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Version finale

33rd Legislature, 2nd Session
(March 8, 1988 au August 9, 1989)

Thursday, May 26, 1988 - Vol. 30 N° 17

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur les projets de loi 106 - Loi sur les élections scolaires et 107 - Loi sur l'instruction publique


Journal des débats

 

(Dix heures dix minutes)

Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre, s'il vous plaît!

J'invite les membres de la commission à prendre place. La commission permanente de l'éducation va poursuivre ses travaux. M. le secrétaire, est-ce que nous avons quorum?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le s ecrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Non, M. le Président. Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, s'il n'y a pas de remplacement, je déclare ouverte cette séance de consultation de la commission permanente de l'éducation.

Je rappelle le mandat de cette commission, soit de tenir des auditions publiques dans le cadre de l'étude des projets de loi 106 et 107: Loi sur les élections scolaires et Loi sur l'instruction publique.

Ce matin, les membres de la commission ont le plaisir d'accueillir le Conseil scolaire de I'île de Montréal qui est représenté par son président et qui sera le porte-parole du conseil scolaire pour les besoins de la cause. M. Mongeau, je veux vous remercier au nom des membres de cette commission d'avoir bien voulu répondre à notre invitation et d'être venu nous faire connaître votre point de vue sur ces deux projets de loi qui revêtent une importance très actuelle. On a vécu et on vit, dans la région de Montréal, depuis 1973, une nouvelle forme de nomination des commissaires d'écoles et la Loi sur l'instruction publique sert de base, enfin de guide, au ministère de l'Éducation. Alors, nous avons devant nous un projet de loi qui tâche de modifier certains règlements de ces lois.

La commission a prévu vous entendre durant environ une heure. Nous vous suggérons, libre à vous, ceci est simplement à titre de suggestion, ce n'est pas une directive, de prendre de quinze à vingt minutes pour nous présenter votre mémoire, lequel d'ailleurs a été reçu et lu par les membres de la commission permanente. Après cela, le reste du temps sera réparti en parts égales entre les membres des deux formations politiques avec lesquels vous aurez l'occasion de discuter.

Pour les besoins de l'enregistrement du Journal des débats, M. le président, si vous voulez bien nous présenter les personnes qui vous accompagnent et enchaîner avec la présentation du mémoire du Conseil scolaire de l'île de Montréal.

Conseil scolaire de l'île de Montréal

M. Mongeau (Jacques): M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs les membres de cette commission, j'aimerais d'abord remercier cette commission de permettre au Conseil scolaire de I'île de Montréal de présenter ses vues sur les projets de loi 106 et 107.

Avec moi, ce matin; à ma droite, M. Joel Hartt, vice-président du Conseil scolaire de l'île de Montréal et président de la commission scolaire de Lakeshore, qui a participé à la rédaction de ce mémoire; à ma gauche, Mme Judith Lortie-Hinse de la commission scolaire Sainte-Croix, qui a aussi siégé au comité qui a préparé ce mémoire; Mme Alice Marcotte, présidente de la Commission des écoles catholiques de Verdun; M. Gérard Latreille, délégué de la commission scolaire du Sault-Saint-Louis, qui représente son président, ce matin, qui est en train de préparer son audition pour l'heure du midi; M. Gilles Dion, de la commission scolaire Jérôme-Le Royer, qui représente ici M. Morselli, qui a siégé au comité qui a préparé ce mémoire. À ma gauche, le directeur général du conseil scolaire, M. Raynald Laplante; Me Jean Marcoux, secrétaire général du conseil scolaire; M. Pierre Tougas, conseiller cadre en planification et pédagogie du Conseil scolaire de l'île de Montréal. Vous remarquerez, M. le Président, qu'il y a derrière moi plusieurs membres du conseil scolaire qui se sont déplacés pour cette audition.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Avant que vous commenciez la présentation du mémoire, juste une question d'information. Le document avec la couverture bleue présente-t-il des différences par rapport à celui que vous nous aviez soumis?

M. Mongeau: Pas du tout.

Le Président (M. Parent, Sauvé): II n'y a aucune différence?

M. Mongeau: II n'y aucune différence. Nous avons simplement abrégé un peu pour les fins de la lecture, pour tenter de rentrer dans les 20 ou 25 minutes.

Le Président (M. Parent, Sauvé): D'accord.

M. Mongeau: II n'y a absolument aucune différence.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Nous vous écoutons.

M. Mongeau: M. le Président, en 1972, lorsque le Parlement du Québec a procédé à une première restructuration scolaire de l'île de

Montréal, il reconnaissait explicitement le caractère particulier de l'organisation scolaire dans la métropole. Il importait, afin de tenir compte tant de l'inégalité des revenus des commissions scolaires que des problèmes engendrés par la densité et le pluralisme de la population de Montréal, de chapeauter les huit commissions scolaires nouvellement créées par un organisme de concertation et de planification, le Conseil scolaire de l'île de Montréal.

Le conseil scolaire était chargé spécifiquement d'assurer un équilibre entre les ressources pécuniaires inégales de ses partenaires et leurs besoins particuliers en tenant compte d'efforts fiscaux comparables et de services pédagogiques équivalents. Il était responsable du financement à court et à long terme des commissions scolaires de l'île de Montréal et devenait l'unique gestionnaire de la dette scolaire. Il devait promouvoir la mise en commun de certains services et assurer la planification et le développement du réseau scolaire. Il constituait enfin un carrefour où les partenaires pouvaient se concerter et procéder conjointement au développement scolaire de l'ensemble du territoire.

Pour ce nouvel organisme, le défi était de taille. La diversité dans la richesse relative de ses partenaires, la disparité de leur taille et, partant, de leurs besoins et de leurs attentes, et l'isolement traditionnel des communautés scolaires selon leur religion et leur langue constituaient autant d'embûches.

Organisme original et unique au Québec, le conseil scolaire devait créer des modèles d'intervention nouveaux et acceptables par les huit commissions scolaires de I'îIe de Montréal dans le respect de leur autonomie respective. Il devait susciter des consensus malgré les divergences d'intérêts locaux et amener ses partenaires à accepter ses interventions dans un esprit de collaboration où chacun devenait de plus en plus conscient des avantages de ces mises en commun et de ces échanges. Quinze ans plus tard, nous croyons pouvoir affirmer que la création du conseil scolaire, pièce fondamentale de la restructuration scolaire de I'île de Montréal, a été bénéfique, et pour la collectivité montréalaise et pour l'ensemble du Québec. Voyons comment.

Sur le plan du financement des commissions scolaires, l'intervention du conseil scolaire a permis des économies substantielles. Au chapitre des emprunts à long terme, par exemple, le conseil scolaire a réussi à s'imposer et à se créer une réputation enviable dans les milieux financiers canadiens et étrangers. Ainsi, grâce à son excellente cote de crédit, le conseil a financé à long terme les dépenses d'immobilisation du système scolaire de l'île en émettant pour plus de 500 000 000 $ d'obligations à des conditions plus qu'avantageuses.

Sur le plan du financement à court terme, le conseil scolaire, par ses transactions sur le marché monétaire, a réalisé depuis neuf ans des économies de près de 8 000 000 $ au profit du système scolaire. En effet, à cause des sommes d'argent importantes qu'il administre, le conseil peut, grâce à son accès au marché monétaire, financer le système scolaire à un taux inférieur au taux préférentiel des banques.

Enfin, au chapitre de la perception de la taxe scolaire, les vérifications très serrées effectuées par le conseil scolaire depuis 1978 ont permis de récupérer un montant de plus de 10 000 000 $.

La présence d'un organisme régional pour-I'île a permis de répartir le fardeau fiscal de façon égale entre tous les contribuables. Plus important encore, cependant, est le rôle majeur joué par le conseil scolaire quant au partage et au revenu des taxes scolaires. On pense ici, principalement, aux mesures de rattrapage en milieux défavorisés où le conseil a consacré près de 52 000 000 $ depuis 1973 pour améliorer l'éducation des enfants de ces milieux et aux allocations pour fins de recherche et de développement en pédagogie, principalement dans les secteurs de la défavorisation de l'orthopédagogie et de l'adaptation des enfants immigrants à l'école du Québec.

Dans le domaine des investissements, une des réalisations les plus significatives du conseil scolaire a été d'obtenir du ministère un budget annuel global décentralisé, géré par le conseil et ses partenaires, pour les dépenses d'investissements relatives aux propriétés actuelles. Ce sont les commissions scolaires, le conseil agissant comme coordonnateur, qui déterminent annuellement les modalités de partage de cette enveloppe globale selon des critères qui sont propres au milieu métropolitain de Montréal et qui tiennent compte des besoins diversifiés et des possibilités largement inégales des partenaires. L'équité dans le partage des revenus ne s'est donc pas manifestée seulement pour les budgets d'opération.

Trop souvent, les politiques visant l'abolition ou la réduction des inégalités n'aboutissent qu'à un nivellement par la base. Aussi le conseil scolaire s'est-il assuré que sa coordination et ses interventions servent à étendre à l'ensemble de l'île des initiatives de l'une ou l'autre des commissions scolaires. Ainsi en a-t-il été de la politique alimentaire que le conseil scolaire adoptait et implantait dans chacune des commissions scolaires de l'île à partir d'un modèle déjà expérimenté à la Commission des écoles catholiques de Montréal. Il en fut de même lorsque le conseil étendait à l'ensemble des commissions scolaires l'octroi de subventions pour des suppléments alimentaires dans les écoles de milieux défavorisés.

C'est dans cette même perspective de partage des expériences et des initiatives que le conseil scolaire décidait de former des comités de coordination ou de réflexion en enseignement professionnel, en éducation interculturelle, en micro-informatique scolaire, en transport scolaire, en alimentation, etc.

Ce dont le conseil scolaire peut toutefois

s'enorgueillir le plus, c'est d'être devenu un lieu privilégié de rencontres et d'échanges où les commissions scolaires de l'île, nonobstant leur taille ou leur religion, leur culture et leur langue, ont pu se connaître, se parler, se comprendre et se respecter. Depuis quinze ans, elles ont appris à collaborer et à partager leur expérience et leur savoir-faire, aussi bien au niveau des commissaires qu'à ceux de l'administration et de la gestion pédagogique.

Lorsqu'un projet est étudié au conseil scolaire, il est presque toujours le produit d'une concertation des représentants de chacune des commissions scolaires qui ont analysé ensemble la problématique et ont élaboré conjointement une ou des hypothèses de solutions qui cherchent à concilier les préoccupations individuelles et le bien général de la communauté scolaire montréalaise.

En concertation avec les commissions scolaires de son territoire, le conseil scolaire a mis au point une formule d'auto-assurance des biens des commissions scolaires, qui a connu un tel succès qu'elle a été prise en charge par le ministère de l'Éducation et étendue à l'ensemble du système scolaire du Québec. Il a également établi un régime commun de gestion des risques, qui est une forme d'auto-assurance en matière de responsabilité civile, et un système d'achats coopératifs des biens de grande consommation qui permettent chaque année des économies substantielles pour les commissions scolaires de l'île.

Dans le domaine de la micro-informatique scolaire, le conseil scolaire a permis à sept des huit commissions scolaires de l'île de se doter d'un centre régional de développement des applications de la micro-informatique à des fins éducatives. Premier du genre au Québec, ce centre a contribué depuis trois ans à encourager l'intégration du micro-ordinateur au processus d'apprentissage des élèves tout en collaborant étroitement avec le ministère de l'Éducation sur le plan de la production et de l'évaluation des logiciels, de la recherche et du développement d'une instrumentation pédagogique. De même, le conseil scolaire a accepté que ses avocats soient mis à la disposition des commissions scolaires permettant ainsi à ces dernières d'obtenir les services d'un personnel spécialisé en droit scolaire.

Depuis 1975, et en collaboration avec ses partenaires, le conseil scolaire a établi et révisé annuellement un plan quinquennal qui prévoit un étalement des dépenses d'investissements. Ce plan a permis entre autres au conseil, compte tenu des besoins exprimés par les commissions scolaires, de ses contraintes financières et des critères de priorité acceptés par tous les partenaires, de prévoir un calendrier de réalisation des projets de construction qui soit à la fois réaliste et équitable pour chacune des commissions scolaires de l'île.

Il en a été de même sur le plan de l'utilisation rationnelle des bâtiments. Dans un milieu à grande densité de population comme celui de l'île de Montréal, on se rend vite compte que les frontières et les territoires sont souvent artificiels quand vient le temps de planifier l'utilisation des équipements scolaires. Ainsi, le conseil scolaire a-t-il pu jouer un rôle important en incitant les commissions scolaires à adopter un plan réseau d'écoles qui tient compte à la fois des besoins à moyen et à long terme de leur population, de leurs équipements et de ceux des commissions scolaires dont les territoires se chevauchent ou sont contigus, et aussi en aidant à résoudre certains problèmes d'utilisation de bâtiments scolaires qui ont surgi à l'occasion entre deux commissions scolaires ayant des frontières contiguës ou des territoires communs.

Dans ce même domaine, le conseil scolaire et les commissions scolaires se sont doté d'une politique de vente et de location des biens immobiliers inutilisés qui, tout en étant profitable financièrement aux commissions scolaires, a diminué le niveau d'emprunt du conseil de près de 51 000 000 $ depuis 1973.

Enfin, dans le domaine de la formation professionnelle, le conseil scolaire, grâce au soutien d'un comité de coordination formé de responsables de l'enseignement professionnel des commissions scolaires de l'Ile, a, depuis sa création, planifié le développement de cette formation sur IHe de Montréal. En 1979, le conseil adoptait un plan de développement de l'enseignement professionnel sur l'île de Montréal et a contribué largement aux débats qui ont eu cours pendant les différentes phases de l'élaboration de la politique ministérielle en cette matière.

Avec les années, le conseil a cheminé et modifié son style d'action, si bien qu'il a trouvé sa voie: arriver à être un organisme de soutien à l'endroit des commissions scolaires beaucoup plus qu'un organisme d'autorité. Si on examine ses agissements tout au long des années, on constate que, en dehors des domaines où la loi lui imposait des devoirs stricts, le conseil scolaire a graduellement évité d'imposer sa loi aux commissions scolaires, d'une part, en recherchant des consensus avant d'agir et, d'autre part, en offrant des services auxquels les commissions scolaires pouvaient librement adhérer.

Ce cheminement du conseil scolaire l'a amené, dans son mémoire sur le projet de loi 3, à proposer lui-même au législateur de lui retirer d'importants pouvoirs. Le conseil scolaire en était là dans son cheminement lorsque, en décembre 1984, la Cour suprême, dans un jugement concernant la Loi sur la fiscalité municipale, est venue rappeler au gouvernement du Québec qu'un certain nombre de droits des commissions scolaires confessionnelles étaient protégés par la constitution canadienne et qu'on ne pouvait impunément mettre des entraves à ces droits.

Comme le conseil scolaire détenait des pouvoirs de réglementation assez étendus à

l'égard des huit commissions scolaires de son territoire, le législateur s'est dit que la meilleure façon de régler le problème serait de ne permettre désormais au conseil d'exercer de rôles à l'égard des deux commissions scolaires confessionnelles que si celles-ci étaient d'accord. C'est ce qu'il a fait par les lois 29 de 1985 et 24 de 1986 qui n'ont laissé au conseil de pouvoir de réglementation à l'égard des deux commissions scolaires confessionnelles qu'en matière de milieux défavorisés.

Ainsi, depuis 1985, le conseil scolaire est formé de deux classes de commissions scolaires: les six commissions scolaires qui sont des membres à part entière et astreints à toutes les prescriptions de la loi et à toutes les règles que le conseil lui-même s'est données au cours des ans et d'autre part, les deux commissions scolaires confessionnelles qui sont en quelque sorte des membres honoraires qui ne sont astreints, abstraction faite des milieux défavorisés, qu'aux règles qu'ils veulent bien accepter.

Pour être équitable, le législateur a toutefois prévu, dans sa loi 29 de 1985, que les représentants des commissions scolaires confessionnelles à la table du conseil scolaire ne voteraient désormais que "sur les matières pour lesquelles la présente partie donne compétence au conseil sur ces commissions scolaires confessionnelles". Après deux classes de commissions scolaires, il créait deux classes de membres du conseil.

Ces deux sortes de "membership" ont des répercussions très concrètes autour de la table des délibérations du conseil scolaire. Les représentants désignés par la Commission des écoles catholiques de Montréal et la Commission des écoles protestantes du grand Montréal votent sur moins de la moitié des sujets inscrits à l'ordre du jour des réunions. Ils en sont frustrés. Leurs collègues des autres commissions scolaires ne sont guère plus heureux, car ils sont enclins à voir dans les délégués des deux commissions scolaires confessionnelles des gens qui ne s'associent à eux que pour tout dossier dont ils peuvent tirer profit.

Au surplus, cette frustration a conduit les deux classes de commissions scolaires à faire connaître, chacune à sa façon, son mécontentement au ministre de l'Éducation. Certaines commissions scolaires, s'attaquant au pouvoir que la loi actuelle donnait au conseil, demandaient de réduire l'influence de ce dernier. D'autres commissions scolaires exigeaient, au contraire, un raffermissement du rôle joué par le conseil. Cette situation est parvenue aux oreilles du législateur qui a imaginé une solution pour mettre tous les membres du conseil sur le même pied et pour satisfaire aux exigences de certaines commissions scolaires: réduire à presque rien le rôle du conseil. C'est, à toutes fins utiles, ce que propose le projet de loi 107.

En effet, si on examine le projet de loi 107, on constate qu'en plus d'enlever au conseil scolaire tout pouvoir à l'égard des budgets des commissions scolaires, de leurs projets de construction, de leurs achats ou ventes d'immeubles et de toutes leurs décisions relatives à leurs immeubles - ce avec quoi le conseil est parfaitement d'accord - ce projet de loi a les effets suivants: Le conseil scolaire continue de percevoir la taxe, mais il n'a plus aucune discrétion sur la façon d'en répartir le produit entre les commissions scolaires; le financement à court terme des besoins d'une commission scolaire, confessionnelle ou pas, n'est effectué qu'avec l'accord de la commission scolaire; le conseil scolaire peut pourvoir à la planification du développement des commissions scolaires à condition qu'elles soient toutes d'accord sur les matières que le conseil scolaire peut planifier; le conseil scolaire peut aussi organiser des services communs au profit des commissions scolaires à condition que, là aussi, elles soient toutes d'accord sur les services que le conseil scolaire peut mettre sur pied; le conseil scolaire ne peut utiliser la taxe scolaire pour apporter une aide particulière aux commissions scolaires qui doivent fournir un soutien à la population scolaire défavorisée que s'il adopte un taux de taxe plus élevé à cette fin, après consultation de la population par référendum.

En somme, en réduisant les fonctions du conseil scolaire à l'égard de toutes les commissions scolaires, le projet de loi 107 place les six commissions scolaires autres que la Commission scolaire des écoles catholiques de Montréal et la Commission des écoles protestantes du grand Montréal dans une situation de presque égalité avec ces dernières. (10 h 30)

Dès lors, les commissions scolaires étant toutes égales ou presque, il n'y a plus lieu de faire des distinctions entre les droits de vote des représentants des commissions scolaires confessionnelles et des représentants des autres commissions scolaires à la table du conseil. Les deux classes de membres du conseil sont abolies. La solution est ingénieuse, mais il y a un hic. Le projet de loi 107 règle un problème de procédure, mais crée un problème de fond: Comment ce nouveau conseil scolaire, dépouillé de presque toutes ses fonctions, pourra-t-il continuer à jouer le rôle qu'il a joué jusqu'ici et qui, comme en témoigne la première partie de cette présentation, est un rôle de première importance? Qu'on ne se méprenne pas ici sur les visées du conseil scolaire. Celui-ci ne cherche pas les moyens d'imposer sa loi aux commissions scolaires. Il demande seulement que la loi lui donne les moyens de continuer sa mission dans les domaines où l'expérience a révélé qu'il pouvait apporter un soutien important aux commissions scolaires.

La vision du conseil que nous offre le projet de loi 107 est tellement loin de son fonctionnement réel qu'on en est totalement décontenancés. Ce n'est pas ainsi que le conseil

exerce son rôle et ce n'est pas ainsi, croyons-nous, qu'il devrait l'exercer.

Qu'on nous permette de mettre ici en parallèle le vécu du conseil scolaire et la pâle image de ce dernier que nous propose le projet de loi 107. En matière de financement à court terme, actuellement, le conseil scolaire assure le financement à court terme des dépenses quotidiennes des commissions scolaires par le recours à un consortium bancaire et aussi au marché monétaire auquel il est le seul organisme scolaire à avoir accès. En plus de libérer les commissions scolaires de tout souci à l'égard de leurs besoins quotidiens de liquidités, ce système permet de réaliser des économies annuelles de centaines de milliers de dollars. Depuis la loi 29 de 1985, les deux commissions scolaires confessionnelles ne recourent à ce service que si elles concluent une entente à cet égard avec le conseil, ce qu'elles ont toujours fait jusqu'à maintenant. Cette option constitue néanmoins une menace pour la stabilité de ce système de financement.

Le projet de loi 107 accentue la menace de déstabilisation en permettant à chaque commission scolaire, confessionnelle ou non, de se soustraire à ce système de financement.

En matière de péréquation des ressources financières, actuellement, le conseil scolaire utilise une partie du produit de la taxe scolaire pour permettre à certaines commissions scolaires de faire face à des charges particulières comme c'est le cas, notamment, du soutien que certaines d'entre elles doivent apporter à leurs élèves de milieux défavorisés. Il partage aussi, selon les besoins, une allocation annuelle du ministre de l'Éducation destinée aux réparations et à l'entretien des écoles.

Le projet de loi 107 édicté que le produit de la taxe sera distribué sur une même base entre les huit commissions scolaires, ne laissant ainsi au conseil scolaire aucune marge de manoeuvre pour apporter une aide particulière quelconque à une commission scolaire. Quant au partage de l'allocation destinée à l'entretien et aux réparations des écoles, le conseil n'a plus aucun rôle à jouer.

Le projet de loi, il faut le dire, laisse la possibilité au conseil scolaire d'imposer un taux de taxe plus élevé que le plafond fixé par la loi, pour venir en aide aux commissions scolaires qui comptent des élèves défavorisés. Mais le taux de la taxe est alors assujetti à un référendum. Le pouvoir de taxation additionnelle devient dès lors bien aléatoire et, si l'on considère le coût d'un référendum, bien illusoire aussi.

En matière de services communs, actuellement, le conseil scolaire peut mettre sur pied des services au bénéfice des commissions scolaires. Il doit consulter les commissions scolaires pour ce faire, mais il n'est pas nécessaire qu'il obtienne leur consentement unanime. C'est le cas, par exemple, du régime de gestion des risques auquel six des huit commissions scolaires participent, du système d'achats coopératifs auquel participent, à divers degrés, les huit commissions scolaires et du centre de microinformatique auquel recourent sept commissions scolaires.

Comme on le voit, les commissions scolaires ne sont pas tenues d'utiliser les services institués par le conseil scolaire. Au surplus, si un service requiert une contribution financière du conseil, comme c'est le cas, par exemple, du système de gestion des risques pour lequel le conseil a dû créer un fonds, les commissions scolaires qui ne participent pas reçoivent une compensation financière.

Le projet de loi 107 ne permet la mise sur pied de services communs qu'avec le consentement unanime des huit commissions scolaires. Il suffit donc qu'une seule commission scolaire s'oppose à l'institution d'un service pour contrecarrer la volonté des sept autres commissions scolaires qui souhaitent un tel service.

En matière de planification, actuellement, le conseil scolaire joue un rôle important en ce qui concerne les équipements scolaires, comme on l'a dit plus haut. Le projet de loi 107 traite la planification comme les services communs: il n'en sera fait que si toutes les commissions scolaires y consentent. On peut dès lors prédire assez facilement qu'il n'y aura plus de plan quinquennal, ni, non plus, de planification par le conseil et ses partenaires en matière d'enseignement professionnel.

En résumé, le projet de loi 107 vide la conseil scolaire de sa substance. Il ne fait même pas allusion à son important rôle de concertation dont on fait état plus haut. Il témoigne d'une profonde méconnaissance des fonctions véritables du conseil, de la même façon que le faisaient le projet de loi 40 de 1983, qui ne lui laissait le soin que de gérer une partie de la dette obligataire des commissions scolaires, et la défunte loi 3 qui, un peu comme le projet actuel, ne lui laissait comme prérogatives que la fixation du taux de taxe et la poursuite de sa mission de rattrapage en milieux défavorisés, sans même, cette fois-ci, lui donner les moyens financiers de le faire.

Ce projet de loi est tout aussi déconcertant et frustrant que l'étaient les deux projets antérieurs, car il rejette du revers de la main le rôle joué par le conseil au cours des quinze dernières années pour amener ces huit partenaires à façonner et à développer ensemble de nouveaux styles de gestion, selon la mission que le législateur lui avait confiée en 1972.

La voie suivie par le gouvernement dans le projet de loi 107 est-elle la seule possible? N'est-il pas possible de faire du conseil un organisme qui répond aux attentes de toutes les commissions scolaires sans réduire son rôle à peu de choses? Cela nous paraît possible, effectivement. Revoyons donc, une à une, à nouveau, les fonctions que devrait exercer le conseil scolaire en nous demandant comment il pourrait exercer chacune d'elles de la même façon à l'égard des

huit commissions scolaires de son territoire.

À première vue, il ne nous paraît pas que le pouvoir d'emprunt des commissions scolaires confessionnelles est un pouvoir protégé par la constitution canadienne, car ce n'est pas un pouvoir que détenaient, au moment de l'Union, les classes de personnes mentionnées à l'article 93 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. À cet égard, les lois 29 et 24 nous paraissent être allées trop loin en permettant aux deux commissions scolaires confessionnelles de contracter elles-mêmes leurs propres emprunts. Si notre point de vue est juste, la loi pourrait, dès lors, accorder au conseil scolaire le pouvoir exclusif d'emprunter, tant à long terme qu'à court terme, pour tous les besoins des huit commissions scolaires de son territoire dont les représentants auraient désormais, à cet égard, un droit de vote égal autour de la table du conseil.

Pour tirer la chose au clair, le ministre de l'Éducation pourrait, croyons-nous, soumettre cette question à la Cour d'appel en même temps que les autres questions qu'il se propose de soumettre à cette cour relativement au projet de loi 107 et aux droits des commissions scolaires confessionnelles.

Concernant la péréquation des revenus, la loi devrait permettre au conseil scolaire d'utiliser une partie du produit de la taxe ou de ses surplus pour venir en aide aux commissions scolaires qui comptent des élèves de milieux défavorisés ou même à celles qui doivent, occasionnellement, faire face à des dépenses inhabituelles, par exemple, pour l'intégration des nouveaux immigrants ou pour l'organisation des élections scolaires qui représentent des charges très inégales d'une commission scolaire à l'autre.

La distribution des revenus selon les besoins est une importante fonction de justice sociale dont le conseil scolaire a toujours usé modérément et qui ne porterait pas atteinte aux droits constitutionnels de la Commission des écoles catholiques de Montréal et de la Commission des écoles protestantes du grand Montréal, à la condition que, comme l'a dit la Cour suprême, celles-ci conservent le pouvoir d'imposer une surtaxe. Encore ici, les délégués des huit commissions scolaires pourraient avoir un droit de vote égal. Ici, comme pour le financement, il y aurait lieu de s'adresser à la Cour d'appel pour faire établir si le conseil scolaire a une certaine discrétion pour répartir le produit de la taxe compte tenu des droits constitutionnels des commissions scolaires confessionnelles.

La loi devrait prévoir que le conseil scolaire peut instituer des services communs sans qu'il ne soit nécessaire d'obtenir l'accord unanime des commissions scolaires, chaque commission scolaire étant libre de recourir à ces services. Ici ne se poserait pas le problème de savoir si la loi porterait atteinte aux droits des commissions scolaires confessionnelles puisque celles-ci ne seraient pas tenues de recourir à ces services.

En matière de planification, nous référons les membres de cette commission parlementaire à notre mémoire où nous expliquons que, si la loi précisait suffisamment bien le rôle du conseil scolaire, il n'y aurait aucun risque de porter atteinte aux droits constitutionnels des commissions scolaires confessionnelles.

En conclusion, le projet de loi 107 tente de régler le problème de procédure relié au droit de vote et de répondre aux griefs exprimés par certaines commissions scolaires de l'île en utilisant une méthode de nivellement par le bas qui enlève, à toutes fins utiles, toutes ses fonctions au conseil scolaire. La proposition que nous formulons dans notre mémoire est tout autre et ferait d'une pierre deux coups. D'abord, la loi présenterait le conseil scolaire non seulement comme il est réellement à plusieurs égards, mais aussi et surtout comme un organisme susceptible de répondre aux attentes de toutes les commissions scolaires de ITle de Montréal, c'est-à-dire essentiellement comme un organisme de services et de concertation.

Les questions posant problèmes, particulièrement les pouvoirs du conseil en matière d'emprunts et de répartition du produit de la taxe, seraient soumises à la Cour d'appel. Ensuite, la proposition du conseil scolaire, en donnant un droit de vote égal à tous ses membres, ferait disparaître les deux classes dans les commissions scolaires de membres du conseil qui ont été à la source de tant de frustrations.

Si d'aventure on jugeait irrecevable la vision du conseil scolaire que propose le présent mémoire, le statu quo nous paraîtrait de loin préférable à la solution que propose le projet de loi 107. Les tiraillements qui entourent la conclusion d'ententes entre le conseil et les commissions scolaires confessionnelles et les situations ambiguës que crée le régime des droits de vote inégaux des membres du conseil nous paraissent encore préférables à cet organisme sans âme que propose le projet de loi 107. Voilà, M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs de la commission, les vues du conseil scolaire à l'égard du projet de loi 107.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci beaucoup, M. Mongeau, pour le mémoire que vous venez présenter aux membres de la commission. Je vous rappelle que le reste du temps sera réparti également entre les deux formations politiques, de façon à pouvoir discuter avec vous et avec les personnes qui vous accompagnent. Dans un premier temps, je reconnais le ministre de l'Éducation. M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, j'ai pris connaissance avec beaucoup d'intérêt du mémoire du Conseil scolaire de l'île de Montréal. Je ne pense pas qu'il y a beaucoup de différence entre ce qui nous a été lu ce matin et le texte que nous avions reçu; c'est à peu près la même chose, j'imagine. J'ai suivi avec le texte que j'avais

annoté au cours de la lecture que j'en ai faite avant la séance. Le sujet de la discussion, ce matin, c'est le Conseil scolaire de l'île de Montréal, c'est ce dont le mémoire traite et on va s'en tenir à cela.

