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Version finale

32e législature, 5e session
(16 octobre 1984 au 10 octobre 1985)

Le mercredi 5 décembre 1984 - Vol. 28 N° 8

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi 42 - Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles


Journal des débats

 

(Onze heures dix-huit minutes)

La Présidente (Mme Juneau): À l'ordre, s'il vous plaît!

Après avoir constaté le quorum, je déclare la séance ouverte. La commission permanente de l'économie et du travail reprend ses travaux pour procéder à l'étude article par article du projet de loi 42, Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. Mme Dougherty (Jacques-Cartier) est remplacée par M. Maltais (Saguenay); M. Kehoe (Chapleau) est remplacé par M. Paradis (Brome-Missisquoi) et M. Maciocia (Viger) est remplacé par M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges).

La Présidente (Mme Juneau): Merci. Nous étions rendus à l'article 53. L'amendement avait été adopté hier et l'article 53 est maintenant en discussion.

M. Fréchette: Voilà. Il y a cinq articles qui ont été laissés en suspens hier. Je suggère qu'on continue de les laisser en suspens pour le moment jusqu'à ce que les renseignements qu'on a demandés nous parviennent et qu'on continue la discussion sur l'article 53. Les articles 47, 48, 50, 51 et 52, en suspens. Article 53?

La Présidente (Mme Juneau): L'article 53 n'est pas encore adopté.

M. Fréchette: L'article 53 est en discussion.

La Présidente (Mme Juneau): Oui, c'est exact. M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Est-ce que je pourrais poser une question au ministre? Dans l'argumentation que j'avais développée hier soir au moment de l'article 53, j'avais soulevé toute la question de la possibilité d'étudier la poursuite de la pension privée ou du régime privé de retraite que les travailleurs pouvaient avoir précédemment. Je sais que ça pourrait se . régler éventuellement en ajoutant un article à l'article 221. Si j'avais ça, je trouve que ça rendrait un peu moins odieuse la portée de l'article 53, en tout cas pour un certain nombre de personnes. Est-ce qu'il serait possible de rediscuter de la question dont on parlait hier, à l'article 221, compte tenu des renseignements que le ministre aura à ce moment-là?

M. Fréchette: Oui, je suis tout à fait disposé à ce que la discussion reprenne au stade de l'article 221. D'ailleurs, il m'apparaissait que c'est précisément à cet endroit que, fondamentalement, la discussion peut se faire. Je n'ai aucune objection à ce qu'on laisse la question en suspens pour la reprendre à l'article 221.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que ça voudrait dire qu'on laisse cet article en suspens?

M. Fréchette: Non. On peut, cependant, continuer la discussion sur l'article 53. Je ne comprends pas, dans la demande du député de Sainte-Marie, qu'il souhaiterait qu'on laisse en suspens l'adoption de l'article 53.

M. Bisaillon: Je n'ai pas proposé cela. M. Fréchette: Alors, c'est ça.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 53? Est-ce que l'article 53 tel qu'amendé est adopté?

M. Bisaillon: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): L'article 54?

M. Bisaillon: C'est dommage qu'on ne puisse pas dire que c'était sur division.

M. Fréchette: Tenons donc pour acquis, Mme la Présidente, que chaque fois cette remarque-là va vous être soumise.

La Présidente (Mme Juneau): D'accord.

M. Fréchette: À l'article 54, je veux simplement vérifier s'il y a des amendements. Il y a un amendement?

La Présidente (Mme Juneau): Je ne pense pas. L'amendement de l'article 54 se lit comme suit: Remplacer dans la troisième ligne du paragraphe 3, le nombre "65" par le

nombre "64".

M. Fréchette: Mme la Présidente, on vient de vous remettre un papillon qui est strictement un amendement de concordance pour remplacer le chiffre "65" par le chiffre "64". Quant au reste, il s'agit de prévoir les conditions en vertu desquelles le paiement de l'indemnité cesserait. Il y en a effectivement trois qui sont prévues à la loi, soit: le moment où le travailleur redevient capable d'exercer son emploi, avec les réserves que l'on retrouve à l'article 45; le décès du travailleur et, troisièmement, après son 68e anniversaire de naissance, le tout conformément à ce qu'on vient d'adopter à l'article 53.

La Présidente (Mme Juneau): Oui, M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: J'ai des questions de clarification avant de faire des interventions. L'article 54 prévoit l'extinction du droit à l'indemnité, premièrement, "lorsque le travailleur redevient capable d'exercer son emploi." Cela réfère à l'article 45 qu'on a discuté hier, sauf qu'à l'article 45, lorsqu'on a discuté de cela hier, il me semble que vous nous expliquiez que cela durait au moins un an après.

M. Fréchette: "Sous réserve de l'article 45." C'est dans l'article 45 que l'on retrouve la disposition à laquelle le député de Sainte-Marie nous réfère. Alors le paragraphe 1 de l'article 54 prévoit que l'indemnité de remplacement du revenu cesse lorsque le travailleur redevient capable, sous la réserve que l'on retrouve à l'article 45, donc conditionnellement à l'application de l'ensemble de l'article 45.

M. Bisaillon: D'accord. Deuxième question...

La Présidente (Mme Juneau): M. le député, je m'excuse. Avant d'aller plus loin, est-ce qu'on ne pourrait pas adopter l'amendement de l'article 54 étant donné que c'est une concordance avec l'article 53? Après cela, on pourrait aller de l'avant avec l'article 54. Est-ce que vous êtes d'accord, M. le député?

M. Fréchette: D'accord, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): Adopté.

M. Bisaillon: Deuxième question, Mme la Présidente.- Lorsqu'on a discuté, hier, de l'exemple du travailleur qui continuait à travailler après 65 ans et qui avait un accident de travail à 66 ou 67 ans, vous m'aviez dit que, dans le cas d'un travailleur qui aurait un accident de travail à 67 ans, il aurait l'indemnité payée la première année et après on appliquerait les mêmes barèmes du 25%, 50% et 75%. Est-ce que le troisième paragraphe de l'article 54 n'empêche pas l'application de ce dont vous me parliez hier?

M. Fréchette: J'ai l'impression qu'on doit arriver à la conclusion tout à fait inverse à ce qui a l'air d'être l'opinion du député de Sainte-Marie. C'est tout à fait le contraire. Le troisième paragraphe de l'article 54, il est là très précisément pour donner effet à cette politique dont on parle, c'est-à-dire l'application d'une indemnité lorsque l'accident arrive après l'âge de 65 ans, pour que cet article reçoive sa pleine application et que l'objectif soit atteint. Je ne sais pas ce qu'il y a dans le texte du paragraphe 3 de l'article 54 qui amène le député de Sainte-Marie à cette conclusion, mais, selon ma lecture à moi, c'est à la conclusion tout à fait contraire qu'il faut aller.

M. Bisaillon: C'est au 68e anniversaire ou lorsqu'il a eu un accident alors qu'il était âgé d'au moins 64 ans...

M. Fréchette: C'est cela.

M. Bisaillon: ..."4 ans après la date du début de son incapacité d'exercer son emploi." Cela va.

M. Fréchette: C'est cela.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article ' 54?

M. Cusano: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): L'article 54 est adopté tel qu'amendé.

M. Bisaillon: Cela va.

La Présidente (Mme Juneau): L'article 55?

M. Fréchette: À l'article 55, il n'y a pas d'amendement, Mme la Présidente. Essentiellement et rapidement, ce que cet article prévoit - je signale qu'il est de droit nouveau, que cela n'existe pas dans la loi actuelle - c'est de garantir au conjoint du travailleur décédé un certain soutien financier pendant une période de trois mois consécutifs au décès du travailleur. Par rapport à l'état actuel des choses, il me semble que c'est une amélioration pour le bénéfice du conjoint du travailleur décédé.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: Quelques questions pour comprendre un peu mieux ce que veut dire l'article 55. Si la personne qui est absente de son travail décède pour des raisons étrangères - pour quelque raison que ce soit, on n'a pas besoin de les énumérer - il y aurait un paiement de trois mois, d'après ce que je comprends, si elle était en train de recevoir une indemnité de remplacement du revenu. Est-ce cela?

M. Fréchette: C'est cela. Exactement.

M. Cusano: Cette indemnité continue pendant trois mois...

M. Fréchette: Trois mois pour le conjoint. C'est cela.

M. Cusano: ...pour le conjoint. Comment la commission est-elle avisée du décès de l'individu? Je pense qu'un des problèmes qu'on avait soulevés concernant ces décès, c'est qu'à un certain moment, pas par mauvaise foi,.. Pardon?

M. Fréchette: Le cas de Longueuil.

M. Cusano: Non, il y avait plusieurs cas.

M. Fréchette: En tout cas, celui-là en particulier.

M. Cusano: Y a-t-il des moyens qui sont pris? On ne demande pas à la commission de vérifier si toutes les personnes qui reçoivent des indemnités sont décédées régulièrement.

M. Fréchette: En fait, la question que soulève le député de Viau est importante, Mme la Présidente, et les moyens pour arriver à éviter ce genre de difficulté ne sont pas légion. Celui qui est utilisé par la Commission de la santé et de la sécurité est de la nature d'une entente avec l'institution bancaire avec laquelle la commission fait affaires. Cette entente prévoit que l'institution bancaire, qui, de toute évidence, va être informée du décès de l'accidenté, va cesser d'honorer les chèques que la Commission de la santé lui envoie lorsque arrivera ce décès. Cela, c'est une façon de pouvoir connaître l'état de fait du décès d'un accidenté. (11 h 30)

Mme la Présidente, le processus qui est observé dans une situation comme celle-là est le suivant: la Commission de la santé et de la sécurité du travail va émettre le chèque d'indemnité payable à l'ordre de l'accidenté. Évidemment, celui-ci va le recevoir et devra, normalement, le négocier, c'est-à-dire l'endosser et, ensuite, le présenter à sa caisse populaire ou à sa banque pour recevoir les sommes qui lui sont dues ou alors le déposer à son compte de banque purement et simplement. Dès lors, donc, qu'il y a endossement du chèque, la commission, quant à elle, est assurée que les montants qu'elle a payés, s'ils étaient payés frauduleusement à cause d'un décès, lui seront remboursés.

Si, par ailleurs, l'accidenté est décédé -ce serait le cas prévu par l'article 55 - il n'y aura effectivement pas d'endossement et le chèque ne sera présenté nulle part pour être négocié. En conséquence, cela va être un des éléments qui permettront à la Commission de la santé et de la sécurité du travail de savoir que l'accidenté est décédé.

Je présume, également, qu'il doit y avoir un nombre assez considérable de cas où la commission est informée par la famille ou par l'association syndicale à laquelle appartenait le travailleur décédé ou, enfin, par tous les autres moyens d'information qui sont normaux. L'employeur, par exemple, peut aussi informer la commission que son salarié accidenté est décédé.

Il y a aussi, dans la loi, une disposition - on va le voir plus tard - qui oblige les gens qui reçoivent des indemnités à informer la commission d'un changement de statut. Dans le cas du décès d'un accidenté, c'est le conjoint qui se retrouve dans un état de changement de statut. Au lieu d'être conjoint et d'être admissible aux droits prévus par la loi, cette personne devient une personne à charge; donc, il y a un changement de statut et la loi l'oblige à informer la commission du décès du travailleur accidenté.

M. Cusano: Si je comprends bien, c'est que les banques, aussitôt qu'un chèque n'est pas endossé, en avisent la CSST.

M. Fréchette: Si le chèque n'est pas endossé, de toute évidence il n'est pas négocié non plus à l'institution bancaire de l'accidenté, c'est clair que la banque va informer la Commission de la santé et de la sécurité du travail, à un moment donné, que tel chèque qui a été émis à telle date, à l'ordre de tel individu, n'a pas encore été négocié.

M. Cusano: Cela va. Selon les statistiques de la CSST - je ne demanderai pas le chiffre précis - combien de personnes décèdent pendant qu'elles reçoivent des indemnités?...

M. Fréchette: Vous allez comprendre qu'il n'y a pas de règle absolue à cet égard. Cela peut, de toute évidence, varier d'une année à l'autre. Maintenant, si le député de Viau me demande de lui faire une moyenne, disons, par exemple, pour les cinq dernières années, je suis bien disposé à essayer d'obtenir ce renseignement-là. Mais il

va convenir avec moi qu'il n'y a rien d'absolu dans cette situation.

M. Cusano: Est-ce que le processus est le même lorsqu'un individu qui a droit à l'indemnité de remplacement du revenu se trouve à l'étranger? Y a-t-il des ententes avec différents pays? Justement, je sais qu'il y a une entente, si je ne me trompe pas, entre le Québec et l'Italie. Si quelqu'un retourne en Italie, par exemple, et qu'il est en train de recevoir une indemnité de remplacement du revenu, il continue à la recevoir. Quel est le mécanisme de ce côté?

M. Fréchette: Deux solutions sont possibles, Mme la Présidente. D'une part, comme vient de le dire le député de Viau, des ententes avec des gouvernements étrangers peuvent être conclues à n'importe quelle époque et pour n'importe quels sujets à la condition, évidemment, que la loi soit respectée. Deuxièmement - on me dit que cela se produit dans certains cas - pour quelqu'un qui quitterait le Québec pour s'en aller dans un pays étranger et qui, au moment de son départ, est bénéficiaire d'une indemnité de remplacement du revenu ou, dans l'état actuel des choses, d'une rente viagère, il y a possibilité de procéder à capitaliser la rente. Maintenant, l'article 128, deuxième paragraphe, prévoit ce genre de situation, si je ne m'abuse. Voilà.

Je peux aussi donner tout de suite au député de Viau l'information qu'il me demandait tout à l'heure. Il y aurait une moyenne d'environ 125 bénéficiaires qui décéderaient chaque année.

M. Cusano: C'est 125 au Québec. M. Fréchette: Oui, oui, bien sûr.

M. Cusano: On ne parle pas de ceux qui sont à l'étranger.

M. Fréchette: Ceux qui sont à l'étranger, non. Pour ceux-là, il va se passer l'un ou l'autre des deux phénomènes dont on vient de parler.

M. Cusano: Quelles sortes d'ententes, justement, existent présentement entre la CSST - je prends l'exemple de l'Italie parce que beaucoup de gens dans mon comté retournent là-bas pour une période de temps - et les pays étrangers, comme la France ou d'autres?

M. Fréchette: Mme la Présidente, la meilleure réponse que l'on pourrait donner au député de Viau, ce serait de procéder au dépôt de l'entente écrite, ce que nous pourrions faire dès cet après-midi. S'il était suffisamment patient pour nous attendre jusque-là, nous procéderions au dépôt de cette entente.

M. Cusano: Oui, c'est bien. Je ne voudrais pas suspendre l'article 55, Mme la Présidente. Selon les informations que je possède - je peux me tromper; alors, j'aimerais bien qu'on m'informe de ce côté -les paiements faits en Italie sont effectués aux banques italiennes, aux banques reconnues en Italie. Est-ce que c'est cela?

M. Fréchette: Ce sont des questions importantes sans doute, mais tellement particularisée, Mme la Présidente, qu'entreprendre ici de donner des réponses, ce serait un peu risqué, dans le sens qu'il faudrait voir au texte ce que l'entente prévoit.

M. Cusano: Oui. Je voudrais bien que le ministre...

M. Fréchette: De toute façon, une chose est absolument certaine, c'est que si l'on se réfère à une entente, de toute évidence, cela fait l'affaire de tout le monde. Tout le monde est satisfait si on signe une entente.

M. Cusano: Oui, mais l'entente ne veut pas nécessairement dire qu'il y a des moyens de contrôle. Je voudrais qu'on soit très clair sur cet article. Sur le principe de continuer l'indemnité pendant trois mois à la veuve ou aux enfants de la personne qui reçoit une indemnité du remplacement de revenu, je suis complètement d'accord. Peut-être me direz-vous que c'est une question qui relève de la CSST et de son fonctionnement, mais je me préoccupe des mesures de contrôle justement pour que ce paiement soit fait à des personnes qui y ont droit, c'est tout. Si la personne est à l'étranger, par exemple, est-ce qu'elle occupait un emploi à l'étranger tel quel? Est-elle en train de recevoir une indemnité de remplacement du revenu chez nous? En même temps, si elle se trouve un autre emploi là-bas, ça devient un peu rentable, le système. Lorsqu'on arrive à un décès, c'est une autre affaire, mais c'est toute cette question de contrôle pour ceux qui se trouvent à l'extérieur, même si ce n'est pas un chiffre énorme.

Premièrement, j'aimerais bien prendre connaissance de ces mesures de contrôle qui existent et est-ce que le ministre permettrait - je n'ai aucunement l'intention de suspendre l'article 55 - au moment où cesera déposé, un peu de temps pour discuter de l'entente?

M. Fréchette: Je n'ai, évidemment, aucune espèce d'objection, Mme la Présidente, à refaire la discussion à un autre moment, particulièrement au moment où nous serons en possession du document. De surcroît, lorsque nous arriverons aux articles qui prévoient la signature de semblables

ententes, on pourra, de toute évidence, faire la discussion.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 55 est adopté?

M. Fortier: Adopté. M. Cusano: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): Adopté. L'article 56? Nous avons un amendement. C'est marqué article 56 et 57, M. le ministre.

M. Fréchette: Oui, bien, c'est ça.

La Présidente (Mme Juneau): Cela veut dire les deux ensemble.

M. Fréchette: C'est pour les renvoyer ailleurs.

Le Secrétaire: On peut dire qu'il est convenu d'étudier simultanément les articles 56 et 57.

M. Bisaillon: À l'article 170? M. Fréchette: C'est cela.

M. Bisaillon: Ce n'est pas nécessaire de faire un amendement à 56. Je veux dire que ce n'est pas un amendement à l'article.

M. Fréchette: Non.

M. Bisaillon: II s'agit de reporter l'article plus loin et de le renuméroter ultérieurement. Donc, on pourrait le suspendre.

M. Fréchette: Les supprimer, purement et simplement, à cet endroit-là.

M. Bisaillon: Ou supprimer l'article 56.

M. Fréchette: Les articles 56 et 57. C'est ce que propose, d'ailleurs, l'amendement, de supprimer les deux articles pour les retrouver dans le chapitre des programmes de réadaptation.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que je vais lire l'amendement, à ce moment-là?

M. Bisaillon: Le programme de réadaptation, article...

La Présidente (Mme Juneau): Je vais lire l'amendement, dans ce cas-là. "Supprimer la sous-section 2 de la section I du chapitre III, comprenant les articles 56 et 57." Est-ce que l'amendement est adopté?

M. Bisaillon: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): L'article 58?

Paiement par l'employeur M. Bisaillon: II y a un amendement.

La Présidente (Mme Juneau): II y a un amendement aussi. L'amendement à l'article 58 se lit comme suit: Ajouter à la fin l'alinéa suivant: "L'employeur verse ce salaire au travailleur à l'époque où il le lui aurait normalement versé."

M. le ministre.

M. Fréchette: Je vois le député de Frontenac qui demande la parole. Je me préparais à donner quelques explications très brèves.

M. Grégoire: Je voulais juste une explication. Peut-être que vous allez la donner; alors, je vais vous laisser aller.

M. Fréchette: Dans l'état actuel de la loi, Mme la Présidente, il y a une disposition qui prévoit un délai de carence d'une journée avant que l'indemnité débute ou soit payée à l'accidenté. Ce que l'article 58 vise, son objectif, c'est de faire en sorte que ce délai de carence soit éliminé. Dans le cas où un accidenté devrait s'absenter de son travail pour une partie de la journée - il a, par exemple, une coupure ou, enfin, une blessure mineure, mais qui l'oblige quand même à sortir de l'endroit de son travail et à aller à l'hôpital pour un traitement d'urgence rapide; cela prend une demi-journée et il revient l'après-midi à son travail - ce que cet article 58 vise, c'est de faire en sorte qu'il soit indemnisé pour la période de temps pendant laquelle il a été absent, ce qui n'existe pas actuellement pour la première journée. (11 h 45)

L'amendement qu'on vient de soumettre aux membres de la commission fait: également en sorte que cette indemnité lui sera payée en même temps que le prochain salaire qui lui est dû. Je pense que cela résume...

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: C'était juste pour demander une information au ministre sur un mot. On dit: "lui verse son salaire net pour la partie de la journée." Depuis le début, on prend le salaire net ou brut; quand on parle du salaire net, c'est les impôts déduits. Est-ce que c'est encore cela que cela veut dire? Est-ce que, pour une partie d'une journée, on lui verserait cela net?

M. Fréchette: Ce que l'on vise dans

l'article 58, Mme la Présidente, c'est à indemniser l'accidenté exactement de la même façon qu'il aurait été payé s'il eût été au travail. C'est cela, l'objectif de l'article 58 pour cette période de temps qui ne vise que des portions de journée ou possiblement une journée complète, mais uniquement la première journée de la lésion.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: Ce que je veux savoir, par rapport à l'impôt pour cette seule journée, est-ce que c'est le salaire net, impôt déduit?

M. Fréchette: Oui, toutes déductions faites: assurance-chômage, impôt; il y en a une troisième, la Régie des rentes, je pense.

M. Grégoire: Maintenant, si c'est pour une journée, M. le ministre, vous ne trouvez pas que, lorsque cet employé va venir faire son rapport d'impôt à la fin de l'année, cela va entraîner des complications beaucoup plus que...

M. Fréchette: Les déductions sont faites, normalement, quand il va être payé.

M. Fortier: À ce moment, Mme la Présidente, pourquoi parler de salaire net? On serait mieux de dire: lui verse son salaire; c'est le salaire normal. J'ai été président d'une compagnie et on payait le salaire jusqu'à une semaine, mais, à ce moment, c'est le salaire normal. Ce n'est pas le salaire net, c'est le salaire.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Fortier: Le salaire sur la même base qu'il est payé normalement.

La Présidente (Mme Juneau): Excusez. M. le député de Viau.

M. Fréchette: D'abord, il y a une définition du terme "salaire net". Le rationnel qu'il y a derrière cela, c'est que, s'il avait été au travail pendant cette période, il aurait reçu un salaire net aussi, c'est-à-dire un salaire après les déductions normales qui sont faites lorsqu'on est payé pour une semaine de travail.

L'article 61 pourrait peut-être nous aider. Voilà, après déduction des impôts, après déduction de la cotisation à l'assurance-chômage et après déduction de la cotisation au Régime de rentes du Québec, c'est ce qu'il recevrait s'il n'avait pas été victime d'accident, s'il était resté au travail. C'est ce salaire net dont on parle à l'article 58.

M. Grégoire: Sur sa feuille de paie, il va être calculé que l'impôt a été déduit...

M. Fréchette: Bien oui.

M. Fortier: De la même façon.

M. Fréchette: Bien oui, exactement.

M. Grégoire: Pourquoi avez-vous employé le terme...

M. Fortier: Autrement dit, il n'y a aucun changement.

M. Fréchette: Aucun changement. Absolument aucun changement.

M. Fortier: La compagnie pourrait peut-être faire deux chèques, mais ce serait son problème.

M. Fréchette: Le quantum de l'indemnité sera toujours l'équivalent du salaire auquel, normalement, il aurait eu droit.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: Juste quelques explications sur l'article 58. Si je lis l'article 58 avec l'article 59, je voudrais demander au ministre: Ce montant qui est déboursé par l'employeur, est-ce qu'il est recouvrable? Est-ce que la CSST va lui rembourser ce montant?

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: II est très certainement recouvrable pour les quatorze jours, mais pour la première journée...

M. Cusano: Je ne parle pas des quatorze jours, M. le ministre.

M. Fréchette: Je sais, j'ai compris.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: L'information que l'on me donne, Mme la Présidente, c'est que, effectivement, on retrouvera, pour cet article 58, le même mécanisme que celui que l'on retrouve à l'article 59, c'est-à-dire que, s'il devait s'avérer, après constatation médicale, constatation d'autre nature, qu'il n'y a pas, effectivement, de relation de cause à effet entre l'absence et un accident de travail présumé au moment où l'accidenté quitte, il pourrait, effectivement, y avoir l'exercice de la répétition de l'indu.

M. Cusano: Ce n'était pas tout à fait cela, ma question. L'article 59 dit que l'employeur aura à verser le paiement des 14 premiers jours et que ces montants reliés aux 14 premiers jours seront remboursés par la commission. Est-ce que je dois comprendre que par l'article 58 c'est la même chose, que l'employeur pourra réclamer, justement, les montants qu'il aura versés...

M. Fréchette: De la commission?

M. Cusano: ...de la commission ou est-ce, dans un sens, une charge additionnelle à l'employeur? Le montant est déboursé à l'origine par l'employeur sur une absence, mettons, d'une vingtaine de jours. L'accident est survenu le matin. L'employeur va payer le reste de la journée. Ce montant-là pour la première journée n'est pas récupérable. Je ne parle pas de mauvaise foi, de fraude ou quoi que ce soit, mais justement d'un accident mineur lorsque l'individu a besoin d'aller à l'hôpital. L'employeur paie la totalité ou partie de cette première journée, mais ne peut pas se faire rembourser pour ce montant. Est-ce bien ce que l'article dit?

M. Fréchette: L'interprétation du député de Viau est la bonne. L'employeur qui aura payé ou indemnisé un accidenté pour une partie de journée ou pour toute la première journée d'absence de l'accidenté ne pourra pas réclamer le remboursement de ce montant à la Commission de la santé et de la sécurité. La seule situation dans laquelle l'employeur pourrait exercer un recours de répétition de l'indu, ce serait celle qui l'amènerait à la conclusion qu'il n'y a pas, encore une fois, de relation de cause à effet entre l'accident et l'absence ou, pour utiliser les termes du député de Viau, la conclusion à laquelle en arriverait l'employeur qu'il a payé à la suite de fausses représentations, de dol, de fraude ou, enfin, de situations de ce genre-là.

M. Cusano: M. le ministre, la question de fraude, cela ne m'inquiète pas parce que je suis sûr que, soit la CSST ou les employeurs, s'ils sentent qu'il y a un peu de fraude quelque part, vont essayer de régler cela à leur façon. Laissez-moi poser la question suivante. Que se passe-t-il présentement, sous la loi actuelle?

M. Fréchette: Sous la loi actuelle, il y a toutes sortes de situations qui peuvent se produire. Prenons la situation prévue par la loi. La loi actuelle sur les accidents du travail prévoit un délai de carence d'une journée. L'employeur qui prendrait la décision de ne pas indemniser partiellement ou totalement la première journée d'absence prendrait une décision qui, à mon sens, est tout à fait légale et juridique.

Il y a, par ailleurs, dans la pratique de tous les jours, des employeurs qui, malgré les dispositions de la loi, vont décider d'indemniser quand même. Une troisième situation qui peut exister, c'est que ce genre de chose soit négociée entre les parties et se retrouve à l'intérieur des conventions collectives. Là, vous seriez en face d'une convention collective qui prévoit des conditions plus avantageuses que la loi elle-même et, en conséquence, tout cela serait parfaitement légal.

M. Cusano: M. le ministre, qu'il y ait une entente collective de signée, ce n'est pas cela qui est l'objet de ma question. Moi, je voudrais bien qu'on comprenne. Ici, mon interprétation est que, par l'article 58, maintenant dans le projet de loi, l'employeur aura, s'il n'y a pas d'entente collective, à débourser le salaire pour - cela ne peut pas être toute la journée; cela va toujours être une partie de la journée parce qu'il faut qu'il ait commencé au moins à travailler avant d'avoir son accident - cette journée. Ce n'est pas recouvrable de la CSST tel que les quatorze premiers jours.

M. Fréchette: Exactement, c'est l'entendement que j'en ai.

M. Cusano: Bon! Le nombre d'accidents d'une durée d'une journée et moins - peut-être que l'adjoint du ministre pourrait me le dire au lieu de me faire chercher cela dans le rapport annuel - cela se chiffre à combien?

M. Fréchette: Autour de 140 000.

M. Cusano: 140 000.

M. Fréchette: Approximativement.

M. Cusano: Si on fait les calculs, 140 000 multipliés par salaire moyen, cela veut dire un coût additionnel aux patrons de combien?

M. Fréchette: On va essayer de faire le calcul. Encore là, c'est fort embarrassant d'arriver à des chiffres absolus. Vous pouvez avoir une absence d'une demi-heure, vous pouvez avoir une absence d'une heure, vous pouvez avoir une absence d'une demi-journée et vous pouvez avoir une absence d'une journée complète.

M. Cusano: Je présume qu'il ne peut...

M. Fréchette: Vous ne pouvez faire le raisonnement suivant: 140 000 personnes qui, indépendamment des circonstances précises de l'accident, se verront rembourser le salaire d'une journée complète; ce n'est pas cela; la situation. Cela peut être, comme je

viens de le signaler pour une demi-journée. Encore une fois, une évaluation approximative rapidement faite nous amène à la conclusion que ce serait un coût d'à peu près 2 000 000 $.

M. Cusano: Je crois que c'est peut-être un peu conservateur.

M. Fréchette: Encore!

M. Cusano: Oui. C'est vrai, le premier ministre s'en vient. Cela amène des coûts additionnels que la présente loi ne prévoit pas, c'est exact.

M. Fréchette: C'est tout à fait vrai, Mme la Présidente. La loi actuelle - je sais que je me répète - ne contient pas une semblable disposition. Il y a des employeurs qui la paient quand même et il y a des entreprises à l'intérieur desquelles la convention collective prévoit que ce doit être payé. Nous, on évalue que c'est 2 000 000 $, le coût global de cela, mais pour les gens qui déjà payaient dans ce genre de situation, pour les gens qui avaient négocié un mécanisme comme celui-là, ce n'est pas un coût additionnel.

M. Cusano: Je suis d'accord avec vous sur cela, M. le ministre. Le point où je veux en venir est que cela amène des coûts additionnels à l'employeur. Lorsqu'on arrive pour nous dire, justement, qu'au Québec on est rendu à un taux de cotisation de 1,89 $, c'est beau, mais là on ajoute. Si cet article n'avait pas eu la portée qu'il a et que le montant avait été recouvré par l'employeur, le taux de cotisation n'aurait peut-être pas été de 1,89 $; il aurait été un peu plus élevé pour compenser, justement, le 1 000 000 $, les 2 000 000 $, les 3 000 000 $ ou les 4 000 000 $ que les employeurs auront à débourser. Je ne suis pas contre le principe de l'article qui dit que l'accidenté doit être compensé pour la journée, c'est sûr; ce n'est pas de cela qu'on parle. On ne parle pas du principe d'être compensé pour sa journée. Où j'accroche, c'est sur le fait que ce montant n'est pas recouvrable.

M. Fréchette: Ah oui!

M. Cusano: II ne l'est pas.

M. Fréchette: Vous avez droit d'accrocher sur cela, mais je vous dis que c'est cela que la loi prévoit. Je vous dis que cela peut entraîner des coûts additionnels qu'on évalue rapidement et approximativement à 2 000 000 $, excepté qu'il faut tenir compte que la pratique existe déjà à certains endroits et que des conventions collectives prévoient aussi cette situation.

M. Cusano: Vous dites que les coûts seraient approximatifs, que cela existe et que cela n'existe pas. Est-ce qu'on pourrait avoir des précisions? L'article 58 va amener des coûts additionnels à l'employeur et j'aimerais bien, avant de pouvoir me prononcer sur cet article-là, savoir quels sont ces coûts que l'employeur aura à supporter. (12 heures)

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Le député de Viau est d'une insistance remarquable.

M. Cusano: Toujours, M. le ministre.

M. Fréchette: Je n'ai pas d'objection à lui donner la même réponse à la même question. Je vais essayer de changer les formules de réponse, mais c'est toujours la même question qui m'est soumise. J'ai essayé d'expliquer, mais il me semble que je n'ai pas réussi, que l'état actuel de la loi ne prévoit pas que l'employeur doive - en tout cas, il n'est pas contraint de le faire -assumer le paiement d'une indemnité pour une partie ou pour la totalité d'une première journée d'absence à la suite d'une lésion professionnelle.

Le projet de loi 42, s'il était adopté, prévoirait que, pour une partie de la première journée d'absence, l'employeur doit indemniser le travailleur accidenté tout comme si celui-ci avait été au travail. Je signale également que cela occasionne des coûts additionnels évalués approximativement à 2 000 000 $. J'ajouterai un élément qui, jusqu'à maintenant, n'a pas été soulevé, mais qu'il est important de lancer dans la discussion. Si le député de Viau développe "une argumentation pour nous convaincre de la nécessité d'inclure dans la loi une disposition en vertu de laquelle l'employeur pourrait faire une réclamation à la Commission de la santé et de la sécurité du travail dans ces situations-là on se retrouverait avec un coût d'administration d'environ le même montant. Alors, c'est à toutes fins utiles du donnant, donnant, puis, en termes de cotisations, cela ne changerait strictement rien.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va, M. le député? Non, cela ne va pas.

M. Cusano: Je comprends que cela pourrait engendrer des coûts administratifs. Justement, puisque les employeurs paient une cotisation - qu'on appelle la mutuelle; le premier jour devient un peu le montant déductible sur la prime d'assurance - est-ce que le ministre ne pourrait pas songer à prendre les articles 58 et 59 et pour raison d'administration à inclure cette partie de journée avec les paiements des quatorze

premiers jours, s'il y a lieu, et que dans ce cas-là le tout soit remboursable au patron?

M. Fréchette: Mme la Présidente, je ne répéterai pas tout ce que j'ai dit depuis une demi-heure; je ferais de la redondance purement et simplement superfétatoire, comme me le souffle le député de Sainte-Marie. J'ajouterai, cependant, un élément qui est nouveau, lui aussi. Quelque part plus loin dans la loi, on va voir qu'il existe une disposition en vertu de laquelle l'employeur ne sera plus obligé de déclarer les accidents de moins d'une journée, très précisément à cause de la disposition que l'on retrouve dans l'article 58. Alors, si l'on doit retenir la suggestion du député de Viau, qui a l'air de vouloir que la première journée soit également "collectable", entre guillemets, à la Commission de la santé et de la sécurité du travail, il nous faudra aussi, évidemment, garder la disposition en vertu de laquelle l'employeur devra se conformer aux exigences administratives de la déclaration d'un accident qui a entraîné une absence d'une heure de l'accidenté. Si on avait les employeurs devant nous et qu'on les laissait choisir l'une ou l'autre des alternatives, je suis à peu près convaincu de la réponse qu'on aurait. Ils nous diraient: On va payer la première journée pour se "débarrasser", entre guillemets, de cette contrainte administrative.

M. Cusano: Un autre question sur la...

La Présidente (Mme Juneau): Cela va, M. le député?

M. Cusano: Non, cela ne va pas.

La Présidente (Mme Juneau): Non? M. le député de Viau.

M. Dussault: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Juneau): Oui, M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: ...j'aimerais savoir de la part du ministre à quel endroit dans la loi on dit ce que le ministre vient d'avancer que, pour un accident d'une journée, selon l'expression employée par le ministre, il n'y aurait pas de déclaration. Je veux savoir où, mais je dois vous dire, M. le ministre, que cela m'inquiète un peu, cette affaire.

M. Fréchette: On enregistre, mais il n'y a plus de déclaration à faire à la commission.

M. Dussault: On enregistre. Il y aurait donc...

M. Fréchette: L'article 262.

M. Dussault: ...un possible suivi à partir de quelque chose qui sera écrit.

M. Fréchette: Voilà: L'article 262.

M. Dussault: L'article 262. D'accord, merci.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: Mme la Présidente, je présume, si l'article reste tel qu'il est, qu'à la suite de l'absence, l'accidenté aura à produire un certificat médical attestant qu'il s'est bien blessé au travail.

M. Fréchette: Cela s'infère de la situation elle-même. Deuxièmement, un peu plus loin - j'aurais des problèmes à vous dire très précisément à quel article - vous allez trouver que, lorsque le travailleur le peut, avant de s'absenter dans un cas comme celui-là, il devra le déclarer à son employeur. C'est l'article 249 qui prévoit cette disposition.

M. Cusano: Le ministre ne veut pas, dans un sens, céder et on ne peut pas prendre cet article et invoquer 51 000 raisons. Alors, on nous dit que ce sera des coûts additionnels à l'employeur. Si la commission avait à s'occuper de rembourser ces coûts additionnels à l'employeur, on serait pris par des coûts administratifs. Je me trouve dans une position assez difficile, à ce moment-ci, personnellement, puisque je suis d'accord avec le principe que l'individu qui est accidenté doit être compensé à la suite de sa lésion pour le reste de cette première journée, mais, de l'autre côté, on impose à l'employeur encore des dépenses additionnelles.

N'y aurait-il pas moyen, pour faciliter la chose ici... Je ne peux pas être pour et contre en même temps.

M. Fréchette: Ni pour ni contre, bien au contraire.

M. Cusano: Ce sont les peut-être de votre côté, je pense. Je ne sais pas si mes collègues ont d'autres questions, peut-être que je vais revenir par la suite.

La Présidente (Mme Juneau): La parole est au député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Mme la Présidente, je voudrais souligner que, quant à moi, l'article 58 était une nette amélioration par rapport à la loi actuelle, il prévoit une possibilité que la loi actuelle ne prévoit pas. L'article 58 ne fait, dans le fond, que procéder d'une pratique déjà établie dans une bonne majorité d'entreprises, ce que font habituellement nos

lois d'ailleurs. Les lois arrivent souvent pour confirmer une pratique déjà établie. Le ministre a souligné tantôt que déjà un certain nombre de conventions collectives ont prévu la chose, qu'un certain nombre d'entreprises, qui analysent aussi la question sous l'angle administratif même à l'interne de l'entreprise, préfèrent faire abstraction de l'heure ou des deux heures d'absence plutôt que d'avoir à traiter cette absence au niveau administratif et la paient déjà. Dans ce sens, je pense que l'article 58 ne vient que confirmer une pratique déjà établie et accorde à l'ensemble des travailleurs subissant des accidents mineurs des droits qui avaient été négociés dans certaines conventions collectives.

On pourrait, évidemment, se poser la question sur les recours que l'employé peut avoir si l'employeur ne payait pas. J'imagine qu'il y a toujours les recours qui seront prévus par la loi en général, sauf que, lorsqu'on sera rendu à cet article, je reviendrai sur la question qu'avait soulevée en deuxième lecture le député de D'Arcy McGee. Il y aurait un aspect intéressant à regarder. Le travailleur qui doit se défendre ou défendre ses droits et aller en appel sur toute la question de la loi 42 va avoir à payer ses frais d'avocat, alors que dans les cours habituelles la personne qui perd la cause se voit en même temps obligée de défrayer les frais d'avocat de l'autre. C'est un aspect intéressant que le député de D'Arcy McGee a soulevé et qu'on pourrait déjà examiner pour pouvoir le discuter à ce moment-là.

Je tiens aussi à souligner, Mme la Présidente, que, depuis qu'on a commencé nos travaux ce matin, il y a deux articles, 55 et 58, qui prévoyaient des choses intéressantes pour les travailleurs. L'article 55 a été suspendu par le député de Viau et l'article 58 pose de grands problèmes. Il a été adopté?

La Présidente (Mme Juneau): L'article 55 a été adopté.

M. Bisaillon: C'est une erreur. L'article 58 semble poser de graves problèmes. Je voudrais rappeler l'intervention que je faisais hier soir, à 23 h 45. J'ai l'impression que je ne m'étais pas trompé. L'Opposition officielle est revenue dans la ligne droite, dans le droit chemin du Conseil du patronat. On pourrait peut-être suggérer au député de Viau de faire un amendement général et de proposer plutôt qu'on examine chacun des articles au plan financier et que si cela dépasse 500 000 $, on coupe l'article. Autrement, on n'en sortira pas. Si on essaie d'examiner ce que l'article 58 représente en termes de coûts, le ministre dit que, globalement, cela représente 2 000 000 $, sauf que, dans ces 2 000 000 $, il y a déjà des choses payées par les employeurs parce qu'ils les ont négociées ou parce qu'ils le paient déjà. Il dit aussi: Si on obligeait l'employeur à le déclarer, juste l'administration de cela, ce serait déjà plus coûteux que ce que la différence peut représenter.

Je trouve qu'on tourne autour du pot quand on essaie de plaindre ces pauvres employeurs qui, déjà, le font pour une grande partie. On essaie de les plaindre parce que cela représente des coûts additionnels. Il faudrait les regarder globalement et peut-être se rendre compte que, globalement, on va peut-être arriver à des gains pour les employeurs avec l'ensemble du projet de loi 42 tel qu'il est là. On pourrait discuter sur les calculs. De son côté, le ministre dit: Au total, le projet de loi 42 par rapport à la situation actuelle représente 20 000 000 $ de plus. On pourrait peut-être arriver à de calculs différents aussi et démontrer que, globalement, il y aura peut-être des gains pour les employeurs. Si on le fait article par article, en termes de coûts, je trouve que c'est une mauvaise piste et que cela va nous empêcher à un moment donné de discuter au fond d'avantages nouveaux ou du maintien d'avantages - "avantages", entre guillemets -qu'on accorde actuellement aux travailleurs.

Le Présidente (Mme Juneau): Cela va, M. le député? M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Mme la Présidente, mon argumentation a déjà été utilisée.

Le Présidente (Mme Juneau): M. le député de Nelligan.

M. Lincoln: Mme la Présidente, par pure coïncidence, hier soir, j'ai eu à donner une petite conférence à un groupe d'hommes d'affaires de PME - ils étaient une cinquantaine - sur toute la question de la taxe sur la masse salariale au Québec. Vous savez, il y a eu de grosses études là-dessus: l'étude de Lanctôt et Laliberté l'année dernière; j'ai devant moi l'article de M. Henri-Paul Rousseau de septembre 1982 sur la fiscalité et le commerce: "Le lourd fardeau des taxes sur la masse salariale". (12 h 15)

II faut réaliser que cela devient quelque chose de crucial pour la petite entreprise. Il faut voir la chose dans son ensemble. Ce qui est arrivé, c'est que le maximum cotisable du salaire est passé, de 1975 à 1983, de 9000 $ à 29 000 $ pour la CSST; de 8000 $ à 29 000 $ pour la Commission des normes du travail. Si on continue à alourdir le fardeau des entreprises par des règlements, par une bureaucratie intense et par des cotisations additionnelles, il ne faut paspenser que cela va causer des problèmes à General Motors ou à Bell Canada, mais la

création d'emplois dépend des PME. Je lisais un article, l'autre jour, de la chambre de commerce qui disait: Je pense que nous avons 240 000 firmes du secteur privé qui produisent 75% du revenu productif du Québec et, de ces compagnies, 96% sont des PME, dépendant de là où vous situez la ligne. Toute cette question de taxes commence à alarmer les gens, quand on arrive ici à un taux de 14%, dans certains secteurs, pour une firme de 200 employés par exemple, contre 8,1% en Ontario. Il me semble qu'il faudrait voir à cela entre l'article 58 et 59. Il y a aussi toute la question des quatorze premiers jours qui a été soulevée par nous durant le débat. On dit, la première fois, à l'employeur: Vous faites les frais de la première journée. On dit aussi à l'employeur: Vous faites les frais des quatorze premiers jours remboursables ensuite, mais c'est vous qui faites la paperasserie, la bureaucratie, c'est vous qui faites les frais des délais, les frais des intérêts. À un moment donné, il faudra commencer à réaliser combien les petites entreprises, qui sont réellement la vache à lait de notre système industriel et économique, peuvent absorber. À un moment donné, cela les rend non compétitives, cela nuit aux investissements.

Tout cela est une partie d'un tout. On ne peut pas travailler en vase clos. J'avais suggéré - et je crois que ce qu'a dit le député de Sainte-Marie était tout à fait valable - de regarder la question globalement. Peut-être qu'on devrait regarder l'article 58 avec l'article 59 pour voir quel est l'impact sur les sociétés des quatorze jours et du premier jour de paiement. On dit, par exemple, qu'il en coûtera X millions de dollars à l'industrie en général. Ce qu'il faut savoir, c'est comment cela va être réparti, parce que X millions de dollars pour une grosse multinationale comme l'Alcan, etc., cela s'absorbe bien facilement. Mais quelques milliers de dollars en plus pour une entreprise qui, déjà, a des problèmes de sous-capitalisation, d'existence, cela ne favorisera pas la création d'emplois. En fait, c'est un cercle vicieux. Si on essaie réellement de faire repartir la machine, de créer des emplois pour que le travail se fasse au Québec, pour qu'on puisse mettre les chômeurs au travail, il me semble que tout cela fait partie d'un tout; il faut l'examiner avec beaucoup de - je ne dirai pas sérieux parce je sais qu'on est tous sérieux ici - minutie pour savoir vraiment ce que sont ces coûts. Si on démontre qu'il n'y a pas de coût pour les petites entreprises, à ce moment-là, nous n'avons pas d'objection. Il nous semble qu'il doit y avoir un coût, d'après ce que j'ai pu lire et étudier.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre, voulez-vous intervenir?

M. Fréchette: Non, je veux simplement indiquer au député de Nelligan que je n'aurais pas d'objection à faire ce débat entre l'article 58 et l'article 59, pas du tout, malgré qu'on en ait fait un bon bout hier quand on a parlé de la situation spécifique de la Commission de la santé et de la sécurité du travail au Québec. On l'a comparée à certains autres organismes de l'extérieur. On a évalué son taux de cotisation moyen par rapport à l'extérieur. Mais je n'ai pas d'objection à refaire le débat.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Je pense que le commentaire de mon collègue de Nelligan s'inscrit dans la même ligne de pensée que ceux que nous avons pu faire hier soir. Je n'étais pas là hier après-midi. J'aimerais bien que le député de Sainte-Marie tente de voir qu'on essaie tous de travailler dans la même direction. Je suis allé chercher cette causerie qu'avait prononcée M. Pierre Fortin, qui est du groupe de recherche en politique économique de l'Université Laval, qui reprenait substantiellement ce que vient de dire le député de Nelligan. C'étaient des gens, en 1983, qui faisaient allusion à des études qui ont été faites. Comme vous le savez et comme je l'ai indiqué hier, le même M. Fortin est conseiller, présentement, du premier ministre en matière économique.

Ce qu'il soulignait, c'était que, bien sûr, on peut faire le débat sur la souveraineté, mais il indique: "Par contre, le Québec est le principal responsable des contrats privés, de la réglementation du travail, de l'impôt sur le revenu, des impôts sur la masse salariale et l'investissement public et le seul responsable de la politique éducative et du régime de retraite public. C'est suffisant pour lui permettre d'avoir un impact déterminant sur l'emploi et le développement économique".

On peut nous accuser de toutes sortes de choses, mais je crois que si on est ici autour de la table, c'est que nous désirons, d'une part, assurer aux travailleurs les meilleurs critères de santé et de sécurité et la meilleure protection possible dans ce domaine et, d'autre part, avoir une haute considération pour le développement économique du Québec et surtout pour la création d'emplois, comme l'a dit M. Fortin ici même. Il faisait, justement, trois recommandations principales. La première, c'est d'apprendre à pratiquer individuellement et collectivement la modération à la flexibilité salariale. La deuxième, c'est de cesser de taxer et de réglementer abusivement l'emploi. La troisième, c'est qu'il faudrait que nos programmes d'emploi publics redistribuent efficacement l'emploi en

faveur des groupes désavantagés.

C'est là où je rejoins peut-être certains commentaires du député de Sainte-Marie; M. Fortin dit: "Avant que la moitié de la salle ne se lève en taxant de réactionnaire et de valet du Conseil du patronat, j'aimerais vous souligner que ce principe fondamental est défendu aujourd'hui par les principaux chefs socialistes d'Europe". J'aimerais bien qu'on arrête tout de suite le débat de la façon dont il s'est engagé. En taxant certains d'entre nous de valets du Conseil du patronat, on reprend justement ce que disait M. Fortin en 1983 et c'est le même M. Fortin qui est au bureau du premier ministre maintenant. Il y a des gens intelligents et il y a des gens probablement qui partagent le point de vue du gouvernement. Si M. Fortin a accepté de quitter l'enseignement à l'Université Laval pour conseiller le premier ministre à temps partiel, j'imagine que c'est parce qu'il partage certains points de vue du gouvernement.

M. Bisaillon: Pas le premier ministre à temps partiel, conseiller à temps partiel du premier ministre.

M. Fortier: Conseiller à temps partiel du premier ministre. On a peut-être un premier ministre à temps partiel aussi. Mais s'il a accepté de conseiller le gouvernement dans des matières aussi fondamentales que la création d'emplois et qu'il nous dit, dans des conférences passées et par des travaux qu'il a faits, de faire attention à des points bien particuliers comme ceux-là, si on reprend le débat, j'aimerais bien qu'on arrête de s'accuser les uns les autres de protéger le patronat ou même de défendre les employés.

