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Version finale

32nd Legislature, 5th Session
(October 16, 1984 au October 10, 1985)

Friday, November 2, 1984 - Vol. 28 N° 2

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Interpellation : Le sous-emploi au Québec


Journal des débats

 

(Dix heures trois minutes)

Le Président (M. Beauséjour): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission de l'économie et du travail se réunit ce matin pour procéder à l'interpellation du député de Notre-Dame-de-Grâce au ministre de l'Industrie et du Commerce sur le sujet suivant: le sous-emploi au Québec.

Je demanderais au secrétaire de la commission de m'indiquer s'il y a des remplacements.

Le Secrétaire: Les remplacements sont les suivants: M. Cusano (Viau) est remplacé par M. Maltais (Saguenay); M. Fortier (Outremont) est remplacé par M. Scowen (Notre-Dame-de-Gr§ce); M. Perron (Duplessis) est remplacé par M. Brouillet (Chauveau).

Le Président (M. Beauséjour): Merci. Je voudrais rappeler aux membres de la commission les règles que nous aurons à suivre. Le député qui a donné l'avis d'interpellation intervient le premier pendant dix minutes. Le ministre interpellé intervient ensuite pendant dix minutes. Il y a ensuite alternance dans les interventions, c'est-à-dire un député du groupe de l'Opposition, ensuite, le ministre et après un député du groupe formant le gouvernement; un député du groupe de l'Opposition, le ministre et ainsi de suite jusqu'à la fin. Cet ordre des interventions a été convenu lors d'une réunion des leaders des groupes parlementaires.

Je vous rappelle que chaque intervenant a un temps de parole de cinq minutes. Si un intervenant n'utilise pas ses cinq minutes, le temps non utilisé est alors perdu. À la fin, j'accorderai un dernier temps de parole de dix minutes au ministre; l'interpellant aura ensuite un droit de réplique de dix minutes. Cela va?

M. Scowen: Cela va.

Le Président (M. Beauséjour): Je donne maintenant la parole au député de Notre-Dame-de-Grâce.

Exposé du sujet

M. Reed Scowen M. Scowen: M. le Président, merci.

Nous avons décidé d'aborder une fois de plus, aujourd'hui, la question du sous-emploi au Québec. Je pense que le gouvernement et l'Opposition sont d'accord sur deux sujets: premièrement, que la question de l'emploi est la question la plus importante pour le gouvernement et pour l'Assemblée nationale; deuxièmement, que la création d'emplois, élément clé dans cette question économique, est insatisfaisante au Québec. Même le gouvernement l'admet: On aurait aimé faire mieux.

Nous avons, je pense, démontré récemment que la création d'emplois au Québec s'est faite beaucoup plus lentement qu'ailleurs depuis cinq ans et que même aujourd'hui, au moment où on se parle, on se retrouve avec moins de monde au travail au Québec qu'on en avait l'année de l'élection du Parti québécois en 1981. Ce matin, on a surtout voulu parler de l'emploi dans l'industrie manufacturière au Québec parce que le ministre que nous avons devant nous, aujourd'hui, c'est le ministre de l'Industrie et, comme tout le monde le sait, c'est l'industrie manufacturière qui est le moteur de notre économie. Il n'y a pas ou presque pas une ville ou un village au Québec qui n'a pas son usine qui est très souvent le moteur de toute l'économie de la communauté.

Pour savoir ce qui se passe dans le domaine de l'emploi dans le secteur manufacturier, nous avons fait faire une compilation spéciale de l'emploi dans les divers secteurs de l'économie dans l'industrie manufacturière. Je veux prendre cinq minutes pour donner les résultats de cette petite enquête que nous avons faite. Nous avons posé deux questions. La première question: Dans chaque secteur, soit le textile, le bois, etc., combien de personnes y a-t-il au travail aujourd'hui comparativement au nombre qui était au travail en 1976 quand le Parti québécois a été élu pour la première fois? Est-ce que nous avons progressé ou non? Deuxièmement, parce qu'il y a souvent des éléments de l'extérieur qui nous touchent, nous avons essayé de savoir si notre part de l'emploi dans chacun de ces secteurs a augmenté notre part, si vous voulez, des emplois au Canada. On ne voulait pas que, devant une baisse de l'emploi, le ministre nous dise: C'est à cause de la conjoncture économique. Je dois vous dire que les résultats de cette analyse nous ont bouleversés, nous ont profondément choqués. Et parce qu'il n'y a pas beaucoup de temps

pour cette première partie de notre débat, je vais passer immédiatement aux résultats. Je dois vous dire que notre préoccupation, ce matin, c'est de demander au ministre, s'il est d'accord avec les chiffres, quelles sont les raisons de cette situation et ce que nous pouvons faire pour analyser le problème et le régler.

Passons immédiatement aux chiffres. Je vais vous énumérer, M. le Président et M. le ministre, les secteurs manufacturiers de l'économie du Québec par ordre d'importance en nombre d'emplois avec ce qui s'est passé depuis 1976. Je commence avec le secteur de l'habillement où on avait, en 1976, 77 000 emplois qui sont descendus à 70 000 en 1983, une baisse de 7000. Notre part du marché canadien dans ce secteur a baissé de 9 points.

Le deuxième secteur le plus important au Québec, c'est l'alimentation et les boissons. Nous avons augmenté le nombre d'emplois en sept ans de 1000 seulement et nous avons gardé notre part de ce marché.

Dans l'industrie des pâtes et papiers, nous avons perdu 8000 emplois depuis sept ans et nous avons perdu 2% de notre part des emplois canadiens.

Dans le secteur de première transformation des métaux; les alumineries, les sidérurgies, les fonderies, nous avons perdu 7000 emplois. Nous avons 7000 personnes de moins au travail en 1983 qu'en 1976 et nous avons perdu notre part du marché canadien aussi.

L'équipement de transport. On parle souvent de Bombardier, mais effectivement dans ce secteur, nous avons 4000 personnes de moins au travail ici au Québec, aujourd'hui, qu'en 1976. Nous avons, encore une fois, perdu notre part du marché canadien.

Les produits de métal. Dans des industries comme le fil, les turbines, les wagons, nous avons perdu 9000 emplois et subi une perte dans notre part des emplois canadiens.

Le textile. Nous avons perdu 7000 emplois et 6% de notre part du marché canadien.

Dans les produits électriques et électroniques, secteurs de pointe, de haute technologie, nous avons perdu 3000 emplois et 2% de notre part du marché.

Dans les produits chimiques, autre secteur de grande importance dans la haute technologie, la biochimie, la pharmaceutique, nous avons perdu 5000 emplois et 5% de notre part du marché.

L'imprimerie et l'édition. C'est à peu près le seul secteur où nous accusons une augmentation de 6000 emplois depuis 1976. À mon avis, cette augmentation est due au fait que, dans l'imprimerie et l'édition vous avez la publicité gouvernementale et la paperasse gouvernementale. C'est à peu près la seule industrie en pleine croissance au Québec.

Le bois. Oui, dans le bois vous avez aussi fait un gain de 2000 emplois en sept ans. C'est probablement le bois qui est entré dans la fabrication du papier qu'on a utilisé pour les formulaires, je ne sais pas, mais c'est une exception.

Les meubles. Un autre petit secteur de 22 000 emplois que nous avons augmentés à 23 000, mais notre part du marché canadien a quand même diminué.

Divers. Ce sont toutes les industries qui ne sont pas dans les autres secteurs, notamment les produits du sport et les produits des instruments: une autre perte.

Fabrication de machineries: match nul. Pas un seul emploi créé.

Produits minéraux non métalliques où vous avez l'amiante et le ciment: 3000 emplois de perdus.

Le cuir - la chaussure si vous voulez -5000 emplois de perdus et notre part du marché diminuée énormément.

Produits plastiques et caoutchouc: un autre secteur de haute technologie: 1000 emplois de perdus et 4% de notre part du marché.

Bonneterie: 1000 emplois perdus.

Tabac: 2000 emplois perdus.

Produits du pétrole et du charbon: 1000 emplois perdus.

Voici, M. le ministre, le total: en 1983, au Québec, 56 000 personnes de moins au travail dans les usines qu'on n'avait en 1976 quand le gouvernement péquiste est arrivé au pouvoir. Notre part des emplois canadiens dans tous ces secteurs manufacturiers a baissé de trois points ou, si voulez, de 10%.

Pour 1984, les chiffres ne sont pas encore disponibles parce que l'année n'est pas encore terminée, mais il semble qu'on va peut-être avoir une récupération de la moitié de ces 56 000 qui est en baisse, mais on sera à la fin de l'année toujours 30 000 en bas du nombre de personnes au travail qu'on avait dans l'industrie manufacturière il y a huit ans.

En terminant, M. le Président, je pose la question suivante au ministre: Il y a 15 ou 16 secteurs manufacturiers sur 20 où nous avons moins de monde au travail, pourquoi? Ce n'est certainement pas la faute des Québécois. Ils sont les mêmes Québécois et peut-être même plus compétents qu'ils ne l'étaient il y a sept ans. Ce n'est pas la faute du fédéral. Le ministre le sait très bien, le fédéral a versé pendant des années des sommes énormes ici - peut-être pour les raisons du référendum, si vous voulez - et le gouvernement a même accusé le fédéral de trop dépenser ici. Mais c'est sûr que ce que le gouvernement fédéral a fait ici, il l'a fait partout au Canada. Que ce soit bien ou mauvais, je crois que personne ne croira le ministre s'il commence ce matin à attaquer le gouvernement fédéral.

(10 h 15)

Ce n'est pas la faute de la crise économique parce que nous avons démontré que c'est un phénomène qui était beaucoup plus important ici que dans le reste du Canada, notre part de l'emploi manufacturier perdue. Et ce n'est pas dû à un accroissement de la productivité parce que, d'après l'Institut national de productivité lui-même, c'est indiqué partout que la productivité au Québec augmente moins vite que dans le reste du Canada.

M. le Président, en terminant, j'aimerais poser deux questions au ministre. Qu'est-il arrivé et qu'entend-il faire?

Le Président (M. Beauséjour): La parole est maintenant au ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Biron: Je voudrais seulement vous corriger, M. le Président. Je n'ai pas eu de changement ministériel, je suis encore ministre de l'Industrie et du Commerce.

Le Président (M. Beauséjour): D'accord.

Une voix: C'est une question de temps.

Réponse du ministre M. Rodrigue Biron

M. Biron: M. le Président, je suis heureux qu'on discute du problème de l'investissement et de la création d'emplois au Québec parce que c'est un problème majeur, qui nous préoccupe grandement et qui préoccupera, au cours de nombreuses années, beaucoup de Québécois et de Québécoises; particulièrement la jeune génération qui se demande comment s'orienter dans son choix de carrière pour avoir le maximum de chances de pouvoir travailler chez elle.

Bien sûr, on aimerait que tout le monde puisse travailler; comme objectif, je pense que tout le monde est d'accord là-dessus, mais on a aussi à vivre dans certaines conjonctures. On a eu à vivre la crise économique, même si le député de Notre-Dame-de-Grâce a dit: ce n'est pas la faute de la crise économique, ce n'est pas la faute des taux d'intérêt si ça n'a pas fonctionné, ce n'est pas la faute du fédéral. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, vous êtes à peu près le seul à penser que ce n'est pas la faute de la crise économique si on a connu des difficultés au cours des dernières années. Les taux d'intérêt ont tué littéralement les entreprises québécoises. Si vous dites que ce n'est pas vrai, vous devriez voir la structure financière des entreprises québécoises, leur gestion et tout ça. On a beaucoup plus de PME que de grandes entreprises. Dans ce sens, nos entreprises ont été beaucoup plus ébranlées que les entreprises ontariennes, pour prendre un exemple. Vous n'avez qu'à discuter avec les gens du Groupement québécois d'entreprises, du Centre des dirigeants d'entreprises, des chambres de commerce, eux au moins vont vous donner les informations nécessaires que vous ne semblez pas avoir.

Vous dites que ce n'est pas la faute de l'ancien gouvernement fédéral. Je pense que le procès a été fait et que la population a jugé sévèrement un gouvernement qui n'avait pas voulu faire l'effort nécessaire pour stimuler l'économie. J'ai rencontré il y a quelques mois, un ancien président de la Fédération libérale du Canada, qui m'a dit que ça faisait quinze ans que le gouvernement fédéral n'avait pas de direction économique. Ce n'est pas un péquiste qui a dit ça, c'est un libéral canadien. Je pense qu'il était grand temps que de ce côté-là, on donne le coup de barre nécessaire; on l'a fait et j'en suis heureux.

La productivité a augmenté au Québec rapidement au cours des dernières années. Il faudrait discuter de ces chiffres avec le député de Notre-Dame-de-Grâce, au moins lui donner les informations de base essentielles là-dessus.

Vis-à-vis de la création d'emplois, dans le secteur manufacturier, il y a une chose qui s'appelle le virage technologique. On a des exemples précis où on a investi des sommes d'argent énormes non pas pour créer de nouveaux emplois, mais pour protéger et garantir les emplois existants. Par exemple, on a parlé il y a quelques mois d'un investissement de 1 000 000 000 $ au Saguenay-Lac-Saint-Jean chez Alcan. Alcan a dit: On a investi 1 000 000 000 $. On ne créera pas d'emplois additionnels, nous allons protéger les emplois existants pour autant que le marché tienne. De ce côté, il s'agit que nos entreprises deviennent de plus en plus compétitives. Il ne faut pas craindre de temps à autre dans certains secteurs d'activité ou dans certaines entreprises particulières, bien sûr, d'assumer certaines pertes d'emplois si on prend le virage technologique. Mais il faut le prendre, on n'a pas le choix; sinon, nous disparaîtrons complètement du marché mondial.

Lorsque le député de Notre-Dame-de-Grâce dit que nous ne sommes pas compétitifs, comment cela se fait-il qu'on exporte 45% de nos produits manufacturiers? Comment cela se fait-il? Si on n'est pas compétitifs, si on n'est pas bons, si on n'est pas capables de produire, on n'exportera pas. Personne de l'extérieur n'achètera nos produits, on sera plus cher que les autres. Si le Québec est un pays exportateur, c'est qu'il y a des entreprises manufacturières qui réussissent à avoir une certaine productivité suffisante pour être compétitives avec

d'autres pays du monde.

Au Québec, en 1984 - le député veut parier de création d'emplois - on a créé, durant les neuf premiers mois de l'année, 87 900 emplois de plus qu'en 1983. C'est plus que ce qui se fait ailleurs au Canada. La création nette d'emplois au Québec après la crise économique... Bien sûr, si on assume la crise économique, on a perdu des emplois comme tout le monde et on le déplore. On a peut-être perdu plus qu'ailleurs parce que la structure des entreprises n'était pas conforme aux folies des taux d'intérêt élevés jusqu'à 20% ou 24%, mais on est en train de regagner, et très rapidement, ces emplois. À l'heure actuelle même, pour les neuf premiers mois de l'année, on a un taux de 6,3% pour la création d'emplois manufacturiers, 33 200 nouveaux travailleurs dans le secteur manufacturier; alors que le Canada a un taux de 4,5%, nous avons 6,3%.

Il faut reconnaître qu'un effort énorme a été fait au Québec là-dessus. Cet effort, on va continuer à le faire et on va continuer à créer non seulement des emplois avec des subventions gouvernementales ou de l'aide gouvernementale, mais des emplois qui vont demeurer longtemps. Il faut d'abord prendre ces emplois dans certains secteurs de haute technologie, dans des secteurs de développement et, aussi, en consolidant les secteurs traditionnels, tels que le textile, le vêtement, la bonneterie, le meuble. Là-dessus, il y a des actions précises qui ont été faites par le gouvernement du Québec en conjonction avec l'entreprise manufacturière ou les associations d'entreprises manufacturières. Je vous rappelle que le centre de productivité du meuble, du vêtement, du textile et le centre de promotion de la mode, cela a été demandé par les entreprises manufacturières, pour aider ces gens à devenir encore plus efficaces et. plus productifs.

