Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Dix heures douze minutes)
Le Président (M. Paré): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Je déclare maintenant la séance ouverte. Le mandat de la
commission est de procéder à une consultation
générale et de tenir des auditions publiques dans le cadre de
l'étude détaillée des projets de loi 106, Loi sur les
élections scolaires, et 107, Loi sur l'instruction publique.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements ce
matin?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Il y a M.
Chagnon (Saint-Louis) qui remplace M. Tremblay (Rimouski).
Organisation des travaux
Le Président (M. Paré): Merci. Maintenant, pour
mettre les membres au courant de l'ordre du jour, nous allons entendre ce matin
comme premier groupe les représentants de la Commission des droits de la
personne. Suivra immédiatement après la Société
Saint-Jean-Baptiste de Montréal. Cet après-midi, il y aura
l'Association des commissions scolaires de la région de
Laval-Laurentides-Lanaudière, suivie de la Commission scolaire
Saint-Eustache, pour terminer avec la Commission scolaire régionale de
la Chaudière.
Nous allons maintenant accueillir... Oui, Mme la députée
de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Cet après-midi, si on respecte l'horaire
que vous nous proposez, on va terminer après 18 heures. Et je ne serai
pas disponible après 18 heures.
Le Président (M. Paré): Je ne sais pas comment on
peut s'entendre, mais je pense qu'il n'est pas possible de commencer avant, de
toute façon, à cause de la période de questions. Avez-vous
une suggestion?
Mme Blackburn: Oui. J'aurais suggéré qu'on puisse
en parler un peu avant que l'horaire soit établi. C'est parce que je ne
serai pas disponible après 18 heures. Je ne sais pas comment vous allez
procéder. Est-ce qu'il faut absolument entendre le troisième
groupe?
Le Président (M. Paré): Je pense qu'il serait
compliqué...
Une voix: II n'y a personne pour vous remplacer?
Mme Blackburn: II y en a d'autres aussi qui auraient avantage
à être remplacés, mais c'est une autre question.
Le Président (M. Paré): S'il vous plaît! Je
pense qu'il serait difficile de retarder ou de changer l'horaire, étant
donné que les groupes sont invités et devraient être ici
cet après-midi. Serait-il possible de préparer un
remplaçant ou une remplaçante?
Mme Blackburn: Oui. Mais, écoutez, on pourra
peut-être essayer de faire un peu plus court. Un remplaçant pour
une demi-heure, je ne trouve pas cela correct.
Le Président (M. Paré): On peut peut-être
procéder avec les invités de ce matin et, tout de suite
après l'audition des deux groupes de ce matin, prendre cinq minutes et
regarder avec le ministre, vous, moi et le secrétaire de la commission,
comment on pourrait s'organiser pour cet après-midi...
Mme Blackburn: Très bien.
Le Président (M. Paré):... soit en trouvant un
remplaçant, soit en essayant d'être à l'heure pour
commencer et comprimer un peu si c'était possible.
Mme Blackburn: Bien.
Le Président (M. Paré): Cela va? Alors, j'invite
immédiatement...
M. Ryan: Je sais que c'est difficile de trouver dans le Parti
québécois des députés intéressés
à l'éducation.
Le Président (M. Paré): M. le ministre, vous allez
me forcer à réagir et à répondre, mais je ne
voudrais pas le faire. On le fera à un autre moment. On n'est pas 99.
Cela étant dit...
Mme Blackburn: Si vous me le permettez, M. le Président,
parce que je pense que la remarque mérite qu'on y réagisse.
L'intérêt des membres qui participent à la commission ne
semble pas plus évident, non plus. Ils n'ont pas souvent l'occasion de
s'exprimer.
M. Ryan: C'est parce qu'en vertu de la courtoisie du gouvernement
ils vous laissent plus de temps pour parler. S'ils exerçaient le droit
qui leur revient, vous auriez trois fois moins de temps pour parler. Ce serait
peut-être trois fois plus utile.
Mme Blackburn: M. le Président...
Le Président (M. Paré): Je m'excuse. Je voudrais
juste spécifier là-dessus que le règlement est clair.
L'entente qui a été faite ne tient pas compte de la
quantité des gens qui sont à la
table, mais du droit de parole et aussi du droit de l'Opposition de
poser des questions. Le temps est partagé selon une entente qui a
été acceptée de part et d'autre.
M. Ryan: Une gracieuseté du gouvernement.
Le Président (M. Paré): Entente entre
président et vice-président de la commission, et ce n'est pas une
gracieuseté de permettre aux gens des deux partis d'avoir un temps
équitable pour pouvoir poser des questions. De tout temps... Je pense
qu'on ne reviendra pas sur les principes qui veulent qu'en commission
parlementaire, lorsqu'il y a des groupes qui sont entendus, il ne s'agit pas de
la générosité d'un homme, d'un Parlement ou d'un
gouvernement, mais il s'agit d'un règlement, d'une procédure et
d'une habitude. Oui, M. le ministre de l'Éducation.
M. Ryan: M. le Président, je tiens à rappeler que
le principe premier de toute l'activité parlementaire, c'est le droit de
chaque député à avoir un temps égal dans la
discussion de tout sujet d'intérêt général. Si des
ententes comme celle dont vous venez de parler surviennent, c'est parce qu'il
faut de la collaboration surtout de la part du groupe qui détient la
majorité. Cela, nous le faisons volontiers. Cela ne m'empêche pas
de souligner que, depuis le début des travaux de la commission, le Parti
québécois a été représenté par une
personne de manière presque générale.
Le Président (M. Paré): Juste pour vous dire
qu'étant vice-président de la commission - et je trouve cela un
peu dommage pour nos invités qu'on ait cette discussion en public ce
matin - le temps a été partagé à la suite d'une
entente entre le président et le vice-président, se basant sur
des principes et des habitudes à l'Assemblée nationale. Je vous
rappellerai que, lors de l'étude de la loi 3 et de la loi 40, on
partageait le temps de la même façon. Il ne s'agit pas d'un
cadeau. il s'agit d'un principe. Il s'agit tout simplement de la
normalité des choses que le temps soit partagé de cette
façon. Que chaque député ait un droit de parole
égal, vous le savez très bien, oui, mais à
l'intérieur d'une enveloppe globale pour chacune des formations
politiques.
M. Ryan: Vous comprendrez que c'est pour cela que, du
côté ministériel, les députés doivent
s'abstenir même s'ils auraient beaucoup de choses à dire souvent.
Vous l'avez vécu quand vous étiez au gouvernement aussi.
Le Président (M. Paré): Oui, M. le ministre.
M. Ryan: Merci.
Le Président (M. Paré): Vous avez raison, mais vous
comprendrez aussi qu'à trois commissions qui siègent en
même temps, en plus des travaux de l'Assemblée nationale,
lorsqu'on est 20 députés du côté de l'Opposition, on
ne peut pas être 20 ici. Malheureusement, nous devons nous partager le
temps et non pas trouver du temps pour nous occuper.
Auditions
Cela dit, je demanderais au président de la Commission des droits
de la personne, M. Lachapelle, de bien vouloir accepter de nous
présenter les personnes qui l'accompagnent et de nous faire la
présentation de son mémoire. Je vous souhaite la bienvenue
à la commission. La parole est à vous.
Commission des droits de la personne
M. Lachapelle (Jacques): Merci, M. le Président, de nous
donner, à nous aussi, le droit de parole. Comme vous m'avez
invité à le faire, j'aimerais présenter les membres de la
Commission des droits de la personne qui m'accompagnent: M. Alain Bissonnet,
commissaire à la Commission des droits de la personne, M. Philippe de
Massy, agent d'éducation à la Commission des droits de la
personne, Me Daniel Carpentier, chercheur à la Commission des droits de
la personne et avocat.
Je voudrais remercier les membres de cette assemblée de donner
à la Commission des droits de la personne l'occasion de se faire
entendre à nouveau sur ces questions d'éducation qui touchent de
très près les droits et libertés de la personne. Je dis
à nouveau, pas quant aux projets de loi 106 et 107, car on sait que ces
projets de loi constituent le troisième projet de réforme du
système scolaire qui ait été présenté au
Québec depuis cinq ans et la Commission des droits de la personne a eu
à chacune de ces occasions le loisir de se faire entendre.
Malheureusement, nous avons constaté que les points de vue que nous
avions apportés devant chacune des commissions n'avaient pas
été retenus et nous revenons, vous le comprendrez, à la
charge avec des arguments un peu semblables.
Nous traiterons donc dans les instants qui nous sont donnés de
cinq thèmes, comme vous pouvez le constater dans notre mémoire:
la confessionnalité scolaire, le droit à l'éducation,
l'accès des élèves handicapés aux services
éducatifs sans discrimination, la responsabilité de
l'école à l'égard des droits et libertés et aussi
quelques autres aspects du projet de loi dont nous aimerions traiter en
ramassant rapidement les éléments.
Le Président (M. Paré): Puis-je vous interrrompre
quelques secondes? J'ai oublié de mentionner que nous avons seulement
une heure. Ce qu'on essaie de faire, normalement, c'est partager en trois tiers
le temps alloué, c'est-à-
dire 20 minutes de présentation et 20 minutes de discussion avec
chacune des formations politiques. Si vous voulez prendre plus de temps,
à votre guise, sauf que ce sera retranché du temps de discussion
avec les membres de la commission.
M. Lachapelle: Nous avions déjà reçu ces
consignes et nous allons tenter de ramasser nos propos dans ces limites de
temps.
J'aimerais revenir à la question de la confessionnal ité
scolaire. Je disais que c'est le troisième projet de loi qui vise ce
double objectif: création de commissions scolaires linguistiques et
possibilité d'établir des écoles confessionnelles. Lors
des deux projets précédents, la Commission des droits de la
personne est intervenue en commission parlementaire pour affirmer que le
respect des libertés de conscience de religion de chacun ne pouvait
s'accorder avec la présence d'écoles publiques et communes
où les croyances, et les valeurs d'une religion sont
intégrées à l'ensemble du projet éducatif de cette
école.
La situation n'est certes pas différente avec le projet de loi
107. Par exemple, une commission scolaire pourra s'adresser au comité
catholique pour demander qu'une école soit reconnue comme catholique
à la suite d'une consultation du conseil d'orientation de
l'école. Si cette demande est acceptée, des élèves
qui professent une autre religion ou qui n'en professent aucune devront vivre
dans un environnement où les valeurs et les croyances catholiques seront
présentes autant dans l'enseignement des diverses matières que
dans les autres aspects de la vie à l'école ou ils devront
changer d'école.
Comment une telle école pourrait-elle être respectueuse des
libertés de conscience et de religion de tous les élèves,
alors qu'elle doit transmettre les valeurs et croyances d'une seule religion?
C'est là une source de conflits entre le droit reconnu à tous et
en pleine égalité de recevoir un enseignement public et gratuit
et les privilèges reconnus à deux seules religions.
La solution retenue par le gouvernement pour trancher ce litige ne nous
apparaît pas acceptable. En permettant l'existence de l'école
publique confessionnelle, le gouvernement ne retient pas la solution que lui
impose la Charte des droits et libertés de la personne, soit la pleine
jouissance des libertés de conscience et de religion et le plein
exercice du droit de ne pas subir de discrimination fondée sur la
religion. Cette démarche ne cadre pas, non plus, avec les principes
énoncés à l'article 13 du Pacte international relatif aux
droits économiques, sociaux et culturels auquel le Québec a
adhéré. En outre, l'article 26 de la Déclaration
universelle des droits de l'homme est au même effet.
Le gouvernement peut, dans le cadre de cette réforme, respecter
à la fois les droits et privilèges garantis par l'article 93 de
la loi constitutionnelle de 1867 et les libertés et droits fondamentaux
conférés par la charte. Au niveau des garanties
constitutionnelles, les articles 107 à 125 du projet de loi assurent le
respect de ces garanties. Donc, si ce n'est pour les commissions scolaires
confessionnelles de Montréal et de Québec et les commissions
scolaires dissidentes, il n'existe pas d'obligation de nature constitutionnelle
qui force le gouvernement du Québec à créer ou à
permettre que soient créées des écoles confessionnelles
qui soient communes et publiques.
Afin d'assurer le respect des libertés de conscience et de
religion, le projet de loi 107 devrait empêcher qu'une école
commune et publique ne puisse intégrer dans son projet éducatif
les croyances et les valeurs d'une confession religieuse
particulière.
Par voie de conséquence, la révision de l'article 93 de la
loi constitutionnelle de 1867 nous apparaît d'autant plus
nécessaire et urgente que c'est dans les régions desservies par
les commissions scolaires confessionnelles de Montréal et de
Québec que la proportion des élèves appartenant aux
minorités culturelles, ethniques et religieuses est la plus
élevée. Ces droits et privilèges, par voie de
conséquence, permettront le financement public de l'enseignement
religieux et le maintien, tant au niveau de l'État que des commissions
scolaires, de structures catholiques et protestantes, accordant ainsi à
ces deux confessions une préférence contraire à l'article
10 de la Charte des droits et libertés de la personne.
D'autre part, pour assurer la mise en place de ces projets de loi, on a
vu l'insertion de clauses dérogatoires à la charte,
respectivement aux articles 253 et 577 de ces deux projets de loi, qui se
lisent ainsi: "Malgré les articles 3 et 10 de la Charte des droits et
libertés de la personne, la présente loi ne porte pas atteinte
aux libertés de conscience et de religion ni au droit à
l'égalité dans la reconnaissance et l'exercice des
libertés de conscience et de religion pour le seul motif qu'elle accorde
des droits et privilèges à une confession religieuse." Ces
articles sont les mêmes que ceux qui avaient été
ajoutés dans des lois précédentes.
Substantiellement, sur cette question des clauses dérogatoires,
nous rappelons l'article 52 de la charte qui dit - je me permets de le citer -
"Aucune disposition d'une loi, même postérieure à la
charte, ne peut déroger aux articles 1 à 38, sauf dans la mesure
prévue par ces articles, à moins que cette loi n'énonce
expressément que cette disposition s'applique malgré la charte."
En n'énonçant pas laquelle ou lesquelles des dispositions de la
loi projetée s'appliquent malgré la charte, le
législateur, selon nous, ne respecte pas l'obligation qu'il s'est faite
en adoptant l'article 52 de la charte. 11 ne nous apparaît certainement
pas nécessaire, ni souhaitable que toutes les dispositions des projets
de loi 106 et 107 soient réputées conformes à la charte
malgré les articles 3 et 10 de celle-ci.
Outre cet aspect de la conformité à la lettre de l'article
52 de la charte, la commission se doit de réitérer les
commentaires qu'elle avait faits à l'égard du projet de loi 3
quant à une éventuelle dérogation à la charte. On
disait ceci: "Les principes contenus dans la charte sont clairs. L'école
doit respecter la liberté de religion et de conscience. La charte
n'oblige pas à intégrer dans le projet éducatif les
croyances et les valeurs d'une ou de plusieurs confessions; elle oblige
à respecter les convictions de tous. L'État doit assurer que,
dans les établissements d'enseignement publics, les enfants
reçoivent un enseignement conforme à leurs convictions. "
En conclusion sur ce premier point force nous est de constater que les
projets de loi 106 et 107 ne résolvent toujours pas la question de la
confessionnalité scolaire.
Le droit à l'éducation est l'autre thème que nous
aimerions aborder. L'article 40 de la charte reconnaît le droit à
l'instruction publique et gratuite dans la mesure et suivant les normes
prévues par la loi. Une loi comme celle qui est proposée dans le.
présent projet de loi prend alors toute son importance, car elle
précise ce que le Québec veut reconnaître comme droit
à l'instruction. Il y a plus: en ratifiant le Pacte relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels, le Québec s'est engagé
à reconnaître progressivement dans ses lois les droits qui y sont
décrits.
Je crois qu'il importe de rappeler cet article 13 du pacte qui en dit
très long sur le droit à l'éducation: "Les États
parties au présent pacte reconnaissent le droit de toute personne
à l'éducation. " C'est un pacte qui a été
ratifié par le Québec. "Ils conviennent que l'éducation
doit viser le plein épanouissement de la personnalité humaine et
du sens de sa dignité et renforcer le respect des droits de l'homme et
des libertés fondamentales. Ils conviennent en outre que
l'éducation doit mettre toute personne en mesure de jouer un rôle
utile dans une société libre, favoriser la compréhension,
la tolérance et l'amitié entre toutes les nations et tous les
groupes raciaux, ethniques ou religieux et encourager le développement
des activités des Nations Unies pour le maintien de la paix. "
On y voit développée l'idée que l'éducation
est plus que le simple enseignement. Au-delà du strict enseignement,
elle doit viser à l'épanouissement de la personne.
Alors, dans ce contexte, que dit le projet de loi 107? L'article 1 du
projet de loi confère à toute personne âgée de 5 ans
et plus le droit à des services de formation et d'éveil au
préscolaire et le droit à des services d'enseignement au primaire
et au secondaire. Cet article confère également à ces
personnes le "droit, dans le cadre des programmes offerts par la commission
scolaire, aux autres services éducatifs, complémentaires et
particuliers, prévus par la présente loi et le régime
pédagogique. "
Les "autres services éducatifs" sont égale- ment reconnus
comme un droit, ce qui constitue, selon nous, véritablement une nette
amélioration par rapport au projet de loi 40 et est dans la
continuité du projet de loi 3. Cependant, la lecture des autres
dispositions du projet ne permet pas de reconnaître la nature de ces
autres services. Il appartient, selon nous, à l'Assemblée
nationale de déterminer dans la loi quels sont les droits des citoyens.
La Loi sur l'instruction publique projetée devrait donc, en plus
d'énoncer le droit aux services éducatifs, les
énumérer et définir les objectifs visés par ces
services. Il ne nous apparaît pas acceptable que la loi reconnaisse un
droit sans qu'elle en établisse ni les objectifs ni les conditions
d'exercice. (10 h 30)
L'exercice du droit à l'éducation de certaines personnes
protégées par l'article 10 de la charte dépend
essentiellement du soin que l'on mettra à définir dans la toi les
services éducatifs autres que l'enseignement.
Ici, nous pensons aux enfants et aux jeunes provenant de
minorités ethniques ou linguistiques, de classes sociales
économiquement faibles et peu scolarisées ou présentant
des handicaps physiques, intellectuels ou affectifs. En effet, il est essentiel
pour ces personnes de se voir reconnaître le droit à certains
services autres que l'enseignement proprement dit afin qu'elles puissent en
toute égalité exercer leur droit à l'éducation.
Ne serait-H pas opportun de déclarer dans la Loi sur
l'instruction publique que toute personne possède un droit à
l'éducation et que ce droit se concrétise par le biais de
services d'enseignement, d'une part, et de services éducatifs
complémentaires et particuliers définis dans la loi, d'autre
part, et de le refléter dans son titre qui serait la loi sur
l'éducation publique?
L'accès des élèves handicapés aux services
éducatifs sans discrimination. Le sujet de l'éducation des
personnes handicapées et de l'accès de celles-ci aux services
d'enseignement dans le cadre régulier est l'une des questions les plus
importantes qui se posent actuellement au système scolaire. Rappelons,
tout d'abord, que la Charte des droits et libertés de la personne
interdit clairement le classement des enfants sur la base de leur seul
handicap. Ainsi, il est discriminatoire et contraire à la charte de
soumettre un enfant trisomique à une procédure
d'évaluation et de classement à laquelle on ne soumet pas les
autres enfants simplement parce qu'il est trisomique. C'est ce qu'a conclu la
Commission des droits de la personne en 1987 au terme d'une enquête
mettant en cause la jeune Julie Legault et la commission scolaire de Tracy.
Tous les cas qui se présentent à la Commission des droits de la
personne ne sont pas aussi clairs. En l'absence de reconnaissance du droit aux
services d'enseignement dans le cadre scolaire régulier, il n'est pas
sûr que les
enquêtes de la Commission des droits de la personne permettront de
débusquer les situations discriminatoires faites aux jeunes
handicapés et de combattre la tendance de certaines commissions
scolaires à n'offrir aux jeunes handicapés que des ressources
éducatives ségréguées. La loi actuelle est bien
imprécise et, jusqu'à présent, n'a pas permis aux enfants
handicapés de faire cerner les obligations de la commission scolaire
à leur égard.
À notre avis, la loi doit reconnaître l'accès
à la classe régulière comme étant la norme, les
services spéciaux ségrégués comme étant de
la ségrégation. Je crois qu'en cela nous rejoignons l'OPHQ qui,
hier, a témoigné devant vous. On ne peut plus laisser à
chaque commission scolaire le soin de réglementer les modalités
d'évaluation, d'intégration et de regroupement. En maintenant la
situation actuelle, l'Assemblée nationale ne s'assure pas que tous les
enfants handicapés aient les mêmes droits et risque de maintenir
les disparités effarantes que l'on voit actuellement.
La commission scolaire, selon notre recommandation, aurait donc le
fardeau de faire la démonstration, dans chaque cas, que telle personne
ne pourrait pas bénéficier des classes régulières
malgré les supports offerts. Il s'agit donc, somme toute, de renverser
le fardeau de la preuve actuel qui impose trop souvent à l'enfant
handicapé de faire la démonstration préalable de sa
capacité de fonctionner dans un groupe régulier,
démonstration impossible à faire la plupart du temps.
La loi doit, en outre, imposer l'obligation à l'école et
à la commission scolaire de faire une évaluation globale de
l'enfant et non pas une évaluation de ses besoins spéciaux
fondée sur ses déficiences ou ses incapacités. Il faudrait
prévoir, en outre, que chaque commission scolaire et chaque école
doive offrir le support nécessaire pour pallier au handicap dans la
situation de classe régulière et ne puisse pas simplement
renvoyer les enfants à d'autres commissions scolaires de la
région ou centraliser tous les enfants dans une école du
territoire, comme le permet le deuxième paragraphe de l'article 196 du
projet de loi 107. Enfin, obligation devrait être faite à chaque
commission scolaire d'adapter ses écoles et ses manuels et
matériels scolaires aux besoins des élèves
handicapés.
Nous abordons maintenant le quatrième thème que nous
avions annoncé, la responsabilité de l'école à
l'égard des droits et libertés de la personne. Nous avons
déjà suggéré que l'article 40 de la charte soit
amendé pour reconnaître un droit à l'éducation dont
la finalité s'inspire des éléments de l'article 13. 1 du
Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels
et que l'éventuelle loi sur l'éducation publique assure les
conditions d'exercice du droit ainsi défini.
Le projet de loi, en partie, reprend un de ces éléments
à son article 19 en imposant à l'enseignant le devoir "de prendre
les moyens appropriés pour développer chez ses
élèves le respect des droits de la personne. " Nous nous
réjouissons grandement de la présence de cet objectif, mais la
poursuite de cet objectif ne doit pas être la seule responsabilité
des enseignants. C'est à tous les intervenants scolaires que l'on doit
imposer cette obligation.
Développer chez les élèves le respect des droits de
la personne n'est pas suffisant. L'école doit également favoriser
chez les jeunes la reconnaissance et l'exercice de leurs droits et
libertés. C'est à la condition de pouvoir faire respecter leurs
droits que les jeunes bénéficieront d'une véritable
éducation aux droits de la personne. Il ne suffit pas d'enseigner les
droits de la personne. Les droits de la personne s'apprennent plus qu'ils ne
s'enseignent. Ils s'apprennent dans un milieu qui les reconnaît et en
favorise l'exercice. L'éducation aux droits passe par le
développement de la capacité de connaître et de faire
respecter ses propres droits, sa propre dignité, ce qui amène
à découvrir les moyens d'agir de façon à respecter
ceux d'autrui.
C'est cette philosophie qui a inspiré la Commission des droits de
la personne dans ce guide que nous avons présenté aux jeunes, qui
s'intitule "Pour mieux vivre ensemble" et qui propose l'apprentissage de la vie
démocratique, celle-ci étant définie comme le
développement de l'acceptation mutuelle, du respect des
différences, de relations humaines égalitaires et
réciproques, de modes de résolution des conflits par le dialogue,
la négociation, l'échange, de la recherche d'une participation
active à l'élaboration de la société à
laquelle ils appartiennent.
Nous sommes heureux de vous dire que, avec l'appui, justement, du
ministre de l'Éducation, nous avons pu avoir une aide appréciable
dans la distribution de ce guide auprès des jeunes, le ministre de
l'Éducation ayant inspiré les commissions scolaires à
s'approprier ce document. Peut-être aussi pour inspirer vos travaux selon
les principes de la charte, nous vous distribuerons tantôt ce guide
à l'intention des jeunes, mais, qui, j'en suis sûr, peut
être extrêmement profitable pour les adultes.
Un des éléments essentiels de l'éducation aux
droits et libertés telle que nous venons de la décrire
réside dans la possibilité, justement, pour les jeunes d'exercer
leur pleine liberté d'association. Dans son mémoire sur le projet
de loi 40, la commission se réjouissait que soit proposée une
formule de participation et de consultation des élèves,
même si elle souhaitait quelques améliorations à la formule
proposée. Le projet de loi 3 reprenait la formule du comité
d'élèves, tout en prévoyant que les élèves
pouvaient décider de confier à une association
d'élèves les fonctions dévolues au comité
d'élèves.
Dans le projet de loi 107, il n'y a pas de référence ni
à un quelconque comité d'élèves, ni à la
présence d'une association d'élèves. Nous ne
pouvons que déplorer qu'après ce qui se voulait un premier
pas vers une participation réelle et autonome des élèves
à la vie de l'école on choisisse de ne plus prévoir la
création dans chaque école d'un comité ou d'une
association où les élèves, entre eux, auraient l'occasion
de discuter des problèmes qui les concernent au premier chef et, par
leurs représentants démocratiquement élus, auraient
l'occasion de faire les représentations voulues auprès des
diverses instances de l'école.
Nous recommandons que soient ajoutées dans le projet de loi 107
des dispositions à cet égard.
Nous aimerions aussi apporter quelques commentaires sur quelques autres,
aspects de ce projet de loi qui, même s'ils sont peut-être
marginaux, n'en sont pas moins importants, quant à nous. Je pense ici
à la gratuité des services éducatifs, aux recours des
élèves et à d'autres aspects.
L'article 4 du projet de loi confère à tout
résident du Québec le droit à la gratuité des
services éducatifs. Cependant, le second alinéa de l'article 4
limite ce droit en fonction des ressources de la commission scolaire pour les
personnes âgées de plus de 16 ans ou de 22 ans dans le cas d'une
personne handicapée, qui ont cessé de fréquenter
l'école pendant six mois ou plus après avoir atteint cet
âge.
Lorsque l'on considère le taux élevé
d'analphabétisme au Québec et les lourdes conséquences
sociales et individuelles que cela comporte, il apparaît plus
approprié de reconnaître un droit à la gratuité
scolaire qui serait uniquement fonction de l'obtention d'une formation minimale
de base. Pour déterminer celle-ci, on pourrait s'inspirer de la
recommandation de la commission d'étude sur la formation des adultes
dans son rapport "Apprendre, une action volontaire et responsable" qui dit:
"Que l'on garantisse aux adultes, en vertu de ce droit, l'équivalent de
13 années de formation, acquises en milieu scolaire ou ailleurs, de
façon formelle ou autrement."
Les recours de l'élève. Contrairement au projet de loi 3,
le présent projet de loi ne contient pas de dispositions permettant de
recourir au Protecteur du citoyen en cas de violation des droits de
l'élève. Il est malheureux que ces dispositions n'apparaissent
plus dans le projet de loi, car elles permettaient un recours rapide et
accessible aux élèves ou à leurs parents. Que l'on songe,
par exemple, à la situation des parents d'un élève
handicapé ou en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage, qui
voudraient contester le processus administratif qui a classé leur enfant
dans une classe spéciale plutôt que régulière. Pour
eux, dans le cadre proposé, seul un recours devant un tribunal de droit
commun, avec les coûts et les délais inhérents à un
tel recours, permettrait de faire respecter les droits de
l'élève. La commission recommande donc que le projet de loi
comporte des dispositions permettant de recourir au
Protecteur du citoyen en cas de violation des droits de
l'élève.
Il y a également l'article 15, concernant la conséquence
de la non-fréquentation scolaire. Il nous apparaît que le
signalement au directeur de la protection de la jeunesse d'un
élève qui ne fréquente pas assidûment l'école
malgré l'avis préalable donné aux parents constitue une
mesure dont tes conséquences peuvent être lourdes pour
l'élève ou ses parents. Le projet de loi 3 prévoyait
plutôt qu'en semblable situation le directeur de l'école
référait l'enfant à une personne des services de
santé et des services sociaux de l'école. Cette approche avait
l'avantage de centrer l'intervention au niveau des services de l'école
en permettant que le problème puisse être résolu par des
intervenants qui proviennent du milieu scolaire. Rien n'empêche, par la
suite, si le problème ne peut être résolu au niveau de
l'école, que le responsable du dossier signale la situation au directeur
de la protection de la jeunesse, conformément à l'article 39 de
la Loi sur la protection de la jeunesse.
En conclusion sur ces cinq thèmes que nous avons discutés
devant vous, si vous me permettez de prendre encore quelques minutes, la
restructuration du système scolaire québécois prend,
certes, une bonne direction en déconfession-nalisant les structures des
commissions scolaires autres que celles faisant l'objet de garanties
constitutionnelles. La commission souhaite, cependant, que la logique de cette
démarche soit plus complète en déconfessionnalisant aussi
l'école, véritable lieu de vie de la population visée par
cette réforme.
En soustrayant l'application des articles 3 et 10 de la charte
relativement aux libertés de conscience et de religion et à la
discrimination fondée sur la religion à l'ensemble des
dispositions des projets de loi 106 et 107, le gouvernement ne respecte ni la
lettre ni l'esprit de la charte. Il est inacceptable, dans le contexte social
actuel où l'accent est mis sur l'acceptation du pluralisme culturel et
religieux, que le système d'éducation publique proposé
perpétue la préférence accordée aux deux
commissions scolaires religieuses en permettant que soient créées
des écoles publiques confessionnelles.
Le projet de loi 107 devrait donc être l'occasion pour
l'Assemblée nationale d'affirmer et de reconnaître dans la loi un
droit à l'éducation. Ce droit à l'éducation dans
ses deux composantes, droit à l'enseignement et droit au
développement et à l'épanouissement de la
personnalité par le biais de services autres que l'enseignement, dits
"services complémentaires", s'il est reconnu dans les faits par la
réglementation, devrait être reconnu dans le texte même de
la loi, permettant à l'Assemblée nationale d'affirmer et de
concrétiser ce droit fondamental.
La situation particulière des élèves
handicapés ou en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage
nécessite des amendements législatifs leur permettant de
véritablement exercer leur droit à
l'éducation. En plus de prévoir le droit à des
services éducatifs particuliers pour ces élèves, le projet
de loi devrait reconnaître le droit à l'intégration de ces
élèves aux classes régulières.
Le projet de loi doit imposer aux commissions scolaires et à
l'école de favoriser l'éducation des jeunes aux droits de la
personne. Cette éducation doit comporter, outre le fait de
développer chez les jeunes le respect des droits de la personne, la
possibilité de faire reconnaître et d'exercer à
l'école leurs propres droits et libertés.
Un des éléments essentiels de l'éducation aux
droits réside dans l'exercice autonome pour les jeunes de leur
liberté d'association que l'école doit favoriser. (10 h 45)
En conclusion finale, la Commission des droits de la personne
recommande: 1° le retrait de l'article 253 du projet de loi 106 et de
l'article 577 du projet de loi 107 (ce sont les clauses dérogatoires);
2° que seules les commissions scolaires confessionnelles et les commissions
scolaires dissidentes puissent donner un caractère confessionnel
à leurs écoles, dans la mesure où subsistent les garanties
constitutionnelles à cet égard; 3° au gouvernement d'engager
sans délai des négociations constitutionnelles permettant le
retrait de l'article 93 de la loi constitutionnelle de 1867; 4° la
suppression de l'article 95 relatif aux visiteurs d'école; 5° la
modification de l'article 1 du projet de loi 107 afin que soit reconnu le droit
à l'éducation et la modification du titre de la loi en
conséquence; 6° l'ajout de dispositions dans la loi
énumérant et définissant les services éducatifs
complémentaires et particuliers auxquels toute personne a droit; 7°
que soit reconnu à tous les élèves le droit à des
services d'enseignement dans le cadre régulier, à charge pour les
commissions scolaires de faire la démonstration dans chaque cas que
telle personne ne pourrait pas bénéficier du cadre
régulier malgré les supports offerts; 8° que soit
modifié le deuxième paragraphe de l'article 196 du projet de loi
107 afin qu'il ne soit pas possible pour une commission scolaire de confier les
services particuliers qu'elle doit dispenser aux élèves
handicapés à une autre commission scolaire; 9° que l'on
crée l'obligation pour chaque commission scolaire d'adapter ses
écoles, ses manuels et matériels scolaires pour les besoins des
élèves handicapés et qu'elle ait également
l'obligation de consacrer exclusivement à l'adaptation scolaire toutes
les subventions versées par le ministère à cette fin;
10° d'étendre à tous les intervenants scolaires le devoir de
développer chez les élèves le respect des droits et
libertés de la personne et de favoriser chez ceux-ci la reconnaissance
et l'exercice de leurs droits et libertés; 11°
l'établissement dans chaque école d'un comité
d'élèves démocratiquement élu qui aurait pour
fonction de représenter les élèves auprès des
instances de l'école. Les fonctions de ce comité pourraient
être exercées par une association d'élèves si les
élèves de l'école le désirent. Le comité ou
l'association d'élèves devrait être assuré de
disposer de conditions matérielles lui permettant d'exercer ses
activités. De plus, le directeur de l'école doit favoriser
l'exercice autonome par les jeunes de leur liberté d'association;
12° la reconnaissance par la loi de l'obligation du ministre de favoriser
la gratuité des services éducatifs jusqu'à l'acquisition
d'une formation de base; 13° que le projet de loi 107 comporte des
dispositions permettant de recourir au Protecteur du citoyen en cas de
violation des droits de l'élève; 14° enfin, la modification
de l'article 15 du projet de loi 107 afin qu'un élève qui ne
fréquente pas assidûment l'école malgré l'avis
communiqué à ses parents soit déféré aux
services de santé et aux services sociaux de l'école.
Voilà en substance, M. le Président, les propos que nous
voulions vous faire tenir sur ce projet de loi. Nous sommes à votre
disposition pour répondre à vos questions.
Le Président (M. Paré): Merci beaucoup, M.
Lachapelle. Nous allons maintenant procéder à la discussion avec
les deux partis. Nous allons commencer avec l'intervention du ministre de
l'Éducation.
M. Ryan: M. le Président, j'ai lu, hier, le mémoire
de la Commission des droits de la personne et j'en ai entendu le
résumé présenté ce matin par son président.
Il n'y a pas beaucoup de motifs de surprise pour moi dans la teneur de ce
document, parce qu'il réédite, moyennant quelques variantes, les
thèmes auxquels on a été habitué de la part de la
Commission des droits de la personne. Nous avons déjà eu avec la
commission des échanges abondants sur ce sujet à l'occasion
d'auditions publiques autour du projet de loi 3 en particulier. Par
conséquent, je n'entends pas reprendre tout le débat jusque dans
ses racines. Je pense qu'il y a des positions qui sont établies pour
longtemps de part et d'autre et qu'une discussion de plus ou de moins ne fera
pas évoluer substantiellement les positions des uns et des autres.
Je rappelle très brièvement que l'interprétation
que la Commision des droits de la personne présente de toute cette
question des droits est une interprétation sujette à
débat. Il y a des choses à considérer. Tout d'abord, il
faut distinguer les institutions publiques. Elles ne sont pas toutes de
même nature. Les tribunaux sont un
type d'institution, les services d'impôts sont un autre type
d'institution, les services de police, de protection contre les incendies, en
sont un autre. On pourrait en énumérer à l'infini. Nous
considérons que les services scolaires ne sont pas des services publics
purement et simplement et qu'il y a beaucoup d'autres choses qui gravitent
autour de cela. L'école est une sorte de lien entre la famille et la
société. Elle est le relais premier de la famille, qui est le
lieu de formation intégrale de l'enfant. L'école ne peut pas
être assimilée uniquement à un service public, comme on le
dirait à propos d'autres services publics. Cela est un point qui nous
sépare de la vision que présente la commission, du moins dans le
texte que j'ai lu. C'est profond et, vu cette différence, nous
considérons que c'est respecter davantage les droits qui nous
intéressent en commun d'en tenir compte que de ne pas en tenir
compte.
Nous essayons d'en tenir compte d'une manière souple et pratique,
adaptée à ia réalité québécoise, non
pas à une réalité abstraite qui existerait quelque part
dans la stratosphère. La position de la commission, finalement, quand on
l'analyse dans ses aboutissants pratiques, conduit à sortir la religion
des écoles. Vous nous dites bien: C'est à l'école qu'on
veut que vous vous intéressiez, cette fois-ci. C'est là que se
situe le gros de vos objections. Si c'est cela que la commission nous demande,
de sortir la religion des écoles, je lui dis que, politiquement, c'est
une position qu'aucun des deux partis qui sont représentés
à l'Assemblée nationale ne serait prêt à tenir.
Une fois qu'on accepte la présence de la religion à
l'école, il y a des choses qui deviennent des modalités. Au
chapitre des modalités, on peut discuter à l'infini. Nous
estimons que les modalités que nous retenons sont l'expression d'un
consensus largement répandu aujourd'hui dans le Québec; ce n'est
pas unanime, mais c'est un consensus largement répandu. Toutes les
indications que nous avons jusqu'à maintenant vont dans ce sens.
Par conséquent, je n'accepte pas, en tant que représentant
du gouvernement à cette commission et porte-parole du gouvernement dans
le secteur de l'éducation, la conception réductrice que met de
l'avant la Commission des droits de la personne dans son interprétation
des droits humains appliquée au domaine scolaire. Je piaide pour une
attitude plus positive, plus compréhensive, plus accueillante. C'est ce
que le gouvernement essaie de faire. Si ce n'est pas possible, je pense que
là il y a un problème formidable, mais je crois que c'est
possible. Le Québec en a donné la preuve depuis au-delà
d'un siècle et je pense qu'il est capable de le faire encore. Dans le
reste du Canada, on la donne également et on peut le faire encore.
Je prends un autre exemple. Très logiquement, la commission
conclut qu'il faudrait - excusez l'expression - "scrapper" l'article 93 de
l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Cela va bien. Si vous voulez
venir faire partie d'un parti politique qui va préconiser cela sur la
scène politique, on vous attend, ce serait intéressant. Mais
c'est une démarche hautement politique et vous remettez en cause toute
l'histoire de ce pays. C'est un des éléments clés du Pacte
confédératif de 1867. Il n'a pas été inventé
par des théoriciens. Peut-être qu'il faudra le remettre en cause
un jour, mais pas d'une manière simpliste et absolue, comme certains
voudraient le faire. Cela va demander des discussions et des conversations. Je
pense bien qu'il faudra consulter les détenteurs de ces droits. Il me
semble que c'est élémentaire, en bonne philosophie de droit, de
consulter les détenteurs de ces droits pour savoir ce qu'ils en pensent.
Ce ne sont pas des "non-entities".
Là-dessus, je trouve que la démarche est logiquement
intéressante, mais pratiquement un peu courte. La même chose pour
les droits sociaux. On peut en mettre, on peut remplir le pot jusqu'au
couvercle. Le gouvernement doit cependant se demander: Est-ce qu'on est capable
d'appliquer cela? Est-ce qu'on a les moyens pour le faire? À quel stade
de son développement la société est-elle rendue pour
être capable de prendre des engagements responsables envers la
population? Il y a eu une période où on a pensé qu'on
pouvait proclamer des chartes, en veux-tu, en voilà; on en a mis, on en
a mis. À un moment donné, les gouvernements se sont
aperçus qu'ils en avaient mis trop pour ce qu'était le potentiel
de la société.
Il y a deux attitudes. Il y en a une qui dit: On va élargir le
champ des droits par le développement des services, des ressources qu'on
met à la disposition des citoyens, par l'amélioration de la
qualité des services offerts. Il y en a d'autres qui disent:
Proclamons-les dans des chartes et, après cela, ils vont être
obligés de marcher, même si cela marche peut-être tout de
travers. Nous avons fait l'expérience de ces enchevêtrements
auxquels peuvent conduire des déclarations globalistes, adoptées
prématurément. Nous optons dans ce projet de loi pour une
démarche prudente qui essaie de mesurer la nature des affirmations
contenues dans le projet de loi à l'appréciation que le
gouvernement fait des possibilités concrètes de la
société québécoise à ce stade de son
développement. Ce n'est pas mauvais et je n'insisterai pas
davantage.
Ma collègue de Jacques-Cartier aura l'occasion de vous donner une
application de ces considérations générales au domaine des
enfants handicapés, des enfants en difficulté d'adaptation et
d'apprentissage, domaine auquel elle s'intéresse depuis toujours et avec
lequel elle est la plus familière parmi les membres de la commission, je
pense pouvoir le dire sans blesser personne. Elle va vous donner sa
réaction là-dessus. Je pense qu'il est important qu'on vous donne
ce point de vue. On est prêt à entendre le vôtre, il n'y a
pas de problème. Il y a bien
d'autres choses que je voudrais dire, mais je pense avoir dit
l'essentiel.
