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Version finale

33rd Legislature, 1st Session
(December 16, 1985 au March 8, 1988)

Wednesday, October 1, 1986 - Vol. 29 N° 21

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale dans le but d'évaluer les orientations et le cadre de financement du réseau universitaire québécois


Journal des débats

 

(Dix heures treize minutes)

Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente de l'éducation reprend ses travaux, toujours dans le cadre du mandat qui lui a été confié par l'Assemblée nationale en juin dernier, à savoir de procéder à une consultation générale sur les orientations et le cadre de financement du réseau universitaire québécois pour les années 1987-1988 et pour les années ultérieures.

Comme je le disais hier, c'est probablement une journée thématique pour nous puisque la commission accueille ce matin l'Université du Québec à Chicoutimi et différents organismes qui gravitent autour de cette université. Nous vous souhaitons la bienvenue. Les membres de la commission et moi vous remercions beaucoup d'avoir répondu à notre appel, de venir échanger avec nous sur la problématique de l'orientation et du financement du réseau universitaire québécois. La commission se penche sur ce problème depuis la mi-septembre déjà, et les informations et les renseignements que nous pourrons recueillir nous aideront certainement, aideront le gouvernement à prendre position face à ce problème qui perdure depuis nombre d'années.

C'est un très grand plaisir d'accueillir les gens de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, où nous comptons beaucoup d'amis. Je dois dire aux gens de Chicoutimi que nous avons déjà eu l'occasion de travailler en collaboration avec votre député. Sentez-vous les bienvenus, sentez-vous bien à l'aise, tâchez de mettre dans nos discussions l'esprit qui règne chez vous, cet esprit de spontanéité que nous connaissons bien, de franchise et d'échanges rigoureux, s'il le faut. Je pense que c'est de là que sort la vérité et que sortent les idées qui font avancer les choses.

Le porte-parole de l'université est M. Alphonse Riverin. M. Riverin, nous vous invitons à nous présenter les gens qui vous accompagnent.

Excusez-moi, est-ce qu'il y a des remplacements?

M. Jolivet: Oui, M. le Président, it y a quelques remplacements ce matin. Le député de Dubuc, Hubert Desbiens, remplace M. Jean-Pierre Charbonneau (Verchères). Le député de Roberval, M. Michel Gauthier, remplacera, au cours de l'avant-midi, Mme Cécile Vermette (Marie-Victorin). Je devrai vous quitter puisque je participe à la commission parlementaire sur les forêts. Je dois vous dire que les membres de l'Opposition auraient été heureux d'être à Chicoutimi aujourd'hui, tel que nous l'avions proposé, mais, malheureusement, cela n'a pas été accepté.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Très bien, M. le député de Laviolette. Vous allez nous manquer; vos réparties, surtout, nous manqueront.

Du côté ministériel, y a-t-il des changements? Pas de changement du côté ministériel. La commission parlementaire est complète. Je dois souligner la présence exceptionnelle du député de Lac-Saint-Jean. M. le député, bienvenue.

M. Riverin, la commission a environ une heure et demie à consacrer à l'université. Par la suite, à temps égal, nous entendrons le Conseil régional de concertation et de développement du Saguenay-Lac-Saint-Jean ainsi que la Société d'électrolyse et de chimie Alcan Ltée. La rencontre de ce matin avec votre groupe et les deux autres groupes doit se terminer vers 13 heures. Il se peut que nous terminions avant, mais, s'il vous faut plus de temps, soyez bien à l'aise, de façon qu'on puisse avoir un échange enrichissant pour tout le monde.

M. Riverin, si vous voulez nous présenter les gens qui vous accompagnent et ensuite enchaîner avec la présentation. Encore une fois, sentez-vous bien à votre aise.

Université du Québec à

Chicoutimi et un groupe

d'organismes de la région 02

M. Riverin (Alphonse): Merci beaucoup, M. le Président. J'ai avec moi ce matin, à ma droite, le vice-recteur à l'administration et aux finances, M. Lucien Gendron, à mon extrême gauche, Mme Michèle Gauthier, secrétaire générale de l'université, et, à ma gauche immédiate, M. Adam Nagy, vice-recteur à l'enseignement et à la recherche. Vous aurez remarqué aussi sans doute, comme à l'accoutumée, que la région du Saguenay- Lac-Saint-Jean est très bien

représentée en arrière de moi. Je remercie l'ensemble des organismes qui nous appuient très ouvertement aujourd'hui.

M, le Président, M. le ministre de l'Éducation, madame la porte-parole de l'Opposition, mesdames, messieurs membres de la commission. C'est avec enthousiasme et intérêt que l'Université du Québec à Chicoutimi se présente, aujourd'hui, devant la commission de l'éducation convoquée pour étudier les orientations et le cadre de financement du réseau universitaire québécois pour Tannée 1987-1988 et pour les années ultérieures.

Enthousiasme, puisqu'en accord avec les propos du ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science l'Université du Québec à Chicoutimi croit, et je cite, "que l'université est et doit devenir de plus en plus un rouage essentiel dans le développement de la société québécoise et que l'appui aux universités doit être perçu comme une véritable obligation à laquelle un gouvernement ne saurait se dérober sans faillir à sa responsabilité". L'Université du Québec à Chicoutimi est donc convaincue de la pertinence et de l'importance des débats qui se déroulent à cette commission et tient è féliciter M. le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science pour son initiative.

Intérêt aussi puisque l'Université du Québec à Chicoutimi voit dans la tenue de cette commission une chance inouïe de démontrer aux autorités supérieures, croyons-nous, d'une part la pertinence et la qualité de ses actions dans le domaine universitaire, actions qui, selon son avis, demeurent souvent méconnues en dehors de son entourage immédiat. Intérêt aussi, d'autre part, puisque l'Université du Québec à Chicoutimi tient à souligner que le présent mémoire soumis à l'attention de cette commission n'est pas strictement le résultat de la réflexion de gestionnaires universitaires mais bien la manifestation de la solidarité d'une communauté régionale et de son université. D'ailleurs, le nombre de représentants des différents organismes qui nous accompagnent aujourd'hui reflète bien l'ensemble des intérêts de la région et témoigne de cet appui indispensable à notre université. Pour votre information, M. le Président, permettez-moi de déposer immédiatement les diverses résolutions des organismes régionaux appuyant l'université dans sa démarche.

Dans cette présentation, vous nous demandez d'insister sur les points importants véhiculés par notre mémoire. Vous nous permettrez alors d'insister sur les deux éléments suivants qui nous semblent les principes directeurs de notre document. En premier lieu, l'Université du Québec à Chicoutimi est une université et non une université régionale. En effet, depuis quelques années, plusieurs intervenants sont tentés de qualifier une université située en région périphérique d'université régionale. Ce faisant, ils oublient que la mission première d'un établissement universitaire, peu importe l'endroit où il est situé, est d'être un lieu privilégié de réflexion critique, réflexion qui ne peut se borner à un cadre régional mais qui doit tenter d'aboutir à l'universalité, c'est-à-dire aux situations qui ont une incidence cosmique. Il est donc antinomique à notre avis de parler d'universités régionales et l'Université du Québec à Chicoutimi, au même titre que les autres universités, affirme son statut d'université à part entière.

D'ailleurs, dans cette ligne de pensée, toute la démarche universitaire de notre institution est soumise aux mêmes critères que celle des autres établissements d'enseignement supérieur. Ainsi, au chapitre des programmes d'études, nos programmes de baccalauréat, de maîtrise et de doctorat doivent, en outre de notre approbation, recevoir celle du Conseil des études de l'Université du Québec et l'assentiment du Conseil des universités et, finalement, du ministère de l'Enseignement supérieur.

Nous insisterons particulièrement sur cette démarche puisque nous n'aimerions pas laisser l'impression que notre université agit en vase clos. L'Université du Québec dans sa totalité est avant tout une structure de concertation à laquelle notre propre constituante est appelée à participer à part entière, concertation dont le résultat est l'application de règles communes et l'aboutissement d'une communauté scientifique dont l'objectif premier est de s'assurer de la qualité des actions des membres qui la composent. Il en est de même pour le Conseil des universités dont le mandat confié par le législateur est de s'assurer entre autres de la qualité des interventions universitaires et de la coordination entre les établissements d'enseignement supérieur. C'est donc dire que, lorsque cet organisme émet un avis au sujet d'un programme d'études qui est porté à son attention, il le fait en fonction de deux paramètres, la qualité et l'opportunité.

Maintenant, au chapitre des projets de recherche, la situation est identique, à savoir que nos demandes de subventions sont adressées, de façon générale, aux mêmes organismes que les demandes de subventions provenant des autres établissements d'enseignement supérieur. En conséquence, elles sont jugées par les pairs, selon des critères uniformes visant à vérifier la qualité de la démarche scientifique et l'opportunité des projets de recherche. Dans ce domaine, la performance de notre université est certainement à considérer puisqu'au cours du dernier exercice financier nos professeurs ont

obtenu pour plus de 3 750 000 $ de subventions de recherche.

En second lieu, l'Université du Québec à Chicoutimi est aussi une institution sociale. Qualifier d'institution sociale notre université, c'est affirmer qu'elle doit répondre de façon tangible aux besoins particuliers d'un espace géographique déterminé, à savoir, dans le cas qui nous occupe, le Saguenay-Lac-Saint-Jean, Charlevoix et la Côte-Nord. En d'autres termes, c'est affirmer que les services universitaires deviennent accessibles pour cette région.

Accessibilité dans ce contexte veut dire, bien sûr, dans un premier temps, rendre disponibles des programmes d'études universitaires liés aux attentes du milieu et correspondant aux caractéristiques de ce milieu. Accessibilité veut dire également, et nous insisterons fortement sur cet aspect, rendre disponible à cette même région une réflexion critique sur les problèmes auxquels elle est confrontée, réflexion exercée par un personnel qualifié. En regard de ce principe d'accessibilité, si l'on observe les résultats de notre université depuis sa fondation, c'est-à-dire depuis à peine dix-sept ans, vous nous permettrez de vous affirmer qu'ils sont concluants.

C'est ainsi qu'au niveau de l'enseignement notre université dispense des programmes originaux basés sur un caractère de multidisciplinarité. À titre d'exemple, je vous citerai nos programmes de maîtrise en gestion des petites et moyennes organisations, de maîtrise en ressource des systèmes, de baccalauréat en génie unifié et de baccalauréat en sciences sociales. Si l'on regarde les retombées concrètes de l'ensemble de notre programmation, nous sommes particulièrement fiers de constater que, depuis la naissance de l'Université du Québec à Chicoutimi, plus de 12 500 diplômés ont contribué à freiner le phénomène qualifié d'exode des cerveaux.

On constate également que plusieurs catégories de professionnels oeuvrant dans notre région sont des diplômés de l'Université du Québec à Chicoutimi. C'est notamment le cas pour les comptables agréés et les ingénieurs. Quant à la recherche, il n'est pas surprenant de constater que plusieurs de ces projets soient intimement liés à des problématiques régionales, c'est-à-dire à la foresterie, aux mines, à l'aluminium, à la population, etc. Par suite des compressions budgétaires que nous avons suivies, je voudrais reprendre une boutade que lançait notre vice-recteur à l'enseignement et à la recherche: Nous vivons dans le bois, dans la forêt, mais nous ne sommes pas sortis du bois. C'est dans ces actions que prend tout le sens de notre responsabilité sociale, responsabilité partagée par notre milieu puisqu'il s'associe aisément à la réalisation desdits projets.

En outre, ces résultats nous convainquent que les sommes d'argent consacrées à la mission universitaire dans notre milieu sont loin d'être une dépense en soi, mais sont plutôt un investissement dont notre mémoire essaie de tracer les grandes lignes en matière de retombées sociales, économiques et culturelles. Plusieurs études, d'ailleurs, confirment la rentabilité élevée des sommes investies dans l'enseignement universitaire supérieur et je ne voudrais en rapporter qu'une: au Royaume-Uni, en particulier, un examen des dépenses effectuées conclut que les crédits consacrés à l'enseignement supérieur rapportent plus que les investissements dans tous les autres secteurs de l'économie.

En résumé, M. le Président, notre mémoire essaie de vous démontrer que, bien que notre université soit intimement liée à son milieu, sa démarche vise fondamentalement des solutions universelles à partir de problématiques régionales pouvant bénéficier à l'ensemble de la société québécoise et nationale.

C'est pourquoi, en ce qui a trait aux modalités de financement, nous vous proposons que les formules de financement qui seront arrêtées par les autorités compétentes s'appuient, en ce qui nous concerne, sur les principes suivants: 1. Reconnaître la vocation générale de l'Université du Québec à Chicoutimi; 2. Tenir compte des paramètres ou des caractéristiques propres à notre université, c'est-à-dire la taille, la densité démographique et l'étendue du territoire; 3. Tenir compte de notre rôle d'instrument essentiel de développement régional et nous permettre de répondre à notre obligation de mission d'enseignement sur l'ensemble du territoire que nous sommes appelés à desservir; 4. Enfin, d'une manière plus spécifique, et sur ce nous rejoignons l'ensemble des intervenants, que toute formule de financement tienne compte des coûts reliés à la recherche.

En terminant, M. le Président, nous vous remercions de votre attention et nous sommes disposés à répondre à l'une ou l'autre des questions que désirent formuler les membres de cette commission.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie beaucoup, M. Riverin, de votre exposé. Nous allons maintenant commencer la période d'échanges avec les membres de la commission. Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, le temps qui nous reste sera séparé également entre les deux formations politiques.

Je reconnais immédiatement le député d'Argenteuil, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.

(10 h 30)

M. Ryan: M. le Président, c'est avec grand plaisir que nous accueillons aujourd'hui à la commission parlementaire le recteur de l'Université du Québec à Chicoutimi et ses collègues et amis institutionnels qui l'accompagnent.

Nous sommes toujours très heureux à la commission parlementaire d'accueillir une délégation nombreuse parce que cela met de la vie dans nos réunions. Cela nous oblige, quoique je pense que nous n'ayons point trop péché de ce côté-là depuis le début, à monter le ton, surtout nous autres du côté ministériel qui avons du terrain à gagner chez vous. Il faut que nous nous montrions sous notre meilleur jour.

J'ai oublié ma cravate bleue, ce matin, Mme la députée de Chicoutimi, je m'en excuse. Je n'ai pas oublié, je n'ai pas été capable de me résoudre à changer de camp de manière aussi radicale.

Mme Blackburn: Je pensais que vous n'en aviez pas trouvé.

M. Ryan: Je sais que les légendes ont parfois la vie facile chez vous et je ne voulais pas en créer une de plus aujourd'hui.

Je voudrais au début en dissiper une, justement. Dans des articles de presse que j'ai lus ces derniers temps, j'ai vu que l'on prêtait au gouvernement l'intention de réduire l'Université du Québec à Chicoutimi en particulier, une sorte de légende qui a circulé. C'est absolument faux. Je veux que cela soit bien clair qu'il n'y a pas de projet dans les cartons gouvernementaux de ce point de vue. Je ne sache point qu'il y ait eu des déclarations qui auraient justifié de telles rumeurs. Je vais vous dire que nous prenons les faits comme ils sont. Nous examinons le dossier de l'Université du Québec à Chicoutimi avec toute la sympathie, la compréhension et aussi la rigueur qui nous incombent dans nos fonctions. Sur cette base, encore une fois, je souhaiterais vivement que tout malentendu qui a pu naître d'interprétations données à des propos tenus je ne sais trop par qui soit dissipé. Nous apprécions le travail qui s'accomplit à l'Université du Québec à Chicoutimi. J'ai eu l'occasion d'aller vous visiter il y a quelque temps et je fus très heureux de l'accueil qu'on m'y a réservé. Je sais depuis longtemps déjà, pour avoir suivi votre travail de bien des manières, qu'il se fait d'excellentes choses chez vous et j'espère que vous pourrez continuer à les faire. Vous avez plaidé avec force dans votre mémoire, avec l'appui, j'en suis sûr, de la presque totalité des organismes régionaux, l'importance du rôle de l'Université du Québec à Chicoutimi autant comme institution d'enseignement et de recherche que comme instrument de développement culturel, social et autre. Vous pouvez compter que sur ces orientations fondamentales il y a un très large accord de notre part. Évidemment, ce sont toutes des choses qui demandent à être interprétées. On peut dire oui à la vocation générale de l'Université du Québec à Chicoutimi. Cela ne veut pas dire qu'on veuille en faire une copie carbone fidèle de l'Université Laval ou de l'Université de Montréal. Je pense que le bon sens le plus élémentaire indique qu'on ne peut pas envisager une université de la même taille à Rimouski, à Chicoutimi, à Rouyn-Noranda, à Hull qu'à Montréal et à Québec. Si on ne peut pas envisager une université de même taille et de même ampleur, cela veut dire qu'il y a des limites quelque part qui sont inscrites dans la réalité. Il s'agit de les identifier avec le plus de précision possible et avec le plus de loyauté possible envers la réalité également tout en veillant à assurer qu'il y ait un éventail de programmes et de services assez large pour que le nom d'université dont votre établissement se réclame à juste titre soit de plus en plus justifié et fort aux yeux de vos concitoyens et aux yeux de l'ensemble du Québec également. C'est un point sur lequel je veux que les choses soient bien nettement établies. Nous serons toujours heureux d'accueillir de nouvelles initiatives. Cela ne veut pas dire que vous êtes gelés au point où vous en êtes, pas du tout. Cela veut dire que nous examinerons chaque projet, je dirais peut-être à la lumière de deux ensembles de critères principaux. Il y a d'abord le critère de sa valeur en soi, qui est celui dont s'est inspiré surtout et presque exclusivement jusqu'à maintenant le Conseil des universités. Il y a évidemment le critère de l'opportunité et de la possibilité concrète également. Jusqu'à maintenant, le Conseil des universités n'a pas été appelé à se pencher beaucoup sur ce critère. On lui demandait: Trouvez-vous que tel projet répond à des exigences universitaires? Il disait oui ou non. Le reste du travail relevait du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science. À l'avenir, je serais assez heureux que le Conseil des universités pousse sa démarche un peu plus loin et donne également un jugement d'opportunité sur certains projets qui nous sont soumis. Cela aiderait à assurer que les décisions soient prises dans un contexte d'objectivité et en même temps de réalisme. Ceci dit, par conséquent, pour les choses qui existent, personne ne peut dire que tout ce qui existe est destiné à survivre éternellement. Il peut arriver que certains programmes doivent être remis en question et même abandonnés parce qu'ils auraient vieilli, parce qu'ils n'auraient plus d'attrait auprès de la clientèle. Toutes sortes de raisons peuvent justifier l'abandon d'un programme ou des modifications importantes. On nous disait à l'Université du Québec à

Trois-Rivières ces jours derniers qu'on a modifié considérablement les programmes au cours des années par un système d'évaluation très élaboré. C'est une chose à laquelle nous souscrivons sans difficulté, j'en suis sûr.

En même temps, pour l'avenir, je souhaite vivement que, dans chaque établissement universitaire, on sente, du côté du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science, une attitude qui est a priori une attitude d'accueil et de sympathie envers tout ce qui peut être progrès de la connaissance et développement de la mission universitaire en conformité avec les possibilités réelles de notre milieu. Je voudrais qu'on sente que notre premier réflexe est un réflexe d'ouverture et non pas un réflexe de freinage. À ce moment-là, je pense qu'on peut engager la discussion et en venir à un examen objectif d'une proposition au terme de laquelle doit intervenir une conclusion qui a l'obligation d'être la plus juste et la plus réaliste possible. C'est l'approche, en tout cas, que je voulais vous communiquer ce matin. Je suis bien content de la rencontre que nous avons, je suis content des choses qui ont pu se dire depuis quelque temps parce que cela nous invite à apporter des précisions utiles.

En ce qui touche à la mission régionale de l'université, j'avais l'occasion d'en toucher un mot à M. Riverin à l'occasion d'une conversation impromptue que nous avons eue à l'issue de l'une des séances de la commission hier. Je l'ai dit à l'occasion d'une rencontre que nous avons eue hier avec une université - je pense que c'est l'UQAM: Je souscris au concept de mission régionale à condition que cela ne devienne pas un fourre-tout. Je parle pas mal ad lib, comme on dit, sans trop de contraintes et je n'ai pas de note de mes collaborateurs dans mes poches ou rien, mais je pense que c'est quelque chose qu'il faut dire à un moment donné à l'occasion des travaux de la commission.

Je vais vous donner une expérience bien simple. Je me souviens de l'essor qu'ont connu les sciences sociales chez nous, il y a à peu près une vingtaine d'années. Un politicologue, un sociologue, un économiste, c'étaient les nouveaux évangélistes qui avaient les vérités nouvelles sur à peu près tous les sujets. Ils ont tellement prodigué leurs vérités qu'au bout d'un certain temps je pense que l'attrait était devenu beaucoup moins fort. Il y a eu un grand nombre de cas. On est allé trop loin dans le sens d'un soi-disant service tous azimuts. Pendant ce temps, on les voyait de plus en plus à la télévision, dans les journaux et dans des commissions de ci et de ça.

Je me rappelle certains, parmi les meilleurs, qui me disaient: Celui-là, il est fini pour "la grosse ouvrage"; il est trop souvent sur la rue Sainte-Catherine et à

Radio-Canada. C'est la contrepartie. Je dois vous dire en toute honnête - c'est un aspect que je surveille, en tout cas, et j'ai suivi ces choses depuis 25 ans - que c'est une limite dont nous devons être conscients.

J'ai également remarqué d'autre chose. Je pense que nous avons tous la responsabiité, comme citoyens, de participer au développement de la communauté. Ce n'est parce qu'un tel est universitaire que nécessairement toute l'université est embarquée là-dedans non plus. Il faut faire attention de ne pas tirer la couverte trop fort non plus de ce côté, parce que pour l'université elle-même cela peut devenir un problème avec le temps. Je pense que sa crédibilité est au-delà des modes passagères, au-delà de telle ou telle cause particulière qui peut être très périssable.

Cela dit, je pense que le souci que vous avez de vous imbriquer dans la vie et les problèmes de la région est très important. Quand je vois l'insistance que vous mettez à développer des programmes et des projets de recherche qui concernent les ressources naturelles dont la région a été dotée, les caractéristiques de votre population, les caractéristiques de votre économie - je souligne au passage, nous aurons l'occasion de le faire plus tard aujourd'hui, les rapports que vous avez développés avec Alcan; je pense que là il y a toute une série d'activités qui sont remarquablement intéressantes - je veux vous assurer que, du côté du gouvernement, ce genre de développement est vu avec une très grande sympathie, une très grande réceptivité également.

Je pense avoir dit l'essentiel en ce qui touche ces propos d'introduction. Je voudrais maintenant vous adresser quelques brèves questions qui pourront éclairer davantage notre discussion. J'aimerais que vous me disiez, au point de vue de projets de développement, quels sont les projets que vous avez en tête actuellement pour les prochaines années, les lignes de développement que vous entrevoyez pour l'Université du Québec à Chicoutimi, en plus de celles que vous avez déjà cultivées depuis quelques années.

M. Riverin: Oui, M. le Président, M. le ministre. En effet, si nous nous référons au plan de développement que nous avons préparé de concertation avec l'ensemble du réseau de l'Université du Québec pour 1985-1988, il y avait trois objectifs très précis qui étaient dans ce plan de développement: il y avait d'abord les études avancées aux 2e et 3e cycles, et je pourrai m'exprimer tout à l'heure plus amplement là-dessus; il y avait également la création de centres de recherche, qui sont toujours en fonction des ressources que nous retrouvons chez nous; et, en troisième lieu, il y avait la création de

nouveaux programmes qui nous apparaissent correspondre à un besoin essentiel de notre université, en ce qui concerne le développement universitaire lui-même, mais également pour - un phénomène qui est extrêmement important à mon point de vue en termes de développement régional et nous l'avons mentionné à plusieurs reprises - freiner l'exode des cerveaux.

Quand on parle du développement des études avancées et de la recherche, M. le ministre, il ne faut pas, encore une fois, nous imaginer - ou que les gens s'imaginent - que l'Université du Québec à Chicoutimi a l'intention d'aller partout dans tous les domaines. Au contraire, nous avons des champs d'action qui ont été délimités depuis fort longtemps, ce sont des choix qui ont été faits au tout début de l'université du Québec. Je pense aux ressources minérales, je pense également à tout ce qui concerne le Moyen-Nord, notre travail avec les Amérindiens - qu'est-ce que je pourrais encore évoquer - et aussi la productivité vétégale.

Vous savez que chez nous, je le mentionnais tantôt, nous vivons dans une région où la forêt demeure l'un des aspects les plus importants. On connaît aussi tous ces programmes qui aujourd'hui, provenant aussi bien du gouvernement québécois que du gouvernement canadien, proposent la régénération de la forêt québécoise. Nous croyons qu'il est de notre devoir de nous immiscer dans ce domaine, ce qui a déjà été fait chez nous par les recherches nombreuses qui ont été poursuivies. Nous espérons pouvoir y greffer des programmes d'études avancées. On ne peut pas laisser des chercheurs, si brillants et si féconds soient-ils, sans qu'ils aient un enseignement pour se créer des disciples qui pourront continuer par la suite les actions qu'ils ont entreprises à un moment ou à un autre de l'existence de notre région.

Vous avez donc ces deux aspects fondamentaux. Nous avons aussi pensé qu'il était extrêmement important que nous développions une expertise nouvelle dans le domaine de la transformation de l'aluminium. Je pense bien qu'on peut, pour le moment, dire que la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean est la capitale de la production de l'aluminium et nous trouvons qu'il serait tout à fait normal que nous puissions créer éventuellement un centre de recherche extrêmement profitable pour tout le Québec qui nous permettrait de trouver de nouvelles façons d'utiliser ce produit que, actuellement, nous expédions surtout à l'étranger. Cela créerait d'ailleurs des sources d'emploi extrêmement importantes.

Il y a un autre point qui nous intéresse énormément, dans le domaine de la productivité végétale, cette fois - je veux vous le rappeler brièvement - c'est celui qu'on appelle les huiles essentielles. Je ne voudrais pas créer de problèmes, mais notre expert dans le domaine et ses collègues avaient l'habitude de parler de terpène. Cela m'a pris deux ans à savoir que c'était la sève des arbres qui pouvait servir à la fabrication de médicaments, de colorants, des cosmétiques ou à toutes sortes d'autres utilités.

Depuis ce temps, j'ai su que le Canada a déjà été le grand exportateur d'huiles essentielles dans le monde et que, maintenant, il a été remplacé par un autre pays. Nous sommes en train de faire des recherches très approfondies à Chicoutimi pour déterminer quel genre d'entreprise nous pourrions lancer, en vertu des recherches qui se font, afin de déterminer la qualité des huiles essentielles que nous sommes capables de tirer à partir non seulement des bois que nous connaissons, le bouleau, l'épinette noire, l'épinette rouge ou n'importe quelle autre essence végétale, mais également - c'est assez étonnant et, au début, je croyais même que c'était une boutade - les foins fous qui poussent le long de notre Saguenay. (10 h 45)

À ce moment, on a réussi à tirer des huiles essentielles de ces herbages, ce foin fou qu'on appelait dans ma jeunesse, et on s'aperçoit maintenant qu'on peut en tirer des huiles essentielles extrêmement importantes qui ne coûteraient rien, dans le fond, en termes de matière première. On n'a pas besoin de le remplacer parce que ça pousse toujours tout seul, c'est comme du chiendent, et on pourrait créer des entreprises extrêmement importantes là-dedans. C'est un domaine, je crois, où il faut absolument nous développer.

Il y a un autre domaine où nous devons... Je pense que c'est notre devoir de le faire puisque nous avons une maîtrise en petites et moyennes organisations à Chicoutimi qui est très originale. Vous savez que j'ai été longtemps doyen ou vice-doyen de facultés d'administration et, par conséquent, quand je suis arrivé à Chicoutimi, j'ai trouvé que c'était un programme fort original par rapport à ceux que j'avais connus et que j'avais moi-même contribué à lancer. Ce programme mériterait, à mon point de vue, d'être beaucoup mieux connu à l'extérieur de notre région et nous avons donc un programme pour le faire connaître à l'extérieur de la région, mais aussi dans les pays en voie de développement. Nous trouvons là une façon de nous développer qui permettrait d'aider les pays en voie de développement et, en même temps, de faire connaître notre université d'une façon internationale.

Voilà les grandes lignes. Je pense que M. le vice-recteur Nagy pourrait poursuivre là-dessus, ce serait intéressant. Ce sont à peu près les grandes lignes de notre

développement futur. Je vous prierais, M. le ministre, de croire que nous n'avons pas du tout l'intention, premièrement, de nous lancer en médecine et, deuxièmement, même pas en droit. Nous avons donc éliminé cela de notre champ d'action, mais nous voulons créer des programmes qui correspondent à la fois à une réalité régionale, mais aussi qu'il y ait une incidence un peu plus provinciale ou québécoise.

M. Ryan: J'ai vu que, pour le développement des programmes de 2e cycle, vous mettez beaucoup l'accent sur la collaboration avec d'autres universités. Pourriez-vous nous donner des précisions là-dessus?

M. Riverin: Oui. Je suis très heureux, M. le ministre, que vous ayez posé cette question, parce que je trouve que c'est une action que nous avons entreprise qui est extrêmement intéressante. Prenons d'abord les ententes que nous avons avec diverses universités. Il y a la maîtrise et le doctorat en sciences religieuses avec l'Université de Montréal. L'Université de Montréal a reconnu les cours que nous donnions chez nous, a accrédité les cours que nous donnions chez nous en même temps que les professeurs. Nous avons une maîtrise en linguistique avec l'Université Laval. Là encore, le même phénomène s'est reproduit; ce n'est pas une complémentarité, c'est une accréditation de la part de l'Université Laval en regard de nos programmes et du corps professoral qui est appelé à les dispenser. Nous avons également le doctorat en ressources minérales avec l'UQAM, bien sûr. Nous avons aussi un doctorat en sciences de la gestion avec l'Université d'Aix-Marseille. Aix-Marseille a accepté certains des cours que nous donnons chez nous et accrédité nos professeurs. Maintenant, nos candidats peuvent aller passer un semestre à l'Université d'Aix-Marseille et revenir chez nous pour poursuivre leurs études de doctorat et terminer leur thèse. Nous avons aussi une maîtrise en gestion des PMO - je vous le mentionnais tout à l'heure - que nous avons étendue à l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue et il est question maintenant que nous l'étendions à l'Université du Québec à Rimouski. Nous avons enfin une maîtrise en études littéraires qui se donne de concert avec l'UQTR et l'UQAR. Je voudrais aussi mentionner, M, le ministre - de cela, nous étions très fiers - le centre interuniversitaire en génétique des populations qu'on appelle SOREP et qui a été créé en collaboration avec l'Université McGill, l'Université Laval et l'Université du Québec à Chicoutimi. Celle-ci, par l'entremise du professeur Gérard Bouchard, avait établi un grand nombre de données sur le problème des maladies héréditaires qui se retrouvent dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean mais que l'on retrouve également dans l'ensemble du Québec, ce qui a fort intéressé les chercheurs de McGill et les chercheurs de Laval. Nous sommes très fiers, M. le ministre, d'avoir trouvé chez nous cette compétence qui permet à de grandes universités de s'allier à nous pour créer un centre interuniversitaire qui a d'ailleurs été reconnu par le ministère de l'Enseignement supérieur lorsqu'on leur a accordé des actions structurantes. Ce que nous cherchons véritablement, c'est une concertation non seulement avec les constituantes du réseau de l'Université du Québec, mais également avec l'ensemble des universités québécoises qui peuvent nous aider à développer les programmes que nous avons déjà ou que nous aimerions avoir.

M. Ryan: Pouvez-nous nous dire comment vous envisagez les rapports avec les cégeps dans la région? Il y a quatre cégeps dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. J'aimerais que vous me disiez comment vous voyez la collaboration entre ces deux ordres d'enseignement.

M. Riverin: II y a trois ans, lorsque je suis arrivé à Chicoutimi, c'est l'une des premières questions que je me suis posées et nous avons commencé à ce moment-là. J'imagine qu'il y avait probablement déjà eu des tentatives avant mon arrivée, je n'ai rien inventé, mais j'avais au moins invité les quatre directeurs de nos quatre cégeps régionaux à une rencontre préliminaire à l'Université du Québec à Chicoutimi et nous avions convenu qu'il était extrêmement important que les institutions d'enseignement supérieur de la région travaillent en très étroite collaboration.

Je pourrais vous mentionner deux points où nous avons réussi cette collaboration, pas au degré où nous aimerions qu'elle soit, mais, tout de même, je pense que des efforts considérables ont été faits. D'abord, en productivité végétale, le cégep de Saint-Félicien et celui de Chicoutimi ont une option d'exploitation forestière dans leurs cours professionnels. Le cégep de Jonquière, dans le secteur professionnel, a une option d'aménagement du territoire et le cégep d'Alma s'occupe surtout de l'agro-alimentaire. Nous avions pensé que les quatre cégeps et l'université pourraient s'allier pour créer un centre de productivité végétale dans la région qui regroupe l'ensemble des phénomènes reliés au domaine végétal.

Là-dessus, je peux vous dire, M. le ministre, que nous avons eu un accord de principe avec les quatre cégeps. Ce qui nous a manqué jusqu'à ce moment-ci pour pouvoir mener cela plus loin, c'est, bien sûr, l'argent. Je ne demande pas qu'on soit

financé là-dessus. Je pense qu'il faudra finir par démontrer que notre équipe est assez solide et assez multidisciplinaire pour pouvoir aller chercher des sommes, par exemple, au FCAR. On n'appelle plus cela comme cela maintenant, je ne m'en souviens plus. C'est peut-être comme cela qu'on l'appelle.

Il y a aussi un autre exemple fort important à notre point de vue, M. le ministre. Il s'agit de notre entente avec le cégep de Jonquière en ce qui concerne la conception assistée par ordinateur et la fabrication assistée par ordinateur. Nous avions signé cette entente l'année dernière, ce qui nous a permis de partir du côté de ce qu'on appelle la CAO, la conception assistée par ordinateur. Le cégep de Jonquière a la FAQ, la fabrication assistée par ordinateur. C'est toujours axé vers les besoins de l'entreprise régionale. Nous espérons bien... Remarquez qu'il n'y a pas encore de résultats tangibles, cela ne fait quand même qu'un an que ce centre fonctionne. Je pense que nous pourrons très bientôt pouvoir donner à l'ensemble des entreprises régionales des services qui pourraient être fort importants.

Et, bien sûr, CEQUIP. Nous avons eu, d'ailleurs, une subvention extrêmement importante de la part de l'OPDQ il y a à peu près deux mois, pour nous permettre d'acheter un ordinateur qui correspondait aux besoins que nous avions dans le domaine de la conception assistée par ordinateur. Nous avons également une subvention prévue de la part de CEQUIP qui est l'organisme québécois pour l'établissement de ces centres de conception et de fabrication assistées par ordinateur. La subvention de CEQUIP nous a aussi associés avec le cégep de Sherbrooke dans le domaine de la fabrication assistée par ordinateur.

Nous avons un autre projet qui, à mon point de vue, est extrêmement valable parce que vous savez sans doute que le cégep de Jonquière est un des cégeps, sinon le cégep au Québec, qui a la meilleure option en - ce n'est pas en journalisme - arts techniques des médias. Nous avions pensé qu'il y aurait avantage, à l'Université du Québec à Chicoutimi, de créer un baccalauréat en communication qui partirait des assises que l'on retrouve à Jonquière, qui sont des assises techniques reconnues partout au Québec, et que nous pourrions construire là-dessus un baccalauréat en communication qui serait fort original et tout à fait différent de ce qu'on retrouve ailleurs dans les autres universités.

