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(Onze heures dix-huit minutes)
La Présidente (Mme Juneau): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Après avoir constaté le quorum, je déclare la
séance ouverte. La commission permanente de l'économie et du
travail reprend ses travaux pour procéder à l'étude
article par article du projet de loi 42, Loi sur les accidents du travail et
les maladies professionnelles.
Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le secrétaire?
Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. Mme
Dougherty (Jacques-Cartier) est remplacée par M. Maltais (Saguenay); M.
Kehoe (Chapleau) est remplacé par M. Paradis (Brome-Missisquoi) et M.
Maciocia (Viger) est remplacé par M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges).
La Présidente (Mme Juneau): Merci. Nous étions
rendus à l'article 53. L'amendement avait été
adopté hier et l'article 53 est maintenant en discussion.
M. Fréchette: Voilà. Il y a cinq articles qui ont
été laissés en suspens hier. Je suggère qu'on
continue de les laisser en suspens pour le moment jusqu'à ce que les
renseignements qu'on a demandés nous parviennent et qu'on continue la
discussion sur l'article 53. Les articles 47, 48, 50, 51 et 52, en suspens.
Article 53?
La Présidente (Mme Juneau): L'article 53 n'est pas encore
adopté.
M. Fréchette: L'article 53 est en discussion.
La Présidente (Mme Juneau): Oui, c'est exact. M. le
député de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Est-ce que je pourrais poser une question au
ministre? Dans l'argumentation que j'avais développée hier soir
au moment de l'article 53, j'avais soulevé toute la question de la
possibilité d'étudier la poursuite de la pension privée ou
du régime privé de retraite que les travailleurs pouvaient avoir
précédemment. Je sais que ça pourrait se . régler
éventuellement en ajoutant un article à l'article 221. Si j'avais
ça, je trouve que ça rendrait un peu moins odieuse la
portée de l'article 53, en tout cas pour un certain nombre de personnes.
Est-ce qu'il serait possible de rediscuter de la question dont on parlait hier,
à l'article 221, compte tenu des renseignements que le ministre aura
à ce moment-là?
M. Fréchette: Oui, je suis tout à fait
disposé à ce que la discussion reprenne au stade de l'article
221. D'ailleurs, il m'apparaissait que c'est précisément à
cet endroit que, fondamentalement, la discussion peut se faire. Je n'ai aucune
objection à ce qu'on laisse la question en suspens pour la reprendre
à l'article 221.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que ça voudrait
dire qu'on laisse cet article en suspens?
M. Fréchette: Non. On peut, cependant, continuer la
discussion sur l'article 53. Je ne comprends pas, dans la demande du
député de Sainte-Marie, qu'il souhaiterait qu'on laisse en
suspens l'adoption de l'article 53.
M. Bisaillon: Je n'ai pas proposé cela. M.
Fréchette: Alors, c'est ça.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur l'article 53? Est-ce que l'article 53 tel qu'amendé
est adopté?
M. Bisaillon: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): L'article 54?
M. Bisaillon: C'est dommage qu'on ne puisse pas dire que
c'était sur division.
M. Fréchette: Tenons donc pour acquis, Mme la
Présidente, que chaque fois cette remarque-là va vous être
soumise.
La Présidente (Mme Juneau): D'accord.
M. Fréchette: À l'article 54, je veux simplement
vérifier s'il y a des amendements. Il y a un amendement?
La Présidente (Mme Juneau): Je ne pense pas. L'amendement
de l'article 54 se lit comme suit: Remplacer dans la troisième ligne du
paragraphe 3, le nombre "65" par le
nombre "64".
M. Fréchette: Mme la Présidente, on vient de vous
remettre un papillon qui est strictement un amendement de concordance pour
remplacer le chiffre "65" par le chiffre "64". Quant au reste, il s'agit de
prévoir les conditions en vertu desquelles le paiement de
l'indemnité cesserait. Il y en a effectivement trois qui sont
prévues à la loi, soit: le moment où le travailleur
redevient capable d'exercer son emploi, avec les réserves que l'on
retrouve à l'article 45; le décès du travailleur et,
troisièmement, après son 68e anniversaire de naissance, le tout
conformément à ce qu'on vient d'adopter à l'article
53.
La Présidente (Mme Juneau): Oui, M. le
député de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: J'ai des questions de clarification avant de faire
des interventions. L'article 54 prévoit l'extinction du droit à
l'indemnité, premièrement, "lorsque le travailleur redevient
capable d'exercer son emploi." Cela réfère à l'article 45
qu'on a discuté hier, sauf qu'à l'article 45, lorsqu'on a
discuté de cela hier, il me semble que vous nous expliquiez que cela
durait au moins un an après.
M. Fréchette: "Sous réserve de l'article 45." C'est
dans l'article 45 que l'on retrouve la disposition à laquelle le
député de Sainte-Marie nous réfère. Alors le
paragraphe 1 de l'article 54 prévoit que l'indemnité de
remplacement du revenu cesse lorsque le travailleur redevient capable, sous la
réserve que l'on retrouve à l'article 45, donc conditionnellement
à l'application de l'ensemble de l'article 45.
M. Bisaillon: D'accord. Deuxième question...
La Présidente (Mme Juneau): M. le député, je
m'excuse. Avant d'aller plus loin, est-ce qu'on ne pourrait pas adopter
l'amendement de l'article 54 étant donné que c'est une
concordance avec l'article 53? Après cela, on pourrait aller de l'avant
avec l'article 54. Est-ce que vous êtes d'accord, M. le
député?
M. Fréchette: D'accord, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): Adopté.
M. Bisaillon: Deuxième question, Mme la
Présidente.- Lorsqu'on a discuté, hier, de l'exemple du
travailleur qui continuait à travailler après 65 ans et qui avait
un accident de travail à 66 ou 67 ans, vous m'aviez dit que, dans le cas
d'un travailleur qui aurait un accident de travail à 67 ans, il aurait
l'indemnité payée la première année et après
on appliquerait les mêmes barèmes du 25%, 50% et 75%. Est-ce que
le troisième paragraphe de l'article 54 n'empêche pas
l'application de ce dont vous me parliez hier?
M. Fréchette: J'ai l'impression qu'on doit arriver
à la conclusion tout à fait inverse à ce qui a l'air
d'être l'opinion du député de Sainte-Marie. C'est tout
à fait le contraire. Le troisième paragraphe de l'article 54, il
est là très précisément pour donner effet à
cette politique dont on parle, c'est-à-dire l'application d'une
indemnité lorsque l'accident arrive après l'âge de 65 ans,
pour que cet article reçoive sa pleine application et que l'objectif
soit atteint. Je ne sais pas ce qu'il y a dans le texte du paragraphe 3 de
l'article 54 qui amène le député de Sainte-Marie à
cette conclusion, mais, selon ma lecture à moi, c'est à la
conclusion tout à fait contraire qu'il faut aller.
M. Bisaillon: C'est au 68e anniversaire ou lorsqu'il a eu un
accident alors qu'il était âgé d'au moins 64 ans...
M. Fréchette: C'est cela.
M. Bisaillon: ..."4 ans après la date du début de
son incapacité d'exercer son emploi." Cela va.
M. Fréchette: C'est cela.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur l'article ' 54?
M. Cusano: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): L'article 54 est adopté
tel qu'amendé.
M. Bisaillon: Cela va.
La Présidente (Mme Juneau): L'article 55?
M. Fréchette: À l'article 55, il n'y a pas
d'amendement, Mme la Présidente. Essentiellement et rapidement, ce que
cet article prévoit - je signale qu'il est de droit nouveau, que cela
n'existe pas dans la loi actuelle - c'est de garantir au conjoint du
travailleur décédé un certain soutien financier pendant
une période de trois mois consécutifs au décès du
travailleur. Par rapport à l'état actuel des choses, il me semble
que c'est une amélioration pour le bénéfice du conjoint du
travailleur décédé.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Quelques questions pour comprendre un peu mieux ce que
veut dire l'article 55. Si la personne qui est absente de son travail
décède pour des raisons étrangères - pour quelque
raison que ce soit, on n'a pas besoin de les énumérer - il y
aurait un paiement de trois mois, d'après ce que je comprends, si elle
était en train de recevoir une indemnité de remplacement du
revenu. Est-ce cela?
M. Fréchette: C'est cela. Exactement.
M. Cusano: Cette indemnité continue pendant trois
mois...
M. Fréchette: Trois mois pour le conjoint. C'est cela.
M. Cusano: ...pour le conjoint. Comment la commission est-elle
avisée du décès de l'individu? Je pense qu'un des
problèmes qu'on avait soulevés concernant ces
décès, c'est qu'à un certain moment, pas par mauvaise
foi,.. Pardon?
M. Fréchette: Le cas de Longueuil.
M. Cusano: Non, il y avait plusieurs cas.
M. Fréchette: En tout cas, celui-là en
particulier.
M. Cusano: Y a-t-il des moyens qui sont pris? On ne demande pas
à la commission de vérifier si toutes les personnes qui
reçoivent des indemnités sont décédées
régulièrement.
M. Fréchette: En fait, la question que soulève le
député de Viau est importante, Mme la Présidente, et les
moyens pour arriver à éviter ce genre de difficulté ne
sont pas légion. Celui qui est utilisé par la Commission de la
santé et de la sécurité est de la nature d'une entente
avec l'institution bancaire avec laquelle la commission fait affaires. Cette
entente prévoit que l'institution bancaire, qui, de toute
évidence, va être informée du décès de
l'accidenté, va cesser d'honorer les chèques que la Commission de
la santé lui envoie lorsque arrivera ce décès. Cela, c'est
une façon de pouvoir connaître l'état de fait du
décès d'un accidenté. (11 h 30)
Mme la Présidente, le processus qui est observé dans une
situation comme celle-là est le suivant: la Commission de la
santé et de la sécurité du travail va émettre le
chèque d'indemnité payable à l'ordre de
l'accidenté. Évidemment, celui-ci va le recevoir et devra,
normalement, le négocier, c'est-à-dire l'endosser et, ensuite, le
présenter à sa caisse populaire ou à sa banque pour
recevoir les sommes qui lui sont dues ou alors le déposer à son
compte de banque purement et simplement. Dès lors, donc, qu'il y a
endossement du chèque, la commission, quant à elle, est
assurée que les montants qu'elle a payés, s'ils étaient
payés frauduleusement à cause d'un décès, lui
seront remboursés.
Si, par ailleurs, l'accidenté est décédé -ce
serait le cas prévu par l'article 55 - il n'y aura effectivement pas
d'endossement et le chèque ne sera présenté nulle part
pour être négocié. En conséquence, cela va
être un des éléments qui permettront à la Commission
de la santé et de la sécurité du travail de savoir que
l'accidenté est décédé.
Je présume, également, qu'il doit y avoir un nombre assez
considérable de cas où la commission est informée par la
famille ou par l'association syndicale à laquelle appartenait le
travailleur décédé ou, enfin, par tous les autres moyens
d'information qui sont normaux. L'employeur, par exemple, peut aussi informer
la commission que son salarié accidenté est
décédé.
Il y a aussi, dans la loi, une disposition - on va le voir plus tard -
qui oblige les gens qui reçoivent des indemnités à
informer la commission d'un changement de statut. Dans le cas du
décès d'un accidenté, c'est le conjoint qui se retrouve
dans un état de changement de statut. Au lieu d'être conjoint et
d'être admissible aux droits prévus par la loi, cette personne
devient une personne à charge; donc, il y a un changement de statut et
la loi l'oblige à informer la commission du décès du
travailleur accidenté.
M. Cusano: Si je comprends bien, c'est que les banques,
aussitôt qu'un chèque n'est pas endossé, en avisent la
CSST.
M. Fréchette: Si le chèque n'est pas
endossé, de toute évidence il n'est pas négocié non
plus à l'institution bancaire de l'accidenté, c'est clair que la
banque va informer la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, à un moment donné, que tel
chèque qui a été émis à telle date, à
l'ordre de tel individu, n'a pas encore été
négocié.
M. Cusano: Cela va. Selon les statistiques de la CSST - je ne
demanderai pas le chiffre précis - combien de personnes
décèdent pendant qu'elles reçoivent des
indemnités?...
M. Fréchette: Vous allez comprendre qu'il n'y a pas de
règle absolue à cet égard. Cela peut, de toute
évidence, varier d'une année à l'autre. Maintenant, si le
député de Viau me demande de lui faire une moyenne, disons, par
exemple, pour les cinq dernières années, je suis bien
disposé à essayer d'obtenir ce renseignement-là. Mais
il
va convenir avec moi qu'il n'y a rien d'absolu dans cette situation.
M. Cusano: Est-ce que le processus est le même lorsqu'un individu
qui a droit à l'indemnité de remplacement du revenu se trouve
à l'étranger? Y a-t-il des ententes avec différents pays?
Justement, je sais qu'il y a une entente, si je ne me trompe pas, entre le
Québec et l'Italie. Si quelqu'un retourne en Italie, par exemple, et
qu'il est en train de recevoir une indemnité de remplacement du revenu,
il continue à la recevoir. Quel est le mécanisme de ce
côté?
M. Fréchette: Deux solutions sont possibles, Mme la
Présidente. D'une part, comme vient de le dire le député
de Viau, des ententes avec des gouvernements étrangers peuvent
être conclues à n'importe quelle époque et pour n'importe
quels sujets à la condition, évidemment, que la loi soit
respectée. Deuxièmement - on me dit que cela se produit dans
certains cas - pour quelqu'un qui quitterait le Québec pour s'en aller
dans un pays étranger et qui, au moment de son départ, est
bénéficiaire d'une indemnité de remplacement du revenu ou,
dans l'état actuel des choses, d'une rente viagère, il y a
possibilité de procéder à capitaliser la rente.
Maintenant, l'article 128, deuxième paragraphe, prévoit ce genre
de situation, si je ne m'abuse. Voilà.
Je peux aussi donner tout de suite au député de Viau
l'information qu'il me demandait tout à l'heure. Il y aurait une moyenne
d'environ 125 bénéficiaires qui décéderaient chaque
année.
M. Cusano: C'est 125 au Québec. M. Fréchette:
Oui, oui, bien sûr.
M. Cusano: On ne parle pas de ceux qui sont à
l'étranger.
M. Fréchette: Ceux qui sont à l'étranger,
non. Pour ceux-là, il va se passer l'un ou l'autre des deux
phénomènes dont on vient de parler.
M. Cusano: Quelles sortes d'ententes, justement, existent
présentement entre la CSST - je prends l'exemple de l'Italie parce que
beaucoup de gens dans mon comté retournent là-bas pour une
période de temps - et les pays étrangers, comme la France ou
d'autres?
M. Fréchette: Mme la Présidente, la meilleure
réponse que l'on pourrait donner au député de Viau, ce
serait de procéder au dépôt de l'entente écrite, ce
que nous pourrions faire dès cet après-midi. S'il était
suffisamment patient pour nous attendre jusque-là, nous
procéderions au dépôt de cette entente.
M. Cusano: Oui, c'est bien. Je ne voudrais pas suspendre
l'article 55, Mme la Présidente. Selon les informations que je
possède - je peux me tromper; alors, j'aimerais bien qu'on m'informe de
ce côté -les paiements faits en Italie sont effectués aux
banques italiennes, aux banques reconnues en Italie. Est-ce que c'est cela?
M. Fréchette: Ce sont des questions importantes sans
doute, mais tellement particularisée, Mme la Présidente,
qu'entreprendre ici de donner des réponses, ce serait un peu
risqué, dans le sens qu'il faudrait voir au texte ce que l'entente
prévoit.
M. Cusano: Oui. Je voudrais bien que le ministre...
M. Fréchette: De toute façon, une chose est
absolument certaine, c'est que si l'on se réfère à une
entente, de toute évidence, cela fait l'affaire de tout le monde. Tout
le monde est satisfait si on signe une entente.
M. Cusano: Oui, mais l'entente ne veut pas nécessairement
dire qu'il y a des moyens de contrôle. Je voudrais qu'on soit très
clair sur cet article. Sur le principe de continuer l'indemnité pendant
trois mois à la veuve ou aux enfants de la personne qui reçoit
une indemnité du remplacement de revenu, je suis complètement
d'accord. Peut-être me direz-vous que c'est une question qui
relève de la CSST et de son fonctionnement, mais je me préoccupe
des mesures de contrôle justement pour que ce paiement soit fait à
des personnes qui y ont droit, c'est tout. Si la personne est à
l'étranger, par exemple, est-ce qu'elle occupait un emploi à
l'étranger tel quel? Est-elle en train de recevoir une indemnité
de remplacement du revenu chez nous? En même temps, si elle se trouve un
autre emploi là-bas, ça devient un peu rentable, le
système. Lorsqu'on arrive à un décès, c'est une
autre affaire, mais c'est toute cette question de contrôle pour ceux qui
se trouvent à l'extérieur, même si ce n'est pas un chiffre
énorme.
Premièrement, j'aimerais bien prendre connaissance de ces mesures
de contrôle qui existent et est-ce que le ministre permettrait - je n'ai
aucunement l'intention de suspendre l'article 55 - au moment où cesera déposé, un peu de temps pour discuter de l'entente?
M. Fréchette: Je n'ai, évidemment, aucune
espèce d'objection, Mme la Présidente, à refaire la
discussion à un autre moment, particulièrement au moment
où nous serons en possession du document. De surcroît, lorsque
nous arriverons aux articles qui prévoient la signature de
semblables
ententes, on pourra, de toute évidence, faire la discussion.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 55 est
adopté?
M. Fortier: Adopté. M. Cusano: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): Adopté. L'article 56?
Nous avons un amendement. C'est marqué article 56 et 57, M. le
ministre.
M. Fréchette: Oui, bien, c'est ça.
La Présidente (Mme Juneau): Cela veut dire les deux
ensemble.
M. Fréchette: C'est pour les renvoyer ailleurs.
Le Secrétaire: On peut dire qu'il est convenu
d'étudier simultanément les articles 56 et 57.
M. Bisaillon: À l'article 170? M. Fréchette:
C'est cela.
M. Bisaillon: Ce n'est pas nécessaire de faire un
amendement à 56. Je veux dire que ce n'est pas un amendement à
l'article.
M. Fréchette: Non.
M. Bisaillon: II s'agit de reporter l'article plus loin et de le
renuméroter ultérieurement. Donc, on pourrait le suspendre.
M. Fréchette: Les supprimer, purement et simplement,
à cet endroit-là.
M. Bisaillon: Ou supprimer l'article 56.
M. Fréchette: Les articles 56 et 57. C'est ce que propose,
d'ailleurs, l'amendement, de supprimer les deux articles pour les retrouver
dans le chapitre des programmes de réadaptation.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que je vais lire
l'amendement, à ce moment-là?
M. Bisaillon: Le programme de réadaptation, article...
La Présidente (Mme Juneau): Je vais lire l'amendement,
dans ce cas-là. "Supprimer la sous-section 2 de la section I du chapitre
III, comprenant les articles 56 et 57." Est-ce que l'amendement est
adopté?
M. Bisaillon: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): L'article 58?
Paiement par l'employeur M. Bisaillon: II y a un amendement.
La Présidente (Mme Juneau): II y a un amendement aussi.
L'amendement à l'article 58 se lit comme suit: Ajouter à la fin
l'alinéa suivant: "L'employeur verse ce salaire au travailleur à
l'époque où il le lui aurait normalement versé."
M. le ministre.
M. Fréchette: Je vois le député de Frontenac
qui demande la parole. Je me préparais à donner quelques
explications très brèves.
M. Grégoire: Je voulais juste une explication.
Peut-être que vous allez la donner; alors, je vais vous laisser
aller.
M. Fréchette: Dans l'état actuel de la loi, Mme la
Présidente, il y a une disposition qui prévoit un délai de
carence d'une journée avant que l'indemnité débute ou soit
payée à l'accidenté. Ce que l'article 58 vise, son
objectif, c'est de faire en sorte que ce délai de carence soit
éliminé. Dans le cas où un accidenté devrait
s'absenter de son travail pour une partie de la journée - il a, par
exemple, une coupure ou, enfin, une blessure mineure, mais qui l'oblige quand
même à sortir de l'endroit de son travail et à aller
à l'hôpital pour un traitement d'urgence rapide; cela prend une
demi-journée et il revient l'après-midi à son travail - ce
que cet article 58 vise, c'est de faire en sorte qu'il soit indemnisé
pour la période de temps pendant laquelle il a été absent,
ce qui n'existe pas actuellement pour la première journée. (11 h
45)
L'amendement qu'on vient de soumettre aux membres de la commission fait:
également en sorte que cette indemnité lui sera payée en
même temps que le prochain salaire qui lui est dû. Je pense que
cela résume...
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Frontenac.
M. Grégoire: C'était juste pour demander une
information au ministre sur un mot. On dit: "lui verse son salaire net pour la
partie de la journée." Depuis le début, on prend le salaire net
ou brut; quand on parle du salaire net, c'est les impôts déduits.
Est-ce que c'est encore cela que cela veut dire? Est-ce que, pour une partie
d'une journée, on lui verserait cela net?
M. Fréchette: Ce que l'on vise dans
l'article 58, Mme la Présidente, c'est à indemniser
l'accidenté exactement de la même façon qu'il aurait
été payé s'il eût été au travail.
C'est cela, l'objectif de l'article 58 pour cette période de temps qui
ne vise que des portions de journée ou possiblement une journée
complète, mais uniquement la première journée de la
lésion.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Frontenac.
M. Grégoire: Ce que je veux savoir, par rapport à
l'impôt pour cette seule journée, est-ce que c'est le salaire net,
impôt déduit?
M. Fréchette: Oui, toutes déductions faites:
assurance-chômage, impôt; il y en a une troisième, la
Régie des rentes, je pense.
M. Grégoire: Maintenant, si c'est pour une journée,
M. le ministre, vous ne trouvez pas que, lorsque cet employé va venir
faire son rapport d'impôt à la fin de l'année, cela va
entraîner des complications beaucoup plus que...
M. Fréchette: Les déductions sont faites,
normalement, quand il va être payé.
M. Fortier: À ce moment, Mme la Présidente,
pourquoi parler de salaire net? On serait mieux de dire: lui verse son salaire;
c'est le salaire normal. J'ai été président d'une
compagnie et on payait le salaire jusqu'à une semaine, mais, à ce
moment, c'est le salaire normal. Ce n'est pas le salaire net, c'est le
salaire.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau.
M. Fortier: Le salaire sur la même base qu'il est
payé normalement.
La Présidente (Mme Juneau): Excusez. M. le
député de Viau.
M. Fréchette: D'abord, il y a une définition du
terme "salaire net". Le rationnel qu'il y a derrière cela, c'est que,
s'il avait été au travail pendant cette période, il aurait
reçu un salaire net aussi, c'est-à-dire un salaire après
les déductions normales qui sont faites lorsqu'on est payé pour
une semaine de travail.
L'article 61 pourrait peut-être nous aider. Voilà,
après déduction des impôts, après déduction
de la cotisation à l'assurance-chômage et après
déduction de la cotisation au Régime de rentes du Québec,
c'est ce qu'il recevrait s'il n'avait pas été victime d'accident,
s'il était resté au travail. C'est ce salaire net dont on parle
à l'article 58.
M. Grégoire: Sur sa feuille de paie, il va être
calculé que l'impôt a été déduit...
M. Fréchette: Bien oui.
M. Fortier: De la même façon.
M. Fréchette: Bien oui, exactement.
M. Grégoire: Pourquoi avez-vous employé le
terme...
M. Fortier: Autrement dit, il n'y a aucun changement.
M. Fréchette: Aucun changement. Absolument aucun
changement.
M. Fortier: La compagnie pourrait peut-être faire deux
chèques, mais ce serait son problème.
M. Fréchette: Le quantum de l'indemnité sera
toujours l'équivalent du salaire auquel, normalement, il aurait eu
droit.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Juste quelques explications sur l'article 58. Si je
lis l'article 58 avec l'article 59, je voudrais demander au ministre: Ce
montant qui est déboursé par l'employeur, est-ce qu'il est
recouvrable? Est-ce que la CSST va lui rembourser ce montant?
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: II est très certainement recouvrable
pour les quatorze jours, mais pour la première journée...
M. Cusano: Je ne parle pas des quatorze jours, M. le
ministre.
M. Fréchette: Je sais, j'ai compris.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: L'information que l'on me donne, Mme la
Présidente, c'est que, effectivement, on retrouvera, pour cet article
58, le même mécanisme que celui que l'on retrouve à
l'article 59, c'est-à-dire que, s'il devait s'avérer,
après constatation médicale, constatation d'autre nature, qu'il
n'y a pas, effectivement, de relation de cause à effet entre l'absence
et un accident de travail présumé au moment où
l'accidenté quitte, il pourrait, effectivement, y avoir l'exercice de la
répétition de l'indu.
M. Cusano: Ce n'était pas tout à fait cela, ma
question. L'article 59 dit que l'employeur aura à verser le paiement des
14 premiers jours et que ces montants reliés aux 14 premiers jours
seront remboursés par la commission. Est-ce que je dois comprendre que
par l'article 58 c'est la même chose, que l'employeur pourra
réclamer, justement, les montants qu'il aura versés...
M. Fréchette: De la commission?
M. Cusano: ...de la commission ou est-ce, dans un sens, une
charge additionnelle à l'employeur? Le montant est
déboursé à l'origine par l'employeur sur une absence,
mettons, d'une vingtaine de jours. L'accident est survenu le matin. L'employeur
va payer le reste de la journée. Ce montant-là pour la
première journée n'est pas récupérable. Je ne parle
pas de mauvaise foi, de fraude ou quoi que ce soit, mais justement d'un
accident mineur lorsque l'individu a besoin d'aller à l'hôpital.
L'employeur paie la totalité ou partie de cette première
journée, mais ne peut pas se faire rembourser pour ce montant. Est-ce
bien ce que l'article dit?
M. Fréchette: L'interprétation du
député de Viau est la bonne. L'employeur qui aura payé ou
indemnisé un accidenté pour une partie de journée ou pour
toute la première journée d'absence de l'accidenté ne
pourra pas réclamer le remboursement de ce montant à la
Commission de la santé et de la sécurité. La seule
situation dans laquelle l'employeur pourrait exercer un recours de
répétition de l'indu, ce serait celle qui l'amènerait
à la conclusion qu'il n'y a pas, encore une fois, de relation de cause
à effet entre l'accident et l'absence ou, pour utiliser les termes du
député de Viau, la conclusion à laquelle en arriverait
l'employeur qu'il a payé à la suite de fausses
représentations, de dol, de fraude ou, enfin, de situations de ce
genre-là.
M. Cusano: M. le ministre, la question de fraude, cela ne
m'inquiète pas parce que je suis sûr que, soit la CSST ou les
employeurs, s'ils sentent qu'il y a un peu de fraude quelque part, vont essayer
de régler cela à leur façon. Laissez-moi poser la question
suivante. Que se passe-t-il présentement, sous la loi actuelle?
M. Fréchette: Sous la loi actuelle, il y a toutes sortes
de situations qui peuvent se produire. Prenons la situation prévue par
la loi. La loi actuelle sur les accidents du travail prévoit un
délai de carence d'une journée. L'employeur qui prendrait la
décision de ne pas indemniser partiellement ou totalement la
première journée d'absence prendrait une décision qui,
à mon sens, est tout à fait légale et juridique.
Il y a, par ailleurs, dans la pratique de tous les jours, des employeurs
qui, malgré les dispositions de la loi, vont décider d'indemniser
quand même. Une troisième situation qui peut exister, c'est que ce
genre de chose soit négociée entre les parties et se retrouve
à l'intérieur des conventions collectives. Là, vous seriez
en face d'une convention collective qui prévoit des conditions plus
avantageuses que la loi elle-même et, en conséquence, tout cela
serait parfaitement légal.
M. Cusano: M. le ministre, qu'il y ait une entente collective de
signée, ce n'est pas cela qui est l'objet de ma question. Moi, je
voudrais bien qu'on comprenne. Ici, mon interprétation est que, par
l'article 58, maintenant dans le projet de loi, l'employeur aura, s'il n'y a
pas d'entente collective, à débourser le salaire pour - cela ne
peut pas être toute la journée; cela va toujours être une
partie de la journée parce qu'il faut qu'il ait commencé au moins
à travailler avant d'avoir son accident - cette journée. Ce n'est
pas recouvrable de la CSST tel que les quatorze premiers jours.
M. Fréchette: Exactement, c'est l'entendement que j'en
ai.
M. Cusano: Bon! Le nombre d'accidents d'une durée d'une
journée et moins - peut-être que l'adjoint du ministre pourrait me
le dire au lieu de me faire chercher cela dans le rapport annuel - cela se
chiffre à combien?
M. Fréchette: Autour de 140 000.
M. Cusano: 140 000.
M. Fréchette: Approximativement.
M. Cusano: Si on fait les calculs, 140 000 multipliés par
salaire moyen, cela veut dire un coût additionnel aux patrons de
combien?
M. Fréchette: On va essayer de faire le calcul. Encore
là, c'est fort embarrassant d'arriver à des chiffres absolus.
Vous pouvez avoir une absence d'une demi-heure, vous pouvez avoir une absence
d'une heure, vous pouvez avoir une absence d'une demi-journée et vous
pouvez avoir une absence d'une journée complète.
M. Cusano: Je présume qu'il ne peut...
M. Fréchette: Vous ne pouvez faire le raisonnement
suivant: 140 000 personnes qui, indépendamment des circonstances
précises de l'accident, se verront rembourser le salaire d'une
journée complète; ce n'est pas cela; la situation. Cela peut
être, comme je
viens de le signaler pour une demi-journée. Encore une fois, une
évaluation approximative rapidement faite nous amène à la
conclusion que ce serait un coût d'à peu près 2 000 000
$.
M. Cusano: Je crois que c'est peut-être un peu
conservateur.
M. Fréchette: Encore!
M. Cusano: Oui. C'est vrai, le premier ministre s'en vient. Cela
amène des coûts additionnels que la présente loi ne
prévoit pas, c'est exact.
M. Fréchette: C'est tout à fait vrai, Mme la
Présidente. La loi actuelle - je sais que je me répète -
ne contient pas une semblable disposition. Il y a des employeurs qui la paient
quand même et il y a des entreprises à l'intérieur
desquelles la convention collective prévoit que ce doit être
payé. Nous, on évalue que c'est 2 000 000 $, le coût global
de cela, mais pour les gens qui déjà payaient dans ce genre de
situation, pour les gens qui avaient négocié un mécanisme
comme celui-là, ce n'est pas un coût additionnel.
M. Cusano: Je suis d'accord avec vous sur cela, M. le ministre.
Le point où je veux en venir est que cela amène des coûts
additionnels à l'employeur. Lorsqu'on arrive pour nous dire, justement,
qu'au Québec on est rendu à un taux de cotisation de 1,89 $,
c'est beau, mais là on ajoute. Si cet article n'avait pas eu la
portée qu'il a et que le montant avait été recouvré
par l'employeur, le taux de cotisation n'aurait peut-être pas
été de 1,89 $; il aurait été un peu plus
élevé pour compenser, justement, le 1 000 000 $, les 2 000 000 $,
les 3 000 000 $ ou les 4 000 000 $ que les employeurs auront à
débourser. Je ne suis pas contre le principe de l'article qui dit que
l'accidenté doit être compensé pour la journée,
c'est sûr; ce n'est pas de cela qu'on parle. On ne parle pas du principe
d'être compensé pour sa journée. Où j'accroche,
c'est sur le fait que ce montant n'est pas recouvrable.
M. Fréchette: Ah oui!
M. Cusano: II ne l'est pas.
M. Fréchette: Vous avez droit d'accrocher sur cela, mais
je vous dis que c'est cela que la loi prévoit. Je vous dis que cela peut
entraîner des coûts additionnels qu'on évalue rapidement et
approximativement à 2 000 000 $, excepté qu'il faut tenir compte
que la pratique existe déjà à certains endroits et que des
conventions collectives prévoient aussi cette situation.
M. Cusano: Vous dites que les coûts seraient approximatifs,
que cela existe et que cela n'existe pas. Est-ce qu'on pourrait avoir des
précisions? L'article 58 va amener des coûts additionnels à
l'employeur et j'aimerais bien, avant de pouvoir me prononcer sur cet
article-là, savoir quels sont ces coûts que l'employeur aura
à supporter. (12 heures)
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: Le député de Viau est d'une
insistance remarquable.
M. Cusano: Toujours, M. le ministre.
M. Fréchette: Je n'ai pas d'objection à lui donner
la même réponse à la même question. Je vais essayer
de changer les formules de réponse, mais c'est toujours la même
question qui m'est soumise. J'ai essayé d'expliquer, mais il me semble
que je n'ai pas réussi, que l'état actuel de la loi ne
prévoit pas que l'employeur doive - en tout cas, il n'est pas contraint
de le faire -assumer le paiement d'une indemnité pour une partie ou pour
la totalité d'une première journée d'absence à la
suite d'une lésion professionnelle.
Le projet de loi 42, s'il était adopté, prévoirait
que, pour une partie de la première journée d'absence,
l'employeur doit indemniser le travailleur accidenté tout comme si
celui-ci avait été au travail. Je signale également que
cela occasionne des coûts additionnels évalués
approximativement à 2 000 000 $. J'ajouterai un élément
qui, jusqu'à maintenant, n'a pas été soulevé, mais
qu'il est important de lancer dans la discussion. Si le député de
Viau développe "une argumentation pour nous convaincre de la
nécessité d'inclure dans la loi une disposition en vertu de
laquelle l'employeur pourrait faire une réclamation à la
Commission de la santé et de la sécurité du travail dans
ces situations-là on se retrouverait avec un coût d'administration
d'environ le même montant. Alors, c'est à toutes fins utiles du
donnant, donnant, puis, en termes de cotisations, cela ne changerait
strictement rien.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va, M. le
député? Non, cela ne va pas.
M. Cusano: Je comprends que cela pourrait engendrer des
coûts administratifs. Justement, puisque les employeurs paient une
cotisation - qu'on appelle la mutuelle; le premier jour devient un peu le
montant déductible sur la prime d'assurance - est-ce que le ministre ne
pourrait pas songer à prendre les articles 58 et 59 et pour raison
d'administration à inclure cette partie de journée avec les
paiements des quatorze
premiers jours, s'il y a lieu, et que dans ce cas-là le tout soit
remboursable au patron?
M. Fréchette: Mme la Présidente, je ne
répéterai pas tout ce que j'ai dit depuis une demi-heure; je
ferais de la redondance purement et simplement superfétatoire, comme me
le souffle le député de Sainte-Marie. J'ajouterai, cependant, un
élément qui est nouveau, lui aussi. Quelque part plus loin dans
la loi, on va voir qu'il existe une disposition en vertu de laquelle
l'employeur ne sera plus obligé de déclarer les accidents de
moins d'une journée, très précisément à
cause de la disposition que l'on retrouve dans l'article 58. Alors, si l'on
doit retenir la suggestion du député de Viau, qui a l'air de
vouloir que la première journée soit également
"collectable", entre guillemets, à la Commission de la santé et
de la sécurité du travail, il nous faudra aussi,
évidemment, garder la disposition en vertu de laquelle l'employeur devra
se conformer aux exigences administratives de la déclaration d'un
accident qui a entraîné une absence d'une heure de
l'accidenté. Si on avait les employeurs devant nous et qu'on les
laissait choisir l'une ou l'autre des alternatives, je suis à peu
près convaincu de la réponse qu'on aurait. Ils nous diraient: On
va payer la première journée pour se "débarrasser", entre
guillemets, de cette contrainte administrative.
M. Cusano: Un autre question sur la...
La Présidente (Mme Juneau): Cela va, M. le
député?
M. Cusano: Non, cela ne va pas.
La Présidente (Mme Juneau): Non? M. le
député de Viau.
M. Dussault: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Juneau): Oui, M. le
député de Châteauguay.
M. Dussault: ...j'aimerais savoir de la part du ministre à
quel endroit dans la loi on dit ce que le ministre vient d'avancer que, pour un
accident d'une journée, selon l'expression employée par le
ministre, il n'y aurait pas de déclaration. Je veux savoir où,
mais je dois vous dire, M. le ministre, que cela m'inquiète un peu,
cette affaire.
M. Fréchette: On enregistre, mais il n'y a plus de
déclaration à faire à la commission.
M. Dussault: On enregistre. Il y aurait donc...
M. Fréchette: L'article 262.
M. Dussault: ...un possible suivi à partir de quelque
chose qui sera écrit.
M. Fréchette: Voilà: L'article 262.
M. Dussault: L'article 262. D'accord, merci.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Mme la Présidente, je présume, si
l'article reste tel qu'il est, qu'à la suite de l'absence,
l'accidenté aura à produire un certificat médical
attestant qu'il s'est bien blessé au travail.
M. Fréchette: Cela s'infère de la situation
elle-même. Deuxièmement, un peu plus loin - j'aurais des
problèmes à vous dire très précisément
à quel article - vous allez trouver que, lorsque le travailleur le peut,
avant de s'absenter dans un cas comme celui-là, il devra le
déclarer à son employeur. C'est l'article 249 qui prévoit
cette disposition.
M. Cusano: Le ministre ne veut pas, dans un sens, céder et
on ne peut pas prendre cet article et invoquer 51 000 raisons. Alors, on nous
dit que ce sera des coûts additionnels à l'employeur. Si la
commission avait à s'occuper de rembourser ces coûts additionnels
à l'employeur, on serait pris par des coûts administratifs. Je me
trouve dans une position assez difficile, à ce moment-ci,
personnellement, puisque je suis d'accord avec le principe que l'individu qui
est accidenté doit être compensé à la suite de sa
lésion pour le reste de cette première journée, mais, de
l'autre côté, on impose à l'employeur encore des
dépenses additionnelles.
N'y aurait-il pas moyen, pour faciliter la chose ici... Je ne peux pas
être pour et contre en même temps.
M. Fréchette: Ni pour ni contre, bien au contraire.
M. Cusano: Ce sont les peut-être de votre
côté, je pense. Je ne sais pas si mes collègues ont
d'autres questions, peut-être que je vais revenir par la suite.
La Présidente (Mme Juneau): La parole est au
député de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Mme la Présidente, je voudrais souligner
que, quant à moi, l'article 58 était une nette
amélioration par rapport à la loi actuelle, il prévoit une
possibilité que la loi actuelle ne prévoit pas. L'article 58 ne
fait, dans le fond, que procéder d'une pratique déjà
établie dans une bonne majorité d'entreprises, ce que font
habituellement nos
lois d'ailleurs. Les lois arrivent souvent pour confirmer une pratique
déjà établie. Le ministre a souligné tantôt
que déjà un certain nombre de conventions collectives ont
prévu la chose, qu'un certain nombre d'entreprises, qui analysent aussi
la question sous l'angle administratif même à l'interne de
l'entreprise, préfèrent faire abstraction de l'heure ou des deux
heures d'absence plutôt que d'avoir à traiter cette absence au
niveau administratif et la paient déjà. Dans ce sens, je pense
que l'article 58 ne vient que confirmer une pratique déjà
établie et accorde à l'ensemble des travailleurs subissant des
accidents mineurs des droits qui avaient été
négociés dans certaines conventions collectives.
On pourrait, évidemment, se poser la question sur les recours que
l'employé peut avoir si l'employeur ne payait pas. J'imagine qu'il y a
toujours les recours qui seront prévus par la loi en
général, sauf que, lorsqu'on sera rendu à cet article, je
reviendrai sur la question qu'avait soulevée en deuxième lecture
le député de D'Arcy McGee. Il y aurait un aspect
intéressant à regarder. Le travailleur qui doit se
défendre ou défendre ses droits et aller en appel sur toute la
question de la loi 42 va avoir à payer ses frais d'avocat, alors que
dans les cours habituelles la personne qui perd la cause se voit en même
temps obligée de défrayer les frais d'avocat de l'autre. C'est un
aspect intéressant que le député de D'Arcy McGee a
soulevé et qu'on pourrait déjà examiner pour pouvoir le
discuter à ce moment-là.
Je tiens aussi à souligner, Mme la Présidente, que, depuis
qu'on a commencé nos travaux ce matin, il y a deux articles, 55 et 58,
qui prévoyaient des choses intéressantes pour les travailleurs.
L'article 55 a été suspendu par le député de Viau
et l'article 58 pose de grands problèmes. Il a été
adopté?
La Présidente (Mme Juneau): L'article 55 a
été adopté.
M. Bisaillon: C'est une erreur. L'article 58 semble poser de
graves problèmes. Je voudrais rappeler l'intervention que je faisais
hier soir, à 23 h 45. J'ai l'impression que je ne m'étais pas
trompé. L'Opposition officielle est revenue dans la ligne droite, dans
le droit chemin du Conseil du patronat. On pourrait peut-être
suggérer au député de Viau de faire un amendement
général et de proposer plutôt qu'on examine chacun des
articles au plan financier et que si cela dépasse 500 000 $, on coupe
l'article. Autrement, on n'en sortira pas. Si on essaie d'examiner ce que
l'article 58 représente en termes de coûts, le ministre dit que,
globalement, cela représente 2 000 000 $, sauf que, dans ces 2 000 000
$, il y a déjà des choses payées par les employeurs parce
qu'ils les ont négociées ou parce qu'ils le paient
déjà. Il dit aussi: Si on obligeait l'employeur à le
déclarer, juste l'administration de cela, ce serait déjà
plus coûteux que ce que la différence peut représenter.
Je trouve qu'on tourne autour du pot quand on essaie de plaindre ces
pauvres employeurs qui, déjà, le font pour une grande partie. On
essaie de les plaindre parce que cela représente des coûts
additionnels. Il faudrait les regarder globalement et peut-être se rendre
compte que, globalement, on va peut-être arriver à des gains pour
les employeurs avec l'ensemble du projet de loi 42 tel qu'il est là. On
pourrait discuter sur les calculs. De son côté, le ministre dit:
Au total, le projet de loi 42 par rapport à la situation actuelle
représente 20 000 000 $ de plus. On pourrait peut-être arriver
à de calculs différents aussi et démontrer que,
globalement, il y aura peut-être des gains pour les employeurs. Si on le
fait article par article, en termes de coûts, je trouve que c'est une
mauvaise piste et que cela va nous empêcher à un moment
donné de discuter au fond d'avantages nouveaux ou du maintien
d'avantages - "avantages", entre guillemets -qu'on accorde actuellement aux
travailleurs.
Le Présidente (Mme Juneau): Cela va, M. le
député? M. le député de Beauharnois.
M. Lavigne: Mme la Présidente, mon argumentation a
déjà été utilisée.
Le Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Nelligan.
M. Lincoln: Mme la Présidente, par pure coïncidence,
hier soir, j'ai eu à donner une petite conférence à un
groupe d'hommes d'affaires de PME - ils étaient une cinquantaine - sur
toute la question de la taxe sur la masse salariale au Québec. Vous
savez, il y a eu de grosses études là-dessus: l'étude de
Lanctôt et Laliberté l'année dernière; j'ai devant
moi l'article de M. Henri-Paul Rousseau de septembre 1982 sur la
fiscalité et le commerce: "Le lourd fardeau des taxes sur la masse
salariale". (12 h 15)
II faut réaliser que cela devient quelque chose de crucial pour
la petite entreprise. Il faut voir la chose dans son ensemble. Ce qui est
arrivé, c'est que le maximum cotisable du salaire est passé, de
1975 à 1983, de 9000 $ à 29 000 $ pour la CSST; de 8000 $
à 29 000 $ pour la Commission des normes du travail. Si on continue
à alourdir le fardeau des entreprises par des règlements, par une
bureaucratie intense et par des cotisations additionnelles, il ne faut paspenser que cela va causer des problèmes à General Motors ou
à Bell Canada, mais la
création d'emplois dépend des PME. Je lisais un article,
l'autre jour, de la chambre de commerce qui disait: Je pense que nous avons 240
000 firmes du secteur privé qui produisent 75% du revenu productif du
Québec et, de ces compagnies, 96% sont des PME, dépendant de
là où vous situez la ligne. Toute cette question de taxes
commence à alarmer les gens, quand on arrive ici à un taux de
14%, dans certains secteurs, pour une firme de 200 employés par exemple,
contre 8,1% en Ontario. Il me semble qu'il faudrait voir à cela entre
l'article 58 et 59. Il y a aussi toute la question des quatorze premiers jours
qui a été soulevée par nous durant le débat. On
dit, la première fois, à l'employeur: Vous faites les frais de la
première journée. On dit aussi à l'employeur: Vous faites
les frais des quatorze premiers jours remboursables ensuite, mais c'est vous
qui faites la paperasserie, la bureaucratie, c'est vous qui faites les frais
des délais, les frais des intérêts. À un moment
donné, il faudra commencer à réaliser combien les petites
entreprises, qui sont réellement la vache à lait de notre
système industriel et économique, peuvent absorber. À un
moment donné, cela les rend non compétitives, cela nuit aux
investissements.
Tout cela est une partie d'un tout. On ne peut pas travailler en vase
clos. J'avais suggéré - et je crois que ce qu'a dit le
député de Sainte-Marie était tout à fait valable -
de regarder la question globalement. Peut-être qu'on devrait regarder
l'article 58 avec l'article 59 pour voir quel est l'impact sur les
sociétés des quatorze jours et du premier jour de paiement. On
dit, par exemple, qu'il en coûtera X millions de dollars à
l'industrie en général. Ce qu'il faut savoir, c'est comment cela
va être réparti, parce que X millions de dollars pour une grosse
multinationale comme l'Alcan, etc., cela s'absorbe bien facilement. Mais
quelques milliers de dollars en plus pour une entreprise qui,
déjà, a des problèmes de sous-capitalisation, d'existence,
cela ne favorisera pas la création d'emplois. En fait, c'est un cercle
vicieux. Si on essaie réellement de faire repartir la machine, de
créer des emplois pour que le travail se fasse au Québec, pour
qu'on puisse mettre les chômeurs au travail, il me semble que tout cela
fait partie d'un tout; il faut l'examiner avec beaucoup de - je ne dirai pas
sérieux parce je sais qu'on est tous sérieux ici - minutie pour
savoir vraiment ce que sont ces coûts. Si on démontre qu'il n'y a
pas de coût pour les petites entreprises, à ce moment-là,
nous n'avons pas d'objection. Il nous semble qu'il doit y avoir un coût,
d'après ce que j'ai pu lire et étudier.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre, voulez-vous
intervenir?
M. Fréchette: Non, je veux simplement indiquer au
député de Nelligan que je n'aurais pas d'objection à faire
ce débat entre l'article 58 et l'article 59, pas du tout, malgré
qu'on en ait fait un bon bout hier quand on a parlé de la situation
spécifique de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail au Québec. On l'a comparée
à certains autres organismes de l'extérieur. On a
évalué son taux de cotisation moyen par rapport à
l'extérieur. Mais je n'ai pas d'objection à refaire le
débat.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Je pense que le commentaire de mon collègue de
Nelligan s'inscrit dans la même ligne de pensée que ceux que nous
avons pu faire hier soir. Je n'étais pas là hier
après-midi. J'aimerais bien que le député de Sainte-Marie
tente de voir qu'on essaie tous de travailler dans la même direction. Je
suis allé chercher cette causerie qu'avait prononcée M. Pierre
Fortin, qui est du groupe de recherche en politique économique de
l'Université Laval, qui reprenait substantiellement ce que vient de dire
le député de Nelligan. C'étaient des gens, en 1983, qui
faisaient allusion à des études qui ont été faites.
Comme vous le savez et comme je l'ai indiqué hier, le même M.
Fortin est conseiller, présentement, du premier ministre en
matière économique.
Ce qu'il soulignait, c'était que, bien sûr, on peut faire
le débat sur la souveraineté, mais il indique: "Par contre, le
Québec est le principal responsable des contrats privés, de la
réglementation du travail, de l'impôt sur le revenu, des
impôts sur la masse salariale et l'investissement public et le seul
responsable de la politique éducative et du régime de retraite
public. C'est suffisant pour lui permettre d'avoir un impact déterminant
sur l'emploi et le développement économique".
On peut nous accuser de toutes sortes de choses, mais je crois que si on
est ici autour de la table, c'est que nous désirons, d'une part, assurer
aux travailleurs les meilleurs critères de santé et de
sécurité et la meilleure protection possible dans ce domaine et,
d'autre part, avoir une haute considération pour le développement
économique du Québec et surtout pour la création
d'emplois, comme l'a dit M. Fortin ici même. Il faisait, justement, trois
recommandations principales. La première, c'est d'apprendre à
pratiquer individuellement et collectivement la modération à la
flexibilité salariale. La deuxième, c'est de cesser de taxer et
de réglementer abusivement l'emploi. La troisième, c'est qu'il
faudrait que nos programmes d'emploi publics redistribuent efficacement
l'emploi en
faveur des groupes désavantagés.
C'est là où je rejoins peut-être certains
commentaires du député de Sainte-Marie; M. Fortin dit: "Avant que
la moitié de la salle ne se lève en taxant de
réactionnaire et de valet du Conseil du patronat, j'aimerais vous
souligner que ce principe fondamental est défendu aujourd'hui par les
principaux chefs socialistes d'Europe". J'aimerais bien qu'on arrête tout
de suite le débat de la façon dont il s'est engagé. En
taxant certains d'entre nous de valets du Conseil du patronat, on reprend
justement ce que disait M. Fortin en 1983 et c'est le même M. Fortin qui
est au bureau du premier ministre maintenant. Il y a des gens intelligents et
il y a des gens probablement qui partagent le point de vue du gouvernement. Si
M. Fortin a accepté de quitter l'enseignement à
l'Université Laval pour conseiller le premier ministre à temps
partiel, j'imagine que c'est parce qu'il partage certains points de vue du
gouvernement.
M. Bisaillon: Pas le premier ministre à temps partiel,
conseiller à temps partiel du premier ministre.
M. Fortier: Conseiller à temps partiel du premier
ministre. On a peut-être un premier ministre à temps partiel
aussi. Mais s'il a accepté de conseiller le gouvernement dans des
matières aussi fondamentales que la création d'emplois et qu'il
nous dit, dans des conférences passées et par des travaux qu'il a
faits, de faire attention à des points bien particuliers comme
ceux-là, si on reprend le débat, j'aimerais bien qu'on
arrête de s'accuser les uns les autres de protéger le patronat ou
même de défendre les employés.