Je crois que ce nous avons dit jusqu'à maintenant, ce que le député de Viau a dit, ce que le député de Nelligan a dit et ce que j'ai dit hier, c'est que, d'une part, il faut assurer la meilleure protection possible, mais s'informer des coûts et, d'autre part, s'inquiéter des coûts parce que toutes les études économiques qui ont été faites nous disent qu'on peut pénaliser l'emploi même au Québec. Autrement dit, on peut créer plus de chômage en tentant de trop donner dans un secteur donné.

Justement, je faisais allusion à cette étude où il disait qu'il y a un écart entre le Québec et l'Ontario et encore je le cite: "Or, au Québec, la taxe sur la masse salariale est déjà de plus de 14% pour les salaires cotisables par comparaison à 9% pour l'Ontario, notre principal concurrent. Mes collègues Rousseau et Taurand, de l'Université Laval, ont récemment calculé que chaque augmentation d'une unité de pourcentage de la taxe sur la masse salariale au Québec détruisait environ 10 000 emplois principalement parmi les moyens et les petits salariés et parmi les femmes."

Maintenant qu'on connaît des études qui n'ont pas été faites nécessairement par des économistes libéraux, mais par des économistes qui ont certains penchants pour le gouvernement, mais qui sont des gens sérieux, je crois que les parlementaires autour de la table ont le droit de poser des questions sur les coûts globaux, tout en tentant de donner la meilleure protection possible aux travailleurs qui, peut-être dans les années cinquante ou dans les années soixante ou peut-être plus récemment, ont eu des difficultés à faire reconnaître leurs droits dans le domaine de la santé et de la sécurité.

Je voudrais prendre, moi aussi, la défense de mon collègue de Viau et je ne voudrais pas qu'on tente de l'accuser lorsqu'il cherche à connaître les coûts imputés à l'entreprise. Quand on dit les coûts imputés à l'entreprise, à la lumière des études faites par M. Fortin, il faut comprendre également que ces coûts ont un impact considérable sur l'emploi au Québec. Si, d'une part, il faut rechercher les meilleurs moyens d'assurer la santé et la sécurité au travail, d'autre part il faut également chercher les meilleurs moyens de favoriser le climat qui va créer de l'emploi au Québec. Ce sont deux contraintes que tout gouvernement éprouve -même le nôtre aurait à vivre avec éventuellement - et ce sont deux contraintes dont les parlementaires doivent discuter en toute honnêteté et en toute objectivité.

Sur cette base, j'aimerais bien qu'on continue à discuter des articles 58 et 59. Malheureusement, je n'ai pas en main les études que j'aurais voulu avoir qui me démontreraient quels sont les coûts exacts de ces deux articles en particulier, mais je crois qu'il serait irresponsable de notre part et pour les travailleurs eux-mêmes de ne pas soulever les questions posées présentement par mon collègue de Viau.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Ce n'est qu'une mise au point, Mme la Présidente, à la suite des propos tenus par le député d'Outremont, pour replacer les choses dans leur contexte. Je n'ai pas porté d'accusation; j'ai juste souligné, hier soir, que le discours avait été modifié, que la façon d'aborder le projet de loi n'était pas la même subitement depuis hier soir. On avait, quand même, adopté 50 articles ensemble avant et cela ne m'avait pas semblé le même genre de discours.

Par ailleurs, je ne m'oppose pas du tout et je trouve tout à fait normal que l'on fasse ressortir à la fois les inquiétudes des employeurs devant le projet de loi et à la fois les inquiétudes des travailleurs devant le projet de loi. Je n'ai pas d'objection à cela du tout. Je préfère, d'ailleurs, que ce soit

clair. Quand ce sont des inquiétudes d'employeur, j'aimerais que ce soit dit comme cela et qu'on n'essaie pas de déguiser cela en une protection du travailleur. C'est incompatible, ces choses-là. Si on veut présenter les inquiétudes de l'employeur, qu'on les présente, mais qu'on ne les justifie pas par l'intérêt du travailleur. Ce sont deux choses différentes qu'on est justifié de présenter à cette commission. Cela fait juste la démonstration qu'il y a des inquiétudes des deux côtés face au projet de loi.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Je n'accepte pas du tout les derniers propos du député de Sainte-Marie. C'est exactement le contraire que j'ai dit. En ce qui me concerne, je crois qu'il faut défendre les intérêts des travailleurs pour assurer le meilleur développement économique. Nous avons assez de chômage au Québec; il faut, justement, prendre cette défense-là, pas seulement de ceux qui travaillent, mais de ceux qui ne travaillent pas, non plus. Je n'accepte pas du tout les insinuations du député de Sainte-Marie, à savoir que nous représentons uniquement les intérêts des employeurs. Au contraire, l'étude de M. Fortin démontre clairement que soulever la question des coûts, dans le fond, c'est prendre également la défense des non-travailleurs qui se cherchent de l'emploi.

La Présidente (Mme Juneau): Ceci étant clair, l'amendement à l'article 58 est-il adopté?

M. Cusano: L'amendement de M. le député de Nelligan?

La Présidente (Mme Juneau): Non, l'amendement que j'ai lu tout à l'heure, M. le député de Viau.

M. Cusano: Sur l'amendement, je n'ai pas de commentaire.

La Présidente (Mme Juneau): Adopté? M. Cusano: L'amendement est adopté.

La Présidente (Mme Juneau): Adopté. Est-ce que l'article 58 tel qu'amendé est adopté?

M. Cusano: Mme la Présidente, le ministre semblait être réceptif au fait qu'on discute la totalité des articles 58 et 59 et que peut-être, à la suite des discussions et des arguments qui auront été apportés, on pourrait revoir l'article 58. Est-il encore réceptif au fait qu'on parle des articles 58 et 59 en même temps et qu'on passe au vote après?

M. Fréchette: Mme la Présidente, je comprends que...

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: ...la position du député de Viau sur les deux articles est liée. C'est ce que je crois comprendre.

M. Cusano: C'est que...

M. Fréchette: Ce que je disais au député de Nelligan, quant à moi, c'était qu'entre l'adoption des articles 58 et 59 j'étais tout à fait disposé à faire le débat de l'aspect économique, des coûts de l'actuel projet de loi. J'essaie de voir pourquoi il nous faudrait suspendre ou réserver l'adoption de l'article 58 après qu'on en a fait, me semble-t-il, une large discussion et que tous ont eu l'occasion de s'exprimer sur ce contenu. Cela n'empêcherait d'aucune espèce de façon que le débat que souhaitent autant le député de Nelligan que le député de Viau puisse se faire.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Nelligan.

M. Lincoln: Je crois, M. le ministre, que cela pourrait modifier nos positions si nous voyons qu'il y a une corrélation entre les articles 58 et 59 par rapport au coût à l'employeur. On parle de la petite entreprise et on voudrait que ce soit situé plus clairement. Alors, si vous pouvez nous montrer que le premier jour qui incombe à l'employeur, à l'article 58, et les quatorze jours de paiement qu'il aura à faire, à l'article 59, ne sont pas un fardeau trop lourd pour une petite entreprise, c'est ce qu'on veut savoir. (12 h 30)

M. Fréchette: Mme la Présidente, nous réserverions donc l'adoption de l'article 58 pour amorcer tout de suite la discussion sur l'article 59.

La Présidente (Mme Juneau): II serait convenu d'abord, M. le ministre, d'étudier simultanément l'article 58 et 59.

M. Fréchette: Encore. Oui.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va, M. le député?

M. Fréchette: Mme la Présidente, quant à l'article 59, je vais essayer, le plus rapidement possible, de faire le résumé des motifs pour lesquels il est dans la loi.

D'abord, faisons le constat de la situation actuelle. La loi actuelle prévoit que l'employeur doit assumer le paiement des cinq premiers jours d'absence en accident de

travail. Par ailleurs, pour quelqu'un qui y regarde d'un peu plus près, on va constater que les accidents de quatorze jours et moins constituent entre 75% et 80% de l'ensemble du volume des 300 000 ou à peu près accidents de travail qui sont généralement déclarés à la Commission de la santé et de la sécurité du travail.

À ce seul chapitre, sans travailler dans l'une ou l'autre des boîtes de la CSST, l'on peut se faire une opinion, une idée de ce que cela signifie, en termes strictement administratifs, d'être obligé de traiter 170 000 à 180 000 accidents mineurs par le canal habituel de la CSST. Ces accidents entrent dans la machine administrative comme tous les autres et doivent être traités comme tous les autres, avec toutes les implications que cela nécessite, par exemple, affecter du personnel nombreux au traitement de ces réclamations, s'équiper de façon informatique aussi pour arriver à terminer les dossiers. C'est donc une charqe administrative absolument spéciale, extraordinaire de traiter régulièrement ces accidents. Il m'apparaît que c'est une première observation à côté de laquelle on ne peut pas passer quand on prend la décision ou, enfin, quand on suggère de retenir la formule qui est prévue à l'article 59.

Deuxièmement, Mme la Présidente, convenons entre nous que le texte de l'article 59 prévoit, d'une façon suffisamment claire, qu'en tout état de cause, la Commission de la santé et de la sécurité du travail devra rembourser l'employeur du montant qui lui aura été payé pour les quatorze premiers jours d'absence. Et quand j'insiste sur les termes "en tout état de cause", c'est tout simplement parce que je veux attirer l'attention des membres de la commission sur le fait suivant: que l'absence soit bien fondée ou pas, l'employeur a droit à son remboursement.

L'autre considération importante que l'on doit garder à l'esprit dans la discussion de cet article, Mme la Présidente, c'est que le dernier paragraphe de l'article 59 prévoit la possibilité de procéder à la répétition de l'indu pour le cas où l'absence de quatorze jours n'aurait aucune relation avec un accident de travail ou une maladie professionnelle. En d'autres termes, si la relation de cause à effet entre l'accident invoqué et l'absence ne peut pas être faite, le travailleur qui a été indemnisé devra rembourser la commission qui, elle, aura remboursé l'employeur.

J'attire immédiatement l'attention des collègues sur le fait que, plaçant l'accidenté ou le travailleur devant l'alternative qu'à un moment donné il doive rembourser si ce n'est pas un véritable accident de travail, cela répond d'ores et déjà à un argument qu'on va me servir tout à l'heure en vertu duquel on va me dire: Quatorze jours vont entraîner une incidence considérable sur l'augmentation du nombre d'accidents.

Par le sens commun des choses, il me semble que, si un travailleur sait à l'avance qu'il va devoir rembourser le montant si son motif d'absence n'est pas bien fondé, si le motif qu'il invoque pour s'absenter n'est pas valable, si le motif qu'il invoque pour s'absenter est en relation avec une excursion de chasse ou de pêche qu'il a planifiée, l'incidence sur l'augmentation éventuelle de ces accidents mineurs va être considérablement diminuée. En d'autres mots, je sais d'avance que si, entre guillemets, je "prends une vacance", que j'essaie par la suite de réclamer mon salaire pour un motif d'accident du travail et que je n'arrive pas à en faire la preuve, je devrai rembourser le montant que j'ai reçu. À moins d'être complètement cinglé, je ne prendrai pas un semblable risque. À partir de là, je suis d'avis, à tort ou à raison, que l'argument de l'incidence de l'augmentation qu'on va me servir tout à l'heure n'est très certainement pas aussi présent qu'on va le dire ou le croire.

Maintenant, Mme la Présidente, entendons-nous bien, dans l'état actuel des choses, les employeurs gèrent également les accidents du travail de moins de quatorze jours. Ils doivent faire leur déclaration à la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Ils sont astreints, actuellement, à une certaine forme de bureaucratie.

Ce que l'article 59 prévoit, c'est la possibilité, pour eux, de continuer de les gérer, mais à l'interne comme on va gérer n'importe quel autre genre de maladie qui n'est pas de la nature d'une lésion •professionnelle. En retenant la disposition prévue à l'article 59, il nous semble que cela ne va pas imposer davantage de bureaucratie, mais que cela va le diminuer. Ce qu'on dit essentiellement aux employeurs, s'ils ont le goût de le faire: Essayez de gérer vos petits accidents comme vous gérez les autres accidents, comme vous gérez les cas de grippe, comme vous gérez les autres cas de maladies. C'est essentiellement ce que l'on dit à l'ensemble des employeurs.

Mme la Présidente, j'ai compris, des observations du député de Nelligan, que c'était à ce stade-ci qu'il souhaitait que l'on fasse la discussion quant à l'aspect économique de l'ensemble de la situation. Je lui réitère que nous l'avons faite, hier, cette discussion.

M. Lincoln: Si cela a été fait, écoutez, je n'ai pas envie de recommencer.

M. Fréchette: Maintenant, à moins qu'on ne me dise...

M. Lincoln: Si le député de Viau est

satisfait, moi, je ne veux pas insister là-dessus, je n'étais pas là hier soir.

M. Fréchette: J'ai compris, mais je ne veux pas non plus...

M. Cusano: Lorsque le ministre dit qu'une analyse aété faite, je pense qu'il faut la clarifier.

M. Fréchette: Bon, alors, faisons-la, Mme la Présidente.

M. Cusano: II me semble - il peut me corriger si je me trompe - que dans tout ce qu'il nous a avancé, même dans les comparaisons qu'il a faites avec les autres provinces, à aucun moment il ne nous aparlé des premiers jours qui étaient payables, justement, par l'employeur et les différentes "Workmen's compensation boards" qui existent à travers le Canada. Il a parlé de certains aspects, mais cette question et les coûts qui seront engendrés par cela n'ont pas été abordés, en ce qui me concerne.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je n'ai pas d'objection à ce qu'on amorce la discussion d'ordre économique à partir des observations générales qu'ont soumises autant le député de Nelligan que le député d'Outremont. Je vous signale qu'il va y avoir, évidemment, de toute nécessité de la répétition et de la redondance par rapport au débat qu'on a fait hier. J'ai déjà signalé aux membres de la commission que, quant à moi, je souhaitais qu'on prenne tout le temps nécessaire pour faire la discussion à fond de ce projet de loi, qu'on ne néglige rien et que, s'il faut, encore une fois, qu'on se retrouve à Pâques ou à la Trinité, moi je n'en ferai pas une jaunisse. Je suis, encore une fois, disponible pour tout le temps que cela nécessite.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Duplessis m'avait demandé la parole. Je m'excuse.

M. Dussault: Une question de règlement, Mme la Présidente.

M. Lincoln: Excusez-moi, madame. J'ai demandé la parole bien avant le député de Duplessis.

La Présidente (Mme Juneau): Oui, mais je croyais que vous l'aviez donnée au député de Viau tout à l'heure dans votre intervention.

M. Dussault: Une question de règlement, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: Je voudrais savoir ceci: le temps qui sera pris pour faire ce débat va se rattacher à quel article?

La Présidente (Mme Juneau): On est en train d'étudier, si je ne m'abuse, les articles 58 et 59. J'imagine que cela va être rattaché à l'étude de ces deux articles.

M. Fréchette: C'est ce que j'ai compris aussi.

M. Dussault: C'est ça. Mme la Présidente, c'est pour cela que je pose la question, parce qu'avant qu'il y ait consentement unanime de la commission pour transgresser d'une certaine façon nos règles, j'aimerais savoir quelles sont effectivement les conditions dans lesquelles on se retrouvera. Je voudrais savoir auquel des deux articles va se rattacher le temps qui sera pris pour cela. Je ne veux pas présumer que nos amis d'en face veulent nous faire perdre du temps, mais il est arrivé souvent qu'on ait eu des raisons de se méfier; alors, j'aimerais que cela soit clarifié.

La Présidente (Mme Juneau): Étant donné que certains règlements nous allouent vingt minutes par député, advenant qu'on étudie, comme on l'a dit tout à l'heure, les deux articles ensemble, avec votre consentement, chacun des députés pourrait avoir quarante minutes au maximum, si cela vous convient.

M. Fréchette: Ce serait imputé à l'étude des articles 58 et 59.

La Présidente (Mme Juneau): 58 et 59.

M. Cusano: II me semble qu'il y avait eu consentement de la part du ministre pour qu'on prenne le temps nécessaire. Je ne pense pas que, de notre côté, il y aurait une question d'abus. Maintenant, si le député de Châteauguay veut qu'on s'en tienne à une certaine limite de temps, il sera en contradiction avec ce que le ministre vient de nous dire, parce que le ministre est prêt, lui, à prendre le temps nécessaire

M. Fréchette: Le temps nécessaire prévu par les règlements. Attention! Je ne suis pas en train de dire...

M. Dussault: Mme la Présidente, nous sommes dans un nouveau régime parlementaire dans le sens que nous avons fait une réforme et moi, je ne me sens pas lié par les propos que tient le ministre à l'Assemblée nationale ou ici en commission, même si je respecte profondément tout ce qu'il dit. J'ai, moi, un poids aussi valable, aussi considérable que celui du ministre quand je parle ici en commission. Le

ministre ne donne jamais son consentement pour moi. Il le donne pour lui. Moi, si je pense qu'on va fonctionner d'une façon telle que cela nous fasse préjudice, à nous les députés, bien, je m'arrange pour que les conditions soient bien claires.

Je n'ai pas encore donné mon consentement là-dessus. Je veux savoir à quel article, soit 58 ou 59, on rattachera le temps qui sera pris pour cela. Je pense que c'est tout à fait légitime de vouloir clarifier cela.

La Présidente (Mme Juneau): Oui. Mais il ne faut pas perdre de vue, par exemple, que nous étions tous d'accord pour étudier simultanément les articles 58 et 59.

M. Fortier: II y a eu consentement. Sur la question de règlement, Mme la Présidente, moi, je pense que, si le député veut soulever la question, c'est son libre choix, il a le droit de le faire. Je crois que le consentement a déjà été donné pour étudier les articles 58 et 59. Vous avez suggéré que les vingt minutes s'appliquent pour chacun des articles, donc quarante minutes chacun. Sur le plan du règlement, je crois que le règlement s'applique. Peut-être qu'on va en prendre beaucoup moins que cela. En tout cas, en ce qui concerne la question de règlement, je crois qu'on peut en disposer de cette façon-là.

La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le député. La parole...

M. Fréchette: Je voulais simplement ajouter un commentaire à celui du député de Châteauguay. C'est évident que je viens de dire qu'il nous fallait prendre tout le temps qu'il faut, mais je n'ai pas dit qu'il fallait balayer de la main les règles de procédure qui nous régissent, par ailleurs. À l'intérieur des règles de procédure qui nous régissent, qu'on prenne tout le temps nécessaire, je suis tout à fait d'accord, mais je n'ai pas "garroché" le règlement au bout de mes bras.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Duplessis, le député de Nelligan m'avait demandé la parole avant vous.

M. Perron: C'est sur la question de règlement, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): Ça va.

M. Perron: Dois-je comprendre, considérant que nous étudions deux articles à la fois, c'est-à-dire 58 et 59, que les membres de cette commission auraient droit à vingt minutes sur chacun des articles...

La Présidente (Mme Juneau): C'est ça.

M. Perron: ...ou si c'est vingt minutes sur les deux articles? (12 h 45)

La Présidente (Mme Juneau): Je vais vous lire l'article 238 des règles de procédure, M. le député, et cela va vous renseigner. "Le temps de parole de vingt minutes dont diposent les membres de la commission vaut pour chaque article". Étant donné la convention que nous avons eue, tout à l'heure, d'étudier les deux articles, il me semble qu'on pourrait vous accorder quarante minutes par député pour l'étude des deux articles ensemble.

M. Perron: Maintenant, est-ce que je peux passer à la question que je voulais adresser au ministre concernant les articles 58 et 59?

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Nelligan m'avait demandé la parole avant vous M. le député de Duplessis. Je reconnaîtrai votre droit de parole tout de suite après le député de Nelligan.

M. Lincoln: Très brièvement, tout ce que je voudrais souligner, c'est que, s'il y a une perte de temps, c'est justement cette discussion inutile du règlement. Je n'accepte pas les commentaires du député de Châteauguay que les amis d'en face ont l'habitude de perdre du temps. Je ne pense pas qu'on a perdu du temps. On a travaillé très dur, très consciencieusement et je pense que le ministre acceptera que le travail qu'on a fait a produit des amendements qui ont été très valables jusqu'ici. Je ne pense pas qu'on essaie de faire un "filibuster" là-dessus. Alors, on continue avec cela.

M. Oussault: Une question de règlement, Mme la Présidente. J'ai bien pris soin de dire: II est arrivé parfois que et cela m'a rendu méfiant. Je n'ai pas dit qu'ils ont l'habitude de. M. le député de Nelligan, peut-être, a l'habitude de déformer les paroles des autres, mais ce n'est pas ce que j'ai dit.

Deuxièmement, Mme la Présidente, toujours sur la question de règlement, je voudrais m'assurer qu'il n'est pas compris présentement que je donne mon consentement pour faire un débat qui pourrait s'avérer, peut-être en cours de route, comme n'étant pas pertinent par rapport au projet de loi. Je voudrais qu'il soit bien clair que, si cela devient non pertinent par rapport au projet de loi, je vais le faire remarquer et qu'à ce moment mon consentement ne tiendra pas pour autre chose que ce qui est pertinent.

Si, par exemple, on veut faire un débat fiscal à l'occasion du projet de loi, je dis, immédiatement, Mme la Présidente, que je ne suis pas d'accord et qu'à ce moment mon consentement n'est pas acquis. Je voudrais

que ce soit bien clair.

La Présidente (Mme Juneau): Je vous remercie, M. le député. Je remercie aussi le député de Nelligan des précisions qu'il nous a apportées. Nous avons, en tout cas, dit chacun ce qu'on pensait. Je pense que j'ai eu la collaboration de chacun d'entre vous depuis le début des travaux. Je souhaiterais la posséder encore pour continuer au moins dans l'harmonie...

M. Lincoln: D'accord.

La Présidente (Mme Juneau): ...s'il vous plaît. M. le député de Nelligan.

M. Lincoln: M. le ministre, vous avez dit que 80% des cas sont de quatorze jours ou moins, n'est-ce pas?

M. Fréchette: Oui, en effet.

M. Lincoln: Là-dedans, quel est le nombre de cas d'accidents de un à cinq jours qui sont indemnisés, qui seront maintenant la responsabilité des entreprises? Quel est le pourcentage maintenant des un à cinq jours?

M. Fréchette: Le nombre d'accidents de un à cinq jour?

M. Lincoln: En fait, vous pouvez voir cela, c'est indiqué dans le rapport annuel de 1983, c'est 22% des cas, de un à cinq jours. Ce qu'on ajoute à l'entreprise, c'est encore 13%. C'est six à dix jours qui est 9% en plus et, ensuite, onze à quinze jours. Ici, on n'a pas onze à quatorze jours; je suppose que c'est un petit peu moins. Donc, c'est environ 12% à 13% des cas.

Si on admet que 80% des cas vont de zéro à quatorze jours, d'abord la question qu'on se pose, c'est si la CSST se départit d'un travail sur les 13% de cas qui représentent six à dix jours et onze a quatorze jours - donc, 27 000 plus 12 000 égale 39 000 - sûrement que la CSST pourrait nous dire quelle est l'économie qui va arriver au contribuable par rapport au fonctionnement de la CSST à qui il reste maintenant à s'occuper de seulement 20% des cas.

Cas inverse: vous dites qu'il n'y a pas de coût pour l'employeur parce qu'il fait déjà la bureaucratie des cas de un à quatorze jours, des petites maladies. Mais certainement qu'il y a une grande différence quand il fait de la bureaucratie sans avoir à indemniser et de la bureaucratie en ayant à indemniser, en ayant à faire une réclamation pour la CSST, en ayant à payer des intérêts sur l'argent qu'il a avancé.

Vous n'avez pas parlé, par exemple, dans votre explication, du délai de remboursement de ces entreprises. Si, par exemple, il y avait quelque chose dans le règlement qui disait que la CSST serait obligée de rembourser dans une période de, nous, peut-être qu'on aurait moins de contraintes et moins de questions à nous poser.

En fait, ce qu'on dit, c'est que, si nous avons 300 000 cas ou 350 000 cas, on en aura 80% qui vont être réellement à la charge de l'employeur, à toutes fins utiles, du premier au quatorzième jour. La CSST reste avec une petite minorité de 20%. Tout le travail bureaucratique de base se fait par l'employeur. Le financement de l'indemnisation se fait par l'employeur. Il est à se demander vraiment pourquoi la CSST coûte tellement cher et ce qu'on va retrouver dedans. Il y a sûrement un équilibre. Si cela coûte plus cher à l'employeur - et c'est indéniable qu'il ne va pas faire l'analyse de 39 000 cas en plus sans coût; nécessairement, il va y avoir un coût quelconque - est-ce que ce coût n'est pas transféré alors? Si l'employeur doit faire les frais de cette chose, ce sera en plus. C'est pourquoi on avait rattaché cela à l'article 58 où on dit qu'il aura à faire les frais du premier jour de la maladie.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Mme la Présidente, il y a plusieurs questions dans les commentaires du député de Nelligan, des questions intéressantes. Une première observation que je voudrais bien que l'on retienne, c'est: Ne commençons pas à parler des accidents de la CSST. Cela continue d'être les accidents qui se produisent chez l'employeur. Il ne faudrait pas que l'on perde de vue cette situation.

Deuxièmement, le député de Nelligan a fait une suggestion...

M. Cusano: À la CSST, il y a des accidents aussi.

M. Fréchette: ...très heureuse, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): S'il vous plaît, M. le député!

M. Fréchette: Le député de Nelligan a fait une suggestion heureuse que je suis disposé à retenir et à coucher en termes législatifs, quand il dit: Est-ce qu'il n'y a pas moyen qu'il y ait un délai prévu pour le remboursement par la commission à l'employeur? Je lui dis oui. Si, par exemple, on introduisait dans la loi une disposition en vertu de laquelle la CSST serait obligée de procéder au remboursement dans les quinze jours de la réception de la réclamation, à défaut de quoi des intérêts commenceraient à s'accumuler, je me demande si on ne

rejoindrais pas là l'une des préoccupations du député de Nelligan.

M. Lincoln: Là, on commence à s'entendre. Vous voyez, cela vaut la peine de discuter.

M. Fréchette: Je pense qu'on s'est toujours bien entendu.

M. Lincoln: Non, dessus. M. Fréchette: Ah,bon!

M. Lincoln: On s'est toujours bien entendu, mais là c'est un pas en avant. Oui, là, cela vaut la peine.

M. Fréchette: Bon, c'est une premier aspect.

Deuxièmement, entendons-nous également sur l'état de fait suivant: actuellement, ces accidents de moins de quatorze jours coûtent un certain montant en réparation, en indemnité. Ce montant est de 25 000 000 $. Cela ne va pas changer, en tout cas, à toutes fins utiles, à peu près pas, le montant à être payé pour des indemnités dans des cas d'accidents de moins de quatorze jours.

Il y a une autre chose qu'il est important de signaler: quand on parle des quatorze jours, Mme la Présidente, entendons-nous aussi pour bien comprendre le texte, on réfère à quatorze jours de calendrier, ce ne sont pas quatorze jours ouvrables.

M. Lincoln: Oui, quatorze jours de calendrier.

M. Fréchette: Alors, à toute fins utiles, en termes pratiques et quotidiens, c'est dix jours, en fait, généralement parlant, deux semaines.

La Présidente (Mme Juneau): Deux semaines.

M. Fréchette: Deux semaines de travail. Une voix: Une période de paie.

M. Fréchette: Je ne reviendrai pas sur les motifs dont j'ai déjà parlé, Mme la Présidente, mais je signalerai simplement au député de Nelligan que la cotisation moyenne à la Commission de la santé et de la sécurité du travail, en 1982, était de 2,05 $ les 100 $. Au 1er janvier 1983, cette cotisation moyenne des employeurs a été diminuée et au moment où on se parle elle est de 1,89 $ les 100 $ assurables, alors qu'en Ontario elle est actuellement à 2,16 $. À cause d'une dette de 5 000 000 000 $ ou à peu près en Ontario, l'on songe très sérieusement à augmenter le taux de cotisation vers un chiffre qui atteindrait à peu près 2,25 $, sinon plus, de cotisation très précisément parce qu'il y a cette accumulation d'une dette de quelque 5 000 000 000 $.

Mme la Présidente, en tenant compte des dispositions de la loi 42, si, éventuellement, elle est adoptée, il est prévu que le taux de cotisation au 1er janvier 1985 passera de 1,89 $, qu'il est actuellement, à 1,88 $, en tenant compte, encore une fois, des intentions qui sont annoncées dans la loi 42.

Je vais convenir, sans aucune réserve et hésitation, avec le député de Nelligan, qu'il fut un temps où il était un petit peu embarrassant de se comparer avec certaines autres commissions de santé et de sécurité du Canada. Je vous signale, par ailleurs, que, depuis les deux dernières années, nous nous comparons avantageusement avec n'importe quelles des commissions de santé et de sécurité du Canada. À 1,88 $ les 100 $ assurables, il n'y a pas beaucoup de commissions de santé qui sont actuellement à ce niveau-là.

Pourquoi, Mme la Présidente, sommes-nous à ce niveau-là? Pour des motifs très précis et qui sont en relation avec des décisions qui ont été prises au cours des deux dernières années. En 1974-1975, la Commission de la santé et de la sécurité du travail s'est retrouvée avec une dette qu'elle n'avait pas prévue, de l'ordre de 300 000 000 $. D'où provenait cette dette? Elle provenait d'une décision gouvernementale qui était, à mon sens, bien fondée et en vertu de laquelle le gouvernement de l'époque décidait que les indemnités de toute espèce allaient être revalorisées annuellement, indexées annuellement. Cela n'existait pas jusque-là, l'indexation ou la revalorisation. Alors, la commission s'est retrouvée, donc, avec cette dette inattendue de 300 000 000 $. Elle cotisait les employeurs pour les fins de l'extinction de cette dette-là.

Il y a deux ans, à peu près, le conseil d'administration de la Commission de la santé et de la sécurité du travail a pris la décision d'arrêter de cotiser les employeurs pour les fins spécifiques du paiement de cette dette et d'inscrire la dette dans les livres de la commission, d'en tenir compte pour des fins de comptabilité, mais de ne pas continuer la perception de la cotisation pour la faire disparaître. C'est un premier motif qui fait que la cotisation a pu diminuer.

Un deuxième motif: toutes choses étant normales, les coûts de la prévention, autant des accidents que des maladies professionnelles, devraient être assumés à 100% par l'ensemble des employeurs. Le raisonnement que le conseil d'administration

a fait, c'est le suivant: les mesures de prévention qui sont actuellement déterminées par les comités de santé et de sécurité ou par tout autre organisme qui travaille dans cette discipline spécifique vont servir aux employeurs du futur. Il ne serait donc pas normal que les employeurs du futur paient maintenant pour des mécanismes de prévention.

Alors, au lieu de cotiser à 100% les coûts de la prévention, le conseil d'administration en est venu à la conclusion de les cotiser à 90% de leur coût réel. C'est un autre motif pour lequel la cotisation est au chiffre dont on parle.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre

M. Fréchette: Je constate qu'il est 13 heures, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): Voilà. J'avais aussi constaté qu'il était 13 heures et nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 59)

(Reprise à 15 h 8)

La Présidente (Mme Juneau): Après avoir constaté le quorum, la commission de l'économie et du travail reprend ses travaux pour l'étude article par article du projet de loi 42, Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

La parole avait été demandée par le député de Frontenac.

M. Fréchette: Je n'avais pas fini, moi.

La Présidente (Mme Juneau): Vous n'aviez pas terminé, M. le ministre?

Une voix: Oui, c'est vrai.

La Présidente (Mme Juneau): C'est vrai, je m'excuse, M. le ministre. La parole est à vous.

M. Fréchette: J'étais sur le point de terminer, Mme la Présidente, mais ce n'était pas complet. Je suis un petit peu malheureux que le député de Nelligan ne soit pas là parce que c'est à sa demande que nous avions entrepris de refaire, en quelque sorte, le débat que nous avons fait hier.

M. Cusano: II est sans doute en train de se rendre.

M. Fréchette: II faudrait qu'il soit là dans un délai très raisonnable.

M. Cusano: Oui.

M. Fréchette: Ou alors sans délai.

M. Cusano: Sans délai.

M. Fréchette: Je terminerai essentiellement, Mme la Présidente, en indiquant au député de Nelligan et au député d'Outremont qui ne sont là ni l'un, ni l'autre, que les préoccupations qu'ils ont soulevées au niveau de la fiscalité chez les employeurs doivent être des préoccupations qui font l'objet de la réflexion de tout le monde.

Entendons-nous, par ailleurs, sur le fait que, s'il fut un temps où, au niveau de la santé et de la sécurité au Québec, on invoquait très souvent ce dossier en fonction de la discussion qu'on est en train d'avoir, ce n'est plus vrai maintenant pour tous les motifs que j'ai donnés ce matin.

Pour revenir aux dispositions plus spécifiques des articles 58 et 59, c'est-à-dire le paiement du premier jour, donc l'abolition du délai de carence d'une journée, le paiement des quatorze premiers jours, l'évaluation que nous en avons faite nous amène à la conclusion qu'à tous égards cela va être avantageux pour tout le monde et cela n'entraînera pas de coûts additionnels, en tout cas pas de coûts additionnels significatifs. C'est l'essentiel des remarques que j'avais à faire.

La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le ministre. J'avais le député de Frontenac qui était inscrit.

M. Grégoire: M. le ministre, toujours aux articles 58 et 59 mais sur un autre point de vue. Dans ces deux articles, il est question de lésion. Celui qui a été victime d'un accident du travail et qui est victime d'une lésion professionnelle, lui, il reçoit une indemnisation dès qu'il subit son accident. Il n'est pas question dans ce chapitre et cette section de ceux qui subissent des maladies professionnelles.

M. Fréchette: La lésion professionnelle réfère aux deux éléments qui retiennent notre attention, c'est-à-dire l'accident du travail et la maladie professionnelle. Quand on parle d'une lésion professionnelle, on réfère tout aussi bien à un accident qu'à la maladie professionnelle.

M. Grégoire: M. le ministre, je voudrais vous poser une question. Dans le cas de la lésion professionnelle, un accident du travail, c'est bien défini. Le gars, il sort souvent en ambulance ou autrement. Il est payé pour la journée même.

Dans le cas de la maladie professionnelle, il faut attendre que cela ait

fait tout le tour de tous les comités d'évaluation médicale, de tout le processus d'évaluation médicale. Ceci veut dire que si, un bon jour, un citoyen va chez son médecin et qu'il lui dit: Toi, tu es "poigné" d'amiantose, tu es pris là-dedans, lui ne peut pas sortir et dire: Je vais être indemnisé immédiatement. Ou il court le risque que, s'il sort, après toutes les évaluations médicales, au bout de, disons trois ou quatre mois - ce sont les délais qui sont raccourcis et je vous en félicite, parce qu'avant cela prenait beaucoup plus de temps -... Là, les délais sont raccourcis. Tout ce temps-là, il n'est pas payé de son arrêt. Il n'est pas indemnisé pendant les évaluations médicales, il n'a pas eu son évaluation.

Mais il y a des articles qui nous donnent des raisons de croire que cela pourrait s'appliquer également aux maladies professionnelles. C'est que, dans le cas des articles 58 et 59, il était indemnisé pour les quinze premiers jours. Si toutefois il y avait de quoi à récupérer de la part de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, ce ne sera fait que si la victime est de mauvaise foi. Si elle est de bonne foi, il n'y a pas de récupération pour les quinze jours d'indemnisation.

Si la même chose pouvait se faire pour les maladies industrielles. Par exemple, un citoyen, un travailleur d'une mine d'amiante va chez son médecin. Le gars ne se sent plus capable de travailler. Le médecin lui dit: Pour moi, tu as l'amiantose. J'admets que c'est encore un médecin traitant, c'est un généraliste. Ce n'est pas encore suffisant pour le déclarer amiantosé.

Mais, s'il va à la clinique parce que, depuis quelque temps, depuis quatre ans, on a une clinique médicale spécialisée à Thetford pour les maladies des poumons...

S'il va consulter un pneumologue qui, lui, lui dit: Moi, mon avis en tant qu'expert, c'est que vous êtes amiantosé, est-ce que, à partir de ce moment-là, le type, comme en vertu des articles 58 et 59, pourrait sortir de la mine et cesser de travailler, puis être indemnisé pendant qu'il ne travaille pas, puis passer tout le processus? C'est-à-dire que la commission, après avoir reçu cela, a dix jours pour le remettre au comité de pneumoconiose qui a vingt jours pour passer l'examen au citoyen. Après cela, ces gens ont vingt jours pour remettre cela à la Commission de la santé et de la sécurité du travail.

La Commission de la santé et de la sécurité du travail a un délai pour le remettre aux trois présidents des trois autres comités de pneumoconiose, lesquels ont trente jours pour réétudier le cas. Puis, c'est remis à la Commission de la santé et de la sécurité du travail, ce qui fait environ quatre mois.

S'il est indemnisé pendant tout ce temps-là, si à la fin de tout le processus il n'est pas reconnu par les deux comités de pneumoconiose devant lesquels il est passé, s'il n'est pas reconnu comme un amiantosé ayant droit aux indemnités, est-ce qu'il pourra retourner à son emploi et est-ce qu'il sera obligé, s'il a été de bonne foi, c'est-à-dire s'il a fourni un certificat de pneumologue... Est-ce que la Commission de la santé et de la sécurité du travail ira recouvrer les montants dus ou est-ce qu'il aura le droit de passer par ce processus?

M. Fréchette: Mme la Présidente, il me semble que la loi prévoit expressément que dans les cas où la bonne foi ne peut pas être mise en doute ou, si je le prends négativement, dans les cas où il n'y a pas fraude, dol, ou enfin les autres éléments que l'on connaît, même si l'instance décisionnelle en venait à la conclusion qu'il n'y a pas effectivement de maladie professionnelle, aucune disposition ne sera prise pour répéter ce qu'on pourrait convenir d'appeler l'indu si, encore une fois, tout a été fait de bonne foi pendant la période qu'ont duré les procédures. Il n'y a pas de réclamation de l'indu à ce moment-là.

M. Grégoire: Un rapport d'un pneumologue privé serait une preuve de bonne foi. M. le ministre, si c'est cela, précisez-le-moi quelque part. C'est un des trois gros points que j'avais et vous allez être... Si on peut marcher comme selon... Dans l'ancienne loi, ce n'était pas cela. Le gars était obligé de continuer à travailler pendant deux ans et il en mourait avant d'avoir les résultats des comités de pneumoconiose.

M. Fréchette: II y a tout un chapitre de consacré très précisément au phénomène dont parle le député de Frontenac.

M. Grégoire: Je le sais, je l'ai lu, mais ce n'est pas spécifié que, quand il sort sur bonne foi et avec un rapport d'un expert, il peut être indemnisé pendant ce temps-là.

M. Fréchette: On va arriver à ce chapitre-là puis je suis tout à fait disposé qu'on le réexamine de plus près.

M. Grégoire: Très bien, M. le ministre. M. Gagnon: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): Oui, M. le député de Champlain.

M. Gagnon: Si vous me le permettez, sur une question de règlement, parce que je me rends compte que je ne suis pas membre de la commission. Hier, je remplaçais mon collègue de Gaspé. Je voudrais être membre.

Je présume que je pourrais remplacer Mme la députée de Maisonneuve, si la commission est d'accord.

La Présidente (Mme Juneau): Mme

Harel.

M. Fortier: Je ne sais pas si tu peux la remplacer, mais tu peux occuper son siège.

M. Gagnon: C'est mieux dit comme cela; je vous remercie.

M. Cusano: On accepte le remplacement de Mme Harel par le député de Champlain.

La Présidente (Mme Juneau): Merci. M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Merci, Mme la Présidente. C'est dommage que notre collègue de Sainte-Marie ne soit pas ici, parce qu'on pourrait argumenter sur une autre partie de la loi, particulièrement à l'article 58, là où on abroge le délai de carence qui existait avant et qui tombe payable au premier jour ou une partie de la première journée, indépendamment de l'heure à laquelle l'accident arrive. Je pense que ce n'est pas un point majeur pour nous; je pense que c'est une amélioration pour le travailleur. Ce ne sont pas ces coûts supplémentaires qui, à mon avis, vont faire trembler les murs de Jéricho ni les murs des employeurs du Québec; ce sont des coûts supplémentaires mais qui ne sont pas quantifiés en monnaies immédiatement parce que c'est difficile. Vous l'avez expliqué ce matin que c'est difficile à quantifier. Je pense que c'est une amélioration du sort des travailleurs. Ce n'est peut-être pas là-dessus qu'on va faire des plus gros plats, mais l'article 59, précisément, il y a deux façons de le voir; vous en avez expliqué une ce matin, mais il y a d'autres façons de le voir aussi.

Si je suis bien votre raisonnement, M. le ministre, ce matin vous avez dit grosso modo que 80% des dossiers ouverts à la CSST étaient des dossiers de moins de quatorze jours. On s'entend sur quatorze jours pour dire deux semaines de travail. Si je comprends bien ce raisonnement, si l'employeur acceptait de faire le travail qui , est fait présentement par la CSST, il y aurait 80% de moins de travail dans ces dossiers de bureau, au départ à la CSST. Or, si on continue mon raisonnement, contrairement au vôtre, la CSST à ce moment-là se dédouane d'une partie de paperasserie qui est fatigante, tannante et aussi pour nous dans nos bureaux de comté. Cependant, si on se souvient du sens de la Loi sur les accidents du travail, c'était un genre de mutuelle que les employeurs se donnaient pour indemniser un travailleur lorsqu'il était blessé ou qu'il avait une maladie professionnelle. Il est évident que, si on confie des rôles administratifs additionnels à l'employeur, en contrepartie on devrait aussi lui donner une réduction sur sa cotisation puisqu'il va faire du travail qui était fait habituellement par la CSST. À ce moment, est-ce que ce montant...? Je n'ai rien contre le fait que vous donniez quatorze jours parce que cela ne change absolument rien au niveau du service que cela va donner à l'employé. L'employé, là-dedans, il n'est pas mis en cause. L'important pour le travailleur, c'est qu'il y ait quelqu'un qui le paie à partir de la première journée et on a établi cela dans la loi. À partir du moment où le travailleur est sûr qu'il va avoir son chèque de paie, peu importe de qui il vient, lui, cela ne l'intéresse pas, c'est que le vendredi il veut avoir son chèque de paie. C'est très important, c'est le sens de la loi. À mon avis, c'est le sens de la loi que, lorsqu'un travailleur est pénalisé par un acccident du travail ou une lésion professionnelle ou une maladie professionnelle, l'important c'est que la loi lui garantisse que le vendredi suivant il va avoir son chèque de paie. Cela, c'est un objectif de l'ancienne loi, mais reconduit dans le projet de loi 42.

Mais là où l'objectif est changé, il y a l'objectif de la loi et l'objectif administratif de la loi. Celle qui se dédouane finalement de responsabilités, qui amoindrit ses responsabilités, c'est la CSST. Et la CSST n'a-t-elle pas pour rôle d'administrer, justement, cette mutuelle que les employeurs se sont donnée pour permettre aux accidentés d'être indemnisés en cas d'accident ou de maladie professionnelle?

Or, si elle se décharge de ses responsabilités administratives, elle devra, par le fait même, M. le ministre, se décharger d'une partie du coût. Si la secrétaire du bureau de M. X fait du travail à votre bureau, M. le ministre, j'imagine que, lorsque vous allez faire sa feuille de paie, vous allez indiquer la provenance de la source pour la payer. Si elle a fait du travail pour un autre ministre, vous allez charger cela à l'autre cabinet, ce qui est tout à fait normal dans la pratique privée.

Or, cela devrait s'ajuster là aussi, parce que quatorze jours pour l'employeur... Il faut qu'il remplisse de la paperasse, il faut qu'il demande à la CSST, par après, pour être remboursé, s'il a le droit, si un moment donné il a le droit parce que, s'il n'a pas le droit, je pense qu'on voit plus loin dans l'article 59: "Si, par la suite, la commission décide que le travailleur n'a pas droit à cette indemnité, en tout ou en partie, elle doit lui en réclamer le trop-perçu conformément..."

Si la CSST devient une tierce partie, l'employeur paie, l'employeur fait la

réclamation à la CSST et la CSST dit: II n'avait pas le droit. Elle ne paie pas l'employeur. Elle se retourne de bord et elle retourne... Dans la loi - cela dépend de l'interprétation - la CSST doit retourner cotiser l'employé pour un trop-perçu, revenir dans ses coffres, retourner à l'employeur. S'il y avait juste un cas dans la province de Québec, ce ne serait pas tellement grave. Cela ne changerait rien aux procédures administratives. Mais le cumulatif de ces cas, au niveau des petites et moyennes entreprises où peut-être trop de chèques qui circulent peuvent mettre en danger leur situation financière... Je pense qu'il faudrait peut-être le regarder sous un angle beaucoup plus pratique.

Ce que j'ai de la difficulté à comprendre, c'est qu'à la minute où on dit qu'on va enlever 80% des dossiers à la CSST il n'y ait pas un article qui nous dit: Les coûts vont diminuer pour autant, la prévention va être mieux faite, il va y avoir plus d'éducation au niveau des travailleurs, au niveau des compagnies, des employeurs, la prévention va être mieux appliquée en milieu du travail qu'une prévention véritable comme on a vu dans le cas présentement, justement, qui est sous commission d'enquête.

Si on nous disait cela dans l'article de loi un peu plus loin, si on retrouvait cela quelque part, cela nous permettrait d'être plus à l'aise et de dire véritablement qu'on garde le premier but de la présente loi ici, d'indemniser un travailleur, mais qui pourrait aller plus loin parce que c'est la CSST qui doit administrer cette mutuelle, qui nous dirait: Là où on va économiser de l'argent, on va réinvestir dans la protection du travailleur. Cela, c'est relié, M. le ministre; qu'on le veuille ou pas, la Loi sur les accidents du travail et la CSST, c'est relié. Et lorsqu'on déplace des sommes importantes, on doit avoir au moins une indication de l'endroit où elles vont aller.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Merci, Mme la Présidente.

Permettez que je prenne un peu en vrac les observations du député de Saguenay les unes après les autres comme je les ai notées. D'abord, quant à la récupération de ce que pourrait être un paiement fait indûment. Prenons l'état actuel des choses. Le délai actuellement est de cinq jours. Lorsqu'il arrive après évaluation du dossier qu'une décision est rendue et que cette décision établit qu'il n'y avait pas de cause pour payer l'accidenté dans l'état actuel des choses, c'est l'employeur qui a "l'odieux" de réclamer du salarié accidenté le montant d'argent qu'il a reçu et auquel il n'avait pas droit conformément à la décision qui a été rendue. C'est l'employeur lui-même dans l'état actuel des choses qui doit se livrer -si vous me prêtez l'expression - à ces procédures.

Dans la loi 42, dans une pareille situation, c'est la CSST qui devra entamer les procédures de réclamation vis-à-vis d'un salarié qui aurait reçu un paiement pour une absence de quatorze jours, paiement auquel il n'avait pas droit. Voilà donc pour l'employeur une tracasserie ou une difficulté qui disparaît.

Deuxièmement, il faut essayer d'avoir la meilleure lecture possible de la loi. J'ai toujours compris - si ce n'est pas cela que la loi veut dire il faudra procéder à l'amender dans ce sens - qu'en tout état de cause l'employeur est remboursé du paiement des quatorze jours; même si après décision, encore une fois, des instances habilitées à le faire, la décision c'est que le salarié y avait droit, il avait des motifs valables, des motifs raisonnables de s'absenter en accident du travail, l'employeur va être remboursé davantage si le salarié a été payé indûment. Si ce n'est pas cela que le texte de loi veut dire il faudrait qu'il veuille dire ce que je viens d'exprimer, d'une part.

Troisièmement, n'allons pas perdre de vue que j'ai signalé ce matin au député de Nelligan que j'étais tout à fait disposé à introduire dans la loi un amendement davantage contraignant pour la CSST et davantage rassurant pour l'employeur. Le remboursement en vertu de cet amendement devra se faire à l'intérieur d'une période de quinze jours à compter de la demande de paiement et, à défaut de paiement dans les quinze jours, les intérêts prévus par la Loi sur le ministère du Revenu commenceraient à courir.

