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(Dix heures dix minutes)
Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre,
s'il vous plaît!
J'invite les membres de la commission à prendre place. La
commission permanente de l'éducation va poursuivre ses travaux. M. le
secrétaire, est-ce que nous avons quorum?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le s
ecrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Non, M. le Président. Merci.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, s'il n'y a
pas de remplacement, je déclare ouverte cette séance de
consultation de la commission permanente de l'éducation.
Je rappelle le mandat de cette commission, soit de tenir des auditions
publiques dans le cadre de l'étude des projets de loi 106 et 107: Loi
sur les élections scolaires et Loi sur l'instruction publique.
Ce matin, les membres de la commission ont le plaisir d'accueillir le
Conseil scolaire de I'île de Montréal qui est
représenté par son président et qui sera le porte-parole
du conseil scolaire pour les besoins de la cause. M. Mongeau, je veux vous
remercier au nom des membres de cette commission d'avoir bien voulu
répondre à notre invitation et d'être venu nous faire
connaître votre point de vue sur ces deux projets de loi qui
revêtent une importance très actuelle. On a vécu et on vit,
dans la région de Montréal, depuis 1973, une nouvelle forme de
nomination des commissaires d'écoles et la Loi sur l'instruction
publique sert de base, enfin de guide, au ministère de
l'Éducation. Alors, nous avons devant nous un projet de loi qui
tâche de modifier certains règlements de ces lois.
La commission a prévu vous entendre durant environ une heure.
Nous vous suggérons, libre à vous, ceci est simplement à
titre de suggestion, ce n'est pas une directive, de prendre de quinze à
vingt minutes pour nous présenter votre mémoire, lequel
d'ailleurs a été reçu et lu par les membres de la
commission permanente. Après cela, le reste du temps sera réparti
en parts égales entre les membres des deux formations politiques avec
lesquels vous aurez l'occasion de discuter.
Pour les besoins de l'enregistrement du Journal des
débats, M. le président, si vous voulez bien nous
présenter les personnes qui vous accompagnent et enchaîner avec la
présentation du mémoire du Conseil scolaire de l'île de
Montréal.
Conseil scolaire de l'île de
Montréal
M. Mongeau (Jacques): M. le Président, M. le ministre,
mesdames et messieurs les membres de cette commission, j'aimerais d'abord
remercier cette commission de permettre au Conseil scolaire de I'île de
Montréal de présenter ses vues sur les projets de loi 106 et
107.
Avec moi, ce matin; à ma droite, M. Joel Hartt,
vice-président du Conseil scolaire de l'île de Montréal et
président de la commission scolaire de Lakeshore, qui a participé
à la rédaction de ce mémoire; à ma gauche, Mme
Judith Lortie-Hinse de la commission scolaire Sainte-Croix, qui a aussi
siégé au comité qui a préparé ce
mémoire; Mme Alice Marcotte, présidente de la Commission des
écoles catholiques de Verdun; M. Gérard Latreille,
délégué de la commission scolaire du Sault-Saint-Louis,
qui représente son président, ce matin, qui est en train de
préparer son audition pour l'heure du midi; M. Gilles Dion, de la
commission scolaire Jérôme-Le Royer, qui représente ici M.
Morselli, qui a siégé au comité qui a
préparé ce mémoire. À ma gauche, le directeur
général du conseil scolaire, M. Raynald Laplante; Me Jean
Marcoux, secrétaire général du conseil scolaire; M. Pierre
Tougas, conseiller cadre en planification et pédagogie du Conseil
scolaire de l'île de Montréal. Vous remarquerez, M. le
Président, qu'il y a derrière moi plusieurs membres du conseil
scolaire qui se sont déplacés pour cette audition.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Avant que vous
commenciez la présentation du mémoire, juste une question
d'information. Le document avec la couverture bleue présente-t-il des
différences par rapport à celui que vous nous aviez soumis?
M. Mongeau: Pas du tout.
Le Président (M. Parent, Sauvé): II n'y a aucune
différence?
M. Mongeau: II n'y aucune différence. Nous avons
simplement abrégé un peu pour les fins de la lecture, pour tenter
de rentrer dans les 20 ou 25 minutes.
Le Président (M. Parent, Sauvé): D'accord.
M. Mongeau: II n'y a absolument aucune différence.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Nous vous
écoutons.
M. Mongeau: M. le Président, en 1972, lorsque le Parlement
du Québec a procédé à une première
restructuration scolaire de l'île de
Montréal, il reconnaissait explicitement le caractère
particulier de l'organisation scolaire dans la métropole. Il importait,
afin de tenir compte tant de l'inégalité des revenus des
commissions scolaires que des problèmes engendrés par la
densité et le pluralisme de la population de Montréal, de
chapeauter les huit commissions scolaires nouvellement créées par
un organisme de concertation et de planification, le Conseil scolaire de
l'île de Montréal.
Le conseil scolaire était chargé spécifiquement
d'assurer un équilibre entre les ressources pécuniaires
inégales de ses partenaires et leurs besoins particuliers en tenant
compte d'efforts fiscaux comparables et de services pédagogiques
équivalents. Il était responsable du financement à court
et à long terme des commissions scolaires de l'île de
Montréal et devenait l'unique gestionnaire de la dette scolaire. Il
devait promouvoir la mise en commun de certains services et assurer la
planification et le développement du réseau scolaire. Il
constituait enfin un carrefour où les partenaires pouvaient se concerter
et procéder conjointement au développement scolaire de l'ensemble
du territoire.
Pour ce nouvel organisme, le défi était de taille. La
diversité dans la richesse relative de ses partenaires, la
disparité de leur taille et, partant, de leurs besoins et de leurs
attentes, et l'isolement traditionnel des communautés scolaires selon
leur religion et leur langue constituaient autant d'embûches.
Organisme original et unique au Québec, le conseil scolaire
devait créer des modèles d'intervention nouveaux et acceptables
par les huit commissions scolaires de I'îIe de Montréal dans le
respect de leur autonomie respective. Il devait susciter des consensus
malgré les divergences d'intérêts locaux et amener ses
partenaires à accepter ses interventions dans un esprit de collaboration
où chacun devenait de plus en plus conscient des avantages de ces mises
en commun et de ces échanges. Quinze ans plus tard, nous croyons pouvoir
affirmer que la création du conseil scolaire, pièce fondamentale
de la restructuration scolaire de I'île de Montréal, a
été bénéfique, et pour la collectivité
montréalaise et pour l'ensemble du Québec. Voyons comment.
Sur le plan du financement des commissions scolaires, l'intervention du
conseil scolaire a permis des économies substantielles. Au chapitre des
emprunts à long terme, par exemple, le conseil scolaire a réussi
à s'imposer et à se créer une réputation enviable
dans les milieux financiers canadiens et étrangers. Ainsi, grâce
à son excellente cote de crédit, le conseil a financé
à long terme les dépenses d'immobilisation du système
scolaire de l'île en émettant pour plus de 500 000 000 $
d'obligations à des conditions plus qu'avantageuses.
Sur le plan du financement à court terme, le conseil scolaire,
par ses transactions sur le marché monétaire, a
réalisé depuis neuf ans des économies de près de 8
000 000 $ au profit du système scolaire. En effet, à cause des
sommes d'argent importantes qu'il administre, le conseil peut, grâce
à son accès au marché monétaire, financer le
système scolaire à un taux inférieur au taux
préférentiel des banques.
Enfin, au chapitre de la perception de la taxe scolaire, les
vérifications très serrées effectuées par le
conseil scolaire depuis 1978 ont permis de récupérer un montant
de plus de 10 000 000 $.
La présence d'un organisme régional pour-I'île a
permis de répartir le fardeau fiscal de façon égale entre
tous les contribuables. Plus important encore, cependant, est le rôle
majeur joué par le conseil scolaire quant au partage et au revenu des
taxes scolaires. On pense ici, principalement, aux mesures de rattrapage en
milieux défavorisés où le conseil a consacré
près de 52 000 000 $ depuis 1973 pour améliorer
l'éducation des enfants de ces milieux et aux allocations pour fins de
recherche et de développement en pédagogie, principalement dans
les secteurs de la défavorisation de l'orthopédagogie et de
l'adaptation des enfants immigrants à l'école du
Québec.
Dans le domaine des investissements, une des réalisations les
plus significatives du conseil scolaire a été d'obtenir du
ministère un budget annuel global décentralisé,
géré par le conseil et ses partenaires, pour les dépenses
d'investissements relatives aux propriétés actuelles. Ce sont les
commissions scolaires, le conseil agissant comme coordonnateur, qui
déterminent annuellement les modalités de partage de cette
enveloppe globale selon des critères qui sont propres au milieu
métropolitain de Montréal et qui tiennent compte des besoins
diversifiés et des possibilités largement inégales des
partenaires. L'équité dans le partage des revenus ne s'est donc
pas manifestée seulement pour les budgets d'opération.
Trop souvent, les politiques visant l'abolition ou la réduction
des inégalités n'aboutissent qu'à un nivellement par la
base. Aussi le conseil scolaire s'est-il assuré que sa coordination et
ses interventions servent à étendre à l'ensemble de
l'île des initiatives de l'une ou l'autre des commissions scolaires.
Ainsi en a-t-il été de la politique alimentaire que le conseil
scolaire adoptait et implantait dans chacune des commissions scolaires de
l'île à partir d'un modèle déjà
expérimenté à la Commission des écoles catholiques
de Montréal. Il en fut de même lorsque le conseil étendait
à l'ensemble des commissions scolaires l'octroi de subventions pour des
suppléments alimentaires dans les écoles de milieux
défavorisés.
C'est dans cette même perspective de partage des
expériences et des initiatives que le conseil scolaire décidait
de former des comités de coordination ou de réflexion en
enseignement professionnel, en éducation interculturelle, en
micro-informatique scolaire, en transport scolaire, en alimentation, etc.
Ce dont le conseil scolaire peut toutefois
s'enorgueillir le plus, c'est d'être devenu un lieu
privilégié de rencontres et d'échanges où les
commissions scolaires de l'île, nonobstant leur taille ou leur religion,
leur culture et leur langue, ont pu se connaître, se parler, se
comprendre et se respecter. Depuis quinze ans, elles ont appris à
collaborer et à partager leur expérience et leur savoir-faire,
aussi bien au niveau des commissaires qu'à ceux de l'administration et
de la gestion pédagogique.
Lorsqu'un projet est étudié au conseil scolaire, il est
presque toujours le produit d'une concertation des représentants de
chacune des commissions scolaires qui ont analysé ensemble la
problématique et ont élaboré conjointement une ou des
hypothèses de solutions qui cherchent à concilier les
préoccupations individuelles et le bien général de la
communauté scolaire montréalaise.
En concertation avec les commissions scolaires de son territoire, le
conseil scolaire a mis au point une formule d'auto-assurance des biens des
commissions scolaires, qui a connu un tel succès qu'elle a
été prise en charge par le ministère de l'Éducation
et étendue à l'ensemble du système scolaire du
Québec. Il a également établi un régime commun de
gestion des risques, qui est une forme d'auto-assurance en matière de
responsabilité civile, et un système d'achats coopératifs
des biens de grande consommation qui permettent chaque année des
économies substantielles pour les commissions scolaires de
l'île.
Dans le domaine de la micro-informatique scolaire, le conseil scolaire a
permis à sept des huit commissions scolaires de l'île de se doter
d'un centre régional de développement des applications de la
micro-informatique à des fins éducatives. Premier du genre au
Québec, ce centre a contribué depuis trois ans à
encourager l'intégration du micro-ordinateur au processus
d'apprentissage des élèves tout en collaborant étroitement
avec le ministère de l'Éducation sur le plan de la production et
de l'évaluation des logiciels, de la recherche et du
développement d'une instrumentation pédagogique. De même,
le conseil scolaire a accepté que ses avocats soient mis à la
disposition des commissions scolaires permettant ainsi à ces
dernières d'obtenir les services d'un personnel spécialisé
en droit scolaire.
Depuis 1975, et en collaboration avec ses partenaires, le conseil
scolaire a établi et révisé annuellement un plan
quinquennal qui prévoit un étalement des dépenses
d'investissements. Ce plan a permis entre autres au conseil, compte tenu des
besoins exprimés par les commissions scolaires, de ses contraintes
financières et des critères de priorité acceptés
par tous les partenaires, de prévoir un calendrier de réalisation
des projets de construction qui soit à la fois réaliste et
équitable pour chacune des commissions scolaires de l'île.
Il en a été de même sur le plan de l'utilisation
rationnelle des bâtiments. Dans un milieu à grande densité
de population comme celui de l'île de Montréal, on se rend vite
compte que les frontières et les territoires sont souvent artificiels
quand vient le temps de planifier l'utilisation des équipements
scolaires. Ainsi, le conseil scolaire a-t-il pu jouer un rôle important
en incitant les commissions scolaires à adopter un plan réseau
d'écoles qui tient compte à la fois des besoins à moyen et
à long terme de leur population, de leurs équipements et de ceux
des commissions scolaires dont les territoires se chevauchent ou sont contigus,
et aussi en aidant à résoudre certains problèmes
d'utilisation de bâtiments scolaires qui ont surgi à l'occasion
entre deux commissions scolaires ayant des frontières contiguës ou
des territoires communs.
Dans ce même domaine, le conseil scolaire et les commissions
scolaires se sont doté d'une politique de vente et de location des biens
immobiliers inutilisés qui, tout en étant profitable
financièrement aux commissions scolaires, a diminué le niveau
d'emprunt du conseil de près de 51 000 000 $ depuis 1973.
Enfin, dans le domaine de la formation professionnelle, le conseil
scolaire, grâce au soutien d'un comité de coordination
formé de responsables de l'enseignement professionnel des commissions
scolaires de l'Ile, a, depuis sa création, planifié le
développement de cette formation sur IHe de Montréal. En 1979, le
conseil adoptait un plan de développement de l'enseignement
professionnel sur l'île de Montréal et a contribué
largement aux débats qui ont eu cours pendant les différentes
phases de l'élaboration de la politique ministérielle en cette
matière.
Avec les années, le conseil a cheminé et modifié
son style d'action, si bien qu'il a trouvé sa voie: arriver à
être un organisme de soutien à l'endroit des commissions scolaires
beaucoup plus qu'un organisme d'autorité. Si on examine ses agissements
tout au long des années, on constate que, en dehors des domaines
où la loi lui imposait des devoirs stricts, le conseil scolaire a
graduellement évité d'imposer sa loi aux commissions scolaires,
d'une part, en recherchant des consensus avant d'agir et, d'autre part, en
offrant des services auxquels les commissions scolaires pouvaient librement
adhérer.
Ce cheminement du conseil scolaire l'a amené, dans son
mémoire sur le projet de loi 3, à proposer lui-même au
législateur de lui retirer d'importants pouvoirs. Le conseil scolaire en
était là dans son cheminement lorsque, en décembre 1984,
la Cour suprême, dans un jugement concernant la Loi sur la
fiscalité municipale, est venue rappeler au gouvernement du
Québec qu'un certain nombre de droits des commissions scolaires
confessionnelles étaient protégés par la constitution
canadienne et qu'on ne pouvait impunément mettre des entraves à
ces droits.
Comme le conseil scolaire détenait des pouvoirs de
réglementation assez étendus à
l'égard des huit commissions scolaires de son territoire, le
législateur s'est dit que la meilleure façon de régler le
problème serait de ne permettre désormais au conseil d'exercer de
rôles à l'égard des deux commissions scolaires
confessionnelles que si celles-ci étaient d'accord. C'est ce qu'il a
fait par les lois 29 de 1985 et 24 de 1986 qui n'ont laissé au conseil
de pouvoir de réglementation à l'égard des deux
commissions scolaires confessionnelles qu'en matière de milieux
défavorisés.
Ainsi, depuis 1985, le conseil scolaire est formé de deux classes
de commissions scolaires: les six commissions scolaires qui sont des membres
à part entière et astreints à toutes les prescriptions de
la loi et à toutes les règles que le conseil lui-même s'est
données au cours des ans et d'autre part, les deux commissions scolaires
confessionnelles qui sont en quelque sorte des membres honoraires qui ne sont
astreints, abstraction faite des milieux défavorisés, qu'aux
règles qu'ils veulent bien accepter.
Pour être équitable, le législateur a toutefois
prévu, dans sa loi 29 de 1985, que les représentants des
commissions scolaires confessionnelles à la table du conseil scolaire ne
voteraient désormais que "sur les matières pour lesquelles la
présente partie donne compétence au conseil sur ces commissions
scolaires confessionnelles". Après deux classes de commissions
scolaires, il créait deux classes de membres du conseil.
Ces deux sortes de "membership" ont des répercussions très
concrètes autour de la table des délibérations du conseil
scolaire. Les représentants désignés par la Commission des
écoles catholiques de Montréal et la Commission des écoles
protestantes du grand Montréal votent sur moins de la moitié des
sujets inscrits à l'ordre du jour des réunions. Ils en sont
frustrés. Leurs collègues des autres commissions scolaires ne
sont guère plus heureux, car ils sont enclins à voir dans les
délégués des deux commissions scolaires confessionnelles
des gens qui ne s'associent à eux que pour tout dossier dont ils peuvent
tirer profit.
Au surplus, cette frustration a conduit les deux classes de commissions
scolaires à faire connaître, chacune à sa façon, son
mécontentement au ministre de l'Éducation. Certaines commissions
scolaires, s'attaquant au pouvoir que la loi actuelle donnait au conseil,
demandaient de réduire l'influence de ce dernier. D'autres commissions
scolaires exigeaient, au contraire, un raffermissement du rôle
joué par le conseil. Cette situation est parvenue aux oreilles du
législateur qui a imaginé une solution pour mettre tous les
membres du conseil sur le même pied et pour satisfaire aux exigences de
certaines commissions scolaires: réduire à presque rien le
rôle du conseil. C'est, à toutes fins utiles, ce que propose le
projet de loi 107.
En effet, si on examine le projet de loi 107, on constate qu'en plus
d'enlever au conseil scolaire tout pouvoir à l'égard des budgets
des commissions scolaires, de leurs projets de construction, de leurs achats ou
ventes d'immeubles et de toutes leurs décisions relatives à leurs
immeubles - ce avec quoi le conseil est parfaitement d'accord - ce projet de
loi a les effets suivants: Le conseil scolaire continue de percevoir la taxe,
mais il n'a plus aucune discrétion sur la façon d'en
répartir le produit entre les commissions scolaires; le financement
à court terme des besoins d'une commission scolaire, confessionnelle ou
pas, n'est effectué qu'avec l'accord de la commission scolaire; le
conseil scolaire peut pourvoir à la planification du
développement des commissions scolaires à condition qu'elles
soient toutes d'accord sur les matières que le conseil scolaire peut
planifier; le conseil scolaire peut aussi organiser des services communs au
profit des commissions scolaires à condition que, là aussi, elles
soient toutes d'accord sur les services que le conseil scolaire peut mettre sur
pied; le conseil scolaire ne peut utiliser la taxe scolaire pour apporter une
aide particulière aux commissions scolaires qui doivent fournir un
soutien à la population scolaire défavorisée que s'il
adopte un taux de taxe plus élevé à cette fin,
après consultation de la population par référendum.
En somme, en réduisant les fonctions du conseil scolaire à
l'égard de toutes les commissions scolaires, le projet de loi 107 place
les six commissions scolaires autres que la Commission scolaire des
écoles catholiques de Montréal et la Commission des écoles
protestantes du grand Montréal dans une situation de presque
égalité avec ces dernières. (10 h 30)
Dès lors, les commissions scolaires étant toutes
égales ou presque, il n'y a plus lieu de faire des distinctions entre
les droits de vote des représentants des commissions scolaires
confessionnelles et des représentants des autres commissions scolaires
à la table du conseil. Les deux classes de membres du conseil sont
abolies. La solution est ingénieuse, mais il y a un hic. Le projet de
loi 107 règle un problème de procédure, mais crée
un problème de fond: Comment ce nouveau conseil scolaire,
dépouillé de presque toutes ses fonctions, pourra-t-il continuer
à jouer le rôle qu'il a joué jusqu'ici et qui, comme en
témoigne la première partie de cette présentation, est un
rôle de première importance? Qu'on ne se méprenne pas ici
sur les visées du conseil scolaire. Celui-ci ne cherche pas les moyens
d'imposer sa loi aux commissions scolaires. Il demande seulement que la loi lui
donne les moyens de continuer sa mission dans les domaines où
l'expérience a révélé qu'il pouvait apporter un
soutien important aux commissions scolaires.
La vision du conseil que nous offre le projet de loi 107 est tellement
loin de son fonctionnement réel qu'on en est totalement
décontenancés. Ce n'est pas ainsi que le conseil
exerce son rôle et ce n'est pas ainsi, croyons-nous, qu'il devrait
l'exercer.
Qu'on nous permette de mettre ici en parallèle le vécu du
conseil scolaire et la pâle image de ce dernier que nous propose le
projet de loi 107. En matière de financement à court terme,
actuellement, le conseil scolaire assure le financement à court terme
des dépenses quotidiennes des commissions scolaires par le recours
à un consortium bancaire et aussi au marché monétaire
auquel il est le seul organisme scolaire à avoir accès. En plus
de libérer les commissions scolaires de tout souci à
l'égard de leurs besoins quotidiens de liquidités, ce
système permet de réaliser des économies annuelles de
centaines de milliers de dollars. Depuis la loi 29 de 1985, les deux
commissions scolaires confessionnelles ne recourent à ce service que si
elles concluent une entente à cet égard avec le conseil, ce
qu'elles ont toujours fait jusqu'à maintenant. Cette option constitue
néanmoins une menace pour la stabilité de ce système de
financement.
Le projet de loi 107 accentue la menace de déstabilisation en
permettant à chaque commission scolaire, confessionnelle ou non, de se
soustraire à ce système de financement.
En matière de péréquation des ressources
financières, actuellement, le conseil scolaire utilise une partie du
produit de la taxe scolaire pour permettre à certaines commissions
scolaires de faire face à des charges particulières comme c'est
le cas, notamment, du soutien que certaines d'entre elles doivent apporter
à leurs élèves de milieux défavorisés. Il
partage aussi, selon les besoins, une allocation annuelle du ministre de
l'Éducation destinée aux réparations et à
l'entretien des écoles.
Le projet de loi 107 édicté que le produit de la taxe sera
distribué sur une même base entre les huit commissions scolaires,
ne laissant ainsi au conseil scolaire aucune marge de manoeuvre pour apporter
une aide particulière quelconque à une commission scolaire. Quant
au partage de l'allocation destinée à l'entretien et aux
réparations des écoles, le conseil n'a plus aucun rôle
à jouer.
Le projet de loi, il faut le dire, laisse la possibilité au
conseil scolaire d'imposer un taux de taxe plus élevé que le
plafond fixé par la loi, pour venir en aide aux commissions scolaires
qui comptent des élèves défavorisés. Mais le taux
de la taxe est alors assujetti à un référendum. Le pouvoir
de taxation additionnelle devient dès lors bien aléatoire et, si
l'on considère le coût d'un référendum, bien
illusoire aussi.
En matière de services communs, actuellement, le conseil scolaire
peut mettre sur pied des services au bénéfice des commissions
scolaires. Il doit consulter les commissions scolaires pour ce faire, mais il
n'est pas nécessaire qu'il obtienne leur consentement unanime. C'est le
cas, par exemple, du régime de gestion des risques auquel six des huit
commissions scolaires participent, du système d'achats
coopératifs auquel participent, à divers degrés, les huit
commissions scolaires et du centre de microinformatique auquel recourent sept
commissions scolaires.
Comme on le voit, les commissions scolaires ne sont pas tenues
d'utiliser les services institués par le conseil scolaire. Au surplus,
si un service requiert une contribution financière du conseil, comme
c'est le cas, par exemple, du système de gestion des risques pour lequel
le conseil a dû créer un fonds, les commissions scolaires qui ne
participent pas reçoivent une compensation financière.
Le projet de loi 107 ne permet la mise sur pied de services communs
qu'avec le consentement unanime des huit commissions scolaires. Il suffit donc
qu'une seule commission scolaire s'oppose à l'institution d'un service
pour contrecarrer la volonté des sept autres commissions scolaires qui
souhaitent un tel service.
En matière de planification, actuellement, le conseil scolaire
joue un rôle important en ce qui concerne les équipements
scolaires, comme on l'a dit plus haut. Le projet de loi 107 traite la
planification comme les services communs: il n'en sera fait que si toutes les
commissions scolaires y consentent. On peut dès lors prédire
assez facilement qu'il n'y aura plus de plan quinquennal, ni, non plus, de
planification par le conseil et ses partenaires en matière
d'enseignement professionnel.
En résumé, le projet de loi 107 vide la conseil scolaire
de sa substance. Il ne fait même pas allusion à son important
rôle de concertation dont on fait état plus haut. Il
témoigne d'une profonde méconnaissance des fonctions
véritables du conseil, de la même façon que le faisaient le
projet de loi 40 de 1983, qui ne lui laissait le soin que de gérer une
partie de la dette obligataire des commissions scolaires, et la défunte
loi 3 qui, un peu comme le projet actuel, ne lui laissait comme
prérogatives que la fixation du taux de taxe et la poursuite de sa
mission de rattrapage en milieux défavorisés, sans même,
cette fois-ci, lui donner les moyens financiers de le faire.
Ce projet de loi est tout aussi déconcertant et frustrant que
l'étaient les deux projets antérieurs, car il rejette du revers
de la main le rôle joué par le conseil au cours des quinze
dernières années pour amener ces huit partenaires à
façonner et à développer ensemble de nouveaux styles de
gestion, selon la mission que le législateur lui avait confiée en
1972.
La voie suivie par le gouvernement dans le projet de loi 107 est-elle la
seule possible? N'est-il pas possible de faire du conseil un organisme qui
répond aux attentes de toutes les commissions scolaires sans
réduire son rôle à peu de choses? Cela nous paraît
possible, effectivement. Revoyons donc, une à une, à nouveau, les
fonctions que devrait exercer le conseil scolaire en nous demandant comment il
pourrait exercer chacune d'elles de la même façon à
l'égard des
huit commissions scolaires de son territoire.
À première vue, il ne nous paraît pas que le pouvoir
d'emprunt des commissions scolaires confessionnelles est un pouvoir
protégé par la constitution canadienne, car ce n'est pas un
pouvoir que détenaient, au moment de l'Union, les classes de personnes
mentionnées à l'article 93 de l'Acte de l'Amérique du Nord
britannique. À cet égard, les lois 29 et 24 nous paraissent
être allées trop loin en permettant aux deux commissions scolaires
confessionnelles de contracter elles-mêmes leurs propres emprunts. Si
notre point de vue est juste, la loi pourrait, dès lors, accorder au
conseil scolaire le pouvoir exclusif d'emprunter, tant à long terme
qu'à court terme, pour tous les besoins des huit commissions scolaires
de son territoire dont les représentants auraient désormais,
à cet égard, un droit de vote égal autour de la table du
conseil.
Pour tirer la chose au clair, le ministre de l'Éducation
pourrait, croyons-nous, soumettre cette question à la Cour d'appel en
même temps que les autres questions qu'il se propose de soumettre
à cette cour relativement au projet de loi 107 et aux droits des
commissions scolaires confessionnelles.
Concernant la péréquation des revenus, la loi devrait
permettre au conseil scolaire d'utiliser une partie du produit de la taxe ou de
ses surplus pour venir en aide aux commissions scolaires qui comptent des
élèves de milieux défavorisés ou même
à celles qui doivent, occasionnellement, faire face à des
dépenses inhabituelles, par exemple, pour l'intégration des
nouveaux immigrants ou pour l'organisation des élections scolaires qui
représentent des charges très inégales d'une commission
scolaire à l'autre.
La distribution des revenus selon les besoins est une importante
fonction de justice sociale dont le conseil scolaire a toujours usé
modérément et qui ne porterait pas atteinte aux droits
constitutionnels de la Commission des écoles catholiques de
Montréal et de la Commission des écoles protestantes du grand
Montréal, à la condition que, comme l'a dit la Cour
suprême, celles-ci conservent le pouvoir d'imposer une surtaxe. Encore
ici, les délégués des huit commissions scolaires
pourraient avoir un droit de vote égal. Ici, comme pour le financement,
il y aurait lieu de s'adresser à la Cour d'appel pour faire
établir si le conseil scolaire a une certaine discrétion pour
répartir le produit de la taxe compte tenu des droits constitutionnels
des commissions scolaires confessionnelles.
La loi devrait prévoir que le conseil scolaire peut instituer des
services communs sans qu'il ne soit nécessaire d'obtenir l'accord
unanime des commissions scolaires, chaque commission scolaire étant
libre de recourir à ces services. Ici ne se poserait pas le
problème de savoir si la loi porterait atteinte aux droits des
commissions scolaires confessionnelles puisque celles-ci ne seraient pas tenues
de recourir à ces services.
En matière de planification, nous référons les
membres de cette commission parlementaire à notre mémoire
où nous expliquons que, si la loi précisait suffisamment bien le
rôle du conseil scolaire, il n'y aurait aucun risque de porter atteinte
aux droits constitutionnels des commissions scolaires confessionnelles.
En conclusion, le projet de loi 107 tente de régler le
problème de procédure relié au droit de vote et de
répondre aux griefs exprimés par certaines commissions scolaires
de l'île en utilisant une méthode de nivellement par le bas qui
enlève, à toutes fins utiles, toutes ses fonctions au conseil
scolaire. La proposition que nous formulons dans notre mémoire est tout
autre et ferait d'une pierre deux coups. D'abord, la loi présenterait le
conseil scolaire non seulement comme il est réellement à
plusieurs égards, mais aussi et surtout comme un organisme susceptible
de répondre aux attentes de toutes les commissions scolaires de ITle de
Montréal, c'est-à-dire essentiellement comme un organisme de
services et de concertation.
Les questions posant problèmes, particulièrement les
pouvoirs du conseil en matière d'emprunts et de répartition du
produit de la taxe, seraient soumises à la Cour d'appel. Ensuite, la
proposition du conseil scolaire, en donnant un droit de vote égal
à tous ses membres, ferait disparaître les deux classes dans les
commissions scolaires de membres du conseil qui ont été à
la source de tant de frustrations.
Si d'aventure on jugeait irrecevable la vision du conseil scolaire que
propose le présent mémoire, le statu quo nous paraîtrait de
loin préférable à la solution que propose le projet de loi
107. Les tiraillements qui entourent la conclusion d'ententes entre le conseil
et les commissions scolaires confessionnelles et les situations ambiguës
que crée le régime des droits de vote inégaux des membres
du conseil nous paraissent encore préférables à cet
organisme sans âme que propose le projet de loi 107. Voilà, M. le
Président, M. le ministre, mesdames et messieurs de la commission, les
vues du conseil scolaire à l'égard du projet de loi 107.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci beaucoup, M.
Mongeau, pour le mémoire que vous venez présenter aux membres de
la commission. Je vous rappelle que le reste du temps sera réparti
également entre les deux formations politiques, de façon à
pouvoir discuter avec vous et avec les personnes qui vous accompagnent. Dans un
premier temps, je reconnais le ministre de l'Éducation. M. le
ministre.
M. Ryan: M. le Président, j'ai pris connaissance avec
beaucoup d'intérêt du mémoire du Conseil scolaire de
l'île de Montréal. Je ne pense pas qu'il y a beaucoup de
différence entre ce qui nous a été lu ce matin et le texte
que nous avions reçu; c'est à peu près la même
chose, j'imagine. J'ai suivi avec le texte que j'avais
annoté au cours de la lecture que j'en ai faite avant la
séance. Le sujet de la discussion, ce matin, c'est le Conseil scolaire
de l'île de Montréal, c'est ce dont le mémoire traite et on
va s'en tenir à cela.
