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(Douze heures cinq minutes)
Le Président (M. Bordeleau): La commission des finances et
des comptes publics reprend son étude article par article du projet de
loi no 70, Loi concernant la rémunération dans le secteur
public.
Les membres de la commission, ce matin, sont: MM. Blais (Terrebonne),
Bourbeau (Laporte) remplacé par Rocheleau (Hull)...
M. Blais: Vous n'êtes pas sérieux!
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît! MM. de
Belleval (Charlesbourg), Forget (Saint-Laurent) qui n'a plus raison
d'être là, mais qu'on pourrait remplacer par M. Ryan...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. Ryan est là, il n'y a
pas de problème.
Le Président (M. Bordeleau): II est déjà
intervenant.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Moi, je ne le suis pas,
cependant.
Le Président (M. Bordeleau): Non, vous n'y êtes pas.
Alors, Forget (Saint-Laurent) remplacé par Johnson
(Vaudreuil-Soulanges)...
M. Ryan: M. Polak est-il inscrit?
M. Grégoire: Question de règlement. Comment
pouvez-vous remplacer par un autre quelqu'un qui n'existe même plus comme
député?
M. de Belleval: II est encore inscrit sur l'ordre sessionnel
parce qu'on est toujours dans la même session.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, ça ne change
rien, parce que l'Opposition a droit à quatre membres sur la commission
et que ce soit le nom de M. Forget...
M. Grégoire: Oui, mais alors vous ne remplacez pas M.
Forget par M. Johnson, M. Forget n'est plus sur la commission, il n'est plus
député. Alors vous ne pouvez pas le remplacer par un autre.
M. de Belleval: II est inscrit sur l'ordre sessionnel, c'est la
même session.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, mais c'est le poste
qu'on remplace, ce n'est pas la personne.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II y a eu conférence des
leaders à ce sujet, mais cela n'a manifestement pas été
transmis jusqu'au service d'impression.
M. Grégoire: Ce serait bon de demander au Parti
libéral de faire parvenir ses changements le plus vite possible.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): On l'a fait.
M. de Belleval: De toute façon, on a commencé les
préliminaires.
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Frontenac, cela va.
M. Ryan: II y a longtemps que cela a été fait.
Le Président (M. Bordeleau): Je continue donc, si je ne
suis pas encore interrompu! MM. French (Westmount), Gagnon (Champlain),
Grégoire (Frontenac), Guay (Taschereau) remplacé par Lachance
(Bellechasse), Lincoln (Nelligan) remplacé par Polak (Sainte-Anne),
Paquette (Rosemont), Parizeau (L'Assomption) remplacé par
Bérubé (Matane).
Les intervenants sont: MM. Assad (Papineau), Fallu (Groulx), Mme
Lachapelle (Dorion), MM. Lafrenière (Ungava), Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), Pagé (Portneuf)...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. Sirros est-il inscrit?
Le Président (M. Bordeleau): Non, on pourrait l'inscrire
comme intervenant à la place de M. Ryan.
Ryan (Argenteuil) remplacé par Sirros (Laurier).
Il y aurait lieu, à ce moment-ci, avant d'aller plus loin, de
nommer un rapporteur de la commission. Il semble que la commission d'hier soir
ait été ajournée sur ce point précis. Est-ce que
j'aurais des suggestions?
M. de Belleval: Nous avions proposé, je pense...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Charlesbourg.
M. de Belleval: ... M. Lachance (Bellechasse).
M. Grégoire: Adopté.
M. de Belleval: Si c'est agréable à l'Opposition,
nous allons maintenir cette proposition et, si l'Opposition s'oppose à
ce que le député de Bellechasse soit nommé, il nous fera
plaisir de trouver quelqu'un d'autre de plus agréable à
l'Opposition.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le
député de Vaudreuil-Soulanges.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Le ministre vient de me
signaler qu'il croit que je vais exprimer un changement d'opinion par rapport
à hier soir. Je pense que, hier soir, nous avons, tous mes
collègues et moi-même, fait état des qualités du
député de Bellechasse, ce qui l'habilitait à remplir ce
poste de rapporteur et je suis toujours du même avis.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, ça va, c'est
donc...
M. Bérubé: M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Je pense cependant qu'on a abusé,
hier. Tout le monde connaît l'humilité légendaire du
député de Bellechasse et je crois que l'Opposition a
véritablement abusé en faisant tomber sur lui une pluie de
louanges et d'appréciations qui, je pense, sont indéniablement
méritées, mais je pense que ce dernier était malheureux et
il ne faudrait pas en abuser.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre.
M. Ryan: Le député de Bellechasse n'a pas l'air
malheureux.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, ça ira, il n'y
a pas de... C'est donc le député de Bellechasse qui sera
rapporteur de la commission.
M. Blais: Adopté.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, vous avez des
remarques préliminaires à faire aux membres de la commission?
Remarques préliminaires M. Yves
Bérubé
M. Bérubé: M. le Président, au moment de la
discussion sur le projet de loi no 68, on a longuement eu à discuter de
l'esprit général des lois que nous abordons ici. Je me
contenterai simplement de souligner un point qui, je pense, M. le
Président, n'a pas été suffisamment mis en lumière;
c'est le pourquoi du projet de loi no 70, dans le fond. Il était
intéressant, ce matin, d'entendre Mme la députée de
L'Acadie, dans sa question au ministre des Affaires sociales concernant le
mandat salarial offert aux médecins: Est-ce que ce taux de 14% est final
ou s'il s'agit simplement de leurrer les médecins sans leur dire
véritablement que le mandat est final? C'est effectivement une des
difficultés que nous allons traverser comme société dans
les mois qui viennent et nous la traversons d'ailleurs depuis maintenant
presque un an.
Dans une crise économique comme celle que nous traversons, il
faut changer des comportements. Certes, traditionnellement, dans les
régimes de négociation, il y a souvent, du côté du
patron, ces barils à double fond, sinon triple ou quadruple, où
on commence par expliquer que c'est le maximum que l'on peut offrir.
Subséquemment, évidemment, dans le débat, on
découvre qu'il y avait un deuxième plancher au baril et on peut
en mettre un peu plus sur la table, etc., de telle sorte qu'évidemment,
du côté des travailleurs également qui négocient,
ceux-ci ont, très rapidement, appris à se méfier de toutes
ces affirmations du patron lorsqu'il affirme que son mandat de
négociation est véritablement la limite de ce qu'il peut offrir.
On a donc souvent pris l'habitude de contester le caractère un peu
définitif des mandats.
En période de crise, il est donc plus difficile de jouer à
ce jeu classique de la négociation. Il faut, au contraire,
peut-être, ouvrir ses livres davantage, tout mettre sur la table et bien
faire comprendre les suites des décisions que l'on prend. Comme certains
ont pu le faire ressortir, lors du débat de deuxième lecture, la
même situation se produit dans le cas des patrons aux prises avec une
entreprise en difficulté menacée de faillite et qui, face
à un renouvellement des conventions collectives, viennent voir leurs
employés - souvent, il s'agit même de patrons qui mènent
une entreprise de type familial; ils n'ont jamais véritablement
révélé en public l'état des finances de
l'entreprise et, dans la conjoncture, ils doivent étaler tous les
chiffres - pour bien leur faire comprendre que si, malheureusement, le passif
à court terme excède l'actif à court terme, il y aura une
faillite dite technique. L'entreprise devra fermer ses portes quitte
à
être vendue, récupérée par la banque et,
évidemment, avec un problème d'incertitude important pour les
employés; donc, on met les cartes sur la table. Lorsque
l'employé, après avoir bien étudié les chiffres et
avoir fait le contrôle, est bien conscient que le patron ne lui a pas
menti, s'il exige trop, il fera faire faillite à son entreprise. On
assiste fréquemment à des règlements sur des bases
très différentes de ce à quoi on aurait été
habitué dans le passé.
Mais lorsque nous sommes élus par nos concitoyens, ce n'est pas
pour fermer le gouvernement, pour couper des services à la population.
Nous sommes élus pour offrir des services à la population. On ne
pourrait pas, dans une argumentation avec nos employés, leur dire:
Écoutez! Si vous demandez plus que cela, nous allons fermer trois
hôpitaux, deux hôpitaux, cinq hôpitaux. Nous ne pourrions pas
faire cela. La population ne nous élit pas pour sacrifier
l'intérêt public dans des règlements de convention
collective qui pourraient être abusifs. Nous sommes dans la situation
où l'État ne peut pas fermer des services publics, par
conséquent, le type de choix est différent de ce que l'on observe
dans le secteur privé.
D'une façon générale, lorsque la conjoncture est
relativement favorable, il s'agit de décider comment l'on partagera la
richesse collective. Est-ce qu'on partagera en donnant plus de services
à la population, en rémunérant davantage nos
employés, en engageant plus de gens? Voilà des choix politiques.
Le processus de négociation permet à l'employé de se
ménager une position où il possède un peu plus de
force.
Il peut donc procéder à des déplacements de
priorités, de telle sorte qu'un État soit amené à
mettre peut-être moins d'argent dans des constructions, par exemple, et
plus d'argent dans la rémunération. (12 h 15)
Ce régime de négociation a permis aux employés du
secteur public qui étaient fort mal rémunérés, dans
le passé, de négocier des conditions de travail qui ont fini par
joindre celles de leurs concitoyens effectuant des travaux semblables, dans le
secteur privé. On pourra même s'entendre pour dire qu'ils sont,
aujourd'hui, sans doute mieux rémunérés que dans le
secteur privé. Les chiffres du gouvernement le démontrent, mais
le chef de l'Opposition pourra cependant vouloir obtenir des analyses plus
objectives, plus probantes où on serait plus certains de la
véracité des chiffres, qui ne seraient pas entachés, au
dire de l'Opposition, par le fait qu'ils ont été
élaborés par la partie patronale. Je peux comprendre cela
également. C'est certainement une critique de bon aloi. Il reste qu'on
doit constater que dans un contexte économique normal, le jeu des
négociations permet d'établir un mode de partage de la richesse
collective.
Le problème est tout autre lorsqu'une société
traverse une crise et lorsque des services essentiels à une population
sont menacés. A ce moment-là, le gouvernement doit, de
façon beaucoup plus claire que d'habitude, indiquer à quelle
enseigne il se loge. Est-ce qu'il choisit d'augmenter les taxes? Est-ce qu'il
choisit d'accroître le déficit? Est-ce qu'il choisit de couper les
services? Là, il y a une problématique. Si après son
analyse, il en arrive à conclure que l'intérêt public ne
doit pas le conduire à accroître les taxes, à
accroître le déficit et à couper les services essentiels
à la population lorsque l'analyse de l'intérêt public le
mène-là, il doit modifier son comportement. Il doit
éviter, comme disait la députée de L'Acadie, ce matin,
dans sa question au ministre des Affaires sociales, de leurrer la population,
d'induire les employés du secteur public à croire qu'il existe
peut-être un double fond, de laisser, comme beaucoup d'employeurs font,
planer la menace. Mais comme on le sait, cette menace ne prend pas beaucoup et,
finalement, peut amener les employés du secteur public à
déclencher des grèves, à pénaliser la population
pour découvrir, au bout d'une semaine, quinze jours, trois semaines,
lorsque l'intérêt public est véritablement menacé,
que des services essentiels à la population sont en cause.
Alors, le gouvernement revient à l'Assemblée nationale, et
fait adopter une loi, les obligeant à reprendre le travail, sur la base
des conditions gu'il avait énoncées dès le début en
disant: Ecoutez, on vous l'a dit, c'est le maximum disponible. Nous n'irons pas
dans le sens d'une augmentation de taxes, d'une augmentation du déficit
ou d'une suppression de services essentiels à la population. Lorsqu'un
gouvernement a fait son lit, il doit avoir l'honnêteté de le dire
d'avance. Nous avons d'abord choisi la voie de la négociation; nous
avons entrepris des tournées dans l'ensemble du Québec pour
fournir à la presse, à l'ensemble de nos concitoyens, une
collection d'information la plus complète possible, car se retrouver
dans le livre des crédits ou les discours des budgets traditionnels
n'est pas une mince affaire et fort peu de spécialistes sont en mesure
de connaître véritablement la situation financière à
partir de l'analyse du livre des crédits. On peut, par contre, à
partir de l'information disponible - même souvent quand elle n'est pas
disponible, il faut la retravailler pour la rendre disponible - en arriver
à une problématique d'analyse des dépenses publiques qui
permette véritablement de comprendre les choix qui s'offrent à
nous. Nous avons choisi cette voie de rendre publiques ces analyses de telle
sorte que l'ensemble de nos concitoyens
soit au courant. Je ne vous cache pas que lorsque je regarde les
analyses financières budgétaires publiées dans la presse
québécoise, je n'ai rien à redire, quant à la
qualité de ces analyses. Nos journalistes ont toute l'information, ils
l'ont bien comprise, ils l'ont bien maîtrisée, et l'ensemble de ce
qu'on peut appeler les conseillers financiers de toutes sortes, qui ont eu
l'occasion d'analyser les données gouvernementales, concordent avec
l'État. En général, ils ont plutôt tendance à
dire que le gouvernement est un peu trop optimiste, que la situation est
peut-être même pire que ce que le gouvernement veut bien
décrire. Nous ne le croyons pas, nous croyons que nos analyses sont
réalistes; cependant, elles nous révèlent une situation
délicate à laquelle il faut véritablement s'attaquer sans
délai.
Nous avons vraiment fait comprendre la réalité de la
situation financière et je n'ai rien à redire sur les traitements
que la presse fait de la situation des finances publiques au Québec. Je
n'ai rien à redire, c'est de première qualité, en ce qui
concerne les faits. Quant aux opinions, on peut toujours avoir les opinions que
l'on veut bien; là-dessus, je n'ai pas à m'en prendre aux
opinions qui peuvent être émises ici ou là. Mais quant aux
faits, il n'y a aucun problème.
Nous avons voulu aller plus loin, ce qui a conduit au sommet où
nous avons étendu ce débat à l'ensemble de la population
et à nos représentants syndicaux pour véritablement amener
l'ensemble des intervenants à bien comprendre les choix. Je dois vous
dire également, qu'à l'heure actuelle, du côté
syndical, on comprend parfaitement la situation. Les rencontres que j'ai eues
m'ont fait très clairement constater que la problématique est
bien perçue et le type de choix est également bien perçu.
On pourra différer d'opinions, penser qu'on devrait hausser le
déficit, augmenter les emprunts; cela, je le concède. D'autres
diront, au contraire, qu'on devrait mettre à pied 15 000 employés
- le Conseil du patronat - position également parfaitement lucide.
En d'autres termes, ce sont des positions qui reposent sur une analyse
fondamentale des mêmes données et qui diffèrent quant au
choix de solutions. C'est là, je pense, le sens de l'action politique.
Nous devons donc porter le débat au niveau du choix des solutions.
S'attaquer à la simple forme me paraît spécieux, car
il faut d'abord commencer par dire quel est, sur le fond, le type de solution;
après, on peut être en désaccord. Mais s'il n'y avait pas
d'autres solutions que des réductions de salaire, si, après
analyse, toutes les parties devaient dire: Effectivement, il n'y a pas d'autres
solutions que de diminuer les salaires de 10%. Je pense qu'à ce
moment-là, l'Assemblée nationale, le gouvernement, placés
devant l'absence d'autres solutions que celle-là, n'auraient d'autre
choix que de voter une loi à l'Assemblée nationale.
L'intérêt public le dicterait.
Donc, il faut commencer par une analyse de fond et c'est pour cela qu'il
y a eu une distinction fondamentale entre les interventions du gouvernement et
les interventions de l'Opposition dans ce débat. L'ensemble des
intervenants gouvernementaux ont parlé du fond, des choix et ont pris
position face aux choix possibles. Du côté de l'Opposition, on a
évité systématiquement d'indiquer quels seraient les choix
que l'on privilégierait. On s'est contenté de discuter de la
forme, c'est-à-dire de l'absence de négociations - ce que je
conteste - du caractère unilatéral, du fait qu'on respecterait
dans la forme les conventions collectives, mais qu'on n'en respecterait pas
l'esprit, enfin, une série d'arguments qui portent sur la forme, mais
qui ne portent pas sur les solutions pouvant être mises en opposition
à celles retenues par le gouvernement.
Si d'abord on prétend que la solution doit être la
réduction des salaires et que, deuxièmement, on prétend
que l'intérêt public, devant cette unique solution, exige une
réduction de 10% des salaires, dans la mesure où le Code du
travail exige une négociation de bonne foi, on n'imagine pas un
gouvernement, allant s'asseoir à une table de négociation, ayant
fait son lit, ayant décidé que, au nom de l'intérêt
public, il doit réduire les salaires et entreprendre un simulacre de
négociation, jouer le jeu des négociations et faire ce que la
députée de L'Acadie a très clairement qualifié
comme de s'engager dans une leurre de négociation. Je pense que c'est
clair: s'il n'y a pas d'autre choix, si on s'entend sur le choix, il n'y a
qu'une seule approche possible, c'est celle de la franchise et de
l'honnêteté, c'est celle de la loi no 70. La loi 70 ne dit pas
qu'il n'y aura pas des négociations. Elle dit seulement: II y aura
négociation, mais s'il n'y a pas entente, l'intérêt public
dictera son comportement au gouvernement.
Toute négociation est possible. Elle peut conduire à
toutes sortes d'accords. Mais s'il n'y a pas accord, l'intérêt
public exigera une réduction de l'enveloppe salariale. La loi le
prévoit. Donc, la loi 70 ne se substitue pas à la
négociation des conventions collectives, elle définit un cadre,
le cadre de l'intérêt public à l'intérieur duquel il
peut y avoir négociation, mais à l'extérieur duquel il ne
peut pas y avoir négociation. C'est le sens pur et simple de la loi 70.
Cette loi définit clairement que le gouvernement n'a pas l'intention de
déposer un soi-disant mandat sur lequel il peut revenir, mais qu'il
existe des contraintes avec lesquelles nous
devrons vivre.
Lorsque nous abordons la loi 70, il faut toujours l'aborder en se posant
d'abord la question: Existe-t-il d'autres choix? Et si on prétend qu'il
y a d'autres choix, à ce moment, on peut effectivement débattre
le projet de loi no 70, puisque devant ces autres choix compatibles avec
l'intérêt public, il y a place pour négociation.
C'est lorsqu'il n'y a pas de choix face à l'intérêt
public qu'il ne peut plus y avoir place à la négociation. Ce que
le gouvernement a simplement dit, c'est qu'il fallait réduire la masse
salariale de 521 000 000 $. Pourquoi? Parce que nous pensions que dans la crise
que nous traversons, nous ne pouvons pas et nous ne devons pas augmenter les
impôts. Nous ne pouvons pas et nous ne devons pas accroître le
déficit, et la problématique a été très
claire: nous ne devons pas sabrer de façon aussi dramatique dans les
services à la population. La loi 70 est une loi pour la défense
de l'intérêt public; le cadrage de la marge de manoeuvre dont un
gouvernement pourrait disposer dans une négociation consiste en une loi
qui a cet énorme avantage qu'elle amène les parties à
prendre position face à une réalité indiscutable qui
permet justement d'adopter des attitudes de négociation qui permettront
de sauver l'intérêt public. Indéniablement, je pense que,
par exemple, les grèves auxquelles nous risquons de faire face dans le
domaine de la santé, avec nos médecins, indiquent très
clairement que lorsqu'on n'est pas face à une réalité et
qu'on ne veut pas en tenir compte, on peut amener la société
à traverser une période extrêmement douloureuse et
très délicate. Dans la mesure où il était clair,
dans notre esprit, que l'on ne devait pas taxer, que l'on ne devait pas
accroître le déficit, que l'on ne devait pas couper les services
essentiels, nous devions avoir la franchise de le dire aux employés du
secteur public tout en laissant toute la place nécessaire pour
entreprendre une négociation sur l'ensemble des conventions collectives,
sur toutes les clauses normatives, sur l'ensemble des conditions de travail sur
les trois années qui viendront. Cependant, il faut que ce soit clair, en
même temps, nous devons régler l'impasse budgétaire et
traverser la crise. Merci, M. le Président. (12 h 30)
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. M. le
chef de l'Opposition.
M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, nous avons entendu de nouveau,
ce matin, l'aveu explicite par un membre du gouvernement que le gouvernement
s'est placé dans une situation telle qu'il ne peut plus s'acquitter de
ses obligations normales de bon employeur envers ses employés, qu'il ne
peut plus faire face, de façon régulière, aux engagements
qu'il avait légalement et solennellement contractés envers ses
travailleurs syndiqués. Je pense que ce fait est établi d'une
manière claire. On verra la rationalisation qu'en fait le gouvernement
tout à l'heure. Je pense que c'est le fait de base qui doit nous retenir
quand nous nous apprêtons à étudier en profondeur le projet
de loi no 70.
Le président du Conseil du trésor, situe cet aveu
d'impuissance du gouvernement dans la perspective de la crise économique
générale que vit actuellement le Québec à l'instar
de plusieurs autres sociétés industrialisées. Nous ne
nions point, du côté de l'Opposition, qu'il y ait un impact de la
crise économique que connaît le monde industrialisé sur
l'activité économique du Québec. Nous savons, par les
statistiques du chômage, les statistiques relatives à la fermeture
d'établissements, par la hausse inquiétante du nombre des
faillites au Québec, par le grand nombre de jeunes chômeurs sur le
marché du travail, par bien d'autres indices, que le Québec n'est
pas resté à l'abri des conséquences de la crise
économique que nous subissons.
Comme je le disais, l'autre jour, les autres provinces du Canada sont
également affectées par la crise économique, le
gouvernement fédéral est également affecté par la
crise économique. Tous ces autres gouvernements ont des relations
contractuelles avec leurs employés syndiqués. Le gouvernement
fédéral signe, à chaque période de renouvellement,
au moins 250 à 300 conventions collectives avec des travailleurs de
différents secteurs de l'administration. Le gouvernement de l'Ontario
n'a pas un modèle de négociations patronales-syndicales aussi
centralisé que celui que nous avons au Québec. Il négocie
quand même un grand nombre de conventions. Il est aussi responsable de
nombreuses conventions négociées par des institutions
intermédiaires, comme les hôpitaux et les commissions scolaires,
mais à l'intérieur de paramètres qu'il définit
lui-même surtout au point de vue des politiques salariales.
On a vu dans les provinces de l'Ouest que les gouvernements
négocient, dans des conditions générales qui ne sont pas
substantiellement différentes de celles du Québec, des
conventions avec leurs employés. On a vu, en Alberta par exemple, les
infirmières se mettre en grève deux fois, ces dernières
années, parce qu'elles ne pouvaient pas s'entendre avec le gouvernement.
Par conséquent, vous avez un gouvernement qui se soumet quand même
au régime de la négociation collective. La même chose s'est
passée en Saskatchewan, au cours de la dernière année,
alors que le gouvernement a été obligé de recourir
à une loi spéciale pour
ramener au travail des fonctionnaires qui avaient été en
grève pendant une longue période. Il a eu, par la suite, la
sanction de son action, à l'occasion de l'élection
générale gui a suivi.
Le gouvernement du Québec, de tous les gouvernements canadiens...
Si vous avez une question à me poser, M. le ministre, je suis prêt
à l'accueillir volontiers.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, est-ce que vous
l'acceptez, M. le ministre?
M. Bérubé: Le chef du Parti libéral a fait
le lien direct entre le comportement du gouvernement de la Saskatchewan dans
ses relations de travail avec le résultat de l'élection, alors
que l'ensemble de la presse avait plutôt insisté sur le lien
étroit ayant existé entre M. Trudeau et M. Blakeney et,
finalement, son échec aux élections.
M. Ryan: C'est la presse québécoise, mais la presse
de l'ensemble du pays a interprété le résultat de
l'élection d'une manière très différente et plus on
se rapproche du plan local, plus on constate qu'il y a des facteurs, comme
celui que nous discutons aujourd'hui, qui ont de la signification pour les
citoyens.
