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(Dix heures trois minutes)
Le Président (M. Beauséjour): À l'ordre,
s'il vous plaît!
La commission de l'économie et du travail se réunit ce
matin pour procéder à l'interpellation du député de
Notre-Dame-de-Grâce au ministre de l'Industrie et du Commerce sur le
sujet suivant: le sous-emploi au Québec.
Je demanderais au secrétaire de la commission de m'indiquer s'il
y a des remplacements.
Le Secrétaire: Les remplacements sont les suivants: M.
Cusano (Viau) est remplacé par M. Maltais (Saguenay); M. Fortier
(Outremont) est remplacé par M. Scowen (Notre-Dame-de-Gr§ce); M.
Perron (Duplessis) est remplacé par M. Brouillet (Chauveau).
Le Président (M. Beauséjour): Merci. Je voudrais
rappeler aux membres de la commission les règles que nous aurons
à suivre. Le député qui a donné l'avis
d'interpellation intervient le premier pendant dix minutes. Le ministre
interpellé intervient ensuite pendant dix minutes. Il y a ensuite
alternance dans les interventions, c'est-à-dire un député
du groupe de l'Opposition, ensuite, le ministre et après un
député du groupe formant le gouvernement; un député
du groupe de l'Opposition, le ministre et ainsi de suite jusqu'à la fin.
Cet ordre des interventions a été convenu lors d'une
réunion des leaders des groupes parlementaires.
Je vous rappelle que chaque intervenant a un temps de parole de cinq
minutes. Si un intervenant n'utilise pas ses cinq minutes, le temps non
utilisé est alors perdu. À la fin, j'accorderai un dernier temps
de parole de dix minutes au ministre; l'interpellant aura ensuite un droit de
réplique de dix minutes. Cela va?
M. Scowen: Cela va.
Le Président (M. Beauséjour): Je donne maintenant
la parole au député de Notre-Dame-de-Grâce.
Exposé du sujet
M. Reed Scowen M. Scowen: M. le Président, merci.
Nous avons décidé d'aborder une fois de plus, aujourd'hui,
la question du sous-emploi au Québec. Je pense que le gouvernement et
l'Opposition sont d'accord sur deux sujets: premièrement, que la
question de l'emploi est la question la plus importante pour le gouvernement et
pour l'Assemblée nationale; deuxièmement, que la création
d'emplois, élément clé dans cette question
économique, est insatisfaisante au Québec. Même le
gouvernement l'admet: On aurait aimé faire mieux.
Nous avons, je pense, démontré récemment que la
création d'emplois au Québec s'est faite beaucoup plus lentement
qu'ailleurs depuis cinq ans et que même aujourd'hui, au moment où
on se parle, on se retrouve avec moins de monde au travail au Québec
qu'on en avait l'année de l'élection du Parti
québécois en 1981. Ce matin, on a surtout voulu parler de
l'emploi dans l'industrie manufacturière au Québec parce que le
ministre que nous avons devant nous, aujourd'hui, c'est le ministre de
l'Industrie et, comme tout le monde le sait, c'est l'industrie
manufacturière qui est le moteur de notre économie. Il n'y a pas
ou presque pas une ville ou un village au Québec qui n'a pas son usine
qui est très souvent le moteur de toute l'économie de la
communauté.
Pour savoir ce qui se passe dans le domaine de l'emploi dans le secteur
manufacturier, nous avons fait faire une compilation spéciale de
l'emploi dans les divers secteurs de l'économie dans l'industrie
manufacturière. Je veux prendre cinq minutes pour donner les
résultats de cette petite enquête que nous avons faite. Nous avons
posé deux questions. La première question: Dans chaque secteur,
soit le textile, le bois, etc., combien de personnes y a-t-il au travail
aujourd'hui comparativement au nombre qui était au travail en 1976 quand
le Parti québécois a été élu pour la
première fois? Est-ce que nous avons progressé ou non?
Deuxièmement, parce qu'il y a souvent des éléments de
l'extérieur qui nous touchent, nous avons essayé de savoir si
notre part de l'emploi dans chacun de ces secteurs a augmenté notre
part, si vous voulez, des emplois au Canada. On ne voulait pas que, devant une
baisse de l'emploi, le ministre nous dise: C'est à cause de la
conjoncture économique. Je dois vous dire que les résultats de
cette analyse nous ont bouleversés, nous ont profondément
choqués. Et parce qu'il n'y a pas beaucoup de temps
pour cette première partie de notre débat, je vais passer
immédiatement aux résultats. Je dois vous dire que notre
préoccupation, ce matin, c'est de demander au ministre, s'il est
d'accord avec les chiffres, quelles sont les raisons de cette situation et ce
que nous pouvons faire pour analyser le problème et le
régler.
Passons immédiatement aux chiffres. Je vais vous
énumérer, M. le Président et M. le ministre, les secteurs
manufacturiers de l'économie du Québec par ordre d'importance en
nombre d'emplois avec ce qui s'est passé depuis 1976. Je commence avec
le secteur de l'habillement où on avait, en 1976, 77 000 emplois qui
sont descendus à 70 000 en 1983, une baisse de 7000. Notre part du
marché canadien dans ce secteur a baissé de 9 points.
Le deuxième secteur le plus important au Québec, c'est
l'alimentation et les boissons. Nous avons augmenté le nombre d'emplois
en sept ans de 1000 seulement et nous avons gardé notre part de ce
marché.
Dans l'industrie des pâtes et papiers, nous avons perdu 8000
emplois depuis sept ans et nous avons perdu 2% de notre part des emplois
canadiens.
Dans le secteur de première transformation des métaux; les
alumineries, les sidérurgies, les fonderies, nous avons perdu 7000
emplois. Nous avons 7000 personnes de moins au travail en 1983 qu'en 1976 et
nous avons perdu notre part du marché canadien aussi.
L'équipement de transport. On parle souvent de Bombardier, mais
effectivement dans ce secteur, nous avons 4000 personnes de moins au travail
ici au Québec, aujourd'hui, qu'en 1976. Nous avons, encore une fois,
perdu notre part du marché canadien.
Les produits de métal. Dans des industries comme le fil, les
turbines, les wagons, nous avons perdu 9000 emplois et subi une perte dans
notre part des emplois canadiens.
Le textile. Nous avons perdu 7000 emplois et 6% de notre part du
marché canadien.
Dans les produits électriques et électroniques, secteurs
de pointe, de haute technologie, nous avons perdu 3000 emplois et 2% de notre
part du marché.
Dans les produits chimiques, autre secteur de grande importance dans la
haute technologie, la biochimie, la pharmaceutique, nous avons perdu 5000
emplois et 5% de notre part du marché.
L'imprimerie et l'édition. C'est à peu près le seul
secteur où nous accusons une augmentation de 6000 emplois depuis 1976.
À mon avis, cette augmentation est due au fait que, dans l'imprimerie et
l'édition vous avez la publicité gouvernementale et la paperasse
gouvernementale. C'est à peu près la seule industrie en pleine
croissance au Québec.
Le bois. Oui, dans le bois vous avez aussi fait un gain de 2000 emplois
en sept ans. C'est probablement le bois qui est entré dans la
fabrication du papier qu'on a utilisé pour les formulaires, je ne sais
pas, mais c'est une exception.
Les meubles. Un autre petit secteur de 22 000 emplois que nous avons
augmentés à 23 000, mais notre part du marché canadien a
quand même diminué.
Divers. Ce sont toutes les industries qui ne sont pas dans les autres
secteurs, notamment les produits du sport et les produits des instruments: une
autre perte.
Fabrication de machineries: match nul. Pas un seul emploi
créé.
Produits minéraux non métalliques où vous avez
l'amiante et le ciment: 3000 emplois de perdus.
Le cuir - la chaussure si vous voulez -5000 emplois de perdus et notre
part du marché diminuée énormément.
Produits plastiques et caoutchouc: un autre secteur de haute
technologie: 1000 emplois de perdus et 4% de notre part du marché.
Bonneterie: 1000 emplois perdus.
Tabac: 2000 emplois perdus.
Produits du pétrole et du charbon: 1000 emplois perdus.
Voici, M. le ministre, le total: en 1983, au Québec, 56 000
personnes de moins au travail dans les usines qu'on n'avait en 1976 quand le
gouvernement péquiste est arrivé au pouvoir. Notre part des
emplois canadiens dans tous ces secteurs manufacturiers a baissé de
trois points ou, si voulez, de 10%.
Pour 1984, les chiffres ne sont pas encore disponibles parce que
l'année n'est pas encore terminée, mais il semble qu'on va
peut-être avoir une récupération de la moitié de ces
56 000 qui est en baisse, mais on sera à la fin de l'année
toujours 30 000 en bas du nombre de personnes au travail qu'on avait dans
l'industrie manufacturière il y a huit ans.
En terminant, M. le Président, je pose la question suivante au
ministre: Il y a 15 ou 16 secteurs manufacturiers sur 20 où nous avons
moins de monde au travail, pourquoi? Ce n'est certainement pas la faute des
Québécois. Ils sont les mêmes Québécois et
peut-être même plus compétents qu'ils ne l'étaient il
y a sept ans. Ce n'est pas la faute du fédéral. Le ministre le
sait très bien, le fédéral a versé pendant des
années des sommes énormes ici - peut-être pour les raisons
du référendum, si vous voulez - et le gouvernement a même
accusé le fédéral de trop dépenser ici. Mais c'est
sûr que ce que le gouvernement fédéral a fait ici, il l'a
fait partout au Canada. Que ce soit bien ou mauvais, je crois que personne ne
croira le ministre s'il commence ce matin à attaquer le gouvernement
fédéral.
(10 h 15)
Ce n'est pas la faute de la crise économique parce que nous avons
démontré que c'est un phénomène qui était
beaucoup plus important ici que dans le reste du Canada, notre part de l'emploi
manufacturier perdue. Et ce n'est pas dû à un accroissement de la
productivité parce que, d'après l'Institut national de
productivité lui-même, c'est indiqué partout que la
productivité au Québec augmente moins vite que dans le reste du
Canada.
M. le Président, en terminant, j'aimerais poser deux questions au
ministre. Qu'est-il arrivé et qu'entend-il faire?
Le Président (M. Beauséjour): La parole est
maintenant au ministre de l'Énergie et des Ressources.
M. Biron: Je voudrais seulement vous corriger, M. le
Président. Je n'ai pas eu de changement ministériel, je suis
encore ministre de l'Industrie et du Commerce.
Le Président (M. Beauséjour): D'accord.
Une voix: C'est une question de temps.
Réponse du ministre M. Rodrigue Biron
M. Biron: M. le Président, je suis heureux qu'on discute
du problème de l'investissement et de la création d'emplois au
Québec parce que c'est un problème majeur, qui nous
préoccupe grandement et qui préoccupera, au cours de nombreuses
années, beaucoup de Québécois et de
Québécoises; particulièrement la jeune
génération qui se demande comment s'orienter dans son choix de
carrière pour avoir le maximum de chances de pouvoir travailler chez
elle.
Bien sûr, on aimerait que tout le monde puisse travailler; comme
objectif, je pense que tout le monde est d'accord là-dessus, mais on a
aussi à vivre dans certaines conjonctures. On a eu à vivre la
crise économique, même si le député de
Notre-Dame-de-Grâce a dit: ce n'est pas la faute de la crise
économique, ce n'est pas la faute des taux d'intérêt si
ça n'a pas fonctionné, ce n'est pas la faute du
fédéral. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce,
vous êtes à peu près le seul à penser que ce n'est
pas la faute de la crise économique si on a connu des difficultés
au cours des dernières années. Les taux d'intérêt
ont tué littéralement les entreprises québécoises.
Si vous dites que ce n'est pas vrai, vous devriez voir la structure
financière des entreprises québécoises, leur gestion et
tout ça. On a beaucoup plus de PME que de grandes entreprises. Dans ce
sens, nos entreprises ont été beaucoup plus
ébranlées que les entreprises ontariennes, pour prendre un
exemple. Vous n'avez qu'à discuter avec les gens du Groupement
québécois d'entreprises, du Centre des dirigeants d'entreprises,
des chambres de commerce, eux au moins vont vous donner les informations
nécessaires que vous ne semblez pas avoir.
Vous dites que ce n'est pas la faute de l'ancien gouvernement
fédéral. Je pense que le procès a été fait
et que la population a jugé sévèrement un gouvernement qui
n'avait pas voulu faire l'effort nécessaire pour stimuler
l'économie. J'ai rencontré il y a quelques mois, un ancien
président de la Fédération libérale du Canada, qui
m'a dit que ça faisait quinze ans que le gouvernement
fédéral n'avait pas de direction économique. Ce n'est pas
un péquiste qui a dit ça, c'est un libéral canadien. Je
pense qu'il était grand temps que de ce côté-là, on
donne le coup de barre nécessaire; on l'a fait et j'en suis heureux.
La productivité a augmenté au Québec rapidement au
cours des dernières années. Il faudrait discuter de ces chiffres
avec le député de Notre-Dame-de-Grâce, au moins lui donner
les informations de base essentielles là-dessus.
Vis-à-vis de la création d'emplois, dans le secteur
manufacturier, il y a une chose qui s'appelle le virage technologique. On a des
exemples précis où on a investi des sommes d'argent
énormes non pas pour créer de nouveaux emplois, mais pour
protéger et garantir les emplois existants. Par exemple, on a
parlé il y a quelques mois d'un investissement de 1 000 000 000 $ au
Saguenay-Lac-Saint-Jean chez Alcan. Alcan a dit: On a investi 1 000 000 000 $.
On ne créera pas d'emplois additionnels, nous allons protéger les
emplois existants pour autant que le marché tienne. De ce
côté, il s'agit que nos entreprises deviennent de plus en plus
compétitives. Il ne faut pas craindre de temps à autre dans
certains secteurs d'activité ou dans certaines entreprises
particulières, bien sûr, d'assumer certaines pertes d'emplois si
on prend le virage technologique. Mais il faut le prendre, on n'a pas le choix;
sinon, nous disparaîtrons complètement du marché
mondial.
Lorsque le député de Notre-Dame-de-Grâce dit que
nous ne sommes pas compétitifs, comment cela se fait-il qu'on exporte
45% de nos produits manufacturiers? Comment cela se fait-il? Si on n'est pas
compétitifs, si on n'est pas bons, si on n'est pas capables de produire,
on n'exportera pas. Personne de l'extérieur n'achètera nos
produits, on sera plus cher que les autres. Si le Québec est un pays
exportateur, c'est qu'il y a des entreprises manufacturières qui
réussissent à avoir une certaine productivité suffisante
pour être compétitives avec
d'autres pays du monde.
Au Québec, en 1984 - le député veut parier de
création d'emplois - on a créé, durant les neuf premiers
mois de l'année, 87 900 emplois de plus qu'en 1983. C'est plus que ce
qui se fait ailleurs au Canada. La création nette d'emplois au
Québec après la crise économique... Bien sûr, si on
assume la crise économique, on a perdu des emplois comme tout le monde
et on le déplore. On a peut-être perdu plus qu'ailleurs parce que
la structure des entreprises n'était pas conforme aux folies des taux
d'intérêt élevés jusqu'à 20% ou 24%, mais on
est en train de regagner, et très rapidement, ces emplois. À
l'heure actuelle même, pour les neuf premiers mois de l'année, on
a un taux de 6,3% pour la création d'emplois manufacturiers, 33 200
nouveaux travailleurs dans le secteur manufacturier; alors que le Canada a un
taux de 4,5%, nous avons 6,3%.
Il faut reconnaître qu'un effort énorme a été
fait au Québec là-dessus. Cet effort, on va continuer à le
faire et on va continuer à créer non seulement des emplois avec
des subventions gouvernementales ou de l'aide gouvernementale, mais des emplois
qui vont demeurer longtemps. Il faut d'abord prendre ces emplois dans certains
secteurs de haute technologie, dans des secteurs de développement et,
aussi, en consolidant les secteurs traditionnels, tels que le textile, le
vêtement, la bonneterie, le meuble. Là-dessus, il y a des actions
précises qui ont été faites par le gouvernement du
Québec en conjonction avec l'entreprise manufacturière ou les
associations d'entreprises manufacturières. Je vous rappelle que le
centre de productivité du meuble, du vêtement, du textile et le
centre de promotion de la mode, cela a été demandé par les
entreprises manufacturières, pour aider ces gens à devenir encore
plus efficaces et. plus productifs.