Il y a un gros problème. À mon point de vue, le
problème de fond se pose comme ceci. J'en viens tout de suite au coeur
de la question. Comme son nom l'indique, le conseil scolaire existe pour toute
l'île de Montréal, c'est-à-dire pour toutes les commissions
scolaires et pour toutes les clientèles scolaires de l'île de
Montréal. Or, des problèmes ont surgi concernant les deux
commissions scolaires principales de l'île de Montréal, sur le
plan numérique: la Commission scolaire des écoles catholiques de
Montréal et la Commission des écoles protestantes du grand
Montréal, lesquelles représentent à elles seules 62 % de
la clientèle scolaire de l'île de Montréal.
Comme je vous l'ai souvent dit, M. le Président, il est difficile
pour le gouvernement d'accepter le statu quo dans une situation où des
décisions sont prises par des délégués qui
représentent 38 %, dans la meilleure des hypothèses, à
supposer qu'ils soient unanimes, tandis que les autres 62 % sont soit
laissés à la porte, soit en désaccord. Je pense que ce qui
a envenimé les choses au cours de la dernière année, c'est
la décision que vous avez prise d'interpréter de manière
privative certaines dispositions de la loi 29, quand vous avez
décidé que les représentants des deux commissions
scolaires confessionnelles n'avaient pas le droit de vote, sauf sur les
questions où ils étaient immédiatement engagés. En
particulier, si j'ai bien compris, on leur a enlevé le droit de vote
pour le choix des dirigeants de l'organisme. Il y avait un choix à
faire: Est-ce qu'ils en font partie ou est-ce qu'ils n'en font pas partie? Eux
considèrent qu'ils en font partie, sauf pour les questions où ils
décident de s'exclure, en vertu de leurs privilèges
constitutionnels. Vous avez conclu - je parle de la présidence et de
ceux qui sont solidaires de la présidence - qu'ils n'en faisaient pas
partie, sauf pour les questions autour desquelles ils décident d'en
faire partie. Cela amène des conséquences
considérables.
Dans l'une ou l'autre hypothèse, le gouvernement ne peut pas se
satisfaire d'une situation comme celle-là. Il fallait clarifier des
choses. Il faut clarifier les choses à partir d'une hypothèse de
solution qui essaie de tenir compte de l'ensemble de la réalité
scolaire de l'île de Montréal, c'est-à-dire non seulement
des commissions scolaires que vous représentez plus
immédiatement, mais aussi des autres. Si on n'est pas capable de
réaliser cette équation, c'est qu'il y a un problème
autour du conseil scolaire, qu'on veuille l'admettre ou non. À ce
moment-là, c'est le devoir des dirigeants politiques de chercher des
solutions. Il y a un problème très aigu. (10 h 45)
Nous avons cherché la solution dans la voie suivante: En ce qui
touche la composition du conseil, nous n'y touchons point, sauf en ce qui
regarde la nomination de trois personnes nommées par le gouvernement.
Nous faisons disparaître ces trois personnes, nous n'avons pas
d'intérêt à essayer de mettre la patte sur le conseil,
d'aucune espèce de façon. Contrairement à bien des
légendes qu'on essaie de créer, ce n'est pas du tout l'intention
de ce projet de loi à l'endroit des commissions scolaires, entre
parenthèses. Il y a des représentations qui nous ont
déjà été faites indiquant que ce serait bon qu'il
reste des personnes nommées par le gouvernement. Nous n'avons pas
d'objection. C'est une chose qui peut être envisagée. Mais
là nous pensons que c'est l'affaire des commissions scolaires de
Montréal; on leur laisse leur affaire. Alors, là-dessus il ne
devrait pas y avoir de problème. Sauf un, vous dites à la fin:
Donner un droit de vote égal à tous ses membres. Là vous
voulez dire les membres individuels, pas les membres corporatifs, j'imagine?
Quand vous dites "un droit de vote égal à tous ses membres",
est-ce que vous voulez dire un vote par commission scolaire ou un vote par
délégué de commission scolaire?
M. Mongeau: Un vote par délégué. Ce sont les
membres qui siègent au conseil.
M. Ryan: Si on s'entend, c'est ce que nous proposons dans le
projet de loi. Il n'y a pas de différence entre nous, sauf une nuance
à laquelle j'en viens très rapidement.
Maintenant, si on regarde les fonctions. Nous laissons le pouvoir
d'emprunt à long terme. À court terme, on se dit: S'il y en a qui
veulent à court terme, ils pourront le faire. Mais à long terme
en tout cas c'est cela qui est important. C'est la base. On le laisse de ce
côté. Et les deux commissions scolaires confessionnelles nous ont
déjà assurés qu'elles acceptaient cette fonction du
conseil. Par conséquent, je ne pense pas qu'il devrait y avoir de
chicane là-dessus. Vous dites qu'il faudrait peut-être le faire
déterminer par la Cour d'appel. On va examiner cette possibilité.
Selon l'avis de nos conseillers, cela a déjà été
réglé par la Cour d'appel. Quand la Cour d'appel a statué
qu'on ne pouvait pas imposer de contraintes sur le pouvoir de dépenser
des commissions scolaires, nous comprenons que, si on voulait imposer des
contraintes par le biais de l'emprunt, cela reviendrait au même et que la
question était décidée en principe. Mais s'il y a un
complément de mémoire que vous voulez nous adresser pour
étayer davantage votre point de vue là-dessus, on n'a pas
d'objection à l'examiner. Et nous n'irons pas à la Cour d'appel
avec l'idée d'exclure des questions qui ne seraient pas claires. Notre
idée est plutôt contraire. De ce côté-là, je
pense que, s'il y a des éléments de preuve qui nous sont
apportés à partir de l'analyse du jugement de 1984, je pense que
cela pourra être intéressant. Alors, quant à
ce pouvoir-là, je pense qu'il n'y a pas trop de problème.
Le pouvoir de taxation reste là.
Le rôle de rattrapage en matière d'éducation dans
les milieux défavorisés reste là, en tout cas, à
l'état de principe. La modalité est mise en question par vous. La
modalité peut faire l'objet de discussion. Il y a une modalité
qui est indiquée dans le projet de loi. Ce n'est pas une
vérité d'évangile. Ce sont des choses qui sont sujettes
à discussion.
Il y a les services de soutien. J'en viens à l'article 399. Ici
dans le projet de loi, c'est écrit "fournit, après entente, des
services de soutien technique aux commissions scolaires de l'île de
Montréal. " Quand on a mis "entente", c'est parce qu'on ne voulait pas
mettre la règle de l'unanimité ici. Cela peut être
formulé autrement. Il y a peut-être un défaut de
formulation ici. C'est une chose qui est tout à fait négociable.
Maintenant, en ce qui concerne les fonctions de planification, cela touche aux
pouvoirs mêmes qui sont inhérents à la nature de chacune
des commissions scolaires concernées. Nous établissons que cela
devrait faire l'objet d'une volonté unanime des commissions scolaires
concernées. Il nous apparaît que c'est la règle la plus
sage pour que les deux plus grosses n'écrasent pas les plus petites et
pour que les plus petites, non plus, n'écrasent pas les deux plus
grosses par des subterfuges ou des ruses, ou agissent dans leur dos ou en leur
absence. Or, c'est la règle qui nous est apparue la plus sage pour ces
fonctions.
Mais je pense que c'est une invitation à rétablir le
climat de compréhension, de respect mutuel et de collaboration
nécessaire pour que des choses puissent se faire ensemble. Je tiens
à vous dire bien clairement que, s'il n'y a pas participation des deux
commissions scolaires principales, il n'y a pas de choses vitales autres que
celles qui sont indiquées clairement dans le projet de loi, que le
gouvernement serait disposé à confier au conseil scolaire de
l'île, actuellement. Il faut qu'on règle ce
problème-là. Il y en a une partie qu'on règle tout de
suite, ce qui est vraiment nécessaire. Quant à l'autre partie, on
laisse la porte ouverte à la collaboration et au respect mutuel. Il y a
peut-être d'autres règles que celle proposée ici. Mais la
simple règle de majorité, surtout comme elle a été
interprétée depuis une couple d'années, dans le sens de
"no can do". Je pense que c'est une chose qu'aucun gouvernement sérieux
ne pourrait accepter.
Maintenant, je voudrais peut-être poser une question à M.
Hartt pour commencer. Je pense que M. Hartt est vice-président du
conseil. Vous m'avez écrit au mois de mai avec le président de la
Commission des écoles catholiques de Montréal et le
président de la Commission des écoles protestantes du grand
Montréal, m'indiquant que vous seriez prêts à consentir des
pouvoirs en matière d'emprunt à long terme et de taxation pour le
conseil scolaire de l'île. Cela finissait là. Quelle est votre
position ce matin? Est-ce que vous endossez entièrement le
mémoire du conseil scolaire de l'île? Est-ce que vous vous
dissociez de cette lettre que vous m'avez adressée ou si tout cela peut
se marier ensemble?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Hartt.
M. Hartt (Joel): I anticipated your question, Mr. Minister, and I
made a few notes to respond to it. As you know probably better than I do, many
things change in politics. From time to time, a group may be in favor of the
Meech Lake accord and then may switch its position, or vice versa, may be in
favor of free trade and then may switch its position, as it happened recently,
when certain problems arised. I would just like to respond on two points this
way.
The Lakeshore School Board, which I am chairman, still seeks its
protected status. We believe we should have the same status as the CECM and the
PSBGM. We noted that the government is not going to recognize us in giving us
this protected status and therefore, as you know, we have decided to go to
court. We expect to win our court case, Mr. Minister. We have been advised very
well by several constitutional lawyers that we have exactly the same rights as
the two boards said to be confessional. Until then, and now I am getting to
answer your question, until then, we are members of the Island Council whether
we like it or not. Our board's interests are better served by cooperating with
the Island Council and the Lakeshore School Board has decided to work with the
Island Council until we win our court case. That being the case, we have
decided to take a very active position with the Island Council to try, at the
negotiating table with the Island Council, to work out our differences, to
seize on the opportunity afforded by the Island Council which sees itself as a
group committed to cooperation among the boards, to work within that group to
see if we can negotiate our positions. So, I think our position has now, in
view of those considerations, Mr. Minister, shifted to some extent. We still
maintain our position, in principle, that we are a protected board. Until that
is recognized by either the Ministry or the courts, our position is that we are
going to work as closely as we can with the Conseil scolaire de I'île de
Montréal and, on that basis, we share the Council's position.
M. Ryan:... I understand that you are dissociating yourself today
from your signature of May 12th?
M. Hartt: Mr. Minister, perhaps I was not clear in my
response...
M. Ryan: But those are two different views, anyway.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Please, Mr.
Minister. M. Hartt, vous avez la parole.
M. Hartt: Thank you. No, Mr. Minister, that would be an incorrect
assumption or interpretation on your part. We still maintain that position in
principle, that is to say that we still believe that Lakeshore is a protected
board, and I want to make that very very clear: Until the courts and/or the
Ministry recognize that, we are in a situation where we are obliged to work
with the island Council. If we are going to work with him, we are going to work
well with him.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre,
une dernière intervention du côté ministériel.
M. Ryan: Je voudrais poser une question à M. Mongeau cette
fois-ci. En même temps que le conseil scolaire de I'île
présente son mémoire à la commission parlementaire ce
matin, la Commission des écoles catholiques de Montréal fait
connaître sa position sur les déclarations que nous avons
entendues tantôt. Elle affirme, entre autres, dans un mémoire qui
est rendu public ce matin et dont je viens d'avoir communication, que les
affirmations du conseil scolaire de I'île concernant le rôle
qu'il a joué en matière de péréquation ne sont pas
reconnues par elle. Elle considère qu'en matière de
péréquation, au lieu de gagner elle a perdu sous l'effet de
l'action du conseil scolaire de l'île. Elle nous dit qu'en matière
de politique alimentaire elle a été défavorisée par
les décisions qu'a prises, au cours des années, le conseil
scolaire de l'île et elle réitère les frustrations
auxquelles le président faisait allusion tantôt au sujet du statut
qui lui a été donné à l'intérieur du conseil
scolaire de I'île, surtout depuis le jugement de la Cour suprême en
1984. Alors, je voudrais demander au président s'il a pris connaissance
de ces déclarations de la Commission des écoles catholiques de
Montréal et quelle réponse il apporte à ces affirmations
au nom du conseil.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Mongeau.
M. Mongeau: Oui, M. le ministre, j'ai pris connaissance, moi
aussi, ce matin, de ce contre-mémoire de la CECM en réaction au
mémoire du Conseil scolaire de l'île de Montréal, ce matin,
devant cette commission parlementaire. Je dois vous dire, M. le ministre, que
j'ai été très étonné de ce document dont le
style me laisse très perplexe quant à celui qui en a fait
l'écriture. Ce document, à mon sens, est une attaque de bas
étage contre un organisme qui représente les commissions
scolaires de l'île de Montréal et contre les petites commissions
scolaires en particulier dont mes collègues présidents sont ici
avec moi ce matin. Oui, j'ai été très étonné
de prendre connaissance de ce document ce matin.
M. le ministre, le conseil scolaire existe depuis quinze ans. Cela fait
quinze ans et, jusqu'en 1984-1985, tous les membres du conseil
siégeaient à parts égales et avaient un droit de vote
égal autour de la table. Jusqu'en 1984-1985, jamais, M. le ministre, la
CECM n'a porté une attaque comme celle-là contre le Conseil
scolaire de l'île de Montréal. Il y avait, comme toujours
d'ailleurs, six représentants à la table du conseil qui votaient
sur la politique alimentaire et sur l'attribution pour les milieux
défavorisés, et jamais, M. le ministre, ils n'ont porté
ces attaques à ce moment-là. Tous ceux qui ont
siégé au nom de la CECM à la table du Conseil scolaire de
l'île de Montréal n'ont pas porté ces accusations
concernant la péréquation. Ils participaient à cette
péréquation, M. le ministre; ils ont voté en accord avec
tous les budgets adoptés au conseil scolaire entre 1973 et 1984-1985.
Tous ceux qui ont présidé la CECM ont été d'accord
avec cela jusqu'en 1984-1985. Je pense que je suis en mesure de le dire, M. le
Président.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je
reconnais...
M. Mongeau: Mais je...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Allez-y, monsieur.
Excusez-moi.
M. Mongeau: Ils auraient pu, s'ils n'étaient pas
satisfaits, M. le ministre, à ce moment-là, proposer des
amendements pour faire augmenter les montants soit pour les milieux
défavorisés, soit pour changer la politique alimentaire. Jamais,
jusqu'en 1984-1985, M. le ministre, et, à ce moment-là, ce sont
les délégués de la CECM qui ont demandé que tous
les budgets pour la politique alimentaire et les programmes communs soient mis
à terre pour être redistribués per capita. Comment peut-on
aujourd'hui venir dire et accuser le conseil scolaire de ne pas faire de
péréquation quand ceux-là même qui accusent de ne
pas faire de péréquation sont ceux qui ont fait en sorte que les
règles de péréquation ne s'appliquent plus? Je pose la
question.
J'aimerais aussi, M. le Président, si vous me le permettez,
répondre à M. le ministre qui disait tantôt sur la question
des droits de vote, et je me suis senti visé personnellement puisque je
suis le président de l'organisme, que j'interprète la loi comme,
semble-t-il, bon me semble, en voulant restreindre le droit de vote des
délégués des deux commissions scolaires confessionnelles.
M. le ministre, je peux vous assurer qu'en autant que je préside les
assemblées du conseil j'essaie d'interpréter la loi le plus
largement possible. Mais la loi, M. le ministre, ce n'est pas moi qui l'ai
faite. La loi 29 et la loi 24, ce n'est pas moi qui les ai faites, et la loi
24, particulièrement à l'article dont le numéro
m'échappe toujours, dit bien que les délégués des
commissions scolaires confessionnelles ne votent que sur les sujets sur
lesquels il y a eu entente entre la commission scolaire et le conseil
scolaire. Ce n'est pas moi qui ai écrit cet article de loi, c'est le
législateur, ici à Québec. Je ne peux même pas
l'interpréter parce qu'il est clair comme de l'eau de roche. (11
heures)
Malgré cela, M. le ministre, je peux vous assurer que, parfois,
contrairement aux avis juridiques que j'ai, je me torture l'esprit pour tenter
de donner le droit de vote. Je peux vous assurer que je me fais parfois
blâmer par des collègues qui me disent: Tu leur en donnes trop, et
que je veux essayer, comme je l'ai toujours fait depuis quinze ans, d'avoir un
consensus et de rallier tout le monde sur l'île de Montréal, de
quelque religion, de quelque race ou de quelque langue qu'on soit, toujours
pour le bénéfice du système de l'éducation. Je
n'accepte pas une accusation personnelle comme celle-là, M. le ministre.
Non, ils n'ont pas voté pour le choix des dirigeants du conseil
scolaire. Vous étiez là, M. le ministre, au mois de
décembre. Vous avez réuni les huit présidents des
commissions scolaires de 111e de Montréal avec les directeurs
généraux. Les avocats du ministère de l'Éducation,
et c'est l'opinion que vous avez lue devant tout le monde, ont dit clairement:
Ils n'ont pas le droit de vote. Ce n'est pas moi qui ai
interprété la loi et ce n'est pas le directeur
général. Les avocats du ministère de l'Éducation
ont dit: Ils n'ont pas le droit de vote. Non seulement cela, ils ont dit: Ils
n'ont pas le droit d'être élus président,
vice-président. D'après vous, ils n'avaient même pas le
droit d'être élus membres du comité exécutif.
Malgré cela, on s'est torturé l'esprit parce qu'on avait
trouvé une opinion juridique un peu divergente sur la question des
membres du comité exécutif et on a élu un
représentant de la CECM et un autre de la CE-PGM au comité
exécutif.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Veuillez conclure,
monsieur.
M. Mongeau: M. le Président, je tenais à
rétablir les faits parce que c'est une question importante qui me vise
personnellement. Je ne voudrais jamais qu'on mette en doute mon
intrégrité là-dessus.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous comprends,
M. le président. Je pense que vous avez eu le temps nécessaire
pour justifier votre position. Maintenant, la commission étant
régie par un facteur sur lequel nous n'avons pas d'influence, qui
s'appelle le facteur temps, je dois reconnaître maintenant la
porte-parole de l'Opposition, Mme la députée de Chicoutimi. Mme
la députée.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le
président, mesdames, messieurs, il me fait plaisir de vous accueillir au
nom de l'Opposition et de vous souhaiter la bienvenue à cette
commission.
Comme le temps est court, comme nous le rappelle le président, et
que malheureusement on n'a qu'une heure pour votre organisme, je vais me
permettre de passer assez rapidement sur les commentaires touchant votre
mémoire. Je voudrais simplement dire que ce qui se passe à
l'endroit du Conseil scolaire de l'île de Montréal ressemble un
peu à ce qui s'est passé à l'endroit des MRC où on
a vu un projet de loi qui donne la possibilité aux municipalités
de se retirer de certains programmes sans préavis, ce qui fait que cela
rend extrêmement aléatoire la possibilité pour les MRC
d'organiser des services. Cependant, en ce qui concerne l'organisation de
services, il est quand même prévu dans le cas des MRC que le
service peut être organisé même s'il y a des
municipalités qui s'en retirent, ce qui n'est vraisemblablement pas le
cas pour le Conseil scolaire de l'île de Montréal. Si
j'établis ce parallèle, c'est parce qu'il me semble qu'il y a
dans de gouvernement, je ne pourrais pas dire une espèce d'attitude mais
une orientation qui se dégage afin de vider de leurs pouvoirs les
organismes intermédiaires. On ne le voit pas seulement en ce qui vous
concerne; on le voit également dans d'autres secteurs
d'activité.
Dans votre mémoire, vous faites un certain nombre de propositions
touchant la loi 106 que j'ai trouvées particulièrement
intéressantes. Dans l'annexe, vous faites des suggestions de
modifications que je saurai, au moment où on sera à l'examen du
projet article par article, sûrement ramener sur la table en termes de
modifications à apporter au projet de loi 106. Les recommandations que
vous faites là-dedans sont particulièrement judicieuses, se
justifient facilement. Elles sont assez faciles d'application. Elles
apporteraient une meilleure compréhension du projet de loi 106.
En ce qui concerne le débat qu'on vient d'avoir, j'ai lu, comme
le ministre, l'avis que nous a soumis la CECM en réaction à votre
propre mémoire. Je ne voudrais pas y revenir, les choses ayant
été dites pour l'essentiel.
On a eu ici un organisme, l'Alliance des professeurs de Montréal,
qui suggère que le Conseil scolaire de l'île de Montréal
pourrait gérer l'autre réseau d'écoles, parce que vous
savez que dans la proposition du ministre, c'est un imbroglio, et on y
reviendra, où on superpose bien des choses sur le territoire de la CECM.
L'Alliance des professeurs de Montréal suggérait que si on devait
créer un autre réseau de commissions scolaires ou un autre
réseau d'écoles, cela pourrait être une solution de confier
la gestion de ce réseau au Conseil scolaire de l'île de
Montréal. Qu'en pensez-vous?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Mongeau.
M. Mongeau: Remarquez bien que lorsque
j'ai pris connaissance du mémoire de l'Alliance sur ce point,
bien sûr, j'ai trouvé que c'était un rôle
intéressant que le conseil scolaire pouvait jouer. Il n'y a aucun doute
là-dessus. À mon sens, ce serait l'organisme tout à fait
approprié pour le faire. Mais, évidemment, cela demande tout
d'abord des consensus entre les différents partenaires et cela requiert
aussi une certaine volonté gouvernementale, je pense. J'ai trouvé
très intéressante cette suggestion dans le mémoire de
l'Alliance. D'ailleurs, vous savez, il y a eu aussi des mémoires
d'autres organismes qui ont fait des suggestions intéressantes ou qui
ont parlé du conseil scolaire, et nous en avons des extraits ici que
nous pourrions vous déposer.
Évidemment, nous les six petits qui sommes ici à cette
table, les 32 % qui sommes tous assis ici à cette table et qui sommes
tous d'accord sur le mémoire que nous présentons, je dois vous
dire que j'ai rencontré le président de la CEPGM avec le
vice-président du conseil, M. Hartt. Le mémoire de la CEPGM sur
le conseil rejoint aussi en beaucoup de points celui que nous présentons
ce matin. Je peux affirmer que M. Butler s'est dit en accord avec les grandes
lignes et les points majeurs du mémoire que nous présentons ce
matin. Je vous assure que la lettre écrite il y a un an à
laquelle le ministre faisait référence il y a un an, je pense
qu'elle est maintenant dépassée.
Mme Blackburn: Je suis d'accord. La réflexion que je me
faisais au moment où j'écoutais votre présentation et les
réactions du ministre, c'est qu'on peut se demander s'il y a lieu de
maintenir une telle structure exclusivement dont le seul pouvoir à peu
près qui lui reste est de faire des emprunts à long terme. C'est
peut-être un peu une grosse structure si finalement si on la
réduit à cette responsabilité. Ma question était:
Est-ce une proposition réaliste que de suggérer que le Conseil
scolaire de 111e de Montréal puisse gérer un autre réseau
d'écoles?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Mon-geau.
M. Mongeau: Dans le contexte actuel, il est évident que la
loi nous dirait demain matin: Vous allez gérer un réseau comme
celui-là, il faudrait avoir ce qu'il faut pour le faire. C'est
évident qu'au moment où l'on se parle on ne l'a pas parce que ce
n'est pas dans la loi actuelle que de gérer des réseaux
scolaires. Encore une fois, je pense que c'est une idée
intéressante dans le sens que cela pourrait être une solution
à apporter à un moment donné si on essayait
d'empêcher la multiplication des structures. À ce
moment-là, au niveau de la gestion, où le conseil scolaire est
fortement équipé, il pourrait, oui.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Mme la
députée.
Mme Blackburn: Je vais revenir un peu de façon plus
précise à votre mémoire. Vous abordez un certain nombre de
questions évidemment, particulièrement celles touchant les effets
du chevauchement des circonscriptions électorales sur le recensement ou
sur le choix de l'électeur, à la page 7, peut-être pour
commencer, vous parlez de l'accroissement du nombre des commissaires. En vertu
de la proposition du projet de loi 106, article 6, on se retrouverait sur
l'île de Montréal avec 150 commissaires comparativement à
104 actuellement. Je ne suis pas certaine; je le dis sous toutes
réserves. Cela n'a pas attiré mon attention au moment où
les autres commissions scolaires sont venues présenter un
mémoire. Selon vous, cela fait-il a peu près l'unanimité
chez vous qu'il ne faudrait pas augmenter le nombre de commissaires dans les
commissions scolaires et combien coûte une telle augmentation du nombre
de commissaires?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le
président.
M. Mongeau: Je pense que ce qu'on dit, madame, c'est
qu'actuellement, à ce niveau, il y a une loi qui s'applique sur
l'île de Montréal et une loi qui s'applique dans le reste de la
province. Le projet de loi 106 dit que maintenant il va y avoir une seule loi
pour tout le Québec. C'est peut-être là, au départ,
qu'il y a un problème. C'est que ma perception, pour moi qui
siège à d'autres instances, c'est que dans le reste du
Québec, pour eux cela fonctionne déjà comme cela, c'est un
statu quo, ils sont pour. À Montréal, la loi donne la
flexibilité à la commission scolaire d'avoir un nombre de
commissaires entre neuf et quinze. C'est la commission scolaire qui le
décide. Cela fixe le nombre, évidemment, à dix-neuf pour
la CECM. C'est exceptionnel et on sait bien pourquoi en termes de population.
Bon! Nous, ce n'est pas ce que nous disons. Nous aimerions garder la même
flexibilité que nous avions, sans empêcher, par exemple la CECM en
particulier, si elle veut augmenter son nombre de commissaires - je ne sais pas
si c'est son souhait, et je ne veux pas parler pour elle, car ils ne voudront
jamais - cela pourrait être possible pour eux, sans leur enlever la
possibilité de l'augmenter de quelques-uns, étant donné
que certains collègues commissaires de la CECM qui ont des districts
électoraux d'au-delà de 50 000 électeurs. Pour les autres
commissions scolaires qui ont le choix entre neuf et quinze commissaires, je
pense que cela devrait rester ainsi et qu'on devrait laisser cette
flexibilité. Les commissaires décident, s'ils sont neuf,
d'augmenter à onze et, s'ils sont onze, d'augmenter à treize ou
à quinze. Le système a très bien marché
jusqu'à maintenant. Je ne vois pas pourquoi on le changerait.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Madame.
Mme Blackburn: Sur la question du chevauchement des secteurs,
vous illustrez bien la complexité de l'opération du recensement.
Au moment où je lisais cela, je me disais que cela vous prendrait des
spécialistes pour faire le recenssement sur l'île de
Montréal. Allez donc expliquer à des gens que, s'ils sont
anglophones, ils ont droit à six écoles, parce qu'il n'y a rien
qui les empêche d'aller à l'école française. Je ne
m'abuse pas en disant cela.
M. Mongeau: Ils peuvent aller à l'école
française.
Mme Blackburn: Ils pourraient aller à l'école
française, à la commission scolaire linguistique française
ou anglaise, à la catholique française ou anglaise, à la
protestante française ou anglaise. Cela donne six choix si vous
êtes anglophone; si vous êtes francophone et obligé de
suivre votre enseignement en français, cela vous donne trois choix, ce
qui est déjà relativement compliqué. Je me mettais dans la
peau d'un recenseur qui dit à quel endroit je dois voter et qui doit
expliquer également que, si vous êtes propriétaire d'un
immeuble, c'est différent. Si vous avez un enfant qui, en vertu d'une
entente, est admis à fréquenter une autre commission scolaire, il
peut aussi aller voter là. À n'en pas douter, cela va
créer un imbroglio tel qu'on ne s'en sortira pas. Un certain nombre de
ces propositions sont assez irréalistes. Je ne vois même pas de
quelle façon on pourrait trouver une solution, avec l'hypothèse
qui est mise sur la table de créer une superposition de réseaux
scolaires sur l'île de Montréal. C'est inextricable. Je ne vois
pas comment le ministre va régler ce genre de situation.
Plusieurs personnes sont venues nous dire que c'était
irréaliste et que si on est minoritaire dans une commission scolaire,
vous avez un autre territoire qui vient s'ajouter pour ceux qui voudraient
être représentés à une commission scolaire
protestante anglaise, alors qu'ils sont du secteur français. La
même chose pour la CECM. Cela va être d'une complexité
absolument... J'ai peine à comprendre qu'on ait avancé une telle
solution. Vous le notez avec beaucoup de justesse, cela ne s'est jamais vu en
démocratie au Québec qu'on réserve comme cela des postes.
Il faudrait peut-être passer la même chose pour l'Assemblée
nationale. Il faudrait passer la même chose pour la ville de
Montréal. Pourquoi n'aurait-on pas des postes réservés aux
Grecs, aux Italiens - ils sont très nombreux - aux Haïtiens? Je
trouve que cette proposition n'a pas été suffisamment
réfléchie. J'imagine que le ministre, à temps, saura
revenir sur cet article du projet de loi. L'exercice qu'on fait en commission
parlementaire est pour avoir une meilleure lecture des effets possibles des
différents articles du projet de loi. S'il y en a un sur lequel il va
falloir que le ministre revienne, c'est bien sur celui-là, car c'est
sans précédent au Québec. Je me demande s'il existe
quelque chose, quelque part ailleurs d'équivalent. Je veux bien qu'on
soit distincts, mais il ne faut pas non plus entraîner inutilement la
confusion. C'est déjà tellement difficile de faire accepter aux
autres qu'on est distincts et de faire appliquer les règles que
supposerait cette distinction. Il ne faut pas exagérer.
Vous faites des propositions également en ce qui concerne la
fréquence des élections scolaires. Vous dites: Plutôt que
d'être à tous les trois ans, cela devrait être à tous
les quatre ans. Comme cela, vu rapidement, je trouve que l'idée est
intéressante. Est-ce que cela a déjà été
proposé? Est-ce que cela a déjà été
discuté? Pourquoi trois ans à ce pallier de gouvernement, alors
qu'au provincial cela peut être de cinq ans, qu'au municipal c'est quatre
ans et qu'au fédéral cela peut être jusqu'à cinq
ans?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Mongeau.
M. Mongeau: Écoutez, je pense que c'est un sujet qui est
revenu souvent dans les discussions, remarquez bien, chez les commissaires du
Québec. Principalement sur l'île de Montréal, nous ne
voyons pas pour quelle raison le terme ne serait pas le même que pour les
municipalités où il est de quatre ans. Bien sûr, quant aux
économies d'argent, ce serait énorme, en tout sur l'île de
Montréal; une élection scolaire - on l'a vécue au mois de
novembre - coûte 5 000 000 $. Si cela avait lieu une fois par quatre ans
au lieu d'une fois par trois ans, on peut additionner cela assez rapidement et
voir qu'au bout de quatre ou cinq termes, on vient de d'épargner
plusieurs millions de dollars. Maintenant, il ne s'agit pas d'épargner
des millions de dollars si c'est antidémocratique, mais je pense que
cela ne l'est pas puisque, comme vous l'avez rappelé, madame, aux
paliers fédéral et provincial, c'est cinq ans et au palier
municipal c'est quatre ans. Nous, nous sommes un pouvoir local, comme le sont
les municipalités et nous pensons qu'en tant que pouvoir local nous
pourrions arrimer certaines choses comme celle-là. D'ailleurs,
déjà dans le projet de loi 106, le ministre a arrimé
plusieurs choses relativement aux élections scolaires avec
l'élection municipale: le remboursement des dépenses ou des
choses comme celle-là. Nous pensons que cela pourrait être une des
choses dont une des conséquences serait, bien sûr,
l'économie de je ne sais pas combien de millions de dollars, à
tout le moins à Montréal.