Un dernier point, l'article 577. Je ne suis pas d'accord avec
l'interprétation, que vous présentez dans votre mémoire de
ce que le gouvernement tente de faire avec l'article 577. Vous dites: Vous avez
une clause générale qui n'a aucune sorte de limitation. On ne le
lit pas de la même manière, je pense qu'on n'a pas la même
sorte de lunettes. Ce que je lis à l'article 577, c'est: "Malgré
les articles 3 et 10 de la Charte des droits et libertés de la personne,
la présente loi ne porte pas atteinte aux libertés de conscience
et de religion ni au droit à l'égalité dans la
reconnaissance et l'exercice des libertés de conscience et de religion
pour le seul motif qu'elle accorde des droits et privilèges à une
confession religieuse. "
Par la teneur de cet article, il me semble évident que sa
portée est limitée aux articles qui définissent des droits
et privilèges pour une confession religieuse et non pas à
l'ensemble de la loi. S'il faut nommer ces articles, on va faire l'exercice, on
va examiner la possibilité de les identifier. Il me semble que le
principe les identifiant est ici. Vous remarquerez, d'ailleurs, que les
articles 577 et 578 ont des formulations très différentes.
L'article 578 est une clause dérogatoire au sens fort et propre du
terme. L'article 577 est plutôt une clause interprétative qu'une
clause dérogatoire au sens rigoureux du terme. Cela peut être
discuté, mais la limite qui est ici de toute manière vaut
d'être soulignée et je m'étonne qu'elle n'ait pas
été soulignée de manière plus explicite. Je vous le
souligne. Encore une fois, si l'exercice vaut d'être fait, on verra si
c'est possible, mais je pense bien, de toute manière, que
l'interprétation ne saurait être globale.
En ce qui touche la liberté d'association des étudiants,
si on prenait la lettre de vos recommandations, il faudrait reconnaître
la liberté d'association dans les écoles primaires. C'est ce que
vous dites. On peut bien trouver cela curieux, mais c'est ce que je lis dans le
mémoire. Comme gouvernement, on ne serait pas prêt à mettre
cela dans une loi. Comme membre du gouvernement, je ne serais pas prêt
à mettre cela dans une loi. On est bien prêt à favoriser
l'exercice de réunions de toutes sortes et de diverses formes
d'association, mais aller établir un droit dans les écoles
primaires... Il ne faut pas le faire exprès, non plus, pour compliquer
la vie de ceux qui travaillent dans les écoles. On essaie d'être
pratique, on essaie de légiférer en restant aussi proche que
possible de la vie.
C'est la même chose pour le droit de visite dans les
écoles. Apparemment, cela vous scandalise; moi, cela me réjouit.
Je veux, comme député, en particulier, que chacun d'entre nous
puisse se présenter dans une école et qu'on sache qu'on a le
droit d'y aller. Je pense que cela ne blesse personne. Il y a des gens qui nous
ont dit: Pour ce qui est des membres du clergé, cela devrait, au moins,
être limité aux écoles, par exemple, qui ont un
caractère confessionnel. Ce sont des choses qui peuvent être
discutées. Je pense qu'il y a des remarques qui ont du bon sens.
Certaines nous ont été faites, notamment, par la Commission des
écoles catholiques de Sherbrooke, hier. Pour ce qui est du principe du
droit de visite pour le député, j'espère que vous serez
d'accord avec nous là-dessus. Vous demandez, dans votre mémoire,
qu'on supprime tout cet article. Regardez vos recommandations.
Une question et, par la suite, je vais laisser un peu de temps à
ma collègue de Jacques-Cartier. D'après vous, le regroupement des
commissions scolaires en commissions scolaires linguistiques
présente-t-il quelque difficulté en regard de l'article 10 de la
Charte des droits de la personne qui proclame que toute personne a droit
à la reconnaissance de ses droits et libertés sans exclusion,
distinction ou préférence fondée sur, etc., y compris la
langue? Est-ce que cela vous crée des difficultés? Est-ce que
vous avez examiné ce point de vue? Je veux savoir si vous l'avez
étudié. (11 heures)
M. Lachapelle: On a regardé cet aspect-là et,
apparemment, cela ne pose pas de difficultés particulières.
M. Ryan: Pourriez-vous me l'expliquer un petit peu?
M. Lachapelle: Me Carpentier pourrait ajouter davantage à
mes quelques courtes phrases.
M. Carpentier (Daniel): Le fait qu'il soit prévu que tout
le territoire sera divisé en commissions scolaires linguistiques,
francophones et anglophones, ne semble pas poser de problèmes,
étant donné que toute personne aura accès, sera inscrite
à une commission scolaire ou à une école francophone ou
anglophone. Tant qu'il y a un accès égalitaire, il n'y a pas de
problème.
M. Ryan: II faut aller plus loin. Il faut regarder le projet de
loi dans son ensemble et dans ses détails. Si on dit: On va avoir deux
réseaux de commissions scolaires linguistiques et aux commissions
scolaires de langue anglaise n'auront accès que telles et telles
catégories d'enfants, est-ce qu'il n'y a pas là des limitations,
des exclusions même, qui sont fondées sur la langue,
d'après votre logique?
M. de Massy (Philippe Robert): M. le ministre, la position de la
commission avait été assez claire lors de l'adoption du projet de
loi 101 qui posait clairement ce problème, puisqu'il s'agissait de
déterminer quels étaient les critères
d'admissibilité des enfants à l'école anglaise. L'analyse
qui avait été faite, vous vous en souvenez, concluait à un
caractère non discriminatoire des critères qui étaient
énumérés,
puisqu'ils s'appliquaient à toutes les personnes, à tous
les enfants. C'étaient des critères qu'on a qualifiés
d'objectifs et de neutres s'appliquant à tout le monde.
C'est la loi 101 qui pourrait créer des difficultés par
les critères qu'elle énumère pour établir
l'admissibilité à l'école anglaise plutôt que ce
projet de loi. Le simple fait de créer des commissions scolaires
linguistiques, françaises et anglaises, en soi ne nous semble pas
contraire aux principes de la charte.
M. Ryan: Merci.
Une voix: M. le Président, M. Bissonnet aimerait
parler.
Le Président (M. Paré): Oui, vous pouvez
compléter.
M. Bissonnet (Alain): Écoutez, j'aimerais simplement
indiquer qu'en ce qui concerne la question qui est soulevée par M. le
ministre on n'a pas débattu à fond de ce sujet, en tout cas, pas
à l'assemblée des commissaires. Quant à moi, j'indiquerai
simplement que, si on regarde la Charte canadienne des droits et
libertés, la question peut se poser. Je pense que, si on regarde les
articles 15.1 et 27 de la Charte canadienne des droits et libertés, on
peut penser que les minorités pourraient réclamer un certain
nombre de droits en matière de langue justement, dans le contexte
scolaire. Je vous donne une réponse personnelle, et si vous le
permettez, je vous réfère à un article de José
Woehriing, publié dans la Revue de droit de McGill de 1985 qui en a fait
état.
Si vous me le permettez, M. le ministre, j'aimerais simplement, en
tenant vraiment compte des informations que vous nous avez apportées
tout à l'heure, vous indiquer que, quant à moi à titre de
commissaire, la question des services scolaires qui ne sont pas des services
publics, la question du lien entre l'école et la famille, et ia
façon de respecter davantage les droits dans ce cadre, sont des sujets
qui me préoccupent grandement. Si le texte peut sembler
réducteur, je vous assure, en tout cas, que les discussions que nous
avons ne visent pas à réduire le débat. Si ma lecture des
articles qui sont des clauses dérogatoires est juste - et,
là-dessus, vous avez semblé évoquer une autre lecture
possible - j'aimerais, quand même, soumettre à votre attention
certaines de nos préoccuptions. li me semble que, par l'inclusion des
clauses dérogatoires, les projets de loi, si jamais ils deviennent lois,
vont empêcher, a priori, toute discussion, tout débat quant au
respect des libertés de conscience et de religion, dès qu'une
école publique sera reconnue catholique. Je vous pose la question.
Il est vrai qu'à l'article 4 du Règlement relatif aux
écoles primaires et secondaires publiques reconnues catholiques on
stipule: "L'école publique reconnue comme catholique intègre,
dans le respect des libertés de conscience et de religion, les croyances
et les valeurs de la religion catholique dans son projet éducatif." La
question que nous nous posons, que je me pose personnellement de façon
très aiguë: Comment va-t-on s'assurer qu'effectivement le projet
éducatif catholique respectera les libertés de conscience et de
religion? À nos yeux, l'adoption des clauses dérogatoires - tout
dépend, bien sûr, de la lecture qu'on en fait - empêche
toute discussion à cet égard.
Gomme représentants, comme membres d'une Commission des droits de
la personne qui a pour mission de promouvoir les principes contenus dans la
charte, si notre lecture est juste, nous ne pouvons que déplorer une
telle situation. Selon nous, H faudrait, à tout le moins, laisser la
porte ouverte à d'éventuelles contestations judiciaires. En
laissant ainsi la porte ouverte, autrement dit en n'utilisant pas les clauses
dérogatoires telles que je les lis - et vous me corrigerez si je me
trompe - il serait permis aux citoyens de demander à la Commission des
droits de la personne ou éventuellement à un juge de
vérifier si une école publique, reconnue comme catholique et
faisant la promotion des croyances et des valeurs de la religion catholique
dans son projet éducatif, respecte bel et bien les libertés de
conscience et de religion de tous et chacun. Un tel accès aux tribunaux
aurait pour effet de renforcer, comme le prévoit l'article 13 du Pacte
relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, le respect des
droits de la personne.
Par conséquent, M. le ministre, je pense que nous nous faisons un
devoir, tout simplement, de vous recommander respectueusement de renforcer le
respect des libertés de conscience et de religion, et de retirer de ces
projets de loi les clauses dérogatoires qui y apparaissent actuellement,
dans la mesure, à tout le moins, où, selon la lecture que nous en
faisons, elles empêchent des recours éventuels à
l'extérieur de la commission scolaire comme telle, soit devant la
Commission des droits de la personne, soit devant des juges, de façon
qu'on puisse avoir un débat à l'extérieur de ces
structures pour bien s'assurer que, dans le cadre d'un projet
éventuellement catholique, les libertés de conscience et de
religion soient, quand même, respectées. Vous voyez, je
m'intéresse à un aspect bien particulier de la question, mais
cela m'apparaît très important.
M. Ryan: Si vous me permettez juste un mot là-dessus, je
ne souscris pas à l'interprétation que vous proposez. Je pense
que l'interprétation qu'on peut raisonnablement tirer de l'article 577
est différente. Une personne ne pourrait pas contester devant les
tribunaux les articles concernés pour le seul motif qu'ils accordent des
droits et privilèges à une confession religieuse. Mais si, dans
la pratique, une personne estime que ses convictions sont foulées
aux pieds, écrasées par le régime qui existe dans
une école, son privilège de contestation existe avec le fardeau
de la preuve que cela comporte pour elle. C'est là qu'est la
différence, je pense. Mais, on n'exclut pas tout recours aux tribunaux,
contrairement à ce que plusieurs auraient voulu laisser entendre; bien
au contraire. C'est pour cela qu'on a tenu à insérer dans le
texte du règlement cette clause: dans le respect des droits fondamentaux
de la personne.
Cela fatigue beaucoup de personnes qu'on ait mis cela là. On l'a
mis à dessein, car ce que le gouvernement veut surtout promouvoir, c'est
une recherche en commun par les citoyens du Québec d'un régime de
convivance où l'on pourra s'affirmer clairement, sans
nécessairement fouler aux pieds les droits des autres. Ce qu'on ne veut
pas, et ce que personnellement je ne veux pas promouvoir, car ce serait
contraire à tout ce que j'ai fait jusqu'à maintenant, c'est une
espèce de régime de neutralité, d'indifférence,
où personne ne pourra plus se reconnaître, parce qu'on aurait
peur, dès qu'on dit qui on est, de déplaire à quelqu'un.
C'est cela qu'on veut éviter, parce que cela ne conduit nulle part. Dans
la mesure où les deux volets sont pris en considération, je pense
que c'est acceptable. Je suis content des explications que vous apportez. Je
pense que cela nous rapproche en même temps. On va regarder cela de plus
près. Si vous avez des compléments de questions ou d'explications
à nous apporter là-dessus, on va en prendre connaissance avec
beaucoup d'intérêt. Le texte qu'on a ici, ce n'est pas une
vérité définitive. Si on peut l'améliorer, on va le
faire avec plaisir.
Une voix: Merci, M. le ministre.
M. Bissonnet (Alain): C'est simplement pour vous indiquer que,
quant à moi, je n'avais pas nécessairement une lecture
réductrice.
M. Ryan: D'accord. Très bien.
Le Président (M. Paré): M. Lachapelle.
M. Lachapelle: M. le ministre, je voudrais, tout simplement,
revenir sur certains de vos propos, surtout lorsque vous parlez d'une
présentation un peu réductrice, comme on l'a souligné
tantôt. Je pense que vous avez peut-être habilement ramassé
nos arguments et vous les avez peut-être habilement réduits aussi
un peu. Je pense bien qu'on n'a indiqué nulle part...
M. Ryan: C'est la faute du président. Je n'avais pas de
temps.
M. Lachapelle: C'est probablement la faute du
président.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lachapelle: Je suis content qu'on puisse, finalement,
constater que la position de la commission est beaucoup plus nuancée que
ce que vous avez bien voulu placer sur la table tantôt en demandant:
Est-ce que la Commission des droits de la personne veut sortir la religion des
écoles? Je pense bien que l'idée n'est pas là.
Ce que l'on dit, c'est que c'est très difficilement viable
d'avoir dans une école un régime catholique, alors qu'il y a des
élèves qui ne partagent pas la même religion. Des personnes
se sont adressées à la Commission des droits de la personne avec
des questions éminemment concrètes et précises. Elles nous
ont demandé quoi faire, par exemple, si, dans une classe où il y
a des élèves qui ne partagent pas la même confession
religieuse, il y a la prière le matin, un exercice pour aller à
l'eucharistie à l'église ou si, une fois l'an, on présente
un spectacle - on nous parlait d'une crèche vivante dans une
école - où les enfants qui ne sont pas de cette confession
religieuse disent: Nous n'irons pas. Qu'est-ce qu'on fait? Est-ce qu'on va leur
organiser une autre petite cérémonie à côté?
Ce sont là des difficultés éminemment concrètes, M.
le ministre. Je ne les invente pas. Des commissions scolaires nous ont soumis
des cas semblables.
Si, il y a 100 ans et peut-être un peu plus - je n'ai pas
compté les années depuis 1867 - il y avait un article 93, il y a
aussi de nouvelles réalités au Québec et également
une Charte des droits et libertés qui a consacré la
liberté de religion. Je pense qu'il faut aussi en tenir compte. Quand
vous dites qu'il faudrait peut-être transformer la commission pour
qu'elle puisse négocier l'article 93, en bon politicien, nous croyons
que vous faites bien le travail et nous n'osons surtout pas vous dire comment
le faire. De la même manière lorsque pour la clause
dérogatoire, vous nous demandez comment il faudrait le faire, je pense
que ce n'est pas à la Commission des droits de la personne d'indiquer
les meilleures façons de déroger à la charte. Vous avez
sûrement de bons juristes qui peuvent vous indiquer comment le faire.
Nous vous invitons, cependant, encore une fois, à relire les
dispositions de l'article 52, quand vous demandez s'il faut préciser les
articles auxquels il faudrait déroger. C'est peut-être cela. Je
pense que les juristes... Mais, encore une fois, nous ne voulons surtout pas
vous dire comment le faire.
Pour revenir à une autre question, notre crainte, comme le disait
M. Bissonnet tantôt, porte, justement, sur la coexistence dans une
école de personnes qui adhèrent à des religions
différentes. Si cette crainte n'est pas la vôtre, pourquoi aller
mettre des clauses - je n'ose plus les qualifier de dérogatoires -
habilement dérogatoires? Je ne sais pas comment les ont
qualifiées vos juristes, mais je pense qu'ils les appellent les clauses
dérogatoires. Encore une fois, voilà l'inquiétude que
partage la commission. Nous vous disons: II y a une charte. Nous y
avons adhéré et la population y a aussi
adhéré, il y a déjà une douzaine
d'années.
Comme vous l'avez mentionné tantôt, je pense bien que ta
commission a une position que vous connaissez depuis longtemps. Nous
connaissons la vôtre. Nous voulions, quand même, ajouter certains
arguments et ajouter un peu à la discussion, mais sans aller plus loin.
Je pense que notre document est fort complet là-dessus.
Pour ce qui est de !a présence à l'école... Tout
simplement, très marginalement, quand vous nous dites que nous ne
voulions pas qu'il y ait des visiteurs à l'écoie, je pense que le
texte dit: "Nous croyons qu'il est inapproprié de maintenir ce droit de
visite pour les prêtres et les ministres protestants, à tout le
moins dans les écoles qui ne sont pas reconnues comme étant d'une
confession religieuse." Or, le texte est peut-être beaucoup plus
précis que notre recommandation.
Le Président (M. Paré): Je vous remercie, M.
Lachapelle.
La parole est maintenant à Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le
président, messieurs, il me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue
au nom de l'Opposition officielle.
J'ai lu avec beaucoup d'intérêt et beaucoup d'attention le
mémoire que vous avez présenté. Je ne suis, quand
même, pas étonnée de la réaction du ministre. Pour
en être à ma troisième commission parlementaire
relativement longue avec le ministre de l'Éducation, je comprends que,
chaque fois qu'un mémoire vient un peu contredire sa propre perception
des choses, ses convictions ou encore son projet de loi ou ses intentions, il
fait un long exposé et il laisse le moins de temps possible aux gens ou
aux invités pour réagir. C'est généralement un
assez bon signe de la valeur du mémoire parce que, lorsque l'argument
est un peu moins solide, il laisse un peu plus de temps aux gens pour
répondre, de manière qu'on puisse déstabiliser un peu
leurs avis. (11 h 15)
Vous soulevez des questions majeures. Je ne voudrais pas en faire le
tour, parce que je voudrais avoir quelques éclaircissements. Les
questions sur lesquelles vous revenez avec beaucoup d'insistance, ce sont
celles qui m'ont "e plus préoccupée, plus particulièrement
au moment où on a discuté ici en commission parlementaire du
projet de réglementation des comités catholique et protestant. Je
dirais que la loi n'est que le prolongement... Habituellement, c'est l'inverse,
le règlement vient après une loi, mais ici le règlement a
précédé la loi. On retrouve dans la loi, tout simplement,
des articles qui viennent confirmer ou appuyer le règlement.
Le ministre dit: Les partis se sont entendus là-dessus, on ne
peut pas sortir la religion de l'école. Ce que je dis au ministre, c'est
qu'avec les problèmes qu'il connaît, ce n'était ni le temps
ni le lieu de renforcer le caractère confessionnel de l'école.
C'était l'objection que je lui faisais.
Encore aujourd'hui qu'il m'apparaît extrêmement difficile de
concilier le respect des libertés de conscience et de religion de chacun
avec un projet éducatif inspiré des valeurs et de la morale
chrétiennes, catholiques. Si mon interprétation n'était
pas juste, on se trouve devant une impossibilité, une incapacité
de respecter intégralement les droits et libertés de chacun, on
n'aurait pas l'article 577. Si cela ne posait pas de problème, on
n'aurait pas d'article. Le ministre dit: Ce n'est pas une clause
dérogatoire, c'est une clause interprétative. Je ne sais pas
comment on l'interpréterait devant les tribunaux, mais, par rapport
à ce que cela dit essentiellement, on ne peut pas contester la loi selon
les articles qui prévoient que l'école catholique ou protestante
vienne en contradiction avec Ses valeurs personnelles, les libertés
individuelles. Alors, s'il n'y avait pas de problème, il n'y aurait pas
d'article.
Le ministre dit: Le Québec s'est bien arrangé avec le
système scolaire actuel. S'il estime que c'est bien s'arranger avec le
système scolaire actuel que de retrouver une croissance constante des
secteurs français dans les commissions scolaires protestantes anglaises,
et que cela n'a pas posé de problème, on ne fait pas la
même lecture de la réalité québécoise.
Les points que vous avez abordés nous sortent, je dirais
heureusement, de ce débat qui a trop porté sur les structures. Au
cours de la présente commission parlementaire, j'ai eu l'occasion de
dire, à quelques reprises, qu'on a beaucoup parlé de partage des
pouvoirs, de structures, comme si on avait oublié l'objectif fondamental
de l'exercice qui est d'assurer la qualité, l'accessibilité et
l'équité en matière d'éducation au Québec.
Vous y revenez plusieurs fois.
Je sais que je l'ai déjà soulevé, mais je pense que
c'est un recul important par rapport à la loi 3 qui, je le rappelle,
n'était pas une vague promesse électorale, mais bien une loi.
N'eût été le fait qu'on l'a invalidée et rendue
inapplicable dans toutes ses dispositions, en raison de quelques-unes de ses
dispositions sur les structures, la loi s'appliquerait actuellement. Elie
prévoyait la gratuite à l'éducation des adultes pour
terminer un secondaire V, l'accès aux services de garde dans les milieux
scolaires, la possibilité pour un parent ou un élève de
demander une interprétation auprès du Protecteur du citoyen pour
voir ses droits protégés. Je pense que vous avez cité
également les autres, la définition, évidemment, des
services particuliers, des services complémentaires. Cela constitue un
recul inacceptable. Je pense que vous l'avez clairement expliqué.
De même on ne retrouve pas l'obligation qui
serait faite de favoriser la création des associations
étudiantes. L'éducation à la participation, cela fait
partie de la formation. Je suis toujours étonnée qu'on ne
retrouve pas cela dans le projet de loi. Juste pour parler de la
gratuité à l'éducation des adultes, lorsque le ministre
s'opposait avec la verve et la violence qu'on peut lui connaître au
projet de loi 3, le premier argument qu'il utilisait, c'était le fait
qu'on n'assurait pas la gratuité à l'éducation des
adultes.
Le ministre nous dit: L'article 577 n'empêcherait pas les parents
d'intervenir au nom de leurs enfants, s'ils sentent que les droits et
libertés ne sont pas respectés. Ils devraient le faire et le
fardeau de la preuve leur appartiendrait, cependant. Cela ne semblait pas
être votre interprétation de l'article 577. Peut-on dire que
l'interprétation de l'article 577, est plus large, c'est-à-dire
que, pour quelqu'un qui estimerait que, dans une école reconnue comme
confessionnelle dans le réseau public, les écoles communes, ses
droits n'ont pas été respectés, tout recours est rendu
inutile ou presque? Est-ce que la seule façon de donner un peu de moyens
ne serait pas, en dépit de l'article 577, de réintroduire au
moins l'article touchant la possibilité de recourir au Protecteur du
citoyen?
M. Carpentier: Quant à l'article 577, on l'a bien lu, il
dit que "la présente loi ne porte pas atteinte aux libertés de
conscience et de religion ni au droit à l'égalité (...)
pour le seul motif qu'elle accorde des droits et privilèges." Quand une
personne fera-t-elle face à une éventuelle atteinte à sa
liberté de conscience ou de religion ou à son droit à
l'égalité fondé sur la religion? Nous pensons que, lorsque
ce sera le cas, ce sera en raison des droits et privilèges
accordés à une confession. Dans ce sens, nous croyons que c'est
extrêmement difficile pour une personne de démontrer devant un
tribunal qu'il y a eu atteinte à sa liberté de conscience et de
religion, et que ce n'est pas du seul fait que la loi a accordé certains
droits et privilèges à une institution ou à des personnes
dans l'institution que cette atteinte a eu lieu. Le débat risque
d'être très très difficile pour la personne qui
soulèverait cela.
Le Président (M. Paré): M. Lachapelle.
M. Lachapelle: J'aimerais peut-être ajouter, tout
simplement, que, si ce que M. le ministre dit est exact, est vrai, et que c'est
ce qu'il veut - on n'a pas tous la même lecture du texte de loi - il
faudrait peut-être que cette volonté de favoriser des recours y
apparaisse clairement. Nous croyons, au contraire - plusieurs avocats se sont
penchés sur cette clause et on y arrive difficilement - qu'il n'est pas
clair, qu'il y aurait peut-être lieu de préciser cette
volonté qu'on n'exclut pas les recours. Que ce soit très clair.
Je pense que nous tous ici, on lit le texte et on dit: Si c'est ce que vous
dites, M. le ministre, il faudrait peut-être que ce soit clair.
Mme Biackburn: Peut-on en même temps, dans la même
loi, maintenir l'article 577 et permettre des recours?
M. Lachapelle: On aurait beaucoup de difficultés avec
cela. Ce qu'on dit, c'est qu'il faut abolir ces clauses dérogatoires. Au
départ, on ne dit pas: Mettez une clause dérogatoire, ensuite,
faites un autre article en-dessous et dites: Malgré...
Mme Blackburn: Bien oui, en disant que vous pouvez le contester.
D'accord.
M. Lachapelle: On pourrait faire un autre article disant:
Malgré l'article 577 qu'on vient d'écrire, les recours à
la charte existent toujours. On va tourner en rond, je pense.
Mme Blackburn: Bien. Vous parlez également des
problèmes qui touchent le droit des parents quant à
l'intégration des enfants handicapés dans les écoles
régulières. Je pense d'ailleurs qu'il y a actuellement une cause
devant la cour pour un jeune élève de la région de
Québec.
Effectivement, je pense que l'absence de recours dans ces cas pose
problème à des parents. J'ai assisté à
l'assemblée annuelle de l'Association des parents d'enfants
handicapés visuels du Québec, la semaine dernière. Selon
le témoignage d'une mère, sa fille aveugle qui avait
fréquenté la maternelle, a appris deux jours avant le
début des classes qu'elle ne serait pas admise en première
année. Elle a utilisé tous les recours et elle se demandait si
elle pouvait aller devant le Protecteur du citoyen. On lui a dit que cela
n'était pas possible parce que ce n'était pas prévu dans
la loi. Cela pose de sérieux problèmes d'équité.
Les pratiques sont extrêmement variables d'une commission scolaire
à l'autre, pour ne pas dire d'une école à l'autre. Je suis
d'accord avec vous que l'obligation devrait être faite aux écoles
et aux commissions scolaires de les intégrer aux classes
régulières. Une fois cela dit, ii y a, quand même, des
enfants handicapés profonds. Comment gère-t-on ce
système?
M. Lachapelle: M. de Massy, qui a longuement étudié
ces questions, pourrait vous donner le point de vue de la commission
là-dessus.
M. de Massy: Je pense qu'il faut bien comprendre l'esprit de
cette recommandation. En créant ou en reconnaissant le droit aux
conditions régulières d'enseignement, on ne fait que renverser le
fardeau de la preuve qui existe actuellement. C'est plutôt cela,
l'élément important qu'il faut retrouver dans la loi. La formule
législative concrète pour en arriver à cet effet pourrait
peut-être varier. Vous connaissez bien les principes qui, depuis 1976,
ont guidé les
milieux scolaires à la suite du rapport du COPEX qui
présentait cette fameuse cascade dont on parle toujours qui
présente, en haut la situation de classe régulière et, en
bas, la situation la plus ségréguée et qui prévoit
que, normalement, on doit commencer dans la situation régulière.
Au fond, il s'agit, dans cette recommandation que nous faisons, de nous assurer
que les enfants se voient reconnaître ce droit de commencer en haut parce
que, vous le savez comme nous, dans certaines commissions scolaires, on n'a que
les services qui sont à la base du triangle, au bas de la cascade. Donc,
les enfants handicapés ne vont jamais en haut, ils entrent en bas et ils
restent en bas. Pour pallier cette situation, il faut que, sur le plan
juridique, on reconnaisse le droit des enfants à commencer dans la
situation du haut.
Dans l'exemple que vous donniez tout à l'heure, à notre
avis, l'enfant doit aller à l'école de son quartier avec tous les
enfants du voisinage. Elle doit être évaluée dans la
situation régulière et non pas, à cause de sa
déficience ou de son handicap, être automatiquement
envoyée, d'abord, à l'évaluation. On n'évalue pas
les autres enfants; on n'évalue pas leur capacité au
préalable en se fondant exclusivement sur leur handicap. Commencer dans
la situation régulière et toujours partir de cette situation
régulière, et que ce soit à la commission scolaire de
démontrer... Il faut associer notre recommandation aux
caractéristiques que l'on voudrait voir reconnues à
l'évaluation de l'enfant. Que, dans la loi, l'obligation soit reconnue
d'évaluer globalement l'enfant et non, comme cela se pratique
malheureusement actuellement, en fonction de sa déficience.
Pour terminer, au fond, le mécanisme discriminatoire actuel
réside dans le fait d'évaluer les enfants par rapport à
leur déficience et non par rapport à l'ensemble de leurs
capacités et de leurs besoins. Les commissions scolaires
répondent toujours: Nous faisons cela, nous envoyons l'enfant dans une
école spéciale pour répondre à ses besoins. Mais ce
dont on ne se rend pas compte, c'est qu'on ne répond pas à
l'ensemble des besoins de cet enfant; on ne répond qu'à ses
besoins spéciaux rattachés à sa déficience. Il a un
ensemble de besoins sociaux auxquels on ne répond pas. (11 h 30)
Mme Blackburn: Bien. Dans votre mémoire, vous touchez
également ia question d'éducation au respect des droits de la
personne, une éducation à être faite et qui doit être
prise en charge non seulement exclusivement par les enseignants, mais par
l'ensemble du système. Vous dites qu'une première façon de
reconnaître ces droits, c'est le droit à l'association.
Le ministre a voulu minimiser l'importance de votre recommandation
là-dessus en disant: Je ne vois pas très bien des associations
d'élèves au primaire. Pourtant, j'ai vu des écoles
où il y avait des associations d'élèves au deuxième
cycle du primaire. Une certaine aisance, une certaine habileté s'est
développée à ce palier parce qu'il y a moins de
gêne, moins de timidité et, ensuite, cela les rendait plus habiles
à fonctionner lorsqu'ils arrivaient dans les grosses polyvalentes. Je
pense que l'idée de favoriser la création d'associations
étudiantes au deuxième cycle du niveau primaire n'est pas aussi
ridicule que semble le voir le ministre. Je me dis qu'à l'occasion il
devrait aller enseigner un peu, passer peut-être une année dans
une école et voir comment cela se passe; il comprendrait peut-être
mieux les subtilités, ce qu'on voit mal lorsqu'on n'a pas
été plus proche de ce milieu.
Par ailleurs, je pense que l'éducation au respect des droits de
la personne est difficile. On sait que les enseignants se voient imposer ce
devoir, article 19, troisième paragraphe, où l'on dit:
L'enseignant doit "prendre les moyens appropriés pour développer
chez ses élèves le respect des droits de la personne. " Je me
demande comment cela est possible dans une école confessionnelle. Je me
demande sur quelle base on va pouvoir évaluer l'enseignant.
M. Lachapelle: Votre question nous embête.
M. Bissonnet (Alain): C'est-à-dire que ce sont un peu les
préoccupations dont j'ai fait état, tout à l'heure, en
m'adressant au ministre. Il va certainement falloir que tous les intervenants
se préoccupent grandement de cette question. Quant à moi, je ne
dis pas que c'est impossible, mais je pense qu'effectivement, lorsqu'un projet
éducatif précis s'appuie sur une confession précise, cela
risque très certainement d'entrer en contradiction avec d'autres
confessions. C'est certainement notre mission, à nous, comme membres de
la commission, de rappeller autant aux membres d'une commission parlementaire
comme celle d'aujourd'hui qu'à l'ensemble de la population que c'est
vrai que la majorité peut faire certains choix, mais qu'il ne faut
jamais oublier que les membres des minorités, même s'il n'y en a
qu'un dans une classe de trente, ont des droits fondamentaux. Il peut arriver,
même si on l'oublie, même si on ne le voit pas, même si cette
personne n'ose même pas s'exprimer, qu'effectivement, au plan de sa
liberté de conscience ou de sa liberté de religion, elle se
retrouve dans un contexte où elle ne se sent pas à l'aise,
où elle ne sent pas qu'elle peut elle-même affirmer
également ses propres libertés de religion ou sa propre
liberté de conviction. idéalement, quant à moi, je pense
qu'on devrait avoir un projet éducatif pluraliste - mais cela est une
autre question, je ne veux pas entrer là-dedans - où on ferait en
sorte que la confession, la culture, les valeurs qui sont celles de chacun des
membres de la classe soient reconnues et discutées. Il pourrait y avoir
un certain nombre de problèmes d'ordre pratique, mais je pense que ce
n'est pas impossible. Si on
se retrouve dans une école publique - il ne faut pas l'oublier,
c'est une école publique, parce que tout le monde reconnaît qu'on
peut se retrouver avec des écoles privées où une
minorité ou un groupe particulier décide d'avoir un projet global
qui correspond à ses convictions, mais cela est un autre débat et
c'est prévu dans les conventions internationales - et commune, il nous
semble, à la Commission des droits de la personne, qu'il y a
effectivement un risque de porter atteinte aux libertés de conscience et
de religion des membres de certaines minorités. Si, effectivement, aucun
des recours dont nous avons parlé préalablement avec le ministre
n'est empêché d'être exercé par le projet de loi, qui
sera éventuellement une loi, je dois dire que j'en suis ravi parce que,
à ce moment-là, le débat va se faire. On devra s'assurer,
soit devant la Commission des droits de la personne ou devant un juge, qu'un
projet éducatif catholique ne portera pas atteinte aux libertés
de conscience et de religion. Dans cette mesure, si le débat peut se
faire, on va peut-être y arriver, il va y avoir des discussions et tout
le monde va se réajuster. Mais si l'article, tel que nous le lisons, ne
permet pas ces recours, je m'inquiète grandement de voir de telles
clauses dérogatoires adoptées par l'Assemblée
nationale.
Le Président (M. Paré): En conclusion, très
brièvement.
Mme Blackburn: En conclusion, M. le Président, parce que
le temps file, on aurait certainement eu avantage à discuter encore
longuement de votre mémoire. Je voudrais juste soulever quelques
réactions que me suggèrent les remarques du ministre. Lorsqu'il
dit que l'école doit être le prolongement de la famille et qu'on
ne peut pas considérer ce service public comme l'ensemble des autres
services publics au Québec, cela sous-entend que la définition
qu'il a de la famille est celle de la famille catholique ou protestante, alors
qu'il y a des familles autres. C'est un Québec avec deux grands morceaux
et cela n'existe plus, plus particulièrement dans certaines
régions.
M. Bissonnet (Alain): Si vous me permettez, tout est toujours
question d'interprétation, c'est sûr. Effectivement, je l'avais
noté. Qu'on dise qu'il s'agit d'un service public ou non, il n'en
demeure pas moins que l'État et, la Commission des droits de la
personne, qui est une institution au Québec, favorisent l'exercice des
droits et libertés et également la notion
d'égalité. Effectivement, si on compare les différentes
familles qui existent au Québec, je ne dis pas que c'est la
majorité, mais on se retrouve avec des familles qui ont des convictions,
qui ont adopté une confession qui n'est pas celle prônée
dans une école reconnue catholique. À ce moment-là, le
lien entre l'école et la famille, comment va-t-il s'établir pour
les membres de ces familles qui, elles, ne professent pas la même
religion ou n'ont pas les mêmes convictions? Je pense que vous avez bien
souligné qu'on se retrouve face à un problème important
dès l'instant où on s'inscrit dans une problématique de
droits fondamentaux.
Mme Blackburn: Juste une dernière remarque. Je pense que
votre remarque est juste, à savoir que la seule solution
concrète, efficace, durable, réaliste à la situation que
nous vivons, aux difficultés qu'on éprouve à gérer
notre réseau scolaire au Québec, c'est la négociation de
l'article 93. On peut se demander si l'exercice que nous faisons
présentement, très enrichissant, très instructif, n'est
pas voué à être à nouveau inutile et les
mémoires à être tablettes puisque, déjà, le
PSBGM nous a annoncé en commission parlementaire, cette semaine, qu'il
entendait en appeler devant les tribunaux de la légitimité de
cette loi. Déjà, avant même qu'elle n'ait franchi
l'étape de la consultation, on nous annonce que cette loi sera
contestée. On connaît le sort qui a été
réservé à la loi 3 là-dessus. Si le passé ne
nous apprend rien, je me dis que c'en est fait de notre espérance en
l'évolution de l'humanité. On devrait apprendre quelque chose
là-dessus.
Nos tentatives successives pour modifier la Loi sur l'instruction
publique au Québec, pour toucher aux structures scolaires ont subi des
échecs consécutifs et il se dégage de plus en plus, de la
part des différents intervenants, que la seuie façon,
c'était la négociation de l'article 93. On ne peut que
déplorer que cela n'ait pas été fait dans la
première ronde de négociations. Le ministre nous dit: On va
essayer cela et, si cela ne fonctionne pas, on ira pour la négociation
de l'article 93. Entre-temps, la situation se détériore. Je pense
qu'il faut être réalistes, ce n'est pas agiter inutilement des
épouvantails de le dire.
Je voudrais vous remercier infiniment de votre participation aux travaux
de cette commission. Je rappelle que le mémoire m'a
particulièrement plu parce qu'il ne s'est pas attardé
exclusivement aux questions de structures. Il a touché plus
fondamentalement les objectifs du réseau d'éducation au
Québec, c'est-à-dire ceux de qualité,
d'équité et d'accessibilité à l'éducation.
Je vous remercie.
Le Président (M. Paré): J'informe les membres de la
commission qu'on a très largement dépassé le temps
consacré au mémoire de la Commission des droits de la personne,
des deux côtés. Donc, je vous demande de conclure très
rapidement du côté ministériel, à peine une minute
parce qu'il y a un groupe qui attend. On a déjà
dépassé de 40 minutes l'heure qui était fixée pour
l'audition. En conclusion.
Mme Dougherty: Si vous me le permettez, M. le Président,
j'ai un court commentaire à faire avant de conclure. C'est que,
comme
membre de ce comité, le COPEX, que vous avez mentionné
tout à l'heure, vos remarques sur l'intégration des enfants dans
l'école régulière m'inquiètent un peu. Le but, qui
est largement, accepté est d'intégrer l'enfant dans le milieu le
plus normal possible, tout en tenant compte de ses besoins particuliers sur le
plan éducatif autant que sur le plan social. Pour arriver à cette
intégration idéale, il faut une éducation
appropriée. Cela veut dire qu'il faut toutes sortes de démarches
pour adapter l'éducation aux besoins particuliers de ces enfants et,
quelquefois, il faut les regrouper parce que c'est dans le meilleur
intérêt de l'enfant. Alors, je crois que vous êtes
allés un peu loin dans votre mémoire sur ce sujet. Il me semble
que le droit qu'on devrait inscrire dans la loi est le droit aux services
éducatifs appropriés pour favoriser le développement
optimal de l'enfant. Alors, c'est tout autre chose que l'intégration qui
pourrait être sauvage et pas dans le meilleur intérêt de
l'enfant.
Alors, M. le Président, je sais que, malheureusement, il manque
de temps pour réagir.
M. Bissonnet (Alain): Si vous me le permettez, en 30
secondes.
Le Président (M. Paré): Oui. Je vous donne la
même chose. Malheureusement, étant donné que ce sont des
conclusions, vous avez à peu près une minute pour répondre
et conclure. Je m'excuse d'être aussi bousculant.
Mme Dougherty: Alors, pour conclure... Oui mais...
M. Bissonnet (Alain): Si vous me donnez quinze secondes
simplement pour répondre à Mme la députée...
Le Président (M. Paré): Vous pourrez...
M. Bissonnet (Alain): Je vous assure simplement que ce qu'on a
voulu, c'est faire en sorte que, d'abord, on évalue bien les personnes
handicapées de façon qu'on s'assure que, si jamais elles ne
peuvent pas se retrouver dans les classes régulières... Mais ii
faut bien s'en assurer, je suis tout à fait d'accord. Une personne qui
ne peut pas suivre dans une classe régulière doit,
évidemment, aller dans des classes spéciales. Quant à moi,
je dis qu'une personne qui n'est pas dans une situation semblable et qui va
dans une classe spéciale, ce n'est pas de la discrimination. Mais
faisons en sorte qu'on vérifie très bien et très
globalement qu'elle n'est vraiment pas capable d'aller dans la classe
régulière. On n'est pas si éloignés que cela,
madame.
Le Président (M. Paré): En concluant, M.
Lachapelle.
M. Lachapelle: L'expérience de la commission, madame, nous
démontre que ce n'est pas ce qui se passe dans ces cas-là. Ce
n'est pas comme cela qu'on évalue les élèves. Ce n'est pas
ce qui arrive malheureusement. On a eu plusieurs cas. Donc, il faudrait
renverser le fardeau pour que ce soit à l'école de faire cette
démonstration-là parce que c'est trop lourd pour les enfants.
Mais je pense que nous sommes tout à fait d'accord sur les principes que
vous avez énoncés. Et les propositions de: a commission ne sont
pas si exigeantes que cela. On demande, tout simplement, de renverser le
fardeau quant à cet enfant qui est tout à fait démuni dans
les circonstances, qui se fait très souvent catapulter des examens, des
tests qu'il n'est pas en mesure de contrer parce qu'il n'y a pas de
spécialistes autour de lui.
Le Président (M. Paré): Je dois vous arrêter.