Voilà en gros, M. le Président, les relations que nous avons avec les cégeps. Je ne dis pas que ce sont des relations faciles parce qu'on a toujours accusé les universités d'être dans leur tour d'ivoire. Je ne suis pas très sûr que les universités n'ont pas, à un certain moment, snobé les cégeps, mais je pense que maintenant la plupart des universités se rendent compte que les cégeps font partie comme nous de l'enseignement supérieur.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre. Terminé? Je reconnais maintenant le porte-parole officiel de l'Opposition en matière d'enseignement supérieur et de science, votre députée, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci. Vous comprendrez, mesdames, messieurs, que je suis particulièrement heureuse aujourd'hui de vous recevoir, M. le recteur et vos collaborateurs. Je me permettrai de souligner la présence des députés de notre région. J'avais déploré, au moment où une université régionale s'était présentée ici, l'absence de députés du gouvernement. Je dois dire que ce n'est pas le reproche que je pourrais faire à mes collègues. Ils ont vraiment fait des efforts pour venir vous rencontrer ici et témoigner de l'appui indéfectible, je dirais, de la députation régionale à l'endroit de l'Université du Québec à Chicoutimi.

Je voudrais saluer les personnes qui vous accompagnent. Je ne les nommerai pas toutes. MM. les maires, madame, MM. les présidents d'organisme et d'association, votre présence dans la salle ici témoigne, s'il fallait encore le faire, de la solidarité et du dynamisme de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. C'est un plaisir pour moi de vous accueillir ici en tant que porte-parole de l'Opposition en matière d'enseignement supérieur.

Écoutez, je vous vois ici et je me suis dit... Pas tout de suite, dans trois ans.

Le Président (M. Parent, Sauvé): S'il vous plaît, évitez les interventions hypothétiques!

Mme Blackburn: Je me suis dit que cette commission avait manqué une occasion d'aller visiter une des plus belles régions du Québec en refusant de se déplacer pour aller entendre les mémoires et les organismes dans les différentes régions. Vous savez, on le sait, Chicoutimi, c'est toujours plus loin de Québec que Québec de Chicoutimi. Alors, faute d'être allé chez vous et d'être allé dans les autres régions également, vous leur montrez qu'on est aussi capable de se déplacer quand la nécessité se fait sentir.

Je suis heureuse de la mise au point qui vient d'être faite par le ministre, à savoir qu'il n'a pas l'intention d'abonder dans le sens des différents mémoires et des différents organismes de réduire ou de ratatiner la mission des universités en régions. Le ministre parle d'une légende qui voudrait que ce gouvernement ait l'intention de réduire la mission des universités en régions à l'enseignement du premier cycle.

Je voudrais lui dire que la légende a été plutôt entretenue par des actes et des gestes assez concrets au cours des derniers mois. Je pense en particulier aux rapports et aux avis du Conseil des universités. Le Conseil des universités jouit d'une grande estime de la part du ministre. On peut penser que, si l'avis du Conseil des universités était suivi, la mission des universités en régions se trouverait considérablement réduite.

Par ailleurs, on ne peut pas non plus oublier que certains ténors de ce gouvernement ont à l'endroit des régions posé des gestes concrets qui ont eu comme effet de réduire le dynamisme et la capacité d'intervention des régions. Je pense en particulier à la recommandation qui touche le siège social de l'UQ. Je pense aux CRCD, recommandation qu'on retrouve dans le rapport Gobeil, de même qu'au sort qui a été réservé à Radio-Québec. Je pense également qu'un des premiers gestes du Conseil des ministres a été d'abroger une décision qui avait été prise d'accorder aux universités en régions 3 600 000 $ d'argent neuf pour contribuer au développement de la mission régionale. Je n'appellerais pas cela une légende fabriquée de toutes pièces, si légende il y a. Elle repose sur des faits concrets qui nous laissaient voir que la mission des universités en régions était menacée.

Le ministre nous dit qu'il examinera tout nouveau projet de développement en partant de deux critères: la valeur du projet en soi et son opportunité. Qu'il applique aux régions et aux universités régionales les mêmes exigences et avec la même rigueur qu'il le fait à l'endroit des autres universités, je suis d'avance convaincue que les universités en régions et l'UQAC en particulier sauront tirer avantageusement leur épingle du jeu. Les programmes d'enseignement et de recherche de l'Université du Québec sont fortement axés sur les particularités de la région. Je ne reviendrai pas sur l'exposé que vient de nous faire à ce sujet le recteur de l'Université du Québec à Chicoutimi. (11 heures)

Par ailleurs, parce qu'il court également d'autres légendes et parce qu'aussi il y a des informations qu'on n'a pas toujours de façon très certaine, j'aimerais poser un certain nombre de questions à M. le recteur. Je ne les présenterai pas nécessairement dans ce que je qualifierais d'un ordre d'importance, mais cela nous permettra certainement d'apporter un peu plus d'éclairage sur le coût de certaines interventions, de même que sur l'avenir de certains programmes. Lorsque vous parlez de financement, vous indiquez un certain nombre de paramètres dont on devrait tenir compte dans l'allocation des ressources: l'enseignement aux 1er, 2e et 3e cycles, la recherche, la taille, l'éloignement et la mission régionale. Je me demandais si vous aviez évalué ce que pourrait représenter en pourcentage ce volet ou ce paramètre de mission régionale dans l'enveloppe de l'Université du Québec à Chicoutimi.

M. Riverin: Mme la députée de Chicoutimi, c'est extrêmement difficile d'établir un chiffre, mais nous pensons que cela représente à peu près 4 % de notre budget de fonctionnement. Alors, si notre budget de fonctionnement est de l'ordre de 30 000 000 $, on peut dire que c'est à peu près 1 000 000 $ par année que nous sommes obligés d'accorder à la région. Je voudrais en profiter ici pour dire, madame, que dans une région comme la nôtre - cela me fait plaisir que cette question soit posée, il y a trois ans je n'aurais pas eu la même réaction. J'étais moi-même dans les grands centres et, même lorsque j'ai été président de l'Université du Québec, le problème des régions était pour moi un problème abstrait. Mais lorsque vous êtes dans une région, cela ne devient plus un problème abstrait, c'est un problème concret. Ce que j'ai remarqué dans la région, chez nous, et j'imagine que c'est la même chose pour les autres constituantes de l'Université du Québec, c'est que l'université est considérée comme une espèce d'agent neutre où les divergences d'opinions, ou de vues, ou de visées entre les différentes municipalités peuvent trouver un certain terrain d'entente, ou au moins on croit que l'université peut avoir un souci d'objectivité plus grand que l'on pourrait voir entre les individus qui sont de municipalités différentes. C'est un premier problème. C'est donc une constatation que j'ai faite, savoir que l'ensemble de la région considère l'université comme un agent neutre. Cela est extrêmement important qu'il y ait quelque part un endroit où les gens se sentent en confiance.

La deuxième, est-ce un défaut de nos institutions? qu'elles soient politiques, qu'elles soient administratives ou autres, nous sommes constamment appelés à faire face à des problèmes qui, normalement, ne devraient pas relever de nous, mais que nous sommes obligés d'étudier parce qu'ils nous sont présentés instamment. Je vais vous donner des exemples très rapides. Par exemple, un maire de village va m'appeler pour me dire: Chez nous, il y a un chômage chez les jeunes extrêmement considérable. Nous sommes dans un endroit forestier, les gens travaillent trois ou quatre mois en forêt et, ensuite, ils sont bénéficiaires de l'assurance-chômage. Ils commencent à fabriquer des meubles, de l'artisanat, bien sûr, mais on ne peut pas trouver de débouché. Est-ce que vous ne pourriez pas nous aider à créer une coopérative pour que nous puissions éventuellement écouler ces produits que nos

jeunes peuvent et savent faire au cours de leurs moments libres? On peut difficilement dire non à une telle demande. Vous avez un autre - je ne mentionnerai pas les noms des villages, bien sûr - qui appelle un de mes collègues, qui appelle à l'Université du Québec à Chicoutimi, pour dire: Nos jeunes ne travaillent pas, il y a un problème de drogue extrêmement pénible chez nous. Est-ce qu'on ne doit pas, à ce moment, nous, par notre service à la communauté et par notre service d'animation sociale, venir à la rescousse de ces personnes qui ont besoin d'une aide quelconque? Malgré qu'on leur dise qu'il existe d'autres instruments à leur disposition, toujours par le fait qu'ils considèrent l'université comme un agent neutre, ces gens croient que nous sommes mieux en mesure de les aider. Vous avez des diminutions d'emploi considérables dans la région par la grande entreprise - la grande entreprise l'a admis au sommet du mois de mai 1984 - il y a un comité de survie de l'emploi qui est créé où l'on regroupe les maires des municipalités, les représentants politiques de la région, et on dit: II faut que ce soit le recteur de l'université qui préside ce comité. Pourquoi? Encore une fois, parce qu'on estime que l'université est toujours l'agent neutre. C'est du temps que nous devons consacrer à cette mission qui est fort importante.

Je parle du recteur, mais il faudrait parler de l'ensemble de la communauté universitaire, aussi bien les professeurs que les professionnels et que les autres personnes qui travaillent à tous ces projets dont j'ai parlé.

Mme Blackburn: Bien. Vous avez parlé de la collaboration étroite avec Alcan; vous avez parlé également de la maîtrise en moyenne et petite organisation comme étant un programme qui serait très exportable. Pourriez-vous nous parler un peu de la collaboration de l'université avec les petites et moyennes entreprises, les PME, au-delà de la maîtrise?

M. Riverin: Oui. On ne peut pas dire que c'est extrêmement développé, mais ce sont des choses qui prennent un peu de temps à se réaliser dans le concret. Il reste cependant que nous avons, par exemple, dans notre département de génie, un atelier mécanique; et vous avez maintenant ce que nous appelons dans la région, et je pense que c'est probablement le meilleur terme que nous puissions y consacrer, nous avons des patenteux, beaucoup de patenteux et des gens qui ont besoin d'un support technique. Ces gens se présentent chez nous, à notre département de génie unifié, à notre atelier mécanique, et peuvent utiliser, grâce à l'aide de nos techniciens et de nos professeurs, les instruments qui sont à leur disposition pour pouvoir parfaire l'instrument qu'ils ont inventé.

Nous avons également - vous êtes au courant sans aucun doute parce que cela a fait la manchette des journaux relativement récemment - la création de SOCCRENT, la Société en commandite pour la création d'entreprises. Là encore, je pense que la collaboration de l'université et de la petite et moyenne entreprise va s'avérer... Et non seulement de l'université, mais de l'ensemble des institutions d'enseignement supérieur de la région, parce que tous les secteurs professionnels des cégeps vont être appelés à collaborer à la mise sur pied de ces entreprises. C'est une initiative qui est partie de l'université, mais qui n'appartient pas à l'université, qui appartient à la région. Il reste que nous sommes extrêmement intéressés à ce que cette initiative se poursuive. II y aura d'ailleurs une conférence de presse vendredi matin prochain pour annoncer la première entreprise créée grâce à SOCCRENT.

Vous avez également un grand nombre de cours qui sont donnés à l'intention de la petite et de la moyenne entreprise. Vous avez aussi le fait - je voudrais le mentionner parce que c'est fort important - qu'à notre cours de génie les étudiants en génie doivent faire trois projets au cours de leurs trois années et demie d'études, mais des projets qui sont des solutions à apporter à des problèmes techniques qu'a l'entreprise, la petite ou la grande entreprise. Ces projets -nous l'avons remarqué d'ailleurs - la plupart du temps auraient mérité un brevet, de sorte qu'on pourrait en créer des entreprises. C'est ce qui nous a amenés à créer ce que nous avons appelé le BITA, Bureau d'innovation de technologie appliquée, non seulement en technologie, mais en administration également.

Toutes ces choses-là constituent, croyons-nous, une relation qui est très étroite avec la petite et la moyenne entreprise dans la région. Et, bien sûr, nous avons les relations établies avec Alcan et avec d'autres grandes entreprises qui nous ont beaucoup aidés. Qu'on prenne simplement notre expertise que nous avons développée dans l'utilisation de l'énergie gratuite, si l'on veut, avec nos serres, en utilisant l'eau usée de Union Carbide que nos experts transportent dans les serres; ils réchauffent ensuite les serres avec l'eau usée et, finalement, renvoient l'eau à Union Carbide une fois qu'elle est refroidie. À ce moment-là, nous avons économisé toute l'électricité qui aurait été nécessaire autrement pour faire ces cultures en serre.

Voilà, madame, ce que je voulais vous dire en ce qui concerne les petites et moyennes entreprises.

Mme Blackburn: M. le recteur, on a

fait souvent allusion ici au coût élevé de la formation, particulièrement dans les sous-centres, de certaines clientèles adultes. Par ailleurs, paradoxalement, on semble extrêmement actif à développer ce genre d'activités dans certaines universités. Pour moi, ça pose une contradiction, Semble-t-il que ce ne seraient pas des activités très payantes, mais il y a une volonté de développer ce secteur et certaines universités parlent même de maraudage. Je voudrais que vous fassiez un peu le point par rapport à ces pratiques et ce que cela représente pour l'Université du Québec à Chicoutimi.

M. Riverin: Dans les centres hors campus, je pense qu'il faut distinguer deux secteurs dans notre région. Dans le Saguenay~Lac-Saint-Jean, je ne crois pas que les centres que nous avons à Aima et à Saint-Félicien puissent être comparés aux centres que nous pouvons avoir, par exemple, à La Malbaie ou sur la Côte-Nord. Ce sont des centres qui coûtent beaucoup plus cher qu'ils ne nous rapportent. Autrement dit, non seulement ils ne s'autofinancent pas, mais ils nous coûtent de l'argent chaque année.

Les chiffres exacts? Je sais, par exemple, que l'année dernière, notre intervention sur la Côte-Nord à Sept-Îles nous a obligés à débourser environ 50 000 $ de plus que les subventions que nous recevions et les frais de scolarité qui nous étaient impartis par les étudiants. Alors, il est évident que, dans ces conditions, nous ne pouvons pas continuer à développer ces centres.

J'étais très heureux hier d'assister à la présentation du mémoire du Regroupement régional pour le développement des services universitaires sur la Côte-Nord, parce que j'estime en effet qu'ils ont besoin eux aussi d'enseignement universitaire comme n'importe quelle autre région de la province. Mais il se pose un problème particulier, c'est que nous, en deçà de 25 étudiants, nous sommes absolument incapables de donner un cours. Or, quand vous avez une population comme à Sept-Îles qui a connu une diminution considérable au cours des dernières années, nous ne pouvons plus trouver le nombre suffisant d'étudiants, souvent, pour pouvoir continuer à donner des cours. C'est un problème extrêmement sérieux sur lequel, d'ailleurs, avec l'Université du Québec à Rimouski et avec le regroupement des intervenants de la Côte-Nord, nous nous penchons pour essayer de trouver une solution. Je pense que nous avons une autre constituante ou un autre organisme à l'Université du Québec qui pourrait être fort utile là-dessus. C'est la Télé-université. Il faudra donc que les trois institutions - si le gouvernement le juge à propos - se regroupent pour réussir à donner à la Côte-Nord les services universitaires dont cette partie de notre province aurait besoin.

En ce qui concerne les centres hors campus, avec le système dp transport que nous avons de Chicoutimi à Sept-Îles, par exemple... Quand on peut y aller en voiture, ce n'est pas trop mal. Il faut du courage, mais on peut y aller. Mais, en avion, c'est trois jours. C'est assez étonnant de le dire. Il faut se rendre à Montréal, coucher à Montréal, prendre un avion le matin, coucher à Sept-îles et revenir, finalement, par Montréal toujours. Alors, c'est extrêmement onéreux en termes de temps, mais également onéreux en termes d'argent. C'est un problème que nous ne pouvons pas nous-mêmes surmonter. Il faudrait que quelqu'un d'autre y voie. Est-ce que ça répond à votre question, madame?

Mme Blackburn: En partie seulement.

M. Riverin: Excusez-moi, vous parliez de maraudage.

Mme Blackburn: Oui.

M. Riverin: C'est une question qui m'intéresse beaucoup. J'ai même vu dans quelques mémoires qu'on parlait de concurrence sauvage.

Mme Blackburn: Oui, voilà.

M. Riverin: Cela m'a fait sourire, parce que les universités qui nous accusent de concurrence sauvage à l'Université du Québec - peut-être moins à l'Université du Québec à Chicoutimi, mais l'ensemble du réseau de l'Université du Québec - sont celles qui assez curieusement se retrouvent particulièrement dans nos régions. Je pourrais les nommer et je ne les nommerai pas. Il y a au moins trois grandes universités qui enseignent très régulièrement au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Il y a des certificats d'émis - certains pouvant même mener au bac -par des universités à la fois de la grande région de Montréal et d'autres régions du Québec. Alors, le maraudage, je pense que c'est une question que nous poumons étudier à fond. Je ne pense pas que ce soit l'Université du Québec qui soit la plus coupable là-dessus, surtout pas Chicoutimi. (11 h 15)

Mme Blackburn: M. le recteur, vous connaissez sans doute une des recommandations du rapport Gobeil qui concerne l'avenir du siège social de l'Université du Québec. J'aimerais que vous nous fassiez part de vos réflexions par rapport à cette hypothèse d'abolir le siège social de l'UQ. On pense que cela ferait autant d'universités qu'il y a actuellement de constituantes.

M. Riverin: Je suis heureux que vous

posiez la question parce que je crois que la recommandation du rapport dont vous parlez n'a pas été très bien saisie, soit par les auteurs du rapport soit par ceux qui l'ont lue, je ne sais pas. Lorsque vous parlez d'éliminer le siège social, cela veut dire que vous éliminez, à toutes fins utiles, l'Université du Québec. Car la loi constitutive de l'Université du Québec c'est justement d'abord un siège social et ensuite des constituantes qui viennent s'y greffer pour créer une assemblée des gouverneurs.

Vous savez fort bien, comme tout le monde d'ailleurs, que l'Université du Québec, par son assemblée des gouverneurs, est un élément extrêmement important de concertation dans le réseau. Je vous parlais tantôt des programmes que nous avons en commun et des centres de recherche que nous avons développés en commun parmi les constituantes de l'Université du Québec. S'il n'y avait pas eu cette assemblée des gouverneurs, il est bien évident que ces centres n'auraient pas vu le jour, de même que ces programmes n'auraient pas été dispensés.

Quand on dit éliminer le siège social, à mon point de vue c'est antinomique. À ce moment, cela veut dire qu'on élimine également l'Université du Québec. Je vous l'avoue, comme président-fondateur de l'Université du Québec, je serais sans doute celui qui crierait le plus fort, parce que je me suis donné assez de mal pour la mettre au monde et j'estime qu'elle a assez rendu service au Québec pour qu'on ne puisse aujourd'hui la remettre en cause d'aucune façon.

Mme Blackburn: On pourrait toujours envisager la possibilité suivante: on abolit le siège social, mais on crée des universités autonomes. Que représente pour vous le siège social de l'UQ?

M. Riverin: Le siège social représente deux choses. D'abord une concertation dans le domaine scientifique, et c'est extrêmement important. Vous avez remarqué que l'ensemble des constituantes ne donnent pas tous les programmes qui se donnent dans l'université. Nous avons fait un choix et chacune des constituantes a accepté de donner un certain nombre de programmes et de ne pas en donner d'autres qui étaient donnés dans des constituantes plus ou moins lointaines. Du point de vue de la concertation scientifique dans le domaine de l'enseignement, cela est extrêmement important.

Dans le domaine de la recherche, on parle souvent, par exemple, de masse critique. Lorsque nous n'avions pas la masse critique, nous avons créé des centres que nous avons appelés multirégionaux, par exemple, en foresterie, en éducation, assistés par ordinateur. Je n'ai pas à l'esprit d'autres centres. À ce moment, si nous n'avions pas la masse critique, nous jugions utile de réunir des constituantes ensemble pour que celles-ci puissent travailler à l'élaboration de recherches qui soient suffisamment étoffées pour garantir le caractère scientifique de telles recherches.

D'ailleurs, là-dessus, madame, je pense qu'on a beaucoup parlé de masse critique. Je ne suis pas très sûr qu'on ne doive pas aussi parler de critique de la masse. Parce que personne n'a jamais défini ce qu'était une masse critique. On pourrait citer des noms, et je vais les citer en dehors de l'Université du Québec à Chicoutimî, mais j'en citerai un à l'Université du Québec a Chicoutimi: Gérard Bouchard était seul au départ, avec une équipe d'assistants. Pourtant, c'est un type qui est mondialement reconnu comme un spécialiste de la démographie des populations, de la génétique des populations et de l'hérédité des populations. Je ne pense pas que ce soit là une masse critique, c'est la valeur de la personne avec le groupe avec lequel il était.

Vous avez des types comme Fernand Dumont qui n'ont jamais été avec une masse critique. Fernand a toujours, je m'excuse de dire Fernand parce que c'est un de mes collègues, M. Dumont a toujours travaillé avec un ou deux assistants ou deux étudiants qui étaient avec lui. C'est l'un de ceux qui ont le plus produit. On peut aujourd'hui penser qu'il ne produit plus, et c'est fort possible, quoiqu'il me disait dernièrement qu'il est en train de produire un livre sur la théologie. On ne pourra pas dire que, malgré qu'il n'ait pas eu la masse critique, il n'a pas touché à peu près à tout dans le domaine de l'économique, des sciences sociales, de la sociologie et même de la théologie.

Ce que j'ai remarqué - parce que vous savez que cela ne fait pas très longtemps que je suis dans ce qu'on pourrait appeler une petite université - j'ai été dans de grandes universités pendant quinze ans, donc presque aussi longtemps qu'à l'Université du Québec, et c'est pour cela que je dis: II faudrait peut-être penser à faire une critique de la masse. Parce qu'une masse trop forte a tendance à l'inertie aussi. Je pense que c'est cela que nous avons retrouvé assez souvent, que moi j'ai pu reprocher aux universités dans lesquelles j'ai oeuvré avant, avec autant d'entousiasme qu'à l'Université du Québec, mais on se bloquait toujours à une inertie qui nous empêchait d'avancer.

Je vais vous donner un exemple assez typique: en 1962, lorsque j'ai présidé un groupe de travail à l'Université Laval pour créer une maîtrise en administration des affaires, je me suis bloqué à l'inertie de l'université. À ce moment-là, il y avait une petite université au Québec, qui s'appelait l'Université de Sherbrooke, où le recteur

m'avait dit: Venez donc faire à Sherbrooke ce que vous ne pouvez faire à Laval. Effectivement, en un an, la maîtrise en administration des affaires avait été créée à Sherbrooke parce que, à ce moment-là, l'inertie n'était pas existante.

Lorsqu'on parle de masse critique, j'ai été fort étonné de voir dans le rapport du Conseil des universités qu'il y avait de grandes universités de recherche au Québec, des universités qui étaient grandes, mais surtout en termes d'accessibilité, et les autres; j'avais bien aimé "les autres". À ce moment-là, je pense qu'il faut faire attention à ce phénomène de classer les grandes universités. Il ne faut pas oublier que l'Université de Sherbrooke a 30 ans. Qu'on donne 30 ans à l'Université du Québec à Chicoutimi et elle sera aussi une grande université de recherche.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Riverin. Je reconnais maintenant le député de Dubuc.

M. Desbiens: Merci, M. le Président. Est-ce que j'ai...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Vous avez quelques minutes, allez-y.

M. Desbiens: Merci, M. le Président. Trois minutes et deux secondes?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Non, non.

M. Desbiens: Cela va? Je vous remercie beaucoup. Je voudrais saluer M. Riverin, M. Gendron, M. Nagy et Mme Gauthier. Je voudrais faire deux remarques et soulever une question qui m'apparaît importante. Je lis la transcription de cette commission parlementaire ainsi que celle d'une autre commission qui se déroule présentement dans nos murs et qui touche un secteur important de l'activité de la vie du Québec, soit les forêts. Je dois d'abord déplorer, le législateur ayant toujours comme objectif d'adopter les lois les plus parfaites possible, le fait que nous ne prenions pas suffisamment de temps. Je constate avec bonheur que c'est peut-être un peu moins le cas dans cette commission. Il reste que le temps, c'est ce qui permet de bien réfléchir et ce qui permet d'entendre aussi des représentations et l'opinion de la population pour laquelle ces lois sont adoptées. Je fais cette remarque parce que j'ai déjà eu l'occasion d'entendre une conférence de M. le recteur et je sais qu'il est sensible aux institutions politiques et à leur fonctionnement.

Ma deuxième remarque serait, comme l'a très bien souligné ma collègue de Chicoutimi tantôt - je crois qu'il est important d'y revenir - pour me réjouir d'avoir entendu le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science affirmer au début de ses remarques qu'il n'avait pas du tout l'intention de réduire le nombre d'organismes en régions, particulièrement l'université régionale du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Cependant, comme l'a souligné ma collègue, il a été en mesure de constater que les inquiétudes manifestées dans notre milieu avaient des bases réelles.

Je suis heureux également de l'avoir entendu parler des modes passagères que peuvent constituer certains évangélistes nouveaux ou autres qui se retrouvent à différentes époques de la vie de la société. J'ai cru comprendre par ses paroles que cette nouvelle mode du gouvernement comptable n'était aussi que passagère; j'espère que ce sera le cas.

Ma question porte sur la forêt. Vous avez soulevé ce point il y a quelques instants et je sais qu'il y a déjà de la recherche qui se fait à l'Université du Québec à Chicoutimi. J'aimerais toutefois, eu égard au nouveau régime forestier qu'on est en train d'étudier et de tenter de mettre en pratique au Québec pour un aménagement global de la forêt québécoise tenant compte de sa polyvalence, savoir quels sont les travaux de façon plus précise qui se font maintenant en recherche à l'Université du Québec à Chicoutimi et quelles seraient les possibilités pour l'université de pousser davantage, toujours en regard de la forêt, et dans quel secteur particulier.

M. Riverin: M. le Président, je vais répondre très brièvement et je laisserai mon collègue, M. Nagy, vous parler plus amplement des recherches. Je pense qu'il y a une chose qui est essentielle d'abord. Vous savez que nous avons un groupe de productivité végétale qui est très actif, multidisciplinaire, qui regroupe des géographes, des physiciens, des chimistes, des biologistes et probablement d'autres personnes - je ne sais pas -qui travaillent très fort dans le domaine de la production bleuetière, dans le domaine de la télédétection, dans le domaine de la régénération forestière de l'épinette noire, qui est notre plus belle source d'essences au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Mais ce qui sera fort important pour nous, en vertu des nouvelles politiques aussi bien du gouvernement québécois que du gouvernement canadien, c'est que nous ayons une entente très sérieuse avec une grande entreprise papetière ou d'exploitation forestière qui nous permette d'aller chercher des montants, parce que, désormais, vous savez que les subventions sont davantage données lorsqu'il y a une collaboration très étroite établie entre une entreprise et une université. Aussi longtemps que nous n'aurons pas réussi cela, je ne pense pas que nous ayons accès à des

sources de financement qui seraient extrêmement importantes pour le développement de notre groupe de productivité végétale. Je demanderais maintenant à mon collègue Nagy d'expliquer où nous sommes rendus.

M. Nagy (Adam): M. le député de Dubuc, comme l'a souligné M. Riverin à l'instant, l'approche que nous préconisons au niveau des travaux est essentiellement multidisciplinaire. En effet, on s'est aperçu que des problématiques comme la forêt, que ce soit dans notre région ou à l'échelle du Canada, demandent et nécessitent des travaux multidisciplinaires débordant nettement le cadre simple de ce qu'on peut appeler la foresterie dans un contexte plus classique. Il se trouve qu'à l'Université du Québec à Chicoutimi, depuis de nombreuses années, des chercheurs, qui étaient d'horizons assez différents - on a cité les géographes qui s'occupaient d'aménagement du territoire et de télédétection, les biologistes qui s'occupaient de façon plus ponctuelle soit de croissance et de productivité végétale sauvage, soit de production en culture abritée, les physiciens qui s'occupaient des problèmes climatiques, microclimatiques et de transfert de chaleur - se trouvaient de par les circonstances qu'impose notre région dans une situation où il était relativement facile de les réunir sous forme de groupe de recherche. Il faut aussi souligner que, lors de la création très formelle de ce groupe reconnu par l'institution, le milieu nous a beaucoup aidés, d'abord, au niveau d'une table de concertation, d'un comité-conseil pour ce groupe de recherche qui inclut tous ceux qui travaillent et vivent de la forêt; également, avec des gestes très concrets - je souligne ici les montants qu'on a reçus - il a eu la capacité de produire des projets qui pouvaient être ensuite subventionnés par des organismes plus traditionnellement reconnus. Donc, à l'aval, c'est quelque chose où l'université en mettant son potentiel de recherche ensemble et appuyée par le milieu direct, encore qu'il y aurait des développements, tel que le disait M. Riverin, dans la grande entreprise... À l'amont, je pourrais dire qu'à l'Université du Québec le centre multirégional de la foresterie, où nous entrons à titre de partenaire avec toute notre problématique, nous permet de fonctionner et de développer des travaux, je le répète, dans un sens multi, voire transdisciplinaire.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Nagy. J'invite maintenant la députée de Chicoutimi à conclure au nom de sa formation politique. (11 h 30)

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. J'aurais une brève question avant de conclure. On a parlé beaucoup de la rétention des diplômés dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean par la présence de l'université, d'une part, par rapport aux diplômés de niveau collégial, mais, de façon plus générale également, de diplômés de l'université qui restaient dans la région, soit au sein des entreprises de génie-conseil, d'administration, de comptabilité ou à l'université même. Voulez-vous brièvement nous dire de quel ordre de grandeur?

M. Riverin: Là aussi, c'est extrêmement difficile parce que c'est difficile de rejoindre l'ensemble de nos diplômés. Ce que l'on sait pertinemment, cependant, c'est que, actuellement, dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean environ 60 % de ceux qui pratiquent la comptabilité publique sont des diplômés de l'Université du Québec à Chicoutimi. Cela a permis l'établissement de très grands bureaux et la fusion de ces bureaux avec des bureaux internationaux comme Touche, Ross et Cie, par exemple, ou - j'ai toujours à l'idée RCMP - Raymond, Chabot, Martin et Paré,

Dans le domaine du génie, c'est la même chose. Environ 65 % des bureaux de consultation en génie dans l'entreprise sont maintenant des diplômés de l'Université du Québec à Chicoutimi. Il faudrait évidemment trouver ceux qui sont diplômés en administration, par exemple, qui foisonnent partout dans toutes les entreprises, y compris la presse, les entreprises commerciales, industrielles, etc. Nous en rencontrons partout. Nous avons réussi à garder chez nous maintenant un grand nombre de diplômés. Nous n'avons malheureusement pas de chiffres. Il est extrêmement difficile de créer une association des anciens qui soit forte avant un certain nombre d'années. Je pense que toutes les universités ont vécu ce phénomène. Nous sommes très jeunes et, avant que l'on puisse retracer nos diplômés, je pense que cela prendra encore une bonne dizaine d'années.

Mme Blackburn: Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je m'excuse, Mme la députée de Chicoutimi. J'ai une demande d'intervention du côté ministériel qui vient d'arriver. Avec le règlement de l'alternance, comme il lui reste encore du temps, je reconnais le ministre.

M. Ryan: Merci. D'autant plus, M. le Président, que je pense qu'il nous restait un peu de temps pour nos questions.

Je remarquais, en examinant les statistiques que vous avez annexées à votre mémoire, M. Riverin, que, dans un nombre relativement élevé de programmes, le nombre des diplômés sur une base d'une quinzaine d'années n'est pas très élevé. C'est particulièrement vrai au niveau de la maîtrise et du doctorat, cela se comprend

plus facilement, mais il y en a un certain nombre aussi au niveau du baccalauréat qui ne donnent pas, au bout de cette période-là, un nombre de diplômés très élevé. Je voudrais que vous nous disiez quelle est votre politique devant ces cas-là. Il y a des cas, par exemple, où vous avez 10 diplômés, d'autres 15, d'autres 25 ou 30 sur une période d'une dizaine d'années. Quelle est votre politique? Est-ce que vous laissez ces programmes continuer quand même ou s'il y en a qui ne sont pas opérants actuellement? En avez-vous annulé sur cette liste-là?

M. Riverin: Vous me permettrez, M. le ministre, de demander à mon collègue, M. Nagy, de répondre à cette question. Il est beaucoup plus ferré que moi dans le domaine.

M. Nagy: Du moins, je l'espère. Il y a deux problématiques. Des programmes à productivité faible au niveau du 1er cycle ne veulent pas dire nécessairement que ce soient des programmes qu'on veuille éliminer, contrairement à l'approche préconisée par Trois-Rivières où on a effectivement éliminé des programmes. Depuis une dizaine d'années maintenant et plus particulièrement au cours des cinq ou six dernières années, notre politique est de rendre viables ces programmes en termes d'étudiants dans les activités. Cela veut dire qu'il faut qu'on puisse maintenir, pour un petit nombre, des programmes, mais il faut que les candidats puissent fréquenter des activités avec des étudiants qui viennent d'autres programmes. Donc, une interpénétration des activités d'un programme à l'autre. Avec cela, nous pouvons assurer un éventail. Nous avons fait quand même quelques suspensions de programmes qui étaient plutôt faibles.

Par ailleurs, au niveau des études avancées, il faut quand même avouer que nous sommes très jeunes dans ces domaines-là. Notre maîtrise maison la plus ancienne date d'une dizaine d'années; la production est relativement comparable, donc faible, à ce qui se fait à ce niveau à l'échelle du Québec. Des maîtrises plus récentes, cinq ans, exception faite du succès reconnu de petites et moyennes organisations dans les secteurs scientifiques, montrent que c'est maintenant que nous allons produire le nombre de diplômés nécessaires.

À votre question relative à l'avenir de ces programmes, ce n'est pas uniquement en termes de diplômés que nous voulons jouer l'avenir de ces programmes, mais en termes de capacité et de rentabilité des activités qu'ils desservent à côté des programmes extrêmement productifs.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Nagy. J'invite maintenant Mme la députée de Chicoutimi à conclure rapidement au nom de sa formation politique.

Mme Blackburn: Merci. M. le recteur, je pense que vous avez réussi avec facilité à faire la démonstration que les programmes d'enseignement et de recherche à l'Université du Québec à Chicoutimi étaient à la fois très pertinents et très axés sur les particularités régionales. Je pense en particulier, parce que je me permets de m'étendre un peu là-dessus, au centre de recherche SOREP. On n'en a pas parié beaucoup ici. En fait, je pense que le démarrage de cette recherche aurait été, pour ainsi dire, impensable à l'extérieur de la région parce qu'elle voulait répondre à un besoin très particulier de la région en ce qui atrait aux maladies héréditaires. Ce centre universitaire de recherche sur les populations, SOREP - Société de recherche sur les populations - a une renommée internationale actuellement. C'est une première en Amérique du Nord. Ce qui a déclenché cette recherche qui donne, après quinze ans, une réputation internationale à l'Université du Québec, c'est une particularité qui est propre aux populations de notre région, à celle de la Côte-Nord de façon générale. C'est réalisé à l'aide d'un fichier de la population qui permet de construire automatiquement les généalogies en combinant diverses approches relevant de la démographie, de la biologie, de l'histoire, de l'informatique et de l'épidémiologie. Avec ces données, on pourra très rapidement éviter certaines maladies transmises génétiquement. C'est un outil extrêmement précieux, dont l'importance est reconnue par tout le monde, et, d'ailleurs, par le Québec, puisqu'on a reconnu ce centre de recherche, on l'a admis dans le programme des actions structurantes. Je rappelle qu'il n'aurait pas été possible ou pensable de le faire démarrer ailleurs parce que précisément la problématique que cela posait était propre à une région. Les programmes, je pense bien, de l'Université du Québec à Chicoutimi, qu'il s'agisse de celui-là, qu'il s'agisse de celui sur la foresterie, sur les ressources minérales, sur les huiles essentielles à partir des plantes indigènes et des arbres, je pense que ce sont des choses qui sont propres à la région.