Puisque le député de Notre-Dame-de-Grâce nous a montré quelques tableaux, je voudrais aussi vous en faire voir quelques-uns en particulier si on veut simplement se comparer avec une province qui a été passablement industrialisée et aussi avec le Canada. C'est le genre d'immobilisations dans les emplois de fabrication, dans les emplois manufacturiers dont le député a parlé tout à l'heure, qui pourrait faire en sorte qu'au cours des prochaines années on puisse continuer à faire ce qu'on a fait au cours des dernières années, c'est-à-dire créer plus d'emplois au Québec que dans les autres provinces canadiennes. Les immobilisations de fabrication, cela c'est dans le domaine manufacturier. C'est cela qui crée des emplois à plus long terme, si on investit, si on a des entreprises qui sont dynamiques et efficaces. En 1976 - la dernière année du gouvernement du chef invisible, de l'homme invisible, M. Bourassa - on avait, 20,7% des immobilisations de fabrication, des investissements manufacturiers au Canada. En 1984, on a 31,4% des investissements dans le domaine de la fabrication au Canada. Donc, on en a repris considérablement; c'est une augmentation de 33%, comparativement à ce qui existait à l'époque, soit la dernière année du gouvernement de l'homme invisible, 1984, c'est la dernière année qu'on a; donc, des augmentations considérables. Cela veut dire qu'il y a des gens qui ont confiance dans l'économie du Québec. À long terme, bien sûr, on va créer des emplois dans le domaine manufacturier et aussi dans les domaines tertiaires l'entourant. Si on veut avoir des entreprises artisanales, c'est une autre affaire. Mais, étant donné que nous avons décidé d'avoir des entreprises bonnes, efficaces et capables de concurrencer, c'est sûr qu'il y aura des emplois dans le domaine tertiaire.

On va comparer maintenant nos investissements avec ceux de la province voisine, l'Ontario, qui est la province manufacturière par excellence, le modèle de nos amis d'en face. En 1976, le Québec avait 37% des investissements qui se faisaient en Ontario. En 1984, on a 71% des investissements de fabrication qui se font en Ontario. Cela veut dire quoi? Cela veut dire que les entreprises québécoises sont plus dynamiques et que, maintenant, elles investissent davantage au Québec qu'elles n'investissaient en 1976. Le climat économique est donc meilleur en soi. On a des chances, à plus long terme, de pouvoir créer des emplois permanents là-dessus.

Nos décisions ne se prennent pas sur un coin de table comme cela s'est fait pour SIDBEC-Normines en particulier, à l'époque de l'homme invisible où on a gaspillé 600 000 000 $ ou 700 000 000 $ appartenant aux citoyens québécois. Les décisions se prennent avec des stratégies de développement. Des documents ont été publiés, entre autres, "Bâtir le Québec", "Le virage technologique", et c'est à partir de ces documents qu'on réussit à organiser un plan d'ensemble de développement économique. On a moins de très grandes entreprises, surtout dans le domaine de l'automobile où, historiquement, le gouvernement canadien a toujours privilégié l'Ontario. Bien sûr qu'il y a des emplois là-dedans. On essaie de faire notre part et d'obtenir une grande partie de ces nouveaux investissements. Qu'on songe que, dans les entreprises manufacturières au Québec, en 1983, on a créé dans l'ensemble de l'économie 64% des emplois au Canada et que, dans les entreprises manufacturières en 1984, dans les premiers mois, on a déjà 35% des emplois canadiens créés. Tout cela veut dire qu'au Québec, à l'heure actuelle, depuis quelques années, au sortir de la crise économique, une fois qu'on a consolidé nos

entreprises, on réussit, dans le domaine de la fabrication de l'industrie manufacturière, à créer, proportionnellement, plus d'emplois que dans le reste du Canada.

Je pense qu'il faut dire bravo aux entreprises. Bien sûr, le gouvernement du Québec a été actif là-dedans, mais ce sont surtout les chefs d'entreprise qui ont confiance dans leur capacité de réussir. Je voudrais que, du côté du Parti libéral, au moins, on commence à rendre hommage aux chefs d'entreprise du Québec.

Le Président (M. Beauséjour): M. le ministre, vous avez terminé?

M. Biron: Oui.

Le Président (M. Beauséjour): D'accord. La parole est au député de Laporte.

Argumentation M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Les chiffres qu'a rendus publics tout à l'heure mon collègue, le député de Notre-Dame-de-Grâce, sont extrêmement révélateurs. Le ministre vient de faire une tentative de réplique en disant que la crise a frappé partout, au Québec comme ailleurs. La vérité - on l'a vu sur les tableaux de mon collègue - c'est que la part du Québec dans les emplois créés ou perdus est plus grande. La part du Québec dans le marché canadien a diminué depuis la crise. C'est donc dire que, lorsque le ministre nous dit que la crise a frappé partout, c'est vrai, mais au Québec on a perdu plus d'emplois et on a récupéré moins d'emplois que dans le reste du Canada. Donc, la performance du Québec est plus mauvaise que partout ailleurs au Canada.

Un deuxième point. Le ministre nous parle aussi de la création d'emplois au Québec cette année et l'an dernier. Or, c'est une fumisterie. Le gouvernement ne crée pas d'emplois au Québec présentement. Il récupère des emplois perdus pendant la crise. Les chiffres sont très faciles à considérer. Pensons que, depuis juillet 1981 et tout au long de la crise, il s'est perdu 222 000 emplois au Québec et 219 000 en Ontario. Donc, il s'est perdu à peu près le même nombre d'emplois. Or, à ce jour, fin septembre 1984, d'après Statistique Canada, le Québec a récupéré 184 000 des 222 000 emplois. Nous avons donc récupéré 83% des emplois. 11 reste encore 38 000 emplois à récupérer avant de revenir à la situation de juillet 1981. Donc, on ne crée pas d'emplois; on récupère des emplois, alors qu'en Ontario on a récupéré la totalité des emplois d'avant la crise et on a même créé 29% plus d'emplois qu'avant la crise. De 219 000, on est passé à 282 000. C'est donc dire que l'Ontario, contrairement à ce que dit le ministre, a fait beaucoup mieux que le Québec. On ne récupère plus d'emplois en Ontario; on crée de nouveaux emplois.

Justement, en parlant de création d'emplois, on sait que ce qui crée le plus d'emplois au Québec et partout, d'ailleurs, ce ne sont pas les grosses entreprises, mais les petites. Les petites entreprises, d'après les études, créent la très grande majorité des nouveaux emplois, surtout les petites entreprises qui sont en forte croissance et très souvent de jeunes entreprises de moins de cinq années d'existence.

Or, le rapport qui a été rendu public ces derniers mois par la commission Saucier a bien cerné ce problème. Il nous a appris que le problème majeur de ces petites entreprises québécoises, c'est leur endettement et, bien sûr, le fait qu'elles n'ont pas de fonds propres. Le rapport Saucier mentionne à ce sujet un biais structurel important dans notre fiscalité. Le rapport Saucier dit ceci: "Les placements admissibles pour les principaux régimes d'impôts différés ou d'allégement d'impôts, (régimes de pensions, REER, Régime d'épargne-actions) excluent le capital-actions des sociétés privées. Il s'agit d'un biais structurel majeur, dont les conséquences s'accroissent parallèlement à la popularité de ces modes d'épargne."

Il faut bien penser que nos petites entreprises québécoises sont des sociétés privées. À ce titre, elles n'ont pas accès à l'épargne publique. On a beau dire que, pour se qualifier en vertu des REA, elles n'ont qu'à faire appel à l'épargne publique, on sait fort bien que ce n'est pas possible pour une petite entreprise de faire appel à l'épargne publique, surtout quand il s'agit de capitalisation, d'obtenir du capital d'environ 200 000 $, 300 000 $ ou en bas de 500 000 $. Il n'y a pas de marché actuellement pour ces petites entreprises.

Le rapport Saucier nous dit également: "La présence de ces régimes et abris fiscaux influe donc grandement sur l'allocation de l'épargne individuelle. Si ce biais n'est pas modifié, les placements non admissibles se verront structurellement désavantagés et, à long terme, l'impact pourra être majeur." Je pense que le cri d'alarme que lance la commission Saucier est important. La commission Saucier a proposé des remèdes précis. Par exemple, un régime enregistré de placement dans leur entreprise pour les dirigeants des PME et leurs employés, des sociétés d'expansion pour les petites entreprises. Une autre recommandation du rapport: l'abolition des droits successoraux, recommandée par le rapport Saucier, au moins pour les commerces eux-mêmes. J'aimerais demander au ministre ce qu'il entend faire pour venir en aide, justement,

aux petites entreprises de façon concrète pour les aider à mieux se capitaliser, à avoir une plus grande part de fonds propres. (10 h 30)

En fin de semaine dernière avait lieu -et je termine là-dessus - dans le cadre de la semaine des petites entreprises, un panel justement par les membres de la commission Saucier et d'autres intervenants du milieu. À la fin du panel, le président Fillion, du Groupement québécois d'entreprises, dont parlait le ministre tout à l'heure, a lancé un appel au gouvernement en disant: "Les entrepreneurs qui sont les créateurs d'emplois demandent de l'action et des gestes concrets." La question que je pose au ministre: Quels gestes concrets allez-vous poser à la suite des recommandations du rapport Saucier?

Le Président (M. Beauséjour): Je donne la parole au ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. Rodrigue Biron

M. Biron: Je suis un peu surpris de l'intervention du député de Laporte. Je ne dis pas, comme le ministre des Finances l'a dit hier, que le député de Laporte est complètement ignorant de ce qui se passe dans le monde économique, mais il y a des choses, je pense, dont il faudrait informer le député de Laporte. Qu'est-ce qu'on fait? Il n'y a jamais eu un gouvernement qui a fait autant au Québec pour les PME. Il n'y a même pas un gouvernement canadien qui ait fait autant pour les PME. Je suis un peu surpris de vous entendre intervenir en faveur des PME puisque, lorsque votre collègue - le document de votre parti, le Parti libéral -M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, a pondu un document d'une soixantaine de pages dernièrement, il n'a pas parlé une fois des PME là-dedans. Le Parti libéral n'a pas encore découvert que les PME, c'est important. Pas une fois dans le document d'orientation du Parti libéral on ne parle des PME, alors qu'ici, au gouvernement du Québec, on s'est occupé activement au cours des dernières années des PME.

Vous voulez savoir ce qui s'est passé au niveau des PME? Demandez à de nombreuses petites ou moyennes entreprises, aux dirigeants de ces entreprises, ce qu'on a fait pour les aider à mieux se capitaliser au cours des dernières années, que ce soit avec le plan d'urgence ou avec le plan de relance. Incidemment, quant au plan de relance, vous avez fait des gorges chaudes. L'an passé, le premier ministre a annoncé 2 000 000 000 $ que nous pourrions générer en nouveaux investissements ou en développements additionnels au niveau des PME manufacturières avec le plan de relance dans l'espace de 27 mois, soit de décembre à mars 1986. Après dix mois de fonctionnement du plan de relance, j'annonce, aujourd'hui, qu'on a déjà 1 000 000 000 $ de nouveaux investissements ou de développements économiques atteints directement à cause du plan de relance dans ce qui avait été annoncé par le premier ministre, 2 000 000 000 $. Cela nous fait penser qu'à la fin des 27 mois de fonctionnement non seulement les 2 000 000 000 $ de nouveaux investissements au niveau des PME seront atteints, mais qu'on pourra peut-être même dépasser les 2 500 000 000 $. Alors, ce sera un succès complet du côté du plan de relance.

Au sujet des actions précises pour les PME, je voudrais me référer au Conseil des sciences du Canada. Vous allez croire cela. Le Conseil des sciences du Canada, dans un document qu'il a publié il y a quelques mois, disait: C'est le Québec qui, parmi toutes les provinces canadiennes, a élaboré la stratégie industrielle la plus complète. C'est aussi dans cette province que les autorités ont mené l'analyse officielle la plus claire des problèmes qu'elle présente et de ses perspectives. Ce qui est encore le plus important, disait le document, c'est que la déclaration du gouvernement québécois contient une politique valable pour la création de nouvelles industries. Elle met l'accent sur les trois principaux domaines: les retombées industrielles des grands projets, l'aide financière et technique aux services de pointe et les programmes d'assistance préférentielle aux entreprises électroniques et biotechnologiques.

M. le Président, je pense que, lorsqu'un organisme aussi crédible que le Conseil des sciences du Canada dit que c'est le Québec qui, parmi toutes les provinces canadiennes, a élaboré la meilleure stratégie industrielle, la stratégie industrielle la plus complète, il faut dire qu'il y a des choses qui sont faites ici.

Au sujet du rapport Saucier, je rappelle aussi au député de Laporte que cette commission a été formée par le gouvernement du Québec, à mon instigation. Les commissaires de la commission Saucier n'ont pas été, comme les commissaires de la commission fédérale Macdonald, payés 800 $ par jour ou quelque chose comme cela. Ils ont travaillé bénévolement et cela n'a pas pris des années à pondre leur rapport, cela a pris trois mois exactement. On a eu un rapport clair, net et précis sur des actions ou des orientations qu'on devait prendre pour aider davantage les PME québécoises. C'est exactement ce qu'on est en train de faire. Bien sûr, il faut trouver le moyen fiscal pour répondre aux besoins de ces entreprises.

Vous nous avez parlé du régime d'épargne et de placement dans son entreprise ou des sociétés de placement dans les entreprises. C'est sûr qu'on a bien

l'intention de réaliser des choses, mais c'est une question de fiscalité. Il faut réussir à amarrer tout cela avec le Régime d'épargne-actions. Mais comment allez-vous faire pour défendre ces SEPE ou ces REPSE, ces investissements dans son entreprise avec le Régime d'épargne-actions, lorsque votre chef, l'homme invisible, dit: Il faut enlever le Régime d'épargne-actions? Je me demande si vous êtes vraiment logiques. Vous devriez au moins essayer de le retrouver. Je ne sais pas si vous pouvez lui parler au téléphone. Je sais que vous ne pouvez pas le voir plus que nous, mais, au moins vous devriez essayer de lui parler au téléphone, lui écrire une lettre et lui dire: Est-ce qu'on est pour ou contre le Régime d'épargne-actions? S'il dit qu'il est contre, vous ne pouvez pas aider les PME avec ces programmes préconisés par la commission Saucier. Eux, ils veulent se servir du Régime d'épargne-actions québécois adapté aux PME, alors que votre chef dit: Non, il faut l'enlever, il ne faut pas aider les PME.

Je crois qu'il faut d'abord que le Parti libéral du Québec se pose des questions: Est-ce que, oui ou non, vous voulez aider les PME? Si oui, dites-nous pourquoi dans le document du député de Notre-Dame-de-Grâce vous n'avez même pas mentionné le cas des PME? Pas une fois les PME n'ont été mentionnées. Pour vous, cela n'existe pas.

Une deuxième chose: Voulez-vous, oui ou non, le Régime d'épargne-actions? Si c'est oui, vous allez nous aider à continuer à l'élargir pour les PME. Si c'est non, comme le dit votre chef, l'homme invisible, essayez de vous orienter de façon à avoir un peu de cohérence dans les interventions que vous allez faire. Quant à nous du gouvernement du Québec, nous allons continuer à aider le financement des PME québécoises, comme nous l'avons fait avec le plan d'urgence ou le plan de relance.

Le Président (M. Beauséjour): Merci. La parole est au député de Châteauguay.

M. Roland Dussault

M. Dussaull: Merci, M. le Président. En commençant mon intervention, je voudrais lire quelques extraits d'une lettre envoyée par un chef d'entreprise au ministre, M. Biron. Il commence en disant: "Il y eut un temps où les PME étaient d'obscures entités, éparpillées ici et là sur le territoire du Québec. Chacune se débrouillait comme elle le pouvait, souvent affublée de qualificatifs amers et négatifs." Plus loin, il dit: "Votre gouvernement et en particulier le ministère que vous pilotez admirablement bien, a réussi, où d'autres ont malheureusement failli, soit à recréer un environnement sécurisant avec un encadrement à vouloir favoriser notre épanouissement plutôt que de nous amener à suivre des directives astreignantes." Le chef d'entreprise donne les moyens qu'on a mis à sa disposition et il ajoute: "Grâce à l'ensemble de tout ce qui précède, mon entreprise et, auparavant, celle de mes parents a pu conserver 30 emplois fortement menacés durant la crise. Maintenant des meilleurs jours sont revenus. Nous sommes positifs et prêts à un nouvel élan pour réussir et grandir."