Je crois que ce nous avons dit jusqu'à maintenant, ce que le
député de Viau a dit, ce que le député de Nelligan
a dit et ce que j'ai dit hier, c'est que, d'une part, il faut assurer la
meilleure protection possible, mais s'informer des coûts et, d'autre
part, s'inquiéter des coûts parce que toutes les études
économiques qui ont été faites nous disent qu'on peut
pénaliser l'emploi même au Québec. Autrement dit, on peut
créer plus de chômage en tentant de trop donner dans un secteur
donné.
Justement, je faisais allusion à cette étude où il
disait qu'il y a un écart entre le Québec et l'Ontario et encore
je le cite: "Or, au Québec, la taxe sur la masse salariale est
déjà de plus de 14% pour les salaires cotisables par comparaison
à 9% pour l'Ontario, notre principal concurrent. Mes collègues
Rousseau et Taurand, de l'Université Laval, ont récemment
calculé que chaque augmentation d'une unité de pourcentage de la
taxe sur la masse salariale au Québec détruisait environ 10 000
emplois principalement parmi les moyens et les petits salariés et parmi
les femmes."
Maintenant qu'on connaît des études qui n'ont pas
été faites nécessairement par des économistes
libéraux, mais par des économistes qui ont certains penchants
pour le gouvernement, mais qui sont des gens sérieux, je crois que les
parlementaires autour de la table ont le droit de poser des questions sur les
coûts globaux, tout en tentant de donner la meilleure protection possible
aux travailleurs qui, peut-être dans les années cinquante ou dans
les années soixante ou peut-être plus récemment, ont eu des
difficultés à faire reconnaître leurs droits dans le
domaine de la santé et de la sécurité.
Je voudrais prendre, moi aussi, la défense de mon collègue
de Viau et je ne voudrais pas qu'on tente de l'accuser lorsqu'il cherche
à connaître les coûts imputés à l'entreprise.
Quand on dit les coûts imputés à l'entreprise, à la
lumière des études faites par M. Fortin, il faut comprendre
également que ces coûts ont un impact considérable sur
l'emploi au Québec. Si, d'une part, il faut rechercher les meilleurs
moyens d'assurer la santé et la sécurité au travail,
d'autre part il faut également chercher les meilleurs moyens de
favoriser le climat qui va créer de l'emploi au Québec. Ce sont
deux contraintes que tout gouvernement éprouve -même le
nôtre aurait à vivre avec éventuellement - et ce sont deux
contraintes dont les parlementaires doivent discuter en toute
honnêteté et en toute objectivité.
Sur cette base, j'aimerais bien qu'on continue à discuter des
articles 58 et 59. Malheureusement, je n'ai pas en main les études que
j'aurais voulu avoir qui me démontreraient quels sont les coûts
exacts de ces deux articles en particulier, mais je crois qu'il serait
irresponsable de notre part et pour les travailleurs eux-mêmes de ne pas
soulever les questions posées présentement par mon
collègue de Viau.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Ce n'est qu'une mise au point, Mme la
Présidente, à la suite des propos tenus par le
député d'Outremont, pour replacer les choses dans leur contexte.
Je n'ai pas porté d'accusation; j'ai juste souligné, hier soir,
que le discours avait été modifié, que la façon
d'aborder le projet de loi n'était pas la même subitement depuis
hier soir. On avait, quand même, adopté 50 articles ensemble avant
et cela ne m'avait pas semblé le même genre de discours.
Par ailleurs, je ne m'oppose pas du tout et je trouve tout à fait
normal que l'on fasse ressortir à la fois les inquiétudes des
employeurs devant le projet de loi et à la fois les inquiétudes
des travailleurs devant le projet de loi. Je n'ai pas d'objection à cela
du tout. Je préfère, d'ailleurs, que ce soit
clair. Quand ce sont des inquiétudes d'employeur, j'aimerais que
ce soit dit comme cela et qu'on n'essaie pas de déguiser cela en une
protection du travailleur. C'est incompatible, ces choses-là. Si on veut
présenter les inquiétudes de l'employeur, qu'on les
présente, mais qu'on ne les justifie pas par l'intérêt du
travailleur. Ce sont deux choses différentes qu'on est justifié
de présenter à cette commission. Cela fait juste la
démonstration qu'il y a des inquiétudes des deux
côtés face au projet de loi.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Je n'accepte pas du tout les derniers propos du
député de Sainte-Marie. C'est exactement le contraire que j'ai
dit. En ce qui me concerne, je crois qu'il faut défendre les
intérêts des travailleurs pour assurer le meilleur
développement économique. Nous avons assez de chômage au
Québec; il faut, justement, prendre cette défense-là, pas
seulement de ceux qui travaillent, mais de ceux qui ne travaillent pas, non
plus. Je n'accepte pas du tout les insinuations du député de
Sainte-Marie, à savoir que nous représentons uniquement les
intérêts des employeurs. Au contraire, l'étude de M. Fortin
démontre clairement que soulever la question des coûts, dans le
fond, c'est prendre également la défense des non-travailleurs qui
se cherchent de l'emploi.
La Présidente (Mme Juneau): Ceci étant clair,
l'amendement à l'article 58 est-il adopté?
M. Cusano: L'amendement de M. le député de
Nelligan?
La Présidente (Mme Juneau): Non, l'amendement que j'ai lu
tout à l'heure, M. le député de Viau.
M. Cusano: Sur l'amendement, je n'ai pas de commentaire.
La Présidente (Mme Juneau): Adopté? M. Cusano:
L'amendement est adopté.
La Présidente (Mme Juneau): Adopté. Est-ce que
l'article 58 tel qu'amendé est adopté?
M. Cusano: Mme la Présidente, le ministre semblait
être réceptif au fait qu'on discute la totalité des
articles 58 et 59 et que peut-être, à la suite des discussions et
des arguments qui auront été apportés, on pourrait revoir
l'article 58. Est-il encore réceptif au fait qu'on parle des articles 58
et 59 en même temps et qu'on passe au vote après?
M. Fréchette: Mme la Présidente, je comprends
que...
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: ...la position du député de
Viau sur les deux articles est liée. C'est ce que je crois
comprendre.
M. Cusano: C'est que...
M. Fréchette: Ce que je disais au député de
Nelligan, quant à moi, c'était qu'entre l'adoption des articles
58 et 59 j'étais tout à fait disposé à faire le
débat de l'aspect économique, des coûts de l'actuel projet
de loi. J'essaie de voir pourquoi il nous faudrait suspendre ou réserver
l'adoption de l'article 58 après qu'on en a fait, me semble-t-il, une
large discussion et que tous ont eu l'occasion de s'exprimer sur ce contenu.
Cela n'empêcherait d'aucune espèce de façon que le
débat que souhaitent autant le député de Nelligan que le
député de Viau puisse se faire.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Nelligan.
M. Lincoln: Je crois, M. le ministre, que cela pourrait modifier
nos positions si nous voyons qu'il y a une corrélation entre les
articles 58 et 59 par rapport au coût à l'employeur. On parle de
la petite entreprise et on voudrait que ce soit situé plus clairement.
Alors, si vous pouvez nous montrer que le premier jour qui incombe à
l'employeur, à l'article 58, et les quatorze jours de paiement qu'il
aura à faire, à l'article 59, ne sont pas un fardeau trop lourd
pour une petite entreprise, c'est ce qu'on veut savoir. (12 h 30)
M. Fréchette: Mme la Présidente, nous
réserverions donc l'adoption de l'article 58 pour amorcer tout de suite
la discussion sur l'article 59.
La Présidente (Mme Juneau): II serait convenu d'abord, M.
le ministre, d'étudier simultanément l'article 58 et 59.
M. Fréchette: Encore. Oui.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va, M. le
député?
M. Fréchette: Mme la Présidente, quant à
l'article 59, je vais essayer, le plus rapidement possible, de faire le
résumé des motifs pour lesquels il est dans la loi.
D'abord, faisons le constat de la situation actuelle. La loi actuelle
prévoit que l'employeur doit assumer le paiement des cinq premiers jours
d'absence en accident de
travail. Par ailleurs, pour quelqu'un qui y regarde d'un peu plus
près, on va constater que les accidents de quatorze jours et moins
constituent entre 75% et 80% de l'ensemble du volume des 300 000 ou à
peu près accidents de travail qui sont généralement
déclarés à la Commission de la santé et de la
sécurité du travail.
À ce seul chapitre, sans travailler dans l'une ou l'autre des
boîtes de la CSST, l'on peut se faire une opinion, une idée de ce
que cela signifie, en termes strictement administratifs, d'être
obligé de traiter 170 000 à 180 000 accidents mineurs par le
canal habituel de la CSST. Ces accidents entrent dans la machine administrative
comme tous les autres et doivent être traités comme tous les
autres, avec toutes les implications que cela nécessite, par exemple,
affecter du personnel nombreux au traitement de ces réclamations,
s'équiper de façon informatique aussi pour arriver à
terminer les dossiers. C'est donc une charqe administrative absolument
spéciale, extraordinaire de traiter régulièrement ces
accidents. Il m'apparaît que c'est une première observation
à côté de laquelle on ne peut pas passer quand on prend la
décision ou, enfin, quand on suggère de retenir la formule qui
est prévue à l'article 59.
Deuxièmement, Mme la Présidente, convenons entre nous que
le texte de l'article 59 prévoit, d'une façon suffisamment
claire, qu'en tout état de cause, la Commission de la santé et de
la sécurité du travail devra rembourser l'employeur du montant
qui lui aura été payé pour les quatorze premiers jours
d'absence. Et quand j'insiste sur les termes "en tout état de cause",
c'est tout simplement parce que je veux attirer l'attention des membres de la
commission sur le fait suivant: que l'absence soit bien fondée ou pas,
l'employeur a droit à son remboursement.
L'autre considération importante que l'on doit garder à
l'esprit dans la discussion de cet article, Mme la Présidente, c'est que
le dernier paragraphe de l'article 59 prévoit la possibilité de
procéder à la répétition de l'indu pour le cas
où l'absence de quatorze jours n'aurait aucune relation avec un accident
de travail ou une maladie professionnelle. En d'autres termes, si la relation
de cause à effet entre l'accident invoqué et l'absence ne peut
pas être faite, le travailleur qui a été indemnisé
devra rembourser la commission qui, elle, aura remboursé
l'employeur.
J'attire immédiatement l'attention des collègues sur le
fait que, plaçant l'accidenté ou le travailleur devant
l'alternative qu'à un moment donné il doive rembourser si ce
n'est pas un véritable accident de travail, cela répond d'ores et
déjà à un argument qu'on va me servir tout à
l'heure en vertu duquel on va me dire: Quatorze jours vont entraîner une
incidence considérable sur l'augmentation du nombre d'accidents.
Par le sens commun des choses, il me semble que, si un travailleur sait
à l'avance qu'il va devoir rembourser le montant si son motif d'absence
n'est pas bien fondé, si le motif qu'il invoque pour s'absenter n'est
pas valable, si le motif qu'il invoque pour s'absenter est en relation avec une
excursion de chasse ou de pêche qu'il a planifiée, l'incidence sur
l'augmentation éventuelle de ces accidents mineurs va être
considérablement diminuée. En d'autres mots, je sais d'avance que
si, entre guillemets, je "prends une vacance", que j'essaie par la suite de
réclamer mon salaire pour un motif d'accident du travail et que je
n'arrive pas à en faire la preuve, je devrai rembourser le montant que
j'ai reçu. À moins d'être complètement
cinglé, je ne prendrai pas un semblable risque. À partir de
là, je suis d'avis, à tort ou à raison, que l'argument de
l'incidence de l'augmentation qu'on va me servir tout à l'heure n'est
très certainement pas aussi présent qu'on va le dire ou le
croire.
Maintenant, Mme la Présidente, entendons-nous bien, dans
l'état actuel des choses, les employeurs gèrent également
les accidents du travail de moins de quatorze jours. Ils doivent faire leur
déclaration à la Commission de la santé et de la
sécurité du travail. Ils sont astreints, actuellement, à
une certaine forme de bureaucratie.
Ce que l'article 59 prévoit, c'est la possibilité, pour
eux, de continuer de les gérer, mais à l'interne comme on va
gérer n'importe quel autre genre de maladie qui n'est pas de la nature
d'une lésion professionnelle. En retenant la disposition
prévue à l'article 59, il nous semble que cela ne va pas imposer
davantage de bureaucratie, mais que cela va le diminuer. Ce qu'on dit
essentiellement aux employeurs, s'ils ont le goût de le faire: Essayez de
gérer vos petits accidents comme vous gérez les autres accidents,
comme vous gérez les cas de grippe, comme vous gérez les autres
cas de maladies. C'est essentiellement ce que l'on dit à l'ensemble des
employeurs.
Mme la Présidente, j'ai compris, des observations du
député de Nelligan, que c'était à ce stade-ci qu'il
souhaitait que l'on fasse la discussion quant à l'aspect
économique de l'ensemble de la situation. Je lui réitère
que nous l'avons faite, hier, cette discussion.
M. Lincoln: Si cela a été fait, écoutez, je
n'ai pas envie de recommencer.
M. Fréchette: Maintenant, à moins qu'on ne me
dise...
M. Lincoln: Si le député de Viau est
satisfait, moi, je ne veux pas insister là-dessus, je
n'étais pas là hier soir.
M. Fréchette: J'ai compris, mais je ne veux pas non
plus...
M. Cusano: Lorsque le ministre dit qu'une analyse aété faite, je pense qu'il faut la clarifier.
M. Fréchette: Bon, alors, faisons-la, Mme la
Présidente.
M. Cusano: II me semble - il peut me corriger si je me trompe -
que dans tout ce qu'il nous a avancé, même dans les comparaisons
qu'il a faites avec les autres provinces, à aucun moment il ne nous aparlé des premiers jours qui étaient payables, justement, par
l'employeur et les différentes "Workmen's compensation boards" qui
existent à travers le Canada. Il a parlé de certains aspects,
mais cette question et les coûts qui seront engendrés par cela
n'ont pas été abordés, en ce qui me concerne.
M. Fréchette: Mme la Présidente, je n'ai pas
d'objection à ce qu'on amorce la discussion d'ordre économique
à partir des observations générales qu'ont soumises autant
le député de Nelligan que le député d'Outremont. Je
vous signale qu'il va y avoir, évidemment, de toute
nécessité de la répétition et de la redondance par
rapport au débat qu'on a fait hier. J'ai déjà
signalé aux membres de la commission que, quant à moi, je
souhaitais qu'on prenne tout le temps nécessaire pour faire la
discussion à fond de ce projet de loi, qu'on ne néglige rien et
que, s'il faut, encore une fois, qu'on se retrouve à Pâques ou
à la Trinité, moi je n'en ferai pas une jaunisse. Je suis, encore
une fois, disponible pour tout le temps que cela nécessite.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Duplessis m'avait demandé la parole. Je m'excuse.
M. Dussault: Une question de règlement, Mme la
Présidente.
M. Lincoln: Excusez-moi, madame. J'ai demandé la parole
bien avant le député de Duplessis.
La Présidente (Mme Juneau): Oui, mais je croyais que vous
l'aviez donnée au député de Viau tout à l'heure
dans votre intervention.
M. Dussault: Une question de règlement, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: Je voudrais savoir ceci: le temps qui sera pris pour
faire ce débat va se rattacher à quel article?
La Présidente (Mme Juneau): On est en train
d'étudier, si je ne m'abuse, les articles 58 et 59. J'imagine que cela
va être rattaché à l'étude de ces deux articles.
M. Fréchette: C'est ce que j'ai compris aussi.
M. Dussault: C'est ça. Mme la Présidente, c'est
pour cela que je pose la question, parce qu'avant qu'il y ait consentement
unanime de la commission pour transgresser d'une certaine façon nos
règles, j'aimerais savoir quelles sont effectivement les conditions dans
lesquelles on se retrouvera. Je voudrais savoir auquel des deux articles va se
rattacher le temps qui sera pris pour cela. Je ne veux pas présumer que
nos amis d'en face veulent nous faire perdre du temps, mais il est
arrivé souvent qu'on ait eu des raisons de se méfier; alors,
j'aimerais que cela soit clarifié.
La Présidente (Mme Juneau): Étant donné que
certains règlements nous allouent vingt minutes par
député, advenant qu'on étudie, comme on l'a dit tout
à l'heure, les deux articles ensemble, avec votre consentement, chacun
des députés pourrait avoir quarante minutes au maximum, si cela
vous convient.
M. Fréchette: Ce serait imputé à
l'étude des articles 58 et 59.
La Présidente (Mme Juneau): 58 et 59.
M. Cusano: II me semble qu'il y avait eu consentement de la part
du ministre pour qu'on prenne le temps nécessaire. Je ne pense pas que,
de notre côté, il y aurait une question d'abus. Maintenant, si le
député de Châteauguay veut qu'on s'en tienne à une
certaine limite de temps, il sera en contradiction avec ce que le ministre
vient de nous dire, parce que le ministre est prêt, lui, à prendre
le temps nécessaire
M. Fréchette: Le temps nécessaire prévu par
les règlements. Attention! Je ne suis pas en train de dire...
M. Dussault: Mme la Présidente, nous sommes dans un
nouveau régime parlementaire dans le sens que nous avons fait une
réforme et moi, je ne me sens pas lié par les propos que tient le
ministre à l'Assemblée nationale ou ici en commission, même
si je respecte profondément tout ce qu'il dit. J'ai, moi, un poids aussi
valable, aussi considérable que celui du ministre quand je parle ici en
commission. Le
ministre ne donne jamais son consentement pour moi. Il le donne pour
lui. Moi, si je pense qu'on va fonctionner d'une façon telle que cela
nous fasse préjudice, à nous les députés, bien, je
m'arrange pour que les conditions soient bien claires.
Je n'ai pas encore donné mon consentement là-dessus. Je
veux savoir à quel article, soit 58 ou 59, on rattachera le temps qui
sera pris pour cela. Je pense que c'est tout à fait légitime de
vouloir clarifier cela.
La Présidente (Mme Juneau): Oui. Mais il ne faut pas
perdre de vue, par exemple, que nous étions tous d'accord pour
étudier simultanément les articles 58 et 59.
M. Fortier: II y a eu consentement. Sur la question de
règlement, Mme la Présidente, moi, je pense que, si le
député veut soulever la question, c'est son libre choix, il a le
droit de le faire. Je crois que le consentement a déjà
été donné pour étudier les articles 58 et 59. Vous
avez suggéré que les vingt minutes s'appliquent pour chacun des
articles, donc quarante minutes chacun. Sur le plan du règlement, je
crois que le règlement s'applique. Peut-être qu'on va en prendre
beaucoup moins que cela. En tout cas, en ce qui concerne la question de
règlement, je crois qu'on peut en disposer de cette
façon-là.
La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le
député. La parole...
M. Fréchette: Je voulais simplement ajouter un commentaire
à celui du député de Châteauguay. C'est
évident que je viens de dire qu'il nous fallait prendre tout le temps
qu'il faut, mais je n'ai pas dit qu'il fallait balayer de la main les
règles de procédure qui nous régissent, par ailleurs.
À l'intérieur des règles de procédure qui nous
régissent, qu'on prenne tout le temps nécessaire, je suis tout
à fait d'accord, mais je n'ai pas "garroché" le règlement
au bout de mes bras.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Duplessis, le député de Nelligan m'avait demandé la parole
avant vous.
M. Perron: C'est sur la question de règlement, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): Ça va.
M. Perron: Dois-je comprendre, considérant que nous
étudions deux articles à la fois, c'est-à-dire 58 et 59,
que les membres de cette commission auraient droit à vingt minutes sur
chacun des articles...
La Présidente (Mme Juneau): C'est ça.
M. Perron: ...ou si c'est vingt minutes sur les deux articles?
(12 h 45)
La Présidente (Mme Juneau): Je vais vous lire l'article
238 des règles de procédure, M. le député, et cela
va vous renseigner. "Le temps de parole de vingt minutes dont diposent les
membres de la commission vaut pour chaque article". Étant donné
la convention que nous avons eue, tout à l'heure, d'étudier les
deux articles, il me semble qu'on pourrait vous accorder quarante minutes par
député pour l'étude des deux articles ensemble.
M. Perron: Maintenant, est-ce que je peux passer à la
question que je voulais adresser au ministre concernant les articles 58 et
59?
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Nelligan m'avait demandé la parole avant vous M. le député
de Duplessis. Je reconnaîtrai votre droit de parole tout de suite
après le député de Nelligan.
M. Lincoln: Très brièvement, tout ce que je
voudrais souligner, c'est que, s'il y a une perte de temps, c'est justement
cette discussion inutile du règlement. Je n'accepte pas les commentaires
du député de Châteauguay que les amis d'en face ont
l'habitude de perdre du temps. Je ne pense pas qu'on a perdu du temps. On a
travaillé très dur, très consciencieusement et je pense
que le ministre acceptera que le travail qu'on a fait a produit des amendements
qui ont été très valables jusqu'ici. Je ne pense pas qu'on
essaie de faire un "filibuster" là-dessus. Alors, on continue avec
cela.
M. Oussault: Une question de règlement, Mme la
Présidente. J'ai bien pris soin de dire: II est arrivé parfois
que et cela m'a rendu méfiant. Je n'ai pas dit qu'ils ont l'habitude de.
M. le député de Nelligan, peut-être, a l'habitude de
déformer les paroles des autres, mais ce n'est pas ce que j'ai dit.
Deuxièmement, Mme la Présidente, toujours sur la question
de règlement, je voudrais m'assurer qu'il n'est pas compris
présentement que je donne mon consentement pour faire un débat
qui pourrait s'avérer, peut-être en cours de route, comme
n'étant pas pertinent par rapport au projet de loi. Je voudrais qu'il
soit bien clair que, si cela devient non pertinent par rapport au projet de
loi, je vais le faire remarquer et qu'à ce moment mon consentement ne
tiendra pas pour autre chose que ce qui est pertinent.
Si, par exemple, on veut faire un débat fiscal à
l'occasion du projet de loi, je dis, immédiatement, Mme la
Présidente, que je ne suis pas d'accord et qu'à ce moment mon
consentement n'est pas acquis. Je voudrais
que ce soit bien clair.
La Présidente (Mme Juneau): Je vous remercie, M. le
député. Je remercie aussi le député de Nelligan des
précisions qu'il nous a apportées. Nous avons, en tout cas, dit
chacun ce qu'on pensait. Je pense que j'ai eu la collaboration de chacun
d'entre vous depuis le début des travaux. Je souhaiterais la
posséder encore pour continuer au moins dans l'harmonie...
M. Lincoln: D'accord.
La Présidente (Mme Juneau): ...s'il vous plaît. M.
le député de Nelligan.
M. Lincoln: M. le ministre, vous avez dit que 80% des cas sont de
quatorze jours ou moins, n'est-ce pas?
M. Fréchette: Oui, en effet.
M. Lincoln: Là-dedans, quel est le nombre de cas
d'accidents de un à cinq jours qui sont indemnisés, qui seront
maintenant la responsabilité des entreprises? Quel est le pourcentage
maintenant des un à cinq jours?
M. Fréchette: Le nombre d'accidents de un à cinq
jour?
M. Lincoln: En fait, vous pouvez voir cela, c'est indiqué
dans le rapport annuel de 1983, c'est 22% des cas, de un à cinq jours.
Ce qu'on ajoute à l'entreprise, c'est encore 13%. C'est six à dix
jours qui est 9% en plus et, ensuite, onze à quinze jours. Ici, on n'a
pas onze à quatorze jours; je suppose que c'est un petit peu moins.
Donc, c'est environ 12% à 13% des cas.
Si on admet que 80% des cas vont de zéro à quatorze jours,
d'abord la question qu'on se pose, c'est si la CSST se départit d'un
travail sur les 13% de cas qui représentent six à dix jours et
onze a quatorze jours - donc, 27 000 plus 12 000 égale 39 000 -
sûrement que la CSST pourrait nous dire quelle est l'économie qui
va arriver au contribuable par rapport au fonctionnement de la CSST à
qui il reste maintenant à s'occuper de seulement 20% des cas.
Cas inverse: vous dites qu'il n'y a pas de coût pour l'employeur
parce qu'il fait déjà la bureaucratie des cas de un à
quatorze jours, des petites maladies. Mais certainement qu'il y a une grande
différence quand il fait de la bureaucratie sans avoir à
indemniser et de la bureaucratie en ayant à indemniser, en ayant
à faire une réclamation pour la CSST, en ayant à payer des
intérêts sur l'argent qu'il a avancé.
Vous n'avez pas parlé, par exemple, dans votre explication, du
délai de remboursement de ces entreprises. Si, par exemple, il y avait
quelque chose dans le règlement qui disait que la CSST serait
obligée de rembourser dans une période de, nous, peut-être
qu'on aurait moins de contraintes et moins de questions à nous
poser.
En fait, ce qu'on dit, c'est que, si nous avons 300 000 cas ou 350 000
cas, on en aura 80% qui vont être réellement à la charge de
l'employeur, à toutes fins utiles, du premier au quatorzième
jour. La CSST reste avec une petite minorité de 20%. Tout le travail
bureaucratique de base se fait par l'employeur. Le financement de
l'indemnisation se fait par l'employeur. Il est à se demander vraiment
pourquoi la CSST coûte tellement cher et ce qu'on va retrouver dedans. Il
y a sûrement un équilibre. Si cela coûte plus cher à
l'employeur - et c'est indéniable qu'il ne va pas faire l'analyse de 39
000 cas en plus sans coût; nécessairement, il va y avoir un
coût quelconque - est-ce que ce coût n'est pas
transféré alors? Si l'employeur doit faire les frais de cette
chose, ce sera en plus. C'est pourquoi on avait rattaché cela à
l'article 58 où on dit qu'il aura à faire les frais du premier
jour de la maladie.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: Mme la Présidente, il y a plusieurs
questions dans les commentaires du député de Nelligan, des
questions intéressantes. Une première observation que je voudrais
bien que l'on retienne, c'est: Ne commençons pas à parler des
accidents de la CSST. Cela continue d'être les accidents qui se
produisent chez l'employeur. Il ne faudrait pas que l'on perde de vue cette
situation.
Deuxièmement, le député de Nelligan a fait une
suggestion...
M. Cusano: À la CSST, il y a des accidents aussi.
M. Fréchette: ...très heureuse, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): S'il vous plaît, M. le
député!
M. Fréchette: Le député de Nelligan a fait
une suggestion heureuse que je suis disposé à retenir et à
coucher en termes législatifs, quand il dit: Est-ce qu'il n'y a pas
moyen qu'il y ait un délai prévu pour le remboursement par la
commission à l'employeur? Je lui dis oui. Si, par exemple, on
introduisait dans la loi une disposition en vertu de laquelle la CSST serait
obligée de procéder au remboursement dans les quinze jours de la
réception de la réclamation, à défaut de quoi des
intérêts commenceraient à s'accumuler, je me demande si on
ne
rejoindrais pas là l'une des préoccupations du
député de Nelligan.
M. Lincoln: Là, on commence à s'entendre. Vous
voyez, cela vaut la peine de discuter.
M. Fréchette: Je pense qu'on s'est toujours bien
entendu.
M. Lincoln: Non, dessus. M. Fréchette: Ah,bon!
M. Lincoln: On s'est toujours bien entendu, mais là c'est
un pas en avant. Oui, là, cela vaut la peine.
M. Fréchette: Bon, c'est une premier aspect.
Deuxièmement, entendons-nous également sur l'état
de fait suivant: actuellement, ces accidents de moins de quatorze jours
coûtent un certain montant en réparation, en indemnité. Ce
montant est de 25 000 000 $. Cela ne va pas changer, en tout cas, à
toutes fins utiles, à peu près pas, le montant à
être payé pour des indemnités dans des cas d'accidents de
moins de quatorze jours.
Il y a une autre chose qu'il est important de signaler: quand on parle
des quatorze jours, Mme la Présidente, entendons-nous aussi pour bien
comprendre le texte, on réfère à quatorze jours de
calendrier, ce ne sont pas quatorze jours ouvrables.
M. Lincoln: Oui, quatorze jours de calendrier.
M. Fréchette: Alors, à toute fins utiles, en termes
pratiques et quotidiens, c'est dix jours, en fait, généralement
parlant, deux semaines.
La Présidente (Mme Juneau): Deux semaines.
M. Fréchette: Deux semaines de travail. Une voix:
Une période de paie.
M. Fréchette: Je ne reviendrai pas sur les motifs dont
j'ai déjà parlé, Mme la Présidente, mais je
signalerai simplement au député de Nelligan que la cotisation
moyenne à la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, en 1982, était de 2,05 $ les 100 $.
Au 1er janvier 1983, cette cotisation moyenne des employeurs a
été diminuée et au moment où on se parle elle est
de 1,89 $ les 100 $ assurables, alors qu'en Ontario elle est actuellement
à 2,16 $. À cause d'une dette de 5 000 000 000 $ ou à peu
près en Ontario, l'on songe très sérieusement à
augmenter le taux de cotisation vers un chiffre qui atteindrait à peu
près 2,25 $, sinon plus, de cotisation très
précisément parce qu'il y a cette accumulation d'une dette de
quelque 5 000 000 000 $.
Mme la Présidente, en tenant compte des dispositions de la loi
42, si, éventuellement, elle est adoptée, il est prévu que
le taux de cotisation au 1er janvier 1985 passera de 1,89 $, qu'il est
actuellement, à 1,88 $, en tenant compte, encore une fois, des
intentions qui sont annoncées dans la loi 42.
Je vais convenir, sans aucune réserve et hésitation, avec
le député de Nelligan, qu'il fut un temps où il
était un petit peu embarrassant de se comparer avec certaines autres
commissions de santé et de sécurité du Canada. Je vous
signale, par ailleurs, que, depuis les deux dernières années,
nous nous comparons avantageusement avec n'importe quelles des commissions de
santé et de sécurité du Canada. À 1,88 $ les 100 $
assurables, il n'y a pas beaucoup de commissions de santé qui sont
actuellement à ce niveau-là.
Pourquoi, Mme la Présidente, sommes-nous à ce
niveau-là? Pour des motifs très précis et qui sont en
relation avec des décisions qui ont été prises au cours
des deux dernières années. En 1974-1975, la Commission de la
santé et de la sécurité du travail s'est retrouvée
avec une dette qu'elle n'avait pas prévue, de l'ordre de 300 000 000 $.
D'où provenait cette dette? Elle provenait d'une décision
gouvernementale qui était, à mon sens, bien fondée et en
vertu de laquelle le gouvernement de l'époque décidait que les
indemnités de toute espèce allaient être
revalorisées annuellement, indexées annuellement. Cela n'existait
pas jusque-là, l'indexation ou la revalorisation. Alors, la commission
s'est retrouvée, donc, avec cette dette inattendue de 300 000 000 $.
Elle cotisait les employeurs pour les fins de l'extinction de cette
dette-là.
Il y a deux ans, à peu près, le conseil d'administration
de la Commission de la santé et de la sécurité du travail
a pris la décision d'arrêter de cotiser les employeurs pour les
fins spécifiques du paiement de cette dette et d'inscrire la dette dans
les livres de la commission, d'en tenir compte pour des fins de
comptabilité, mais de ne pas continuer la perception de la cotisation
pour la faire disparaître. C'est un premier motif qui fait que la
cotisation a pu diminuer.
Un deuxième motif: toutes choses étant normales, les
coûts de la prévention, autant des accidents que des maladies
professionnelles, devraient être assumés à 100% par
l'ensemble des employeurs. Le raisonnement que le conseil d'administration
a fait, c'est le suivant: les mesures de prévention qui sont
actuellement déterminées par les comités de santé
et de sécurité ou par tout autre organisme qui travaille dans
cette discipline spécifique vont servir aux employeurs du futur. Il ne
serait donc pas normal que les employeurs du futur paient maintenant pour des
mécanismes de prévention.
Alors, au lieu de cotiser à 100% les coûts de la
prévention, le conseil d'administration en est venu à la
conclusion de les cotiser à 90% de leur coût réel. C'est un
autre motif pour lequel la cotisation est au chiffre dont on parle.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre
M. Fréchette: Je constate qu'il est 13 heures, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): Voilà. J'avais aussi
constaté qu'il était 13 heures et nous allons suspendre nos
travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 59)
(Reprise à 15 h 8)
La Présidente (Mme Juneau): Après avoir
constaté le quorum, la commission de l'économie et du travail
reprend ses travaux pour l'étude article par article du projet de loi
42, Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.
La parole avait été demandée par le
député de Frontenac.
M. Fréchette: Je n'avais pas fini, moi.
La Présidente (Mme Juneau): Vous n'aviez pas
terminé, M. le ministre?
Une voix: Oui, c'est vrai.
La Présidente (Mme Juneau): C'est vrai, je m'excuse, M. le
ministre. La parole est à vous.
M. Fréchette: J'étais sur le point de terminer, Mme
la Présidente, mais ce n'était pas complet. Je suis un petit peu
malheureux que le député de Nelligan ne soit pas là parce
que c'est à sa demande que nous avions entrepris de refaire, en quelque
sorte, le débat que nous avons fait hier.
M. Cusano: II est sans doute en train de se rendre.
M. Fréchette: II faudrait qu'il soit là dans un
délai très raisonnable.
M. Cusano: Oui.
M. Fréchette: Ou alors sans délai.
M. Cusano: Sans délai.
M. Fréchette: Je terminerai essentiellement, Mme la
Présidente, en indiquant au député de Nelligan et au
député d'Outremont qui ne sont là ni l'un, ni l'autre, que
les préoccupations qu'ils ont soulevées au niveau de la
fiscalité chez les employeurs doivent être des
préoccupations qui font l'objet de la réflexion de tout le
monde.
Entendons-nous, par ailleurs, sur le fait que, s'il fut un temps
où, au niveau de la santé et de la sécurité au
Québec, on invoquait très souvent ce dossier en fonction de la
discussion qu'on est en train d'avoir, ce n'est plus vrai maintenant pour tous
les motifs que j'ai donnés ce matin.
Pour revenir aux dispositions plus spécifiques des articles 58 et
59, c'est-à-dire le paiement du premier jour, donc l'abolition du
délai de carence d'une journée, le paiement des quatorze premiers
jours, l'évaluation que nous en avons faite nous amène à
la conclusion qu'à tous égards cela va être avantageux pour
tout le monde et cela n'entraînera pas de coûts additionnels, en
tout cas pas de coûts additionnels significatifs. C'est l'essentiel des
remarques que j'avais à faire.
La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le ministre. J'avais
le député de Frontenac qui était inscrit.
M. Grégoire: M. le ministre, toujours aux articles 58 et
59 mais sur un autre point de vue. Dans ces deux articles, il est question de
lésion. Celui qui a été victime d'un accident du travail
et qui est victime d'une lésion professionnelle, lui, il reçoit
une indemnisation dès qu'il subit son accident. Il n'est pas question
dans ce chapitre et cette section de ceux qui subissent des maladies
professionnelles.
M. Fréchette: La lésion professionnelle
réfère aux deux éléments qui retiennent notre
attention, c'est-à-dire l'accident du travail et la maladie
professionnelle. Quand on parle d'une lésion professionnelle, on
réfère tout aussi bien à un accident qu'à la
maladie professionnelle.
M. Grégoire: M. le ministre, je voudrais vous poser une
question. Dans le cas de la lésion professionnelle, un accident du
travail, c'est bien défini. Le gars, il sort souvent en ambulance ou
autrement. Il est payé pour la journée même.
Dans le cas de la maladie professionnelle, il faut attendre que cela
ait
fait tout le tour de tous les comités d'évaluation
médicale, de tout le processus d'évaluation médicale. Ceci
veut dire que si, un bon jour, un citoyen va chez son médecin et qu'il
lui dit: Toi, tu es "poigné" d'amiantose, tu es pris là-dedans,
lui ne peut pas sortir et dire: Je vais être indemnisé
immédiatement. Ou il court le risque que, s'il sort, après toutes
les évaluations médicales, au bout de, disons trois ou quatre
mois - ce sont les délais qui sont raccourcis et je vous en
félicite, parce qu'avant cela prenait beaucoup plus de temps -...
Là, les délais sont raccourcis. Tout ce temps-là, il n'est
pas payé de son arrêt. Il n'est pas indemnisé pendant les
évaluations médicales, il n'a pas eu son évaluation.
Mais il y a des articles qui nous donnent des raisons de croire que cela
pourrait s'appliquer également aux maladies professionnelles. C'est que,
dans le cas des articles 58 et 59, il était indemnisé pour les
quinze premiers jours. Si toutefois il y avait de quoi à
récupérer de la part de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, ce ne sera fait que si la victime est de
mauvaise foi. Si elle est de bonne foi, il n'y a pas de
récupération pour les quinze jours d'indemnisation.
Si la même chose pouvait se faire pour les maladies industrielles.
Par exemple, un citoyen, un travailleur d'une mine d'amiante va chez son
médecin. Le gars ne se sent plus capable de travailler. Le
médecin lui dit: Pour moi, tu as l'amiantose. J'admets que c'est encore
un médecin traitant, c'est un généraliste. Ce n'est pas
encore suffisant pour le déclarer amiantosé.
Mais, s'il va à la clinique parce que, depuis quelque temps,
depuis quatre ans, on a une clinique médicale spécialisée
à Thetford pour les maladies des poumons...
S'il va consulter un pneumologue qui, lui, lui dit: Moi, mon avis en
tant qu'expert, c'est que vous êtes amiantosé, est-ce que,
à partir de ce moment-là, le type, comme en vertu des articles 58
et 59, pourrait sortir de la mine et cesser de travailler, puis être
indemnisé pendant qu'il ne travaille pas, puis passer tout le processus?
C'est-à-dire que la commission, après avoir reçu cela, a
dix jours pour le remettre au comité de pneumoconiose qui a vingt jours
pour passer l'examen au citoyen. Après cela, ces gens ont vingt jours
pour remettre cela à la Commission de la santé et de la
sécurité du travail.
La Commission de la santé et de la sécurité du
travail a un délai pour le remettre aux trois présidents des
trois autres comités de pneumoconiose, lesquels ont trente jours pour
réétudier le cas. Puis, c'est remis à la Commission de la
santé et de la sécurité du travail, ce qui fait environ
quatre mois.
S'il est indemnisé pendant tout ce temps-là, si à
la fin de tout le processus il n'est pas reconnu par les deux comités de
pneumoconiose devant lesquels il est passé, s'il n'est pas reconnu comme
un amiantosé ayant droit aux indemnités, est-ce qu'il pourra
retourner à son emploi et est-ce qu'il sera obligé, s'il a
été de bonne foi, c'est-à-dire s'il a fourni un certificat
de pneumologue... Est-ce que la Commission de la santé et de la
sécurité du travail ira recouvrer les montants dus ou est-ce
qu'il aura le droit de passer par ce processus?
M. Fréchette: Mme la Présidente, il me semble que
la loi prévoit expressément que dans les cas où la bonne
foi ne peut pas être mise en doute ou, si je le prends
négativement, dans les cas où il n'y a pas fraude, dol, ou enfin
les autres éléments que l'on connaît, même si
l'instance décisionnelle en venait à la conclusion qu'il n'y a
pas effectivement de maladie professionnelle, aucune disposition ne sera prise
pour répéter ce qu'on pourrait convenir d'appeler l'indu si,
encore une fois, tout a été fait de bonne foi pendant la
période qu'ont duré les procédures. Il n'y a pas de
réclamation de l'indu à ce moment-là.
M. Grégoire: Un rapport d'un pneumologue privé
serait une preuve de bonne foi. M. le ministre, si c'est cela,
précisez-le-moi quelque part. C'est un des trois gros points que j'avais
et vous allez être... Si on peut marcher comme selon... Dans l'ancienne
loi, ce n'était pas cela. Le gars était obligé de
continuer à travailler pendant deux ans et il en mourait avant d'avoir
les résultats des comités de pneumoconiose.
M. Fréchette: II y a tout un chapitre de consacré
très précisément au phénomène dont parle le
député de Frontenac.
M. Grégoire: Je le sais, je l'ai lu, mais ce n'est pas
spécifié que, quand il sort sur bonne foi et avec un rapport d'un
expert, il peut être indemnisé pendant ce temps-là.
M. Fréchette: On va arriver à ce chapitre-là
puis je suis tout à fait disposé qu'on le réexamine de
plus près.
M. Grégoire: Très bien, M. le ministre. M.
Gagnon: Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): Oui, M. le
député de Champlain.
M. Gagnon: Si vous me le permettez, sur une question de
règlement, parce que je me rends compte que je ne suis pas membre de la
commission. Hier, je remplaçais mon collègue de Gaspé. Je
voudrais être membre.
Je présume que je pourrais remplacer Mme la députée
de Maisonneuve, si la commission est d'accord.
La Présidente (Mme Juneau): Mme
Harel.
M. Fortier: Je ne sais pas si tu peux la remplacer, mais tu peux
occuper son siège.
M. Gagnon: C'est mieux dit comme cela; je vous remercie.
M. Cusano: On accepte le remplacement de Mme Harel par le
député de Champlain.
La Présidente (Mme Juneau): Merci. M. le
député de Saguenay.
M. Maltais: Merci, Mme la Présidente. C'est dommage que
notre collègue de Sainte-Marie ne soit pas ici, parce qu'on pourrait
argumenter sur une autre partie de la loi, particulièrement à
l'article 58, là où on abroge le délai de carence qui
existait avant et qui tombe payable au premier jour ou une partie de la
première journée, indépendamment de l'heure à
laquelle l'accident arrive. Je pense que ce n'est pas un point majeur pour
nous; je pense que c'est une amélioration pour le travailleur. Ce ne
sont pas ces coûts supplémentaires qui, à mon avis, vont
faire trembler les murs de Jéricho ni les murs des employeurs du
Québec; ce sont des coûts supplémentaires mais qui ne sont
pas quantifiés en monnaies immédiatement parce que c'est
difficile. Vous l'avez expliqué ce matin que c'est difficile à
quantifier. Je pense que c'est une amélioration du sort des
travailleurs. Ce n'est peut-être pas là-dessus qu'on va faire des
plus gros plats, mais l'article 59, précisément, il y a deux
façons de le voir; vous en avez expliqué une ce matin, mais il y
a d'autres façons de le voir aussi.
Si je suis bien votre raisonnement, M. le ministre, ce matin vous avez
dit grosso modo que 80% des dossiers ouverts à la CSST étaient
des dossiers de moins de quatorze jours. On s'entend sur quatorze jours pour
dire deux semaines de travail. Si je comprends bien ce raisonnement, si
l'employeur acceptait de faire le travail qui , est fait présentement
par la CSST, il y aurait 80% de moins de travail dans ces dossiers de bureau,
au départ à la CSST. Or, si on continue mon raisonnement,
contrairement au vôtre, la CSST à ce moment-là se
dédouane d'une partie de paperasserie qui est fatigante, tannante et
aussi pour nous dans nos bureaux de comté. Cependant, si on se souvient
du sens de la Loi sur les accidents du travail, c'était un genre de
mutuelle que les employeurs se donnaient pour indemniser un travailleur
lorsqu'il était blessé ou qu'il avait une maladie
professionnelle. Il est évident que, si on confie des rôles
administratifs additionnels à l'employeur, en contrepartie on devrait
aussi lui donner une réduction sur sa cotisation puisqu'il va faire du
travail qui était fait habituellement par la CSST. À ce moment,
est-ce que ce montant...? Je n'ai rien contre le fait que vous donniez quatorze
jours parce que cela ne change absolument rien au niveau du service que cela va
donner à l'employé. L'employé, là-dedans, il n'est
pas mis en cause. L'important pour le travailleur, c'est qu'il y ait quelqu'un
qui le paie à partir de la première journée et on a
établi cela dans la loi. À partir du moment où le
travailleur est sûr qu'il va avoir son chèque de paie, peu importe
de qui il vient, lui, cela ne l'intéresse pas, c'est que le vendredi il
veut avoir son chèque de paie. C'est très important, c'est le
sens de la loi. À mon avis, c'est le sens de la loi que, lorsqu'un
travailleur est pénalisé par un acccident du travail ou une
lésion professionnelle ou une maladie professionnelle, l'important c'est
que la loi lui garantisse que le vendredi suivant il va avoir son chèque
de paie. Cela, c'est un objectif de l'ancienne loi, mais reconduit dans le
projet de loi 42.
Mais là où l'objectif est changé, il y a l'objectif
de la loi et l'objectif administratif de la loi. Celle qui se dédouane
finalement de responsabilités, qui amoindrit ses responsabilités,
c'est la CSST. Et la CSST n'a-t-elle pas pour rôle d'administrer,
justement, cette mutuelle que les employeurs se sont donnée pour
permettre aux accidentés d'être indemnisés en cas
d'accident ou de maladie professionnelle?
Or, si elle se décharge de ses responsabilités
administratives, elle devra, par le fait même, M. le ministre, se
décharger d'une partie du coût. Si la secrétaire du bureau
de M. X fait du travail à votre bureau, M. le ministre, j'imagine que,
lorsque vous allez faire sa feuille de paie, vous allez indiquer la provenance
de la source pour la payer. Si elle a fait du travail pour un autre ministre,
vous allez charger cela à l'autre cabinet, ce qui est tout à fait
normal dans la pratique privée.
Or, cela devrait s'ajuster là aussi, parce que quatorze jours
pour l'employeur... Il faut qu'il remplisse de la paperasse, il faut qu'il
demande à la CSST, par après, pour être remboursé,
s'il a le droit, si un moment donné il a le droit parce que, s'il n'a
pas le droit, je pense qu'on voit plus loin dans l'article 59: "Si, par la
suite, la commission décide que le travailleur n'a pas droit à
cette indemnité, en tout ou en partie, elle doit lui en réclamer
le trop-perçu conformément..."
Si la CSST devient une tierce partie, l'employeur paie, l'employeur fait
la
réclamation à la CSST et la CSST dit: II n'avait pas le
droit. Elle ne paie pas l'employeur. Elle se retourne de bord et elle
retourne... Dans la loi - cela dépend de l'interprétation - la
CSST doit retourner cotiser l'employé pour un trop-perçu, revenir
dans ses coffres, retourner à l'employeur. S'il y avait juste un cas
dans la province de Québec, ce ne serait pas tellement grave. Cela ne
changerait rien aux procédures administratives. Mais le cumulatif de ces
cas, au niveau des petites et moyennes entreprises où peut-être
trop de chèques qui circulent peuvent mettre en danger leur situation
financière... Je pense qu'il faudrait peut-être le regarder sous
un angle beaucoup plus pratique.
Ce que j'ai de la difficulté à comprendre, c'est
qu'à la minute où on dit qu'on va enlever 80% des dossiers
à la CSST il n'y ait pas un article qui nous dit: Les coûts vont
diminuer pour autant, la prévention va être mieux faite, il va y
avoir plus d'éducation au niveau des travailleurs, au niveau des
compagnies, des employeurs, la prévention va être mieux
appliquée en milieu du travail qu'une prévention véritable
comme on a vu dans le cas présentement, justement, qui est sous
commission d'enquête.
Si on nous disait cela dans l'article de loi un peu plus loin, si on
retrouvait cela quelque part, cela nous permettrait d'être plus à
l'aise et de dire véritablement qu'on garde le premier but de la
présente loi ici, d'indemniser un travailleur, mais qui pourrait aller
plus loin parce que c'est la CSST qui doit administrer cette mutuelle, qui nous
dirait: Là où on va économiser de l'argent, on va
réinvestir dans la protection du travailleur. Cela, c'est relié,
M. le ministre; qu'on le veuille ou pas, la Loi sur les accidents du travail et
la CSST, c'est relié. Et lorsqu'on déplace des sommes
importantes, on doit avoir au moins une indication de l'endroit où elles
vont aller.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: Merci, Mme la Présidente.
Permettez que je prenne un peu en vrac les observations du
député de Saguenay les unes après les autres comme je les
ai notées. D'abord, quant à la récupération de ce
que pourrait être un paiement fait indûment. Prenons l'état
actuel des choses. Le délai actuellement est de cinq jours. Lorsqu'il
arrive après évaluation du dossier qu'une décision est
rendue et que cette décision établit qu'il n'y avait pas de cause
pour payer l'accidenté dans l'état actuel des choses, c'est
l'employeur qui a "l'odieux" de réclamer du salarié
accidenté le montant d'argent qu'il a reçu et auquel il n'avait
pas droit conformément à la décision qui a
été rendue. C'est l'employeur lui-même dans l'état
actuel des choses qui doit se livrer -si vous me prêtez l'expression -
à ces procédures.
Dans la loi 42, dans une pareille situation, c'est la CSST qui devra
entamer les procédures de réclamation vis-à-vis d'un
salarié qui aurait reçu un paiement pour une absence de quatorze
jours, paiement auquel il n'avait pas droit. Voilà donc pour l'employeur
une tracasserie ou une difficulté qui disparaît.
Deuxièmement, il faut essayer d'avoir la meilleure lecture
possible de la loi. J'ai toujours compris - si ce n'est pas cela que la loi
veut dire il faudra procéder à l'amender dans ce sens - qu'en
tout état de cause l'employeur est remboursé du paiement des
quatorze jours; même si après décision, encore une fois,
des instances habilitées à le faire, la décision c'est que
le salarié y avait droit, il avait des motifs valables, des motifs
raisonnables de s'absenter en accident du travail, l'employeur va être
remboursé davantage si le salarié a été payé
indûment. Si ce n'est pas cela que le texte de loi veut dire il faudrait
qu'il veuille dire ce que je viens d'exprimer, d'une part.
Troisièmement, n'allons pas perdre de vue que j'ai signalé
ce matin au député de Nelligan que j'étais tout à
fait disposé à introduire dans la loi un amendement davantage
contraignant pour la CSST et davantage rassurant pour l'employeur. Le
remboursement en vertu de cet amendement devra se faire à
l'intérieur d'une période de quinze jours à compter de la
demande de paiement et, à défaut de paiement dans les quinze
jours, les intérêts prévus par la Loi sur le
ministère du Revenu commenceraient à courir.