Mme Blackburn: Au moment où cela a été
discuté, quels étaient les arguments qui militaient en faveur du
maintien de la situation actuelle, c'est-à-dire trois ans? Qu'est-ce
qu'on invoque pour maintenir l'élection tous les trois ans?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le
président.
M. Mongeau: Je pense qu'il n'y en a pas eu.
Mme Blackburn: Non?
M. Mongeau: II n'y en a pas eu.
Mme Blackburn: D'accord.
M. Mongeau: On demande toujours quatre ans et le gouvernement dit
toujours: Trois ans. Alors, c'est cela.
Mme Blackburn: II n'y a eu de débat là-dessus.
M. Mongeau: Pardon?
Mme Blackburn: II n'y a pas vraiment eu de débat
là-dessus.
M. Mongeau: Non, pas à ma connaissance.
Mme Blackburn: Vous le proposez et cela reste là.
M. Mongeau: Bien oui.
Mme Blackburn: Je voudrais voir parce qu'il serait
intéressant d'entendre les arguments là-dessus. Je trouve que
cela se défend.
M. Mongeau: Remarquez bien qu'à Montréal, au cours
des ans, enfin, depuis 1973, cela fait deux fois que le mandat est
prolongé. On devait avoir des élections scolaires en 1976...
Mme Blackburn: Oui.
M. Mongeau:... et le gouvernement nous a donné une
quatrième année, jusqu'en 1977. L'an dernier, encore la
même chose; on devait avoir des élections scolaires en juin 1986
et cela a été prolongé à novembre 1987. Je ne vois
pas pourquoi on ne mettrait pas cela à quatre ans, tout le temps.
Le Président (M. Parent, Sauvé): J'espère
que vous n'invoquez pas des droits acquis!
M. Mongeau: Je n'oserais jamais, M. le Président.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la
députée, en conclusion.
Mme Blackburn: Je vous remercie, M. le Président.
Évidemment, c'est très court pour échanger des propos sur
un mémoire qui a autant de contenu. Je sais que vous n'avez pas voulu
aborder les autres questions, les grandes questions de fond touchant
l'accessibilité, la qualité de l'éducation, le partage du
pouvoir.
En matière de partage du pouvoir, la réflexion que je me
faisais en vous entendant, ce matin, c'est que le ministre ne peut pas
continuer à accroître le pouvoir des niveaux intermédiaires
parce que vous ne pouvez partager le pouvoir des commissions scolaires que dans
la mesure où le gouvernement accepte de se départir d'un certain
nombre de pouvoirs, sinon vous videz complètement les premiers niveaux,
c'est-à-dire les commissions scolaires en ce qui vous concerne. Ce qu'on
constate dans le projet de loi, c'est un resserrement des contrôles et
des pouvoirs du ministre, donc une diminution des pouvoirs des commissions
scolaires. Il va de soi que ceux qui se voient vidés de leurs pouvoirs,
de plus en plus, acceptent mal de les diviser ou de les partager. Le rôle
d'un organisme comme le vôtre se justifie pour être plus important
à certains égards, dans la mesure où le gouvernement
accepterait de décentraliser une partie de ses pouvoirs. Il ne me semble
pas, loin de là, que ce soit l'orientation privilégiée par
le ministre dans son projet de loi.
Je voudrais redire ce que j'ai dit tout à l'heure: Les
propositions que vous apportez touchant la loi 106, en particulier, sont
très intéressantes. Je dirais que c'est probablement, à ce
jour, le mémoire le plus fouillé que nous ayons eu sur cette
question, et quand on sera au moment de revoir le projet de loi article par
article, et de suggérer des amendements, parce que je n'ai pas le
pouvoir de les apporter, nul doute qu'on puisera largement dans votre
mémoire, et je vous en remercie.
Le Président
(M. Parent, Sauvé): Merci,
Mme la députée. Je reconnais maintenant le ministre pour
une dernière intervention. M. le ministre.
M. Ryan: Je pense bien que nous avons soulevé le coeur du
problème, ce matin. Il n'était pas soulevé clairement dans
le mémoire, parce que quand vous disiez, à la fin, que certaines
commissions scolaires n'étaient pas satisfaites, je pense qu'on a
établi clairement que c'est plus que certaines, ce sont en particulier
deux commissions scolaires qui représentent 62 % de la clientèle
scolaire de l'île de Montréal, et on ne peut pas considérer
cela comme un fait mineur.
Il y a un problème fondamental, un problème structurel qui
ne reçoit pas de solution satisfaisante dans la structure actuelle. Dans
son projet de loi, le gouvernement essaie d'inviter les huit commissions
scolaires de l'île de Montréal, à partir du point où
elles en sont réellement, à cheminer ensuite dans la
collaboration et la confiance. C'est cela qu'est le sens du projet de loi, pas
autre chose. On ne veut pas que des choses qui vont au-delà de ce qui
est vraiment partie du consensus réel soient maintenues comme elles le
sont. Peut-être que ce serait une bonne chose, au cours des prochaines
semai-
nés - on va avoir la période d'été pour
réfléchir - qu'il y ait une rencontre entre les commissions
scolaires concernées. On l'a fait pour d'autres sujets, on l'a
déjà fait quand il y avait une impasse, et cela a quand
même permis d'en sortir pour l'immédiat. Peut-être qu'on
pourra trouver ensemble des voies qui aideront à préciser
certaines choses, à les aménager autrement.
Là-dessus, il n'y a pas d'entêtement de la part du
gouvernement, pas d'obstination parce que nous savons que c'est un domaine
où il y a beaucoup d'incertitude et de flottement. Le message du projet
de loi, c'est de dire: On va prendre acte de la situation comme elle est
réellement, au-delà de toutes les prétentions juridiques,
positions politiques ou affirmations, la situation au point où elle est
réellement et trouver des aménagements qui y correspondent. Si on
peut faire davantage, tant mieux, nous allons le faire volontiers, nous sommes
prêts à vous donner notre collaboration là-dessus. Je pense
que le président peut témoigner que, dans bien des situations,
nous avons donné, du côté du ministère, le coup de
main qui pouvait être souhaitable.
Vous faisiez allusion tantôt, je ne veux pas y revenir longuement,
à un certain avis qu'ont donné nos conseillers juridiques. Je
pense que vous me connaissez assez pour savoir que je ne suis pas
nécessairement lié à ces avis, surtout politiquement.
J'aime bien, quand c'est trop compliqué, qu'on ait deux ou trois avis.
Je ne veux pas que vous pensiez... On a été honnêtes avec
vous, on vous a donné le texte de l'avis qui nous avait
été donné, mais ce n'était pas
nécessairement l'interprétation définitive du
ministère. Même nos conseillers, depuis ce temps, ont
peut-être continué de cheminer et de s'interroger. Ils ont
peut-être ajouté des nuances. Disons que c'était le point
où en était la situation. On a trouvé une solution qui
reste paradoxale puisque, comme vous le savez, parmi les gens des commissions
scolaires qui n'ont pas le droit de voter pour le choix du conseil, il y en a
deux qui sont à l'exécutif, et à l'exécutif ils ont
le droit de vote comme les autres. Ils n'ont pas le droit de vote?
M. Mongeau: Non.
M. Ryan: Tant mieux, la logique est au moins
préservée.
M. Mongeau: Je m'excuse M. le ministre. Je sais que c'est ce que
dit le document de la CECM, mais c'est faux, comme il y a d'ailleurs d'autres
faussetés dans ce document.
M. Ryan: II peut y avoir des faussetés
particulières ici ou là, mais cela n'enlève pas le malaise
profond, qui est un fait évident auquel doit se mesurer le
législateur s'il veut améliorer les choses. Comme je vous le
disais, on va essayer de faire avec vous un cheminement au cours des prochaines
semaines, qui permettra d'améliorer le projet de loi. Au point où
nous en sommes, je n'ai pas entendu ce matin d'arguments qui me pousseraient
fortement à changer de point de vue sur ce chapitre du projet de loi.
Encore une fois, nous allons écouter tout le monde, y compris ceux qui
sont absents. Ce n'est pas par caprice, au contraire. Étant donné
que ce conseil a comme mission le bien scolaire de toute lUe de
Montréal, il faut qu'on tienne compte de tout.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, s'il n'y a
pas d'autre intervention je vais vous reconnaître pour une courte
intervention, si vous voulez, M. le président. Je vous ferai remarquer
que le temps est écoulé, mais je vous écoute quand
même...
M. Mongeau: Bien...
Le Président (M. Parent, Sauvé): ...étant
donné que vous avez répondu si généreusement
à notre invitation.
M. Mongeau: Simplement pour remercier encore une fois les membres
de cette commission et aussi dire au ministre de l'Éducation que je
pense qu'on est à la recherche de cette solution. Nous croyons que la
solution que nous avançons ne brime les droits de personne et rencontre
peut-être mieux ou serait la meilleure pour qu'il y ait un conseil
scolaire qui soit opérant sur l'île de Montréal. Dans ce
sens, je prends note de l'ouverture du ministre à des rencontres
subséquentes pour tenter d'établir cela.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le
président, merci aux gens qui vous accompagnent pour l'éclairage
que vous avez bien voulu donner à la commission de l'éducation
sur ces deux projets de loi. Nous suspendons nos travaux pour quelques
minutes.
(Suspension de la séance à 11 h 26)
(Repriseà11 h 31)
Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre,
s'il vous plaît!
La commission permanente de l'éducation reprend ses travaux.
Je vous ferai remarquer que la commission accuse déjà un
retard d'une demi-heure à son horaire. Nous nous en excusons
auprès de nos invités.
J'inviterais les membres de la commission permanente de
l'éducation à prendre place. À l'ordre, s'il vous
plaît, à l'arrière de la salle! Les travaux vont
débuter.
La commission permanente de l'éducation poursuit ses travaux et
accueille maintenant les
représentants de la commission scolaire Baldwin-Cartier. La
commission scolaire Baldwin-Cartier est représentée par son
président, M. Jacques Mongeau. M. Mongeau, je n'ai pas à vous
répéter la façon dont on procède. On vous a vu ici
à plusieurs reprises, même avant l'étude des projets de loi
106 et 107. Si vous voulez bien, M. Mongeau, nous présenter les
personnes qui vous accompagnent et nous identifier ceux qui vont prendre la
parole. On a environ une heure à consacrer à votre organisme. Il
est 11 h 30, c'est donc dire que vers 12 h 25, 12 h 30, nous devrons ajourner
nos travaux. M. Mongeau, nous vous écoutons.
Commission scolaire Baldwin-Cartier
M. Mongeau: M. le Président, M. le ministre, madame et
messieurs de la commission, j'aimerais vous présenter les gens de la
commission scolaire qui m'accompagnent. Tout d'abord, à ma gauche, la
vice-présidente de la commission scolaire Baldwin-Cartier, Mme Diane
Berty...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Rebonjour,
madame.
M. Mongeau:... que vous connaissez bien. À ma droite, M.
Yvon Cherrier, commissaire et membre du comité exécutif de la
commission scolaire; M. Marcel Arsenault, directeur général de la
commission scolaire; M. Don Myles, directeur général adjoint de
la commission scolaire, et M. Yves Gravel, directeur général
adjoint de la commission scolaire. Plusieurs de mes collègues
commissaires sont aussi à l'arrière, M. le Président.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je leur souhaite
la bienvenue au nom des membres de la commission, M. le président. Il me
fait plaisir de les revoir d'ailleurs.
M. Mongeau: Peut-être, M. le Président, pour vous
permettre, ainsi qu'aux membres de cette commission, de vous reposer d'entendre
ma voix, je vais demander à mon collègue Yvon Cherrier de vous
faire part de ce mémoire et je pourrai, à la période des
questions, reprendre.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Cherrier.
M. Cherrier (Yvon): M. le Président, le temps étant
limité, nous avons pensé vous présenter une version
abrégée de notre mémoire. Certains paragraphes ou
rubriques seront passés sous silence et nous nous abstiendrons de faire
la lecture de notre mémoire sur le projet de loi 106. Cependant, nous
voulons nous assurer que l'objet de nos réflexions et recommandations
demeure inchangé en ce qui a trait à ce mémoire. Nous
allons donc commencer la lecture à la page 4 du présent
mémoire.
La commission scolaire Baldwin-Cartier est la seule responsable depuis
plus de quinze ans de l'enseignement aux catholiques francophones et
anglophones pour l'ensemble des municipalités de l'ouest de I'île
de Montréal, à savoir Dorval, Pointe-Claire, Beaconsfield, Baie
d'Urfé, Sainte-Anne-de-Bel!eyue, Senneville, Kirkland,
Sainte-Geneviève, Île-Bizard, Pierrefonds, Dollard-des-Ormeaux et
Roxboro. Elle offre à sa population étudiante, toujours
grandissante, la gamme complète des services éducatifs aux
niveaux préscolaire, primaire et secondaire. De plus, elle offre un
large éventail de cours à l'éducation des adultes et
assure l'enseignement dans deux établissements du réseau des
affaires sociales.
Sa clientèle de 17 218 élèves se répartit
dans 31 écoles: neuf écoles primaires anglaises, seize
écoles primaires françaises, deux écoles secondaires
anglaises et quatre écoles secondaires françaises. Elle
administre également des services pédagogiques dans une
école spéciale à vocation régionale à une
population bilingue d'enfants gravement handicapés, avec la
collaboration de la commission scolaire protestante du Lakeshore. Ses services
de l'éducation des adultes et du transport scolaire sont
gérés conjointement avec cette même commission scolaire;
ses services informatiques le sont avec la commission scolaire
Sainte-Croix.
Enfin, depuis plusieurs années, la commission scolaire
Baldwin-Cartier a conclu des ententes de services avec plusieurs
municipalités faisant partie de son territoire. À cause de la
diversité des écoles sous sa juridiction, de ses structures
pédagogiques et de son mode d'opération, la commission scolaire
est convaincue que son expérience et ses opinions peuvent
éclairer les discussions actuelles sur les propositions de changements
mises de l'avant dans le projet de loi 107.
Conception de la commission scolaire. Dans le présent
mémoire, la commission scolaire Baldwin-Cartier réagit au projet
de loi 107 en se basant sur sa conception de ce qu'est une commission scolaire.
La commission scolaire est un gouvernement démocratique, local, autonome
et responsable d'offrir à toute sa population étudiante les
meilleurs services éducatifs disponibles. La commission scolaire est un
gouvernement; c'est elle qui doit prendre les décisions
appropriées pour remplir sa mission, qui est de fournir une
éducation de qualité à ses élèves. La
commission scolaire est un gouvernement démocratique; les commissaires
sont les représentants officiels de la population de leur territoire;
ils sont élus par les citoyens au suffrage universel. De plus, comme
instance démocratique, elle gouverne en se mettant constamment à
l'écoute de la population par des mécanismes de consultation et
de concertation. La commission scolaire est un gouvernement local; elle
accomplit son mandat, d'abord en se basant sur les besoins, les attentes, les
possibilités, les particularités et les modes de vie
spécifiques à son milieu, à sa
population, ce qui ne l'empêche pas de considérer les
dimensions régionale, provinciale et nationale.
La commission scolaire est un gouvernement autonome; elle est capable de
gouverner dans son champ d'action à partir de la compétence, de
l'expérience et de la connaissance du milieu de ses représentants
locaux élus sans l'intervention dirigiste, contraignante et limitative
de toute source extérieure. Ceci ne l'empêche pas d'avoir recours,
au besoin, à des expertises extérieures afin de l'éclairer
dans la gouverne de certains de ses dossiers. La commission scolaire est un
gouvernement responsable; elle est un gouvernement consciencieux, soucieux de
tenir compte des attentes du milieu et de prendre tous les moyens
appropriés pour mener à bien sa mission éducative. Elle
est en mesure de répondre de ses actes à la population qu'elle
représente.
La commission scolaire est un gouvernement qui a pour mission d'offrir
à toute sa population étudiante les meilleurs services
éducatifs disponibles. Sa mission consiste à offrir ces services
afin de développer chez tout élève le maximum de son
potentiel sous tous ses aspects en tenant compte de son niveau de
capacités. Sa mission exige qu'elle utilise toutes les ressources
disponibles, humaines, matérielles et financières pour assurer
à chaque élève les services de la meilleure qualité
qui répondent à ses besoins.
La commission scolaire Baldwin-Cartier croit que le gouvernement ne peut
que se dire d'accord avec cette conception de la commission scolaire et qu'il
est essentiel que la lecture et l'étude du projet de loi 107 se
réalisent en tenant compte des diverses composantes de cette conception.
C'est, pour sa part, ce qu'elle a fait elle-même.
La constitution des commissions scolaires. Lors des consultations
précédentes sur les projets de loi 40 et 3, la commission
scolaire s'était montrée ouverte à la constitution de
commissions scolaires linguistiques et elle l'est encore. Elle l'avait fait
avec une réserve importante toutefois. En effet, elle avait
demandé qu'advenant la création de telles commissions soient
inscrites dans la loi des clauses garantissant le caractère
confessionnel de l'école au sein de cette même commission.
Les groupes de confessionnalité religieuse demandent que le
projet éducatif de l'école fréquentée par leurs
enfants soit inspiré des croyances de leur foi. Pour eux, il ne s'agit
pas de garantir leurs droits uniquement par l'enseignement de cours de leur
religion; pour eux, l'éducation dépasse le niveau du seul
enseignement et comprend le développement d'une manière
d'être et de vivre basée sur une morale, des principes et des
croyances particulières à leur religion.
La commission scolaire est très consciente de ces attentes de son
milieu et croit elle-même qu'il est important que la loi permette aux
groupes qui le désirent de pouvoir se donner un projet éducatif
qui corresponde à leurs aspirations.
Afin que la possibilité pour les groupes confessionnels d'avoir
des écoles avec leur propre statut leur soit assurée, il est
primordial que la loi comprenne des clauses garantissant l'existence
d'écoles confessionnelles. La commission scolaire sait que le
règlement du comité catholique comprend déjà de
telles clauses. Toutefois, comme la loi prévaut sur la
réglementation et que la réglementation peut être
modifiée plus facilement qu'une loi, elle demande que les clauses
inscrites dans le règlement fassent partie de la loi 107 afin d'offrir
plus de garanties aux groupes qui aspirent à des écoles
confessionnelles.
Les structures de la commission scolaire. Lors de l'analyse qu'elle a
faite des diverses clauses du projet de loi 107 touchant les structures, la
commission scolaire s'est attardée sur certains éléments
à la lumière de la conception qu'elle a de celle-ci. C'est ainsi
qu'elle a décidé de donner son avis sur les points suivants.
Le conseil des commissaires. Comme elle l'a toujours soutenu, la
commission scolaire demande que les commissaires soient élus au suffrage
universel. Comme la loi leur confère des droits, des pouvoirs et des
responsabilités et qu'ils en sont les seuls à répondre
devant la population, elle est d'avis que, pour voter des décisions
à prendre, ils doivent être élus par suffrage
universel.
La commission scolaire ne s'oppose pas à la présence de
représentants de parents au conseil des commissaires, car elle croit
qu'ils peuvent apporter un éclairage additionnel lors du processus
décisionnel. Toutefois, comme ils n'ont pas été
élus par voie de suffrage universel, ils ne doivent pas voter, selon
elle, lors de l'exercice par les commissaires des droits, pouvoirs et
responsabilités prévus par la loi.
Le projet de loi 107 prévoit certains changements concernant le
vote des commissaires qui risquent de provoquer des conséquences
fâcheuses dans le fonctionnement du conseil des commissaires. La
commission scolaire est d'accord qu'un commissaire puisse s'abstenir de voter,
même s'il s'agit d'un sujet pour lequel il n'est pas en situation de
conflit d'intérêts, mais elle est en désaccord sur le fait
que son abstention ait une influence sur le quorum de la séance. Le
fonctionnement du conseil pourrait être paralysé ou, encore, des
décisions devant être prises pourraient être
reportées indéfiniment si plusieurs membres s'abstenaient de
voter.
En ce qui concerne le vote prépondérant du
président en cas d'égalité des voix, la commission
scolaire est d'avis que d'autres formules pourraient être
déterminées sur le plan local, formules qui permettraient
d'assurer au conseil de prendre quand même ses décisions et de
fonctionner avec efficacité. De telles formules ont déjà
été expérimentées dans certains organismes et ont
apporté des résultats positifs. C'est
pourquoi la commission scolaire recommande que 1 le vote
prépondérant soit utilisé à la discrétion du
président.
Le comité exécutif. Le changement proposé dans le
projet de loi 107 qui prévoit que l'existence du comité
exécutif devienne facultative ne correspond pas au point de vue de la
commission scolaire à ce sujet. En effet, son expérience lui a
démontré la nécessité d'un comité
exécutif dans les structures d'une commission scolaire.
La commission scolaire est d'avis que certaines fonctions
administratives doivent relever d'un comité exécutif, fonctions
qui pourraient difficilement se réaliser de façon fonctionnelle
par le conseil des commissaires à cause, entre autres, du grand nombre
de commissaires, de la haute fréquence des réunions
nécessitées pour l'accomplissement de ces fonctions. Le nombre
plus restreint des commissaires nommés au comité exécutif
par le conseil des commissaires permet à ce dernier d'exercer certaines
fonctions administratives rattachées à ses responsabilités
quant à un mécanisme plus fonctionnel. (11 h 45)
En plus de demander que la loi 107 indique que le comité
exécutif demeure obligatoire, la commission scolaire veut que les
pouvoirs qui seront délégués à ce dernier soient
déterminés par chaque commission scolaire. De plus, comme
l'expérience lui a démontré que la formule actuelle se
révèle fonctionnelle, la commission demande que celle-ci soit
reconduite dans la loi 107.
Par contre, il apparaît à la commission scolaire
contradictoire d'exiger de faire entériner par le conseil des
commissaires les décisions prises par le comité exécutif.
En effet, la délégation de pouvoirs transférés au
comité exécutif implique que ce dernier est en droit de prendre
des décisions qui se rapportent aux objets de la
délégation. Pourquoi faire approuver ces décisions par le
conseil des commissaires? Qu'il l'informe de ses décisions, d'accord. Ce
qui est proposé dans le projet de loi nie toute délégation
de pouvoirs. Ceci ne doit pas apparaître dans la loi, selon la commission
scolaire.
Les comités de la commission scolaire. Plusieurs comités
sont inscrits dans le projet de loi 107 et imposés à la
commission scolaire. Si d'une part la commission scolaire ne s'oppose pas
à la présence de comités de parents, elle réagit
d'autre part avec vigueur à tout autre comité auquel le projet de
loi veut la contraindre.
Si le gouvernement reconnaît que la commission scolaire est un
gouvernement démocratique, local, autonome et responsable, il n'a pas
à l'assujettir par une loi à gouverner à l'aide d'une
série de mécanismes préétablis qui viennent
restreindre ses possibilités de remplir ses responsabilités en
tenant compte de son milieu.
Certains prétendent que plusieurs commissions scolaires
possèdent déjà de tels comités. Alors, pourquoi ne
pas les inclure dans la loi 107, se dit-on? En premier lieu il faut se dire
que, si telle est la situation, cela prouve que les commissions scolaires
agissent en gouvernement démocratique et qu'elles font participer la
population qui en a élu les commissaires à la chose scolaire. En
second lieu, cela indique qu'il n'est pas nécessaire d'imposer ces
comités par une loi.
De plus, un de ces comités fait déjà partie
intégrante de conventions collectives: c'est le comité
consultatif des services aux élèves en difficulté
d'adaptation et d'apprentissage. Il serait malencontreux de l'engoncer dans la
loi venant restreindre ainsi les objets de futures négociations.
La commission scolaire considère que la création de
comités relève de sa compétence et de sa gestion. Elle est
plus en mesure comme gouvernement local de mettre en place des
mécanismes favorisant la participation des divers intervenants de son
milieu parce que son milieu, comme tout autre milieu, est unique et
différent et qu'elle est la plus apte à discerner ses besoins.
Aussi, elle est plus avisée qu'un gouvernement central pour mettre en
place les modalités les plus fonctionnelles de ces mécanismes que
sont ces comités. La commission scolaire recommande donc que la loi 107
ne prévoie pas de comité autre que les comités de
parents.
Les ressources de la commission scolaire. À l'origine, le pouvoir
de taxation donné aux commissions scolaires devait leur permettre de
donner une couleur locale, à savoir de répondre à des
besoins et des attentes spécifiques de leur milieu. Cependant, ce
pouvoir est limité par l'imposition d'un plafond de 6 %.
Il est faux de croire que les produits de la taxe servent à
donner une couleur locale, car, en réalité, les commissions
scolaires doivent les utiliser pour combler le manque à gagner
créé par les diminutions annuelles des budgets qui leur sont
alloués par le gouvernement.
Année après année, une indexation située
sous le taux réel d'indexation ou encore une non-indexation pure et
simple ainsi que des compressions budgétaires diminuent sans cesse les
ressources financières de la commission scolaire et l'obligent à
puiser dans les produits de la taxe scolaire afin d'équilibrer ses
budgets. Ajoutons à cela l'absence totale de subventions pour
l'application de nouveaux régimes pédagogiques,
particulièrement l'implantation des nouveaux programmes. La situation
s'aggrave encore plus lorsque les commissions scolaires se voient
obligées d'appliquer des lois coûteuses, sans
bénéficier d'aucune aide financière: par exemple, la loi
17, Loi sur la santé et la sécurité du travail; la loi 65,
Loi sur l'accès à l'information; la loi 3, Loi sur les
archives.
Un autre exemple d'obligation faite à la commission scolaire sans
qu'il soit question de la financer pour être en mesure de remplir
celle-ci se retrouve dans le projet de loi. C'est celui de l'obligation
d'assurer la surveillance des élèves
qui choisiront de ne pas être transportés à leur
domicile pour la période du midi. Si l'organisation et
l'aménagement physique des écoles secondaires sont
déjà conçus pour offrir ce service, il n'en est pas de
même pour les écoles primaires. Afin de répondre à
cette exigence, des investissements considérables, autant au niveau des
équipements que de la gestion, devront être encore pris en charge
par la commission scolaire à même ses ressources
déjà limitées qui devraient être allouées
à des services éducatifs. La commission scolaire ne s'attarde pas
ici au problème même du manque d'espace pour assurer un tel
service \e midi.
À partir des exemples ci-haut mentionnés, il
apparaît clairement pour la commission scolaire que le pouvoir de
taxation locale ne sert en réalité que pour l'application en tout
ou en partie de politiques et d'objectifs gouvernementaux.
Pourquoi ne pas permettre à la commission scolaire de
bénéficier d'un réel pouvoir de taxation local afin
qu'elle ait une source de revenu lui permettant de jouer efficacement son
rôle de gouvernement scolaire local?
Tout comme on peut croire que les gouvernements provincial et municipal
sont assez responsables pour ne pas surcharger indûment les citoyens de
taxes, on peut faire confiance au gouvernement scolaire pour en faire de
même. Si les élus ne s'avèrent pas dignes de cette
confiance, le processus démocratique des élections est
déjà en place pour rétablir les choses.
C'est pourquoi la commission scolaire s'attend à ce que la loi
reconnaisse de façon plus concrète la commission scolaire comme
un gouvernement local, autonome et responsable en accroissant, entre autres,
son pouvoir de taxation local.
L'école. À la suite de son étude des
éléments du projet de loi se rapportant à l'école,
la commission scolaire a retenu de traiter trois points: le rôle social
de l'école, le conseil d'orientation et le comité d'école,
le directeur d'école.
Le rôle social de l'école. La commission scolaire
reconnaît un rôle social à ses écoles et elle est
prête à les aider à l'assurer. Toutefois, elle croit que ce
rôle social mérite d'être défini de façon plus
précise, ce que le projet de loi ne fait pas. Au contraire, il ouvre la
porte à toutes sortes d'interprétations et, si elle se fie
à ses expériences et aux tendances actuelles, la commission
scolaire se rend compte qu'on donne à l'école des
responsabilités sociales et même qu'on veut lui imposer des
programmes sociaux comme si elle en était la première responsable
par rapport à chaque individu qui fait partie de sa
clientèle.
Pour la commission scolaire, l'école est un des nombreux
éléments de la société tout comme le sont la
famille, les groupes de diverses confessionnalités, les
municipalités, les groupes sociaux, les services sociaux
gouvernementaux, etc. Elle reconnaît à chacun un rôle
à jouer au niveau social face à chaque individu de la
communauté. Ce rôle en est un de complémentarité.
C'est pourquoi elle n'est pas prête à prendre seule la
responsabilité première du rôle social dans le
développement de la personne. Comme elle craint que les perceptions et
les tendances présentes veulent donner une telle responsabilité
à l'école, elle croit qu'il est important de départager le
rôle de chacun par rapport à ses responsabilités sociales
et qu'une fois cela accompli il y aurait lieu de déterminer comment et
avec quels moyens l'école peut jouer ce rôle.
Le conseil d'orientation et le comité d'école. La
commission scolaire adhère au processus démocratique et c'est
dans cette ligne de pensée qu'elle ne s'oppose pas à ce que des
mécanismes de participation des parents soient prévus dans la loi
et que ceux-ci permettent à ces derniers de jouer un rôle actif au
sein de l'école.
Le projet de loi prévoit deux groupes de participation: le
conseil d'orientation et le comité d'école. La lecture des
clauses s'y rapportant dégage une perception de confusion quant au
rôle, aux fonctions et au fonctionnement des deux comités, l'un
par rapport à l'autre et également par rapport au comité
de parents se situant au niveau de la commission scolaire. En plus de cette
confusion, il en resssort que ces mécanismes paraissent très
complexes et compliqués, au point qu'on peut mettre en doute la
possibilité qu'ils puissent fonctionner avec efficacité comme
mécanismes de participation intégrés au processus
décisionnel, soit au niveau de l'école, soit au niveau de la
commission scolaire.
À la suite de l'examen de cette facette de la participation des
parents à la vie de l'école, la commission scolaire croit qu'il
est nécessaire que la participation des parents soit assurée au
niveau de l'école dans un cadre clair, fonctionnel et efficace qui
permet aux parents un rôle actif et qui évite que les
énergies de tous et chacun soient consacrées à des
démarches longues et infructueuses issues d'un manque de clarté
des rôles confiés à chaque intervenant.
Nous allons passer maintenant à la page 25 où on parle de
l'élève. L'examen des clauses se rapportant à
l'élève amène la commission scolaire à soulever
deux points: l'un touchant l'âge d'admissibilité, l'autre, la
gratuité à l'élève adulte.
L'âge d'admissibilité. La commission scolaire trouve fort
étonnant que le projet de loi ne contienne pas l'âge
d'admissibilité aux services éducatifs fixé au 1 er
janvier.
Depuis plusieurs années, les gouvernements promettent une telle
mesure. Celle-ci a d'ailleurs déjà existé au
Québec. Les autres provinces du Canada ont déjà
fixé la date d'admissibilité au 1er janvier et les commissions
scolaires du Québec doivent admettre dans leurs écoles les
élèves provenant des autres provinces qui sont nés
entre le 30 septembre et le 1er janvier. Pendant ce temps, nos propres enfants
québécois doivent attendre une année pour
bénéficier des services éducatifs.
Ces enfants québécois possèdent autant de
capacités sur tous les plans que ceux des autres provinces et nos
programmes d'éducation sont équivalents à ceux de nos
voisins canadiens. Ils devraient donc être aptes à être
admis dans nos écoles s'ils sont nés avant le 1er janvier de
chaque année. Cette affirmation nous a été
confirmée continuellement au cours des années par notre personnel
professionnel pédagogique sur qui la commission scolaire peut se fier
sur les plans de l'expertise et de la compétence.