M. le Président, je pourrais donner beaucoup d'autres extraits qui démontrent l'intérêt des chefs d'entreprise. C'est une lettre éloquente. On en a, d'ailleurs, plusieurs autres du même genre, qui démontrent comme l'intérêt des chefs de petite et moyenne entreprise, pour l'aide qu'on peut leur apporter, est significatif. C'est compréhensible, puisque le secteur de la PME est celui qui, à toutes fins utiles, comporte le plus de potentiel pour la création d'emplois.

J'ai les chiffres de l'industrie manufacturière au Québec, en 1981, sur le nombre d'employés salariés. En fait, il y avait, pour la PME de 4 à 199 employés, 10 436 établissements et cela représentait 249 102 salariés, alors que, dans la grande entreprise, il y en avait 479, comparativement à 10 436, et le nombre des salariés était de 276 741. Cela veut dire que la création d'emplois dans la petite et moyenne entreprise est très importante.

Ce matin, j'entends les gens de l'Opposition nous parler de la petite et moyenne entreprise et, curieusement, alors qu'ils essaient de faire un focus sur cette question-là ce matin, que voit-on, entre autres, dans leur document "Stratégie économique pour un gouvernement libéral" qui, à mon point de vue, devrait être considéré comme un programme, pour le moment, parce que c'est tout ce qu'il y a comme véritable programme du Parti libéral, présentement? On sait qu'il y a un congrès qui s'en vient et ils disent qu'ils sont prêts. En réalité, ils ne sont pas prêts du tout. Mais il y a cela. Dans ce document comme le disait le ministre tout à l'heure, il n'est pas du tout question de la petite et moyenne entreprise. L'expression PME n'apparaît nulle part dans ce document. Donc, c'est dire que cela n'est pas très important pour eux. Ce n'est pas tout.

Non seulement il n'est pas question de petite et moyenne entreprise dans ce document, mais on ravale au second rang l'exploitation des ressources naturelles - c'est grave - et l'agriculture du Québec. On sait que ce sont des secteurs où il y a un potentiel considérable sur le plan de la création d'emplois. On met de côté les aspirations du Québec à sa juste part de l'industrie canadienne de l'automobile. Ils disent: C'est l'Ontario. On renonce à cela, nous les Québécois, même s'il y a là un

potentiel extraordinaire. Cette espèce de programme de stratégie économique c'est dans le document de M. Scowen. Quand on dit qu'on a un programme de stratégie économique, cela signifie qu'on dit où on irait; sinon, c'est un document qui ne veut rien dire.

M. le Président, dans ce document-là, on ravale toutes nos aspirations du côté de la sidérurgie. Ce n'est pas étonnant qu'on nous ait reproché d'avoir aidé Pétromont à rester sur pied, en y mettant un effort plus grand que le gouvernement fédéral. On nous a reproché cela, ici, à l'Assemblée nationale. Ce n'est pas étonnant, c'est dans la logique de ce parti. On voit cela dans ce document.

Nulle part il n'est question de PME dans cette feuille de route du Parti libéral préparée par M. Scowen, lequel, il ne faut pas l'oublier, est censé être le penseur no 1 du Parti libéral parmi les parlementaires de cette formation à l'Assemblée nationale. Alors, c'est très significatif.

Avant qu'on fasse quelque reproche que ce soit au gouvernement relativement à ses performances... Entre 1976 et 1983, il ne faut jamais oublier une chose, c'est qu'il y a eu une crise. Ce n'est pas le gouvernement du Parti libéral, celui qui nous a précédés, qui a connu cette crise; c'est nous qui l'avons connue. On ne l'a pas inventée, elle nous est venue d'ailleurs, mais on l'a vécue et on essaie de s'en sortir le mieux possible. Le ministre, tout à l'heure, a bien démontré comment les résultats ont été étonnants. Dans les neuf premiers mois, en 1983-1984, 64% de la création d'emplois du Canada s'est faite au Québec. Ce n'est pas compliqué, c'est deux sur trois. C'est extraordinaire, mais il ne faut pas s'arrêter là.

Mais j'aimerais bien comprendre la logique du Parti libéral. Ce document, d'après moi, c'est capital. Si on ne peut pas saisir la portée des orientations du Parti libéral, je vais prendre avec un gros grain de sel tout ce que ces gens vont nous dire ce matin sur la création d'emplois qui nous concerne. Quand on parle de quelque chose, il faut savoir quelles sont les assises, quelles sont nos orientations pour bien saisir. On les connaît, c'est là-dedans.

Qu'on nous explique si...

Le Président (M. Beauséjour): M. le député de Châteauguay, votre temps est écoulé.

M. Dussault: Je termine là-dessus, M. le Président. Qu'on nous explique si on a l'intention - à partir de ce document, c'est clair - dorénavant, au Parti libéral, de laisser tomber la petite et moyenne entreprise qui a un potentiel extraordinaire de création d'emplois.

Le Président (M. Beauséjour): Merci. La parole est au député de Saguenay. M. Ghislain Maltais

M. Maltais: Merci, M. le Président. Je pense que beaucoup de personnes de l'autre côté n'ont pas compris l'interpellation de ce matin. On n'est pas ici pour faire le procès du Parti libéral, ce n'est pas lui qui administre présentement. Après avoir entendu le ministre tout à l'heure, avec ses chiffres éloquents, on s'aperçoit qu'il reste à peine un petit million de chômeurs et d'assistés sociaux au Québec. Il a tellement créé d'emplois depuis 1976 qu'il en reste à peine un petit million. Ce n'est pas beaucoup, vous allez me dire, c'est un Québécois ou une Québécoise sur six qui ne travaille pas et qui n'a pas d'espoir de travailler, non plus.

Tout à l'heure, il parlait de ces grandes décisions stratégiques qui ne sont pas prises sur le coin des pupitres. J'aimerais que le ministre nous explique quelle est l'ambition qu'il donne à nos diplômés de cégeps et d'universités et à nos jeunes compétents. La seule ambition qu'il leur donne, ce sont des travaux communautaires à ramasser de vieux pneus le long du Saint-Laurent. C'est ça, le programme de relance du premier ministre. Pensez-vous que les jeunes Québécois et les jeunes Québécoises vont accepter ça? Êtes-vous tombés sur la tête? Ce n'est pas ainsi que ça fonctionne au Québec, ce ne sont pas des emplois!

Je parlerai d'un domaine à cause duquel le député de Duplessis n'a pas osé venir ici, ce matin; il a eu honte de son gouvernement, et je lui donne raison. Il s'agit du domaine minier. Tout à l'heure, vous avez parlé de notre chef invisible. À l'époque où Robert Bourassa était premier ministre du Québec, il venait sur la Côte-Nord avec des ciseaux pour couper les rubans pour l'ouverture des usines et des villes. Depuis 1976, le Parti québécois vient avec des clés pour fermer les villes, et vous allez me faire croire que vous avez créé des emplois sur la Côte-Nord? Quelle sorte de statistiques avez-vous là?

M. le Président, je pense que ce n'est pas sérieux de tromper ainsi une population. Je ne vous en veux pas comme personne. Au contraire, vous êtes un excellent citoyen québécois, mais comme ministre de l'Industrie et du Commerce, vous êtes persona non grata sur la Côte-Nord, M. le ministre. Chaque fois que vous venez, c'est pour fermer une ville. Il faut être plus sérieux que ça. Et vous venez dire, ici, que vous créez des emplois! Dites-moi donc comment vous allez récupérer les emplois de Schefferville et de Gagnon sur la Côte-Nord? Quelle alternative avez-vous à ça? Allez-vous les transférer dans les mines d'amiante à Asbestos, dans la Société nationale de l'amiante, l'orgueil du Parti québécois? Vous

allez transférer nos 2000 ou 3000 mineurs là? Ce n'est pas vrai, vous êtes en train de la fermer aussi.

Ce qui m'intéresse, ce n'est pas d'avoir des statistiques et des chiffres; c'est de savoir comment les gens de la Côte-Nord, comment les gens des villes nordiques vont subsister maintenant que vous avez fermé leurs mines. Vous avez parlé du désastre de 51DBEC-Normines; je suis d'accord avec vous, mais vous ne l'avez pas su hier après-midi, par exemple; ça fait quatre ou cinq ans que vous le savez. Quand on n'est même pas capable de planifier une fermeture de ville, comment voulez-vous en ouvrir de nouvelles? C'est ça que les gens de la Côte-Nord n'acceptent pas dans le domaine minier.

Le Président (M. Beauséjour): M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Beauséjour): Adressez-vous au président, s'il vous plaît!

M. Maltais: Oui, M. le Président, je vais m'adresser à vous. Je m'excuse, M. le ministre, je vais m'adresser au président. (10 h 45)

M. le Président, lorsqu'on regarde tous ces emplois perdus... Je vais vous donner un exemple bien concret. En 1976, à peine arrivé au gouvernement, le Parti québécois a été une des causes de la fermeture de Rayonier, à Port-Cartier. Depuis 1976 et surtout à chaque campagne électorale, il nous ramène cela dans le décor, alors qu'on sait très bien que le ministre M. Bérubé, député de Matane, travaille pour avoir une papeterie et que tous les experts ont dit qu'il n'y avait pas de place pour deux dans l'Est du Québec. Alors qu'on conte des chansons à notre ami, le député de Duplessis, qu'on l'amuse en lui donnant un mandat a REXFOR d'essayer de regarder ce qu'il peut faire avec cela, le ministre et député de Matane se rit du député de Duplessis en disant: S'il y a un investissement dans le domaine papetier, il se fera à Matane. Vous le savez très bien, vous êtes au Conseil des ministres. C'est cela qui se passe.

Le député de Duplessis, à un moment donné, a été le plus grand accusateur du Parti québécois, beaucoup plus que les libéraux. Vous le savez! Dans un article du 17 octobre, il a nommé les ministres qui n'avaient pas tenu leurs promesses, les ministres qui n'avaient pas fait leur travail. Et vous allez me faire accroire que, dans toute cette prospérité que vous annoncez, il y a de la place pour les gens de la Côte-Nord! C'est utopique, M. le ministre. Il faut être plus réaliste que cela. C'est très utopique.

M. le Président, je termine sur ceci.

Ce n'est pas en disant qu'on fait mieux qu'ailleurs qu'on règle nos problèmes. Je dirais tout simplement: Redonnez-nous les emplois que vous nous avez enlevés sur la Côte-Nord et on sera heureux. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Beauséjour): Merci. La parole est maintenant au ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. Rodrigue Biron

M. Biron: Je suis un peu estomaqué de voir que du côté de l'Opposition personne ne connaît quoi que ce soit à l'économie ou n'a lu, au moins, des journaux économiques tels que Les affaires, Finance ou les pages économiques des quotidiens. Si le député de Saguenay avait lu cela, il saurait tout de suite les raisons de la fermeture de Port-Cartier ce n'est certainement pas dû au gouvernement du Québec. Vous savez vous-même la qualité du produit là-bas, les problèmes de gestion qu'ITT a eus. C'est une grande multinationale, parmi vos amis probablement, parce vous n'aidez pas les PME; vous voulez aider simplement les multinationales. Qu'est-ce que cette construction a donné à votre ancien chef, directement ou indirectement, pour son parti? Je ne le sais pas. Mais Rayonier a perdu de l'argent et a décidé de fermer.

Quant à Gagnon - on va en parler un peu - Fermont, Port-Cartier et SIDBEC-Normines, si le gouvernement du Québec n'avait pas agi, c'est non seulement Gagnon, mais c'est Fermont et Port-Cartier qui seraient fermés complètement. Vous le savez! L'année dernière, la compagnie British Steel a décidé de ne plus acheter de minerai de fer du Québec parce que nos prix n'étaient pas compétitifs. Il fallait absolument que nous trouvions une autre façon de fournir du minerai et des boulettes de fer à un prix compétitif. La production complète de Gagnon est maintenant transférée à Fermont, 3 000 000 de tonnes de plus. L'an prochain -je vais vous faire une prévision - au lieu de produire sur la Côte-Nord 10 000 000 ou 12 000 000 de tonnes comme on l'a fait cette année, on produira 12 000 000 ou 14 000 000 de tonnes, 3 000 000 de tonnes de plus l'an prochain en minerai de fer. Pourquoi? À cause de l'action du gouvernement du Québec et des compagnies minières qui ont rationalisé l'industrie.

Ce n'est pas ma faute à moi si, en 1974-1975, sur un coin de table, Robert Bourassa, votre chef, l'homme invisible, qui ne connaît rien à l'économie non plus, a signé des documents qui pénalisaient le Québec, ce qui nous a coûté jusqu'à maintenant environ 600 000 000 $. Cela aurait été bien mieux de les investir autrement, de les investir dans des PME

québécoises plutôt que de tirer dans un trou de mine 600 000 000 $; vous le savez bien. Cela a été une autre parmi les grandes erreurs de Robert Bourassa.

Vous me parlez aussi de développer les richesses naturelles. IL faudrait vous caser. Lisez au moins le document de votre collègue, le document de votre parti. Votre collègue, le député de Notre-Dame-de-Grâce, dit dans son document - il faudrait que vous expliquiez à la population ce que vous voulez. "Ce n'est pas dans l'exploitation et les ventes de nos richesses naturelles que nous allons créer des emplois nombreux et stables." Il est contre cela, lui, l'exploitation et la vente de nos richesses naturelles. Il est de votre parti. Il faudrait au moins que vous vous parliez. Je comprends que votre chef invisible ne dit pas tout à fait la même chose, mais, pour nous, il est important de développer et de vendre nos richesses naturelles au maximum.

Qu'a-t-on fait au cours des dernières années avec l'électricité? Au lieu de vendre de l'électricité comme cela, brute, aux Américains, on en a vendu un peu, bien sûr, mais on a conservé la plus grande partie pour développer des entreprises au Québec. Dans votre comté, Reynolds commence la semaine prochaine sa première ligne de production de la nouvelle aluminerie d'au-delà de 500 000 000 $, en exploitant une richesse naturelle du Québec: l'électricité. C'est à cause d'une politique gouvernementale québécoise qu'on créera plus d'emplois dans votre comté, à Baie-Comeau. Vous devriez vous lever et être assez honnête pour au moins dire au gouvernement...

M. Maltais: Combien d'emplois?

M. Biron: ...du Québec: Vous aviez une bonne politique. Vis-à-vis des investissements, M. le Président...

Le Président (M. Beauséjour): À l'ordre! M. le ministre! M. le député de Saguenay et M. le ministre, actuellement, vous vous parlez entre vous et, selon le règlement, vous devez vous adresser au président. Même pour le député de Saguenay, tantôt; si vous reprenez la parole, je vais vous rappeler à l'ordre chaque fois si vous ne vous adressez pas au président la prochaine fois. Je demanderais de poursuivre en s'adressant au président.

M. Biron: Le message au député de Saguenay, c'est que, si Pechiney s'est établi à Bécancour, c'est à cause de la politique du gouvernement du Parti québécois d'exploiter nos richesses naturelles au Québec, alors que son parti, le Parti libéral, dit, par la voix du député de Notre-Dame-de-Grâce dans son document - il faudrait nous expliquer cela - "Ce n'est pas dans l'exploitation et la vente de nos richesses naturelles que nous allons créer des emplois nombreux et rentables." C'est ce que dit votre parti.

M. le Président, vous devriez demander au député de Saguenay et au député de Notre-Dame-de-Grâce de nous expliquer pourquoi à l'heure actuelle on a une étude de faisabilité pour une aluminerie sur la Côte-Nord et qu'on est en train de négocier une deuxième étude de faisabilité pour une deuxième aluminerie parce que le gouvernement du Québec a décidé d'exploiter à fond nos richesses naturelles et de créer des emplois au Québec pour des Québécois et des Québécoises à même nos richesses naturelles.

