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(Dix heures huit minutes)
Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre,
s'il vous plaîtl J'inviterais les membres de la commission à
prendre place et j'inviterais également nos invités à
prendre place à l'avant. La commission parlementaire de
l'éducation reprend ses travaux dans le cadre du mandat qui lui a
été confié, à savoir: l'étude des projets de
règlement soumis par les comités catholique et protestant du
Conseil supérieur de l'éducation.
M. le secrétaire, est-ce que nous avons quorum?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le
secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Non, M. le Président.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, je vous
rappelle que l'ordre du jour de la commission parlementaire de
l'éducation pour aujourd'hui, 21 octobre, s'établit comme suit:
dans un premier temps, nous entendrons l'Université du Québec;
ensuite, la Famille de formation des maîtres de l'Université du
Québec à Montréal; à midi, l'Association
québécoise des professeurs de morale et de religion et, à
13 heures, l'Université Laval. Est prévue pour 16 heures
l'audition de la Faculté de théologie de l'Université de
Montréal et, après cela, une période sera consacrée
aux conclusions de cette commission parlementaire de la part du ministre de
l'Éducation et de la part de la porte-parole officielle de l'Opposition
en matière d'éducation.
J'informe immédiatement les membres de cette commission que, par
exception, la commission siégera d'une façon continue
jusqu'à 14 heures, avec une période de répit entre 14
heures et 15 heures pour le lunch. Alors, préparez-vous à une vie
ascétique pour cette journée.
Comme je vous le disais tout à l'heure, nous accueillons
l'Université du Québec, représentée par M. Claude
Hamel, vice-président à l'enseignement et à la recherche
de l'Université du Québec, qui est accompagné de M.
Paul-André Quintin, vice-recteur à l'enseignement et à la
recherche de la même université à Trois-Rivières, et
de M. Jean-Jacques Bachand, directeur du service des études de premier
cycle à l'Université du Québec.
Alors, M. Hamel et messieurs, nous vous souhaitons la bienvenue. Nous
voulons aussi vous remercier d'avoir bien voulu accepter l'invitation de la
commission de l'éducation de venir discuter avec nous et nous faire
connaître vos perceptions et vos réactions concernant les projets
de règlement présentés par les comités catholique
et protestant du Conseil supérieur de l'éducation. Cette
commission parlementaire n'a qu'un but, c'est d'aller chercher le plus de
renseignements possible pour l'aider à faire des recommandations et
à tirer des conclusions sur ces deux rapports.
M. Hamel, si vous voulez bien commencer et nous présenter votre
mémoire, en prévoyant environ 15 à 20 minutes pour sa
présentation et, après, le reste de la période sera
consacré à des discussions entre vous, les gens qui vous
accompagnent et les membres de cette commission. M. Hamel.
Université du Québec
M. Hamel (Claude): Merci, M. le Président. Notre
mémoire étant bref, la présentation le sera
également et la période que vous m'allouez, j'imagine, sera
amplement suffisante.
Ma première remarque est pour dire que l'Université du
Québec tient à exprimer sa satisfaction à la suite de la
décision du ministre de surseoir à la présentation de ces
projets de règlement à son gouvernement pour approbation et de
convoquer la présente commission parlementaire. Au printemps dernier,
l'Université du Québec avait adressé au ministre une
demande en ce sens, pour lui donner le temps de réagir aux projets de
règlement dont elle prenait connaissance avec une certaine surprise
à ce moment.
C'est donc avec un grand intérêt que l'Université du
Quebec accepte de participer à la consultation que mène la
commission de l'éducation sur les trois projets de règlement du
Conseil supérieur de l'éducation. Il s'agit là de
règlements importants qui engagent l'avenir de l'école
québécoise et qui doivent être analysés et
discutés dans cette perspective.
L'Université du Québec, par sa direction, entend, pour sa
part, limiter ses
interventions à la partie des règlements dont l'objet
relève de ses responsabilités, soit la qualification des
enseignants chargés de l'enseignement religieux catholique et les
conséquences de ces règlements sur l'organisation des programmes.
Nous nous abstiendrons en conséquence de discuter et de porter jugement
sur l'opportunité sociale de ces projets de règlement.
Les projets de règlement ont pour effet de déterminer la
formation minimale touchant la foi catholique et l'enseignement moral et
religieux catholique que devront avoir acquise les enseignants pour être
habilités à dispenser cet enseignement aux niveaux primaire et
secondaire.
Au primaire, cette formation devrait totaliser un minimum de 9
crédits. Au secondaire, elle devrait totaliser 30 crédits pour
l'enseignement aux deux premières années et 60 crédits
pour les autres années. Ces exigences de formation sont identiques dans
les trois règlements proposés. L'entrée en vigueur des
règlements nécessitera donc que des modifications soient
apportées aux programmes de formation des enseignants dispensés
actuellement dans notre université.
Depuis la publication des projets de règlement dans la Gazette
officielle, il n'a été possible de procéder qu'à
une analyse sommaire des impacts que ces projets sont susceptibles
d'occasionner sur les programmes universitaires concernés. À
l'intérieur de l'Université du Québec, pour
préparer la présente réaction de la direction, nous avons
dû nous contenter d'une consultation rapide auprès de nos doyens
de premier cycle qui sont responsables dans nos différents
établissements, de ces programmes ainsi qu'auprès de notre
Commission de l'enseignement et de la recherche qui regroupe les vice-recteurs
enseignement-recherche de l'université.
Les difficultés les plus importantes constatées
jusqu'à maintenant concernent les programmes de formation des
enseignants des niveaux préscolaire et primaire. Il faut, en effet,
rappeler que des contraintes très lourdes pèsent
déjà sur ces programmes. Le contenu de ces derniers constitue, en
quelque sorte, un compromis difficilement atteint entre, d'une part, les
exigences posées par le ministère dans le cadre du
règlement no 4 relatif au permis et brevet d'enseignement et, d'autre
part, les objectifs de formation définis par l'université pour
ces programmes.
Oans ces baccalauréats, outre les activités obligatoires
portant sur l'enseignement de la langue maternelle et des mathématiques,
un tiers des activités totales doivent être consacrées
à la préparation à l'enseignement des disciplines ou
groupes de disciplines suivantes: les sciences au primaire; les sciences
humaines au primaire; la catéchèse et les sciences morales; les
moyens d'expression; la langue seconde.
Chaque futur enseignant est tenu de choisir au moins trois groupes de
disciplines parmi les cinq proposés. Il doit, en plus, au cours de son
programme, toucher à tous les secteurs qui constituent le programme
d'études qu'il sera appelé à dispenser.
Oans ce contexte, il faut déterminer s'il est possible d'y
ajouter 9 crédits obligatoires sur les contenus essentiels de la foi
catholique et sur l'enseignement moral et religieux catholique sans que cela ne
se fasse au détriment des autres disciplines à l'intérieur
des 90 crédits alloués pour ces baccalauréats.
Il faut signaler de plus, dans cette perspective de possibilité
d'ajout de crédits, qu'un comité du Conseil des
universités, qui s'est penché sur le secteur de
l'éducation, propose lui aussi des ajouts dans deux recommandations que
je vous cite. Elles sont brèves.
La recommandation 13 de ce comité propose que les programmes de
formation initiale et de perfectionnement des enseignants offrent une
initiation à l'éducation interculturelle et au travail
auprès d'élèves de commaunautés culturelles
variées. La recommandation 14, elle, propose aussi que les
étudiants des programmes de formation à l'enseignement soient
initiés à certaines méthodes de recherche, plus
particulièrement à la recherche applicable à des
situations de classe.
Dans chaque cas, on peut penser que ces recommandations conduiraient
à la mise sur pied de nouveaux cours de 3 crédits chacun qui
viendraient s'ajouter aux 9 crédits pour l'enseignement religieux
catholique et, possiblement, 9 autres crédits pour l'enseignement moral,
ce qui laisse entendre, à ce stade-ci, qu'on pourrait être
amenés à considérer une hypothèse d'ajout de 24
crédits sur 90 dans les programmes de formation aux niveaux
préscolaire et primaire.
D'autres questions de posent aussi pour l'université quant
à l'application de ces règlements. Comment, par exemple,
réconcilier ces exigences avec le souhait que l'on entend émettre
de plus en plus, à savoir que l'on devrait réduire le
degré de spécialisation des programmes de premier cycle pour
donner aux étudiants une meilleure formation fondamentale. Encore
là, je me réfère aux recommandations du comité du
Conseil des universités sur le secteur de l'éducation. La toute
première recommandation de ce comité dit ceci: "Que les objectifs
des programmes de baccalauréat soient revus de façon à
accorder une plus large place à la formation
générale".
L'Université du Québec se préoccupe actuellement
justement de ces questions et elle tiendra, dans deux semaines, un colloque sur
l'orientation de ses programmes de premier cycle, colloque qui réunira
tous les
responsables de ces programmes dans notre réseau, environ 250
personnes. Évidemment, les discussions vont déborder le secteur
de l'éducation pour toucher tous nos programmes de premier cycle, mais
on sera amenés, à cette occasion, à discuter aussi, sans
doute à la lumière du rapport du Conseil des universités,
des programmes d'éducation.
Autre question concernant le niveau primaire. Si l'on offre le choix aux
étudiants entre une filière pour l'enseignement religieux
catholique et une filière pour l'enseignement moral, pourrait-on rendre
ces filières exclusives l'une de l'autre et ne pourrait-on pas
prévoir que plusieurs étudiants, désirant se donner une
formation polyvalente en vue du marché du travail, suivent les deux
filières, ce qui les conduirait à un baccalauréat de 99
crédits? Pourquoi, encore au niveau secondaire, introduire une nouvelle
distinction de niveaux par des exigences différentes,
c'est-à-dire 30 crédits pour les première et
deuxième années du niveau secondaire et 60 crédits pour
l'enseignement moral et religieux au niveau des 3e, 4e et 5e années du
secondaire? Là encore, il nous semble que le comité du Conseil
des universités fait une recommandation qui ne va pas tout à fait
dans ce sens. Il s'agit de la recommandation 2 du conseil qui dit ceci: Que les
programmes de formation initiale des enseignants visent désormais
à une préparation plus générale rendant le futur
enseignant capable d'intervenir dans plus d'une discipline, à plus d'un
ordre scolaire, le cas échéant, et dans des milieux autres que le
milieu scolaire.
Dernière interrogation sur les difficultés d'application:
Comment les universités devront-elles procéder, durant la
période de transition précédant le 1er juillet 1991, pour
les étudiants déjà inscrits à des programmes de
formation initiale et pour les adultes inscrits souvent depuis plusieurs
années à des programmes de perfectionnement?
Devant ces difficultés et ces incertitudes, il nous
apparaît nécessaire de demander que soit reportée
l'application du règlement initialement prévue pour juillet 1988,
d'une part, pour permettre d'y apporter toutes les clarifications requises et,
d'autre part, pour laisser aux universités le temps nécessaire
à l'étude et à l'approbation des modifications des
programmes en cause. Un autre facteur, évidemment, nous semble aussi
justifier l'opportunité de ce report, c'est la publication du rapport du
comité directeur de l'étude sectorielle en éducation du
Conseil des universités, que j'ai cité à quelques
reprises, et les suites qui seront éventuellement données
à ces recommandations.
Au terme de l'analyse qu'il vient de compléter sur le secteur de
l'éducation et au moment même où il consulte les
universités sur le contenu de ce rapport en vue de soumettre un avis au
ministre, il nous apparaîtrait souhaitable que le conseil se penche sur
ce projet de règlement, en examine la portée et le situe dans la
problématique globale du secteur qu'il vient d'étudier. Merci, M.
le Président.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie,
M. Hamel. Je reconnais maintenant le ministre de l'Éducation. M. le
ministre.
M. Ryan: M. le Président, c'est avec plaisir que nous
reprenons nos travaux, ce matin, en compagnie de la direction de
l'Université du Québec que nous sommes très heureux de
rencontrer au sujet de ce projet de règlement du comité
catholique.
J'ai écouté avec attention ce qu'a dit M. Hamel. Comme
nous devons rencontrer, plus tard dans la journée, la Famille de
formation des maîtres de l'Université du Québec à
Montréal, je me dispenserai d'entrer trop dans les détails parce
qu'il faudrait examiner les programmes et les politiques de chacune des
composantes et nous n'avons pas le temps voulu pour faire cet
exercice-là en votre compagnie, si intéressant eût-il
été.
Je voudrais cependant faire quelques observations
générales. Tout d'abord, vous avez soulevé une
difficulté reliée aux travaux qui se poursuivent au Conseil des
universités: sujet très important, évidemment. Une
commission d'étude a publié un rapport assez monumental sur
l'état actuel des sciences de l'éducation, si on peut employer
cette expression discutable, à mon point de vue. Elle a produit des
recommandations qui vont très loin. Maintenant, comme vous le savez, le
Conseil des universités est à examiner ce rapport de son groupe
de travail et doit lui-même soumettre un avis sur ce sujet au ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science au cours des prochaines
semaines, j'imagine. J'attends cet avis avant la fin de la présente
année.
Même quand le Conseil des universités aura émis son
avis, avant que nous puissions passer à l'action, il va s'écouler
beaucoup de temps encore parce que cela demandera des études très
approfondies et on sait que les études avec les établissements
universitaires, en général, cela ne va pas très vite.
Alors, le problème est quand même posé et c'est toute la
question de la politique du gouvernement et des universités, des
composantes du système d'enseignement en matière de formation des
maîtres qui est impliquée là-dedans. Des changements
très importants seront probablement effectués avec le temps. Je
ne sais pas à quel moment, cependant, et je suis même incapable ce
matin de proposer, même à titre indicatif, un quelconque
échéancier.
La question qui se pose est la suivante,
à mon point de vue. Le comité catholique nous a fait part
de ses désirs; il a travaillé à un projet de
règlement pendant peut-être une couple d'années, deux ou
trois ans, d'après ce que j'ai pu constater. Est-ce que l'on peut
assujettir l'acceptation d'un projet de règlement comme celui-là,
qui nous est soumis par un organisme dont c'est le mandat légal
d'établir des règlements pour l'enseignement et les écoles
catholiques, à toutes ces conditions qui risqueraient de ie renvoyer,
à toutes fins utiles, aux calendes grecques ou, au moins, de le rendre
inapplicable pour une période de trois à cinq ans? C'est la
question que je vous pose.
Pour ce qui est des objectifs que poursuit le comité catholique
dans la perspective desquels nous devons nous situer pour l'examen que nous
faisons ensemble - il y a d'autres tribunes pour les objectifs des
universités en général - quelle est votre attitude face
à cela?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Hamel.
M. Hamel (Claude): Mon impression, M. le ministre, c'est qu'il ne
s'agirait pas d'un délai très considérable. En effet, le
Conseil des universités se penche actuellement sur l'avis qu'il doit
vous soumettre et il a demandé aux universités de lui faire part
de leur position à cet égard pour le 1er novembre. Les
universités, compte tenu de l'importance du sujet, ont demandé un
délai d'un mois, donc jusqu'au 1er décembre 1987. Je sais que le
conseil souhaite vous présenter son avis au début de
l'année 1988. Donc, j'imagine que le délai du Conseil des
universités serait de l'ordre de quelques mois.
Une fois que le conseil vous aura soumis son avis et que vous aurez pris
une décision, je pense que les universités peuvent réagir
relativement rapidement. Ce qu'il s'agit de faire pour elles, c'est d'engager
le processus de modification des programmes, en travaillant au niveau des
comités de programmes, des modules, des départements et, ensuite,
de faire cheminer les dossiers -pour ce qui est de l'Université du
Québec -dans les sous-commissions des études, les commissions des
études et le conseil des études de l'ensemble du
réseau.
Ce que nous avions à l'esprit comme délai, car il nous
faut annoncer à l'avance à nos étudiants les modifications
aux programmes, les exigences auxquelles ils devront répondre, c'est un
délai d'un an, puisqu'on prévoit l'application pour juillet 1988.
Les universités doivent faire des annonces à leurs
étudiants beaucoup plus tôt que cela pour l'inscription de
septembre. Et, l'on se disait que, s'il y avait un délai d'un an, si
l'on nous demandait d'agir pour septembre 1989, je pense que nous aurions le
temps de procéder aux modifications requises à la fois par le
nouveau règlement du comité catholique et l'avis du Conseil des
universités. Vous compendrez que nous souhaitons considérer
toutes ces exigences nouvelles simultanément, afin de les inscrire dans
un projet global et aussi cohérent que possible.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Alors, je
reconnais maintenant la députée de Chicouttmi, qui est la
porte-parole officielle de l'Opposition en matière d'éducation.
Mme la députée.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. Hamel,
messieurs, ça me fait plaisir, au nom de l'Opposition officielle, de
vous souhaiter la bienvenue et de vous remercier d'avoir accepté de
participer aux travaux de cette commission. J'ai lu avec attention votre
mémoire. Vous rappelez justement un certain nombre de conditions qui
militent en faveur d'un report du projet de règlement faisant l'objet de
(a présente commission.
Tout à l'heure, le ministre vous demandait: Est-ce qu'il est
possible ou envisageable d'assujettir à des conditions
extérieures l'application d'un projet de règlement
présenté par un organisme légalement constitué qui
s'appelle le comité catholique? J'aurais le goût de poser la
question d'une autre façon et de dire: Est-ce qu'il est possible que le
projet du comité catholique vienne en quelque sorte assujettir
l'école, son financement et son projet, sans intégrer les
différents éléments du projet éducatif?
L'éducation, c'est un tout; quand on parlera de réforme, il
faudra prévoir une réforme qui tienne compte de l'ensemble. (10 h
30)
À présent, vous dites, à la page 2 de votre
mémoire - c'est là-dessus que j'aimerais avoir vos commentaires -
que vouloir introduire, dans la situation actuelle, de nouvelles exigences, de
nouvelles connaissances - par exemple, neuf crédits pour l'enseignement
au primaire - c'est un compromis difficile à atteindre en vertu des
autres exigences et des objectifs de formation. Est-ce qu'on peut penser, comme
le suggèrent d'autres intervenants, que, si c'est difficile à
faire pour former des généralistes, on devrait envisager, au
primaire, de former des spécialistes, en dépit des objections
qu'on a souvent au niveau primaire où on dit qu'on devrait avoir
davantage de généralistes que de spécialistes en raison de
la pédagogie?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Hamel.
M. Hamel (Claude): Mme la députée, vous aurez
compris que, dans notre mémoire,
nous n'avons pas pris position sur cette question parce qu'à
l'intérieur de notre université le débat n'a pas
été complété à cet égard. Nos
départements, nos modules et nos professeurs discutent actuellement ces
questions, C'est dans le cadre de la réflexion globale que je souhaitais
qu'on nous laisse le temps de tenir, tout à l'heure, que l'on pourra
déterminer une position concernant la question que vous soulevez.
Il est sûr que toutes les exigences additionnelles que l'on
propose - on parle toujours surtout de la formation des enseignants pour le
niveau primaire - vont nous amener à réfléchir sur ce
scénario de formation de spécialistes pour quelques
matières, s'il apparaît que la formation de
généraliste devra couvrir tellement de matières qu'elle
deviendra, à toutes fins utiles, irréalisable. Mais, pour
l'instant, comme direction d'université, nous n'avons pas de position
là-dessus. Je sais que certaines de nos unités internes ont, par
ailleurs, des positions à ce sujet que, peut-être, vous pourrez
débattre avec elles au moment où elles rencontreront la
commission.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Madame.
Mme Blackburn: M. Quintin.
M. Quintin (Paul-André): Je voudrais simplement dire, au
nom de l'Université du Québec à Trois-Rivières, que
nous appuyons fortement la position soutenue par l'Université du
Québec, mais la question que vous soulevez est au coeur des discussions
que nous avons actuellement. Ce n'est pas tellement sur ce règlement en
particulier que sur tout un contexte qui fait qu'on essaie de plus en plus
d'ajouter des choses, d'une année à l'autre à cette
formation de généraliste faisant en sorte que le modèle
est en train d'éclater sans que la question fondamentale soit
posée, à savoir... Qu'attend-on attend vraiment de
l'enseignant?
Nous sommes actuellement dans des situations où, d'une part, nous
avons une pression très forte de réflexion intellectuelle
à faire sur la formation plus fondamentale. Nous sommes en train de la
faire chez nous, comme dans plusieurs universités, sur la notion de
formation fondamentale dans le cadre de la préparation de plans
triennaux et les sciences de l'éducation participent à cela. Le
comité d'étude sectorielle nous amène aussi dans cette
direction de réflexion sur la formation générale. Par
ailleurs, nous nous retrouvons, en plein coeur de cette réflexion,
à devoir examiner la possibilité d'aller dans une direction tout
à fait inverse pour une question plus immédiate et plus
ponctuelle.
C'est ce contexte, actuellement, qui est difficile à vivre pour
nous dans le sens d'avoir une réponse rapide et sur laquelle nos gens
puissent s'entendre. Il faut dire aussi que, selon nos structures et la
composition même de la formation, il n'y a pas seulement la didactique
qui est impliquée, il y a toute la formation disciplinaire dans les
différents programmes. Chaque fois qu'on essaie d'introduire quelque
chose, il faut sortir autre chose aussi. Cela suppose des discussions sur le
modèle même de la formation et on n'a pas eu le temps de les tenir
jusqu'à maintenant.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Quintin.
Mme la députée.
Mme Blackburn: Tout à l'heure, M. Hamel nous disait: II y
aurait deux filières: la filière pour l'enseignement religieux et
la filière pour l'enseignement moral. Comme vos diplômés et
vos étudiants voudront avoir le plus de chances possible de se placer,
ils seraient alors devant l'obligation de choisir les 9 crédits dans
chacune des filières, c'est-à-dire, 18 crédits, ce qui
porterait à 99 crédits la formation qui vous donne un peu plus de
chances de vous placer.
Je pense qu'il est superflu de vous demander si c'est réalisable
sans porter atteinte à l'équilibre du programme. Selon vous, si
c'était la situation même en réaménageant le
programme de manière à tenir compte de ces nouvelles exigences,
est-ce qu'on serait devant l'obligation de prolonger la durée de
formation des maîtres ou encore est-ce que c'est envisageable, cela? Je
sais que vous n'avez pas terminé vos consultations sur cela, mais est-ce
qu'on peut envisager sérieusement une telle hypothèse sans
tomber, sans être placé devant la nécessité de
prolonger la formation des maîtres ou encore de former des
spécialistes?
M. Hamel (Claude): Techniquement, c'est un scénario que
l'on peut considérer bien sûr, l'allongement pour le niveau
primaire du programme, si la somme des exigences est telle qu'elles ne peuvent
être satisfaites à l'intérieur de 90 crédits. Cela
posera d'autres sortes de questions concernant les conséquences de
l'allongement du programme: des questions sur le financement, par exemple, des
questions sur l'intérêt des étudiants également
à prolonger leur formation d'une session ou de deux sessions. Nous avons
des programmes de premier cycle à l'université qui ont plus que
90 crédits. On a des programmes de 105 crédits. On a des
programmes qui vont jusqu'à 120 crédits dans certains domaines
professionnels.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Une autre
intervention, madame?
Mme Blackburn: Oui, selon vous, puisque vous parlez d'un
programme de formation - là, c'est plus une opinion personnelle, je le
pense bien, que je vous demanderais - il y a deux filières: la
préparation pour l'enseignement religieux et la préparation pour
l'enseignement moral. Certains ont soutenu ici que du moment où vous
aviez une formation en enseignement religieux et en morale catholique, vous
pouviez aussi enseigner la morale dite sans étiquette.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Quintin.
M. Quintin: Oui. J'insisterais, pour ma part, sur le fait qu'une
distinction doit être faite dans le mode d'approche, de toute
façon - je parle plus comme philosophe, peut-être, que comme
enseignant - car il y a sûrement des bases différentes et des
conceptions différentes qui doivent être présentes
lorsqu'il s'agit d'enseignement moral absolument non religieux.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Monsieur.
M. Bachand (Jean-Jacques): Je voudrais simplement ramener le
débat là où nous avons souhaité qu'il soit
placé, c'est-à-dire sur le caractère technique, si on
veut, de la réalisation de la demande. M. Hamel a affirmé au
début de son exposé que la principale raison pour laquelle on
n'était pas en mesure maintenant d'y donner suite, c'était une
question de délai, c'est-à-dire l'ensemble de la démarche
dans laquelle nous sommes actuellement à l'Université du
Québec, pas seulement à l'Université du Québec,
mais très fermement, en tout cas, à l'Université du
Québec. L'ensemble de la démarche est si complexe, à cause
de l'étude sectorielle, à cause du colloque que nous tenons sur
l'étude sectorielle du Conseil des universités, à cause du
colloque que nous tenons au début de novembre sur les orientations du
premier cycle, à cause de toute cette réflexion qu'on a mise en
branle dans le système de l'Université du Québec, qu'on ne
voit pas comment on pourrait répondre maintenant à la
demande.
C'est ce sur quoi on voudrait insister pour le moment. On voudrait avoir
du temps pour réfléchir et pour mettre cette demande dans
l'ensemble de la réflexion. Si on reçoit du ministre, demain
matin, l'ordre de faire cela, de mettre les 9 crédits d'enseignement
religieux dans nos programmes, on peut le faire en six mois. Techniquement, il
n'y a pas de problème. On passe par les étapes: approbation du
conseil des modules, consultation du département concerné,
commission des études locales, conseil des études, etc. On passe
les étapes et en six mois, c'est fait. Mais cela désorganise tout
le reste. On peut toujours donner suite à cette demande. Dans le
contexte actuel des autres demandes, pression systématique pour
augmenter le nombre de crédits de formation générale dans
les baccalauréats, tous les baccalauréats, pas seulement de
l'éducation, tout le système où on dit que la formation
générale est décidément trop faible, les
étudiants sortent avec un diplôme de bachelier un peu
insignifiant. Ils ne savent pas lire, ils ne savent pas écrire, ils ne
savent pas s'exprimer, ils ne savent pas ceci, ils ne savent pas cela. On dit:
On va essayer de corriger cela. Mais, en même temps, ce qu'on nous dit,
c'est: Si vous rajoutiez 9 crédits de foi catholique, 9 crédits
de morale, 2 crédits de préparation à la recherche
appliquée en sciences de l'éducation pour le système
scolaire, 3 crédits sur le multiculturel, etc., à la demande du
Conseil des universités, en plus d'améliorer la formation
générale.
Actuellement, seulement pour faire un petit schéma simple, notre
baccalauréat d'enseignement au primaire le moins
spécialisé compte 66 crédits obligatoires pour
répondre aux normes minimales du ministère. Tous les autres ont
plus de crédits obligatoires que cela: 72, 75, 78. Où va-t-on
mettre les autres crédits? Après cela, quand fait-on de la
formation générale, et ainsi de suite? La demande nous arrive
à un moment où on ne peut pas la gérer, pour tout dire.
Mais on peut dire oui demain matin et, dans six mois, vous aurez une
réponse. Vos 9 crédits, vous les aurez. Mais comment pour le
reste? C'est la question qu'on a à régler aussi.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Remarquez, M.
Bachand, que ce ne sont pas les 9 crédits de la commission de
l'éducation, ce sont les 9 crédits proposés par...
M. Bachand: Oui, oui, oui.
Le Président (M. Parent, Sauvé): ...les deux
comités.
M. Bachand: Excusez-moi.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Nos 9
crédits, on ne les a pas encore, nous non plus.
M. Bachand: Pardonnez.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Donc, vous demandez
un délai, parce que, taut à l'heure, une des remarques du
ministre, qu'il a déjà formulée d'ailleurs à
d'autres moments de la commission parlementaire, a été de
dire: Quand on demande quelque chose à l'université, cela ne va
pas vite. Ce que vous dites, c'est que c'est un délai d'une année
additionnelle, c'est-à-dire que le programme soit applicable, chez vous
en 1989 plutôt qu'en 1988, ce serait suffisant. Ai-je bien compris?
M. Bachand: C'est faisable.
Mme Blackburn: Ah bon! Alors...
M. Bachand: Mais, attention! C'est faisable si le Conseil des
universités ne s'entête pas dans un certain nombre de ses
demandes. Parce qu'il y a des demandes dans le rapport du Conseil des
universités qui vont bousculer beaucoup l'Université du
Québec. La loi prévoit qu'on s'occupe en effet de la formation
des maîtres. Si on suivait certaines recommandations du Conseil des
universités, telles qu'elles sont formulées, la moitié du
mandat de l'Université du Québec tomberait tellement certaines
recommandations ne vont pas dans le sens de l'existence de l'Université
du Québec en vertu même de sa loi. Cela demande plus que six mois,
n'est-ce pas?
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Mme la
députée.
Mme Blackburn: Bien. MM. Hamel, Bachand et Quintin, je vous
remercie de votre participation aux travaux de cette commission. Soyez
assurés que c'est avec beaucoup d'intérêt que je suis
à la fois ce dossier sur la formation des maîtres et le rapport
sectoriel du Conseil des universités, ainsi que tout le dossier de
l'Université du Québec, de façon générale,
soit les rapports Després et de l'UQ qui sont plus récents.
À nouveau, je vous remercie de votre participation. J'espère que
vos commentaires et recommandations seront pris en considération par le
ministre.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la
députée. M. le ministre.
M. Ryan: M. le Président, je remercie les
représentants de l'Université du Québec. J'ai pris note de
la demande essentielle qui a été formulée, que M. Hamel a
tenté, tantôt, de ramener à un délai d'application
d'un an. Si c'est de cela qu'il s'agit réellement, ce sont des choses
qui peuvent être examinées. On a déjà
été saisis de difficultés d'application par d'autres
intervenants depuis le début des travaux de la commission. Je pense bien
qu'il faudra voir à ce que le passage d'un régime à un
autre soit assuré harmonieusement.