Puisque le député de Notre-Dame-de-Grâce nous a
montré quelques tableaux, je voudrais aussi vous en faire voir
quelques-uns en particulier si on veut simplement se comparer avec une province
qui a été passablement industrialisée et aussi avec le
Canada. C'est le genre d'immobilisations dans les emplois de fabrication, dans
les emplois manufacturiers dont le député a parlé tout
à l'heure, qui pourrait faire en sorte qu'au cours des prochaines
années on puisse continuer à faire ce qu'on a fait au cours des
dernières années, c'est-à-dire créer plus d'emplois
au Québec que dans les autres provinces canadiennes. Les immobilisations
de fabrication, cela c'est dans le domaine manufacturier. C'est cela qui
crée des emplois à plus long terme, si on investit, si on a des
entreprises qui sont dynamiques et efficaces. En 1976 - la dernière
année du gouvernement du chef invisible, de l'homme invisible, M.
Bourassa - on avait, 20,7% des immobilisations de fabrication, des
investissements manufacturiers au Canada. En 1984, on a 31,4% des
investissements dans le domaine de la fabrication au Canada. Donc, on en a
repris considérablement; c'est une augmentation de 33%, comparativement
à ce qui existait à l'époque, soit la dernière
année du gouvernement de l'homme invisible, 1984, c'est la
dernière année qu'on a; donc, des augmentations
considérables. Cela veut dire qu'il y a des gens qui ont confiance dans
l'économie du Québec. À long terme, bien sûr, on va
créer des emplois dans le domaine manufacturier et aussi dans les
domaines tertiaires l'entourant. Si on veut avoir des entreprises artisanales,
c'est une autre affaire. Mais, étant donné que nous avons
décidé d'avoir des entreprises bonnes, efficaces et capables de
concurrencer, c'est sûr qu'il y aura des emplois dans le domaine
tertiaire.
On va comparer maintenant nos investissements avec ceux de la province
voisine, l'Ontario, qui est la province manufacturière par excellence,
le modèle de nos amis d'en face. En 1976, le Québec avait 37% des
investissements qui se faisaient en Ontario. En 1984, on a 71% des
investissements de fabrication qui se font en Ontario. Cela veut dire quoi?
Cela veut dire que les entreprises québécoises sont plus
dynamiques et que, maintenant, elles investissent davantage au Québec
qu'elles n'investissaient en 1976. Le climat économique est donc
meilleur en soi. On a des chances, à plus long terme, de pouvoir
créer des emplois permanents là-dessus.
Nos décisions ne se prennent pas sur un coin de table comme cela
s'est fait pour SIDBEC-Normines en particulier, à l'époque de
l'homme invisible où on a gaspillé 600 000 000 $ ou 700 000 000 $
appartenant aux citoyens québécois. Les décisions se
prennent avec des stratégies de développement. Des documents ont
été publiés, entre autres, "Bâtir le Québec",
"Le virage technologique", et c'est à partir de ces documents qu'on
réussit à organiser un plan d'ensemble de développement
économique. On a moins de très grandes entreprises, surtout dans
le domaine de l'automobile où, historiquement, le gouvernement canadien
a toujours privilégié l'Ontario. Bien sûr qu'il y a des
emplois là-dedans. On essaie de faire notre part et d'obtenir une grande
partie de ces nouveaux investissements. Qu'on songe que, dans les entreprises
manufacturières au Québec, en 1983, on a créé dans
l'ensemble de l'économie 64% des emplois au Canada et que, dans les
entreprises manufacturières en 1984, dans les premiers mois, on a
déjà 35% des emplois canadiens créés. Tout cela
veut dire qu'au Québec, à l'heure actuelle, depuis quelques
années, au sortir de la crise économique, une fois qu'on a
consolidé nos
entreprises, on réussit, dans le domaine de la fabrication de
l'industrie manufacturière, à créer, proportionnellement,
plus d'emplois que dans le reste du Canada.
Je pense qu'il faut dire bravo aux entreprises. Bien sûr, le
gouvernement du Québec a été actif là-dedans, mais
ce sont surtout les chefs d'entreprise qui ont confiance dans leur
capacité de réussir. Je voudrais que, du côté du
Parti libéral, au moins, on commence à rendre hommage aux chefs
d'entreprise du Québec.
Le Président (M. Beauséjour): M. le ministre, vous
avez terminé?
M. Biron: Oui.
Le Président (M. Beauséjour): D'accord. La parole
est au député de Laporte.
Argumentation M. André Bourbeau
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Les chiffres qu'a
rendus publics tout à l'heure mon collègue, le
député de Notre-Dame-de-Grâce, sont extrêmement
révélateurs. Le ministre vient de faire une tentative de
réplique en disant que la crise a frappé partout, au
Québec comme ailleurs. La vérité - on l'a vu sur les
tableaux de mon collègue - c'est que la part du Québec dans les
emplois créés ou perdus est plus grande. La part du Québec
dans le marché canadien a diminué depuis la crise. C'est donc
dire que, lorsque le ministre nous dit que la crise a frappé partout,
c'est vrai, mais au Québec on a perdu plus d'emplois et on a
récupéré moins d'emplois que dans le reste du Canada.
Donc, la performance du Québec est plus mauvaise que partout ailleurs au
Canada.
Un deuxième point. Le ministre nous parle aussi de la
création d'emplois au Québec cette année et l'an dernier.
Or, c'est une fumisterie. Le gouvernement ne crée pas d'emplois au
Québec présentement. Il récupère des emplois perdus
pendant la crise. Les chiffres sont très faciles à
considérer. Pensons que, depuis juillet 1981 et tout au long de la
crise, il s'est perdu 222 000 emplois au Québec et 219 000 en Ontario.
Donc, il s'est perdu à peu près le même nombre d'emplois.
Or, à ce jour, fin septembre 1984, d'après Statistique Canada, le
Québec a récupéré 184 000 des 222 000 emplois. Nous
avons donc récupéré 83% des emplois. 11 reste encore 38
000 emplois à récupérer avant de revenir à la
situation de juillet 1981. Donc, on ne crée pas d'emplois; on
récupère des emplois, alors qu'en Ontario on a
récupéré la totalité des emplois d'avant la crise
et on a même créé 29% plus d'emplois qu'avant la crise. De
219 000, on est passé à 282 000. C'est donc dire que l'Ontario,
contrairement à ce que dit le ministre, a fait beaucoup mieux que le
Québec. On ne récupère plus d'emplois en Ontario; on
crée de nouveaux emplois.
Justement, en parlant de création d'emplois, on sait que ce qui
crée le plus d'emplois au Québec et partout, d'ailleurs, ce ne
sont pas les grosses entreprises, mais les petites. Les petites entreprises,
d'après les études, créent la très grande
majorité des nouveaux emplois, surtout les petites entreprises qui sont
en forte croissance et très souvent de jeunes entreprises de moins de
cinq années d'existence.
Or, le rapport qui a été rendu public ces derniers mois
par la commission Saucier a bien cerné ce problème. Il nous a
appris que le problème majeur de ces petites entreprises
québécoises, c'est leur endettement et, bien sûr, le fait
qu'elles n'ont pas de fonds propres. Le rapport Saucier mentionne à ce
sujet un biais structurel important dans notre fiscalité. Le rapport
Saucier dit ceci: "Les placements admissibles pour les principaux
régimes d'impôts différés ou d'allégement
d'impôts, (régimes de pensions, REER, Régime
d'épargne-actions) excluent le capital-actions des
sociétés privées. Il s'agit d'un biais structurel majeur,
dont les conséquences s'accroissent parallèlement à la
popularité de ces modes d'épargne."
Il faut bien penser que nos petites entreprises
québécoises sont des sociétés privées.
À ce titre, elles n'ont pas accès à l'épargne
publique. On a beau dire que, pour se qualifier en vertu des REA, elles n'ont
qu'à faire appel à l'épargne publique, on sait fort bien
que ce n'est pas possible pour une petite entreprise de faire appel à
l'épargne publique, surtout quand il s'agit de capitalisation, d'obtenir
du capital d'environ 200 000 $, 300 000 $ ou en bas de 500 000 $. Il n'y a pas
de marché actuellement pour ces petites entreprises.
Le rapport Saucier nous dit également: "La présence de ces
régimes et abris fiscaux influe donc grandement sur l'allocation de
l'épargne individuelle. Si ce biais n'est pas modifié, les
placements non admissibles se verront structurellement
désavantagés et, à long terme, l'impact pourra être
majeur." Je pense que le cri d'alarme que lance la commission Saucier est
important. La commission Saucier a proposé des remèdes
précis. Par exemple, un régime enregistré de placement
dans leur entreprise pour les dirigeants des PME et leurs employés, des
sociétés d'expansion pour les petites entreprises. Une autre
recommandation du rapport: l'abolition des droits successoraux,
recommandée par le rapport Saucier, au moins pour les commerces
eux-mêmes. J'aimerais demander au ministre ce qu'il entend faire pour
venir en aide, justement,
aux petites entreprises de façon concrète pour les aider
à mieux se capitaliser, à avoir une plus grande part de fonds
propres. (10 h 30)
En fin de semaine dernière avait lieu -et je termine
là-dessus - dans le cadre de la semaine des petites entreprises, un
panel justement par les membres de la commission Saucier et d'autres
intervenants du milieu. À la fin du panel, le président Fillion,
du Groupement québécois d'entreprises, dont parlait le ministre
tout à l'heure, a lancé un appel au gouvernement en disant: "Les
entrepreneurs qui sont les créateurs d'emplois demandent de l'action et
des gestes concrets." La question que je pose au ministre: Quels gestes
concrets allez-vous poser à la suite des recommandations du rapport
Saucier?
Le Président (M. Beauséjour): Je donne la parole au
ministre de l'Industrie et du Commerce.
M. Rodrigue Biron
M. Biron: Je suis un peu surpris de l'intervention du
député de Laporte. Je ne dis pas, comme le ministre des Finances
l'a dit hier, que le député de Laporte est complètement
ignorant de ce qui se passe dans le monde économique, mais il y a des
choses, je pense, dont il faudrait informer le député de Laporte.
Qu'est-ce qu'on fait? Il n'y a jamais eu un gouvernement qui a fait autant au
Québec pour les PME. Il n'y a même pas un gouvernement canadien
qui ait fait autant pour les PME. Je suis un peu surpris de vous entendre
intervenir en faveur des PME puisque, lorsque votre collègue - le
document de votre parti, le Parti libéral -M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, a pondu un document d'une soixantaine de pages
dernièrement, il n'a pas parlé une fois des PME là-dedans.
Le Parti libéral n'a pas encore découvert que les PME, c'est
important. Pas une fois dans le document d'orientation du Parti libéral
on ne parle des PME, alors qu'ici, au gouvernement du Québec, on s'est
occupé activement au cours des dernières années des
PME.
Vous voulez savoir ce qui s'est passé au niveau des PME? Demandez
à de nombreuses petites ou moyennes entreprises, aux dirigeants de ces
entreprises, ce qu'on a fait pour les aider à mieux se capitaliser au
cours des dernières années, que ce soit avec le plan d'urgence ou
avec le plan de relance. Incidemment, quant au plan de relance, vous avez fait
des gorges chaudes. L'an passé, le premier ministre a annoncé 2
000 000 000 $ que nous pourrions générer en nouveaux
investissements ou en développements additionnels au niveau des PME
manufacturières avec le plan de relance dans l'espace de 27 mois, soit
de décembre à mars 1986. Après dix mois de fonctionnement
du plan de relance, j'annonce, aujourd'hui, qu'on a déjà 1 000
000 000 $ de nouveaux investissements ou de développements
économiques atteints directement à cause du plan de relance dans
ce qui avait été annoncé par le premier ministre, 2 000
000 000 $. Cela nous fait penser qu'à la fin des 27 mois de
fonctionnement non seulement les 2 000 000 000 $ de nouveaux investissements au
niveau des PME seront atteints, mais qu'on pourra peut-être même
dépasser les 2 500 000 000 $. Alors, ce sera un succès complet du
côté du plan de relance.
Au sujet des actions précises pour les PME, je voudrais me
référer au Conseil des sciences du Canada. Vous allez croire
cela. Le Conseil des sciences du Canada, dans un document qu'il a publié
il y a quelques mois, disait: C'est le Québec qui, parmi toutes les
provinces canadiennes, a élaboré la stratégie industrielle
la plus complète. C'est aussi dans cette province que les
autorités ont mené l'analyse officielle la plus claire des
problèmes qu'elle présente et de ses perspectives. Ce qui est
encore le plus important, disait le document, c'est que la déclaration
du gouvernement québécois contient une politique valable pour la
création de nouvelles industries. Elle met l'accent sur les trois
principaux domaines: les retombées industrielles des grands projets,
l'aide financière et technique aux services de pointe et les programmes
d'assistance préférentielle aux entreprises électroniques
et biotechnologiques.
M. le Président, je pense que, lorsqu'un organisme aussi
crédible que le Conseil des sciences du Canada dit que c'est le
Québec qui, parmi toutes les provinces canadiennes, a
élaboré la meilleure stratégie industrielle, la
stratégie industrielle la plus complète, il faut dire qu'il y a
des choses qui sont faites ici.
Au sujet du rapport Saucier, je rappelle aussi au député
de Laporte que cette commission a été formée par le
gouvernement du Québec, à mon instigation. Les commissaires de la
commission Saucier n'ont pas été, comme les commissaires de la
commission fédérale Macdonald, payés 800 $ par jour ou
quelque chose comme cela. Ils ont travaillé bénévolement
et cela n'a pas pris des années à pondre leur rapport, cela a
pris trois mois exactement. On a eu un rapport clair, net et précis sur
des actions ou des orientations qu'on devait prendre pour aider davantage les
PME québécoises. C'est exactement ce qu'on est en train de faire.
Bien sûr, il faut trouver le moyen fiscal pour répondre aux
besoins de ces entreprises.
Vous nous avez parlé du régime d'épargne et de
placement dans son entreprise ou des sociétés de placement dans
les entreprises. C'est sûr qu'on a bien
l'intention de réaliser des choses, mais c'est une question de
fiscalité. Il faut réussir à amarrer tout cela avec le
Régime d'épargne-actions. Mais comment allez-vous faire pour
défendre ces SEPE ou ces REPSE, ces investissements dans son entreprise
avec le Régime d'épargne-actions, lorsque votre chef, l'homme
invisible, dit: Il faut enlever le Régime d'épargne-actions? Je
me demande si vous êtes vraiment logiques. Vous devriez au moins essayer
de le retrouver. Je ne sais pas si vous pouvez lui parler au
téléphone. Je sais que vous ne pouvez pas le voir plus que nous,
mais, au moins vous devriez essayer de lui parler au téléphone,
lui écrire une lettre et lui dire: Est-ce qu'on est pour ou contre le
Régime d'épargne-actions? S'il dit qu'il est contre, vous ne
pouvez pas aider les PME avec ces programmes préconisés par la
commission Saucier. Eux, ils veulent se servir du Régime
d'épargne-actions québécois adapté aux PME, alors
que votre chef dit: Non, il faut l'enlever, il ne faut pas aider les PME.
Je crois qu'il faut d'abord que le Parti libéral du Québec
se pose des questions: Est-ce que, oui ou non, vous voulez aider les PME? Si
oui, dites-nous pourquoi dans le document du député de
Notre-Dame-de-Grâce vous n'avez même pas mentionné le cas
des PME? Pas une fois les PME n'ont été mentionnées. Pour
vous, cela n'existe pas.
Une deuxième chose: Voulez-vous, oui ou non, le Régime
d'épargne-actions? Si c'est oui, vous allez nous aider à
continuer à l'élargir pour les PME. Si c'est non, comme le dit
votre chef, l'homme invisible, essayez de vous orienter de façon
à avoir un peu de cohérence dans les interventions que vous allez
faire. Quant à nous du gouvernement du Québec, nous allons
continuer à aider le financement des PME québécoises,
comme nous l'avons fait avec le plan d'urgence ou le plan de relance.
Le Président (M. Beauséjour): Merci. La parole est
au député de Châteauguay.
M. Roland Dussault
M. Dussaull: Merci, M. le Président. En commençant
mon intervention, je voudrais lire quelques extraits d'une lettre
envoyée par un chef d'entreprise au ministre, M. Biron. Il commence en
disant: "Il y eut un temps où les PME étaient d'obscures
entités, éparpillées ici et là sur le territoire du
Québec. Chacune se débrouillait comme elle le pouvait, souvent
affublée de qualificatifs amers et négatifs." Plus loin, il dit:
"Votre gouvernement et en particulier le ministère que vous pilotez
admirablement bien, a réussi, où d'autres ont malheureusement
failli, soit à recréer un environnement sécurisant avec un
encadrement à vouloir favoriser notre épanouissement plutôt
que de nous amener à suivre des directives astreignantes." Le chef
d'entreprise donne les moyens qu'on a mis à sa disposition et il ajoute:
"Grâce à l'ensemble de tout ce qui précède, mon
entreprise et, auparavant, celle de mes parents a pu conserver 30 emplois
fortement menacés durant la crise. Maintenant des meilleurs jours sont
revenus. Nous sommes positifs et prêts à un nouvel élan
pour réussir et grandir."