Il y a un gros problème. À mon point de vue, le problème de fond se pose comme ceci. J'en viens tout de suite au coeur de la question. Comme son nom l'indique, le conseil scolaire existe pour toute l'île de Montréal, c'est-à-dire pour toutes les commissions scolaires et pour toutes les clientèles scolaires de l'île de Montréal. Or, des problèmes ont surgi concernant les deux commissions scolaires principales de l'île de Montréal, sur le plan numérique: la Commission scolaire des écoles catholiques de Montréal et la Commission des écoles protestantes du grand Montréal, lesquelles représentent à elles seules 62 % de la clientèle scolaire de l'île de Montréal.

Comme je vous l'ai souvent dit, M. le Président, il est difficile pour le gouvernement d'accepter le statu quo dans une situation où des décisions sont prises par des délégués qui représentent 38 %, dans la meilleure des hypothèses, à supposer qu'ils soient unanimes, tandis que les autres 62 % sont soit laissés à la porte, soit en désaccord. Je pense que ce qui a envenimé les choses au cours de la dernière année, c'est la décision que vous avez prise d'interpréter de manière privative certaines dispositions de la loi 29, quand vous avez décidé que les représentants des deux commissions scolaires confessionnelles n'avaient pas le droit de vote, sauf sur les questions où ils étaient immédiatement engagés. En particulier, si j'ai bien compris, on leur a enlevé le droit de vote pour le choix des dirigeants de l'organisme. Il y avait un choix à faire: Est-ce qu'ils en font partie ou est-ce qu'ils n'en font pas partie? Eux considèrent qu'ils en font partie, sauf pour les questions où ils décident de s'exclure, en vertu de leurs privilèges constitutionnels. Vous avez conclu - je parle de la présidence et de ceux qui sont solidaires de la présidence - qu'ils n'en faisaient pas partie, sauf pour les questions autour desquelles ils décident d'en faire partie. Cela amène des conséquences considérables.

Dans l'une ou l'autre hypothèse, le gouvernement ne peut pas se satisfaire d'une situation comme celle-là. Il fallait clarifier des choses. Il faut clarifier les choses à partir d'une hypothèse de solution qui essaie de tenir compte de l'ensemble de la réalité scolaire de l'île de Montréal, c'est-à-dire non seulement des commissions scolaires que vous représentez plus immédiatement, mais aussi des autres. Si on n'est pas capable de réaliser cette équation, c'est qu'il y a un problème autour du conseil scolaire, qu'on veuille l'admettre ou non. À ce moment-là, c'est le devoir des dirigeants politiques de chercher des solutions. Il y a un problème très aigu. (10 h 45)

Nous avons cherché la solution dans la voie suivante: En ce qui touche la composition du conseil, nous n'y touchons point, sauf en ce qui regarde la nomination de trois personnes nommées par le gouvernement. Nous faisons disparaître ces trois personnes, nous n'avons pas d'intérêt à essayer de mettre la patte sur le conseil, d'aucune espèce de façon. Contrairement à bien des légendes qu'on essaie de créer, ce n'est pas du tout l'intention de ce projet de loi à l'endroit des commissions scolaires, entre parenthèses. Il y a des représentations qui nous ont déjà été faites indiquant que ce serait bon qu'il reste des personnes nommées par le gouvernement. Nous n'avons pas d'objection. C'est une chose qui peut être envisagée. Mais là nous pensons que c'est l'affaire des commissions scolaires de Montréal; on leur laisse leur affaire. Alors, là-dessus il ne devrait pas y avoir de problème. Sauf un, vous dites à la fin: Donner un droit de vote égal à tous ses membres. Là vous voulez dire les membres individuels, pas les membres corporatifs, j'imagine? Quand vous dites "un droit de vote égal à tous ses membres", est-ce que vous voulez dire un vote par commission scolaire ou un vote par délégué de commission scolaire?

M. Mongeau: Un vote par délégué. Ce sont les membres qui siègent au conseil.

M. Ryan: Si on s'entend, c'est ce que nous proposons dans le projet de loi. Il n'y a pas de différence entre nous, sauf une nuance à laquelle j'en viens très rapidement.

Maintenant, si on regarde les fonctions. Nous laissons le pouvoir d'emprunt à long terme. À court terme, on se dit: S'il y en a qui veulent à court terme, ils pourront le faire. Mais à long terme en tout cas c'est cela qui est important. C'est la base. On le laisse de ce côté. Et les deux commissions scolaires confessionnelles nous ont déjà assurés qu'elles acceptaient cette fonction du conseil. Par conséquent, je ne pense pas qu'il devrait y avoir de chicane là-dessus. Vous dites qu'il faudrait peut-être le faire déterminer par la Cour d'appel. On va examiner cette possibilité. Selon l'avis de nos conseillers, cela a déjà été réglé par la Cour d'appel. Quand la Cour d'appel a statué qu'on ne pouvait pas imposer de contraintes sur le pouvoir de dépenser des commissions scolaires, nous comprenons que, si on voulait imposer des contraintes par le biais de l'emprunt, cela reviendrait au même et que la question était décidée en principe. Mais s'il y a un complément de mémoire que vous voulez nous adresser pour étayer davantage votre point de vue là-dessus, on n'a pas d'objection à l'examiner. Et nous n'irons pas à la Cour d'appel avec l'idée d'exclure des questions qui ne seraient pas claires. Notre idée est plutôt contraire. De ce côté-là, je pense que, s'il y a des éléments de preuve qui nous sont apportés à partir de l'analyse du jugement de 1984, je pense que cela pourra être intéressant. Alors, quant à

ce pouvoir-là, je pense qu'il n'y a pas trop de problème. Le pouvoir de taxation reste là.

Le rôle de rattrapage en matière d'éducation dans les milieux défavorisés reste là, en tout cas, à l'état de principe. La modalité est mise en question par vous. La modalité peut faire l'objet de discussion. Il y a une modalité qui est indiquée dans le projet de loi. Ce n'est pas une vérité d'évangile. Ce sont des choses qui sont sujettes à discussion.

Il y a les services de soutien. J'en viens à l'article 399. Ici dans le projet de loi, c'est écrit "fournit, après entente, des services de soutien technique aux commissions scolaires de l'île de Montréal. " Quand on a mis "entente", c'est parce qu'on ne voulait pas mettre la règle de l'unanimité ici. Cela peut être formulé autrement. Il y a peut-être un défaut de formulation ici. C'est une chose qui est tout à fait négociable. Maintenant, en ce qui concerne les fonctions de planification, cela touche aux pouvoirs mêmes qui sont inhérents à la nature de chacune des commissions scolaires concernées. Nous établissons que cela devrait faire l'objet d'une volonté unanime des commissions scolaires concernées. Il nous apparaît que c'est la règle la plus sage pour que les deux plus grosses n'écrasent pas les plus petites et pour que les plus petites, non plus, n'écrasent pas les deux plus grosses par des subterfuges ou des ruses, ou agissent dans leur dos ou en leur absence. Or, c'est la règle qui nous est apparue la plus sage pour ces fonctions.

Mais je pense que c'est une invitation à rétablir le climat de compréhension, de respect mutuel et de collaboration nécessaire pour que des choses puissent se faire ensemble. Je tiens à vous dire bien clairement que, s'il n'y a pas participation des deux commissions scolaires principales, il n'y a pas de choses vitales autres que celles qui sont indiquées clairement dans le projet de loi, que le gouvernement serait disposé à confier au conseil scolaire de l'île, actuellement. Il faut qu'on règle ce problème-là. Il y en a une partie qu'on règle tout de suite, ce qui est vraiment nécessaire. Quant à l'autre partie, on laisse la porte ouverte à la collaboration et au respect mutuel. Il y a peut-être d'autres règles que celle proposée ici. Mais la simple règle de majorité, surtout comme elle a été interprétée depuis une couple d'années, dans le sens de "no can do". Je pense que c'est une chose qu'aucun gouvernement sérieux ne pourrait accepter.

Maintenant, je voudrais peut-être poser une question à M. Hartt pour commencer. Je pense que M. Hartt est vice-président du conseil. Vous m'avez écrit au mois de mai avec le président de la Commission des écoles catholiques de Montréal et le président de la Commission des écoles protestantes du grand Montréal, m'indiquant que vous seriez prêts à consentir des pouvoirs en matière d'emprunt à long terme et de taxation pour le conseil scolaire de l'île. Cela finissait là. Quelle est votre position ce matin? Est-ce que vous endossez entièrement le mémoire du conseil scolaire de l'île? Est-ce que vous vous dissociez de cette lettre que vous m'avez adressée ou si tout cela peut se marier ensemble?

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Hartt.

M. Hartt (Joel): I anticipated your question, Mr. Minister, and I made a few notes to respond to it. As you know probably better than I do, many things change in politics. From time to time, a group may be in favor of the Meech Lake accord and then may switch its position, or vice versa, may be in favor of free trade and then may switch its position, as it happened recently, when certain problems arised. I would just like to respond on two points this way.

The Lakeshore School Board, which I am chairman, still seeks its protected status. We believe we should have the same status as the CECM and the PSBGM. We noted that the government is not going to recognize us in giving us this protected status and therefore, as you know, we have decided to go to court. We expect to win our court case, Mr. Minister. We have been advised very well by several constitutional lawyers that we have exactly the same rights as the two boards said to be confessional. Until then, and now I am getting to answer your question, until then, we are members of the Island Council whether we like it or not. Our board's interests are better served by cooperating with the Island Council and the Lakeshore School Board has decided to work with the Island Council until we win our court case. That being the case, we have decided to take a very active position with the Island Council to try, at the negotiating table with the Island Council, to work out our differences, to seize on the opportunity afforded by the Island Council which sees itself as a group committed to cooperation among the boards, to work within that group to see if we can negotiate our positions. So, I think our position has now, in view of those considerations, Mr. Minister, shifted to some extent. We still maintain our position, in principle, that we are a protected board. Until that is recognized by either the Ministry or the courts, our position is that we are going to work as closely as we can with the Conseil scolaire de I'île de Montréal and, on that basis, we share the Council's position.

M. Ryan:... I understand that you are dissociating yourself today from your signature of May 12th?

M. Hartt: Mr. Minister, perhaps I was not clear in my response...

M. Ryan: But those are two different views, anyway.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Please, Mr.

Minister. M. Hartt, vous avez la parole.

M. Hartt: Thank you. No, Mr. Minister, that would be an incorrect assumption or interpretation on your part. We still maintain that position in principle, that is to say that we still believe that Lakeshore is a protected board, and I want to make that very very clear: Until the courts and/or the Ministry recognize that, we are in a situation where we are obliged to work with the island Council. If we are going to work with him, we are going to work well with him.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre, une dernière intervention du côté ministériel.

M. Ryan: Je voudrais poser une question à M. Mongeau cette fois-ci. En même temps que le conseil scolaire de I'île présente son mémoire à la commission parlementaire ce matin, la Commission des écoles catholiques de Montréal fait connaître sa position sur les déclarations que nous avons entendues tantôt. Elle affirme, entre autres, dans un mémoire qui est rendu public ce matin et dont je viens d'avoir communication, que les affirmations du conseil scolaire de I'île concernant le rôle qu'il a joué en matière de péréquation ne sont pas reconnues par elle. Elle considère qu'en matière de péréquation, au lieu de gagner elle a perdu sous l'effet de l'action du conseil scolaire de l'île. Elle nous dit qu'en matière de politique alimentaire elle a été défavorisée par les décisions qu'a prises, au cours des années, le conseil scolaire de l'île et elle réitère les frustrations auxquelles le président faisait allusion tantôt au sujet du statut qui lui a été donné à l'intérieur du conseil scolaire de I'île, surtout depuis le jugement de la Cour suprême en 1984. Alors, je voudrais demander au président s'il a pris connaissance de ces déclarations de la Commission des écoles catholiques de Montréal et quelle réponse il apporte à ces affirmations au nom du conseil.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Mongeau.

M. Mongeau: Oui, M. le ministre, j'ai pris connaissance, moi aussi, ce matin, de ce contre-mémoire de la CECM en réaction au mémoire du Conseil scolaire de l'île de Montréal, ce matin, devant cette commission parlementaire. Je dois vous dire, M. le ministre, que j'ai été très étonné de ce document dont le style me laisse très perplexe quant à celui qui en a fait l'écriture. Ce document, à mon sens, est une attaque de bas étage contre un organisme qui représente les commissions scolaires de l'île de Montréal et contre les petites commissions scolaires en particulier dont mes collègues présidents sont ici avec moi ce matin. Oui, j'ai été très étonné de prendre connaissance de ce document ce matin.

M. le ministre, le conseil scolaire existe depuis quinze ans. Cela fait quinze ans et, jusqu'en 1984-1985, tous les membres du conseil siégeaient à parts égales et avaient un droit de vote égal autour de la table. Jusqu'en 1984-1985, jamais, M. le ministre, la CECM n'a porté une attaque comme celle-là contre le Conseil scolaire de l'île de Montréal. Il y avait, comme toujours d'ailleurs, six représentants à la table du conseil qui votaient sur la politique alimentaire et sur l'attribution pour les milieux défavorisés, et jamais, M. le ministre, ils n'ont porté ces attaques à ce moment-là. Tous ceux qui ont siégé au nom de la CECM à la table du Conseil scolaire de l'île de Montréal n'ont pas porté ces accusations concernant la péréquation. Ils participaient à cette péréquation, M. le ministre; ils ont voté en accord avec tous les budgets adoptés au conseil scolaire entre 1973 et 1984-1985. Tous ceux qui ont présidé la CECM ont été d'accord avec cela jusqu'en 1984-1985. Je pense que je suis en mesure de le dire, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je reconnais...

M. Mongeau: Mais je...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Allez-y, monsieur. Excusez-moi.

M. Mongeau: Ils auraient pu, s'ils n'étaient pas satisfaits, M. le ministre, à ce moment-là, proposer des amendements pour faire augmenter les montants soit pour les milieux défavorisés, soit pour changer la politique alimentaire. Jamais, jusqu'en 1984-1985, M. le ministre, et, à ce moment-là, ce sont les délégués de la CECM qui ont demandé que tous les budgets pour la politique alimentaire et les programmes communs soient mis à terre pour être redistribués per capita. Comment peut-on aujourd'hui venir dire et accuser le conseil scolaire de ne pas faire de péréquation quand ceux-là même qui accusent de ne pas faire de péréquation sont ceux qui ont fait en sorte que les règles de péréquation ne s'appliquent plus? Je pose la question.

J'aimerais aussi, M. le Président, si vous me le permettez, répondre à M. le ministre qui disait tantôt sur la question des droits de vote, et je me suis senti visé personnellement puisque je suis le président de l'organisme, que j'interprète la loi comme, semble-t-il, bon me semble, en voulant restreindre le droit de vote des délégués des deux commissions scolaires confessionnelles. M. le ministre, je peux vous assurer qu'en autant que je préside les assemblées du conseil j'essaie d'interpréter la loi le plus largement possible. Mais la loi, M. le ministre, ce n'est pas moi qui l'ai faite. La loi 29 et la loi 24, ce n'est pas moi qui les ai faites, et la loi 24, particulièrement à l'article dont le numéro m'échappe toujours, dit bien que les délégués des commissions scolaires confessionnelles ne votent que sur les sujets sur

lesquels il y a eu entente entre la commission scolaire et le conseil scolaire. Ce n'est pas moi qui ai écrit cet article de loi, c'est le législateur, ici à Québec. Je ne peux même pas l'interpréter parce qu'il est clair comme de l'eau de roche. (11 heures)

Malgré cela, M. le ministre, je peux vous assurer que, parfois, contrairement aux avis juridiques que j'ai, je me torture l'esprit pour tenter de donner le droit de vote. Je peux vous assurer que je me fais parfois blâmer par des collègues qui me disent: Tu leur en donnes trop, et que je veux essayer, comme je l'ai toujours fait depuis quinze ans, d'avoir un consensus et de rallier tout le monde sur l'île de Montréal, de quelque religion, de quelque race ou de quelque langue qu'on soit, toujours pour le bénéfice du système de l'éducation. Je n'accepte pas une accusation personnelle comme celle-là, M. le ministre. Non, ils n'ont pas voté pour le choix des dirigeants du conseil scolaire. Vous étiez là, M. le ministre, au mois de décembre. Vous avez réuni les huit présidents des commissions scolaires de 111e de Montréal avec les directeurs généraux. Les avocats du ministère de l'Éducation, et c'est l'opinion que vous avez lue devant tout le monde, ont dit clairement: Ils n'ont pas le droit de vote. Ce n'est pas moi qui ai interprété la loi et ce n'est pas le directeur général. Les avocats du ministère de l'Éducation ont dit: Ils n'ont pas le droit de vote. Non seulement cela, ils ont dit: Ils n'ont pas le droit d'être élus président, vice-président. D'après vous, ils n'avaient même pas le droit d'être élus membres du comité exécutif. Malgré cela, on s'est torturé l'esprit parce qu'on avait trouvé une opinion juridique un peu divergente sur la question des membres du comité exécutif et on a élu un représentant de la CECM et un autre de la CE-PGM au comité exécutif.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Veuillez conclure, monsieur.

M. Mongeau: M. le Président, je tenais à rétablir les faits parce que c'est une question importante qui me vise personnellement. Je ne voudrais jamais qu'on mette en doute mon intrégrité là-dessus.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous comprends, M. le président. Je pense que vous avez eu le temps nécessaire pour justifier votre position. Maintenant, la commission étant régie par un facteur sur lequel nous n'avons pas d'influence, qui s'appelle le facteur temps, je dois reconnaître maintenant la porte-parole de l'Opposition, Mme la députée de Chicoutimi. Mme la députée.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le président, mesdames, messieurs, il me fait plaisir de vous accueillir au nom de l'Opposition et de vous souhaiter la bienvenue à cette commission.

Comme le temps est court, comme nous le rappelle le président, et que malheureusement on n'a qu'une heure pour votre organisme, je vais me permettre de passer assez rapidement sur les commentaires touchant votre mémoire. Je voudrais simplement dire que ce qui se passe à l'endroit du Conseil scolaire de l'île de Montréal ressemble un peu à ce qui s'est passé à l'endroit des MRC où on a vu un projet de loi qui donne la possibilité aux municipalités de se retirer de certains programmes sans préavis, ce qui fait que cela rend extrêmement aléatoire la possibilité pour les MRC d'organiser des services. Cependant, en ce qui concerne l'organisation de services, il est quand même prévu dans le cas des MRC que le service peut être organisé même s'il y a des municipalités qui s'en retirent, ce qui n'est vraisemblablement pas le cas pour le Conseil scolaire de l'île de Montréal. Si j'établis ce parallèle, c'est parce qu'il me semble qu'il y a dans de gouvernement, je ne pourrais pas dire une espèce d'attitude mais une orientation qui se dégage afin de vider de leurs pouvoirs les organismes intermédiaires. On ne le voit pas seulement en ce qui vous concerne; on le voit également dans d'autres secteurs d'activité.

Dans votre mémoire, vous faites un certain nombre de propositions touchant la loi 106 que j'ai trouvées particulièrement intéressantes. Dans l'annexe, vous faites des suggestions de modifications que je saurai, au moment où on sera à l'examen du projet article par article, sûrement ramener sur la table en termes de modifications à apporter au projet de loi 106. Les recommandations que vous faites là-dedans sont particulièrement judicieuses, se justifient facilement. Elles sont assez faciles d'application. Elles apporteraient une meilleure compréhension du projet de loi 106.

En ce qui concerne le débat qu'on vient d'avoir, j'ai lu, comme le ministre, l'avis que nous a soumis la CECM en réaction à votre propre mémoire. Je ne voudrais pas y revenir, les choses ayant été dites pour l'essentiel.

On a eu ici un organisme, l'Alliance des professeurs de Montréal, qui suggère que le Conseil scolaire de l'île de Montréal pourrait gérer l'autre réseau d'écoles, parce que vous savez que dans la proposition du ministre, c'est un imbroglio, et on y reviendra, où on superpose bien des choses sur le territoire de la CECM. L'Alliance des professeurs de Montréal suggérait que si on devait créer un autre réseau de commissions scolaires ou un autre réseau d'écoles, cela pourrait être une solution de confier la gestion de ce réseau au Conseil scolaire de l'île de Montréal. Qu'en pensez-vous?

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Mongeau.

M. Mongeau: Remarquez bien que lorsque

j'ai pris connaissance du mémoire de l'Alliance sur ce point, bien sûr, j'ai trouvé que c'était un rôle intéressant que le conseil scolaire pouvait jouer. Il n'y a aucun doute là-dessus. À mon sens, ce serait l'organisme tout à fait approprié pour le faire. Mais, évidemment, cela demande tout d'abord des consensus entre les différents partenaires et cela requiert aussi une certaine volonté gouvernementale, je pense. J'ai trouvé très intéressante cette suggestion dans le mémoire de l'Alliance. D'ailleurs, vous savez, il y a eu aussi des mémoires d'autres organismes qui ont fait des suggestions intéressantes ou qui ont parlé du conseil scolaire, et nous en avons des extraits ici que nous pourrions vous déposer.

Évidemment, nous les six petits qui sommes ici à cette table, les 32 % qui sommes tous assis ici à cette table et qui sommes tous d'accord sur le mémoire que nous présentons, je dois vous dire que j'ai rencontré le président de la CEPGM avec le vice-président du conseil, M. Hartt. Le mémoire de la CEPGM sur le conseil rejoint aussi en beaucoup de points celui que nous présentons ce matin. Je peux affirmer que M. Butler s'est dit en accord avec les grandes lignes et les points majeurs du mémoire que nous présentons ce matin. Je vous assure que la lettre écrite il y a un an à laquelle le ministre faisait référence il y a un an, je pense qu'elle est maintenant dépassée.

Mme Blackburn: Je suis d'accord. La réflexion que je me faisais au moment où j'écoutais votre présentation et les réactions du ministre, c'est qu'on peut se demander s'il y a lieu de maintenir une telle structure exclusivement dont le seul pouvoir à peu près qui lui reste est de faire des emprunts à long terme. C'est peut-être un peu une grosse structure si finalement si on la réduit à cette responsabilité. Ma question était: Est-ce une proposition réaliste que de suggérer que le Conseil scolaire de 111e de Montréal puisse gérer un autre réseau d'écoles?

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Mon-geau.

M. Mongeau: Dans le contexte actuel, il est évident que la loi nous dirait demain matin: Vous allez gérer un réseau comme celui-là, il faudrait avoir ce qu'il faut pour le faire. C'est évident qu'au moment où l'on se parle on ne l'a pas parce que ce n'est pas dans la loi actuelle que de gérer des réseaux scolaires. Encore une fois, je pense que c'est une idée intéressante dans le sens que cela pourrait être une solution à apporter à un moment donné si on essayait d'empêcher la multiplication des structures. À ce moment-là, au niveau de la gestion, où le conseil scolaire est fortement équipé, il pourrait, oui.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Mme la députée.

Mme Blackburn: Je vais revenir un peu de façon plus précise à votre mémoire. Vous abordez un certain nombre de questions évidemment, particulièrement celles touchant les effets du chevauchement des circonscriptions électorales sur le recensement ou sur le choix de l'électeur, à la page 7, peut-être pour commencer, vous parlez de l'accroissement du nombre des commissaires. En vertu de la proposition du projet de loi 106, article 6, on se retrouverait sur l'île de Montréal avec 150 commissaires comparativement à 104 actuellement. Je ne suis pas certaine; je le dis sous toutes réserves. Cela n'a pas attiré mon attention au moment où les autres commissions scolaires sont venues présenter un mémoire. Selon vous, cela fait-il a peu près l'unanimité chez vous qu'il ne faudrait pas augmenter le nombre de commissaires dans les commissions scolaires et combien coûte une telle augmentation du nombre de commissaires?

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le président.

M. Mongeau: Je pense que ce qu'on dit, madame, c'est qu'actuellement, à ce niveau, il y a une loi qui s'applique sur l'île de Montréal et une loi qui s'applique dans le reste de la province. Le projet de loi 106 dit que maintenant il va y avoir une seule loi pour tout le Québec. C'est peut-être là, au départ, qu'il y a un problème. C'est que ma perception, pour moi qui siège à d'autres instances, c'est que dans le reste du Québec, pour eux cela fonctionne déjà comme cela, c'est un statu quo, ils sont pour. À Montréal, la loi donne la flexibilité à la commission scolaire d'avoir un nombre de commissaires entre neuf et quinze. C'est la commission scolaire qui le décide. Cela fixe le nombre, évidemment, à dix-neuf pour la CECM. C'est exceptionnel et on sait bien pourquoi en termes de population. Bon! Nous, ce n'est pas ce que nous disons. Nous aimerions garder la même flexibilité que nous avions, sans empêcher, par exemple la CECM en particulier, si elle veut augmenter son nombre de commissaires - je ne sais pas si c'est son souhait, et je ne veux pas parler pour elle, car ils ne voudront jamais - cela pourrait être possible pour eux, sans leur enlever la possibilité de l'augmenter de quelques-uns, étant donné que certains collègues commissaires de la CECM qui ont des districts électoraux d'au-delà de 50 000 électeurs. Pour les autres commissions scolaires qui ont le choix entre neuf et quinze commissaires, je pense que cela devrait rester ainsi et qu'on devrait laisser cette flexibilité. Les commissaires décident, s'ils sont neuf, d'augmenter à onze et, s'ils sont onze, d'augmenter à treize ou à quinze. Le système a très bien marché jusqu'à maintenant. Je ne vois pas pourquoi on le changerait.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Madame.

Mme Blackburn: Sur la question du chevauchement des secteurs, vous illustrez bien la complexité de l'opération du recensement. Au moment où je lisais cela, je me disais que cela vous prendrait des spécialistes pour faire le recenssement sur l'île de Montréal. Allez donc expliquer à des gens que, s'ils sont anglophones, ils ont droit à six écoles, parce qu'il n'y a rien qui les empêche d'aller à l'école française. Je ne m'abuse pas en disant cela.

M. Mongeau: Ils peuvent aller à l'école française.

Mme Blackburn: Ils pourraient aller à l'école française, à la commission scolaire linguistique française ou anglaise, à la catholique française ou anglaise, à la protestante française ou anglaise. Cela donne six choix si vous êtes anglophone; si vous êtes francophone et obligé de suivre votre enseignement en français, cela vous donne trois choix, ce qui est déjà relativement compliqué. Je me mettais dans la peau d'un recenseur qui dit à quel endroit je dois voter et qui doit expliquer également que, si vous êtes propriétaire d'un immeuble, c'est différent. Si vous avez un enfant qui, en vertu d'une entente, est admis à fréquenter une autre commission scolaire, il peut aussi aller voter là. À n'en pas douter, cela va créer un imbroglio tel qu'on ne s'en sortira pas. Un certain nombre de ces propositions sont assez irréalistes. Je ne vois même pas de quelle façon on pourrait trouver une solution, avec l'hypothèse qui est mise sur la table de créer une superposition de réseaux scolaires sur l'île de Montréal. C'est inextricable. Je ne vois pas comment le ministre va régler ce genre de situation.

Plusieurs personnes sont venues nous dire que c'était irréaliste et que si on est minoritaire dans une commission scolaire, vous avez un autre territoire qui vient s'ajouter pour ceux qui voudraient être représentés à une commission scolaire protestante anglaise, alors qu'ils sont du secteur français. La même chose pour la CECM. Cela va être d'une complexité absolument... J'ai peine à comprendre qu'on ait avancé une telle solution. Vous le notez avec beaucoup de justesse, cela ne s'est jamais vu en démocratie au Québec qu'on réserve comme cela des postes. Il faudrait peut-être passer la même chose pour l'Assemblée nationale. Il faudrait passer la même chose pour la ville de Montréal. Pourquoi n'aurait-on pas des postes réservés aux Grecs, aux Italiens - ils sont très nombreux - aux Haïtiens? Je trouve que cette proposition n'a pas été suffisamment réfléchie. J'imagine que le ministre, à temps, saura revenir sur cet article du projet de loi. L'exercice qu'on fait en commission parlementaire est pour avoir une meilleure lecture des effets possibles des différents articles du projet de loi. S'il y en a un sur lequel il va falloir que le ministre revienne, c'est bien sur celui-là, car c'est sans précédent au Québec. Je me demande s'il existe quelque chose, quelque part ailleurs d'équivalent. Je veux bien qu'on soit distincts, mais il ne faut pas non plus entraîner inutilement la confusion. C'est déjà tellement difficile de faire accepter aux autres qu'on est distincts et de faire appliquer les règles que supposerait cette distinction. Il ne faut pas exagérer.

Vous faites des propositions également en ce qui concerne la fréquence des élections scolaires. Vous dites: Plutôt que d'être à tous les trois ans, cela devrait être à tous les quatre ans. Comme cela, vu rapidement, je trouve que l'idée est intéressante. Est-ce que cela a déjà été proposé? Est-ce que cela a déjà été discuté? Pourquoi trois ans à ce pallier de gouvernement, alors qu'au provincial cela peut être de cinq ans, qu'au municipal c'est quatre ans et qu'au fédéral cela peut être jusqu'à cinq ans?

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Mongeau.

M. Mongeau: Écoutez, je pense que c'est un sujet qui est revenu souvent dans les discussions, remarquez bien, chez les commissaires du Québec. Principalement sur l'île de Montréal, nous ne voyons pas pour quelle raison le terme ne serait pas le même que pour les municipalités où il est de quatre ans. Bien sûr, quant aux économies d'argent, ce serait énorme, en tout sur l'île de Montréal; une élection scolaire - on l'a vécue au mois de novembre - coûte 5 000 000 $. Si cela avait lieu une fois par quatre ans au lieu d'une fois par trois ans, on peut additionner cela assez rapidement et voir qu'au bout de quatre ou cinq termes, on vient de d'épargner plusieurs millions de dollars. Maintenant, il ne s'agit pas d'épargner des millions de dollars si c'est antidémocratique, mais je pense que cela ne l'est pas puisque, comme vous l'avez rappelé, madame, aux paliers fédéral et provincial, c'est cinq ans et au palier municipal c'est quatre ans. Nous, nous sommes un pouvoir local, comme le sont les municipalités et nous pensons qu'en tant que pouvoir local nous pourrions arrimer certaines choses comme celle-là. D'ailleurs, déjà dans le projet de loi 106, le ministre a arrimé plusieurs choses relativement aux élections scolaires avec l'élection municipale: le remboursement des dépenses ou des choses comme celle-là. Nous pensons que cela pourrait être une des choses dont une des conséquences serait, bien sûr, l'économie de je ne sais pas combien de millions de dollars, à tout le moins à Montréal.