Le député de Saguenay est préoccupé par le phénomène de la bureaucratie. Je n'ai pas besoin de vous signaler que je pense qu'on l'a tous, cette préoccupation. Mais n'allons pas nous imaginer que dans l'état actuel des choses l'employeur ne doit pas se soumettre à une certaine bureaucratie quand arrive un accident qui entraîne une absence même de moins de quatorze jours. Il doit le déclarer, cet accident, il doit se soumettre à l'ensemble des procédures qui sont prévues par la loi. Ce n'est pas parce que l'introduction de ce nouveau mécanisme est dans la loi que cela va lui faire plus de bureaucratie. Il est déjà obligé de se soumettre à un certain nombre d'opérations quand arrive ce genre d'accident. Ce que l'on dit par ailleurs, c'est que, si cette disposition était adoptée comme elle est écrite ou avec des changements mais que le sens demeure le même, l'employeur va être en mesure de gérer - je n'aime pas bien ce mot mais en tout cas pour essayer de me faire comprendre - sur place lui-même les accidents de courte durée, ce

qu'actuellement il ne fait pas. Ce qu'il fait actuellement, il ne fait qu'envoyer à la Commission de la santé et de la sécurité du travail la documentation qui est nécessaire et il attend purement et simplement le déroulement des événements. (15 h 30)

Mme la Présidente, c'est bien sûr qu'une disposition comme celle-ci va contribuer à désengorger la machine administrative de la commission. Le député de Saguenay m'a amené carrément sur la piste vers laquelle il faut de toute évidence aller, c'est-à-dire que les énergies, les activités et les efforts qui ne seront plus nécessaires pour traiter ces dossiers vont devoir, de toute évidence, être consacrés à autre chose, le domaine de la prévention en étant un particulièrement important. Le phénomène de la réadaptation avec les dispositions que contient la loi va également exiger des ressources humaines additionnelles. Il me semble qu'à partir de ces préoccupations, s'il y a des gens qui sont libérés de la machine administrative à cause du mécanisme des quatorze jours, les compétences de ces gens, les connaissances ou les expertises de ces gens vont devoir, de toute évidence, être consacrées à d'autres objectifs de la loi.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Mme la Présidente, je suis très heureux des déclarations du ministre parce que, même si on a toujours eu une certaine prudence vis-à-vis des actions de la CSST, c'est parce qu'on a vécu dans le quotidien, et particulièrement les membres de l'Assemblée nationale, on a vécu dans le quotidien les difficultés extraordinaires de l'accidenté. C'est pour ça qu'on veut faire préciser certains articles.

L'article 59, indépendamment de l'interprétation qu'on peut lui donner, ce serait peut-être une bonne chose qu'on le clarifie avec un amendement dans lequel il est bien dit tout le processus de récupération de salaire que vous m'avez expliqué, qu'il soit bien inclus dans un article ou dans un appendice d'article, dans un amendement qui va nous permettre... Vous avez tout le processus d'intérêt et, ainsi de suite, les quinze jours...

M. Fréchette: II y a un amendement pour ça.

M. Maltais: Je m'excuse, je n'ai pas eu le temps de le lire. Mais ça, c'est une perception que j'avais.

Il y a un autre aspect que vous avez touché et que j'ai touché aussi, et malheureusement, il faut en parler. C'est l'aspect de la bureaucratie écrasante. On est conscient de ce qui se passe à l'heure actuelle, et c'est un peu pour ça que vous avez apporté... C'était un des objectifs du projet de loi d'améliorer le sort de la personne blessée, du travailleur blessé, mais aussi de réduire...

Lorsqu'on fait une loi comme ça - on n'en fait pas tous les ans, ça fait 50 ans qu'il n'y en avait pas eu - je pense qu'il est important d'améliorer la loi dans tout son sens. Si elle est une amélioration pour le travailleur, elle doit être aussi un mieux-être pour l'employeur. À partir du moment où on est conscient de ça, toute la paperasserie qu'il y a de trop dans l'ancienne loi, on ne devrait pas la retrouver dans la nouvelle loi, si on veut faire une loi qui va durer encore 50 ans. Nos prédécesseurs qui l'ont faite, même si elle n'était pas parfaite - en tout cas, elle a duré 50 ans - ont certainement un des records de longévité de loi.

Ce qui serait prudent à ce stade-ci, ce serait de ne pas reconduire la bureaucratie dont vous avez des échos depuis des années, de ne pas la reconduire, ou de la simplifier le plus rapidement possible dans la nouvelle loi. Je ne sais pas à quel point on pourrait le mettre, mais ça devrait être un des objectifs aussi. Parce que corriger une loi en gardant les bois morts ou les poids morts qu'il y avait dans l'autre, ce n'est pas bon, ce n'est pas progressif. Il faudrait peut-être y penser quelque part, dans un article de la loi.

Tout à l'heure, lorsqu'on a parlé des quinze jours, de la période de travail indemnisée par l'employeur, vous avez dit: Moi non plus je n'aime pas ce mot, mais je n'en trouve pas d'autre, concernant le terme "gérer ses accidentés". Les droits de gérance comportent des obligations et il doit les payer aussi, même s'il est remboursé. C'est sûr que, à l'heure actuelle, il n'a pas à débourser plus de cinq jours, si je me rappelle bien; cependant, il gère aussi ses accidentés. Lorsqu'on va avec un employeur qui a 1500 ou 2500 employés, le dossier de chacun de ces employés est très bien suivi parce qu'il ne peut pas se permettre qu'il lui en manque dix le matin, surtout quand on fait de la production à la chaîne. Cela ne marche pas dans l'industrie privée, ça peut marcher dans la fonction publique, ça peut marcher ailleurs, mais dans l'industrie privée, ça ne marche pas.

Gérer ses accidentés, je ne pense pas que ce soit une nouveauté à l'intérieur de la loi parce que les employeurs qui ont beaucoup d'employés doivent nécessairement le faire par leur direction du personnel. Je ne pense pas que ça apporte quelque chose de neuf, pour moi, à part le fait de payer. Payer, cela apporte quelque chose de neuf pendant dix jours, mais gérer, cela ne m'apporte rien de neuf parce que, déjà, dans les grandes industries, dans celles de mon

comté, les directeurs de personnel sont obligés de gérer les cas d'accidentés et de maladies personnelles des gens.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Mme la Présidente, le dernier commentaire du député de Saguenay confirme en quelque sorte l'argumentation que je soumettais tout à l'heure quand il dit que les employeurs sont de toute manière obligés de gérer avec les mêmes réserves les accidents ou les maladies qui ne seraient pas professionnelles et qui arrivent à l'intérieur de l'entreprise.

Quelques observations à partir des préoccupations du député de Saguenay, dont la nécessité de faire disparaître une certaine forme de bureaucratie. Permettez que je revienne à l'article 58 où on parle des accidents de moins d'une journée et qu'on est convenu d'appeler les accidents non compensables par la commission elle-même. Dans l'état actuel des choses, même pour ce genre d'accident, l'employeur est obligé d'envoyer son rapport à la Commission de la santé et de la sécurité du travail; il y en a 140 000. Avec les dispositions de l'article 58, il n'y a plus, pour lui, l'obligation de procéder à compléter ce rapport et à l'expédier à la CSST. Il n'a qu'à faire un enregistrement dans un registre qu'il doit garder à l'intérieur de l'entreprise. Donc, pour 140 000 employeurs, voilà une tracasserie administrative qui disparaît. Plus besoin d'envoyer de rapport - inscription dans le registre.

Deuxièmement, dans l'état actuel des choses, pour la gérance des accidents de moins de cinq jours, l'employeur est obligé de payer, même si, par exemple, le salarié ne soumet pas une attestation médicale. À l'article 251 de la loi, vous allez constater qu'avant de procéder au paiement des quatorze jours, l'employeur peut exiger et le salarié doit remettre à l'employeur une attestation médicale pour confirmer le fait qu'il y a effectivement eu accident du travail. C'est une disposition nouvelle qui n'existait pas et qui va dans le sens dont on parle depuis quelques minutes, c'est-à-dire de la possibilité pour l'employeur d'exercer un droit de gérance normal et de ne payer que sur constatation qu'il y a effectivement eu accident du travail. Il me semble que non seulement cela ne bureaucratise pas, mais cela diminue les obligations de l'employeur en ces termes.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Juste une petite correction, M. le ministre. Vous avez parlé de 140 000 employeurs. J'imagine que dans votre esprit, c'étaient 140 000 travailleurs?

M. Fréchette: Vous avez tout à fait raison.

M. Maltais: D'accord. M. Fréchette: Oui, oui. M. Maltais: Merci.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Mme la Présidente, je voudrais avoir une explication de la part du ministre. Il y a une chose qui m'embête un peu. On regarde le deuxième alinéa de l'article 59, ce que vient d'expliquer, à toutes fins utiles, le ministre, c'est-à-dire: "L'employeur verse ce salaire au travailleur à l'époque où il le lui aurait normalement versé si celui-ci lui a fourni l'attestation médicale visée dans l'article 186." Par contre, quand on... Cela revient à dire, si je comprends bien, que l'employeur doit payer son employé si l'employé lui fournit un certificat médical.

M. Fréchette: Oui.

M. Lavigne: D'accord? Oui, on se comprend bien jusque-là. Par contre, on avait étudié l'article 35 et, au premier alinéa de cet article, il est dit: "Le défaut d'un travailleur de se conformer à la présente loi n'exonère pas l'employeur d'une obligation que lui impose la présente loi."

M. Fréchette: Oui.

M. Lavigne: Est-ce qu'on ne devrait pas faire éliminer ce paragraphe de l'article 35?

M. Fréchette: L'article 35 est une disposition d'ordre général qui ne va pas rejoindre des dispositions spécifiques qu'on retrouve à l'intérieur de certains chapitres. Mais, si c'était le contraire, la seule chose qui pourrait arriver, à mon sens, c'est que le salarié ne soit pas payé tant et aussi longtemps que le rapport médical n'est pas déposé. Il ne perdrait pas le droit au paiement - c'est mon évaluation - mais le défaut qu'on lui reprocherait serait de ne pas avoir soumis d'expertise médicale ou de rapport médical. Il n'est nulle part écrit dans la loi que ce défaut entraînerait la déchéance du droit au paiement de sorte que la seule pénalité ou le seul préjudice, ce serait d'être payé plus tard qu'autrement il aurait pu l'être.

M. Lavigne: Mais il pourrait de toute façon être payé.

M. Fréchette: Ah oui! De toute évidence, selon ma propre interprétation.

M. Lavigne: Donc, on ne peut pas enlever, à partir de cette explication, le paragraphe 1 de l'article 35?

M. Fréchette: Non.

M. Lavigne: Cela n'exonère pas le patron.

M. Fréchette: Non. La pénalité qui est prévue par le sens commun des choses, c'est le paiement plus tard que prévu du montant auquel il a droit.

M. Lavigne: Parfait. Merci.

La Présidente (Mme Juneau): Monsieur...

M. Fréchette: Est-ce qu'on a pris connaissance, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Juneau): Non.

M. Fréchette: ...de l'amendement qui serait ajouté à l'article 59?

M. Cusano: Oui, on l'a reçu.

La Présidente (Mme Juneau): II a été distribué, M. le ministre, mais il n'a pas été lu. Souhaiteriez-vous qu'on le lise tout de suite?

M. Cusano: Pourrait-on peut-être...

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: ...faire quelques commentaires avant de...

M. Fréchette: Oui, oui.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: J'aimerais dire au ministre que j'apprécie l'amendement qu'il nous présente à la suite de la suggestion du député de Nelligan. Ce ne sera pas un amendement qui fera un grand débat.

Si je comprends bien, le ministre nous dit que, présentement, l'employeur est impliqué dans une bureaucratie assez considérable justement pour fournir à la commission les détails à la suite d'un accident et d'une absence d'au moins une journée. D'abord, c'est un travail qui est fait présentement. On pourrait toujours argumenter sur la question des coûts supplémentaires. Encore là, si on regarde le rapport annuel on parle d'un nombre de jours d'une indemnisation: aucun. Cela devrait être sous la loi actuelle, on parle de 146 000. C'est dans le rapport annuel de la CSST. Dans le rapport actuariel sur le projet de loi 42 réimprimé, sauf si je le lis mal, on parle de 187 900, presque 188 000 journées dans le rapport actuariel. Cela fait une différence de quasiment 50 000. Le ministre pourrait peut-être nous expliquer la différence entre ces chiffres. M. le ministre, c'est dans le rapport actuariel que vous nous avez déposé.

M. Fréchette: M. le député de Viau est en train de m'expliquer que mon chiffre...

M. Cusano: Non, non, ce n'est pas tout à fait cela...

M. Fréchette: ...du nombre d'accidents de moins d'une journée serait erroné; est-ce que c'est cela?

M. Cusano: ...que je veux dire. C'est que lorsqu'on arrive pour faire certains calculs, à savoir quels seront les coûts reliés... Je ne voulais pas faire un débat, mais on peut se rendre dans un sens...

M. Fréchette: C'est à quelle page du rapport actuariel?

M. Cusano: C'est à la page... La page n'apparaît pas sur ma copie, attendez un peu, je vais en trouver une autre. Page 18. Peut-être qu'il y aurait une précision à faire: la durée des jours ouvrables qui est indiquée là serait-elle en dedans des quatorze jours ou...?

M. Fréchette: Cela ne réfère pas au même phénomène.

M. Cusano: Cela ne réfère pas au même phénomène. Même si on prend les 146 000...

M. Fréchette: Là on parle d'une journée compensable alors qu'à l'article 58 on parle de journées non compensables.

M. Cusano: Non compensables, d'accord. Mais, quand même, ce seront des coûts qu'on pourrait, comme cela a été chiffré ce matin... Ce montant que l'employeur aura à débourser, c'est un montant qui peut être dans les 2 000 000 $, 3 000 000 $ ou 4 000 000 $ dans l'ensemble des...

M. Fréchette: On a parlé de 2 000 000 $ ce matin.

M. Cusano: On pourrait dire que vous êtes conservateurs, on est plus libéral.

M. Fréchette: Prenez votre temps avant de dire que je suis libéral, ce n'est pas sûr.

M. Cusano: Non, non, on est plus libéral.

Une voix: Conservateurs, cela va. (15 h 45)

M. Cusano: J'aimerais bien comprendre la situation. On nous dit que, dans la loi actuelle, l'employeur a déjà un grand boulot à faire en ce qui regarde ces absences de moins d'une journée. La seule chose qu'il n'aura pas à faire, c'est... Je présume encore que le registre qu'il aura à tenir, mentionné dans un des articles de la loi, c'est un registre qui sera fourni par la CSST ou bien la CSST va lui dire exactement ce que le rapport doit contenir. Je me demande quelle est la différence avec le rapport que l'employeur fournit présentement, quel est l'ouvrage qui est nécessaire pour donner cette information à la CSST présentement et quel est l'ouvrage, justement, lorsqu'on en arrive à la tenue du registre.

Je suis d'avis qu'il ne peut pas y avoir une grande différence entre les deux. Lorsqu'on dit que cela va diminuer la tâche de l'employeur, la seule chose que cela peut éliminer c'est vraiment le timbre et le temps d'aller poster le rapport. De ce côté, si vous me dites qu'il y a une très, très grande différence entre le registre qu'il aura à tenir et ce qu'il y a présentement, peut-être que cela va changer un peu notre position.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je vais essayer de fournir au député de Viau les meilleures explications possible et je demandais aux gens qui sont avec moi...

M. Cusano: Est-ce que je pourrais, si vous me permettez, M. le ministre, en même temps... Le ministre nous a dit tout à l'heure qu'il faudrait traiter aussi, de la part de la CSST, tous ces cas d'absence de moins d'une journée seulement avec la même préoccupation qu'on traiterait tout autre cas qui est soumis à la CSST mais je pense que, dans la pratique, quelqu'un qui est absent pour une journée et qui est de retour le lendemain, il n'y a pas de question de réadaptation physique, sociale ou professionnelle. C'est juste un petit commentaire que je voulais passer.

M. Fréchette: Ou bien je me suis très mal exprimé ou le député de Viau n'a pas compris. Ce que j'ai dit, essentiellement, dans mes remarques, c'est que les ressources qui sont actuellement affectées au traitement des dossiers de moins de quatorze jours pourront être réaffectées à d'autres tâches plus importantes que le traitement d'un dossier de moins de quatorze jours comme, par exemple, s'adonner au développement des politiques de prévention, consacrer plus d'énergie à l'inspection, consacrer plus d'énergie à la réadaptation. Il me semble que c'est simple à comprendre. Je m'excuse si je me suis mal expliqué tout à l'heure mais c'est très précisément ce que je voulais dire, d'une part.

Deuxièmement, le député de Viau est en train de nous dire: Mettre une lettre à la poste avec un timbre dessus et puis adresser cela à la Commission de la santé et de la sécurité du travail, c'est une affaire banale, ce n'est pas préoccupant pour l'employeur. C'est aussi bien qu'il continue d'envoyer sa lettre que de retenir les dispositions de l'article 58.

Le député de Viau, qui est un homme très préoccupé par les politiques administratives de la CSST, a sans doute poussé la curiosité jusqu'à prendre connaissance d'un formulaire de rapport d'accident. Il a dû aussi réaliser que procéder à compléter un rapport d'accident ce n'est pas une formule simple dans l'état actuel des choses.

M. Cusano: Cela ne l'est pas.

M. Fréchette: Cela ne prend pas deux minutes pour compléter cela. Il faut répondre à toute une série de questions, donner force détails qui doivent prendre le temps, je ne sais pas, d'une secrétaire pendant une heure ou deux, uniquement pour compléter le formulaire d'accident. Alors, si le député de Viau est en train de nous dire: Cela devrait rester, même pour les accidents de moins d'une journée, je vais lui dire tout de suite qu'on va avoir beaucoup de difficultés à se rencontrer.

M. Cusano: Oui.

M. Fréchette: Deuxièmement, s'il trouve simple, pour l'employeur, le fait d'être obligé de procéder à compléter le rapport d'accident, l'introduire dans une enveloppe, mettre le timbre sur l'enveloppe, affecter du personnel à ces opérations, s'il trouve que cela n'est pas préoccupant actuellement pour l'employeur, tant mieux si c'est comme cela. On va garder le régime actuel, à toutes fins utiles.

Vous allez voir quand on arrivera au chapitre du registre qu'il n'y a qu'à donner deux ou trois détails et tout le processus est complété. On a chacun, évidemment, notre appréciation des choses, chacun notre appréciation des situations mais moi, au risque de me trouver en contradiction avec le député de Viau, je suis obligé de lui dire que ma conclusion est que c'est beaucoup plus simple, dans ces cas, de procéder par la seule voie du registre que de conserver l'état actuel des choses.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: Le ministre nous dit alors que les renseignements qui seront requis dans le registre seront minimes par rapport aux renseignements qui sont demandés présentement pour un rapport d'accident.

M. Fréchette: C'est écrit dans la loi.

M. Cusano: D'accord. Cela va. Le ministre a démontré une ouverture et il maintient le fait que, justement, ce montant ne serait pas remboursable. Il veut le maintenir, c'est son option. J'aimerais, par exemple, puisqu'on touche aux deux articles, lui demander, sur la question des quatorze premiers jours payables par l'employeur et qui seraient remboursés... Et je suis très heureux, justement, de l'amendement proposé, à savoir que, s'il y a retard de la part de la commission, il y aurait des intérêts payés à l'employeur. Cela va régler beaucoup de choses. Cela va régler des problèmes énormes, spécialement dans la relation entre l'employeur et la CSST. On a vu plusieurs occasions où, justement, la CSST devait rembourser des montants à l'employeur et on lui a dit tout simplement par lettre: Écoutez, l'argent qu'on vous doit, on va l'appliquer sur vos cotisations de l'année prochaine. Cela s'est vu assez souvent, cela. Cela va régler ces problèmes et j'en suis fier. Mais la question des quatorze premiers jours, avant de l'aborder telle quelle, je demanderais au ministre s'il serait aussi ouvert - parce que la question de l'obligation de payer dans les quinze jours, c'est une grosse concession - sur la période des quatorze jours.

M. Fréchette: Ouvert à quoi?

M. Cusano: C'est-à-dire à faire un certain changement, à réduire. Je vais expliquer pourquoi. Lorsque la période au Québec, justement, a augmenté, il s'est installé... Ce n'est peut-être la faute de personne; ce sont juste des choses... Les êtres humains étant ce qu'ils sont, cela se produit. On nous a dit en commission parlementaire que, depuis que les cinq premiers jours sont payables par l'employeur, dans chaque accident, c'est quasiment devenu automatique que l'absence est de cinq jours.

Ce n'est pas à cause des fraudeurs du système. Je voudrais bien que le ministre me comprenne. Ce n'est pas à cause des fraudeurs, comme l'a dit le juge Sauvé récemment. Je pense qu'il était dans le bout de la Gaspésie et il disait qu'il y avait un nombre incroyable de fraudeurs. Ce n'est pas ce que je veux dire. C'est que l'attitude générale qui se développe, l'attitude du médecin qui a à traiter l'accidenté et l'attitude du travailleur lui-même, sans mauvaise foi, qui arrive avec une lésion et... Puisque le médecin sait fort bien qu'il n'y aura pas de retard, que l'accidenté ne subira aucune perte de salaire, aucun délai, alors, on peut se ramasser dans une situation où ces absences qui sont maintenant quasi automatiques de cinq jours se prolongent à sept, huit, neuf, ou dix jours et que cela soit considéré normal. C'est une préoccupation parce que, vous savez, c'est un peu comme les réunions. On vit tous les réunions et, lorsqu'on commence à 4 heures, c'est rare... Malgré qu'ici on ne peut pas se plaindre, c'est rare que les réunions commencent à 4 heures. Cela me fait penser un peu... L'exemple que je pourrais vous donner, c'est que cela me fait penser au temps où j'étais directeur d'école. On est arrivé il y a dix ans et on m'a dit: M. Cusano, le dernier jour de classe, on devrait avoir un "party" pour les élèves. Je sais qu'il y a d'autres professeurs autour de cette table ou de cette salle. Parfait! On donne la dernière moitié de la journée justement pour pouvoir fêter la fête de Noël. L'année suivante, on m'a dit: Vous savez, ce n'est pas assez, cette demi-journée, parce qu'après cela il y a le ménage à faire. On demande que les "parties" de Noël soient le matin et non l'après-midi pour qu'on puisse nettoyer par après.

M. Lavigne: II y a les concierges.

M. Cusano: Oui, mais cela ne se fait pas toujours, M. le député de Beauharnois. Je ne veux pas m'éterniser sur le sujet, Mme la Présidente. Mon inquiétude particulière sur la question des quatorze jours, c'est qu'il s'instaure une espèce d'automatisme lorsqu'on parle d'une période d'absence. Je me demandais si le ministre serait prêt de ce côté à avancer des suggestions pour réduire cette période de quatorze jours à une période moins longue. Si on se base sur l'expérience que nous avons tous vécue dans nos comtés, l'accidenté, ce qui le préoccupe, ce n'est pas de savoir de qui ce montant vient. Les problèmes qu'on a vécus, ce sont justement les délais de la CSST à rembourser ou à commencer le paiement à la suite d'un accident. Ces délais, dans certains cas, vont jusqu'à une période de un ou deux mois avant que l'accidenté puisse recevoir son chèque de la CSST. Combien de cas - de l'autre côté de cette table, je pense que vous l'avez constaté - d'accidentés qui ont été obligés de se rendre au bonheur social, comme dit mon collègue le député de Sainte-Marie, pour se faire avancer de l'argent! Est-ce que vraiment la commission, dans toute son organisation, avec tous les ordinateurs qui ont été mis en place, elle n'est pas capable de commencer des paiements avant ces quatorze jours? L'autre inquiétude, pour se référer à l'exemple que

je vous donnais de l'école: Va-t-on nous arriver par après, dans un ou deux ans, et dire: Écoutez; Quatorze jours, ce n'est pas assez. Ce serait mieux si on allait à 21 jours. Ce sont mes inquiétudes, Mme la Présidente, et M. le ministre, je voulais simplement savoir si, sur cette question, vous seriez ouvert à examiner la possibilité que les quatorze jours soient réduits à un chiffre inférieur.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: J'aurais souhaité, Mme la Présidente, que le député complète sa suggestion et me dise à combien de jours il faudrait ramener les quatorze dont il nous parle. Il m'a demandé de faire des propositions. Ma proposition est dans l'article 59 de la loi et je suis obligé de vous dire à mon grand regret, Mme la Présidente, que l'argumentation que vient de développer le député de Viau ne m'a pas convaincu, mais pas du tout, de la nécessité qu'il y aurait de réduire le nombre de quatorze jours et je vais vous dire pourquoi. Le député de Viau a pris un nombre assez impressionnant de précautions oratoires pour dire: Mais non, je ne fais pas référence aux gens qui veulent essayer de frauder le système. Je ne suis pas en train de vous dire que des gens utilisent, à mauvais escient, les dispositions de la loi, mais je vais vous donner l'exemple de ce qui se passait dans l'école chez nous quand on avait nos "parties" de Noël. Il affirme le principe d'une façon tout à fait claire et catégorique qu'il ne se réfère pas, d'aucune espèce de façon, à des moyens de contourner la loi mais, par l'exemple qu'il utilise, il dit: C'est cela qui peut aussi arriver à cause du phénomène des quatorze jours. J'ai un peu de difficulté à accepter ce raisonnement. (16 heures)

En outre, Mme la Présidente, le député de Viau a affirmé avec beaucoup de conviction que, depuis qu'on a introduit dans la loi le paiement des cinq premiers jours, à peu près tous les accidents durent au moins cinq jours. C'est l'affirmation qu'il a faite, si je l'ai bien comprise. On n'a peut-être pas les mêmes renseignements et on ne fait peut-être pas la même lecture des documents qui nous sont soumis, mais je suis obligé de lui dire que les renseignements qu'on a, c'est que dans l'état actuel des choses alors que les cinq jours sont là, il y a 187 933 accidents annuellement qui sont compensables pour une journée. Alors, il y a donc 187 933 accidents, depuis que les cinq jours ont été introduits dans la loi, qui entraînent des pertes de temps d'une journée ou moins.

Alors, je ne suis évidemment pas tout à fait disposé â accepter l'affirmation aussi globale et générale qu'a faite le député de Viau.

Deuxièmement, Mme la Présidente... Pardon?

M. Grégoire: ...qui se rendent à cinq jours?

M. Fréchette: De six jours: 97 897.

M. Cusano: Vous vous référez justement au rapport actuariel...

M. Fréchette: Oui, bien sûr.

M. Cusano: Oui, je remarque cela. Qui se rendent à six jours, cela veut dire entre deux et six.

M. Fréchette: Oui, c'est cela.

Maintenant, Mme la Présidente, ce que plaide le député de Viau est un des arguments qui a été invoqué avec le plus de conviction qu'on pouvait voir par les gens qui représentaient les employeurs. L'argumentation qu'on développait, c'était de nous dire ceci: À partir de l'expérience de l'introduction des cinq jours dans la loi, nous avons constaté une incidence quant à l'augmentation des accidents du travail de cinq jours et moins. Nous avons effectivement procédé à cette vérification pour arriver à la conclusion que c'était vrai pendant un certain temps, pendant les quelques mois qui ont suivi l'introduction encore une fois des cinq jours. Mais, très peu de temps après, la situation s'est restabilisée et l'incidence des accidents de cinq jours ou moins est demeurée exactement ce qu'elle était avant l'introduction des cinq jours.

Maintenant, le député de Viau nous invite également à fortement accélérer les processus de paiement à la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Je veux bien que l'on paie dans les meilleurs délais, mais convenez avec moi que, dans l'état actuel des choses, la moyenne que cela prend en termes de jours pour que le rapport d'accident entre à la Commission de la santé et de la sécurité du travail, c'est 20 jours. Ajoutons à ces premiers 20 jours une autre période de 20 jours qui est aussi la période moyenne pour la réception du rapport médical. Il s'écoule donc obligatoirement une période de 40 jours avant que la commission ne soit en possession des instruments, des renseignements dont elle a besoin pour commander le paiement qui, généralement, arrive entre dix et quinze jours après que le dossier est complété.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Le ministre vient de donner une information qui suscite une question. Dans mon ignorance de l'administration de la

CSST, je croyais que l'idée pour laquelle on avait mis quatorze jours dans la loi, c'était pour permettre à la CSST d'enclencher immédiatement un processus qui ferait qu'il y aurait une continuité dans le paiement des indemnités que l'employé qui souffre d'une lésion professionnelle recevrait. Alors, je croyais qu'il y avait quatorze jours, justement pour permettre à la CSST de s'organiser et que, la fin de semaine suivante, cela serait au tour de la CSST de payer.

Ce que le ministre nous dit maintenant, c'est que ce seront 40 jours plus 15 jours, donc 55 jours, de toute façon. Alors, ceci veut dire qu'il va toujours y avoir, indépendamment des 14 jours, 5 jours ou quoi que ce soit, une période de 50 à 55 jours qui devrait s'écouler avant que l'employé reçoive une indemnité quelconque. Est-ce que j'ai mal compris? C'est ce que j'ai compris de votre intervention.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Pour l'accidenté, ce n'est pas ce processus qui va être suivi, c'est l'employeur qui, après avoir pris connaissance de l'attestation médicale que doit lui remettre le salarié, va procéder à indemniser le salarié pour les quatorze jours, au moment où, normalement, il recevrait sa paie.

M. Fortier: D'accord. Qu'est-ce qui arrive après quatorze jours?

M. Fréchette: Après les quatorze jours, l'employeur envoie son dossier è la commission et, dès lors que le dossier est complet, que toutes les pièces s'y retrouvent, il est immédiatement remboursé immédiatement... il y a les quinze jours dont on parle dans l'amendement, plus le paiement de l'intérêt.

M. Fortier: Là, je ne parlais pas de l'employeur. Je m'inquiète de l'employé.

M. Fréchette: Oui.

M. Fortier: L'employé, dans le moment, ce qu'on a dit, c'est qu'on voulait améliorer la loi, parce que l'employé était pénalisé parce que, lorsqu'il avait subi une lésion professionnelle, cela prenait un temps considérable avant qu'il reçoive une indemnité. Le ministre nous apporte un article qui dit: Je règle le problème pour les premiers quatorze jours. Bravo, le problème est réglé pour les premiers quatorze jours.

Mais je ne sais pas si le processus est enclenché à partir du jour no 1 ou du jour no 14, mais il y a un processus qui est enclenché à un certain moment. Le ministre nous dit que, de toute façon, cela prend quarante jours plus quinze jours avant que la CSST puisse émettre un chèque. Donc, que le délai ait lieu tout à fait au début ou tout à fait après les quatorze jours, il n'y a rien de réglé. Je veux dire qu'il va y avoir une période durant laquelle l'employé va être pénalisé de la même façon et je ne vois pas ce qu'on règle en payant les premiers quatorze jours.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: II y a certainement une incompréhension quelque part, Mme la Présidente. Dans le cas des quatorze jours, encore une fois, cela n'est plus la CSST qui va indemniser l'accidenté, c'est l'employeur qui va le faire. Et plus rapidement l'accidenté lui soumettra l'attestation médicale exigée par la loi, plus rapidement l'accidenté sera payé. Cela n'est pas simplement une affirmation d'ordre général que je fais, la loi prévoit que dès que l'employeur, s'il en exige un, est en possession d'un certificat médical attestant de l'état de l'accidenté, il doit l'indemniser au moment où il le paiera pour sa prochaine paie. Ce n'est plus l'accidenté qui fait sa réclamation à la Commission de la santé et de la sécurité du travail. L'employeur, cependant, quand il aura indemnisé pour ces quatorze premiers jours, après avoir reçu l'attestation médicale, soumettra sa réclamation à la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Là, la commission va traiter son dossier dans les délais que prévoit l'amendement.

M. Fortier: Je pense qu'on ne se comprend pas, M. le ministre. Prenons le cas d'une personne qui devrait être indemnisée pour trois ou quatre mois. Je comprends bien qu'il n'y a aucun arrêt en ce qui concerne le paiement de son salaire pour les quatorze premiers jours. Je comprends cela.

Ce qui m'inquiète, ce ne sont pas les premières deux semaines, cela est réglé. Mais si la personne doit être indemnisée pendant quatre ou cinq mois...

M. Fréchette: C'est l'article 254.

M. Fortier: ...quel est le délai que va mettre la CSST pour enclencher un processus sur l'informatique, qui va faire que la machine va émettre un chèque et que cette personne va le recevoir à la maison?

M. Fréchette: Alors, il faudrait d'abord voir comment le processus va s'enclencher, c'est l'article 254 de la loi qui nous le dit. Je pense que cela vaut la peine, pour les fins de la discussion qu'on est en train d'avoir....

M. Fortier: D'accord. M. Fréchette: ...de regarder... M. Fortier: Quel article? M. Fréchette: L'article 254.

M. Fortier: J'ai lu l'article 254 qui dit: "Le travailleur victime d'une lésion professionnelle qui le rend incapable d'exercer son emploi pendant plus de quatorze jours complets ou, s'il en décède, le bénéficiaire, produit sa réclamation à la commission...". C'est le bénéficiaire qui produit sa...

M. Fréchette: C'est le réclamant, l'accidenté, ou les personnes à charge...

M. Fortier: Alors...

M. Fréchette: ...qui ont droit à des indemnités.

M. Fortier: Je croyais que le but de la loi était de s'assurer que l'accidenté recevrait des paiements continus mais il va y avoir un hiatus de toute façon, un hiatus administratif. Tout ce que la loi change, c'est qu'au lieu que ce soit cinq jours cela va être quatorze jours pendant lesquels il n'y aura pas d'hiatus.

M. Fréchette: Non, la loi change autre chose aussi. La loi prévoit que, dans des cas spécifiques, lorsqu'il apparaît évident que l'accidenté qui ne recevrait pas d'indemnités en attendant qu'une décision finale soit prise... La commission pourra procéder au paiement des indemnités quand il apparaît tout à fait clair et évident que de toute façon c'est là-dessus que cela va déboucher et que le seul litige qui pourrait exister, si encore il y en a un, c'est le quantum.

En d'autres mots, c'est la mise sur pied, à la commission, d'un fonds de dépannage pour ceux qui, encore une fois, de toute évidence, ont une apparence de droit certaine mais dont le quantum de la réclamation peut être contesté.

M. Fortier: Ce qui est changé par les premiers quatorze jours, c'est que je ne sais pas quel pourcentage des accidents se retrouve à l'intérieur des quatorze jours? C'est certainement...

M. Fréchette: C'est 80%.

M. Fortier: 80%, donc il y a seulement les 20% qui dépassent quatorze jours. Dans ces cas, normalement, il y aurait quand même un hiatus tel qu'il existait avant mais là vous dites qu'il y a peut-être un fonds de dépannage qui pourrait permettre à la CSST de faire des paiements temporaires.

M. Fréchette: Non seulement il pourrait mais il y en a un de prévu dans les dispositions de la loi. Je ne sais pas précisément à quel article mais je sais qu'il y a une disposition prévue dans ce sens.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va, M. le député? Est-ce qu'on peut lire l'amendement qui a été proposé par le ministre?

M. Fréchette: Un instant, si vous me permettez, Mme la Présidente, je voudrais...

La Présidente (Mme Juneau): Oui, M. le ministre.

M. Fréchette: ...essayer de faire disparaître les doutes qui peuvent exister encore dans l'esprit du député d'Outremont, s'il y en a. L'article 126.

M. Fortier: Oui, là on dit qu'elle peut payer une indemnité. Je croyais que les critiques qui étaient faites venant des travailleurs étaient le fait qu'il y avait un hiatus important entre le moment où une personne souffrait d'une lésion professionnelle et le moment où elle recevrait un chèque.

M. Fréchette: Oui, c'est un hiatus.

M. Fortier: C'était une des critiques acerbes, je crois.

M. Fréchette: Bien sûr, c'est un hiatus. Prenez simplement l'état actuel des choses qui fait qu'un accidenté doive attendre trois ans ou quatre ans avant une décision de la Commission des affaires sociales. Pendant cette période, il ne reçoit pas d'indemnités. D'ailleurs, c'est l'équivalent d'un délit de justice, soyons très clairs entre nous. N'importe qui va se plaindre d'une semblable situation. Par ailleurs, va-t-on reprocher à un organisme payeur, qui prétend être dans son droit en refusant le paiement, de ne pas le faire tant et aussi longtemps qu'une décision formelle en ce sens n'est pas rendue? C'est un peu pour cela que l'article 126 est introduit pour, au moins, parer aux cas les plus patents de nécessité et de besoin.

M. Fortier: Oui. Je vois que cela ne réglera pas tout le problème mais cela va en régler.

M. Fréchette: Sans doute pas.

M. Fortier: S'il y a encore un doute... Parce que la CSST, sûrement, va se trouver dans cette situation, même avec l'article 126, que, si elle prend le risque de payer des

montants, elle ne les recouvrera pas éventuellement si sa décision est négative par la suite.

M. Fréchette: C'est cela.

M. Fortier: Il y aura toujours ce risque...

M. Fréchette: C'est cela.

M. Fortier: ...et de toute façon la procédure va être que l'employeur, je pense bien, va payer ses quatorze jours. A ce moment, il va envoyer le rapport à la CSST; cela va lui prendre peut-être encore dix jours. À ce moment, il va envoyer le certificat médical. Alors, c'est peut-être 25 jours ou un mois après l'accident que la CSST aura le document ou les documents, d'une part pour rembourser la compagnie et d'autre part pour entreprendre le processus parce que, j'imagine, la compagnie va envoyer tout cela en vrac.

M. Fréchette: Oui, et tout dépendra...

M. Fortier: À ce moment, le processus s'enclenche. C'est un mois après l'accident et cela va prendre encore un certain temps avant que l'article 126 puisse intervenir ou l'article 245, je ne sais pas trop.

M. Fréchette: Tout dépendra de la diligence que mettra l'employeur. Il est évident que, s'il laisse les formulaires sur le coin du bureau pendant un mois, ce n'est la faute de personne. Mais, il y a nécessairement l'obligation de vivre avec certaines contraintes de cette nature. On ne peut pas tout éliminer cela, c'est impossible.

M. Fortier: Remarquez bien que, quand j'étais dans le secteur privé, nous faisions la gestion vis-à-vis de certaines compagnies privées qui géraient certains programmes. Comme c'étaient nos employés, on faisait tout notre possible - je ne parle pas nécessairement de la CSST - pour qu'il y ait la plus grande continuité possible. C'est un employeur qui est bien organisé, qui est bien structuré, qui cherche à satisfaire ses employés; alors, on peut espérer que cela va se produire aussi.

La Présidente (Mme Juneau): Cela va?

M. Fortier: On peut procéder. (16 h 15)

La Présidente (Mme Juneau): L'amendement du ministre à l'article 59 se lirait comme suit: Ajouter, à la fin du troisième alinéa, les mots "dans les quatorze jours de la réception de la réclamation de celui-ci, à défaut de quoi elle lui paie des intérêts, déterminés conformément à l'article 305, à compter du premier jour de retard." Est-ce que l'amendement à l'article 59 est adopté?

M. Cusano: Adopté, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que les articles 58 et 59...

M. Fortier: À l'article 59, j'aurais une suggestion à faire. Je pense bien que le ministre, en faisant cet amendement, ne veut pas pénaliser l'employeur. C'est simplement qu'un employeur agisse, en tant qu'administrateur au nom de la CSST, ni plus ni moins, en tant qu'agent, je dirais, et que l'employeur se fasse rembourser le montant intégral du montant qu'il aura payé. Pour éviter ce qui est arrivé dans le passé où la CSST retenait des montants en prévision de certains paiements dus par la compagnie dans l'avenir, je me demandais si on ne pourrait pas mettre "le montant intégral" dans le troisième alinéa qui dit: "Ce salaire constitue l'indemnité de remplacement du revenu à laquelle le travailleur a droit pour les quatorze jours complets suivant le début de son incapacité et la commission en rembourse le montant à l'employeur."

M. Fréchette: C'est le montant qu'elle a payé. C'est le montant que l'employeur a payé que la commission doit rembourser. Il me semble qu'à partir du moment où l'on dit que le montant que l'employeur a payé lui est remboursé par la commission, cela ne peut pas être autre chose que l'intégralité du paiement qui a été fait. D'ailleurs, le phénomène dont le député d'Outremont parle ne procède pas de cette situation. C'est une autre situation.

M. Fortier: C'est une autre situation semblable. Le dernier alinéa dit: "Si, par la suite, la commission décide que le travailleur n'a pas droit à cette indemnité, en tout ou en partie, elle doit lui en réclamer le trop-perçu conformément à la section I du chapitre XIII". Donc, on en discutera plus tard. Là, c'est bien de l'individu et non pas de la compagnie.

M. Fréchette: Alors qu'actuellement c'est l'employeur qui est obligé de se livrer à ce mécanisme de perception, là, c'est la commission qui assume - pas le pouvoir -l'obligation de percevoir ce qui a été payé en trop.

M. Fortier: Merci.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va? M. le député de Viau.

M. Cusano: J'aurais un amendement à proposer au ministre concernant l'article 59.

Que le chiffre "14" soit remplacé par le chiffre "7", au premier alinéa, à l'avant-dernière ligne.

M. Fréchette: II faudrait bien savoir si ce sont sept jours ouvrables ou sept jours de calendrier.

M. Cusano: Sept jours de calendrier.

M. Fréchette: Sept jours de calendrier. Mme la Présidente, sur la motion je serai très bref parce qu'évidemment elle pourrait susciter tout le débat qu'on vient de faire. Je ne répéterai pas, donc, l'argumentation qu'on a développée. Je vous dirai essentiellement cependant que, pour les motifs qu'on plaide depuis trois heures cet après-midi, je ne pourrai, quant à moi en tout cas, souscrire à l'amendement du député de Viau.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: Je n'ai pas non plus l'intention, M. le ministre... Au cas où il serait inquiet qu'un prochain amendement, si celui-ci est battu, de toute évidence, il l'est peut-être déjà... Je n'ai pas l'intention de procéder avec un autre amendement en disant que cela fait huit et de commencer tous les arguments jusqu'au moment où on se rendra à quatorze. Je n'en ai aucunement l'intention. Je pense que jusqu'à maintenant on a fonctionné de façon adéquate et intelligente.

Ma préoccupation, Mme la Présidente, c'est, comme cela a été mentionné par mon collègue de Nelligan et d'autres, le fardeau qu'on amène à la petite et moyenne entreprise et spécialement la petite entreprise. Je ne suis pas inquiet pour les multinationales mais je voudrais tout simplement dire que la petite entreprise qui a cinq, six, sept employés, Dieu sait combien il lui est difficile de nos jours de joindre les deux bouts. Dans le cas d'un accident, justement, l'employeur propriétaire de cette petite entreprise se voit débourser pendant quatorze jours... En réalité ce sont dix jours puisqu'on parle - le ministre l'a spécifié - de quatorze jours de calendrier. On essaie de réduire et, en même temps, de faciliter aussi la tâche administrative de la CSST. Je le comprends et c'est pour cela que j'aurais bien pu faire un amendement pour l'amener à cinq, mais il me semblerait que sept, ce serait raisonnable. Pour en revenir à la petite entreprise, lorsqu'elle a un accidenté, pendant cette période, elle doit verser les 90%. En même temps, il faut que l'ouvrage soit fait en entreprise. Il faut que, justement, l'employeur aille chercher un remplaçant. Pour cette période, l'employeur se trouve à verser deux salaires. C'est vrai que le montant est remboursable par la CSST et c'est vrai que, à la suite de l'amendement qu'on a adopté, si la CSST est irresponsable dans son remboursement, des intérêts seraient versés, seraient dus. C'est justement sur le fait que la petite entreprise, elle, qui n'a pas un fonds de roulement énorme, doit débourser le salaire de l'accidenté et, en même temps, payer l'autre salaire. Cela veut dire que, pour cette période, il y a un double paiement qui nécessite peut-être que l'employeur se rende à la banque, emprunte de l'argent et ainsi de suite. Je n'embarquerai pas dans les calculs pour savoir combien cela va coûter, mais c'est une préoccupation. Il y a aussi la question des sept jours. Cela rejoint l'opinion que j'ai. Je voudrais préciser. Le ministre m'a dit que, j'ai fait bien attention, je parlais de fraudeurs et ainsi de suite; je ne parlais pas de fraudeurs, je parlais de l'être humain. Lorsqu'on n'a pas assez d'exigences, qu'est-ce qui arrive? On est un peu plus ouvert sur certaines choses.

M. Gagnon: Je m'excuse auprès de notre collègue...

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Champlain.

M. Gagnon: Je ne sais pas si c'est une impression que j'ai, mais cela fait très certainement une heure et demie qu'on entend sensiblement les mêmes choses sur les mêmes articles. Si c'est tout simplement perdre notre temps qu'on fait ici, on peut continuer dans ce sens; mais, serait-il possible de demander au député de Viau... J'ai essayé de faire de la lecture en même temps pour me distraire parce que je trouvais que les mêmes arguments revenaient souvent, mais là on recommence encore. Est-ce que c'est juste pour étirer le temps? Vraiment, cela commence à être un peu démoralisant. Je demanderais au député de Viau de ne pas s'obliger à répéter encore toute l'argumentation qu'on entend depuis une heure et demie et peut-être qu'on mette son amendement au vote le plus vite possible pour qu'on puisse avancer dans nos travaux.

M. Lavigne: Question de règlement, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député...

M. Lavigne: Est-ce qu'il n'y a pas un temps limite de discussion pour chacun des arguments?

M. Cusano: Oui, on est sur l'amendement.

M. Lavigne: Sur l'amendement, ah!

M. Gagnon: Mme la Présidente, avant l'amendement. On a fait toute la discussion et, après, on arrive avec un amendement et on recommence les 20 minutes par personne sur l'amendement. Y a-t-il possibilité - je ne vous en tiens pas rigueur - à l'avenir de surveiller le temps de parole de tout le monde de façon qu'on discute l'amendement après l'avoir déposé et non pas avant et après encore?

La Présidente (Mme Juneau): M. le député... Un instant, s'il vous plaît!

M. Cusano: Question de règlement, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): Voulez-vous me laisser intervenir deux petites minutes, s'il vous plaît?

M. Cusano: Oui, madame.

La Présidente (Mme Juneau): Sur l'effet du calcul du temps, tout a été fait à la minute près, d'une part. D'une autre part, chacun des membres n'a pas complètement dépensé son temps, si je peux m'exprimer ainsi. Donc, le député...

M. Gagnon: De ce côté-ci, sûrement pas.

La Présidente (Mme Juneau): Sûrement pas, M. le député.

M. Cusano: Mais vous avez le droit de le dépenser, M. le député de Champlain.

M. Gagnon: On a trop de respect pour les travaux de l'Assemblée nationale pour faire perdre autant de temps que vous le faites, monsieur.

M. Cusano: Ah bon! C'est pour cela qu'on étudie un projet de loi de 556 articles et presque 200 amendements ainsi que plusieurs autres qui sont en rédaction.

La Présidente (Mme Juneau): Cela dit, est-ce qu'on pourrait convenir que les articles 58 et 59 seraient adoptés avec amendements, M. le député de Viau?

M. Cusano: C'est-à-dire que j'ai un amendement à proposer. J'aimerais bien que...

Une voix: Qu'on en dispose.

M. Cusano: ... qu'on en dispose. Si mes collègues avaient des commentaires à ajouter... Je voulais tout simplement préciser... Le ministre a aussi fait une ouverture. Il disait que sa proposition était sur la table et il s'attendait qu'il y ait une proposition de notre part. Je l'ai faite, la proposition.

Une voix: Je suis prêt à voter, moi.

M. Cusano: Vous êtes prêt à voter? C'est bien.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que vous voulez que je relise l'amendement qui a été proposé par le... Cela va? Vous êtes prêts à voter?

M. Fortier: Mme la Présidente, je voudrais vous indiquer que je n'utiliserai pas mon temps de parole pour des motifs autres que ceux de mon collègue. Quant aux explications que j'ai eues tout à l'heure, je me demande encore pourquoi c'est quatorze et que ce n'est pas autre chose. J'ai écouté attentivement les explications du ministre, mais je n'ai pas saisi toute l'astuce dans le choix de quatorze jours par rapport à sept jours.

M. Fréchette: Cela représente 80% des dossiers.

M. Cusano: Et pour sept jours, on parlerait de quel pourcentage des dossiers, M. le ministre?

M. Fréchette: Cela représente 97 000 dossiers au lieu de 180 000.

M. Cusano: Cela faciliterait un peu la tâche de la CSST et je pense que c'est une bonne solution de compromis sur cette période. Alors...

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'amendement du député...