Revenons à mon sujet de préoccupation. Il n'y a aucun
autre gouvernement qui a été placé, par la crise que nous
connaissons tous, dans une situation telle qu'il aurait été
obligé d'en venir à des mesures aussi extrêmes que celles
qu'annonce le projet de loi no 70. C'est le point que je voulais établir
bien clairement. Si la situation se présente différemment au
Québec, je pense que nous devons convenir que c'est dans une très
grande mesure parce que le gouvernement, de par sa propre et seule
responsabilité, s'est placé dans une situation telle qu'il avait,
sur le dos, des obligations auxquelles il n'était plus capable de faire
face et dont il est obligé de chercher à s'exempter par un
recours tout à fait extraordinaire comme celui que nous avons.
Par conséquent, ici, on le voit dans tous les sujets que nous
discutons, c'est la même chose; la problématique que nous
établissons conditionne énormément les solutions. Si vous
établissez une problématique de crise économique pure et
simple, vous êtes conduits à l'argumentation que nous connaissons:
obligés de prendre des mesures d'urgence, obligés de faire appel
à la solidarité nationale, obligés de faire ceci et cela;
cela est bien connu, il y a d'autres gouvernements qui ont été
obligés de faire la même chose au cours de l'histoire
contemporaine et le cas que nous observons aujourd'hui est loin d'être le
premier. C'est généralement l'argumentation d'un gouvernement
réduit à la dernière extrémité, qui est
obligé de s'accrocher à toutes les crises qui passent pour
essayer de faire oublier ses propres erreurs, sa propre impéritie.
Dans ce cas-ci, nous soutenons, du côté de l'Opposition,
qu'il y a une responsabilité majeure du gouvernement. Si la crise avait
été telle que les revenus du gouvernement auraient baissé
d'une manière dramatique par exemple, seraient tombés en
deçà même de ce que peut être le produit de notre
activité commune à chaque année, ou qui aurait
été à un niveau bien inférieur aux
prévisions. Mais, généralement, au cours des
dernières années, l'augmentation des revenus a quand même
été à un niveau supérieur à celui du produit
intérieur brut au Québec. Ce sont vos dépenses qui ont
augmenté plus vite que vos revenus, et cela ne date pas de la crise qui
a commencé l'été dernier, ça date surtout de la
deuxième et de la troisième année des conventions
collectives que vous avez signées avant le référendum.
À ce moment-là, vous nagiez dans l'euphorie, vous
étiez venus nous dire à l'Assemblée nationale: C'est
magnifique cette nuit lumineuse où nous avons consommé je ne sais
pas combien de verres d'eau avec la partie syndicale, nous avons trouvé
des solutions à nos problèmes, puis nous avons agi en
fidèles intendants des deniers publics du Québec, puis nous
allons vers des années où le niveau moyen de l'inflation sera
d'à peu près 8%, même pour la deuxième partie de la
dernière année, ça sera 7,5%; si cela ne marche pas, il
suffira de procéder à de petits ajustements. Vous vous rappelez
cette parole historique, M. le ministre, il suffira d'ajustements et on
s'arrangera. On nageait dans l'euphorie et dans la certitude anticipée.
Puis, les événements se sont déroulés d'une
manière très différente; on s'est aperçu que la
signature du gouvernement comprenait des possibilités qui avaient
été mal prévues, mal calculées, le coût des
conventions s'est révélé infiniment supérieur
à ce qu'on avait prévu.
Je crois que le coût additionnel par rapport aux prévisions
annoncées par le ministre des Finances - c'est assez curieux, je pense
que c'est 2 000 000 000 $ de plus; nous avons fait des calculs
détaillés à ce sujet-là dont je pourrai vous donner
la nature, un peu plus tard au cours de nos discussions. Le ministre des
Finances aime souvent dire que s'il s'en était tenu à la lettre
des conventions précédentes, ça aurait coûté
2 000 000 000 $ de plus. Or, avec les conventions qu'il a signées et les
prévisions qu'il avait annoncées à ce moment-là,
c'est 2 000 000 000 $ de plus auxquels vous devez faire face. Je crois que nous
serons en mesure de vous en faire la démonstration un peu plus tard,
mais pour le moment, je me limite à nos...
M. Bérubé: C'est contraire aux faits.
M. Ryan: En tout cas, on aura l'occasion d'en parler un peu plus
tard au cours de la journée; c'est important que nous nettoyions cela
comme il faut.
Par conséquent, au niveau de la problématique, nous
soutenons que la responsabilité principale vient du gouvernement et que
la manière dont un gouvernement doit rendre compte de ses erreurs n'est
pas en s'en prenant à une classe de citoyens en particulier, ce n'est
pas, non plus, en se soustrayant à ses obligations normales - en
particulier à ses obligations d'employeur - mais c'est en prenant les
moyens, les recours que l'autorisent à prendre notre pratique politique
et la tradition de notre régime. Nous vous disons qu'il y a trois
recours principaux: la taxation, l'emprunt, la réduction des
dépenses; il y a aussi un quatrième recours que vous connaissez
très bien et qui a été utilisé par d'autres
gouvernements antérieurement: lorsqu'un gouvernement n'est plus capable
de faire face à ses obligations et qu'il n'est plus capable de trouver
les revenus dont il a besoin pour lui faire face, il va se présenter
devant le peuple en disant: J'ai fait mon possible, maintenant j'ai besoin de
faire des choses extraordinaires, c'est à vous de décider si vous
voulez continuer avec ce genre d'intendance.
Le ministre est encore jeune, j'en suis bien content pour lui, mais il a
sans doute entendu dire qu'en 1939 le gouvernement était placé un
petit peu dans la même situation que le gouvernement actuel. Il
s'était avancé le cou pas mal et avait pensé que la chance
allait lui sourire, que tout s'annonçait très bien, qu'il
pouvait, par conséquent, s'engager en haute mer en matière de
budget sans trop d'inquiétudes. À un moment donné, dans
des circonstances qu'il n'est pas nécessaire de rappeler, il a
été ramené à l'ordre. Il s'est fait dire que
c'était beaucoup plus difficile maintenant de lui faire confiance au
point de vue emprunt qu'auparavant. Il a été obligé
d'aller en élection et il s'est fait battre. Ce gouvernement...
M. Grégoire: C'était la guerre.
M. Ryan: ... était dirigé par un homme qui a appris
sa leçon. Quand il est revenu au pouvoir en 1944, la première
chose qu'il a dite à ses collègues, d'après ce que
certains nous en ont rapporté, c'est qu'il ne fallait plus faire
d'imprudences comme celles qu'ils avaient faites pendant les trois
premières années. Le chef a dit qu'il faudrait toujours garder
une avance solide en ce qui concerne les disponibilités du gouvernement,
son pouvoir d'action, ses obligations, de manière à ne plus
jamais être obligé de se faire dire par Wall Street ou la rue
Saint-Jacques, comme on disait dans le temps, qu'il y avait des limites
inscrites à tel et tel moment. Ce qui nous fatigue et nous peine
énormément dans le comportement du gouvernement, c'est cette
sensation que nous avons que vous êtes obligés d'agir avec cette
précipitation, ce genre de mesure exceptionnelle parce que vous vous
seriez fait dire quelque part que vous êtes rendus au maximum de votre
pouvoir d'emprunt et que, maintenant, vous devez faire des preuves parce que
autrement cela va être très difficile de continuer à
fonctionner. Un gouvernement qui s'est amené, à ce point, au bord
du précipice est un gouvernement qui n'a pas manifesté le sens
des responsabilités qu'on est en droit d'attendre des élus du
peuple.
L'autre jour, l'adjoint parlementaire au ministre des Finances a
énoncé une théorie que je n'ai pas très bien
comprise d'ailleurs - le président du Conseil du trésor voudrait
peut-être l'expliciter - en essayant de nous faire croire que c'est
absolument indispensable que nous adoptions le budget comme l'a conçu le
gouvernement d'ici à une date X. Il n'y a pas de date à
établir, à mon point de vue, dans nos statuts pour l'adoption du
budget, si vous tenez compte de notre régime parlementaire. Au niveau
fédéral, on a passé une année et demie ou deux sans
qu'un budget ait été adopté. On l'a
présenté, on l'a discuté, il y a eu un changement de
gouvernement, un autre changement de gouvernement, on est revenu.
D'après ce que me disait, tantôt, le député de
Frontenac, le budget présenté en novembre dernier par le ministre
fédéral des Finances n'a pas encore été
adopté par la Chambre des communes. Je ne sais pas s'il y a des chances
qu'il soit adopté avant l'ajournement d'été, mais je pense
qu'ici il y a une marge. Lorsqu'on veut s'engager dans des voies aussi
exceptionnelles que celles que nous propose le gouvernement, il faut être
bien sûr de ce qu'on dit et j'aimerais que le président du Conseil
du trésor nous donne des précisions à ce sujet, s'il en
a.
Maintenant, j'entendais le ministre dire tantôt: C'est un
problème de forme. Nous, nous prenons position sur le fond; ensuite,
nous voyons au problème de forme. Je regrette profondément, mais
je suis en désaccord total avec le ministre à propos de cette
affirmation. Je crois que les questions qui se rattachent au droit
d'association, de liberté des associations de travailleurs de
négocier leurs conditions de travail dans des conditions conformes
à ce que prescrit la loi ne sont pas des questions de forme, ce sont des
questions fondamentales, tellement fondamentales que ces grands droits sont
inscrits dans des chartes de droits humains partout où l'on juge
à propos d'en avoir. Je voudrais dire au gouvernement que sans confondre
le problème financier auquel il fait face avec le problème de la
libre négociation des conditions de travail, nous refusons
totalement d'accepter le postulat suivant lequel il y aurait un
problème qui se poserait au niveau de la substance, celui des conditions
de rémunération, un autre qui serait un problème de forme.
On pourrait très bien faire l'affirmation inverse, cela n'avancerait
personne. Je pense que c'est comme les deux poumons d'une même
entité. La rémunération est un facteur essentiel à
la fois de la politique budgétaire d'un gouvernement et de sa politique
de traitement de son personnel. C'est, en même temps, une dimension
absolument essentielle. Tout le processus de libre négociation,
dès qu'on soustrait un élément aussi important au
processus de libre négociation, je pense qu'on ferme la porte à
la libre négociation elle-même. (12 h 45)
Le projet de loi, évidemment, va tout à fait dans ce sens.
Je pense qu'il n'est peut-être pas mauvais de rappeler quelques propos
qu'on tenus, devant nous, l'autre jour, des dirigeants des trois grandes
centrales syndicales. Dans un mémoire dont le ton tranchait
singulièrement comparativement à d'autres interventions provenant
de la même source que nous avons entendues dans le passé. Je ne
sais pas ce qui est en train de se produire, mais j'ai l'impression - nous les
avons entendues l'autre jour - que nous allons vers une plus grande
sobriété dans les interventions, vers des interventions à
caractère plus pratique, qui s'adressent plus au sujet lui-même
que vers ce genre de tirade démagogique qui a trop longtemps
caractérisé le langage syndical parfaitement brumeux et qui ne
faisait rien avancer.
L'autre jour, le mémoire que nous avons lu était un
mémoire rationnel, sobre, d'une brièveté exemplaire pour
ce genre de comparution. Les affirmations qu'il contenait n'étaient
d'ailleurs pas formulées dans des termes excessifs. À mon point
de vue, loin de leur enlever de la force, cela leur en donne davantage. Je
voudrais simplement en retenir quelques-unes. On disait, par exemple: Ce n'est
pas la première fois qu'un gouvernement cherche à faire imposer,
par l'autorité de l'Assemblée nationale, un décret contre
des travailleurs et des travailleuses, mais c'est la première fois qu'un
tel décret survient par anticipation, alors même qu'une convention
collective est en vigueur.
Je pense que c'est très important de souligner que nous entrons
dans un précédent historique qui n'a jamais connu son
équivalent. C'est la première fois qu'avant même qu'une
négociation ait lieu, au moment où une convention collective est
encore en vigueur, qu'un gouvernement décide de régler, par
décret anticipatoire, les conditions de travail de ses salariés
pour les quinze ou dix-huit mois qui suivront.
Une autre affirmation, non moins importante qu'on trouve dans le texte
des centrales syndicales, a trait à l'objectif de réduction des
salaires. Ce n'est pas tout. Le gouvernement ne se borne pas à dire: On
va fixer, d'une manière anticipatoire, vos conditions de
rémunération à compter du début
présumé de la prochaine convention collective. Il dit: On vous
avait proposé de renoncer à des obligations auxquelles vous aviez
droit. Comme vous n'avez pas voulu, nous allons le faire à votre place.
En l'espace de trois mois, on va aller chercher ce qu'on a été
obligé de vous donner en l'espace de six mois pour la deuxième
moitié de 1982. On vous le dit, nous vous l'avons dit, les centrales
syndicales vous le disent et je pense que tous les commentateurs impartiaux
l'ont également dit, que ce soit ceux du Soleil, de la Gazette, du
Devoir -évidemment, il n'y a jamais de problèmes avec le Devoir,
il est généralement dans la bonne voie - même quand il nous
critique, on l'accepte très bien, nous aussi.
M. Bérubé: Depuis le départ d'un certain
directeur, c'est effectivement beaucoup mieux.
M. Ryan: Cela, c'est une remarque que vous regretterez parce
qu'elle n'a aucune pertinence. La Presse, également, je pense qu'elle
est allée dans le même sens. Ce n'est pas pour arriver et citer
des autorités innombrables à l'appui de cette thèse qui
s'impose par le simple fait qu'on la propose parce qu'elle est tellement
évidente par elle-même. Le gouvernement va plus loin; il dit: On
avait mal calculé cette affaire, on avait mal organisé notre
affaire, on vous retire cela. C'est un point qui a fait l'objet de remarques
très dures au cours des dialogues, vendredi dernier à cette
commission. Je pense que nous devons le rappeler; nous ne pouvons que
réprouver cette manière de procéder et je voyais, ce
matin, par exemple, que Loto-Québec va chercher 550 000 000 $ dans la
poche des contribuables. Combien d'argent revient au gouvernement
là-dessus? Il n'y a que 150 000 000 $. Je pense que c'est 450 000 000 $.
Sur 450 000 000 $ que vous allez chercher, il n'y a que 150 000 000 $ qui
reviennent au gouvernement. C'est beaucoup d'argent pour encourager le jeu,
beaucoup d'argent pour stimuler l'industrie de la publicité pour des
fins qui restent quand même très artificielles. (12 h 50)
M. Bérubé: Est-ce que le chef de l'Opposition
pourrait cependant indiquer quel est le montant retourné à ceux
qui gagnent?
M. Ryan: Je crois que ce n'est pas plus que le tiers. Je pense
que c'est à peu près le tiers. C'est que, tout de suite, il y a
pas mal d'argent qui s'en vient là. C'est un gouvernement qui n'a pas eu
le courage de
nettoyer cette affaire-là comme il le faut; mais de toute
façon, c'est votre problème, c'est un problème politique
et il y a bien d'autres choix que vous pourriez faire. Vous avez accordé
une réduction des impôts, au début de l'année,
d'à peu près 200 000 000 $ pour des frais de garde des enfants.
C'était libre à vous de le faire, mais vous ne pouvez pas arriver
et dire: On vous donne des choses d'une main et on va chercher cela dans la
poche dans ceux à qui on l'a promis. Vous aviez pris l'engagement envers
ces gens-là.
Je ne veux pas entrer là-dedans, ce matin, parce qu'on a eu
l'occasion d'exprimer nos opinions lors du discours sur le budget à
l'Assemblée nationale, et je suis convaincu que les avenues qui
s'ouvraient au gouvernement pour la solution du problème de
liquidité dans lequel il s'était enfermé par sa propre
imprévoyance étaient multiples et n'étaient pas
réduites, loin de là, à ce seul recours rétroactif.
Je vous ai dit, tout à l'heure, ce que je pensais de la crise, c'est un
problème qui, d'après moi, ne peut pas être
présenté de manière aussi simple.
Maintenant, il y a un troisième point qui doit faire l'objet de
précisions; il faut absolument que ce soit nettoyé. Les centrales
syndicales nous disaient, l'autre jour: Nous vous avons fait une offre. Quand
nous vous avons répondu, nous vous avons présenté quatre
conditions.
M. Blais: Pas d'offre.
M. Ryan: Je ne les ai point à la portée de la main,
mais je pense qu'on s'en souvient très bien: il y avait d'abord le
respect intégral des conventions en vigueur; deuxièmement,
début des négociations dès le début du mois de
juin; troisièmement, ils demandaient le remboursement du salaire des
permanents qui devraient être libérés pour les fins de la
négociation; le quatrième point disait qu'il ne fallait pas
toucher aux acquis en matières mécanique et normative, surtout.
On ne voulait pas qu'on touche au régime de retraite.
Maintenant, ils disaient qu'on devait maintenir le statu quo en
matière de salaires, ce qui n'excluait pas la possibilité que,
dans l'éventualité d'une entente en vue de l'année 1983,
on pourrait envisager la possibilité que la nouvelle convention entre en
vigueur à une date plus rapprochée. Ce qui voulait dire, en
termes à peine voilés, qu'on acceptait de négocier
même l'augmentation due pour la deuxième partie de l'année.
J'ai demandé, l'autre jour, aux représentants des centrales
syndicales: Attachiez-vous la même importance arithmétique
à chacune des quatre conditions que vous aviez définies? Et tout
de suite, la réponse a été que les conditions n'avaient
pas le même degré d'importance. Par conséquent, certaines
auraient pu être sujettes à de la négociation, à de
la discussion et auraient peut-être pu déboucher sur des
arrangements importants. Peut-être se serait-on aperçu qu'il y
avait moyen d'ouvrir des négociations véritables dans des
conditions qui auraient été acceptables des deux
côtés. Cela, c'est une chose que j'aimerais bien qu'on clarifie
parce qu'il est resté de l'ambiguïté à ce
sujet-là.
Ce sont les trois grands points que les représentants des
travailleurs syndiqués, par l'entremise des dirigeants des trois
centrales majeures du Québec, sont venus soumettre à l'attention
de la commission parlementaire, l'autre jour. Maintenant, quand ils nous disent
que des accrocs à des lois aussi fondamentales - et je vais y revenir
avant de terminer cette introduction - touchent à l'essence même
de notre régime démocratique, je pense qu'il faut écouter
cela avec sérieux. Moi, je ne prête pas de mauvaises intentions au
gouvernement. Pas du tout. Et je ne me nourris pas d'une espèce de
manichéisme en ces choses qui feraient voir seulement du mal d'un
côté et seulement du bien de l'autre, mais nous savons que les
libertés syndicales sont au coeur du processus démocratique.
Au tout premier rang des libertés syndicales, il y a
évidemment la liberté de négociation des conditions de
travail. Et quand ils nous disent - cela peut sembler très
ésotérique - que ceux qui ont à coeur le bien de la
démocratie savent que, dans les pays où on a opprimé des
libertés, on a très souvent commencé par des
libertés syndicales. Je pense qu'on est tous d'accord pour
reconnaître que c'est un fait historique incontestable. Je regarde
même ce qui s'est produit en Pologne, ces derniers mois. Les gens qui
dirigent le gouvernement de la Pologne ne sont pas de mauvaise foi, ce sont des
gens qui ont été placés dans une situation
économique et financière extrêmement serrée. Ils se
sont dit: La première cible qu'on va viser, ça va être
certains avantages que se sont appropriés les centrales syndicales. Je
ne prétends pas qu'il faille les mettre sur les autels; je les ai
moi-même critiqués souvent et j'entends continuer à le
faire en toute liberté, à l'avenir. Mais ce que je vous
dis...
M. Blais: Mais nous comparer à la Pologne; quand
même!
M. Ryan: Non, je vous donne un exemple historique...
M. Blais: Quand même!
M. Ryan: Ce n'est pas ça que j'ai fait, j'ai le droit
d'invoquer un exemple historique...
M. Blais: L'analogie!
M. Ryan: ... montrant combien les libertés syndicales sont
au coeur du processus démocratique et combien la tentation peut
être grande d'attaquer ces libertés au nom des raisons
d'intérêt national les plus nobles et les plus défendables.
C'est une mise en garde que je fais, ce n'est pas une accusation encore une
fois, j'examine le développement des institutions et des
sociétés contemporaines et je suis bien obligé de faire
certaines constatations en toute liberté et en toute
responsabilité, aussi. Je n'établis pas de lien d'identité
absolu avec ce que fait le gouvernement et ce que nous pouvons faire
d'ailleurs; je mentionne un fait tout simplement.
Je vous dis que, pour ces raisons, nous avons une extrême
répugnance devant ce projet de loi et j'ajoute une dernière
chose. C'est que j'ai encore un peu de mal à comprendre ce qui se passe.
L'autre jour, quand les porte-parole syndicaux sont venus nous rencontrer et
quand nous avons écouté, vendredi soir, la manifestation qui
s'est déroulée devant l'édifice de l'Assemblée
nationale, nous avons entendu un langage qui, généralement, a
été correct, mais qui, à certains moments, a
été très dur. Je me trompe peut-être dans ma
citation et vous pourrez me corriger si j'amplifie injustement, mais je crois
avoir entendu M. Laberge, président de la FTQ, dire que le projet de loi
no 70 est, à son avis, le plus abject, le plus odieux et le plus
dangereux qu'il ait vu en 30 ans de carrière syndicale.
M. Blais: C'est à peu près ça.
M. Ryan: II a dit une chose comme celle-là. Il a aussi
employé d'autres expressions que je ne reprendrai pas ici parce qu'elles
allaient peut-être en-dehors du cadre linguistique auquel nous essayons
de nous astreindre. Ses collègues ont aussi employé des
expressions très fortes. Au cours de la manifestation, on a entendu des
choses très dures; les discours ont été brefs, mais quand
on écoutait ce qui se disait sur la rue et tout... Je vous avertis tout
de suite, M. le ministre, que nous ne sommes pas allés faire de
discours; nous n'avons pas essayé d'aller nous pavaner pour chercher des
votes; pas du tout. Au contraire, je pense qu'il y a une responsabilité
de ce côté-là qu'on saura indiquer en temps utile, mais
nous ne voulons pas faire le jeu de flirt qui, aujourd'hui, fait
apparaître le gouvernement dans une lumière si ridicule. Ces gens,
qui étaient sur les barricades, il y a quelques années, sont
aujourd'hui les auteurs de projets de loi dont leurs amis d'hier et même
encore d'aujourd'hui nous disent qu'ils sont les plus odieux, les plus abjects
et les plus dangereux. Il faut quand même prendre les mots "at their face
value" comme on dit, il faut bien les accueillir comme ils sont dits et essayer
de les comprendre.
Ce sont autant de points qui me font dire au gouvernement que, s'il
était possible de retarder l'adoption en bonne et due forme de ce projet
de loi, jusqu'à ce que des négociations sérieuses aient
lieu avec ses employés, la démocratie serait infiniment mieux
servie et nous éviterions de mettre sur la conscience de
l'Assemblée nationale et du processus démocratique
québécois des agissements qui pourront servir de
précédents très dangereux pour les gouvernements de
l'avenir et même, éventuellement, pour celui-ci, si sa gestion des
finances publiques devait continuer d'être aussi déplorable
qu'elle l'a été au cours des dernières années. On
aura l'occasion d'invoquer d'autres arguments à l'encontre du projet de
loi, mais je pense que c'étaient les points essentiels que je voulais
signaler, à ce moment-ci, avec le plus de calme possible, mais avec
fermeté.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie, M. le chef
de l'Opposition. Comme il est treize heures, je propose de suspendre
jusqu'à quinze heures.
La commission suspend ses travaux jusqu'à cet après-midi,
quinze heures.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise de la séance à 15 h 25)
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, s'il vous
plaît!
On commence.