Le recteur a illustré l'importance que revêt l'Université du Québec à Chicoutimi pour notre région, mais le rôle de l'université a été reconnu par tous les organismes socio-économiques qui se sont présentés ici. Je pense à la Chambre de commerce du Québec métropolitain qui estimait que l'importance de l'Université Laval dans le développement de la grande région de Québec était, pour ainsi dire, inestimable parce que non seulement elle avait comme effet d'améliorer la productivité et la qualité des entreprises, mais elle permettait également de mettre en

place des capacités, un potentiel de réflexion...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Madame.

Mme Blackburn: ...et d'imagination qui avait des effets sur le développement social et économique de toute la région. D'ailleurs, selon une analyse qui a été réalisée, à ce que nous disait la chambre de commerce, par Techno police, on estime que c'est la présence d'une université dans une région donnée qui donne à cette région la capacité de se développer dans de grands secteurs industriels comme de faire de cette région un lieu...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous invite à conclure, Mme la députée.

Mme Blackburn: Oui, M. le Président. On a jusqu'à une heure.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la députée, je vous invite à conclure.

Mme Blackburn: Je vais conclure si vous ne m'interrompez pas. Je vais le faire.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela fait trois fois que je vous demande de conclure.

Mme Blackburn: ...qui constitue un facteur d'attirance important lorsqu'il s'agit de faire du recrutement pour les grandes entreprises et pour les maisons d'enseignement.

M. le recteur, madame, messieurs les collaborateurs, je vous remercie infiniment de votre présentation et de votre collaboration aux travaux de cette commission.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la députée. Je vous remercie aussi de votre collaboration. M. le ministre, je vous invite à conclure rapidement.

M. Ryan: Nous sommes habitués du côté gouvernemental à subir avec docilité les foudres de la présidence et nous allons le faire encore. Je voudrais vous remercier des éclaircissements que vous avez apportés sur différents aspects du rôle que joue l'Université du Québec dans la région de Chicoutimi et du Lac-Saint-Jean. Je pense que beaucoup d'aspects très intéressants ont été soulevés à la fois dans votre mémoire et dans vos remarques et dans l'échange de vues que nous avons pu avoir avec vous.

J'aurais bien aimé qu'on puisse discuter davantage de toute l'affaire des programmes, mais c'est une chose qu'on aura l'occasion de faire au cours des prochaines semaines. Je croîs qu'il y aurait lieu de pousser beaucoup plus loin l'examen à l'aide de statistiques détaillées comme celles que je vous remercie d'avoir annexées à votre mémoire.

En conclusion, je voudrais traiter de deux thèmes. Tout d'abord, les recommandations que vous avez faites à la fin de votre mémoire. On n'en a point parlé beaucoup ce matin parce que la discussion s'est engagée plutôt sur l'activité de l'Université du Québec à Chicoutimi. Vous demandez essentiellement que la formule de financement, c'est-à-dire la formule qui sert au partage des subventions gouvernementales entre les établissements universitaires, soit révisée de manière à tenir compte davantage de certains critères que vous soulignez dans vos recommandations, en particulier le financement des coûts indirects de la recherche, le critère de la taille, le critère de l'étendue du territoire, la densité de la population et la contribution au développement régional et l'activité que j'appellerais d'extension de l'université en dehors de ses murs pour étendre ses services à la population d'une région.

Je veux vous dire que tous ces facteurs seront considérés avec beaucoup d'attention quand nous mettrons au point un projet de nouvelle formule de financement. Dès que les travaux de la commission auront été complétés, nous pourrons nous atteler à cette tâche pour laquelle, d'ailleurs, beaucoup de travail a déjà été accompli, comme vous le savez. Je ne sais pas à quelle équation nous arriverons. Nous soumettrons un projet aux milieux concernés, en particulier à la Conférence des recteurs et des principaux. Je pense que nous pourrons travailler ensemble à une nouvelle formule au cours des prochains mois.

Maintenant, il y a une grosse condition à cela dont ne traite point votre mémoire. Je ne pense pas qu'on puisse facilement modifier la formule de financement tant qu'on n'aura pas pris une option claire au sujet du niveau de financement des universités parce qu'il y a des limites à partager les ressources qui sont déjà très limitées au départ. On crée des frustrations, on les multiplie presque à dessein à ce moment. Je pense qu'il y a une première option qui doit être prise sur le niveau de financement. Quel devrait être le niveau de financement satisfaisant et compatible avec les ressources de la collectivité québécoise et capable d'assurer une plus grande stabilité et, je dirais même, une plus grande sérénité à nos établissements universitaires dans la conduite de leur développement? C'est une question à laquelle n'a point touché votre mémoire, mais qui nous préoccupe beaucoup. J'aurais aimé que vous nous fassiez part de vos suggestions surtout dans l'hypothèse d'un redressement du niveau de financement. J'aurais aimé connaître vos suggestions quant

aux moyens d'assurer ce redressement.

Je vous laisse ces questions. Vous pourrez compléter votre présentation par voie d'un supplément d'information, si vous le voulez bien, c'est votre responsabilité, mais je vous dis cela pour que vous ayez l'heure juste en ce qui touche le point actuel de l'évolution des travaux de la commission. Je vous remercie pour tout ce que vous nous avez apporté et j'espère que, sur les points qui relèvent plus directement de notre responsabilité, vous allez continuer la recherche avec nous. Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre, merci. Mme la porte-parole de l'Opposition, merci, M. Riverin, madame, messieurs, je vous remercie beaucoup d'être venus nous rencontrer. La commission parlementaire de l'éducation va suspendre ses travaux pour quelques minutes seulement. Nous allons entendre immédiatement après le Conseil régional de concertation et de développement du Saguenay-Lac-Saint-Jean-Chibougamau-Chapais, suivi de la Société d'électrolyse et de chimie Alcan Ltée. Merci.

(Suspension de la séance à 11 h 45)

(Reprise à 11 h 51)

Le Président (M. Parent, Sauvé): Nous accueillons nos prochains invités. La commission permanente de l'éducation poursuit ses travaux en accueillant le Conseil régional de concertation et de développement du Saguenay-Lac-Saint-Jean-Chibougamau-Chapais.

Conseil régional de concertation

et de développement du

Saguenay-Lac-Saint-Jean-

Chibougamau-Chapais

Avant de commencer ces audiences, je veux d'abord vous remercier, messieurs, d'avoir accepté, à notre suggestion, de vous regrouper pour venir témoigner devant la commission en même temps que l'université. Vous nous avez aidés à équilibrer le calendrier de travail de la commission et nous l'apprécions beaucoup.

Le groupe devant nous est représenté par M. Gérard Claveau, son président, et des présentations seront faites par MM. Desjardins et Boivin, ainsi que par le président.

M. le président, nous vous souhaitons la bienvenue. Merci encore une fois d'avoir répondu à l'appel de la commission. Nous avons environ 45 minutes pour partager ensemble le temps de cet échange. Vous jugerez de la façon dont vous voulez répartir le temps, si vous voulez donner plus de temps à la présentation ou non; en fait, cela va se faire d'une façon assez facile et informelle. Nous vous écoutons.

M. Claveau (Gérard): M. le Président, messieurs et madame de la commission, permettez-moi d'abord de vous présenter les membres qui m'accompagnent, à savoir M. Rosaire Boivin, directeur régional de la maison Charette, Fortier, représentant chez nous le milieu des affaires et professionnel, plus particulièrement relié aux petites et moyennes entreprises; M. Jean-Eudes Bergeron, à ma gauche, directeur régional de la Fédération des caisses populaires Desjardins; M. Éric Jacques, préfet et maire de Sainte-Rose-du-Nord et, enfin, vous le verrez dans quelques secondes, M. Serge Lemelin, président de la Confédération des syndicats nationaux.

Je ne voudrais pas vous présenter le mémoire sans vous énumérer la liste des personnes qui ont eu le courage - je dirais bien le courage - de partir ce matin à 6 heures pour monter à la capitale. Je vais vous énumérer rapidement quelques noms: M. André Besner, de la Banque fédérale de développement, M. Ulric Blackburn, de la ville de Chicoutimi; M. Lucien Émond, de la compagnie Price; M. Éric Jacques, de la MRC du Fjord; M. Alain Belley, du conseil régional; M. Serge Chiasson, du CRCD; M. Roger Claveau, de la ville de La Baie; M. Robert Salette, de SECAL; M. Robert Lavoie, M. Claude Tremblay, M. Johann Ellefson de SECAL; M. Jean-Eudes Bergeron, de la Fédération des caisses populaires; M. Germain Simard, de l'UPA; M. Rosaire Boivin, de Charette, Fortier; M. Clément Vaillancourt, de l'ARCI, l'Association régionale des commissaires industriels; Me François Godin, du cégep de Saint-Félicien; M. Serge Lemelin, de la CSN; M. Arthur Bonneau, de la Fédération des syndicats de l'Alcan; Mme Lucette Lessard, de l'AFEAS; Mme Monique Morin, de l'AFEAS, ainsi que M. Gilles Marceau, de la ville de Jonquière, sans oublier, évidemment, les gens de la presse. Je ne voudrais surtout pas oublier Mme Josée Thibeault, de Radio-Canada, M. Marcel Martel, du Réveil, M. Bertrand Tremblay, du Quotidien, M. Claude Paradis, de la Rive nord, ainsi que M. Michel Gagné, de Radio-Canada.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Claveau.

M. Claveau (Gérard): M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs de la commission, nous tenons, en tout premier lieu, à vous remercier de l'opportunité qui nous est offerte, par les travaux de cette commission, de venir exprimer le point de vue d'une région sur une question qui la préoccupe à plus d'un titre et qui concerne, dans une large mesure, l'avenir du réseau

universitaire québécois.

C'est donc un plaidoyer favorable au maintien et au développement de ce réseau d'enseignement que nous entendons vous livrer aujourd'hui. Comme beaucoup d'autres régions du Québec, le Saguenay-Lac-Saint-Jean-Chibougamau-Chapais a cet avantage considérable de pouvoir disposer de sa propre institution universitaire qui se révèle être -nous tenterons de vous le démontrer dans la courte intervention qui suivra - un élément extrêmement important de notre vie régionale.

Afin de justifier cette intervention devant cette commission, vous me permettrez de vous entretenir pendant quelques instants de la mission et de la représentativité du Conseil régional de concertation et de développement.

Comme l'a si bien reconnu le présent gouvernement, et nous y souscrivons d'emblée, "il convient d'instaurer une forme de régularité et de permanence à la concertation gouvernement-régions... et c'est d'abord et avant tout la région, par l'intermédiaire de ses représentants, qui est responsable de la préparation et de la démarche". Citation du nouveau gouvernement.

Issu d'une volonté régionale, unanimement partagée, visant à doter la région d'un instrument efficace d'action et d'intervention, conforme à la vision nouvelle du gouvernement du Québec en matière de développement régional, le CRCD s'est vu confier l'identification des grandes priorités régionales, la promotion des intérêts régionaux auprès des instances gouvernementales et la concertation des divers partenaires influençant l'activité régionale.

Le CRCD devient, dans le cadre de cette relation privilégiée établie par le gouvernement du Québec avec les régions, un interlocuteur reconnu et habilité à l'évaluation des attentes nouvelles de la société régionale, à la négociation et à la signature d'ententes-cadres de développement avec l'État et à l'organisation des sommets régionaux permanents sur la base d'un processus quadriennal. Ce partenariat État-région repose sur la notion d'une concertation élargie et permanente où tous les acteurs du développement, gouvernementaux et régionaux, conviennent d'une stratégie unique d'intervention et assument, selon leurs champs d'intérêts respectifs, les mandats et les engagements.

Cette structure inédite favorise une meilleure vision d'ensemble de la problématique régionale, une concertation optimale des agents de développement et cadre parfaitement avec la philosophie développée par le gouvernement du Québec qui appelle une efficacité accrue des actions et une conscientisation sur le partage des responsabilités en développement régional.

Le Conseil régional de concertation et de développement repose sur la participation ' volontaire de plus de 150 membres corporatifs représentant l'ensemble des composantes dynamiques de cette grande région. Son conseil d'administration, composé d'une quarantaine de délégués, reflète fidèlement cette diversité régionale et assure un juste équilibre entre les divers courants d'idées. Vous verrez en annexe la liste des membres.

L'UQAC, une présence essentielle, un partenaire de premier plan. Le choix de ce titre, comme amorce à notre propos d'aujourd'hui, n'est pas étranger a notre intention d'entraîner les travaux de cette commission vers une perception nouvelle du rôle de l'université dans une dynamique plus large où celle-ci devient davantage un partenaire attentif aux réalités régionales et partie prenante aux aspirations de la collectivité.

L'université de l'ère moderne ne peut plus se confiner à une seule mission d'enseignement et cultiver un élitisme à outrance, mais doit, bien au contraire, se rapprocher des vécus quotidiens et participer pleinement à la vie régionale.

Nous sommes à même d'apprécier les efforts soutenus de l'Université du Québec à Chicoutimi dans l'application de ce précepte et les réussites concrètes qui en ont jalonné le cheminement. Notre université régionale est devenue rapidement un acteur présent et apprécié sur la scène où se jouent les grands enjeux d'une région à la recherche d'alternatives à son développement.

Sans délaisser pour autant sa mission d'enseignement, qu'elle continue de prodiguer avec ferveur et excellence, l'UQAC a démontré la justesse d'une relation permanente avec son milieu qui lui procure une vision pragmatique et qui se traduit par le tissage de liens étroits et sans cesse renouvelés avec notre collectivité.

Aujourd'hui, notre région ne saurait accepter, ni se satisfaire d'un relâchement de cette trame et encore moins d'un désengagement auquel l'UQAC serait contrainte, face à ses responsabilités sociales. Nous demandons avec force la réaffirmation et l'accentuation de ce rôle qui contribue à une saine émulation parmi les agents dynamisants oeuvrant en régions.

L'enseignement, un champ d'excellence. La régionalisation de l'enseignement supérieur demeure le résultat le plus tangible et le plus remarquable de l'évolution de la philosophie éducationnelle du Québec en ce qu'elle a permis à toute une population, disséminée sur un vaste territoire, un accès relativement aisé aux centres de haut savoir.

Ainsi, la connaissance et sa diffusion franchissent les enceintes des grandes métropoles et deviennent accessibles aux populations vivant dans les régions

périphériques.

La qualité exceptionnelle de l'enseignement dispensé par l'Université du Québec à Chicoutimi et l'universalité de ses programmes, soutenus par des effectifs hautement qualifiés, en ont vite fait une université populaire qui attire depuis sa création une clientèle croissante.

Cet état de fait, qui doit être perçu comme la conséquence d'une alternative aux choix traditionnels auxquels se trouvaient confrontés les étudiants et les étudiantes de la région, vient confirmer une part des arguments qui ont présidé à la décision du gouvernement du Québec d'établir un réseau universitaire sur la base d'une répartition géographique équitable, arguments qui laissaient entendre que l'accessibilité à la formation universitaire relevait tout autant des capacités financières des étudiants et des étudiantes que de leurs aptitudes intellectuelles. Aussi, devons-nous reconnaître qu'en l'absence d'une composante de ce réseau québécois, bon nombre de nos diplômés actuels n'auraient eu d'autre choix que de mettre un terme à leurs études sitôt franchi le seuil collégial. Un des mérites de l'Université du Québec à Chicoutimi n'est-il pas de permettre la concrétisation de ces aspirations légitimes qui autrement relèveraient de l'éphémère?

Celui qui connaît bien la dynamique propre aux régions périphériques reconnaîtra que cette situation a contribué à l'éclosion d'une volonté réelle de prise en main par les collectivités locales de leur destinée. En permettant aux régions concernées de freiner l'exode des cerveaux en direction des grands centres et en favorisant la mise en place de centres de formation mieux adaptés à leurs besoins et spécificités, la démocratisation de l'enseignement a entraîné dans son sillage le développement d'une nouvelle conscience régionale.

La contribution de l'Université du Québec à Chicoutimi, bien qu'elle ait fait sentir sa présence et son influence dans un nombre grandissant de sphères d'activité régionales, se mesure à sa juste valeur en ce qu'elle a donné tout son sens et toute sa portée à la notion de "mission régionale".

La formation dispensée à l'UQAC a vite fait de susciter de nouvelles attentes chez sa clientèle et de créer des besoins nouveaux qui ont entraîné celle-ci à offrir dans certaines disciplines académiques une formation complémentaire de 2e et de 3e cycle dont la popularité vient confirmer l'existence d'un réel besoin.

Nous ne saurions trop insister en réclamant de cette commission de l'éducation la reconnaissance formelle de cette spécialisation de l'enseignement universitaire à l'UQAC et des mesures incitatives appropriées, ceci devant contribuer, à notre avis, à la consolidation de ses assises et à lui assurer une constante évolution adaptée à la progression de nos besoins spécifiques en formation.

Une recherche universelle au service d'une dynamique régionale. En adaptant ses programmes de recherche aux particularités régionales, en y associant très étroitement les agents du milieu et en contribuant de multiples manières au transfert des connaissances et à leur application concrète, l'Université du Québec à Chicoutimi a démontré de façon éclatante le rationnel d'une collaboration soutenue dans ce domaine avec le milieu des affaires.

Cette tendance régionaliste a contribué significativement à l'essor économique et social de la région. Cette affirmation trouve un écho favorable partout, pour peu qu'on se donne la peine d'en vérifier l'exactitude.

Vous me permettrez d'ouvrir ici une parenthèse en précisant, et cela nous apparaît important, que la recherche universitaire menée par l'UQAC, même si elle cadre parfaitement avec les spécificités régionales, n'en demeure pas moins une recherche à caractère universel, exportable et applicable ailleurs. Elle répond en tous points aux normes et critères universellement reconnus et contribue ainsi à l'accroissement du savoir humain.

Cette présence universitaire permet le maintien et l'expansion en régions des activités de recherche, tant industrielles qu'académiques, en créant un environnement propice et stimulant et en mettant à la portée des entrepreneurs industrieux un personnel scientifique de premier ordre et des laboratoires et équipements à la fine pointe du développement.

La gamme étendue de ses champs de recherche, alliés à la compétence des équipes pluridisciplinaires qui y oeuvrent, permet l'accroissement des connaissances régionales et la formulation de solutions pratiques aux problèmes spécifiques qui confrontent la région. Que l'on cite les programmes de recherche sur les maladies héréditaires, sur la productivité végétale, en ressources minérales ou sur la transformation de l'aluminium et combien d'autres où l'UQAC a fait montre d'excellence; on y dénote des signes positifs des applications scientifiques et du transfert technologique reliés aux problématiques régionales. Qu'il s'agisse de l'accroissement de la productivité de nos bleuetières, du développement d'essences végétales adaptées à nos rigueurs climatiques, de l'utilisation de techniques nouvelles en prospection minière, de la compilation d'informations génétiques et médicales ou de la conceptualisation pure et simple de nouveaux procédés industriels développés en collaboration avec l'entreprise privée, l'Université du Québec à Chicoutimi démontre une préoccupation à saveur régionale.

Nous devons nous interroger sérieusement sur les capacités de notre région à intéresser d'autres centres universitaires à ses problématiques spécifiques si l'UQAC devait délaisser son expertise en recherche faute de moyens appropriés et se consacrer exclusivement è sa mission d'enseignement. À cet égard, l'expérience vécue préalablement à la venue de cette institution dans la région apporte une réponse on ne peut plus décevante.

Il relève de la responsabilité de tous les intervenants concernés d'assurer la poursuite et le développement de ce secteur où l'université pose un jalon si profitable au rapprochement des intérêts académiques des réalités économiques. Car il faut bien reconnaître que la recherche universitaire, outre sa contribution significative au mieux-être de la collectivité, entraîne des retombées économiques non négligeables et recèle un pouvoir attractif certain en ce qu'elle permet le maintien des activités de recherche en milieu privé et la consolidation des effectifs professionnels qu'on y retrouve, permettant ainsi à la région de sortir de l'anonymat et d'accéder au club restreint des régions inscrites dans le virage technologique.

Cette vocation scientifique contribue aussi et surtout à l'établissement de liens durables et complémentaires avec les structures régionales d'enseignement collégial en favorisant un partage des tâches de recherche et une collaboration permanente entre les équipes de chercheurs de différents niveaux. Citons deux domaines à l'appui de cette réalité, soit les travaux reliés à la recherche sur la synthèse historique régionale et ceux, plus récents, relevant des programmes FAO-CAO, deux secteurs parmi tant d'autres qui appellent à une collaboration efficace où l'Université du Québec à Chicoutimi a fait montre d'une ouverture d'esprit remarquable en mettant à contribution des chercheurs attitrés au secteur collégial. Il est important de bien comprendre ici qu'il ne s'agit pas strictement d'événements ponctuels, mais que ceci s'inscrit dans une orientation qu'entend privilégier l'université dans son mode d'association avec les intervenants régionaux.

Enfin, l'UQAC, un partenaire du développement régional. Vous avez pu constater que j'ai lu assez rapidement puisqu'on m'a dit que le temps était relativement court. L'Université du Québec à Chicoutimi s'implique d'une manière tout aussi méritoire dans tous les grands mouvements qui se dessinent dans la région. Partenaire efficace et volontaire, l'UQAC demeure à bien des égards la source de cristallisation des forces régionales et un élément dynamisant. Sa participation exceptionnelle à toutes les étapes préparatoires et exécutives du Sommet sur le développement et l'économie de la région en 1984 apporte un témoignage concluant de ce rapprochement avec la collectivité régionale et demeure l'une des causes du succès phénoménal qu'a connu cet événement.

Force nous est de reconnaître que, sans la participation de notre université régionale, ce sommet n'aurait pu atteindre une performance telle que ses effets sur le développement régional et sur la conscientisation des agents du milieu se font toujours sentir et maintiennent à son plus haut niveau une motivation sans précédent des leaders régionaux.

À mesurer le grand nombre d'engagements issus de ce sommet régional et qui concernent d'une manière ou d'une autre l'Université du Québec à Chicoutimi, on se rend vite compte de la place prépondérante qu'occupe celle-ci dans la dynamique régionale. Bien intégrée au milieu, réceptive aux demandes qu'il exprime et ouverte à la collaboration avec un nombre grandissant de partenaires régionaux, l'UQAC poursuit son implantation et affiche une maturité de plus en plus évidente.

Donc, c'est un actif à développer. L'ensemble des retombées qu'entraîne pour la région la présence d'un centre universitaire justifie amplement sa raison d'être. En plus de retombées économiques évidentes et considérables, l'UQAC apporte aussi à la région une richesse sociale et culturelle indéniable. L'image qu'elle projette, la diversité intellectuelle qu'elle engendre, son encouragement â l'expression artistique et sa contribution exemplaire au maintien d'une culture régionale originale sont autant d'éléments qui contribuent è créer un milieu de vie actif et valorisant apte à intéresser toute la collectivité.

Veuillez croire, mesdames et messieurs de la commission de l'éducation, que la communauté régionale apprécie à sa juste valeur l'apport significatif de son université et reconnaît la nécessité de lui voir attribuer des moyens appropriés, tenant compte de sa relative jeunesse et de ses besoins particuliers, afin de lui assurer des assises solides à partir desquelles elle pourra poursuivre son développement et accroître sa mission régionale.

Nous souhaitons que les travaux de cette commission sauront apporter des garanties suffisantes quant à l'avenir de notre université régionale, fleuron de notre culture et signe tangible de notre vitalité.

Enfin, comme conclusion, la résolution adoptée par l'ensemble de nos membres dont vous avez la liste: "Attendu que l'Université du Québec à Chicoutimi contribue de façon exemplaire par ses activités et programmes au maintien des dynamismes régionaux; "Attendu que l'Université du Québec à Chicoutimi s'est toujours impliquée volontairement et efficacement dans les initiatives du milieu;

"Attendu que l'Université du Québec à Chicoutîmi demeure un partenaire indispensable à la région et indissociable à son avenir; "Attendu que l'Université du Québec à Chicoutimi a démontré d'une manière si tangible l'efficacité des programmes de recherche adaptés aux problématiques locales; "Attendu que l'Université du Québec à Chîcoutîmi souhaite maintenir et accentuer sa mission régionale; "II est proposé, appuyé et résolu à l'unanimité que le Conseil régional de concertation et de développement du Saguenay-Lac-Saint-Jean-Chibougarnau-Chapais, région 02, demande au gouvernement du Québec d'assurer à l'Université du Québec à Chicoutimi les ressources nécessaires au maintien et au développement de ses activités d'enseignement et de recherche, de reconnaître à l'Université du Québec à Chicoutimi, en accord avec ses objectifs et ses projets de développement, une mission d'enseignement de premier, deuxième et troisième cycles et de favoriser, en y consacrant le niveau requis de ressources, le rayonnement de la mission régionale de l'Université du Québec à Chicoutimi." Merci.

Le Président (M. Thérien): Merci beaucoup, M, Claveau, d'avoir répondu aux voeux du président. Pour vous permettre de reprendre votre souffle, nous allons passer à la période des questions.

M. Claveau (Gérard): Si vous le permettez, cependant, comme il y a avec moi deux personnes qui ont à livrer aussi deux messages, je demanderais à M. Rosaire Boivin, représentant le monde des affaires et professionnel relié à la petite et moyenne entreprise, de bien vouloir présenter sa communication.

Le Président (M. Thérien): C'est avec plaisir que je vous cède la parole.

M. Claveau (Gérard): Merci, M. le Président.

M. Boivin (Rosaire): M. le Président, mesdames et messieurs les membres de la commission d'étude sur le financement du réseau universitaire québécois, mesdames, messieurs, nous avons exprimé le désir d'être entendus par cette commission parce que nous nous préoccupons du financement des universités régionales au Québec. C'est pourquoi notre intervention est un appui au mémoire que l'Université du Québec à Chicoutimi a présenté devant cette commission. Notre cabinet de comptables agréés Charette, Fortier, Hawey, Touche, Ross, a été le vérificateur de l'Université du Québec à Chicoutimi depuis sa fondation.

Cette position privilégiée nous a permis d'assister à toutes les péripéties de son développement, ainsi qu'aux difficultés qu'elle a rencontrées au cours de son existence. Cette expérience unique nous permet, à notre avis, d'exprimer une opinion fondée concernant certaines valeurs de base qui devraient être considérées pour évaluer l'importance et l'influence d'une institution universitaire dans une région comme la nôtre. (12 h 15)

Notre cabinet de comptables agréés, par ses huit bureaux locaux situés au Saguenay-Lac-Saint-Jean, est présent dans toute la région couverte par les activités de l'Université du Québec a Chicoutimi. Nous croyons que cette présence régionale nous permet d'exprimer une opinion valable au sujet de l'importance des différents agents économiques qui contribuent à maintenir et à développer cette grande région que constituent le Saguenay-Lac-Saint-Jean et la Côte-Nord.

Nous avons voulu être entendus tout d'abord simplement par reconnaissance pour notre université. En effet, notre cabinet, qui compte dans la région plus de 91 professionnels, peut s'enorgueillir d'avoir parmi ceux-ci plus de 60 % de diplômés de l'Université du Québec à Chicoutimi. Ces professionnels ont tous fréquenté l'Université du Québec à Chicoutimi. Cela leur a permis de développer des connaissances particulières et un intérêt marqué pour les problèmes régionaux. Leur succès dans ce domaine a attiré un cabinet de professionnels international qui s'est associé à eux pour développer une unité de services de vérification et de comptabilité qui dessert maintenant toute la région.

La présence de l'université a certainement contribué pour beaucoup dans l'établissement d'un service de cette envergure en milieu régional. C'est encore cette présence qui assure à notre cabinet une relève de qualité. Il faut avoir vécu les années de recrutement difficile, alors qu'il était particulièrement ardu d'attirer chez nous des professionnels comptables, pour mieux comprendre le rôle que l'Université du Québec à Chicoutimi a joué dans ce développement formidable. D'ailleurs, les difficultés de recrutement que la profession médicale vit lorsqu'il s'agit de desservir les régions périphériques sont une illustration frappante de ce qui peut arriver lorsqu'une discipline très poussée est concentrée dans quelques grands centres.

Nous ne voulons pas nous immiscer dans les décisions des hommes politiques et des gens qui ont comme tâche de distribuer les budgets du Québec: ce n'est pas notre responsabilité et la population ne nous a pas confié ce mandat. Nous désirons, cependant, affirmer que le gouvernement de cette

province, même s'il est en droit de demander à l'Université du Québec à Chicoutimi de performer d'une façon concurrentielle en dépit des circonstances particulières à la région, doit soutenir la croissance normale de cette ressource irremplaçable qu'elle constitue dans notre milieu.

Notre population a le droit de continuer d'avoir accès à l'immense richesse que constitue ce réservoir de connaissances et de haut savoir. En effet, dans une région comme la nôtre, l'université est devenue l'une des conditions indispensables à la poursuite du développement économique et socioculturel. Par le corps professoral qui l'anime, par les étudiants qui la fréquentent ou qui l'ont fréquentée, cette université maintient dans notre milieu une activité intellectuelle irremplaçable et à nulle autre comparable. Sans une université, comment pourrions-nous prétendre d'une part attirer ici des spécialistes, des chercheurs, des administrateurs chevronnés et leur assurer une vie intellectuelle, un milieu de développement acceptable pour eux et pour leur famille?

D'autre part, notre université produit chaque année des diplômés qui, majoritairement, proviennent de notre milieu et qui sont heureux d'y demeurer pour développer leur carrière.

Dans cette ligne d'intégration régionale, notre cabinet, chaque année, retient les services de plusieurs diplômés. Cette manne de cerveaux disponibles nous a permis d'intéresser un cabinet international à s'établir dans notre région, de sorte que maintenant on peut offrir aux gens d'affaires de chez nous des services plus spécialisés.

Par ce processus de développement rendu possible par la présence d'une université, nous pouvons maintenant offrir des services qui, il y a quelques années, n'étaient disponibles que dans les bureaux des grands centres urbains. Ces services spécialisés contribuent au développement économique de notre région et assurent une croissance plus ordonnée de notre potentiel.

Mentionnons maintenant très brièvement l'apport économique que peut constituer le budget annuel de l'université. L'afflux de 30 000 000 $, par son effet multiplicateur, vient aider notre économie régionale et n'est sûrement pas à dédaigner. L'importance de cette contribution pécuniaire n'a pas besoin d'être démontrée. Nous nous abstenons d'en faire une mention plus détaillée car, à notre avis, l'apport le plus important que notre université locale donne à la région ne doit pas se mesurer seulement aux 30 000 000 $ que constitue son budget annuel.

La présence d'une université dans une région comme la nôtre permet à un plus grand nombre de cerveaux d'avoir accès à un développement intellectuel plus avancé. Cela permet la réalisation partielle du principe généralement accepté de la nécessité de la démocratisation des études universitaires. Sans cette présence, ce développement deviendrait impossible pour plusieurs à cause des coûts et des inconvénients que comporte l'obligation de faire des études a l'extérieur. Qu'il nous suffise de mentionner les cours aux adultes, ainsi que les cours aux étudiants à temps partiel auxquels plusieurs adhèrent tout en poursuivant leur vie régulière dans leur milieu.

Devant tous ces faits, nous avons la conviction que le budget de l'université est un juste retour de nos taxes. Même si des calculs savants venaient à démontrer que per capita ce service coûte plus cher que s'il était offert uniquement dans les grands centres, il faut maintenir et développer l'université. Nous sommes d'avis que le gouvernement doit reconnaître que l'augmentation du niveau de scolarité de toute une région est à long terme l'un des investissements les plus rentables pour une société. Souvent, le surplus per capita que le gouvernement est appelé à débourser est économisé autrement par ceux qui suivent ces cours sur place dans leur région.

Finalement, cette mécanique n'a qu'une résultante, c'est que les régionaux peuvent avoir accès à un développement égal à celui qui est accessible aux résidents des grands centres. Lorsque c'est matériellement possible et socialement nécessaire, les gouvernements ont l'obligation de fournir à leur population cet accès aux études avancées sans distinction de classe ou de région.

Dans une région comme la nôtre, l'université donne plus encore. La contribution impondérable qu'elle fournit vient surtout de l'intérêt que les chercheurs développent à l'égard des problèmes régionaux. À titre d'exemple, les recherches sur les maladies héréditaires spécifiques à notre région et l'isolement des causes de ces maladies permettront probablement d'éviter que notre population n'en soit plus longtemps victime et ne devienne ainsi une charge financière supplémentaire pour l'État. Nous pouvons aussi mentionner l'importance pour notre région des travaux de recherche qui s'effectuent sur les mines, les cultures en serre dans les milieux nordiques et surtout sur le développement des produits d'aluminium. À toutes ces recherches spécifiques s'ajoute une contribution sociale que notre université a accepté de fournir avec un très grand succès.

Parmi les nombreuses initiatives sociales de l'université depuis sa fondation, nous devons mentionner l'une des toutes dernières, la formation de SOCCRENT. Cette société en commandite pour la création d'entreprises est quasi unique en son genre et des plus prometteuses pour la région. Elle implique à la fois les grandes industries et

les groupements d'affaires de la région, ainsi que les gens d'affaires intéressés au développement de notre économie. Seule la caution de l'Université du Québec à Chicoutimi pouvait permettre la création et le soutien du mouvement qui a conduit à la fondation de SOCCRENT. Dans une région comme la nôtre, le rôle d'une institution très engagée comme l'Université du Québec à Chicoutimi est comparable en importance à celui que l'Église a joué au Québec tout au long de son histoire. En effet, l'université jouit d'une réputation d'intégrité, d'objectivité intellectuelle et de capacité qu'on ne peut pas contester.

Pas une compagnie si importante soit-elle, pas un parti politique si bien structuré puisse-t-il être, pas un regroupement de citoyens ne pourra démontrer à la population autant de qualités et de capacité pour la stimuler, l'enthousiasmer et la soutenir dans son développement. Il faut se souvenir des problèmes qu'ont vécus certaines régions pour comprendre que, sans la présence d'institutions dynamiques pour les guider et pour regrouper leurs forces vives, elles peuvent péricliter jusqu'à en mourir. Mais avec les expériences heureuses que l'université a fait vivre à notre région, nous sommes en mesure de croire que, malgré le contexte économique extrêmement difficile que nous vivons, nous réussirons à survivre parce que cette institution de haut savoir assure le développement intellectuel de notre population et s'implique dans la recherche de solutions adaptées à nos problèmes.

Toutes ces contributions, recherches, expériences faites spécifiquement pour nos besoins, adaptées à notre mode de vie et aux contraintes que nous connaissons ne sauraient se réaliser sans la présence et l'action de l'université. En effet, celle-ci a développé un climat de confiance dans la région pour l'amener à contribuer et à investir dans le développement de la région.