J'ose espérer que vous ne considérerez pas ma tolérance
comme de l'intransigeance puisqu'on a dépassé, de 45 minutes
déjà, le temps qui nous était alloué. Je vous
remercie beaucoup. À cause du temps qui nous est limité à
nous aussi, je vais devoir conclure immédiatement en vous remerciant au
nom de tous les membres de la commission et inviter immédiatement les
gens de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal
à prendre place. Merci beaucoup.
M. de Massy: La commission a des exemplaires de ce petit ouvrage.
Je ne sais pas comment vous les laisser.
Le Président (M. Paré): Oui, on va les distribuer.
Apportez-les, tout simplement, ici. (11 h 45)
À l'ordre, s'il vous plaît! J'invite immédiatement
les représentants de la Société Saint-Jean-Baptiste de
Montréal à prendre place à la table en avant. J'invite
aussi les membres de la commission à prendre place.
Je souhaite la bienvenue aux représentants de la
Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal. Bienvenue, Mme
Boudreau, Mme la présidente. On va essayer de respecter l'horaire cette
fois-ci. Nous avons une heure à notre disposition. La coutume veut que
l'on essaie de faire un partage par tiers, c'est-à-dire 20 minutes pour
la présentation et 20 minutes pour chacune des formations politiques. Si
vous décidez d'en prendre plus, cela veut dire que le temps sera
coupé sur les échanges avec les différentes formations
politiques.
Je vous invite à nous présenter les gens qui vous
accompagnent et à procéder immédiatement après
à la présentation de votre mémoire.
Société Saint-Jean-Baptiste de
Montréal
Mme Boudreau (Nicole): M. le Président, M. le ministre,
Mmes et MM. les députés, permettez-moi d'abord, au nom de
l'organisme que je
représente, la Société Saint-Jean-Baptiste de
Montréal, de vous exprimer notre reconnaissance d'avoir bien voulu nous
entendre et discuter avec nous de notre mémoire sur les projets de loi
106 et 107.
Sans plus tarder, j'aimerais vous présenter les deux
collègues qui m'accompagnent. D'abord, à ma gauche, notre premier
vice-président, M. Pierre Légaré, qui, à plusieurs
autres occasions, a bien voulu et su défendre la position de notre
organisme dans le dossier scolaire, ayant lui-même une solide expertise
dans le domaine. En plus d'être membre du Conseil scolaire de l'île
de Montréal, et ce pendant une période de quatorze ans, dont
quatre à l'exécutif, M. Légaré a également
été commissaire à la Commission des écoles
catholiques de Montréal. Son expérience et son
intérêt pour l'éducation ne sont plus à
démontrer et c'est avec plaisir qu'en tant que responsable du dossier de
l'éducation à la Société Saint-Jean-Baptiste il se
chargera, ce matin, de répondre aux questions que notre mémoire
pourrait susciter.
À ma droite, notre secrétaire général, M.
Ferdinand Prémont, qui est, quant à lui, enseignant à
l'écoie Saint-Luc de Montréal, une école dont la
population allophone est de l'ordre de 80 %. Il est donc à même de
constater ce que sera le portrait de la société
québécoise de demain.
M. le secrétaire de cette commission me faisait part d'une
certaine souplesse des membres de ladite commission sur le temps imparti
à la présentation du mémoire comme tel. C'est pourquoi, si
vous me le permettez, M. le Président, M. Légaré et
moi-même déborderons légèrement les 20 minutes
prévues.
La Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal existe
depuis plus d'un siècle et demi. Dès l'origine, on constate que
la diffusion de l'instruction publique compte parmi les buts qu'elle s'est
donnés et qui sont inscrits dans sa charte. Au fil des ans, cette charte
a été refondue, mais la préoccupation initiale est
demeurée et s'est élargie.
Cette mission n'est pas restée un vain mot. La
Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal a pris les moyens
pour s'en acquitter. Par exemple, elle a mis sur pied, il y a quelques
décennies, les cours publics du Monument national qui ont
été, je vous le rappelle, à l'origine de la fondation de
l'École des hautes études commerciales, de l'École des
beaux-arts, des écoles techniques et des écoles d'arts et
métiers. Plus récemment, elle a organisé des cours de
français gratuits pour les réfugiés, ce qui leur a permis
de mieux s'intégrer à la société
québécoise.
À tous les tournants de notre histoire, comme à l'occasion
des grands débats qui ont marqué la vie du Québec, la
Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal a tenu à
être présente. Encore une fois, aujourd'hui, le gouvernement
engage le débat sur ces sujets d'intérêt majeur pour
l'ensemble de la population. Encore une fois, la Société
Saint-Jean-Baptiste de Montréal répond à l'appel.
Dans les projets de loi 106 et 107 déposés avant
Noël, le gouvernement se penche à nouveau sur le
réaménagement de la structure scolaire du Québec et
cherche à mieux adapter la démocratie scolaire aux exigences
contemporaines. Notre réflexion a porté sur ces deux projets de
loi. Il existe un consensus, presque une unanimité, parmi les
Québécois et les Québécoises pour reconnaître
la nécessité de moderniser notre structure scolaire en l'ajustant
à la société d'aujourd'hui et de demain. Mais comment
faire? Dès qu'on aborde les formules ou les hypothèses, le
consensus s'effrite. C'est un problème qui a tenu en échec tous
les ministres de l'Éducation et tous les gouvernements depuis le
début des années soixante.
Le système d'éducation que se donne une
société projette une image qui n'est pas neutre, mais qui, au
contraire, est pleine de signification. Il met en lumière des choix de
société, il oriente le cours de l'histoire d'un groupe humain, il
propose en quelque sorte une vision de l'avenir. En superposant, sur l'ensemble
du territoire du Québec, des commissions scolaires francophones et des
commissions scolaires anglophones, le gouvernement institutionnalise la
parité entre la majorité francophone et ia minorité
anglophone.
À l'occasion de l'entente constitutionnelle du lac Meech le 3
juin dernier, le gouvernement n'a pas voulu définir ce qu'il entendait
par société distincte. Plusieurs intervenants et intervenantes,
et non les moindres, ont appuyé cette approche jugeant que ce
qualificatif renvoyait de toute évidence au caractère
français du Québec. Avec le projet de loi 107, le
législateur envoie un tout autre message aux tribunaux: le Québec
n'est pas une société, mais la juxtaposition de deux
sociétés. Le Québec n'est pas distinct par son
caractère français, mais par sa dualité linguistique.
Après la loi 142 sur les services de santé en anglais et l'actuel
projet de loi 107, quelle sera la prochaine demande des leaders anglophones et
le prochain pas du gouvernement vers la bilinguisation du Québec?
Au lieu d'inviter la minorité anglophone à
s'intégrer à la société québécoise et
à collaborer à une même mission éducative, le
gouvernement l'invite à se ghettoïser davantage par le moyen de ses
structures. Il institutionnalise, au niveau d'organismes qui font partie de
l'administration publique québécoise et qui devraient
refléter le caractère français de celle-ci, une sorte de
séparatisme linguistique. De plus, en substituant le chevauchement
linguistique au chevauchement confessionnel, le gouvernement ne diminue
guère les sommes d'argent injectées dans la structure
administrative. Sans compter qu'avec les articles 107 et 109 qui maintiennent
les commissions scolaires confessionnelles et les commissions scolaires
dissidentes protégées par l'Acte de l'Amérique du Nord
britannique certaines portions importantes du territoire
québécois abriteront
quatre commissions scolaires superposées. Or, les crédits
disponibles ne sont pas illimités. Ce qui est consacré au
fonctionnement d'un système dédoublé sera
inévitablement soustrait au budget des interventions
pédagogiques.
Le projet de loi provoquera, à notre sens, des tiraillements et
aussi des embrouilles. Comment, en effet, s'y retrouver dans un processus
électoral qui doit tenir compte de la superposition de quatre
structures? On a déjà de ia difficulté à
confectionner une liste électorale convenable, alors que n'interviennent
que deux structures superposées. Imaginons le scénario quand il
faudra demander à chaque citoyen s'il désire voter pour la
commission scolaire francophone ou anglophone ou encore catholique ou
protestante. Sans oublier la difficulté d'aiguiller tout le monde vers
le bon bureau de vote.
Pour nous, donc, à la lumière de toutes les autres
objections contenues jusqu'à la page 10 de notre mémoire et trop
brièvement résumées, la solution, c'est l'unification. Les
commissions scolaires unifiées, c'est la solution qui a
été retenue par la Commission royale d'enquête sur
l'enseignement dans la province de Québec, présidée par
Mgr Alphonse-Marie Parent. Cette commission d'enquête, composée de
francophones et d'anglophones, ne peut certainement pas être
accusée d'avoir été insensible aux exigences de la
pluralité de la société québécoise et aux
préoccupations des minorités. La plupart des arguments auxquels
elle a eu recours pour justifier son choix n'ont pas vieilli, comme, par
exemple, l'utilisation rationnelle et intégrée des ressources
humaines et matérielles en vue d'assurer les meilleurs services possible
ou encore les avantages pédagogiques du pluralisme culturel.
Il semble, à Sire les sondages effectués depuis la
publication du rapport Parent, que le bon sens populaire ait rejoint les
conclusions de ce rapport et ait penché jusqu'à présent
pour les commissions scolaires unifiées. Je iaisserai le soin à
M. Légaré d'élaborer davantage, tant pour la
communauté francophone qu'anglophone, sur les avantages de la mise sur
pied d'un tel type de commission scolaire.
J'ajouterai qu'avec le projet de loi 107 l'histoire du
réaménagement de notre structure scolaire déjà
passablement surchargée risque de devenir un véritable
psychodrame social. Il faudrait, une fois pour toutes, se rendre à
l'évidence. Dans le domaine de l'éducation, qui est pourtant de
juridiction provinciale et qui est extrêmement vital pour la
préservation et le développement de son caractère
distinct, le Québec ne possède pas les pleins pouvoirs. C'est
là le coeur du problème et c'est donc par là, à
notre sens, qu'il faut commencer. Agir autrement ne fait que compliquer la
situation et la rendre inextricable.
La voie à suivre s'impose d'elle-même. Il faut d'abord
scinder en deux le projet de Soi 107, séparer la question des structures
du rôle des usagers et adopter cette dernière partie pour ne pas
retarder indûment les correctifs qui doivent être apportés
à la loi actuelle. Il faut ensuite enclencher immédiatement soit
des négociations constitutionnelles, soit des procédures
judiciaires pour rapatrier les pleins pouvoirs du Québec en
matière d'éducation. C'est alors seulement qu'on pourra
instaurer, sur tout le territoire, une structure qui soit adaptée
à la réalité du Québec d'aujourd'hui, une structure
compatible avec le projet de société que nous voulons et conforme
aux exigences d'une saine gestion des fonds publics.
Notre réflexion ne s'est pas limitée au domaine des
structures scolaires. La démocratie constitue l'autre assise d'un
système d'éducation qui se veut vraiment public. Les deux projets
de loi déposés nous inspirent des commentaires à ce sujet.
Ces commentaires sont contenus dans notre mémoire, aux pages 15 à
29. Vu le peu de temps qui m'est imparti, je n'en extirperai que quelques
bribes sur ce qui nous apparaît être des progrès notables
mais également des reculs significatifs.
Avec le projet de loi 106, le législateur comble enfin des
lacunes importantes qui hypothéquaient gravement le processus
électoral du système scolaire. Avec la reconnaissance officielle
des équipes, le remboursement des dépenses liées aux
campagnes électorales et le vote par anticipation, le législateur
reconnaît enfin l'importance de la démocratie dans le monde
scolaire et lui accorde presque les mêmes chances que sur le plan
municipal.
Le projet de loi 107 propose également quelques
améliorations qui seront, à notre avis, de nature à
stimuler l'intérêt des citoyens entre les élections et les
aideront à mieux comprendre le rôle des commissaires. Ainsi,
l'article 149 instaure une période de questions réservée
au public lors des réunions du conseil des commissaires et l'article 365
stipule que les projets de règlements adoptés par ies
commissaires doivent faire l'objet d'un avis public.
Comment comprendre qu'au moment où le législateur accepte
enfin d'investir plus d'argent dans le processus électoral il retire en
même temps quelques-uns des pouvoirs des commissions scolaires? N'est-il
pas alors justifié de se demander: À quoi bon se présenter
aux élections, à quoi bon aller voter si le pouvoir
conféré aux élus correspond à si peu de chose?
Comme l'écrivait l'éditorialiste Jean-Guy Dubuc dans La Presse,
édition du 16 février 1988: "Les commissions scolaires vont
finalement retenir si peu de pouvoirs qu'il ne faudra pas être surpris de
ne voir qu'une poignée de gens intéressés à y
participer ou même à voter pour des représentants
fantômes."
Également, quelques autres précisions. Si nous
interprétons bien la formulation compliquée de l'article 9 du
projet de loi 106, le législateur propose d'établir, nonobstant
son abrogation éventuelle selon l'article 518 du projet de loi
107, dans les commissions scolaires confessionnelles et dissidentes des
circonscriptions supplémentaires pour la minorité linguistique
là où le nombre le justifie.
Disons en premier lieu que pour nous il est tout à fait
inacceptable que le législateur identifie les élèves
francophones par l'expression "non admissibles à recevoir l'enseignement
en anglais". Les élèves francophones font partie de la
majorité québécoise dont les droits linguistiques sont
assurés, et ils n'ont pas à être définis
autrement.
Par rapport à la Charte de la langue française et au
caractère distinct, c'est-à-dire francophone - c'est ce que nous
imaginons - de la société québécoise, il s'agit
d'un glissement de nature grave dont le sens est inquiétant s'il est
révélateur de la pensée gouvernementale.
Si vous le permettez, un paragraphe sur la diversité religieuse.
Pour répondre de façon démocratique aux exigences de la
nouvelle réalité, le législateur a procédé,
au cours des dernières années, à plusieurs modifications
du régime pédagogique. Il a d'abord instauré le droit
à l'exemption pour le remplacer ensuite par le libre choix entre
l'enseignement moral et religieux et l'enseignement moral. (12 heures)
Avec le projet de loi 107, le gouvernement propose de faire un pas de
plus en permettant l'enseignement moral et religieux d'une confession autre que
catholique ou protestante. Ce geste témoigne apparemment d'une grande
ouverture d'esprit. En réalité, nous croyons que le gouvernement
fait preuve d'irréalisme. Comment peut-il songer à introduire
d'autres religions quand, dans bien des écoles catholiques, les
élèves ont encore de la difficulté à obtenir un
cours de morale de qualité et quand le projet de loi lui-même ne
leur reconnaît pas encore le droit d'avoir, eux aussi, des services
d'animation spirituelle non confessionnelle? Nous croyons que, avec le libre
choix entre l'enseignement religieux - catholique - et protestant, et
l'enseignement moral dans chaque école, le législateur a atteint,
pour le moment, un équilibre satisfaisant entre notre passé
religieux monolithique et notre avenir pluraliste.
Je termine avec la conclusion. L'organisation de notre système
scolaire préoccupe la société québécoise
depuis plus d'un quart de siècle. Que le gouvernement cherche, une fois
de plus, à proposer une solution est une entreprise louable à
laquelle nous souscrivons entièrement. En particulier, la
Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal trouve que c'est
une excellente chose de vouloir simplifier l'actuelle Loi sur l'instruction
publique et lui donner une cohérence centrée sur
l'élève. Nous avons souligné au passage les
améliorations qu'apportent les projets de loi 106 et 107. Mais,
malgré ces éléments positifs, nous avons exprimé de
fortes réserves sur certaines orientations majeures qui y sont
proposées.
En résumé et de façon concise, presque lapidaire,
la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal
considère que le gouvernement met directement en cause le
caractère fondamental francophone de la société
québécoise en établissant des commissions scolaires
anglophones sur l'ensemble du territoire québécois; que le
gouvernement ne rend pas justice aux droits et aux responsabilités des
parents, considérés pourtant par la société
québécoise comme les premiers responsables de l'éducation
de leurs enfants; que le gouvernement fait preuve d'incohérence en
améliorant, d'une part, les modalités du suffrage universel et en
grugeant, d'autre part, les pouvoirs des gouvernements scolaires locaux; et,
finalement, que le gouvernement se lance dans une véritable fuite en
avant avec la solution multiconfessionnelle qu'il offre en réponse
à la diversité religieuse qui constitue de plus en plus la
réalité des écoles du Québec et surtout de la
région métropolitaine.
Si vous le permettez, je demanderai maintenant à M.
Légaré d'ajouter quelques commentaires à ce qui a
déjà été dit.
M. Légaré (Pierre): M. le Président, nous
avons pris connaissance des communiqués de presse et des autres
documents remis aux médias à l'occasion du dépôt des
projets de loi 106 et 107 à l'Assemblée nationale le 15
décembre 1987. Nous avons également lu plusieurs articles de
journaux relatant les travaux de votre commission depuis le début du
mois. Nous avons même parcouru quelques mémoires qui vous ont
été présentés et qui se disent d'accord avec les
commissions scolaires linguistiques. Nous pensions pouvoir apprendre enfin
pourquoi vraiment on privilégiait la structure linguistique et ainsi
pouvoir confronter notre position avec la leur. Ce fut peine perdue parce qu'en
somme tout ce que nous avons retenu peut se résumer par la phrase
suivante: II faut à tout prix déconfessionnaliser les structures
et les commissions scolaires linguistiques conviendraient mieux au pluralisme
actuel de la société québécoise.
Cette argumentation, vous l'admettrez, est plutôt mince. C'est
assez étonnant qu'on invoque le pluralisme pour consacrer la
dualité linguistique. C'est d'autant plus étonnant quand on sait
qu'un des antonymes de pluralisme, d'après le Petit Robert, c'est
justement le dualisme. Quant à nous, c'est précisément au
nom de ce pluralisme que nous disons que les éléments de
diversité doivent être pondérés par des
éléments assurant l'unité de l'ensemble. Voilà en
peu de mots pourquoi nous privilégions les commissions scolaires
unifiées. Mais la Société Saint-Jean-Baptiste de
Montréal ne se contente pas d'énoncer de vagues
généralités. Elle vous dit en long et en large pourquoi
les commissions scolaires unifiées doivent remplacer les commissions
scolaires confessionnelles.
Demandons-nous maintenant pourquoi plusieurs organismes se disent
d'accord avec la
structure linguistique sans même en démontrer la logique.
C'est qu'ils ont cru à l'existence d'un consensus et qu'ils se sont dit:
Aussi bien s'y rallier par crainte que la déconfessionnalisation tant
souhaitée avorte encore une fois. Quant à nous, nous nous
refusons d'adopter Sa politique du moindre mal. Les jeunes
Québécois et Québécoises, quelles que soient leurs
différences, méritent plus que cela. Si nous n'y avions pas
regardé de plus près, qui sait, nous aurions peut-être,
nous aussi, risqué de tomber dans ce piège du prétendu
consensus en faveur de la structure linguistique.
À la page 11 de notre mémoire, nous citons les
résultats de six sondages effectués entre 1973 et 1983. Dans tous
les cas, sans exception, on y constate au moins une majorité relative en
faveur des commissions scolaires unifiées et, dans deux cas, dont l'un
sur l'île de Montréal où i! y a une forte concentration
d'anglophones et d'allophones, une majorité absolue.
Le consensus existe donc dans la population, mais il n'est pas celui
dont on nous rebat les oreilles depuis un certain temps. Il devient donc
évident que les prises de position et les déclarations des petits
et grands ténors de certaines classes régnantes - pour ne pas
dire "establishment" - qui ont des intérêts sinon des
privilèges à défendre sont à l'origine de ce
supposé consensus en faveur de la structure linguistique.
Regardons maintenant les avantages que nous voyons dans la structure que
nous préconisons. Quant à nous, la démocratie se
réalise plus pleinement lorsque les structures permettent à
chaque citoyen de s'intéresser activement à l'éducation de
chaque enfant, quels que soient la langue, la race, le pays d'origine, ia
nationalité ou les croyances religieuses de ce dernier. N'est-il pas
préférable, voire essentiel, que les Québécois et
Québécoises de toutes langues et de toutes convictions puissent
travailler ensemble à une même oeuvre d'éducation? La
commission scolaire unifiée permet aux deux communautés
linguistiques de travailler ensemble et d'avoir des échanges sur le plan
administratif et pédagogique. Les commissions scolaires unifiées
serviraient davantage la communauté anglophone puisqu'elles ne
risqueraient pas, à ia longue, d'accroître son isolement et sa
marginalité. C'est dans la commission scolaire unifiée que
l'objectif de la répartition équitable et économique des
ressources humaines et financières est le mieux respectée. La
nécessité de doubler ou même, dans certains cas, de tripler
ou de quadrupler certaines ressources sur un même territoire
disparaît. En d'autres mots, c'est la structure scolaire la moins
coûteuse, c'est celle qui permet le plus de ne pas détourner au
profit de l'appareil administratif les efforts financiers que le Québec
est prêt à consentir pour l'éducation. Les parents se
plaignent, à juste titre, que les élèves manquent de
manuels scolaires, de services professionnels et de bien d'autres choses. Pour-
quoi donc, si on le leur expliquait sérieusement, ne seraient-ils pas
d'accord avec la structure la moins coûteuse qui permettrait de
soustraire des sommes à un appareil administratif alourdi au profit des
élèves?
Les commissions scolaires unifiées seraient en mesure d'offrir
beaucoup plus facilement un apprentissage vivant et fonctionnel des langues
secondes. L'immersion ou le bain linguistique serait possible à
l'intérieur même de ces commissions scolaires contrairement aux
commissions scolaires linguistiques puisqu'on y trouverait des écoles
françaises, des écoles anglaises et un bon nombre d'enseignants
francophones et anglophones.
D'après les hypothèses de découpage, la superficie
de certaines commissions scolaires linguistiques en province,
particulièrement les anglophones, serait immense. Il faudrait parcourir
plusieurs centaines de kilomètres pour les traverser. Les primes
d'éloignement et de dispersion accordées par le ministère
aux commissions scolaires dont le territoire est très étendu
seraient alors inévitablement augmentées, et on sait que, chaque
année, ces primes coûtent au Trésor québécois
plus de 20 000 000 $. Avec la structure unifiée, le
phénomène contraire se produirait: on ferait, à ce
chapitre également, des économies au profit de services directs
aux élèves.
M. le Président, plutôt brièvement, voilà
pourquoi ia Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal croit
fermement que ce serait une grave erreur historique que de ne pas profiter de
cette restructuration pour créer des commissions scolaires
unifiées que nous considérons comme étant la structure la
plus adéquate pour atteindre une saine collaboration entre tous les
Québécois et toutes les Québécoises. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Paré): Alors, merci beaucoup pour
votre présentation. Maintenant, nous allons passer à la
période de discussions. La parole est au ministre de
l'Éducation.
M. Ryan: M. le Président, je remercie la
Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal d'être venue
présenter son point de vue devant la commission parlementaire. Je crois
que cette apparition témoigne d'un intérêt
renouvellé pour les questions d'éducation qui s'était
manifesté moins souvent au cours des dernières années, du
moins dans nos commissions parlementaires. Je ne me souviens pas,
peut-être ma mémoire me trahit-elle, que la société
Saint-Jean-Baptiste soit venue devant la commission parlementaire lorsque nous
étudiions les projets de loi 40 et 3. Je suis bien content que vous
soyez ici, ce matin, avec nous.
Il y a une chose que je voudrais signaler au départ. Je pense que
la présidente, Mme Bou-dreau, est du milieu de l'éducation; je
pense que nous partageons ensemble un souci commun, celui
de l'amélioration de la langue maternelle écrite et
parlée, dans nos écoles. Je suis heureux de signaler que le plan
d'action que nous diffusons depuis quelques semaines dans le Québec
reçoit un accueil formidable de la part des milieux de
l'éducation; je pense qu'il a déjà déclenché
et continuera de déclencher, au cours des mois à venir, des
initiatives pratiquement innombrables de la part des milieux de
l'éducation. Je pense qu'on a compris le sens de la démarche du
gouvernement. Nous avons voulu qu'au lieu d'être un plan imposé
d'en haut ce soit un plan qui propose l'action à partir d'en bas. Cette
dimension est très bien comprise et surtout très bien
acceptée dans les milieux de l'éducation. J'en suis ravi pour les
fruits qu'elle promet de livrer au cours des mois et même des
années à venir. Sur ce point, en tout cas, je pense qu'il y a une
communion de préoccupations réelle et profonde qui, pour moi, est
une source d'espoir.
Le principal élément de la position que vient
défendre la société Saint-Jean-Baptiste réside dans
le caractère qu'elle voudrait donner aux structures des commissions
scolaires. J'ai cru discerner l'influence de M. Légaré qui est un
vieux militant des questions scolaires et qui défend ce point de vue
depuis très longtemps. Je le félicite de sa constance.
La position que vous présentez, ce matin, implique un reproche
aux deux partis qui siègent à l'Assemblée nationale
actuellement, le Parti québécois qui avait fait adopter la loi 3,
laquelle instituait la formule des commissions scolaires linguistiques, et le
Parti libéral qui propose le projet de loi 107, lequel préconise
la même formule. Je voudrais simplement vous signaler que, tout en
trouvant cette formule éminemment respectable et digne d'attention, les
partis politiques ont été amenés à conclure que,
pour la phase prévisible de notre avenir, la formule des commissions
scolaires linguistiques serait mieux adaptée aux mentalités et
aux possibilités réelles de fonctionnement du système
scolaire. (12 h 15)
Vous avez cité des sondages. Je pense que vous me connaissez
assez pour savoir que ce n'est pas ma source de réflexion principale.
J'aime mieux regarder la réalité avec mes propres yeux, consulter
l'expérience vécue par mes concitoyens et en arriver à des
conclusions par le chemin de l'étude et de la réflexion.
Franchement, quand on regarde l'expérience concrète vécue
depuis plusieurs années au Québec, je ne pense pas qu'on puisse
envisager la possibilité de commissions scolaires unifiées dans
un avenir prévisible. Je n'exclus pas cette formule pour l'avenir, moi,
je la trouve personnellement la plus intéressante de toutes.
Dans l'immédiat, on voit déjà... Je suis un
représentant de la région des Laurentides à
l'Assemblée nationale et, dans le comté d'Argenteuil que je
représente plus immédiatement, nous avons une commission scolaire
catholique où il y a des élèves anglo-catholiques. Elle
n'avait pas les moyens de leur offrir tous les services, elle n'avait pas le
même intérêt, non plus. En pratique, elle a
décidé, il y a déjà plusieurs années, de
conclure une entente avec le Lauren-tian Protestant School Board pour que
celui-ci dispense l'enseignement aux élèves catholiques de langue
anglaise. Plusieurs sont venus nous dire en commission que, dans ces
écoles où cohabitent des catholiques, des protestants et des
élèves de langue anglaise d'autres allégeances morales ou
religieuses, cela fonctionne bien et constitue un milieu original.
Maintenant, une croisée des chemins se présente. Je
respecte votre point de vue, et je vous donne l'autre point de vue. M.
Légaré disait: On n'a pas expliqué pourquoi. Je pense
qu'ii est de mon devoir de répondre à votre question et d'essayer
de vous expliquer pourquoi on choisit plutôt des commissions scolaires
linguistiques. Il y a d'abord la question d'un réalisme politique. Nous
pensons que c'est la formule qui répond le mieux aux possibilités
concrètes de la société québécoise actuelle
et aux attentes des membres de chaque communauté. Deuxièmement,
en matière de droits linguistiques, nous avons une position
différente de celle de la Société Saint-Jean-Baptiste. Je
ne pense pas que j'annonce une hérésie en faisant cette
constatation. Nous croyons qu'il y a au Québec une communauté
anglophone; nous acceptons ce fait, nous n'essayons pas de le nier. Nous
disons: Le Québec est une société française. Le
caractère formel de la société québécoise,
c'est d'être une société française. À
l'intérieur de cette société, il y a une minorité
importante qui est la communauté anglophone. Nous reconnaissons à
cette minorité le droit à ses institutions dans les
matières fondamentales qui touchent à la culture et à la
langue, en particulier. Nous lui reconnaissons le droit à ses
hôpitaux, à ses services sociaux et également à ses
services éducatifs. Nous allons plus loin: Nous lui reconnaissons le
droit de diriger elle-même ses établissements éducatifs,
sociaux et sanitaires, comme nous voulons que ce droit soit reconnu à
nos minorités francophones dans les autres provinces du Canada. Cela ne
change en rien le caractère français de fa société
québécoise. C'est une de ses caractéristiques que cette
aptitude qu'elle manifeste à traiter avec respect et dignité les
droits de sa principale communauté minoritaire, surtout dans les
domaines où ses valeurs culturelles sont vitalement impliquées,
en particulier celui de l'éducation.
Alors, c'est ce que j'appellerais (a justification profonde qui
sous-tend la proposition majeure du projet de loi préconisant le
remplacement des commissions scolaires confessionnelles par des commissions
scolaires linguistiques. Je pense que ce sont deux raisons, en tout cas les
possibilités réelles. Et, deuxièmement, la position aussi,
du côté du Parti libéral, qui consiste à
reconnaître non seulement le droit à des services
mais aussi le droit de les diriger de manière que ce soient les
institutions de cette communauté-là et non pas simplement les
services qu'on lui offre toujours sous le contrôle immédiat d'une
majorité qui n'est pas la sienne. Cela élimine également
la possibilité de situations paradoxales qui pourraient surgir dans
certaines parties du territoire, où des commissions scolaires seraient
dominées par la minorité linguistique alors que le Québec
est d'abord français.
Alors, ce sont les considérations. On est prêt à
subir la contradiction et je souhaiterais vivement que nous soyons dans une
situation où le temps nous permettrait de discuter ces choses à
tête reposée et, si jamais il se créait un courant
d'opinions qui irait plutôt dans le sens de la proposition de !a
Société Saint-Jean-Baptiste, en provenance autant de la
communauté francophone que de la minorité anglophone, moi,
personnellement, je n'aurais aucune objection à examiner cette
possibilité. Mais nous devons conclure, hic at nunc, ici et maintenant,
que ce n'est pas une proposition qui est réalisable dans un avenir
prévisible. C'est notre réponse sur ce point-là. Et je
vous le dis en tout respect pour la position que vous présentez.
J'apprécie ce que le mémoire nous apporte au point de vue
du respect de la diversité religieuse dans les aménagements que
nous proposons. Ce n'est pas parfait, comme vous le signalez, mais
j'apprécie quand même que vous reconnaissiez la possibilité
qu'au niveau de l'école on puisse tenir compte des valeurs religieuses.
Vous le dites clairement dans votre mémoire. Il n'est pas toujours
absolument lumineux sur ces questions-là, à mon humble point de
vue, mais je sens quand même au fond une générosité
et un réalisme auxquels, personnellement, je veux souscrire.
Je vais vous poser deux questions, si vous me permettez, qui vont aller
au fond du problème sur d'autres aspects que vous soulevez. Vous dites
qu'il faudrait une modification constitutionnelle. De quel ordre serait-elle?
Qu'est-ce que vous voudriez mettre dans cette modification constitutionnelle?
Ce n'est pas clair dans ce que vous présentez. J'ai essayé de
savoir, de la part de la porte-parole de l'Opposition, ce que serait le contenu
de l'amendement constitutionnel qu'elle dit souhaiter vivement. Je n'ai pas
été capable d'obtenir de réponse jusqu'à
maintenant. Mais, puisque vous invoquez le même thème, est-ce que
vous pourriez nous dire quelle sorte d'amendement vous verriez là?
Mme Boudreau: M. le ministre, d'abord vous m'avez dit avoir deux
questions. Celle-ci est la première et je vais laisser M.
Légaré y répondre. Par ailleurs, avant de céder la
parole à mon collègue, je vous rappellerai simplement que la
Société Saint-Jean-Baptiste a effectivement déposé
un mémoire en 1984, je crois...
Une voix: En janvier 1984.
Mme Boudreau:... lors de la tenue de la commission parlementaire
qui avait été convoquée sur cette très importante
question.
M. Ryan: Est-ce que vous défendiez alors la même
position?
Mme Boudreau: Oui. M. Ryan: Merci.
Mme Boudreau: Donc, sur cette très importante question de
l'éducation, dans un premier temps. Et je vous dirai, M. le ministre,
qu'il y a un avantage et un inconvénient à être une
société nationale populaire. L'avantage, évidemment, c'est
que, dans notre champ, n'intervient jamais aucune perspective
électoraliste. Les sondages ne sont pas - et je suis heureuse de
constater que c'est la même chose pour vous - notre principale source de
référence. L'inconvénient, c'est que, ou bien nous
devançons la population, ou bien encore nous défendons des
positions qui ne sont pas nécessairement des positions populaires, mais
qui nous semblent représenter les intérêts fondamentaux de
la nation, pour utiliser un langage grandiloquent.
Avant de céder la parole à M. Légaré, il y a
simplement une des choses que vous avez dites que j'aimerais souligner,
concernant votre respect de la communauté anglophone qui, croyez-le
bien, est amplement partagé par notre société. Je vous
rappellerai qu'à la page 12 de notre mémoire, un paragraphe
spécifique dit: "Les commissions scolaires unifiées ne privent
pas les anglophones de leurs institutions scolaires: les écoles
anglaises demeureront et les élèves continueront de recevoir les
services éducatifs dans leur langue. À titre d'exemple, à
l'intérieur du secteur catholique, la Commission des écoles
catholiques de Montréal fonctionne déjà selon une certaine
forme d'unification. L'unification de la structure administrative n'interdit
pas l'existence de services propres à la clientèle anglophone.
Par exemple, à la CECM, le secteur anglophone possède, avec son
service des ressources auxiliaires, toute l'autonomie et l'autorité
requises pour administrer ses écoles selon ses besoins. "
Je vous cite un dernier paragraphe de notre mémoire qui illustre,
je pense, toute notre ouverture vis-à-vis de la communauté
anglophone. "Il serait toutefois normal de retrouver une direction des
écoles anglaises au niveau du ministère de l'Éducation,
là où se prennent les décisions concernant la nature et la
qualité de l'éducation dispensée aux enfants. C'est en
effet le MEQ qui contrôle l'essentiel des programmes, du financement et
des critères relatifs aux permis d'enseigner. Si, en plus d'avoir la
gestion de ses écoles, la communauté anglophone voit ses
intérêts protégés au plus haut niveau, elle n'aura
aucune raison de s'inquiéter. "
Cela dit, je cede la parole, pour la réponse, à mon
collègue, M. Légaré.
M. Légaré: M. le Président, pour
répondre à la dernière question de M. le ministre, ce que
nous souhaitons comme modification constitutionnelle, dans notre
mémoire, quelque part, on dit justement que la modification
constitutionnelle, ce serait de rapatrier au Québec tous les pouvoirs
dans le domaine de l'éducation. À ce moment-là, les
contraintes constitutionnelles n'existeraient plus et le Québec pourrait
procéder à une restructuration selon ses besoins et selon l'avis
de la population, et non seulement selon l'avis de certains
"establishments11 lesquels, je le répète comme je l'ai
dit plus tôt, ont des privilèges et des intérêts
à défendre.
J'aimerais réagir également aux commentaires de M. le
ministre qui disait que, dans l'immédiat, pour lui, il semblait plus
réaliste de créer des commissions scolaires linguistiques.
J'aimerais, M. le Président, lui faire remarquer qu'on ne change pas les
structures de façon aussi profonde tous les ans, tous les cinq ans ou
tous les dix ans. Sur l'île de Montréal, si je ne m'abuse, cela
fait presque un siècle et demi et peut-être même davantage
qu'existent des commissions scolaires confessionnelles. Est-ce que nous aurons
des commissions scolaires linguistiques pour les 150 ans à venir? Je ne
pense pas qu'un tel changement soit un pas vers ce que le ministre qualifiait
peut-être lui-même, en d'autres mots, la structure idéale.
Je pense que c'est plutôt un pas en arrière, dans le sens que la
commission scolaire unifiée, si on ne profite pas de l'occasion de la
créer, ne sera pas pour demain.
M. le ministre faisait aussi allusion à certaines ententes prises
dans son comté par les anglo-catholiques pour obtenir les services de la
commission scolaire protestante, si je ne m'abuse. Je lui ferai remarquer que,
tout autant que dans les commissions scolaires linguistiques, les commissions
scolaires unifiées feront en sorte que ces ententes seront
facilitées ou ne seront peut-être même plus
nécessaires puisque cohabiteront, dans les commissions scolaires
unifiées, et les anglo-catholiques et les anglo-protestants.
M. le ministre disait également qu'il respecte le droit de la
minorité d'avoir son institution. Nous aussi, de la
Société Saint-Jean-Baptiste, respectons ce droit et Mme la
présidente vous a dit tantôt comment la commission scolaire
unifiée respecterait ce droit.
M. le ministre nous félicitait pour le respect que nous avons
manifesté dans notre mémoire à l'égard de la
diversité religieuse. Je lui ferai remarquer que la diversité
religieuse, d'après le projet de loi 107, ne se situera pas dans les
structures mais elle se situera au niveau des commissions scolaires et surtout
des écoles. Quant à nous, le respect de la diversité
religieuse aussi se ferait et se vivrait dans les écoles.
Si vous me le permettez, M. le Président, j'aimerais
maintenant... Même si je souhaitais l'éviter, je pense que je ne
pourrais l'éviter. Personnellement, j'ai siégé quatre ans
à la Commission des écoles catholiques de Montréal et
également, Mme !a présidente vous l'a dit plus tôt, au
Conseil scolaire de I'île. Surtout à la Commission des
écoles catholiques de Montréal, j'ai eu l'immense avantage de
siéger avec des anglo-catholiques, avec des anglophones. C'était
pour moi un avantage précieux. Je pense que cela l'était aussi
pour les anglophones, d'oeuvrer avec les francophones. Nous pouvions
échanger sur nos projets. Nous pouvions enrichir nos projets face
à certaines suggestions des autres. Selon quel principe voudrait-on
maintenant priver les deux communautés linguistiques de cette saine
collaboration dans les structures scolaires? Je vous avoue que je ne puis faire
autrement que vous dire que cela me semble tout à fait aberrant. (12 h
30)
C'est un gouvernement qui tente, semble-t-il
désespérément, de trouver des solutions miracles pour que
- et je ne dirai pas si c'est avec succès ou non; ce n'est pas l'objet
de notre démarche aujourd'hui - vivent dans la plus grande harmonie les
deux communautés linguistiques. Je n'apprendrai rien à personne
en disant que c'est la méconnaissance ou la non-connaissance des autres
qui engendre et qui perpétue les préjugés. Ce n'est pas en
ghettoïsant la minorité linguistique, en ne lui permettant pas
d'avoir des contacts fréquents avec la majorité linguistique que
nous parviendrons à mieux nous connaître et à bien nous
connaître.
Le Président (M. Paré): Merci. Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Mme la
présidente et messieurs, c'est avec plaisir que je vous accueille au nom
de l'Opposition à cette commission parlementaire. Je pense qu'il
était important que vous rappeliez au ministre le fait que vous avez
déjà participé aux commissions touchant la réforme
de la Loi sur l'instruction publique à l'occasion des projets de loi 40
et 3. Il est toujours un peu dangereux que de vouloir laisser paraître
que l'intérêt de la Société Saint-Jean-Baptiste
à l'endroit de l'éducation n'est présent qu'au moment
où le Parti libéral est au pouvoir. C'est un peu ce que cela
sous-entendait et je pense que vous aviez raison de trouver utile de corriger
l'affirmation du ministre.
Comme j'ai eu l'occasion de le dire tout à l'heure pour le groupe
qui vous a précédés, la Commission des droits de la
personne, votre mémoire déborde la question des structures pour
aborder celle de la participation, de la qualité et de
l'accessibilité. Je vous le dis, c'est probablement cet
élément qui a retenu beaucoup aussi
mon attention parce que, malheureusement, les débats qu'on a ici
en commission parlementaire sont des débats de structure. Je serais
curieuse de voir et d'être en mesure d'évaluer ce que ceia aura
donné sur la qualité de l'éducation dans deux, trois, cinq
ou six ans. Ce qu'il faut se dire, c'est autant il est vrai que la Loi sur
l'instruction publique est dépassée à !a fois en regard de
sa structure et en regard également du partage des pouvoirs, des
responsabilités et de la définition des services, autant au cours
des années on a réussi à fonctionner avec cette loi en
assurant au maximum l'équité, au moins l'accessibilité
à des services à peu près égaux dans toutes les
régions du Québec. La loi qu'on a sur la table risque, de toute
façon, de ne pas être appliquée si la PSBGM obtient gain de
cause dans sa contestation de la loi, laquelle nous a déjà
d'ailleurs annoncée. Dans les faits, je pense que cela a peu de chances
de modifier la situation actuelle.
La loi 3, cependant, faisait au gouvernement un certain nombre
d'obligations en ce qui touchait la qualité, l'équité et
l'accessibilité. C'est ce qu'on ne retrouve plus dans le présent
projet de loi.
Le ministre m'a interpellée à quelques reprises, et je
pense que c'est important de lui répondre sur cela. Il dit: La
députée de Chicoutimi nous dit que la seule façon de
résoudre ce problème, c'est de négocier 93. Je maintiens
que c'est de négocier 93. Comme le gouvernement ne nous a pas
consultés pour écrire sa proposition de négociation
constitutionnelle, je ne vois pas pourquoi je serais en train de !ui
écrire la proposition qu'il entendrait faire à l'occasion d'une
négociation touchant l'article 93.
M. Ryan: Vous n'avez rien à dire sur cela.
Mme Blackburn: Bien!