Le député de Saguenay est préoccupé par le
phénomène de la bureaucratie. Je n'ai pas besoin de vous signaler
que je pense qu'on l'a tous, cette préoccupation. Mais n'allons pas nous
imaginer que dans l'état actuel des choses l'employeur ne doit pas se
soumettre à une certaine bureaucratie quand arrive un accident qui
entraîne une absence même de moins de quatorze jours. Il doit le
déclarer, cet accident, il doit se soumettre à l'ensemble des
procédures qui sont prévues par la loi. Ce n'est pas parce que
l'introduction de ce nouveau mécanisme est dans la loi que cela va lui
faire plus de bureaucratie. Il est déjà obligé de se
soumettre à un certain nombre d'opérations quand arrive ce genre
d'accident. Ce que l'on dit par ailleurs, c'est que, si cette disposition
était adoptée comme elle est écrite ou avec des
changements mais que le sens demeure le même, l'employeur va être
en mesure de gérer - je n'aime pas bien ce mot mais en tout cas pour
essayer de me faire comprendre - sur place lui-même les accidents de
courte durée, ce
qu'actuellement il ne fait pas. Ce qu'il fait actuellement, il ne fait
qu'envoyer à la Commission de la santé et de la
sécurité du travail la documentation qui est nécessaire et
il attend purement et simplement le déroulement des
événements. (15 h 30)
Mme la Présidente, c'est bien sûr qu'une disposition comme
celle-ci va contribuer à désengorger la machine administrative de
la commission. Le député de Saguenay m'a amené
carrément sur la piste vers laquelle il faut de toute évidence
aller, c'est-à-dire que les énergies, les activités et les
efforts qui ne seront plus nécessaires pour traiter ces dossiers vont
devoir, de toute évidence, être consacrés à autre
chose, le domaine de la prévention en étant un
particulièrement important. Le phénomène de la
réadaptation avec les dispositions que contient la loi va
également exiger des ressources humaines additionnelles. Il me semble
qu'à partir de ces préoccupations, s'il y a des gens qui sont
libérés de la machine administrative à cause du
mécanisme des quatorze jours, les compétences de ces gens, les
connaissances ou les expertises de ces gens vont devoir, de toute
évidence, être consacrées à d'autres objectifs de la
loi.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Saguenay.
M. Maltais: Mme la Présidente, je suis très heureux
des déclarations du ministre parce que, même si on a toujours eu
une certaine prudence vis-à-vis des actions de la CSST, c'est parce
qu'on a vécu dans le quotidien, et particulièrement les membres
de l'Assemblée nationale, on a vécu dans le quotidien les
difficultés extraordinaires de l'accidenté. C'est pour ça
qu'on veut faire préciser certains articles.
L'article 59, indépendamment de l'interprétation qu'on
peut lui donner, ce serait peut-être une bonne chose qu'on le clarifie
avec un amendement dans lequel il est bien dit tout le processus de
récupération de salaire que vous m'avez expliqué, qu'il
soit bien inclus dans un article ou dans un appendice d'article, dans un
amendement qui va nous permettre... Vous avez tout le processus
d'intérêt et, ainsi de suite, les quinze jours...
M. Fréchette: II y a un amendement pour ça.
M. Maltais: Je m'excuse, je n'ai pas eu le temps de le lire. Mais
ça, c'est une perception que j'avais.
Il y a un autre aspect que vous avez touché et que j'ai
touché aussi, et malheureusement, il faut en parler. C'est l'aspect de
la bureaucratie écrasante. On est conscient de ce qui se passe à
l'heure actuelle, et c'est un peu pour ça que vous avez
apporté... C'était un des objectifs du projet de loi
d'améliorer le sort de la personne blessée, du travailleur
blessé, mais aussi de réduire...
Lorsqu'on fait une loi comme ça - on n'en fait pas tous les ans,
ça fait 50 ans qu'il n'y en avait pas eu - je pense qu'il est important
d'améliorer la loi dans tout son sens. Si elle est une
amélioration pour le travailleur, elle doit être aussi un
mieux-être pour l'employeur. À partir du moment où on est
conscient de ça, toute la paperasserie qu'il y a de trop dans l'ancienne
loi, on ne devrait pas la retrouver dans la nouvelle loi, si on veut faire une
loi qui va durer encore 50 ans. Nos prédécesseurs qui l'ont
faite, même si elle n'était pas parfaite - en tout cas, elle a
duré 50 ans - ont certainement un des records de longévité
de loi.
Ce qui serait prudent à ce stade-ci, ce serait de ne pas
reconduire la bureaucratie dont vous avez des échos depuis des
années, de ne pas la reconduire, ou de la simplifier le plus rapidement
possible dans la nouvelle loi. Je ne sais pas à quel point on pourrait
le mettre, mais ça devrait être un des objectifs aussi. Parce que
corriger une loi en gardant les bois morts ou les poids morts qu'il y avait
dans l'autre, ce n'est pas bon, ce n'est pas progressif. Il faudrait
peut-être y penser quelque part, dans un article de la loi.
Tout à l'heure, lorsqu'on a parlé des quinze jours, de la
période de travail indemnisée par l'employeur, vous avez dit: Moi
non plus je n'aime pas ce mot, mais je n'en trouve pas d'autre, concernant le
terme "gérer ses accidentés". Les droits de gérance
comportent des obligations et il doit les payer aussi, même s'il est
remboursé. C'est sûr que, à l'heure actuelle, il n'a pas
à débourser plus de cinq jours, si je me rappelle bien;
cependant, il gère aussi ses accidentés. Lorsqu'on va avec un
employeur qui a 1500 ou 2500 employés, le dossier de chacun de ces
employés est très bien suivi parce qu'il ne peut pas se permettre
qu'il lui en manque dix le matin, surtout quand on fait de la production
à la chaîne. Cela ne marche pas dans l'industrie privée,
ça peut marcher dans la fonction publique, ça peut marcher
ailleurs, mais dans l'industrie privée, ça ne marche pas.
Gérer ses accidentés, je ne pense pas que ce soit une
nouveauté à l'intérieur de la loi parce que les employeurs
qui ont beaucoup d'employés doivent nécessairement le faire par
leur direction du personnel. Je ne pense pas que ça apporte quelque
chose de neuf, pour moi, à part le fait de payer. Payer, cela apporte
quelque chose de neuf pendant dix jours, mais gérer, cela ne m'apporte
rien de neuf parce que, déjà, dans les grandes industries, dans
celles de mon
comté, les directeurs de personnel sont obligés de
gérer les cas d'accidentés et de maladies personnelles des
gens.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: Mme la Présidente, le dernier
commentaire du député de Saguenay confirme en quelque sorte
l'argumentation que je soumettais tout à l'heure quand il dit que les
employeurs sont de toute manière obligés de gérer avec les
mêmes réserves les accidents ou les maladies qui ne seraient pas
professionnelles et qui arrivent à l'intérieur de
l'entreprise.
Quelques observations à partir des préoccupations du
député de Saguenay, dont la nécessité de faire
disparaître une certaine forme de bureaucratie. Permettez que je revienne
à l'article 58 où on parle des accidents de moins d'une
journée et qu'on est convenu d'appeler les accidents non compensables
par la commission elle-même. Dans l'état actuel des choses,
même pour ce genre d'accident, l'employeur est obligé d'envoyer
son rapport à la Commission de la santé et de la
sécurité du travail; il y en a 140 000. Avec les dispositions de
l'article 58, il n'y a plus, pour lui, l'obligation de procéder à
compléter ce rapport et à l'expédier à la CSST. Il
n'a qu'à faire un enregistrement dans un registre qu'il doit garder
à l'intérieur de l'entreprise. Donc, pour 140 000 employeurs,
voilà une tracasserie administrative qui disparaît. Plus besoin
d'envoyer de rapport - inscription dans le registre.
Deuxièmement, dans l'état actuel des choses, pour la
gérance des accidents de moins de cinq jours, l'employeur est
obligé de payer, même si, par exemple, le salarié ne soumet
pas une attestation médicale. À l'article 251 de la loi, vous
allez constater qu'avant de procéder au paiement des quatorze jours,
l'employeur peut exiger et le salarié doit remettre à l'employeur
une attestation médicale pour confirmer le fait qu'il y a effectivement
eu accident du travail. C'est une disposition nouvelle qui n'existait pas et
qui va dans le sens dont on parle depuis quelques minutes, c'est-à-dire
de la possibilité pour l'employeur d'exercer un droit de gérance
normal et de ne payer que sur constatation qu'il y a effectivement eu accident
du travail. Il me semble que non seulement cela ne bureaucratise pas, mais cela
diminue les obligations de l'employeur en ces termes.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Saguenay.
M. Maltais: Juste une petite correction, M. le ministre. Vous
avez parlé de 140 000 employeurs. J'imagine que dans votre esprit,
c'étaient 140 000 travailleurs?
M. Fréchette: Vous avez tout à fait raison.
M. Maltais: D'accord. M. Fréchette: Oui, oui. M.
Maltais: Merci.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Beauharnois.
M. Lavigne: Mme la Présidente, je voudrais avoir une
explication de la part du ministre. Il y a une chose qui m'embête un peu.
On regarde le deuxième alinéa de l'article 59, ce que vient
d'expliquer, à toutes fins utiles, le ministre, c'est-à-dire:
"L'employeur verse ce salaire au travailleur à l'époque où
il le lui aurait normalement versé si celui-ci lui a fourni
l'attestation médicale visée dans l'article 186." Par contre,
quand on... Cela revient à dire, si je comprends bien, que l'employeur
doit payer son employé si l'employé lui fournit un certificat
médical.
M. Fréchette: Oui.
M. Lavigne: D'accord? Oui, on se comprend bien jusque-là.
Par contre, on avait étudié l'article 35 et, au premier
alinéa de cet article, il est dit: "Le défaut d'un travailleur de
se conformer à la présente loi n'exonère pas l'employeur
d'une obligation que lui impose la présente loi."
M. Fréchette: Oui.
M. Lavigne: Est-ce qu'on ne devrait pas faire éliminer ce
paragraphe de l'article 35?
M. Fréchette: L'article 35 est une disposition d'ordre
général qui ne va pas rejoindre des dispositions
spécifiques qu'on retrouve à l'intérieur de certains
chapitres. Mais, si c'était le contraire, la seule chose qui pourrait
arriver, à mon sens, c'est que le salarié ne soit pas payé
tant et aussi longtemps que le rapport médical n'est pas
déposé. Il ne perdrait pas le droit au paiement - c'est mon
évaluation - mais le défaut qu'on lui reprocherait serait de ne
pas avoir soumis d'expertise médicale ou de rapport médical. Il
n'est nulle part écrit dans la loi que ce défaut
entraînerait la déchéance du droit au paiement de sorte que
la seule pénalité ou le seul préjudice, ce serait
d'être payé plus tard qu'autrement il aurait pu l'être.
M. Lavigne: Mais il pourrait de toute façon être
payé.
M. Fréchette: Ah oui! De toute évidence, selon ma
propre interprétation.
M. Lavigne: Donc, on ne peut pas enlever, à partir de
cette explication, le paragraphe 1 de l'article 35?
M. Fréchette: Non.
M. Lavigne: Cela n'exonère pas le patron.
M. Fréchette: Non. La pénalité qui est
prévue par le sens commun des choses, c'est le paiement plus tard que
prévu du montant auquel il a droit.
M. Lavigne: Parfait. Merci.
La Présidente (Mme Juneau): Monsieur...
M. Fréchette: Est-ce qu'on a pris connaissance, Mme la
Présidente...
La Présidente (Mme Juneau): Non.
M. Fréchette: ...de l'amendement qui serait ajouté
à l'article 59?
M. Cusano: Oui, on l'a reçu.
La Présidente (Mme Juneau): II a été
distribué, M. le ministre, mais il n'a pas été lu.
Souhaiteriez-vous qu'on le lise tout de suite?
M. Cusano: Pourrait-on peut-être...
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: ...faire quelques commentaires avant de...
M. Fréchette: Oui, oui.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: J'aimerais dire au ministre que j'apprécie
l'amendement qu'il nous présente à la suite de la suggestion du
député de Nelligan. Ce ne sera pas un amendement qui fera un
grand débat.
Si je comprends bien, le ministre nous dit que, présentement,
l'employeur est impliqué dans une bureaucratie assez considérable
justement pour fournir à la commission les détails à la
suite d'un accident et d'une absence d'au moins une journée. D'abord,
c'est un travail qui est fait présentement. On pourrait toujours
argumenter sur la question des coûts supplémentaires. Encore
là, si on regarde le rapport annuel on parle d'un nombre de jours d'une
indemnisation: aucun. Cela devrait être sous la loi actuelle, on parle de
146 000. C'est dans le rapport annuel de la CSST. Dans le rapport actuariel sur
le projet de loi 42 réimprimé, sauf si je le lis mal, on parle de
187 900, presque 188 000 journées dans le rapport actuariel. Cela fait
une différence de quasiment 50 000. Le ministre pourrait peut-être
nous expliquer la différence entre ces chiffres. M. le ministre, c'est
dans le rapport actuariel que vous nous avez déposé.
M. Fréchette: M. le député de Viau est en
train de m'expliquer que mon chiffre...
M. Cusano: Non, non, ce n'est pas tout à fait cela...
M. Fréchette: ...du nombre d'accidents de moins d'une
journée serait erroné; est-ce que c'est cela?
M. Cusano: ...que je veux dire. C'est que lorsqu'on arrive pour
faire certains calculs, à savoir quels seront les coûts
reliés... Je ne voulais pas faire un débat, mais on peut se
rendre dans un sens...
M. Fréchette: C'est à quelle page du rapport
actuariel?
M. Cusano: C'est à la page... La page n'apparaît pas
sur ma copie, attendez un peu, je vais en trouver une autre. Page 18.
Peut-être qu'il y aurait une précision à faire: la
durée des jours ouvrables qui est indiquée là serait-elle
en dedans des quatorze jours ou...?
M. Fréchette: Cela ne réfère pas au
même phénomène.
M. Cusano: Cela ne réfère pas au même
phénomène. Même si on prend les 146 000...
M. Fréchette: Là on parle d'une journée
compensable alors qu'à l'article 58 on parle de journées non
compensables.
M. Cusano: Non compensables, d'accord. Mais, quand même, ce
seront des coûts qu'on pourrait, comme cela a été
chiffré ce matin... Ce montant que l'employeur aura à
débourser, c'est un montant qui peut être dans les 2 000 000 $, 3
000 000 $ ou 4 000 000 $ dans l'ensemble des...
M. Fréchette: On a parlé de 2 000 000 $ ce
matin.
M. Cusano: On pourrait dire que vous êtes conservateurs, on
est plus libéral.
M. Fréchette: Prenez votre temps avant de dire que je suis
libéral, ce n'est pas sûr.
M. Cusano: Non, non, on est plus libéral.
Une voix: Conservateurs, cela va. (15 h 45)
M. Cusano: J'aimerais bien comprendre la situation. On nous dit
que, dans la loi actuelle, l'employeur a déjà un grand boulot
à faire en ce qui regarde ces absences de moins d'une journée. La
seule chose qu'il n'aura pas à faire, c'est... Je présume encore
que le registre qu'il aura à tenir, mentionné dans un des
articles de la loi, c'est un registre qui sera fourni par la CSST ou bien la
CSST va lui dire exactement ce que le rapport doit contenir. Je me demande
quelle est la différence avec le rapport que l'employeur fournit
présentement, quel est l'ouvrage qui est nécessaire pour donner
cette information à la CSST présentement et quel est l'ouvrage,
justement, lorsqu'on en arrive à la tenue du registre.
Je suis d'avis qu'il ne peut pas y avoir une grande différence
entre les deux. Lorsqu'on dit que cela va diminuer la tâche de
l'employeur, la seule chose que cela peut éliminer c'est vraiment le
timbre et le temps d'aller poster le rapport. De ce côté, si vous
me dites qu'il y a une très, très grande différence entre
le registre qu'il aura à tenir et ce qu'il y a présentement,
peut-être que cela va changer un peu notre position.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: Mme la Présidente, je vais essayer de
fournir au député de Viau les meilleures explications possible et
je demandais aux gens qui sont avec moi...
M. Cusano: Est-ce que je pourrais, si vous me permettez, M. le
ministre, en même temps... Le ministre nous a dit tout à l'heure
qu'il faudrait traiter aussi, de la part de la CSST, tous ces cas d'absence de
moins d'une journée seulement avec la même préoccupation
qu'on traiterait tout autre cas qui est soumis à la CSST mais je pense
que, dans la pratique, quelqu'un qui est absent pour une journée et qui
est de retour le lendemain, il n'y a pas de question de réadaptation
physique, sociale ou professionnelle. C'est juste un petit commentaire que je
voulais passer.
M. Fréchette: Ou bien je me suis très mal
exprimé ou le député de Viau n'a pas compris. Ce que j'ai
dit, essentiellement, dans mes remarques, c'est que les ressources qui sont
actuellement affectées au traitement des dossiers de moins de quatorze
jours pourront être réaffectées à d'autres
tâches plus importantes que le traitement d'un dossier de moins de
quatorze jours comme, par exemple, s'adonner au développement des
politiques de prévention, consacrer plus d'énergie à
l'inspection, consacrer plus d'énergie à la réadaptation.
Il me semble que c'est simple à comprendre. Je m'excuse si je me suis
mal expliqué tout à l'heure mais c'est très
précisément ce que je voulais dire, d'une part.
Deuxièmement, le député de Viau est en train de
nous dire: Mettre une lettre à la poste avec un timbre dessus et puis
adresser cela à la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, c'est une affaire banale, ce n'est pas
préoccupant pour l'employeur. C'est aussi bien qu'il continue d'envoyer
sa lettre que de retenir les dispositions de l'article 58.
Le député de Viau, qui est un homme très
préoccupé par les politiques administratives de la CSST, a sans
doute poussé la curiosité jusqu'à prendre connaissance
d'un formulaire de rapport d'accident. Il a dû aussi réaliser que
procéder à compléter un rapport d'accident ce n'est pas
une formule simple dans l'état actuel des choses.
M. Cusano: Cela ne l'est pas.
M. Fréchette: Cela ne prend pas deux minutes pour
compléter cela. Il faut répondre à toute une série
de questions, donner force détails qui doivent prendre le temps, je ne
sais pas, d'une secrétaire pendant une heure ou deux, uniquement pour
compléter le formulaire d'accident. Alors, si le député de
Viau est en train de nous dire: Cela devrait rester, même pour les
accidents de moins d'une journée, je vais lui dire tout de suite qu'on
va avoir beaucoup de difficultés à se rencontrer.
M. Cusano: Oui.
M. Fréchette: Deuxièmement, s'il trouve simple,
pour l'employeur, le fait d'être obligé de procéder
à compléter le rapport d'accident, l'introduire dans une
enveloppe, mettre le timbre sur l'enveloppe, affecter du personnel à ces
opérations, s'il trouve que cela n'est pas préoccupant
actuellement pour l'employeur, tant mieux si c'est comme cela. On va garder le
régime actuel, à toutes fins utiles.
Vous allez voir quand on arrivera au chapitre du registre qu'il n'y a
qu'à donner deux ou trois détails et tout le processus est
complété. On a chacun, évidemment, notre
appréciation des choses, chacun notre appréciation des situations
mais moi, au risque de me trouver en contradiction avec le député
de Viau, je suis obligé de lui dire que ma conclusion est que c'est
beaucoup plus simple, dans ces cas, de procéder par la seule voie du
registre que de conserver l'état actuel des choses.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Le ministre nous dit alors que les renseignements qui
seront requis dans le registre seront minimes par rapport aux renseignements
qui sont demandés présentement pour un rapport d'accident.
M. Fréchette: C'est écrit dans la loi.
M. Cusano: D'accord. Cela va. Le ministre a
démontré une ouverture et il maintient le fait que, justement, ce
montant ne serait pas remboursable. Il veut le maintenir, c'est son option.
J'aimerais, par exemple, puisqu'on touche aux deux articles, lui demander, sur
la question des quatorze premiers jours payables par l'employeur et qui
seraient remboursés... Et je suis très heureux, justement, de
l'amendement proposé, à savoir que, s'il y a retard de la part de
la commission, il y aurait des intérêts payés à
l'employeur. Cela va régler beaucoup de choses. Cela va régler
des problèmes énormes, spécialement dans la relation entre
l'employeur et la CSST. On a vu plusieurs occasions où, justement, la
CSST devait rembourser des montants à l'employeur et on lui a dit tout
simplement par lettre: Écoutez, l'argent qu'on vous doit, on va
l'appliquer sur vos cotisations de l'année prochaine. Cela s'est vu
assez souvent, cela. Cela va régler ces problèmes et j'en suis
fier. Mais la question des quatorze premiers jours, avant de l'aborder telle
quelle, je demanderais au ministre s'il serait aussi ouvert - parce que la
question de l'obligation de payer dans les quinze jours, c'est une grosse
concession - sur la période des quatorze jours.
M. Fréchette: Ouvert à quoi?
M. Cusano: C'est-à-dire à faire un certain
changement, à réduire. Je vais expliquer pourquoi. Lorsque la
période au Québec, justement, a augmenté, il s'est
installé... Ce n'est peut-être la faute de personne; ce sont juste
des choses... Les êtres humains étant ce qu'ils sont, cela se
produit. On nous a dit en commission parlementaire que, depuis que les cinq
premiers jours sont payables par l'employeur, dans chaque accident, c'est
quasiment devenu automatique que l'absence est de cinq jours.
Ce n'est pas à cause des fraudeurs du système. Je voudrais
bien que le ministre me comprenne. Ce n'est pas à cause des fraudeurs,
comme l'a dit le juge Sauvé récemment. Je pense qu'il
était dans le bout de la Gaspésie et il disait qu'il y avait un
nombre incroyable de fraudeurs. Ce n'est pas ce que je veux dire. C'est que
l'attitude générale qui se développe, l'attitude du
médecin qui a à traiter l'accidenté et l'attitude du
travailleur lui-même, sans mauvaise foi, qui arrive avec une
lésion et... Puisque le médecin sait fort bien qu'il n'y aura pas
de retard, que l'accidenté ne subira aucune perte de salaire, aucun
délai, alors, on peut se ramasser dans une situation où ces
absences qui sont maintenant quasi automatiques de cinq jours se prolongent
à sept, huit, neuf, ou dix jours et que cela soit
considéré normal. C'est une préoccupation parce que, vous
savez, c'est un peu comme les réunions. On vit tous les réunions
et, lorsqu'on commence à 4 heures, c'est rare... Malgré qu'ici on
ne peut pas se plaindre, c'est rare que les réunions commencent à
4 heures. Cela me fait penser un peu... L'exemple que je pourrais vous donner,
c'est que cela me fait penser au temps où j'étais directeur
d'école. On est arrivé il y a dix ans et on m'a dit: M. Cusano,
le dernier jour de classe, on devrait avoir un "party" pour les
élèves. Je sais qu'il y a d'autres professeurs autour de cette
table ou de cette salle. Parfait! On donne la dernière moitié de
la journée justement pour pouvoir fêter la fête de
Noël. L'année suivante, on m'a dit: Vous savez, ce n'est pas assez,
cette demi-journée, parce qu'après cela il y a le ménage
à faire. On demande que les "parties" de Noël soient le matin et
non l'après-midi pour qu'on puisse nettoyer par après.
M. Lavigne: II y a les concierges.
M. Cusano: Oui, mais cela ne se fait pas toujours, M. le
député de Beauharnois. Je ne veux pas m'éterniser sur le
sujet, Mme la Présidente. Mon inquiétude particulière sur
la question des quatorze jours, c'est qu'il s'instaure une espèce
d'automatisme lorsqu'on parle d'une période d'absence. Je me demandais
si le ministre serait prêt de ce côté à avancer des
suggestions pour réduire cette période de quatorze jours à
une période moins longue. Si on se base sur l'expérience que nous
avons tous vécue dans nos comtés, l'accidenté, ce qui le
préoccupe, ce n'est pas de savoir de qui ce montant vient. Les
problèmes qu'on a vécus, ce sont justement les délais de
la CSST à rembourser ou à commencer le paiement à la suite
d'un accident. Ces délais, dans certains cas, vont jusqu'à une
période de un ou deux mois avant que l'accidenté puisse recevoir
son chèque de la CSST. Combien de cas - de l'autre côté de
cette table, je pense que vous l'avez constaté - d'accidentés qui
ont été obligés de se rendre au bonheur social, comme dit
mon collègue le député de Sainte-Marie, pour se faire
avancer de l'argent! Est-ce que vraiment la commission, dans toute son
organisation, avec tous les ordinateurs qui ont été mis en place,
elle n'est pas capable de commencer des paiements avant ces quatorze jours?
L'autre inquiétude, pour se référer à l'exemple
que
je vous donnais de l'école: Va-t-on nous arriver par
après, dans un ou deux ans, et dire: Écoutez; Quatorze jours, ce
n'est pas assez. Ce serait mieux si on allait à 21 jours. Ce sont mes
inquiétudes, Mme la Présidente, et M. le ministre, je voulais
simplement savoir si, sur cette question, vous seriez ouvert à examiner
la possibilité que les quatorze jours soient réduits à un
chiffre inférieur.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: J'aurais souhaité, Mme la
Présidente, que le député complète sa suggestion et
me dise à combien de jours il faudrait ramener les quatorze dont il nous
parle. Il m'a demandé de faire des propositions. Ma proposition est dans
l'article 59 de la loi et je suis obligé de vous dire à mon grand
regret, Mme la Présidente, que l'argumentation que vient de
développer le député de Viau ne m'a pas convaincu, mais
pas du tout, de la nécessité qu'il y aurait de réduire le
nombre de quatorze jours et je vais vous dire pourquoi. Le député
de Viau a pris un nombre assez impressionnant de précautions oratoires
pour dire: Mais non, je ne fais pas référence aux gens qui
veulent essayer de frauder le système. Je ne suis pas en train de vous
dire que des gens utilisent, à mauvais escient, les dispositions de la
loi, mais je vais vous donner l'exemple de ce qui se passait dans
l'école chez nous quand on avait nos "parties" de Noël. Il affirme
le principe d'une façon tout à fait claire et catégorique
qu'il ne se réfère pas, d'aucune espèce de façon,
à des moyens de contourner la loi mais, par l'exemple qu'il utilise, il
dit: C'est cela qui peut aussi arriver à cause du
phénomène des quatorze jours. J'ai un peu de difficulté
à accepter ce raisonnement. (16 heures)
En outre, Mme la Présidente, le député de Viau a
affirmé avec beaucoup de conviction que, depuis qu'on a introduit dans
la loi le paiement des cinq premiers jours, à peu près tous les
accidents durent au moins cinq jours. C'est l'affirmation qu'il a faite, si je
l'ai bien comprise. On n'a peut-être pas les mêmes renseignements
et on ne fait peut-être pas la même lecture des documents qui nous
sont soumis, mais je suis obligé de lui dire que les renseignements
qu'on a, c'est que dans l'état actuel des choses alors que les cinq
jours sont là, il y a 187 933 accidents annuellement qui sont
compensables pour une journée. Alors, il y a donc 187 933 accidents,
depuis que les cinq jours ont été introduits dans la loi, qui
entraînent des pertes de temps d'une journée ou moins.
Alors, je ne suis évidemment pas tout à fait
disposé â accepter l'affirmation aussi globale et
générale qu'a faite le député de Viau.
Deuxièmement, Mme la Présidente... Pardon?
M. Grégoire: ...qui se rendent à cinq jours?
M. Fréchette: De six jours: 97 897.
M. Cusano: Vous vous référez justement au rapport
actuariel...
M. Fréchette: Oui, bien sûr.
M. Cusano: Oui, je remarque cela. Qui se rendent à six
jours, cela veut dire entre deux et six.
M. Fréchette: Oui, c'est cela.
Maintenant, Mme la Présidente, ce que plaide le
député de Viau est un des arguments qui a été
invoqué avec le plus de conviction qu'on pouvait voir par les gens qui
représentaient les employeurs. L'argumentation qu'on développait,
c'était de nous dire ceci: À partir de l'expérience de
l'introduction des cinq jours dans la loi, nous avons constaté une
incidence quant à l'augmentation des accidents du travail de cinq jours
et moins. Nous avons effectivement procédé à cette
vérification pour arriver à la conclusion que c'était vrai
pendant un certain temps, pendant les quelques mois qui ont suivi
l'introduction encore une fois des cinq jours. Mais, très peu de temps
après, la situation s'est restabilisée et l'incidence des
accidents de cinq jours ou moins est demeurée exactement ce qu'elle
était avant l'introduction des cinq jours.
Maintenant, le député de Viau nous invite également
à fortement accélérer les processus de paiement à
la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Je
veux bien que l'on paie dans les meilleurs délais, mais convenez avec
moi que, dans l'état actuel des choses, la moyenne que cela prend en
termes de jours pour que le rapport d'accident entre à la Commission de
la santé et de la sécurité du travail, c'est 20 jours.
Ajoutons à ces premiers 20 jours une autre période de 20 jours
qui est aussi la période moyenne pour la réception du rapport
médical. Il s'écoule donc obligatoirement une période de
40 jours avant que la commission ne soit en possession des instruments, des
renseignements dont elle a besoin pour commander le paiement qui,
généralement, arrive entre dix et quinze jours après que
le dossier est complété.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Le ministre vient de donner une information qui
suscite une question. Dans mon ignorance de l'administration de la
CSST, je croyais que l'idée pour laquelle on avait mis quatorze
jours dans la loi, c'était pour permettre à la CSST d'enclencher
immédiatement un processus qui ferait qu'il y aurait une
continuité dans le paiement des indemnités que l'employé
qui souffre d'une lésion professionnelle recevrait. Alors, je croyais
qu'il y avait quatorze jours, justement pour permettre à la CSST de
s'organiser et que, la fin de semaine suivante, cela serait au tour de la CSST
de payer.
Ce que le ministre nous dit maintenant, c'est que ce seront 40 jours
plus 15 jours, donc 55 jours, de toute façon. Alors, ceci veut dire
qu'il va toujours y avoir, indépendamment des 14 jours, 5 jours ou quoi
que ce soit, une période de 50 à 55 jours qui devrait
s'écouler avant que l'employé reçoive une indemnité
quelconque. Est-ce que j'ai mal compris? C'est ce que j'ai compris de votre
intervention.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: Pour l'accidenté, ce n'est pas ce
processus qui va être suivi, c'est l'employeur qui, après avoir
pris connaissance de l'attestation médicale que doit lui remettre le
salarié, va procéder à indemniser le salarié pour
les quatorze jours, au moment où, normalement, il recevrait sa paie.
M. Fortier: D'accord. Qu'est-ce qui arrive après quatorze
jours?
M. Fréchette: Après les quatorze jours, l'employeur
envoie son dossier è la commission et, dès lors que le dossier
est complet, que toutes les pièces s'y retrouvent, il est
immédiatement remboursé immédiatement... il y a les quinze
jours dont on parle dans l'amendement, plus le paiement de
l'intérêt.
M. Fortier: Là, je ne parlais pas de l'employeur. Je
m'inquiète de l'employé.
M. Fréchette: Oui.
M. Fortier: L'employé, dans le moment, ce qu'on a dit,
c'est qu'on voulait améliorer la loi, parce que l'employé
était pénalisé parce que, lorsqu'il avait subi une
lésion professionnelle, cela prenait un temps considérable avant
qu'il reçoive une indemnité. Le ministre nous apporte un article
qui dit: Je règle le problème pour les premiers quatorze jours.
Bravo, le problème est réglé pour les premiers quatorze
jours.
Mais je ne sais pas si le processus est enclenché à partir
du jour no 1 ou du jour no 14, mais il y a un processus qui est
enclenché à un certain moment. Le ministre nous dit que, de toute
façon, cela prend quarante jours plus quinze jours avant que la CSST
puisse émettre un chèque. Donc, que le délai ait lieu tout
à fait au début ou tout à fait après les quatorze
jours, il n'y a rien de réglé. Je veux dire qu'il va y avoir une
période durant laquelle l'employé va être
pénalisé de la même façon et je ne vois pas ce qu'on
règle en payant les premiers quatorze jours.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: II y a certainement une
incompréhension quelque part, Mme la Présidente. Dans le cas des
quatorze jours, encore une fois, cela n'est plus la CSST qui va indemniser
l'accidenté, c'est l'employeur qui va le faire. Et plus rapidement
l'accidenté lui soumettra l'attestation médicale exigée
par la loi, plus rapidement l'accidenté sera payé. Cela n'est pas
simplement une affirmation d'ordre général que je fais, la loi
prévoit que dès que l'employeur, s'il en exige un, est en
possession d'un certificat médical attestant de l'état de
l'accidenté, il doit l'indemniser au moment où il le paiera pour
sa prochaine paie. Ce n'est plus l'accidenté qui fait sa
réclamation à la Commission de la santé et de la
sécurité du travail. L'employeur, cependant, quand il aura
indemnisé pour ces quatorze premiers jours, après avoir
reçu l'attestation médicale, soumettra sa réclamation
à la Commission de la santé et de la sécurité du
travail. Là, la commission va traiter son dossier dans les délais
que prévoit l'amendement.
M. Fortier: Je pense qu'on ne se comprend pas, M. le ministre.
Prenons le cas d'une personne qui devrait être indemnisée pour
trois ou quatre mois. Je comprends bien qu'il n'y a aucun arrêt en ce qui
concerne le paiement de son salaire pour les quatorze premiers jours. Je
comprends cela.
Ce qui m'inquiète, ce ne sont pas les premières deux
semaines, cela est réglé. Mais si la personne doit être
indemnisée pendant quatre ou cinq mois...
M. Fréchette: C'est l'article 254.
M. Fortier: ...quel est le délai que va mettre la CSST
pour enclencher un processus sur l'informatique, qui va faire que la machine va
émettre un chèque et que cette personne va le recevoir à
la maison?
M. Fréchette: Alors, il faudrait d'abord voir comment le
processus va s'enclencher, c'est l'article 254 de la loi qui nous le dit. Je
pense que cela vaut la peine, pour les fins de la discussion qu'on est en train
d'avoir....
M. Fortier: D'accord. M. Fréchette: ...de
regarder... M. Fortier: Quel article? M. Fréchette:
L'article 254.
M. Fortier: J'ai lu l'article 254 qui dit: "Le travailleur
victime d'une lésion professionnelle qui le rend incapable d'exercer son
emploi pendant plus de quatorze jours complets ou, s'il en
décède, le bénéficiaire, produit sa
réclamation à la commission...". C'est le
bénéficiaire qui produit sa...
M. Fréchette: C'est le réclamant,
l'accidenté, ou les personnes à charge...
M. Fortier: Alors...
M. Fréchette: ...qui ont droit à des
indemnités.
M. Fortier: Je croyais que le but de la loi était de
s'assurer que l'accidenté recevrait des paiements continus mais il va y
avoir un hiatus de toute façon, un hiatus administratif. Tout ce que la
loi change, c'est qu'au lieu que ce soit cinq jours cela va être quatorze
jours pendant lesquels il n'y aura pas d'hiatus.
M. Fréchette: Non, la loi change autre chose aussi. La loi
prévoit que, dans des cas spécifiques, lorsqu'il apparaît
évident que l'accidenté qui ne recevrait pas d'indemnités
en attendant qu'une décision finale soit prise... La commission pourra
procéder au paiement des indemnités quand il apparaît tout
à fait clair et évident que de toute façon c'est
là-dessus que cela va déboucher et que le seul litige qui
pourrait exister, si encore il y en a un, c'est le quantum.
En d'autres mots, c'est la mise sur pied, à la commission, d'un
fonds de dépannage pour ceux qui, encore une fois, de toute
évidence, ont une apparence de droit certaine mais dont le quantum de la
réclamation peut être contesté.
M. Fortier: Ce qui est changé par les premiers quatorze
jours, c'est que je ne sais pas quel pourcentage des accidents se retrouve
à l'intérieur des quatorze jours? C'est certainement...
M. Fréchette: C'est 80%.
M. Fortier: 80%, donc il y a seulement les 20% qui
dépassent quatorze jours. Dans ces cas, normalement, il y aurait quand
même un hiatus tel qu'il existait avant mais là vous dites qu'il y
a peut-être un fonds de dépannage qui pourrait permettre à
la CSST de faire des paiements temporaires.
M. Fréchette: Non seulement il pourrait mais il y en a un
de prévu dans les dispositions de la loi. Je ne sais pas
précisément à quel article mais je sais qu'il y a une
disposition prévue dans ce sens.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va, M. le
député? Est-ce qu'on peut lire l'amendement qui a
été proposé par le ministre?
M. Fréchette: Un instant, si vous me permettez, Mme la
Présidente, je voudrais...
La Présidente (Mme Juneau): Oui, M. le ministre.
M. Fréchette: ...essayer de faire disparaître les
doutes qui peuvent exister encore dans l'esprit du député
d'Outremont, s'il y en a. L'article 126.
M. Fortier: Oui, là on dit qu'elle peut payer une
indemnité. Je croyais que les critiques qui étaient faites venant
des travailleurs étaient le fait qu'il y avait un hiatus important entre
le moment où une personne souffrait d'une lésion professionnelle
et le moment où elle recevrait un chèque.
M. Fréchette: Oui, c'est un hiatus.
M. Fortier: C'était une des critiques acerbes, je
crois.
M. Fréchette: Bien sûr, c'est un hiatus. Prenez
simplement l'état actuel des choses qui fait qu'un accidenté
doive attendre trois ans ou quatre ans avant une décision de la
Commission des affaires sociales. Pendant cette période, il ne
reçoit pas d'indemnités. D'ailleurs, c'est l'équivalent
d'un délit de justice, soyons très clairs entre nous. N'importe
qui va se plaindre d'une semblable situation. Par ailleurs, va-t-on reprocher
à un organisme payeur, qui prétend être dans son droit en
refusant le paiement, de ne pas le faire tant et aussi longtemps qu'une
décision formelle en ce sens n'est pas rendue? C'est un peu pour cela
que l'article 126 est introduit pour, au moins, parer aux cas les plus patents
de nécessité et de besoin.
M. Fortier: Oui. Je vois que cela ne réglera pas tout le
problème mais cela va en régler.
M. Fréchette: Sans doute pas.
M. Fortier: S'il y a encore un doute... Parce que la CSST,
sûrement, va se trouver dans cette situation, même avec l'article
126, que, si elle prend le risque de payer des
montants, elle ne les recouvrera pas éventuellement si sa
décision est négative par la suite.
M. Fréchette: C'est cela.
M. Fortier: Il y aura toujours ce risque...
M. Fréchette: C'est cela.
M. Fortier: ...et de toute façon la procédure va
être que l'employeur, je pense bien, va payer ses quatorze jours. A ce
moment, il va envoyer le rapport à la CSST; cela va lui prendre
peut-être encore dix jours. À ce moment, il va envoyer le
certificat médical. Alors, c'est peut-être 25 jours ou un mois
après l'accident que la CSST aura le document ou les documents, d'une
part pour rembourser la compagnie et d'autre part pour entreprendre le
processus parce que, j'imagine, la compagnie va envoyer tout cela en vrac.
M. Fréchette: Oui, et tout dépendra...
M. Fortier: À ce moment, le processus s'enclenche. C'est
un mois après l'accident et cela va prendre encore un certain temps
avant que l'article 126 puisse intervenir ou l'article 245, je ne sais pas
trop.
M. Fréchette: Tout dépendra de la diligence que
mettra l'employeur. Il est évident que, s'il laisse les formulaires sur
le coin du bureau pendant un mois, ce n'est la faute de personne. Mais, il y a
nécessairement l'obligation de vivre avec certaines contraintes de cette
nature. On ne peut pas tout éliminer cela, c'est impossible.
M. Fortier: Remarquez bien que, quand j'étais dans le
secteur privé, nous faisions la gestion vis-à-vis de certaines
compagnies privées qui géraient certains programmes. Comme
c'étaient nos employés, on faisait tout notre possible - je ne
parle pas nécessairement de la CSST - pour qu'il y ait la plus grande
continuité possible. C'est un employeur qui est bien organisé,
qui est bien structuré, qui cherche à satisfaire ses
employés; alors, on peut espérer que cela va se produire
aussi.
La Présidente (Mme Juneau): Cela va?
M. Fortier: On peut procéder. (16 h 15)
La Présidente (Mme Juneau): L'amendement du ministre
à l'article 59 se lirait comme suit: Ajouter, à la fin du
troisième alinéa, les mots "dans les quatorze jours de la
réception de la réclamation de celui-ci, à défaut
de quoi elle lui paie des intérêts, déterminés
conformément à l'article 305, à compter du premier jour de
retard." Est-ce que l'amendement à l'article 59 est adopté?
M. Cusano: Adopté, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que les articles 58 et
59...
M. Fortier: À l'article 59, j'aurais une suggestion
à faire. Je pense bien que le ministre, en faisant cet amendement, ne
veut pas pénaliser l'employeur. C'est simplement qu'un employeur agisse,
en tant qu'administrateur au nom de la CSST, ni plus ni moins, en tant
qu'agent, je dirais, et que l'employeur se fasse rembourser le montant
intégral du montant qu'il aura payé. Pour éviter ce qui
est arrivé dans le passé où la CSST retenait des montants
en prévision de certains paiements dus par la compagnie dans l'avenir,
je me demandais si on ne pourrait pas mettre "le montant intégral" dans
le troisième alinéa qui dit: "Ce salaire constitue
l'indemnité de remplacement du revenu à laquelle le travailleur a
droit pour les quatorze jours complets suivant le début de son
incapacité et la commission en rembourse le montant à
l'employeur."
M. Fréchette: C'est le montant qu'elle a payé.
C'est le montant que l'employeur a payé que la commission doit
rembourser. Il me semble qu'à partir du moment où l'on dit que le
montant que l'employeur a payé lui est remboursé par la
commission, cela ne peut pas être autre chose que
l'intégralité du paiement qui a été fait.
D'ailleurs, le phénomène dont le député d'Outremont
parle ne procède pas de cette situation. C'est une autre situation.
M. Fortier: C'est une autre situation semblable. Le dernier
alinéa dit: "Si, par la suite, la commission décide que le
travailleur n'a pas droit à cette indemnité, en tout ou en
partie, elle doit lui en réclamer le trop-perçu
conformément à la section I du chapitre XIII". Donc, on en
discutera plus tard. Là, c'est bien de l'individu et non pas de la
compagnie.
M. Fréchette: Alors qu'actuellement c'est l'employeur qui
est obligé de se livrer à ce mécanisme de perception,
là, c'est la commission qui assume - pas le pouvoir -l'obligation de
percevoir ce qui a été payé en trop.
M. Fortier: Merci.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va? M. le
député de Viau.
M. Cusano: J'aurais un amendement à proposer au ministre
concernant l'article 59.
Que le chiffre "14" soit remplacé par le chiffre "7", au premier
alinéa, à l'avant-dernière ligne.
M. Fréchette: II faudrait bien savoir si ce sont sept
jours ouvrables ou sept jours de calendrier.
M. Cusano: Sept jours de calendrier.
M. Fréchette: Sept jours de calendrier. Mme la
Présidente, sur la motion je serai très bref parce
qu'évidemment elle pourrait susciter tout le débat qu'on vient de
faire. Je ne répéterai pas, donc, l'argumentation qu'on a
développée. Je vous dirai essentiellement cependant que, pour les
motifs qu'on plaide depuis trois heures cet après-midi, je ne pourrai,
quant à moi en tout cas, souscrire à l'amendement du
député de Viau.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Je n'ai pas non plus l'intention, M. le ministre... Au
cas où il serait inquiet qu'un prochain amendement, si celui-ci est
battu, de toute évidence, il l'est peut-être déjà...
Je n'ai pas l'intention de procéder avec un autre amendement en disant
que cela fait huit et de commencer tous les arguments jusqu'au moment où
on se rendra à quatorze. Je n'en ai aucunement l'intention. Je pense que
jusqu'à maintenant on a fonctionné de façon
adéquate et intelligente.
Ma préoccupation, Mme la Présidente, c'est, comme cela a
été mentionné par mon collègue de Nelligan et
d'autres, le fardeau qu'on amène à la petite et moyenne
entreprise et spécialement la petite entreprise. Je ne suis pas inquiet
pour les multinationales mais je voudrais tout simplement dire que la petite
entreprise qui a cinq, six, sept employés, Dieu sait combien il lui est
difficile de nos jours de joindre les deux bouts. Dans le cas d'un accident,
justement, l'employeur propriétaire de cette petite entreprise se voit
débourser pendant quatorze jours... En réalité ce sont dix
jours puisqu'on parle - le ministre l'a spécifié - de quatorze
jours de calendrier. On essaie de réduire et, en même temps, de
faciliter aussi la tâche administrative de la CSST. Je le comprends et
c'est pour cela que j'aurais bien pu faire un amendement pour l'amener à
cinq, mais il me semblerait que sept, ce serait raisonnable. Pour en revenir
à la petite entreprise, lorsqu'elle a un accidenté, pendant cette
période, elle doit verser les 90%. En même temps, il faut que
l'ouvrage soit fait en entreprise. Il faut que, justement, l'employeur aille
chercher un remplaçant. Pour cette période, l'employeur se trouve
à verser deux salaires. C'est vrai que le montant est remboursable par
la CSST et c'est vrai que, à la suite de l'amendement qu'on a
adopté, si la CSST est irresponsable dans son remboursement, des
intérêts seraient versés, seraient dus. C'est justement sur
le fait que la petite entreprise, elle, qui n'a pas un fonds de roulement
énorme, doit débourser le salaire de l'accidenté et, en
même temps, payer l'autre salaire. Cela veut dire que, pour cette
période, il y a un double paiement qui nécessite peut-être
que l'employeur se rende à la banque, emprunte de l'argent et ainsi de
suite. Je n'embarquerai pas dans les calculs pour savoir combien cela va
coûter, mais c'est une préoccupation. Il y a aussi la question des
sept jours. Cela rejoint l'opinion que j'ai. Je voudrais préciser. Le
ministre m'a dit que, j'ai fait bien attention, je parlais de fraudeurs et
ainsi de suite; je ne parlais pas de fraudeurs, je parlais de l'être
humain. Lorsqu'on n'a pas assez d'exigences, qu'est-ce qui arrive? On est un
peu plus ouvert sur certaines choses.
M. Gagnon: Je m'excuse auprès de notre
collègue...
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Champlain.
M. Gagnon: Je ne sais pas si c'est une impression que j'ai, mais
cela fait très certainement une heure et demie qu'on entend sensiblement
les mêmes choses sur les mêmes articles. Si c'est tout simplement
perdre notre temps qu'on fait ici, on peut continuer dans ce sens; mais,
serait-il possible de demander au député de Viau... J'ai
essayé de faire de la lecture en même temps pour me distraire
parce que je trouvais que les mêmes arguments revenaient souvent, mais
là on recommence encore. Est-ce que c'est juste pour étirer le
temps? Vraiment, cela commence à être un peu démoralisant.
Je demanderais au député de Viau de ne pas s'obliger à
répéter encore toute l'argumentation qu'on entend depuis une
heure et demie et peut-être qu'on mette son amendement au vote le plus
vite possible pour qu'on puisse avancer dans nos travaux.
M. Lavigne: Question de règlement, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): M. le
député...
M. Lavigne: Est-ce qu'il n'y a pas un temps limite de discussion
pour chacun des arguments?
M. Cusano: Oui, on est sur l'amendement.
M. Lavigne: Sur l'amendement, ah!
M. Gagnon: Mme la Présidente, avant l'amendement. On a
fait toute la discussion et, après, on arrive avec un amendement et on
recommence les 20 minutes par personne sur l'amendement. Y a-t-il
possibilité - je ne vous en tiens pas rigueur - à l'avenir de
surveiller le temps de parole de tout le monde de façon qu'on discute
l'amendement après l'avoir déposé et non pas avant et
après encore?
La Présidente (Mme Juneau): M. le député...
Un instant, s'il vous plaît!
M. Cusano: Question de règlement, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): Voulez-vous me laisser
intervenir deux petites minutes, s'il vous plaît?
M. Cusano: Oui, madame.
La Présidente (Mme Juneau): Sur l'effet du calcul du
temps, tout a été fait à la minute près, d'une
part. D'une autre part, chacun des membres n'a pas complètement
dépensé son temps, si je peux m'exprimer ainsi. Donc, le
député...
M. Gagnon: De ce côté-ci, sûrement pas.
La Présidente (Mme Juneau): Sûrement pas, M. le
député.
M. Cusano: Mais vous avez le droit de le dépenser, M. le
député de Champlain.
M. Gagnon: On a trop de respect pour les travaux de
l'Assemblée nationale pour faire perdre autant de temps que vous le
faites, monsieur.
M. Cusano: Ah bon! C'est pour cela qu'on étudie un projet
de loi de 556 articles et presque 200 amendements ainsi que plusieurs autres
qui sont en rédaction.
La Présidente (Mme Juneau): Cela dit, est-ce qu'on
pourrait convenir que les articles 58 et 59 seraient adoptés avec
amendements, M. le député de Viau?
M. Cusano: C'est-à-dire que j'ai un amendement à
proposer. J'aimerais bien que...
Une voix: Qu'on en dispose.
M. Cusano: ... qu'on en dispose. Si mes collègues avaient
des commentaires à ajouter... Je voulais tout simplement
préciser... Le ministre a aussi fait une ouverture. Il disait que sa
proposition était sur la table et il s'attendait qu'il y ait une
proposition de notre part. Je l'ai faite, la proposition.
Une voix: Je suis prêt à voter, moi.
M. Cusano: Vous êtes prêt à voter? C'est
bien.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que vous voulez que je
relise l'amendement qui a été proposé par le... Cela va?
Vous êtes prêts à voter?
M. Fortier: Mme la Présidente, je voudrais vous indiquer
que je n'utiliserai pas mon temps de parole pour des motifs autres que ceux de
mon collègue. Quant aux explications que j'ai eues tout à
l'heure, je me demande encore pourquoi c'est quatorze et que ce n'est pas autre
chose. J'ai écouté attentivement les explications du ministre,
mais je n'ai pas saisi toute l'astuce dans le choix de quatorze jours par
rapport à sept jours.
M. Fréchette: Cela représente 80% des dossiers.
M. Cusano: Et pour sept jours, on parlerait de quel pourcentage
des dossiers, M. le ministre?
M. Fréchette: Cela représente 97 000 dossiers au
lieu de 180 000.
M. Cusano: Cela faciliterait un peu la tâche de la CSST et
je pense que c'est une bonne solution de compromis sur cette période.
Alors...
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'amendement du
député...