À l'endroit des jeunes chez vous, vous dites: Qu'est-ce qu'ils veulent? Qu'est-ce qu'ils vont faire? On a un fonds d'aide aux jeunes entrepreneurs qu'on est en train de développer avec les programmes qui existent au MIC: UNI-PME, outils de gestion, bourses d'affaires, les jeunes coopératives de travailleurs. Au cours des dernières années on a formé plusieurs chefs de nouvelles entreprises. Les bourses d'affaires, jusqu'à maintenant, on a au-delà de 700 emplois créés par de jeunes diplômés universitaires. Voulez-vous poser des questions? C'est la première fois que cela existe au Canada, un tel programme. Le gouvernement fédéral, tous les partis politiques au niveau du fédéral, les gouvernements des autres provinces canadiennes viennent nous voir pour dire: Comment cela fonctionne, votre affaire de bourses d'affaires et de fonds d'aide aux jeunes entrepreneurs? Comment vous faites pour intégrer les jeunes diplômés universitaires qui veulent partir en affaires, être leur propre patron, être indépendants dans leurs affaires personnelles, dans leurs entreprises personnelles? Vous devriez lire ce qui se passe. M. le Président, vous devriez informer le député de Saguenay de ce qui se passe et lui demander d'informer son collègue de Notre-Dame-de-Grâce et de nous dire véritablement si, oui ou non, ces gens veulent exploiter nos richesses naturelles pour créer des emplois au Québec.

Le Président (M. Beauséjour): La parole est au député de Chauveau.

M. Raymond Brouillet

M. Brouillet: M. le Président, j'aimerais revenir quelque peu sur le tableau que nous a présenté le député de Notre-Dame-de-Grâce au début de cette interpellation alors qu'il a fait un peu le bilan des emplois dans le secteur manufacturier.

Disons que, au point de départ, nous reconnaissons que dans le secteur manufacturier, à l'occasion de la crise économique, il y a eu des pertes d'emplois

considérables; cela est reconnu par tout le monde, c'est un fait dont certains ont eu à souffrir. Maintenant, nous savons aussi c'est un fait reconnu par tous ceux qui s'ouvrent les yeux et qui veulent voir les faits sans partisanerie - que depuis la reprise économique, dans le domaine manufacturier, il y a eu un essor considérable et que les investissements dans ce domaine, depuis deux ans, sont considérablement plus hauts au Québec que dans le reste du Canada. On peut s'appuyer sur Statistique Canada pour le dire, ce sont les faits.

Dans votre liste - je veux revenir, cependant, sur un point - vous avez fait mention d'une série d'industries traditionnelles qu'on appelle les secteurs mous. Et vous constatez que sur cela, depuis 1977, il y a eu un certain nombre de pertes d'emplois dans la chaussure, dans le vêtement. Ce qui est assez paradoxal, c'est que, dans votre document qui se veut être la stratégie du Parti libéral, vous reprochez au gouvernement d'avoir soutenu les secteurs traditionnels. On va vous en énumérer une série tantôt.

Vous mettez en doute l'investissement dans certains secteurs, à savoir les secteurs qui n'ont peut-être pas beaucoup d'avenir. Alors, la question que je vous pose, M. le Président, est la suivante: Que serait-il advenu des emplois qui existent encore dans le domaine des secteurs traditionnels, par exemple, la chaussure - et je pense aux travailleurs de mon comté - si le gouvernement n'était pas intervenu dans ce secteur pour permettre à ces industries de conserver une part du marché? Vous savez que ces secteurs étaient fortement menacés par l'entrée des produits étrangers et n'eussent été les pressions du gouvernement, avec l'appui qu'il a accordé aux travailleurs, pour amener le gouvernement fédéral à maintenir les quotas, cette industrie n'existerait à peu près pas aujourd'hui. Il faut quand même, quand on analyse des situations, être capable d'étudier le contexte et voir ce qui se serait passé si le gouvernement n'avait pas apporté son appui à ces secteurs.

Vous avez beaucoup parlé des difficultés pour les entreprises du Québec de se développer à cause du régime fiscal. Je reviens sur des témoignages qui n'appartiennent pas du tout aux membres du Parti québécois, mais qui viennent des gens du monde des affaires. Je fais allusion au témoignage de M. Pierre Lortie, le jeune président de la Bourse de Montréal, qui dit ceci en toutes lettres - je crois que c'est très important d'être attentif et d'écouter ce que dit M. Pierre Lortie - "Québec offre, et de loin, le meilleur environnement sur le plan fiscal pour le financement des entreprises." Il faut reconnaître cela et ce n'est pas pour rien que nous constatons, aujourd'hui, que le taux d'accroissement des investissements au Québec, pour 1983-1984, va être supérieur à l'ensemble des investissements dans le reste du Canada.

J'aimerais aussi aborder la question de la stratégie de développement du gouvernement. On me fait signe qu'il me reste seulement 30 secondes. Je crois qu'étant donné cela...

Une voix: C'est suffisant.

Le Président (M. Beauséjour): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Brouillet: ...je vais réserver pour tantôt mon intervention concernant les critiques qu'on a faites sur la stratégie du gouvernement.

Le Président (M. Beauséjour): Merci, M. le député de Chauveau. Je vous rappelle de vous adresser au président. Cela semble difficile. Vous pouvez me dire beaucoup de choses, vous savez, cela me fera plaisir. Je donne la parole au député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Reed Scowen

M. Scowen: Merci, M. le Président. Je m'excuse de rire, mais, quand le député qui m'a précédé a dit qu'il avait l'intention d'exposer la politique économique du gouvernement en 30 secondes, je croyais que c'était probablement possible de le faire et cela a fait rire tout le monde.

Je remercie le ministre d'avoir fait allusion au document que j'ai écrit. Il est, semble-t-il, le quatrième ministre à vocation économique qui indique qu'il a lu mon document avec beaucoup d'intérêt. Parce que cela semble attirer l'attention de tout le monde, je vais consacrer une grande partie des dix dernières minutes de cette interpellation à faire un peu de publicité pour ce document. Je trouve que là-dedans vous allez découvrir un paquet de solutions aux problèmes qu'on a essayé d'aborder aujourd'hui.

J'aimerais, dans les cinq minutes qui me sont accordées, essayer de ramener le débat sur la question que nous avons posée ce matin, à savoir examiner les pertes d'emplois, secteur par secteur, comprendre ce qui s'est passé et ce qu'on peut faire pour régler le problème.

Une mise au point que je veux faire tout de suite concerne l'investissement. Quant à moi, un des grands problèmes que nous récoltons aujourd'hui dans le domaine de la faiblesse d'emplois, c'est la faiblesse des investissements manufacturiers au Québec depuis 1976. Le ministre et son collègue ont dit, à l'aide de tableaux, que cette année les investissements manufacturiers sont forts.

Moi, j'ai un tableau à vous montrer qui démontre l'évolution de cette affaire et qui va mettre votre tableau dans une juste perspective.

Voici un tableau où vous voyez les investissements manufacturiers canadiens en pourcentage du produit intérieur brut, parce qu'il faut les normaliser chaque année pour tenir compte de l'inflation. La ligne rouge souligne les investissements canadiens et la ligne bleue, les investissements québécois. Ici, vous avez l'année 1976, l'année de l'arrivée au pouvoir du Parti québécois. Pssch! C'est ce qui s'est produit après l'arrivée au pouvoir du Parti québécois. La seule chose qu'on peut dire - c'est l'élément qui explique le tableau du ministre - c'est que, cette année, il y a un nivellement; la chute s'est arrêtée au Québec et la diminution qui a commencé en 1981 au Canada a continué. (11 heures)

Cette augmentation que vous voyez dans son tableau c'est à cause de ce nivellement ici accompagné par la descente canadienne qui continue. Mais l'important, c'est cet écart énorme. Pendant huit ans il y a eu une chute dans les investissements au Québec et ceux du Canada ont augmenté. Aujourd'hui, la faiblesse de l'emploi, qu'on constate quant à moi, c'est en grande partie à cause de cet écart épouvantable qu'on vivait depuis 1976 à 1981. J'aimerais que le ministre revienne à quelques questions qui sont très intéressantes, qui se posent dans ces chiffres que nous avons développés.

Par exemple, dans le domaine du vêtement, on a parlé des difficultés de cette industrie, on a perdu 7000 emplois. Comment se fait-il que nous ayons quand même vu les autres régions du Canada augmenter le nombre d'emplois dans ce domaine? Il y avait, semble-t-il, un mouvement dans l'industrie du vêtement du Québec comparativement aux autres provinces. Par contre, comment se fait-il que dans le domaine du bois nous avons réussi non seulement à augmenter les emplois, mais à augmenter légèrement notre part du marché canadien? Comment se fait-il que dans le domaine de l'industrie du papier nous ayons perdu, avec toute la modernisation qu'on a faite, 8000 emplois? Comment se fait-il que dans le domaine des équipements de transport, où on parle souvent de Bombardier, on a quand même perdu 4000 emplois depuis que vous êtes arrivés au pouvoir? 4000 emplois.

Comment se fait-il, en terminant, que dans les secteurs de pointe, l'électrique, l'électronique, le chimique, le pharmaceutique et le plastique, dans tous ces domaines de pointe, nous ayons non seulement perdu des emplois dans chacun des secteurs depuis 1976, mais nous avons aussi accusé des pertes importantes de notre part des emplois canadiens dans ce domaine? C'est le genre de questions que je veux aborder ce matin avec le ministre plutôt que de l'écouter parler de Robert Bourassa et du gouvernement fédéral. Merci.

Le Président (M. Beauséjour): Merci. La parole est maintenant au ministre.

M. Rodrigue Biron

M. Biron: On note qu'en plus de l'absence de son chef le député de Notre-Dame-de-Grâce ne veut même pas en parler. Cela va commencer à faire une absence non seulement physique, il y a déjà une absence mentale, mais il y a un grand vide de ce côté.

Je vous parle, M. le Président. Le député de Notre-Dame-de-Grâce avec son tableau, je pense qu'il a pas mal charrié. Tout à l'heure, le député de Notre-Dame-de-Grâce nous parlait des investissements manufacturiers. Là il change de tableau et il parle des investissements, mais il a oublié de dire si c'est manufacturier ou si ce n'est pas manufacturier. Je peux lui dire que ce n'est pas manufacturier. Les investissements qui ont fait en sorte que la pointe a augmenté au Québec en 1974, 1975, 1976, c'était le déficit olympique. On a construit un stade olympique alors que, dans les autres provinces canadiennes, les autres États américains, on en construit pour 50 000 000 $ à 80 000 000 $. Nous autres ça nous a coûté environ 1 000 000 000 $. C'est la façon d'administrer les finances publiques - je ne veux même pas le nommer parce que cela a l'air qu'il est invisible et qu'il ne faut pas en parler, de l'homme invisible. C'est sûr que si tu gaspilles 1 000 000 000 $ quelque part dans l'investissement, ça monte la moyenne d'investissements, mais cela ne veut pas dire que cela a servi à développer le Québec.

J'ai un tableau. Je vais être conforme avec ce que j'ai dit tout à l'heure. Je vais rester dans les investissements manufacturiers. Les investissements manufacturiers, le député de Notre-Dame-de-Grâce en a sorti depuis 1976 ou quelque chose comme ça tantôt. On a une idée des investissements manufacturiers en pourcentage, du Québec, avec ce qui se fait dans le reste du Canada. On va me dire que cela a été stable un bout de temps. Regardez à l'heure actuelle, depuis trois ans, depuis qu'on est sorti de la crise économique le Québec, avec nos politiques, réussit finalement à attirer des investisseurs et à développer des investisseurs québécois qui ont confiance en eux et qui reprennent les investissements là où ils devraient être normalement.

Le Québec a presque doublé - il est parti de 20% et on est en haut de 30% - les

investissements manufacturiers canadiens qui se font maintenant au Québec parce qu'il y a des investisseurs qui ont confiance dans leur capacité de le faire. Nous autres, on fait confiance aux hommes et aux femmes chefs d'entreprise. Le gouvernement a juste aidé à encourager.

Si on compare maintenant avec notre principal compétiteur, l'Ontario, regardez ce que cela a fait. On est parti de 35% à peu près de ce que l'Ontario faisait en 1976, on est au-delà de 70%. Regardez la courbe. Cela montre une chose. Cela montre qu'au Québec on reprend le retard qu'on avait historiquement parce qu'on ne s'est peut-être pas assez mêlé d'affaires et tout ça. On reprend le retard historique et on est en train de reprendre véritablement toute la place qui nous revient et même plus que la place qui nous revient.

Il me semble que, si le député de Notre-Dame-de-Grâce, tout à l'heure, avait été logique avec son tableau et s'il avait voulu être honnête avec la population du Québec, il aurait continué de parler que ce qu'il faisait au départ d'immobilisation dans la fabrication manufacturière et il aurait dit: Bravo au gouvernement du Québec depuis la crise économique, depuis que le Parti libéral fédéral, son chef, a cassé les reins de l'entreprise québécoise, vous avez réussi à retourner cela avec des plans réalistes, des plans d'urgence ou des plans de relance qui donnaient la garantie nécessaire aux entreprises que les folies de taux d'intérêt, cela ne reviendrait pas. La preuve de cela c'est que si cela avait été normal, on n'aura pas déjà atteint 1 000 000 000 $ sur notre plan de relance de 2 000 000 000 $.

Les chefs d'entreprise nous demandaient deux choses: Donnez-nous des garanties et aidez-nous à emprunter à la banque et on va créer des emplois. Deuxièmement, donnez-nous une police d'assurance que la folie des taux d'intérêt décrétés par les libéraux, cela ne reviendra plus au cours des cinq prochaines années. On a institué un programme exactement pour répondre à la demande de chefs d'entreprise. Bien sûr, c'est parce qu'on est en contact constant avec les chefs d'entreprise et nous, au lieu de rester dans notre tour d'ivoire et d'être invisibles, on rencontre les chefs d'entreprise, on en discute avec eux. Ce sont les chefs d'entreprise finalement qui nous font des suggestions dans ce sens. Les chefs d'entreprise nous ont fait les suggestions du plan de relance. C'est cela que nous avons fait. La marchandise a été livrée de leur part. On va annoncer au cours des prochains jours un investissement majeur. On a une quinzaine d'investissements majeurs.

Cette semaine, à la Société de développement industriel du Québec, cela a été un record jamais vu, on a autorisé 275 000 000 $ d'investissements dans la même semaine avec de l'aide et des garanties de prêts et des polices d'assurance contre l'augmentation du taux d'intérêt de la Société de développement industriel du Québec. 275 000 000 $, dans la même semaine, qu'on a autorisés avec la SDI, cela ne s'est jamais fait dans l'histoire du Québec, ni dans l'histoire du Canada. C'est dire que nos programmes répondent. 0e vais annoncer une grande entreprise multinationale qui va investir 70 000 000 $ dans la fabrication d'équipements périphériques pour des ordinateurs à Montréal. 70 000 000 $ dans cela, c'est une grande entreprise qui vient s'établir au Québec et qui a confiance dans le Québec. On va reparler d'autres investissements qu'on fait, tout à l'heure. Mais, je pense qu'au Québec, à l'heure actuelle, vis-à-vis des investissements manufacturiers, les hommes d'affaires, les femmes d'affaires reprennent véritablement toute la place qu'ils devraient occuper.

Le Président (M. Beauséjour): La parole est au député de Montmagny-L'Islet.

M. Jacques Le Blanc

M. Le Blanc: M. le Président, dans la démonstration à l'aide de tableaux que nous a faite le député de Notre-Dame-de-Grâce, je pense que la seule démonstration véritable que cela a apporté c'est de nous démontrer que la crise économique avait eu des effets au Québec comme partout ailleurs au Canada et que les taux d'intérêt, même s'il ne l'a pas mentionné, étaient la cause directe de l'assassinat de plusieurs de nos entreprises et par conséquent d'une diminution du nombre d'emplois actifs. Même s'il ne faudrait pas dire que le gouvernement fédéral est responsable de la fixation des taux d'intérêt, ce n'est tout de même pas la responsabilité du gouvernement du Québec, mais il y a des domaines tout de même qui sont très difficiles à concilier, soit la question du député de Notre-Dame-de-Grêce et l'exposé qu'il a fait tout récemment dans un document sur la stratégie économique d'un futur gouvernement libéral. Il y a des choses dans cela qui sont assez étonnantes quand on veut faire un peu de concordance dans ces énoncés et ces questions d'aujourd'hui.