Il est vrai que le projet de loi laisse entrevoir la possibilité
de modifier la date d'admissibilité par la voie du régime
pédagogique, mais cette façon de faire ne garantit aucunement que
les enfants québécois seront traités sur un même
pied d'égalité avec leurs voisins des autres provinces. Bien
plus, ceci risque que les modifications au régime pédagogique ne
soient étudiées qu'à la lumière de facteurs
étrangers aux besoins de développement des enfants. C'est
pourquoi la commission scolaire demande que la loi indique que l'âge
d'admissibilité soit fixé au 1er janvier de chaque
année.
Nous allons passer à la page 28: Le Conseil scolaire de
l'île de Montréal. Comme la commission scolaire est membre du
Conseil scolaire de l'île de Montréal et qu'elle attribue à
cet organisme un rôle important dans le développement des services
autant administratifs qu'éducatifs du territoire qu'il couvre, elle a
porté une attention particulière à ce chapitre du projet
de loi. La lecture de cette partie de loi nous amène à constater
que le projet diminue grandement le rôle du conseil et, à notre
avis, c'est rater l'occasion de doter le milieu urbain montréalais d'un
organisme fort et fonctionnel dont il a besoin. C'est pourquoi la commission
scolaire réagit à la proposition du projet de loi et vous fait
connaître sa position concernant le rôle devant être
dévolu au Conseil scolaire de l'île de Montréal.
Problématique. LTle de Montréal constitue un grand milieu
urbain caractérisé par d'évidentes
inégalités sociales et économiques. La
pluriethnicité croissante vient encore rendre plus complexe le
développement d'un système scolaire appelé à
répondre adéquatement aux besoins de la population. La baisse ou
les migrations de population font varier considérablement le taux
d'utilisation des équipements scolaires d'une ville à l'autre,
même à l'intérieur d'une même ville ou d'un
même secteur géographique. Certains programmes, tels
l'enseignement professionnel, l'éducation interculturelle, les services
alimentaires, requièrent une réelle concertation pour atteindre
une efficacité significative.
Tout en reconnaissant l'inégalité des tailles des
commissions scolaires de l'île, il reste qu'elles ne peuvent par leurs
efforts isolés assurer un développement scolaire équitable
et comparable dans toutes les parties de l'île de Montréal.
Enfin, des amendements à la Loi sur l'instruction publique qui
toucheraient le Conseil scolaire de l'île de Montréal ne devraient
pas faire perdre aux commissions scolaires les avantages financiers que leur
regroupement a permis de réaliser au cours des quinze dernières
années.
Recommandations. À cause justement de la problématique
ci-avant évoquée, nous croyons à la
nécessité de maintenir sur l'île de Montréal un
organisme scolaire régional qui n'est pas une simple association
volontaire des partenaires que sont les commissions scolaires. Cet organisme,
de notre point de vue, doit être doté de pouvoirs précis et
prescripts dans un certain nombre de domaines dont les suivants: le financement
du système scolaire montréalais dans toutes ses composantes, soit
la perception et la redistribution de la taxe, le financement à court et
long terme, de même que l'administration de toutes les subventions
versées par le ministère de l'Éducation; le
développement de l'éducation dans les milieux moins
favorisés; l'utilisation rationnelle et juste des équipements
scolaires pour les diverses clientèles jeunes et adultes à
desservir; le développement rationnel et équilibré de
l'enseignement professionnel pour les jeunes et les adultes, (carte des options
et utilisation rationnelle des équipements); le développement de
l'éducation à une saine nutrition chez tous les
élèves de IHe; le développement de la recherche et de
modèles d'intervention en éducation interculturelle.
En outre, le Conseil scolaire de l'île de Montréal pourrait
établir, en concertation volontaire avec les commissions scolaires,
d'autres programmes en vue d'améliorer la gestion des services
éducatifs sur l'île de Montréal. À titre d'exemple,
nous mentionnons l'établissement d'un régime d'auto-assurance, le
développement de la micro-informatique à des fins d'enseignement
ou de gestion, l'établissement d'un système d'achats
regroupés, des programmes de recherche sur les élèves en
difficulté ou les doués, la mise en commun d'autres services tels
les services juridiques, les études démographiques, etc. (12
heures)
Les pouvoirs du gouvernement et du ministre. L'analyse du chapitre
touchant les pouvoirs du gouvernement et du ministre crée chez nous soit
un sentiment de déception vive, soit une incompréhension de la
logique ministérielle par rapport aux divers paliers de gouvernement,
des affaires de l'éducation. En effet, la commission scolaire
considère que le gouvernement et le ministre se donnent une série
de pouvoirs qui relèvent du gouvernement local qu'est la commission
scolaire. Loin de responsabiliser cette dernière, ces pouvoirs
enclenchent un retour vers la centralisation.
Des pouvoirs attribués au gouvernement, certains constituent une
ingérence dans la gestion relevant de la commission scolaire.
Mentionnons par exemple celui d'établir le nombre maximum de postes pour
chaque classe d'emploi, ou encore celui de fixer des conditions d'attribution
de contrat que la commission scolaire devra respecter, même si celle-ci
finance ses travaux à même ses revenus de taxation.
Un relevé des pouvoirs attribués au ministre par le projet
nous permet d'en dénombrer plus d'une douzaine. Encore ici, on constate
rapidement que plusieurs de ces pouvoirs viennent renier certaines
responsabilités de la commission scolaire ou s'immiscer dans la gestion
de la commission scolaire. Il appartient à la responsabilité de
la commission scolaire de s'assurer que les personnes relevant de sa
compétence, à savoir celles qui résident sur son
territoire, reçoivent les services éducatifs auxquels elles ont
droit. Par contre, du même coup, on attribue au ministre le pouvoir
d'établir la liste des commissions scolaires qui peuvent organiser
l'éducation des adultes, le pouvoir d'établir la liste de
spécialités ou des services particuliers aux élèves
handicapés qu'une commission scolaire peut offrir.
Le projet va même jusqu'à donner au ministre le pouvoir de
libérer une commission scolaire de toutes ou d'une partie de ses
fonctions. Enfin, le projet lui donne la possibilité d'exiger de la
commission scolaire qu'elle suspende, lors d'une enquête, la prise de
décision ou l'application d'une décision déjà
prise.
Il est évident que la commission scolaire, en tant que
gouvernement démocratique local, autonome et responsable, ne peut se
dire d'accord avec les pouvoirs alloués au gouvernement et au ministre.
Ce serait pour elle renier ses responsabilités et laisser bafouer la
démocratie. C'est pourquoi la commission scolaire demande que la loi
n'alloue ni au gouvernement ni au ministre des pouvoirs entraînant une
diminution de la responsabilité de la commission scolaire. Que la loi
alloue plutôt des pouvoirs aux commissions scolaires afin de leur
permettre de remplir leurs responsabilités et d'être en mesure
d'exercer leur autonomie. Que la loi attribue uniquement au gouvernement le
pouvoir de suspendre les pouvoirs d'une commission scolaire pendant ou
après la tenue d'une enquête.
En conclusion, même si au cours de son étude du projet de
loi 107, la commission scolaire a relevé des commentaires sur d'autres
points qui concernaient, entre autres, l'ambiguïté de certains
textes, des aspects techniques ou des éléments mineurs, elle a
décidé de présenter dans son mémoire ses avis sur
des éléments de la loi qu'elle juge importants en fonction de sa
mission à remplir en tant que gouvernement démocratique, local,
autonome et responsable.
Pour compléter sa rétroaction sur le projet de loi 107, la
commission scolaire tient à souligner qu'un très grand nombre
d'articles viennent prédéterminer des mécanismes et des
modalités de fonctionnement qui appartiennent à la gestion de la
commission scolaire parce qu'ils sont rattachés aux fonctions qui lui
sont attribuées par le projet de loi lui-même. Pourtant, comme
gouvernement local et compte tenu de son expertise et de son expérience
dans la gestion des affaires scolaires, la commission scolaire est convaincue
qu'elle est apte à faire face à toutes ses responsabilités
et que la loi doit éviter de lui indiquer comment gérer.
C'est la fin de la présentation de notre mémoire, M. le
Président.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Nous vous
remercions beaucoup, M. Cherrier, pour la présentation du mémoire
de la commission scolaire Balwin-Cartier. Je vous informe immédiatement
qu'en fonction de nos règlements, étant aujourd'hui jeudi,
étant donné que la Chambre siège à 14 heures, nous
devrons terminer à 12 h 30. Je reconnais, dans un premier temps, le
ministre de l'Éducation. M. le ministre.
M. Ryan: M. le Président, il me fait plaisir de saluer la
direction de la commission scolaire Baldwin-Cartier qui est avec nous ce matin.
Nous avons pris connaissance du mémoire qu'a lu tantôt M.
Cherrier. Je pense que le mémoire témoigne du soin avec lequel la
commission scolaire s'acquitte de son travail. C'est une commission scolaire
très bien organisée, dont les résultats aux examens du
ministère sont très impressionnants. Ce sont d'excellents
résultats. Je veux profiter de l'occasion pour en féliciter la
commission scolaire. La commission scolaire offre des services à la fois
à une clientèle de langue française et à une
clientèle de langue anglaise et je crois que son travail se
déroule en harmonie. Et ce sont des choses qu'il est bon de
souligner.
Il y a un grand nombre de suggestions contenues dans le mémoire
qui nous est présenté. Elles seront retenues pour examen attentif
et certaines, j'en suis sûr, pour insertion dans une version
retouchée du projet de loi qui verra le jour au cours des prochaines
semaines, à la suite de tout ce que nous avons entendu.
J'aurais deux brefs commentaires. Je crois qu'il faut introduire des
nuances. Lorsqu'on qualifie la commission scolaire de gouvernement local, cela
peut être de nature à créer de la confusion dans les
esprits. C'est le cas sous certains aspects, mais il faut éviter de se
laisser entrainer dans des comparaisons qui ne seraient pas assorties des
nuances nécessaires. Déjà, si on compare avec la
municipalité, c'est très différent. D'abord, la commission
scolaire s'adresse à une clientèle qui est définie,
délimitée par la loi, tandis que la municipalité s'adresse
à tout le monde qui est sur son territoire. Les fonctions de la
commission scolaire sont spécialisées; celles de la
municipalité sont générales et diversifiées. Le
service qu'offre la municipalité est un service
qui vient d'elle et sur lequel elle a l'entier ' contrôle, tandis
que le service qu'offre la commission scolaire n'est pas un service qui est
créé entièrement par elle. C'est un service sur lequel le
gouvernement, surtout depuis qu'un ministère de l'Éducation a
été institué, a une prise très importante. On ne
peut pas comparer les deux facilement; ce n'est pas la même chose. Je
crois qu'en jouant trop sur cette note sans mettre les nuances
appropriées, on risque d'être conduits dans un cul-de-sac. Si vous
me demandez ce que j'en pense. J'ai toujours évité... J'ai
peut-être laissé tomber cette expression-là deux ou trois
fois au cours des dix dernières années, dans des moments de
faiblesse ou de distraction...
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Ryan: ...mais ce n'est pas ma conception. Il y a quelque chose
qui est différent et je pense qu'on se le dit bien cordialement aussi,
par souci de vérité réciproque, de franchise. Alors, il
faut apporter là-dessus des nuances que je ne trouve pas dans le texte
que M. Cherrier a lu d'une voix bien agréable tantôt.
Il y a un autre point, qui dérive de ceci évidemment.
Quand on parle du partage des pouvoirs, il en dérive évidemment
des malentendus. Vous parliez du pouvoir que le projet de loi accorderait au
ministre d'établir la liste des spécialités
professionnelles ou la liste des commissions scolaires qui seront
habilitées à dispenser des cours d'éducation des adultes.
C'est une raison purement fonctionnelle qui justifie cette disposition ou ces
dispositions. C'est qu'on ne peut pas les avoir partout, offerts par toutes les
commissions scolaires. On ne peut pas avoir toutes les options
professionnelles. On ne peut pas avoir l'éducation des adultes offerte
par toutes les commissions scolaires. Alors, il faut qu'une certaine carte soit
établie, carte des endroits où seront, d'où partiront les
services en question. En matière d'éducation des adultes, comme
vous le savez, nous avons 212 commissions scolaires et il y a 82 services
d'éducation des adultes. Il faut bien que quelqu'un décide au
bout de la ligne où ils seront. Cela n'empêche pas qu'ils doivent
être offerts à toute la population du territoire. Mais il y a de
ces délimitations...
Je comprends votre réaction à ces articles du projet. Il y
a peut-être lieu de les retoucher quelque peu pour dire, en
dernière analyse, des choses comme cela, parce que la commission
scolaire a un rôle très important aussi dans ces décisions.
C'est tellement vrai que dans la mesure où les commissions scolaires
d'une région peuvent se concerter entre elles pour dire au gouvernement:
Nous serions d'accord que telle commission scolaire prenne cette
responsabilité-ci. Le gouvernement, s'il a l'assurance que la
qualité et l'économie seront là, sera très heureux
de s'associer à ces démarches et d'endosser des résultats.
Mais là où il y a des désaccords - et il y en a -
il faut bien que quelqu'un puisse trancher quelque part. C'est l'esprit de ces
articles. Je défie qui que ce soit de venir faire une
démonstration contraire. Je l'ai demandé à tous ceux qui
sont venus depuis le début des audiences de la commission. Je n'ai
jamais eu de réponse sur ces questions. Et, si on peut nous faire la
preuve que cela n'a pas de bon sens, que cela sort du raisonnable, très
bien. On emploiera les qualificatifs qu'on voudra autrement. Il n'y en a pas
dans votre mémoire. Je vous en félicite parce que c'est un
mémoire qui argumente sur un ton très raisonnable. Mais je vous
pose la question ici, M. le président. Je vais vous la poser dans une
seconde. S'il y a des points sur lesquels vous pouvez réellement nous
faire la preuve qu'il faudrait que telle responsabilité soit
transférée aux commissions scolaires à partir du ministre
ou du gouvernement, j'aimerais que vous me les indiquiez clairement parce que
j'ai l'impression que nous avons recherché un équilibre
raisonnable fondé très largement sur les vues que nous avons
entendues depuis quelques années et aussi sur les constatations que nous
avons faites depuis deux ans et demi que nous sommes au pouvoir.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Cherrier ou M.
Mongeau.
M. Mongeau: Je peux tenter, M. le Président, de
répondre. D'abord, j'ai pris bonne note que le ministre avouait avoir
quelquefois certaines faiblesses.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Mongeau: Mais sérieusement...
M. Ryan:...
M. Mongeau: Pardon?
M. Ryan: Sept fois le jour.
M. Mongeau: Sérieusement, M. le ministre. Je vais vous
expliquer dans mes mots à moi ce que j'entends par ce qu'on appelle soit
le gouvernement local ou peut-être l'expression que j'aime le mieux - je
ne me chicanerai pas sur l'expression - le pouvoir local. Vous dites:
Contrairement aux municipalités, les commissions scolaires ne
s'adressent pas à tout le monde. Avec tout le respect que je vous dois,
je ne partage pas votre opinion, M. le ministre, parce que,
premièrement, les commissaires sont élus par tout le monde et on
ne parle pas uniquement des services que doit rendre une commission scolaire,
mais on parle aussi des valeurs qu'on veut voir les jeunes adopter au sein
d'une génération qui devient les adultes de demain.
Deuxièmement, même chez la clientèle à laquelle on
s'adresse, on s'adresse à tout le monde, par le truchement
de l'éducation aux adultes aussi. On est même rendu avec
une catégorie qu'on appelle les jeunes adultes. On a les jeunes jeunes,
on a les jeunes adultes et, ensuite, on a les adultes. Il y a les
analphabètes. Je vous assure qu'il ne reste plus grand monde à
qui on ne s'adresse pas si je le prends dans les termes dans lesquels vous le
prenez. Mais moi, je ne le prends pas dans ces termes-là.
Vous dites, M. le ministre: Depuis qu'il y a un ministère de
l'Éducation, c'est normal, c'est ci et c'est ça. Ça, c'est
l'historique. C'est vrai que c'était normal en 1964. Imaginez, le
Québec a attendu jusqu'en 1964 pour avoir un ministère de
l'Éducation. Entre vous et moi, c'est effrayant. Mais c'était en
1964. C'était normal à ce moment-là que, pour partir, il y
ait un phénomène de centralisation au niveau du ministère
de l'Éducation. Je trouve cela normal. Seulement, une fois que les
grands paramètres, les grands objectifs de l'éducation nationale
au Québec sont établis, il est normal qu'on décentralise
à nouveau. Cela, à un moment donné, un de vos
prédécesseurs, M. François Cloutier, l'avait compris,
puisqu'on 1974 il a publié un document qui s'appelait. Pour une
véritable décentralisation. H faudrait peut-être
ressortir ce document. Je l'ai encore dans ma bibliothèque, M. le
ministre. On avait commencé à faire des consultations au
Québec sur ce document du ministre de l'Éducation du temps.
Évidemment, et je ne porte pas de jugement, il y a eu un changement de
gouvernement, et sont arrivés d'autres ministres et d'autres, et
aujourd'hui... Mais c'est fini le phénomène de la centralisation,
si on croit au pouvoir local.
M. le ministre, vous me demandez de vous donner des exemples. Je ne veux
pas tomber là-dedans parce que, pour moi, ce n'est pas de trouver un
exemple en particulier. Bien sûr, on pourrait en trouver. On vous en cite
dans le mémoire. Oui, on vous en cite dans le mémoire. On l'a lu
d'ailleurs tantôt, M. le ministre. Mais ce qui est important, c'est la
répartition des pouvoirs entre le ministère de l'Éducation
et le pouvoir local. Vous dites à un moment donné qu'il faut bien
que quelqu'un tranche. Oui. Je dis que le pouvoir local est capable de trancher
si on lui en donne les moyens. Il est capable de trancher. D'ailleurs, il l'a
fait bien des fois déjà, avant même que ces nouveaux
pouvoirs que le ministre s'attribue, en tant que ministre, bien sûr, dans
la loi soient là. Ces pouvoirs n'étaient pas là et le
pouvoir local a pris ses décisions à partir de ce moment. On ne
peut pas morceler chapitre par chapitre. C'est une question de philosophie, au
fond, une question d'idéologie. Ou on croit au pouvoir local ou on n'y
croit pas.
Chose sûre, quand on regarde le projet de loi 107 tel quel, sans
aucun amendement - je sais que vous avez dit que vous alliez en apporter -
premièrement, les pouvoirs d'administration courante sont donnés
au directeur général; deuxièmement, la commission scolaire
n'est pas obligée d'avoir un comité exécutif;
troisièmement, s'il y en a un, il doit faire entériner ses
décisions par le conseil des commissaires; quatrièmement, la
commission scolaire ne peut dire quelle sorte de comité elle voudrait
établir; c'est déjà décidé dans la loi,
c'est X comités; sixièmement, les pouvoirs du ministre sont
augmentés; septièmement, les pouvoirs du gouvernement sont
renforcés. On demeure toujours élus au suffrage universel, mais,
à part ça, je ne sais pas ce que... Une fois qu'on doit suivre
les règles budgétaires du ministre et le régime
pédagogique, le taux de taxe est limité à 6 % et le reste
est dans le projet de loi 107. À part se faire élire au suffrage
universel, pour autant que tout le monde ait compris la complexité du
système avec les quartiers superposés et tout ça. On est
là, c'est vrai qu'on est là et qu'on a été
élus au suffrage universel, mais c'est à peu près tout,
avec tout le respect, bien sûr, que je dois. C'est ça: Ou on croit
au pouvoir local ou on n'y croit pas. (12 h 15)
Cela fait longtemps que le temps de la décentralisation est
arrivé, mais on ne le fait pas. On l'a dit à propos du projet de
loi 40, on l'a dit à propos du projet de loi 3 et on le dit encore pour
le projet de loi 107, mais il n'arrive pas. C'est le contraire, on centralise
encore.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M.
Mongeau.
M. le ministre, une dernière intervention.
M. Ryan: Je signalerai à M. Mongeau que, s'il veut faire
une lecture complète du projet de loi, il trouvera au moins une
vingtaine de pouvoirs nouveaux attribués aux commissions scolaires. Je
lui en donnerai la liste tantôt avant qu'il ne parte, si cela
l'intéresse.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Avez-vous
terminé, M. le ministre?
M. Ryan: Oui.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la
porte-parole de l'Opposition et députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président.
M. le Président, madame et messieurs, à nouveau bonjour.
À entendre M. Mongeau, j'aurais le goût de lui suggérer de
venir me donner un coup de main.
Il dit, je pense, de façon plus éloquente que je ne
saurais le faire, ce que je dis depuis le début de cette commission, que
l'économie générale de ce projet de loi vient
réduire les obligations du ministre et augmenter ses pouvoirs. En guise
d'exemple, je pense à la gratuité scolaire pour les adultes,
à la définition des services complémentaires et aux
services de garde à l'enfance en milieu scolaire et à un
certain nombre d'obligations de cette nature qui étaient faites
au ministre parce que, du moment où on indique qu'une commission
scolaire est obligée d'offrir un certain nombre de services, il va de
soi que la responsabilité du gouvernement, c'est de lui en offrir les
moyens. C'est ce que j'estime être les devoirs du gouvernement qui
n'apparaissent plus dans le présent projet de loi.
Le ministre dit souvent: II n'y a pas plus de pouvoirs qu'il y en avait.
À la très grande différence qu'il prend des pouvoirs qui
étaient de l'ordre du règlement pour les introduire dans la loi.
Dans beaucoup de cas, il légifère, alors qu'on sait tous combien
il nous aura fallu d'années pour modifier la Loi désuète
sur l'instruction publique parce qu'il est difficile de modifier une loi. Un
règlement, c'est plus souple et, dès qu'on prévoit
l'obligation de faire des consultations, c'est beaucoup plus souple et plus
facilement malléable. Cela s'adapte mieux aux situations.
D'ailleurs, le ministre augmente ses pouvoirs et diminue ses
obligations, y compris celle de consulter ses différents partenaires.
Vous aurez remarqué que cela aussi disparaît dans la loi.
Je voudrais vous dire que, comme vous, j'apprécie que le ministre
reconnaisse qu'à l'occasion il a ses faiblesses. Je vous dirai qu'il m'a
été donné de constater que c'est peut-être une
façon un peu facile de s'en sortir. Il y a eu de nombreuses faiblesses,
ne serait-ce que toute l'énergie qu'il a mise pour défendre la
gratuité à l'éducation des adultes au cours des 30
dernières années, si je ne m'abuse. Cela ne vous vieillit pas
trop, M. le ministre. On voit que, dans le projet de loi, la gratuité
n'est pas assurée. C'est une première faiblesse qu'il commence
à avouer. L'autre faiblesse qu'il nous avouait ici, en cette commission,
c'est que concernant le respect de l'intégrité physique des
élèves, c'est-à-dire les punitions corporelles, il avait
mené ici un débat intéressant, passionnant, duquel il
garde un souvenir tout à fait heureux, pour ne pas dire amusant. On ne
retrouve rien d'équivalent dans le projet de loi. C'est étonnant
compte tenu du discours auquel il nous avait habitué au cours des
années, entre autres, sur le respect des pouvoirs et des juridictions de
ce gouvernement local que constitue une commission scolaire.
Je vous avoue en toute simplicité, je dois être un peu
naïve, mais je l'avais cru. Je dois déchanter parce que le projet
de loi est très centralisateur. Le ministre dit: On donne plus de
pouvoirs aux commissions scolaires. Je pense que transférer des pouvoirs
réglementaires dans une loi, c'est important. La différence entre
les deux n'est pas mineure. Je ne partage pas l'avis du ministre selon lequel
il faille absolument que le gouvernement intervienne en ce qui touche les
services à l'éducation des adultes à offrir. Je ne pense
pas qu'aucune commission scolaire n'aurait l'indécence d'offrir un cours
dans lequel il n'y aurait plus d'élèves. Cela ne fonctionnerait
pas. C'est faire preuve d'un manque de confiance absolument inacceptable de la
part du ministre qui, par ailleurs, accorde la plus grande confiance aux
écoles privées qui, elles, ont toute latitude, y compris celle
d'offrir des services à l'éducation des adultes pour lesquelles
le ministre ne se sent pas obligé de dire: Vous offrez cela et pas cela.
Du moment où ils sont en mesure d'offrir un certain nombre de services,
ils les offrent. De même le ministre n'a pas le pouvoir de contingenter -
pour les écoles secondaires je suis moins informée, mais pour les
collèges je le sais - dans les collèges privés du
Québec. On sait bien qu'il a l'obligation à certains
égards, mais il a certainement le pouvoir de le faire dans les
collèges publics.
C'est une approche extrêmement différente selon qu'on fasse
ou non confiance. Je pense que vous avez raison là-dessus. Moi, je pense
qu'il faut absolument décentraliser et ce que le ministre fait est
à contre-courant. J'ai peine à le suivre et à le
comprendre là-dedans. J'espère cependant que le ministre sera
plus sensible aux arguments que toutes les commissions scolaires sont venues
faire valoir en cette commission parlementaire. Non seulement les commissions
scolaires, parce qu'on pourrait dire qu'elles sont juge et partie, mais la
très grande majorité des intervenants lui disent deux choses,
ici, en commission parlementaire: C'est: Établissez des commissions
scolaires linguistiques et redonnez-leur le pouvoir, évitez de prendre
les pouvoirs que vous êtes en train de vous donner. Mais avant tout allez
donc vérifier la légalité de votre loi avant de commencer
à jouer là-dedans.
En gros, je pense que, comme c'est la dernière journée de
trois semaines en commission parlementaire sur ce sujet, l'essentiel est
là. La grande majorité des intervenants disent: Le seul moyen de
le faire, c'est de négocier l'article 93. Autrement, vous êtes en
train de nous faire perdre du temps. Moi, j'aimerais poser - il nous reste peu
de temps - quelques questions. Dans vos recommandations - et je vais passer par
les pages 36, 37 et 38 de vos recommandations, cela va aller plus rapidement -
vous parlez de vérifier la constitutionnalité du projet de loi.
Est-ce que, pour vous, cette vérification auprès de la Cour
d'appel, cette demande d'en référer auprès de la Cour
d'appel devrait être faite sur toute la loi ou simplement sur les
quelques articles qui touchent la structure scolaire.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Mon-geau.
M. Mongeau: C'est-à-dire que je pense que, normalement,
c'est peut-être sur la structure scolaire, à mon sens.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Y a-t-il d'autres
intervenants de votre groupe? Je vois que vous semblez interroger vos
collègues.
M. Mongeau: Non, mais...
Mme Blackburn: Non, cela va, c'est parce qu'il y a d'autres
commissions scolaires qui font valoir - je pense au PSBGM - que même en
matière de pouvoirs...
M. Mongeau: Non. Nous, lorsqu'on dit qu'on est d'accord,
d'ailleurs, pour en référer à la Cour d'appel, c'est
évidemment sur la question de la structure linguistique par rapport
à la structure confessionnelle. C'est là-dessus.
Mme Blackburn: Bien. Vous parlez des services
complémentaires et je dois dire que là-dessus, je ne sais pas si
je vous ai bien compris. À la page 16 de votre mémoire, parlant
des services complémentaires destinés aux élèves en
difficulté d'adaptation et d'apprentissage, vous dites: "II serait
malencontreux de l'engoncer dans la loi, venant restreindre ainsi les objets de
futures négociations", parce que c'est déjà prévu
dans les conventions collectives des enseignants, si je ne m'abuse. Est-ce
exclusivement pour cette raison parce que dans la loi 3 - on l'oublie trop
facilement que c'était une loi, et si le ministre avait maintenu son
appel sur les articles touchant la structure scolaire, tout le reste de la loi
s'appliquerait - on définissait les services que la commission scolaire
devait offrir? J'en tirais la conclusion que, du moment où les services
de la commission scolaire étaient définis dans la loi, le
ministre avait la responsabilité d'assurer les ressources
financières qui lui permettaient effectivement d'offrir et de rendre ces
services. Ici, vous semblez dire qu'on ne devrait pas définir ce service
dans la loi. Est-ce exclusivement pour ce service ou pour les autres
services?
M. Mongeau: Ce qu'on dit, Mme la députée - si vous
me le permettez, M. le Président - c'est simplement au sujet de la
formation du comité et non pas des services à donner. On dit que
ce comité existe déjà en vertu des conventions
collectives. Mais c'est une exemple qu'on donne, qui est rattaché au
point principal dont je parlais tantôt en ce qui concerne le pouvoir
local. Nous, on dit que c'est la commission scolaire qui doit décider,
de quel comité elle a besoin ou non et que ce n'est pas la loi qui
devrait venir nous imposer cela. C'est cela, le principe de base. L'un des
exemples, c'est celui-là. D'ailleurs, celui-là, en plus, existe
déjà en vertu des conventions collectives. Voilà, c'est
cela.
Mme Blackburn: Cela va, je le revois dans cette perspective.
À ce moment-là, sauriez-vous nous dire si vous seriez
plutôt favorable à ce qu'on inscrive dans la loi une série
de services complémentaires que la commission scolaire serait tenue
d'offrir, comme ce l'était dans la loi 3 où on voyait une
série de services que la commission scolaire était tenue
d'offrir? La conclusion que j'en tirais, c'est que, du moment qu'on indique les
services qui doivent être offerts... Il s'agit de l'article 24: "Les
services complémentaires comprennent notamment: des services de
promotion des droits et responsabilités de l'élève; des
services de participation de l'élève à la vie de
l'école; des services d'encadrement et de surveillance; des services
d'orientation scolaire et professionnelle; des services de santé et de
services sociaux; des services d'animation pastorale catholique ou d'animation
religieuse protestante; des services de psychologie; des services
d'orthophonie...; des services de recherche d'emploi." On indiquait un certain
nombre de services que la commission scolaire devait offrir. On peut donc en
tirer la conclusion logique que le gouvernement devait offrir les ressources
nécessaires pour ce faire. Est-ce que vous seriez en faveur ou non de
l'inscription dans le projet de loi actuel de la définition de ces
services?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Mongeau.
M. Mongeau: Moi, je ne vois pas la nécessité de
mettre ces choses dans la loi. Je pense que cela existe déjà dans
le régime pédagogique. Je ne vois pas la nécessité
de mettre cela dans la loi, mais c'est toujours en vertu de mon optique...
Écoutez, laissez les gens tenter de répondre à leurs
besoins et que le ministère fixe les grands objectifs nationaux, les
balises, les standards minima de chacun des services, ces choses-là,
mais ensuite laissez-nous souffler. Excusez-moi d'employer cette expression,
mais c'est à peu près cela.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Mme la
députée.
Mme Blackburn: En page 18 de votre mémoire - je pense que
c'est sous le chapitre "Les ressources de la commission scolaire" - vous dites,
en parlant de ces ressources: "...il n'en est pas de même du tout...;
afin de répondre à cette exigence" - c'est-à-dire d'offrir
un service de garde à l'heure du midi - vous dites que cela demande
à la fois des espaces, des équipements et du personnel, et que
cette obligation est difficilement acceptable du moment où on n'a pas la
garantie que les ressources suivront. Vous n'abordez pas l'obligation de
l'école qui était faite dans la loi 3, d'offrir des services de
garde en milieu scolaire.
Je pense à tous ces enfants qui entrent entre 11 h 15 et 11 h 30
dans une maison vide; ce sont de jeunes enfants, qu'on appelle les enfants qui
se promènent avec la clef dans le cou; ils terminent à 15 h 30 et
ils n'ont pas ce service. Je connais, parce que cela a été
porté à mon attention, plusieurs écoles qui refusent
systématiquement d'offrir de tels services actuellement parce que, la
loi 3 ne s'appliquant pas, ils n'ont pas l'obligation de le faire. Dans le
projet de loi actuel, on dit que l'école "peut
offrir" un tel service, ce qui laisse à la discrétion et
au pouvoir du directeur de l'école d'organiser de tels services,
indépendamment des besoins de la collectivité. Je m'en
étonne. Quelle est l'opinion de la commission scolaire sur cette
question, à savoir si on doit ou non offrir des services de garde en
milieu scolaire et si la commission scolaire ou l'école doit être
obligée de les offrir? (12 h 30)
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Mon-geau.