Mme Blackburn: Au moment où cela a été discuté, quels étaient les arguments qui militaient en faveur du maintien de la situation actuelle, c'est-à-dire trois ans? Qu'est-ce qu'on invoque pour maintenir l'élection tous les trois ans?

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le président.

M. Mongeau: Je pense qu'il n'y en a pas eu.

Mme Blackburn: Non?

M. Mongeau: II n'y en a pas eu.

Mme Blackburn: D'accord.

M. Mongeau: On demande toujours quatre ans et le gouvernement dit toujours: Trois ans. Alors, c'est cela.

Mme Blackburn: II n'y a eu de débat là-dessus.

M. Mongeau: Pardon?

Mme Blackburn: II n'y a pas vraiment eu de débat là-dessus.

M. Mongeau: Non, pas à ma connaissance.

Mme Blackburn: Vous le proposez et cela reste là.

M. Mongeau: Bien oui.

Mme Blackburn: Je voudrais voir parce qu'il serait intéressant d'entendre les arguments là-dessus. Je trouve que cela se défend.

M. Mongeau: Remarquez bien qu'à Montréal, au cours des ans, enfin, depuis 1973, cela fait deux fois que le mandat est prolongé. On devait avoir des élections scolaires en 1976...

Mme Blackburn: Oui.

M. Mongeau:... et le gouvernement nous a donné une quatrième année, jusqu'en 1977. L'an dernier, encore la même chose; on devait avoir des élections scolaires en juin 1986 et cela a été prolongé à novembre 1987. Je ne vois pas pourquoi on ne mettrait pas cela à quatre ans, tout le temps.

Le Président (M. Parent, Sauvé): J'espère que vous n'invoquez pas des droits acquis!

M. Mongeau: Je n'oserais jamais, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la députée, en conclusion.

Mme Blackburn: Je vous remercie, M. le Président. Évidemment, c'est très court pour échanger des propos sur un mémoire qui a autant de contenu. Je sais que vous n'avez pas voulu aborder les autres questions, les grandes questions de fond touchant l'accessibilité, la qualité de l'éducation, le partage du pouvoir.

En matière de partage du pouvoir, la réflexion que je me faisais en vous entendant, ce matin, c'est que le ministre ne peut pas continuer à accroître le pouvoir des niveaux intermédiaires parce que vous ne pouvez partager le pouvoir des commissions scolaires que dans la mesure où le gouvernement accepte de se départir d'un certain nombre de pouvoirs, sinon vous videz complètement les premiers niveaux, c'est-à-dire les commissions scolaires en ce qui vous concerne. Ce qu'on constate dans le projet de loi, c'est un resserrement des contrôles et des pouvoirs du ministre, donc une diminution des pouvoirs des commissions scolaires. Il va de soi que ceux qui se voient vidés de leurs pouvoirs, de plus en plus, acceptent mal de les diviser ou de les partager. Le rôle d'un organisme comme le vôtre se justifie pour être plus important à certains égards, dans la mesure où le gouvernement accepterait de décentraliser une partie de ses pouvoirs. Il ne me semble pas, loin de là, que ce soit l'orientation privilégiée par le ministre dans son projet de loi.

Je voudrais redire ce que j'ai dit tout à l'heure: Les propositions que vous apportez touchant la loi 106, en particulier, sont très intéressantes. Je dirais que c'est probablement, à ce jour, le mémoire le plus fouillé que nous ayons eu sur cette question, et quand on sera au moment de revoir le projet de loi article par article, et de suggérer des amendements, parce que je n'ai pas le pouvoir de les apporter, nul doute qu'on puisera largement dans votre mémoire, et je vous en remercie.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci,

Mme la députée. Je reconnais maintenant le ministre pour une dernière intervention. M. le ministre.

M. Ryan: Je pense bien que nous avons soulevé le coeur du problème, ce matin. Il n'était pas soulevé clairement dans le mémoire, parce que quand vous disiez, à la fin, que certaines commissions scolaires n'étaient pas satisfaites, je pense qu'on a établi clairement que c'est plus que certaines, ce sont en particulier deux commissions scolaires qui représentent 62 % de la clientèle scolaire de l'île de Montréal, et on ne peut pas considérer cela comme un fait mineur.

Il y a un problème fondamental, un problème structurel qui ne reçoit pas de solution satisfaisante dans la structure actuelle. Dans son projet de loi, le gouvernement essaie d'inviter les huit commissions scolaires de l'île de Montréal, à partir du point où elles en sont réellement, à cheminer ensuite dans la collaboration et la confiance. C'est cela qu'est le sens du projet de loi, pas autre chose. On ne veut pas que des choses qui vont au-delà de ce qui est vraiment partie du consensus réel soient maintenues comme elles le sont. Peut-être que ce serait une bonne chose, au cours des prochaines semai-

nés - on va avoir la période d'été pour réfléchir - qu'il y ait une rencontre entre les commissions scolaires concernées. On l'a fait pour d'autres sujets, on l'a déjà fait quand il y avait une impasse, et cela a quand même permis d'en sortir pour l'immédiat. Peut-être qu'on pourra trouver ensemble des voies qui aideront à préciser certaines choses, à les aménager autrement.

Là-dessus, il n'y a pas d'entêtement de la part du gouvernement, pas d'obstination parce que nous savons que c'est un domaine où il y a beaucoup d'incertitude et de flottement. Le message du projet de loi, c'est de dire: On va prendre acte de la situation comme elle est réellement, au-delà de toutes les prétentions juridiques, positions politiques ou affirmations, la situation au point où elle est réellement et trouver des aménagements qui y correspondent. Si on peut faire davantage, tant mieux, nous allons le faire volontiers, nous sommes prêts à vous donner notre collaboration là-dessus. Je pense que le président peut témoigner que, dans bien des situations, nous avons donné, du côté du ministère, le coup de main qui pouvait être souhaitable.

Vous faisiez allusion tantôt, je ne veux pas y revenir longuement, à un certain avis qu'ont donné nos conseillers juridiques. Je pense que vous me connaissez assez pour savoir que je ne suis pas nécessairement lié à ces avis, surtout politiquement. J'aime bien, quand c'est trop compliqué, qu'on ait deux ou trois avis. Je ne veux pas que vous pensiez... On a été honnêtes avec vous, on vous a donné le texte de l'avis qui nous avait été donné, mais ce n'était pas nécessairement l'interprétation définitive du ministère. Même nos conseillers, depuis ce temps, ont peut-être continué de cheminer et de s'interroger. Ils ont peut-être ajouté des nuances. Disons que c'était le point où en était la situation. On a trouvé une solution qui reste paradoxale puisque, comme vous le savez, parmi les gens des commissions scolaires qui n'ont pas le droit de voter pour le choix du conseil, il y en a deux qui sont à l'exécutif, et à l'exécutif ils ont le droit de vote comme les autres. Ils n'ont pas le droit de vote?

M. Mongeau: Non.

M. Ryan: Tant mieux, la logique est au moins préservée.

M. Mongeau: Je m'excuse M. le ministre. Je sais que c'est ce que dit le document de la CECM, mais c'est faux, comme il y a d'ailleurs d'autres faussetés dans ce document.

M. Ryan: II peut y avoir des faussetés particulières ici ou là, mais cela n'enlève pas le malaise profond, qui est un fait évident auquel doit se mesurer le législateur s'il veut améliorer les choses. Comme je vous le disais, on va essayer de faire avec vous un cheminement au cours des prochaines semaines, qui permettra d'améliorer le projet de loi. Au point où nous en sommes, je n'ai pas entendu ce matin d'arguments qui me pousseraient fortement à changer de point de vue sur ce chapitre du projet de loi. Encore une fois, nous allons écouter tout le monde, y compris ceux qui sont absents. Ce n'est pas par caprice, au contraire. Étant donné que ce conseil a comme mission le bien scolaire de toute lUe de Montréal, il faut qu'on tienne compte de tout.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, s'il n'y a pas d'autre intervention je vais vous reconnaître pour une courte intervention, si vous voulez, M. le président. Je vous ferai remarquer que le temps est écoulé, mais je vous écoute quand même...

M. Mongeau: Bien...

Le Président (M. Parent, Sauvé): ...étant donné que vous avez répondu si généreusement à notre invitation.

M. Mongeau: Simplement pour remercier encore une fois les membres de cette commission et aussi dire au ministre de l'Éducation que je pense qu'on est à la recherche de cette solution. Nous croyons que la solution que nous avançons ne brime les droits de personne et rencontre peut-être mieux ou serait la meilleure pour qu'il y ait un conseil scolaire qui soit opérant sur l'île de Montréal. Dans ce sens, je prends note de l'ouverture du ministre à des rencontres subséquentes pour tenter d'établir cela.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le président, merci aux gens qui vous accompagnent pour l'éclairage que vous avez bien voulu donner à la commission de l'éducation sur ces deux projets de loi. Nous suspendons nos travaux pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 26)

(Repriseà11 h 31)

Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente de l'éducation reprend ses travaux.

Je vous ferai remarquer que la commission accuse déjà un retard d'une demi-heure à son horaire. Nous nous en excusons auprès de nos invités.

J'inviterais les membres de la commission permanente de l'éducation à prendre place. À l'ordre, s'il vous plaît, à l'arrière de la salle! Les travaux vont débuter.

La commission permanente de l'éducation poursuit ses travaux et accueille maintenant les

représentants de la commission scolaire Baldwin-Cartier. La commission scolaire Baldwin-Cartier est représentée par son président, M. Jacques Mongeau. M. Mongeau, je n'ai pas à vous répéter la façon dont on procède. On vous a vu ici à plusieurs reprises, même avant l'étude des projets de loi 106 et 107. Si vous voulez bien, M. Mongeau, nous présenter les personnes qui vous accompagnent et nous identifier ceux qui vont prendre la parole. On a environ une heure à consacrer à votre organisme. Il est 11 h 30, c'est donc dire que vers 12 h 25, 12 h 30, nous devrons ajourner nos travaux. M. Mongeau, nous vous écoutons.

Commission scolaire Baldwin-Cartier

M. Mongeau: M. le Président, M. le ministre, madame et messieurs de la commission, j'aimerais vous présenter les gens de la commission scolaire qui m'accompagnent. Tout d'abord, à ma gauche, la vice-présidente de la commission scolaire Baldwin-Cartier, Mme Diane Berty...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Rebonjour, madame.

M. Mongeau:... que vous connaissez bien. À ma droite, M. Yvon Cherrier, commissaire et membre du comité exécutif de la commission scolaire; M. Marcel Arsenault, directeur général de la commission scolaire; M. Don Myles, directeur général adjoint de la commission scolaire, et M. Yves Gravel, directeur général adjoint de la commission scolaire. Plusieurs de mes collègues commissaires sont aussi à l'arrière, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je leur souhaite la bienvenue au nom des membres de la commission, M. le président. Il me fait plaisir de les revoir d'ailleurs.

M. Mongeau: Peut-être, M. le Président, pour vous permettre, ainsi qu'aux membres de cette commission, de vous reposer d'entendre ma voix, je vais demander à mon collègue Yvon Cherrier de vous faire part de ce mémoire et je pourrai, à la période des questions, reprendre.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Cherrier.

M. Cherrier (Yvon): M. le Président, le temps étant limité, nous avons pensé vous présenter une version abrégée de notre mémoire. Certains paragraphes ou rubriques seront passés sous silence et nous nous abstiendrons de faire la lecture de notre mémoire sur le projet de loi 106. Cependant, nous voulons nous assurer que l'objet de nos réflexions et recommandations demeure inchangé en ce qui a trait à ce mémoire. Nous allons donc commencer la lecture à la page 4 du présent mémoire.

La commission scolaire Baldwin-Cartier est la seule responsable depuis plus de quinze ans de l'enseignement aux catholiques francophones et anglophones pour l'ensemble des municipalités de l'ouest de I'île de Montréal, à savoir Dorval, Pointe-Claire, Beaconsfield, Baie d'Urfé, Sainte-Anne-de-Bel!eyue, Senneville, Kirkland, Sainte-Geneviève, Île-Bizard, Pierrefonds, Dollard-des-Ormeaux et Roxboro. Elle offre à sa population étudiante, toujours grandissante, la gamme complète des services éducatifs aux niveaux préscolaire, primaire et secondaire. De plus, elle offre un large éventail de cours à l'éducation des adultes et assure l'enseignement dans deux établissements du réseau des affaires sociales.

Sa clientèle de 17 218 élèves se répartit dans 31 écoles: neuf écoles primaires anglaises, seize écoles primaires françaises, deux écoles secondaires anglaises et quatre écoles secondaires françaises. Elle administre également des services pédagogiques dans une école spéciale à vocation régionale à une population bilingue d'enfants gravement handicapés, avec la collaboration de la commission scolaire protestante du Lakeshore. Ses services de l'éducation des adultes et du transport scolaire sont gérés conjointement avec cette même commission scolaire; ses services informatiques le sont avec la commission scolaire Sainte-Croix.

Enfin, depuis plusieurs années, la commission scolaire Baldwin-Cartier a conclu des ententes de services avec plusieurs municipalités faisant partie de son territoire. À cause de la diversité des écoles sous sa juridiction, de ses structures pédagogiques et de son mode d'opération, la commission scolaire est convaincue que son expérience et ses opinions peuvent éclairer les discussions actuelles sur les propositions de changements mises de l'avant dans le projet de loi 107.

Conception de la commission scolaire. Dans le présent mémoire, la commission scolaire Baldwin-Cartier réagit au projet de loi 107 en se basant sur sa conception de ce qu'est une commission scolaire. La commission scolaire est un gouvernement démocratique, local, autonome et responsable d'offrir à toute sa population étudiante les meilleurs services éducatifs disponibles. La commission scolaire est un gouvernement; c'est elle qui doit prendre les décisions appropriées pour remplir sa mission, qui est de fournir une éducation de qualité à ses élèves. La commission scolaire est un gouvernement démocratique; les commissaires sont les représentants officiels de la population de leur territoire; ils sont élus par les citoyens au suffrage universel. De plus, comme instance démocratique, elle gouverne en se mettant constamment à l'écoute de la population par des mécanismes de consultation et de concertation. La commission scolaire est un gouvernement local; elle accomplit son mandat, d'abord en se basant sur les besoins, les attentes, les possibilités, les particularités et les modes de vie spécifiques à son milieu, à sa

population, ce qui ne l'empêche pas de considérer les dimensions régionale, provinciale et nationale.

La commission scolaire est un gouvernement autonome; elle est capable de gouverner dans son champ d'action à partir de la compétence, de l'expérience et de la connaissance du milieu de ses représentants locaux élus sans l'intervention dirigiste, contraignante et limitative de toute source extérieure. Ceci ne l'empêche pas d'avoir recours, au besoin, à des expertises extérieures afin de l'éclairer dans la gouverne de certains de ses dossiers. La commission scolaire est un gouvernement responsable; elle est un gouvernement consciencieux, soucieux de tenir compte des attentes du milieu et de prendre tous les moyens appropriés pour mener à bien sa mission éducative. Elle est en mesure de répondre de ses actes à la population qu'elle représente.

La commission scolaire est un gouvernement qui a pour mission d'offrir à toute sa population étudiante les meilleurs services éducatifs disponibles. Sa mission consiste à offrir ces services afin de développer chez tout élève le maximum de son potentiel sous tous ses aspects en tenant compte de son niveau de capacités. Sa mission exige qu'elle utilise toutes les ressources disponibles, humaines, matérielles et financières pour assurer à chaque élève les services de la meilleure qualité qui répondent à ses besoins.

La commission scolaire Baldwin-Cartier croit que le gouvernement ne peut que se dire d'accord avec cette conception de la commission scolaire et qu'il est essentiel que la lecture et l'étude du projet de loi 107 se réalisent en tenant compte des diverses composantes de cette conception. C'est, pour sa part, ce qu'elle a fait elle-même.

La constitution des commissions scolaires. Lors des consultations précédentes sur les projets de loi 40 et 3, la commission scolaire s'était montrée ouverte à la constitution de commissions scolaires linguistiques et elle l'est encore. Elle l'avait fait avec une réserve importante toutefois. En effet, elle avait demandé qu'advenant la création de telles commissions soient inscrites dans la loi des clauses garantissant le caractère confessionnel de l'école au sein de cette même commission.

Les groupes de confessionnalité religieuse demandent que le projet éducatif de l'école fréquentée par leurs enfants soit inspiré des croyances de leur foi. Pour eux, il ne s'agit pas de garantir leurs droits uniquement par l'enseignement de cours de leur religion; pour eux, l'éducation dépasse le niveau du seul enseignement et comprend le développement d'une manière d'être et de vivre basée sur une morale, des principes et des croyances particulières à leur religion.

La commission scolaire est très consciente de ces attentes de son milieu et croit elle-même qu'il est important que la loi permette aux groupes qui le désirent de pouvoir se donner un projet éducatif qui corresponde à leurs aspirations.

Afin que la possibilité pour les groupes confessionnels d'avoir des écoles avec leur propre statut leur soit assurée, il est primordial que la loi comprenne des clauses garantissant l'existence d'écoles confessionnelles. La commission scolaire sait que le règlement du comité catholique comprend déjà de telles clauses. Toutefois, comme la loi prévaut sur la réglementation et que la réglementation peut être modifiée plus facilement qu'une loi, elle demande que les clauses inscrites dans le règlement fassent partie de la loi 107 afin d'offrir plus de garanties aux groupes qui aspirent à des écoles confessionnelles.

Les structures de la commission scolaire. Lors de l'analyse qu'elle a faite des diverses clauses du projet de loi 107 touchant les structures, la commission scolaire s'est attardée sur certains éléments à la lumière de la conception qu'elle a de celle-ci. C'est ainsi qu'elle a décidé de donner son avis sur les points suivants.

Le conseil des commissaires. Comme elle l'a toujours soutenu, la commission scolaire demande que les commissaires soient élus au suffrage universel. Comme la loi leur confère des droits, des pouvoirs et des responsabilités et qu'ils en sont les seuls à répondre devant la population, elle est d'avis que, pour voter des décisions à prendre, ils doivent être élus par suffrage universel.

La commission scolaire ne s'oppose pas à la présence de représentants de parents au conseil des commissaires, car elle croit qu'ils peuvent apporter un éclairage additionnel lors du processus décisionnel. Toutefois, comme ils n'ont pas été élus par voie de suffrage universel, ils ne doivent pas voter, selon elle, lors de l'exercice par les commissaires des droits, pouvoirs et responsabilités prévus par la loi.

Le projet de loi 107 prévoit certains changements concernant le vote des commissaires qui risquent de provoquer des conséquences fâcheuses dans le fonctionnement du conseil des commissaires. La commission scolaire est d'accord qu'un commissaire puisse s'abstenir de voter, même s'il s'agit d'un sujet pour lequel il n'est pas en situation de conflit d'intérêts, mais elle est en désaccord sur le fait que son abstention ait une influence sur le quorum de la séance. Le fonctionnement du conseil pourrait être paralysé ou, encore, des décisions devant être prises pourraient être reportées indéfiniment si plusieurs membres s'abstenaient de voter.

En ce qui concerne le vote prépondérant du président en cas d'égalité des voix, la commission scolaire est d'avis que d'autres formules pourraient être déterminées sur le plan local, formules qui permettraient d'assurer au conseil de prendre quand même ses décisions et de fonctionner avec efficacité. De telles formules ont déjà été expérimentées dans certains organismes et ont apporté des résultats positifs. C'est

pourquoi la commission scolaire recommande que 1 le vote prépondérant soit utilisé à la discrétion du président.

Le comité exécutif. Le changement proposé dans le projet de loi 107 qui prévoit que l'existence du comité exécutif devienne facultative ne correspond pas au point de vue de la commission scolaire à ce sujet. En effet, son expérience lui a démontré la nécessité d'un comité exécutif dans les structures d'une commission scolaire.

La commission scolaire est d'avis que certaines fonctions administratives doivent relever d'un comité exécutif, fonctions qui pourraient difficilement se réaliser de façon fonctionnelle par le conseil des commissaires à cause, entre autres, du grand nombre de commissaires, de la haute fréquence des réunions nécessitées pour l'accomplissement de ces fonctions. Le nombre plus restreint des commissaires nommés au comité exécutif par le conseil des commissaires permet à ce dernier d'exercer certaines fonctions administratives rattachées à ses responsabilités quant à un mécanisme plus fonctionnel. (11 h 45)

En plus de demander que la loi 107 indique que le comité exécutif demeure obligatoire, la commission scolaire veut que les pouvoirs qui seront délégués à ce dernier soient déterminés par chaque commission scolaire. De plus, comme l'expérience lui a démontré que la formule actuelle se révèle fonctionnelle, la commission demande que celle-ci soit reconduite dans la loi 107.

Par contre, il apparaît à la commission scolaire contradictoire d'exiger de faire entériner par le conseil des commissaires les décisions prises par le comité exécutif. En effet, la délégation de pouvoirs transférés au comité exécutif implique que ce dernier est en droit de prendre des décisions qui se rapportent aux objets de la délégation. Pourquoi faire approuver ces décisions par le conseil des commissaires? Qu'il l'informe de ses décisions, d'accord. Ce qui est proposé dans le projet de loi nie toute délégation de pouvoirs. Ceci ne doit pas apparaître dans la loi, selon la commission scolaire.

Les comités de la commission scolaire. Plusieurs comités sont inscrits dans le projet de loi 107 et imposés à la commission scolaire. Si d'une part la commission scolaire ne s'oppose pas à la présence de comités de parents, elle réagit d'autre part avec vigueur à tout autre comité auquel le projet de loi veut la contraindre.

Si le gouvernement reconnaît que la commission scolaire est un gouvernement démocratique, local, autonome et responsable, il n'a pas à l'assujettir par une loi à gouverner à l'aide d'une série de mécanismes préétablis qui viennent restreindre ses possibilités de remplir ses responsabilités en tenant compte de son milieu.

Certains prétendent que plusieurs commissions scolaires possèdent déjà de tels comités. Alors, pourquoi ne pas les inclure dans la loi 107, se dit-on? En premier lieu il faut se dire que, si telle est la situation, cela prouve que les commissions scolaires agissent en gouvernement démocratique et qu'elles font participer la population qui en a élu les commissaires à la chose scolaire. En second lieu, cela indique qu'il n'est pas nécessaire d'imposer ces comités par une loi.

De plus, un de ces comités fait déjà partie intégrante de conventions collectives: c'est le comité consultatif des services aux élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage. Il serait malencontreux de l'engoncer dans la loi venant restreindre ainsi les objets de futures négociations.

La commission scolaire considère que la création de comités relève de sa compétence et de sa gestion. Elle est plus en mesure comme gouvernement local de mettre en place des mécanismes favorisant la participation des divers intervenants de son milieu parce que son milieu, comme tout autre milieu, est unique et différent et qu'elle est la plus apte à discerner ses besoins. Aussi, elle est plus avisée qu'un gouvernement central pour mettre en place les modalités les plus fonctionnelles de ces mécanismes que sont ces comités. La commission scolaire recommande donc que la loi 107 ne prévoie pas de comité autre que les comités de parents.

Les ressources de la commission scolaire. À l'origine, le pouvoir de taxation donné aux commissions scolaires devait leur permettre de donner une couleur locale, à savoir de répondre à des besoins et des attentes spécifiques de leur milieu. Cependant, ce pouvoir est limité par l'imposition d'un plafond de 6 %.

Il est faux de croire que les produits de la taxe servent à donner une couleur locale, car, en réalité, les commissions scolaires doivent les utiliser pour combler le manque à gagner créé par les diminutions annuelles des budgets qui leur sont alloués par le gouvernement.

Année après année, une indexation située sous le taux réel d'indexation ou encore une non-indexation pure et simple ainsi que des compressions budgétaires diminuent sans cesse les ressources financières de la commission scolaire et l'obligent à puiser dans les produits de la taxe scolaire afin d'équilibrer ses budgets. Ajoutons à cela l'absence totale de subventions pour l'application de nouveaux régimes pédagogiques, particulièrement l'implantation des nouveaux programmes. La situation s'aggrave encore plus lorsque les commissions scolaires se voient obligées d'appliquer des lois coûteuses, sans bénéficier d'aucune aide financière: par exemple, la loi 17, Loi sur la santé et la sécurité du travail; la loi 65, Loi sur l'accès à l'information; la loi 3, Loi sur les archives.

Un autre exemple d'obligation faite à la commission scolaire sans qu'il soit question de la financer pour être en mesure de remplir celle-ci se retrouve dans le projet de loi. C'est celui de l'obligation d'assurer la surveillance des élèves

qui choisiront de ne pas être transportés à leur domicile pour la période du midi. Si l'organisation et l'aménagement physique des écoles secondaires sont déjà conçus pour offrir ce service, il n'en est pas de même pour les écoles primaires. Afin de répondre à cette exigence, des investissements considérables, autant au niveau des équipements que de la gestion, devront être encore pris en charge par la commission scolaire à même ses ressources déjà limitées qui devraient être allouées à des services éducatifs. La commission scolaire ne s'attarde pas ici au problème même du manque d'espace pour assurer un tel service \e midi.

À partir des exemples ci-haut mentionnés, il apparaît clairement pour la commission scolaire que le pouvoir de taxation locale ne sert en réalité que pour l'application en tout ou en partie de politiques et d'objectifs gouvernementaux.

Pourquoi ne pas permettre à la commission scolaire de bénéficier d'un réel pouvoir de taxation local afin qu'elle ait une source de revenu lui permettant de jouer efficacement son rôle de gouvernement scolaire local?

Tout comme on peut croire que les gouvernements provincial et municipal sont assez responsables pour ne pas surcharger indûment les citoyens de taxes, on peut faire confiance au gouvernement scolaire pour en faire de même. Si les élus ne s'avèrent pas dignes de cette confiance, le processus démocratique des élections est déjà en place pour rétablir les choses.

C'est pourquoi la commission scolaire s'attend à ce que la loi reconnaisse de façon plus concrète la commission scolaire comme un gouvernement local, autonome et responsable en accroissant, entre autres, son pouvoir de taxation local.

L'école. À la suite de son étude des éléments du projet de loi se rapportant à l'école, la commission scolaire a retenu de traiter trois points: le rôle social de l'école, le conseil d'orientation et le comité d'école, le directeur d'école.

Le rôle social de l'école. La commission scolaire reconnaît un rôle social à ses écoles et elle est prête à les aider à l'assurer. Toutefois, elle croit que ce rôle social mérite d'être défini de façon plus précise, ce que le projet de loi ne fait pas. Au contraire, il ouvre la porte à toutes sortes d'interprétations et, si elle se fie à ses expériences et aux tendances actuelles, la commission scolaire se rend compte qu'on donne à l'école des responsabilités sociales et même qu'on veut lui imposer des programmes sociaux comme si elle en était la première responsable par rapport à chaque individu qui fait partie de sa clientèle.

Pour la commission scolaire, l'école est un des nombreux éléments de la société tout comme le sont la famille, les groupes de diverses confessionnalités, les municipalités, les groupes sociaux, les services sociaux gouvernementaux, etc. Elle reconnaît à chacun un rôle à jouer au niveau social face à chaque individu de la communauté. Ce rôle en est un de complémentarité. C'est pourquoi elle n'est pas prête à prendre seule la responsabilité première du rôle social dans le développement de la personne. Comme elle craint que les perceptions et les tendances présentes veulent donner une telle responsabilité à l'école, elle croit qu'il est important de départager le rôle de chacun par rapport à ses responsabilités sociales et qu'une fois cela accompli il y aurait lieu de déterminer comment et avec quels moyens l'école peut jouer ce rôle.

Le conseil d'orientation et le comité d'école. La commission scolaire adhère au processus démocratique et c'est dans cette ligne de pensée qu'elle ne s'oppose pas à ce que des mécanismes de participation des parents soient prévus dans la loi et que ceux-ci permettent à ces derniers de jouer un rôle actif au sein de l'école.

Le projet de loi prévoit deux groupes de participation: le conseil d'orientation et le comité d'école. La lecture des clauses s'y rapportant dégage une perception de confusion quant au rôle, aux fonctions et au fonctionnement des deux comités, l'un par rapport à l'autre et également par rapport au comité de parents se situant au niveau de la commission scolaire. En plus de cette confusion, il en resssort que ces mécanismes paraissent très complexes et compliqués, au point qu'on peut mettre en doute la possibilité qu'ils puissent fonctionner avec efficacité comme mécanismes de participation intégrés au processus décisionnel, soit au niveau de l'école, soit au niveau de la commission scolaire.

À la suite de l'examen de cette facette de la participation des parents à la vie de l'école, la commission scolaire croit qu'il est nécessaire que la participation des parents soit assurée au niveau de l'école dans un cadre clair, fonctionnel et efficace qui permet aux parents un rôle actif et qui évite que les énergies de tous et chacun soient consacrées à des démarches longues et infructueuses issues d'un manque de clarté des rôles confiés à chaque intervenant.

Nous allons passer maintenant à la page 25 où on parle de l'élève. L'examen des clauses se rapportant à l'élève amène la commission scolaire à soulever deux points: l'un touchant l'âge d'admissibilité, l'autre, la gratuité à l'élève adulte.

L'âge d'admissibilité. La commission scolaire trouve fort étonnant que le projet de loi ne contienne pas l'âge d'admissibilité aux services éducatifs fixé au 1 er janvier.

Depuis plusieurs années, les gouvernements promettent une telle mesure. Celle-ci a d'ailleurs déjà existé au Québec. Les autres provinces du Canada ont déjà fixé la date d'admissibilité au 1er janvier et les commissions scolaires du Québec doivent admettre dans leurs écoles les

élèves provenant des autres provinces qui sont nés entre le 30 septembre et le 1er janvier. Pendant ce temps, nos propres enfants québécois doivent attendre une année pour bénéficier des services éducatifs.

Ces enfants québécois possèdent autant de capacités sur tous les plans que ceux des autres provinces et nos programmes d'éducation sont équivalents à ceux de nos voisins canadiens. Ils devraient donc être aptes à être admis dans nos écoles s'ils sont nés avant le 1er janvier de chaque année. Cette affirmation nous a été confirmée continuellement au cours des années par notre personnel professionnel pédagogique sur qui la commission scolaire peut se fier sur les plans de l'expertise et de la compétence.