Au sujet des délais qu'entraînera toute cette étude
sur le problème de fond de la formation des maîtres, je suis
porté à être plus pessimiste que vous. Je pense que cela va
prendre une période de temps pas mal plus longue que celle que vous
esquissiez tantôt mais, de toute manière, l'expérience nous
instruira.
J'ajoute, peut-être en guise de dernier commentaire, une opinion
qui nous a été communiquée par l'Association
québécoise des doyens et directeurs pour l'avancement des
études et de la recherche en éducation sur les projets de
règlement. C'est une association qui regroupe les doyens de treize
unités universitaires de formation et de perfectionnement.
Peut-être qu'on est portés à exagérer la
difficulté; je ne le sais pas pour l'instant. Mais on va quand
même l'examiner attentivement. Ils nous disaient, de façon
générale, que les programmes de formation des enseignants dans
les universités, grâce à des aménagements mineurs,
peuvent faire place aux exigences prévues par les règlements en
cause. Je pense qu'à la minute où il n'est pas question de
chambarder tous les programmes pour les conformer uniquement en fonction des
exigences ««du comité catholique et de faire comprendre aux
étudiants qu'il y a des exigences particulières pour ceux qui
voudront enseigner la religion ou la morale, c'est bien différent.
Déjà, dans la plupart des départements, on a des
programmes ou des cours qui répondent aux attentes du comité
catholique. Le problème, c'est qu'il y a bien des étudiants qui
passent à travers le cours complet sans s'y inscrire. Peut-être
faudra-t-il identifier clairement la difficulté. Une fois qu'on l'aura
identifiée, peut-être que l'on conclura aussi qu'elle n'est pas
tout à fait la même que celle que semble évoquer la
présentation de l'Université du Québec. Je vous pose la
question. Je ne la résous point. Mais on va entendre d'autres
institutions aujourd'hui. Cela va contribuer à nous éclairer
davantage. Pour l'instant, cependant, je ne suis pas convaincu par votre
présentation quant à l'ampleur de la difficulté.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci.
Vouliez-vous répliquer, M. Hamel?
M. Hamel (Claude): Oui, si vous le permettez, M. le
Président.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Avec plaisir,
oui.
M. Hamel (Claude): En effet, M. le ministre, on pourrait - je
pense qu'on l'a indiqué - agir assez rapidement, de façon
ponctuelle et ad hoc, parce que les cours existent généralement
dans nos banques de cours et la petite souplesse qui reste dans les programmes
pourrait permettre de faire
cela de façon ad hoc. Jusqu'à maintenant, et vous l'avez
signalé, les étudiants fréquentent peu ces
activités et s'il fallait que, du jour au lendemain, on doive offrir
à un grand nombre d'étudiants ces cours peu
fréquentés jusqu'à maintenant, cela demanderait une
certaine adaptation dans l'affectation des professeurs, mais il serait possible
de le faire et, effectivement, assez rapidement, mais en faisant abstraction,
par ailleurs, du débat global que l'on souhaite tenir, dans le sens de
ce que l'on a dit ce matin.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie
beaucoup, M. Hamel. Les membres de la commission parlementaire vous sont
reconnaissants de votre participation. Encore une fois, merci.
Nous suspendons nos travaux pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 10 h 47)
(Reprise à 10 h 55)
Le Président (M. Parent, Sauvé):
J'invite les membres de ta commission à prendre place et j'invite
aussi nos prochains invités, soit la Famille de formation des
maîtres de l'Université du Québec à Montréal,
à prendre place en avant.
À l'ordre, s'il vous plaît! La commission parlementaire
poursuit ses travaux. À l'ordre, s'il vous plaît! J'invite les
membres de la commission à prendre place.
Alors, la commission parlementaire de l'éducation poursuit ses
travaux et accueille la Famille de formation des maîtres de
l'Université du Québec à Montréal. La Famille de
formation des maîtres de l'Université du Québec à
Montréal est représentée par Mme Dolorès
Gagnon-Heynemand, qui est la vice-doyenne de la Faculté de formation des
maîtres de l'Université du Québec à
Montréal.
À l'ordre, s'il vous plaît!. Je vous ferai remarquer que la
commission a repris ses travaux. À l'ordre, s'il vous plaît! Si
vous voulez prendre place, la commission siège actuellement. M. le
député de Richelieu, M. le ministre de l'Éducation, je
vous rappelle à l'ordre. Je vais m'acheter une cloche.
Alors, Mme Heynemand, nous vous écoutons. Si vous voulez bien
nous présenter les gens qui vous accompagnent, Mme Heynemand, et
enchaîner avec votre présentation. La commission a environ 45
minutes à consacrer à votre organisme.
Famille de formation des maîtres de
l'Université du Québec à Montréal
Mme Gagnon-Heynemand (Dolorès): M. le Président,
M. le ministre de l'Éducation, distingués membres de la
commission parlementaire, mesdames et messieurs, il me fait plaisir de
présenter les membres de ma délégation. A ma droite. M.
Guy Lusignant, le doyen adjoint aux études de premier cycle à
l'Université du Québec à Montréal; à ma
gauche, Mme Louise Julien Bordeleau qui est la directrice adjointe du
département des sciences de l'éducation; à ma droite, M.
Guy Ménard, le directeur du département des sciences religieuses.
Je vous ferais remarquer que, l'autre jour, vous avez rencontré le
directeur du module des sciences religieuses; M. Ménard est directeur du
département de sciences religieuses. À ma gauche, Mme Nathalie
Morissette, étudiante et membre de la commission des études.
C'est à ce titre qu'elle vient, Mme Nathalie Morissette.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, mesdames et
messieurs, bienvenue. Mme la Présidente, nous vous écoutons.
Mme Gagnon-Heynemand: Vous me permettrez de ne pas lire notre
mémoire en entier, vous en avez déjà pris connaissance, je
préfère plutôt vous faire une lecture commentée de
certains paragraphes qui le composent. J'espère ainsi respecter le temps
alloué pour les discussions. J'indiquerai le numéro du paragraphe
du mémoire auquel je me réfère et j'identifierai chaque
fois la partie qui en constitue le commentaire.
Paragraphe 1, commentaire: La Famille de formation des maîtres est
l'une des six familles ou groupes de modules qui administrent tous les
programmes de premier cycle universitaire. Elle compte neuf modules qui
encadrent environ 4600 étudiants. Les règlements du comité
catholique affecteraient à divers titres six de nos neuf modules,
c'est-à-dire près de 2870 étudiants.
Paragraphe 2, commentaire: Le débat que fait naître le
projet du comité catholique nous semble beaucoup plus large que la
simple réglementation des crédits universitaires exigés
pour obtenir l'autorisation légale de dispenser l'enseignement moral et
religieux catholique. Le contexte socioculturel nouveau dans lequel se situent
nos écoles et l'université pose de manière aiguë le
problème de l'identité culturelle québécoise face
à un pluralisme socioculturel de plus en plus marqué qui va en
s'accélérant. Le projet du comité catholique nous semble
lié à l'avenir de l'école québécoise dans le
sens des nouveaux défis posés à l'identité
catholique par le multiculturalisme.
Si nous avons bien compris, il s'agit pour les enseignants de recevoir
une formation universitaire à l'enseignement moral et religieux
catholique dans le nouveau contexte créé par la présence
de multiples religions et par l'avènement de sectes de plus en plus
nombreuses qui laissent souvent
perplexes les élèves et, parfois aussi, les enseignants
eux-mêmes. Des besoins nouveaux exigent des réponses
adaptées. Plus tes enjeux sont profonds et complexes, plus l'exigence de
la compétence des enseignants devient impérieuse.
L'université se sent particulièrement responsable
d'apporter un éclairage dans ces questions qui mettent à
l'épreuve son esprit de recherche et d'adaptation réelle, en
particulier, dans la formation des maîtres à un enseignement moral
et religieux catholique.
Paragraphe 3: Le mémoire que la Famille de formation des
maîtres de l'UQAM, soucieuse d'un esprit d'ouverture à la
société québécoise, soumet à l'examen de la
commission de l'éducation de l'Assemblée nationale se
répartit en cinq sections. La section I: Quelques notes historiques
reliées au projet de règlement du Conseil supérieur de
l'éducation présentée par le comité catholique.
Paragraphe 7: L'Université du Québec a été
créée en 1968 et la formation des maîtres a
été confiée aux universités l'année
suivante. Commentaire: Dans son sommaire déposé en septembre
1986, le comité directeur de l'étude sectorielle en
éducation du Conseil des universités écrit: II est
hautement significatif que le transfert de la formation des maîtres de
l'école normale à l'université ait commencé en
1968: année de la remise en question des systèmes
d'éducation dans le monde. Ce changement organisationnel trouve son
explication dans des transformations socioculturelles beaucoup plus profondes.
Au Québec, la culture traditionnelle est de plus en plus
confrontée dans ses croyances, ses idéaux, son mode
d'organisation et sa définition des rôles par l'apparition de
nouvelles cultures qui véhiculent de nouvelles façons de penser,
de nouveaux objectifs sociaux, une nouvelle répartition des rôles
et du pouvoir.
Dans un tel contexte - c'est peut-être la partie plus importante -
le maître n'est plus le représentant d'une culture, comme l'a
noté Fernand Dumont, le transmetteur des valeurs éprouvées
de la société, il se trouve face à face à des
élèves qui désormais ont leur propre code culturel, leur
littérature et leur musique. Alors, le maître se transforme en
enseignant et l'enseignement fait peu à peu place à
l'apprentissage comme pôle important du processus d'éducation. Les
changements de rôles trouvent leur justification et leur inspiration dans
les multiples modèles éducatifs proposés par la
littérature. On en compte environ 80.
Ces propos nous amènent à rappeler que le défi
auquel nous faisons face dans le présent débat tient aux choix
qui s'imposent en ce moment dans la formation des maîtres au double point
de vue de l'identité culturelle québécoise et du
modèle de formation des maîtres, à savoir celui de
l'identité professionnelle des enseignants. L'enseignant est-il un
professionnel ou un simple spécialiste d'une discipline?
Paragraphe 8: Commentaire. Il faut mentionner ici, force nous est de le
reconnaître, que des universitaires ont fait, à l'époque et
aussi par après, le pan d'une société
québécoise de plus en plus sécularisée qui
bannirait progressivement de l'école l'enseignement religieux catholique
et peut-être même tout enseignement religieux. Certains
universitaires se sont alors appliqués à défendre au moins
l'enseignement religieux de type purement culturel, sans
référence à une confession particulière. La
religion était alors abordée sous l'angle
phénoménologique. La connaissance du phénomène
religieux prenait ainsi le pas sur la connaissance de foi prise en
elle-même.
Sans enlever quoi que ce soit à la valeur de cette option
universitaire, nous nous devons de constater qu'il s'est creusé ici un
fossé entre les exigences des parents pour l'éducation religieuse
de leurs enfants à l'école et le pari de certains universitaires
à ce sujet. Sans l'expliciter peut-être, on oeuvrait dans un monde
de présomption en pensant prématurément, semble-t-il, que
la modification de la pratique religieuse entraînait de soi que les
parents abandonneraient leur droit d'exiger pour les enfants à
l'école une education religieuse conforme à leurs croyances.
La réalité actuelle nous semble bien démontrer le
contraire. Sur ce point, le comité catholique nous paraît vouloir
insister sur le fait que les parents doivent toujours être reconnus comme
les premiers responsables de l'éducation de leurs enfants et qu'à
ce titre ils peuvent demander à l'école de dispenser un
enseignement religieux qui soit conforme à leurs croyances. Par voie de
conséquence, on demande que l'université prépare des
enseignants pour l'école réelle, telle que les parents la
veulent. Nous souscrivons à cette problématique fondée sur
le droit et en fait.
Paragraphe 19. L'article 16.2 des règlements précise les
nouvelles dispositions relatives à l'autorisation légale de
dispenser l'enseignement moral et religieux catholique au primaire: l'exigence
de neuf crédits universitaires. Commentaire: C'est ici le moment
d'affirmer, avec plusieurs responsables des programmes universitaires de
formation des maîtres, l'importance d'une formation qui conduise le futur
enseignant à une certaine synthèse de la foi et de la morale
catholique.
Un certain nombre de raisons militent en ce sens. Tout d'abord,
l'étude des sources de la révélation est d'autant plus
important qu'il s'agit de connaître les assises de l'identité
catholique. À ce chapitre, semble-t-il, l'initiation à la Bible
s'impose.
Deuxièmement, ajoutons à cela l'étude de la
tradition qui permettrait de montrer comment l'Église s'y est prise pour
conserver son identité dans toutes les cultures. Troisièmement,
il faut y joindre la connaissance des autres religions professées par
des élèves qui côtoient ceux qui sont de foi catholique; le
souci de sauvegarder l'identité catholique pose le défi de
comprendre d'autres croyances à la lumière de la foi catholique.,
Une étude comparée des religions s'impose donc maintenant dans la
formation des maîtres de l'école québécoise.
À cela s'ajoute un autre élément:
l'émergence du phénomène des sectes religieuses qui
appelle un éclairage que ne devaient pas consentir, autrefois, les
maîtres de l'enseignement catholique. Cinquièmement, vient ensuite
la morale catholique, morale révélée dans ses sources,
déterminant des règles de comportement accordées à
la dignité du croyant» Au futur maître, il faudrait
enseigner en quoi consiste cette morale, ce qui la différencie des
autres morales et comment l'enseigner à de jeunes enfants et
adolescents.
Sixièmement, il faudrait de toute urgence s'attaquer au
problème de la pédagogie de la foi catholique. Nous nous trouvons
en présence d'une forme toute particulière d'éducation de
la personne, de son intelligence, de son affectivité, de son insertion
dans une communauté de croyants. Toute pédagogie, on le sait,
repose sur le postulat que l'élève possède en
lui-même tous les éléments de sa croissance personnelle et
sociale. La pédagogie repose aussi sur l'importance du rôle du
maître dans cette croissance, pour autant qu'il suscite et oriente une
démarche chez l'élève. La pédagogie de la foi
procède des mêmes postulats, à la différence que
l'élève et le maître puisent à des sources
révélées.
Tous ces éléments du savoir moral et religieux catholique
rendent compte, en ce qui nous concerne, de l'opportunité des nouvelles
règles de qualification que préconise le Comité
catholique. Nous ne redirons jamais assez combien une formation universitaire
est nécessaire, ici, le maître, par fonction, devant faire figure
de maturité, faire montre de sa compétence auprès des
élèves. Il va de soi que le minimum de 9 crédits
universitaires, compte tenu de l'ampleur du champ d'études dans lequel
il faudra évidemment couper, s'accorde au fait que les enseignants du
primaire sont des généralistes.
Le paragraphe 23: L'article 17.2 précise les nouvelles
dispositions relatives à l'autorisation légale de dispenser
l'enseignement moral et religieux catholique au secondaire. On exige 30
crédits universitaires pour enseigner aux deux premières
années du secondaire et 60 crédits aux autres années.
Commentaire: Nous pensons ici que la distinction établie par le
comité catholique entre les deux cycles du secondaire reflète une
confusion asez répandue entre les règles de certification et les
règles d'affectation. Les règles de certification, on le sait,
relèvent de la formation universitaire, jusqu'à un certain point,
et, à ce titre, on ne voit pas comment on pourrait exiger moins que les
60 crédits universitaires dans la discipline. Il s'agit là de
conditions généralement admises dans un programme d'enseignement
au seondaire conduisant à l'obtention d'une autorisation légale
d'enseigner. Le règlement no 4 est clair à ce chapitre et nous
l'avons toujours interprété en ce sens à l'UQAM, ainsi que
dans les autres universités.
On ne voit pas non plus, en pratique, comment un enseignant pourrait
vouloir se qualifier au seul premier cycle du secondaire, sans que cela lui
pose à lui-même et aux commissions scolaires des problèmes
importants de mobilité et de polyvalence. Les règles
d'affectation, par contre, reflètent des commissions scolaires qui
doivent répondre à des situations très variées,
avec un personnel enseignant déjà détenteur d'un permis
d'enseignement. Nous aimerions recevoir du comité catholique des
éclaircissements à ce sujet, quant à la distinction qu'il
introduit entre les deux cycles du secondaire.
Section III: La réponse de la Famille de formation des
maîtres au projet de règlement. Paragraphe 24, commentaire: La
Famille de formation des maîtres tient à manifester clairement
à la commission parlementaire de l'éducation qu'elle donne son
appui de principe au projet de règlement du comité catholique.
Nos programmes actuels, bien sûr, permettent de certifier nos
diplômés pour le primaire et, par voie de conséquence, pour
l'enseignement moral et religieux catholique, mais il faut reconnaître
qu'ils n'y préparent pas, du moins si l'on se réfère aux
exigences actuelles indiquées dans le projet de règlement du
comité catholique tel que nous l'interprétons. Il y avait donc
place à l'UQAM pour une intervention non seulement opportune, mais
urgente à cet égard. Nous voulons dire à cette commission
que nous possédons les structures universitaires et de programmation qui
permettent de répondre aux attentes des règlements du
comité catholique, moyennant des ajouts dans la banque de cours de
l'UQAM.
Paragraphe 25: Notre réponse de principe pourrait se
concrétiser dans une modification de programme. Commentaire: Nous sommes
disposés à modifier nos programmes en y introduisant, au
primaire, deux options au bloc de cours. La première porterait sur
l'enseignement moral et religieux catholique et la seconde, sur l'enseignement
moral.
Paragraphe 26. Commentaire. Voici ce que nous pourrions faire dès
maintenant. Nous pourrions enrichir notre banque de cours de manière
à respecter sans équivoque les exigences du nouveau
règlement du comité catholique. Les échéances
prévues par le calendrier universitaire à cet effet nous le
permettent, de sorte que ces cours pourraient devenir disponibles dès
l'automne 1968. Déjà, deux départements nous ont
assurés de leur collaboration à ce sujet: le département
des sciences de l'éducation, dont l'exécutif a appuyé
d'emblée le mémoire remis à votre commission, et le
département des sciences religieuses qui se dit disposé,
après l'adoption des règlements seulement, à donner
satisfaction aux requêtes de la Famille de formation des
maîtres.
Par ailleurs, la structure de nos programmes du primaire se
présente sous la forme de trois composantes: des blocs de cours
obligatoires, des blocs de cours à option et des blocs de cours libres.
Chaque étudiant doit dessiner sa propre démarche à
l'intérieur des balises de ces programmes, de manière à
accumuler l'ensemble des 90 crédits exigés pour un
baccalauréat. Or, une banque de cours enrichie nous permettrait d'offrir
de nouvelles possibilités aux étudiants dans les blocs de cours
à option et de cours libres. Cela n'affecterait pas les blocs de cours
actuellement obligatoires. Les étudiants se verraient alors offrir la
possibilité de choisir un ensemble de cours répondant aux
exigences des crédits universitaires prévues par les
règlements.
Paragraphe 27. En fait, le seul de nos programmes qui permettrait
actuellement d'inscrire des étudiants sans devoir procéder
à une modification de programme est notre certificat en sciences de
l'éducation. Ce certificat qualifie pour l'enseignement au secondaire
les candidats ayant déjà acquis une formation disciplinaire dans
une des matières enseignées au secondaire. En ce sens, ce
certificat en sciences de l'éducation pourrait assurer la formation
pédagogique, pour des fins d'obtention d'un permis d'enseignement au
secondaire, des candidats détenteurs d'un diplôme de premier cycle
en théologie catholique, en sciences religieuses ou l'équivalent.
L'application des nouveaux règlements, s'ils étaient
adoptés, pourrait donc se faire dès le trimestre d'hiver 1988,
mais dans le strict cadre du certificat en sciences de l'éducation.
Paragraphe 28. Commentaire. Nous nous sentons responsables de
préparer des maîtres pour l'enseignement de la morale et nous
souscrivons entièrement au fait qu'une telle préparation de
niveau universitaire est absolument indispensable. En effet, de même
qu'il existe une régulation objective de la foi catholique au moyen des
énoncés de la foi catholique proposés par le
magistère ecclésial, il existe aussi une régulation de
l'agir humain qui, pour ne pas être religieuse, n'en demeure pas moins
objective, ses références étant l'ensemble des
comportements reconnus par une société comme acceptables ou
inacceptables.
Bref, à défaut d'une telle référence
objective, on le sait, une morale ne saurait être reconnue comme telle.
Ce champ d'études est de taille. Qu'on songe à l'importance, dans
un contexte multiculturel, de ne pas laisser les enseignants dans l'ignorance
des diverses morales: morale épicurienne, kantienne, morale religieuse
protestante, catholique, musulmane, hindouiste - et on peut en mettre
shintoïste, sikh, etc. Qu'on pense à l'importance de faire des
études comparées des diverses morales et d'en faire la critique
car l'esprit humain, on le sait, ne cherche pas seulement à saisir les
choses sous leur aspect esthétique - cela nous fait plaisir, c'est beau
- mais sous leur aspect de vérité. Il faudra donc y joindre une
étude différentielle de ces morales et de ses contrefaçons
telles que le laxisme et le rigorisme.
À cela s'ajoutent des études psychologiques plus
récentes sur le développement génétique du sens
moral chez l'enfant et chez l'adolescent et des études sociologiques sur
le comportement des sociétés. S'ajoutent aussi les nouveaux
problèmes de moralité publique que pose le progrès des
sciences. Que l'on songe seulement aux nouvelles techniques de
fécondation qui provoquent de nouveaux rôles sociaux tels: les
parents générateurs, la mère porteuse, les parents
sociaux, etc. Ajoutons que, devant le choc du multiculturalisme et des
multiples confessions religieuses, l'esprit humain veut en arriver à
dégager les éléments d'une morale, entre guillemets,
naturelle qui convient dans son ensemble à l'agir humain
socialisé, valable pour tous, dans toutes les cultures, fondant
l'existence ordonnée et pacifique des diverses sociétés et
leur permettant de vivre entre elles en harmonie.
Terminons en disant que, si nous avons retenu trois critères pour
évaluer les programmes d'enseignement moral et religieux catholique, au
paragraphe 15, de même, nous avons établi trois critères
relatifs à l'évaluation de la formation universitaire en
formation morale. 1) Ces critères devraient faire place à la
connaissance des diverses morales et d'une morale naturelle; 2) ces
critères devraient comporter l'étude des programmes et des
instruments pédagogigues approuvés en cette matière par le
ministère de l'Éducation; 3) ces crédits devraient
être marqués par une connaissance de la pédagogie de l'agir
humain socialisé.
Inutile d'insister pour dire combien nous
souscrivons à l'idée que ce champ de connaissances doive
faire l'objet d'études universitaires par les futurs enseignants si l'on
veut, en particulier, les préparer convenablement à dispenser
l'enseignement de la morale.
Le paragraphe 29: Les futurs maîtres du primaire qui le
désireront pourront, en tenant compte des aménagements que nous
leur fournirons, se donner également une formation polyvalente.
Commentaire: Je tiens à ajouter que je n'ai pas terminé
les consultations sur le commentaire que je vais vous formuler. Si nous avons
bien compris les règlements du comité catholique, un enseignant
du primaire probablement n'aurait pas le droit de refuser de dispenser des
cours de morale dite non confessionnelle ou naturelle. Les futurs maîtres
qui voudront exercer cette option, dès l'université, pourraient
s'inscrire à des cours de morale naturelle. Ce qui veut dire qu'ils
pourraient être disponibles dans les commissions scolaires pour donner
ces cours de morale naturelle et on ne sentirait pas le besoin de recourir
à des spécialistes pour enseigner la morale. Nous n'avons
cependant pas eu le temps de terminer notre consultation pour confronter nos
dires aux différentes commissions scolaires.
La section IV: Une demande de la Famille de formation des maîtres
relative au projet de règlement. Paragraphe 30, commentaire: Le sens de
notre demande de surseoir à l'application des règlements veut
dire qu'il nous faut du temps pour modifier nos programmes si nous voulons
former des enseignants avec des programmes approuvés. Bien entendu, nous
pourrons, s'il le faut, offrir des cours d'enseignement moral et religieux
catholique approuvés par les instances internes de l'UQUAM qui
respecteraient à notre niveau les exigences des nouveaux
règlements, mais ces cours ne feraient alors pas partie d'un programme
approuvé.
Paragraphe 31: Ce report de l'application des règlements
projetés nous paraît également justifié par la
publication récente du rapport du comité directeur de
l'étude sectorielle en éducation du Conseil des
universités, instance qui joue un rôle privilégié
dans la concertation des programmes universitaires. Nous anticipons
déjà que les recommandations contenues dans le rapport du
comité directeur auront pour effet d'amener les responsables de la
programmation en formation des maîtres à procéder à
de nouveaux aménagements à des programmes, du moins, en ce qui a
trait à la concertation souhaitable à cet égard.
Permettez-nous d'ajouter un souhait qui ne s'adresse pas
spécialement à l'enseignement catholique. Je profite de
l'occasion qui m'est fournie en tant que vice-doyenne de la famille de
formation des maîtres pour exprimer ce souhait: Que soit examinée
attentivement par le ministère de l'Éducation la situation
injuste que nous vivons à l'UQAM au sujet de notre certificat en
sciences de l'éducation. Lorsqu'on y compare les conditions d'obtention
du permis d'enseignement avec celles qui prévalent dans une autre
université à Montréal, on se rend compte qu'à
l'UQAM on doit exiger un premier grade universitaire, c'est-à-dire 90
crédits, alors que 60 crédits suffisent dans une autre
université pour un certificat équivalent. Nous demandons que
cette pratique soit normalisée en ce sens. Il nous semble que le projet
de règlement du comité catholique soit extrêmement opportun
et tout à fait à propos puisqu'il permettra, nous
l'espérons, de normaliser les conditions d'obtention du permis
d'enseignement au secondaire dans toutes les universités
montréalaises qui offrent un certificat en sciences de
l'éducation ou l'équivalent. (11 h 15)
Je me permets, avant de terminer, d'adresser à cette commission
deux questions relatives aux crédits universitaires. À l'article
16.2, le projet de règlement rappelle qu'au primaire l'enseignant doit
avoir acquis un minimum de 9 crédits universitaires. À l'article
17.2, on dit qu'au secondaire l'enseignant de première et de
deuxième année doit avoir acquis un minimum de 30 crédits
universitaires, aux trois autres années, de 70 crédits
universitaires, et ainsi de suite. À l'article 21.1 - on continue
-l'animateur de pastorale doit avoir acquis 30 crédits en
théologie, catéchèse ou pastorale catholique; à
l'école secondaire, au moins 60 crédits.
Question 1: Pour déterminer le nombre de crédits
universitaires à acquérir, le comité catholique du Conseil
supérieur de l'éducation avait-il auparavant
élaboré des contenus de formation universitaire
précis?
Question 2: Si les contenus n'ont pas été
élaborés et qu'il faille établir des orientations
générales, prévoyez-vous - et c'est plutôt un
souhait qu'une question - pour les universités un comité
spécial de concertation et de coordination qui déterminerait les
objectifs à poursuivre et les cours à offrir aux futurs
enseignants pour fins de sanction ministérielle, c'est-à-dire de
certification? Là-dessus, je vous remercie de votre attention.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, Mme
Heynemand, c'est moi qui vous remercie de votre participation et de la
présentation de votre mémoire. Quant à vos deux questions,
j'imagine que le ministre, dans sa première intervention, aura
l'occasion d'essayer de clarifier, enfin, vos interrogations. M. le
ministre.
M. Ryan: M. le Président, j'ai écouté
avec beaucoup d'intérêt le résumé que Mme la
vice-doyenne nous a fait du mémoire de la Famille de formation des
maîtres de l'UQAM. J'ai eu l'impression, à un certain moment, que
le résumé était peut-être plus long que le
mémoire lui-même. Il y a des petites nuances qui ont semblé
varier d'un texte à l'autre. Je pense que le résumé est la
version la plus récente. Il y a encore des compléments que vous
pourrez apporter. Évidemment, le temps n'était pas très
long pour tout cet exercice.
J'apprécie beaucoup le soin que vous vous êtes
imposé pour faire une étude approfondie non seulement des
propositions du comité catholique, mais de la problématique qui
les inspire. C'est beaucoup plus important que les solutions, à bien des
égards. À ce sujet, j'ai remarqué dans votre
mémoire des passages d'une remarquable franchise qui m'ont quand
même retenu. Surtout à la page 7 de votre résumé,
vous dites qu'il s'est creusé un fossé entre des exigences des
parents pour l'éducation religieuse de leurs enfants et l'orientation
qu'a semblé prendre l'enseignement universitaire en matière de
formation des maîtres. Vous dites, en particulier, que l'enseignement du
fait religieux à l'Université du Québec à
Montréal a surtout tendu à se concentrer sur la dimension
phénoménologique, la religion comme phénomène, avec
tout ce que cette approche peut comporter d'éléments
intéressants au point de vue approche scientifique positive et, en
même temps, tout ce qu'elle peut comporter de danger comme
élément réducteur aussi. Vous dites: La connaissance du
phénomène religieux prenait ainsi le pas sur la connaissance de
foi prise en elle-même. C'est du moins le cas des programmes de la
Famille de formation des maîtres à l'UQAM. Pouvez-vous nous donner
un petit peu plus de précisions là-dessus et nous expliquer
comment il se fait que cela se soit produit comme cela? Comment expliquez-vous
que - cela fait quand même 20 ans qu'on évolue dans ce sens - les
réactions aient été aussi lentes à rejoindre
l'inquiétude des parents?