De plus, une partie des régions nordiques du Québec compte sur le maintien de nos institutions régionales afin d'avoir accès à l'éventail de services qui assurent à leur population une qualité de vie comparable à celle que connaissent les citoyens des grands centres. L'Université du Québec à Chicoutimi doit accroître sa présence dans ces milieux et, par conséquent, obtenir les ressources indispensables pour répondre pleinement à cette mission. Notre région a toujours reconnu la valeur de notre université et appuyé ses objectifs et ses actions. Lorsqu'il s'est agi de la soutenir et de combler une partie de ses besoins qui ne pouvaient être pris en charge par l'État, la région a créé la Fondation de l'Université du Québec à Chicoutimi pour appuyer ses activités de recherche, ainsi que la Fondation Sagamie pour ses besoins physiques. Les fonds ont été recueillis à travers toute notre population parce que tous étaient conscients de l'importance de cette institution de haut savoir dans notre région. Cette réponse enthousiaste de toute une région démontre sans l'ombre d'un doute l'appréciation de la population envers son université régionale. Nous sommes d'avis que, à la suite de ces résultats positifs obtenus par l'Université du Québec à Chicoutimi, le gouvernement de cette province doit faire en sorte que son développement se poursuive sur tous les plans, ce qui démontrera sa volonté de soutenir le développement des régions périphériques, ainsi que son adhésion au principe de l'universalité de l'accès à la connaissance, à la culture et à la science, ce pourquoi précisément l'Université du Québec a été fondée.

Nous espérons que les témoignages qui ont été rendus devant cette commission confirmeront que le soutien à une université comme la nôtre ne devrait pas être considéré comme une activité marginale de la part de l'État, mais comme une stricte obligation de justice envers sa population. Il faut se rappeler que les millions investis dans le budget annuel de l'université sont à la longue beaucoup plus rentables et plus profitables pour l'ensemble de la population que certaines subventions distribuées pour satisfaire des besoins à court terme.

Le financement des universités telles que la nôtre doit se faire d'une façon rationnelle et avec beaucoup de compréhension en tenant compte des circonstances particulières qu'entraîne le maintien d'une institution de haut savoir dans une région éloignée. Mais ce financement doit se faire aussi en appliquant le principe de la justice distributive face au droit des personnes d'accéder à un développement intellectuel supérieur. Si souvent les régions périphériques prennent naissance et se développent grâce à la présence de richesses naturelles spécifiques à leur milieu, cela ne doit pas les condamner à être privées des autres richesses que constituent l'éducation, l'instruction et la culture. Dans le tangage des gens de chez nous, il faut bien distinguer entre accepter d'être éloignés et accepter d'être reculés. Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): S'il vous plaît, monsieur. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? (12 h 30)

M. Bergeron (Jean-Eudes): Oui.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Monsieur.

M. Bergeron: M. le Président, M. le ministre et MM. les membres de la commission, une réalité de notre région périphérique qui est aux prises avec son développement régional a fait en sorte que,

sur le plan régional, ont évolué un grand nombre de coopératives, de PME coopératives qu'on peut appeler les multi-Iocales du développement régional. Le monde de la coopération de la région est à l'aise avec l'Université du Québec à Chicoutimi parce que c'est une université qui est près du milieu et qui sait écouter et communiquer. Nos relations avec elle sont excellentes et on continue toujours à développer cette relation et cette communication.

Notre région est riche en structures coopératives. Elle regroupe sur le plan régional 160 000 coopérateurs, 1300 administrateurs élus et au-delà de 2000 employés et ce, dans toutes les sphères d'activités, soit l'épargne et le crédit, l'agriculture, la forêt, les coopératives ouvrières de production, l'habitation, etc.

Le monde de la coopération et les PME coopératives font face, comme les autres entreprises, au développement technologique et les ressources humaines qui en font partie devront évoluer grandement pour faire face à tous ces changements. Donc, tout cela ne pourra se faire sans des efforts au niveau de la formation et de l'éducation de nos ressources humaines.

Je tenais à mentionner, M. le Président et M. le ministre, que, à l'Université du Québec à Chicoutimi - d'ailleurs, le recteur en a fait mention tout à l'heure - il y a eu un effort, à la suite de celui des PME régionales, pour se pencher sur la gestion particulière des petites entreprises et c'est de là que provient le programme de maîtrise en gestion des PMO qui comprend les coopératives, tes petites entreprises et les organisations diverses.

C'était un besoin d'accorder une attention particulière à toute la dimension touchant à l'administration des entreprises et particulièrement aux PME. Étant en périphérie, on n'a pas le choix, il faut se débrouiller, il faut s'organiser, il faut entreprendre si on veut créer des emplois et si on veut développer notre région. Des efforts sont faits depuis longtemps. On mentionnait tout à l'heure SOCCRENT. Je peux vous dire aussi qu'au niveau du Mouvement des caisses populaires, tout récemment nous nous sommes donné un fonds d'investissement pour la petite entreprise. Avec cela, plus les efforts du milieu plus l'université, on devrait être capables de franchir d'autres étapes dans notre développement régional.

En plus de cet effort particulier qui est la maîtrise en PMO, il y a quand même beaucoup d'échanges de services qui se font au niveau de la formation, de la recherche et de l'animation. Il y a aussi du donnant-donnant, en ce sens qu'il y a des dons, des souscriptions et des commandites qui se font pour, justement, s'entraider et développer cette région qui nous tient à coeur.

M. le Président, j'aimerais dire en terminant que le monde de la coopération se sent complice avec l'université pour le développement régional et nous en sommes très fiers. Vous devez prendre tous les moyens pour que ce développement continue avec cette attention particulière qu'accorde l'université à ce monde de la PME et de la coopération. Merci.

Le Président (M, Parent, Sauvé): Merci, M. Bergeron. Je reconnais maintenant le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.

M. Ryan: Je vous remercie beaucoup, messieurs, de cet appui impressionnant et représentatif que vous venez apporter aux vues qui nous ont été exprimées par les autorités de l'Université du Québec à Chicoutimi.

J'ai parcouru les résolutions d'appui qui nous ont été remises dans un cahier qui est un peu la synthèse de toute la société du Saguenay-Lac-Saint-Jean. On trouve là-dedans des commissions scolaires, des municipalités, des MRC - dont plusieurs sont représentées ici aujourd'hui - des syndicats ouvriers, affiliés tant à la CSN qu'à la FTQ, les chambres de commerce, les caisses populaires - je pense que vous êtes du secteur des caisses populaires - et d'autres mouvements coopératifs, les gens de l'AFEAS, les grandes entreprises comme l'AIcan, Price, le cabinet des comptables qu'on a entendu tantôt, Charette, Fortier, Hawey, Touche et Ross.

C'est très important pour nous d'entendre tous ces points de vue et nous les écoutons avec énormément de respect. Je voudrais vous remercier de l'intérêt que vous portez au développement de l'enseignement universitaire dans votre région. Je pense qu'il est excellent que vous portiez cet intérêt au développement de l'enseignement universitaire et je pense que, si dans toutes les régions du Québec, tous les milieux s'associaient de manière aussi active pour collaborer au développement de l'enseignement universitaire, ce serait un acquis considérable pour notre société.

J'aurais deux questions à vous poser si vous me le permettez. Tout d'abord, vous dites à la page 6 - c'est peut-être un des paragraphes les plus importants de votre présentation et je le cite - "Nous ne saurions trop insister en réclamant de cette commission de l'éducation la reconnaissance formelle, et des mesures incitatives appropriées à cette spécialisation de l'enseignement universitaire à l'Université du Québec à Chicoutimi. Ceci devant contribuer, à notre avis, à la consolidation de ses assises et à lui assurer une constante évolution adaptée à la progression de nos besoins spécifiques en formation."

Je voudrais me permettre juste quelques commentaires là-dessus avec votre consentement. Ce sont des choses qui sont peut-être plus faciles à dire qu'à faire. J'ai demandé qu'on me produise une liste des projets qu'on nous a soumis au cours de la dernière année en matière de développement des maîtrises et des doctorats en particulier, et pour les baccalauréats aussi. Au niveau des baccalauréats, nous n'avons aucun projet dans nos dossiers actuellement, à moins que je ne me trompe. Il y en a peut-être qui auraient été oubliés. J'avais eu connaissance d'un projet de baccalauréat spécial en communications qui avait été conçu en collaboration avec des cégeps de la région. Cela avait été envoyé à la Direction de l'enseignement collégial. Je crois que cela va prendre la filière du Conseil des universités. Mais nous n'en avons pas été saisis encore.

Il y avait un projet de doctorat en ressources minérales qui avait été soumis à l'approbation du gouvernement, qui avait été approuvé sous le régime précédent et que nous serons heureux de contribuer à mettre en marche avec le prochain exercice. Avec les règles budgétaires de 1986-1987, nous prévoirons des dispositions devant permettre la mise en route de ce programme de doctorat en ressources minérales.

Un projet de doctorat en génie informatique a été communiqué au Conseil des universités, il y a déjà quelque temps. Le Conseil des universités est ent train d'en faire l'étude et nous attendons l'avis du Conseil des universités pour le début de la prochaine année. Je ne pense pas que le Conseil des universités sera en mesure de se prononcer avant le mois de janvier ou le mois de février.

Comme vous le savez, quand il s'agit de l'implantation d'un nouveau programme, d'une durée de plus d'un an, de baccalauréat, de maîtrise ou de doctorat, on doit d'abord recueillir l'avis du Conseil des universités et, ensuite, le ministère décide sur la base de l'opportunité, des possibilités de financement, etc. Par conséquent, tant que le Conseil des universités ne s'est pas prononcé, il est difficile pour nous d'agir.

Ensuite, il y a un projet de doctorat en éducation qui a été soumis conjointement par plusieurs constituantes de l'Universités du Québec, l'UQAM, l'Université du Québec à Trois-Rivières, l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue également. Ce projet a déjà reçu l'aval du Conseil des universités. Il est à l'étude pour l'étape définitive au ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science.

C'est une chose que nous regardons très attentivement, parce que vous n'êtes pas sans savoir que, dans le domaine des sciences de l'éducation, il n'y a pas pénurie d'activités actuellement dans nos universités par rapport aux besoins de la société québécoise.

J'étais agréablement étonné comme ministre de l'Éducation de constater que l'éducation est une discipline qui attire toujours beaucoup la jeunesse québécoise en voyant les statistiques qui ont été publiées récemment sur les inscriptions universitaires en septembre de cette année. Il faut bien se dire que c'est un secteur qui est très occupé, très achalandé actuellement, mais que les besoins du marché de l'éducation se sont extrêmement rétrécis ces dernières années à cause des contraintes financières que nous connaissons tous, des diminutions de clientèles qui se sont produites aux niveaux primaire et secondaire, et dont l'effet va se faire sentir sur le niveau collégial et universitaire au cours des années à venir.

Depuis quelques années, nous avons assisté à une augmentation des effectifs aux niveaux collégial et universitaire, mais, dans quelques années, il va se produire un mouvement dans l'autre sens. Il faut que le gouvernement pense à tout cela avant de se lancer dans une direction comme celle qui est proposée. Cela, c'est à l'étude. Je peux vous assurer qu'on va l'étudier en tenant compte de tout ce qui a été dit ce matin, en tenant compte également des autres réalités qui sont pour nous également impératives. Là-dessus, c'est la communication que j'ai à vous faire. J'ai dit tantôt à M. Riverin que, s'il y a d'autres projets, on peut toujours les examiner. C'est notre devoir de le faire, on ne fait de faveur à personne en le faisant. On s'acquitte d'un devoir élémentaire d'un gouvernement et on le fera avec toute l'attention et la compréhension souhaitables.

Maintenant, je voudrais vous poser juste une brève question. Vous avez parlé - je pense que c'est monsieur qui représente la firme de comptables - de l'implication de l'Université du Québec dans SOCCRENT, société pour le lancement de nouvelles entreprises. J'aimerais que vous m'expliquiez de quelle manière l'Université du Québec est impliquée là-dedans. Est-ce sous la forme de mise de fonds?

M. Boivin: Cela a été, pourrait-on dire, une contribution de prestige. L'idée a germé. Lors de réunions, de sommets régionaux, il a fallu lancer l'idée et, comme cela demandait l'implication de sommes importantes - entre parenthèses, SOCCRENT va disposer d'un capital investi et payé de 10 000 000 $ au départ - les grandes industries se sont impliquées fortement. Vous le verrez dans le mémoire qu'Alcan va déposer tout à l'heure, je pense qu'elle le mentionne. Les grandes industries se sont impliquées énormément et, pour assurer le succès, les grandes industries ont demandé aux gens d'affaires locaux de s'impliquer aussi financièrement, d'investir.

À ce moment, comme c'étaient des

sommes importantes - on parle de 10 000 000 $, je le répète - l'université, principalement M. le recteur, a joué le rôle de catalyseur ou de parrain pour mettre en marche le mouvement qui a mené à la fondation de SOCCRENT, Cela prenait une personnalité ou une institution compétente, indépendante, dégagée et hors de tout soupçon ou de velléité personnelle. L'université, à ce moment, a joué un rôle vraiment formidable. Aujourd'hui, SOCCRENT est lancée au moment où on se parle, elle va annoncer, probablement cette semaine, la création de sa première industrie, sa première réalisation. Juste un mot, M. le ministre, l'université maintenant participe de moins en moins à SOCCRENT parce que SOCCRENT est lancée.

M. Ryan: Je comprends très bien que M, le recteur ait pu être invité à présider un comité au début ou à donner son concours. Ce que je veux vous demander: Est-ce qu'il incombe à l'université de se prononcer, comme université, de prendre position sur des choses comme celles-là, que des universitaires le fassent et que même le recteur, dans certaines occasions, donne son concours? Est-ce que, d'après vous, il est dans la mission de l'université de s'embarquer dans des projets, comme université?

M. Boivin: Cela dépend si vous référez à ce qu'on entendait par l'université traditionnelle ou à une université qui peut être présente chez nous. L'université traditionnelle, peut-être que des gens vont prétendre que ce n'est pas son rôle, mais, si on parle du rôle que l'université s'est efforcée de jouer dans notre région, je croîs qu'elle joue parfaitement son rôle parce qu'elle sert d'agent motivateur ou catalyseur.

M. Claveau (Gérard): Permettez-moi d'ajouter, M. le ministre, que la création de SOCCRENT vient d'une idée émise lors du sommet économique de 1984 et des interventions qui se sont faites tout autour de cette question à savoir qui serait preneur du ballon. On en arrive toujours à cela lorsqu'on participe à des sommets. Et le preneur a été à la fois l'université, par l'intermédiaire d'un chercheur, M. Lapointe, et le milieu des affaires.

Voilà la contribution qu'on peut s'attendre d'avoir d'une université dans certains types de dossiers. Je pense que cela a été manifestement un bon actif. La preuve en est que c'est maintenant lancé et ce n'est plus la responsabilité de l'université. (12 h 45)

M. Bergeron: M. le Président, j'aimerais ajouter un point là-dessus. Je pense que l'université a déclenché le processus, mais elle y aura aussi contribué par ses ressources internes. L'avantage d'avoir une université dans une région est que cela amène dans la région énormément de matière grise qui peut contribuer sous différentes formes à la recherche, au marketing et à beaucoup d'autres choses. Cela n'est pas négligeable.

Il y a aussi un lien qui se fait bien avec SOCCRENT. On parle de l'annonce d'une première entreprise où SOCCRENT investira; ce sera annoncé vendredi. Je trouve intéressant que ce soit un finissant d'université maîtrise en PMO qui doit lancer l'entreprise. Je sais que, dans quelques semaines, on donnera un mérite régional à un autre Finissant en gestion de PMO qui, en fait, excelle dans une jeune entreprise qu'il a créée lui-même.

Ce programme de PMO, plus les étudiants ayant une formation en administration, plus SOCCRENT, plus les efforts qu'on va fournir feront que la région se prendra davantage en main.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Mme la ministre... Mme la députée de Chicoutimi.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela vous fait plaisir. Vous aimeriez avoir un ministre dans votre comté.

Une voix: Ce ne sera pas long. Ce ne sera pas long.

Mme Blackburn: M. le Président, je vois que le temps passe rapidement. Je voudrais remercier le président du CRCD et les gens qui l'accompagnent, M. Bergeron, M. Boivin, M. Jacques et M. Lemelin, de leur participation aux travaux de cette commission. Je pense qu'il n'y avait pas de meilleure façon d'illustrer de manière plus concrète le rôle et l'importance d'une université dans le développement économique et social d'une région.

Le ministre vous faisait remarquer que, si les populations s'impliquaient de façon aussi assidue, aussi intensive dans le développement des autres universités dans la province, cela pourrait avoir des résultats heureux. Cela veut dire que c'est probablement impossible dans certains centres quand les universités n'ont pas cette préoccupation qui m'apparaît essentielle d'être ouvertes et accessibles à toute la population. C'est possible et réalisable parce qu'on est dans une région et parce que cette région a décidé avec l'université qu'on en tirerait le meilleur avantage possible et le plus grand bénéfice.

Tout à l'heure, le ministre s'interrogeait sur le rôle qu'avait joué l'université dans la création de SOCCRENT. Ce qu'il est important de rappeler ici, c'est

que, comme l'a dit tout à l'heure le recteur, c'était le lieu le plus neutre où on ne risquait pas de voir des organismes se tirailler pour savoir qui aurait la paternité d'une telle création. C'est pourquoi il était important que l'université joue un rôle dans la création de SOCCRENT, Je voudrais rappeler qu'elle n'a pas investi. Ce qui a été investi, c'est un local et ce local a été fourni par la Fondation Sagamie. Les salaires du chercheur étaient payés par une grande entreprise de chez nous.

Ce rôle de catalyseur de l'Université du Québec è Chicoutimi a été extrêmement important. Si le ministre écoute un peu, je pourrais peut-être essayer d'expliquer la différence qu'il y a entre le rôle d'une université dans une région par rapport au rôle d'une université dans un grand centre. Il existe dans les grands centres des lieux d'expertise et ils sont multiples, alors que, dans les régions, le seul lieu d'expertise, souvent, c'est l'université. C'est pourquoi il ne faut pas comparer l'implication d'une université dans une région avec celle d'une université dans un grand centre. Elles ont des rôles fort distincts en raison, précisément, de la taille, des populations et des niveaux de développement de ces régions.

Je ne voudrais pas vous retenir plus longtemps, sauf que j'aurais une question très générale. Elle s'adresserait probablement à M. Boivin ou à M. Bergeron. M. Boivin a fait état tout à l'heure de façon fort éloquente de l'importance de l'université dans la région par rapport à sa propre entreprise. Il nous a peu parlé, cependant, de la présence de l'université dans une région par rapport aux besoins de perfectionnement du personnel, mais il pourrait peut-être nous en parler un peu tout à l'heure à la table ou à l'extérieur. Ma question est la suivante: Le Conseil du patronat reconnaissait hier que le Québec devait, s'il voulait être compétitif sur le plan international, hausser le degré de scolarité au Québec. Bien qu'on ait fait des progrès remarquables au cours des dernières années, on n'a pas réussi à rattraper la scolarité des autres provinces et des États-Unis pour une raison fort simple: même si on a fait des progrès remarquables, les autres ne se sont pas arrêtés pour nous attendre; on est encore en période de rattrapage et on doit continuer à investir là-dedans si on veut être compétitif. Vous connaissez les difficultés que pose le financement des universités. Dans votre mémoire, M. Boivin, vous dites que l'université doit accroître sa présence dans le milieu et, conséquemment, obtenir les ressources indispensables pour répondre pleinement à cette mission. Estimez-vous que le gouvernement doive investir davantage?

M. Boivin: À mon avis, oui. On vient de publier certaines statistiques. M. le recteur, d'ailleurs, dans son discours, y a référé à juste titre. À long terme, l'investissement le plus rentable pour une population, pour un pays, c'est d'investir dans sa population, dans la matière grise, dans le développement et dans l'instruction. On ne parle pas de grand développement, mesdames, messieurs. On parle simplement de développement d'études de 1er cycle, de 2e cycle et de 3e cycle. On est loin d'être rendus là où certains pays sont rendus. On ne parle pas de cela, on ne veut pas se rendre là ce matin. Comme vous le disiez si bien, madame, on est encore loin du perfectionnement que d'autres pays ont atteint et même que d'autres provinces ont atteint. Ce dont on parle, c'est quasi un juste minimum pour rester parmi les gens qu'on peut qualifier de relativement développés.

Le Président (M. Parent, Sauvé):

Madame.

Mme Blackburn: M. Bergeron.

M. Bergeron: J'aurais le goût de dire que le perfectionnement est un besoin très grand dans une région comme la nôtre, étant donné qu'il y a une université, mais qui n'est quand même pas en plein centre de la région. Il n'est pas toujours facile pour l'université, avec ses budgets, de pouvoir s'approcher un peu plus près des besoins particuliers des régions, par exemple du côté ouest du lac Saint-Jean. Il y a justement des frais un peu trop onéreux de ce côté-là. Quand on parle de perfectionnement, on parle des adultes, des gens sur le marché du travail. Je pense que ce n'est pas toujours facile pour ces personnes-là de prendre des cours du soir sans que l'université s'approche un peu plus. Je pense qu'il faudra avoir des subventions un peu plus généreuses pour permettre ce genre de satisfaction des besoins.

Le Président (M. Parent, Sauvé): On conclut.

Mme Blackburn: En concluant? Comme le temps passe vite! Le recteur me faisait remarquer tout à l'heure que la période de réchauffement prend toujours un peu de temps. On est meilleur quand le temps est presque écoulé. Sûrement que vous aurez l'occasion d'être entendus sur d'autres tribunes. Je voudrais vous remercier de votre participation aux travaux de cette commission. Je voudrais également adresser mes remerciements à tous ceux et celles qui ont appuyé la démarche de l'université. Je voudrais également vous remercier - le président l'a fait un peu tout à l'heure -d'avoir accepté d'alléger un peu les travaux de cette commission en vous regroupant. Je

pense bien que cela n'enlève pas la qualité générale des interventions. La quantité serait simplement venue répéter, je pense, le message initial, c'est-à-dire que l'université joue un rôle vital dans le développement économique et social de notre région.

Je ne pourrais terminer, cependant, sans revenir brièvement sur un paragraphe du mémoire du CRCD, en page 2, où on cite les propos du présent gouvernement qui dit: "II convient d'instaurer une forme de régularité et de permanence à la concertation gouvernement-régions, et c'est d'abord et avant tout la région, par l'intermédiaire de ses représentants, qui est responsable de la préparation de la démarche." Cela ne me semble pas très cohérent avec la recommandation d'un certain rapport Gobeil qui recommande l'abolition des conseils régionaux de concertation et de développement, les CRCD. J'ajouterais que, sur cette question du rôle des CRCD comme de l'avenir du siège social de l'UQ, comme de la restructuration des organismes de recherche où l'on confond, finalement, recherche fondamentale, recherche appliquée et recherche et développement... Sur la tâche des professeurs, on règle assez facilement le problème de financement des universités par une équation mathématique. On dit tout simplement: Augmentons de 50 % la tâche des professeurs et on va avoir résolu une partie du problème de financement. Cela illustre, je pense bien, que les personnes qui ont préparé ce rapport ou ne connaissaient vraiment pas ce dont elles parlaient ou, si elles le connaissaient le rationnel nous échappe, ce qui me fait dire qu'il faudrait peut-être qu'elles viennent nous l'expliquer. On finirait peut-être par comprendre, ce dont je doute un peu.

Messieurs, je vous remercie infiniment de votre présence ici et de votre participation aux travaux de cette commission.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la députée. M. le ministre.

M. Ryan: Je commencerai par apporter quelques précisions faisant suite aux propos que vient de tenir la députée de Chicoutimi sur la coordination du développement régional. Le ministre responsable du Développement régional a rendu publique ces temps derniers la politique du gouvernement en matière de développement régional. Je pense que la députée de Chicoutimi ferait bien de se mettre à l'heure d'aujourd'hui. Elle cite des passages d'un document qui est déjà dépassé. Sur ce point précis, le gouvernement a défini et arrêté sa politique par voie d'arrêté ministériel il y a déjà plusieurs semaines. Cela a été communiqué par le ministre la semaine dernière. Je pense qu'on pourrait au moins se mettre à l'heure de ces développements. Cela veut dire que les sommets économiques et sociaux continueront. Leur permanence et leur continuité seront assurées par des organismes du genre du vôtre. Cela variera selon les régions, je pense qu'on n'a pas de modèle uniforme. Contrairement à ce que l'ancien gouvernement faisait, on tient compte des diversités régionales et on fait preuve de souplesses. Par conséquent, de ce côté, je pense qu'on aura quelque chose de beaucoup mieux défini, de beaucoup plus clair que ce qu'on avait auparavant.

J'ai des nouvelles à part cela. C'est que les députés de l'Opposition pourront participer à la préparation et à la réalisation des sommets, tandis que, sous le gouvernement qui était celui de votre parti, ils étaient exclus. Ils étaient gardés à l'extérieur. On aurait eu l'air fin dans votre région, cinq députés de l'Opposition, s'il avait fallu qu'il y ait une politique gouvernementale disant: Les députés de l'Opposition ne participent pas. Mais, ce n'était pas plus intéressant pour nous dans les Laurentides quand c'était cela, la politique. Aujourd'hui, je peux vous dire qu'il y aura beaucoup plus d'objectivité et de démocratie véritable. Cela étant dit, vous pourrez continuer, par conséquent, de nous appuyer de vos bons conseils et de vos représentations.

J'ai été à même de vérifier à plusieurs reprises l'excellent travail qu'accomplit le Conseil régional de concertation et de développement du Saguenay-Lac-Saint-Jean-Chibougamau-Chapais. J'ai eu de nombreux contacts avec lui par le passé. Je suis très heureux, en conséquence, que vous soyez venus présenter vos représentations à l'appui des besoins que nous a fait valoir l'Université du Québec à Chicoutimi. J'ajoute simplement une phrase par souci d'honnêteté avec vous. Il est facile de définir l'objectif que vous énonciez à la page 6 de votre mémoire et plus difficile de le réaliser dans les faits. Cela va demander beaucoup de discernement, beaucoup de réalisme, beaucoup de sens de la mesure également et de collaboration entre tous les éléments de votre région et les différents services du gouvernement qui peuvent être impliqués. Je veux vous assurer, en ce qui nous touche, que nous sommes prêts à regarder dans la voie que vous avez définie. Nous ne mettons pas de balise ou d'obstacle au départ. Nous serons obligés, par contre, d'exiger que chaque développement qui sera proposé soit appuyé sur des dossiers solides, des dossiers qui répondent à des besoins véritables et qu'on ne veuille pas procéder à des développements seulement pour le désir d'avoir une chose qui serait absolument universelle. Vous convenez vous-mêmes que ce n'est pas possible. Je pense que, sur cette

base, il sera très intéressant d'envisager au cours des mois et, je l'espère bien, des années à venir une collaboration fructueuse avec votre région. Merci d'être venus.

Le Président (M, Parent, Sauvé): Merci, M. le ministre, merci, Mme la députée; merci, M. Claveau. Messieurs, la commission parlementaire de l'éducation suspend ses travaux jusqu'à 15 heures, alors qu'elle entendra la Société d'électrolyse et de chimie Alcan Ltée.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 5)

Le Président (M. Parent, Sauvé): La commission permanente de l'éducation poursuit ses travaux et accueille la Société d'éleetrolyse et de chimie Alcan Ltée, de la région de Chicoutimi, c'est-à-dire de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Ceci fait suite à la venue ce matin en commission parlementaire de l'Université du Québec à Chicoutimi. La société d'éleetrolyse fait partie du groupe qui vient appuyer les demandes et les revendications et vient aussi justifier les interventions de l'Université du Québec à Chicoutimi.

Société d'électrolyse et de chimie Alcan Ltée

Le groupe est représenté par M. Robert Salette qui est le vice-président régional. M. Salette, bonjour, nous vous souhaitons la bienvenue et nous vous remercions beaucoup d'avoir accepté de venir rencontrer la commission parlementaire de l'éducation.

Je veux aussi vous remercier pour l'esprit avec lequel vous avez accepté notre demande de décaler votre intervention à cette commission parlementaire. D'habitude, on donne une heure et demie à une université, et on s'était entendu pour un bloc de trois heures environ. Par contre, les échanges ont été tellement intéressants et enrichissants pour les deux parties qu'on n'a pas pu se limiter à l'intérieur du cadre prévu. C'est la raison pour laquelle nous avons dû décaler votre témoignage. Nous avons beaucoup apprécié la façon dont vous avez accepté de collaborer avec nous.

On a environ 45 minutes, donc jusqu'à 15 h 50 ou 15 h 55, pour passer en revue votre intervention et aussi pour mettre en marche la période d'échange ou de dialogue avec les membres de la commission.

Si vous voulez bien, M. Salette, nous présenter les gens qui vous accompagnent et enchaîner avec votre présentation.

M. Salette (Robert): À ma droite, M. Robert Lavoie, qui est directeur au complexe de Jonquière pour les services d'appui technique. À mon extrême gauche, M. Claude Tremblay, coordonnateur en formation du personnel, qui depuis 20 ans consacre beaucoup de réflexion sur le sujet; et M. Nagy, que vous avez rencontré ce matin lors de la présentation de l'université et qui pourra peut-être enrichir nos réponses lorsque ce sera la période des questions.

M. le Président, mesdames et messieurs les membres de la commission, mesdames et messieurs, permettez-moi d'abord de vous rappeler ce que nous sommes et pourquoi nous sommes ici. Alcan, au Saguenay-Lac-Saint-Jean, c'est plus de 8000 personnes travaillant à produire de l'aluminium dans près de 20 installations: centrales hydroélectriques, usine de chimie, usines d'électrolyse, centres de coulée, centre de recherche, usines de transformation, port de mer, compagnie de chemin de fer et usines de services, toutes ces installations étant distribuées un peu partout sur le territoire de cette grande région qu'est le Saguenay-Lac-Saint-Jean.

Alcan, c'est aussi une communauté scientifique, tant à l'intérieur de son centre de recherche que dans ses usines, qui ne saurait vivre pleinement sans retrouver ses pairs dans son environnement.

Mon objectif, aujourd'hui, s'insère dans un prolongement logique et dans un renforcement de liens déjà étroits entre l'Université du Québec à Chicoutimi et notre société industrielle car il nous faut bien le souligner, ces deux organisations ne sont pas des inconnues l'une pour l'autre. Depuis la fondation de l'UQAC, à la fin des années soixante, cette université et Alcan ont en maintes occasions créé des liens par une collaboration plutôt informelle au début et ce, grâce à des gens avant-gardistes, peut-être plus convaincus que d'autres des nécessités et de la pertinence des relations monde universitaire-industrie. Depuis quelques années, cette collaboration s'est étendue, officialisée et mieux structurée.

À plusieurs reprises, nous avons eu l'occasion de confier à des professeurs ou à des équipes de l'UQAC, spécialistes des communications organisationnelles, de la santé-sécurité, des sciences appliquées, de la physiologie du travail - et j'en passe - des projets de recherche relatifs à des problèmes précis que nous rencontrions. Cette collaboration a donné l'occasion à nos gestionnaires d'obtenir l'avis d'experts en même temps qu'elle permettait aux professeurs et aux étudiants de vérifier leurs approches théoriques et leurs méthodes en milieu réel de travail.

De plus, Alcan a collaboré avec le module de génie unifié à mettre sur pied un système de tutorat mixte où l'on retrouve un professeur et un ingénieur d'Alcan qui, conjointement, encadrent le projet d'un

étudiant de façon à lui donner une densité plus concrète. De 1979 à 1985, on compte plus de 80 de ces projets dont les sujets de recherche vont de l'étude d'un matériel granulaire pour l'absorption des pertes d'huile autour des transformateurs à la conception d'un échantillonneur automatique d'alumine, en passant par l'étude d'un système pour mesurer le solide liquide dans un décanteur et le développement d'un appareil servant à mesurer le profil de gelée dans une cuve électrolytique.

Ce ne sont là que quelques exemples qui ne donnent, nous le savons bien, qu'un très faible aperçu de la collaboration existante. Nous ne voudrions pas abuser du temps de cette commission en donnant lecture d'une langue liste de projets à la terminologie fastidieuse.

Le 27 janvier dernier, des représentants d'AIcan International dont dépend, entre autres, le Centre de recherche et de développement Arvida, des représentants du Conseil de la recherche en sciences naturelles et en génie et des représentants de l'Université du Québec à Chicoutimi ont procédé à la signature d'une convention tripartite de recherche dans le cadre du programme conjoint universités-industries.

Le projet d'envergure des fours de refonte et des fours de coulée présente pour nous une importance primordiale puisque tout le métal produit passe par là. Jusqu'à maintenant, nous en avons une connaissance plutôt empirique, car nous les utilisons presque constamment, mais de façon intermittente, ce qui entraîne, nous en sommes a priori convaincus, des pertes d'énergie appréciables. Auparavant, nous n'avions d'autre choix que l'expérience. Mais, depuis quelques années, de nouvelles générations d'ordinateurs permettent de modéliser ce qui s'y passe et de théoriquement dégager les procédés d'opération les plus efficaces, les plus rentables. C'est ce besoin que devrait combler le projet en collaboration avec le Département des sciences appliquées et le CRSNG, qui s'étendra de janvier 1986 à janvier 1989. Le coût total de cette recherche équivaudra approximativement à 500 000 $. C'est là une occasion pour les scientifiques de notre centre de recherche et les scientifiques du Département des sciences appliquées de collaborer étroitement à l'intérieur de ce projet d'envergure.

Cependant, ce n'est pas là une première. Il y avait déjà eu collaboration pour une recherche sur la modélisation des opérations des fours à feux mobiles. Il ne faudrait pas, non plus, oublier le projet conjoint UQAC-SECAL visant à améliorer l'efficacité des épurateurs à balles de façon à réduire encore davantage la nocivité des émissions atmosphériques, surtout au niveau des hydrocarbures aromatiques polycycliques.

Cette recherche dure depuis deux ans et entraînera pour l'Alcan des déboursés de 250 000 $.

Il existe de nombreux autres petits projets que nous ne mentionnerons pas ici, mais qui indiquent bien la persistance et le caractère pragmatique de nos relations.

Outre les projets de recherche en commandite ou conjoints, Alcan et l'UQAC collaborent de multiples autres façons, Alcan a contribué financièrement pour un montant de 125 000 $ et indirectement, par l'entremise de ses cadres qui ont siégé au conseil d'administration, à la Fondation de l'Université du Québec à Chicoutimi. Cette fondation est un organisme bienfaiteur dont l'objectif principal est d'accorder des subventions à des chercheurs de cette institution.

En ce qui a trait à la Fondation Sagamie, Alcan y a versé une contribution de 100 000 $ et ses cadres ont également siégé et siègent encore au conseil d'administration.

Alcan a également encouragé et encouragera les recherches des 2e et 3e cycles par une bourse d'excellence annuelle de 10 000 $ s'adressant à des étudiants dont les travaux font preuve d'une pertinence régionale dans les domaines de la socio-économie, des sciences pures et des sciences économiques et administratives.

Un événement d'importance a eu lieu au Saguenay-Lac-Saint-Jean en juin dernier -on y a référé ce matin - il s'agit du lancement de la Société en commandite pour la création d'entreprises (SQCCRENT) où, avec la collaboration d'autres grandes entreprises et de divers agents du milieu, Alcan et l'UQAC ont joué un rôle de catalyseurs. Cette société a comme objectif de développer les PME et de combler les baisses d'emploi qu'une modernisation inévitable entraînera dans la région. (15 h 15)

Nous nous en voudrions de passer sous silence une collaboration qui démontre le souci grandissant qu'a l'Université du Québec à Chicoutimi de coller aux besoins du milieu: il s'agit de la préparation de séries de cours que l'on pourrait qualifier de "sur mesure", avec le support, pour les employés d'Alcan à tous les niveaux.

