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(Dix heures six minutes)
Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre,
s'il vous plaît!
M. le secrétaire, est-ce que nous avons quorum?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président, nous avons
quorum.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Est-ce qu'il y a
des remplacements pour cette commission parlementaire?
Le Secrétaire: II y a toujours M. Doyon
(Louis-Hébert) qui remplace M. Khelfa (Richelieu).
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Doyon
(Louis-Hébert) remplace M. Khelfa (Richelieu). Merci. Je déclare
la séance ouverte.
La commission parlementaire de l'éducation se réunit dans
le but d'étudier les projets de règlement des comités
catholique et protestant du Conseil supérieur de l'éducation.
Ce matin, la commission parlementaire accueille la
Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec, représentée par le président qui sera aussi
le porte-parole de cette fédération, M. Gabriel
Légaré. M. Légaré, on vous souhaite la bienvenue et
on vous remercie aussi beaucoup d'avoir répondu à l'invitation de
la commission permanente de l'éducation pour venir nous faire
connaître vos observations et nous livrer votre témoignage face
à ces projets de règlement qui ont été
proposés au gouvernement par les deux comités que j'ai
mentionnés plus tôt.
La commission parlementaire de l'éducation, M.
Légaré, a prévu de consacrer à votre
fédération une heure qui pourrait -je dis bien "pourrait" -
être répartie comme suit: 15 à 20 minutes pour la
présentation de votre mémoire et le reste du temps sera
dévolu à des échanges d'idées entre les membres de
la commission, vous-même et les gens qui vous accompagnent. Le temps sera
réparti également entre les deux formations politiques en
respectant la règle de l'alternance.
M. Légaré, si vous voulez bien nous présenter les
gens qui vous accompagnent et enchaîner immédiatement avec la
présenta- tion de votre mémoire.
M. Légaré (Gabriel): Merci beaucoup, M. le
Président. Alors, vous me permettrez de vous présenter notre
délégation: à ma gauche, Me François Houde, de nos
services juridiques, conseiller juridique; à ma droite immédiate,
M. Aurèle Hudon, directeur de la gestion scolaire et, à la droite
de M. Hudon, M. Alain Doyer, responsable du dossier que nous abordons ce matin
et qui est conseiller.
Une voix: Alain, à gauche.
Le Président (M. Parent, Sauvé): L'autre
droite.
M. Légaré: Excusez-moi. Alors, Alain Doyer est
à ma gauche et M. François Houde, à l'extrême
droite. Excusez-moi.
Le Président (M- Parent, Bertrand): Voulez-vous dire
qu'à la fédération il y a des gens de l'extrême
droite et des gens de ta gauche?
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Légaré: Vous m'accordez des paroles que je n'ai
pas prononcées, M. le Président.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Allez, monsieur.
Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec
M. Légaré: Si vous me le permettez, je vais
commencer. M. le Président, M. le ministre et distingués membres
de la commission de l'éducation, la Fédération des
commissions scolaires catholiques du Québec vous remercie d'avoir
sollicité son opinion sur ces nouveaux projets de règlement du
comité catholique.
Malgré la période de l'année peu propice où
ces projets de règlement ont été dévoilés -
soit la fin de l'année scolaire et la période des vacances - et
le délai extrêmement court entre la réception de
l'invitation à participer à vos audiences et les dates où
elles se tenaient, nous avons jugé important de vous faire
connaître notre opinion sur ce sujet même si le temps qui nous
était imparti ne nous permettait pas de procéder à une
consultation de nos membres,
comme l'aurait mérité une question aussi importante.
C'est donc en nous basant principalement sur des prises de position
antérieures de nos membres sur ces sujets abordés lors des
débats entourant le projet de loi 40 et la loi 3 qui lui a
succédé que nous portons ces quelques réflexions à
votre attention.
Les propos que nous tenons dans notre mémoire se divisent
essentiellement en deux grandes parties. Dans une première partie, nous
rappelons un certain nombre d'éléments de fond qui constituent
les assises des positions prises par la fédération sur la
confessionnalité dans les écoles. Dans la deuxième partie,
nous formulons les réflexions qui découlent de notre analyse des
projets de règlement proposés par le comité
catholique.
Alors, notre position de fond. Il importe, dans un premier temps, de
rappeler que la fédération ne se range pas dans le camp de ceux
qui favorisent la neutralité de l'école et sa
déconfessionnalisation. Nous avons, en effet, le sentiment que cette
idée de l'école neutre constitue dans notre société
québécoise une utopie véhiculée par un groupe
très restreint de personnes et d'organismes. Si l'on regarde
l'évolution de notre société du Québec et
même celle de tout le Canada, des religions tels le catholicisme et le
protestantisme ont occupé dans notre histoire et occupent encore
aujourd'hui une place prépondérante qui a laissé sa trace
sur toutes nos institutions et plus spécialement sur nos systèmes
d'éducation qui sont des instruments indéniables de formation et
de transmission des valeurs privilégiées dans nos
sociétés.
Or, malgré une quelconque remise en question de certaines valeurs
religieuses et une tiédeur relative dans la pratique religieuse, des
millions d'individus continuent chez nous d'adhérer à ces grandes
religions prépondérantes et souhaitent maintenir les liens qui
existent entre ces religions et notre système d'éducation.
Aujourd'hui encore, cela nous apparaît comme un fait social et culturel
qui découle de nos racines, de nos appartenances, de nos aspirations et
dont doivent tenir compte nos dirigeants, qu'ils soient du
fédéral, du provincial ou sur le plan local - ce que nous sommes
- s'ils ne veulent pas être taxés de jouer à
l'autruche.
Cette position de fond est largement partagée par nos membres
comme en témoignent les résolutions suivantes touchant la
confessionnalité des écoles adoptées par ceux-ci lors
d'une assemblée générale les 18 et 19 mars 1983: "Que l'on
garantisse que l'enseignement religieux continue d'être dispensé
dans les écoles publiques et que la règle de l'option entre
l'enseignement religieux et l'enseignement moral soit substituée
à celle de l'exemption. Il appartient aux parents d'effectuer ce choix
pour les enfants qui n'auraient pas atteint le secondaire III. Que les services
d'animation pastorale soient garantis que les écoles se voient
reconnaître un statut confessionnel, conformément à la
volonté des parents. Une dernière position: qu'une consultation
concernant le maintien ou non de ce statut soit faite seulement si un nombre
significatif de parents en font la demande.
On y réclame donc que les parents se voient reconnaître
dans les faits le droit pour leurs enfants de recevoir un enseignement conforme
à leurs croyances religieuses et complété par des services
d'animation pastorale. Pour ceux dont les croyances sont différentes de
celles de la majorité, qu'ils ne soient pas forcés de
s'intégrer aux activités religieuses prévues pour cette
majorité et, pour ce faire, le système de l'option, pour peu
qu'on accorde aux commissions scolaires et aux écoles les ressources
requises, leur semblait préférable au système de
l'exemption pratiqué jusque-là. Enfin, on reconnaissait la
possibilité pour l'école de se voir reconnaître un statut
confessionnel, si tel est le désir exprimé par une
majorité de parents à la suite de la consultation, qui ne devait
s'enclencher que si un nombre significatif de parents de cette école en
faisaient la demande, évitant ainsi une consultation systématique
et périodique onéreuse, généralisée
inutilement à toutes les écoles.
Cependant, cette position - nous tenons à le faire remarquer -
n'a pas pour effet de remettre en question la pratique actuelle, dans le cas
des écoles nouvellement construites, qui amène la commission
scolaire à vérifier auprès des parents qui ont des enfants
dans cette école s'ils désirent ou non doter celle-ci d'un statut
confessionnel.
Voici notre analyse des projets de règlement. Les projets de
règlement proposés par le comité catholique du Conseil
supérieur de l'éducation nous semblent inspirés
d'objectifs avec lesquels nous sommes en accord. Nous y avons
décelé, en effet, une préoccupation visant à
permettre aux écoles de s'afficher comme catholiques et à y
améliorer la prestation des services en enseignement moral et religieux
catholique et en animation pastorale. Compte tenu des positions
exprimées antérieurement par nos membres et que nous avons
rappelées juste un peu plus haut dans notre mémoire, ces
objectifs nous semblent assez conformes aux désirs fondamentaux exprimes
par nos membres à l'occasion des débats sur le projet de loi 40
et la loi 3 et, par conséquent, ces objectifs entraînent
l'adhésion de la fédération. Il ne faut pas, cependant,
établir une équation directe entre l'adhésion aux
objectifs et l'adhésion aux règlements comme tels.
Une nouvelle réglementation et des contrôles accrus
sont-ils nécessaires pour
l'atteinte de ces objectifs? La religion, dans notre Québec
actuel où l'on traverse une phase de questionnement de toutes sortes de
valeurs, y compris les valeurs religieuses, est interpellée pour
remettre en question certains principes et certaines pratiques et pour trouver
de nouvelles voies pour s'exprimer. Elle vit une sorte d'opération
vérité qui l'oblige à départager l'essentiel et
l'accessoire, à rechercher plus de transparence et à se
présenter aux fidèles dans une perspective moins rigide et plus
centrée sur des appels au dépassement de soi, sur la poursuite
d'un idéal inspiré de certaines valeurs très fondamentales
qui suscitent l'adhésion profonde et le désir d'en
témoigner dans sa vie et dans son comportement général,
tout en étant davantage respectueux de ceux qui ont des croyances
différentes. (10 h 15)
Or, nous n'avons pas tendance à penser qu'une telle
capacité à témoigner de leur foi chez les divers agents de
l'école résultera d'un resserrement des règles et des
contrôles, mais plus sûrement d'une démarche librement
consentie de prise de conscience et de prise en charge progressive des valeurs
qu'ils privilégient et qu'ils rendent transparentes en les rendant
explicites dans le projet éducatif de l'école pour qu'elles
soient connues de tous, acceptées et servent de guide à l'action.
Voilà, à notre avis, ce qui constitue un véritable projet
éducatif qui pourrait s'inspirer de valeurs chrétiennes.
Il faut se demander, en somme, en quoi une série de
barrières protectrices et de contraintes additionnelles favoriseront
véritablement une meilleure expression de la confessionnalité et
plus de vérité et de transparence de la foi.
Nous sommes plutôt enclins à souhaiter que les
améliorations souhaitées par le comité catholique soient
présentées aux agents de l'école comme des balises
à considérer, comme des guides à leur réflexion et
à leur action, comme une sorte d'idéal à poursuivre pour
lequel on leur laisse le soin de se responsabiliser.
Si les catholiques devaient s'avérer incapables de
témoigner véritablement de leur foi, d'influencer et de
convaincre, donc, de rayonner autour d'eux par leurs convictions et leurs
actions et qu'alors on doive compenser leur manque d'ardeur et de militantisme
par des contraintes et des règles additionnelles, ne faudrait-il pas
douter sérieusement de la profondeur de leurs convictions et de la
possibilité réelle d'atteindre plus de vérité et de
transparence face à l'expression de la confessionnalité dans le
système? Les nouvelles règles édictées ne
seraient-elles pas alors, de toute façon, susceptibles d'être
rapidement transgressées et battues en brèche de toutes
parts?
Alors, nous posons aussi la question: Y a-t-il urgence d'intervenir par
la voie réglementaire? Sans nier que des problèmes puissent
exister en certains milieux, force nous est de constater, lorsqu'on interroge
les intervenants du système - et ici, nous référons aux
États généraux, à la consultation qui a suivi
ensuite en régions, l'année dernière et à nos
contacts quotidiens avec nos membres - que les problèmes reliés
à l'expression de la confessionnalité dans les écoles ne
sont perçus ni comme si importants ni si
généralisés et ne sont pas, non plus, ressentis si
cruellement qu'il faille d'urgence intervenir par la voie réglementaire
pour modifier le cours des choses.
Il est plausible de penser que ces problèmes ont une
résonance plus grande et qu'ils affectent d'une façon plus
spéciale les écoles situées dans la grande région
métropolitaine de Montréal, à cause du pluralisme du
milieu, de la diversité des ethnies, des rivalités entre les
commissions scolaires catholiques et protestantes pour attirer la
clientèle scolaire, etc.; mais, encore là, nous sommes loin
d'être sûrs que c'est à ce type de problèmes que les
commissions scolaires de cette région désirent qu'on s'attaque en
premier, en tout cas, rien ne nous a été communiqué en ce
sens, ni qu'elles favoriseraient la voie réglementaire pour les
résoudre. Nous aurions plutôt tendance à croire que,
là comme ailleurs en province où il nous semble que le
problème de la confessionnalité se pose avec beaucoup moins
d'acuité, les intervenants des milieux sont suffisamment créatifs
et capables de se responsabiliser pour trouver progressivement, dans une
demarche dynamique de préparation de projets éducatifs, les
accommodements qui correspondent à leur réalité et qui
leur conviendraient le mieux.
Notre lecture globale de la réglementation proposée. Nous
avons exprimé antérieurement notre accord sur les objectifs de
fond qui sous-tendent, à notre avis, la nouvelle réglementation
proposée. Nous ne reviendrons donc pas là-dessus. Nous rappelons
simplement que nous nous interrogeons sur la pertinence de rechercher une
amélioration de la situation par la voie réglementaire
plutôt que par une approche incitative centrée sur l'animation des
agents de l'école dans une demarche progressive de prise en charge des
valeurs religieuses et autres dans l'école.
Il importe également de rappeler -c'était vrai avant et au
moment du projet de loi 40 et de la loi 3 et c'est encore vrai aujourd'hui -
que la Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec a été et continue d'être farouchement
préoccupée d'assurer la responsabilisation et l'autonomie la plus
grande possible des commissions scolaires et qu'elle a toujours
réclamé une diminution significative de la
réglementation.
Il ne faut donc pas s'étonner que la fédération
exprime des réserves sur la pertinence d'utiliser la voie
réglementaire. C'est encore plus vrai quand l'analyse de la nouvelle
réglementation nous révèle que celle-ci manifeste à
bien des égards un resserrement significatif des contrôles pour
tout ce qui touche l'expression de la confessionnalité dans les
écoles. Des contraintes additionnelles sont faites, à n'en pas
douter, aux commissions scolaires; règles de consultation
édictées pour la reconnaissance du statut confessionnel,
formulaire précis à remplir, rapport d'évaluation
périodique à faire, exigences de qualification à
respecter, processus d'embauché des animateurs de pastorale plus ou
moins contrôlé par le conseiller en éducation
chrétienne de la commission scolaire, exigences de tâches pour les
directeurs d'école, ingérence en certaines matières que
l'on devrait considérer normalement comme relevant de la régie
interne de la commission scolaire et de ses écoles.
Ces nouveaux projets de règlement, on l'aura compris, ne nous
apparaissent pas comme très responsabilisants (un règlement
peut-il, d'ailleurs, l'être? Par sa nature même, il crée des
obligations) et si, malgré tout, le gouvernement devait procéder
à leur adoption, il faudra qu'il se préoccupe sérieusement
de les rendre moins détaillés et moins tatillons à bien
des égards parce que, dans leur forme actuelle, nous sommes
assurés qu'ils seront plutôt mal vus par beaucoup de nos
membres.
Des problèmes juridiques sont à prévoir. Par
ailleurs, toujours dans l'optique où le gouvernement aurait l'intention
d'adopter cette réglementation, nous trouvons important d'attirer
l'attention des membres de la commission de l'éducation sur la situation
juridique qui pourrait en découler.
Notre service juridique a fait une analyse des documents proposés
et celle-ci révèle que la promulgation de ces règlements
risquerait de paver la voie à des contestations juridiques, soit en
vertu de l'article 93 de la constitution canadienne, soit en vertu de la Charte
des droits et libertés de la personne et même en vertu des
dispositions du Code civil. On y recèle aussi nombre
d'imprécisions et de dédoublements avec la Loi sur l'instruction
publique et le régime pédagogique.
Nous en concluons que la réglementation proposée n'est pas
suffisamment précise et étanche pour être, d'une part,
facile d'application dans nos écoles et pour éviter, d'autre
part, de nous entraîner dans la voie des contestations juridiques, ce que
le gouvernement ne doit sûrement pas souhaiter, nous en sommes
persuadés.
Pour plus de précisions à ce sujet, nous invitons le
ministère de l'Éducation et son service juridique à
contacter notre service juridique et à examiner avec lui les
problèmes qui pourraient se présenter sur le plan juridique, dans
l'hypothèse, bien sûr, où les règlements seraient
promulgués dans leur facture actuelle.
Quelques observations spécifiques sur certains articles. Article
1. Accord pour que la demande provienne de la commission scolaire, mais
pourquoi sur un formulaire précis élaboré centralement par
le comité catholique? Ce n'est pas très responsabilisant.
Article 2. Pourquoi cette preuve documentaire incluant les rapports de
consultation auprès des écoles et de la documentation ayant servi
à la consultation? Pourquoi ce manque de confiance envers les
administrations scolaires? Ont-elles fait la preuve de leur incompétence
à gérer la dimension confessionnelle malgré des
problèmes à l'occasion? Y a-t-il eu détérioration
significative au cours des dernières années?
Article 7. Les projets éducatifs chrétiens ou catholiques
sont-ils organisés selon des cycles de cinq ans comme un plan
d'aménagement? Un projet éducatif n'est-il pas plutôt une
démarche dynamique qui se réalise graduellement? Et, alors, ne
faut-il pas procéder de façon continuelle à des
évaluations qu'on pourrait qualifier de continues?
En ce domaine du vécu confessionnel, comme dans d'autres
domaines, d'ailleurs, il nous paraît normal qu'on procède à
des évaluations. C'est un principe auquel on ne peut s'opposer; mais
l'évaluation, comme la planification, d'ailleurs, sont des
responsabilités de gestion qui relèvent en propre des
administrateurs des commissions scolaires et des responsables des écoles
sous leur juridiction. Ce n'est pas quelque chose qu'on peut
réglementer, c'est une activité normale du cycle de gestion.
On comprendra aussi que le vécu confessionnel, c'est un concept
très large, très imprécis et très englobant;
à la limite, cela peut inclure toute la gestion et le fonctionnement de
l'école. Or, c'est là, à notre avis, une
responsabilité qui déborde des limites du mandat du comité
catholique dont la responsabilité comme organisme de contrôle
devrait se limiter à vérifier si oui ou non ces règlements
sont appliqués et non à vérifier la qualité du
vécu confessionnel des écoles, responsabilité qui
appartient en propre aux commissions scolaires et aux écoles et pour
laquelle celles-ci ne devraient pas avoir à faire rapport au
comité catholique.
Articles 8 et 10. Quand il y a moins de quinze élèves
à suivre le cours d'enseignement moral, il est très difficile
d'organiser un cours pour des élèves dont l'âge varie
de
six à onze ans. On devrait parler de quinze élèves
d'un même cycle.
Également, comme conséquence de ces dispositions, on
assistera à une multiplication des petits groupes dans une
majorité d'écoles, ce qui va entraîner un accroissement
important des ressources humaines nécessaires pour dispenser
l'enseignement dans l'ensemble des matières, à cause des effets
importants que cela aurait sur le nombre moyen d'élèves par
groupe.
Si, par contre, la situation prévue à l'article 10 se
présente et qu'on se retrouve avec un seul groupe par degré dans
une même école ou encore avec un groupe composé de
plusieurs degrés différents, il faudra ajouter des ressources
humaines additionnelles ou prévoir des regroupements de plusieurs
degrés différents.
Articles 11 et 12. La spécialisation de la tâche
découlant des dispositions des articles 16 et 17, combinée au
fait qu'un petit nombre d'heures (60 et 50 heures par année) sont
consacrées à l'enseignement de cette discipline, obligera les
enseignants qui le dispenseront à rencontrer beaucoup de groupes, les
empêchant ainsi d'établir des liens étroits avec leurs
élèves. On sait que cette situation rencontrée dans
d'autres matières a toujours été dénoncée et
considérée comme non valable au point de vue
pédagogique.
Article 13. Pourquoi les élèves de l'enseignement
professionnel seraient-ils exemptés de suivre un cours d'enseignement
religieux? Le rationnel derrière cette option ne nous apparaît pas
évident. N'y aurait-il pas lieu d'expliciter cette exclusion?
Article 16. Nos commentaires touchent le premier paragraphe du
règlement sur cet article. Comment délimiter de façon
très précise ce que veut dire l'expression "être de foi
catholique" pour un enseignant? Ce ne sera pas facile d'application. Nos
commentaires touchent aussi le deuxième paragraphe de l'article 16. Cela
semble conduire, au primaire, à une spécialisation de la
tâche en enseignement religieux dans un contexte où l'on fait
plutôt la promotion d'enseignants généralistes. Rien
n'indique actuellement qu'on souhaite réviser cette orientation.
De plus, cela créera des problèmes d'organisation car on
réduit la présentation de cours et de leçons des
titulaires et, comme on ne peut les utiliser pour dispenser d'autres cours et
leçons, on augmente dans la même proportion le nombre
d'enseignants requis pour la présentation des cours et leçons-
Donc, des coûts additionnels à prévoir.
Article 17. Le premier paragraphe qui vous est présenté
réfère au deuxième paragraphe de l'article 17. Cela rendra
plus difficile et limitera la marge d'une commission scolaire qui opterait pour
des enseignants généralistes au premier cycle du secondaire.
Est-il absolument nécessaire d'avoir au deuxième cycle du
secondaire des exigences de qualification de 60 crédits au lieu des 30
crédits requis pour un enseignant du premier cycle en enseignement
religieux? La complexité accrue de la tâche sera-t-elle
automatiquement comblée par l'ajout de crédits
supplémentaires? Ne devrait-on pas plutôt insister davantage sur
la capacité de témoigner de façon crédible du
message chrétien? Or, les critères objectifs sont difficiles
à trouver en cette matière.
Au secondaire, l'enseignement de cette matière est souvent
jumelé avec d'autres matières, telles que la formation
personnelle et sociale et les autres cours de formation générale,
pour réduire le nombre de groupes qu'un enseignant doit rencontrer; en
faisant de cette matière une spécialité, on oblige les
enseignants à rencontrer plus de groupes.
Article 21. Cette exigence de 30 crédits en théologie pour
travailler à l'animation pastorale au primaire empêchera des
personnes bénévoles et compétentes d'exercer ce râle
dans nos écoles. On se retrouvera dans bien des milieux devant un
problème de personnes-ressources. Qui paiera en plus pour les
coûts additionnels ainsi engendrés?
Article 23. Il n'appartient ni au directeur d'école, ni au
conseiller en éducation chrétienne d'agréer les personnes
qui travaillent à l'animation pastorale dans les écoles. C'est la
commission scolaire qui est l'employeur, c'est une responsabilité qui
lui appartient.
Article 24. Cela ne concerne pas le comité catholique. La
planification est bonne en soi, mais les exigences en cette matière et
les façons de procéder sont des questions de régie interne
au sein des commissions scolaires.
Articles 25 et 26. Même commentaire qu'à l'article 24. Ce
sont des questions de régie interne au sein des commissions scolaires.
On n'a pas à leur faire la leçon ou à leur dicter une
ligne de conduite. Elles sont fort capables d'assumer leurs
responsabilités de la façon qui leur paraîtra la plus
conforme aux attentes et aux aspirations dans leur milieu.
Notre conclusion. En nous basant sur des positions adoptées
antérieurement par nos membres, nous affirmons notre accord avec le
comité catholique sur les objectifs qui sous-tendent la
réglementation, à savoir permettre aux écoles de
s'afficher comme catholiques et y améliorer la prestation des services
en enseignement moral et religieux, ainsi qu'en animation pastorale.
Cependant, comme moyen d'atteindre ces objectifs, nous favorisons une
approche plus centrée sur la prise en charge par les écoles de la
dimension confessionnelle dans
le contexte d'une démarche dynamique de conscientisation et
d'animation de ses agents pour nommer et rendre explicites les valeurs qu'ils
privilégient. Donc, une approche plus responsabilisante plutôt
qu'une approche normalisante. (10 h 30)
II ne nous semble pas qu'il y ait urgence d'intervenir sur cette
question, surtout par la voie réglementaire, et nous suggérons
respectueusement d'attendre que soient connus, d'abord, les amendements
annoncés par le ministre à la Loi sur l'instruction publique,
puis de voir alors comment la réglementation sur les aspects
confessionnels pourra s'y arrimer. Nous apprécierions, ensuite, qu'on
nous donne le temps de consulter nos membres sur les projets de
règlement qui apparaîtraient nécessaires, le cas
échéant, avant de les adopter. Cela donnera aussi le temps de
mieux explorer le contexte juridique entourant une telle
réglementation.
L'école doit conserver la possibilité d'être
confessionnelle et les parents, dans cette décision, doivent être
largement mis à profit.
Nous vous remercions de nous avoir invités à vos audiences
et nous vous assurons de notre collaboration dans la recherche des solutions
les plus adaptées à cette problématique. Merci
beaucoup.
Le Président (M. Parent, Sauvé): C'est moi qui vous
remercie, M. le président.
On va débuter immédiatement cette période de
discussions entre les membres de la commission, vous-même et les gens qui
vous accompagnent et, pour ce faire, je reconnais dans un premier temps le
ministre de l'Éducation. M. le ministre.
M. Ryan: II me fait plaisir de retrouver à la table de la
commission les dirigeants de la Fédération des commissions
scolaires catholiques du Québec que nous avons l'occasion de rencontrer
fréquemment autour des questions reliées au fonctionnement de
notre système scolaire. Je veux les remercier de la collaboration qu'ils
apportent, de manière continue, au bon fonctionnement du système
d'enseignement et surtout du rôle clé qu'ils remplissent dans la
gestion quotidienne du système.
Cela étant dit, je voudrais rappeler également que le bon
fonctionnement du système d'enseignement du Québec repose sur un
équilibre dynamique entre les attributions confiées par la loi
aux commissions scolaires et celles qui sont confiées par la loi au
ministre de l'Éducation, au gouvernement, au Conseil supérieur de
l'éducation et aux comités confessionnels du Conseil
supérieur de l'éducation.
Notre loi repose essentiellement sur un équilibre délicat
et subtil. Autant il incombe aux commissions scolaires d'assurer
l'aménagement concret des services éducatifs offerts à la
population, tant jeune qu'adulte, sur leur territoire, autant il incombe au
gouvernement, au ministre de l'Éducation, au Conseil supérieur de
l'éducation et aux comités confessionnels, chacun dans son ordre
de compétence, de veiller à établir des normes qui
garantiront que, dans tout le territoire, la population aura accès
à des services d'égale qualité.
Il existe d'autres sociétés où le rôle de
l'autorité centrale en matière normative, en matière de
programmes, en matière de reconnaissance des études, par exemple,
est beaucoup moins développé qu'au Québec. On
s'aperçoit qu'au bout d'un certain temps elles éprouvent le
besoin d'en venir à un équilibre meilleur. En Angleterre,
actuellement, un projet de loi très important est à
l'étude au Parlement britannique, en vertu duquel il y aurait à
l'avenir des programmes nationaux parce qu'on s'aperçoit qu'en
fonctionnant seulement avec des programmes locaux on trouve dans bien des
endroits des poches de médiocrité qui ne sont pas
tolérables dans une société démocratique.
C'est la même chose aux États-Unis. Dans la plupart des
États, vous n'avez pas, pour l'instant, de programme d'État, ni
de diplôme d'État aux niveaux primaire et secondaire. Mais il y a
tout un mouvement pour que, dans la mesure où on lui demande de
s'engager davantage financièrement, l'État américain
s'implique aussi davantage dans la définition des standards auxquels
doit satisfaire le système d'enseignement.
Quoi qu'il en soit, nous avons fait un choix de ce côté, au
Québec, il y a déjà maintenant près d'un qua'rt de
siècle. Tout indique que nous devons le maintenir. Je ne pense pas que,
du côté du gouvernement, il y ait la moindre intention de modifier
à ce sujet, en aucun de ses points essentiels, l'équilibre que
nous avons défini avec les années. C'est là un premier
point que je rappelle.
Par conséquent, autant je suis sensible à la
réticence des commissions scolaires devant la possibilité de
règlements plus compliqués, plus lourds à administrer,
autant je dois rappeler ce devoir qui incombe au gouvernement du Québec
d'assurer que nous aurons partout des normes capables de fournir à la
population les services de qualité, au moins comparables, au moins
relativement égaux, auxquels elle a droit dans tous les points du
territoire.
Je rappelle aussi que, d'après la Loi sur le Conseil
supérieur de l'éducation, il incombe au comité catholique
et au comité protestant de faire des règlements pour
reconnaître les institutions d'enseignement confessionnel comme
catholiques ou protestantes. Ils sont chargés de faire des
règlements; ils n'ont pas le choix, c'est le
mandat que la loi leur donne de faire des règlements pour cela.
Ils sont chargés également: "de faire des règlements
concernant l'éducation chrétienne, l'enseignement religieux et
moral et le service religieux dans les institutions d'enseignement reconnues
comme catholiques ou protestantes, selon le cas; "de faire des
règlements sur la qualification, au point de vue religieux et moral, du
personnel dirigeant et enseignant dans ces institutions d'enseignement." C'est
ce que la loi dit.
Je rappelle ceci pour faire voir que le comité catholique, quand
il propose un règlement comme celui qui est présentement à
l'étude, ne sort pas de ses frontières, au contraire. Je rappelle
aussi, pour nos amis de la presse, qu'il ne s'agit pas du projet du ministre de
l'Éducation, mais d'un projet du comité catholique. J'ai vu que
les journaux parlent du projet Ryan, cela m'honore, mais c'est un projet du
comité catholique que le gouvernement a reçu, dont il a
été saisi et qu'il a cru devoir soumettre, d'abord, à
l'étape de la prépublication dans la Gazette officielle en vue
d'en assurer l'adoption è un stade ultérieur. Mais, si le
gouvernement a décidé de respecter intégralement les
exigences de la Loi sur les règlements, c'est parce qu'il trouvait que
c'est comme cela que les choses devaient être faites. L'étape de
la prépublication d'un règlement a été
prévue dans la Loi sur les règlements, adoptée sous le
gouvernement actuel, pour fournir à des groupes comme le vôtre
l'occasion d'exprimer leurs opinions avant qu'un règlement soit
édicté et appliqué. Je pense que la consultation que nous
avons instituée se poursuit dans les meilleures conditions possible et
je m'en réjouis.
Sur le fond, la tendance du gouvernement actuel va dans le même
sens que la vôtre: nous nous méfions de la réglementation
à l'extrême et, dans la mesure où on nous fera la preuve
que certaines parties du règlement proposé sont excessivement
lourdes, artificielles ou superfétatoires, nous avons l'esprit ouvert
pour l'examiner, mais cela va prendre un examen au texte, évidemment.
C'est ce que vous faites dans la deuxième partie de votre
mémoire. Je l'apprécie et je voudrais en venir à cette
partie maintenant, assez rapidement.
Je vais prendre les principaux points que vous avez signalés pour
indiquer des éléments de rapprochement et peut-être,
ensuite, annoncer quelques questions. À propos de l'article 1, vous
êtes d'accord pour que la demande provienne de la commission scolaire en
ce qui touche la reconnaissance d'une école comme catholique. C'est un
gros point d'acquis. Je pense que le gros changement qu'introduit le
règlement ici, c'est que la demande doit parvenir au comité
catholique par la commission scolaire, alors que, sous le régime que
définissait la loi 3, la demande serait venue du conseil d'école.
Nous, nous avions insisté, quand nous étions dans l'Opposition -
vous vous en souvenez sans doute, M. Légaré - pour que cette
responsabilité soit laissée à la commission scolaire, sans
interdire, pour autant, l'intervention des parents dans le processus. Ici, je
pense que nous nous entendons. Pourquoi "sur un formulaire précis
élaboré centralement par le comité catholique"? C'est
matière à discussion; ce sont des modalités, ce n'est pas
l'essentiel. Si vous nous faites la preuve que ce formulaire est trop lourd et
trop exigeant, ce sont des choses qui peuvent être discutées
facilement.
Maintenant, j'en viens au deuxième article. Là, on exige
qu'une consultation ait lieu auprès des parents et que la preuve
documentaire soit envoyée au comité catholique. J'ai
déjà indiqué hier, pour ceux qui étaient
présents, qu'encore ici ce sont des modalités. L'essentiel qui
est visé par cette partie du règlement, c'est qu'une commission
scolaire ne puisse pas s'asseoir sur un dossier, le geler là et dire: II
n'y a personne qui aura accès à ce dossier d'autre que nous. Si
c'était cela, nous aurions besoin d'une soupape de sûreté.
Je pense que c'est ce que le comité catholique a voulu
prévoir.
J'indiquais hier qu'on pourrait très bien se contenter que le
comité catholique puisse avoir accès, sur demande, à cette
documentation. Je pense qu'ils ne tiendront pas du tout à garder cela
dans des archives à Québec. Si la commission scolaire juge que
cela doit rester chez elle, c'est très bien, mais il peut s'imposer
qu'un devoir d'approfondissement soit ressenti par le comité catholique
et je ne pense pas que je serais enclin, personnellement, à lui
interdire ce genre d'accès. Je ne vois pas au nom de quelle
rationalité on pourrait le faire.