Mme Gagnon-Heynemand: Oui. Il faut se rappeler que l'UQAM n'est
pas, comme d'autres universités, munie d'une faculté de
théologie catholique. Dès l'origine, nous n'étions pas
confrontés, dans le discours institutionnel, à de la
théologie catholique. Nous étions plutôt confrontés
à des ressources professorales qui trouvaient qu'à
l'époque la société avait besoin de formateurs dans le
domaine des sciences de la religion. D'ailleurs, c'est pour cela que nous
avions trouvé, dans les répertoires des programmes de formation
des maîtres de l'UQAM, certains programmes qui parlaient plutôt
d'une formation en religiologie.
Bien sûr, en même temps, il y avait un programme de
baccalauréat d'enseignement en sciences religieuses au secondaire. Mais
le fait que nous n'ayons pas de faculté de théologie catholique
et que des ressources professorales se soient perçues comme des
personnes-ressources pour parler du phénomène religieux, des
sciences de la religion, en pensant que c'était adéquat par
rapport aux besoins de la société, cela a engendré des
cours dans les programmes de formation des maîtres qui ressemblaient
à cela. Nous avons alors eu pendant longtemps un cours sur la situation
de l'enseignement moral et religieux au Québec qui donnait un reflet
très exact de la situation de l'enseignement moral et religieux au
Québec. Je pense que nos étudiants du primaire sont très
bien formés par notre département de sciences religieuses sur le
phénomène religieux. Je pense que ces ressources professorales
ont réussi à maintenir un intérêt pour les valeurs
religieuses et qu'on doit les en remercier.
Cependant, nos étudiants qui se présentaient aux
programmes de formation des maîtres n'étaient peut-être pas
suffisamment aiguisés pour réclamer de façon
spécifique et systématique des cours les préparant
à l'enseignement moral et religieux catholique dans les écoles.
Ces étudiants venaient aussi d'une société qui parlait des
phénomènes religieux. Le département des sciences
religieuses, quand les étudiants ont demandé, à
l'intérieur du cours Phénomènes de la religion, de
s'intéresser davantage à, appelons-les la théologie
catholique ou l'enseignement moral et religieux catholique, le
département des sciences religieuses, avec chacun des individus, a
répondu. Mais il n'a pas répondu de façon
institutionnelle, il a répondu de façon ponctuelle. C'est
pourquoi, il y a quatre ou cinq ans, nous avions des étudiants qui nous
disaient que leur formation n'était pas reconnue par la CECM parce que
nos étudiants n'étaient pas suffisamment munis du contenu
catholique pour enseigner dans les écoles de la CECM.
C'est alors que nous avons fait une étude, à la Famille de
formation des maîtres, et finalement nous avons constaté qu'il y
avait peut-être lieu de demander explicitement à notre
département de sciences religieuses de fournir des cours à
contenu dont on est obligé de dire chez nous "catholique". Je sais que
dans les autres universités, on parle de cours religieux et cela veut
dire "catholique". Mais chez nous, religieux peut tout aussi bien vouloir dire
musulman, protestant, bouddhiste, shintoYste. Cela peut vouloir dire les
sciences de la religion. C'est pourquoi nous avions demandé à
notre département de sciences religieuses de nous produire des cours
■ nettement catholiques pour que nos étudiants puissent arriver
avec un relevé de notes où il était
clair qu'ils avaient suivi des cours de contenu catholique.
Qu'avons-nous obtenu à ce moment-là? Un cours de plus dans
la banque de cours de l'UQAM. Il y en a un qui est nettement "siglé":
Didactique des instruments pédagogiques. Comment dites-vous cela, M.
Ménard? Un petit moment, s'il vous plaît! Programmes et
instruments didactiques pour l'enseignement religieux catholique au primaire.
C'est tout récent» Cela date de l'an dernier. Nous avons quand
même pris deux ou trois ans pour en arriver à cette formulation.
Après cela, il y a eu un autre cours; le cours L 5085: Didactique de
l'intervention religieuse au préscolaire et au primaire. Là,
c'est dans la description que l'on retrouve le mot "catholique",
spécifiquement. Je vous le lis; Présenter et analyser les
objectifs proposés par le programme de l'enseignement religieux
catholique destiné aux classes du primaire et du préscolaire.
L'objection que l'on faisait à ce moment-là - parce que
vous comprenez que cela a donné lieu à d'énormes
débats - c'est que dans les universités voisines le mot
"catholique" n'est pas exigé. J'ai dû dire: Bien sûr qu'il
n'est pas exigé parce qu'il va de soi: par exemple, à
l'Université de Montréal, on a une faculté de
théologie catholique. On suppose que les cours qui s'ensuivent, en tout
cas, sont catholiques. Mais chez nous, dans l'image de l'UQAM, c'est une
université qui n'est pas dotée d'une faculté de
théologie catholique. Le département de sciences religieuses a
fini par comprendre un peu notre point de vue et nous a fourni, finalement, ces
cours-là. Je pense qu'ils apparaissent pour la première fois dans
la banque de cours de l'UQAM, cette année.
Le Président (M. Parent, Sauvé): D'accord. M. le
ministre, avez-vous une autre intervention?
M. Ryan: Oui, j'ai une autre question. Vous dites: Si le
règlement proposé par le comité catholique est
adopté, il faudra faire des modifications, surtout pour la formation des
maîtres du primaire. Vous faites état de certains programmes qu'il
faudra changer. Vous dites: A la rigueur, on pourra le faire; pour septembre
1988, ce seraient des aménagements temporaires qui n'auraient
peut-être pas toutes les cautions et les garanties de fini qu'on
souhaiterait.
J'ai remarqué, cependant, qu'on disait dans le mémoire:
"Cette disposition ne nous paraît pas, cependant, souhaitable." Dans le
résumé que vous nous avez donné, vous n'allez pas aussi
loin et vous dites: "À la rigueur, on peut s'ajuster." Pourriez-vous
nous dire si cela va vous créer une turbulence vraiment majeure de vous
ajuster pour septembre 1988? Si ce n'est pas septembre 1988, quelle
échéance proposez-vous?
Mme Gagnon-Heynemand: Oui. Il y a un écart entre les deux,
M. le ministre. Bien sûr, le premier texte que j'ai
présenté - il a fallu le faire dans un délai relativement
court - a suscité des débats. C'est pour cela que j'ai
décidé de faire ce matin une lecture commentée de mon
mémoire.
Strictement parlant, nous, à la Famille de formation des
maîtres, voudrions traiter cette demande du comité catholique
comme toutes les autres demandes qui nous sont arrivées jusqu'ici.
Croyez-moi, quand les commissions scolaires nous ont demandé d'ajouter
la didactique des sciences humaines et des sciences de la nature dans notre
programme, nous l'avons fait en deux temps trois mouvements. Nous avons eu une
demande de 40 conseillers pédagogiques à cet effet et ç'a
été suffisant pour que l'on fasse une modification de programme.
Je l'ai moi-même présenté avec les directeurs de module
impliqués.
C'est dans cet esprit que je dis que, si je traite cette demande comme
les autres, on va faire la modification. Pourquoi insister outre mesure pour
dire que cela demande un scénario beaucoup plus complexe? Bon. Il y a un
bémol ou un dièse que je peux mettre sur cela, je ne sais pas. Il
est vrai que le fait que le Conseil des universités fasse toute une
vague sur la réflexion de l'avenir des sciences de l'éducation
met dans l'air des scénarios de modification de programmes et des
inquiétudes du point de vue de la formation des maîtres à
l'université. Pour nous, le problème fondamental de la formation
des maîtres, je tiens à le dire ici, c'est qu'à force de
demander des disciplines, des disciplines et des disciplines, on arrive bien
sûr à un programme éclaté parce que, finalement, on
oublie qu'on forme des enseignants.
Quand le milieu scolaire nous dit qu'il manque de professeurs de chimie,
de biologie et de physique, il ne dit pas: Je veux engager des chimistes, des
physiciens et des biologistes. Il dit: Je veux engager des enseignants. Que
veut dire: Je veux engager des enseignants de chimie et de biologie? Je pense
que les universités ont mal compris ou ont décodé ce
message-là de façon, en tout cas, différente de nous,
à la Famille de formation des maîtres, en tant que
spécialistes de la formation des maîtres. Nous disons que
l'enseignant a une identité professionnelle. Il est le
spécialiste de la gestion du travail scolaire. Il n'est pas simplement
un didacticien. Il n'est pas seulement celui qui connaît très bien
sa discipline et qui est capable de diviser les chapitres de connaissances
qu'il doit proposer à son élève et, par la suite, mesurer
si les connaissances correspondent bien aux chapitres de
connaissances dûment exposés.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la
vice-doyenne, pourriez-vous, s'il vous plaît, essayer de rendre plus
concise un peu votre explication? Les règles parlementaires nous
demandent de séparer à part égale le temps entre les deux
formations politiques. Le ministre a encore une question à poser et son
temps est déjà écoulé.
Mme Gagnon-Heynemand: Très bien.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre, je
vous reconnais une dernière intervention rapide.
M. Ryan: Vous dites, toujours en vue de cet ajout que vous feriez
de certains éléments nouveaux dans le programme de formation, que
vous vous êtes assurée de la collaboration du département
des sciences de l'éducation et du département des sciences
religieuses à cette fin. Comme, pour les cours traitant de la religion,
vous devrez compter sur le département des sciences religieuses,
j'aimerais peut-être avoir l'assurance - il y a quelqu'un du
département des sciences religieuses ici, je pense que c'est M.
Ménard - que ce passage est corroboré par le département
des sciences religieuses et que ces choses sont de l'ordre du faisable, comme
l'indique votre mémoire.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Ménard,
pouvez-vous rapidement rassurer le ministre?
M. Ménard (Guy): Je vais vous rassurer clairement et
rapidement. Oui, notre département...
M. Ryan: Je voudrais ajouter aussi... M. Ménard:
Oui.
M. Ryan: ...le genre de complications que cela peut vous causer
ou de changement dans l'organisation que cela peut entraîner.
M. Ménard: Je ne prévois pas vraiment de
complications, au contraire. Plusieurs professeurs qui oeuvrent au
département des sciences religieuses dans le domaine de la formation des
maîtres depuis plusieurs années souhaitent vraiment être en
mesure d'injecter plus de formation de manière à rendre les
futurs enseignants plus équipés pour faire ce travail. Alors,
nous, en un sens, cela nous réjouit beaucoup. (11 h 30)
M. Ryan: Alors, je peux considérer pour finir, Mme
Gagnon-Heynemand, que le passage "cette disposition ne nous paraît pas
cependant souhaitable", qui était dans la première version de
votre texte, a reçu au moins un bémol dans la version que vous
nous présentez aujourd'hui.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, merci, M.
le ministre. Je reconnais maintenant la porte-parole de l'Opposition en
matière d'éducation, Mme la députée de Chicoutimi.
Mme la députée.
Mme Blackburn: M. le ministre est en train, selon son habitude,
d'essayer de trouver - évidemment, c'est normal - des appuis à sa
théorie qui veut que cela puisse être applicable dès 1988.
Je pense qu'il a oublié de rappeler vos propos qui disent: Oui, c'est
faisable, c'est techniquement faisable, sauf qu'il n'est pas souhaitable de
procéder alors qu'on est en train de réviser tout le programme de
l'enseignement pour la formation des maîtres. C'est dans cette
perspective, je pense, que la question était posée: Si c'est
faisable, est-ce que c'est souhaitable à ce moment-ci, compte tenu qu'on
est en train d'examiner tout le secteur de la formation des maîtres?
Je vais être relativement brève. Vous nous dites -
d'ailleurs, j'ai vu un "curriculum" de formation - que pour former un
spécialiste cela demande 30 crédits. D'accord. Alors, sur quoi
repose, selon vous, la recommandation du comité catholique disant qu'on
peut avoir 30 ou 60 crédits? Qu'est-ce qu'on ferait? Quel genre de
programmes pourrions-nous offrir à cet étudiant qui dirait: Moi,
je veux juste enseigner au premier cycle du secondaire?
Mme Gagnon-Heynemand: Mme la députée, j'ai bien dit
que je n'étais pas d'accord avec cette distinction qu'on faisait entre
30 et 60 crédits; elle n'existe pas dans les faits. Je veux dire
qu'à l'université nous formons pour le secondaire, nous ne disons
pas à l'étudiant: Si tu t'en vas au secondaire I ou au secondaire
II, tu ne feras que 30 crédits. Sinon, il n'aurait pas les
qualifications légales.
Je comprends, cependant, que le comité catholique a
peut-être été sensible au fait -et c'est vrai - que les
enseignants pensent qu'en secondaire I et secondaire II la formation
disciplinaire est moins importante pour l'enseignant que la formation
pédagogique. Vous avez eu, dans La Presse du mois d'août, une
demi-page où un étudiant le formulait tel quel et disait qu'en
secondaire I et secondaire II il pouvait passer facilement de la physique aux
mathématiques, parce que cela allait chercher plus de performance
personnelle. Donc, moi, je pense que cet article du règlement du
comité catholique prête beaucoup plus à confusion,
même si je comprends un peu la préoccupation qu'ils avaient et je
voudrais bien qu'ils nous éclairent sur le sens de leur distinction.
Mais, pour ma part, je ne ia
cautionne pas.
Mme Blackburn: Bien! Dans votre mémoire, j'ai retenu un
certain nombre de choses pertinentes certes, intéressantes; cependant,
je n'y ai pas retrouvé votre préoccupation touchant ce que
j'appellerais une certaine équité en regard de
l'égalité des citoyens devant la loi. Lorsque vous êtes en
train de former des enseignants pour un système public - je pense, entre
autres, au mémoire du module des sciences religieuses chez vous - si je
pense à l'Université du Québec à Montréal,
qui faisait état d'un certain manque d'équité à
l'endroit des individus qui se verraient contraints d'aller chercher une
formation pour l'enseignement primaire en foi catholique en dépit de
leurs croyances, tantôt, s'ils veulent trouver à se placer, par
exemple, à la CECM... Vous ne soulevez pas non plus le fait que le
contenu des 60 crédits doit être essentiellement de foi
catholique. Est-ce que vous entrevoyez que cela soit possible dans ce programme
qu'on utilise, qu'on examine aussi les différentes traditions
religieuses, le nouveau phénomène ou si, dans votre esprit, si
vous étiez en train de revoir le programme, admettons, si vous placiez
60 crédits pour l'enseignement secondaire, cela serait exclusivement sur
la foi catholique et sans examen ou sans analyse des autres
phénomènes religieux?
Mme Gagnon-Heynemand: Pour la dernière partie de votre
question, je crois que j'ai suffisamment répondu tout à l'heure
en disant qu'il fallait intégrer dans la formation des maîtres la
connaissance des cultures religieuses, la connaissance du
phénomène des sectes et, pour nous, les 60 crédits du
comité catholique incluent cela. Nous ne croyons pas que le
comité catholique a voulu dire qu'il fallait absolument parler tout le
temps et spécifiquement d'enseignement religieux catholique dans les 60
crédits. Je crois que ce qu'ils ont voulu dire, c'est qu'il faut donner
une formation à l'enseignement religieux catholique et prendre 60
crédits pour le faire de façon scientifique et rendre les
étudiants compétents dans le domaine. Pour les rendre
compétents dans le domaine, nous, nous disons: II faut absolument que le
contenu des cours universitaires parle de formation dans d'autres traditions
religieuses. C'est ce que j'ai dit tout à l'heure dans ma
présentation.
Mme Blackburn: Et l'équité touchant...
Mme Gagnon-Heynemand: À la Famille de formation des
maîtres, nous sommes habitués peut-être d'interpréter
l'équité en termes de respect du système scolaire pour
lequel nos étudiants sont certifiés. Notre équité
consiste à les rendre compétents pour enseigner dans notre
système scolaire et on explique aux étudiants que notre
système scolaire est confessionnel, catholique ou protestant, et
peut-être que l'on rêverait qu'il y ait une section autre, de sorte
qu'il semble juste de préparer des candidats qui seront habilites
à enseigner dans un système scolaire qui va les embaucher. Nous
leur offrons la possibilité de la morale autre que religieuse et de
l'enseignement religieux catholique. Cela sera leur décision de choisir
tel ou tel profil. Nous ne le leur imposons pas.
Mme Blackburn: Bien! En conclusion, je veux d'abord vous
remercier d'avoir participé à cette commission parlementaire,
pour venir enrichir notre réflexion de votre expérience et de
votre compétence en ces matières. Je veux vous dire que j'ai
apprécié, entre autres, le fait que vous souligniez qu'on ne
semble pas vouloir avoir d'exigences équivalentes pour enseigner la
morale. Cela ne doit pas préoccuper. Lorsque l'on est dans un
système public, à mon avis, on devrait se préoccuper -
particulièrement vous, dans votre secteur - de cette carence par rapport
aux exigences de formation des maîtres.
Par ailleurs, vous soulignez - le ministre l'a relevé au
début de son intervention - qu'il y a un fossé entre ce que
vraisemblablement les parents attendaient en matière de formation et de
compétence en enseignement religieux et ce que les universités
ont offert à leurs enseignants. Je dirais qu'il y a également un
fossé qui ne cesse de me surprendre entre ce qui semble être les
exigences des parents et la pratique des parents. On sait que, dans la
région de Montréal, la pratique religieuse serait de 12 % ou 13
%; dans la région de Québec, peut-être moins de 25 %. Dans
ma région, c'est certainement 40 % et je pense qu'un tel
règlement - je dois le répéter -correspond de façon
générale à ce qu'on attend dans certaines régions
du Québec. C'est peut-être plus difficile dans les régions
où il y a un pluralisme certain. Je pense aux régions de Quebec
et de Montréal.
Vous aviez un commentaire?
Mme Gagnon-Heynemand: Mme la députée, j'aurais le
goût de vous dire que cela me fait penser à la phrase de Voltaire
que tout le monde a dans la bouche depuis quelque temps, que Dieu a
créé l'homme à son image et que l'homme le lui a bien
rendu. On savait que c'était dans un esprit cynique qu'il l'a dite mais,
en même temps, Voltaire disait: Surtout, ne touchez pas à la
sainte de Paris. Du même souffle, il disait cela. Je voudrais vous dire
que de l'ambivalence, il en existe sûrement. Cela tient à la
condition humaine- Mais irait-on jusqu'à dire, par exemple, que quand on
vote
pour un gouvernement - prenons nos formations politiques - quand on vote
péquiste, c'est en pensant aux libéraux et, quand on vote
libéral, c'est en pensant aux péquistes. Je crois que
l'ambivalence, il ne faut pas non plus la pousser à l'extrême dans
ce domaine-là.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Madame, vous jouez
avec le feu. Ah! madamel Vous êtes d'une témérité,
Mme la vice-doyenne, dangereuse.
Mme Blackburn: Comme j'ai encore une minute, je vous dirai...
Mme Gagnon-Heynemand: J'aurais le goût de vous dire, Mme la
députée, que chez certains on avait peut-être
réglé le problème que l'on débat aujourd'hui en
disant que l'homme est un animal religieux qui a perdu son adresse.
Mme Blackburn: À savoir...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui, ou qui n'a
jamais eu de laisse.
Mme Blackburn: ...Mme la vice-doyenne, que si les
Québécois en votant libéral pensent péquiste et en
votant péquiste pensent libéral, je vous dirais que les
Québécois ne votent pas pour, ils votent contre. Ils ne votent
pas pour un gouvernement, ils votent contre un gouvernement.
M. Ryan: Ils ont voté contre vous, c'est vrai. Je n'ai pas
d'objection.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Sur ces bonnes
paroles, Mme la députée de Chicoutimi...
Mme Blackburn: C'est tout à fait juste. Et aux prochaines
élections, ils vont voter contre, comme ils ont déjà
voté contre le Parti libéral en 1981.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre de
l'Education, je vous remercie. Mme la vice-doyenne et les gens qui vous
accompagnent, merci beaucoup d'avoir répondu à l'invitation de la
commission de l'éducation et aux membres de cette commission. Encore une
fois, je vous remercie grandement.
La commission suspend ses travaux pour quelques secondes et nous
accueillerons immédiatement après l'Association
québécoise des professeurs de morale et de religion.
(Suspension de la séance à 11 h 40)
(Reprise à 11 h 44)
Association québécoise des professeurs
de morale et de religion
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je pense que tous
les invités sont là. Alors, la commission parlementaire de
l'éducation poursuit ses travaux. Nous accueillons l'Association
québécoise des professeurs de morale et de religion,
représentée par son président, M. André Doucet, qui
est accompagné de M. Jean-Pierre Monn, le porte-parole et
répondant pour la région de Québec.
M. Doucet et M. Monn, soyez les bienvenus. Recevez aussi les
remerciements des membres de cette commission d'avoir répondu d'une
façon généreuse à leur invitation et d'être
venus nous informer et nous faire connaître vos préoccupations et
vos réactions face à ces deux projets de règlement qui ont
été soumis au ministère de l'Éducation par les
comités catholique et protestant du Conseil supérieur de
l'éducation.
Tel qu'entendu avec vous au début de cette rencontre, la
commission va vous consacrer entre 20 et 30 minutes. Quelques minutes seront
utilisées au début de cette période pour la
présentation de votre mémoire et, après cela, la balance
du temps sera répartie également entre les deux formations
politiques à des discussions entre M. Doucet, M. Monn et les membres des
deux formations. Alors, M. le porte-parole, M. Monn, si vous voulez bien
enchaîner avec votre présentation.
M. Monn (Jean-Pierre): Je vous remercie beaucoup, M. le
Président, de votre chaleureux accueil et de la
générosité dont vous avez parlé. En effet, il a
fallu être généreux pour venir ici, ce matin.
M. le ministre, mesdames, messieurs les représentants du
gouvernement...
Une voix: ...
M. Monn: ...et de l'Opposition.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Ce n'est pas le
gouvernement, ce n'est pas l'Opposition, c'est une commission parlementaire qui
relève du pouvoir législatif et non pas du pouvoir
exécutif. Alors, ici, vous êtes en pleine
sécurité... relative.
M. Monn: Alors, tel que vous l'avez dit, nous sommes deux
enseignants" M. André Doucet, à ma droite, et moi-même,
Jean-Pierre Morin. Nous travaillons dans de vraies écoles, avec du vrai
monde au secondaire. Mais nous allons aussi parler au nom du primaire.
Nous voulons la continuité des valeurs et des croyances et non la
confrontation et la contradiction des comportements ou de la
pratique religieuse. Nous sommes héritiers des grandeurs et
faiblesses du catholicisme québécois et aussi des grandeurs et
faiblesses de notre histoire. Nous avons été
façonnés, en effet, par une foi qui aurait pu être
différente, mais qui est celle du christianisme. Depuis le XVIIe
siècle, le Québec affiche des valeurs venues d'ailleurs, mais
acceptées comme vivantes et gagnantes, telles que le respect, la
justice, l'engagement social, le sens du spirituel, l'ouverture, l'adaptation
à la nouveauté, l'éducation, la santé, les
syndicats. Il ne faudrait pas oublier que nous sommes issus de cette
souche-là.
C'est au nom de cet héritage historique que nous situons notre
vision face à la confessionnalité. Ces valeurs chrétiennes
qui ont fait ce peuple du Québec, les voulons-nous encore? Nous disons
oui. Nous voulons transmettre cet héritage culturel à ceux qui
continuent de choisir la foi chrétienne. Mais, aussi, nous voulons
donner ce que l'histoire a fait de nous à ceux qui ne partagent pas
d'emblée notre option religieuse à travers des valeurs humaines
et universelles qui sont vécues, ici, au Québec.
En conséquence, nous pensons que l'enseignement moral et
religieux catholique mérite des garanties de qualité dans les
écoles qui désirent être reconnues comme confessionnelles,
tout comme l'enseignement moral dans celles qui désirent être
reconnues comme non confessionnelles.
L'AQPMR, comme association professionnelle, s'est davantage
portée sur les exigences pour dispenser l'enseignement moral et
religieux catholique. À noter que, pour nous, les exigences touchent du
même titre les professeurs d'enseignement moral, notre association
représentant les enseignants qui dispensent à la fois la religion
et la morale, qui sont deux disciplines avec des objectifs tout à fait
différents.
Concernant le nombre de crédits pour chacun des niveaux, nous
sommes on ne peut plus d'accord pour ce minimum de 9 crédits au
primaire, de 30 crédits au premier cycle du secondaire et de 60
crédits au deuxième cycle du secondaire.
Reconnaître l'importance d'un enseignement de qualité exige
cette décence au niveau de la formation des maîtres. Mais, encore
une fois, reconnaître les exigences pour l'enseignant en enseignement
religieux catholique, pour nous, c'est aussi reconnaître les mêmes
exigences en enseignement moral. Connaissant le souci de perfectionnement des
universités, ces dernières sauront sûrement s'adapter et
procurer ce service aux enseignants.
Nous pensons que le souci d'exiger un minimum de crédits
apportera davantage de qualité aux apprentissages dans les écoles
primaires et aussi davantage de sérieux dans la distribution des
tâches dans les écoles secondaires. Les disciplines religion et
morale sont souvent vues comme des disciplines bouche-trous où chacun
vient compléter une tâche, croyant facilement que l'impact sur la
formation du jeune est sans importance. Au secondaire, selon les milieux, les
professeurs d'enseignement moral ou religieux sont "bumpés" plus souvent
qu'à leur tour.
Quant au temps d'enseignement, il nous paraît surprenant que l'on
baisse de 10 le nombre d'heures de cours aux étudiants du secondaire.
Nous ne sommes pas sans reprocher le manque de culture de nos étudiants
sur le plan de la religion et de la morale, et on augmenterait ainsi le nombre
de groupes aux enseignants tout en diminuant du même coup le temps pour
l'apprentissage du savoir religieux ou moral? Nous demandons de bien vouloir
reconduire les 100 minutes/semaine de l'ancien règlement.
Pour le primaire, en particulier en enseignement moral, nous
souhaiterions fortement, au nom de la pédagogie, qu'un groupe soit
limité à la clientèle d'un seul cycle.
Au paragraphe 3 de l'article traitant des exigences, qui se ht comme
suit: "ne pas s'opposer pour des motifs de liberté de conscience", nous
aurions préféré l'article 25 de l'ancien règlement:
"Pour garantir le droit de l'enfant à un enseignement religieux de
qualité, l'institution doit faire en sorte qu'un professeur puisse
être exempté de donner cet enseignement; a) lorsque tel professeur
persiste à dispenser un enseignement qui n'est pas conforme aux
exigences; b) lorsque la liberté de conscience du professeur
l'exige."
Concernant le nota, je vous demanderais de bien vouloir le
"bémoliser", pour prendre un langage que j'ai entendu tantôt. Il
reste que nous avons été confrontés, à
l'intérieur de notre groupe, à des difficultés de
communication qui font que le nota n'est peut-être pas tout à fait
exact. Nous pourrions cependant dire que nous aurions aimé une
consultation plus -comment dire... Si on nous avait préparés un
peu plus à l'avance concernant la consultation... Il n'y a pas beaucoup
de membres qui ont été consultés, ce qui fait que nous
avons dû, è la dernière minute, un peu au nom de
l'éthique et du professionnalisme, faire davantage de consultations.
Même st c'est écrit et que c'est déjà sorti sur
impression, je vous demanderais de bien vouloir ignorer un peu la teneur de
cette note.
Le Président (M- Parent, Sauvé): Est-ce qu'on
l'ignore ou si on l'ignore un peu?
M. Morin: Bien, la note comme telle...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Vous avez l'air
d'hésiter.
M. Morin: J'hésite à cause de la consultation. La
note comme telle, nous l'ignorerons, si vous le voulez bien.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Bon. Nous ignorons
le nota. Très bien, merci. Alors, est-ce que cela termine votre
exposé?
M. Morin: C'est terminé pour l'exposé.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci beaucoup, M.
Monn, de votre présence parmi nous. Je reconnais immédiatement,
dans un premier temps, le ministre de l'Éducation. M. le ministre.
M. Ryan: M. le Président, je remercie M. Monn et celui qui
l'accompagne, M. Doucet, de la présentation qu'ils nous ont faite du
mémoire de l'association québécoise regroupant les
professeurs de morale et de religion de nos écoles publiques et
privées aussi, je crois. Est-ce que vous avez des enseignants du
privé également dans votre association?
M. Morin: Oui.
M. Doucet (André): Oui.
M. Ryan: Je pense que votre mémoire dans sa concision est
éloquent par l'appui qu'il donne au projet du comité catholique,
qui est l'objet majeur de notre discussion depuis quelques jours. J'ai bien
noté ce que vous avez dit, que la mise en oeuvre du projet de
règlement va apporter au moins un élément de solution
à des pratiques administratives et organisationnelles qui ont souvent
comme effet d'évaluer l'enseignement de la religion et de la morale au
niveau secondaire en particulier. Là, j'ai bien noté cet
avantage. C'est extrêmement important pour celui qui a la fonction de
ministre de l'Education de s'assurer que chacune des matières prises en
charge par un enseignant le soit de manière sérieuse,
consciencieuse et compétente. Dans la mesure où vous nous
affirmez, vous qui êtes de l'association regroupant les enseignants de
religion et de morale, qu'il s'agit là d'un projet de règlement
comportant des perspectives d'amélioration sérieuse, je le
retiens avec beaucoup d'intérêt.
Au sujet du nombre d'heures consacrées à l'enseignement de
la religion au secondaire, là, c'est vrai que le règlement
introduit une modification. Maintenant, il y en a quelques-uns, parmi ceux qui
se sont présentés devant nous, qui ont fait des remarques
semblables à la vôtre, mais pas avec une insistance
particulière. Je pense que j'ai retenu d'un bon nombre de
mémoires en tout cas que, tout en souhaitant qu'on eût
conservé davantage, ils comprenaient que les exigences d'un programme
extrêmement chargé obligent à des ajustements de ce
côté-ci qu'on souhaite pouvoir compenser par une
amélioration de la qualité. De toute manière, on prend
note de ceci, mais je vous avoue que cela me paraît pratiquement
impossible de revenir en arrière sur ce point particulier. Je vous le
dis en toute simplicité.