M. le Président, je pourrais donner beaucoup d'autres extraits
qui démontrent l'intérêt des chefs d'entreprise. C'est une
lettre éloquente. On en a, d'ailleurs, plusieurs autres du même
genre, qui démontrent comme l'intérêt des chefs de petite
et moyenne entreprise, pour l'aide qu'on peut leur apporter, est significatif.
C'est compréhensible, puisque le secteur de la PME est celui qui,
à toutes fins utiles, comporte le plus de potentiel pour la
création d'emplois.
J'ai les chiffres de l'industrie manufacturière au Québec,
en 1981, sur le nombre d'employés salariés. En fait, il y avait,
pour la PME de 4 à 199 employés, 10 436 établissements et
cela représentait 249 102 salariés, alors que, dans la grande
entreprise, il y en avait 479, comparativement à 10 436, et le nombre
des salariés était de 276 741. Cela veut dire que la
création d'emplois dans la petite et moyenne entreprise est très
importante.
Ce matin, j'entends les gens de l'Opposition nous parler de la petite et
moyenne entreprise et, curieusement, alors qu'ils essaient de faire un focus
sur cette question-là ce matin, que voit-on, entre autres, dans leur
document "Stratégie économique pour un gouvernement
libéral" qui, à mon point de vue, devrait être
considéré comme un programme, pour le moment, parce que c'est
tout ce qu'il y a comme véritable programme du Parti libéral,
présentement? On sait qu'il y a un congrès qui s'en vient et ils
disent qu'ils sont prêts. En réalité, ils ne sont pas
prêts du tout. Mais il y a cela. Dans ce document comme le disait le
ministre tout à l'heure, il n'est pas du tout question de la petite et
moyenne entreprise. L'expression PME n'apparaît nulle part dans ce
document. Donc, c'est dire que cela n'est pas très important pour eux.
Ce n'est pas tout.
Non seulement il n'est pas question de petite et moyenne entreprise dans
ce document, mais on ravale au second rang l'exploitation des ressources
naturelles - c'est grave - et l'agriculture du Québec. On sait que ce
sont des secteurs où il y a un potentiel considérable sur le plan
de la création d'emplois. On met de côté les aspirations du
Québec à sa juste part de l'industrie canadienne de l'automobile.
Ils disent: C'est l'Ontario. On renonce à cela, nous les
Québécois, même s'il y a là un
potentiel extraordinaire. Cette espèce de programme de
stratégie économique c'est dans le document de M. Scowen. Quand
on dit qu'on a un programme de stratégie économique, cela
signifie qu'on dit où on irait; sinon, c'est un document qui ne veut
rien dire.
M. le Président, dans ce document-là, on ravale toutes nos
aspirations du côté de la sidérurgie. Ce n'est pas
étonnant qu'on nous ait reproché d'avoir aidé
Pétromont à rester sur pied, en y mettant un effort plus grand
que le gouvernement fédéral. On nous a reproché cela, ici,
à l'Assemblée nationale. Ce n'est pas étonnant, c'est dans
la logique de ce parti. On voit cela dans ce document.
Nulle part il n'est question de PME dans cette feuille de route du Parti
libéral préparée par M. Scowen, lequel, il ne faut pas
l'oublier, est censé être le penseur no 1 du Parti libéral
parmi les parlementaires de cette formation à l'Assemblée
nationale. Alors, c'est très significatif.
Avant qu'on fasse quelque reproche que ce soit au gouvernement
relativement à ses performances... Entre 1976 et 1983, il ne faut jamais
oublier une chose, c'est qu'il y a eu une crise. Ce n'est pas le gouvernement
du Parti libéral, celui qui nous a précédés, qui a
connu cette crise; c'est nous qui l'avons connue. On ne l'a pas
inventée, elle nous est venue d'ailleurs, mais on l'a vécue et on
essaie de s'en sortir le mieux possible. Le ministre, tout à l'heure, a
bien démontré comment les résultats ont été
étonnants. Dans les neuf premiers mois, en 1983-1984, 64% de la
création d'emplois du Canada s'est faite au Québec. Ce n'est pas
compliqué, c'est deux sur trois. C'est extraordinaire, mais il ne faut
pas s'arrêter là.
Mais j'aimerais bien comprendre la logique du Parti libéral. Ce
document, d'après moi, c'est capital. Si on ne peut pas saisir la
portée des orientations du Parti libéral, je vais prendre avec un
gros grain de sel tout ce que ces gens vont nous dire ce matin sur la
création d'emplois qui nous concerne. Quand on parle de quelque chose,
il faut savoir quelles sont les assises, quelles sont nos orientations pour
bien saisir. On les connaît, c'est là-dedans.
Qu'on nous explique si...
Le Président (M. Beauséjour): M. le
député de Châteauguay, votre temps est
écoulé.
M. Dussault: Je termine là-dessus, M. le Président.
Qu'on nous explique si on a l'intention - à partir de ce document, c'est
clair - dorénavant, au Parti libéral, de laisser tomber la petite
et moyenne entreprise qui a un potentiel extraordinaire de création
d'emplois.
Le Président (M. Beauséjour): Merci. La parole est
au député de Saguenay. M. Ghislain Maltais
M. Maltais: Merci, M. le Président. Je pense que beaucoup
de personnes de l'autre côté n'ont pas compris l'interpellation de
ce matin. On n'est pas ici pour faire le procès du Parti libéral,
ce n'est pas lui qui administre présentement. Après avoir entendu
le ministre tout à l'heure, avec ses chiffres éloquents, on
s'aperçoit qu'il reste à peine un petit million de chômeurs
et d'assistés sociaux au Québec. Il a tellement
créé d'emplois depuis 1976 qu'il en reste à peine un petit
million. Ce n'est pas beaucoup, vous allez me dire, c'est un
Québécois ou une Québécoise sur six qui ne
travaille pas et qui n'a pas d'espoir de travailler, non plus.
Tout à l'heure, il parlait de ces grandes décisions
stratégiques qui ne sont pas prises sur le coin des pupitres. J'aimerais
que le ministre nous explique quelle est l'ambition qu'il donne à nos
diplômés de cégeps et d'universités et à nos
jeunes compétents. La seule ambition qu'il leur donne, ce sont des
travaux communautaires à ramasser de vieux pneus le long du
Saint-Laurent. C'est ça, le programme de relance du premier ministre.
Pensez-vous que les jeunes Québécois et les jeunes
Québécoises vont accepter ça? Êtes-vous
tombés sur la tête? Ce n'est pas ainsi que ça fonctionne au
Québec, ce ne sont pas des emplois!
Je parlerai d'un domaine à cause duquel le député
de Duplessis n'a pas osé venir ici, ce matin; il a eu honte de son
gouvernement, et je lui donne raison. Il s'agit du domaine minier. Tout
à l'heure, vous avez parlé de notre chef invisible. À
l'époque où Robert Bourassa était premier ministre du
Québec, il venait sur la Côte-Nord avec des ciseaux pour couper
les rubans pour l'ouverture des usines et des villes. Depuis 1976, le Parti
québécois vient avec des clés pour fermer les villes, et
vous allez me faire croire que vous avez créé des emplois sur la
Côte-Nord? Quelle sorte de statistiques avez-vous là?
M. le Président, je pense que ce n'est pas sérieux de
tromper ainsi une population. Je ne vous en veux pas comme personne. Au
contraire, vous êtes un excellent citoyen québécois, mais
comme ministre de l'Industrie et du Commerce, vous êtes persona non grata
sur la Côte-Nord, M. le ministre. Chaque fois que vous venez, c'est pour
fermer une ville. Il faut être plus sérieux que ça. Et vous
venez dire, ici, que vous créez des emplois! Dites-moi donc comment vous
allez récupérer les emplois de Schefferville et de Gagnon sur la
Côte-Nord? Quelle alternative avez-vous à ça? Allez-vous
les transférer dans les mines d'amiante à Asbestos, dans la
Société nationale de l'amiante, l'orgueil du Parti
québécois? Vous
allez transférer nos 2000 ou 3000 mineurs là? Ce n'est pas
vrai, vous êtes en train de la fermer aussi.
Ce qui m'intéresse, ce n'est pas d'avoir des statistiques et des
chiffres; c'est de savoir comment les gens de la Côte-Nord, comment les
gens des villes nordiques vont subsister maintenant que vous avez fermé
leurs mines. Vous avez parlé du désastre de 51DBEC-Normines; je
suis d'accord avec vous, mais vous ne l'avez pas su hier après-midi, par
exemple; ça fait quatre ou cinq ans que vous le savez. Quand on n'est
même pas capable de planifier une fermeture de ville, comment voulez-vous
en ouvrir de nouvelles? C'est ça que les gens de la Côte-Nord
n'acceptent pas dans le domaine minier.
Le Président (M. Beauséjour): M. le
député de Saguenay.
M. Maltais: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Beauséjour): Adressez-vous au
président, s'il vous plaît!
M. Maltais: Oui, M. le Président, je vais m'adresser
à vous. Je m'excuse, M. le ministre, je vais m'adresser au
président. (10 h 45)
M. le Président, lorsqu'on regarde tous ces emplois perdus... Je
vais vous donner un exemple bien concret. En 1976, à peine arrivé
au gouvernement, le Parti québécois a été une des
causes de la fermeture de Rayonier, à Port-Cartier. Depuis 1976 et
surtout à chaque campagne électorale, il nous ramène cela
dans le décor, alors qu'on sait très bien que le ministre M.
Bérubé, député de Matane, travaille pour avoir une
papeterie et que tous les experts ont dit qu'il n'y avait pas de place pour
deux dans l'Est du Québec. Alors qu'on conte des chansons à notre
ami, le député de Duplessis, qu'on l'amuse en lui donnant un
mandat a REXFOR d'essayer de regarder ce qu'il peut faire avec cela, le
ministre et député de Matane se rit du député de
Duplessis en disant: S'il y a un investissement dans le domaine papetier, il se
fera à Matane. Vous le savez très bien, vous êtes au
Conseil des ministres. C'est cela qui se passe.
Le député de Duplessis, à un moment donné, a
été le plus grand accusateur du Parti québécois,
beaucoup plus que les libéraux. Vous le savez! Dans un article du 17
octobre, il a nommé les ministres qui n'avaient pas tenu leurs
promesses, les ministres qui n'avaient pas fait leur travail. Et vous allez me
faire accroire que, dans toute cette prospérité que vous
annoncez, il y a de la place pour les gens de la Côte-Nord! C'est
utopique, M. le ministre. Il faut être plus réaliste que cela.
C'est très utopique.
M. le Président, je termine sur ceci.
Ce n'est pas en disant qu'on fait mieux qu'ailleurs qu'on règle
nos problèmes. Je dirais tout simplement: Redonnez-nous les emplois que
vous nous avez enlevés sur la Côte-Nord et on sera heureux. Merci,
M. le Président.
Le Président (M. Beauséjour): Merci. La parole est
maintenant au ministre de l'Industrie et du Commerce.
M. Rodrigue Biron
M. Biron: Je suis un peu estomaqué de voir que du
côté de l'Opposition personne ne connaît quoi que ce soit
à l'économie ou n'a lu, au moins, des journaux économiques
tels que Les affaires, Finance ou les pages économiques des quotidiens.
Si le député de Saguenay avait lu cela, il saurait tout de suite
les raisons de la fermeture de Port-Cartier ce n'est certainement pas dû
au gouvernement du Québec. Vous savez vous-même la qualité
du produit là-bas, les problèmes de gestion qu'ITT a eus. C'est
une grande multinationale, parmi vos amis probablement, parce vous n'aidez pas
les PME; vous voulez aider simplement les multinationales. Qu'est-ce que cette
construction a donné à votre ancien chef, directement ou
indirectement, pour son parti? Je ne le sais pas. Mais Rayonier a perdu de
l'argent et a décidé de fermer.
Quant à Gagnon - on va en parler un peu - Fermont, Port-Cartier
et SIDBEC-Normines, si le gouvernement du Québec n'avait pas agi, c'est
non seulement Gagnon, mais c'est Fermont et Port-Cartier qui seraient
fermés complètement. Vous le savez! L'année
dernière, la compagnie British Steel a décidé de ne plus
acheter de minerai de fer du Québec parce que nos prix n'étaient
pas compétitifs. Il fallait absolument que nous trouvions une autre
façon de fournir du minerai et des boulettes de fer à un prix
compétitif. La production complète de Gagnon est maintenant
transférée à Fermont, 3 000 000 de tonnes de plus. L'an
prochain -je vais vous faire une prévision - au lieu de produire sur la
Côte-Nord 10 000 000 ou 12 000 000 de tonnes comme on l'a fait cette
année, on produira 12 000 000 ou 14 000 000 de tonnes, 3 000 000 de
tonnes de plus l'an prochain en minerai de fer. Pourquoi? À cause de
l'action du gouvernement du Québec et des compagnies minières qui
ont rationalisé l'industrie.
Ce n'est pas ma faute à moi si, en 1974-1975, sur un coin de
table, Robert Bourassa, votre chef, l'homme invisible, qui ne connaît
rien à l'économie non plus, a signé des documents qui
pénalisaient le Québec, ce qui nous a coûté
jusqu'à maintenant environ 600 000 000 $. Cela aurait été
bien mieux de les investir autrement, de les investir dans des PME
québécoises plutôt que de tirer dans un trou de mine
600 000 000 $; vous le savez bien. Cela a été une autre parmi les
grandes erreurs de Robert Bourassa.
Vous me parlez aussi de développer les richesses naturelles. IL
faudrait vous caser. Lisez au moins le document de votre collègue, le
document de votre parti. Votre collègue, le député de
Notre-Dame-de-Grâce, dit dans son document - il faudrait que vous
expliquiez à la population ce que vous voulez. "Ce n'est pas dans
l'exploitation et les ventes de nos richesses naturelles que nous allons
créer des emplois nombreux et stables." Il est contre cela, lui,
l'exploitation et la vente de nos richesses naturelles. Il est de votre parti.
Il faudrait au moins que vous vous parliez. Je comprends que votre chef
invisible ne dit pas tout à fait la même chose, mais, pour nous,
il est important de développer et de vendre nos richesses naturelles au
maximum.
Qu'a-t-on fait au cours des dernières années avec
l'électricité? Au lieu de vendre de l'électricité
comme cela, brute, aux Américains, on en a vendu un peu, bien sûr,
mais on a conservé la plus grande partie pour développer des
entreprises au Québec. Dans votre comté, Reynolds commence la
semaine prochaine sa première ligne de production de la nouvelle
aluminerie d'au-delà de 500 000 000 $, en exploitant une richesse
naturelle du Québec: l'électricité. C'est à cause
d'une politique gouvernementale québécoise qu'on créera
plus d'emplois dans votre comté, à Baie-Comeau. Vous devriez vous
lever et être assez honnête pour au moins dire au
gouvernement...
M. Maltais: Combien d'emplois?
M. Biron: ...du Québec: Vous aviez une bonne politique.
Vis-à-vis des investissements, M. le Président...
Le Président (M. Beauséjour): À l'ordre! M.
le ministre! M. le député de Saguenay et M. le ministre,
actuellement, vous vous parlez entre vous et, selon le règlement, vous
devez vous adresser au président. Même pour le
député de Saguenay, tantôt; si vous reprenez la parole, je
vais vous rappeler à l'ordre chaque fois si vous ne vous adressez pas au
président la prochaine fois. Je demanderais de poursuivre en s'adressant
au président.
M. Biron: Le message au député de Saguenay, c'est
que, si Pechiney s'est établi à Bécancour, c'est à
cause de la politique du gouvernement du Parti québécois
d'exploiter nos richesses naturelles au Québec, alors que son parti, le
Parti libéral, dit, par la voix du député de
Notre-Dame-de-Grâce dans son document - il faudrait nous expliquer cela -
"Ce n'est pas dans l'exploitation et la vente de nos richesses naturelles que
nous allons créer des emplois nombreux et rentables." C'est ce que dit
votre parti.
M. le Président, vous devriez demander au député de
Saguenay et au député de Notre-Dame-de-Grâce de nous
expliquer pourquoi à l'heure actuelle on a une étude de
faisabilité pour une aluminerie sur la Côte-Nord et qu'on est en
train de négocier une deuxième étude de faisabilité
pour une deuxième aluminerie parce que le gouvernement du Québec
a décidé d'exploiter à fond nos richesses naturelles et de
créer des emplois au Québec pour des Québécois et
des Québécoises à même nos richesses naturelles.