Sur ce point-ci, je pense que le fardeau de la preuve incombe à
votre fédération. Si vous nous apportez de bons arguments, nous
allons les examiner soigneusement. Je vous indique aussi que ta
majorité des points de vue que nous avons entendus sur ce point
indiquent que l'on souhaiterait avoir des instruments nationaux pour
procéder à ces consultations. On ne veut pas que le soin de
mettre au point des instruments soit laissé à chaque commission
scolaire ou à chaque école de manière que cela se fasse,
dans certains cas, de façon plus ou moins improvisée. On nous
demande qu'il y ait des garanties quant à la teneur de la consultation
et que ces garanties soient fournies par des instruments nationaux. On nous l'a
demandé en provenance de plusieurs organismes. J'aimerais cela avoir
votre point de vue là-dessus parce que c'est un point sur lequel nous
écoutons des opinions, mais qui n'est pas de l'ordre du
nécessaire.
Vous parlez, ensuite, de l'article 7 sur l'opération
vérification. On aura l'occasion d'en discuter tantôt. Je pense
que cette opération a donné lieu à bien des malentendus.
Comme je l'ai comprise, c'était une vérification qui était
faite tous les cinq ans. Si elle se faisait habituellement, peut-être que
ce ne serait pas nécessaire, mais l'expérience que nous observons
tous nous indique qu'il n'y a pas beaucoup de vérification rigoureuse.
Il y en a pour l'enseignement religieux, pour les services de base qui sont
prévus dans les écoles, mais une bonne vérification du
vécu d'une école qui a un statut de reconnaissance
confessionnelle de la part du comité catholique, est-ce qu'il s'en fait
une? Est-ce que c'est une bonne chose qu'il s'en fasse une fois de temps
à autre, en plus des vérifications habituelles qui sont
prévues annuellement à tous les échelons de fonctionnement
d'une commission scolaire"? Je pense que c'est un sujet dont on peut discuter
froidement, rationnellement. On va essayer d'en venir à la meilleure
conclusion possible. Le comité catholique a pensé que
c'était bon. Certains nous ont dit qu'il serait mieux que cela se fasse
avec tout le reste, peut-être! Mais, en tout cas, on écoute les
arguments là-dessus.
Quand vous dites que ce n'est pas quelque chose qu'on peut
réglementer, que c'est une activité normale du cycle de gestion,
c'est un peu plus que cela parce que là c'est une opération qui
ne relève pas de la commission scolaire; la reconnaissance comme
catholique ou protestante relève du comité catholique. Le
comité catholique ne veut pas qu'on s'assoie là-dessus pendant 20
ans et qu'on n'y touche plus en disant: Cela a été donné,
c'est fini, on ne regarde plus cela. On aurait une opération qui
permettrait de faire la lumière. Sur le fond, je suis plutôt
enclin à accepter cette idée du comité catholique, je la
trouve bonne, mais sur Les modalités, s'il y a des point qui ne sont pas
admissibles, j'aimerais que vous les précisiez tantôt.
Sur les articles 8 et 10, la formation des groupes, je prends note des
difficultés techniques qui se présentent ici et nous allons voir
à les examiner de près.
En ce qui touche la formation des enseignants, je voudrais vous rappeler
seulement un passage. Les choses qui sont dans le projet de règlement
sont peut-être étonnantes à première vue, mais, pour
ceux qui ont lu la documentation du comité catholique depuis quelques
années, il n'y a rien de neuf là-dedans, ce sont toutes des
choses qui étaient annoncées par des interventions
antérieures du comité catholique.
Je me rappelle que, dans un document, qui a été
publié juste avant la dernière élection, intitulé
"Éduquer la foi à l'école", il y avait le passage suivant:
"Depuis la fermeture des écoles normales, la question de la formation
initiale des enseignants relativement à l'enseignement religieux
catholique n'a jamais trouvé de réponse valable. Des efforts ont
été tentés ici et là, mais avec un succès
plutôt mitigé. En 1974, le comité catholique faisait un
certain nombre de recommandations. Force est de constater que ces
recommandations n'ont pas eu tout l'effet escompté. Cette fois, le
comité ne voudrait pas refaire une longue analyse de la situation; qu'il
suffise de faire les constats suivants: de manière
générale, les universités n'offrent que des cours
optionnels de nature très variée relatifs soit au contenu
doctrinal, soit à la didactique de l'enseignement religieux soit
à la psychologie. Il faut aussi noter que ces cours optionnels font
partie d'une banque très étendue, ce qui réduit d'autant
la probabilité qu'ils soient choisis ou la probabilité qu'ils
soient dispensés, faute d'un nombre suffisant d'étudiants
inscrits. En conséquence, un pourcentage minime de futurs enseignants
ont suivi l'un ou l'autre cours optionnel, ce qui ne leur assure pas pour
autant une formation appropriée. Une telle situation ne peut plus se
perpétuer dans un contexte scolaire où la loi oblige à
offrir l'enseignement religieux catholique dans les écoles du
Québec et où il accepte que des écoles puissent être
reconnues comme catholiques." (10 h 45)
C'est le problème auquel veut répondre le comité
catholique par les propositions qu'il formule dans son projet de
règlement. Vous nous dites que ce n'est pas urgent. Je vais vous poser
la question: Est-ce nécessaire ou artificiel? Nous considérons
que ce n'est pas urgent; par conséquent, on n'a pas demande de recourir
aux dispositions d'urgence qui sont dans la loi et les règlements, on a
suivi la procédure ordinaire. Mais je vous demande: Est-ce
nécessaire qu'on envisage des améliorations là-dessus et
avez-vous des propositions meilleures que celles du comité catholique
à formuler, autres que de dire: On va tous se faire confiance et tout va
bien marcher?
Nous ne pouvons pas accepter cette réponse. Il faut qu'on ait des
choses plus précises et, dans la mesure ou il y aurait des choses
meilleures ou plus concrètes, on va les examiner avec beaucoup
d'intérêt. Mais on ne pourrait pas simplement s'asseoir, M. le
Président - je le dis en terminant - en disant: Tout va bien dans le
meilleur des mondes. On s'assoit tranquillement et chacun va faire son
possible. On va tous se donner une bonne tape sur l'épaule et tout va
bien aller.
Je pense qu'on est ici pour discuter de choses qui sont là. Vous
les avez très bien discutées. Je vous en remercie et, si vous
avez des commentaires à faire sur ces
propos, je vous en serais très reconnaissant.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Est-ce que vous
vouiez intervenir, M. le président?
M. Légaré: Oui, M. le Président. Pour
plusieurs des interventions que nous adresse le ministre, nous sommes d'accord
avec l'essentiel des propos qu'il tient. Nous sommes d'accord aussi - je le
disais tout à l'heure - avec les objectifs poursuivis par le
comité catholique dans ses intentions. Le problème concerne plus,
comme vous l'avez souligné, la mécanique d'application.
Selon nous, il existe au Québec des différences
importantes entre les divers milieux. On n'a qu'à comparer le milieu de
la Gaspésie, par exemple, par rapport à celui de Montréal
et, en regardant un peu partout au Québec, on va voir un tas de
situations totalement différentes.
Pour un règlement comme celui-là sur un sujet fortement,
hautement préoccupant, nous sommes d'accord avec vous qu'il doit y avoir
des balises, un encadrement qui est assuré par le comité
catholique pour l'ensemble du territoire québécois. Par ailleurs,
il nous apparaît essentiel que, à partir de cet encadrement
important et large assuré par le comité catholique, on permette
à chacun des milieux - parce qu'ils ne sont pas uniformes et loin de
l'être - de se donner, d'établir la mécanique qui leur
permettrait respectivement de tenir compte de toutes ces situations
différentes.
Je pense qu'on n'a pas besoin d'expliquer davantage si je compare,
encore une fois, les extrêmes que je vous proposais tantôt. Si, par
exemple, on demandait à la Commission des écoles catholiques de
Montréal d'établir son règlement ou sa politique
concernant l'enseignement religieux, qu'on demandait au comité
catholique de la critiquer et de la commenter, et qu'on demandait, par
ailleurs, à une commission scolaire du Bas-du-Fleuve de faire la
même chose, on aurait des politiques totalement différentes,
c'est-à-dire qu'elles seraient toujours soumises au même
encadrement provenant du comité catholique, mais cela permettrait des
ajustements locaux qui sont, selon nous, essentiels.
C'est dans ce cadre-là que nous faisons nos remarques,
c'est-à-dire que, quand nous abordons la question de la
responsabilisation des milieux, c'est que nous croyons fermement que les
milieux ne sont pas uniformes. Mais quand on établit un règlement
provincial, malheureusement, cela comporte des obligations et une normalisation
qui est parfois inacceptable dans certains milieux et qui peut être tout
à fait correcte dans d'autres. Sauf qu'on dit: Demeurons donc plus
larges sur le plan des idées et des balises que nous donnerait ou
qu'établirait le comité catholique.
Quant à l'autre aspect de vos commentaires, soit la formation des
maîtres, nous sommes d'accord qu'il est nécessaire de travailler
à améliorer le plus possible la structure concernant la formation
des maîtres. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas des choses qui sont
faites actuellement et qui sont tout à fait correctes et qui ne sont pas
conformes à ce qui apparaîtrait là-dedans.
Malheureusement, encore une fois, un règlement trop normatif
ferait en sorte qu'on éliminerait du revers de la main des actions ou
des interventions faites par les milieux qui sont tout à fait correctes
pour des fins de normalisation et qui, en soi, sont peut-être louables,
mais qui, dans la pratique, apportent des inconvénients importants.
Le Président (M. Parent, Sauvé):
M.Légaré, le temps dévolu au parti ministériel
étant épuisé, je reconnais maintenant la porte-parole
officielle de l'Opposition en matière d'éducation, la
députée de Chicoutimi. Madame.
Mme Blackburn: Merci, M, le Président. M. le
président et messieurs, permettez-moi, au nom de ma formation politique,
de vous souhaiter la bienvenue à cette commission parlementaire et de
vous dire que c'est avec beaucoup de plaisir et d'intérêt que j'ai
lu votre mémoire. J'ai eu l'occasion à quelques reprises de
souligner qu'examiner cette question dans un cadre plus théorique, cela
me semble intéressant. Cependant, quand ce sont des praticiens, si je
peux m'exprimer ainsi, qui viennent nous indiquer les difficultés
d'application d'un règlement, d'une loi ou d'un projet, je trouve qu'on
doit y attacher une importance particulière,
Il y a une espèce de paradoxe dans la façon de fonctionner
du présent gouvernement. Le ministre invoque souvent la tradition
libérale de son parti pour dire: On laisse plus de latitude pour se
justifier de ne pas intervenir dans certains secteurs. Pourtant, s'il est un
secteur où on devrait laisser le milieu se prendre en charge, c'est bien
celui de la confessionnalité, des croyances ou de la religion, et le
ministre, d'autorité, appuie le projet qui a été
déposé par le comité catholique. Il ne faut pas
s'étonner de la confusion que cela a pu créer chez les
observateurs que sont les participants, les auditeurs à la commission
parlementaire ici ou les journalistes. D'emblée, le ministre a accorde
son appui au projet de règlement et le peu d'intérêt qu'il
semblait vouloir manifester à une consultation sur le sujet pouvait
laisser croire en toute sincérité que le règlement du
comité catholique était aussi le règlement du
ministre.
À présent, vous soulevez un certain nombre de questions
que je trouve majeures. Elles ont semblé poser des problèmes
à
plusieurs organismes qui se sont présentés en commission
parlementaire. Le principal point sur lequel je voudrais attirer votre
attention et l'attention des membres de cette commission, c'est le fait que ce
règlement semble faire de moins en moins confiance -pour ne pas dire ne
pas faire confiance du tout - aux commissions scolaires catholiques pour
gérer l'activité de formation catholique et morale dans les
écoles. Le propos du ministre vient, si je peux m'exprimer ainsi,
appuyer ce manque de confiance. J'écoutais seulement comment il
commentait votre mémoire et je me permets de relever quelques
éléments. Il dit, en fait: Si je suis d'accord ou si le
comité catholique a cru utile de renforcer le règlement, c'est en
somme une certaine forme de soupape de sécurité par rapport aux
modalités de reconnaissance d'une école confessionnelle, au cas
où la commission scolaire s'assoirait sur un statut quelque part au
sujet d'une école et refuserait l'accès aux documents touchant la
reconnaissance des écoles. Le ministre semble oublier qu'au
Québec on s'est donné ce qui s'appelle la loi sur l'accès
à l'information qui prévoit déjà que tout ce qui
est consultation est d'ordre public et, si c'est d'ordre public, n'importe qui
peut réclamer d'y avoir accès.
Mais le propos lui-même, c'est: Au cas où il y aurait
quelques écoles ou quelques commissions scolaires, on
généralise la pratique, on la réglemente. Pourtant - je
sais qu'il est sensible à ce genre d'argument - il s'est toujours
opposé à une certaine uniformisation dans la
réglementation, sauf dans le cas présent.
Deuxième remarque, il disait: C'est important qu'on se donne, par
rapport aux critères de consultation touchant la reconnaissance d'une
école, des instruments nationaux de crainte de l'improvisation des
commissions scolaires. Je trouve que cette attitude est déplorable -
pour ne pas dire méprisante - à l'endroit de gouvernements locaux
élus. Les commissions scolaires, c'est un gouvernement. Je trouve que
cette attitude de vouloir réglementer presque dans le moindre
détail une partie de l'activité éducative des commissions
scolaires est difficilement acceptable, d'autant plus que cela vient du
ministre de l'Éducation.
Qui dit réglementation dit uniformisation et cela ne peut pas
vraiment tenir compte des différences. C'est un problème.
Où qu'on soit, il est important de se donner des règles
nationales en ce qui touche l'accessibilité et la qualité,
l'universalité des soins de santé, des services éducatifs
et ainsi de suite. Mais aller leur dire les moindres détails comment le
faire, je trouve cela discutable.
Par rapport au rôle du comité catholique, il faut se
rappeler qu'il a la responsabilité, effectivement, des
règlements, des programmes et des qualifications des personnes. À
ma connaissance, à moins de faire une interprétation
erronée, on ne lui a pas donné à proprement parler des
pouvoirs de contrôle sur l'activité. C'est un peu ce que viennent
faire certains éléments du règlement en disant: On aurait
besoin d'avoir certaines informations.
Vous dites également, et cela nous a été dit par
plusieurs intervenants, qu'on ne peut pas facilement dissocier
l'évaluation du vécu confessionnel du projet éducatif
catholique du projet éducatif de l'école dans son ensemble. Cela
fait partie, comme vous le rappelez bien, d'une activité normale du
cycle de gestion.
II me semblait important de faire ces mises au point, parce qu'on a
tendance à laisser planer, dans les discussions à cette
commission parlementaire, l'impression qu'on n'a pas vraiment bien fait son
travail. On est en train de faire courir une espèce de menace: cela fait
six ans qu'on consulte, il faudrait arranger des choses. Moi, j'estime, comme
plusieurs intervenants, qu'il n'y avait pas péril en la demeure et que
ce n'est pas quand on aura adopté ce règlement qu'on s'assurera
qu'il sera parfaitement appliqué, d'autant plus que ce n'est pas demain
matin, non plus, que les Québécois souhaiteront
déconfessionnaliser toutes les écoles. Je ne pense pas que ce
soit pour demain.
J'aimerais, quand même, aborder quelques questions avec vous.
Qu'est-ce qui fonde vos craintes par rapport aux contestations juridiques en
regard de la loi 131? J'essaie de me rappeler la page. C'est à la page
15: "Notre service juridique, dites-vous, a fait une analyse des
règlements proposés et celle-ci révèle que la
promulgation de ces règlements risquerait de paver la voie à des
contestations juridiques." Est-ce que vous pourriez nous expliquer un peu cela,
sans déposer l'avis, parce que j'imagine que cela comporte quelques
pages?
M. Légaré: Si vous me te permettez, M. le
Président, j'inviterais Me François Houde sur cette question
à vous apporter la réponse la plus pertinente et la plus
appropriée. Me Houde.
M. Houde (François): Merci, M. le Président. Les
problèmes juridiques soulevés par le projet de règlement
sont de différents ordres. Dans un premier temps, la Loi sur le Conseil
supérieur de l'éducation prévoit, aux articles 22a) et
22b), le pouvoir de réglementer certains sujets qui y sont inscrits. Je
signale respectueusement que le projet de règlement tel que soumis ne
correspond pas aux définitions données par la jurisprudence
à ce qu'est un règlement. La jurisprudence est la doctrine et il
faut entendre la doctrine comme étant les professeurs Pépin,
Ouellet, Garant, René Dussault et Louis Borgeat, qui
définissent le pouvoir réglementaire de la façon
suivante: "Le pouvoir réglementaire prend normalement sa source dans une
loi -l'article 22a) de la Loi sur le Conseil supérieur de
l'éducation - il autorise son titulaire à édicter des
normes de comportement, à caractère général et
impersonnel; ces normes ont force obligatoire tout comme une loi. Le
règlement est, bien entendu, une mesure décisionnelle qui
découle de l'exercice d'un tel pouvoir."
À cet effet, je crois que les articles 1 et 3 du projet de
règlement ne respectent pas la définition qu'en donne la
doctrine. Ces mêmes définitions ont été reprises
également par la Cour suprême dans deux décisions
relativement récentes, soit dans la cause Brant Dairy ltée contre
la Commission du lait de l'Ontario, une décision de 1973 - les motifs
avaient été rendus par le juge Laskin - et, plus
récemment, en 1979, dans le cas de l'Institut canadien des compagnies
immobilières contre la ville de Toronto. Ce n'était pas nouveau
non plus, car une vieille cause impliquant la ville de Verdun contre la
compagnie pétrolière Sun Oil reprenait sensiblement les
mêmes propos.
Donc, sous ces aspects, je croîs que le règlement est ultra
vires des pouvoirs du comité catholique du Conseil supérieur de
l'éducation, malgré la présence de l'article 22b) qui
autorise le comité catholique à reconnaître comme
confessionnelles les écoles. Je crois que dans les deux causes
précitées, Brant Dairy et les compagnies immobilières de
Toronto, les textes se comparent facilement. On a délégué,
tout simplement. Le comité catholique s'est trouvé à
reprendre les pouvoirs décrits à l'article 22a) sans en
édicter les normes. Il s'est donc arrogé un pouvoir
discrétionnaire de décider à la pièce de la
reconnaissance comme confessionnelle de chacune des écoles. Sous cet
aspect, je crois que le règlement pourrait être
déclaré ultra vires des pouvoirs du comité catholique. (11
heures)
L'autre aspect, c'est relativement à l'article 93 de la loi
constitutionnelle. C'est beaucoup plus simple et, à la fois, un peu plus
compliqué. Dans le jugement rendu par la Cour supérieure dans
l'affaire que tout le monde appelle Notre-Dame-des-Neiges, l'honorable juge
Deschênes, à l'époque, avait mentionné que les
articles 22a) et 22b) de la Loi sur le Conseil supérieur de
l'éducation ne permettaient pas au comité catholique de
reconnaître ou de révoquer le statut confessionnel des
écoles protégées par l'article 93 de la constitution. Cela
ne veut pas dire pour autant que certaines parties du règlement soumis
ne s'appliqueraient pas à la CECM ou à la CECQ.
Un autre effet aussi qui ne rend pas nécessairement
illégal te règlement, mais qui pose des problèmes dans son
application, ce sont les dispositions relatives particulièrement
à l'article 4 et à l'article 27. Bien que non écrites dans
le règlement, bien que je considère que le texte même de
ces articles soit tout à fait légal, compte tenu des articles 31
et 32 de la Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation, qui sont
des dispositions dérogatoires aux chartes, ces dispositions ont pour
effet pratique d'annihiler ou de rendre inopérant un autre
règlement, soit le règlement sur l'inscription et l'admission des
élèves et la fréquentation scolaire, règlement qui
prévoit qu'il revient à la commission scolaire de
déterminer l'école de fréquentation des
élèves soumis à sa juridiction. La commission scolaire
doit, quant à elle, respecter la liberté de conscience et de
religion de chacun des individus soumis à sa juridiction. Le
comité catholique a le pouvoir d'accorder des droits et
privilèges à une confessionnalité religieuse; toutefois,
la commission scolaire, elle, doit respecter la liberté de conscience et
de religion des personnes qui désirent fréquenter ses
écoles.
Lorsqu'un parent désire inscrire son enfant dans une
école, il pourrait exiger que son enfant fréquente une autre
école que celle déterminée par la commission scolaire sur
la base de sa liberté de conscience et de religion, si - et uniquement
si - le projet éducatif de cette école reconnue comme catholique
ne correspond pas aux croyances et valeurs auxquelles croit cet individu. Cela
peut amener des complications relativement aux services éducatifs, qui
peuvent être dans certaines écoles plutôt que dans d'autres.
Particulièrement en matière de transport scolaire, cela peut
forcer la commission scolaire à fournir le transport gratuit à
l'élève concerné pour qu'il fréquente
l'école choisie par les parents. La conséquence ultime, c'est de
faire en sorte que chaque commission scolaire puisse avoir au moins une
école non reconnue comme confessionnelle sur son territoire. Je dis la
conséquence ultime, parce qu'il pourrait arriver que les parents dont
les croyances et valeurs ne correspondent pas à celles du projet
éducatif acceptent quand même que leur enfant fréquente une
telle école.
Mme Blackburn: M. le Président, est-ce qu'on pourrait
demander au président s'il peut déposer le document?
M. Légaré: Le document de Me Houde?
Mme Blackburn: Oui.
M. Légaré: II n'y a pas de problème. Nous
allons le déposer.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Avant de le
déposer, il faut absolument que je le voie, que je l'accepte.
Mme Blackburn: Si vous me le permettez, M. le Président,
ma question s'adresserait à Me Houde. Je me demandais si Me Houde avait
eu l'occasion d'examiner ce que pouvait représenter l'article 4 du
présent règlement et de le mettre en parallèle avec le
respect de la liberté de conscience et de religion. On peut relire
l'article 4 du projet de règlement: "L'école publique reconnue
comme catholique intègre les croyances et les valeurs de la religion
catholique dans son projet éducatif et s'affiche comme telle." Sur la
base d'un tel article, est-ce que quelqu'un qui choisit pour son enfant
l'enseignement moral, sans épithète religieuse, pourrait invoquer
que cet article-là brime son droit à la liberté ou ne
respecte pas sa liberté de conscience et de religion?
M. Houde (François): En soi, je ne crois pas que l'article
4 ait pour effet de brimer la liberté de conscience et de religion
compte tenu des articles 31 et 32 de la Loi sur le Conseil supérieur de
l'éducation qui, à mon sens, permettent l'adoption d'un tel
article 4. C'est sur les considérations que doit prendre la commission
scolaire que cela peut avoir des effets. Comme je l'ai mentionné
tantôt, si le parent se sent incapable d'accepter un tel projet
éducatif, la commission scolaire devrait répondre à son
voeu de permettre l'inscription dans une école autre que celle
où, normalement, la commission scolaire aurait pu l'inscrire,
Mme Blackburn: Mais, comme il n'y a pas d'école autre
actuellement, cela pourrait poser un problème..
M. Houde (François): II est du pouvoir actuel des
commissions scolaires catholiques d'avoir des écoles sous leur
juridiction qui ne soient pas reconnues comme catholiques.
Mme Blackburn: Une dernière question. Comment
envisagez-vous, à la Fédération des commissions scolaires
catholiques, la possibilité de la multiplication d'écoles neutres
au sein des commissions scolaires confessionnelles?
M. Légaré: Vous me demandez comment nous
considérons l'arrivée...
Mme Blackburn: Comment vous envisagez...
M. Légaré: ...d'écoles neutres dans le
système actuel?
Mme Blackburn: Oui.
M. Légaré: Lors des débats sur la loi 3, les
commissions scolaires étant alors linguistiques, elles pouvaient, sans
difficulté, gérer des écoles autres ou neutres.
Actuellement, sauf pour deux commissions scolaires particulières, CECM
et CECQ, il nous apparaît que les autres commissions scolaires au
Québec pourraient gérer aussi ce type d'écoles. Cela se
pratique actuellement dans certains cas, de façon très minime,
cependant.
Mme Blackburn: D'accord. En conclusion, parce qu'on m'a dit que
le temps qui m'est imparti est écoulé, je voudrais à
nouveau vous remercier de votre participation aux travaux de cette commission.
Cela aurait demandé plus d'une heure pour aborder toutes les questions
qui me venaient à l'esprit, à la fois, à lire votre
mémoire et à écouter les réponses que vous avez
données au ministre ou à moi-même.
Je voudrais juste vous dire que j'aurais aimé qu'on puisse
approfondir un peu ce que peuvent représenter les effets de la
spécialisation des professeurs d'enseignement religieux et moral, ce que
cela peut vouloir dire administrativement, au plan pédagogique
également, alors qu'on envisage comme étant beaucoup plus
heureuse la venue de personnes plus polyvalentes, plus
généralistes que spécialistes.
Il reste, évidemment, de nombreuses questions en suspens. Je dois
dire que l'approche que vous avez touchant l'application de vos
responsabilités en regard de l'enseignement catholique dans les
écoles, en disant qu'il serait peut-être intéressant que le
comité catholique édicte un certain nombre de balises, de
critères et demande ensuite aux commissions scolaires d'établir
là-dessus une politique, serait beaucoup plus respectueuse de ce qu'on
reconnaît généralement comme faisant partie de la
responsabilité de gestion de nos gouvernements ou d'une
administration.
Je ferai un parallèle entre cette démarche et celle du
Conseil des collèges que j'ai eu l'occasion de présider au moment
où on parlait de politiques institutionnelles d'évaluation. Il
n'était pas question, pour le conseil, d'aller établir des
politiques d'évaluation de l'activité professionnelle des
collèges. On établissait un certain nombre de paramètres
ou une grille d'analyse et les collèges avaient à se doter de
politiques d'évaluation, par exemple, des apprentissages.
Je pense que votre démarche se situe davantage dans cette
approche qui m'apparaît beaucoup plus respectueuse. Je la trouve
intéressante et j'espère que, sur cet élément en
particulier, le ministre sera attentif à votre suggestion. Je vous
remercie.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la
députée. Avant d'inviter le ministre à de brefs
commentaires, je déclare officiellement déposé le document
de la
Fédération des commissions scolaires qui a pour titre:
"Projet de règlement du comité catholique du Conseil
supérieur de l'éducation", qui émane de la
Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec, direction de la gestion des affaires scolaires, service
juridique, daté de septembre 1987. Document déposé. M. le
ministre.
M. Ryan: Brièvement, M. le Président, je voudrais
rappeler une chose pour qu'on ne soit pas perdu dans les nuages. Il existe
déjà un règlement qui remonte à 1974. Je pense
qu'il a été modifié une fois en 1983. Sur certains points,
le projet de règlement que propose le comité catholique
élargit les choses au lieu de les rétrécir. Je donne un
exemple concret. Dans le règlement de 1974 il est dit que les membres du
personnel d'une école catholique doivent être catholiques, sauf
exception. Cela tombe. C'est une chose qui a été
enlevée.
Par conséquent, il y a un élargissement très
important proposé ici. On pourrait en trouver d'autres également.
Il y en a d'autres sur lesquels le comité catholique propose des
précisions plus grandes. Si on nous fait la preuve que les
précisions proposées vont trop loin dans le sens de la
bureaucratie ou des choses tatillonnes, je pense bien que ce sont des choses
que le comité catholique serait intéressé à
examiner. Encore une fois, je vous demande de vous souvenir aussi des exigences
qui ont été formulées par certains qui veulent avoir des
garanties, même au plan national. Contrairement à ce que disait la
députée de Chicoutimi tantôt, je n'ai pas dit qu'il fallait
un instrument national, ceci ou cela. J'ai dit: Des gens sont venus nous dire
cela ici. Nous les écoutons. J'ai bien dit que je n'avais pas
tiré de conclusions, en ce qui me touche, là-dessus.
Cela étant dit, je pense que, sur chacun des points, je n'ai pas
été impressionné outre mesure par l'aspect juridique. Je
vous le dis franchement, M. Houde, en toute amitié. On va le regarder de
près, par exemple. Vous avez déposé un mémoire. Je
vous en sais gré. Il me semble que c'est bien clair, dans la loi, le
pouvoir du comité catholique, non seulement de faire des
règlements pour la reconnaissance, mais de reconnaître et de
révoquer au besoin.
De toute façon, on l'examinera attentivement parce qu'on ne
voudrait pas faire des choses qui seraient contestées plus tard. Je sais
que c'est fait dans un esprit constructif. Je l'apprécie
énormément. Je pense qu'on va rester en consultation avec vous
pour les différents points sur lesquels la discussion de ce matin n'a
pas permis d'aller jusqu'au bout de la présentation de votre point de
vue. Merci beaucoup.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci,
M. le ministre. M. Légaré, M. Hudon, M. Houde, M. Doyer,
merci beaucoup.
La commission parlementaire va continuer ses travaux en accueillant les
représentants de la Centrale de l'enseignement du Québec. Je les
invite à se faire connaître de notre secrétaire et à
prendre place à la table qui leur est réservée. Nous
allons suspendre nos travaux quelques secondes. (11 h 15)
À l'ordre, s'il vous plaît!
Alors, j'inviterais les membres de la commission à prendre place.
Je leur ferai remarquer que nos invités sont déjà en place
et que nous les attendons impatiemment.
À l'ordre, s'il vous plaît! Dans la salle, je vous rappelle
à l'ordre! La commission poursuit ses travaux.
M. Jolivet: Nous, nous sommes là, M. le
Président.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous
félicite, M. le vice-président et Mme la députée de
Chicoutimi, d'être là et non pas d'être las!
CEQ
Alors, nous accueillons la Centrale de l'enseignement du Québec
et sa porte-parole, Mme Monique Giroux, qui est vice-présidente de la
CEQ. Mme Giroux, bonjour.
Mme Giroux (Monique): Bonjour.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je veux vous
remercier au nom des membres de cette commission d'avoir bien voulu accepter
l'invitation de venir nous faire connaître vos observations et vos
commentaires sur ces projets de règlement qui ont été
proposés au gouvernement par le comité catholique et te
comité protestant.
Cette commission parlementaire qui a pour but de mieux se renseigner sur
la perception des principaux intervenants dans le monde de l'éducation
attend avec impatience vos commentaires. La commission a prévu de vous
consacrer une heure. Je me permets de vous suggérer, mais à titre
de suggestion seulement, de répartir le temps comme ceci: de quinze
à vingt minutes au maximum pour présenter votre mémoire,
gardant le reste de la période pour des discussions avec les membres de
la commission.
Pour la connaissance des membres, je vous ferai remarquer qu'à
l'ordre du jour, le mémoire de la Centrale de l'enseignement du
Québec est identifié comme 25M alors qu'on devrait lire 26M.
Cela dit, Mme Giroux, je vous invite à nous présenter les
gens qui vous accompagnent et à enchaîner immédiatement
avec la présentation de votre mémoire.
Mme Giroux: Je vous remercie, M. le Président. Pour la
CEQ, c'est un moment important que de venir dire à la commission ses
opinions sur les projets de modification aux règlements. J'en profite
pour vous dire aussi qu'il y a un document qui s'ajoute ce matin au
mémoire que nous avons déjà produit, des notes concernant
le secteur de l'enseignement privé, compte tenu que nous avons, à
la CEQ, du personnel syndiqué d'établissements privés.
Je vous présente, dans un deuxième temps, les gens qui
m'accompagnent; Pierre Tellier, qui est président de la
Fédération des professionnels et professionnelles des commissions
scolaires; Francine Schoeb, qui est vice-présidente de la Commission des
enseignants de commissions scolaires; Nicole Santerre, qui est
vice-présidente à la Fédération des institutions
privées; Luc Joncas, qui est conseiller syndical à la centrale,
et Raymond Johnston, vice-président de la CEQ.
Pour notre présentation, on va essayer d'être le plus bref
possible, de façon à pouvoir miser sur les échanges que
nous pourrions avoir. Donc, M. Johnston fera le premier volet du mémoire
en ce qui a trait à toutes les dimensions constitutionnelles et, par la
suite, je ferai la deuxième partie.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Très bien.
Allez-y, monsieur!
M. Johnston (Raymond): M. le Président, la position de la
centrale sur la confessionnalité des structures scolaires est connue.
Elle a été déjà abondamment
présentée, expliquée et défendue à
l'occasion des commissions parlementaires sur les projets de loi 40 et 3 qui
avaient été déposés par le précédent
gouvernement. Notre position n'est pas substantiellement modifiée, loin
de là.
Ce qui nous amène à cette présentation un peu
ramassée de notre position sur le fond avant d'examiner le
règlement, c'est que, à la lecture du règlement, on se
rend compte qu'il y a beaucoup d'éléments qui reviennent sous
forme de dispositions réglementaires et que nous avions critiqués
lors des débats sur les projets de loi 40 et 3. Donc, il y a lieu,
à notre point de vue, de revenir sur le fond de la question avant de
regarder le mode d'intervention par voie réglementaire sur la
reconnaissance des écoles.
Je rappelle que, pour nous, il n'y a aucune justification qui tienne
à la volonté politique de maintenir des structures scolaires
confessionnelles au sein du système public d'éducation. On peut
certes nous dire qu'il y a des contraintes constitutionnelles, l'article 93 de
la constitution canadienne, mais que nous sachions, il y a eu des occasions de
rediscuter du contenu de l'article 93. Nous avions instamment prié le
présent gouvernement de même que le précédent de
mettre cette question-là à l'ordre du jour et, naturellement,
nous n'accepterons pas dans le cadre de ce débat, qu'on prétende
devoir se retrancher derrière les prescriptions de l'article 93. Nous
n'accepterons pas non plus qu'on donne à cet article 93 une
portée telle que cela vienne couvrir des protections qui ne sont pas
garanties par la constitution canadienne.