M. Grégoire: Concernant la bureaucratie, si vous proposez
quatorze jours ou sept jours, dans les faits, le gars dans l'industrie qui est
blessé, s'il est blessé le mercredi et que le chèque de
paie arrive le vendredi suivant, il y a cinq ou six jours ouvrables. Cela veut
dire qu'il y a six jours sur le chèque de paie de deux semaines pour
cette quinzaine qui sont remboursables par la CSST et qui doit donc faire
l'objet d'un document. À la deuxième quinzaine, comme c'est
quatorze jours, il y a encore une autre - parce que ce sont deux jours de
calendrier - période de quatre jours sur le chèque de paie qui
fait l'objet d'une autre document à envoyer à la CSST. C'est
simplement la bureaucratie que le mot "quatorze" indique. Le mot "quatorze" ne
semble pas s'aligner sur les normes hebdomadaires des chèques de
paie.
M. Fréchette: On ne peut pas choisir les jours où
on a nos accidents.
M. Grégoire: Non, mais les jours de paiement, par exemple,
vous pouvez le dire. Si c'est aligné sur les jours où les
industries font ordinairement leurs chèques de paie, je pense que
là...
M. Fréchette: C'est exactement ce qui est écrit
dans la loi: à la prochaine paie.
M. Grégoire: À la prochaine paie, mais, si la
prochaine paie ne comprend que quatre jours après l'accident...
M. Fréchette: Écoutez, vous êtes en train de
me demander: Y a-t-il moyen que les travailleurs choisissent...
M. Grégoire: Cela veut dire que..
M. Fréchette: ...quelle journée ils vont avoir un
accident?
M. Grégoire: Non, non. M. le ministre, écoutez-moi
bien. Vous savez exactement ce que je veux dire et je pense bien que...
M. Fréchette: Je ne comprends pas.
M. Grégoire: ...ce n'est pas moi qui ai abusé de la
discussion. Oui, vous comprenez. Si le prochain chèque de paie vient
quatre jours après l'accident - je sais bien que vous n'avez pas choisi
le jour de l'accident - cela veut dire que l'employeur devra l'indiquer sur
deux chèques de paie au lieu de sur un. C'est ce que je voulais faire
remarquer. C'est de la paperasse qui s'ajoute.
M. Fréchette: D'accord.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'amendement du
député de Viau est adopté?
M. Cusano: Adopté. M. Fréchette:
Rejeté.
La Présidente (Mme Juneau): Rejeté. Est-ce que
l'article 58 tel qu'amendé est adopté?
M. Fortier: Quel était l'amendement, Mme la
Présidente?
La Présidente (Mme Juneau): On a adopté un
amendement ce matin, M. le député d'Outremont, qui était
d'ajouter, à la fin de l'article 58: "L'employeur verse le salaire au
travailleur à l'époque où il le lui aurait normalement
versé..."
M. Fortier: C'est cela.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 58 tel
qu'amendé est adopté?
M. Cusano: Sur division.
La Présidente (Mme Juneau): Sur division. Est-ce que
l'article 59 tel qu'amendé est adopté?
M. Cusano: Sur division.
La Présidente (Mme Juneau): Merci. Article 60?
M. Fréchette: Y a-t-il des amendements à l'article
60?
La Présidente (Mme Juneau): Non, cela va à
l'article 65, M. le ministre. (16 h 30)
M. Fréchette: L'article 60 me paraît relativement
simple. Mais ce n'est pas parce qu'il est simple en apparence qu'on doit
l'adopter rapidement. Il spécifie purement et simplement que, lorsque le
travailleur accidenté qui est revenu au travail se retrouve dans
l'obligation de s'absenter de son travail pour des fins de traitements
médicaux, pour réaliser son programme de réadaptation, ces
absences nécessitées par l'une ou l'autre des deux situations
dont je viens de parler doivent être payées par l'employeur.
Il y a un cas où l'employeur... Alors, c'est ce que je viens de
dire. La commission va rembourser à l'employeur le montant qu'elle paie
pour ces fins-là, les deux fins dont je viens de parler, mais elle ne
remboursera pas l'employeur si l'accidenté est allé en traitement
médical ou en expertise médicale à la demande de
l'employeur.
J'attire l'attention des collègues sur le libellé du
deuxième paragraphe de l'article 60: "La commission rembourse à
l'employeur, sur demande, le salaire qu'il a payé..." C'est pour couvrir
le cas où l'employeur en viendrait à la conclusion qu'une absence
d'une heure ne vaut pas la peine, à toutes fins utiles, d'être
réclamée, parce que cela commanderait de l'énergie pour
plus que le montant réclamé que de présenter la demande de
paiement à la commission.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce qu'il y a des
interventions? M. le député de Viau.
M. Cusano: C'est strictement pour des examens médicaux,
n'est-ce pas?
M. Fréchette: Bien, la loi le précise très
clairement: "...s'absenter de son travail pour recevoir des soins ou subir des
examens médicaux relativement à sa lésion ou pouraccomplir une activité dans le cadre de son plan
individualisé de réadaptation." Il y a deux
phénomènes, donc.
M. Cusano: Cela est dans le cas, si je comprends bien, d'une
personne qui est réintégrée au travail, mais qui aurait
à subir des traitements une fois par semaine, une fois par mois ou ainsi
de suite.
M. Fréchette: Physiothérapie, enfin tout autre
phénomène ou activité qu'on retrouverait à
l'intérieur de son programme de réadaptation, ou alors un examen
médical chez son médecin.
M. Cusano: II n'y a pas de problème avec cela.
Une voix: Adopté?
La Présidente (Mme Juneau): L'article 60 est-il
adopté?
M. Cusano: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): L'article 61?
Une voix: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): Adopté. L'article
62?
Calcul de l'indemnité de remplacement du
revenu
M. Fréchette: II n'y a toujours pas d'amendement?
La Présidente (Mme Juneau): Non, monsieur.
Une voix: La même chose qu'à l'article 61.
M. Fréchette: Ah bon!
La Présidente (Mme Juneau): C'est à 65.
M. Fréchette: Mme la Présidente, ce ne sera
peut-être pas suffisant pour moi de simplement indiquer que l'article 62,
tel qu'on le retrouve dans le projet de loi 42, est la reconduction
intégrale du texte de la loi actuelle sur les accidents du travail. Cet
article 62 donne les balises dont il faut tenir compte pour déterminer
le revenu net retenu que le travailleur tire annuellement.
La Présidente (Mme Juneau): L'article 62.
M. Cusano: L'article 62.
M. Grégoire: ...
La Présidente (Mme Juneau): Oui.
M. Grégoire: Vite de même?
La Présidente (Mme Juneau): Oui.
Une voix: Cela a été vite.
M. Fréchette: Cela ne se peut pas, n'est-ce pas?
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce qu'il y a des
interventions sur l'article 62?
M. Grégoire: Non, sur l'article 61, j'ai...
M. Fréchette: Ah, il est adopté!
La Présidente (Mme Juneau): II est adopté, M. le
député.
Une voix: Trop tard.
M. Grégoire: D'accord, je vais le faire à l'article
62. Le calcul de l'indemnité de remplacement du revenu, cela va revenir
è ce que je vous ai parlé ce matin, M. le ministre, il va falloir
trouver l'article où placer cela.
Le revenu net que le travailleur tire annuellement, c'est à peu
près les mêmes mots qu'à l'article 61, ou à peu
près, c'est ce qu'il retire moins ce qu'on lui enlève en
impôt, moins ce qu'on lui enlève en assurance-chômage,
cotisation ouvrière payable, et moins la Loi sur le Régime de
rentes du Québec.
Or, il n'est pas fait mention du tout de ce qu'il paie - parce que cela
aussi est une retenue - pour son régime de retraite vis-à-vis de
la compagnie. Est-ce que cela veut dire, comme cela n'est pas mentionné,
que son revenu net... C'est bien mentionné que c'est moins
l'impôt, moins son assurance-chômage, moins son régime de
rentes; mais ce n'est pas mentionné moins son régime de retraite
qu'il paie avec la compagnie. Si cela fait 20 ou 25 ans que le gars est avec la
même compagnie et qu'il est rendu à 50 ans, pourquoi,
jusqu'à l'âge de 65 ans, ne pourrait-il pas continuer à
payer son régime de retraite pour l'avoir à 65 ans quand son
indemnité de remplacement du revenu va tomber?
M. Fréchette: Mme la Présidente, je vous signale
que la discussion qu'est en train d'amorcer le député de
Frontenac a déjà été faite à certains
égards et, deuxièmement, il y a trois ou quatre articles qui sont
encore en suspens et qui ont été mis en suspens, très
précisément, pour revenir sur cette question. Ce sont les
articles 47, 48, enfin, je les ai donnés ce matin. 47, 48, 50, 51 et 52.
Tous ces articles ont été tenus en suspens à la demande du
député de Sainte-Marie et du consentement de tous les
membres de la commission qui étaient présents, pour que
nous puissions y revenir et faire toute la discussion.
M. Grégoire: Sur cette affaire. M. Fréchette:
Très précisément.
M. Grégoire: Très bien, M. le ministre, cela me
satisfait, je n'insisterai pas. Deuxièmement, je voudrais demander au
ministre - cela ne sera pas plus long - quand il ne paie pas sa régie
des rentes, est-ce que cela veut dire que, lorsque vient le temps où son
indemnité de remplacement du revenu cesse, c'est-à-dire à
65, 67 ou 68 ans, avec la diminution de 100% à 75%, à 50%,
à 25%...
M. Fréchette: II y a un article dans la loi qui
prévoit cela. On va vous dire très précisément
lequel.
M. Grégoire: Quel numéro?
M. Fréchette: C'est ce qu'on va vous dire dans une seconde.
M. Grégoire: Il prévoit cela. M.
Fréchette: Oui.
M. Grégoire: Le gars aurait droit à son
régime des rentes comme s'il y avait contribué?
M. Fréchette: L'article 487.
Le Président (M. Dussault): Y a-t-il d'autres
interventions?
M. Grégoire: Attendez un peu. On me dit l'article 487.
Le Président (M. Dussault): Cela va-t-il, M. le
député de Frontenac?
M. Grégoire: Est-ce qu'on indique que, si on lui retranche
les paiements qu'il aurait faits autrement à la Régie des rentes
du Québec, même s'il n'a plus à les payer, il recevra sa
régie des rentes tout comme s'il les avait payés?
M. Fréchette: Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: Je ne voudrais pas être
désagréable à l'endroit du député de
Frontenac, mais je viens de lui signaler que nous avions tous convenu, à
l'unanimité des membres de la commission, de réserver cette
discussion lorsque nous reprendrions l'étude des articles qui ont
été tenus en suspens.
Cela serait contre-indiqué, me semble-t-il, puisqu'il y a des
membres qui étaient ici et qui ont participé à ce
consentement qui n'y sont pas actuellement, d'entreprendre la discussion sur
cela. D'autant plus qu'on aura une autre occasion, à l'article dont on
vient de parler, de refaire la discussion. Cela n'est pas pour être
désagréable, mais on avait entrepris l'étude de l'article
62.
M. Grégoire: À l'article 62, on parle aussi de ces
choses. Ma dernière question: Est-ce que cela veut dire qu'on a
réservé cela aux articles qui vont traiter et du régime de
rentes et des régimes de retraite des compagnies?
M. Fréchette: Très précisément.
M. Grégoire: D'accord, M. le ministre, quand on y
reviendra, on en parlera.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 62 est
adopté? M. le député d'Outremont?
M. Fortier: Cela va.
La Présidente (Mme Juneau): Adopté. L'article
63?
M. Fortier: À ce sujet, il y avait des articles en suspens
parce qu'on s'était posé la question de savoir si c'était
uniquement revaloriser à la hausse ou revaloriser à la baisse.
Ici, on parle de revaloriser...
M. Fréchette: Cela aurait une relation avec les articles
qui ont été laissés en suspens.
M. Fortier: Je ne sais pas. Est-ce que "revaloriser" peut
s'appliquer autant à la hausse qu'à la baisse? J'imagine que
oui.
M. Fréchette: Juste un petit instant, si vous
permettez.
Alors, Mme la Présidente, est-ce que les membres de la commission
permettraient que le spécialiste de la technique l'explique? Je
risquerais de...
M. Fortier: II y a consentement, oui.
La Présidente (Mme Juneau): La parole est à M.
Lionel Bernier.
M. Bernier (Lionel): Ce que vise l'article 63, c'est de
prévoir que, lorsque la commission révise ou revalorise une
indemnité - la révision est une chose: la revalorisation, c'est
l'indexation - lorsqu'elle le fait, cela indique à partir de quelle
table elle le fait. Supposons que l'accident survient en 1984 et qu'elle doit
réviser ou revaloriser en 1986, la table des revenus nets retenus a
été indexée en 1985, elle a été
indexée en 1986. Ce que cela dit, c'est qu'au lieu de prendre la table
des revenus du moment de l'accident on doit prendre la table des revenus au
moment où on fait cette révision ou cette revalorisation. Cela
veut dire que le revenu de base, par exemple, qui était de 20 000 $, au
bout de deux ans, quand on l'indexe, devient 23 000 $. C'est cette table...
M. Fortier: Je n'ai pas de difficulté avec cela. Tout
simplement, ce que je veux dire, c'est que... Je comprends. Je vous remercie
beaucoup de l'explication, mais je n'ai aucune difficulté avec votre
explication.
C'est simplement qu'on dit: "détermine un nouveau revenu brut en
vertu de l'article 75 ou revalorise le revenu brut..." Et si vous disiez: ou
modifie le revenu brut, parce qu'il y a d'autres articles où on s'est
posé la question pour savoir s'il pouvait y avoir une diminution ou une
augmentation. Mais que la modification se fasse en fonction de la nouvelle
table, ce qui est comme s'ajuster par rapport à une nouvelle table
d'impôt, je ne vois aucune difficulté avec cela.
M. Bernier: Mais la revalorisation, cela vise seulement
l'indexation. Il y a un article qui spécifie comment cela doit se faire,
c'est 65. Aux articles 114 et suivants, vous avez le chapitre de la
revalorisation. C'est la forme d'indexation...
M. Fortier: L'article 114 nous réfère à
l'article 47. Si je me souviens bien, l'article 47 a été
suspendu.
M. Fréchette: Oui.
M. Fortier: Pour les motifs dont je viens de faire état.
À quel moment le ministre va-t-il pouvoir nous revenir avec l'article
47?
M. Fréchette: Sans doute demain, Mme la Présidente.
Je n'ai pas d'objection à laisser aussi en suspens l'article 63.
M. Fortier: Je ne vois pas de difficulté, je serais
prêt à dire adopté. C'est simplement le fait, selon la
décision qu'on va prendre sur l'article 47.
M. Fréchette: Est-ce qu'on ne pourrait pas l'adopter sous
cette réserve?
M. Fortier: C'est la seule réserve que j'ai.
M. Cusano: J'aurais une question, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): M» le
député de Viau.
M. Cusano: On dit: "en considérant la situation
familiale..." C'est en considérant le nombre de personnes qui sont dans
la famille, justement...
M. Fréchette: Cela serait peut-être un des
éléments à considérer.
M. Cusano: Mais, est-ce que cela peut déborder
au-delà... La situation familiale, c'est la famille
immédiate?
M. Fréchette: II me semble que les mots veulent dire ce
qu'ils veulent dire: l'épouse, deux enfants de tel âge,
enfin...
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va, M. le
député?
M. Fortier: La réaction que j'ai, c'est que, normalement
on retournerait au rapport d'impôt de l'individu, sauf qu'ici c'est comme
normalisé pour simplifier l'administration.
M. Fréchette: C'est cela.
La Présidente (Mme Juneau): L'article 63 est
adopté, sous réserve.
M. Fortier: Adopté sous réserve de la modification
à l'article 47, éventuellement.
La Présidente (Mme Juneau): D'accord. L'article 64?
M. Fréchette: Alors, l'article 64, Mme la
Présidente...
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre. (16 h 45)
M. Fréchette: Vous permettez que je ne fasse que lire et
rapidement. Il faudrait retenir qu'on a adopté l'article 6. Cela ne fait
que confirmer en quelque sorte le fait qu'il ne peut pas y avoir
d'indemnité qui soit calculée à partir d'une base
inférieure au salaire minimum....
M. Fortier: Pas de problème avec cela.
M. Fréchette: ...ni supérieure, bien sûr, au
maximum assurable.
La Présidente (Mme Juneau): L'article 64 est-il
adopté?
M. Cusano: Adopté. M. Fortier: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): Adopté. L'article 65 a
un amendement. C'est tout un amendement à part cela: Remplacer l'article
65 par le suivant: "65. Pour l'année 1985, le maximum annuel assurable
est de 33 000 $.
"Pour l'année 1986 et chaque année subséquente, le
maximum annuel assurable est obtenu en multipliant le maximum pour
l'année 1985 par le rapport entre la somme des
rémunérations hebdomadaires moyennes des travailleurs de
l'ensemble des activités économiques du Québec
établies par Statistique Canada pour chacun des 12 mois
précédant le 1er juillet de l'année qui
précède celle pour laquelle le maximum annuel assurable est
calculé et cette même somme pour chacun des 12 mois
précédant le 1er juillet 1984. "Le maximum annuel assurable est
établi au plus haut 500 $ et est applicable pour une année
à compter du 1er janvier de chaque année. "Pour l'application du
présent article, la commission utlise les données fournies par
Statistique Canada au 1er octobre de l'année qui précède
celle pour laquelle le maximum annuel assurable est calculé. "Si les
données fournies par Statistique Canada ne sont pas complètes le
1er octobre d'une année, la commission peut utiliser celles qui sont
alors disponibles pour établir le maximum annuel assurable. "Si
Statistique Canada applique une nouvelle méthode pour déterminer
la rémunération hebdomadaire moyenne pour un mois donné,
en modifiant la période ou le champ d'observation visé, et que la
somme des rémunérations hebdomadaires moyennes pour une
année au cours de laquelle Statistique Canada a appliqué une
nouvelle méthode est supérieure ou inférieure de plus de
1% à la somme des rémunérations hebdomadaires moyennes
établies selon les données de l'ancienne méthode, les
rémunérations hebdomadaires moyennes à utiliser pour
établir la moyenne annuelle pour chacune des années
affectées par le changement de méthode sont ajustées par
la commission de façon à tenir compte des données selon la
méthode appliquée par Statistique Canada le... (inscrire ici la
date de l'entrée en vigueur du présent article)."
M. Cusano: Cet...
La Présidente (Mme Juneau): Pardon?
M. Fréchette: Mme la Présidente, c'est...
M. Cusano: Peut-être avant que le ministre...
M Fréchette: C'est une formule singulièrement
compliquée pour, finalement, dire quelque chose de très simple.
On veut arriver à déterminer que le maximum annuel assurable, qui
est actuellement de 31 500 $, sera porté à 33 000 $ pour
l'année 1985.
Nous procédions à partir de la méthode que retenait
Statistique Canada et, avec l'article 65 tel qu'on le retrouve dans le projet
de loi 42, nous aurions effectivement atteint le maximum dont on parle,
c'est-à-dire les 33 000 $ en 1985.
Cependant, Statistique Canada a changé sa formulation ou sa
méthode pour en arriver à établir le salaire moyen dans le
sens suivant. Jusqu'à tout récemment, on ne tenait pas compte des
situations existant dans les entreprises de 20 travailleurs et moins.
Maintenant, on en tient compte. De sorte que, si on ne retenait pas le texte
qu'on retrouve à l'article 65, nous ne pourrions pas atteindre
l'objectif de voir le salaire maximum annuel assurable à 33 000 $ en
1985. C'est encore une fois une formule bien compliquée pour strictement
dire ce que je viens de dire.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Quel est le maximum?
M. Fréchette: Actuellement, il est de 31 500 $.
M. Cusano: Cette même formule...
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: ...a été employée à
l'assurance automobile.
M. Fréchette: C'est la nouvelle formule utilisée
par Statistique Canada qui va s'appliquer partout maintenant.
M. Bisaillon: D'année en année? M.
Fréchette: Oui.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'amendement
à l'article 65 est adopté?
Une voix: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): L'article 65 tel
qu'amendé est adopté.
M. Cusano: Cela va bien.
La Présidente (Mme Juneau): Adopté. L'article
66?
M. Cusano: II n'y a pas d'amendement à l'article 66.
La Présidente (Mme Juneau): Non, M. le
député. Cela va aller à l'article 72.
M. Fréchette: Mme la Présidente, je ne fais que
lire rapidement le commentaire. Cet article permettra à la commission de
tenir compte du revenu brut prévu par le contrat
de travail du travailleur, tout en laissant à celui-ci, pour
qu'il n'en soit pas lésé, la possibilité de
démontrer un revenu brut annuel d'emploi plus élevé.
Comparativement à la méthode prévue par l'actuelle loi sur
les accidents du travail qui oblige, sauf exception, à tenir compte des
gains passés, cette méthode est à la fois plus facile
d'application et plus juste.
C'est précisément pour arriver à établir le
revenu brut annuel d'un salarié à partir de son contrat de
travail, tout en laissant ouverte la possibilité de faire la preuve que
ses gains réels provenant de ses occupations sont supérieurs
à ce qui est prévu à son contrat de travail; pour les
gens, par exemple, qui auraient deux emplois.
Une voix: Les bonis et les primes.
M. Fréchette: Les bonis et les primes, des situations
comme celles-là. D'ailleurs, au paragraphe 2 de l'article 66, on
énumère quelques-unes des situations auxquelles on peut se
référer.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: L'article 66 prévoit que c'est le
travailleur qui doit faire cette démonstration à la commission.
Je voudrais savoir, de la part du ministre, s'il serait trop compliqué
que ce réexamen se fasse d'année en année par la
commission elle-même; autrement dit, qu'on renverse le...
M. Fréchette: Ce mécanisme n'intervient qu'une
seule fois et c'est au moment où l'accident se produit, quand arrive le
temps de déterminer le salaire annuel brut du salaire. Par la suite, il
n'est plus nécessaire de reprocéder à cette
évaluation.
M. Bisaillon: On se fixe sur le contrat de travail, même si
le contrat de travail prévoyait des augmentations, par exemple.
M. Fréchette: II va être revalorisé, de toute
façon, à l'anniversaire de la lésion. C'est pour cela que
c'est nécessaire de le faire seulement une fois.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Mme la Présidente, sur la question, justement,
du deuxième paragraphe, lorsqu'on dit qu'on peut y inclure des bonis et
des primes, je n'y vois aucune difficulté, mais, lorsqu'on arrive
à y inclure des pourboires, des commissions, ainsi de suite, est-ce
qu'il y aurait un mécanisme, dans un sens, c'est-à-dire le nombre
de personnes dans un établissement, le pourboire pour cette
période, le pourboire moyen, si on veut, parce que d'abord, de ce
côté, on pourrait, tout d'un coup... Spécialement, on sait
les problèmes qu'on connaît du côté des pourboires
ces jours-ci. Je suis d'accord avec le principe qu'on puisse, justement, le
démontrer, mais c'est encore un autre article qui pourrait amener des
abus. De quelles sortes de moyens de vérification se dote la commission
pour s'assurer qu'une personne qui, par exemple, n'a jamais
déclaré ou a déclaré très peu de pourboires,
en vienne tout à coup, à la suite d'un accident, à faire
une déclaration de pourboires énormes?
M. Fréchette: Qu'est-ce qui arrive? M. Cusano:
Oui.
M. Fréchette: D'abord, je signale au député
de Viau que le texte du deuxième paragraphe de l'article 66 a un
caractère tout à fait facultatif.
M. Cusano: Oui, oui.
M. Fréchette: Le travailleur n'est pas du tout
obligé...
M. Cusano: Non.
M. Fréchette: ...de déclarer, par exemple, ses
revenus de pourboires. S'il prend sur lui de le faire, il est évident
que cela peut déboucher sur un certain nombre d'autres implications si
cette personne a certaines choses sur lesquelles elle n'est pas tout à
fait à l'aise. Mais elle prendra elle-même ses propres
décisions qui déboucheront sur les conséquences normales
d'une semblable décision. II n'y a pas d'obligation.
M. Cusano: Non, je n'ai pas dit qu'il y avait une obligation.
Lorsque le travailleur démontre, justement, qu'il aurait pu, s'il avait
travaillé, gagné un montant X en commissions ou en pourboires, je
me demande quels sont les moyens de contrôle de la part de la commission.
Si c'est accepté tel quel et qu'on dit: II subira...
M. Fréchette: La commission peut très certainement
exiger de l'accidenté qui fait une réclamation d'appuyer sa
déclaration par une preuve documentaire s'il en existe une. Rien
n'empêche la commission, non plus, de faire la vérification
auprès, par exemple, de l'employeur pour confirmer la
véracité des déclarations qui sont faites. Ce sont les
moyens usuels mis à la disposition de quiconque pour obtenir des
renseignements.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va?
M. Fréchette: On me dit qu'actuelle-
ment il y a effectivement une vérification auprès de
l'employeur.
M. Cusano: C'est bien.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article... M. le
député de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: À la question que j'ai posée
tantôt, le ministre a répondu que le revenu fixé selon
l'article 66 serait revalorisé tous les ans par la méthode
prévue dans la loi. Mais cela ne tient pas compte, par exemple, des
augmentations ou cela n'atteindra jamais le niveau des augmentations
prévues aux conventions collectives. Je ne parle pas seulement
d'augmentations d'échelle, mais il y a des augmentations
d'échelon qui sont prévues aussi dans les conventions
collectives. Est-ce qu'on ne pourrait pas procéder dans cet article
comme on l'a fait pour la notion d'emploi convenable qui était
réévaluée ou réexaminée, il me semble, aux
deux ans? On disait qu'à tous les deux ans, si c'est supérieur
ou... On n'a pas encore réglé le problème de la baisse...
Mais on réajustait aux deux ans. Je sais que, d'un côté, on
dit que c'est trop et, de l'autre, on dit que ce n'est pas assez et on vous
amène de façon très pédagogique à dire:
C'est assez, c'est correct comme cela.
M. Fréchette: Oui.
M. Bisaillon: En examinant cela attentivement...
M. Fréchette: C'est une formule qui va devenir
familière dans la bouche du député de Sainte-Marie. La
préoccupation du député de Sainte-Marie est très
facilement "comprenable" - entre guillemets. Cependant, Mme la
Présidente, vous voyez d'ici ce que cela pourrait vouloir dire en
termes... Je comprends que c'est une préoccupation d'ordre strictement
technique ou bureaucratique que je vais soulever, mais elle n'est pas mineure
quant à moi. C'est ce que pourrait vouloir dire de procéder
à l'analyse de la convention collective de chacun des accidentés
qui se présente à la commission pour une réclamation. Il
me semble que d'inscrire dans la loi que l'indemnité sera
revalorisée annuellement à partir de l'indice des prix à
la consommation, cela devrait, à toutes fins utiles, à moins de
se retrouver dans des conventions collectives d'une
générosité absolument extraordinaire, rejoindre l'objectif
que le député de Sainte-Marie est en train de nous soumettre.
Avantages et inconvénients dans chacun des plateaux de la balance, je
préfère, et de beaucoup, garder la formule de la loi qui
prévoit cette indexation ou cette revalorisation.
M. Bisaillon: Je ne veux pas faire un débat ni soulever
à nouveau toute la question. Je veux indiquer cependant, que, lorsque le
ministre disait tantôt: On va se baser sur le contrat de travail, tout ce
que comprend le contrat de travail au moment de l'accident, le contrat de
travail a une extension. Il n'est pas fixé dans le temps ou figé
dans le temps pour une année. Autrement dit, ce que le travailleur a
réussi à obtenir à l'intérieur de son contrat de
travail, cela s'échelonne sur deux ou trois ans et il en est
déjà propriétaire au moment où son accident du
travail se produit. La réponse du ministre est une réponse qui
dit qu'au plan administratif ce serait plus onéreux d'appliquer cela de
la façon dont je le propose. Il y aurait peut-être un moyen de
s'en sortir, c'est de prévoir dans l'article que cela puisse tenir
compte de cela et de laisser le travailleur le soumettre. (17 heures)
Dans l'article actuel, le travailleur démontre à la
commission. Au moment où le travailleur va vouloir le démontrer
à la commission, celle-ci va être obligée, de toute
façon, de se pencher sur son cas et de l'examiner en détail.
Alors, plutôt que de dire que ma proposition était que cela se
fasse année après année, ou aux deux ans, comme pour
l'emploi convenable, on pourrait tout simplement laisser l'article tel qu'il
est là, mais en prévoyant que cela peut être un
élément dont le travailleur se sert pour faire sa
démonstration à la commission.
M. Fréchette: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: ...peu importe la formule qui est
suggérée par le député de Sainte-Marie, je continue
de prétendre qu'en faisant l'analyse des deux colonnes classiques que
l'on connaît, la balance des inconvénients et des avantages, la
balance des inconvénients est passablement plus pesante.
Deuxièmement, oublions cet aspect strictement technique. Je
réitère, Mme la Présidente, qu'à partir du moment
où l'on inscrit dans le projet de loi et que c'est adopté comme
tel que toutes les indemnités sont revalorisées annuellement, on
rejoint, à toutes fins utiles, le même objectif, à moins,
comme je le disais tout à l'heure, qu'on ne se retrouve devant des
contrats de travail qui...
M. Bisaillon: Je diverge sûrement d'opinion avec le
ministre quant à l'équilibre que cela peut représenter. En
tout cas, c'était un effort honnête, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 66 est
adopté?
Une voix: Oui.
M. Bisaillon: Si j'avais la possibilité, je dirais sur
division...
La Présidente (Mme Juneau): Vous ne l'avez pas.
M. Bisaillon: ...quoique je trouve qu'il y ait des
améliorations.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau, est-ce correct?
M. Cusano: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): Adopté. L'article
67?
M. Fréchette: Y a-t-il des...
La Présidente (Mme Juneau): Non. Cela va à
l'article 72.
M. Fréchette: Mme la Présidente, je ne fais, encore
une fois, que lire rapidement le commentaire. Cet article répète
en quelque sorte les termes du deuxième alinéa du paragraphe 2 de
l'article 46 de la loi actuelle. Il prévoit utiliser, comme base de
calcul de l'indemnité de remplacement du revenu, les gains d'un
travailleur "correspondants" - entre guillemets - comme l'article
précédent. Il permet cependant au travailleur de faire la preuve
de gains plus élevés.
La Présidente (Mme Juneau): Pas d'interventions?
M. Bisaillon: Je ne reprendrai pas les interventions que j'ai
faites à l'article précédent.
La Présidente (Mme Juneau): C'est cela.
M. Bisaillon: Mais on comprend que... M. Fortier: Quel
article?
M. Bisaillon: ...je serais tenté de le faire.
La Présidente (Mme Juneau): L'article 67.
M. Fréchette: Ce sera au Journal des débats.
Une voix: Adopté? M. Cusano: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): Adopté. L'article
68?
M. Fréchette: Mme la Présidente, cet article
prévoit que le revenu brut d'un travailleur qui n'a plus d'emploi
lorsque se manifeste sa lésion professionnelle sera celui qu'il tirait
de l'emploi par le fait ou a l'occasion duquel il a été victime
de cette lésion. Et il y a la prévision que, le 1er janvier de
chaque année, cela doit être revalorisé depuis la date
où le travailleur a cessé d'occuper cet emploi. Cela ne fait que
reconduire, à moins que je ne me trompe, in extenso,
intégralement, une disposition actuelle de la loi.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Mme la Présidente, c'est la formulation du
deuxième paragraphe de l'article 68 qui n'est pas claire pour moi. "Ce
revenu brut est revalorisé au 1er janvier de chaque année depuis
la date où le travailleur a cessé d'occuper cet emploi..." Je
trouve que ce n'est pas clair, comme formulation.
M. Fréchette: Cela veut dire que c'est même
antérieur au moment où se découvre la lésion
professionnelle. II a cessé de travailler et, au moment où il
cesse de travailler, ce n'est pas pour un motif de lésion
professionnelle, c'est pour n'importe quel autre motif. Et au moment où
toutes les étapes prévues par la loi pour les fins de la
réclamation sont franchies, qu'une décision est rendue, cette
indemnité sera rétroactive à compter du moment où
il a quitté son emploi, pas à compter du moment où, six
mois plus tard, on a confirmé qu'il y avait diagnostic de maladie
professionnelle ou séquelle d'un accident du travail.
M. Bisaillon: Donc, s'il avait quitté son emploi en
décembre, admettons...
M. Fréchette: Oui.
M. Bisaillon: ...on lui affecterait ce revenu...
M. Fréchette: À compter de...
M. Bisaillon: ...ce serait en fonction du revenu de
décembre et, au 1er janvier, ce serait...
M. Fréchette: II y aurait revalorisation. M. Bisaillon:
...une revalorisation. M. Fréchette: C'est cela.
M. Bisaillon: Je ne comprends pas que c'est cela qu'on veut
dire.
M. Lavigne: Quand on le relit, il me
semble que cela se comprend mieux.
M. Bisaillon: Avec l'explication, vous comprenez mieux? Le
problème c'est que le ministre ne pourra pas être à
côté de chaque travailleur qui va le lire. C'est cela.
M. Lavigne: Oui. "Ce revenu brut est revalorisé au 1er
janvier de chaque année..."
M. Bisaillon: Cela pourrait être fait en deux phrases.
Est-ce que cela dirait la même chose en deux phrases?
M. Fréchette: J'arrive, Mme la Présidente, dans une
seconde. Peut-être qu'en procédant par le mécanisme d'un
exemple, on saisirait mieux ce à quoi l'article 68 nous
réfère. Prenons l'exemple d'une personne qui travaille dans une
mine d'amiante ou de silice, peu importe. À un moment donné, en
1984, cette personne, non pas pour des motifs de lésions
professionnelles comme je le disais tout à l'heure, mais pour n'importe
quel autre motif, décide de changer d'emploi. Elle se retrouve dans un
autre emploi et, dans ce deuxième emploi, devient en chômage,
à un moment donné. Pendant la période de chômage, a
la suite d'examens médicaux ou à la suite d'autres
phénomènes du même genre, un diagnostic d'amiantose est
rendu parce qu'elle avait travaillé dans la mine jusqu'en 1984. Elle a
travaillé deux ans ailleurs après, a été en
chômage pendant une autre période et c'est pendant cette
dernière période que le diagnostic est posé. Le salaire de
ce travailleur, à partir duquel l'indemnité sera
déterminée, sera celui qu'il avait au moment où il
travaillait dans la mine en 1984, mais revalorisé depuis qu'il en est
sorti.
M. Bisaillon: Au 1er janvier. M. Fréchette:
Voilà.
M. Bisaillon: L'exemple nous fait comprendre et il me semble
que... Je ne fais pas d'amendement, mais je signale que, souvent, quand on
inverse nos phrases, on comprend mieux. Si on disait: Â compter de la
date où le travailleur a cessé d'occuper cet emploi, le revenu
brut est revalorisé au 1er janvier de chaque année, il me semble
que la séquence nous montre d'abord le premier événement
et on la suit. Je vous dis ça comme ça. Souvent, dans le texte,
on a...
M. Fréchette: C'est une formule que vous
suggérez?
M. Bisaillon: Si le texte disait... Il ne change rien, mais il me
semble qu'il nous fait voir plus clairement ce qu'on veut dire: À
compter de la date où le travailleur a cessé d'occuper cet
emploi, ce revenu brut est revalorisé au 1er janvier de chaque
année. Cela n'est qu'une inversion, mais il me semble qu'on comprend
mieux. Je ne veux pas en faire un amendement, mais je vous indique que,
souvent, dans un texte, on a de la difficulté à comprendre parce
que les phrases ne sont pas faites dans les séquences où les
événements se présentent.
M. Fréchette: Mme la Présidente, si l'objectif est
le même, est-ce qu'on peut...
M. Bisaillon: Oui, c'est comme je disais au député
de Beauharnois, le problème c'est que le ministre sera obligé
d'être à côté de chaque travailleur qui va lire la
loi.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Je voudrais comprendre l'esprit de l'amendement qui
est apporté. Peut-être que le ministre...
M. Fréchette: d'amendement.
Il n'y pas
M. Cusano: II n'y a pas d'amendement. Alors, il s'agit d'un
travailleur qui - peut-être que je me répète - à un
certain moment, peut être atteint d'une maladie professionnelle, mais il
n'en est peut-être pas conscient. Pour n'importe quelle raison, il quitte
son emploi deux ans après. La maladie est découverte. Son salaire
est basé sur ce qu'il gagnait au moment où il quittait et non au
moment où il est prouvé que la maladie a été
contractée.
M. Fréchette: Au moment où il quittait l'emploi
où la maladie professionnelle peut avoir été
contractée.
M. Cusano: Oui.
M. Fréchette: S'il a de l'amiantose et qu'après
être sorti de l'amiante il a travaillé deux ans comme commis dans
un magasin général, c'est évident qu'il va avoir
contracté sa maladie professionnelle au moment où il était
dans les mines d'amiante.
M. Cusano: C'est cela, pas de problème.
Une voix: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 68 est
adopté? Adopté. L'article 69?
M. Fréchette: L'article 69, c'est très
exactement le même principe, le même
phénomène, mais qui se réfère à
l'aggravation, à la rechute ou à la récidive autant de la
maladie professionnelle que de l'accident lui-même. À ce moment,
on retiendra le mécanisme prévu à l'article 68 pour fixer
l'indemnité de remplacement du revenu.
La Présidente (Mme Juneau): Adopté? Adopté.
L'article 70?
M. Cusano: II n'y a pas d'amendement.
La Présidente (Mme Juneau): Non, monsieur, cela va
à l'article 72.
M. Cusano: À l'article 72.
La Présidente (Mme Juneau): Oui.
M. Cusano: Cela veut dire, en termes très pratiques, M. le
ministre, que quelqu'un qui occupe deux emplois, indépendamment
où il a subi son accident, va recevoir une indemnité de
remplacement du revenu basée sur le montant de l'emploi qui est le plus
rémunérateur. Cela veut dire qu'un électricien, un
plombier qui, en fin de semaine, travaille dans une brasserie ou travaille au
Stade olympique, au Forum comme placier, s'il a un accident du travail dans son
emploi à temps partiel, va être rémunéré
selon le montant qu'il reçoit de son employeur où il travaille
cinq jours par semaine.
M. Fréchette: Oui, avec la nuance suivante: si l'accident
qu'il a subi alors qu'il travaillait comme serveur au Stade olympique, au Forum
ou dans une brasserie le rend incapable d'exercer son métier principal
d'électricien, pour utiliser le même exemple que celui que le
député de Viau a employé. A supposer, par exemple, je ne
sais pas, que ce soit la fracture des deux jambes qu'est l'accident alors qu'il
travaille comme serveur, évidemment, pour une période de temps X,
à cause de la fracture des deux jambes, il ne pourra pas faire son
métier d'électricien. Son indemnité va être
fixée à partir de son salaire d'électricien parce que son
accident, même subi ailleurs, l'empêche d'exercer son emploi
principal.
M. Cusano: D'accord, cela va.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Lorsqu'on parle, justement, de l'indemnité de
remplacement du revenu pour les 14 premiers jours, cela veut dire, si je
comprends bien, que l'employeur où il est a temps partiel - supposons
que c'est 35 $ par semaine - aura, pour les 14 jours à venir, à
débourser 90% du salaire qu'il gagne chez son employeur qui est
électricien?
M. Fréchette: Non.
M. Cusano: Expliquez-moi cela.
M. Fréchette: II va avoir à débourser 90% du
revenu net de l'emploi chez l'employeur où l'accident est arrivé,
les 14 premiers jours. Après les 14 premiers jours, c'est une autre
affaire.
M. Cusano: Oui, mais c'est dit où cela, M. le ministre? Je
comprends votre explication et je l'accepte. (17 h 15)
M. Fréchette: L'article 59 qui prévoit le paiement
des 14 premiers jours commence par les termes suivants: "L'employeur au service
duquel se trouve le travailleur lorsqu'il est victime d'une lésion
professionnelle..." Alors, dans l'exemple du député de Viau, il
est évident que l'employeur au service duquel se trouve le travailleur
au moment de cet accident...
M. Cusano: Oui.
M. Fréchette: C'est, je ne sais pas, la RIO ou...
M. Cusano: Oui, oui.
M. Fréchette: C'est ce salaire qui va être
considéré pour les fins de la fixation de l'indemnité de
remplacement du revenu pour les 14 premiers jours.
M. Cusano: II ne peut pas être inférieur... Il n'y a
pas un autre article qui dit que le montant ne peut pas être
inférieur au salaire minimum?
M. Fréchette: Bien oui. Il y a un autre article qui dit
cela, bien sûr.
M. Cusano: Ah! Bon. Alors, je veux bien comprendre, M. le
ministre. Cela veut dire que quelqu'un qui gagne 35 $ par semaine à
temps partiel, qui a un accident, l'employeur va lui donner, s'il ne sait pas
ce qu'il gagnerait ailleurs, peut-être 400 $ par semaine. Cela va
être basé sur le salaire minimum.
M. Fréchette: Non. Dans ce cas-ci, le mécanisme du
salaire minimum ne s'appliquerait pas. La lecture de l'article 59, me
semble-t-il en tout cas, donne réponse a toutes ces questions.
"L'employeur au service duquel se trouve le travailleur lorsqu'il est victime
d'une lésion professionnelle lui verse, si celui-ci devient incapable
d'exercer son emploi en raison de sa lésion, 90% de son salaire net pour
chaque jour ou partie de
jour - on prévoit même le travail à temps partiel -
où ce travailleur aurait normalement travaillé..."
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va, M. le
député?
M. Cusano: II n'y a pas d'autre explication sur...
M. Fréchette: Non. Il me semble que l'article 59
répond aux deux préoccupations que soulevait le
député de Viau.
M. Cusano: C'est une question d'interprétation, je ne le
vois pas tout à fait comme cela.
Une autre question sur le système de mérite et de
démérite. Qui va être pénalisé? C'est
où l'accident...
M. Fréchette: C'est de toute évidence l'employeur
chez qui l'accident s'est produit.
M. Cusano: Cela va.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Cusano: Non, allez-y. Il me semble que l'article, M. le
ministre, n'est pas tout à fait clair, et je vais citer mon
collègue, le député de Sainte-Marie: Les avocats qui vont
travailler à temps partiel... Il me semble que l'article n'est pas clair
et, en tout cas, il n'est pas clair pour moi.
M. Fréchette: II y a peut-être une autre information
qui pourrait être utile pour tenter de clarifier la situation. Il faut
nous rappeler que l'article 70 parle du mécanisme prévu dans un
cas comme celui-là pour fixer le revenu brut d'un travailleur, alors
qu'à l'article 59 on se référé au salaire net du
travailleur. Alors, ce sont deux notions, deux concepts tout à fait
différents.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Mme la Présidente, je n'ai pas de
difficulté avec le deuxième paragraphe de l'article 70. Je trouve
que la situation est clairement exprimée. Mais, dans le cas du premier
paragraphe, on dit: "Le revenu brut d'un travailleur qui occupe plus d'un
emploi est celui qu'il tire de l'emploi le plus rémunérateur
qu'il devient incapable d'exercer." Je ne vois pas pourquoi on choisit, pour
établir son revenu brut, l'emploi le plus rémunérateur.
Pourquoi n'est-ce pas l'addition des emplois qu'il occupait? Dans l'exemple que
le ministre a utilisé en réponse au député de Viau,
il donnait l'exemple d'un électricien qui est en même temps
serveur, qui a deux emplois, un comme électricien et l'autre comme
serveur et qui se casse les deux jambes. S'il se casse les deux jambes à
son emploi de serveur, on dit: On va calculer son revenu brut à partir
de son salaire le plus rémunérateur, qui serait, dans le cas
actuel, celui d'électricien. Mais, dans les faits, ce travailleur, avant
son accident puisqu'il faut le replacer, l'objectif étant toujours de
replacer le travailleur dans la situation où il était avant,
avait deux revenus et il est momentanément dans l'incapacité
d'exercer ses deux emplois. Donc, il perd ses deux revenus. Pourquoi
calcule-t-on son revenu brut uniquement sur l'emploi le plus
rémunérateur? Pourquoi ne tient-on pas compte du fait que ses
revenus réels proviennent de deux emplois?
J'aimerais entendre le ministre là-dessus et je vais y revenir,
Mme la Présidente.
M. Fréchette: Oui, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: Je vais revenir à une argumentation
qu'a développée hier le député de Sainte-Marie,
à plusieurs occasions. Il nous a même indiqué, à un
moment donné, même assez clairement, qu'il fallait se retrouver ou
qu'on se retrouvait nécessairement dans l'obligation de faire des choix
dans certaines circonstances.
Ce que l'on a visé, c'est d'essayer d'améliorer la
situation par rapport à l'état actuel des choses. Et dans
l'état actuel des choses, le député de Sainte-Marie sait
très certainement que ce n'est pas l'emploi le plus
rémunérateur qui est le barème de fixation, c'est l'emploi
dans lequel l'accident se produit. Bien sûr, l'idéal serait
d'arriver à la suggestion que fait le député de
Sainte-Marie et de procéder à l'addition des trois, quatre ou
cinq salaires que peut faire un travailleur ou des deux salaires que peut faire
un travailleur. Mais le choix qui a été fait, pour le moment en
tout cas, c'est d'améliorer la situation par rapport à
l'état actuel des choses, en précisant que ce serait le salaire
le plus rémunérateur de ceux qu'il fait, alors que, actuellement,
c'est le salaire qui est payé dans la fonction qu'exerce
l'accidenté. Je n'ai pas d'autres explications que celles-là.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Mme la Présidente, dans son intervention,
dans sa réponse, le ministre a indiqué que c'était le
choix qui avait été fait. Il a ajouté: "pour le moment".
Pour lui permettre de peut-être réviser sa position sur le sujet,
je vais présenter l'amendement suivant: Au premier paragraphe de
l'article
70, remplacer les termes "l'emploi le plus rémunérateur
qu'il devient incapable d'exercer" par les mots "la somme des emplois qu'il
devient incapable d'exercer".
Je vais expliquer mon amendement en vous disant ceci. Il est clair,
selon les explications qu'on a déjà entendues, que le texte
actuel représente une amélioration dans la façon de
calculer le revenu brut par rapport à la situation actuelle. Le ministre
nous dit: L'idéal, ce serait, évidemment... Et si on a voulu
améliorer par rapport à la situation actuelle, je suppose que
c'est parce qu'on avait fait le constat que celle-ci était injuste pour
le travailleur victime d'un accident. Parce que, si on avait
considéré que la situation actuelle, où on ne calculait
pas nécessairement l'emploi le plus rémunérateur, mais le
revenu de l'emploi qu'il occupait au moment de l'accident, si on n'avait pas
calculé cela injuste de procéder ainsi, on n'aurait pas
tenté de l'améliorer.
Donc, à partir du moment où on veut le faire, c'est qu'on
reconnaît qu'il y avait une injustice dans le traitement actuel. Comment
répare-t-on une injustice? Est-ce que c'est toujours en choisisssant la
demi-mesure ou si ce n'est pas plutôt carrément en donnant
l'ensemble des droits qui n'étaient pas reconnus dans le
passé?
Le ministre nous disait: II faut faire des choix. Sur quelle base ce
choix a-t-il été fait? Pourquoi nous sommes-nous
arrêtés en plein milieu? Je comprends que le ministre a pu, depuis
qu'on a commencé l'étude du projet de loi 42, et pourra encore,
dans les articles qui viennent, nous dire que c'est une amélioration,
mais qu'est-ce qui fait qu'on n'a pas amélioré jusqu'à
"l'idéal", comme il l'appelle? Est-ce qu'on va constamment se contenter
de rester en plein milieu? Je comprends que la position au centre semble de
plus en plus confortable, mais il faudrait reconnaître que, s'il y a eu
un geste de posé, c'est parce qu'on a fait un constat d'injustice dans
le passé.
Là-dessus, après avoir présenté
l'amendement, il me semble que cela pourrait être intéressant de
connaître rapidement où se situent les députés de
l'Opposition et les députés ministériels sur cette
question.
M. Fréchette: Mme la Présidente, je ne reviendrai
pas sur les quelques commentaires que j'ai faits tout à l'heure. Je veux
simplement en ajouter un autre aux deux ou trois que j'ai soumis. Dans
l'évaluation du mécanisme de l'article 70, on a été
guidé par une préoccupation. Cette préoccupation
était de faire en sorte que l'emploi principal du travailleur
accidenté soit protégé en termes d'indemnisation. On a
retenu cette formule parce qu'il nous apparaît que c'est essentiellement
de ce côté que la protection - non pas la protection, c'est un
terme que je n'aime pas - enfin, la réparation doit être faite.
C'est un des motifs qu'il faut ajouter aux trois ou quatre que j'ai
donnés tout à l'heure. Cela reste évidemment, et je n'en
disconviens pas, un choix qui me paraît être une
amélioration sensible par rapport à l'état actuel des
choses, même si cela n'est pas l'idéal. On pourrait faire un long
débat aussi sur la nécessité d'atteindre
l'idéal.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: Mme la Présidente, je voudrais avoir une
clarification là-dessus. Si, par exemple, l'emploi le plus
rémunérateur pour ce travailleur accidenté était
occupé trois jours par semaine et qu'il avait un second emploi qu'il
occupait deux jours par semaine, est-ce que l'emploi le plus
rémunérateur et le salaire qu'on considérerait serait ce
salaire, sur la base horaire qu'on aurait découverte à partir de
certains calculs et qu'on prolongerait ensuite sur cinq jours, ou si le salaire
dont on parle serait uniquement le salaire de trois jours, ce qui pourrait
être inférieur, bien sûr, à l'ensemble du salaire
qu'il aurait sur cinq jours?
M. Fréchette: Dans une situation comme celle-là,
l'indemnité de remplacement du revenu serait fixée à
partir du meilleur salaire généré par l'un ou l'autre des
deux emplois; en termes concrets, le montant d'argent effectivement reçu
de l'un ou l'autre des deux emplois. Si, de son emploi principal, le
travailleur retire une paie qui est inférieure à celle qu'il
reçoit dans son emploi secondaire, l'indemnité va être
fixée à partir de la paie qu'il reçoit dans l'emploi
secondaire.
M. Dussault: Jamais, avec le calcul que vous m'indiquez, M. le ministre,
on ne peut être assuré que le salarié aura un salaire qui
équivaut à l'ensemble de ses revenus, s'il travaille pendant cinq
jours et qu'il ne travaille pas plus de 40 heures par semaine. Ce qui me
préoccupe, c'est d'être sûr que la personne est payée
sur la base d'une semaine de travail. Que son travail se fasse à un
endroit ou à un autre, il me semble que cette préoccupation de
base, sur le plan de l'équité, devrait s'appliquer sur une
semaine de travail et sur le salaire qui est généré sur
cette semaine. Si c'est le cas, s'iltravaille seulement trois jours, je
comprendrais qu'on ne dise pas une semaine.