M. Ryan: Vous n'avez rien à dire sur cela.
Mme Blackburn: Alors donc, je pense que le ministre le
reconnaît. S'il ne nous a pas consultés sur les autres
éléments, je ne vois pas pourquoi je serais en train de lui faire
son travail. C'est lui qui est ministre, que je sache. Il l'est
déjà depuis deux ans et demi. Chaque fois qu'il est un peu aux
prises avec une difficulté, c'est toujours le gouvernement
précédent. Je me demande toujours quand ce gouvernement va
prendre le pouvoir. Que le ministre ne s'attende pas à ce que je !ui
tienne !a main et que je lui dise: Écoutez, il faudrait qu'on fasse ceci
et cela. Cependant, cela m'inquiète, parce que le premier ministre s'est
engagé, lui, à aller négocier. Je voudrais voir sa
proposition. Le ministre a également dit: Si on a un échec dans
cela, on ira négocier. Je voudrais voir la proposition du ministre.
Est-ce que dans sa proposition on va retrouver l'essentiel de ce qu'on retrouve
dans le projet de loi? Si tel est le cas, je trouverais extrêmement
inquiétant qu'on ne puisse pas aller plus loin que cela.
Le projet de loi 3, avec toutes ses imperfections, nous le
reconnaissons, avait à tout le moins tenté de limiter les
dégâts, si vous me passez l'expression, en disant: Au moins,
essayons de réduire les territoires des commissions scolaires
protégés en vertu de l'article 93. Je ne dis pas que
c'était parfait, je ne l'ai jamais prétendu. Cependant,
c'était de loin préférable à ce qu'on retrouve dans
le présent projet de loi qui n'est, à mon avis, qu'une fuite en
avant. Je ne suis pas loin de penser que l'opinion émise par la PSBGM
cette semaine ici, en commission parlementaire, fait, en quelque sorte,
l'affaire du ministre parce que je ne suis pas certaine qu'il avait le
goût et vraiment l'intention de réformer les structures scolaires.
Cela va lui donner tout à fait l'argument qu'il fallait pour ne pas
procéder là-dedans. On attendra et, pendant qu'on attend, les
situations se détériorent.
En page 8, vous avez parlé de la réforme scolaire,
particulièrement sur l'île de Montréal, et des
problèmes que poserait la superposition de quatre commissions scolaires.
Il faut savoir que quatre commissions scolaires pourraient donner six secteurs:
les protestantes et les catholiques ont déjà deux secteurs; si
vous aviez les linguistiques, cela vous donnerait, en fait, comme six
commissions scolaires. Alors, je souhaite bonne chance à ceux qui auront
à choisir, pour leurs enfants, dans quelle école ils vont vouloir
les envoyer. Je souhaite également bonne chance aux parents qui vont
vouloir voter.
Une voix:...
Mme Blackburn: On pourrait peut-être le faire après
la commission, mais brièvement, si vous avez une commission scolaire
française, une anglaise, vous gardez la protestante anglaise avec un
secteur français, et la CECM qui a aussi un secteur anglais, cela vous
donne six secteurs.
Une voix: Oui, oui.
Mme Blackburn: Refaites le compte. Pour un parent catholique qui
doit envoyer son enfant à l'école française, cela lui
donne le droit de l'envoyer à la commission scolaire protestante,
secteur français; cela lui donne le droit de l'envoyer à la
commission scolaire iinguistique française; cela lui donne le droit de
l'envoyer à la commission scolaire catholique. C'est cela le choix que
les parents, sur le territoire de la CECM, auront tantôt, parce que le
choix se fait sur la base de la langue.
Vous dites que ce serait évidemment un nid de chicanes et
d'embrouilles. Vous soulevez un certain nombre de difficultés qui sont
réelles, qui ne sont pas imaginaires, comme veut souvent le
laisser croire le ministre.
Vous abordez également toute la question des droits et des
pouvoirs du ministre. C'est la question que je lui pose depuis le début.
S'il est en train de miner de telle manière les pouvoirs des commissions
scolaires, faut-il conserver les commissions scolaires? Je pense que la
question se pose. Les commissions scolaires se trouvent vidées de leurs
pouvoirs. Ce qu'on retrouve dans votre mémoire, je pense, traduit bien
cette réalité. Vous vous dites: Comment le ministre peut-il, en
même temps qu'il est en train de vider de leurs pouvoirs les commissions
scolaires, proposer un projet de loi qui favorise la participation des parents
ou des citoyens aux élections scolaires? À quoi cela sert-il
d'avoir une plus grande participation si les gens qu'on élit,
finalement, n'ont pas de pouvoir?
Le projet de loi constitue un recul majeur quant à ces questions.
Pour répondre au ministre qui me dit toujours que les commissions
scolaires ont un pouvoir très grand, qu'elles engagent le personnel,
donnent l'enseignement et gèrent un parc immobilier, etc., j'ai
commencé à comparer quels étaient les pouvoirs en vertu
des règles et des politiques administratives des commissions scolaires,
des hôpitaux et des collèges. En gros, je pense qu'il n'y a pas
beaucoup de différence. La différence, c'est qu'on ne se croit
pas obligés, dans les collèges et dans les établissements
de santé, de faire élire un conseil d'administration par suffrage
universel.
Je ne voudrais pas que mon propos soit interprété comme
étant une volonté de voir abolir les commissions scolaires. Je
veux être claire là-dessus. Je crois fondamentalement qu'il faut
aller dans le sens de la décentralisation et non de la centralisation.
Cela a toujours été ma conviction la plus intime et la plus
profonde. Je suis née dans une région, j'y ai travaillé.
J'habite dans une autre région depuis 25 ans et j'ai toujours ressenti
ce sentiment de frustration devant le manque de confiance que les structures
gouvernementales ont à l'endroit des gens qui sont dans l'action. Je
pense que ce n'est pas la bonne direction et, là-dessus, je partage tout
à fait votre avis.
Vous dites que la consultation actuelle ne retient pas i'attention
autant qu'on le souhaiterait. Je partage tout à fait votre avis. Vous
dites que le gouvernement devrait procéder là-dessus à une
consultation plus large. C'est en page 24 de votre mémoire. Vous dites,
en parlant de la modernisation de la démocratie scolaire: "Si le
gouvernement trouve cette mainmise justifiée - en parlant des pouvoirs -
du fait qu'il finance à plus de 90 % les commissions scolaires, il
devrait soumettre sa vision des choses à la discussion publique." Quelle
forme pourrait prendre une telle consultation?
M. Légaré: Je m'excuse. Voulez-vous
répéter la question, s'il vous plaît?
Mme Blackburn: Vous dites que l'actuel débat en commission
parlementaire n'a pas cette espèce de visibilité, ne rejoint pas
suffisamment les gens, d'après ce que je crois comprendre dans votre
mémoire, et que, si le ministre veut s'arroger de plus en plus de
pouvoirs du fait qu'il paie 90 % du budget de fonctionnement des commissions
scolaires, il devrait soumettre sa vision des choses à la discussion
publique. C'est en page 24 de votre mémoire. Quel aspect devrait prendre
cette discussion, ces échanges ou cette consultation? Est-ce que cette
consultation devrait toucher l'ensemble du projet de loi?
M. Légaré: Remarquez que nous ne nous sommes pas
penchés sur les modalités de cette consultation. J'ai presque le
goût de dire à Mme la députée de Chicoutimi ce
qu'elle disait à l'intention du ministre tout à l'heure, face
à la constitution. C'est le gouvernement qui a les moyens et les
ressources pour établir les modalités d'une consultation. Nous
laissons au gouvernement le soin de choisir les modalités les plus
adéquates.
Le Président (M. Paré): Mme la
députée de Chicoutimi.
M. Légaré: Excusez-moi, M. le Président,
mais est-ce que je peux réagir sur autre chose?
Mme Blackburn: Oui, je vous en prie. Le Président (M.
Paré): Oui, d'accord.
M. Légaré: II est bien évident que nous
avons constaté, cela sautait aux yeux, que les commissions scolaires et
les parents perdaient certains pouvoirs, pour ne pas dire plus, et que le
ministre, évidemment, se donnait plus de pouvoirs qu'il n'en avait
auparavant. En comparant le projet de loi 107 et la Loi sur l'instruction
publique actueile, nous avons tenté de faire l'énumération
de ces pouvoirs perdus ou gagnés de part et d'autre. Comme nous ne
possédons pas les ressources ni du gouvernement ni de l'Opposition, et
que c'était presque un travail de bénédictin, nous y avons
renoncé. Mais, à la lecture du projet de loi 107, il était
tout à fait évident que les pouvoirs étaient perdus par
les commissions scolaires. Quant aux parents, il était plus facile de
faire la comparaison puisqu'ils n'ont jamais eu beaucoup de pouvoirs.
Le Président (M. Paré): Merci. En conclusion, Mme
la cjéputée.
Mme Blackburn: J'ajouterais, en conclusion, qu'en ce qui concerne
les commissions scolaires unifiées il y a comme une proposition qui nous
a été faite ici, en commission parlementaire, par les commissions
scolaires South Shore et Lakeshore, si je me souviens bien. Elles pensent
à une commission scolaire unifiée dans le sens que,
gérée par des anglophones, elle accueillerait de plus en plus
d'étudiants francophones. (12 h 45)
À la page 23 de votre mémoire, vous avez aussi
attiré notre attention - ce que je n'avais pas vu - sur le fait qu'on
fait disparaître, dans le présent projet de loi, l'obligation qui
serait faite aux commissions scolaires de rendre compte à la population
de la qualité des services offerts, de l'administration des
écoles et de l'utilisation des ressources. C'est vrai que cela se
justifie mat dans le débat actuel, dans la prespective où l'on
parle ici de gouvernement élu. Ou c'est une erreur ou c'est un oubli ou
il y a quelque chose, mais c'est difficilement explicable. Je pense que cela
n'existe nulle part où vous élisez un gouvernement et où
vous ne lui faites pas obligation de rendre des comptes de sa gestion. Je ne
vois pas beaucoup cela ailleurs. Cela m'étonne. On aura certainement
l'occasion d'y revenir. Je vous remercie infiniment de votre participation
à cette commission parlementaire. On connaît votre
intérêt de toujours à la fois pour l'éducation et
pour la langue. Je souhaite que votre action porte fruit le plus rapidement
possible et, parfois il me prend l'envie d'ajouter "avant qu'il ne soit trop
tard". Je vous remercie.
Le Président (M. Paré): En conclusion, M. le
ministre.
M. Ryan: Je vous remercie des points de vue que vous avez
exprimés. Il y a peut-être une chose que nous allons examiner. Il
y aurait peut-être moyen de mettre dans ce projet de loi !a
possibilité que, sur requête conjointe de deux commissions
scolaires linguistiques d'un territoire, le gouvernement puisse former une
commission scolaire unifiée. Ceia pourrait peut-être ouvrir la
voie à des développements. Il y a des possibilités de ce
côté-là. On va l'étudier. Je ne ferme pas la porte
totalement à cette perspective pour laquelle, en principe, encore une
fois, j'éprouve beaucoup de respect.
Au point de vue de ia constitution, vous ne m'avez pas
éclairé beaucoup parce que, finalement, je pense que vous avez
réitéré de manière fort discrète la position
foncièrement souverainiste de la Société
Saint-Jean-Baptiste de Montréal. Si vous enlevez l'article 93, vous
allez enlever la charte des droits linguistiques, l'article 23 aussi, et tout
cela. Il ne restera plus rien comme garantie de droits au plan canadien. Je
respecte votre point de vue, mais je voudrais vous dire en toute franchise que
je ne le partage point. Je trouve que la réponse a été
sibylline de ce côté-là. J'en tire les conclusions
logiques, qui me semblent être ce que je viens d'énoncer. En
terminant, je signale que j'attends toujours des précisions quant
à la position du Parti québécois sur le contenu des
amendements constitutionnels qu'il dit souhaiter avec beaucoup de vigueur.
Je vous remercie infiniment et nous restons ouverts au dialogue sur les
points qui ont été soulevés ce matin.
Le Président (M. Paré): En conclusion, Mme la
présidente.
Mme Boudreau: En terminant, M. le Président, ma question
s'adressera à M. le ministre, s'il le permet. Ai-je bien entendu, M. le
ministre, que vous avez mentionné à la fin de votre
première intervention que, si vous sentiez un certain courant d'opinion
s'exprimer dans le sens de notre point de vue pour les commissions scolaires
unifiées, vous ne demanderiez pas mieux, finalement, que de
vérifier cette avenue? Ai-je bien entendu ceia?
M. Ryan: Oui, mais je vous dirai franchement que je n'entrevois
aucunement la possibilité que ceia se manifeste dans ia période
qui nous reste avant l'adoption du projet de loi.
Mme Boudreau: Alors, peut-être...
M. Ryan: Regardez, on fait une consultation publique. Il faut
être réalistes. Ce n'est pas une pétition de 500 000
personnes qui nous fera changer d'idée, je vous avertis d'avance. On
fait une consultation publique au cours de laquelle plus d'une centaine
d'organismes se sont déjà présentés ou vont se
présenter. Jusqu'à maintenant, le seul mémoire qui fasse
état de cette proposition, c'est celui de !a Société
Saint-Jean-Baptiste de Montréal.
Mme Boudreau: Alors, il va...
M. Ryan: Par conséquent, je pense que vous avez un travail
d'éducation à faire auprès de l'opinion, auquel je suis
prêt à participer dans la mesure des limites que m'imposera la
politique que présente le gouvernement dans le projet de loi. J'ai
donné tantôt une indication d'ouverture qui n'est pas
négligeable.
Mme Boudreau: il va de soi, M. le ministre, que nous ne songeons
nullement, rassurez-vous, à une autre pétition...
Une voix: Ha, ha, ha!
Mme Boudreau:... mais je ferais peut-être une toute petite
mise en garde, si vous me le permettez. Les courants d'idée s'expriment
très souvent dans les sondages d'opinion. Nous, à la
Société Saint-Jean-Baptiste, nous croyons fermement que le
gouvernement du Québec doit avoir un rôle de leader dans
l'éducation. Nous croyons également qu'il doit élaborer
des politiques à long terme.
Si vous le permettez, M. le ministre, à la toute fin de cette
intervention, je vous ferai une confidence. Dans tous ces mouvements amis qui
ont présenté des mémoires ici, prônant plus ou
moins les commissions scolaires linguistiques telles que vous les
préconisez, nous avons senti dans nos discussions personnelles une forme
de démission et d'abdication collectives vis-à-vis d'un processus
de commissions scolaires unifiées, ce qui n'est pas le cas de chaque
personne, d'un point de vue strictement personnel. Alors, vous avez raison, M.
le ministre, nous avons nous aussi un travail d'éducation à
faire. Je vous assure que, dès cet après-midi, nous nous y
mettrons très sérieusement. Merci.
Le Président (M. Paré): Au nom de tous les membres
de la commission, Mme Boudreau, M. Légaré et M. Prémont,
merci de votre présence en commission.
Là-dessus, les travaux sont ajournés sine die.
(Suspension de la séance à 12 h 50)
(Reprise à 15 h 38)
Le Président (M. Paré): Je déclare la
séance ouverte. Nous allons maintenant procéder à
l'audition des trois mémoires qui sont prévus pour cet
après-midi. J'invite immédiatement les gens de l'Association des
commissions scolaires de la région de
Laval-Laurentides-Lanaudière à prendre place à la table en
avant, s'il vous plaît.
Association des commissions scolaires de la
région de Laval-Laurentides-Lanaudière
Je vous souhaite la bienvenue, messieurs. Je veux seulement vous
expliquer très rapidement la façon de procéder. Comme nous
avons une heure, nous essaierons de répartir le temps à parts
égales: vingt minutes de présentation et, ensuite, vingt minutes
de chaque côté: du côté ministériel et du
côté de l'Opposition. Si vous dépassez un peu, cela va
couper le temps des échanges avec les membres de la commission
parlementaire. Je vous invite donc, M. le président, à
présenter la personne qui vous accompagne et, ensuite, à
procéder à la présentation de votre mémoire.
M. Clermont (Normand): M. Jean-Paul Vermette, directeur
général de l'Association des commissions scolaires de
Laval-Laurentides-Lanaudière, m'accompagne.
M. le Président, M. le ministre de l'Éducation, de
l'Enseignement supérieur et de la Science, mesdames et messieurs les
membres de la commission parlementaire, nous avons voulu nous prêter
à cet exercice de la prestation devant cette commission parlementaire
dans !e but de faire connaître explicitement nos vues et positions visant
à assurer la véritable dimension de la démocratie scolaire
au Québec et dans le but aussi, à l'égard de la loi 107,
de participer à l'harmonisation des principes d'égalité,
de justice et d'équité dans l'exécution des tâches
et responsabilités qui nous incombent, nous, les élus
scolaires.
Plus de 125 000 élèves seront directement concernés
dans ies douze commissions scolaires regroupées dans notre association
dont le territoire stratégique s'étend de Repentigny à
Lachute, dans son axe est-ouest, et de Laval à Mont-Laurier dans son axe
nord-sud, sans compter des dizaines d'élus et des milliers de parents,
par les orientations qui découleront de l'application des lois
106 et 107 et des amendements qui pourraient être issus de cette
consultation qui s'exprimera au sein de cette commission parlementaire.
Sur le projet de loi 106, de façon générale,
l'Association des commissions scolaires de la région de
Lavai-Laurentides-Lanaudière ne pose pas d'objections majeures à
l'ensemble législatif proposé. Tout au plus, les commissions
scolaires membres expriment-elles des réserves fondées,
croyons-nous, en ce qui a trait à plusieurs mécanismes
prévus dans ce projet de loi qui auraient pour effet d'imposer des
contraintes supplémentaires et inutiles dans l'administration du
processus de démocratie. Nos représentations concernent les
éléments sous-mentionnés au sujet des circonscriptions
électorales. À l'article 5, nous verrions que la division du
territoire en circonscriptions électorales se fasse entre le 31 mars et
le 30 juin de l'année où se tient l'élection en vue de
favoriser la réalisation optimale des étapes
subséquentes.
À l'article 6, nous verrions d'un meilleur oeil le fait que le
nombre de quartiers électoraux soit déterminé par le
nombre d'électeurs davantage que par le nombre d'élèves
inscrits.
Nous demandons le retrait de l'article 9 dont les dispositions
prévoient l'établissement de circonscriptions électorales
superposées, car il s'agit là, selon nous, d'une entorse
flagrante au principe même du suffrage universel si jalousement
défendu par nos divers paliers de gouvernement.
En ce qui concerne les électeurs, nous préconisons,
contrairement à ce qui est énoncé à l'article 20,
que le citoyen ne puisse voter que dans !a circonscription électorale
où il est domicilié ou là où il possède une
propriété foncière.
Concernant le personnel électoral, nous sommes convenus de
recommander que l'article 24 soit remanié de façon que chaque
commission scolaire ait la prérogative de désigner son
président d'élection plutôt que de déférer
cette tâche d'office au directeur général qui,
déjà, assume une tâche accaparante et lourde de
responsabilités.
En ce qui concerne la liste électorale, il nous apparaît
opportun de recommander aux instances concernées, en regard de l'article
41, l'institution d'une liste électorale permanente.
À l'article 46, nous recommandons, pour des raisons
d'efficacité, qu'une demande écrite en inscription, en radiation
ou en correction puisse
être déposée dans les dix jours ouvrables suivant
l'avis de dépôt de la liste électorale.
Également à l'article 47, nous recommandons que la date
à laquelle le conseil pourra examiner toute demande en inscription, en
radiation ou en correction soit fixée dans les quinze jours suivant
l'expiration du délai de la période de révision de la
liste électorale.
Candidatures 9t constitution d'équipes. En ce qui a trait
à la constitution d'équipes, les avis sont partagés et la
réflexion que nous nous permettons de commettre à haute voix
serait de laisser libre cours aux lois naturelles d'association d'influer sur
le milieu, sans pour autant légiférer.
Quant à la déclaration de candidature, il nous
apparaît incongru que cette déclaration doive être
accompagnée d'une pièce d'identité du candidat et d'une
déclaration signée par ceSui-ci. Nous préférons que
le pouvoir de vérification soit entièrement dévolu au
président ou secrétaire d'élection.
Nous préconisons le retrait de l'article 71 qui prévoit
qu'une nouvelle période de mise en candidature puisse être tenue
le second vendredi qui suit la fin d'une période de mise en candidature
qui n'aurait suscité aucune candidature. Nous pensons que cela constitue
une démarche supplémentaire vaine.
Vote par anticipation: À l'article 84, nous recommandons que,
dès que l'électeur est admis à voter par anticipation, le
secrétaire du bureau de vote ne soit tenu d'inscrire dans le registre
que les nom et prénom de l'électeur, ia liste des
électeurs comportant les autres données et étant incluse,
au surplus, dans l'urne avec le registre.
Opérations préalables au scrutin. Nous préconisons
de supprimer l'article 98, car déjà la procédure des
commissions scolaires détermine l'instrumentation des scrutateurs et des
greffiers d'élection, de même que la distribution des bulletins de
vote. S'il devait arriver que cette recommandation ne soit pas retenue, nous
accepterions un article 98 amendé qui fixerait à deux heures au
plus tard avant le scrutin la remise de l'instrumentation nécessaire au
scrutateur par le président d'élection.
À propos de la vérification du contenu de l'urne, nous
recommandons, à l'artide 101, de prévoir que le scrutateur, en
présence du secrétaire du bureau de vote, enlève le sceau,
puis ouvre l'urne et examine les documents s'y trouvant et le matériel
nécessaire au vote, en respectant les directives émises par le
président d'élection.
Nous nous interrogeons à savoir si, à l'article 107, le
fait de devoir inscrire l'âge et la profession de l'électeur
inscrit ne violerait pas les droits de la personne tels
qu'édictés par la charte québécoise des droits de
la personne.
Le recensement, tel que prévu par les articles 131 à 135
inclusivement, nous paraît être la négation de la
compétence des officiers d'élection, particulièrement
celle des scrutateurs.
Nous recommandons son abrogation au profit du maintien du statu quo. La
procédure usuelle fait, selon nous, ses preuves et satisfait les
attentes et des électeurs et des candidats qui, le soir même de
l'élection, tiennent à connaître les résultats du
scrutin. Là aussi, nous exprimons notre désaccord au chapitre du
nouveau dépouillement des votes, car l'article 147 tel que
libellé ne peut qu'entraîner une dépense
supplémentaire de fonds et d'énergie.
Nous recommandons que le président d'élection exerce son
droit de vote, comme le prévoit d'ailleurs l'actuel article 138 de la
Loi sur l'instruction publique.
Proclamation et contestation d'élection. La proclamation de
l'élection intervenant quatre jours après l'élection, il
nous paraît inadéquat, comme le propose l'article 151, de fixer la
date d'entrée en fonction au jour de cette proclamation car, à
notre avis, cela créerait un vide juridique inacceptable si,
évidemment, aucune demande de nouveau dépouillement n'a
été adressée dans le délai prévu. Nous
recommandons donc que la proclamation de l'élection soit faite le jour
même du scrutin afin de combler ce vide juridique. Il nous semblerait
tout aussi à propos de maintenir la procédure d'assermentation
pour les commissaires entrant en fonction.
Nous recommandons que l'article 152 soit plus explicite à
l'endroit du temps d'expiration des délais de contestation d'une
élection. De plus, nous recommandons que l'article 166 fixe une
période précise à l'intérieur de laquelle tout
électeur peut prétendre qu'il y a eu manoeuvres
électorales dilatoires ou frauduleuses, si celles-ci ont
été portées à sa connaissance après la
proclamation d'une élection. À défaut de quoi, le
président d'élection devra conserver indéfiniment tous les
documents relatifs à l'élection, ce qui conférerait
à son mandat un caractère de permanence injustifié.
Élection partielle. Compte tenu du fait qu'une élection
partielle nécessite toujours le recours à des ressources humaines
supplémentaires et à des mises de fonds imprévues, nous
recommandons que les articles 189 et 190 soient fondus indistinctement, de
manière à ce qu'une vacance à un poste de commissaire,
qu'elle soit pour moins ou pour plus de douze mois avant l'expiration d'un
mandat, puisse être comblée par une nomination du conseil des
commissaires, après consultation du milieu, dans le cadre d'une
procédure spécifique, telle qu'elle se pratique à i'heure
actuelle.
Nous favorisons, en ce qui a trait au remboursement des dépenses
électorales, selon la règle édictée par l'article
197, que tout candidat qui a recueilli au moins 20 % des voix exprimées
ou plus, ou qui a été élu sans opposition, ait droit au
remboursement de ses dépenses électorales.
Voilà, M. le Président, mesdames et messieurs, l'essentiel
de nos observations et de nos recommandations pour ce qui est de ce projet
de
loi 106 sur les élections scolaires. Il s'agit d'un point de vue
qui, de façon générale, a été exprimé
à la suite de l'atteinte de consensus et de l'expression d'une
volonté tantôt majoritaire, tantôt unanime de la
région de Laval-Lauren-tides-Lanaudière que nous avons le
privilège de représenter.
Au sujet de la loi 107, il faut sans détour l'avouer, certains
aspects du projet de loi 107 nous laissent pour le moins perplexes, dans la
mesure où certaines appréhensions bien assises nous laissent
entrevoir un alourdissement certain des processus administatifs qui
procéderaient d'une nette tendance à la centralisation, au
détriment des règles d'autonomie et d'intégrité
juridiques dont jouissent nos commissions scolaires, comme gouvernements
locaux, et des normes administratives serrées que nous nous sommes
données au fil des ans.
À l'article 5, concernant le choix de l'école, nous
estimons qu'il existe ici une nette opposition entre la question de principe et
la question de pratique qui en découle, lorsqu'il s'agit d'un choix
exercé en milieu urbain par rapport au même choix, mais
exercé celui-là en milieu rural. Nous recommandons
expressément que le libellé de cet article tienne compte de la
réalité des milieux ruraux, jusque-là ignorée, en
raison de contraintes économiques, physiques et géographiques
particulières.
Le conseil d'orientation. Sous réserve qu'il n'y ait pas
d'unanimité sur cette question dans les commissions scolaires membres,
nous reconnaissons qu'un tel conseil puisse être formé par la
commission scolaire pour chacune des écoles de son territoire, en tenant
compte cependant des particularités de chacune des écoles. Nous
jugeons incomplet l'article 56 et nous recommandons d'y inclure des
dispositions particulières qui pourraient assurer une participation
pleine et entière à ce même conseil à un commissaire
dont le quartier est dépourvu d'école.
Les commissions scolaires, chapitre IV. Une majorité de
commissions scolaires membres s'expriment en faveur du découpage du
territoire du Québec en commissions* scolaires francophones et en
commissions scolaires anglophones, mais après que la
constitutionnalité du projet aura été
vérifiée. Cependant, il nous serait impossible de passer sous
silence la très nette opposition de la commission scolaire des Manoirs
et particulièrement de la commission scolaire Chomedey de Laval qui
réclament le maintien du découpage du territoire en commissions
scolaires pour catholiques et en commissions scolaires pour protestants. La
position de la commission scolaire Chomedey de Laval repose sur deux arguments
principaux. D'une part, les commissaires sont d'avis qu'il faut maintenir son
statut actuel pour bénéficier des garanties de la constitution
canadienne. D'autre part, la majorité des commissaires a acquis la
conviction que le mandat qui leur a été confié suppose le
maintien de son caractère confessionnel catholique. Quant à la
commission scolaire Les Écores, elle nuance sa position en demandant que
le statut confessionnel d'une commission scolaire soit reconnu pour autant que
la majorité des écoles ait revendiqué la reconnaissance de
la confessionnal ité catholique.
À la lecture de l'article 125, nous répliquons que tous
les commissaires doivent être élus au suffrage universel. Nous
préconisons que les deux parents participent sans droit de vote au
conseil des commissaires car, selon nous, il ne peut y avoir deux poids deux
mesures puisqu'il nous apparaît essentiel de ne pas revaloriser la
démocratie scolaire en légiférant par ricochet sur le dos
de la démocratie telle qu'on la connaît. Contrairement au
deuxième alinéa de l'article 127, nous recommandons
d'éliminer la notion du deuxième domicile.
Les fonctions du conseil des commissaires. À l'article 135, sur
la convocation du conseil des commissaires par le directeur
général de la commission scolaire, nous recommandons que cette
première convocation des élus, à la première
séance du conseil, soit effectuée dans un délai de quinze
jours suivant l'élection des commissaires. À l'article 143, sur
la fixation des date, heure et lieu de la tenue du conseil des commissaires,
nous recommandons de procéder, non par règlement, mais
plutôt par résolution suivie de la publication d'un avis public.
À l'article 155, nous préconisons que les procès-verbaux
et les autres documents ayant un caractère officiel provenant de la
commission scolaire ne soient certifiés conformes que par le
secrétaire général.
Nous sommes d'avis que la loi ne doit pas préciser arbitrairement
et le nombre et la nature des comités de la commission scolaire et les
pouvoirs des comités à créer tant dans les écoles
qu'à la commission scolaire comme telle. Il en va du pouvoir même
des commissions scolaires d'assumer leurs propres responsabilités et de
l'intégrité de leur droit de gérance qui nous
apparaît inaliénable. Contrairement à ce
qu'édicté l'article 162, nous croyons que la formation du
comité exécutif doit demeurer obligatoire.
Par ailleurs, l'article 163, tel que prononcé, nous amène
à exprimer un très profond désaccord et il s'agit d'une
opinion unanime, car nous avons la conviction profonde que le fait d'avoir
à soumettre les décisions de l'exécutif au conseil pour
être entérinées constitue la négation même de
la raison d'être profonde de l'exécutif qui, par
définition, est investi d'un pouvoir réel d'accomplissement dans
toute l'acception du terme. De même, il apparaît au comité
exécutif, et nous en faisons une recommandation formelle, d'assurer
toute l'administration courante de la commission scolaire tout comme le droit
d'ester en justice constitue l'une des prérogatives exclusives de la
commission scolaire.
La nature des fonctions de la commission scolaire s'articule, selon
nous, à partir de la responsabilité globale qui lui incombe
d'assurer à
la population de son territoire tous les services éducatifs
auxquels elle est en droit de s'attendre.
En concordance avec ia volonté générale
exprimée de façon constante quant à l'autonomie et
à i'"assumationM des droits, devoirs et
responsabilités qui en découlent, les commissions scolaires
membres de l'association sont unanimes à affirmer que la commission
scolaire doit bénéficier d'un pouvoir de taxation local accru ou
encore d'une source de revenus autonomes significative de manière
à lui permettre de réaliser efficacement la plénitude de
son rôle de gouvernement scolaire local.
L'association recommande d'éliminer la contrainte du moindre de
l'excédent des 6 % de la dépense nette et des 0,25 $ les 100 $
l'évaluation. Cette mesure, tout en découvrant une plus grande
marge de manoeuvre financière, permettrait à !a commission
scolaire de réduire ia portée d'une certaine dépendance
qui l'affecte, tout en la brimant parfois dans sa démarche
évolutive.
Il serait faux de prétendre que, devant l'étendue de plus
en plus manifeste des contrôles gouvernementaux, les commissions
scolaires se sentent dans un état de responsabilisation accrue. Il
serait donc souhaitable que des mesures menant à une plus grande
responsabilisation, soient instituées comme la seule alternative valable
aux contrôles et normes administratives de plus en plus poussés
qui prennent l'allure de véritables enfarges. Parallèlement, et
la voix de l'unanimité s'est aussi prononcée à ce
chapitre, les membres de l'association rejettent ce contingentement de la
compétence des commissions scolaires en ce qui a trait à
l'organisation des services éducatifs pour les adultes. En
préconisant ia réduction de la réglementation,
l'élimination des contrôles a priori, au profit d'une
évaluation centrée sur les résultats, nous recommandons la
reconnaissance de l'autonomie des commissions scolaires en matière de
gestion des activités éducatives, de ressources humaines,
matérielles et financières.
À proprement parler, nous souhaiterions que ce projet de loi
jette les bases d'une relation plus harmonisée entre, d'une part, les
commissions scolaires et, d'autre part, le ministre de l'Éducation,
histoire de faire en sorte que, nous, commissions scolaires, devenions de
véritables administrateurs responsables du système
d'éducation. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Paré): Je vous remercie beaucoup
de la présentation. Nous aiions maintenant procéder à la
période d'échanges et ia parole est au ministre de
l'Éducation.
M. Ryan: M. le Président, je salue avec un plaisir
particulier, que vous comprendrez facilement, les représentants de
l'association des commissions scolaires des Laurentides, dont certains
émanent du territoire même du comté d'Argenteuil et dont
les autres sont tous et toutes des voisins estimés avec qui nous
entretenons des rapports amicaux.
Les commissions scolaires de la région de
Laval-Laurentides-Lanaudière ont l'avantage d'être
regroupées dans une association qui leur permet de se retrouver pour la
discussion de problèmes d'intérêt commun. L'association qui
est devant nous cet après-midi est très active. Elle a un
secrétaire dynamique. Elle permet aux commissions scolaires de se
concerter, d'échanger des expériences et des avis sur des suietc;
d'intérêt commun comme ceux que soulèvent les projets de
loi 106 et 107. Je veux vous féliciter de l'intérêt que
vous avez porté à ces deux projets de loi. Nous avons eu
l'occasion de nous rencontrer pour discuter d'autres sujets. Encore
récemment, nous avions une rencontre très importante au cours de
laquelle les porte-parole des commissions scolaires de la région sont
venus me saisir de problèmes de locaux scolaires qui sont
particulièrement aigus dans la région située au nord de la
rivière des Mille-Iles, toute la partie qui va d'Oka jusqu'à
Repentigny. On me signalait, dans un mémoire qu'on m'a remis, qu'il
faudrait construire à très court terme. Je dis cela à
l'intention de mes collègues, les députés d'Arthabaska, et
de Shefford, qui ont aussi des besoins qu'ils jugent, avec raison, importants.
Mais, dans cette région, ce n'est pas à l'unité, c'est
à la demi-douzaine et même a la douzaine que les besoins
d'écoles existent. On m'a signalé, dans ce mémoire, si mes
souvenirs sont bons, qu'il y avait un besoin urgent de cinq écoles
primaires, de cinq écoles secondaires, et il y a un besoin
d'agrandissement ou d'ajout dans au moins une dizaine d'autres écoles.
Dans le rapport de la direction régionale du ministère que j'ai
reçu récemment pour Laval-Laurentides-Lanaudière, on
estime à un montant considérable les projets de construction ou
d'agrandissement qui nous ont été soumis, qui sont conformes aux
normes du ministère, lesquelles sont soumises au contrôle du
Conseil du trésor, comme on le sait, et en plus jugées non
reportables. Nous n'avons pas encore pris les décisions relatives
à ces questions, mais je ne voulais pas que vous veniez sans que vous
sachiez que je m'en souvenais très bien. J'espère que nous
pourrons en venir, au cours des prochaines semaines, à des
décisions. D'ordinaire, nous réglons ces choses avant
l'ajournement d'été et je n'ai pas de raison de craindre que nous
ne puissions pas faire de même cette année, mais je veux vous
assurer que je veille au grain avec une attention toute spéciale.
Le mémoire que vous nous avez présenté, je pense
pouvoir conclure de manière générale qu'il est
plutôt favorable au projet de loi.
M. Clermont: Dans l'ensemble, oui.
M. Ryan: Je dis cela pour qu'il n'y ait pas de malentendu entre
la députée de Chicoutimi, nous et vous. Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Ryan: Je voulais m'assurer que c'était bien votre
impression aussi parce que ce n'est pas dit explicitement. Mais c'est toujours
plus important ce qu'on peut lire entre les lignes. Nous autres...
M. Clermont: Vous prépariez le terrain pour de nouvelles
écoles.
M. Ryan: Pardon?
M. Clermont: Vous prépariez le terrain pour de nouvelles
écoles.
M. Ryan: Ha, ha, ha! Là, je parlais du mémoire.
M. Clermont: Oui, oui, j'avais compris. Ha, ha, ha!
M. Ryan: Dans la permière partie de votre mémoire,
il y a une série d'observations sur le projet de loi 106 qui m'ont
particulièrement intéressé parce que nous n'avons pas eu,
dans l'ensemble, beaucoup de représentations sur le projet de loi 106.
Et vous, vous formulez toute une série d'observations concrètes,
dont une bonne partie pourront sans doute être retenues parce qu'elles
procèdent de l'expérience, et je vois que vous aviez
étudié cela en vous demandant comment cela fonctionnerait dans la
pratique. Vous avez signalé un bon nombre de points que - je peux vous
le dire tout de suite - nous n'aurons aucune difficulté à
retenir. Il y a en un à propos duquel je voudrais vous poser une petite
question tantôt. Il y en a deux, en fait: il y a la question relative
à la liste électorale et la question relative à la
représentation de la minorité linguistique. On peut vider cela
tout de suite et revenir à la deuxième partie du mémoire
par la suite. (16 heures)
Le recensement des électeurs en vue de la liste, comment
faites-vous cela actuellement, vous autres, comment cela se passe-t-il dans vos
commissions scolaires?
M. Clermont: Généralement, nos commissions
scolaires s'associent aux municipalités pour la confection de ces listes
électorales et, comme vous n'êtes pas sans le savoir, on doit
contacter toutes les municipalités et cela peut représenter
quatre, cinq, six ou sept municipalités par commission scolaire. Donc,
on est prêtes, les commissions scolaires, je pense, à avoir une
certaine liste, à prendre en charge cette liste électorale,
puisqu'elle couvre l'ensemble des municipalités. Et on revient tout le
temps avec une confection. Chez nous, on reviendrait dans les commissions
scolaires tous les trois ans, donc avec une liste électorale qui
pourrait servir à la fois aux municipalités et à nos
commissions scolaires.
M. Ryan: Vous remarquez que, dans le projet de loi, nous
maintenons à peu près le statu quo là-dessus. Nous disons:
Vous partez de la dernière liste électorale qui a
été confectionnée...
M. Clermont: Oui, oui.
M. Ryan:... et vous prenez toute autre mesure jugée
nécessaire au parachèvement de cette liste. C'est à
dessein que nous l'avons formulée de cette manière parce que,
construire une liste électorale spécialement pour les commissions
scolaires, c'est une dépense d'une quinzaine de millions, d'après
les estimations que nous avions faites, et nous trouvions qu'il y avait
d'autres endroits où mettre cet argent-là, tant que nous n'avons
pas d'argent à jeter par les fenêtres. C'est pour cela que nous
avons laissé, à toutes fins utiles, dans le projet de loi, des
dispositions qui ne sont pas tellement éloignées de la pratique
actuelle. Vous autres, vous dites qu'il faudrait aller vers une liste
permanente. Cela fera bien plaisir au Directeur général des
élections, mais il lui reste à nous faire la preuve que ce serait
un système économique aisément gérabie et pouvant
répondre aux questions différentes qu'on doit vérifier
suivant le type d'élection. Par exemple, pour les élections
scolaires, il y a des éléments qu'on doit vérifier: est-ce
que cela sera sur la liste catholique, est-ce que ce sera sur la liste
protestante? Il y a la question de la résidence, ou de la
propriété, que nous ne sommes pas obligés de
vérifier quand il s'agit d'autres élections. Alors, cela pose un
problème qui, apparemment, n'est pas insoluble du point de vue
technique. Mais, quant à la question des coûts, le Directeur
général des élections, jusqu'à maintenant, n'a pas
apporté de réponses jugées safisfaisantes par le
gouvernement. Il n'est évidemment pas question de listes permanentes ou
de listes exclusives, seulement pour les commissions scolaires.
Alors, je ne sais pas comment vous voyez ce problème-là,
M. Clermont: Est-ce qu'il y a réellement un besoin urgent de faire des
changements qui entraîneraient des déboursés
importants?
M. Ciermont: Est-ce qu'on échange cela pour une
école, M. Ryan? Ha, ha, ha!
Non, je pense que le processus qui est vécu dans nos commissions
scolaires... Il devient quand même assez fastidieux de faire cette liste
électorale et, à cet effet, je pense qu'on peut voir qu'il y a
des dispositions... Je pense que vous prenez bonne note que cette liste
électorale devient quelque chose de plus en plus permanent, facilement
verifiable et facilement accessible par tous les électeurs. C'est un peu
la contrainte que nous avons à partir des municipalités où
on doit enlever les enfants parce que c'est souvent
un recensement qui a été fait, donc on doit enlever les
enfants. Il y a plusieurs mécanismes qui deviennent difficiles
d'opération.
M. Ryan: Les catholiques et protestants, vous mettez cela au pif
un petit peu. En partant de la liste de la fois précédente, vous
faites les ajustements en consultation avec les deux commissions scolaires.
Comment procédez-vous?
M. Clermont: Comment dites-vous, je m'excuse?
M. Ryan: Pour la liste de ia commission scolaire pour catholiques
et la liste de la commission scolaire pour protestants.
M. Clermont: Vous m'en posez un bout, M. Ryan, là. Il
faudrait voir les mécanismes à mettre en place,
effectivement.
M. Ryan: Vous voyez Dougherty et vous vous dites: Cela doit
être protestant.
Des voix: Ha, ha, ha! Une voix: Gardner! M. Ryan:
Ha, ha, ha! Une voix: Ryan!
M. Ryan: Ryan, il y en a des catholiques et des protestants. Cela
dépend de la souche.