M. Grégoire: Concernant la bureaucratie, si vous proposez quatorze jours ou sept jours, dans les faits, le gars dans l'industrie qui est blessé, s'il est blessé le mercredi et que le chèque de paie arrive le vendredi suivant, il y a cinq ou six jours ouvrables. Cela veut dire qu'il y a six jours sur le chèque de paie de deux semaines pour cette quinzaine qui sont remboursables par la CSST et qui doit donc faire l'objet d'un document. À la deuxième quinzaine, comme c'est quatorze jours, il y a encore une autre - parce que ce sont deux jours de calendrier - période de quatre jours sur le chèque de paie qui fait l'objet d'une autre document à envoyer à la CSST. C'est simplement la bureaucratie que le mot "quatorze" indique. Le mot "quatorze" ne semble pas s'aligner sur les normes hebdomadaires des chèques de paie.

M. Fréchette: On ne peut pas choisir les jours où on a nos accidents.

M. Grégoire: Non, mais les jours de paiement, par exemple, vous pouvez le dire. Si c'est aligné sur les jours où les industries font ordinairement leurs chèques de paie, je pense que là...

M. Fréchette: C'est exactement ce qui est écrit dans la loi: à la prochaine paie.

M. Grégoire: À la prochaine paie, mais, si la prochaine paie ne comprend que quatre jours après l'accident...

M. Fréchette: Écoutez, vous êtes en train de me demander: Y a-t-il moyen que les travailleurs choisissent...

M. Grégoire: Cela veut dire que..

M. Fréchette: ...quelle journée ils vont avoir un accident?

M. Grégoire: Non, non. M. le ministre, écoutez-moi bien. Vous savez exactement ce que je veux dire et je pense bien que...

M. Fréchette: Je ne comprends pas.

M. Grégoire: ...ce n'est pas moi qui ai abusé de la discussion. Oui, vous comprenez. Si le prochain chèque de paie vient quatre jours après l'accident - je sais bien que vous n'avez pas choisi le jour de l'accident - cela veut dire que l'employeur devra l'indiquer sur deux chèques de paie au lieu de sur un. C'est ce que je voulais faire remarquer. C'est de la paperasse qui s'ajoute.

M. Fréchette: D'accord.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'amendement du député de Viau est adopté?

M. Cusano: Adopté. M. Fréchette: Rejeté.

La Présidente (Mme Juneau): Rejeté. Est-ce que l'article 58 tel qu'amendé est adopté?

M. Fortier: Quel était l'amendement, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Juneau): On a adopté un amendement ce matin, M. le député d'Outremont, qui était d'ajouter, à la fin de l'article 58: "L'employeur verse le salaire au travailleur à l'époque où il le lui aurait normalement versé..."

M. Fortier: C'est cela.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 58 tel qu'amendé est adopté?

M. Cusano: Sur division.

La Présidente (Mme Juneau): Sur division. Est-ce que l'article 59 tel qu'amendé est adopté?

M. Cusano: Sur division.

La Présidente (Mme Juneau): Merci. Article 60?

M. Fréchette: Y a-t-il des amendements à l'article 60?

La Présidente (Mme Juneau): Non, cela va à l'article 65, M. le ministre. (16 h 30)

M. Fréchette: L'article 60 me paraît relativement simple. Mais ce n'est pas parce qu'il est simple en apparence qu'on doit l'adopter rapidement. Il spécifie purement et simplement que, lorsque le travailleur accidenté qui est revenu au travail se retrouve dans l'obligation de s'absenter de son travail pour des fins de traitements médicaux, pour réaliser son programme de réadaptation, ces absences nécessitées par l'une ou l'autre des deux situations dont je viens de parler doivent être payées par l'employeur.

Il y a un cas où l'employeur... Alors, c'est ce que je viens de dire. La commission va rembourser à l'employeur le montant qu'elle paie pour ces fins-là, les deux fins dont je viens de parler, mais elle ne remboursera pas l'employeur si l'accidenté est allé en traitement médical ou en expertise médicale à la demande de l'employeur.

J'attire l'attention des collègues sur le libellé du deuxième paragraphe de l'article 60: "La commission rembourse à l'employeur, sur demande, le salaire qu'il a payé..." C'est pour couvrir le cas où l'employeur en viendrait à la conclusion qu'une absence d'une heure ne vaut pas la peine, à toutes fins utiles, d'être réclamée, parce que cela commanderait de l'énergie pour plus que le montant réclamé que de présenter la demande de paiement à la commission.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce qu'il y a des interventions? M. le député de Viau.

M. Cusano: C'est strictement pour des examens médicaux, n'est-ce pas?

M. Fréchette: Bien, la loi le précise très clairement: "...s'absenter de son travail pour recevoir des soins ou subir des examens médicaux relativement à sa lésion ou pouraccomplir une activité dans le cadre de son plan individualisé de réadaptation." Il y a deux phénomènes, donc.

M. Cusano: Cela est dans le cas, si je comprends bien, d'une personne qui est réintégrée au travail, mais qui aurait à subir des traitements une fois par semaine, une fois par mois ou ainsi de suite.

M. Fréchette: Physiothérapie, enfin tout autre phénomène ou activité qu'on retrouverait à l'intérieur de son programme de réadaptation, ou alors un examen médical chez son médecin.

M. Cusano: II n'y a pas de problème avec cela.

Une voix: Adopté?

La Présidente (Mme Juneau): L'article 60 est-il adopté?

M. Cusano: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): L'article 61?

Une voix: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): Adopté. L'article 62?

Calcul de l'indemnité de remplacement du revenu

M. Fréchette: II n'y a toujours pas d'amendement?

La Présidente (Mme Juneau): Non, monsieur.

Une voix: La même chose qu'à l'article 61.

M. Fréchette: Ah bon!

La Présidente (Mme Juneau): C'est à 65.

M. Fréchette: Mme la Présidente, ce ne sera peut-être pas suffisant pour moi de simplement indiquer que l'article 62, tel qu'on le retrouve dans le projet de loi 42, est la reconduction intégrale du texte de la loi actuelle sur les accidents du travail. Cet article 62 donne les balises dont il faut tenir compte pour déterminer le revenu net retenu que le travailleur tire annuellement.

La Présidente (Mme Juneau): L'article 62.

M. Cusano: L'article 62.

M. Grégoire: ...

La Présidente (Mme Juneau): Oui.

M. Grégoire: Vite de même?

La Présidente (Mme Juneau): Oui.

Une voix: Cela a été vite.

M. Fréchette: Cela ne se peut pas, n'est-ce pas?

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce qu'il y a des interventions sur l'article 62?

M. Grégoire: Non, sur l'article 61, j'ai...

M. Fréchette: Ah, il est adopté!

La Présidente (Mme Juneau): II est adopté, M. le député.

Une voix: Trop tard.

M. Grégoire: D'accord, je vais le faire à l'article 62. Le calcul de l'indemnité de remplacement du revenu, cela va revenir è ce que je vous ai parlé ce matin, M. le ministre, il va falloir trouver l'article où placer cela.

Le revenu net que le travailleur tire annuellement, c'est à peu près les mêmes mots qu'à l'article 61, ou à peu près, c'est ce qu'il retire moins ce qu'on lui enlève en impôt, moins ce qu'on lui enlève en assurance-chômage, cotisation ouvrière payable, et moins la Loi sur le Régime de rentes du Québec.

Or, il n'est pas fait mention du tout de ce qu'il paie - parce que cela aussi est une retenue - pour son régime de retraite vis-à-vis de la compagnie. Est-ce que cela veut dire, comme cela n'est pas mentionné, que son revenu net... C'est bien mentionné que c'est moins l'impôt, moins son assurance-chômage, moins son régime de rentes; mais ce n'est pas mentionné moins son régime de retraite qu'il paie avec la compagnie. Si cela fait 20 ou 25 ans que le gars est avec la même compagnie et qu'il est rendu à 50 ans, pourquoi, jusqu'à l'âge de 65 ans, ne pourrait-il pas continuer à payer son régime de retraite pour l'avoir à 65 ans quand son indemnité de remplacement du revenu va tomber?

M. Fréchette: Mme la Présidente, je vous signale que la discussion qu'est en train d'amorcer le député de Frontenac a déjà été faite à certains égards et, deuxièmement, il y a trois ou quatre articles qui sont encore en suspens et qui ont été mis en suspens, très précisément, pour revenir sur cette question. Ce sont les articles 47, 48, enfin, je les ai donnés ce matin. 47, 48, 50, 51 et 52. Tous ces articles ont été tenus en suspens à la demande du député de Sainte-Marie et du consentement de tous les

membres de la commission qui étaient présents, pour que nous puissions y revenir et faire toute la discussion.

M. Grégoire: Sur cette affaire. M. Fréchette: Très précisément.

M. Grégoire: Très bien, M. le ministre, cela me satisfait, je n'insisterai pas. Deuxièmement, je voudrais demander au ministre - cela ne sera pas plus long - quand il ne paie pas sa régie des rentes, est-ce que cela veut dire que, lorsque vient le temps où son indemnité de remplacement du revenu cesse, c'est-à-dire à 65, 67 ou 68 ans, avec la diminution de 100% à 75%, à 50%, à 25%...

M. Fréchette: II y a un article dans la loi qui prévoit cela. On va vous dire très précisément lequel.

M. Grégoire: Quel numéro?

M. Fréchette: C'est ce qu'on va vous dire dans une seconde.

M. Grégoire: Il prévoit cela. M. Fréchette: Oui.

M. Grégoire: Le gars aurait droit à son régime des rentes comme s'il y avait contribué?

M. Fréchette: L'article 487.

Le Président (M. Dussault): Y a-t-il d'autres interventions?

M. Grégoire: Attendez un peu. On me dit l'article 487.

Le Président (M. Dussault): Cela va-t-il, M. le député de Frontenac?

M. Grégoire: Est-ce qu'on indique que, si on lui retranche les paiements qu'il aurait faits autrement à la Régie des rentes du Québec, même s'il n'a plus à les payer, il recevra sa régie des rentes tout comme s'il les avait payés?

M. Fréchette: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Je ne voudrais pas être désagréable à l'endroit du député de Frontenac, mais je viens de lui signaler que nous avions tous convenu, à l'unanimité des membres de la commission, de réserver cette discussion lorsque nous reprendrions l'étude des articles qui ont été tenus en suspens.

Cela serait contre-indiqué, me semble-t-il, puisqu'il y a des membres qui étaient ici et qui ont participé à ce consentement qui n'y sont pas actuellement, d'entreprendre la discussion sur cela. D'autant plus qu'on aura une autre occasion, à l'article dont on vient de parler, de refaire la discussion. Cela n'est pas pour être désagréable, mais on avait entrepris l'étude de l'article 62.

M. Grégoire: À l'article 62, on parle aussi de ces choses. Ma dernière question: Est-ce que cela veut dire qu'on a réservé cela aux articles qui vont traiter et du régime de rentes et des régimes de retraite des compagnies?

M. Fréchette: Très précisément.

M. Grégoire: D'accord, M. le ministre, quand on y reviendra, on en parlera.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 62 est adopté? M. le député d'Outremont?

M. Fortier: Cela va.

La Présidente (Mme Juneau): Adopté. L'article 63?

M. Fortier: À ce sujet, il y avait des articles en suspens parce qu'on s'était posé la question de savoir si c'était uniquement revaloriser à la hausse ou revaloriser à la baisse. Ici, on parle de revaloriser...

M. Fréchette: Cela aurait une relation avec les articles qui ont été laissés en suspens.

M. Fortier: Je ne sais pas. Est-ce que "revaloriser" peut s'appliquer autant à la hausse qu'à la baisse? J'imagine que oui.

M. Fréchette: Juste un petit instant, si vous permettez.

Alors, Mme la Présidente, est-ce que les membres de la commission permettraient que le spécialiste de la technique l'explique? Je risquerais de...

M. Fortier: II y a consentement, oui.

La Présidente (Mme Juneau): La parole est à M. Lionel Bernier.

M. Bernier (Lionel): Ce que vise l'article 63, c'est de prévoir que, lorsque la commission révise ou revalorise une indemnité - la révision est une chose: la revalorisation, c'est l'indexation - lorsqu'elle le fait, cela indique à partir de quelle table elle le fait. Supposons que l'accident survient en 1984 et qu'elle doit réviser ou revaloriser en 1986, la table des revenus nets retenus a

été indexée en 1985, elle a été indexée en 1986. Ce que cela dit, c'est qu'au lieu de prendre la table des revenus du moment de l'accident on doit prendre la table des revenus au moment où on fait cette révision ou cette revalorisation. Cela veut dire que le revenu de base, par exemple, qui était de 20 000 $, au bout de deux ans, quand on l'indexe, devient 23 000 $. C'est cette table...

M. Fortier: Je n'ai pas de difficulté avec cela. Tout simplement, ce que je veux dire, c'est que... Je comprends. Je vous remercie beaucoup de l'explication, mais je n'ai aucune difficulté avec votre explication.

C'est simplement qu'on dit: "détermine un nouveau revenu brut en vertu de l'article 75 ou revalorise le revenu brut..." Et si vous disiez: ou modifie le revenu brut, parce qu'il y a d'autres articles où on s'est posé la question pour savoir s'il pouvait y avoir une diminution ou une augmentation. Mais que la modification se fasse en fonction de la nouvelle table, ce qui est comme s'ajuster par rapport à une nouvelle table d'impôt, je ne vois aucune difficulté avec cela.

M. Bernier: Mais la revalorisation, cela vise seulement l'indexation. Il y a un article qui spécifie comment cela doit se faire, c'est 65. Aux articles 114 et suivants, vous avez le chapitre de la revalorisation. C'est la forme d'indexation...

M. Fortier: L'article 114 nous réfère à l'article 47. Si je me souviens bien, l'article 47 a été suspendu.

M. Fréchette: Oui.

M. Fortier: Pour les motifs dont je viens de faire état. À quel moment le ministre va-t-il pouvoir nous revenir avec l'article 47?

M. Fréchette: Sans doute demain, Mme la Présidente. Je n'ai pas d'objection à laisser aussi en suspens l'article 63.

M. Fortier: Je ne vois pas de difficulté, je serais prêt à dire adopté. C'est simplement le fait, selon la décision qu'on va prendre sur l'article 47.

M. Fréchette: Est-ce qu'on ne pourrait pas l'adopter sous cette réserve?

M. Fortier: C'est la seule réserve que j'ai.

M. Cusano: J'aurais une question, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): M» le député de Viau.

M. Cusano: On dit: "en considérant la situation familiale..." C'est en considérant le nombre de personnes qui sont dans la famille, justement...

M. Fréchette: Cela serait peut-être un des éléments à considérer.

M. Cusano: Mais, est-ce que cela peut déborder au-delà... La situation familiale, c'est la famille immédiate?

M. Fréchette: II me semble que les mots veulent dire ce qu'ils veulent dire: l'épouse, deux enfants de tel âge, enfin...

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va, M. le député?

M. Fortier: La réaction que j'ai, c'est que, normalement on retournerait au rapport d'impôt de l'individu, sauf qu'ici c'est comme normalisé pour simplifier l'administration.

M. Fréchette: C'est cela.

La Présidente (Mme Juneau): L'article 63 est adopté, sous réserve.

M. Fortier: Adopté sous réserve de la modification à l'article 47, éventuellement.

La Présidente (Mme Juneau): D'accord. L'article 64?

M. Fréchette: Alors, l'article 64, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre. (16 h 45)

M. Fréchette: Vous permettez que je ne fasse que lire et rapidement. Il faudrait retenir qu'on a adopté l'article 6. Cela ne fait que confirmer en quelque sorte le fait qu'il ne peut pas y avoir d'indemnité qui soit calculée à partir d'une base inférieure au salaire minimum....

M. Fortier: Pas de problème avec cela.

M. Fréchette: ...ni supérieure, bien sûr, au maximum assurable.

La Présidente (Mme Juneau): L'article 64 est-il adopté?

M. Cusano: Adopté. M. Fortier: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): Adopté. L'article 65 a un amendement. C'est tout un amendement à part cela: Remplacer l'article 65 par le suivant: "65. Pour l'année 1985, le maximum annuel assurable est de 33 000 $.

"Pour l'année 1986 et chaque année subséquente, le maximum annuel assurable est obtenu en multipliant le maximum pour l'année 1985 par le rapport entre la somme des rémunérations hebdomadaires moyennes des travailleurs de l'ensemble des activités économiques du Québec établies par Statistique Canada pour chacun des 12 mois précédant le 1er juillet de l'année qui précède celle pour laquelle le maximum annuel assurable est calculé et cette même somme pour chacun des 12 mois précédant le 1er juillet 1984. "Le maximum annuel assurable est établi au plus haut 500 $ et est applicable pour une année à compter du 1er janvier de chaque année. "Pour l'application du présent article, la commission utlise les données fournies par Statistique Canada au 1er octobre de l'année qui précède celle pour laquelle le maximum annuel assurable est calculé. "Si les données fournies par Statistique Canada ne sont pas complètes le 1er octobre d'une année, la commission peut utiliser celles qui sont alors disponibles pour établir le maximum annuel assurable. "Si Statistique Canada applique une nouvelle méthode pour déterminer la rémunération hebdomadaire moyenne pour un mois donné, en modifiant la période ou le champ d'observation visé, et que la somme des rémunérations hebdomadaires moyennes pour une année au cours de laquelle Statistique Canada a appliqué une nouvelle méthode est supérieure ou inférieure de plus de 1% à la somme des rémunérations hebdomadaires moyennes établies selon les données de l'ancienne méthode, les rémunérations hebdomadaires moyennes à utiliser pour établir la moyenne annuelle pour chacune des années affectées par le changement de méthode sont ajustées par la commission de façon à tenir compte des données selon la méthode appliquée par Statistique Canada le... (inscrire ici la date de l'entrée en vigueur du présent article)."

M. Cusano: Cet...

La Présidente (Mme Juneau): Pardon?

M. Fréchette: Mme la Présidente, c'est...

M. Cusano: Peut-être avant que le ministre...

M Fréchette: C'est une formule singulièrement compliquée pour, finalement, dire quelque chose de très simple. On veut arriver à déterminer que le maximum annuel assurable, qui est actuellement de 31 500 $, sera porté à 33 000 $ pour l'année 1985.

Nous procédions à partir de la méthode que retenait Statistique Canada et, avec l'article 65 tel qu'on le retrouve dans le projet de loi 42, nous aurions effectivement atteint le maximum dont on parle, c'est-à-dire les 33 000 $ en 1985.

Cependant, Statistique Canada a changé sa formulation ou sa méthode pour en arriver à établir le salaire moyen dans le sens suivant. Jusqu'à tout récemment, on ne tenait pas compte des situations existant dans les entreprises de 20 travailleurs et moins. Maintenant, on en tient compte. De sorte que, si on ne retenait pas le texte qu'on retrouve à l'article 65, nous ne pourrions pas atteindre l'objectif de voir le salaire maximum annuel assurable à 33 000 $ en 1985. C'est encore une fois une formule bien compliquée pour strictement dire ce que je viens de dire.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Quel est le maximum?

M. Fréchette: Actuellement, il est de 31 500 $.

M. Cusano: Cette même formule...

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: ...a été employée à l'assurance automobile.

M. Fréchette: C'est la nouvelle formule utilisée par Statistique Canada qui va s'appliquer partout maintenant.

M. Bisaillon: D'année en année? M. Fréchette: Oui.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'amendement à l'article 65 est adopté?

Une voix: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): L'article 65 tel qu'amendé est adopté.

M. Cusano: Cela va bien.

La Présidente (Mme Juneau): Adopté. L'article 66?

M. Cusano: II n'y a pas d'amendement à l'article 66.

La Présidente (Mme Juneau): Non, M. le député. Cela va aller à l'article 72.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je ne fais que lire rapidement le commentaire. Cet article permettra à la commission de tenir compte du revenu brut prévu par le contrat

de travail du travailleur, tout en laissant à celui-ci, pour qu'il n'en soit pas lésé, la possibilité de démontrer un revenu brut annuel d'emploi plus élevé. Comparativement à la méthode prévue par l'actuelle loi sur les accidents du travail qui oblige, sauf exception, à tenir compte des gains passés, cette méthode est à la fois plus facile d'application et plus juste.

C'est précisément pour arriver à établir le revenu brut annuel d'un salarié à partir de son contrat de travail, tout en laissant ouverte la possibilité de faire la preuve que ses gains réels provenant de ses occupations sont supérieurs à ce qui est prévu à son contrat de travail; pour les gens, par exemple, qui auraient deux emplois.

Une voix: Les bonis et les primes.

M. Fréchette: Les bonis et les primes, des situations comme celles-là. D'ailleurs, au paragraphe 2 de l'article 66, on énumère quelques-unes des situations auxquelles on peut se référer.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: L'article 66 prévoit que c'est le travailleur qui doit faire cette démonstration à la commission. Je voudrais savoir, de la part du ministre, s'il serait trop compliqué que ce réexamen se fasse d'année en année par la commission elle-même; autrement dit, qu'on renverse le...

M. Fréchette: Ce mécanisme n'intervient qu'une seule fois et c'est au moment où l'accident se produit, quand arrive le temps de déterminer le salaire annuel brut du salaire. Par la suite, il n'est plus nécessaire de reprocéder à cette évaluation.

M. Bisaillon: On se fixe sur le contrat de travail, même si le contrat de travail prévoyait des augmentations, par exemple.

M. Fréchette: II va être revalorisé, de toute façon, à l'anniversaire de la lésion. C'est pour cela que c'est nécessaire de le faire seulement une fois.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: Mme la Présidente, sur la question, justement, du deuxième paragraphe, lorsqu'on dit qu'on peut y inclure des bonis et des primes, je n'y vois aucune difficulté, mais, lorsqu'on arrive à y inclure des pourboires, des commissions, ainsi de suite, est-ce qu'il y aurait un mécanisme, dans un sens, c'est-à-dire le nombre de personnes dans un établissement, le pourboire pour cette période, le pourboire moyen, si on veut, parce que d'abord, de ce côté, on pourrait, tout d'un coup... Spécialement, on sait les problèmes qu'on connaît du côté des pourboires ces jours-ci. Je suis d'accord avec le principe qu'on puisse, justement, le démontrer, mais c'est encore un autre article qui pourrait amener des abus. De quelles sortes de moyens de vérification se dote la commission pour s'assurer qu'une personne qui, par exemple, n'a jamais déclaré ou a déclaré très peu de pourboires, en vienne tout à coup, à la suite d'un accident, à faire une déclaration de pourboires énormes?

M. Fréchette: Qu'est-ce qui arrive? M. Cusano: Oui.

M. Fréchette: D'abord, je signale au député de Viau que le texte du deuxième paragraphe de l'article 66 a un caractère tout à fait facultatif.

M. Cusano: Oui, oui.

M. Fréchette: Le travailleur n'est pas du tout obligé...

M. Cusano: Non.

M. Fréchette: ...de déclarer, par exemple, ses revenus de pourboires. S'il prend sur lui de le faire, il est évident que cela peut déboucher sur un certain nombre d'autres implications si cette personne a certaines choses sur lesquelles elle n'est pas tout à fait à l'aise. Mais elle prendra elle-même ses propres décisions qui déboucheront sur les conséquences normales d'une semblable décision. II n'y a pas d'obligation.

M. Cusano: Non, je n'ai pas dit qu'il y avait une obligation. Lorsque le travailleur démontre, justement, qu'il aurait pu, s'il avait travaillé, gagné un montant X en commissions ou en pourboires, je me demande quels sont les moyens de contrôle de la part de la commission. Si c'est accepté tel quel et qu'on dit: II subira...

M. Fréchette: La commission peut très certainement exiger de l'accidenté qui fait une réclamation d'appuyer sa déclaration par une preuve documentaire s'il en existe une. Rien n'empêche la commission, non plus, de faire la vérification auprès, par exemple, de l'employeur pour confirmer la véracité des déclarations qui sont faites. Ce sont les moyens usuels mis à la disposition de quiconque pour obtenir des renseignements.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va?

M. Fréchette: On me dit qu'actuelle-

ment il y a effectivement une vérification auprès de l'employeur.

M. Cusano: C'est bien.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article... M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: À la question que j'ai posée tantôt, le ministre a répondu que le revenu fixé selon l'article 66 serait revalorisé tous les ans par la méthode prévue dans la loi. Mais cela ne tient pas compte, par exemple, des augmentations ou cela n'atteindra jamais le niveau des augmentations prévues aux conventions collectives. Je ne parle pas seulement d'augmentations d'échelle, mais il y a des augmentations d'échelon qui sont prévues aussi dans les conventions collectives. Est-ce qu'on ne pourrait pas procéder dans cet article comme on l'a fait pour la notion d'emploi convenable qui était réévaluée ou réexaminée, il me semble, aux deux ans? On disait qu'à tous les deux ans, si c'est supérieur ou... On n'a pas encore réglé le problème de la baisse... Mais on réajustait aux deux ans. Je sais que, d'un côté, on dit que c'est trop et, de l'autre, on dit que ce n'est pas assez et on vous amène de façon très pédagogique à dire: C'est assez, c'est correct comme cela.

M. Fréchette: Oui.

M. Bisaillon: En examinant cela attentivement...

M. Fréchette: C'est une formule qui va devenir familière dans la bouche du député de Sainte-Marie. La préoccupation du député de Sainte-Marie est très facilement "comprenable" - entre guillemets. Cependant, Mme la Présidente, vous voyez d'ici ce que cela pourrait vouloir dire en termes... Je comprends que c'est une préoccupation d'ordre strictement technique ou bureaucratique que je vais soulever, mais elle n'est pas mineure quant à moi. C'est ce que pourrait vouloir dire de procéder à l'analyse de la convention collective de chacun des accidentés qui se présente à la commission pour une réclamation. Il me semble que d'inscrire dans la loi que l'indemnité sera revalorisée annuellement à partir de l'indice des prix à la consommation, cela devrait, à toutes fins utiles, à moins de se retrouver dans des conventions collectives d'une générosité absolument extraordinaire, rejoindre l'objectif que le député de Sainte-Marie est en train de nous soumettre. Avantages et inconvénients dans chacun des plateaux de la balance, je préfère, et de beaucoup, garder la formule de la loi qui prévoit cette indexation ou cette revalorisation.

M. Bisaillon: Je ne veux pas faire un débat ni soulever à nouveau toute la question. Je veux indiquer cependant, que, lorsque le ministre disait tantôt: On va se baser sur le contrat de travail, tout ce que comprend le contrat de travail au moment de l'accident, le contrat de travail a une extension. Il n'est pas fixé dans le temps ou figé dans le temps pour une année. Autrement dit, ce que le travailleur a réussi à obtenir à l'intérieur de son contrat de travail, cela s'échelonne sur deux ou trois ans et il en est déjà propriétaire au moment où son accident du travail se produit. La réponse du ministre est une réponse qui dit qu'au plan administratif ce serait plus onéreux d'appliquer cela de la façon dont je le propose. Il y aurait peut-être un moyen de s'en sortir, c'est de prévoir dans l'article que cela puisse tenir compte de cela et de laisser le travailleur le soumettre. (17 heures)

Dans l'article actuel, le travailleur démontre à la commission. Au moment où le travailleur va vouloir le démontrer à la commission, celle-ci va être obligée, de toute façon, de se pencher sur son cas et de l'examiner en détail. Alors, plutôt que de dire que ma proposition était que cela se fasse année après année, ou aux deux ans, comme pour l'emploi convenable, on pourrait tout simplement laisser l'article tel qu'il est là, mais en prévoyant que cela peut être un élément dont le travailleur se sert pour faire sa démonstration à la commission.

M. Fréchette: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: ...peu importe la formule qui est suggérée par le député de Sainte-Marie, je continue de prétendre qu'en faisant l'analyse des deux colonnes classiques que l'on connaît, la balance des inconvénients et des avantages, la balance des inconvénients est passablement plus pesante.

Deuxièmement, oublions cet aspect strictement technique. Je réitère, Mme la Présidente, qu'à partir du moment où l'on inscrit dans le projet de loi et que c'est adopté comme tel que toutes les indemnités sont revalorisées annuellement, on rejoint, à toutes fins utiles, le même objectif, à moins, comme je le disais tout à l'heure, qu'on ne se retrouve devant des contrats de travail qui...

M. Bisaillon: Je diverge sûrement d'opinion avec le ministre quant à l'équilibre que cela peut représenter. En tout cas, c'était un effort honnête, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 66 est adopté?

Une voix: Oui.

M. Bisaillon: Si j'avais la possibilité, je dirais sur division...

La Présidente (Mme Juneau): Vous ne l'avez pas.

M. Bisaillon: ...quoique je trouve qu'il y ait des améliorations.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau, est-ce correct?

M. Cusano: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): Adopté. L'article 67?

M. Fréchette: Y a-t-il des...

La Présidente (Mme Juneau): Non. Cela va à l'article 72.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je ne fais, encore une fois, que lire rapidement le commentaire. Cet article répète en quelque sorte les termes du deuxième alinéa du paragraphe 2 de l'article 46 de la loi actuelle. Il prévoit utiliser, comme base de calcul de l'indemnité de remplacement du revenu, les gains d'un travailleur "correspondants" - entre guillemets - comme l'article précédent. Il permet cependant au travailleur de faire la preuve de gains plus élevés.

La Présidente (Mme Juneau): Pas d'interventions?

M. Bisaillon: Je ne reprendrai pas les interventions que j'ai faites à l'article précédent.

La Présidente (Mme Juneau): C'est cela.

M. Bisaillon: Mais on comprend que... M. Fortier: Quel article?

M. Bisaillon: ...je serais tenté de le faire.

La Présidente (Mme Juneau): L'article 67.

M. Fréchette: Ce sera au Journal des débats.

Une voix: Adopté? M. Cusano: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): Adopté. L'article 68?

M. Fréchette: Mme la Présidente, cet article prévoit que le revenu brut d'un travailleur qui n'a plus d'emploi lorsque se manifeste sa lésion professionnelle sera celui qu'il tirait de l'emploi par le fait ou a l'occasion duquel il a été victime de cette lésion. Et il y a la prévision que, le 1er janvier de chaque année, cela doit être revalorisé depuis la date où le travailleur a cessé d'occuper cet emploi. Cela ne fait que reconduire, à moins que je ne me trompe, in extenso, intégralement, une disposition actuelle de la loi.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Mme la Présidente, c'est la formulation du deuxième paragraphe de l'article 68 qui n'est pas claire pour moi. "Ce revenu brut est revalorisé au 1er janvier de chaque année depuis la date où le travailleur a cessé d'occuper cet emploi..." Je trouve que ce n'est pas clair, comme formulation.

M. Fréchette: Cela veut dire que c'est même antérieur au moment où se découvre la lésion professionnelle. II a cessé de travailler et, au moment où il cesse de travailler, ce n'est pas pour un motif de lésion professionnelle, c'est pour n'importe quel autre motif. Et au moment où toutes les étapes prévues par la loi pour les fins de la réclamation sont franchies, qu'une décision est rendue, cette indemnité sera rétroactive à compter du moment où il a quitté son emploi, pas à compter du moment où, six mois plus tard, on a confirmé qu'il y avait diagnostic de maladie professionnelle ou séquelle d'un accident du travail.

M. Bisaillon: Donc, s'il avait quitté son emploi en décembre, admettons...

M. Fréchette: Oui.

M. Bisaillon: ...on lui affecterait ce revenu...

M. Fréchette: À compter de...

M. Bisaillon: ...ce serait en fonction du revenu de décembre et, au 1er janvier, ce serait...

M. Fréchette: II y aurait revalorisation. M. Bisaillon: ...une revalorisation. M. Fréchette: C'est cela.

M. Bisaillon: Je ne comprends pas que c'est cela qu'on veut dire.

M. Lavigne: Quand on le relit, il me

semble que cela se comprend mieux.

M. Bisaillon: Avec l'explication, vous comprenez mieux? Le problème c'est que le ministre ne pourra pas être à côté de chaque travailleur qui va le lire. C'est cela.

M. Lavigne: Oui. "Ce revenu brut est revalorisé au 1er janvier de chaque année..."

M. Bisaillon: Cela pourrait être fait en deux phrases. Est-ce que cela dirait la même chose en deux phrases?

M. Fréchette: J'arrive, Mme la Présidente, dans une seconde. Peut-être qu'en procédant par le mécanisme d'un exemple, on saisirait mieux ce à quoi l'article 68 nous réfère. Prenons l'exemple d'une personne qui travaille dans une mine d'amiante ou de silice, peu importe. À un moment donné, en 1984, cette personne, non pas pour des motifs de lésions professionnelles comme je le disais tout à l'heure, mais pour n'importe quel autre motif, décide de changer d'emploi. Elle se retrouve dans un autre emploi et, dans ce deuxième emploi, devient en chômage, à un moment donné. Pendant la période de chômage, a la suite d'examens médicaux ou à la suite d'autres phénomènes du même genre, un diagnostic d'amiantose est rendu parce qu'elle avait travaillé dans la mine jusqu'en 1984. Elle a travaillé deux ans ailleurs après, a été en chômage pendant une autre période et c'est pendant cette dernière période que le diagnostic est posé. Le salaire de ce travailleur, à partir duquel l'indemnité sera déterminée, sera celui qu'il avait au moment où il travaillait dans la mine en 1984, mais revalorisé depuis qu'il en est sorti.

M. Bisaillon: Au 1er janvier. M. Fréchette: Voilà.

M. Bisaillon: L'exemple nous fait comprendre et il me semble que... Je ne fais pas d'amendement, mais je signale que, souvent, quand on inverse nos phrases, on comprend mieux. Si on disait: Â compter de la date où le travailleur a cessé d'occuper cet emploi, le revenu brut est revalorisé au 1er janvier de chaque année, il me semble que la séquence nous montre d'abord le premier événement et on la suit. Je vous dis ça comme ça. Souvent, dans le texte, on a...

M. Fréchette: C'est une formule que vous suggérez?

M. Bisaillon: Si le texte disait... Il ne change rien, mais il me semble qu'il nous fait voir plus clairement ce qu'on veut dire: À compter de la date où le travailleur a cessé d'occuper cet emploi, ce revenu brut est revalorisé au 1er janvier de chaque année. Cela n'est qu'une inversion, mais il me semble qu'on comprend mieux. Je ne veux pas en faire un amendement, mais je vous indique que, souvent, dans un texte, on a de la difficulté à comprendre parce que les phrases ne sont pas faites dans les séquences où les événements se présentent.

M. Fréchette: Mme la Présidente, si l'objectif est le même, est-ce qu'on peut...

M. Bisaillon: Oui, c'est comme je disais au député de Beauharnois, le problème c'est que le ministre sera obligé d'être à côté de chaque travailleur qui va lire la loi.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: Je voudrais comprendre l'esprit de l'amendement qui est apporté. Peut-être que le ministre...

M. Fréchette: d'amendement.

Il n'y pas

M. Cusano: II n'y a pas d'amendement. Alors, il s'agit d'un travailleur qui - peut-être que je me répète - à un certain moment, peut être atteint d'une maladie professionnelle, mais il n'en est peut-être pas conscient. Pour n'importe quelle raison, il quitte son emploi deux ans après. La maladie est découverte. Son salaire est basé sur ce qu'il gagnait au moment où il quittait et non au moment où il est prouvé que la maladie a été contractée.

M. Fréchette: Au moment où il quittait l'emploi où la maladie professionnelle peut avoir été contractée.

M. Cusano: Oui.

M. Fréchette: S'il a de l'amiantose et qu'après être sorti de l'amiante il a travaillé deux ans comme commis dans un magasin général, c'est évident qu'il va avoir contracté sa maladie professionnelle au moment où il était dans les mines d'amiante.

M. Cusano: C'est cela, pas de problème.

Une voix: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 68 est adopté? Adopté. L'article 69?

M. Fréchette: L'article 69, c'est très

exactement le même principe, le même phénomène, mais qui se réfère à l'aggravation, à la rechute ou à la récidive autant de la maladie professionnelle que de l'accident lui-même. À ce moment, on retiendra le mécanisme prévu à l'article 68 pour fixer l'indemnité de remplacement du revenu.

La Présidente (Mme Juneau): Adopté? Adopté. L'article 70?

M. Cusano: II n'y a pas d'amendement.

La Présidente (Mme Juneau): Non, monsieur, cela va à l'article 72.

M. Cusano: À l'article 72.

La Présidente (Mme Juneau): Oui.

M. Cusano: Cela veut dire, en termes très pratiques, M. le ministre, que quelqu'un qui occupe deux emplois, indépendamment où il a subi son accident, va recevoir une indemnité de remplacement du revenu basée sur le montant de l'emploi qui est le plus rémunérateur. Cela veut dire qu'un électricien, un plombier qui, en fin de semaine, travaille dans une brasserie ou travaille au Stade olympique, au Forum comme placier, s'il a un accident du travail dans son emploi à temps partiel, va être rémunéré selon le montant qu'il reçoit de son employeur où il travaille cinq jours par semaine.

M. Fréchette: Oui, avec la nuance suivante: si l'accident qu'il a subi alors qu'il travaillait comme serveur au Stade olympique, au Forum ou dans une brasserie le rend incapable d'exercer son métier principal d'électricien, pour utiliser le même exemple que celui que le député de Viau a employé. A supposer, par exemple, je ne sais pas, que ce soit la fracture des deux jambes qu'est l'accident alors qu'il travaille comme serveur, évidemment, pour une période de temps X, à cause de la fracture des deux jambes, il ne pourra pas faire son métier d'électricien. Son indemnité va être fixée à partir de son salaire d'électricien parce que son accident, même subi ailleurs, l'empêche d'exercer son emploi principal.

M. Cusano: D'accord, cela va.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: Lorsqu'on parle, justement, de l'indemnité de remplacement du revenu pour les 14 premiers jours, cela veut dire, si je comprends bien, que l'employeur où il est a temps partiel - supposons que c'est 35 $ par semaine - aura, pour les 14 jours à venir, à débourser 90% du salaire qu'il gagne chez son employeur qui est électricien?

M. Fréchette: Non.

M. Cusano: Expliquez-moi cela.

M. Fréchette: II va avoir à débourser 90% du revenu net de l'emploi chez l'employeur où l'accident est arrivé, les 14 premiers jours. Après les 14 premiers jours, c'est une autre affaire.

M. Cusano: Oui, mais c'est dit où cela, M. le ministre? Je comprends votre explication et je l'accepte. (17 h 15)

M. Fréchette: L'article 59 qui prévoit le paiement des 14 premiers jours commence par les termes suivants: "L'employeur au service duquel se trouve le travailleur lorsqu'il est victime d'une lésion professionnelle..." Alors, dans l'exemple du député de Viau, il est évident que l'employeur au service duquel se trouve le travailleur au moment de cet accident...

M. Cusano: Oui.

M. Fréchette: C'est, je ne sais pas, la RIO ou...

M. Cusano: Oui, oui.

M. Fréchette: C'est ce salaire qui va être considéré pour les fins de la fixation de l'indemnité de remplacement du revenu pour les 14 premiers jours.

M. Cusano: II ne peut pas être inférieur... Il n'y a pas un autre article qui dit que le montant ne peut pas être inférieur au salaire minimum?

M. Fréchette: Bien oui. Il y a un autre article qui dit cela, bien sûr.

M. Cusano: Ah! Bon. Alors, je veux bien comprendre, M. le ministre. Cela veut dire que quelqu'un qui gagne 35 $ par semaine à temps partiel, qui a un accident, l'employeur va lui donner, s'il ne sait pas ce qu'il gagnerait ailleurs, peut-être 400 $ par semaine. Cela va être basé sur le salaire minimum.

M. Fréchette: Non. Dans ce cas-ci, le mécanisme du salaire minimum ne s'appliquerait pas. La lecture de l'article 59, me semble-t-il en tout cas, donne réponse a toutes ces questions. "L'employeur au service duquel se trouve le travailleur lorsqu'il est victime d'une lésion professionnelle lui verse, si celui-ci devient incapable d'exercer son emploi en raison de sa lésion, 90% de son salaire net pour chaque jour ou partie de

jour - on prévoit même le travail à temps partiel - où ce travailleur aurait normalement travaillé..."

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va, M. le député?

M. Cusano: II n'y a pas d'autre explication sur...

M. Fréchette: Non. Il me semble que l'article 59 répond aux deux préoccupations que soulevait le député de Viau.

M. Cusano: C'est une question d'interprétation, je ne le vois pas tout à fait comme cela.

Une autre question sur le système de mérite et de démérite. Qui va être pénalisé? C'est où l'accident...

M. Fréchette: C'est de toute évidence l'employeur chez qui l'accident s'est produit.

M. Cusano: Cela va.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Cusano: Non, allez-y. Il me semble que l'article, M. le ministre, n'est pas tout à fait clair, et je vais citer mon collègue, le député de Sainte-Marie: Les avocats qui vont travailler à temps partiel... Il me semble que l'article n'est pas clair et, en tout cas, il n'est pas clair pour moi.

M. Fréchette: II y a peut-être une autre information qui pourrait être utile pour tenter de clarifier la situation. Il faut nous rappeler que l'article 70 parle du mécanisme prévu dans un cas comme celui-là pour fixer le revenu brut d'un travailleur, alors qu'à l'article 59 on se référé au salaire net du travailleur. Alors, ce sont deux notions, deux concepts tout à fait différents.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Mme la Présidente, je n'ai pas de difficulté avec le deuxième paragraphe de l'article 70. Je trouve que la situation est clairement exprimée. Mais, dans le cas du premier paragraphe, on dit: "Le revenu brut d'un travailleur qui occupe plus d'un emploi est celui qu'il tire de l'emploi le plus rémunérateur qu'il devient incapable d'exercer." Je ne vois pas pourquoi on choisit, pour établir son revenu brut, l'emploi le plus rémunérateur. Pourquoi n'est-ce pas l'addition des emplois qu'il occupait? Dans l'exemple que le ministre a utilisé en réponse au député de Viau, il donnait l'exemple d'un électricien qui est en même temps serveur, qui a deux emplois, un comme électricien et l'autre comme serveur et qui se casse les deux jambes. S'il se casse les deux jambes à son emploi de serveur, on dit: On va calculer son revenu brut à partir de son salaire le plus rémunérateur, qui serait, dans le cas actuel, celui d'électricien. Mais, dans les faits, ce travailleur, avant son accident puisqu'il faut le replacer, l'objectif étant toujours de replacer le travailleur dans la situation où il était avant, avait deux revenus et il est momentanément dans l'incapacité d'exercer ses deux emplois. Donc, il perd ses deux revenus. Pourquoi calcule-t-on son revenu brut uniquement sur l'emploi le plus rémunérateur? Pourquoi ne tient-on pas compte du fait que ses revenus réels proviennent de deux emplois?

J'aimerais entendre le ministre là-dessus et je vais y revenir, Mme la Présidente.

M. Fréchette: Oui, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Je vais revenir à une argumentation qu'a développée hier le député de Sainte-Marie, à plusieurs occasions. Il nous a même indiqué, à un moment donné, même assez clairement, qu'il fallait se retrouver ou qu'on se retrouvait nécessairement dans l'obligation de faire des choix dans certaines circonstances.

Ce que l'on a visé, c'est d'essayer d'améliorer la situation par rapport à l'état actuel des choses. Et dans l'état actuel des choses, le député de Sainte-Marie sait très certainement que ce n'est pas l'emploi le plus rémunérateur qui est le barème de fixation, c'est l'emploi dans lequel l'accident se produit. Bien sûr, l'idéal serait d'arriver à la suggestion que fait le député de Sainte-Marie et de procéder à l'addition des trois, quatre ou cinq salaires que peut faire un travailleur ou des deux salaires que peut faire un travailleur. Mais le choix qui a été fait, pour le moment en tout cas, c'est d'améliorer la situation par rapport à l'état actuel des choses, en précisant que ce serait le salaire le plus rémunérateur de ceux qu'il fait, alors que, actuellement, c'est le salaire qui est payé dans la fonction qu'exerce l'accidenté. Je n'ai pas d'autres explications que celles-là.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Mme la Présidente, dans son intervention, dans sa réponse, le ministre a indiqué que c'était le choix qui avait été fait. Il a ajouté: "pour le moment". Pour lui permettre de peut-être réviser sa position sur le sujet, je vais présenter l'amendement suivant: Au premier paragraphe de l'article

70, remplacer les termes "l'emploi le plus rémunérateur qu'il devient incapable d'exercer" par les mots "la somme des emplois qu'il devient incapable d'exercer".

Je vais expliquer mon amendement en vous disant ceci. Il est clair, selon les explications qu'on a déjà entendues, que le texte actuel représente une amélioration dans la façon de calculer le revenu brut par rapport à la situation actuelle. Le ministre nous dit: L'idéal, ce serait, évidemment... Et si on a voulu améliorer par rapport à la situation actuelle, je suppose que c'est parce qu'on avait fait le constat que celle-ci était injuste pour le travailleur victime d'un accident. Parce que, si on avait considéré que la situation actuelle, où on ne calculait pas nécessairement l'emploi le plus rémunérateur, mais le revenu de l'emploi qu'il occupait au moment de l'accident, si on n'avait pas calculé cela injuste de procéder ainsi, on n'aurait pas tenté de l'améliorer.

Donc, à partir du moment où on veut le faire, c'est qu'on reconnaît qu'il y avait une injustice dans le traitement actuel. Comment répare-t-on une injustice? Est-ce que c'est toujours en choisisssant la demi-mesure ou si ce n'est pas plutôt carrément en donnant l'ensemble des droits qui n'étaient pas reconnus dans le passé?

Le ministre nous disait: II faut faire des choix. Sur quelle base ce choix a-t-il été fait? Pourquoi nous sommes-nous arrêtés en plein milieu? Je comprends que le ministre a pu, depuis qu'on a commencé l'étude du projet de loi 42, et pourra encore, dans les articles qui viennent, nous dire que c'est une amélioration, mais qu'est-ce qui fait qu'on n'a pas amélioré jusqu'à "l'idéal", comme il l'appelle? Est-ce qu'on va constamment se contenter de rester en plein milieu? Je comprends que la position au centre semble de plus en plus confortable, mais il faudrait reconnaître que, s'il y a eu un geste de posé, c'est parce qu'on a fait un constat d'injustice dans le passé.

Là-dessus, après avoir présenté l'amendement, il me semble que cela pourrait être intéressant de connaître rapidement où se situent les députés de l'Opposition et les députés ministériels sur cette question.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je ne reviendrai pas sur les quelques commentaires que j'ai faits tout à l'heure. Je veux simplement en ajouter un autre aux deux ou trois que j'ai soumis. Dans l'évaluation du mécanisme de l'article 70, on a été guidé par une préoccupation. Cette préoccupation était de faire en sorte que l'emploi principal du travailleur accidenté soit protégé en termes d'indemnisation. On a retenu cette formule parce qu'il nous apparaît que c'est essentiellement de ce côté que la protection - non pas la protection, c'est un terme que je n'aime pas - enfin, la réparation doit être faite. C'est un des motifs qu'il faut ajouter aux trois ou quatre que j'ai donnés tout à l'heure. Cela reste évidemment, et je n'en disconviens pas, un choix qui me paraît être une amélioration sensible par rapport à l'état actuel des choses, même si cela n'est pas l'idéal. On pourrait faire un long débat aussi sur la nécessité d'atteindre l'idéal.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: Mme la Présidente, je voudrais avoir une clarification là-dessus. Si, par exemple, l'emploi le plus rémunérateur pour ce travailleur accidenté était occupé trois jours par semaine et qu'il avait un second emploi qu'il occupait deux jours par semaine, est-ce que l'emploi le plus rémunérateur et le salaire qu'on considérerait serait ce salaire, sur la base horaire qu'on aurait découverte à partir de certains calculs et qu'on prolongerait ensuite sur cinq jours, ou si le salaire dont on parle serait uniquement le salaire de trois jours, ce qui pourrait être inférieur, bien sûr, à l'ensemble du salaire qu'il aurait sur cinq jours?

M. Fréchette: Dans une situation comme celle-là, l'indemnité de remplacement du revenu serait fixée à partir du meilleur salaire généré par l'un ou l'autre des deux emplois; en termes concrets, le montant d'argent effectivement reçu de l'un ou l'autre des deux emplois. Si, de son emploi principal, le travailleur retire une paie qui est inférieure à celle qu'il reçoit dans son emploi secondaire, l'indemnité va être fixée à partir de la paie qu'il reçoit dans l'emploi secondaire.