À l'endroit des jeunes chez vous, vous dites: Qu'est-ce qu'ils
veulent? Qu'est-ce qu'ils vont faire? On a un fonds d'aide aux jeunes
entrepreneurs qu'on est en train de développer avec les programmes qui
existent au MIC: UNI-PME, outils de gestion, bourses d'affaires, les jeunes
coopératives de travailleurs. Au cours des dernières
années on a formé plusieurs chefs de nouvelles entreprises. Les
bourses d'affaires, jusqu'à maintenant, on a au-delà de 700
emplois créés par de jeunes diplômés universitaires.
Voulez-vous poser des questions? C'est la première fois que cela existe
au Canada, un tel programme. Le gouvernement fédéral, tous les
partis politiques au niveau du fédéral, les gouvernements des
autres provinces canadiennes viennent nous voir pour dire: Comment cela
fonctionne, votre affaire de bourses d'affaires et de fonds d'aide aux jeunes
entrepreneurs? Comment vous faites pour intégrer les jeunes
diplômés universitaires qui veulent partir en affaires, être
leur propre patron, être indépendants dans leurs affaires
personnelles, dans leurs entreprises personnelles? Vous devriez lire ce qui se
passe. M. le Président, vous devriez informer le député de
Saguenay de ce qui se passe et lui demander d'informer son collègue de
Notre-Dame-de-Grâce et de nous dire véritablement si, oui ou non,
ces gens veulent exploiter nos richesses naturelles pour créer des
emplois au Québec.
Le Président (M. Beauséjour): La parole est au
député de Chauveau.
M. Raymond Brouillet
M. Brouillet: M. le Président, j'aimerais revenir quelque
peu sur le tableau que nous a présenté le député de
Notre-Dame-de-Grâce au début de cette interpellation alors qu'il a
fait un peu le bilan des emplois dans le secteur manufacturier.
Disons que, au point de départ, nous reconnaissons que dans le
secteur manufacturier, à l'occasion de la crise économique, il y
a eu des pertes d'emplois
considérables; cela est reconnu par tout le monde, c'est un fait
dont certains ont eu à souffrir. Maintenant, nous savons aussi c'est un
fait reconnu par tous ceux qui s'ouvrent les yeux et qui veulent voir les faits
sans partisanerie - que depuis la reprise économique, dans le domaine
manufacturier, il y a eu un essor considérable et que les
investissements dans ce domaine, depuis deux ans, sont considérablement
plus hauts au Québec que dans le reste du Canada. On peut s'appuyer sur
Statistique Canada pour le dire, ce sont les faits.
Dans votre liste - je veux revenir, cependant, sur un point - vous avez
fait mention d'une série d'industries traditionnelles qu'on appelle les
secteurs mous. Et vous constatez que sur cela, depuis 1977, il y a eu un
certain nombre de pertes d'emplois dans la chaussure, dans le vêtement.
Ce qui est assez paradoxal, c'est que, dans votre document qui se veut
être la stratégie du Parti libéral, vous reprochez au
gouvernement d'avoir soutenu les secteurs traditionnels. On va vous en
énumérer une série tantôt.
Vous mettez en doute l'investissement dans certains secteurs, à
savoir les secteurs qui n'ont peut-être pas beaucoup d'avenir. Alors, la
question que je vous pose, M. le Président, est la suivante: Que
serait-il advenu des emplois qui existent encore dans le domaine des secteurs
traditionnels, par exemple, la chaussure - et je pense aux travailleurs de mon
comté - si le gouvernement n'était pas intervenu dans ce secteur
pour permettre à ces industries de conserver une part du marché?
Vous savez que ces secteurs étaient fortement menacés par
l'entrée des produits étrangers et n'eussent été
les pressions du gouvernement, avec l'appui qu'il a accordé aux
travailleurs, pour amener le gouvernement fédéral à
maintenir les quotas, cette industrie n'existerait à peu près pas
aujourd'hui. Il faut quand même, quand on analyse des situations,
être capable d'étudier le contexte et voir ce qui se serait
passé si le gouvernement n'avait pas apporté son appui à
ces secteurs.
Vous avez beaucoup parlé des difficultés pour les
entreprises du Québec de se développer à cause du
régime fiscal. Je reviens sur des témoignages qui n'appartiennent
pas du tout aux membres du Parti québécois, mais qui viennent des
gens du monde des affaires. Je fais allusion au témoignage de M. Pierre
Lortie, le jeune président de la Bourse de Montréal, qui dit ceci
en toutes lettres - je crois que c'est très important d'être
attentif et d'écouter ce que dit M. Pierre Lortie - "Québec
offre, et de loin, le meilleur environnement sur le plan fiscal pour le
financement des entreprises." Il faut reconnaître cela et ce n'est pas
pour rien que nous constatons, aujourd'hui, que le taux d'accroissement des
investissements au Québec, pour 1983-1984, va être
supérieur à l'ensemble des investissements dans le reste du
Canada.
J'aimerais aussi aborder la question de la stratégie de
développement du gouvernement. On me fait signe qu'il me reste seulement
30 secondes. Je crois qu'étant donné cela...
Une voix: C'est suffisant.
Le Président (M. Beauséjour): À l'ordre,
s'il vous plaît!
M. Brouillet: ...je vais réserver pour tantôt mon
intervention concernant les critiques qu'on a faites sur la stratégie du
gouvernement.
Le Président (M. Beauséjour): Merci, M. le
député de Chauveau. Je vous rappelle de vous adresser au
président. Cela semble difficile. Vous pouvez me dire beaucoup de
choses, vous savez, cela me fera plaisir. Je donne la parole au
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Reed Scowen
M. Scowen: Merci, M. le Président. Je m'excuse de rire,
mais, quand le député qui m'a précédé a dit
qu'il avait l'intention d'exposer la politique économique du
gouvernement en 30 secondes, je croyais que c'était probablement
possible de le faire et cela a fait rire tout le monde.
Je remercie le ministre d'avoir fait allusion au document que j'ai
écrit. Il est, semble-t-il, le quatrième ministre à
vocation économique qui indique qu'il a lu mon document avec beaucoup
d'intérêt. Parce que cela semble attirer l'attention de tout le
monde, je vais consacrer une grande partie des dix dernières minutes de
cette interpellation à faire un peu de publicité pour ce
document. Je trouve que là-dedans vous allez découvrir un paquet
de solutions aux problèmes qu'on a essayé d'aborder
aujourd'hui.
J'aimerais, dans les cinq minutes qui me sont accordées, essayer
de ramener le débat sur la question que nous avons posée ce
matin, à savoir examiner les pertes d'emplois, secteur par secteur,
comprendre ce qui s'est passé et ce qu'on peut faire pour régler
le problème.
Une mise au point que je veux faire tout de suite concerne
l'investissement. Quant à moi, un des grands problèmes que nous
récoltons aujourd'hui dans le domaine de la faiblesse d'emplois, c'est
la faiblesse des investissements manufacturiers au Québec depuis 1976.
Le ministre et son collègue ont dit, à l'aide de tableaux, que
cette année les investissements manufacturiers sont forts.
Moi, j'ai un tableau à vous montrer qui démontre
l'évolution de cette affaire et qui va mettre votre tableau dans une
juste perspective.
Voici un tableau où vous voyez les investissements manufacturiers
canadiens en pourcentage du produit intérieur brut, parce qu'il faut les
normaliser chaque année pour tenir compte de l'inflation. La ligne rouge
souligne les investissements canadiens et la ligne bleue, les investissements
québécois. Ici, vous avez l'année 1976, l'année de
l'arrivée au pouvoir du Parti québécois. Pssch! C'est ce
qui s'est produit après l'arrivée au pouvoir du Parti
québécois. La seule chose qu'on peut dire - c'est
l'élément qui explique le tableau du ministre - c'est que, cette
année, il y a un nivellement; la chute s'est arrêtée au
Québec et la diminution qui a commencé en 1981 au Canada a
continué. (11 heures)
Cette augmentation que vous voyez dans son tableau c'est à cause
de ce nivellement ici accompagné par la descente canadienne qui
continue. Mais l'important, c'est cet écart énorme. Pendant huit
ans il y a eu une chute dans les investissements au Québec et ceux du
Canada ont augmenté. Aujourd'hui, la faiblesse de l'emploi, qu'on
constate quant à moi, c'est en grande partie à cause de cet
écart épouvantable qu'on vivait depuis 1976 à 1981.
J'aimerais que le ministre revienne à quelques questions qui sont
très intéressantes, qui se posent dans ces chiffres que nous
avons développés.
Par exemple, dans le domaine du vêtement, on a parlé des
difficultés de cette industrie, on a perdu 7000 emplois. Comment se
fait-il que nous ayons quand même vu les autres régions du Canada
augmenter le nombre d'emplois dans ce domaine? Il y avait, semble-t-il, un
mouvement dans l'industrie du vêtement du Québec comparativement
aux autres provinces. Par contre, comment se fait-il que dans le domaine du
bois nous avons réussi non seulement à augmenter les emplois,
mais à augmenter légèrement notre part du marché
canadien? Comment se fait-il que dans le domaine de l'industrie du papier nous
ayons perdu, avec toute la modernisation qu'on a faite, 8000 emplois? Comment
se fait-il que dans le domaine des équipements de transport, où
on parle souvent de Bombardier, on a quand même perdu 4000 emplois depuis
que vous êtes arrivés au pouvoir? 4000 emplois.
Comment se fait-il, en terminant, que dans les secteurs de pointe,
l'électrique, l'électronique, le chimique, le pharmaceutique et
le plastique, dans tous ces domaines de pointe, nous ayons non seulement perdu
des emplois dans chacun des secteurs depuis 1976, mais nous avons aussi
accusé des pertes importantes de notre part des emplois canadiens dans
ce domaine? C'est le genre de questions que je veux aborder ce matin avec le
ministre plutôt que de l'écouter parler de Robert Bourassa et du
gouvernement fédéral. Merci.
Le Président (M. Beauséjour): Merci. La parole est
maintenant au ministre.
M. Rodrigue Biron
M. Biron: On note qu'en plus de l'absence de son chef le
député de Notre-Dame-de-Grâce ne veut même pas en
parler. Cela va commencer à faire une absence non seulement physique, il
y a déjà une absence mentale, mais il y a un grand vide de ce
côté.
Je vous parle, M. le Président. Le député de
Notre-Dame-de-Grâce avec son tableau, je pense qu'il a pas mal
charrié. Tout à l'heure, le député de
Notre-Dame-de-Grâce nous parlait des investissements manufacturiers.
Là il change de tableau et il parle des investissements, mais il a
oublié de dire si c'est manufacturier ou si ce n'est pas manufacturier.
Je peux lui dire que ce n'est pas manufacturier. Les investissements qui ont
fait en sorte que la pointe a augmenté au Québec en 1974, 1975,
1976, c'était le déficit olympique. On a construit un stade
olympique alors que, dans les autres provinces canadiennes, les autres
États américains, on en construit pour 50 000 000 $ à 80
000 000 $. Nous autres ça nous a coûté environ 1 000 000
000 $. C'est la façon d'administrer les finances publiques - je ne veux
même pas le nommer parce que cela a l'air qu'il est invisible et qu'il ne
faut pas en parler, de l'homme invisible. C'est sûr que si tu gaspilles 1
000 000 000 $ quelque part dans l'investissement, ça monte la moyenne
d'investissements, mais cela ne veut pas dire que cela a servi à
développer le Québec.
J'ai un tableau. Je vais être conforme avec ce que j'ai dit tout
à l'heure. Je vais rester dans les investissements manufacturiers. Les
investissements manufacturiers, le député de
Notre-Dame-de-Grâce en a sorti depuis 1976 ou quelque chose comme
ça tantôt. On a une idée des investissements manufacturiers
en pourcentage, du Québec, avec ce qui se fait dans le reste du Canada.
On va me dire que cela a été stable un bout de temps. Regardez
à l'heure actuelle, depuis trois ans, depuis qu'on est sorti de la crise
économique le Québec, avec nos politiques, réussit
finalement à attirer des investisseurs et à développer des
investisseurs québécois qui ont confiance en eux et qui
reprennent les investissements là où ils devraient être
normalement.
Le Québec a presque doublé - il est parti de 20% et on est
en haut de 30% - les
investissements manufacturiers canadiens qui se font maintenant au
Québec parce qu'il y a des investisseurs qui ont confiance dans leur
capacité de le faire. Nous autres, on fait confiance aux hommes et aux
femmes chefs d'entreprise. Le gouvernement a juste aidé à
encourager.
Si on compare maintenant avec notre principal compétiteur,
l'Ontario, regardez ce que cela a fait. On est parti de 35% à peu
près de ce que l'Ontario faisait en 1976, on est au-delà de 70%.
Regardez la courbe. Cela montre une chose. Cela montre qu'au Québec on
reprend le retard qu'on avait historiquement parce qu'on ne s'est
peut-être pas assez mêlé d'affaires et tout ça. On
reprend le retard historique et on est en train de reprendre
véritablement toute la place qui nous revient et même plus que la
place qui nous revient.
Il me semble que, si le député de
Notre-Dame-de-Grâce, tout à l'heure, avait été
logique avec son tableau et s'il avait voulu être honnête avec la
population du Québec, il aurait continué de parler que ce qu'il
faisait au départ d'immobilisation dans la fabrication
manufacturière et il aurait dit: Bravo au gouvernement du Québec
depuis la crise économique, depuis que le Parti libéral
fédéral, son chef, a cassé les reins de l'entreprise
québécoise, vous avez réussi à retourner cela avec
des plans réalistes, des plans d'urgence ou des plans de relance qui
donnaient la garantie nécessaire aux entreprises que les folies de taux
d'intérêt, cela ne reviendrait pas. La preuve de cela c'est que si
cela avait été normal, on n'aura pas déjà atteint 1
000 000 000 $ sur notre plan de relance de 2 000 000 000 $.
Les chefs d'entreprise nous demandaient deux choses: Donnez-nous des
garanties et aidez-nous à emprunter à la banque et on va
créer des emplois. Deuxièmement, donnez-nous une police
d'assurance que la folie des taux d'intérêt
décrétés par les libéraux, cela ne reviendra plus
au cours des cinq prochaines années. On a institué un programme
exactement pour répondre à la demande de chefs d'entreprise. Bien
sûr, c'est parce qu'on est en contact constant avec les chefs
d'entreprise et nous, au lieu de rester dans notre tour d'ivoire et
d'être invisibles, on rencontre les chefs d'entreprise, on en discute
avec eux. Ce sont les chefs d'entreprise finalement qui nous font des
suggestions dans ce sens. Les chefs d'entreprise nous ont fait les suggestions
du plan de relance. C'est cela que nous avons fait. La marchandise a
été livrée de leur part. On va annoncer au cours des
prochains jours un investissement majeur. On a une quinzaine d'investissements
majeurs.
Cette semaine, à la Société de développement
industriel du Québec, cela a été un record jamais vu, on a
autorisé 275 000 000 $ d'investissements dans la même semaine avec
de l'aide et des garanties de prêts et des polices d'assurance contre
l'augmentation du taux d'intérêt de la Société de
développement industriel du Québec. 275 000 000 $, dans la
même semaine, qu'on a autorisés avec la SDI, cela ne s'est jamais
fait dans l'histoire du Québec, ni dans l'histoire du Canada. C'est dire
que nos programmes répondent. 0e vais annoncer une grande entreprise
multinationale qui va investir 70 000 000 $ dans la fabrication
d'équipements périphériques pour des ordinateurs à
Montréal. 70 000 000 $ dans cela, c'est une grande entreprise qui vient
s'établir au Québec et qui a confiance dans le Québec. On
va reparler d'autres investissements qu'on fait, tout à l'heure. Mais,
je pense qu'au Québec, à l'heure actuelle, vis-à-vis des
investissements manufacturiers, les hommes d'affaires, les femmes d'affaires
reprennent véritablement toute la place qu'ils devraient occuper.
Le Président (M. Beauséjour): La parole est au
député de Montmagny-L'Islet.
M. Jacques Le Blanc
M. Le Blanc: M. le Président, dans la démonstration
à l'aide de tableaux que nous a faite le député de
Notre-Dame-de-Grâce, je pense que la seule démonstration
véritable que cela a apporté c'est de nous démontrer que
la crise économique avait eu des effets au Québec comme partout
ailleurs au Canada et que les taux d'intérêt, même s'il ne
l'a pas mentionné, étaient la cause directe de l'assassinat de
plusieurs de nos entreprises et par conséquent d'une diminution du
nombre d'emplois actifs. Même s'il ne faudrait pas dire que le
gouvernement fédéral est responsable de la fixation des taux
d'intérêt, ce n'est tout de même pas la
responsabilité du gouvernement du Québec, mais il y a des
domaines tout de même qui sont très difficiles à concilier,
soit la question du député de Notre-Dame-de-Grêce et
l'exposé qu'il a fait tout récemment dans un document sur la
stratégie économique d'un futur gouvernement libéral. Il y
a des choses dans cela qui sont assez étonnantes quand on veut faire un
peu de concordance dans ces énoncés et ces questions
d'aujourd'hui.