M. Bérubé: M. le Président, je n'ai aucune
objection à ce que vous laissiez la presse siéger à notre
table. Toutefois, je vous suggérerais de l'envoyer dans l'Opposition
parce que je ne vois jamais un article de sa part qui nous est favorable.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre, mais
j'ai des objections.
Des voix: Ah!
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission des finances et des comptes publics reprend donc
l'étude article par article du projet de loi no 70. Je voudrais, avant
d'aller plus loin, vous faire part d'une demande de remplacement des membres,
M. le député de Charlesbourg, cela peut s'adresser à vous
également parce que cela va me prendre votre consentement. Pour
remplacer M. Assad (Papineau) comme intervenant, ce serait Mme
Thérèse Lavoie-Roux (L'Acadie)?
M. Bérubé: M. le Président, est-ce qu'on
commence la commission ou ne l'a-t-on pas commencée ce matin?
M. Grégoire: M. le Président, rendu
là...
Le Président (M. Bordeleau): C'est pour cette raison que
j'ai...
M. Bérubé: Est-ce qu'on renouvelle la
commission?
M. Grégoire: M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): On peut procéder
à certains changements. C'est pour cette raison que je demande à
tout le monde d'écouter parce que cela va me prendre le consentement des
membres. J'ai, comme demande de remplacement, Mme Thérèse
Lavoie-Roux (L'Acadie) à la place de M. Assad (Papineau) comme
intervenant. Comme membre - ce que j'ai oublié de faire ce matin - c'est
de remplacer M. French (Westmount) par M. Ryan (Argenteuil). Mais comme aucun
membre ne s'est opposé ce matin, tacitement, c'était
déjà acquis. Est-ce que cela va?
M. Bérubé: M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Du côté
ministériel, est-ce qu'il y a d'autres remplacements?
M. Grégoire: M. le Président, soucieux de permettre
à l'Opposition de s'exprimer librement et...
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît! Je
veux savoir si vous consentez, oui ou non.
M. Grégoire: ... à sa guise, nous allons accepter
de consentir aux changements.
Des voix: Oui.
Le Président (M. Bordeleau): Oui. D'accord.
M. Bérubé: Moi, j'aurais déporté
L'Acadie n'importe quand, parce que la dernière fois qu'on l'a
acceptée ici, à cette commission, cela a été un
désastre.
Le Président (M. Bordeleau): Ne serait-ce pas une
revanche, M. le ministre, parce que Mme la députée de L'Acadie
n'a pas voulu vous accepter comme membre d'une certaine commission la semaine
dernière?
M. Bérubé: Non, M. le Président. Le
Président (M. Bordeleau): Non.
M. Bérubé: M. le Président, il faut quand
même avouer qu'hier soir, Mme la députée de L'Acadie est
intervenue pendant ses 20 minutes réglementaires pour louanger le
député de Bellechasse - reconnaissons-le, pour louanger le
député de Bellechasse -mais fallait-il en mettre autant?
Le Président (M. Bordeleau): Je m'excuse. Je n'ai pu
participer à ces ébats.
Ce matin, avant la suspension, nous en étions à une
discussion préliminaire du projet de loi. M. le ministre avait fait
certaines remarques. Le chef de l'Opposition en a fait.
M. Bérubé: J'ai fait certaines remarques et le chef
de l'Opposition a répondu. Je n'ai pas utilisé mon droit de
réplique encore.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous rappelle qu'en
commission, M. le ministre, comme vous êtes le parrain du projet de loi,
vous avez un droit de parole illimité. M. le député de
Vaudreuil-Soulanges.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Dans la mesure où les
commentaires du chef de l'Opposition ont donné lieu, de la part du
président du Conseil du trésor, à la prise copieuse de
notes pour autant que j'aie pu en juger ce matin...
M. Bérubé: Oui, M. le Président, comme
toujours.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): ... il est peut-être
loisible à ce moment-ci de laisser une chance au président du
Conseil du trésor de revenir, à son sens, sur des affirmations du
chef de l'Opposition afin d'élargir ou de préciser le
débat.
M. Yves Bérubé M. Bérubé: En fait, M.
le Président...
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: ... j'ai écouté avec
beaucoup d'attention le chef du Parti libéral. Ce qui m'a frappé,
c'est qu'à nouveau, il a refusé de se prononcer sur le fond,
c'est-à-dire les choix qui s'offrent à nous et, par
conséquent, n'étant pas d'accord avec les choix gouvernementaux,
qu'est-ce que nous proposons. Sur cette base, on aurait pu en arriver à
un débat intéressant, mais ce n'est pas cela. Nous avons eu droit
à une première intervention du chef de l'Opposition qui est la
suivante. Bon! Il y a une crise; on n'est pas sot, on comprend qu'il y a une
crise. Elle a nécessairement des incidences sur le budget
gouvernemental, on en est conscient; concédons cette
réalité. Mais si on se
retrouve avec l'obligation de procéder à des gestes aussi
radicaux, c'est que le gouvernement a particulièrement mal
géré et qu'il est responsable de l'aggravation
particulière de la crise au Québec. Voilà, je dirais, le
premier élément de l'intervention du chef du Parti
libéral.
Là, je m'arrête et je suis bien obligé de dire que
je ne partage pas la position du chef du Parti libéral. Mais
plutôt que de me contenter d'une opinion, je peux l'étayer, M. le
Président. Par exemple, lorsqu'on regarde la dernière
décennie de 1971 à 1975 et de 1976 à 1980, il faut
constater que la croissance des dépenses publiques par rapport à
l'inflation est de 8,6% supérieure à l'inflation. Le
député de Johnson qui ne pousse pas de hauts cris...
Une voix: Vaudreuil-Soulanges. (15 h 30)
M. Bérubé: - j'ai vraiment de la difficulté
avec Mme Juneau - le député de Vaudreuil-Soulanges ne pousse pas
et n'a pas poussé de hauts cris, que je sache. C'est 8,6% de croissance
plus rapide que l'inflation sous l'administration libérale
antérieure. Cela veut dire une augmentation substantielle de la part de
la richesse collective utilisée dans le cadre des dépenses
publiques. Lorsque je regarde notre administration, je constate que
l'écart a baissé à 5,1%. Donc, la croissance de nos
dépenses par rapport à l'inflation, ou la croissance
réelle de nos dépenses, est beaucoup plus faible, nettement plus
faible. Elle passe de 9% à 5%, voilà qui est intéressant.
Donc, comme gouvernement, il faut reconnaître que, durant le premier
mandat, nous avons administré de façon serrée, mais ce
n'est pas tout. Le chef du Parti libéral, dans une affirmation que je
qualifierais d'éhontée, accuse le gouvernement d'avoir
signé des conventions collectives épouvantablement
généreuses. On nous accuse également d'avoir engagé
une pléthore de nouveaux fonctionnaires avec tous ces nouveaux
programmes, ces multiples organismes, dont on parle dans les médias,
évidemment parce qu'ils rapportent fidèlement les
déclarations du Parti libéral, sans plus. Donc, on nous accuse
d'avoir effectivement été responsables et des augmentations de
salaire et des augmentations des effectifs. Or, M. le Président, j'ai
quelques données qui sont intéressantes. Il vaut la peine de les
citer. C'est dommage que le député de Vaudreuil-Soulanges ne
prête pas attention aux débats.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
J'écoute avec beaucoup d'attention.
M. Bérubé: J'ai fait sortir l'historique des
effectifs des secteurs public et parapublic depuis une dizaine d'années,
pour notre intérêt personnel. Qu'est-ce que je découvre?
1970-1971, première année du régime Bourassa, il y a 239
559 fonctionnaires à la fonction publique, au ministère de
l'Éducation et aux Affaires sociales. Là, je m'en vais à
la première année de notre mandat, 1977-1978, pour voir combien
il y en a au moment où nous prenons le pouvoir et commençons
à exercer le pouvoir. À ma grande surprise, j'en trouve 339 663.
Alors, j'ai fait vérifier le chiffre. Je me suis dit: 339 000, il y a
certainement une erreur. Cela doit être 239 663, c'est-à-dire
aucune augmentation du nombre d'employés au gouvernement sous
l'administration libérale. Cela ne se peut pas, ce n'est pas possible
qu'il y en ait 239 000 quand ils ont pris le pouvoir et 339 000 quand ils
cèdent le pouvoir. Il y a quelque chose qui ne va pas.
M. de Belleval: Une augmentation de combien?
Une voix: 50%.
M. de Belleval: Vous n'êtes pas fort dans les pourcentages,
M. le Président, je m'excuse.
Une voix: 40%.
M. Bérubé: Et là je fais le calcul et je
dis: 100 000 emplois nouveaux. Ce n'est pas possible. Alors, j'ai
demandé à l'administration publique s'ils étaient
absolument certains de leurs chiffres. Ils ont dit: M. le ministre, on va aller
vérifier, on va vraiment les compter un par un...
M. de Belleval: ... comme sur les Falkland.
M. Bérubé: Oui. Effectivement, ils les ont
comptés un par un. Ils sont venus me voir, l'air absolument
désolé, en disant: Écoutez, M. le ministre,
indéniablement, que voulez-vous que l'on vous dise? Ce sont les
chiffres. 100 000 emplois de plus créés par M. Bourassa. Les 100
000 emplois de M. Bourassa, c'étaient 100 000 fonctionnaires. Alors,
aujourd'hui...
Une voix: C'est épouvantable.
M. Bérubé: ... c'est épouvantable, c'est le
scandale le plus éhonté qu'on ait eu l'occasion...
Évidemment, aujourd'hui, ils nous disent: II y a une sous-utilisation du
personnel, il y a des effectifs pléthoriques, il y a un gaspillage
éhonté des fonds publics; mais 100 000 fonctionnaires de plus
sous le régime libéral! C'est le scandale le plus incroyable.
M. de Belleval: C'est plus que tous les fonctionnaires qui
existaient avant la
Confédération.
M. Bérubé: Ah oui! nettement plus, M. le
Président. Évidemment, je me suis posé la question: II
faudrait peut-être vérifier notre administration, car tout d'un
coup qu'on aurait réussi à créer 100 000 emplois nous
aussi. Parce que les performances de création d'emplois du gouvernement,
depuis que nous sommes là, sont relativement bonnes par rapport aux
performances libérales...
M. de Belleval: Meilleures.
M. Bérubé: ... meilleures. Je me suis dit:
Peut-être que nous avons fait comme les libéraux et que nous avons
créé des emplois dans le secteur public.
M. de Belleval: M. le Président, je brûle de
connaître la réponse...
M. Bérubé: Le député de Charlesbourg
veut vous donner cette information.
Le Président (M. Bordeleau): Écoutez,
écoutez!
M. Grégoire: Depuis que je sais que c'est 100 000 pendant
les six ans des libéraux, j'ai hâte de savoir ce qu'on a fait,
nous.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît!
M. Bérubé: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Si vous voulez avoir la
réponse, laissez parler le ministre.
M. Bérubé: Donc, au début de notre mandat,
je vous rappelle qu'il y avait 339 663 employés de l'État.
M. Grégoire: Des secteurs public et parapublic?
M. Bérubé: Oui, des secteurs public et
parapublic.
M. Grégoire: Combien?
M. Bérubé: 339 663.
M. de Belleval: En 1976?
M. Bérubé: En 1977-1978, lors de notre
première année de mandat. Je n'ai malheureusement pas de chiffres
avant que les libéraux arrivent. Je prends la première
année de leur mandat et la première année de notre
mandat.
M. de Belleval: Avant le déluge fiscal.
M. Bérubé: C'est cela. En 1982-1983, j'ai voulu
faire faire une analyse pour avoir une idée, quand même.
M. de Belleval: On est rendu à combien? 449 000, quoi?
Non?
M. Bérubé: Je craignais que ce soit 449 000, qu'un
gouvernement inconscient ait effectivement créé 100 000 emplois
de fonctionnaires, surtout avec les nombreuses régies de toutes sortes,
gouvernementales...
M. de Belleval; Un gouvernement qui a perdu les
pédales.
M. Bérubé: Oui, c'est cela, un gouvernement qui a
complètement perdu les pédales, qui gère mal.
M. Grégoire: Je veux savoir, moi, j'ai hâte de
savoir.
M. Bérubé: Ah! M. le Président!
M. de Belleval: Je donne ma langue au chat!
M. Bérubé: D'abord, le chiffre qu'on m'a soumis, je
vous le rappelle, était de 339 663 fonctionnaires. Là, je trouve
335 030 fonctionnaires.
M. de Belleval: On a abaissé le chiffre, mais on est des
incompétents.
M. Bérubé: Là, je ne comprends plus
rien.
M. Grégoire: M. le Président, je voudrais poser une
question. Est-ce que cela comprend tous les nouveaux programmes?
M. Bérubé: Vous voulez dire qu'on a
créé plus d'emplois sous notre administration que sous
l'administration libérale, mais sans fonctionnaires de plus. Imaginons
ce qui serait arrivé si nous avions gaspillé les deniers publics
comme les libéraux, combien de fonctionnaires aurions-nous?
Le Président (M. Gagnon): Question de règlement, M.
le député de Frontenac.
M. Grégoire: Non, je voudrais poser une question au
ministre. Est-ce que le chiffre de 335 000 comprend tous les nouveaux et
nombreux programmes que le gouvernement actuel a mis en place, comme la
Régie de l'assurance automobile et le reste?
M. Bérubé: Oui, absolument tout. D'ailleurs, je ne
le croyais pas moi-même.
M. Grégoire: Le zonage agricole?
M. Bérubé: Oui.
M. Grégoire: L'aide juridique? Tout?
Le Président (M. Gagnon): À l'ordre! On va lui
laisser finir sa question, M. le ministre.
M. Bérubé: Oui.
M. Grégoire: Santé et sécurité du
travail?
M. Bérubé: Oui, M. le député de
Frontenac, absolument tout. Je ne le croyais pas, j'ai fait vérifier une
fois, deux fois, six fois et je me retrouve toujours avec le même
chiffre. Avec toute ces innovations, avec ces nombreux programmes additionnels,
il y a 335 030 fonctionnaires.
Évidemment, là, je commence à comprendre
d'où viennent les problèmes. Je commence, je ne fais que
commencer, je n'ai pas vraiment regardé combien ils les payaient, quand
ils étaient là, et combien nous les payons. Vous le savez, la
rémunération globale - je vais vous expliquer, M. le
député de Vaudreuil-Soulanges - est le produit des effectifs par
la rémunération.
Une voix: Moyenne.
M. Bérubé: Oui. Étant donné la
catastrophe libérale en termes d'effectifs, nous allons maintenant
examiner la rémunération, pour voir.
M. de Belleval: Donc, M. le Président, 100 000 nouveaux
emplois...
Le Président (M. Gagnon): À l'ordre! C'est M. le
ministre qui a la parole, vous demanderez la parole après.
M. Bérubé: Je suis prêt à donner la
parole au député de Charlesbourg pour qu'il pose sa question.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Charlesbourg.
M. de Belleval: Si j'ai bien compris, en six ans, le Parti
libéral a augmenté la fonction publique de 100 000 personnes.
Nous, en cinq ans, l'avons diminuée de 4000.
M. Bérubé: C'est bien cela. M. de Belleval:
Parfait, merci.
M. Grégoire: M. le Président, moi aussi, j'aurais
une question.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Frontenac.
M. Grégoire: Je sais que le ministre, président du
Conseil du trésor, a une espèce de petite calculatrice. Si j'ai
bien compris, en 1970, il y avait à peu près 239 000 personnes
dans les secteurs de la fonction publique et parapublique.
M. Bérubé: Oui.
M. Grégoire: Cela a augmenté à 339 000 en
1976.
M. Bérubé: C'est bien cela.
M. Grégoire: Si on avait continué sous le
même régime - et c'est pour cela que j'ai mentionné que le
ministre avait une petite calculatrice électronique - si, de 1970
à 1976, cela a passé de 239 000 à 339 000, combien en
aurions-nous en 1982, si on avait le même régime scandaleux qu'on
avait avant?
M. Bérubé: Je ne réponds jamais aux
questions hypothétiques, mais il faut comprendre cependant qu'elle n'est
pas si hypothétique que cela car, si nous prenons la croissance
exponentielle et la projetons dans l'espace, comme dans l'espace temps...
M. Sirros: À la place de projeter cela dans l'espace, ne
pourriez-vous pas projeter le projet de loi no 70 dans l'espace?
M. Bérubé: ... comme le souligne le
député de Rosemont, c'est sans doute 6 000 000 de fonctionnaires
qu'on aurait présentement au Québec.
M. Grégoire: Et pas de chômeurs!
M. Bérubé: Absolument pas! On manquerait d'enfants,
M. le député de Frontenac!
M. de Belleval: À la fin du siècle, cela?
M. Bérubé: Oui.
M. de Belleval: Avez-vous projeté cela dans le temps? Cela
prendrait combien de temps pour que tous les Québécois soient
fonctionnaires? En 1998, 1999?
Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.
M. Bérubé: Comme nous le disions tantôt, on
s'est donc interrogé. Il ne suffit pas d'engager des fonctionnaires, il
faut les payer. Là, on s'est dit, surtout après les nombreux
discours nous venant de l'Opposition sur le caractère
scandaleusement
généreux de nos dernières conventions collectives -
évidemment, j'ai battu ma coulpe, comme membre de ce gouvernement qui a
consenti des augmentations de salaire sans bon sens, qui ont permis
l'enrichissement des employés du secteur public d'une manière
absolument éhontée, au détriment du reste de la
collectivité, comme nous en accuse le Parti libéral. J'ai
commencé à examiner l'évolution de la
rémunération sous l'administration libérale. M. le
Président, ce qui est intéressant là-dedans, c'est
qu'hier, le chef de l'Union Nationale... le chef du Parti libéral, je
m'excuse, enfin, bientôt, j'ai l'impression que c'est là où
il va être.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Cela me surprendrait beaucoup
étant donné que le chef de l'Union Nationale est un donateur
péquiste.
M. Bérubé: Donc, le chef du Parti libéral a
émis, sorti un certain nombre de chiffres en commission
démontrant que les augmentations de salaires avaient été
plus fortes sous l'administration péquiste que sous l'administration
libérale. Inquiet, j'ai fait vérifier et d'ailleurs cet
après-midi, avec le chef du Parti libéral, nous avons pu examiner
les chiffres un à un et il a avoué qu'il s'était
trompé. J'avoue en toute franchise cependant qu'à sa
décharge, il avait entre les mains un document qui s'appelle "Les
mécanismes de fonctionnement des diverses composantes de la croissance
des salaires" qui ne visait pas à faire une comparaison entre deux
conventions collectives, mais qui visait à expliciter les
mécanismes de fonctionnement des diverses composantes. Donc, il ne
permettait pas une comparaison complète. Or, nous avons fait cette
vérification, cette conciliation et, effectivement, on retrouve
exactement les mêmes chiffres. À titre d'exemple, dans les
chiffres du chef de l'Opposition libérale, il y avait 5,4%
d'augmentation de salaire qu'il attribuait au présent gouvernement dans
ses conventions ayant oublié qu'il s'agissait d'un redressement consenti
dans les conventions précédentes.
Il n'y a rien de grave. C'est 5,4% à notre charge plutôt
qu'à la sienne, mais enfin, en apportant les correctifs
appropriés, voici ce que nous retrouvons. M. le Président,
l'inflation dramatique de 1975 à 1979 a représenté 38%
d'augmentation des prix. Alors là, on s'est dit que l'un des principes
fondamentaux que les employés du secteur public défendent, c'est
la protection du pouvoir d'achat. Donc, examinons l'augmentation des salaires
durant la même période. À nouveau, à ma grande
surprise, j'ai fait vérifier au moins trois fois les chiffres, je
découvre que l'augmentation de salaire pour la période en
question est de 62%, 38% d'inflation et 62% d'augmentation de salaire. Non
seulement on crée 100 000 emplois, mais de plus, on leur permet de
s'enrichir au rythme de 4% par année pendant toute la durée de la
convention. Bien oui, M. le Président. Non seulement on en a
créé 100 000, mais en plus de ça, on a
décidé de les rendre millionnaires.
Intéressant. Là évidemment, après avoir
écouté l'Opposition libérale accusant l'actuel
gouvernement d'avoir signé des conventions généreuses,
évidemment, ces arguments ont été repris par des
éditorialistes de haut renom comme Mme Gagnon, ou autres de la presse,
à plusieurs reprises, comme quoi nous avions signé des
conventions éhontées. Évidemment, il ne faut pas leur
attribuer cette opinion. Je pense qu'ils l'ont simplement prise chez les
porte-parole du Parti libéral et se sont contentés de la
transmettre. Mais à ma grande surprise, lorsque j'examine notre
convention collective, alors là je m'attendais à un
désastre. Qu'est-ce que je découvre? L'inflation durant la
période qui nous concerne est de 43,48% sur la période. Un peu
plus que sous les libéraux qui était de 38%, mais comparable.
Là, je m'attendais à trouver au moins 75% d'augmentation de
salaire, absolument inévitable. Qu'est-ce que je découvre?
L'augmentation du salaire a été de 45,52%. Vous allez me dire que
la convention que nous avons signée a permis essentiellement de
protéger le pouvoir d'achat des employés du secteur public.
45,52% d'augmentation pour une inflation de 43,5%, c'est, somme toute,
raisonnable. Aucune comparaison avec la véritable orgie à
laquelle on a assisté, dans les fonds publics, dans les dépenses
des fonds publics qu'on a observée sous l'administration
libérale. Cette administration scandaleuse par la multiplication des
effectifs, par une absence de recherche totale de l'efficacité
administrative, je commence à comprendre d'où elle vient. Elle
vient, essentiellement, d'une mauvaise administration libérale dont la
société québécoise, hélas, a
hérité; rien de plus. (15 h 45)
Le deuxième argument étoffé de la part du chef du
Parti libéral porte essentiellement sur l'obligation pour un parti
politique au pouvoir, lorsqu'il fait un constat d'échec
économique, de retourner devant la population, de lui mettre les faits
sur la table et d'aller en élection. Mais le chef du Parti
libéral oublie que, juste avant la dernière élection, nous
avons déposé un budget dans lequel nous avons indiqué pour
1 000 000 000 $ de compressions, où nous avons expliqué
exactement le contexte économique qui allait sous-tendre le mandat qui
venait. L'électorat a tranché, l'électorat a voté;
sur la base exactement de l'information, il a voté. Il a tout
simplement...
M. Sïrros: Question d'information, M. le
Président.
Le Président (M. Bordeleau): Question de règlement,
M. le député de...
M. Sirros: Est-ce que j'ai manqué cela, est-ce que la loi
no 70 était aussi publiée avant l'élection?
M. Bérubé: Non, mais...
M. Sirros: Ah!.
M. Bérubé: Dommage que le député de
Laurier n'ait pas été ici ce matin, dans la mesure où j'ai
eu très longuement l'occasion d'expliquer le sens de la loi no 70 et,
à votre question, je répondrais: Oui, elle y était.
M. Sirros: Vous aviez annoncé que vous alliez
réduire les salaires de 521 000 000 $, la masse...
M. Bérubé: Non, elle y était de façon
implicite.
M. Sirros: Ah! Je me demandais si j'avais manqué quelque
chose.
Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.
M. Bérubé: Donc, M. le Président-Une
voix: Vous n'avez rien manqué...
M. Bérubé: ... elle y était. Je prends en
note votre question, M. le député de Laurier, et quand j'aurai
terminé ma tirade, je compléterai...
M. Bérubé: Donc, nous avons, effectivement,
expliqué clairement à la population la situation
financière générale, les compressions budgétaires
qu'il faudrait s'imposer, la situation économique générale
et avons demandé un mandat à la population pour régler ces
problèmes avec lesquels la société
québécoise allait être confrontée dans les
prochaines années. Ce mandat nous a été accordé et
nous réglons les problèmes. Donc, le chef du Parti libéral
oublie que nous avons eu l'honnêteté de déposer un budget.