M. Dussault: Jamais, avec le calcul que vous m'indiquez, M. le ministre, on ne peut être assuré que le salarié aura un salaire qui équivaut à l'ensemble de ses revenus, s'il travaille pendant cinq jours et qu'il ne travaille pas plus de 40 heures par semaine. Ce qui me préoccupe, c'est d'être sûr que la personne est payée sur la base d'une semaine de travail. Que son travail se fasse à un endroit ou à un autre, il me semble que cette préoccupation de base, sur le plan de l'équité, devrait s'appliquer sur une semaine de travail et sur le salaire qui est généré sur cette semaine. Si c'est le cas, s'iltravaille seulement trois jours, je comprendrais qu'on ne dise pas une semaine.

M. Fréchette: J'ai compris que c'était l'exemple qu'utilisait le député de Châteauguay. Vous vous référez à un travailleur qui se retrouverait dans un emploi principal à trois jours par semaine et dans un emploi secondaire à un nombre X d'heures de travail par semaine. Quelle est la

préoccupation que l'on doit avoir? C'est, il me semble, de faire en sorte que l'indemnité de remplacement du revenu soit la plus juste et la plus équitable possible pour répondre à la situation et l'on dit que c'est à partir du salaire le plus élevé de l'un ou l'autre des deux emplois que l'indemnité de remplacement du revenu va être fixée.

M. Dussault: La base, c'est le temps. Quelle période de travail couvre-t-on cependant sur cette base de paiement? C'est cela qui me préoccupe.

M. Fréchette: C'est la période de temps qui est faite pour obtenir le salaire le plus élevé des deux.

M. Dussault: Donc, s'il ne travaille que trois jours et que c'est considéré comme son emploi principal et aussi le plus rémunérateur, l'article mène carrément à ne le rémunérer que sur la base de trois jours. (17 h 30)

M. Fréchette: On a vu ces mécanismes dans les articles qu'on a adoptés antérieurement, quand on a étudié les modalités qu'il fallait retenir pour fixer le revenu brut d'un salarié. En tout cas, l'un des éléments était la référence au contrat de travail. Quand on parle de référence au contrat de travail, ce n'est pas nécessairement un contrat écrit. Ce peut être un contrat tacite, verbal, intervenant entre un employeur et un salarié qui va faire en sorte que le salaire pour le temps ou les heures travaillées va être de X. Là, on serait en face de deux contrats de travail. À partir des critères qui sont là, il faudrait en arriver à déterminer lequel des deux contrats de travail commande le salaire le plus élevé des deux. C'est en fonction de ce contrat, de la conclusion à laquelle on en arrive quant au quantum du salaire, que l'indemnité de remplacement du revenu est fixée.

La Présidente (Mme Juneau): Cela va.

M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: J'essaie, dans mon expérience d'ex-syndicaliste, de retrouver le mécanisme qui permettrait au travailleur d'avoir recours contre l'employeur pour lequel il travaillait et dans l'entreprise duquel il a eu son accident du travail, un recours pour faire en sorte qu'il puisse recouvrer la partie du salaire qu'il n'a pas chez le deuxième employeur. Il me semble que cela n'existe pas, ce genre de recours. Est-ce qu'au minimum on ne devrait pas considérer que, si le travailleur a deux emplois et que cela constitue pour lui la possibilité d'aller chercher une semaine de salaire, c'est cette base d'une semaine qui devrait être la base de calcul pour rémunérer la personne? Je ne dis pas si le travailleur faisait quatre jours à un endroit et l'équivalent de trois jours à un autre endroit, mais sur la base de travail le soir, et qu'il arriverait, à toutes fins utiles, à aller chercher quasiment deux semaines de salaire dans une. Je dirais: Bon, peut-être qu'il y a lieu d'être un peu raisonnable sur cette question. Mais si son salaire est constitué de deux emplois sur une base d'une semaine de travail, il me semble qu'on devrait regarder la possibilité qu'il aille chercher une rémunération sur cette base d'une semaine de travail. Autrement, il me semble que je ne serais pas bien dans ma peau.

M. Fréchette: Mme la Présidente, une première question du député de Châteauguay. Il est préoccupé par la possibilité qui existe d'intenter des procédures civiles pour réclamer l'excédent des dommages qu'un travailleur peut avoir subis dans un accident. Nous avons, hier soir, fait un très court commentaire sur l'historique de la Loi sur les accidents du travail et pourquoi, il y a 50 ans, employeurs et syndicats avaient convenu de ces mécanismes-là, les uns et les autres renonçant à un certain nombre de droits que les règles normales et ordinaires du droit civil permettraient, comme la poursuite pour réclamer des dommages. A partir de ce qui a présidé à ce moment-là à l'instauration de la Loi sur les accidents du travail, les salariés renonçaient à des poursuites civiles alors que les employeurs consentaient à payer des cotisations pour éviter des poursuites civiles. Ce que la loi dit, parce que c'était le principe fondamental à l'époque: II n'y a pas de poursuites civiles qui sont possibles sauf si les dommages arrivent par la faute d'un tiers qui se trouverait, par exemple, sur les lieux du travail où un objet dont il est propriétaire aurait causé l'accident en question. Quant à l'autre aspect de la question, je veux bien prendre le temps de considérer l'argumentation du député de Châteauguay, mais je lui signale qu'à ce stade-ci je ne suis vraiment pas en mesure de me prononcer ni dans un sens ni dans l'autre. Je réitère ce que je disais tout à l'heure. Il me semble qu'à partir de l'état actuel de la loi le pas qui est fait est relativement important. Vous savez, si on gardait ce qu'on a actuellement comme dispositions législatives, cela voudrait dire que l'électricien qui gagne, je ne sais pas, 400 $, 450 $ par semaine, mais qui a un accident comme serveur à 150 $ par semaine serait indemnisé à partir des 150 $ par semaine, actuellement. Là, on dit dans la loi: Si l'accident se produit chez l'employeur qui lui paie un salaire de 150 $ par semaine, que cet accident le rend incapable d'exercer son métier d'électricien, il va être indemnisé à partir du salaire d'électricien qu'il reçoit,

même si son employeur entrepreneur électricien n'a rien à voir dans l'accident lui-même. Il n'y a aucun lien de droit entre l'employeur entrepreneur électricien et son employé qui subit un accident à l'extérieur.

Maintenant, je suis disposé à regarder de plus près la suggestion du député de Châteauguay. Je ne peux pas, à ce stade-ci, encore une fois, me prononcer d'aucune espèce de façon là-dessus.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: J'ai donc compris du ministre que, dans le premier cas, le recours n'existe pas puisque la loi 42 ultérieurement, la loi actuelle serait le recours du travailleur; donc, il n'y aurait pas de recours autre à moins qu'il...

M. Fréchette: À moins qu'il n'y ait faute d'un tiers.

M. Dussault: À moins qu'un tiers n'intervienne. Dans le deuxième cas, ce que je comprends du ministre, c'est que ma suggestion à savoir qu'il devrait y avoir une base d'une semaine de travail... La réflexion qu'on ferait dans les prochaines heures serait qu'on viserait à rémunérer le travailleur sur la base d'une semaine de travail, s'il travaille au moins une semaine, peu importe que ce soit avec un, deux ou trois employeurs et même si cela dépassait une semaine de travail.

M. Fréchette: II faudrait faire attention parce qu'il pourrait peut-être arriver des circonstances où une semaine complète de travail serait moins rémunératrice qu'un emploi partiel dans un métier ou une profession, par exemple. Quelqu'un qui travaille une semaine complète, qui travaille 40 heures à 6 $ l'heure pourrait gagner moins que quelqu'un qui travaillerait comme électricien à 15 $ l'heure pendant trois jours.

M. Dussault: M. le ministre, si on avait prévu dans la loi cette précaution qu'on allait surtout calculer sur la base du salaire le plus rémunérateur, j'en conclus que le législateur souhaitait que le travailleur ne perde pas d'argent ou en tout cas qu'il en perde le moins possible. On tiendrait compte de ce que vient de dire le ministre.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va? M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: On se rend compte qu'au moment où j'ai présenté mon amendement, j'ai utilisé un exemple où il était question de double emploi. Le ministre conviendra que, même lorsqu'il y a double emploi, il y a une perte de revenu; même si on calcule le salaire le plus rémunérateur des deux emplois, il y a quand même une perte de revenu. Par ailleurs, l'argumentation du ministre avait plus de prise sur mon exemple; étant donné que c'était un double emploi, par rapport à une situation normale, il était "plus ou moins" défavorisé. Cela a cependant soulevé le problème qui n'était pas prévu dans la loi et qu'a soulevé le député de Châteauguay, c'est-à-dire les employés à temps partiel, les personnes qui occupent deux emplois, et de plus en plus on s'en va vers le travail partagé, les personnes qui occupent deux emplois, non pas pour se faire un supplément de revenu, mais pour se faire un revenu. Si on appliquait la même pratique dans le cas de ces employés à temps partiel, il y a carrément là une perte de revenu, ce qui ne leur assure pas le revenu hebdomadaire que ce travailler va chercher.

La réplique ou la façon dont le ministre répondait à mon premier exemple est plus difficile d'application dans le cas d'employés à temps partiel. Je pense que le ministre en est fort conscient lorsqu'il se dit prêt à regarder cet aspect.

Une suggestion que je pourrais faire, Mme la Présidente, c'est de remettre à plus tard mon amendement de même que l'article et de prendre la période d'arrêt pour voir comment on pourrait, au moins au minimum, régler le problème des employés à temps partiel; c'est vraiment d'assurer un revenu hebdomadaire à une personne qui occupe deux emplois, mais pour se faire un seul revenu, finalement.

M. Fréchette: C'est ce que je pensais avoir indiqué au député de Châteauguay. Je suis disposé à suspendre l'adoption de l'article et, à l'heure du lunch, de regarder cela d'un peu plus près, pour voir comment cela pourrait s'introduire dans la loi et voir aussi les implications que cela peut avoir, avec un peu plus de temps pour en parler informellement. On pourra évaluer tout cela.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Beauharnois m'a demandé la parole.

M. Lavigne: Dans la même foulée des arguments qu'on vient d'entendre, Mme la Présidente, c'est sûr qu'à première vue, sans être actuaire, je pense qu'on n'a pas besoin de l'être, cela va nécessairement coûter plus cher aux employeurs...

M. Fréchette: C'est évident.

M. Lavigne: Par ailleurs, il y a quand même deux employeurs qui paient. C'est vrai que l'accident n'aura lieu que chez l'un des deux. L'employeur chez qui l'accident n'est

pas arrivé n'aura peut-être pas à payer pour l'accident qui s'est produit chez l'autre. Au niveau des employeurs, cela serait peut-être défendable. Mais, au niveau de l'employé, comme on le soutient, et j'abonde un peu dans ce sens, c'est pour se faire un salaire. Est-ce qu'on présume qu'un salaire se fait dans 40 heures et que le deuxième emploi qui découlerait d'un surplus de 40 heures de travail ne serait pas considéré? Il faudrait peut-être baliser, à un moment donné. Un gars ou une femme, peu importe, peut avoir un emploi de 40 heures. Il se fait, en principe, un salaire normal et, en surplus, il travaille, par exemple, à laver la vaisselle, dans un restaurant, la fin de semaine, le samedi et le dimanche. Là, il passerait à 60 heures par semaine. Est-ce que là, on dirait que les deux journées additionnelles, le samedi et le dimanche, seraient considérées comme faisant partie d'un salaire? Je pense qu'il y a des distinctions à faire et c'est à l'examen de cet article qu'on pourra peut-être les faire. Si les deux emplois sont à l'intérieur de 40 heures par semaine, trois jours à un endroit, par exemple, et deux jours à l'autre, je pense que cela serait un peu légitime qu'on regarde cela. Pour le travailleur, il me semble que cela se défend bien. Par ailleurs, pour l'employeur, cela se défend peut-être un peu plus mal, dans le sens qu'il serait porté à nous servir l'argument que l'accident n'est pas arrivé chez lui.

M. Bisaillon: Est-ce que le député me permettrait, Mme la Présidente, de lui faire remarquer qu'il est évident que, dans le cas d'un travailleur qui a deux emplois partiels, il y a apparence de sympathie plus évidente. Il faut quand même reconnaître que, lorsque quelqu'un occupe deux emplois, il a un revenu équivalent, non seulement aux deux emplois, mais au nombre d'heures qu'il travaille. Le fait de subir un accident le rend incapable non seulement d'occuper un emploi, mais les deux et il perd les revenus de ces deux occupations.

M. Fréchette: D'une des deux.

M. Bisaillon: S'il s'est brisé les deux jambes, il ne pourra occuper ni l'un ni l'autre des ces emplois pendant un certain temps. Il va perdre l'ensemble du revenu qu'il se faisait. On peut bien dire: II était déjà gâté. Il était déjà gâté, mais il travaillait plus que les autres aussi. En principe, tu dois être payé pour ce que tu fais. Dire: Quand il y a un accident... Il faudrait peut-être interdire le double emploi carrément à travers tout le Québec. Là, on aura peut-être gagné quelque chose. Tant qu'on permettra le double emploi, il me semble que c'est difficile de dire: C'est uniquement quand il y a un accident qu'on va le diminuer. Interdisons le double emploi, si on veut... Cela serait peut-être une façon d'en créer. Tant que la situation est là, je comprends que c'est moins "glamorous", l'employé qui fait deux ou trois jours de travail et qui fait ses 40 heures avec ces deux emplois. Il reste quand même qu'en principe un accident lui fait perdre deux revenus et qu'on ne calcule, même si c'est une amélioration, je le reconnais, que l'emploi le plus rémunérateur.

M. Fréchette: Soyons conscients d'un autre problème, par ailleurs. Est-ce qu'on va cotiser l'employeur chez qui l'accident n'est pas arrivé ou est-ce qu'on va cotiser deux fois l'employeur chez qui l'accident est arrivé? C'est une préoccupation qu'on doit aussi avoir.

Une voix: Qui est le responsable?

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Beauharnois, si vous voulez terminer.

M. Lavigne: Cela pourrait aussi débloquer. Mme la Présidente, je ne voudrais pas non plus prolonger le débat inutilement, mais je pense qu'il n'est pas inutile. Effectivement, je pense qu'il y a une faiblesse là. Est-ce que cela viendrait englober, par exemple, non pas le travailleur qui a deux emplois, mais le travailleur qui fait du temps supplémentaire à l'occasion? Il travaille plus. Si son patron lui a demandé de travailler un samedi parce qu'il y a plus d'ouvrage, est-ce qu'on considérera, dans l'analyse, le temps supplémentaire?

M. Fréchette: C'est déjà prévu dans la loi.

M. Lavigne: C'est déjà prévu.

M. Bisaillon: On l'a déjà reconnu dans l'article qui précède, je pense, aux articles 66 et 67.

M. Lavigne: Si cela est réglé, Mme la Présidente, je retire mes paroles.

La Présidente (Mme Juneau): Oui.

M. Bisaillon: Mais c'est intéressant, Mme la Présidente, l'argument du député de Beauharnois parce que, comme on l'a prévu aux articles 66 et 67, on a prévu que l'emploi était accompagné aussi de revenus additionnels comme le temps supplémentaire. On n'avait pas d'objection aux articles 66 et 67. Pourquoi, quand il y a deux emplois, on coupe tout à coup? Il y a aussi cette question qu'il faut se poser.

M. Fréchette: Parce qu'on demande à

quelqu'un de payer pour une chose dont il n'est pas responsable.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Bisaillon: Cotisons le vrai responsable, celui où s'est produit l'accident.

M. Cusano: Juste pour ajouter quelques éléments de réflexion pour le ministre. En ce qui me concerne, je considère quelqu'un qui a un emploi régulier et qui, pour s'amuser, peut-être pour se payer des vacances, va travailler - j'ai employé l'exemple - comme placier au Stade olympique, parce qu'il aime regarder les spectacles qui y sont présentés. Cela, pour moi, c'est une chose, mais où je rejoins un peu le député de Sainte-Marie, c'est sur l'individu, justement, qui, pour en arriver à un salaire convenable, doit travailler une partie de journée à une place et une partie de la semaine à une autre pour en arriver à un salaire convenable. Là je rejoindrais la suggestion, dans ce cas, du député de Sainte-Marie.

M. Fréchette: Cela commence à prendre du poids, sérieusement.

M. Bisaillon: Maintenant, on se retrouve tous au centre...

M. Fréchette: On peut continuer de garder en suspens cet article comme on en avait convenu tout à l'heure. On regarde cela à l'heure du lunch et on peut peut-être, dans les dix minutes qui restent, à moins qu'il n'y ait là des difficultés que je ne verrais pas, aborder l'article 71.

M. Bisaillon: À moins qu'on n'ajourne les travaux maintenant. Ces dix minutes vous donnent justement le temps... Alors, on suspendrait l'amendement et l'article.

La Présidente (Mme Juneau): L'amendement et l'article. Est-ce qu'on ajourne les travaux? Est-ce que vous êtes d'accord pour ajourner étant donné qu'il est 17 h 50, non pas ajourner, pardon, suspendre les débats jusqu'à 20 heures?

M. Fréchette: 20 heures. (Suspension de la séance à 17 h 50)

(Reprise à 20 h 8)

La Présidente (Mme Juneau): Y a-t-il quorum? La commission reprend ses travaux pour procéder à l'étude détaillée du projet de loi 42, Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

La parole était au député de Viau lorsque nous avons suspendu nos travaux.

M. Cusano: À ce moment, le ministre s'apprêtait à amener des changements, des modifications à l'article. Il était en réflexion.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je comprends que le député de Sainte-Marie a déjà une proposition d'amendement sur la table. Vous allez excuser mon ignorance au plan de la procédure mais nous faut-il disposer de cet amendement avant de procéder à toute autre chose?

M. Bisaillon: J'avais compris, Mme la Présidente, au moment où on a suspendu les travaux ce soir, qu'on avait déposé à la fois mon amendement et l'article 70 pour permettre de regarder plus à fond la question. Ce qu'on pourrait suggérer c'est de prendre le temps que cela prendra pour examiner plus à fond la question. Ceci étant fait techniquement, je pense qu'il faudra disposer de l'amendement, soit en le retirant, soit en le battant, soit en l'adoptant et, après cela, passer à d'autres propositions s'il doit y en avoir d'autres.

M. Fréchette: Alors, il faut disposer de cet amendement d'abord.

La Présidente (Mme Juneau): Oui, c'est exact.

M. Bisaillon: Oui, mais ce serait peut-être intéressant de conserver cela dans le décor de la discussion cependant.

M. Fréchette: Oui, oui.

M. Bisaillon: Puis après cela on aura juste à le voter.

M. Fréchette: Oui, absolument.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que vous pouvez me le remettre, M. le député, s'il vous plaît?

M. Bisaillon: Oui.

La Présidente (Mme Juneau): L'amendement du député de Sainte-Marie se lisait comme suit: Remplacer à la seconde ligne du premier alinéa les mots "l'emploi le plus rémunérateur" par les mots "la somme des emplois". M. le député de Châteauguay.

M. Bisaillon: La somme des emplois qu'il devient incapable d'exercer.

M. Fréchette: Oui.

La Présidente (Mme Juneau): Cela,

c'est le reste du texte.

M. Fréchette: C'est le reste du texte probablement.

M. Bisaillon: D'accord, c'est parce que j'avais enlevé tout le reste.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: Mme la Présidente, quand nous avons terminé nos travaux avant d'aller souper, le ministre s'était montré disposé à rechercher une solution tout au moins pour le type de problèmes que j'avais évoqués. Si le ministre a terminé sa réflexion et qu'il nous identifiait le type d'amendement qui pourrait être apporté pour répondre, en tout cas, au type de problèmes que j'avais évoqués, cela rallierait peut-être M. le député de Sainte-Marie et, avec cet éclairage, le député de Sainte-Marie pourrait peut-être tout simplement nous dire immédiatement qu'il n'y aura pas lieu de continuer à discuter sur son amendement. Est-ce que le ministre peut nous dire s'il a trouvé une solution à un des deux problèmes qui ont été évoqués?

M. Fréchette: Mme la Présidente, je ne sais pas si c'est une solution mais c'est à tout le moins une proposition.

La Présidente (Mme Juneau): À ce moment-là, vous pourriez la lire, M. le ministre.

M. Fréchette: Je vais en donner la teneur, quitte, par la suite, à voir, à partir de la résolution du député de Sainte-Marie, comment on peut régulariser la situation. Je comprends que la préoccupation du député de Sainte-Marie, c'est de faire en sorte que l'indemnité de remplacement du revenu soit fixée è partir de l'addition de tous les salaires de tous les emplois qu'un travailleur peut occuper. Le député de Chèteauguay revient avec une proposition qui est d'assurer que l'indemnité se fasse à partir d'un salaire au moins hebdomadaire.

M. Dussault: Hebdomadaire, c'est cela.

M. Fréchette: Voilà. À partir de ces deux propositions, donc, on a retenu un texte qui m'apparaît rejoindre les préoccupations dont on discute. Ce texte pourrait être le suivant et remplacerait complètement le premier alinéa de l'article 70; il se lirait comme suit: "Le revenu brut d'un travailleur qui occupe plus d'un emploi est celui qu'il tirerait de l'emploi le plus rémunérateur qu'il devient incapable d'exercer comme s'il exerçait cet emploi à temps plein."

M. Bisaiilon: Pouvez-vous nous répéter cela?

M. Fréchette: Si je peux me débarrasser...

M. Bisaillon: Comme si on n'était pas sténo, là.

M. Fréchette: Pardon?

M. Bisaiilon: Comme si on n'était pas sténo, là!

M. Fréchette: Ah bien, je vous donne un texte.

M. Dussault: M. le ministre, après avoir lu ce texte, cela m'apparaît - sauf que, sur le plan de l'interprétation, je ne suis pas en mesure de dire si cela veut dire exactement ce qu'on souhaitait - être vraiment l'atteinte de l'objectif que j'avais demandé d'atteindre.

M. Bisaillon: J'aimerais cela, cependant, que le ministre nous explique comment... Je ne comprends...

La Présidente (Mme Juneau): Une minute, là.

M. Bisaillon: ...pas comment cela atteint l'objectif du député de Châteauguay.

M. Lavigne: Moi, comme je comprends comme cela, M. le député de Sainte-Marie, c'est que si on prend l'exemple d'un travailleur, quel qu'il soit, qui gagnerait 75 $ par jour, pendant trois jours, et qu'il aurait un autre salaire à 50 $ par jour pendant deux jours, on le paierait, advenant un accident, indépendamment chez l'un ou l'autre des deux employeurs, pendant cinq jours à 75 $ par jour...

M. Fréchette: C'est cela.

M. Lavigne: ...c'est-à-dire que ce serait sur cette base-là qu'on considérerait sa rémunération.

M. Fréchette: Le salaire complet.

M. Bisaillon: D'accord, d'accord. Comme s'il occupait cet emploi le plus rémunérateur...

M. Fréchette: À temps plein.

M. Lavigne: À temps plein.

M. Bisaillon: À temps plein.

M. Fréchette: C'est cela.

La Présidente (Mme Juneau): M. le

député de Viau.

M. Cusano: Non, c'est justement...

M. Dussault: C'est plus que ce que je demandais et beaucoup plus proche de ce que demandait le député de Sainte-Marie.

M. Fréchette: Enfin, cela...

La Présidente (Mme Juneau): La parole est au député de Viau. Je m'excuse, il ne faudrait pas tous intervenir. Le ministre expliquera tout à l'heure son amendement. Le député de Viau avait demandé la parole.

M. Cusano: Non, Mme la Présidente, c'est simplement pour indiquer au ministre que l'interprétation que je lui donnais, c'est la même que le député de Beauharnois. Je lui ai cédé la parole, il a interprété ma pensée. C'est justement parce que cela se relie un peu à ma préoccupation sur l'individu, je ne parle pas d'une personne... Je ne parlais pas, avant qu'on se quitte pour le souper, d'une personne qui travaille trois jours dans un endroit et deux jours dans l'autre. Ma préoccupation c'était plutôt l'individu qui travaille quasiment chaque jour de la semaine à un endroit différent. Je vous fais un compliment, M. le ministre. Je pense que cela rejoint, en tout cas, mes préoccupations. Je ne sais pas si cela rejoint celles du député de Sainte-Marie. (20 h 15)

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Si on parle, M. le ministre, des gens qui sont "charty", des débardeurs, par exemple, on sait très bien que leur salaire est journalier. Cela dépend des bateaux et cela dépend des cargaisons qu'ils ont. Dans une semaine ils vont faire peut-être 200 $ et l'autre semaine ils vont en faire 500 $, 600 $, 800 $. Est-ce que vous allez les indemniser sur la moyenne des salaires, par exemple, dans le mois ou au cours... C'est assez difficile parce que dans une semaine ils vont peut-être travailler une journée. Cela dépend un petit peu comment cela se passe dans les ports de mer.

M. Fréchette: Cela dépend si les travailleurs auxquels réfère le député de Saguenay sont des gens qui n'occupent que ce seul emploi. S'ils n'occupent que ce seul emploi, ils seront indemnisés en cas d'accident ou de maladie professionnelle à partir des dispositions et du contenu de leur contrat de travail.

M. Maltais: Heureusement, M. le ministre, que vous avez apporté votre amendement parce que c'est une des catégories de travailleurs qui occupent le double emploi.

M. Fréchette: S'ils occupent le double emploi, ils seront indemnisés a partir de l'emploi le plus rémunérateur de tous ceux qu'ils occupent comme s'ils l'occupaient à temps plein.

M. Maltais: D'accord, je vais vous donner un exemple bien concret. Advenant qu'un débardeur fasse 2000 $ par mois, règle générale; admettons que c'est cela. Cela veut dire 24 000 $ par année. Hebdomadairement, c'est difficile parce qu'il y a des semaines où il ne travaillera même pas, ou une journée. Si ce gars subit un accident, vous prenez sa moyenne de salaire des trois derniers mois ou de la dernière année, son rapport d'impôt, pour établir son indemnité hebdomadaire. C'est bien cela que je comprends.

M. Fréchette: Oui, c'est la formule.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Mme la Présidente, malheureusement, ce n'est pas tout à fait ce que je demandais mais je pense que...

M. Fréchette: Je suis conscient que ce n'est pas tout à fait ce que vous demandiez.

M. Bisaillon: Mais je trouve qu'on en a couvert quand même un bon bout. On prend tellement de temps à souligner les moments où on n'en a pas assez, je trouve que cela vaut la peine de souligner, en tout cas, que c'est une amélioration plus que sensible à ce qu'il y avait dans l'article original.

On ne couvre pas 100% du double emploi mais on améliore la situation du double emploi par rapport à ce qu'il y avait. On couvre surtout, peut-être pas le plus important mais ce qui était important à nos yeux aussi, c'était de couvrir les temps partiels qui ne l'étaient pas. Là, ils le sont de façon évidente.

Je pense que c'est un article qui est de beaucoup amélioré et qu'on devrait retenir sous cette forme.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce à dire, M. le député de Sainte-Marie, que l'amendement que vous aviez proposé est retiré?

M. Bisaillon: Techniquement, Mme la Présidente, je pense qu'on va battre l'amendement. On peut battre l'amendement pour démontrer qu'on bat quelque chose quand même...

La Présidente (Mme Juneau): Vous pouvez le retirer aussi, M. le député.

M. Bisaillon: Non, je peux endosser cela tout en reconnaissant qu'on ne va pas jusqu'où je voulais aller. Cela prend deux secondes, battre. C'est de dire: Rejeté. Cela prend un mot pour cela.

La Présidente (Mme Juneau): Cela va.

M. Bisaillon: Après cela, on revient à ce texte et on l'adopte.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'amendement du député de Sainte-Marie est adopté?

M. Fréchette: Rejeté.

La Présidente (Mme Juneau): Rejeté.

M. Maltais: II y a une curieuse astuce, Mme la Présidente; le député de Sainte-Marie ne votant pas, c'est nous qui avons l'odieux de battre sa motion alors qu'il est consentant à l'accepter. Dans les faits, c'est nous qui portons l'odieux. C'était très astucieux.

M. Fréchette: II aurait voté contre s'il avait eu le droit de voter, c'est-à-dire il aurait voté pour s'il avait eu le droit de voter.

M. Bisaillon: On me met, décidément, Mme la Présidente, beaucoup de mots dans la bouche.

M. Fréchette: Pour permettre de vous reposer un peu quand arrive cette période de temps.

La Présidente (Mme Juneau): L'amendement proposé par le ministre, souhaiteriez-vous que je le relise? Non.

M. Bisaillon: Pour les fins du Journal des débats...

La Présidente (Mme Juneau): Le secrétaire me dit que pour le Journal des débats ce serait préférable. Donc, l'amendement proposé par le ministre est celui-ci: Remplacer le premier alinéa par le suivant: "70. Le revenu brut d'un travailleur qui occupe plus d'un emploi est celui qu'il tirerait de l'emploi le plus rémunérateur qu'il devient incapable d'exercer comme s'il exerçait cet emploi à temps plein." Est-ce que l'amendement proposé par le ministre est adopté?

M. Cusano: Adopté.

M. Bisaillon: Mme la Présidente, si j'avais eu la possibilité de voter, je tiens à vous dire que j'aurais dit oui.

La Présidente (Mme Juneau): C'est déjà une amélioration. Est-ce que l'article 70, tel qu'amendé, est adopté?

M. Cusano: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): L'article 71.

M. Fréchette: Mme la Présidente, il n'y a pas d'amendement à l'article 71. Le contenu de l'article 71 prévoit le mécanisme qui sera utilisé pour arriver à déterminer le revenu brut annuel du travailleur autonome, tel qu'on l'a défini à l'article 9 de la loi. Le moyen pour y arriver... Je vais lire l'article. Il est fort simple dans son texte. C'est la meilleure façon d'arriver à en avoir une bonne compréhension. "Le revenu brut d'un travailleur autonome visé dans l'article 9 est celui d'un travailleur de même catégorie occupant un emploi semblable dans la même région, sauf si ce travailleur démontre à la commission qu'il a tiré un revenu brut plus élevé d'un travail visé dans l'article 9 pendant les 12 mois précédant le début de son incapacité."

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Mme la Présidente, j'aurais une question d'éclaircissement à poser au ministre. Lorsqu'on parle de revenu brut plus élevé, j'aimerais bien que le ministre me dise qu'on va se baser sur le rapport d'impôt.

M. Fréchette: Dans le cas du travailleur autonome?

M. Maltais: Oui.

M. Fréchette: II serait embarrassant de se baser sur le rapport d'impôt puisque la référence que l'on fait est celle d'un travailleur de même catégorie occupant un emploi semblable dans la même région.

M. Maltais: On parle toujours d'un travailleur autonome.

M. Fréchette: Oui. Ce que je veux dire c'est que...

M. Maltais: Si le travailleur veut démontrer que son revenu brut est supérieur à la moyenne de ces travailleurs autonomes dans la même région, est-ce que le rapport d'impôt sera un guide pour lui?

M. Fréchette: C'est sûr que, si le travailleur autonome qui est impliqué dans l'accident veut faire la démonstration que son revenu annuel brut est plus élevé que la moyenne de la même région et qu'à l'appui

de sa prétention il dépose son rapport d'impôt, cela peut être une pièce justificative importante.

M. Maltais: C'est évident.

M. Fréchette: C'est même la preuve principale.

M. Maltais: L'indemnité sera basée sur le revenu brut.

M. Fréchette: C'est-à-dire que là on détermine le revenu annuel brut.

M. Maltais: C'est la définition du revenu brut.

M. Fréchette: C'est cela.

M. Maltais: Alors, l'indemnité sera basée là-dessus.

M. Fréchette: C'est cela.

M. Fortier: Est-ce qu'il existe des statistiques sur...

La Présidente (Mme Juneau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: ...ce que vous définissez comme étant des revenus bruts pour un travailleur dans la même région? Je n'ai jamais vu de statistiques à cet effet.

M. Fréchette: C'est particulièrement la situation qui existe chez les camionneurs qui sont organisés en association, région par région. C'est plus facile pour cette catégorie de travailleurs d'arriver à déterminer quel peut être le salaire moyen pour une région donnée. C'est sûr que le...

M. Fortier: Si on prend l'Estrie. L'Estrie est dans la région de Montréal, au point de vue des statistiques fédérales en particulier.

M. Fréchette: Oui. Les délimitations des territoires peuvent varier mais quand on veut référer au revenu ou au salaire, peu importe la délimitation de la zone ou de la région, on peut arriver à obtenir ce renseignement. C'est moins vrai, par ailleurs, pour des cultivateurs. Les agriculteurs sont l'autre catégorie de travailleurs autonomes organisés en association, bien sûr, mais c'est moins régionalisé que dans le cas des camionneurs et, deuxièmement, il peut y avoir tellement de différences d'une porte à l'autre chez des cultivateurs que cela n'est presque pas possible d'arriver à déterminer une moyenne régionale. Là, il faut quasiment faire du "cas-par-cas" pour les cultivateurs.

M. Fortier: Si je comprends bien, dans le cas des travailleurs autonomes, c'est nouveau dans la loi. Cela n'existe pas présentement.

M. Fréchette: Cela existe.

M. Fortier: Cela existe?

M. Fréchette: Cela existe.

M. Fortier: Dans la loi de la CSST?

M. Fréchette: Oui, dans la Loi sur les accidents du travail.

M. Fortier: Est-ce qu'il y a des gens qui se prévalent... Autrement dit, ils doivent payer la totalité de la...

M. Fréchette: De leur cotisation.

M. Fortier: Est-ce qu'il y en a beaucoup? Il y en a quelques-uns ou...

M. Fréchette: Chez les cultivateurs, il y en a un bon groupe. Chez les camionneurs aussi. On parle de camionneurs et d'agriculteurs parce que ce sont les deux groupes les plus...

M. Fortier: D'accord, et d'autant plus que la loi permet aux associations de faire des représentations ou de les inscrire à la CSST. Ce que vous espérez finalement, c'est que... Quoique, dans le cas des associations, on peut parler d'employés ou on peut parler de travailleurs autonomes également, j'imagine.

M. Fréchette: Oui, bien sûr.

M. Fortier: Mais, dans le cas des agriculteurs?

M. Fréchette: Les associations, quand on en parle dans la loi, on réfère surtout aux domestiques. Alors, ce sont des travailleurs autonomes aussi qui payent eux-mêmes leurs propres cotisations quand ils veulent être couverts. C'est le même phénomène.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va, M. le député de Sainte-Marie?

M. Bisaillon: Mme la Présidente, juste une remarque au ministre. À quelques reprises, on a utilisé le terme "région". Vous venez justement d'indiquer que celui-ci est variable. Il y aurait peut-être utilité, à l'article 2, de définir ce qu'on va entendre par région, autrement dit quels critères on va utiliser pour nommer les régions. Est-ce que cela va être les régions administratives? Est-ce que cela va être autre chose? Si,

dans le cours de l'application de la loi, le critère pour déterminer la région est modifié, il me semble que cela ne serait pas correct.

M. Fréchette: Généralement, Mme la Présidente, quand on utilise le terme "région", la référence qui revient le plus souvent, c'est celle, évidemment, de la région administrative. Mais il peut arriver des cas où, référant uniquement et strictement à la région administrative, on ne puisse pas atteindre les objectifs que l'on vise. Je vous donne l'exemple de la région que j'habite. La région se termine à environ quinze milles de la ville de Sherbrooke, par exemple, alors que, pour les fins de pouvoir déterminer le salaire moyen des camionneurs, il faudrait se rendre au-delà des limites de la stricte région géographique de l'Estrie, ou 05. Le critère fondamental est toujours la région administrative, mais on ne voudrait pas être lié par la seule et stricte région administrative ou le seul et strict autre genre de région à cause du phénomène dont je viens de parler.

M. Bisaillon: Cela ne peut-il pas amener, éventuellement, des problèmes, suivant les critères qui pourraient être retenus pour déterminer le salaire moyen de la région? Un travailleur pourrait-il prétendre, par exemple, que les critères utilisés auraient dû être différents de ceux qui ont été utilisés par la régie, à partir du moment où ils ne sont pas définis?

M. Fréchette: Peu importe la définition ou la référence que l'on ferait du terme "région", un travailleur, camionneur, agriculteur, artisan aurait toujours la possibilité de contester le résultat que la commission tirerait pour arriver à définir un salaire régional moyen.

M. Bisaillon: Sauf qu'il n'y aurait pas de critère de référence, pas plus que la CSST, dans son application, n'en aurait de par la loi. C'est au plan administratif qu'on déciderait que dans tel cas, on prend la région administrative et que, dans tel autre cas, on doit lui donner de l'extension. Le travailleur aurait plus ou moins de base pour...

M. Fréchette: En fait, dans une situation de cette nature, il faut prendre pour acquis qu'il faudra faire jouer, également, les notions d'équité et de justice naturelle. Cela serait davantage contraignant - il me semble, en tout cas - si on se limitait géographiquement à une région très précise. Cela pourrait faire en sorte que des gens soient victimes d'un préjudice à cause de cela parce que, de l'autre côté de la frontière géographique, il peut y avoir des conditions de travail plus avantageuses que celles qui existent à un mille de là. C'est pour cela que cela pourrait devenir embarrassant de se contraindre dans une délimitation géographique stricte.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Champlain.

M. Gagnon: Merci, Mme la Présidente. Je m'excuse, M. le ministre, mais j'ai de la difficulté à comprendre la partie pour les agriculteurs. Vous avez expliqué la région et, à un moment donné, vous avez dit: II faut presque faire du "cas-par-cas". Qu'est-ce que c'est, si vous prenez un exemple concret, celui d'un agriculteur... (20 h 30)

M. Fréchette: Oui.

M. Gagnon: ...qui s'assure comme travailleur autonome? Sur quoi...

M. Fréchette: Ce que je veux dire, Mme la Présidente, c'est que, si l'on entreprend de faire la tournée des rangs du comté de Champlain, on va sans doute frapper un cultivateur qui est particulièrement prospère...

M. Gagnon: II y en a plus d'un.

M. Fréchette: C'est pour cela que je dis cela. Vous allez peut-être frapper, à travers la tournée que vous allez faire, un cultivateur de condition un peu plus modeste et les conditions de l'un et de l'autre peuvent varier autant de fois que vous visitez l'un ou l'autre. C'est à partir de ce raisonnement ou de cette image que je me dis qu'il est plus difficile de déterminer le salaire moyen d'un cultivateur dans une région que cela ne l'est de le faire pour des camionneurs, qui ont, essentiellement ou à peu près, le même salaire pour le même travail. C'est strictement dans ce sens-là que...

La Présidente (Mme Juneau): Cela va? Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 71?

Une voix: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 71 est adopté?

M. Cusano: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): À l'article 72, il y a un amendement. L'amendement de l'article 72 se lit comme suit: Remplacer lepremier alinéa par le suivant: "72. Le revenu brut d'un travailleur victime d'une lésion professionnelle alors qu'il reçoit une indemnité de remplacement

du revenu est le plus élevé de celui, revalorisé, qui a servi de base au calcul de son indemnité initiale et de celui qu'il tire de son nouvel emploi."

M. Fréchette: Vous n'allez pas vous surprendre, Mme la Présidente, si je vous dis que je vais lire le commentaire qui accompagne...

M. Cusano: Et, après cela, expliquer le commentaire!

M. Fréchette: ...l'article 72.

M. Fortier: L'article actuel parle du revenu net, là on parle du revenu brut.

M. Fréchette: Voici le commentaire qui accompagne l'article. Le présent projet, donc l'article 72, prévoit qu'un travailleur qui, à la suite d'une lésion professionnelle, occupera un nouvel emploi moins rémunérateur pourra continuer à recevoir une indemnité de remplacement du revenu pour combler la perte subie. Comme il est possible que ce travailleur subisse alors une nouvelle lésion professionnelle, il est nécessaire de prévoir quelle base sera utilisée pour calculer sa nouvelle indemnité et ce qu'il adviendra de l'indemnité qu'il reçoit.

On considère que le revenu net que tirera ce travailleur de son nouvel emploi, joint au revenu net qui sert de base au calcul de cette indemnité, constituera son revenu net retenu à partir duquel devra être calculé le montant de la nouvelle indemnité.

Par conséquent, l'indemnité que ce travailleur reçoit déjà cessera de lui être versée puisqu'elle sera incluse dans la nouvelle indemnité.

Non, c'est... Si les membres de la commission le permettent, je vais laisser les experts expliquer, dans la technique, dans le détail, la signification de cet article 72.

M. Bisaillon: Un exemple nous ferait mieux comprendre.

M. Fréchette: Par un exemple, cela irait probablement mieux.

La Présidente (Mme Juneau): M. Lionel Bernier, vice-président à la réparation, de la CSST.

M. Bernier: L'exemple qu'on pourrait donner, c'est le suivant: Un travailleur qui a été victime d'une lésion professionnelle et qui, à la suite de celle-ci, est retourné à un emploi avec un salaire moindre, la commission lui verse la différence entre son ancien salaire et son nouveau salaire; j'arrondis, là. Supposons que cela lui donne une indemnité de 5000 $ - retourne dans un nouvel emploi et, une fois qu'il est retourné dans son nouvel emploi - supposons que celui-ci lui donne 10 000 $ de revenus - il a un nouvel accident. Ce que dit l'article, c'est que pour calculer sa nouvelle indemnité - là aussi, j'arrondis - on va tenir compte du salaire qu'il faisait, plus l'indemnité qu'il recevait déjà. On va tenir compte des 10 000 $ qu'il tirait de son nouvel emploi et on va additionner les deux.

M. Gagnon: On va tenir compte du salaire initial.

M. Bernier: Finalement, l'objectif c'est d'arriver à ce que le salaire initial soit pris en compte mais en additionnant les deux.

M. Lavigne: Donc, cela donnerait sur 15 000 $.

M. Bernier: Cela donnerait sur 15 000 $. Le texte de l'article 72 était difficile à lire parce qu'il est très technique; c'est pour cela qu'il y a eu un amendement qui, je pense, pourrait peut-être clarifier la situation. Peut-être que cela ne sera pas plus clair mais...

M. Fréchette: Il y a un effort de fait.

M. Bernier: ...il y a eu un effort de fait.

M. Maltais: J'essaie de raisonner avec M. Bernier, c'est qu'après trois accidents il devient un pensionné de l'État.

M. Fréchette: Cela pourrait ressembler à cela, oui.

M. Maltais: Si l'éventualité d'un troisième accident arrivait, sur quoi vous baseriez-vous? Il y a des "Jos Bad Luck" dans la province, il doit y en avoir là aussi. Au troisième accident, on se baserait sur les premiers 5000 $ plus les 10 000 $ pour établir l'indemnité au troisième.

M. Bernier: Pour toujours conserver... M. Maltais: L'acquis.

M. Bernier: ...comme objectif le premier salaire...

M. Maltais: D'accord.

M. Bernier: ... revalorisé, bien sûr, d'année en année.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce qu'il y a d'autres commentaires sur l'amendement de l'article 72?

M. Maltais: Ce serait une excellente idée qu'elle nous soit... pas dans la loi mais,

comme interprétation, c'est quand même quelque chose.

M. Fréchette: Oui, oui, c'est du bénédictin, cela.

M. Maltais: Je suis sûr qu'il va y avoir de la jurisprudence là-dessus.

M. Fréchette: II me semble que...

M. Maltais: C'est clair avec l'exemple mais, je veux dire, pas d'exemple...

M. Fréchette: II me semble aussi qu'avec l'effort de simplification qui a été fait le texte amendé se lit beaucoup plus facilement que ce qu'on retrouvait dans la loi 42. Je ne dis pas que c'est facile de comprendre; il se lit plus facilement. C'est l'exemple, je pense bien, qui illustre le mieux la signification précise de ce texte.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce qu'il y a d'autres commentaires?

M. Cusano: On pourrait toujours envoyer ces exemples aux avocats qui auront...

M. Fréchette: Peut-être. M. Cusano: ...à interpréter. M. Fréchette: Absolument.

M. Bisaillon: On n'a tout simplement pas dit qu'au nouveau salaire s'ajoutait...

M. Fréchette: C'est parce que ce n'est pas cela qu'on vise.

M. Bisaillon: Si j'ai bien compris l'exemple, le nouveau revenu brut va être le revenu de son nouvel emploi, celui qu'il tire de son nouvel emploi, plus le revenu brut revalorisé qu'il avait au moment où il a eu le premier accident.

M. Fréchette: Non. Reprenons l'exemple, si on le veut; corrigez-moi, M. Bernier, et arrêtez-moi si... Voici un travailleur qui est dans un emploi qui commande un salaire de 15 000 $. Dans l'exercice de ses fonctions il a un accident du travail qui l'oblige à se retirer du marché du travail pour un certain temps. Après que la consolidation est faite, il revient dans un autre emploi mais à 10 000 $ plutôt que de recevoir les 15 000 $ du début. En vertu des explications et des dispositions de la loi, à partir des exemples que j'ai donnés hier, même s'il retourne dans un endroit moins rémunérateur, il va quand même continuer de recevoir les 15 000 $ qu'il recevait au moment où il a eu son accident.

Si, dans le deuxième emploi, il a eu cet accident, l'indemnité sera fixée à partir de son salaire initial, du salaire qu'il gagnait dans l'emploi où il a eu son premier accident, même s'il ne faisait que 10 000 $, à ce moment, dans le deuxième. Il serait indemnisé, donc, à partir des 15 000 $. C'est cela l'objectif, revalorisé, évidemment...

Peut-être que, si on lisait l'amendement lentement, cela pourrait...

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Champlain.

M. Gagnon: Si c'était écrit comme vous venez de le dire, cela serait pas mal plus facile.

M. Fréchette: On va essayer de voir ce que cela donne avec le nouveau texte. "Le revenu brut d'un travailleur victime d'une lésion professionnelle alors qu'il reçoit une indemnité de remplacement du revenu est le plus élevé de celui, revalorisé, qui a servi de base au calcul de son indemnité initiale et de celui qu'il tire de son nouvel emploi."

M. Bisaillon: Ce que cela dit c'est que c'est le plus élevé de deux choses. Le plus élevé du salaire qu'il retire de son nouvel emploi ou du salaire revalorisé du premier accident. C'est cela? Le salaire revalorisé du premier accident c'était 15 000 $.

M. Fréchette: C'est cela.

M. Bisaillon: Pourquoi ne dit-on pas son premier salaire? C'est pour montrer qu'il y a... Parce qu'en fait on revient au premier salaire.

M. Fréchette: C'est le premier salaire.

M. Bisaillon: C'est le premier salaire. Alors, c'est le plus élevé du premier ou du deuxième salaire. Si le deuxième salaire est plus élevé, comme c'est le plus élevé du premier ou du deuxième, cela va être le deuxième.

M. Fréchette: C'est cela.

M. Bisaillon: Je reprends l'exemple. Il a eu un accident au premier emploi. Il est revenu au travail dans un emploi à moindre salaire et on a compensé, ce qui a maintenu son niveau de salaire du premier emploi. Il prend un deuxième emploi. Si le deuxième emploi est à un salaire plus élevé que le premier et qu'il a un accident dans son deuxième emploi, il aura le salaire du deuxième.

M. Fréchette: Voilà.

M. Bisaillon: Si le salaire de son deuxième emploi est inférieur à son salaire du premier, il aura le salaire du premier emploi. Le revenu brut d'un travailleur victime d'une lésion alors qu'il reçoit une indemnité de remplacement du revenu et le plus élevé du premier salaire ou du deuxième.

M. Fréchette: La seule...

M. Bisaillon: Si je comprends bien, dès qu'il y a revalorisation, quand on parle de revenu revalorisé, c'est parce qu'on a fait une compensation et que le salaire initial du premier emploi était supérieur à ce qu'il gagne quand il revient au travail après le premier accident.

M. Dussault: II y a eu revalorisation entre-temps. Ce qui fait que, si le député de Sainte-Marie reprend comme base le premier salaire uniquement, il se pourrait très bien que cela soit moindre. S'il y a eu revalorisation, il y a donc eu possiblement ajout de dollars entre-temps. C'est cette base qu'il faut prendre et non pas, si on dit le premier salaire, en plus de défavoriser le...

M. Bisaillon: La revalorisation c'est la différence entre le salaire au moment de l'accident...

M. Fortier: Le salaire au moment de l'accident ou celui qui a été accepté comme base de calcul.

M. Bisaillon: Mais non.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre voulait parler. Peut-être qu'on pourrait lui donner la chance d'intervenir.

M. Fortier: Oui. C'est cela qui est écrit ici.

M. Fréchette: II y a une chose, me semble-t-il, sur laquelle on s'entend.

M. Bisaillon: C'est le plus élevé des deux.

M. Fréchette: C'est le plus élevé des deux salaires. Cela a l'air clair dans l'esprit de tout le monde.

M. Fortier: Si son premier salaire était trop haut, c'est le salaire maximum, donc c'est le salaire qui a servi de base au calcul.

