sujet. On pourrait aller
voir ce qui se passe dans des entreprises, créer de nouvelles
façons, être original.
Mais nous croyons qu'il est possible de mettre des mécanismes en
jeu pour évaluer les professeurs et au bout de cela voir, juger de la
qualité. En ce moment, on ne peut pas juger de la qualité du
travail d'un professeur et non plus de tous les autres employés à
l'intérieur de l'école. On trouve cela inacceptable. Ce n'est pas
qu'on en veuille à ces employés. On est très satisfait, on
est très content de leur travail. Cependant, il y en a qui... hein!
C'est ce qu'on veut dire.
Le Président (M. Thérien): Je vous remercie
beaucoup. Je cède maintenant la parole pour une brève
intervention au député de Laviolette.
M. Jolivet: Merci, M. le Président. J'ai été
un peu surpris, même si on a donné des indications inverses
à un certain moment au niveau des groupes étudiants, de votre
recommandation à la page 15 où vous dites que si une augmentation
de la contribution étudiante avait lieu, etc.. Il y a des conditions qui
sont apportées.
Quand on entend une chambre de commerce venir dire cela, quand on entend
le groupe des recteurs venir parler d'une augmentation des frais de
scolarité, quand on entend d'autres groupes universitaires de parler de
l'augmentation des frais de scolarité, on est surpris. Quand ce sont les
étudiants qui le proposent de la façon dont vous le proposez, on
peut aussi rester surpris. C'était une partie de la question que je
voulais poser et j'ai eu une réponse intéressante tout à
l'heure. C'est pourquoi je ne vous en demanderai pas davantage, mais je vous
dirai qu'il y a d'autres propositions qui ont été faites par des
groupes étudiants, des groupes de jeunes. Je vous donne comme exemple la
proposition qui a été faite par le groupe des jeunes du Parti
québécois qui propose un impôt universitaire. Est-ce que
d'après vous cette formule est intéressante dans la mesure
où elle fait l'objet d'une capacité pour les étudiants de
prendre en charge une certaine partie, une fois leurs études
terminées, des frais de scolarité actuels? J'aimerais
connaître votre opinion sur cette proposition qui est sur la table par
l'intermédiaire des journaux, actuellement?
M. Cardinal: Si vous me permettez, par rapport à la
proposition des jeunes du Parti québécois, on peut faire
l'historique de cette proposition. Il ne faut quand même pas donner tout
le mérite au Parti québécois de l'avoir faite. Ce sont des
étudiants qui étaient à Concordia qui avaient formé
un premier modèle qui s'appelait le POET, Post-Obligatory Educational
Tax, qui avait certaines lacunes après une étude approfondie
entre autres des gens qui militent soit au RAEU, dans les associations
étudiantes. Je me souviens, dans le temps que j'étais simplement
étudiant, on avait discuté et regardé le pour et le contre
de cette façon de voir. Il y avait des lacunes. Il semblerait qu'on
aurait trouvé des solutions pour qu'il n'y ait pas de lacunes. Je dois
vous avouer que je n'ai pas encore pris le temps d'étudier, de prendre
des colonnes de chiffres et de faire tous les pour et les contre de cela. Cela
peut être quand même assez long. On avait d'autres chats à
fouetter, ce qu'on considère plus primordial pour l'instant. Il s'agira
de voir, avec des preuves à l'appui, si ce système pourrait
être valable.