J'ai noté la remarque au sujet des groupes dont les enseignants
sont responsables au niveau primaire, en particulier. Je crois bien comprendre
que vous voulez que ce soit un seul cycle et que les groupes réunissent
les étudiants d'un seul cycle. J'aimerais que vous nous donniez des
explications sur cela dans deux minutes.
Il y a un autre point sur lequel j'aimerais avoir des explications de
votre part également. Vous semblez accepter la proposition du
comité catholique qui a une exigence de 9 crédits pour
l'enseignement de la religion et de la morale au primaire, 30 crédits au
premier cycle du secondaire et 60 crédits au deuxième cycle du
secondaire. La majorité des réactions que nous avons entendues
jusqu'à maintenant s'opposait à cette distinction entre premier
cycle et deuxième cyle du secondaire et entrevoyait des complications si
nous acceptions cette partie du projet du comité catholique. J'aimerais
avoir votre opinion sur cela.
Vous avez peut-être suivi les délibérations qui ont
marqué les travaux de ce comité. Est-ce que vous maintenez votre
position ou si vous convenez que cela peut créer des difficultés,
cette distinction qu'on fait? Pour l'affectation des enseignants en
particulier, cela peut entraîner des complications sérieuses. Je
ne sais pas, comment réagissez-vous à ce point-là?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Monn ou M.
Doucet, un des deux.
M. Morin: Nous avons réfléchi à partir des
programmes et des exigences qui sont imposées au premier cycle du
secondaire, les étudiants du secondaire I et du secondaire II. Il nous
semble que 30 crédits seraient suffisants pour répondre à
une certaine qualité et à une certaine compétence. Si
c'est haussé à 60 crédits, tant mieux! Cela fera quelque
chose de plus de qualité encore. Nous avons arrêté notre
jugement sur 30 crédits comme étant un nombre adéquat en
raison des programmes parce que, au deuxième cycle, les programmes font
ressortir des problèmes assez difficiles de notre
société.
J'entendais tantôt des universités qui parlaient de
fécondation in vitro et d'avortement. Il reste que cela demande non
seulement une certaine compétence, mais une certaine maturité de
la part de l'enseignant pour aider l'enfant à penser à ces
problèmes soit d'une manière religieuse, greffée à
la religion à laquelle il adhère, soit d'une
manière morale, d'autre part. Alors, c'est en raison des
qualités académiques qui sont sous-jacentes. Mais il reste que 60
crédits au secondaire, ce serait plus simple et, là, nous ne
pouvons pas être contre la vertu.
Le Président (M. Parent, Sauvé); Merci, M- Morin.,
M. le ministre, vous avez une intervention.
M. Ryan: Une autre question, M. Morin. Il y avait Sa
deuxième partie de la question que je vous avais posée: des
explications au sujet de votre accommodation relative aux groupes, au niveau
où devraient être formés les groupes.
M. Morin: À l'élémentaire.
M. Ryan: Est-ce que c'est à l'élémentaire
que vous songez...
M. Morin: C'est plutôt à
l'élémentaire. À l'élémentaire, on retrouve
des écoles où il y a dans un même groupe les six
degrés. Écoutez, honnêtement, cela ne marche pas, ni en
morale, ni en religion. L'enfant de sixième année n'a pas le
même développement que celui de troisième année.
M. Ryan: C'est surtout la morale.
M. Morin: II faut respecter les cycles. Disons qu'au premier
cycle il y aurait un groupe de quinze, ou quel que soit le nombre, et le
deuxième cycle...
M. Ryan: Le problème dont vous parlez doit se poser plus
pour l'enseignement moral?
M. Morin: Je le croirais, selon les régions, M. le
ministre. Nous avons des régions qui sont plus...
M. Ryan: Seulement une autre question, si vous me permettez, M.
le Président.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui, M. le
ministre.
M. Ryan: Est-ce que, parmi les professeurs qui enseignent la
religion, il y en a plusieurs qui sont appelés à donner aussi des
cours de morale? Est-ce que cela crée des problèmes, selon
vous?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Doucet.
M. Doucet: Présentement, dans la province, il est certain
qu'on n'a rien à cacher» Un professeur d'enseignement religieux
doit, par sa tâche, à un moment donné, enseigner aussi la
morale. C'est de plus en plus régulier dans la tâche des
enseignants. Je dirais que, d'ici à une dizaine d'années, cela ne
fera que s'intensifier. Un professeur pourra aussi bien avoir
moitié-moitié dans sa tâche, à un moment
donné. Il faut respecter cela.
M. Ryan: Mais, d'après votre expérience,
pensez-vous qu'il y a des difficultés à cela? Il y a un programme
qui est défini par le ministère de l'Éducation pour
l'enseignement moral. Est-ce que le professeur de religion est moins
qualifié qu'un autre pour donner le programme d'enseignement moral,
selon vous?
M. Doucet: Selon moi, non, tout en respectant bien sûr les
deux choses et en fermant le tiroir lorsqu'il a terminé son cours
d'enseignement religieux et qu'il donne un cours d'enseignement moral. Cela
peut être vice-versa. Il ferme le tiroir et repart à neuf.
J'enseigne aussi la morale. Je suis d'ailleurs spécialisé en
morale de la Faculté de théologie de l'Université
Laval.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Doucet.
Mme la députée de Chicoutimi, qui est la porte-parole de
l'Opposition en matière d'éducation. Mme la
députée. (12 heures)
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. Doucet et M.
Morin, il me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue au nom de ma formation
politique. Je me permettrai peut-être de poursuivre dans le sens de
l'intervention du ministre tout à l'heure.
Si je comprends bien, selon ce qui semblait se dégager de votre
bref mémoire, vous pensez qu'on peut indistinctement changer de chapeau
pour un enseignement catholique et une morale plus neutre et ce, en respectant
évidemment les libertés de conscience et les libertés
individuelles des élèves qui se trouvent devant vous.
M. Doucet: Je pense que c'est une question
d'honnêteté professionnelle, comme quelqu'un pourrait être
malhonnête et, par exemple, dans sa profession, dispenser l'enseignement
religieux et arriver à la fin de l'année en disant: Vous savez,
tout ce que je vous ai enseigné, je n'y crois absolument pas. Alors,
vous voyez un gros vice de forme sur le plan professionnel. Pour ce qui est de
la morale, si le professeur y croit vraiment, qu'il enseigne la morale, et
c'est mon cas. Il n'y a aucune référence quand je fais de la
morale; je ne parle que de valeurs et de valeurs humaines, point.
M. Ryan: M. Doucet...
M. Doucet: Je ne pense pas refléter, dans cette
situation, vis-à-vis de mes jeunes, que je suis un croyant
religieux.
Mme Blackburn: Pensez-vous qu'on
devrait normalement avoir une formation... Il me semble que je lis aussi
dans votre mémoire, aux dernières lignes de la première
page: "Mais, encore une fois, reconnaître les exigences pour l'enseignant
en enseignement religieux et catholique, pour nous, c'est aussi
reconnaître les mêmes exigences en enseignement moral." Dans le
règlement du comité catholique, on a l'enseignement religieux
catholique et la morale catholique, d'accord? Mais vous semblez dire "morale".
Quand vous parlez de ces exigences, est-ce pour une morale, je dirais, plus
universelle et sans épithète, pour utiliser un terme qu'on a
entendu ici, ou si, à partir du moment où on est formé en
enseignement catholique religieux ou protestant et en enseignement moral
catholique ou protestant, on peut aussi enseigner la morale? Est-ce que ce sont
les exigences dont vous parlez à la fin de votre mémoire?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Morin.
M. Morin: Je vais répondre. Un enseignant en enseignement
religieux, qu'il soit établi que, s'il est formé et
compétent, il a aussi une formation morale, quoique son enseignement ne
porte pas sur les objectifs de ia morale; ce sont deux mondes tout à
fait différents. Les objectifs de la morale sont liés et
collés à l'agir humain, avec des valeurs qui ont l'avantage de
développer, évidemment, des attitudes d'autonomie. Tandis que
l'enseignement religieux a des objectifs collés à une foi qui est
une tradition, qui fera appel à ce qui s'est passé avant,
à l'expérience des autres. Ce sont deux mondes tout à fait
différents.
L'enseignant religieux est habileté à faire aussi de la
morale. Le contraire, actuellement, n'est pas vrai. Quelqu'un peut avoir des
habiletés à développer des attitudes morales avec ses
étudiants et n'avoir aucun sens de la religion ou... C'est cela.
Mme Blackburn: Lorsque le comité catholique parle de
l'enseignement catholique et moral, c'est de la morale catholique. Il ne faut
pas se tromper. Je pense qu'il y a une espèce de confusion dans les
termes. Je pensais comprendre de votre intervention qu'il fallait bien
distinguer deux types de formations pour les maîtres: une formation en
enseignement catholique et moral et une formation en enseignement moral, ce qui
me semblerait beaucoup plus respectueux du pluralisme, en particulier dans
certaines régions.
Vous dites, au début de votre mémoire, en rappelant les
traditions québécoises que je reconnais et que j'apprécie,
soyez-en assurés, et qui remontent au XVII siècle: C'est
important que les nouveaux venus puissent aussi partager ces valeurs
chrétiennes. Dans la régon de Montréal, d'ici à
1990, on prétend que 50 % des élèves dans les
écoles de la CECM seront des nouveaux Québécois avec
d'autres valeurs et d'autres traditions religieuses. Comment peut-on les
respecter? Je reprends le quatrième paragraphe de votre mémoire,
en page 1. Vous dites: "L'enseignement moral et religieux catholique
mérite les garanties de qualités - ce que je partage tout
à fait avec vous - dans les écoles qui désirent être
reconnues comme confessionnelles."
Dans la grande région de Montréal, les écoles
publiques sont confessionnelles, c'est protestant ou catholique. Vous n'avez
pas le choix d'un réseau autre et le ministre ne se sent pas prêt
à créer un réseau parallèle à celui de la
CECM ou de la PSBGM, avec les conséquences qu'on connaît. Si vous
avez regardé "Le Point" cette semaine - c'est avant-hier soir, je pense
- on y relatait la situation dans les écoles protestantes
françaises à la PSBGM où la clientèle s'est
multipliée par six au cours des dix dernières années,
parce qu'ils prennent, en particulier, les nouveaux arrivants qui sont d'autres
dénominations religieuses ou d'autres traditions religieuses. Comment
réagissez-vous à cela?
M. Morin: Je comprends, Mme la ministre, votre
inquiétude...
Mme Blackburn: Merci. M. Morin: C'est cela?
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je crois, parce
que...
M. Morin: Mme la députée.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui, si cela peut
faire plaisir et garder l'harmonie à la commission.
M. Morin: On peut aller avec la détente aussi. Je
comprends votre inquiétude, mais, au point de départ, je crois
qu'on mélange deux choses- C'est pour cela qu'on est dans la
contradiction, quelquefois. C'est pour cela que j'ai marqué, en haut:
Nous voulons la continuité et non la contradiction. Je pense qu'on ne
s'en sort pas quand on compare, on identifie l'enseignement religieux, la
religion, à des comportements ou une pratique. Bien sûr la
religion chrétienne débouche sur une pratique, mais elle ne
s'identifie pas à la foi des gens. En fait, nos écoles
n'enseignent pas la pratique, on leur enseigne la religion
chrétienne.
Bien sûr, si on est logique ou si on veut être conforme avec
ce qu'on croit, on amène normalement, en toute honnêteté,
à une certaine pratique. La minute où l'on commence à
mettre ia pratique au niveau de
l'enseignement, des valeurs et de l'éclaircissement, à ce
moment-là, on mélange tout. C'est sûr que c'est
contradictoire, mais les parents veulent l'école confessionnelle. Ils la
veulent même si eux mêmes ne pratiquent pas. C'est qu'ils veulent
autre chose que la pratique. Ils veulent des valeurs, ils veulent continuer ce
que ce pays a développé par une religion, des valeurs très
profondes. Entre nous, les valeurs du christianisme, je les
préfère à n'importe quelle autre valeur: le marxisme ou le
capitalisme. Je pense qu'à certains égards on a une religion qui
est très ouverte, qui va même jusqu'à respecter d'autres
confessionalités.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Madame.
Mme Blackburn: M. Doucet, je respecte tout à fait... C'est
votre droit le plus strict, le droit à vos propres valeurs. Je pense que
c'est le droit le plus strict de tous les élèves qui s'inscrivent
dans nos écoles publiques. C'est là où se pose le
problème actuellement. À présent on a reçu de votre
organisme...
M. Morin: Dans les écoles publiques, nous avons la
possibilité de choisir la morale.
Mme Blackburn: Ce dont je voudrais m'assurer - je suis d'accord
avec vous -c'est qu'on respecte la morale des autres également. Mais, de
toute façon, on a eu deux textes de votre association, un qui est
signé par Mme Leblanc - je ne me trompe pas, c'est cela, Association
québécoise des professeurs de morale et de religion - et celui
que vous nous avez présenté ce matin. Dans celui de Mme LeBlanc,
en dernière page, par rapport à la formation des maîtres,
elle se demandait comment traiter la règle de la mutation du personnel
enseignant prévue dans les conventions collectives et les nouvelles
exigences de formation. Vous n'avez pas relevé cela dans votre
mémoire en disant: On est d'accord avec cela sans le remettre en
question. Comment doit-on lire ces deux textes-là?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Morin, est-ce
que vous voulez donner rapidement une explication à Mme la
députée?
Mme Blackburn: Madame est vice-présidente, je pense, de
votre association?
M. Morin: Oui. Le mémoire au la lettre que vous avez
reçue, qui est antérieure au petit mémoire de ce matin,
est un peu greffée au nota. Nous avons des problèmes de
communication à l'intérieur même de notre association.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Est-ce que vous
voulez dire par là que - je ne veux rien vous faire dire, c'est juste
une explication - la lettre que nous avons reçue avec le premier
mémoire, comme le nota, ne fait pas partie de votre présentation?
Est-ce que c'est ce que vous vouliez nous dire?
M. Morin: Oui.
Mme Blackburn: Je comprends deux choses. D'abord, une
première question: Est-ce que vous avez été
consulté comme association par le comité catholique? La seconde
question: Lequel de ces deux textes a fait l'objet d'une consultation
auprès de vos membres?
M. Doucet: Pour répondre à la première
question, quelques membres ont été consultés
confidentiellement et non pas l'association comme telle. Les membres ne
pouvaient pas non plus nous communiquer quoi que ce soit parce que
c'était quelque chose de personnel et de confidentiel. Alors, moi, comme
président, je n'ai jamais reçu de mes membres la réponse
que vous me donnez.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Autrement dit,
l'association n'a jamais été consultée par le
comité catholique.
M. Doucet: Quelques membres, mais confidentiellement.
Le Président (M. Parent, Sauvé): L'association,
non?
Mme Blackburn: Les membres de votre association ont-ils
été consultés sur le contenu du texte qui nous est
présenté ce matin?
M. Doucet: Le conseil d'administration seulement et le conseil
exécutif, à cause d'une situation très difficile
reliée au temps.
Mme Blackburn: Vous avez combien de membres?
M. Doucet: 350.
Le Président (M. Parent, Sauvé): J'aimerais
souligner une chose à l'intention des membres de la commission. M. Morin
a soulevé tout à l'heure la question du temps et M. Doucet vient
de soulever la question du temps. Je veux que les membres de la commission
sachent bien que l'Association québécoise des professeurs de
morale et de religion a été invitée dans ce que
j'appellerais la première vague. La première fois que nous avons
invité les gens, nous les avons invités en même temps que
tout le monde. Je veux que vous sachiez bien qu'ils ont eu le même temps
et la même
disponibilité que tout autre organisme pour préparer leur
mémoire et faire le travail interne au sein de leur association.
Sur ce, M. Doucet et M. Morin, je vous remercie beaucoup de votre
participation et la commission parlementaire vous en sait gré. Merci.
Nous suspendons pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 12 h 12)
(Reprise à 12 h 19)
Le Président (M. Parent, Sauvé): S'il vous
plaît, j'inviterais les membres de la commission parlementaire à
prendre place. Alors, la commission parlementaire de l'éducation, dans
le cadre du mandat qui lui a été donné, reprend ses
audiences et continue l'étude des deux projets soumis par les
comités catholique et protestant du Conseil supérieur de
l'éducation. Comme dernier intervenant, cet avant-midi, nous avons le
plaisir d'accueillir les représentants de l'Université Laval,
représentée par Mme Thérèse Laferrière,
doyenne de la Faculté des sciences de l'éducation, qui est
accompagnée par M. Jacques Racine, doyen de la Faculté de
théologie.
Mme la doyenne, M. le doyen, nous vous souhaitons la plus cordiale des
bienvenues. Nous vous disons surtout un gros merci d'avoir répondu
à notre invitation, tardive peut-être, de venir nous rencontrer.
Vous avez été chanceux et nous également, car il ne
restait qu'une journée, ce qui fait que nous allons avoir le
témoignage des gens de l'Université Laval. Alors, la commission a
entre 45 et 60 minutes à vous consacrer. Vous pourrez diviser te temps
de la façon que vous jugerez la plus appropriée. D'habitude, on
consacre un tiers du temps à la présentation du mémoire et
les deux autres tiers à la discussion avec les membres de la
commission.
Alors, madame, si vous voulez nous présenter votre
mémoire, nous vous écoutons religieusement.
Université Laval
Mme Laferrière (Thérèse): M. le
Président, M. le ministre, Mme la députée Blackburn,
mesdames et messieurs de la commission parlementaire, nous apprécions
pouvoir être entendus à une heure aussi tardive. Après
entente avec notre recteur, l'Université Laval est
représentée par les deux facultés particulièrement
interpellées par le projet de règlement qui fait l'objet de cette
commission parlementaire: la Faculté de théologie et la
Faculté des sciences de l'éducation. Le recteur et
nous-mêmes vous remercions.
Le projet de règlement a été l'occasion de
véritables discussions pour les deux facultés présentes.
En effet, s'est engagé un rapport dialectique et synergique du point de
vue de nos deux expertises qui a déjà commencé à
produire ses fruits. Nous présenterons, ici, quelques
éléments de position et certaines répercussions, advenant
l'approbation desdits règlements, en particulier, le règlement
sur la qualification des enseignants. Dit autrement, nous partons de nos
conceptions de la formation des enseignants et d'une analyse de nos pratiques,
pour faire valoir des points et identifier les problèmes concrets que
poserait le règlement sur la qualification des enseignants au sein de
notre institution, s'il devait être adopté.
À ce stade-ci des audiences de cette commission et puisque vous
avez entre les mains nos mémoires respectifs, nous choisissons, M. le
Président, de ne prendre parole, respectivement, que cinq minutes, afin
de laisser le maximum de temps aux questions des membres de cette commission.
Nous y répondrons volontiers.
D'abord, pour ce qui est des options de fond, options lourdes de
conséquences pour l'avenir du système scolaire
québécois, et de leur opérationnalisation, un seul
commentaire sera fait. Ce commentaire traduit la position de nos deux
facultés, la Faculté de théologie et la Faculté des
sciences de l'éducation. Il est le suivant: C'est à un
gouvernement qui travaille à ce que le consensus acquis pour une
restructuration des commissions scolaires, sur une base linguistique
plutôt que religieuse, devienne au plus tôt réalité
que nous donnons notre appui. Et, à la Faculté des sciences de
l'éducation, nous ajoutons, pour exprimer notre position, deux
questions: Pourquoi la voie réglementaire plutôt que la voie
législative? Pourquoi décider maintenant?
Mon collègue, M. Racine, va maintenant enchaîner avec sa
présentation et je reviendrai pour une troisième partie.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci.
M. Racine (Jacques): Pour ma part, je ne vais m'attarder
qu'à un seul sujet, non pas que les autres ne m'intéressent pas,
mais, dans le cadre de cette commission, il s'agit de la qualité de
l'enseignement moral et religieux à l'école et de ses
exigences.
Au-delà des formes réglementaires et de leurs limites,
l'une des intentions fortes du comité catholique est d'assurer la
qualité de l'enseignement moral et religieux catholique par deux biais
qui sont les mêmes pour tout enseignement: la qualité des
programmes et la qualification des maîtres.
Je proposerais, ce matin, six considérations qui rejoignent mon
mémoire d'une autre façon quant à la qualification des
enseignants. Je dois vous dire aussi, pour
être honnête, que j'ai lu l'ensemble des mémoires et
des comptes rendus de la commission, de telle sorte qu'il y a des choses qui
seront dites en réaction, d'une certaine façon.
Première considération: L'enseignement moral et religieux
catholique doit se situer à l'intérieur même de la mission
éducative de l'école primaire et de l'école secondaire. Il
doit s'inscrire à l'intérieur des objectifs pédagogiques.
Il doit concourir au développement intégral de la personne. Il
doit se vivre au coeur de la pluralité. Il doit aussi, comme tout
enseignement, favoriser divers apprentissages, l'acquisition de connaissances
spécifiques et le développement d'attitudes. Il requiert de
bonnes connaissances en psychopédagogie et en didactique, autant qu'en
théologie.
Deuxième considération: En lien avec cette première
affirmation, on ne peut accepter l'argument que la foi ou le témoignage
remplace la compétence et la qualification. La conviction seule peut
être mauvaise éducatrice, peu attentive à
l'élève et à son développement.
Troisièmement, depuis la disparition des écoles normales,
les universités ont la responsabilité de la formation des
maîtres; cela doit être vrai pour l'enseignement moral et religieux
catholique. Les universités, dans cette discipline comme dans les
autres, ont plus ou moins bien répondu à cette mission. À
l'Université Laval, comme ailleurs, il n'a pas toujours
été facile d'assurer les liens entre la formation disciplinaire
et la formation psychopédagogique. Mais, dans cette analyse, nos
collègues des sciences de l'éducation nous disent que nous avons
été parmi leurs meilleurs partenaires.
Quatrième point: La formation des maîtres en enseignement
moral et religieux catholique, à l'intérieur d'une
université, situe mieux l'étudiant face aux dimensions
éducatives et à la pluralité. À la Faculté
de théologie catholique de l'Université Laval, il y a, cette
année, au doctorat, des étudiants de quatre confessions
religieuses différentes. Nous avons décerné le premier
doctorat à un étudiant du Zaïre de confession baptiste. Des
recherches importantes...
Une voix: ...
M. Racine: C'est chrétien. Une voix: Oui?
M. Racine: Oui.
Des recherches importantes et subventionnées sont faites sur le
théologien protestant Paul Tillich. Nous avons aussi des professeurs
spécialisés en histoire des religions, particulièrement en
hindouïsme et en bouddhisme, des sociologues et des psychologues, en plus
d'exégètes, de moralistes, de dogmaticiens et d'historiens.
Cinquième point: Jusqu'ici, la Faculté de théologie
offre un programme spécifique de 60 crédits joint à une
mineure en psychopédagogie pour la formation des maîtres au
secondaire. Nous croyons que ce programme, évalué
régulièrement, répond aux besoins. Il assure une bonne
connaissance du contenu essentiel de la foi, une formation
psychopédagogique, une formation de stages sur le terrain
supervisés par nos professeurs, une ouverture aux grandes religions,
à l'oecuménisme et aux phénomènes des sectes.
Nous souhaiterions que ce programme demeure le programme de base en
formation des maîtres au secondaire. Nous ne sommes donc pas d'accord,
à ce moment-ci du moins, à moins de plus d'explications, à
ce qu'il y ait deux types d'exigences pour les maîtres au secondaire. Je
comprends que cela puisse venir dans la mesure où l'ensemble du
système d'éducation se demande si, au premier cycle du
secondaire, cela ne doit pas aller vers quelqu'un de plus
généraliste, mais à ce moment il faudra mettre cela dans
ce large débat. Pour le moment, il n'y a pas d'explications, sinon cette
hypothèse que possiblement on ira vers des maîtres plus
généralistes au secondaire dans les premières
années.
Sixièmement, j'arrive au point chaud, la qualification des
maîtres au primaire. C'est là que la situation est plus
délicate, mais c'est aussi là que les faiblesses sont plus
grandes et plus flagrantes. C'est là aussi que les consensus sont plus
difficiles à atteindre entre nos deux facultés, du moins, quant
aux applications, sinon quant aux principes. On peut cacher ce fait en disant
qu'il est passible à Laval de suivre les crédits
nécessaires indiqués par le comité catholique, puisque ces
18 crédits sont déjà offerts aux étudiants. Or, si
on regarde sérieusement la question, on s'aperçoit qu'au cours
des dernières années les étudiants ne les ont à peu
près pas suivis. De telle sorte qu'il faut aller au pratique et dire que
nous n'avons pas formé les maîtres adéquats pour assurer
cet enseignement moral et religieux par rapport aux besoins des écoles
exprimés par les demandes des parents.
Dans mon mémoire, j'ai présenté l'état des
discussions entre nos facultés au moment où on l'a écrit
et aussi la solution que la Faculté de théologie favorise. Ma
position idéale, que je ne sais traduire correctement en
règlement... J'ai appris que le comité catholique ne pouvait pas
s'adresser aux universités, il faut qu'il s'adresse à l'embauche.
Donc, je ne sais pas trop comment le faire, mais je vous dis que ma position,
je ne sais pas comment la réglementer.
Le premier point, c'est que le développement intégral de
la personne implique une attention à la dimension morale
et religieuse qui doit être présentée de quelque
façon dans le programme de formation des maîtres et cela, de
façon obligatoire pour tous les étudiants. Pour bien me faire
comprendre, il ne s'agit pas ici de l'enseignement moral ou religieux
catholique; il y a eu tel enseignement moral, il y a eu une
compréhension de la dimension morale et religieuse de la personne qui
doit être acquise comme un des objectifs du programme. Ce ne devrait pas
être donné nécessairement par des gens de théologie
ou autres, mais cela fait partie de la compréhension du
développement intégral de la personne. Cela doit être
présent au coeur du programme, non pas nécessairement en termes
de crédits, mais en termes d'attention dans différents cours.
Deuxièmement, les étudiants qui ont
bénéficié, depuis le secondaire particulièrement,
du choix entre l'enseignement moral et religieux catholique et l'enseignement
moral doivent pouvoir bénéficier de ce choix dans le programme de
formation des maîtres. Je ne vois pas comment on peut, rendu à
l'université, changer une dynamique qu'on a vécue dans sa culture
depuis si longtemps. On devrait donc, à mon point de vue, s'inscrire
soit à des cours qui assurent d'une bonne connaissance des programmes
d'enseignement moral ou à des cours qui assurent d'une bonne
connaissance des programmes d'enseignement moral et religieux catholique. Les
universités doivent garder une certaine latitude dans
l'interprétation des exigences du comité catholique. Je pense
qu'on se durcit les choses en disant: 18 crédits ou ceci, ou cela. Il
n'y a pas seulement des crédits, il y a aussi des intégrations
à des cours existants. Il y a des parts de l'enseignement moral qui,
bien sûr, sont partagées à la fois par l'enseignement moral
et religieux catholique et par l'enseignement moral; je dis bien des parts.
Enfin, il faut développer le programme de perfectionnement des
maîtres pour permettre à ceux-ci de répondre aux besoins de
la population. Permettez-moi une petite annonce. En ce sens, la Faculté
de théologie ouvrira dès janvier un enseignement
télévisé dans toute la province, un cours de 3
crédits sur les nouveaux programmes en enseignement moral et religieux
catholique.
Je termine en soulignant qu'un recul important du comité
catholique sur la qualification des maîtres, aux articles 16 et 17,
concourrait à l'aggravation d'une situation déjà
pénible quant à la qualité de l'enseignement moral et
religieux dans les écoles. Ceci ne signifie pas, cependant, pour ma
part, que des amendements ne doivent pas être faits et qu'il ne faut pas
non plus tenir compte des questions très concrètes et des
répercussions à court terme que cela signifie. Pour vous en
parler, je laisse la parole à Mme Laferrière.
Mme Laferrière: M. le Président, à ce
stade-ci des travaux de la commission et vu que je m'attends que vous
m'interrogiez sur mon mémoire, je vais vous soumettre quelques
considérations seulement.
D'abord, je veux parler du point de vue de l'étudiant en
formation à l'Université Laval au niveau du bac en enseignement
au préscolaire et au primaire. Je n'aborderai pas ici la question de la
formation au niveau secondaire, les 30 ou 60 crédits, mon
collègue Racine ayant déjà précisé certains
points là-dessus, et je crois qu'il y a consensus en ce sens qu'au
niveau du préscolaire et du primaire il y a surtout des interrogations
plus considérables.
Du point de vue de l'étudiant, j'intitulerais mon premier point:
Déséquilibre dès la préinscription de novembre
1987. Nos étudiants de première année, de deuxième
année et même nos finissants de troisième année sont
inquiets. Quel choix de cours à option feront-ils? Ont-ils le choix de
ne pas s'engager immédiatement dans le processus de qualification
demandé, vu les échéances qui sont actuellement
projetées? Et nous nous demandons: Que se passera-t-il à la
préinscription de nos étudiants et de nos étudiantes? Nos
délais sont très courts. Il m'importe d'attirer votre attention
là-dessus et de demander immédiatement que, dans les très
prochains jours, le ministre nous offre déjà quelques
éléments de position pour que nous puissions en informer nos
étudiants.
C'est vrai qu'à Laval les cours sont déjà dans ce
programme. C'est vrai que peu d'étudiants les prennent, mais nous
prédisons qu'il va y avoir un déséquilibre à la
préinscription. Les étudiants vont vouloir déjà
commencer à prendre les 9 crédits. J'ai d'ailleurs une lettre
d'intention de leur part. Même nos étudiants disent: On veut avoir
les 18 crédits et nous, très clairement, on doit répondre:
II n'en est pas question.