M. Fréchette: J'ai compris que c'était l'exemple
qu'utilisait le député de Châteauguay. Vous vous
référez à un travailleur qui se retrouverait dans un
emploi principal à trois jours par semaine et dans un emploi secondaire
à un nombre X d'heures de travail par semaine. Quelle est la
préoccupation que l'on doit avoir? C'est, il me semble, de faire
en sorte que l'indemnité de remplacement du revenu soit la plus juste et
la plus équitable possible pour répondre à la situation et
l'on dit que c'est à partir du salaire le plus élevé de
l'un ou l'autre des deux emplois que l'indemnité de remplacement du
revenu va être fixée.
M. Dussault: La base, c'est le temps. Quelle période de
travail couvre-t-on cependant sur cette base de paiement? C'est cela qui me
préoccupe.
M. Fréchette: C'est la période de temps qui est
faite pour obtenir le salaire le plus élevé des deux.
M. Dussault: Donc, s'il ne travaille que trois jours et que c'est
considéré comme son emploi principal et aussi le plus
rémunérateur, l'article mène carrément à ne
le rémunérer que sur la base de trois jours. (17 h 30)
M. Fréchette: On a vu ces mécanismes dans les
articles qu'on a adoptés antérieurement, quand on a
étudié les modalités qu'il fallait retenir pour fixer le
revenu brut d'un salarié. En tout cas, l'un des éléments
était la référence au contrat de travail. Quand on parle
de référence au contrat de travail, ce n'est pas
nécessairement un contrat écrit. Ce peut être un contrat
tacite, verbal, intervenant entre un employeur et un salarié qui va
faire en sorte que le salaire pour le temps ou les heures travaillées va
être de X. Là, on serait en face de deux contrats de travail.
À partir des critères qui sont là, il faudrait en arriver
à déterminer lequel des deux contrats de travail commande le
salaire le plus élevé des deux. C'est en fonction de ce contrat,
de la conclusion à laquelle on en arrive quant au quantum du salaire,
que l'indemnité de remplacement du revenu est fixée.
La Présidente (Mme Juneau): Cela va.
M. le député de Châteauguay.
M. Dussault: J'essaie, dans mon expérience
d'ex-syndicaliste, de retrouver le mécanisme qui permettrait au
travailleur d'avoir recours contre l'employeur pour lequel il travaillait et
dans l'entreprise duquel il a eu son accident du travail, un recours pour faire
en sorte qu'il puisse recouvrer la partie du salaire qu'il n'a pas chez le
deuxième employeur. Il me semble que cela n'existe pas, ce genre de
recours. Est-ce qu'au minimum on ne devrait pas considérer que, si le
travailleur a deux emplois et que cela constitue pour lui la possibilité
d'aller chercher une semaine de salaire, c'est cette base d'une semaine qui
devrait être la base de calcul pour rémunérer la personne?
Je ne dis pas si le travailleur faisait quatre jours à un endroit et
l'équivalent de trois jours à un autre endroit, mais sur la base
de travail le soir, et qu'il arriverait, à toutes fins utiles, à
aller chercher quasiment deux semaines de salaire dans une. Je dirais: Bon,
peut-être qu'il y a lieu d'être un peu raisonnable sur cette
question. Mais si son salaire est constitué de deux emplois sur une base
d'une semaine de travail, il me semble qu'on devrait regarder la
possibilité qu'il aille chercher une rémunération sur
cette base d'une semaine de travail. Autrement, il me semble que je ne serais
pas bien dans ma peau.
M. Fréchette: Mme la Présidente, une
première question du député de Châteauguay. Il est
préoccupé par la possibilité qui existe d'intenter des
procédures civiles pour réclamer l'excédent des dommages
qu'un travailleur peut avoir subis dans un accident. Nous avons, hier soir,
fait un très court commentaire sur l'historique de la Loi sur les
accidents du travail et pourquoi, il y a 50 ans, employeurs et syndicats
avaient convenu de ces mécanismes-là, les uns et les autres
renonçant à un certain nombre de droits que les règles
normales et ordinaires du droit civil permettraient, comme la poursuite pour
réclamer des dommages. A partir de ce qui a présidé
à ce moment-là à l'instauration de la Loi sur les
accidents du travail, les salariés renonçaient à des
poursuites civiles alors que les employeurs consentaient à payer des
cotisations pour éviter des poursuites civiles. Ce que la loi dit, parce
que c'était le principe fondamental à l'époque: II n'y a
pas de poursuites civiles qui sont possibles sauf si les dommages arrivent par
la faute d'un tiers qui se trouverait, par exemple, sur les lieux du travail
où un objet dont il est propriétaire aurait causé
l'accident en question. Quant à l'autre aspect de la question, je veux
bien prendre le temps de considérer l'argumentation du
député de Châteauguay, mais je lui signale qu'à ce
stade-ci je ne suis vraiment pas en mesure de me prononcer ni dans un sens ni
dans l'autre. Je réitère ce que je disais tout à l'heure.
Il me semble qu'à partir de l'état actuel de la loi le pas qui
est fait est relativement important. Vous savez, si on gardait ce qu'on a
actuellement comme dispositions législatives, cela voudrait dire que
l'électricien qui gagne, je ne sais pas, 400 $, 450 $ par semaine, mais
qui a un accident comme serveur à 150 $ par semaine serait
indemnisé à partir des 150 $ par semaine, actuellement.
Là, on dit dans la loi: Si l'accident se produit chez l'employeur qui
lui paie un salaire de 150 $ par semaine, que cet accident le rend incapable
d'exercer son métier d'électricien, il va être
indemnisé à partir du salaire d'électricien qu'il
reçoit,
même si son employeur entrepreneur électricien n'a rien
à voir dans l'accident lui-même. Il n'y a aucun lien de droit
entre l'employeur entrepreneur électricien et son employé qui
subit un accident à l'extérieur.
Maintenant, je suis disposé à regarder de plus près
la suggestion du député de Châteauguay. Je ne peux pas,
à ce stade-ci, encore une fois, me prononcer d'aucune espèce de
façon là-dessus.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: J'ai donc compris du ministre que, dans le premier
cas, le recours n'existe pas puisque la loi 42 ultérieurement, la loi
actuelle serait le recours du travailleur; donc, il n'y aurait pas de recours
autre à moins qu'il...
M. Fréchette: À moins qu'il n'y ait faute d'un
tiers.
M. Dussault: À moins qu'un tiers n'intervienne. Dans le
deuxième cas, ce que je comprends du ministre, c'est que ma suggestion
à savoir qu'il devrait y avoir une base d'une semaine de travail... La
réflexion qu'on ferait dans les prochaines heures serait qu'on viserait
à rémunérer le travailleur sur la base d'une semaine de
travail, s'il travaille au moins une semaine, peu importe que ce soit avec un,
deux ou trois employeurs et même si cela dépassait une semaine de
travail.
M. Fréchette: II faudrait faire attention parce qu'il
pourrait peut-être arriver des circonstances où une semaine
complète de travail serait moins rémunératrice qu'un
emploi partiel dans un métier ou une profession, par exemple. Quelqu'un
qui travaille une semaine complète, qui travaille 40 heures à 6 $
l'heure pourrait gagner moins que quelqu'un qui travaillerait comme
électricien à 15 $ l'heure pendant trois jours.
M. Dussault: M. le ministre, si on avait prévu dans la loi
cette précaution qu'on allait surtout calculer sur la base du salaire le
plus rémunérateur, j'en conclus que le législateur
souhaitait que le travailleur ne perde pas d'argent ou en tout cas qu'il en
perde le moins possible. On tiendrait compte de ce que vient de dire le
ministre.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va? M. le
député de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: On se rend compte qu'au moment où j'ai
présenté mon amendement, j'ai utilisé un exemple où
il était question de double emploi. Le ministre conviendra que,
même lorsqu'il y a double emploi, il y a une perte de revenu; même
si on calcule le salaire le plus rémunérateur des deux emplois,
il y a quand même une perte de revenu. Par ailleurs, l'argumentation du
ministre avait plus de prise sur mon exemple; étant donné que
c'était un double emploi, par rapport à une situation normale, il
était "plus ou moins" défavorisé. Cela a cependant
soulevé le problème qui n'était pas prévu dans la
loi et qu'a soulevé le député de Châteauguay,
c'est-à-dire les employés à temps partiel, les personnes
qui occupent deux emplois, et de plus en plus on s'en va vers le travail
partagé, les personnes qui occupent deux emplois, non pas pour se faire
un supplément de revenu, mais pour se faire un revenu. Si on appliquait
la même pratique dans le cas de ces employés à temps
partiel, il y a carrément là une perte de revenu, ce qui ne leur
assure pas le revenu hebdomadaire que ce travailler va chercher.
La réplique ou la façon dont le ministre répondait
à mon premier exemple est plus difficile d'application dans le cas
d'employés à temps partiel. Je pense que le ministre en est fort
conscient lorsqu'il se dit prêt à regarder cet aspect.
Une suggestion que je pourrais faire, Mme la Présidente, c'est de
remettre à plus tard mon amendement de même que l'article et de
prendre la période d'arrêt pour voir comment on pourrait, au moins
au minimum, régler le problème des employés à temps
partiel; c'est vraiment d'assurer un revenu hebdomadaire à une personne
qui occupe deux emplois, mais pour se faire un seul revenu, finalement.
M. Fréchette: C'est ce que je pensais avoir indiqué
au député de Châteauguay. Je suis disposé à
suspendre l'adoption de l'article et, à l'heure du lunch, de regarder
cela d'un peu plus près, pour voir comment cela pourrait s'introduire
dans la loi et voir aussi les implications que cela peut avoir, avec un peu
plus de temps pour en parler informellement. On pourra évaluer tout
cela.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Beauharnois m'a demandé la parole.
M. Lavigne: Dans la même foulée des arguments qu'on
vient d'entendre, Mme la Présidente, c'est sûr qu'à
première vue, sans être actuaire, je pense qu'on n'a pas besoin de
l'être, cela va nécessairement coûter plus cher aux
employeurs...
M. Fréchette: C'est évident.
M. Lavigne: Par ailleurs, il y a quand même deux employeurs
qui paient. C'est vrai que l'accident n'aura lieu que chez l'un des deux.
L'employeur chez qui l'accident n'est
pas arrivé n'aura peut-être pas à payer pour
l'accident qui s'est produit chez l'autre. Au niveau des employeurs, cela
serait peut-être défendable. Mais, au niveau de l'employé,
comme on le soutient, et j'abonde un peu dans ce sens, c'est pour se faire un
salaire. Est-ce qu'on présume qu'un salaire se fait dans 40 heures et
que le deuxième emploi qui découlerait d'un surplus de 40 heures
de travail ne serait pas considéré? Il faudrait peut-être
baliser, à un moment donné. Un gars ou une femme, peu importe,
peut avoir un emploi de 40 heures. Il se fait, en principe, un salaire normal
et, en surplus, il travaille, par exemple, à laver la vaisselle, dans un
restaurant, la fin de semaine, le samedi et le dimanche. Là, il
passerait à 60 heures par semaine. Est-ce que là, on dirait que
les deux journées additionnelles, le samedi et le dimanche, seraient
considérées comme faisant partie d'un salaire? Je pense qu'il y a
des distinctions à faire et c'est à l'examen de cet article qu'on
pourra peut-être les faire. Si les deux emplois sont à
l'intérieur de 40 heures par semaine, trois jours à un endroit,
par exemple, et deux jours à l'autre, je pense que cela serait un peu
légitime qu'on regarde cela. Pour le travailleur, il me semble que cela
se défend bien. Par ailleurs, pour l'employeur, cela se défend
peut-être un peu plus mal, dans le sens qu'il serait porté
à nous servir l'argument que l'accident n'est pas arrivé chez
lui.
M. Bisaillon: Est-ce que le député me permettrait,
Mme la Présidente, de lui faire remarquer qu'il est évident que,
dans le cas d'un travailleur qui a deux emplois partiels, il y a apparence de
sympathie plus évidente. Il faut quand même reconnaître que,
lorsque quelqu'un occupe deux emplois, il a un revenu équivalent, non
seulement aux deux emplois, mais au nombre d'heures qu'il travaille. Le fait de
subir un accident le rend incapable non seulement d'occuper un emploi, mais les
deux et il perd les revenus de ces deux occupations.
M. Fréchette: D'une des deux.
M. Bisaillon: S'il s'est brisé les deux jambes, il ne
pourra occuper ni l'un ni l'autre des ces emplois pendant un certain temps. Il
va perdre l'ensemble du revenu qu'il se faisait. On peut bien dire: II
était déjà gâté. Il était
déjà gâté, mais il travaillait plus que les autres
aussi. En principe, tu dois être payé pour ce que tu fais. Dire:
Quand il y a un accident... Il faudrait peut-être interdire le double
emploi carrément à travers tout le Québec. Là, on
aura peut-être gagné quelque chose. Tant qu'on permettra le double
emploi, il me semble que c'est difficile de dire: C'est uniquement quand il y a
un accident qu'on va le diminuer. Interdisons le double emploi, si on veut...
Cela serait peut-être une façon d'en créer. Tant que la
situation est là, je comprends que c'est moins "glamorous",
l'employé qui fait deux ou trois jours de travail et qui fait ses 40
heures avec ces deux emplois. Il reste quand même qu'en principe un
accident lui fait perdre deux revenus et qu'on ne calcule, même si c'est
une amélioration, je le reconnais, que l'emploi le plus
rémunérateur.
M. Fréchette: Soyons conscients d'un autre
problème, par ailleurs. Est-ce qu'on va cotiser l'employeur chez qui
l'accident n'est pas arrivé ou est-ce qu'on va cotiser deux fois
l'employeur chez qui l'accident est arrivé? C'est une
préoccupation qu'on doit aussi avoir.
Une voix: Qui est le responsable?
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Beauharnois, si vous voulez terminer.
M. Lavigne: Cela pourrait aussi débloquer. Mme la
Présidente, je ne voudrais pas non plus prolonger le débat
inutilement, mais je pense qu'il n'est pas inutile. Effectivement, je pense
qu'il y a une faiblesse là. Est-ce que cela viendrait englober, par
exemple, non pas le travailleur qui a deux emplois, mais le travailleur qui
fait du temps supplémentaire à l'occasion? Il travaille plus. Si
son patron lui a demandé de travailler un samedi parce qu'il y a plus
d'ouvrage, est-ce qu'on considérera, dans l'analyse, le temps
supplémentaire?
M. Fréchette: C'est déjà prévu dans
la loi.
M. Lavigne: C'est déjà prévu.
M. Bisaillon: On l'a déjà reconnu dans l'article
qui précède, je pense, aux articles 66 et 67.
M. Lavigne: Si cela est réglé, Mme la
Présidente, je retire mes paroles.
La Présidente (Mme Juneau): Oui.
M. Bisaillon: Mais c'est intéressant, Mme la
Présidente, l'argument du député de Beauharnois parce que,
comme on l'a prévu aux articles 66 et 67, on a prévu que l'emploi
était accompagné aussi de revenus additionnels comme le temps
supplémentaire. On n'avait pas d'objection aux articles 66 et 67.
Pourquoi, quand il y a deux emplois, on coupe tout à coup? Il y a aussi
cette question qu'il faut se poser.
M. Fréchette: Parce qu'on demande à
quelqu'un de payer pour une chose dont il n'est pas responsable.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau.
M. Bisaillon: Cotisons le vrai responsable, celui où s'est
produit l'accident.
M. Cusano: Juste pour ajouter quelques éléments de
réflexion pour le ministre. En ce qui me concerne, je considère
quelqu'un qui a un emploi régulier et qui, pour s'amuser,
peut-être pour se payer des vacances, va travailler - j'ai employé
l'exemple - comme placier au Stade olympique, parce qu'il aime regarder les
spectacles qui y sont présentés. Cela, pour moi, c'est une chose,
mais où je rejoins un peu le député de Sainte-Marie, c'est
sur l'individu, justement, qui, pour en arriver à un salaire convenable,
doit travailler une partie de journée à une place et une partie
de la semaine à une autre pour en arriver à un salaire
convenable. Là je rejoindrais la suggestion, dans ce cas, du
député de Sainte-Marie.
M. Fréchette: Cela commence à prendre du poids,
sérieusement.
M. Bisaillon: Maintenant, on se retrouve tous au centre...
M. Fréchette: On peut continuer de garder en suspens cet
article comme on en avait convenu tout à l'heure. On regarde cela
à l'heure du lunch et on peut peut-être, dans les dix minutes qui
restent, à moins qu'il n'y ait là des difficultés que je
ne verrais pas, aborder l'article 71.
M. Bisaillon: À moins qu'on n'ajourne les travaux
maintenant. Ces dix minutes vous donnent justement le temps... Alors, on
suspendrait l'amendement et l'article.
La Présidente (Mme Juneau): L'amendement et l'article.
Est-ce qu'on ajourne les travaux? Est-ce que vous êtes d'accord pour
ajourner étant donné qu'il est 17 h 50, non pas ajourner, pardon,
suspendre les débats jusqu'à 20 heures?
M. Fréchette: 20 heures. (Suspension de la séance
à 17 h 50)
(Reprise à 20 h 8)
La Présidente (Mme Juneau): Y a-t-il quorum? La commission
reprend ses travaux pour procéder à l'étude
détaillée du projet de loi 42, Loi sur les accidents du travail
et les maladies professionnelles.
La parole était au député de Viau lorsque nous
avons suspendu nos travaux.
M. Cusano: À ce moment, le ministre s'apprêtait
à amener des changements, des modifications à l'article. Il
était en réflexion.
M. Fréchette: Mme la Présidente, je comprends que
le député de Sainte-Marie a déjà une proposition
d'amendement sur la table. Vous allez excuser mon ignorance au plan de la
procédure mais nous faut-il disposer de cet amendement avant de
procéder à toute autre chose?
M. Bisaillon: J'avais compris, Mme la Présidente, au
moment où on a suspendu les travaux ce soir, qu'on avait
déposé à la fois mon amendement et l'article 70 pour
permettre de regarder plus à fond la question. Ce qu'on pourrait
suggérer c'est de prendre le temps que cela prendra pour examiner plus
à fond la question. Ceci étant fait techniquement, je pense qu'il
faudra disposer de l'amendement, soit en le retirant, soit en le battant, soit
en l'adoptant et, après cela, passer à d'autres propositions s'il
doit y en avoir d'autres.
M. Fréchette: Alors, il faut disposer de cet amendement
d'abord.
La Présidente (Mme Juneau): Oui, c'est exact.
M. Bisaillon: Oui, mais ce serait peut-être
intéressant de conserver cela dans le décor de la discussion
cependant.
M. Fréchette: Oui, oui.
M. Bisaillon: Puis après cela on aura juste à le
voter.
M. Fréchette: Oui, absolument.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que vous pouvez me le
remettre, M. le député, s'il vous plaît?
M. Bisaillon: Oui.
La Présidente (Mme Juneau): L'amendement du
député de Sainte-Marie se lisait comme suit: Remplacer à
la seconde ligne du premier alinéa les mots "l'emploi le plus
rémunérateur" par les mots "la somme des emplois". M. le
député de Châteauguay.
M. Bisaillon: La somme des emplois qu'il devient incapable
d'exercer.
M. Fréchette: Oui.
La Présidente (Mme Juneau): Cela,
c'est le reste du texte.
M. Fréchette: C'est le reste du texte probablement.
M. Bisaillon: D'accord, c'est parce que j'avais enlevé
tout le reste.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: Mme la Présidente, quand nous avons
terminé nos travaux avant d'aller souper, le ministre s'était
montré disposé à rechercher une solution tout au moins
pour le type de problèmes que j'avais évoqués. Si le
ministre a terminé sa réflexion et qu'il nous identifiait le type
d'amendement qui pourrait être apporté pour répondre, en
tout cas, au type de problèmes que j'avais évoqués, cela
rallierait peut-être M. le député de Sainte-Marie et, avec
cet éclairage, le député de Sainte-Marie pourrait
peut-être tout simplement nous dire immédiatement qu'il n'y aura
pas lieu de continuer à discuter sur son amendement. Est-ce que le
ministre peut nous dire s'il a trouvé une solution à un des deux
problèmes qui ont été évoqués?
M. Fréchette: Mme la Présidente, je ne sais pas si
c'est une solution mais c'est à tout le moins une proposition.
La Présidente (Mme Juneau): À ce moment-là,
vous pourriez la lire, M. le ministre.
M. Fréchette: Je vais en donner la teneur, quitte, par la
suite, à voir, à partir de la résolution du
député de Sainte-Marie, comment on peut régulariser la
situation. Je comprends que la préoccupation du député de
Sainte-Marie, c'est de faire en sorte que l'indemnité de remplacement du
revenu soit fixée è partir de l'addition de tous les salaires de
tous les emplois qu'un travailleur peut occuper. Le député de
Chèteauguay revient avec une proposition qui est d'assurer que
l'indemnité se fasse à partir d'un salaire au moins
hebdomadaire.
M. Dussault: Hebdomadaire, c'est cela.
M. Fréchette: Voilà. À partir de ces deux
propositions, donc, on a retenu un texte qui m'apparaît rejoindre les
préoccupations dont on discute. Ce texte pourrait être le suivant
et remplacerait complètement le premier alinéa de l'article 70;
il se lirait comme suit: "Le revenu brut d'un travailleur qui occupe plus d'un
emploi est celui qu'il tirerait de l'emploi le plus rémunérateur
qu'il devient incapable d'exercer comme s'il exerçait cet emploi
à temps plein."
M. Bisaiilon: Pouvez-vous nous répéter cela?
M. Fréchette: Si je peux me débarrasser...
M. Bisaillon: Comme si on n'était pas sténo,
là.
M. Fréchette: Pardon?
M. Bisaiilon: Comme si on n'était pas sténo,
là!
M. Fréchette: Ah bien, je vous donne un texte.
M. Dussault: M. le ministre, après avoir lu ce texte, cela
m'apparaît - sauf que, sur le plan de l'interprétation, je ne suis
pas en mesure de dire si cela veut dire exactement ce qu'on souhaitait -
être vraiment l'atteinte de l'objectif que j'avais demandé
d'atteindre.
M. Bisaillon: J'aimerais cela, cependant, que le ministre nous
explique comment... Je ne comprends...
La Présidente (Mme Juneau): Une minute, là.
M. Bisaillon: ...pas comment cela atteint l'objectif du
député de Châteauguay.
M. Lavigne: Moi, comme je comprends comme cela, M. le
député de Sainte-Marie, c'est que si on prend l'exemple d'un
travailleur, quel qu'il soit, qui gagnerait 75 $ par jour, pendant trois jours,
et qu'il aurait un autre salaire à 50 $ par jour pendant deux jours, on
le paierait, advenant un accident, indépendamment chez l'un ou l'autre
des deux employeurs, pendant cinq jours à 75 $ par jour...
M. Fréchette: C'est cela.
M. Lavigne: ...c'est-à-dire que ce serait sur cette
base-là qu'on considérerait sa rémunération.
M. Fréchette: Le salaire complet.
M. Bisaillon: D'accord, d'accord. Comme s'il occupait cet emploi
le plus rémunérateur...
M. Fréchette: À temps plein.
M. Lavigne: À temps plein.
M. Bisaillon: À temps plein.
M. Fréchette: C'est cela.
La Présidente (Mme Juneau): M. le
député de Viau.
M. Cusano: Non, c'est justement...
M. Dussault: C'est plus que ce que je demandais et beaucoup plus
proche de ce que demandait le député de Sainte-Marie.
M. Fréchette: Enfin, cela...
La Présidente (Mme Juneau): La parole est au
député de Viau. Je m'excuse, il ne faudrait pas tous intervenir.
Le ministre expliquera tout à l'heure son amendement. Le
député de Viau avait demandé la parole.
M. Cusano: Non, Mme la Présidente, c'est simplement pour
indiquer au ministre que l'interprétation que je lui donnais, c'est la
même que le député de Beauharnois. Je lui ai
cédé la parole, il a interprété ma pensée.
C'est justement parce que cela se relie un peu à ma préoccupation
sur l'individu, je ne parle pas d'une personne... Je ne parlais pas, avant
qu'on se quitte pour le souper, d'une personne qui travaille trois jours dans
un endroit et deux jours dans l'autre. Ma préoccupation c'était
plutôt l'individu qui travaille quasiment chaque jour de la semaine
à un endroit différent. Je vous fais un compliment, M. le
ministre. Je pense que cela rejoint, en tout cas, mes préoccupations. Je
ne sais pas si cela rejoint celles du député de Sainte-Marie. (20
h 15)
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Saguenay.
M. Maltais: Si on parle, M. le ministre, des gens qui sont
"charty", des débardeurs, par exemple, on sait très bien que leur
salaire est journalier. Cela dépend des bateaux et cela dépend
des cargaisons qu'ils ont. Dans une semaine ils vont faire peut-être 200
$ et l'autre semaine ils vont en faire 500 $, 600 $, 800 $. Est-ce que vous
allez les indemniser sur la moyenne des salaires, par exemple, dans le mois ou
au cours... C'est assez difficile parce que dans une semaine ils vont
peut-être travailler une journée. Cela dépend un petit peu
comment cela se passe dans les ports de mer.
M. Fréchette: Cela dépend si les travailleurs
auxquels réfère le député de Saguenay sont des gens
qui n'occupent que ce seul emploi. S'ils n'occupent que ce seul emploi, ils
seront indemnisés en cas d'accident ou de maladie professionnelle
à partir des dispositions et du contenu de leur contrat de travail.
M. Maltais: Heureusement, M. le ministre, que vous avez
apporté votre amendement parce que c'est une des catégories de
travailleurs qui occupent le double emploi.
M. Fréchette: S'ils occupent le double emploi, ils seront
indemnisés a partir de l'emploi le plus rémunérateur de
tous ceux qu'ils occupent comme s'ils l'occupaient à temps plein.
M. Maltais: D'accord, je vais vous donner un exemple bien
concret. Advenant qu'un débardeur fasse 2000 $ par mois, règle
générale; admettons que c'est cela. Cela veut dire 24 000 $ par
année. Hebdomadairement, c'est difficile parce qu'il y a des semaines
où il ne travaillera même pas, ou une journée. Si ce gars
subit un accident, vous prenez sa moyenne de salaire des trois derniers mois ou
de la dernière année, son rapport d'impôt, pour
établir son indemnité hebdomadaire. C'est bien cela que je
comprends.
M. Fréchette: Oui, c'est la formule.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Mme la Présidente, malheureusement, ce n'est
pas tout à fait ce que je demandais mais je pense que...
M. Fréchette: Je suis conscient que ce n'est pas tout
à fait ce que vous demandiez.
M. Bisaillon: Mais je trouve qu'on en a couvert quand même
un bon bout. On prend tellement de temps à souligner les moments
où on n'en a pas assez, je trouve que cela vaut la peine de souligner,
en tout cas, que c'est une amélioration plus que sensible à ce
qu'il y avait dans l'article original.
On ne couvre pas 100% du double emploi mais on améliore la
situation du double emploi par rapport à ce qu'il y avait. On couvre
surtout, peut-être pas le plus important mais ce qui était
important à nos yeux aussi, c'était de couvrir les temps partiels
qui ne l'étaient pas. Là, ils le sont de façon
évidente.
Je pense que c'est un article qui est de beaucoup amélioré
et qu'on devrait retenir sous cette forme.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce à dire, M. le
député de Sainte-Marie, que l'amendement que vous aviez
proposé est retiré?
M. Bisaillon: Techniquement, Mme la Présidente, je pense
qu'on va battre l'amendement. On peut battre l'amendement pour démontrer
qu'on bat quelque chose quand même...
La Présidente (Mme Juneau): Vous pouvez le retirer aussi,
M. le député.
M. Bisaillon: Non, je peux endosser cela tout en reconnaissant
qu'on ne va pas jusqu'où je voulais aller. Cela prend deux secondes,
battre. C'est de dire: Rejeté. Cela prend un mot pour cela.
La Présidente (Mme Juneau): Cela va.
M. Bisaillon: Après cela, on revient à ce texte et
on l'adopte.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'amendement du
député de Sainte-Marie est adopté?
M. Fréchette: Rejeté.
La Présidente (Mme Juneau): Rejeté.
M. Maltais: II y a une curieuse astuce, Mme la Présidente;
le député de Sainte-Marie ne votant pas, c'est nous qui avons
l'odieux de battre sa motion alors qu'il est consentant à l'accepter.
Dans les faits, c'est nous qui portons l'odieux. C'était très
astucieux.
M. Fréchette: II aurait voté contre s'il avait eu
le droit de voter, c'est-à-dire il aurait voté pour s'il avait eu
le droit de voter.
M. Bisaillon: On me met, décidément, Mme la
Présidente, beaucoup de mots dans la bouche.
M. Fréchette: Pour permettre de vous reposer un peu quand
arrive cette période de temps.
La Présidente (Mme Juneau): L'amendement proposé
par le ministre, souhaiteriez-vous que je le relise? Non.
M. Bisaillon: Pour les fins du Journal des débats...
La Présidente (Mme Juneau): Le secrétaire me dit
que pour le Journal des débats ce serait préférable. Donc,
l'amendement proposé par le ministre est celui-ci: Remplacer le premier
alinéa par le suivant: "70. Le revenu brut d'un travailleur qui occupe
plus d'un emploi est celui qu'il tirerait de l'emploi le plus
rémunérateur qu'il devient incapable d'exercer comme s'il
exerçait cet emploi à temps plein." Est-ce que l'amendement
proposé par le ministre est adopté?
M. Cusano: Adopté.
M. Bisaillon: Mme la Présidente, si j'avais eu la
possibilité de voter, je tiens à vous dire que j'aurais dit
oui.
La Présidente (Mme Juneau): C'est déjà une
amélioration. Est-ce que l'article 70, tel qu'amendé, est
adopté?
M. Cusano: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): L'article 71.
M. Fréchette: Mme la Présidente, il n'y a pas
d'amendement à l'article 71. Le contenu de l'article 71 prévoit
le mécanisme qui sera utilisé pour arriver à
déterminer le revenu brut annuel du travailleur autonome, tel qu'on l'a
défini à l'article 9 de la loi. Le moyen pour y arriver... Je
vais lire l'article. Il est fort simple dans son texte. C'est la meilleure
façon d'arriver à en avoir une bonne compréhension. "Le
revenu brut d'un travailleur autonome visé dans l'article 9 est celui
d'un travailleur de même catégorie occupant un emploi semblable
dans la même région, sauf si ce travailleur démontre
à la commission qu'il a tiré un revenu brut plus
élevé d'un travail visé dans l'article 9 pendant les 12
mois précédant le début de son incapacité."
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Saguenay.
M. Maltais: Mme la Présidente, j'aurais une question
d'éclaircissement à poser au ministre. Lorsqu'on parle de revenu
brut plus élevé, j'aimerais bien que le ministre me dise qu'on va
se baser sur le rapport d'impôt.
M. Fréchette: Dans le cas du travailleur autonome?
M. Maltais: Oui.
M. Fréchette: II serait embarrassant de se baser sur le
rapport d'impôt puisque la référence que l'on fait est
celle d'un travailleur de même catégorie occupant un emploi
semblable dans la même région.
M. Maltais: On parle toujours d'un travailleur autonome.
M. Fréchette: Oui. Ce que je veux dire c'est que...
M. Maltais: Si le travailleur veut démontrer que son
revenu brut est supérieur à la moyenne de ces travailleurs
autonomes dans la même région, est-ce que le rapport d'impôt
sera un guide pour lui?
M. Fréchette: C'est sûr que, si le travailleur
autonome qui est impliqué dans l'accident veut faire la
démonstration que son revenu annuel brut est plus élevé
que la moyenne de la même région et qu'à l'appui
de sa prétention il dépose son rapport d'impôt, cela
peut être une pièce justificative importante.
M. Maltais: C'est évident.
M. Fréchette: C'est même la preuve principale.
M. Maltais: L'indemnité sera basée sur le revenu
brut.
M. Fréchette: C'est-à-dire que là on
détermine le revenu annuel brut.
M. Maltais: C'est la définition du revenu brut.
M. Fréchette: C'est cela.
M. Maltais: Alors, l'indemnité sera basée
là-dessus.
M. Fréchette: C'est cela.
M. Fortier: Est-ce qu'il existe des statistiques sur...
La Présidente (Mme Juneau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: ...ce que vous définissez comme étant
des revenus bruts pour un travailleur dans la même région? Je n'ai
jamais vu de statistiques à cet effet.
M. Fréchette: C'est particulièrement la situation
qui existe chez les camionneurs qui sont organisés en association,
région par région. C'est plus facile pour cette catégorie
de travailleurs d'arriver à déterminer quel peut être le
salaire moyen pour une région donnée. C'est sûr que
le...
M. Fortier: Si on prend l'Estrie. L'Estrie est dans la
région de Montréal, au point de vue des statistiques
fédérales en particulier.
M. Fréchette: Oui. Les délimitations des
territoires peuvent varier mais quand on veut référer au revenu
ou au salaire, peu importe la délimitation de la zone ou de la
région, on peut arriver à obtenir ce renseignement. C'est moins
vrai, par ailleurs, pour des cultivateurs. Les agriculteurs sont l'autre
catégorie de travailleurs autonomes organisés en association,
bien sûr, mais c'est moins régionalisé que dans le cas des
camionneurs et, deuxièmement, il peut y avoir tellement de
différences d'une porte à l'autre chez des cultivateurs que cela
n'est presque pas possible d'arriver à déterminer une moyenne
régionale. Là, il faut quasiment faire du "cas-par-cas" pour les
cultivateurs.
M. Fortier: Si je comprends bien, dans le cas des travailleurs
autonomes, c'est nouveau dans la loi. Cela n'existe pas
présentement.
M. Fréchette: Cela existe.
M. Fortier: Cela existe?
M. Fréchette: Cela existe.
M. Fortier: Dans la loi de la CSST?
M. Fréchette: Oui, dans la Loi sur les accidents du
travail.
M. Fortier: Est-ce qu'il y a des gens qui se prévalent...
Autrement dit, ils doivent payer la totalité de la...
M. Fréchette: De leur cotisation.
M. Fortier: Est-ce qu'il y en a beaucoup? Il y en a quelques-uns
ou...
M. Fréchette: Chez les cultivateurs, il y en a un bon
groupe. Chez les camionneurs aussi. On parle de camionneurs et d'agriculteurs
parce que ce sont les deux groupes les plus...
M. Fortier: D'accord, et d'autant plus que la loi permet aux
associations de faire des représentations ou de les inscrire à la
CSST. Ce que vous espérez finalement, c'est que... Quoique, dans le cas
des associations, on peut parler d'employés ou on peut parler de
travailleurs autonomes également, j'imagine.
M. Fréchette: Oui, bien sûr.
M. Fortier: Mais, dans le cas des agriculteurs?
M. Fréchette: Les associations, quand on en parle dans la
loi, on réfère surtout aux domestiques. Alors, ce sont des
travailleurs autonomes aussi qui payent eux-mêmes leurs propres
cotisations quand ils veulent être couverts. C'est le même
phénomène.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va, M. le
député de Sainte-Marie?
M. Bisaillon: Mme la Présidente, juste une remarque au
ministre. À quelques reprises, on a utilisé le terme
"région". Vous venez justement d'indiquer que celui-ci est variable. Il
y aurait peut-être utilité, à l'article 2, de
définir ce qu'on va entendre par région, autrement dit quels
critères on va utiliser pour nommer les régions. Est-ce que cela
va être les régions administratives? Est-ce que cela va être
autre chose? Si,
dans le cours de l'application de la loi, le critère pour
déterminer la région est modifié, il me semble que cela ne
serait pas correct.
M. Fréchette: Généralement, Mme la
Présidente, quand on utilise le terme "région", la
référence qui revient le plus souvent, c'est celle,
évidemment, de la région administrative. Mais il peut arriver des
cas où, référant uniquement et strictement à la
région administrative, on ne puisse pas atteindre les objectifs que l'on
vise. Je vous donne l'exemple de la région que j'habite. La
région se termine à environ quinze milles de la ville de
Sherbrooke, par exemple, alors que, pour les fins de pouvoir déterminer
le salaire moyen des camionneurs, il faudrait se rendre au-delà des
limites de la stricte région géographique de l'Estrie, ou 05. Le
critère fondamental est toujours la région administrative, mais
on ne voudrait pas être lié par la seule et stricte région
administrative ou le seul et strict autre genre de région à cause
du phénomène dont je viens de parler.
M. Bisaillon: Cela ne peut-il pas amener, éventuellement,
des problèmes, suivant les critères qui pourraient être
retenus pour déterminer le salaire moyen de la région? Un
travailleur pourrait-il prétendre, par exemple, que les critères
utilisés auraient dû être différents de ceux qui ont
été utilisés par la régie, à partir du
moment où ils ne sont pas définis?
M. Fréchette: Peu importe la définition ou la
référence que l'on ferait du terme "région", un
travailleur, camionneur, agriculteur, artisan aurait toujours la
possibilité de contester le résultat que la commission tirerait
pour arriver à définir un salaire régional moyen.
M. Bisaillon: Sauf qu'il n'y aurait pas de critère de
référence, pas plus que la CSST, dans son application, n'en
aurait de par la loi. C'est au plan administratif qu'on déciderait que
dans tel cas, on prend la région administrative et que, dans tel autre
cas, on doit lui donner de l'extension. Le travailleur aurait plus ou moins de
base pour...
M. Fréchette: En fait, dans une situation de cette nature,
il faut prendre pour acquis qu'il faudra faire jouer, également, les
notions d'équité et de justice naturelle. Cela serait davantage
contraignant - il me semble, en tout cas - si on se limitait
géographiquement à une région très précise.
Cela pourrait faire en sorte que des gens soient victimes d'un préjudice
à cause de cela parce que, de l'autre côté de la
frontière géographique, il peut y avoir des conditions de travail
plus avantageuses que celles qui existent à un mille de là. C'est
pour cela que cela pourrait devenir embarrassant de se contraindre dans une
délimitation géographique stricte.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Champlain.
M. Gagnon: Merci, Mme la Présidente. Je m'excuse, M. le
ministre, mais j'ai de la difficulté à comprendre la partie pour
les agriculteurs. Vous avez expliqué la région et, à un
moment donné, vous avez dit: II faut presque faire du "cas-par-cas".
Qu'est-ce que c'est, si vous prenez un exemple concret, celui d'un
agriculteur... (20 h 30)
M. Fréchette: Oui.
M. Gagnon: ...qui s'assure comme travailleur autonome? Sur
quoi...
M. Fréchette: Ce que je veux dire, Mme la
Présidente, c'est que, si l'on entreprend de faire la tournée des
rangs du comté de Champlain, on va sans doute frapper un cultivateur qui
est particulièrement prospère...
M. Gagnon: II y en a plus d'un.
M. Fréchette: C'est pour cela que je dis cela. Vous allez
peut-être frapper, à travers la tournée que vous allez
faire, un cultivateur de condition un peu plus modeste et les conditions de
l'un et de l'autre peuvent varier autant de fois que vous visitez l'un ou
l'autre. C'est à partir de ce raisonnement ou de cette image que je me
dis qu'il est plus difficile de déterminer le salaire moyen d'un
cultivateur dans une région que cela ne l'est de le faire pour des
camionneurs, qui ont, essentiellement ou à peu près, le
même salaire pour le même travail. C'est strictement dans ce
sens-là que...
La Présidente (Mme Juneau): Cela va? Est-ce qu'il y a
d'autres interventions sur l'article 71?
Une voix: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 71 est
adopté?
M. Cusano: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): À l'article 72, il y a
un amendement. L'amendement de l'article 72 se lit comme suit: Remplacer lepremier alinéa par le suivant: "72. Le revenu brut d'un travailleur
victime d'une lésion professionnelle alors qu'il reçoit une
indemnité de remplacement
du revenu est le plus élevé de celui, revalorisé,
qui a servi de base au calcul de son indemnité initiale et de celui
qu'il tire de son nouvel emploi."
M. Fréchette: Vous n'allez pas vous surprendre, Mme la
Présidente, si je vous dis que je vais lire le commentaire qui
accompagne...
M. Cusano: Et, après cela, expliquer le commentaire!
M. Fréchette: ...l'article 72.
M. Fortier: L'article actuel parle du revenu net, là on
parle du revenu brut.
M. Fréchette: Voici le commentaire qui accompagne
l'article. Le présent projet, donc l'article 72, prévoit qu'un
travailleur qui, à la suite d'une lésion professionnelle,
occupera un nouvel emploi moins rémunérateur pourra continuer
à recevoir une indemnité de remplacement du revenu pour combler
la perte subie. Comme il est possible que ce travailleur subisse alors une
nouvelle lésion professionnelle, il est nécessaire de
prévoir quelle base sera utilisée pour calculer sa nouvelle
indemnité et ce qu'il adviendra de l'indemnité qu'il
reçoit.
On considère que le revenu net que tirera ce travailleur de son
nouvel emploi, joint au revenu net qui sert de base au calcul de cette
indemnité, constituera son revenu net retenu à partir duquel
devra être calculé le montant de la nouvelle indemnité.
Par conséquent, l'indemnité que ce travailleur
reçoit déjà cessera de lui être versée
puisqu'elle sera incluse dans la nouvelle indemnité.
Non, c'est... Si les membres de la commission le permettent, je vais
laisser les experts expliquer, dans la technique, dans le détail, la
signification de cet article 72.
M. Bisaillon: Un exemple nous ferait mieux comprendre.
M. Fréchette: Par un exemple, cela irait probablement
mieux.
La Présidente (Mme Juneau): M. Lionel Bernier,
vice-président à la réparation, de la CSST.
M. Bernier: L'exemple qu'on pourrait donner, c'est le suivant: Un
travailleur qui a été victime d'une lésion professionnelle
et qui, à la suite de celle-ci, est retourné à un emploi
avec un salaire moindre, la commission lui verse la différence entre son
ancien salaire et son nouveau salaire; j'arrondis, là. Supposons que
cela lui donne une indemnité de 5000 $ - retourne dans un nouvel emploi
et, une fois qu'il est retourné dans son nouvel emploi - supposons que
celui-ci lui donne 10 000 $ de revenus - il a un nouvel accident. Ce que dit
l'article, c'est que pour calculer sa nouvelle indemnité - là
aussi, j'arrondis - on va tenir compte du salaire qu'il faisait, plus
l'indemnité qu'il recevait déjà. On va tenir compte des 10
000 $ qu'il tirait de son nouvel emploi et on va additionner les deux.
M. Gagnon: On va tenir compte du salaire initial.
M. Bernier: Finalement, l'objectif c'est d'arriver à ce
que le salaire initial soit pris en compte mais en additionnant les deux.
M. Lavigne: Donc, cela donnerait sur 15 000 $.
M. Bernier: Cela donnerait sur 15 000 $. Le texte de l'article 72
était difficile à lire parce qu'il est très technique;
c'est pour cela qu'il y a eu un amendement qui, je pense, pourrait
peut-être clarifier la situation. Peut-être que cela ne sera pas
plus clair mais...
M. Fréchette: Il y a un effort de fait.
M. Bernier: ...il y a eu un effort de fait.
M. Maltais: J'essaie de raisonner avec M. Bernier, c'est
qu'après trois accidents il devient un pensionné de
l'État.
M. Fréchette: Cela pourrait ressembler à cela,
oui.
M. Maltais: Si l'éventualité d'un troisième
accident arrivait, sur quoi vous baseriez-vous? Il y a des "Jos Bad Luck" dans
la province, il doit y en avoir là aussi. Au troisième accident,
on se baserait sur les premiers 5000 $ plus les 10 000 $ pour établir
l'indemnité au troisième.
M. Bernier: Pour toujours conserver... M. Maltais:
L'acquis.
M. Bernier: ...comme objectif le premier salaire...
M. Maltais: D'accord.
M. Bernier: ... revalorisé, bien sûr, d'année
en année.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce qu'il y a d'autres
commentaires sur l'amendement de l'article 72?
M. Maltais: Ce serait une excellente idée qu'elle nous
soit... pas dans la loi mais,
comme interprétation, c'est quand même quelque chose.
M. Fréchette: Oui, oui, c'est du bénédictin,
cela.
M. Maltais: Je suis sûr qu'il va y avoir de la
jurisprudence là-dessus.
M. Fréchette: II me semble que...
M. Maltais: C'est clair avec l'exemple mais, je veux dire, pas
d'exemple...
M. Fréchette: II me semble aussi qu'avec l'effort de
simplification qui a été fait le texte amendé se lit
beaucoup plus facilement que ce qu'on retrouvait dans la loi 42. Je ne dis pas
que c'est facile de comprendre; il se lit plus facilement. C'est l'exemple, je
pense bien, qui illustre le mieux la signification précise de ce
texte.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce qu'il y a d'autres
commentaires?
M. Cusano: On pourrait toujours envoyer ces exemples aux avocats
qui auront...
M. Fréchette: Peut-être. M. Cusano:
...à interpréter. M. Fréchette: Absolument.
M. Bisaillon: On n'a tout simplement pas dit qu'au nouveau
salaire s'ajoutait...
M. Fréchette: C'est parce que ce n'est pas cela qu'on
vise.
M. Bisaillon: Si j'ai bien compris l'exemple, le nouveau revenu
brut va être le revenu de son nouvel emploi, celui qu'il tire de son
nouvel emploi, plus le revenu brut revalorisé qu'il avait au moment
où il a eu le premier accident.
M. Fréchette: Non. Reprenons l'exemple, si on le veut;
corrigez-moi, M. Bernier, et arrêtez-moi si... Voici un travailleur qui
est dans un emploi qui commande un salaire de 15 000 $. Dans l'exercice de ses
fonctions il a un accident du travail qui l'oblige à se retirer du
marché du travail pour un certain temps. Après que la
consolidation est faite, il revient dans un autre emploi mais à 10 000 $
plutôt que de recevoir les 15 000 $ du début. En vertu des
explications et des dispositions de la loi, à partir des exemples que
j'ai donnés hier, même s'il retourne dans un endroit moins
rémunérateur, il va quand même continuer de recevoir les 15
000 $ qu'il recevait au moment où il a eu son accident.
Si, dans le deuxième emploi, il a eu cet accident,
l'indemnité sera fixée à partir de son salaire initial, du
salaire qu'il gagnait dans l'emploi où il a eu son premier accident,
même s'il ne faisait que 10 000 $, à ce moment, dans le
deuxième. Il serait indemnisé, donc, à partir des 15 000
$. C'est cela l'objectif, revalorisé, évidemment...
Peut-être que, si on lisait l'amendement lentement, cela
pourrait...
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Champlain.
M. Gagnon: Si c'était écrit comme vous venez de le
dire, cela serait pas mal plus facile.
M. Fréchette: On va essayer de voir ce que cela donne avec
le nouveau texte. "Le revenu brut d'un travailleur victime d'une lésion
professionnelle alors qu'il reçoit une indemnité de remplacement
du revenu est le plus élevé de celui, revalorisé, qui a
servi de base au calcul de son indemnité initiale et de celui qu'il tire
de son nouvel emploi."
M. Bisaillon: Ce que cela dit c'est que c'est le plus
élevé de deux choses. Le plus élevé du salaire
qu'il retire de son nouvel emploi ou du salaire revalorisé du premier
accident. C'est cela? Le salaire revalorisé du premier accident
c'était 15 000 $.
M. Fréchette: C'est cela.
M. Bisaillon: Pourquoi ne dit-on pas son premier salaire? C'est
pour montrer qu'il y a... Parce qu'en fait on revient au premier salaire.
M. Fréchette: C'est le premier salaire.
M. Bisaillon: C'est le premier salaire. Alors, c'est le plus
élevé du premier ou du deuxième salaire. Si le
deuxième salaire est plus élevé, comme c'est le plus
élevé du premier ou du deuxième, cela va être le
deuxième.
M. Fréchette: C'est cela.
M. Bisaillon: Je reprends l'exemple. Il a eu un accident au
premier emploi. Il est revenu au travail dans un emploi à moindre
salaire et on a compensé, ce qui a maintenu son niveau de salaire du
premier emploi. Il prend un deuxième emploi. Si le deuxième
emploi est à un salaire plus élevé que le premier et qu'il
a un accident dans son deuxième emploi, il aura le salaire du
deuxième.
M. Fréchette: Voilà.
M. Bisaillon: Si le salaire de son deuxième emploi est
inférieur à son salaire du premier, il aura le salaire du premier
emploi. Le revenu brut d'un travailleur victime d'une lésion alors qu'il
reçoit une indemnité de remplacement du revenu et le plus
élevé du premier salaire ou du deuxième.
M. Fréchette: La seule...
M. Bisaillon: Si je comprends bien, dès qu'il y a
revalorisation, quand on parle de revenu revalorisé, c'est parce qu'on a
fait une compensation et que le salaire initial du premier emploi était
supérieur à ce qu'il gagne quand il revient au travail
après le premier accident.
M. Dussault: II y a eu revalorisation entre-temps. Ce qui fait
que, si le député de Sainte-Marie reprend comme base le premier
salaire uniquement, il se pourrait très bien que cela soit moindre. S'il
y a eu revalorisation, il y a donc eu possiblement ajout de dollars
entre-temps. C'est cette base qu'il faut prendre et non pas, si on dit le
premier salaire, en plus de défavoriser le...
M. Bisaillon: La revalorisation c'est la différence entre
le salaire au moment de l'accident...
M. Fortier: Le salaire au moment de l'accident ou celui qui a
été accepté comme base de calcul.
M. Bisaillon: Mais non.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre voulait parler.
Peut-être qu'on pourrait lui donner la chance d'intervenir.
M. Fortier: Oui. C'est cela qui est écrit ici.
M. Fréchette: II y a une chose, me semble-t-il, sur
laquelle on s'entend.
M. Bisaillon: C'est le plus élevé des deux.
M. Fréchette: C'est le plus élevé des deux
salaires. Cela a l'air clair dans l'esprit de tout le monde.
M. Fortier: Si son premier salaire était trop haut, c'est
le salaire maximum, donc c'est le salaire qui a servi de base au calcul.
M. Fréchette: C'est un principe qu'il faut retenir dans
tous les cas d'indemnité.
M. Fortier: C'est pour cela qu'on ne peut pas écrire le
premier salaire.