Je n'en dirais pas autant de nos collègues fédéraux qui,
pendant des années, n'ont pas déposé de budget de peur
d'avoir à faire face à l'opinion publique. Nous avons choisi de
déposer un budget et d'affronter l'électorat sur la base du
budget que nous avions eu l'honnêteté de déposer avec 1 000
000 000 $ de compressions.
Tertio. Grave critique du chef de l'Opposition libérale: le
gouvernement doit se garder une marge de manoeuvre. C'est facile, mais quand,
par l'administration précédente, on a enlevé au
gouvernement toute marge de manoeuvre possible en engageant des centaines de
milliers de fonctionnaires et en leur donnant des augmentations de salaires que
notre société est incapable de payer, alors, doit-on
véritablement s'étonner que le gouvernement n'ait pas tellement
de marge de manoeuvre et que même il ait dû réduire les
effectifs de 5000 employés dans le secteur public? Non pas les
accroître, pour la simple raison qu'ils avaient mangé le pain
blanc. Depuis 1976, on essaie de corriger le tir...
M. de Belleval: Et là, on mange le pain noir.
M. Bérubé: ... et là, maintenant, on peut
parler d'un redressement quasi complété.
M. de Belleval: C'était même du pain au raisin qu'il
y avait.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Je termine, M. le Président,
je...
M. de Belleval: Comme dirait Marie-Antoinette.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Marie-Antoinette a
également dit, sur l'échafaud, qu'il fallait discuter de cela
à tête reposée.
M. Bérubé: Si je comprends bien, c'est la sentence
que vous répétez et réitérez
régulièrement à votre chef de parti.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): La dernière fois que
j'ai vu une guillotine, elle émanait du leader parlementaire du
gouvernement.
M. Bérubé: M. le Président, je reprends
uniquement quelques points du chef du Parti libéral concernant la loi no
70.
Le chef du Parti libéral ne s'est pas prononcé sur le
fond, il n'a pas parlé de la crise, il n'a pas parlé des moyens
qui s'offraient à la société pour les régler et de
ceux qu'il proposait. Il a simplement dit: Le gouvernement est responsable de
la crise et, deuxièmement, le moyen que vous prenez est mauvais. Je lui
laisse bien ses opinions, mais tant et aussi longtemps que le Parti
libéral n'aura pas dit ce que lui ferait dans la crise que nous
traversons, son intervention n'a aucune crédibilité. Il n'en aura
jamais parce que la population se posera toujours la question: Oui, c'est bien
beau de dire que ce n'est pas bon ce que fait le gouvernement, mais qu'est-ce
que l'Opposition ferait?
Comme on ne le sait pas, on n'a aucune raison de croire que ce serait
mieux. Je vois que L'Acadie a été déportée d'une
autre commission. Est-ce qu'on pourrait lui souhaiter la bienvenue?
Le chef du Parti libéral nous dit: Dans la réponse des
syndicats, il y avait une ouverture à la négociation. Oui, il y
avait une ouverture à la négociation, indéniablement. Et
comme je l'ai expliqué, j'ai la ferme conviction, par les contacts que
j'ai eus et d'ailleurs par les déclarations publiques des chefs
syndicaux, que la perception de la crise est passablement identique à
celle du gouvernement. Il peut y avoir des différences d'opinions quant
à la façon de régler la crise, mais à nouveau
j'estime que certaines des opinions sur lesquelles d'ailleurs les chefs
syndicaux n'ont pas beaucoup insisté ne résistent pas
véritablement à l'analyse.
De fait, lorsqu'on parcourt l'ensemble de la presse financière
québécoise, on doit bien constater qu'il s'est fait un consensus
très rapide sur l'analyse gouvernementale. Je n'ai, en fait, à ma
connaissance, qu'une seule expression d'opinion claire, qui est distincte et
divergente de celle du gouvernement, c'est celle du Conseil du patronat. Le
Conseil du patronat propose simplement la mise à pied de 15 000 à
20 000 employés du secteur public comme étant la solution au
problème. C'est à peu près le seul exemple où je
suis prêt à reconnaître non pas la validité de
l'opinion du Conseil du patronat, mais la validité de l'effort, en ce
sens qu'ayant analysé la problématique, ayant
étudié les choix qui s'offraient, le Conseil du patronat a
choisi, parmi les moyens possibles, la mise à pied. Chacun a droit
à ses opinions, et je pense que le Conseil du patronat peut
défendre le point de vue qu'on doit mettre à pied 20 000
personnes en période de chômage. Avec un effondrement
économique comme celui que nous connaissons, on crée 20 000
chômeurs difficilement recyclables et on ne s'occupe pas trop des
problèmes familiaux que cela représentera, des problèmes
sociaux, cela n'a pas d'importance. C'est la position du Conseil du
patronat.
J'ai l'impression que l'affinité entre le Conseil du patronat et
le Parti libéral fait peut-être que, sans que le Parti
libéral le dise, le Conseil du patronat est finalement le haut-parleur
du Parti libéral et que c'est peut-être la position
libérale. C'est tout à fait plausible, mais enfin, je ne pourrai
pas nécessairement...
Le Président (M. Bordeleau): Excusez, M. le ministre.
M. Bérubé: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie pose une question.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que le ministre me permettrait une
question?
M. Bérubé: ... parleur, si je comprends bien.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que vous acceptez, M.
le ministre, la question?
Mme Lavoie-Roux: Je ne parle pas de haut-parleur. Le ministre dit
qu'il y a un consensus sur l'approche gouvernementale à toute cette
question.
M. Bérubé: La problématique.
Mme Lavoie-Roux: Oui. Le seul consensus que j'ai pu observer,
c'est celui de la faillite du gouvernement.
M. Bérubé: C'est dommage, Mme la
députée de L'Acadie, vous avez manqué la première
partie de l'exposé. Je suis convaincu qu'en lisant les comptes rendus
des journalistes, qui sont ici présents, demain, dans les médias,
ou encore en lisant le journal des Débats je vous épargnerai la
dure épreuve de vous dire vos vérités, Mme la
députée de L'Acadie, et par conséquent, je ne
répéterai pas...
Mme Lavoie-Roux: ... le journal des Débats.
M. Bérubé: Oui, vous lirez le journal des
Débats. Vous allez vous marrer. Vous allez plutôt pleurer parce
que, si j'étais à votre place, je pleurerais.
M. Lachance: La population pleure, aussi.
Le Président (M. Bordeleau): ... à l'ordre!
M. Lachance: Alors, il n'y a pas de danger, ils sont d'accord
avec nous. Voulez-vous un référendum sur cela?
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît:
Mme Lavoie-Roux: 29% de satisfaction.
M. Bérubé: M. le Président, si vous me
redonnez la parole.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre, c'est
à vous.
M. Bérubé: Donc, on nous a dit que, dans la
réponse syndicale, il y avait une ouverture. Oui, M. le
Président, il y avait une ouverture. Je suis convaincu qu'il y a
chez les représentants des travailleurs une réelle
volonté de s'asseoir à une table de négociation et de
négocier les prochaines conventions collectives, indéniablement.
Je suis également convaincu que les représentants syndicaux dans
leur tournée à travers le Québec n'ont pas obtenu le
mandat de la part de leurs syndiqués d'accepter l'offre de
réduction des salaires du mois de juillet.
Troisièmement, je sais que nous devrons verser les augmentations
de salaires et que les délais normaux de négociation font que
nous nous retrouverons sans doute quelque part à l'automne dans une
position où, de toute façon, le gouvernement aura à agir.
Étant devant cette réalité, nous n'avons pas nié
qu'il y avait une ouverture dans la position syndicale, une ouverture à
la négociation; mais nous avons dû prendre acte du refus syndical
de la proposition d'avril, laquelle proposition permettait d'amorcer le virage
plus tôt et de faire en sorte que l'on n'ait pas effectivement à
intervenir plus brutalement à la fin du virage. Car, qu'on le veuille ou
non, il y a 521 000 000 $ à aller chercher et nous n'irons pas taxer,
nous n'irons pas emprunter et nous ne couperons pas de services. Donc, cela
dit, je pense qu'il faut faire face à la réalité et, comme
gouvernement, nous avons choisi la voie de la loi no 70.
La loi no 70, je le reprends parce que le chef du Parti libéral
n'a pas semblé comprendre le sens de mon intervention, est très
simple. La loi no 70 n'exclut pas la négociation, au contraire, elle
prévoit la négociation. Elle dit même que la
négociation prévaut sur la loi, que toute entente
négociée l'emporte sur les stipulations de la loi. C'est tout de
même important, que les négociations soient au-dessus de la loi.
Premier élément.
Deuxième élément: Comme le disait d'ailleurs, ce
matin, la députée de L'Acadie à sa question au ministre
des Affaires sociales, il ne faut pas leurrer ceux avec qui nous
négocions en leur faisant croire que nos mandats pourraient être
beaucoup plus généreux, que nous avons deux, ou trois fonds de
baril. À l'époque du Parti libéral, il y avait deux ou
trois fonds, il n'y avait même pas de fond du tout. On l'a vu
tantôt, ces gens donnaient notre chemise généreusement.
Mme Lavoie-Roux: Vous ne parlez pas de vos négociations
avant le référendum vous?
M. Bérubé: Justement on en parlé Mme la
députée de L'Acadie. C'est dommage que la députation
libérale ne soit pas au grand complet quand nous commençons. Je
pense qu'il y aurait lieu que je reprenne l'exposé de tantôt.
Des voix: Oui, oui.
M. Bérubé: ... consentement.
À l'intention de la députée de L'Acadie, je le
reprendrai succinctement, quand j'aurai terminé mon exposé, quand
j'aurai répondu à la question du député de Laurier
et, subséquemment, je répondrai à votre question.
La loi no 70 pose très clairement quelles sont les contraintes
à l'intérieur desquelles nous devons évoluer. Elle fait en
sorte que les parties puissent prendre position en fonction de contraintes
clairement perçues plutôt qu'en fonction d'une hypothétique
menace qui pourrait, comme dit la députée de L'Acadie ce matin,
représenter un leurre - c'est un mot sonore et très
agréable, un leurre, c'est ce mot habituel que l'on trouve dans la
bouche du Parti libéral - faire croire que nous sommes peut-être
au bout de notre coton, qu'il n'y a pas de deuxième fond, alors qu'il y
en aurait deux, trois, quatre et cinq que l'on pourrait ouvrir les uns
après les autres dans un espoir de régler. Nous avons choisi une
autre voie, elle est plus dangereuse, je le reconnais. Nous avons choisi de
mettre tous les chiffres sur la table, absolument tous, de telle sorte que
l'inconvénient, lorsque vous avez mis tous les chiffres sur la table,
c'est qu'il n'y a plus de fond, il n'y a pas de double fond. Vous avez votre
baril, il est là, et on dit: Voici ce qu'il y a dans le baril. Vous
pouvez prendre tout ce qu'il y a dans le baril, mais pas plus. Si vous cherchez
à prendre plus que ce qu'il y a dans le baril, au nom de
l'intérêt public, on ne pourra pas l'accepter. Cela, c'est
l'inconvénient de tout mettre sur la table. Nous y avons pensé,
nous avons même hésité à mettre tous les chiffres
sur la table, de manière à pouvoir en offrir moins et
céder après. Non, ce n'est pas cela que nous avons fait. Nous
avons dit: Nous mettons tout sur la table et nous négocierons
carrément, dans la franchise la plus totale. La loi 70, cependant, est
nécessaire dans la mesure où, ayant fait ce choix, il faut
désormais couler ce choix dans le béton, faire en sorte qu'ayant
choisi la voie de l'honnêteté et de la franchise, de cette absence
de double-fond comme le pratiquait le Parti libéral, ceci nous oblige
nécessairement à poser très clairement par loi les limites
d'une négociation dans les secteurs public et parapublic. C'est le sens
effectivement de notre intervention.
Mme Lavoie-Roux: ... votre tonneau à la
négociation.
M. Bérubé: Je reviens maintenant à la
question du député de Laurier. Il dit: La loi était-elle
expliquée lors de l'élection? La loi 68 y était puisque le
ministre des Finances avait annoncé un nouveau régime de
retraite,
à la baisse, dans son budget, avant les élections. La loi
68 était inscrite dans le budget et expliquée publiquement, non
pas dans toutes ses modalités, mais dans la volonté du
gouvernement de modifier les régimes de retraite,
premièrement.
Deuxièmement, quant à la loi 70, le jour où nous
avons dit qu'il y avait une crise, que nous ne le cacherions pas à
l'électorat comme l'a fait le Parti libéral... Je ne parle pas de
la succursale, du club ferme du Parti libéral au Québec; je parle
du grand Parti libéral, celui qui a écrasé le
Québec de façon aussi dramatique lors des dernières rondes
de négociations constitutionnelles. Je parle du grand Parti
libéral.
M. Sirros: Est-ce que...
Mme Lavoie-Roux: C'est parce qu'on n'avait pas un gouvernement
qui se respectait.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): On peut vous remercier pour
cela.
M. Bérubé: Le jour où nous avons choisi la
franchise, en déposant le budget avant les élections, d'indiquer
clairement la crise et que nous étions prêts à prendre les
moyens pour régler cette crise, oui, nous avions choisi la voie de la
franchise; oui, nous avions choisi la voie de l'explication des finances
publiques et, par conséquent, nous avions en même temps choisi les
conséquences de ce geste; et oui, la loi 70 pouvait être
implicitement incluse dans le mandat électoral. C'était le mandat
d'un gouvernement qui demandait un mandat clair de la population pour
régler la crise économique que l'ensemble des pays occidentaux
allait connaître et que nous étions décidés, nous,
à juguler au Québec.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Est-ce que le slogan du
parti...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Vaudreuil-Soulanges.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): ministériel lors de
l'élection était: II faut rester fort ou il faut comprimer?
M. Bérubé: II faut comprimer pour rester fort.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je me doutais de la
réponse, mais je pensais que cela appelait peut-être un peu de
détails.
M. Bérubé: M. le Président, maintenant, il
faut que je réponde à la députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: On y va. On va faire venir le
député de...
M. Sirros: Votre plaisir, vous pouvez le trouver.
Prématuré, sûrement.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: À de nombreuses reprises, j'ai
écouté des représentants du Parti libéral qui,
répétant des discours somme toute identiques
préparés par le seul recherchiste du Parti libéral qui
connaisse quoi que ce soit aux finances publiques, et je dois avouer que c'est
plutôt catastrophique comme résultat, mais enfin, on prend ce
qu'on a, donc, ayant écouté à de nombreuses reprises des
discours libéraux, j'ai commencé à m'inquiéter.
Même la députée de L'Acadie... Je ne peux pas m'adresser
à vous, mais je m'adresse au président de manière qu'il
vous parle à l'oreille.
M. le Président, lorsque la députée de L'Acadie,
à plusieurs reprises, a parlé de ces pléthores de
fonctionnaires engagés par le gouvernement dans ses multiples nouveaux
organismes de toutes sortes, qui sont en train d'accabler l'État sous un
nombre de fonctionnaires et d'employés de l'État qui sont
sous-utilisés, M. le Président, j'avoue, j'avoue.
Mme Lavoie-Roux: ... sous-utilisés.
M. Bérubé: ... que la sincérité -
parce que je pense qu'on ne peut pas douter de la sincérité de la
députée de L'Acadie - que la sincérité de la
députée de L'Acadie m'a ému, m'a inquiété,
m'a bouleversé, M. le Président. J'ai dû demander à
l'administration du secteur public de bien vouloir me faire l'analyse du nombre
d'emplois, en 1970-1971 lors de la première année du
régime bourrassiste, de le comparer avec la première année
d'un régime péquiste et, finalement, avec cette année
1982-1983.
M. le Président, qu'est-ce que j'ai découvert comme
chiffres? Je vous le donne en mille...
Une voix: En 100 000.
M. Bérubé: ... oui, je vous le donne en 100 000.
Pour compléter quand même mon intervention, parce que je suis
sûr que la presse maintenant va être ennuyée par cette
répétition, cette redondance, qui n'est attribuable qu'au fait
que les députés de l'Opposition sont arrivés en retard. Il
y avait donc 45 000 fonctionnaires dans la fonction publique. 92 000 à
l'Éducation et 102 000 aux Affaires sociales pour un grand total de 239
559 employés de l'État. Voilà donc le nombre
d'employés.
Et à la fin du régime bourrassiste, au
moment où nous prenons le pouvoir, je me suis interrogé.
Ce gouvernement qui a créé de nombreux emplois dans le secteur
privé, qui a mis l'accent sur le développement de notre
économie, a certainement dû contrôler les effectifs dans le
secteur public. M. le Président, j'ai examiné les chiffres que
l'on m'a fournis. J'ai été atterré: 70 994 fonctionnaires,
au lieu de 45 000 environ; 126 000 employés de plus à
l'Éducation; 142 000 personnes aux Affaires sociales, pour un total de
339 663 fonctionnaires.
Mme Lavoie-Roux: En quelle année, cela, M. le
Président?
M. Bérubé: Cela, c'est la première
année du régime Bourassa à la première année
du régime péquiste, 1970-1971 à 1977-1978.
Mme Lavoie-Roux: Oui, sauf que les enfants augmentaient encore
dans les écoles, M. le Président.
M. Bérubé: 100 000 fonctionnaires de plus, M. le
Président.
Mme Lavoie-Roux: D'accord, allez-y.
M. Bérubé: Évidemment, avec la
création des nombreux organismes sous notre administration,
j'étais convaincu que j'allais en trouver au moins 300 000 de plus.
Mme Lavoie-Roux: On a jamais parlé de cela...
M. Bérubé: En fait, je dois vous avouer que j'ai
même demandé à notre administration: Ne calculez pas les
chiffres, je vous en prie. Mais l'administration, totalement apolitique, a dit:
M. le ministre, si vous nous les faites compter sous le régime
libéral, nous devons les comptabiliser sous le régime
péquiste. C'est une question d'honneur. L'honneur, nous connaissons
cela, au Parti québécois, nous avons dit, évidemment:
Acceptons. Mais j'étais horrifié à la pensée des
chiffres que j'allais lire, surtout après avoir entendu les discours
épouvantablement catastrophés de la députée de
L'Acadie. Je me suis dit: Combien y aura-t-il de fonctionnaires quand nous
aurons fait le total?
Ainsi, je découvre 72 287 fonctionnaires, 118 616 à
l'Éducation et 144 000 aux Affaires sociales, c'est-à-dire 335
030; 4 000 de moins. Ciel! M. le Président, qui est responsable du
dégât? Qui a causé cette catastrophe avec laquelle nous
devons vivre? Je me promène parfois avec une petite courbe qui
intéressera la députée de L'Acadie, fort
intéressée par l'Éducation. Nous avons le rapport
maître-élèves au Québec, en fonction des
années. Qu'est-ce que je découvre? Voici une convention
libérale et voici l'évolution du rapport
maître-élèves, à la suite de cette convention. Il
passe de 19,6 à 16,8, et voici notre convention.
Voici le portrait d'une catastrophe libérale. J'ai tantôt
analysé les salaires, mais je pense que le chef du Parti libéral,
ayant maintenant en main toutes les données... il m'en a d'ailleurs
remercié. Je pense que c'est un des rares hommes politiques du Parti
libéral honnête. D'ailleurs, c'est l'inconvénient; j'ai
l'impression, qu'il n'arrive pas à s'intégrer facilement au Parti
libéral. Je crois effectivement qu'on le trouve insuffisamment partisan,
on trouve ses jugements un peu trop pondérés. Il aime bien avoir
l'ensemble des données en main avant de proférer une affirmation
quelconque, ce qui évidemment est très opposé à
l'esprit général qui prévaut dans ce parti...
Mme Lavoie-Roux: C'est très différent de votre
chef, n'est-ce pas? Je comprends que ça vous étonne.
M. Bérubé: Mais enfin, M. le Président, je
comprends que ce soit un problème propre au Parti libéral et,
évidemment, je sympathise avec le chef du Parti libéral, chef
pour peu de temps encore. Donc ce dernier a en main toutes les données
sur l'évolution du coût des conventions collectives. Je dois vous
avouer qu'il a pris un air atterré. Il a même dit, devant les gens
qui étaient ici: Mais ce n'est pas possible! Je lui ai dit: Eh oui, M.
Ryan, c'est possible, hélas! Et c'est la raison pour laquelle vous
n'avez pas de place dans ce parti, vous ne pensiez pas qu'ils étaient
comme ça. Et aujourd'hui, nous sommes encore en train de ramasser les
morceaux causés par le dégât épouvantable, immonde,
laissé par six années d'administration libérale. Merci, M.
le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. M. le
député de Vaudreuil-Soulanges, toujours sur les remarques
préliminaires?
M. Daniel Johnson
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
Certainement, M. le Président, on a assisté à une
performance semblable à celle que le ministre a l'habitude de nous
donner en commission parlementaire.
M. Paquette: ... Deux performances...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, une performance
répétée, j'allais le souligner et je remercie le
député de Rosemont de le souligner de la même façon.
Je ne sais pas véritablement quels progrès pour la
compréhension des raisons de la présentation du projet de
loi no 70 peuvent paraître à la suite de cette
démonstration, parce que je pense qu'on peut parler longuement. À
titre d'exemple, je vais reprendre les points que le ministre a fait
valoir.
On peut reprendre longuement les discussions sur les effectifs. On peut
regarder comment, dans la fonction publique, d'une part, et, d'autre part dans
le monde de l'enseignement et des affaires sociales, les effectifs auraient
augmenté de 1970 à 1976. Mais je pense qu'on doit
également décomposer, à l'intérieur de ces trois
grandes classes, quelles ont été les véritables secteurs
de croissance. Il me semble qu'il faudrait mesurer quels sont les facteurs de
croissance qui tiennent à l'augmentation des clientèles, à
la création de programmes que les Québécois avaient
demandés, auxquels ils aspiraient et que, incidemment, ils avaient les
moyens de se donner. Je reviendrai là-dessus.
Il faut quand même tenir compte - je suis sûr que ma
collègue de L'Acadie en parlera plus longuement - de l'explosion du
nombre des enfants d'âge scolaire, de la fréquentation scolaire,
etc. On pourra revenir sur le ratio maître-élèves, mais je
pense que la qualité des services, la gamme des services,
l'éventail des services sont également en cause et sont, pour une
grande part, une explication des augmentations qu'on a connues dans ce
secteur.
Par ailleurs, il est évident que la croissance exponentielle,
elle aussi dans certains secteurs, à la suite de la mise en place de
tout un système d'assurances relatives au service de santé et aux
services sociaux, n'est pas étrangère à l'augmentation du
personnel dans ces réseaux.
De cette façon, je pense qu'il faut pondérer grandement
les comparaisons qu'on peut faire entre 1970 et 1976, d'une part, et de 1976
à nos jours, d'autre part, étant donné qu'il est
absolument élémentaire de tenir compte de l'augmentation des
services que toutes ces nombreuses dizaines de milliers de personnes ont pu
rendre à la population.
M. Bérubé: Patinage;
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Le ministre peut bien dire
qu'on patine, mais, pour le moment, on a juste eu droit à un ensemble de
chiffres dans trois catégories, pour l'année 1970, pour
l'année 1976 et pour l'année courante ou à peu
près, chiffres préliminaires qu'on ne met pas en doute, mais qui
couvrent quand même une réalité. Ce n'est pas pour le
plaisir de la chose qu'il y a 100 000 fonctionnaires de plus de 1970 à
1976 et je ne pense pas que qui que ce soit et certainement pas l'Opposition
d'alors, les six ou sept péquistes qui siégaient à
l'Assemblée nationale, ait dénoncé cet état de
chose. Au contraire, en général, ils se sont plaints de
l'insuffisance des services que le gouvernement pouvait donner à la
population; de l'insuffisance, non seulement quant au nombre, mais quant
à la qualité des effectifs qu'on mettait à la disposition
des contribuables québécois. (16 h 15)
Dans ce sens-là, il faudrait quand même faire preuve d'un
peu de cohérence ou, à tout le moins, en l'absence de
cohérence dans le discours, mettre sur la table les chiffres qui
démontrent que des créations de programmes dont les
Québécois avaient, d'une part, besoin et, d'autre part, qu'ils
avaient les moyens de se payer, expliquent très certainement - cela
tombe sous le sens - l'augmentation des effectifs dont le ministre nous fait la
description. Étant donné qu'il constate lui-même que, dans
notre formation politique, le système veut que nous n'ayons, dit-il,
qu'un seul recherchiste alors qu'il a à sa disposition, ne serait-ce que
pour son seul cabinet, plus de 400 000 $ - je fais exception de toute la
fonction publique...