M. Mongeau: Je dois vous dire qu'en pratique, nous, on n'a pas
dans notre commission scolaire le problème que vous soulevez. Il y a des
services de garde qui sont offerts dans les écoles là où
les gens l'ont demandé et là où les gens ne l'ont pas
demandé, il n'y en a pas. Il y a même certaines écoles
où on se disait: Comment cela se fait qu'il n'y en a pas? On est
allés revoir les parents et cette population, et on a dit: Vous
êtes certains que vous n'en voulez pas, et ils ont dit: Non, on n'en veut
pas.
Là, on ne peut pas en faire un juste pour le plaisir d'en faire
un; ils n'en veulent pas. Encore une fois, je sais que ce n'est pas facile
d'accepter ce que je dis, mais ce que je disais, d'un côté, pour
le pouvoir local, cela sert également à ça. À ce
jour, ce n'est pas obligatoire; c'est le rôle de la commission scolaire,
elle établit ses règles, cela doit être autofinancé
et on offre le service.
Mais je pense que, sur l'île de Montréal - je ne
peux pas parler pour ailleurs - c'est un système qui fonctionne dans
beaucoup d'écoles. Mais ce n'est pas un directeur d'école qui
doit avoir la décision finale là-dedans. C'est la commission
scolaire. Il n'y a aucun doute dans mon esprit. Je ne sais pas s'il y a eu des
cas de refus sur I'île de Montréal. S'il y en a eu, je n'en ai pas
entendu parler. Ailleurs, je ne le sais pas non plus. Mais, chez nous, je peux
vous dire que le système actuel fonctionne très bien.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Voulez-vous
conclure, madame, de la part de vôtre formation politique?
Mme Blackburn: On a porté à mon attention des cas
où des écoles, de façon systématique, ont
refusé l'organisation de services de garde en milieu scolaire. Il faut
dire que la population de Montréal représente le tiers de la
population étudiante du Québec et qu'il en reste deux tiers. Je
pense qu'un service aussi important que celui de la garde en milieu scolaire ne
peut être laissé à la discrétion d'un directeur
d'école, selon sa propre perception des priorités.
Une toute dernière question et ce sera en même temps ma
conclusion. Vous abordez la question de l'âge d'admission à
l'école et, évidemment, des dérogations du ministre. On
est en train de se demander si, finalement, le fait que cela n'apparaisse pas
dans le projet de loi, ce n'est pas parce qu'il veut se garder le plaisir de
choisir qui aura ce privilège d'être admis à
l'école, alors qu'il n'a pas l'âge requis en vertu du
régime pédagogique. C'était un engagement du Parti
libéral.
On est à deux ans et demi de pouvoir et tout ce dont on a eu
droit, cela a été des dérogations, alors que les
commissions scolaires, dans la très grande majorité des cas, me
dit-on, ne sont pas en mesure d'offrir des services professionnels pour les
parents qui demandent une dérogation pour leur enfant.
J'ai deux questions. Chez vous, est-ce qu'il y a eu de nombreuses
demandes de dérogation? Est-ce que la commission scolaire offre les
services? Je présume que oui. C'est une commission scolaire relativement
bien nantie. L'autre question, celle-ci: Est-ce qu'il ne serait pas
préférable plutôt... C'est une question qui se fonde sur
l'avis qui a été émis par le Conseil supérieur de
l'éducation et qui suggère qu'au lieu de baisser l'âge
d'admission en première année il serait préférable
d'avoir des maternelles à plein temps?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Mongeau, si
vous voulez essayer de répondre d'une façon concise. On a
déjà dépassé le temps qui nous a été
alloué.
M. Mongeau: Je vous avoue, madame, qu'on ne s'est penchés
sur la question des maternelles à plein temps. Mais je pense que le
problème demeure toujours le même. Il y a des enfants qui ont cinq
ou six ans le 1er, le 2, le 15 ou le 25 octobre et ils n'acceptent pas
d'attendre un an pour aller à l'école. Lorsqu'on les fait
évaluer par nos services professionnels, dans neuf cas sur dix, ils
seraient près pour aller à l'école. Je pense que c'est
cela, le problème.
C'est pour cela que nous sommes favorables, disons-nous dans notre
mémoire, à ce que l'âge d'admission soit reporté au
1er janvier, comme cela l'était - j'oserais dire - dans mon temps, parce
que je suis un enfant né entre le 1er octobre et le 1er janvier. Je suis
même plus proche du 1er janvier que du 1er octobre. J'ai commencé
ma première année à cinq ans et je ne pense pas que cela
m'ait nui dans mon développement.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Moi aussi! Merci,
M. Mongeau et je reconnais la députée de Jacques-Cartier. Mme la
députée.
Mme Dougherty: M. le Président, vous avez demandé
un pouvoir accru de taxation. Est-ce que vous êtes au courant du
mémoire du PSBGM? Parce que le PSBGM a suggéré que le
Conseil scolaire de l'île de Montréal soit autorisé, sans
référendum, à prélever une taxe spéciale,
non scolaire, jusqu'à concurrence de 0, 05 $ par 100 $
d'évaluation.
Une voix: Oui.
Mme Dougherty: Alors, j'aimerais avoir votre réaction
là-dessus.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Mon-geau.
Mme Dougherty: C'est pour les milieux
défavorisés.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela va.
M. Mongeau: II n'y a pas de doute que le plafond de 6 % de la
taxe scolaire est atteint. On l'a atteint à Montréal depuis 1984,
1985. Il n'y a pas de doute là-dessus. Tant et aussi longtemps qu'il y a
des coupures budgétaires annuelles et que les dépenses nettes
globales des commissions scolaires, sur lesquelles est finalement basé
le taux de 6 %, diminuent, cela reste peut-être à 6 % mais cela
diminue parce que ce sont 6 %, des dépenses nettes globales. Il n'y a
aucun doute dans mon esprit que ce plafond doit disparaître. À mon
sens, il doit disparaître. Je peux être d'accord pour qu'on aille
chercher un certain montant d'imposition pour les milieux
défavorisés. On pourrait peut-être discuter du montant,
s'entendre; je pourrais être d'accord là-dessus. D'autant plus que
dans le projet de loi 107, pour le faire, il faut passer par un
référendum. À mon avis, cela n'a pas de sens de
dépenser 5 000 000 $, parce que vous savez qu'un
référendum coûte le même prix qu'une élection
scolaire à Montréal, pour aller chercher 1 000 000 $ pour les
milieux défavorisés. Il y a quelque chose qui ne va pas.
Je n'ai rien contre la formule suggérée par la CEPGM, Mme
la députée. J'étais au courant et je l'ai vue dans leur
mémoire. Je n'ai rien contre, mais je pense qu'il faudrait creuser un
peu plus. Comme principe, il est évident que le plafond des 6 % ne peut
pas s'appliquer lorsqu'on a des devoirs particuliers en matière de
rattrapage dans les milieux défavorisés.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Mongeau.
M. le ministre, en guise de conclusion.
M. Ryan: Oui. Puisqu'on parle de taxation, j'en dirai
peut-être quelques mots. Vous savez que cette limite des 6 % a
été instituée par la loi 57, dont l'auteur était le
chef actuel du Parti québécois. Or, si la députée
de Chicoutimi voulait aider à persuader son chef qu'il y aurait
peut-être des modifications à apporter à ce
sujet-là...
Mme Blackburn: II n'est pas au pouvoir, que je sache.
M. Ryan: Je le sais bien, mais s'il était prêt
à reconnaître...
Mme Blackburn: Franchement...
M. Ryan:... publiquement les conséquences de ce qu'il a
fait à ce moment-là, de la loi contre laquelle avait voté
l'Opposition dont je faisais partie, cela pourrait rendre service pour le
développement d'une opinion plus favorable à cette position des
commissions scolaires.
Je crois qu'il faut reconnaître que cette limite crée de
sérieuses contraintes. Nous en sommes conscients. Politiquement, il n'a
pas paru possible, à l'heure actuelle, de faire des changements
là-dessus. Mais c'est un objectif dont je reconnais la validité.
Je pense qu'il appartient aux commissions scolaires de faire leur travail
auprès de l'opinion publique pour que celle-ci devienne plus favorable.
Jusqu'à maintenant, les municipalités opposent un mur
infranchissable. Comme elles sont très vigilantes, peut-être
encore plus que les commissions scolaires, on en est à ce point. Je ne
pense pas que, politiquement encore une fois, il soit possible, à court
terme, de modifier cela. Nous avons l'esprit ouvert de ce
côté.
Je pense que tant et aussi longtemps qu'on va en rester au point actuel,
on peut bien faire les théories qu'on voudra, mais il y a des
conséquences qui dérivent de cela, que vous mesurez comme moi. Il
est évident que, quand 93 % ou 94 % des revenus des commissions
scolaires proviennent de subventions gouvernementales, on ne peut pas s'en
aller dans un régime de décentralisation trop forte parce que
ceux qui distribuent ces subventions ont le devoir d'en rendre compte devant
l'opinion publique, devant l'Assemblée nationale, devant l'Opposition,
etc. C'est un devoir qui est très exigeant. Quand on réussira
à rétablir un certain équilibre à la source, je
pense que les autres questions vont peut-être se poser dans une
perspective quelque peu différente.
J'ajoute ce point-ci. Au Québec, on s'était
orientés depuis une vingtaine d'années dans un régime de
dépenses élevées. C'était un régime plus
confortable que celui de la moyenne canadienne. Il a fallu faire des coupures.
Il a fallu mettre de l'ordre là-dedans. C'est un travail qui se poursuit
depuis sept ou huit ans et qui, à mon point de vue, est pratiquement
terminé maintenant. Je pense qu'on va pouvoir aller vers un
régime de souplesse un peu plus grande. Je le souhaite vivement.
Je renouvelle la demande que j'ai formulée et à laquelle
le président m'a répondu en termes très
généraux tantôt. On est prêts à examiner
l'affaire des responsabilités. Si vous voulez prendre acte de tous les
pouvoirs nouveaux que nous donnons aux commissions scolaires, cela sera autant
de pris. S'il y a des pouvoirs contestables qui sont donnés au ministre
entre hommes raisonnables, entre femmes raisonnables, on est capables de les
regarder et des modifications peuvent être apportées sur un point
ou l'autre. Mais j'espère que nous serons gouvernés, dans
les discussions qui vont se poursuivre, par des considérations
fonctionnelles et le souci de répondre à des besoins concrets.
Dans cet esprit, je renouvelle ma vive appréciation pour l'excellente
présentation que nous a faite la commission scolaire
Baldwin-Cartier.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, M. Cherrier
et M. Mongeau, je vous remercie. Je voudrais rappeler à M. Mongeau qu'il
a eu une offre pour aller siéger dans l'Opposition. Libre à vous
de l'administrer...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Parent, Sauvé): La commission
parlementaire va suspendre ses travaux jusqu'après la période des
affaires courantes, alors que nous accueillerons la commission scolaire du
Sault-Saint-Louis, la commission scolaire Sainte-Croix et la commission
scolaire Jérôme-LeRoyer. Nous suspendons nos travaux
jusqu'après la période des affaires courantes.
(Suspension de la séance à 12 h 40)
(Reprisée 15 h 36)
Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre,
s'il vous plaît!
La commission permanente de l'éducation poursuit ses travaux et
accueille les représentants de la commission scolaire du
Sault-Saint-Louis. La commission scolaire du Sault-Saint-Louis est
représentée par son président, M. Léo
Pétrin. M. Pétrin, bonjour. On vous remercie d'avoir
répondu à l'invitation de la commission permanente de
l'éducation et de venir apporter un éclairage nouveau sur les
projets de loi 106 et 107, projets de loi ayant trait aux élections
scolaires et à la Loi sur l'instruction publique. Alors, je vous ai
informé tout à l'heure de la situation assez exceptionnelle que
nous vivions aujourd'hui. On accuse un peu de retard. On s'attend à un
vote vers 17 heures ou 17 h 30. Alors, sans accélérer, sans
presser personne, on va tenter de travailler de la façon la plus
efficace possible. Si vous voulez nous présenter les gens qui vous
accompagnent et enchaîner avec votre mémoire.
Commission scolaire du Sault-Saint-Louis
M. Pétrin (Léo): Bonjour, M. le Président.
Au nom de la commission scolaire du Sault-Saint-Louis, je vous remercie de nous
recevoir ici, aujourd'hui. J'aimerais vous présenter les membres qui
m'accompagnent. À mon extrême gauche, M. Jules Poirier,
président du comité exécutif et M. Rémi Poliquin,
secrétaire général, à mon extrême droite, M.
Gérard Latreille, commissaire et délégué au conseil
de ITle, M. Arthur Des- lauriers, commissaire et membre du comité
exécutif et M. Pierre Gabrièle, directeur général
de la commission scolaire. Je suis M. Léo Pétrin.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, messieurs,
bienvenue. M. Pétrin, nous vous écoutons.
M. Pétrin: M. le Président, nous avons
préparé une formule abrégée de notre
mémoire, qui contient cependant le texte d'une façon
inchangée dans son ensemble.
La commission scolaire du Sault-Saint-Louis intervient pour souligner
l'effort du législateur dans sa recherche pour moderniser la Loi sur
l'instruction publique. Dans cet esprit, il convient de mentionner positivement
le cheminement effectué depuis la loi 3. La volonté du
législateur de conserver certaines valeurs traditionnelles comme valeurs
fondamentales du système d'éducation est fort honorable, mais
cela ne se fera pas sans causer quelques problèmes au chapitre de la
discrimination, si le projet de loi reste tel quel. Nous constatons
également que le texte soumis à la consultation doit être
amélioré non seulement en ce qui concerne quelques détails
techniques, mais également en ce qui concerne les structures où
les commissions scolaires doivent être assurées de leur existence
par des garanties équivalentes à celles qu'elles ont
actuellement. Enfin, nous croyons que le style de la rédaction doit
également être modifié.
À la page 2 de notre mémoire, nous mentionnons qu'il est
heureux que l'on ait songé à consacrer formellement le droit des
élèves à l'éducation, mais que l'on ne devrait pas
pour autant limiter l'accès des adultes aux services éducatifs.
Dans la même section du projet de loi, nous recommandons de conserver une
définition plus traditionnelle et plus conforme au droit actuel à
la notion de parent, qui devrait se limiter au véritable titulaire de
l'autorité parentale.
Au chapitre de la fréquentation scolaire, à la page 4 de
notre texte, nous croyons que l'article 15, tel que proposé dans le
projet de loi, risque beaucoup plus de causer des embêtements aux
directions d'école que d'améliorer l'administration de la
fréquentation scolaire. Dans cet esprit, nous recommandons plutôt
de refondre les articles de la Loi sur l'instruction publique actuelle afin de
les rendre plus fonctionnels et de confier à la commission scolaire le
signalement d'absences répétées au directeur de la
protection de la jeunesse, laquelle commission scolaire doit s'assurer que les
services éducatifs sont adéquatement fournis.
En ce qui concerne l'enseignant, nous vous recommandons de mieux
circonscrire la nature des obligations qui sont décrites à
l'article 19, afin que celles-ci ne deviennent pas des droits. Ces devoirs
devraient être situés dans le cadre des services offerts par la
commission scolaire
ou encore être décrits comme des obligations personnelles.
Les modalités d'intervention pédagogique prévues à
l'article 16, de même que les mesures concernant les instruments
d'évaluation devraient être revues de façon que les droits
prévus à l'article 16 en question ne s'exercent que dans le cadre
prévu aux articles 211 et 213 du projet de loi 107.
Au chapitre de l'école, nous croyons qu'il n'apparaît pas
pertinent d'exclure les adultes de l'école dans la mesure où cela
peut handicaper l'harmonisation des programmes de formation professionnelle. Le
processus de nomination du directeur de l'école devrait tenir compte des
mesures contenues dans les décrets dans les cas de déplacement et
de mutation. L'avis du conseil d'orientation ne devrait être donné
qu'en ce qui concerne les premières nominations. La loi devrait contenir
des précisions en ce qui concerne les devoirs du directeur
d'école - article 48 - lesquels devraient s'exercer dans le respect des
directives de la commission scolaire.
Toujours dans le chapitre de l'école, le conseil d'orientation
pouvant coexister avec le comité d'école, il faudrait en tenir
compte dans la rédaction de l'article 79, bien que le comité
d'école apparaisse redondant lorsque l'on considère les fonctions
des deux comités.
En ce qui concerne le droit d'ester, il devrait être
réservé à la commission scolaire. Les visiteurs, à
la section V, devraient avoir l'obligation de s'annoncer avant de se
présenter à l'école.
En ce qui concerne les sections I et II du chapitre IV, nous soutenons
que le gouvernement peut probablement faire ce qu'il entend dans son champ de
compétence constitutionnelle, mais nous suggérons de retirer ces
dispositions du projet de loi pour les soumettre à l'approbation des
tribunaux dans un autre projet de loi. En effet, l'article 98 du projet de loi
n'entrant pas en vigueur le 1er juillet 1989, mais à une date
ultérieure fixée par le gouvernement, selon l'article 579, cela
risque de paralyser quelque peu les opérations de la commission puisque
c'est de cet article que celle-ci tire ses pouvoirs. De plus, nous nous
interrogeons sur la légalité du gouvernement et même de
l'Assemblée nationale, de pouvoir fixer le territoire des commissions
scolaires. Enfin, nous nous interrogeons sur la nature de la garantie que l'on
nous offre, ainsi que sur les dispositions discriminatoires que l'on retrouve
aux articles 577 et 578 du projet de loi.
Toujours au chapitre de la commission scolaire, nous vous recommandons
quelques modifications techniques au texte de loi proposé, dans les
pages 12 et suivantes de notre texte, à savoir, en premier lieu:
l'élimination de la notion de deuxième domicile ou de domicile
réputé. Nous vous suggérons également de
prévoir à l'article 137 une disposition autorisant le directeur
général à ouvrir les séances lorsque
nécessaire.
À la page 13 de notre texte, nous vous suggérons de
préciser à l'article 142 que la commission scolaire ne s'exprime
que par résolution, de faire disparaître la notion de
règlement et de maintenir une disposition semblable à l'article 9
de la Loi sur l'instruction publique, actuelle afin d'atténuer les
effets des articles imposant des délais de rigueur.
Nous vous suggérons également de maintenir une certaine
uniformité dans la sémantique et de ne pas employer le terme
"étude" au lieu du terme "délibérations". En ce qui
concerne les procès-verbaux, nous vous suggérons de maintenir les
dispositions actuelles contenues aux articles 320 et 329 de la Loi sur
l'instruction publique, puisque ces articles sont conformes aux dispositions
concernant la preuve dans le Code civil du Bas-Canada.
Ainsi, l'article 155 devrait être repris et l'article 154 ne
devrait mentionner que ce que le registre des procès-verbaux devrait
contenir, à savoir: les résolutions du conseil des commissaires
ou du comité exécutif, s'il y a lieu. Ce comité
exécutif devrait conserver l'administration courante de la commission
scolaire et les décisions prises par ce comité ne devraient pas
être entérinées par le conseil des commissaires.
Le projet de loi nous impose une nouvelle procédure en
remplaçant le mécanisme de résolution par le
mécanisme de réglementation qui n'est pas très
approprié pour le secteur de l'éducation. Cette procédure
s'avère, en premier lieu, beaucoup moins souple que celle que nous
connaissons actuellement avec le mécanisme des résolutions. En
second lieu, cette procédure est d'autant plus lourde qu'elle nous
impose de multiples consultations préalablement à l'adoption d'un
règlement. Enfin, le mécanisme de publication et d'avis qui
complète cette procédure la rend encore moins pratique. Le tout
sans compter les risques de contestation plus importants au simple niveau de la
forme.
Au chapitre des ressources financières, nous nous interrogeons
sur le bien-fondé de l'article 245 du projet qui distingue inutilement
selon nous les commissions scolaires linguistiques et confessionnelles.
En ce qui concerne les ressources matérielles, nous croyons que
les mesures contenues aux articles 239 et 416 alourdissent
considérablement le processus d'administration des contrats. Nous vous
suggérons, en ce qui concerne le Conseil scolaire de l'île de
Montréal, de limiter ses fonctions à la répartition de la
taxe foncière, la dette obligataire, les milieux
défavorisés et l'éducation interculturelle, et pour le
reste d'en faire un organisme de services sur demande des commissions
scolaires.
Au chapitre 6 du projet de loi, nous traitons du style de
rédaction de la loi ainsi que de l'activité réglementaire.
Le style large et vague de la loi est, d'une part, incompatible avec le style
d'interprétation que les tribunaux seront appelés à faire
et, d'autre part, il laisse une
place trop ample à la réglementation, comme nous
l'indiquent les articles 413 et suivants du projet de loi.
Enfin, en ce qui concerne les articles 437 à 440 du projet de
loi, à propos de la mise sous tutelle et de la retenue des subventions,
nous les considérons comme exagérés et injustifiables.
Nous concluons donc en vous signalant que le projet de loi, tel que
déposé, constitue un pas dans la bonne direction et que ce projet
de loi devrait être scindé en deux parties. Une première
partie pouvant contenir l'ensemble des dispositions proposées dans le
projet de loi, mais en y retranchant les sections I et II du chapitre IV et en
harmonisant le tout conformément à ce qui est ci-devant
exposé, de manière à moderniser la Loi sur l'instruction
publique que l'on connaît actuellement.
En ce qui concerne les dispositions litigieuses contenues aux sections I
et II du chapitre IV, elles devraient faire l'objet d'un autre projet de loi,
celui-ci pouvant être soumis à l'examen des tribunaux.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M.
Pétrin de la présentation de votre mémoire et je reconnais
dans un premier temps le ministre de l'Éducation. M. le ministre.
M. Ryan: M. le Président, je remercie la commission
scolaire du Sault-Saint-Louis du soin avec lequel elle s'est penchée sur
les deux projets de loi que nous examinons présentement à la
commission parlementaire de l'éducation. J'ai pris connaissance, avec
profit, des nombreuses observations que nous apporte le mémoire de la
commission scolaire et je veux l'assurer que toutes ces propositions imbues
d'esprit pratique et de souci de simplicité bien comprise seront
examinées avec toute l'attention souhaitable.
Je voudrais peut-être en venir rapidement à quelques
questions qui m'apparaissent pertinentes à la lumière de la
lecture que j'ai faite du mémoire. Il y en a une, d'abord, qui m'a
frappé. Vous parlez de l'omniprésence ou de la présence
trop lourde de la réglementation dans le projet de loi. Vous dites
à la page 2, en particulier: "II nous faut dénoncer une fois
encore, le style large et vague de la loi qui laisse amplement place à
la réglementation qui est nécessairement propre à
engendrer des inquiétudes." Plus loin, vous donnez une explication et
vous dites: "En particulier, on oblige la commission scolaire à
procéder par réglementation plutôt que par
résolution." Vous semblez trouver que c'est beaucoup plus pratique de
procéder par résolution, comme vous le faites très
généralement à l'heure actuelle. Pourriez-vous nous
expliquer, un petit peu, le genre de difficulté que vous entrevoyez ici?
Pourquoi il faudrait, selon vous, alléger le projet de loi de ce point
de vue?
M. Pétrin: Si vous le permettez, je passerais la parole
à M. Rémi Poliquin.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Poliquin.
M. Poliquin (Rémi): Oui, M. le Président, lorsque
l'on parle du style large et vague de la rédaction du projet de loi,
c'est évidemment en tenant compte de l'interprétation stricte que
les tribunaux sont appelés à faire de la loi en question dans la
mesure où on peut la qualifier de loi spéciale. Alors, dans cet
esprit, un tel projet de loi amène inévitablement beaucoup de
règlements, qui ne sont pas soumis au même processus d'adoption
que la loi comme telle. Alors, les tribunaux étant appelés
à interpréter le texte de la loi l'interpréteront
nécessairement d'une manière stricte, et on risque à ce
moment-là de se retrouver avec des interprétations qui
n'étaient pas recherchées au départ lorsqu'on a
rédigé la loi.
En ce qui concerne le processus de réglementation que l'on impose
à la commission scolaire, il s'agit évidemment d'un
alourdissement du processus actuel dans le sens où les
résolutions, actuellement, n'ont pas besoin d'avis préalable,
où les sujets discutes, les politiques de la commission scolaire n'ont
pas besoin d'être adoptées après des avis, aucun avis
d'aucune sorte. Alors que ce qu'on nous propose, c'est un processus qui
nécessite, d'une part, beaucoup d'autres avis qu'on ne connaît pas
actuellement. D'autre part, on nous demande aussi d'effectuer des consultations
qu'on n'a pas à faire actuellement, avant ou en plus de procéder
à ces avis. Je pense entre autres à l'article 226 du projet de
loi où l'on demande à la commission scolaire de consulter les
enseignants sur tout ce qui concerne les politiques à caractère
pédagogique.
Actuellement, il y a beaucoup de ces politiques que l'on adopte par voie
de résolution et que l'on modifie par voie de résolution assez
facilement. Alors que, si on nous impose un processus de réglementation
et de consultation chaque fois que l'on doit adopter ces politiques à
caractère pédagogique, cela nous impose évidemment un
processus beaucoup plus long et cela peut dégénérer en
conflit de travail en fin de compte.
M. Ryan: Je vous remercie des explications. Je pense que ce sont
des explications plausibles. On va regarder le projet de loi en pensant
à ce que vous avez dit. Il y a sans doute moyen d'alléger des
choses. Parfois on veut bien faire puis on dit: On est mieux d'en mettre plus
que moins. Mais après avoir entendu des points de vue, des fois, on
trouve que c'est peut-être mieux, à certains endroits, d'en mettre
moins que plus. Ha, ha!
On va examiner le texte de nouveau en pensant à cette explication
qui a été donnée, qui me paraît, en tout cas, fort
vraisemblable.
Une autre question, sur l'éducation des adultes. Vous avez l'air
d'avoir certaines inquié-
tudes à propos de la place qui est faite aux adultes dans le
projet de loi. Vous en avez une, en particulier, à propos de l'article
35. Quand on met à qui l'école s'adresse; "la formation de
l'élève autre que l'adulte", ce n'est pas pour exclure l'adulte,
évidemment, mais c'est parce que ce chapitre est consacré
à l'école des jeunes, puis il y a d'autres passages qui traitent
de l'adulte. Mais vous, quelle difficulté voyez-vous, là, dans la
manière générale dont nous parlons des adultes? J'aimerais
avoir votre réaction en gros sur les différents articles qui
parlent des adultes.
M. Pétrin: Peut-être que... Pardon. Notre directeur
général pourrait sûrement vous parler de cela.
M. Ryan: Ha, ha! On l'attendait.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le directeur
général.
M. Gabrièle (Pierre): M. le Président. En ce qui
concerne les adultes, d'abord, le délai de six mois qu'il y a dans la
loi, à l'article 2, délai avant qu'un adulte puisse avoir
accès à une scolarisation, cela nous embête, parce que
c'est une façon de restreindre l'accès de l'adulte à des
services.
Ensuite, à l'égard de l'école elle-même,
quand nous excluons l'adulte, actuellement, la commission scolaire du
Sault-Saint-Louis est en train d'intégrer, dans ses écoles, les
adultes, en faisant l'harmonisation des jeunes et des adultes dans le cadre du
programme de formation professionnelle, qui est la politique du
ministère de l'Éducation.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci M.
Gabrièie. M. le ministre.
M. Ryan: L'idée qui sous-tend ce paragraphe dont vous
parlez, c'est qu'on ne veut pas que les jeunes soient incités à
quitter l'école prématurément.
On trouve que si on n'a aucun délai d'attente, à un moment
donné, cela peut être une véritable incitation à
quitter l'école ou les études régulières avant le
temps, en se disant: On prendra des cours du soir. Puis, très souvent,
cela n'aboutit pas à cela. On veut protéger
l'intérêt du jeune. Mais vous ne trouvez pas que c'est une bonne
manière de faire.
M. Gabrièle: Non.
M. Ryan: Déjà, vous avez des expériences, je
crois.
M. Gabrièle: Oui. M. le Président. Ce qui arrive
c'est que nous avons des décrocheurs potentiels. Nous avons aussi des
élèves qui décrochent. Alors, quelquefois le milieu de vie
ou même la structure pédagogique de l'école polyvalente ne
va pas à un jeune. Alors, nous pourrions l'inscrire dans un centre
d'éducation aux adultes. On obligerait, par le projet de loi 107,
à maintenir un jeune dans la rue pendant six mois, s'il a
décroché, sans lui accorder aucun service. Actuellement, les
commissions scolaires ont la possibilité... Si on regarde les
règles budgétaires du ministère de l'Éducation, un
jeune peut être inscrit à la formation aux adultes dès le
moment où il a l'âge de 16 ans. C'est dans la notion de
clientèle subventionnée. Les commissions scolaires peuvent
déterminer, par voie de résolution ou de règlement, qu'un
jeune va continuer sa scolarité dans une polyvalente et se former par
des procédures internes des comités de classement du jeune qui
lui permettent d'avoir accès à la formation aux adultes. Mais ce
que nous voyons là-dedans, c'est que ce jeune, s'il décroche,
aura six mois à trainer dans les rues sans avoir aucun service, alors
que nous pourrons récupérer ces jeunes décrocheurs dans la
formation aux adultes.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. M. le
ministre.
M. Ryan: J'aimerais que vous m'expliquiez les
considérations que j'ai trouvées dans votre mémoire au
sujet de l'aspect constitutionnel du projet de loi. Je n'ai pas trop bien saisi
ce que vous vouliez dire. Nous disons qu'il y a l'article 93 qui crée
des problèmes. Il y a des commissions scolaires protégées,
d'autres qui ne le sont pas. Nous allons soumettre une série de
questions à la cour pour clarifier cela avant de créer des
commissions scolaires linguistiques. Qu'avez-vous à nous dire exactement
là-dessus? Qu'est-ce qui fait une difficulté dans le projet de
loi, d'après vous?
Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui, monsieur.
M. Pétrin: M. le directeur général.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Pétrin'?
M. le directeur général?
M. Pétrin: C'est cela, oui.
M. Gabrièle: Ce que nous vous recommandions, M. le
Président, c'est qu'il y ait deux projets de loi; qu'un projet de loi
remodernise la Loi sur l'instruction publique et qu'on ne retrouve pas dans le
même projet de loi la création de commissions scolaires
linguistiques. L'idée de soumettre des questions devant les tribunaux,
que ce soit dans un deuxième projet de loi séparé.
M. Ryan: Regardez...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui.
M. Ryan: Regardez. Est-ce qu'il y a d'autres
explications à fournir là-dessus? Cette suggestion nous a
déjà été présentée. Nous allons
examiner s'il est possible de la traduire dans les textes. Ce n'est pas
sûr, parce que la formule des commissions scolaires linguistiques a
beaucoup de ramifications dans l'ensemble du projet de loi, mais nous allons
voir s'il y a des possibilités de ce côté. En tout cas, la
suggestion nous a déjà été faite. Vous la
reprenez.
M. Gabrièle: Nous voyions une forme pratique. En fait, la
modernisation de la Loi sur l'instruction publique nous permettrait d'appliquer
cette nouvelle loi et attendre que les tribunaux disposent...
M. Ryan: Très bien.
M. Gabrièle:... de la formation de commissions scolaires
linguistiques et confessionnelles qui s'appliquerait par la suite.
Le Président (M. Parent, Sauvé): D'accord.