M. Fréchette: Deuxièmement, c'est parce que les
formules qui sont utilisées sont toujours les mêmes partout. Si
dans cet article-ci il fallait procéder à remplacer le terme
"revenu brut" par "salaire", il y aurait un problème sérieux de
concordance avec les autres articles.
M. Fortier: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): Adopté. L'amendement
à l'article 72 est adopté. Est-ce que l'article 72, tel
qu'amendé, est adopté?
M. Fortier: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): Article 73. Il y a un
amendement aussi. L'amendement de l'article 73 se lit comme suit: Remplacer les
deuxième et troisième lignes par les mots "égal au montant
pour lequel elle est inscrite".
M. Fortier: Cela se lirait comment? Mme la Présidente,
voulez-vous lire l'article au complet?
La Présidente (Mme Juneau): Oui. "Le revenu brut d'une
personne inscrite à la commission est égal au montant pour lequel
elle est inscrite."
M. Fortier: C'est vrai pour le travailleur autonome ou pour tout
le monde?
M. Fréchette: C'est pour tous ceux qui s'inscrivent de
leur propre initiative. C'est évidemment, en première instance,
les travailleurs autonomes qui sont visés par cette disposition.
M. Fortier: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): L'amendement est
adopté... (20 h 45)
M. Fortier: Une seule question. Tout à l'heure, on parlait
de l'article 71. Comment concilier l'article 73 amendé avec l'article
71? À l'article 73 on dit: "Le revenu brut d'un personne inscrite
à la commission est égal au montant pour lequel elle est
inscrite." Je comprends cela. À l'article 71, on dit: "Le revenu brut
d'un travailleur autonome (...) est celui d'un travailleur de même
catégorie occupant un emploi semblable dans la même
région..." S'il est inscrit avec un salaire donné, pourquoi
prendre la moyenne des salaires de la région?
M. Fréchette: En fait, c'est parce qu'il y a,
effectivement, dans la pratique deux catégories de travailleurs
autonomes. Vous pouvez avoir un travailleur autonome qui va
s'engager, je parle d'un camionneur par exemple, à contrat pour
la ville de Montréal ou pour n'importe quelle municipalité pour
une semaine, deux semaines, trois semaines. Il ne répond plus aux
exigences de la définition d'un travailleur autonome. Il devient,
à ce moment-là, une personne considérée comme un
travailleur à l'emploi d'un employeur. Alors, que l'article 73
s'applique expressément aux travailleurs qui ne sont jamais
considérés autrement qu'autonomes.
M. Fortier: Un genre de domestique.
M. Fréchette: Un genre de domestique ou le cultivateur qui
part le matin avec sa batteuse et qui fait 4 ou 5 portes dans la même
journée et qui recommence le même manège le lendemain, il
va toujours être considéré comme un travailleur autonome
sans employeur officiel et donc, il devra s'inscrire pour avoir la
protection.
M. Maltais: Même chose pour les artisanes.
M. Fortier: Mais, l'article 71 se réfère à
l'article 9. Autrement dit, ce que vous dites, c'est que l'article 73 se
référerait au travailleur autonome, genre domestique, qui
s'inscrit en disant: Je suis domestique et je gagne en moyenne 45 $ par
jour...
M. Fréchette: C'est cela.
M. Fortier: L'article 71 dit: "Le revenu brut d'un travailleur
autonome visé par l'article 9". L'article 9 définit le
travailleur autonome: "S'il exerce des activités simultanément
pour plusieurs personnes ou s'il s'agit d'activités qui ne sont que
sporadiquement requises par la personne qui retient ses services". Alors,
qu'est-ce qu'on veut couvrir par l'article 71, selon la définition?
M. Fréchette: L'article 71 veut couvrir le camionneur dont
je vous parlais qui va s'engager pour une période plus longue que des
périodes sporadiques, qui va s'engager, comme je le disais tout à
l'heure, pour deux semaines, un mois ou deux mois pour un même employeur.
À ce moment-là, il va être inscrit à la commission
comme étant un travailleur salarié d'un employeur donné et
c'est l'employeur qui va défrayer les cotisations, dans ce cas.
M. Fortier: II n'est pas autonome, à ce
moment-là?
M. Fréchette: En fait, il n'est pas, à proprement
parler, autonome au même titre que celui qui se livre à ces
activités sparodiques. Le député d'Outremont a raison.
Cela ne l'empêcherait pas, après avoir terminé son
contrat de deux ou trois semaines, de redevenir un travailleur autonome au sens
de l'article 9.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'amendement de
l'article 73 est adopté?
Une voix: J'espère que les avocats vont se retrouver
là-dedans.
M. Cusano: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): Adopté. Est-ce que
l'article 73 tel qu'amendé est adopté?
M. Fréchette: Adopté. M. Cusano:
Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): L'article 74.
M. Fréchette: Alors, à l'article 74, Mme la
Présidente, il n'y a pas d'amendement. C'est un espèce d'article
tampon ou enfin, un article qui permettrait de procéder à
évaluer un revenu brut si, encore, il arrivait qu'aucune des
méthodes retenues dans les articles qu'on vient d'étudier ne
s'applique à cette condition particulière d'un travailleur.
J'essaie de retenir un exemple d'une situation comme celle-là, et au
moment où on se parle, il n'y en a pas. Enfin, on n'en a pas
rencontré. Mais, est-ce que parce qu'on n'en a pas rencontré,
c'est une garantie qu'il n'en arrivera pas des situations comme
celle-là? On pense que non et on ne la met qu'en termes de
précaution et de prudence.
M. Cusano: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Je comprends qu'un article tampon d'un tel projet de
loi est nécessaire. S'il n'y en n'a pas présentement, il pourrait
y en avoir. Ma préoccupation sur l'article, justement, est lorsqu'on dit
"d'une manière autre que". Advenant qu'il s'en produise un ou deux ou
trois, tout à coup qu'on a besoin de faire cela, cette autre
manière, cela va être calculé, je présume, par
l'agent d'indemnisation dans une région?
M. Fréchette: Oui, à la lecture même de
l'article, il faut, de toute évidence, arriver à la conclusion...
Ah je m'excuse, je pensais que le député avait
terminé.
M. Cusano: Non. Ma préoccupation sur cela, c'est comment
s'assurer que cette autre façon soit interprétée de la
même
façon dans chaque région administrative de la CSST.
M. Fréchette: Je ne suis pas capable d'écrire dans
la loi, Mme la Présidente, que lorsque l'on accorde une
discrétion à un agent d'indemnisation ou à n'importe quel
autre fonctionnaire, il y aura obligation, pour tout un chacun qui va
être appelé à évaluer le dossier, de rendre
exactement la même décision dans les mêmes
circonstances.
M. Cusano: Mais...
M. Fréchette: Vous avez des cours de justice qui rendent
des jugements tout à fait différents l'un de l'autre, à
partir d'exactement les mêmes circonstances, les mêmes situations
et la même loi.
M. Cusano: C'est cela, dans le passé, avec certaines
décisions de la CSST, qui étaient rendues de façon
différente d'une région à l'autre, qui a
créé toutes sortes de problèmes. Alors, je pense que de
s'interroger sur l'uniformité au moins au sein de l'organisme de la
CSST, il devrait y avoir des mesures de prévues.
Si, dans ce cas-là, vous n'avez pas d'autre cas
présentement, peut-être en termes de suggestion, au niveau
administratif de la CSST, je sais qu'on ne peut pas l'inscrire dans le projet
de loi, puisque, jusqu'à présent, vous n'en connaissez pas et,
dans l'avenir, il pourrait y en avoir deux ou trois dans un laps de temps, une
suggestion à faire au vice-président, qui sera certainement
là, c'est d'au moins s'assurer que la méthode soit bien suivie et
de façon - je sais que les manuels de directives sont assez volumineux -
mais de peut-être concentrer cela à un individu en particulier
pour qu'au moins il puisse rendre la même décision.
M. Fréchette: Je pense que la préoccupation du
député de Viau est absolument bien fondée.
M. Cusano: Ah bon!
M. Fréchette: C'est une préoccupation dont il faut,
évidemment, tenir compte. Cependant, il y a une espèce de
garantie quant à l'uniformité de semblables décisions, si
jamais il doit y en avoir de rendues. Si jamais il y avait un commissison
d'appel quelque part dans la loi et que des situations comme celle-là
étaient soumises à cette dernière, il est très
probable que le tribunal d'appel établirait une jurisprudence à
partir de laquelle les critères se fixeraient et les décisions
s'encadreraient.
M. Cusano: Oui.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Mme la Présidente, je comprends que
l'article 74 en est un de protection, pour permettre, par exemple,
l'établissement de politiques administratives prévues dans la loi
et qui doivent être toujours, de toute façon, à la hausse,
c'est-à-dire au-delà du minimum qui est déjà
inscrit dans la loi. Alors là, il y a une protection quant au plancher.
Le deuxième paragraphe, là-dessus, est clair.
Ce dont parle le député de Viau, c'est que tant et aussi
longtemps que la situation demeure la même, cela devrait devenir la
règle. Autrement dit, tant et aussi longtemps que la nouvelle
façon utilisée, malgré que différente des articles
66 à 73, demeure au-dessus de et répond encore aux besoins
nouveaux, cela devrait devenir la règle d'application.
M. Fréchette: Oui, cela pourrait être la conclusion
qu'il faudrait tirer de l'intervention du député de Viau. Sauf
qu'il faudrait peut-être vivre un cas, à un moment donné,
pour savoir comment cela pourrait s'appliquer dans la pratique.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions?
M. Bisaillon: Non, Mme la Présidente.
M. Fréchette: Non, j'étais en train de dire, Mme la
Présidente, que j'étais d'accord avec l'observation du
député de Sainte-Marie. C'est tout ce que j'ai dit.
M. Bisaillon: Mais vous ne jugez pas que ce soit
nécessaire de l'inscrire là?
M. Fréchette: Je ne pense pas, Mme la
Présidente.
M. Bisaillon: Cela va.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 74 est
adopté?
M. Cusano: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): L'article 75?
M. Fréchette: Un amendement?
La Présidente (Mme Juneau): Non, monsieur, juste à
l'article 80.
M. Fréchette: L'exemple est peut-être encore ici,
Mme la Présidente, le meilleur moyen d'illustrer la signification de
l'article 75. Je prends le cas, par exemple, d'un mécanicien, dans le
domaine de la mécanique automobile qui sort de l'école de
formation
et qui a tout ce dont il a besoin pour exercer son métier de
mécanicien mais qui, malheureusement, ne peut pas se trouver d'emploi.
En attendant de pouvoir se dénicher un emploi comme mécanicien,
il décide de faire du taxi à un salaire beaucoup moins
élevé que celui qu'il retirerait s'il était dans
l'exercice de la profession pour laquelle il est particulièrement
qualifié. Pendant qu'il est dans l'exercice de son métier de
chauffeur de taxi, il est victime d'un accident d'automobile. Ce que l'article
75 indique c'est que, pendant la première année de son
incapacité, il sera indemnisé à partir du salaire qu'il
faisait comme conducteur de taxi. Si, cependant, cette incapacité se
prolonge au-delà de l'année de la date de l'accident,
l'indemnité, à ce moment-là, sera
réévaluée pour être fixée à partir du
salaire qu'il aurait gagné comme mécanicien. C'est la
signification de l'article.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Juste une précision. Le ministre a donné
un exemple, je voudrais lui en donner un autre. Il a employé l'exemple
d'un mécanicien, je vais employer l'exemple d'un comptable. Il n'est pas
capable de se trouver un job en tant que comptable et il se ramasse dans
l'entretien ménager. Il va gagner le salaire minimum. Il est comptable
de profession. Cela arrive. S'il a un accident pendant qu'il est en train de
faire de l'entretien, il est certainement capable de démontrer qu'il
aurait pu trouver un emploi ailleurs. Là, on va le
rémunérer en se basant sur le salaire qu'il aurait pu gagner
éventuellement, c'est cela?
M. Fréchette: Après un an de la date de l'accident
qu'il a subi alors qu'il était dans l'entretien ménager.
M. Cusano: Cette limite étant seulement d'un an, la
deuxième année, s'il fait la preuve qu'il peut avoir un emploi,
indépendamment s'il peut occuper cet emploi, parce que s'il peut
l'occuper, il n'y a pas de problème... Là, il arrive et dit: Je
suis comptable, j'ai mon diplôme dans mon salon et maintenant vous allez
me payer selon le salaire d'un comptable.
M. Fréchette: C'est cela.
M. Cusano: C'est extrêmement généreux.
M. Fréchette: En tenant pour acquis qu'aucune
indemnité ne pourrait être fixée pour un salaire qui
dépasserait le maximum assurable.
M. Cusano: 33 000 $
M. Fréchette: C'est cela. Si votre comptable
prétend que, dans l'exercice de ses fonctions, il pourrait
réaliser un salaire de 50 000 $ par année, il peut bien faire la
preuve qu'effectivement, il pourrait obtenir un emploi à ce point
rémunérateur mais son indemnité sera toujours fixée
à partir du maximum assurable, soit 33 000 $ dans ce cas-ci.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Mme la Présidente, je crois que, depuis
quelques articles, on a été généreux. On a reconnu
des définitions de travailleurs autonomes qui réfèrent
à des situations. Dans des cas où le travailleur autonome avait
deux ou trois emplois, on reconnaît le salaire le plus
élevé. (21 heures)
Je crois que, rendu à l'article 75, on dépasse les bornes
complètement. On a perdu les pédales. On tombe dans l'arbitraire
le plus complet. Il y a des exemples par milliers de gens qui sont venus
à mon bureau, qui ont des diplômes d'ingénieur, des
diplômes de géologue, des diplômes de toutes sortes, qui
cherchent des emplois et qui n'en ont pas.
C'est une situation malheureuse et que, sûrement, je n'endosse
pas. Notre formation politique croit qu'une relance de l'économie
pourrait régler un peu ce genre de problèmes si on pouvait la
faire. Quand même, il reste que c'est une situation de fait et de dire,
dans un article, que la commission, d'une façon arbitraire,
discrétionnaire, va déterminer qu'un employé peut
prétendre, parce qu'il a suivi des cours, parce qu'il a un diplôme
universitaire qu'il a droit à un salaire plus élevé alors
qu'il faisait du taxi, si on faisait le relevé de tous ceux qui
conduisent des taxis à Montréal, on découvrirait
peut-être des politiciens, on trouverait des avocats, on trouverait des
gens de toutes sortes et je ne crois pas, Mme la Présidente, qu'on doive
accepter cet article. On dépasse les bornes complètement. Je ne
sais pas qui a proposé cela mais c'est de l'arbitraire le plus complet,
inacceptable et j'estime qu'on doit rejeter cet article complètement
parce que l'on tombe... Dans les autres articles on était
généreux, on disait: S'il y a deux ou trois emplois, ondevrait prendre le plus élevé mais là on tombe dans
l'arbitraire et dans le discrétionnaire et donner ce pouvoir à la
commission c'est dépasser les bornes complètement. Pour ma part,
je vais voter contre cet article et je suggère que nous passions au
vote.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: Juste un commentaire additionnel, Mme la
Présidente. Le député d'Outremont s'interroge avec
beaucoup d'acuité pour savoir d'où cela vient. Je lui dirai
essentiellement que l'un des objectifs de la loi, dans tous les cas où
c'est possible, c'est d'arriver à s'harmoniser avec les autres
régimes d'indemnités et ce n'est pas tellement sorcier, cela
vient du régime de l'assurance automobile où l'on retrouve
très précisément le même
phénomène.
M. Fortier: On est ici pour voter sur la loi...
M. Fréchette: Non, non, je ne veux pas...
M. Fortier: ...42 et s'il y a d'autres parlementaires qui n'ont
pas fait leur travail, c'est leur job, mais je vous pose la question. Dans la
situation où on se trouve présentement, il y a un tas de gens qui
suivent des cours universitaires et qui, malheureusement, ne trouvent pas le
travail qu'il leur faut. S'il faut reconnaître cette situation de fait,
on s'en va dans une direction qui va être très difficile
d'administration parce que ce n'est pas l'exception. Pour les nouveaux
diplômés universitaires, c'est quasiment la règle.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: Je ne vais pas insister et tenter de
convaincre le député d'Outremont. Je respecte l'opinion qu'il est
en train de nous émettre. Je voulais tout simplement ajouter
l'observation suivante: II va très certainement comprendre que le cas
qui est visé par l'article 75 est là très
spécifiquement pour contrer des situations d'accidents graves,
d'accidents qui entraînent des états d'incapacité totale et
permanente.
Ce n'est évidemment pas le cas d'un accident mineur. Ce n'est pas
le cas de la fracture d'une jambe qui va faire en sorte que l'accidenté
se rétablira après 40 jours, 60 jours ou deux mois de
plâtre. C'est pour couvrir le cas de l'accidenté qui, après
un accident, va se retrouver dans un état d'incapacité totale et
de façon permanente. S'il s'agit d'un ingénieur, s'il s'agit d'un
avocat, s'il s'agit d'un travailleur de n'importe quelle profession qui est
ainsi affecté pour le restant de ses jours d'une incapacité
totale permanente, moi, je suis obligé de conclure que ce n'est quand
même pas sa faute s'il n'a pas été capable,
immédiatement après avoir été qualifié pour
remplir les fonctions pour lesquelles il s'est spécialisé, ce
n'est pas de sa faute s'il ne pouvait pas trouver d'emploi.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Décidément, Mme la Présidente,
le député d'Outremont et moi sommes faits pour nous entendre.
J'allais justement demander plus.
M. Fortier: On va former une coalition. On va faire un
consensus...
M. Bisaillon: Je voudrais juste lui souligner, cependant...
M. Fortier: ...comme le suggère Pierre-Marc Johnson.
M. Bisaillon: Je laisse au député d'Outremont la
liberté de différer d'opinion avec nous et avec les articles du
projet de loi mais je n'apprécie pas, outre mesure, le fait qu'il met en
doute que les parlementaires qui ont travaillé sur la loi sur
l'assurance automobile pendant au-delà de 70 journées aient mal
fait leur travail. Le degré de satisfaction de la population à
l'endroit de la loi sur l'assurance automobile devrait au moins indiquer au
député d'Outremont que ses jugements sont peut-être un peu
téméraires à cet égard.
Je voulais juste demander au ministre, Mme la Présidente, si
l'article 75 ne nous permettrait pas de faire un lien avec l'article 66. Cet
après-midi, quand on a étudié l'article 66, j'ai
passé le commentaire suivant au ministre: Lorsqu'on pouvait
établir, à l'article 66, un revenu plus élevé,
est-ce qu'on ne devrait pas tenir compte des avantages qu'il y avait dans la
convention collective, comme les avancements d'échelons, comme les
augmentations de salaires, comme les possibilités de promotions, par
exemple? Il me disait que la revalorisation était réputée
- parce que là, ce n'était pas autre chose que
"réputée" -être équivalente aux avantages
additionnels qu'on retrouve dans une convention collective, d'année en
année. Est-ce qu'on ne fait pas là, à l'article 75, des
choses qu'on a refusé de faire à l'article 66? Parce que,
jusqu'à un certain point, je suis d'accord avec l'argumentation du
ministre et avec l'article 75. J'essaie juste de lui dire que les personnes qui
sont visées ou touchées par l'article 75, je suis pour qu'elles
aient ces droits-là. Mais je remarque qu'on les a refusés
à l'article 66.
C'est une forme de promotion que de dire, par exemple, je suis
comptable, j'ai pris un autre emploi parce que je ne me trouvais pas d'emploi
de comptable, j'ai eu un accident du travail, là je reprends toute
l'argumentation du ministre, que j'endosse. Alors que pendant un an, je n'ai
pas été considéré au revenu d'un comptable, le
fait, après un an, de me retrouver à ce salaire-là,
j'assimile cela à une promotion possible dans
une convention collective.
Or, on n'a pas retenu cela à l'article 66. Je suis prêt
à endosser l'article 75, tel quel. Mais je demanderais au ministre ceci:
Pour quelle raison cela ne nous permettrait pas de revenir à l'article
66 et de rediscuter de toute cette question?
M. Fréchette: Pour plusieurs raisons sans doute, mais une
en particulier. Dans le cas de l'article 66, on parlait de gens qui sont
liés à un employeur, qui peuvent l'être par le contrat de
travail qui s'appelle la convention collective, laquelle convention collective
va prévoir toute espèce d'avantages, autant au niveau des
augmentations de salaires annuelles ou peu importe qu'au niveau du
normatif.
Dans le cas de l'article 75, il s'agit d'un travailleur qui n'a aucun
lien d'emploi avec personne, qui n'est donc pas lié par convention
collective avec personne non plus. De sorte qu'il me semble que le seul
avantage qui peut lui être consenti, c'est celui qui est d'ordre
strictement salarial ou économique. On ne pourrait pas arriver à
la conclusion que notre chauffeur de taxi, dont on parle, aurait reçu
une augmentation de salaire dans les six mois qui ont suivi l'accident, il
était nulle part. Il n'était lié par aucun contrat de
travail nulle part. Alors, je ne vois pas comment on pourrait modifier le texte
pour faire en sorte que les avantages d'un hypothétique contrat de
travail, d'une hypothétique convention collective devraient
également lui être . accordés, il n'en a pas.
M. Bisaillon: Mon argumentation est dans le sens contraire. Je
trouve que, par l'article 75, avec lequel je suis d'accord encore une fois, on
va reconnaître des choses qu'on a refusé de reconnaître
à la convention collective.
Je reprends mon argumentation. La convention collective contenait, par
exemple, des clauses de promotion, où on disait: La personne, qui va
obtenir le poste, est celui qui a le plus d'ancienneté. Supposons que
c'était une promotion automatique, c'est une promotion qui est
réservée à l'interne et qui se donne ou se distribue par
ancienneté. Alors je prends l'application de l'article 66 et le
travailleur ne pourra pas faire valoir, même après un an, que de
par l'application de sa convention collective, le poste qui a été
ouvert, lui, aurait été attribué parce que c'est lui qui
avait le plus d'ancienneté, ce qui lui aurait fait une promotion et des
revenus additionnels. Est-ce que le ministre me comprend jusque là?
M. Fréchette: Est-ce que je dois comprendre que vous
faites référence au cas de la personne qui aurait
déjà occupé un emploi de mécanicien?
M. Bisaillon: Oublions cela. M. Fréchette: Non?
M. Bisaillon: M. le ministre, ce que je veux expliquer, c'est que je
parle de l'article 75 pour essayer de faire un parallèle avec la
situation du travailleur de l'article 66 et celle de la personne de l'article
75. À l'article 66, un travailleur qui a eu un accident à un
moment donné, on prévoit qu'on peut lui établir un revenu
brut plus élevé et que, pour établir ce revenu brut plus
élevé, on peut inclure les bonis, les primes, les pourboires, les
commissions, les majorations pour heures supplémentaires, etc. Je vous
avais dit: Pourquoi pas aussi les avantages de la convention collective qu'il
pouvait avoir? Je vous avais donné comme exemple: augmentation
d'échelon, augmentation de salaire déjà prévue et
vous m'avez répondu: La revalorisation, c'est-à-dire,
l'indexation est réputée comprendre tout cela.
Je vous donne maintenant l'exemple du travailleur visé par
l'article 66 et qui pourrait faire la preuve à un moment donné,
qu'une clause de sa convention collective lui aurait apporté, parce
qu'il aurait plus d'ancienneté, lui aurait accordé une promotion
à l'intérieur d'une entreprise, s'il avait été au
travail alors qu'il était en accident du travail. Ce sont des clauses
que vous connaissez sûrement, vous qui avez fait beaucoup d'arbitrage de
conventions collectives, des clauses où la promotion est uniquement
à l'interne et où elle est distribuée avec un
critère d'ancienneté. Il peut faire la preuve que c'était
le plus ancien, que le poste s'est ouvert pendant qu'il était en
accident du travail et qu'il en aurait profité. On ne le lui
reconnaîtra pas. Cette promotion lui aurait donné un salaire
additionnel, des revenus additionnels et on ne lui reconnaîtra pas en
calculant son nouveau revenu brut plus élevé à l'article
66. On ne tiendra pas compte de cet avantage. Je dis qu'à l'article 75,
la personne qui n'a pas occupé l'emploi pour lequel elle était
formée et qui se retrouve accidentée, qui répond aux
conditions que vous avez énumérées, après un an, on
lui reconnaîtra son statut de comptable ou de mécanicien, un
statut plus élevé. Je suis en accord avec cela, mais je vous dis
que si on fait le parallèle, il me semble qu'il y a une personne
à qui on refuse de considérer un certain nombre
d'éléments alors qu'à l'article 75, on le ferait.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre, est-ce que
vous répondez tout de suite?
M. Fréchette: Mme la Présidente, oui. Le
raisonnement du député de Sainte-Marie
peut servir à l'inverse de l'objectif qu'il poursuit
également.
M. Bisaillon: Malheureusement, Mme la Présidente, c'est
exact, mais je me fiais au ministre, quand même.
M. Fréchette: Si le député de Sainte-Marie
souhaite la concordance, que l'harmonisation soit parfaite et intégrale
entre les deux articles et que l'on doive vivre avec la situation que l'article
66 est maintenant adopté, il va falloir restreindre la portée de
l'article 75.
M. Bisaillon: C'est du chantage.
M. Fréchette: C'est à cela qu'il va falloir arriver
comme conclusion si on suit le raisonnement du député de
Sainte-Marie jusqu'au bout. Il y aurait un moyen de le faire. On pourrait, par
exemple, et là, on établirait une espèce d'harmonisation
entre les deux situations, on pourrait lire l'article 75, à la
quatrième ligne de la façon suivante, mais partons de la
deuxième ligne: La commission détermine un revenu brut plus
élevé que celui que prévoit la présente
sous-section, si ce travailleur lui démontre qu'il a occupé un
emploi plus rémunérateur dans l'année
précédent la date de sa lésion professionnelle.
M. Bisaillon: Ce n'est plus la même chose du tout.
M. Fréchette: Mais non, je le sais bien.
M. Bisaillon: Mais, vous en... Mais, vous retournez à
l'article 66.
M. Fréchette: Bien oui, c'est cela.
M. Bisaillon: Donc, l'article 75 n'est plus utile.
La Présidente (Mme Juneau): La parole est au
député de Viau.
Une voix: Ahl Bon.
M. Cusano: Justement...
M. Bisaillon: Si le député de Viau me le permet.
Au-delà de cela, M. le ministre, comment vous réagissez à
mon argumentation par rapport à l'article 66? Est-ce que vous êtes
conscient qu'il y a quand même un petit aspect qu'on a laissé
tomber dans l'article 66?
M. Fréchette: Le député me demande si je
suis conscient. Oui.
M. Bisaillon: Mme la Présidente, est-ce que le ministre me
permet une question additionnelle?
Est-ce que sa conscience l'amènerait à regarder davantage
la question?
M. Fréchette: Je ne suis pas à ce point
troublé.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau, ensuite, ceux de Beauharnois et d'Outremont. (21 h 15)
M. Cusano: Oui, justement, sur l'article, je me demandais si,
à la suite de l'intervention de mon collègue d'Outremont, ce
projet de loi est adopté, quel serait l'impact sur la recherche d'emploi
de la part... Je voudrais bien qu'il m'écoute.
M. Fréchette: Je m'excuse. M. Cusano: Cela va.
M. Fréchette: Je n'ai pas compris la question.
M. Cusano: Non. J'ai arrêté pour ne pas la
reposer.
M. Fréchette: Allez. Cela va.
M. Cusano: C'est que mon collègue d'Outremont parlait du
nombre...
M. Fréchette: Je vous écoute.
M. Cusano: Je sais que vous avez deux oreilles mais je pense
qu'on peut...
M. Fréchette: Je vous écoute. M. Cusano:
Vous m'écoutez? M. Fréchette: Bien sûr!
M. Cusano: Alors je disais que mon collègue parlait
justement du nombre de personnes qui ont un diplôme aujourd'hui, qui se
promènent un peu partout mais... En ajoutant cela, est-ce qu'on a
étudié l'impact qu'un tel article pourrait avoir sur la recherche
d'emploi de la part d'étudiants de cégep ou des étudiants
universitaires? Parce qu'à la fin du compte, quelqu'un qui est dans sa
quatrième année de n'importe quel cours et qui se trouverait un
emploi durant l'été, s'il a un accident grave, il pourra
certainement démontrer qu'il aurait pu éventuellement occuper un
tel emploi. Dans ce sens, il me semble que les employeurs, avant d'engager
quelqu'un qui aurait un potentiel pour obtenir un meilleur emploi que celui
qu'il cherche, cela peut restreindre le nombre d'employeurs ouverts à
offrir des emplois à ces jeunes. Je me demande si on a regardé
cet aspect de l'article 75.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: Mme la Présidente, à la
question du député de Viau, je suis obligé de dire que
non, il n'y a pas eu d'évaluation de faite, d'évaluation
scientifique en tout cas.
M. Cusano: Non, pas une évaluation, mais s'est-on
penché sur l'impact que cela peut avoir sur l'embauche
d'étudiants?
M. Fréchette: Non, pour le seul motif suivant. C'est que
j'essaie d'imaginer une situation qui ferait que quelqu'un se trouve un emploi
de cette nature, avec l'intention de se retrouver dans un accident, à un
moment donné. En fait...
M. Cusano: Ce n'est pas cela que je dis.
M. Fréchette: Bien...
M. Cusano: La personne se trouve un emploi. C'est que
l'employeur, avec un tel article, si c'est un travail spécialement plus
dangereux que d'autres, va être très réticent à
employer des personnes qui auraient un potentiel pour gagner beaucoup plus que
ce que l'emploi offre. C'est une question de réticence.
M. Fréchette: Le député de Viau me demande
une évaluation personnelle ou une appréciation personnelle. Cela
peut bien être vrai ce qu'il me dit sauf que je ne suis pas capable
d'être absolu ni formel è cet égard. Je lui dis cependant
que, théoriquement, peut-être que ce phénomène peut
exister dans l'esprit de quelques-uns. C'est possible.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Beauharnois. Vous avez la parole.
M. Lavigne: Mme la Présidente, je ne voudrais pas allonger
le débat inutilement mais le député de Sainte-Marie me
trouble la conscience.
M. Bisaillon: II est là pour cela le député
de Sainte-Marie.
M. Lavigne: J'ai pensé à une autre
hypothèse. J'essaie d'imaginer que dans une grande entreprise où
l'on engage, par exemple, plusieurs ingénieurs, on engage un jeune
ingénieur qui a fini ses études mais qui n'a pas, dans cette
grande entreprise, un poste d'ingénieur comme tel, mais un poste
inférieur à ce qu'il pourrait avoir comme formation, en attendant
de se familiariser avec les rouages de la compagnie et il est à salaire
moindre que ce que sa profession pourrait réclamer normalement. Dans le
sens des échelons que le député de Sainte-Marie
soulignait, s'il s'avérait que cet ingénieur ait un accident
avant d'avoir atteint ce que, normalement, sa profession pouvait lui donner
comme rémunération, est-ce qu'il serait payé selon
l'article 66 au salaire moindre en question, ou bien est-ce qu'on lui
reconnaîtrait, comme on le reconnaît dans l'article 75, un salaire
qui correspondrait à sa profession? Ce n'est pas par hasard que j'ai
choisi un ingénieur comme exemple.
M. Fortier: S'il prend cet exemple, on va voir pourquoi on a
parlé.
M. Lavigne: J'ai terminé, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que vous allez
intervenir, M. le ministre?
M. Fortier: Mme la Présidente, si vous le permettez, je
vais aborder le même sujet et le ministre pourra statuer.
La Présidente (Mme Juneau): D'accord, M. le
député d'Outremont.
M. Fortier: Ce que je voulais dire en relation avec cela - je
veux remercier le député de Sainte-Marie d'avoir parlé
comme il l'a fait, parce que cela renforce mon argumentation - c'est que depuis
qu'on a commencé l'étude de ce projet de loi, je pense qu'il y a
deux principes de base. Quand on regarde un article qui peut être
litigieux pour certains d'entre nous, il faut le regarder en
référence à des principes de base, parce que, sans cela,
on ne peut pas en sortir.
Il y a deux principes qu'on a établis. C'est que ce projet de loi
n'était pas une loi des Affaires sociales, ce n'était pas une loi
pour aider les gens dans le besoin, c'était une loi pour compenser des
gens qui étaient au travail et qui, selon une entente entre les
employés et les employeurs, tel que l'a expliqué le ministre sur
une base historique, il y a eu une espèce de concordat qui a dit: Au
lieu de nous poursuivre sur le plan civil, nous allons prévoir des
compensations financières dans les cas où vous êtes
accidentés.
On a accepté le principe qu'il ne s'agissait pas d'une loi du
ministère des Affaires sociales. C'était une loi qui
dérivait de la progression historique, qui va en s'améliorant,
d'ailleurs, d'année en année, pour compenser les accidents du
travail.
Deuxième des choses, c'est que, quand on regarde, depuis le
début, toutes les définitions qu'on a prises, on se
réfère à des situations de fait. On prend la peine, depuis
le début, de définir combien d'argent faisait M. X lorsqu'il
travaillait et quelle était la base, quelle était la
référence.
Depuis le début, on essaie de définir
les situations exactes d'emploi et c'est pour cela qu'il y a beaucoup
d'articles, de définitions pour définir la base de calculs et
tout cela. Donc, on se réfère à des situations de
fait.
S'il faut maintenant avoir un article -je crois que c'est le premier que
nous ayons ici - qui nous amène dans ce que j'appellerais des
interprétations...
L'interprétation, c'est justement de supposer quel serait le
déroulement d'une carrière, dans un cas ou dans un autre. Je peux
dire au député de Beauharnois que chez les ingénieurs,
tous les ingénieurs commencent à peu près, j'imagine,
à 23 000 $ ou à 24 000 $. Il y en a qui se rendent à 150
000 $ et il y en a qui sont plafonnés à 35 000 $. Mais cela
dépend de la carrière de chacun.
C'est comme les avocats. Il y en a qui restent toujours à peu
près au même salaire et il y en a qui vont beaucoup plus haut.
Cela, on ne peut pas prévoir d'avance. Il n'y aucun plan de
carrière pour aucune personne en particulier et il n'y aucun profil de
carrière qui est standard.
Ce qui est encore plus vrai, c'est que dans la situation en 1984 - tout
à l'heure j'ai passé un jugement, mais je crois que la situation,
lorsqu'on a voté la loi de l'assurance-automobile, article 179 ou 178
-la situation est différente maintenant et je crois, malheureusement,
qu'elle va peut-être se perpétuer. C'est que les gens obtiennent
des diplômes - on parle des professeurs, mais cela s'applique autant
à des techniciens de toutes sortes - et il n'y a aucune
corrélation ou à peu près pas, maintenant, entre le fait
d'obtenir un diplôme et la pratique de la profession.
Quand j'ai gradué en 1957 à l'École polytechnique
de Montréal, je pense que pour chaque ingénieur
diplômé, il y avait dix offres d'emploi. Pour chaque avocat qui
graduait de la faculté de droit de l'Université de
Montréal, il y avait certainement un ou deux offres d'emploi.
En 1984, il y a un tas d'avocats qui graduent de l'Université de
Montréal et il y en peut-être le tiers qui se trouvent un emploi
dans des bureaux d'avocats. C'est moins vrai chez les ingénieurs, mais
on peut dire d'une façon générale que chez les
différents professionnels, en particulier, il n'y a plus aucune relation
entre le fait d'avoir un diplôme et la profession qu'on peut faire.
La semaine dernière, il y a un jeune qui est venu chez moi
à mon bureau, au bureau du député d'Outremont, qui
cherchait un emploi et qui est un professionnel spécialisé,
diplômé de l'Université de Montréal dans
l'aménagement des parcs, l'aménagement urbain. Il était
prêt à se trouver un emploi. Je lui ai demandé: Combien
voulez-vous gagner. Il a dit: Si je me trouvais un emploi à 8,75 $, cela
ferait bien mon affaire. Là, on est loin des tarifs professionnels.
Mais, comme je le disais, ce projet de loi n'est pas une loi du
ministère des Affaires sociales et jusqu'à maintenant, on se
référait à des situations de fait. Maintenant, d'avoir un
article de loi qui permet à la commission d'interpréter quelle
serait la progression d'un individu... Je suis complètement d'accord
avec le député de Sainte-Marie, il peut arriver qu'un
travailleur, s'il avait continué à travailler, aurait eu des
promotions simplement par le fait de l'ancienneté, c'est patent. Plus
que cela, peut-être que ce travailleur, dans certaines circonstances,
serait devenu contremaître. On ne saura jamais parce que cela ne se
produira pas parce que le type est handicapé à vie, disons, et il
n'aura jamais l'occasion de démontrer ce qu'il aurait pu faire s'il
avait continué la progression de sa profession.
Basé là-dessus, cela ouvre la porte à toutes sortes
d'interprétations. Le député de Sainte-Marie a raison, si
on le fait dans l'article 75, il faudrait revenir en arrière pour
pouvoir le faire pour les autres. Chacun aurait le droit de démontrer
que s'il n'avait pas eu d'accident, s'il avait pu être très mobile
pour se déplacer à travers le Québec, à supposer
que son employeur lui demandait d'aller sur différents chantiers du
Québec, ou si l'employeur lui a demandé de monter jusqu'au
quinzième étage, sur un chantier de construction et maintenant
qu'il est handicapé, il est toujours obligé de rester sur le
plancher des vaches. C'est certain que cette personne pourrait argumenter que,
s'il n'avait pas eu un accident du travail, il aurait une progression
très différente de celle qu'il a de facto.
C'est cela que je dis, je crois que là nous avons un projet de
loi, à venir jusqu'à maintenant, on s'est
référé à des situations de fait et d'ailleurs il y
a eu certains articles dans 68 à 74 où, lorsqu'une personne a
deux ou trois emplois, on accepte le salaire le plus élevé. C'est
déjà de reconnaître, implicitement, que cet employé
aurait pu trouver un emploi le plus rémunérateur des trois
emplois qu'il avait à plein temps, ce qui n'est peut-être pas
vrai. Maintenant, on est rendu, à l'article 75, d'essayer de
connaître ce qu'il aurait pu faire, s'il s'était trouvé un
emploi, alors qu'on ne le sait jamais. Il peut bien arriver qu'un type qui est
diplômé en droit de l'Université de Montréal soit
chauffeur de taxi toute sa vie. Peut-être qu'il n'aura jamais l'occasion
de pratiquer le droit de sa vie. C'est bien malheureux, mais c'est la situation
dans laquelle on est.
C'est pour cela que je m'insurge contre cela dans le sens... et je suis
complètement d'accord avec le député de Sainte-Marie, si
on accepte 75, il faudrait revenir en arrière.
Je ne crois qu'on doive revenir en arrière. Je crois qu'on doit
reconnaître les situations de fait, c'est malheureux. Ce n'est pas un
projet du ministère des Affaires sociales, c'est un projet de la Loi sur
les accidents du travail et la maladie professionnelle. À cause de cela,
je crois que cet article dépasse la portée de l'intention de la
loi et de ce qu'on devrait faire ici autour de cette table.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: J'ai juste deux observations à faire,
Mme la Présidente. Il y a quand même un bémol dont il faut
tenir compte dans l'argumentation du député d'Outremont. C'est
bien sûr qu'il y a des ingénieurs qui peuvent arriver à
gagner 150 000 $ et 200 000 $ et des médecins qui peuvent gagner 300 000
$ et 400 000 $, mais ne perdons jamais de vue que l'indemnité de
remplacement de revenu ne peut jamais procéder d'une autre source que le
maximum assurable. Dans l'état actuel des choses, même quelqu'un
qui, théoriquement, aurait pu gagner 150 000 $, il aura une
indemnité basée sur les 31 500 $ qui est le maximum
assurable.
M. Fortier: Je suis parfaitement d'accord.
M. Fréchette: Deuxièmement, Mme la
Présidente, si vous me le permettiez, nous tiendrions en suspens
l'article pour essayer de voir comment cela peut s'aménager. Je ne suis
pas en train de vous dire qu'il y a une décision de prise è cet
égard, mais je vous signale que j'aurais besoin d'en discuter davantage
pour arriver à finaliser une décision.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre, vous me
permettez? M. le député de Champlain avait demandé la
parole. Est-ce qu'il pourrait intervenir tout de suite? Est-ce que vous le
souhaiteriez, M. le député de Champlain?
M. Gagnon: Si on demande de suspendre l'article, je serais
d'accord avec cela. Je veux juste faire remarquer au ministre, quand
même, que ce débat à eu lieu lors de la Loi sur l'assurance
automobile. Je m'en souviens; d'ailleurs, vous n'y étiez pas, mais vous
aviez un digne représentant...
M. Fortier: Claude Forget.
M. Gagnon: ...en la personne de M. Saint-Germain...
M. Fortier: Ah oui! Lui, il pouvait faire une filibuster, comme
on dit.
M. Gagnon: ...qui nous a tenus en commission parlementaire au
moins 70 jours. Mais, en fait, c'est exactement la même chose que dans
l'assurance automobile où l'on parle de salaire réel ou salaire
potentiel. Je pense que ce sont les termes qu'on emploie. C'est exactement ta
même chose.
Le ministre, lorsqu'il va penser à, peut-être,
aménager autrement l'article, il ne faut tout de même pas oublier,
quand on parle d'un travailleur qui est diplômé de
l'université, dans une profession comme celle qu'on a
mentionnée...
M. Fortier: Peut-être technicien, technologue.
M. Gagnon: ...technicien aussi, il a énormément de
chance, même si la situation de l'emploi n'est peut-être pas aussi
rose -cela peut lui prendre un certain temps pour se trouver un emploi dans son
métier - il a quasiment 100% des chances de trouver de l'emploi dans son
métier.
M. Fortier: Exemple: l'employé de la construction. (21 h
30)
M. Gagnon: Peut-être. C'est ça. Je pense par exemple
à un diplômé qui temporairement prend un travail qui est
beaucoup moins rémunérateur et qui s'adonnerait à avoir un
accident qui le rend invalide pour le reste de ses jours. Cela veut dire qu'il
a perdu sa carrière complètement avec quasiment l'assurance de ne
pouvoir travailler dans sa profession. En tout cas, on va en reparler?
M. Fréchette: C'est ça.
La Présidente (Mme Juneau): Si vous êtes d'accord,
M. le député de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Mme la Présidente, quand le ministre propose de
suspendre l'article 75, je dois vous avouer qu'il me fait peur un peu. Je
trouve que l'article 75...
M. Fréchette: Le député d'Outremont a des
arguments convaincants.
M. Bisaillon: Oui, mais j'aurais aimé que le ministre
avant de suspendre s'enquière auprès du député
ministériel pour savoir si effectivement il était d'accord avec
le député d'Outremont et s'enquière auprès du
député de Sainte-Marie pour voir s'il était d'accord avec
le député d'Outremont.
M. Fréchette: Ce n'était pas nécessaire de
le faire.
M. Fortier: ...allé ce matin au bureau du premier
ministre.
M. Fréchette: On est en face d'une présomption
irréfragable quant à l'opinion du député de
Sainte-Marie.
M. Risaillon: Je veux juste indiquer au ministre que cela me
semblait un article intéressant. Par ailleurs, j'étais d'accord
cependant avec une partie de l'intervention du député d'Outremont
à partir du moment où il disait qu'il y avait beaucoup
d'arbitraire dans l'application de l'article. Comme le ministre nous a dit que
c'était issu, comme modèle, de la Loi sur l'assurance automobile,
est-ce que, dans vos réflexions, vous ne pourriez pas penser à
ajouter à l'article 75 une référence au mode d'application
ou aux règles d'application de la Loi sur l'assurance automobile? Il me
semble que cela indiquerait le type de personnes qu'on veut couvrir, le type
d'événements qu'on veut couvrir et ça rendrait cela
correct. Adoptons donc l'article 75 et par la suite on verra s'il y a des
débats à faire. Il me semble que cela devrait être la
position à tenir.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre a
demandé de suspendre l'article. Êtes-vous d'accord avec la
suspension de l'article?
Une voix: Mme la Présidente, on suspend.
La Présidente (Mme Juneau): On suspend l'article 75 et on
prend l'article 76.
M. Cusano: On en a combien de suspendus à ce jour?
M. Fréchette: Je vais vous dire cela. 7, peut-être.
10.
Dispositions particulières à certains
travailleurs
La Présidente (Mme Juneau): On en a 10. L'article 76. Il
n'y a pas d'amendement.
M. Fréchette: Mme la Présidente, l'article 76 vise
l'étudiant qui est couvert par l'article 10, la personne qui
exécute des travaux compensatoires ou des travaux communautaires ou qui
est détenue et exécute un travail dans le cadre d'un programme
d'activités rémunérées, l'enfant qui fait un
travail en vertu de la Loi sur la protection de la jeunesse, article 11,
paragraphe 3; la personne qui suit des cours de formation en matière de
mesures d'urgence ou qui apporte son aide à l'application de telles
mesures et, finalement, le travailleur bénévole.
Compte tenu des conditions spéciales de travail de ces personnes,
il est nécessaire de prévoir des dispositions
particulières quant à l'ouverture du droit à
l'indemnité de remplacement du revenu et le calcul de cette
indemnité et dans le domaine du travailleur qui est aussi
étudiant à temps plein compte tenu des conséquences
particulières que peut entraîner pour lui une lésion
professionnelle.
En fait, l'article 76 n'est qu'un énoncé de principes pour
couvrir les personnes dont je viens de faire l'énumération. Cet
article 76 spécifie que les dispositions qui suivent, de 77 à 81,
vont s'appliquer à cette catégorie de personnes
particulières.
M. Fortier: Voilà.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 76 est
adopté?
M. Fortier: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): L'article 77.
M. Fréchette: Cet article 77 prévoit les conditions
d'ouverture du droit à l'indemnité de remplacement du revenu
d'une personne qui effectue des travaux compensatoires ou communautaires ou qui
est un travailleur bénévole lorsque cette personne occupe par
ailleurs un emploi rémunéré ou exerce un travail pour
lequel elle est inscrite è la commission.
Comme cet emploi ou ce travail constitue son gagne-pain et que
l'indemnité de remplacement du revenu a pour but de compenser la perte
d'un revenu de travail que subit une personne en raison d'une lésion
professionnelle, il est normal d'évaluer son droit en fonction de son
incapacité d'exercer son emploi ou le travail pour lequel elle est
inscrite plutôt que de son incapacité d'exercer les travaux au
cours desquels elle a subi sa lésion.
M. Fortier: L'article 77? M. Fréchette: Oui.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: C'est un peu comme l'article 75. Cela a la même
portée que l'article 75.
M. Fréchette: Pardon?
M. Cusano: Cela a à peu près la même
portée que l'article 75.
M. Fréchette: Oui.
M. Fortier: Pour quelle raison a-t-on laissé de
côté... Pourquoi l'article 10 n'est-il pas là?
M. Fréchette: Non, ce n'est pas comme l'article 75.
M. Fortier: Dans l'article 76 on réfère à
10, 11, 12 et 14. Là ici c'est 11, 12 et 14. On a laissé tomber
les étudiants.
M. Fréchette: Dans l'article 76?
M. Fortier: On est à l'article 76 ou à l'article
77?
M. Fréchette: L'article 77.
M. Fortier: On a laissé tomber l'article 10. Ce sont les
étudiants.
M. Fréchette: C'est à l'article 78 qu'on couvre
l'étudiant.
M. Fortier: On couvre les étudiants; d'accord.
M. Fréchette: Mais ce n'est pas le cas de l'article 75.
Dans le cas de l'article 75, et si le texte devait demeurer ce qu'il est, je
donne ces renseignements sous la réserve que l'article est actuellement
suspendu... Pour les besoins de la discussion tenons pour acquis que l'article
75 est adopté tel qu'on le retrouve actuellement. Remarquez que l'on
réfère à un emploi que ce travailleur aurait pu occuper
alors que, dans le cas de l'article 77, c'est un emploi qui est effectivement
occupé.
M. Cusano: Et non celui qu'il exerce comme
bénévole, c'est cela que vous voulez dire.
M. Fréchette: C'est cela, c'est exactement cela.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 77 est
adopté?
Une voix: Adopté.
M. Fortier: Attendez. Il y a juste "qu'il aurait pu occuper
habituellement compte tenu de sa formation, de son expérience de travail
et de la capacité..." D'accord, je pense que cela est plus
général.
La Présidente (Mme Juneau): Cela va? M. Fortier:
Cela va, oui.
La Présidente (Mme Juneau): Adopté. L'article
78.
M. Cusano: Cela va bien.
M. Fréchette: II n'y a pas d'amendement.
La Présidente (Mme Juneau): Non, monsieur.
M. Cusano: On peut peut-être adopter le projet de loi avant
Noël.
M. Fréchette: Je vous réitère que je ne suis
pas pressé du tout. S'il me suggère d'adopter le projet de loi
avant Noël...
M. Cusano: Non, j'ai dit: On peut peut-être.
M. Fréchette: J'ai compris.
M. Fortier: C'est parce qu'il ne veut pas revenir le 2
janvier.
M. Fréchette: Je vous signale que je ne suis pas
nerveux.
À l'article 78, voici le commentaire.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fortier: Là, on retombe à l'article 75.
M. Fréchette: À l'article 78: dans le cas
particulier de l'étudiant les conséquences d'une lésion
professionnelle revêtent plusieurs formes. Elles peuvent affecter sa
capacité de travail, sans affecter sa capacité de poursuivre ses
études. Elles peuvent aussi affecter sa capacité de poursuivre
ses études ou d'exercer un emploi en rapport avec l'achèvement de
ses études, ce qui peut lui occasionner des retards parfois importants
dans la poursuite de ses études et dans l'accès ultérieur
au marché du travail. C'est pourquoi cet article prévoit des
conditions plus larges d'ouverture du droit de l'étudiant à
l'indemnité de remplacement du revenu.
M. Fortier: Là, on va reprendre toute la discussion de
l'article 75.
M. Fréchette: Très précisément.
M. Fortier: Là, est-ce que cela va être un avocat
à 150 000 $ ou à 35 000 $, celui-là?
C'est peut-être un futur premier ministre, on ne le sait pas.
...de l'Union Nationale.
M. Fréchette: La question de fond, je le sais bien - et je
suis d'accord avec le député d'Outremont quand il attire notre
attention là-dessus - c'est le fait que le phénomène ou le
principe ressemble étrangèrement à celui qu'on a
regardé dans l'article 75 sans l'adopter.