M. Bérubé: J'ai à ma disposition,
grâce à vous, 350 000 fonctionnaires maintenant.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Déjà, on voit le
rapport dans la somme des données qui peuvent être disponibles au
ministre pour avancer les choses qu'il a prétendues, mais on aimerait
beaucoup une ventilation, le cas échéant, si ses dossiers le lui
permettent, des raisons d'augmentation des effectifs, peut-être par
secteurs, sans aller jusque dans les moindres détails, les moindres
classes, les moindres pieds carrés d'espaces occupés, une
justification à la lumière des programmes
créés.
Le deuxième sujet qu'a soulevé le ministre dans sa
réplique et qui n'avait pas été évoqué de ce
côté-ci, ni d'ailleurs par lui-même, depuis le 14 avril
1981, c'est à savoir que le gouvernement est parfaitement
légitimé de procéder de la façon qu'il le fait en
présentant le projet de loi no 70, étant donné qu'il y a
eu des élections générales, que le Parti
québécois a été reporté au pouvoir et
qu'à l'occasion de la campagne électorale qui a suivi la
présentation d'un budget, l'électorat a été
à même de voter positivement et affirmativement pour l'ensemble
des projets à venir du gouvernement.
On a, en général, tendance à diviser les
écoles de pensée politique qui ont trait au comportement de
l'électorat entre l'école qui prétend que
l'électorat vote pour dire merci ou alors que l'électorat vote
étant donné les promesses qui lui sont faites. Donc, on vote soit
pour le passé, soit pour l'avenir. Le ministre est en train
d'accréditer la thèse que non seulement la gestion
extraordinaire
dont il fait état explique, en partie, les résultats de
l'élection, mais que les promesses qu'il faisait miroiter pour l'avenir,
y compris les promesses extrêmement dures de compressions, ont
été approuvées par les Québécois lors de
l'élection de 1981. J'ai évoqué tout à l'heure la
question de savoir si les Québécois ont perçu que le
gouvernement se présentait en prétextant que le Québec
pourrait rester fort avec le Parti québécois reconduit au
pouvoir, alors que le ministre semble vouloir nous dire que les promesses
électorales qu'il a fait valoir, que le programme d'action qui serait
celui du gouvernement s'il était reporté au pouvoir,
étaient non seulement de comprimer les dépenses, de couper dans
certains services, mais également d'imposer à environ 300 000
Québécois, des employés de l'État, un nouveau
régime de négociation de leur convention collective, à la
lumière, manifestement, de circonstances environnantes et surtout
économiques et financières qu'il imposerait.
On peut se souvenir, à l'occasion de ce débat, que le
premier ministre lui-même avait indiqué que le budget avait
été présenté en catastrophe. C'était un
budget préélectoral. C'était un budget
présenté tout de suite avant des élections. Les
échéances électorales avaient manifestement obligé
le ministre des Finances à agir très rapidement, à
présenter quelque chose que le premier ministre lui-même, dans les
semaines qui ont suivi l'élection, a qualifié de catastrophique
ou de fait en catastrophe, parce qu'il y a une distinction que je vais
respecter. Dans ce sens-là, je ne peux pas voir comment on peut
s'inspirer d'un budget qui est dressé en catastrophe pour
prétendre qu'on a mis sur la table les vrais chiffres, la vraie
situation qui nous mène aujourd'hui à la présentation du
projet de loi no 70 par le gouvernement.
La véritable et la seule catastrophe devant laquelle nous nous
trouvons aujourd'hui - le chef de l'Opposition l'a fait remarquer ce matin et
le président du Conseil du trésor a tenté de la
réfuter tout à l'heure - c'est effectivement la perte de la marge
de manoeuvre du gouvernement. Le président du Conseil du trésor
nous a dit que, de 1970 à 1976, le taux d'augmentation des
dépenses publiques avait largement excédé le taux
d'inflation, ce qui est beaucoup plus considérable, dit-il - et les
chiffres le démontrent, si on veut se limiter à ceux-là -
que le rythme d'augmentation des dépenses, depuis six ans,
comparé à l'inflation. Je cherche vainement la raison rationnelle
qui permet de prétendre que c'est un assainissement des finances
publiques que de limiter à un certain écart au-dessus du taux
d'inflation la croissance des dépenses publiques. J'ai toujours
pensé que la santé financière des programmes de
dépenses, que la place que peuvent prendre, dans l'économie, les
dépenses gouvernementales, ne peut être mesurée
valablement, quant au rythme d'augmentation, qu'en comparaison de la croissance
réelle de l'économie. C'est-à-dire que c'est plutôt,
il me semble, l'écart entre le rythme d'augmentation des dépenses
et le rythme d'augmentation de notre produit intérieur brut qui nous
permettrait d'avoir une meilleure compréhension des progrès ou du
recul que la santé des finances publiques aurait fait. Que le taux
d'inflation soit de 20% ou de 0%, l'écart qui existe entre ce taux
d'inflation et le taux d'augmentation des dépenses publiques n'est pas
aussi pertinent, il me semble, il n'est même pas pertinent, si,
sous-jacent, dans la même période, à la croissance des
dépenses publiques, on peut constater des niveaux d'augmentation de
produit intérieur brut, en dollars constants, qui permettent de
supporter ces dépenses-là.
M. Bérubé: Nettement inférieur.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est dans ce sens-là
que le ministre, il me semble, s'est livré à un raccourci, dans
le discours, pour les fins de sa démonstration, qu'il avait
intérêt à emprunter mais qui ne supporte pas l'analyse.
Nous avons déjà fait valoir, et mes collègues continueront
à le faire - j'invite le ministre à traverser au salon bleu, un
peu plus tard aujourd'hui, pour écouter certains de mes collègues
répondre à son collègue du ministère des Finances,
à l'égard du budget qui nous a été
présenté le 25 mai - que les chiffres qui sont là pour que
tout le monde les regarde démontrent que, de 1970 à 1976, le taux
d'augmentation de dépenses du gouvernement pouvait largement être
supporté par l'accroissement de la richesse véritable des
Québécois pendant cette période, que l'activité
économique en dollars constants - je n'ai pas les chiffres devant moi
mais si le ministre insiste, on ira les chercher - a permis justement des
programmes de dépenses qu'on a décrits comme étant
somptuaires, il y a quelques instants, de la part du ministre. Depuis cinq ou
six ans, il n'est aucunement question de connaître des croissances dans
les niveaux de dépenses, alors que, de la même façon et au
même rythme, étant donné l'affaissement relatif de la
richesse collective, le produit intérieur brut n'a pas connu des
progrès en dollars constants nets de l'inflation de la même
ampleur que ceux qu'on a connus dans les années
précédentes.
À mon sens, c'est beaucoup plus vers ces mesures de comparaison
qu'il faut porter un peu plus d'attention, si on veut véritablement
mesurer quels genres de services on s'est donnés. Est-ce que
véritablement, depuis six ans, comparé à la période
de six ans antérieurs, on a fait des ponctions dans la richesse
collective qu'on
avait les moyens de supporter ou pas? Est-ce que, en attendant, les
écarts fiscaux avec nos voisins se sont agrandis ou pas? On pourrait
avoir une longue discussion sur les écarts. Est-ce que l'augmentation -
et ce n'est pas négligeable - des déficits et de la dette nette
du Québec, dans la même période de six ans, ne correspond
pas à un effort fiscal virtuel, de la part des Québécois,
à venir qui était largement inférieur dans les six
années qui ont précédé l'accession du Parti
québécois au pouvoir?
Dans ce sens-là, je pense que c'est un peu faire injure, de la
part du président du Conseil du trésor, à des
démonstrations qui appellent manifestement encore des
répétitions de notre part, si on veut mettre tous les chiffres
sur la table. Pendant que nous discutions, certains de nos adjoints se sont
effectivement déplacés vers les lieux où on pouvait
retrouver les chiffres que j'évoquais sans les donner
spécifiquement tout à l'heure. On voit que, pour la
période de 1970 à 1976, le produit provincial brut, le produit
intérieur brut du Québec a connu un taux d'augmentation de 110%,
les revenus personnels des Québécois ont connu une augmentation
de 135% en dollars constants dans les deux cas. Les résultats
démontrent une augmentation du produit intérieur brut du
Québec de 27,5% et des revenus personnels des Québécois de
l'ordre de 55% en dollars constants de 1971.
Deuxièmement, pour la période de six ans...
M. Bérubé: Des dépenses publiques? M.
Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui.
M. Bérubé: Pourriez-vous nous donner maintenant le
taux réel, en dollars constants, des dépenses publiques. Ce
serait intéressant d'avoir les chiffres complets.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, sûrement.
M. Bérubé: Ah!
Une voix: Ce n'est pas en dollars constants.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Ce n'est pas en dollars
constants.
M. Bérubé: Ah! Ce n'est pas en dollars
constants?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Une seconde, on y revient. On
va tout vous donner.
M. Bérubé: Ce serait intéressant, cela.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): On a les deux mesures, en dollars
courants et en dollars constants...
M. Bérubé: Oui, ce serait intéressant, M. le
Président, je trouve très intéressant qu'on nous
fournisse...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): ... M. le président du
Conseil du trésor.
M. Bérubé: ... l'augmentation réelle de la
richesse, l'augmentation du pouvoir d'achat des citoyens.
Le Président (M. Blais): S'il vous plaît, M. le
ministre!
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, j'en
appelle à vous.
Le Président (M. Blais): S'il vous plaît, M. le
ministre!
M. Bérubé: Ce serait très
intéressant, M. le Président. J'aimerais bien cela car cela
permettrait à la presse, en même temps qu'à nos concitoyens
qui nous écoutent ou qui nous lisent...
Le Président (M. Blais): M. le ministre, s'il vous
plaît!
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, si vous
me le permettez...
M. Doyon: Qui a la parole, M. le Président?
Le Président (M. Blais): S'il vous plaît, M. le
ministre, je m'excuse, la parole est au député de
Vaudreuil-Soulanges.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Le ministre aura amplement le
temps de revenir sur le sujet.
Le Président (M. Blais): Elle n'est pas au
député de Louis-Hébert non plus.
M. Doyon: Je m'interrogeais.
Le Président (M. Blais): M. le député de
Vaudreuil-Soulanges.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, votre
fermeté est de bon aloi. Pour les dernières six années, de
1976-1977 à 1981-1982, l'augmentation du produit intérieur brut
du Québec, en dollars courants, était de 83,2%; les revenus
personnels, 92,8%, en dollars constants, 10,4 dans le cas du produit
intérieur brut et 9,4 pour les revenus personnels.
Nous en arrivons aux dépenses budgétaires. Mettons les
chiffres pertinents en regard. Je ne veux pas vous induire en
erreur.
M. Bérubé: Ah! Voilà! C'est un sentiment qui
vous honore, vous devriez quitter, vous aussi, le Parti libéral.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je ne veux pas vous induire en
erreur. Alors que le produit intérieur brut augmentait, en dollars
courants, de 110%, il y avait augmentation de 160% dans les dépenses
budgétaires de 1970-1976, écart manifeste, alors que pour les
dernières six années l'augmentation du produit intérieur
brut du Québec est de 83,2 et de 112,8 pour les dépenses
budgétaires.
On voit qu'il y a quand même là des différences
importantes. On voit que malgré une augmentation en dollars courants de
la richesse des Québécois depuis quelques années, au
niveau des dépenses budgétaires qui ne sont financées que
par emprunt, les dépenses budgétaires totales ont connu un rythme
d'augmentation qui n'était pas aussi bien supporté par le rythme
d'enrichissement des Québécois que dans les années
précédentes. C'est là que se trouve la difficulté.
C'est là qu'on est obligé de constater qu'il y a crise
budgétaire. Ce que le ministre invoque, à l'appui de la
présentation du projet de loi no 70, c'est la crise budgétaire.
On se serait attendu que ce soit une crise sociale ou une crise politique qui
amène le gouvernement à présenter un projet de loi qui
aurait des répercussions à caractère éminemment
social et politique, dans la mesure où ce qu'on fait est de modifier,
comme nous l'avons précisé, le régime connu jusqu'ici des
négociations dans le secteur public. (16 h 30)
II me semble que cela tient à une conception de la politique,
à une conception du rôle du gouvernement que ne partagent pas
l'Opposition et le parti gouvernemental. Lorsque le président du Conseil
du trésor accuse le chef de l'Opposition de ne pas s'être
adressé au fond même de la question, je pense que, au contraire,
ce que le parti de l'Opposition fait depuis le début, depuis les
premières velléités exprimées de la part du
gouvernement lorsqu'il a présenté ce projet de loi, c'est de
faire valoir que, crise budgétaire ou non, crise des finances publiques
ou non il n'y a pas, à ce moment-ci, de raison qui porterait le
gouvernement à renier la signature qu'il a opposée et que
d'autres ont apposée de bonne foi, dans leur cas, sur des conventions
collectives. C'est exprimer, je pense, malgré tout, un sens des
responsabilités de la part de l'Opposition d'avoir toujours, dans ses
interventions, fait remarquer à tous les interlocuteurs qu'une fois la
convention collective présentement en cours venue à expiration,
il s'agissait de négocier une nouvelle entente, à partir du 1er
janvier, qui tenait compte des circonstances économiques que nous
connaissons. Ce n'est pas ce que le gouvernement fait. Nous avons dit, nous
avons toujours redit et répété que le gouvernement doit,
d'abord et avant tout, donner le bon exemple du respect de sa signature, de
valable gardien de la crédibilité publique, pour paraphraser un
discours récent du ministre des Finances.
Il me semble que le gouvernement manque à ce devoir premier de
tout gouvernement qui veut prétendre d'abord s'assurer que le
gouvernement du Québec reste fort et ensuite s'assurer que le niveau, le
climat social dont il est un des éléments déterminants
puisse demeurer acceptable.
Le Président (M. Blais): Merci, M. le député
de Vaudreuil-Soulanges.
M. Réjean Doyon
M. Doyon: Lors de l'exposé du ministre, j'ai cru
comprendre qu'il affirmait - si j'ai mal compris, il va sûrement me
corriger - il n'a pas l'habitude d'être gêné...
Le Président (M. Blais): Nous en sommes encore aux
remarques préliminaires.
M. Doyon: Simplement une question en passant, simplement pour
clarifier la situation, avec la permission du ministre, bien sûr. Si j'ai
bien compris le ministre, pour la période qui s'est
échelonnée à partir de 1976 jusqu'à maintenant,
1979-1980, il n'y a pas eu d'augmentation d'effectifs, à toutes fins
utiles. C'est qu'il y a eu un gel, le nombre de fonctionnaires a
été constant ou à peu près.
M. Bérubé: Pour être honnête avec vous,
je devrais... Je dois avoir cette note-là, parce que, d'habitude, je la
traîne. Voilà! La petite courbe fait une espèce de creux
comme ceci en 1977 à la suite du gel quand nous sommes arrivés;
après ça, elle passe par un maximum et elle décroît.
Il s'agit uniquement de la fonction publique. En d'autres termes, on a eu une
décroissance la première année, une remontée les
deux années suivantes et, après ça, on a enclenché
le processus de décroissance des effectifs, ce qui fait qu'en fin de
période, on se retrouve avec les chiffres que je vous ai
mentionnés tantôt.
M. Doyon: Là-dessus, M. le Président, j'aimerais
que le ministre me concilie les chiffres que j'ai ici et qui proviennent du
sixième rapport annuel de la CARR, 1979. Dans ce rapport officiel qui a
été déposé, je pense, au nom du ministre, en tant
que ministre responsable de la CARR, il est indiqué qu'en 1975, il y
avait, dans la totalité, le nombre total des cotisants aussi
bien au RRE, au RRF qu'au RREGOP, il y avait la sûreté, la
Législature, les juges là-dedans, les particuliers qui sont
inexistants...
M. Bérubé: Les chiffres que je vous ai
donnés, ce sont des personnes-année alors que ce que vous avez
à la CARR, ce sont des dossiers, quoi, des personnes inscrites.
M. Doyon: On parle du nombre de participants ici et cela passe de
329 000 en 1975 à 348 600 en 1979.
M. Bérubé: Ce que je vous ai donné, ce sont
des personnes-année. Ce que vous avez là, ce sont des personnes
qui ont des dossiers à la CARR. Ce n'est pas du tout le même
concept.
M. Doyon: Le ministre est en train de nous dire que... Moi, j'ai
un tableau qui s'appelle nombre de participants, parce que je veux bien
comprendre la situation. Nombre de participants, cela veut dire des cotisants,
des gens qui versent des montants. Est-ce qu'il y a des dossiers sans des
personnes derrière ces dossiers? Est-ce qu'il y a des fantômes qui
cotisent quelque part?
Le Président (M. Blais): M. le ministre.
M. Bérubé: II y a des quarts de dossier, des
dixièmes de dossier, des vingtièmes de dossier dont la somme
finit par former un dossier; à ce moment, cela fait beaucoup plus de
participants que l'équivalent en personnes-année. C'est dommage
que le député de Louis-Hébert ne comprenne pas la
différence entre une personne-année et une personne inscrite,
mais enfin, je n'y puis absolument rien.
M. Doyon: Je comprends très bien la différence,
sauf que j'ai un tableau sous les yeux qui s'appelle nombre de participants et
les participants, c'est du monde. Des dossiers, ça ne participe pas. Les
participants, c'est du monde et ça passe de 329 000 en 1975 à 348
600 en 1979. J'ai de la difficulté à concilier cela et le
ministre vient nous dire que ce sont des personnes-année, soit, mais
cela n'explique pas la différence qui existe entre ces affirmations
et...
M. Bérubé: ... des collèges privés
qui s'inscrivent à la CARR, est-ce que cela inclut les organismes non
budgétaires?
M. Doyon: Cela inclut les participants, comme j'ai indiqué
au ministre au tout début de ma question. Cela inclut les participants
au RRE, au RRF, au RREGOP, les cotisants à la sûreté, les
cotisants à la Législature, les juges et coroners qui ont
été, à toutes fins utiles, constants, les maires et
conseillers qui, en toute honnêteté pour le ministre, sont
passés de 337 participants à 500, donc, une différence
là de 263. À part cela, on ne trouve pas la justification de la
différence de 329 000 à 348 000.
M. Bérubé: Alors, je vais vous expliquer la
différence, c'est très facile. Il faut deux députés
libéraux pour faire un député péquiste.
M. Doyon: Au-delà des boutades, M....
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît!
M. Bérubé: Cela fait deux fois plus de
participants, mais cela fait une personne...
M. Blais: ... des confrères en Chambre.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît; M. le
ministre.
M. Bérubé: Non, cela vient tout simplement de ce
que je vous ai donné, ce sont des personnes-année,
c'est-à-dire que vous additionnez les occasionnels et les permanents
pour calculer les équivalents personnes-année. Autrefois, avant
la venue de la députée de L'Acadie et de la ministre de la
Fonction publique, on parlait d'hommes-année, mais aujourd'hui, ce n'est
plus de mise, alors il faut parler de personnes-année. Il s'agit donc
d'équivalents, de personnes-année, à l'emploi du
gouvernement. D'accord? Ce sont les chiffres que je vous ai donnés.
Donc, c'est basé sur les feuilles de paie, c'est donc basé sur
les déboursés. Qu'il y ait des gens, par exemple, qui travaillent
à l'extérieur du gouvernement et qui soient inscrits à la
CARR, c'est indéniable, on l'a vu d'ailleurs, puisque dans le projet de
loi que nous avons adopté, la loi no 68, je vous rappellerai que nous
avons passé des articles spécifiques qui référaient
à des organismes extérieurs qui contribuaient directement
à la CARR. Donc, les chiffres que vous avez sont des chiffres globaux de
la CARR qui n'ont rien à voir avec ceux que je vous ai
donnés.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Est-ce que cela comprend les
contractuels?
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Vaudreuil-Soulanges.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): On a eu droit à un
inventaire, mais est-ce que les contractuels, les gens à contrat,
temporaires et de toute nature, qui entrent et qui sortent...?
M. Bérubé: Non, non, cela n'inclut pas les
contractuels.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Ah bon! c'est
intéressant,
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que cela comprend tous les gens des
régies, qui ne sont pas sur la paie du...
M. Bérubé: ... ministères et organismes.
Alors, cela inclut les organismes.
M. Doyon: Est-ce que le ministre a des chiffres concernant
l'augmentation de la participation des membres des cabinets politiques entre
1976 et 1982? Est-ce que le ministre pourrait nous éclairer
là-dessus? Qu'est-ce que c'était? Étant donné qu'on
accepte les chiffres du ministre à l'effet qu'il y a eu constance dans
le nombre global de fonctionnaires, il y a peut-être des gens qui ne sont
pas considérés, à proprement parler, comme des
fonctionnaires. Je ne sais pas quel est le statut exact là-dedans des
membres des cabinets politiques des ministres etc. Est-ce que le ministre
pourrait nous éclairer là-dessus, si c'était un effet de
sa bonté?
Discussion générale M. Lachance: M. le
Président...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Bellechasse.
M. Lachance: ... sans connaître l'ampleur exacte des
chiffres, il est quand même un élément essentiel dans ce
que vient de toucher le député de Louis-Hébert. Alors
qu'auparavant les membres d'un cabinet étaient automatiquement
versés à la fonction publique lorsque le gouvernement
était défait, le gouvernement du Parti québécois a
adopté une mesure qui fait que, maintenant, ces gens ne sont plus
versés automatiquement, donc, c'est déjà une mesure, je
pense, pour assainir considérablement ce qui existait auparavant.
Mme Lavoie-Roux: ...
M. Lachance: Je pense que la date que vous donnez est
antérieure à cela.
M. Blais: Cela ne change rien.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Johnson.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Est-ce que... De
Vaudreuil-Soulanges, toujours.
Le Président (M. Bordeleau): Pardon, excusez-moi.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):Il a déjà
été question que ce soit Johnson, au commencement de 1978 ou je
ne sais trop, d'après les journaux, mais...
M. Bérubé: Mais vous aviez compris hein, vous vous
êtes cherché un comté anglophone pour pouvoir entrer. Je
comprends.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): c'est particulièrement
député de Vaudreuil-Soulanges.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Vaudreuil-Soulanges, oui.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je me suis douté que le
député de Bellechasse aurait la réponse, quoique le
ministre soit beaucoup plus habilité, en l'occurrence. Est-ce que le
nombre de personnes participant aux différents régimes comprend
les 570 attachés politiques et de presse qui ne comptaient que 104
personnes en 1976?
M. Bérubé: Tous ceux qui ont été
engagés sous l'ancienne loi sont inclus, mais ceux qui sont
engagés sous la nouvelle loi ne sont pas inclus.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Cela représente combien
de personnes, M. le ministre?
M. Bérubé: Je ne sais pas. Ce n'est pas un gros
pourcentage parce que la plupart de nos cabinets ont été
maintenus. Dans la mesure, comme vous le savez, où nous avons
été reconduits au pouvoir, nos cabinets sont restés, ce
qui fait qu'un bon nombre de nos membres des cabinets sont inscrits à la
fonction publique. D'ailleurs, je dois souligner aussi que beaucoup...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II y a des membres du cabinet
du ministre du Revenu qui mettraient cela en doute.