C'est ainsi qu'en janvier 1982 démarrait le certificat de 1er cycle en gestion de l'entretien; nous devrions avoir maintenant près de 50 diplômés. Depuis le printemps 1982, existe le certificat en études individualisées pour les formateurs industriels d'AIcan. Quinze étudiants ont ou sont sur le point de terminer. On retrouve également dans le même état d'esprit une maîtrise en gestion de projets et le tout dernier-né, un cours spécialisé en ergonomie; jusqu'à maintenant, 110 participants ont suivi ce cours. L'intéressant est que toutes ces expériences pédagogiques peuvent par la suite

profiter à d'autres organisations du milieu.

M. le Président, mesdames et messieurs les commissaires, tout ce que nous avons dît jusqu'à maintenant exprime que, comme grande entreprise, Alcan considère l'UQAC comme de plus en plus nécessaire et indispensable à l'équilibre du système socio-économique régional. Avec le temps, cette maison d'enseignement a appris, à notre avis, à mieux saisir les besoins des autres éléments du système et, conséquemment, à mieux les satisfaire. De la même façon, nous avons appris à mieux communiquer et à mieux puiser dans nos ressources réciproques par des relations déjà fructueuses et qui deviendront de plus en plus de type "partnership" à mesure que chez elle comme chez nous toute une série de préjugés, hérités d'un autre âge, tomberont.

C'est pourquoi nous vous prions respectueusement de bien examiner tous les aspects du problème avant de recommander une diminution de la capacité présente ou d'entraver le développement normal de cette institution qui, en grande partie, fait que nous sommes passés du statut de région périphérique à celui de région semi-périphérique. Nous sommes donc d'opinion qu'il serait extrêmement dommageable, à la fois pour cette maison d'enseignement et pour le milieu, qu'elle soit réduite à n'être plus qu'un prolongement du cours collégial par une limitation de l'enseignement au 1er cycle.

Le professorat universitaire et la recherche se nourrissent réciproquement. Nous nous retrouverions alors face à des cours de 1er cycle appauvris et à un corps professoral en transit et démotivé.

C'est chez les chercheurs professeurs et étudiants du 2e et du 3e cycle que les entreprises comme la nôtre et autres organisations de l'environnement vont chercher l'expertise dont elles ont besoin.

Nous comprenons très bien que l'Université du Québec à Chicoutimi ne peut se développer inconsidérément et que les fonds gouvernementaux sont limités, mais on devrait, cependant, lui assurer fermement des champs où elle a déjà développé ou pourra développer des activités de recherche à moyen et long terme, et ainsi attirer des chercheurs qui feront son renom et provoqueront des retombées économiques et intellectuelles profitables à la communauté régionale dans son ensemble. Si on veut demeurer réaliste dans la détermination de ces domaines privilégiés pour l'UQAC, on ne saurait ignorer la présence très importante pour l'économie régionale des industries reliées au bois et à l'aluminium.

Les paramètres utilisés pour le financement universitaire devraient, à notre avis, être révisés et tenir compte de la très vaste étendue du territoire que l'Université du Québec à Chicoutimi doit desservir, de même que de la très faible densité démographique de ce même territoire.

Dans toutes leurs transactions avec l'Université du Québec à Chicoutimi, les divers paliers de gouvernement et les divers organismes subventionnaires devraient prendre en considération que, dans une région comme la nôtre, l'université, en plus de jouer ses rôles traditionnels d'enseignement et de recherche, joue également un rôle important de réflexion et d'action comme moteur de développement économique et social, et que cette dimension ne saurait être ignorée.

Il importe de bien saisir la nouvelle dynamique inscrite dans le développement des communautés par l'apparition de la technologie informatique. Le développement ne provient plus tant de l'amoncellement de capitaux en un endroit donné que de l'amoncellement d'information et de cerveaux possédant les capacités de traiter cette même information. C'est pourquoi nous croyons qu'il serait superflu de distribuer des subventions et d'élaborer des structures propres à susciter de l'emploi si, d'autre part, on enlève à cette région son principal noeud d'accumulation, de traitement et de distribution de l'information.

Malgré les liens tangibles qui existent avec d'autres universités, nous ne saurions nous passer de la proximité d'une université suffisamment équipée de ressources humaines et physiques pour favoriser la recherche-application nécessitant des contacts quotidiens.

M. le Président, mesdames et messieurs les commissaires, l'histoire a lié Alcan au Saguenay- Lac-Saint-Jean. Les mentalités et les conditions socio-économiques s'étant modifiées, nous devenons de moins en moins un gros bateau dans la mare et de plus en plus un partenaire. Un partenaire d'importance, certes, mais tout de même un des partenaires ayant partie prenante à l'économie régionale et ayant intérêt à ce que ses autres partenaires se portent bien.

C'est ce type de relations que nous avons développé et développerons avec l'UQAC: des relations entre deux organisations suffisamment grandes et complexes et possédant des expertises et des objectifs d'excellence suffisamment semblables pour échanger réciproquement et fructueusement des services. Nous ne pouvons aujourd'hui que formuler un voeu: celui que l'Université du Québec à Chicoutimi puisse conserver et développer les moyens nécessaires à la continuité et à l'amélioration de tels échanges. Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie beaucoup, M. le vice-président. Je dois, à ce moment-ci, vous faire part d'un message et vous demander d'excuser le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science qui est retenu

d'une façon tout à fait inattendue au Conseil des ministres. Dans la mesure du passible, il se joindra à nous dans les minutes qui suivent. Il s'en excuse et se dit très malheureux de la situation. Ce sont souvent des obligations sur lesquelles on n'a aucun contrôle.

Je reconnais l'adjointe parlementaire au ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Merci, M. le Président. Au nom du ministre, j'aimerais d'abord vous remercier d'être présents aujourd'hui pour témoigner en faveur du rôle très important que joue l'Université du Québec à Chicoutimi et de partager avec nous votre propre expérience en ce qui concerne vos liens qui sont, évidemment, très étroits avec l'Université du Québec à Chicoutimi. C'est évident que la présence d'Alcan qui existe depuis longtemps et votre efficacité, surtout dans vos efforts sur le plan de la recherche et du perfectionnement de vos travailleurs, ont été grandement renforcées par la présence de l'Université du Québec à Chicoutimi.

Ma question porte sur la mission de l'université et surtout sur l'avenir de l'Université du Québec. Comme le ministre l'a dit ce matin, c'est évident que l'existence de l'université n'est pas remise en question. Mais ce que nous cherchons comme gouvernement pour tout le réseau universitaire au Québec, c'est peut-être quelque consolidation, quelque rationalisation pour que le réseau soit plus efficace, surtout peut-être sur le plan de la recherche. J'aimerais savoir quelles sont les orientations que vous privilégeriez dans la région pour l'université sur le plan de la recherche dans l'avenir.

M. Salette: C'est un sujet, évidemment, d'actualité. Nous avons un centre de recherche à Jonquière. Il serait très malhabile d'utiliser l'université pour faire des travaux de recherche qui feraient que l'activité de ce centre de recherche en soit amoindrie. Par contre, pour l'industrie de l'aluminium, pas simplement chez Alcan, mais un peu partout dans le monde, il y a un créneau qui s'ouvre au niveau de la recherche où des discussions intéressantes ont pris place avec l'université depuis un certain temps, et même les protocoles d'entente ont été signés il y a une semaine: c'est tout le domaine de la fonderie. Comme dans toutes les activités de formation ou de recherche qu'on fait avec l'université, une fois que les structures sont en place, que le personnel est bien rodé et que l'université est assurée de la qualité de son produit, on essaie toujours d'ouvrir cette expertise à d'autres entreprises.

Dans le domaine de l'industrie de l'aluminium, vous savez tous qu'il y a la compagnie Reynolds, vous savez tous qu'il y a maintenant la compagnie Pechiney. Nous espérons qu'une fois que ce groupe de recherche sera mis en place, une fois qu'il aura entrepris des projets venant de chez nous et qu'il sera bien rodé, qu'il aura fait ses classes, M. le recteur et M. Nagy s'assureront qu'aussi bien la compagnie Reynolds que la compagnie Pechiney voient à lui donner des contrats en commandite. De ce côté, nous voyons avec l'université dans le domaine de l'industrie de l'aluminium un créneau très intéressant pour l'avenir.

Mme Dougherty: Si on considère l'ensemble des efforts de l'université... Vous avez parlé des liens strictement avec Alcan, mais je cherche une vue encore plus large des possibilités de la recherche dans la région. Est-ce que la mission de l'université sur le plan de la recherche doit être plutôt une mission de recherche appliquée liée aux besoins évidents de la région ou est-ce qu'elle a un rôle à jouer aussi dans la recherche fondamentale?

M. Salette: Je pense que toute université, pour pouvoir avoir au niveau de la recherche appliquée une qualité, doit aussi enrichir son activité scientifique de recherche fondamentale. Évidemment, la proportion entre l'effort consenti à la recherche appliquée et l'effort consenti à la recherche purement fondamentale doit être établie de façon adéquate. C'est certain qu'avec la présence de la compagnie Alcan au Saguenay, c'est certain qu'avec la haute concentration de l'industrie du papier et du bois, ce sont deux créneaux où une recherche appliquée est peut-être plus accessible à court terme, mais, à mon point de vue, je crois qu'il faut aussi avoir une recherche fondamentale.

Mme Dougherty: Est-ce que la recherche que vous faites ou que vous avez l'intention de faire conjointement avec l'Université du Québec est unique au Québec et au monde même?

M. Salette: Non, c'est une approche qui est déjà bien en place en Europe et dans certains secteurs américains. Au Québec, nous devons apprendre et découvrir cette nouvelle philosophie ou cette nouvelle façon de faire les choses. Du reste, nous avons aussi d'autres projets de recherche qui ne sont pas avec l'Université du Québec à Chicoutimi. Nous travaillons beaucoup avec l'Université Laval dans le domaine des relations du travail. Nous travaillons actuellement avec l'Université de Sherbrooke dans le domaine des bétons. Nous travaillons avec l'Université McGill dans le domaine de la santé. Donc, ce ne sont pas des

phénomènes nouveaux, sauf que la proximité de l'Université du Québec à Chicoutimi et de nos installations fait que nous pouvons nous attaquer à des projets beaucoup plus nombreux. (15 h 30)

Mme Dougherty: Très bien, merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la députée de Jacques-Cartier. Je reconnais maintenant le porte-parole officiel de l'Opposition en matière d'éducation supérieure, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. Salette, M. le vice-président, messieurs, il me fait plaisir que vous ayez accepté l'invitation qui vous a été faite de vous présenter en commission parlementaire. Je dois ici rappeler que l'invitation qui a été faite de se présenter en commission parlementaire s'adressait à tous ceux et celles, à tous les organismes qui estimaient important d'intervenir sur cette question. De nombreux intervenants nous sont venus des régions et je dirais un peu moins des grands centres. Cela illustre vraiment l'intérêt et l'attachement que portent les organismes régionaux à leur université.

Le temps court toujours rapidement et, même si cela fait déjà quelques jours ou même plusieurs jours qu'on est en commission parlementaire, on réalise que c'est presque à la fin des interventions qu'on commence à sortir des choses importantes et intéressantes. Je vais donc passer immédiatement aux questions. Vous nous avez parlé de l'importance pour votre entreprise d'une université dans la région, mais, par ailleurs, ce que je trouve intéressant et à la fois un peu étonnant, c'est que vous avez, vous, dans votre entreprise, un centre de recherche extrêmement important en transformation de l'aluminium, probablement l'un des plus importants au Canada. Comment l'Université du Québec, avec les moyens qu'on lui connaît, peut-elle être utile à une entreprise comme la vôtre qui possède déjà des moyens considérables?

M. Salette: Elle est déjà utile seulement sur le point de l'effervescence scientifique. Une université qui serait seule dans le bois verrait aussi à péricliter assez rapidement et c'est la même chose pour nos centres de recherche. Les chercheurs qu'on a chez nous ont besoin d'être dans un milieu où ils peuvent échanger, accroître leur performance, acrroître leurs connaissances, pouvoir discuter avec d'autres personnes qui ont des doctorats ou des maîtrises et, ce point-là, l'université le joue très bien. Les liens entre le centre de recherche que nous avons à Arvida, ou à Jonquière, et l'université fonctionnent depuis déjà nombre d'années. Nous avons chez nous, au centre de recherche à Arvida, 23 chercheurs au niveau du doctorat; nous avons 18 chercheurs au niveau de la maîtrise et 20 au niveau du baccalauréat. Tous ces gens ont évidemment besoin de vivre dans un milieu qui leur permette de s'enrichir encore davantage.

Mme Blackburn: Au niveau des travaux de recherche proprement dits, vous utilisez également l'expertise de l'Université du Québec.

M. Salette: L'expertise de l'Université du Québec, mais une recherche beaucoup plus appliquée sur nos opérations qu'une recherche fondamentale.

Mme Blackburn: D'accord. On a parlé dans différents documents au cours des dernières années, et quelques intervenants ont un peu abordé la question ici mais ils l'ont plus effleurée qu'approfondie, de toute la question de la collaboration entre l'université et l'industrie, mais davantage sous l'angle des stages en milieu de travail tant pour les étudiants que pour les professeurs. Vous nous parlez d'une expérience qu'il y a chez vous. Y a-t-il également cette possibilité d'échanges où des chercheurs de votre centre de recherche pourraient aller, par exemple, donner des cours à l'UQAC et la même chose pour les professeurs qui pourraient à l'occasion tâter un peu plus le terrain en revenant un peu dans l'industrie? Est-ce que cela se fait? Est-ce souhaitable?

M. Salette: C'est un désir que je partage avec M. le recteur. Nous en parlons souvent, il nous reste maintenant à l'actualiser. Les projets de commandite font évidemment que les chercheurs ou les professeurs d'université, ou même les étudiants qui font partie d'une équipe, viennent chez nous pour travailler au projet, donc s'apprivoisent à l'industrie et aussi viennent chercher des besoins qui ne sont peut-être pas toujours connus. Cela leur permet de revenir avec les pieds sur terre. Là où on a un peu plus de difficulté autre que celle des gens de chez nous qui acceptent de donner des cours à l'université, c'est d'avoir un échange un peu plus long, sur une période de deux ou trois mois et même davantage, d'ingénieurs de chez nous. Mais en ce qui nous concerne, nos portes sont ouvertes et tout professeur qui voudrait se greffer à une équipe de travail ou même parfaire une recherche... On a eu une recherche dans le domaine de la santé avec deux professeurs de l'université, M. MacClean et M. Marcon, qui sont venus passer un été chez nous. On voudrait que cela se fasse plus souvent.

Mme Blackburn: Vous savez que, dans

le mandat de la commission, il y a à la fois les orientations dont on a plus longuement parlé avec les intervenants précédents, mais aussi il y a toute la question du financement. Quelques hypothèses - je ne dirais pas plusieurs - sont avancées. Il y en a une qui parle des frais indirects de la recherche. Ce que l'on dit, finalement, par rapport à cette question, c'est que les organismes subventionnaires ne paient pas les frais indirects de la recherche et, dans certains cas, cela peut s'élever entre 35 % et 50 % du coût de la recherche. Je sais qu'il y a plusieurs projets de recherche en commandite avec l'université. Est-ce que la pratique, chez vous, est de payer la totalité des frais indirects? Comment cela se présente-t-il?

M. Salette: Cela peut prendre différentes formes. Évidemment, si c'est quelqu'un de l'université qui vient frapper à notre porte et qui nous dit: On aimerait bien faire une recherche dans un certain domaine, à ce moment-là, nous nous servons beaucoup plus des laboratoires et l'aide financière se limite à très peu sauf le fait d'assigner souvent des ressources de chez nous pour pouvoir mieux encadrer ou aider le chercheur qui est dans nos installations.

Nous avons des projets qui sont une commande directe à l'université. Le projet que nous avons actuellement, qui en est à sa deuxième année, est pour améliorer la captation des gaz sortant de nos épurateurs. Nous avons payé ce projet ou nous allons le payer, comme n'importe quel autre projet qui serait fait par une entreprise privée, c'est-à-dire que l'université nous dit: Voici la facture, si vous voulez que l'on fasse votre recherche. La première phase a coûté 100 000 $ et la deuxième en coûte 150 000 $. On paie l'ensemble des coûts, à ce moment-là.

Il y a des projets, aussi, de l'université et de l'entreprise où, souvent, des fonds qui viennent du fédéral sont impliqués. La norme fédérale exige qu'il y ait une participation en biens et services ou en argent, venant de l'entreprise, qui va chercher jusqu'à 38 %.

Mme Blackburn: Donc, ce n'est pas vraiment là que l'on pourrait aller chercher des revenus additionnels pour les universités.

M. Salette: Chez les autres entrepreneurs, je ne le sais pas.

Mme Blackburn: En tout cas, pas chez vous. Par ailleurs, hier, on a rencontré le Conseil du patronat qui nous disait que, si le Québec devait devenir et rester compétitif en matière de développement économique, on devait hausser la scolarisation des Québécois.

En même temps que le Conseil du patronat, différents intervenants reconnaissent l'importance de la qualification des personnes dans la capacité des entreprises à devenir performantes et à faire des profits. Comme plusieurs intervenants invoquent le fait que la personne qui tire le plus d'avantages de la scolarisation, c'est celle qui la reçoit et, en même temps, l'entreprise qui l'embauche... Sur le premier postulat, on dit: Étant donné que c'est l'étudiant qui reçoit le plus d'avantages de sa formation à tous les points de vue, il devrait donc davantage participer au financement de l'enseignement supérieur. Comme le deuxième intervenant - c'est surtout l'entreprise qui embauche ces personnes - en tire des avantages considérables, est-ce qu'on peut penser - c'est une recommandation ou, plutôt, une suggestion, une hypothèse qui est avancée dans l'avis de l'École polytechnique est-ce qu'on peut penser que les entreprises consentiraient... Est-ce qu'il serait souhaitable que l'on pense à un impôt éducation dans les entreprises? En France, cela se fait; évidemment, pas pour les mêmes raisons et avec d'autres modèles. C'est 2 % du revenu, en France, pour la formation de la main-d'oeuvre dans l'entreprise. Est-ce qu'on pourrait envisager un impôt éducation dans les entreprises?

M. Salette: La formule est peut-être originale, mais avec ce que je vous ai dit aujourd'hui, je n'ai pas fait le décompte, mais je pense que les 2 % sont certainement dépassés avec l'approche que nous préconisons. Ce n'est certainement pas une formule que nous allons mettre de l'avant demain matin, ou que nous suggérerons demain matin. Aussi, ce serait probablement difficile de gérer, de superviser et de définir dans quel champ d'action ces fonds iraient. Évidemment, si vous parlez à une entreprise, je ne pense pas que nous injecterons 2 % pour des cours en théologie ou en géographie. Ce serait dans un créneau très étroit, et je ne sais pas si ce serait rendre justice aux universités.

Mme Blackburn: On pourrait penser -brièvement, on terminera là-dessus parce que mon temps est écoulé - que ce que vous faîtes actuellement répond à des intérêts très particuliers de votre entreprise et à des fins propres à l'entreprise tandis que la scolarisation répond à un besoin à la fois de la collectivité et des entreprises. La collectivité paie sa part par nos impôts et les entreprises, qui sont les deuxièmes bénéficiaires après nos institutions, il serait peut-être envisageable qu'elles puissent aussi contribuer de façon générale par un impôt général. C'était le sens de la question. Cela allait au-delà des projets ou des contrats de recherche.

M. Salette: II faudrait peut-être le demander à l'université, mais je doute que

les fonds que nous versons à l'université pour différents projets en commandite autres que pour la partie physique où elle a à acheter l'équipement soient uniquement utilisés pour les secteurs avec lesquels nous fonctionnons. Je suppose que l'université, avec ces fonds, assure qu'il y a une redistribution équitable pour les autres secteurs.

Mme Blackburn: Je vous remercie.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Je reconnais maintenant le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.

M. Ryan: II me fait plaisir de vous saluer. Je m'excuse de mon retard, je devais participer à une réunion du Conseil des ministres où j'ai été retenu pendant un certain temps. J'ai pris connaissance avec intérêt de votre mémoire. Je pense que j'ai eu l'occasion de signaler ce matin combien je me réjouis des nombreux rapports qu'Alcan a établis avec le système d'enseignement à différents paliers, non seulement au niveau de l'université, mais aux autres niveaux également. Je pense que c'est une expérience extrêmement intéressante pour nous tous. Je me souviens que, quand nous avions mis au point certains chapitres du programme du Parti libéral du Québec en matière d'éducation, nous avions pris soin de nous renseigner auprès de personnes de chez vous quant aux attentes d'une entreprise comme la vôtre en matière d'éducation des adultes et les récits qu'on nous avait donnés avaient été très utiles.

Une question me vient à l'esprit en écoutant vos recommandations. Dans l'ensemble, je pense que nous sommes tous disposés à souscrire à l'essentiel des recommandations que vous présentez à la fin de votre mémoire. Évidemment, la mise en oeuvre de ces recommandations nécessitera plus d'argent qu'il n'y en a d'affecté présentement pour les universités. Je voudrais vous demander comment, selon vous, cet argent devrait être trouvé par le gouvernement. Est-ce que ce sera sous forme de taxes accrues, de déficits aggravés, de dépenses réduites des universités ou encore par d'autres sources que vous pourriez indiquer?

M. Salette: Je pense que l'université pourrait profiter de l'expérience que l'entreprise privée doit vivre. Alcan passe actuellement par une phase de restructuration et tout est remis en cause. Il serait peut-être sage pour les universités de faire un exercice semblable. À ce moment-là, on regarde tous les aspects, et les programmes qui n'ont pas la rentabilité voulue, évidemment, sont peut-être mis de côté pour un certain temps. On regarde les ressources humaines et physiques, on regarde la productivité de l'entreprise, on regarde son financement, on se demande si le financement venant de la clientèle devrait être majoré. Alors, il y a peut-être toute une brochette de choses qui devraient être regardées plutôt que de regarder uniquement les goussets du gouvernement ou encore d'augmenter le déficit. Je pense qu'une collaboration avec le gouvernement, la direction des entreprises et la direction des universités serait peut-être une chose à encourager. (15 h 45)

M. Ryan: D'après les observations que vous avez faites sur le fonctionnement de l'Université du Québec à Chicoutimi, est-ce qu'il y a des secteurs où vous envisageriez des exercices de rationalisation possible, souhaitable?

M. Salette: Je n'ai pas fait l'analyse de tous les secteurs de l'Université du Québec à Chicoutimi et ce serait malsain de ma part de me prononcer dans un domaine que je ne connais pas. Mais il y a peut-être un domaine que je connais plus, du moins où j'ai remarqué davantage que l'Université du Québec à Chicoutimi pouvait servir d'exemple à d'autres; c'est dans le domaine des services, où le faire-faire est très présent.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Salette. Je reconnais maintenant pour une dernière intervention la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord à nouveau vous remercier pour votre participation aux travaux de cette commission. Comme je vous le faisais remarquer un peu plus tôt, il y a peu d'entreprises de la taille de la vôtre qui ont trouvé utile de se présenter ici en commission parlementaire pour défendre l'importance des universités et des travaux de recherche et d'enseignement qui s'y font. Par ailleurs, je trouvais importante, pour une autre raison, votre présence ici. On sait actuellement qu'il y a un discours extrêmement comptable qui nous laisse penser qu'il y a un écart considérable entre ce qui s'appelle la formation, l'enseignement supérieur et les vues des entreprises. L'importance que vous attachez d'abord à l'Université du Québec à Chicoutimi mais, de façon générale, la nécessité que vous ressentez d'un accroissement des compétences de nos personnes trouveront, je le souhaite, des oreilles attentives à des niveaux qui, on le sait, semblent moins disposés à ouvrir les goussets. Le président du Conseil du trésor - parce qu'à la toute fin je pense bien que c'est lui qui décide ce qu'on donnera ou ne donnera pas aux universités - nous semble particulièrement

sensible à un discours qui vient du monde des affaires et des entreprises. À cet égard, je pense que votre présence ici n'est pas négligeable.

Je m'en voudrais de terminer cette séance sans relever ce qui a semblé être une affirmation tout à l'heure à la fin de ta séance de ce matin concernant l'avenir des CRCD. Je dois faire en partie amende honorable, mais en partie aussi rappeler que je n'avais pas tout à fait tort: les CRCD seraient maintenus - le ministre responsable du Développement régional l'a annoncé - sauf qu'on ne sait pas dans quel état on va ramasser le moribond, et qu'on ne connaît pas le mandat qui lui sera confié, non plus que le financement qui lui sera assuré. Le ministre s'est empressé de me donner les dernières nouvelles touchant son collègue ministre responsable du Développement régional. J'aurais été intéressée qu'il puisse nous dire également les distances que lui-même entend prendre par rapport aux recommandations du même ministre et du président du Conseil du trésor, M. Gobeil, particulièrement en ce qui concerne l'avenir du siège social de l'UQ.

Le Président (M. Parent, Sauvé): S'il vous plaît!

Mme Blackburn: Qu'il fasse état des distances que prend son collègue, M. Côté, à l'endroit des recommandations du rapport Gobeil, on est bien heureux de l'apprendre, mais j'ai hâte également de connaître les distances que le ministre entend prendre par rapport à certaines recommandations, je le rappelle, particulièrement quant à l'avenir du siège social de l'UQ. Messieurs, je vous remercie infiniment de votre participation et au plaisir.

M. Salette: J'aimerais ajouter...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui, monsieur.

M. Salette: ...une petite statistique... Le Président (M. Parent, Sauvé): Allez!

M. Salette: ...qui n'est pas toujours connue. Vous avez vu, par les projets et la relation que nous avons avec l'université et les sommes que nous investissons, que nous considérons la qualité du travail fait par l'université. Un autre produit de l'université, évidemment, ce sont les gens qui reçoivent le diplôme. J'ai des statistiques ici qui portent sur 1125 diplômés que nous avons au Canada. Laval vient en tête avec 15 %, McGilI, 11 %, Montréal - si on inclut Polytechnique et HEC - 14 % et l'Université du Québec à Chicoutimi, 10 %, une université qui est encore relativement jeune.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci beaucoup, M. Salette. Je reconnais maintenant le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.

M. Ryan: Je voudrais seulement préciser pour l'information de la députée de Chicoutimi que les montants qui seront mis è la disposition des organismes chargés d'assurer la continuité des sommets socio-économiques ont été bien indiqués par M. Marc-Yvan Côté. Si mes souvenirs sont bons, ce sera 250 000 $ par année dans les années où il n'y aura pas de sommet. Dans l'année qui précédera un sommet, ce sera 100 000 $ de plus. La composition des organismes a également été précisée. Il sera désormais assuré qu'il y aura trois composantes principales: les organismes économico-sociaux, les corps municipaux et les organismes du gouvernement provincial. Il y aura peut-être un équilibre mieux pondéré que ce qu'on a pu constater dans certains de ces organismes-là au cours des années passées. On va chercher un équilibre qui permettra davantage au sommet socio-économique de se tenir en jonction avec les objectifs qu'on veut lui assigner et dont la réalisation relève généralement de ces trois paliers d'intervention. Je pense qu'avec cela on aura un cadre clair. S'il faut l'ajuster, on l'ajustera, mais je pense que M. Côté a donné l'essentiel.

Pour les autres recommandations qui sont, pour nos amis de l'Opposition, objet de hantise, nous répondons qu'ils sont pour nous objet de réflexion. En temps utile, sur chacune nous ferons connaître notre opinion. Je veux assurer la députée de Chicoutimi qu'aucune de ces recommandations ne nous empêche de dormir parce que nous savons prendre les choses à leur mérite. S'il y a du bon nous le retenons et s'il y avait un tir à rajuster nous demanderons qu'il soit rajusté. Cela se fait dans l'excellent climat de discussion qui existe au sein de notre gouvernement et de notre parti.

Je reviens à des choses plus pertinentes, M. le Président. Je m'excuse de dire ces choses-là devant vous, mais il faut un petit peu de discussion entre nous parce que, autrement, vous trouveriez cela monotone.

M. Salette: Cela met un peu de piquant.

M. Ryan: Si on vous inonde uniquement de compliments pendant toute la journée vous retournerez chez vous et, le lendemain, vous vous demanderez ce que nous vous avons dit.

Je voudrais vous dire encore une fois que j'apprécie vivement l'intérêt que votre société Alcan et ses composantes et institutions annexées portent à l'éducation.

Je pense que nous l'avons signalé tantôt, c'est un actif pour nous tous. Je suis content de voir comment cela se réalise dans la région où vous êtes principalement implantés au Québec. Je pense que c'est un exemple dont nous pouvons nous inspirer pour beaucoup d'autres expériences.

Ma collègue, Mme Dougherty, la députée de Jacques-Cartier, me disait tantôt à l'oreille qu'elle aimerait bien connaître le texte de certaines ententes que vous avez signées avec l'Université du Québec à Chicoutimi. Je pense que, si vous pouviez nous adresser une documentation sur ces ententes que vous avez, dans la mesure où ce n'est pas confidentiel, évidemment, cela pourrait nous servir de modèle pour des conversations que nous pourrions avoir avec d'autres entreprises et d'autres universités également. La liaison universités-entreprises, la liaison, je dirais plus largement, systèmes d'enseignement et entreprises, est une dimension que nous avons amplement soulignée dans notre programme politique et à laquelle nous entendons donner de l'extension dans le respect de la mission propre de chacune. L'entreprise a sa mission propre, le système d'enseignement également, mais je pense que dans le respect de la mission de chacun il y a moyen de promouvoir une liaison beaucoup plus efficace afin que le système d'enseignement contribue davantage au développement de l'économie et de l'emploi et qu'en retour les entreprises soient peut-être plus conscientes de leurs responsabilités envers les milliers de jeunes que notre système d'enseignement met chaque année sur la route du travail. Merci infiniment et bonne chance.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le ministre. Merci, M. Salette.

La commission parlementaire de l'éducation suspend ses travaux pour quelques minutes. J'invite le Syndicat des professeurs de l'Université du Québec à Chicoutimi à prendre place immédiatement de façon qu'on puisse récupérer le retard que la commission accuse actuellement.

(Suspension de la séance à 15 h 54)

(Reprise à 15 h 57)

Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre, s'il vous plaîti

J'inviterais les représentants du syndicat des professeurs à prendre place à l'avant et à nous aider à accélérer un peu le rythme de nos travaux de façon à respecter notre échéancier et à respecter aussi nos invités.

La commission parlementaire de l'éducation reprend ses travaux dans le cadre du mandat qui lui a été confié par l'Assemblée nationale, à savoir tenir une consultation générale sur les orientations et le cadre de financement du réseau universitaire québécois pour l'année 1987-1988 et pour les années ultérieures. La commission parlementaire de l'éducation accueille maintenant le Syndicat des professeurs de l'Université du Québec à Chicoutimi dont le porte-parole est M. André Leblond.

M. Leblond, bienvenue. Je vous remercie beaucoup, au nom de tous les membres de cette commission, d'avoir bien voulu accepter de venir nous rencontrer pour nous aider dans notre recherche de solutions pour améliorer le réseau universitaire québécois tant sur le plan de ses orientations que sur le plan de son financement.

La commission parlementaire a prévu accorder à votre organisme environ une heure. On m'informe que vous pourriez prendre environ quinze minutes pour la présentation de votre exposé et, ensuite, les quarante-cinq autres minutes seront réparties en parts égales entre les deux formations politiques. C'est donc dire qu'à 16 h 50 je donnerai la parole au représentant de l'Opposition, en l'occurrence la députée de Chicoutimi, pour l'inviter à conclure au nom de sa formation politique, et, normalement, à 16 h 55, je devrais être en mesure de faire la pareille avec le ministre, de façon à vous libérer pour 17 heures pour que nous puissions accueillir vos étudiants.

M. le président, si vous voulez bien nous présenter les gens qui vous accompagnent et enchaîner avec la présentation de votre mémoire.

Syndicat des professeurs de l'Université du Québec à Chicoutimi

M. Leblond (André): Merci, M. le Président. Le Syndicat des professeurs de l'Université du Québec à Chicoutimi est très heureux d'accepter votre invitation. Vous retrouverez, à ma droite, Mme Marina Lessard, professeure en sciences de l'éducation et membre du conseil d'administration de l'université; M. Pasquale Puchella, vice-président exécutif; à ma gauche, M. Marc Roberge, professeur et secrétaire de notre syndicat; à ma gauche immédiate, M. Sergieh Moussaly, professeur en sciences économiques et administratives.

Le Président (M. Parent, Sauvé):

Madame et messieurs, bienvenue.

M. Leblond: M. Ryan n'étant pas là, Mme la députée qui accompagne M. Ryan, Mme la députée de Chicoutimi, et messieurs et mesdames les députés de cette commission. Compte tenu du court délai donné pour réaliser ce mémoire et considérant que notre syndicat est déjà

associé au mémoire de l'Intersyndicale des professeurs des universités du Québec, le Syndicat des professeurs de l'Université du Québec à Chicoutimi se bornera à exposer le plus simplement possible quelques aspects spécifiques à l'UQAC. Après un exposé liminaire, le document exposera quelques études statistiques décrivant le vécu de l'UQAC depuis le début des coupures budgétaires imposées aux universités dès 1978.

La rationalisation des finances publiques pose une double contrainte aux universités régionales relativement à leur capacité d'ajustement. D'une part, elles doivent réévaluer leurs objectifs et leurs modalités de fonctionnement interne en vue d'atteindre une situation d'équilibre budgétaire dans les meilleurs délais possible. D'autre part, elles doivent définir les normes et les critères de choix qui permettront de minimiser les coûts effectifs du processus de reconversion budgétaire.

Plus concrètement, à la différence des grandes institutions universitaires qui disposent d'une latitude de continuité assurée, les enjeux que posent les coupures budgétaires s'expriment en termes de viabilité, de capacité de développement et de potentiel d'adaptation. À cet égard, il y a lieu de mettre en évidence les concepts opérationnels suivants: a) la distinction entre le déficit global de l'UQAC et sa rentabilité effective: ainsi la rentabilité effective se mesure par les gains marginaux de productivité associant les coûts directs de production du volume des activités ventilées par catégories ou programmes; b) la notion de seuil d'encadrement administratif (optimal) permet d'évaluer la surcharge en coûts fixes (ou variables) que représentent la fonction administrative et son évolution dans le temps; c) le déficit budgétaire global de l'UQAC peut se ramener théoriquement à trois causes principales: 1) une baisse de la productivité (activité d'enseignement, par exempte) engendrant une détérioration des rapports entre coûts fixes et coûts variables; 2) une hausse inconsidérée ou non justifiée des coûts fixes associés à la fonction administration ou à l'enseignement; 3) des coûts fixes imputables à une mauvaise allocation des ressources, à l'orientation des programmes, è la capacité d'attraction et... (coûts de défaillance).

Les propositions suivantes peuvent être démontrées. Dans le cadre administratif actuel, considérant le mode effectif de fonctionnement, toute coupure budgétaire procédant de façon uniforme et radicale sera supportée principalement par la fonction productive, c'est-à-dire enseignement, avec pour conséquences directes d'abord la baisse de la qualité des services, c'est-à-dire accroissement arbitraire de la charge professorale; la baisse de la clientèle, conséquente à la baisse de la qualité et de l'offre de services productifs; troisièmement, la réduction des programmes et de l'offre des activités; quatrièmement, surspécialisation vers des programmes-outils, soit, un nivellement par le bas. Par exemple, citons les programmes administration, informatique, comptabilité spécialisée, etc., et bien d'autres.

Le mode de fonctionnement interne explique la surcharge en coûts fixes et le coût de défaillance associé à la fonction prévisionnelle de la planification du développement.