Je considère qu'il y a une autre solution et elle a
été pensée et amenée tout à l'heure. Les
industries pourraient être mises à contribution dans le
financement. Il
n'y a pas juste les étudiants, il n'y pas juste le gouvernement
qui doivent financer. Je vous pose la question et je pourrais la poser à
n'importe lequel des députés ici, c'est qui le premier qui retire
le plus d'un enseignement supérieur de qualité, si ce ne sont pas
les industries? Je suis d'accord, pour l'étudiant, en tant que
formation, c'est intéressant. Bon, une bonne élocution, des
connaissances, il peut lire ce qu'il veut. Mais l'industrie, si cela ne lui
rapporte pas, je me demande bien... M. Doré le disait tout à
l'heure, on considère que ce qui est le plus important ce sont les
connaissances, ce sont les personnes. L'industrie au Québec - on peut
faire un petit historique sur cela - à partir des années
soixante-dix dans le temps où justement on avait de l'argent à
jeter par les fenêtres et où on en donnait comme on voulait aux
universités, l'industrie s'est dissociée d'amener des fonds. Elle
s'est dit: Bien, le gouvernement en met, je n'en mettrai pas. Mais maintenant
on est rendus en 1986, il va falloir que l'industrie se rebranche. On a une
campagne de publicité qui dit: Des universités branchées
dans la société. Les industries, il va falloir qu'elles se
branchent, il va falloir qu'elles investissent. Si elles ne veulent pas, on
veut bien leur donner la chance, on n'est pas des tortionnaires, on veut bien
leur donner la chance d'investir mais, si elles ne veulent pas, à un
moment donné il va falloir qu'il y ait des obligations qui viennent de
quelque part. On ne cesse de nous comparer à l'Ontario sur le fait que
les étudiants doivent faire leur part. Si on compare les industries avec
l'Ontario, il va falloir qu'elles fassent leur part elles aussi. Si on compare
les industries avec celles des États-Unis, c'est encore pire. À
un moment donné, les industries, il va falloir littéralement
qu'elles fassent leur part. On ne la voit pas leur part pour l'instant.
Le Président (M. Thérien): Je demanderais
maintenant a la représentante de l'Opposition de conclure. Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je voudrais vous
remercier pour la qualité de votre présentation, pour votre
franchise, je l'ai dit tout à l'heure, également pour votre
ouverture d'esprit par rapport aux hypothèses qui sont avancées
et par rapport à la société de façon
générale. Vous dites avec raison que les étudiants ne sont
pas les seuls à bénéficier des avantages d'une formation
universitaire. Je pense que cela a été largement
démontré. Si vous aviez assisté à la
présentation à la fois de la Chambre de commerce hier et des
différents ordres, l'Ordre des agronomes, l'Ordre des ingénieurs,
ces gens-là sont très conscients de leur contribution au
développement de leur secteur d'activité. Dans ce sens-là,
tes entreprises tirent les avantages les plus importants, plus aujourd'hui
qu'il y a 20 ans parce que, comme tout le monde le reconnaît - et tout
à l'heure cela nous est revenu dans le mémoire de l'École
polytechnique - le savoir devient capital dans le développement
économique et social. Si le savoir a cette importance, qu'il joue dans
le développement économique ce que jouait le capital et l'argent
antérieurement, cela a une valeur réelle.
Tout le monde reconnaît qu'aujourd'hui, dans les entreprises, ce
qui fait la différence dans la rentabilité d'une entreprise, ce
n'est plus la technologie parce que vous pouvez l'acquérir rapidement et
qu'elle va être de plus en plus semblable, elle évolue mais il y a
toujours moyen de l'acheter. Ce qui fait la différence dans la
rentabilité d'une entreprise, c'est exclusivement, aujourd'hui dans
beaucoup d'entreprises, la qualité des ressources humaines.
Je partage avec vous l'opinion qu'il faudrait qu'on envisage d'autres
formules de financement et qu'on commence à sensibiliser
également d'autres milieux. Votre ouverture d'esprit me rassure de toute
façon par rapport à l'avenir à la fois du Québec,
de nos entreprises mais également de nos universités. Je vous
remercie.
Le Président (M. Thérien): Je céderai
maintenant la parole au parti ministériel, à M. le ministre.
M. Ryan: Brièvement, je voudrais faire une couple de
commentaires sur des points qui ont été soulevés au cours
de la discussion. J'ai fait allusion à quelques reprises aux engagements
électoraux du Parti libéral, il y en avait 22. Pour votre
information, il y en a déjà au moins 15 ou 16 qui sont
réalisés ou qui sont en voie très sérieuse de
l'être. Par conséquent, de ce point de vue, je pense que c'est un
argument que vous pouvez soulever sans crainte. La feuille de route est
très bonne pour un gouvernement qui a seulement neuf mois de pouvoir,
nous sommes prêts à faire face à l'électorat sur
cette question n'importe quand.