M. Bérubé: Je souligne également que nous
avons souvent pris des fonctionnaires quand il s'agit de dossiers techniques,
par exemple... Je sais qu'aux Terres et Forêts, il m'est arrivé
d'aller chercher directement dans la fonction publique des fonctionnaires pour
les amener au cabinet politique dans la mesure où ils se voyaient
chargés de dossiers plutôt techniques que politiques. De fait,
c'est assez difficile de répondre spécifiquement à votre
question, mais ce n'est pas un gros nombre, c'est le petit nombre.
M. Doyon: Un chiffre que le ministre peut peut-être nous
donner. Est-ce qu'il est exact que ça se situait dans la centaine de
personnes qui étaient dans les cabinets politiques lors de votre
arrivée au pouvoir, pendant que les libéraux étaient au
pouvoir, et que ça se situerait actuellement dans les 570? Est-ce que le
ministre serait en mesure de dire si c'est juste ou non?
M. Bérubé: C'est difficile à dire, mais sur
le total, je peux vous donner la réponse. Les libéraux ont
engagé 100 000 fonctionnaires de plus et nous avons réduit de
5000 le nombre de fonctionnaires.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président...
M. Bérubé: Maintenant, la place qu'occupent les
membres des cabinets là-dedans, c'est difficile, mais dans l'ensemble,
vous en avez engagé 100 000 de plus, puis nous, 5000 de moins.
M. Doyon: M. le Président, ce que je veux savoir du
ministre, c'est très simple. Quand vous avez pris le pouvoir,
étant donné qu'il est en mesure d'affirmer que ces
personnes-là ont été versées dans la fonction
publique, le ministre doit savoir combien il y en a. Cela représentait
combien de personnes? Vous ne le savez pas. Alors, comment pouvez-vous
critiquer une situation que vous ne connaissez pas?
M. Bérubé: Non, c'est parce que je n'ai pas le
total. Quand je constate que vous avez créé 100 000 postes de
fonctionnaires et que nous, on a réduit de 5000 le nombre total de
fonctionnaires depuis que nous sommes là, il peut y en avoir un de plus
ici un de moins là, mais comme résultat net, on en a
créé 5000 de moins, vous, vous en avez créé 100 000
de plus; c'est cela qui est important.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: C'est la première fois que je me trouve
à une commission parlementaire avec le ministre, je le trouve amusant
pendant un bout de temps, et après cela, je trouve, pour utiliser le
langage parlementaire, qu'il charrie un peu. Quand il dit: Vous avez
ajouté 100 000 fonctionnaires et qu'il fait les comparaisons entre 1970
et 1980, pour arrondir cela, il sait fort bien que notre système
d'éducation a connu son développement le plus fort au
début des années soixante-dix, c'est là qu'on a permis aux
étudiants d'aller...
M. Bérubé: Laisse Mme la députée, on
plantera notre clou après.
M. Lachance: On va vous laisser continuer, on est gentil.
Mme Lavoie-Roux: Je ne veux pas de condescendance.
M. Bérubé: Je regrette, le député de
Bellechasse est nouveau et je pense qu'il n'est pas encore habitué aux
droits parlementaires. La vraie bonne façon aurait consisté
à vous laisser mettre les pieds dans les plats comme il faut, puis
après, vous corriger; mais là, malheureusement, le
député de Bellechasse voulait vous empêcher de commettre
l'erreur et c'est la seule erreur qu'il a faite, il aurait dû d'abord
vous laisser faire votre intervention.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît! Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je ne me mettrai pas les pieds dans les plats
comme on le souhaite.
Le Président (M. Bordeleau): Un instant, s'il vous
plaît! Je veux simplement vous faire remarquer qu'effectivement je suis
obligé d'entériner un peu ce que le député de
Bellechasse disait...
Mme Lavoie-Roux: Oui, il a raison.
Le Président (M. Bordeleau): Ce n'était pas une
question de règlement, mais c'était une question, et je vous
donne le droit de parole de toute façon.
Mme Lavoie-Roux: Je parlais du développement scolaire et
particulièrement des cégeps qui ont été
créés en 1968-1969, pour la première fois on
généralisait l'enseignement postsecondaire, et on a maintenant
quoi? 100 000 étudiants au collégial ou même 120 000, vous
pourrez corriger mon chiffre, on est allé le chercher. J'en ai appris
d'autres aux affaires sociales, j'ai un peu oublié ceux-là. La
même chose au niveau universitaire, je pense qu'on retrouve 100 000
fonctionnaires d'abord du côté de l'éducation. Le niveau
d'éducation des Québécois, avant 1970, c'était
septième année en moyenne; maintenant, on éduque nos gens,
tout le monde est content de cela et on ne voudrait pas revenir en
arrière...
M. Lachance: On les instruit. (16 h 45)
Mme Lavoie-Roux: Vous les intruisez, moi, je pensais qu'on les
éduquait aussi un peu.
Du côté des affaires sociales, on a assisté
exactement, au début des années soixante-dix, à la
réorganisation du réseau des affaires sociales, alors que les
institutions qui étaient surtout entre les
mains des groupes religieux sont passées entre les mains des
groupes laïques, les travailleurs ont commencé à
s'organiser. Qu'on ait mis à la disposition des régions
éloignées des équipements, tant en centres d'accueil pour
les jeunes que dans le milieu hospitalier, etc., ceci aussi explique... Quand
vous comparez les 100 000 et que vous dites que cela ne se produit pas en 1980,
ce serait bien décourageant quand on a 400 000 enfants de moins
maintenant, en 1982... Cela s'est échelonné, mais c'est tout
près de 400 000 enfants de moins.
M. Blais: On ne peut les sauvegarder. On ne peut pas renvoyer les
professeurs.
Mme Lavoie-Roux: Non, non, je ne dis pas cela. Ce que je veux
dire, ce n'est pas le raisonnement que je fais, mais cela n'augmente plus et ce
que vous dites...
M. Doyon: II n'y a pas de mérite là.
Mme Lavoie-Roux: ... il n'y a pas de mérite là
puisqu'il y a cette diminution. On réussit à peine à
équilibrer tout cela. Mais je pense que les 100 000 envoyés en
l'air comme cela par le président du Conseil du trésor...
À moins qu'il ne veuille retourner aux années cinquante, on peut
toujours le faire. Mais je pense que lui-même est probablement un de ceux
qui ont profité de la réforme de l'éducation.
M. Bérubé: ... j'ai été
éduqué aux États-Unis.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais avant cela. Avant cela, vous avez
dû aller à l'école à Matane? Vous ne venez pas de
Matane, vous?
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie, est-ce que votre...
M. Bérubé: Boston.
Mme Lavoie-Roux: Cela, c'est quand vous étiez devenu bien
fin, mais avant cela, au début?
Le Président (M. Bordeleau): ... Mme la
députée de L'Acadie? Non.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, quand je parle de
l'augmentation des fonctionnaires, je n'ai jamais fait allusion aux
fonctionnaires au niveau de l'éducation ou au niveau des affaires
sociales. Je pense que personne ne pourrait se rappeler cela. Cela a
été des fonctionnaires dans la fonction publique. L'autre
argument, évidemment... Il faut tenir compte des revenus bien relatifs
que la province avait entre 1970 et 1976 et des difficultés que la
province connaît depuis trois ou quatre ans, mais d'une façon plus
aiguë cette année. Mais nous lancer les 100 000 et les opposer aux
5000, je pense que c'est une façon pour le ministre de dire: On n'aurait
jamais dû faire la réforme de l'éducation et on n'aurait
jamais dû faire la réforme des affaires sociales. C'est ce que
cela veut dire.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Bellechasse. (16 h 45)
M. Lachance: Merci, M. le Président. Je n'ai pas
l'intention de parler à travers mon chapeau puisque j'ai
présentement devant les yeux les chiffres du ministère de
l'Éducation. Deuxièmement, je pense avoir une expérience
pratique dans le domaine de l'éducation pour avoir été
directeur d'école de 1974 à 1981 et avoir été
enseignant de 1970 à 1974. C'est un milieu que je connais assez bien. Je
pourrais même vous dire, Mme la députée de L'Acadie, cela
vous intéressera sûrement, que j'ai été
président du conseil d'administration du CLSC Lac-Etchemin, un de ceux
qui fonctionnent bien...
Mme Lavoie-Roux: Si on avait su tout cela hier soir.
M. Lachance: ... durant un an et demi. Ce n'est pas l'effet du
hasard...
Une voix: ...
Mme Lavoie-Roux: C'est lui qui est le rapporteur.
M. Lachance: J'ai ici des chiffres qui illustrent que...
Évidemment, on ne peut pas dire qu'on est contre ce qui s'est fait, mais
de là à nous mettre comme responsabilité et sur le dos
tous les malheurs qui nous confrontent présentement à cause de la
situation économique, il y a toute une marge. C'est dans l'optique de
l'héritage que nous avons.
En 1976, si on regarde le ratio maître-élèves, il
était à 1 sur 19,45, pour 1975-1976. Avec l'entrée en
vigueur des nouvelles dispositions des conventions collectives des enseignants,
je parle du niveau primaire et secondaire... Cela est arrivé, je le
souligne, à la veille des élections de 1976; je le mets en
opposition parce que souvent on nous reproche d'avoir négocié de
grandes largesses à la veille du référendum de 1980. Je
reviens en 1976. Lors des négociations, le ratio a chuté de 1 sur
19,45 à 1 sur 17,73. Cela a eu pour effet d'injecter environ 3700
nouveaux enseignants dans le système scolaire. Bien sûr, cela a
créé des emplois; bien sûr, c'est intéressant. Cela
ne tient pas compte, Mme la députée de L'Acadie, des nombreuses
personnes qui ont été engagées en même temps au
niveau du personnel de
soutien, au niveau des spécialistes, les psychologues, les
conseillers en information, les conseillers en orientation et tout le bataclan,
mais il...
Mme Lavoie-Roux: ... vous n'en voulez plus dans les écoles
de cela? Vous n'en voulez plus.
M. Lachance: ... ce n'est pas cela que j'ai dit, Mme la
députée de L'Acadie. C'est bien intéressant, mais cela
implique des coûts.
Mme Lavoie-Roux: Vous revenez à l'ère de
Duplessis.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît!
Une voix: Avant cela.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Bellechasse, c'est à vous la parole.
M. Lachance: Mme la députée de L'Acadie, vous me
prêtez des intentions que je n'ai absolument pas.
M. Blais: Dans des cas comme cela, Duplessis disait: "Toi,
tais-toi".
M. Lachance: Non, je ne vous dirai pas comme disait Duplessis:
"Toi, tais-toi". En tout cas, laissez-moi terminer. Le ratio, donc, est
passé de 19,45 à 17,73, et cela a eu pour effet d'injecter, comme
je le disais tantôt, 3700 nouveaux enseignants dans le système,
alors que si on avait maintenu le même ratio, en 1976-1977, que lors de
la convention antérieure, cela aurait signifié une baisse, une
mise à pied de 2900 enseignants. Au lieu d'en renvoyer chez eux 2900, on
en a engagé 3700, parce qu'il y a eu une diminution de clientèle
de 56 300 élèves, lors de l'entrée en vigueur de la
nouvelle convention collective.
Mme Lavoie-Roux: 300 000 de moins aujourd'hui.
M. Lachance: Cela veut dire que, finalement, cette convention
collective, en 1976-1977, a eu pour effet d'avoir 6600 enseignants de plus que
ce qui existait auparavant. Tant mieux pour les élèves, tant
mieux pour tout le monde. Mais cela implique des coûts. Si je regarde
maintenant ce que vous montrait tantôt de ministre, le tableau des
ratios, lors de la dernière année de la convention 1975-1976, on
avait un ratio de 19,6; à la convention de 1979-1980, on était
rendu à 16,8, et aujourd'hui, on parle de 16,4. Depuis la convention qui
a été signée sous le régime péquiste, on
constate que le ratio s'est à peu près maintenu, donc, on ne peut
pas nous imputer tous les malheurs économiques qui découlent de
cette situation. Et encore une fois, j'insiste pour dire qu'on est heureux
d'avoir pu contribuer à la qualité de l'enseignement au
Québec, mais il y a des coûts qu'il faut payer et, aujourd'hui, on
est pris avec cela. Il faut payer la note, et c'est très cher.
Le Président (M. Bordeleau): Vous avez terminé, M.
le député de Bellechasse? J'avais reconnu d'abord le
député de Sainte-Anne.
M. Polak: Je suis avant vous, là. M. Grégoire:
Question de règlement.
Le Président (M. Bordeleau): On est aux remarques
préliminaires. Je suis prêt à passer à l'article 1,
mais les membres ont le droit de s'exprimer au début du projet de loi
avant de passer à l'article 1.
M. le député de Frontenac.
M. Grégoire: S'il n'y a eu aucune motion
préliminaire, tout le monde a pu émettre...
Mme Lavoie-Roux: Non, non. On n'a pas eu le droit
d'émettre...
M. Grégoire: Tout cela peut se faire sur l'article 1 quand
même. À ce moment, on régularisera la situation. Vous
pourrez faire vos interventions sur l'article 1.
De quoi parlons-nous?
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Frontenac, je vais vous rappeler un article de notre règlement qui dit
qu'au début de l'étude d'un projet de loi, avant que la
commission entreprenne l'étude article par article d'un projet de loi
dont la deuxième lecture a été adoptée en vertu de
l'article 119, chacun de ses membres peut s'exprimer sur le principe et la
teneur générale du projet de loi. Et nous en sommes là, ce
qui veut dire qu'il y a un droit de parole de vingt minutes pour chacun des
membres de la commission et des intervenants également.
M. le député de Sainte-Anne.
M. Polak: M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Dans les remarques
préliminaires, votre droit de parole...
M. Polak: Oui, je n'étais pas ici. Je m'excuse,
j'étais à une autre commission. Je voudrais poser une question au
ministre. On cherche, avec ce projet de loi, à couvrir un petit trou de
700 000 000 $ mais, apparemment, on a établi une sorte de
déductible, comme on dit dans les
assurances, de 3 000 000 000 $. On ne parle pas de cela, c'est correct.
On accepte 3 000 000 000 $. Mais juste au-dessus de 3 000 000 000 $, si on
avait excédé 3 000 000 000 $ de 100 000 000 $, est-ce que cela
aurait affecté immédiatement la cote financière de la
province de Québec? Pourquoi a-t-on établi ce déductible
à 3 000 000 000 $? Pourquoi ce chiffre magique de 3? Pourquoi pas 2,8,
2,9, 3,1? On coupe de 100 000 000 $. Pour vous, vous allez vite avec les
chiffres, pour quelle raison?
M. Bérubé: II n'y a pas de règle absolue
mais un certain nombre de guides. D'abord, rappelons que, l'année
dernière, si on totalise le financement à long terme des
commissions scolaires, municipalités, organismes de toutes sortes qui
n'a pu se faire, on s'est retrouvé en fin d'année avec presque
700 000 000 $ d'emprunts non effectués parce que le marché des
emprunts à long terme s'est rétréci à un point tel
que c'est impossible de le financer. Donc, déjà l'année
dernière, le financement à long terme a été
extrêmement difficile sur la base de nos propres besoins financiers de 2
000 000 000 $. Donc, il faut bien se rendre compte que des emprunts comme ceux
que nous avons faits l'année dernière ont été tels
que si on essaie d'ajouter à cela ceux des autres organismes publics, on
s'aperçoit que ces derniers n'ont pas été capables d'aller
sur le marché. Donc il y a un problème de disponibilité de
capitaux.
Ce problème évidemment est amplifié du fait qu'aux
États-Unis, le déficit a des chances de dépasser le 100
000 000 000 $ et que le déficit canadien qui doit être autour de
10 000 000 000 $ est maintenant à 16 000 000 000 $ et on le projette
possiblement à 20 000 000 000 $.
Évidemment, vous me direz que les gouvernements nationaux ont
l'avantage de pouvoir imprimer de l'argent, et de fait, c'est ce que fait le
gouvernement fédéral, il imprime de l'argent, d'ailleurs vous
connaissez le nouveau dollar. D'ailleurs, moi, ce matin, j'en avais un. Est-ce
qu'on a encore l'exemplaire...
Mme Lavoie-Roux: J'aimerais avoir toute la collection, en
auriez-vous un à me donner?
M. Bérubé: Je vais vous en fournir un pour la
collection, mais je vais en avoir un autre aussi qui va vous intéresser
tantôt. Donc, évidemment...
Mme Lavoie-Roux: ...
M. Bérubé: ... l'inconvénient d'imprimer
trop d'argent, c'est l'effondrement des valeurs des monnaies et de fait...
M. Lachance: C'est le fait.
M. Bérubé: ... c'est le fait, oui. De toute
façon, je vais vous le montrer tout à l'heure, il est
intéressant d'ailleurs.
Une voix: II ne vaut pas cher.
M. Bérubé: Non, il ne vaut pas cher.
Mme Lavoie-Roux: ... votre banque.
M. Bérubé: Alors, voyez-vous, celui-là
s'appelait le PQ. Le PQ valait 0,85 $ en 1970.
Mme Lavoie-Roux: ...
M. Doyon: En dollar américain ou en dollar canadien?
M. Bérubé: Ce n'était rien. Cela s'appelait
le prix de la séparation...
M. Doyon: En dollar américain ou en dollar canadien?
M. Bérubé: ... alors, maintenant, on a le prix du
fédéralisme à 0,78 $, cela s'appelle le PET. Alors, ce
sont deux monnaies et elles ont exactement la même valeur d'après
ce qu'on peut voir.
Mme Lavoie-Roux: ... élection. J'aimerais les avoir comme
pièces de collection.
M. Bérubé: Le PQ est un peu plus fort par
contre.
Le Président (M. Bordeleau): Une question de
règlement?
M. Polak: M. le Président, je veux attirer l'attention au
sujet d'un touriste américain ici, il commence à avoir
peur...
M. Bérubé: Je vais vous offrir par contre un PET
avec plaisir.
M. Grégoire: Si vous en voulez une dans votre collection,
il y a la piastre à
Caouette autrefois qui était à 0,85 $ elle aussi.
Mme Lavoie-Roux: Je ne me souviens pas de la piastre à
Caouette.
Le Président (M. Bordeleau): Vous en avez des exemplaires
encore, M. le député de Frontenac?
M. Grégoire: Ah oui. On ne veut pas les perdre.
Le Président (M. Bordeleau): Bon, alors
cela va, M. le député de Sainte-Anne, c'est vous qui aviez
la parole.
M. Polak: Non, non, je commence mon débat. Est-ce que le
ministre a terminé? J'ai une autre question pour lui. M. le ministre
après votre... Ah, bon, il n'a pas fini.
Le Président (M. Bordeleau): C'est à vous que j'ai
donné la parole.
M. Bérubé: Donc, pour en revenir...
Le Président (M. Bordeleau): Non, M. le ministre,
d'accord.
M. Bérubé: ... à la question plus
précisément, le deuxième paramètre à part la
disponibilité des capitaux, c'est évidemment l'équilibre
qui doit exister entre les immobilisations publiques et les emprunts publics.
Si on regarde le document qui a été déposé par le
ministre des Finances lors du sommet, on s'aperçoit qu'effectivement
lorsqu'on fait le ratio, on divise les emprunts par les investissements. On
devrait avoir au moins 1. On constate en 1976, année libérale
et...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): S'il vous
plaît!
M. Bérubé: ... non, inférieur à 1, si
vous voulez des emprunts inférieurs aux investissements.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Vous dites: Au moins 1. M. le
ministre...
M. Bérubé: Ah, au plus 1, vous avez raison. Je
m'excuse, M. le député de Vaudreuil-Soulanges, vous avez
parfaitement raison - c'est faux - au plus 1. Je le divisais dans l'autre sens.
Donc, il faut au plus 1. Alors, de fait en 1976, le ratio est de 1,05, bon,
cela peut aller, en 1977 il est de 0,75, en 1978 de 0,72, en 1979 de 0,69, en
1980 il remonte à 1,06, en 1981 à 1,02, oui, c'est aussi grave
que sous la fin du régime libéral. Ce que nous faisons, c'est que
nous essayons de le maintenir en équilibre et même
éventuellement de le baisser en laissant l'inflation gruger dans ce
ratio.
Donc, c'est l'équilibre entre les emprunts et les investissements
qui est le deuxième paramètre à surveiller. Il est en
équilibre à l'heure actuelle mais nous n'avons aucune marge
à cet égard. Donc, premier facteur, disponibilité sur les
marchés financiers. Je vous ai expliqué à quel point c'est
difficile présentement. Deuxième facteur, l'équilibre
entre investissements publics et emprunts publics, cet équilibre est
maintenu mais il est fragile puisque nous sommes à la limite
supérieure. Le troisième argument, évidemment, c'est en
général le ratio des besoins financiers nets par rapport aux
revenus de l'État. À cet égard, j'ai eu l'occasion,
à l'Assemblée nationale déjà, de faire une
comparaison avec d'autres provinces. On s'aperçoit que le Québec
par rapport aux Maritimes, par exemple, cette année, n'est pas en
mauvaise posture, dans ce sens que nos emprunts représentent environ
10%...
M. Doyon: Cela nous rassure.
Mme Lavoie-Roux: ... île-du-Prince-Édouard...
M. Bérubé: Non, non, nos emprunts
représentent environ 10% de nos revenus, alors que lorsqu'on regarde le
Nouveau-Brunswick, l'Île-du-Prince-Édouard, le
Manitoba, c'est plutôt autour de 25%.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Pour cette année, pas
depuis cinq ans.
M. Bérubé: Je n'ai pas dit depuis cinq ans, mais
j'ai...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Bien, c'est là
l'histoire, c'est là tout le problème. (17 heures)
M. Bérubé: Non, la question du député
de Sainte-Anne est précisément: Est-ce qu'à l'heure
actuelle, la situation est catastrophique? Quand je la compare avec les autres
provinces, en termes de l'importance de nos emprunts par rapport à nos
revenus...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Pour un an.
M. Bérubé: ... c'est effectivement
élevé. Je ne dis pas que ce n'est pas élevé, c'est
élevé, mais on se rend compte qu'il y a indéniablement
d'autres gouvernements en plus mauvaise posture que nous. Cependant, le vrai
critère qui finalement détermine le volume des emprunts à
l'heure actuelle, c'est l'équilibre à maintenir entre emprunts et
investissements qu'il faut maintenir à un rapport de un.
M. Polak: M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: C'est pour revenir aux éléments
mentionnés par le ministre. D'abord, l'élément de
disponibilité. Il y a toujours de l'argent disponible, ça
dépend du prix qu'on veut payer pour obtenir l'argent. Alors, quand vous
parlez du facteur de la disponibilité, est-ce qu'il faut voir ça
un peu sur le plan psychologique? C'est que j'ai une certaine cote, j'obtiens
certains taux et je
ne veux pas perdre ma cote, parce que je peux devenir un État de
troisième rang ou ce qu'on appelle une république de bananes.
Évidemment, elles aussi font des emprunts, elles cherchent d'autres
marchés, mais elles obtiennent de l'argent. Que voulez-vous dire par le
terme "disponibilité"? Est-ce qu'il faut comprendre ça comme une
disponibilité dans la haute classe, parce qu'on est tout de même
vu comme étant un État responsable, et vous avez peur qu'il tombe
dans une classe à laquelle votre gouvernement appartient
peut-être, ça veut dire une classe un peu inférieure au
point de vue de la responsabilité financière? Ou est-ce que
l'argent n'est simplement pas disponible?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: L'argent n'est tout simplement pas
disponible.
M. Polak: Là, je ne comprends pas. Comment se fait-il que
le Ghâna a fait un emprunt de quelques centaines de millions de dollars?
Il l'a obtenu, sauf qu'il a été obligé de payer 2% de plus
que le taux payé par un autre pays beaucoup plus riche. Il y a des pays
arabes qui sont bien prêts à accorder des emprunts, mais ça
dépend du taux qu'on est prêt à payer.
Mme Lavoie-Roux: Pour que les gens continuent à vous
prêter, vous avez des difficultés. C'est ça?
M. Bérubé: C'est ça.
Mme Lavoie-Roux: Les gens ne vous prêteraient plus si vous
n'équilibriez pas...