Réciproquement, des gains de productivité sont réalisables si une des transformations suivantes surgit: premièrement, modification du processus décisionnel interne impliquant un contrôle plus serré du pouvoir discrétionnaire de l'administration centrale de l'UQAC; deuxièmement, un amendement de la loi régissant le fonctionnement interne de l'UQ et ses constituantes.

En définitive, dans le cadre des structures et du mode de fonctionnement interne de l'UQAC, toute rationalisation budgétaire additionnelle met en cause la viabilité de cette institution et son potentiel de développement.

Troisième partie. Répartition interne du budget et le déficit. Le tableau 1 - qui suit tout de suite le document, qui n'est pas annexé - nous montre l'évolution de la répartition budgétaire interne selon deux grandes fonctions: la fonction enseignement et recherche et la fonction support, elle-même subdivisée en trois parties.

Au début des coupures budgétaires imposées par le gouvernement du Québec, soit depuis 1978-1979, la fonction enseignement et recherche recueillait près de 65 % du budget global.

En 1981-1982, les coupures budgétaires furent plus sévères et un groupe de travail fut formé à l'UQAC afin de soumettre des recommandations de coupures pour 1982-1983, 1983-1984, 1984-1985 (voir pour cela le tableau 2 qui donne une image de ces coupures). Signalons que la plus permanente des recommandations de ce comité et de ce groupe de travail fut la suppression au printemps 1982 de quinze postes de professeur.

L'effet de ces coupures fut de ramener la part de l'enseignement et de la recherche au niveau de 56,7 % en 1983-1984 (toujours au tableau 1), la fonction support prenant alors une part plus importante, soit la différence.

En 1984-1985, on assiste à un léger redressement, soit 61,3 %. Il semble que l'opération coupure laissera sa marque en plafonnant la part de l'enseignement et de la recherche à environ 62 % plutôt qu'au niveau de 65 % ou 66 % comme c'était le

cas auparavant à l'UQAC.

Le tableau 1 montre un autre effet des coupures "indiscriminées" dans les budgets universitaires. L'UQAC est passée d'un surplus accumulé de 2 017 000 $ en 1981-1982 à un déficit accumulé de 1 846 000 $ au 31 mai 1987, comme il est prévu dans le budget de cette année. Comment expliquer un tel revirement? N'y a-t-il pas là un indice sérieux de sous-financement de notre université régionale?

Quatrième partie. L'augmentation de la tâche d'enseignement des professeurs. La tâche d'un professeur d'université contrairement aux autres niveaux d'enseignement se subdivise selon les composantes suivantes: enseignement, encadrement des étudiants, gestion académique, recherche et service à la communauté- Le Conseil supérieur de l'éducation (1982) a produit à ce sujet un excellent document. Le mémoire des 18 syndicats et associations déposé ici le 18 septembre dernier a très bien décrit ce rôle.

Le tableau 3 contient les statistiques globales pour l'UQAC concernant la seule tâche d'enseignement, soit la partie facilement quantifiable c'est-à-dire les cours crédités. Ce tableau nous permet de constater deux faits importants. D'abord, pour l'enseignement assuré par les professeurs de carrière, le nombre d'activités d'enseignement assuré par ces professeurs à temps plein a évolué de 35,8 % à près de 40 % entre 1981 et 1984-1985. Ce qui signifie qu'à l'UQAC plus de 60 % des cours sont assurés en appoint par des professeurs, soit environ 10 %, et par les chargés de cours, soit environ 50 %.

Serait-il imaginable qu'au primaire, au secondaire ou au collégial un nombre si élevé d'activités soient assurées par des surnuméraires? Avec un tel déficit de professeurs il ne faut pas se surprendre que dans certains programmes ou options les étudiants n'ont que peu de fois pu entrer en contact avec un professeur de carrière. Est-ce que c'est normal?

La productivité du corps professoral. Certaines oreilles seraient sûrement choquées dans notre milieu mais je pense qu'il faut le prendre dans le contexte de ce mémoire. De 1980-1981 à 1984-1985 le tableau 3 nous révèle une "augmentation de productivité" -entre guillemets - du corps professoral de 13,1 % pour les activités d'enseignement comptabilisées. En 1985-1986, nous estimons ce gain à 1,5 % et l'actuel budget de 1986-1987, en comprimant le nombre d'activités à 1350 - en partant d'environ 1415 comme le montre le tableau - forcera un gain de productivité de 5,1 % à clientèle constante. Au total, de 1980-1981 à 1986-1987 la productivité du corps professoral de l'UQAC aura grimpé de 19,7 % au seul chapitre de l'enseignement comptabilisé. Cela revient à dire qu'en moyenne les professeurs de l'UQAC assument virtuellement un cinquième cours par rapport à la charge normale de quatre cours-année sans que cela ne paraisse dans les rapports annuels de l'institution ou du réseau UQ.

Enfin, l'effort de recherche à l'UQAC. Compte tenu de la difficulté d'évaluer les résultats de la recherche, c'est-à-dire en fonction de publications, articles, rapports, brevets, etc., nous avons choisi le montant moyen de subvention de recherche comme indicateur objectif de l'effort de recherche. Même si, pour certains cas particuliers, le volume de subvention n'est pas important par rapport aux résultats obtenus, il reste que, dans l'ensemble, le montant moyen de subventions reçues est un excellent indicateur de la reconnaissance par les organismes subventionnaires de la qualité de la recherche. Ajoutons une réserve à cet énoncé: la comparaison d'une constituante à l'autre ou d'une université à l'autre devrait être pondérée par les fractions de professeurs appartenant, en particulier, au secteur des sciences pures et appliquées - on aurait pu ajouter la médecine, par exemple -lequel reçoit en moyenne des montants plus importants à cause de la nature des recherches réalisées.

La figure ci-jointe démontre - vous la voyez un peu plus loin - que l'effort de recherche à l'UQAC est élevé et qu'il se compare à celui de l'UQTR; que la progression de cet effort - parlons entre guillemets de "productivité" - depuis cinq ans a augmenté de 66 %.

Contrairement à ce que certains pourraient croire, une recherche de qualité, même orientée, dans certains créneaux est possible dans une université régionale. L'UQAC le prouve. Gageons qu'aucune autre Université du Québec (et même toutes ensemble) ne pourrait remplacer l'UQAC dans sa mission de recherche orientée vers les besoins de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Enfin, l'effort de recherche est si important qu'il a un impact non négligeable sur les coûts de fonctionnement de l'UQAC. Comme la formule de financement des universités ne tient pas compte du degré des efforts déployés au plan de la recherche, l'UQAC est gravement pénalisée. À ce titre, notre proposition est la suivante: Que l'État québécois tienne compte de l'effort de recherche dans l'attribution du budget de fonctionnement.

Les autres tâches du corps professoral, rapidement. La gestion académique, l'encadrement des étudiants et le service à la communauté interne et régional exigent un personnel qualifié et à temps plein. Le pivot essentiel de ces tâches est le corps professoral lui-même à temps plein. Plus il y a de professeurs à temps plein dans une institution, moins l'effort moyen pour exécuter ces autres tâches est grand, mais,

aussi, plus il y a de personnel pour exécuter ce service. Un indice permettant de mesurer cet effort collectif ou encore cette tâche collective autre que l'enseignement comptabilisé est de calculer le rapport (R), c'est-à-dire le rapport des étudiants équivalent temps complet par le nombre de professeurs à temps plein. Le tableau 4 qui suit la figure montre l'évolution de ce ratio de 1980-1981 à 1984-1985. Ce ratio est à environ 21 presque pour toutes les années et il se compare très bien avec le ratio moyen tel qu'établi par le ministère en 1981-1982, lequel était de 22 pour l'ensemble du Québec.

Dernier chapitre avant la conclusion. La Loi sur l'Université du Québec. Cette loi de 1968 a permis de démocratiser l'enseignement universitaire et de rendre plus réel le principe d'accessibilité de l'université en régions et même dans une grande ville comme Montréal; nous parlons de l'UQAM, entre autres. En général, les professeurs sont satisfaits de cette loi, mais il existe une lacune importante qui devrait être corrigée afin que l'UQAC puisse revenir à l'esprit même de cette loi. (16 h 15)

II s'agit de son conseil d'administration dominé par la toute-puissance des gestionnaires associés de fait avec les représentants socio-économiques et souffrant de l'absence presque systématique des étudiants et du trop faible nombre de professeurs. À cet effet, notre proposition est la suivante: 1) augmenter le nombre de professeurs au conseil d'administration de façon qu'ils composent au moins 50 % de ce conseil; cette nouvelle composition permettrait un rééquilibrage des forces en cause et un meilleur éventail des compétences universitaires; deuxièmement, rendre obligatoire la nomination des professeurs au conseil d'administration dans un délai n'excédant pas un mois le moment de leur élection démocratique par l'assemblée des professeurs; troisièmement, régler au plus vite le différend qui oppose les étudiants et l'UQAC sur la représentation étudiante à cet organisme.

En conclusion, de nouvelles coupures budgétaires imposées à l'UQAC auront pour conséquences de mettre son existence en jeu et de bloquer, si ce n'est pas déjà fait, son potentiel de développement. L'institution supporte déjà un déficit accumulé dont le niveau avoisine 5 % du budget des dépenses annuelles. De plus, notre université régionale, éloignée des grands centres, doit aussi supporter les coûts de l'étalement de la formation universitaire sur le territoire, tout en ne bénéficiant pas des facteurs d'échelle pour ses autres coûts au même titre qu'une grande université. De même, le grand nombre d'activités de recherche impose des coûts indirects importants qui ne sont pas considérés dans la formule de financement des universités.

Le corps professoral a augmenté sa productivité de près de 20 % pour ce qui est de la partie quantifiable de l'enseignement, depuis 1980-1981, et de 66 % pour la recherche subventionnée. Ce même corps professoral n'assure que 40 % de la tâche totale d'enseignement et il doit supporter toutes les autres tâches de l'institution: l'encadrement des étudiants, etc. Nous croyons avoir fait plus que notre possible pour aider notre institution à relever les défis qu'elle s'est donnés à la suite des dures coupures budgétaires imposées par le gouvernement. Il est urgent que l'État québécois réinjecte à nouveau des sommes spécifiquement pour engager de nouveaux professeurs afin d'augmenter notre capacité de développement régional et de permettre le renouvellement d'une partie du corps professoral qui prendra sa retraite dans les prochaines années.

Nous croyons également que la Loi sur l'Université du Québec devrait être modifiée pour garantir une meilleure représentation des professeurs au conseil d'administration, une plus grande efficacité administrative et un retour à l'esprit de cette loi. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie, M. Leblond. Je reconnais maintenant le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.

M. Ryan: M. le Président, je vous remercie. II me fait plaisir de saluer les représentants du Syndicat des professeurs de l'Université du Québec à Chicoutimi. J'ai eu l'occasion de faire connaissance avec plusieurs d'entre vous lors d'une visite que j'ai faite à Chicoutimi, il y a quelques mois. Vous m'aviez apporté des éléments très intéressants autant au sujet de votre travail que des problèmes de l'institution au sein de laquelle vous oeuvrez. Cela augmente le plaisir que j'éprouve à vous retrouver aujourd'hui avec mes collègues du côté ministériel. Je ne parle pas de mes collègues du côté de l'Opposition parce que, pour eux, un facteur additionnel vient s'ajouter au plaisir qu'ils éprouvent sans doute, vu que vous êtes de la même région. Vous n'avez pas encore compris, par conséquent, le message que nous vous proposions lors de la dernière campagne, mais nous acceptons le verdict sans récriminer. Sans récriminer, nous l'acceptons joyeusement en sachant que l'avenir nous réserve des jours meilleurs.

Mme la députée de Chicoutimi a suivi autant que moi sans doute le développement de votre mémoire. Je ne sais pas si elle a éprouvé les mêmes difficultés que moi à propos de certains chiffres. Il y a des chiffres qui m'ont un peu étonné. Je vous

dirais que c'est une question que je voudrais clarifier au départ; cela va permettre de nettoyer le paysage.

Aux tableaux 3 et 4, vous avez fait mention, dans votre texte, d'une augmentation de la productivité de l'ordre d'à peu près 20 % qui serait intervenue au cours des dernières années dans le travail des professeurs. Si je prends les chiffres qui sont à la page 7, à la première colonne, les activités données par les professeurs à temps plein, et ensuite à la page 11, première colonne, le nombre de professeurs à temps plein, si je divise les activités données par ces professeurs par le nombre de professeurs, en 1981 et ensuite en 1984-1985, j'arrive à une diminution d'activités plutôt qu'à une augmentation. Je pense qu'il y en a un parmi vous qui est sûrement mathématicien parce qu'il y a beaucoup de chiffres et d'équations dans votre mémoire. Il y avait une moyenne de trois activités par professeur en 1980-1981 et la moyenne descendrait à 2,83 en 1984-1985.

De même, au niveau du ratio étudiants équivalent temps complet et professeur plein temps - c'est la dernière colonne de votre tableau de la page 11 - le ratio aurait été de 21,61 en 1980-1981 et il serait de 20,96 en 1984-1985, soit une diminution, alors que, dans toutes les autres universités qui se sont présentées devant la commission, on nous a indiqué une augmentation notable du ratio. Je voudrais vous demander des précisions sur cette difficulté qui m'est venue à l'esprit en vous en entendant faire la lecture de votre texte.

M. Leblond: Quand on regarde le tableau 3, on parle d'augmentation de productivité. C'est calculé à partir d'activités d'enseignement effectivement données par un professeur, c'est-à-dire le nombre d'étudiants moyen que reçoit un professeur dans sa classe; il est passé de 23,88 à 27,02 et il a encore augmenté au cours des deux dernières années. Il faut distinguer cela. Lorsque vous faites des ratios de cours donnés dans une année par un professeur, cela ne veut pas dire qu'un professeur a donné plus d'activités en moyenne selon la convention collective. Le maximum qu'un professeur va donner, c'est quatre cours.

Cependant, de ces quatre cours, au maximum, il existe des dégagements à des fins de direction de départements et de modules qu'il faut soustraire, ce qui fait qu'on descend en bas de la moyenne de quatre. Il y a aussi les congés sabbatiques, les congés de perfectionnement des professeurs qui font qu'il y a toujours des professeurs enlevés du système pour ces différentes tâches. Il y a quelques dégagements d'enseignement que l'institution assure pour la recherche; l'institution a une politique et, par exemple, en 1984-1985, il y avait six dégagements.

Toutes ces données, je pourrais vous les communiquer pour ces mêmes années. Je ne sais pas si vous avez fait de mauvais calculs, mais, si on regarde comme il faut, en 1980- 1981, les activités assurées par professeur à temps complet, en tenant compte de tous les professeurs qui ont un lien d'emploi, qu'ils soient en congé sabbatique ou autre, qui ont été dégagés pour des fonctions administratives, des centres de recherche, etc., il y avait 3,16 activités par professeur. Cela a évolué à 3,24 l'année suivante, à 3,26, à 3,30, et c'est revenu à 3,06 en 1984-1985 parce que plusieurs professeurs, cette année-là, ont pris des congés sabbatiques et de perfectionnement. Vous savez que dans les conventions de professeurs, tous les six ans, un professeur a droit à un congé sabbatique. Durant toutes ces années, plusieurs professeurs - je ne sais pas si c'est à cause du contenu de la charge ou par difficulté économique - avaient acquis le droit de partir en congé sabbatique sans jamais le prendre et, en 1984-1985, on a reçu plus de demandes pour un congé sabbatique. Je pourrais vous fournir, si vous le désirez, un tableau qui décrit un peu mieux toute cette problématique en fonction du nombre de professeurs effectivement en fonction.

En ce qui concerne le ratio étudiants-professeur, c'est vrai qu'à l'Université de Montréal, par exemple, il est passé de 17 à 25. À l'UQAC, présentement, passer à un ratio de 25, cela voudrait certainement dire l'élimination de beaucoup d'activités et de plusieurs programmes. Passer de 21,6 à 21, ou à peu près, je pense que le ratio étudiants-professeur a pratiquement été constant durant toutes ces années. C'est dû à un facteur simple: la clientèle a été pratiquement stagnante; elle a augmenté de 5,6 % et le nombre de professeurs... En 1982, on a dit qu'il y avait eu une coupure de quinze professeurs, mais il y a eu des tentatives de rationalisation. Lorsque, en 1983-1984, on a demandé à tout le monde un effort de rationalisation, certains départements - un en particulier - ont demandé que l'effort de rationalisation s'accompagne d'engagements de professeurs; donc, un échange en termes d'engagement de professeurs. Donc, l'effet des coupures de quinze postes en 1982-1983 a été annulé par une contribution volontaire des professeurs, dans le but d'aider l'université, qui ont consenti à prendre beaucoup plus d'étudiants dans leur classe, surtout là où c'était possible, par exemple en sciences économiques, ce qui fait que c'est simplement la division de deux colonnes qui donne une augmentation sensible de huit professeurs et aussi le fait que, comme syndicat, nous avions fait des pressions pour que les postes qui étaient déjà prévus au budget soient

comblés. Ce qui fausse un peu le portrait, c'est que, durant plusieurs années, là où on retrouve 181 professeurs, il y avait toujours 20 ou 25 postes de professeurs non comblés. Il y a donc eu un effort des départements et du syndicat pour que les postes soient comblés. Ce qui fait que, si, effectivement, les postes avaient été comblés, on aurait eu un ratio non pas de 21 mais un ratio qui se serait rapproché de celui de l'Université de Montréal, c'est-à-dire autour de 17, probablement 18 plus que 17. Ce qui explique le fait, c'est le grand nombre de postes non comblés pendant plusieurs années et l'effort qu'il y a eu de combler des postes et, en même temps, la conversion d'une partie de la rationalisation en postes de professeurs.

M. Ryan: Cela veut dire qu'en fait il n'y aurait pas eu d'économie véritable. On aurait laissé tomber des postes qui étaient déjà vacants.

M. Leblond: On a...

M. Ryan: Le nombre de professeurs effectivement employés est resté à peu près le même dans ces années et, au cours de l'année 1983-1984 à 1984-1985, il a connu une augmentation de 10 %.

M. Leblond: II y a eu une augmentation de 10 % qui est le résultat en grande partie des huit postes qui avaient été accordés en sciences économiques et administratives. Cela fluctue beaucoup au cours d'une année. Ce sont des chiffres au 31 mai de chaque année et, dans une même année, le chiffre de 199 a pu varier de 191 à 203. Je pense qu'il faut réaliser qu'il y a un mouvement de personnel également au cours de l'année. Ce n'est pas un chiffre moyen annuel; c'est un chiffre à une date fixe de l'année. C'est cela qui complique un peu l'étude des statistiques dans ce domaine.

M. Ryan: Vous faites une équation que j'ai du mal à comprendre. Vous dites: On est limité par la convention collective à quatre cours par professeur et, en pratique, ils en ont donné l'équivalent de cinq. Je ne suis pas absolument sûr de cela, parce que j'ai l'impression qu'il y a une portion très important des cours qui sont donnés par des chargés de cours. D'après ce que je vois, c'est presque 60 %, sinon davantage. Je regarde les activités au tableau 3: 60,27 % des cours sont donnés par des chargés de cours et autres. Les professeurs, eux, en donnent 39,73 %. Êtes-vous sûr que, de fait, il y a eu cinq cours donnés par l'ensemble des professeurs plutôt que quatre ou si c'est juste un calcul abstrait qui vous a conduit à cette conclusion?

M. Leblond: En fait, on dit virtuelle- ment un cinquième cours. C'est que le fait d'accueillir 20 % plus d'élèves en moyenne, c'est une augmentation de la tâche du professeur. Contrairement à ce que le Conseil des universités a prétendu dans son tableau 13 à la commission parlementaire, la tâche d'enseignement, ce n'est pas une présence dans une classe à quatre cours-année. Je pense que, dans l'équation de cette tâche, il faut tenir compte du nombre de cours et de la charge réelle de cette classe. Si vous avez une classe de 40 étudiants plutôt que de 30, ce n'est pas la même chose. Est-ce qu'on se comprend là-dessus? C'est dans ce sens que nous le faisons. En ce qui concerne les chargés de cours, dans un document plus complet que je pourrais vous faire parvenir, le nombre de chargés de cours en pourcentage a évolué à 51 % au début de ces années; il a diminué en 1983-1984 à 48 % et il est revenu autour de 50 %. Ce qui fait qu'on peut dire que les chargés de cours assument 50 % à 51 % des charges de cours depuis cinq ans, cela a été constant; alors que les professeurs, en cours d'appoint - les départements demandent aux professeurs, lorsqu'ils ne trouvent pas de chargés de cours, d'assumer un cours supplémentaire - donnent environ 10 % ou 11 % par année de ces cours.

M. Ryan: J'ai une autre question à vous adresser. J'apprécierai énormément tout envoi de documentation additionnelle que vous voudrez nous faire sur les questions que nous venons de discuter. Je pense que cela nous serait très utile que vous nous envoyiez des suppléments d'information.

M. Leblond: D'accord. (16 h 30)

M. Ryan: Je voudrais vous poser une dernière question à propos d'une recommandation que vous faites dans votre mémoire concernant la représentation des professeurs au conseil d'administration de l'université. Vous demandez que la Loi sur l'Université du Québec soit modifiée de manière que les professeurs aient la moitié des sièges - ai-je bien compris? - au sein du conseil d'administration. Deux questions. D'abord, je pense que vous en avez deux actuellement. Pourquoi cela ne marche-t-il pas? Deuxièmement, en quoi un conseil d'administration formé de 50 % de professeurs serait-il plus capable de prendre les décisions quand on sait la difficulté que des professeurs - surtout des professeurs d'université - entre eux, ont souvent à en venir à des conclusions étant donné toutes les distinctions que leur science les amène à faire en cours de discussion?

M. Leblond: II court des préjugés sur notre façon de nous unir. Je pense que les professeurs en général sont capables de faire

des consensus sur un certain nombre de sujets. Vous avez bien raison de dire que sur certains points on est appelé à être assez critique. C'est notre fonction, d'ailleurs cela déteint dans notre quotidien. Ce n'est pas toujours facile.

En ce qui concerne la représentation des professeurs à 50 %, cette recommandation est pour mettre l'accent sur le problème du droit de recours de l'assemblée des professeurs où des professeurs, sur des décisions qui, à notre sens, sont prises au conseil d'administration et qui, systématiquement écartent de facto les professeurs... Cela est dû au fait que la loi prévoit d'abord un certain nombre de membres de l'université et un certain nombre de membres socio-économiques et la somme de ces membres donne systématiquement un décompte en défaveur des professeurs. Même si les professeurs membres du conseil d'administration, qui sont cinq sur quatorze chez nous, créent une union presque sacrée, si on veut, avec tous les directeurs de départements et de modules, etc., chez nous on connaît ce rapport de forces.

Une autre façon de régler cela, plutôt que de nommer 50 % de professeurs, serait que les professeurs ou l'assemblée des professeurs aient un droit de recours ou un droit de veto sur des décisions importantes comme le budget ou un droit de recours à une instance supérieure qui a la responsabilité de faire la coordination. Chez nous, c'est l'assemblée des gouverneurs au réseau UQ qui a la responsabilité. Le réseau UQ a une façon à lui de venir vérifier l'administration. Ce sont ces fameux 5 % qu'il ne faut pas dépasser en termes de déficit accumulé. Je pense que cela ne va pas plus loin que cela. Les professeurs aimeraient avoir une voix qu'ils avaient traditionnellement, anciennement. En France, avant la Loi Savary, les professeurs étaient plus de 50 % aux conseils d'administration. Je pense qu'on devrait revenir à cela étant donné l'impact tellement fort des administrateurs qui ont toute l'information de l'université et qui, en plus, ont le pouvoir.

À ce conseil d'administration il y a l'absence presque systématique des étudiants qui sont là pour un an en principe, nommés pour un an, élus au début de l'année mais nommés souvent au mois de janvier. Si tu n'es pas un étudiant permanent pendant plusieurs années et que tu n'es pas au courant de tout, finalement l'efficacité est faible. Là-dessus, je pense qu'il faudra avoir une rapidité exemplaire pour la nomination des étudiants.

Je pense aussi qu'à l'exemple des collèges... La loi 24 des collèges nomme d'office le président du conseil d'administration. C'est un socio-économique. Est-ce que ce ne serait pas une voie à examiner? Est-ce que ce ne serait pas une façon d'acquiescer un peu à la demande du Conseil des universités qui proposait à cette commission que les socio-économiques jouent un rôle plus grand, qu'ils soient peut-être encore plus représentatifs du milieu? Je ne dis pas que les socio-économiques ne le sont pas mais je pense que le gouvernement devrait prendre un soin encore plus grand de ce côté-là et leur donner peut-être un pouvoir plus grand en même temps que les professeurs en auraient un. Je pense que ce serait peut-être une façon de rééquilibrer les pouvoirs à l'université.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Leblond. Je reconnais maintenant la porte-parole officielle en matière d'enseignement supérieur et de science, la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: De l'Opposition. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): De l'Opposition.

Mme Blackburn: Madame, messieurs, il me fait plaisirs au nom de ma formation politique, de vous accueillir à cette commission. On n'a pas souvent l'occasion de rencontrer ceux qui font les universités. On a souvent tendance à l'oublier. L'université, c'est fait pour les étudiants et c'est fait beaucoup par les professeurs. Je ne ferai pas de long préambule parce que j'ai plus le goût de vous entendre. Je dois dire que, même si je ne partage pas toujours les avis du ministre et encore moins ses options politiques, il m'arrive de faire une même lecture que lui de certaines choses et j'éprouve certaines difficultés par rapport aux chiffres que vous apportez.

J'ai deux questions très claires. Au total, je sais qu'il y a une modulation de la tâche à la baisse. Si vous faites plus d'administration, vous donnez moins de cours. Est-ce qu'il y a une modulation à la hausse? J'ai de la difficulté à la voir. Par exemple, quand vous dites que 10 % des cours sont en appoint par des professeurs réguliers, est-ce que cela constitue une augmentation de la tâche, de la charge d'enseignement, ou si c'est en plus, comme du temps supplémentaire? Je voudrais que cela soit clair. Je dois dire que j'éprouve de la difficulté à comprendre.

M. Leblond: Je pense que c'est essentiel. Dans toutes les conventions collectives de professeurs - là où il y en a ou, même là où il n'y en a pas, c'est de tradition - il y a une tâche dite normale, une modulation qui existe. Lorsque le département ou le décanat exige ou demande qu'un professeur, à cause de ses qualifications particulières, donne un cours

supplémentaire, il reçoit une rémunération elle-même supplémentaire qui correspond actuellement, selon la convention, à 2400 $, ce qui est vraiment faible comme rémunération. Comme syndicat, on ne se bat pas non plus pour la faire augmenter. Nous considérons que le professeur doit se consacrer à ses autres tâches et que cela doit être une mesure exceptionnelle.

En ce qui concerne les chargés de cours, il y a des conventions collectives à ce titre. Je vous dirai qu'actuellement les conventions collectives des chargés de cours prévoient 3300 $ environ, 3200 $. Il y a une différence d'environ 900 $ entre les deux, pour la même activité en appoint. Dans les conventions collectives, les cours dits en appoint, c'est une clause spéciale qui les régit et qui en spécifie la rémunération.

Mme Blackburn: Ma question est la suivante. Le maximum de quatre cours, c'est arrêté par convention. Donc, on ne peut pas moduler à la hausse. Quelqu'un qui, par exemple, s'adonne moins à la recherche ne pourrait pas donner un cours de plus. C'est pourquoi j'ai de la difficulté à comprendre que vous donniez effectivement, sans contester et sans qu'il y ait de grief, cinq cours plutôt que quatre.

M. Leblond: Ce type de modulation n'existe pas. Il n'y aurait pas de limite à cela, je pense. Si on voulait moduler à six, par exemple, ce serait peut-être possible, mais, à ce moment-là, il faudrait dire adieu à la recherche, à certaines tâches d'administration, etc. Je pense qu'il y a là un équilibre qui s'est établi entre un concept très objectif et mathématique qui dit: Quatre cours au maximum... Ce n'est pas quatre cours en moyenne, le ministre l'a bien souligné tout à l'heure. Lorsqu'on prend le nombre de cours assumés vraiment par les professeurs et qu'on le divise par le nombre de professeurs, on s'aperçoit que ce ratio tombe à 3,10, 3,20. Dans certaines universités, il peut tomber à 2,8. C'est selon le nombre d'activités autres qui, elles, permettent des dégagements de tâches. Dans le système québécois actuel de relations du travail avec les professeurs, ce niveau est maintenant accepté et il se situe à un maximum de quatre.

M. Puchella (Pasquale): J'aimerais apporter un complément de réponse parce que je pense que la question que vous posez, c'est une question de compréhension de texte. Lorsqu'on dit "virtuellement un cinquième cours", cela ne veut pas effectivement dire qu'on donne un cinquième cours, mais c'est tout comme si, effectivement, on donnait un cinquième cours par le fait que le ratio étudiants-professeur a augmenté depuis 1980-1981 à 1984-1985. Le fait d'accepter plus d'étudiants a eu comme effet de diminuer les activités d'enseignement. Si on avait gardé le même pourcentage d'activités d'enseignement, il aurait fallu avoir beaucoup plus d'activités d'enseignement. Dans ce sens-là, évidemment, il aurait fallu avoir plus de chargés de cours, etc. La charge d'enseignement qui est une charge normale de quatre cours pour un professeur, c'est comme si on avait donné cinq cours, mais, en fait, on ne les a pas donnés, parce que le nombre d'étudiants a augmenté dans nos classes. Je pense que c'est un raisonnement qu'on retrouve très souvent au niveau des conventions collectives du primaire, du secondaire et du collégial et tout cela. L'augmentation du rapport étudiants-professeur aurait eu comme effet... C'est comme si on avait donné un cinquième cours. Toujours au niveau de la tâche normale.

Mme Blackburn: D'accord. Je comprends votre calcul. Si je reprends vos données sur les mêmes bases, cela veut dire que dans les universités il y a une augmentation qui est passée de 17 a 27 étudiants et ils donneraient l'équivalent de six cours.

M. Puchella: Oui.

Mme Blackburn: Bien. Je voulais bien comprendre.

M. Leblond: Ce qu'il faut comprendre, Mme la députée, peut-être un petit complément. Contrairement à ce que le Conseil des universités - je me répète - au tableau 13... C'est d'ailleurs pourquoi M. Ryan et peut-être vous-même aviez demandé un complément d'information sur la tâche des professeurs. C'est justement dû au fait que la tâche d'enseignement, lorsqu'on prend seulement cette composante, ne se réduit pas à un temps de présence uniquement. Cela se réduit aussi à un facteur d'intensité, qui est le nombre d'étudiants. Il faudrait presque parler, à ce moment, d'une tâche en termes d'étudiants-crédits, en multipliant le nombre d'étudiants dans une classe et les trois crédits d'une activité d'enseignement. C'est pour cela que dans le tableau 3 on voit la clientèle exprimée en étudiants-crédits. C'est en fonction de ce critère qu'il est plus facile, qu'il est plus logique, je pense, de calculer la tâche d'enseignement, plutôt que simplement un nombre d'activités.

Mme Blackburn: Si je refais un autre petit calcul et vous me le permettez... Vous nous tentez en nous fournissant des chiffres; on a le goût de les examiner de plus près.

M. Leblond: Je comprends cela.

Mme Blackburn: Quand vous dites: Donner 10 % des cours en appoint, cela veut

dire que 20 % de vos cours, comme professeur à temps complet, sont donnés en appoint.

M. Leblond: En fait, je pense que votre conclusion est passablement exacte.

Mme Blackburn: Je veux dire que vous comprenez que cela pose une certaine difficulté lorsqu'on parle d'une tâche ensuite qui est trop lourde. Vous me suivez, n'est-ce pas?

Est-ce que vous avez des données -j'aurais dû poser la question tout à l'heure à M. le recteur - sur le taux de diplomation?

M. Leblond: Sur le taux de diplomation, nous n'en avons pas. Je pense que ce serait à l'université de fournir ces statistiques. Les statistiques que nous vous présentons et que j'enverrai à la commission, les autres, complémentaires, sont obtenues grâce à l'une de nos clauses de la convention collective, qui est la clause 623. Si on n'avait pas cette clause, ce serait très difficile d'obtenir des données. Heureusement, nous avons cette clause et cela nous permet d'obtenir un certain nombre de statistiques.

En ce qui concerne les taux de diplomation, je vous réfère au mémoire de l'intersyndicale des professeurs d'université, lequel discutait de ces taux de fréquentation, des taux de diplomation pour les 2e et 3e cycles.

Mme Blackburn: Je ne vous demanderai pas de vous prononcer sur une modulation de la tâche qui aurait comme effet de fixer à quatre, de moduler à la hausse. Je pense que vous êtes en négociation. Il y a eu des négociations et de toute façon c'est objet de négociation. J'aimerais revenir un peu sur la question touchant la composition des conseils d'administration. Le Conseil des universités va tout à fait dans l'autre direction. Probablement avez-vous lu leur mémoire. Eux, ce qu'ils recommandent c'est de renforcer les fonctions administratives, donc de probablement réduire - si je me rappelle bien - la taille des conseils d'administration et de renforcer la présence des socio-économiques. Â l'inverse, vous recommandez 50 % de professeurs.

Est-ce que vous avez établi ce que serait une représentation équitable d'étudiants?

M. Leblond: C'est difficile à fixer en ce qui concerne les étudiants; je pense que c'est à eux de faire cette évaluation. Je pense que la présence des étudiants est importante. Il ne faut pas la négliger. C'est actuellement négligé depuis deux ou trois ans à l'université chez nous. Maintenant, la quantité c'est très difficile à fixer. Je pense que le ministre se doit de consulter. On n'a pas fait de réflexion, disons, sur la quantité et le nombre. En ce qui nous concerne, nous croyons que le professeur d'université doit avoir un rôle beaucoup plus important. Je ne sais pas. (16 h 45)

Je pense que les étudiants, quant à eux, ont beaucoup d'intérêt à la commission des études et au conseil des modules. Est-ce que pour eux c'est important d'avoir deux, trois ou quatre étudiants? Je crois qu'un peu plus d'étudiants ce serait une bonne chose, ne serait-ce que pour assurer une certaine continuité de la représentation étudiante à cause du virement, c'est-à-dire que la nomination est d'une seule année comparativement à trois ans pour les professeurs et les agents socio-économiques. Alors, le taux de roulement étant rapide et les étudiants n'étant pas là très souvent l'été, s'il y en avait un peu plus, peut-être qu'il y en aurait un ou deux sur le groupe qui pourraient assister beaucoup plus assidûment au conseil d'administration.

En ce qui concerne le Conseil des universités, si vous me permettez, nous, les professeurs, cette augmentation de la rigidité et du dirigisme des administrations universitaires va dans le sens contraire de ce que les professeurs croient. Je pense que ce serait une erreur grave de donner plus de pouvoirs qu'il n'y en a déjà. C'est justement le contraire que nous voudrions voir. Nous voudrions que l'Université du Québec et ses constituantes reviennent à l'esprit même de cette loi, laquelle a permis un taux de concertation, une administration concertée entre professeurs et administrateurs dans le passé, ce qui était, à mon sens, beaucoup plus efficace et qui peut donner des résultats beaucoup plus évidents. De même, je dois dire que le Conseil des universités recommandait aussi un dirigisme beaucoup plus grand à un niveau supérieur de la coordination.