M. Clermont: Clermont, c'est catholique. Des voix:...
M. Ryan: Vous aussi, d'ailleurs, vous autres aussi.
Disons, en tout cas, qu'il y a là un problème qui n'est
pas complètement clair dans mon esprit. Sur la représentation de
la minorité linguistique, vous n'êtes pas trop favorables à
la procédure qui est proposée dans le projet de loi 106,
d'après ce que je comprends.
M. Clermont: En référence à l'article... ?
M. Ryan: L'article 9. M. Clermont: De superposition? M. Ryan:
Oui, c'est cela.
M. Clermont: Je pense qu'à cet égard, comme je le
mentionnais d'ailleurs, c'est une entorse flagrante au principe même du
suffrage universel par nos divers paliers de gouvernement. Je pense que c'est
ce principe qu'on défend dans cet article.
M. Ryan: Ce que le gouvernement cherchait à
résoudre, c'était le problème suivant: c'est que, dans la
plupart des commissions scolaires qui ont une clientèle minoritaire au
point de vue linguistique, celle-ci n'est pas représentée parmi
les commissaires élus, sauf dans certains endroits où on voit
à choisir un des deux parents membres de la commission scolaire parmi
les gens de la minorité linguistique. Mais là, cela devient comme
une espèce de grâce qui est faite à ces parents-là
par la bienveillance des autorités en place. Ils n'ont pas de
représentation démocratique et cela avait été
conçu comme un moyen, mais, si vous voyez des difficultés, je
serais intéressé à ce que vous nous le disiez.
Vous autres, c'est l'entorse au principe démocratique. Vous
voulez que les commissaires soient élus sur le même territoire,
qu'il y ait une liste de commissaires élus, pas deux.
M. Clermont: C'est cela.
M. Ryan: D'accord, je continue. Les commissions scolaires
linguistiques, d'après ce que je comprends... Vous autres, combien de
commissions scolaires en tout regroupez-vous?
M. Clermont: Douze commissions scolaires.
M. Ryan: Douze. Est-ce que je dois comprendre qu'il y en a dix
qui seraient plutôt favorables à des commissions scolaires
linguistiques puis deux, que vous nommez d'ailleurs dans votre mémoire,
qui auraient des réserves?
M. Clermont: Neuf qui sont favorables, deux qui, trois, en fait,
qui ont manifesté...
M. Ryan: Est-ce qu'il y en a qui vous auraient dit en cours de
route qu'elles voudraient plutôt des commissions scolaires
unifiées?
M. Clermont: Non.
M. Ryan: Non. La Saint-Jean-Baptiste va avoir un travail de vente
à faire.
Mme Blackburn: Cela n'a peut-être pas été
demandé.
M. Ryan: Pardon?
Mme Blackburn: Cela n'a peut-être pas été
posé comme question.
M. Ryan: Mais ils sont au courant, ils connaissent le rapport
Parent, vous savez. Cela fait longtemps qu'ils sont là-dedans,
quelques-uns d'entre eux.
Mme Blackburn: On va le leur demander.
M. Ryan: Alors, une dizaine se sont prononcées. Dans la
région, est-ce que cela entraînerait
de grands changements au point de vue de l'organisation scolaire
pratique?
M. Clermont: Je pense que ce sont des principes, comme je le
mentionnais d'ailleurs dans le mémoire, du réseau Chomedey de
Laval; à un moment donné, ce réseau scolaire s'est aussi
accolé à celui de la CECM. Je pense qu'à cet égard
ils sont pour défendre ces garanties constitutionnelles. Est-ce que cela
va en faire? Je n'en ai aucune idée.
M. Ryan: La question que je vous posais était plutôt
la suivante, M. Clermont. Pour la commission scolaire moyenne de la
région, faisons exception du réseau Chomedey en particulier,
disons pour la vôtre, la commission scolaire Deux-Montagnes, la
commission scolaire Saint-Eustache ou celle du Long Sault, est-ce que
l'érection de commissions scolaires linguistiques entraînera un
changement radical?
M. Clermont: Pas à notre avis.
M. Ryan: Pardon?
M. Clermont: Dans l'implantation, non.
M. Ryan: Non? Merci. Je continue. Quant au comité
exécutif, vous dites qu'il faudrait lui donner des fonctions et des
pouvoirs réels. Vous ne voulez pas qu'il soit simplement un organisme
dont toutes les actions devront être entérinées. Autrement,
comme vous le dites, c'est aussi bien de ne pas en avoir. À cet
égard, on sera d'accord avec vous, il n'y aura pas de problème.
C'est un autre ajustement qui peut se faire assez facilement. Je ne veux pas en
discuter plus longuement. Je trouve que votre point de vue est bon à ce
sujet.
À propos des fonctions de la commission scolaire dont le pouvoir
de taxation, en somme, vous ne vous voulez pas que l'on garde la clause en
vertu de laquelle les commissions scolaires doivent choisir le plus bas des
deux: 6 % ou 0,25 $ les 100 $ d'évaluation. Vous voudriez que ce soit
l'un ou l'autre.
M. Clermont: On élimine le moindre des deux, l'un ou
l'autre. Le plus avantageux pour la commission scolaire.
M. Ryan: Le gouvernement ne serait pas réfractaire
à une idée comme celle-là. Maintenant, il y a le point de
vue des municipalités qui sont extrêmement vigilantes et
sévères sur ce point. Il y avait une espèce de contrat qui
a été conclu avec elles, il y a quelques années, sous le
règne du gouvernement précédent, et en vertu duquel on
leur avait donné l'assurance que ce serait leur part du gâteau.
Les municipalités savent compter comme nous. La Fédération
des commissions scolaires a sûrement fait des calculs sur le coût
potentiel d'un changement comme celui-ci, et ce sera de l'ordre de 200 000 000
$ à 300 000 000 $. Ce serait bon comme renforcement; pour les finances
des commissions scolaires, ce serait formidable. Je vous donne juste une
idée de l'ampleur du problème; en tout cas, je l'ai noté.
Je vais en faire part au gouvernement. Je n'ai pas l'autorité pour me
prononcer, parce que cela regarde le ministre des Finances au plus haut point,
et je vais transmettre votre demande au gouvernement avec d'autant plus de
fidélité qu'il y en a d'autres qui ont formulé la
même demande. C'est une demande qui commence à se
répéter et qui prend par conséquent plus de poids.
En ce qui concerne les conseils consultatifs, vous dites qu'il ne
faudrait pas les rendre obligatoires, que les commissions scolaires sont assez
grandes pour les former elles-mêmes, quand elles en ont besoin. Je prends
note de cela. Elles ne sont peut-être pas de la même importance non
plus. Pour les élèves en difficulté d'adaptation et
d'apprentissage, nous y tenons assez, parce que nous avons été
assaillis de représentations de ia part des parents de ces
élèves. Ils nous disent que dans bien des endroits, leur voix
n'est pas entendue. On voudrait qu'ils aient une voix. Je ne sais pas si vous
aviez des objections à ceiui-ci en particulier.
M. Ciermont: On n'aurait pas d'objection à
celui-ià, puisque, déjà, dans nos commissions scolaires
membres, c'est aussi l'une de nos préoccupations. Comme vous connaissez
très bien la région de Laval-Laurentides-Lanaudière, vous
n'êtes pas sans savoir qu'on est aussi à l'écoute des
besoins de cette population. C'est d'ailleurs dans l'ensemble de nos
commissions scolaires qu'ont aussi été créés ces
comités de façon à favoriser l'écoute de ces gens
et leur permettre d'avoir des réponses à leurs besoins.
M. Ryan: Un dernier point. Vous parlez de l'éducation des
adultes et vous dites: On ne voudrait pas que ce soit le ministre qui
décide ça. C'est l'une des attributions de la commission
scolaire, si j'ai bien compris votre mémoire.
M. Clermont: Vous avez bien compris.
M. Ryan: Oui? Ce que l'on veut dire dans le projet de loi, je
vais vous l'expliquer. Peut-être qu'il faudrait le formuler autrement,
mais, sur le fond, vous serez d'accord avec nous quand on vous aura
expliqué clairement nos motifs.
M. Clermont: M. le ministre, le contexte de l'éducation
des adultes se situe aussi au niveau optionnel, de la carte des options, etc.
C'est une implantation...
M. Ryan: C'est la même chose.
M. Clermont: ...qui est en train de prendre forme.
M. Ryan: Ce que nous voulons dire ici essentiellement, M.
Clermont, c'est qu'en dernière analyse il faut bien que quelqu'un
décide. Prenez les options professionnelles: on ne peut pas les avoir
partout en même temps. On a procédé à un partage au
cours des deux ou trois derniers mois, depuis le mois de janvier. On a
laissé le plus possible le soin aux commissions scolaires d'en
décider avec les directions régionales du ministère. Quand
il y avait des problèmes insolubles, il fallait bien qu'une
décision soit prise à quelque part. Ce que nous disons dans le
projet de loi, c'est que le pouvoir de décision ultime sera entre les
mains du ministre de l'Éducation. Même chose pour les services
d'éducation des adultes. On en a 82 dans tout le Québec et il y a
213 commissions scolaires. Dans la mesure où l'on peut s'entendre dans
une région, que ce sera ici ou là, pas de problème pour
nous. Nous en sommes très heureux, si la qualité des services est
jugée convenable. Mais, s'il n'y a pas d'entente... il y a encore trois
ou quatre cas sur mon bureau que je dois trancher. Les régions ne
s'entendent pas. La question que je vous pose est la suivante: En
dernière analyse, est-ce que vous n'êtes pas prêt à
admettre qu'il faut bien que le pouvoir soit quelque part?
M. Clermont: Je pense que oui. Il faut se rendre à
l'évidence, la démarche du gouvernement a toujours
été auprès des commissions scolaires. En dernier ressort,
quelqu'un doit prendre une décision. C'est effectivement la bonne
voie.
M. Ryan: Je vais être obligé d'arrêter, parce
qu'il ne restera plus de problèmes pour l'Opposition. Je vous remercie
infiniment. Je pense que cela éclaire un bon nombre de points. Cela va
être utile pour la démarche du gouvernement.
M. Clermont: Merci, M. le ministre.
Le Président (M. Bradet): Merci, M. le ministre. Je vais
reconnaître maintenant la critique de l'Opposition en matière
d'éducation, Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs!
Il me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue et de vous recevoir en cette
commission parlementaire au nom de l'Opposition officielle. Je voudrais
rassurer tout de suite le ministre, lorsqu'il dit qu'il n'y aura plus de
problème à soulever pour la députée de
l'Opposition. Il en a escamoté quelques-uns, et j'aurais le goût
d'y revenir.
Vous dites, en commentant la restructuration, à la page 9 de
votre résumé, qu'une majorité des commissions scolaires
membres s'expriment en faveur du découpage du territoire du
Québec en commissions scolaires francophones et en commissions scolaires
anglophones, mais après que la constitutionnalité du projet aura
été vérifiée. Est-ce que vous parlez de tout le
projet de loi?
M. Clermont: Cet article, je pense qu'il est déjà
en voie d'être vérifié.
Mme Blackburn: C'est déjà prévu. M.
Clermont: C'est déjà prévu.
Mme Blackburn: Donc, c'est pour l'ensemble du projet?
M. Clermont: Oui. Vous me parlez de l'ensemble du projet de
loi?
Mme Blackburn: Oui, 107.
M. Clermont: C'est strictement pour cet article qu'on l'a
mentionné, pour ce qui est de l'aspect de la confessionnalité des
écoles.
Mme Blackburn: C'est déjà prévu.
M. Clermont: C'est ce qu'on dit. On est d'accord, quand on aura
eu cette constitutionnalité...
Mme Blackburn: Plusieurs intervenants sont venus nous dire que
c'est toute la loi qui devrait être... qu'on devrait attendre, pour
appliquer la loi, qu'elle soit validée par les tribunaux.
M. Clermont: Non, pas dans notre association.
Mme Blackburn: Vous mettez un peu en doute la
légitimité des commissions scolaires, dans la mesure où
les pouvoirs de contrôle du ministre s'accroissent, au détriment,
évidemment, des commissions scolaires. Cet avis est partagé, je
pense, par la quasi-totalité des intervenants qui se sont
prononcés sur cette question. Je rappelle ce qu'écrivait M. Dubuc
dans La Presse du 16 février 1988. Il disait: La commission
scolaire va finalement retenir si peu de pouvoirs qu'il ne faudra pas
être surpris de ne voir qu'une poignée de gens
intéressés à y participer ou même à voter
pour des représentants fantômes. (16 h 15)
Le ministre prétend qu'il n'y a pas trop de problèmes
entre vous et lui. Comment vous sentirez-vous au moment où le projet de
loi va être adopté? On peut penser que l'application peut
être retardée, car des commissions scolaires ont
déjà annoncé qu'elles contesteraient la validité du
projet de loi. Mais comment allez-vous vous sentir dans une commission scolaire
vidée de ses pouvoirs? J'ai fait un petit exercice que je compte
terminer dans les prochains jours. J'ai comparé les pouvoirs qui
restaient aux commissions scolaires à ceux des conseils d'ad-
ministration des hôpitaux, des collèges. Je n'ai pas fini
l'exercice. Essentiellement, cela finit par se ressembler beaucoup, à
une différence importante près. C'est qu'on n'estime pas
nécessaire d'avoir des élus pour gérer les hôpitaux,
des élus au suffrage universel, naturellement.
Je ne voudrais pas que vous compreniez par ma question que je pense
qu'il faut abolir les commissions scolaires. Loin de moi cette pensée.
Je crois beaucoup à la décentralisation. Mais ne peut-on pas
poser sincèrement et honnêtement cette question? Si les
commissions scolaires finissent par avoir à peu près les
mêmes pouvoirs qu'un conseil d'administration d'hôpital, sera-t-il
utile de maintenir les commissions scolaires?
M. Clermont: Mme la députée, je pense qu'à
cet égard, s'il y a eu institution de cette commission parlementaire et
comme en faisait foi tantôt M. le ministre, les représentations
qui ont été faites, c'est justement parce qu'il y aura certains
changements dans cette loi. Je pense qu'en l'occurrence, si je me
réfère à l'aspect des comités, il y a certaines
dispositions qui risquent d'être remaniées. Ces remaniements vont
tenir compte du respect de l'autonomie et de l'administration de nos
commissions scolaires par les élus scolaires. C'est dans cette optique
que nous voulons travailler, comme on le mentionnait tantôt, comme des
partenaires à part entière du système d'éducation
au Québec. C'est la responsabilité qui nous est confiée
comme commission scolaire, par l'entremise d'élus, soit de gérer
justement l'éducation de nos enfants dans nos territoires.
Mme Blackburn: Vous allez beaucoup plus loin, lorsque vous
demandez une certaine responsabilisation des commissions scolaires. Vous allez
plus loin que la seule idée d'avoir la possibilité de former les
comités qui vous conviennent. Si je me rappelle ce que j'ai lu, vous
parlez des pouvoirs qui touchent... Vous dites: Nous recommandons la
reconnaissance de l'autonomie des commissions scolaires en matière de
gestion des activités éducatives, des ressources humaines,
matérielles et financières. Auparavant, vous parlez aussi de
toute la question qui touche les services et de l'éducation des adultes
en particulier. J'essaie de le retrouver en même temps que je pose la
question. C'est beaucoup plus vaste que de laisser aux commissions scolaires la
liberté de former des comités pour répondre à l'un
ou l'autre de ces besoins.
M. Clermont: À i'intérieur de toute cette
nomenclature que vous venez de faire, il est important de respecter l'autonomie
des commissions scolaires et la gestion que nous assurons à
l'intérieur de nos commissions scolaires.
Pour répondre à votre question, je vous dirai que l'aspect
de la gestion des ressources financières et des ressources humaines fait
en sorte qu'on a un certain respect de tous les mécanismes mis en place.
Si chacune des commissions scolaires peut aussi, dans le respect de ces
mécanismes, y mettre sa couleur locale, c'est là, je pense, le
voeu des commissions scolaires lorsqu'on parie d'autonomie. Chacune des
commissions scolaires a une responsabilité devant ses élus, et je
pense que c'est cette responsabilité que nous voulons garder, tant sur
le plan financier que sur le plan des ressources humaines ou sur celui des
activités éducatives. Il y a des commissions scolaires qui
innovent dans certains programmes éducatifs, et je pense qu'elles
doivent encore être en mesure de le faire. On ne doit pas tout
légiférer à ce niveau. C'est un peu l'esprit dans lequel
se situe le mémoire.
Mme Blackburn: Je repose ma question. Je sais qu'il est difficile
pour vous d'y répondre. Dans l'hypothèse où on est en
mesure de démontrer que même dans les questions qui touchent la
gestion des ressources humaines, l'innovation pédagogique, la prestation
de services... On retrouvera dans les commissions scolaires, une fois ce projet
de loi adopté, sensiblement les mêmes pouvoirs que ceux
détenus par les conseils d'administration des centres hospitaliers.
Selon vous, est-ce que c'est suffisant pour maintenir une structure de
commission scolaire?
M. Clermont: À mon avis, maintenir une structure de
commission scolaire, je pense que cela peut être suffisant, mais, comme
je vous le mentionnais tantôt, il est difficile de prétendre que
ce sera ce projet de loi. C'est d'ailleurs pour cela qu'on fait certaines
représentations. On voudrait quand même y voir certains
changements, certaines nuances, certains autres articles ou certaines
procédures... Je n'en ai aucune idée. Je pense que la
responsabilisation se fait aussi à l'intérieur même de
cette structure. Je pense que le financement des commissions scolaires est
très important. Puis l'autonomie, bien, ce seront souvent les
commissions scolaires, par leurs ressources financières, qui pourront
être innovatrices en matière d'éducation, en matière
de projet éducatif, en matière de ressources humaines, en
matière d'encadrement, en matière de réponses aux besoins
des élèves. Je pense que cette réponse, par le biais de
l'autonomie financière des commissions scolaires, ferait en sorte de
répondre. Je pense que ce sont ces nuances qu'on doit retrouver à
l'intérieur de cette loi et qu'on a inscrites dans notre
mémoire.
Mme Blackburn: Est-ce que vous avez... Moi, je dois dire que je
ne l'avais pas vu, parce que cela nous a été souligné ce
matin par la Société Saint-Jean-Baptiste... Dans le projet de
loi, à l'article 203, le législateur n'oblige plus les
commissions scolaires - comme dans la loi actuelle - à rendre compte
à la population de la qualité des services offerts, de
l'administration des écoles et de l'utilisation des ressources.
Là,
on finit par rejoindre tout à fait les obligations qui sont
faites à des conseils d'administration - et j'y reviens - parce que les
conseils d'administration de nos institutions - et je reviens aux centres
hospitaliers - n'ont pas cette obligation de rendre des comptes à la
population, ils rendent des comptes directement au ministère.
M. Clermont: Vous me parlez de l'article 203?
Mme Blackburn: Est-ce que vous ne trouvez pas que c'est un
glissement important et significatif que, du moment où l'on est dans un
gouvernement local élu, qu'il n'y ait aucun article qui prévoie
que ce même gouvernement ait à rendre des comptes à la
population qui l'a élu?
M. Clermont: Je pense que les comptes qu'on aura à rendre
à la population qui nous a élus, elle nous le fera savoir trois
ans après ou elle nous le fera savoir par des représentations de
mécanisme tels nos comités de parents, nos comités
d'écoles, les conseils d'orientation, si je me réfère
à la loi qui s'en vient. Je pense que c'est par cette entremise que la
gestion des commissions scolaires va passer ce véhicule. Certaines
décisions, prises par les commissions scolaires, ont des
répercussions, bien entendu, que ce soit sur le transport, sur les
services aux élèves ou ailleurs. Je pense que c'est par ce biais
que la réponse de la population se fait.
Mme Blackburn: Donc, vous estimez que cet article était
superflu?
M. Clermont: Qu'il soit quoi?
Mme Blackburn: Que l'article de faire obligation à ce
niveau de gouvernement - parce que c'est un gouvernement local - de rendre
compte de la qualité des services offerts, que cet article était
superflu? Cela veut dire aussi, généralement, répondre
à des questions, tenir des assemblées pubiiques, produire des
rapports, répondre à des demandes ou à des revendications
faites par les parents, les associations...
M. Clermont: Mais...
Mme Blackburn: ...et rendre compte, finalement, publiquement, de
la gestion
M. Clermont: Mais je pense que, déjà, dans nos
commissions scolaires et à l'intérieur même de la loi, on
rend compte justement de ce travail qui est fait dans nos commissions
scolaires. Présentement, cela se fait avant même...
Une voix:... Une voix: Allez-y!
M. Vermette (Jean-Paul): Bon! Disons que, de mémoire, je
ne pourrais pas me rappeler si la loi actuelle impose aux commissions scolaires
l'obligation de publier un rapport annuel, mais, dans les faits, les
commissions scolaires - peut-être pas toutes les commissions scolaires
mais plusieurs - publient annuellement un rapport d'activité, tant des
obligations au niveau de la commission que des activités
éducatives. Ce sont des choses qui sont présentées
à la population par le biais des comités de parents ou de
rencontres publiques. De là à dire que c'est
systématisé dans la loi, j'ai un blanc de mémoire.
Mme Blackburn: Oui, c'est à l'article 189, paragraphe
22.
Vous ne faites pas allusion, à une exception près, je
pense - non, c'est dans le mémoire suivant que je l'ai trouvé -
à toute la question touchant l'accès à des services
éducatifs de qualité, donc, l'absence dans la loi de
définition sur les services éducatifs, l'absence dans la loi d'un
article qu'on retrouvait dans la loi 3 sur la gratuité à
l'éducation des adultes pour ceux qui voulaient terminer leur
secondaire, l'absence dans la loi de l'obligation qui était farte en
vertu de la loi 3 - je rappelle que la loi 3 était une loi dûment
adoptée par l'Assemblée - l'absence de l'obligation faite
à l'école d'organiser des services de garde à l'enfance,
l'absence de provisions permettant ou assurant le soutien dans les
écoies pour les élèves qui veulent se constituer des
associations étudiantes, la possibilité d'en appeler devant le
Protecteur du citoyen pour un parent ou un enfant et l'absence totale de
définition des services complémentaires et des services
particuliers. L'absence de ces définitions devrait nous
préoccuper, ii me semble, dans la mesure où ces choses
n'étant pas définies, elles ne font pas obligation au ministre de
donner les ressources nécessaires pour les assumer.
M. Clermont: Certaines des nomenclatures que vous avez
énoncées sont déjà inscrites dans nos commissions
scolaires présentement. Je verrais très mal qu'on élimine
ce qui est actuellement dans nos commissions scolaires comme services
complémentaires à nos élèves, comme services
d'associations étudiantes. Dans ce document, puisqu'au conseil
d'orientation il devrait avoir élection d'étudiants au conseil
d'orientation, c'est donc dire qu'il y aura une association d'étudiants
pour faire ces élections. Je pense que, déjà, on part avec
l'idée que ce que nous avons présentement on le sauvegarde. C'est
là aussi l'autonomie des commissions scolaires et la gérance des
commissions scolaires.
Mme Blackburn: Vous faites une bonne analyse, je pense, une
solide analyse du projet de loi 106. Vous nous apportez des recommanda tions
intéressantes. Je pense à une recommanda tion. Je ne pense pas
l'avoir vue dans votro
mémoire, soit celle sur le dépouillement des votes qui
pourrait se faire le lendemain matin. Vous l'avez également?
M. Clermont: On en a parlé, oui. Mme Blackburn:
Oui.
M. Ciermont: On disait que le dépouillement se fasse
immédiatement et que la déclaration de l'élu se fasse
aussi.
Mme Blackburn: D'accord. Proclamation, cela va.
Une toute dernière question. Sur les commissions scolaires
intégrées, unifiées, le ministre demandait: Quelle est
votre position là-dessus? La question que je me posais est la suivante:
Est-ce que cela a été seulement abordé dans vos
échanges ou si, simplement, les discussions et les échanges que
vous avez eus, c'est sur la base du projet de loi qui est
présenté là et qui suggère des commissions
scolaires linguistiques?
M. Ciermont: Je pense que nos discussions se sont d'abord
appuyées sur l'aspect des projets de loi 106 et 107.
Mme Blackburn: D'accord.
M. Ciermont: C'est à partir de ces documents de travail
que nous avons aussi produit ce mémoire, en l'occurrence, avec le
consensus de l'ensemble de nos commissions scolaires.
Mme Blackburn: Une opinion personnelle, étant donné
que vous n'avez pas échangé sur la question: Dans votre
région, l'établissement de commissions scolaires unifiées
serait-il envisageable? (16 h 30)
M. Vermette: Pour répondre à votre question et
surtout pour expliquer la raison pour laquelle on n'a pas abordé cet
aspect plus en profondeur, c'est peut-être que le milieu que nous
desservons est plus homogène que celui de la région de
Montréal. Je me rappelle, pour avoir travaillé dans la
région de Montréal il y a quelques années, que la
commission scolaire unifiée présentait peut-être plus
d'avantages ou, en tout cas, pouvait attirer la population plus qu'à
Laval où la population était plus homogène. Mais
effectivement, on ne l'a pas abordé, on ne l'a pas traité et on
n'a pas eu de commentaires ou de remarques à ce sujet de la part des
commissions scolaires.
Mme Blackburn: Je vous remercie, M. le Président. J'aurais
terminé. Je vous remercie de votre participation aux travaux de cette
commission et je me permets de rappeler qu'en ce qui concerne le projet de loi
106, sur lequel on n'a effectivement et malheureusement pas beaucoup
discuté, vous nous apportez un éclairage intéressant.
Déjà, je pense que le ministre vous a annoncé qu'il serait
en mesure de tenir compte d'une partie de ces recommandations. Vous m'en voyez
rassurée et réjouie. Je vous remercie.
Le Président (M. Bradet): Merci, Mme ia
députée de Chicoutimi. En conclusion, M. le ministre de
l'Éducation.
M. Ryan: Je dois d'abord un mot de reconnaissance à
l'Association des commissions scolaires de la région de
Laval-Laurentides-Lanaudière parce que le caractère positif de
son mémoire aura peut-être contribué à rapprocher la
députée de Chicoutimi du point de vue gouvernemental. Si j'en
juge d'après ses dernières remarques, cela serait une
contribution vraiment formidable. Blague à part, je pense que nous avons
tous apprécié la cordialité des échanges que nous
avons eus.
Comme je l'ai dit tantôt, nous examinerons soigneusement toutes et
chacune des suggestions que vous avez faites. Je pense que nous pourrons en
retenir plusieurs en vue de bonifier le projet de loi. Je veux vous en
remercier spécialement. Comme je crois comprendre que certains d'entre
vous devez participer ce soir et demain à une réunion de la
Fédération des commissions scolaires, où sera
discuté, entre autres, le projet de !oi 107, je voudrais vous laisser un
petit viatique pour faciliter votre... Non, un viatique, ce n'est pas cela.
C'est un réconfort; c'est un élément qui va donner de !a
force.
Mme Blackburn:... bénédiction. Ha, ha, ha!
M. Ryan: Non, madame. On voit qu'au point de vue des rites il
vous manque des étapes. Un viatique est le meilleur mot que je puisse
employer. C'est un petit réconfort, une liste des pouvoirs qui sont
attribués aux commissions scolaires dans le projet de loi 107 et que
j'ai demandée à nos conseillers.
J'entendais toutes sortes de choses depuis un mois, en particulier qu'on
dépouillait les commissions scolaires de tout pouvoir et tout. Je vois
que votre mémoire n'a pas du tout cette tournure et je m'en
réjouis. J'ai demandé à nos conseillers de préparer
une liste des pouvoirs qui sont dévolus aux commissions scolaires dans
le projet de loi 107. Je leur ai demandé d'écrire, quand
c'était un nouveau pouvoir, nouveau entre parenthèses. Cela va
vous donner un instrument de référence qui ne sera
peut-être pas inutile.
J'ajoute ceci en terminant: Des fois, il peut vous sembler que nous
avons augmenté les pouvoirs du ministre ou du gouvernement dans la loi.
En réalité, ce que nous avons fait, c'est ceci: c'est qu'il y a
bien des responsabilités ou des attributions qui étaient
exercées tantôt par les commissions scolaires, tantôt par le
ministre, mais qui n'étaient pas définies dans la loi. Elles
étaient le fruit de ia pratique et elles s'étaient
installées à travers les réglementations ou le
régime pédagogique. Nos conseillers nous disaient: Vous,
savez-vous, faites ceci, mais il n'y a pas d'assise légale, il n'y a pas
d'assise législative et, un jour, vous pourriez vous faire prendre le
doigt dans le tordeur de la contestation judiciaire. Nous avons vu à
renforcer les assises légales des fonctions accomplies autant par les
commissions scolaires que par le ministre. C'est pour cela qu'il y en a plus
dans le projet de loi pour les commissions scolaires et pour le ministre. Mais,
en pratique, l'équilibre réel n'est pas beaucoup affecté.
S'il y a des points qu'on souligne au cours de vos travaux et de vos
discussions qui pourraient paraître abusifs ou de nature à
contribuer à un raidissement des rapports, on peut nous les signaler.
Nous avons encore un peu de temps devant nous et nous les examinerons avec
attention. Mais, avant que vous partiez, encore une fois, je vais vous laisser
cette liste et vous pourrez dire qu'elle vous fut remise par le ministre de
l'Éducation après qu'il l'eut reçue de ses conseillers
juridiques. Merci.
Le Président (M. Paré): Alors, je vous inviterais
maintenant à conclure.
M. Clermont: M. le Président, M. le ministre,
distingués membres de Sa commission parlementaire, je pense que ce
mémoire se veut le reflet d'une région qui s'est regroupée
en association, Laval, Laurentides et Lanaudière, une région qui
travaille avec acharnement au bien-être des enfants de nos écoles,
comme nous le mentionnons avant chaque prière d'un conseil des
commissaires. Je pense que le dépôt de ce mémoire se veut,
justement, le reflet de cette région et il veut apporter à de
nouveaux projets de loi des dimensions qui feront que nous serons en mesure de
répondre de plus en plus aux besoins des enfants qui nous seront
confiés dans nos écoles et que nous prendrons, nous, les
commissions scolaires, les responsabilités comme administrateurs
élus. Je tiens à vous remercier, au nom de toutes les commissions
scolaires membres de l'association. Merci.
Le Président (M. Paré): Alors, c'est moi qui, au
nom de tous les membres de la commission, vous remercie pour votre contribution
aux débats qui se tiennent ici, en invitant maintenant les gens de la
commission scolaire Saint-Eustache à bien vouloir prendre ia
refève.
Commission scolaire de Saim-Eustache
Alors, M. le président et les autres personnes de la commission
scolaire de Saint-Eustache, je vous souhaite la bienvenue à la
commission parlementaire.
Je vais juste vous rappeler très rapidement la façon de
procéder. On a exactement une heure d'échanges ensemble, en
essayant de répartir cela en tiers, c'est-à-dire 20 minutes de
présentation et 20 minutes pour chacune des formations politiques, pour
pouvoir échanger et faire des commentaires sur votre mémoire. Si
vous décidez d'en prendre un peu plus, libre à vous, sauf que ce
sera réduit sur le temps des échanges.
Une petite question avant de vous laisser procéder. H y a un
document jaune qui vient de nous être remis. Est-ce qu'on doit en
conclure que c'est celui qu'on devra suivre et non l'autre mémoire qui
avait été présenté? C'est exactement ceia? Donc, M.
le président, je vous invite à nous présenter les
personnes qui vous accompagnent et à procéder ensuite à la
lecture de votre mémoire.
M. Latour (Jean-Gilles): Alors, M. le Président, M. le
ministre de l'Éducation, mesdames et messieurs les membres de la
commission, avant de vous faire la présentation des membres, j'aimerais
en premier lieu remercier publiquement le député de Fabre qui a
gracieusement consenti à me prêter sa paire de lunettes, les
miennes étant restées dans mon bureau à Montréal.
Sinon je n'aurais pas pu vous faire la lecture de ce compte rendu et de nos
études.
Alors, il me fait plaisir, au nom de la commission scolaire de
Saint-Eustache, et plus particulièrement du conseil des commissaires que
j'ai l'honneur et le privilège de présider, de vous soumettre
l'avis des intervenants de la commission scolaire de Saint-Eustache sur les
projets de loi 106 et 107.
Dès le départ, je tiens à préciser que
l'avis sur le projet de loi 106 est strictement celui des commissaires, ies
autres intervenants n'ayant pas senti le besoin de s'exprimer à ce
sujet. Par contre, l'avis sur le projet de loi 107 est composé des
observations et recommandations des commissaires, des parents et directions
d'écoles. C'est pourquoi nous sommes accompagnés dans la
présente démarche de Mme Mireille Portugais, présidente du
comité de parents, de M. Jacques Lachapelie, directeur d'école,
lesquels vous livreront les observations de leurs commettants respectifs.
Également avec nous se trouve M. Pierre Fleury, directeur
général de la Commission scolaire de Saint-Eustache, qui se fera
un plaisir, si cela s'avérait nécessaire, de compléter les
réponses à certaines questions que vous ne manquerez sans doute
pas de nous poser.
Alors, si vous voulez bien, nous allons procéder maintenant
à l'avis des commissaires sur le projet de loi 106.
Le conseil des commissaires de la commission scolaire de Saint-Eustache
exprime par le présent avis ses recommandations sur le projet de loi 106
visant à favoriser la démocratie scolaire. Le conseil des
commissaires est favorable à ce projet de loi car il vient
améliorer le déroulement des élections et rendre plus
concordants divers aspects de ce processus avec les autres lois
québécoises touchant les élections. Nous soulevons
toutefois de nombreuses Interrogations sur la portée de certains
articles qui
ne nous permettent pas de croire qu'ils auront pour effet
d'améliorer le processus décisionnel au sein de la commission ou
de favoriser le vote lors des prochaines élections scolaires. Nous
constatons que plusieurs des dispositions de ce projet de loi vont
entraîner parfois un alourdissement de la machine électorale. Nous
pensons particulièrement aux objets suivants: les élections
partielles, la mise en candidature: une trop longue période, le droit de
vote des parents non domiciliés sur le territoire, le
dédoublement de circonscriptions électorales et le regroupement
de candidats en équipe, points au sujet desquels, d'ailleurs, nous
formulons les observations qui suivent. À l'article 9, le conseil des
commissaires se prononce contre le dédoublement des circonscriptions
électorales et la mise en place de circonscriptions
supplémentaires basées sur les minorités linguistiques. Le
rôle du commissaire d'écoles est de représenter la
totalité de ses électeurs et non une partie de sa population.
Nous voyons mal comment un représentant de l'Assemblée nationale
ou d'un conseil d'une municipalité ne pourrait représenter qu'un
groupe ethnique.
Aux articles 20 à 22, l'article 20 et le deuxième
alinéa de l'article 22 devraient être abrogés car il y a
confusion entre le droit du citoyen d'orienter l'éducation dans son
milieu et le droit des parents de participer à l'éducation de
leurs enfants. Seul le résident d'un territoire scolaire ou un
contribuable devrait pouvoir choisir son commissaire d'écoles.
Cependant, la Loi sur l'instruction publique devrait permettre à tous
les parents d'élèves fréquentant une école de faire
partie du comité d'école ou du comité de parents et
limiter l'éligibilité au poste de représentant du
comité de parents auprès des commissaires aux seuls parents du
territoire.
À l'article 41, nous recommandons de permettre la confection de
la liste électorale entre le 180e jour et le 60e jour
précédant le scrutin pour permettre le traitement des iistes
municipales ou provinciales, le recensement partiel de nouveaux quartiers
domiciliaires, ce qui est particulièrement vrai dans des régions
en développement comme celle de Saint-Eusîache, et le traitement
informatique de ces données.
À l'article 43, nous recommandons de prolonger la période
de révision de la liste électorale et qu'en conséquence !e
dépôt de la liste se fasse le 60e jour avant celui du scrutin.
À l'article 46, nous recommandons de prolonger la période
de révision à au moins 15 jours ouvrables pour permettre une
révision adéquate par les citoyens. Il ne faut pas oublier que la
confection de la liste électorale s'effectue à partir de listes
provinciales ou municipales vieilles d'un an et parfois de deux ans.
À l'article 53, nous recommandons de prolonger la période
électorale d'une semaine et qu'en conséquence la mise en
candidature ait lieu le 21e jour avant l'élection. Nous croyons qu'une
campagne électorale demande une certaine préparation et que la
production de feuillets publicitaires nécessite certains délais.
De plus, nous recommandons que la mise en candidature dure une journée,
entre 9 heures et 21 heures, et qu'il soit permis aux commissions scolaires
éloignées de prolonger cette période.
Aux articles 54 à 59, le conseil des commissaires recommande
fortement au législateur d'abroger tous les articles relatifs au
regroupement de candidats en équipe. Nous ne croyons pas que les partis
politiques amélioreront la qualité des services dans le domaine
de l'éducation. En effet, compte tenu du grand nombre de contraintes et
d'encadrement provenant du gouvernement et du ministère de
l'Éducation, comment des équipes peuvent-elles réussir
à se démarquer sensiblement l'une de l'autre dans le domaine de
l'éducation? De plus, cela irait à rencontre de notre vive
croyance en la concertation des intervenants de la commission scolaire. (16 h
45)
Article 71. Nous ne comprenons pas les objectifs visés par le
législateur en regard de la procédure d'une deuxième mise
en candidature qui, selon nous, n'encourage pas la responsabilisation du
citoyen. En conséquence, nous recommandons de conserver la disposition
actuelle de la Loi sur l'instruction publique qui permet au ministre de
l'Éducation de nommer un commissaire, en cas d'absence de candidat.
Article 83. Nous recommandons d'abroger cet article car le vote par
anticipation doit favoriser la participation et non la restreindre.
L'obligation de prêter serment est plus de nature à rebuter
l'électeur qu'à l'inviter à poser un geste de citoyen
responsable.
Articles 131-135. Nous recommandons d'abroger en son entier la section
II du chapitre VI et que l'on conserve la procédure actuelle de la Loi
sur l'instruction publique concernant le dépouillement des votes et ia
proclamation des élus.
Article 190. Nous recommandons de conserver la procédure actuelle
prévue à l'article 189 qui permet au conseil des commissaires de
nommer un commissaire remplaçant après consultation du
comité de parents. Le recours à des élections partielles
est un procédé coûteux en temps et en argent et ne permet
pas de croire qu'il donnera plus de satisfaction que la procédure suivie
jusqu'à maintenant. Ceci termine nos recommandations en ce qui a trait
au projet de loi 106. Je passe maintenant à l'avis des commissaires sur
le projet de loi 107.
Le présent avis sur le projet de loi 107 est issu d'une
réflexion réalisée par le conseil des commissaires, la
direction générale, la table de gestion des directeurs
d'école, les comités d'école et le comité de
parents de la commission scolaire de Saint-Eustache. Nous avons cru bon de
formuler une position commune sur les principales orientations du projet, mais
aussi d'inclure des observations spécifiques à un groupe
d'intervenants de la commission. C'est ainsi que
Mme Mireille Portugais formulera une position particulière du
comité de parents de la Commission scolaire de Saint-Eustache et que M.
Jacques Lachapelle vous livrera un message propre à l'équipe des
directeurs d'école de la Commission scolaire de Saint-Eustache.
La commission scolaire partage les objectifs généraux
visés par le projet de loi, à savoir ceux qui concernent le droit
de l'élève, les droits et devoirs de l'enseignant, la
participation véritable des parents à la vie scolaire, le respect
de la volonté des milieux en regard des valeurs religieuses et
l'aménagement de commissions scolaires selon le critère de !a
langue plutôt que celui de la confessionnalité. La commission
soumet donc au ministre de l'Éducation, M. Claude Ryan, le
présent avis qui concerne essentiellement les dispositions sur
l'élève, l'école et la commission, laissant la
responsabilité à la Fédération des commissions
scolaires catholiques du Québec de véhiculer nos commentaires sur
les dispositions relatives au gouvernement et au ministre de
l'Éducation.
Nous voudrions tout de même souligner que, si diverses
dispositions du projet de loi ont la qualité de clarifier les fonctions
du ministre et du gouvernement, elles concentrent un pouvoir que l'on
considère excessif dans les mains du ministre. Soulignons entre autres,
pour ne donner que quelques exemples, les pouvoirs relatifs à la
taxation, aux dérogations au régime pédagogique en raison
de l'âge, à l'enseignement de l'anglais, langue seconde, aux
règles du personnel-cadre, au contrôle des plans et devis de
construction et aux modalités de consultation des parents relativement
à la confessionnalité de l'école.
Il nous apparaît donc utile de souligner que, d'une part, le
projet favorise la centralisation des décisions entre les mains du
ministre et du gouvernement et, d'autre part, qu'il propose la
décentralisation de certains pouvoirs de la commission scolaire vers les
parents dans les écoles, comme le pouvoir de décider des
orientations de l'école, des règles de conduite des
élèves dans l'école et d'approuver les activités
hors horaire.
La Commission scolaire de Saint-Eustache croit qu'il y a place pour un
meilleur partage des responsabilités entre les intervenants dans le
respect du rôle de chacun si la volonté du législateur est
d'améliorer la qualité des services d'éducation au
Québec et d'accorder en même temps des responsabilités
significatives et appropriées aux commissaires d'écoles qui sont,
il faut bien se le rappeler, des élus du peuple au même titre que
les conseillers municipaux.