Dans la plupart des pays occidentaux, les États, les
gouvernements ont établi, souvent par constitution ou autrement, par
pratique, une séparation claire entre l'État et l'Eglise ou les
Églises. Le gouvernement qui nous dirige et le régime qui est le
nôtre prétend s'inspirer de cette tradition de démocratie
libérale qui, en principe, ailleurs, se traduit par cette
séparation claire du rôle de l'Etat, d'une part, et, d'autre part,
du rôle de l'Église. Sous cet angle, il faut se rappeler que c'est
aussi dans cette perspective que la Charte québécoise des droits
et libertés de la personne, à l'article 10, avait inclus une
certaine protection contre la discrimination sur la base de l'appartenance
à une confession religieuse ou de la liberté de conscience. Cette
garantie se retrouve aussi, quoique limitée et encadrée par
l'accord constitutionnel de 1982, reconduite par l'accord du lac Meech dans sa
dernière version. En plus, la charte québécoise tout
autant que la charte canadienne prévoit une protection du droit à
l'égalité, quelle que soit l'appartenance à une confession
religieuse ou non et quelle que soit cette confession religieuse.
Il faut donc tenir compte de tout cela et, à notre point de vue,
le cadre actuel ne correspond pas à cette espèce de consensus qui
conduisait tout le monde ou presque à réclamer dans le cadre du
dernier débat sur une possible restructuration scolaire une
transformation des structures confessionnelles en structures linguistiques,
d'une part, et, d'autre part, la mise en place de mécanismes qui
assurent vraiment que l'école la plus rapprochée, que
l'école du quartier, que l'école la plus accessible pour les
étudiantes et les étudiants sans trop de frais et sans trop
d'inconvénients pour les parents sott l'école commune, ouverte,
pluraliste et sans aucune forme de discrimination ou de traitement
discriminatoire ou distinctif que ce soit. On pense que la ligne devrait
être celle-là.
Nous disons donc qu'il faut déconfessionnaliser les structures
scolaires à partir du ministère de l'Education jusqu'à
l'école sans oublier aucun des paliers intermédiaires tout en
préservant le droit que nous reconnaissons comme d'autres à
l'enseignement religieux confessionnel
correspondant aux croyances des étudiantes et des
étudiants ou de leurs parents, le cas échéant, en option
avec un enseignement moral de type laïque.
Voilà essentiellement la position de fond que nous avions
défendue et que nous continuons de défendre. Nous
prétendons qu'il faut tenir compte maintenant non seulement de
l'évolution des valeurs même à l'intérieur de la
communauté identifiée comme catholique, mais il y a une
diversité de valeurs qui doit être enregistrée, d'une part.
D'autre part, il faut aussi considérer que notre société
est devenue sur ce plan de plus en plus pluraliste, même sans
égard à l'apport important des immigrantes et des immigrants au
Québec.
Il faut aussi considérer qu'on est en train de créer, de
façon directe ou indirecte, une certaine forme de ghettoïsation au
plan scolaire pour des groupes religieux particuliers qui devront ou bien
être marginalisés, ou bien revendiquer sur la base de
l'égalité des droits équivalant à ceux qui
appartiennent aux gens de religion catholique ou protestante.
L'autre volet qui est non négligeable, c'est la croissance
très importante que personne ne peut ignorer de la clientèle
francophone qu'on retrouve maintenant à l'intérieur du
réseau protestant et qui n'est là, finalement, que parce qu'elle
veut éviter de subir les contraintes d'une confession religieuse trop
présente dans le milieu scolaire. Je m'arrêterai là-dessus
pour permettre la présentation de l'autre volet de notre
mémoire.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Madame.
Mme Giroux: En deuxième partie, on dit que ce projet de
règlement va beaucoup plus loin que la simple reconnaissance comme
catholique de l'école publique. Par le biais des exigences nouvelles
qu'il apporte, il accentue le caractère confessionnel de celle-ci. On se
réfère à quatre points quand même assez
précis: toute la question de l'intégration des croyances et des
valeurs de la religion catholique dans le projet éducatif de
l'école; l'évaluation du vécu confessionnel de
l'école; l'exigence de qualifications particulières pour
l'enseignement moral et religieux catholique et l'animation pastorale, de
même que le respect du caractère catholique pour lequel on voit
aussi à l'intérieur du projet de règlement un
problème de définition très important.
Demande de reconnaissance comme catholique. La demande de reconnaissance
comme catholique et la reconnaissance qui va s'ensuivre permettront
l'introduction des différentes exigences que j'ai
présentées dans le premier paragraphe.
L'élément principal de cette première étape
des démarches vers une reconnaissance comme catholique, c'est la
consultation qui va être menée auprès des parents. La
consultation des parents de l'école telle qu'elle est proposée
dans le projet de règlement ne nous paraît pas une garantie du
respect des droits de toutes et de tous considérant que les croyances,
les pratiques et les attitudes religieuses relèvent de valeurs
individuelles que des individus, même s'ils forment une majorité,
ne peuvent imposer à d'autres.
Au niveau de l'intégration des croyances et des valeurs de la
religion catholique - là, on fait référence au contenu de
l'article 4 - l'article A fait obligation à l'école reconnue
comme catholique d'intégrer les croyances et les valeurs de la religion
catholique dans son projet éducatif et de s'afficher comme telle. Cet
article, pour nous, est une pièce très importante du projet de
règlement. Le projet éducatif doit donner à l'école
sa couleur et l'intégration des croyances et des valeurs de la religion
catholique dans un tel projet va transformer l'école publique commune et
ouverte à toutes et à tous en une école catholique.
Dans une telle école, toute la question de l'exemption de
l'enseignement moral et religieux perdra son sens, puisque les
élèves qui vont vivre des modalités d'exemption vont quand
même être confrontés, au-delà des 50 ou 60 heures
annuelles qu'ils vont passer dans les cours de formation morale, aux croyances
et aux valeurs de la religion catholique.
Pour bien saisir la portée d'un article comme l'article 4,
référons-nous à l'exemple d'une commission scolaire
catholique qui met en application ce précepte. Ce n'est pas notre
intention de faire le procès de la Commission des écoles
catholiques de Montréal, mais de voir comment l'application de tels
principes pourrait avoir des conséquences au niveau de l'organisation
scolaire et de l'école publique.
La Commission des écoles catholiques de Montréal a
adopté à l'automne 1985 un plan de promotion des valeurs
chrétiennes. Peu après, au nom de ces mêmes croyances et
valeurs de la religion catholique, cette même commission voulait faire de
l'adhésion aux objectifs de l'institution, notamment à sa
dimension chrétienne, un des six critères d'évaluation des
candidates et des candidats à l'embauche.
Au cours de la même année, les autorités de la CECM
intervenaient auprès des professionnels et professionnelles pour que,
dans leurs interventions auprès des jeunes en matière de pratique
sexuelle, de contraception et d'avortement, ils respectent les enseignements de
la doctrine de la religion catholique. Et, au nom de ces mêmes valeurs,
en septembre 1985, les commissaires de la CECM ont refusé
d'autoriser l'utilisation d'un cahier pédagogique produit par ta
CEQ qui, selon eux, ne mettait pas assez en relief les valeurs
chrétiennes et qui portait sur l'Année internationale de la
jeunesse. (11 h 30)
Par ces exemples, on veut démontrer à quel point un
article comme l'article 4 pourrait influencer la vie de l'école tant sur
le plan des contenus pédagogiques que sur celui des attitudes et des
relations entre les intervenants et les intervenantes., Tout cela, est-il
besoin de le rappeler, dans une école commune ouverte à tous et
à toutes.
De plus, quant à cet article 4, il est important de soulever les
dangers de ghettoïsation. Subissant le passage des valeurs
confessionnelles qui vont imposer à tout le monde, à tous les
étudiants et les étudiantes, les valeurs et les croyances
catholiques, les nouvelles Québécoises et les nouveaux
Québécois, quelles seront leurs réactions? Ils choisiront
peut-être de créer leurs propres écoles ou de se joindre
à un réseau plus ouvert que le réseau catholique. Cette
seconde éventualité qu'on doit prendre au sérieux pourrait
amener la minorité anglophone à craindre de perdre le
contrôle de son réseau d'éducation, tout cela dans un
contexte où l'éducation à la connaissance interculturelle
et l'intégration de ces nouvelles Québécoises et nouveaux
Québécois deviennent des défis qui interpellent la
société québécoise et devant lesquels ceile-ci ne
peut plus se défiler. On n'a qu'à lire l'avis du Conseil
supérieur de l'éducation sur les défis éducatifs
à la pluralité pour voir comme on a du travail à faire
dans nos écoles québécoises.
Les mesures de contrôle, en référence à
l'article 7. La mesure de la catholicité de l'école se fera par
le biais de l'évaluation du vécu confessionnel de l'école.
Le projet de règlement veut garantir au comité catholique qu'il
recevra non pas de la commission scolaire mais de chaque école un
rapport d'évaluation de son vécu confessionnel qui devra
refléter la réalité. Il est pour le moins bizarre de voir
que ce souci de vérité n'ait pas incité les auteurs de ce
projet à joindre à la liste des conseillers les enseignants, les
enseignantes et les autres personnels de l'école qui oeuvrent
quotidiennement dans ce milieu.
Par ailleurs, le rôle de conseillère ou de conseiller en
éducation chrétienne nous paraît aussi modifié par
le contenu de l'article 7. Déjà, les conseillers et
conseillères à la commission scolaire ont un rôle
d'intervention auprès de la direction générale.
Maintenant, cette personne devra superviser les écoles quant à
leur vécu confessionnel. Compte tenu de cette ambiguïté au
niveau du mandat des conseillers et conseillères, il sera difficile de
s'acquitter fidèlement du mandat qui lui est originellement
confié. Ajoutons aussi que, par cette nouvelle fonction
d'évaluation, on semble vouloir confier aux conseillères et aux
conseillers en éducation chrétienne un rôle de cadre, ce
à quoi nous nous étions opposés quand ces,
éléments nous avaient été présentés
dans le cadre du projet de loi 3.
Une autre mesure de contrôle réside dans le contenu de
l'article 27 qui précise que le personnel de l'école publique
reconnue comme catholique ainsi que toute autre personne qui y travaille, les
parents et les élèves, doivent être respectueux du
caractère catholique de l'école. Voilà un article qui
prête à interprétation et qui laisse place à
l'arbitraire. Que signifie "le respect du caractère catholique de
l'école"? Une personne divorcée ou en union libre sera-t-elle
considérée comme respectueuse du caractère catholique de
l'école? Une étudiante ou une femme membre du personnel qui
subira un avorternent respectera-t-elle le caractère confessionnel de
l'école? Celui ou celle qui refusera de participer à une
célébration religieuse à l'école en respectera-t-il
le caractère catholique? Pourra-t-on, tout en respectant le
caractère catholique de l'école, informer les
élèves quant aux diverses méthodes de contraception ou
aborder l'éducation à la sexualité sans faire
nécessairement référence à la morale catholique?
Lors d'une entrevue avec une étudiante enceinte, une psychologue ou une
infirmière en milieu scolaire pourra-t-elle évoquer la
possibilité de recourir à l'avortement?
Les réponses à ces questions ne sont pas simples, on en
convient. Mais dites-nous qui définira ce qu'est le caractère
catholique de l'école. Dites-nous qui jugera de l'application du respect
ou non de ce caractère catholique et nous pourrons, à ce
moment-là, émettre certaines hypothèses.
Les nouvelles dispositions sur la qualification des enseignants et des
enseignantes. Les changements que propose le comité catholique
concernant les exigences de formation de celles et ceux qui dispensent
l'enseignement religieux catholique sont inacceptables tant au niveau de leur
nature que de leurs modalités d'application. Le règlement actuel,
si on s'y réfère, ne précise pas d'autres exigences que
celle d'être de foi catholique en ce qui concerne la qualification des
enseignantes et des enseignants qui dispensent l'enseignement moral et
religieux catholique. Cependant, il est prévu à l'article 25 du
règlement actuel qu'une enseignante ou un enseignant puisse être
exempté si cette personne persiste à dispenser un enseignement
qui n'est pas conforme aux exigences. Aux articles 7 et 8, on indique que
l'institution doit veiller - c'est sa responsabilité - à la
qualité de l'enseignement religieux en vue de favoriser chez
l'étudiante ou l'étudiant l'approfondissement
de la foi chrétienne ainsi que l'élargissement de son
expérience et de sa culture religieuse. On y ajoute aussi que
l'enseignement religieux doit être à la fois respectueux du
mystère chrétien, soucieux de rigueur intellectuelle et attentif
au cheminement personnel de la foi des étudiantes et des
étudiants.
Le projet de règlement que nous discutons modifie
complètement cette vision des choses en imposant des critères de
qualification pour l'engagement ou l'affectation des enseignants et
enseignantes. On peut se demander, premièrement, s'il est pertinent de
procéder à un changement dans le contexte actuel. Comment
justifier la nécessité d'être aussi contraignant dans ce
règlement au sujet des qualifications? N'y a-t-il pas le risque
d'alourdir l'organisation scolaire en instaurant des exigences aussi
précises à l'engagement et à l'affectation des personnels?
De deux choses l'une: au niveau primaire, ou on peut prévoir que
l'enseignement moral et religieux catholique va devenir une
spécialité, ou on peut prévoir une forme de discrimination
pour l'engagement et l'affectation des titulaires au primaire. Si
l'enseignement moral et religieux, dans le premier cas, devient une
spécialité, c'est toute l'organisation scolaire du niveau
primaire qui risque d'être perturbée, perturbation d'autant plus
grande que rien n'empêchera que soient réclamées de telles
exigences pour les autres matières.
Dans le deuxième cas, dans l'éventualité où
les titulaires dispenseront cet enseignement, c'est la formation des
maîtres à l'université qui risque d'être
bouleversée. Présentement, la formation en enseignement moral et
religieux catholique fait partie du domaine des cours optionnels, mais il en
ira tout autrement si les exigences proposées entrent en vigueur. Les
futurs enseignants et enseignantes voudront dans une très forte
majorité obtenir les crédits de formation en enseignement moral
et religieux pour répondre aux exigences et s'assurer un emploi. N'y
a-t-il pas également le risque de provoquer une discrimination
spécialement à l'égard de l'engagement de titulaires au
primaire?
Au secondaire, le problème est différent. L'enseignement
moral et religieux catholique étant déjà une
spécialité ou, en matière de conditions de travail,
constituant déjà un champ, la situation est vécue
différemment. Cependant, l'exigence à double niveau de
crédits différents - 30 crédits au premier cycle et 60
crédits au deuxième cycle - peut avoir pour effet de scinder ce
champ - qui est une référence à la mécanique de la
sécurité d'emploi - et limiter ainsi la mobilité des
enseignants et enseignantes. D'autre part, l'organisation scolaire du
secondaire fait qu'un grand nombre d'enseignantes et d'enseignants en
enseignement moral et religieux oeuvre aux premier et deuxième cycles.
De cette réalité, est-ce qu'il peut découler que
l'exigence sera de 30 crédits universitaires pour tout le monde?
Nous sommes d'avis que des modifications de cet ordre ne sont pas
nécessaires pour assurer la qualité de l'enseignement religieux
catholique. Ce sont les commissions scolaires qui doivent assumer la
responsabilité de l'engagement des personnels et non le comité
catholique. Quant aux affectations, elles sont déjà régies
par des mécanismes négociés entre les parties loales. Il
n'est pas souhaitable que des contraintes extérieures viennent ajouter
à la rigidité des critères déjà existants.
Ajoutons encore que des programmes de perfectionnement et de recyclage sont
accessibles en enseignement religieux catholique comme dans d'autres
matières et que le ministère a annoncé pour l'année
1987-1988 un débat sur toute la question du perfectionnement.
Au sujet de l'application du projet de règlement, on fixe
l'entrée en vigueur des modifications au 1er juillet 1991. 11 faut donc
comprendre que toutes les personnes engagées après le 1er juillet
1991 seront assujetties aux nouvelles exigences, de même que les
personnes affectées à l'enseignement religieux catholique
après cette date» à l'exception de celles qui le
dispensaient en 1990-1991; c'est ce qui est écrit dans les articles du
comité catholique.
Ces dispositions soulèvent un autre problème. N'y a-t-il
pas lieu de craindre que des pressions soient exercées sur les
enseignantes et enseignants déjà en place pour qu'ils
acquièrent les qualifications exigées des nouvelles et des
nouveaux, pressions qui pourraient provenir du milieu ou avoir cours lors des
prochaines négociations. Ce n'est pas pour dire que nous sommes contre
le perfectionnement ou le recyclage. Je pense qu'il faut le situer dans le
débat tel qu'il est prévu.
Avec l'entrée en vigueur de ces dispositions, nous aurons donc
deux catégories d'enseignants: les qualifiés et les
non-qualifiés. Nous voyons déjà un effet de cette
distinction dans la formule de demande de reconnaissance d'une école
comme catholique qui est annexée au projet de règlement.
Là, on se réfère à la question 5 où on vise
à faire le portrait du personnel de l'école en mettant en
évidence les deux catégories. Le nombre de non-qualifiés
ou d'exemptés de l'enseignement religieux ira-t-il jusqu'à servir
de facteur explicatif à une évaluation négative du
vécu confessionnel de l'école? C'est la même chose pour les
conseillers et les conseillères ou les professionnels non
enseignants.
Nous ne croyons pas pertinent de créer une telle division parmi
le personnel affecté
à l'enseignement d'une même matière. En
conséquence, nous nous opposons à l'ajout d'exigences
particulières aux dispositions touchant à la qualification des
enseignantes et enseignants dispensant l'enseignement religieux et nous
privilégions une formule de statu quo ou une formule
générale comme celle qui est proposée par le comité
protestant.
Les services d'animation pastorale catholique. Ils sont dispensés
par des membres du personnel professionnel, les animatrices et les animateurs.
Une convention collective régit les conditions de travail de ces
syndiqués. Cette entente définit les qualifications et les
tâches de ces personnels tandis que le plan de classification
précise les diplômes appropriés à l'exercice de la
fonction d'animateur de pastorale.
Cependant, l'article 20 du projet de règlement
énumère lui aussi un ensemble d'activités faisant partie
des services complémentaires en animation pastorale. C'est donc une
forme de définition de la tâche des animatrices et des animateurs
qui interfère, selon nous, dans le plan de classification qui a
reçu l'assentiment de la partie syndicale. De même, à
l'article 21, où on précise les qualifications
particulières exigibles de toute personne chargée de l'animation
pastorale, cela vient aussi en conflit avec des éléments qui sont
déjà stipulés dans la convention collective.
Bien que nous n'ayons pas d'objection à ce que l'obtention d'un
mandat pastoral décerné par l'évêque du
diocèse soit une condition à l'exercice de la fonction
d'animatrice ou d'animateur de pastorale, ou de conseiller ou
conseillère en éducation chrétienne, nous
considérons comme une anomalie que la perte de ce mandat signifie la
perte de l'emploi.
L'article 22 définit les diplômes appropriés
à l'exercice de la fonction d'animation de pastorale. Le projet de
règlement fait également double emploi avec le plan de
classification des personnels professionnels.
Quand on se réfère aux articles 23, 24 et 25, ces articles
comportent des éléments qut, selon nous, relèvent de la
gestion interne des commissions scolaires. On pense, entre autres, à
l'obligation faite aux animatrices et animateurs de pastorale de
présenter à la direction de l'école un rapport de
planification et un rapport d'évaluation, ce qui se fait de façon
habituelle. On pense aussi à l'exigence pour les écoles
d'affecter des fonds pour le fonctionnement des activités de pastorale.
Donc, on fait déjà un choix par les modifications que nous
propose le comité catholique. D'ailleurs, le chapitre du projet de
règlement qui traite de l'animation pastorale restreint la marge de
manoeuvre des commissions scolaires quant à l'établissement des
services complémentaires puisqu'il les oblige à
privilégier des postes. Comme dans le cas des enseignants et des
enseignantes, le projet de règlement comporte aussi des exigences
particulières à l'endroit des nouveaux animateurs de pastorale et
nous nous opposons à ce genre de division. Nous ne saurions trop
insister sur le fait qu'il est important que toute personne qui dispense le
service d'animation pastorale dans l'école doit être membre du
personnel salarié de la commission scolaire.
En conclusion, la reconnaissance comme catholique d'une école
publique s'apparente davantage à l'accentuation du caractère
confessionnel de celle-ci. L'inclusion des valeurs et des croyances, la
négation du droit à la différence, le non-respect du
caractère pluraliste de la société
québécoise et les exigences particulières de formation,
c'est passer outre à des conditions de travail négociées
de bonne foi pour ce volet.
Nous demandons donc le retrait de ce projet et nous affirmons que la
majorité de la population du Québec est trop respectueuse des
droits fondamentaux que sont la liberté de conscience et la
liberté de religion et qu'elle tient trop à ce que s'instaure
dans les écoles un climat de coopération pour endosser les
dispositions de ce projet de règlement
Quant au secteur de l'enseignement privé, je tiens à vous
préciser, d'entrée de jeu, que les remarques qui sont faites dans
le mémoire relativement au personnel s'appliquent aussi aux personnels
en institution privée. On n'a pas jugé bon de le
réécrire. On a jugé bon de soulever quelques
éléments plus importants. (11 h 45)
Des retombées sur le personnel. D'entrée de jeu, il nous
faut admettre qu'on n'impose pas à l'école privée
l'obligation d'être commune et ouverte. Elle se dote donc d'un projet
éducatif auquel doivent adhérer les parents qui inscrivent leurs
enfants dans une telle institution. Cependant, les membres du personnel
risquent maintenant de voir pendre au-dessus de leur tête deux
épées de Damoclès. Il s'agit de l'article 20 de la Charte
des droits et libertés de la personne et de l'article 27 du projet de
règlement.
En effet, selon le projet de règlement, le personnel de
l'institution d'enseignement privée reconnue comme catholique ainsi que
toute autre personne qui y travaille, les parents et les élèves,
doivent être respectueux du caractère catholique de l'institution.
Si un membre du personnel voyait des mesures disciplinaires lut être
imposées parce qu'ayant été jugé non respectueux du
caractère catholique de l'institution, celui-ci ne pourrait
prétendre qu'il y a discrimination à son endroit cai l'article 20
de la Charte des droits et libertés de la personne précise
qu'une
distinction, exclusion ou préférence fondée sur les
aptitudes ou qualités requises par un emploi ou justifiée par le
caractère charitable, philantropique, religieux, politique ou
éducatif d'une institution sans but lucratif ou qui est vouée
exclusivement au bien-être d'un groupe ethnique est réputée
non discriminatoire. Nous demandons qu'advenant l'adoption d'exigences
supplémentaires découlant du projet de règlement,
celles-ci n'aient pas de retombées sur les personnels en regard de
l'embauche, du maintien en emploi et des conditions de travail.
Nous soulignons au gouvernement que l'article 20 de la Charte des droits
et libertés de la personne est libellé de façon telle que
les personnes des établissements privés d'enseignement sont
placées dans une situation pour le moins insécure. Nous proposons
de placer cette disposition d'exception dans un cadre législatif qui
puisse être arbitrable ou d'en réduire la portée.
Contrôle des budgets subventionnés. Nous demandons que le
gouvernement prévoie un meilleur contrôle de l'utilisation des
budgets pour que les personnels soient mis à l'abri de toute utilisation
discrétionnaire de sommes initialement prévues aux fins de la
gestion des personnels.
Pour une participation valable. Après avoir fait un tour
d'horizon de nos établissements d'enseignement privé
affiliés à la fédération, on observe que les
comités d'école ne sont pas fonctionnels dans toutes les
institutions. Alors, nous croyons que les professionnels, les enseignants et
les parents seront écartés par l'adoption du règlement
dans sa présente formulation. Nous nous permettons de suggérer au
comité catholique d'étudier cette dimension sous le signe de la
participation aussi valable au secteur privé qu'au secteur public dans
notre structure sociale démocratique.
S'adapter aux clientèles. Les écoles privées qui
servent des clientèles avec des problèmes d'adaptation sociale ou
académique éprouveront des difficultés certaines dans
l'application du règlement. Comme les exigences académiques sont
les mêmes dans ces milieux que dans le réseau régulier
d'éducation et que l'organisation de ces écoles ne fait appel
à des spécialistes que pour les programmes d'éducation
physique, il nous paraît difficile de satisfaire aux exigences de
formation dont il est fait mention dans le présent projet de
règlement. Merci.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci beaucoup de
votre exposé, Mme Giroux. En dérogation à nos
règles de procédure -d'habitude, c'est le ministre qui
répond immédiatement - mais étant donné les
occupations des membres de cette commission, je reconnais immédiatement
la porte-parole de l'Opposition en matière d'éducation, Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Je vous remercie, M. le Président. Je dois
également remercier le ministre. Effectivement, c'est habituellement le
ministre qui commence la discussion, mais, malheureusement, je devrai vous
quitter vers 12 h 5. Je reviendrai quelque 20 minutes plus tard, mais je ne
pourrai pas poursuivre au-delà de 12 h 5.
D'abord, Mme la Présidente, mesdames et messieurs, je voudrais
vous souhaiter la bienvenue au nom de ma formation politique et vous rappeler,
parce que vous n'étiez pas dans la salle au moment où je l'ai
fait, que je suis toujours plus sensible aux mémoires des organismes et
des personnes qui sont vraiment dans l'action. Je trouve toujours que
d'élaborer de façon plus théorique un règlement, de
façon plus abstraite, dans l'abstrait, c'est facile et, effectivement,
on peut dire que certaines modifications pourraient être
apportées, mais, lorsqu'il s'agit des effets de cette mise en
application, j'ai tendance à faire confiance à ceux qui auront
à travailler, à composer avec un tel règlement.
J'ai été à la fois très
intéressée par votre mémoire et sensible aux
difficultés que vous soulevez quant à l'application possible de
ce règlement, particulièrement aux effets qu'il pourra avoir,
soit la discrimination qu'il pourrait introduire dans ta sélection du
personnel comme la discrimination qu'il pourrait introduire dans le choix de
formation que feront les étudiants lorsqu'ils seront à
l'université.
J'aimerais que vous expliquiez un peu deux aspects: celui de la
qualification et celui de la discrimination. Mais, avant, je sais que votre
mémoire recommande carrément le retrait du projet de
règlement. Vous demandez au ministre qu'au cours de la prochaine
négociation constitutionnelle, l'article 93 qui touche à la
protection des structures confessionnelles au Québec fasse partie du
débat de manière à adapter d'abord la structure scolaire
à la réalité d'aujourd'hui et à donner au
Québec plein pouvoir en matière d'éducation.
Je dois dire que, depuis le début de cette commission et
même avant, nous n'avons pas réussi à avoir du ministre une
position claire par rapport à l'introduction dans la prochaine ronde de
négociation de cet article 93. On l'a demandé à quelques
reprises. Je le vois sourire. Il a commencé par dire oui, cela va y
être; ensuite non, cela n'y restera pas; ensuite oui, on va changer cela
où on peut le faire et là, il commence à moins le changer.
Je dois dire que j'attends toujours, et le Québec également, sa
réponse sur cette question.
Sur la question de la qualification, évidemment, on sait que
c'est différent au
primaire et au secondaire. Pour ce qui est du primaire, la lecture que
j'en fais est la suivante; du moment où on exige des professeurs qui
enseignent la morale et la religion neuf crédits universitaires, cela
veut dire qu'on se trouve devant la situation où celui qui est en cours
de formation, bien qu'il ait des convictions religieuses ou morales autres, se
verra pour ainsi dire contraint d'aller chercher ses neuf crédits s'il
veut être embauché. S'il ne le fait pas, la commission scolaire
aura tendance à privilégier quelqu'un qui a déjà
cette formation parce qu'on veut voir davantage des généralistes
que des spécialistes parmi les titulaires.
Dans l'hypothèse où le règlement est adopté
tel quel et qu'on maintienne les neuf crédits qui viennent, à
votre avis, porter atteinte aux libertés de conscience, aux
libertés religieuses et même créer disons une certaine
discrimination, est-ce que vous privilégieriez l'embauche de
spécialistes ou de généralistes au primaire pour
l'enseignement religieux''
Mme Giroux: La question des généralistes et des
spécialistes est déjà débattue au secondaire. On
sait que cela soulève beaucoup d'émotions. On a affaire à
des enfants de niveau primaire, des enfants de cinq à douze ans, et je
pense que, pour l'hypothèse des spécialistes, il faudrait avoir
une période de réflexion très importante là-dessus.
On est en contact avec ces enfants et on met des exigences sur une
matière particulière qui va chambarder l'organisation scolaire.
Il faut bien voir les conséquences de cela. On peut s'étiqueter,
se dire d'une formation très spécialisée dans une
matière, mats quand on met en jeu notre capacité d'intervention
pédagogique et professionnelle dans un niveau de notre système
d'éducation, je pense qu'il faut voir les enjeux de ce qu'on
écrit quand on parle d'éducation et quand on parle d'autre chose
ailleurs aussi. Ce sur quoi on intervient, c'est l'éducation. Je pense
qu'au niveau primaire, si on s'en va dans une dynamique de
spécialisation, qu'on le dise, mais qu'on ne le fasse pas par le biais
de projets de règlement comme ceux-là qui, petit bout par petit
bout, pourraient amener cela. Je ne pense pas que ce soit le choix du
ministère de l'Education ni que ce soit le choix des intervenants et des
intervenantes en éducation, pas plus que celui de la population du
Québec.
Donc, il faut voir réellement les conséquences d'une mise
en application de crédits ou d'exigences comme celles-là quant
à la qualification. Je ne sais pas si Francine a quelque chose à
ajouter là-dessus.
Mme Schoeb (Francine): Je pense qu'il faut aussi regarder toute
la question de la qualification en fonction du personnel actuellement en place.
Cela a bien sûr un effet sur la formation des gens qui sont à
l'université. Mais le fait d'ajouter dans un règlement des
qualifications précises, doit des crédits universitaires,
même s'il y a une disposition dans le projet de règlement qui fait
que les gens qui sont en place sont comme non assujettis à ces
dispositions, cela fait quand même en sorte de définir, si on
veut, la qualification pour enseigner la religion au primaire ou au
secondaire.
Les gens qui sont actuellement en place, qui n'ont pas cette
qualification, qui n'ont pas suivi les neuf crédits parce que cela
n'existait pas dans leur temps, mats qui ont la compétence de
l'enseigner parce que cela fait des années qu'ils l'enseignent, - ils se
sont recyclés ou ils se sont perfectionnés - vont se sentir comme
"déqualifiés". Là, on touche à beaucoup de monde;
on touche à toutes les personnes qui sont titulaires au primaire, les
personnes qui sont même au secondaire et qui enseignent cette
matière depuis des années. On va encore créer une
espèce de courant de démotivation, de "déqualification".
Je pense que la question est un peu posée dans l'annexe au projet de
règlement. Quand on fait le portrait d'une école en parlant des
non-qualifiés et des qualifiés, cela a un impact sur les gens qui
sont en place et qui se pensent compétents et qualifiés pour
enseigner cela. Je pense que c'est un impact majeur, l'ajout, dans un projet de
règlement, de qualifications très précises. Je ne veux pas
dire qu'on n'est pas d'accord pour dire que le comité catholique
établisse des balises, entre autres, quant à la formation des
maîtres, et dire ce que devrait être une formation adéquate,
mais sans en faire une contrainte en ce qui concerne l'engagement et
l'affectation. C'est là-dessus qu'on en a le plus.
Mme Blackburn: Au secondaire où on exigerait 30
crédits au premier cycle et 60 crédits au second cycle, ce que
vous nous dites, c'est qu'on vient faire un cloisonnement entre le premier et
ie deuxième cycle et brimer une certaine mobilité. Est-ce que
cela existe dans d'autres matières? Je me demandais si, pour enseigner
le français ou les sciences, il y avait un cloisonnement entre le
premier et le deuxième cycle en ce qui touche les professeurs.
Mme Giroux: Quant aux exigences de qualification?
Mme Blackburn: Oui, oui. Mme Giroux: Non.
Mme Blackburn: Les exigences de qualification sont les
mêmes.
Mme Giroux: Oui.
Mme Blackburn: Donc, c'est vraiment quelque chose de tout
à fait nouveau et de particulier. D'accord.
Quant aux qualifications, je sais que le règlement prévoit
qu'elles s'appliquent en 1990-1991. L'université serait obligée -
pour ne pas dire "contrainte" - de commencer à modifier son programme
dès septembre 1988, pour autant que la formation est donnée sur
trois ans. Mais cela veut également dire une autre chose. Comment
va-t-on régler le cas de ceux qui ont terminé leur formation et
qui ne sont pas actuellement embauchés? Qu'est-ce qu'on fait avec ces
jeunes - et on sait qu'ils sont nombreux actuellement - qui sont à
attendre aux portes des écoles pour aller y exercer leur profession?
Cette question n'a pas été abordée.
Mme Schoeb: Cela n'a pas été abordé et je
pense que c'est une question extrêmement importante, surtout que,
actuellement, il y a beaucoup de personnes qui sont dans le système, par
exemple, des personnels à statut précaire qui font de la
suppléance, du temps partiel et qui attendent un poste à temps
plein. Avec l'application de ce règlement, ils seraient exclus d'un
poste à temps plein parce qu'au moment où ils ont suivi leur
cours à l'université il n'y avait pas cette disposition. Je pense
que ces personnels ne sont pas du tout protégés par l'article 30
qui prévoit qui est assujetti et qui ne l'est pas. On les a
oubliés, mais c'est une réalité importante dans le
système actuel que les personnels qui sont à temps partiel ou en
suppléance et qui attendent. D'ailleurs, on revendique des listes de
rappel et un ordre prioritaire de rappel pour ces personnels avant d'aller voir
les nouveaux ou les nouvelles qui sortent de l'université.