Un point soulève des difficultés, c'est celui dont vous
avez parlé. On l'examine dans l'ensemble du contexte où nous
examinons la question du financement universitaire. Je trouve que sur ce
point-là l'ouverture d'esprit dont fait montre votre mémoire est
très encourageante et nous invite à faire un examen impartial, de
manière à arriver aux conlusions qui seront les plus conformes au
bien commun.
Je ne pense pas que nos sociétés soient arrivées
à un point où elles soient en mesure d'envisager la
gratuité universitaire. Là nous sommes assis entre deux chaises.
Avec la
politique actuelle, si nous la maintenons, c'est une politique de
gratuité que nous n'avons pas le courage de nous avouer, parce que cela
nous mène tranquillement vers le point zéro et plus rapidement
que plus lentement depuis une dizaine d'années; mais cela n'est pas ce
que l'on dit que la société est capable d'accepter. Si cela n'est
pas une politique de gratuité, il faut que cela soit une politique
alignée sur quelque chose de réel et de vivant; cela ne peut pas
être statique non plus. Alors, quelles que soient les conclusions de la
commission, il y aura un changement de venue. Cela ne peut pas rester comme
cela, c'est une politique de faiblesse qui a été pratiquée
depuis une quinzaine d'années par les gouvernements. Je pense que vous
comprenez mon point: au point de vue logique, c'est d'une logique
élémentaire.
Un deuxième point que je voudrais souligner, parce que cela a
été soulevé à bien des reprises par la
députée de Chicoutimi, c'est: N'y aurait-il pas moyen d'imposer
une taxe sur les entreprises pour financer l'enseignement universitaire? J'aime
autant vous dire tout de suite que c'est improbable. Ce n'est pas moi qui
décide de l'imposition des taxes dans le gouvernement. Il appartient au
ministre des Finances de faire ces recommandations, mais il faut se souvenir
que lorsqu'on parle de fiscalité, déjà le fardeau fiscal
du Québécois, taxes corporatives comprises, est à l'indice
d'environ 123 ou 127 par rapport à 100 qui est la moyenne canadienne.
Alors nous sommes beaucoup plus élevés que les autres. Il ne peut
pas être question d'ajouter de nouvelles taxes par-dessus celles qui sont
déjà en vigueur. Est-ce que des échanges peuvent
être faits? Il faudrait enlever d'une main ce que l'on prendrait de
l'autre. Il n'y a pas beaucoup de marge du côté de la
fiscalité dans l'immédiat.
On va examiner les propositions qui ont été faites par de
nombreuses personnes et organismes voulant que des contributions soient
demandées aux entreprises en retour d'allégements fiscaux. Une
chose qui va être regardée, je vais demander à mon
collègue, le ministre des Finances, d'examiner cela attentivement, mais
comme je vous le dis, connaissant l'atmosphère dans laquelle se
discutent les questions de fiscalité au Québec à l'heure
actuelle, je ne pense pas que l'on puisse entrevoir beaucoup de choses. Celui
qui s'imaginerait que l'on va financer plus, il faudrait qu'il soit prêt
à nous dire où on pourrait couper pour ajouter là et ce
qui financerait les activités qui ne seraient plus financées par
des taxes déjà existantes. C'est un problème
extrêmement aigu. Je vous le souligne en toute simplicité parce
que nos échanges ont été très francs, mais
j'espère qu'on aura l'occasion de continuer cela, le président
l'a mentionné à une couple de reprises. Il y a des points
précis que nous aurons intérêt à discuter encore,
puis je voudrais que vous sachiez que nous sommes très ouverts à
discuter avec vous. Ne vous gênez pas pour nous faire signe et nous
ferons de même.
Le Président (M. Thérien): C'est à mon tour
de vous remercier de votre contribution à la commission parlementaire.
Permettez-moi de vous souhaiter, à vous ainsi qu'à tous les
étudiants qui sont ici, bon succès dans cette nouvelle
année scolaire.
Les travaux sont ajournés à demain, 10 heures,
journée consacrée à l'Université de
Montréal.
(Fin de la séance à 22 h 32)