J'attirerai cependant l'attention aussi des membres de la commission sur
le fait que, si l'étudiant est victime d'un accident
du travail qui l'empêche de façon définitive et
permanente de même continuer ses études. Est-ce qu'on va tenir
pour acquis qu'il sera indemnisé pour toute la période qui
restera à courir jusqu'à l'âge de 68, à partir du
salaire minimum?
M. Fortier: Non. Dans un cas comme celui-là, pour
être bien précis, où une personne est à
l'université - pour prendre un cas d'étudiant en génie -
en troisième année de polytechnique et qu'elle a une
lésion professionnelle permanente, je crois que ce serait raisonnable,
étant donné qu'il lui restait un an ou un an et demi, de dire: Le
salaire qu'il aurait eu la première année de la pratique de sa
profession. Mais ici on laisse cela ouvert ad vitam aeternam. Autrement dit,
quel est le salaire qu'il aurait eu? Cela peut être le salaire qu'il
aurait eu à 30 ans, 35 ans ou 40 ans. Si, dans le texte, on avait un
amendement pour dire que, dans le cas des étudiants, ce sera le salaire
minimum qu'il aurait eu en tant que professionnel ou en tant que
diplômé dans un secteur donné, là je dirais: Cela a
du bon sens. Mais tel que l'article est écrit, il n'y a aucune limite,
aucune référence.
M. Fréchette: Cela pourrait ressembler passablement au
maximum assurable.
M. Fortier: Pas tout à fait parce que, si on prend comme
exemple un diplômé en droit - je n'ai pas de bureau d'avocats
moi-même - les jeunes diplômés en droit ne doivent pas
gagner une fortune quand ils commencent à travailler. C'est plus que le
salaire minimum. C'est quoi? C'est autour de 15 000 $ ou de 18 000 $.
M. Fréchette: Cela a déjà été
cela; ce n'est plus cela maintenant.
M. Fortier: 20 000 $, en tout cas, ce n'est pas
énorme.
M. Fréchette: Enfin, entre 20 000 $ et...
M. Fortier: C'est plus bas que 33 000 $.
M. Fréchette: Oui, je suis d'accord.
M. Fortier: À part cela, quelqu'un pourrait discuter en ce
sens qu'au fur et à mesure qu'il vieillit il aurait eu des augmentations
de toute façon. Oui, mais où s'arrête-t-on?
M. Bisaillon: On se fait gruger pas mal, mes petits
camarades.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Je disais à mes petits camarades qu'ils sont
en train de se faire gruger pas mal. Le député d'Outremont,
à l'article 75, a émis une opinion - ce n'est pas sa
première et ce ne sera pas sa dernière - mais on n'est pas
obligés de faire un x sur l'ensemble des articles du projet de loi pour
cela. De la façon dont je vous regarde aller ce soir, vous êtes
après couper environ 16 000 000 $ de dépenses additionnelles qui
avaient été prévues. On va pouvoir appliquer cela à
tout le reste qu'on n'a pas donné.
M. Fortier: Ce n'est pas ce que je dis, ce sont les arguments que
j'utilise.
M. Bisaillon: Non, ce n'est pas ce que vous dites, mais l'effet,
d'après ce que je peux voir, est à peu près le même.
On est après se faire saper l'article 75; on a failli passer à
travers l'article 77; là, on hésite sur l'article 78.
M. Fréchette: On n'hésite pas pour la raison
suivante.
M. Bisaillon: C'est ce que je voulais vous entendre dire, M. le
ministre.
M. Fréchette: L'article 78...
M. Gagnon: Pour l'article 75, ce sont les arguments du
député de Sainte-Marie qui ont commencé le
débat.
M. Fréchette: C'est vrai, cela.
M. Bisaillon: Vous vous êtes laissé saisir par
l'intervention du député d'Outremont.
M. Fréchette: Ce que je voulais dire, Mme la
Présidente...
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: ...c'est que l'article 78 n'est qu'un
article de principe qui donne ouverture au droit. Il ne prévoit pas du
tout les modalités d'indemnité. C'est à l'article 79 que
l'on retrouve les modalités d'indemnité. Si le
député d'Outremont y regarde de près à l'article
79, je pense que plusieurs des appréhensions qu'il nous a soumises
pourraient s'atténuer quand on regarde les modalités qui sont
prévues et retenues pour l'application du principe que l'on retrouve
à l'article 78.
M. Fortier: À quel endroit va-t-on voir cela?
M. Fréchette: À l'article 79, l'article
immédiatement après.
M. Cusano: Mais à l'article 79, il y a un troisième
paragraphe...
M. Fréchette: Je comprends, mais, enfin, cela
atténue considérablement les inquiétudes du
député d'Outremont, généralement parlant.
M. Bisaillon: Le député d'Outremont
généralement parlant ou?
M. Fréchette: Pardon?
M. Bisaillon: Le député d'Outremont
généralement parlant ou?
M. Fortier: J'essaie de comprendre ici. Malgré ce
qu'a dit le député de Sainte-Marie, je suis ouvert dans ce cas-ci
au principe. J'essaie simplement de voir la difficulté
d'interprétation. Pour faciliter les choses, on va prendre comme exemple
un étudiant en droit qui a une lésion professionnelle permanente.
S'il avait continué ses études, à sa graduation, il aurait
gagné, disons, 20 000 $. Est-ce que l'argumentation que pourrait
développer cette personne-là serait en ce sens que, si elle avait
continué sa carrière par la suite, cela aurait été
plus élevé ou si c'est le salaire qu'elle aurait eu au moment de
sa graduation. Autrement dit, est-ce que ce sera une revalorisation continue de
cette personne? (21 h 45)
M. Fréchette: Pas du...
M. Fortier: Une revalorisation continue dans le temps, disons
tous les trois ans, tous les quatre ans, il aurait toujours pu avoir un salaire
additionnel. J'essaie simplement de voir la difficulté
d'interprétation.
M. Fréchette: Dès lors qu'un premier salaire aura
été déterminé, ce qu'on appelle le salaire annuel
brut, il n'est pas révisable, sauf pour y ajouter l'indexation annuelle,
comme dans tous les cas d'indemnité.
M. Fortier: On n'a pas encore vu les clauses de revalorisation;
je ne sais pas dans quel cas elles s'appliquent. Si c'est ça, je suis
d'accord avec l'article 78. Ce que je voulais éviter, c'est une remise
en question continue du salaire de base qui détermine
l'indemnité.
La Présidente (Mme Juneau): L'article 78 est-il
adopté?
Des voix: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que c'est
adopté, M. le député de Viau?
M. Fortier: J'ai peut-être une réserve.
Ici, j'aurais ajouté après "d'exercer l'emploi
rémunéré qu'il occupe ou qu'il aurait occupé"
à sa graduation, "n'eût été de sa lésion, de
poursuivre ses études d'exercer un emploi..."
M. Cusano: À l'article 79.
M. Fréchette: C'est à l'article 79 qu'on va voir
ça.
M. Fortier: D'accord, je suis d'accord avec le principe.
M. Cusano: Adopté. M. Fortier: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): Adopté. Article 79?
M. Fréchette: Mme la Présidente, il n'y a pas
d'amendement à l'article 79. Cet article complète l'article 78 en
déterminant le mode de calcul de l'indemnité de remplacement du
revenu de l'étudiant. Cette indemnité sera égale à
50 $ par semaine tant que l'étudiant aura moins de 18 ans et ce ne sera
qu'à ses 18 ans qu'elle sera portée à un montant
calculé sur la base du salaire minimum, comme le prévoit la loi
actuelle.
Cependant, l'étudiant pourra démontrer des revenus
d'emploi qui lui permettraient d'obtenir une indemnité
supérieure. Dans ce cas, la base minimale ne s'appliquera pas si
l'étudiant est âgé de moins de 18 ans, puisque c'est alors
l'indemnité de 50 $ qui constituera l'indemnité minimale.
À l'âge de 21 ans, il y aura révision de l'indemnité
si le bénéficiaire démontre qu'il pourrait gagner un
revenu d'emploi plus élevé s'il n'avait pas subi de
lésion. Cette révision s'apparente à celle que
prévoit l'article 27 de la loi actuelle.
Il faut également noter que le présent article
s'appliquera aussi à l'enfant qui exécute un travail en vertu de
la Loi sur la protection de la jeunesse, lequel est nécessairement
âgé de moins de 18 ans.
Je ne sais pas si la discussion va s'engager particulièrement sur
le paragraphe 3 de l'article 79.
M. Cusano: Au paragraphe 2, on dit: "à compter de
l'âge de 18 ans, calculée à partir du "revenu brut annuel
déterminé sur la base du salaire minimum alors en vigueur".
Est-ce que cette indemnité, c'est toujours 90% de ça?
M. Fréchette: Voilà.
M. Cusano: Bon, on a dit que c'était 139 $.
M. Fréchette: 136 $ ou 139 $. C'est
ça.
M. Cusano: Pour des chiffres ronds, on va dire 140 $. Alors,
c'est 50 $ en bas de 18 ans; de 18 a 21 ans, c'est 140 $, il n'y a pas de
problème. Où on semble avoir plus de difficulté, c'est au
troisième paragraphe.
M. Fortier; Avant d'arriver au troisième paragraphe,
j'aurais juste une question. Dans le cas d'un travailleur qui travaille, on a
défini tout à l'heure qu'il s'agissait d'un emploi sur les lieux
du travail, selon le mandat qu'un employeur lui avait donné. On a dit au
tout début que ça excluait l'accident qui pouvait survenir sur le
terrain de stationnement.
Dans le cas d'un étudiant, comment est-ce défini? Si des
étudiants de l'Université de Montréal vont faire du ski
sur la côte de ski de l'Université de Montréal durant la
journée, est-ce que c'est un accident du travail?
M. Fréchette: C'est l'étudiant qui est en stage
dans une entreprise.
M. Fortier: C'est-à-dire soit qu'il est en stage ou qu'il
exerce une activité qui est semblable à une activité
exercée dans un établissement...
M. Fréchette: C'est cela.
M. Fortier: ...et qui est déterminée par
règlement. Mais est-ce que le fait de suivre des cours à
l'université, cela le définit comme étant un travailleur
à l'université?
M. Fréchette: Non, non. Pas le fait de suivre des cours.
Si, à l'intérieur de ses cours, par exemple, il y a une
période de stage pratique...
M. Fortier: Dans une école technique.
M. Fréchette: ...dans une école technique ou dans
une entreprise, peu importe...
M. Fortier: Oui.
M. Fréchette: ...et qu'à l'occasion de ces
activités il subit un accident, c'est là que la loi
s'applique.
M. Fortier: D'accord. Alors, seulement en relation avec les
stages...
M. Fréchette: Voilà!
M. Fortier: ...de formation.
M. Fréchette: Et l'exercice d'une activité de
travail.
M. Fortier: D'accord. Quand j'étais jeune étudiant
en génie, on allait à l'École technique de Montréal
pour faire des moules et des choses comme cela, c'était un travail
technique. Ce serait juste ce genre d'activités.
M. Fréchette: C'est cela.
M. Fortier: J'avais les cheveux noirs à ce
moment-là.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Beauharnois.
M. Lavigne: M. le ministre, pour compléter l'exemple que
vient de nous donner le député d'Outremont, par exemple, à
un niveau inférieur, au niveau du secondaire IV et V, il y a aussi des
stages en milieu de travail de perfectionnement.
M. Fréchette: Oui.
M. Lavigne: Là, on rencontre des gars de 17 ou 18 ans.
M. Fréchette: Dans les écoles de formation
professionnelle.
M. Lavigne: Dans les écoles de formation en soudure, en
ferblanterie, dans les métiers de construction et tout cela.
M. Fortier: Toutes ces activités-là.
M. Lavigne: Exactement. On les envoie dans des endroits de
perfectionnement pour six mois, à leur dernière année,
entre autres.
M. Fortier: Dans mon temps, même les jeunes
ingénieurs allaient là-dedans.
M. Lavigne: Ah oui!
La Présidente (Mme Juneau): M. le député...
Non, cela va?
M. Cusano: C'est au troisième paragraphe.
La Présidente (Mme Juneau): D'accord.
M. Cusano: Est-ce que le ministre a quelque chose à
préciser sur le troisième?
M. Fréchette: Je ne voulais pas aller au devant des coups,
mais je savais fort bien que nous allions entreprendre une discussion un peu
plus serrée sur le troisième paragraphe.
Ce que je serais disposé à suggérer -cen'est, à ce stade-ci, en tout cas, qu'une simple suggestion pour
aider à faire progresser la discussion, si c'est possible - ce serait
d'intégrer, au paragraphe 3 de l'article
79, les critères que l'on retrouve à la fin de l'article
77. Par exemple, "l'emploi qu'il aurait pu occuper habituellement compte tenu
de sa formation, de son expérience de travail et de la capacité
physique et intellectuelle qu'il avait avant que se manifeste sa
lésion." Cela balise très sérieusement la
généralité du troisième paragraphe de l'article 79.
Je ne sais pas, je le mets sur la table pour fins de discussion, pour le
moment.
M. Cusano: Est-ce que vous pouvez répéter cela, M.
le ministre? Parce qu'il y a quelque chose...
M. Fréchette: Écoutez, si on disait: "3°
à compter de l'âge de 21 ans, révisée à la
hausse s'il démontre à la commission qu'il pourrait gagner un
revenu brut d'emploi plus élevé si ce n'était de sa
lésion professionnelle" - la, j'improvise - en tenant compte de
"l'emploi qu'il aurait pu occuper...
M. Cusano: Excusez, vous vous référez à quel
article?
La Présidente (Mme Juneau): L'article 77, a
l'avant-dernière ligne.
M. Cusano: L'article 77.
M. Fréchette: ...compte tenu de sa formation, de son
expérience de travail et de la capacité physique et
intellectuelle qu'il avait avant que se manifeste sa lésion."
M. Cusano: La capacité physique, cela va. Mais la
capacité intellectuelle, cela peut ouvrir toutes sortes de portes.
M. Fréchette: BienI
M. Fortier: Je crois, M. le ministre...
M. Fréchette: II semble que les résultats scolaires
vont démontrer quelle peut être la capacité intellectuelle
d'un étudiant.
M. Cusano: Pas nécessairement, M. le ministre.
M. Fortier: Non, mais je crois...
M. Cusano: II y a des étudiants qui ont des quotients
intellectuels de 145...
M. Fréchette: En tout cas!
M. Cusano: ...et ils ont échoué des examens de
mathématiques.
M. Fortier: Non, je crois que c'était un essai louable.
Mais, dans le cas des bénévoles ou des autres personnes, enfin je
ne sais pas, normalement ce serait des gens qui ont une certaine
expérience de la vie, des gens un peu plus âgés. Je crois
que la définition qu'en donnait le ministre, à la fin de
l'article 77, s'appliquait.
Dans le cas d'un étudiant qui, à l'âge de 21 ans, a
droit à cette indemnité, j'aurais cru que, peut-être, la
meilleure définition aurait été le salaire initial qu'il
aurait eu dans une profession dans un secteur donné. À ce
moment-là, c'est assez facile à définir. Si le type
était étudiant en soudure, en graduant comme technicien en
soudure, il avait un salaire initial de tant; s'il était étudiant
en droit, la première année de droit, il aurait obtenu un salaire
de tant. Donc, si on référait à la première
année où il aurait pratiqué dans un secteur donné,
je crois que cela définirait passablement le niveau de salaire auquel il
aurait droit.
M. Fréchette: Cela va être difficile d'arriver
à déterminer quel pourrait être très
précisément le salaire qu'un étudiant en droit de
troisième année aurait gagné à sa première
année de pratique.
M. Fortier: Bien, je vous donne raison; je connais plus le milieu
des ingénieurs. Pour les ingénieurs, c'est assez facile...
M. Fréchette: On va faire...
M. Fortier: ...de déterminer ce que reçoit un
diplômé de poly, la première année, en moyenne. Cela
peut varier de 10%, mais en moyenne, c'est à peu près le
même salaire pour tous.
M. Fréchette: Le même montant.
Mme la Présidente, on a l'habitude à cette heure-ci de nos
travaux, de suspendre pour cinq ou dix minutes...
M. Fortier: Je pense que c'est une bonne idée.
M. Fréchette: ...histoire de se délier les
muscles.
La Présidente (Mme Juneau): Nous allons suspendre pour
quelques minutes.
(Suspension de la séance à 21 h 56)
(Reprise à 22 h 10)
Le Président (M. Dussault): Messieurs, nous allons
reprendre les travaux de la commission. Nous en étions à
l'article 79. Qui avait la parole? M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, j'avais
effectivement la parole pour vous dire, au moment où on a suspendu nos
travaux, que
nous travaillions à un nouveau texte relativement au paragraphe 3
de l'article 79. Je le fais à titre de suggestion, à ce stade ci.
Ce paragraphe 3 pourrait se lire de la façon suivante et remplacerait le
texte qu'on retrouve actuellement dans la loi 42: "À compter de
l'âge de 21 ans, révisée à la hausse s'il
démontre à la commission qu'il aurait probablement gagné
un revenu brut d'emploi plus élevé à cet âge s'il
n'avait pas été victime d'une lésion professionnelle."
Cela se réfère - c'est l'interprétation qu'on en fait
à ce stade - très précisément à la notion
qu'a développée le député d'Outremont,
c'est-à-dire au premier salaire qu'aurait gagné l'étudiant
dans sa profession après sa graduation. Il faudra qu'il fasse la
démonstration qu'il aurait été capable d'obtenir sa
graduation et qu'il aurait probablement gagné ce salaire. Ce salaire qui
sera fixé sera revalorisé, évidemment, conformément
aux dispositions de la loi, annuellement, l'indice des prix à la
consommation, et ne dépassera jamais, de façon évidente
aussi, le maximum assurable. Si, dans une profession - je pense aux actuaires,
par exemple - le premier salaire qu'on peut gagner était de 50 000 $, on
serait indemnisé à partir de 33 000 $, du maximum assurable.
D'ailleurs, ce que les légistes me disaient tout à l'heure, c'est
que le texte que l'on retrouve actuellement dans la loi 42, a toutes fins
utiles, est à peu près l'équivalent de ce qu'on vient
d'écrire; peut-être que, pédagogiquement, c'est plus
simple. Ce texte est tiré presque mot à mot de la loi actuelle,
celui que je viens de lire, comme amendement. Je le soumets actuellement comme
base d'une discussion et, si cette discussion nous amenait à la
conclusion qu'on rejoint les objectifs visés, cela pourrait devenir un
amendement.
M. Fortier: À ce moment, je suis d'accord. Je suis
prêt à adopter l'article 79 moins le troisièmement,
c'est-à-dire moins le...
M. Fréchette: Et le remplacer.
M. Fortier: ...troisièmement qui viendrait comme
amendement spécifique. Vous ne le proposez pas comme un amendement
spécifique, à ce moment.
M. Fréchette: Je le proposerais effectivement comme
amendement spécifique: Remplacer le texte du paragraphe 3 de l'article
79 par celui que je viens de lire.
M. Fortier: Pour me faire l'avocat de la défense de
l'étudiant, le seul ajustement qu'il y aurait, c'est à 21 ans.
Disons que, normalement, l'étudiant aurait terminé son cours
à 22 ou à 23 ans. Qu'est-ce qui .arrive, à ce moment?
Alors, à 21 ans, il faudrait qu'il fasse la démonstration, mais
il n'aurait pas l'occasion de faire la même démonstration à
22 ans ou à 23 ans.
M. Fréchette: C'est plus difficile pour lui d'arriver
à convaincre les "décideurs" qu'il aurait pu gagner ce salaire
à cet âge. Il sera probablement obligé d'attendre
que...
M. Fortier: Est-ce qu'il aura l'occasion de...
M. Fréchette: Oui, il. aura l'occasion de faire revoir la
situation. Un instant: Je ne veux pas qu'on crée d'embêtement
à qui que ce soit. Je vais me poser une question à moi-même
et j'aimerais bien qu'on y réponde. À supposer qu'un
étudiant en médecine termine son cours à 26 ans...
M. Fortier: Normalement, 25 ans.
M. Fréchette: ...25 ans, 26 ans ou 27 ans. Il
faudra qu'à l'âge de 21 ans il puisse convaincre ces
"décideurs" dont on parlait que, de toute évidence, il allait
obtenir, à 25 ou 26 ans, les autorisations nécessaires pour
pratiquer la médecine. S'il réussit à convaincre ces
personnes-là, à l'âge de 21 ans, il commencera à
recevoir l'indemnité conforme au salaire annuel brut qu'il aurait
gagné dans l'exercice de la médecine pendant la première
année.
Mais là où je me place, il y a une côte importante
à monter. L'étudiant qui a 21 ans et qui est en première
année de médecine devra devoir faire une sérieuse
démonstration pour convaincre, encore une fois, les gens qui ont la
décision à prendre que, de toute manière, il aurait
complété ses études en médecine. Il ne faudrait pas
non plus qu'on prenne des dispositions telles qu'on ferme la porte.
M. Fortier: J'aurais un amendement à proposer à
l'amendement: Si, au lieu de dire "à cet âge", on marquait
"à la fin des études en cours"?
M. Fréchette: Avez-vous compris M. Bernier?
M. Fortier: Non. Alors, cela se lirait: "à compter de
l'âge de 21 ans, révisée à la hausse s'il
démontre à la commission qu'il aurait probablement gagné
un revenu brut d'emploi plus élevé à la fin des
études en cours s'il n'avait pas été victime d'une
lésion professionnelle." À ce moment-là, je pense
que...
M. Fréchette: Ce n'est pas strictement nécessaire
d'indiquer "en cours"; "à la fin de ses études", cela
pourrait...
M. Fortier: C'est parce que, si on
prend l'étudiant en médecine, il pourrait dire: J'avais
l'intention de prendre une spécialité par la suite...
M. Fréchette: Ah! Oui.
M. Fortier: Alors, "les études en cours", s'il est inscrit
en première année de médecine à l'Université
de Montréal, ce sont les études dans lesquelles il est
engagé à ce moment-là, pas les études qu'il aurait
pu prendre subséquemment.
M. Fréchette: Cela pourrait aller.
M. Fortier: Alors, ce serait de remplacer "à cet
âge" par "à la fin des études en cours".
Le Président (M. Dussault): Alors, est-ce qu'on pourrait
commencer par adopter cet amendement: Remplacer les mots, à la
quatrième avant-dernière ligne du texte que nous avons, "à
cet âge" par "à la fin des études en cours"?
Une voix: C'est cela.
Le Président (M. Dussault): Est-ce que cet amendement est
adopté?
M. Fréchette: Adopté. M. Fortier:
Adopté.
Le Président (M. Dussault): Adopté. Nous revenons
maintenant au 3° de l'article 79 tel qu'amendé. Est-il
adopté?
M. Fortier: Adopté. M. Fréchette:
Adopté.
Le Président (M. Dussault): Alors, ce 3° est
adopté. Nous revenons maintenant à l'article 79 tel
qu'amendé. Y a-t-il d'autres intervenants? Non.
Est-ce que l'article 79 tel qu'amendé est adopté?
M. Fortier: Adopté. M. Fréchette:
Adopté.
Le Président (M. Dussault): Adopté. J'appelle
maintenant l'article 80...
M. Fortier: Attendez une minute. Il y a seulement au dernier
alinéa qui dit: "La révision faite en vertu du paragraphe 3 du
premier alinéa tient lieu de celle que prévoit l'article 75."
Alors, je crois que là, selon ce qu'on va décider pour l'article
75, ce dernier suppose une interprétation subjective de ce que
l'étudiant aurait pu faire s'il avait pu grandir dans sa profession. En
tout cas, je propose qu'on abroge l'article 75, mais, à ce
moment-là, les deux dernières lignes de l'article 79 devraient
également être abrogées.
Pour le moment, peut-être qu'on peut adopter l'article 79, moins
les deux dernières lignes.
Le Président (M. Dussault): Ou encore sous réserve
de ce qui sera adopté à l'article 75.
M. Fortier: En ce qui concerne les deux dernières lignes,
sous réserve de ce qu'on décidera pour l'article 75.
M. Fréchette: Cela va.
Le Président (M. Dussault): Je m'excuse, je n'ai pas
entendu la fin de ce que vous avez dit, M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Sous réserve. Alors, je propose qu'on adopte
l'article 79 et qu'en ce qui concerne tout particulièrement les deux
dernières lignes de l'article 79 ce soit sous réserve de la
décision qui sera prise pour l'article 75.
Le Président (M. Dussault): D'accord, c'est compris.
Alors, l'article 79, dans ces conditions, est adopté?
M. Fréchette: Adopté.
Le Président (M. Dussault): Adopté. J'appelle
l'article 80.
M. Fréchette: Sur lequel il y a des amendements de
proposés.
M. Fortier: Cela allait bien, on avait un bon président.
C'est vrai qu'il fait bien cela.
Le Président (M. Dussault): II faudrait que vous vous en
souveniez, M. le député d'Outremont.
La Présidente (Mme Juneau): II y a un amendement à
l'article 80. L'amendement se lirait comme suit: "Remplacer, dans les
première et deuxième lignes, les mots "paragraphe 1 ou 2 de
l'article 11" par les mots "paragraphe 1°, 2° ou 4° de l'article
11".
M. Fortier: C'est l'article 11.
La Présidente (Mme Juneau): D'accord.
M. Fortier: Dans le système numérique arabe.
M. Fréchette: Mme la Présidente, l'amendement en
est un de concordance pour
s'arrimer avec les amendements qu'on a faits à l'article 11. On a
ajouté des choses, je pense, à l'article 11; on a ajouté
le paragraphe 4. Alors il faut, de toute évidence, que l'article 80 se
réfère également au paragraphe 4.
M. Fortier: Je suis d'accord. Je crois que là, on se
retrouve avec deux fois le salaire minimum: le salaire minimum ici pour le
salaire minimum, et l'article 79 qui est le salaire minimum d'un professionnel
ou d'un étudiant qui est en stage de formation et qui aurait
terminé ses études.
M. Fréchette: C'est exact.
La Présidente (Mme Juneau): L'amendement est-il
adopté?
Une voix: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): L'article 80 tel
qu'amendé est adopté. À l'article 81, il n'y a pas
d'amendement.
M. Fréchette: Article 81, Mme la Présidente. Cet
article apportera en pratique peu de changements à la situation
actuelle. Le sous-paragraphe b du paragraphe 7 de l'article 46 de la Loi sur
les accidents du travail adopte aussi, comme règle
générale, la détermination du revenu d'un travailleur non
rémunéré sur la base du salaire minimum, sauf si cela
apparaît inéquitable. Dans ce cas, la commission utilise le revenu
d'un travailleur correspondant. Le présent article délaisse la
règle de l'équité pour tenir compte du fait que le
travailleur retire ou non un revenu d'un autre travail.
Dans ce cas, on déterminera le revenu de ce travailleur selon les
règles générales établies
précédemment, c'est-à-dire d'après les revenus
qu'il tire de son travail. De plus, en conformité avec l'article 79, on
prévoit des règles particulières è l'égard
du travailleur bénévole qui a moins de 18 ans. C'est
expressément le mécanisme qui s'applique dans le cas du
travailleur bénévole. Alors, il sera indemnisé à
partir de ce qui a été retenu dans l'article 79 s'il est
âgé de moins de 18 ans, c'est-à-dire 50 $ par semaine, et
suivant la modalité prévue au deuxième paragraphe s'il a
plus de 18 ans.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 81 est
adopté?
M. Fortier: Adopté.
M. Cusano: Un instantl Cela va.
La Présidente (Mme Juneau): Adopté. L'article
82?
M. Bisaillon: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Maintenant qu'on a adopté les articles 76,
77, 78, 79, 80 et 81, je me demande toujours ce qui nous empêcherait de
nous prononcer sur l'article 75. Il me semble qu'il y a des mécanismes
dont on a décidé, dont on a convenu dans les articles 76 à
81 qui nous permettraient d'adopter l'article 75.
M. Fréchette: Mme la Présidente, le seul motif pour
lequel j'ai demandé tout à l'heure la possibilité de
réserver l'adoption de l'article 75, c'est que je ne me prétends
pas prêt à une décision finale à cet égard et
j'ai besoin de revoir un certain nombre de situations, de faire un peu de
consultation avant de me faire une opinion définitive. C'est la seule
raison pour laquelle je souhaite que l'article 75 soit
réservé.
La Présidente (Mme Juneau): Nous en avions convenu ainsi,
M. le ministre. Nous passons à l'article 82.
Indemnité pour dommages corporels
M. Fréchette: Mme la Présidente, voici le court
commentaire quant à l'article 82. Cet article a pour but de
reconnaître le droit du travailleur à une indemnité pour
dommages corporels pour compenser les pertes non économiques qu'il subit
en raison d'une lésion professionnelle. À l'instar de la Loi sur
l'assurance automobile et de la Loi sur l'indemnisation des victimes
d'amiantose ou de silicose dans les mines et les carrières, le projet de
loi distinguera les pertes économiques subies par le travailleur en les
compensant au moyen d'une indemnité de remplacement du revenu des pertes
non économiques qui ne s'évaluent pas financièrement et
pour lesquelles il prévoit le versement d'une indemnité
forfaitaire. Les douleurs et la perte de jouissance de la vie ne seront
indemnisées que lorsqu'elles découleront d'un déficit
anatomophysiologique ou d'un préjudice esthétique.
En fait, c'est la consécration du forfaitaire dont on a
longuement parlé dans les remarques préliminaires lorsqu'on a
amorcé l'étude de la loi.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va? Est-ce que
l'article...
M. Cusano: Un instant!
La Présidente (Mme Juneau): Oui, M. le
député de Viau.
M. Cusano: Quitte à choquer le ministre...
M. Fréchette: ...
M. Cusano: Des fois, il se choque pour des choses insignifiantes
et, d'autres fois, il est très patient. Je dois dire que, la plus grande
partie du temps, il est très patient.
J'aimerais...
M. Fréchette: II y a quelque chose qui s'en vient, c'est
certain.
La Présidente (Mme Juneau): Ce sont les fleurs, M. le
ministre.
M. Cusano: Hier, on a examiné cette comparaison et, selon
des calculs qui ont été faits, qui ont été
démontrés, et je n'accuse personne de mauvaise foi, je pense
qu'on a fait une erreur assez importante lorsqu'on parlait de la capitalisation
de la rente à vie qui existe présentement.
J'aimerais avoir - pas une cinquantaine - une couple d'autres exemples
pour être sûr et certain qu'on comprend la situation. C'est que
présentement, dans le projet de loi qui est devant nous, j'ai nettement
l'impression que l'individu qui gagne un salaire assez considérable
recevra, à cause de son accident, de sa lésion professionnelle,
une indemnité de remplacement du revenu. Parfait! Pas d'objection
globale à cela. Mais c'est que, plus on approche, plus on diminue le
salaire gagné et plus on s'en vient au salaire minimum. C'est qu'au
salaire minimum - et corrigez-moi si je me trompe une personne qui travaille au
salaire minimum et qui reprend une occupation encore au salaire minimum ne se
trouve pas à avoir une indemnité de remplacement du revenu. C'est
bien cela.
Ce qu'il faudrait faire, dans un sens, parce qu'on nous a dit, dans les
discours en Chambre, que le système proposé dans le projet de loi
42 est nettement supérieur... Maintenant, je suis prêt à
concéder que, pour certaines catégories de gens, c'est
supérieur. Celui qui peut recevoir jusqu'au maximum de 33 000 $ - c'est
bien cela, son salaire brut - s'il tombe à un emploi qui va lui donner
12 000 $, l'indemnité de remplacement du revenu est substantielle.
Tandis que pour les plus démunis de la société, ceux qui
sont au salaire minimum, il n'y a aucune indemnité de remplacement du
revenu. Est-ce que je me trompe dans cette analyse?
M. Fréchette: II n'y a aucune indemnité de
remplacement du revenu. (22 h 30)
M. Cusano: Celui qui est au salaire minimum et qui revient
travailler, après une période de temps, à un salaire
minimum ne reçoit rien, en tant qu'indemnité...
M. Fréchette: II n'y a effectivement pas
d'indemnité de remplacement du revenu.
Sur le plan strictement économique, il est dans la même
situation que celle dans laquelle il était au moment de son
accident.
M. Cusano: D'accord. Si on fait les calculs, dans le
système actuel, cet individu qui est au salaire minimum, on calcule son
déficit anatomophysiologique et on lui donne une rente à vie, une
vente viagère qui comprend, dans un sens, seulement cette notion de ne
pouvoir réintégrer un travail convenable, c'est-à-dire
qu'il y a une diminution de capacité du travail. Tandis que là,
il perd cette rente. C'est remplacé par un montant forfaitaire, dans son
cas à lui, et ce montant forfaitaire, comparé à ce qui
aurait été sa rente viagère, est extrêmement
inférieur à ce qu'il aurait été selon la loi
actuelle.
Si le ministre dit que mon raisonnement est correct, je demanderais si,
à ce moment-ci, il est prêt à apporter certains changements
en ce qui concerne tout cet aspect des indemnités touchées pour
dommages corporels. Si on peut revenir à l'exemple d'hier - je ne
voudrais pas éterniser - on m'avait donné un exemple, le dernier
que vous avez donné. Un instant.
Je ne le trouve pas. Le dernier exemple que vous avez intitulé le
3a, est-ce que votre aide serait assez gentil de m'en faire parvenir une copie?
Je ne trouve pas ma copie.
M. Fréchette: On n'en a qu'une copie actuellement.
M. Cusano: Si on prend cette situation-là, la rente
à vie de 15 000 $ et 33 000 $, justement, capitalisée, je
demanderais, à ce moment-ci - parce que sur celle-là, on ne l'a
pas - ce que cela donne exactement? Parce qu'à un certain moment, on
disait, je pense, 4855 $, mais, après révision du calcul, cela
donnait un montant beaucoup plus élevé que 4855 $.
M. Bisaillon: Je m'excuse auprès du député.
Est-ce qu'il pourrait nous dire quel exemple, parce que j'ai de la
misère à trouver...
M. Cusano: 3a.
La Présidente (Mme Juneau): Celui qui a été
fait...
M. Fréchette: Vous ne l'avez peut-être pas, M. le
député de Sainte-Marie. Cela a été ajouté
à la liasse qu'on a déposée hier.
La Présidente (Mme Juneau): C'était une
demande.
M. Fréchette: Probablement que vous ne l'avez pas.
La Présidente (Mme Juneau): On va la faire photocopier, M.
le député, et on va vous en fournir un exemplaire.
M. Bisaillon: Merci beaucoup.
M. Cusano: Le montant capitalisé, la rente à vie
capitalisée donnerait combien, exactement?
M. Fréchette: Nos calculs à nous, en tous cas, nous
amènent au chiffre de 10 514 $.
M. Cusano: 10 514 $. Selon le régime actuel, cet individu
- c'est une grande partie de notre société - va recevoir 10 514
$, tandis que le montant forfaitaire, selon la loi actuelle, serait de 4362 $.
C'est cela qu'on appelle un système qui est plus
généreux.
M. Fréchette: C'est la question? M. Cusano: Oui, pour le
moment.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: Mme la Présidente, la question que me
pose le député de Viau va m'obliger en quelque sorte à
revenir sur des considérations qu'on a déjà faites
à l'occasion de remarques générales lorsqu'on a
essayé, tant bien que mal, de présenter l'ensemble du projet. Je
dirai en toute honnêteté - et je n'ai pas l'intention de prendre
de faux-fuyants ni non plus de détours - que l'évaluation que
fait le député de Viau de la situation précise qu'on a
devant nous est tout à fait conforme à la réalité
et à la vérité. En termes de rentes viagères
capitalisées, il y a carrément un avantage dans le régime
actuel par rapport aux montants forfaitaires que recevrait le travailleur
à partir des coordonnées qu'on retrouve dans le document.
Cependant, il ne faut jamais perdre de vue - à la condition,
évidemment, qu'on l'accepte - que le principe nouveau que l'on retrouve
dans la loi est de faire en sorte que le travailleur, quelle que soit sa
condition économique, quel que soit l'état de ses salaires, doit
être replacé dans une situation équivalente, autant que
c'est possible de le faire, à celle qui prévalait au moment
où il a eu cet accident. Dans l'exemple que nous donne le
député de Viau, voici un cas dont les coordonnés nous
amènent à la conclusion que le travailleur accidenté se
retrouvera économiquement, en termes de revenu du travail, exactement
dans la même situation que celle qui prévalait au moment où
il a eu son accident. Il était au salaire minimum quand il a eu son
accident, il retourne au travail gagnant encore le salaire minimum. Donc, en
termes de remplacement du revenu, il ne subit pas de préjudice.
Par ailleurs, il y aura une évaluation qui sera faite de ce qu'on
est convenu d'appeler son incapacité partielle permanente et, à
partir de cette évaluation tenant compte de son âge, tenant compte
du préjudice esthétique dont il peut être affecté,
de la perte de jouissance de la vie, le forfaitaire sera
déterminé. C'est exact -encore une fois, Mme la
Présidente, je vous réitère que je n'essaierai pas de
faire des détours pour dire que l'argumentation du député
de Viau n'est pas correcte, elle est correcte - au niveau de la rente, c'est
plus avantageux pour ce travailleur dans l'état actuel des choses que
les prévisions de la loi 42. Cependant, c'est un choix et c'est à
partir de ce choix qu'il nous est possible de mieux compenser les
accidentés lourds affectés d'une incapacité totale et
permanente. Là-dessus on s'entend tous pour dire, enfin, j'ai cru
comprendre qu'il y avait une espèce de consensus autour de la situation
qui fait que l'accidenté lourd, donc celui atteint d'une
incapacité totale permanente, est beaucoup mieux compensé, et
compensé dans le sens le plus pur du terme, avec les dispositions de la
loi 42. C'est parce qu'on a fait le choix de consacrer plus d'argent à
ces accidentés qu'à ceux qui peuvent retourner dans leur emploi
et dans le même emploi, aux mêmes conditions. C'est pour cela que
le phénomène est celui qu'on est en train d'expliquer.
Je vous signalerai cependant que, par rapport à un autre
état de situation, ce travailleur va pouvoir disposer d'un droit
qu'actuellement il n'a pas, et parce qu'il ne l'a pas actuellement, il est
souvent victime d'un congédiement ou d'un licenciement à la suite
d'un accident du travail dans les semaines ou les quelques mois qui suivent
l'accident, et s'il était l'objet d'un congédiement ou d'un
licenciement dans ces conditions-là, généralement il
n'avait pas de recours.
Dans le cas qui nous occupe et avec les dispositions du projet de loi
42, il aura pendant une année ou deux années, suivant les
circonstances, le droit de réclamer et de retourner à son
travail; ce qu'actuellement il n'a pas. Encore une fois, actuellement,
l'accidenté du travail peut être dans n'importe quelle
circonstance victime de la décision de l'employeur qui décide de
ne plus le reprendre à son service.
Cela ne s'évalue sans doute pas en termes financiers
précis, absolus, mais convenons par ailleurs que ce travailleur qui
aurait pu être victime d'un congédiement et qui ne le serait pas
à cause de l'exercice du droit de retour au travail... On ne peut
peut-être pas évaluer cela financièrement avec des sous,
des dollars, des chiffres absolus, mais convenons que c'est sérieusement
plus
important que la différence qui peut exister entre la rente
capitalisée dont on parle et le montant forfaitaire qu'il recevra. La
possibilité de pouvoir retourner à son emploi, en vertu des
dispositions de la loi, en vertu de droits qui sont consacrés dans la
loi, ce qui actuellement n'existe pas, c'est un peu comme essayer
d'évaluer ce que peut valoir la sécurité du revenu dans
certaines conventions collectives. Des gens ont essayé d'évaluer
en termes et en chiffres absolus ce que peut valoir la sécurité
du revenu dans une convention collective; personne n'arrive à le
déterminer, mais le phénomène est là et ceux qui
jouissent d'une sécurité du revenu dans leur convention
collective sont conscients du fait qu'ils sont en possession d'un droit que
plusieurs autres n'ont pas et qu'ils voudraient bien avoir.
Je pense que, donnant donnant, malgré l'inconvénient dont
parle le député de Viau et que j'accepte sans aucune discussion,
ce droit de retour au travail, particulièrement dans le cas qui nous
occupe, parce qu'il peut revenir au travail et dans un délai de moins
d'une année, ne peut pas s'évaluer financièrement, mais il
est sérieusement plus important pour le travailleur qui se retrouve dans
cette situation-là que la différence, encore une fois, qui peut
exister entre la rente capitalisée et le montant forfaitaire qui lui
sera remis.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va? Est-ce que
l'article 82 est adopté?
M. Cusano: Un instant, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): Oui. M. le
député de Viau.
M. Cusano: Le ministre est d'accord, c'est un choix que son
gouvernement a fait, c'est clair. Notre choix n'est pas le même que celui
du ministre, mais c'est une question d'option.
Est-ce qu'on pourrait nous chiffrer, pour l'ensemble des personnes
couvertes par la CSST, combien de ces personnes sont dans le système de
l'exemple qu'on vient de voir à 3a? C'est-à-dire que le ministre,
même en me donnant raison, dit: Dans l'exemple ici, le
député de Viau a raison. Mais j'aimerais savoir, sur l'ensemble
des travailleuses et des travailleurs au Québec, combien se situeraient,
selon les statistiques présentes, dans cette catégorie de
l'exemple 3a?
M. Fréchette: Le renseignement que vous voulez avoir,
c'est: Combien y a-t-il de travailleurs qui sont au salaire minimum?
M. Cusano: Oui.
M. Fréchette: C'est cela?
M. Cusano: Dans un sens, oui.
M. Fréchette: Pardon?
M. Bisaillon: Accidentés, oui.
M. Fréchette: Cela, il faudra qu'on le vérifie. On
peut sans doute fournir cette information, mais j'avoue très
honnêtement qu'à brûle-pourpoint je ne suis pas en mesure de
répondre à la question.
La Présidente (Mme Juneau): Y a-t-il d'autres questions,
M. le député?
M. Fréchette: Qu'on procède à des
vérifications, c'est tout à fait possible.
M. Cusano: Non, pour le moment. Peut-être que mon
collègue, le député de Rosemont...
La Présidente (Mme Juneau): D'Outremont.
M. Fortier: Je ne suis pas sécessionniste.
M. Cusano: On va certainement en avoir un de Rosemont aux
prochaines élections. C'est mon collègue d'Outremont. (22 h
45)
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur l'article 82?
M. Fortier: J'aurais juste une question à poser au
ministre. Quand on parle de l'indemnité pour dommages corporels qui
tient compte du déficit anatomophysiologique et du préjudice
esthétique, je pense qu'il s'agit de concepts qui sont familiers ou qui
existent dans la loi actuelle. Est-ce qu'une lésion corporelle
importante à un bras, ça veut dire que, pour qu'il y ait
consolidation, il faut que le préjudice esthétique soit
corrigé complètement? Ici, on parle du préjudice
esthétique qui résulte de cette atteinte.
M. Fréchette: Prenons le cas d'une brûlure, par
exemple. Il est bien évident que le préjudice esthétique
causé par une brûlure, si la brûlure est au deuxième
ou au troisième degré, toutes les présomptions sont que
jamais le préjudice esthétique ne pourra complètement
disparaître. Un bras coupé, cela crée à la fois un
déficit à la fois anatomophysiologique, un préjudice
esthétique sérieux et également, bien sûr, une perte
de jouissance de la vie.
Dans ce cas, la consolidation se référerait à la
guérison de la blessure, mais très certainement pas à la
récupération intégrale... Enfin, il ne pourrait pas
recouvrer son intégrité physique totale.
M. Fortier: L'article 82 ne fait que dire que cette
personne-là a droit à une indemnité.
M. Fréchette: Voilà, c'est ça.
M. Fortier: On ne peut pas être contre le principe, je
pense bien.
M. Cusano: Un instant.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: On arrive avec des montants forfaitaires qui
remplacent la rente viagère actuelle.
M. Fortier: L'article 82 ne parle pas de montant forfaitaire.
M. Cusano: Non, mais on a déjà discuté de
tout ça, M. le député d'Outremont. Je ne voudrais pas
m'éterniser là-dessus, je pense que ça a été
très clair hier, on a posé des questions et vous ne semblez pas
avoir de réponse quant à savoir quel est vraiment l'impact
réel sur ces travailleurs.
La perception que j'ai, c'est qu'on protège plus celui qui en
reçoit plus. Ce n'est pas ça le discours que j'ai entendu du
côté ministériel depuis que je suis en cette Chambre. De
leur donner ce montant spécialement basé... Si nu moins le
tableau à l'annexe était un peu plus raisonnable, encore
là, ça irait, mais...
M. Fréchette: Je vais simplement...
M. Cusano: Toute cette section d'indemnités pour dommages
corporels me laisse très froid.
M. Fréchette: Je vais prendre la situation en sens
inverse. Prenons le travailleur accidenté qui est au salaire minimum
mais qui, à cause de son accident, ne peut pas retourner à son
travail; il est affecté d'une incapacité totale permanente ou
partielle tellement élevée qu'il ne peut plus faire quelque
travail que ce soit. Quelle sera sa situation si l'on considère les
dispositions de la loi actuelle par rapport aux dispositions de la loi 42? En
vertu des dispositions de la loi actuelle, il va recevoir une rente de 90%
à partir de son revenu brut annuel, point.
Dans la loi actuelle, il va recevoir la même rente, 90% du revenu
net, plus le montant forfaitaire. Il faudrait bien que l'on considère
les deux situations. Ce n'est pas parce qu'on est un travailleur au salaire
minimum qu'on ne peut pas être victime d'un accident qui nous
empêcherait de retourner à notre travail.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Mme la Présidente, on avait indiqué
au ministre, à la suite de la discussion qui a suivi hier, que dans
l'ensemble du projet de loi, en tout cas quant à moi, il y avait quatre
points qui méritaient une discussion de fond. On en a amorcé un
hier, qui était la partie indemnité, et on arrive à la
deuxième partie du premier point, qui est dommages corporels.
Le ministre conviendra que de la façon dont se sont
passées les choses hier, on a d'abord fait une discussion de principe
sur l'approche du projet de loi 42. Cette discussion de principe a duré,
selon mon évaluation, près d'une heure ou une heure et demie.
J'exclus évidemment la présentation du ministre et la
période de questions qui a suivi. Je parle à partir du moment
où on a embarqué dans l'étude article par article.
La question de principe ayant été réglée,
non pas vidée mais réglée, par les membres de la
commission, les articles qui ont suivi, on les a analysés en fonction du
principe qui avait été réglé comme ils
découlaient de l'application du principe qui avait été
réglé, même si on n'était pas nécessairement
d'accord avec le principe initial.
Je pense qu'il faudrait aussi avoir en tête ce type de
fonctionnement lorsqu'on aborde le chapitre des dommages corporels. Cette
façon de procéder, même si elle continue à
être appelée ou qualifiée par un certain nombre
d'intervenants qui n'assistent pas de toute façon aux travaux de la
commission comme un "filibuster", je pense que le ministre est conscient que ce
n'est pas ce qui se passe actuellement et que ce n'est pas l'objectif qui est
poursuivi.
Le ministre a indiqué tantôt qu'on semblait tous d'accord
pour dire que le régime de remplacement du revenu, pour des personnes
qui étaient victimes d'accident ou d'incapacité permanente
totale, était supérieur dans le projet de loi qui est devant nous
par rapport à la loi actuelle. Sauf que j'ajouterais la réserve
qui avait été mentionnée hier: sauf à compter de 65
ans dans certains cas. Cela je pense que, pour donner le portrait complet de la
vérité, il faudrait ajouter cette partie-là.
Pour ce qui est de l'indemnité pour dommages corporels, il y a
deux éléments. Il y a l'élément des critères
qu'on va retenir pour déterminer le dommage corporel et il y a,
deuxièmement, l'approche qu'on va privilégier pour
dédommager la victime d'un accident de travail des dommages corporels
qu'elle a subis. Non pas de la perte de son revenu, mais du dommage corporel
comme tel. Le régime actuel prévoyait une indemnité de
remplacement du revenu, plus une rente viagère. La rente viagère
c'était
la méthode retenue pour compenser les dommages corporels, les
dommages reliés à l'accident du travail. Le projet de loi devant
nous présente lui aussi une indemnité de remplacement du revenu
et des dommages corporels sous la forme d'un montant forfaitaire. Je pense
qu'à l'article 83 on aura l'occasion de revenir sur le fond de la
question: Est-ce qu'on doit privilégier une forme plutôt qu'une
autre? Cela n'empêcherait pas, selon moi, qu'à l'article 82, peu
importe la forme qu'on retiendra à l'article 83, ce que cela sera -
est-ce que cela devrait être une rente viagère ou est-ce que cela
devrait être ce qui nous est proposé, un montant forfaitaire? -
peu importe ce qu'on retiendra à l'article 83, il me semble qu'à
l'article 82 on doit tenir compte des critères qui pourraient être
les mêmes, peu importe la solution qu'on va privilégier à
l'article 83.
Dans ce sens-là, je voudrais indiquer au ministre qu'il me semble
que la formulation de la loi actuelle quant aux aspects dont on tient compte
pour établir la rente viagère, qui est la forme de
dédommagement corporel, pourrait se retrouver à l'article 82.
Dans ce sens-là, cela pourrait prendre la forme de l'amendement suivant.
On laisserait le paragraphe tel qu'il est mais en ajoutant, après
"préjudice": Cette indemnité tient aussi compte de la diminution
de la capacité de travail, de l'aptitude du travailleur à
reprendre le travail au cours duquel il a été blessé ou
à s'adapter à quelque autre fonction appropriée.
Cela voudrait dire que dans l'établissement du dommage corporel,
peu importe, comme je l'ai dit tantôt, que ce soit un montant forfaitaire
ou qu'on revienne à la rente viagère, dans l'établissement
de ce montant, on tiendrait compte d'un ensemble de facteurs, qui sont ceux que
l'on retrouve dans la loi actuelle.
Je ne sais pas comment le ministre réagit à cela, mais
cela ne présume pas du tout de l'une ou l'autre formule quant au choix
qu'on va retenir tantôt. C'est à l'article 83 qu'on va faire cela.
Mais il me semble qu'on pourrait, dès maintenant, s'entendre sur le
critères que l'on va appliquer à l'une ou l'autre formule.
M. Fréchette: Je vais attendre d'avoir le texte de
l'amendement.