Mme Blackburn: Actuellement, le champ d'enseignement des
enseignants qui offrent l'enseignement religieux c'est l'enseignement
religieux, la morale, la formation professionnelle et sociale. Ils peuvent
compléter leur tâche dans ces trois secteurs ou si...
Mme Schoeb: Oui, c'est le champ. Il y a les enseignants en morale
et les enseignants en religion qui sont dans le même champ. Ils peuvent
aussi compléter leur tâche dans d'autres champs. Il arrive
aussi...
Mme Blackburn: Tous les autres champs ou si...
Mme Schoeb: Bien, c'est selon les compétences...
Mme Blackburn: D'accord.
Mme Schoeb: ...des gens, bien entendu.
Mme Blackburn: Oui.
Mme Schoeb: Des parties de tâche, cela existe au
secondaire, mais disons que la majorité des gens qui sont dans ce champ
enseignent dans ce champ-là. Il peut arriver que même des
personnes d'autres champs enseignent cela, mais cela serait limité par
l'application du règlement. Ce serait difficile, par exemple, de
demander à un prof de français de secondaire I de
compléter sa tâche avec un cours d'enseignement moral et religieux
à un groupe s'il n'a pas les 30 crédits du secondaire I. Alors,
l'organisation scolaire serait beaucoup plus difficile au secondaire comme au
primaire, je pense, avec un règlement comme celui-là. (12
heures)
Mme Blackburn: C'est-à-dire que cela introduit une
discrimination qui favorise celui qui a cette formation au détriment des
autres. Il peut aller terminer sa tâche dans tous les autres secteurs du
moment qu'il a les compétences, mais l'inverse n'est pas possible pour
celui qui n'a pas la formation en enseignement religieux.
Une brève question: Avez-vous été consultés,
comme intervenants en milieu scolaire, avant la parution de ce
règlement?
Mme Giroux: On a lu comme tout le monde la Gazette officielle du
Québec et on a réagi. On a demandé une consultation et une
rencontre au comité catholique. C'est tout ce qu'on a eu comme
renseignement.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Avez-vous obtenu
la rencontre avec le comité catholique?
Mme Giroux: Oui.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui, vous l'avez
eue. Merci.
Mme Blackburn: Évidemment, si le règlement
était adopté, vous l'avez fait remarquer, cela suppose l'ajout de
ressources financières, que ce soit pour les services, pour l'embauche
d'animateurs de pastorale, pour les locaux, etc. Vous qui êtes
aujourd'hui dans les écoles, si vous aviez à établir une
priorité, quelle serait-elle?
Mme Giroux: II y a tellement de besoins en ce qui concerne
l'école. Je pense qu'il y a des choix de société qui
s'imposent et, nous, notre priorité n'irait pas à ce volet. Il y
a toute la question de l'apprentissage de la langue et toute la question des
apprentissages de base. Il y a un grand nombre de matières. On n'a
qu'à regarder comment les gens parlent, comment les gens critiquent
l'école pour voir, entre autres quant à l'enfance en
difficulté d'adaption et d'apprentissage et quant à
l'éducation des adultes où on a une interrogation majeure
au Québec, combien il y a d'endroits essentiels où on devrait
mettre des ressources.
Mme Blackburn: Je pense que mon temps est...
Le Président (M. Parent, Sauvé); Vous pouvez
conclure.
Mme Blackburn: ...presque écoulé. Je voudrais
profiter des quelques minutes qui me restent pour vous remercier à
nouveau de votre participation aux travaux de cette commission. J'espère
que le ministre sera sensible non seulement aux avis auxquels il a
naturellement - en vertu de ses convictions, certainement - tendance à
être un peu plus favorable, mais qu'il sera aussi ouvert aux organismes
qui viennent lui présenter les difficultés que poserait
éventuellement l'application de ce règlement s'il était
adopté, tant au plan administratif qu'en vertu des discriminations qu'il
introduirait dans l'embauche* du personnel, la préparation et la
qualification de ce personnel, de même que dans la liberté de
conscience des personnes, à la fois celles qui enseignent, celles qui se
forment et celles qui fréquentent les écoles.
Je vous remercie de votre présentation et je nous souhaite
à tous une bonne chance dans ce dossier.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la
députée de Chicoutimi. Je reconnais maintenant le ministre de
l'Éducation. M. le ministre.
M. Ryan: Merci, M. le Président. Je vais essayer
d'être bref parce que je voudrais que mon collègue, le
député de Charlevoix, puisse intervenir aussi dans le
débat, étant donné qu'il a été durant
plusieurs années un enseignant activement engagé au niveau
secondaire, en particulier dans le domaine de l'enseignement religieux et de la
pastorale. Je pense qu'il sera bon d'avoir son expérience et ses points
de vue.
Je suis toujours heureux de rencontrer la CEQ avec laquelle nous avons
de nombreux rapports à toutes sortes de points de vue. Pour être
bref, sur la première partie du mémoire, je m'abstiendrai de
commentaires ce matin parce que la position du Parti libéral du
Québec a été exposée maintes fois sur ce sujet.
Elle na pas changé et, contrairement à ce que laissait entendre
la députée de Chicoutimi tantôt, nous n'avons pas promis
une chose, ensuite une autre et une autre; notre position est rectiligne. Nous
avons dit substantiellement que nous favorisions le remplacement des
commissions scolaires confessionnelles par des commissions scolaires
linguistiques à condi- tion qu'il y ait un consensus bien
vérifié dans la population et, deuxièmement, que nous
soyons assurés de marcher en terrain solide au point de vue juridique.
Ces deux conditions, nous sommes à les vérifier et quand nous
aurons obtenu satisfaction sur ces deux points-là, l'autre objectif
pourra être envisagé. Mais, essentiellement, nous ne voulons pas
mettre la charrue devant les boeufs et nous exposer à des
déconvenues comme celles qui ont suivi l'adoption
prématurée de la loi 3. C'est essentiellement notre position sur
tout le reste.
Quant au projet de règlement lui-même, plus
j'écoute, plus je considère qu'il y a une tendance chez certains
à exagérer la portée de certains changements qu'annonce le
projet de règlement. Il y a bien des points sur lesquels le projet de
règlement, loin d'accroître la discipline actuelle, la diminue. Je
vais donner des exemples. Le temps réservé à
l'enseignement moral et religieux, dans le règlement actuel, est de deux
heures par semaine, ce qui fait 72 heures à la fin de l'année.
Dans le projet de règlement qui est proposé, c'est 60. Pour les
élèves qui s'en vont vers l'enseignement professionnel, le
règlement entérine les changements déjà faits il y
a .quelques mois et réduit la part d'enseignement moral et religieux
confessionnel imposé aux élèves. Par conséquent, ce
n'est pas plus ici, c'est moins.
En ce qui regarde les enseignants, le règlement actuel - si je le
lis comme il faut - exige que le personnel d'une école soit de foi
catholique, cela tombe aussi. Cela tombe parce que le comité catholique,
me semble-t-il, s'est rendu compte que la réalité d'aujourd'hui
n'est pas la même.
Si on veut faire un examen objectif, il faudra reconnaître tous
ces points-là. La liberté de choix qui a été
introduite par la modification de 83 est confirmée de manière
beaucoup plus explicite en ce qui touche le choix entre enseignement moral et
religieux et enseignement moral. La liberté de l'enseignant d'être
exempté est reconnue ici peut-être de manière trop
négative. J'ai déjà indiqué, lors de discussions
antérieures avec d'autres groupes, que nous pourrons revenir à
une formulation plus explicite si c'est de nature à offrir des garanties
plus solides.
Je regarde les autres articles du projet de loi. Je laisse à mon
collègue la partie de la qualification des enseignants. C'est un sujet
que nous allons examiner à fond. Mais, sur les autres, la
reconnaissance, je pense que ce qu'il y a là, c'est
élémentaire. On peut bien faire toutes sortes de
simagrées, mais il me semble, que si vous avez un pouvoir de
reconnaissance, il va bien falloir que vous disiez comment cela va se faire.
Là, il me semble que c'est dit de manière minimale. S'il y en a
trop, on va nous dire
ce qu'il y a de trop, mais j'ai bien du mal à le voir.
Le projet éducatif. J'ai indiqué hier qu'il y a moyen
d'assouplir la formulation de manière à tenir compte des droits
fondamentaux. Nous avons déjà des formules dans notre
réservoir, mais nous voudrons en discuter avec le comité
catholique auparavant. Je pense qu'il n'y a pas de problème
là-dessus.
Le directeur de l'école, c'est pas mal la même chose
qu'actuellement. Je regarde la disposition actuelle du règlement, ce qui
est ici, c'est pas mal la même chose. Je continue. Même pour le
respect du caractère catholique de l'école à la fin,
à la page 27, j'ai indiqué hier qu'on pourrait ajouter des
précisions parce que notre école n'est pas seulement catholique,
elle est d'abord publique et commune. Cela peut être écrit dans
cet article. On peut le proposer au comité catholique. On ajoute cela
parce qu'on ne voudrait pas que ce soit seulement le caractère
catholique qui soit respecté et que tout le reste soit envoyé
par-dessus bord. Je pense que ce n'est pas du tout l'esprit de ce
règlement.
On parle de l'animation pastorale. C'est déjà dans le
règlement et la commission scolaire doit voir à ce que
l'animation pastorale existe. On essaie de le préciser un peu.
Peut-être que c'est inexact. Sur la question du personnel, vous savez
comme moi qu'il y a bien des gens qui font cela à temps partiel,
même des gens qui !e font de manière bénévole.
J'espère que la CEQ ne pousse pas l'exigence aussi loin que de dire: 11
n'y aura plus de bénévoles qui vont collaborer à
l'animation pastorale dans les écoles, parce que j'y serais farouchement
opposé. Mais je pense que ce n'est pas l'esprit de la remarque qui a
été faite vers la fin du mémoire.
Je vous dis, en conséquence, que je ne vois pas de
problème majeur. Plus j'écoute, sur la grande majorité des
articles du projet de règlement... Sur la formation, je mets une grande
parenthèse et je laisse à mon collègue, le
député de Charlevoix, le soin de pousser plus loin l'examen. Sur
d'autres points, je pense que j'ai indiqué - j'en ai une douzaine dans
mon calepin - les points sur lesquels nous serons intéressés
à discuter avec le comité catholique d'élargissement au
d'assouplissement possible, de manière à faire tomber les
inquiétudes qui peuvent être réelles et fondées.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le
ministre. Je reconnais maintenant M. le député de Charlevoix.
M. Bradet: Merci, M. le Président. Mesdames, messieurs, je
voudrais profiter de l'occasion que m'offre le ministre pour m'exprimer sur ce
que j'entends depuis deux jours en tant qu'ex-enseignant d'enseignement
religieux depuis les 17 dernières années et vous dire que je veux
m'en tenir surtout à la qualification.
J'aimerais revenir sur quelques points. Je ne partage pas au complet
votre position sur la confessionnalité. Quand on est un petit peu plus
terre à terre et que, dans des écoles secondaires ou
élémentaires, mais surtout secondaires, on a à vivre avec
l'étudiant, le jeune, c'est vers lui que l'école doit s'orienter.
On se rend compte très souvent - cela, il faut le vivre avec eux -que
ces jeunes-là sont perturbés, manquent de motivation, sont
désorientés, ce qui explique le taux de suicide. Ils se
cherchent, de quelque façon que ce soit. Je suis dans une région
qu'on peut dire encore fortement catholique, mais, très souvent, je dois
vous dire que j'ai été beaucoup plus à l'écoute de
ces étudiants à l'intérieur d'une balise de 50 minutes
où... Tout à l'heure, à propos du caractère
catholique de l'école, vous sembliez dire que cela va changer
énormément dans les écoles. Je n'ai pas peur qu'on
revienne au chapelet ou qu'on recommence à dire la messe tous les
matins. Je ne vois pas ce caractère catholique comme étant
quelque chose d'astreignant. Quand vous dites: Celui ou celle qui refusera de
participer à une célébration, qu'est-ce qu'on en fait? Je
dois vous dire que dans les écoles actuellement, très sauvent,
l'étudiant a la liberté de choisir d'aller en
catéchèse ou d'aller en morale. Même s'il a la
liberté de choisir, on lui donne encore après la liberté
de participer à des activités. Je pense que l'enseignement
religieux est l'enseignement le plus ouvert dans une école. On ne
forcera pas un étudiant, on lui dira: Une telle activité ne te
plaît pas, on n'en fait pas un plat. Je pense qu'on est là plus,
comme je vous le disais tantôt, pour être à l'écoute
de ces jeunes, pour essayer de donner un sens à leur vie.
Donc, je trouve étonnant que, très souvent, on semble
dire: On devrait éliminer cela du revers de la main, sous le couvert
d'une société pluraliste et d'une société
très ouverte, très technique. Si vous regardez les cours qui se
donnent en IV et V, vous verrez qu'on parle de sciences, qu'on parle de
chrétiens et d'engagement sociopolitique, qu'on parle de choses qui font
qu'on va quand même très loin dans les balises qu'on leur donne.
Quand je regarde cela, il me semble que ce ne sera pas si contraignant et, moi,
cela ne me ferait pas peur.
Quand vous parlez de qualification, par exemple, là je trouve que
c'est important. J'ai trop vu de mes confrères s'improviser profs de
catéchèse pour une journée ou pour une semaine, ou
même des commissions scolaires forcer certaines personnes ou orienter
certaines personnes vers une période d'enseignement religieux. La
qualification est
extrêmement importante à ce niveau. La plus belle preuve,
je pense, c'est d'appeler dans n'importe quelle commission scolaire le matin.
Demandez quel prof est malade et, si c'est le prof d'enseignement religieux,
vous pouvez être sûr que les élèves sont en
période libre. C'est très difficile de remplacer un prof
d'enseignement religieux et, pour bien des directeurs, c'est vraiment la
période problème lorsqu'il s'agit de trouver un suppléant.
On n'a pas de problème en mathématiques ou en français.
Cela prouve que même l'étudiant s'attend toujours à avoir,
à ce niveau, un professeur qui, bien sûr, reflète un peu la
foi religieuse. C'est tout à fait normal, celui qui ne la transpirerait
pas ne serait pas capable de rester là une demi-heure. Mais c'est
important de pousser plus loin la qualification de façon qu'on puisse,
avec ces cours, éviter justement qu'il y ait des transfuges ou une
problématique selon laquelle le professeur qui n'a pas la bonne
qualification se retrouve là, et ce n'est pas seulement faire des
exercices avec les élèves. C'est important un exercice de
français, mais en enseignement religieux ou en morale, on ne fait pas
seulement des exercices. On a à parler de la vie, du bonheur, de la
mort, des problèmes de l'existence, et cela ne se mesure pas comme on
peut le faire en géographie, en regardant des diapositives ou des choses
comme cela.
Ma question, pour terminer: Vous parlez de champ à la page 12.
C'est revenu à quelques reprises dans nos délibérations.
Est-ce que vous êtes contre le fait que le professeur d'enseignement
religieux puisse enseigner la morale, puisse enseigner l'éducation
sexuelle dans son champ? Est-ce que vous voyez un problème
là-dessus? Certains groupes semblaient nous dire que l'enseignement
religieux et l'enseignement moral ne devraient pas aller ensemble. Est-ce que
cela vous chatouille qu'on puisse faire cela dans le même champ? Je
comprends que vous disiez tantôt que c'était important, et je
pense que vous aviez raison de dire que d'ajouter une période
d'enseignement religieux à un professeur de français, c'est assez
problématique. On devrait éviter cela parce que, très
souvent, cela cause un problème dans une école. Est-ce que vous
pensez que le principe de dire: Ce champ, le champ de formation personnelle
où même, maintenant, on donne des cours d'éducation
sexuelle... Je dois vous dire que les cours d'éducation sexuelle qu'on
donne, il ne faudrait pas voir là des cours fermés ou on ne parle
que des méthodes sympto-thermiques.
Je pense que les cours sont très bien faits, de façon que
l'étudiant puisse faire un choix. Je ne suis pas prêt à
dire qu'on lui impose toujours le choix. Je pense que les enseignants qui ont
une bonne formation sont capables de laisser la religion, c'est un choix. Cela
a semblé un problème pour bien des gens qui sont venus ici que le
même professeur ne puisse pas chapeauter ces matières globales
d'enseignement et de formation de la personne. (12 h 15)
Le Président (M. Parent, Sauvé): Qui va
répondre à la question du député de Charlevoix?
Malheureusement, il ne reste plus de temps pour d'autres interventions, sauf
pour la réponse que nous attendons.
M. Johnston: Si vous le permettez, on va se partager à
deux la réponse.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui, allez!
M. Johnston: Je ne voudrais pas être méchant,
mais...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Si vous
l'êtes, je vais vous le dire! Ha! Ha!
M. Johnston: ...le député de Charlevoix a dit que
cela ne conduit pas toujours à imposer des choix. Il fait lui-même
des nuances dans ses propres propos. Je pense qu'il convient de noter que,
même si la demarche dans laquelle l'enseignant s'inscrit n'est pas
contraignante, l'enseignant qui délivre l'enseignement moral et
religieux -naturellement confessionnel - dans la mesure où il a devant
lui des jeunes qui sont associés à cette croyance, qui
s'identifient à cette croyance, nous, on ne voit pas de problème
au fait que la démarche dans laquelle s'inscrivent ces étudiants
puisse les amener à conditionner un peu leur choix, à la
condition cependant qu'on ne colore pas l'école mur à mur des
valeurs qui passent dans l'enseignement moral et religieux; il faut être
clair là-dessus. Il n'y a pas d'ambiguïté passible et je
pense que, là-dessus, si on est capable de faire un bout de chemin comme
société québécoise, c'est en admettant qu'il peut y
avoir un corridor d'enseignement moral et religieux qui corresponde aux
croyances des individus à l'intérieur du réseau public
d'enseignement, il n'y a aucun problème à cela. Mais est-ce qu'on
va demander, en même temps, sous prétexte qu'on a un projet
éducatif catholique, que la biologie corresponde aux cours
d'enseignement moral et religieux, ou la physique ou la chimie, le cas
échéant - je parle de biologie parce que c'est peut-être
plus approprié - ou l'éducation sexuelle, qui, dans certains cas,
ne passe pas nécessairement par l'enseignement moral ou religieux?
Est-ce que cela devra nécessairement être teinté de cette
couleur? II nous semble qu'il y a une part d'endoctrinement qu'il faut chercher
à éviter. Il faut laisser une certaine forme de choix, oui, mais
il faut respecter
les valeurs diverses dans cette communauté. Respecter les valeurs
diverses dans cette communauté, cela doit aller aussi loin que de
permettre qu'à l'intérieur d'un établissement scolaire,
où il y a des activités alléchantes pour les
étudiantes et les étudiants qui suivent le cours d'enseignement
moral et religieux catholique, les gens qui ne suivent pas ce même cours
aient le même type de soutien ou le même type de moyens mis
à leur disposition pour avoir des activités tout aussi
alléchantes, pour ne pas créer de discrimination sur la base des
moyens disponibles.
Vous dites, et vous avez sûrement raison, que les enseignants qui
ont la charge de l'enseignement moral et religieux, il y a beaucoup de travail
d'écoute. C'est vrai aussi pour l'enseignant qui a la charge de
l'enseignement moral non confessionnel, cela devrait normalement être
vrai. Il devrait normalement y avoir, pour l'ensemble des enseignants, cette
possibilité de se mettre à l'écoute des
étudiants.
J'ajouterai un élément important qui devrait traverser
toute la réflexion qu'on doit faire collectivement comme
société. L'égalité, quelle que soit la croyance
religieuse, dans le système scolaire public, ne peut pas, entendons-nous
bien, accepter d'écart significatif. On peut se mettre à l'abri
des contestations par des lois qui disent "nonobstant", mais on ne règle
pas le problème politique d'équité. On pense qu'on est
maintenant devant un problème politique d'équité au plan
de la société québécoise.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous invite
à conclure, s'il vous plaît! Le temps est
dépassé.
Mme Giroux: Oui. Francine et Pierre, sur des
éléments spécifiques qui ont été
soulevés - ce ne sera pas...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je regrette. Je
vous ai dit, au début, que la commission avait une heure et je vous ai
fait une suggestion que vous n'avez pas suivie. Remarquez bien que
c'était libre à vous. Vous avez pris une demi-heure...
Mme Giroux: Tout était important.
Le Président (M. Parent, Sauvé): ...pour nous
présenter votre mémoire. Moi, j'ai partagé le temps. Il y
a d'autres groupes qui sont ici et qui doivent partir. Je vous remercie de la
qualité de votre témoignage et de l'engagement dont vous avez
fait preuve. Au nom des membres de la commission, encore une fois, merci
beaucoup, Mmes les vice-présidentes et MM. les conseillers.
La commission suspend ses travaux pour quelques minutes. Nous
continuerons en accueillant le représentant du module de sciences
religieuses de l'Université du Québec à
Montréal.
(Suspension de la séance à 12 h 22)
(Reprise à 12 h 24)
Le Président (M. Parent, Sauvé): J'invite le groupe
suivant à prendre place à la table. J'invite aussi les membres de
la commission à prendre place. Je vous informe que nous avons pris 25
minutes de retard.
À l'ordre dans la salle, s'il vous plaît! La commission
poursuit ses travaux. J'inviterais les gens à prendre place. La
commission accueille M. Roland Chagnon, directeur et porte-parole du module de
sciences religieuses de l'Université du Québec à
Montréal. M. Chagnon, je vous remercie d'avoir accepté
l'invitation de la commission permanente de l'éducation, à savoir
de venir à cette commission parlementaire nous faire connaître
votre témoignage face aux projets de règlement mis de l'avant par
les comités catholique et protestant.
Les règles s'établissent comme suit: la commission a
réservé une heure pour chaque groupe, quitte à vous de
l'utiliser ou non et quitte aux membres de la commission de procéder
selon les règles à l'intérieur de cette période de
temps qui a été dévolue pour votre comparution à
cette commission.
Voulez-vous nous présenter votre mémoire ou commencer
immédiatement les échanges de vues avec les membres de la
commission?
Module de sciences religieuses de l'UQAM
M. Chagnon (Roland): Je vous remercie, M. le Président de
la commission. Je remercie aussi les membres de la commission de nous donner
l'occasion de présenter le mémoire que notre module vous a remis
sur le projet de règlement émis récemment par le
comité catholique sur la reconnaissance des écoles comme
confessionnelles et, également, sur les exigences de qualification des
maîtres pour l'enseignement religieux.
Avant de donner, en quelques lignes, la teneur de notre mémoire,
j'aimerais un peu le situer en présentant, en quelques mots, le module
de sciences religieuses qui fait partie de la famille des sciences humaines de
l'Université du Québec à Montréal. H s'occupe
surtout de la formation des enseignants en sciences religieuses pour le niveau
secondaire. Pour ce faire, le module gère trois programmes qui sont un
baccalauréat d'enseignement en sciences religieuses, un
baccalauréat en religiologie et, également, un programme de
certificat de premier cycle en éducation morale. Le
module s'occupe de la formation des maîtres depuis 1969. Depuis
ces 18 dernières années, environ 200, 300 maîtres sont
venus chercher leur formation pour le secondaire à l'UQAM, dans notre
module.
Avant de vous présenter le contenu du module, je voudrais aussi
faire deux remarques. La première remarque est la suivante: Comme notre
module oeuvre principalement à la formation des maîtres en
enseignement religieux pour le niveau secondaire, nous avons pensé
restreindre notre propos à ce niveau. J'ai appris, il n'y a pas
tellement longtemps, que Mme Gagnon-Heynemand, qui est la vice-doyenne de la
famille de formation des maîtres à I'UQAM, vous présentera
plus tard, je crois que c'est le 21 octobre, un mémoire qui émane
de la famille de formation des maîtres à l'Université du
Québec à Montréal, famille qui, elle, voit à la
formation des enseignants au niveau élémentaire,,
Donc, la cible ou les propos que je vais vous présenter
concerneront surtout les exigences de qualification des enseignants et, encore
pour être plus précis, mon propos visera surtout l'article 17 du
projet de règlement du comité catholique.
Une deuxième remarque que je veux faire d'entrée de jeu,
c'est la suivante: Bien sûr, vous le savez, la consultation a
été ouverte en mai. Dans les universités, ce n'est pas la
meilleure période pour entreprendre une consultation. Alors, nous avons
dû faire une mobilisation des troupes pour réagir au projet de
règlement. Je demanderais à la commission de bien vouloir prendre
note de cette circonstance pour juger et recevoir notre rapport.
J'en arrive au rapport lui-même que je n'ai pas l'intention de
vous lire, car je pense que c'est de mauvaise guerre de lire un texte que la
majorité d'entre vous a sans doute déjà lu. Je vais
plutôt tenter de le résumer dans ses grandes lignes et laisser
à vos interventions et aux miennes, tout à l'heure, le soin,
peut-être, de préciser ces grandes lignes.
Je voudrais d'abord vous signaler que l'horizon dans lequel on s'est
placé pour réagir, c'est l'horizon de notre société
concrète d'aujourd'hui, avec les problématiques précises
qui sont vécues dans les écoles et notre société
1987. Pour nous, cela voulait dire que le Québec, bien sûr, vit
d'un héritage religieux qui est l'héritage religieux transmis par
l'Église catholique et qui n'est pas un héritage simplement en
termes de passé. Nous croyons que c'est un héritage encore
vivant, premièrement. Deuxièmement, nous pensons aussi que la
société québécoise d'aujourd'hui - je ne vous
apprends rien, mais c'est parce que c'est important de le dire - a
changé et nous sommes dans une société qui est devenue
-c'est un mot un peu usé, mais il est encore commode - une
société pluraliste, une société qui est
habitée par des gens de toutes croyances, des gens qui viennent de plus
en plus de tout horizon et ceci est d'autant plus valable quand on se situe
dans des milieux urbains comme Montréal, Québec,
Trois-Rivières et d'autres grandes villes du même genre. Alors, je
voulais vous dire, donc, que nous avons voulu nous situer dans ce contexte qui
nous paraît être le contexte réel dans lequel nous nous
trouvons.
Essentiellement, le reste de mes propos portera sur deux exigences de
qualification que le comité catholique vous recommande d'adopter
à partir de 1990, en ce qui concerne la qualification des maîtres
pour l'enseignement religieux catholique dans les écoles.
Alors, cette première exigence qui nous a frappés - elle
n'est pas nouvelle, on le sait cependant - c'est l'exigence indiquant que les
maîtres doivent être de foi catholique» Je vaudrais bien
préciser que notre module n'a rien, j'espère que vous le
comprendrez bien, contre la foi catholique, contre l'Église catholique,
contre le message de la religion catholique. J'ai dit, tout à l'heure,
que nous sommes très conscients que notre histoire a été
façonnée par cette tradition et que cette tradition agit encore,
dans une certaine mesure, et assez importante, dans notre
société.
Cependant, à cause du caractère pluraliste de notre
société, le module que je représente éprouve une
certaine gêne face à cette exigence de qualification. Cette
gêne, je la situerais sur le plan de ce que j'appellerais le traitement
égal des citoyens devant la loi et, tout à l'heure,
j'écoutais les propos du monsieur de la CEQ qui disait des choses
semblables à ce que nous pensons, à cet égard tout au
moins, c'est-à-dire que, dans une institution publique, il nous
paraît difficile, sur le plan du respect de tous les citoyens devant
l'État et ses institutions, d'exiger comme critère d'embauche de
quelqu'un pour l'enseignement religieux, que cette personne se déclare,
se dise de foi catholique.
Il nous paraîtrait préférable que le comité
catholique mette l'accent sur des exigences de compétence qui elles,
bien sûr, s'imposent lorsqu'on parle d'éducation et lorsqu'on
parle d'enseignement.
Il y a un autre aspect de ce premier critère d'être de foi
catholique qui suscite des interrogations chez nous, c'est la gestion
concrète de ce critère. Autrement dit, comment va-t-on faire,
à supposer même que nous acceptions ce critère, pour le
gérer complètement? Comment va-t-on faire pour mesurer
l'application à tel ou tel candidat ou candidate de ce critère?
Et il semble y avoir à ce chapitre, des problèmes qui sont
certainement des problèmes majeurs.
Alors, il n'est pas de notre mandat de
suggérer des formules meilleures, mais il nous semble - nous nous
efforçons un peu de jouer ce jeu des suggestions et des propositions
qu'il serait préférable que la première exigence se lise
dans le sens suivant, c'est-à-dire qu'une personne qui veut faire de
l'enseignement religieux catholique, dans les écoles du Québec,
se dise capable de respecter le caractère confessionnel de
l'école. Il nous semble que le caractère du respect est plus
mesurable que le caractère de la foi. On peut voir si quelqu'un respecte
une institution, on peut voir si quelqu'un respecte une personne, il est plus
difficile d'aller plus loin. Il nous semble que le respect du caractère
confessionnel de l'école par les enseignants pourrait être
avantageusement substitué à la mention "être de foi
catholique" qui fait partie des premières exigences de
qualification.
J'en arrive à la deuxième exigence du règlement qui
stipule deux choses, c'est-à-dire qu'on s'attendra que le maître
voulant pratiquer l'enseignement religieux catholique ait suivi 30
crédits de formation sur les contenus essentiels de la foi
chrétienne et/ou sur les programmes d'enseignement religieux catholique
au secondaire, s'il veut oeuvrer en secondaire I et II. La deuxième
exigence ajoute que, pour enseigner en secondaire III, IV et V, le candidat
devrait posséder 60 crédits de formation dans ce programme.
Je dois vous dire d'emblée que le module que je représente
est tout à fait d'accord avec la mention de 10 cours ou de 30
crédits de formation sur les contenus essentiels de la foi
chrétienne, pour les raisons déjà évoquées
et, aussi, parce que vous n'êtes pas sans savoir que la programmation
dans les écoles secondaires aujourd'hui est une programmation qui porte
essentiellement sur la tradition chrétienne catholique. Il nous
paraît tout à fait décent et nous sommes tout à fait
d'accord avec l'exigence de 30 crédits de formation sur les contenus
essentiels de la foi chrétienne. Là où nous sommes plus
hésitants, c'est lorsque, dans cette exigence seconde, on demande au
futur maître d'avoir 60 crédits dans ce programme de
formation.
Je dois dire que, lors de la consultation que nous avons menée
chez nous, dans notre module, nous avons eu quelques problèmes avec
l'article déterminatif "ce". C'est quoi ce"? Il peut être
interprété de deux manières. On peut l'interpréter
comme un programme de formation qui se situe dans le filon d'une formation
portant exclusivement sur les contenus essentiels de la foi chrétienne
ou on peut lui donner une interprétation plus large. Si on lui donne une
interprétation stricte, notre module éprouve quelques
problèmes avec l'interprétation stricte. Cela tient à ce
que j'appelais tout à l'heure le caractère pluraliste de notre
société.
Il nous apparaît essentiel, au module, qu'une place soit faite
dans la formation des maîtres pour l'enseignement religieux catholique
dans les écoles secondaires et qu'une place soit faite pour les
traditions religieuses autres que chrétiennes, pour ce que j'appellerais
l'univers des nouvelles religions, des sectes qui circulent dans notre
société et qui sollicitent l'appartenance, l'engagement des
jeunes. Il nous paraîtrait aussi essentiel qu'une formation soit offerte
aux futurs maîtres dans des domaines que j'appellerais plutôt
parareligieux ou quasi religieux. Je pense à
l'ésotérisrne, à la parapsychologie, tous des domaines qui
intriguent les jeunes, vous le savez, dans les écoles. Les jeunes se
posent des questions et ils attendent de leurs maîtres d'avoir des
réponses, des renseignements pour les aider à se situer.
Alors, notre module croit qu'il serait malheureux que la formation des
futurs maîtres soit exclusivement située sur le terrain du
christianisme catholique. Nous sommes d'accord avec une très bonne base
de formation en ce domaine, d'où notre accord avec l'idée de dix
cours. Cela nous apparaît fondamental et essentiel. Mais nous pensons
qu'il faut assurer aux maîtres la possibilité de se former dans
des traditions religieuses qui deviennent importantes chez nous au
Québec dans le contexte pluraliste où nous nous trouvons et que
les maîtres soient capables d'aider les jeunes à se situer
vis-à-vis d'autres traditions religieuses, vis-à-vis des sectes
qui, maintenant, sont aussi présentes dans notre société
et vis-à-vis des divers phénomènes qu'on a de la
misère à qualifier comme religieux et que nous appelons, à
cause de cela, quasi ou parareligieux.
Le module croit aussi que l'idée même de séparer les
exigences de qualification des maîtres qui enseigneront au premier cycle
du secondaire et au deuxième cycle n'est pas très heureuse. Il ne
nous apparaît pas, au module, que les programmes, la situation des jeunes
et la situation des écoles exigent cette distinction dans la formation
des maîtres entre ceux qui s'adressent au premier cycle et au
deuxième cycle.
Je terminerai mon résumé en insistant sur une chose qui
nous paraît éminemment importante. Quand je dis cela, je voudrais
vous dire aussi que nous ne sommes pas seuls à penser ce que je vais
vous dire.