Contrairement à ce que les représentants de
l'Université du Québec ont mentionné tout à
l'heure, moi, je crois fermement que les programmes de formation initiale dans
l'enseignement sont de 90 crédits; je gère ma faculté de
la sorte. Bien des professeurs voudraient chez nous que ce soit une formation
de quatre ans. Je continue de répéter que toutes les orientations
vont dans le sens que les programmes de baccalauréat soient de 90
crédits. Étant donné que nous avons déjà 63
crédits obligatoires, le tout ferait en sorte que nous ayons 72
crédits obligatoires.
Pour cela, nous n'avons pas besoin de rendre ces cours obligatoires,
d'autant plus que le règlement inclut aussi un respect de la
liberté de conscience. Si cela s'applique aux enseignants, l'on pense
que cela devrait s'appliquer à nos programmes de formation
initiale. Mais que les cours soient à option ou pas, cela ne
change rien, parce qu'on ne peut pas reprocher à nos étudiants de
vouloir se garantir un emploi. Demain matin, nos étudiants vont se
gérer avec cette intention de travailler. Vous comprenez leur
inquiétude à ce stade-ci.
Quant à notre déficit informationnel, que pourrons-nous
leur dire? Si l'on retourne à la présentation faite par la
fédération des commissions scolaires et un peu à la
réserve qui a été émise, selon ce que j'en
comprends, à savoir que les commissions scolaires
préfèrent se gérer localement, que même si elles
sont d'accord avec les objectifs et les intentions des règlements elles
préféreraient gérer entièrement leur embauche,
pouvons-nous dire cela à nos étudiants? Pouvons-nous leur dire:
Là où tu cogneras pour avoir de l'emploi, on ne sait pas ce que
la commission scolaire fera. Peut-être que, d'ici à un certain
temps, les règlements vont passer. Ne prends pas de chance, inscris-toi
tout de suite. Je me dois, personnellement, demain matin, de pouvoir donner des
instructions claires à la direction du programme qui va inscrire dans
les prochaines semaines plus de 900 étudiants à ses cours de
l'hiver.
Deuxième point: En ce qui a trait toujours à la formation
de l'étudiant, nous serons témoins d'un choix forcé et non
d'un choix authentique de la part de l'étudiant, toujours sous cette
provision que nos étudiants voudront de l'emploi. Déjà,
l'expression circule à l'Université Laval: Cela fait longtemps
qu'on voulait des cours en expression dramatique, on va en avoir. L'on sait
que, dès qu'ils auront la permanence, certains d'entre eux vont demander
l'exemption.
J'aimerais, à ce stade-ct, lire un passage de la lettre que
l'association des étudiants m'adressait récemment: "Madame, "Dans
un premier temps, nous voulons préciser que nous estimons qu'il est de
la responsabilité de la faculté d'intervenir activement dans tout
projet de politique qui peut avoir des répercussions sur la formation,
l'identité professionnelle, les perspectives d'emploi, la
crédibilité de ses diplômés et qu'en ce sens nous
sommes très heureux que la faculté soit à étudier
le projet mentionné en titre. Nous estimons également que la
mission sociale de notre faculté est impliquée dans ce type de
dossier. "Dans un deuxième temps, nous désirons faire ressortir
les répercussions de l'adoption du projet de règlement qui nous
touchent particulièrement et font que nous ne pouvons être
d'accord avec cette réglementation éventuelle. "Mme
Laferrière, nous comptons sur votre appui pour défendre nos
intérêts."
Du point de vue des formateurs que nous sommes, l'on se demande à
la faculté pourquoi ne pas reconsidérer en profondeur la
possibilité que cet enseignement soit offert par des
généralistes. Serait-il souhaitable que le choix fait soit
reconsidéré? Nous aurions, cependant, mon collègue Racine
et moi, nos réserves respectives à ce sujet. L'on se demande
encore quand viendra la réforme attendue en formation et en
perfectionnement des enseignants. Nous faisons l'observation suivante: "Les
rapports se suivent et se ressemblent." À cette fin, nous pouvons
remonter au rapport Parent. Déjà, certaines réserves
étaient exprimées quant au passage de la formation des
enseignants des écoles normales à l'université.
À bien des égards, le bât blesse. D'un rapport
à l'autre, toujours les mêmes recommandations reviennent. Nommons
le partage des responsabilités, la formation professionnelle et
pratique, le droit de pratique. Nous insistons, M. le ministre. La politique
globale de formation des enseignants est attendue. À notre avis, cela
urge. Cela urge, parce que, bientôt, nous remplacerons le personnel dans
les écoles. Les enseignants seront remplacés, selon des
statistiques connues. Le temps de produire les nouveaux programmes, le temps de
la formation, soit les trois ans, et nous serons en train de renouveler le
personnel enseignant dans les écoles. Allons-nous manquer le bateau?
En terminant, je rappelle deux principes directeurs que nous faisons
nôtres: 1° offrir une formation initiale de qualité aux futurs
enseignants et enseignantes; 2 favoriser l'authenticité de choix pour
nos étudiants et étudiantes. Je rappelle aussi que ma
faculté demande, dans le mémoire soumis, le report du projet
actuel de règlement et la venue du projet de politique de formation et
de perfectionnement des enseignants.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la
doyenne et M. le doyen, de votre exposé. Je reconnais, dans un premier
temps, comme premier intervenant, le ministre de l'Éducation. M, le
ministre.
M. Ryan: Je remercie Mme Lafernère et M. Racine pour les
excellentes présentations qu'ils nous ont faites. Cela m'amène
presque à souhaiter que chaque organisme qui se présente devant
la commission y vienne avec une présentation à deux volets, pas
nécessairement convergents. Cela facilite beaucoup notre travail, nous
oblige à plus de clarté et nous rend davantage conscients des
choses qu'il reste à régler.
J'ai bien apprécié les deux présentations que nous
avons entendues. Il n'est pas question de commencer à faire le partage
des mérites d'un point et de l'autre. Je voudrais en profiter,
cependant, pour
signaler à M. Racine que j'apprécie beaucoup la
collaboration qu'il apporte au Conseil supérieur de l'éducation
à titre de membre très assidu et pour dire aussi à Mme
Laferrière que j'ai été heureux de rencontrer plusieurs
membres du personnel de sa faculté à l'occasion du récent
congrès sur les recherches dans le domaine de l'éducation. Voici
un domaine, entre parenthèses, où les travaux de recherche sont
soit ignorés de nous, soit assez peu directement reliés à
nos préoccupations, j'ai vu qu'il y avait, à un moment
donné, dans l'un des mémoires, une allusion à un travail
fait sur les préférences des parents qui est très
significatif. Cela rejoint les préoccupations qui nous ont,
évidemment, été exprimées par le comité
catholique.
Je serais porté à vous poser une question. M. Racine a dit
tantôt une chose qui m'a intéressé: Il faut que la
dimension morale et/ou religieuse, la dimension spirituelle, soit un
élément obligatoire dans le contenu de la formation
dispensée aux futurs enseignants. C'est une proposition à
laquelle je suis enclin à adhérer sans difficulté. Mais je
voudrais vous demander ceci: Dans les crédits obligatoires que vous avez
actuellement - je pense que c'est un bloc de 63 crédits obligatoires que
vous avez actuellement - quelle place est faite à cette
dimension-là?
Mme Laferrière: La place qui y est faite actuellement
n'est pas en termes de crédits spécifiquement identifiés.
La Faculté des sciences de l'éducation se comporte souvent ainsi
à l'égard des programmes de formation des enseignants. Â
l'intérieur d'un même cours, il y a une préoccupation pour
le développement intégral de la personne de l'enfant et, dans le
développement intégral de la personne de l'enfant, il y a la
dimension spirituelle ou morale.
M. Ryan: Cela ne répond pas à la question que nous
pose le comité catholique avec son projet de règlement, surtout
concernant les exigences de compétence pour l'enseignement de la
religion ou de la morale.
Mme Laferrière: Exactement.
M. Ryan: Est-ce qu'il y a des difficultés invincibles
à ce que l'acquisition d'une compétence minimale dans cette
dimension que j'appellerais alternative ou complémentaire - cela peut
être l'un ou l'autre, d'après ce que j'ai compris de la
présentation de M. Racine - figure dans le bloc de matières
obligatoires, de manière que ceux qui seront chargés de
l'enseignement de nos enfants offrent des garanties de compétence en
matière religieuse ou en matière morale? Je le dis avec d'autant
plus de liberté que, ces temps-ci, je me suis imposé un exercice
personnel. Je suis en train de relire La République de Platon,
car j'avais lu dans le livre d'Allan Bloom sur le rétrécissement
de l'esprit américain que, s'il n'avait qu'un seul ouvrage à
apporter sur une île où il serait condamné à vivre
longtemps, c'est celui-là qu'il apporterait. Vous savez comme moi que
l'insistance sur la dimension morale est très très forte dans cet
ouvrage de base pour tous ceux qui s'intéressent à
l'éducation. Est-ce qu'il y a des objections invincibles à
cela?
Mme Laferrière: La seule objection, c'est que la position
de plusieurs professeurs dans la faculté veut qu'il y ait plusieurs
voies pour ce faire. Il y a plusieurs voies pour développer le sens
moral et le sens spirituel des personnes. L'une de ces voies est très
certainement ce que suggère le comité catholique.
M. Ryan: Sur la proposition de M. Racine, si je la comprends bien
- si je l'interprète mal, vous me corrigerez, M. Racine - est-ce que
vous avez des objections? Est-ce l'un des points de désaccord entre
vous?
M. Racine: Entre nous deux? Non. (12 h 45)
M. Ryan: Entre les deux vénérables institutions que
sont vos facultés respectives?
M. Racine: C'est-à-dire que je ne crois pas qu'on soit
rendu au point où on a vraiment analysé cette question au
comité des programmes. C'est toujours un petit peu embêtant, on
vient ici en tant qu'institution et an n'a pas les mêmes institutions. Il
n'y a pas la même culture institutionnelle aux sciences de
l'éducation que chez nous et c'est ce qui explique un peu nos
difficultés, beaucoup plus que des questions théoriques à
ce niveau-ci, mais je dirais qu'on n'est pas rendu loin sur cette
possibilité. On ne peut pas dire qu'il y ait acquiescement d'une
problématique comme cela. Si vous me voyez venir, pour ma part, je me
dis: Supposons que le règlement ait été accepté,
avec les 9 crédits, il pourrait y avoir des ajustements universitaires
qui diraient: II y a 3 crédits qui sont intégrés à
la formation; ensuite, il y a une possibilité d'avoir 3 ou 6
crédits directement dans les programmes, soit en enseignement moral et
religieux, soit en morale. Puisqu'il y a des programmes, il faut les
comprendre, etc. Mais on n'est pas rendu là, M. le ministre, si on
l'était... On est sur le chemin de je ne sais trop quoi, mais...
M. Ryan: M. Racine, est-ce que je dois aller jusqu'à
comprendre que vous trouveriez préférable qu'on n'énonce
pas de manière numérique les exigences en matière de
formation professionnelle pour l'enseignement de ces matières?
J'ai cru comprendre qu'il y avait une réticence dans votre
présentation, tantôt. Vous venez d'y faire allusion à
nouveau. Est-ce que cela veut dire que vous ne recommanderiez pas de mettre "9
crédits pour le primaire et 30 et 60, si on règle le
problème autrement. Vous avez objection à ce qu'on fasse cette
distinction au secondaire, entre les deux cycles. J'aimerais que vous me
donniez votre opinion clairement là-dessus.
M. Racine: Mon opinion là-dessus, je vous ai dit que je
n'avais pas réussi à traduire cela en règlement. Je crois
que vous êtes pris avec une difficulté qui est la mienne. Il me
semble qu'on parle trop de crédits en milieu universitaire pour penser
qu'on peut tout faire seulement avec des crédits. Il me semble que
chaque fois qu'un intervenant vient il veut des crédits, mais, sous
prétexte qu'il veut des crédits et qu'on ne veut pas lui en
donner, on ne prend pas la demande. Évidemment, il y a un risque; s'il
n'y en a pas, c'est que les gens peuvent ne pas prendre la demande. À
mon point de vue, la demande pourrait être faite sans crédit si on
pensait qu'il y avait des moyens qu'elle soit prise.
M. Ryan: C'est là qu'est le problème.
M. Racine: C'est là qu'est le problème, je le
comprends très bien et c'est pour cela que je vous ai dit que je n'avais
pas trouvé de solution. Comme universitaire, je
préférerais que ce ne soit pas en crédits, parce que les
économistes arrivent, ils ont besoin de telle chose. Il y a tel
mouvement populaire, les écologistes, les féministes, tout le
monde veut 3 crédits. Mais, à mon point de vue, il y a une
intégration à laquelle on pense peu.
M. Ryan: Vous avez souligné d'autre part, si j'ai bien
compris, la nécessité assez urgente d'une action en ce qui
concerne la formation des enseignants et des enseignantes du primaire.
M. Racine: M. le ministre, je pense qu'au niveau du secondaire le
travail va bien. Au niveau du primaire, je pense qu'il y a une absence; je
dirais que le débat actuel nous aide à regarder la question et
à voir ce qu'on peut faire pour améliorer une situation que je
trouve déplorable.
M. Ryan: Une remarque à l'attention de Mme
Laferrière. Tout d'abord, il y a une question que vous avez
soulevée, que nous avons discutée tantôt avec les
autorités de l'Université du Québec et je pense que les
mêmes remarques s'appliqueraient mutatis mutandis. On a dit qu'il
faudrait attendre une politique générale, globale sur la
formation des maîtres avant de toucher à ceci. Je ne sais pas, il
y a bien des gouvernements qui ont essayé de mettre au point une
politique globale de formation des maîtres, depuis une douzaine
d'années. Les choses n'ont pas abouti jusqu'à maintenant.
Nous-mêmes, nous sommes saisis du dossier, mais il y a une chose qui va
nous presser de l'examiner de plus près, c'est l'étude qui a
été faite au Conseil des universités. Il n'y aura
sûrement pas de politique émanant du ministre de
l'Éducation et du ministre de l'Enseignement supérieur et de la
Science avant l'année 1988-1989. Il n'y aura aucun document qui va
émaner de l'un ou l'autre des ministères là-dessus avant
l'été, je dirais même avant l'automne de l'année
1988. Il y a beaucoup de travaux à faire, beaucoup de consultations et
je n'entrevois pas qu'on soit capable d'y arriver avant cela. Sortir un
document, faire une commission parlementaire, des consultations, c'est
très intéressant, mais "it takes time", cela prend beaucoup de
temps. On va être obligé d'envisager des mesures maintenant, sans
oublier l'autre dimension qui est beaucoup plus importante à long terme,
la dimension plus large que vous avez soulignée à juste
titre.
Maintenant, là, vous me dites: II y a des problèmes
urgents. Nous allons être obligés de procéder à la
préinscription en vue de la prochaine session. Vous dites: Nous
attendons des précisions de la part... Vous m'avez identifié
assez clairement, je pense. J'aimerais vous demander quelles sortes de
précisions vous attendez. Qu'est-ce qui doit être clarifié
à votre point de vue de la part du gouvernement?
Le Président (M. Parent, Sauvé): Madame.
Mme Laferrière: L'échéancier est juin 1990.
Autrement dit, les étudiants nouvellement entrés en septembre
1987, lorsqu'ils seront diplômés en juin 1990, sont-ils soumis
à la nouvelle qualification? À l'heure actuelle, nous
interprétons que oui. Si cela est, déjà, ils doivent se
donner la formation. Maintenant, les étudiants de deuxième
année qui ont déjà 30 crédits de faits dans le
programme, peut-être qu'ils ont déjà bouffé
plusieurs de leurs cours à option possibles parmi les crédits
disponibles. Ces étudiants vont graduer en juin 1989. S'ils enseignent,
possiblement qu'en septembre 1990 ils auront la qualification, mais, s'ils
n'enseignent pas, ce sont des diplômés déqualifiés
et cela met drôlement en doute la crédibilité du programme
de formation que nous avons offert. Nous pouvons reculer jusqu'à juin
1988. Nous avons des étudiants qui vont dans des classes d'immersion
hors Québec pour quelques années et qui reviennent. Ces
étudiants ne pourront pas se qualifier au Québec par une
pratique d'enseignement qui les rendra qualifiés pour septembre 1990. Ce
sont, encore plus concrètement, les considérations que je voulais
apporter. Maintenant, ce dont nous avons besoin... J'ai l'impression qu'on ne
peut pas, à deux semaines d'avis, dire aux étudiants: Commencez!
Je pense que cela nous prend au moins un report de délai.
M. Ryan: Vous voulez dire d'un an?
Mme Laferrière: Au minimum. C'est l'urgence!
M. Ryan: Si vous pouviez nous adresser une note
complémentaire sur ce point, sur toute la mécanique, des
difficultés auxquelles vous devrez faire face, vous, comme responsables
de l'orientation des choix des étudiants, après eux
évidemment, je pense que cela pourrait nous être très
utile. Il faudrait que vous nous adressiez cela ces jours-ci pour que nous
puissions en tenir compte dans l'examen que nous faisons de toutes les
représentations soumises à la commission parlementaire.
J'aurais une dernière question pour M. Racine et aussi pour vous.
Je pense que cela vous intéresse tous les deux. Vous dites: tout cela
c'est très bien, il ne faut pas que cela ait de l'effet sur l'embauche.
Là, je ne sais pas ce qu'on peut envisager de ce point de vue. Les
employeurs des enseignants sont les commissions scalaires. Nous, au
ministère, définissons certaines exigences non extraordinaires
comme vous le savez actuellement et qui n'empêchent pas beaucoup de monde
de respirer. Là, qu'est-ce que vous envisageriez pour obtenir l'effet
que vous recherchez pour éviter celui que vous redoutez?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Racine ou Mme
Laferrière. M. Racine.
M. Racine: Bon! Pourtant j'avais pris la précaution de
dire que je ne savais pas comment faire des règlements à ce
niveau. La voie que j'envisagerais, c'est qu'il faudrait que le maître
ait une capacité d'offrir, soit les programmes d'enseignement moral ou
soit d'offrir les programmes d'enseignement moral et religieux.
Évidemment qu'à ce sujet, il reste une distance entre ce que vont
prendre les étudiants et ce que vont demander les milieux. Il y a
là me semble-t-il une question des droits personnels et collectifs. El y
a un jeu qui reste. Je me dis que cela vaut le prix du perfectionnement si
nécessaire s'il y a des gens qui ne sont vraiment pas... Je pense que le
type qui aurait un DEC, nous on appelle cela comme cela, son certificat, ayant
dedans soit une formation pour l'enseignement moral ou pour l'enseignement
moral et religieux catholique devrait de soit être embauché.
Le Président (M. Parent, Sauvé): C'est votre
perception.
M. Racine: La mienne.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Vous madame,
est-ce la même chose?
Mme Laferrière: Je pourrais me rallier à cette
position.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Vous vous ralliez
ou vous pourriez vous rallier?
Mme Laferrière: Je pourrais.
M. Ryan: La première question est pour éveiller son
esprit.
Mme Laferrière: On pourrait envisager qu'un nombre pas
trop grand d'étudiants sortent qualifiés de nos programmes par
les exigences que les professeurs de la Faculté de théologie
mettront dans leur cours, c'est-à-dire jusqu'à quel point on peut
mesurer l'authenticité de la personne face à sa foi catholique,
mais à quelque part, on va jouer là-dedans. Là, ou cela
devient difficile, c'est qu'on sait que sur le marché de l'emploi,
l'emploi va être beaucoup plus fréquent du côté de
l'enseignement moral, religieux catholique que du côté de
l'enseignement moral. Et, c'est ça qui vient tout vicier. Parce que,
jusqu'à ce jour, j'avais dans mon bureau, il y a deux jours, des
étudiantes qui contestaient sur l'espace de la didacthèque, qui
disaient qu'elles marchaient au plafond de la didacthèque, espace trop
réduit et, ce que l'étudiante me disait, accidentellement, dans
la conversation: Je prends des cours d'enseignement moral, religieux catholique
et j'aime cela beaucoup. Et, je sentais, non seulement sa ferveur mais
déjà aussi, toute sa pratique de recherche en ce sens-là
et elle me disait: Mon travail en didacthèque me permet de faire les
recherches nécessaires, etc.
Je sentais chez-elle, que c'était une personne que vous voudriez
avoir pour enseigner l'enseignement moral religieux catholique, une personne
qui répondrait aux attentes du Comité catholique.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Dernière
intervention du ministre. M. le ministre.
M. Ryan: Oui. Vous autres des sciences de l'éducation,
vous semblez évoluer vers une conception qui ferait de l'enseignant de
la religion un spécialiste au primaire.
Mme Laferrière: Plutôt.
M. Ryan: Tandis que, pour les pédagogues, il y a beaucoup
d'avantages à ce qu'il demeure un généraliste
chargé de la classe en général.
Mme Laferrière: On est déchirés
là-dessus, M. le ministre.
M. Ryan: Merci.
Le Président (M. Parent-Sauvé): Merci. Alors, je
reconnais maintenant la...
M. Ryan: Alors, la question qui se pose fondamentalement, c'est:
Est-ce que nous sommes capables, financièrement et
matériellement, d'aller jusque là? et deuxièmement, en cas
de difficultés insolubles, qu'est-ce qui se passe avant: le droit de
l'enfant à une formation répondant aux attentes de ses parents ou
le droit d'un individu à obtenir un poste d'enseignant?
Le Président (M.
Parent, Sauvé): Alors, M.
le ministre, la commission vous dit que cela vaut réflexion et
reconnaît maintenant la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président, Mme
Laferrière, M. Racine. Permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue, au
nom de ma formation politique. J'ai suivi, avec beaucoup
d'intérêt, l'échange de propos que vous venez d'avoir avec
le ministre. Ce que j'apprécie chez le ministre, c'est le fait qu'il
apprécie, précisément, le fait d'avoir devant lui des
personnes qui, dans une même institution, ont des opinions un peu
divergentes. Je le comprends beaucoup parce qu'il n'aurait pas eu l'occasion de
faire le même exercice avec beaucoup d'organismes qui se sont
présentés, ici. Parce que je dirais que la majorité, pour
ne pas dire la totalité de ceux qui vivent quotidiennement
l'enseignement, que ce soit dans des écoles, ceux qui enseignent ou ceux
qui dirigent les écoles, sont assez unanimes pour dire qu'il faudrait
que soit reporté le projet de règlement du comité
catholique.
Par ailleurs, vous avez eu droit à vos bonnes étoiles de
la part du ministre. Vous êtes bien pointés. Vos bonne notes,
bravo!
Vous avez souligné un certain nombre de questions
extrêmement intéressantes et qui me placent devant un certain
nombre de contradictions, par rapport à ce projet de règlement.
Et, je pense à votre première remarque, M. Racine. Vous disiez
qu'il faut absolument qu'on puisse respecter l'étudiant qui se
présente à la Faculté de l'éducation, par rapport
à son choix de prendre des cours en enseignement religieux catholique
moral, comme on l'a respecté tout au cours de sa formation depuis le
primaire.
On sait par exemple qu'ici, dans la région de Québec, vous
recevez majoritairement... j'imagine que vos clientèles vous viennent de
la grande région de Québec. Ici, Sainte-Foy et Sillery, 50 % des
élèves du secondaire choisissent l'enseignement moral. Cela pose
certainement une difficulté. J'ai aussi apprécié votre
remarque touchant le fait qu'il ne faut peut-être pas toujours chercher
des crédits, par rapport aux préoccupations ou aux valeurs
morales ou spirituelles ou d'éthique, que cela, ça pouvait
être transmis dans différents cours du programme. D'ailleurs, le
comité catholique le fait pour le projet éducatif catholique
où il dit que ces valeurs doivent être transmises à travers
tous les cours. Ce avec quoi, j'ai des réserves, du moment où
l'on accueille des clientèles qui ne partagent pas nécessairement
les mêmes valeurs ou les mêmes croyances. Mais, par ailleurs, je
trouve que cette préoccupation est intéressante et je reconnais,
avec M. Racine, que je n'ai pas vu là une intention sexiste, mais que
lorsque les écologistes et les féministes demandent d'avoir leurs
trois crédits, on pourrait peut-être mieux intégrer cela
à l'intérieur des différents cours du programme. (13
heures)
II reste que je pense bien que ce n'est ni à la satisfaction du
ministre non plus qu'à celle des enseignants, tantôt. C'est
comment s'assurer, par rapport à votre mémoire... Vous dites que
l'université assure une promotion équitable des deux options en
référence aux besoins du milieu. Cela veut donc dire: essayer
d'accueillir et, déjà, faire une espèce de contingentement
qui tiendrait compte d'un certain nombre d'étudiants qui s'inscriraient
en enseignement moral et d'autres, en enseignement religieux et moral. Comment
faire cela actuellement et comment le faire sans exercer une certaine
discrimination sur vos clientèles? Comment assurer - je rejoins Mme
Laferrière là-dessus, et cela a été notre propos un
peu tout au long de cette commission - la qualité, la
véracité, la vérité, alors que vos étudiants
vont vouloir se donner le plus de chances possible? Donc, indépendamment
de leur croyance, de leur foi ou de la solidité de leur foi, ils
voudront prendre les deux options, neuf crédits en enseignement
religieux catholique et neuf crédits en enseignement moral. Vous nous
avez dit, si je me rappelle votre propos, M. Racine, qu'on ne pouvait pas
intégrer les deux actuellement, à moins de prolonger la
formation, ce que je comprends. Est-ce que c'est juste? En tout cas, je pense
que vos propos soulèvent, pour l'essentiel, plusieurs grandes
interrogations qui ont été celles de cette commission.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M.
Racine.
M. Racine: Écoutez, pour bien se comprendre, ce que je
propose ici est que l'étudiant... Je ne dis pas que c'est la position du
comité; cela peut être le règlement, etc. J'ai
réfléchi à la question à partir du milieu
étudiant et des besoins du milieu. Â mon avis, l'étudiant
qui veut faire de l'enseignement au primaire et au préscolaire devrait
avoir l'obligation de choisir entre se former pour la morale ou se former pour
la morale et l'enseignement religieux. C'est ce que je dis.
Mme Blackburn: Cela va.
M. Racine: D'accord? Ce que je dis, en termes de
crédits... Cela se traduit par des crédits, et j'ai
peut-être été... Il m'arrive, parfois, de sauter rapidement
sur des questions comme cela. Je veux simplement dire que, quelques fois,
cependant, il peut y avoir des agencements de crédits. Je ne dis pas
qu'il ne doit rien y avoir. Il ne faut pas trop fermer cela. Dans ma propre
faculté, quand je fais un programme en théologie, tes
exégètes n'en ont jamais assez, les moralistes n'en ont jamais
assez, les dogmaticiens n'en ont jamais assez, les historiens n'en ont jamais
assez et il faut qu'on finisse par arriver à 90 crédits. Si je
prends la théorie de chacun, ils ne pourront jamais réaliser les
objectifs avec ce qu'on leur donne. C'est un peu contre cela que j'en ai. Mais
je ne dis pas qu'il ne faut pas que cela se traduise à la fin.
D'autre part, ce serait une discussion philosophique beaucoup trop
large. Je pense qu'il faut distinguer, mais ne pas opposer la question de la
formation morale et celle de l'enseignement moral catholique. Il y a des
distinctions, mais il n'y a pas de contradiction fondamentale à
l'égard de cela, à moins de vouloir, en éducation morale,
défendre une unique morale.
Mme Blackburn: J'ai peut-être une dernière question,
parce qu'on va finir par être serré dans le temps
tantôt.
Vous terminez en disant qu'il faut distinguer la formation en
enseignement religieux catholique moral et la formation en enseignement moral,
sans les opposer. Selon vous, est-ce qu'on devrait avoir des exigences
comparables pour les futurs enseignants en morale? Le comité catholique
dit: Pour enseigner la religion catholique et la morale catholique, il faudrait
neuf crédits au primaire et 30 à 60 crédits au secondaire.
Est-ce qu'on devrait avoir les mêmes exigences pour l'enseignement
moral?
Le Président (M. Parent, Sauvé): À qui
posez-vous votre question, madame?
Mme Laferrière: Ce qui serait préférable
pour nous, ce serait de ne pas exiger neuf crédits sur les contenus de
foi catholique ou de didactique, mais de faire de la place pour la dimension
morale spirituelle dans le programme. On pourrait imaginer trois crédits
couvrant un certain nombre de contenus de manière très ouverte
et, dans un deuxième temps, une option de trois crédits pour
l'étudiant qui ira en enseignement moral religieux catholique ou en
enseignement moral. Au mieux, je pense, c'est ce que le programme pourrait
prendre.
Mme Blackburn: D'accord. Cela, c'est pour le primaire. Pour le
secondaire, est-ce qu'on devrait - je répète ma question - avoir
les mêmes exigences de formation ou s'il y aurait ce qu'on appelle en
enseignement collégial, un tronc commun, à un moment
donné, c'est-à-dire une trentaine de crédits qui
pourraient être davantage sur la morale de façon
générale, sur l'exploration des autres traditions religieuses
etc?
M. Racine: Pour vous donner une réponse, madame, je dois
dire qu'actuellement il y a un certificat en éducation morale de 30
crédits d'offert. Nous sommes dans un projet d'exploration de programme
pouvant conduire jusqu'à un bac en morale. Où va cette
exploration? Il faut bien voir quels seraient les contenus etc. C'est une
exploration.
Mme Blackburn: D'accord.