M. Bisaillon: Vous l'avez, M. le ministre.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que c'est une
proposition? Est-ce que je peux vous la lire, M. le ministre?
M. Fréchette: Oui, s'il vous plaît.
La Présidente (Mme Juneau): La proposition du
député de Sainte-Marie se lit comme suit: Cette indemnité
tient aussi compte de la diminution de la capacité de travail, de
l'aptitude du travailleur à reprendre le travail au cours duquel il a
été blessé ou à s'adapter à quelque autre
fonction appropriée.
M. Fréchette: Mme la Présidente, c'est
manifestement l'article 38.4 dont on parle. Et les éléments que
suggère le député de Sainte-Marie se retrouvent,
effectivement, à cet article 38.4. Il y a eu les jugements de la Cour
suprême, les jugements que l'on connaît, qui ont été
dans le sens que l'on sait.
Les éléments que le député de Sainte-Marie
nous suggère d'ajouter sont, quant à moi, des
éléments qui s'appliquent très expressément
à la perte économique que subit le salarié à cause
de la diminution de ses capacités de travailler. En d'autres mots, par
ces critères dont nous parle le député de Sainte-Marie, le
travailleur pourrait se retrouver dans une situation telle que sa
capacité de gagner un salaire est diminuée ou alors que sa
capacité de gagner le même salaire est diminuée.
C'est très précisément pour ces motifs que l'on
retient, dans le projet de loi, le principe du remplacement du revenu. C'est
très précisément pour ces motifs, pour tenir compte des
critères de l'article 38.4 et particulièrement des
critères sur lesquels le député de Sainte-Marie attire
notre attention, des critères, donc, qui sont en relation directe,
encore une fois, avec la capacité de gagner un salaire à partir
d'un travail qu'on exécute ou de gagner, encore une fois, le même
salaire que celui qu'on gagnait au moment ou avant son accident.
Alors, en introduisant dans le projet de loi l'indemnité de
remplacement du revenu, on compense, on ne compense pas, mais enfin on remplace
la perte économique dont peut être victime le travailleur en
compensant le revenu qu'il ne peut plus gagner à cause des
séquelles de son accident. Ce sont les critères auxquels a
référé le député de Sainte-Marie, qui, dans
l'état actuel des choses, ont fait que la Cour suprême a rendu les
jugements que l'on sait. Si donc, encore une fois, on retient le principe de
l'indemnité de remplacement du revenu, il me semble qu'on rejoint
très précisément l'objectif que souhaite atteindre le
député de Sainte-Marie.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Je pense qu'il y a d'autres députés
qui veulent prendre la parole.
M. Lavigne: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Beauharnois.
M. Lavigne: ...si vous permettez, je ferais part au
député de Sainte-Marie, encore une fois, que c'est une question
de choix. C'est sûr que, dans certains cas - je pense que le ministre l'a
évoqué très clairement tout à l'heure, à la
suite des interventions du député de Viau - dans certains cas,
effectivement, le projet de loi 42 va indemniser moins largement que dans la
loi actuelle. (23 heures)
Mais il n'en reste pas moins que, dans d'autres cas, c'est clair que le
projet de loi 42 est nettement plus avantageux dans le sens suivant: C'est
qu'au lieu qu'on indemnise le manque à gagner entre... Je vais donner un
exemple; prenez un employé qui gagne 20 000 $ par année et qui,
après sa consolidation, reprend un travail à 10 000 $ par
année. Il y a un manque à gagner de 10 000 $, qui va être
indemnisé à 90%. Dans la loi actuelle, on considérait ce
manque à gagner de façon discrétionnaire. Dans certains
cas, la commission le donnait et, dans d'autres, elle ne le donnait pas. C'est
cela qui est contesté devant les tribunaux, et là on en fait
force de loi. Cette partie qui était discrétionnaire dans
l'ancienne loi aura, par la loi, force de loi. C'est sûr que si on le
considère comme faisant partie de l'ancienne loi, ces 90%, plus la
rente, on fait une fausse interprétation de la loi actuelle.
Ce qu'il faut comprendre de la loi actuelle, c'est que l'obligation de
la loi 42 est là. Cela oblige la commission à défrayer, en
plus du forfaitaire pour le dommage corporel, les 90% du manque à
gagner. Dans ces cas - et c'est plusieurs cas - je pense que c'est là
que la loi actuelle est beaucoup plus avantageuse. Et l'économie qu'on
ferait en retirant la rente de l'autre cas, la rente qu'on ne donne plus dans
la nouvelle loi, est, semble-t-il, réinjectée dans - si vous me
permettez l'expression - le pot pour voir à indemniser davantage les cas
plus lourds. Encore là, c'est un choix. Moi, je l'achète.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Mme la Présidente, je ne prendrai personne
par surprise en disant que je vais tenter, plus tard, de faire comprendre aux
membres de la commission que j'aimerais mieux le principe de la rente
viagère plutôt que du montant forfaitaire. Je pense que tout le
monde va comprendre que je vais au moins tenter cet effort. Sauf qu'à
l'article 82 ce n'est pas ce que j'essaie de faire. J'essaie juste de dire:
Même si vous faisiez l'erreur de ne pas adhérer à
l'argumentation que je vais développer tantôt et que vous
mainteniez le système que vous allez proposer, c'est-à-dire du
montant forfaitaire pour le dommage corporel, il n'en reste pas moins qu'on
peut tenir compte d'une multitude de critères pour l'établir ce
dommage corporel.
Dans l'article 82, les deux seuls critères que vous retenez,
c'est le déficit anatomo-physiologique - des mots qu'on emploie à
tous les jours - et le préjudice esthétique. Je prétends
que la difficulté de s'adapter par la suite, parce qu'on a subi un
dommage, c'est un élément dont on pourrait tenir compte et dont
vous pourriez tenir compte, même si vous décidiez de maintenir un
montant forfaitaire. Autrement dit, pourquoi vous n'ajoutez pas un peu aux
critères qui vont vous permettre de définir le montant
forfaitaire? Pourquoi vous vous limitez dans ce genre de critères?
Pourquoi on n'en ajoute pas d'autres? Par exemple, l'âge va entrer en
ligne de compte dans le tableau dont on va se servir. Les travailleurs
accidentés vont être traités comme des voitures. Plus tu
l'as longtemps, moins elle a de valeur. L'oeil, à 60 ans, ce n'est plus
comme l'oeil à 40 ans. Je trouve que vous pourriez maintenir, si vous le
désiriez... Si vous preniez cette décision politique de maintenir
un montant forfaitaire, vous pourriez au moins tenir compte de critères
différents, rendant davantage justice à la personne humaine. Et
tenir compte du fait que, au-delà du préjudice esthétique,
au-delà du déficit physique qu'on peut comptabiliser, il y a
aussi d'autres critères, y compris des critères psychologiques
éventuellement, dont on pourrait tenir compte pour établir la
même chose à laquelle vous voulez en arriver.
Je ne sais pas si je me fais comprendre clairement, mais ce que je dis
au ministre c'est: Pourquoi vous n'élargissez pas un peu les
barèmes qui vont vous servir à déterminer, si vous le
maintenez... Parce que je crois encore que je serais capable de vous expliquer
les raisons qui devraient vous amener à le réviser, mais, si vous
le mainteniez, vous êtes capable, selon moi, d'ajouter aux
critères et de tenir compte d'autres éléments. Vous
pourriez, par exemple, faire disparaître l'âge comme le
critère et puis que le montant forfaitaire ne soit pas
nécessairement en fonction de l'âge, comme on le ferait pour une
voiture. Je pense que c'est le meilleur exemple qu'on peut donner.
On a référé tantôt à la Loi sur
l'assurance automobile pour indiquer qu'on voulait s'inspirer de cette loi
pourtant populaire... Souvenez-vous, les députés
ministériels, comme vous étiez fiers après l'adoption de
la Loi sur l'assurance automobile et comme vous aviez peur avant. Souvenez-vous
collectivement. Ah, oui, oui! Quand même vous me diriez non, j'ai vu
le
Conseil des ministres paniquer avant l'adoption de la loi et le lobby
était fort, souvenez-vous de cela. Les avocats, les assureurs et les
courtiers d'assurances étaient contre. On avait peur, on se demandait si
on faisait un bon coup. Vous l'avez fait quand même, vous vous êtes
tenus debout. Le résultat, c'est qu'il y a eu 86% de satisfaction avec
cette loi.
On s'est référé a la Loi sur l'assurance
automobile, tantôt, pour dire qu'on devrait s'inspirer des mêmes
critères. Bien, le slogan qu'on avait développé - je suis
fier de dire "qu'on avait développé", c'était une
époque où j'étais fier d'être là -
c'était "La personne avant toute chose". Trouvez-vous que, dans les
critères que vous retenez pour déterminer votre forfaitaire de
dommages corporels, vous tenez compte de la personne avant toute chose? Je
trouve que cela, M. le ministre, demanderait d'être
amélioré. J'ai 20 minutes au maximum pour vous le dire et pour
essayer de vous convaincre, mais je trouve que cela vaudrait la peine qu'on
prenne ces 20 minutes pour essayer de voir si on ne peut pas l'améliorer
un peu. Je ne voudrais pas que vous perceviez cela ainsi: II s'agit juste de
laisser couler le temps et, quand il aura fait ses 20 minutes, on sera
placé devant autre chose et on passera à l'article suivant. Je
pense qu'il y a plus au fond de cela.
Il me semble, M. le ministre, que vous seriez capable de vous laisser
attendrir un peu. Il me semble que vous êtes le genre de ministre capable
de comprendre qu'on ne chambarde pas tout votre projet en essayant de vous
aider à l'améliorer. Je pense que vous êtes assez
honnête pour reconnaître cela. Tout ce que je vous demande, c'est
d'élargir un peu vos critères et de tenir compte du monde. Il me
semble que je ne suis pas exigeant. Il me semble que ce que je fais est
correct. Il me semble que vous devriez retenir cela. Qu'est-ce que vous en
pensez?
Le Président (M. Perron): M. le ministre.
M. Fréchette: Qu'en termes élégants ces
choses sont dites!
M. le Président, je suis content de la référence
que fait le député de Sainte-Marie à la Loi de
l'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile, parce qu'il a
plaidé avec beaucoup de conviction que cette dernière avait
produit un taux de satisfaction dans les proportions qu'il dit, qu'il y a eu
des hésitations à un moment donné, que je n'ai pas
vécues de l'intérieur, de l'extérieur, je les ai
vécues. Je puis confirmer que ce que le député de
Sainte-Marie nous a dit est tout à fait conforme à la
réalité.
Mais pourquoi suis-je heureux qu'il utilise cet exemple? C'est
uniquement et strictement parce que les mécanismes que l'on retient dans
la Loi sur les accidents du travail sont très précisément
ceux que l'on retrouve dans la Loi sur l'indemnisation des victimes d'accidents
d'automobile. C'est très précisément le système qui
a été retenu et qui est harmonisé avec les
mécanismes de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'accidents
d'automobile. Non seulement est-il harmonisé dans les mêmes
proportions, mais le montant forfaitaire prévu dans notre projet de loi
42 est supérieur au montant forfaitaire que l'on retrouve dans la Loi
sur l'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile.
Je vais prendre le risque de vous dire que le montant forfaitaire
maximum prévu dans la Loi sur l'indemnisation des victimes d'accidents
d'automobile est de 35 000 $. Je vous le donne avec toutes les réserves
nécessaires d'une vérification plus approfondie. Mais ce que je
suis en train de dire au député de Sainte-Marie est assez
près de la réalité. Le montant maximum prévu dans
le projet de loi 42 est de 50 000 $, une quinzaine de milliers de dollars de
plus en termes de montant forfaitaire. Si, dans ces circonstances, cette Loi
sur l'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile a donné un
taux de satisfaction dans la proportion que nous indique le
député de Sainte-Marie, pourquoi ne serait-ce pas le même
phénomène dans ce cas-ci?
Deuxièmement, le député de Sainte-Marie nous dit:
Vous devriez retenir des critères. Vous devriez les incorporer à
l'article 82. Ces critères sont ceux que l'on retrouve dans l'actuel
article 38.4 de la Loi sur les accidents du travail. Ces critères sont
ceux en vertu desquels il est nécessaire d'indemniser le travailleur
accidenté en remplaçant son revenu. C'est ce que la Cour
suprême du Canada a dit: Le travailleur accidenté a droit à
une indemnité de remplacement du revenu. Le député de
Sainte-Marie nous dit: Vous devriez incorporer cela à l'article 82. Nous
venons de terminer le chapitre qui a été consacré à
l'indemnité de remplacement du revenu. Non seulement l'avons-nous
consacrée dans le principe d'un article en y ajoutant les
critères dont parle le député de Sainte-Marie, mais nous
avons consacré un chapitre complet à la reconnaissance de
l'obligation de remplacer le revenu du travailleur accidenté. Dans ces
circonstances, je me demande pourquoi il faudrait, par redondance,
réinscrire dans l'article 82 les critères en vertu desquels le
revenu doit être remplacé par l'indemnité qu'on
reconnaît dans le chapitre précédent et dans lequel
à peu près tous les articles ont été
adoptés, sauf quelques-uns qui ont été tenus sous
réserve.
Une autre considération. Le député de Sainte-Marie
attire notre attention sur la
situation suivante. Pourquoi faut-il qu'un membre d'un travailleur
accidenté, strictement en termes de compensation de dommages, soit moins
évalué à l'âge de 60 ans qu'il ne le serait à
l'âge de 40 ans? C'est strictement en fonction du principe de
l'expectative de vie, du temps qu'il nous reste à vivre et des
possibilités qu'on aurait, selon qu'on est à tel âge
plutôt qu'à tel âge, de pouvoir gagner un tel montant
d'argent. C'est strictement en fonction de cela que les critères dont je
viens de parler sont retenus. Ce n'est pas seulement dans le projet de loi 42
qu'on retrouve ces critères. On retrouve ces critères devant tous
les tribunaux de droit commun qui ont à procéder à
l'évaluation de dommages corporels qui peuvent découler d'un
délit ou d'un quasi-délit.
C'est la règle universellement reconnue. Ce n'est pas parce que,
humainement, cela vaut moins cher. Ce n'est pas parce que, humainement, on
doive traiter de façon différente l'une et l'autre des deux
situations, c'est parce qu'en termes d'expectative de vie il y en a moins
lonqtemps à l'âge de 60 ans qu'il peut y en avoir à
l'âge de 30 ans. C'est uniquement à cause de ce
phénomène et non pas parce que cela vaut moins cher sur le plan,
encore une fois, strictement humain.
La dernière observation d'ordre strictement factuel que je veux
soumettre au député de Sainte-Marie, c'est qu'il a oublié
un critère que l'on retrouve à l'article 82 quand il a fait
l'énumération tout à l'heure. Il n parlé de
déficit anatomophysiologique. Il a parlé du préjudice
esthétique. Il a oublié d'indiquer qu'on intégrait,
à l'article 82, un critère qui, actuellement, n'existe pas et qui
s'appelle la perte de jouissance de la vie. C'est, évidemment, comme on
l'a dit tout à l'heure, un choix là aussi mais un choix qui nous
paraît procéder de principes tout à fait
défendables, équitables et justes.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'amendement du
député de Sainte-Marie...
M. Fréchette: Les 20 minutes ne sont pas
écoulées...
M. Bisaillon: Non, je ne les prendrai pas toutes. Je vais prendre
au moins le droit de réplique avant que le vote se prenne.
M. Fréchette: Ah oui! Bien sûr.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Même si mes 20 minutes étaient
écoulées, je pourrais !e prendre quand même. Je veux juste
indiquer au ministre que, quand j'ai fait référence à la
Loi sur l'assurance automobile, j'y ai fait référence pour
rappeler aux députés de cette Assemblée que le slogan qui
avait été utilisé, c'était "La personne avant toute
chose". Compte tenu de cela, je dis que dans le cas de l'évaluation des
dommages corporels, peu importe la formule que vous allez retenir, on oublie
cet aspect. (23 h 15)
Ma perception du projet de loi, malgré un certain nombre
d'améliorations, il y a des choses dont on ne tient pas compte. Le
ministre m'indique que j'avais oublié un critère qui était
la perte de la jouissance de la vie. Il a oublié, lui, de
répondre à l'argument que j'utilisais, en disant que les facteurs
psychologiques, les séquelles psychologiques, on devrait normalement
tenir compte de cela aussi, par rapport à un travailleur.
Autrement dit, quand, dans mon argumentation, je disais: II n'y a rien
qui vous empêcherait de maintenir votre orientation, tout en
élargissant les critères que vous choisissez, il n'y a rien qui
vous empêcherait de faire cela.
Je pense que le ministre a retenu une expression que j'ai
utilisée hier, en disant, c'est un choix. Depuis ce temps-là, je
me rends compte que chaque fois que je présente quelque chose, on dit:
Bon, faites le choix. Je voudrais qu'en même temps on se rende compte que
chaque fois qu'on fait des choix, on s'en va aussi tranquillement vers un
jugement. Le choix va être jugé. C'est une évaluation que
vous pouvez faire et que, moi, je peux faire du résultat en bout de
course.
On prétend que vous devriez profiter de l'occasion à
l'article 82 pour élargir les critères qui sont
mentionnés, sans présumer, pour l'instant, du type de
régime qu'on retiendrait.
Je terminerai, Mme la Présidente, en indiquant que, malgré
les explications qu'on nous donne sur l'indemnité de remplacement du
revenu, il y a un certain nombre de choses dont on ne tient pas compte. On ne
tient pas compte, par exemple, qu'à 65 ans, ça arrête,
qu'on n'a pas encore de réponse sur ce qui va arriver après 65
ans. Par exemple, au fonds de retraite privé dont on a parlé hier
et qu'on n'a pas. Si cela n'existe pas, au moins pour les personnes qui y
auraient droit, admettez que les coûts ou les avantages que vous allez
retirer là et que vous vouliez appliquer là-bas, il y en aura
moins, parce que cela va être moins coûteux, le système que
vous proposez, s'il n'y a rien après 65 ans, si on ne prévoit
rien pour aider les gens à avoir autre chose que la pension de
vieillesse quand ils ont dépassé 65, plus les quatre ans qui sont
dévalués d'année en année.
Je dis que c'est l'ensemble qu'il faut regarder. Quand je regarde
l'ensemble, on me donne l'exemple de l'incapacité permanente
totale où on dit: Le système est meilleur. On en convient
jusqu'à 65 ans. Après cela, on pourrait faire la
démonstration que, dans certains cas, selon l'âge, selon le temps
que la personne va vivre, ça pourrait être différent.
On ne tient pas compte non plus, quand on me dit que l'indemnité
de remplacement de revenu est meilleure comme système. Les arguments que
le député de Viau a utilisés où il a
démontré clairement que pour toute une catégorie de
travailleurs accidentés, ceux qui sont au salaire minimum, par exemple,
ou qui sont près du salaire minimum, le aussi, il n'y a pas d'avantages
additionnels, et que, dans ces cas, non seulement il n'y a pas d'avantages
additionnels, mais il y a une perte, une perte nette, quand on tient compte que
le dommage corporel va remplacer une rente viagère à laquelle ils
avaient droit dans le passé.
Si le ministre et les députés ministériels veulent
à tout prix conserver les critères qui sont prévus
à l'article 82, c'est leur choix. On ne peut pas les empêcher de
faire cela. C'est leur décision.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: Une information d'ordre factuel, si vous me
le permettez, Mme la Présidente. Le député de Sainte-Marie
nous signale qu'il n'est pas tenu compte du phénomène des
séquelles physiologiques...
M. Bisaillon: Psychologiques.
M. Fréchette: Je pense pouvoir lui dire que dans
l'évaluation de ce qu'on est convenu d'appeler le DAP ou le
déficit anatomophysiologique, il est effectivement tenu compte de ces
séquelles dont il parle.
M. Bisaillon: Mais ces séquelles-là, vous allez les
évaluer à un moment donné et au moment où vous
allez verser dans le système proposé le forfaitaire en dommages
corporels. Les séquelles psychologiques, cela peut surgir plus tard
aussi. Cela peut prendre du temps avant de prendre forme et être visible.
Vous n'avez pas de mesures qui permettent d'en tenir compte.
M. Fréchette: Oui, oui, il y a une mesure qui
prévoit que s'il y a aggravation de la situation, la décision qui
a été originellement prise peut être revue en tout
temps...
M. Bisaillon: Sur le...
M. Fréchette: ...autant au niveau de l'indemnité de
remplacement du revenu que du montant forfaitaire.
Une voix: ...
M. Fréchette: Absolument.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'amendement
à l'article 82, présenté par le député de
Sainte-Marie, est adopté?
M. Fréchette: Rejeté.
La Présidente (Mme Juneau): Rejeté.
M. Bisaillon: Vous comprendrez, Mme la Présidente, que
j'aurais voté pour.
La Présidente (Mme Juneau): Je comprends très bien,
oui. Est-ce que l'article 82 est adopté?
M. Cusano: Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): Oui, M. le
député de Viau.
M. Cusano: Je voudrais faire quelques remarques avant qu'on passe
à... Une chose qui m'a étonné, justement, sur la question
de remplacer les rentes viagères même dans des cas de dommages
corporels... Je serais curieux - peut-être qu'on me dira que le ministre
n'a pas ces réponses à la portée de la main - de savoir
quelles seront les économies réalisées par la CSST du
simple fait qu'elle n'aura plus à émettre des chèques une
fois tous les quinze jours ou une fois par mois pour des indemnités qui
auraient autrement été accordées par la loi actuelle.
M. Fréchette: Est-ce que le député de Viau
est en train de me demander quelles seraient les économies d'ordre
administratif?
M. Cusano: Oui.
M. Fréchette: Parce qu'il ne sera plus nécessaire
d'envoyer un chèque...
M. Cusano: Oui, oui. C'est un peu cela, oui.
M. Fréchette: ...tous les mois? Il faudrait que... Je ne
le sais vraiment pas.
M. Cusano: Mais on peut dire... Je pense qu'on peut facilement
conclure que l'émission d'un chèque... Vous allez certainement me
répondre que je prends un long détour pour arriver à
quelque chose. Mais il va y avoir des économies substantielles. Je pense
qu'on peut lancer toutes sortes de chiffres en disant que l'émission
d'un chèque dans un appareil gouvernemental coûte entre 20 $ et 30
$. Si on considère le nombre des personnes qui ne recevront plus de
chèque, ce sont des
économies énormes. Est-ce qu'en calculant ces montants qui
se trouvent en annexe, on a pris en considération les économies
qui seront faites par le fait qu'on n'aura pas à émettre de
chèques?
M. Fréchette: Écoutez, non. Je voudrais bien...
M. Cusano: Cela dépasse... Je comprends.
M. Fréchette: ...ouvrir le tiroir dans lequel on
trouverait la réponse. Je ne suis pas obligé de vous dire... Je
ne connais pas le tiroir où je pourrais avoir la réponse. Je ne
le sais pas.
M. Cusano: D'accord.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Champlain.
M. Gagnon: Mme la Présidente, de ce
côté-là, tant mieux. On n'a qu'à se féliciter
si l'administration de la loi coûte meilleur marché.
M. Fréchette: II me semble.
M. Gagnon: Je ne sais pas où il veut en venir, mais j'ai
l'impression qu'on cherche à faire en sorte que plus d'argent retourne
au public assuré, qu'il n'en reste pas dans l'administration. Je ne
pense pas que ce soit un inconvénient.
M. Cusano: II est certainement au courant que ce ne sont pas les
plus démunis, ceux qui reçoivent le salaire minimum, qui vont en
recevoir le plus. Il est au courant de cela et il a fait son choix.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 82 est
adopté?
M. Gagnon: Non. Oui, adopté, oui. Je répondais au
député.
La Présidente (Mme Juneau): Article 82, oui.
M. Cusano: Adopté, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): II est adopté. À
l'article 83, il y a un amendement.
M. Bisaillon: Vous avez compris, Mme la Présidente, que je
vais voter sur division.
M. Fréchette: ...sortir la cassette...
M. Bisaillon: Non, mais cela vous indique que lorsque je ne le
dis pas...
La Présidente (Mme Juneau):
L'amendement à l'article 83 se lit comme suit: "Supprimer, dans
la dernière ligne du troisième alinéa, le mot
"semblables". Ajouter, dans la dernière ligne du troisième
alinéa, après le mot "mentionnés" les mots "et qui sont du
même genre". M. le ministre.
M. Fréchette: Mme la Présidente, cet amendement
vise à laisser une marge de manoeuvre plus réaliste pour
permettre de déterminer le pourcentage correspondant à un dommage
corporel qui ne serait pas mentionné dans le barème des dommages
corporels. Il peut arriver qu'il y ait un dommage corporel qui, par sa nature,
n'est pas couvert dans les listes habituelles de dommages corporels. C'est pour
permettre de quand même fixer le quantum du montant forfaitaire pour
retenir une formule. Quant à l'article lui-même, Mme la
Présidente, il précise le mode de calcul de l'indemnité
pour dommages corporels. L'annexe B du présent projet prévoit le
montant maximum qui pourrait être versé à ce titre selon
l'âge du travailleur. Le maximum est de 50 000 $ pour un travailleur de
18 ans ou moins. L'indemnité tient compte du fait que plus le
travailleur est jeune, plus lourde est la perte subie compte tenu de son
espérance de vie. En vertu de la Loi sur l'indemnisation des victimes
d'amiantose ou de silicose dans les mines et les carrières, le montant
maximum de cette indemnité est de 67 509 $ en 1984.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: J'ai une note ici disant que les montants de
l'indemnité qui sont proposés à l'annexe 2, dont on trouve
la liste à l'annexe 2...
M. Fréchette: À l'annexe B.
M. Fortier: ...seraient plus élevés que ceux qu'on
retrouve à l'annexe B de la Loi sur l'assurance automobile.
M. Fréchette: C'est exact.
M. Fortier: Est-ce que vous avez soulevé cette
question-là? Si c'est plus élevé, quelle est la raison qui
motive cette augmentation par rapport à la Loi sur l'assurance
automobile?
M. Fréchette: C'est effectivement exact que les montants
que l'on retrouve dans l'annexe B de la loi 42 sont plus élevés
que ceux de l'assurance automobile. En fait, le maximum ici est de 50 000 $
alors que dans l'assurance automobile il serait j'emploie le conditionnel
à dessein - à peu près de 35 000 $. Pourquoi sont-ils de
cette nature? C'est parce que nous en sommes
arrivés à la conclusion qu'il était plus
équitable de retenir les barèmes de l'annexe B et,
deuxièmement, parce que l'on sait également que la Régie
de l'assurance automobile a manifesté l'intention de s'harmoniser avec
les barèmes que l'on retrouve dans la loi 42.
M. Fortier: Est-ce que l'harmonisation dont vous faites
état demanderait un changement à la Loi sur l'assurance
automobile?
M. Fréchette: Oui. Je sais que cette loi, au moment
où l'on se parle, est en préparation. Les gens y travaillent et
normalement une loi devrait être présentée pour atteindre
cet objectif. C'est d'ailleurs un des principes fondamentaux de la loi 42
d'essayer d'harmoniser les différents régimes d'indemnité
de revenu. Dans ce cas-ci, ce sera à l'assurance automobile à
s'harmoniser sur les barèmes de la loi 42.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Vous dites que le "pourcentage d'atteinte permanente
à l'intégrité physique est égal à la somme
des pourcentages déterminés suivant le barème des dommages
corporels adopté par règlement". Peut-être que le ministre
va me répondre qu'il ne sait pas la réponse. Dans le
passé, il semble y avoir eu des conflits, c'est-à-dire
qu'à la CSST on appliquait certains barèmes et à la
Commission des affaires sociales d'autres barèmes. Est-ce qu'on peut
savoir lesquels sont employés à la CSST et est-ce qu'il y a eu
des difficultés justement en ce qui concerne les barèmes
employés par la CSST et ceux de la Commission des affaires sociales?
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre. (23 h 30)
M. Fréchette: Mme la Présidente, je pense devoir
dire au député de Viau que les barèmes qui sont
utilisés à la CSST pour fixer le déficit
anatamophysiologique n'ont jamais été contestés devant la
Commission des affaires sociales. Ce qui a été contesté
c'était les barèmes utilisés pour arriver à
déterminer l'incapacité partielle permanente, qui fait en sorte
qu'on est placé dans une situation où on gagne moins de revenus.
En fait, les barèmes de l'article 38.4, en d'autres mots, la perte de
capacité de travail, c'est ce qui a été contesté
devant la Commission des affaires sociales. C'est ce qui s'est retrouvé
devant les tribunaux de droit commun. C'est là-dessus que la Cour
suprême a tranché.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: D'accord. Lorsqu'on dit que ces barèmes sont
adoptés par règlement, on peut aussi présumer que cela
peut changer selon les pratiques en Amérique du Nord. Est-ce que vous
avez l'assurance que ce qui a été planifié par la CSST a
un certain aspect de permanence?
M. Fréchette: Le règlement, qui prévoira les
barèmes pour la détermination du montant forfaitaire de
même que les modalités d'application de ces barèmes, va
être adopté par le conseil d'administration de la CSST. Il sera
ensuite soumis à l'approbation gouvernementale. Il est évident
qu'à l'intérieur de cette réglementation, il va falloir
nous assurer que les barèmes que l'on retrouve à l'article 83 de
la loi sont bien reconduits dans le règlement qui va fixer les
modalités d'application pour arriver à déterminer le
montant forfaitaire auquel un accidenté peut avoir droit.
Aura-t-il un caractère de permanence? Je serais fort
hésitant à dire au député de Viau qu'il aura un
caractère de permanence immuable. Il est bien évident que les
circonstances changeant, il peut arriver aussi que les barèmes
eux-mêmes ou bien alors les modalités d'application peuvent
varier. Le guide le plus sûr à ce chapitre-là, c'est,
évidemment, la jurisprudence que les tribunaux de droit civil
établissent au fur et à mesure qu'ils rendent des jugements en
semblable matière.
Je dois dire au député de Viau que l'objectif visé
est évidemment un caractère de permanence, mais qu'on ne peut pas
conclure que cette permanence est inscrite ad infinitum dans les lois.
M. Cusano: Cela va.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'amendement de
l'article 83 est adopté?
M. Cusano: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 83 tel
qu'amendé est adopté? Oui, M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Je vous remercie d'avoir beaucoup de patience avec
moi, Mme la Présidente.
M. Fréchette: Non, mais c'est agréable, très
agréable.
La Présidente (Mme Juneau): Cela va soi.
M. Bisaillon: Bon. L'article 83, c'est à cet endroit que,
normalement, je devrais présenter l'amendement que le ministre
attend sûrement. Je pense que je ne le ferai pas. Les discussions
qui ont eu lieu depuis deux jours m'indiquent que, sur ce sujet, la position du
ministre et de ses collègues ministériels est immuable.
J'ai cru comprendre aussi qu'il n'y avait pas possibilité de
faire étudier sérieusement l'application du système
actuel. L'amendement que j'aurais pu faire ici, c'était pour indemniser
les dommages corporels sous forme de rente à vie et de remplacer tout
l'article 83 par un système de rente viagère. Si je l'avais fait,
on comprendra tout de suite, à partir des propos que le ministre a tenus
tantôt, le sort qui aurait été réservé
à cet amendement. Comme on est tous conscients de cela, je ne vois pas
pourquoi on perdrait du temps dans la procédure.
Sauf qu'on me permettra, cependant, de donner mon opinion sur l'article
83 et de souligner que, selon moi, le choix que les ministériels font
n'est pas un bon choix. Les ministériels ont une chance unique de doter
les travaileurs et les travailleuses du Québec d'un système
complet. Je ne vois pas pourquoi ils se contentent de rester au centre avec des
demi-mesures. Pourquoi n'iraient-ils pas plus loin et ne
décideraient-ils pas, avant de partir - parlons-nous sérieusement
- de laisser au moins cela en gage aux travailleurs et aux travailleuses du
Québec. Il me semble que c'est une chose dont on devrait tenir
compte.
M. Fréchette! Ce n'est pas la meilleure façon de
gagner votre objectif.
M. Bisaillon: Pardon?
M. Fréchette: Ce n'est pas la meilleure façon de
gagner votre objectif.
M. Bisaillon: Je tiens juste à dire au ministre que ce
n'est pas pour moi. Ce n'est pas mon objectif, et peut-être que pour
rester, cela prendrait des choses plus importantes que ce qu'il y a dans le
projet de loi. Peut-être qu'un projet de loi amélioré
permettrait de ne pas partir. Il faudrait peut-être tenir compte de cela.
Depuis le début, on entend parler des coûts. Si on parlait des
gains. Je suis tanné d'entendre parler des coûts. Cela peut
être quoi, les coûts? Il y a les coûts pécuniaires, il
y a peut-être aussi des coûts politiques et des coûts
sociaux. Si on en parlait un peu. Je trouve qu'on ne tient pas compte de cela
du tout. On essaie d'équilibrer en bon gestionnaires à la toute
dernière minute. Je trouve que. c'est une gestion qui arrive bien tard.
Il me semble que, tout à coup, on essaie de donner l'image de bons
gestionnaires qui mesurent, qui évaluent chacune des mesures et chacun
des articles du projet de loi. Je trouve que cela ne répond pas à
l'objectif. L'objectif premier, qu'on dilue de plus en plus, c'était la
réparation des lésions professionnelles et des
conséquences qu'elles entraînent pour les
bénéficiares. C'était l'objectif de la loi. Pour atteindre
cet objectif, on devrait viser ce qu'il y a de mieux et ne pas se contenter du
moins bien.
Or, il est clair que le régime proposé, dans sa partie
concernant l'indemnité pour dommages corporels est une diminution par
rapport au texte actuel de la loi pour un bon nombre de travailleurs et de
travailleuses accidentés. Je trouve qu'on est plus soucieux des
arguments qu'apporte le député d'Outremont quant au coût
pour les employeurs. Je ne dis pas que le député d'Outremont n'a
pas raison de mettre de l'avant ce genre d'argument et cette
préoccupation des employeurs. Je dis seulement que je mets de l'avant
une autre chose. Il me semble que ce serait le temps pour les
ministériels de faire un choix entre ces deux choses. Quel est le type
d'argument qu'on va privilégier? Si j'utilisais actuellement le ton que
le député d'Outremont a utilisé sur l'article 75... Il n'a
pas fait cela lontemps, cela a pris trois minutes. Il a dit rapidement trois
raisons et il a terminé en disant: Moi, je voterais contre. Tout
à coup, on s'est retrouvé avec l'article 75 suspendu... Oui, bien
sûr. Peut-être que c'est une question de crédibilité
-je ne veux rien enlever au député d'Outremont quant à sa
crédibilité - mais c'est peut-être aussi une question de
crédulité. Je trouve qu'on a attaché beaucoup d'importance
rapidement à une intervention. Si je prenais le même ton, juste
pour trois minutes, et que je vous disais: Moi, je voterais contre, est-ce que
cela aurait le même effet? La crédibilité ne serait
peut-être pas la même, mais la crédulité... Il me
semble que vous ne répondez pas aux objectifs que vous poursuivez ou que
vous annoncez. Cela n'y répond pas du tout.
De toute façon, je ne peux pas voter ici, mais en Chambre je peux
voter. Il y a des amendements... On retournera en Chambre avec le projet de loi
quand on l'aura étudié article par article. Devant la population,
cela peut revenir, les amendements. Même si je ne le fais pas maintenant,
ils pourraient toujours revenir. Ce n'est pas de cela que je parle. Je ne parle
pas de procédure. Je parle de décider, finalement, d'essayer de
donner le meilleur plutôt que le passable. Cette démonstration,
autant le député de Viau que d'autres députés dans
cette commission l'ont faite: Globalement, pour un bon nombre de travailleurs -
globalement, je dis - il y a une diminution par rapport au régime
actuel. On a parlé de ceux qui avaient plus de 65 ans avec une
incapacité totale permanente, pour
autant qu'ils vivent un bon bout de temps après 65 ans. Le
député de Viau a parlé des travailleurs au salaire
minimum. Il y a toute une série de choses qu'on a soulevées
depuis le début de l'étude du projet de loi. Pour un bon nombre
de ces choses, on attend encore des réponses. Je dis que si vous
décidez de maintenir cela, sachant que cela va représenter moins,
globalement, au moins on s'attendrait à ce que vous donniez des
réponses favorables au reste. Or, on n'a pas de garanties sur le reste
non plus.
Mme la Présidente, je ne propose pas d'amendement. Je ne vous
ferai pas perdre de temps sur des amendements ou sur de la procédure,
mais je dis que la question de fond reste là quand même. Quand on
va avoir dépassé ces articles, le choix gouvernemental va
être fait. Le reste, on va l'étudier en fonction du choix
gouvernemental jusqu'au moment où on arrivera au deuxième
pôle de la loi, et là on pourra essayer de nouveau de faire une
discussion de fond et de principe. Pour l'instant, il me semble que les
ministériels ont fait leur choix, qu'ils ont décidé des
principes et qu'ils sont immuables là-dessus. Je leur demande quand
même une dernière fois d'évaluer les conséquences
des choix qu'ils ont faits, de les évaluer en termes sociaux, en termes
politiques aussi. Il me semble qu'il ne faut pas se cacher de cela non plus.
C'est un geste politique qu'on pose quand on fait une loi. Alors, il y a des
conséquences politiques aussi et on doit en tenir compte pour les
personnes qu'on veut protéger ou qu'on dit vouloir protéger.
La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le
député. M. le ministre.
M. Fréchette: Oui, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): J'imagine que vous avez
quelque chose...
M. Fréchette: Enfin, le député de
Sainte-Marie vient de faire des remarques d'ordre général qui
visent l'ensemble du projet de loi. Il nous a instamment priés de songer
sérieusement à la situation, dit-il, avant de partir.
Je comprends que le rôle d'un député de
l'Opposition, comme, d'ailleurs, le rôle d'un député
indépendant, est effectivement d'essayer de scruter les lois dans tous
les détails pour faire en sorte qu'elles reçoivent la meilleure
application possible et qu'elles puissent atteindre les objectifs pour lesquels
elles sont faites, pour lesquels elles sont adoptées.
Ce rôle, qui est difficile, qui est ingrat, qui est laborieux,
fait cependant en sorte que lorsqu'on procède à
l'évaluation d'un projet de loi, on ne retient que les choses qui
paraissent négatives. Je n'ai pas entendu, par exemple, dans la
dernière argumentation du député de Sainte-Marie, qu'il
faut considérer que le droit de retour au travail qui est inscrit dans
la loi est une amélioration sensible par rapport à la situation
actuelle. C'est une amélioration tellement sensible - on l'a
démontré tout à l'heure - que, dans certains cas, c'est
l'équivalent de la sécurité d'emploi pour des gens qui,
autrement, seraient complètement démunis et n'auraient à
leur disposition aucun moyen de continuer à gagner leur vie. De cela, on
ne parle pas, bien sûr. Je ne m'attends pas non plus qu'on fasse
l'apologie de la loi dans ce sens. Mais il me semble que, si on veut être
objectif jusqu'à la limite, c'est le genre de choses à
côté desquelles il ne faut pas passer. (23 h 45)
Le député de Sainte-Marie ne nous dira pas, dans
l'évaluation qu'il fait de la loi, qu'on a retenu les demandes qui nous
ont été soumises, par toutes les associations syndicales, par
toutes les associations de représentants de travailleurs
accidentés, d'inscrire dans la loi un mécanisme de choix du
médecin traitant et de faire en sorte que l'expertise médicale de
ce médecin traitant soit l'instrument prioritaire à partir duquel
on va indemniser. Je ne ferai pas le reproche au député de
Sainte-Marie de ne pas indiquer ce genre de situation, mais la
vérité a ses droits, et je pense qu'on doit le souligner. Je ne
m'attendais pas à ce que le député de Sainte-Marie nous
dise que nous répondons au voeu de tous les intervenants travailleurs
lorsque nous inscrivons dans la loi le droit à la réadaptation.
Bien sûr, il ne fallait pas espérer que le député de
Sainte-Marie nous le signale. Et pourtant, cela procède de
revendications fermes, formelles, unanimes de la part de toutes les
associations de travailleurs, malgré ce que nous leur avons
signalé à ce moment-là en leur disant. Soyez conscients du
fait que si on retrouve dans la loi le principe du droit à la
réadaptation, de même que le détail des programmes de
réadaptation, vous devrez vous promener devant tous les tribunaux
pendant un certain nombre d'années pour obtenir une
interprétation finale de la signification de la loi à
l'égard de la réadaptation. Les travailleurs nous ont dit: Nous
préférons vivre avec cette difficulté plutôt que de
laisser à la Commission de la santé et de la
sécurité du travail la discrétion qu'elle exerçait
jusqu'à maintenant, à partir d'une réglementation qu'elle
bâtit elle-même et qui est interprétée de
façon différente d'une région à une autre. Nous
préférons de beaucoup faire face à ce genre de
difficulté plutôt que de continuer d'évoluer dans la
situation actuelle. Bien sûr, je ne m'attendais pas à ce que le
député de Sainte-Marie soulève cet aspect du dossier et de
la loi.
Il n'allait pas non plus très
certainement signaler un obstacle majeur sur lequel on a constamment
attiré notre attention pendant onze jours de commission parlementaire,
pendant l'audition de 42 groupes d'intervenants qui nous ont dit: Cette
Commission de la santé et de la sécurité du travail a des
pouvoirs réglementaires qui sont trop étendus, d'une part, et qui
sont trop vastes, d'autre part. Est-ce qu'il existe des possibilités de
faire en sorte que ces pouvoirs réglementaires soient diminués et
qu'ils ne soient limités qu'au strict nécessaire? Il y a un
article de la loi qui ramène les 26 pouvoirs réglementaires qui
existe dans la loi actuelle a 5. Nous avions, dans la première version
du projet de loi 42, retenu un sixième pouvoir réglementaire de
la nature d'une clause omnibus que nous avons finalement retiré. II n'y
a donc plus que cinq domaines où le pouvoir réglementaire existe,
et c'est strictement et uniquement parce qu'il n'y a vraiment pas moyen de
faire autrement.
Le député de Sainte-Marie a l'air de procéder
à l'évaluation de la loi à partir du seul critère
économique, du seul critère pécuniaire. Il me paraît
tout à fait important de tenir compte de l'un et l'autre des aspects
dont je viens de parler.
Quant à l'autre aspect de la question du député de
Sainte-Marie, je lui dirai essentiellement que quoi qu'il arrive, tant au
niveau de ce projet de loi que de la politique de ce gouvernement en
matière de santé et de sécurité, je serai toujours
fier de proclamer que ce gouvernement a fait un bout de chemin
considérable en cette matière. Je prendrai deux minutes pour
résumer le chemin qui a été fait. Ce sont des
événements que le député de Sainte-Marie a
vécus lui-même et avec lesquels, sans doute, à bien des
égards, il a été d'accord. Rappelons-nous que l'objectif
de procéder à la réévaluation de toutes les
politiques de santé et de sécurité a été
inscrit en 1978 dans un livre blanc, un livre blanc a deux volets. Le premier
volet précisait les objectifs du gouvernement d'adopter un projet de loi
qui contiendrait des principes de prévention des accidents du travail et
des maladies professionnelles. Cela a été la loi 17 qui a
été adoptée et qui a retenu ces principes de
prévention.
Le député de Sainte-Marie va se rappeler mieux que moi que
la loi 17 a été contestée beaucoup plus
sérieusement que la loi 42 et par un nombre considérable
d'intervenants. II y avait des manifestations devant ce parlement. Ce salon
rouge était constamment rempli de gens qui ne voulaient pas la loi
17.
Allez demander à ces mêmes personnes, autant du
côté syndical que patronal, quelle serait leur réaction si
le gouvernement prenait la décision de retirer la loi 17, d'abolir la
Commission de la santé et de la sécurité du travail,
d'abolir les mécanismes de prévention qu'on retrouve dans cette
loi.
Ceux-là mêmes qui la contestaient avec le plus de vigueur,
le plus de fermeté, sont ceux aujourd'hui qui nous disent: Ne la retirez
pas, ne retraitez pas à l'égard de cette loi 17. On nous dit: Les
objectifs de la loi 17 n'ont pas été atteints, parce que les
accidents n'ont pas diminué.
Toute personne, Mme la Présidente, toute personne objective en
cette matière va convenir qu'un régime de prévention des
accidents du travail ne peut être efficace qu'après une dizaine
d'années de mise en application. Déjà, il y a
au-delà de 800 comités de santé et de
sécurité qui sont formés, qui marchent, qui fonctionnent
dans les entreprises. Avant de partir, s'il faut partir, je serai fier des
actions posées par ce gouvernement en cette matière.
Ce que nous sommes en train d'étudier actuellement constituerait
le deuxième et dernier volet de la politique globale en matière
de santé et de sécurité, le volet de la
réparation.
Le député de Sainte-Marie sait très bien, avec
l'expérience qu'il a, que surtout en cette matière, compte tenu
de la culture qui existe dans ces milieux de travail, le gouvernement doit
jouer un rôle d'arbitre. C'est pour cela que l'on parle de choix depuis
hier. C'est pour cela qu'on parle de choix. Il doit effectivement faire ses
choix, il doit effectivement jouer ce rôle d'arbitre, il doit
effectivement tenter de faire adopter des lois qui, dans son évaluation,
sont celles qui répondent le plus adéquatement aux principes de
l'équité, aux principes de la justice.
C'est ce que nous essayons de faire dans la loi 42. C'est certain
qu'elle n'est pas parfaite. C'est certain qu'elle ne répond pas à
toutes les demandes qui nous ont été soumises. Mais nous sommes
honnêtement convaincus, Mme la Présidente, que ce que nous sommes
en train de faire est pour le mieux-être de tous ceux qui sont
visés par cette loi.
Le député de Sainte-Marie nous dit: Vous êtes des
gestionnaires de dernière minute. Il y a maintenant un peu plus de deux
ans que je suis au ministère du Travail. Est-ce que je peux simplement
vous rappeler, pour parler de la gestion de dernière minute, qu'il ne
s'est pas passé une semaine, depuis deux ans et trois mois maintenant,
sans que nous ne consacrions deux jours, trois jours, par semaine pour
étudier ce projet de loi?
Gestionnaires de dernière minute en matière de
santé et de sécurité? Il y a plus de six ans maintenant
que ce gouvernement est préoccupé par le phénomène
et qu'il a accompli des choses dont il peut être fier et qu'aucun autre
gouvernement n'avait réussi à réaliser.
Mme la Présidente, je l'ai dit lorsqu'on
a commencé nos travaux, je l'ai répété tout
au cours de nos travaux: la loi 42 n'est pas faite pour celui qui vous parle;
elle n'est pas faite pour les députés autour de cette table. Elle
est faite pour une clientèle très spécifique. Mais qu'on
me dise que la clientèle n'en veut pas, je serai très facilement
disposé à vivre avec cela et à garder le statu quo. Je
n'aurai aucune hésitation. Si personne n'en veut, nous n'allons pas la
rentrer à coups de couteau dans la gorge.
Très clairement, si l'on est en train de nous exprimer que le
statu quo, sans droit de retour au travail, sans le choix du médecin
traitant, sans le droit a la réadaptation, sans disparition des pouvoirs
réglementaires, si on est en train de me dire que c'est ça qu'on
veut, que c'est ce que les milieux de travail désirent, écoutez,
vous n'aurez pas besoin de me faire de longues démonstrations pour que
je me rende à une demande de cette nature. La loi n'est pas faite pour
nous encore une fois. Nous essayons de la faire pour améliorer la
situation des gens qui vivent avec un régime qui a plus de 50 ans
d'existence maintenant. C'est ça l'objectif que nous essayons
d'atteindre. Nous n'avons jusqu'à maintenant bousculé personne.
Nous n'avons pas l'intention de bousculer qui que ce soit. Si, avant de partir,
nous ne l'adoptions pas, bien, il arrivera ce qu'il arrivera. Si c'est
çn les objectifs que l'on vine, moi je suis disposé à
vivre avec. Si l'on doit partir, un autre gouvernement prendra les dispositions
nécessaires pour régler le problème si nous on est pas
capables de le régler parce que les intervenants ne le veulent pas.
Mme la Présidente, je pense que c'était utile de faire ce
genre de remarques à ce stade-ci, à partir des commentaires du
député de Sainte-Marie. Nous sommes, quant à nous, tout
à fait disposés à continuer avec autant de sérieux
que possible, avec autant d'attention que possible. Je signale que la
contribution du député de Sainte-Marie et celle des
députés de l'Opposition ont permis, jusqu'à ce jour en
tout cas dam mon évaluation, de procéder à un certain
nombre de changements qui améliorent des situations. Je suis quant
à moi disposé à continuer dans le même sens sans,
encore une fois, bousculer ni des personnes ni des événements. Si
ce travail honnête que nous avons commencé devait nous amener
à l'adoption d'une loi qui améliorerait la situation des
personnes à qui elle s'adresse, nous pourrions, je pense, ensemble, nous
dire que nous aurions accompli le travail pour lequel nous sommes ici. Nous
aurions très certainement, après cela, la satisfaction d'avoir
accompli notre devoir.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Champlain. Vous avez une minute.
M. Gagnon: Merci Mme la Présidente. Je veux tout
simplement vous annoncer que demain - parce qu'on va revenir demain
-n'admettant pas les propos du député de Sainte-Marie, en ce qui
me concerne - je présume que cela doit être vrai pour d'autres -
je voudrais avoir l'occasion de répliquer. J'ai droit è vingt
minutes demain matin. Je voudrais avoir l'occasion de répliquer à
ces propos-là parce que je ne pense pas qu'un seul député
ait le monopole de la vérité autour de cette table.
La Présidente (Mme Juneau): C'est d'accord M. le
député de Champlain. Étant donné que nous avons
adopté l'amendement de l'article 83, est-ce qu'on pourrait adapter
l'article 83 tel qu'amendé?
M. Bisaillon: Non, Mme la Présidente. Il y a une
intervention à ce moment-ci qui est déjà prévue et
j'avais...
M. Gagnon: Je retire mon intervention. Je me reprendrai.
M. Bisaillon: Alors, c'est moi qui ai la parole?
La Présidente (Mme Juneau): II est minuit.
M. Bisaillon: Donc, demain matin.
La Présidente (Mme Juneau): La commission ajourne ses
travaux sine die.
Vous conservez votre droit de parole. C'est d'accord.
(Fin de la séance à 23 h 58)