L'an passé, le module que je dirige a procédé
à une évaluation de ses programmes auprès des conseillers
pédagogiques à l'enseignement moral et religieux de la
région de Montréal, de la région de la rive sud de
Montréal et de la région de Laval. Lors de cette
évaluation qui s'est faite par contacts et aussi par écrit,
plusieurs conseillers pédagogiques en enseignement moral et religieux
ont insisté sur
l'importance d'une formation polyvalente pour les maîtres
d'aujourd'hui voulant faire l'enseignement religieux catholique dans les
écoles.
Qu'est-ce que cela signifie, cette polyvalence? Cela signifie un
désir que les maîtres qui sortiront de nos universités ces
années-ci soient capables de se retourner, sans paniquer» de
l'enseignement moral et religieux catholique à l'enseignement moral et
même, parfois, jusqu'à la formation personnelle et sociale.
Pour que le maître soit capable de se retourner, cela veut dire
que les universités doivent penser dans leurs programmes de formation
à une formation souple qui ne fasse pas des maîtres des
surspécialistes, mais qui fasse des maîtres des gens capables
d'offrir une formation sérieuse, valable, compétente dans le
domaine de l'enseignement moral et religieux catholique et aussi dans le
domaine de l'enseignement moral, bien sûr. Mais aussi, nous pensons que
les maîtres doivent avoir des connaissances sur les grandes traditions
religieuses de l'humanité, sur le phénomène religieux
mouvant dans notre société qui est représenté par
le phénomène sectaire et sur des phénomènes que
j'appelais tout à l'heure des phénomènes quasi ou
parareligieux.
Alors, je pense avoir fait le tour des principaux éléments
de mon mémoire et je vous remercie de votre attention. Je serai heureux,
si vous avez des questions, de tenter d'y répondre si je le peux.
Le Président (M, Parent, Sauvé): Merci,
monsieur.
M. Ryan: M. Chagnon, je vous remercie de votre contribution
à notre recherche. Je pense que vous avez mis en relief des points qui
sont fondamentaux. Ils ne sont pas tous également solubles avec la
même facilité. Quant au premier que vous avez soulevé,
celui de l'exigence de foi à poser aux professeurs chargés de
l'enseignement moral et religieux catholique, le critère proposé
soulève des difficultés. Il a l'avantage d'être
déjà là depuis longtemps. Il est en application plus ou
moins minutieuse, j'imagine, depuis déjà une bonne douzaine
d'années. (12 h 45)
Je ne pense pas, personnellement - on transmettra votre avis au
comité catholique, évidemment - que celui que vous proposez
pourrait être satisfaisant, parce que le critère de respect
demeure quand même un critère qui peut être
interprété privativement par plusieurs. Ce n'est pas cela qui va
assurer la qualité de l'enseignement religieux s'il y a seulement cela.
Je comprends l'idée qui est derrière votre proposition, mais je
ne serais pas prêt à m'en porter le défenseur, tout en
considérant qu'il est très important qu'il y ait une
atmosphère de respect à tous points de vue dans l'école.
Mais je ne crois pas que cela réponde à la difficulté.
J'en viens à la seconde exigence dont vous discutez dans votre
mémoire. II y a une chose sur laquelle je suis entièrement
d'accord avec vous, c'est lorsque vous dites que la préparation du futur
enseignant en matières morale et religieuse devrait déborder les
cadres de sa propre confession pour embrasser l'héritage et les valeurs
d'autres confessions. Je pense qu'il y a là un élément
d'enrichissement possible de la proposition du comité catholique qui
doit être examiné avec beaucoup d'intérêt. Il y a des
éléments dans cette proposition de réponse positive
à la diversification culturelle et spirituelle du milieu
québécois qui me semblent dignes d'être retenus. Je pense
bien que le comité catholique va se faire un agréable devoir
d'étudier la possibilité de faire un ajout, d'ajouter des
éléments. Je pense que lui, quand il a fait sa proposition,
pensait surtout à sa responsabilité propre, immédiate.
Comme vous le dites, même cette responsabilité englobe aujourd'hui
une dimension plus large. Je pense que c'est très bon qu'elle ait
été signalée à notre attention.
Je voudrais vous poser une question, si vous me le permettez. Quelqu'un
m'a remis tantôt une copie des cours offerts au département que
vous dirigez à l'UQAM. J'ai regardé la liste des cours offerts.
Je ne sais pas si je me trompe, mais j'ai l'impression que vous aurez des
changements à faire pour répondre aux exigences du comité
catholique si le projet de règlement est adopté. Est-ce que j'ai
été mal informé? Je regarde la liste, il y a à peu
près de tout, sauf la doctrine chrétienne.
M. Chagnon (Roland): M. Ryan, vous me permettez de
répondre? Je dois vous dire -je l'ai mentionné tout à
l'heure dans ma présentation - que notre module a entrepris l'an dernier
l'évaluation de son programme qui n'a pas été
retouché depuis 1978, et à la suite de cette évaluation de
l'an dernier, nous avons déjà sur la table, cette année,
à l'UQAM, deux projets de refonte de nos programmes, c'est-à-dire
un projet pour le bac en religiologie et un projet pour le bac d'enseignement
en sciences religieuses qui s'appellerait, si c'est accepté à
l'université, bac en enseignement moral et religieux; vous voyez
l'idée de polyvalence qui est là. Aussi, nous avons
anticipé ce qui s'en venait dans cette réglementation dont on
parle aujourd'hui, et nous avons, dans ce projet de refonte, enrichi beaucoup
notre répertoire de cours sur la tradition chrétienne catholique.
Non seulement nous avons additionné des cours, mais nous avons rendu un
nombre de cours dans cette tradition obligatoires pour rejoindre l'exigence de
dix cours.
Ce que vous disiez est vrai du passé et même
peut-être d'aujourd'hui, mais nous espérons qu'à partir de
septembre 1988 la situation sera tout à fait nouvelle.
M. Ryan: Très bien. Maintenant, le comité
catholique, si je comprends bien, aurait une exigence de 60 crédits pour
le deuxième cycle du secondaire et de 30 crédits pour le premier
cycle. Vous aimeriez mieux que ce soient 30 crédits pour les
éléments de doctrine chrétienne ou d'héritage
chrétien proprement dits pour les deux cycles.
M. Chagnon (Roland): Oui. La raison, c'est que nous pensons,
à cause même de la société actuelle, de son
pluralisme, qu'il est important que les jeunes dans les écoles
secondaires entendent des choses sensées, bien présentées
sur les traditions comme l'hindouisme, le bouddhisme, l'islam, qui ne sont plus
des traditions d'Asie seulement. Il y a beaucoup de gens de ces pays qui vivent
maintenant au Québec, notamment à Montréal, et qui vivent
côte à côte avec de petits Québécois
d'origine. Je pense que c'est une question éducative fondamentale que de
présenter aux jeunes d'aujourd'hui ces traditions avec le respect et
toute l'empathie qu'elles méritent. Nous pensons donc qu'il est bon de
garder dans la formation des maîtres un ensemble de cours qui porteraient
sur des traditions autres que chrétiennes. J'ai mentionné tout
à l'heure qu'il faudrait aussi des cours qui porteraient sur les
sectes.
Vous n'êtes pas sans savoir qu'il y a beaucoup de sectes qui se
développent au Québec. Il y a depuis trois ans, à
Montréal, un centre d'information sur les nouvelles religions qui a
recensé près de 300 religions nouvelles chez nous. On ne peut pas
ignorer des phénomènes comme ceux-là et l'école se
doit, au contraire, d'aider le jeune à se situer vis-à-vis de ces
nouveaux courants religieux pour ne pas qu'il soit victime de mauvaise
information et qu'il soit facilement happé par ces nouveaux courants
religieux, parce qu'il n'aurait pas eu d'information de base.
M. Ryan: Juste une dernière question, si vous me le
permettez. Vu la place centrale qu'ont occupée dans notre histoire les
valeurs religieuses chrétiennes, est-ce que vous iriez jusqu'à
considérer que des crédits dans ce champ devraient faire partie
obligatoirement de la formation universitaire d'une personne qui se destine
à l'enseignement moral et religieux ou si vous laisseriez cela
optionnel, comme c'est le cas dans les universités où il y a
quelque chose là-dessus?
M. Chagnon (Roland): Je répondrais spontanément oui
à votre question. Il faut absolument que les maîtres qui veulent
enseigner au secondaire et à l'élémentaire... Je sais que
madame Gagnon-Heynemand parlera davantage du niveau élémentaire,
mais pour le secondaire, je suis tout à fait d'accord pour dire: Oui, il
faut absolument que les maîtres aient une formation sérieuse sur
la tradition chrétienne. C'est la nôtre, c'est de là que
nous venons et les programmes de formation dans les écoles secondaires,
vous le savez fort bien, portent actuellement exclusivement sur cette
tradition. Il est inacceptable que quelqu'un aille sur le marché du
travail actuellement dans ce domaine en ignorant une tradition qui est ici,
bien sûr, la principale.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la
députée de Chicoutirni.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. Chagnon, je
voudrais vous souhaiter la bienvenue au nom de ma formation politique. J'ai lu
avec intérêt votre mémoire, de même que j'ai
écouté vos commentaires. Vous allez me permettre d'essayer de
préciser un peu quelques aspects de ce que vous nous avez dit. D'abord,
en parlant des exigences, vous les avez situées à deux niveaux:
être de foi catholique et avoir une formation de tant de crédits
selon qu'on se destine à enseigner au niveau primaire ou secondaire.
Vous dites: Si les exigences, plutôt que d'être de foi catholique
étaient d'être capable de respecter le caractère
confessionnel de l'école, cela permettrait, si j'ai bien compris,
à celui qui détient cette formation d'enseigner à la fois
la morale et la religion catholique et la formation sociale et personnelle.
Dans l'hypothèse où on conserve l'exigence d'être de foi
catholique et qu'on aille chercher sa formation pour enseigner la religion,
estimez-vous que ces personnes seraient aussi compétentes, sans porter
atteinte aux valeurs des autres, pour enseigner la morale dite sans
épithète religieuse?
M. Chagnon (Roland): Pour mot, le problème de la
capacité ou de l'habileté à enseigner tient de la
compétence de la personne et ce n'est pas parce qu'on maintiendrait le
critère de qualification "être de foi catholique" qu'une personne
deviendrait automatiquement inhabile ou inapte à enseigner la morale.
J'ai émis cette idée du respect du caractère confessionnel
de l'école sur la base qu'il nous paraissait, au module de sciences
religieuses, un critère moins discutable, moins préjudiciable
à la Charte des droits et libertés de la personne qui cherche
à traiter tous les citoyens comme des citoyens égaux devant la
loi. Alors, il nous paraît difficile avec cette charte d'imaginer
quelqu'un qui serait compétent pour dispenser l'enseignement religieux
catholique et qui se verrait refuser
le droit d'être embauché parce qu'il se dirait non croyant,
par exemple. Et c'est là-dessus que porte mon intervention. Je pense que
nous devrions juger de l'habileté d'un maître à enseigner
sur la base de sa compétence et non pas sur la base de ses convictions
intimes qui sont, par ailleurs, des convictions extrêmement difficiles
à mesurer et à éprouver. Si je vous dis que je suis de foi
catholique, comment allez-vous faire pour contester mon affirmation? Et si je
vous dis que je ne l'ai pas, peut-être que je l'ai plus que vous qui
m'écoutez et qui me posez la question. Je veux dire que la foi, c'est
difficilement mesurable, d'une part, et dans la société dans
laquelle nous avons accédé -je ne la juge pas; elle n'est
peut-être pas meilleure qu'une autre - c'est un fait qu'il est difficile
d'attribuer davantage de mérite pour l'enseignement à quelqu'un
qui se dirait de foi catholique et de refuser Je même avantage à
quelqu'un qui aurait la compétence, mais qui n'irait pas jusqu'à
dire: Oui, j'ai la foi catholique. Autrement dit, pour moi, c'est une question
de principe. Dans le contexte d'une société démocratique,
il me semblerait préférable qu'on songe à d'autres
formulations. J'ai entendu M. Ryan, tout à l'heure, me répondre
que c'est difficile; j'enregistre cela, mais j'émets la position que
notre module a précisée, la critique, la position et la
suggestion, dans une perspective de suggestion, bien sûr, et je pense
que, strictement, cette position repose sur ce que nous comprenons être
notre société actuelle.
Mme Blackburn: Vous qui accueillez les étudiants dans
votre module tous les ans, sachant les difficultés que cela pose de se
trouver un poste permanent, même occasionnel, dans les écoles du
Québec, si une telle exigence est faite, quelle sera la tendance que
vous pourriez à peu près deviner? Est-ce que la tendance sera de
tous se déclarer de foi catholique au maximum pour aller chercher les
crédits? Est-ce qu'on pourra accorder un certain crédit, pas par
malhonnêteté, parce qu'il faut gagner sa vie à un moment
donné, à cette déclaration à être de foi
catholique, d'autant plus que cela n'est pas défini?
M. Chagnon (Roland): J'aimerais que vous précisiez le sens
de votre question.
Mme Blackburn: Oui. Vous savez, les étudiants qui se
destinent à l'enseignement voudront se donner le plus de chances
possible. Se donner le plus de chances possible, ce sera, par exemple, pour le
primaire en particulier, d'aller chercher les crédits nécessaires
à l'enseignement religieux. Ils devront donc se déclarer de foi
catholique.
M. Chagnon (Roland): Oui, vous avez raison d'évoquer cela.
Les gens qui se formeront dans les universités en fonction de
l'enseignement moral et religieux catholique et qui, s'ils se sont bien
formés, auront pris connaissance des règlements du comité
catholique, je crois que, s'ils sont intelligents, comme on pense qu'ils le
sont, ils s'y conformeront, si ces règlements sont adoptés, sauf
que le problème reste là. Ce n'est pas parce qu'ils s'y
conformeront qu'il n'y a pas de problème. Je dis simplement qu'il y a un
problème. J'espère que vous me comprenez. Il y a un
problème. Alors, allons-nous exiger une conformité sans la
mesurer, sans l'estimer? Je suggère, au nom de mon module, qu'on ne
s'enferre pas dans cette problématique de: Avez-vous la foi ou ne
l'avez-vous pas?, mais qu'on demande plutôt un critère plus
objectif qui est celui du respect qui est mesurable. Je peux le voir. Si un
enseignant dit dans une classe: La religion, mes jeunes, c'est l'opium du
peuple, je pense qu'il ne respecte pas le caractère confessionnel de
l'école. Cela se mesure. Mais la foi, c'est plus délicat. C'est
cela que nous voulons dire.
Sur la question de la compétence en termes de cours suivis, c'est
une autre question. Là-dessus, j'ai dit que le module se
réjouissait de l'exigence nouvelle que le comité catholique veut
recommander, soit dix cours sur les contenus essentiels de la foi
chrétienne. Cela nous paraît un acquis important et on s'en
réjouit.
Mme Blackburn:s Une autre question. Tout à l'heure, vous
avez abordé la difficulté que pouvait poser - j'ai cru comprendre
-l'interprétation de ce qu'on ferait par rapport au contenu de ces 10 ou
20 cours, selon le nombre de crédits. La connaissance que vous en avez
actuellement et l'interprétation que vous en faites, quelles
seraient-elles?
M. Chagnon (Roland): Le contenu essentiel de la foi
chrétienne, cela voudrait dire, bien sûr, des cours sur le Dieu
chrétien, sur Jésus-Christ, sur l'Église, sur la vie
sacramentaire, sur la vie morale, sur l'Exégèse, sur la Bible,
ancien et nouveau testaments. Je pense qu'on est rendu à dix et
peut-être un peu plus. C'est essentiellement cela, je pense, que le
comité catholique recommande comme exigence fondamentale. Dans la
nouvelle programmation que le module propose à l'Université du
Québec à Montréal cette année, nous allons vers
cette exigence-là.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je m'excuse. Nos
règles de procédure nous demandent de suspendre nos travaux
à moins qu'il n'y ait consentement. On me dit que le parti
ministériel n'a plus d'intervention. Il
reste le parti de l'Opposition. Madame, est-ce que...
Mme Blackburn: Je dois malheureusement quitter. J'ai certaines
contraintes qui rendent difficile...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Est-ce que cela
termine votre intervention ou si vous voulez continuer cet
après-midi?
Mme Blackburn: Je vais continuer cet après-midi.
Le Président (M. Parent, Sauvé):
Monsieur, êtes-vous disponible pour être ici cet
après-midi?
M. Chagnon (Roland): À quelle heure?
Le Président (M. Parent, Sauvé): On essaierait de
faire cela vers 14 h 45.
M. Chagnon (Roland): J'aimerais mieux savoir si d'autres
personnes se proposent d'intervenir. Si vous pensez que...
Le Président (M. Parent, Sauvé): II n'y a pas
d'autres interventions sauf celle de Mme la députée.
M. Chagnon (Roland): J'avoue que c'est un peu tard pour moi.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Libre à
vous, monsieur, c'est vous qui êtes libre de votre participation. Nous
vous garantissons une heure, mais vous n'êtes pas obligé de la
prendre.
M. Chagnon (Roland): Quant à moi, je
préférerais vraiment disposer tout de suite, soit entendre la ou
les dernières questions de madame et disposer de mon temps par
après.
Le Président (M. Parent, 5auvé): Est-ce qu'il y a
consensus pour une dernière question? Allez-y, madame!
Mme Blackburn: Une dernière question, M. Chagnon. J'avais
cru comprendre - et c'est l'explication qu'on m'avait donnée - que
lorsqu'on parlait de ces crédits, 29, 30 ou 60, cela devait comporter
non seulement des cours touchant la foi et la morale catholiques, mais
également la pédagogie didactique, etc.
M. Chagnon (Roland): C'est juste. Dans les dix cours
exigés, le comité catholique parle de cours qui touchent
également au programme de formation en enseignement religieux catholique
à l'élémentaire ou au secondaire. Cela fait partie des dix
cours exigés.
Mme Blackburn: D'accord. Cela irait.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela va?
Mme Blackburn: Je vous remercie à nouveau de votre
présence ici parmi nous. Comme vous, je déplore le fait que la
consultation se soit faite à un moment qui n'est pas très
favorable, particulièrement dans les universités et dans les
milieux qui, finalement, sont les premiers concernés par la question
qu'on est en train de débattre. Par ailleurs, j'avais le goût de
vous demander si, comme responsable de la formation des maîtres, vous
avez été consulté par le comité catholique avant
que le règlement ne soit publié.
M. Chagnon (Roland): Non. Nous avons été saisis de
l'existence des règlements par la publication de ces règlements
dans la Gazette officielle du Québec le 13 mai.
Mme Blackburn: Vous n'étiez pas informés des
orientations qu'on proposait?
M. Chagnon (Roland): Non.
Mme Blackburn: Quelle est votre capacité de modifier votre
programme pour septembre 1988, dans l'hypothèse où ce serait
adopté, par rapport au personnel, à la mobilité, etc.?
M. Chagnon (Roland): C'est-à-dire que, dans les contacts
que nous avions faits l'an dernier auprès des conseillers
pédagogiques, j'avais eu des informations non officielles, bien
sûr, sur le projet de règlement qui est devant nous aujourd'hui.
Nous avons travaillé dans l'hypothèse de ces
règlements-là. Nous ne sommes pas pris à court dans ce
sens-là.
Mme Blackburn: Dans l'hypothèse où votre
proposition qui dit qu'il faudrait que cette formation déborde les
cadres de la stricte foi catholique pour examiner les différents
phénomènes de même que les autres religions, ce
n'était pas retenu que ce soit axe sur la foi catholique, le
christianisme. Estimez-vous toujours que ces personnes seraient aussi
compétentes pour enseigner la morale sans épithète? Je
reviens toujours...
M. Chagnon (Roland): Je pense que, dans le programme que nous
proposons cette année, il y aura un volet pour la formation morale qui
sera obligatoire pour les maîtres qui voudront se former à
l'intérieur de notre programme de baccalauréat et, à ce
moment-là, je crois qu'ils seront habilités pour enseigner aussi
la morale.
Mme Blackburn: Je pense au projet tel
que présenté où la formation est axée sur la
foi catholique, qu'il faut être de foi catholique. Dites-vous toujours
que ces personnes pourraient être habiles à respecter les valeurs
d'autres dénominations religieuses ou de ceux qui ne partagent plus les
convictions et les valeurs de l'Église catholique?
M. Chagnon (Roland): Je pense que le module de sciences
religieuses a une tradition de formation des maîtres qui remonte à
18 ans maintenant. Nous avons servi les écoles québécoises
de la région de Montréal, de la rive sud et de Laval depuis ce
nombre d'années et nous avons des éloges assez nombreux pour les
enseignants qui sont sortis de chez nous de la part de commissions scolaires.
On nous dit que les étudiants formés à l'UQAM donnent de
bons services dans les écoles où ils sont embauchés.
Alors, je ne vois pas que la situation change dans l'avenir, y compris si on
adopte les règlements qui sont devant nous aujourd'hui.
Mme Blackburn: Je vous remercie.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Chagnon, c'est
moi qui vous remercie. M. le ministre, avez-vous...
M. Ryan: Je remercie M. Chagnon. C'est malheureux que le temps
soit aussi bref. Je pense que M. Chagnon nous a posé des interrogations
qui vont continuer de faire l'objet d'un examen. Le projet du comité
catholique en pose également à son département. Nous
espérons qu'elles vont continuer à être l'objet d'un examen
attentif parce que j'ai l'impression que pendant quelques années il y a
eu des carences regrettables.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Chagnon.
La commission parlementaire de l'éducation suspend ses travaux
jusqu'à cet après-midi, 15 heures. J'inviterais les membres de la
commission à être ici à 15 heures cet
après-midi.
(Suspension de la séance à 13 h 6)
(Reprise à 15 h 10)
Le Président (M. Parent, Sauvé): La commission
permanente de l'éducation va reprendre ses travaux dans le cadre du
mandat qui lui a été confie d'entendre les principaux
intervenants dans le domaine de l'éducation qui se sentent
touchés ou qui veulent intervenir concernant les deux règlements
soumis au ministère de l'Éducation par les comités
catholique et protestant du Conseil supérieur de l'éducation.
Cette commission parlementaire, qui a commencé ses travaux mardi, va les
continuer jusqu'au mercredi 21 octobre aiors que nous entendrons les derniers
intervenants.
Je vous rappelle que cette commission parlementaire émane du
pouvoir législatif et non du pouvoir exécutif, qu'elle est
normalement apolitique et qu'elle est réunie pour entendre de
façon tout à fait neutre les doléances, les commentaires
et les témoignages des gens qui se sentent touchés par ces deux
projets de règlement.
Cet après-midi, nous entendrons, dans un premier temps les
représentants de la Commission des écoles catholiques de
Montréal, qu'il me fait plaisir d'accueillir en votre nom, surtout que
ce sont des gens que je connais très bien. M. le président, je
vous souhaite la plus cordiale des bienvenues. Je veux aussi souligner la
présence dans la salle de certains commissaires avec lesquels j'ai eu le
plaisir de travailler il y a déjà quelques années. C'est
donc vous dire que je me sens tout à fait à mon aise de les
accueillir, les ponts ayant été coupés par le temps. Mon
"fan club", comme disait Mme la députée de Chicoutimt.
M. le président, soyez le bienvenu. La commission a une heure
pour vous entendre et pour discuter avec vous et avec les gens qui vous
accompagnent. Nous vous suggérons d'utiliser un tiers du temps pour la
présentation de votre mémoire. En tout cas, vous jugerez, vous
êtes un peu libre de l'utilisation du temps de cette commission. Un
deuxième temps sera consacré à des discussions avec les
membres de la commission. À dix minutes de la fin, j'aviserai Mme la
porte-parole de l'Opposition qu'il lui reste cinq minutes pour les commentaires
finals et je ferai de même pour le porte-parole du côté
ministériel, à savoir le ministre de l'Éducation.
M. le président, veuillez nous présenter les gens qui vous
accompagnent et enchaîner immédiatement avec votre
présentation.
Commission des écoles catholiques de
Montréal
M. Pallascio (Michel): On vous remercie, M. le Président.
Je pense qu'on se sent un peu en famille en vous voyant en face de nous
présentement.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Ne présumez
pas!
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Pallascio: Il ne faut pas présumer?
Je vous présente, à ma droite, M. René Desjarlais,
directeur général adjoint de la commission, que vous connaissez
bien, et M, Hervé Leduc, conseiller en éducation
chrétienne à la CECM. Comme vous l'avez mentionné tout
à l'heure, quatre de mes collègues commissaires sont ici
présents
parce que c'est quand même un dossier très impartant pour
la CECM.
Je voudrais situer dès le départ la présentation
actuelle de la CECM. Consciente d'être une commission scolaire
confessionnelle de fait, reconnue explicitement et protégée comme
telle en vertu de la constitution du Canada, la CECM ne se considère pas
liée par obligation à l'application des règlements
émis par le comité catholique du Conseil supérieur de
l'éducation. Cependant, elle estime très important de faire
valoir ses opinions et de faire connaître ses propositions dans le cadre
de la consultation proposée en vertu de son intérêt
fréquemment démontré pour tout ce qui entoure la
problématique de la confessionnalité de l'école
québécoise. C'est dans cet esprit que nous venons un peu faire
entendre notre voix à cette table.
En ce qui concerne la section I du projet, la reconnaissance comme
catholiques de l'école publique, les articles 1 à 3, la CECM
admet que le comité catholique puisse reconnaître comme catholique
une école publique sur demande de la commission scolaire dont
relève cette école. Cependant, on s'étonne un peu que le
règlement en question ne mentionne en aucune façon des
critères sur lesquels cette reconnaissance devrait être faite.
À notre sens, il serait souhaitable que le texte du règlement ou
à tout le moins une annexe au texte du règlement stipule de
façon claire sur quoi devrait reposer une demande de reconnaissance du
statut confessionnel. Oans notre mémoire, nous proposons trois
critères maintes fois évoqués dans les différents
documents concernant le projet éducatif de l'école
catholique.
Ces trois critères, si vous me permettez, sont la
présentation explicite et respectueuse de la foi catholique, l'attention
prioritaire à la qualité des relations et la volonté
d'éducation globale de la personne.
La CECM admet aussi le principe de la consultation pour la
reconnaissance de l'école comme catholique. Cependant, elle voudrait
attirer l'attention de la commission sur les difficultés
inhérentes à une telle consultation, surtout en milieu urbain. En
effet, toute cette question repose sur l'homogénéité du
milieu scolaire concerné ainsi que sur la qualité des relations
humaines des personnes consultées. Par exemple, et on tient à le
spécifier, quel est le niveau de représentativité du
comité d'école d'une polyvalente de 1500 ou 2000
élèves d'un milieu urbain comme Montréal où la
majorité des élèves viennent des quatre coins de la ville
et non pas du quartier immédiat où est située
l'école? Que faire lorsqu'une école accueille une importante
quantité d'immigrants de cultures et de traditions religieuses diverses
mais qui ne sont pas représentés au conseil d'école?
Pour ces raisons, la consultation de l'ensemble des parents prend une
importance capitale à l'intérieur de ce processus. La CECM
déplore que cette consultation générale
énoncée à l'alinéa 2° de l'article 2 ne soit
pas mieux définie et que la démarche ne soit pas
précisée. Nous voudrions trouver, à l'intérieur de
ce règlement, des réponses aux questions que cet article fait
surgir. La consultation ne rejoindrait-elle que les parents des
élèves actuellement inscrits à l'école?
Admettra-t-on les parents qui manifestent leur intention d'inscrire leurs
enfants dans les années suivantes? Comment se fera cette consultation?
Par référendum, par assemblée de parents ou par un autre
mécanisme? Et sur quel principe établira-t-on la majorité?
Comment évaluera-t-on les résultats? Est-ce que, par exemple, 51
% des opinions exprimées constitueront une majorité suffisante
pour prendre une décision? Ne pourrait-on pas aussi prévoir des
moyens pour que les parents allophones soient bien informés de la
question et qu'ils puissent s'exprimer en toute connaissance de cause? Nous
sommes d'avis que ce règlement devrait être beaucoup plus
explicite en ces matières, de sorte que le processus de consultation ne
soit pas livré à l'arbitraire qui engendre toujours des
malentendus et des injustices.
La CECM admet aussi que le comité catholique exerce le pouvoir
d'approuver et de rendre officielle la reconnaissance d'une école
publique comme catholique. Cependant, elle s'étonne de ne retrouver
nulle part dans le texte du règlement l'existence et la
définition d'un pouvoir équivalent de retrait de la
reconnaissance comme catholique. À cet effet, on constate un net
changement par rapport au texte précédent de ta version de 1974.
La CECM souhaite aussi vivement que l'on permette au comité catholique
de jouer pleinement son rôle et d'affirmer son pouvoir de retirer
à une école sa reconnaissance comme catholique.
La deuxième partie concerne plus particulièrement le
projet éducatif, soit les articles 4 à 7. La CECM se
félicite de la préoccupation, exprimée dans le
règlement, que les écoles reconnues comme catholiques mettent de
l'avant un projet éducatif qui intègre les croyances et les
valeurs de la religion catholique. Elle se demande toutefois ce que le
comité entend par "s'afficher comme une école catholique". Elle
souhaite donc que le comité clarifie aussi cette expression qui donne
prise à toutes sortes d'interprétations. Cette clarification
pourrait être donnée dans les notes explicatives. La CECM
suggère même la réalisation et la diffusion d'un guide
à cet effet qui fournirait des modèles à l'usage des
écoles qui ont le souci de mettre sur pied de tels projets
éducatifs.
La CECM, dans le milieu pluraliste et multiculturel qui est le sien est
très sensible
aux difficultés que peut rencontrer une école qui
décide d'exprimer ouvertement sa foi et son attachement aux valeurs
chrétiennes, surtout si cette école est coupée des autres
instances religieuses et, notamment, des communautés chrétiennes
qui gravitent autour d'elle. C'est pourquoi elle fait sienne cette remarque que
le comité catholique exprimait dans un récent document. Si vous
me le permettez, j'aimerais le rappeler parce qu'il est très important:
"Quoi qu'il en soit des raisons, il devient urgent que les adultes qui croient
aux valeurs chrétiennes demeurent de plus en plus aptes à les
véhiculer dans leurs comportements devant leurs pairs ou leurs
élèves et soient capables d'en rendre compte par la parole. Et
pourquoi la communauté catholique ne leur offrirait-elle pas des
équipes de soutien où ils pourraient trouver ressourcement et
fraternité? Ce témoignage est d'autant plus important que
l'enseignement religieux tombe souvent en terrain vierge, lorsqu'il s'adresse
à des jeunes qui ne savent pratiquement rien de leur foi en arrivant
à l'école... Un tel témoignage est d'autant plus important
aussi parce qu'il n'existe pas beaucoup d'autres manières de promouvoir
les valeurs chrétiennes sans risquer de tomber dans le
prosélytisme l'embrigadement et l'endoctrinement. Le témoignage
authentique et vrai, rendu possible par des structures qui le soutiennent, se
pose et se propose comme un appel à l'adhésion libre. Il agit
plutôt par contagion et suscite l'enthousiasme."
Il va de soi aussi que les écoles reconnues comme catholiques
utilisent le matériel pédagogique approuvé par le
comité catholique. Ceci implique, bien entendu, de la part des
commissions scolaires, que le temps prévu pour l'implantation des
nouveaux programmes en enseignement moral et religieux catholique soit
suffisant et que les ressources humaines soient adéquates.
Le présent règlement précise aussi davantage les
responsabilités du directeur de l'école publique reconnue comme
catholique. Ces responsabilités sont lourdes, mais elles en font le
moteur de tout le projet éducatif chrétien de son école.
La CECM comprend que, pour être en mesure de répondre à ce
que le règlement lui demande, elle devra nommer à la tête
de ses écoles des personnes qui s'affirment croyantes et qui ont
à coeur de rendre vivant dans leur école le projet
éducatif chrétien. Cette remarque étant faite, il y a
trois propositions qui nous semblent devoir trouver leur place dans le
règlement.
Premièrement, que l'on affirme dans le texte du règlement
que le directeur de l'école reconnue comme catholique soit
lui-même de foi catholique; deuxièmement, que le conseiller
pédagogique à l'enseignement moral et religieux est
impliqué dans l'orientation, l'animation, la coordination et
l'évaluation des activités d'enseignement moral et religieux
paraisse aussi dans les notes explicatives du règlement et,
troisièmement, que la fin de l'article 6 soit corrigée comme
suit, par hypothèse: À cette fin, il collabore avec le conseiller
en éducation chrétienne et le conseiller pédagogique en
enseignement moral et religieux catholique de la commission scolaire.
La CECM s'interroge sur le sens de l'article 7 touchant
l'évaluation du vécu confessionnel avec le comité
d'école à tous les cinq ans. D'une part, il est
irréaliste, à notre avis, de croire que le comité
d'école puisse bien collaborer à une telle évaluation,
parce que sa composition change, parfois de façon substantielle,
à tous les ans et surtout dans le cas de Montréal, où nous
avons plus de 30 % de déménagements annuellement et un changement
de clientèle plus élevé que la normale. Il en
résulterait une évaluation forcément très partielle
qui, à la rigueur, pourrait couvrir l'année scolaire
précédente. D'autre part, la CECM ne peut s'empêcher de se
poser des questions. Pourquoi une telle évaluation à tous les
cinq ans? Dans quel but? Quel est le rôle du comité catholique
là-dedans, puisque, comme on l'a fait remarquer
précédemment, il ne semble pas se reconnaître le pouvoir de
retirer la reconnaissance confessionnelle? Autant d'interrogations qui
empêchent la CECM de souscrire à cette démarche.