Je ne toucherai qu'un domaine où il met en cause - j'essaie d'établir la relation entre le sous-emploi et sa prise de position par rapport, entre autres, à la compétitivité de nos entreprises québécoises, de nos PME, dont il ne parle pas. Il pose la question à la page 11: Actuellement sommes-nous compétitifs? Il dit: Non, nous le sommes pas. En réponse à son affirmation, il faudrait peut-être lui poser la question si ce n'est pas insulter nos entreprises québécoises, nos dirigeants d'entreprise du Québec que d'affirmer qu'ils ne sont pas productifs et

qu'ils ne font aucun progrès dans l'amélioration de leur position concurrentielle.

Cela amène une deuxième question aussi: Comment pouvons-nous exporter, à partir d'une constatation que M. le député de Notre-Dame-de-Grâce connaît... Nous exportons 45% de notre production et en même temps nous ne sommes pas compétitifs. Je connais un domaine en particulier, le bois d'oeuvre, où nos voisins américains ont, à un certain moment, fait état d'une concurrence déloyale par rapport à nos exportations de bois d'oeuvre aux États-Unis. Il y a eu une poussée des entrepreneurs, de ceux qui oeuvraient dans l'industrie du sciage sur le marché américain à l'effet d'imposer une tarification de 65% sur les bois entrant aux États-Unis en provenance du Québec.

Si nos méthodes de production et notre compétitivité dans ce domaine n'existaient pas, comment ces gens-là auraient-ils été dans l'obligation de faire un tel débat et de réclamer de telles mesures pour contrer l'arrivée de nos produits à des prix très compétitifs sur le marché américain?

Il n'y a pas que nos entreprises qui ont su et qui savent encore par leur esprit d'entreprise être compétitives, il y a aussi la part et la stratégie industrielle du gouvernement du Québec dans ce domaine. Ce n'est pas une incitation partisane. Quand, par exemple, on invoque un document du Conseil des sciences du Canada qui traite de la politique industrielle dans la fédération canadienne, il est cité que c'est le Québec qui, parmi toutes les provinces, a élaboré la stratégie industrielle la plus complète. C'est aussi dans cette province que les autorités ont mené l'analyse officielle la plus claire des problèmes qu'elle présente et de ses perspectives.

M. le Président, malheureusement mon temps est pratiquement écoulé. J'ajouterai que dans le volet "Bâtir le Québec", dans l'analyse qui en est faite dans le même Conseil des sciences du Canada, il est dit que ce qui est encore le plus important, c'est que la déclaration du gouvernement du Québec contient une politique valable pour la création de nouvelles industries et, par conséquent, de nouveaux emplois. Je m'inquiète des déclarations du député de Notre-Dame-de-Grâce quand il met en cause la compétitivité de nos entreprises.

Le Président (M. Beauséjour): Merci, M. le député. Je donne la parole maintenant au député de Laporte.

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Mon collègue, le député de Saguenay, faisait état du fait que, sur la Côte-Nord, le ministre de l'Industrie et du Commerce est persona non grata, ayant eu à fermer de nombreuses usines, ce qui fait qu'il n'est pas très bienvenu dans la région. Cela me fait un peu penser à ce personnage, un homme célèbre de Haïti, qui est d'ailleurs un héro, un ex-général, qui avait pour nom Toussaint Louverture. Dorénavant, si Haïti a eu son Toussaint Louverture, au Québec, on aura eu notre Biron Lafermeture. Voilà pour la Côte-Nord, M. le Président.

Je voudrais simplement souligner une chose. Le ministre a parlé tout à l'heure de décision prise sur le coin de la table, en accusant l'ancien gouvernement libéral. Je voudrais souligner le dossier de la Société nationale de l'amiante comme étant un beau cas d'une décision prise sur le coin de la table. D'ailleurs, c'est le ministre lui-même, alors qu'il était membre de l'Union Nationale - un parti qu'il a renié par la suite - qui disait ici même en cette Chambre au sujet de ce projet-là: "Avec le projet de loi de la nationalisation d'Asbestos Corporation, est-ce qu'on est dans le feu? Est-ce qu'on va créer des emplois avec cela, M. le Président?" C'est le ministre de l'Industrie et du Commerce qui parlait. "Pas du tout, disait-il, tout simplement une nationalisation des sociétés minières. Je ne sais pas si le premier ministre va le consulter - il parlait du député de Frontenac - pour la nomination des dirigeants de ces sociétés minières à Thetford. Est-ce que le député de Frontenac va avoir son mot à dire à ce sujet?"

Le ministre critiquait la décision et il avait raison, parce que si on regarde le résultat des opérations, depuis trois ans, que le gouvernement est là-dedans, on se rend compte que le déficit accumulé, depuis trois ans, est de 30 000 000 $. Donc, celui de 1983 qui était de 16 000 000 $ et celui de 1984 de 11 300 000 $. Or, on serait porté à penser que si le déficit accumulé est de 30 000 000 $ en trois ans, le nombre d'emplois a dû augmenter beaucoup puisqu'on a dépensé tant d'argent. Or, ce qui est étrange, c'est qu'en 1981, au moment de la nationalisation, il y avait 1843 employés dans l'amiante à Thetford et, aujourd'hui, au moment où on se parle, il y aurait, semble-t-il, 800 employés, d'après la compagnie et d'après, d'ailleurs, une déclaration publiée dans le Devoir du 28 août 1984. C'était la situation, hier: 800. Or, ce matin dans le journal Le Soleil, vous pourrez le lire tout le monde, la compagnie Asbestos déclare qu'elle mettra à pied 450 personnes le 15 octobre -ce qui fera qu'il restera 350 employés, si on lit bien - et 350 autres le 17 novembre.

M. le Président, j'espère que le ministre va nous éclairer sur ce sujet, mais si je comprends bien, sur les 800 employés, 450 employés seront mis à pied le 15 octobre, alors que les 350 autres employés seront en congé forcé à partir du 1er

décembre. Si on comprend bien, c'est donc dire qu'il y aurait exactement 0 employé à Asbestos, à Therford-Mines, à la fin de l'année. De toute façon, 0 ou 800, c'est quand même beaucoup moins que ce qu'il y avait dans le temps.

Or, qu'est-ce que Asbestos va coûter aux contribuables? Le ministre Parizeau et le ministre Duhaime nous disaient en 1981: C'est l'achat du siècle, cela ne coûtera pas un sou. Autrement dit, on ne paie rien tout de suite, on paiera plus tard. Le prix avait été fixé à 42 $ l'action et ce prix-là est indexé de 16% chaque année qu'on n'achète pas. Autrement dit, plus le temps passe, plus ça va coûter cher au moment où on va devoir acheter. On va devoir acheter au plus tard dans deux ou trois ans, à peu près. (11 h 15)

Si le gouvernement achète aujourd'hui, en 1984, avec les actions indexées à 16%, le prix est de 127 000 000 $; c'est ce qu'on doit débourser aujourd'hui. Comme le gouvernement parle de fusionner cette mine avec celle de Bell Asbestos, les conseillers juridiques nous disent qu'il faudra à ce moment-là acheter les minoritaires. Les minoritaires, au même prix, ça coûterait 84 000 000 $. Comme la mine a besoin d'investissements pour se moderniser, on estime à 60 000 000 $ le montant qui devra obligatoirement être investi là-dedans et le fonds de roulement est absolument à sec puisqu'on vient de faire 30 000 000 $ de déficit en trois ans; on a besoin de 40 000 000 $ supplémentaires là-dedans.

Le total de tout cela, tout en étant conservateur, aujourd'hui, ça coûte 311 000 000 $ pour Asbestos Corporation. Ce qui a coûté zéro, la trouvaille du siècle il y a trois ans, nous coûtera 311 000 000 $. Si on attend encore deux ans pour exercer l'option, ce sera encore 50 000 000 $ ou 60 000 000 $. Voici une belle décision prise sur le coin de la table par le gouvernement et qui fait que les emplois qui étaient de 1843 sont rendus aujourd'hui soit à 800 et, probablement dans deux mois, à zéro. De 1843 à zéro, pour un placement qui devait coûter zéro en 1981, ça va nous coûter, semble-t-il, 311 000 000 $.

Je conclus avec le ministre présent qui disait à cette Chambre, en 1978: "Le gouvernement péquiste, ce sont des théoriciens, de grands rêveurs. 11 y en a trop dans le cabinet." C'est le ministre Biron qui disait ça. "Il faut des administrateurs." C'est un jugement très sévère qu'avait porté le ministre à l'époque sur le gouvernement, ce sont les mêmes ministres qui sont là aujourd'hui, et le jugement, c'est la population qui le pose, maintenant, à l'endroit de ce gouvernement.

Le Président (M. Beauséjour): Merci. Maintenant, la parole est au ministre.

M. Rodrigue Biron

M. Biron: M. le Président, juste pour répondre au député de Laporte, d'abord, il s'est trompé de commission parlementaire, il aurait dû convoquer le ministre de l'Énergie et des Ressources qui est responsable de la société Asbestos et qui répondrait exactement à ses questions. Deuxièmement, je pense que les gens du Québec connaissent l'expérience pratique que j'ai eue au niveau des entreprises, des petites et moyennes entreprises pendant une vingtaine d'années. Mon action depuis quelques années, au ministère de l'Industrie et du Commerce, je pense qu'elle est reconnue par ceux et celles qui savent ce qu'est le développement économique.

À ce point de vue, ce qu'on est en train d'annoncer, toutes sortes d'investissements, partout au Québec, c'est impressionnant. Je reçois des listes d'entreprises qui décident d'investir au Québec et, chaque fois, je suis impressionné. Dernièrement, deux entreprises dans le domaine de l'électrochimie décidaient d'investir 25 000 000 $ et 35 000 000 $ dans la région de Valleyfield et de Beauharnois. 60 000 000 $, on va me dire que ça ne crée peut-être pas beaucoup d'emplois, une soixantaine d'emplois, ça coûte à peu près 1 000 000 $ par emploi dans le domaine de l'électrochimie, mais ce sont des emplois de très longue durée, de très haute technologie et des emplois très rémunérateurs.

Ce sont des entreprises, des multinationales qui ont confiance en leur capacité et qui ont confiance au Québec et ça fait partie de la politique, de la stratégie de développement du gouvernement du Québec d'exploiter nos richesses naturelles et de les développer au Québec. Je parlais tout à l'heure d'une entreprise, l'entreprise STC, Storage Technology Corporation, des États-Unis, qui a investi dans les équipements périphériques pour les ordinateurs. Cela, ça va créer au Québec, dans la région de Montréal, environ 300 emplois. Je pense que c'est important de noter cela, 70 000 000 $.

Dans le domaine de la fabrication des canettes d'aluminium, nous avons généré une centaine de millions de dollars de nouveaux investissements. On a déjà annoncé deux investissements et je me prépare, la semaine prochaine ou dans deux semaines, à annoncer un troisième investissement dans le domaine de la fabrication de canettes d'aluminium, ce qui va faire en sorte que le Québec soit de loin à l'avant-garde et le seul à produire au Canada ce genre de canettes d'aluminium avec les matières premières produites dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, à Baie-Comeau ou ailleurs au Québec. Cela, c'est de faire travailler les gens de toutes les régions du Québec. Avec une stratégie bien

précise de développement économique, on va produire plusieurs centaines de millions de canettes d'aluminium par année non seulement pour le marché québécois, mais pour le marché canadien et même pour l'exportation sur le marché américain. Cela fait partie d'une stratégie de développement économique. J'aimerais que des députés ou de leurs concitoyens qui en bénéficient dans leur comté comme le député de Saguenay, se lèvent de temps à autre et soient assez honnêtes pour dire: j'apprécie le travail que le gouvernement du Québec fait dans ce secteur, mais dans tel autre secteur, je veux le critiquer pour telle et telle raisons. Je comprendrais cela. Mais des éteignoirs et des critiqueurs comme on a de l'autre côté, sans jamais rien trouver de ce qu'ils veulent bien au Québec, cela pourrait contribuer à décourager nos chefs d'entreprises.

Après avoir lu le document de travail du député de Notre-Dame-de-Grâce, il y a des choses que je voudrais qu'il m'explique. Lorsqu'il parle du secteur de l'automobile, il dit: "II est loin d'être certain que l'avantage comparatif se trouve dans les secteurs traditionnels - il veut qu'on aille dans des secteurs où on a un avantage comparatif -de forte capitalisation comme la sidérurgie -je peux bien le comprendre - et l'automobile à moins qu'ils amènent des changements importants dans le processus de production." Cela veut dire que, dans l'automobile, vous allez dire aux 4500 employés de GM à Sainte-Thérèse, à Boisbriand: Vous allez perdre vos jobs parce que le Parti libéral pense que le secteur de l'automobile serait mieux de s'en aller en Ontario parce que historiquement, l'avantage comparatif a été dans l'Ontario. J'ai de la difficulté à suivre le député de Notre-Dame-de-Grâce là-dessus. Cela veut dire que la pétrochimie au Québec devrait disparaître parce que cela représente une trop forte capitalisation. Cela ne devrait pas être dans notre secteur. Là-dessus, le député de Notre-Dame-de-Grâce devrait expliquer son document. Il est contre les PME parce qu'il n'en parle pas du tout. Il1 ne faut pas aller dans les secteurs de forte capitalisation comme celui de l'automobile, les jobs sont en Ontario et ce sont eux qui en ont profité. Il ne faut pas faire de l'exploitation et de la vente de nos richesses naturelles. Il ne faut pas aller dans les secteurs traditionnels. Il ne faudrait pas avoir le régime d'épargne-actions... Qu'est-ce qu'il faut finalement? Il semble que c'est un document qui est négatif, fade, tiède, incolore, qui n'a pas de structure, qui vraiment n'est pas d'attaque et ne contient pas de vision de développement et d'orientation. C'est probablement à l'image même du chef du Parti libéral qui n'a pas de vision, il est incolore, invisible, tiède et fade.

Si un parti politique veut un jour espérer prendre le pouvoir, il devrait avoir au moins des documents de travail sur le développement économique qui donnent certaines orientations du genre: "Bâtir le Québec" ou "Le virage technologique", qui ont été faits par le Parti québécois.

Le Président (M. Beauséjour): Merci, M. le ministre. La parole est au député deChâteauguay.

M. Roland Dussault

M. Dussault: Merci, M. le Président, je voudrais d'abord reprendre quelque chose qu'a dit tout à l'heure le député de Saguenay concernant le député de Duplessis, M. Perron. Je dois dire que M. Perron ne pouvait pas être ici ce matin pour des raisons importantes. Je regrette que le député de Saguenay fasse ce genre d'intervention ici à l'Assemblée nationale à propos de notre collègue.

M. le Président, jusqu'à maintenant, j'ai remarqué que l'attitude du Parti libéral à cette commission, c'est d'isoler des chiffres sortis de la réalité et de nous demander de les commenter. Il me semble qu'il serait plus positif - il me semble que c'est l'approche que devrait avoir le Parti libéral - d'essayer de nous faire commenter les moyens que nous entendons prendre pour développer le Québec sur le plan économique et les moyens qui, effectivement, arriveraient à créer encore plus d'emplois que ce qu'on a réussi à faire jusqu'à maintenant. Des gens sont satisfaits, M. le Président, dans le monde des affaires et ils nous le disent. Cela fait plaisir de le savoir. Un homme d'affaires a écrit au ministre à deux reprises en disant: "Ma jeune société s'est retrouvée devant un mur insurmontable et, chaque fois, c'est vous qui avez sauvé la situation en lui accordant l'aide nécessaire."

Il ajoute: "Je vous écris ces lignes pour vous faire part avec un sentiment de bonheur et de fierté que votre confiance et les deniers publics placés dans ma société ont porté les résultats escomptés et même plus. "C'est pour vous remercier au nom d'une société québécoise pleine de foi en son avenir, de dynamisme, d'idées et de détermination, au nom d'une société québécoise pleinement consciente du fait indéniable que, sans votre aide, elle aurait cessé d'exister depuis décembre 1982."