Il est vrai que le projet de loi laisse entrevoir la possibilité de modifier la date d'admissibilité par la voie du régime pédagogique, mais cette façon de faire ne garantit aucunement que les enfants québécois seront traités sur un même pied d'égalité avec leurs voisins des autres provinces. Bien plus, ceci risque que les modifications au régime pédagogique ne soient étudiées qu'à la lumière de facteurs étrangers aux besoins de développement des enfants. C'est pourquoi la commission scolaire demande que la loi indique que l'âge d'admissibilité soit fixé au 1er janvier de chaque année.

Nous allons passer à la page 28: Le Conseil scolaire de l'île de Montréal. Comme la commission scolaire est membre du Conseil scolaire de l'île de Montréal et qu'elle attribue à cet organisme un rôle important dans le développement des services autant administratifs qu'éducatifs du territoire qu'il couvre, elle a porté une attention particulière à ce chapitre du projet de loi. La lecture de cette partie de loi nous amène à constater que le projet diminue grandement le rôle du conseil et, à notre avis, c'est rater l'occasion de doter le milieu urbain montréalais d'un organisme fort et fonctionnel dont il a besoin. C'est pourquoi la commission scolaire réagit à la proposition du projet de loi et vous fait connaître sa position concernant le rôle devant être dévolu au Conseil scolaire de l'île de Montréal.

Problématique. LTle de Montréal constitue un grand milieu urbain caractérisé par d'évidentes inégalités sociales et économiques. La pluriethnicité croissante vient encore rendre plus complexe le développement d'un système scolaire appelé à répondre adéquatement aux besoins de la population. La baisse ou les migrations de population font varier considérablement le taux d'utilisation des équipements scolaires d'une ville à l'autre, même à l'intérieur d'une même ville ou d'un même secteur géographique. Certains programmes, tels l'enseignement professionnel, l'éducation interculturelle, les services alimentaires, requièrent une réelle concertation pour atteindre une efficacité significative.

Tout en reconnaissant l'inégalité des tailles des commissions scolaires de l'île, il reste qu'elles ne peuvent par leurs efforts isolés assurer un développement scolaire équitable et comparable dans toutes les parties de l'île de Montréal.

Enfin, des amendements à la Loi sur l'instruction publique qui toucheraient le Conseil scolaire de l'île de Montréal ne devraient pas faire perdre aux commissions scolaires les avantages financiers que leur regroupement a permis de réaliser au cours des quinze dernières années.

Recommandations. À cause justement de la problématique ci-avant évoquée, nous croyons à la nécessité de maintenir sur l'île de Montréal un organisme scolaire régional qui n'est pas une simple association volontaire des partenaires que sont les commissions scolaires. Cet organisme, de notre point de vue, doit être doté de pouvoirs précis et prescripts dans un certain nombre de domaines dont les suivants: le financement du système scolaire montréalais dans toutes ses composantes, soit la perception et la redistribution de la taxe, le financement à court et long terme, de même que l'administration de toutes les subventions versées par le ministère de l'Éducation; le développement de l'éducation dans les milieux moins favorisés; l'utilisation rationnelle et juste des équipements scolaires pour les diverses clientèles jeunes et adultes à desservir; le développement rationnel et équilibré de l'enseignement professionnel pour les jeunes et les adultes, (carte des options et utilisation rationnelle des équipements); le développement de l'éducation à une saine nutrition chez tous les élèves de IHe; le développement de la recherche et de modèles d'intervention en éducation interculturelle.

En outre, le Conseil scolaire de l'île de Montréal pourrait établir, en concertation volontaire avec les commissions scolaires, d'autres programmes en vue d'améliorer la gestion des services éducatifs sur l'île de Montréal. À titre d'exemple, nous mentionnons l'établissement d'un régime d'auto-assurance, le développement de la micro-informatique à des fins d'enseignement ou de gestion, l'établissement d'un système d'achats regroupés, des programmes de recherche sur les élèves en difficulté ou les doués, la mise en commun d'autres services tels les services juridiques, les études démographiques, etc. (12 heures)

Les pouvoirs du gouvernement et du ministre. L'analyse du chapitre touchant les pouvoirs du gouvernement et du ministre crée chez nous soit un sentiment de déception vive, soit une incompréhension de la logique ministérielle par rapport aux divers paliers de gouvernement, des affaires de l'éducation. En effet, la commission scolaire considère que le gouvernement et le ministre se donnent une série de pouvoirs qui relèvent du gouvernement local qu'est la commission scolaire. Loin de responsabiliser cette dernière, ces pouvoirs enclenchent un retour vers la centralisation.

Des pouvoirs attribués au gouvernement, certains constituent une ingérence dans la gestion relevant de la commission scolaire. Mentionnons par exemple celui d'établir le nombre maximum de postes pour chaque classe d'emploi, ou encore celui de fixer des conditions d'attribution de contrat que la commission scolaire devra respecter, même si celle-ci finance ses travaux à même ses revenus de taxation.

Un relevé des pouvoirs attribués au ministre par le projet nous permet d'en dénombrer plus d'une douzaine. Encore ici, on constate rapidement que plusieurs de ces pouvoirs viennent renier certaines responsabilités de la commission scolaire ou s'immiscer dans la gestion de la commission scolaire. Il appartient à la responsabilité de la commission scolaire de s'assurer que les personnes relevant de sa compétence, à savoir celles qui résident sur son territoire, reçoivent les services éducatifs auxquels elles ont droit. Par contre, du même coup, on attribue au ministre le pouvoir d'établir la liste des commissions scolaires qui peuvent organiser l'éducation des adultes, le pouvoir d'établir la liste de spécialités ou des services particuliers aux élèves handicapés qu'une commission scolaire peut offrir.

Le projet va même jusqu'à donner au ministre le pouvoir de libérer une commission scolaire de toutes ou d'une partie de ses fonctions. Enfin, le projet lui donne la possibilité d'exiger de la commission scolaire qu'elle suspende, lors d'une enquête, la prise de décision ou l'application d'une décision déjà prise.

Il est évident que la commission scolaire, en tant que gouvernement démocratique local, autonome et responsable, ne peut se dire d'accord avec les pouvoirs alloués au gouvernement et au ministre. Ce serait pour elle renier ses responsabilités et laisser bafouer la démocratie. C'est pourquoi la commission scolaire demande que la loi n'alloue ni au gouvernement ni au ministre des pouvoirs entraînant une diminution de la responsabilité de la commission scolaire. Que la loi alloue plutôt des pouvoirs aux commissions scolaires afin de leur permettre de remplir leurs responsabilités et d'être en mesure d'exercer leur autonomie. Que la loi attribue uniquement au gouvernement le pouvoir de suspendre les pouvoirs d'une commission scolaire pendant ou après la tenue d'une enquête.

En conclusion, même si au cours de son étude du projet de loi 107, la commission scolaire a relevé des commentaires sur d'autres points qui concernaient, entre autres, l'ambiguïté de certains textes, des aspects techniques ou des éléments mineurs, elle a décidé de présenter dans son mémoire ses avis sur des éléments de la loi qu'elle juge importants en fonction de sa mission à remplir en tant que gouvernement démocratique, local, autonome et responsable.

Pour compléter sa rétroaction sur le projet de loi 107, la commission scolaire tient à souligner qu'un très grand nombre d'articles viennent prédéterminer des mécanismes et des modalités de fonctionnement qui appartiennent à la gestion de la commission scolaire parce qu'ils sont rattachés aux fonctions qui lui sont attribuées par le projet de loi lui-même. Pourtant, comme gouvernement local et compte tenu de son expertise et de son expérience dans la gestion des affaires scolaires, la commission scolaire est convaincue qu'elle est apte à faire face à toutes ses responsabilités et que la loi doit éviter de lui indiquer comment gérer.

C'est la fin de la présentation de notre mémoire, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Nous vous remercions beaucoup, M. Cherrier, pour la présentation du mémoire de la commission scolaire Balwin-Cartier. Je vous informe immédiatement qu'en fonction de nos règlements, étant aujourd'hui jeudi, étant donné que la Chambre siège à 14 heures, nous devrons terminer à 12 h 30. Je reconnais, dans un premier temps, le ministre de l'Éducation. M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, il me fait plaisir de saluer la direction de la commission scolaire Baldwin-Cartier qui est avec nous ce matin. Nous avons pris connaissance du mémoire qu'a lu tantôt M. Cherrier. Je pense que le mémoire témoigne du soin avec lequel la commission scolaire s'acquitte de son travail. C'est une commission scolaire très bien organisée, dont les résultats aux examens du ministère sont très impressionnants. Ce sont d'excellents résultats. Je veux profiter de l'occasion pour en féliciter la commission scolaire. La commission scolaire offre des services à la fois à une clientèle de langue française et à une clientèle de langue anglaise et je crois que son travail se déroule en harmonie. Et ce sont des choses qu'il est bon de souligner.

Il y a un grand nombre de suggestions contenues dans le mémoire qui nous est présenté. Elles seront retenues pour examen attentif et certaines, j'en suis sûr, pour insertion dans une version retouchée du projet de loi qui verra le jour au cours des prochaines semaines, à la suite de tout ce que nous avons entendu.

J'aurais deux brefs commentaires. Je crois qu'il faut introduire des nuances. Lorsqu'on qualifie la commission scolaire de gouvernement local, cela peut être de nature à créer de la confusion dans les esprits. C'est le cas sous certains aspects, mais il faut éviter de se laisser entrainer dans des comparaisons qui ne seraient pas assorties des nuances nécessaires. Déjà, si on compare avec la municipalité, c'est très différent. D'abord, la commission scolaire s'adresse à une clientèle qui est définie, délimitée par la loi, tandis que la municipalité s'adresse à tout le monde qui est sur son territoire. Les fonctions de la commission scolaire sont spécialisées; celles de la municipalité sont générales et diversifiées. Le service qu'offre la municipalité est un service

qui vient d'elle et sur lequel elle a l'entier ' contrôle, tandis que le service qu'offre la commission scolaire n'est pas un service qui est créé entièrement par elle. C'est un service sur lequel le gouvernement, surtout depuis qu'un ministère de l'Éducation a été institué, a une prise très importante. On ne peut pas comparer les deux facilement; ce n'est pas la même chose. Je crois qu'en jouant trop sur cette note sans mettre les nuances appropriées, on risque d'être conduits dans un cul-de-sac. Si vous me demandez ce que j'en pense. J'ai toujours évité... J'ai peut-être laissé tomber cette expression-là deux ou trois fois au cours des dix dernières années, dans des moments de faiblesse ou de distraction...

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: ...mais ce n'est pas ma conception. Il y a quelque chose qui est différent et je pense qu'on se le dit bien cordialement aussi, par souci de vérité réciproque, de franchise. Alors, il faut apporter là-dessus des nuances que je ne trouve pas dans le texte que M. Cherrier a lu d'une voix bien agréable tantôt.

Il y a un autre point, qui dérive de ceci évidemment. Quand on parle du partage des pouvoirs, il en dérive évidemment des malentendus. Vous parliez du pouvoir que le projet de loi accorderait au ministre d'établir la liste des spécialités professionnelles ou la liste des commissions scolaires qui seront habilitées à dispenser des cours d'éducation des adultes. C'est une raison purement fonctionnelle qui justifie cette disposition ou ces dispositions. C'est qu'on ne peut pas les avoir partout, offerts par toutes les commissions scolaires. On ne peut pas avoir toutes les options professionnelles. On ne peut pas avoir l'éducation des adultes offerte par toutes les commissions scolaires. Alors, il faut qu'une certaine carte soit établie, carte des endroits où seront, d'où partiront les services en question. En matière d'éducation des adultes, comme vous le savez, nous avons 212 commissions scolaires et il y a 82 services d'éducation des adultes. Il faut bien que quelqu'un décide au bout de la ligne où ils seront. Cela n'empêche pas qu'ils doivent être offerts à toute la population du territoire. Mais il y a de ces délimitations...

Je comprends votre réaction à ces articles du projet. Il y a peut-être lieu de les retoucher quelque peu pour dire, en dernière analyse, des choses comme cela, parce que la commission scolaire a un rôle très important aussi dans ces décisions. C'est tellement vrai que dans la mesure où les commissions scolaires d'une région peuvent se concerter entre elles pour dire au gouvernement: Nous serions d'accord que telle commission scolaire prenne cette responsabilité-ci. Le gouvernement, s'il a l'assurance que la qualité et l'économie seront là, sera très heureux de s'associer à ces démarches et d'endosser des résultats. Mais là où il y a des désaccords - et il y en a - il faut bien que quelqu'un puisse trancher quelque part. C'est l'esprit de ces articles. Je défie qui que ce soit de venir faire une démonstration contraire. Je l'ai demandé à tous ceux qui sont venus depuis le début des audiences de la commission. Je n'ai jamais eu de réponse sur ces questions. Et, si on peut nous faire la preuve que cela n'a pas de bon sens, que cela sort du raisonnable, très bien. On emploiera les qualificatifs qu'on voudra autrement. Il n'y en a pas dans votre mémoire. Je vous en félicite parce que c'est un mémoire qui argumente sur un ton très raisonnable. Mais je vous pose la question ici, M. le président. Je vais vous la poser dans une seconde. S'il y a des points sur lesquels vous pouvez réellement nous faire la preuve qu'il faudrait que telle responsabilité soit transférée aux commissions scolaires à partir du ministre ou du gouvernement, j'aimerais que vous me les indiquiez clairement parce que j'ai l'impression que nous avons recherché un équilibre raisonnable fondé très largement sur les vues que nous avons entendues depuis quelques années et aussi sur les constatations que nous avons faites depuis deux ans et demi que nous sommes au pouvoir.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Cherrier ou M. Mongeau.

M. Mongeau: Je peux tenter, M. le Président, de répondre. D'abord, j'ai pris bonne note que le ministre avouait avoir quelquefois certaines faiblesses.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Mongeau: Mais sérieusement...

M. Ryan:...

M. Mongeau: Pardon?

M. Ryan: Sept fois le jour.

M. Mongeau: Sérieusement, M. le ministre. Je vais vous expliquer dans mes mots à moi ce que j'entends par ce qu'on appelle soit le gouvernement local ou peut-être l'expression que j'aime le mieux - je ne me chicanerai pas sur l'expression - le pouvoir local. Vous dites: Contrairement aux municipalités, les commissions scolaires ne s'adressent pas à tout le monde. Avec tout le respect que je vous dois, je ne partage pas votre opinion, M. le ministre, parce que, premièrement, les commissaires sont élus par tout le monde et on ne parle pas uniquement des services que doit rendre une commission scolaire, mais on parle aussi des valeurs qu'on veut voir les jeunes adopter au sein d'une génération qui devient les adultes de demain. Deuxièmement, même chez la clientèle à laquelle on s'adresse, on s'adresse à tout le monde, par le truchement

de l'éducation aux adultes aussi. On est même rendu avec une catégorie qu'on appelle les jeunes adultes. On a les jeunes jeunes, on a les jeunes adultes et, ensuite, on a les adultes. Il y a les analphabètes. Je vous assure qu'il ne reste plus grand monde à qui on ne s'adresse pas si je le prends dans les termes dans lesquels vous le prenez. Mais moi, je ne le prends pas dans ces termes-là.

Vous dites, M. le ministre: Depuis qu'il y a un ministère de l'Éducation, c'est normal, c'est ci et c'est ça. Ça, c'est l'historique. C'est vrai que c'était normal en 1964. Imaginez, le Québec a attendu jusqu'en 1964 pour avoir un ministère de l'Éducation. Entre vous et moi, c'est effrayant. Mais c'était en 1964. C'était normal à ce moment-là que, pour partir, il y ait un phénomène de centralisation au niveau du ministère de l'Éducation. Je trouve cela normal. Seulement, une fois que les grands paramètres, les grands objectifs de l'éducation nationale au Québec sont établis, il est normal qu'on décentralise à nouveau. Cela, à un moment donné, un de vos prédécesseurs, M. François Cloutier, l'avait compris, puisqu'on 1974 il a publié un document qui s'appelait. Pour une véritable décentralisation. H faudrait peut-être ressortir ce document. Je l'ai encore dans ma bibliothèque, M. le ministre. On avait commencé à faire des consultations au Québec sur ce document du ministre de l'Éducation du temps. Évidemment, et je ne porte pas de jugement, il y a eu un changement de gouvernement, et sont arrivés d'autres ministres et d'autres, et aujourd'hui... Mais c'est fini le phénomène de la centralisation, si on croit au pouvoir local.

M. le ministre, vous me demandez de vous donner des exemples. Je ne veux pas tomber là-dedans parce que, pour moi, ce n'est pas de trouver un exemple en particulier. Bien sûr, on pourrait en trouver. On vous en cite dans le mémoire. Oui, on vous en cite dans le mémoire. On l'a lu d'ailleurs tantôt, M. le ministre. Mais ce qui est important, c'est la répartition des pouvoirs entre le ministère de l'Éducation et le pouvoir local. Vous dites à un moment donné qu'il faut bien que quelqu'un tranche. Oui. Je dis que le pouvoir local est capable de trancher si on lui en donne les moyens. Il est capable de trancher. D'ailleurs, il l'a fait bien des fois déjà, avant même que ces nouveaux pouvoirs que le ministre s'attribue, en tant que ministre, bien sûr, dans la loi soient là. Ces pouvoirs n'étaient pas là et le pouvoir local a pris ses décisions à partir de ce moment. On ne peut pas morceler chapitre par chapitre. C'est une question de philosophie, au fond, une question d'idéologie. Ou on croit au pouvoir local ou on n'y croit pas.

Chose sûre, quand on regarde le projet de loi 107 tel quel, sans aucun amendement - je sais que vous avez dit que vous alliez en apporter - premièrement, les pouvoirs d'administration courante sont donnés au directeur général; deuxièmement, la commission scolaire n'est pas obligée d'avoir un comité exécutif; troisièmement, s'il y en a un, il doit faire entériner ses décisions par le conseil des commissaires; quatrièmement, la commission scolaire ne peut dire quelle sorte de comité elle voudrait établir; c'est déjà décidé dans la loi, c'est X comités; sixièmement, les pouvoirs du ministre sont augmentés; septièmement, les pouvoirs du gouvernement sont renforcés. On demeure toujours élus au suffrage universel, mais, à part ça, je ne sais pas ce que... Une fois qu'on doit suivre les règles budgétaires du ministre et le régime pédagogique, le taux de taxe est limité à 6 % et le reste est dans le projet de loi 107. À part se faire élire au suffrage universel, pour autant que tout le monde ait compris la complexité du système avec les quartiers superposés et tout ça. On est là, c'est vrai qu'on est là et qu'on a été élus au suffrage universel, mais c'est à peu près tout, avec tout le respect, bien sûr, que je dois. C'est ça: Ou on croit au pouvoir local ou on n'y croit pas. (12 h 15)

Cela fait longtemps que le temps de la décentralisation est arrivé, mais on ne le fait pas. On l'a dit à propos du projet de loi 40, on l'a dit à propos du projet de loi 3 et on le dit encore pour le projet de loi 107, mais il n'arrive pas. C'est le contraire, on centralise encore.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Mongeau.

M. le ministre, une dernière intervention.

M. Ryan: Je signalerai à M. Mongeau que, s'il veut faire une lecture complète du projet de loi, il trouvera au moins une vingtaine de pouvoirs nouveaux attribués aux commissions scolaires. Je lui en donnerai la liste tantôt avant qu'il ne parte, si cela l'intéresse.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Avez-vous terminé, M. le ministre?

M. Ryan: Oui.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la porte-parole de l'Opposition et députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président.

M. le Président, madame et messieurs, à nouveau bonjour. À entendre M. Mongeau, j'aurais le goût de lui suggérer de venir me donner un coup de main.

Il dit, je pense, de façon plus éloquente que je ne saurais le faire, ce que je dis depuis le début de cette commission, que l'économie générale de ce projet de loi vient réduire les obligations du ministre et augmenter ses pouvoirs. En guise d'exemple, je pense à la gratuité scolaire pour les adultes, à la définition des services complémentaires et aux services de garde à l'enfance en milieu scolaire et à un

certain nombre d'obligations de cette nature qui étaient faites au ministre parce que, du moment où on indique qu'une commission scolaire est obligée d'offrir un certain nombre de services, il va de soi que la responsabilité du gouvernement, c'est de lui en offrir les moyens. C'est ce que j'estime être les devoirs du gouvernement qui n'apparaissent plus dans le présent projet de loi.

Le ministre dit souvent: II n'y a pas plus de pouvoirs qu'il y en avait. À la très grande différence qu'il prend des pouvoirs qui étaient de l'ordre du règlement pour les introduire dans la loi. Dans beaucoup de cas, il légifère, alors qu'on sait tous combien il nous aura fallu d'années pour modifier la Loi désuète sur l'instruction publique parce qu'il est difficile de modifier une loi. Un règlement, c'est plus souple et, dès qu'on prévoit l'obligation de faire des consultations, c'est beaucoup plus souple et plus facilement malléable. Cela s'adapte mieux aux situations.

D'ailleurs, le ministre augmente ses pouvoirs et diminue ses obligations, y compris celle de consulter ses différents partenaires. Vous aurez remarqué que cela aussi disparaît dans la loi.

Je voudrais vous dire que, comme vous, j'apprécie que le ministre reconnaisse qu'à l'occasion il a ses faiblesses. Je vous dirai qu'il m'a été donné de constater que c'est peut-être une façon un peu facile de s'en sortir. Il y a eu de nombreuses faiblesses, ne serait-ce que toute l'énergie qu'il a mise pour défendre la gratuité à l'éducation des adultes au cours des 30 dernières années, si je ne m'abuse. Cela ne vous vieillit pas trop, M. le ministre. On voit que, dans le projet de loi, la gratuité n'est pas assurée. C'est une première faiblesse qu'il commence à avouer. L'autre faiblesse qu'il nous avouait ici, en cette commission, c'est que concernant le respect de l'intégrité physique des élèves, c'est-à-dire les punitions corporelles, il avait mené ici un débat intéressant, passionnant, duquel il garde un souvenir tout à fait heureux, pour ne pas dire amusant. On ne retrouve rien d'équivalent dans le projet de loi. C'est étonnant compte tenu du discours auquel il nous avait habitué au cours des années, entre autres, sur le respect des pouvoirs et des juridictions de ce gouvernement local que constitue une commission scolaire.

Je vous avoue en toute simplicité, je dois être un peu naïve, mais je l'avais cru. Je dois déchanter parce que le projet de loi est très centralisateur. Le ministre dit: On donne plus de pouvoirs aux commissions scolaires. Je pense que transférer des pouvoirs réglementaires dans une loi, c'est important. La différence entre les deux n'est pas mineure. Je ne partage pas l'avis du ministre selon lequel il faille absolument que le gouvernement intervienne en ce qui touche les services à l'éducation des adultes à offrir. Je ne pense pas qu'aucune commission scolaire n'aurait l'indécence d'offrir un cours dans lequel il n'y aurait plus d'élèves. Cela ne fonctionnerait pas. C'est faire preuve d'un manque de confiance absolument inacceptable de la part du ministre qui, par ailleurs, accorde la plus grande confiance aux écoles privées qui, elles, ont toute latitude, y compris celle d'offrir des services à l'éducation des adultes pour lesquelles le ministre ne se sent pas obligé de dire: Vous offrez cela et pas cela. Du moment où ils sont en mesure d'offrir un certain nombre de services, ils les offrent. De même le ministre n'a pas le pouvoir de contingenter - pour les écoles secondaires je suis moins informée, mais pour les collèges je le sais - dans les collèges privés du Québec. On sait bien qu'il a l'obligation à certains égards, mais il a certainement le pouvoir de le faire dans les collèges publics.

C'est une approche extrêmement différente selon qu'on fasse ou non confiance. Je pense que vous avez raison là-dessus. Moi, je pense qu'il faut absolument décentraliser et ce que le ministre fait est à contre-courant. J'ai peine à le suivre et à le comprendre là-dedans. J'espère cependant que le ministre sera plus sensible aux arguments que toutes les commissions scolaires sont venues faire valoir en cette commission parlementaire. Non seulement les commissions scolaires, parce qu'on pourrait dire qu'elles sont juge et partie, mais la très grande majorité des intervenants lui disent deux choses, ici, en commission parlementaire: C'est: Établissez des commissions scolaires linguistiques et redonnez-leur le pouvoir, évitez de prendre les pouvoirs que vous êtes en train de vous donner. Mais avant tout allez donc vérifier la légalité de votre loi avant de commencer à jouer là-dedans.

En gros, je pense que, comme c'est la dernière journée de trois semaines en commission parlementaire sur ce sujet, l'essentiel est là. La grande majorité des intervenants disent: Le seul moyen de le faire, c'est de négocier l'article 93. Autrement, vous êtes en train de nous faire perdre du temps. Moi, j'aimerais poser - il nous reste peu de temps - quelques questions. Dans vos recommandations - et je vais passer par les pages 36, 37 et 38 de vos recommandations, cela va aller plus rapidement - vous parlez de vérifier la constitutionnalité du projet de loi. Est-ce que, pour vous, cette vérification auprès de la Cour d'appel, cette demande d'en référer auprès de la Cour d'appel devrait être faite sur toute la loi ou simplement sur les quelques articles qui touchent la structure scolaire.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Mon-geau.

M. Mongeau: C'est-à-dire que je pense que, normalement, c'est peut-être sur la structure scolaire, à mon sens.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Y a-t-il d'autres intervenants de votre groupe? Je vois que vous semblez interroger vos collègues.

M. Mongeau: Non, mais...

Mme Blackburn: Non, cela va, c'est parce qu'il y a d'autres commissions scolaires qui font valoir - je pense au PSBGM - que même en matière de pouvoirs...

M. Mongeau: Non. Nous, lorsqu'on dit qu'on est d'accord, d'ailleurs, pour en référer à la Cour d'appel, c'est évidemment sur la question de la structure linguistique par rapport à la structure confessionnelle. C'est là-dessus.

Mme Blackburn: Bien. Vous parlez des services complémentaires et je dois dire que là-dessus, je ne sais pas si je vous ai bien compris. À la page 16 de votre mémoire, parlant des services complémentaires destinés aux élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, vous dites: "II serait malencontreux de l'engoncer dans la loi, venant restreindre ainsi les objets de futures négociations", parce que c'est déjà prévu dans les conventions collectives des enseignants, si je ne m'abuse. Est-ce exclusivement pour cette raison parce que dans la loi 3 - on l'oublie trop facilement que c'était une loi, et si le ministre avait maintenu son appel sur les articles touchant la structure scolaire, tout le reste de la loi s'appliquerait - on définissait les services que la commission scolaire devait offrir? J'en tirais la conclusion que, du moment où les services de la commission scolaire étaient définis dans la loi, le ministre avait la responsabilité d'assurer les ressources financières qui lui permettaient effectivement d'offrir et de rendre ces services. Ici, vous semblez dire qu'on ne devrait pas définir ce service dans la loi. Est-ce exclusivement pour ce service ou pour les autres services?

M. Mongeau: Ce qu'on dit, Mme la députée - si vous me le permettez, M. le Président - c'est simplement au sujet de la formation du comité et non pas des services à donner. On dit que ce comité existe déjà en vertu des conventions collectives. Mais c'est une exemple qu'on donne, qui est rattaché au point principal dont je parlais tantôt en ce qui concerne le pouvoir local. Nous, on dit que c'est la commission scolaire qui doit décider, de quel comité elle a besoin ou non et que ce n'est pas la loi qui devrait venir nous imposer cela. C'est cela, le principe de base. L'un des exemples, c'est celui-là. D'ailleurs, celui-là, en plus, existe déjà en vertu des conventions collectives. Voilà, c'est cela.

Mme Blackburn: Cela va, je le revois dans cette perspective. À ce moment-là, sauriez-vous nous dire si vous seriez plutôt favorable à ce qu'on inscrive dans la loi une série de services complémentaires que la commission scolaire serait tenue d'offrir, comme ce l'était dans la loi 3 où on voyait une série de services que la commission scolaire était tenue d'offrir? La conclusion que j'en tirais, c'est que, du moment qu'on indique les services qui doivent être offerts... Il s'agit de l'article 24: "Les services complémentaires comprennent notamment: des services de promotion des droits et responsabilités de l'élève; des services de participation de l'élève à la vie de l'école; des services d'encadrement et de surveillance; des services d'orientation scolaire et professionnelle; des services de santé et de services sociaux; des services d'animation pastorale catholique ou d'animation religieuse protestante; des services de psychologie; des services d'orthophonie...; des services de recherche d'emploi." On indiquait un certain nombre de services que la commission scolaire devait offrir. On peut donc en tirer la conclusion logique que le gouvernement devait offrir les ressources nécessaires pour ce faire. Est-ce que vous seriez en faveur ou non de l'inscription dans le projet de loi actuel de la définition de ces services?

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Mongeau.

M. Mongeau: Moi, je ne vois pas la nécessité de mettre ces choses dans la loi. Je pense que cela existe déjà dans le régime pédagogique. Je ne vois pas la nécessité de mettre cela dans la loi, mais c'est toujours en vertu de mon optique... Écoutez, laissez les gens tenter de répondre à leurs besoins et que le ministère fixe les grands objectifs nationaux, les balises, les standards minima de chacun des services, ces choses-là, mais ensuite laissez-nous souffler. Excusez-moi d'employer cette expression, mais c'est à peu près cela.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Mme la députée.

Mme Blackburn: En page 18 de votre mémoire - je pense que c'est sous le chapitre "Les ressources de la commission scolaire" - vous dites, en parlant de ces ressources: "...il n'en est pas de même du tout...; afin de répondre à cette exigence" - c'est-à-dire d'offrir un service de garde à l'heure du midi - vous dites que cela demande à la fois des espaces, des équipements et du personnel, et que cette obligation est difficilement acceptable du moment où on n'a pas la garantie que les ressources suivront. Vous n'abordez pas l'obligation de l'école qui était faite dans la loi 3, d'offrir des services de garde en milieu scolaire.

Je pense à tous ces enfants qui entrent entre 11 h 15 et 11 h 30 dans une maison vide; ce sont de jeunes enfants, qu'on appelle les enfants qui se promènent avec la clef dans le cou; ils terminent à 15 h 30 et ils n'ont pas ce service. Je connais, parce que cela a été porté à mon attention, plusieurs écoles qui refusent systématiquement d'offrir de tels services actuellement parce que, la loi 3 ne s'appliquant pas, ils n'ont pas l'obligation de le faire. Dans le projet de loi actuel, on dit que l'école "peut

offrir" un tel service, ce qui laisse à la discrétion et au pouvoir du directeur de l'école d'organiser de tels services, indépendamment des besoins de la collectivité. Je m'en étonne. Quelle est l'opinion de la commission scolaire sur cette question, à savoir si on doit ou non offrir des services de garde en milieu scolaire et si la commission scolaire ou l'école doit être obligée de les offrir? (12 h 30)

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Mon-geau.