Dans la question de l'enseignement moral et religieux, aux articles 8
à 18, la CECM se réjouit aussi de ce que le comité
catholique réaffirme le principe de l'option offerte aux
élèves des niveaux primaire et secondaire entre l'enseignement
moral et religieux catholique et l'enseignement moral. Mais elle ne croit pas
que l'expression "sans référence à une confession
particulière" accolée au cours d'enseignement moral soit
heureuse. Elle est plutôt propre à semer la confusion, à
notre avis.
Il serait pertinent aussi, à ce moment-ci de notre étude,
de souligner les difficultés inhérentes à la gestion de
l'option en enseignement moral et religieux catholique-enseignement moral. Pour
simplifier, ces difficultés, à notre avis, sont de deux ordres.
Premièrement, la difficulté de respecter le choix de chaque
élève à l'intérieur du profil de choix de cours au
secondaire et deuxièmement, la difficulté de faire en sorte que
l'élève et ses parents fassent un choix vraiment
éclairé. On remarque, parfois, un illogisme flagrant dans la
demarche de certains élèves, démarche qui les amène
à changer d'option tous les ans, de sorte qu'ils se retrouvent à
la fin de leur cours secondaire avec deux démarches
incomplètes.
La CECM n'a pas de solution immédiate à ce problème
et n'entend pas non plus suggérer de recettes miracles au
comité catholique. Cependant, l'occasion qui lut est
donnée d'étudier le présent règlement
l'amène à se proposer de favoriser et d'encourager chez ses
élèves un encouragement dans la continuité autant au
niveau primaire que secondaire, même si le choix doit se faire
annuellement.
L'article 10, qui traite du cas où 15 élèves ou
moins sont inscrits au cours d'enseignement moral et religieux catholique ou en
enseignement moral, nous apparaît aussi très confus. Il n'y a pas
d'explication à savoir s'il s'agit d'élèves inscrits dans
une classe, dans une école ou dans une commission scolaire. Tel qu'il
est présenté, cet article semble être une voie ouverte
à peu près à tous les arbitraires. Il nous semble de plus
contraire aux buts visés par le présent règlement. On
aimerait, à cet effet, qu'il y ait des clarifications sur la
portée de cet article.
En ce qui concerne le temps consacré à l'enseignement
moral et religieux catholique et à l'enseignement moral, la CECM
l'estime suffisant, surtout si les écoles ont vraiment à coeur de
veiller à la stricte application du règlement. Elle fait, en
plus, au comité la proposition suivante: étant donné qu'on
a réduit le temps de l'enseignement moral et religieux catholique au
niveau primaire, il serait souhaitable qu'on assure du temps aux
activités d'animation pastorale en sus des 60 heures de cet
enseignement. Une mention à cet effet devrait apparaître au moins
dans les notes explicatives.
Nous soulignons plus haut la nécessité que l'école
accorde à l'enseignement moral et religieux catholique toute
l'importance et tout le temps qui doivent lui être consacrés. Mais
quel recours auraient les personnes qui seraient lésées dans ces
matières? La CECM souhaite que le comité catholique se penche sur
cette question, car à quoi bon énoncer des droits s'il n'y a
aucun moyen efficace prévu pour s'assurer que ces droits sont
effectivement exercés? La même remarque vaut pour la question de
l'évaluation.
La CECM admet d'emblée aussi que les enseignants chargés
de l'enseignement moral et religieux catholique soient de foi catholique, et ne
s'y opposent pas pour des motifs de liberté de conscience. En ce qui
concerne la première exigence, la CECM a d'ailleurs déjà
intégré dans son processus de sélection de personnel des
normes dans ce sens. Elle voudrait cependant mentionner aussi les
difficultés qu'elle rencontre habituellement dans la gestion de ce
dossier. Entre autres, au primaire, certains enseignants ont peur de demander
l'exemption de dispenser l'enseignement moral et religieux catholique dans leur
classe. Ils ont peur d'être mal vus de la direction, d'être
pénalisés ou même de se voir obligés de changer
d'école. En conséquence, ils se taisent mais ils ne font pas ou
ils font d'une façon insuffisante l'enseignement de la religion. Au
secondaire, il arrive aussi que la porte d'entrée pour un poste soit
l'enseignement moral et religieux catholique, car c'est souvent pour cette
matière qu'il y a une pénurie d'enseignants qualifiés.
À ce problème s'ajoutent les compléments de tâche
et, dans les deux cas, c'est la qualité de l'enseignement qui est
touchée.
On a eu l'occasion maintes fois de réfléchir sur ces
situations difficiles. Nous le faisons encore une fois à l'occasion de
l'étude du présent règlement et nous avons trois
propositions sur la table. Premièrement, qu'il soit mentionné,
dans les notes explicatives jointes au présent règlement, que,
par souci de la vérité et du respect des personnes, il serait
souhaitable que la commission scolaire soit très attentive aux personnes
qui s'opposent à l'enseignement moral et religieux catholique pour des
motifs de liberté de conscience et qu'elle leur facilite le droit
à l'exemption. Deuxièmement, que des ententes soient
établies entre les instances du ministère et les diverses
associations d'enseignants, afin que la prochaine convention collective des
enseignants soit compatible avec les exigences du présent
règlement. Troisièmement, que l'on ajoute â la fin de
l'article 18 les mots suivants: Lorsqu'un enseignant persiste à
dispenser un enseignement qui n'est pas conforme à ces exigences, le
directeur en exempte ce dernier.
En ce qui concerne la formation des futurs enseignants, nous croyons
que, pour le primaire, un minimum de six crédits universitaires est
suffisant, au lieu des neuf proposés dans le règlement.
Au sujet de l'animation pastorale catholique, articles 19 à 27,
la CECM se réjouit que le comité catholique précise le
rôle de l'animation pastorale d'une manière plus
élaborée qu'il ne l'avait fait dans le précédent
règlement. Cependant, la CECM s'interroge sur la signification de
l'expression "à l'intérieur du temps consacré aux services
éducatifs", que l'on retrouve à la fin de l'article 19. Dans
l'état actuel des choses, ce temps n'existe pas. Les activités
prévues en animation pastorale se font sur le temps du cours
d'enseignement moral et religieux catholique ou en dehors de l'horaire
académique de l'élève. Si le comité catholique
prévoit rendre possibles des temps spécifiques pour les
interventions en animation pastorale, nous apprécierions grandement une
affirmation claire dans ce sens.
L'article 20 vient préciser la nature et la diversité des
interventions en animation pastorale. Nous remarquons toutefois que cette liste
ne fait mention que de trois des cinq apprentissages proposés par "Voies
et impasses" et qu'elle ne tient pas compte de
l'ensemble des tâches de l'animateur de pastorale au secondaire.
Nous proposons au comité catholique de modifier l'article 20 de
façon que les cinq apprentissages de "Voies et impasses" soient
explicitement mentionnés, de même que l'ensemble des tâches
dévolues à l'animateur de pastorale, telles que décrites
à la page 23 du guide. On voudrait ajouter au septième
alinéa: 7° projets en lien avec les besoins du milieu.
La CECM est soucieuse du degré de qualification et de la
formation de ses animateurs de pastorale. C'est pourquoi on souscrit volontiers
aux exigences énoncées ici. On ne peut s'empêcher de
remarquer que les exigences sont très fortes en regard de la
rémunération versée et on voudrait attirer l'attention du
comité sur cette anomalie et on manifeste notre intention d'y apporter
des correctifs, en collaboration avec les instances gouvernementales et
ecclésiales concernées. A notre avis, il s'agit d'une stricte
justice sociale.
Par ailleurs, le nouveau règlement admet que la formation
universitaire de l'animateur de pastorale au secondaire pourrait être
exceptionnellement compensée par une expérience pertinente
"après évaluation de sa qualification". Â notre avis, il
serait bon et souhaitable de mentionner explicitement le rôle du
conseiller en éducation chrétienne en regard de cette
évaluation de la qualification.
La remise annuelle au directeur de l'école d'une planification et
d'un rapport d'évaluation des activités pastorales est aussi bien
admise par nous et elle constitue actuellement une pratique courante tant au
niveau primaire qu'au niveau secondaire, à l'heure actuelle.
Enfin, en ce qui concerne les ressources matérielles de
l'animation pastorale - locaux et bureaux - la CECM est d'avis qu'il faudrait
niveler les différences qui existent entre les deux niveaux. On peut
considérer, à l'heure actuelle, que les besoins des
élèves du primaire sont aussi importants que ceux de leurs
aînés du secondaire. On se demande aussi pourquoi les jeunes ne
pourraient pas le faire aussi concernant la relation d'aide pastorale.
Je voudrais aussi parler du respect du caractère catholique,
à l'article 27. Cet article a le mérite de préciser les
catégories de personnes qui doivent respecter le caractère
confessionnel de l'école, mais nous ne pouvons pas nous empêcher
de penser que, tel que formulé, il s'apparente davantage à un
voeu pieux qu'à autre chose. Il y a tant de façons d'être
respectueux, selon le contexte et aussi selon les personnes. Certaines
façons d'être respectueux touchent au mépris ou à
l'indifférence totale. Il nous semble qu'une formulation plus dynamique
s'impose ici et nous avons une suggestion: "Le personnel de l'école
publique reconnue comme catholique ainsi que toute autre personne qui y
travaille, les parents et les élèves doivent collaborer, chacun
selon ses propres moyens, au projet éducatif chrétien de
l'école."
Dans les dispositions particulières, aux articles 28 à 33,
il y a certains éléments qui ont déjà
été traités dans le mémoire. Par contre, la CECM
désire informer le comité que les délais touchant la
qualification des enseignants chargés de l'enseignement moral et
religieux catholique seront devancés dans la mesure du possible et que,
déjà, nos politiques d'embauche des enseignants vont dans le sens
du présent règlement. Il en est de même pour l'engagement
du personnel chargé de l'animation pastorale.
Enfin, la CECM désire exprimer son accord avec l'esprit de ce
règlement qui impose aux enseignants chargés de l'enseignement
religieux dans les écoles autres que catholiques les mêmes normes
qu'à ceux qui enseigneront dans les écoles reconnues comme
catholiques. Cette formation s'avère d'autant plus nécessaire que
ces enseignants ne trouveront peut-être pas dans leur milieu le soutien
et les ressources disponibles dans l'école catholique. Nous
apprécions à sa juste valeur les exigences d'être de foi
catholiques, et de ne pas s'y opposer pour des motifs de liberté de
conscience. À notre sens, ces exigences, déjà pleinement
justifiées dans le cadre de l'école reconnue comme catholique,
prennent encore plus de signification et de valeur de témoignage dans un
milieu scolaire qui n'intègre pas dans son projet éducatif les
valeurs de la foi catholique. (15 h 30)
De même, il nous apparaît impérieux que la
conformité aux exigences des programmes approuvés par le
comité catholique soit ainsi affirmée. Il y a là, à
notre avis, une garantie de la qualité de l'enseignement fourni. Les
élèves inscrits à ces écoles, qui ont choisi
l'enseignement religieux, ont pleinement droit aux services d'enseignants
convaincus et compétents et à des contenus de cours signifiants
et authentiques.
Je suis revenu sur le mémoire, M. le Président, parce
qu'il y avait des éléments très importants que nous
devions quand même souligner de façon assez explicite. Je vous
remercie de votre attention.
Le Président (M. Parent, Sauvé): C'est moi qui vous
remercie, M. Pallascio. Nous allons maintenant commencer la période
d'échange entre les membres de la commission, vous-même et les
gens qui vous accompagnent. Je reconnais, dans un premier temps, le ministre de
l'Éducation.
M. le ministre.
M. Ryan: M. le Président, je vous
remercie. Il me fait plaisir de saluer la présence parmi nous de
la Commission des écoles catholiques de Montréal, de son
président et de ceux et celles - peut-être que, parmi les
commissaires, il y a des dames aussi - qui l'accompagnent. Nous avons souvent
l'occasion de transiger avec vous, au cours d'une année, et c'est
toujours une occasion que nous accueillons avec plaisir. Il en va de même
de la rencontre d'aujourd'hui. Je vous remercie de l'examen que vous avez fait
du projet de règlement du comité catholique. Vous en avez fait un
examen exhaustif. Vous nous donnez une position claire et franche que nous
examinerons avec soin.
Pour les fins de la discussion de cet après-midi, j'aurais
quelques questions à vous adresser qui permettront peut-être
d'éclaircir des choses que vous avez dites à différents
passages. Il y en a une, au tout début, où vous avez
signalé que la Commission des écoles catholiques de
Montréal ne s'estime pas liée par les règlements du
comité catholique. Je pense que vous énonciez une position
juridique à ce moment-là. Est-ce que la position juridique que
vous avez énoncée est celle que vous appliquez en pratique ou si,
de facto, à toutes fins utiles, vous observez les règlements du
comité catholique?
M. Pallascio: Je dois dire qu'au point de vue juridique on est
obligé de se fier au dernier jugement en cause, dans le cas de
Notre-Dame-des-Neiges, pour la question juridique, mats on n'aime pas tellement
amener ce genre de sujet sur ce terrain. On peut prendre un exemple très
récent. Je pense que les règlements du comité catholique
ont été appliqués par la CECM et je prends la question
très particulière de l'option qui est peut-être
l'élément le plus récent. Je pense que la CECM,
après étude, a appliqué la question de l'option dans nos
écoles, et ce, sans aucun problème.
M. Ryan: II n'y a pas lieu d'interpréter ce passage de
votre déclaration comme signifiant que vous vous mettez en marge ou
au-dessus d'un règlement du comité catholique? Vous avez
énoncé une position juridique, mais de facto ce sont des choses
que vous considérez avec un intérêt actif.
M. Pallascio: Je pense que le sujet nous intéresse
grandement. Tout à l'heure, on s'en venait de Montréal et on se
disait que le sujet est loin d'être vidé sur la question
présentement sur la table, sauf qu'une question se pose au plan
juridique pour nous et c'est pour cela que je faisais référence
au jugement rendu sur cette question. Pour nous, juridiquement parlant, a
l'heure actuelle, il semble que nos écoles seraient légalement
confessionnelles; alors, il n'y aurait pas lieu d'appliquer un règlement
comme celui-là puisque, si elles sont déjà reconnues
légalement comme confessionnelles, le but du présent
règlement est une demande de reconnaissance qui semblerait ne pas
s'appliquer dans le cas de notre commission scolaire. Cela dit, au plan
juridique, on pense que le sujet nous touche quand même
particulièrement dans cet aspect pour toutes sortes de raisons
concernant aussi notre clientèle à l'intérieur de nos
écoles.
M. Ryan: À supposer qu'une école nouvelle soit
inaugurée sur le territoire de (a commission scolaire, comme on aura
l'occasion de le faire prochainement, si les parents voulaient demander que
l'école soit reconnue comme catholique, est-ce qu'on doit
présumer que la réponse de la Commission des écoles
catholiques de Montréal serait: Ce n'est pas nécessaire, vous
êtes déjà catholiques du fait que vous appartenez à
la CECM. Ou encore laisseriez-vous la procédure s'instituer jusqu'au
comité catholique?
M. Pallascio: Bien que je n'aie pas l'avis du contentieux ici,
selon le dernier avis de notre contentieux, effectivement, la commission
scolaire catholique ne pourrait gérer autre chose qu'une école
catholique. Donc, une nouvelle école rentrerait immédiatement
sous l'administration de la commission scolaire parce qu'il semble, toujours
sous réserve d'un avis contraire, que ce serait la commission scolaire
qui serait l'élément juridique constituant dans le cas
présent.
M. Ryan: II y a un article, dans le projet de règlement,
qui traite de l'évaluation périodique du vécu
confessionnel de l'école; c'est l'article 7, si mes souvenirs sont bons.
Vous faites des commentaires à propos de cet article. Vous vous demandez
si cet article est nécessaire. Vous vous demandez aussi si la
manière dont on ferait fonctionner cette exigence est la bonne.
J'aimerais que vous nous donniez des explications sur la position de la
Commission des écoles catholiques de Montréal au sujet de
l'article 7.
M. Pallascio: Tout dépend de ce qu'on entend par
évaluation à ce niveau et, dans le règlement comme tel, on
ne retrouve pas ce point de façon claire. J'aimerais laisser le
conseiller, M. Leduc, répondre à cette question
particulièrement.
M. Leduc (Hervé): En fait, c'est une question qui
découle des questions précédentes de M. le ministre. Nous
présumons que cette consultation aurait pour but de remettre en question
le statut confessionnel d'une école tous les cinq ans.
Or, comme M. le président de la CECM vient de le dire, le
problème ne semble pas se poser chez nous puisque toutes nos
écoles sont, de fait et de droit, confessionnelles. En outre, nous avons
souligné dans le mémoire que nous sommes dans une position un peu
incertaine face à l'utilisation que le comité catholique ferait
de cette évaluation du vécu confessionnel, étant
donné que nous ne retrouvons nulle part dans le texte que nous
étudions, dans le nouveau du règlement du comité
catholique, un pouvoir d'enlever ou de proroger cette reconnaissance comme
confessionnelle. C'est un ordre de chose et il ne nous semble pas que la CECM
se doive de le faire.
Dans un autre ordre d'idées, nous posons des questions sur les
modalités de cette consultation. Nous avons exprimé des
réserves par rapport à la représentativité
des comités d'école de nos écoles sur une base de cinq
ans. Également, avant de poser un jugement là-dessus, nous
aimerions avoir des éclaircissements sur les modalités qui
seraient envisagées pour faire cette consultation.
M. Ryan: Est-ce qu'il se fait des choses de cette nature à
la CECM, actuellement?
M. Pallascio: Dans le cadre du règlement comme tel, c'est
une procédure quand même très précise
proposée tous les cinq ans. Une évaluation du vécu
confessionnel, on se pose la question, dans le règlement, qu'est-ce que
cela veut dire exactement? Vous posez la question suivante: Qu'est-ce qui se
fait à la CECM à ce chapitre? Il y a certainement une
évaluation des activités qui se fait dans nos écoles de
façon régulière. Est-ce que cela correspond exactement
à ce que le règlement propose? C'est ce que nous ne pouvons pas
déterminer.
M. Ryan: Mais l'idée, en soi, ne vous répugne pas
nécessairement. Vous demandez qu'on la présente de manière
plus claire.
M. Pallascio: Le problème de l'évaluation, tel
qu'il est posé... On revient peut-être à la case de tout
à l'heure lorsqu'on disait: Comment va-t-on procéder pour
l'évaluer? Qui va faire l'évaluation? Il y a toute une
procédure là-dedans qui, à notre avis, paraît
très incertaine et très ambiguë. Par contre, nous serions
prêts à l'étudier. Mais, à l'heure actuelle, se
prononcer de façon définitive sur un tel processus qui, à
ma connaissance, n'a jamais été appliqué... On aimerait
aussi, voir un peu ce que cela donnerait en pratique de ce côté.
On n'est pas prêts à répondre à votre question de
façon définitive là-dessus. Par contre, nous sommes
prêts à étudier cette question parce qu'elle est
très importante, à notre avis.
M. Ryan: Une autre question. Vous dites, à la page 17,
concernant les exigences de qualification qu'il y aurait lieu de
requérir des enseignants chargés de l'enseignement moral et
religieux catholique, que vous ne vous apposez pas aux exigences
définies dans le projet de règlement. Vous ajoutez qu'en ce qui
concerne la première exigence la CECM a d'ailleurs déjà
intégré, à son processus de sélection du personnel,
des normes dans ce sens. Vous dites qu'il se présente des
difficultés dans la gestion de ce dossier. J'aimerais que vous me
donniez des précisions à la fois sur les politiques
adoptées par la CECM à cet égard et à la fois sur
les difficultés que vous éprouvez dans l'application.
M. Pallascio: Je pense qu'on mentionne des exemples.
Naturellement, dans notre processus de sélection tel qu'il se retrouve
dans le règlement il y a l'obligation, surtout au primaire, où
l'enseignant se doit de donner une formation religieuse à ses
élèves, d'être de foi catholique. Ceux qui ne sont pas de
foi catholique et qui doivent enseigner au primaire à ce niveau ont
quand même le droit d'exemption et la dispensation de l'enseignement.
Naturellement, sur le plan administratif, cela cause certains problèmes
et les gens doivent faire valoir leur point de vue pour demander
l'exemption.
On mentionne quelques aspects. Au niveau primaire, ce sera la demande du
professeur d'être dispensé de l'enseignement et, au secondaire, ce
sera pour les compléments de tâches puisque,
généralement, ce sont des spécialistes et la question ne
se pose pas de la même façon. D'ailleurs, dans notre processus de
sélection, on fait une distinction entre primaire et secondaire quant
aux exigences vis-à-vis des enseignants qui viennent travailler dans nos
écoles. L'exigence au primaire est peut-être un peu plus
rigoureuse qu'au secondaire. Par contre, les problèmes se retrouvent aux
deux niveaux.
Une voix: Oui, M. Desjarlais.
M. Desjarlais (René): Si vous permettez, M. le
Président, j'aborde ce point en disant que, en ce qui concerne le
personnel de suppléance, ce que la CECM a intégré à
toutes fins utiles dans son processus c'était, bien sûr, de
reconnaître chez ces enseignants suppléants qu'ils puissent
respecter et reconnaître les valeurs privilégiées par la
CECM. Nous ne sommes pas allés jusqu'à évaluer s'ils les
mettaient en pratique ou non. Cependant, on pose la question, au moment de
l'engagement: Est-ce que vous les reconnaissez et vous vous engagez à
les respecter? Voilà donc l'élément nouveau qui est dans
le processus d'engagement de nos suppléants.
Si vous permettez, M. le Président, j'aurais le goût
d'enchaîner aussi à une question posée
antérieurement par M. le ministre de l'Éducation. Est-ce que la
CECM a une petite histoire en ce qui concerne le vécu confessionnel?
Jusqu'à ce jour, les directions d'école, au moment du rapport
annuel à la fin de chacune des années scolaires, font une
reddition de comptes sur leurs activités principales. Mais, compte tenu
que de plus en plus un grand nombre ont déjà cerné des
valeurs à l'intérieur de leur projet éducatif, bien
sûr, en ce qui concerne le vécu confessionnel il y a là des
valeurs que les écoles privilégient et, à
l'intérieur du rapport annuel, elles nous informent également des
activités menées et de certains niveaux atteints. Voilà
donc une expérience ou, si vous vouiez, un élément qui se
fait présentement à Montréal.
M. Ryan: Merci. Juste à propos des politiques d'embauche,
j'aimerais que vous nous donniez de manière plus claire les changements
que vous avez introduits. Vous avez parlé d'une exigence de respect
envers les valeurs catholiques de l'école de la part de ceux que vous
embauchez comme suppléants. Est-ce que cela vaut également pour
l'embauche de professeurs réguliers pour les promotions?
M. Pallascio: C'est qu'on recommence seulement à
réengager à la CECM comme telle. Alors, le règlement a
été réaménagé dernièrement à
cause de ce nouveau phénomène. Par contre, je voudrais juste
souligner une chose. Déjà, d'autres commissions scolaires avaient
un tel règlement. Je pense entre autres à la commission scolaire
Baldwin-Cartier qui avait déjà des règlements dans ce
sens. Cela s'applique aux deux niveaux à ce moment pour l'engagement de
notre personnel.
M. Ryan: Juste une question. Est-ce que cela vous a valu des
représentations de la part de vos syndicats comme l'Alliance?
M. Pallascio: Bon, disons, des représentations formelles,
je ne pense pas qu'il y en ait eu, mais c'est sûr qu'à un certain
moment l'Alliance s'est prononcée sur cette question. Je pense que dans
son mémoire elle est revenue un peu sur toutes ces questions de
façon générale sans revenir nécessairement sur
cette politique d'embauché.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le
ministre. Maintenant, je vais reconnaître la porte-parole de l'Opposition
en matière d'éducation, la députée de Chicoutimi.
Mme la députée.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président.
M. le Président, messieurs, je voudrais vous souhaiter la
bienvenue au nom de ma formation politique. Vous allez me permettre de ne pas
reprendre l'essentiel de votre mémoire, de passer immédiatement
aux questions parce qu'elles sont nombreuses. Puisqu'on a les gens avec nous,
autant en profiter pour avoir le plus d'éclairage possible. (15 h
45)
Je commencerai immédiatement, et ce n'est pas
nécessairement dans l'ordre des pages. C'est beaucoup plus cueilli comme
cela un peu partout dans votre mémoire Vous parlez, en page 14 de votre
mémoire, des difficultés de respecter le choix de chaque
élève à l'intérieur du profil de choix de cours au
secondaire. Pourriez-vous m'expliquer un peu en quoi consistent ces
difficultés, comment vous les gérez et qu'est-ce que cela
représente en fonction du respect du choix de l'élève?
M. Pallascio: Je vais laisser M. Leduc répondre.
M. Leduc: Alors, M. le Président, effectivement, comme
dans toute autre commission scolaire, nous avons des écoles secondaires
qui offrent à l'élève un très grand nombre de choix
d'options possibles et différents programmes à l'intérieur
d'une même matière, en sciences, notamment. Lorsqu'il s'agit de
bâtir un horaire d'élève, même si on est aidé
par l'informatique, nous avons dû - les directeurs de nos écoles
et les responsables de cette dimension de l'école - trouver des
stratégies pour faire en sorte que le choix des élèves
soit respecté. Chaque directeur d'école est invité
à tenir compte de ce choix et, dans l'ensemble, cela se fait, mais,
pratiquement, l'expérience nous démontre que c'est presque
impassible de respecter 100 % des choix lorsqu'on a un très grand nombre
de variables et d'élèves. La meilleure solution qui a
été trouvée jusqu'à présent, c'est de
bâtir l'horaire à partir du choix de l'élève entre
l'enseignement religieux et l'enseignement moral. Encore là, il peut
arriver qu'à certaines occasions, à cause d'un choix de cours
particulier, en mathématique, en chimie, en physique ou en
français, il n'y ait pas possibilité de donner à
l'élève ce qu'il demande.
À ce moment-là et pour chacun des cas, d'une façon
personnalisée, la famille de l'élève et
l'élève lui-même sont appelés par l'école; on
essaie de s'entendre à l'amiable. Dans une très grande proportion
des cas, on parvient à trouver un accommodement. L'élève
va accepter de changer son option et on essaie de procéder comme cela.
On essaie de faire en sorte que ce soit vraiment l'exception et on essaie
d'avoir, à la fin, l'accord des familles et des élèves
concernés.
Cela représente quand même une difficulté et nous
avons trouvé bon de le mentionner.
Mme Blackburn: Quel est le pourcentage d'élèves qui
se trouvent contrariés dans leur choix?
M. Leduc: Je n'ai pas de chiffres précis. Comme je vous le
disais tantôt, tout dépend de la façon dont on fabrique
l'horaire, mais lorsqu'on réussit è bâtir l'horaire
à partir du choix de cours, on a peut-être une marge de
difficulté qui va autour de 5 %.
Mme Blackburn: C'est-à-dire que, lorsqu'on respecte ce
critère, on affecte le choix des étudiants dans d'autres cours,
que ce soit en mathématique, sciences, en éducation physique,
etc., quoique, en éducation physique, ils n'ont pas le choix.
M. Leduc: Non. C'est-à-dire que, lorsqu'on part de cette
diagonale, on réussit quand même à le faire. Lorsqu'on part
d'autres diagonales ou lorsqu'on le place en dernier, à ce
moment-là, les contraintes se sont tellement accumulées qu'il n'y
a plus moyen de le faire.
Mme Blackburn: L'élève qui voit son choix
contrarié, est-ce qu'il peut être exempté?
M. Leduc: À ma connaissance - peut-être que mes
confrères pourraient être plus explicites que moi là-dessus
- il n'y a pas d'exemption possible; l'élève doit suivre un des
deux cours optionnels, enseignement moral religieux catholique ou enseignement
moral.
Mme Blackburn: Bien. En page 9 de votre mémoire - cela m'a
frappée au moment de ta lecture et à nouveau cela a attiré
mon attention lorsque vous en avez fait la lecture tout à l'heure - vous
citez un document du comité catholique en disant ceci: Cela vaut la
peine que je le cite à nouveau parce qu'il est important. On n'a
probablement pas accordé tous les deux la même valeur au document.
Ce qui m'a frappée dans votre citation et dans cette réflexion du
comité catholique, c'était la dernière phrase: "Ce
témoignage - parlant du témoignage religieux - est d'autant plus
important que l'enseignement religieux tombe souvent en terrain vierge,
lorsqu'il s'adresse à des jeunes qui ne savent pratiquement rien de leur
foi en arrivant à l'école." D'abord, quand on a la foi, il me
semble qu'on devrait savoir qu'on l'a, juste au plan de la foi catholique. Mais
est-ce que - précisément à cause de cette remarque on
n'est pas en train, artificiellement, d'entretenir la foi chez les jeunes
Québécois alors qu'elle n'est pas portée par la famille et
très peu portée par la communauté? Je prétends que
les enseignements, que ce soit religieux ou de la langue ou culturel, qui ne
sont pas portés par la communauté et par la famille n'ont pas une
espérance de vie bien longue. Je pense à la langue
française, en particulier, et, ici, on parle de la foi catholique.
Ce paragraphe me frappe; je le relis et j'ai la même impression.
Vous nous dites que les enfants arrivent à l'école et que
l'enseignement religieux tombe en terrain vierge.. On me dit que la plupart des
enfants qui arrivent chez vous ne savent même pas faire le signe de la
croix, n'ont jamais entendu parler du Christ. Noël, c'est une fête
de cadeaux, mais cela ne va jamais plus loin que ça.
Aujourd'hui, au moment où on se parle, qu'est-ce que cela peut
vouloir dire, une école confessionnelle catholique qui pratique et qui
entretient la nécessité d'enseigner la foi dans de telles
conditions?
M. Pallascio: Je pense qu'il y a d'abord, là-dessus, un
choix de société et je pense qu'il y a quand même un choix
que les parents font d'envoyer leurs enfants dans une école catholique
jusqu'à preuve du contraire, bien que le parallèle, je ne l'aime
pas. On parle de problèmes de société, vous mentionnez la
question de la langue, il y a aussi des problèmes de langue. C'est
sûr que, dans tous les domaines, quand on n'a pas l'appui des parents ou
l'appui de la société -on peut parler des médias, on peut
parler des valeurs véhiculées dans la société -
cela cause des problèmes et on a des retards - je n'entrerai pas dans
les détails - dans toutes les matières. Dans ce cas-là
aussi, on peut retrouver le même phénomène dans un certain
sens. Mais il reste quand même qu'on s'attend aussi que l'école
puisse transmettre, à l'intérieur de l'éducation,
certaines valeurs conformes à ce que la population désire.
Mme Blackburn: Là, vous dites que les parents... C'est
parce que les parents choisissent d'envoyer leur enfant à l'école
catholique. Je veux bien voir qu'à Montréal ils ont la
possibilité de l'envoyer à la section française de
l'école protestante, mais ce n'est pas toujours très bien
réparti sur le territoire. Ils n'ont pas vraiment le choix d'envoyer les
enfants dans une école catholique à la CECM. Elles sont toutes
catholiques.
M. Pallascio: Quand on parle d'écoles catholiques, comme
telles, naturellement, ceux qui sont inscrits comme catholiques -en partant, on
présume qu'ils veulent une école catholique - peuvent s'inscrire
à la CECM. S'ils ne sont pas de religion catholique ou renoncent
à la religion catholique, ils peuvent s'inscrire, à ma
connaissance, au PSBGM.
Ceux qui veulent choisir et qui ne sont pas de religion protestante ou
catholique peuvent s'inscrire à l'un ou à l'autre. Je pense
qu'à la CECM nous n'en refusons aucun de ce côté-là.
Il reste que c'est un choix libre, à notre avis, de ce
côté-là.
Mme Blackburn: À propos du caractère catholique de
l'école, vous endossez entièrement, dans son esprit, le
règlement du comité catholique. J'aimerais attirer votre
attention sur l'article 4: "L'école publique reconnue comme catholique
intègre les croyances - non pas seulement les valeurs -et les valeurs de
la religion catholique dans son projet éducatif et elle s'affiche comme
telle."
À l'article 27: "Le personnel de l'école publique reconnue
comme catholique ainsi que toute autre personne qui y travaille, les parents et
les élèves, doivent être respectueux du caractère
catholique de l'école." J'ai vu dans votre mémoire que vous
vouliez renforcer l'article 27.
On sait, par ailleurs, que le comité catholique a la
responsabilité d'adopter, au plan du respect des valeurs catholiques et
morales, les programmes, matériel didactique et manuels. Donc, c'est une
école, je dirais, catholique mur à mur. Jusqu'à quel point
peut-on être respectueux des valeurs de ceux qui ne partagent pas les
valeurs et les croyances de l'Église catholique dans un tel climat
lorsque le projet éducatif, en sa totalité, est inspiré
des valeurs et des croyances catholiques?
M. Pallascio: Je pense qu'il faut faire une grande distinction
là-dessus. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, on ne
refuse personne à l'intérieur de nos écoles pour quelque
raison que ce soit, ni langue, ni religion. Seulement, à
l'intérieur de nos écoles, il y a des cours de religion qui se
donnent. Pour ceux qui n'en veulent pas, il y a le choix du cours de morale et
aussi, en ce qui concerne les activités, il n'y a personne à qui
on impose des activités et, tout particulièrement, les
activités de pastorale.