M. Ryan: Juste une dernière question, si vous me le per,
ettez, M. le Président. Je ne sais pas si je me suis trompé, mais
je crois que le président de la commission scolaire du Sault-Saint-Louis
n'était pas à la table ce matin quand nous avons rencontré
le Conseil scolaire de l'île de Montréal. Je voudrais vous
demander ceci: Les passages qu'il y a dans votre mémoire au sujet du
Conseil scolaire de l'île de Montréal, en quoi
diffèrent-ils de la position du Conseil scolaire de l'île de
Montréal et du projet de loi?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M.
Pétrin.
M. Pétrin: Ils ne diffèrent peut-être pas
nécessairement de la position du conseil de l'île. Nous sommes
évidemment partenaires du conseil de l'île. Je n'étais pas
ici ce matin puisque je suis arrivé un peu plus tard que prévu,
mais nous aimerions simplement que le Conseil scolaire de l'île de
Montréal nous permette de présenter les services que nous voulons
présenter et qu'il demeure comme service aux commissions scolaires qui
sont partenaires du conseil de l'île.
Le Président (M. Parent, Sauvé): D'autres
interventions du côté ministériel? Cela termine votre
explication?
M. le directeur général.
M. Gabrièle: M. le Président, il y a une
différence. Notre mémoire est différent de celui du
Conseil scolaire de I'île de Montréal. Le conseil scolaire de
I'île demande le statu quo actuel. Ce que nous demandons dans notre
mémoire, c'est qu'il y ait certains pouvoirs qui soient laissés
au conseil scolaire de I'île, tels que la taxation foncière, la
dette obligataire, les milieux défavorisés, mais que, pour tout
le reste, il devienne un organisme de services. C'est là la
différence. (16 heures)
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci.
M. Gabrièle: C'est différent aussi du projet de loi
107 parce que ce projet de loi en fait un organisme de services, mais à
la condition qu'il y ait une résolution de chacune des commissions
scolaires, alors que nous ne voulons pas cela. Ce que nous voulons c'est
simplement que ce soit un organisme de services à la disposition des
commissions scolaires et les commissions scolaires qui veulent avoir un service
donné vont payer pour à cet organisme.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela va.
M. Ryan: Juste une brève question, si vous me le
permettez.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Allez.
M. Ryan: Comment les décisions seraient-elles prises de
créer de tels services? Cela prendrait une majorité des membres
à tout le moins. Si les deux commissions scolaires confessionnelles ont
une majorité des membres, est-ce...
M. Gabrièle: C'est-à-dire que nous distinguons, M.
le Président, entre l'organisme de services et l'organisme qui a le
pouvoir d'utiliser le produit de la taxe pour donner des services.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela va. Mme la
députée de Chicoutimi et porte-parole de l'Opposition en
matière d'éducation.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je voudrais
souhaiter la bienvenue aux représentants de la commission scolaire du
Sault-Saint-Louis et, peut-être parce que le temps va nous presser
tantôt, juste poursuivre dans le prolongement de la question du ministre,
concernant le Conseil scolaire de I'île de Montréal. Dans la loi
telle que libellée, le Conseil scolaire de I'île de
Montréal ne pourrait pas offrir de services du moment où une
commission scolaire se retire, si j'ai bien compris. Alors, dans cette
hypothèse et selon la question du ministre, je pense qu'il fallait aussi
entendre cela: Du moment où la CECM ou la PSBGM n'accepte pas des
prestations de services faites par le Conseil scolaire de I'île de
Montréal, elle se trouve ainsi amputée de la possibilité
de le faire. Comment réagissez-vous à cela?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le directeur
général.
M. Gabrièle: Je ne le pense pas. Je vais vous donner un
exemple de ce qui arrive actuellement. Au Conseil scolaire de l'île de
Montréal, il y a un service qui a été offert, qu'on
appelle le service sur la politique alimentaire. Il y a
actuellement des commissions scolaires qui se sont retirées de ce
service. Cela n'implique pas qu'il n'y a pas de politique alimentaire dans les
commissions scolaires qui s'en sont retirées, et pour les autres
commissions scolaires qui sont demeurées, le conseil scolaire a pu
mettre de l'avant un service de politique alimentaire pour les
élèves.
Mme Blackburn: Si je comprends bien, c'est la situation actuelle
et oui c'est juste. Mais cela ne serait plus la situation si le projet de loi
était adopté tel quel.
M. Gabrièle: Je ne vois pas la différence.
Mme Blackburn: Alors, il faudrait y revenir. C'est le conseil
scolaire, ce matin, qui nous a soulevé la difficulté que cela
posait d'être incapable d'offrir des services du moment où une
commission scolaire se retirait. Vous seriez donc contre, si mon
interprétation est juste?
M. Gabrièle: C'est-à-dire...
Mme Blackburn: II y a un article dans le projet de loi - il
faudrait que je le retrouve, on va vous le donner - qui prévoit que le
Conseil scolaire de l'île de Montréal ne peut offrir des services
qu'à la condition qu'il y ait l'unanimité.
M. Gabrièle: C'est l'article 400.
Mme Blackburn: Donc, dans cette perspective, l'exemple que vous
venez de donner, les services alimentaires, le conseil scolaire ne pourrait
plus les offrir. Êtes-vous pour ou contre? Êtes-vous en faveur
d'une modification de l'article pour qu'on conserve le statu quo?
M. Gabrièle: Ce que nous proposons et que nous
suggérons dans notre mémoire c'est que nous n'acceptons pas
l'article 400 et nous n'acceptons pas non plus le statu quo.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la
députée.
M. Gabrièle: Ce que nous voulons, je le
répète, c'est qu'on délimite certains pouvoirs du Conseil
scolaire de l'île de Montréal sur la taxe foncière, la
dette obligataire, les milieux défavorisés et que pour tout le
reste ce soit uniquement un organisme de services.
Mme Blackburn: Pour tout le reste, cela concerne les
établissements, les écoles, etc.?
M. Gabrièle: Cela peut être n'importe quoi.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Un instant! Si
vous voulez, monsieur, on va tâcher de s'entendre. Vous avez la parole,
madame a la parole, mais pour autant qu'on se comprenne.
Alors, Mme la députée.
Mme Blackburn: J'aimerais que vous me donniez un exemple de ce
que tout le reste représente. Actuellement, on sait que cela concerne
les écoles, mais en vertu du projet de loi actuel il ne reste plus rien
ou à peu près. Cela vide, pour ainsi dire, le conseil scolaire de
ce qu'étaient ses prérogatives. Alors, je dirais: Est-ce que vous
êtes d'accord avec ce projet de loi? C'était l'essence de ma
question.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le directeur
général, voulez-vous compléter?
M. Gabrièle: Oui. Quand je dis "pour tout le reste", je
peux vous faire une liste de ce que pourrait être tout le reste. Si un
groupe de commissions scolaires, huit, ou six, ou quatre, ou trois,
décide de mettre de l'avant un projet de politique alimentaire, elles
peuvent demander au conseil scolaire de coordonner ce projet et financer le
conseil scolaire pour mettre de l'avant ce type de projet.
Un autre exemple. Si l'ensemble des commissions scolaires
décident de mettre de l'avant un service de micro-informatique avec
application pédagogique, elles peuvent demander au conseil scolaire de
jouer ce rôle de coordonnateur. C'est un organisme qui jouerait un
rôle de coordonnateur sur demande à partir de services que les
commissions scolaires voudront avoir.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le
directeur général. Mme la députée de
Chicou-timi.
Mme Blackburn: Oui. En page 4 de votre mémoire, sur une
tout autre question, vous pariez de la fréquentation scolaire et du
contrôle des absences des élèves. Actuellement, vous dites
que la procédure en vigueur aux articles 256 et suivants de la Loi sur
l'instruction publique est désuète, mais que les articles 262,
272 et 273 s'avéraient quand même d'une certaine utilité.
Est-ce qu'actuellement ces articles sont appliqués lorsqu'il s'agit
d'absences des élèves ou si, finalement, pour l'essentiel, les
cas ne se règlent pas à l'école?
M. Poliquin: Si vous me le permettez, M. le
Président...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui, M. le
secrétaire général.
M. Poliquin: ...c'est que les actuels articles 262, 272 et 273 de
la Loi sur l'instruction publique que l'on connaît sont évidemment
lourds dans tout le processus qui est exposé dans la loi actuelle.
Cependant, il y a ces trois articles qui n'imposent pas un recours judiciaire
et qui nous évitent souvent un recours même au directeur de la
protection de la jeunesse.
Ce qui se passe chez nous, c'est ceci. Lorsqu'un cas devient lourd,
où c'est évident que des parents ou des enfants ne respectent pas
la fréquentation scolaire le directeur d'école en informe la
commission scolaire et nous prenons les moyens, tel que c'est prescrit dans la
Loi sur l'instruction publique actuelle, pour mettre en demeure les parents de
respecter leur obligation. Aussi surprenant que cela puisse paraître,
chez nous, cela a porté fruits. On n'a même pas eu besoin d'aller
plus loin et on a évité de recourir au directeur de la protection
de la jeunesse.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Mme la
députée.
Mme Blackburn: Des organismes sont venus nous dire, concernant
cette question, qu'effectivement le fait de référer
immédiatement au directeur de la protection de la jeunesse était
peut-être un peu lourd et qu'il serait peut-être souhaitable et
intéressant qu'il y ait d'abord une référence à un
centre des services sociaux, par exemple, avant d'aller à cette instance
quasi judiciaire qui s'appelle le directeur de la protection de la
jeunesse.
Est-ce que vous ne trouvez pas que ce serait juste à mi-terme
entre les deux et qu'on pourrait, à ce moment-là, si l'enfant a
des problèmes de comportement, mettre à sa disposition les
services requis pour l'aider à mieux s'adapter? Vous ne trouvez pas un
peu lourd, un peu formel le recours ou la transmission à la commission
scolaire de ces cas?
Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, qui...
M. Poliquin: Oui, M. le Président. À la commission
scolaire, on dispose de certains cas. On a un service aux élèves,
pour commencer, qui peut régler certains cas sociaux. Évidemment,
si cela devient trop lourd socialement, s'il y a des difficultés de
comportement qui ne relèvent pas de la juridiction de la commission
scolaire, si c'est vraiment un problème social, socio-familial,
évidemment, un recours à un organisme dispensant ces services
pourrait être une voie valable, pour autant qu'il puisse répondre
à la demande. Ce qu'on regarde aussi, quand on parle de la direction de
la protection de la jeunesse, c'est que, dans plusieurs cas, le directeur de la
protection de la jeunesse est débordé et il ne peut pas toujours
apporter toute l'attention requise pour chacun des cas qui lui sont soumis.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, monsieur.
Mme la députée.
Mme Blackburn: En page 6 de votre mémoire, je dois dire
qu'une première lecture a quelque chose de surprenant. Lorsque vous
parlez des devoirs de l'enseignant, vous dites, en soulignant les articles
19.6°, 19.3° et 19.5°, qu'il ne faudrait pas que ces articles
puissent justifier le droit d'obtenir des mesures de perfectionnement. Et vous
me voyez très étonnée. Devant l'incapacité d'un
enseignant d'atteindre ces objectifs, à quoi doit-il recourir? Se
saborder? Démissionner? Je dois dire que j'ai été
étonnée. Ce n'est probablement pas ce que vous vouliez dire, mais
il me semble que l'enseignant qui est incapable de remplir ses devoirs, il faut
qu'il ait un peu d'aide.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le directeur
général.
M. Gabrièle: M. le Président, dans les conventions
collectives qui régissent les conditions de travail des enseignants,
est-ce qu'il y a un chapitre qui traite du perfectionnement? On dit qu'on
préfère que ce soit traité à partir des conventions
collectives. Dans le projet de loi 107, quand on dit, par exemple, aux articles
3 et 5, de prendre les moyens appropriés pour développer chez les
élèves le respect des droits de la personne, on trouve cela
tellement vaste et large qu'on a peur de se trouver confrontés à
la chose suivante, c'est-à-dire qu'on nous dise: Écoutez, je ne
peux pas prendre ces moyens-là. Vous allez me libérer pendant
deux semaines, je dois aller me perfectionner. Ce n'est pas comme ça
qu'on fait du perfectionnement d'enseignements ou d'autres employés. On
fait une étude des besoins du milieu et, à partir d'une
étude des besoins du milieu, on établit des sessions de
perfectionnement.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Mme la
députée, d'autres questions?
Mme Blackburn: Oui, mais très brièvement. Vous
abordez, à quelques endroits, les pouvoirs du ministre, de façon
assez sommaire cependant. Lorsque cette question a été
abordée en commission, le ministre a dit: Faites-moi la
démonstration que c'est vrai, parce que le fardeau de la preuve semble
appartenir aux commissions scolaires, sauf que j'ai l'impression qu'elles sont
également en train de s'organiser pour lui faire la démonstration
qu'il y a une centralisation excessive dans ce projet de loi.
Il y a également des omissions dans ce projet de loi assez
étonnantes ou encore, qui illustrent que, finalement, les commissions
scolaires restent avec peu de pouvoirs, parce que parlant de commissions
scolaires on a changé le terme "pouvoir" pour "fonction", de même
que dans la présente loi on ne fait plus l'obligation aux commissions
scolaires de rendre compte à la population de leur administration.
J'ai vu peu de commissions scolaires s'étonner de ce fait, qui
semble indiquer qu'elles n'ont peut-être plus à rendre compte de
grand-chose à la population, ce qui fait que ce n'est peut-être
pas nécessaire de maintenir cet article dans le projet de loi. De
même, on a l'impression que
cela ressemble à un lapsus, le fait qu'on ait changé
"pouvoir" pour "fonction", un peu comme dans le cas du directeur
d'école, d'ailleurs qui gère, contrôle, surveille. Je pense
que ce serait à revoir. Mais ce sont tous des termes qui ont rapport
à une situation ou à des fonctions de gérance et non
d'administration. Cela n'a pas retenu votre attention?
Le Président (M. Parent, Sauvé): Qui doit
répondre? M. le président ou M. le directeur
général? M. le directeur général.
M. Gabrièle: M. le Président, cela a attiré
notre attention de voir que la commission scolaire perdait ses pouvoirs et que
c'était remplacé par des fonctions. On aimerait qu'on nous
maintienne la notion de pouvoirs au lieu de fonctions. Pour le reste, ce qui a
attiré le plus notre attention, ce sont les fonctions du ministre de
l'Éducation et la tutelle. On trouvait que la tutelle ou la
vérification devenait plus draconienne. Ce qu'on demandait dans notre
mémoire, c'était qu'on maintienne le statu quo de la Loi sur
l'instruction publique actuelle. (16 h 15)
Le Président (M. Parent, Sauvé): En conclusion.
Mme Blackburn: En conclusion, M. le Président. Seulement
un bref commentaire. Vous vous êtes inquiétés de la
situation qui pourrait être faite aux adultes. Je vous ferais remarquer
qu'à l'article 199 - cela a un côté assez surprenant, mais
assez révélateur également - si on le relit bien, on dit:
"Une commission scolaire peut, conformément aux règles
budgétaires établies par le ministre, exiger une contribution
financière pour un élève qui fréquente l'une de ses
écoles, mais qui n'est pas un résidant du Québec, ou une
personne visée à l'article 2." La personne visée à
l'article 2, c'est l'adulte. Donc, l'adulte est considéré un peu
comme une personne non résidante selon les termes de ce projet de loi.
Cela a un côté un peu choquant.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Est-ce que vous
voulez réagir à cela, monsieur?
M. Gabrièle: M. le Président, nous ne l'avons pas
interprété de cette façon. Pour nous, la scolarisation de
l'adulte est gratuite quand il a accès à une scolarisation qui
mène à un diplôme d'études secondaires, sauf
qu'actuellement toutes les commissions scolaires mandatées pour donner
des services d'éducation aux élèves adultes demandent aux
adultes une certaine contribution financière pour payer du
matériel didactique ou l'ouverture d'un dossier. Ce ne sont pas des
frais de scolarité, c'est pour payer du matériel didactique au
même titre que pour nos élèves d'écoles secondaires.
Quand ils achètent des cahiers d'exercices, il y a une contribution des
parents. Les manuels sont gratuits, mais les cahiers d'exercices, les parents
les payent. Alors, cela ne nous a pas frappés parce qu'on
considérait que c'était le statu quo, puisque pour tout
élève adulte et actuellement en ce qui concerne les règles
budgétaires, c'est la même chose: la scolarité est gratuite
pour les adultes. La seule chose que l'adulte paie, c'est le matériel
didactique.
Mme Blackburn: Remarquez bien que si c'était le statu quo,
ce ne serait pas indiqué là-dedans puisque, comme vous
l'expliquez bien, les jeunes paient pour leur matériel scolaire et
qu'ils ne sont pas compris dans cet article-là. Alors, si ce
n'était qu'une question de matériel scolaire, on n'aurait pas cet
article touchant les adultes.
Juste une dernière question, et je voudrais vous remercier tout
de suite, parce que je sais que M. le Président ne me laissera plus le
temps de le faire...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Ah non, soyez-en
certaine!
Mme Blackburn: À combien s'élèvent en
moyenne ces frais qui sont exigés des étudiants adultes qui
s'inscrivent chez vous? On a avancé ici des chiffres assez
élevés.
M. Gabrièle: M. le Président, je vais essayer de
vous les donner de mémoire. Il y a une table de concertation des
directeurs de l'éducation aux adultes pour toute I He de Montréal
et de l'île de Laval qui est réunie dernièrement. Je peux
vous donner le montant, c'est de l'ordre de 60 $.
Mme Blackburn: Par session?
M. Gabrièle: Par session ou si un élève
s'inscrit à temps plein pour toute l'année, c'est 60 $ pour toute
l'année et, en plus, il y a certaines catégories d'adultes qui
sont exonérées de ces frais. Par exemple, l'adulte qui est
bénéficiaire de l'aide sociale est exonéré de ces
frais, l'adulte qui est employé de la commission scolaire est
exonéré de ces frais s'il suit des cours et ainsi de suite.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Expliquez-nous
ça. Cela vaut la peine qu'on prenne le temps d'entendre ça.
Pourquoi un adulte employé de la commission scolaire serait-il
exonéré des frais? C'est la même situation qu'on a vue dans
les universités, n'est-ce pas? Expliquez-nous donc cela.
M. Gabrièle: Je vais vous donner la raison. Normalement,
si je fais des changements technologiques, si j'installe, par exemple, des
microordinateurs pour l'ensemble des services et qu'à ce
moment-là les secrétaires sont obligés d'aller suivre un
cours de mise à jour ou de perfectionnement en traitement de texte, bien
sûr, comme
j'ai un service de l'éducation aux adultes chez nous, je vais lui
demander d'organiser les cours. Il ne me chargera pas de frais pour organiser
ces cours. Voilà un exemple.
Le Président (M. Parent, Sauvé): C'est une
explication. Je vous remercie. Madame, si vous voulez conclure, au nom de
l'Opposition.
Mme Blackburn: Je vous remercie de votre participation aux
travaux de cette commission. Vous comprendrez que vos réponses ont
suscité plusieurs questions chez moi. Si on avait un peu plus de temps,
j'aurais aimé mieux comprendre votre fonctionnement et savoir, par
exemple, lorsque vous parlez des 60 $ pour les adultes pour toute une session,
si c'est 60 $ s'ils prennent seulement un cours dans la session, si cela les
exempte d'acheter leurs cahiers d'exercices s'ils en ont besoin ou si c'est
requis pour leurs études. Alors, j'avais un certain nombre de questions
de cette nature. Par exemple, vos employés qui ont la gratuité
à l'éducation des adultes, cela touche-t-il aussi les
employés à temps partiel et les employés à la pige
et les employés occasionnels? Alors, c'étaient autant de
questions que j'aurais aimé vous poser, mais le temps file et on va
devoir retourner en Chambre tantôt. Je vous remercie infiniment de votre
participation.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je reconnais le
ministre de l'Éducation en conclusion.
M. Ryan: Je remercie beaucoup la commission scolaire du
Sault-Saint-Louis. On a reçu un mémoire très
intéressant. On va continuer l'examen de ce mémoire, surtout sur
les points qui ont été discutés cet après-midi,
mais il y en a plusieurs autres que j'aurais voulu soulever. Malheureusement,
le temps se fait court et on est obligés de s'interrompre ici. On aura
l'occasion de continuer cette discussion sous d'autres aspects, sous d'autres
cieux.
Alors, merci beaucoup.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je veux aussi vous
remercier pour votre compréhension de la situation spéciale que
nous vivons aujourd'hui, avec les votes qui s'en viennent. On est
obligés de précipiter un peu la rencontre. Alors, encore une
fois, merci beaucoup.
Nous suspendons nos travaux pour quelques minutes, alors que nous
accueillerons, immédiatement après la commission scolaire du
Sault-Saint-Louis, les représentants de la commission scolaire
Sainte-Croix.
(Suspension de la séance à 16 h 21)
(Reprise à 16 h 23)
Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre,
s'il vous plaît! J'invite les membres de la com- mission de
l'éducation à reprendre place. Je salue d'une façon toute
particulière nos amis de Sault-Saint-Louis. Bon voyage de retour
à Montréal!
J'inviterais les membres de la commission à prendre place. La
commission poursuit ses travaux en accueillant les représentants de la
commission scolaire Sainte-Croix, laquelle est représentée ici
par sa présidente, Mme Judith Lortie-Hinse. Mme Hinse, la commission
consacrera à l'audition et à la discussion avec votre commission
scolaire une période d'environ 45 minutes. Je vous invite
immédiatement à commencer la présentation de votre
mémoire et aussi à nous présenter les gens qui vous
accompagnent, de façon que nous puissions voir leur nom dans le
Journal des débats. Mme la présidente, nous vous
écoutons.
Commission scolaire Sainte-Croix
Mme Lortie-Hinse (Judith): Merci, M. le Président.
À ma droite, vous avez le directeur général, M. Pierre
Grou, à ma gauche, le secrétaire général, Me
Gauthier. Il y a également dans la salle des commissaires qui sont venus
nous entendre: Mme Madeleine Benoît-Gougeon,
déléguée au conseil scolaire, M. Ibrahim Michel Sabbabh,
membre de l'exécutif et Mme Louise Côté,
représentante du comité de parents, qui siège à la
table des commissaires.
M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs les
membres de la commission parlementaire, c'est avec intérêt que le
conseil des commissaires de la commission scolaire Sainte-Croix a reçu
et analysé les projets de loi 106, Loi sur les élections
scolaires, et 107, Loi sur l'instruction publique.
D'entrée de jeu, il nous faut, M. le ministre, M. le
Président, saluer le désir de votre gouvernement de vouloir
moderniser et consolider nos institutions scolaires primaires et secondaires
publiques. C'est là une oeuvre bien délicate mais combien
nécessaire et nous vous savons gré de l'aborder avec
détermination, simplicité et clairvoyance.
L'objectif que vous vous êtes proposé en déposant le
projet de loi sur l'instruction publique se révèle un
véritable défi. Donner à l'école une plus grande
autonomie juridique sans pour autant la dissocier du tissu organique qui la lie
à ses partenaires, la commission scolaire et le ministère de
l'Éducation. Voilà tout un programme!
Quant au projet de loi sur les élections scolaires, nous tenons
à souligner le plaisir que nous avons eu à constater qu'enfin
était reconnue l'importance du suffrage universel, comme garantie de la
santé et de la vitalité de la démocratie scolaire.
Nous avons, M. le Président, considéré l'ensemble
des dispositions des projets de loi à la lumière des principes
suivants: le système scolaire public québécois doit se
concevoir et s'articuler autour de trois pôles: l'école, la
commission scolaire et le ministère de l'Éducation. La
vitalité de chacun de ces pôles est essentielle à la
santé de notre système scolaire public. Chacun des pôles a
un rôle déterminant à jouer; la qualité, voire la
profondeur de celui-ci, dépend de la densité des pouvoirs qui lui
sont associés. Des marges de manoeuvre significatives doivent garantir
aux partenaires les moyens suffisants pour remplir la mission qui leur est
dévolue. Un équilibre constant doit être maintenu entre les
partenaires comme forces convergentes d'un même ensemble.
Après consultation des parents de notre territoire par le biais
des présidents de comité d'école, forts de l'expertise de
notre personnel d'encadrement, nous avons, M. le Président, M. le
ministre, le plaisir de vous livrer les quelques rélfexions et
commentaires suivants.
Depuis la Révolution tranquille, l'évolution
socio-politique du Québec nous a amenés à concevoir la
dynamique de l'organisation scolaire publique autour de trois grands
pôles: l'école, la commission scolaire et le ministère de
l'Éducation. Chacun de ces trois partenaires a eu, jusqu'ici, un
rôle déterminant à jouer à l'intérieur de
notre dynamique scolaire. Pour continuer à participer activement au
développement équilibré et harmonieux de notre
système, chacun des partenaires doit disposer d'une place relative
vitale et dort se voir consacrer un rôle nettement défini et
établi en parfait équilibre par rapport à celui des
autres.
Dans cette perspective, l'école revalorisée ne peut pas se
concevoir comme l'atomisation du système scolaire. Il faut, pour
garantir les acquis des 30 dernières années, éviter de la
laisser seule, face aux instances de l'État. La revalorisation de
l'école, associée à un renforcement des pouvoirs du
ministère de l'Éducation, reviendrait à
déséquilibrer le système scolaire québécois.
Lui assurer la place qui lui revient ne doit pas se concevoir comme
l'évacuation du système scolaire du seul palier local de
concertation et d'action, c'est-à-dire la commission scolaire. En 1988,
l'on ne saurait considérer notre système scolaire public sans y
reconnaître la place d'un gouvernement local fort, doté de
fonctions et de pouvoirs déterminants entre l'école et
l'État.
Ce palier a, traditionnellement, faut-il le rappeler, fait partie du
paysage de la vie démocratique du Québec. Les parents et les
usagers de l'école éprouvent un impérieux besoin de
pouvoir se retourner vers un niveau d'autorité aux dimensions et
à visage humain. C'est en continuant de s'y adresser qu'ils pourront
trouver un lieu d'écoute, d'arbitrage et de décision propre
à assurer la sauvegarde de leurs intérêts.
Par ailleurs, l'état de développement de notre
société, celui de notre système scolaire, la conjoncture
sociale et économique et, finalement, les attentes de nos concitoyens
forcent le ministère de l'Éducation à s'orienter vers
l'essentiel. Il doit apprendre à centrer son action vers sa mission
éducative, c'est là l'essentiel de son rôle. Dans cette
perspective, il doit continuer à simplifier et à alléger
ses structures. Il doit faire en sorte que ses partenaires, l'école et
la commission scolaire, exercent pleinement leur rôle, se consacrant pour
sa part a l'essentiel du sien en adoptant un style d'intervention beaucoup plus
inspiré par sa mission d'orientation et de service.
En définitive, si l'on compte laisser place à la
créativité de chacun des partenaires dans le meilleur
intérêt de l'acte éducatif, il importe que les pratiques et
les gestes traduisent une volonté politique et administrative, nette et
ferme, axée sur le développement et la confiance plutôt que
sur les contrôles et les encadrements. Jusqu'ici et cela de façon
de plus en plus criante, l'école et la commission scolaire ont
disposé de marges de manoeuvre de plus en plus étriquées.
Les contrôles se sont faits de plus en plus pesants et les codes, chaque
année, plus contraignants.
La multitude de contrôles exercés sur les commissions
scolaires et, par voie de conséquence, sur l'école ont
atténué le degré d'autonomie dont elles pouvaient jouir.
Partant, elles ont eu vite fait d'étouffer le dynamisme dont le
ministère de l'Éducation avait voulu imprégner tout le
système scolaire québécois au milieu des années
soixante.
La recherche d'un meilleur équilibre entre l'autonomie et les
contrôles, dans le but de permettre à l'école et à
la commission scolaire de renforcer leur rôle auprès de la
population qu'elles servent, nécessite la définition d'un
régime simple et souple.
Les conventions collectives, la législation et la
réglementation tendent à renforcer leurs emprises sur la vie de
l'école et la répartition des ressources. Plus la
négociation évolue, plus elle tend à confisquer l'acte
éducatif au profit d'intérêts, voire de privilèges,
de plus en plus éloignés des finalités de
l'éducation. Plus l'État, en cherchant à rationaliser
l'utilisation des ressources publiques, adopte une réglementation et des
règles budgétaires astreignantes, plus il tend à
scléroser l'action à l'intérieur de moules administratifs
étroits et contraignants.
Pour sa part, l'État poursuivant des objectifs de
démocratisation, d'accessibilité, d'égalité des
chances, de rationalité et d'efficacité a graduellement
procédé à une concentration des décisions. Petit
à petit, il a multiplié les règles; celles-ci,
associées aux contrôles, ont eu tôt fait de priver
l'école et la commission scolaire de la part d'initiatives
créatrices qui leur permettent de développer des modèles
originaux, adaptés et performants.
Le ministère de l'Éducation, plus souvent qu'autrement,
happé par les exigences et les contraintes d'ordre administratif, a, au
risque de négliger les finalités de l'appareil, cherché
à répondre aux préoccupations pédagogiques et
éducatives par des encadrements de plus en plus lourds, à saveur
nettement technocratique et administrative.
II n'y a qu'un moyen de permettre aux écoles et aux commissions
scolaires de développer davantage leur emprise sur l'acte
éducatif et de développer des modèles intéressants
propres à répondre aux besoins des milieux qu'elles servent,
c'est de les autoriser à prendre une certaine distance par rapport
à la rigueur des grands encadrements, sans pour autant autoriser
l'arbitraire. Cela suppose un défit de taille: assou-plir, laisser place
à l'originalité sans pour autant sacrifier les acquis. Il faut de
l'imagination, de la volonté et de l'audace.
Un mot sur la consultation. Même si, à l'origine, on a
cherché bien légitimement à associer les partenaires de
l'école à la définition des principaux aspects du projet
éducatif et de l'acte éducatif, en faisant le pari que chacun
saurait reconnaître la place qui est la sienne, l'expérience nous
démontre qu'il est temps de marquer le pas. Il y a participation et
participation. À l'usage, l'on constate que l'essence même de la
consultation sur les enjeux déterminants, à savoir les grandes
orientations à la base de l'organisation scolaire et du projet
éducatif, se trouve le plus souvent neutralisée au profit de
mécanismes lourds, laborieux et par trop onéreux. Il faut
maintenant consolider et surtout apprendre les limites d'une saine implication.
\ Ce que le projet de loi 107 nous réserve.
Malheureusement, M. le Président, M. le ministre, la lecture du
projet de loi laisse les commissions scolaires quelque peu
désillusionnées. L'énoncé de votre objectif de fond
annonçait des réformes délicates mais combien
nécessaires et surtout suggérait un repositionnement des
partenaires en équilibre relatif, affranchis qu'ils seraient des
procédures et préceptes aussi lourds que pénibles.
Il nous faut, M. le Président, constater qu'en dépit des
avis et de la compétence d'un appareil scolaire résolument
tourné vers la satisfaction des besoins des populations qu'il sert, vous
avez privilégié un modèle encore plus
contrôlé, structuré et, il nous faut le dire,
entravé. De fait, sans ressources supplémentaires, sans pouvoir
de taxation amélioré, sans assouplissement des grands
encadrements que sont les règles budgétaires et les conventions
collectives, les commissions scolaires doivent gérer une
réalité chaque jour de plus en plus contraignante, comme la
fluctuation des effectifs, le flux et le reflux des populations du territoire,
l'évolution de la famille québécoise, la pauvreté
et l'analphabétisme, les multiethnies et la
multiconfessionnalité.