Je ne toucherai qu'un domaine où il met en cause - j'essaie
d'établir la relation entre le sous-emploi et sa prise de position par
rapport, entre autres, à la compétitivité de nos
entreprises québécoises, de nos PME, dont il ne parle pas. Il
pose la question à la page 11: Actuellement sommes-nous
compétitifs? Il dit: Non, nous le sommes pas. En réponse à
son affirmation, il faudrait peut-être lui poser la question si ce n'est
pas insulter nos entreprises québécoises, nos dirigeants
d'entreprise du Québec que d'affirmer qu'ils ne sont pas productifs
et
qu'ils ne font aucun progrès dans l'amélioration de leur
position concurrentielle.
Cela amène une deuxième question aussi: Comment
pouvons-nous exporter, à partir d'une constatation que M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce connaît... Nous
exportons 45% de notre production et en même temps nous ne sommes pas
compétitifs. Je connais un domaine en particulier, le bois d'oeuvre,
où nos voisins américains ont, à un certain moment, fait
état d'une concurrence déloyale par rapport à nos
exportations de bois d'oeuvre aux États-Unis. Il y a eu une
poussée des entrepreneurs, de ceux qui oeuvraient dans l'industrie du
sciage sur le marché américain à l'effet d'imposer une
tarification de 65% sur les bois entrant aux États-Unis en provenance du
Québec.
Si nos méthodes de production et notre
compétitivité dans ce domaine n'existaient pas, comment ces
gens-là auraient-ils été dans l'obligation de faire un tel
débat et de réclamer de telles mesures pour contrer
l'arrivée de nos produits à des prix très
compétitifs sur le marché américain?
Il n'y a pas que nos entreprises qui ont su et qui savent encore par
leur esprit d'entreprise être compétitives, il y a aussi la part
et la stratégie industrielle du gouvernement du Québec dans ce
domaine. Ce n'est pas une incitation partisane. Quand, par exemple, on invoque
un document du Conseil des sciences du Canada qui traite de la politique
industrielle dans la fédération canadienne, il est cité
que c'est le Québec qui, parmi toutes les provinces, a
élaboré la stratégie industrielle la plus complète.
C'est aussi dans cette province que les autorités ont mené
l'analyse officielle la plus claire des problèmes qu'elle
présente et de ses perspectives.
M. le Président, malheureusement mon temps est pratiquement
écoulé. J'ajouterai que dans le volet "Bâtir le
Québec", dans l'analyse qui en est faite dans le même Conseil des
sciences du Canada, il est dit que ce qui est encore le plus important, c'est
que la déclaration du gouvernement du Québec contient une
politique valable pour la création de nouvelles industries et, par
conséquent, de nouveaux emplois. Je m'inquiète des
déclarations du député de Notre-Dame-de-Grâce quand
il met en cause la compétitivité de nos entreprises.
Le Président (M. Beauséjour): Merci, M. le
député. Je donne la parole maintenant au député de
Laporte.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Mon collègue,
le député de Saguenay, faisait état du fait que, sur la
Côte-Nord, le ministre de l'Industrie et du Commerce est persona non
grata, ayant eu à fermer de nombreuses usines, ce qui fait qu'il n'est
pas très bienvenu dans la région. Cela me fait un peu penser
à ce personnage, un homme célèbre de Haïti, qui est
d'ailleurs un héro, un ex-général, qui avait pour nom
Toussaint Louverture. Dorénavant, si Haïti a eu son Toussaint
Louverture, au Québec, on aura eu notre Biron Lafermeture. Voilà
pour la Côte-Nord, M. le Président.
Je voudrais simplement souligner une chose. Le ministre a parlé
tout à l'heure de décision prise sur le coin de la table, en
accusant l'ancien gouvernement libéral. Je voudrais souligner le dossier
de la Société nationale de l'amiante comme étant un beau
cas d'une décision prise sur le coin de la table. D'ailleurs, c'est le
ministre lui-même, alors qu'il était membre de l'Union Nationale -
un parti qu'il a renié par la suite - qui disait ici même en cette
Chambre au sujet de ce projet-là: "Avec le projet de loi de la
nationalisation d'Asbestos Corporation, est-ce qu'on est dans le feu? Est-ce
qu'on va créer des emplois avec cela, M. le Président?" C'est le
ministre de l'Industrie et du Commerce qui parlait. "Pas du tout, disait-il,
tout simplement une nationalisation des sociétés minières.
Je ne sais pas si le premier ministre va le consulter - il parlait du
député de Frontenac - pour la nomination des dirigeants de ces
sociétés minières à Thetford. Est-ce que le
député de Frontenac va avoir son mot à dire à ce
sujet?"
Le ministre critiquait la décision et il avait raison, parce que
si on regarde le résultat des opérations, depuis trois ans, que
le gouvernement est là-dedans, on se rend compte que le déficit
accumulé, depuis trois ans, est de 30 000 000 $. Donc, celui de 1983 qui
était de 16 000 000 $ et celui de 1984 de 11 300 000 $. Or, on serait
porté à penser que si le déficit accumulé est de 30
000 000 $ en trois ans, le nombre d'emplois a dû augmenter beaucoup
puisqu'on a dépensé tant d'argent. Or, ce qui est étrange,
c'est qu'en 1981, au moment de la nationalisation, il y avait 1843
employés dans l'amiante à Thetford et, aujourd'hui, au moment
où on se parle, il y aurait, semble-t-il, 800 employés,
d'après la compagnie et d'après, d'ailleurs, une
déclaration publiée dans le Devoir du 28 août 1984.
C'était la situation, hier: 800. Or, ce matin dans le journal Le Soleil,
vous pourrez le lire tout le monde, la compagnie Asbestos déclare
qu'elle mettra à pied 450 personnes le 15 octobre -ce qui fera qu'il
restera 350 employés, si on lit bien - et 350 autres le 17 novembre.
M. le Président, j'espère que le ministre va nous
éclairer sur ce sujet, mais si je comprends bien, sur les 800
employés, 450 employés seront mis à pied le 15 octobre,
alors que les 350 autres employés seront en congé forcé
à partir du 1er
décembre. Si on comprend bien, c'est donc dire qu'il y aurait
exactement 0 employé à Asbestos, à Therford-Mines,
à la fin de l'année. De toute façon, 0 ou 800, c'est quand
même beaucoup moins que ce qu'il y avait dans le temps.
Or, qu'est-ce que Asbestos va coûter aux contribuables? Le
ministre Parizeau et le ministre Duhaime nous disaient en 1981: C'est l'achat
du siècle, cela ne coûtera pas un sou. Autrement dit, on ne paie
rien tout de suite, on paiera plus tard. Le prix avait été
fixé à 42 $ l'action et ce prix-là est indexé de
16% chaque année qu'on n'achète pas. Autrement dit, plus le temps
passe, plus ça va coûter cher au moment où on va devoir
acheter. On va devoir acheter au plus tard dans deux ou trois ans, à peu
près. (11 h 15)
Si le gouvernement achète aujourd'hui, en 1984, avec les actions
indexées à 16%, le prix est de 127 000 000 $; c'est ce qu'on doit
débourser aujourd'hui. Comme le gouvernement parle de fusionner cette
mine avec celle de Bell Asbestos, les conseillers juridiques nous disent qu'il
faudra à ce moment-là acheter les minoritaires. Les minoritaires,
au même prix, ça coûterait 84 000 000 $. Comme la mine a
besoin d'investissements pour se moderniser, on estime à 60 000 000 $ le
montant qui devra obligatoirement être investi là-dedans et le
fonds de roulement est absolument à sec puisqu'on vient de faire 30 000
000 $ de déficit en trois ans; on a besoin de 40 000 000 $
supplémentaires là-dedans.
Le total de tout cela, tout en étant conservateur, aujourd'hui,
ça coûte 311 000 000 $ pour Asbestos Corporation. Ce qui a
coûté zéro, la trouvaille du siècle il y a trois
ans, nous coûtera 311 000 000 $. Si on attend encore deux ans pour
exercer l'option, ce sera encore 50 000 000 $ ou 60 000 000 $. Voici une belle
décision prise sur le coin de la table par le gouvernement et qui fait
que les emplois qui étaient de 1843 sont rendus aujourd'hui soit
à 800 et, probablement dans deux mois, à zéro. De 1843
à zéro, pour un placement qui devait coûter zéro en
1981, ça va nous coûter, semble-t-il, 311 000 000 $.
Je conclus avec le ministre présent qui disait à cette
Chambre, en 1978: "Le gouvernement péquiste, ce sont des
théoriciens, de grands rêveurs. 11 y en a trop dans le cabinet."
C'est le ministre Biron qui disait ça. "Il faut des administrateurs."
C'est un jugement très sévère qu'avait porté le
ministre à l'époque sur le gouvernement, ce sont les mêmes
ministres qui sont là aujourd'hui, et le jugement, c'est la population
qui le pose, maintenant, à l'endroit de ce gouvernement.
Le Président (M. Beauséjour): Merci. Maintenant, la
parole est au ministre.
M. Rodrigue Biron
M. Biron: M. le Président, juste pour répondre au
député de Laporte, d'abord, il s'est trompé de commission
parlementaire, il aurait dû convoquer le ministre de l'Énergie et
des Ressources qui est responsable de la société Asbestos et qui
répondrait exactement à ses questions. Deuxièmement, je
pense que les gens du Québec connaissent l'expérience pratique
que j'ai eue au niveau des entreprises, des petites et moyennes entreprises
pendant une vingtaine d'années. Mon action depuis quelques
années, au ministère de l'Industrie et du Commerce, je pense
qu'elle est reconnue par ceux et celles qui savent ce qu'est le
développement économique.
À ce point de vue, ce qu'on est en train d'annoncer, toutes
sortes d'investissements, partout au Québec, c'est impressionnant. Je
reçois des listes d'entreprises qui décident d'investir au
Québec et, chaque fois, je suis impressionné.
Dernièrement, deux entreprises dans le domaine de l'électrochimie
décidaient d'investir 25 000 000 $ et 35 000 000 $ dans la région
de Valleyfield et de Beauharnois. 60 000 000 $, on va me dire que ça ne
crée peut-être pas beaucoup d'emplois, une soixantaine d'emplois,
ça coûte à peu près 1 000 000 $ par emploi dans le
domaine de l'électrochimie, mais ce sont des emplois de très
longue durée, de très haute technologie et des emplois
très rémunérateurs.
Ce sont des entreprises, des multinationales qui ont confiance en leur
capacité et qui ont confiance au Québec et ça fait partie
de la politique, de la stratégie de développement du gouvernement
du Québec d'exploiter nos richesses naturelles et de les
développer au Québec. Je parlais tout à l'heure d'une
entreprise, l'entreprise STC, Storage Technology Corporation, des
États-Unis, qui a investi dans les équipements
périphériques pour les ordinateurs. Cela, ça va
créer au Québec, dans la région de Montréal,
environ 300 emplois. Je pense que c'est important de noter cela, 70 000 000
$.
Dans le domaine de la fabrication des canettes d'aluminium, nous avons
généré une centaine de millions de dollars de nouveaux
investissements. On a déjà annoncé deux investissements et
je me prépare, la semaine prochaine ou dans deux semaines, à
annoncer un troisième investissement dans le domaine de la fabrication
de canettes d'aluminium, ce qui va faire en sorte que le Québec soit de
loin à l'avant-garde et le seul à produire au Canada ce genre de
canettes d'aluminium avec les matières premières produites dans
la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, à Baie-Comeau ou ailleurs
au Québec. Cela, c'est de faire travailler les gens de toutes les
régions du Québec. Avec une stratégie bien
précise de développement économique, on va produire
plusieurs centaines de millions de canettes d'aluminium par année non
seulement pour le marché québécois, mais pour le
marché canadien et même pour l'exportation sur le marché
américain. Cela fait partie d'une stratégie de
développement économique. J'aimerais que des
députés ou de leurs concitoyens qui en bénéficient
dans leur comté comme le député de Saguenay, se
lèvent de temps à autre et soient assez honnêtes pour dire:
j'apprécie le travail que le gouvernement du Québec fait dans ce
secteur, mais dans tel autre secteur, je veux le critiquer pour telle et telle
raisons. Je comprendrais cela. Mais des éteignoirs et des critiqueurs
comme on a de l'autre côté, sans jamais rien trouver de ce qu'ils
veulent bien au Québec, cela pourrait contribuer à
décourager nos chefs d'entreprises.
Après avoir lu le document de travail du député de
Notre-Dame-de-Grâce, il y a des choses que je voudrais qu'il m'explique.
Lorsqu'il parle du secteur de l'automobile, il dit: "II est loin d'être
certain que l'avantage comparatif se trouve dans les secteurs traditionnels -
il veut qu'on aille dans des secteurs où on a un avantage comparatif -de
forte capitalisation comme la sidérurgie -je peux bien le comprendre -
et l'automobile à moins qu'ils amènent des changements importants
dans le processus de production." Cela veut dire que, dans l'automobile, vous
allez dire aux 4500 employés de GM à
Sainte-Thérèse, à Boisbriand: Vous allez perdre vos jobs
parce que le Parti libéral pense que le secteur de l'automobile serait
mieux de s'en aller en Ontario parce que historiquement, l'avantage comparatif
a été dans l'Ontario. J'ai de la difficulté à
suivre le député de Notre-Dame-de-Grâce là-dessus.
Cela veut dire que la pétrochimie au Québec devrait
disparaître parce que cela représente une trop forte
capitalisation. Cela ne devrait pas être dans notre secteur.
Là-dessus, le député de Notre-Dame-de-Grâce devrait
expliquer son document. Il est contre les PME parce qu'il n'en parle pas du
tout. Il1 ne faut pas aller dans les secteurs de forte capitalisation comme
celui de l'automobile, les jobs sont en Ontario et ce sont eux qui en ont
profité. Il ne faut pas faire de l'exploitation et de la vente de nos
richesses naturelles. Il ne faut pas aller dans les secteurs traditionnels. Il
ne faudrait pas avoir le régime d'épargne-actions... Qu'est-ce
qu'il faut finalement? Il semble que c'est un document qui est négatif,
fade, tiède, incolore, qui n'a pas de structure, qui vraiment n'est pas
d'attaque et ne contient pas de vision de développement et
d'orientation. C'est probablement à l'image même du chef du Parti
libéral qui n'a pas de vision, il est incolore, invisible, tiède
et fade.
Si un parti politique veut un jour espérer prendre le pouvoir, il
devrait avoir au moins des documents de travail sur le développement
économique qui donnent certaines orientations du genre: "Bâtir le
Québec" ou "Le virage technologique", qui ont été faits
par le Parti québécois.
Le Président (M. Beauséjour): Merci, M. le
ministre. La parole est au député deChâteauguay.
M. Roland Dussault
M. Dussault: Merci, M. le Président, je voudrais d'abord
reprendre quelque chose qu'a dit tout à l'heure le député
de Saguenay concernant le député de Duplessis, M. Perron. Je dois
dire que M. Perron ne pouvait pas être ici ce matin pour des raisons
importantes. Je regrette que le député de Saguenay fasse ce genre
d'intervention ici à l'Assemblée nationale à propos de
notre collègue.
M. le Président, jusqu'à maintenant, j'ai remarqué
que l'attitude du Parti libéral à cette commission, c'est
d'isoler des chiffres sortis de la réalité et de nous demander de
les commenter. Il me semble qu'il serait plus positif - il me semble que c'est
l'approche que devrait avoir le Parti libéral - d'essayer de nous faire
commenter les moyens que nous entendons prendre pour développer le
Québec sur le plan économique et les moyens qui, effectivement,
arriveraient à créer encore plus d'emplois que ce qu'on a
réussi à faire jusqu'à maintenant. Des gens sont
satisfaits, M. le Président, dans le monde des affaires et ils nous le
disent. Cela fait plaisir de le savoir. Un homme d'affaires a écrit au
ministre à deux reprises en disant: "Ma jeune société
s'est retrouvée devant un mur insurmontable et, chaque fois, c'est vous
qui avez sauvé la situation en lui accordant l'aide
nécessaire."
Il ajoute: "Je vous écris ces lignes pour vous faire part avec un
sentiment de bonheur et de fierté que votre confiance et les deniers
publics placés dans ma société ont porté les
résultats escomptés et même plus. "C'est pour vous
remercier au nom d'une société québécoise pleine de
foi en son avenir, de dynamisme, d'idées et de détermination, au
nom d'une société québécoise pleinement consciente
du fait indéniable que, sans votre aide, elle aurait cessé
d'exister depuis décembre 1982."