Alors, il faut bien se comprendre. Ces activités, on ne les
empêche pas, mais on n'oblige pas - surtout ceux à qui cela ne
correspond pas, selon leurs valeurs - à y participer. Alors, je pense
que, dans ce contexte, ceux qui sont à l'intérieur de nos
écoles se doivent de respecter l'orientation première et, nous,
de rechange, on doit respecter leur liberté de conscience sans leur
imposer un quelconque geste ou activité contraire à leurs
croyances.
Mme Blackburn: Comment respecter la liberté de conscience
des individus en même temps qu'on leur donne des contenus
pédagogiques qui respectent des croyances et des valeurs qu'ils ne
partagent pas? C'est essentiellement la question. Je ne parlais pas
d'accueillir ou non. Je pense, d'ailleurs, que vous ne pouvez refuser personne.
On est dans un réseau public, on n'est pas dans le réseau
privé, que je sache. Étant donné qu'on est dans le
réseau public, vous êtes tenus d'accepter tout le monde qui s'y
présente, y compris ceux que l'école privée vous
déverse. De ce temps-ci, il va vous en arriver quelques-uns, mais ce que
je veux dire ici, c'est: Comment peut-on avoir un projet éducatif
catholique - on a le droit de s'y attendre dans une école catholique -
qui transpire, transparaît et s'inspire, dans son ensemble, des valeurs
catholiques et des croyances catholiques et, en même temps, être
respectueux de ceux qui ne partagent pas ces valeurs dans n'importe quel autre
cours?
M. Pallascio: Dans le moment présent, il faut
s'entendre...
Mme Blackburn: Que ce soit l'éducation à la
sexualité, par exemple.
M. Pallascio: Je vais peut-être me répéter,
mais je pense que nous avons ici une commission scolaire catholique avec des
écoles catholiques à la base. Je ne pense pas qu'en tant que
catholique je sois étroit d'esprit au point de ne pas respecter les
autres dans mon école là-dessus. Si on veut vraiment avoir un
projet éducatif catholique, on se doit d'abord d'avoir des programmes
qui reflètent cette question et d'avoir aussi du personnel autant que
possible qui respecte ces orientations. Ceci étant dit, s'il y en a
d'autres dans l'école, je pense qu'on se doit de les respecter sans leur
imposer quoi que ce soit. Je le répète.
Si on va dans le sens où vous posez votre question, si on accepte
cette prémisse, c'est-à-dire que tout doit être fait sans
aucun caractère catholique à l'intérieur, on va se
retrouver avec une école neutre, à la limite. Je ne sais pas si
M. Leduc...
Mme Blackburn: Donc, vous admettez -c'est ce que je vaudrais
qu'on éclaire un peu qu'on ne peut pas avoir un projet catholique tel
qu'on le conçoit - je le répète, je trouve que c'est un
projet intéressant, du moment où on est dans une école
catholique - et, en même temps, éviter de transmettre des valeurs
qui ne viennent pas en contradiction avec ceux qui ne partagent pas les valeurs
et les croyances catholiques.
M. Leduc: En fait, je vais dans le même sens. Je parle de
la nouvelle formulation de l'article 27 que nous proposons à la page 25
de notre mémoire:
"Le personnel de l'école publique reconnue comme catholique -
donc, on suppose qu'il y a une majorité de gens qui y adhère,
quand même - ainsi que toute autre personne qui y travaille, les parents
et les élèves doivent collaborer - j'attire votre attention sur
les mots qui suivent - chacun selon ses propres moyens, au projet
éducatif chrétien de l'école." Le "chacun selon ses
propres moyens" est très important. Cela veut dire, dans le concret,
qu'on demandera à ceux qui peuvent poser des gestes activement de le
faire et ceux qui ne peuvent aller plus loin qu'une attitude de respect de
l'avoir.
Je pense que pour répondre à votre question on pourrait
dire ceci. Il y a une différence entre proposer un projet confessionnel
dans une école et obliger les gens à poser des gestes qui vont
à l'encontre de leurs convictions. Le respect des minorités non
confessionnelles ou non chrétiennes ou non religieuses pourrait
commencer, il me semble, au moment où on n'oblige personne à
poser des gestes contraires. Mais il y a toujours, dans un milieu où on
a une majorité de catholiques, une majorité de croyants, un
projet qu'on peut présenter en demandant à chacun d'y collaborer
selon ses moyens et son cheminement.
Mme Blackburn: Prenons en guise d'exemple - vous me parlez des
personnes qui travaillent à l'intérieur et je vous parlais des
étudiants qui font un choix autre, enseignement moral - une polyvalente.
On voit des jeunes très curieux d'un certain nombre de choses et qui
voudraient, par exemple, à l'occasion d'une journée
pédagogique, tenir un kiosque d'information sur les différentes
méthodes de contraception, y compris les adresses de certaines cliniques
d'avortement. On connaît les enseignements du pape à ce sujet.
Est-ce que, selon vous, c'est acceptable dans une école qui a un projet
éducatif chrétien catholique? C'est plus fort que
chrétien, parce que le catholicisme est assez exclusif. (16 heures)
Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, M. Leduc ou
M. le président? M. Leduc.
M. Leduc: M. Pallascio me laisse cette responsabilité.
J'espère que je vais être à la hauteur. Vous donnez un
exemple extrêmement précis sur un point de vue extrêmement
délicat aussi. Je vous donnerai un point de vue tout aussi précis
disant que l'avortement n'étant pas un concept accepté par
l'Église, il y aurait sûrement une difficulté à
proposer ce projet tel qu'il est. Ce projet ne pourrait-il pas être
renégocié, retravaillé, assorti d'une explication,
d'explications? Est-ce qu'on pourrait présenter des points de vue? Cela,
c'est une autre question. Tel que vous le présentez, je ne crois pas
qu'il pourrait faire partie d'un projet éducatif de l'école
catholique.
Mme Blackburn: Donc, de la même façon, dans vos
écoles, un membre du personnel professionnel ou encore
l'infirmière qui proposerait l'avortement à une jeune fille de 13
ou 14 ans, cela va aussi à l'encontre des valeurs de l'Eglise
catholique.
M. Pallascio: C'est certain que cela va à l'encontre de
l'enseignement qui est donné actuellement sur ce sujet.
Mme Blackburn: Est-ce que cette personne serait taxée de
ne pas respecter le caractère catholique de l'école?
M. Pallascio; Actuellement, au niveau de ce qu'un parent doit
attendre de l'enseignement qu'on donne à son enfant - je parle de la
majorité, puisqu'on est dans une école catholique a priori - cela
pourrait effectivement créer des problèmes. Cela dit, vous parlez
d'un cas bien précis et la CECM est en train d'étudier cette
question précise pour arriver à des solutions qui respectent tout
le problème qu'on rencontre dans des situations identiques.
Présentement, je peux donner juste une piste. Nous sommes en train
d'examiner la possibilité d'avoir des comités interdisciplinaires
dans notre commission scolaire pour répondre à ces points et
essayer de répondre de façon objective au problème que
vous soulevez. Cela dit, on peut signaler plusieurs cas spécifiques
comme ceux que vous mentionnez au sujet de l'école catholique qui
peuvent mettre en évidence certaines contradictions en apparence mais
qui, à mon avis, n'en sont pas dans le sens que, lorsqu'un enseignement
se donne dans une école catholique, cela doit être en
conformité avec l'enseignement de l'Église. Je pense que c'est
cela qui doit être donné et que ceux qui adhèrent à
cette école se doivent de respecter cet enseignement pour autant qu'on
ne leur impose pas quelque geste ou action contraire à leurs
croyances.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le
président. Mme la députée, je vous invite à
conclure au nom de votre formation politique.
Mme Blackburn: Je termine là-dessus, M. le
Président. Ce que je tire comme conclusion de votre exposé au
sujet du projet catholique, c'est que ceux qui y travaillent et ceux qui
inscrivent leurs enfants dans cette école sont tenus de respecter le
caractère catholique. Le projet étant catholique dans son
ensemble, tout ce qu'on s'engage à faire, c'est de ne pas obliger les
gens qui choisissent la morale à participer à des
activités qui heurteraient leurs valeurs, par exemple à une
cérémonie religieuse, ainsi
de suite. Mais votre perception du respect des autres ne va pas plus
loin que cela. Je voudrais juste vous dire qu'à Montréal,
à ma connaissance, à part d'aller dans la section
française de la commission des écoles protestantes, il n'y a pas
de choix. Cela fait trois jours qu'on tient des auditions ici et je sais que le
ministre n'a pas vraiment l'intention de créer un réseau
d'écoles neutres. D'ailleurs, c'était un peu... Je rappelle
simplement que la présidente du comité catholique, au moment
où elle nous présentait le projet, nous disait qu'effectivement
elle était consciente que le renforcement du caractère catholique
de l'école pourrait avoir comme effet de hâter l'avènement
d'écoles autres. Mais on sait de plus en plus que le ministre n'est pas
prêt à accorder ces écoles autres. Vous êtes, pour ce
qui est de la commission scolaire, sur le territoire de la province de
Québec qui présente à cet égard le plus de
problèmes. Je me dis qu'une attitude d'intolérance, où on
tolère tout juste - je ne dirais pas d'intolérance dans le sens
où vous acceptez tout le monde...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous invite
à conclure, madame.
Mme Blackburn: ...mais où on tolère tout juste la
présence de ceux qui font des choix autres va poser le problème
que vous connaissez, c'est-à-dire un glissement des clientèles
francophones en direction des écoles protestantes, section
française. Je suis préoccupée par cette question et je
voudrais vous le répéter, au cas où j'aurais
été mal comprise là-dessus. Il ne s'agit pas pour moi de
discuter de la valeur d'un projet éducatif d'une école qui serait
catholique mur à mur, qui n'accepterait que ceux qui font ce choix. Mais
lorsque les gens n'ont pas d'autre choix, cela pose un problème. Je
termine là-dessus parce que le président m'a déjà
au moins concédé une minute de plus que...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Peut-être
plus.
Mme Blackburn: ...ce qui m'était imparti. Je vous remercie
infiniment, au nom de ma formation politique, de votre participation aux
travaux de cette commission.
M. Pallascio: M. le Président, j'aimerais revenir sur un
point.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Brièvement,
M. le président.
M. Pallascio: Si vous me le permettez. D'abord, je comprends
qu'on a utilisé un terme un peu fort à mon avis, le terme
"intolérant". Je comprends qu'on peut ne pas partager nos points de vue
sur certains points, mais ce terme, je ne l'accepte pas et pour une raison bien
précise. Nous avons présentement des demandes sur la table, entre
autres des demandes d'écoles associées, et ce sont toutes des
demandes confessionnelles. À ma connaissance, depuis le cas de
Notre-Dame-des-Neiges, nous n'avons eu aucune demande d'écoles autres,
si je peux m'exprimer ainsi. Donc, si ce besoin s'était
réellement fait sentir, cela se serait manifesté auparavant de ce
côté-là. Je puis vous assurer, M. le Président, que
si cette demande devait être déposée sur la table nous la
regarderions avec attentton, au moins autant d'attention que nous l'avons fait
pour des demandes des écoles associées que nous avons
présentement sur la table et pour lesquelles nous sommes en
communication avec le ministère pour tenter de trouver une solution.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie
de cette mise au point.
Je reconnais maintenant le dernier intervenant, M. le ministre de
l'Éducation.
M. Ryan: Je vous remercie. Je pense qu'il n'appartient pas au
ministre de l'Éducation, M. le Président, d'aller commencer
à créer des écoles ici ou là. Là, ce sont
les citoyens qui se donnent des écoles par le truchement de leur
commission scolaire. C'est la logique même, c'est l'esprit de notre
système d'enseignement. Ce n'est peut-être pas mauvais de signaler
justement, en parlant des écoles autres, qu'actuellement on a une
école grecque à Montréal - j'en ai déjà
parlé - avec un statut d'école associée auprès de
la CECM, qui n'est pas une école confessionnelle catholique. Elle a un
statut d'école associée. Elle bénéficie de
financement en provenance du ministère de l'Éducation. Elle
fonctionne très bien. C'est une des très bonnes écoles.
Comme !e président l'a dit, il y a d'autres dossiers qui sont sur la
table également, mais il y en a beaucoup qui parlent de ces
choses-là, mais qui ne vont pas toujours se renseigner à la bonne
source, et cela explique qu'ils disent des choses parfois un peu
aériennes.
Une voix: ...
M. Ryan: Cela dit, je pense qu'il y a une équivoque qu'il
faut dissiper à propos du projet éducatif. Je voudrais que cela
soit clair. Cela fait trois jours à ma connaissance que la
députée de Chicoutimi s'acharne, à chaque rencontre que
nous faisons ici, à essayer de démontrer qu'un projet
éducatif va être quelque chose d'antitolérant s'il
intègre des valeurs et croyances chrétiennes. Il me semble que ce
n'est pas cela, la réalité. D'abord, dans un projet
éducatif, il me semble qu'on ne passe pas son temps à parler de
religion. Il y a toutes sortes de choses là-dedans. À un moment
donné, il
peut arriver qu'une année ils vont mettre l'accent sur le
français langue maternelle, sur l'anglais langue seconde - on ne
demandera pas la permission de la députée de Chicoutimi pour
celle-là - sur les mathématiques, sur les sciences, sur le
contact avec la communauté, sur le développement de relations
entre différentes communautés culturelles, etc. Il y a une
infinie variété d'horizons qui couvrent le concept même de
projet éducatif et on peut très bien intégrer des valeurs
inhérentes au caractère, è la reconnaissance catholique de
l'école sans que, pour cela, tout baigne là-dedans comme dans les
lampions. Il me semble, quand on visite les écoles, quand on cause avec
les gens, que ce n'est pas si compliqué que cela. Il y en a des
écoles dans mon comté. Je n'ai jamais entendu parler de
représentations dans ce sens, sauf pour le cas dont j'ai parlé et
que nous avons résolu de manière très positive. Je le
mentionne. Je pense qu'on peut faire le débat à l'infini. Il
reste une chose délicate. Nous avons une présentation du point de
vue de la CECM, mais c'est la présentation autorisée parce que
vous êtes les élus au suffrage démocratique pour diriger
les affaires scolaires. Hier, l'Alliance est venue nous faire des
représentations. Elle nous a présenté un message sur un
ton et d'un contenu différents aussi. J'accepte très bien
finalement, les porte-parole de la CECM, c'est le groupe qui a
été élu par les citoyens. J'entendais un murmure indiquant
que le taux de participation n'était pas très
élevé. On va souhaiter que, cette année, il soit plus
élevé. Je vais souhaiter qu'il y ait une participation
très forte. Nous avons essayé de modifier la loi pour que
l'élection scolaire se fasse dans un meilleur contexte. Je voudrais
dire, au nom du gouvernement, qu'en fin de compte, nous autres, nous allons
transiger avec les élus du peuple, avec ceux qui ont reçu le
mandat de représenter leurs concitoyens et leurs concitoyennes
auprès du gouvernement, et que nous ne passerons pas par la porte d'en
arrière pour essayer de mettre en question les choses qu'ils nous
disent. Je vous remercie beaucoup et je vous souhaite bonne chance.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le
président, M. Leduc, M. Desjarlais, merci beaucoup de votre
témoignage.
La commission parlementaire de l'éducation suspend ses travaux
pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 16 h 10)
(Reprise à 16 h 12)
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît! S'il vous plaît! Est-ce que les gens de la
Conférence de la pastorale scolaire pourraient s'installer, s'il vous
plaît?
Conférence de la pastorale scolaire
S'il vous plaît! Une dernière fois, est-ce qu'on pourrait
avoir le silence? Les gens de la Conférence de la pastorale scolaire
peuvent-ils s'installer à la table, s'il vous plaît? Est-ce que le
président, M. Charron, pourrait nommer ceux qui l'accompagnent?
Comme vous le savez, on met une heure à votre disposition; de 15
à 20 minutes pour présenter votre rapport, le reste étant
distribué entre les membres des deux formations politiques.
M. Charron (Jacques): Est-ce que vous pouvez attendre juste une
minute?
Le Président (M.Jolivet): Parfait!
M. Charron: Avec les changements, il y a du branle-bas. Je vais
présenter les membres de la Conférence de la pastorale scolaire
qui vont soutenir le mémoire aujourd'hui. À ma gauche, M. Michel
Cartier, ancien président de la CPS jusqu'en juin dernier, animateur de
pastorale au secondaire à la polyvalente Chanoine-Armand-Racicot,
à Saint-Jean-sur-Richelieu. Je veux situer comme il faut où
chacun est. Ensuite, Mme Françoise Fleury, à temps partiel au
primaire, à l'école le Trivent de Sainte-Brigitte-de-Laval,
commission scolaire de Beauport; M. Yves Tremblay, école primaire
privée Val-Marie de Cap-de-la-Madeleine et un des vice-présidents
de la CPS; M. Fernand Lambert, ici, à ma droite, animateur de pastorale
à la commission scalaire Des Découvreurs, école Les
Compagnons-de-Cartier de Québec, et, enfin moi-même, Jacques
Charron, président de la Conférence de la pastorale scolaire et
animateur au secondaire à la polyvalente Jean-Jacques-Bertrand de
Farnham, commission scolaire Des Rivières.
En introduction, nous avons voulu situer notre organisme. Vous avez
cela. La Conférence de la pastorale scolaire est un regroupement
professionnel à but non lucratif qui vise, comme objectif premier, de
concourir avec les autorités religieuses compétentes au
développement de la pastorale en milieu scolaire. Notre association
professionnelle compte 448 membres volontaires. Ce sont des animatrices et des
animateurs de pastorale scolaire répartis dans les 19 diocèses du
Québec. Nos membres travaillent dans le secteur public et dans le
secteur privé. Nous les retrouvons au primaire et au secondaire. Parmi
ceux qui
vont défendre notre mémoire aujourd'hui, vous avez
également cette représentativité du privé et du
public, du primaire et du secondaire. Nous rejoignons des laïques, des
religieuses et des religieux et des prêtres. Le présent
mémoire fait suite aux commentaires et aux questions que nous avons
formulés lors de la parution du règlement dans la Gazette
officielle du Québec, le 13 mai 1987.
Nous n'avons pas cru bon de nous prononcer sur le règlement du
comité protestant du Conseil supérieur de l'éducation sur
les institutions d'enseignement reconnues comme protestantes. À la fin,
après la présentation article par article, je reviendrai aux
recommandations que notre organisme entend promouvoir. Je cède la parole
à Michel.
M. Cartier (Michel): Article 2 concernant la consultation des
parents. En tant que premiers responsables de l'éducation de leurs
enfants, nous croyons essentiel qu'il y ait consultation et que cette
consultation soit faite de façon identique. Pour cela, nous demandons
qu'on puisse bâtir des instruments simples et 'accessibles à
l'ensemble de la population.
Article 5, matériel didactique. Nous croyons important, compte
tenu du développement intégral de l'enfant, que l'ensemble des
instruments utilisés dans les écoles soit approuvé par le
comité catholique.
Article 6. Nous croyons essentiel que la direction d'école porte
le projet éducatif d'école catholique jusqu'au bout. Dans une
école reconnue comme catholique, la direction a à faire la
promotion des valeurs chrétiennes. Il ne s'agit pas uniquement pour la
directrice ou le directeur de l'école de faire preuve de respect, mais
plus encore des valeurs de l'école reconnue comme catholique. Lors de
l'embauche du personnel de direction d'une telle école, les options de
l'école ainsi que ses engagements pour la réalisation de ce
projet éducatif devraient être très nettement
définis. Pour ce faire, le conseiller ou la conseillère en
éducation chrétienne joue alors un véritable rôle de
conseil.
Article 7, évaluation du vécu confessionnel.
L'évaluation du vécu confessionnel ne nous apparaît pas
suffisante pour remettre en question le caractère confessionnel de
l'école. L'ensemble des parents n'est représenté que par
le comité d'école. Cette évaluation risque d'être
faussée en n'interrogeant qu'un petit nombre de personnes. En effet, il
suffirait d'un noyautage de quelques personnes dans un sens ou dans l'autre
pour que le jugement soit complètement faussé.
Comme la population des parents qui ont leurs enfants dans une
école change en cinq ans, dans l'esprit de l'article 2 du présent
règlement, nous voudrions qu'il y ait, pour chaque école, tous
les cinq ans, une remise en question du caractère confessionnel, avec
une consultation de tous les parents impliqués. Une telle
opération permettrait de faire la lumière sur le caractère
confessionnel réel des écoles du Québec.
Article 8, l'option. Nous croyons que ce choix doit être offert
à chaque école, quelles que soient les classes dans lesquelles
cet enfant est éduqué.
Respect de l'option. Quelle que soit la taille des écoles, nous
demandons que cette option soit respectée jusqu'au bout, même si
cette gérance peut parfois être difficile à appliquer.
Formation des enseignantes et des enseignants au primaire, article 16.
Nous croyons qu'il est bon de préciser un minimum de crédits
universitaires. Neuf crédits nous paraissent un minimum. Nous voudrions
au moins maintenir ces neuf crédits parce qu'il y a là une
approche et une méthodologie propres à l'enseignement religieux
et, compte tenu de la formation des jeunes maîtres qui arrivent, nous
croyons que c'est un minimum.
Formation des enseignantes et des enseignants au secondaire, article 17.
Pourquoi exiger moins de crédits pour enseigner au premier cycle? II y a
discrimination entre les enseignantes et les enseignants. Plusieurs
écoles reçoivent des élèves qui vont de la
première à la cinquième secondaire. Donc, il y a rotation
du personnel pour enseigner à ces nombreux niveaux. De plus, les
nouveaux programmes demandent une vision globale de la foi et de la
théologie. Donc, la formation de base des maîtres doit être
la même. Ainsi, une ou un spécialiste devrait posséder plus
de 30 crédits dans sa spécialité. Pour toutes ces raisons,
nous demandons de porter le minimum de crédits universitaires à
60 pour toutes les enseignantes et tous les enseignants qui dispensent
l'enseignement moral et religieux catholique au secondaire.
L'animation pastorale au sein des services complémentaires,
article 19. Nous croyons essentiel de situer l'animation pastorale dans la
structure scolaire, tant au primaire qu'au secondaire, comme faisant partie des
services complémentaires assumés par l'école. Pour
soutenir le projet d'école avec des valeurs chrétiennes, le
service de pastorale donne un élan et un soutien essentiels. Pour que le
service soit efficace et significatif, des normes minimales doivent être
élaborées. En deçà de certaines limites,
l'élève ne reçoit pas le service qui lui permettrait
d'avoir une aide pour le développement intégral de sa
personnalité. Dans les faits, ce qui était des minima autrefois
est devenu monnaie courante. Dans "L'école catholique, situation et
avenir", on constate
que la moyenne provinciale au secondaire est d'à peu près
une animatrice ou un animateur pour 1000 élèves. Il s'agissait
là, dans les années antérieures, de situations en
deçà du minimum. Aujourd'hui, au secondaire,
l'élève n'a plus droit à des services de qualité,
il n'a droit qu'à des services minimums.
Au primaire, devant l'extrême diversité des situations,
pourra-t-on élaborer des normes qui puissent garantir aux
élèves un service décent? L'assemblée
générale de la Conférence de la pastorale scolaire de juin
1937 a mandaté son bureau de direction en vue de présenter au
ministre de l'Éducation une demande de ratio animatrice ou
animateur-élèves tant pour le primaire que pour le
secondaire.
Article 20, description de tâche. Nous croyons important de
souligner l'importance de la concertation famille-paroisse-école. Nous
posons la question: comment a-t-on fait pour mettre dans un règlement
une description de tâche d'une animatrice ou d'un animateur? Il n'y a
là rien d'exclusif et on peut risquer d'en faire un moyen
d'évaluation. Pour ces raisons, nous demandons que soit rayée du
règlement cette énumération ainsi faite.
Article 21, formation des animatrices et des animateurs du primaire. Cet
article nous apparaît complètement illogique avec l'ensemble du
présent règlement. Partout ailleurs, dans ce règlement, on
demande de hausser les exigences de qualification du personnel affecté
à l'éducation de la foi. Pourquoi, ici, dans cet article,
refuse-t-on d'exiger des animatrices et animateurs de pastorale au primaire
qu'ils possèdent des crédits universitaires? N'a-t-on pas
exigé, à l'article 16, un minimum de neuf crédits
universitaires pour dispenser l'enseignement moral et religieux catholique au
primaire?
N'a-t-on pas exigé, à l'article 22, un diplôme
universitaire terminal pour être animatrice ou animateur de pastorale au
secondaire? N'exige-t-on pas des psychologues, des travailleuses et
travailleurs sociaux, des conseillères et conseillers
pédagogiques qu'ils aient les mêmes qualifications pour
intervenir, tant au primaire qu'au secondaire?
Si cet article est adopté tel qu'il est maintenant, nous allons
nous retrouver avec deux catégories de personnel affecté à
l'animation pastorale dans les écoles: d'une part, les chargés
qui possèdent des crédits non universitaires et qui oeuvrent au
primaire et, d'autre part, les animatrices et les animateurs qui
possèdent des diplômes universitaires et qui oeuvrent au
secondaire. Somme toute, cela reviendrait à dire: au secondaire, cela
nous prend des professionnelles et des professionnels pour l'animation
pastorale, et, au primaire, des techniciennes et des techniciens en pastorale,
c'est bien suffisant.
Cette vision de l'éducation de la foi est méprisante et
discriminatoire pour les gens qui travaillent en animation pastorale au
primaire. De plus, les élèves du primaire sont en droit d'avoir,
en animation pastorale, un service professionnel. En conséquence, nous
exigeons de biffer complètement cet article.
Nous ajouterions, à l'article 22, le mot "primaire" après
le mot "secondaire" pour que tous aient les mêmes exigences. Nous nous
réjouissons, de plus, de l'exigence d'un mandat pastoral pour exercer
l'animation pastorale.
Article 23, les collaboratrices et collaborateurs. Cet article
prête à confusion. Après avoir parlé d'animatrices
et d'animateurs, de chargés, nous voici maintenant avec le terme
"collaboratrices et collaborateurs". Nous voudrions que soit
précisé que le service d'animation pastorale est assuré,
d'abord et avant tout, par une animatrice ou un animateur de pastorale. Ce ne
sont pas des collaboratrices ou des collaborateurs qui assurent ce service.
À l'occasion, et sous la responsabilité des animatrices et des
animateurs, peuvent collaborer à l'animation pastorale des
personnes-ressources de l'extérieur de l'école.
Article 24, planification et évaluation. Au moment où la
Direction de l'enseignement catholique publie des guides de planification en
vue d'améliorer la qualité du travail professionnel, tant au
primaire qu'au secondaire, nous trouvons étonnant qu'on n'ait pas le
personnel qualifié au primaire pour faire la tâche. Encore ici,
pour le primaire, nous trouvons le terme "chargé" qui impliquerait que
la personne en poste ne possède pas de formation universitaire. Nous
trouvons essentiel cette politique de planification et d'évaluation.
Comme tout service professionnel à l'intérieur de l'école,
il est normal que l'animation pastorale rende compte de ses
activités.
Bureau et local. Pourquoi ne pas demander pour l'animatrice ou
l'animateur du primaire un bureau, alors qu'on le fait pour le secondaire? Un
minimum de discrétion et de confidentialité est exigé pour
les élèves du primaire.
Respect du caractère catholique de l'école. Nous aimerions
que soit précisé que c'est le directeur ou la directrice
d'école qui assume cette responsabilité.
Article 29, première évaluation. Nous nous demandons ce
qu'il adviendrait si une telle évaluation n'était pas faite.
Article 30, enseignantes et enseignants déjà en poste.
Nous voudrions que soit préparée une politique pour
perfectionner, de façon permanente, les gens qui sont déjà
là et qui ont peut-être oublié de se perfectionner. (16 h
30)
Animation pastorale au primaire. En
concordance avec l'article 21, on bifferait l'article 31.
Et, enfin, l'article 32, animatrices et animateurs en poste. Nous
trouvons juste et raisonnable que soient maintenus en poste ceux qui sont
déjà là.
Concernant les qualifications des enseignants dans les écoles
autres pour l'enseignement religieux moral catholique, bien sûr, les
élèves de ces écoles sont en droit d'avoir des services en
enseignement religieux qui soient d'une qualité égale à
celle offerte aux élèves des écoles reconnues comme
catholiques. Ainsi donc, nous demandons les mêmes exigences pour ces
personnes.
Enfin, nous ajouterions, pour le secteur privé, un commentaire
sur l'article 8. Nous sommes d'accord avec cet article qui permet d'offrir dans
les écoles reconnues comme catholiques, dans le secteur privé, la
possibilité et non pas l'obligation d'offrir un cours d'enseignement
moral qui soit sans référence à la foi catholique.
Je cède la parole à M. Charron qui va résumer, sous
forme de recommandations, notre propos.
M. Charron: En première page des recommandations, nous
avons voulu montrer que nous sommes des praticiens, des gens de la base, des
gens en continuel contact avec les élèves, les parents et les
membres du personnel. La Conférence de la pastorale scolaire a lu les
projets de règlement à partir du présupposé
suivant: l'élève a droit à un service de qualité
pour l'éducation de sa foi à l'école. Cet angle d'approche
ne peut sûrement pas être contesté. Nous sommes là
pour le service aux élèves.
Nos recommandations sont rédigées par des
éducatrices et des éducateurs de la foi, continuellement en
contact avec les élèves. Notre préoccupation centrale est
de donner à l'élève les meilleures conditions permettant
un développement complet de sa foi à l'école, en lien avec
sa famille et sa communauté chrétienne.
Nous faisons cette recommandations. La première: attendu que,
selon les articles 8, 9, 10 du présent règlement, l'enfant a
droit à un cours d'enseignement moral et religieux catholique ou
à un cours d'enseignement moral sans référence à
une confession particulière, nous recommandons que ce droit soit reconnu
comme primordial, que chaque élève ait effectivement ce choix,
quels que soient son classement, la taille de l'école, le choix d'autres
options académiques et que ce choix de l'élève soit
respecté intégralement.
Deuxième recommandation: attendu que les parents sont en droit
d'obtenir, pour leurs enfants, une école qui fasse la promotion des
valeurs qu'ils jugent essentielles pour l'épanouissement de leurs
enfants, nous recommandons, dans toutes les écoles du système
public, que les parents aient à se prononcer sur le caractère
confessionnel de l'école fréquentée par leurs enfants,
qu'une démarche simple et uniforme soit élaborée en vue de
la révision du statut d'école catholique et, enfin, que des
mécanismes de révocation soient prévus dans le
présent règlement.
Troisième recommandation: attendu que la population
étudiante se renouvelle tous les cinq ans, nous recommandons, dans
l'esprit de l'article 7, qu'une évaluation du statut confessionnel dans
chaque école soit faite tous les cinq ans.
Quatrième recommandation: attendu que l'ensemble du projet
d'école repose sur la directrice ou le directeur d'école, selon
l'esprit des articles 6, 7 et 27, nous recommandons que la directrice ou le
directeur d'école soit identifié comme le premier ou la
première responsable du projet éducatif qui inclut les valeurs
chrétiennes, que la directrice ou le directeur d'école
évalue, chaque année, avec l'ensemble des usagers de
l'école, le vécu confessionnel, que la directrice ou le directeur
de l'école effectue, tous les cinq ans, une révision du statut
confessionnel de l'école auprès de l'ensemble des parents
concernés.
Cinquième recommandation: attendu que les élèves
sont en droit d'avoir, pour l'enseignement moral et religieux catholique, les
services les plus qualifiés, nous recommandons, dans l'esprit des
articles 16 et 17, que la formation exigée pour l'enseignement moral et
religieux catholique au primaire soit d'au moins neuf crédits
universitaires, que la formation exigée au secondaire en enseignement
moral et religieux catholique soit celle d'un spécialiste avec 60
crédits universitaires et, enfin, que la formation permanente soit
favorisée pour mieux qualifier l'ensemble du personnel
déjà en place qui dispense l'enseignement moral et religieux
catholique.
Sixième recommandation: attendu que les élèves ont
droit à des services complémentaires en animation pastorale qui
soient de qualité, nous recommandons que chaque école primaire et
secondaire ait un service de pastorale sous la responsabilité d'une
animatrice ou d'un animateur de pastorale, que la qualification requise pour
être animatrice ou animateur de pastorale, tant au primaire qu'au
secondaire, soit la même, au moins 60 crédits univesitaires, et,
enfin, qu'un mandat pastoral soit émis par l'évêque
à l'animatrice ou à l'animateur de pastorale.
Dernière recommandation: attendu que le service de pastorale est
assumé par des professionnels et des professionnelles, nous recommandons
qu'une planification et une évaluation soient présentées
par l'animateur ou l'animatrice de pastorale, chaque année, à la
direction de l'école, qu'un local de pastorale soit donné pour le
service de
pastorale et qu'enfin un bureau soit réservé pour
l'animatrice ou l'animateur de pastorale tant au primaire qu'au secondaire. Je
vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Jolivet): Merci, M. Charron, M. Cartier.
M. le ministre, vous avez maintenant la parole.
M. Ryan: Messieurs les porte-parole de la Conférence de la
pastorale scolaire, vous nous avez apporté une série de
considérations qui sont le reflet de votre expérience quotidienne
au contact de nos écoles. Je voudrais vous remercier du travail que vous
accomplissez au sein de nos écoles; je pense que c'est un travail
très important. C'est une des constatations qui se dégagent du
travail de la commission qu'il existe une atmosphère de flottement
autour de l'animation pastorale, particulièrement au niveau primaire.