Nous constatons que plusieurs dispositions du projet de loi 107 vont
entraîner des contraintes inutiles pour le milieu et amener une
iuîte de pouvoir plutôt que de favoriser des attitudes de
concertation, de partage et de collaboration que nous vivons depuis plusieurs
années à Saint-Eustache. C'est là une vive
inquiétude et le principal motif de notre opposition à certaines
parties de ce projet au sujet desquelles nous vous faisons part de nos
observations basées, bien entendu, sur le vécu de la Commission
scolaire de Saint-Eustache.
Concernant !es commissaires, c'est-à-dire les articles 125
à 129, les droits, pouvoirs et obligations du représentant de
parents au sein du conseil ne devraient pas être modifiés. Il nous
apparaît inutile de lui donner le droit de vote car, d'une part, le
représentant n'est pas élu au suffrage universel, mais
désigné par ses pairs, et d'autre part, le représentant
des parents serait en conflit d'intérêts sur certaines
décisions. D'ailleurs, les parents, toujours à la lumière
du vécu de !a commission scolaire de Saint-Eustache, nous ont clairement
signifié leur désaccord avec ce droit.
Article 136. Le conseil des commissaires souhaite que l'élection
du président et du vice-président se fasse annuellement. Nous
considérons comme trop contraignante la volonté du
législateur de fixer la durée du mandat sur trois ans.
Article 162. Le président du comité exécutif
devrait être élu par les membres de ce comité. En
conséquence, le président du conseil ne devrait pas être
automatiquement désigné président du comité
exécutif.
Article 163. Le deuxième alinéa de l'article 163 devrait
être abrogé car le comité exécutif n'a pas à
voir ses décisions entérinées par le conseil. Cette
disposition apparaît contradictoire avec l'esprit de
délégation de pouvoirs.
Comité des services aux élèves handicapés et
aux élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage.
Article 167. Les représentants des enseignants et des professionnels qui
dispensent des services à ces élèves devraient être
désignés par leurs pâte au comité et non par
l'association qui les représente. Nous estimons que les associations ont
un rôle à jouer dans le cadre des négociations de travail
et ne devraient pas disposer d'un pouvoir défini par la loi de
désigner des représentants qui siégeraient peut-être
avec des mandats autres que ceux visés par la loi, c'est-à-dire
des mandats à caractère professionnel. En conséquence,
nous recommandons au législateur de modifier le libellé de cet
article, afin que la désignation des enseignants et des professionnels
s'effectue par leurs pairs du secteur d'enseignement concerné.
Article 169. Nous sommes d'accord avec la volonté du
législateur de favoriser l'implication des intervenants dans les champs
d'activité qui les concernent. Cependant, certaines
responsabilités doivent être laissées aux intervenants
directements impliqués par la prestation de services. Il nous
apparaît donc inutile de permettre aux comités composés
majoritairement de parents non professionnels de donner un avis sur
l'application du plan d'intervention à un élève, tel que
cela est indiqué au dernier alinéa de l'article 169. Nous
recommandons plutôt au législateur de prévoir la
possibilité pour les parents de l'élève concerné de
soumettre une
requête auprès du comité dans le cas de contestation
du plan d'intervention élaboré par les professionnels et les
enseignants de la commission. Il s'agirait donc d'une instance d'appel pour les
parents concernés qui leur permettrait de vérifier si les
politiques et règles de gestion de la commission ont été
respectées et appliquées sans discrimination.
Articles touchant le comité de parents. La commission scolaire
endosse largement les recommandations des parents de notre territoire sur les
modes d'organisation et de mise en place du comité de parents. Nous
sommes également d'accord avec leur recommandation, d'ajouter plusieurs
objets de consultation obligatoire auprès du comité de parents.
Toutefois, les commissaires émettent une réserve quant à
la pertinence de consulter les parents sur des objets à caractère
strictement administratif comme les règles de répartition des
ressources financières de la commission scolaire entre les
écoles. En effet, nous croyons qu'il s'agit là d'une
responsabilité d'administrateur et de gestionnaire, qui sont davantage
en mesure de porter un jugement sur le niveau de partage entre les
écoles et le niveau de centralisation nécessaire à la
réalisation des activités éducatives. Nous croyons qu'il
ne faut pas confondre le rôle et la responsabilité des
différents intervenants. Le rôle des parents consiste
essentiellement en l'expression de leurs besoins et de leurs attentes
auprès des commissaires et directions d'école. Il appartient aux
gestionnaires de trouver les meilleurs moyens pour réaliser les
objectifs, et aux commmissaires élus de juger et d'évaluer si les
gestionnaires assument correctement leurs responsabilités.
Article 179. Nous avons été grandement
étonnés de retrouver un tel article dans le projet de loi. Nous
croyons sincèrement qu'un tel droit pour un comité interne de la
commission scolaire de pouvoir ester en justice contre la commission scolaire
est porteur de conflits et de discordes sérieuses. Nous sommes
convaincus que ce droit ne fera qu'entraîner la multiplication de
querelles juridiques onéreuses et inutiles, tout à fait
opposées à la recherche de la concertation entre les
partenaires.
En ce qui a trait à l'école, article 38, nous comprenons
la volonté du législateur d'assurer une stabilité pour les
élèves et les parents dans l'utilisation des édifices qui
leur sont dévolus. Cependant, cet article nous paraît
irréalisable pour une commission scolaire en croissance qui se doit de
trouver chaque année des solutions pour l'ensemble des besoins de son
territoire. Si le législateur croit nécessaire d'obliger ia
commission scolaire à élaborer et à respecter un plan
triennal de répartition, il devrait alors soumettre le ministre de
l'Éducation à la même obligation en ce qui a trait au plan
triennal de construction d'écoles. En conséquence, nous
recommandons d'abroger cet article ou, à tout le moins, de permettre
à la commission scolaire de modifier son plan, quitte à ce
qu'elle soit obligée de consulter le comité de parents avant de
le faire.
Articles touchant le conseil d'orientation, articles 54 à 83. Les
commissaires de la commission scolaire de Saint-Eustache rejettent à
l'unanimité la mise en place de conseils d'orientation dans les
écoles et, de cette façon, endossent la position
véhiculée par le comité de parents. En effet, il nous
apparaît Inutile de retrouver dans l'école deux structures de
consultation créées à l'intention des parents. Nous
croyons même qu'il y a là un risque de diminuer le pouvoir
d'influence des parents qui auraient sans doute plus de difficulté
à se concerter, surtout si l'une des instances a un pouvoir
décisionnel.
Également, la coexistence de ces deux instances entraînera
un fonctionnement boiteux du comité de parents qui compterait des
représentants provenant de deux instances distinctes. De pius, il ne
nous apparaît pas pertinent que le conseil d'orientation ait le pouvoir
de décider des orientations de l'école, d'autant plus que ce
pouvoir est imprécis et peut facilement entraîner des situations
confuses. En effet, comment peut-on définir ce qu'est une orientation?
Qui en décidera de la définition? il en va de même en ce
qui a trait à ia conduite des élèves. Qu'arrive-t-il si le
directeur ou la commission est en désaccord avec le règlement
adopté? Ne serait-il pas préférable de laisser cette
responsaiblité à la direction de l'école, après
consultation de son équipe et du comité d'école?
En somme, nous croyons que la concertation et la collaboration sont
beaucoup plus compromises lorsque l'on divise les pouvoirs entre intervenants,
il faut plutôt amener ceux-ci à participer activement et
réellement au pouvoir du responsable de l'école qui, lui, doit
assurer la cohérence de la gestion administrative et pédagogique
de l'école. En conséquence, nous demandons au législateur
de retirer du projet de loi l'obligation pour une commission scolaire
d'instaurer un conseil d'orientation, de laisser la formation du comité
d'école obligatoire et d'amender le projet de loi pour transférer
les responsabilités dévolues au conseil d'administration à
la direction de l'école, avec obligation pour cette dernière de
consulter le comité d'école.
Sans paraître contradictoire ou atténuer notre position
précédente, nous recommandons au législateur, s'il
persiste dans sa volonté d'instaurer un conseil d'orientation
obligatoire, de tenir compte plus spécifiquement des deux suggestions
suivantes: à l'article 37, puisque le législateur institue le
conseil d'orientation, il devrait aussi fixer la composition et le nombre de
sièges attribués aux parents et aux enseignants au prorata du
nombre d'élèves dans l'école, afin d'éviter des
disputes inutiles et d'assurer le respect facile de ia loi. Quant aux articles
54 et 55, le directeur d'école se doit
d'être membre à part entière à titre
d'intervenant éminemment concerné par les décisions qui
seront prises.
Enfin, sur cette question du consei! d'orientation, les commissaires
sont heureux de constater l'accueil et l'ouverture démontrés par
les directions d'école lorsqu'elles se disent prêtes à
vivre les deux structures qui permettraient aux parents de s'impliquer dans Sa
vie de l'école. Toutefois, nous constatons que leur avis reflète
en partie les inquiétudes que nous venons de formuler relativement aux
responsabilités attribuées aux parents, au sens du mot
"orientation" et aux difficultés de gérer ce partage du pouvoir.
(17 heures)
Articles concernant le comité d'école. Toujours à
la lumière de notre vécu à la commission scolaire de
Saint-Eustache, le comité d'école nous paraît l'instance
pour favoriser et permettre la participation active et assurée des
parents aux principales décisions de la direction de l'école.
Nous favorisons donc cette instance et recommandons au législateur de
transférer ies objets de consultation prévus du consei!
d'orientation au comité d'école. En conséquence, nous
souhaitons que le comité d'école soit obligatoire. En toute
logique et cohérence avec notre croyance en la concertation des divers
intervenants de la commission et en leur implication la plus complète
dans le respect des rôles et responsabilités dévolus
à chacun, nous sommes d'avis que les rôles et fonctions
prévus pour le conseil d'orientation soient pratiquement tous
transférés au comité d'école. Cela démontre
bien à la fois notre ouverture à l'implication des parents et
notre souci de voir à ce que cette implication soit la plus efficace et
la plus unifiée possible pour assurer aux parents un pouvoir d'influence
réel auprès de ceux qui assument la responsabilité des
décisions, à savoir les commissaires.
Articles touchant le directeur d'école, soit les numéros
40 à 52. Article 48. Les commissaires souhaitent que soient
précisés le sens et la portée du terme "gère le
personnel de l'école" utilisé dans les fonctions du directeur
d'école et ce, afin de s'assurer qu'il ne soit pas une source
d'ambiguïté entre la direction générale de la
commission scolaire et ies directions d'école.
Article 52. La commission scolaire de Saint-Eustache ne peut que se
réjouir de voir un article qui assure la participation des directions
d'école à l'élaboration des politiques, programmations et
réglementations devant être mises en oeuvre dans les
écoles. C'est là une forme de concertation pratiquée
depuis longtemps à ia commission scolaire de Saint-Eustache et qui
s'avère très rentable quant à la qualité des
décisions qui sont prises.
Articles touchant l'enseignant. Le conseil des commissaires
adhère à la volonté du législateur de
préciser certains devoirs de l'enseignant en regard de sa profession.
Nous inter- prétons ce désir de clarification des devoirs de
i'enseignant comme le prolongement évident de l'avis du Conseil
supérieur de l'éducation sur la condition enseignante. Faisant
nôtres les termes de cet avis, nous croyons en effet que l'appartenance
à une profession exige une préparation et qu'elle comporte des
obligations spécifiques. L'enseignement et la transmission de
connaissances ne s'improvisent pas. L'amélioration de la qualité
de l'enseignement passe, à notre avis, par la responsabilisation des
enseignants qui doivent, entre eux, contrôler l'accès et la
pratique de la profession et garantir au public la qualité des services
professionnels. Il ne s'agit pas de développer une attitude
corporatiste, mais de donner les moyens aux enseignants d'établir et de
soutenir leur crédibilité et leur respectabilité en
édictant des standards professionnels, des programmes de formation, des
règles d'éthique, de conduite, des sanctions, etc.
La Commission scolaire de Saint-Eustache adhère au principe de
professionnalisation de l'enseignement et souhaite que le législateur,
dans une deuxième étape, concrétise cette
interprétation de notre part qui se doit de devenir une orientation
claire du milieu de l'éducation par la création éventuelle
d'un organisme professionnel voué à la promotion de la
profession, à la qualité des actes professionnels et à la
protection des usagers. Ce débat reste à faire et il est urgent,
si nous voulons assurer la qualité de l'enseignement au Québec,
de le mener à terme.
Ceci termine, M. le Président, les principales recommandations en
ce qui a trait aux articles bien précis des textes de loi. Si vous me le
permettez, je vais demander maintenant à Mme Mireille Portugais,
présidente du comité de parents, de vous faire lecture de son
mémoire, en fait, de sa participation au mémoire de la Commission
scolaire de Saint-Eustache.
Mme Portugais (Mireille): Merci.
M. le Président, M. le ministre de l'Éducation, mesdames
et messieurs les membres de la commission, la position des parents de la
Commission scolaire de Saint-Eustache n'a pas été prise à
la légère. Après avoir reçu copie des projets de
loi 106 et 107, des rencontres d'information ont été mises sur
pied dans notre milieu. Tous les comités d'école de la commission
scolaire ont participé à l'étude, aux discussions, aux
comparaisons des documents et ont établi leurs orientations. Le
comité de parents a pris position en respectant les orientations issues
de nos consultations.
Confrontés à un changement majeur dans la
représentativité des parents dans le milieu école,
c'est-à-dire un conseil d'orientation obligatoire et un comité
d'école facultatif, notre position a découlé du
raisonnement suivant: Un conseil d'orientation, dans la loi actuelle et dans le
projet de loi 107, représente un milieu école et il
prévoit, dans sa composition, des représentants
de tous les intervenants d'une école. Actuellement, il est
presque inconnu et le gouvernement n'a pas cru nécessaire de le
réglementer. Le comité d'école formé de parents,
pour les parents, véhicule des besoins, des idées et des
croyances qui leur sont spécifiques et défend ces mêmes
principes. Dans la loi actuelie, le comité d'école est un
organisme connu et reconnu, avec des règles établies,
rodées et efficaces, dont les parents ont l'habitude du fonctionnement.
Compte tenu que les parents sont ies seuls représentants appelés
à travailler bénévolement au sein du système
scolaire, nous trouvons nécessaire de garder le comité
d'école obligatoire. Demander aux parents de doubler leurs tâches
bénévoles pour travailler dans un conseil d'orientation qui n'a
ni structure établie, ni règlement, ni reconnaissance du milieu,
pour la possibilité d'une meilleure concertation, est
exagéré.
Donc, il va de soi que le comité de parents de la commission
scolaire de Saint-Eustache demande unanimement le maintien du comité
d'école obligatoire et le rejet du conseil d'orientation. Il est
à noter que le conseil des commissaires a adhéré à
notre position. Le projet de loi 107 prévoit le droit de vote pour les
représentants des parents au conseil des commissaires. Nous croyons qu'H
n'est pas nécessaire d'avoir le droit de vote pour bien
représenter les parents. Les demandes de ces derniers, en étant
raisonnables, logiques et représentatives des besoins du milieu,
invitent les commissaires d'école à en reconnaître la
valeur et le bien-fondé, et à y adhérer.
Il est aussi ressorti de nos discussions la nécessité que
le gouvernement maintienne des règlements pour les comités
d'école et les comités de parents, afin de garantir une
uniformité de gestion et de fonctionnement à l'échelle
provinciale. Il nous apparaît normal de demander que les comités
d'école, qui sont formés d'adultes raisonnables et responsables,
gèrent leur budget et en fassent rapport à ceux qui ont
contribué à leur financement.
Afin d'assurer une représentativité constante des parents,
nous croyons nécessaire qu'il y ait, au conseil des commissaires, au
moins deux représentants des parents par niveau d'enseignement. Ce
besoin est encore plus évident pour les commissions scolaires non
intégrées où, en l'absence de leur seul
représentant, les parents perdent leur porte-parole.
En conclusion, notre préoccupation première est de nous
assurer de la qualité et de la continuité de l'implication des
parents bénévoles dans le système scolaire pour le
bien-être de nos enfants.
M. Latour: Maintenant, j'invite M. Jacques Lachapelle, directeur
d'école, à nous faire la lecture de l'avis des directions
d'école.
M. Lachapelle (Jacques): Merci. M. le Président, M. le
ministre de l'Éducation, mes- dames et messieurs membres de la
commission, dans un premier temps, nous déplorons le délai
très court dont nous disposions pour nous prononcer sur un projet de loi
d'une telle ampleur et qui, de plus, aura un impact considérable sur le
travail des directeurs et directrices d'école. Pour mieux
préciser, nous avons fait le travail avec, en tête, la
première date énoncée pour la commission parlementaire.
Nous avons quand même pu en apprécier l'esprit et l'approche, ce
qui nous permet d'en partager également les objectifs. Mais nous avons
dû nous limiter à certains aspects du projet de loi.
Les trois premiers chapitres ont retenu notre attention et, de
façon plus particulière, le conseil d'orientation. Voici donc un
résumé des éléments que nous avons eu le temps
d'aborder et au sujet desquels nous pourrons apporter des explications
supplémentaires dans le but d'étoffer notre position, de bien la
situer et, éventuellement, la faire partager.
Le conseil d'orientation. Ce sujet a fait l'objet d'une longue
discussion compte tenu de son impact dans le domaine de la gestion de nos
écoles, mais également de la position que nous avions
déjà prise antérieurement dans le cadre du projet de loi
40, soit de rejeter le conseil d'orientation. Cette fois-ci, nous nous sommes
présentés en faveur du conseil d'orientation, mais avec certaines
réserves, tant et aussi lontemps que les pouvoirs qu'on lui attribue ne
seront pas modifiés et que les gestes et décisions à
caractère professionnel demeureront à la direction de
l'école. Plusieurs éléments, dont l'approche, entre
autres, de ce projet de loi, justifient ce changement d'attitude de notre part.
Toutefois, nous croyons qu'il y aurait lieu de préciser la portée
de certains articles et de définir certaines expressions pour une
meilleure compréhension des différents intervenants de nos
milieux. Entres autres, les articles 83 et 201 méritent une attention
plus particulière car, selon le cas et avec la réserve
précédemment mentionnée, lorsqu'on parlait des
décisions à caractère professionnel qu'on devrait laisser
aux directeurs d'école, les pouvoirs qu'on peut éventuellement
transférer à un conseil d'orientation, selon le cas, pourraient
être transférés à la direction de l'école et
non pas exclusivement au conseil d'orientation, parce qu'on fait exclusivement
mention de droits qui pourraient être transférés au conseil
d'orientation. Certaines expressions comme "orientation", à l'article
78, et "coordonne", à l'article 44, auraient avantage à
être plus explicites pour éviter la confusion. Le conseil
d'orientation pourrait avoir pour effet de faire disparaître le
comité d'école. Nous nous retrouvons encore devant des
incertitudes, car, selon la composition du conseil et son fonctionnement, nous,
les directeurs et les directrices de Saint-Eustache, pourrions souhaiter cette
éventualité, c'est-à-dire la disparition du comité
d'école. Par contre, selon d'autres modalités dans la composition
et le fonctionnement, on pourrait
tout simplement refuser la disparition du comité d'école.
Alors, nous ne pouvons afficher un emballement sans limite vis-à-vis de
cette nouvelle instance, mais, à tout considérer et en nous
appuyant surtout sur ia connaissance que nous avons du milieu, l'aspect de
cette loi et des ajustements à venir, nous nous prononçons en
faveur du conseil d'orientation. Tout en conservant certaines réserves
et. interrogations, nous appuyons les principes qui justifient cette nouvelle
gestion, à savoir reconnaître officiellement les différents
intervenants du milieu, entre autres, les parents, et éventuellement de
donner à l'école les pouvoirs dont elle aura besoin pour
progresser. Merci.
M. Latour: Voilà, M. le ministre, Mmes et MM. les membres
de cette commission parlementaire, les principaux éléments sur
lesquels la commission scolaire de Saint-Eustache désire attirer votre
attention et qui reflètent nos plus vives préoccupations,
à savoir que cette loi de l'éducation doit faire en sorte que les
rôles et les responsabilités soient clairement établis et
qu'ils soient garantis par des mécanismes qui favorisent l'implication,
ia participation et ia concertation des intervenants, non pas dans un souci
d'obtenir du pouvoir, mais plutôt en ayant comme objectif de faire en
sorte que ceux qui assument les responsabilités conférées
par ia détention du pouvoir puissent exercer ce dernier avec le souci
constant d'y faire participer Ses intervenants concernés. Merci
beaucoup.
Le Président (M. Paré): Merci, M. le
président, madame et messieurs, de votre présentation. Je dois
maintenant informer les membres de la commission qu'il nous reste exactement 24
minutes d'échanges, donc 12 minutes de chaque côté. Comme
Mme la députée de Deux-Montagnes a demandé la parole, je
demanderais le consentement pour lui permettre d'intervenir, étant
donné qu'elle n'est pas membre régulière de !a commission.
Pas de problème? Alors, Mme !a députée de Deux-Montagnes,
la parole est à vous.
Mme Legault: Merci, M. le Président. Je voudrais souhaiter
la bienvenue aux gens de Deux-Montagnes, M. Fleury, Mme Portugais, M. Latour et
M. Lachapelle, ainsi qu'à l'association dont le représentant, M.
Clermont, que je connais bien et qui est de Pointe-Calumet. Cela me fait
plaisir de vous accueillir et de vous souhaiter la bienvenue. (17 h 15)
J'ai bien apprécié votre mémoire. Par contre, je
n'ai pas retrouvé, dans votre présentation, ce que vous pensez
des valeurs religieuses et de l'enseignement dans nos écoles. Je ne l'ai
pas retrouvé dans votre mémoire. Je ne sais pas, peut-être
que ce n'est pas un oubli de votre part, mais je ne l'ai pas retrouvé,
et je me demandais ce que vous en pensiez, si c'était nécessaire
ou pas, l'enseignement religieux dans nos écoles et. ceci s'adresse
peut-être plus à Mme Portugais, du comité de parents, et
à M. Lachapelle, qui est directeur d'école.
Mme Portugais: Évidemment, M. Lachapelle en a fait mention
tantôt, à savoir que les délais étaient
extrêmement courts pour aller en consultation auprès des
comités d'école et des comités de parents. Alors, ce n'est
pas qu'on ne Juge pas Importants les articles concernant la
confessionnalité dans les écoles, mais nous n'avons pas eu le
temps. Cela nous aurait demandé vraiment plus de temps pour donner des
orientations et prendre des positions vraiment précises, alors nous
sommes allés, comme on dit, au plus pressant, c'est-à-dire
à ce qui nous intéressait, non pas à ce qui nous
intéressait le plus, mais à ce qui nous préoccupait le
plus. C'était le conseil d'orientation et le comité
d'école. Mais ce n'est pas qu'on ne juge pas importants les autres
articles.
M. Lachapelle: Je peux continuer? Vous avez fait allusion aux
directeurs d'école.
Mme Portugais: Oui, M. Lachapelle.
M. Lachapelle: On n'a pas abordé la composition des
commissions scolaires sur une base linguistique ni sur une base
confessionnelle. Par contre, ce qu'on sait, c'est qu'il y aura de nouveaux
règlements édictés par le comité catholique qui
entreront en vigueur le 1er juillet 1988. Je pense que là-dessus la
réglementation est quand même assez claire. Il reste
peut-être certains articles à éclaircir, par exemple,
comment intégrerons-nous une croyance religieuse à
l'intérieur du projet éducatif, mais je pense quand même
que les règlements du comité catholique nous disent exactement
quel type d'école nous devrons avoir selon les voeux des parents, selon
que l'école est confessionnelle ou non, et, si l'école est
confessionnelle, je pense que la réglementation, pour nous, en termes de
fonctionnement, est relativement claire à cet égard, il resterait
seulement certains termes à préciser, peut-être surtout en
ce qui concerne la réglementation du comité catholique.
Mme Legault: Est-ce que, d'après vous, M. Lachapelle, le
projet répond vraiment à l'intégrité au plan
religieux?
M. Lachapelle: D'après moi, dans le projet de loi, en tout
cas, en ce qui regarde les chapitres qu'on a eu le temps d'étudier, nous
n'avons absolument rien relevé qui pouvait aller à rencontre
d'une école de foi catholique. Cela nous paraissait assez clair à
gérer. Mais encore là c'est sous toute réserve, parce que,
comme je vous le mentionnais, nous avons retenu seulement certains chapitres
compte tenu du temps.
Mme Legault: D'accord. Merci beaucoup, M.
Lachapelle.
M. Latour: Si vous me permettez, Mme Legault, j'aimerais
renchérir sur la question, parce qu'on ne peut pas dire que ce n'est pas
un sujet sur lequel on ne s'est pas penché en tant que conseil des
commissaires. Je puis vous dire que la question religieuse est fondamentale et
elle nous préoccupe énormément, et la commission scolaire
de Saint-Eustache tient à exprimer au ministre sa satisfaction quant
à l'introduction des garanties nécessaires dans le texte de loi
pour assurer, que l'enseignement religieux puisse être garanti à
nos élèves à l'avenir.
En tant que président de la commission scolaire, avec la
direction générale, avant d'amorcer l'étude du projet de
loi comme tel, nous nous sommes assurés de consultations au niveau
diocésain pour connaître la concordance qu'il y avait dans les
objectifs. Il est sûr que pour un certain nombre de gens le maintien du
statu quo actuel peut représenter l'idéal à
préserver. Mais if semble, à la lecture du projet de loi, que des
garanties suffisantes soient données aux minorités, même
sur le plan confessionnel, pour que soit assuré l'enseignement
religieux. Si une telle chose ne nous était pas apparue évidente
au départ, il est sûr que nous aurions probablement amorcé
notre présentation d'aujourd'hui en touchant particulièrement ce
point-là.
Pour terminer, Mme Legault, je voudrais tout simplement vous souligner
que nous sommes de Saint-Eustache.
Mme Legault: En particulier de Saint-Eustache. Je vous
remercie.
Merci, M. le Président, de m'avoir accordé la parole,
étant donné que je ne fais pas partie de cette
commission-là, et je remercie l'Opposition de m'avoir accordé
cette parole.
Le Président (M. Paré): Merci, Mme la
députée. Je cède maintenant la parole à M. le
ministre de l'Éducation, en vous rappelant qu'il vous reste sept
minutes.
M. Ryan: Vous me posez un gros problème. Le
Président (M. Paré): J'ai le même.
M. Ryan: C'est bien. On va essayer de forcer la note un petit
peu, mais on va essayer de s'en tenir aussi à ce que vous dites.
Je suis bien content de la présentation que nous a faite la
Commission scolaire de Saint-Eustache. Je pense qu'elle nous avait
habitués, lors d'une série d'audiences précédentes,
à un examen attentif, sérieux et pratique, d'un projet de loi. Je
crois que la contribution que vous nous apportez est extrêmement valable.
J'ai particulièrement apprécié la diversité des
points de vue que vous avez laissés s'exprimer. Il y a un sujet en
particulier qui m'intéresse beaucoup.
C'est le genre de structure qu'on va avoir à l'intérieur
de l'école. J'étais intéressé à voir la
diversité des points de vue que nous avons entendus, pas pour conclure
que nous ferons ce que nous voudrons, mais parce que cela ajoute à ma
propre perplexité. On va être obligés de regarder tout cela
attentivement. Il y a encore d'autres organismes que nous devons entendre. Je
vous écoute et je vois que vous avez fait une démarche
sincère. La preuve, c'est que vous n'avez pas nécessairement une
conclusion unanime. Je peux vous dire que je prends cela en sérieuse
considération.
Il y a une question que je voudrais vous poser. Je vais peut-être
revenir là-dessus s'il me reste du temps, mais ce
président-là est absolument intransigeant. Il y a une question
que je voudrais vous poser. À l'article 105 du projet de loi, il y a un
pouvoir nouveau que nous définissons pour le ministre. Je vois que cela
a l'air de vous inquiéter légèrement, pas de
manière à créer un scandale, d'après ce que je
vois, mais, à l'article 105, vous n'avez pas parlé de ce
pouvoir-là. Ça, c'est quand une commission scolaire veut se
détacher d'une régionale. Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Ryan: Sans allusion à aucune situation
particulière, cela va de soi. Actuellement, s'il n'y a pas accord entre
les commissions scolaires concernées au sujet de toute la disposition
des actifs et des passifs, c'est-à-dire, au fond, de la décision
à prendre, nous restons dans le statu quo pour une période qui
menace d'être indéfinie. Dans le projet de loi, nous introduisons
une clé, vous l'avez sans doute noté. Nous disons: En cas
d'impossibilité d'accord ou de litige invincible entre les commissions
scolaires concernées, le ministre tranche cette partie-là. La
raison de ceci est double. Nous ne voulons pas que l'impossibilité d'un
accord sur le partage des actifs serve de prétexte pour empêcher
une décision légitime de se réaliser et,
deuxièmement, nous ne voulons pas que dans un endroit où, disons,
trois ou quatre commissions scolaires sur quatre ou cinq voudraient
procéder à l'intégration de leurs enseignements primaire
et secondaire, le veto d'une seule suffise à rendre cela impossible
indéfiniment.
Maintenant, je vous demande: Qu'est-ce que vous pensez de cet
article-là? Je ne sais pas s'il a retenu votre attention et qu'est-ce
que vous en pensez? Le trouvez-vous abusif, ou raisonnable, ou inutile, ou
redondant?
M. Latour: Je ne sais pas, M. Ryan, où un tel article
pourrait trouver application.
M. Ryan: Ha, ha, ha!
M. Latour: On peut deviner certaines situations. Nous n'avons pas
cru bon de nous prononcer sur le libellé de cet article probable-
ment parce que nous acceptions que le ministre puisse exercer, en somme,
dans certains cas litigieux, un droit de regard et d'intervention. Je pense que
la situation que vous évoquez peut être réelle, mais ce que
l'on espère, c'est que le ministre n'en fasse l'utilisation
qu'après consultation des partenaires de ladite commission scoiaire qui
pourrait demander l'application d'un tel article pour qu'éventuellement
le ministre amène les partenaires à une décision commune
plutôt qu'à un retrait unilatéral accepté de la part
du ministre. Nous croyons à cet esprit qui doit animer le ministre dans
ses décisions.
M. Ryan: Merci. Je pense bien que c'est comme cela que ceia se
passe dans la pratique, mais je suis content que vous ajoutiez ces
nuances-là. Peut-être qu'on nuancera davantage ce paragraphe de
manière à donner des assurances plus explicites quant aux
consultations préalables. J'en ai justement fait cette semaine encore
dans une région où il y a un litige semblable et, cette fois-ci,
cela a porté des fruits très intéressants. Je n'ai pas
encore commencé chez vous. Quand on va commencer pour le vrai, cela va
progresser, mais on laisse mûrir le fruit. Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Ryan: Je voudrais laisser une question à M. Lachapelle,
si vous me permettez, parce qu'il m'a déjà fourni des
éléments d'information extrêmement intéressants sur
les conditions réelles dans lesquelles se passe la vie quotidienne dans
les écoles aujourd'hui. Je serais intéressé à ce
qu'il nous raconte brièvement comment s'est fait le cheminement des
directeurs d'école, à sa commission scolaire, sur la question du
conseil d'orientation et j'aimerais aussi qu'il nous dise, au sujet du
comité d'école, si eux, les directeurs et directrices
d'école de Saint-Eusîache, acceptent l'idée d'un
comité d'école facultatif, en plus du comité
d'orientation? J'aimerais que vous précisiez comment vous en êtes
venus à cette position que vous exprimez. Évidemment, si Mme
Portugais veut, ensuite compléter de son côté j'en serai
ravi. Il y a toujours le problème de la présidence qui a un oeil
extrêmement sévère sur tout ce qui se passe ici.
M. Lachapelle: Puisqu'on a un problème de temps, je vais
être bref, quitte à susciter d'autres questions.
M. Ryan: On donnera cinq minutes à l'Opposition si on a
besoin de prolonger, M. le Président. Je pense que ce sont des questions
cruciales.
Le Président (M. Paré): Je n'ai rien dit, M. le
ministre, mais je vous demande quand même, si possible, parce qu'on doit
aussi respecter l'horaire... Il y a un autre groupe qui doit suivre.
Mais on va vous donner le temps de répondre correctement et
complètement à la question.
M. Lachapelle: Si j'ai bien compris, M. Ryan, c'était le
cheminement qui avait fait que nous avions changé notre position en
regard du conseil d'orientation. Dans un premier temps, dans le projet de loi
40, nous étions contre. Maintenant, nous sommes pour. C'est exactement
l'objet de votre question?
M. Ryan: Oui.
M. Lachapelle: Parfait! Entre autres, ce qui nous a grandement
influencés, c'est d'abord l'approche du projet de loi qui vient vraiment
définir des choses en disant à certains corps d'emploi: Vous
êtes des professionnels et on va vous laisser les décisions
à caractère professionnel. Ce qu'on donne aux parents comme
décisions... Évidemment, il y a des nuances à apporter. On
demande également des précisions. C'est que si vous avez
statué sur les orientations de l'école, qui sont des croyances,
qui sont des valeurs tout simplement. Déjà, cette approche nous
plaisait énormément.
Il y a peut-être un autre élément; le contenu qu'on
donnait comme fonctions au conseil d'orientation. Si ma mémoire est
bonne, dans le cadre du projet de loi 40 - je ne l'ai pas relu depuis le temps
- le conseil d'orientation, entre autres, pouvait faire des recommandations
à la commission scolaire, si jamais il y avait des difficultés
à l'intérieur de l'école. Nous, les directeurs, on ne
pouvait absolument pas entériner cela parce qu'on considère que
nous sommes les responsables de nos écoles et que ce sont des
décisions à caractère professionnel ou des recommandations
professionnelles.
Deuxièmement, c'est peut-être par le biais d'un autre
élément qu'on a changé d'idée. Il y a le fait que
dans votre projet de loi vous statuez de façon officielle en disant: Les
écoles, ce sont des entités qui dépendent
évidemment du ministère de l'Éducation, d'une commission
scolaire. Ce qu'on retrouvait toujours avant ou ce qu'on a connu il y a
peut-être 15 ans ou 20 ans, c'est que les écoles étaient
des succursales de la commission scolaire. Seulement le fait de
reconnaître les écoles comme des entités et qu'à ces
entités la commission scolaire puisse éventuellement
transférer d'autres pouvoirs, sans se déposséder,
toutefois, nous, comme directeurs d'école, on trouvait très
intéressant d'être reconnus, que notre institution soit reconnue
comme une composante très importante du système. On s'est dit
que, si ce plaisir est bon pour nous, il l'est sûrement pour les parents
aussi, le fait d'être reconnus de façon officielle dans certains
domaines comme les décideurs ayant, en fin de compte, un pouvoir
réel. C'est un peu tout le cheminement qui nous a amenés à
modifier notre position.
Évidemment, comme je vous le mentionnais,
on ne partira pas en campagne pour faire la promotion du conseil
d'orientation, mais, pour ces raisons, on penche un peu plus du
côté du: Oui, on est en faveur. Mais, chez nous, dans la pratique,
compte tenu de l'aide que notre commission scolaire nous a donnée depuis
1977 en termes d'élaboration de projets éducatifs, on est
très près de la frontière ou de la clôture. D'un
côté, on pourrait situer, par exemple, le pouvoir consultatif et,
de l'autre côté, le pouvoir décisionnel. Chez nous, on est
très près de cette clôture. Du côté
consultatif, nous pensons que les parents peuvent même s'appuyer sur la
clôture.
Vous nous faites sauter la clôture d'une certaine façon, en
disant: Sur certains aspects, les parents seront décisionnels. Ils
seront seulement de l'autre côté de la clôture et votre
projet de loi, toujours avec certaines bonifications, va faire en sorte que les
parents, dans le cadre décisionnel qu'ils auront, vont rester quand
même très près de cette clôture. Tout cela fait en
sorte qu'on a changé notre fusil d'épaule.
Quant à la question concernant le deuxième aspect, les
comités d'école, j'aimerais que vous la reprécisiez. Vous
me demandiez pourquoi on pouvait être en accord ou en désaccord
avec l'abolition?
M. Ryan: Que pensez-vous de la disposition du projet de loi? Nous
disons que cela pourra exister si une majorité de parents en
décident ainsi. Il y en a qui nous disent: On n'en veut pas deux, un
c'est assez. Il y en a qui disent: On devrait l'enlever complètement. Je
voulais savoir ce que vous en pensiez.
M. Lachapelle: Ce que nous en pensons, c'est qu'on pourrait
éventuellement prendre deux positions. Ce que nous vous disons, c'est
que cela va vraiment dépendre du fonctionnement et de la composition du
conseil d'orientation.
M. Ryan: D'accord. (17 h 30)
M. Lachapelle: À titre d'exemple, si le conseil
d'orientation était composé de 15 ou 18 parents qui se
réunissaient une fois par mois, nous dirions que nous n'avons pas besoin
du comité d'école, que ce serait vraiment un dédoublement.
Comme le mentionnait Mme Portugais tout à l'heure, il y a quand
même des limites au bénévolat aussi. Si la composition et
le fonctionnement du conseil d'orientation allait dans ce sens, nous, en termes
de participation... En tout cas, l'aspect décisionnel, le conseil
d'orientation pourrait prendre des décisions. Pour ce qui est de tous
les autres objets qui sont consultatifs, on aurait un groupe valable qu'on
pourrait consulter au même titre que nos comités d'école.
À ce moment-là, nous dirions que c'est dédoubler le
travail que de travailler avec un comité d'école et un conseil
d'orientation. Par contre, si le conseil d'orientation se composait de cinq,
six ou huit personnes, qui devaient se réunir une fois ou deux par
année pour prendre des décisions, les grandes orientations de
l'école, on tiendrait absolument à l'existence du comité
d'école. Je me dis qu'il faut un groupe de parents avec lequel cheminer,
de qui on souhaite des avis et qu'on souhaite également informer. Selon
le fonctionnement et la composition d'un conseil d'orientation, on pourra aller
dans un sens ou dans l'autre.
Le Président (M. Paré): Merci beaucoup. La parole
est maintenant à Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Biackburn: Merci, M. le Président. Madame, messieurs,
je voudrais vous souhaiter la bienvenue au nom l'Opposition officielle et vous
dire, comme le ministre, que je suis heureuse de constater qu'il semble
régner beaucoup d'harmonie à votre commission scolaire et que
vous permettez l'expression d'opinion des différents groupes, même
si, comme on a pu le constater, iîs peuvent être divergents. Si
vous me le permettez, je vais passer assez rapidement sur votre mémoire
et soulever quelques questions touchant vos propositions.
D'abord, à l'article 9, vous soulevez une question importante,
qu'on n'a pas beaucoup abordée parce que, dans un projet de loi comme
celui-là, il y a 579 articles et il y en a un certain nombre sur lequel
il faudrait presque revenir de façon systématique. Vous le
soulevez de façon intéressante, parce que c'est un
précédent au Québec. Une telle structure qui vient
élire quelqu'un dans une circonscription pour représenter une
minorité serait un précédent au Québec. Vous avez
raison de dire que cela peut créer des précédents dont on
envisage difficilement l'application. Est-ce qu'un jour il n'y a pas quelqu'un
ou un groupe qui réclamera la même chose pour l'Assemblée
nationale, qui demandera la même chose au conseil municipal? Cela
pourrait être aussi légitime. Je pense que vous avez raison de
soulever cette question, car on n'a pas encore eu l'occasion de commenter les
effets un peu pervers d'une telle disposition.
Lorsque vous parlez des pouvoirs du ministre, et le ministre ne s'est
pas longuement étendu sur cette partie de votre mémoire, vous
êtes assez sévère. Vous dites que ce projet de loi
concentre un pouvoir que l'on considère comme excessif entre les mains
du ministre et qu'il vous apparaît utile de souligner que, d'une part, le
projet favorise la centralisation des décisions entre les mains du
ministre et du gouvernement et que, d'autre part, il propose la
décentralisation de certains pouvoirs de la commission scolaire vers les
parents et vers les écoles. Également, vous n'avez pas
souligné le fait que le ministre, qui s'arroge plus de pouvoirs en
même temps, ne se fait pas à lui l'obligation de consulter. Pour
justifier cette décision de ne pas inclure dans la loi l'obligation
au ministre de consulter sur l'établissement de
règlements, par exemple, le ministre nous dit: On a adopté une
loi qui, somme toute, fait obligation à tous les ministres de publier
les règlements de manière que tous les gens puissent faire
connaître leur opinion sur ces questions. Cependant, entre la
possibilité d'émettre une opinion et l'obligation faite au
ministre de consulter, il y a une marge. Vous ajoutez, d'ailleurs, et vous
concluez sur cette question, que c'est là votre plus vive
inquiétude et le principal motif de votre opposition à certaines
parties de ce projet de loi au sujet desquelles, d'ailleurs, vous faites des
observations.
Je ne ramènerai pas la question de tout à l'heure, celle
que j'ai posée aux gens qui vous ont précédés:
Est-ce que vous croyez que c'est toujours utile une commission scolaire? Il
n'en demeure pas moins que ia situation a quelque chose de préoccupant.
Le ministre disait: Il vous reste beaucoup de pouvoirs. Il citait !a CECM et
l'importance du budget qu'elle a à gérer. J'ai
vérifié auprès de l'hôpital de Cnicoutimi hier
quelle était l'importance de son budget et auprès de la
commission scolaire, de même que les règles qui régissaient
les activités de l'un et de l'autre. À l'hôpital de
Chicoutimi, le budget est de 63 000 000 $ et le revenu autonome d'environ 7 %.