Mme Blackburn: Vous avez quand même un lieu dans lequel vous avez, je pense bien, le pouvoir ou la majorité, c'est à la commission des études, quoique ce n'est pas tout à fait la même structure dans les Universités du Québec. Vous dites actuellement que cela a permis une action plus concertée, une administration plus concertée, la présence des professeurs aux conseils d'administration. Qu'est-ce que cela pourra avoir comme conséquence si on donne - c'est un service public quand même, l'enseignement universitaire - le pouvoir exclusivement ou majoritairement, et très majoritairement, à l'interne? Vous avez les administrateurs qui siègent, les membres de la direction, vous avez les professeurs à 50 %, selon votre modèle, plus les étudiants; les agents socio-économiques seraient réduits à une portion congrue, finalement, au conseil d'admi-

nistration. Est-ce que vous trouvez que c'est la meilleure façon de gérer un service public et est-ce qu'on pourrait penser que ce modèle serait applicable, par exemple, dans un hôpital où on mettrait majoritairement des médecins pour gérer un hôpital?

M. Leblond: Lorsque l'université est subventionnée à 80 % ou 90 %, cela cause sûrement certains problèmes d'éthique. C'est pour cela qu'on a nuancé un peu notre recommandation tout à l'heure en ce sens qu'à défaut d'une représentation... Je sais que les politiciens auront une décision à prendre, si jamais il y en a une qui est prise. Ce que nous voulons, c'est une plus grande responsabilisation face aux pro- ' fesseurs. Plusieurs moyens peuvent être utilisés. On peut revenir à une formule qui a existé et qui pourrait exister encore, un modèle qui a existé pendant des centaines d'années où les professeurs étaient les principaux intervenants ou les principaux dirigeants, si on peut dire, du devenir des universités. C'est ce que nous réclamons, Nous croyons être en mesure de jouer ce rôle efficacement et l'augmentation du nombre de professeurs aiderait également à une meilleure représentation des intervenants du milieu universitaire. Lorsque vous avez seulement cinq représentants et que vous avez une vingtaine de modules qui proviennent de sept départements, vous avez les centres de recherche et les groupes de recherche, je crois que les intérêts ne sont pas tous bien représentés dans le temps. Il faut pour ce faire une meilleure représentation de la base de l'université. C'est une philosophie, elle existe très bien dans des universités privées américaines où ce sont les professeurs qui orientent, grâce à leurs projets de recherche et leurs subventions, le devenir de l'université. Il y aura peut-être un complément de réponse de la part de M. Moussaly.

M. Moussaly (Sergieh): Mme Blackburn, j'aimerais ajouter une petite remarque qui me paraît très pertinente concernant votre question, c'est: Quel serait l'impact d'un changement de la composition du pouvoir décisionnel au niveau de l'université? La loi constitutive de l'Université du Québec a voulu justement la répartition tripartite du pouvoir, c'est-à-dire que l'administration, les professeurs et les étudiants plus le milieu socio-économique soient présents à tous les échelons depuis le module, la commission des études jusqu'au conseil d'administration. C'était voulu afin d'éviter les égarements des administrations. On n'a pas voulu que l'Université du Québec fonctionne selon le modèle bureaucratique ou le modèle conventionnel des universités traditionnelles. On a voulu cette répartition pour pouvoir impliquer directement les producteurs, si vous permettez ce terme, qui sont le corps professoral, pour qu'ils puissent intervenir dans les décisions majeures qui concernent leurs activités et le développement de leur institution. Malheureusement, avec le temps, ceci a changé. Finalement, on est arrivé à un fonctionnement de type bureaucratique où le corps professoral, à toutes fins utiles, n'a plus d'emprise ni même d'information complète pour pouvoir orienter et ajuster les activités qui se font.

Tantôt, vous posiez une question concernant le ratio des étudiants et l'évolution des charges. C'est l'un des exemples qui démontrent que le changement dans l'offre des cours et des programmes a forcé les professeurs à temps plein à assurer des charges additionnelles pour pouvoir répondre à une politique qui fonctionnait à deux vitesses. La première, c'était d'augmenter le ratio des étudiants par classe, par effet de rationalisation. La deuxième, c'était de créer des activités qui sont des investissements, bien sûr, à long terme, mais dont les ratios sont très faibles. C'est pour cette raison que la participation des producteurs, c'est-à-dire le corps professoral, au processus décisionnel, d'une façon effective, nous apparaît comme l'un des moyens pour soutenir un développement équilibré de l'université...

Le Président (M. Parent» Sauvé): Merci, monsieur.

M. Moussaly: ...à moins de changer la loi elle-même.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Continuez, je m'excuse; je pensais que vous aviez terminé. Avez-vous terminé?

M. Moussaly: Oui.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie, M. Moussaly. Je reconnais maintenant la députée de Chtcoutimi pour conclure au nom de sa formation politique.

Mme Blackburn: Vous allez me permettre, M. le Président, d'utiliser ce temps exclusivement pour une question et des salutations. J'aurais voulu que vous m'entreteniez un peu de la situation qui constitue le vieillissement du corps professoral. Avez-vous envisagé des moyens concrets? Avez-vous pensé aux façons de résorber cela? On connaît la situation actuelle et c'est un problème important.

M. Leblond: Beaucoup de professeurs ont été engagés en 1969, quelques-uns étaient dans des écoles: écoles normales, écoles de génie et commerce ou Grand Séminaire. Plusieurs ont une carrière allant de 12 à 20-22 ans. On sait qu'une carrière

de professeur d'université est de 30-35 ans environ, compte tenu de l'âge normal d'obtention d'un doctorat qui est autour de 26-28 ans. Je pense que cela tombe à peu près dans cet ordre-là.

Actuellement, la moyenne d'âge des professeurs est d'environ 43 ans, ce qui n'est peut-être pas exagéré dans les circonstances. Au départ, c'est sûr qu'on avait une moyenne d'âge très basse. On a tous vieilli d'un an par année. Le nombre de professeurs nouveaux n'augmente pas à un rythme extrêmement rapide, de sorte qu'il y a un risque de déséquilibre dans la structure d'âge. Cela est très important. Je me souviens que lorsqu'on a créé cette université nous étions tous jeunes. Il y avait très peu de personnes d'un autre âge qui avaient cette expérience de la recherche ou de la publication et qui avaient déjà des entrées un peu partout dans les clubs de recherche, si vous voulez, autant de façons d'obtenir des subventions. Nous étions tous presque au même niveau. Le danger est de recommencer ce même processus. Cela nuirait énormément au système universitaire de ne pas tout de suite faire entrer des jeunes dans les équipes et qui pourraient bénéficier de la présence de gens plus âgés et plus expérimentés.

Mme Blackburn: Je vous remercie, M. le président, madame et messieurs qui vous accompagnent. Je dois dire qu'on n'est pas revenu beaucoup, parce que cela semblait bien énoncé, sur l'appui que vous accordez à l'université par rapport à différents aspects de son développement, de même que concernant son niveau de financement.

Je voudrais vous remercier au nom de ma formation politique de votre participation aux travaux de cette commission et vous assurer que les informations que vous nous avez communiquées, avec celles que vous accepterez de nous communiquer ultérieurement et que vous possédez, devraient nous permettre d'avoir un meilleur éclairage quant à ce que constituent les questions sur la tâche d'enseignement, de même que sur le développement de différents programmes. Je vous remercie infiniment et je vous souhaite un bon retour.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, madame. Je reconnais le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.

M. Ryan: Je vous remercie, M. le président, ainsi que madame et messieurs qui l'accompagnez, de votre présence parmi nous. J'aurais souhaité que nous ayons davantage de temps pour pouvoir mieux approfondir certains aspects de votre présentation, mais les journées sont brèves et les organismes que nous devons rencontrer sont nombreux.

Soyez assurés que nous avons pris bonne note des principaux points soulevés dans votre mémoire et dans les réponses que vous avez apportées à nos questions. Nous nous ferons un devoir d'examiner toute cette matière attentivement. Nous espérons surtout que, au-delà de tous les liens administratifs ou politiques qui peuvent s'établir à l'occasion de discussions publiques comme celles-ci, nous puissions établir des liens plus directs et plus fréquents avec les membres du corps professoral dans nos différentes universités. Je crois qu'il est très différent de causer de nos universités avec ceux qui font le travail immédiat qui est l'essentiel de la tâche universitaire, c'est-à-dire le travail d'enseignement et de recherche, que de causer avec les administrateurs ou avec ceux qui représentent les superstructures nécessaires par ailleurs. C'est très important pour nous, afin d'avoir l'heure juste, de pouvoir causer avec ceux et celles qui sont au travail tous les jours dans les laboratoires, dans les salles de cours et dans leurs bureaux d'étude. Soyez assurés qu'à l'occasion des visites qu'il m'arrive de faire dans nos universités je ne manque jamais de voir à cette dimension de m'assurer que des contacts directs soient établis avec les membres du corps professoral. J'espère que nous pourrons continuer de le faire.

Comme je le disais l'autre jour, nous allons entreprendre incessamment un travail complémentaire à celui de la commission. Ce travail sera entrepris par le ministère pour des fins d'efficacité parce que c'est un travail qui demande une oeuvre de précision et de suivi immédiat pendant tout le temps qu'il durera, afin de situer de manière plus précise les problèmes relatifs au statut, au rôle et à la tâche de travail du professeur d'université. Nous aurons besoin de votre collaboration pour ce travail qui sera un volet complémentaire de toute la démarche que nous accomplissons ces temps-ci. J'espère que nous pourrons compter sur votre collaboration, comme cela a été le cas pour le travail de la commission parlementaire. Je vous remercie cordialement de votre participation à nos travaux. Je vous souhaite bonne chance dans votre très important travail.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le ministre, merci, M. Leblond. Madame, messieurs, encore une fois, merci beaucoup d'avoir répondu à notre invitation.

La commission parlementaire de l'éducation suspend ses travaux pour quelques minutes. Nous accueillerons immédiatement après les représentants de l'Association générale étudiante de l'Université du Québec à Chicoutimi, lesquels j'invite à prendre place.

(Suspension de la séance à 16 h 59)

(Reprise à 17 h 5)

Le Président (M. Parent, Sauvé): La commission permanente de l'éducation reprend ses travaux et accueille l'Association générale étudiante de l'Université du Québec à Chicoutimi.

Association générale étudiante de l'UQAC

L'association est représentée par son président, M. Yvan Côté. M. Côté, nous vous saluons et vous remercions beaucoup d'avoir accepté l'invitation de la commission de venir dialoguer avec nous concernant la problématique du financement et des orientations du réseau des universités du Québec.

En plus de vous remercier, je dois vous féliciter. Vous, les principaux intéressés à l'université, êtes les principaux intervenants parce que, si l'université existe, elle existe pour vous. Pour vous être impliqués au point de présenter un mémoire et d'être venus ici, chose qui n'est quand même pas facile avec les moyens limités dont vous disposez, pour être partis de votre région pour vous rendre ici à l'Assemblée nationale et présenter votre mémoire, je dois vous dire que vous avez l'admiration des membres de cette commission et, personnellement, je vous félicite.

Nous avons une heure pour travailler ensemble. On m'a dit que vous avez reçu une communication, le 23 septembre dernier, vous informant qu'environ quinze minutes avaient été prévues pour la présentation de votre mémoire et quarante-cinq minutes d'échanges avec les membres de cette commission.

Si vous voulez bien, M. Côté, nous présenter les gens qui vous accompagnent et enchaîner immédiatement avec la présentation de votre mémoire; immédiatement après, il y aura dialogue avec les gens de la commission. Nous vous écoutons.

M. Côté (Yvan): Merci, M. le Président. Je veux tout d'abord présenter mes collègues. À mon extrême droite, M. Guy Gagnon, membre de l'exécutif à l'association générale étudiante; à ma droite, M. Raymond Bégin, membre du conseil d'administration et délégué du module de physique au conseil d'administration. À ma gauche, M. Wack Thiam, membre de l'exécutif aux affaires externes.

D'abord, M. le Président, M. le ministre, Mme la députée de l'Opposition, mesdames et messieurs, il nous fait plaisir, au nom de l'Association générale étudiante de l'Université du Québec à Chicoutimi, de participer à cette commission afin de vous faire part de nos réflexions concernant les orientations et le cadre de financement. Ces réflexions ont été faites par les membres depuis dix ans, puisque c'est notre dixième anniversaire de fonctionnement.

Pour mettre en situation et débattre la première partie de notre mémoire, je passerai la parole à mon collègue, M. Bégin, qui vous exposera les recommandations de la première partie.

M. Bégin (Raymond): Messieurs de la commission, mesdames, en effet, depuis quelque temps, les intervenants des milieux universitaire et gouvernemental semblent unir leurs voix en prétendant qu'une hausse des frais de scolarité est nécessaire. Nous entendons dénoncer ce discours. Le problème des frais de scolarité est, en effet, un faux problème. On tente de faire croire à la population que les étudiants ont été choyés par un oubli du gouvernement, à savoir que le gel des frais de scolarité fut, en fait, quasi ignoré du gouvernement et que les étudiants ayant bénéficié si longtemps d'un sursis n'ont maintenant qu'à payer l'augmentation qui s'impose afin de réajuster leur contribution au financement des universités.

En fait, il n'en est rien. Le gel des frais de scolarité est un moyen que le Québec s'est donné afin de tendre progressivement vers la gratuité scolaire qu'on ne pouvait se payer immédiatement. On a choisi délibérément de laisser se marginaliser lentement la contribution directe des étudiants au financement des universités, tandis qu'on s'affairait à trouver d'autres moyens et d'autres sources de financement pour combler le vide ainsi créé petit à petit dans le financement des institutions supérieures. Essayer de tendre vers la gratuité scolaire est un choix de société qu'a fait le Québec, rappelons-le.

Si on se retrouve aujourd'hui sans mesure de remplacement, c'est qu'il y a, au Québec, des gens qui en sont responsables, et ce ne sont certes pas les étudiants du Québec, qui investissent déjà énormément dans leur formation. Bien qu'on veuille laisser croire que cet investissement se limite aux seuls frais de scolarité, il n'en est rien.

Nous n'adhérons pas à l'analyse qui veut démontrer que la hausse des frais de scolarité est nécessaire et inévitable. Nous percevons plutôt, derrière ce discours qui ne mène nulle part, une stratégie inventée par les universités traditionnelles qui sont les seules à la défendre et véhiculée par ce qu'il nous est permis d'appeler la "ligue du vieux poêle" des universités traditionnelles.

Nous considérons cette manoeuvre comme l'ultime effort contre le réseau de l'Université du Québec qui, on en est bien conscient, apparaît aujourd'hui beaucoup plus menaçant qu'on ne l'aurait cru lors de sa

création dans les milieux universitaires traditionnels. Qu'il soit bien clair que nous entendons défendre l'institution qu'est l'Université du Québec, institution faisant partie de notre patrimoine. Nous sommes bien conscients que cette volonté se traduit directement dans la volonté annoncée de chercher à faire disparaître le siège social de l'Université du Québec. S'attaquer au siège social, lieu de coordination et de planification de l'ensemble du réseau de l'Université du Québec, est effectivement un choix judicieux pour ceux qui voudraient voir disparaître l'Université du Québec ou tout simplement voir les constituantes du réseau de l'Université du Québec devenir lentement des Nordair Metro de CP des universités traditionnelles, se limitant à certains programmes de 1er cycle afin d'alimenter en étudiants le 2e cycle des universités traditionnelles, laissant pour compte à la fois nos institutions et nos régions.

Faire disparaître un siège social équivaut à faire disparaître le moteur d'une automobile: en apparence, rien n'est changé, mais point n'est besoin de s'étendre sur les conséquences que cela implique. C'est pourquoi nous pensons qu'on a choisi le siège social, centre névralgique de l'Université du Québec, pour s'attaquer au réseau, choix politiquement plus facile face à la population en général qui ne réaliserait pas toute la portée du geste avant qu'il soit trop tard, une sorte de bombe à retardement qui ferait éclater le réseau, le menant lentement à sa perte. C'est pourquoi nous recommandons le maintien du siège social du réseau de l'Université du Québec.

Quant aux frais de scolarité, nous recommandons le maintien de leur gel, respectant ainsi un choix de société que le Québec a fait. Si le gouvernement venait à prêter l'oreille de façon sérieuse aux discours visant à hausser les frais de scolarité, nous le mettons en garde contre les effets néfastes que cela aurait sur l'accessibilité. Plusieurs étudiants se verraient retirés prématurément du système d'éducation au même moment où le gouvernement cherche par tous les moyens à y réintégrer ceux qui l'ont quitté. Il ne faut pas croire, ni faire croire que le retrait d'étudiants du système d'éducation est synonyme d'économie pour la société. Il y a des coûts sociaux importants associés au retrait de ceux-ci. On n'a qu'à penser à ceux qui, justement, faute d'emploi ou de formation suffisante pour en obtenir un ou en créer un, se retrouveront dans le système de l'aide sociale, service qui n'est pas gratuit pour la société et plus coûteux, il faut le dire, que les sommes investies dans l'éducation pour le même individu.

Rappelons les propos de Concordia: Si vous pensez que l'éducation coûte cher, essayez l'ignorance pour voir. On ne passerait sous silence le proverbe qui dit:

Celui qui ouvre une école ferme une prison; celui qui ferme un école ouvre une prison. Le message est éloquent, surtout quand on sait que le budget de l'éducation supérieure au Québec est d'environ 1 500 000 000 $ pour 210 000 étudiants, tandis que le budget du système correctionnel canadien est de 1 300 000 000 $ pour environ 27 000 incarcérés. Il faut tenir compte des frais judiciaires qui ne sont pas inclus ici et qui viennent grossir ce budget. On voit bien tout le dilemme de fixer les priorités sociales en matière d'activités qu'on privilégie. Si on persistait dans cette direction, malgré ces arguments, il faudrait songer à ne pas mettre tous les oeufs dans le même panier. À cet effet, nous recommandons, le cas échéant, la création d'un réseau public et d'un réseau d'institutions privées tels que décrits dans notre mémoire aux pages 8, 9 et 10. Merci.

M. Côté (Yvan): J'aimerais compléter, M. le Président, pour aborder les autres thèmes de notre mémoire.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Vous êtes maîtres de la façon dont vous voulez répartir votre droit de parole et votre temps. Jugez-en. (17 h 15)

M. Côté (Yvan): Oui, d'accord. Comme complément d'information, je vais terminer avec un petit passage sur la gestion des ressources. Par la suite, on a une proposition, dans un document qu'on vous a remis tantôt, concernant un système de ressources financières pour les étudiants.

Face aux restrictions budgétaires, les administrations universitaires se sont rabattues sur un moyen de fortune pour assurer un enseignement à des clientèles étudiantes toujours grandissantes: l'embauche des chargés de cours. Plusieurs avantages économiques sont rattachés à cette décision: salaires moins élevés, pas de bureau personnel à fournir, pas de sécurité d'emploi à long terme. Certains avantages pédagogiques peuvent aussi justifier la présence de chargés de cours, par exemple, l'expérience qu'ils ont du marché du travail et le "vent frais" de nouvelles idées qu'ils peuvent amener. Enfin, on peut aussi dire qu'être chargé de cours est un excellent moyen pour un étudiant gradué d'acquérir de l'expérience et de réussir à boucler son budget.

Par contre, plusieurs problèmes en résultent également: enseignants non disponibles entre les cours pour faire l'encadrement des étudiants, surtout dans les cas trop souvent fréquents où les chargés de cours viennent de l'extérieur de la région; chargés de cours manquant de pédagogie ou qui ne semblent pas utiliser le matériel disponible pour le faire ou encore étudiants

en maîtrise mal préparés à enseigner.

Ce n'est pas la présence de chargés de cours que nous critiquons ici, mais leur surabondance. On en est rendu au point où, dans certaines universités, plus de 60 % des cours sont donnés par eux. Pendant ce temps, on n'engage pas de nouveaux professeurs et le corps professoral vieillit, étant donné le non-renouvellement de celui-ci.

Face à cela, il nous semble anormal que plus d'un cours sur trois soit donné par des chargés de cours, peu importe l'économie que leur utilisation entraîne. Il faudrait qu'une réglementation empêche les universités de dépasser ce nombre, c'est-à-dire 33 %

Dans le cas des centres hors campus, la situation est encore plus tragique: la presque totalité des cours sont donnés par des chargés de cours. Mais il paraît presque impossible d'y trouver une solution, sauf peut-être faire appel à la collaboration des professeurs de la constituante mère ou du réseau de l'Université du Québec, par une certaine mobilité.

Au niveau de la gestion des ressources humaines, la permanence des professeurs fait en sorte que le corps professoral ne se renouvelle pas, nécessairement. La moyenne d'âge d'un professeur universitaire est maintenant rendue à 43 ans. Elle vieillit d'un an chaque année. Donc, c'est une chose sur laquelle il faut se poser des questions.

Les universités québécoises ont un des ratios étudiant équivalent temps complet par professeur les plus hauts au pays. L'Université du Québec à Chicoutimi a un ratio de 22. C'est un des plus élevés au Québec; c'est deux fois le ratio du cégep de Jonquière qui est à 11. C'est une conséquence du grand nombre de chargés de cours et de la stagnation du nombre de professeurs.

Pour régler ces problèmes, en particulier celui du vieillissement du corps professoral, nous croyons que des mesures s'imposent pour permettre à de jeunes professeurs d'accéder à l'enseignement universitaire et de réduire ainsi le ratio étudiant temps complet par professeur, soit que l'université priorise un investissement massif du gouvernement pour engager de nouveaux jeunes professeurs. Une certaine économie serait effectuée en éliminant des chargés de cours, soit un investissement gouvernemental dans une formule de préretraite et de remplacement du personnel ainsi libéré.

Les professeurs et la recherche. Tout le monde sait qu'un professeur d'université fait de l'enseignement et de la recherche. Tout le monde? En fait, plusieurs professeurs ne font pas du tout de recherche et ne se retrouvent qu'avec deux cours à donner par session. Certains sont, d'ailleurs, tellement excédés par la ribambelle éternelle de la recherche qu'ils se sont dits prêts à donner trois ou quatre cours, selon les commentaires qu'on a reçus.

D'un autre côté, certains chercheurs ne donnent des cours que parce qu'ils sont obligés d'en donner. Ils préféreraient se consacrer entièrement à la recherche et ainsi en faire profiter les étudiants intéressés et l'institution. Ce sont les étudiants qui en subissent les conséquences néfastes: des professeurs peu intéressés.

Beaucoup, finalement, aiment le système actuel - je croîs que c'est l'ensemble - qui marie bien l'enseignement et la recherche. Pour améliorer la qualité de l'éducation dans nos universités, tout en réduisant les coûts, nous suggérons la création de quatre statuts de professeurs -vous en avez trois dans le mémoire, et un sur l'erratum qu'on vous a distribué - soît le professeur, celui qui ne fait pas de recherche et qui se consacre à l'enseignement; le professeur-chercheur, c'est-à-dire le statu quo par rapport à la situation actuelle; le chercheur qui fait de la recherche à temps plein et encadre des étudiants de 2e et 3e cycles; enfin, la quatrième catégorie, les chercheurs émérites, les retraités. Ils sont payés à même leur fonds de retraite, ils font de la recherche ou gèrent celle-ci, et l'établissement leur fournit bureau et services.

Il y a plus de professeurs qui optent pour l'enseignement à temps plein plutôt que pour la recherche, se basant sur une étude publiée l'an dernier par l'Université de Montréal. Il est à noter que le choix est laissé au professeur également. À cet effet, on comprend la réticence des professeurs à la lumière des actions que les administrations ont posées dans le passé et l'utilisation qu'elles pourraient être tentées de faire par rapport au choix du professeur.

Si un professeur veut continuer de combiner l'enseignement et la recherche, cette formule lui en laisse la possibilité. Des critères d'évaluation de la recherche feront, cependant, en sorte d'éliminer le problème des professeurs qui sont présentement payés pour de la recherche qu'ils ne font pas. Les chercheurs à temps plein pourront, grâce à leur libération, se consacrer presque entièrement à leurs recherches, faire croître la réputation de l'établissement et contribuer activement à son développement.

La mobilité, du moins à l'intérieur du réseau de l'UQ, étant donné le système de communications privilégié entre les constituantes, devrait être encouragée principalement dans les centres hors campus où les chargés de cours sont présentement omniprésents. Il ne coûte, d'ailleurs, pas plus cher pour une constituante de l'Université du Québec en régions de faire venir un professeur de l'UQAM qu'un chargé de cours

de Montréal. C'est évidemment un choix de gestion. On pourrait ainsi économiser sur les coûts d'autres chargés de cours et le professeur pourrait simultanément échanger avec d'autres professeurs dans d'autres constituantes sur les différents travaux de recherche en cours et sur leur développement.

La permanence et l'évaluation. Le problème le plus important concernant les professeurs demeure le non-renouvellement du corps professoral. En plus de la mise à la retraite de certains professeurs énoncée plus haut, c'est-à-dire la préretraite, nous demandons l'instauration d'un système d'évaluation des professeurs et de leur enseignement. Ceux-ci se verraient offrir un contrat de dix ans. Durant cette période, une évaluation progressive du professeur et de son enseignement est faite sur la base de questionnaires destinés aux étudiants à la fin de chaque session, de ses travaux de recherche, s'il y a lieu, et de l'opinion de ses confrères, c'est-à-dire de l'évaluation de ses confrères. Un comité de coordination formé d'étudiants, de professeurs et d'administrateurs est chargé d'assurer la bonne marche de l'évaluation.

Si l'évaluation se révèle positive - je crois que le barème sera déterminé en fonction de cette évaluation - un nouveau contrat de dix ans lui est automatiquement accordé; sinon, un contrat d'une durée de trois ans est signé. Si la situation ne s'est pas améliorée à la suite de l'évaluation de ces trois ans, le professeur est congédié. Si la situation est corrigée, un nouveau contrat de dix ans lui est accordé. Cela fait donc treize ans, plus la possibilité de renouvellement automatique advenant une évaluation positive.

Nous croyons que la durée de dix ans assure une certaine sécurité d'emploi nécessaire à un bon climat de travail. Elle permet aussi d'éviter le facteur émotionnel de l'évaluation. Ainsi, un professeur qui serait affecté d'une dépression pendant deux ans, par exemple, pour cause de divorce ou de mortalité, ne verrait ce facteur n'influencer qu'un cinquième de son évaluation.

C'est donc un système de quasi-permanence qui, dans un sens, ne produira probablement pas beaucoup de mises à pied; le recyclage, ainsi qu'une actualisation des méthodes d'enseignement sont importants. À ce point de vue, nous trouvons important que les professeurs puissent se recycler, au moins tous les dix ans, et que des sessions sabbatiques leur soient payées en ce sens.

Les administrations. Le vrai problème de nos universités en est un de gestion. Comme les trois petits singes, le gouvernement ne voit rien, les conseils d'administration universitaires n'entendent rien et les syndicats ne disent rien.

La gestion des universités au Québec est présentement assumée par un groupe d'individus assez fermé, considéré par la communauté universitaire comme la mafia universitaire. Un tel système fermé fait en sorte que, si une personne ne partage pas les points de vue du groupuscule au pouvoir dans une université, ses chances de travailler efficacement sont presque réduites à néant à la suite des pressions des administrateurs. Il faut, en effet, se poser sérieusement des questions quand on voit des doyens démissionner, comme c'est le cas à l'UQAC.

C'est pourquoi nous demandons la tenue d'une commission d'enquête sur l'administration universitaire. Cela entraînerait sûrement un nettoyage des éléments négatifs du milieu universitaire et ferait en sorte que les investissements futurs dans les universités soient bien gérés.

Il y a également la problématique de la place des étudiants dans la gestion. Â l'UQAC, c'est un phénomème bien précis, c'est-à-dire que, depuis novembre 1984, il n'y a aucun étudiant qui siège au conseil d'administration. Cela fait maintenant deux ans. Donc, c'est une problématique au niveau de la loi 32 qui vous est exprimée ici dans le mémoire. Vous pourrez le lire.

Pour terminer, on a préparé une nouvelle recommandation, la 24, qui est dans l'erratum. On recommande l'élaboration d'un nouveau système d'aide financière basé sur la réalité socio-économique actuelle du Québec et en tenant compte des priorités sociales de l'accessibilité en matière d'aide financière. À cet effet, M. Bégin va expliquer le feuillet que vous avez reçu: À la recherche d'un système idéal.

M. Bégin: J'essaierai d'être aussi bref que possible.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Prenez le temps qu'il vous faut pour bien nous expliquer cela. J'ai la réputation d'encadrer le travail des députés; mais celui de nos invités, jamais.

Une voix: Ha! Ha!

M. Begin: C'est bien. Lorsqu'un système informatique - d'ailleurs, notre analyse se base là-dessus - a subi plus de 10 % de modifications, il est souvent moins coûteux et plus efficace d'en faire un nouveau plutôt que d'essayer de rajuster l'ancien. C'est le cas du système de prêts et bourses* qui, depuis les années soixante, a subi maintes et maintes modifications sans pour autant satisfaire ses utilisateurs. Ce n'est pas surprenant, puisque celui-ci ne correspond plus à la réalité socio-économique d'aujourd'hui. C'est un système incompréhensible où même les spécialistes sont incapables de se retrouver tant les

différentes réglementations s'enchevêtrent.

Il est grand temps de poser les vraies questions et de mettre sur pied un nouveau système qui rejoint les préoccupations de ses utilisateurs. Nous avons fait l'exercice et nous croyons avoir trouvé une solution à tout le moins beaucoup plus simple et efficace. Dans un premier temps, la première préoccupation en est une d'accessibilité financière à l'éducation postsecondaire. Dans un deuxième temps, une préoccupation d'équité pour tous les utilisateurs. Nous rejoignons ces deux préoccupations. Il faut dire que ce n'est pas tant l'endettement qui est grave que les modalités de remboursement du présent système.

Nous préconisons un nouveau mécanisme quant au remboursement. Il ne faut pas, non plus, se leurrer concernant les bourses actuelles qui, en fait, souvent ne sont pas aussi élevées que le montant des intérêts que nous paierons lors du remboursement des prêts qui nous sont consentis. C'est pourquoi nous favorisons la solution des prêts sans intérêt, qui permet de connaître le niveau d'endettement réel. Nous croyons que la société a la responsabilité, dans son ensemble, de voir à maintenir pour l'étudiant l'accessibilité financière. Du même coup, les parents ont une responsabilité directe et se doivent alors de contribuer spécifiquement au financement.

Le système actuel calcule une contribution des parents, mais ne contient aucun mécanisme pour la vérifier. Nous entendons le faire. Le système serait administré par le ministère du Revenu et serait grandement simplifié, générant des économies considérables au plan de la papeterie et du traitement des demandes. Tout serait traité selon le niveau d'études, collégial ou universitaire, de la même manière indépendamment de la provenance familiale ou de quelque autre critère quant à l'attribution de l'aide financière et du montant consenti. Dès l'entrée à l'université ou au collège, chaque étudiant se verrait remettre un premier chèque d'une série de cinq correspondant à une fraction du montant total de l'aide financière accordée pour le niveau d'étude fréquenté. Il recevrait subséquemment les autres tranches au cours de l'année scolaire, pour autant qu'il soit toujours reconnu comme étudiant à temps complet de son établissement d'enseignement. Ainsi de suite d'année en année jusqu'à ce qu'il quitte pour le marché du travail. Rappelons qu'il s'agit de prêts sans intérêt et que ceux-ci seront assumés par l'État tant et aussi longtemps que le prêt ne sera pas entièrement remboursé par l'étudiant.

Source de financement du système. Le financement proviendra de deux sources: du budget actuel des services de prêts et bourses, avec des économies de papeterie, de formulaires de demande, de traitement des demandes etc., et d'une contribution réelle des parents pour la période d'études de leur enfant. Expliquons-nous. Il y aura une contribution des parents, et nous insistons sur le "des" puisque le calcul s'effectuerait sur la base des déclarations de revenu des deux parents, le cas échéant, mariés ou non, à l'aide d'une table de contributions incluse au rapport d'impôt pour fins de calcul et après déductions admissibles. (17 h 30)

La contribution des parents se ferait au prorata des revenus de chacun, mais serait, cependant, calculée sur la base de leurs revenus globaux une fois ceux-ci jumelés. Ces contributions seraient, bien sûr, déductibles d'impôt. Afin de permettre la planification d'une telle contribution, il y aurait lieu de créer un programme d'épargne-étude sur le modèle des programmes d'épargne-logement. C'est là que le système rejoint notre préoccupation de responsabilité spécifique des parents.

Pour ce qui est de la responsabilité sociale, lorsque le calcul de la contribution des parents sera inférieur au montant prêté à l'étudiant, c'est l'État qui financera la différence. À titre d'exemple, le couple, père et mère, gagnant plus de 100 000 $ pourrait bien, en vertu du régime, être appelé à fournir 100 % du montant prêté à leur enfant par l'État, tandis que celui gagnant 25 000 $ pourrait contribuer è 20 % et l'État assumerait la différence. Maintenant, tout montant versé au ministère du Revenu par les parents serait comptabilisé durant toute la période d'études de leur enfant et, lorsque celui-ci sortirait du système d'éducation, les parents se verraient rembourser par le gouvernement par tranches réparties sur trois ou cinq ans le montant total pour lequel ils ont contribué. Ces remboursements seraient, évidemment, imposables une fois ajoutés à leur revenu.

Modalités de remboursement par l'étudiant. Quant à l'étudiant, celui-ci se voit dans l'obligation de rembourser le ministère du Revenu en fonction de son revenu après déductions admissibles lors de la production de sa déclaration de revenu suivant une table de remboursement et ce, même lorsque celui-ci est encore aux études. Cette mesure existe afin que, si un étudiant gagne un revenu important tandis qu'il est aux études, l'État ne le finance pas en plus. Un étudiant n'ayant d'autres revenus que le régime n'a aucune contribution de remboursement à verser. Il y a lieu aussi de fixer un montant pouvant être gagné durant les études sans pour autant qu'il y ait une contribution à verser à titre de remboursement. Une fois sur le marché du travail, une contribution de remboursement minimale fixée à 250 $ ou calculée en fonction de la table, le plus élevé des deux, serait imposée à l'étudiant lors de sa déclaration d'impôt sur le revenu.

De telie manière, un étudiant se retrouvant sans emploi à sa sortie ne serait pas confronté à des remboursements insurmontables et à une situation financière des plus difficiles, tandis que celui gagnant un gros salaire se verrait appelé à un remboursement rapide du montant mis à sa disposition. C'est ce que nous appelons un système simple et équitable qui assure des modalités de paiement qui font de l'endettement pour fins d'études un moindre mal en attendant que notre société puisse se permettre mieux encore dans sa recherche d'un système idéal.

M. Côté (Yvan): Pour terminer au niveau de l'aide financière, il est également mentionné dans le mémoire, à la page 21, que, pour favoriser un cheminement normal de l'étudiant, il existerait le remboursement d'un pourcentage de la dette de l'étudiant ayant fait son baccalauréat, sa maîtrise ou son doctorat dans les délais requis et ayant eu un résultat supérieur à la moyenne. Donc, un pourcentage des étudiants ayant fait leur baccalauréat en trois ans se verraient ainsi réduire leur dette. Nous croyons que cette suggestion ferait chuter le nombre d'abandons du 1er cycle et ferait grimper le nombre d'étudiants à plein temps au détriment de ceux à temps partiel.

Donc, c'est l'ensemble des 26 recommandations; vous pouvez les consulter à la fin. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): C'est moi qui vous remercie, M. le président, de votre exposé, ainsi que de celui de votre collègue. On a commencé à vous entendre à 17 h 5. Nos règlements nous demandent de terminer à 18 heures, à moins que je n'aie le consentement. Je sollicite immédiatement le consentement des deux côtés, du côté ministériel et du coté de l'Opposition, pour dépasser 18 heures, si on veut vous donner votre heure, jusqu'à 18 h 15 au maximum. D'accord? Y-a-t-il consentement?