Tantôt, je vous posais une question à ce sujet. On constate par
beaucoup d'échos qu'on a sur le terrain, qu'il y a beaucoup d'endroits
où les politiques sont plutôt indéfinies, où les
ressources sont souvent très limitées. J'aurai l'occasion de vous
poser une question ou deux tantôt là-dessus.
Avant d'en venir là, je voudrais vous demander une explication.
Si je comprends bien, dans votre esprit, le statut confessionnel de
l'école devrait être remis en question tous les cinq ans. Il ne
s'agirait pas seulement d'une vérification après laquelle on
passe à autre chose, mais ce serait une vérification qui serait
accompagnée d'une remise en question., Est-ce que vous voulez dire qu'il
faudrait que les parents soient invités à se prononcer de nouveau
d'une manière explicite et formelle sur le statut de l'école?
M. Cartier: Vous avez très bien vu. C'est notre demande.
Tous les cinq ans, étant donné que les parents qui envoient des
élèves à l'école se renouvellent, on s'est dit que
le projet d'école pour les élèves présents doit
répondre aux parents. Nous, on se dit que l'enfant qui est là
doit recevoir une éducation qui correspond à ce que les parents
attendent. C'est pour cela que nous plaçons cette idée des cinq
ans et, compte tenu de la population qui change, cela permettrait à
chaque école de dire son projet et d'être en mesure de
répondre, pour les parents qui sont là maintenant, à leurs
besoins.
M. Ryan: Au sujet de la démarche de consultation
auprès des parents, vous indiquez dans votre mémoire que vous
souhaiteriez que des instruments soient disponibles et soient les mêmes
pour tout le Québec. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi vous demandez
cela? Ce matin, la Fédération des commissions scolaires
catholiques est venue nous voir en nous disant: On n'a pas besoin d'instruments
nationaux ou provinciaux; faites-nous confiance, on sera capables de faire cela
comme il faut. Vous demandez qu'il y ait des instruments identiques dans tout
le territoire du Québec. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi? Quelle
sorte d'instrumentation vous envisageriez?
M. Cartier: Ce pourquoi on demande quelque chose d'identique et
d'uniforme, c'est qu'on se dit: Si on veut répondre adéquatement,
tout le monde, à la même question, il faut qu'elle soit
formulée clairement, partout, de la même façon. Il peut
être facile de simplifier les choses, ou de les compliquer, ou de les
biaiser. Dans notre tête, on s'est dits Si on veut vraiment que ce soit
honnête partout et que cela réponde vraiment aux attentes des
gens, il ne faut pas qu'on se mette à commencer partout des
questionnaires maison, des choses qui feront qu'on va se retrouver avec des
types de questionnaires qui ne répondent pas à la même
visée. Dans notre esprit, il s'agit de fournir à chaque
commission scolaire des choses identiques, une démarche qui soit
identique et qui permette aux parents de se prononcer clairement sur la
même question.
Quel genre d'instruments cela pourrait-il être? Il y a
sûrement des instruments concernant la consultation, l'information, le
mode de scrutin, tout cet appareillage. Pour moi, il devrait y avoir quelque
chose de global, plusieurs types de démarches qui aboutiraient à
la fin par une consultation des parents. Il ne s'agirait pas d'une simple
démarche, il y aurait sûrement de l'information sous
différentes formes; ce serait à préciser.
M. Ryan: Vous dites, à la page 5, que vous avez
mandaté votre bureau de direction en vue de présenter au ministre
de l'Éducation une demande de ratio animateur-élèves tant
pour le primaire que pour le secondaire. Vous évoquez, quelques lignes
plus haut, la constatation faite par le comité catholique au secondaire
selon laquelle, actuellement, on aurait un ratio d'un animateur ou animatrice
pour 1000 élèves. Quelle est la situation au primaire? De quel
ordre de grandeur seraient les ratios que vous entendez proposer?
M. Charron: Moi, j'ai eu à travailler cet aspect des
ratios. Je vais faire une séparation, je vais commencer par le
secondaire et je vais ensuite aborder le primaire. Plusieurs commissions
scolaires, présentement, ont un ratio assez effarant de un pour 2000, un
pour 2200. Pour nous, ce n'est plus vivant, ce n'est plus possible d'animer
seui une écoie de 2000 ou de 2200 élèves. On parle de
services de qualité. Dans
les documents antérieurs qui ont été
publiés, on a évoqué - on l'a déjà
demandé, cela avait déjà été signalé
au ministère de l'Éducation - le fait qu'un service de
qualité serait autour de un pour 700 au secondaire. Le comité
catholique a jugé que la norme de un pour 1000 était acceptable,
mais, au moment où on a évoqué ces services, le ratio de
un pour 1000 c'étaient les services essentiels, le minimum vital. Est-ce
qu'on a dévalué, dilué, délayé au point
où on ne peut plus vraiment avoir un service de qualité?
Au primaire, vous l'avez évoqué tantôt, M. le
ministre, avec beaucoup de justesse, il y a autant de visages qu'il y a de
commissions scolaires. Il y a les commissions scolaires où le ratio est
d'un animateur qui est employé à raison d'une heure par
groupe-classe par mois. Cette norme a été appliquée au
primaire dans plusieurs commissions scolaires. Pour d'autres commissions
scolaires, c'est deux heures par groupe-classe par mois et, pour d'autres, un
animateur peut être à temps très partiel, à raison
d'une journée pour une école de 300 ou 400 élèves.
Les normes au primaire sont présentement très floues. Comme
organisme représentant les membres du primaire, nous voulons qu'il y ait
une promotion d'animation pastorale pour le primaire et certaines normes
minimales qui permettent aux commissions scolaires d'offrir un service de
qualité et ne pas seulement se justifier en disant: Nous offrons un
service de pastorale c'est parfait. Nous voulons vraiment offrir quelque chose
de qualité.
M. Ryan: J'ai remarqué qu'à l'article 22 vous
voudriez qu'on applique les exigences définies à cet article
autant à l'école primaire qu'à l'école secondaire.
Est-ce que vous ne pensez pas, vu cette diversité très
prononcée de situations qu'on observe d'une commission scolaire à
l'autre, voire d'une école à l'autre à l'intérieur
d'une même commission scolaire, que ce serait aller un peu vite que de
faire cette transformation? Est-ce que vous pensez que c'est réaliste de
demander cela?
M. Cartier: Ce que je me pose comme question, c'est: Est-ce qu'on
doit s'adapter à la réalité ou si on doit être
capables de regarder quels sont les besoins des élèves? C'est une
situation qui est très mêlée. Il est sûr que, si on
engage des professionnels, derrière cela, il y a des sous. Si je le
prends autrement, je dis: II y a des élèves qui sont dans des
écoles reconnues comme catholiques et l'une des dimensions pour mettre
en éveil les valeurs chrétiennes, c'est l'animation pastorale.
C'est donc un service qui doit être assumé par l'école en
tant que porteuse de ces écoles catholiques. Je me dis: Qu'est-ce que
cela prend? Est-ce qu'il s'agît de faire des activités pastorales
pour faire des activités? À ce moment-là, on qualifie des
gens et on leur fait appliquer des choses. Ou encore est-ce que cela prend un
animateur? C'est-à-dire, quelqu'un qui est capable d'avoir des
visées larges, capable de collaborer avec des enseignants, d'autres
professionnels non enseignants, des directions d'école. Comme on
demande, pour n'importe quel intervenant auprès des enfants de
posséder un diplôme universitaire terminal, je dis: Pourquoi avoir
peur de demander des animatrices et des animateurs de pastorale qui
possèdent une formation universitaire? (16 h 45)
M. Ryan: Je pense à la réalité. Je pense
à mon comté, par exemple. Les animateurs de pastorale, dans la
plupart des cas, sont fournis par le diocèse, pas par la commission
scolaire. Il y en a qui jouent un rôle très utile, mais qui n'ont
pas de qualifications universitaires comme celles que vous voudriez qu'on
exige. Qu'est-ce qu'on va faire avec ce monde-là? La commission scolaire
dit qu'elle n'a pas de ressources pour embaucher du personnel qui ait les
qualifications souhaitées. On a ces personnes qui sont des ressources
mises à la disposition de l'école par la communauté
diocésaine ou paroissiale. Est-ce qu'on va leur mettre des exigences
telles qu'on va être obligés de les sortir, elles aussi? Est-ce
qu'on va être plus avancés?
M. Cartier: On peut analyser le problème de
différentes façons. Cela dépend du point de vue où
on se place. Je me dis: Dans les écoles, c'est ce service de pastorale;
il a été assumé par des éducateurs et des
éducatrices de la foi. Si l'école accepte que, dans le
développement intégral de l'enfant, la dimension religieuse avec
l'enseignement et l'animation pastorale soient assumés par
l'école - cela fait partie de notre projet d'école publique -
pourquoi, pour l'animation pastorale, exigerait-on moins? Est-ce qu'on fait le
même marchandage quand on parle de psychologue ou de travailleur social?
Pourquoi, quand on parle d'Église, quand on parle d'éducation de
la foi, commence-t-on à dire: Là, ce serait autre chose?
M. Charron: J'aimerais simplement ajouter, M. le ministre, que
nous avons, à l'article 32, insisté sur une question de justice,
d'équité, comme vous venez de le suggérer, en fonction des
animateurs qui sont déjà en place. Ces gens-là ont
donné le meilleur d'eux-mêmes, ils donnent le meilleur
d'eux-mêmes et, souvent, la plupart d'entre eux sont inscrits à
des programmes de formation, de recyclage et même de formation
universitaire de premier cycle. Évidemment, plusieurs parmi nos membres
sont des gens qui sont présentement en poste et nous les encourageons.
Mais notre
demande, c'est face à l'avenir, c'est-à-dire les nouveaux
animateurs et les nouvelles animatrices qui vont être engagés.
Nous ne voulons pas d'une animation pastorale à rabais. Nous voulons
vraiment une animation pastorale professionnelle au primaire, comme elle l'est
au secondaire.
M. Ryan: Je reviens au primaire, ilya des cégeps qui
donnent des cours de formation en vue de l'animation pastorale. Ils donnent de
très bon cours. Ce n'est pas nécessaire d'avoir suivi un cours
universitaire, me semble-t-il, pour faire un travail convenable d'animation
pastorale dans une école paroissiale. Je crois comprendre dans votre
texte - je voudrais que cela soit clair que, d'après vous, le
responsable de l'animation pastorale dans l'école, il faut que ce soit
un salarié et, après, si on veut ajouter des travailleurs
bénévoles ou des collaborateurs, il y aura moyen d'en ajouter.
Mais, autour de lui, il faut qu'il y ait comme base, un salarié.
M. Charron: II faut vraiment qu'il y ait un animateur de
pastorale et non pas une équipe de travailleurs bénévoles
où personne ne porte le titre. Pour nous, cela est important. Vous posez
la question de la formation de type collégial. Nous trouvons que cette
formation n'est pas mauvaise. Je pense qu'elle est excellente, mais elle n'est
pas suffisante pour l'animation pastorale. Nous formons, à ce
moment-là, un technicien qui intervient, qui intervient dans une
école où ce sont tous des professionnels, des enseignants et des
directions d'école. Nous trouvons que, pour être membre du
personnel à part entière, il faut qu'il ait une formation
adéquate.
M. Ryan: Je vous remercie. Je voulais comprendre votre point de
vue.
Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de
Chicoutimi et porte-parole officielle de l'Opposition.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le
président, madame et messieurs, il me fait plaisir de vous souhaiter la
bienvenue au nom de ma formation politique. Vous allez me permettre de passer
immédiatement aux questions. J'aurais le goût de prolonger dans le
sens - c'est simplement une remarque -de la question que le ministre vient de
poser touchant les animateurs de pastorale dans les écoles primaires. Ce
qui nous a été dit beaucoup ici, c'est qu'on devait
considérer différemment la situation, selon qu'elle se
présente au secondaire ou au primaire, selon qu'on soit au primaire ou
au secondaire. Au secondaire, c'est souvent un territoire plus vaste, et il y a
peu de contacts avec une paroisse en particulier, alors qu'au primaire,
l'école est restée une école de quartier dans la
très grande majorité des cas, avec des liens assez étroits
avec la paroisse. Cela permet une implication de la communauté
catholique, à la fois dans l'animation et comme collaboratrice, et les
exigences en animation pastorale au primaire devraient porter davantage sur des
témoignages de foi, de sincérité, d'authenticité.
On nous a dit que cela n'a pas toujours à voir avec une qualification,
une diplomation à toute épreuve. Je me rappelle la remarque d'un
intervenant qui disait: Ce n'est pas tout d'avoir des diplômes, on
connaît d'ex-prêtres religieux bardés de diplômes qui
ont défroqué quand même. Je me disais que ce n'était
pas tout d'avoir des diplômes, qu'il était peut-être
beaucoup plus important, parce que, là, on fait appel à la
transmission de valeurs, d'avoir des gens qui croient. Comme le ministre, je me
faisais la remarque qu'en hygiène dentaire, en hygiène
alimentaire, en technique de loisir, ce sont des techniciens et qu'ils sont en
rapports étroits dans nos écoles, dans les CLSC et dans nos
services de loisirs municipaux avec les enfants et je ne pense pas que cela ait
posé beaucoup de problèmes à ce jour.
J'aimerais revenir à votre mémoire. C'est revenu souvent
et quelques-uns ont remis en question cette idée de dissocier
l'évaluation du vécu confessionnel de l'évaluation du
projet éducatif. Je trouve toujours un peu délicate cette
idée de dissocier, d'autant plus que, dans la perspective où vous
nous présentez un projet très intégrateur des valeurs et
des croyances catholiques, comment dissocier dans l'évaluation le
vécu confessionnel du projet éducatif lui-même? C'est une
gymnastique qui me paraît pas très porteuse d'avenir. J'essaie de
voir comment, dans les faits, vous pourrez évaluer cela sans vous
interroger sur la valeur du projet éducatif, à moins qu'on ne
dise que les enfants sont à l'école exclusivement pour apprendre
et s'imprégner des valeurs de la foi. J'espère que ce n'est pas
juste cela. C'est beaucoup plus vaste que cela, c'est un ensemble, et c'est
tout un projet qui permet l'acquisition à la fois de valeurs, de
croyances et de connaissances. Cela m'a toujours un peu dérangée;
c'est la première fois que je pose la question. Comment entrevoyez-vous
cela?
M. Charron: L'objet de la consultation partait directement sur
les règlements du comité catholique; ce n'était pas sur le
vécu éducatif. Je suis d'accord avec vous qu'une
évaluation exhaustive devrait comporter tous les volets. Un vécu
confessionnel ne se vit pas en l'air à côté d'un
vécu éducatif, tout cela est intégré, mais nous
avons voulu répondre à la consultation qui nous a
été demandée. Est-ce que j'ai répondu un peu?
Mme Blackburn: Oui, cela va. C'est que les gens ont réagi
sans remettre en question cette approche du comité. Ce qui
m'étonne dans le discours de nombreux intervenants aussi, y compris la
CECM tantôt, les gens réclament à la fois une certaine
autonomie, et particulièrement d'une commission scolaire -
généralement, c'est le discours qu'on a entendu - et ils
réclament une intervention de contrôle et de sanctions de la part
d'un comité chargé de faire des règlements. Je dois dire
que cette attitude me laisse toujours un peu perplexe par rapport à ce
qu'on serait en mesure d'attendre lorsqu'on élit un gouvernement,
municipal ou scolaire.
J'aimerais savoir de vous, en page 5, toujours autour de l'animation
pastorale, que le ratio - parlant du ratio j'ai été un peu
distraite - serait actuellement autour de un pour 1000; il est variable, il y a
des endroits où c'est un pour 2000, un pour 2500. Vous dites qu'il
faudrait que ce soit autour de un pour 700. J'essaie de voir ce que cela peut
donner pour deux écoles de 350. On aurait donc un animateur, au
primaire, pour deux écoles de 350 élèves chacune. Cela
donne un ratio de un pour 700. Cet animateur qui serait là à
temps complet aurait la responsabilité de remplir combien de temps
d'activités? II n'y a pas de temps prévu pour l'animation
scolaire proprement dite à l'intérieur des services
éducatifs dans la grille horaire au primaire. Donc, il faut que ce soit
à l'heure du lunch, avant ou en parascolaire.
M. Charron: J'aimerais donner la parole à Françoise
qui travaille présentement en animation pastorale au primaire. Je pense
qu'elle est à même, le vivant quotidiennement, de répondre
à votre question.
Mme Fleury (Françoise): En ce qui concerne l'animation
pastorale, on y va en fonction des loisirs de chaque classe. Si, à un
moment donné, il y a un problème dans une classe, on fait une
activité pour intégrer une valeur ou une difficulté qui
existe dans la classe. Habituellement, on fait une activité par mois
dans chaque groupe-classe. Tous les temps sont soulignés. Les temps
forts sont vécus. On prend du temps, comme on prend du temps, à
un moment donné, pour faire un défi mathématiques ou un
défi français. On a notre place. Â un moment donné,
on propose des activités et les enseignants choisissent le temps
où ils peuvent nous accepter comme...
Mme Blackburn: Vous avez donc actuellement de l'espace à
l'intérieur du temps prévu pour l'enseignement.
Mme Fleury: On le prend. Quand arrivent de nouvelles choses dans
une commission scolaire... Chez nous, cette année, il y a une grosse
promotion pour le sport. Les enseignants sont obligés d'intégrer
le sport. À ce moment-là, quand on arrive avec d'autres
activités, il arrive que c'est coupé. Par contre, habituellement
les professeurs, quand ils nous établissent un temps, ils le prennent et
ils sont, non pas obligés parce que ce sont eux qui ont fait le choix...
Au début de l'année, on offre une liste, une banque
d'activités et les enseignants ont à faire un choix. Ensuite, on
fixe un horaire.
Mme Blackburn: Êtes-vous à temps plein
actuellement?
Mme Fleury: Non. Je suis à temps partiel dans une
école de presque 300 élèves.
Mme Blackburn: À temps partiel. Combien de temps? Combien
d'heures par semaine?
Mme Fleury: Je suis rémunérée pour une
journée.
Mme Blackburn: Pour une journée par semaine. J'essayais de
faire un rapport entre votre ratio et le temps qu'on pouvait consacrer à
cette activité et quelqu'un qui est à temps plein pour faire
trois, quatre ou cinq heures d'activité par semaine. Cela m'apparaissait
beaucoup pour, finalement, répondre à des activités. Ce
serait comme engager un enseignant à temps plein alors qu'il donnerait
cinq ou six heures de cours par semaine. J'essaie de voir comment vous
gérez cela.
Mme Fleury: Mon mandat est d'une journée, mais je ne peux
pas arriver avec une journée. Je suis obligée de travailler au
moins deux jours, sans compter ce que je fais à la maison. C'est comme
pour un professionnel. Il faut les préparer, les activités. Si on
est demandé pour une activité de 50 minutes, on est payé
pour 50 minutes, mais on a une préparation de peut-être cinq
heures.
Mme Blackburn: Alors, quand vous avez une activité sur les
heures d'enseignement d'une matière quelconque, cela veut dire que le
professeur est en congé à ce moment-là.
Mme Fleury: Non, il n'est pas en congé parce qu'il
participe à notre activité.
Mme Blackburn: Sur une autre question, vous parliez de la
qualification des animateurs de pastorale au primaire. Actuellement, si cette
mesure était acceptée, cela ferait...
Une voix: ...
Mme Blackburn: ...oui, sur le plan de la
qualification, elle va l'être; c'est ce que j'ai entendu. Je ne
sais plus qui l'a dit. Sur le plan de la qualification, si cette mesure
était adoptée... À combien estimez-vous actuellement le
nombre de personnes qui n'ont pas de formation universitaire et qui font de
l'animation pastorale?
M. Charron: Nous n'avons pas les données exactes. Nous
pouvons dire que, présentement, la situation évolue au primaire
à peu près chaque mois. Antérieurement, l'animation de
pastorale au primaire était assumée en quasi totalité par
les prêtres des paroisses qui, évidemment, avaient la formation
adéquate en théologie. Depuis la raréfaction des
prêtres et avec la promotion du laïcesme, nous pouvons dire que,
dans plusieurs diocèses du Québec, dans plusieurs écoles,
des la?cs sont engagés, et plus particulièrement des femmes. Dans
plusieurs cas portés à ma connaissance, il y a des enseignantes
qui étaient retournées à la maison et qui ont pris charge
de l'animation pastorale. Ce sont des femmes croyantes qui ont une formation
psychopédagogique. Évidemment, cela les prépare à
une intervention de qualité. La plupart de ces enseignantes obtiennent
un certificat ou deux en animation pastorale. Nous pouvons dire que,
présentement, la situation au primaire évolue d'une façon
rapide, mais positive, du côté de la qualification de ceux qui
assument l'animation pastorale. (17 heures)
Mme Blackburn: En relevant le niveau de vos exigences, ne
craignez-vous pas de faire fuir une partie des gens qui, de bonne
volonté et de bonne foi, ne craignez-vous pas que de bons témoins
de la foi se ne trouvent plus qualifiés pour participer? D'autant plus
que, en page 8 de votre mémoire, vous dites; "À l'occasion et
sous la responsabilité des animatrices et des animateurs, peuvent
collaborer à l'animation pastorale des personnes-ressources de
l'extérieur de l'école." Autrement dit, on est en train de dire:
Ce qui est de la communauté chrétienne, laissez donc cela aux
spécialistes à l'école. En gros, cela finit par ressembler
à cela, alors que ce que je trouvais particulièrement
intéressant, c'était précisément ce lien
étroit entre la communauté, l'Église, la paroisse et
l'école. Là, en spécialisant tout votre monde, vous allez
à nouveau spécialiser l'école et, en même temps, pas
juste l'enseignement dans l'animation, mais... Écoutez, votre
démarche en tant que chrétiens me surprend.
M. Charron: J'aimerais répondre à votre question
là-dessus. Il me semble qu'il y a deux points: compétence et
conviction. Ce que vous dites du témoin, ce que vous dites du
témoignage de la foi, ce que vous dites du lien avec la paroisse,
même au secondaire, nous le redécouvrons beaucoup
présentement. Nous faisons un travail ecclésial et
éducatif au secondaire.
Au primaire, il y a toujours eu un lien plus intense, plus proche entre
l'école primaire et une, deux ou trois paroisses
représentées. Je peux vous assurer que, dans la majorité
des cas que je connais, ce lien est préservé par des gens qui ont
à coeur la communauté chrétienne. Mais ce sur quoi nous
voulions insister aujourd'hui évidemment, nous voulons la conviction des
gens parce qu'on sait que la foi est une conviction qui peut se transmettre,
mais nous voulions insister aussi sur la compétence. Ce n'est pas juste
une question de bonne volonté et de venir parler des apparitions de je
ne sais pas trop quoi à l'école. Ce sont parfois des choses qui
peuvent avoir une importance, mais qui sont vraiment secondaires. Nous voulons
que l'intervenant qui vient en pastorale soit formé, qu'il insiste sur
l'essentiel et qu'il transmette vraiment l'essentiel du message
chrétien.
Mme Blackburn: Bien. Dans votre mémoire, en page 2, vous
dites, en parlant du rôle de la direction de l'école, que ce qui
est indiqué à l'article 6 du projet de règlement n'est pas
suffisamment fort et que, dans une école reconnue comme catholique, la
direction a à faire la promotion des valeurs chrétiennes. Vous
dites: "... il ne s'agit pas uniquement, pour ta directrice ou le directeur de
l'école, de faire preuve de respect, mais plus encore de défendre
les valeurs de l'école reconnue comme catholique." Là, on n'est
plus seulement respectueux, on se porte à la défense des valeurs
de l'école et je dirais, un peu comme le ministre le dit à
l'occasion, qu'il y a une espèce de glissement parce que, en page 13,
vous dites que tes mécanismes de révocation du statut de
l'école doivent être prévus dans le présent
règlement et qu'une évaluation du statut confessionnel de chaque
école doit être faite tous les cinq ans. Est-ce qu'on pourrait
aller jusqu'à dire que, si un directeur d'école ne se porte pas
à la défense des valeurs, il pourrait être démis de
ses fonctions? Expliquez-moi ce que veut dire "défendre les valeurs de
l'école".
M. Cartier: Je pense qu'un directeur d'école porte son
école. C'est lui qui répond de son école. Si
l'école comme telle, dans son projet éducatif, inclut les valeurs
chrétiennes, à ce moment, il a à défendre son
école. Il en est le responsable. Il n'a pas qu'à dire que la
promotion de son projet éducatif, c'est le milieu qui va la porter, cela
va, ils disent cela, je ne suis pas tellement d'accord, mais je vais laisser
aller l'école puisqu'elle le dît comme cela. Je ne sais pas ce que
donnerait une pareille gestion d'école. Je pense que le directeur est
quand
même quelqu'un qui porte le projet d'école. Quand cette
école se donne le projet qui inclut les valeurs chrétiennes, je
pense qu'à ce moment il a à en être solidaire et à
faire montre de plus de respect du projet, c'est-à-dire: C'est mon
projet d'école; c'est l'école à laquelle je participe et
j'y mets le coeur qu'il faut et non pas seulement une tolérance.
Mme Blackburn: Je voudrais que vous me donniez quelques exemples
de ce que pourrait être un directeur qui défend le projet
éducatif de l'école fondé sur les croyances et les valeurs
du catholicisme. Je ne comprends pas comment... Si vous avez jugé utile
de l'indiquer dans votre mémoire, c'est que c'est important. Vous dites
que ce qu'il y a à l'article 6 n'est pas assez fort; il doit non
seulement avoir la responsabilité de s'assurer qu'on respecte le projet,
mais il faut qu'il le défende. Qu'est-ce que cela veut dire en termes
clairs?
M. Cartier: Au point de vue d'un administrateur, si tu as un
projet d'école, si ton école, pour toi, promeut les
mathématiques ou l'honnêteté, je m'attends que, dans cette
école, le directeur ou la directrice soit capable de démontrer
les efforts qui ont été faits au point de vue éducatif
pour promouvoir ces valeurs dans son école; sinon, ce sont des mots. Ce
sont des mots qu'on se donne. C'est un projet éducatif. On fait un beau
discours, on l'écrit sur du papier et cela donne bonne bouche
auprès des administrateurs, pas plus!
Mme Blackburn: Qu'est-ce que cela pourrait vouloir dire, par
exemple, par rapport à un projet d'éducation à la
sexualité qui ne prend pas en compte les valeurs et les croyances
catholiques? Qu'est-ce que devrait faire votre directeur d'école dans ce
cas-là?
M. Cartier: Ce que je peux dire, c'est que, dans une
école, l'éducation à la sexualité n'est pas absente
des projets chrétiens.
Mme Blackburn: Ce n'est pas ma question et vous le savez
bien.
M. Cartier: Reposez-la, s'il vous plaît!
Mme Blackburn: Dans l'hypothèse où un projet -
parce que je sais que cela a été soulevé - où un
programme de formation à l'éducation sexuelle ne prenait pas,
où on accusait ce programme de ne pas tenir compte des valeurs
chrétiennes, des croyances catholiques, devant un tel projet, un tel
programme de formation, quelle devrait être l'attitude de votre directeur
d'école qui a à défendre le caractère confessionnel
de son école?
M. Charron: J'aimerais réagir ici. Le point que vous
soulevez - je vous ai entendue tantôt en parler avec ceux qui nous ont
précédés - est quand même délicat.
L'éducation à la sexualité est abordée,
présentement, dans le cours qui s'appelle FPS, formation personnelle et
sociale. Ce que j'aimerais dire sur le directeur d'école, c'est qu'il
est quand même le premier responsable, le répondant de la
pédagogie dans son école. C'est lui qui est responsable de cela.
Le conseiller pédagogique peut l'aider, ainsi que le conseiller en
éducation, mais c'est le directeur qui est le premier
répondant.
Évidemment, ce qui va être abordé en formation
à la sexualité, il va avoir à coeur que ceux qui prennent
l'option enseignement religieux aient les informations touchant leur foi en
relation avec la sexualité. Je pense, personnellement, que l'option est
un acquis de taille qui permet de compléter, présentement, en
enseignement religieux, les données de la foi, les données de
l'Église pour ceux qui choisissent l'enseignement religieux. Pour ceux
qui choisissent l'enseignement moral, cela va être de donner la
perspective la plus honnête et la plus correcte possible, mais sans
référence à la foi parce qu'ils ont choisi l'enseignement
moral. Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question.
Mme Blackburn: Donc, à l'intérieur d'un même
cours, on devrait faire une distinction entre ce qui est offert à ceux
qui optent pour l'enseignement catholique religieux et ce qui est offert
à ceux qui optent pour l'enseignement moral.
M. Charron: Le respect de l'option va jusque-là.
Mme Blackburn: II faudrait en informer le comité
catholique.
M. Cartier: Je voudrais juste ajouter ceci, madame. Actuellement,
le pédagogue, dans plusieurs commissions scolaires, le responsable du
cours de formation personnelle et sociale est le même que celui qui donne
l'enseignement moral ou l'enseignement religieux. C'est le même groupe
d'élèves et c'est la même personne qui donne ce cours.
Mme Blackburn: Cela m'amène à une autre question.
Comment pouvez-vous respecter les valeurs de ceux qui ne partagent pas les
valeurs catholiques, non plus que les croyances catholiques, si c'est la
même personne qui offre à la fois la morale, dite sans
épithète, et la morale catholique et ses croyances?
M. Cartier: Je me suis mal exprimé.
C'est la même personne qui est responsable. Par exemple, pour le
groupe 03, elle enseigne, dans le groupe 03, la morale et la formation
personnelle et sociale, si cette personne a les deux enseignements au
même groupe. Ce n'est pas nécessairement...
Mme Blackburn: D'accord. Je vous remercie infiniment d'être
venus enrichir notre réflexion par votre présence.
Le Président (M.
Jolivet)? Pour le mot de la fin,
pour l'équipe ministérielle, je cède la parole au
député de Charlevoix.
M. Bradet: Madame, messieurs, je suis très heureux de
conclure et il y a une bonne raison à cela. J'ai eu l'occasion pendant
les 17 dernières années de côtoyer des animateurs de
pastorale, comme ancien prof de catéchèse en secondaire V. Il y
avait dans notre programme, à l'époque, "Des rues et des hommes",
un volet qui était: le chrétien et l'engagement socio-politique.
Je l'ai tellement bien enseigné que je me suis retrouvé ici.
Sérieusement, je voudrais vous féliciter de votre
présentation et vous dire que j'ai eu à travailler pendant toutes
ces années avec deux types d'animateurs de pastorale: l'animateur
laïque et l'animateur prêtre. Je dois vous dire que, par
expérience, ce qui me fait peur un peu dans votre démarche, c'est
la superspécialisation des animateurs de pastorale. Je pense que c'est
un complément à la catéchèse qui se donne dans un
cours et il y a une interrelation. Tantôt, madame disait: Est-ce que le
prof est libre quand c'est l'animation de la pastorale? Je ne le pense pas. Il
y a une animation qui se fait autant par l'enseignant que par l'animateur. Tout
cela se fait très bien, mais j'aurais peur, s'il y avait trop de
spécialisation là-dedans, qu'on prêche dans le
désert ou qu'on parle en paraboles, sachant bien que, très
souvent, ces activités doivent être plus terre à terre.
Pour les avoir vécues, les plus belles opérations que le prof et
l'animateur de pastorale mettent en place, très souvent, ne donneront
pas de résultats au bout parce qu'on n'a pas essayé de se mettre
à la place de l'étudiant qui recevait tout cela. Si bien qu'au
niveau élémentaire, cela me fait peur. Je ne vous cache pas que
cela me fait peur.
Autant, ce matin, on disait que c'est important pour l'enseignant
d'avoir une très bonne formation, parce que ce n'est pas n'importe quoi,
enseigner la catéchèse, autant, du point de vue de l'animation
pastorale, je pense qu'il ne faut pas aller trop loin de façon à
avoir trop de théorie et pas assez de pratique. Je ne vous en fais pas
un reproche très large, mais j'ai eu à vivre les deux
expériences et je dois vous dire que c'est avec le laïque qu'on
s'est le mieux entendu, parce qu'il avait peut-être un vécu de
milieu, un vécu de famille qu'on pouvait appliquer dans toute notre
démarche. Donc, ce n'est pas une question, au fond, c'est une...
Une voix: ...
M. Bradet: Ceci dit, au nom de notre parti, j'aimerais vous
féliciter et vous dire qu'autant les animateurs de pastorale que les
profs de catéchèse, ce n'est peut-être pas nous qui avons
les médailles à la fin d'année scolaire, mais vous
remarquerez que dans le "lobby" des polyvalentes, ce sont peut-être les
deux personnes que les élèves viennent remercier les premiers.
C'est peut-être le signe qu'on est le plus près des
élèves et je pense qu'on doit tout faire dans notre
démarche pour que cet aspect soit conservé le plus
intégralement possible. Je vous remercie.
Le Président (M. Jolivet): Je vous remercie au nom des
membres de la commission. Quant à moi, il me reste un devoir, soit
d'ajourner les travaux à 10 heures, le mercredi, 21 octobre prochain.
Mais, d'une façon ou d'une autre, il y aura fort probablement à
ce moment un ordre de l'Assemblée nationale puisqu'elle siégera
dès le 20.
Les travaux de la commission sont ajournés sine die.
(Fin de la séance à 17 h 14)