M. Mongeau: Je dois vous dire qu'en pratique, nous, on n'a pas dans notre commission scolaire le problème que vous soulevez. Il y a des services de garde qui sont offerts dans les écoles là où les gens l'ont demandé et là où les gens ne l'ont pas demandé, il n'y en a pas. Il y a même certaines écoles où on se disait: Comment cela se fait qu'il n'y en a pas? On est allés revoir les parents et cette population, et on a dit: Vous êtes certains que vous n'en voulez pas, et ils ont dit: Non, on n'en veut pas.

Là, on ne peut pas en faire un juste pour le plaisir d'en faire un; ils n'en veulent pas. Encore une fois, je sais que ce n'est pas facile d'accepter ce que je dis, mais ce que je disais, d'un côté, pour le pouvoir local, cela sert également à ça. À ce jour, ce n'est pas obligatoire; c'est le rôle de la commission scolaire, elle établit ses règles, cela doit être autofinancé et on offre le service.

Mais je pense que, sur l'île de Montréal - je ne peux pas parler pour ailleurs - c'est un système qui fonctionne dans beaucoup d'écoles. Mais ce n'est pas un directeur d'école qui doit avoir la décision finale là-dedans. C'est la commission scolaire. Il n'y a aucun doute dans mon esprit. Je ne sais pas s'il y a eu des cas de refus sur I'île de Montréal. S'il y en a eu, je n'en ai pas entendu parler. Ailleurs, je ne le sais pas non plus. Mais, chez nous, je peux vous dire que le système actuel fonctionne très bien.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Voulez-vous conclure, madame, de la part de vôtre formation politique?

Mme Blackburn: On a porté à mon attention des cas où des écoles, de façon systématique, ont refusé l'organisation de services de garde en milieu scolaire. Il faut dire que la population de Montréal représente le tiers de la population étudiante du Québec et qu'il en reste deux tiers. Je pense qu'un service aussi important que celui de la garde en milieu scolaire ne peut être laissé à la discrétion d'un directeur d'école, selon sa propre perception des priorités.

Une toute dernière question et ce sera en même temps ma conclusion. Vous abordez la question de l'âge d'admission à l'école et, évidemment, des dérogations du ministre. On est en train de se demander si, finalement, le fait que cela n'apparaisse pas dans le projet de loi, ce n'est pas parce qu'il veut se garder le plaisir de choisir qui aura ce privilège d'être admis à l'école, alors qu'il n'a pas l'âge requis en vertu du régime pédagogique. C'était un engagement du Parti libéral.

On est à deux ans et demi de pouvoir et tout ce dont on a eu droit, cela a été des dérogations, alors que les commissions scolaires, dans la très grande majorité des cas, me dit-on, ne sont pas en mesure d'offrir des services professionnels pour les parents qui demandent une dérogation pour leur enfant.

J'ai deux questions. Chez vous, est-ce qu'il y a eu de nombreuses demandes de dérogation? Est-ce que la commission scolaire offre les services? Je présume que oui. C'est une commission scolaire relativement bien nantie. L'autre question, celle-ci: Est-ce qu'il ne serait pas préférable plutôt... C'est une question qui se fonde sur l'avis qui a été émis par le Conseil supérieur de l'éducation et qui suggère qu'au lieu de baisser l'âge d'admission en première année il serait préférable d'avoir des maternelles à plein temps?

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Mongeau, si vous voulez essayer de répondre d'une façon concise. On a déjà dépassé le temps qui nous a été alloué.

M. Mongeau: Je vous avoue, madame, qu'on ne s'est penchés sur la question des maternelles à plein temps. Mais je pense que le problème demeure toujours le même. Il y a des enfants qui ont cinq ou six ans le 1er, le 2, le 15 ou le 25 octobre et ils n'acceptent pas d'attendre un an pour aller à l'école. Lorsqu'on les fait évaluer par nos services professionnels, dans neuf cas sur dix, ils seraient près pour aller à l'école. Je pense que c'est cela, le problème.

C'est pour cela que nous sommes favorables, disons-nous dans notre mémoire, à ce que l'âge d'admission soit reporté au 1er janvier, comme cela l'était - j'oserais dire - dans mon temps, parce que je suis un enfant né entre le 1er octobre et le 1er janvier. Je suis même plus proche du 1er janvier que du 1er octobre. J'ai commencé ma première année à cinq ans et je ne pense pas que cela m'ait nui dans mon développement.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Moi aussi! Merci, M. Mongeau et je reconnais la députée de Jacques-Cartier. Mme la députée.

Mme Dougherty: M. le Président, vous avez demandé un pouvoir accru de taxation. Est-ce que vous êtes au courant du mémoire du PSBGM? Parce que le PSBGM a suggéré que le Conseil scolaire de l'île de Montréal soit autorisé, sans référendum, à prélever une taxe spéciale, non scolaire, jusqu'à concurrence de 0, 05 $ par 100 $ d'évaluation.

Une voix: Oui.

Mme Dougherty: Alors, j'aimerais avoir votre réaction là-dessus.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Mon-geau.

Mme Dougherty: C'est pour les milieux défavorisés.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela va.

M. Mongeau: II n'y a pas de doute que le plafond de 6 % de la taxe scolaire est atteint. On l'a atteint à Montréal depuis 1984, 1985. Il n'y a pas de doute là-dessus. Tant et aussi longtemps qu'il y a des coupures budgétaires annuelles et que les dépenses nettes globales des commissions scolaires, sur lesquelles est finalement basé le taux de 6 %, diminuent, cela reste peut-être à 6 % mais cela diminue parce que ce sont 6 %, des dépenses nettes globales. Il n'y a aucun doute dans mon esprit que ce plafond doit disparaître. À mon sens, il doit disparaître. Je peux être d'accord pour qu'on aille chercher un certain montant d'imposition pour les milieux défavorisés. On pourrait peut-être discuter du montant, s'entendre; je pourrais être d'accord là-dessus. D'autant plus que dans le projet de loi 107, pour le faire, il faut passer par un référendum. À mon avis, cela n'a pas de sens de dépenser 5 000 000 $, parce que vous savez qu'un référendum coûte le même prix qu'une élection scolaire à Montréal, pour aller chercher 1 000 000 $ pour les milieux défavorisés. Il y a quelque chose qui ne va pas.

Je n'ai rien contre la formule suggérée par la CEPGM, Mme la députée. J'étais au courant et je l'ai vue dans leur mémoire. Je n'ai rien contre, mais je pense qu'il faudrait creuser un peu plus. Comme principe, il est évident que le plafond des 6 % ne peut pas s'appliquer lorsqu'on a des devoirs particuliers en matière de rattrapage dans les milieux défavorisés.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Mongeau. M. le ministre, en guise de conclusion.

M. Ryan: Oui. Puisqu'on parle de taxation, j'en dirai peut-être quelques mots. Vous savez que cette limite des 6 % a été instituée par la loi 57, dont l'auteur était le chef actuel du Parti québécois. Or, si la députée de Chicoutimi voulait aider à persuader son chef qu'il y aurait peut-être des modifications à apporter à ce sujet-là...

Mme Blackburn: II n'est pas au pouvoir, que je sache.

M. Ryan: Je le sais bien, mais s'il était prêt à reconnaître...

Mme Blackburn: Franchement...

M. Ryan:... publiquement les conséquences de ce qu'il a fait à ce moment-là, de la loi contre laquelle avait voté l'Opposition dont je faisais partie, cela pourrait rendre service pour le développement d'une opinion plus favorable à cette position des commissions scolaires.

Je crois qu'il faut reconnaître que cette limite crée de sérieuses contraintes. Nous en sommes conscients. Politiquement, il n'a pas paru possible, à l'heure actuelle, de faire des changements là-dessus. Mais c'est un objectif dont je reconnais la validité. Je pense qu'il appartient aux commissions scolaires de faire leur travail auprès de l'opinion publique pour que celle-ci devienne plus favorable. Jusqu'à maintenant, les municipalités opposent un mur infranchissable. Comme elles sont très vigilantes, peut-être encore plus que les commissions scolaires, on en est à ce point. Je ne pense pas que, politiquement encore une fois, il soit possible, à court terme, de modifier cela. Nous avons l'esprit ouvert de ce côté.

Je pense que tant et aussi longtemps qu'on va en rester au point actuel, on peut bien faire les théories qu'on voudra, mais il y a des conséquences qui dérivent de cela, que vous mesurez comme moi. Il est évident que, quand 93 % ou 94 % des revenus des commissions scolaires proviennent de subventions gouvernementales, on ne peut pas s'en aller dans un régime de décentralisation trop forte parce que ceux qui distribuent ces subventions ont le devoir d'en rendre compte devant l'opinion publique, devant l'Assemblée nationale, devant l'Opposition, etc. C'est un devoir qui est très exigeant. Quand on réussira à rétablir un certain équilibre à la source, je pense que les autres questions vont peut-être se poser dans une perspective quelque peu différente.

J'ajoute ce point-ci. Au Québec, on s'était orientés depuis une vingtaine d'années dans un régime de dépenses élevées. C'était un régime plus confortable que celui de la moyenne canadienne. Il a fallu faire des coupures. Il a fallu mettre de l'ordre là-dedans. C'est un travail qui se poursuit depuis sept ou huit ans et qui, à mon point de vue, est pratiquement terminé maintenant. Je pense qu'on va pouvoir aller vers un régime de souplesse un peu plus grande. Je le souhaite vivement.

Je renouvelle la demande que j'ai formulée et à laquelle le président m'a répondu en termes très généraux tantôt. On est prêts à examiner l'affaire des responsabilités. Si vous voulez prendre acte de tous les pouvoirs nouveaux que nous donnons aux commissions scolaires, cela sera autant de pris. S'il y a des pouvoirs contestables qui sont donnés au ministre entre hommes raisonnables, entre femmes raisonnables, on est capables de les regarder et des modifications peuvent être apportées sur un point ou l'autre. Mais j'espère que nous serons gouvernés, dans

les discussions qui vont se poursuivre, par des considérations fonctionnelles et le souci de répondre à des besoins concrets. Dans cet esprit, je renouvelle ma vive appréciation pour l'excellente présentation que nous a faite la commission scolaire Baldwin-Cartier.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, M. Cherrier et M. Mongeau, je vous remercie. Je voudrais rappeler à M. Mongeau qu'il a eu une offre pour aller siéger dans l'Opposition. Libre à vous de l'administrer...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Parent, Sauvé): La commission parlementaire va suspendre ses travaux jusqu'après la période des affaires courantes, alors que nous accueillerons la commission scolaire du Sault-Saint-Louis, la commission scolaire Sainte-Croix et la commission scolaire Jérôme-LeRoyer. Nous suspendons nos travaux jusqu'après la période des affaires courantes.

(Suspension de la séance à 12 h 40)

(Reprisée 15 h 36)

Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente de l'éducation poursuit ses travaux et accueille les représentants de la commission scolaire du Sault-Saint-Louis. La commission scolaire du Sault-Saint-Louis est représentée par son président, M. Léo Pétrin. M. Pétrin, bonjour. On vous remercie d'avoir répondu à l'invitation de la commission permanente de l'éducation et de venir apporter un éclairage nouveau sur les projets de loi 106 et 107, projets de loi ayant trait aux élections scolaires et à la Loi sur l'instruction publique. Alors, je vous ai informé tout à l'heure de la situation assez exceptionnelle que nous vivions aujourd'hui. On accuse un peu de retard. On s'attend à un vote vers 17 heures ou 17 h 30. Alors, sans accélérer, sans presser personne, on va tenter de travailler de la façon la plus efficace possible. Si vous voulez nous présenter les gens qui vous accompagnent et enchaîner avec votre mémoire.

Commission scolaire du Sault-Saint-Louis

M. Pétrin (Léo): Bonjour, M. le Président. Au nom de la commission scolaire du Sault-Saint-Louis, je vous remercie de nous recevoir ici, aujourd'hui. J'aimerais vous présenter les membres qui m'accompagnent. À mon extrême gauche, M. Jules Poirier, président du comité exécutif et M. Rémi Poliquin, secrétaire général, à mon extrême droite, M. Gérard Latreille, commissaire et délégué au conseil de ITle, M. Arthur Des- lauriers, commissaire et membre du comité exécutif et M. Pierre Gabrièle, directeur général de la commission scolaire. Je suis M. Léo Pétrin.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, messieurs, bienvenue. M. Pétrin, nous vous écoutons.

M. Pétrin: M. le Président, nous avons préparé une formule abrégée de notre mémoire, qui contient cependant le texte d'une façon inchangée dans son ensemble.

La commission scolaire du Sault-Saint-Louis intervient pour souligner l'effort du législateur dans sa recherche pour moderniser la Loi sur l'instruction publique. Dans cet esprit, il convient de mentionner positivement le cheminement effectué depuis la loi 3. La volonté du législateur de conserver certaines valeurs traditionnelles comme valeurs fondamentales du système d'éducation est fort honorable, mais cela ne se fera pas sans causer quelques problèmes au chapitre de la discrimination, si le projet de loi reste tel quel. Nous constatons également que le texte soumis à la consultation doit être amélioré non seulement en ce qui concerne quelques détails techniques, mais également en ce qui concerne les structures où les commissions scolaires doivent être assurées de leur existence par des garanties équivalentes à celles qu'elles ont actuellement. Enfin, nous croyons que le style de la rédaction doit également être modifié.

À la page 2 de notre mémoire, nous mentionnons qu'il est heureux que l'on ait songé à consacrer formellement le droit des élèves à l'éducation, mais que l'on ne devrait pas pour autant limiter l'accès des adultes aux services éducatifs. Dans la même section du projet de loi, nous recommandons de conserver une définition plus traditionnelle et plus conforme au droit actuel à la notion de parent, qui devrait se limiter au véritable titulaire de l'autorité parentale.

Au chapitre de la fréquentation scolaire, à la page 4 de notre texte, nous croyons que l'article 15, tel que proposé dans le projet de loi, risque beaucoup plus de causer des embêtements aux directions d'école que d'améliorer l'administration de la fréquentation scolaire. Dans cet esprit, nous recommandons plutôt de refondre les articles de la Loi sur l'instruction publique actuelle afin de les rendre plus fonctionnels et de confier à la commission scolaire le signalement d'absences répétées au directeur de la protection de la jeunesse, laquelle commission scolaire doit s'assurer que les services éducatifs sont adéquatement fournis.

En ce qui concerne l'enseignant, nous vous recommandons de mieux circonscrire la nature des obligations qui sont décrites à l'article 19, afin que celles-ci ne deviennent pas des droits. Ces devoirs devraient être situés dans le cadre des services offerts par la commission scolaire

ou encore être décrits comme des obligations personnelles. Les modalités d'intervention pédagogique prévues à l'article 16, de même que les mesures concernant les instruments d'évaluation devraient être revues de façon que les droits prévus à l'article 16 en question ne s'exercent que dans le cadre prévu aux articles 211 et 213 du projet de loi 107.

Au chapitre de l'école, nous croyons qu'il n'apparaît pas pertinent d'exclure les adultes de l'école dans la mesure où cela peut handicaper l'harmonisation des programmes de formation professionnelle. Le processus de nomination du directeur de l'école devrait tenir compte des mesures contenues dans les décrets dans les cas de déplacement et de mutation. L'avis du conseil d'orientation ne devrait être donné qu'en ce qui concerne les premières nominations. La loi devrait contenir des précisions en ce qui concerne les devoirs du directeur d'école - article 48 - lesquels devraient s'exercer dans le respect des directives de la commission scolaire.

Toujours dans le chapitre de l'école, le conseil d'orientation pouvant coexister avec le comité d'école, il faudrait en tenir compte dans la rédaction de l'article 79, bien que le comité d'école apparaisse redondant lorsque l'on considère les fonctions des deux comités.

En ce qui concerne le droit d'ester, il devrait être réservé à la commission scolaire. Les visiteurs, à la section V, devraient avoir l'obligation de s'annoncer avant de se présenter à l'école.

En ce qui concerne les sections I et II du chapitre IV, nous soutenons que le gouvernement peut probablement faire ce qu'il entend dans son champ de compétence constitutionnelle, mais nous suggérons de retirer ces dispositions du projet de loi pour les soumettre à l'approbation des tribunaux dans un autre projet de loi. En effet, l'article 98 du projet de loi n'entrant pas en vigueur le 1er juillet 1989, mais à une date ultérieure fixée par le gouvernement, selon l'article 579, cela risque de paralyser quelque peu les opérations de la commission puisque c'est de cet article que celle-ci tire ses pouvoirs. De plus, nous nous interrogeons sur la légalité du gouvernement et même de l'Assemblée nationale, de pouvoir fixer le territoire des commissions scolaires. Enfin, nous nous interrogeons sur la nature de la garantie que l'on nous offre, ainsi que sur les dispositions discriminatoires que l'on retrouve aux articles 577 et 578 du projet de loi.

Toujours au chapitre de la commission scolaire, nous vous recommandons quelques modifications techniques au texte de loi proposé, dans les pages 12 et suivantes de notre texte, à savoir, en premier lieu: l'élimination de la notion de deuxième domicile ou de domicile réputé. Nous vous suggérons également de prévoir à l'article 137 une disposition autorisant le directeur général à ouvrir les séances lorsque nécessaire.

À la page 13 de notre texte, nous vous suggérons de préciser à l'article 142 que la commission scolaire ne s'exprime que par résolution, de faire disparaître la notion de règlement et de maintenir une disposition semblable à l'article 9 de la Loi sur l'instruction publique, actuelle afin d'atténuer les effets des articles imposant des délais de rigueur.

Nous vous suggérons également de maintenir une certaine uniformité dans la sémantique et de ne pas employer le terme "étude" au lieu du terme "délibérations". En ce qui concerne les procès-verbaux, nous vous suggérons de maintenir les dispositions actuelles contenues aux articles 320 et 329 de la Loi sur l'instruction publique, puisque ces articles sont conformes aux dispositions concernant la preuve dans le Code civil du Bas-Canada.

Ainsi, l'article 155 devrait être repris et l'article 154 ne devrait mentionner que ce que le registre des procès-verbaux devrait contenir, à savoir: les résolutions du conseil des commissaires ou du comité exécutif, s'il y a lieu. Ce comité exécutif devrait conserver l'administration courante de la commission scolaire et les décisions prises par ce comité ne devraient pas être entérinées par le conseil des commissaires.

Le projet de loi nous impose une nouvelle procédure en remplaçant le mécanisme de résolution par le mécanisme de réglementation qui n'est pas très approprié pour le secteur de l'éducation. Cette procédure s'avère, en premier lieu, beaucoup moins souple que celle que nous connaissons actuellement avec le mécanisme des résolutions. En second lieu, cette procédure est d'autant plus lourde qu'elle nous impose de multiples consultations préalablement à l'adoption d'un règlement. Enfin, le mécanisme de publication et d'avis qui complète cette procédure la rend encore moins pratique. Le tout sans compter les risques de contestation plus importants au simple niveau de la forme.

Au chapitre des ressources financières, nous nous interrogeons sur le bien-fondé de l'article 245 du projet qui distingue inutilement selon nous les commissions scolaires linguistiques et confessionnelles.

En ce qui concerne les ressources matérielles, nous croyons que les mesures contenues aux articles 239 et 416 alourdissent considérablement le processus d'administration des contrats. Nous vous suggérons, en ce qui concerne le Conseil scolaire de l'île de Montréal, de limiter ses fonctions à la répartition de la taxe foncière, la dette obligataire, les milieux défavorisés et l'éducation interculturelle, et pour le reste d'en faire un organisme de services sur demande des commissions scolaires.

Au chapitre 6 du projet de loi, nous traitons du style de rédaction de la loi ainsi que de l'activité réglementaire. Le style large et vague de la loi est, d'une part, incompatible avec le style d'interprétation que les tribunaux seront appelés à faire et, d'autre part, il laisse une

place trop ample à la réglementation, comme nous l'indiquent les articles 413 et suivants du projet de loi.

Enfin, en ce qui concerne les articles 437 à 440 du projet de loi, à propos de la mise sous tutelle et de la retenue des subventions, nous les considérons comme exagérés et injustifiables.

Nous concluons donc en vous signalant que le projet de loi, tel que déposé, constitue un pas dans la bonne direction et que ce projet de loi devrait être scindé en deux parties. Une première partie pouvant contenir l'ensemble des dispositions proposées dans le projet de loi, mais en y retranchant les sections I et II du chapitre IV et en harmonisant le tout conformément à ce qui est ci-devant exposé, de manière à moderniser la Loi sur l'instruction publique que l'on connaît actuellement.

En ce qui concerne les dispositions litigieuses contenues aux sections I et II du chapitre IV, elles devraient faire l'objet d'un autre projet de loi, celui-ci pouvant être soumis à l'examen des tribunaux.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Pétrin de la présentation de votre mémoire et je reconnais dans un premier temps le ministre de l'Éducation. M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, je remercie la commission scolaire du Sault-Saint-Louis du soin avec lequel elle s'est penchée sur les deux projets de loi que nous examinons présentement à la commission parlementaire de l'éducation. J'ai pris connaissance, avec profit, des nombreuses observations que nous apporte le mémoire de la commission scolaire et je veux l'assurer que toutes ces propositions imbues d'esprit pratique et de souci de simplicité bien comprise seront examinées avec toute l'attention souhaitable.

Je voudrais peut-être en venir rapidement à quelques questions qui m'apparaissent pertinentes à la lumière de la lecture que j'ai faite du mémoire. Il y en a une, d'abord, qui m'a frappé. Vous parlez de l'omniprésence ou de la présence trop lourde de la réglementation dans le projet de loi. Vous dites à la page 2, en particulier: "II nous faut dénoncer une fois encore, le style large et vague de la loi qui laisse amplement place à la réglementation qui est nécessairement propre à engendrer des inquiétudes." Plus loin, vous donnez une explication et vous dites: "En particulier, on oblige la commission scolaire à procéder par réglementation plutôt que par résolution." Vous semblez trouver que c'est beaucoup plus pratique de procéder par résolution, comme vous le faites très généralement à l'heure actuelle. Pourriez-vous nous expliquer, un petit peu, le genre de difficulté que vous entrevoyez ici? Pourquoi il faudrait, selon vous, alléger le projet de loi de ce point de vue?

M. Pétrin: Si vous le permettez, je passerais la parole à M. Rémi Poliquin.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Poliquin.

M. Poliquin (Rémi): Oui, M. le Président, lorsque l'on parle du style large et vague de la rédaction du projet de loi, c'est évidemment en tenant compte de l'interprétation stricte que les tribunaux sont appelés à faire de la loi en question dans la mesure où on peut la qualifier de loi spéciale. Alors, dans cet esprit, un tel projet de loi amène inévitablement beaucoup de règlements, qui ne sont pas soumis au même processus d'adoption que la loi comme telle. Alors, les tribunaux étant appelés à interpréter le texte de la loi l'interpréteront nécessairement d'une manière stricte, et on risque à ce moment-là de se retrouver avec des interprétations qui n'étaient pas recherchées au départ lorsqu'on a rédigé la loi.

En ce qui concerne le processus de réglementation que l'on impose à la commission scolaire, il s'agit évidemment d'un alourdissement du processus actuel dans le sens où les résolutions, actuellement, n'ont pas besoin d'avis préalable, où les sujets discutes, les politiques de la commission scolaire n'ont pas besoin d'être adoptées après des avis, aucun avis d'aucune sorte. Alors que ce qu'on nous propose, c'est un processus qui nécessite, d'une part, beaucoup d'autres avis qu'on ne connaît pas actuellement. D'autre part, on nous demande aussi d'effectuer des consultations qu'on n'a pas à faire actuellement, avant ou en plus de procéder à ces avis. Je pense entre autres à l'article 226 du projet de loi où l'on demande à la commission scolaire de consulter les enseignants sur tout ce qui concerne les politiques à caractère pédagogique.

Actuellement, il y a beaucoup de ces politiques que l'on adopte par voie de résolution et que l'on modifie par voie de résolution assez facilement. Alors que, si on nous impose un processus de réglementation et de consultation chaque fois que l'on doit adopter ces politiques à caractère pédagogique, cela nous impose évidemment un processus beaucoup plus long et cela peut dégénérer en conflit de travail en fin de compte.

M. Ryan: Je vous remercie des explications. Je pense que ce sont des explications plausibles. On va regarder le projet de loi en pensant à ce que vous avez dit. Il y a sans doute moyen d'alléger des choses. Parfois on veut bien faire puis on dit: On est mieux d'en mettre plus que moins. Mais après avoir entendu des points de vue, des fois, on trouve que c'est peut-être mieux, à certains endroits, d'en mettre moins que plus. Ha, ha!

On va examiner le texte de nouveau en pensant à cette explication qui a été donnée, qui me paraît, en tout cas, fort vraisemblable.

Une autre question, sur l'éducation des adultes. Vous avez l'air d'avoir certaines inquié-

tudes à propos de la place qui est faite aux adultes dans le projet de loi. Vous en avez une, en particulier, à propos de l'article 35. Quand on met à qui l'école s'adresse; "la formation de l'élève autre que l'adulte", ce n'est pas pour exclure l'adulte, évidemment, mais c'est parce que ce chapitre est consacré à l'école des jeunes, puis il y a d'autres passages qui traitent de l'adulte. Mais vous, quelle difficulté voyez-vous, là, dans la manière générale dont nous parlons des adultes? J'aimerais avoir votre réaction en gros sur les différents articles qui parlent des adultes.

M. Pétrin: Peut-être que... Pardon. Notre directeur général pourrait sûrement vous parler de cela.

M. Ryan: Ha, ha! On l'attendait.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le directeur général.

M. Gabrièle (Pierre): M. le Président. En ce qui concerne les adultes, d'abord, le délai de six mois qu'il y a dans la loi, à l'article 2, délai avant qu'un adulte puisse avoir accès à une scolarisation, cela nous embête, parce que c'est une façon de restreindre l'accès de l'adulte à des services.

Ensuite, à l'égard de l'école elle-même, quand nous excluons l'adulte, actuellement, la commission scolaire du Sault-Saint-Louis est en train d'intégrer, dans ses écoles, les adultes, en faisant l'harmonisation des jeunes et des adultes dans le cadre du programme de formation professionnelle, qui est la politique du ministère de l'Éducation.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci M. Gabrièie. M. le ministre.

M. Ryan: L'idée qui sous-tend ce paragraphe dont vous parlez, c'est qu'on ne veut pas que les jeunes soient incités à quitter l'école prématurément.

On trouve que si on n'a aucun délai d'attente, à un moment donné, cela peut être une véritable incitation à quitter l'école ou les études régulières avant le temps, en se disant: On prendra des cours du soir. Puis, très souvent, cela n'aboutit pas à cela. On veut protéger l'intérêt du jeune. Mais vous ne trouvez pas que c'est une bonne manière de faire.

M. Gabrièle: Non.

M. Ryan: Déjà, vous avez des expériences, je crois.

M. Gabrièle: Oui. M. le Président. Ce qui arrive c'est que nous avons des décrocheurs potentiels. Nous avons aussi des élèves qui décrochent. Alors, quelquefois le milieu de vie ou même la structure pédagogique de l'école polyvalente ne va pas à un jeune. Alors, nous pourrions l'inscrire dans un centre d'éducation aux adultes. On obligerait, par le projet de loi 107, à maintenir un jeune dans la rue pendant six mois, s'il a décroché, sans lui accorder aucun service. Actuellement, les commissions scolaires ont la possibilité... Si on regarde les règles budgétaires du ministère de l'Éducation, un jeune peut être inscrit à la formation aux adultes dès le moment où il a l'âge de 16 ans. C'est dans la notion de clientèle subventionnée. Les commissions scolaires peuvent déterminer, par voie de résolution ou de règlement, qu'un jeune va continuer sa scolarité dans une polyvalente et se former par des procédures internes des comités de classement du jeune qui lui permettent d'avoir accès à la formation aux adultes. Mais ce que nous voyons là-dedans, c'est que ce jeune, s'il décroche, aura six mois à trainer dans les rues sans avoir aucun service, alors que nous pourrons récupérer ces jeunes décrocheurs dans la formation aux adultes.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. M. le ministre.

M. Ryan: J'aimerais que vous m'expliquiez les considérations que j'ai trouvées dans votre mémoire au sujet de l'aspect constitutionnel du projet de loi. Je n'ai pas trop bien saisi ce que vous vouliez dire. Nous disons qu'il y a l'article 93 qui crée des problèmes. Il y a des commissions scolaires protégées, d'autres qui ne le sont pas. Nous allons soumettre une série de questions à la cour pour clarifier cela avant de créer des commissions scolaires linguistiques. Qu'avez-vous à nous dire exactement là-dessus? Qu'est-ce qui fait une difficulté dans le projet de loi, d'après vous?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui, monsieur.

M. Pétrin: M. le directeur général.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Pétrin'? M. le directeur général?

M. Pétrin: C'est cela, oui.

M. Gabrièle: Ce que nous vous recommandions, M. le Président, c'est qu'il y ait deux projets de loi; qu'un projet de loi remodernise la Loi sur l'instruction publique et qu'on ne retrouve pas dans le même projet de loi la création de commissions scolaires linguistiques. L'idée de soumettre des questions devant les tribunaux, que ce soit dans un deuxième projet de loi séparé.

M. Ryan: Regardez...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui.

M. Ryan: Regardez. Est-ce qu'il y a d'autres

explications à fournir là-dessus? Cette suggestion nous a déjà été présentée. Nous allons examiner s'il est possible de la traduire dans les textes. Ce n'est pas sûr, parce que la formule des commissions scolaires linguistiques a beaucoup de ramifications dans l'ensemble du projet de loi, mais nous allons voir s'il y a des possibilités de ce côté. En tout cas, la suggestion nous a déjà été faite. Vous la reprenez.

M. Gabrièle: Nous voyions une forme pratique. En fait, la modernisation de la Loi sur l'instruction publique nous permettrait d'appliquer cette nouvelle loi et attendre que les tribunaux disposent...

M. Ryan: Très bien.

M. Gabrièle:... de la formation de commissions scolaires linguistiques et confessionnelles qui s'appliquerait par la suite.

Le Président (M. Parent, Sauvé): D'accord.