M. Racine: II s'agira de voir. Actuellement on a commencé
avec un certificat en éducation morale sous le contrôle des
sciences de l'éducation mais auquel nous participons. Nous avons
même un membre au comité du programme, comme Faculté de
théologie. Il n'est pas impassible qu'il pourrait y avoir une majeure en
éducation morale. Eux pensent même à un
baccalauréat. L'étude n'est pas faite à savoir s'il y a
des objectifs suffisants, s'il y a une matière suffisante etc.
Mme Blackburn: Au nom de ma formation politique, à
nouveau, je vous remercie d'avoir participé à cette commission
parlementaire en dépit des informations un peu contradictoires qu'on a
eues au début de la commission en ce sens que vous ne vous
présenteriez pas nécessairement. Je trouve cela
particulièrement intéressant que vous soyez venus; à
preuve, les échanges qu'on a eus sont fort enrichissants pour
l'éclairage par rapport aux décisions à prendre touchant
ce règlement.
Il me reste à souhaiter que le ministre soit ouvert à vos
préoccupations et conscient des difficultés que poserait à
court terme l'application du règlement. Je vous remercie
infiniment.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie,
madame. Je me fais le porte-parole de la formation ministérielle pour
vous remercier en leur nom et au nom de tous les membres de cette commission je
vous dis, merci.
La commission suspend ses travaux jusqu'à une heure à
être identifiée immédiatement après la
période des questions à l'Assemblée nationale. J'invite
tous les membres de cette commission à être présents
dès la fin des travaux à l'Assemblée nationale et de se
rendre ici en commission parlementaire.
(Suspension de la séance à 13 h 7)
(Reprise à 16 h 42)
Le Président (M- Parent, Sauvé): À l'ordre,
s'il vous plaît!
J'inviterais les membres de cette commission parlementaire à
prendre place à leur fauteuil et nos invités à prendre
place à la table qui me fait face.
La commission parlementaire de l'éducation, dans le cadre du
mandat qui lui a été confié, accueille cet
après-midi les représentants de la Faculté de
théologie de l'Université de Montréal, M. André
Charron qui est accompagné du doyen adjoint, M. Jean-René Milot.
Messieurs, je vous souhaite la bienvenue. Merci beaucoup d'avoir bien voulu
répondre à l'invitation de la commission parlementaire de
l'éducation de lui faire connaître vos commentaires et vos
réactions face à ces deux projets de règlement
présentés par les comités catholique et protestant.
La commission a environ 45 minutes à vous consacrer. Je vous
suggérerais qu'un tiers du temps soit pris à faire un
résumé de votre mémoire, lequel a d'ailleurs
été lu par les membres de cette commission. Le reste du temps
sera réparti entre les deux formations politiques, à part
égale, à l'occasion de discussions que vous pourrez avoir avec
les représentants des formations politiques.
Le porte-parole, est-ce que c'est M. Charron? M. Charron, nous vous
écoutons.
Doyen de la Faculté de théologie de
l'Université de Montréal
M. Charron (André): Est-ce que je dois comprendre qu'il
est mieux de lire in extenso le mémoire, étant donné qu'il
est assez condensé, assez court, finalement?
Le Président (M. Parent, Sauvé): C'est libre
à vous. La commission a 45 minutes à vous consacrer. Je vous dis
que le mémoire a été lu par les membres de la commission.
Libre à vous de le relire, d'en faire une synthèse ou d'y aller
directement...
M. Charron: Disons que j'opte pour la lecture, mais assez
rapide.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Allez, monsieur,
nous vous écoutons.
M. Charron; Merci.
Nous ne voulons pas rouvrir ici le dossier complexe de la
confessionnalité de l'école publique. Nous ne commenterons donc
pas l'ensemble du projet de règlement, mais bien spécifiquement
les exigences de formation des futurs enseignants et agents pastoraux.
Cependant, en entrée de jeu, nous constatons avec satisfaction
que la procédure de reconnaissance d'une école confessionnelle
catholique avancée dans le présent règlement
représente une amélioration certaine par rapport à la
procédure de 1974. En effet, on reconnaissait d'office qu'une
institution d'enseignement public était confessionnelle catholique, on
étendait en pratique à toute école existante cette
reconnaissance et on faisait porter le poids de la révocation sur une
demande expresse de l'autorité scolaire concernée.
Le présent règlement établi plutôt, comme
procédure de reconnaissance, la présentation d'une formule de
demande à l'initiative de l'école concernée par la voie de
la commission scolaire dont elle relève, formule qui exige une
consultation du comité d'école et des parents de l'école.
Cela suppose une démarche positive qui lève les principales
ambiguïtés, fait appel à la clarté des intentions et
à la responsabilité, d'autant qu'elle s'appuie sur la demande des
parents.
En conséquence, nous comprenons qu'il y aura au Québec non
seulement des écoles publiques confessionnelles, mais aussi des
écoles autres. Nous appuyons enfin le maintien de la
réglementation sur la liberté donnée à
l'élève de pouvoir faire un choix entre un cours d'enseignement
moral et religieux catholique et un cours d'enseignement moral, sans
référence à une confession particulière. C'est
là, à l'intérieur même de l'école catholique,
respecter la pluralité des cheminements individuels et encore le
pluralisme des options en matière religieuse envers la clientèle
souvent diversifiée d'un quartier ou d'une région.
Il existera donc des écoles catholiques parmi d'autres. À
partir du moment où il existe des écoles telles, il est
socialement justifiable et pédagogiquement nécessaire que ces
écoles catholiques se donnent les moyens de réaliser leurs
projets, notamment par l'embauche de maîtres compétents dans les
secteurs où ils auront à intervenir. Pour assurer l'excellence de
l'éducation chrétienne
scolaire, nous estimons que la grande question est celle de la
qualité de la formation des maîtres quant au contenu à
transmettre. L'intervenant scolaire dans le domaine religieux doit être
à la hauteur de sa tâche. Or le généraliste du
primaire, tout particulièrement, n'avait souvent, depuis une quinzaine
d'années, que son petit bagage religieux hérité de ses
études primaires ou secondaires, sans avoir eu la chance
d'acquérir des connaissances l'habilitant à surmonter ses propres
carences ou difficultés, sans avoir eu l'opportunité
d'intégrer ce savoir en une synthèse organique et remise à
jour pour la communication. Outre l'enjeu confessionnel, il y a là des
enjeux éducatifs et culturels.
D'une façon générale, nous appuyons donc le projet
de règlement sur les exigences de formation des enseignants du primaire
(article 16, paragraphe 2) et des maîtres du secondaire (article 17,
paragraphe 2) et des personnes chargées de l'animation pastorale au
primaire (article 21, paragraphe 1) et au secondaire (article 22, paragraphe
1).
Nous voulons faire savoir que la Faculté des sciences de
l'éducation et la Faculté de théologie de
l'Université de Montréal, qui agissent souvent de concert en ces
matières, sont équipées en programmes et en cours pour
répondre à ces exigences de formation. Mais nous comprenons que
c'est aux futurs enseignants ou agents pastoraux qu'il reviendra de s'imposer
le profil de formation qui sera exigé par les employeurs tors de leur
embauche.
Nous en venons maintenant à notre propos spécifique, qui
est de commenter les articles en cause.
Formation des enseignants au primaire. Tant que la tâche de
l'enseignement moral et religieux catholique sera confiée aux
titulaires, c'est-à-dire à des généralistes, neuf
crédits universitaires de formation disciplinaire nous semblent
être un minimum réaliste, compte tenu des exigences de formation
dans les autres disciplines à enseigner. Actuellement la personne qui
s'inscrit au majeur en éducation à la Faculté des sciences
de l'éducation de l'Université de Montréal peut facilement
satisfaire à ce minimum de neuf crédits et même aller
jusqu'à douze crédits portant sur les contenus essentiels de la
foi catholique et sur les programmes d'enseignement moral et religieux
catholique.
En effet, deux blocs de ce programme de 60 crédits donnent
accès à la fois à des cours de didactique à la
Faculté des sciences de l'éducation et à des cours
disciplinaires dispensés par la Faculté de théologie. Par
exemple au bloc 70 G, l'étudiant doit prendre au moins un et au plus
deux des 4 cours de 3 crédits qui suivent: CAT 1310:
catéchèse et projet éducatif global; CAT 1412: programmes,
guides et instru- ments du primaire; FIE 2016: enseignement religieux, il
s'agit de l'enseignement tnoral et religieux catholique et FIE 2025 -ici il y a
une petite correction due à une erreur de transcription, ce n'est pas
2026, c'est 2025: enseignement moral et religieux, il s'agit ici de
l'enseignement moral, c'est-à-dire sans référence
confessionnelle et moral et religieux catholique.
Au bloc 70 Y l'étudiant doit prendre au moins un et au plus deux
d'un ensemble de cours incluant: B8L 1135: initiation à la Bible; THL
1330: croire aujourd'hui; THL 1435: foi en Jésus, le Christ; THL 2841:
morale et respect de la vie. L'étudiant dispose en plus d'un cours au
choix qu'il peut prendre à la Faculté de théologie. Cette
structure de programme reflète clairement l'importance accordée
à la fois à la didactique de l'enseignement moral et religieux
catholique et aux connaissances bibliques et théologiques. En ce qui
concerne l'Université de Montréal, il est donc possible à
un étudiant de se donner le profil de formation requis pour
répondre aux exigences de l'employeur, conformément à
l'article 16, paragraphe 2 du présent règlement.
Formation des maîtres au secondaire. À défaut de
connaître les raisons précises qui ont incité le
comité catholique à distinguer entre le 1er et le 2e cycle du
secondaire, on peut s'étonner de cette distinction dans les exigences de
formation des maîtres. Pour notre part, nous constatons en tout cas que
l'exigence minimale de 30 crédits nous apparaît insuffisante en
regard du profil actuel de formation des maîtres du secondaire à
l'Université de Montréal. En effet, les programmes
approuvés pour fins d'octroi du permis légal d'enseigner
s'articulent en termes de majeur, c'est-à-dire 60 crédits, et de
mineur, 30 crédits ou certificat, à l'intérieur d'un
baccalauréat ès arts. La formation en psychopédagogie et
en didactique est assurée par le certificat en enseignement secondaire
de 30 crédits - vous avez tout cela dans les annexes - dispensé
par la Faculté des sciences de l'éducation. Mais, pour être
admis à ce certificat, l'étudiant doit avoir au moins
complété la scolarité d'un majeur, donc de 60
crédits dans une discipline qui fait l'objet d'un enseignement au
secondaire. C'est une formation disciplinaire, en d'autres termes.
En ce qui a trait à l'enseignement moral et religieux catholique,
cette formation disciplinaire est dispensée par la Faculté de
théologie sous forme d'un majeur en études théologiques ou
en études bibliques ou de deux certificats équivalant à un
majeur. Vous avez les différents certificats aux annexes. Le minimum de
30 crédits prévu par l'article 17, ne satisfait donc pas aux
exigences d'admission au certificat en enseignement secondaire et, en
conséquence, n'assure pas l'obtention du permis légal
d'enseigner.
C'est là une première raison qui nous fait souhaiter que
soit maintenue l'exigence uniforme de 60 crédits disciplinaires pour les
deux cycles du secondaire. Â cela s'ajoute une autre raison qui tient
à l'affectation de l'enseignant et au contenu des programmes qu'il doit
enseigner. Dans l'état actuel des choses, la répartition des
tâches d'enseignement permet rarement à un enseignant d'être
affecté uniquement à l'un ou l'autre des cycles du secondaire.
D'une année à l'autre, et souvent à l'intérieur
d'une même année, il est appelé à oeuvrer
successivement ou simultanément aux deux cycles du secondaire, ce qu'on
appelle la mobilité, finalement. La formation exigée de
l'enseignant doit donc tenir compte de cette réalité et l'y
préparer le mieux possible.
En outre, un coup d'oeil sur les nouveaux programmes d'enseignement
moral et religieux catholique du secondaire me semblent postuler le besoin,
pour l'enseignant, d'une bonne formation en études bibliques, secondaire
1 et 11; en théologie, secondaire 111; en éthique
chrétienne, secondaire IV et en ecclésiologie, secondaire V.
L'exigence de 30 crédits nous apparaît, ici encore, insuffisante
pour acquérir une telle formation initiale.
Pour ces raisons, donc, liées à la fois au profil actuel
de formation des maîtres du secondaire, à la tâche
concrète qu'ils doivent assumer et au contenu des programmes qu'ils
doivent enseigner, nous croyons que l'exigence minimale prévue à
l'article 17, paragraphe 2, devrait être de 60 crédits pour les
deux cycles du secondaire. De toute façon, la Faculté de
théologie est équipée pour donner un programme de
formation sur les contenus de la foi catholique et sur les programmes
d'enseignement moral et religieux catholique qui satisfasse aux exigences du
présent règlement.
Passons maintenant à la formation des personnes chargées
de l'animation pastorale au primaire, article 21. À notre avis,
l'article 21 représente un progrès appréciable, du fait
qu'il définit des exigences minimales de formation, là où
la bonne volonté et le dévouement sont trop souvent
considérés comme les principaux critères de recrutement et
d'affectation. Par ailleurs, en n'exigeant pas immédiatement que les 30
crédits soient universitaires, le comité catholique fait sans
doute preuve de réalisme, en tenant compte de la situation actuelle,
notamment de la difficulté à recruter et à
rémunérer convenablement des personnes qualifiées.
 cet égard, la mise en place de programmes d'études
collégiales à l'intention des agents de pastorale a
marqué, dans notre milieu, un grand pas en avant vers la reconnaissance
d'une qualification professionnelle pour l'animation pastorale au primaire.
Dans ce même sens, il serait peut-être temps de faire un autre pas
plus avant, en s'orientant vers une formation proprement universitaire. Cela
pourrait se faire, sans qu'il y ait contrainte, si l'article 21, paragraphe 1
se lisait: "avoir acquis 30 crédits, de préférence
universitaires en théologie", etc.
Sans prétendre trancher les débats et les interrogations
impliquant actuellement diverses instances concernées par cette
animation pastorale au primaire, nous nous permettons de souligner l'importance
que nous attachons au caractère professionnel d'une telle fonction. Dans
une école où l'on exige des divers intervenants une formation
universitaire, l'animation pastorale, même si elle est un service
complémentaire, se situe à l'intérieur du temps
consacré au service éducatif. À ce titre, elle risquerait
d'être considérée comme un parent pauvre, si elle ne
comportait pas d'exigences de formation comparable à celle des autres
intervenants. Nous croyons qu'il y a là plus qu'une question d'image. Il
s'agit d'une question de compétence, compte tenu du fait que dans la
structure scolaire actuelle, les exigences de planification et
d'évaluation s'appliquent à l'animation pastorale comme aux
autres activités éducatives. L'atteinte des objectifs dans les
domaines énumérés à l'article 20 suppose, chez
l'agent de pastorale, une formation universitaire qui ne va pas à
l'encontre du témoignage mais vient au contraire en amplifier la
portée et y fournir les instances de clarification et de discernement
quant au contenu qui y sont nécessairement véhiculées. Et
j'ajouterais aussi, peut-être, donner des connaissances sur la structure
scolaire, la psychologie du jeune, les contenus et les programmes. Cela ne
s'improvise pas, cela suppose une formation universitaire.
Pour sa part, la Faculté de théologie offre depuis des
années un certificat d'études pastorales - que vous trouverez
à l'annexe 7 - qui veut répondre, entre autres, à ces
besoins de formation. La démarche de ce programme suppose l'engagement
d'étudiants dans une intervention pastorale. Ce programme peut se
prendre par cours du soir. Il est offert sur le campus et dans une dizaine de
localités, en collaboration avec des centres diocésains de
formation. Dans une perspective de formation continue, les agents de pastorale
ayant complété ce programme peuvent - et de fait, le font
-parfaire leur formation en s'inscrivant au certificat d'études
bibliques et d'études théologiques et éventuellement
même obtenir un baccalauréat. Nous nous permettons donc de
souligner à la fois l'importance et la faisabilité d'une
formation universitaire pour les agents de pastorale au primaire.
Finalement, formation des animateurs de pastorale au secondaire, article
22. Nous
sommes d'accord avec cet article qui nous paraît correspondre
à la fois aux exigences de formation pour les professionnels non
enseignants et à la pratique actuelle dans notre milieu. Â cet
égard, la Faculté de théologie dispense depuis longtemps
des programmes permettant de satisfaire à ces exigences. Depuis quelques
années, il semble se dégager chez les employeurs un consensus
privilégiant les candidats qui incluent dans leur baccalauréat le
certificat d'études pastorales.
Récemment, une concertation s'est même opérée
entre, d'une part, l'Office de l'éducation du diocèse de
Montréal, des représentants des commissions scolaires, des
institutions privées et, d'autre part, la Faculté de
théologie. Il en est résulté l'établissement d'un
profil de formation qui est recommandé aux futurs animateurs de
pastorale du secondaire. Ce profil peut être satisfait selon deux
cheminements pédagogiques. L'un allie le majeur en études
théologiques au certificat d'études pastorales tandis que l'autre
conjugue les certificats d'études théologiques, d'études
pastorales et de sciences religieuses. Dans un cas comme dans l'autre, on y
pointe les cours qui sont privilégiés par ledit profil de
formation. C'est ce que vous avez aux annexes 8 et 9, avec les indications
graphiques à gauche des colonnes.
Cette initiative réalisée pour la région de
Montréal reflète bien une préoccupation commune en
matière d'exigences de formation et assure concrètement la
possibilité de satisfaire à ces exigences à même les
programmes dispensés par notre faculté. Cela illustre
également la pertinence réelle et la viabilité de
l'article 22, paragraphe 1 du projet de règlement.
Au terme de ces quelques commentaires, nous réitérons donc
notre appui au projet de règlement, avec les nuances apportées et
pour les points qui ont retenu notre attention. Pour ce qui la concerne, la
Faculté de théologie entend poursuivre sa collaboration avec la
Faculté des sciences de l'éducation, les commissions scolaires,
les organismes diocésains et les instances gouvernementales afin
d'assurer une formation adéquate aux intervenants en milieu
scolaire.
Donc, essentiellement, nous voulons montrer la faisabilité des
exigences de formation à l'Université de Montréal.
Maintenant, j'aimerais accorder quelques minutes à M. Jean-René
Milot pour dire un mot sur les annexes.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Milot.
M. Milot (Jean-René): Merci. M. le Président,
rassurez-vous je n'ai pas l'intention de lire ni de commenter toutes les
annexes, cela ne vous inquiète pas le temps vous appartient, seulement,
le temps est limite. Voici, simplement un regard dans l'annexe 1 qui est le
majeur en éducation de la Faculté des sciences de
l'éducation. Je veux simplement mentionner que ce majeur ne suffit pas
à lui seul évidemment pour assurer la formation initiale des
enseignants du primaire. Il s'articule avec un mineur en éducation
pré-scolaire et en enseignement primaire pour les gens qui se destinent
à cela et, dans d'autres cas, il peut s'articuler aussi, c'est une
espèce de tronc commun qui peut s'articuler avec un mineur en
orthopédagogie pour les intervenants en adaptation scolaire. Donc, c'est
une structure qui est peut-être moins familière, majeur et mineur,
mais qui est aussi adoptée aux sciences de l'éducation depuis
à peu près deux ans qu'il est en vigueur et qui permet justement,
à la limite, à un enseignant d'obtenir la certification à
la fois pour enseignement, éducation préscolaire et primaire et
aussi intervention en adaptation scolaire par le biais des deux mineurs qui
s'ajouteront au majeur. Mais, habituellement, pour les enseignants du primaire,
c'est vraiment le majeur en éducation et ensuite le mineur en
éducation préscolaire et enseignement primaire.
À l'intérieur de ce mineur, il y a aussi trois
crédits de cours au choix qu'un étudiant pourrait à la
limite, qu'un maître en formation pourrait, à la limite aussi,
utiliser pour complementer sa formation du côté contenu de la foi
chrétienne par des cours en théologie ou dans d'autres
secteurs.
En théorie, la structure du programme permet donc d'aller
jusqu'à 15 crédits en ce qui a trait à la didactique et
des contenus essentiels. Alors, les autres annexes, je pense, parlent par
elles-mêmes et s'il y a des questions, on peut essayer d'y
répondre.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, je vous
remercie M. Milot. Je reconnais immédiatement, comme premier
intervenant, le ministre de l'Éducation. M. le ministre. (17 heures)
M. Ryan: M. le Président, j'ai lu avec
intérêt le mémoire de la Faculté de théologie
de l'Université de Montréal. Je comprends bien que c'est le
mémoire de la Faculté de théologie pas seulement de M. le
doyen.
M. Charron: C'est plutôt à titre de doyen mais, je
ne suis pas mandaté par ma faculté. Nous n'en avons pas
discuté en assemblée de professseurs mais, quand même,
c'est la direction de la Faculté de théologie, donc c'est
l'exécutif, c'est aussi mon adjoint, bref, c'est plutôt à
titre de doyen et c'est pour cela que j'ai signé moi-même
d'ailleurs.
M. Ryan: Mais, c'est pourquoi je posais
la question parce que la formulation est un petit peu inusitée
dans ce genre de présentation.
M. Charron: Excusez-moi. M. Ryan: Merci.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Juste pour les
besoins de l'enregistrement du Journal des débats, M. le
ministre, vous allez m'excuser, est-ce que nous accueillons la Faculté
de théologie de l'Université de Montréal ou si nous
accueillons le doyen et l'adjoint du doyen? Qui est-ce que la commission
accueille?
M. Charron: Vous me posez la question?
Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui, je vous pose
la question.
M. Charron: C'est le doyen de la Faculté de
théologie et son adjoint.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. M. le
ministre.
M. Ryan: Je ne sais pas si je peux poser cette question
additionnelle. Est-ce que c'est indiscret de vous demander si vous avez de
bonnes raisons de présumer que vous parlez aussi au nom de l'ensemble du
corps enseignant de la faculté?
M. Charron: Bien sûr. M. Ryan: Merci.
M. Charron: Surtout pour les questions que nous abordons ici.
M. Ryan: Très bien.
En Usant votre texte, je suis frappé surtout par la
démonstration que vous faites de la faisabilité, de la
proposition qui est présentée dans le projet du comité
catholique. Non seulement la faisabilité mais du fait que c'est
déjà de facto disponible dans la mesure où ce n'est pas
une contrainte obligatoire, cela n'entraîne pas une modification radicale
dans l'aménagement des cours qui sont donnés par la
Faculté de théologie en conjonction, évidemment, avec la
Faculté des sciences de l'éducation.
Alors, c'est ce que je crois comprendre de la démonstration que
vous nous avez donnée. J'en prends acte avec beaucoup
d'intérêt. Il y a peut-être une question que je voudrais
vous poser qui fait suite à un échange de vues que nous avons eu
ce matin avec la Faculté des sciences de l'éducation et la
Faculté de théologie de l'Université Lavai.
Le doyen de la Faculté de théologie de l'Université
Laval nous a dit que, selon lui et selon la Faculté de théologie
de Laval, il serait bon que, dans la formation du futur enseignant, il y ait
comme élément obligatoire le choix entre une option enseignement
religieux et moral catholique et une option enseignement moral.
Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de prendre connaissance du
mémoire de la Faculté de théologie de Laval mais
j'aimerais bien savoir comment vous réagissez à cette
proposition,,
Le Président (M. Parent, Sauvé): Monsieur.
M. Charron: Je vais dire ce qu'on fait d'abord. Vous avez
remarqué qu'aux sciences de l'éducation... parce que là,
on parle du primaire, n'est-ce-pas, quand vous posez cette
question-là?
M. Ryan: Disons au primaire pour tout de suite, si vous
voulez.
M. Charron: On parle du primaire, c'est cela. Donc, dans le
programme de la Faculté des sciences de l'éducation, vous avez au
bloc 70G, effectivement, des cours de didactique mais, il n'y a pas une voie
uniquement réservée à la morale sans
référence religieuse. Si vous remarquez, le cours de didactique
en enseignement religieux et moral * comporte les deux volets à
l'intérieur d'un même cours. Donc, il n'y a pas place, au niveau
de la didactique, pour prendre les deux voies, soit la morale sans
référence confessionnelle au la morale avec
référence confessionnelle. Par ailleurs, dans le bloc 70Y, vous
avez déjà trois cours de philosophie, introduction à
l'éthique, éthique, vision du monde des valeurs qui peuvent
laisser supposer qu'il y aurait une voie possible déjà à
l'intérieur du programme qui est là.
Moi, évidemment, j'ai posé la question au doyen Trahan,
des sciences de l'éducation, mais je ne l'ai pas posée comme vous
l'avez posée, je l'ai posée en fonction de la liberté de
conscience. J'ai dit: qu'est-ce que vous faites, par exemple, avec celui qui
n'enseignera jamais l'enseignement religieux alors que dans la formation vous
lui imposez de passer par trois crédits d'enseignement religieux. Il m'a
répondu: c'est au nom de l'argument éducatif de pouvoir
travailler au service de la dimension religieuse pour un développement
intégral de la personne humaine. Donc, il faut bien distinguer entre un
programme de formation dans le domaine des connaissances des habilités,
donc d'une compétence éventuelle et l'exercice de ta profession
qui, lui, pose la question de la liberté de conscience.
Par ailleurs, moi je pense qu'il serait possible d'aménager
facilement ce bloc 70G pour le rendre conforme à un cheminement
de didactique en morale sans référence confessionnelle et
un autre en référence confessionnelle. Je pense qu'effectivement
il faudrait les deux voies. Je ne peux pas parler au nom de la Faculté
des sciences de l'éducation mais j'imagine que c'est facilement
aménageable à l'intérieur de ce bloc, d'autant plus que la
version qui est actuellement à l'annuaire de l'année courante
comportait ce double volet, alors que le projet que vous avez ici, c'est pour
l'an prochain. Alors, il y aurait moyen de rétablir la situation. Quant
à un programme plus élaboré concernant le 70Y, il y aurait
probablement moyen, là aussi, de détailler davantage les cours de
morale.
Le problème qui se pose, c'est: À qui appartiendront les
cours de morale? Est-ce que ce sera le Département de philosophie ou la
Faculté des sciences de l'éducation? Sûrement pas la
théologie, puisqu'on veut que ce soit sans référence
confessionnelle. Alors, à l'intérieur de notre institution,
disons que les jeux ne sont pas faits, quant à savoir à qui
appartient l'éducation morale. Je sais qu'à l'UQAM il y a un
certificat déjà préparé pour cela, mais, chez nous,
cela n'existe pas. Vous poseriez une question avec laquelle il faudrait se
débattre, je pense.
M. Ryan: Les cours du cycle primaire offerts par la
Faculté de théologie dans des domaines reliés à la
formation des enseignants, pouvez-vous nous dire dans quelle mesure ils sont
suivis par des étudiants et...
M. Charron: En termes de statistiques, de nombre surtout?
M. Ryan: Oui, et les raisons qui peuvent expliquer les faits que
vous nous communiquerez?
M. Milot: Actuellement, M. le Président, on n'a pas de
données très précises à ce sujet, étant
donné qu'il y a un certain nombre de cours. La répartition des
cours... Ce programme est en oeuvre depuis deux ans seulement et
déjà, ce bloc 70 G, en particulier, a été soumis
à des remaniements, précisément pour s'aligner de nouveau
sur les choix majoritaires des étudiants. Autrement dit, un cours ne
peut pas être offert à cinq, à dix ou à douze
étudiants. Donc, il y a eu un réalignement, ce qui a fait que,
par exemple, en 1985-1986, les cours disciplinaires... On n'a pas les chiffres
disponibles pour cette année, mais l'année antérieure, il
y avait peut-être eu une dizaine ou une douzaine d'inscriptions aux cours
de la faculté. On a mis le doigt sur le problème, c'est une
question de concertation dans les horaires. Comme c'était nouveau, on
n'a pas prévu ces choses. Par contre, un cours de service, le cours
CAT 1310, catéchèse et projet éducatif, a
été demandé par une trentaine d'étudiants
intéressés, à la suite d'un sondage auprès des
étudiants des sciences de l'éducation. Donc, la Faculté
des sciences de l'éducation a demandé à la faculté
de l'offrir comme cours de service, ce qui a été fait. Certains
étudiants de la Faculté de théologie se sont joints aussi
à ce groupe et, finalement, on a eu environ 33 ou 34 inscriptions.
Cette année, le jeu des blocs s'est fait différemment
à la suite de modifications assez techniques qui ont été
faites, du fait que la très grande majorité des étudiants,
dans un sondage, optait pour un cours comportant à la fois
l'enseignement moral et religieux catholique et aussi le programme de morale.
À ce moment-là, la Faculté des sciences de
l'éducation a cru bon de respecter cette chose, de sorte que le cours
qui est dispensé actuellement est davantage un cours portant sur les
deux didactiques. Mais, advenant le cas de l'adoption du règlement du
comité catholique, il est évident qu'il y aurait des
réaménagements mineurs à faire. Le potentiel est
là, mais au chapitre de la concertation et de l'aménagement, il
faudrait réaligner les choses.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre,
une autre intervention?
M. Ryan: Oui, une autre question. À propos de la
distinction que le projet de règlement institue entre les qualifications
exigées pour le premier cycle du secondaire et pour le deuxième
cycle du secondaire, pourriez-vous nous expliquer pourquoi vous n'êtes
pas enclin à accepter cette distinction?
M. Charron: Je vais répondre. Jean-René, tu pourras
peut-être compléter.
Pour ce qui est de l'affectation des enseignants, on sait bien qu'au
niveau secondaire il est assez rare qu'un enseignant n'enseigne qu'au premier
cycle ou qu'au second cycle. Il y a donc souvent un passage qui se fait de l'un
à l'autre. Alors, au nom de la mobilité, il nous paraît
important que le futur enseignant soit habilité à répondre
à tous ces besoins.
Deuxièmement, il y a aussi, comme on l'a dit tantôt, une
question de fonctionnement à l'intérieur de l'université.