Malgré cette réalité, le projet de loi que votre
gouvernement propose à la population du Québec requiert des
commissions scolaires qu'elles prennent et maintiennent sur trois ans
rétablissement de leurs écoles sans grande adaptation possible;
qu'elles soumettent la gestion scolaire au joug puissant et organisé des
alignements syndicaux en forçant législativement la consultation
des enseignants sur la gérance des fonctions reliées aux services
éducatifs; qu'elles adjoignent un nombre croissant de comités
à la gestion de leurs écoles; qu'elles consultent davantage sur
plus de sujets les corps les plus divers dont les mandats et les juridictions
vont s'entrechoquant, nantis qu'ils sont de leur tout nouveau pouvoir d'ester
en justice.
Le projet de loi projette de figer le dynamisme et l'originalité
de la gestion scolaire à l'intérieur de procédures
supplémentaires, onéreuses et parfois même inutiles, de
générer une fois de plus de nouvelles attentes dans la population
alors que, souvent déjà et cruellement, les moyens manquent pour
satisfaire celles déjà exprimées.
Ce même projet de loi renforce les contrôles et en augmente
le nombre et le poids. De nouveaux rapports sont demandés; le mandat des
vérificateurs peut être précisé par le ministre de
façon générale ou particulière; l'administration
des immeubles est nouvellement réglementée. De plus, il confirme
les codes: non seulement les conventions collectives ne sont pas
réévaluées, mais le projet de loi donne aux forces
syndicales des outils de pression beaucoup plus puissants sur le système
de la négociation. Le projet de loi renforce le principe des
règlements, règles, programmes et directives de tous genres qui
viennent définir et limiter l'originalité des milieux.
Il vous donne, M. le ministre, de même qu'à l'appareil de
l'État, une latitude encore plus large vous permettant de dicter
davantage aux écoles et aux commissions scolaires la règle
à suivre. Si plusieurs des pouvoirs qui vous sont reconnus par le projet
de loi étaient exercés par le passé sans disposition
habilitante claire, le projet en autorise de nouveaux: conditions et
procédures d'attribution des contrats de construction, d'agrandissement,
d'amélioration et de transformation des immeubles; intervention sur la
fixation du prix de vente des immeubles de la commission scolaire; renforcement
des pouvoirs du gouvernement sur les conditions d'emploi du personnel non
syndiqué; intervention au niveau de la répartition des
spécialités professionnelles.
L'accroissement des pouvoirs réglementaires du gouvernement ou du
ministre, l'émergence de pouvoirs purement discrétionnaires,
l'introduction de pouvoirs de substitution de l'autorité du ministre
à celle du conseil des commissaires démocratiquement élus,
l'accroissement des contrôles, la confirmation de l'emprise des forces
syndicales, l'alourdissement de la consultation, voilà autant
d'éléments du projet de loi qui nous laissent dire que non
seulement la place et l'équilibre des partenaires ne sont pas
respectés, mais bien plus, dans les circonstances, qu'ils sont
délibérément écartés, les marges de
manoeuvre étant pour leur part ignorées.
Tout l'équilibre du système, nous l'avons
démontré, suppose la reconnaissance et le renforcement du
rôle et des pouvoirs de la
commission scolaire comme palier intermédiaire de gouvernement et
cela devient chose possible dès que législativement on en
convient, notamment: en reconnaissant à la commission scolaire sa
responsabilité et sa juridiction sur la planification et l'utilisation
de ses ressources; en reconnaissant à la commission scolaire son
autorité sur la planification et l'utilisation de ses équipements
scolaires selon la variation des facteurs déterminants du milieu et ce,
par la suppression des notions d'actes d'établissement et de plan
triennal; en reconnaissant la compétence et la juridiction des
commissions scolaires sur la détermination des orientations de la
formation professionnelle et sur les concertations possibles, eu égard
au développement des besoins régionaux et provinciaux; en
reconnaissant aux commissaires élus leur sens des responsabilités
et leur sensibilité aux besoins du système étant
donné la proximité des populations qu'ils servent; en retirant
toute disposition visant à donner au ministre l'autorité de
substituer sa décision à celle des commissaires
démocratiquement élus; en garantissant législativement aux
commissions scolaires un niveau de ressources financières basé
sur des planifications triennales du MEQ et du Conseil du trésor; en
supprimant toutes les procédures de réglementation jugées
largement superflues; en supprimant le pouvoir d'ester en justice des
comités consultatifs; en maintenant dans l'école un comité
d'école obligatoire et un conseil d'orientation facultatif purgé
du veto qu'entraîne l'absolutisme de l'unanimité que suppose la
loi actuelle; en limitant au strict nécessaire, c'est-à-dire
à la réglementation sur les régimes pédagogiques,
les services éducatifs particuliers, la sanction des études et
les pouvoirs réglementaires du ministre ou du gouvernement; en limitant
l'étendue et le nombre des pouvoirs discrétionnaires du ministre;
en rendant à l'enseignant sa fonction première à
l'école, agent premier de l'acte éducatif, sans pour autant
prêter flanc, par une législation calquée sur les
conventions collectives, à la prise en charge de l'école et de
l'acte éducatif par les forces syndicales; en limitant le nombre de
comités consultatifs statutaires au strict nécessaire, quitte
à retoucher aux mandats des comités existants actuellement,
parents, école, orientation, transport, faisant confiance à
l'originalité des milieux pour le développement de modes de
partage et de participation des parents à la vie éducative.
J'étais présente ce matin lorsque le Conseil scolaire de
l'île de Montréal a présenté son mémoire et
j'ai moi-même travaillé à ce mémoire. Je voudrais
quand même ajouter l'opinion de l'ensemble du conseil des commissaires de
la commission scolaire Sainte-Croix.
Créé depuis déjà 15 ans, le Conseil scolaire
de l'île de Montréal a permis que se bâtisse entre les
commissions scolaires de l'île de Montréal une précieuse
expérience de concertation, de mise en commun et de
développement.
Le milieu métropolitain requiert, en raison des
caractéristiques propres de sa population, de la densité de
celle-ci et des difficultés très particulières que cela
suppose pour l'organisation scolaire, un organisme de concertation fort et
équilibré.
Dans cette perspective, nous contestons vigoureusement l'approche du
législateur, lorsque celui-ci soumet l'organisation des services en
commun et donc d'initiatives de concertation et de planification au veto de
chacune des commissions scolaires et au vote d'une majorité des deux
tiers des membres du conseil scolaire. Si la première mesure a pour
effet de museler l'émergence de projets communs sur IHe, la seconde
signe l'arrêt de mort du développement concerté.
Nous sommes d'avis que la tradition de développement et de
planfication des commissions scolaires de l'île de Montréal par
l'intermédiaire du conseil scolaire doit être maintenue. Nous
proposons que le conseil scolaire puisse pourvoir à la planification du
développement, à la recherche et à l'organisation de
services communs, à la demande de la majorité des commissions
scolaires de l'île, pour celles parmi celles-ci qui sont
intéressées à s'en prévaloir, sans pour autant
pénaliser les autres. Il est cependant entendu, dans le cadre d'une
telle proposition, que l'initiative vienne des commissions scolaires et non du
conseil scolaire.
Nous aurions quelques remarques à apporter sur le projet de loi
sur les élections scolaires. La lecture de ce projet de loi nous a
réservé d'agréables constats: rafraîchissement des
dispositions législatives concernant les élections scolaires;
maitien du suffrage universel comme base du gouvernement scolaire local; net
renforcement de la participation en permettant le remboursement des
dépenses électorales selon certains critères, en
reconnaissant le concept d'équipe politique et en introduisant de
nouvelles dispositions facilitant le vote et les candidatures auprès des
employeurs.
Par contre, toutes les dispositions du projet n'ont pas soulevé
chez nous le même enthousiasme. En effet, un certain nombre d'entre elles
présentent d'inquiétantes anomalies. Parmi celles-ci, notons:
l'accroissement remarquable du nombre de circonscriptions électorales;
la notion de confection de la liste électorale; la notion de
circonscriptions réservées aux minorités linguistiques; la
mécanique de fonction de la liste électorale; la notion de
"deuxième domicile" pour l'électeur ou le candidat; la confusion
générée par l'éparpillement des dispositions
concernant les notions d'électeur, candidat et liste électorale.
(16 h 45)
Parmi celles-ci, nous tenons à demander - là, je dois vous
référer au texte original qui vous a été remis,
parce qu'il y a eu un saut de deux ou trois paragraphes dans ce
résumé-ci, au mémoire qu'on a envoyé il y a
quelques semaines - que la notion de "deuxième domicile"
I soit retranchée. Outre le fait qu'elle entraînera des
difficultés réelles sur le plan de l'organisation des
élections, cette notion constitue une question tout à fait
discutable sur le plan de la démocratie scolaire. Quel est
l'enracinement local d'un électeur ou d'un candidat non résidant
dans la localité? Sa connaissance des enjeux est nettement insuffisante
pour lui permettre de jouer un rôle un tant soit peu
déterminant.
Nous aimerions aussi voir retranchée la notion de
"circonscriptions réservées aux minorités linguistiques".
Cette notion risque d'introduire des clivages, voire des braquages,
indésirables au sein du conseil des commissaires. Conçue dans le
but louable d'assurer aux minorités linguistiques une
représentation, elle risque fort de servir de catalyseur
d'affrontements. Cela est absolument indéfendable dans un contexte
où l'on cherche à intégrer le plus possible les diverses
composantes de la population québécoise. Il nous semble que le
premier lieu d'intégration au niveau scolaire soit bien le conseil des
commissaires.
Vu la confusion générée par l'épapillement
des notions, dans le but de clarifier l'interprétation des notions
d'électeur, candidat et liste électorale et d'en faciliter
l'application pour le directeur du scrutin, il est indispensable que ces
notions soient revues, clarifiées et regroupées à
l'intérieur d'un même corps de dispositions.
En conclusion, M. le Président, les projets de loi 106 et 107
visent essentiellement la revalorisation de l'école à
l'intérieur d'un système scolaire sain et harmonieux, de
même ils favorisent des populations. Le mémoire de la commission
scolaire Sainte-Croix vise essentiellement à favoriser la
réalisation de cet objectif.
En guise de conclusion, voici nos recommandations les plus importantes:
que les commissions scolaires soient reconnues comme de véritables
gouvernements locaux nantis de pouvoirs déterminants et assurés
de marge de manoeuvre significative; que les pouvoirs du gouvernement et du
ministère de l'Éducation soient revus et limités, de sorte
que soit reconnue aux commissions scolaires la juridiction qui leur revient
démocratiquement; que les grands encadrements que constituent les
conventions collectives, les règles budgétaires et les
règlements soient revus et allégés de sorte qu'ils
laissent davantage cours à la créativité des partenaires
dans le meilleur intérêt de l'acte éducatif; que le
ministère de l'Éducation définisse son rôle et ses
interventions en fonction et dans le respect des responsabilités de ses
partenaires, les commissions scolaires et les écoles; que le directeur
de l'école demeure le pivot de son école; que le comité
d'école soit reconnu et maintenu comme palier obligatoire de
participation des parents à l'école; que le conseil d'orientation
puisse être institué sur une base volontaire, là où
les milieux se déclarent prêts à en vivre le
fonctionnement; que la commission scolaire conserve la responsabilité de
la planification de ses équipements et de ses ressources, eu
égard aux fluctuations de la conjoncture locale. À cet effet, que
les notions d'acte d'établissement et de plan triennal de
répartition et destination des immeubles soient retranchées ou
modifiées de sorte qu'elles laissent une latitude suffisante à la
commission scolaire pour mieux gérer ses ressources.
Que le nombre de comités consultatifs soit limité à
ce qu'il est sous l'empire de la loi actuelle; que le droit d'ester en justice
pour les comités soit retiré dans le but évident
d'éviter des confrontations aussi inutiles qu'onéreuses; que les
contrôles de l'État soient revus, limités et
allégés; que les règles et les procédures soient
allégées de sorte que la souplesse du système soit
garantie; que les dispositions autorisant les délégations de
pouvoirs soient revues, simplifiées et regroupées, de sorte que
leur objectif soit atteint sans conflit de juridiction; que le pouvoir de
taxation soit élargi pour permettre aux milieux d'organiser leurs
services selon les besoins des populations; que les droits et les devoirs des
enseignants soient énoncés de sorte que les dispositions qui les
régissent ne handicapent pas davantage la négociation de
conventions collectives et leur application à l'école; que soit
retranché le droit pour les enseignants à la consultation
systématique sur l'exercice des fonctions éducatives de la
commission scolaire.
Qu'en définitive, M. le Président, l'équilibre soit
maintenu entre les partenaires du système et que des marges de manoeuvre
significatives soient reconnues à l'école et à la
commission scolaire.
Voilà, M. le Président, M. le ministre, mesdames et
messieurs les membres de la commission parlementaire, le mémoire que la
commission scolaire Sainte-Croix voulait vous présenter aujourd'hui.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci beaucoup,
Mme Hinse. Il nous reste une période de 20 minutes exactement pour
discuter avec les membres des deux formations politiques. Sans plus tarder, je
reconnais le ministre de l'Éducation. M. le ministre.
M. Ryan: M. le Président, je remercie la commission
scolaire Sainte-Croix de l'examen qu'elle a fait du projet de loi 107.
J'écoutais défiler les recommandations qui viennent en conclusion
du mémoire et je me disais que sur à peu près toute la
ligne ce que la commission scolaire Sainte-Croix semble souhaiter est soit le
statu quo, soit le retour à un régime que nous avons connu il y a
plusieurs années. Je chercherais en vain dans ce mémoire une
conception positive du rôle du gouvernement et du ministère de
l'Éducation qui fournissent seulement 92 % à 93 % des ressources.
Je ne pense pas qu'on puisse... Je pense que c'est comme un projet de
rêve. Je ne pense pas du tout qu'on puisse atterrir avec des
recommandations comme celles-
là. Je vous le dis bien simplement.
On dit que les commissions scolaires soient reconnues comme de
véritables gouvernements locaux nantis de pouvoirs déterminants
et assurées d'une marge de manoeuvre significative. On en a
discuté toutes la journée. Je pense qu'on a fait des
précisions à l'occasion des rencontres qui ont marqué la
matinée. Il me semble qu'il y a des distinctions de base qu'il faut
établir. Le système d'enseignement québécois n'est
pas une affaire de simples gouvernements locaux. C'est un système
beaucoup plus complexe qui comprend un partage de fonctions dont une portion
très importante a été confiée depuis
déjà une génération au ministère de
l'Éducation et au gouvernement, dont une autre partie est assumée
par les commissions scolaires et une autre partie doit être
assumée par l'école sous la direction des commissions
scolaires.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre, je
m'excuse, tout le monde entend la cloche comme moi. À ce
moment-là, le devoir de chaque député, c'est d'aller
remplir son rôle de député, soit celui de voter. Je
suspends temporairement et j'invite les membres, immédiatement
après le vote, à réintégrer le plus rapidement
possible le salon législatif.
(Suspension de la séance à 16 h 53)
(Repriseà17h18)
Le Président (Parent, Sauvé): La commission de
l'Éducation va reprendre ses travaux. Nous nous excusons auprès
de nos invités et nous les remercions. Vous devez comprendre la
situation que nous vivons aujourd'hui. La parole était au ministre de
l'Éducation et je dois vous rappeler qu'il reste huit minutes à
la formation ministérielle et dix minutes à la formation de
l'Opposition.
M. le ministre de l'Éducation. Vous souvenez-vous où nous
étions rendus, M. le ministre de l'Éducation?
Oui, allez, madame, nous vous écoutons.
Mme Lortie-Hinse: Bon, très bien. C'était loin de
nous, M. le ministre, d'offenser ou de choquer le gouvernement du Québec
ou le ministère de l'Éducation par nos propos. Depuis que je suis
commissaire, j'ai vécu le livre blanc, le projet de loi 40, le projet de
loi 3, ou la loi 3 si vous voulez, et ceux-ci, les projets de loi 107 et 106.
Tout le temps, à chaque moment, on a analysé avec beaucoup de
sérieux chacun de ces projets de loi et, cette fois-ci, on s'est dit:
Allons encore plus en profondeur et demandons-nous pourquoi on veut tant
changer la Loi sur l'instruction publique. Et on a fait un retour aux
années cinquante non pas parce qu'on veut y retourner, mais parce qu'on
voulait comprendre d'où partaient tous ces changements.
Dans les années cinquante, on sait que l'instruction ou
l'école n'était pas accessible à tous, que les enseignants
étaient plus ou moins bien payés, qu'il y avait toutes sortes de
problèmes. Donc, l'État a pris en charge l'éducation et
c'est avec succès qu'il a mené à bien son projet. Dans les
années soixante-dix, il y a eu les négociations nationales et,
à ce moment-là, le développement des conventions
collectives pour aider les enseignants à avoir une meilleure
qualité de vie dans leur travail. Tout cela a cheminé
jusqu'à l'année 1988 et maintenant nous croyons qu'il est temps
que les commissions scolaires soient responsables de l'éducation dans
leur milieu, parce qu'elles sont beaucoup plus près de la population
qu'elles desservent que peut-être le ministère de
l'Éducation. Ce sont ces gens qui nous élisent et nous voulons
vraiment leur offrir un service de qualité. C'était pour cette
raison qu'on a mis tant de points qui semblent être l'idéal, mais
c'était une opinion, à la suite de notre étude.
Nous nous sommes dit que, si les commissions scolaires avaient un plus
grand pouvoir de taxation et si le ministère subventionnait moins, cela
nous obligerait peut-être à nous rapprocher de nos commettants et,
peut-être aussi, que cela améliorerait la qualité... non
pas tout à fait cela, mais disons que cela améliorerait
l'intérêt de la population envers la chose scolaire.
C'était dans cette optique, M. le ministre, que nous avons mis tant de
considérants à la fin de notre mémoire en conclusion. Ce
n'était pas avec un autre objectif.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la
présidente. Je reconnais encore le ministre qui n'avait pas
terminé sa question.
M. Ryan: Je n'ai même pas eu le temps de poser une
question, M. le Président, mais j'ai seulement commencé une
entrée en matière tantôt.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je m'excuse, mais
je ne comprends pas comment il se fait qu'il soit survenu une réponse
s'il n'y a pas eu de question qui a été posée.
M. Ryan: Mais, regardez, ce n'est pas grave du tout, parce que la
séance vise surtout à permettre à nos visiteurs de
s'exprimer. Par conséquent, il n'y a aucune offense en ce qui touche le
ministre.
Je vous disais que j'avais l'impression d'être un peu dans un
univers de rêve. Je vais vous donner un exemple. Dans les recommandations
qui terminent le mémoire - je vous dis cela dans un esprit de dialogue,
on n'a pas beaucoup de temps, et pour que les réactions soient franches
de part et d'autre - il y a une recommandation, "que les grands encadrements
que constituent les conventions collectives, les règles
budgétaires et les règlements soient revus et
allégés de sorte
qu'ils laissent davantage cours à la créativité des
partenaires dans le meilleur intérêt de l'acte éducatif. "
C'est de la belle littérature, mais, les règles
budgétaires, c'est cela qu'on vient de faire depuis deux ans. On les a
allégées considérablement dans un travail de concertation
immédiate avec les commissions scolaires. On n'est pas pour recommencer
ce travail tout de suite. On a consacré beaucoup d'énergie
à faire cela. On a donné beaucoup plus de latitude aux
commissions scolaires.
Les conventions collectives sont un héritage que nous avons. Cela
se décide à deux. Il y a deux signataires dans une convention
collective: il y a le gouvernement avec ses partenaires des commissions
scolaires et il y a de l'autre côté les syndicats. Les syndicats
ont toujours tenu à avoir une négociation nationale. Il est
absolument impensable de revenir à une négociation locale, sauf
dans des matières comme celles qui sont présentement
réservées à la négociation locale. C'est tellement
vrai. Dans la loi 37, on avait énuméré toute une
série de matières qui étaient renvoyées à la
négociation locale. C'était tellement peu réaliste qu'il a
fallu que des ententes interviennent privément lors de la
dernière ronde de négociation, en vertu desquelles au moins une
dizaine ou une douzaine de ces clauses ont été
négociées, à toutes fins utiles, nationalement.
Après cela, les commissions scolaires les ont ratifiées, chacune
à son niveau. Autrement, il n'y aurait pas eu de négociation.
Cela n'aurait pas abouti.
Je lis cela ici et je me demande comment on va... Les règlements,
on vient d'en adopter. Les derniers dont j'ai eu connaissance sont ceux qui
regardent la confessionnalité dans les écoles. Je ne sais pas,
cela aussi a fait l'objet de consultations aussi abondantes qu'on puisse le
souhaiter. J'espère que vous ne nous demandez pas de recommencer cela
tout de suite. Comme c'est écrit ici, c'est cela qu'on pourrait
comprendre. Cela surprend. À la première lecture, cela surprend.
Je voulais vous le dire.
Maintenant, on pourrait discuter des passages qui sont dans la
deuxième partie de votre mémoire, au sujet des pouvoirs qui sont
donnés au gouvernement. Prenez par exemple les conditions de travail, la
classification des emplois des employés non salariés, tout cela
est soit dans la loi actuelle, soit dans la réglementation en vertu de
la loi actuelle. Il n'y a rien de changé par rapport au régime
sous lequel vous vivez actuellement. C'est simplement une transposition
juridique différente. Il n'y a rien de changé à cela. Tout
le règlement actuel est fait en vertu de l'article 16. 1° de
l'actuelle Loi sur l'instruction publique, qui donne des pouvoirs infiniment
plus grands au gouvernement que ce qu'on a inscrit dans le projet de loi 107.
Mais, si cela vous est passé inaperçu, je n'ai pas d'objection.
C'est la même chose quand on parle des procédures pour
l'attribution des contrats de construction, etc. Ce qu'on fait, on prend la
discipline générale du gouvernement et du secteur public, tel que
cela existe pour tout le secteur public et parapublic, et on l'applique aux
commissions scolaires. Dans bien des cas, cela implique un allégement.
Vous dites, à un moment donné: Vous allez faire cela par
réglementation dorénavant. C'est justement pour éviter que
le ministre prenne des décisions dans chaque cas. On dit qu'on va avoir
un règlement, que, là, les commissions scolaires vont l'observer
et qu'elles ne seront plus obligées de soumettre chaque affaire au
ministre, comme c'est le cas actuellement. Mais la lecture est
différente. Peut-être le texte n'est-il pas assez précis?
Mais je vous assure que c'est l'interprétation juste et que nous l'avons
travaillée en détail. Il y a beaucoup d'allégements qui,
par conséquent, n'ont pas été aperçus, mais je les
souligne pour l'utilité commune des personnes qui sont ici et de nos
concitoyens.
Il n'y a pas de temps, malheureusement, pour des questions. C'est
malheureux, mais on aura l'occasion de se reprendre en d'autres circonstances,
je pense bien.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je reconnais
maintenant la porte-parole de l'Opposition, Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Mme la
présidente, messieurs, il me fait plaisir de vous accueillir au nom de
l'Opposition officielle. Comme on a eu l'occasion, malheureusement, de vous le
faire remarquer à plusieurs reprises, le temps nous presse un peu. J'ai
lu votre mémoire avec intérêt et je dois dire que le
ministre devrait être satisfait parce que, depuis le début des
audiences, il demande aux intervenants de lui indiquer quels sont les articles
qui viennent augmenter le pouvoir ou accroître le pouvoir du ministre. Il
y a, là, une lecture assez exhaustive des principaux articles par
lesquels le ministre voit accroître ses pouvoirs. Il nous dit que cela ne
change pas la situation, qu'il ne fait qu'introduire dans la loi ce que les
règlements lui accordaient comme pouvoirs. Mais il sait très bien
que c'est toute la différence. Il va finir, j'imagine, par comprendre
qu'il n'est certes pas le seul à détenir la vérité
absolue là-dedans, parce qu'aujourd'hui on sait qu'à
l'unanimité les commissions scolaires déplorent et
dénoncent la centralisation qu'entraînerait l'adoption du projet
de loi tel que libellé. Je trouve que c'est vouloir, en dépit
à la fois des manifestations évidentes d'insatisfaction et des
lectures qui sont faites par les commissions scolaires, les premières
concernées, continuer à s'obstiner que de dire: Je vous donne
plus de pouvoirs que vous n'en aviez. Il a même confié un viatique
à une commission scolaire qui allait assister aux
délibérations de la fédération des commissions
scolaires, la semaine dernière. N'empêche que je n'ai pas
l'impression que cela ait réussi à convaincre la
fédération des commissions scolai-
res.
Je sais que ce n'est peut-être pas ici que vous pourrez le faire,
mais j'ai fait un exercice relativement simple et, évidemment,
extrêmement sommaire. J'ai essayé de comparer quels étaient
les pouvoirs laissés à une commission scolaire et quels
étaient les pouvoirs laissés à un conseil d'administration
d'un établissement de santé, d'un hôpital, et j'ai
l'impression que cela finit par se ressembler beaucoup, à la
différence qu'on ne pense pas être obligé, ou qu'on ne
considère pas un conseil d'administration d'un hôpital comme une
commission scolaire. Une commission scolaire, cela demeure un gouvernement
élu. Ce matin, j'ai trouvé cela assez étonnant -
d'ailleurs, je pense que le président du Conseil scolaire de l'île
de Montréal a répondu avec justesse - lorsque le ministre dit:
Cela ne touche pas à toutes les populations, une commission scolaire.
Par exemple, une ville gère tout un territoire, alors qu'une commission
scolaire, c'est sur des parties de territoire. Le ministre s'est situé
par rapport à Montréal ou à Québec, mais dans mon
comté la commission scolaire couvre au moins trois municipalités:
la municipalité de Chicoutimi, celle de Laterrière et... Vous
avez ainsi des commissions scolaires qui couvrent trois, quatre, cinq, six ou
une dizaine de municipalités. Alors, dire qu'elles n'ont pas le
même pouvoir qu'une municipalité sous prétexte qu'elles ne
couvrent que des parties de territoire, je pense que c'est avoir une lecture de
la situation qui est plus montréalaise que québécoise. (17
h 30)
Je voulais juste soumettre cela à votre attention. Je me
demandais si cet exercice avait été fait ou si cela ne serait pas
souhaitable de le faire: l'exercice de comparer les pouvoirs qui sont ceux qui
sont laissés au conseil d'administration d'un cégep, d'un centre
hospitalier, d'un centre d'accueil en comparaison avec les pouvoirs qui sont
effectivement laissés à une commission scolaire. J'ai la nette
impression que cela finit par se ressembler beaucoup.
Ainsi, à l'Hôpital de Chicoutimi, je rappelle quelques
chiffres, le budget est de 63 000 000 $ avec des revenus autonomes d'environ 4
000 000 $. Il a un personnel total et émet 2500 paies-semaines pour
environ 1600 permanents. Il y a aussi des occasionnels. Il offre des services
de diagnostic, de soins et il gère un peu le centre régional.
Autrement dit, l'hôpital dispense des services de santé,
particulièrement dans diverses spécialités, pour toute la
région.
À la commission scolaire de Chicoutimi, le budget est de 54 000
000 $. Il y a environ 2 000 000 $ de revenus autonomes. Il y a 8600
élèves et à peu près 800 membres du personnel. Cela
finit par se ressembler quand on regarde les politiques administratives, les
politiques budgétaires, la gestion des ressources humaines. Finalement,
on engage le personnel dans les hôpitaux comme dans les commissions
scolaires. Moi, je me demandais s'il ne serait pas utile que les commissions
scolaires fassent cet execice. On doit sérieusement, mais
sérieusement s'interroger sur cette espèce de glissement de
pouvoirs qui vient ici à être accentué par le
présent projet de loi, alors qu'on a un gouvernement élu, un
gouvernement élu. Je me demandais si vous aviez déjà
réfléchi, sous cet angle, aux pouvoirs laissés aux
commissions scolaires ou à ceux qui devraient l'être.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme
Hinse?
Mme Lortie-Hinse: Je crois comprendre que c'est une demande, on
pourra faire parvenir la réponse à la commission, je ne sais pas,
à Mme Blackburn, à M. Ryan...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Au
secrétaire de la commission.
Mme Lortie-Hinse: D'accord, au secrétaire de la
commission. On fera certainement cet exercice-là. Je vous remercie de
nous avoir éclairci ce point-là. On enverra cela en annexe,
aussitôt que ce sera prêt.
Mme Blackburn: Une question: selon vous, l'article touchant le
droit d'ester pour les conseils, je pense que c'est pour le comité de
parents et le conseil d'orientation...
Mme Lortie-Hinse: Les comités d'école.
Mme Blackburn: Les comités d'école, oui. Le conseil
d'orientation ne serait pas légitime ou légal. L'explication, je
pense, se retrouve en page 10, non de votre annexe. Vous citez le Code de
procédure civile: 'Tout groupement de personnes formé pour la
poursuite d'un but commun au Québec, mais qui n'y jouit pas de la
personnalité civile ni ne constitue une société au sens du
Code civil, peut néamnoins ester en justice pour défendre aux
actions portées contre lui. "
Mais, j'avais de la difficulté à suivre votre analyse
là-dessus, puisque vous dites: "Nous soumettons qu'à la
lumière de cet article le conseil d'orientation ou tout autre
comité formé en vertu de la loi ne pourrait validement ester en
justice, en demande, parce que la loi ne lui confère pas de
personnalité juridique. "
Mme Lortie-Hinse: Pour l'explication juridique, je vais laisser
M. Gauthier fournir les détails.
On a cela, c'est cela, dans les articles en annexe, n'est-ce pas, Mme
Blackburn?
Mme Blackburn: À votre mémoire. Mme
Lortie-Hinse: M. Gauthier.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Gauthier, nous
vous écoutons.
M. Gauthier (Alain): Alors, Mme Blackburn, sans entrer dans une
discussion juridique qui risquerait d'être longue ou laborieuse et
peut-être bien inutile, ce qu'on a voulu dire ici, c'est tout simplement
que l'économie de notre droit, de notre droit civil, entre autres, de
notre procédure civile, est à l'effet que les groupements de
personnes, les corps consultatifs ou les corps qui ne disposent pas de la
personnalité juridique, ne peuvent pas ester en justice et cela, au
fond, pour assurer, entre autres, au justiciable qui est vis-à-vis la
possibilité, entre autres, de contraindre cet organisme ou ce groupement
qu'il poursuit.
Il y a deux malaises, ici, qui sont manifestés. Le premier
malaise, c'est que ce genre de disposition est à toutes fins utiles une
disposition de droit nouveau qui va vraiment à l'en-contre de toute
l'économie de notre procédure civile. Deuxièmement, il y a
le fait qu'on va avoir une série de comités, de conseils qui
vont, pour une raison ou pour une autre, poursuivre la commission scolaire, si
tant est que juridiquement ils peuvent le faire, et se poursuivre entre eux
autres, l'un et l'autre comité. Finalement, on va avoir un "nid à
chicane". On se demande à quoi cela va servir. Est-ce que cela va aider
à rencontrer les finalités de l'éducation? Est-ce que cela
va favoriser l'harmonie dans le milieu? On a des doutes là-dessus.
Pour les aspects purement juridiques, ici, je n'ai pas amené
d'argumentation sur le fond mais, si cela vous intéresse, je pourrais
vous soumettre une note complémentaire avec plaisir.
Mme Blackburn: Cela serait intéressant, je présume,
pour les travaux de la commission.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Vous pourrez la
faire parvenir au secrétaire de la commission. Malheureusement, le temps
étant écoulé, j'invite Mme la représentante de
l'Opposition à conclure au nom de sa formation politique.