M. Ryan: Juste une dernière question, si vous me le per, ettez, M. le Président. Je ne sais pas si je me suis trompé, mais je crois que le président de la commission scolaire du Sault-Saint-Louis n'était pas à la table ce matin quand nous avons rencontré le Conseil scolaire de l'île de Montréal. Je voudrais vous demander ceci: Les passages qu'il y a dans votre mémoire au sujet du Conseil scolaire de l'île de Montréal, en quoi diffèrent-ils de la position du Conseil scolaire de l'île de Montréal et du projet de loi?

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Pétrin.

M. Pétrin: Ils ne diffèrent peut-être pas nécessairement de la position du conseil de l'île. Nous sommes évidemment partenaires du conseil de l'île. Je n'étais pas ici ce matin puisque je suis arrivé un peu plus tard que prévu, mais nous aimerions simplement que le Conseil scolaire de l'île de Montréal nous permette de présenter les services que nous voulons présenter et qu'il demeure comme service aux commissions scolaires qui sont partenaires du conseil de l'île.

Le Président (M. Parent, Sauvé): D'autres interventions du côté ministériel? Cela termine votre explication?

M. le directeur général.

M. Gabrièle: M. le Président, il y a une différence. Notre mémoire est différent de celui du Conseil scolaire de I'île de Montréal. Le conseil scolaire de I'île demande le statu quo actuel. Ce que nous demandons dans notre mémoire, c'est qu'il y ait certains pouvoirs qui soient laissés au conseil scolaire de I'île, tels que la taxation foncière, la dette obligataire, les milieux défavorisés, mais que, pour tout le reste, il devienne un organisme de services. C'est là la différence. (16 heures)

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci.

M. Gabrièle: C'est différent aussi du projet de loi 107 parce que ce projet de loi en fait un organisme de services, mais à la condition qu'il y ait une résolution de chacune des commissions scolaires, alors que nous ne voulons pas cela. Ce que nous voulons c'est simplement que ce soit un organisme de services à la disposition des commissions scolaires et les commissions scolaires qui veulent avoir un service donné vont payer pour à cet organisme.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela va.

M. Ryan: Juste une brève question, si vous me le permettez.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Allez.

M. Ryan: Comment les décisions seraient-elles prises de créer de tels services? Cela prendrait une majorité des membres à tout le moins. Si les deux commissions scolaires confessionnelles ont une majorité des membres, est-ce...

M. Gabrièle: C'est-à-dire que nous distinguons, M. le Président, entre l'organisme de services et l'organisme qui a le pouvoir d'utiliser le produit de la taxe pour donner des services.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela va. Mme la députée de Chicoutimi et porte-parole de l'Opposition en matière d'éducation.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je voudrais souhaiter la bienvenue aux représentants de la commission scolaire du Sault-Saint-Louis et, peut-être parce que le temps va nous presser tantôt, juste poursuivre dans le prolongement de la question du ministre, concernant le Conseil scolaire de I'île de Montréal. Dans la loi telle que libellée, le Conseil scolaire de I'île de Montréal ne pourrait pas offrir de services du moment où une commission scolaire se retire, si j'ai bien compris. Alors, dans cette hypothèse et selon la question du ministre, je pense qu'il fallait aussi entendre cela: Du moment où la CECM ou la PSBGM n'accepte pas des prestations de services faites par le Conseil scolaire de I'île de Montréal, elle se trouve ainsi amputée de la possibilité de le faire. Comment réagissez-vous à cela?

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le directeur général.

M. Gabrièle: Je ne le pense pas. Je vais vous donner un exemple de ce qui arrive actuellement. Au Conseil scolaire de l'île de Montréal, il y a un service qui a été offert, qu'on appelle le service sur la politique alimentaire. Il y a

actuellement des commissions scolaires qui se sont retirées de ce service. Cela n'implique pas qu'il n'y a pas de politique alimentaire dans les commissions scolaires qui s'en sont retirées, et pour les autres commissions scolaires qui sont demeurées, le conseil scolaire a pu mettre de l'avant un service de politique alimentaire pour les élèves.

Mme Blackburn: Si je comprends bien, c'est la situation actuelle et oui c'est juste. Mais cela ne serait plus la situation si le projet de loi était adopté tel quel.

M. Gabrièle: Je ne vois pas la différence.

Mme Blackburn: Alors, il faudrait y revenir. C'est le conseil scolaire, ce matin, qui nous a soulevé la difficulté que cela posait d'être incapable d'offrir des services du moment où une commission scolaire se retirait. Vous seriez donc contre, si mon interprétation est juste?

M. Gabrièle: C'est-à-dire...

Mme Blackburn: II y a un article dans le projet de loi - il faudrait que je le retrouve, on va vous le donner - qui prévoit que le Conseil scolaire de l'île de Montréal ne peut offrir des services qu'à la condition qu'il y ait l'unanimité.

M. Gabrièle: C'est l'article 400.

Mme Blackburn: Donc, dans cette perspective, l'exemple que vous venez de donner, les services alimentaires, le conseil scolaire ne pourrait plus les offrir. Êtes-vous pour ou contre? Êtes-vous en faveur d'une modification de l'article pour qu'on conserve le statu quo?

M. Gabrièle: Ce que nous proposons et que nous suggérons dans notre mémoire c'est que nous n'acceptons pas l'article 400 et nous n'acceptons pas non plus le statu quo.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la députée.

M. Gabrièle: Ce que nous voulons, je le répète, c'est qu'on délimite certains pouvoirs du Conseil scolaire de l'île de Montréal sur la taxe foncière, la dette obligataire, les milieux défavorisés et que pour tout le reste ce soit uniquement un organisme de services.

Mme Blackburn: Pour tout le reste, cela concerne les établissements, les écoles, etc.?

M. Gabrièle: Cela peut être n'importe quoi.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Un instant! Si vous voulez, monsieur, on va tâcher de s'entendre. Vous avez la parole, madame a la parole, mais pour autant qu'on se comprenne.

Alors, Mme la députée.

Mme Blackburn: J'aimerais que vous me donniez un exemple de ce que tout le reste représente. Actuellement, on sait que cela concerne les écoles, mais en vertu du projet de loi actuel il ne reste plus rien ou à peu près. Cela vide, pour ainsi dire, le conseil scolaire de ce qu'étaient ses prérogatives. Alors, je dirais: Est-ce que vous êtes d'accord avec ce projet de loi? C'était l'essence de ma question.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le directeur général, voulez-vous compléter?

M. Gabrièle: Oui. Quand je dis "pour tout le reste", je peux vous faire une liste de ce que pourrait être tout le reste. Si un groupe de commissions scolaires, huit, ou six, ou quatre, ou trois, décide de mettre de l'avant un projet de politique alimentaire, elles peuvent demander au conseil scolaire de coordonner ce projet et financer le conseil scolaire pour mettre de l'avant ce type de projet.

Un autre exemple. Si l'ensemble des commissions scolaires décident de mettre de l'avant un service de micro-informatique avec application pédagogique, elles peuvent demander au conseil scolaire de jouer ce rôle de coordonnateur. C'est un organisme qui jouerait un rôle de coordonnateur sur demande à partir de services que les commissions scolaires voudront avoir.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le directeur général. Mme la députée de Chicou-timi.

Mme Blackburn: Oui. En page 4 de votre mémoire, sur une tout autre question, vous pariez de la fréquentation scolaire et du contrôle des absences des élèves. Actuellement, vous dites que la procédure en vigueur aux articles 256 et suivants de la Loi sur l'instruction publique est désuète, mais que les articles 262, 272 et 273 s'avéraient quand même d'une certaine utilité. Est-ce qu'actuellement ces articles sont appliqués lorsqu'il s'agit d'absences des élèves ou si, finalement, pour l'essentiel, les cas ne se règlent pas à l'école?

M. Poliquin: Si vous me le permettez, M. le Président...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui, M. le secrétaire général.

M. Poliquin: ...c'est que les actuels articles 262, 272 et 273 de la Loi sur l'instruction publique que l'on connaît sont évidemment lourds dans tout le processus qui est exposé dans la loi actuelle. Cependant, il y a ces trois articles qui n'imposent pas un recours judiciaire et qui nous évitent souvent un recours même au directeur de la protection de la jeunesse.

Ce qui se passe chez nous, c'est ceci. Lorsqu'un cas devient lourd, où c'est évident que des parents ou des enfants ne respectent pas la fréquentation scolaire le directeur d'école en informe la commission scolaire et nous prenons les moyens, tel que c'est prescrit dans la Loi sur l'instruction publique actuelle, pour mettre en demeure les parents de respecter leur obligation. Aussi surprenant que cela puisse paraître, chez nous, cela a porté fruits. On n'a même pas eu besoin d'aller plus loin et on a évité de recourir au directeur de la protection de la jeunesse.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Mme la députée.

Mme Blackburn: Des organismes sont venus nous dire, concernant cette question, qu'effectivement le fait de référer immédiatement au directeur de la protection de la jeunesse était peut-être un peu lourd et qu'il serait peut-être souhaitable et intéressant qu'il y ait d'abord une référence à un centre des services sociaux, par exemple, avant d'aller à cette instance quasi judiciaire qui s'appelle le directeur de la protection de la jeunesse.

Est-ce que vous ne trouvez pas que ce serait juste à mi-terme entre les deux et qu'on pourrait, à ce moment-là, si l'enfant a des problèmes de comportement, mettre à sa disposition les services requis pour l'aider à mieux s'adapter? Vous ne trouvez pas un peu lourd, un peu formel le recours ou la transmission à la commission scolaire de ces cas?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, qui...

M. Poliquin: Oui, M. le Président. À la commission scolaire, on dispose de certains cas. On a un service aux élèves, pour commencer, qui peut régler certains cas sociaux. Évidemment, si cela devient trop lourd socialement, s'il y a des difficultés de comportement qui ne relèvent pas de la juridiction de la commission scolaire, si c'est vraiment un problème social, socio-familial, évidemment, un recours à un organisme dispensant ces services pourrait être une voie valable, pour autant qu'il puisse répondre à la demande. Ce qu'on regarde aussi, quand on parle de la direction de la protection de la jeunesse, c'est que, dans plusieurs cas, le directeur de la protection de la jeunesse est débordé et il ne peut pas toujours apporter toute l'attention requise pour chacun des cas qui lui sont soumis.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, monsieur. Mme la députée.

Mme Blackburn: En page 6 de votre mémoire, je dois dire qu'une première lecture a quelque chose de surprenant. Lorsque vous parlez des devoirs de l'enseignant, vous dites, en soulignant les articles 19.6°, 19.3° et 19.5°, qu'il ne faudrait pas que ces articles puissent justifier le droit d'obtenir des mesures de perfectionnement. Et vous me voyez très étonnée. Devant l'incapacité d'un enseignant d'atteindre ces objectifs, à quoi doit-il recourir? Se saborder? Démissionner? Je dois dire que j'ai été étonnée. Ce n'est probablement pas ce que vous vouliez dire, mais il me semble que l'enseignant qui est incapable de remplir ses devoirs, il faut qu'il ait un peu d'aide.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le directeur général.

M. Gabrièle: M. le Président, dans les conventions collectives qui régissent les conditions de travail des enseignants, est-ce qu'il y a un chapitre qui traite du perfectionnement? On dit qu'on préfère que ce soit traité à partir des conventions collectives. Dans le projet de loi 107, quand on dit, par exemple, aux articles 3 et 5, de prendre les moyens appropriés pour développer chez les élèves le respect des droits de la personne, on trouve cela tellement vaste et large qu'on a peur de se trouver confrontés à la chose suivante, c'est-à-dire qu'on nous dise: Écoutez, je ne peux pas prendre ces moyens-là. Vous allez me libérer pendant deux semaines, je dois aller me perfectionner. Ce n'est pas comme ça qu'on fait du perfectionnement d'enseignements ou d'autres employés. On fait une étude des besoins du milieu et, à partir d'une étude des besoins du milieu, on établit des sessions de perfectionnement.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Mme la députée, d'autres questions?

Mme Blackburn: Oui, mais très brièvement. Vous abordez, à quelques endroits, les pouvoirs du ministre, de façon assez sommaire cependant. Lorsque cette question a été abordée en commission, le ministre a dit: Faites-moi la démonstration que c'est vrai, parce que le fardeau de la preuve semble appartenir aux commissions scolaires, sauf que j'ai l'impression qu'elles sont également en train de s'organiser pour lui faire la démonstration qu'il y a une centralisation excessive dans ce projet de loi.

Il y a également des omissions dans ce projet de loi assez étonnantes ou encore, qui illustrent que, finalement, les commissions scolaires restent avec peu de pouvoirs, parce que parlant de commissions scolaires on a changé le terme "pouvoir" pour "fonction", de même que dans la présente loi on ne fait plus l'obligation aux commissions scolaires de rendre compte à la population de leur administration.

J'ai vu peu de commissions scolaires s'étonner de ce fait, qui semble indiquer qu'elles n'ont peut-être plus à rendre compte de grand-chose à la population, ce qui fait que ce n'est peut-être pas nécessaire de maintenir cet article dans le projet de loi. De même, on a l'impression que

cela ressemble à un lapsus, le fait qu'on ait changé "pouvoir" pour "fonction", un peu comme dans le cas du directeur d'école, d'ailleurs qui gère, contrôle, surveille. Je pense que ce serait à revoir. Mais ce sont tous des termes qui ont rapport à une situation ou à des fonctions de gérance et non d'administration. Cela n'a pas retenu votre attention?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Qui doit répondre? M. le président ou M. le directeur général? M. le directeur général.

M. Gabrièle: M. le Président, cela a attiré notre attention de voir que la commission scolaire perdait ses pouvoirs et que c'était remplacé par des fonctions. On aimerait qu'on nous maintienne la notion de pouvoirs au lieu de fonctions. Pour le reste, ce qui a attiré le plus notre attention, ce sont les fonctions du ministre de l'Éducation et la tutelle. On trouvait que la tutelle ou la vérification devenait plus draconienne. Ce qu'on demandait dans notre mémoire, c'était qu'on maintienne le statu quo de la Loi sur l'instruction publique actuelle. (16 h 15)

Le Président (M. Parent, Sauvé): En conclusion.

Mme Blackburn: En conclusion, M. le Président. Seulement un bref commentaire. Vous vous êtes inquiétés de la situation qui pourrait être faite aux adultes. Je vous ferais remarquer qu'à l'article 199 - cela a un côté assez surprenant, mais assez révélateur également - si on le relit bien, on dit: "Une commission scolaire peut, conformément aux règles budgétaires établies par le ministre, exiger une contribution financière pour un élève qui fréquente l'une de ses écoles, mais qui n'est pas un résidant du Québec, ou une personne visée à l'article 2." La personne visée à l'article 2, c'est l'adulte. Donc, l'adulte est considéré un peu comme une personne non résidante selon les termes de ce projet de loi. Cela a un côté un peu choquant.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Est-ce que vous voulez réagir à cela, monsieur?

M. Gabrièle: M. le Président, nous ne l'avons pas interprété de cette façon. Pour nous, la scolarisation de l'adulte est gratuite quand il a accès à une scolarisation qui mène à un diplôme d'études secondaires, sauf qu'actuellement toutes les commissions scolaires mandatées pour donner des services d'éducation aux élèves adultes demandent aux adultes une certaine contribution financière pour payer du matériel didactique ou l'ouverture d'un dossier. Ce ne sont pas des frais de scolarité, c'est pour payer du matériel didactique au même titre que pour nos élèves d'écoles secondaires. Quand ils achètent des cahiers d'exercices, il y a une contribution des parents. Les manuels sont gratuits, mais les cahiers d'exercices, les parents les payent. Alors, cela ne nous a pas frappés parce qu'on considérait que c'était le statu quo, puisque pour tout élève adulte et actuellement en ce qui concerne les règles budgétaires, c'est la même chose: la scolarité est gratuite pour les adultes. La seule chose que l'adulte paie, c'est le matériel didactique.

Mme Blackburn: Remarquez bien que si c'était le statu quo, ce ne serait pas indiqué là-dedans puisque, comme vous l'expliquez bien, les jeunes paient pour leur matériel scolaire et qu'ils ne sont pas compris dans cet article-là. Alors, si ce n'était qu'une question de matériel scolaire, on n'aurait pas cet article touchant les adultes.

Juste une dernière question, et je voudrais vous remercier tout de suite, parce que je sais que M. le Président ne me laissera plus le temps de le faire...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Ah non, soyez-en certaine!

Mme Blackburn: À combien s'élèvent en moyenne ces frais qui sont exigés des étudiants adultes qui s'inscrivent chez vous? On a avancé ici des chiffres assez élevés.

M. Gabrièle: M. le Président, je vais essayer de vous les donner de mémoire. Il y a une table de concertation des directeurs de l'éducation aux adultes pour toute I He de Montréal et de l'île de Laval qui est réunie dernièrement. Je peux vous donner le montant, c'est de l'ordre de 60 $.

Mme Blackburn: Par session?

M. Gabrièle: Par session ou si un élève s'inscrit à temps plein pour toute l'année, c'est 60 $ pour toute l'année et, en plus, il y a certaines catégories d'adultes qui sont exonérées de ces frais. Par exemple, l'adulte qui est bénéficiaire de l'aide sociale est exonéré de ces frais, l'adulte qui est employé de la commission scolaire est exonéré de ces frais s'il suit des cours et ainsi de suite.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Expliquez-nous ça. Cela vaut la peine qu'on prenne le temps d'entendre ça. Pourquoi un adulte employé de la commission scolaire serait-il exonéré des frais? C'est la même situation qu'on a vue dans les universités, n'est-ce pas? Expliquez-nous donc cela.

M. Gabrièle: Je vais vous donner la raison. Normalement, si je fais des changements technologiques, si j'installe, par exemple, des microordinateurs pour l'ensemble des services et qu'à ce moment-là les secrétaires sont obligés d'aller suivre un cours de mise à jour ou de perfectionnement en traitement de texte, bien sûr, comme

j'ai un service de l'éducation aux adultes chez nous, je vais lui demander d'organiser les cours. Il ne me chargera pas de frais pour organiser ces cours. Voilà un exemple.

Le Président (M. Parent, Sauvé): C'est une explication. Je vous remercie. Madame, si vous voulez conclure, au nom de l'Opposition.

Mme Blackburn: Je vous remercie de votre participation aux travaux de cette commission. Vous comprendrez que vos réponses ont suscité plusieurs questions chez moi. Si on avait un peu plus de temps, j'aurais aimé mieux comprendre votre fonctionnement et savoir, par exemple, lorsque vous parlez des 60 $ pour les adultes pour toute une session, si c'est 60 $ s'ils prennent seulement un cours dans la session, si cela les exempte d'acheter leurs cahiers d'exercices s'ils en ont besoin ou si c'est requis pour leurs études. Alors, j'avais un certain nombre de questions de cette nature. Par exemple, vos employés qui ont la gratuité à l'éducation des adultes, cela touche-t-il aussi les employés à temps partiel et les employés à la pige et les employés occasionnels? Alors, c'étaient autant de questions que j'aurais aimé vous poser, mais le temps file et on va devoir retourner en Chambre tantôt. Je vous remercie infiniment de votre participation.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je reconnais le ministre de l'Éducation en conclusion.

M. Ryan: Je remercie beaucoup la commission scolaire du Sault-Saint-Louis. On a reçu un mémoire très intéressant. On va continuer l'examen de ce mémoire, surtout sur les points qui ont été discutés cet après-midi, mais il y en a plusieurs autres que j'aurais voulu soulever. Malheureusement, le temps se fait court et on est obligés de s'interrompre ici. On aura l'occasion de continuer cette discussion sous d'autres aspects, sous d'autres cieux.

Alors, merci beaucoup.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je veux aussi vous remercier pour votre compréhension de la situation spéciale que nous vivons aujourd'hui, avec les votes qui s'en viennent. On est obligés de précipiter un peu la rencontre. Alors, encore une fois, merci beaucoup.

Nous suspendons nos travaux pour quelques minutes, alors que nous accueillerons, immédiatement après la commission scolaire du Sault-Saint-Louis, les représentants de la commission scolaire Sainte-Croix.

(Suspension de la séance à 16 h 21)

(Reprise à 16 h 23)

Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre, s'il vous plaît! J'invite les membres de la com- mission de l'éducation à reprendre place. Je salue d'une façon toute particulière nos amis de Sault-Saint-Louis. Bon voyage de retour à Montréal!

J'inviterais les membres de la commission à prendre place. La commission poursuit ses travaux en accueillant les représentants de la commission scolaire Sainte-Croix, laquelle est représentée ici par sa présidente, Mme Judith Lortie-Hinse. Mme Hinse, la commission consacrera à l'audition et à la discussion avec votre commission scolaire une période d'environ 45 minutes. Je vous invite immédiatement à commencer la présentation de votre mémoire et aussi à nous présenter les gens qui vous accompagnent, de façon que nous puissions voir leur nom dans le Journal des débats. Mme la présidente, nous vous écoutons.

Commission scolaire Sainte-Croix

Mme Lortie-Hinse (Judith): Merci, M. le Président. À ma droite, vous avez le directeur général, M. Pierre Grou, à ma gauche, le secrétaire général, Me Gauthier. Il y a également dans la salle des commissaires qui sont venus nous entendre: Mme Madeleine Benoît-Gougeon, déléguée au conseil scolaire, M. Ibrahim Michel Sabbabh, membre de l'exécutif et Mme Louise Côté, représentante du comité de parents, qui siège à la table des commissaires.

M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs les membres de la commission parlementaire, c'est avec intérêt que le conseil des commissaires de la commission scolaire Sainte-Croix a reçu et analysé les projets de loi 106, Loi sur les élections scolaires, et 107, Loi sur l'instruction publique.

D'entrée de jeu, il nous faut, M. le ministre, M. le Président, saluer le désir de votre gouvernement de vouloir moderniser et consolider nos institutions scolaires primaires et secondaires publiques. C'est là une oeuvre bien délicate mais combien nécessaire et nous vous savons gré de l'aborder avec détermination, simplicité et clairvoyance.

L'objectif que vous vous êtes proposé en déposant le projet de loi sur l'instruction publique se révèle un véritable défi. Donner à l'école une plus grande autonomie juridique sans pour autant la dissocier du tissu organique qui la lie à ses partenaires, la commission scolaire et le ministère de l'Éducation. Voilà tout un programme!

Quant au projet de loi sur les élections scolaires, nous tenons à souligner le plaisir que nous avons eu à constater qu'enfin était reconnue l'importance du suffrage universel, comme garantie de la santé et de la vitalité de la démocratie scolaire.

Nous avons, M. le Président, considéré l'ensemble des dispositions des projets de loi à la lumière des principes suivants: le système scolaire public québécois doit se concevoir et s'articuler autour de trois pôles: l'école, la

commission scolaire et le ministère de l'Éducation. La vitalité de chacun de ces pôles est essentielle à la santé de notre système scolaire public. Chacun des pôles a un rôle déterminant à jouer; la qualité, voire la profondeur de celui-ci, dépend de la densité des pouvoirs qui lui sont associés. Des marges de manoeuvre significatives doivent garantir aux partenaires les moyens suffisants pour remplir la mission qui leur est dévolue. Un équilibre constant doit être maintenu entre les partenaires comme forces convergentes d'un même ensemble.

Après consultation des parents de notre territoire par le biais des présidents de comité d'école, forts de l'expertise de notre personnel d'encadrement, nous avons, M. le Président, M. le ministre, le plaisir de vous livrer les quelques rélfexions et commentaires suivants.

Depuis la Révolution tranquille, l'évolution socio-politique du Québec nous a amenés à concevoir la dynamique de l'organisation scolaire publique autour de trois grands pôles: l'école, la commission scolaire et le ministère de l'Éducation. Chacun de ces trois partenaires a eu, jusqu'ici, un rôle déterminant à jouer à l'intérieur de notre dynamique scolaire. Pour continuer à participer activement au développement équilibré et harmonieux de notre système, chacun des partenaires doit disposer d'une place relative vitale et dort se voir consacrer un rôle nettement défini et établi en parfait équilibre par rapport à celui des autres.

Dans cette perspective, l'école revalorisée ne peut pas se concevoir comme l'atomisation du système scolaire. Il faut, pour garantir les acquis des 30 dernières années, éviter de la laisser seule, face aux instances de l'État. La revalorisation de l'école, associée à un renforcement des pouvoirs du ministère de l'Éducation, reviendrait à déséquilibrer le système scolaire québécois. Lui assurer la place qui lui revient ne doit pas se concevoir comme l'évacuation du système scolaire du seul palier local de concertation et d'action, c'est-à-dire la commission scolaire. En 1988, l'on ne saurait considérer notre système scolaire public sans y reconnaître la place d'un gouvernement local fort, doté de fonctions et de pouvoirs déterminants entre l'école et l'État.

Ce palier a, traditionnellement, faut-il le rappeler, fait partie du paysage de la vie démocratique du Québec. Les parents et les usagers de l'école éprouvent un impérieux besoin de pouvoir se retourner vers un niveau d'autorité aux dimensions et à visage humain. C'est en continuant de s'y adresser qu'ils pourront trouver un lieu d'écoute, d'arbitrage et de décision propre à assurer la sauvegarde de leurs intérêts.

Par ailleurs, l'état de développement de notre société, celui de notre système scolaire, la conjoncture sociale et économique et, finalement, les attentes de nos concitoyens forcent le ministère de l'Éducation à s'orienter vers l'essentiel. Il doit apprendre à centrer son action vers sa mission éducative, c'est là l'essentiel de son rôle. Dans cette perspective, il doit continuer à simplifier et à alléger ses structures. Il doit faire en sorte que ses partenaires, l'école et la commission scolaire, exercent pleinement leur rôle, se consacrant pour sa part a l'essentiel du sien en adoptant un style d'intervention beaucoup plus inspiré par sa mission d'orientation et de service.

En définitive, si l'on compte laisser place à la créativité de chacun des partenaires dans le meilleur intérêt de l'acte éducatif, il importe que les pratiques et les gestes traduisent une volonté politique et administrative, nette et ferme, axée sur le développement et la confiance plutôt que sur les contrôles et les encadrements. Jusqu'ici et cela de façon de plus en plus criante, l'école et la commission scolaire ont disposé de marges de manoeuvre de plus en plus étriquées. Les contrôles se sont faits de plus en plus pesants et les codes, chaque année, plus contraignants.

La multitude de contrôles exercés sur les commissions scolaires et, par voie de conséquence, sur l'école ont atténué le degré d'autonomie dont elles pouvaient jouir. Partant, elles ont eu vite fait d'étouffer le dynamisme dont le ministère de l'Éducation avait voulu imprégner tout le système scolaire québécois au milieu des années soixante.

La recherche d'un meilleur équilibre entre l'autonomie et les contrôles, dans le but de permettre à l'école et à la commission scolaire de renforcer leur rôle auprès de la population qu'elles servent, nécessite la définition d'un régime simple et souple.

Les conventions collectives, la législation et la réglementation tendent à renforcer leurs emprises sur la vie de l'école et la répartition des ressources. Plus la négociation évolue, plus elle tend à confisquer l'acte éducatif au profit d'intérêts, voire de privilèges, de plus en plus éloignés des finalités de l'éducation. Plus l'État, en cherchant à rationaliser l'utilisation des ressources publiques, adopte une réglementation et des règles budgétaires astreignantes, plus il tend à scléroser l'action à l'intérieur de moules administratifs étroits et contraignants.

Pour sa part, l'État poursuivant des objectifs de démocratisation, d'accessibilité, d'égalité des chances, de rationalité et d'efficacité a graduellement procédé à une concentration des décisions. Petit à petit, il a multiplié les règles; celles-ci, associées aux contrôles, ont eu tôt fait de priver l'école et la commission scolaire de la part d'initiatives créatrices qui leur permettent de développer des modèles originaux, adaptés et performants.

Le ministère de l'Éducation, plus souvent qu'autrement, happé par les exigences et les contraintes d'ordre administratif, a, au risque de négliger les finalités de l'appareil, cherché à répondre aux préoccupations pédagogiques et éducatives par des encadrements de plus en plus lourds, à saveur nettement technocratique et administrative.

II n'y a qu'un moyen de permettre aux écoles et aux commissions scolaires de développer davantage leur emprise sur l'acte éducatif et de développer des modèles intéressants propres à répondre aux besoins des milieux qu'elles servent, c'est de les autoriser à prendre une certaine distance par rapport à la rigueur des grands encadrements, sans pour autant autoriser l'arbitraire. Cela suppose un défit de taille: assou-plir, laisser place à l'originalité sans pour autant sacrifier les acquis. Il faut de l'imagination, de la volonté et de l'audace.

Un mot sur la consultation. Même si, à l'origine, on a cherché bien légitimement à associer les partenaires de l'école à la définition des principaux aspects du projet éducatif et de l'acte éducatif, en faisant le pari que chacun saurait reconnaître la place qui est la sienne, l'expérience nous démontre qu'il est temps de marquer le pas. Il y a participation et participation. À l'usage, l'on constate que l'essence même de la consultation sur les enjeux déterminants, à savoir les grandes orientations à la base de l'organisation scolaire et du projet éducatif, se trouve le plus souvent neutralisée au profit de mécanismes lourds, laborieux et par trop onéreux. Il faut maintenant consolider et surtout apprendre les limites d'une saine implication. \ Ce que le projet de loi 107 nous réserve.

Malheureusement, M. le Président, M. le ministre, la lecture du projet de loi laisse les commissions scolaires quelque peu désillusionnées. L'énoncé de votre objectif de fond annonçait des réformes délicates mais combien nécessaires et surtout suggérait un repositionnement des partenaires en équilibre relatif, affranchis qu'ils seraient des procédures et préceptes aussi lourds que pénibles.

Il nous faut, M. le Président, constater qu'en dépit des avis et de la compétence d'un appareil scolaire résolument tourné vers la satisfaction des besoins des populations qu'il sert, vous avez privilégié un modèle encore plus contrôlé, structuré et, il nous faut le dire, entravé. De fait, sans ressources supplémentaires, sans pouvoir de taxation amélioré, sans assouplissement des grands encadrements que sont les règles budgétaires et les conventions collectives, les commissions scolaires doivent gérer une réalité chaque jour de plus en plus contraignante, comme la fluctuation des effectifs, le flux et le reflux des populations du territoire, l'évolution de la famille québécoise, la pauvreté et l'analphabétisme, les multiethnies et la multiconfessionnalité.