Il émet toutes les deux semaines quelque 2500 paies. Cela comprend le
personne! permanent et occasionnel. Il dessert toute la région pour
certains programmes. La commission scolaire a un budget de 54 000 000 $ et
environ, 2 000 000 $ de revenu de taxes, 524 enseignants, 164 soutiens eî
84 autres, aux alentours do 800 personnes, pas tout à fait. Cela finit
par se ressembler et les deux ont sensiblement les mêmes structures
administratives, c'est-à-dire les mômes pouvoirs, les mômes
politiques administratives et les mêmes contraintes, je dirais, par
rapport aux conventions collectives qui sont, comme on le sait, nationales dans
les deux cas.
J'aimerais cependant revenir sur la question du comité
d'école et du conseil d'orientation. Vous dites, en page 12 de votre
mémoire: II ne nous apparaît pas pertinent que le conseil
d'orientation ait le pouvoir de décider des orientations de
l'école, parce que, faute d'avoir une bonne définition de
ça, cela pose des problèmes. Il en va de même en ce qui a
trait à la conduite des élèves. Qu'arr!ve-t-ll si le
directeur de la commission scolaire est en désaccord avec le
règlemenî adopté? Mais, à la page suivante - et
j'aurais voulu comprendre - vous vous dites d'accord avec le fait que l'on
transfère les pouvoirs prévus comme devant être
exercés par le conseil d'orientation, que ces pouvoirs pourraient
être transférés au comité d'école. Est-ce que
cela comprend les deux pouvoirs que vous citez en page 12?
M. Latour: Je vais répondre en premier à cette
question. Ce que je voudrais dire à ce moment-ci et bien préciser
pour chacun des membres de cette commission, c'est que le mémoire
reflète le vécu de notre commission, scolaire et que nous n'avons
par recherché à nous positionner dans toute la province,
là où peuvent se vivre des situations totalement
différentes de celles que nous vivons. Nous vivons une situation de
concertation et ce que ce mémoire dénote, c'est qu'en vivant une
démarche de concertation et de respect pour chacun des intervenants, il
s'avère que les intervenants ne recherchent pas, dans un tel contexte,
à s'approprier des pouvoirs pour finalement réussir à
influencer un certain nombre de décisions prises par ceux qui sont les
élus du peuple.
Donc, ceci doit transpirer continuellement à travers l'analyse
que l'on fait de notre document et, lorsque l'on dit que nous envisagerions
d'une façon très favorable la transmission de ces pouvoirs au
comité d'école, ce serait bien entendu en lui laissant ce
rôle consultatif qu'il considère conserver. Il ne veut pas, par
cette démarche, s'approprier des devoirs, des obligations ou des
pouvoirs décisionnels. Le sens de notre texte doit donc être
interprété comme une délégation de pouvoirs, mais
strictement sur le pian consultatif.
Mme Blackburn: Bien. Sur la distinction, je dirais, très
grande qu'il faut faire entre le conseil d'orientation et le comité
d'école, c'est la composition du conseil d'orientation qui permet
d'asseoir à une même table les principaux intervenants, les
principaux acteurs, finalement. C'est ce qui me faisait pencher en faveur d'une
telle formule que je trouve dynamique au sein d'une école parce qu'elle
oblige un peu les gens à se parier, à échanger. J'irais
même jusqu'à dire, par rapport à ce qui est prévu et
à ce que vous notez quant au pouvoir de décider des orientations
de l'école et de la conduite des élèves, qu'ii y a moins
de danger, de risques d'écart entre la direction de l'école et ce
qui est préconisé par le conseil d'orientation du moment que tout
le monde est assis ensemble. Je me demandais si cela n'était pas une
formule heureuse, finalement, et qui obligeait à plus de concertation
entre les différentes parties. C'est pourquoi vous me voyez un peu
étonnée. Est-ce qu'ii ne serait pas aussi pertinent de maintenir
les deux niveaux, c'est-à-dire les deux organismes? Mais j'aimerais
entendre quand même l'explication de Mme Portugais.
Mme Portugais: Concernant le conseil d'orientation, les raisons
pour lesquelles les parents de notre commission scolaire le rejette, c'est que
les parents sont des bénévoles dans un système scolaire et
on est engagé dans ce système à titre consultatif. Ce qui
nous préoccupe quant à un conseil d'orientation où
seraient assis les différents intervenants du milieu école, c'est
le fait que les parents perdraient des personnes-ressources, une structure qui
nous est propre. Nous avons une fédération de comités
de
parents dans la province de Québec qui nous dessert directement
depuis quinze ans, nous, les parents, par des colloques, des congrès, de
ia documentation. Dans un conseil d'orientation, tout adulte aurait un soutien,
sauf les parents. Les enseignants auraient leur syndicat, les directions leur
fédération, les cadres le soutien de leur commission scolaire.
Nous, les parents, qui aurions-nous comme soutien? On a déjà un
système de soutien et, si on acceptait le conseil d'orientation, ce
serait rejeter le soutien que nous offre notre fédération de
comités de parents. On est une structure bien établie, on
fonctionne bien. Cela fait quinze ans qu'on fonctionne dans cette structure.
Cela a été difficile au début. Aujourd'hui, dans notre
commission scolaire chez nous, comme le disait M. Latour tantôt, on se
base sur notre vécu. On fonctionne bien avec le comité
d'école. Alors, on ne voit vraiment pas la nécessité de
changer une structure déjà bien établie,
déjà bien rodée, efficace, pour une autre dont les
règlements ne sont même pas établis.
Mme Blackburn: Bien. Une autre question et celle-là,
probablement, au président, M. Latour ou M. Fleury, l'une ou l'autre de
ces personnes. Cela touche le chapitre sur l'enseignant. Vous dites que
l'amélioration de la qualité de l'enseignement passe, à
votre avis, par ia responsabilisation des enseignants et vous vous dites
d'accord et favorable avec la définition des devoirs qui apparaissent
à l'article 19, plus particulièrement aux articles 16 et 19,
parce qu'il y a les droits et devoirs. Dans les droits, il y a peu de choses.
C'est celui de refuser, de ne pas enseigner la religion. À l'article 19,
on voit apparaître une série de devoirs. Touchant cette question,
vous dites que c'est une façon d'établir la
crédibilité des enseignants et leur respectabilité en
édictant des standards professionnels, des programmes de formation, des
règles d'éthique, de conduite et des sanctions. J'aimerais un peu
avoir votre avis là-dessus. En quoi cet article 19... Bien que je ne
sois pas en désaccord, je me demande simplement si ces devoirs ne
devraient pas s'appliquer aux différents partenaires, au ministre
d'abord par rapport aux obligations qu'il aurait de définir ce qu'est le
service éducatif et ce que sont ses obligations quant à la
gratuité et à l'accessibilité. Mais ces devoirs, qui sont
indiqués pour l'enseignant, pourraient l'être également
dans le cas du directeur d'école, du directeur des services
pédagogiques, dans le cas des autres instances professionnelies ou
administratives. Comment parler de sanctions par rapport à ces devoirs
qui sont dictés là? Moi, je trouve toujours qu'il y en a deux sur
lesquels j'aurais peine à porter un jugement quant à la
compétence professionnelle des personnes concernées. (17 h
45)
Le troisième paragraphe dit de prendre les moyens
appropriés pour développer, chez les élèves, le
respect des droits de la personne. Comment demander à l'enseignant
d'assumer cette responsabilité dans le cas d'écoles
confessionnelles, où le projet éducatif est entièrement
confessionnel? Vous avez de plus en plus d'enfants et de parents qui
choisissent la morale. Comment évaluer l'enseignant sur cette partie de
ses devoirs, alors que les ressources consacrées à l'enseignement
religieux sont clairement identifiées, les qualifications
exigées, qu'il y a un service compétent au sein de ia commission
scolaire et qu'en ce qui concerne l'enseignement moral, dit neutre ou sans
épithète - quoique la morale n'est jamais neutre - on ne retrouve
aucune spécification quant à cette obligation?
Le septième également, c'est d'appliquer - et je trouve
toujours qu'on a mis là-dedans tout ce qu'il fallait, et c'est la
responsabilité, le devoir de l'enseignant - les décisions et les
règlements du gouvernement, du ministre, de la commission scolaire, du
conseil d'orientation et du directeur d'école. Si je connais un peu ce
que cela peut représenter, combien de pouces de cahiers de directives,
de cahiers à anneaux de huit pouces, quelque chose comme cela, j'ai de
la difficulté à voir comment on peut évaluer les
enseignants par rapport à ce genre... Je peux partager l'avis que
l'essentiel des devoirs qui apparaissent là sont de l'ordre du sens
commun et d'un minimum de connaissances professionnelles, mais quand
même, comment?
M. Latour: Je vais peut-être amorcer un
élément de réponse. À ce moment-ci, ce qu'il faut
admettre en ce qui concerne ce chapitre, c'est que nous avons cru bon de porter
notre réflexion au delà du libellé de l'article 19. Je
pense que vous comprendrez avec moi que l'éducation de nos jeunes est
une chose extrêmement importante, sinon la plus importante pour des
parents. En fait, il faut transmettre non seulement l'enseignement, mais aussi
des valeurs aux enfants, et bien souvent, l'école est ce site de
transmission pour plusieurs de nos familles. Nous croyons donc que ceux qui
doivent assumer une telle charge, et cela représente une partie
très importante du budget de notre province que d'assumer une
qualité d'éducation... Cette éducation est
véhiculée par des gens qui ont des responsabilités
à assumer et que donc ces regroupements d'enseignants, de professionnels
doivent non seulement être compétents, mais doivent aussi
répondre à des règles d'éthique. Vous savez qu'il
existe, pour plusieurs professions, des mécanismes, des associations qui
assurent la qualité des actes qui sont livrés par des mesures qui
sont autres que celles qui impliquent strictement les règles
syndicales.
Alors, nous croyons dans le milieu de l'éducation, que la
profession d'enseignant doit être revalorisée à
l'égard de son sens professionnel, mais que cette reconnaissance
professionnelle doit être assortie, en même temps, de l'obligation
pour ces regroupements d'assurer,
par des règles d'éthique qui peuvent aussi inclure des
sanctions, la qualité de l'acte qui est livré. Je pense qu'en
matière d'éducation, cela nous touche tous. Il est donc
très important que, si l'on confère à cette masse
d'enseignants un caractère professionnel, ils soient aussi responsables.
Parce qu'être professionnels c'est aussi, dans mon esprit, assumer des
responsabilités qui vont au delà de strictement livrer un
enseignement à nos jeunes. Je ne sais pas si vous voulez d'autres
éléments de réponse de la part de...
M. Lachapelle: Tout dépend de votre degré de
satisfaction, madame.
Mme Blackburn: Bien.
Le Président (M. Paré): Je vous demanderais, Mme la
députée de Chicoutimi, de conclure très rapidement.
Mme Blackburn: Oui, M. le Président. Mesdames, messieurs,
il m'a fait plaisir de vous accueillir à cette commission. J'ai
trouvé assez intéressantes les explications que nous a fournies
Mme Portugais quant au choix que vous avez fait de privilégier le
comité d'école au conseil d'orientation. Je présume que
c'est une opinion que l'association provinciale des parents viendra
probablement ici à nouveau nous livrer.
Mme Portugais: Leur position est différente de la
nôtre. Par contre, on revient toujours à notre vécu. Chez
nous, c'est comme cela qu'on se sent.
Mme Blackburn: Très bien. Je vous remercie infiniment.
Le Président (M. Paré): M. le ministre maintenant,
en concluant aussi très rapidement.
M. Ryan: Oui. Je remercie la Commission scolaire de
Saint-Eustache de son témoignage très intéressant,
très subtil pour la commission et dont j'ai particulièrement
apprécié, comme je l'ai indique plus tôt, la saine
diversité. En même temps, j'ajoute que j'ai apprécié
la clarté des réponses. Merci beaucoup.
Le Président (M. Paré): Je vous demanderais aussi
de conclure, s'il vous plaît!
M. Latour: Je tiens tout simplement à exprimer, au nom de
la commission scolaire, du comité de parents et des directeurs
d'écoie de notre commission, la joie procurée par l'accueil que
vous nous avez réservé cet après-midi. Je pense que la
Commission scolaire de Saint-Eustache a toujours voulu présenter,
lorsque l'occasion s'y prêtait, une image diffuse des intervenants de son
milieu et ne pas représenter uniquement l'opinion des élus. Je
pense qu'une commission scolaire, une vraie, c'est cela: ce sont des parents,
ce sont des commissaires d'écoles, ce sont des enseignants et ce sont
aussi des directeurs d'école. Lorsqu'on peut réunir ces
différents intervenants autour d'une table, on peut ne pas avoir au
départ tous la même opinion, mais on peut tous travailler dans la
même direction pour réussir à faire des choses qui sont
belles et qui sont grandes. Merci beaucoup.
Le Président. (M. Paré): Alors, au nom de tous ies
membres de la commission, je vous remercie beaucoup de votre importante
contribution. Je vous souhaite un bon voyage de retour. J'inviterais maintenant
ies membres de la commission scolaire régionale de la Chaudière
à s'avancer à la table, ici, en avant.
À l'ordre, s'il vous plaît!
J'inviterais les membres de la commission à bien vouloir
reprendre leur place.
Donc, à l'ordre, s'il vous plaît!
Le commission reprend ses travaux. Je souhaite la bienvenue aux
représentants de la commission scolaire régionale de la
Chaudière et, pour ne pas avoir à vous interrompre lorsque aurez
commencé, je vais demander immédiatement certains consentements
aux membres de la commission. Premièrement, un consentement pour pouvoir
dépasser 18 heures. Étant donné que nos invités
arrivent, il faudrait bien leur donner le temps nécessaire. Donc, il me
faut un consentement pour dépasser, en fonction de notre
règlement, 13 heures.
Mme Blackburn: Consentement.
Le Président (M. Paré): Consentement.
En voyant des gens qui se sont ajoutés à la commission et
à qui je souhaite la bienvenue, je voudrais tout de suite, au cas
où ils demandent la parole, un consentement pour que les
députés présents à la table, même s'ils ne
sont pas membres, puissent intervenir.
Consentement?
Mme Blackburn: Volontiers, M. le Président.
Le Président (M. Paré): Donc, ceci étant
dit, je vous informe encore une fois des procédures que nous allons
essayer de suivre, à la minute.
Oui, M. le député d'Arthabaska.
M. Gardner: Est-ce qu'on pourrait connaître les nouveaux
députés qui se sont ajoutés, ou est-ce que vous pourriez
les nommer et dire de quel comté...
Le Président (M. Paré): M. le député
d'Arthabaska, s'il vous plaît, je vous demanderais...
M. Gardner: Et on va être surpris de voir
que c'est la Beauce...
Le Président (M. Paré): ... étant
donné l'heure, de ne pas retarder les travaux. Je pense que vous
connaissez vos collègues, sinon je vous les présenterai
après.
Ceci étant dit, je souhaite encore la bienvenue aux gens de la
commission scolaire régionale de la Chaudière, en vous rappelant
que les débats doivent durer 60 minutes. Je vous invite donc à
essayer de comprimer en 20 minutes pour permettre aux deux groupes d'avoir
chacun 20 minutes pour pouvoir échanger avec vous.
Donc, M. le président, je vous souhaite la bienvenue et je vous
invite à nous faire la lecture ou la présentation de votre
mémoire et à nous présenter les gens qui vous
accompagnent. La parole est à vous.
Commission scolaire régionale de la
Chaudière
M. Roy (Florent): Merci, M. le Président. Il me fait
plaisir de vous présenter notre délégation. À ma
gauche, M. Charles-Henri Lecours, commissaire et président du
comité du plan à la régionale Chaudière; à
ma droite, M. Roger Carette, directeur général de cette
commission régionale Chaudière, et, à mon extrême
droite, M. Pierre Paré, qui est le directeur des services financiers
à la commission scolaire.
Nous avons quelques commissaires qui ont daigné nous accompagner
et nous avons aussi quelques gestionnaires, et nous en sommes fiers, nous
apprécions cette démarche-là.
Nous apprécions beaucoup l'occasion qui nous est donnée
par le gouvernement et l'Assemblée nationale de nous adresser aux
députés membres de cette commission, au moment où ils et
elles étudient ce projet de loi que nous considérons comme
majeur. Nous vous en remercions sincèrement.
M. le Président, nous allons procéder de façon un
peu différente des autres commissions, en ce sens que nous n'allons pas
vous présenter notre mémoire, qui est quand même assez
long. Nous allons vous résumer, en quelque sorte, les principales
critiques que nous en avons tirées.
Tout d'abord, je voudrais vous situer notre commission scolaire dans
l'espace, le temps et dans son environnement social. Par la suite, M.
Charles-Henri Lecours vous dira comment nous avons élaboré nos
positions relatives au projet de loi 107, et M. Carette vous présentera
une synthèse des opinions d'hommes et de femmes de chez nous qui ont
accepté de remplir les fonctions et d'assumer les responsabilités
de commissaires d'écoles.
Tout d'abord, laissez-moi vous situer géographiquement notre
commission scolaire. Nous sommes sur la rive sud bornés par Sainte-Marie
et les frontières américaines. Notre commission scolaire regroupe
42 municipalités dans Beauce et Bellechasse. Nous entretenons de
très bonnes relations avec ces 42 municipalités. (18 heures)
Nous avons une dizaine d'ententes à long terme au niveau
scolaire-municipal, telles que la location des arenas, des piscines et autres
aménagements sportifs. Nous avons, également, plusieurs ententes
annuelles ou ad hoc. Laissez-moi vous dire que nous avons, également,
dans notre territoire, trois MRC: les MRC de Robert-Ciiche, de Beauce-Sartigan
et des Etchemins. Ces trois MRC sont sur notre territoire. Nous avons quelques
municipalités qui sont de la Nouvelle-Beauce et de la MRC de
Lac-Mégantic, ou quelque chose de même; ce sont quelques
écarts, quelques municipalités qui ne sont pas des MRC de
Robert-Cliche, de Beauce-Sartigan et des Etchemins. Nous entretenons
également avec ces MRC de très bonnes relations. À titre
d'exemple, laissez-moi vous dire que nous sommes présentement à
la préparation du colloque socio-économique Beauce-Sartigan.
Nous avons également cinq commissions scolaires primaires avec
lesquelles nous entretenons des relations constantes et très
fructueuses. Nous rencontrons à plusieurs reprises les présidents
de ces commissions, les directeurs généraux, les directeurs des
services financiers, les directeurs des services de l'enseignement, le
secrétaire général; nous entretenons des protocoles
d'échanges de services. Également, nous avons deux institutions
privées secondaires avec qui nous entretenons une saine
compétition. Ces deux institutions privées desservent environ 5 %
de notre clientèle, ce qui peut représenter à peu
près 300 élèves. Nous les intégrons à
plusieurs programmes d'activités culturelles, sportives, etc.
Également, nous avons un collège privé sur notre
territoire avec qui nous entretenons de bonnes relations. Nous desservons une
clientèle d'environ 5700 élèves au secondaire et nous
recevons des inscriptions aux adultes de l'ordre de 13 000 annuellement.
C'est vous dire que notre commission scolaire est très
impliquée dans son milieu. Nous faisons partie du Conseil
économique de Beauce, du Groupement économique de Beauce-Centre,
de ia Chambre de commerce, du Camp musical de Grande-Coudée, de la
Fondation du mérite scolaire qui, soit dit en passant, est née de
ia volonté de la Commission scolaire régionale de la
Chaudière.
La Commission scolaire régionale de ia Chaudière a ses
propres caractéristiques, vous vous en doutez bien. Étant
donné qu'on est situé en Beauce et Bellechasse, vous avez saris
doute des doutes quant à l'audace et l'originalité que nous
pouvons avoir en étant situé dans ce territoire. Incidemment,
nous sommes la première commission scolaire régionale au
Québec, avant même le rapport Parent et la Révolution
tranquille.
En ce qui a trait au domaine des innovations, eh bien, nous sommes
innovateurs dans plusieurs services comme le service des stages,
système coopératif, informatique éducative,
siège social et bien d'autres encore. Quant à notre performance
administrative, nous la jugeons très bonne et notre situation
financière n'en est pas moins bonne, non plus. Laissez-moi vous dire en
passant que nous ne sommes pas parmi les quatorze commissions scolaires
déficitaires dans le domaine du transport.
En fait de relations de travail, on peut vous dire que,
également, nous sommes au beau fixe. En performances éducatives
nous avons une très grande satisfaction puisque nous nous situons dans
le premier dizième d'élèves et ce, depuis environ une
vingtaine d'année. Mais notre plus grande satisfaction, c'est de
constater nos taux d'acceptation, de persévérance et de
réussite dans Ses cégeps. Au niveau culturel et musical,
laissez-moi vous dire que, encore tout dernièrement, l'harmonie de la
polyvaiente Saint-Georges allait décrocher la médaille d'argent
au dernier Festival international des harmonies scolaires qui se tenait
à Montréal. Nous avons, également, des productions
littéraires et des éditions annuelles des oeuvres des
élèves. En sports, notre réputation en gymnase,
voiiey-ba!!, football et badminton n'est plus à faire, non plus. Une
vingtaine de nos employés ont publié au cours des récentes
années. Alors, c'est vous dire que l'implication sociaie est une
caractéristique majeure chez notre personne! et nous en sommes
très fiers.
Alors, vous voyez, M. le Président, en Beauce, Beilechasse, on
essaie de faire la promotion de l'écoie publique en étant bon, en
étant bon plus qu'en le disant. D'ordinaire, ceia porte plus de fruits.
De plus, les fruits se conservent mieux. M. le Président, nous estimons
que notre régionale est très performante et qu'elle donne grande
satisfaction à notre population. Toutes nos enquêtes le
démontrent. C'est pour cela, et c'est pour les élèves et
la qualité des services que nous voulons la garder. Les commissaires de
notre territoire, les parents, les citoyens sont également très
satisfaits des écoles et des commissions scolaires primaires dans notre
milieu. Nous espérons que ce gouvernement, libéral de par sa
philosophie, ne touchera pas aux institutions que nous avons choisi de nous
donner et de garder.
Si je me permettais une petite exhortation personnelle, M. le
Président, Mmes et MM. les députés, je vous dirais ceci:
Faites donc confiance aux gens un peu plus que dans le projet de loi.
Faites-leur confiance. Faites confiance au milieu. Faites confiance aux
personnes, aux élus locaux. À la longue, vous verrez, c'est la
seule philosophie sociale qui rapporte. Maintenant, M. le Président, je
voudrais céder la parole à M. Charles Lecours, qui va vous
entretenir quelque peu.
M. Lecours (Charles-Henri): M. le Président, M. le
ministre de l'Éducation, Mmes et MM. les députés. Les
femmes et les hommes commissaires de notre régionale ont résolu
de s'adresser à vous sur le projet de loi 107 en raison de l'importance
des changements ou des consécrations de changement qu'ils y ont vu. A la
commission scolaire régionale de la Chaudière, nous nous sommes
donné un comité du plan formé de quatorze commissaires et
de quatre gestionnaires. Le comité est responsable de faire des
recommandations au conseil sur toute matière pédagogique, ies
plans d'organisation - celui des jeunes et celui des adultes - les
régimes pédagogiques, ies priorités de la commission, etc.
Ce n'est pas par hasard que le conseil des commissaires a demandé
à ce comité de préparer l'ébauche des positions du
milieu et de tous les comités de notre corporation sur les lois 106 et
107. Le comité du plan est celui qui est le plus près et
peut-être le plus sensible aux besoins des éièves ainsi
qu'à la qualité des services éducatifs.
Notre comité a consacré plus d'une vingtaine d'heures
à l'étude du projet de loi 107. D'autre part, !e conseil des
commissaires a débattu du fond à deux reprises, ii faut
considérer, de plus, les débats que nous avons menés dans
nos commissions scolaires primaires. Nous avons pris très au
sérieux les enjeux en cause dans ces projets de révision de la
Loi sur l'instruction publique. Sur les 60 positions que nous présentons
dans le mémoire, il y a eu unanimité sauf pour deux. En ce qui
concerne le projet de loi 106, nous intégrons nos recommandations
à celles que la Fédération des commissions scolaires vous
soumettra.
M. le Président, nous avons prétendu que nous avions une
contribution originale et fondamentale à vous apporter. C'est ce qui a
justifié notre travail, notre mémoire et notre présence
ici. Le directeur général de notre commission, M. Carette, fera
maintenant synthèse de nos opinions. Merci.
M. Carette (Roger): M. le Président je voudrais d'abord
vous dire qu'avec les moyens dont je dispose je vais tenter, au meilleur de ma
connaissance, de résumer l'opinion des femmes et des hommes qui sont
commissaires dans notre territoire sur l'ensemble de la loi. Avec très
peu de moyens, dans une commission scolaire comme la nôtre, mais avec
énormément de bonne foi et sans prétention, on s'est
attaqué à la critique de ce qu'on appelle l'esprit de la loi. Le
mémoire que nous avons déposé comprend nos opinions sur ce
que je vais appeler !a grosse plomberie de ia loi. On a essayé de
regarder par delà cette plomberie, grosse ou fine, quel était
l'esprit de cette loi et on a essayé de se poser la question à
savoir si elle répondait au plus grand besoin de ia communauté
québécoise actuelle. On a pensé que c'était
important, M. le Président, parce que si cette loi vit aussi longtemps
que sa mère, quand elle sera remplacée par une autre loi de
l'instruction publique, nous serons en 2135. J'aurai eu 20 successeurs et sans
doute vous
également, M. le Président.
C'est important de regarder une loi dans son esprit parce que, dans une
communauté et dans un réseau comme le nôtre, la loi est
là, mais elle a des fils: les règlements, les normes. Elle
génère chez les hommes et les femmes politiques, chez les
fonctionnaires dont je suis - il y en a toute une série d'autres, si
vous voulez - un vécu, des valeurs et une tradition. C'est sous cet
angle-là qu'on a essayé de regarder la loi.
Pour nous, les gens de Beauce et de Bellechasse, le but d'une loi est de
faire deux choses: c'est de garantir des droits aux citoyens quels qu'ils
soient et quel que soit leur âge et, deuxièmement, c'est de
répartir les responsabilités, j'aimerais mieux dire les
rôles sociaux des institutions que le législateur crée. On
est conscients que ce que l'on voulait faire est bien gros et bien tard, mais
on a quand même tenté de le faire. On est également
conscients qu'une loi n'est pas l'acte d'un ministre, ce n'est pas l'acte non
plus d'un gouvernement, c'est l'acte du législateur. Si je
résumais d'une façon que je vais dire grossière,
très grosse, l'opinion des commissaires de chez nous relativement
à la garantie des droits que cette loi assure aux citoyens en
matière d'éducation primaire et secondaire, on aurait le
goût de vous donner la note "bien". Pour l'ensemble, notre mémoire
ne répète pas nos accords. Sur le fond de la loi, on dit
généralement nos désaccords. Pour ce qui est du
deuxième rôle d'une loi, le partage des responsabilités ou
le partage des rôles - ce qui est mieux poser la question à notre
point de vue - on vous donne une note supérieure au résultat de
passage des examens au primaire et secondaire, mais un peu moins que "bien",
à notre point de vue.
Vous savez, vu de la Beauce - avec les lunettes, les télescopes
et les microscopes que l'on peut avoir - la loi de l'instruction publique,
à l'origine, la vieille Soi mère de 1841, profondément
changée par l'arrivée de la loi créant le ministère
de l'Éducation, cela faisait fondamentalement une chose, telle que nous
la voyons: le législateur partageait les responsabilités de
l'éducation primaire et secondaire entre, d'une part, le ministre de
l'Éducation puis, d'autre part, les commissions scolaires. C'est bien
évident que le vécu des deux dernières décennies a
changé un peu cet esprit original et pas nécessairement en bien,
tel que vu par nous. Tranquillement - je ne dirai pas le ministre, surtout pas
le titulaire actuel car ce ne sont pas ses intentions - le ministère
s'est placé en situation de "subalterner" les commissions. On a
l'impression que dans la loi 107 cette recherche de "subalternation" est encore
présente. On n'est pas sûr que le législateur veut vraiment
partager entre, d'une part, les commissions et, d'autre part, le ministre de
l'Éducation les responsabilités en matière
d'éducation.
Les gens de chez nous ont été fortement
impressionnés par la tenue des états généraux au
Québec en 1985, événement majeur, s'il en est un, dans les
réseaux primaire et secondaire. Pour la première fois, les grands
intervenants nationaux se voyaient ensemble et simultanément, sans se
passer la claque, sans se dire de bêtises. Ils n'ont pas dit des grandes
choses communes. C'était une première. Pour la première
fois ils disaient des choses qui se ressemblaient. Le ministère de
l'Éducation, la CEQ, la Fédération des commissions
scolaires et tous les autres groupements disaient la même chose. On
essaie de donner à notre ressemblance et à notre dimension un
suivi à cela. On a retenu, des états généraux, une
relative satisfaction de la communauté québécoise et de
ses réseaux primaire et secondaire mais une exhortation à la
responsabilisation des personnes et des institutions au partenariat entre
celles-ci et à la stabilité.
Quant on a lu la loi, on s'est demandé ceci. L'auteur, le parrain
et, peut-être mieux, le rédacteur du projet a-t-il visé ces
cibles-là? Est-ce que la loi 107 est une loi qui fait des institutions
que sont l'école et la commission des institutions plus responsables,
plus stables et plus partenaires? De façon générale, on
n'est pas tout à fait satisfait de la loi à ce sujet. Je vous
donnerai juste des commentaires sommaires là-dessus. À notre
point de vue, il y a trois grands articles dans la loi: l'article 35, l'article
191 et celui qui devrait précéder le 423. Ce n'est pas tout
à fait l'article 422 qui précède l'article 423. Ce sont
ces articles par lesquels le législateur va dire à
l'école: Voici ton rôle, à la commission: Voici ton
rôle, et au ministre de l'Éducation: Voici ton rôle. (18 h
15)
Concernant l'article 35, nous avons une grosse question. On a envie de
dire: C'est vous qui devriez nous questionner, mais on va vous poser une
question. Je pense que c'est une colle, une question de dix points. Qui est
détenteur, dans l'esprit de la loi, de l'acte d'établissement de
l'école? C'est le comité d'orientation? C'est le directeur de
l'école? C'est le personnel de l'école? Qu'est-ce qu'une
école? Qui est-ce? On sait qui a la charte de la commission, c'est le
conseil des commissaires.
Une autre observation sur l'article 35. On trouve que le projet de loi
est bien court et quelquefois hésitant, et qu'il devrait se compromettre
davantage sur le rôle de l'école et de la commission en
matière d'éducation des adultes. Il y a un discours administratif
nouveau, majeur, important, qui fait pression sur les commissions scolaires.
C'est l'harmonisation, voire même l'intégration des adultes. Il y
a énormément d'hésitation, nous semble-t-il, et ce,
à plusieurs égards. Si j'en ai l'occasion, j'essaierai de
profiter tantôt d'une réponse à une question pour vous dire
combien on trouve qu'il y a des hésitations là-dedans.
En ce qui concerne l'article 191 - le deuxième des plus gros
articles de la loi, à mon
point de vue - nous préférerions qu'on y parie de
clientèles plutôt que. de personnes. On souhaiterait que l'article
19 'i parle de services éducatifs de qualité, plutôt que de
services éducatifs. Cela met de la pression sur l'institution sociale
qu'est la commission scolaire, pour qu'elle offre quelque chose de
qualité. Finalement, on souhaiterait que l'article 191 ne fasse pas
allusion seulement aux droits des personnes ou des clientèles, tels que
définis par la loi. On interprète la commission scolaire comme
étant une institution sociale qui devrait être suffisamment forte
pour être capable d'interpréter elle-même les droits
légitimes de sa communauté. Si l'article était plus
ouvert, nous trouverions que le législateur est plus
généreux et qu'il accorde une meilleure confiance à
l'institution sociale qu'est la commission scolaire.
Quant à l'article qui devrait précéder l'article
423 - et qui n'est pas l'article 422 - nous souhaiterions que le
législateur inclue une déclaration générale campant
le rôle du ministre de l'Éducation dans le réseau primaire
et secondaire. Nous n'ignorons pas qu'il existe une loi du ministère de
l'Éducation. Nous l'avons lue et relue, regardée et mise en
parrallèle. !l me semble que dans l'économie globale de !a Soi,
s'il y avait une déclaration parralièle aux deux
premières, ce serait pas mal intéressant.
Sur le plan de la responsabilisation, je veux vous dire que les
commissaires, hommes et femmes de chez nous, souhaiteraient être un peu
mieux investis, que ce soit au chapitre de ia carte des adultes, des services
complémentaires, de la carte des options d'enseignement professionnel et
avoir prioritairement un espace un peu plus grand dans la définition du
régime pédagogique. Je vous rappelle qu'à notre avis c'est
la loi qui va donner naissance aux régimes pédagogiques, aux
règles budgétaires, etc.
Deuxième point. Je voudrais vous dire deux mots sur !e
partenariat. On considère que le rédacteur de la loi, ou le
législateur qui va la voter un de ces jours, devrait se
préoccuper davantage de cette dimension. Nous souhaiterions que la
commission scolaire soit définie du point de vue opérationnel,
par ce que j'appelais tout à l'heure la plomberie, comme étant un
partenaire du ministre dans l'administration et ia gestion de la mission
éducative primaire et secondaire du Québec, notamment en
matière de consultation. Le législateur veut exercer sur nous
énormément de pression en ce qui a trait à la
consultation. C'est un peu embarrassant de se faire dire: Consulte le monde. On
n'avait pas besoin de cela chez nous. Si vous pensez que c'est
nécessaire pour d'autres milieux, écrivez-le dans la loi. Nous,
on le fait déjà depuis fort longtemps. Mais si vous le faites
pour nous... Peut-être pas pour le titulaire actuel du ministère
de l'Éducation, mais pour un prochain titulaire qui ne serait pas comme
cela, vous, les législateurs, donnez donc au ministre des obligations
inspirées d'une semblable phiiosophie. On n'aime pas beaucoup cela quand
il y a un article de loi qui nous dit: Je vais te demander des informations
n'importe quand, n'importe où, etc. il s'agit de l'article 222 OU
227.
Le pouvoir d'enquête, de suspension, de décision et de
tutelle agace un petit peu. Quand on est deux partenaires, il n'y en a pas un
des deux qui peut faire tout cela. Que le législateur que vous
êtes puisse le faire, vous qui partagez les pouvoirs, cela ne nous pose
pas de problème.
Un exemple de petite plomberie sur le partenariat. Pourquoi nous
diriez-vous: C'est le commissaire du secteur qui est
délégué à telle école? Ceia existe dans une
commission scolaire comme ia nôtre depuis une quinzaine d'années.
On a des commissaires délégués à chacune des
écoles. S'ii arrive que c'est le président dans tel coin,
pourquoi serait-ce le commissaire dudit territoire qui peut aller siéger
au conseil d'orientation? Celui-ci, soit dit en passant, est une belle
création de partenariat. C'en est une. C'est un aspect positif du projet
de loi.
Dernière chose, je vais vous dire quelques mots sur la
stabilité. Nous pensons que le projet de loi mériterait
également d'être relu dans l'optique, dans ia perspective de la
stabilité. Les mouvements de la carte scolaire devraient être,
selon nous, un peu plus arrêtés, un peu plus
précisés. On souhaiterait qu'à certains égards, en
matière de... Ce qui a des incidences sur le régime
pédagogique, on trouve normal que ce soit mis à l'abri, par la
ioi ou par le législateur, des chapelles, des riches, des crises de
négociations ou des courants d'air. Par contre, on aimerait qu'il y ait
une déclaration sur le rôle social et pédagogique de la
commission à cet égard.
On s'est beaucoup interrogé. Une deuxième question que je
vais vous poser: Pourquoi le législateur ne nous dit pas qu'elle est sa
pensée actuelle, soit par une loi, soit par une déclaration
ministérielle ou autre chose, en matière d'enseignement
privé? Vous nous dites ce que vous faites au primaire et au secondaire;
votre intention, c'est cela. Nous disons: Pourquoi sont-ils silencieux
relativement au secteur privé?
Bon, j'ai terminé. Je suis un peu désolé d'avoir
pris beaucoup de temps. Il me reste des choses à dire. Cela fait
quelques fois que je viens ici et j'ai regardé les gens habiles. Je
trouverai bien le moyen de dire ce qui me reste à dire en
répondant à des questions.
Le Président (M. Paré): Alors, je vous remercie
beaucoup et je dois vous dire que vous vous êtes conformés aux
vingt minutes. Félicitations. Peut-être deux minutes... Disons
qu'on n'en tiendra pas compte.
Nous allons maintenant commencer les échanges, en espérant
que vous pourrez donner les informations complémentaires dont vous venez
de parler. Donc, vingt minutes pour chacun des côtés. Je donne la
parole à M. le ministre et député de Beauce-Sud.
M. Dutil: Tout d'abord, cela me fait plaisir de constater non
seulement la qualité du mémoire mais encore celle de la
présentation qui a été faite par les gens de la
Chaudière. Nous tenions, moi-même et mes collègues de
Beauce-Nord et de Beilechasse, à être présents pour
entendre ce que vous aviez à dire sur la loi 107, loi très
importante. Je suis très heureux de voir que tout ce travail a
été fait par notre commission scolaire.
Le président a mentionné, tout à l'heure, les
précédents qui ont été créés dans le
passé par la commission scolaire régionale. Il y a juste notre
modestie, en tant que Beaucerons, qui a été touchée par
votre exposé, mais je pense que c'est très approprié.
Quant aux questions, le temps est tellement court, M. le
Président, que je vais laisser le ministre et l'Opposition poser les
diverses questions qui les intéressent, ayant déjà
rencontré la commission scolaire à ce sujet.
Le Président (M. Paré): Alors, merci. La parole est
maintenant au ministre de l'Éducation.
M. Ryan: Bien, cela va me gêner, parce que tout cela a
été préparé en concertation avec mon
collègue, le député de Beauce-Sud; cela me gêne un
petit peu de vous faire part de certaines critiques.
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Ryan: Parce que, comme vous le savez, entre ministres, on n'a
jamais de désaccord.
Une voix: Ha, ha!
M. Ryan: Est-ce qu'il y a d'autres députés qui
voudraient parler? Est-ce que Mme la députée de Beilechasse
voudrait dire un mot?
Mme Bégin: Non, je partage tout simplement les opinions de
M. le ministre.
M. Ryan: On est content de vous avoir avec nous. Il y a le
député de Chambly, pardon, de Saint-Louis qui va peut-être
vouloir vous poser une question, et qui le veut. On va essayer de lui trouver
le temps.
Je vais faire vite, M. le Président. Je vous remercie de votre
excellente contribution à notre recherche commune. Nous continuons
d'être en recherche. Les choses ne sont pas arrêtées de
manière définitive sur bien des points que vous avez
soulevés. C'est pourquoi les commentaires que vous avez apportés
seront examinés avec beaucoup d'attention.
Je remarque qu'il y a deux points de fond, dans le projet de loi,
auxquels vous ne touchez pas du tout dans votre mémoire. Cela m'a un
petit peu étonné. Premièrement, les commissions scolaires
linguistiques; deuxièmement, la place faite aux valeurs religieuses et
morales dans l'éducation. Je ne sais pas si vous pourriez nous en dire
un mot. Pourquoi ne traitez-vous pas de ces deux sujets fondamentaux? Qu'est-ce
que vous pensez du projet de loi à ce sujet?
M. Roy: M. le Président, si vous le permettez, je laisse
la question à mon collègue, Charles-Henri Lecours, qui va
répondre sur un élément et, au besoin, M. Carette
enchaînera.
M. Lecours: M. le Président, nous n'avons pas retenu et
nous n'avons pas élaboré tellement sur la question linguistique
et confessionnelle, parce que nous sommes d'accord avec les commissions
scolaires linguistiques, pour autant que nos écoles, bien entendu, aient
le droit de choisir leur confessionnalité.
M. Ryan: Cela me satisfait. Si c'est clair, je ne veux pas
confondre les questions, je ne veux pas les embrouiller. Je vous remercie. Cela
me satisfait. C'est très bien.
Je veux en venir aux points de fond qui ont été
brièvement soulevés par M. Carette, tantôt. En ce qui
touche l'école, vous avez parié des articles 35 et 191, et du
préambule à l'article 423.
Article 35: l'école. Pour nous, il est bien clair que l'acte
d'établissement émane de la commission scolaire. Maintenant, il y
a des caractéristiques de l'école qui émaneront de la
volonté de ses intervenants. Le caractère confessionnel, par
exemple, sera largement déterminé à la suite d'une
consultation auprès des parents. Le projet éducatif sera
déterminé par le conseil d'orientation, auquel sont amenés
à participer les principaux intervenants de l'école. Par
conséquent, il y a une sorte de mixité d'influences, mais l'acte
d'établissement lui-même émane de la commission scolaire.
Cela est bien clair dans notre esprit.
En ce qui touche la commission scolaire, vous proposez une autre
définition de son rôle, qui inclurait le service à ia
communauté et aux organismes. Je voudrais seulement vous souligner
qu'à i'articie 227 du projet de loi vous avez précisément
cette autre dimension. Elle n'est pas absente du projet de loi. On va regarder
si cela pourrait être harmonisé, mais, en tout cas, cela y est en
toutes lettres, à l'article 227.