Il est important de bien se rappeler qu'il y a eu la crise et des difficultés et les moyens qu'on a pris pour s'en sortir. C'est une entreprise qui est descendue jusqu'à trois employés et qui est remontée jusqu'à 30. C'est encourageant de se rendre compte de cela. Plutôt que d'isoler des chiffres, il me semble qu'il vaudrait mieux regarder quels sont les moyens que le gouvernement prend et entend prendre pour développer le

potentiel économique du Québec. On se référait aussi - M. le député de Notre-Dame-de-Grâce s'y réfère aussi - dans son document "Stratégie économique pour un gouvernement libéral"... Je pense qu'il y a lieu de donner un peu d'explication. Cela prendrait évidemment beaucoup de temps pour faire un portrait très exhaustif. Du côté du virage technologique, on s'est occupé des secteurs traditionnels. Nous avons mis en place des centres de productivité, dans les secteurs du vêtement, du textile, du meuble et du bois ouvré ainsi que pour le centre de promotion de la mode de Montréal. C'est important, parce qu'on sait les effets que cela entraîne. Ces centres, qui regroupent les industriels du milieu, seront des outils pour améliorer la compétitivité de ces secteurs, en termes de qualité et de prix sur les marchés internationaux. Il faudrait que le Parti libéral tienne compte de ces réalités.

Dans le domaine de la recherche et du développement, M. le Président, c'est très important et c'était un élément essentiel du virage technologique. La SDI, la société sur laquelle on s'appuie énormément pour le développement du Québec, et avec raison d'ailleurs, parce qu'elle fait un excellent travail, a été chargée de stimuler la recherche et l'innovation, et d'orienter les entreprises vers les technologies de pointe. On a parlé de cela tout à l'heure. Après 18 mois, avec deux programmes, PARIQ 1 et PARIQ II, on a réussi au-delà de 100 projets de développement d'un nouveau procédé ou produit. Cela totalise 150 000 000 $. Ces programmes sont présentement en cours dans plusieurs secteurs industriels, mais principalement dans la télécommunication, dans la micro-électronique et dans le logiciel. Ce sont des secteurs de pointe, des secteurs dont on a dit qu'il fallait faire un effort important, sinon le Québec serait devenu un pays du tiers monde. Il fallait vraiment prendre le virage technologique. On a fait des efforts considérables et cela donne des résultats phénoménaux. On n'a jamais vu cela, M. le Président. Tout cela c'est grâce au travail de la SDI, grâce au travail du CRIQ, grâce au travail du gouvernement du Québec qui, en fin de compte, oriente toutes ces actions pour avoir des résultats.

M. le Président, ces entreprises dont je vous parlais - 150 000 000 $ d'investissements - sont très importantes, mais ce sont généralement des petites et moyennes entreprises. J'aimerais bien quand, à la fin de l'interpellation aujourd'hui, le député de Notre-Dame-de-Grâce nous fera un petit exposé commercial, comme il disait, quand il nous donnera des informations supplémentaires là-dessus, qu'il nous dise pourquoi, dans ce document, on a totalement ignoré la petite et moyenne entreprise. Dorénavant, c'est celle sur laquelle on doit compter au maximum, pour le développement économique du Québec et pour la création d'emplois. J'aimerais qu'il nous dise pourquoi ce secteur important - tout le monde le dit au Québec - ne fait pas partie du document stratégique économique pour un gouvernement libéral, document qui a l'air d'être, à toutes fins utiles, le programme du Parti libéral, faute de mieux, sans doute. Mais c'est quand même une feuille de route importante. On a fait une conférence de presse là-dessus, il n'y a pas longtemps. Si je ne me trompe pas, c'était le 4 octobre 1984 ou le lendemain, peut-être. J'aimerais qu'on nous dise - sinon on n'aura pas eu de réponse aujourd'hui - comment il se fait que ce document laisse systématiquement tomber la petite et moyenne entreprise dans les intentions d'un éventuel - je dis bien éventuel parce que c'est conditionnel, M. le Président - gouvernement libéral. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Beauséjour): Merci. La parole est au député de Saguenay.

M. Ghislain Maltais

M. Maltais: Merci, M. le Président. Je m'adresse à vous. Auriez-vous l'amabilité de transmettre le message suivant au ministre de l'Industrie et du Commerce, ex-chef de la défunte Union Nationale et député de Lotbinière. Depuis le début de l'interpellation, il nous parle de notre chef, j'en suis très heureux, mais, j'ai juste un petit message, en passant, je lui donne la recette pour avoir le chef du Parti libéral à l'Assemblée nationale, ici: qu'il demande à son chef, qui a la grippe de Hongkong, présentement, de déclencher des élections immédiatement et, dans 28 jours, il va être là pour administrer honorablement les choses du Québec. M. le ministre...

Le Président (M. Beauséjour): À l'ordre! À l'ordre!

M. Biron: ...

M. Maltais: ...quand cela sera votre tour, vous parlerez.

Tout à l'heure, M. le Président, le député de Châteauguay a fait une citation concernant mon collègue de Duplessis, M. Denis Perron. Ce n'est pas moi qui ai écrit l'article du 17 octobre, disant qu'il n'avait plus confiance en ce gouvernement, qu'il le boudait et qu'il ne viendrait plus en Chambre. Ce n'est pas moi, c'est lui qui a déclaré cela, M. le Président. Alors, que le député de Châteauguay relise les articles de la presse et les déclarations de son collègue.

M. le Président, j'aurais juste une autre...

Le Président (M. Beauséjour): On va

revenir au débat lui-même.

M. Maltais: Je ne peux pas m'adresser à eux, je m'adresse à vous.

Le Président (M. Beauséjour): Est-ce qu'il y a une question de règlement?

M. Dussault: De règlement, oui. On m'a mal cité, ce n'est pas du tout de cela dont j'ai parlé. J'ai simplement dit que le député Perron, notre collègue, ne pouvait pas être ici ce matin, pour des raisons importantes. C'est la seule chose que j'ai dite, M. le Président.

M. Maltais: M. Bourassa non plus, ne peut pas être ici ce matin, il n'y a pas d'élection générale.

Le Président (M. Beauséjour): Si vous voulez, on ne réglera pas tous ces dossiers...

M. Maltais: J'aimerais continuer, M. le Président, en m'adressant à vous.

Le Président (M. Beauséjour): ...on va revenir au débat de ce matin.

M. Maltais: M. le Président, je vous demande de retirer de mon temps d'intervention, celle du député de Châteauguay.

Le Président (M. Beauséjour): Oui, absolument.

M. Maltais: Merci. M. le Président. Le député de Châteauguay nous lit une lettre depuis ce matin et j'aimerais savoir qui l'a signée. Serait-elle signée par Pierre Allard ou quelque chose comme cela? On continuera un peu plus tard. J'imagine qu'à un moment donné, il va nous donner la signature. (11 h 30)

Le ministre, tout à l'heure, a vanté d'une façon extraordinaire les projets, en particulier le projet Reynolds à Baie-Comeau. Je ne peux pas croire que le ministre de l'Industrie et du Commerce et le Parti québécois vont accaparer l'investissement de 500 000 $ à Baie-Comeau. Je suis d'accord avec lui pour féliciter les gouvernements quand ils posent de bons gestes: le gouvernement de M. Lesage, de 1960 à 1966; celui de M. Johnson, de 1966 à 1970; celui de M. Bourassa, de 1970 à 1976 qui a construit la Manicouagan et créé un potentiel hydroélectrique au Québec qui a fait que Reynolds est venue s'installer à Baie-Comeau, parce qu'il y avait de l'électricité. Ce n'est pas le Parti québécois qui a développé la Manicouagan. Ce n'est certainement pas le ministre de l'Industrie et du Commerce, non plus. Ce sont les gouvernements antérieurs qui ont été prévoyants alors que celui-ci n'a même pas été capable de vendre les surplus d'électricité. S'il était aussi brillant - il pourra transmettre la question au ministre de l'Énergie et des Ressources qui a fermé Manic 5, puissance additionnelle, l'an passé... Les 600 000 000 $ qu'Hydro-Québec devait investir à Manic 5 pour augmenter le potentiel hydroélectrique, il les a littéralement siphonnés d'Hydro-Québec pour les mettre dans le plan de relance du premier ministre. Le premier ministre a fermé la Chambre pendant un mois pour préparer son plan de relance qui a été une catastrophe. Il l'a dit lui-même ici.

Je pense qu'il faut être plus sérieux. Quand on parle de projets sur la Côte-Nord, on parle surtout de projets de fermeture. Il y a une scierie à Sacré-Coeur que le gouvernement a essayé de vendre et qu'il n'a pas encore vendue. Il y a des problèmes pour la vendre. Ce sont 450 emplois perdus. Reynolds, on le sait, c'est un investissement majeur, mais, après la construction, cela va donner 125 ou 130 emplois. Le ministre a beau dire... Je me souviens très bien lorsqu'il est venu faire l'annonce - pas lui, mais le ministre de l'Énergie et des Ressources qui disait: Cela va créer 500 emplois. Où sont-ils? Les travailleurs de la CSN, de l'International et de la FTQ se demandent où sont ces 500 emplois présentement. Je suis bien heureux qu'il y ait un investissement de 500 000 $ dans mon comté, mais ce n'est pas un investissement public, ce n'est pas un investissement qui appartient au Québec, au gouvernement du Parti québécois; cela appartient à Reynolds. Il l'a fait, parce qu'il y a eu des gouvernements précédents, comme ceux de M. Robert Bourassa, de M. Jean Lesage et de M. Daniel Johnson, qui ont créé un potentiel hydroélectrique permettant cette réalisation.

Tout à l'heure, on parlait du discours d'ouverture et le ministre le citait allègrement. Savez-vous ce qu'il a trouvé pour les jeunes de chez nous? Des projets, des sommets, des réunions, de la publicité -rien de concret - et des nettoyages de berges de vieux pneus à 150 $ par mois. C'est à cela que les jeunes de la Côte-Nord sont confinés; pas seulement ceux de la Côte-Nord, ceux du comté de Lotbinière aussi. Il faut être plus sérieux que cela.

J'aimerais terminer mon intervention en citant un ex-politicien du Québec... Le ministre actuel de l'Industrie et du Commerce - transmettez-lui cela - on ne peut pas dire qu'il a bien géré l'industrie et le commmerce au Québec depuis qu'il est là. La plus belle preuve: il avait seulement un parti politique et il n'a même pas été capable de le vendre d'une façon convenable. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Beauséjour): La parole est au ministre.

M. Rodrigue Biron

M. Biron: M. le Président, le député qui m'a précédé parlait de l'investissement de Reynolds à Baie-Comeau. Il a dit que cet investissement dépendait du potentiel hydroélectrique du Québec. Le député a fait un seul oubli. Probablement qu'il n'y a pas pensé ou qu'il n'a pas lu l'histoire du Québec. Le grand maître d'oeuvre qui a bâti un potentiel hydroélectrique au Québec, un Hydro-Québec fort, c'est quand même M. René Lévesque, l'actuel premier ministre du Québec. Le député de Saguenay aurait peut-être dû dire, dans sa grande honnêteté -mais je pense que cela n'appartient pas aux membres de l'autre côté - que le père de l'entreprise moderne qu'est Hydro-Québec, c'est quand même le premier ministre, M. Lévesque. C'est un petit oubli, mais on essaie de passer cela sous silence. C'est quand même la stratégie de développement du Parti québécois, du gouvernement du Québec que de nous servir au maximum de notre puissance hydroélectrique pour attirer des investissements majeurs au Québec.

Je vous ai dit aujourd'hui, M. le Président, que, sur la liste de cette semaine qui a été acceptée à la Société de développement industriel, il y avait de grands projets. Il y a beaucoup de ces projets qui sont reliés - et je ne peux malheureusement pas tous les annoncer aujourd'hui, parce que les entreprises veulent faire leurs propres annonces - la moitié de ces grands projets sont reliés directement à la capacité du Québec de produire de l'électricité. C'est une électricité qui n'appartient ni à un parti politique ni à l'autre, mais qui appartient aux citoyens du Québec. Nous, on veut encourager les citoyens du Québec à profiter au maximum de leur électricité pour travailler au Québec, non pas exporter aux États-Unis la totalité de nos surplus d'électricité, mais s'en servir, à prix de rabais, bien sûr, vis-à-vis de certaines grandes entreprises qui vont créer des emplois soit à Bécancour, soit à Granby, soit à Beauharnois, à ville de Saint-Laurent - il y a un deuxième projet à Lachute qu'on a accepté cette semaine à cause de l'électricité - à Tracy, à Montréal, à Beauport. Cela fait pas mal de projets qui sont reliés directement à la capacité du Québec de produire de l'hydroélectricité. C'est toute une série de projets qui ont été acceptés cette semaine par la Société de développement industriel. Les députés de l'Opposition disent: Ce n'est pas le gouvernement. Il faudrait peut-être qu'eux aussi se tranchent. J'ai toujours entendu, depuis que je suis ici en Chambre, de la part du Parti libéral: Le gouvernement ne devrait pas s'en mêler.

Le gouvernement est obligé quand même d'établir certaines stratégies, certaines politiques qui vont attirer les investisseurs. Quand ça ne marche pas, on dit: Cela dépend du gouvernement. Quand ça marche, on dit: Cela ne dépend pas du gouvernement. Ça dépend de nous autres quand on fait des politiques viables. Quand on peut attirer des investisseurs, quand on peut avoir des politiques fiscales qui sont les meilleures au Canada pour aider les entreprises québécoises. Tout à l'heure, mon collègue de Chauveau a mentionné cela. Ce n'est pas le Parti québécois qui a dit cela. C'est le président de la Bourse de Montréal, M. Pierre Lortie, qui n'est pas un péquiste, qui a dit: C'est au Québec qu'on a les meilleures politiques fiscales pour attirer les entreprises. Je pense que c'est important de le noter. C'est à cause, justement, de cet encadrement général que les gens viennent au Québec et à cause de notre potentiel de richesses naturelles.

Tout à l'heure, dans sa réplique, le député de Notre-Dame-de-Grâce va finalement nous expliquer son papier. C'est bien important qu'on le sache parce que les richesses naturelles, il ne faut pas les exploiter et il ne faut pas créer des jobs avec. Il ne faut pas aller dans les entreprises à grand potentiel d'investissement. Dans l'automobile, il faut laisser ça à l'Ontario. Je voudrais savoir. Il y a un tas de choses qu'il faudrait savoir. La pétrochimie, qu'est-ce qui serait arrivé au Québec si le gouvernement du Québec n'avait pas bougé? Il y a trois ans, la stratégie du gouvernement du Québec vis-à-vis de Pétromont, la pétrochimie, c'était la même que celle d'aujourd'hui. Ce qu'on demandait, c'était de ne pas payer deux fois les taxes sur les produits de la pétrochimie et d'avoir une politique de "feed stock", d'intrants ou de matières premières qui soit acceptable par l'industrie pétrochimique québécoise. Ce n'est pas juste une entreprise Pétromont, il y a 400 PME. Les libéraux fédéraux nous ont toujours dit non, non, non. Ils ont toujours dit: non, on veut faire disparaître la pétrochimie du Québec. C'est curieux, on ne pouvait pas s'entendre. Les gens d'en face nous accusaient de chialer. Il s'agit juste de changer le gouvernement de l'autre côté à Ottawa. Lorsqu'on arrive avec un autre gouvernement, on s'asseoit avec eux, cela prend quelques heures et on règle le problème de la pétrochimie.

Je pense que ça prouve la bonne foi du gouvernement du Québec. Nous avions de bonnes stratégies de développement. Un ancien président de la Fédération libérale du Canada nous a dit: II n'y a pas de direction économique depuis quinze ans au gouvernement canadien avec le Parti libéral. Nous autres, on a une direction économique. Comment voulez-vous négocier une direction économique avec des gens qui n'en avaient pas? Il me semble que maintenant, depuis

qu'il y en a une là-bas, il y a peut-être lieu de discuter avec l'autre gouvernement et de faire en sorte de répondre aux besoins des citoyens. Notre objectif, c'est de répondre le mieux possible aux besoins des citoyens, c'est d'aider à prendre le virage technologique et à devenir meilleur que n'importe quel autre, non seulement au Canada, mais dans le monde entier. Vous allez voir que dans les chiffres d'exportation, on est pas mal bon au Québec. Les chefs d'entreprises, bravo, chapeau, moi je trouve qu'ils font un travail extraordinaire.