Malgré cette réalité, le projet de loi que votre gouvernement propose à la population du Québec requiert des commissions scolaires qu'elles prennent et maintiennent sur trois ans rétablissement de leurs écoles sans grande adaptation possible; qu'elles soumettent la gestion scolaire au joug puissant et organisé des alignements syndicaux en forçant législativement la consultation des enseignants sur la gérance des fonctions reliées aux services éducatifs; qu'elles adjoignent un nombre croissant de comités à la gestion de leurs écoles; qu'elles consultent davantage sur plus de sujets les corps les plus divers dont les mandats et les juridictions vont s'entrechoquant, nantis qu'ils sont de leur tout nouveau pouvoir d'ester en justice.

Le projet de loi projette de figer le dynamisme et l'originalité de la gestion scolaire à l'intérieur de procédures supplémentaires, onéreuses et parfois même inutiles, de générer une fois de plus de nouvelles attentes dans la population alors que, souvent déjà et cruellement, les moyens manquent pour satisfaire celles déjà exprimées.

Ce même projet de loi renforce les contrôles et en augmente le nombre et le poids. De nouveaux rapports sont demandés; le mandat des vérificateurs peut être précisé par le ministre de façon générale ou particulière; l'administration des immeubles est nouvellement réglementée. De plus, il confirme les codes: non seulement les conventions collectives ne sont pas réévaluées, mais le projet de loi donne aux forces syndicales des outils de pression beaucoup plus puissants sur le système de la négociation. Le projet de loi renforce le principe des règlements, règles, programmes et directives de tous genres qui viennent définir et limiter l'originalité des milieux.

Il vous donne, M. le ministre, de même qu'à l'appareil de l'État, une latitude encore plus large vous permettant de dicter davantage aux écoles et aux commissions scolaires la règle à suivre. Si plusieurs des pouvoirs qui vous sont reconnus par le projet de loi étaient exercés par le passé sans disposition habilitante claire, le projet en autorise de nouveaux: conditions et procédures d'attribution des contrats de construction, d'agrandissement, d'amélioration et de transformation des immeubles; intervention sur la fixation du prix de vente des immeubles de la commission scolaire; renforcement des pouvoirs du gouvernement sur les conditions d'emploi du personnel non syndiqué; intervention au niveau de la répartition des spécialités professionnelles.

L'accroissement des pouvoirs réglementaires du gouvernement ou du ministre, l'émergence de pouvoirs purement discrétionnaires, l'introduction de pouvoirs de substitution de l'autorité du ministre à celle du conseil des commissaires démocratiquement élus, l'accroissement des contrôles, la confirmation de l'emprise des forces syndicales, l'alourdissement de la consultation, voilà autant d'éléments du projet de loi qui nous laissent dire que non seulement la place et l'équilibre des partenaires ne sont pas respectés, mais bien plus, dans les circonstances, qu'ils sont délibérément écartés, les marges de manoeuvre étant pour leur part ignorées.

Tout l'équilibre du système, nous l'avons démontré, suppose la reconnaissance et le renforcement du rôle et des pouvoirs de la

commission scolaire comme palier intermédiaire de gouvernement et cela devient chose possible dès que législativement on en convient, notamment: en reconnaissant à la commission scolaire sa responsabilité et sa juridiction sur la planification et l'utilisation de ses ressources; en reconnaissant à la commission scolaire son autorité sur la planification et l'utilisation de ses équipements scolaires selon la variation des facteurs déterminants du milieu et ce, par la suppression des notions d'actes d'établissement et de plan triennal; en reconnaissant la compétence et la juridiction des commissions scolaires sur la détermination des orientations de la formation professionnelle et sur les concertations possibles, eu égard au développement des besoins régionaux et provinciaux; en reconnaissant aux commissaires élus leur sens des responsabilités et leur sensibilité aux besoins du système étant donné la proximité des populations qu'ils servent; en retirant toute disposition visant à donner au ministre l'autorité de substituer sa décision à celle des commissaires démocratiquement élus; en garantissant législativement aux commissions scolaires un niveau de ressources financières basé sur des planifications triennales du MEQ et du Conseil du trésor; en supprimant toutes les procédures de réglementation jugées largement superflues; en supprimant le pouvoir d'ester en justice des comités consultatifs; en maintenant dans l'école un comité d'école obligatoire et un conseil d'orientation facultatif purgé du veto qu'entraîne l'absolutisme de l'unanimité que suppose la loi actuelle; en limitant au strict nécessaire, c'est-à-dire à la réglementation sur les régimes pédagogiques, les services éducatifs particuliers, la sanction des études et les pouvoirs réglementaires du ministre ou du gouvernement; en limitant l'étendue et le nombre des pouvoirs discrétionnaires du ministre; en rendant à l'enseignant sa fonction première à l'école, agent premier de l'acte éducatif, sans pour autant prêter flanc, par une législation calquée sur les conventions collectives, à la prise en charge de l'école et de l'acte éducatif par les forces syndicales; en limitant le nombre de comités consultatifs statutaires au strict nécessaire, quitte à retoucher aux mandats des comités existants actuellement, parents, école, orientation, transport, faisant confiance à l'originalité des milieux pour le développement de modes de partage et de participation des parents à la vie éducative.

J'étais présente ce matin lorsque le Conseil scolaire de l'île de Montréal a présenté son mémoire et j'ai moi-même travaillé à ce mémoire. Je voudrais quand même ajouter l'opinion de l'ensemble du conseil des commissaires de la commission scolaire Sainte-Croix.

Créé depuis déjà 15 ans, le Conseil scolaire de l'île de Montréal a permis que se bâtisse entre les commissions scolaires de l'île de Montréal une précieuse expérience de concertation, de mise en commun et de développement.

Le milieu métropolitain requiert, en raison des caractéristiques propres de sa population, de la densité de celle-ci et des difficultés très particulières que cela suppose pour l'organisation scolaire, un organisme de concertation fort et équilibré.

Dans cette perspective, nous contestons vigoureusement l'approche du législateur, lorsque celui-ci soumet l'organisation des services en commun et donc d'initiatives de concertation et de planification au veto de chacune des commissions scolaires et au vote d'une majorité des deux tiers des membres du conseil scolaire. Si la première mesure a pour effet de museler l'émergence de projets communs sur IHe, la seconde signe l'arrêt de mort du développement concerté.

Nous sommes d'avis que la tradition de développement et de planfication des commissions scolaires de l'île de Montréal par l'intermédiaire du conseil scolaire doit être maintenue. Nous proposons que le conseil scolaire puisse pourvoir à la planification du développement, à la recherche et à l'organisation de services communs, à la demande de la majorité des commissions scolaires de l'île, pour celles parmi celles-ci qui sont intéressées à s'en prévaloir, sans pour autant pénaliser les autres. Il est cependant entendu, dans le cadre d'une telle proposition, que l'initiative vienne des commissions scolaires et non du conseil scolaire.

Nous aurions quelques remarques à apporter sur le projet de loi sur les élections scolaires. La lecture de ce projet de loi nous a réservé d'agréables constats: rafraîchissement des dispositions législatives concernant les élections scolaires; maitien du suffrage universel comme base du gouvernement scolaire local; net renforcement de la participation en permettant le remboursement des dépenses électorales selon certains critères, en reconnaissant le concept d'équipe politique et en introduisant de nouvelles dispositions facilitant le vote et les candidatures auprès des employeurs.

Par contre, toutes les dispositions du projet n'ont pas soulevé chez nous le même enthousiasme. En effet, un certain nombre d'entre elles présentent d'inquiétantes anomalies. Parmi celles-ci, notons: l'accroissement remarquable du nombre de circonscriptions électorales; la notion de confection de la liste électorale; la notion de circonscriptions réservées aux minorités linguistiques; la mécanique de fonction de la liste électorale; la notion de "deuxième domicile" pour l'électeur ou le candidat; la confusion générée par l'éparpillement des dispositions concernant les notions d'électeur, candidat et liste électorale. (16 h 45)

Parmi celles-ci, nous tenons à demander - là, je dois vous référer au texte original qui vous a été remis, parce qu'il y a eu un saut de deux ou trois paragraphes dans ce résumé-ci, au mémoire qu'on a envoyé il y a quelques semaines - que la notion de "deuxième domicile"

I soit retranchée. Outre le fait qu'elle entraînera des difficultés réelles sur le plan de l'organisation des élections, cette notion constitue une question tout à fait discutable sur le plan de la démocratie scolaire. Quel est l'enracinement local d'un électeur ou d'un candidat non résidant dans la localité? Sa connaissance des enjeux est nettement insuffisante pour lui permettre de jouer un rôle un tant soit peu déterminant.

Nous aimerions aussi voir retranchée la notion de "circonscriptions réservées aux minorités linguistiques". Cette notion risque d'introduire des clivages, voire des braquages, indésirables au sein du conseil des commissaires. Conçue dans le but louable d'assurer aux minorités linguistiques une représentation, elle risque fort de servir de catalyseur d'affrontements. Cela est absolument indéfendable dans un contexte où l'on cherche à intégrer le plus possible les diverses composantes de la population québécoise. Il nous semble que le premier lieu d'intégration au niveau scolaire soit bien le conseil des commissaires.

Vu la confusion générée par l'épapillement des notions, dans le but de clarifier l'interprétation des notions d'électeur, candidat et liste électorale et d'en faciliter l'application pour le directeur du scrutin, il est indispensable que ces notions soient revues, clarifiées et regroupées à l'intérieur d'un même corps de dispositions.

En conclusion, M. le Président, les projets de loi 106 et 107 visent essentiellement la revalorisation de l'école à l'intérieur d'un système scolaire sain et harmonieux, de même ils favorisent des populations. Le mémoire de la commission scolaire Sainte-Croix vise essentiellement à favoriser la réalisation de cet objectif.

En guise de conclusion, voici nos recommandations les plus importantes: que les commissions scolaires soient reconnues comme de véritables gouvernements locaux nantis de pouvoirs déterminants et assurés de marge de manoeuvre significative; que les pouvoirs du gouvernement et du ministère de l'Éducation soient revus et limités, de sorte que soit reconnue aux commissions scolaires la juridiction qui leur revient démocratiquement; que les grands encadrements que constituent les conventions collectives, les règles budgétaires et les règlements soient revus et allégés de sorte qu'ils laissent davantage cours à la créativité des partenaires dans le meilleur intérêt de l'acte éducatif; que le ministère de l'Éducation définisse son rôle et ses interventions en fonction et dans le respect des responsabilités de ses partenaires, les commissions scolaires et les écoles; que le directeur de l'école demeure le pivot de son école; que le comité d'école soit reconnu et maintenu comme palier obligatoire de participation des parents à l'école; que le conseil d'orientation puisse être institué sur une base volontaire, là où les milieux se déclarent prêts à en vivre le fonctionnement; que la commission scolaire conserve la responsabilité de la planification de ses équipements et de ses ressources, eu égard aux fluctuations de la conjoncture locale. À cet effet, que les notions d'acte d'établissement et de plan triennal de répartition et destination des immeubles soient retranchées ou modifiées de sorte qu'elles laissent une latitude suffisante à la commission scolaire pour mieux gérer ses ressources.

Que le nombre de comités consultatifs soit limité à ce qu'il est sous l'empire de la loi actuelle; que le droit d'ester en justice pour les comités soit retiré dans le but évident d'éviter des confrontations aussi inutiles qu'onéreuses; que les contrôles de l'État soient revus, limités et allégés; que les règles et les procédures soient allégées de sorte que la souplesse du système soit garantie; que les dispositions autorisant les délégations de pouvoirs soient revues, simplifiées et regroupées, de sorte que leur objectif soit atteint sans conflit de juridiction; que le pouvoir de taxation soit élargi pour permettre aux milieux d'organiser leurs services selon les besoins des populations; que les droits et les devoirs des enseignants soient énoncés de sorte que les dispositions qui les régissent ne handicapent pas davantage la négociation de conventions collectives et leur application à l'école; que soit retranché le droit pour les enseignants à la consultation systématique sur l'exercice des fonctions éducatives de la commission scolaire.

Qu'en définitive, M. le Président, l'équilibre soit maintenu entre les partenaires du système et que des marges de manoeuvre significatives soient reconnues à l'école et à la commission scolaire.

Voilà, M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs les membres de la commission parlementaire, le mémoire que la commission scolaire Sainte-Croix voulait vous présenter aujourd'hui.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci beaucoup, Mme Hinse. Il nous reste une période de 20 minutes exactement pour discuter avec les membres des deux formations politiques. Sans plus tarder, je reconnais le ministre de l'Éducation. M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, je remercie la commission scolaire Sainte-Croix de l'examen qu'elle a fait du projet de loi 107. J'écoutais défiler les recommandations qui viennent en conclusion du mémoire et je me disais que sur à peu près toute la ligne ce que la commission scolaire Sainte-Croix semble souhaiter est soit le statu quo, soit le retour à un régime que nous avons connu il y a plusieurs années. Je chercherais en vain dans ce mémoire une conception positive du rôle du gouvernement et du ministère de l'Éducation qui fournissent seulement 92 % à 93 % des ressources. Je ne pense pas qu'on puisse... Je pense que c'est comme un projet de rêve. Je ne pense pas du tout qu'on puisse atterrir avec des recommandations comme celles-

là. Je vous le dis bien simplement.

On dit que les commissions scolaires soient reconnues comme de véritables gouvernements locaux nantis de pouvoirs déterminants et assurées d'une marge de manoeuvre significative. On en a discuté toutes la journée. Je pense qu'on a fait des précisions à l'occasion des rencontres qui ont marqué la matinée. Il me semble qu'il y a des distinctions de base qu'il faut établir. Le système d'enseignement québécois n'est pas une affaire de simples gouvernements locaux. C'est un système beaucoup plus complexe qui comprend un partage de fonctions dont une portion très importante a été confiée depuis déjà une génération au ministère de l'Éducation et au gouvernement, dont une autre partie est assumée par les commissions scolaires et une autre partie doit être assumée par l'école sous la direction des commissions scolaires.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre, je m'excuse, tout le monde entend la cloche comme moi. À ce moment-là, le devoir de chaque député, c'est d'aller remplir son rôle de député, soit celui de voter. Je suspends temporairement et j'invite les membres, immédiatement après le vote, à réintégrer le plus rapidement possible le salon législatif.

(Suspension de la séance à 16 h 53)

(Repriseà17h18)

Le Président (Parent, Sauvé): La commission de l'Éducation va reprendre ses travaux. Nous nous excusons auprès de nos invités et nous les remercions. Vous devez comprendre la situation que nous vivons aujourd'hui. La parole était au ministre de l'Éducation et je dois vous rappeler qu'il reste huit minutes à la formation ministérielle et dix minutes à la formation de l'Opposition.

M. le ministre de l'Éducation. Vous souvenez-vous où nous étions rendus, M. le ministre de l'Éducation?

Oui, allez, madame, nous vous écoutons.

Mme Lortie-Hinse: Bon, très bien. C'était loin de nous, M. le ministre, d'offenser ou de choquer le gouvernement du Québec ou le ministère de l'Éducation par nos propos. Depuis que je suis commissaire, j'ai vécu le livre blanc, le projet de loi 40, le projet de loi 3, ou la loi 3 si vous voulez, et ceux-ci, les projets de loi 107 et 106. Tout le temps, à chaque moment, on a analysé avec beaucoup de sérieux chacun de ces projets de loi et, cette fois-ci, on s'est dit: Allons encore plus en profondeur et demandons-nous pourquoi on veut tant changer la Loi sur l'instruction publique. Et on a fait un retour aux années cinquante non pas parce qu'on veut y retourner, mais parce qu'on voulait comprendre d'où partaient tous ces changements.

Dans les années cinquante, on sait que l'instruction ou l'école n'était pas accessible à tous, que les enseignants étaient plus ou moins bien payés, qu'il y avait toutes sortes de problèmes. Donc, l'État a pris en charge l'éducation et c'est avec succès qu'il a mené à bien son projet. Dans les années soixante-dix, il y a eu les négociations nationales et, à ce moment-là, le développement des conventions collectives pour aider les enseignants à avoir une meilleure qualité de vie dans leur travail. Tout cela a cheminé jusqu'à l'année 1988 et maintenant nous croyons qu'il est temps que les commissions scolaires soient responsables de l'éducation dans leur milieu, parce qu'elles sont beaucoup plus près de la population qu'elles desservent que peut-être le ministère de l'Éducation. Ce sont ces gens qui nous élisent et nous voulons vraiment leur offrir un service de qualité. C'était pour cette raison qu'on a mis tant de points qui semblent être l'idéal, mais c'était une opinion, à la suite de notre étude.

Nous nous sommes dit que, si les commissions scolaires avaient un plus grand pouvoir de taxation et si le ministère subventionnait moins, cela nous obligerait peut-être à nous rapprocher de nos commettants et, peut-être aussi, que cela améliorerait la qualité... non pas tout à fait cela, mais disons que cela améliorerait l'intérêt de la population envers la chose scolaire. C'était dans cette optique, M. le ministre, que nous avons mis tant de considérants à la fin de notre mémoire en conclusion. Ce n'était pas avec un autre objectif.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la présidente. Je reconnais encore le ministre qui n'avait pas terminé sa question.

M. Ryan: Je n'ai même pas eu le temps de poser une question, M. le Président, mais j'ai seulement commencé une entrée en matière tantôt.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je m'excuse, mais je ne comprends pas comment il se fait qu'il soit survenu une réponse s'il n'y a pas eu de question qui a été posée.

M. Ryan: Mais, regardez, ce n'est pas grave du tout, parce que la séance vise surtout à permettre à nos visiteurs de s'exprimer. Par conséquent, il n'y a aucune offense en ce qui touche le ministre.

Je vous disais que j'avais l'impression d'être un peu dans un univers de rêve. Je vais vous donner un exemple. Dans les recommandations qui terminent le mémoire - je vous dis cela dans un esprit de dialogue, on n'a pas beaucoup de temps, et pour que les réactions soient franches de part et d'autre - il y a une recommandation, "que les grands encadrements que constituent les conventions collectives, les règles budgétaires et les règlements soient revus et allégés de sorte

qu'ils laissent davantage cours à la créativité des partenaires dans le meilleur intérêt de l'acte éducatif. " C'est de la belle littérature, mais, les règles budgétaires, c'est cela qu'on vient de faire depuis deux ans. On les a allégées considérablement dans un travail de concertation immédiate avec les commissions scolaires. On n'est pas pour recommencer ce travail tout de suite. On a consacré beaucoup d'énergie à faire cela. On a donné beaucoup plus de latitude aux commissions scolaires.

Les conventions collectives sont un héritage que nous avons. Cela se décide à deux. Il y a deux signataires dans une convention collective: il y a le gouvernement avec ses partenaires des commissions scolaires et il y a de l'autre côté les syndicats. Les syndicats ont toujours tenu à avoir une négociation nationale. Il est absolument impensable de revenir à une négociation locale, sauf dans des matières comme celles qui sont présentement réservées à la négociation locale. C'est tellement vrai. Dans la loi 37, on avait énuméré toute une série de matières qui étaient renvoyées à la négociation locale. C'était tellement peu réaliste qu'il a fallu que des ententes interviennent privément lors de la dernière ronde de négociation, en vertu desquelles au moins une dizaine ou une douzaine de ces clauses ont été négociées, à toutes fins utiles, nationalement. Après cela, les commissions scolaires les ont ratifiées, chacune à son niveau. Autrement, il n'y aurait pas eu de négociation. Cela n'aurait pas abouti.

Je lis cela ici et je me demande comment on va... Les règlements, on vient d'en adopter. Les derniers dont j'ai eu connaissance sont ceux qui regardent la confessionnalité dans les écoles. Je ne sais pas, cela aussi a fait l'objet de consultations aussi abondantes qu'on puisse le souhaiter. J'espère que vous ne nous demandez pas de recommencer cela tout de suite. Comme c'est écrit ici, c'est cela qu'on pourrait comprendre. Cela surprend. À la première lecture, cela surprend. Je voulais vous le dire.

Maintenant, on pourrait discuter des passages qui sont dans la deuxième partie de votre mémoire, au sujet des pouvoirs qui sont donnés au gouvernement. Prenez par exemple les conditions de travail, la classification des emplois des employés non salariés, tout cela est soit dans la loi actuelle, soit dans la réglementation en vertu de la loi actuelle. Il n'y a rien de changé par rapport au régime sous lequel vous vivez actuellement. C'est simplement une transposition juridique différente. Il n'y a rien de changé à cela. Tout le règlement actuel est fait en vertu de l'article 16. 1° de l'actuelle Loi sur l'instruction publique, qui donne des pouvoirs infiniment plus grands au gouvernement que ce qu'on a inscrit dans le projet de loi 107. Mais, si cela vous est passé inaperçu, je n'ai pas d'objection. C'est la même chose quand on parle des procédures pour l'attribution des contrats de construction, etc. Ce qu'on fait, on prend la discipline générale du gouvernement et du secteur public, tel que cela existe pour tout le secteur public et parapublic, et on l'applique aux commissions scolaires. Dans bien des cas, cela implique un allégement. Vous dites, à un moment donné: Vous allez faire cela par réglementation dorénavant. C'est justement pour éviter que le ministre prenne des décisions dans chaque cas. On dit qu'on va avoir un règlement, que, là, les commissions scolaires vont l'observer et qu'elles ne seront plus obligées de soumettre chaque affaire au ministre, comme c'est le cas actuellement. Mais la lecture est différente. Peut-être le texte n'est-il pas assez précis? Mais je vous assure que c'est l'interprétation juste et que nous l'avons travaillée en détail. Il y a beaucoup d'allégements qui, par conséquent, n'ont pas été aperçus, mais je les souligne pour l'utilité commune des personnes qui sont ici et de nos concitoyens.

Il n'y a pas de temps, malheureusement, pour des questions. C'est malheureux, mais on aura l'occasion de se reprendre en d'autres circonstances, je pense bien.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je reconnais maintenant la porte-parole de l'Opposition, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Mme la présidente, messieurs, il me fait plaisir de vous accueillir au nom de l'Opposition officielle. Comme on a eu l'occasion, malheureusement, de vous le faire remarquer à plusieurs reprises, le temps nous presse un peu. J'ai lu votre mémoire avec intérêt et je dois dire que le ministre devrait être satisfait parce que, depuis le début des audiences, il demande aux intervenants de lui indiquer quels sont les articles qui viennent augmenter le pouvoir ou accroître le pouvoir du ministre. Il y a, là, une lecture assez exhaustive des principaux articles par lesquels le ministre voit accroître ses pouvoirs. Il nous dit que cela ne change pas la situation, qu'il ne fait qu'introduire dans la loi ce que les règlements lui accordaient comme pouvoirs. Mais il sait très bien que c'est toute la différence. Il va finir, j'imagine, par comprendre qu'il n'est certes pas le seul à détenir la vérité absolue là-dedans, parce qu'aujourd'hui on sait qu'à l'unanimité les commissions scolaires déplorent et dénoncent la centralisation qu'entraînerait l'adoption du projet de loi tel que libellé. Je trouve que c'est vouloir, en dépit à la fois des manifestations évidentes d'insatisfaction et des lectures qui sont faites par les commissions scolaires, les premières concernées, continuer à s'obstiner que de dire: Je vous donne plus de pouvoirs que vous n'en aviez. Il a même confié un viatique à une commission scolaire qui allait assister aux délibérations de la fédération des commissions scolaires, la semaine dernière. N'empêche que je n'ai pas l'impression que cela ait réussi à convaincre la fédération des commissions scolai-

res.

Je sais que ce n'est peut-être pas ici que vous pourrez le faire, mais j'ai fait un exercice relativement simple et, évidemment, extrêmement sommaire. J'ai essayé de comparer quels étaient les pouvoirs laissés à une commission scolaire et quels étaient les pouvoirs laissés à un conseil d'administration d'un établissement de santé, d'un hôpital, et j'ai l'impression que cela finit par se ressembler beaucoup, à la différence qu'on ne pense pas être obligé, ou qu'on ne considère pas un conseil d'administration d'un hôpital comme une commission scolaire. Une commission scolaire, cela demeure un gouvernement élu. Ce matin, j'ai trouvé cela assez étonnant - d'ailleurs, je pense que le président du Conseil scolaire de l'île de Montréal a répondu avec justesse - lorsque le ministre dit: Cela ne touche pas à toutes les populations, une commission scolaire. Par exemple, une ville gère tout un territoire, alors qu'une commission scolaire, c'est sur des parties de territoire. Le ministre s'est situé par rapport à Montréal ou à Québec, mais dans mon comté la commission scolaire couvre au moins trois municipalités: la municipalité de Chicoutimi, celle de Laterrière et... Vous avez ainsi des commissions scolaires qui couvrent trois, quatre, cinq, six ou une dizaine de municipalités. Alors, dire qu'elles n'ont pas le même pouvoir qu'une municipalité sous prétexte qu'elles ne couvrent que des parties de territoire, je pense que c'est avoir une lecture de la situation qui est plus montréalaise que québécoise. (17 h 30)

Je voulais juste soumettre cela à votre attention. Je me demandais si cet exercice avait été fait ou si cela ne serait pas souhaitable de le faire: l'exercice de comparer les pouvoirs qui sont ceux qui sont laissés au conseil d'administration d'un cégep, d'un centre hospitalier, d'un centre d'accueil en comparaison avec les pouvoirs qui sont effectivement laissés à une commission scolaire. J'ai la nette impression que cela finit par se ressembler beaucoup.

Ainsi, à l'Hôpital de Chicoutimi, je rappelle quelques chiffres, le budget est de 63 000 000 $ avec des revenus autonomes d'environ 4 000 000 $. Il a un personnel total et émet 2500 paies-semaines pour environ 1600 permanents. Il y a aussi des occasionnels. Il offre des services de diagnostic, de soins et il gère un peu le centre régional. Autrement dit, l'hôpital dispense des services de santé, particulièrement dans diverses spécialités, pour toute la région.

À la commission scolaire de Chicoutimi, le budget est de 54 000 000 $. Il y a environ 2 000 000 $ de revenus autonomes. Il y a 8600 élèves et à peu près 800 membres du personnel. Cela finit par se ressembler quand on regarde les politiques administratives, les politiques budgétaires, la gestion des ressources humaines. Finalement, on engage le personnel dans les hôpitaux comme dans les commissions scolaires. Moi, je me demandais s'il ne serait pas utile que les commissions scolaires fassent cet execice. On doit sérieusement, mais sérieusement s'interroger sur cette espèce de glissement de pouvoirs qui vient ici à être accentué par le présent projet de loi, alors qu'on a un gouvernement élu, un gouvernement élu. Je me demandais si vous aviez déjà réfléchi, sous cet angle, aux pouvoirs laissés aux commissions scolaires ou à ceux qui devraient l'être.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme

Hinse?

Mme Lortie-Hinse: Je crois comprendre que c'est une demande, on pourra faire parvenir la réponse à la commission, je ne sais pas, à Mme Blackburn, à M. Ryan...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Au secrétaire de la commission.

Mme Lortie-Hinse: D'accord, au secrétaire de la commission. On fera certainement cet exercice-là. Je vous remercie de nous avoir éclairci ce point-là. On enverra cela en annexe, aussitôt que ce sera prêt.

Mme Blackburn: Une question: selon vous, l'article touchant le droit d'ester pour les conseils, je pense que c'est pour le comité de parents et le conseil d'orientation...

Mme Lortie-Hinse: Les comités d'école.

Mme Blackburn: Les comités d'école, oui. Le conseil d'orientation ne serait pas légitime ou légal. L'explication, je pense, se retrouve en page 10, non de votre annexe. Vous citez le Code de procédure civile: 'Tout groupement de personnes formé pour la poursuite d'un but commun au Québec, mais qui n'y jouit pas de la personnalité civile ni ne constitue une société au sens du Code civil, peut néamnoins ester en justice pour défendre aux actions portées contre lui. "

Mais, j'avais de la difficulté à suivre votre analyse là-dessus, puisque vous dites: "Nous soumettons qu'à la lumière de cet article le conseil d'orientation ou tout autre comité formé en vertu de la loi ne pourrait validement ester en justice, en demande, parce que la loi ne lui confère pas de personnalité juridique. "

Mme Lortie-Hinse: Pour l'explication juridique, je vais laisser M. Gauthier fournir les détails.

On a cela, c'est cela, dans les articles en annexe, n'est-ce pas, Mme Blackburn?

Mme Blackburn: À votre mémoire. Mme Lortie-Hinse: M. Gauthier.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Gauthier, nous vous écoutons.

M. Gauthier (Alain): Alors, Mme Blackburn, sans entrer dans une discussion juridique qui risquerait d'être longue ou laborieuse et peut-être bien inutile, ce qu'on a voulu dire ici, c'est tout simplement que l'économie de notre droit, de notre droit civil, entre autres, de notre procédure civile, est à l'effet que les groupements de personnes, les corps consultatifs ou les corps qui ne disposent pas de la personnalité juridique, ne peuvent pas ester en justice et cela, au fond, pour assurer, entre autres, au justiciable qui est vis-à-vis la possibilité, entre autres, de contraindre cet organisme ou ce groupement qu'il poursuit.

Il y a deux malaises, ici, qui sont manifestés. Le premier malaise, c'est que ce genre de disposition est à toutes fins utiles une disposition de droit nouveau qui va vraiment à l'en-contre de toute l'économie de notre procédure civile. Deuxièmement, il y a le fait qu'on va avoir une série de comités, de conseils qui vont, pour une raison ou pour une autre, poursuivre la commission scolaire, si tant est que juridiquement ils peuvent le faire, et se poursuivre entre eux autres, l'un et l'autre comité. Finalement, on va avoir un "nid à chicane". On se demande à quoi cela va servir. Est-ce que cela va aider à rencontrer les finalités de l'éducation? Est-ce que cela va favoriser l'harmonie dans le milieu? On a des doutes là-dessus.

Pour les aspects purement juridiques, ici, je n'ai pas amené d'argumentation sur le fond mais, si cela vous intéresse, je pourrais vous soumettre une note complémentaire avec plaisir.

Mme Blackburn: Cela serait intéressant, je présume, pour les travaux de la commission.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Vous pourrez la faire parvenir au secrétaire de la commission. Malheureusement, le temps étant écoulé, j'invite Mme la représentante de l'Opposition à conclure au nom de sa formation politique.