Il est important de bien se rappeler qu'il y a eu la crise et des
difficultés et les moyens qu'on a pris pour s'en sortir. C'est une
entreprise qui est descendue jusqu'à trois employés et qui est
remontée jusqu'à 30. C'est encourageant de se rendre compte de
cela. Plutôt que d'isoler des chiffres, il me semble qu'il vaudrait mieux
regarder quels sont les moyens que le gouvernement prend et entend prendre pour
développer le
potentiel économique du Québec. On se
référait aussi - M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce s'y réfère aussi - dans son document
"Stratégie économique pour un gouvernement libéral"... Je
pense qu'il y a lieu de donner un peu d'explication. Cela prendrait
évidemment beaucoup de temps pour faire un portrait très
exhaustif. Du côté du virage technologique, on s'est occupé
des secteurs traditionnels. Nous avons mis en place des centres de
productivité, dans les secteurs du vêtement, du textile, du meuble
et du bois ouvré ainsi que pour le centre de promotion de la mode de
Montréal. C'est important, parce qu'on sait les effets que cela
entraîne. Ces centres, qui regroupent les industriels du milieu, seront
des outils pour améliorer la compétitivité de ces
secteurs, en termes de qualité et de prix sur les marchés
internationaux. Il faudrait que le Parti libéral tienne compte de ces
réalités.
Dans le domaine de la recherche et du développement, M. le
Président, c'est très important et c'était un
élément essentiel du virage technologique. La SDI, la
société sur laquelle on s'appuie énormément pour le
développement du Québec, et avec raison d'ailleurs, parce qu'elle
fait un excellent travail, a été chargée de stimuler la
recherche et l'innovation, et d'orienter les entreprises vers les technologies
de pointe. On a parlé de cela tout à l'heure. Après 18
mois, avec deux programmes, PARIQ 1 et PARIQ II, on a réussi
au-delà de 100 projets de développement d'un nouveau
procédé ou produit. Cela totalise 150 000 000 $. Ces programmes
sont présentement en cours dans plusieurs secteurs industriels, mais
principalement dans la télécommunication, dans la
micro-électronique et dans le logiciel. Ce sont des secteurs de pointe,
des secteurs dont on a dit qu'il fallait faire un effort important, sinon le
Québec serait devenu un pays du tiers monde. Il fallait vraiment prendre
le virage technologique. On a fait des efforts considérables et cela
donne des résultats phénoménaux. On n'a jamais vu cela, M.
le Président. Tout cela c'est grâce au travail de la SDI,
grâce au travail du CRIQ, grâce au travail du gouvernement du
Québec qui, en fin de compte, oriente toutes ces actions pour avoir des
résultats.
M. le Président, ces entreprises dont je vous parlais - 150 000
000 $ d'investissements - sont très importantes, mais ce sont
généralement des petites et moyennes entreprises. J'aimerais bien
quand, à la fin de l'interpellation aujourd'hui, le député
de Notre-Dame-de-Grâce nous fera un petit exposé commercial, comme
il disait, quand il nous donnera des informations supplémentaires
là-dessus, qu'il nous dise pourquoi, dans ce document, on a totalement
ignoré la petite et moyenne entreprise. Dorénavant, c'est celle
sur laquelle on doit compter au maximum, pour le développement
économique du Québec et pour la création d'emplois.
J'aimerais qu'il nous dise pourquoi ce secteur important - tout le monde le dit
au Québec - ne fait pas partie du document stratégique
économique pour un gouvernement libéral, document qui a l'air
d'être, à toutes fins utiles, le programme du Parti
libéral, faute de mieux, sans doute. Mais c'est quand même une
feuille de route importante. On a fait une conférence de presse
là-dessus, il n'y a pas longtemps. Si je ne me trompe pas,
c'était le 4 octobre 1984 ou le lendemain, peut-être. J'aimerais
qu'on nous dise - sinon on n'aura pas eu de réponse aujourd'hui -
comment il se fait que ce document laisse systématiquement tomber la
petite et moyenne entreprise dans les intentions d'un éventuel - je dis
bien éventuel parce que c'est conditionnel, M. le Président -
gouvernement libéral. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Beauséjour): Merci. La parole est
au député de Saguenay.
M. Ghislain Maltais
M. Maltais: Merci, M. le Président. Je m'adresse à
vous. Auriez-vous l'amabilité de transmettre le message suivant au
ministre de l'Industrie et du Commerce, ex-chef de la défunte Union
Nationale et député de Lotbinière. Depuis le début
de l'interpellation, il nous parle de notre chef, j'en suis très
heureux, mais, j'ai juste un petit message, en passant, je lui donne la recette
pour avoir le chef du Parti libéral à l'Assemblée
nationale, ici: qu'il demande à son chef, qui a la grippe de Hongkong,
présentement, de déclencher des élections
immédiatement et, dans 28 jours, il va être là pour
administrer honorablement les choses du Québec. M. le ministre...
Le Président (M. Beauséjour): À l'ordre!
À l'ordre!
M. Biron: ...
M. Maltais: ...quand cela sera votre tour, vous parlerez.
Tout à l'heure, M. le Président, le député
de Châteauguay a fait une citation concernant mon collègue de
Duplessis, M. Denis Perron. Ce n'est pas moi qui ai écrit l'article du
17 octobre, disant qu'il n'avait plus confiance en ce gouvernement, qu'il le
boudait et qu'il ne viendrait plus en Chambre. Ce n'est pas moi, c'est lui qui
a déclaré cela, M. le Président. Alors, que le
député de Châteauguay relise les articles de la presse et
les déclarations de son collègue.
M. le Président, j'aurais juste une autre...
Le Président (M. Beauséjour): On va
revenir au débat lui-même.
M. Maltais: Je ne peux pas m'adresser à eux, je m'adresse
à vous.
Le Président (M. Beauséjour): Est-ce qu'il y a une
question de règlement?
M. Dussault: De règlement, oui. On m'a mal cité, ce
n'est pas du tout de cela dont j'ai parlé. J'ai simplement dit que le
député Perron, notre collègue, ne pouvait pas être
ici ce matin, pour des raisons importantes. C'est la seule chose que j'ai dite,
M. le Président.
M. Maltais: M. Bourassa non plus, ne peut pas être ici ce
matin, il n'y a pas d'élection générale.
Le Président (M. Beauséjour): Si vous voulez, on ne
réglera pas tous ces dossiers...
M. Maltais: J'aimerais continuer, M. le Président, en
m'adressant à vous.
Le Président (M. Beauséjour): ...on va revenir au
débat de ce matin.
M. Maltais: M. le Président, je vous demande de retirer de
mon temps d'intervention, celle du député de
Châteauguay.
Le Président (M. Beauséjour): Oui, absolument.
M. Maltais: Merci. M. le Président. Le
député de Châteauguay nous lit une lettre depuis ce matin
et j'aimerais savoir qui l'a signée. Serait-elle signée par
Pierre Allard ou quelque chose comme cela? On continuera un peu plus tard.
J'imagine qu'à un moment donné, il va nous donner la signature.
(11 h 30)
Le ministre, tout à l'heure, a vanté d'une façon
extraordinaire les projets, en particulier le projet Reynolds à
Baie-Comeau. Je ne peux pas croire que le ministre de l'Industrie et du
Commerce et le Parti québécois vont accaparer l'investissement de
500 000 $ à Baie-Comeau. Je suis d'accord avec lui pour féliciter
les gouvernements quand ils posent de bons gestes: le gouvernement de M.
Lesage, de 1960 à 1966; celui de M. Johnson, de 1966 à 1970;
celui de M. Bourassa, de 1970 à 1976 qui a construit la Manicouagan et
créé un potentiel hydroélectrique au Québec qui a
fait que Reynolds est venue s'installer à Baie-Comeau, parce qu'il y
avait de l'électricité. Ce n'est pas le Parti
québécois qui a développé la Manicouagan. Ce n'est
certainement pas le ministre de l'Industrie et du Commerce, non plus. Ce sont
les gouvernements antérieurs qui ont été prévoyants
alors que celui-ci n'a même pas été capable de vendre les
surplus d'électricité. S'il était aussi brillant - il
pourra transmettre la question au ministre de l'Énergie et des
Ressources qui a fermé Manic 5, puissance additionnelle, l'an
passé... Les 600 000 000 $ qu'Hydro-Québec devait investir
à Manic 5 pour augmenter le potentiel hydroélectrique, il les a
littéralement siphonnés d'Hydro-Québec pour les mettre
dans le plan de relance du premier ministre. Le premier ministre a fermé
la Chambre pendant un mois pour préparer son plan de relance qui a
été une catastrophe. Il l'a dit lui-même ici.
Je pense qu'il faut être plus sérieux. Quand on parle de
projets sur la Côte-Nord, on parle surtout de projets de fermeture. Il y
a une scierie à Sacré-Coeur que le gouvernement a essayé
de vendre et qu'il n'a pas encore vendue. Il y a des problèmes pour la
vendre. Ce sont 450 emplois perdus. Reynolds, on le sait, c'est un
investissement majeur, mais, après la construction, cela va donner 125
ou 130 emplois. Le ministre a beau dire... Je me souviens très bien
lorsqu'il est venu faire l'annonce - pas lui, mais le ministre de
l'Énergie et des Ressources qui disait: Cela va créer 500
emplois. Où sont-ils? Les travailleurs de la CSN, de l'International et
de la FTQ se demandent où sont ces 500 emplois présentement. Je
suis bien heureux qu'il y ait un investissement de 500 000 $ dans mon
comté, mais ce n'est pas un investissement public, ce n'est pas un
investissement qui appartient au Québec, au gouvernement du Parti
québécois; cela appartient à Reynolds. Il l'a fait, parce
qu'il y a eu des gouvernements précédents, comme ceux de M.
Robert Bourassa, de M. Jean Lesage et de M. Daniel Johnson, qui ont
créé un potentiel hydroélectrique permettant cette
réalisation.
Tout à l'heure, on parlait du discours d'ouverture et le ministre
le citait allègrement. Savez-vous ce qu'il a trouvé pour les
jeunes de chez nous? Des projets, des sommets, des réunions, de la
publicité -rien de concret - et des nettoyages de berges de vieux pneus
à 150 $ par mois. C'est à cela que les jeunes de la
Côte-Nord sont confinés; pas seulement ceux de la Côte-Nord,
ceux du comté de Lotbinière aussi. Il faut être plus
sérieux que cela.
J'aimerais terminer mon intervention en citant un ex-politicien du
Québec... Le ministre actuel de l'Industrie et du Commerce -
transmettez-lui cela - on ne peut pas dire qu'il a bien géré
l'industrie et le commmerce au Québec depuis qu'il est là. La
plus belle preuve: il avait seulement un parti politique et il n'a même
pas été capable de le vendre d'une façon convenable.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Beauséjour): La parole est au
ministre.
M. Rodrigue Biron
M. Biron: M. le Président, le député qui m'a
précédé parlait de l'investissement de Reynolds à
Baie-Comeau. Il a dit que cet investissement dépendait du potentiel
hydroélectrique du Québec. Le député a fait un seul
oubli. Probablement qu'il n'y a pas pensé ou qu'il n'a pas lu l'histoire
du Québec. Le grand maître d'oeuvre qui a bâti un potentiel
hydroélectrique au Québec, un Hydro-Québec fort, c'est
quand même M. René Lévesque, l'actuel premier ministre du
Québec. Le député de Saguenay aurait peut-être
dû dire, dans sa grande honnêteté -mais je pense que cela
n'appartient pas aux membres de l'autre côté - que le père
de l'entreprise moderne qu'est Hydro-Québec, c'est quand même le
premier ministre, M. Lévesque. C'est un petit oubli, mais on essaie de
passer cela sous silence. C'est quand même la stratégie de
développement du Parti québécois, du gouvernement du
Québec que de nous servir au maximum de notre puissance
hydroélectrique pour attirer des investissements majeurs au
Québec.
Je vous ai dit aujourd'hui, M. le Président, que, sur la liste de
cette semaine qui a été acceptée à la
Société de développement industriel, il y avait de grands
projets. Il y a beaucoup de ces projets qui sont reliés - et je ne peux
malheureusement pas tous les annoncer aujourd'hui, parce que les entreprises
veulent faire leurs propres annonces - la moitié de ces grands projets
sont reliés directement à la capacité du Québec de
produire de l'électricité. C'est une électricité
qui n'appartient ni à un parti politique ni à l'autre, mais qui
appartient aux citoyens du Québec. Nous, on veut encourager les citoyens
du Québec à profiter au maximum de leur électricité
pour travailler au Québec, non pas exporter aux États-Unis la
totalité de nos surplus d'électricité, mais s'en servir,
à prix de rabais, bien sûr, vis-à-vis de certaines grandes
entreprises qui vont créer des emplois soit à Bécancour,
soit à Granby, soit à Beauharnois, à ville de
Saint-Laurent - il y a un deuxième projet à Lachute qu'on a
accepté cette semaine à cause de l'électricité -
à Tracy, à Montréal, à Beauport. Cela fait pas mal
de projets qui sont reliés directement à la capacité du
Québec de produire de l'hydroélectricité. C'est toute une
série de projets qui ont été acceptés cette semaine
par la Société de développement industriel. Les
députés de l'Opposition disent: Ce n'est pas le gouvernement. Il
faudrait peut-être qu'eux aussi se tranchent. J'ai toujours entendu,
depuis que je suis ici en Chambre, de la part du Parti libéral: Le
gouvernement ne devrait pas s'en mêler.
Le gouvernement est obligé quand même d'établir
certaines stratégies, certaines politiques qui vont attirer les
investisseurs. Quand ça ne marche pas, on dit: Cela dépend du
gouvernement. Quand ça marche, on dit: Cela ne dépend pas du
gouvernement. Ça dépend de nous autres quand on fait des
politiques viables. Quand on peut attirer des investisseurs, quand on peut
avoir des politiques fiscales qui sont les meilleures au Canada pour aider les
entreprises québécoises. Tout à l'heure, mon
collègue de Chauveau a mentionné cela. Ce n'est pas le Parti
québécois qui a dit cela. C'est le président de la Bourse
de Montréal, M. Pierre Lortie, qui n'est pas un péquiste, qui a
dit: C'est au Québec qu'on a les meilleures politiques fiscales pour
attirer les entreprises. Je pense que c'est important de le noter. C'est
à cause, justement, de cet encadrement général que les
gens viennent au Québec et à cause de notre potentiel de
richesses naturelles.
Tout à l'heure, dans sa réplique, le député
de Notre-Dame-de-Grâce va finalement nous expliquer son papier. C'est
bien important qu'on le sache parce que les richesses naturelles, il ne faut
pas les exploiter et il ne faut pas créer des jobs avec. Il ne faut pas
aller dans les entreprises à grand potentiel d'investissement. Dans
l'automobile, il faut laisser ça à l'Ontario. Je voudrais savoir.
Il y a un tas de choses qu'il faudrait savoir. La pétrochimie, qu'est-ce
qui serait arrivé au Québec si le gouvernement du Québec
n'avait pas bougé? Il y a trois ans, la stratégie du gouvernement
du Québec vis-à-vis de Pétromont, la pétrochimie,
c'était la même que celle d'aujourd'hui. Ce qu'on demandait,
c'était de ne pas payer deux fois les taxes sur les produits de la
pétrochimie et d'avoir une politique de "feed stock", d'intrants ou de
matières premières qui soit acceptable par l'industrie
pétrochimique québécoise. Ce n'est pas juste une
entreprise Pétromont, il y a 400 PME. Les libéraux
fédéraux nous ont toujours dit non, non, non. Ils ont toujours
dit: non, on veut faire disparaître la pétrochimie du
Québec. C'est curieux, on ne pouvait pas s'entendre. Les gens d'en face
nous accusaient de chialer. Il s'agit juste de changer le gouvernement de
l'autre côté à Ottawa. Lorsqu'on arrive avec un autre
gouvernement, on s'asseoit avec eux, cela prend quelques heures et on
règle le problème de la pétrochimie.
Je pense que ça prouve la bonne foi du gouvernement du
Québec. Nous avions de bonnes stratégies de développement.
Un ancien président de la Fédération libérale du
Canada nous a dit: II n'y a pas de direction économique depuis quinze
ans au gouvernement canadien avec le Parti libéral. Nous autres, on a
une direction économique. Comment voulez-vous négocier une
direction économique avec des gens qui n'en avaient pas? Il me semble
que maintenant, depuis
qu'il y en a une là-bas, il y a peut-être lieu de discuter
avec l'autre gouvernement et de faire en sorte de répondre aux besoins
des citoyens. Notre objectif, c'est de répondre le mieux possible aux
besoins des citoyens, c'est d'aider à prendre le virage technologique et
à devenir meilleur que n'importe quel autre, non seulement au Canada,
mais dans le monde entier. Vous allez voir que dans les chiffres d'exportation,
on est pas mal bon au Québec. Les chefs d'entreprises, bravo, chapeau,
moi je trouve qu'ils font un travail extraordinaire.