Le Président (M. Beauséjour): Merci, M. le ministre. La parole est au député de Chauveau.

M. Raymond Brouillet

M. Brouillet: J'avais annoncé tantôt que je parlerais un peu de la stratégie de développement. Mes collègues ont abordé cette question par la suite. J'aimerais quand même revenir et insister sur certains aspects, certains témoignages. Le Parti libéral, un peu trop facilement, accuse le gouvernement de ne pas savoir où il va dans le domaine économique. Vraiment, si M. le député de Notre-Dame-de-Grâce s'est permis de rire tantôt, permettez-moi de rire à ce moment-ci. Quand on entend le Parti libéral du Québec dire cela, il faut voir quelles étaient les stratégies de développement économique sous les gouvernements antérieurs pour savoir que c'est avec le gouvernement du Parti québécois, entre 1977 et 1980, que vraiment l'on a assisté à l'élaboration d'un véritable énoncé de politique de développement économique.

Tout le monde le sait, à l'époque, cet énoncé de politique est paru dans ce qu'on a appelé "Bâtir le Québec 1". À l'intérieur de cela, on précisait les objectifs à atteindre au tournant des années quatre-vingt pour assurer au Québec un développement économique. C'est évident que cela a eu du succès à l'époque. Ce projet, ce plan de développement a eu beaucoup de succès durant ces années. D'ailleurs c'est un peu sur la performance économique du gouvernement du Québec que le Parti québécois a été réélu au pouvoir en 1981.

Vous savez que quelque temps avant l'élection, le témoignage des économistes canadiens à l'intérieur du "Financial Post" disait que la province de Québec et le gouvernement du Québec avaient eu, au cours des dernières années, une performance économique assez surprenante et assez renversante. C'est sur cette performance que le gouvernement a été réélu; cela est su de tout le monde. Il y a eu la crise économique, c'est évident, qui nous a fait reculer avec les taux d'intérêt décrétés par Ottawa et Washington, des taux d'intérêt qui ont vraiment donné un coup de fouet en plein front à nos entreprises, c'est vrai, une perte d'emplois considérable. Le gouvernement du Québec s'est ressaisi immédiatement pour tâcher de contrer les effets néfastes de ces politiques de taux d'intérêt décidées à l'extérieur du Québec. Là, nous avons vu une reprise économique qui donne des résultats encore qui étonnent tout le monde. Le reste du Canada nous dit, par le biais de Statistique Canada, et par le biais aussi de la voie de ses spécialistes: C'est surprenant comme le Québec se redresse de la crise en 1983 et 1984! On est surpris de voir le taux d'accroissement, le taux d'accroissement des investissements et aussi, par le biais de ces investissements, le taux d'accroissement de l'emploi. On a dit tantôt: Ce n'est pas de la création, c'est de la récupération. Mais pour récupérer il faut créer de l'emploi, voyons donc! C'est un jeu de mots enfantin. Que voulez-vous? Tous les spécialistes dans le domaine parlent de création d'emplois à ce moment. Pour récupérer il faut créer de l'emploi.

Il y a eu aussi, "Bâtir le Québec -phase 2", qu'on a appelé "Le virage technologique". Encore là, on a mis au point une stratégie pour tâcher d'être à l'heure de la mutation technologique contemporaine. Je vais citer, encore une fois, le Conseil des sciences du Canada, lequel traitait dans son document de la politique industrielle dans la fédération canadienne. Il faut bien voir ce que ces gens disent: "C'est le Québec qui, parmi toutes les provinces, a élaboré la stratégie industrielle la plus complète. C'est aussi dans cette province que les autorités ont mené l'analyse officielle la plus claire des problèmes qu'elle présente et de ses perspectives." Témoignage du Conseil des sciences du Canada. Et, d'une façon plus particulière, en ce qui concerne le second volet de l'énoncé de politique "Bâtir le Québec", ce qu'on a appelé et ce qu'on appelle encore "Le virage technologique", le document du Conseil des sciences du Canada jette encore plus de lumière sur la stratégie du gouvernement du Québec en matière de développement économique et je cite: "Ce qui est encore plus important, c'est que la déclaration du gouvernement québécois contient une politique valable pour la création de nouvelles entreprises. Elle met l'accent sur trois principaux domaines: les retombées industrielles des grands projets, l'aide financière et technique aux services de pointe et le programme d'assistance préférentielle aux entreprises électroniques et biotechnologiques. Pour conclure, le document nous dit ceci: C'est le Québec qui, probablement, dispose de la gamme de moyens - les gens qui nous disent qu'on est uniquement des penseurs et qu'on ne passe pas à l'action, au contraire on apporte des moyens d'action - c'est

le Québec qui, probablement dispose de la gamme de moyens concrets, de programmes pour aider effectivement les entreprises et créer de l'emploi. C'est le Québec qui dispose de la gamme de moyens - dit le document du Conseil des sciences du Canada - les plus diversifiés pour mettre en oeuvre une stratégie industrielle."

M. le Président, il est temps qu'on s'ouvre les yeux et qu'on reconnaisse les efforts considérables du gouvernement, la performance de nos milieux d'affaires et de nos entreprises. Ce n'est pas surprenant qu'actuellement nous ayons la meilleure performance dans le Canada concernant les investissements et concernant la création d'emploi.

Le Président (M. Beauséjour): Merci, M. le député de Chauveau. La parole est au député de Laporte.

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Nous parlons toujours ce matin d'emplois au Québec, du moins de ce côté-ci. Le gouvernement s'est distingué depuis quelques années par ses contre-performances dans le domaine des emplois. On a parlé tout à l'heure de la Côte-Nord et de l'amiante; il y a une autre société d'État où le gouvernement a fait des prétendus miracles, c'est la Raffinerie de sucre du Québec. On va peut-être en dire quelques mots. C'est un organisme qui avait été formé dans les années quarante par un gouvernement libéral et qui menait une petite vie tranquille dans la région de Saint-Hilaire, ne faisait pas beaucoup d'argent et même en perdait un peu chaque année, mais qui faisait quand même en sorte que la région se maintienne sur le plan économique. Or, notre bon gouvernement, tout à coup, dans ses rêves de grandeur, a décidé, au début des années quatre-vingt, qu'il y avait une mission mondiale pour le sucre au Québec et a décidé d'investir des millions de dollars, un programme de 55 000 000 $ d'investissements dans la raffinerie du sucre. Aujourd'hui, à la fin de l'année financière 1982-1983, les investissements du gouvernement sont de 67 800 000 $ dans la Raffinerie de sucre du Québec avec des engagements pour 9 000 000 $ pour les deux années financières suivantes. (11 h 45)

Or, je voudrais citer un article du journal La Presse, d'Alain Dubuc, un chroniqueur financier très réputé et qui dit justement que les problèmes ont commencé quand on a décidé de tripler la capacité de l'usine avec un investissement de 55 000 000 $ visant à développer cette culture excellente pour les sols. Il parle de cette décision comme un aveuglement bureaucratique qui mène à des monstres comme Canadair ou SIDBEC et on pourrait ajouter la Société nationale de l'amiante ou même Quebecair. Après de nombreuses tergiversations... La conclusion du journaliste - je sais que le temps est limité, je ne peux pas lire tout l'article - c'est: Au-delà des pratiques de cow-boy, c'est un non-sens économique. Il est bon que le Québec diversifie ses cultures et augmente son autosuffisance. Mais est-ce logique, dans les secteurs où l'on sera toujours perdants comme les ananas, les noix de coco ou le sucre? Pourquoi ne pas se concentrer là où l'on peut exceller? Le marché du sucre mondial est en perte de vitesse parce qu'on en consomme moins. La concurrence est forte parce qu'il y a une surproduction. Nos coûts sont beaucoup plus élevés que ceux des pays producteurs de canne. C'est ainsi que la raffinerie a perdu 2 700 000 $ en 1983, mais cette perte ne tient pas compte du fait que la betterave est subventionnée. Le prix mondial commanderait un prix de 15 $ la tonne de betterave, on la paie ici 40 $. La différence tend à être payée par l'assurance-stabilisation. Cela a coûté 4 600 000 $ l'an dernier. Le journaliste conclut: L'équation est sans issue.

M. le Président, la Raffinerie de sucre du Québec perd de l'argent chaque année. On serait portés à penser qu'avec des investissements aussi massifs que le gouvernement a décidé d'y mettre - et on parle de 77 000 000 $ à la fin de 1983 -cela emploierait beaucoup de monde au Québec. Or, croirez-vous, M. le Président, quand on a cherché à savoir combien il y avait d'employés dans cette immense raffinerie du sucre, le rapport annuel 1982-1983 - le dernier sur la table - nous indique qu'il y a 64 emplois permanents dans cette société et quelques centaines d'emplois saisonniers. Ce sont essentiellement des étudiants qu'on engage pour ramasser des betteraves l'été. Voici le genre de placement dans lequel le gouvernement investit les fonds publics.

Tout à l'heure, je parlais de Quebecair. Un autre bel exemple, cette compagnie québécoise qui, jusqu'en 1981, avait réussi à vivre et à servir son public des régions du Québec, sans créer de déficit et sans faire de gain non plus. Une année un petit déficit, une année un petit gain, la compagnie, bon an mal an, rendait de bons services aux Québécois et faisait ses frais.

Quand notre bon gouvernement a décidé qu'il y avait un avenir pour le gouvernement du Québec dans Quebecair et qu'on devait en faire une grande société, on a investi des fonds massivement. Aujourd'hui, on serait rendu à environ 75 000 000 $. C'est difficile à dire parce que le gouvernement a mis un écran depuis un an ou deux entre le ministère des Transports et la société

Quebecair. On a formé la Société nationale des Transports qui sert d'écran entre les deux. Aujoud'hui, on se promène encore dans les mêmes avions, les BAC 1-11 que Quebecair avait avant que le gouvernement injecte les 75 000 000 $. On n'a pas changé d'avion, ce ne sont pas des avions chromés, ce sont les mêmes vieux avions qu'on avait avant et on a dépensé 75 000 000 $. De plus, les emplois n'ont pas augmenté à Quebecair non plus, même que ça a diminué l'an dernier.

Quelle sorte de gouvernement a-t-on là? Il investit dans centaines de millions de dollars à gauche et à droite dans l'amiante, dans le sucre, dans Quebecair pour ne créer aucun emploi mais, au contraire, pour créer des trous. C'est le genre de gouvernement qu'on a et ce n'est pas surprenant, aujourd'hui, qu'on soit en déficit en ce qui concerne les emplois par rapport à l'Ontario. Merci.

Le Président (M. Beauséjour): Merci, M. le député. Pour conclure, maintenant, M. le ministre, vous avez dix minutes.

Conclusions M. Rodrigue Biron

M. Biron: M. le Président, je vous recommanderais de faire un cours très court au député de Laporte pour lui enseigner, concernant les sociétés d'État dont il a mentionné l'existence tout à l'heure, de quel ministre elles relèvent, parce qu'il s'est trompé de commission parlementaire. Il n'a pas nommé une seule société d'État qui relève du ministère de l'Industrie et du Commerce. Ou le député de Laporte ne travaille pas ses dossiers de l'Industrie et du Commerce ou tout simplement il travaille les dossiers ailleurs et il n'a absolument rien à reprocher au ministère de l'Industrie et du Commerce là-dessus.

Je vais lui faire comprendre quelque chose. Le député de Laporte se plaint de l'intervention du gouvernement dans certaines sociétés d'État. D'un autre côté, on décide de fermer une socité déficitaire, SIDBEC-Normines, pour laquelle l'homme invisible dont il ne veut pas mentionner le nom et l'existence a signé un contrat, il y a déjà une dizaine d'années; il nous a embarqués dedans et cela a coûté 600 000 000 $ ou 700 000 000 $ aux contribuables québécois. Si on décide de fermer cela, la critique commence de son côté.

Voulez-vous, s'il vous plaît, informer les gens autour de vous, dans votre parti -vous devez les voir de temps à autre, au caucus - leur dire de ne pas critiquer... M. le Président, passez donc le message au député de Laporte qu'il passe le message aux gens de son parti de ne pas critiquer si on ferme certaines sociétés d'État déficitaires.

Pour l'information du député de Laporte, depuis que je suis à la direction du ministère de l'Industrie et du Commerce, il y a sept sociétés qui ont été vendues par la Société générale de financement. Le gouvernement ne veut pas s'impliquer dans les affaires si on juge qu'une entreprise privée peut faire mieux que nous. On a vendu Tricots La Salle, on a vendu Lac-des-Îles, on a vendu John Meunier, on a vendu Volcano, Forano, BG Checo, une partie de Marine Industrie. Je pense que l'orientation globale et générale du gouvernement du Québec, c'est de faire en sorte d'être dans les sociétés d'État où il faut absolument être. Je comprends qu'il faut être dans certaines sociétés d'État et là, on n'a pas le choix, il faut y être pour développer.

Par exemple, si le Parti québécois ne s'était pas impliqué dans Domtar, il n'y aurait pas eu de développement au Québec; là, il y en a beaucoup. Par contre, il y a d'autres sociétés qu'on peut vendre à l'entreprise privée. C'est la philosophie du gouvernement. Donc, c'est une stratégie de développement dans ce sens.

En ce qui concerne ce qui nous intéresse particulièrement aujourd'hui, la création d'emplois, le développement technologique, le développement économique, les investissements dans le domaine manufacturier, mon collègue de Chauveau, tout à l'heure, mentionnait un rapport du Conseil des sciences du Canada qui dit que c'est le Québec qui, probablement, dispose de la gamme de moyens la plus diversifiée pour mettre en oeuvre une stratégie industrielle et pour répondre aux besoins des chefs d'entreprise.

J'ai ici une lettre parmi les centaines que j'ai reçues d'entreprises qu'on a aidées. Cela vaut la peine; cela n'a pas été inventé sur un coin de table. On consulte les gens dans le milieu; nous ne sommes pas invisibles. On consulte les gens, alors que certaines personnes dans votre parti sont invisibles; vous ne voulez même pas en parler: "L'automne dernier, vous invitiez les bénéficiaires du plan Biron à une rencontre pour évaluer la portée du programme et les commentaires des entreprises. Nous vous avions exprimé notre appréciation et le fait que, pour nous, l'oxygène de ce programme nous avait permis de croître en doublant nos ventes et notre effectif de personnel de 65 à 140 entre 1982 et 1983. Nous poursuivons en 1984 aussi vigoureusement. À cette rencontre, je vous suggérerais d'instaurer une assurance contre les variations des taux d'intérêt. Je ne voudrais pas qu'on recommence la folie des taux d'intérêt. Grande fut ma surprise de constater que cette mesure existe maintenant dans le nouveau programme. Nous avons pu ainsi refinancer à long terme une dette. Je désire

vous remercier sincèrement de l'ouverture d'esprit, de l'initiative et du dynamisme qu'a connus votre ministère sous votre gouverne. Je vous souhaite longue vie à ce poste."

Plusieurs chefs d'entreprise écrivent dans ce sens. Je peux même vous mentionner des gens dans vos comtés respectifs, des anglophones, je peux vous en nommer dans tous les comtés qui m'écrivent en me disant: Bravo! Vous faites un excellent travail. Si le gouvernement du Québec fait un excellent travail, c'est qu'on est conscient de ce qui se passe au Québec et on consulte les gens. Cela se traduit par des résultats concrets au point de vue de la création d'emplois.

Quand on songe que dans le secteur manufacturier, on a créé jusqu'à maintenant cette année au-delà de 35% des emplois canadiens dans le secteur manufacturier, alors qu'on est seulement 25% de la population. Notre performance dans le secteur manufacturier est meilleure. Notre performance dans le secteur général de l'économie de l'an dernier aussi est meilleure que le reste du Canada. Dans ce sens, il faut reconnaître les actions du gouvernement du Québec. Ce n'est ni par erreur, ni par accident qu'on a des accroissements d'investissements manufacturiers énormes dans certains secteurs.