Mme Blackburn: Je vous remercie, M. le Président. Je
voudrais brièvement commenter les propos du ministre qui dit que c'est
rêver que de penser à un système scolaire
décentralisé. Cela ne serait pas plus rêver de penser
à un système scolaire décentralisé que cela n'est
rêver que de penser à des écoles privées qui ont
toute l'autonomie, entière, complète. Bien qu'on leur ait
accordé un financement qui a déjà été
jusqu'à 80 %, on leur en accorde encore un qui va jusqu'à 65 % et
elles ont toute l'autonomie. C'est important de le rappeler. Cela m'a
frappée au moment où l'association des institutions secondaires
privées est venue présenter un mémoire dans lequel on a
établi un parallèle avec le problème que cela posait pour
les commissions scolaires d'atteindre un certain niveau de performance à
l'intérieur d'autant de règles, de normes et de contraintes. Ce
qu'avance l'associa- tion des écoles privées, c'est que les
écoles publiques seraient peut-être plus performantes si on leur
laissait un peu plus de marge de manoeuvre. Elle va aussi loin que de justifier
une partie des difficultés qu'éprouvent les commissions scolaires
et les écoles en raison du trop grand encadrement dont celles-ci font
l'objet.
Le ministre dit: Vous rêvez en couleurs! Pourtant, je pense qu'il
y a moyen d'alléger les règles budgétaires; à
preuve, il nous dit: Je l'ai déjà fait.
Le Président (M. Parent, Sauvé): En conclusion,
madame.
Mme Blackburn: Je prétends que le ministre va à
contre-courant de l'avenir en augmentant ses pouvoirs et son emprise sur le
réseau de l'éducation du Québec. J'espère cependant
qu'à la lumière des pressions dont il est de plus en plus l'objet
- on a été informé du consensus qui s'est fait sur cette
question au sein des commissions scolaires du Québec - il saura revenir
à de meilleurs sentiments, si je puis ainsi m'exprimer. Je vous
remercie.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre de
l'Éducation.
M. Ryan: J'ajouterai simplement en terminant que la
députée de Chicoutimi me semble rêver, elle aussi. C'est
facile de nommer des pouvoirs qu'on voudrait. C'est facile. J'ai bien dit:
Indiquez-nous des pouvoirs qui devraient être renvoyés du
gouvernement ou du ministre aux commissions scolaires avec preuves à
l'appui. Faire une liste, il n'y a rien de plus facile que cela. On n'a
seulement qu'à prendre le catalogue et à faire une liste, avec
preuves à l'appui. De cela nous n'avons pas eu de preuve cet
après-midi. J'ai beaucoup de respect pour la commission scolaire
Sainte-Croix. Je lui ai même indiqué qu'il y a des choses qu'elle
demande - ils ont l'air d'être surpris de cela - et que cela ne change
rien à la situation actuelle. En général, cela
améliore les choses pour les commissions scolaires par rapport à
la situation actuelle. Il faut au moins lire ces choses-là.
La preuve, nous pouvons l'administrer n'importe quand. Nous ne voulons
pas abuser du temps des gens, mais la preuve de ce côté-là
est facile à faire. Il y a un certain nombre de points sur lesquels j'ai
déjà indiqué, à plusieurs reprises, qu'il y avait
des possibilités d'amélioration du projet de loi. J'en ai
indiqué toute une série en cours de route. Nous allons
procéder à ces améliorations. Mais vouloir entretrenir
cette espèce de légende, je pense que cela ne change absolument
rien au caractère objectif et fonctionnel de l'examen que nous devons
faire. Si vous êtes intéressés à ce qu'on prenne ces
points de manière plus précise, on les reprendra. Mais encore une
fois, il faut à la fois la mention des
pouvoirs précis et une justification objective. C'est là
qu'est le débat. C'est ce qui est le coeur du débat. Ce n'est pas
en réaffirmant la prémisse qu'on apporte la preuve.
J'apprécie l'échange de propos que nous avons eu et je
déplore seulement qu'il ait été trop bref.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la
présidente, une dernière intervention brève.
Mme Lortie-Hinse: Oui, j'aimerais simplement remercier la
commission de nous avoir reçus, de nous avoir permis de présenter
notre mémoire et surtout d'émettre nos idées aussi
clairement.
Le Président (M. Parent, Sauvé): C'est la
commission qui vous remercie, madame, d'être venus nous rencontrer et
d'avoir passé avec nous une période de temps très
enrichissante.
La commission suspend ses travaux pour quelques secondes, alors que nous
accueillons immédiatement après la commission scolaire
Jérôme-Le Royer, que j'invite immédiatement à
prendre place à la suite des commissaires de la commission scolaire
Sainte-Croix.
(Suspension de la séance à 17 h 41 )
(Reprise à 17 h 44)
Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre,
s'il vous plaît! J'invite les membres de la commission permanente de
l'éducation à prendre place. J'invite nos invités aussi
à prendre place à la tribune qui leur est réservée.
La commission permanente de l'éducation, dans le cadre du mandat qui lui
a été confié par l'Assemblée nationale, à
savoir tenir des auditions publiques sur les projets de loi 106 et 107,
poursuit ses travaux.
Nous accueillons les représentants de la commission scolaire
Jérôme-Le Royer, commission scolaire située sur 'île
de Montréal, dont le président est M. Joseph Morselli. M.
Morselli, bonjour. Il me fait plaisir de vous rencontrer et de vous remercier
d'avoir accepté l'invitation de la commission permanente de
l'éducation à venir discuter avec nous de votre perception de ces
deux projets de loi, dont le premier porte sur les élections scolaires
et le deuxième sur la Loi de l'instruction publique.
M. Morselli, la commission a environ 40 à 45 minutes à
consacrer à votre commission scolaire. Je vous invite donc à nous
présenter immédiatement les gens qui vous accompagnent et
à enchaîner avec la présentation de votre mémoire.
Tous les gens présents ont reçu votre mémoire et l'ont lu.
Alors, libre à vous de le présenter d'une façon globale ou
d'une façon abrégée. Je n'ai pas de directives à
vous donner, sauf que nous sommes limités par le temps et nous le
regrettons. M. Morselli, nous vous écoutons.
Commission scolaire Jérôme-Le
Royer
M. Morselli (Joseph): M. le Président, merci. M. le
ministre, messieurs les membres de l'Assemblée nationale, bonsoir
à vous tous. J'aimerais vous présenter mes collègues de la
commission scolaire, en commençant, à gauche, par les membres de
l'exécutif: M. Domenico Moschella; M. le délégué au
conseil scolaire de l'île, M. Gilles Dion; mon vice-président, M.
Denis Tremblay; notre DGA, M. André Gauthier. Cela fait seulement six
ans qu'on se connaît!
Le Président (M. Parent, Sauvé): II est
important.
M. Morselli: Mon directeur général, M. Maurice
Poirier; un autre membre de l'exécutif, M. Michel Daoust; et un des
représentants des parents au conseil des commissaires, M. André
Bélisle.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Messieurs, soyez
les bienvenus.
M. Morselli: Merci. Comme vous l'avez dit, M. le
Président, vous avez tous les documents devant vous et j'aimerais
débuter en disant, pour qui ne connaît pas exactement la situation
géographique de Jérôme-Le Royer, qu'on est la commission
scolaire qu'on appelle du bout de Ille, par rapport à toute l'île
de Montréal. Elle dessert quatre municipalités, en
commençant à l'ouest par Saint-Léonard, Anjou,
Montréal-Est et une partie aujourd'hui de Montréal, connu sous le
nom de Pointe-aux-Trembles, dans le passé et encore aujourd'hui.
Ça, c'est la situation géographique. J'avais pensé, M. le
Président, de vous lire toute la synthèse de notre
présentation. Mais, comme vous l'avez dit, le temps est très
court et je pense que vous me permettrez de vous faire grâce de ne pas
répéter, en effet, ce que vous avez devant vous. Si vous
êtes d'accord, j'aimerais plutôt entrer tout de suite au coeur de
la discussion et je pense que mes collègues seront aussi très
d'accord.
On a devant nous un projet de loi au sujet duquel, avec sept autres
présidents de commissions scolaires de l'île de Montréal,
j'ai eu le plaisir de discuter, avant même qu'il soit
présenté à l'Assemblée nationale par M. le ministre
Claude Ryan, dans une rencontre qu'on a eue à Montréal. Et en en
parlant, sans voir le projet de loi rédigé, cela avait l'air
vraiment très bien et très beau. Je peux vous dire qu'on est tous
d'accord dans notre commission scolaire avec les principes fondamentaux du
projet de loi 107.
En lisant plus tard la loi, quand elle a été
présentée en première lecture, c'est alors qu'on s'est
aperçu que ce ne pouvait être la même personne qui nous
avait expliqué les principes de
la loi et qui l'avait écrite. Si on s'enfarge dans la lecture de
la loi et dans certains articles qui ne reflètent même pas ce
qu'on nous avait dit, je pense honnêtement qu'il ne s'agissait pas de la
même personne.
En effet, on parle ici, comme j'imagine vous en avez déjà
entendu parler aujourd'hui à plusieurs reprises, du problème
suivant: Est-ce qu'on essaie de centraliser tout le pouvoir dans les mains du
ministère de l'Éducation? Est-ce qu'on essaie de se
défaire des commissions scolaires en enlevant tous les pouvoirs avec une
loi, mais sans le dire ouvertement? Les exemples que je pourrais vous apporter
ou que j'aimerais vous apporter sont naturellement multiples. Je me
réfère surtout à ce fameux article 439, où l'on
donne vraiment le pouvoir au ministère, au ministre, en effet,
excusez-moi, d'intervenir dans toutes les actions entreprises dans une
commission scolaire. En effet, pour être réalistes et
cohérents avec la loi, comme elle est écrite aujourd'hui, on
devrait presque vous envoyer chaque résolution que nous adoptons chez
nous, pour qu'elle soit approuvée par le ministre, si on veut être
sûrs - je charrie un petit peu, je suis d'accord - si on veut être
sûrs qu'il n'y aura pas d'intervention, car l'article permet en
même temps d'intervenir dans toutes les résolutions qu'on pourrait
adopter dans une commission scolaire.
L'autre aspect, qui saute aux yeux aussi, c'est qu'on n'a plus de
devoir, on n'a plus de pouvoir chez nous. On a seulement des fonctions. Et
quand on regarde la loi comme telle, et qu'on examine les différents
articles, à partir de l'article 191 jusqu'à 241, on parle
continuellement des fonctions générales des commissions scolaires
et des services éducatifs, ainsi que toutes les différentes
fonctions reliées aux ressources humaines et financières. Encore
là, on se demande: est-ce qu'on va conserver des pouvoirs à ce
sujet ou seulement des fonctions? En effet, les commissaires supposent que la
commission scolaire de l'avenir, telle qu'envisagée par le projet de loi
107, ne sera pas autre chose qu'un fonctionnaire, une exécutrice du
règlement émis par le gouvernement. Comme vous le voyez, M. le
Président, je suis très franc et très précis sur
l'impression véritable qu'on a dans notre commission scolaire. Cela
termine l'intervention, si on veut aller aux points précis.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Sur la
présentation. Alors, je vous remercie M. Morselli, et s'il n'y a pas
d'autres intervenants, je vais immédiatement reconnaître le
ministre de l'Éducation, avec lequel nous allons commencer les
échanges de propos avec les membres de la commission.
M. le ministre de l'Éducation.
M. Ryan: Je voudrais tout d'abord signaler que j'ai
apprécié, dans le mémoire de la commission scolaire
Jérôme-Le Royer, les recommanda- tions précises qui sont
faites concernant les articles nettement identifiés du projet de loi. On
n'est pas nécessairement d'accord avec toutes ces recommandations, loin
de là, mais au moins on a une base précise de discussion. Vous
nous dites: À tel article, on n'aime pas le deuxième
alinéa; tel article, on voudrait qu'il soit enlevé; tel article,
on voudrait qu'il soit précisé dans tel sens. Si nous avions
davantage de temps, nous pourrions faire l'exercice et je pense que ce serait
très constructif. En tout cas, je veux vous dire que chacune des
propositions précises qui sont apportées fera l'objet d'un examen
attentif. Il y en a un certain nombre qui pourront être retenues et il y
en a d'autres, pour lesquelles ce sera plus difficile évidemment, mais
c'est la première remarque que je voulais vous adresser.
Il y en a une deuxième. Je pense que vous soulevez un faux
problème, et je vous le dis en toute franchise, par le mot "fonctions".
C'est le titre d'une section: Fonctions reliées aux ressources
matérielles. Dès que vous entrez dans le texte des articles: la
commission scolaire peut, la commission scolaire fait ceci, la commission
scolaire peut faire ceci... Il reste que quand on dit "peut", "peut" et
"pouvoir", c'est synonyme. Le mot "peut", c'est l'indicatif pour l'infinitif
"pouvoir", à ma connaissance. Alors, on peut bien fendre les cheveux en
quatre, mais à un moment donné, il faut se mettre les pieds
à terre et se rendre compte que les mots, c'est ce que l'on dit dans le
texte de loi. Il y a des endroits où on dit: Elle ne peut pas. Ce sont
des choses qu'elle ne peut pas faire, sans qu'il y ait telle ou telle
condition, mais essentiellement, les articles, si vous les regardez froidement,
traitent de pouvoirs et d'obligations; on ne peut pas faire autrement dans les
textes de loi. Les titres: on met "Fonctions", on pourrait bien mettre
"Pouvoirs et attributions", cela ne changerait pas grand-chose, mais encore une
fois, sur le contenu des articles précis, je voudrais vous poser une
question. Par conséquent, pour tout ce qui regarde les pouvoirs, on ne
peut malheureusement pas engager le débat là-dessus. Il y a des
choses de fond qu'il est nécessaire de maintenir au niveau du
gouvernement et du ministre de l'Éducation. J'aimerais que vous me
disiez comment vous voyez cela. Qu'est-ce qui va rester au ministre de
l'Éducation dans votre conception idéale? Ensuite, je vous
poserai peut-être une deuxième question: Comment va se faire le
partage, par rapport à ce qui existe aujourd'hui? Quels sont les
changements majeurs que vous envisagez pour avoir un meilleur
équilibre?
M. Morselli: C'est normal que nos... Excusez-moi, M. le
Président.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Allez, allez!
M. Morselli: Dans nos recommandations de principe, on dit
clairement, au point 9.2 à la
page 18 de notre rapport, "que le gouvernement et le ministre de
l'Éducation disposent et détiennent les pouvoirs d'orientation et
de contrôle sans être omniprésents dans tous les rouages du
système scolaire".
En effet, on est conscients que les pouvoirs d'orientation et de
contrôle doivent être dans les mains du ministre, mais ce sont
justement par les termes ou par la façon dont la loi est écrite,
qu'on s'aperçoit, pour la première fois, qu'on veut être
presque omniprésents. Je me réfère peut-être encore
à l'article 439. En effet, il y a un article en particulier sur lequel
on s'enfarge. Quand on dit qu'on peut prendre toute décision chez nous,
vous dites qu'on a vraiment tous les pouvoirs et on est d'accord que c'est ce
qu'on dit. D'autre part, on les enlève en disant que le ministre peut
intervenir en tout temps pour changer toute décision d'une commission
scolaire. C'est là-dessus qu'on ne pourrait pas être d'accord.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le
ministre.
M. Ryan: Je suis content que vous souleviez l'article 439, parce
qu'on va apporter des clarifications. Tout d'abord, dans le texte du projet de
loi, il n'est pas écrit qu'il peut intervenir en tout temps. Vous pouvez
bien dire cela sur la place publique, cela va bien. Mais, ce qui est
écrit dans le texte, c'est pendant la tenue d'une enquête ou d'une
vérification. C'est bien différent.
Deuxièmement, nous avons mis cette disposition afin d'adoucir le
pouvoir de tutelle qui est dans le texte de loi. J'ai dit à maintes
reprises depuis le début des audiences de la commission que, si cela
donne lieu aux interprétations dont vous venez de donner l'exemple, on
va être prêts à laisser tomber celui-là. Il n'y a pas
de problème majeur dans ce cas. Cela a été mis pour
adoucir la loi, comme nous la connaissons actuellement. Mais, si c'est
interprété autrement et qu'on préfère, du
côté des commissions scolaires, garder les dispositions actuelles
de la loi, nous n'avons pas d'objection à cela. Cela règle un
gros problème.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui, M.
Morselli.
M. Morselli: Excusez-moi, j'aimerais vous dire merci M. le
ministre, parce que je vous assure que, même en en parlant avec des
collègues d'autres commissions scolaires, c'est vraiment un point qui,
tant qu'il sera là, va susciter un paquet de discussions, comme vous
dites, peut-être inutiles. Je vous comprends. Mais ce serait vraiment
apprécié.
M. Ryan: Seulement un dernier point. Il y a beaucoup d'autres
articles. C'est là-dessus que j'apprécie votre intervention, en
les prenant un par un. Il y a certains articles sur lesquels on va vous faire
des concessions, et il y en a d'autres où on va vous dire: Cela ne
marche pas, pour telle ou telle raison. Je pense que vous allez comprendre
aussi. Mais on va arriver à ce processus au cours des semaines qui
suivront. C'est pour cela que c'est bon qu'on ait des indications. Encore une
fois, j'apprécie la précision de vos recommandations.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le
ministre. Avant de reconnaître le porte-parole de l'Opposition, et par
égard pour nos invités, M. Morselli et ses commissaires, je
requiers le consentement des deux côtés de l'assemblée pour
dépasser 18 heures. Accordé? Alors, madame.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le
président, messieurs, il me fait plaisir de vous accueillir à
cette commission parlementaire. Je me faisais juste la remarque - si vous
permettez que je vous la communique - qu'il n'y a pas beaucoup de femmes chez
vous. J'espère qu'il y en a quelques-unes parmi les commissaires.
Par ailleurs, je trouve que l'exercice que vous avez fait est
extrêmement intéressant. Plus particulièrement,
j'inviterais le ministre à examiner la partie de votre mémoire
qui parle des recommandations techniques et qui identifie de façon
très claire des articles sur lesquels la commission scolaire
souhaiterait avoir les pouvoirs. Je pense à la page 20 de votre
mémoire. Vous dites au point 9.6.2: "Que les commmissions scolaires
conservent leur autonomie dans la détermination des postes à
créer pour chaque classe d'emploi. Advenant que ce nombre de postes
signifierait une dépense totale au-delà du budget
autorisé, que telle dépense soit alors aux frais de la commission
scolaire... Que les dispositions de la nouvelle loi ne soient pas plus
restrictives que celles de l'arrêté en conseil 2380".
La recommandation suivante dit: "Que les commissions scolaires puissent
conserver le droit d'aliéner leurs immeubles à une juste valeur
marchande; que le principe de la division du territoire en commissions
scolaires linguistiques sur l'île de Montréal soit retenu à
la condition qu'un tel principe s'applique à l'ensemble du territoire de
me de Montréal".
Se rapportant au ministre, vous dites: "Que l'article 28 soit
retiré".
Je pense que vous avez là une série de recommandations.
C'est ce que le ministre nous demande et ce, depuis le début. Je suis
assez impressionnée par la qualité de votre mémoire
à cet égard. Si le ministre voulait avoir des réponses, je
pense qu'il les a, elles sont contenues là^dedans. De façon
très nette, vous identifiez à la fois les articles pour lesquels
il devrait y avoir des modifications, et l'ordre des modifications.
Vous dites, à la page 19 de votre mémoire, qu'au lieu de
définir dans la loi les obligations
et les droits des enseignants, que soit assuré l'avènement
d'un code de déontologie du personnel enseignant. Pouvez-vous nous dire
comment vous voyez l'adoption d'un code de déontologie? Ce serait fait
par quelle instance? Actuellement, on n'a pas vraiment, au sens traditionnel du
terme, d'association professionnelle des enseignants qui pourrait
éventuellement se doter d'un code de déontologie. Avez-vous
réfléchi à la façon possible de procéder?
(18 heures)
M. Morselli: Je pense qu'il serait très facile de voir
à inscrire dans une loi les devoirs d'un professeur d'école;
même si cela serait parfois souhaitable, cela pourrait conduire à
d'autres problèmes juridiques. On dit même que c'est le devoir
d'un professeur d'inculquer à un enfant l'amour de... Excusez, le vrai
mot, c'est...
Une voix: Le goût d'apprendre.
M. Morselli: ...le goût d'apprendre. Dans une loi, c'est
très difficile à calculer, comme tel, quand un garçon a
fini d'avoir le goût d'apprendre. C'est pourquoi nous suggérons
plutôt d'avoir un code d'éthique qui, naturellement, pourrait
être prévu par la loi, mais ne pas faire partie d'une loi; un code
d'éthique que, j'en suis sûr et certain, même les
différentes associations syndicales seraient prêtes à
accepter et à faire respecter par leurs membres.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Mme la
députée.
Mme Blackburn: Oui. Dans votre mémoire, vous abordez
brièvement la question touchant la commission scolaire linguistique et
vous ne parlez pas du tout de la partie de la loi relative à la
reconnaissance d'écoles confessionnelles. Ce point a été
ramené à maintes reprises et j'avançais l'hypothèse
suivante en guise de solution, pour garantir que les élèves ou
leurs parents qui choisissent un enseignement moral plutôt qu'un
enseignement religieux et moral puissent s'assurer que leurs droits soient
protégés, au même titre que celui qui veut l'enseignement
moral catholique ou protestant, religieux également: Que en plus du
personnel qui est prévu au sein de la commission scolaire pour s'assurer
que les droits des écoles catholiques ou protestantes soient
respectés on ait en contrepartie du personnel pour veiller au respect
des droits des autres élèves. Comment réagiriez-vous
devant une telle hypothèse? On sait que, dans le règlement du
comité catholique et du comité protestant, on prévoit la
formation de l'enseignant, les encadrements, un certain nombre de
règles. Est-ce qu'il ne serait pas souhaitable qu'on retrouve
sensiblement la même chose en ce qui concerne les personnes
qualifiées pour dispenser l'enseignement moral et les services qui
devraient être offerts à ceux qui choisissent l'enseignement
moral?
M. Morselli: Oui, je pense qu'à ce sujet on est
déjà bien clairs. Quand on a dit qu'on était d'accord pour
une commission scolaire linguistique, c'est bien vrai que chez nous, on n'a
aucun problème. Toutes nos écoles sont reconnues comme
catholiques aujourd'hui. En effet, elles ont déjà un statut
confessionnel. Alors, pour la totalité de nos écoles, on souhaite
toujours avoir un personnel spécialisé pour les différents
enseignements, c'est vrai; et il y a déjà aujourd'hui des
spécialistes en oeuvre pour l'enseignement moral, en ce qui concerne
Jérôme-Le Royer. Est-ce que c'était la réponse
que...
Mme Blackburn: Non, je me demandais quel est chez vous le
pourcentage d'élèves qui demandent l'enseignement moral.
M. Morselli: Pour le pourcentage, je me réfère au
statisticien, à mon directeur général. Quant au
pourcentage, je ne le connais pas par coeur, Mme Blackburn, mais je peux vous
assurer qu'il est très, très bas. En effet, il est presque
inexistant à Saint-Léonard, inexistant à Anjou. Je
parlerais peut-être d'une douzaine d'élèves dans une ville
comme Anjou. On parlerait peut-être d'une vingtaine
d'élèves...
Une voix: De 2 % au total.
M. Morselli: De 2 % au total. C'est déjà
beaucoup.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela inclut le
secondaire et le primaire?
M. Morselli: Oui. Si vous le permettez, M. le
Président...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui, M.
Morselli.
M. Morselli: M. Poirier, notre directeur général
aimerait intervenir au sujet de...
Mme Blackburn: Alors, on a envoyé la bonne ministre.
M. Morselli: ...la première question de Mme
Blackburn...
Mme Blackburn: Le bon candidat.
M. Morselli: ...concernant le code d'éthique pour les
enseignants.
Mme Blackburn: Oui.
M. Poirier (Maurice): Voici. Nous avons pensé placer cet
article sur la table aux fins de discussion, parce que nous trouvons difficile
le fait qu'on définisse dans une loi des droits et devoirs des
enseignants qui sont déjà définis une première fois
dans les conventions collectives.
Alors, jusqu'à quel point, est-ce qu'on ne pourrait pas... Ces
questions sont revenues périodiquement au cours des 20 dernières
années, ces questions de code d'éthique, de code de profession ou
des choses comme cela pour, petit à petit, amener peut-être les
enseignants à ne plus négocier leurs droits et devoirs mais,
à l'instar des différentes professions qui existent dans notre
société, à pouvoir se soumettre, disons, à des
critères, à des modes, à des normes qui seraient reconnus
de part et d'autre pour les enseignants. Et nous trouvons - j'insiste sur ce
que notre président a dit tout à l'heure - nous trouvons
très difficile le fait de "judiciariser" par une loi certains pouvoirs
et devoirs des enseignants.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Mme la
députée.
Mme Blackburn: Vous n'avez pas abordé dans votre
mémoire l'aspect des services complémentaires. On retrouvait dans
la loi 3 une série de services complémentaires que la commission
scolaire devait organiser, devait offrir, parce que parler des services
éducatifs sans en spécifier la nature et le support, cela nous
apparaît un peu vague. Vous n'avez pas abordé cette question.
Est-ce que vous estimez qu'il serait important que la définition des
services complémentaires apparaisse dans la loi, comme c'était le
cas dans la loi 3 ou si, pour vous, c'est superflu?
M. Morselli: Par services complémentaires, on entend les
services de garderie en milieu scolaire, des services semblables,
n'est-ce-pas?
Mme Blackburn: Non, c'était...
M. Morselli: Qu'est-ce que c'est les services
complémentaires dans nos écoles?
Une voix: Les psychologues, les conseils d'orientation...
M. Morselli: Je pense que cela faisait davantage
référence à un service de garderies, à des services
à la population étudiante, n'est-ce pas madame?
Mme Blackburn: C'était dans la loi 3. On retrouvait des
services de promotion des droits et responsabilités de
l'élève, des services de participation de l'élève,
des services d'encadrement et de surveillance, d'orientation scolaire, des
services de santé et services sociaux, des services d'animation, de
psychologie, d'orthophonie et de recherche d'emploi. C'était les
services complémentaires. Alors, on avait une série de services
qui apparaissaient dans la loi, de manière à ce que le
gouvernement soit tenu d'assurer aux commissions scolaires les ressources qui
vont, évidemment, avec la mise en place de tels services. Alors,
c'était là ma question. Est-ce que vous estimez utile de ramener
dans la présente loi une définition de ces services ou si cela
vous semble inutile?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Morselli.
M. Morselli: Vu qu'aujourd'hui tous ces services sont
déjà compris dans le régime pédagogique qui
émane du ministère de l'Éducation, c'est bien normal
qu'ils y soient. On s'aperçoit que c'est toujours le gouvernement qui
inclut ce qu'il y a dans ce qu'on appelle le régime pédagogique,
et qui va aussi se préoccuper de ce que le régime
pédagogique soit respecté chez nous, de sorte qu'il sera aussi
obligé de nous subventionner pour fournir tel ou tel service. Je veux
dire que, normalement, le régime pédagogique est
déjà presque perçu comme une loi, même s'il ne l'est
pas en soi. Je comprends très bien, mais c'est déjà
perçu comme une loi, au moins, qui provient du ministère, sinon
plus de l'Assemblée nationale. Comme tel, on a mentionné qu'on a
compris aussi presque l'inutilité de l'inscrire dans la loi. Chez nous
du moins, personne n'a fait ressortir ce problème.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. D'autres
interventions du côté de l'Opposition?
Mme Blackburn: Bien, j'aurais terminé, M. le
Président. Je voudrais vous remercier infiniment de votre participation
aux travaux de cette commission et vous dire que j'ai presque le goût de
m'excuser un peu parce que cela a été bref. Je voudrais vous
remercier de l'effort de concision, également que vous avez fait en
présentant l'essentiel de vos recommandations. Cela nous a permis, quand
même, d'échanger nos points de vue. Soyez assurés que nous
avons pris connaissance de votre mémoire et, je le rappelle, vos
recommandations, qui touchent de façon très claire et très
précise, plusieurs articles du projet de loi, vont être pour nous
une référence précieuse au moment où on
suggérera au ministre des amendements à son projet de loi. Je
vous remercie.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre de
l'Éducation.
M. Ryan: Justement, parmi les recommandations dont la
députée de Chicoutimi pourrait s'inspirer pour nuancer ses
jugements, j'en trouve une qui regarde les articles 108 et 105, par exemple. Il
y a des problèmes qui se posent depuis de nombreuses années dans
les commissions scolaires en matière d'intégration, par exemple,
des enseignements primaire et secondaire. Il y a des cas qui sont insolubles
actuellement et ce, depuis de nombreuses années. Le projet de loi a
introduit une clé pour les régler
et, à mon agréable étonnement, la commission
scolaire Jérôme-Le Royer a compris ce problème, en fait
mention dans son mémoire et reconnaît qu'il faut une clé.
Elle demande même qu'on l'applique également à l'article
108. Je trouve que c'est réaliste à part cela. C'est pour cela
que ce n'est pas tout de regarder l'énumération. Il faut voir ce
qu'il y a dans les propositions. Parmi les propositions que vous avez faites,
il y en a qui sont réalistes. C'est pour cela que je vous ai dit qu'on
les examinerait une par une. Je pense qu'il y a un souci du bien
général qu'on doit reconnaître. Ce qui m'intéresse,
c'est un souci de la qualité de l'ensemble du système, pas
seulement l'intérêt de la commission scolaire
Jérôme-Le Royer. C'est capital dans le débat que nous
faisons. Si cette dimension est absente, le débat n'a plus sa raison
d'être. Je pense que vous l'avez saisi.
Maintenant, il y a un certain nombre d'autres propositions, comme la
députée le disait tantôt sur l'article 28. L'article 28 est
une affaire de sagesse élémentaire. Si le ministre est saisi
d'une plainte frivole, à sa face même irréaliste, il peut
dire: cette plainte, on y répond tout de suite, on ne s'occupe pas de
cela. Vous demandez que cela soit retiré. Cela a frappé la
députée de Chicoutimi. Mais, moi, cela me frappe moins. Je vous
le dis en toute simplicité. Je pense qu'on pourrait s'entendre
rapidement. De toute manière, ce n'est pas une question majeure. Encore
là, si cela partait, on ne mourrait pas. Il me semble que c'est une
protection élémentaire à donner au ministre. Il faut
penser que réunir un conseil de trois personnes pour examiner une
plainte, cela coûte de l'argent au gouvernement. Rien que pour le former,
cela demande des fois des heures de délibérations. Quand c'est
frivole à sa face même, le ministre devrait être capable de
pouvoir dire: C'est cela. De toute manière, il rend compte de ses actes
devant la Législature et devant une foule d'instances. Ce sont deux
exemples que je prends.
J'en avais un autre. C'est mon dernier exemple. Vous dites: Quand la
commission scolaire procède à une construction à
même ses propres fonds, elle devrait peut-être être
exemptée de soumettre ses plans et devis au gouvernement. Cela a du bon
sens. Ce sont des choses qu'on peut examiner. Ce n'est pas irréaliste du
tout. On voit que cela procède de l'expérience. Maintenant, il
pourrait arriver qu'une commission scolaire riche se donne avec cela une
construction qui va être infiniment plus belle que celle de la
construction scolaire pauvre qui est juste à côté. Il faut
y penser deux fois. Mais, à sa face, la proposition a du bon sens. On
est prêts à l'examiner sérieusement. Ce sont seulement
trois exemples que je prends pour montrer comment c'est diversifié.
C'est un des mémoires qui va le plus dans l'analyse du contenu. Cela
nous invite, autant l'Opposition que le gouvernement, à une
réflexion objective. Je pense que vous nous connaissez assez pour savoir
qu'on est capables de le faire. Je vous remercie infiniment. Cela a
été très agréable. Si cela avait été
plus long, cela aurait été encore plus enrichissant pour tout le
monde.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie.
Nous sommes aujourd'hui le 26 mai et cette commission parlementaire
siège depuis le 3 mai. Conscients qu'on n'a pas terminé notre
mandat, on se voit dans l'obligation, à cause des contraintes de la vie
parlementaire, d'ajourner nos travaux sine die.
(Fin de la séance à 18 h 13)