Le Président (M. Beauséjour): Merci, M. le
ministre. La parole est au député de Chauveau.
M. Raymond Brouillet
M. Brouillet: J'avais annoncé tantôt que je
parlerais un peu de la stratégie de développement. Mes
collègues ont abordé cette question par la suite. J'aimerais
quand même revenir et insister sur certains aspects, certains
témoignages. Le Parti libéral, un peu trop facilement, accuse le
gouvernement de ne pas savoir où il va dans le domaine
économique. Vraiment, si M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce s'est permis de rire tantôt, permettez-moi de
rire à ce moment-ci. Quand on entend le Parti libéral du
Québec dire cela, il faut voir quelles étaient les
stratégies de développement économique sous les
gouvernements antérieurs pour savoir que c'est avec le gouvernement du
Parti québécois, entre 1977 et 1980, que vraiment l'on a
assisté à l'élaboration d'un véritable
énoncé de politique de développement
économique.
Tout le monde le sait, à l'époque, cet
énoncé de politique est paru dans ce qu'on a appelé
"Bâtir le Québec 1". À l'intérieur de cela, on
précisait les objectifs à atteindre au tournant des années
quatre-vingt pour assurer au Québec un développement
économique. C'est évident que cela a eu du succès à
l'époque. Ce projet, ce plan de développement a eu beaucoup de
succès durant ces années. D'ailleurs c'est un peu sur la
performance économique du gouvernement du Québec que le Parti
québécois a été réélu au pouvoir en
1981.
Vous savez que quelque temps avant l'élection, le
témoignage des économistes canadiens à l'intérieur
du "Financial Post" disait que la province de Québec et le gouvernement
du Québec avaient eu, au cours des dernières années, une
performance économique assez surprenante et assez renversante. C'est sur
cette performance que le gouvernement a été réélu;
cela est su de tout le monde. Il y a eu la crise économique, c'est
évident, qui nous a fait reculer avec les taux d'intérêt
décrétés par Ottawa et Washington, des taux
d'intérêt qui ont vraiment donné un coup de fouet en plein
front à nos entreprises, c'est vrai, une perte d'emplois
considérable. Le gouvernement du Québec s'est ressaisi
immédiatement pour tâcher de contrer les effets néfastes de
ces politiques de taux d'intérêt décidées à
l'extérieur du Québec. Là, nous avons vu une reprise
économique qui donne des résultats encore qui étonnent
tout le monde. Le reste du Canada nous dit, par le biais de Statistique Canada,
et par le biais aussi de la voie de ses spécialistes: C'est surprenant
comme le Québec se redresse de la crise en 1983 et 1984! On est surpris
de voir le taux d'accroissement, le taux d'accroissement des investissements et
aussi, par le biais de ces investissements, le taux d'accroissement de
l'emploi. On a dit tantôt: Ce n'est pas de la création, c'est de
la récupération. Mais pour récupérer il faut
créer de l'emploi, voyons donc! C'est un jeu de mots enfantin. Que
voulez-vous? Tous les spécialistes dans le domaine parlent de
création d'emplois à ce moment. Pour récupérer il
faut créer de l'emploi.
Il y a eu aussi, "Bâtir le Québec -phase 2", qu'on a
appelé "Le virage technologique". Encore là, on a mis au point
une stratégie pour tâcher d'être à l'heure de la
mutation technologique contemporaine. Je vais citer, encore une fois, le
Conseil des sciences du Canada, lequel traitait dans son document de la
politique industrielle dans la fédération canadienne. Il faut
bien voir ce que ces gens disent: "C'est le Québec qui, parmi toutes les
provinces, a élaboré la stratégie industrielle la plus
complète. C'est aussi dans cette province que les autorités ont
mené l'analyse officielle la plus claire des problèmes qu'elle
présente et de ses perspectives." Témoignage du Conseil des
sciences du Canada. Et, d'une façon plus particulière, en ce qui
concerne le second volet de l'énoncé de politique "Bâtir le
Québec", ce qu'on a appelé et ce qu'on appelle encore "Le virage
technologique", le document du Conseil des sciences du Canada jette encore plus
de lumière sur la stratégie du gouvernement du Québec en
matière de développement économique et je cite: "Ce qui
est encore plus important, c'est que la déclaration du gouvernement
québécois contient une politique valable pour la création
de nouvelles entreprises. Elle met l'accent sur trois principaux domaines: les
retombées industrielles des grands projets, l'aide financière et
technique aux services de pointe et le programme d'assistance
préférentielle aux entreprises électroniques et
biotechnologiques. Pour conclure, le document nous dit ceci: C'est le
Québec qui, probablement, dispose de la gamme de moyens - les gens qui
nous disent qu'on est uniquement des penseurs et qu'on ne passe pas à
l'action, au contraire on apporte des moyens d'action - c'est
le Québec qui, probablement dispose de la gamme de moyens
concrets, de programmes pour aider effectivement les entreprises et
créer de l'emploi. C'est le Québec qui dispose de la gamme de
moyens - dit le document du Conseil des sciences du Canada - les plus
diversifiés pour mettre en oeuvre une stratégie
industrielle."
M. le Président, il est temps qu'on s'ouvre les yeux et qu'on
reconnaisse les efforts considérables du gouvernement, la performance de
nos milieux d'affaires et de nos entreprises. Ce n'est pas surprenant
qu'actuellement nous ayons la meilleure performance dans le Canada concernant
les investissements et concernant la création d'emploi.
Le Président (M. Beauséjour): Merci, M. le
député de Chauveau. La parole est au député de
Laporte.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Nous parlons toujours
ce matin d'emplois au Québec, du moins de ce côté-ci. Le
gouvernement s'est distingué depuis quelques années par ses
contre-performances dans le domaine des emplois. On a parlé tout
à l'heure de la Côte-Nord et de l'amiante; il y a une autre
société d'État où le gouvernement a fait des
prétendus miracles, c'est la Raffinerie de sucre du Québec. On va
peut-être en dire quelques mots. C'est un organisme qui avait
été formé dans les années quarante par un
gouvernement libéral et qui menait une petite vie tranquille dans la
région de Saint-Hilaire, ne faisait pas beaucoup d'argent et même
en perdait un peu chaque année, mais qui faisait quand même en
sorte que la région se maintienne sur le plan économique. Or,
notre bon gouvernement, tout à coup, dans ses rêves de grandeur, a
décidé, au début des années quatre-vingt, qu'il y
avait une mission mondiale pour le sucre au Québec et a
décidé d'investir des millions de dollars, un programme de 55 000
000 $ d'investissements dans la raffinerie du sucre. Aujourd'hui, à la
fin de l'année financière 1982-1983, les investissements du
gouvernement sont de 67 800 000 $ dans la Raffinerie de sucre du Québec
avec des engagements pour 9 000 000 $ pour les deux années
financières suivantes. (11 h 45)
Or, je voudrais citer un article du journal La Presse, d'Alain Dubuc, un
chroniqueur financier très réputé et qui dit justement que
les problèmes ont commencé quand on a décidé de
tripler la capacité de l'usine avec un investissement de 55 000 000 $
visant à développer cette culture excellente pour les sols. Il
parle de cette décision comme un aveuglement bureaucratique qui
mène à des monstres comme Canadair ou SIDBEC et on pourrait
ajouter la Société nationale de l'amiante ou même
Quebecair. Après de nombreuses tergiversations... La conclusion du
journaliste - je sais que le temps est limité, je ne peux pas lire tout
l'article - c'est: Au-delà des pratiques de cow-boy, c'est un non-sens
économique. Il est bon que le Québec diversifie ses cultures et
augmente son autosuffisance. Mais est-ce logique, dans les secteurs où
l'on sera toujours perdants comme les ananas, les noix de coco ou le sucre?
Pourquoi ne pas se concentrer là où l'on peut exceller? Le
marché du sucre mondial est en perte de vitesse parce qu'on en consomme
moins. La concurrence est forte parce qu'il y a une surproduction. Nos
coûts sont beaucoup plus élevés que ceux des pays
producteurs de canne. C'est ainsi que la raffinerie a perdu 2 700 000 $ en
1983, mais cette perte ne tient pas compte du fait que la betterave est
subventionnée. Le prix mondial commanderait un prix de 15 $ la tonne de
betterave, on la paie ici 40 $. La différence tend à être
payée par l'assurance-stabilisation. Cela a coûté 4 600 000
$ l'an dernier. Le journaliste conclut: L'équation est sans issue.
M. le Président, la Raffinerie de sucre du Québec perd de
l'argent chaque année. On serait portés à penser qu'avec
des investissements aussi massifs que le gouvernement a décidé
d'y mettre - et on parle de 77 000 000 $ à la fin de 1983 -cela
emploierait beaucoup de monde au Québec. Or, croirez-vous, M. le
Président, quand on a cherché à savoir combien il y avait
d'employés dans cette immense raffinerie du sucre, le rapport annuel
1982-1983 - le dernier sur la table - nous indique qu'il y a 64 emplois
permanents dans cette société et quelques centaines d'emplois
saisonniers. Ce sont essentiellement des étudiants qu'on engage pour
ramasser des betteraves l'été. Voici le genre de placement dans
lequel le gouvernement investit les fonds publics.
Tout à l'heure, je parlais de Quebecair. Un autre bel exemple,
cette compagnie québécoise qui, jusqu'en 1981, avait
réussi à vivre et à servir son public des régions
du Québec, sans créer de déficit et sans faire de gain non
plus. Une année un petit déficit, une année un petit gain,
la compagnie, bon an mal an, rendait de bons services aux
Québécois et faisait ses frais.
Quand notre bon gouvernement a décidé qu'il y avait un
avenir pour le gouvernement du Québec dans Quebecair et qu'on devait en
faire une grande société, on a investi des fonds massivement.
Aujourd'hui, on serait rendu à environ 75 000 000 $. C'est difficile
à dire parce que le gouvernement a mis un écran depuis un an ou
deux entre le ministère des Transports et la société
Quebecair. On a formé la Société nationale des
Transports qui sert d'écran entre les deux. Aujoud'hui, on se
promène encore dans les mêmes avions, les BAC 1-11 que Quebecair
avait avant que le gouvernement injecte les 75 000 000 $. On n'a pas
changé d'avion, ce ne sont pas des avions chromés, ce sont les
mêmes vieux avions qu'on avait avant et on a dépensé 75 000
000 $. De plus, les emplois n'ont pas augmenté à Quebecair non
plus, même que ça a diminué l'an dernier.
Quelle sorte de gouvernement a-t-on là? Il investit dans
centaines de millions de dollars à gauche et à droite dans
l'amiante, dans le sucre, dans Quebecair pour ne créer aucun emploi
mais, au contraire, pour créer des trous. C'est le genre de gouvernement
qu'on a et ce n'est pas surprenant, aujourd'hui, qu'on soit en déficit
en ce qui concerne les emplois par rapport à l'Ontario. Merci.
Le Président (M. Beauséjour): Merci, M. le
député. Pour conclure, maintenant, M. le ministre, vous avez dix
minutes.
Conclusions M. Rodrigue Biron
M. Biron: M. le Président, je vous recommanderais de faire
un cours très court au député de Laporte pour lui
enseigner, concernant les sociétés d'État dont il a
mentionné l'existence tout à l'heure, de quel ministre elles
relèvent, parce qu'il s'est trompé de commission parlementaire.
Il n'a pas nommé une seule société d'État qui
relève du ministère de l'Industrie et du Commerce. Ou le
député de Laporte ne travaille pas ses dossiers de l'Industrie et
du Commerce ou tout simplement il travaille les dossiers ailleurs et il n'a
absolument rien à reprocher au ministère de l'Industrie et du
Commerce là-dessus.
Je vais lui faire comprendre quelque chose. Le député de
Laporte se plaint de l'intervention du gouvernement dans certaines
sociétés d'État. D'un autre côté, on
décide de fermer une socité déficitaire, SIDBEC-Normines,
pour laquelle l'homme invisible dont il ne veut pas mentionner le nom et
l'existence a signé un contrat, il y a déjà une dizaine
d'années; il nous a embarqués dedans et cela a coûté
600 000 000 $ ou 700 000 000 $ aux contribuables québécois. Si on
décide de fermer cela, la critique commence de son
côté.
Voulez-vous, s'il vous plaît, informer les gens autour de vous,
dans votre parti -vous devez les voir de temps à autre, au caucus - leur
dire de ne pas critiquer... M. le Président, passez donc le message au
député de Laporte qu'il passe le message aux gens de son parti de
ne pas critiquer si on ferme certaines sociétés d'État
déficitaires.
Pour l'information du député de Laporte, depuis que je
suis à la direction du ministère de l'Industrie et du Commerce,
il y a sept sociétés qui ont été vendues par la
Société générale de financement. Le gouvernement ne
veut pas s'impliquer dans les affaires si on juge qu'une entreprise
privée peut faire mieux que nous. On a vendu Tricots La Salle, on a
vendu Lac-des-Îles, on a vendu John Meunier, on a vendu Volcano, Forano,
BG Checo, une partie de Marine Industrie. Je pense que l'orientation globale et
générale du gouvernement du Québec, c'est de faire en
sorte d'être dans les sociétés d'État où il
faut absolument être. Je comprends qu'il faut être dans certaines
sociétés d'État et là, on n'a pas le choix, il faut
y être pour développer.
Par exemple, si le Parti québécois ne s'était pas
impliqué dans Domtar, il n'y aurait pas eu de développement au
Québec; là, il y en a beaucoup. Par contre, il y a d'autres
sociétés qu'on peut vendre à l'entreprise privée.
C'est la philosophie du gouvernement. Donc, c'est une stratégie de
développement dans ce sens.
En ce qui concerne ce qui nous intéresse particulièrement
aujourd'hui, la création d'emplois, le développement
technologique, le développement économique, les investissements
dans le domaine manufacturier, mon collègue de Chauveau, tout à
l'heure, mentionnait un rapport du Conseil des sciences du Canada qui dit que
c'est le Québec qui, probablement, dispose de la gamme de moyens la plus
diversifiée pour mettre en oeuvre une stratégie industrielle et
pour répondre aux besoins des chefs d'entreprise.
J'ai ici une lettre parmi les centaines que j'ai reçues
d'entreprises qu'on a aidées. Cela vaut la peine; cela n'a pas
été inventé sur un coin de table. On consulte les gens
dans le milieu; nous ne sommes pas invisibles. On consulte les gens, alors que
certaines personnes dans votre parti sont invisibles; vous ne voulez même
pas en parler: "L'automne dernier, vous invitiez les
bénéficiaires du plan Biron à une rencontre pour
évaluer la portée du programme et les commentaires des
entreprises. Nous vous avions exprimé notre appréciation et le
fait que, pour nous, l'oxygène de ce programme nous avait permis de
croître en doublant nos ventes et notre effectif de personnel de 65
à 140 entre 1982 et 1983. Nous poursuivons en 1984 aussi vigoureusement.
À cette rencontre, je vous suggérerais d'instaurer une assurance
contre les variations des taux d'intérêt. Je ne voudrais pas qu'on
recommence la folie des taux d'intérêt. Grande fut ma surprise de
constater que cette mesure existe maintenant dans le nouveau programme. Nous
avons pu ainsi refinancer à long terme une dette. Je désire
vous remercier sincèrement de l'ouverture d'esprit, de
l'initiative et du dynamisme qu'a connus votre ministère sous votre
gouverne. Je vous souhaite longue vie à ce poste."
Plusieurs chefs d'entreprise écrivent dans ce sens. Je peux
même vous mentionner des gens dans vos comtés respectifs, des
anglophones, je peux vous en nommer dans tous les comtés qui
m'écrivent en me disant: Bravo! Vous faites un excellent travail. Si le
gouvernement du Québec fait un excellent travail, c'est qu'on est
conscient de ce qui se passe au Québec et on consulte les gens. Cela se
traduit par des résultats concrets au point de vue de la création
d'emplois.
Quand on songe que dans le secteur manufacturier, on a
créé jusqu'à maintenant cette année au-delà
de 35% des emplois canadiens dans le secteur manufacturier, alors qu'on est
seulement 25% de la population. Notre performance dans le secteur manufacturier
est meilleure. Notre performance dans le secteur général de
l'économie de l'an dernier aussi est meilleure que le reste du Canada.
Dans ce sens, il faut reconnaître les actions du gouvernement du
Québec. Ce n'est ni par erreur, ni par accident qu'on a des
accroissements d'investissements manufacturiers énormes dans certains
secteurs.