M. Fréchette: C'est un principe qu'il faut retenir dans tous les cas d'indemnité.

M. Fortier: C'est pour cela qu'on ne peut pas écrire le premier salaire.

M. Fréchette: Deuxièmement, c'est parce que les formules qui sont utilisées sont toujours les mêmes partout. Si dans cet article-ci il fallait procéder à remplacer le terme "revenu brut" par "salaire", il y aurait un problème sérieux de concordance avec les autres articles.

M. Fortier: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): Adopté. L'amendement à l'article 72 est adopté. Est-ce que l'article 72, tel qu'amendé, est adopté?

M. Fortier: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): Article 73. Il y a un amendement aussi. L'amendement de l'article 73 se lit comme suit: Remplacer les deuxième et troisième lignes par les mots "égal au montant pour lequel elle est inscrite".

M. Fortier: Cela se lirait comment? Mme la Présidente, voulez-vous lire l'article au complet?

La Présidente (Mme Juneau): Oui. "Le revenu brut d'une personne inscrite à la commission est égal au montant pour lequel elle est inscrite."

M. Fortier: C'est vrai pour le travailleur autonome ou pour tout le monde?

M. Fréchette: C'est pour tous ceux qui s'inscrivent de leur propre initiative. C'est évidemment, en première instance, les travailleurs autonomes qui sont visés par cette disposition.

M. Fortier: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): L'amendement est adopté... (20 h 45)

M. Fortier: Une seule question. Tout à l'heure, on parlait de l'article 71. Comment concilier l'article 73 amendé avec l'article 71? À l'article 73 on dit: "Le revenu brut d'un personne inscrite à la commission est égal au montant pour lequel elle est inscrite." Je comprends cela. À l'article 71, on dit: "Le revenu brut d'un travailleur autonome (...) est celui d'un travailleur de même catégorie occupant un emploi semblable dans la même région..." S'il est inscrit avec un salaire donné, pourquoi prendre la moyenne des salaires de la région?

M. Fréchette: En fait, c'est parce qu'il y a, effectivement, dans la pratique deux catégories de travailleurs autonomes. Vous pouvez avoir un travailleur autonome qui va

s'engager, je parle d'un camionneur par exemple, à contrat pour la ville de Montréal ou pour n'importe quelle municipalité pour une semaine, deux semaines, trois semaines. Il ne répond plus aux exigences de la définition d'un travailleur autonome. Il devient, à ce moment-là, une personne considérée comme un travailleur à l'emploi d'un employeur. Alors, que l'article 73 s'applique expressément aux travailleurs qui ne sont jamais considérés autrement qu'autonomes.

M. Fortier: Un genre de domestique.

M. Fréchette: Un genre de domestique ou le cultivateur qui part le matin avec sa batteuse et qui fait 4 ou 5 portes dans la même journée et qui recommence le même manège le lendemain, il va toujours être considéré comme un travailleur autonome sans employeur officiel et donc, il devra s'inscrire pour avoir la protection.

M. Maltais: Même chose pour les artisanes.

M. Fortier: Mais, l'article 71 se réfère à l'article 9. Autrement dit, ce que vous dites, c'est que l'article 73 se référerait au travailleur autonome, genre domestique, qui s'inscrit en disant: Je suis domestique et je gagne en moyenne 45 $ par jour...

M. Fréchette: C'est cela.

M. Fortier: L'article 71 dit: "Le revenu brut d'un travailleur autonome visé par l'article 9". L'article 9 définit le travailleur autonome: "S'il exerce des activités simultanément pour plusieurs personnes ou s'il s'agit d'activités qui ne sont que sporadiquement requises par la personne qui retient ses services". Alors, qu'est-ce qu'on veut couvrir par l'article 71, selon la définition?

M. Fréchette: L'article 71 veut couvrir le camionneur dont je vous parlais qui va s'engager pour une période plus longue que des périodes sporadiques, qui va s'engager, comme je le disais tout à l'heure, pour deux semaines, un mois ou deux mois pour un même employeur. À ce moment-là, il va être inscrit à la commission comme étant un travailleur salarié d'un employeur donné et c'est l'employeur qui va défrayer les cotisations, dans ce cas.

M. Fortier: II n'est pas autonome, à ce moment-là?

M. Fréchette: En fait, il n'est pas, à proprement parler, autonome au même titre que celui qui se livre à ces activités sparodiques. Le député d'Outremont a raison.

Cela ne l'empêcherait pas, après avoir terminé son contrat de deux ou trois semaines, de redevenir un travailleur autonome au sens de l'article 9.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'amendement de l'article 73 est adopté?

Une voix: J'espère que les avocats vont se retrouver là-dedans.

M. Cusano: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): Adopté. Est-ce que l'article 73 tel qu'amendé est adopté?

M. Fréchette: Adopté. M. Cusano: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): L'article 74.

M. Fréchette: Alors, à l'article 74, Mme la Présidente, il n'y a pas d'amendement. C'est un espèce d'article tampon ou enfin, un article qui permettrait de procéder à évaluer un revenu brut si, encore, il arrivait qu'aucune des méthodes retenues dans les articles qu'on vient d'étudier ne s'applique à cette condition particulière d'un travailleur. J'essaie de retenir un exemple d'une situation comme celle-là, et au moment où on se parle, il n'y en a pas. Enfin, on n'en a pas rencontré. Mais, est-ce que parce qu'on n'en a pas rencontré, c'est une garantie qu'il n'en arrivera pas des situations comme celle-là? On pense que non et on ne la met qu'en termes de précaution et de prudence.

M. Cusano: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: Je comprends qu'un article tampon d'un tel projet de loi est nécessaire. S'il n'y en n'a pas présentement, il pourrait y en avoir. Ma préoccupation sur l'article, justement, est lorsqu'on dit "d'une manière autre que". Advenant qu'il s'en produise un ou deux ou trois, tout à coup qu'on a besoin de faire cela, cette autre manière, cela va être calculé, je présume, par l'agent d'indemnisation dans une région?

M. Fréchette: Oui, à la lecture même de l'article, il faut, de toute évidence, arriver à la conclusion... Ah je m'excuse, je pensais que le député avait terminé.

M. Cusano: Non. Ma préoccupation sur cela, c'est comment s'assurer que cette autre façon soit interprétée de la même

façon dans chaque région administrative de la CSST.

M. Fréchette: Je ne suis pas capable d'écrire dans la loi, Mme la Présidente, que lorsque l'on accorde une discrétion à un agent d'indemnisation ou à n'importe quel autre fonctionnaire, il y aura obligation, pour tout un chacun qui va être appelé à évaluer le dossier, de rendre exactement la même décision dans les mêmes circonstances.

M. Cusano: Mais...

M. Fréchette: Vous avez des cours de justice qui rendent des jugements tout à fait différents l'un de l'autre, à partir d'exactement les mêmes circonstances, les mêmes situations et la même loi.

M. Cusano: C'est cela, dans le passé, avec certaines décisions de la CSST, qui étaient rendues de façon différente d'une région à l'autre, qui a créé toutes sortes de problèmes. Alors, je pense que de s'interroger sur l'uniformité au moins au sein de l'organisme de la CSST, il devrait y avoir des mesures de prévues.

Si, dans ce cas-là, vous n'avez pas d'autre cas présentement, peut-être en termes de suggestion, au niveau administratif de la CSST, je sais qu'on ne peut pas l'inscrire dans le projet de loi, puisque, jusqu'à présent, vous n'en connaissez pas et, dans l'avenir, il pourrait y en avoir deux ou trois dans un laps de temps, une suggestion à faire au vice-président, qui sera certainement là, c'est d'au moins s'assurer que la méthode soit bien suivie et de façon - je sais que les manuels de directives sont assez volumineux - mais de peut-être concentrer cela à un individu en particulier pour qu'au moins il puisse rendre la même décision.

M. Fréchette: Je pense que la préoccupation du député de Viau est absolument bien fondée.

M. Cusano: Ah bon!

M. Fréchette: C'est une préoccupation dont il faut, évidemment, tenir compte. Cependant, il y a une espèce de garantie quant à l'uniformité de semblables décisions, si jamais il doit y en avoir de rendues. Si jamais il y avait un commissison d'appel quelque part dans la loi et que des situations comme celle-là étaient soumises à cette dernière, il est très probable que le tribunal d'appel établirait une jurisprudence à partir de laquelle les critères se fixeraient et les décisions s'encadreraient.

M. Cusano: Oui.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Mme la Présidente, je comprends que l'article 74 en est un de protection, pour permettre, par exemple, l'établissement de politiques administratives prévues dans la loi et qui doivent être toujours, de toute façon, à la hausse, c'est-à-dire au-delà du minimum qui est déjà inscrit dans la loi. Alors là, il y a une protection quant au plancher. Le deuxième paragraphe, là-dessus, est clair.

Ce dont parle le député de Viau, c'est que tant et aussi longtemps que la situation demeure la même, cela devrait devenir la règle. Autrement dit, tant et aussi longtemps que la nouvelle façon utilisée, malgré que différente des articles 66 à 73, demeure au-dessus de et répond encore aux besoins nouveaux, cela devrait devenir la règle d'application.

M. Fréchette: Oui, cela pourrait être la conclusion qu'il faudrait tirer de l'intervention du député de Viau. Sauf qu'il faudrait peut-être vivre un cas, à un moment donné, pour savoir comment cela pourrait s'appliquer dans la pratique.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

M. Bisaillon: Non, Mme la Présidente.

M. Fréchette: Non, j'étais en train de dire, Mme la Présidente, que j'étais d'accord avec l'observation du député de Sainte-Marie. C'est tout ce que j'ai dit.

M. Bisaillon: Mais vous ne jugez pas que ce soit nécessaire de l'inscrire là?

M. Fréchette: Je ne pense pas, Mme la Présidente.

M. Bisaillon: Cela va.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 74 est adopté?

M. Cusano: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): L'article 75?

M. Fréchette: Un amendement?

La Présidente (Mme Juneau): Non, monsieur, juste à l'article 80.

M. Fréchette: L'exemple est peut-être encore ici, Mme la Présidente, le meilleur moyen d'illustrer la signification de l'article 75. Je prends le cas, par exemple, d'un mécanicien, dans le domaine de la mécanique automobile qui sort de l'école de formation

et qui a tout ce dont il a besoin pour exercer son métier de mécanicien mais qui, malheureusement, ne peut pas se trouver d'emploi. En attendant de pouvoir se dénicher un emploi comme mécanicien, il décide de faire du taxi à un salaire beaucoup moins élevé que celui qu'il retirerait s'il était dans l'exercice de la profession pour laquelle il est particulièrement qualifié. Pendant qu'il est dans l'exercice de son métier de chauffeur de taxi, il est victime d'un accident d'automobile. Ce que l'article 75 indique c'est que, pendant la première année de son incapacité, il sera indemnisé à partir du salaire qu'il faisait comme conducteur de taxi. Si, cependant, cette incapacité se prolonge au-delà de l'année de la date de l'accident, l'indemnité, à ce moment-là, sera réévaluée pour être fixée à partir du salaire qu'il aurait gagné comme mécanicien. C'est la signification de l'article.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: Juste une précision. Le ministre a donné un exemple, je voudrais lui en donner un autre. Il a employé l'exemple d'un mécanicien, je vais employer l'exemple d'un comptable. Il n'est pas capable de se trouver un job en tant que comptable et il se ramasse dans l'entretien ménager. Il va gagner le salaire minimum. Il est comptable de profession. Cela arrive. S'il a un accident pendant qu'il est en train de faire de l'entretien, il est certainement capable de démontrer qu'il aurait pu trouver un emploi ailleurs. Là, on va le rémunérer en se basant sur le salaire qu'il aurait pu gagner éventuellement, c'est cela?

M. Fréchette: Après un an de la date de l'accident qu'il a subi alors qu'il était dans l'entretien ménager.

M. Cusano: Cette limite étant seulement d'un an, la deuxième année, s'il fait la preuve qu'il peut avoir un emploi, indépendamment s'il peut occuper cet emploi, parce que s'il peut l'occuper, il n'y a pas de problème... Là, il arrive et dit: Je suis comptable, j'ai mon diplôme dans mon salon et maintenant vous allez me payer selon le salaire d'un comptable.

M. Fréchette: C'est cela.

M. Cusano: C'est extrêmement généreux.

M. Fréchette: En tenant pour acquis qu'aucune indemnité ne pourrait être fixée pour un salaire qui dépasserait le maximum assurable.

M. Cusano: 33 000 $

M. Fréchette: C'est cela. Si votre comptable prétend que, dans l'exercice de ses fonctions, il pourrait réaliser un salaire de 50 000 $ par année, il peut bien faire la preuve qu'effectivement, il pourrait obtenir un emploi à ce point rémunérateur mais son indemnité sera toujours fixée à partir du maximum assurable, soit 33 000 $ dans ce cas-ci.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Mme la Présidente, je crois que, depuis quelques articles, on a été généreux. On a reconnu des définitions de travailleurs autonomes qui réfèrent à des situations. Dans des cas où le travailleur autonome avait deux ou trois emplois, on reconnaît le salaire le plus élevé. (21 heures)

Je crois que, rendu à l'article 75, on dépasse les bornes complètement. On a perdu les pédales. On tombe dans l'arbitraire le plus complet. Il y a des exemples par milliers de gens qui sont venus à mon bureau, qui ont des diplômes d'ingénieur, des diplômes de géologue, des diplômes de toutes sortes, qui cherchent des emplois et qui n'en ont pas.

C'est une situation malheureuse et que, sûrement, je n'endosse pas. Notre formation politique croit qu'une relance de l'économie pourrait régler un peu ce genre de problèmes si on pouvait la faire. Quand même, il reste que c'est une situation de fait et de dire, dans un article, que la commission, d'une façon arbitraire, discrétionnaire, va déterminer qu'un employé peut prétendre, parce qu'il a suivi des cours, parce qu'il a un diplôme universitaire qu'il a droit à un salaire plus élevé alors qu'il faisait du taxi, si on faisait le relevé de tous ceux qui conduisent des taxis à Montréal, on découvrirait peut-être des politiciens, on trouverait des avocats, on trouverait des gens de toutes sortes et je ne crois pas, Mme la Présidente, qu'on doive accepter cet article. On dépasse les bornes complètement. Je ne sais pas qui a proposé cela mais c'est de l'arbitraire le plus complet, inacceptable et j'estime qu'on doit rejeter cet article complètement parce que l'on tombe... Dans les autres articles on était généreux, on disait: S'il y a deux ou trois emplois, ondevrait prendre le plus élevé mais là on tombe dans l'arbitraire et dans le discrétionnaire et donner ce pouvoir à la commission c'est dépasser les bornes complètement. Pour ma part, je vais voter contre cet article et je suggère que nous passions au vote.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Juste un commentaire additionnel, Mme la Présidente. Le député d'Outremont s'interroge avec beaucoup d'acuité pour savoir d'où cela vient. Je lui dirai essentiellement que l'un des objectifs de la loi, dans tous les cas où c'est possible, c'est d'arriver à s'harmoniser avec les autres régimes d'indemnités et ce n'est pas tellement sorcier, cela vient du régime de l'assurance automobile où l'on retrouve très précisément le même phénomène.

M. Fortier: On est ici pour voter sur la loi...

M. Fréchette: Non, non, je ne veux pas...

M. Fortier: ...42 et s'il y a d'autres parlementaires qui n'ont pas fait leur travail, c'est leur job, mais je vous pose la question. Dans la situation où on se trouve présentement, il y a un tas de gens qui suivent des cours universitaires et qui, malheureusement, ne trouvent pas le travail qu'il leur faut. S'il faut reconnaître cette situation de fait, on s'en va dans une direction qui va être très difficile d'administration parce que ce n'est pas l'exception. Pour les nouveaux diplômés universitaires, c'est quasiment la règle.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Je ne vais pas insister et tenter de convaincre le député d'Outremont. Je respecte l'opinion qu'il est en train de nous émettre. Je voulais tout simplement ajouter l'observation suivante: II va très certainement comprendre que le cas qui est visé par l'article 75 est là très spécifiquement pour contrer des situations d'accidents graves, d'accidents qui entraînent des états d'incapacité totale et permanente.

Ce n'est évidemment pas le cas d'un accident mineur. Ce n'est pas le cas de la fracture d'une jambe qui va faire en sorte que l'accidenté se rétablira après 40 jours, 60 jours ou deux mois de plâtre. C'est pour couvrir le cas de l'accidenté qui, après un accident, va se retrouver dans un état d'incapacité totale et de façon permanente. S'il s'agit d'un ingénieur, s'il s'agit d'un avocat, s'il s'agit d'un travailleur de n'importe quelle profession qui est ainsi affecté pour le restant de ses jours d'une incapacité totale permanente, moi, je suis obligé de conclure que ce n'est quand même pas sa faute s'il n'a pas été capable, immédiatement après avoir été qualifié pour remplir les fonctions pour lesquelles il s'est spécialisé, ce n'est pas de sa faute s'il ne pouvait pas trouver d'emploi.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Décidément, Mme la Présidente, le député d'Outremont et moi sommes faits pour nous entendre. J'allais justement demander plus.

M. Fortier: On va former une coalition. On va faire un consensus...

M. Bisaillon: Je voudrais juste lui souligner, cependant...

M. Fortier: ...comme le suggère Pierre-Marc Johnson.

M. Bisaillon: Je laisse au député d'Outremont la liberté de différer d'opinion avec nous et avec les articles du projet de loi mais je n'apprécie pas, outre mesure, le fait qu'il met en doute que les parlementaires qui ont travaillé sur la loi sur l'assurance automobile pendant au-delà de 70 journées aient mal fait leur travail. Le degré de satisfaction de la population à l'endroit de la loi sur l'assurance automobile devrait au moins indiquer au député d'Outremont que ses jugements sont peut-être un peu téméraires à cet égard.

Je voulais juste demander au ministre, Mme la Présidente, si l'article 75 ne nous permettrait pas de faire un lien avec l'article 66. Cet après-midi, quand on a étudié l'article 66, j'ai passé le commentaire suivant au ministre: Lorsqu'on pouvait établir, à l'article 66, un revenu plus élevé, est-ce qu'on ne devrait pas tenir compte des avantages qu'il y avait dans la convention collective, comme les avancements d'échelons, comme les augmentations de salaires, comme les possibilités de promotions, par exemple? Il me disait que la revalorisation était réputée - parce que là, ce n'était pas autre chose que "réputée" -être équivalente aux avantages additionnels qu'on retrouve dans une convention collective, d'année en année. Est-ce qu'on ne fait pas là, à l'article 75, des choses qu'on a refusé de faire à l'article 66? Parce que, jusqu'à un certain point, je suis d'accord avec l'argumentation du ministre et avec l'article 75. J'essaie juste de lui dire que les personnes qui sont visées ou touchées par l'article 75, je suis pour qu'elles aient ces droits-là. Mais je remarque qu'on les a refusés à l'article 66.

C'est une forme de promotion que de dire, par exemple, je suis comptable, j'ai pris un autre emploi parce que je ne me trouvais pas d'emploi de comptable, j'ai eu un accident du travail, là je reprends toute l'argumentation du ministre, que j'endosse. Alors que pendant un an, je n'ai pas été considéré au revenu d'un comptable, le fait, après un an, de me retrouver à ce salaire-là, j'assimile cela à une promotion possible dans

une convention collective.

Or, on n'a pas retenu cela à l'article 66. Je suis prêt à endosser l'article 75, tel quel. Mais je demanderais au ministre ceci: Pour quelle raison cela ne nous permettrait pas de revenir à l'article 66 et de rediscuter de toute cette question?

M. Fréchette: Pour plusieurs raisons sans doute, mais une en particulier. Dans le cas de l'article 66, on parlait de gens qui sont liés à un employeur, qui peuvent l'être par le contrat de travail qui s'appelle la convention collective, laquelle convention collective va prévoir toute espèce d'avantages, autant au niveau des augmentations de salaires annuelles ou peu importe qu'au niveau du normatif.

Dans le cas de l'article 75, il s'agit d'un travailleur qui n'a aucun lien d'emploi avec personne, qui n'est donc pas lié par convention collective avec personne non plus. De sorte qu'il me semble que le seul avantage qui peut lui être consenti, c'est celui qui est d'ordre strictement salarial ou économique. On ne pourrait pas arriver à la conclusion que notre chauffeur de taxi, dont on parle, aurait reçu une augmentation de salaire dans les six mois qui ont suivi l'accident, il était nulle part. Il n'était lié par aucun contrat de travail nulle part. Alors, je ne vois pas comment on pourrait modifier le texte pour faire en sorte que les avantages d'un hypothétique contrat de travail, d'une hypothétique convention collective devraient également lui être . accordés, il n'en a pas.

M. Bisaillon: Mon argumentation est dans le sens contraire. Je trouve que, par l'article 75, avec lequel je suis d'accord encore une fois, on va reconnaître des choses qu'on a refusé de reconnaître à la convention collective.

Je reprends mon argumentation. La convention collective contenait, par exemple, des clauses de promotion, où on disait: La personne, qui va obtenir le poste, est celui qui a le plus d'ancienneté. Supposons que c'était une promotion automatique, c'est une promotion qui est réservée à l'interne et qui se donne ou se distribue par ancienneté. Alors je prends l'application de l'article 66 et le travailleur ne pourra pas faire valoir, même après un an, que de par l'application de sa convention collective, le poste qui a été ouvert, lui, aurait été attribué parce que c'est lui qui avait le plus d'ancienneté, ce qui lui aurait fait une promotion et des revenus additionnels. Est-ce que le ministre me comprend jusque là?

M. Fréchette: Est-ce que je dois comprendre que vous faites référence au cas de la personne qui aurait déjà occupé un emploi de mécanicien?

M. Bisaillon: Oublions cela. M. Fréchette: Non?

M. Bisaillon: M. le ministre, ce que je veux expliquer, c'est que je parle de l'article 75 pour essayer de faire un parallèle avec la situation du travailleur de l'article 66 et celle de la personne de l'article 75. À l'article 66, un travailleur qui a eu un accident à un moment donné, on prévoit qu'on peut lui établir un revenu brut plus élevé et que, pour établir ce revenu brut plus élevé, on peut inclure les bonis, les primes, les pourboires, les commissions, les majorations pour heures supplémentaires, etc. Je vous avais dit: Pourquoi pas aussi les avantages de la convention collective qu'il pouvait avoir? Je vous avais donné comme exemple: augmentation d'échelon, augmentation de salaire déjà prévue et vous m'avez répondu: La revalorisation, c'est-à-dire, l'indexation est réputée comprendre tout cela.

Je vous donne maintenant l'exemple du travailleur visé par l'article 66 et qui pourrait faire la preuve à un moment donné, qu'une clause de sa convention collective lui aurait apporté, parce qu'il aurait plus d'ancienneté, lui aurait accordé une promotion à l'intérieur d'une entreprise, s'il avait été au travail alors qu'il était en accident du travail. Ce sont des clauses que vous connaissez sûrement, vous qui avez fait beaucoup d'arbitrage de conventions collectives, des clauses où la promotion est uniquement à l'interne et où elle est distribuée avec un critère d'ancienneté. Il peut faire la preuve que c'était le plus ancien, que le poste s'est ouvert pendant qu'il était en accident du travail et qu'il en aurait profité. On ne le lui reconnaîtra pas. Cette promotion lui aurait donné un salaire additionnel, des revenus additionnels et on ne lui reconnaîtra pas en calculant son nouveau revenu brut plus élevé à l'article 66. On ne tiendra pas compte de cet avantage. Je dis qu'à l'article 75, la personne qui n'a pas occupé l'emploi pour lequel elle était formée et qui se retrouve accidentée, qui répond aux conditions que vous avez énumérées, après un an, on lui reconnaîtra son statut de comptable ou de mécanicien, un statut plus élevé. Je suis en accord avec cela, mais je vous dis que si on fait le parallèle, il me semble qu'il y a une personne à qui on refuse de considérer un certain nombre d'éléments alors qu'à l'article 75, on le ferait.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre, est-ce que vous répondez tout de suite?

M. Fréchette: Mme la Présidente, oui. Le raisonnement du député de Sainte-Marie

peut servir à l'inverse de l'objectif qu'il poursuit également.

M. Bisaillon: Malheureusement, Mme la Présidente, c'est exact, mais je me fiais au ministre, quand même.

M. Fréchette: Si le député de Sainte-Marie souhaite la concordance, que l'harmonisation soit parfaite et intégrale entre les deux articles et que l'on doive vivre avec la situation que l'article 66 est maintenant adopté, il va falloir restreindre la portée de l'article 75.

M. Bisaillon: C'est du chantage.

M. Fréchette: C'est à cela qu'il va falloir arriver comme conclusion si on suit le raisonnement du député de Sainte-Marie jusqu'au bout. Il y aurait un moyen de le faire. On pourrait, par exemple, et là, on établirait une espèce d'harmonisation entre les deux situations, on pourrait lire l'article 75, à la quatrième ligne de la façon suivante, mais partons de la deuxième ligne: La commission détermine un revenu brut plus élevé que celui que prévoit la présente sous-section, si ce travailleur lui démontre qu'il a occupé un emploi plus rémunérateur dans l'année précédent la date de sa lésion professionnelle.

M. Bisaillon: Ce n'est plus la même chose du tout.

M. Fréchette: Mais non, je le sais bien.

M. Bisaillon: Mais, vous en... Mais, vous retournez à l'article 66.

M. Fréchette: Bien oui, c'est cela.

M. Bisaillon: Donc, l'article 75 n'est plus utile.

La Présidente (Mme Juneau): La parole est au député de Viau.

Une voix: Ahl Bon.

M. Cusano: Justement...

M. Bisaillon: Si le député de Viau me le permet. Au-delà de cela, M. le ministre, comment vous réagissez à mon argumentation par rapport à l'article 66? Est-ce que vous êtes conscient qu'il y a quand même un petit aspect qu'on a laissé tomber dans l'article 66?

M. Fréchette: Le député me demande si je suis conscient. Oui.

M. Bisaillon: Mme la Présidente, est-ce que le ministre me permet une question additionnelle?

Est-ce que sa conscience l'amènerait à regarder davantage la question?

M. Fréchette: Je ne suis pas à ce point troublé.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau, ensuite, ceux de Beauharnois et d'Outremont. (21 h 15)

M. Cusano: Oui, justement, sur l'article, je me demandais si, à la suite de l'intervention de mon collègue d'Outremont, ce projet de loi est adopté, quel serait l'impact sur la recherche d'emploi de la part... Je voudrais bien qu'il m'écoute.

M. Fréchette: Je m'excuse. M. Cusano: Cela va.

M. Fréchette: Je n'ai pas compris la question.

M. Cusano: Non. J'ai arrêté pour ne pas la reposer.

M. Fréchette: Allez. Cela va.

M. Cusano: C'est que mon collègue d'Outremont parlait du nombre...

M. Fréchette: Je vous écoute.

M. Cusano: Je sais que vous avez deux oreilles mais je pense qu'on peut...

M. Fréchette: Je vous écoute. M. Cusano: Vous m'écoutez? M. Fréchette: Bien sûr!

M. Cusano: Alors je disais que mon collègue parlait justement du nombre de personnes qui ont un diplôme aujourd'hui, qui se promènent un peu partout mais... En ajoutant cela, est-ce qu'on a étudié l'impact qu'un tel article pourrait avoir sur la recherche d'emploi de la part d'étudiants de cégep ou des étudiants universitaires? Parce qu'à la fin du compte, quelqu'un qui est dans sa quatrième année de n'importe quel cours et qui se trouverait un emploi durant l'été, s'il a un accident grave, il pourra certainement démontrer qu'il aurait pu éventuellement occuper un tel emploi. Dans ce sens, il me semble que les employeurs, avant d'engager quelqu'un qui aurait un potentiel pour obtenir un meilleur emploi que celui qu'il cherche, cela peut restreindre le nombre d'employeurs ouverts à offrir des emplois à ces jeunes. Je me demande si on a regardé cet aspect de l'article 75.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Mme la Présidente, à la question du député de Viau, je suis obligé de dire que non, il n'y a pas eu d'évaluation de faite, d'évaluation scientifique en tout cas.

M. Cusano: Non, pas une évaluation, mais s'est-on penché sur l'impact que cela peut avoir sur l'embauche d'étudiants?

M. Fréchette: Non, pour le seul motif suivant. C'est que j'essaie d'imaginer une situation qui ferait que quelqu'un se trouve un emploi de cette nature, avec l'intention de se retrouver dans un accident, à un moment donné. En fait...

M. Cusano: Ce n'est pas cela que je dis.

M. Fréchette: Bien...

M. Cusano: La personne se trouve un emploi. C'est que l'employeur, avec un tel article, si c'est un travail spécialement plus dangereux que d'autres, va être très réticent à employer des personnes qui auraient un potentiel pour gagner beaucoup plus que ce que l'emploi offre. C'est une question de réticence.

M. Fréchette: Le député de Viau me demande une évaluation personnelle ou une appréciation personnelle. Cela peut bien être vrai ce qu'il me dit sauf que je ne suis pas capable d'être absolu ni formel è cet égard. Je lui dis cependant que, théoriquement, peut-être que ce phénomène peut exister dans l'esprit de quelques-uns. C'est possible.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Beauharnois. Vous avez la parole.

M. Lavigne: Mme la Présidente, je ne voudrais pas allonger le débat inutilement mais le député de Sainte-Marie me trouble la conscience.

M. Bisaillon: II est là pour cela le député de Sainte-Marie.

M. Lavigne: J'ai pensé à une autre hypothèse. J'essaie d'imaginer que dans une grande entreprise où l'on engage, par exemple, plusieurs ingénieurs, on engage un jeune ingénieur qui a fini ses études mais qui n'a pas, dans cette grande entreprise, un poste d'ingénieur comme tel, mais un poste inférieur à ce qu'il pourrait avoir comme formation, en attendant de se familiariser avec les rouages de la compagnie et il est à salaire moindre que ce que sa profession pourrait réclamer normalement. Dans le sens des échelons que le député de Sainte-Marie soulignait, s'il s'avérait que cet ingénieur ait un accident avant d'avoir atteint ce que, normalement, sa profession pouvait lui donner comme rémunération, est-ce qu'il serait payé selon l'article 66 au salaire moindre en question, ou bien est-ce qu'on lui reconnaîtrait, comme on le reconnaît dans l'article 75, un salaire qui correspondrait à sa profession? Ce n'est pas par hasard que j'ai choisi un ingénieur comme exemple.

M. Fortier: S'il prend cet exemple, on va voir pourquoi on a parlé.

M. Lavigne: J'ai terminé, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que vous allez intervenir, M. le ministre?

M. Fortier: Mme la Présidente, si vous le permettez, je vais aborder le même sujet et le ministre pourra statuer.

La Présidente (Mme Juneau): D'accord, M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Ce que je voulais dire en relation avec cela - je veux remercier le député de Sainte-Marie d'avoir parlé comme il l'a fait, parce que cela renforce mon argumentation - c'est que depuis qu'on a commencé l'étude de ce projet de loi, je pense qu'il y a deux principes de base. Quand on regarde un article qui peut être litigieux pour certains d'entre nous, il faut le regarder en référence à des principes de base, parce que, sans cela, on ne peut pas en sortir.

Il y a deux principes qu'on a établis. C'est que ce projet de loi n'était pas une loi des Affaires sociales, ce n'était pas une loi pour aider les gens dans le besoin, c'était une loi pour compenser des gens qui étaient au travail et qui, selon une entente entre les employés et les employeurs, tel que l'a expliqué le ministre sur une base historique, il y a eu une espèce de concordat qui a dit: Au lieu de nous poursuivre sur le plan civil, nous allons prévoir des compensations financières dans les cas où vous êtes accidentés.

On a accepté le principe qu'il ne s'agissait pas d'une loi du ministère des Affaires sociales. C'était une loi qui dérivait de la progression historique, qui va en s'améliorant, d'ailleurs, d'année en année, pour compenser les accidents du travail.

Deuxième des choses, c'est que, quand on regarde, depuis le début, toutes les définitions qu'on a prises, on se réfère à des situations de fait. On prend la peine, depuis le début, de définir combien d'argent faisait M. X lorsqu'il travaillait et quelle était la base, quelle était la référence.

Depuis le début, on essaie de définir

les situations exactes d'emploi et c'est pour cela qu'il y a beaucoup d'articles, de définitions pour définir la base de calculs et tout cela. Donc, on se réfère à des situations de fait.

S'il faut maintenant avoir un article -je crois que c'est le premier que nous ayons ici - qui nous amène dans ce que j'appellerais des interprétations...

L'interprétation, c'est justement de supposer quel serait le déroulement d'une carrière, dans un cas ou dans un autre. Je peux dire au député de Beauharnois que chez les ingénieurs, tous les ingénieurs commencent à peu près, j'imagine, à 23 000 $ ou à 24 000 $. Il y en a qui se rendent à 150 000 $ et il y en a qui sont plafonnés à 35 000 $. Mais cela dépend de la carrière de chacun.

C'est comme les avocats. Il y en a qui restent toujours à peu près au même salaire et il y en a qui vont beaucoup plus haut. Cela, on ne peut pas prévoir d'avance. Il n'y aucun plan de carrière pour aucune personne en particulier et il n'y aucun profil de carrière qui est standard.

Ce qui est encore plus vrai, c'est que dans la situation en 1984 - tout à l'heure j'ai passé un jugement, mais je crois que la situation, lorsqu'on a voté la loi de l'assurance-automobile, article 179 ou 178 -la situation est différente maintenant et je crois, malheureusement, qu'elle va peut-être se perpétuer. C'est que les gens obtiennent des diplômes - on parle des professeurs, mais cela s'applique autant à des techniciens de toutes sortes - et il n'y a aucune corrélation ou à peu près pas, maintenant, entre le fait d'obtenir un diplôme et la pratique de la profession.

Quand j'ai gradué en 1957 à l'École polytechnique de Montréal, je pense que pour chaque ingénieur diplômé, il y avait dix offres d'emploi. Pour chaque avocat qui graduait de la faculté de droit de l'Université de Montréal, il y avait certainement un ou deux offres d'emploi.

En 1984, il y a un tas d'avocats qui graduent de l'Université de Montréal et il y en peut-être le tiers qui se trouvent un emploi dans des bureaux d'avocats. C'est moins vrai chez les ingénieurs, mais on peut dire d'une façon générale que chez les différents professionnels, en particulier, il n'y a plus aucune relation entre le fait d'avoir un diplôme et la profession qu'on peut faire.

La semaine dernière, il y a un jeune qui est venu chez moi à mon bureau, au bureau du député d'Outremont, qui cherchait un emploi et qui est un professionnel spécialisé, diplômé de l'Université de Montréal dans l'aménagement des parcs, l'aménagement urbain. Il était prêt à se trouver un emploi. Je lui ai demandé: Combien voulez-vous gagner. Il a dit: Si je me trouvais un emploi à 8,75 $, cela ferait bien mon affaire. Là, on est loin des tarifs professionnels.

Mais, comme je le disais, ce projet de loi n'est pas une loi du ministère des Affaires sociales et jusqu'à maintenant, on se référait à des situations de fait. Maintenant, d'avoir un article de loi qui permet à la commission d'interpréter quelle serait la progression d'un individu... Je suis complètement d'accord avec le député de Sainte-Marie, il peut arriver qu'un travailleur, s'il avait continué à travailler, aurait eu des promotions simplement par le fait de l'ancienneté, c'est patent. Plus que cela, peut-être que ce travailleur, dans certaines circonstances, serait devenu contremaître. On ne saura jamais parce que cela ne se produira pas parce que le type est handicapé à vie, disons, et il n'aura jamais l'occasion de démontrer ce qu'il aurait pu faire s'il avait continué la progression de sa profession.

Basé là-dessus, cela ouvre la porte à toutes sortes d'interprétations. Le député de Sainte-Marie a raison, si on le fait dans • l'article 75, il faudrait revenir en arrière pour pouvoir le faire pour les autres. Chacun aurait le droit de démontrer que s'il n'avait pas eu d'accident, s'il avait pu être très mobile pour se déplacer à travers le Québec, à supposer que son employeur lui demandait d'aller sur différents chantiers du Québec, ou si l'employeur lui a demandé de monter jusqu'au quinzième étage, sur un chantier de construction et maintenant qu'il est handicapé, il est toujours obligé de rester sur le plancher des vaches. C'est certain que cette personne pourrait argumenter que, s'il n'avait pas eu un accident du travail, il aurait une progression très différente de celle qu'il a de facto.

C'est cela que je dis, je crois que là nous avons un projet de loi, à venir jusqu'à maintenant, on s'est référé à des situations de fait et d'ailleurs il y a eu certains articles dans 68 à 74 où, lorsqu'une personne a deux ou trois emplois, on accepte le salaire le plus élevé. C'est déjà de reconnaître, implicitement, que cet employé aurait pu trouver un emploi le plus rémunérateur des trois emplois qu'il avait à plein temps, ce qui n'est peut-être pas vrai. Maintenant, on est rendu, à l'article 75, d'essayer de connaître ce qu'il aurait pu faire, s'il s'était trouvé un emploi, alors qu'on ne le sait jamais. Il peut bien arriver qu'un type qui est diplômé en droit de l'Université de Montréal soit chauffeur de taxi toute sa vie. Peut-être qu'il n'aura jamais l'occasion de pratiquer le droit de sa vie. C'est bien malheureux, mais c'est la situation dans laquelle on est.

C'est pour cela que je m'insurge contre cela dans le sens... et je suis complètement d'accord avec le député de Sainte-Marie, si on accepte 75, il faudrait revenir en arrière.

Je ne crois qu'on doive revenir en arrière. Je crois qu'on doit reconnaître les situations de fait, c'est malheureux. Ce n'est pas un projet du ministère des Affaires sociales, c'est un projet de la Loi sur les accidents du travail et la maladie professionnelle. À cause de cela, je crois que cet article dépasse la portée de l'intention de la loi et de ce qu'on devrait faire ici autour de cette table.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: J'ai juste deux observations à faire, Mme la Présidente. Il y a quand même un bémol dont il faut tenir compte dans l'argumentation du député d'Outremont. C'est bien sûr qu'il y a des ingénieurs qui peuvent arriver à gagner 150 000 $ et 200 000 $ et des médecins qui peuvent gagner 300 000 $ et 400 000 $, mais ne perdons jamais de vue que l'indemnité de remplacement de revenu ne peut jamais procéder d'une autre source que le maximum assurable. Dans l'état actuel des choses, même quelqu'un qui, théoriquement, aurait pu gagner 150 000 $, il aura une indemnité basée sur les 31 500 $ qui est le maximum assurable.

M. Fortier: Je suis parfaitement d'accord.

M. Fréchette: Deuxièmement, Mme la Présidente, si vous me le permettiez, nous tiendrions en suspens l'article pour essayer de voir comment cela peut s'aménager. Je ne suis pas en train de vous dire qu'il y a une décision de prise è cet égard, mais je vous signale que j'aurais besoin d'en discuter davantage pour arriver à finaliser une décision.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre, vous me permettez? M. le député de Champlain avait demandé la parole. Est-ce qu'il pourrait intervenir tout de suite? Est-ce que vous le souhaiteriez, M. le député de Champlain?

M. Gagnon: Si on demande de suspendre l'article, je serais d'accord avec cela. Je veux juste faire remarquer au ministre, quand même, que ce débat à eu lieu lors de la Loi sur l'assurance automobile. Je m'en souviens; d'ailleurs, vous n'y étiez pas, mais vous aviez un digne représentant...

M. Fortier: Claude Forget.

M. Gagnon: ...en la personne de M. Saint-Germain...

M. Fortier: Ah oui! Lui, il pouvait faire une filibuster, comme on dit.

M. Gagnon: ...qui nous a tenus en commission parlementaire au moins 70 jours. Mais, en fait, c'est exactement la même chose que dans l'assurance automobile où l'on parle de salaire réel ou salaire potentiel. Je pense que ce sont les termes qu'on emploie. C'est exactement ta même chose.

Le ministre, lorsqu'il va penser à, peut-être, aménager autrement l'article, il ne faut tout de même pas oublier, quand on parle d'un travailleur qui est diplômé de l'université, dans une profession comme celle qu'on a mentionnée...

M. Fortier: Peut-être technicien, technologue.

M. Gagnon: ...technicien aussi, il a énormément de chance, même si la situation de l'emploi n'est peut-être pas aussi rose -cela peut lui prendre un certain temps pour se trouver un emploi dans son métier - il a quasiment 100% des chances de trouver de l'emploi dans son métier.

M. Fortier: Exemple: l'employé de la construction. (21 h 30)

M. Gagnon: Peut-être. C'est ça. Je pense par exemple à un diplômé qui temporairement prend un travail qui est beaucoup moins rémunérateur et qui s'adonnerait à avoir un accident qui le rend invalide pour le reste de ses jours. Cela veut dire qu'il a perdu sa carrière complètement avec quasiment l'assurance de ne pouvoir travailler dans sa profession. En tout cas, on va en reparler?

M. Fréchette: C'est ça.

La Présidente (Mme Juneau): Si vous êtes d'accord, M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Mme la Présidente, quand le ministre propose de suspendre l'article 75, je dois vous avouer qu'il me fait peur un peu. Je trouve que l'article 75...

M. Fréchette: Le député d'Outremont a des arguments convaincants.

M. Bisaillon: Oui, mais j'aurais aimé que le ministre avant de suspendre s'enquière auprès du député ministériel pour savoir si effectivement il était d'accord avec le député d'Outremont et s'enquière auprès du député de Sainte-Marie pour voir s'il était d'accord avec le député d'Outremont.

M. Fréchette: Ce n'était pas nécessaire de le faire.

M. Fortier: ...allé ce matin au bureau du premier ministre.

M. Fréchette: On est en face d'une présomption irréfragable quant à l'opinion du député de Sainte-Marie.

M. Risaillon: Je veux juste indiquer au ministre que cela me semblait un article intéressant. Par ailleurs, j'étais d'accord cependant avec une partie de l'intervention du député d'Outremont à partir du moment où il disait qu'il y avait beaucoup d'arbitraire dans l'application de l'article. Comme le ministre nous a dit que c'était issu, comme modèle, de la Loi sur l'assurance automobile, est-ce que, dans vos réflexions, vous ne pourriez pas penser à ajouter à l'article 75 une référence au mode d'application ou aux règles d'application de la Loi sur l'assurance automobile? Il me semble que cela indiquerait le type de personnes qu'on veut couvrir, le type d'événements qu'on veut couvrir et ça rendrait cela correct. Adoptons donc l'article 75 et par la suite on verra s'il y a des débats à faire. Il me semble que cela devrait être la position à tenir.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre a demandé de suspendre l'article. Êtes-vous d'accord avec la suspension de l'article?

Une voix: Mme la Présidente, on suspend.

La Présidente (Mme Juneau): On suspend l'article 75 et on prend l'article 76.

M. Cusano: On en a combien de suspendus à ce jour?

M. Fréchette: Je vais vous dire cela. 7, peut-être. 10.

Dispositions particulières à certains travailleurs

La Présidente (Mme Juneau): On en a 10. L'article 76. Il n'y a pas d'amendement.

M. Fréchette: Mme la Présidente, l'article 76 vise l'étudiant qui est couvert par l'article 10, la personne qui exécute des travaux compensatoires ou des travaux communautaires ou qui est détenue et exécute un travail dans le cadre d'un programme d'activités rémunérées, l'enfant qui fait un travail en vertu de la Loi sur la protection de la jeunesse, article 11, paragraphe 3; la personne qui suit des cours de formation en matière de mesures d'urgence ou qui apporte son aide à l'application de telles mesures et, finalement, le travailleur bénévole.

Compte tenu des conditions spéciales de travail de ces personnes, il est nécessaire de prévoir des dispositions particulières quant à l'ouverture du droit à l'indemnité de remplacement du revenu et le calcul de cette indemnité et dans le domaine du travailleur qui est aussi étudiant à temps plein compte tenu des conséquences particulières que peut entraîner pour lui une lésion professionnelle.

En fait, l'article 76 n'est qu'un énoncé de principes pour couvrir les personnes dont je viens de faire l'énumération. Cet article 76 spécifie que les dispositions qui suivent, de 77 à 81, vont s'appliquer à cette catégorie de personnes particulières.

M. Fortier: Voilà.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 76 est adopté?

M. Fortier: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): L'article 77.

M. Fréchette: Cet article 77 prévoit les conditions d'ouverture du droit à l'indemnité de remplacement du revenu d'une personne qui effectue des travaux compensatoires ou communautaires ou qui est un travailleur bénévole lorsque cette personne occupe par ailleurs un emploi rémunéré ou exerce un travail pour lequel elle est inscrite è la commission.

Comme cet emploi ou ce travail constitue son gagne-pain et que l'indemnité de remplacement du revenu a pour but de compenser la perte d'un revenu de travail que subit une personne en raison d'une lésion professionnelle, il est normal d'évaluer son droit en fonction de son incapacité d'exercer son emploi ou le travail pour lequel elle est inscrite plutôt que de son incapacité d'exercer les travaux au cours desquels elle a subi sa lésion.

M. Fortier: L'article 77? M. Fréchette: Oui.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: C'est un peu comme l'article 75. Cela a la même portée que l'article 75.

M. Fréchette: Pardon?

M. Cusano: Cela a à peu près la même portée que l'article 75.

M. Fréchette: Oui.

M. Fortier: Pour quelle raison a-t-on laissé de côté... Pourquoi l'article 10 n'est-il pas là?

M. Fréchette: Non, ce n'est pas comme l'article 75.

M. Fortier: Dans l'article 76 on réfère à 10, 11, 12 et 14. Là ici c'est 11, 12 et 14. On a laissé tomber les étudiants.

M. Fréchette: Dans l'article 76?

M. Fortier: On est à l'article 76 ou à l'article 77?

M. Fréchette: L'article 77.

M. Fortier: On a laissé tomber l'article 10. Ce sont les étudiants.

M. Fréchette: C'est à l'article 78 qu'on couvre l'étudiant.

M. Fortier: On couvre les étudiants; d'accord.

M. Fréchette: Mais ce n'est pas le cas de l'article 75. Dans le cas de l'article 75, et si le texte devait demeurer ce qu'il est, je donne ces renseignements sous la réserve que l'article est actuellement suspendu... Pour les besoins de la discussion tenons pour acquis que l'article 75 est adopté tel qu'on le retrouve actuellement. Remarquez que l'on réfère à un emploi que ce travailleur aurait pu occuper alors que, dans le cas de l'article 77, c'est un emploi qui est effectivement occupé.

M. Cusano: Et non celui qu'il exerce comme bénévole, c'est cela que vous voulez dire.

M. Fréchette: C'est cela, c'est exactement cela.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 77 est adopté?

Une voix: Adopté.

M. Fortier: Attendez. Il y a juste "qu'il aurait pu occuper habituellement compte tenu de sa formation, de son expérience de travail et de la capacité..." D'accord, je pense que cela est plus général.

La Présidente (Mme Juneau): Cela va? M. Fortier: Cela va, oui.

La Présidente (Mme Juneau): Adopté. L'article 78.

M. Cusano: Cela va bien.

M. Fréchette: II n'y a pas d'amendement.

La Présidente (Mme Juneau): Non, monsieur.

M. Cusano: On peut peut-être adopter le projet de loi avant Noël.

M. Fréchette: Je vous réitère que je ne suis pas pressé du tout. S'il me suggère d'adopter le projet de loi avant Noël...

M. Cusano: Non, j'ai dit: On peut peut-être.

M. Fréchette: J'ai compris.

M. Fortier: C'est parce qu'il ne veut pas revenir le 2 janvier.

M. Fréchette: Je vous signale que je ne suis pas nerveux.

À l'article 78, voici le commentaire.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fortier: Là, on retombe à l'article 75.

M. Fréchette: À l'article 78: dans le cas particulier de l'étudiant les conséquences d'une lésion professionnelle revêtent plusieurs formes. Elles peuvent affecter sa capacité de travail, sans affecter sa capacité de poursuivre ses études. Elles peuvent aussi affecter sa capacité de poursuivre ses études ou d'exercer un emploi en rapport avec l'achèvement de ses études, ce qui peut lui occasionner des retards parfois importants dans la poursuite de ses études et dans l'accès ultérieur au marché du travail. C'est pourquoi cet article prévoit des conditions plus larges d'ouverture du droit de l'étudiant à l'indemnité de remplacement du revenu.

M. Fortier: Là, on va reprendre toute la discussion de l'article 75.

M. Fréchette: Très précisément.

M. Fortier: Là, est-ce que cela va être un avocat à 150 000 $ ou à 35 000 $, celui-là?

C'est peut-être un futur premier ministre, on ne le sait pas. ...de l'Union Nationale.