M. Bérubé: C'est-à-dire que, pour
maintenir...
Mme Lavoie-Roux: ... vos dépenses publiques avec les
revenus.
M. Bérubé: Pour maintenir un niveau d'emprunt
à un niveau où les épargnants considèrent que le
placement est sécuritaire, il faut maintenir un ensemble de cotes, de
critères qui sont le rapport entre les emprunts et les revenus...
Mme Lavoie-Roux: C'est ça.
M. Bérubé: ... qui sont l'équilibre entre
les emprunts et les investissements...
Mme Lavoie-Roux: Les investissements publics.
M. Bérubé: ... qui sont la dette publique par
rapport au produit intérieur brut. C'est l'ensemble de ces
critères que vous devez respecter.
Mme Lavoie-Roux: Et là, vous êtes rendus au bout de
la corde!
M. Bérubé: C'est-à-dire que, oui,
effectivement, nous reconnaissons que nous ne devrions pas emprunter plus, sous
peine de mettre en cause la sécurité financière de
l'État.
Mme Lavoie-Roux: C'est-à-dire qu'on refuserait de vous
prêter au même taux que celui auquel on vous prête
présentement.
M. Bérubé: Comme le dit le député de
Sainte-Anne, le problème d'un déséquilibre financier qui
affecterait la cote de l'État, ce serait, d'une part, la très
grande difficulté à obtenir les capitaux et, advenant le cas
où on obtiendrait les capitaux en question, possiblement, d'autre part,
des coûts beaucoup plus élevés. Mais il n'y a pas que le
gouvernement qui soit en cause, il y a également toutes les
municipalités, parce que la cote des municipalités...
Mme Lavoie-Roux: Oui, municipalités,
sociétés d'État, etc.
M. Bérubé: ... des organismes publics et
d'Hydro-Québec est accrochée à celle du gouvernement.
Alors, l'impact économique sur l'ensemble des organismes publics,
advenant une baisse de confiance des épargnants envers la
collectivité québécoise, serait considérable; et
c'est le genre de chose que vous ne voulez pas faire. D'où l'objectif de
maintenir l'équilibre entre les emprunts et les investissements autour
de un, comme d'ailleurs cela était en 1976, sous l'administration
libérale, à 1,05.
M. Polak: Maintenant, M. le Président, pour revenir...
Le Président (M. Bordeleau): Excusez-moi, M. le
député de Sainte-Anne, mais M. le député de
Louis-Hébert me demande la parole.
M. Doyon: Juste une très brève question.
Le Président (M. Bordeleau): Avant de vous l'accorder, M.
le député de Louis-Hébert, je voudrais vous mentionner que
vous n'êtes pas membre; j'ai vérifié et vous n'êtes
pas membre de la commission.
M. Doyon: Ah, mon Dieu, quelle erreur!
Le Président (M. Bordeleau): Là, remarquez
que...
Mme Lavoie-Roux: Pourrait-on le
mettre comme intervenant, M. le Président?
M. Bérubé: Non, pas vraiment, M. le
Président.
Le Président (M. Bordeleau): Cela dépend des
membres de la commission.
M. Bérubé: Cette fois-ci, je ne jouerai pas le jeu;
ça fait trois fois que je me fais rouler avec ça.
Mme Lavoie-Roux: Mais hier, j'ai bien voulu, moi.
M. Grégoire: M. le Président, je pense que nous
avons accepté...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Frontenac, sur...
M. Grégoire: Sur la question de règlement que vous
demandez d'inscrire. Je pense qu'on a accepté quand Mme la
député de L'Acadie est venue, mais ce qui se produit, c'est que,
comme le dit le règlement, chacun peut s'exprimer pendant 20 minutes.
L'Opposition compte 43 membres à l'Assemblée nationale et elle a
le droit d'avoir 8 représentants ici. Si, à tour de rôle,
les 43 viennent remplacer les 8 qui sont déjà sur la liste,
ça veut dire qu'on aura 43 interventions de 20 minutes. Et s'il se
produit ce qu'il s'est produit sur la loi 37, alors qu'on n'a même pas eu
le temps d'atteindre l'article 1, après huit ou neuf jours de
séance de la commission, on voit dans quel piège nous nous
trouverons. Qu'il y ait huit interventions de 20 minutes, c'est parfait, mais
s'ils viennent se faire remplacer à tour de rôle par les autres,
c'est ce qu'on appelle un "filibuster" et on voudrait l'éviter.
Mme Lavoie-Roux: II y en a à peine deux qui ont eu une
intervention de 20 minutes.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le
député de Frontenac. Effectivement, cela peut être
très long, si vous acceptez.
Mme Lavoie-Roux: II n'y en aura pas 43. Je peux vous garantir
cela, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Mais comme je n'ai pas le
consentement...
M. Doyon: Simplement pour éclairer ma lanterne, et je suis
sûr que le ministre va accepter cela parce que...
Le Président (M. Bordeleau): Je voudrais d'abord que les
membres ne s'opposent pas.
M. Doyon: C'est simplement pour éclairer ma lanterne.
M. Grégoire: Si c'est simplement une question du
député de Louis-Hébert, on va faire cela.
Le Président (M. Bordeleau): Pour une question
précise, disons que...
M. Doyon: Oui, une question en passant. Dans les secteurs que le
ministre a énumérés comme affectant la cote de
crédit de la province, je reconnais que ces secteurs sont réels.
Je ne suis pas un expert, mais je reconnais qu'ils sont réels. N'y
a-t-il pas un autre facteur qu'il a oublié? Je lui demande s'il n'y a
pas le facteur qualité des administrateurs comme dans toute compagnie.
Quand une compagnie, une corporation quelconque va chercher des fonds, elle
nous fait valoir, dans le prospectus, le passé du président, le
passé du vice-président, leur expérience. En tant que
prêteurs, je pense que les gens qui ont de l'argent à disposer
évaluent un des éléments importants dont ils doivent tenir
compte et c'est la qualité des administrateurs qui leur demandent de
leur prêter de l'argent. N'y a-t-il pas là un sérieux
problème pour le gouvernement actuel qui n'est pas perçu comme
étant un bon administrateur? Cela n'est-il pas un facteur? En tout cas,
sans poser de question de jugement, le ministre ne reconnaîtra-t-il pas
que c'est là un facteur qu'il a omis? Sans vouloir l'accuser
d'être un bon ou un mauvais administrateur, cela n'est-il pas un facteur
qui peut jouer?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Je pense, M. le Président, que le
député de Louis-Hébert a certainement raison. C'est, somme
toute, un facteur qui n'est pas quantifié, mais un facteur, et cela
explique largement pourquoi le Québec a une bonne cote. C'est
relié à sa bonne administration.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: M. le Président, le ministre vient de dire, en
réponse à une de mes questions, que l'idée d'avoir ce que
j'appelle ce "déductible" de 3 000 000 000 $, c'est pour retenir la
cote. Je comprends son raisonnement. Supposons qu'en cours de route - prenons
l'exercice 1982-1983 - cela va mal dans la province de Québec, que les
revenus qui vont entrer vont être moindres que ceux anticipés, que
les dépenses vont être plus élevées que celles
prévues, qu'il y a un autre trou qui va se former de 500 000 000 $, par
le fait même, en respectant ce principe de
retenir la cote et vu qu'on est arrivé au bout de la ligne,
est-ce que le gouvernement sera obligé, à ce moment-là, de
chercher ces fonds additionnels chez les contribuables par l'imposition
d'autres taxes directes ou indirectes?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Non, M. le Président. D'ailleurs,
je pense que votre question, à un moment donné, avait
porté sur le fait que, possiblement, 2 000 000 000 $ n'étaient
pas un absolu pour ce qui touche les emprunts du gouvernement; là-dessus
je suis absolument d'accord avec vous. Je ne veux pas dire que le
déficit du gouvernement doit être de 3 010 000 692,22 $. Il y a
une limite. Ce n'est pas comme cela. C'est bien sûr qu'il y a une marge.
C'est bien sûr que, dans la mesure où, à la suite des
accords fiscaux en particulier, il y a un effondrement des équilibres
financiers de toutes les provinces -les provinces maritimes, le Manitoba en
particulier, et même l'Ontario, on l'a vu avec les paiements de transfert
dans les secteurs de la santé et de l'éducation - dans la mesure
où toutes les provinces canadiennes ont pris la claque par suite de la
décision fédérale de pelleter son déficit dans
celui des provinces, les prêteurs sont peut-être plus conciliants.
Toutefois, dans la mesure où les projections économiques ne sont
pas très rassurantes pour l'avenir, il ne faut pas hypothéquer
cette marge-là. Il faut se garder une marge de manoeuvre advenant un
coup dur, comme cela est possible. C'est pour cette raison qu'il ne faut pas
non plus aller à cette limite absolue des emprunts telle que, s'il y
avait un pépin, on n'ait plus aucune marge de manoeuvre.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: Maintenant, quel est le chiffre total de cette marge de
manoeuvre? Sans doute devez-vous avoir regardé cela pour retenir une
certaine marge de manoeuvre. De quel montant approximatif parle-t-on?
M. Bérubé: C'est subjectif. C'est de l'ordre de 100
000 000 $. C'est de cet ordre-là. Il ne s'agit pas de milliards.
M. Polak: Ce peut être 500 000 000 $ ou 750 000 000 $.
M. Bérubé: Non, cela nous apparaît nettement
trop élevé.
M. Polak: On peut donc dire que, certainement, comme il s'agit
d'une somme de 100 000 000 $, sans renoncer au principe de retenir la cote, il
n'y aurait pas de problème.
M. Bérubé: Ce n'est pas zéro. Ce n'est pas
500. C'est quelque part entre les deux. Là, je laisse cela à
l'appréciation du député de Sainte-Anne, qui connaît
très bien les milieux financiers, puisqu'il se vante d'être
régulièrement plongé dans ces milieux, de
déterminer lui-même le niveau.
M. Polak: La raison pour laquelle je pose la question, M. le
ministre, c'est que je pense à l'intérêt de la population,
par exemple, de ceux qui sont touchés par ce projet de loi et qui se
posent la question. Pendant l'exercice financier 1982-1983, est-ce qu'on peut
nous arriver encore avec d'autres pilules? D'abord, vous avez dit une marge de
100 000 000 $. Maintenant vous dites que ce n'est pas zéro, que c'est
quelque part entre zéro et 500 000 000 $. J'aimerais avoir un chiffre un
peu plus précis.
M. Bérubé: Je laisse le soin au
député de Sainte-Anne de faire sa propre...
M. Polak: Ce n'est pas à moi. Vous êtes le
président du Conseil du trésor et vous devez sans doute avoir
beaucoup plus de détails sur les chiffres que moi.
M. Bérubé: Non, M. le Président. Je suis
responsable des dépenses.
M. Polak: J'aimerais bien être capable de répondre
à mes commettants si au cours de l'exercice financier on trouve un autre
trou, parce que les dépenses vont augmenter et les revenus vont
être moindres que prévus, est-ce que, automatiquement, le
gouvernement est obligé de revenir chercher cela ou s'il reste une marge
de manoeuvre? Sur le plan politique, vous donnez une bonne réponse, vous
dites: On s'est gardé une marge de manoeuvre, mais j'ai demandé
quels sont les chiffres, et votre réponse est: Je laisse cela au
député de Sainte-Anne. S'il vous plaît, M. le ministre, je
demande une réponse un peu plus objective et ministérielle, parce
que, quant à moi, la réponse est zéro pour la marge de
manoeuvre. C'est probablement la vraie réponse, mais j'aimerais savoir
et le public a le droit de savoir ce que vous avez prévu comme marge de
manoeuvre sans toucher ce fameux principe de retenir le...
M. Bérubé: Je suis assez d'accord avec vous que la
marge de manoeuvre est plutôt minime, c'est la raison pour laquelle on
présente la loi 70.
Mme Lavoie-Roux: Oui, M. le Président, est-ce que...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, mais à moins que
le député de Sainte-Anne ait terminé.
M. Polak: J'ai juste une question additionnelle. Quand on regarde
les frais de service de la dette de l'État, peut-être suis-je un
peu conservateur, sur le plan financier, mais je me demande si on n'est jamais
capable...
M. Bérubé: M. le député de
Sainte-Anne, non, vous n'êtes pas un peu conservateur, vous êtes
très conservateur.
M. Polak: Je vous remercie, parce que de nos jours, c'est un
compliment. Sachant quel est le montant que l'État est obligé de
payer au service de la dette par année, est-ce que vous prévoyez
qu'on sera capable un jour de sortir du trou ou si on se touve dans une
situation où tout ce qu'on peut faire, au mieux, c'est de payer les
intérêts? Et même cela, ce n'est pas certain.
M. Bérubé: Non.
M. Polak: Est-ce que cela ne devient pas un peu comme cette
fameuse formule de Réal Caouette et le pont - je ne sais pas quel pont,
Jacques-Cartier, je pense - alors qu'il disait qu'on ne pourrait jamais
rembourser le capital, parce qu'on est condamné à payer seulement
les intérêts.
M. Bérubé: Non. Le service de la dette croît
à l'heure actuelle, indéniablement, plus rapidement que
l'inflation en bonne partie, non pas entièrement, parce qu'on refinance
de la vieille dette à des taux d'intérêt supérieurs.
Donc, il y a un accroissement du fardeau à cet égard auquel
s'ajoute le financement d'un niveau de déficit qui est supérieur
à ce qui existait antérieurement et, par conséquent, nous
oblige également à augmenter nos dépenses à ce
chapitre-là. Toutefois, je souligne que notre déficit est
bloqué à 3 000 000 000 $ depuis trois ans. C'est simple, quand on
dit que le déficit est trop élevé, il y a deux
façons de le régler, c'est de couper les dépenses ou
augmenter les revenus, alors taxer ou couper les services. Ce que nous faisons
présentement, c'est essentiellement ceci: nous bloquons la croissance de
nos dépenses, bloquons le niveau de déficit à 3 000 000
0000 $ et faisons en sorte que l'inflation graduellement vient gruger... En
d'autres termes, autrefois, on dit que la livre de beurre - je n'ose même
plus citer d'ailleurs le prix d'une livre de beurre aujourd'hui, étant
donné la vitesse avec laquelle le prix monte - coûtait dix cents.
C'est toujours la même livre de beurre et, aujourd'hui, elle se vend
peut-être 2 $ 2,50 $. La livre est toujours là, c'est toujours la
même, sauf que le montant qui y est attaché varie dans le temps.
Alors, si on garde le même 3 000 000 000 $ et qu'on laisse l'inflation
faire croître les revenus de l'ensemble de la société,
tranquillement le 3 000 000 000 $ baisse. Un bel exemple de cela, et
c'était amusant d'ailleurs dans l'intervention du chef du Parti
libéral à Radio-Québec il y a deux semaines, on faisait
dire au chef du Parti libéral que la dette par famille était
d'environ 1000 $ au début du régime de M. Bourassa, ensuite,
à la fin du régime, elle était d'environ 3000 $ et, sous
le régime péquiste, elle monte à 11 000 $. Deux
périodes de six ans. C'était amusant, parce que si on soustrait
les contributions au régime de retraite qui n'étaient pas faites
à l'époque du régime Bourassa, donc, on soustrait cela
parce que nous, on le met dans notre déficit, alors que eux, ils ne le
mettaient pas, mais il était là, quand même. Quand on fait
des comparaisons sur une base comparable, on s'aperçoit que, sous le
régime Bourassa, la dette a presque triplé. De fait, le montant a
l'air plus petit, mais c'est en partie à cause de l'inflation. Donc,
c'est vrai que le déficit a augmenté moins vite, à
l'époque, sous le régime libéral que sous notre
régime, mais pas beaucoup moins vite. Ce n'est pas sensible. J'ai
déjà fait le calcul, c'est minime. Il me semble que c'est 1% de
différence dans les taux de croissance, si on fait la moyenne. (17 h
15)
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que cela va, M. le
député de Sainte-Anne?
M. Polak: Dans vos prévisions, au point de vue des taux
d'intérêt, avez-vous prévu une baisse des taux, les taux
vont-ils demeurer stationnaires pour la prochaine année ou vont-ils
augmenter? On a eu une discussion avec M. Saulnier quand la RIO parlait de
prévisions. Quelques prévisions, sans doute, vous ont
influencé au point de vue du service de la dette, c'est un facteur
important.
M. Bérubé: Je n'ai pas ici les projections sur
trois ans. On prévoit une baisse des taux d'intérêt, mais
je pense que, dans trois ans, de mémoire, on prévoit une
inflation de 7% et des taux d'intérêt de 12%, si je ne me trompe
pas.
M. le député de Jean-Talon, nos salutations.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: Je veux juste regarder ma feuille. Maintenant, M. le
Président, j'ai une autre question pour le ministre. Dans vos
prévisions de revenus, en préparant le budget, si on avait la
même expérience que celle des deux années
précédentes, combien serait la différence sur le budget
prévu? Si
la même ligne de conduite était suivie ou si le même
phénomène continue de se révéler, combien y
aura-t-il de millions de dollars de moins, au point de vue des recettes?
M. Bérubé: ... de vous donner cette réponse.
Par exemple, entre la préparation du budget d'il y a une année et
là où nous sommes, si je ne m'abuse, nous avions prévu une
croissance de 1% qu'on a ensuite révisée à zéro et,
finalement, qu'on a révisée à la baisse, à moins 1%
de croissance réelle de l'économie.
Il semble, en ce moment, que les organismes économiques qui font
de la prévision dans ce domaine - je pense au Conference Board en
particulier maintiennent ces prévisions pour le Québec d'une
réduction à peu près de 1% du produit national brut. Donc,
à l'heure actuelle, il n'y a pas d'indication selon laquelle il faudrait
réviser à la baisse à la suite du prolongement de la
récession au-delà de la période prévue. Mais cela
suppose cependant une stabilisation des taux d'intérêt à
l'automne, et pas de remontée, et cela suppose que l'économie
commence à se replacer vers la fin de l'année.
Maintenant, à nouveau, je n'ai aucune boule de cristal et nous
n'avons personne avec des boules de cristal qui nous permettraient de dire ce
que sera l'économie dans un an ou deux. Cela dépend largement,
d'une part - reconnaissons-le - des décisions américaines. Tant
et aussi longtemps que le gouvernement américain maintiendra un
déficit aussi considérable, un déséquilibre aussi
important entre ses revenus et ses dépenses, en maintenant ses
dépenses, au niveau de la défense, aussi élevées
qu'elles le sont présentement, les besoins en financement seront
à ce point élevés sur le marché qu'on ne
prévoit pas de baisse des taux d'intérêts.
Comme vous le savez, il y a présentement querelle entre le
président de la Federal Reserve Bank et le président Reagan quant
aux taux d'intérêt qui devraient être pratiqués. La
position de la Federal Reserve Bank, aux États-Unis, est que, tant et
aussi longtemps que l'on maintiendra des déficits aussi
élevés, la banque américaine croit qu'il faut maintenir
des taux d'intérêts élevés pour réduire la
masse monétaire en circulation, en dépit du fait que l'inflation
a baissé de façon considérable. Comment se résoudra
cette querelle? Il est extrêmement difficile d'en juger. Vous savez que
le budget de M. Reagan a été rejeté par le Congrès
et le sénat et, par conséquent, tout est en l'air à
l'heure actuelle quant au budget américain. Donc, indéniablement,
il y a un inconnu important au niveau du pays, le plus important pour ce qui
est de définir l'évolution de l'économie mondiale.
Également, cela pose la question: Quelle sera l'attitude de la
Banque du Canada en ce qui a trait au soutien du dollar et au maintien des taux
d'intérêt au Canada encore plus élevés que les taux
américains, dans le but d'atteindre deux objectifs, c'est-à-dire
la lutte à l'inflation et le maintien du dollar? Donc, à nouveau,
l'inconnu. On nous dit que le premier ministre du Canada est à
réviser ses politiques qui ont été qualifiées de
véritable désastre par l'ex-ministre des Finances du gouvernement
Pearson, M. Walter Gordon, qui est une autorité en matière de
financements nationaux. Par conséquent, il m'est assez difficile de
juger quand, par exemple, le Parti libéral à Ottawa acceptera de
déclencher des élections pour se faire battre afin que l'on
puisse élire un autre type de gouvernement qui, lui, aura plus la
volonté de rétablir l'équilibre des finances
publiques.
À cet égard, je n'ai pas vraiment de réponse, je
suis partisan d'essayer de renverser ce gouvernement à Ottawa le plus
vite possible. Enfin, ça, évidemment, je ne peux pas en
décider. Il faudra que l'électorat en décide.
M. Polak: Maintenant, dans votre...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: Quand on prend, par exemple, le taux de chômage,
dans vos prévisions, avez-vous prévu que le taux de chômage
resterait au même niveau ou augmenterait? Disons que le taux de
chômage, dans la province de Québec, a augmenté de 2% ou
même 3%, disons quelque chose de très sérieux. Est-ce que
ce serait un petit choc qui, tout de suite, affecterait, disons, notre position
financière parce qu'il y a tant de revenus de moins qui entreraient? Ou
avez-vous encore, dans cette marge de manoeuvre, une prévision pour
dire: Si cela nous arrive, on est encore au moins capable de faire face
à cela.
M. Bérubé: Très faible marge de manoeuvre.
Elle est, pour ainsi dire, comme vous l'avez dit tantôt, inexistante,
c'est-à-dire qu'un effondrement de l'économie nous
amènerait soit à supprimer des services, soit à hausser
les impôts. Je crois qu'ayant demandé l'effort que nous demandons
présentement aux employés du secteur public, il faudrait regarder
ailleurs et, indéniablement, s'il y avait un effondrement plus
accentué de l'économie, il faudrait alors procéder
à des mesures encore plus draconiennes, mais c'est
inévitable.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Que le gouvernement en appelle
au peuple.
M. Bérubé: Non, parce qu'un changement de
gouvernement ne changera pas la situation économique, d'une part, et
d'autre part, ne modifiera pas l'état des finances publiques. Par
conséquent, on aura encore les mêmes choix à faire. Dans la
mesure où, au moins, vous aurez un gouvernement avec une échine,
vous avez des chances de résoudre un problème. Mais je ne vois
absolument pas ce qu'on pourrait faire avec un Parti libéral qui se perd
en querelles internes et qui n'est même pas capable de suggérer
des solutions à la crise que nous vivons.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Vaudreuil-Soulanges, je m'excuse, sur les remarques préliminaires, selon
le calcul du temps, il semble que votre droit de parole soit
écoulé.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Conformément à la
suggestion du député de Frontenac, je ferai des remarques
préliminaires à l'étude de l'article 1.
M. Polak: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): Vous pourrez. M. le
député de Sainte-Anne, une autre question?
Une voix: II achève, lui...
Une voix: Mais non, le ministre répond plus longtemps que
lui.
M. Polak: M. le ministre, quand je lisais hier...
Le Président (M. Bordeleau): II pose la question, oui, le
temps que tu réponds, non.
M. Blais: II lui reste une minute. Il a le droit.
M. Polak: M. le Président, je lisais, par exemple, hier,
la déclaration de M. Lévesque: L'indépendance s'impose
plus que jamais. Je peux vous dire que dans certains quartiers ou dans certains
secteurs de la population, qui paie tout de même une partie assez
importante des impôts, c'est justement le petit choc qui peut influencer
votre marge de manoeuvre. Est-ce que vous êtes d'accord avec cela? Disons
que les gens qui voient une déclaration comme ça, qui
étaient peut-être sur le point d'investir, disent: Je ne fais plus
d'entente, je ne fais plus rien, ou je pars. Peut-être que vous pouvez
appeler cela une réaction d'hystérie ou de panique, c'est
à définir comme vous le voulez, mais sur le plan de l'argent, de
sous, je demande si un petit choc comme ça peut être juste assez
pour déséquilibrer la marge de manoeuvre que vous n'avez pas de
toute façon?