Mme Blackburn: Je vous remercie, M. le Président. Je voudrais brièvement commenter les propos du ministre qui dit que c'est rêver que de penser à un système scolaire décentralisé. Cela ne serait pas plus rêver de penser à un système scolaire décentralisé que cela n'est rêver que de penser à des écoles privées qui ont toute l'autonomie, entière, complète. Bien qu'on leur ait accordé un financement qui a déjà été jusqu'à 80 %, on leur en accorde encore un qui va jusqu'à 65 % et elles ont toute l'autonomie. C'est important de le rappeler. Cela m'a frappée au moment où l'association des institutions secondaires privées est venue présenter un mémoire dans lequel on a établi un parallèle avec le problème que cela posait pour les commissions scolaires d'atteindre un certain niveau de performance à l'intérieur d'autant de règles, de normes et de contraintes. Ce qu'avance l'associa- tion des écoles privées, c'est que les écoles publiques seraient peut-être plus performantes si on leur laissait un peu plus de marge de manoeuvre. Elle va aussi loin que de justifier une partie des difficultés qu'éprouvent les commissions scolaires et les écoles en raison du trop grand encadrement dont celles-ci font l'objet.

Le ministre dit: Vous rêvez en couleurs! Pourtant, je pense qu'il y a moyen d'alléger les règles budgétaires; à preuve, il nous dit: Je l'ai déjà fait.

Le Président (M. Parent, Sauvé): En conclusion, madame.

Mme Blackburn: Je prétends que le ministre va à contre-courant de l'avenir en augmentant ses pouvoirs et son emprise sur le réseau de l'éducation du Québec. J'espère cependant qu'à la lumière des pressions dont il est de plus en plus l'objet - on a été informé du consensus qui s'est fait sur cette question au sein des commissions scolaires du Québec - il saura revenir à de meilleurs sentiments, si je puis ainsi m'exprimer. Je vous remercie.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: J'ajouterai simplement en terminant que la députée de Chicoutimi me semble rêver, elle aussi. C'est facile de nommer des pouvoirs qu'on voudrait. C'est facile. J'ai bien dit: Indiquez-nous des pouvoirs qui devraient être renvoyés du gouvernement ou du ministre aux commissions scolaires avec preuves à l'appui. Faire une liste, il n'y a rien de plus facile que cela. On n'a seulement qu'à prendre le catalogue et à faire une liste, avec preuves à l'appui. De cela nous n'avons pas eu de preuve cet après-midi. J'ai beaucoup de respect pour la commission scolaire Sainte-Croix. Je lui ai même indiqué qu'il y a des choses qu'elle demande - ils ont l'air d'être surpris de cela - et que cela ne change rien à la situation actuelle. En général, cela améliore les choses pour les commissions scolaires par rapport à la situation actuelle. Il faut au moins lire ces choses-là.

La preuve, nous pouvons l'administrer n'importe quand. Nous ne voulons pas abuser du temps des gens, mais la preuve de ce côté-là est facile à faire. Il y a un certain nombre de points sur lesquels j'ai déjà indiqué, à plusieurs reprises, qu'il y avait des possibilités d'amélioration du projet de loi. J'en ai indiqué toute une série en cours de route. Nous allons procéder à ces améliorations. Mais vouloir entretrenir cette espèce de légende, je pense que cela ne change absolument rien au caractère objectif et fonctionnel de l'examen que nous devons faire. Si vous êtes intéressés à ce qu'on prenne ces points de manière plus précise, on les reprendra. Mais encore une fois, il faut à la fois la mention des

pouvoirs précis et une justification objective. C'est là qu'est le débat. C'est ce qui est le coeur du débat. Ce n'est pas en réaffirmant la prémisse qu'on apporte la preuve. J'apprécie l'échange de propos que nous avons eu et je déplore seulement qu'il ait été trop bref.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la présidente, une dernière intervention brève.

Mme Lortie-Hinse: Oui, j'aimerais simplement remercier la commission de nous avoir reçus, de nous avoir permis de présenter notre mémoire et surtout d'émettre nos idées aussi clairement.

Le Président (M. Parent, Sauvé): C'est la commission qui vous remercie, madame, d'être venus nous rencontrer et d'avoir passé avec nous une période de temps très enrichissante.

La commission suspend ses travaux pour quelques secondes, alors que nous accueillons immédiatement après la commission scolaire Jérôme-Le Royer, que j'invite immédiatement à prendre place à la suite des commissaires de la commission scolaire Sainte-Croix.

(Suspension de la séance à 17 h 41 )

(Reprise à 17 h 44)

Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre, s'il vous plaît! J'invite les membres de la commission permanente de l'éducation à prendre place. J'invite nos invités aussi à prendre place à la tribune qui leur est réservée. La commission permanente de l'éducation, dans le cadre du mandat qui lui a été confié par l'Assemblée nationale, à savoir tenir des auditions publiques sur les projets de loi 106 et 107, poursuit ses travaux.

Nous accueillons les représentants de la commission scolaire Jérôme-Le Royer, commission scolaire située sur 'île de Montréal, dont le président est M. Joseph Morselli. M. Morselli, bonjour. Il me fait plaisir de vous rencontrer et de vous remercier d'avoir accepté l'invitation de la commission permanente de l'éducation à venir discuter avec nous de votre perception de ces deux projets de loi, dont le premier porte sur les élections scolaires et le deuxième sur la Loi de l'instruction publique.

M. Morselli, la commission a environ 40 à 45 minutes à consacrer à votre commission scolaire. Je vous invite donc à nous présenter immédiatement les gens qui vous accompagnent et à enchaîner avec la présentation de votre mémoire. Tous les gens présents ont reçu votre mémoire et l'ont lu. Alors, libre à vous de le présenter d'une façon globale ou d'une façon abrégée. Je n'ai pas de directives à vous donner, sauf que nous sommes limités par le temps et nous le regrettons. M. Morselli, nous vous écoutons.

Commission scolaire Jérôme-Le Royer

M. Morselli (Joseph): M. le Président, merci. M. le ministre, messieurs les membres de l'Assemblée nationale, bonsoir à vous tous. J'aimerais vous présenter mes collègues de la commission scolaire, en commençant, à gauche, par les membres de l'exécutif: M. Domenico Moschella; M. le délégué au conseil scolaire de l'île, M. Gilles Dion; mon vice-président, M. Denis Tremblay; notre DGA, M. André Gauthier. Cela fait seulement six ans qu'on se connaît!

Le Président (M. Parent, Sauvé): II est important.

M. Morselli: Mon directeur général, M. Maurice Poirier; un autre membre de l'exécutif, M. Michel Daoust; et un des représentants des parents au conseil des commissaires, M. André Bélisle.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Messieurs, soyez les bienvenus.

M. Morselli: Merci. Comme vous l'avez dit, M. le Président, vous avez tous les documents devant vous et j'aimerais débuter en disant, pour qui ne connaît pas exactement la situation géographique de Jérôme-Le Royer, qu'on est la commission scolaire qu'on appelle du bout de Ille, par rapport à toute l'île de Montréal. Elle dessert quatre municipalités, en commençant à l'ouest par Saint-Léonard, Anjou, Montréal-Est et une partie aujourd'hui de Montréal, connu sous le nom de Pointe-aux-Trembles, dans le passé et encore aujourd'hui. Ça, c'est la situation géographique. J'avais pensé, M. le Président, de vous lire toute la synthèse de notre présentation. Mais, comme vous l'avez dit, le temps est très court et je pense que vous me permettrez de vous faire grâce de ne pas répéter, en effet, ce que vous avez devant vous. Si vous êtes d'accord, j'aimerais plutôt entrer tout de suite au coeur de la discussion et je pense que mes collègues seront aussi très d'accord.

On a devant nous un projet de loi au sujet duquel, avec sept autres présidents de commissions scolaires de l'île de Montréal, j'ai eu le plaisir de discuter, avant même qu'il soit présenté à l'Assemblée nationale par M. le ministre Claude Ryan, dans une rencontre qu'on a eue à Montréal. Et en en parlant, sans voir le projet de loi rédigé, cela avait l'air vraiment très bien et très beau. Je peux vous dire qu'on est tous d'accord dans notre commission scolaire avec les principes fondamentaux du projet de loi 107.

En lisant plus tard la loi, quand elle a été présentée en première lecture, c'est alors qu'on s'est aperçu que ce ne pouvait être la même personne qui nous avait expliqué les principes de

la loi et qui l'avait écrite. Si on s'enfarge dans la lecture de la loi et dans certains articles qui ne reflètent même pas ce qu'on nous avait dit, je pense honnêtement qu'il ne s'agissait pas de la même personne.

En effet, on parle ici, comme j'imagine vous en avez déjà entendu parler aujourd'hui à plusieurs reprises, du problème suivant: Est-ce qu'on essaie de centraliser tout le pouvoir dans les mains du ministère de l'Éducation? Est-ce qu'on essaie de se défaire des commissions scolaires en enlevant tous les pouvoirs avec une loi, mais sans le dire ouvertement? Les exemples que je pourrais vous apporter ou que j'aimerais vous apporter sont naturellement multiples. Je me réfère surtout à ce fameux article 439, où l'on donne vraiment le pouvoir au ministère, au ministre, en effet, excusez-moi, d'intervenir dans toutes les actions entreprises dans une commission scolaire. En effet, pour être réalistes et cohérents avec la loi, comme elle est écrite aujourd'hui, on devrait presque vous envoyer chaque résolution que nous adoptons chez nous, pour qu'elle soit approuvée par le ministre, si on veut être sûrs - je charrie un petit peu, je suis d'accord - si on veut être sûrs qu'il n'y aura pas d'intervention, car l'article permet en même temps d'intervenir dans toutes les résolutions qu'on pourrait adopter dans une commission scolaire.

L'autre aspect, qui saute aux yeux aussi, c'est qu'on n'a plus de devoir, on n'a plus de pouvoir chez nous. On a seulement des fonctions. Et quand on regarde la loi comme telle, et qu'on examine les différents articles, à partir de l'article 191 jusqu'à 241, on parle continuellement des fonctions générales des commissions scolaires et des services éducatifs, ainsi que toutes les différentes fonctions reliées aux ressources humaines et financières. Encore là, on se demande: est-ce qu'on va conserver des pouvoirs à ce sujet ou seulement des fonctions? En effet, les commissaires supposent que la commission scolaire de l'avenir, telle qu'envisagée par le projet de loi 107, ne sera pas autre chose qu'un fonctionnaire, une exécutrice du règlement émis par le gouvernement. Comme vous le voyez, M. le Président, je suis très franc et très précis sur l'impression véritable qu'on a dans notre commission scolaire. Cela termine l'intervention, si on veut aller aux points précis.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Sur la présentation. Alors, je vous remercie M. Morselli, et s'il n'y a pas d'autres intervenants, je vais immédiatement reconnaître le ministre de l'Éducation, avec lequel nous allons commencer les échanges de propos avec les membres de la commission.

M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: Je voudrais tout d'abord signaler que j'ai apprécié, dans le mémoire de la commission scolaire Jérôme-Le Royer, les recommanda- tions précises qui sont faites concernant les articles nettement identifiés du projet de loi. On n'est pas nécessairement d'accord avec toutes ces recommandations, loin de là, mais au moins on a une base précise de discussion. Vous nous dites: À tel article, on n'aime pas le deuxième alinéa; tel article, on voudrait qu'il soit enlevé; tel article, on voudrait qu'il soit précisé dans tel sens. Si nous avions davantage de temps, nous pourrions faire l'exercice et je pense que ce serait très constructif. En tout cas, je veux vous dire que chacune des propositions précises qui sont apportées fera l'objet d'un examen attentif. Il y en a un certain nombre qui pourront être retenues et il y en a d'autres, pour lesquelles ce sera plus difficile évidemment, mais c'est la première remarque que je voulais vous adresser.

Il y en a une deuxième. Je pense que vous soulevez un faux problème, et je vous le dis en toute franchise, par le mot "fonctions". C'est le titre d'une section: Fonctions reliées aux ressources matérielles. Dès que vous entrez dans le texte des articles: la commission scolaire peut, la commission scolaire fait ceci, la commission scolaire peut faire ceci... Il reste que quand on dit "peut", "peut" et "pouvoir", c'est synonyme. Le mot "peut", c'est l'indicatif pour l'infinitif "pouvoir", à ma connaissance. Alors, on peut bien fendre les cheveux en quatre, mais à un moment donné, il faut se mettre les pieds à terre et se rendre compte que les mots, c'est ce que l'on dit dans le texte de loi. Il y a des endroits où on dit: Elle ne peut pas. Ce sont des choses qu'elle ne peut pas faire, sans qu'il y ait telle ou telle condition, mais essentiellement, les articles, si vous les regardez froidement, traitent de pouvoirs et d'obligations; on ne peut pas faire autrement dans les textes de loi. Les titres: on met "Fonctions", on pourrait bien mettre "Pouvoirs et attributions", cela ne changerait pas grand-chose, mais encore une fois, sur le contenu des articles précis, je voudrais vous poser une question. Par conséquent, pour tout ce qui regarde les pouvoirs, on ne peut malheureusement pas engager le débat là-dessus. Il y a des choses de fond qu'il est nécessaire de maintenir au niveau du gouvernement et du ministre de l'Éducation. J'aimerais que vous me disiez comment vous voyez cela. Qu'est-ce qui va rester au ministre de l'Éducation dans votre conception idéale? Ensuite, je vous poserai peut-être une deuxième question: Comment va se faire le partage, par rapport à ce qui existe aujourd'hui? Quels sont les changements majeurs que vous envisagez pour avoir un meilleur équilibre?

M. Morselli: C'est normal que nos... Excusez-moi, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Allez, allez!

M. Morselli: Dans nos recommandations de principe, on dit clairement, au point 9.2 à la

page 18 de notre rapport, "que le gouvernement et le ministre de l'Éducation disposent et détiennent les pouvoirs d'orientation et de contrôle sans être omniprésents dans tous les rouages du système scolaire".

En effet, on est conscients que les pouvoirs d'orientation et de contrôle doivent être dans les mains du ministre, mais ce sont justement par les termes ou par la façon dont la loi est écrite, qu'on s'aperçoit, pour la première fois, qu'on veut être presque omniprésents. Je me réfère peut-être encore à l'article 439. En effet, il y a un article en particulier sur lequel on s'enfarge. Quand on dit qu'on peut prendre toute décision chez nous, vous dites qu'on a vraiment tous les pouvoirs et on est d'accord que c'est ce qu'on dit. D'autre part, on les enlève en disant que le ministre peut intervenir en tout temps pour changer toute décision d'une commission scolaire. C'est là-dessus qu'on ne pourrait pas être d'accord.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre.

M. Ryan: Je suis content que vous souleviez l'article 439, parce qu'on va apporter des clarifications. Tout d'abord, dans le texte du projet de loi, il n'est pas écrit qu'il peut intervenir en tout temps. Vous pouvez bien dire cela sur la place publique, cela va bien. Mais, ce qui est écrit dans le texte, c'est pendant la tenue d'une enquête ou d'une vérification. C'est bien différent.

Deuxièmement, nous avons mis cette disposition afin d'adoucir le pouvoir de tutelle qui est dans le texte de loi. J'ai dit à maintes reprises depuis le début des audiences de la commission que, si cela donne lieu aux interprétations dont vous venez de donner l'exemple, on va être prêts à laisser tomber celui-là. Il n'y a pas de problème majeur dans ce cas. Cela a été mis pour adoucir la loi, comme nous la connaissons actuellement. Mais, si c'est interprété autrement et qu'on préfère, du côté des commissions scolaires, garder les dispositions actuelles de la loi, nous n'avons pas d'objection à cela. Cela règle un gros problème.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui, M. Morselli.

M. Morselli: Excusez-moi, j'aimerais vous dire merci M. le ministre, parce que je vous assure que, même en en parlant avec des collègues d'autres commissions scolaires, c'est vraiment un point qui, tant qu'il sera là, va susciter un paquet de discussions, comme vous dites, peut-être inutiles. Je vous comprends. Mais ce serait vraiment apprécié.

M. Ryan: Seulement un dernier point. Il y a beaucoup d'autres articles. C'est là-dessus que j'apprécie votre intervention, en les prenant un par un. Il y a certains articles sur lesquels on va vous faire des concessions, et il y en a d'autres où on va vous dire: Cela ne marche pas, pour telle ou telle raison. Je pense que vous allez comprendre aussi. Mais on va arriver à ce processus au cours des semaines qui suivront. C'est pour cela que c'est bon qu'on ait des indications. Encore une fois, j'apprécie la précision de vos recommandations.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le ministre. Avant de reconnaître le porte-parole de l'Opposition, et par égard pour nos invités, M. Morselli et ses commissaires, je requiers le consentement des deux côtés de l'assemblée pour dépasser 18 heures. Accordé? Alors, madame.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le président, messieurs, il me fait plaisir de vous accueillir à cette commission parlementaire. Je me faisais juste la remarque - si vous permettez que je vous la communique - qu'il n'y a pas beaucoup de femmes chez vous. J'espère qu'il y en a quelques-unes parmi les commissaires.

Par ailleurs, je trouve que l'exercice que vous avez fait est extrêmement intéressant. Plus particulièrement, j'inviterais le ministre à examiner la partie de votre mémoire qui parle des recommandations techniques et qui identifie de façon très claire des articles sur lesquels la commission scolaire souhaiterait avoir les pouvoirs. Je pense à la page 20 de votre mémoire. Vous dites au point 9.6.2: "Que les commmissions scolaires conservent leur autonomie dans la détermination des postes à créer pour chaque classe d'emploi. Advenant que ce nombre de postes signifierait une dépense totale au-delà du budget autorisé, que telle dépense soit alors aux frais de la commission scolaire... Que les dispositions de la nouvelle loi ne soient pas plus restrictives que celles de l'arrêté en conseil 2380".

La recommandation suivante dit: "Que les commissions scolaires puissent conserver le droit d'aliéner leurs immeubles à une juste valeur marchande; que le principe de la division du territoire en commissions scolaires linguistiques sur l'île de Montréal soit retenu à la condition qu'un tel principe s'applique à l'ensemble du territoire de me de Montréal".

Se rapportant au ministre, vous dites: "Que l'article 28 soit retiré".

Je pense que vous avez là une série de recommandations. C'est ce que le ministre nous demande et ce, depuis le début. Je suis assez impressionnée par la qualité de votre mémoire à cet égard. Si le ministre voulait avoir des réponses, je pense qu'il les a, elles sont contenues là^dedans. De façon très nette, vous identifiez à la fois les articles pour lesquels il devrait y avoir des modifications, et l'ordre des modifications.

Vous dites, à la page 19 de votre mémoire, qu'au lieu de définir dans la loi les obligations

et les droits des enseignants, que soit assuré l'avènement d'un code de déontologie du personnel enseignant. Pouvez-vous nous dire comment vous voyez l'adoption d'un code de déontologie? Ce serait fait par quelle instance? Actuellement, on n'a pas vraiment, au sens traditionnel du terme, d'association professionnelle des enseignants qui pourrait éventuellement se doter d'un code de déontologie. Avez-vous réfléchi à la façon possible de procéder? (18 heures)

M. Morselli: Je pense qu'il serait très facile de voir à inscrire dans une loi les devoirs d'un professeur d'école; même si cela serait parfois souhaitable, cela pourrait conduire à d'autres problèmes juridiques. On dit même que c'est le devoir d'un professeur d'inculquer à un enfant l'amour de... Excusez, le vrai mot, c'est...

Une voix: Le goût d'apprendre.

M. Morselli: ...le goût d'apprendre. Dans une loi, c'est très difficile à calculer, comme tel, quand un garçon a fini d'avoir le goût d'apprendre. C'est pourquoi nous suggérons plutôt d'avoir un code d'éthique qui, naturellement, pourrait être prévu par la loi, mais ne pas faire partie d'une loi; un code d'éthique que, j'en suis sûr et certain, même les différentes associations syndicales seraient prêtes à accepter et à faire respecter par leurs membres.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Mme la députée.

Mme Blackburn: Oui. Dans votre mémoire, vous abordez brièvement la question touchant la commission scolaire linguistique et vous ne parlez pas du tout de la partie de la loi relative à la reconnaissance d'écoles confessionnelles. Ce point a été ramené à maintes reprises et j'avançais l'hypothèse suivante en guise de solution, pour garantir que les élèves ou leurs parents qui choisissent un enseignement moral plutôt qu'un enseignement religieux et moral puissent s'assurer que leurs droits soient protégés, au même titre que celui qui veut l'enseignement moral catholique ou protestant, religieux également: Que en plus du personnel qui est prévu au sein de la commission scolaire pour s'assurer que les droits des écoles catholiques ou protestantes soient respectés on ait en contrepartie du personnel pour veiller au respect des droits des autres élèves. Comment réagiriez-vous devant une telle hypothèse? On sait que, dans le règlement du comité catholique et du comité protestant, on prévoit la formation de l'enseignant, les encadrements, un certain nombre de règles. Est-ce qu'il ne serait pas souhaitable qu'on retrouve sensiblement la même chose en ce qui concerne les personnes qualifiées pour dispenser l'enseignement moral et les services qui devraient être offerts à ceux qui choisissent l'enseignement moral?

M. Morselli: Oui, je pense qu'à ce sujet on est déjà bien clairs. Quand on a dit qu'on était d'accord pour une commission scolaire linguistique, c'est bien vrai que chez nous, on n'a aucun problème. Toutes nos écoles sont reconnues comme catholiques aujourd'hui. En effet, elles ont déjà un statut confessionnel. Alors, pour la totalité de nos écoles, on souhaite toujours avoir un personnel spécialisé pour les différents enseignements, c'est vrai; et il y a déjà aujourd'hui des spécialistes en oeuvre pour l'enseignement moral, en ce qui concerne Jérôme-Le Royer. Est-ce que c'était la réponse que...

Mme Blackburn: Non, je me demandais quel est chez vous le pourcentage d'élèves qui demandent l'enseignement moral.

M. Morselli: Pour le pourcentage, je me réfère au statisticien, à mon directeur général. Quant au pourcentage, je ne le connais pas par coeur, Mme Blackburn, mais je peux vous assurer qu'il est très, très bas. En effet, il est presque inexistant à Saint-Léonard, inexistant à Anjou. Je parlerais peut-être d'une douzaine d'élèves dans une ville comme Anjou. On parlerait peut-être d'une vingtaine d'élèves...

Une voix: De 2 % au total.

M. Morselli: De 2 % au total. C'est déjà beaucoup.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela inclut le secondaire et le primaire?

M. Morselli: Oui. Si vous le permettez, M. le Président...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui, M. Morselli.

M. Morselli: M. Poirier, notre directeur général aimerait intervenir au sujet de...

Mme Blackburn: Alors, on a envoyé la bonne ministre.

M. Morselli: ...la première question de Mme Blackburn...

Mme Blackburn: Le bon candidat.

M. Morselli: ...concernant le code d'éthique pour les enseignants.

Mme Blackburn: Oui.

M. Poirier (Maurice): Voici. Nous avons pensé placer cet article sur la table aux fins de discussion, parce que nous trouvons difficile le fait qu'on définisse dans une loi des droits et devoirs des enseignants qui sont déjà définis une première fois dans les conventions collectives.

Alors, jusqu'à quel point, est-ce qu'on ne pourrait pas... Ces questions sont revenues périodiquement au cours des 20 dernières années, ces questions de code d'éthique, de code de profession ou des choses comme cela pour, petit à petit, amener peut-être les enseignants à ne plus négocier leurs droits et devoirs mais, à l'instar des différentes professions qui existent dans notre société, à pouvoir se soumettre, disons, à des critères, à des modes, à des normes qui seraient reconnus de part et d'autre pour les enseignants. Et nous trouvons - j'insiste sur ce que notre président a dit tout à l'heure - nous trouvons très difficile le fait de "judiciariser" par une loi certains pouvoirs et devoirs des enseignants.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Mme la députée.

Mme Blackburn: Vous n'avez pas abordé dans votre mémoire l'aspect des services complémentaires. On retrouvait dans la loi 3 une série de services complémentaires que la commission scolaire devait organiser, devait offrir, parce que parler des services éducatifs sans en spécifier la nature et le support, cela nous apparaît un peu vague. Vous n'avez pas abordé cette question. Est-ce que vous estimez qu'il serait important que la définition des services complémentaires apparaisse dans la loi, comme c'était le cas dans la loi 3 ou si, pour vous, c'est superflu?

M. Morselli: Par services complémentaires, on entend les services de garderie en milieu scolaire, des services semblables, n'est-ce-pas?

Mme Blackburn: Non, c'était...

M. Morselli: Qu'est-ce que c'est les services complémentaires dans nos écoles?

Une voix: Les psychologues, les conseils d'orientation...

M. Morselli: Je pense que cela faisait davantage référence à un service de garderies, à des services à la population étudiante, n'est-ce pas madame?

Mme Blackburn: C'était dans la loi 3. On retrouvait des services de promotion des droits et responsabilités de l'élève, des services de participation de l'élève, des services d'encadrement et de surveillance, d'orientation scolaire, des services de santé et services sociaux, des services d'animation, de psychologie, d'orthophonie et de recherche d'emploi. C'était les services complémentaires. Alors, on avait une série de services qui apparaissaient dans la loi, de manière à ce que le gouvernement soit tenu d'assurer aux commissions scolaires les ressources qui vont, évidemment, avec la mise en place de tels services. Alors, c'était là ma question. Est-ce que vous estimez utile de ramener dans la présente loi une définition de ces services ou si cela vous semble inutile?

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Morselli.

M. Morselli: Vu qu'aujourd'hui tous ces services sont déjà compris dans le régime pédagogique qui émane du ministère de l'Éducation, c'est bien normal qu'ils y soient. On s'aperçoit que c'est toujours le gouvernement qui inclut ce qu'il y a dans ce qu'on appelle le régime pédagogique, et qui va aussi se préoccuper de ce que le régime pédagogique soit respecté chez nous, de sorte qu'il sera aussi obligé de nous subventionner pour fournir tel ou tel service. Je veux dire que, normalement, le régime pédagogique est déjà presque perçu comme une loi, même s'il ne l'est pas en soi. Je comprends très bien, mais c'est déjà perçu comme une loi, au moins, qui provient du ministère, sinon plus de l'Assemblée nationale. Comme tel, on a mentionné qu'on a compris aussi presque l'inutilité de l'inscrire dans la loi. Chez nous du moins, personne n'a fait ressortir ce problème.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. D'autres interventions du côté de l'Opposition?

Mme Blackburn: Bien, j'aurais terminé, M. le Président. Je voudrais vous remercier infiniment de votre participation aux travaux de cette commission et vous dire que j'ai presque le goût de m'excuser un peu parce que cela a été bref. Je voudrais vous remercier de l'effort de concision, également que vous avez fait en présentant l'essentiel de vos recommandations. Cela nous a permis, quand même, d'échanger nos points de vue. Soyez assurés que nous avons pris connaissance de votre mémoire et, je le rappelle, vos recommandations, qui touchent de façon très claire et très précise, plusieurs articles du projet de loi, vont être pour nous une référence précieuse au moment où on suggérera au ministre des amendements à son projet de loi. Je vous remercie.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: Justement, parmi les recommandations dont la députée de Chicoutimi pourrait s'inspirer pour nuancer ses jugements, j'en trouve une qui regarde les articles 108 et 105, par exemple. Il y a des problèmes qui se posent depuis de nombreuses années dans les commissions scolaires en matière d'intégration, par exemple, des enseignements primaire et secondaire. Il y a des cas qui sont insolubles actuellement et ce, depuis de nombreuses années. Le projet de loi a introduit une clé pour les régler

et, à mon agréable étonnement, la commission scolaire Jérôme-Le Royer a compris ce problème, en fait mention dans son mémoire et reconnaît qu'il faut une clé. Elle demande même qu'on l'applique également à l'article 108. Je trouve que c'est réaliste à part cela. C'est pour cela que ce n'est pas tout de regarder l'énumération. Il faut voir ce qu'il y a dans les propositions. Parmi les propositions que vous avez faites, il y en a qui sont réalistes. C'est pour cela que je vous ai dit qu'on les examinerait une par une. Je pense qu'il y a un souci du bien général qu'on doit reconnaître. Ce qui m'intéresse, c'est un souci de la qualité de l'ensemble du système, pas seulement l'intérêt de la commission scolaire Jérôme-Le Royer. C'est capital dans le débat que nous faisons. Si cette dimension est absente, le débat n'a plus sa raison d'être. Je pense que vous l'avez saisi.

Maintenant, il y a un certain nombre d'autres propositions, comme la députée le disait tantôt sur l'article 28. L'article 28 est une affaire de sagesse élémentaire. Si le ministre est saisi d'une plainte frivole, à sa face même irréaliste, il peut dire: cette plainte, on y répond tout de suite, on ne s'occupe pas de cela. Vous demandez que cela soit retiré. Cela a frappé la députée de Chicoutimi. Mais, moi, cela me frappe moins. Je vous le dis en toute simplicité. Je pense qu'on pourrait s'entendre rapidement. De toute manière, ce n'est pas une question majeure. Encore là, si cela partait, on ne mourrait pas. Il me semble que c'est une protection élémentaire à donner au ministre. Il faut penser que réunir un conseil de trois personnes pour examiner une plainte, cela coûte de l'argent au gouvernement. Rien que pour le former, cela demande des fois des heures de délibérations. Quand c'est frivole à sa face même, le ministre devrait être capable de pouvoir dire: C'est cela. De toute manière, il rend compte de ses actes devant la Législature et devant une foule d'instances. Ce sont deux exemples que je prends.

J'en avais un autre. C'est mon dernier exemple. Vous dites: Quand la commission scolaire procède à une construction à même ses propres fonds, elle devrait peut-être être exemptée de soumettre ses plans et devis au gouvernement. Cela a du bon sens. Ce sont des choses qu'on peut examiner. Ce n'est pas irréaliste du tout. On voit que cela procède de l'expérience. Maintenant, il pourrait arriver qu'une commission scolaire riche se donne avec cela une construction qui va être infiniment plus belle que celle de la construction scolaire pauvre qui est juste à côté. Il faut y penser deux fois. Mais, à sa face, la proposition a du bon sens. On est prêts à l'examiner sérieusement. Ce sont seulement trois exemples que je prends pour montrer comment c'est diversifié. C'est un des mémoires qui va le plus dans l'analyse du contenu. Cela nous invite, autant l'Opposition que le gouvernement, à une réflexion objective. Je pense que vous nous connaissez assez pour savoir qu'on est capables de le faire. Je vous remercie infiniment. Cela a été très agréable. Si cela avait été plus long, cela aurait été encore plus enrichissant pour tout le monde.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie. Nous sommes aujourd'hui le 26 mai et cette commission parlementaire siège depuis le 3 mai. Conscients qu'on n'a pas terminé notre mandat, on se voit dans l'obligation, à cause des contraintes de la vie parlementaire, d'ajourner nos travaux sine die.

(Fin de la séance à 18 h 13)

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