Le député de Notre-Dame-de-Grâce nous parlait tout
à l'heure, à l'aide de ses tableaux, de l'industrie
métallique primaire. Quand on a presque 200% d'augmentation des
investissements dans les pâtes et papiers, les programmes mis de l'avant
par le gouvernement du Parti québécois, cela a été
extraordinaire. Cela n'a pas créé beaucoup d'emplois, mais cela a
sécurisé un nombre incalculable d'emplois dans tout le
Québec. C'est l'une des plus grandes industries du Québec que
l'industrie des pâtes et papiers.
Juste pour vous donner un autre tableau, M. le Président, sur les
immobilisations de fabrication encore. On a comparé les trois
dernières années depuis la crise économique qui a
tué l'économie au Québec et dans le reste du Canada
d'ailleurs, comment on est ressorti de la crise, nous autres, plus rapidement
que les autres. Entre 1981, qui était la pire année de la crise,
et 1984, regardez ce qui s'est passé, pour le reste du Canada: une
diminution de 40%; l'Ontario, 28%; les immobilisations au Québec:
augmentation de 26,8%. Le Québec se sort beaucoup mieux de la crise
économique parce qu'il est vrai qu'on a restructuré nos
entreprises. Il est vrai qu'on a eu des programmes de financement. IL est vrai
qu'on a eu toutes sortes de programmes à la SDI. Tout le monde
reconnaît que ie Québec est la meilleure province canadienne pour
cela. Je devrais vous donner la liste de tous les ministres des provinces
canadiennes qui viennent nous voir pour s'informer des programmes du
ministère de l'Industrie et du
Commerce, des programmes de la SDI pour aider les entreprises. Ce n'est
pas par accident non plus qu'on en arrive à une courbe comme
celle-là où on s'aperçoit que le Québec
réussit beaucoup mieux que l'Ontario et beaucoup mieux que le reste du
Canada au cours des dernières années. Nos programmes sont
ajustés aux besoins des entreprises après la crise
économique. La crise économique a frappé le Québec
comme elle a frappé les autres provinces canadiennes. Ce qui est
important pour nous, c'est d'en sortir.
M. le Président, je sais que le député de
Notre-Dame-de-Grâce va répondre avec son volume sur l'orientation
- je ne sais pas si ce sera l'orientation du Parti libéral... C'est
mieux que ce qui existait parce qu'il n'y avait rien au Parti libéral
auparavant; au moins, c'est mieux. Même si j'ai dit qu'il n'y avait pas
grand-chose, qu'on avait oublié les PME, qu'on ne voulait pas se servir
des richesses naturelles, que le secteur de l'automobile devait s'en aller en
Ontario, d'après le livre du Parti libéral. S'il ne faut pas
aller dans les secteurs traditionnels, je me demande dans quels secteurs on va
aller. Son chef dit: II ne faut pas avoir le régime
d'épargne-actions, donc il ne faut pas aider les PME à avoir ce
régime. Il faudra se poser des questions particulières
là-dessus. Quelle sera la protection que vous voulez donner aux secteurs
traditionnels? Voulez-vous conserver le textile, le vêtement, la
bonneterie, le meuble ou si vous voulez, comme vos grands frères
à Ottawa, que cela s'en aille complètement? Ce sont des questions
élémentaires, M. le Président, qu'il faudra se poser.
La question élémentaire qu'il faudrait savoir de la part
du Parti libéral du Québec, c'est: Quel est son programme de
développement d'un secteur traditionnel? Dans les secteurs de la haute
technologie, il nous dit: II faudrait prendre le virage technologique, aller
dans la haute technologie. Mon collègue, le député de
Châteauguay, a mentionné tout à l'heure qu'il y a une
centaine d'entreprises, dans les 18 premiers mois du programme à la SDI,
qui ont investi 150 000 000 $ dans la recherche et le développement. La
plupart sont de petites ou de moyennes entreprises. Il est important de voir
tout ce qui se fait. On le fait le virage technologique, on prend la haute
technologie, mais il faut aussi protéger les emplois dans certains
autres secteurs, les secteurs traditionnels.
Je voudrais savoir du Parti libéral, M. le Président, ce
qu'il va faire avec le cuir, avec le vêtement, avec le textile, avec le
meuble. Va-t-on développer ces secteurs comme le gouvernement du Parti
québécois les a développés? Si oui, le Parti
libéral dira bravo au Parti québécois. Va-t-on faire
l'exploitation et la vente de nos richesses
naturelles? Ce serait le temps de voir, M. le Président, ce que
va faire le Parti libéral. S'il nous dit: Oui, on va faire
l'exploitation et la vente de nos richesses naturelles pour créer des
emplois au Québec, il fera la même chose que le Parti
québécois; il faut qu'il dise bravo au Parti
québécois. Vous êtes correct, dans ce sens.
Que voudrait faire le Parti libéral, M. le Président,
vis-à-vis des secteurs traditionnels à forte capitalisation: la
pétrochimie ou l'automobile? Que fera-t-il là-dessus? Il faudrait
le savoir. S'il nous dit: On va protéger la pétrochimie, on va
essayer de développer l'automobile, c'est la même chose que le
Parti québécois. Il faudrait qu'il dise bravo au gouvernement du
Parti québécois et vous faites une mosus de bonne "job"
là-dedans. Il est important de savoir cela. Autrement, M. le
Président, on ne sait pas ce qui tient dans cette structure. Leur chef
est invisible et les gens de l'autre bord nous disent: N'en parlez pas. Il est
invisible et on ne veut même pas en parler. Il faudrait au moins savoir
ce que les gens ont dans la tête et ce qu'ils pensent de ce
côté.
À propos des jeunes - le député de Saguenay en a
parlé à quelques reprises tout à l'heure - aucune province
canadienne ni non plus le gouvernement fédéral n'ont de
programmes pour aider les jeunes entrepreneurs à se lancer en affaires.
Cela n'existe nulle part. Cela a été copié; cela faisait
partie des engagements électoraux des trois principaux partis
fédéraux. Les provinces canadiennes viennent nous voir, le
gouvernement fédéral vient nous voir pour savoir comment
fonctionnent nos programmes de fonds aux jeunes entrepreneurs. Ils nous
demandent: Vos "Bourses d'affaires", comment fonctionnent-elles? "UNI-PME",
comment cela fonctionne-t-il? "Outils de gestion", comment cela
fonctionne-t-il? Vos groupes de gestion communautaire et coopérative,
comment cela fonctionne-t-il? Qu'est-ce que vous faites pour aider les jeunes
à se lancer en affaires? On leur dit ce qu'on fait: on leur donne des
garanties de prêts, on leur donne des polices d'assurances contre
l'augmentation des taux d'intérêt. Mais des jeunes qui se lancent
dans la fabrication de produits thermoplastiques, dans la fabrication de
microprocesseurs, dans l'aménagement et le reboisement des forêts,
dans le service à l'exportation, dans la fabrication de robots, dans des
entreprises de production de croquis, de patrons et d'échantillonnages,
dans la mode, dans la fabrication de produits spécialisés pour
handicapés... Ces jeunes entrepreneurs que nous aidons à se
lancer en affaires - cela n'a existé nulle part ailleurs - le Parti
québécois en aide au-delà d'une centaine. 11 y a 500
personnes, d'ici la fin de mars, qui vont accepter de se lancer en affaires, ce
qui crée, en moyenne, sept emplois par entreprise. Ce ne sont pas des
moyennes ou de grandes entreprises; ce sont de petites entreprises. Ce sont les
actions bien concrètes que le gouvernement du Parti
québécois fait pour les jeunes, pour la création d'emplois
pour ces jeunes.
Le Président (M. Beauséjour): Merci, M. le
ministre. La parole est maintenant au député de
Notre-Dame-de-Grâce. M. le député, vous avez dix minutes
pour conclure.
M. Reed Scowen
M. Scowen: Merci, M. le Président. Nous avons
essayé, ce matin, de soulever une question importante, le sous-emploi
dans le secteur manufacturier, et nous en avons présenté une
analyse sérieuse. Je laisse à vous, M. le Président, et
à la population le soin de décider de la qualité de la
réponse qui nous a été donnée par le ministre et
par ses collègues.
J'ai surtout l'impression qu'ils ont agi en parti d'Opposition. Ils ont
pris comme principal argument la faiblesse d'un document que j'ai écrit
il y a quelques semaines et ils ont passé beaucoup de temps à
parler de M. Bourassa. Je dois vous dire quelque chose au sujet de M. Bourassa.
Vous croyez peut-être qu'il est invisible, mais je vous assure que, pour
la population du Québec, il n'est pas invisible. Il est partout au
Québec, partout à l'écoute de la population, et vous allez
voir les conséquences de ses activités quand vous convoquerez la
prochaine élection générale.
Quant à mon document, je pense que je vais utiliser les dix
minutes qu'il me reste pour en parler. Vous m'avez invité à le
faire, effectivement. Vous n'avez fait que le critiquer toute la
matinée. Je trouve qu'il y a, dans ce document, des
éléments de solution aux problèmes dont on parle. Je dois
d'abord dire que ce n'est pas une politique du Parti libéral, c'est un
document qui se veut une contribution au débat à
l'intérieur du parti. J'espère que cela va devenir le programme
du parti. Pour le moment, ce sont les idées d'un député de
l'Assemblée nationale. (12 heures)
Premièrement, je pense - beaucoup d'autres pensent aussi - que
cela doit être pris au sérieux. Je vais citer quelques
commentaires faits par des personnes neutres au sujet de ce document. M.
Fréderic Wagnière, dans la Presse, disait que cette étude
se livre à une réflexion qui est d'autant plus riche qu'elle se
rapporte à une réalité économique et politique et
qu'elle ne s'embarrasse pas de tabous idéologiques. Il ajoute: Le
gouvernement lui-même devrait y trouver plus matière à
réflexion qu'à critique. M. Jacques Dumais, dans le Soleil, dit:
M. Scowen n'invite pas moins ses collègues libéraux à se
rallier enfin à une politique économique réaliste et
novatrice
d'ici le congrès. Le débat qu'il propose tient davantage
de la politique sérieuse que de la politicaillerie inutile. M. Hugh
Anderson, dans la Gazette, disait: It is an admirable statement of the problems
but there are many of those more strikingly useful. It contains the ingredients
of a prescription for curing those problems that would certainly works if it
were ever administered.
M. Jean-Paul Gagné, du journal Les Affaires, a dit: La
stratégie économique proposée par M. Scowen est pertinente
et courageuse. Elle repose, cependant, sur un changement des mentalités,
ce qui deviendra possible quand la société comprendra mieux le
gaspillage des ressources humaines auxquelles nous a conduit notre insouciance
collective face à la nécessité d'être concurrentiel
en tout par rapport à nos partenaires commerciaux et concurrents.
Vous ne l'avez pas pris au sérieux. Vous êtes à peu
près les seuls. Je pense que vous faites une très grande erreur.
Je dois dire d'abord que ce n'est pas un document qui regarde le Parti
québécois. Je ne critique pas le Parti québécois
là-dedans. S'il y a des personnes qui s'intéressent à ces
questions, cela me fera plaisir de leur en envoyer une copie si elles me le
demandent.
Je veux simplement noter une chose en commençant. Je n'ai pas
mentionné une seule fois, dans ce document, les petites entreprises. Je
n'ai mentionné ni les moyennes ni les grandes. Je n'ai pas de
leçon à recevoir de M. le ministre concernant les PME. J'ai
été le président-directeur général d'une PME
pendant quinze ans. J'ai vécu toutes les expériences de la vie
économique et les problèmes d'une PME. J'ai parlé à
toutes les entreprises, à tous les travailleurs et à tous les
Québécois.
Je vais terminer mon intervention en lisant quelques citations de ce
document. Elles sont hors contexte, j'en conviens, mais elles sont beaucoup
moins hors contexte que les efforts que les membres du gouvernement ont faits
ce matin.
Je dis dans ce document, M. le Président, que la perspective de
celui-ci est fondée sur la conviction que, sur le plan
économique, les Québécois sont prêts à
accepter l'enjeu économique des pays démocratiques modernes,
qu'ils sont capables de réussir en se prêtant aux règles du
jeu qui s'imposent et que nous sommes profondément convaincus qu'en
acceptant pleinement ce défi, la création d'emplois de
qualité, pour tous les hommes, les femmes et les jeunes qui veulent
travailler au Québec, est possible et cela, dans un avenir
rapproché.
Je continue, en disant que l'emploi, ce n'est pas seulement un terme
dans un manuel d'économie. Pour la plupart des gens, c'est quelque chose
de tout à fait concret et de très important. Cela signifie avoir
la possibilité de gagner sa vie dans des conditions acceptables, savoir
qu'on a un emploi sûr, qu'il y en a d'autres qui sont disponibles, et
savoir que c'est vrai, non seulement pour nous, mais pour nos enfants et nos
amis. C'est la réponse à une aspiration humaine fondamentale.
Mais, je dis: II faut reconnaître que, dans la recherche d'emplois,
certains pays s'en sortent mieux que d'autres. Aujourd'hui, par exemple, le
taux de chômage est de 13% au Québec, de 9% en Ontario, de 7% aux
États-Unis, de 3% au Japon et de 1% en Suisse. Il doit y avoir des
raisons à cela.
Je continue en disant que - et ceci est très important - pour
n'importe quel pays, l'existence d'un haut niveau d'emploi et de
productivité est une condition essentielle à la création
d'une société civilisée. Un pays pauvre est un pays
injuste. Nous avons des exemples, sur tous les continents, pour confirmer cette
affirmation. Pour une société moderne, créer la richesse
est une activité aussi noble que celle de consoler les
défavorisés.
Je passe ensuite à la question de la compétitivité,
qui est la clé de la création d'emplois. Je dis: Si nous voulons
produire de grandes quantités de biens et de services, au Québec,
ce que nous produisons doit être vendu, et cela ne sera pas possible si
nos produits sont incapables de concurrencer des produits semblables
fabriqués ailleurs. Je pose la question - j'ai été
cité ce matin -Actuellement, sommes-nous compétitifs? La
réponse est claire: Nous ne le sommes pas. Il y a, bien sûr, des
secteurs où nous sommes compétitifs. C'est évident: il y a
beaucoup de gens au travail, au Québec. Mais, l'indication principale de
notre manque de compétitivité et, en fait, la seule dont nous
avons besoin, c'est qu'il y a près de 600 000 Québécois
aujourd'hui, 20% de notre population, qui ne réussissent pas à
trouver du travail. Ces gens ne trouvent aucun bien ni aucun service ou produit
qui ne soit acceptable et susceptible d'intéresser qui que ce soit
à l'étranger ou même ici au Québec. Trouver de
nouveaux emplois pour 600 000 Québécois peut sembler une
tâche désespérée. Il y en a quand même 130 000
000 au travail en Amérique du Nord. On n'a pas besoin de
récupérer tous les emplois. Il y a des choix que nous pouvons
faire.
Le premier pas est le plus difficile. Rechercher prioritairement comme
société la création d'emplois et convenir que, pour y
arriver, nous sommes prêts à faire le nécessaire pour
devenir concurrentiels sur les marchés internationaux. Nous avons
souvent parlé de cette nécessité. Jusqu'à ce jour,
nous avons refusé de l'accepter pleinement avec les conséquences
et les disciplines qu'il convient. Nous sommes en réalité les
victimes du gouvernement des autres régions
qui réussissent mieux que nous à apporter les
compléments nécessaires aux efforts de leurs secteurs
privés par des stratégies qui créent une économie
plus productive, plus rentable, plus concurrentielle. Notre gouvernement - je
le dis - n'est pas concurrentiel avec d'autres gouvernements. C'est la
clé du problème.
Je parle des services publics et je dis qu'il faut faire attention. On
veut se donner toutes sortes de choses. Les services et le type de protection
que nous voulons offrir à notre population ne doivent pas être
forcément les mêmes que ceux offerts dans les pays qui sont nos
concurrents. Si le coût au total dépasse leur coût, nous
devons accepter le fait que nous sommes en train de diminuer d'autant la
compétitivité de notre économie et qu'en
conséquence certains Québécois auront un jour ou l'autre
à payer le prix des services excessifs donnés par le
gouvernement; et le prix qu'ils vont payer, c'est leur emploi. Je vais toucher
deux autres sujets.
Le Président (M. Beauséjour): Cinq secondes.
M. Scowen: Cinq secondes. Je n'ai pas le temps d'expliquer ce que
j'ai dit au sujet des richesses naturelles, mais j'incite le ministre à
le relire parce qu'il va voir qu'il a déformé complètement
mes paroles. Je termine...
Le Président (M. Beauséjour): M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Je termine en remerciant le ministre de sa
présence, ce matin. Je regrette de ne pas pouvoir lire les conclusions
de mon document, mais ça va se faire une autre fois. Merci.
Le Président (M. Beauséjour): Je remercie tous les
membres de la commission. La commission de l'économie et du travail
ayant accompli son mandat ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 12 h 7)