Pour obtenir le certificat en enseignement, selon les règlements
internes de l'université de Montréal, vous prenez
déjà 30 crédits aux sciences de l'éducation, mais
vous devez déjà avoir 60 crédits disciplinaires. On ne
voit pas comment on donnerait un baccalauréat avec 30 crédits en
théologie et 30 crédits en sciences de l'éducatton. Cela
ne fait que 60 crédits alors qu'un baccalauréat a 90
crédits. Ce n'est donc pas conforme à la structure
actuelle.
Troisièmement, sur le plan des contenus, il nous semble important
qu'un futur enseignant du secondaire ait fait le tour du jardin. En tout cas,
60 crédits, ce n'est quand même pas énorme si c'est pour un
spécialiste. Et, je ne sais pas si la question viendra, je serais
très sensible au fait que nous ouvrions même nos programmes
à davantage de cours sur les autres traditions religieuses que la
tradition catholique et chrétienne. Si on demande toutes ces choses, je
me dis qu'il n'y a pas trop de 60 crédits pour faire le tour. C'est ma
façon de répondre. Je ne sais pas si M. Milot aurait des choses
à ajouter.
M. Milot: J'ai tout simplement un élément à
ajouter. Évidemment, ce n'est pas uniquement qu'avec 60 crédits,
on satisfait aux exigences pour l'obtention d'un baccalauréat, mais je
crois qu'on ne satisferait pas non plus aux exigences du mininistère de
l'Éducation pour la certification des enseignants. À ma
connaissance, actuellement il faut un strict minimum de 48 crédits de
formation disciplinaire. C'est-à-dire que c'est l'équivalent d'un
majeur, moins un hypothétique 12 crédits de cours au choix. Donc
le strict minimum, que je sache est de 48 crédits de cours
disciplinaires; alors avec 30, je ne sais pas quelle autre unité de 30
crédits on peut avoir en tête pour joindre à cela et faire
un baccalauréat et en même temps assurer la certification.
Le Président (M. Parent, Sauvé); Merci, M. Milot.
M. le ministre d'autres interventions?
M. Ryan: Une autre question à propos de la formation des
animateurs de pastorale. Vous demandez qu'au niveau de l'école primaire
on exige du responsable d'animation pastorale qu'il ait un minimum de 30
crédits universitaires. Actuellement, il y en a beaucoup qui vont
chercher une formation dispensée par des cégeps. Cette formation
semble être de bonne qualité. Nous l'avons du côté de
l'Estrie, nous l'avons à Montréal, nous l'avons à
Québec également. Est-ce que cela ferait vraiment progresser les
choses d'instituer une exigence comme celle-là dans le règlement
à ce stade-ci?
M. Charron: Remarquez qu'on a reconnu que c'était un gros
pas en avant que d'avoir déjà une formation collégiale
plutôt que de tenir compte tout simplement de la formation sur le terrain
de telle ou telle personne. Nous pensons que, oui, cela serait davantage
intéressant pour elle. Il y a déjà l'expérience de
gens qui ont fait la formation collégiale et qui viennent ensuite
à l'université et qui nous disent - je m'excuse, je ne voudrais
pas porter un jugement sur ces collèges on a plus ou moins perdu notre
temps; il aurait été intéressant qu'on vienne
immédiatement à l'université» Ils font le long
cheminement alors qu'ils auraient pu passer immédiatement à
l'université. Je le vois surtout en qualité de contenu. C'est
pour cela que j'ai insisté, à un moment donné dans une
petite phrase: fournir les instances de clarification de discernement quand aux
contenus qui sont nécessairement véhiculés. Car,
même s'ils ne sont pas dans l'enseignement, il y a toujours des contenus
qui sont impliqués par l'animation pastorale, même au primaire. Je
trouve que c'est important que l'étudiant se donne le temps de refaire
ses conceptions des croyances et de resituer cela dans un ensemble organique.
Il me semble que c'est en théologie, d'une part, qu'il pourrait le
faire, mais aussi, comme j'ai dit tantôt - même si ce n'est pas
dans mon texte écrit - acquérir des connaissances sur la
structure scolaire, la psychologie du jeune, des contenus des programmes, bref,
étayer davantage sa formation, si tant est que c'est un professionnel de
l'enseignement. C'est notre point de vue. Évidemment on est à
l'université, vous comprendrez bien qu'on insiste sur la formation
universitaire. On n'a rien contre le collégial, mais on pense qu'on
pourrait éviter peut-être de passer par là. Bien que ce
soit pas superflu, parce qu'il y a des gens qui n'ont peut-être pas les
qualifications voulues pour entrer à l'université.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci.
Dernière intervention du côté ministériel. M. le
ministre.
M. Ryan: M. le Président, pour terminer cet échange
de notre côté, je voudrais vous communiquer une partie d'une
lettre que je recevais vers la fin de septembre du recteur de
l'Université de Montréal dans laquelle le recteur souscrit
à l'orientation qui a été définie par le doyen de
la Faculté de théologie et son adjoint. J'en cite les extraits
suivants. Je mettrai volontiers toute la lettre à votre disposition, il
n'y a pas de problème. "L'Université de Montréal est
heureuse de vous informer qu'elle est en mesure de répondre aux
exigences des articles 16 et 17 du projet de règlement concernant la
formation des enseignants chargés de renseignement moral et religieux
catholique, aussi bien du niveau primaire que du niveau secondaire. "En effet,
les programmes d'enseignement offerts par la Faculté des sciences de
l'éducation avec la collaboration de ta Faculté de
théologie prévoit la possibilité, pour le futur enseignant
du primaire, de prendre 9 crédits répondant aux objectifs de
l'alinéa 2 de l'article 16. Le bloc de cours 70G - dont il a
été question tantôt -
regroupé sous le titre "Didactique et l'enseignement religieux et
moral" constitue déjà un réservoir de cours pertinents de
12 crédits auxquels s'ajoutent 9 autres crédits du bloc 70Y
donné par la Faculté de théologie. "Quant aux futurs
enseignants du secondaire, ils peuvent facilement répondre aux exigences
de l'article 17 du projet de règlement en s'inscrivant soit au mineur de
30 crédits, soit au majeur de 60 crédits, tous deux donnés
par la Faculté de théologie, peuvent compléter leur
baccalauréat d'enseignement secondaire au moyen du certificat en
enseignement secondaire et collégial dispensé par la
Faculté des sciences de l'éducation. "Enfin, l'Université
de Montréal est en mesure également, par ses programmes, de
répondre aux exigences des articles 21 et 22 du projet de
règlement concernant la formation des animateurs de pastorale, aussi
bien pour l'école primaire que pour l'école secondaire. En effet,
la Faculté de théologie offre à la fois un mineur de 30
crédits et un majeur de 60 crédits en théologie,
catéchèse ou pastorale catholique. (17 h 15) "Nous aurions
cependant de sérieuses réserves s'il fallait obliger les futurs
enseignants inscrits à nos programmes de formation à prendre les
cours dont il est question ici, selon les exigences du projet de
règlement. L'Université de Montréal forme des enseignants
pour toutes les écoles du Québec et non pas seulement pour les
écoles catholiques. D'ailleurs, même à l'intérieur
des écoles catholiques, les enseignants ne sauraient être
forcés de donner l'enseignement religieux et dans les faits, cet
enseignement ne sera pas dispensé par tous les enseignants. Il
appartiendra donc, aux employeurs catholiques, commissions scolaires ou
écoles, de faire connaître clairement leurs exigences à
leurs futures recrues."
Alors, je signale seulement en guise de dernier commentaire que, dans le
projet de règlement, comme il nous est présenté, ces
cours-là qui conduiraient à une qualification pour l'enseignement
religieux moral catholique ne seraient pas nécessairement obligatoires.
Ils peuvent très bien demeurer des cours optionnels et il appartiendra
à l'employeur de définir ses exigences et à
l'étudiant concerné de prendre ses responsabilités. Alors,
merci.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le
ministre. Je reconnais maintenant le porte-parole officiel de l'Opposition, Mme
la députée de Chicouttmi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. Charron, M.
Milot, permettez-moi, au nom de ma formation politique de vous souhaiter la
bienvenue et de vous remercier d'avoir participé aux travaux de cette
commission. Comme j'ai eu l'occasion de vous le dire, tout à l'heure, M.
Charron, malheureusement, je ne peux pas être longtemps avec vous, parce
que j'ai pris d'autres engagements.
Je vais donc être brève et je ne reprendrai pas, pour
l'essentiel, le contenu de votre mémoire. Je vais prendre quelques
phrases qui, il me semble, devraient jeter un nouvel éclairage sur les
propos qu'on a entendus.
Vous dites en première page de votre mémoire, au milieu du
premier paragraphe: "En conséquence, nous comprenons qu'il y aura au
Québec, non seulement des écoles publiques confessionnelles, mais
aussi des écoles autres". Dernier paragraphe au tout début: "II
existera donc des écoles catholiques parmi d'autres". Comme on sait,
d'une part, que le ministre n'a pas demandé, ce gouvernement n'a pas
demandé de modifications aux structures scolaires, à l'occasion
des négociations constitutionnelles, comme on sait qu'on ne
connaît pas son intention quant à une telle demande dans le futur
- ce qu'on a appelé la deuxième ronde des négociations -
comme on sait que, sur l'île de Montréal, les commissions
scolaires sont soit catholiques, soit protestantes, devant cette situation,
est-ce que vous estimez toujours que la formation des futurs enseignants
devrait être aussi fortement axée sur l'enseignement religieux
catholique"?
Le Président (M. Parent, Sauvé): Monsieur.
M. Charron: Ma façon à moi de répondre,
c'est que quel que soit le régime des structures scolaires, quel que
soit le régime même de la confessionnalité, dès lors
qu'il y a de l'enseignement religieux dans les écoles, il devrait y
avoir une formation adéquate pour assurer la compétence. Alors,
c'est un peu pour cela que, dès la première phrase, j'ai dit que
je n'entrais pas dans le dossier complexe de la confessionnahté. Mais,
si l'on réfère même à la loi 3 ou même
à l'opinion actuelle de la CEQ, si on s'en va vers des commissions
scolaires linguistiques, par exemple, si l'on admet que l'école commune
doit, de toute façon, offrir le choix entre l'enseignement religieux et
l'enseignement moral non confessionnel, il y aura toujours un enseignement tel
que l'enseignement religieux catholique. Alors, pour cela, je pense que
devraient être exigés des critères de qualification des
maîtres, donc de formation, si l'on veut que ce soit quelque chose qui
est bien fait. Et depuis une quinzaine d'années qu'on déplore que
ce n'est pas très bien fait, il faut s'y mettre, je pense.
Mme Blackurn: Je partage votre avis
que si on a des écoles autres et qu'on a des écoles
catholiques, un enseignement religieux mérite d'être bien
fait.
M. Charron: Pardon"?
Mme Blackburn: II mérite d'être bien fait.
M. Charron: Bien oui.
Mme Blackburn: Sauf que, dans les circonstances actuelles, est-ce
que vous ne craignez pas que, même s'il n'y a pas d'obligation pour le
primaire, par exemple, de suivre les cours d'enseignement religieux moral
catholique, pour se donner plus de chances d'être embauchés,
à peu près tous vos étudiants vont accepter de s'inscrire
à ces cours-là? À présent, ma question serait
autre, et j'y viens tout de suite. Selon vous, un projet éducatif
catholique - pour utiliser l'expression du comité laïc ou mouvement
laïc - qui serait un projet catholique mur à mur, est-ce qu'on peut
avoir dans une école un tel projet et en même temps respecter le
choix de ceux qui prennent la morale, sans référence
religieuse?
M.Charron: Vous parlez des étudiants ou des
professeurs?
Mme Blackburn: Je parle des étudiants, ensuite on
reviendra aux professeurs. Est-ce qu'on peut respecter ces étudiants
dans un projet aussi imprégné des valeurs et des croyances
religieuses?
M. Charron: Bon. Remarquez que la question du projet
éducatif global, pour moi, elle se comprend, disons, dans l'optique
où il y a justement différentes sortes d'écoles,
l'école confessionnelle n'étant qu'un type d'écoles parmi
d'autres. S'il y a d'autres écoles, il est normal que l'école
confessionnelle ait sa spécificité propre, donc, un projet
éducatif global intégrant, disons, les valeurs et les croyances
chrétiennes comme c'est indiqué dans le texte.
Je comprends qu'à Montréal il y a un obstacle juridique
qu'il faudra un jour surmonter par un amendement constitutionnel ou autrement,
je ne sais pas. Peut-être qu'il y aurait lieu - c'est mon avis personnel
-d'assouplir la formulation du projet éducatif, mais encore une fois, il
faut ménager à l'école catholique sa
spécificité. Elle est en droit de la demander et de la maintenir.
Mais dans un contexte pluraliste comme à Montréal où, de
fait, il n'est pas possible... -enfin, il est possible de respecter
l'étudiant, mais cela peut lui paraître contraignant - je me
demande si effectivement il n'y aurait pas lieu de parler d'un projet
éducatif non pas qui intègre... Si on pense que le mot
intégration est un concept psychopédagogique très large et
qui demande une articulation très serrée, on pourrait parler d'un
projet éducatif qui implique ou qui inclut les croyances et valeurs
chrétiennes ou encore, selon la formulation de 1964, un projet
éducatif en harmonie avec la conception chrétienne de la
personne, ou encore un projet éducatif répondant aux valeurs
chrétiennes ou un projet éducatif reflet du milieu qui fait place
aux croyances et valeurs chrétiennes. Voyez-vous, déjà
c'est un peu différent dans la formulation et c'est peut-être un
peu moins contraignant. Maintenant, je vous rappellerai, surtout que vous
représentez l'Opposition et un gouvernement qui avait déjà
voté la loi 3, que cette expression d'un projet éducatif ou
global qui intègre les croyances religieuses, cela vient de l'ancienne
loi 3, articles 78 et 80, qui avait été votée par le
gouvernement qui était du parti que vous représentez.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Un instant,
monsieur, qui avait été présenté par le
gouvernement.
Mme Blackburn: Je partage encore M. Charron...
M. Charron: Bon, d'accord.
Mme Blackburn: Et qui a été adopté par
l'Assemblée nationale. Et puis, je partage encore tout à fait cet
avis, je voudrais le répéter ici, du moment qu'on a le choix
entre une école catholique et d'autres écoles, je pense qu'on est
tout à fait en droit de s'attendre que cette école puisse se
donner des conditions qui lui permettent à la fois d'être de
qualité et d'être vraie. Au moment où on se parle,
aujourd'hui, ce n'est pas possible. D'ailleurs, il faut se rappeler que le
projet de règlement du comité catholique a commencé, je
pense - au moment où on a commencé la consultation - se fondait
précisément sur le projet de loi 3 qui créait les
commissions scolaires confessionnelles et non la situation qui est la
nôtre aujourd'hui-Juste une dernière remarque. J'ai
constaté qu'en regardant un peu le programme de certificat de mineur en
sciences religieuses, différents programmes vous offrez peu de cours qui
permettent d'explorer les autres traditions religieuses et cela
m'étonne, je dois dire, parce qu'il me semble qu'un enseignement ou un
apprentissage, une formation axée presque exclusivement sur la bible et
la foi catholique ne développe pas cet esprit critique, cet esprit
d'ouverture et de respect des autres traditions religieuses et il me semble
qu'aujourd'hui cet enseignement exclusif - parce que j'ai remarqué vous
avez quelques cours sur l'islam, l'hindouisme, le bouddhisme, sauf que cela ne
fait pas partie
des cours qui sont recommandés ou qui sont obligatoires...
M. Charron: Est-ce que je peux vous demander si vous parlez
surtout au niveau du primaire ou du secondaire?
Mme Blackburn: Je regarde, vous avez un certificat au mineur en
sciences religieuses, certificat d'études pastorales dans vos programmes
de façon générale, c'était une remarque que je ne
voulais pas...
M. Charron: Bon, d'accord. Moi, je vous ferai remarquer que pour
la formation au primaire, il y a déjà dans le bloc 70Y des
sciences de l'éducation, deux REL: un qui s'appelle "nouvelles
religions", ça c'est les sectes et gnoses, et REL 1200, "introduction au
phénomène religieux". C'est l'annexe 1. Donc, déjà
dans la formation au primaire, l'étudiant peut prendre en option deux
cours de sciences humaines de la religion et c'est un phénomène
très important qu'il y ait des nouvelles sectes qu'on appelle aussi des
nouvelles religions.
Quant aux programmes de formation au secondaire, nous avons
effectivement dans le certificat au mineur en sciences religieuses qui, en
fait, comporte un peu un programme cafétéria dans la banque
même de la faculté, vous avez 25 cours, 25 sigles REL qui vont dE
judaïsme en passant par l'islam, l'hindouisme, le bouddhisme, les
nouvelles religions jusqu'aux sciences occultes et les mythologies de l'homme
contemporain. Bref, vous avez tout l'éventail des cours de religiologie
ou de sciences humaines de la religion, sauf que c'est à
l'intérieur d'un certificat très élastique de sciences
religieuses où l'étudiant peut prendre, au choix, ces
choses-là.
On pourrait peut-être, si l'indication du ministère allait
dans ce sens-là au niveau d'une politique, le demander, aux
Facultés de théologie ou aux Facultés des sciences de
l'éducation, on pourrait parler d'un certificat de sciences religieuses
qui serait jumelable avec un certificat de théologie. C'est toujours
possible, on l'a déjà. On ne l'a pas apporté ici parce
qu'on n'avait pas prévu que vous poseriez cette question, mais,
effectivement, c'est déjà dans nos structures facultaires. Je ne
sais pas si M. Milot voudrait ajouter quelque chose là-dessus.
M. Milot: Déjà, la faculté a le programme
majeur. Autrement dit, les cours REL qu'on trouve à l'annexe 9 à
la fin, ces cours sont là précisément parce qu'ils font
partie de la banque de cours de la faculté, mais ils existent d'abord et
avant tout à l'intérieur d'un majeur en science de la religion -
non pas en sciences religieuses -science de la religion étant entendue
au sens approche non confessionnelle du fait et des traditions religieuses. Il
y a aussi un certificat de science de la religion qui a déjà
fonctionné, mais, actuellement, pour répondre à la
question qui est là, il y a une question d'offre et de demande. Les
cours sont encore dans la banque, mais quand les gens viennent chez nous
habituellement, c'est pour entendre parler de théologie, de bible, de
pastorale et à la limite, ce qu'on leur répond en tant
qu'officier d'admission, je leur dis: si vous voulez avoir plus de choses, nous
on ne peut pas actuellement, avec les contraintes budgétaires qu'on a,
offrir des cours à trois, quatre ou six étudiants. Donc, si vous
voulez avoir des choses de ce côté-là, vous allez dans une
université voisine qui, elle, a peut-être sa
spécialité de ce côté-là.
Mme Blackburn: Me permettez-vous une dernière question
brève qui traite davantage - je sais que cela ne relève pas
forcément de votre compétence... Vous avez dit, tout à
l'heure, en réponse à une question du ministre, que pour
l'enseignant en morale sans référence, il serait important qu'il
ait des crédits. Autrement dit, celui qui est habitué à
enseigner l'enseignement religieux catholique et moral n'est pas
nécessairement habilité à enseigner la morale sans
référence et devrait avoir une formation lui permettant de le
faire. À présent, dînez-vous la même chose pour la
formation du niveau secondaire: 60 crédits pour l'enseignement
moral?
Le Président
(M. Parent, Sauvé): M.
Milot.
M. Milot: Actuellement, pour donner une réponse
brève et plutôt pragmatique, les universités, de
façon générale, essaient de répondre aux commandes
qu'on leur présente. Quand la commande n'est pas encore là, c'est
difficile d'y répondre. Actuellement, il y a des choses qui pourraient
être mises sur pied. Je ne sais pas ce que va prévoir la politique
de formation des maîtres mais, pour l'instant, je pense qu'il n'y a pas,
au niveau du ministère, de profil approuvé pour la formation
initiale des enseignants en morale au secondaire. À ma connaissance, on
ne sait pas. Donc, les universités cherchent, essaient de
présenter des choses et pour l'instant, tant qu'il n'y a pas de... c'est
difficile pour une université d'élaborer un programme pour
répondre à une exigence qui n'est pas formulée. Ce qu'on
a, au fond, ce sont des programmes d'enseignement moral au secondaire avec une
série de programmes, de guides etc. mais, on n'a pas encore de profil de
formation vraiment ou officiellement reconnu. À ce moment-là, il
faut attendre de voir ce qui va se passer.
Mme Blackburn: Je le savais. C'est plus une opinion personnelle
que je demandais, vous avez répondu en politicien.
M. Milot; Merci!
M. Charron: Mais, je pense que c'est impartant d'avoir une
formation quand même morale effectivement. Cela s'impose une formation
comme celle que vous souhaitez.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M.
Charron.,
M. Charron: Maintenant, moi je dirais qu'il est important que le
ministère nous indique des choses aussi. Nous, on a pris l'initiative de
mettre sur pied un programme qui répond à ce que le comité
catholique demande. On a pris l'initiative, en 1982, qui a aboutit à la
faisabilité en 1984, mais si le ministère de l'Éducation
indique aux sciences de l'éducation ou aux Facultés de
théologie ce qu'il attend pour la formation des maîtres, il serait
beaucoup plus simple pour nous de répondre et de rendre la marchandise,
si je peux dire.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Charron.
D'autres interventions? Alors, s'il n'y a pas d'autres interventions M. Charron
et M. Milot, vous êtes les deux derniers intervenants que nous avons
accueillis à cette commission parlementaire. Maintenant, j'inviterais,
en guise de conclusion, le porte-parole de l'Opposition à terminer au
nom de sa formation politique.
Mme Blackburn: Je vaudrais vous remercier de votre participation
et vous dire que ce qui est intéressant de cette commission, c'est qu'on
a entendu différents points de vue et par rapport aux
préoccupations des autres facultés d'éducation ou
départements de sciences religieuses, vous nous dites que là,
chez vous, c'est faisable assez rapidement. Cela, je l'ai
apprécié. Cela vient, comme dirait le ministre, cela vient de
nous donner un autre son de cloche et on l'apprécie. On vous
remercie.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie.
Est-ce que la formation ministérielle a une dernière
intervention? Alors, s'il n'y a pas d'autres interventions en guise de
conclusion de cette commission parlementaire là, est-ce qu'il y en a
d'autres?
Mme Blackburn: Bien oui...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Vous n'avez pas de
remarques? C'est ce que j'attends.
Mme Blackburn: Alors vous attendez mes propos de conclusion. Bien
alors, comment partagez-vous le temps? (17 h 30)
Le Président (M, Parent, Sauvé): 50-50. Mme
Blackburn: 50-50?
Le Président (M. Parent, Sauvé): 15 minutes chacun.
Allez-y. C'est parti!
Conclusions Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Bien. C'est parti, M. le Président? Je vous
remercie. En fait, il est de coutume, au terme d'une commission parlementaire,
que les parties en présence exposent leurs réflexions à la
suite des propos entendus. Je voudrais quand même dire à M.
Charron et au vice-doyen qu'ils ne sont pas obligés de rester à
la table. S'ils veulent se libérer, ils peuvent le faire, comme ils
peuvent rester là également.
J'entends profiter des quelques minutes qui me sont imparties au terme
de cette commission parlementaire d'abord pour revenir sur les grandes lignes
des discussions auxquelles elle a donné lieu et pour formuler la
position de l'Opposition dans ce dossier. H faut d'abord se réjouir que
les projets de règlement présentés d'abord en catimini au
printemps aient finalement fait l'objet d'un débat public. Le ministre
ne semblait pas tout à fait chaud à l'idée de tenir une
commission parlementaire sur ce sujet. Â prime abord, le sujet pouvait
paraître assez complexe, sinon nébuleux, peut-être
même un peu anodin, mais l'enjeu est crucial pour l'avenir du
système d'éducation public au Québec.
Ces audiences publiques, auxquelles auront participé une
vingtaine d'intervenants, ont fourni l'occasion de clarifier et de bien cerner
cet enjeu, autant que les conséquences à maints égards
préoccupantes d'une éventuelle application du règlement
projeté. La commission a donné lieu à des échanges
nourris et fructueux qui sauront, nous le souhaitons, inspirer le ministre dans
ses décisions.
Nous avons en effet été à même de constater
que le projet de règlement sur la reconnaissance comme catholiques et le
caractère confessionnel des écoles primaires et secondaires du
système catholique public, projet qui accentue le caractère
confessionnel des écoles, suscite non seulement de très
nombreuses réserves, mais une opposition marquée de la part
d'intervenants majeurs du système d'éducation. À peu
près tous ceux et celles qui auront à vivre et à
gérer ce règlement dans le quotidien mettent très
sérieusement en doute la pertinence de l'adopter dans son libellé
actuel et à ce moment-ci.
Il y a d'abord les intervenants dont te désaccord porte sur le
fond même de la question. Je pense, entre autres, aux syndicats
d'enseignants. Ils sont venus ici
réitérer leur opinion en faveur de la
déconfessionnalisation des écoles publiques et
l'établissement de commissions scolaires linguistiques. Ces derniers
estiment également que, compte tenu de la diversité des valeurs
et des croyances, on ne saurait accrocher une étiquette confessionnelle
à l'école publique sans porter atteinte à la
liberté de conscience et au droit à l'égalité.
D'autres organismes, notamment ceux qui agissent comme porte-parole des
personnes chargées de l'administration et de la bonne marche quotidienne
des commissions scolaires et des écoles, sont venus nous dire qu'ils
estiment la réglementation trop contraignante et tatillonne. Les
procédures de gestion et de contrôle sont jugées
"déresponsabilisantes" pour les principaux intéressés et
contraires à la volonté d'autonomie des agents du système
d'éducation. Les discussions en commission ont d'ailleurs permis d'avoir
une meilleure vision des difficultés ou de la lourdeur d'application de
plusieurs des dispositions réglementaires proposées.
Le projet compte bien sûr ses partisans, que l'on retrouve dans la
mouvance de l'Église ou intéressés de près aux
questions d'enseignement religieux et d'animation pastorale. Certains sont
même venus plaider en faveur d'un renforcement des dispositions des
règlements et donc d'un encadrement plus rigoureux de la dimension
confessionnelle dans le milieu scolaire. À notre avis, le ministre
aurait tort d'emprunter cette voie dans le contexte actuel.
Au-delà des objections de fond au des critiques sur un impact ou
l'autre du projet, plusieurs intervenants remettent en question la pertinence
d'agir maintenant. L'urgence de procéder en ces matières, selon
eux, est discutable. Ainsi, le ministre a annoncé le dépôt
prochain d'un projet de réforme sur la Loi sur l'instruction publique.
Par ailleurs, on ignore toujours où s'en va le gouvernement dans le
dossier de la confessionnalité des structures scolaires. Enfin, les
représentants des universités responsables de la formation des
maîtres font valoir, à une exception près, qu'il y a des
réformes de programmes en chantier, que le conseil des
universités vient de terminer son étude sectorielle en
éducation et qu'il vaudrait mieux attendre la présentation d'une
politique d'ensemble de formation des maîtres plutôt que de
procéder à la pièce pour l'enseignement religieux
catholique, comme c'est le cas avec les nouvelles exigences de qualification
prescrites dans ce projet de règlement.
Au terme de ces audiences, nous devons donc répondre à une
double question: Y a-t-il lieu d'adopter maintenant un nouveau
règlement? Le projet présenté est-il acceptable dans sa
facture actuelle? Â ces deux questions, nous devons répondre non.
À l'instar de plusieurs intervenants, nous croyons qu'il n'est pas
opportun de procéder maintenant à des modifications
substantielles au règlement sur le caractère catholique des
écoles publiques.
Avant de reconsidérer la réglementation, il faut d'abord
savoir à quoi s'en tenir sur le plan législatif. Ce n'est pas le
cas, le projet de refonte de la Loi sur l'instruction publique n'a pas encore
été porté à l'attention de la population. Le
ministre prétend rassurer en indiquant qu'il y aura concordance a
posteriori. Qu'il laisse, à notre avis, aux partenaires de
l'éducation et qu'il nous permette, à nous, de
préférer connaître d'abord tous les éléments
du dossier. C'est de la configuration de nos structures scolaires dont il est
question et les parties ne sauraient, ici comme ailleurs être
dissociées du tout.
L'incertitude par ailleurs persistante quant à la
réorganisation des commissions scolaires sur une base linguistique
plutôt que confessionnelle - je parle particulièrement des
régions de Québec et de Montréal -ajoutent à
l'inopportunité de procéder à l'adoption du projet
présenté dans le contexte actuel. Nous aurions cru que le
ministre allait profiter de l'occasion fournie par cette commission
parlementaire pour faire connaître clairement ses intentions en ce
domaine pourtant crucial. Ses propos sont simplement venus confirmer
l'immobilisme gouvernemental qui peut se résumer ainsi: Inaction sur le
plan constitutionnel, désengagement au niveau juridique et manque de
volonté politique.
Tant que l'ensemble de notre système scolaire public demeurera
confessionnel, tant que les parents qui le désirent ne
bénéficieront pas d'une réelle possibilité
d'envoyer leur enfant dans des écoles non confessionnelles, tant que la
quasi totalité de nos écoles publiques communes seront
dotées d'un statut catholique, toute accentuation du caractère
confessionnel catholique de ces écoles nous semble inacceptable. Il y va
du respect de la diversité des croyances et des valeurs, de la
réalité plurielle du Québec de 1987, pluralisme ethnique,
culturel, croissant d'une part, mais aussi éclatement d'une
majorité francophone qui ne veut plus se fondre dans un moule
monolithique.