M. Fréchette: La question de fond, je le sais bien - et je suis d'accord avec le député d'Outremont quand il attire notre attention là-dessus - c'est le fait que le phénomène ou le principe ressemble étrangèrement à celui qu'on a regardé dans l'article 75 sans l'adopter.

J'attirerai cependant l'attention aussi des membres de la commission sur le fait que, si l'étudiant est victime d'un accident

du travail qui l'empêche de façon définitive et permanente de même continuer ses études. Est-ce qu'on va tenir pour acquis qu'il sera indemnisé pour toute la période qui restera à courir jusqu'à l'âge de 68, à partir du salaire minimum?

M. Fortier: Non. Dans un cas comme celui-là, pour être bien précis, où une personne est à l'université - pour prendre un cas d'étudiant en génie - en troisième année de polytechnique et qu'elle a une lésion professionnelle permanente, je crois que ce serait raisonnable, étant donné qu'il lui restait un an ou un an et demi, de dire: Le salaire qu'il aurait eu la première année de la pratique de sa profession. Mais ici on laisse cela ouvert ad vitam aeternam. Autrement dit, quel est le salaire qu'il aurait eu? Cela peut être le salaire qu'il aurait eu à 30 ans, 35 ans ou 40 ans. Si, dans le texte, on avait un amendement pour dire que, dans le cas des étudiants, ce sera le salaire minimum qu'il aurait eu en tant que professionnel ou en tant que diplômé dans un secteur donné, là je dirais: Cela a du bon sens. Mais tel que l'article est écrit, il n'y a aucune limite, aucune référence.

M. Fréchette: Cela pourrait ressembler passablement au maximum assurable.

M. Fortier: Pas tout à fait parce que, si on prend comme exemple un diplômé en droit - je n'ai pas de bureau d'avocats moi-même - les jeunes diplômés en droit ne doivent pas gagner une fortune quand ils commencent à travailler. C'est plus que le salaire minimum. C'est quoi? C'est autour de 15 000 $ ou de 18 000 $.

M. Fréchette: Cela a déjà été cela; ce n'est plus cela maintenant.

M. Fortier: 20 000 $, en tout cas, ce n'est pas énorme.

M. Fréchette: Enfin, entre 20 000 $ et...

M. Fortier: C'est plus bas que 33 000 $.

M. Fréchette: Oui, je suis d'accord.

M. Fortier: À part cela, quelqu'un pourrait discuter en ce sens qu'au fur et à mesure qu'il vieillit il aurait eu des augmentations de toute façon. Oui, mais où s'arrête-t-on?

M. Bisaillon: On se fait gruger pas mal, mes petits camarades.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Je disais à mes petits camarades qu'ils sont en train de se faire gruger pas mal. Le député d'Outremont, à l'article 75, a émis une opinion - ce n'est pas sa première et ce ne sera pas sa dernière - mais on n'est pas obligés de faire un x sur l'ensemble des articles du projet de loi pour cela. De la façon dont je vous regarde aller ce soir, vous êtes après couper environ 16 000 000 $ de dépenses additionnelles qui avaient été prévues. On va pouvoir appliquer cela à tout le reste qu'on n'a pas donné.

M. Fortier: Ce n'est pas ce que je dis, ce sont les arguments que j'utilise.

M. Bisaillon: Non, ce n'est pas ce que vous dites, mais l'effet, d'après ce que je peux voir, est à peu près le même. On est après se faire saper l'article 75; on a failli passer à travers l'article 77; là, on hésite sur l'article 78.

M. Fréchette: On n'hésite pas pour la raison suivante.

M. Bisaillon: C'est ce que je voulais vous entendre dire, M. le ministre.

M. Fréchette: L'article 78...

M. Gagnon: Pour l'article 75, ce sont les arguments du député de Sainte-Marie qui ont commencé le débat.

M. Fréchette: C'est vrai, cela.

M. Bisaillon: Vous vous êtes laissé saisir par l'intervention du député d'Outremont.

M. Fréchette: Ce que je voulais dire, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: ...c'est que l'article 78 n'est qu'un article de principe qui donne ouverture au droit. Il ne prévoit pas du tout les modalités d'indemnité. C'est à l'article 79 que l'on retrouve les modalités d'indemnité. Si le député d'Outremont y regarde de près à l'article 79, je pense que plusieurs des appréhensions qu'il nous a soumises pourraient s'atténuer quand on regarde les modalités qui sont prévues et retenues pour l'application du principe que l'on retrouve à l'article 78.

M. Fortier: À quel endroit va-t-on voir cela?

M. Fréchette: À l'article 79, l'article immédiatement après.

M. Cusano: Mais à l'article 79, il y a un troisième paragraphe...

M. Fréchette: Je comprends, mais, enfin, cela atténue considérablement les inquiétudes du député d'Outremont, généralement parlant.

M. Bisaillon: Le député d'Outremont généralement parlant ou?

M. Fréchette: Pardon?

M. Bisaillon: Le député d'Outremont généralement parlant ou?

M. Fortier: J'essaie de comprendre ici. Malgré ce qu'a dit le député de Sainte-Marie, je suis ouvert dans ce cas-ci au principe. J'essaie simplement de voir la difficulté d'interprétation. Pour faciliter les choses, on va prendre comme exemple un étudiant en droit qui a une lésion professionnelle permanente. S'il avait continué ses études, à sa graduation, il aurait gagné, disons, 20 000 $. Est-ce que l'argumentation que pourrait développer cette personne-là serait en ce sens que, si elle avait continué sa carrière par la suite, cela aurait été plus élevé ou si c'est le salaire qu'elle aurait eu au moment de sa graduation. Autrement dit, est-ce que ce sera une revalorisation continue de cette personne? (21 h 45)

M. Fréchette: Pas du...

M. Fortier: Une revalorisation continue dans le temps, disons tous les trois ans, tous les quatre ans, il aurait toujours pu avoir un salaire additionnel. J'essaie simplement de voir la difficulté d'interprétation.

M. Fréchette: Dès lors qu'un premier salaire aura été déterminé, ce qu'on appelle le salaire annuel brut, il n'est pas révisable, sauf pour y ajouter l'indexation annuelle, comme dans tous les cas d'indemnité.

M. Fortier: On n'a pas encore vu les clauses de revalorisation; je ne sais pas dans quel cas elles s'appliquent. Si c'est ça, je suis d'accord avec l'article 78. Ce que je voulais éviter, c'est une remise en question continue du salaire de base qui détermine l'indemnité.

La Présidente (Mme Juneau): L'article 78 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que c'est adopté, M. le député de Viau?

M. Fortier: J'ai peut-être une réserve.

Ici, j'aurais ajouté après "d'exercer l'emploi rémunéré qu'il occupe ou qu'il aurait occupé" à sa graduation, "n'eût été de sa lésion, de poursuivre ses études d'exercer un emploi..."

M. Cusano: À l'article 79.

M. Fréchette: C'est à l'article 79 qu'on va voir ça.

M. Fortier: D'accord, je suis d'accord avec le principe.

M. Cusano: Adopté. M. Fortier: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): Adopté. Article 79?

M. Fréchette: Mme la Présidente, il n'y a pas d'amendement à l'article 79. Cet article complète l'article 78 en déterminant le mode de calcul de l'indemnité de remplacement du revenu de l'étudiant. Cette indemnité sera égale à 50 $ par semaine tant que l'étudiant aura moins de 18 ans et ce ne sera qu'à ses 18 ans qu'elle sera portée à un montant calculé sur la base du salaire minimum, comme le prévoit la loi actuelle.

Cependant, l'étudiant pourra démontrer des revenus d'emploi qui lui permettraient d'obtenir une indemnité supérieure. Dans ce cas, la base minimale ne s'appliquera pas si l'étudiant est âgé de moins de 18 ans, puisque c'est alors l'indemnité de 50 $ qui constituera l'indemnité minimale. À l'âge de 21 ans, il y aura révision de l'indemnité si le bénéficiaire démontre qu'il pourrait gagner un revenu d'emploi plus élevé s'il n'avait pas subi de lésion. Cette révision s'apparente à celle que prévoit l'article 27 de la loi actuelle.

Il faut également noter que le présent article s'appliquera aussi à l'enfant qui exécute un travail en vertu de la Loi sur la protection de la jeunesse, lequel est nécessairement âgé de moins de 18 ans.

Je ne sais pas si la discussion va s'engager particulièrement sur le paragraphe 3 de l'article 79.

M. Cusano: Au paragraphe 2, on dit: "à compter de l'âge de 18 ans, calculée à partir du "revenu brut annuel déterminé sur la base du salaire minimum alors en vigueur". Est-ce que cette indemnité, c'est toujours 90% de ça?

M. Fréchette: Voilà.

M. Cusano: Bon, on a dit que c'était 139 $.

M. Fréchette: 136 $ ou 139 $. C'est

ça.

M. Cusano: Pour des chiffres ronds, on va dire 140 $. Alors, c'est 50 $ en bas de 18 ans; de 18 a 21 ans, c'est 140 $, il n'y a pas de problème. Où on semble avoir plus de difficulté, c'est au troisième paragraphe.

M. Fortier; Avant d'arriver au troisième paragraphe, j'aurais juste une question. Dans le cas d'un travailleur qui travaille, on a défini tout à l'heure qu'il s'agissait d'un emploi sur les lieux du travail, selon le mandat qu'un employeur lui avait donné. On a dit au tout début que ça excluait l'accident qui pouvait survenir sur le terrain de stationnement.

Dans le cas d'un étudiant, comment est-ce défini? Si des étudiants de l'Université de Montréal vont faire du ski sur la côte de ski de l'Université de Montréal durant la journée, est-ce que c'est un accident du travail?

M. Fréchette: C'est l'étudiant qui est en stage dans une entreprise.

M. Fortier: C'est-à-dire soit qu'il est en stage ou qu'il exerce une activité qui est semblable à une activité exercée dans un établissement...

M. Fréchette: C'est cela.

M. Fortier: ...et qui est déterminée par règlement. Mais est-ce que le fait de suivre des cours à l'université, cela le définit comme étant un travailleur à l'université?

M. Fréchette: Non, non. Pas le fait de suivre des cours. Si, à l'intérieur de ses cours, par exemple, il y a une période de stage pratique...

M. Fortier: Dans une école technique.

M. Fréchette: ...dans une école technique ou dans une entreprise, peu importe...

M. Fortier: Oui.

M. Fréchette: ...et qu'à l'occasion de ces activités il subit un accident, c'est là que la loi s'applique.

M. Fortier: D'accord. Alors, seulement en relation avec les stages...

M. Fréchette: Voilà!

M. Fortier: ...de formation.

M. Fréchette: Et l'exercice d'une activité de travail.

M. Fortier: D'accord. Quand j'étais jeune étudiant en génie, on allait à l'École technique de Montréal pour faire des moules et des choses comme cela, c'était un travail technique. Ce serait juste ce genre d'activités.

M. Fréchette: C'est cela.

M. Fortier: J'avais les cheveux noirs à ce moment-là.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: M. le ministre, pour compléter l'exemple que vient de nous donner le député d'Outremont, par exemple, à un niveau inférieur, au niveau du secondaire IV et V, il y a aussi des stages en milieu de travail de perfectionnement.

M. Fréchette: Oui.

M. Lavigne: Là, on rencontre des gars de 17 ou 18 ans.

M. Fréchette: Dans les écoles de formation professionnelle.

M. Lavigne: Dans les écoles de formation en soudure, en ferblanterie, dans les métiers de construction et tout cela.

M. Fortier: Toutes ces activités-là.

M. Lavigne: Exactement. On les envoie dans des endroits de perfectionnement pour six mois, à leur dernière année, entre autres.

M. Fortier: Dans mon temps, même les jeunes ingénieurs allaient là-dedans.

M. Lavigne: Ah oui!

La Présidente (Mme Juneau): M. le député... Non, cela va?

M. Cusano: C'est au troisième paragraphe.

La Présidente (Mme Juneau): D'accord.

M. Cusano: Est-ce que le ministre a quelque chose à préciser sur le troisième?

M. Fréchette: Je ne voulais pas aller au devant des coups, mais je savais fort bien que nous allions entreprendre une discussion un peu plus serrée sur le troisième paragraphe.

Ce que je serais disposé à suggérer -cen'est, à ce stade-ci, en tout cas, qu'une simple suggestion pour aider à faire progresser la discussion, si c'est possible - ce serait d'intégrer, au paragraphe 3 de l'article

79, les critères que l'on retrouve à la fin de l'article 77. Par exemple, "l'emploi qu'il aurait pu occuper habituellement compte tenu de sa formation, de son expérience de travail et de la capacité physique et intellectuelle qu'il avait avant que se manifeste sa lésion." Cela balise très sérieusement la généralité du troisième paragraphe de l'article 79. Je ne sais pas, je le mets sur la table pour fins de discussion, pour le moment.

M. Cusano: Est-ce que vous pouvez répéter cela, M. le ministre? Parce qu'il y a quelque chose...

M. Fréchette: Écoutez, si on disait: "3° à compter de l'âge de 21 ans, révisée à la hausse s'il démontre à la commission qu'il pourrait gagner un revenu brut d'emploi plus élevé si ce n'était de sa lésion professionnelle" - la, j'improvise - en tenant compte de "l'emploi qu'il aurait pu occuper...

M. Cusano: Excusez, vous vous référez à quel article?

La Présidente (Mme Juneau): L'article 77, a l'avant-dernière ligne.

M. Cusano: L'article 77.

M. Fréchette: ...compte tenu de sa formation, de son expérience de travail et de la capacité physique et intellectuelle qu'il avait avant que se manifeste sa lésion."

M. Cusano: La capacité physique, cela va. Mais la capacité intellectuelle, cela peut ouvrir toutes sortes de portes.

M. Fréchette: BienI

M. Fortier: Je crois, M. le ministre...

M. Fréchette: II semble que les résultats scolaires vont démontrer quelle peut être la capacité intellectuelle d'un étudiant.

M. Cusano: Pas nécessairement, M. le ministre.

M. Fortier: Non, mais je crois...

M. Cusano: II y a des étudiants qui ont des quotients intellectuels de 145...

M. Fréchette: En tout cas!

M. Cusano: ...et ils ont échoué des examens de mathématiques.

M. Fortier: Non, je crois que c'était un essai louable. Mais, dans le cas des bénévoles ou des autres personnes, enfin je ne sais pas, normalement ce serait des gens qui ont une certaine expérience de la vie, des gens un peu plus âgés. Je crois que la définition qu'en donnait le ministre, à la fin de l'article 77, s'appliquait.

Dans le cas d'un étudiant qui, à l'âge de 21 ans, a droit à cette indemnité, j'aurais cru que, peut-être, la meilleure définition aurait été le salaire initial qu'il aurait eu dans une profession dans un secteur donné. À ce moment-là, c'est assez facile à définir. Si le type était étudiant en soudure, en graduant comme technicien en soudure, il avait un salaire initial de tant; s'il était étudiant en droit, la première année de droit, il aurait obtenu un salaire de tant. Donc, si on référait à la première année où il aurait pratiqué dans un secteur donné, je crois que cela définirait passablement le niveau de salaire auquel il aurait droit.

M. Fréchette: Cela va être difficile d'arriver à déterminer quel pourrait être très précisément le salaire qu'un étudiant en droit de troisième année aurait gagné à sa première année de pratique.

M. Fortier: Bien, je vous donne raison; je connais plus le milieu des ingénieurs. Pour les ingénieurs, c'est assez facile...

M. Fréchette: On va faire...

M. Fortier: ...de déterminer ce que reçoit un diplômé de poly, la première année, en moyenne. Cela peut varier de 10%, mais en moyenne, c'est à peu près le même salaire pour tous.

M. Fréchette: Le même montant.

Mme la Présidente, on a l'habitude à cette heure-ci de nos travaux, de suspendre pour cinq ou dix minutes...

M. Fortier: Je pense que c'est une bonne idée.

M. Fréchette: ...histoire de se délier les muscles.

La Présidente (Mme Juneau): Nous allons suspendre pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 21 h 56)

(Reprise à 22 h 10)

Le Président (M. Dussault): Messieurs, nous allons reprendre les travaux de la commission. Nous en étions à l'article 79. Qui avait la parole? M. le ministre.

M. Fréchette: M. le Président, j'avais effectivement la parole pour vous dire, au moment où on a suspendu nos travaux, que

nous travaillions à un nouveau texte relativement au paragraphe 3 de l'article 79. Je le fais à titre de suggestion, à ce stade ci. Ce paragraphe 3 pourrait se lire de la façon suivante et remplacerait le texte qu'on retrouve actuellement dans la loi 42: "À compter de l'âge de 21 ans, révisée à la hausse s'il démontre à la commission qu'il aurait probablement gagné un revenu brut d'emploi plus élevé à cet âge s'il n'avait pas été victime d'une lésion professionnelle." Cela se réfère - c'est l'interprétation qu'on en fait à ce stade - très précisément à la notion qu'a développée le député d'Outremont, c'est-à-dire au premier salaire qu'aurait gagné l'étudiant dans sa profession après sa graduation. Il faudra qu'il fasse la démonstration qu'il aurait été capable d'obtenir sa graduation et qu'il aurait probablement gagné ce salaire. Ce salaire qui sera fixé sera revalorisé, évidemment, conformément aux dispositions de la loi, annuellement, l'indice des prix à la consommation, et ne dépassera jamais, de façon évidente aussi, le maximum assurable. Si, dans une profession - je pense aux actuaires, par exemple - le premier salaire qu'on peut gagner était de 50 000 $, on serait indemnisé à partir de 33 000 $, du maximum assurable. D'ailleurs, ce que les légistes me disaient tout à l'heure, c'est que le texte que l'on retrouve actuellement dans la loi 42, a toutes fins utiles, est à peu près l'équivalent de ce qu'on vient d'écrire; peut-être que, pédagogiquement, c'est plus simple. Ce texte est tiré presque mot à mot de la loi actuelle, celui que je viens de lire, comme amendement. Je le soumets actuellement comme base d'une discussion et, si cette discussion nous amenait à la conclusion qu'on rejoint les objectifs visés, cela pourrait devenir un amendement.

M. Fortier: À ce moment, je suis d'accord. Je suis prêt à adopter l'article 79 moins le troisièmement, c'est-à-dire moins le...

M. Fréchette: Et le remplacer.

M. Fortier: ...troisièmement qui viendrait comme amendement spécifique. Vous ne le proposez pas comme un amendement spécifique, à ce moment.

M. Fréchette: Je le proposerais effectivement comme amendement spécifique: Remplacer le texte du paragraphe 3 de l'article 79 par celui que je viens de lire.

M. Fortier: Pour me faire l'avocat de la défense de l'étudiant, le seul ajustement qu'il y aurait, c'est à 21 ans. Disons que, normalement, l'étudiant aurait terminé son cours à 22 ou à 23 ans. Qu'est-ce qui .arrive, à ce moment? Alors, à 21 ans, il faudrait qu'il fasse la démonstration, mais il n'aurait pas l'occasion de faire la même démonstration à 22 ans ou à 23 ans.

M. Fréchette: C'est plus difficile pour lui d'arriver à convaincre les "décideurs" qu'il aurait pu gagner ce salaire à cet âge. Il sera probablement obligé d'attendre que...

M. Fortier: Est-ce qu'il aura l'occasion de...

M. Fréchette: Oui, il. aura l'occasion de faire revoir la situation. Un instant: Je ne veux pas qu'on crée d'embêtement à qui que ce soit. Je vais me poser une question à moi-même et j'aimerais bien qu'on y réponde. À supposer qu'un étudiant en médecine termine son cours à 26 ans...

M. Fortier: Normalement, 25 ans.

M. Fréchette: ...25 ans, 26 ans ou 27 ans. Il faudra qu'à l'âge de 21 ans il puisse convaincre ces "décideurs" dont on parlait que, de toute évidence, il allait obtenir, à 25 ou 26 ans, les autorisations nécessaires pour pratiquer la médecine. S'il réussit à convaincre ces personnes-là, à l'âge de 21 ans, il commencera à recevoir l'indemnité conforme au salaire annuel brut qu'il aurait gagné dans l'exercice de la médecine pendant la première année.

Mais là où je me place, il y a une côte importante à monter. L'étudiant qui a 21 ans et qui est en première année de médecine devra devoir faire une sérieuse démonstration pour convaincre, encore une fois, les gens qui ont la décision à prendre que, de toute manière, il aurait complété ses études en médecine. Il ne faudrait pas non plus qu'on prenne des dispositions telles qu'on ferme la porte.

M. Fortier: J'aurais un amendement à proposer à l'amendement: Si, au lieu de dire "à cet âge", on marquait "à la fin des études en cours"?

M. Fréchette: Avez-vous compris M. Bernier?

M. Fortier: Non. Alors, cela se lirait: "à compter de l'âge de 21 ans, révisée à la hausse s'il démontre à la commission qu'il aurait probablement gagné un revenu brut d'emploi plus élevé à la fin des études en cours s'il n'avait pas été victime d'une lésion professionnelle." À ce moment-là, je pense que...

M. Fréchette: Ce n'est pas strictement nécessaire d'indiquer "en cours"; "à la fin de ses études", cela pourrait...

M. Fortier: C'est parce que, si on

prend l'étudiant en médecine, il pourrait dire: J'avais l'intention de prendre une spécialité par la suite...

M. Fréchette: Ah! Oui.

M. Fortier: Alors, "les études en cours", s'il est inscrit en première année de médecine à l'Université de Montréal, ce sont les études dans lesquelles il est engagé à ce moment-là, pas les études qu'il aurait pu prendre subséquemment.

M. Fréchette: Cela pourrait aller.

M. Fortier: Alors, ce serait de remplacer "à cet âge" par "à la fin des études en cours".

Le Président (M. Dussault): Alors, est-ce qu'on pourrait commencer par adopter cet amendement: Remplacer les mots, à la quatrième avant-dernière ligne du texte que nous avons, "à cet âge" par "à la fin des études en cours"?

Une voix: C'est cela.

Le Président (M. Dussault): Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Fréchette: Adopté. M. Fortier: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Adopté. Nous revenons maintenant au 3° de l'article 79 tel qu'amendé. Est-il adopté?

M. Fortier: Adopté. M. Fréchette: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Alors, ce 3° est adopté. Nous revenons maintenant à l'article 79 tel qu'amendé. Y a-t-il d'autres intervenants? Non.

Est-ce que l'article 79 tel qu'amendé est adopté?

M. Fortier: Adopté. M. Fréchette: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Adopté. J'appelle maintenant l'article 80...

M. Fortier: Attendez une minute. Il y a seulement au dernier alinéa qui dit: "La révision faite en vertu du paragraphe 3 du premier alinéa tient lieu de celle que prévoit l'article 75." Alors, je crois que là, selon ce qu'on va décider pour l'article 75, ce dernier suppose une interprétation subjective de ce que l'étudiant aurait pu faire s'il avait pu grandir dans sa profession. En tout cas, je propose qu'on abroge l'article 75, mais, à ce moment-là, les deux dernières lignes de l'article 79 devraient également être abrogées.

Pour le moment, peut-être qu'on peut adopter l'article 79, moins les deux dernières lignes.

Le Président (M. Dussault): Ou encore sous réserve de ce qui sera adopté à l'article 75.

M. Fortier: En ce qui concerne les deux dernières lignes, sous réserve de ce qu'on décidera pour l'article 75.

M. Fréchette: Cela va.

Le Président (M. Dussault): Je m'excuse, je n'ai pas entendu la fin de ce que vous avez dit, M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Sous réserve. Alors, je propose qu'on adopte l'article 79 et qu'en ce qui concerne tout particulièrement les deux dernières lignes de l'article 79 ce soit sous réserve de la décision qui sera prise pour l'article 75.

Le Président (M. Dussault): D'accord, c'est compris. Alors, l'article 79, dans ces conditions, est adopté?

M. Fréchette: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Adopté. J'appelle l'article 80.

M. Fréchette: Sur lequel il y a des amendements de proposés.

M. Fortier: Cela allait bien, on avait un bon président. C'est vrai qu'il fait bien cela.

Le Président (M. Dussault): II faudrait que vous vous en souveniez, M. le député d'Outremont.

La Présidente (Mme Juneau): II y a un amendement à l'article 80. L'amendement se lirait comme suit: "Remplacer, dans les première et deuxième lignes, les mots "paragraphe 1 ou 2 de l'article 11" par les mots "paragraphe 1°, 2° ou 4° de l'article 11".

M. Fortier: C'est l'article 11.

La Présidente (Mme Juneau): D'accord.

M. Fortier: Dans le système numérique arabe.

M. Fréchette: Mme la Présidente, l'amendement en est un de concordance pour

s'arrimer avec les amendements qu'on a faits à l'article 11. On a ajouté des choses, je pense, à l'article 11; on a ajouté le paragraphe 4. Alors il faut, de toute évidence, que l'article 80 se réfère également au paragraphe 4.

M. Fortier: Je suis d'accord. Je crois que là, on se retrouve avec deux fois le salaire minimum: le salaire minimum ici pour le salaire minimum, et l'article 79 qui est le salaire minimum d'un professionnel ou d'un étudiant qui est en stage de formation et qui aurait terminé ses études.

M. Fréchette: C'est exact.

La Présidente (Mme Juneau): L'amendement est-il adopté?

Une voix: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): L'article 80 tel qu'amendé est adopté. À l'article 81, il n'y a pas d'amendement.

M. Fréchette: Article 81, Mme la Présidente. Cet article apportera en pratique peu de changements à la situation actuelle. Le sous-paragraphe b du paragraphe 7 de l'article 46 de la Loi sur les accidents du travail adopte aussi, comme règle générale, la détermination du revenu d'un travailleur non rémunéré sur la base du salaire minimum, sauf si cela apparaît inéquitable. Dans ce cas, la commission utilise le revenu d'un travailleur correspondant. Le présent article délaisse la règle de l'équité pour tenir compte du fait que le travailleur retire ou non un revenu d'un autre travail.

Dans ce cas, on déterminera le revenu de ce travailleur selon les règles générales établies précédemment, c'est-à-dire d'après les revenus qu'il tire de son travail. De plus, en conformité avec l'article 79, on prévoit des règles particulières è l'égard du travailleur bénévole qui a moins de 18 ans. C'est expressément le mécanisme qui s'applique dans le cas du travailleur bénévole. Alors, il sera indemnisé à partir de ce qui a été retenu dans l'article 79 s'il est âgé de moins de 18 ans, c'est-à-dire 50 $ par semaine, et suivant la modalité prévue au deuxième paragraphe s'il a plus de 18 ans.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 81 est adopté?

M. Fortier: Adopté.

M. Cusano: Un instantl Cela va.

La Présidente (Mme Juneau): Adopté. L'article 82?

M. Bisaillon: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Maintenant qu'on a adopté les articles 76, 77, 78, 79, 80 et 81, je me demande toujours ce qui nous empêcherait de nous prononcer sur l'article 75. Il me semble qu'il y a des mécanismes dont on a décidé, dont on a convenu dans les articles 76 à 81 qui nous permettraient d'adopter l'article 75.

M. Fréchette: Mme la Présidente, le seul motif pour lequel j'ai demandé tout à l'heure la possibilité de réserver l'adoption de l'article 75, c'est que je ne me prétends pas prêt à une décision finale à cet égard et j'ai besoin de revoir un certain nombre de situations, de faire un peu de consultation avant de me faire une opinion définitive. C'est la seule raison pour laquelle je souhaite que l'article 75 soit réservé.

La Présidente (Mme Juneau): Nous en avions convenu ainsi, M. le ministre. Nous passons à l'article 82.

Indemnité pour dommages corporels

M. Fréchette: Mme la Présidente, voici le court commentaire quant à l'article 82. Cet article a pour but de reconnaître le droit du travailleur à une indemnité pour dommages corporels pour compenser les pertes non économiques qu'il subit en raison d'une lésion professionnelle. À l'instar de la Loi sur l'assurance automobile et de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'amiantose ou de silicose dans les mines et les carrières, le projet de loi distinguera les pertes économiques subies par le travailleur en les compensant au moyen d'une indemnité de remplacement du revenu des pertes non économiques qui ne s'évaluent pas financièrement et pour lesquelles il prévoit le versement d'une indemnité forfaitaire. Les douleurs et la perte de jouissance de la vie ne seront indemnisées que lorsqu'elles découleront d'un déficit anatomophysiologique ou d'un préjudice esthétique.

En fait, c'est la consécration du forfaitaire dont on a longuement parlé dans les remarques préliminaires lorsqu'on a amorcé l'étude de la loi.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va? Est-ce que l'article...

M. Cusano: Un instant!

La Présidente (Mme Juneau): Oui, M. le député de Viau.

M. Cusano: Quitte à choquer le ministre...

M. Fréchette: ...

M. Cusano: Des fois, il se choque pour des choses insignifiantes et, d'autres fois, il est très patient. Je dois dire que, la plus grande partie du temps, il est très patient.

J'aimerais...

M. Fréchette: II y a quelque chose qui s'en vient, c'est certain.

La Présidente (Mme Juneau): Ce sont les fleurs, M. le ministre.

M. Cusano: Hier, on a examiné cette comparaison et, selon des calculs qui ont été faits, qui ont été démontrés, et je n'accuse personne de mauvaise foi, je pense qu'on a fait une erreur assez importante lorsqu'on parlait de la capitalisation de la rente à vie qui existe présentement.

J'aimerais avoir - pas une cinquantaine - une couple d'autres exemples pour être sûr et certain qu'on comprend la situation. C'est que présentement, dans le projet de loi qui est devant nous, j'ai nettement l'impression que l'individu qui gagne un salaire assez considérable recevra, à cause de son accident, de sa lésion professionnelle, une indemnité de remplacement du revenu. Parfait! Pas d'objection globale à cela. Mais c'est que, plus on approche, plus on diminue le salaire gagné et plus on s'en vient au salaire minimum. C'est qu'au salaire minimum - et corrigez-moi si je me trompe une personne qui travaille au salaire minimum et qui reprend une occupation encore au salaire minimum ne se trouve pas à avoir une indemnité de remplacement du revenu. C'est bien cela.

Ce qu'il faudrait faire, dans un sens, parce qu'on nous a dit, dans les discours en Chambre, que le système proposé dans le projet de loi 42 est nettement supérieur... Maintenant, je suis prêt à concéder que, pour certaines catégories de gens, c'est supérieur. Celui qui peut recevoir jusqu'au maximum de 33 000 $ - c'est bien cela, son salaire brut - s'il tombe à un emploi qui va lui donner 12 000 $, l'indemnité de remplacement du revenu est substantielle. Tandis que pour les plus démunis de la société, ceux qui sont au salaire minimum, il n'y a aucune indemnité de remplacement du revenu. Est-ce que je me trompe dans cette analyse?

M. Fréchette: II n'y a aucune indemnité de remplacement du revenu. (22 h 30)

M. Cusano: Celui qui est au salaire minimum et qui revient travailler, après une période de temps, à un salaire minimum ne reçoit rien, en tant qu'indemnité...

M. Fréchette: II n'y a effectivement pas d'indemnité de remplacement du revenu.

Sur le plan strictement économique, il est dans la même situation que celle dans laquelle il était au moment de son accident.

M. Cusano: D'accord. Si on fait les calculs, dans le système actuel, cet individu qui est au salaire minimum, on calcule son déficit anatomophysiologique et on lui donne une rente à vie, une vente viagère qui comprend, dans un sens, seulement cette notion de ne pouvoir réintégrer un travail convenable, c'est-à-dire qu'il y a une diminution de capacité du travail. Tandis que là, il perd cette rente. C'est remplacé par un montant forfaitaire, dans son cas à lui, et ce montant forfaitaire, comparé à ce qui aurait été sa rente viagère, est extrêmement inférieur à ce qu'il aurait été selon la loi actuelle.

Si le ministre dit que mon raisonnement est correct, je demanderais si, à ce moment-ci, il est prêt à apporter certains changements en ce qui concerne tout cet aspect des indemnités touchées pour dommages corporels. Si on peut revenir à l'exemple d'hier - je ne voudrais pas éterniser - on m'avait donné un exemple, le dernier que vous avez donné. Un instant.

Je ne le trouve pas. Le dernier exemple que vous avez intitulé le 3a, est-ce que votre aide serait assez gentil de m'en faire parvenir une copie? Je ne trouve pas ma copie.

M. Fréchette: On n'en a qu'une copie actuellement.

M. Cusano: Si on prend cette situation-là, la rente à vie de 15 000 $ et 33 000 $, justement, capitalisée, je demanderais, à ce moment-ci - parce que sur celle-là, on ne l'a pas - ce que cela donne exactement? Parce qu'à un certain moment, on disait, je pense, 4855 $, mais, après révision du calcul, cela donnait un montant beaucoup plus élevé que 4855 $.

M. Bisaillon: Je m'excuse auprès du député. Est-ce qu'il pourrait nous dire quel exemple, parce que j'ai de la misère à trouver...

M. Cusano: 3a.

La Présidente (Mme Juneau): Celui qui a été fait...

M. Fréchette: Vous ne l'avez peut-être pas, M. le député de Sainte-Marie. Cela a été ajouté à la liasse qu'on a déposée hier.

La Présidente (Mme Juneau): C'était une demande.

M. Fréchette: Probablement que vous ne l'avez pas.

La Présidente (Mme Juneau): On va la faire photocopier, M. le député, et on va vous en fournir un exemplaire.

M. Bisaillon: Merci beaucoup.

M. Cusano: Le montant capitalisé, la rente à vie capitalisée donnerait combien, exactement?

M. Fréchette: Nos calculs à nous, en tous cas, nous amènent au chiffre de 10 514 $.

M. Cusano: 10 514 $. Selon le régime actuel, cet individu - c'est une grande partie de notre société - va recevoir 10 514 $, tandis que le montant forfaitaire, selon la loi actuelle, serait de 4362 $. C'est cela qu'on appelle un système qui est plus généreux.

M. Fréchette: C'est la question? M. Cusano: Oui, pour le moment.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Mme la Présidente, la question que me pose le député de Viau va m'obliger en quelque sorte à revenir sur des considérations qu'on a déjà faites à l'occasion de remarques générales lorsqu'on a essayé, tant bien que mal, de présenter l'ensemble du projet. Je dirai en toute honnêteté - et je n'ai pas l'intention de prendre de faux-fuyants ni non plus de détours - que l'évaluation que fait le député de Viau de la situation précise qu'on a devant nous est tout à fait conforme à la réalité et à la vérité. En termes de rentes viagères capitalisées, il y a carrément un avantage dans le régime actuel par rapport aux montants forfaitaires que recevrait le travailleur à partir des coordonnées qu'on retrouve dans le document.

Cependant, il ne faut jamais perdre de vue - à la condition, évidemment, qu'on l'accepte - que le principe nouveau que l'on retrouve dans la loi est de faire en sorte que le travailleur, quelle que soit sa condition économique, quel que soit l'état de ses salaires, doit être replacé dans une situation équivalente, autant que c'est possible de le faire, à celle qui prévalait au moment où il a eu cet accident. Dans l'exemple que nous donne le député de Viau, voici un cas dont les coordonnés nous amènent à la conclusion que le travailleur accidenté se retrouvera économiquement, en termes de revenu du travail, exactement dans la même situation que celle qui prévalait au moment où il a eu son accident. Il était au salaire minimum quand il a eu son accident, il retourne au travail gagnant encore le salaire minimum. Donc, en termes de remplacement du revenu, il ne subit pas de préjudice.

Par ailleurs, il y aura une évaluation qui sera faite de ce qu'on est convenu d'appeler son incapacité partielle permanente et, à partir de cette évaluation tenant compte de son âge, tenant compte du préjudice esthétique dont il peut être affecté, de la perte de jouissance de la vie, le forfaitaire sera déterminé. C'est exact -encore une fois, Mme la Présidente, je vous réitère que je n'essaierai pas de faire des détours pour dire que l'argumentation du député de Viau n'est pas correcte, elle est correcte - au niveau de la rente, c'est plus avantageux pour ce travailleur dans l'état actuel des choses que les prévisions de la loi 42. Cependant, c'est un choix et c'est à partir de ce choix qu'il nous est possible de mieux compenser les accidentés lourds affectés d'une incapacité totale et permanente. Là-dessus on s'entend tous pour dire, enfin, j'ai cru comprendre qu'il y avait une espèce de consensus autour de la situation qui fait que l'accidenté lourd, donc celui atteint d'une incapacité totale permanente, est beaucoup mieux compensé, et compensé dans le sens le plus pur du terme, avec les dispositions de la loi 42. C'est parce qu'on a fait le choix de consacrer plus d'argent à ces accidentés qu'à ceux qui peuvent retourner dans leur emploi et dans le même emploi, aux mêmes conditions. C'est pour cela que le phénomène est celui qu'on est en train d'expliquer.

Je vous signalerai cependant que, par rapport à un autre état de situation, ce travailleur va pouvoir disposer d'un droit qu'actuellement il n'a pas, et parce qu'il ne l'a pas actuellement, il est souvent victime d'un congédiement ou d'un licenciement à la suite d'un accident du travail dans les semaines ou les quelques mois qui suivent l'accident, et s'il était l'objet d'un congédiement ou d'un licenciement dans ces conditions-là, généralement il n'avait pas de recours.

Dans le cas qui nous occupe et avec les dispositions du projet de loi 42, il aura pendant une année ou deux années, suivant les circonstances, le droit de réclamer et de retourner à son travail; ce qu'actuellement il n'a pas. Encore une fois, actuellement, l'accidenté du travail peut être dans n'importe quelle circonstance victime de la décision de l'employeur qui décide de ne plus le reprendre à son service.

Cela ne s'évalue sans doute pas en termes financiers précis, absolus, mais convenons par ailleurs que ce travailleur qui aurait pu être victime d'un congédiement et qui ne le serait pas à cause de l'exercice du droit de retour au travail... On ne peut peut-être pas évaluer cela financièrement avec des sous, des dollars, des chiffres absolus, mais convenons que c'est sérieusement plus

important que la différence qui peut exister entre la rente capitalisée dont on parle et le montant forfaitaire qu'il recevra. La possibilité de pouvoir retourner à son emploi, en vertu des dispositions de la loi, en vertu de droits qui sont consacrés dans la loi, ce qui actuellement n'existe pas, c'est un peu comme essayer d'évaluer ce que peut valoir la sécurité du revenu dans certaines conventions collectives. Des gens ont essayé d'évaluer en termes et en chiffres absolus ce que peut valoir la sécurité du revenu dans une convention collective; personne n'arrive à le déterminer, mais le phénomène est là et ceux qui jouissent d'une sécurité du revenu dans leur convention collective sont conscients du fait qu'ils sont en possession d'un droit que plusieurs autres n'ont pas et qu'ils voudraient bien avoir.

Je pense que, donnant donnant, malgré l'inconvénient dont parle le député de Viau et que j'accepte sans aucune discussion, ce droit de retour au travail, particulièrement dans le cas qui nous occupe, parce qu'il peut revenir au travail et dans un délai de moins d'une année, ne peut pas s'évaluer financièrement, mais il est sérieusement plus important pour le travailleur qui se retrouve dans cette situation-là que la différence, encore une fois, qui peut exister entre la rente capitalisée et le montant forfaitaire qui lui sera remis.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que cela va? Est-ce que l'article 82 est adopté?

M. Cusano: Un instant, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): Oui. M. le député de Viau.

M. Cusano: Le ministre est d'accord, c'est un choix que son gouvernement a fait, c'est clair. Notre choix n'est pas le même que celui du ministre, mais c'est une question d'option.

Est-ce qu'on pourrait nous chiffrer, pour l'ensemble des personnes couvertes par la CSST, combien de ces personnes sont dans le système de l'exemple qu'on vient de voir à 3a? C'est-à-dire que le ministre, même en me donnant raison, dit: Dans l'exemple ici, le député de Viau a raison. Mais j'aimerais savoir, sur l'ensemble des travailleuses et des travailleurs au Québec, combien se situeraient, selon les statistiques présentes, dans cette catégorie de l'exemple 3a?

M. Fréchette: Le renseignement que vous voulez avoir, c'est: Combien y a-t-il de travailleurs qui sont au salaire minimum?

M. Cusano: Oui.

M. Fréchette: C'est cela?

M. Cusano: Dans un sens, oui.

M. Fréchette: Pardon?

M. Bisaillon: Accidentés, oui.

M. Fréchette: Cela, il faudra qu'on le vérifie. On peut sans doute fournir cette information, mais j'avoue très honnêtement qu'à brûle-pourpoint je ne suis pas en mesure de répondre à la question.

La Présidente (Mme Juneau): Y a-t-il d'autres questions, M. le député?

M. Fréchette: Qu'on procède à des vérifications, c'est tout à fait possible.

M. Cusano: Non, pour le moment. Peut-être que mon collègue, le député de Rosemont...

La Présidente (Mme Juneau): D'Outremont.

M. Fortier: Je ne suis pas sécessionniste.

M. Cusano: On va certainement en avoir un de Rosemont aux prochaines élections. C'est mon collègue d'Outremont. (22 h 45)

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 82?

M. Fortier: J'aurais juste une question à poser au ministre. Quand on parle de l'indemnité pour dommages corporels qui tient compte du déficit anatomophysiologique et du préjudice esthétique, je pense qu'il s'agit de concepts qui sont familiers ou qui existent dans la loi actuelle. Est-ce qu'une lésion corporelle importante à un bras, ça veut dire que, pour qu'il y ait consolidation, il faut que le préjudice esthétique soit corrigé complètement? Ici, on parle du préjudice esthétique qui résulte de cette atteinte.

M. Fréchette: Prenons le cas d'une brûlure, par exemple. Il est bien évident que le préjudice esthétique causé par une brûlure, si la brûlure est au deuxième ou au troisième degré, toutes les présomptions sont que jamais le préjudice esthétique ne pourra complètement disparaître. Un bras coupé, cela crée à la fois un déficit à la fois anatomophysiologique, un préjudice esthétique sérieux et également, bien sûr, une perte de jouissance de la vie.

Dans ce cas, la consolidation se référerait à la guérison de la blessure, mais très certainement pas à la récupération intégrale... Enfin, il ne pourrait pas recouvrer son intégrité physique totale.

M. Fortier: L'article 82 ne fait que dire que cette personne-là a droit à une indemnité.

M. Fréchette: Voilà, c'est ça.

M. Fortier: On ne peut pas être contre le principe, je pense bien.

M. Cusano: Un instant.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: On arrive avec des montants forfaitaires qui remplacent la rente viagère actuelle.

M. Fortier: L'article 82 ne parle pas de montant forfaitaire.

M. Cusano: Non, mais on a déjà discuté de tout ça, M. le député d'Outremont. Je ne voudrais pas m'éterniser là-dessus, je pense que ça a été très clair hier, on a posé des questions et vous ne semblez pas avoir de réponse quant à savoir quel est vraiment l'impact réel sur ces travailleurs.

La perception que j'ai, c'est qu'on protège plus celui qui en reçoit plus. Ce n'est pas ça le discours que j'ai entendu du côté ministériel depuis que je suis en cette Chambre. De leur donner ce montant spécialement basé... Si nu moins le tableau à l'annexe était un peu plus raisonnable, encore là, ça irait, mais...

M. Fréchette: Je vais simplement...

M. Cusano: Toute cette section d'indemnités pour dommages corporels me laisse très froid.

M. Fréchette: Je vais prendre la situation en sens inverse. Prenons le travailleur accidenté qui est au salaire minimum mais qui, à cause de son accident, ne peut pas retourner à son travail; il est affecté d'une incapacité totale permanente ou partielle tellement élevée qu'il ne peut plus faire quelque travail que ce soit. Quelle sera sa situation si l'on considère les dispositions de la loi actuelle par rapport aux dispositions de la loi 42? En vertu des dispositions de la loi actuelle, il va recevoir une rente de 90% à partir de son revenu brut annuel, point.

Dans la loi actuelle, il va recevoir la même rente, 90% du revenu net, plus le montant forfaitaire. Il faudrait bien que l'on considère les deux situations. Ce n'est pas parce qu'on est un travailleur au salaire minimum qu'on ne peut pas être victime d'un accident qui nous empêcherait de retourner à notre travail.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Mme la Présidente, on avait indiqué au ministre, à la suite de la discussion qui a suivi hier, que dans l'ensemble du projet de loi, en tout cas quant à moi, il y avait quatre points qui méritaient une discussion de fond. On en a amorcé un hier, qui était la partie indemnité, et on arrive à la deuxième partie du premier point, qui est dommages corporels.

Le ministre conviendra que de la façon dont se sont passées les choses hier, on a d'abord fait une discussion de principe sur l'approche du projet de loi 42. Cette discussion de principe a duré, selon mon évaluation, près d'une heure ou une heure et demie. J'exclus évidemment la présentation du ministre et la période de questions qui a suivi. Je parle à partir du moment où on a embarqué dans l'étude article par article.

La question de principe ayant été réglée, non pas vidée mais réglée, par les membres de la commission, les articles qui ont suivi, on les a analysés en fonction du principe qui avait été réglé comme ils découlaient de l'application du principe qui avait été réglé, même si on n'était pas nécessairement d'accord avec le principe initial.

Je pense qu'il faudrait aussi avoir en tête ce type de fonctionnement lorsqu'on aborde le chapitre des dommages corporels. Cette façon de procéder, même si elle continue à être appelée ou qualifiée par un certain nombre d'intervenants qui n'assistent pas de toute façon aux travaux de la commission comme un "filibuster", je pense que le ministre est conscient que ce n'est pas ce qui se passe actuellement et que ce n'est pas l'objectif qui est poursuivi.

Le ministre a indiqué tantôt qu'on semblait tous d'accord pour dire que le régime de remplacement du revenu, pour des personnes qui étaient victimes d'accident ou d'incapacité permanente totale, était supérieur dans le projet de loi qui est devant nous par rapport à la loi actuelle. Sauf que j'ajouterais la réserve qui avait été mentionnée hier: sauf à compter de 65 ans dans certains cas. Cela je pense que, pour donner le portrait complet de la vérité, il faudrait ajouter cette partie-là.

Pour ce qui est de l'indemnité pour dommages corporels, il y a deux éléments. Il y a l'élément des critères qu'on va retenir pour déterminer le dommage corporel et il y a, deuxièmement, l'approche qu'on va privilégier pour dédommager la victime d'un accident de travail des dommages corporels qu'elle a subis. Non pas de la perte de son revenu, mais du dommage corporel comme tel. Le régime actuel prévoyait une indemnité de remplacement du revenu, plus une rente viagère. La rente viagère c'était

la méthode retenue pour compenser les dommages corporels, les dommages reliés à l'accident du travail. Le projet de loi devant nous présente lui aussi une indemnité de remplacement du revenu et des dommages corporels sous la forme d'un montant forfaitaire. Je pense qu'à l'article 83 on aura l'occasion de revenir sur le fond de la question: Est-ce qu'on doit privilégier une forme plutôt qu'une autre? Cela n'empêcherait pas, selon moi, qu'à l'article 82, peu importe la forme qu'on retiendra à l'article 83, ce que cela sera - est-ce que cela devrait être une rente viagère ou est-ce que cela devrait être ce qui nous est proposé, un montant forfaitaire? - peu importe ce qu'on retiendra à l'article 83, il me semble qu'à l'article 82 on doit tenir compte des critères qui pourraient être les mêmes, peu importe la solution qu'on va privilégier à l'article 83.

Dans ce sens-là, je voudrais indiquer au ministre qu'il me semble que la formulation de la loi actuelle quant aux aspects dont on tient compte pour établir la rente viagère, qui est la forme de dédommagement corporel, pourrait se retrouver à l'article 82. Dans ce sens-là, cela pourrait prendre la forme de l'amendement suivant. On laisserait le paragraphe tel qu'il est mais en ajoutant, après "préjudice": Cette indemnité tient aussi compte de la diminution de la capacité de travail, de l'aptitude du travailleur à reprendre le travail au cours duquel il a été blessé ou à s'adapter à quelque autre fonction appropriée.

Cela voudrait dire que dans l'établissement du dommage corporel, peu importe, comme je l'ai dit tantôt, que ce soit un montant forfaitaire ou qu'on revienne à la rente viagère, dans l'établissement de ce montant, on tiendrait compte d'un ensemble de facteurs, qui sont ceux que l'on retrouve dans la loi actuelle.

Je ne sais pas comment le ministre réagit à cela, mais cela ne présume pas du tout de l'une ou l'autre formule quant au choix qu'on va retenir tantôt. C'est à l'article 83 qu'on va faire cela. Mais il me semble qu'on pourrait, dès maintenant, s'entendre sur le critères que l'on va appliquer à l'une ou l'autre formule.