Le député de Notre-Dame-de-Grâce nous parlait tout à l'heure, à l'aide de ses tableaux, de l'industrie métallique primaire. Quand on a presque 200% d'augmentation des investissements dans les pâtes et papiers, les programmes mis de l'avant par le gouvernement du Parti québécois, cela a été extraordinaire. Cela n'a pas créé beaucoup d'emplois, mais cela a sécurisé un nombre incalculable d'emplois dans tout le Québec. C'est l'une des plus grandes industries du Québec que l'industrie des pâtes et papiers.

Juste pour vous donner un autre tableau, M. le Président, sur les immobilisations de fabrication encore. On a comparé les trois dernières années depuis la crise économique qui a tué l'économie au Québec et dans le reste du Canada d'ailleurs, comment on est ressorti de la crise, nous autres, plus rapidement que les autres. Entre 1981, qui était la pire année de la crise, et 1984, regardez ce qui s'est passé, pour le reste du Canada: une diminution de 40%; l'Ontario, 28%; les immobilisations au Québec: augmentation de 26,8%. Le Québec se sort beaucoup mieux de la crise économique parce qu'il est vrai qu'on a restructuré nos entreprises. Il est vrai qu'on a eu des programmes de financement. IL est vrai qu'on a eu toutes sortes de programmes à la SDI. Tout le monde reconnaît que ie Québec est la meilleure province canadienne pour cela. Je devrais vous donner la liste de tous les ministres des provinces canadiennes qui viennent nous voir pour s'informer des programmes du ministère de l'Industrie et du

Commerce, des programmes de la SDI pour aider les entreprises. Ce n'est pas par accident non plus qu'on en arrive à une courbe comme celle-là où on s'aperçoit que le Québec réussit beaucoup mieux que l'Ontario et beaucoup mieux que le reste du Canada au cours des dernières années. Nos programmes sont ajustés aux besoins des entreprises après la crise économique. La crise économique a frappé le Québec comme elle a frappé les autres provinces canadiennes. Ce qui est important pour nous, c'est d'en sortir.

M. le Président, je sais que le député de Notre-Dame-de-Grâce va répondre avec son volume sur l'orientation - je ne sais pas si ce sera l'orientation du Parti libéral... C'est mieux que ce qui existait parce qu'il n'y avait rien au Parti libéral auparavant; au moins, c'est mieux. Même si j'ai dit qu'il n'y avait pas grand-chose, qu'on avait oublié les PME, qu'on ne voulait pas se servir des richesses naturelles, que le secteur de l'automobile devait s'en aller en Ontario, d'après le livre du Parti libéral. S'il ne faut pas aller dans les secteurs traditionnels, je me demande dans quels secteurs on va aller. Son chef dit: II ne faut pas avoir le régime d'épargne-actions, donc il ne faut pas aider les PME à avoir ce régime. Il faudra se poser des questions particulières là-dessus. Quelle sera la protection que vous voulez donner aux secteurs traditionnels? Voulez-vous conserver le textile, le vêtement, la bonneterie, le meuble ou si vous voulez, comme vos grands frères à Ottawa, que cela s'en aille complètement? Ce sont des questions élémentaires, M. le Président, qu'il faudra se poser.

La question élémentaire qu'il faudrait savoir de la part du Parti libéral du Québec, c'est: Quel est son programme de développement d'un secteur traditionnel? Dans les secteurs de la haute technologie, il nous dit: II faudrait prendre le virage technologique, aller dans la haute technologie. Mon collègue, le député de Châteauguay, a mentionné tout à l'heure qu'il y a une centaine d'entreprises, dans les 18 premiers mois du programme à la SDI, qui ont investi 150 000 000 $ dans la recherche et le développement. La plupart sont de petites ou de moyennes entreprises. Il est important de voir tout ce qui se fait. On le fait le virage technologique, on prend la haute technologie, mais il faut aussi protéger les emplois dans certains autres secteurs, les secteurs traditionnels.

Je voudrais savoir du Parti libéral, M. le Président, ce qu'il va faire avec le cuir, avec le vêtement, avec le textile, avec le meuble. Va-t-on développer ces secteurs comme le gouvernement du Parti québécois les a développés? Si oui, le Parti libéral dira bravo au Parti québécois. Va-t-on faire l'exploitation et la vente de nos richesses

naturelles? Ce serait le temps de voir, M. le Président, ce que va faire le Parti libéral. S'il nous dit: Oui, on va faire l'exploitation et la vente de nos richesses naturelles pour créer des emplois au Québec, il fera la même chose que le Parti québécois; il faut qu'il dise bravo au Parti québécois. Vous êtes correct, dans ce sens.

Que voudrait faire le Parti libéral, M. le Président, vis-à-vis des secteurs traditionnels à forte capitalisation: la pétrochimie ou l'automobile? Que fera-t-il là-dessus? Il faudrait le savoir. S'il nous dit: On va protéger la pétrochimie, on va essayer de développer l'automobile, c'est la même chose que le Parti québécois. Il faudrait qu'il dise bravo au gouvernement du Parti québécois et vous faites une mosus de bonne "job" là-dedans. Il est important de savoir cela. Autrement, M. le Président, on ne sait pas ce qui tient dans cette structure. Leur chef est invisible et les gens de l'autre bord nous disent: N'en parlez pas. Il est invisible et on ne veut même pas en parler. Il faudrait au moins savoir ce que les gens ont dans la tête et ce qu'ils pensent de ce côté.

À propos des jeunes - le député de Saguenay en a parlé à quelques reprises tout à l'heure - aucune province canadienne ni non plus le gouvernement fédéral n'ont de programmes pour aider les jeunes entrepreneurs à se lancer en affaires. Cela n'existe nulle part. Cela a été copié; cela faisait partie des engagements électoraux des trois principaux partis fédéraux. Les provinces canadiennes viennent nous voir, le gouvernement fédéral vient nous voir pour savoir comment fonctionnent nos programmes de fonds aux jeunes entrepreneurs. Ils nous demandent: Vos "Bourses d'affaires", comment fonctionnent-elles? "UNI-PME", comment cela fonctionne-t-il? "Outils de gestion", comment cela fonctionne-t-il? Vos groupes de gestion communautaire et coopérative, comment cela fonctionne-t-il? Qu'est-ce que vous faites pour aider les jeunes à se lancer en affaires? On leur dit ce qu'on fait: on leur donne des garanties de prêts, on leur donne des polices d'assurances contre l'augmentation des taux d'intérêt. Mais des jeunes qui se lancent dans la fabrication de produits thermoplastiques, dans la fabrication de microprocesseurs, dans l'aménagement et le reboisement des forêts, dans le service à l'exportation, dans la fabrication de robots, dans des entreprises de production de croquis, de patrons et d'échantillonnages, dans la mode, dans la fabrication de produits spécialisés pour handicapés... Ces jeunes entrepreneurs que nous aidons à se lancer en affaires - cela n'a existé nulle part ailleurs - le Parti québécois en aide au-delà d'une centaine. 11 y a 500 personnes, d'ici la fin de mars, qui vont accepter de se lancer en affaires, ce qui crée, en moyenne, sept emplois par entreprise. Ce ne sont pas des moyennes ou de grandes entreprises; ce sont de petites entreprises. Ce sont les actions bien concrètes que le gouvernement du Parti québécois fait pour les jeunes, pour la création d'emplois pour ces jeunes.

Le Président (M. Beauséjour): Merci, M. le ministre. La parole est maintenant au député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député, vous avez dix minutes pour conclure.

M. Reed Scowen

M. Scowen: Merci, M. le Président. Nous avons essayé, ce matin, de soulever une question importante, le sous-emploi dans le secteur manufacturier, et nous en avons présenté une analyse sérieuse. Je laisse à vous, M. le Président, et à la population le soin de décider de la qualité de la réponse qui nous a été donnée par le ministre et par ses collègues.

J'ai surtout l'impression qu'ils ont agi en parti d'Opposition. Ils ont pris comme principal argument la faiblesse d'un document que j'ai écrit il y a quelques semaines et ils ont passé beaucoup de temps à parler de M. Bourassa. Je dois vous dire quelque chose au sujet de M. Bourassa. Vous croyez peut-être qu'il est invisible, mais je vous assure que, pour la population du Québec, il n'est pas invisible. Il est partout au Québec, partout à l'écoute de la population, et vous allez voir les conséquences de ses activités quand vous convoquerez la prochaine élection générale.

Quant à mon document, je pense que je vais utiliser les dix minutes qu'il me reste pour en parler. Vous m'avez invité à le faire, effectivement. Vous n'avez fait que le critiquer toute la matinée. Je trouve qu'il y a, dans ce document, des éléments de solution aux problèmes dont on parle. Je dois d'abord dire que ce n'est pas une politique du Parti libéral, c'est un document qui se veut une contribution au débat à l'intérieur du parti. J'espère que cela va devenir le programme du parti. Pour le moment, ce sont les idées d'un député de l'Assemblée nationale. (12 heures)

Premièrement, je pense - beaucoup d'autres pensent aussi - que cela doit être pris au sérieux. Je vais citer quelques commentaires faits par des personnes neutres au sujet de ce document. M. Fréderic Wagnière, dans la Presse, disait que cette étude se livre à une réflexion qui est d'autant plus riche qu'elle se rapporte à une réalité économique et politique et qu'elle ne s'embarrasse pas de tabous idéologiques. Il ajoute: Le gouvernement lui-même devrait y trouver plus matière à réflexion qu'à critique. M. Jacques Dumais, dans le Soleil, dit: M. Scowen n'invite pas moins ses collègues libéraux à se rallier enfin à une politique économique réaliste et novatrice

d'ici le congrès. Le débat qu'il propose tient davantage de la politique sérieuse que de la politicaillerie inutile. M. Hugh Anderson, dans la Gazette, disait: It is an admirable statement of the problems but there are many of those more strikingly useful. It contains the ingredients of a prescription for curing those problems that would certainly works if it were ever administered.

M. Jean-Paul Gagné, du journal Les Affaires, a dit: La stratégie économique proposée par M. Scowen est pertinente et courageuse. Elle repose, cependant, sur un changement des mentalités, ce qui deviendra possible quand la société comprendra mieux le gaspillage des ressources humaines auxquelles nous a conduit notre insouciance collective face à la nécessité d'être concurrentiel en tout par rapport à nos partenaires commerciaux et concurrents.

Vous ne l'avez pas pris au sérieux. Vous êtes à peu près les seuls. Je pense que vous faites une très grande erreur. Je dois dire d'abord que ce n'est pas un document qui regarde le Parti québécois. Je ne critique pas le Parti québécois là-dedans. S'il y a des personnes qui s'intéressent à ces questions, cela me fera plaisir de leur en envoyer une copie si elles me le demandent.

Je veux simplement noter une chose en commençant. Je n'ai pas mentionné une seule fois, dans ce document, les petites entreprises. Je n'ai mentionné ni les moyennes ni les grandes. Je n'ai pas de leçon à recevoir de M. le ministre concernant les PME. J'ai été le président-directeur général d'une PME pendant quinze ans. J'ai vécu toutes les expériences de la vie économique et les problèmes d'une PME. J'ai parlé à toutes les entreprises, à tous les travailleurs et à tous les Québécois.

Je vais terminer mon intervention en lisant quelques citations de ce document. Elles sont hors contexte, j'en conviens, mais elles sont beaucoup moins hors contexte que les efforts que les membres du gouvernement ont faits ce matin.

Je dis dans ce document, M. le Président, que la perspective de celui-ci est fondée sur la conviction que, sur le plan économique, les Québécois sont prêts à accepter l'enjeu économique des pays démocratiques modernes, qu'ils sont capables de réussir en se prêtant aux règles du jeu qui s'imposent et que nous sommes profondément convaincus qu'en acceptant pleinement ce défi, la création d'emplois de qualité, pour tous les hommes, les femmes et les jeunes qui veulent travailler au Québec, est possible et cela, dans un avenir rapproché.

Je continue, en disant que l'emploi, ce n'est pas seulement un terme dans un manuel d'économie. Pour la plupart des gens, c'est quelque chose de tout à fait concret et de très important. Cela signifie avoir la possibilité de gagner sa vie dans des conditions acceptables, savoir qu'on a un emploi sûr, qu'il y en a d'autres qui sont disponibles, et savoir que c'est vrai, non seulement pour nous, mais pour nos enfants et nos amis. C'est la réponse à une aspiration humaine fondamentale. Mais, je dis: II faut reconnaître que, dans la recherche d'emplois, certains pays s'en sortent mieux que d'autres. Aujourd'hui, par exemple, le taux de chômage est de 13% au Québec, de 9% en Ontario, de 7% aux États-Unis, de 3% au Japon et de 1% en Suisse. Il doit y avoir des raisons à cela.

Je continue en disant que - et ceci est très important - pour n'importe quel pays, l'existence d'un haut niveau d'emploi et de productivité est une condition essentielle à la création d'une société civilisée. Un pays pauvre est un pays injuste. Nous avons des exemples, sur tous les continents, pour confirmer cette affirmation. Pour une société moderne, créer la richesse est une activité aussi noble que celle de consoler les défavorisés.

Je passe ensuite à la question de la compétitivité, qui est la clé de la création d'emplois. Je dis: Si nous voulons produire de grandes quantités de biens et de services, au Québec, ce que nous produisons doit être vendu, et cela ne sera pas possible si nos produits sont incapables de concurrencer des produits semblables fabriqués ailleurs. Je pose la question - j'ai été cité ce matin -Actuellement, sommes-nous compétitifs? La réponse est claire: Nous ne le sommes pas. Il y a, bien sûr, des secteurs où nous sommes compétitifs. C'est évident: il y a beaucoup de gens au travail, au Québec. Mais, l'indication principale de notre manque de compétitivité et, en fait, la seule dont nous avons besoin, c'est qu'il y a près de 600 000 Québécois aujourd'hui, 20% de notre population, qui ne réussissent pas à trouver du travail. Ces gens ne trouvent aucun bien ni aucun service ou produit qui ne soit acceptable et susceptible d'intéresser qui que ce soit à l'étranger ou même ici au Québec. Trouver de nouveaux emplois pour 600 000 Québécois peut sembler une tâche désespérée. Il y en a quand même 130 000 000 au travail en Amérique du Nord. On n'a pas besoin de récupérer tous les emplois. Il y a des choix que nous pouvons faire.

Le premier pas est le plus difficile. Rechercher prioritairement comme société la création d'emplois et convenir que, pour y arriver, nous sommes prêts à faire le nécessaire pour devenir concurrentiels sur les marchés internationaux. Nous avons souvent parlé de cette nécessité. Jusqu'à ce jour, nous avons refusé de l'accepter pleinement avec les conséquences et les disciplines qu'il convient. Nous sommes en réalité les victimes du gouvernement des autres régions

qui réussissent mieux que nous à apporter les compléments nécessaires aux efforts de leurs secteurs privés par des stratégies qui créent une économie plus productive, plus rentable, plus concurrentielle. Notre gouvernement - je le dis - n'est pas concurrentiel avec d'autres gouvernements. C'est la clé du problème.

Je parle des services publics et je dis qu'il faut faire attention. On veut se donner toutes sortes de choses. Les services et le type de protection que nous voulons offrir à notre population ne doivent pas être forcément les mêmes que ceux offerts dans les pays qui sont nos concurrents. Si le coût au total dépasse leur coût, nous devons accepter le fait que nous sommes en train de diminuer d'autant la compétitivité de notre économie et qu'en conséquence certains Québécois auront un jour ou l'autre à payer le prix des services excessifs donnés par le gouvernement; et le prix qu'ils vont payer, c'est leur emploi. Je vais toucher deux autres sujets.

Le Président (M. Beauséjour): Cinq secondes.

M. Scowen: Cinq secondes. Je n'ai pas le temps d'expliquer ce que j'ai dit au sujet des richesses naturelles, mais j'incite le ministre à le relire parce qu'il va voir qu'il a déformé complètement mes paroles. Je termine...

Le Président (M. Beauséjour): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Je termine en remerciant le ministre de sa présence, ce matin. Je regrette de ne pas pouvoir lire les conclusions de mon document, mais ça va se faire une autre fois. Merci.

Le Président (M. Beauséjour): Je remercie tous les membres de la commission. La commission de l'économie et du travail ayant accompli son mandat ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 7)

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