Nous disons oui à un encadrement plus rigoureux du vécu
confessionnel de certaines écoles qui saura répondre aux
exigences de vérité et de qualité, dans la mesure
où il y a, à côté de celles-ci, des écoles
neutres ou autres. Nous disons oui à un projet éducatif
intégrant les valeurs et les croyances de la religion catholique, dans
la mesure où les parents qui le désirent ont aussi la
possibilité d'envoyer leurs enfants dans des écoles autres.
C'était d'ailleurs là l'esprit du projet de loi 3, adopté
par le gouvernement du Parti québécois, et c'est d'ailleurs
vraisemblement dans le contexte introduit
par cette loi que le comité catholique avait amorcé sa
réflexion. Mais nous disons non au projet de règlement
aujourd'hui devant nous, si l'école confessionnelle demeure
l'école de tous.
Peut-être est-il utile de rappeler que notre position ici est
renforcée par le fait que le comité catholique lui-même,
par la voix de sa présidente, est venu nous dire que l'adoption de
nouveaux règlements, compte tenu des implications résultant
désormais de l'octroi d'une reconnaissance confessionnelle, pouvait
favoriser ou hâter l'avènement d'écoles autres. Donc ce
projet est, de l'aveu même du comité catholique, contraignant. Il
y a d'ailleurs là tout un paradoxe d'un discours qui, d'un
côté, prétend que l'école franchement et
résolument catholique peut en même temps être respectueuse
de la liberté de conscience de chacun, du pluralisme des croyances et
des valeurs mais qui, de l'autre côté, concède bien
humblement que l'accentuation du caractère catholique de l'école
publique puisse inciter davantage de gens à opter pour une école
autre. On sait qu'actuellement ils optent pour une commission scolaire
autre.
La démarche du comité catholique et du ministre est donc
viciée à sa base même dans un contexte où
l'émergence de telles écoles autres, neutres, non
confessionnelles, demeurent de l'ordre de la fiction dans les régions de
Québec et de Montréal. Comme chacun le sait, Québec et
Montréal, c'est carrément impassible, en vertu de protections
constitutionnelles.
En dehors de ces grands centres, une fois fait le choix du statut
confessionnel, les parents n'ont pas, dans les faits, le choix d'envoyer leurs
enfants dans les écoles autres, à moins que celles-ci ne se
trouvent à proximité ou que l'on offre le transport. C'est dans
ce contexte que le sens ou l'interprétation donnée à la
notion de projet éducatif qui intègre les valeurs et les
croyances de la religion catholique à la notion d'une école
catholique qui s'affiche comme telle, à la notion du respect du
caractère catholique de l'école prend toute son importance.
Les échanges de vues que nous avons eus tout au long de cette
commission parlementaire n'ont pas fait disparaître nos
appréhensions à cet égard. Bien au contraire, si les mots
veulent dire quelque chose, si la notion de projet éducatif catholique a
un sens, c'est que l'ensemble des facettes de la vie scolaire, le contenu des
enseignements comme les diverses activités para-scolaires devront
s'inscrire en symbiose avec les croyances et les valeurs de la religion
catholique. Sinon, à quoi bon parler d'un projet éducatif
catholique?
Dans cette perspective, il ne suffit pas d'offrir un régime
d'options entre l'enseignement religieux catholique et l'enseignement moral. Ou
encore d'exempter de l'enseignement religieux catholique les enseignants qui en
feraient la demande pour prétendre respecter la liberté de
conscience de tous et chacun.
L'école ne peut être à la fois catholique et neutre.
Vouloir concilier un vécu scolaire résolument confessionnel avec
le pluralisme des clientèles, afficher le catholicisme d'une
école sans heurter d'une façon ou d'une autre les personnes qui
partagent d'autres valeurs et croyances, relève de la quadrature du
cercle. D'ailleurs, les écoles privées l'ont compris, lesquelles,
jusqu'à ce jour, n'ont pas demandé de statut confessionnel, bien
que la très grande majorité d'entre elles aient effectivement un
projet éducatif catholique, parce que l'obligation leur aura
été faite d'offrir aussi la morale, sans
référence.
Je n'ai pas l'intention de reprendre ici les articles du projet de
règlement, un à un, pour souligner les interrogations qui
suscitent l'imprécision des termes, les éventuelles
difficultés d'application ou encore pour proposer une liste
d'amendements. La consultation a fourni amplement de matière à ce
sujet. D'ailleurs, pour nous, la question ne se pose pas à ce moment-ci
en termes de bonification du projet, mais de jugement sur sa pertinence. Tant
que les perspectives n'auront pas été éclaircies sur le
plan de la confessionnalité des commissions scolaires et des
écoles, il nous semble préférable de continuer à
fonctionner dans le cadre de la réglementation actuelle.
J'aimerais, cependant, revenir sur un volet majeur de ce qui est devant
nous, soit celui des exigences de qualification pour les enseignants
chargés de dispenser l'enseignement religieux catholique. Si le ministre
décidait, malgré tout, de faire adopter le projet, il devrait
être très attentif à cette dimension car les commentaires
recueillis au cours des audiences invitent à beaucoup de prudence.
Au niveau primaire, ou bien les neuf crédits requis de formation
universitaire susciteront l'avènement d'une nouvelle catégorie de
spécialistes, ce qui est, de l'avis de tous, peu souhaitable sur le plan
pédagogique, ou bien ils pèseront lourdement sur le profil de
formation des futurs maîtres titulaires devant assumer l'enseignement
religieux catholique. Les conséquences sont faciles à
prévoir dans la mesure où les titulaires se chargeront de
l'enseignement religieux, que, pour ce faire, ils devront avoir les neuf
crédits et qu'il est impassible de prévoir quels seront les
besoins des prochaines années dans les commissions scolaires pour la
demande d'enseignement religieux ou d'enseignement moral. Les étudiants
et les étudiantes en formation des maîtres seront fortement
incités à prendre les cours de contenu de la foi catholique,
tout comme les commissions scolaires le seront à embaucher des
diplômés remplissant ces exigences. D'où atteinte à
la liberté de conscience des étudiants et risque de
discrimination à l'embauche.
En effet, comment répondre aux objectifs de vérité
et de qualité lorsque les futurs enseignants suivront par obligation les
cours requis pour l'enseignement religieux catholique et se déclareront
automatiquement de foi catholique pour obtenir un poste? Par ailleurs, pourquoi
ne faudrait-il pas aussi introduire des exigences de qualification pour
dispenser l'enseignement moral, ce qui ne serait pas non plus sans
conséquences sur le plan des programmes et des critères
d'embauche? Il y a gros à parier qu'à ce moment-là, les
étudiants en formation des maîtres iront chercher à la fois
les neuf crédits en enseignement religieux catholique et les neuf en
morale.
Au niveau secondaire, la disparité des exigences de formation
créditées entre les deux cycles pose un problème
évident sur le plan de la tâche des enseignants qui peuvent
être appelés à dispenser l'enseignement religieux
catholique à des groupes d'élèves de divers niveaux. Je
pense que cette question a été largement débattue. Les
exposés qui ont été faits par ceux qui ont des
compétences en ces matières démontrent qu'on peut
difficilement avoir des exigences différentes, selon l'un ou l'autre
niveau.
J'aimerais aussi revenir sur une dimension importante soulevée
par les intervenants qui assument l'administration quotidienne des commissions
scolaires et de nos écoles. À l'instar de la
Fédération des commissions scolaires, des directeurs
d'école, des directeurs généraux des commissions scolaires
et cadres scalaires, j'estime que la réglementation proposée
pêche par excès de détails et de contrôles. Je n'y
retrouve pas le respect et la confiance dont un ministre de l'Éducation
devrait faire preuve à l'endroit des commissions scolaires et des
écoles. Il est, bien sûr, de son autorité et de son devoir
de fixer les grandes orientations, de déterminer un certain nombre
d'obligations. Par ailleurs, le projet de règlement va cependant
beaucoup plus loin en fixant des procédures de contrôle
inutilement tracassières et qui, à certains égards,
empiètent sur les droits de gérance des instances locales.
Nous doutons aussi de la pertinence de démarches distinctes en ce
qui a trait à l'évaluation du vécu confessionnel et
à l'évaluation de l'ensemble du projet éducatif.
Soulignons, finalement, que nous ne disposons d'aucune évaluation
des coûts directs et indirects des mesures proposées. Il n'est
d'ailleurs pas sûr qu'il doive constituer une priorité pour le
gouvernement d'investir dans ce domaine, vu les énormes besoins qui se
manifestent dans d'autres secteurs comme celui de l'enseignement du
français et des sciences.
Voilà donc les quelques remarques que je tenais à formuler
au terme de cette commission parlementaire. Celle-ci a raffermi notre
conviction qu'ils ne devraient pas être adoptés. Le ministre
semble, cependant, vouloir procéder, quitte à y apporter
certaines modifications. Nous les évaluerons à leur mérite
lorsqu'elles seront portées à notre connaissance. (17 h 45)
En terminant, je voudrais dire qu'il faut être extrêmement
attentif au phénomène qui se passe particulièrement dans
la grande région de Montréal, où la commission scolaire
protestante, section française, a vu sa clientèle se multiplier
par six au cours des dernières années parce que les nouveaux
arrivants au Québec, de même qu'un certain nombre de francophones,
catholiques d'origine, choisissent l'enseignement dans les écoles
protestantes.
Par ailleurs, je tiens à indiquer très clairement que le
projet sur la reconnaissance comme catholiques et le caractère
confessionnel des écoles publiques ne nous semble pas acceptable
considérant à la fois le contexte dans lequel il s'inscrit et de
son contenu. Je vous remercie.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, c'est moi
qui vous remercie, Mme la porte-parole officielle de l'Opposition en
matière d'éducation et députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: M. le Président, si vous me le permettez,
je voudrais également vous prier de m'excuser. Ce n'est pas que je ne
veuille pas entendre le ministre, je lui ai dit tout à l'heure, mais
j'ai malheureusement pris des engagements avant cette commission parlementaire.
Alors, je vais devoir vous priver de ma présence, M. le ministre,
mesdames et messieurs. M. le Président, je vous remercie.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Allez, madame.
Merci. M. le ministre de l'éducation.
M. Ryan: Avant que la députée de Chicoutimi
disparaisse...
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Blackburn: C'est peut être un voeu, mais je ne suis pas
sûre que vous allez l'avoir. Il ne faut pas prendre ses désirs
pour des réalités!
Le Président (M. Parent, Sauvé): À
l'ordre!
M. Claude Ryan
M. Ryan: Je voudrais simplement m'élever contre son
affirmation laissant
entendre que le gouvernement aurait voulu procéder en catimini.
C'est absolument faux, elle le sait très bien. Au contraire, nous avons
procédé en pleine lumière et en parfaite conformité
avec la loi. Nous avons été très heureux de demander la
convocation de la commission parlementaire. Nous avons été
d'accord avec l'Opposition sur ce point. Je ne vois pas pourquoi on chercherait
à tirer la couverte d'un côté ou de l'autre. II n'y a pas
de problème là.
Mme Blackburn: Je voudrais juste dire au ministre que son voeu de
me voir disparaître, il ne faut pas prendre ses désirs pour la
réalité.
Le Président (M. Parent, Sauvé): S'il vous
plaît, à l'ordre. M. le ministre vous avez la parole.
M. Ryan: Non, c'est disparaître de la réunion, parce
qu'on veut que vous reveniez. À bien des égards, la
députée de Chicoutimi fait un travail excellent, dont je veux lui
rendre hommage avant qu'elle nous quitte.
Je voudrais souligner une chose. Nous avons écouté des
organismes divers pendant plusieurs jours. Il est important de rappeler, en
conclusion, les besoins auxquels veut répondre le comité
catholique en présentant son projet de règlement. On nous a dit
tout d'abords Nous sommes en matière de reconnaissance des
écoles, du statut confessionnel des écoles devant une situation
qui est figée depuis longtemps. Les écoles ont été
classées comme catholiques massivement il y a déjà douze
à quinze ans. Je ne me rappelle pas de l'année. Je pense que
c'est en 1974 que cela s'est passé. Depuis ce temps il n'y a pas eu de
mouvement, sauf peut-être une centaine d'écoles nouvelles qui ont
été reconnues par le comité catholique sur
présentation d'une requête à cette fin.
Avec le projet de règlement du comité catholique on
introduit de la mobilité dans la situation. Loin de la figer ou de la
durcir, comme le prétend la députée de Chicoutimi, on
introduit de la mobilité, en particulier en introduisant un
mécanisme de vérifications quinquennales. On oblige les gens qui
sont dépositaires d'un statut d'école catholique à
examiner leur vécu et à se dire: Peut-être, on a ce statut
et on a vécu dans une situation qui est complètement
différente de ce que nous avons. À ce moment-là, il y aura
j'imagine des conclusions à tirer. En tout cas, on aura une dynamique
qui permettra de remettre en cause des situations figées. On
prévoit une procédure plus précise pour le processus de
reconnaissance du statut confessionnel.
En même temps qu'on institue cette procédure, on institue
par voie d'implication une procédure pour des gens qui voudraient
demander un changement de statut. C'est évident qu'ils pourront
procéder de la même manière pour demander un changement de
statut vu que le comité catholique a les deux pouvoirs: celui d'accorder
un statut et celui de le retirer. Par conséquent, ici, il saute aux yeux
dans tout ce qui touche le statut confessionnel des écoles, que, le
règlement qu'on nous propose introduit plus de souplesse et de
mobilité et non pas plus de rigidité comme on voudrait le laisser
entendre. Par conséquent, de ce point de vue, je pense qu'il apporte une
nette amélioration. II ouvre la porte à des écoles autres
que désire assez fortement la députée de Chicoutimi.
Actuellement c'est très difficile d'enclencher un processus qui
conduira vers ce résultat. Avec ce règlement, cela devient plus
possible et même à tous les cinq ans, dans chaque école, il
y aura une garantie qu'un examen de fond pourra être fait. On fait
confiance au jugement de nos concitoyens, les parents en particulier. S'ils
voient que la situation ne correspond plus à ce que seraient leurs
aspirations, ils le diront et le processus s'enclenchera. Par
conséquent, c'est une nette amélioration.
Deuxièmement, on veut une certaine unité et une certaine
cohérence dans le projet éducatif. Il ne servirait à rien
d'avoir une école qui aurait été reconnue comme catholique
si cela ne devait se manifester d'aucune manière dans son projet
éducatif. Il me semble que j'énonce là une
évidence, une vérité de La Palice, autrement cela ne
vaudrait pas la peine de suivre toutes ces démarches compliquées
s'il ne devait pas y avoir certaines conséquences dans la vie
concrète de l'école, c'est-à-dire dans le projet
éducatif qui inspire son activité.
On a dit là-dessus... c'est peut-être un peu trop
dangereux, j'y reviendrai tantôt, je pense que des nuances peuvent
être apportées à l'article 4, qui traite de ce sujet pour
répondre aux besoins. Mais sur le besoin de fond, le besoin d'un minimum
d'unité et de cohérence dans le projet éducatif, il me
semble qu'une certaine logique élémentaire devrait nous inciter
à voir que c'est nécessaire et même absolument
indispensable au bon accomplissement de l'oeuvre éducative.
Un troisième problème: on dit qu'on aide les écoles
catholiques où un enseignement moral et religieux catholique est
prévu. Le comité catholique nous dit depuis des années que
les personnes chargées de cet enseignement, dans une très grande
proportion, n'ont pas reçu la formation nécessaire. Je prends un
extrait de son rapport Eduquer la foi à l'école qui remonte
à mai 1985, c'est-à-dire à deux ans et demi: "Depuis la
fermeture des écoles normales, la question de la formation initiale
des
enseignants relativement à l'enseignement religieux catholique
n'a jamais trouvé de réponse valable. Des efforts ont
été tentés ici et là avec un succès
plutôt mitigé. En 1974, le comité catholique faisait un
certain nombre de recommandations. Force est de constater qu'elles n'ont pas eu
tout l'effet escompté. Qu'il suffise de faire les constats suivants: De
manière générale, les universités n'offrent que des
cours optionnels de nature très variée relatifs soit au contenu
doctrinal soit à la didactique de l'enseignement religieux soit à
la psychologie. "Il faut aussi noter que ces cours optionnels font partie d'une
banque très étendue, ce qui réduit d'autant soit la
probabilité qu'ils soient choisis soit la probabilité qu'ils
soient dispensés faute d'un nombre suffisant d'étudiants
inscrits. En conséquence, un pourcentage minime de futurs enseignants
ont suivi l'un ou l'autre des cours optionnels ce qui ne leur assure pas pour
autant une formation appropriée. Une telle situation ne peut plus se
perpétuer dans un contexte scolaire où la loi oblige à
offrir l'enseignement religieux catholique dans les écoles du
Québec et où il accepte que les écoles puissent être
reconnues comme catholiques."
Ce ne sont pas des choses d'aujourd'hui, ce ne sont pas des inventions,
cela fait partie d'un document qui a suscité beaucoup
d'intérêt à l'époque, qui remonte au mois de mai
1985 et dont les thèmes majeurs ont été repris à
différentes reprises par le comité catholique depuis ce temps. Ce
sont les trois besoins auxquels veut répondre le projet du Comité
catholique. On peut bien dire: remettons cela aux calendes grecques, remettons
cela jusqu'à ce qu'on ait clarifié les enjeux constitutionnels ou
même les réaménagements nécessaires dans l'ensemble
de la Loi sur l'instruction publique. Je ne pense pas qu'il soit
nécessaire d'attendre aussi longtemps et ceci pour, entre autre raisons,
la suivante: Le comité catholique est au travail là-dessus depuis
1980. Je me renseignais tantôt auprès du sous-ministre
associé, M. Stein; je lui ai dit: quand cet exercice a-t-il
commencé? Moi-même, je suis un peu perdu dans la nuit des temps,
nous n'étions pas au pouvoir à ce moment-là, nous
n'étions pas toujours au courant de tout ce qui se faisait,
peut-être par négligence de notre côté,
peut-être parce que le bon ministre est venu trop tard.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Ryan: II m'a dit: depuis 1980. Cela va faire huit ans, on peut
bien dire dix et douze ans, mais un moment donné, cela finit par devenir
une véritable comédie. Si le travail de fond a été
fait, si on a identifié des problèmes et si des solutions
apparaissent raisonnables, le gouvernement doit fonctionner et ne doit pas
s'embarrasser de toutes les autres complications tout en veillant, comme c'est
son devoir, à ce que ce qui sera fait maintenant n'entre pas en
contradiction avec ce qui pourra être fait la semaine prochaine ou dans
quelques semaines.
C'est la position de fond du gouvernement. Nous sommes tout à
fait sensibles aux arguments de fond que l'on nous a apportés pour
justifier ces choses-là. Je voudrais rappeler une chose: je suis
sensible aux réactions des administrateurs scolaires, je suis sensible
aux réactions des porte-parole syndicaux, je suis sensible aux
réactions des élus des commissions scolaires, mais je suis
beaucoup plus sensible aux devoirs qui m'incombent, comme ministre de
l'Éducation, de faire en sorte qu'une formation morale solide soit
donnée dans nos écoles pour le bien de nos enfants et de notre
population. Cela passe, dans mon esprit, avant n'importe quel
intérêt corporatif. Cela je tiens à le dire avec toute la
clarté et la fermeté dont je suis capable. En fin de compte, je
pense que c'est là-dessus que nous devons nous fonder pour prendre nos
décisions, tout en tenant compte des autres points de vue qui sont
légitimes, mais qui ne sauraient être premiers dans l'approche
d'un gouvernement responsable.
Maintenant, sur le règlement lui-même, on nous a soumis en
cours de route diverses considérations dont plusieurs m'ont paru fort
pertinentes. J'ai déjà eu l'occasion d'indiquer en cours de route
que le gouvernement sera ouvert à des propositions visant à
l'amélioration du projet de règlement. J'ai déjà
exposé la situation au point de vue juridique. Ce règlement est
un projet du comité catholique du Conseil supérieur de
l'éducation. Il a été soumis au gouvernement qui l'a
évidemment examiné et qui l'a même endossé puisqu'il
en a assuré la publication préliminaire dans la Gazette
officielle du Québec, en mai dernier.
Je voudrais dire aujourd'hui que le gouvernement maintient son appui de
fond au projet de règlement du comité catholique et que nous
accueillerons avec beaucoup d'intérêt les modifications que le
comité catholique voudra proposer afin que le règlement tienne
compte, dans toute la mesure raisonnable, des points de vue sérieux et
responsables qui ont été exprimés devant cette commission.
Je donne quelques exemples de considérations auxquelles nous sommes
particulièrement sensibles du côté gouvernemental.
Par exemple, au début on a dit: Ce n'est pas tout de
prévoir qu'il y aura une procédure de consultation. il faudra
prévoir que cette procédure soit faite d'une manière
sérieuse et, selon la majorité des témoignages entendus,
selon des règles qui devront être les mêmes sur tout le
territoire du Québec. Ici, le règlement ne va pas assez
loin aux yeux d'une proportion importante des intervenants. Il ne va pas
trop loin; il ne va pas assez loin. On nous a dit qu'il fallait qu'il y ait des
normes assurées dans tout le Québec, soit par le comité
catholique, soit par la Direction de l'enseignement catholique, soit par le
ministre. Ce sera à déterminer. Seulement, en tout cas,
là-dessus, je pense qu'il n'y a pas trop de problèmes.
Deuxièmement, en ce qui concerne le projet éducatif, j'en
parlais tantôt, je pense qu'il faut ajouter une précision à
savoir d'intégrer - encore une fois, j'appréciais les
précisions que M. Charron apportait à ce sujet, tantôt les
croyances et les valeurs de la religion catholique dans le projet
éducatif. Cela ne veut pas dire qu'on va les imposer à tout le
monde. Cela veut dire qu'on va leur faire une place qui sera conforme à
la réalité de telle école, à la volonté des
parents et des éducateurs qui oeuvrent dans cette école, à
la situation des élèves également. Je pense qu'il serait
souhaitable que l'on ajoute "dans le plein respect des droits de chacun", pour
qu'on soit bien certain qu'il n'y aura pas d'imposition à partir d'en
haut. Ce sont des choses qui peuvent être envisagées.
Dans l'examen de l'évaluation quinquennale, on nous a dit que
l'on prévoit que M. le directeur va faire cela avec le comité
d'école. Les autres ne sont pas intégrés à cela. Si
le comité catholique était prêt à nous
suggérer que tous les personnels, et en particulier le personnel
enseignant, devraient être impliqués dans cette démarche,
le gouvernement en serait extrêmement heureux* On est capable d'ajuster
cela. On peut faire cela. Je ne vois pas pourquoi on attendrait un temps
indéfini.
On nous a dit qu'il fallait des garanties quant aux conditions dans
lesquelles sera effectué le choix entre l'enseignement moral et
religieux et l'enseignement moral; aussi quant aux conditions dans lesquelles
sera dispensé l'enseignement moral. Je crois que le comité
catholique doit être sensible à cela. Il a la
responsabilité, d'après la loi, à la suite de ma lecture,
de faire des règlements concernant l'enseignement religieux et
l'enseignement moral dans les écoles catholiques. Il est responsable de
ce que l'enseignement moral soit de très bonne qualité et
dispensé dans d'excellentes conditions dans les écoles
catholiques. S'il veut examiner ce point et nous faire des observations, nous
les recevrons encore avec beaucoup d'intérêt.
J'ai été étonné de constater que les
témoignages que nous avons entendus des institutions universitaires ont
été beaucoup moins réticents que je ne l'aurais
pensé au début. Nous en avons entendu quatre ou cinq aujourd'hui.
La Famille de formation des maîtres de l'Université du
Québec nous a dit que les exigences que propose le comité
catholique peuvent se réaliser assez rapidement. Ils avaient fait un
premier mémoire dans lequel ils disaient qu'il n'était pas
souhaitable qu'on le fasse avant septembre 1988. En se consultant de nouveau,
ils se sont dit entre eux et ils sont venus nous le dire ici: On est prêt
à laisser tomber cette phrase. Cela ne peut pas être plus
clair.
La Faculté de théologie de l'Université de
Montréal vient de nous faire part de son point de vue. C'est
déjà là de facto. La Faculté de théologie de
l'Université Laval nous a dit ce matin que cette partie était
déjà là. S'il était question de rendre cela
obligatoire à tout prix dans le curriculum, cela poserait des
problèmes. Ce n'est pas ce que le comité catholique
suggère. C'est quelque chose de plus nuancé que cela. Cela reste
à étudier à la lumière de tout ce qui a
été dit. Je pense que le comité catholique pourra
s'interroger et nous faire des remarques.
Un autre point qu'on a mentionné et qui est un petit peu
délicat est à propos de l'article...
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre, je
regrette...
M. Ryan: M. le Président, voulez-vous me donner trois
minutes...
M. Gendron: M. le Président, je regrette, ça prend
le consentement.
M» Ryans Voulez-vous me donner 3 minutes?
Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela prend un
consentement. Est-ce qu'il y a consentement?
M. Gendron: Oui.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Allez, M. le
ministre.
M. Ryan: Vous m'avez distrait, M. le Président. Je le
regrette infiniment, mais...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Moi aussi, M. le
ministre.
M. Ryan: On va se retrouver, il n'y a pas de
problèmes.
Alors, on nous fait part d'une difficulté pratique, en ce qui
concerne en particulier la mise en oeuvre des articles 16 et 17. Il va falloir
examiner avec beaucoup de soin les dates qui seront indiquées pour la
mise en vigueur de ces deux articles de règlement de manière
à ne causer de préjudice à qui que ce soit. La doyenne de
la Faculté des sciences de l'éducation de l'Université
Laval nous a dit qu'il y avait des indications qui
devaient être données très prochainement afin que
des étudiants ne soient pas aux prises avec des problèmes
insurmontables. Elle a pris l'engagement ce matin - et elle est ici cet
après-midi encore, je la remercie - de nous envoyer une note
complémentaire fournissant des précisions sur la nature des
difficultés auxquelles nous devrons songer et je l'ai assurée
qu'on pourrait avoir un débat constructif là-dessus. Je veux
l'assurer également que, s'il y a lieu, avant de préciser ces
choses de manière définitive, nous consulterons tous les
départements, toutes les facultés des sciences de
l'éducation. Nous le ferons volontiers parce que nous voulons que ces
choses se fassent avec eux et non pas sur leur dos, par-dessus leur
tête.
Une fois qu'on a ajouté... Vous savez, il y a l'article 27 qui
m'intéresse en particulier, parce qu'il y a une précision que je
voudrais apporter. L'article 27 nous dit: "le personnel de l'école
publique reconnue comme catholique ainsi que toute personne qui y travaille,
les parents et les élèves, doivent être respectueux du
caractère catholique de l'école". C'est une autre
vérité de La Palice. Si tu es dans une institution catholique, tu
dois en respecter le caractère. Maintenant, on nous a fait valoir
à juste titre que l'école catholique dans notre système
est en même temps une école publique. Cela impose d'autres
obligations. Je serais très heureux si le comité catholique
ajoutait ici qu'ils devront également être respectueux du
caractère public de l'école, pour qu'on voie que ce n'est pas une
chapelle, ce n'est pas une affaire qui appartient seulement à un groupe
en particulier, que c'est un bien public qui a reçu une qualification
particulière, étant donné les volontés
démocratiquement exprimées des parents et qui ne doit pas pour
autant être considéré comme une propriété
privée ou exclusive et catholique au sens étroit du terme. On
peut ajouter cela ici, je pense que le comité catholique est capable de
comprendre le bon sens, la réalité québécoise.
Avec les améliorations de cette nature dont j'ai donné un
certain nombre d'exemples, j'aurais pu en donner d'autres en ce qui touche
l'animation pastorale, je pense qu'il y a des ajustements qui doivent
être envisagés là. Il y a toutes sortes
d'énumérations qui sont prévues dans le règlement.
Est-ce que c'est absolument nécessaire? Est-ce que cela nous
éclaire beaucoup? Est-ce que c'est complet? On verra. Je pense qu'il y a
un travail qui doit être fait par un comité catholique. Je suis
assuré que la présidente du comité catholique et d'autres
responsables de cet organisme ont suivi tous les travaux de la commission
parlementaire. J'aurai l'occasion de consulter les députés du
comité ministériel dont l'assiduité et
l'intérêt furent exemplaires. Je les en remercie. J'aurai
l'occasion de les consulter dès ces jours-ci pour recueillir leurs
impressions. Je recueillerai volontiers les impressions complémentaires
de l'Opposition également. Mon intention, une fois que je serai saisi
des intentions définitives du comité catholique, est de faciliter
la mise en oeuvre du règlement dans les délais les plus
raisonnables. Je remercie tous ceux et toutes celles qui ont contribué
au travail fort utile et fort éclairant de cette commission, sous la
direction efficace et compétente de notre magnifique
président.
Le Président (M. Parent, Sauvé); C'est à
moi, au nom du président de la commission, à remercier tous les
intervenants, tous ceux et celles qui ont répondu à l'invitation
de la commission de venir nous faire connaître leurs commentaires face
à ces projets de règlement. La commission a accompli son mandat,
à savoir tenir des consultations particulières dans le cadre de
l'étude des projets de règlement suivants publiés dans la
Gazette officielle du Québec du 13 mai 1987: règlement du
comité protestant du Conseil supérieur de l'éducation sur
les institutions d'enseignement reconnues comme protestantes; règlement
sur la qualification des enseignants chargés de l'enseignement religieux
catholique dans les écoles primaires et les écoles secondaires
publiques ou privées autres que les écoles reconnues comme
catholiques; règlement sur la reconnaissance comme catholique et le
caractère confessionnel des écoles primaires et des écoles
secondaires du système scolaire public; règlement sur la
reconnaissance comme catholique et le caractère confessionnel des
institutions d'enseignement privé du primaire et de secondaire. Elle
ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 18 h 5)