M. Fréchette: Je vais attendre d'avoir le texte de l'amendement.

M. Bisaillon: Vous l'avez, M. le ministre.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que c'est une proposition? Est-ce que je peux vous la lire, M. le ministre?

M. Fréchette: Oui, s'il vous plaît.

La Présidente (Mme Juneau): La proposition du député de Sainte-Marie se lit comme suit: Cette indemnité tient aussi compte de la diminution de la capacité de travail, de l'aptitude du travailleur à reprendre le travail au cours duquel il a été blessé ou à s'adapter à quelque autre fonction appropriée.

M. Fréchette: Mme la Présidente, c'est manifestement l'article 38.4 dont on parle. Et les éléments que suggère le député de Sainte-Marie se retrouvent, effectivement, à cet article 38.4. Il y a eu les jugements de la Cour suprême, les jugements que l'on connaît, qui ont été dans le sens que l'on sait.

Les éléments que le député de Sainte-Marie nous suggère d'ajouter sont, quant à moi, des éléments qui s'appliquent très expressément à la perte économique que subit le salarié à cause de la diminution de ses capacités de travailler. En d'autres mots, par ces critères dont nous parle le député de Sainte-Marie, le travailleur pourrait se retrouver dans une situation telle que sa capacité de gagner un salaire est diminuée ou alors que sa capacité de gagner le même salaire est diminuée.

C'est très précisément pour ces motifs que l'on retient, dans le projet de loi, le principe du remplacement du revenu. C'est très précisément pour ces motifs, pour tenir compte des critères de l'article 38.4 et particulièrement des critères sur lesquels le député de Sainte-Marie attire notre attention, des critères, donc, qui sont en relation directe, encore une fois, avec la capacité de gagner un salaire à partir d'un travail qu'on exécute ou de gagner, encore une fois, le même salaire que celui qu'on gagnait au moment ou avant son accident.

Alors, en introduisant dans le projet de loi l'indemnité de remplacement du revenu, on compense, on ne compense pas, mais enfin on remplace la perte économique dont peut être victime le travailleur en compensant le revenu qu'il ne peut plus gagner à cause des séquelles de son accident. Ce sont les critères auxquels a référé le député de Sainte-Marie, qui, dans l'état actuel des choses, ont fait que la Cour suprême a rendu les jugements que l'on sait. Si donc, encore une fois, on retient le principe de l'indemnité de remplacement du revenu, il me semble qu'on rejoint très précisément l'objectif que souhaite atteindre le député de Sainte-Marie.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Je pense qu'il y a d'autres députés qui veulent prendre la parole.

M. Lavigne: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: ...si vous permettez, je ferais part au député de Sainte-Marie, encore une fois, que c'est une question de choix. C'est sûr que, dans certains cas - je pense que le ministre l'a évoqué très clairement tout à l'heure, à la suite des interventions du député de Viau - dans certains cas, effectivement, le projet de loi 42 va indemniser moins largement que dans la loi actuelle. (23 heures)

Mais il n'en reste pas moins que, dans d'autres cas, c'est clair que le projet de loi 42 est nettement plus avantageux dans le sens suivant: C'est qu'au lieu qu'on indemnise le manque à gagner entre... Je vais donner un exemple; prenez un employé qui gagne 20 000 $ par année et qui, après sa consolidation, reprend un travail à 10 000 $ par année. Il y a un manque à gagner de 10 000 $, qui va être indemnisé à 90%. Dans la loi actuelle, on considérait ce manque à gagner de façon discrétionnaire. Dans certains cas, la commission le donnait et, dans d'autres, elle ne le donnait pas. C'est cela qui est contesté devant les tribunaux, et là on en fait force de loi. Cette partie qui était discrétionnaire dans l'ancienne loi aura, par la loi, force de loi. C'est sûr que si on le considère comme faisant partie de l'ancienne loi, ces 90%, plus la rente, on fait une fausse interprétation de la loi actuelle.

Ce qu'il faut comprendre de la loi actuelle, c'est que l'obligation de la loi 42 est là. Cela oblige la commission à défrayer, en plus du forfaitaire pour le dommage corporel, les 90% du manque à gagner. Dans ces cas - et c'est plusieurs cas - je pense que c'est là que la loi actuelle est beaucoup plus avantageuse. Et l'économie qu'on ferait en retirant la rente de l'autre cas, la rente qu'on ne donne plus dans la nouvelle loi, est, semble-t-il, réinjectée dans - si vous me permettez l'expression - le pot pour voir à indemniser davantage les cas plus lourds. Encore là, c'est un choix. Moi, je l'achète.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Mme la Présidente, je ne prendrai personne par surprise en disant que je vais tenter, plus tard, de faire comprendre aux membres de la commission que j'aimerais mieux le principe de la rente viagère plutôt que du montant forfaitaire. Je pense que tout le monde va comprendre que je vais au moins tenter cet effort. Sauf qu'à l'article 82 ce n'est pas ce que j'essaie de faire. J'essaie juste de dire: Même si vous faisiez l'erreur de ne pas adhérer à l'argumentation que je vais développer tantôt et que vous mainteniez le système que vous allez proposer, c'est-à-dire du montant forfaitaire pour le dommage corporel, il n'en reste pas moins qu'on peut tenir compte d'une multitude de critères pour l'établir ce dommage corporel.

Dans l'article 82, les deux seuls critères que vous retenez, c'est le déficit anatomo-physiologique - des mots qu'on emploie à tous les jours - et le préjudice esthétique. Je prétends que la difficulté de s'adapter par la suite, parce qu'on a subi un dommage, c'est un élément dont on pourrait tenir compte et dont vous pourriez tenir compte, même si vous décidiez de maintenir un montant forfaitaire. Autrement dit, pourquoi vous n'ajoutez pas un peu aux critères qui vont vous permettre de définir le montant forfaitaire? Pourquoi vous vous limitez dans ce genre de critères? Pourquoi on n'en ajoute pas d'autres? Par exemple, l'âge va entrer en ligne de compte dans le tableau dont on va se servir. Les travailleurs accidentés vont être traités comme des voitures. Plus tu l'as longtemps, moins elle a de valeur. L'oeil, à 60 ans, ce n'est plus comme l'oeil à 40 ans. Je trouve que vous pourriez maintenir, si vous le désiriez... Si vous preniez cette décision politique de maintenir un montant forfaitaire, vous pourriez au moins tenir compte de critères différents, rendant davantage justice à la personne humaine. Et tenir compte du fait que, au-delà du préjudice esthétique, au-delà du déficit physique qu'on peut comptabiliser, il y a aussi d'autres critères, y compris des critères psychologiques éventuellement, dont on pourrait tenir compte pour établir la même chose à laquelle vous voulez en arriver.

Je ne sais pas si je me fais comprendre clairement, mais ce que je dis au ministre c'est: Pourquoi vous n'élargissez pas un peu les barèmes qui vont vous servir à déterminer, si vous le maintenez... Parce que je crois encore que je serais capable de vous expliquer les raisons qui devraient vous amener à le réviser, mais, si vous le mainteniez, vous êtes capable, selon moi, d'ajouter aux critères et de tenir compte d'autres éléments. Vous pourriez, par exemple, faire disparaître l'âge comme le critère et puis que le montant forfaitaire ne soit pas nécessairement en fonction de l'âge, comme on le ferait pour une voiture. Je pense que c'est le meilleur exemple qu'on peut donner.

On a référé tantôt à la Loi sur l'assurance automobile pour indiquer qu'on voulait s'inspirer de cette loi pourtant populaire... Souvenez-vous, les députés ministériels, comme vous étiez fiers après l'adoption de la Loi sur l'assurance automobile et comme vous aviez peur avant. Souvenez-vous collectivement. Ah, oui, oui! Quand même vous me diriez non, j'ai vu le

Conseil des ministres paniquer avant l'adoption de la loi et le lobby était fort, souvenez-vous de cela. Les avocats, les assureurs et les courtiers d'assurances étaient contre. On avait peur, on se demandait si on faisait un bon coup. Vous l'avez fait quand même, vous vous êtes tenus debout. Le résultat, c'est qu'il y a eu 86% de satisfaction avec cette loi.

On s'est référé a la Loi sur l'assurance automobile, tantôt, pour dire qu'on devrait s'inspirer des mêmes critères. Bien, le slogan qu'on avait développé - je suis fier de dire "qu'on avait développé", c'était une époque où j'étais fier d'être là - c'était "La personne avant toute chose". Trouvez-vous que, dans les critères que vous retenez pour déterminer votre forfaitaire de dommages corporels, vous tenez compte de la personne avant toute chose? Je trouve que cela, M. le ministre, demanderait d'être amélioré. J'ai 20 minutes au maximum pour vous le dire et pour essayer de vous convaincre, mais je trouve que cela vaudrait la peine qu'on prenne ces 20 minutes pour essayer de voir si on ne peut pas l'améliorer un peu. Je ne voudrais pas que vous perceviez cela ainsi: II s'agit juste de laisser couler le temps et, quand il aura fait ses 20 minutes, on sera placé devant autre chose et on passera à l'article suivant. Je pense qu'il y a plus au fond de cela.

Il me semble, M. le ministre, que vous seriez capable de vous laisser attendrir un peu. Il me semble que vous êtes le genre de ministre capable de comprendre qu'on ne chambarde pas tout votre projet en essayant de vous aider à l'améliorer. Je pense que vous êtes assez honnête pour reconnaître cela. Tout ce que je vous demande, c'est d'élargir un peu vos critères et de tenir compte du monde. Il me semble que je ne suis pas exigeant. Il me semble que ce que je fais est correct. Il me semble que vous devriez retenir cela. Qu'est-ce que vous en pensez?

Le Président (M. Perron): M. le ministre.

M. Fréchette: Qu'en termes élégants ces choses sont dites!

M. le Président, je suis content de la référence que fait le député de Sainte-Marie à la Loi de l'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile, parce qu'il a plaidé avec beaucoup de conviction que cette dernière avait produit un taux de satisfaction dans les proportions qu'il dit, qu'il y a eu des hésitations à un moment donné, que je n'ai pas vécues de l'intérieur, de l'extérieur, je les ai vécues. Je puis confirmer que ce que le député de Sainte-Marie nous a dit est tout à fait conforme à la réalité.

Mais pourquoi suis-je heureux qu'il utilise cet exemple? C'est uniquement et strictement parce que les mécanismes que l'on retient dans la Loi sur les accidents du travail sont très précisément ceux que l'on retrouve dans la Loi sur l'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile. C'est très précisément le système qui a été retenu et qui est harmonisé avec les mécanismes de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile. Non seulement est-il harmonisé dans les mêmes proportions, mais le montant forfaitaire prévu dans notre projet de loi 42 est supérieur au montant forfaitaire que l'on retrouve dans la Loi sur l'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile.

Je vais prendre le risque de vous dire que le montant forfaitaire maximum prévu dans la Loi sur l'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile est de 35 000 $. Je vous le donne avec toutes les réserves nécessaires d'une vérification plus approfondie. Mais ce que je suis en train de dire au député de Sainte-Marie est assez près de la réalité. Le montant maximum prévu dans le projet de loi 42 est de 50 000 $, une quinzaine de milliers de dollars de plus en termes de montant forfaitaire. Si, dans ces circonstances, cette Loi sur l'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile a donné un taux de satisfaction dans la proportion que nous indique le député de Sainte-Marie, pourquoi ne serait-ce pas le même phénomène dans ce cas-ci?

Deuxièmement, le député de Sainte-Marie nous dit: Vous devriez retenir des critères. Vous devriez les incorporer à l'article 82. Ces critères sont ceux que l'on retrouve dans l'actuel article 38.4 de la Loi sur les accidents du travail. Ces critères sont ceux en vertu desquels il est nécessaire d'indemniser le travailleur accidenté en remplaçant son revenu. C'est ce que la Cour suprême du Canada a dit: Le travailleur accidenté a droit à une indemnité de remplacement du revenu. Le député de Sainte-Marie nous dit: Vous devriez incorporer cela à l'article 82. Nous venons de terminer le chapitre qui a été consacré à l'indemnité de remplacement du revenu. Non seulement l'avons-nous consacrée dans le principe d'un article en y ajoutant les critères dont parle le député de Sainte-Marie, mais nous avons consacré un chapitre complet à la reconnaissance de l'obligation de remplacer le revenu du travailleur accidenté. Dans ces circonstances, je me demande pourquoi il faudrait, par redondance, réinscrire dans l'article 82 les critères en vertu desquels le revenu doit être remplacé par l'indemnité qu'on reconnaît dans le chapitre précédent et dans lequel à peu près tous les articles ont été adoptés, sauf quelques-uns qui ont été tenus sous réserve.

Une autre considération. Le député de Sainte-Marie attire notre attention sur la

situation suivante. Pourquoi faut-il qu'un membre d'un travailleur accidenté, strictement en termes de compensation de dommages, soit moins évalué à l'âge de 60 ans qu'il ne le serait à l'âge de 40 ans? C'est strictement en fonction du principe de l'expectative de vie, du temps qu'il nous reste à vivre et des possibilités qu'on aurait, selon qu'on est à tel âge plutôt qu'à tel âge, de pouvoir gagner un tel montant d'argent. C'est strictement en fonction de cela que les critères dont je viens de parler sont retenus. Ce n'est pas seulement dans le projet de loi 42 qu'on retrouve ces critères. On retrouve ces critères devant tous les tribunaux de droit commun qui ont à procéder à l'évaluation de dommages corporels qui peuvent découler d'un délit ou d'un quasi-délit.

C'est la règle universellement reconnue. Ce n'est pas parce que, humainement, cela vaut moins cher. Ce n'est pas parce que, humainement, on doive traiter de façon différente l'une et l'autre des deux situations, c'est parce qu'en termes d'expectative de vie il y en a moins lonqtemps à l'âge de 60 ans qu'il peut y en avoir à l'âge de 30 ans. C'est uniquement à cause de ce phénomène et non pas parce que cela vaut moins cher sur le plan, encore une fois, strictement humain.

La dernière observation d'ordre strictement factuel que je veux soumettre au député de Sainte-Marie, c'est qu'il a oublié un critère que l'on retrouve à l'article 82 quand il a fait l'énumération tout à l'heure. Il n parlé de déficit anatomophysiologique. Il a parlé du préjudice esthétique. Il a oublié d'indiquer qu'on intégrait, à l'article 82, un critère qui, actuellement, n'existe pas et qui s'appelle la perte de jouissance de la vie. C'est, évidemment, comme on l'a dit tout à l'heure, un choix là aussi mais un choix qui nous paraît procéder de principes tout à fait défendables, équitables et justes.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'amendement du député de Sainte-Marie...

M. Fréchette: Les 20 minutes ne sont pas écoulées...

M. Bisaillon: Non, je ne les prendrai pas toutes. Je vais prendre au moins le droit de réplique avant que le vote se prenne.

M. Fréchette: Ah oui! Bien sûr.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Même si mes 20 minutes étaient écoulées, je pourrais !e prendre quand même. Je veux juste indiquer au ministre que, quand j'ai fait référence à la Loi sur l'assurance automobile, j'y ai fait référence pour rappeler aux députés de cette Assemblée que le slogan qui avait été utilisé, c'était "La personne avant toute chose". Compte tenu de cela, je dis que dans le cas de l'évaluation des dommages corporels, peu importe la formule que vous allez retenir, on oublie cet aspect. (23 h 15)

Ma perception du projet de loi, malgré un certain nombre d'améliorations, il y a des choses dont on ne tient pas compte. Le ministre m'indique que j'avais oublié un critère qui était la perte de la jouissance de la vie. Il a oublié, lui, de répondre à l'argument que j'utilisais, en disant que les facteurs psychologiques, les séquelles psychologiques, on devrait normalement tenir compte de cela aussi, par rapport à un travailleur.

Autrement dit, quand, dans mon argumentation, je disais: II n'y a rien qui vous empêcherait de maintenir votre orientation, tout en élargissant les critères que vous choisissez, il n'y a rien qui vous empêcherait de faire cela.

Je pense que le ministre a retenu une expression que j'ai utilisée hier, en disant, c'est un choix. Depuis ce temps-là, je me rends compte que chaque fois que je présente quelque chose, on dit: Bon, faites le choix. Je voudrais qu'en même temps on se rende compte que chaque fois qu'on fait des choix, on s'en va aussi tranquillement vers un jugement. Le choix va être jugé. C'est une évaluation que vous pouvez faire et que, moi, je peux faire du résultat en bout de course.

On prétend que vous devriez profiter de l'occasion à l'article 82 pour élargir les critères qui sont mentionnés, sans présumer, pour l'instant, du type de régime qu'on retiendrait.

Je terminerai, Mme la Présidente, en indiquant que, malgré les explications qu'on nous donne sur l'indemnité de remplacement du revenu, il y a un certain nombre de choses dont on ne tient pas compte. On ne tient pas compte, par exemple, qu'à 65 ans, ça arrête, qu'on n'a pas encore de réponse sur ce qui va arriver après 65 ans. Par exemple, au fonds de retraite privé dont on a parlé hier et qu'on n'a pas. Si cela n'existe pas, au moins pour les personnes qui y auraient droit, admettez que les coûts ou les avantages que vous allez retirer là et que vous vouliez appliquer là-bas, il y en aura moins, parce que cela va être moins coûteux, le système que vous proposez, s'il n'y a rien après 65 ans, si on ne prévoit rien pour aider les gens à avoir autre chose que la pension de vieillesse quand ils ont dépassé 65, plus les quatre ans qui sont dévalués d'année en année.

Je dis que c'est l'ensemble qu'il faut regarder. Quand je regarde l'ensemble, on me donne l'exemple de l'incapacité permanente

totale où on dit: Le système est meilleur. On en convient jusqu'à 65 ans. Après cela, on pourrait faire la démonstration que, dans certains cas, selon l'âge, selon le temps que la personne va vivre, ça pourrait être différent.

On ne tient pas compte non plus, quand on me dit que l'indemnité de remplacement de revenu est meilleure comme système. Les arguments que le député de Viau a utilisés où il a démontré clairement que pour toute une catégorie de travailleurs accidentés, ceux qui sont au salaire minimum, par exemple, ou qui sont près du salaire minimum, le aussi, il n'y a pas d'avantages additionnels, et que, dans ces cas, non seulement il n'y a pas d'avantages additionnels, mais il y a une perte, une perte nette, quand on tient compte que le dommage corporel va remplacer une rente viagère à laquelle ils avaient droit dans le passé.

Si le ministre et les députés ministériels veulent à tout prix conserver les critères qui sont prévus à l'article 82, c'est leur choix. On ne peut pas les empêcher de faire cela. C'est leur décision.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Une information d'ordre factuel, si vous me le permettez, Mme la Présidente. Le député de Sainte-Marie nous signale qu'il n'est pas tenu compte du phénomène des séquelles physiologiques...

M. Bisaillon: Psychologiques.

M. Fréchette: Je pense pouvoir lui dire que dans l'évaluation de ce qu'on est convenu d'appeler le DAP ou le déficit anatomophysiologique, il est effectivement tenu compte de ces séquelles dont il parle.

M. Bisaillon: Mais ces séquelles-là, vous allez les évaluer à un moment donné et au moment où vous allez verser dans le système proposé le forfaitaire en dommages corporels. Les séquelles psychologiques, cela peut surgir plus tard aussi. Cela peut prendre du temps avant de prendre forme et être visible. Vous n'avez pas de mesures qui permettent d'en tenir compte.

M. Fréchette: Oui, oui, il y a une mesure qui prévoit que s'il y a aggravation de la situation, la décision qui a été originellement prise peut être revue en tout temps...

M. Bisaillon: Sur le...

M. Fréchette: ...autant au niveau de l'indemnité de remplacement du revenu que du montant forfaitaire.

Une voix: ...

M. Fréchette: Absolument.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'amendement à l'article 82, présenté par le député de Sainte-Marie, est adopté?

M. Fréchette: Rejeté.

La Présidente (Mme Juneau): Rejeté.

M. Bisaillon: Vous comprendrez, Mme la Présidente, que j'aurais voté pour.

La Présidente (Mme Juneau): Je comprends très bien, oui. Est-ce que l'article 82 est adopté?

M. Cusano: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): Oui, M. le député de Viau.

M. Cusano: Je voudrais faire quelques remarques avant qu'on passe à... Une chose qui m'a étonné, justement, sur la question de remplacer les rentes viagères même dans des cas de dommages corporels... Je serais curieux - peut-être qu'on me dira que le ministre n'a pas ces réponses à la portée de la main - de savoir quelles seront les économies réalisées par la CSST du simple fait qu'elle n'aura plus à émettre des chèques une fois tous les quinze jours ou une fois par mois pour des indemnités qui auraient autrement été accordées par la loi actuelle.

M. Fréchette: Est-ce que le député de Viau est en train de me demander quelles seraient les économies d'ordre administratif?

M. Cusano: Oui.

M. Fréchette: Parce qu'il ne sera plus nécessaire d'envoyer un chèque...

M. Cusano: Oui, oui. C'est un peu cela, oui.

M. Fréchette: ...tous les mois? Il faudrait que... Je ne le sais vraiment pas.

M. Cusano: Mais on peut dire... Je pense qu'on peut facilement conclure que l'émission d'un chèque... Vous allez certainement me répondre que je prends un long détour pour arriver à quelque chose. Mais il va y avoir des économies substantielles. Je pense qu'on peut lancer toutes sortes de chiffres en disant que l'émission d'un chèque dans un appareil gouvernemental coûte entre 20 $ et 30 $. Si on considère le nombre des personnes qui ne recevront plus de chèque, ce sont des

économies énormes. Est-ce qu'en calculant ces montants qui se trouvent en annexe, on a pris en considération les économies qui seront faites par le fait qu'on n'aura pas à émettre de chèques?

M. Fréchette: Écoutez, non. Je voudrais bien...

M. Cusano: Cela dépasse... Je comprends.

M. Fréchette: ...ouvrir le tiroir dans lequel on trouverait la réponse. Je ne suis pas obligé de vous dire... Je ne connais pas le tiroir où je pourrais avoir la réponse. Je ne le sais pas.

M. Cusano: D'accord.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Champlain.

M. Gagnon: Mme la Présidente, de ce côté-là, tant mieux. On n'a qu'à se féliciter si l'administration de la loi coûte meilleur marché.

M. Fréchette: II me semble.

M. Gagnon: Je ne sais pas où il veut en venir, mais j'ai l'impression qu'on cherche à faire en sorte que plus d'argent retourne au public assuré, qu'il n'en reste pas dans l'administration. Je ne pense pas que ce soit un inconvénient.

M. Cusano: II est certainement au courant que ce ne sont pas les plus démunis, ceux qui reçoivent le salaire minimum, qui vont en recevoir le plus. Il est au courant de cela et il a fait son choix.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 82 est adopté?

M. Gagnon: Non. Oui, adopté, oui. Je répondais au député.

La Présidente (Mme Juneau): Article 82, oui.

M. Cusano: Adopté, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): II est adopté. À l'article 83, il y a un amendement.

M. Bisaillon: Vous avez compris, Mme la Présidente, que je vais voter sur division.

M. Fréchette: ...sortir la cassette...

M. Bisaillon: Non, mais cela vous indique que lorsque je ne le dis pas...

La Présidente (Mme Juneau):

L'amendement à l'article 83 se lit comme suit: "Supprimer, dans la dernière ligne du troisième alinéa, le mot "semblables". Ajouter, dans la dernière ligne du troisième alinéa, après le mot "mentionnés" les mots "et qui sont du même genre". M. le ministre.

M. Fréchette: Mme la Présidente, cet amendement vise à laisser une marge de manoeuvre plus réaliste pour permettre de déterminer le pourcentage correspondant à un dommage corporel qui ne serait pas mentionné dans le barème des dommages corporels. Il peut arriver qu'il y ait un dommage corporel qui, par sa nature, n'est pas couvert dans les listes habituelles de dommages corporels. C'est pour permettre de quand même fixer le quantum du montant forfaitaire pour retenir une formule. Quant à l'article lui-même, Mme la Présidente, il précise le mode de calcul de l'indemnité pour dommages corporels. L'annexe B du présent projet prévoit le montant maximum qui pourrait être versé à ce titre selon l'âge du travailleur. Le maximum est de 50 000 $ pour un travailleur de 18 ans ou moins. L'indemnité tient compte du fait que plus le travailleur est jeune, plus lourde est la perte subie compte tenu de son espérance de vie. En vertu de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'amiantose ou de silicose dans les mines et les carrières, le montant maximum de cette indemnité est de 67 509 $ en 1984.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: J'ai une note ici disant que les montants de l'indemnité qui sont proposés à l'annexe 2, dont on trouve la liste à l'annexe 2...

M. Fréchette: À l'annexe B.

M. Fortier: ...seraient plus élevés que ceux qu'on retrouve à l'annexe B de la Loi sur l'assurance automobile.

M. Fréchette: C'est exact.

M. Fortier: Est-ce que vous avez soulevé cette question-là? Si c'est plus élevé, quelle est la raison qui motive cette augmentation par rapport à la Loi sur l'assurance automobile?

M. Fréchette: C'est effectivement exact que les montants que l'on retrouve dans l'annexe B de la loi 42 sont plus élevés que ceux de l'assurance automobile. En fait, le maximum ici est de 50 000 $ alors que dans l'assurance automobile il serait j'emploie le conditionnel à dessein - à peu près de 35 000 $. Pourquoi sont-ils de cette nature? C'est parce que nous en sommes

arrivés à la conclusion qu'il était plus équitable de retenir les barèmes de l'annexe B et, deuxièmement, parce que l'on sait également que la Régie de l'assurance automobile a manifesté l'intention de s'harmoniser avec les barèmes que l'on retrouve dans la loi 42.

M. Fortier: Est-ce que l'harmonisation dont vous faites état demanderait un changement à la Loi sur l'assurance automobile?

M. Fréchette: Oui. Je sais que cette loi, au moment où l'on se parle, est en préparation. Les gens y travaillent et normalement une loi devrait être présentée pour atteindre cet objectif. C'est d'ailleurs un des principes fondamentaux de la loi 42 d'essayer d'harmoniser les différents régimes d'indemnité de revenu. Dans ce cas-ci, ce sera à l'assurance automobile à s'harmoniser sur les barèmes de la loi 42.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: Vous dites que le "pourcentage d'atteinte permanente à l'intégrité physique est égal à la somme des pourcentages déterminés suivant le barème des dommages corporels adopté par règlement". Peut-être que le ministre va me répondre qu'il ne sait pas la réponse. Dans le passé, il semble y avoir eu des conflits, c'est-à-dire qu'à la CSST on appliquait certains barèmes et à la Commission des affaires sociales d'autres barèmes. Est-ce qu'on peut savoir lesquels sont employés à la CSST et est-ce qu'il y a eu des difficultés justement en ce qui concerne les barèmes employés par la CSST et ceux de la Commission des affaires sociales?

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre. (23 h 30)

M. Fréchette: Mme la Présidente, je pense devoir dire au député de Viau que les barèmes qui sont utilisés à la CSST pour fixer le déficit anatamophysiologique n'ont jamais été contestés devant la Commission des affaires sociales. Ce qui a été contesté c'était les barèmes utilisés pour arriver à déterminer l'incapacité partielle permanente, qui fait en sorte qu'on est placé dans une situation où on gagne moins de revenus. En fait, les barèmes de l'article 38.4, en d'autres mots, la perte de capacité de travail, c'est ce qui a été contesté devant la Commission des affaires sociales. C'est ce qui s'est retrouvé devant les tribunaux de droit commun. C'est là-dessus que la Cour suprême a tranché.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: D'accord. Lorsqu'on dit que ces barèmes sont adoptés par règlement, on peut aussi présumer que cela peut changer selon les pratiques en Amérique du Nord. Est-ce que vous avez l'assurance que ce qui a été planifié par la CSST a un certain aspect de permanence?

M. Fréchette: Le règlement, qui prévoira les barèmes pour la détermination du montant forfaitaire de même que les modalités d'application de ces barèmes, va être adopté par le conseil d'administration de la CSST. Il sera ensuite soumis à l'approbation gouvernementale. Il est évident qu'à l'intérieur de cette réglementation, il va falloir nous assurer que les barèmes que l'on retrouve à l'article 83 de la loi sont bien reconduits dans le règlement qui va fixer les modalités d'application pour arriver à déterminer le montant forfaitaire auquel un accidenté peut avoir droit.

Aura-t-il un caractère de permanence? Je serais fort hésitant à dire au député de Viau qu'il aura un caractère de permanence immuable. Il est bien évident que les circonstances changeant, il peut arriver aussi que les barèmes eux-mêmes ou bien alors les modalités d'application peuvent varier. Le guide le plus sûr à ce chapitre-là, c'est, évidemment, la jurisprudence que les tribunaux de droit civil établissent au fur et à mesure qu'ils rendent des jugements en semblable matière.

Je dois dire au député de Viau que l'objectif visé est évidemment un caractère de permanence, mais qu'on ne peut pas conclure que cette permanence est inscrite ad infinitum dans les lois.

M. Cusano: Cela va.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'amendement de l'article 83 est adopté?

M. Cusano: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 83 tel qu'amendé est adopté? Oui, M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Je vous remercie d'avoir beaucoup de patience avec moi, Mme la Présidente.

M. Fréchette: Non, mais c'est agréable, très agréable.

La Présidente (Mme Juneau): Cela va soi.

M. Bisaillon: Bon. L'article 83, c'est à cet endroit que, normalement, je devrais présenter l'amendement que le ministre

attend sûrement. Je pense que je ne le ferai pas. Les discussions qui ont eu lieu depuis deux jours m'indiquent que, sur ce sujet, la position du ministre et de ses collègues ministériels est immuable.

J'ai cru comprendre aussi qu'il n'y avait pas possibilité de faire étudier sérieusement l'application du système actuel. L'amendement que j'aurais pu faire ici, c'était pour indemniser les dommages corporels sous forme de rente à vie et de remplacer tout l'article 83 par un système de rente viagère. Si je l'avais fait, on comprendra tout de suite, à partir des propos que le ministre a tenus tantôt, le sort qui aurait été réservé à cet amendement. Comme on est tous conscients de cela, je ne vois pas pourquoi on perdrait du temps dans la procédure.

Sauf qu'on me permettra, cependant, de donner mon opinion sur l'article 83 et de souligner que, selon moi, le choix que les ministériels font n'est pas un bon choix. Les ministériels ont une chance unique de doter les travaileurs et les travailleuses du Québec d'un système complet. Je ne vois pas pourquoi ils se contentent de rester au centre avec des demi-mesures. Pourquoi n'iraient-ils pas plus loin et ne décideraient-ils pas, avant de partir - parlons-nous sérieusement - de laisser au moins cela en gage aux travailleurs et aux travailleuses du Québec. Il me semble que c'est une chose dont on devrait tenir compte.

M. Fréchette! Ce n'est pas la meilleure façon de gagner votre objectif.

M. Bisaillon: Pardon?

M. Fréchette: Ce n'est pas la meilleure façon de gagner votre objectif.

M. Bisaillon: Je tiens juste à dire au ministre que ce n'est pas pour moi. Ce n'est pas mon objectif, et peut-être que pour rester, cela prendrait des choses plus importantes que ce qu'il y a dans le projet de loi. Peut-être qu'un projet de loi amélioré permettrait de ne pas partir. Il faudrait peut-être tenir compte de cela. Depuis le début, on entend parler des coûts. Si on parlait des gains. Je suis tanné d'entendre parler des coûts. Cela peut être quoi, les coûts? Il y a les coûts pécuniaires, il y a peut-être aussi des coûts politiques et des coûts sociaux. Si on en parlait un peu. Je trouve qu'on ne tient pas compte de cela du tout. On essaie d'équilibrer en bon gestionnaires à la toute dernière minute. Je trouve que. c'est une gestion qui arrive bien tard. Il me semble que, tout à coup, on essaie de donner l'image de bons gestionnaires qui mesurent, qui évaluent chacune des mesures et chacun des articles du projet de loi. Je trouve que cela ne répond pas à l'objectif. L'objectif premier, qu'on dilue de plus en plus, c'était la réparation des lésions professionnelles et des conséquences qu'elles entraînent pour les bénéficiares. C'était l'objectif de la loi. Pour atteindre cet objectif, on devrait viser ce qu'il y a de mieux et ne pas se contenter du moins bien.

Or, il est clair que le régime proposé, dans sa partie concernant l'indemnité pour dommages corporels est une diminution par rapport au texte actuel de la loi pour un bon nombre de travailleurs et de travailleuses accidentés. Je trouve qu'on est plus soucieux des arguments qu'apporte le député d'Outremont quant au coût pour les employeurs. Je ne dis pas que le député d'Outremont n'a pas raison de mettre de l'avant ce genre d'argument et cette préoccupation des employeurs. Je dis seulement que je mets de l'avant une autre chose. Il me semble que ce serait le temps pour les ministériels de faire un choix entre ces deux choses. Quel est le type d'argument qu'on va privilégier? Si j'utilisais actuellement le ton que le député d'Outremont a utilisé sur l'article 75... Il n'a pas fait cela lontemps, cela a pris trois minutes. Il a dit rapidement trois raisons et il a terminé en disant: Moi, je voterais contre. Tout à coup, on s'est retrouvé avec l'article 75 suspendu... Oui, bien sûr. Peut-être que c'est une question de crédibilité -je ne veux rien enlever au député d'Outremont quant à sa crédibilité - mais c'est peut-être aussi une question de crédulité. Je trouve qu'on a attaché beaucoup d'importance rapidement à une intervention. Si je prenais le même ton, juste pour trois minutes, et que je vous disais: Moi, je voterais contre, est-ce que cela aurait le même effet? La crédibilité ne serait peut-être pas la même, mais la crédulité... Il me semble que vous ne répondez pas aux objectifs que vous poursuivez ou que vous annoncez. Cela n'y répond pas du tout.

De toute façon, je ne peux pas voter ici, mais en Chambre je peux voter. Il y a des amendements... On retournera en Chambre avec le projet de loi quand on l'aura étudié article par article. Devant la population, cela peut revenir, les amendements. Même si je ne le fais pas maintenant, ils pourraient toujours revenir. Ce n'est pas de cela que je parle. Je ne parle pas de procédure. Je parle de décider, finalement, d'essayer de donner le meilleur plutôt que le passable. Cette démonstration, autant le député de Viau que d'autres députés dans cette commission l'ont faite: Globalement, pour un bon nombre de travailleurs - globalement, je dis - il y a une diminution par rapport au régime actuel. On a parlé de ceux qui avaient plus de 65 ans avec une incapacité totale permanente, pour

autant qu'ils vivent un bon bout de temps après 65 ans. Le député de Viau a parlé des travailleurs au salaire minimum. Il y a toute une série de choses qu'on a soulevées depuis le début de l'étude du projet de loi. Pour un bon nombre de ces choses, on attend encore des réponses. Je dis que si vous décidez de maintenir cela, sachant que cela va représenter moins, globalement, au moins on s'attendrait à ce que vous donniez des réponses favorables au reste. Or, on n'a pas de garanties sur le reste non plus.

Mme la Présidente, je ne propose pas d'amendement. Je ne vous ferai pas perdre de temps sur des amendements ou sur de la procédure, mais je dis que la question de fond reste là quand même. Quand on va avoir dépassé ces articles, le choix gouvernemental va être fait. Le reste, on va l'étudier en fonction du choix gouvernemental jusqu'au moment où on arrivera au deuxième pôle de la loi, et là on pourra essayer de nouveau de faire une discussion de fond et de principe. Pour l'instant, il me semble que les ministériels ont fait leur choix, qu'ils ont décidé des principes et qu'ils sont immuables là-dessus. Je leur demande quand même une dernière fois d'évaluer les conséquences des choix qu'ils ont faits, de les évaluer en termes sociaux, en termes politiques aussi. Il me semble qu'il ne faut pas se cacher de cela non plus. C'est un geste politique qu'on pose quand on fait une loi. Alors, il y a des conséquences politiques aussi et on doit en tenir compte pour les personnes qu'on veut protéger ou qu'on dit vouloir protéger.

La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Fréchette: Oui, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): J'imagine que vous avez quelque chose...

M. Fréchette: Enfin, le député de Sainte-Marie vient de faire des remarques d'ordre général qui visent l'ensemble du projet de loi. Il nous a instamment priés de songer sérieusement à la situation, dit-il, avant de partir.

Je comprends que le rôle d'un député de l'Opposition, comme, d'ailleurs, le rôle d'un député indépendant, est effectivement d'essayer de scruter les lois dans tous les détails pour faire en sorte qu'elles reçoivent la meilleure application possible et qu'elles puissent atteindre les objectifs pour lesquels elles sont faites, pour lesquels elles sont adoptées.

Ce rôle, qui est difficile, qui est ingrat, qui est laborieux, fait cependant en sorte que lorsqu'on procède à l'évaluation d'un projet de loi, on ne retient que les choses qui paraissent négatives. Je n'ai pas entendu, par exemple, dans la dernière argumentation du député de Sainte-Marie, qu'il faut considérer que le droit de retour au travail qui est inscrit dans la loi est une amélioration sensible par rapport à la situation actuelle. C'est une amélioration tellement sensible - on l'a démontré tout à l'heure - que, dans certains cas, c'est l'équivalent de la sécurité d'emploi pour des gens qui, autrement, seraient complètement démunis et n'auraient à leur disposition aucun moyen de continuer à gagner leur vie. De cela, on ne parle pas, bien sûr. Je ne m'attends pas non plus qu'on fasse l'apologie de la loi dans ce sens. Mais il me semble que, si on veut être objectif jusqu'à la limite, c'est le genre de choses à côté desquelles il ne faut pas passer. (23 h 45)

Le député de Sainte-Marie ne nous dira pas, dans l'évaluation qu'il fait de la loi, qu'on a retenu les demandes qui nous ont été soumises, par toutes les associations syndicales, par toutes les associations de représentants de travailleurs accidentés, d'inscrire dans la loi un mécanisme de choix du médecin traitant et de faire en sorte que l'expertise médicale de ce médecin traitant soit l'instrument prioritaire à partir duquel on va indemniser. Je ne ferai pas le reproche au député de Sainte-Marie de ne pas indiquer ce genre de situation, mais la vérité a ses droits, et je pense qu'on doit le souligner. Je ne m'attendais pas à ce que le député de Sainte-Marie nous dise que nous répondons au voeu de tous les intervenants travailleurs lorsque nous inscrivons dans la loi le droit à la réadaptation. Bien sûr, il ne fallait pas espérer que le député de Sainte-Marie nous le signale. Et pourtant, cela procède de revendications fermes, formelles, unanimes de la part de toutes les associations de travailleurs, malgré ce que nous leur avons signalé à ce moment-là en leur disant. Soyez conscients du fait que si on retrouve dans la loi le principe du droit à la réadaptation, de même que le détail des programmes de réadaptation, vous devrez vous promener devant tous les tribunaux pendant un certain nombre d'années pour obtenir une interprétation finale de la signification de la loi à l'égard de la réadaptation. Les travailleurs nous ont dit: Nous préférons vivre avec cette difficulté plutôt que de laisser à la Commission de la santé et de la sécurité du travail la discrétion qu'elle exerçait jusqu'à maintenant, à partir d'une réglementation qu'elle bâtit elle-même et qui est interprétée de façon différente d'une région à une autre. Nous préférons de beaucoup faire face à ce genre de difficulté plutôt que de continuer d'évoluer dans la situation actuelle. Bien sûr, je ne m'attendais pas à ce que le député de Sainte-Marie soulève cet aspect du dossier et de la loi.

Il n'allait pas non plus très

certainement signaler un obstacle majeur sur lequel on a constamment attiré notre attention pendant onze jours de commission parlementaire, pendant l'audition de 42 groupes d'intervenants qui nous ont dit: Cette Commission de la santé et de la sécurité du travail a des pouvoirs réglementaires qui sont trop étendus, d'une part, et qui sont trop vastes, d'autre part. Est-ce qu'il existe des possibilités de faire en sorte que ces pouvoirs réglementaires soient diminués et qu'ils ne soient limités qu'au strict nécessaire? Il y a un article de la loi qui ramène les 26 pouvoirs réglementaires qui existe dans la loi actuelle a 5. Nous avions, dans la première version du projet de loi 42, retenu un sixième pouvoir réglementaire de la nature d'une clause omnibus que nous avons finalement retiré. II n'y a donc plus que cinq domaines où le pouvoir réglementaire existe, et c'est strictement et uniquement parce qu'il n'y a vraiment pas moyen de faire autrement.

Le député de Sainte-Marie a l'air de procéder à l'évaluation de la loi à partir du seul critère économique, du seul critère pécuniaire. Il me paraît tout à fait important de tenir compte de l'un et l'autre des aspects dont je viens de parler.

Quant à l'autre aspect de la question du député de Sainte-Marie, je lui dirai essentiellement que quoi qu'il arrive, tant au niveau de ce projet de loi que de la politique de ce gouvernement en matière de santé et de sécurité, je serai toujours fier de proclamer que ce gouvernement a fait un bout de chemin considérable en cette matière. Je prendrai deux minutes pour résumer le chemin qui a été fait. Ce sont des événements que le député de Sainte-Marie a vécus lui-même et avec lesquels, sans doute, à bien des égards, il a été d'accord. Rappelons-nous que l'objectif de procéder à la réévaluation de toutes les politiques de santé et de sécurité a été inscrit en 1978 dans un livre blanc, un livre blanc a deux volets. Le premier volet précisait les objectifs du gouvernement d'adopter un projet de loi qui contiendrait des principes de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles. Cela a été la loi 17 qui a été adoptée et qui a retenu ces principes de prévention.

Le député de Sainte-Marie va se rappeler mieux que moi que la loi 17 a été contestée beaucoup plus sérieusement que la loi 42 et par un nombre considérable d'intervenants. II y avait des manifestations devant ce parlement. Ce salon rouge était constamment rempli de gens qui ne voulaient pas la loi 17.

Allez demander à ces mêmes personnes, autant du côté syndical que patronal, quelle serait leur réaction si le gouvernement prenait la décision de retirer la loi 17, d'abolir la Commission de la santé et de la sécurité du travail, d'abolir les mécanismes de prévention qu'on retrouve dans cette loi.

Ceux-là mêmes qui la contestaient avec le plus de vigueur, le plus de fermeté, sont ceux aujourd'hui qui nous disent: Ne la retirez pas, ne retraitez pas à l'égard de cette loi 17. On nous dit: Les objectifs de la loi 17 n'ont pas été atteints, parce que les accidents n'ont pas diminué.

Toute personne, Mme la Présidente, toute personne objective en cette matière va convenir qu'un régime de prévention des accidents du travail ne peut être efficace qu'après une dizaine d'années de mise en application. Déjà, il y a au-delà de 800 comités de santé et de sécurité qui sont formés, qui marchent, qui fonctionnent dans les entreprises. Avant de partir, s'il faut partir, je serai fier des actions posées par ce gouvernement en cette matière.

Ce que nous sommes en train d'étudier actuellement constituerait le deuxième et dernier volet de la politique globale en matière de santé et de sécurité, le volet de la réparation.

Le député de Sainte-Marie sait très bien, avec l'expérience qu'il a, que surtout en cette matière, compte tenu de la culture qui existe dans ces milieux de travail, le gouvernement doit jouer un rôle d'arbitre. C'est pour cela que l'on parle de choix depuis hier. C'est pour cela qu'on parle de choix. Il doit effectivement faire ses choix, il doit effectivement jouer ce rôle d'arbitre, il doit effectivement tenter de faire adopter des lois qui, dans son évaluation, sont celles qui répondent le plus adéquatement aux principes de l'équité, aux principes de la justice.

C'est ce que nous essayons de faire dans la loi 42. C'est certain qu'elle n'est pas parfaite. C'est certain qu'elle ne répond pas à toutes les demandes qui nous ont été soumises. Mais nous sommes honnêtement convaincus, Mme la Présidente, que ce que nous sommes en train de faire est pour le mieux-être de tous ceux qui sont visés par cette loi.

Le député de Sainte-Marie nous dit: Vous êtes des gestionnaires de dernière minute. Il y a maintenant un peu plus de deux ans que je suis au ministère du Travail. Est-ce que je peux simplement vous rappeler, pour parler de la gestion de dernière minute, qu'il ne s'est pas passé une semaine, depuis deux ans et trois mois maintenant, sans que nous ne consacrions deux jours, trois jours, par semaine pour étudier ce projet de loi?

Gestionnaires de dernière minute en matière de santé et de sécurité? Il y a plus de six ans maintenant que ce gouvernement est préoccupé par le phénomène et qu'il a accompli des choses dont il peut être fier et qu'aucun autre gouvernement n'avait réussi à réaliser.

Mme la Présidente, je l'ai dit lorsqu'on

a commencé nos travaux, je l'ai répété tout au cours de nos travaux: la loi 42 n'est pas faite pour celui qui vous parle; elle n'est pas faite pour les députés autour de cette table. Elle est faite pour une clientèle très spécifique. Mais qu'on me dise que la clientèle n'en veut pas, je serai très facilement disposé à vivre avec cela et à garder le statu quo. Je n'aurai aucune hésitation. Si personne n'en veut, nous n'allons pas la rentrer à coups de couteau dans la gorge.

Très clairement, si l'on est en train de nous exprimer que le statu quo, sans droit de retour au travail, sans le choix du médecin traitant, sans le droit a la réadaptation, sans disparition des pouvoirs réglementaires, si on est en train de me dire que c'est ça qu'on veut, que c'est ce que les milieux de travail désirent, écoutez, vous n'aurez pas besoin de me faire de longues démonstrations pour que je me rende à une demande de cette nature. La loi n'est pas faite pour nous encore une fois. Nous essayons de la faire pour améliorer la situation des gens qui vivent avec un régime qui a plus de 50 ans d'existence maintenant. C'est ça l'objectif que nous essayons d'atteindre. Nous n'avons jusqu'à maintenant bousculé personne. Nous n'avons pas l'intention de bousculer qui que ce soit. Si, avant de partir, nous ne l'adoptions pas, bien, il arrivera ce qu'il arrivera. Si c'est çn les objectifs que l'on vine, moi je suis disposé à vivre avec. Si l'on doit partir, un autre gouvernement prendra les dispositions nécessaires pour régler le problème si nous on est pas capables de le régler parce que les intervenants ne le veulent pas.

Mme la Présidente, je pense que c'était utile de faire ce genre de remarques à ce stade-ci, à partir des commentaires du député de Sainte-Marie. Nous sommes, quant à nous, tout à fait disposés à continuer avec autant de sérieux que possible, avec autant d'attention que possible. Je signale que la contribution du député de Sainte-Marie et celle des députés de l'Opposition ont permis, jusqu'à ce jour en tout cas dam mon évaluation, de procéder à un certain nombre de changements qui améliorent des situations. Je suis quant à moi disposé à continuer dans le même sens sans, encore une fois, bousculer ni des personnes ni des événements. Si ce travail honnête que nous avons commencé devait nous amener à l'adoption d'une loi qui améliorerait la situation des personnes à qui elle s'adresse, nous pourrions, je pense, ensemble, nous dire que nous aurions accompli le travail pour lequel nous sommes ici. Nous aurions très certainement, après cela, la satisfaction d'avoir accompli notre devoir.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Champlain. Vous avez une minute.

M. Gagnon: Merci Mme la Présidente. Je veux tout simplement vous annoncer que demain - parce qu'on va revenir demain -n'admettant pas les propos du député de Sainte-Marie, en ce qui me concerne - je présume que cela doit être vrai pour d'autres - je voudrais avoir l'occasion de répliquer. J'ai droit è vingt minutes demain matin. Je voudrais avoir l'occasion de répliquer à ces propos-là parce que je ne pense pas qu'un seul député ait le monopole de la vérité autour de cette table.

La Présidente (Mme Juneau): C'est d'accord M. le député de Champlain. Étant donné que nous avons adopté l'amendement de l'article 83, est-ce qu'on pourrait adapter l'article 83 tel qu'amendé?

M. Bisaillon: Non, Mme la Présidente. Il y a une intervention à ce moment-ci qui est déjà prévue et j'avais...

M. Gagnon: Je retire mon intervention. Je me reprendrai.

M. Bisaillon: Alors, c'est moi qui ai la parole?

La Présidente (Mme Juneau): II est minuit.

M. Bisaillon: Donc, demain matin.

La Présidente (Mme Juneau): La commission ajourne ses travaux sine die.

Vous conservez votre droit de parole. C'est d'accord.

(Fin de la séance à 23 h 58)

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