Vous parlez de la nécessité d'une sorte de
préambule, en guise de préface à l'article 423, qui
définirait ce qu'est le rôle du ministre. Je voudrais vous
référer à l'article 553. C'est un article que j'ai fait
insérer moi-même, il est vraiment de mon cru, celui-là. Je
le confesse, je ne devrais pas faire cela, parce que cela peut m'attirer des
difficultés additionnelles.
On ajouterait un article à la Loi sur le ministère de
l'Éducation qui dirait ceci: "Dans les domaines de sa compétence,
le ministre a la responsabilité de promouvoir l'éducation,
d'assurer le développement des institutions d'enseignement et de veiller
à la qualité des services éducatifs dispensés par
ces institutions". Je me
suis aperçu, en lisant la Loi sur le ministère de
l'Éducation, qu'on parlait de tout, sauf du véritable rôle
du ministre. Je pense que ceia coiffe, a posteriori - dans une rédaction
définitive, cela pourra éventuellement trouver une autre place -
toutes Ses fonctions particulières qui sont attribuées au
ministre. C'est la conception que je me fais de ce que devrait être le
rôle du ministre de l'Éducation dans notre système. C'est
dit clairement, mais je comprends très bien que vous ayez
été frappé par l'absence de références de
cette nature, juste avant la série de dispositions qui
définissent les pouvoirs du ministre.
Je vous pose une question. Non, je vais laisser mon collègue de
Saint-Louis poser la question qu'il veut vous poser. Je pense qu'il sera bon de
connaître votre avis à ce sujet.
Pour tout le reste, j'ajoute, au cas où je n'en aurais pas le
temps tantôt, qu'un bon nombre des observations que vous nous faites vont
faire l'objet d'un examen attentif. il y en a plusieurs qui peuvent être
retenues, d'ores et déjà. Il y en a d'autres qu'on va regarder
avec plus de précision. Au besoin, on en reparlera peut-être
tantôt, peut-être un peu plus tard. Je pense que la très
grande majorité des observations que vous nous apportez sont fort
pertinentes.
Le Président (M. Paré): M. le député
de Saint-Louis.
M. Chagnon: Alors, merci, M. le Président. Il y a
peut-être un enchaînement que je pourrais faire avec l'appellation
que me donnait le ministre, c'est-à-dire député de
Chambly. Probablement que le ministre pensait à ces heureux temps, et je
ne dirai pas plus tranquilles ni moins tranquilles qu'actuellement, où
j'étais président de ia commission scolaire régionale de
Chambly. Quand on dit une commission scolaire régionale, ceia implique
une commission scolaire qui fait l'enseignement et qui voit à
l'administration de l'enseignement du secteur secondaire sur son territoire.
Pour ia première fois aujourd'hui, nous avons une commission scolaire
qui administre l'enseignement secondaire, soit une commission scolaire
régionale, celle de Beauce-Bellechasse, qui est mieux connue sous le nom
de Chaudière, et que nous recevons cet après-midi.
Peut-être que ses membres pourraient nous parler d'une
problématique, qui, dans le secteur de l'éducation, a
évoiué passablement depuis cinq ou six ans, soit
l'intégration des commissions scolaires. Vous avez vu, les articles 97
à 106 du projet de loi IQ7 qui définissent ia constitution de
commissions scolaires francophones et anglophones, mais qui peuvent aussi
amener des commissions scolaires à avoir de nouveaux territoires, de
nouvelles répartitions de clientèles, de nouvelles
répartitions de services, et pour le secteur secondaire,
évidemment, dans un territoire comme le vôtre, une nouvelle
réparti- tion de la carte des services professionnels, de la carte de
l'enseignement aux adultes, de la carte d'autres services comme l'informatique,
le transport, etc.
Comment vivez-vous cela chez vous, au stade où on en est? Comment
pouvez-vous vivre avec les articles du projet de loi? (18 h 30)
M. Roy: M. le Président, si vous le permettez, je vais
répondre aux questions du député. Vous connaissez
maintenant notre philosophie de base, c'est-à-dire le respect des
milieux, le respect des personnes, le respect des élèves et la
confiance dans la dynamique locale.
Vous savez que, dès le lendemain du jugement Deschênes sur
la loi 3, les commissaires du territoire ont unanimement décidé
d'abandonner les études et travaux que cette loi, même en projet,
les avait forcés de faire, et ils ont décidé de maintenir
les structures en place dans le meilleur intérêt des
élèves et des étudiants adultes. Vous savez, M. le
Président, l'intégration, cela peut paraître bien attrayant
pour des commissaires, pour des gestionnaires ou même pour des directeurs
généraux, ou pour des fonctionnaires du ministère de
l'Éducation. Mais quand on étudie le véritable enjeu,
c'est-à-dire la qualité des services aux élèves et
leur coût, on constate qu'ils y perdent et beaucoup. Vous savez, ce n'est
pas très beau, la balkanisation du réseau primaire et secondaire
qui est intervenue depuis quelques années, sauf pour ceux-là,
bien sûr, qui veulent ou voudraient manipuler les écoles, parce
que les commissions seraient trop petites pour agir en partenaires
compétents. Les considérations financières pour une
province qui est assez à l'aise mais quand même pas très
riche et nos études de coûts concluaient aussi à la
non-pertinence de l'intégration chez nous.
Pour répondre plus précisément à la
question, M. le Président, notre credo à nous, c'est que le
milieu décide. Chez nous, il y a 61 femmes et hommes élus qui
prennent part à l'administration du réseau primaire et secondaire
et, croyez-moi, je vous donne ma parole là-dessus, toutes et tous sont
actives et actifs et profondément engagés. Si la majorité
de ces personnes responsables choisissait de désintégrer la
régionale, ce que je ne crois pas, si vous nous laissiez notre
liberté, ce seraient à elles et à eux de décider,
selon notre opinion.
Encore une fois, je vous le répète, je vous l'ai dit
tantôt, faites confiance au monde. Le ministère de
l'Éducation fera peut-être ainsi l'envie des autres
ministères et vous aurez la réputation d'assurer un suivi,
d'avoir une saine administration.
M. Chagnon: Vous êtes en train de me dire que vous
êtes contre l'intégration, mais il y a des constituantes qui
forment la commission scolaire régionale de la Chaudière. Est-ce
que chacune des commissions scolaires élémentaires partage votre
opinion?
Une voix: Une résolution unanime chez nous.
M. Lecours: M. le Président, je peux peut-être
essayer de répondre à cette question. Chez nous, à la
commission scolaire Langevin, dont fait partie, bien entendu, la commission
scolaire régionale de la Chaudière, on a étudié le
projet d'intégration, il y a une couple d'années, et on a
décidé de ne pas continuer notre étude, parce que nous
avons constaté que nous recevions, de la part de la régionale de
la Chaudière, les services dont nous avions besoin pour donner à
nos jeunes l'éducation qu'ils méritent. C'est uniquement cette
raison, M. le Président, qui nous a amenés à ne pas
continuer notre processus d'intégration. On ne dit pas, cependant,
à la Langevin, qu'on est contre l'intégration. Tant que l'on aura
des services adéquats de la part de la régionale, nous serons
avec la régionale.
M. Chagnon: Songez-vous à intégrer
l'élémentaire?
M. Lecours: Pardon?
M. Chagnon: Envisagez-vous d'intégrer le niveau
élémentaire?
M. Lecours: On est content actuellement de ce qui se passe avec
notre primaire et notre secondaire.
M. Chagnon: La section I du chapitre IV du projet de loi vous va?
Il n'y aurait aucun problème au niveau de la problématique du
découpage des territoires ou quoi que ce soit, s'il y avait modification
ultérieurement, d'ici l'arrivée de vos 20 successeurs? M. Carette
ou M. le président?
M. Carette: Monsieur, je voudrais juste vous dire qu'on estime
que les 61 personnes qui sont commissaires d'écoles présentement
chez nous auront des successeurs tout aussi responsables envers leurs
commettants.
Je voudrais profiter de l'occasion, si vous le permettez, M. le
Président, pour donner réponse, à tout le moins une
opinion, sur une partie de la question de M. le député de
Saint-Louis qui faisait un lien avec la carte des options de l'enseignement
professionnel. L'opinion fondamentale qu'on a en cette matière - on
s'est bagarré pas mai à ce sujet ce printemps dernier. Ce
printemps, c'est une façon de dire que le printemps englobe l'hiver et
l'automne passés - est la suivante: Si le gouvernement, englobant le
Conseil du trésor et le ministère de l'Éducation, nous
laissait, en toute liberté, au moins le champ de taxation qu'on a
présentement, si les décisions prises au ministère de
l'Éducation, les décisions prises au gouvernement du
Québec nous laissaient la marge de 6 % ou de 0, 25 $ pour prendre des
décisions, pour payer et financer les décisions qui sont les
nôtres... Autrement dit, si j'étais de mauvaise humeur, on
pourrait vous dire: Si vous payiez vos décisions et que vous nous
laissiez nos 0, 25 $, on pourrait, en matière de carte, en
matière de régime pédagogique et en toute autre
matière, prendre des décisions responsables chez nous. La
conviction qu'on a au sujet de la carte des options de l'enseignement
professionnel est celle-ci: Si tu as des élèves, des profs
compétents et des équipements, donne l'option chez vous.
On l'a démontré du point de vue financier. On est venu au
Conseil du Trésor pour démontrer qu'à compter de douze
élèves, quand on répond à ces critères, on
devrait, à notre avis, donner l'option chez nous. On a même dit
plus que cela politiquement. Les commissaires chez nous sont allés
jusqu'à dire: S'il manque de l'argent au-delà de l'argent
ordinaire que le gouvernement du Québec nous donne par
l'intermédiaire du ministère de l'Éducation, on va imposer
une taxe. Nous pensons qu'avec dix, douze élèves une option est
viable chez nous. On a des élèves, on a des profs et on a de
l'équipement. Pourquoi envoyer les enfants à Québec? A
compter de dix ou douze élèves, cela coûte
financièrement plus cher, et socialement énormément plus.
Le problème, c'est que ce ne sont peut-être pas toutes les
commissions scolaires qui peuvent vous donner cette réponse. Il y a une
grande partie des taxes qu'on peut aller chercher et qui sert à payer
des décisions prises ailleurs. Je ne ferai pas l'histoire des
compressions des quatre dernières années. Je ne ferai pas non
plus l'histoire des décisions non payées ou partiellement
payées. Je veux seulement vous dire que si on disposait ne serait-ce que
de ce petit pouvoir détaxation...
J'aimerais dire, en passant, tant qu'à être dans ce
domaine, qu'il y a des affaires qui clochent un peu dans la loi. Probablement
que ce sont des erreurs. On estime que c'est une erreur lorsque le
rédacteur de la loi nous dit, par exemple, à l'article 278 - je
ne connais pas par coeur les numéros, je vais vous donner les quelques
numéros que je connais, il me semble que c'est à l'article 278 -
que la personne physique qui ne va pas à l'école des adultes et
dont les enfants ne vont pas à l'école des jeunes peut payer sa
taxe à ia commission de son choix. Nous trouvons que ce n'est pas
très juste. Il me semble que l'éducation primaire et secondaire
est une propriété individuelle et collective, collective à
la dimension du Québec, et à la dimension de notre petite
région. La personne qui ne va pas à l'école des adultes et
dont les enfants ont quitté l'école, pourquoi ne
contribuerait-elle pas de ses deniers? Que va-t-elle choisir? À
chaque 1er avril, elle va dire: Cette année, c'est la commission
protestante qui coûte moins cher, pas protestante, dis-je, la commission
linguistique anglophone. Le décodage qu'on en fait, à moins qu'on
se comprenne mal sur la
lecture, c'est qu'il y a quelque chose qui ne marche pas tout à
fait bien.
Je reviens à la question principale concernant la carte. Si nous
avons les moyens financiers pour !e faire, nos commissaires aimeraient prendre
les décisions, éventuellement imposer une taxe et venir devant le
peuple de temps à autre pour demander: Est-ce qu'on a pris les bonnes
décisions, oui ou non?
Le Président (M. Paré): Merci. La parole est
maintenant à Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. Roy,
président de la commission scolaire, M. Carette, messieurs, j'ai le
plaisir de vous accueillir au nom de l'Opposition à cette commission
parlementaire. Ayant déjà eu l'occasion de travailler avec M.
Carette, je n'attendais pas moins que ce que le ministre a constaté. Le
ministre délégué à la Famille vous i'a d'ailleurs
dit tout à l'heure en signalant que votre mémoire était
très rigoureux, bien fait et touchait, pour l'essentiel, les points
majeurs du projet de loi. Je pense que le président, d'entrée de
jeu, a lancé ce que j'ai interprété quasiment comme un cri
d'alarme en disant: Écoutez, faites donc confiance aux gens. Le
directeur généra! a renchéri sur sa conception et sur la
définition d'un véritable et réel partenariat en disant:
Même si on ne peut pas se porter garant pour l'ensemble des commissions
scolaires du Québec, chez nous, on a fait nos preuves. On
reconnaît le dynamisme, le sens des responsabilités, le sens des
valeurs, des traditions, de la culture des gens de la Beauce. C'est bien connu.
Je pense qu'on peut également dire, de la très grande
majorité des commissions scolaires, de ceux qui gèrent le
réseau d'éducation au Québec, qu'on pourrait leur faire
également au moins ia môme confiance. J'espère - parce que
je vols qu'il y a un ministre et il y en a quelques-uns qui sont venus ici
à cette commission parlementaire - qu'ils puissent faire un peu
réfléchir le ministre quant à cette orientation du projet
de !oi, alors qu'il vient enlever beaucoup de pouvoirs tout en ne se donnant
pas beaucoup de responsabilités.
Si les mots veulent dire quelque chose, nous constations qu'il y a des
glissements. Par exemple, il y a un article de la Loi sur l'instruction
publique - c'est l'article 189, paragraphe 22 - qui prévoit que les
commissions scolaires sont obligées de rendre compte de ia gestion
devant la population. Cela n'apparaît plus dans l'actuel projet de loi.
L'autre glissement: on est passé de délégation de pouvoir
à délégation de fonction. Si les mots veulent dire quelque
chose, il semble qu'une fonction n'a pas tout à fait la même
valeur qu'un pouvoir. Cette espèce de glissement tend, comme vous i'avez
fait remarquer, à déresponsabiliser ou à "subalterniser" -
je pense que c'est le terme que vous avez utilisé - les commissions
scolaires. Vous avez également souligné que le droit de visite
dans la loi n'avait pas sa contrepartie dans la Loi sur l'enseignement
privé - c'est juste - alors qu'on sait qu'on paie avec nos impôts
plus de la moitié de leurs frais de fonctionnement. Cela ne doit pas
étonner et ça ne me surprend pas, je dois dire.
J'avais un certain nombre de questions. Vous nous avez dit à un
moment donné, et je pense bien comprendre que vous dites:
Écoutez, on est assez grand, on connaît assez bien nos besoins. On
est même capable de définir nos besoins, en partant des ressources
qu'on a et des services qu'on est capable d'offrir à l'éducation
des adultes, en particulier, mais cela touche en même temps toute la
carte des programmes de l'enseignement professionnel, parce qu'il y a de plus
en plus une volonté d'harmonisation entre les jeunes et les adultes. Sur
ce, vous dites qu'il y a des espèces d'hésitations de
flottements, qu'on ne comprend pas bien où veut en venir le ministre
à cet égard. J'aimerais vous entendre sur cette question.
M. Carette: Je ne veux pas donner une réponse exhaustive,
M. le Président, à la question. Je vais juste vous mentionner un
certain nombre d'articles sur lesquels nous nous interrogeons et qui nous
justifient, à mon point de vue, de dire: I! y a un petit bout de
réflexion qui reste à faire au législateur pour mieux
intégrer la responsabilité des commissions scolaires en
matière d'éducation des adultes, en tout cas, selon nous, sans
prétendre être experts an droit.
Par exemple, l'article 13. L'employeur emploie un jeune d'âge
secondaire durant les heures de classe, mais ce jeune de moins de 16 ans est
dans un groupe intégré jeunes et adultes, et, en termes
juridiques, il fréquente l'école en dehors des heures
régulières, soit de 16 h 30 à 23 h 30. On exerce des
pressions sur nous pour intégrer nos clientèles, pour sauver nos
cartes et donner des services sur place. L'article 13 nous fait hésiter,
il me semble qu'il faudrait en relire le libellé. Un adolescent de 16
ans qui va à l'école avec des adultes peut le faire, parce que
c'est bien, mais est-il soumis à l'article 13 ou pas? L'employeur
concerné fait-il l'objet des sanctions qui sont à la fin de la
loi?
Autre article. Est-il clair, par exemple, qu'en matière des
droits et devoirs de l'enseignant les articles 16 à 19 visent autant les
enseignants aux jeunes que les enseignants aux adultes? Autre question: Dans
l'article 20, les termes "enseignant à ia leçon" s'appliquent-ils
aux enseignants aux adultes ou strictement aux enseignants aux jeunes? (18 h
45)
Article 35. Pourquoi une commission scolaire ne pourrait-elle pas donner
à une ou plusieurs de ses institutions un rôle explicite autrement
que par délégation de pouvoir en matière
d'éducation des adultes? On ne comprend pas tout à fait
pourquoi, à l'article 35, quant à la participation des
étudiants adultes. On a des étudiants à temps plein
là-dedans, qui font un an ou un an et demi et qui sont en
démarche vers des DES. On a beaucoup structuré par parents
interposés, si vous voulez, et cela était correct. En tout cas,
j'ai participé ce matin et je partageais l'opinion de M. le ministre
là-dessus. Mais, les adultes, où sont-ils? Qu'est-ce qu'un centre
d'éducation des adultes? L'article 35 nous dit: Une école, c'est
cela. Je ne suis pas capable de vous donner le numéro de tous les
articles. Un peu plus tard, on parle à différents endroits d'une
centre d'éducation des adultes. Qu'est-ce que c'est? Est-ce que cela
existe? Est-ce que cela a un acte d'établissement?
À l'article 193, on ne parle pas du tout d'un centre
d'éducation des adultes. Par contre, à l'article 218, on en fait
mention. Un petit problème que cela nous pose, à nous les
gestionnaires - il n'est pas d'ordre politique - pourquoi, à l'article
262, nous dit-on: Vous avez le droit de faire des règlements de
transport pour jeunes à l'exclusion des adultes et, à l'article
39, on nous redit: Vous pouvez, s'il y a des places disponibles,
"critérier" l'allocation de celles-ci? Que le législateur nous
dise: Vous pouvez ou vous ne pouvez pas. Le problème c'est que, si cela
nous crée des problèmes d'interprétation chez nous, on va
se faire "poigner", pas parce qu'on est chez nous, mais on va avoir des
problèmes là-dedans.
Quand je disais, M. le Président, qu'il semble y avoir une
certaine hésitation à affirmer ce qu'est l'éducation des
adultes et à intégrer le discours d'harmonisation qui se tient au
Québec depuis une vingtaine de mois, il me semble que l'adoption de
cette ioi aurait été une occasion en or de dire: Le ministre a
telles responsabilités dans l'éducation des adultes et la
commission a celles-ci. Je vous ai mentionné quatre, cinq articles,
peut-être dix qui demanderaient d'être revus avec ou sans un vrai
désir de donner des responsabilités à la commission
scolaire là-dedans.
Mme Blackburn: Oui. On n'aura pas le temps de faire le tour de
toutes vos recommandations et commentaires, mais, sur le chapitre des services
éducatifs complémentaires - évidemment, c'est par souci de
cohérence - vous dites: "Nous estimons que la commission scolaire
devrait être investie de pouvoirs en toute matière de programme de
formation complémentaire. " Cela veut donc dire que la définition
des services complémentaires qu'on retrouvait dans la loi 3... On parle
ici de formation complémentaire et je ne sais pas si cela a trait - il
faudrait que je revoie - aux services complémentaires parce que, dans la
loi 3, on retrouvait une définition des services complémentaires
et une définition des services éducatifs. Vous dites: il faudrait
au moins qu'on ait "services éducatifs de qualité" de
manière que cela exerce une pression sur le système. Le projet de
loi 3 définissait des services complémentaires et des services
particuliers qui venaient donner, si je puis m'exprimer ainsi, une certaine
garantie à la qualité des services éducatifs. On ne
retrouve plus ces articles dans le projet de loi alors que j'estimais que cela
faisait également obligation au ministre d'offrir les ressources
financières et humaines correspondantes aux obligations,
c'est-à-dire l'obligation d'offrir un certain nombre de services
complémentaires. On sait qu'il y en a deux qui sont identifiés:
celui des transports et celui aux enfants souffrant de handicaps.
M. Carette: Au moment où on a débattu toute la
notion de services complémentaires en ce qui concerne nos travaux sur le
projet de loi 107, je dois vous dire que, dans l'esprit de pas mal de personnes
chez nous, on avait de présente encore la crise de: II vous reste une
demi-heure ou quelque chose comme cela. Cela avait fait des petites vagues dans
notre milieu, cette histoire que les gens du ministère des Affaires
sociales - j'oublie le vrai nom - viennent dire aux écoles: Voici un
instrument que vous pouvez utiliser, etc. On sortait de cette crise. Ce que
nous affirmons dans le mémoire en matière de services ou de
programmes d'activités complémentaires, c'est que, vu par nous
autres, on estime qu'au Québec, en matière d'éducation
primaire et secondaire, l'autorité devrait être entre les mains du
ministre - on le dit explicitement dans notre mémoire - à ce
sujet-là, ce qui est de dimension provinciale. Mais partenaire
intégral, un peu plus partenaire... J'ai envie de dire que, maintenant
dans la loi, la commission scolaire devrait avoir ce qu'on appelle chez nous
une poignée sur les programmes de ces services complémentaires.
On ressent cela un peu mal que les gens du CLSC viennent donner des programmes
éducatifs chez nous, sans droit de regard de la commission, sauf si on
est bien "chum" avec les gens. Comme on est "chum" avec tout le monde dans la
Beauce, généralement il n'y a pas de problème, sauf
lorsque ce sont des gens de Québec qui nous envoient des papiers et des
programmes et qu'ils disent: Faites-le. On les connaît moins, on peut
moins leur parler.
Ce qu'on dit dans notre mémoire, c'est: Ramassez donc la fonction
éducative chez le ministre de l'Éducation pour autant que
Québec est concerné. On sait qu'il va partager les
responsabilités et il va en donner aux commissions. Cela veut dire que,
dans notre milieu, les ressources adéquates pour cela seraient
peut-être gérées par les commissions scolaires.
Mme Blackburn: D'accord. Vous n'avez pas abordé la
question de la gratuité de l'éducation des adultes, il me semble,
des services de garde en milieu scolaire, du droit de recours devant le
Protecteur du citoyen pour l'élève ou ses parents. J'imagine,
comme vous l'avez expliqué, que
vous n'avez pas eu le temps de faire le tour de toutes ces questions de
façon exhaustive. Peut-être une brève réaction
là-dessus et, en même temps, une dernière question.
La question que je me pose est la suivante: La Loi sur l'instruction
publique, telle qu'on l'a amendée, corrigée, je dirais
radoubée et avec laquelle on vit, est-ce que, finalement, elle n'est pas
préférable aux modifications qui sont en train d'être
apportées dans le projet de loi?
M. Carette: Bien...
Mme Blackburn: Si vous permettez que je raffine ma question,
c'est à l'exclusion, évidemment, de tout ce qui touche les
structures scolaires, parce qu'il ne faudrait pas tout confondre. Je pense
davantage à toute la question que vous avez soulevée dans votre
mémoire.
M. Carette: En tout cas, je vais placer cela sous réserve
des seuls débats qu'on a menés. Dans le milieu, chez nous, il y a
des questions qui ne se posent pas dans le sens commun. Le problème des
commissions scolaires linguistiques, chez nous, on ne l'a même pas
débattu. Les gens ont dit: Que la commission scolaire soit linguistique,
qu'elle ne soit plus confessionnelle, cela ne nous pose pas de problème
à partir du moment où les écoles pourront se baptiser
elles-mêmes; elles pourront devenir confessionnelles par choix. C'est ce
que je veux dire par là. Cela ne pose pas de problème.
Sur les grands débats de la loi, je ne suis pas en mesure de
porter un jugement global. Est-ce que la Loi sur l'instruction publique,
rafistolée à l'heure actuelle, est mieux que le projet de loi
107? J'ai envie de dire - en tout cas, je pense interpréter l'opinion
des commissaires chez nous ~ que le bien-fondé du projet de loi 107,
dans son ensemble, on le reconnaît. On n'aime pas des
éléments dedans, mais c'est surtout au plan de l'esprit. Il y a
des morceaux de plomberie qui ne sont pas beaux, à notre point de vue;
on l'a écrit. Ce qu'on veut surtout vous dire, quant à l'esprit,
c'est qu'il y a des morceaux pas tout à fait corrects. Il y a de bons
morceaux. Tout à l'heure, M. le Président, M. le ministre de
l'Éducation parlait de l'article 227. On l'avait très bien lu. Je
vais vous féliciter pour l'article 227; l'auteur ou le rédacteur
de cet article l'a bien écrit. Il a dit: Les commissions scolaires
peuvent faire cela. Il ne nous a pas dit quand, comment, etc. il dit:
Là-dessus, je leur fais confiance. Bravo! Là-dessus, on vous
trouve très correct. Parfois, vous nous prenez un petit peu plus par la
main. L'idée est bonne, mais on n'aime pas beaucoup se faire prendre par
la main.
Quand vous nous dites: Faites des conseils d'orientation, bravo! Ce!a
est quasiment né aux états généraux et c'est un
beau modèle de partenariat, le conseil d'orientation dans
l'école. Chez nous, les commissaires - on ne parle que des commissaires
- trouvent cela bien; cela est un vécu.
Maintenant, vous nous en dites pas mal, le 15 novembre...
Peut-être que vous auriez pu nous laisser un peu libres là-dessus.
Il y a d'autres beaux morceaux dans le projet de loi. Autant on est d'accord
avec les conseils d'orientation, autant on trouve cela le "fun" quand vous
dites: II peut y avoir des comités de parents à côté
de cela, des comités d'école. "So much", c'est beau, les parents
vont décider s'ils en ont. Une institution sociale, si on la veut, si on
veut un instrument de participation, on décide de l'avoir quand on est
maître de son existence, et son bébé est beau. Nos
bébés sont tous beaux, les nôtres, ils sont à nous.
Si les parents décident de se donner un comité, je vous jure
qu'il va fonctionner. Nous autres, on décide! Pas dire: Le commissaire
de ce territoire va surveiller, va être présent à cette
école. On a décidé il y a quinze ans, on a un commissaire
délégué. Nous avons décidé d'inventer cette
patente et on décide. Les commissaires disent: M. Untel, c'est vous qui
êtes délégué à cette école-là,
cette année; participez au socio, allez au comité de parents,
occupez-vous de faire le lien politique, etc. Pourquoi viend riez-vous nous
dire que c'est le commissaire du territoire qui va là? Il y a de beaux
morceaux dans la loi, maintenant c'est quasiment une prise par la main qui nous
agace un peu. Il doit y avoir d'autres personnes que les Beaucerons qui vous
tiennent un discours comme celui-ci; j'espère, en tout cas.
J'espère!
Mme Blackburn: II me reste quelques minutes?
Le Président (M. Paré): Oui, quelques
minutes...
Mme Blackburn: Oui.
Le Président (M. Paré):... et il faudrait conclure
ensuite.
Mme Blackburn: Bien. Peut-être en conclusion, vous parlez
de la rémunération des commissaires, d'une certaine
dévalorisation du rôle, de la minimisation des fonctions ou de la
reconnaissance moindre qu'elle ne le serait par rapport aux élus
municipaux. Je me permets une question qui me trotte dans la tête depuis
que j'entends, et que je suis mieux à même de les saisir, les
contraintes qui sont faites aux commissions scolaires, par le biais des
règles, règlements, politiques, directives, la politique
administrative et salariale, les immobilisations, les réfections, les
conventions collectives... Puis, évidemment, le fait que, dans la loi
qu'on a actuellement, on vient légiférer sur beaucoup de
matières qui étaient objets de règlements, ce qui donne
beaucoup moins de souplesse et vient consacrer, dans une loi, des pouvoirs que
le ministre avait dans les règlements - je le
reconnais - mais cela n'a quand même pas la même rigueur. Je
me faisais \a réflexion suivantes. Finalement, si on compare les
pouvoirs qui restent aux commissions scolaires par rapport aux pouvoirs et aux
fonctions exercés par des centres hospitaliers, des collèges, si
cela continue dans cette direction, est-ce qu'il sera utile de maintenir des
élus? C'est quasiment le modèle qu'on est en train de
développer avec l'espèce de cooptation des partenariats et des
représentants des différents groupes au conseil des commissaires.
Cela finit par ressembler un peu au conseil d'administration d'un cégep
ou d'un hôpital, Si cela continue ainsi, est-ce qu'on a encore besoin
d'un gouvernement élu?
M. Carette: Je vais donner le premier bout. Quand on vient vous
dire deux ou trois affaires: Faites confiance au monde, on espère que
cela n'arrivera pas là. On ne voudrait pas gérer la commission
scolaire comme un conseil d'administration d'hôpital le fait. Je veux
dire un peu plus enferré et sans responsabilité. Je pense que la
Loi sur l'instruction publique, telle qu'elle est vécue, malgré
ce qui s'est passé de 1964 à aujourd'hui, empiétement, je
dois dire, je ne dirai pas du ministre mais du ministère, sur nos marges
de manoeuvre... Je vous garantis, M. le Président, que les commissions
scolaires peuvent personnaliser leurs affaires. Elles ne sont pas pareilles,
les commissions scolaires dans la province de Québec. Même dans
les petites marges de manoeuvre qu'on avait, on pouvait faire quelque chose.
Maintenant, il y a des affaires qui nous piquent la langue, dans la loi; il y a
des affaires qui nous font peur. Je vais vous raccrocher cela aux trois grands
thèmes qu'on utilisait, tout à l'heure: je vais vous en nommer un
certain nombre. Il me semble qu'il y a un peu trop, je vais dire,
d'interventionnisme. Quand le législateur de la communauté
québécoise vient nous dire: La personne que vous allez utiliser
comme conseiller en éducation chrétienne, vous lui donnez un
statut de cadre, on n'aime pas cela. Si le législateur nous dit: Vous
devez avoir un conseiller en éducation chrétienne ou de quelque
confessionnalité, "so much"! mais arrêtez là, de
grâce! Ne venez pas dire que c'est un cadre. Pourquoi nous dites-vous:
"Vous devez nommer, par résolution, explicitement, une personne
responsable de l'éducation des adultes si vous avez de
l'éducation des adultes? Câline! Excusez, ce n'est pas
parlementaire cela, câline, mais, en tout cas, on se comprend. On est
capables de faire cela tout seuls.
Quand, par exemple, le projet de loi ne donne aucun rôle à
la commission ou à sa fédération en matière des
conditions de travail des non-syndiqués, ce n'est pas beau! Ce n'est pas
beau que vous ne donniez aucun rôle à l'employeur. Vous
déclarez employeur la commission. On a un paquet d'employés, chez
nous... Il y a du monde qui dit qu'on en a trop mais, nous autres, on pense
qu'on n'en a peut-être pas assez: on en a une quarantaine qui sont non
syndiqués. On n'a pas de rôle à jouer dans les conditions
de travail de ce monde-là. On n'aime pas cela.
Pourtant, malgré cela, on est capables de faire des affaires
parce qu'on a personnalisé nos écoles, chez nous. Je vais vous
nommer d'autres affaires. À un moment donné, le
législateur voudrait nous dire... S'il fallait, nous autres, aller dire
au législateur: Dites à tel ministre de procéder comme
cela... On ne viendrait pas dire cela à Québec, on aurait peur de
se faire tuer; on ne reviendrait pas, probablement. Si vous avez un
comité de gestion, il est formé comme cela, comme cela, comme
cela! Mais quelle est cette histoire-là? Le législateur n'aurait
pas l'idée de dire - je vais prendre un titulaire, un ministre qui n'est
pas ici - au ministre de la Justice: Si vous avez un comité
sous-ministériel, voici comment il marche. Ce n'est pas beau de dire
cela. On est capables de faire cela tout seuls. Faites confiance au monde.
Faites confiance au monde. On est capables; on l'a fait. On l'a fait avant que
vous ne nous le disiez. Laissez-nous le faire à notre image et à
notre ressemblance. (19 heures)
Bon, je pourrais dire... D'accord, je conclus. Ce que je veux vous dire:
Faites donc confiance au monde sur les affaires. Le monde est capable de faire
tout seul et il l'a bien fait.
Le Président (M. Paré): Mme la
députée de Chicoutimi, il reste une minute de conclusion.
Mme Blackburn: Oui, je vous remercie. Je voudrais vous remercier
infiniment de votre participation aux travaux de cette commission et je dirais
que, de tous les mémoires qu'on a entendus, c'est un mémoire qui
couvre, je pense, de façon assez efficace, l'essentiel des principaux
articles du projet de loi qui est sur la table, il est assez impressionnant
à cet égard, et je dois dire que j'admire une fois de plus
l'excellente mémoire de M. Carette, lorsqu'il est capable de citer, de
mémoire, différents articles du projet de ioi et d'y
référer.
Je voudrais vous dire, et redire, et vous assurer que je partage tout
à fait votre avis sur la nécessité de revoir - et cela, je
dirais que ce n'est pas né avec l'actuel ministre de l'Éducation
- le mouvement de centralisation au Québec; vous l'avez remarqué
tout à l'heure, c'est depuis 1964. Je pense qu'actuellement, au moment
où l'on se parle, on a, dans nos régions, dans nos commissions
scolaires, dans nos institutions, des gens compétents qui sont beaucoup
plus scolarisés qu'ils ne l'étaient à l'époque, qui
ont acquis beaucoup de compétences, qui ont fait la preuve qu'ils
étaient capables de gérer, et je pense que le mouvement devrait
être à la décentralisation, essentiellement. Tout cela pour
vous dire que je partage tout à fait votre avis en regard de cette
question plus particulière du partage du pouvoir
et des responsabilités.
Je vous remercie infiniment de votre participation aux travaux de cette
commission, et j'espère sincèrement que le ministre sera
très sensible aux arguments que vous avez avancés, d'autant que,
je me permets de vous le dire, la très grande majorité des
mémoires qui ont abordé ces questions abondent dans le sens du
vôtre, c'est-à-dire qu'il faudrait faire confiance aux partenaires
et assurer un meilleur partage des responsabilités. Je vous
remercie.
Le Président (M. Paré): M. le ministre de
l'Éducation, en conclusion?
M. Roy: M. le Président? Le Président (M.
Paré): Oui?
M. Roy: Est-ce que vous permettez que j'intervienne, juste avant
le ministre, une dernière fois, pour donner l'occasion au ministre de
conclure vraiment le discours sur cette chose-là?
Le Président (M. Paré): Vous voulez intervenir
même si je vous donne la chance d'intervenir par la suite, ou si vous
préférez attendre?
M. Roy: Je préférerais intervenir tout de suite,
plutôt.
Le Président (M. Paré): D'accord.
M. Roy: C'est tout simplement pour vous dire que nous voulons
répéter notre appréciation quant à l'occasion que
nous avons eue de nous adresser à celles et à ceux qui font la
loi, et qui ont l'énorme responsabilité de la faire
légitime, c'est-à-dire conforme aux besoins actuels et futurs de
la communauté québécoise et de ses membres individuels ou
collectifs. C'est une bien grosse responsabilité que vous avez,
messieurs, et que vous partagez avec les autres membres de l'Assemblée
nationale. Je ne reprendrai pas notre intervention; je ne
répéterai que le trait fondamental de celle-ci: Nous voulons des
commissions scolaires renouvelées, responsables, stables et partenaires.
Et, pour cela, nous croyons, au point qu'on est venus vous le dire à
Québec, qu'il y a une bonne révision du projet de loi à
faire dans son esprit et dans sa forme. Nous avons l'espoir que vous ferez ces
ajustement. Je suis prêt, nous sommes prêts à vous offrir
une collaboration et celle de nos gestionnaires, sous quelque forme que ce
soit, en quelque temps que ce soit, C'est ce que j'avais à conclure, M.
le Président.
Le Président (M. Paré): Merci de votre conclusion.
Je demande maintenant au ministre de l'Éducation de nous livrer sa
conclusion.
M. Ryan: J'ai écouté ce que vous avez dit et, sur
le thème de fond qui s'est dégagé vers la fin de
l'échange, je n'ai pas été persuadé par ce que vous
avez dit, et surtout pas par les exemples que vous avez apportés. Je
pense que c'est facile de prendre un exemple dans un texte, de l'isoler du
contexte et de faire un effet avec cela. Mais quand on se retrouve avec le
problème, le lendemain matin, souvent on n'est pas plus avancé.
Je vais vous donner un exemple. Vous dites: Nécessité que le
responsable de l'éducation chrétienne à la commission
scolaire soit un cadre. C'est facile de rire de cela, mais c'est un
élément clé de l'accord qui est intervenu entre les
autorités religieuses catholiques et le gouvernement
précédent autour de la loi 3. C'est un élément sur
lequel l'autorité religieuse a insisté énormément
pour accepter tout le reste. C'est un boulon essentiel dans l'édifice.
On peut bien dire que c'est de la centralisation excessive mais, à un
moment donné, il faut étudier le contexte dans lequel une chose
est née.
Vous parlez de l'éducation des adultes, à partir du point
de vue d'une commission scolaire régionale comme la vôtre; je le
comprends très bien. Mais vous savez très bien qu'il y a bien des
commissions scolaires locales qui ne sont pas capables d'offrir
l'éducation des adultes. On a 212 commissions scolaires au
Québec. Il y en a 82 qui ont un service d'éducation des adultes.
Puis quand, dans une région, on a de la place pour un service
d'éducation des adultes et que trois commissions scolaires veulent le
donner, qu'est-ce qu'on va faire? On n'a pas les ressources pour en avoir trois
séparés; cela prend un minimum d'équipement de base, un
minimum de ressources pour fournir les services minimums que cela prend. C'est
bien facile, on peut bien faire de la rhétorique avec cela mais,
à un moment donné, nous autres, il faut qu'on décide
où va être le lieu de décision. Là-dessus, il ne
faut pas qu'il y art d'équivoque. Il faut que cela sort clair et il faut
se demander, en dernière analyse: Où est-ce que cela va
être? Si vous avez des preuves à nous donner sur ces
points-là, on va les écouter avec plaisir, mais je peux vous
assurer qu'on a étudié tous ces points-là, dans le
détail, pendant des mois. Si on est arrivés à ces
conclusions-là, c'est parce qu'il y avait des raisons
précises.
Prenez les conditions de travail des personnels non syndiqués. Je
me rappelle toujours, quand on a eu la commission parlementaire sur la loi 3,
l'association des cadres était venue dire: II faut de la
décentralisation, puis il faut ceci, puis cela. Je leur avais dit:
Qu'est-ce que vous diriez si on renvoyait les conditions de travail des
personnels non syndiqués aux commissions scolaires? Ils m'ont
demandé une entrevue privée, j'étais dans l'Opposition,
pour me dire: Ne fartes jamais cela, on va retourner à la tour de Babel
où on était il y a quelques années. Il faut penser
à toute cette contrepartie. C'est bon que vous souleviez ce
volet-là. On va regarder le projet de loi en y pensant. Mais les
exemples qui ont
été apportés sont tous des exemples qui ont
été minutieusement examinés et sur lesquels je ne pense
pas qu'on pourra modifier beaucoup le projet de loi. Il y en a d'autres, il y a
toutes sortes d'autres suggestions dans votre mémoire qui sont tout
à fait de nature à influencer des modifications, et j'en suis
très heureux, mais sur ce thème fondamental... Je vais vous
remettre, comme on l'a fait à d'autres, une liste de tous les pouvoirs
qu'on donne aux commissions scolaires dans le projet de loi. C'est bon qu'on
ajoute cette pièce-là au dossier; apparemment, cela n'a pas
été fait. S'il y a des points sur lesquels la conversation peut
continuer, nous en serons des plus intéressés. Notre
responsabilité, c'est de faire en sorte qu'on ait au Québec un
système d'enseignement qui marche, non pas 212 systèmes; un
système géré par un certain nombre de commissions
scolaires dotées de responsabilités véritables, mais c'est
d'abord un système avec une direction qui doit, nécessairement,
avoir aussi une certaine force pour répondre aux besoins d'aujourd'hui.
Mais l'échange est très intéressant; je suis obligé
d'apporter la contrepartie pour qu'il soit complet.
Je vous remercie infiniment et je pense qu'on aura l'occasion de se
reprendre.
Le Président (M. Paré): M. Roy, M. Carette, M.
Lecours et M. Paré, merci beaucoup de votre contribution, au nom de tous
les membres de la commission. Merci aussi de votre patience, parce qu'on a
dépassé d'une demi-heure l'heure prévue pour l'audition de
ce mémoire.
Je voudrais, en terminant, rappeler aux membres de la commission qu'on
doit se retrouver ici, mardi matin prochain, à 10 heures. Donc, la
commission ajourne ses travaux jusqu'au mardi 24 mai, à 10 heures. Merci
beaucoup.
(Fin de séance à 19 h 8)