Mme Blackburn: Cela va.

Le Président (M. Parent, Sauvé): II y a consentement. M. le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.

M. Ryan: On m'a averti de bien des sources d'être le plus aimable possible, ce que je pensais être toujours. Je veux vous dire que, sans aucune recherche d'artifice, j'ai trouvé intéressant le mémoire que vous nous avez soumis. D'abord, on voit que cela n'a pas été écrit par un technocrate commandé et que c'est votre réflexion à vous. C'est cela que nous voulons avoir quand nous entendons des représentants d'organismes étudiants. On veut avoir le fruit de la réflexion des personnes qu'ils représentent et, de ce côté-là, le ton général du mémoire, la facture du mémoire, l'indique assez bien. C'est l'impression que j'ai eue et je vous le dis bien simplement.

Une chose que j'ai appréciée également: vous avez réussi à dépasser ce que j'appellerais la tentation du nombrilisme. Vous avez épousé le problème des universités dans son ensemble. Vous auriez pu nous parler uniquement de vos chicanes de représentation à l'Université du Québec à Chicoutimi. Il y a un bref passage là-dessus. Je vous remercie de nous avoir fait grâce des détails. C'est un problème qui est devant les tribunaux, si je comprends bien, et que nous suivons de très près, que nous regrettons, mais où il y a des choses à "dirimer" de part et d'autre, si vous voulez en venir à une solution. On pourra en parler tantôt. Mais je vous remercie de ne pas nous avoir présenté ce problème comme votre souci majeur. Ça l'est peut-être en pratique, mais votre mémoire nous parle d'autre chose et il nous parle de choses qui nous intéressent au plus haut point, ce dont je vous suis reconnaissant.

Je pense que c'est un mémoire qui nous apporte les questions les plus radicales; d'un côté, on s'attend à cela. On a besoin d'être interpellés à ce niveau-là. Cela ne veut pas dire qu'on tombe d'accord sur tous les points, mais on est interpellé et on est obligé de faire face à des problèmes qui nous sont posés. C'est l'un des buts d'une commission parlementaire comme celle-ci. J'ai bien apprécié surtout de ne pas avoir trouvé dans votre mémoire la rhétorique facile qu'on trouve assez souvent. Cela m'encourage énormément.

Vous avez posé au début le problème du cégep par rapport à l'université. D'ailleurs, vous avez une recommandation à la fin de votre liste de recommandations là-dessus. Vous dites qu'il y a des problèmes de jonction qui ne sont peut-être pas réglés aussi harmonieusement et définitivement qu'on pourrait le penser. C'est l'une des rares fois au cours des audiences de la commission que ce problème a été posé. À quelques reprises, par leurs questions, les parlementaires ont voulu évoquer ce problème et cela n'a pas pris. La canne à pêche est tombée dans l'eau et les poissons n'ont pas mordu. Mais vous posez le problème. Je veux vous dire que c'est une question qui me préoccupe et à laquelle je n'ai pas de solution immédiate. Mais c'est une question qui fait partie de celles qui habitent mon esprit et que nous devons continuer à nous poser au cours des années futures parce que c'est l'un des points sur lesquels nous sommes à peu près seuls de notre espèce en Amérique du Nord. Il y a un prix à payer pour ces différences que nous poussons souvent à l'extrême. Je ne remets rien en cause pour l'instant, mais, dans mon

esprit, cette question est soulevée et je suis bien content de l'avoir trouvée dans le mémoire que vous nous présentez aujourd'hui.

Vous présentez une suggestion qui est très intéressante au point de vue de l'avenir et de la structure de nos universités. Cela peut sembler bizarre que, à travers le concert d'unanimité un peu conventionnel que nous avons entendu depuis le début, vous veniez nous dire que le même système d'université pour tout le monde, ce n'est pas une bonne chose; on aimerait qu'il y eût un certain nombre d'universités privées et un grand réseau public d'institutions universitaires qui regrouperait d'autres établissements, dont celui où vous oeuvrez actuellement.

L'idée peut sembler étonnante pour un public québécois; elle n'est pas étonnante pour un public américain parce que c'est l'équivalent du système qu'on a aux États-Unis. Aux États-Unis, on a des universités d'État dans un grand nombre d'États à côté desquelles il y a des universités privées. C'est vrai qu'entre les frais de scolarité, en particulier, exigés par les unes et les autres, il y a des écarts considérables, les frais de scolarité exigés par les universités publiques étant de beaucoup inférieurs aux frais de scolarité exigés par les universités privées.

Je vous souligne cependant que, même dans les universités publiques, la moyenne que nous établissons, nous, ici, est autour de 1500 $ par année en frais de scolarité et non pas 550 $ comme nous l'avons au Québec, avec un dollar américain, comme vous le savez, qui a une valeur de 33 % de plus que le nôtre. Mais, quand même, cette chose est très intéressante. J'ai essayé de faire des calculs rapides sur ce qu'impliquerait votre proposition, sous l'angle de l'augmentation des frais de scolarité qui devrait découler de votre recommandation pour les universités qui s'en iraient dans le secteur privé. Ce ne sont pas des choses qui sont impossibles à considérer. En tout cas, il y a des éléments sur lesquels nous allons faire des calculs, réfléchir et dont nous allons discuter, je vous remercie d'avoir proposé ces perspectives parce que cela nous oblige à réfléchir. Cela nous sort des sentiers battus et j'estime que ce n'est pas de la démagogie.

Sur le statut des professeurs, des questions très impartantes aussi ont été soulevées. Je ne sais pas dans quelle mesure le système que vous proposez pourrait s'appliquer. Des recommandations un peu semblables nous ont été faites antérieurement. Je pense qu'il y a un effort de réflexion pour essayer de sortir de l'espèce de cercle vicieux dans lequel peut déboucher le régime de permanence. Il y a de très bons arguments en sa faveur. Il y a aussi un certain nombre d'inconvénients. Vous optez pour une façon de voir. Cela nous interpelle encore une fois et c'est loin d'être négligeable, la manière dont vous le faites, bien au contraire.

Sur l'aide financière, il y a des propositions qui témoignent d'une réflexion aussi, franchement, 11 y en a une qui est plus difficile - je vous le dis tout de suite -c'est la deuxième, quand vous recommandez que les étudiants soient tous considérés comme autonomes et aient accès à un prêt de 4000 $ plus le montant des frais de scolarité, sur demande. J'ai essayé de faire une estimation du coût. J'ai demandé à nos collaborateurs du ministère de faire une estimation du coût éventuel d'une mesure comme celle-là. Les calculs préliminaires que nous établissons ce ne sont pas du tout des calculs définitifs - vont chercher quelque chose de l'ordre de 300 000 000 $. Pardon?

Mme Blackburn: Additionnels?

M. Ryan: Oui, par rapport à ce que nous dépensons actuellement. C'est une chose à laquelle il faudrait penser de très près. Nous l'avons déjà dit à plusieurs reprises depuis le début des travaux de la commission, nous ne sommes pas capables d'envisager actuellement l'élimination de ce régime qui reconnaît un étudiant comme dépendant de sa famille, parce que cela entraînerait plusieurs centaines de millions de dollars d'augmentation; nous ne sommes pas capables de le faire actuellement. Quand même, je pense que l'idée, en soi, est juste. Si vous me demandiez: Est-ce que vous ne considérez pas qu'une personne qui est apte à voter devrait aussi être considérée comme autonome, je vais vous répondre spontanément oui. Je vais vous répondre oui sans hésitation, comme elle est aussi apte à faire partie de l'armée si on a besoin d'elle; c'est vrai.

D'autre part, il y a ces limites financières qui sont omniprésentes dans les décisions que nous devons prendre et aussi la concurrence qui vient d'autres besoins encore plus aigus d'autres secteurs de la société qui nous oblige à tenir compte de facteurs comme ceux-là. C'est le cas, d'ailleurs, pour l'aide sociale aux jeunes également. Je pense bien que, même le parti qui nous a précédés au pouvoir aurait voulu donner l'égalité dans les allocations d'aide sociale, II n'a pas pu le faire parce qu'il trouvait qu'il y avait des priorités plus impérieuses qui le sollicitaient autour d'autres objets. En tout cas, ce sont des choses dont on discute.

Les autres propositions, par ailleurs, je pense qu'il y aurait lieu de les étudier soigneusement, même dans une perspective plutôt prochaine. Il y a des choses que l'on pourrait tirer de là, me semble-t-il, qui pourraient être extrêmement intéressantes.

Cela résume un peu l'impression que je retire de la lecture de votre mémoire et de

l'écoute que j'ai faite du résumé que vous nous en avez donné. Par conséquent, j'exprime une pensée d'appréciation. Ce n'est pas seulement pour être agréable envers mes collègues et vous-mêmes. J'ai l'habitude de dire le fond de ma pensée. Encore une fois, je vous remercie.

Maintenant, je vous poserai peut-être quelques questions, puisque le temps s'écoule. Dans votre mémoire, de toute façon, il y a bien des choses qu'on pourra reprendre en temps utile. En quoi pensez-vous que la création de deux classes d'étudiants universitaires... C'est l'objection de fond qu'on soulèvera au sujet de votre suggestion principale. Vous dites: Ayons des universités privées, payons un réseau d'établissements universitaires publics. Vous créez ainsi deux classes d'étudiants. Il y en a qui seront des étudiants à 2000 $ par année de frais de scolarité et d'autres qui seront des étudiants, éventuellement, si on suit votre suggestion, qui ne paieront pas de frais de scolarité. N'oublions pas une chose, chaque année où on décide de ne pas augmenter les frais de scolarité, on fait un pas vers la gratuité sans avoir toujours la logique de se l'avouer. (17 h 45)

Qu'est-ce qui justifie la création de deux classes d'étudiants aussi marquées? Les quatre universités que vous choisissez pour aller dans le secteur privé regroupent au moins 60 % de toute la clientèle étudiante universitaire en équivalence temps complet. Sur la base de quelles raisons, de quelles considérations allez-vous créer deux classes d'étudiants universitaires?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, M. Côté ou M. Bégin.

M. Bégin: M. le ministre, en réalité, comme l'explique un peu notre mémoire, c'est sur la base du discours de ces établissements. D'une part, l'Association générale étudiante de l'Université du Québec à Chicoutimi ne favorise pas nécessairement deux classes d'étudiants, loin de là. L'Association générale étudiante de l'Université du Québec à Chicoutimi favorise l'accès pour tout le monde. On dit dans notre préambule que, si on fait le choix au Québec de hausser les frais de scolarité, avec les conséquences que cela aura, le Québec ne peut se permettre de mettre tous ses oeufs dans le même panier pour faire, dans cinq ans, un constat d'échec devant ce choix.

Nous disons: Comme population, comme société responsable, on doit garantir dans un système l'accessibilité à toute personne qui voudrait poursuivre des études de niveau supérieur. C'est à cet effet que nous suggérons la création d'un réseau public qui aura cette mission. Nous ne sommes pas contre le libre choix de l'individu de faire des choix et, dans la mesure où on garantit l'accessibilité à l'éducation supérieure, nous croyons que les établissements ont le droit, à ce moment-là, de faire des choix. Ce sera le marché qui équilibrera ce choix, finalement.

M. Ryan: Je voudrais faire une correction. On m'indique que la clientèle des trois universités dont j'ai parlé représente 48 %. Si on ajoute la quatrième dont vous avez parlé, cela ira probablement chercher 50 %, et non pas 60 %, comme je l'ai dit. Cela ne change pas le problème, mais c'est une précision qu'il est bon d'apporter.

Ce qui me paraît difficile dans votre argument, vous répondez: Nous fonctionnons d'après le discours que tiennent les représentants de ces institutions. Il y a des étudiants dans ces universités, comme il y en a à l'Université du Québec à Chicoutimi. Est-ce que vous tenez compte de leur discours? Je pense qu'eux s'opposeraient à une telle distinction. Ne doit-on pas prêter l'oreille autant aux besoins de ces étudiants qui sont sensiblement les mêmes que les vôtres pour la très grande majorité? Je ne comprends pas très bien comment on pourrait faire cela après ce que nous avons fait au Québec depuis vingt ans. En soi, il n'y a pas de problème. Aux États-Unis, comme je l'ai dit tout à l'heure, il y a un système un peu comme celui que vous proposez. Mais, au Québec, après être allés vers une démocratisation beaucoup plus grande de l'accès à l'université, est-ce que cela ne serait pas un pas en arrière que de faire ce que vous proposez?

M. Bégin: En fait, M. le ministre, on croît que les universités traditionnelles ne seraient pas capables de relever le défi. Nous ne sommes pas de ceux qui croient que l'Université du Québec est une université de second ordre. Nous sommes confiants que l'université traditionnelle au Québec - et nous parlons de Laval, de McGill, de Bishop et Montréal, évidemment - ne serait pas capable de relever le défi. Nous croyons que l'augmentation des frais de scolarité au Québec est une barrière suffisante à l'accessibilité qui fait en sorte que si on maintient un réseau public avec l'accessibilité, les universités traditionnelles ne seraient pas capables de relever le défi. On est prêt à les laisser essayer.

M. Côté (Yvan): Comme complément, je dirai que nous avons identifié des problématiques qui pourraient amener des diminutions importantes de la clientèle de l'ensemble du réseau universitaire du Québec, particulièrement du réseau UQ. Une hausse des frais de scolarité aurait une certaine répercussion négative sur précisément les universités en région, étant donné l'optique d'une structure quand même bien implantée

des universités traditionnelles. On estime que, pour le réseau UQ principalement, une hausse des frais de scolarité ferait en sorte qu'il y aurait un mouvement de la clientèle vers les institutions de type traditionnel. D'autre part, je pense que les étudiants, quant à faire un cours universitaire en s'endettent de plus en plus, choisiraient la voie des cégeps techniques avec spécialisation à temps partiel lorsqu'ils auraient un régime établi, c'est-à-dire un emploi stable, etc. Nous croyons que le fait de hausser les frais de scolarité aurait des effets très néfastes sur le réseau de l'Université du Québec.

C'est ce qui nous a amenés à suggérer des propositions comme celles qu'on a avancées, c'est-à-dire une démocratisation vers les régions des universités du Québec, à Montréal et à Québec, étant donné le bassin de population, et donner le libre choix aux gens d'aller vers les institutions qu'ils préfèrent, et aider d'ailleurs les étudiants qui choisiraient l'université dite privée plutôt que l'Université du Québec par un système de prêts. Sauf que l'argent récupéré de ce système - on dit qu'on financerait les institutions privées à 80 % - servirait au développement qui a été un peu, à notre avis, perturbé par les compressions, c'est-à-dire une certaine stabilisation avec une augmentation de clientèle.

Donc, il faudrait investir dans le développement du réseau pour en arriver à un réseau public très compétent et à un réseau privé qui a déjà les infrastructures disponibles. Cette recommandation, c'est dans la perspective où une hausse des frais de scolarité, à notre avis, serait très défavorable aux régions principalement et au réseau de l'Université du Québec.

M. Ryan: On m'indique que mon temps est terminé. C'est malheureux, je reviendrai peut-être un petit peu tantôt vers la fin. J'apprécie les réponses.

Le Président (M. Parent (Sauvé): Merci. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le président - je pense qu'on dit M. le secrétaire général dans les associations étudiantes - messieurs, permettez-moi une remarque. Je ne vois pas beaucoup de filles. Elles doivent être 50 % chez vous. C'est un peu comme dans l'administration et ailleurs. Je voudrais vous souhaiter la bienvenue et vous dire que je suis heureuse de vous retrouver ici. On l'a dit au moment où les étudiants sont venus faire des présentations ici devant nous, il est important de voir la réalité des universités présentée par le biais de ceux qui la fréquentent. Il est juste de dire, et ce n'est pas ce qu'on attend de vous, que généralement vos analyses ne se veulent pas exhaustives et fines, sauf que je pense bien qu'elles font état de vos perceptions et des situations que vous vivez à l'intérieur des établissements. C'est pourquoi votre participation aux travaux de la commission parlementaire est extrêmement importante. Je voudrais pour cela vous remercier, de même que saluer, par la même occasion, les personnes qui vous accompagnent.

Je passerais quand même sans plus tarder à des questions d'éclaircissement, si vous me le permettez. Contrairement au ministre, je dois dire que je trouve intéressant le système que vous proposez. Somme toute, il y a effectivement des parents qui ne paient pas leur contribution, même si le calcul de l'aide financière établit qu'ils devraient le faire. Cela permet de corriger ces situations qui deviennent difficiles pour certains étudiants et certaines étudiantes. Par ailleurs, les parents qui paient effectivement les études de leurs étudiants ne reçoivent pas une déduction d'impôt comparable. Je pense que ce serait un avantage que vous n'avez peut-être pas évalué, mais qui est important pour les parents. Vous dites que ce serait déductible d'impôt, mais, en ce qui me concerne, ce serait nouveau parce que j'ai payé les études de mes enfants et ce n'était pas déductible d'impôt, sauf une partie relativement faible de ce que cela coûte.

Il y a une chose qui m'a étonnée un peu et qui, finalement, fait peut-être monter les coûts du système proposé. Vous remboursez à la fin les parents, si j'ai bien compris. Pourquoi?

M. Bégin: Je vais vous expliquer. Il faut bien comprendre qu'il s'agit d'un système qui ne s'apparente en rien au système précédent, c'est-à-dire que la contribution des parents déductible de l'impôt - il faut bien suivre le développement - c'est seulement au moment où le parent contribue. Ce dernier est remboursé et lorsque ce montant lui est remboursé, à ce moment-là il paie l'impôt sur ce montant. Cela se trouve à être un prêt en capital d'un parent à son enfant pour la durée de ses études et ce capital lui est remboursé, capital que le gouvernement accepte de lui faire passer en franchise d'impôt à son enfant et, au moment où il le récupère par le biais du système, comme il aurait dû le faire au moment où le gouvernement a fait la déduction, il paie l'impôt. C'est uniquement une mesure qui est un transfert fiscal et il va récupérer le même montant, mais celui-ci est différé.

Mme Blackburn: J'ai bien compris votre système. D'ailleurs, même si cela peut sembler complexe, c'est assez clairement expliqué. Tout ce que je voulais savoir, c'est

ceci. Actuellement, il n'y a aucun retour. Les parents ne retrouvent pas les sommes qu'ils ont investies dans la formation des étudiants, la formation de leurs enfants. Pourquoi un retour? Pourquoi rembourser les parents? C'est ma question.

M. Bégin: En réalité, je pense que s'il y avait un projet... On voulait présenter un projet qui soit à la fois fonctionnel et acceptable pour une mise en application. Je crois que si un gouvernement voulait mettre en application un système où il aurait une contribution nette, fiscale, sans remboursement, j'aimerais voir quel gouvernement adopterait cette mesure.

Mme Blackburn: Vous n'avez pas fait état là-dedans de la durée des études. Par exemple, ma fille décide de rester, de prendre sept ans pour faire un bac. Est-ce que moi, comme parent, je suis obligée de contribuer pendant sept ans?

Une voix: Bien oui.

M. Côté (Yvan): Oui. Je pense qu'il y a des incitatifs qu'on a mentionnés dans l'aide financière, des incitatifs à terminer, faire un cheminement normal, autrement dit. Donc, ces incitatifs demeurent. Si on prend le texte: un remboursement de la dette de l'étudiant soit à l'obtention de son bac ou dans un temps de cheminement régulier, la maîtrise dans le cadre d'un cheminement régulier et le doctorat dans te cadre d'un cheminement régulier, il est certain que, s'il y a une continuité pour sept ans, le système va continuer à fonctionner. Il y aura des contributions des parents qui vont être proportionnelles au salaire, c'est-à-dire que ce sera proportionnel au salaire du parent, selon une table d'impôt. Donc, cela ferait une contribution, par exemple, un endettement de 42 000 $ pour l'enfant, donc, je ne pense pas que l'étudiant à 42 000 $ va continuer à s'endetter longtemps. Je pense que rendu à un certain montant il y aura des incitatifs naturels à terminer. Je pense que la mesure est pour cela.

Mme Blackburn: L'endettement forcerait un peu les étudiants, les jeunes à terminer plus tôt. Jusqu'à quel âge les parents sont-ils responsables selon vous par rapport aux jeunes? Ce n'est pas l'objet, mais je me sens comme obligée.

M. Bégin: C'est une bonne question. C'est moi qui vais répondre à cela. Eu égard au Code civil du Québec, un parent est responsable de son enfant toute sa vie, et un enfant est responsable de ses parents toute sa vie. Donc, gardons le Code civil en vue, amendons-le, le cas échéant.

Mme Blackburn: Avez-vous des enfants?M. Bégin: Oui.

Mme Blackburn: Je vais revenir sur le sujet. Est-ce que vous avez examiné l'hypothèse - quoique, évidemment, elle est fort différente de la vôtre et la vôtre prend en considération tous les coûts essentiels de la formation, c'est-à-dire les frais de scolarité plus les frais de survivance, de subsistance, survivance aussi - qui est avancée par la Commission jeunesse du Parti québécois et qui serait un impôt étudiant qui aurait comme effet de payer les frais de scolarité. Évidemment, cela ne toucherait pas aux autres frais de subsistance. (18 heures)

M. Bégin: Par rapport à un impôt étudiant, il faut savoir qu'il faudrait déterminer s'il est rétroactif pour tout le monde qui a eu un statut d'étudiant. S'il ne l'est pas, ce serait là une mesure fiscale ou de taxation qui serait discriminatoire en fonction de l'âge, c'est-à-dire que quelqu'un qui aurait tel âge, parce qu'il est né dans le mauvais temps, se verrait imposer une taxe ou un impôt, tandis qu'une personne qui serait née avant, la chanceuse, s'en sort. Nous pensons qu'il serait mieux d'avoir un régime qui soit indépendant de toute taxation, parce qu'il y a une chose qu'on peut réaliser, c'est que, lorsque l'on impose une taxe la première fois, on sait à quoi elle sert, mais, avec le temps, on ne sait plus trop à quoi elle sert. On peut donner l'exemple des taxes sur les cigarettes et l'essence qui paient n'importe quoi. Donc, on ne voudrait pas se retrouver avec un champ de taxation qui puisse, à un moment donné, s'emballer et servir à tout autre chose.

Mme Blackburn: Vous dites qu'il y aurait une inéquité à l'endroit de ceux qui seraient imposés et que ceux qui auraient terminé plus tôt ne le seraient pas. C'est que ceux qui terminent actuellement le paient déjà et immédiatement. C'est ce pourquoi ils ne seraient pas imposés par la suite. Je ne vois pas l'inéquité par rapport à cela. Par rapport à votre deuxième préoccupation, cependant, cela vous donne et cela donnerait aux étudiants moins de contrôle sur l'augmentation des frais de scolarité et pas davantage sur l'utilisation qui pourrait en être faite.

Le ministre, tout à l'heure, a insisté sur les conséquences que pourrait avoir le choix que vous proposez de créer deux réseaux, un réseau privé et un réseau public. Je dois dire que je partagerais, si jamais il abondait dans ce sens-là, ses préoccupations. Je trouve qu'il est trop facile de faire des comparaisons avec les Etats-Unis. Vous savez, vous connaissez un peu votre géographie. Si vous allez dans la région de

New York, vous avez 11 000 000 d'habitants. Si vous vous en allez un petit peu dans la pointe où les Québécois vont beaucoup, en Floride, vous retrouvez, à quelque 30 milles de distance, 9 000 000 ou 10 000 000 d'habitants. C'est cela, la population. Quand on parle d'une densité telle, je pense qu'on peut penser à des régimes fort variés qui sont acceptables chez eux. II faut dire aussi qu'on n'a pas là-bas tout à fait les mêmes préoccupations de démocratisation qu'on a ici au Québec.

Je voudrais mieux comprendre votre recommandation sur la suppression - sur une tout autre question - d'une année du cégep général. Je n'ai pas très bien...

M. Côté (Yvan): C'est-à-dire...

Mme Blackburn: C'est la toute dernière, je pense.

M. Côté (Yvan): Oui, c'est la 26e. Il y a un texte détaillé en page 6 qui analyse cette situation. Il ne faut pas oublier que certains programmes de cégep recoupent ceux des universités. D'ailleurs, j'ai eu connaissance, à quelques reprises, de certains projets voulant faire l'équivalence entre un cégep et l'université, donner des équivalences à l'université, etc. Je pense qu'on commençait à préciser les possibilités d'entrecouper cégep et université. Disons qu'il y a une différence fondamentale. Au cégep, les deux années qu'on fait, le général du cégep sert plutôt à orienter l'étudiant vers une branche ou une autre. Donc, on considérait, étant donné le peu de progression entre le cégep et l'université - je pense que c'est 15 % des étudiants de cégeps qui progressent vers les universités, je crois que c'était à ce niveau - que c'était un "désincitatif" à poursuivre des études plus complètes au niveau universitaire. Donc, la réflexion qu'on a faite, c'est de voir, si on coupait une année de cégep, si cela ne serait pas un incitatif plus grand à ce qu'il y ait un cheminement rapide vers l'université. En fin de compte, un cégep général qui serait plus orienté vers les cours dits généraux, un cheminement général, puis faire en sorte qu'il y ait une sorte d'explication des programmes de l'université en vue d'amener les étudiants à l'université.

On avait regardé les données et on disait que les deux années de cégep étaient un incitatif à une technique au niveau du cégep. Étant donné qu'on veut une plus grande démocratisation, une plus grande accessibilité aux universités, il faudrait peut-être considérer d'abolir une année de cégep pour qu'il y ait une plus grande progression secondaire-cégep-université.

Mme Blackburn: Vous avez en partie raison. Je pense qu'il y a une déperdition entre le cégep et l'université. Par ailleurs, dans les réseaux ontariens en particulier, il y a un taux d'abandon plus élevé une fois à l'université. Donc, cette espèce de déperdition qui se fait au niveau collégial finit par être équilibrée par rapport à ce qu'on constate en Ontario.

Une dernière question, et là on va vous demander d'être bref dans la réponse; je vais essayer d'être brève dans ma question. Vous proposez, pour les professeurs, la création de trois statuts de professeurs. Je ne vous demanderai pas de les réexpliquer. Ce sont: le professeur, celui qui n'a aucune recherche à faire - et vous en avez ajouté un quatrième - le professeur-chercheur, le chercheur, et le chercheur émérite qui existe déjà un peu. Celui qui trouve... Ha! Ha! Ha!

Comment le partage des tâches par professeur est-il conciliable avec une institution qui a comme responsabilité de faire et de l'enseignement et de la recherche? D'autres étudiants sont venus nous dire qu'il y avait un rapport étroit - je ne fais que répéter ce qu'ils nous ont dit -entre la qualité de l'enseignement et la qualité de la recherche. Le professeur qui s'adonne à la recherche est généralement également un bon professeur en matière de pédagogie.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M.

Bégin.

M. Bégin: Bon, d'une part, nous croyons que le taux de passage vers les différentes catégories ne serait quand même pas élevé. Nous croyons qu'il y aurait un certain niveau de stagnation vers le professeur-chercheur, c'est-à-dire le statu quo actuel. Et comme le rapport le préconise, le cheminement est au choix du professeur. À ce moment-là, nous croyons que c'est pire pour un professeur qui n'est pas intéressé à faire de la recherche -et il y a de très bons professeurs qui ne sont pas intéressés à faire de la recherche, du moins de la façon dont on la définit classiquement. Ce type de professeur se fait harceler parce qu'il ne produit pas et passe pour une personne qui ne fait pas son travail. À ce moment-là, cela a une incidence sur les cours qu'il donne, les deux charges de cours; plutôt que d'en donner plus, d'avoir un statut qui justifie sa façon de procéder et de pouvoir ainsi fonctionner efficacement dans le système...

Nous ne croyons pas à une seconde classe d'individus dans le monde, ce qui fait qu'il y a sûrement place pour certains professeurs qui enseignent plus et d'autres moins.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci beaucoup, M. Bégin. Je reconnais maintenant Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Merci, M. le Président. À mon tour, j'aimerais vous féliciter de votre mémoire. Je trouve que c'est l'un des plus intéressants que nous ayons reçus. Je m'intéresse particulièrement à votre quatrième recommandation, la possibilité de privatiser certaines universités en diminuant , la part de l'État dans leur financement.

Vous avez aussi suggéré qu'on les laisse libres de fixer le montant des frais de scolarité et de recueillir des fonds dans le secteur privé. Est-ce que cela veut dire que vous êtes contre la possibilité que les universités publiques recueillent des fonds du secteur privé?

M. Bégin: Non, ce n'est pas là notre propos.

Mme Dougherty: Alors, tout le monde sera, selon votre vision des choses, libre de recueillir ces fonds.

M. Bégin: Oui, mais tout le monde ne le fera pas de façon aussi performante, dans la situation actuelle. C'est un secret de polichinelle, en fait, que les universités traditionnelles, ayant des finissants déjà bien intégrés à tous les degrés de la structure de l'entreprise au Québec, ont beaucoup plus de facilité à aller chercher du financement dans le réseau des entreprises privées que les universités du Québec en ce moment. On ne dit pas que la situation ne changera pas. Personnellement, je le crois. Mais je pense qu'en ce moment, la démonstration de l'Université Laval, cette année, avec son fonds d'environ 25 000 000 $ et la démonstration de l'Université McGill, il y a quelque temps - trois ans, je croîs - avec 50 000 000 $ sont éloquentes en la matière.

Mme Dougherty: C'est à cause de leur place dans l'évolution des choses. Elles ont développé certaines masses critiques dans certains domaines qui attirent des fonds de recherche, des fonds fédéraux, etc. Ce n'est pas parce que l'université... Un jour, quand l'Université du Québec sera aussi développée pour ce qui est des deuxième et troisième cycles, elle aura le même pouvoir, j'en suis sûre, d'attirer des fonds.

M. Bégin: Si on prend l'exemple de la bibliothèque de l'Université McGill, en droit, je ne crois pas que ce soit une question particulière d'excellence dans le domaine. II y a d'autres bonnes universités en droit. Je crois que c'est une question d'affinité avec le subventionneur.

Mme Dougherty: Je ne crois pas. Il faut vérifier vos faits. Pour rectifier la situation, d'abord, la bibliothèque de l'Université McGill est loin en retard sur l'Ontario en volumes par étudiant, si on mesure sa force ainsi. Je crois que c'est vrai que certaines universités ont des racines historiques plus fortes que d'autres, mais en général cela n'aide pas leur fonctionnement.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la députée de Jacques-Cartier. J'invite maintenant Mme la députée de Chicoutimi à conclure au nom de sa formation politique.

Mme Blackburn: Je vous remercie, M. le Président. Au nom de ma formation politique, je vous remercie à nouveau de votre participation aux travaux de cette commission. Je le répète, la participation des étudiants à la réflexion qu'on est en train de faire, tant sur les orientations que sur le financement des universités, nous est précieuse. Je le disais hier, au moment où l'on rencontrait un autre groupe, il y a des choses qu'on ne peut connaître et mieux comprendre que par ceux qui les vivent. Nul doute que les préoccupations que vous nous apportez et la perception que vous avez également de vos universités, vous êtes les seuls à pouvoir nous les communiquer de façon intéressante et concrète. C'est ce que vous avez fait et je vous en remercie, parce que cela demande du travail, de la disponibilité et un certain engagement. Pour tout cela, je voudrais vous remercier. Je voudrais également vous souhaiter un bon retour chez vous et chez nous, mais soyez prudents en vous en allant; je constate que vous allez partir tard. Il faut être prudent. Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la députée. M. le ministre.

M. Ryan: On pensait écouter un annonceur de radio: il vous avertit d'être prudents sur la route.

Je vous remercie bien cordialement de l'échange de vues que nous avons pu avoir avec vous. Je ne pense pas qu'il soit facile, à court terme, d'épouser les orientations que vous proposez en matière de structures. Je pense que, à court terme, nous sommes un peu pris avec les structures que nous avons. Une des politiques de notre parti, c'est de ne pas jouer trop avec les structures qui ont été l'objet de beaucoup de bouleversements ces dernières années, souvent pour l'amusement de ceux qui se plaisaient à construire des organigrammes sur papier. Il y a des points de fond, dans les orientations que vous proposez, qui demandent à être examinés soigneusement et nous allons le faire au cours des prochaines semaines avec toute l'attention et la diligence nécessaires. (18 h 15)

II y a des points que nous aurions bien aimé examiner de plus près. J'aurais aimé examiner avec vous toute la question du statut du professeur d'université, son rôle,

ses rapports avec les étudiants. Je crois constater qu'il s'est produit une dépersonnalisation assez marquée des rapports entre professeurs d'université et étudiants à la faveur de tous les changements, de toutes les contraintes qui ont pesé sur les universités au cours des dernières années. Cela est profondément inquiétant pour la qualité de la formation donnée dans les universités. Je pense que c'est un des points sur lesquels les universités vont être obligées de se pencher ces prochaines années.

De l'aide financière, on n'a pas pu discuter beaucoup non plus parce que c'est un sujet très technique. Je tiens à vous dire que des travaux sont en cours au ministère au sujet de changements substantiels qu'il y aurait lieu éventuellement d'apporter au régime d'aide financière de manière qu'il soit plus capable de répondre aux besoins véritables des étudiants. Une chose nous complique la vie: c'est la composition du corps étudiant qui s'est sensiblement modifiée. On l'a vu chez vous comme ailleurs, la proportion des étudiants adultes -je ne veux pas supposer que vous ne seriez pas adultes, mais je veux dire ceux qui sont âgés de 24, 25 ans et plus - est maintenant devenue majoritaire dans plusieurs établissements universitaires. Cela change la nature des choses pas mal. C'est un point que nous devons examiner. Actuellement, ces personnes qui sont des étudiants à temps partiel pour la très grande majorité n'ont accès à aucune forme d'aide. C'est injuste. Seul le Québec est dans cette situation-là. Les autres provinces participent à un programme fédéral, comme vous le savez sans doute, qui donne accès aux adultes étudiants à temps partiel à une certaine forme d'aide. C'est un des points sur lesquels j'espère bien que nous pourrons faire une percée au cours des prochains mois.

Il y a beaucoup d'autres points que nous travaillons. Je veux vous assurer que les recommandations que vous avez faites concernant l'aide financière aux étudiants seront examinées avec soin. Il y en a une qui est très difficile. Je vous l'ai dit franchement. Je ne pense pas qu'on puisse s'attendre à des merveilles de notre part sur celle-là, mais sur les autres je pense que vous pouvez être assurés que nous allons étudier vos recommandations avec tout le sérieux qu'elles méritent.

Je vous remercie de vous être prêtés à l'exercice de démocratie que représente la tenue d'une commission parlementaire. Je pense que vous avez pu constater vous-mêmes que l'Assemblée nationale du Québec demeure un lieu d'échanges démocratiques, un Heu de rencontres civilisées, un lieu de débats qui peuvent être fort dignes à certains moments. Depuis le début de la présente commission, je me plais à le souligner. Grâce à la coopération autant des députés de l'Opposition que des députés ministériels, nous avons eu une qualité de discussion qui est bonne pour l'institution parlementaire. Cela fait du bien et vous avez contribué à cela en représentant un secteur qu'on voit peut-être moins souvent dans l'institution parlementaire. J'en suis très heureux pour l'institution. Merci beaucoup.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le ministre, merci, Mme la députée, M. Côté, M. Bégin, M. Thiam et votre autre collègue. Nous vous remercions beaucoup et nous vous souhaitons un bon voyage de retour.

La commission parlementaire de l'éducation ajourne ses travaux au mardi 7 octobre, à 10 heures, alors que nous accueillerons l'Université Laval.

(Fin de la séance à 18 h 19)

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