M. Bérubé: Juste assez pour améliorer la
situation. Dans la mesure où le gouvernement du Québec, disposant
à ce moment d'outils, dans le domaine constitutionnel, pour intervenir
dans le secteur du commerce international, dans le secteur du financement, le
gouvernement du Québec, disposant d'instruments dont nous ne disposons
pas présentement, pourrait introduire un certain nombre de politiques en
ce qui a trait, par exemple, au financement de nos entreprises qui seraient de
nature à permettre au Québec de se tirer beaucoup mieux
d'affaire. Donc, c'est plutôt l'inverse. D'ailleurs, une
intéressante étude de chercheurs de l'Université de
Kingston, lors de la campagne référendaire, avait
démontré qu'en termes de facteurs statiques,
l'indépendance du Québec n'influençait en aucune
façon la situation économique au Québec, mais qu'en termes
de facteurs dynamiques, c'était l'inverse, c'est-à-dire que les
Québécois seraient avantagés par
l'indépendance.
M. Polak: Et au point de vue de la confiance du public, pas
seulement le public de la province de Québec, mais celui de
l'extérieur qui fait affaires avec nous.
M. Bérubé: Non, c'est le facteur confiance qui est
très important. Les Québécois, ayant enfin confiance en
eux, ont plus de chance de tirer leur épingle du jeu qu'en n'ayant pas
confiance en eux et en confiant au gouvernement fédéral le soin
de résoudre leurs problèmes ce qui, de toute évidence - on
voit le résultat - ne fonctionne pas.
M. Polak: Si j'ai bien compris, vous croyez que...
M. Blais: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Terrebonne.
M. Blais: II me semble que le député de l'autre
côté, que j'adore, parle depuis au moins 20 minutes, pourriez-vous
me dire combien de temps il lui reste?
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Terrebonne, effectivement, M. le député de Sainte-Anne arrive
à peu près au terme de ses 20 minutes. Je suis obligé de
le calculer en secondes et en minutes, disons que j'ai laissé un peu de
marge.
M. Polak: M. le Président, après cet
échange intéressant...
Le Président (M. Bordeleau): Mais vous m'avez dit
tantôt que c'était la dernière question.
M. Polak: ... je suis prêt à renoncer à la
dernière minute qu'il me reste.
M. Blais: Bravo!
Le Président (M. Bordeleau): Alors, est-ce que cela va?
Mme la députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, on se trouve...
Une voix: II lui reste combien de temps, M. le
Président?
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je n'ai pas encore utilisé mon droit de
parole, M. le Président.
M. Blais: Ah! oui, vous avez parlé tantôt au moins
sept minutes.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, en certaines occasions.
J'ai calculé environ six à sept minutes que vous avez prises
jusqu'à maintenant.
Mme Lavoie-Roux: Oh! à peine, M. le Président. Non,
honnêtement, c'est vrai.
M. Blais: Ah! oui.
Le Président (M. Bordeleau): Vous avez posé un
certain nombre de questions. J'ai calculé à la minute
près.
Mme Lavoie-Roux: Non, mais c'est surtout le ministre qui m'a
répondu longuement.
Le Président (M. Bordeleau): Non, mais ce n'est pas
déduit de votre temps, madame.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais M. le ministre, plus...
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: ... sérieusement, on se trouve devant un
projet de loi qui est un événement assez, non pas assez, mais
très anormal, le type de projet de loi qu'on a devant nous qui a pour
objet, à toutes fins utiles, de rouvrir des conventions collectives
qu'on avait signées supposément de bonne foi de part et d'autre.
On ne les ouvre pas au sens strict du mot puisqu'elles seront échues au
mois de décembre, mais on sait que le Code du travail prévoit
qu'elles restent en vigueur jusqu'au moment où elles sont
renouvelées, c'est-à-dire où on arrive à une
nouvelle convention ou à s'entendre pour une nouvelle convention.
D'autant plus qu'on ira récupérer par ce projet de loi une partie
des montants qui ont été versés en fonction des
conventions collectives qu'on a signées. Alors, cela semble clair. Quand
on dit que le gouvernement, par ce projet de loi, bafoue les règles
habituelles de négociation et nos règles habituelles du Code du
travail, je pense que, si l'on peut parler de consensus, il y en a vraiment un
là-dessus.
M. Bérubé: Non, sur le mot "bafoue"...
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Si vous utilisez un autre verbe que
"bafouer", oui, on peut s'entendre. "Modifier" les règles habituelles de
négociation, oui, c'est d'accord.
Mme Lavoie-Roux: Bon, écoutez, "renie", si le ministre
trouve que c'est plus élégant que "bafoue", je n'ai aucune
espèce d'objection, mais c'est du pareil au même. Quand on renie
la signature qu'on a apposée en bas d'un contrat, signé de bonne
foi de part et d'autre, et puis que l'on fait comme s'il n'existait plus, si le
mot "bafoue" offense les oreilles du ministre, je vous dis: heureusement que
nous n'étions pas susceptibles quand j'ai entendu toutes les turpitudes
qu'il nous a servies depuis le commencement de cet après-midi...
C'est grave, ce type de projet de loi. C'est grave sur le plan du climat
social. Cette mesure exceptionnelle, extraordinaire, arrive à la toute
veille du renouvellement des conventions collectives. On sait fort bien,
à cause de notre système de négociation qui est un
système centralisé, qui est un rapport de forces entre, d'un
côté, la force syndicale, de l'autre, le pouvoir gouvernemental
et, entre les deux, les citoyens qui, quelquefois, sont plus fragiles que
d'autres, particulièrement dans le domaine des affaires sociales et
j'ajouterais aussi dans le domaine de l'éducation, mais à un
dégré moindre, c'est-à-dire avec une urgence
peut-être un peu moindre, que c'est là qu'est le danger.
Même dans des conditions ordinaires où toujours on a
respecté... où on n'a jamais agi de la façon dont on va
agir aujourd'hui, cela a été des affrontements sous quelque
gouvernement que ce soit. Là-dessus, je pense qu'on ne se lancera pas de
pierres de part et d'autre. (17 h 30)
Cela a été ainsi sous des gouvernements libéraux,
unionistes ou péquistes. Malheureusement, c'est comme
cela. Là, on vient rendre cette phase des négociations
extrêmement pénible et extrêmement difficile en
prévoyant une mesure qui n'a jamais été vue auparavant. Et
le ministre pourra et même mes savants collègues qui ont tous des
chiffres en tête sur l'économie, le taux d'investissement, la
progression ou la régression du revenu intérieur brut, etc., et
je respecte tous les chiffres qu'on veut bien me donner...
Il reste qu'il y a une chose qui est tout à fait unique pour le
Québec. Je ne connais pas d'autres provinces au Canada et je voudrais
bien qu'on me nomme même un État en Amérique du Nord,
c'est-à-dire aux États-Unis, qui ait dû trouver une
semblable formule pour se sortir du pétrin. On a beau dire que nos
problèmes économiques sont causés par la hausse des taux
d'intérêt, sont causés par tous les gouvernements qui nous
ont précédés sauf nous, parce que nous, on est tellement
vertueux et on a tellement bien administré, toutes les excuses qu'on
peut trouver ne tiennent pas devant le fait que c'est, à ma connaissance
- et si on veut le corriger par la suite, si je me trompais -la première
fois qu'un gouvernement non seulement du Québec, mais un gouvernement du
pays et probablement de l'Amérique du Nord doit recourir à une
mesure aussi extraordinaire, aussi exceptionnelle, avec tous les risques
qu'elle comporte à la veille d'une nouvelle ronde de
négociations.
M. Lachance: Est-ce que vous me permettriez une question, Mme la
députée de L'Acadie, avec la permission du président?
Mme Lavoie-Roux: Oui, parce que le député est
toujours très gentil.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, allez-y.
Mme Lavoie-Roux: Si je peux y répondre, remarquez
bien.
M. Lachance: Merci, Mme la députée de L'Acadie.
Écoutez, la politique, pour moi, ce n'est pas un jeu et je constate avec
grand plaisir que, pour vous, ça ne semble pas être un jeu non
plus. Vous êtes une personne - je voulais vous rendre un petit peu la
monnaie de la pièce d'hier - qui m'apparaît très
sincère, honnête; vous vous êtes fait remarquer dans la
défense des plus démunis de la société, je continue
à penser que vous êtes toujours dans cette optique-là.
Est-ce que vous pensez que, dans la situation économique difficile que
nous traversons, personne ne le conteste, il appartient seulement à ceux
qui ne sont pas bien organisés ou qui ne sont pas organisés du
tout, aux plus démunis de faire les frais seuls de la situation
économique difficile dans laquelle nous vivons, et qu'on laisserait de
côté ceux qui sont les mieux organisés, c'est-à-dire
en partie les 300 000 personnes et ceux qui sont les plus hauts
salariés?
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas de ce point-là que je
discute à ce moment-ci. Je vais répondre à la question du
député. Je pense que notre parti ou notre formation politique n'a
jamais nié qu'il y ait nécessité de mesures rigoureuses
pour assainir les finances publiques. Le chef de notre parti, et ceci a
été repris, je pense, par d'autres de mes collègues, a
quand même dit: II faut que vous présentiez, enfin, appelons-le un
plan budgétaire réparti sur une période d'au moins trois
ans où justement on aura des objectifs très précis. Et si
on se situe uniquement sur les négociations ou même sur les
prochaines conventions que l'on doit signer, qui vont s'étendre sur une
période de trois ans, normalement, il faut qu'on ait des objectifs
très précis. On a parlé, par exemple, d'une parité,
enfin d'une recherche de la parité la plus comparable possible, avec
toutes les variables qui peuvent exister, du secteur public avec le secteur
privé, d'un ralentissement dans le taux de croissance, par exemple, des
augmentations. Est-ce qu'on peut désormais parler, du moins à
l'époque que l'on vit présentement, en 1982-1983,
d'enrichissement collectif quand il n'y a pas d'enrichissement collectif?
Sur tout cela, nous n'avons aucune espèce d'objection; ce contre
quoi on a mis le gouvernement en garde, c'est de procéder d'une
façon qui mette en péril justement ces objectifs qui, de part et
d'autre, on le pense, on le reconnaît, doivent être atteints au
moment des prochaines négociations. Alors, là-dessus, je pense
qu'il n'y a pas de difficulté.
C'est évident que vous ne pouvez pas aller chercher l'argent chez
les bénéficiaires de l'aide sociale. Je ne veux surtout pas faire
de démagogie sur leur dos. On sait qu'ils vivent en bas du seuil de la
pauvreté. Ni même chez des gens qui travaillent au salaire minimum
et qui, eux aussi, ont du mal à joindre les deux bouts; ils sont tout
juste au seuil de la pauvreté. Alors, c'est évident qu'on n'ira
pas le chercher là. Ce sur quoi je reviens, c'est qu'aujourd'hui on est
obligé de recourir à une mesure extraordinaire à laquelle
d'autres n'ont pas besoin d'avoir recours, parce que, quelque part - je sais
que le gouvernement n'aime pas quand on lui dit cela - le gouvernement a
manqué de prévoyance. Quand on dit que l'Ontario, depuis
déjà quelques années déjà, annonçait
des moments difficiles; peut-être sentait-on un ralentissement -
là, mes savants collègues économistes me diront un
ralentissement économique à l'horizon - dès 1976-1977, on
a senti la crise aller en progressant. Au lieu de couper, on a
continué
d'augmenter, de dépenser. Je ne veux pas revenir sur toutes les
choses qu'on vous dit tout le temps: Vous avez trop dépensé dans
le domaine des communications, est-ce qu'il faudrait couper ici, est-ce qu'il
faudrait couper là? C'est une autre chose.
Je vais vous donner un autre exemple très concret. Je crois que
cela doit être la quatrième fois que je l'apporte. C'est celui qui
comporte des sommes importantes. Je ne vous parle pas de couper dans ce que
vous appelez des "peanuts" quelque part, quoique vous sachiez que lorsqu'un
budget va mal dans votre propre famille, chaque chose qui aide à
équilibrer un budget familial, ce n'est pas une "peanut", même si,
en termes absolus, le montant peut être assez modeste. Avant le dernier
budget du ministre des Finances, en mars, deux jours avant le
déclenchement des élections, le budget a été
présenté le 10, les élections ont été
annoncées le 12, on a promis un crédit d'impôt aux familles
qui avaient des enfants de moins de six ans; appelons cela une allocation de
disponibilité parce que cela vous rend plus ou moins disponible, mais,
en tout cas, avec le montant que cela comporte était de 180 000 000 $.
Le ministre des Finances a annoncé cela au même moment où
il coupait 1 000 000 000 $ dans des services, peut-être une partie des
services était superflue, mais il savait fort bien qu'il coupait aussi
dans des services extrêmement importants pour la population. Là
vous l'avez diminué d'environ 30 000 000 $ à 40 000 000 $ parce
que vous avez réduit les indemnités, vous avez réduit les
crédits d'impôt. Cela n'était pas de la
responsabilité, à la veille d'une élection, et vous avez
maintenu cette promesse.
Si, encore, une partie de ces montants avait servi à augmenter la
sécurité des personnes touchant des revenus 15 000 $, et moins.
Au contraire, vous l'avez donné et cela ne m'étonnerait pas - non
je pense que ses enfants ont vieilli - je ne lui en fait pas le reproche, ce
n'est pas par mesquinerie, cela s'applique à certains de mes
collègues -non, pas à lui, lui non plus, n'en a pas. Il y a des
gens à l'Assemblée nationale qui bénéficient de ce
crédit d'impôt - bon, vous en êtes un - qui n'est même
pas imposable. Cela est un exemple et c'est une somme importante. Je pourrais
en ajouter du côté des soins dentaires des choses qui ont
été faites et cela représente des millions, du
côté des médicaments gratuits, cela représente aussi
des millions. Est-ce que le député sait, par exemple, que
lorsqu'on a donné des médicaments gratuits à la
totalité des personnes âgées, et non pas aux deux tiers qui
n'avaient que la pension de vieillesse et la sécurité du revenu,
que ce troisième tiers a consommé plus de médicaments que
les deux autres tiers, ce dont il ne faut pas se surprendre parce que
c'étaient probablement des gens généralement plus
préoccupés de leur santé, etc. Maintenant, peut-être
ne faudrait-il pas l'enlever d'une façon complète au
troisième tiers parce que compte tenu de l'inflation, etc. Il y aurait
peut-être aussi moyen de voir à ce que ceux qui sont capables de
payer leurs médicaments sans se priver - je ne parle pas uniquement de
choses essentielles - d'une vie tout de même un peu agréable, qui
sont capables de les payer, car cela coûte des millions.
Le Président (M. Bordeleau): Je veux seulement vous
signaler que vos vingt minutes sont écoulées.
Elles sont vraiment écoulées.
M. Bérubé: Dommage et intérêts.
M. Grégoire: On peut laisser la députée de
L'Acadie conclure et terminer une minute.
Mme Lavoie-Roux: Je pourrais conclure parce que cela va finir par
une question.
M. Grégoire: Oui, oui.
Mme Lavoie-Roux: Je m'éloigne de ce... Vous savez que je
réponds toujours à la question du député de...
Le Président (M. Bordeleau): ... aux questions que vous
voulez, Mme la députée de L'Acadie, sauf que cela fait partie des
remarques préliminaires qui sont prévues dans nos
règlements.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Grégoire: Vous allez avoir l'occasion bien des fois de
reparler.
Mme Lavoie-Roux: Mais sa question c'est qu'on a ces
préoccupations; c'est la façon dont il procède et aussi la
responsabilité qu'à ce moment, ils doivent assumer et qu'ils
n'ont pas à imputer aux autres; c'est vraiment ce point.
M. le Président, dans un document qui apparemment émane -
cela va être ma conclusion, cela va être une question - du
président du Conseil du trésor, qui a été à
ma connaissance envoyé aux organisations locales du Parti
québécois, accompagné d'une lettre du président du
Conseil du trésor et qui s'appelle la problématique des finances
publiques, synthèse, démarches, choix et propositions
gouvernementales, on a véritablement un bon résumé de la
problématique, des mesures que le gouvernement a prises. Mais...
M. Bérubé: ... ce compliment qui
s'adresse à elle en pratique.
Mme Lavoie-Roux: C'est vous qui avez préparé cela,
mais je trouve que c'est bien fait. Je ne sais pas si mes collègues
l'ont vu. En tout cas, moi, j'ai trouvé que c'était clair. Il y a
une question quand même qui m'intéresse; on explique comment la
répartition de l'effort s'est fait pour justement faire accepter cette
hypothèse d'aller récupérer dans la fonction publique un
montant de 521 000 000 $.
Il semblerait qu'en dépit de tous les calculs qu'on a faits,
compressions, taxes imposées, etc., je peux lire à la fin que la
contribution du secteur public, si la proposition déposée
était acceptée, serait de 521 000 000 $. À ce moment, ils
ne l'ont pas accepté. C'était au moment où on en
discutait, j'imagine. Le solde à comprimer le serait soit par
réduction de services ou par mesures fiscales, parce qu'on avait
parlé de 700 000 000 $, de 640 000 000 $, c'est de cela que vous aviez
parlé au début. Là, vous allez en chercher 521 000 000 $.
Est-ce que c'est cette différence que vous iriez chercher, selon vos
propres termes, dans un autre effort collectif qui serait requis de la part de
nos concitoyens? Où est-ce que vos 521 000 000 $ ferment la boucle?
M. Bérubé: L'écart entre les 641 000 000 $
et les 521 000 000 $ vient de ce que, dans les 641 000 000 $, il faut inclure
les cadres, les médecins qui ne faisaient pas partie du personnel
syndiqué, mais qui sont couverts cependant par le gel au 1er
juillet.
Mme Lavoie-Roux: Et tous les ministres.
M. Bérubé: Oui, c'est bien cela.
Mme Lavoie-Roux: Cela ne veut pas dire qu'il y aurait d'autres
taxes supplémentaires, pour autant que les chiffres sont connus
présentement. Cela pourrait arriver, ce n'est pas impossible. On a vu
cela à l'automne.
M. Bérubé: À l'exception des mesures
annoncées par le ministre des Finances telles que la taxe de vente qui a
augmenté de 1%.
Mme Lavoie-Roux: Cela, c'est les 250 000 000 $ qu'il a
annoncés au mois de mars. D'accord. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, Mme la
députée de L'Acadie. Est-ce qu'on peut appeler l'article 1?
Autre intervention M. Gilles Rocheleau
M. Rocheleau: M. le Président, si vous permettez, j'aurais
quelques mots à dire...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Hull. Sur des remarques préliminaires?
M. Rocheleau: ... sur des remarques préliminaires, bien
entendu, pour ne pas dire plus.
Je suis particulièrement intéressé au projet de loi
70 parce que j'ai vécu, dans le domaine municipal, des
expériences assez intéressantes de négociation, mais,
comme ex-maire d'une municipalité, moi et mes collègues du temps,
on n'aurait jamais eu l'occasion d'adopter un règlement municipal ou
d'adopter une loi qui disait tout simplement que les fonds prévus pour
les salaires de nos employés étaient limités à tant
de millions. Jamais. C'est vrai qu'on était une créature de la
province et, comme créature, il fallait se limiter un peu au rôle
que joue l'Opposition à cette Assemblée nationale: parler quand
c'est le temps, accepter même quand ce n'est pas le temps et la seule
décision, à toutes fins utiles, qu'il nous reste, c'est de donner
notre consentement pour dépasser les heures. Cela, c'est d'une
importance capitale pour l'Opposition.
Mais je comprends mal le président du Conseil du trésor
qui a pris une partie du travail du ministre des Finances qui semblait,
à toutes fins utiles, perdre les pédales, et qui nous annonce,
dans un projet de loi qui fait frémir les fonctionnaires du
gouvernement, non seulement les fonctionnaires du gouvernement mais l'ensemble
du Québec, des modifications radicales. C'est ainsi que ce gouvernement
soi-disant social-démocrate semble vouloir traiter les concitoyens et
concitoyennes du Québec à compter de maintenant. (17 h 45)
Sans pour autant, M. le Président, faire allusion à la loi
no 37 qui est un projet de loi anti démocratique, je tiens à
souligner que le projet de loi no 70 est aussi anti démocratique
à l'égard de nos travailleurs, et plus particulièrement
les travailleurs de la fonction publique.
Une voix: Et les travailleuses.
M. Rocheleau: Et les travailleuses, bien entendu. M. le
Président, à moins que vous soyez tellement occupé que
cela ne vous permet pas de vous en apercevoir, il y a du gaspillage qui se fait
par la volonté de ce
gouvernement. J'aimerais simplement vous énumérer quelques
cas. Sans pour autant faire de l'extrapolation dans les différents
comtés du Québec, dans l'Outaouais et plus
particulièrement dans le comté de Hull, on a, depuis les quelques
derniers mois, fait des nominations politiques. On a créé des
postes. On a remis en usage un poste d'espionnage, de l'autre côté
de la rivière des Outaouais, à Ottawa. On a nommé
l'ex-député et ministre des Travaux publics, Mme Ouellet, au
ministère des Affaires intergouvernementales. Je ne sais pas si c'est
pour décacheter le courrier le matin, pour ramasser les timbres rares
qui viennent de pays étrangers ou simplement pour faire le
découpage des journaux et envoyer cela par Purolator à
Québec, mais c'est quand même une rémunération qui
frise les 40 000 $ par année.
Ce n'était pas assez, M. le Président, on vient, il y a
à peine quelque temps, de créer un nouveau poste dans
l'Outaouais, un poste de conseiller politique au ministre des mirages
économiques, de l'expansion économique, M. Landry, Mme Manon
Vitare, l'organisatrice du Parti québécois aux dernières
élections - profondément convaincue, le 20 mai 1980, pour le
comité du oui - à qui on a donné "une job" sûrement
dans un bureau fort acceptable, avec les services d'une secrétaire,
dactylo, papeterie si elle en a besoin, mais plus particulièrement un
téléphone. Ces postes-là, M. le Président, sont
créés pourquoi? C'est du gaspillage. Il y a cinq
députés libéraux dans l'Outaouais québécois.
Tantôt, au Québec, cela va être tous des
députés libéraux parce que, dans l'Outaouais, on est un
peu plus près des frontières et on a appris à parler au
fédéral sans toujours se chicaner pour autant. On a appris
à négocier, on a appris à en prendre et à en
laisser. Mais la gourmandise, cela ne paie pas toujours. Vous l'apprendrez
sûrement un jour. M. le Président, je vous prie de transmettre
cela, éventuellement.
M. Polak: Au ministre, quand il sera là.
M. Rocheleau: Mais, M. le Président, un cas encore plus
particulier qui me préoccupe sûrement, c'est la nomination de Mme
Cuerrier, ex-vice-présidente de l'Assemblée nationale,
ex-députée du comté de Vaudreuil-Soulanges. C'est bien
évident que, depuis la dernière année, on
s'aperçoit que Mme Cuerrier ne reprendra jamais son comté, alors
on lui a donné "une job" aux Affaires municipales, à la
Commission municipale.
M. le Président, je suis convaincu que cette personne, qui a
sûrement énormément de qualités, n'a jamais vu de
près la clé qui ouvre un hôtel de ville. On l'implique dans
le domaine des affaires municipales alors que l'on connaît la
complexité de ce travail. Je trouve malheureux qu'on n'ait pas pu, en
l'occurrence, la faire bénéficier d'une largesse politique, d'une
récompense politique, pour des services rendus antérieurement. On
aurait pu, dans le contexte actuel, M. le Président, même s'il y
avait certaines vacances à la Commission municipale, reporter certaines
nominations parce qu'actuellement, je pense qu'ils sont dix commissaires, ou
ils devraient être dix commissaires, et il y en a déjà
quelques-uns de trop. On aurait pu profiter de l'attrition, c'est-à-dire
de postes qui étaient déjà éliminés, pour ne
pas les combler de nouveau.
Non, M. le Président. Je pense que le président du Conseil
du trésor, qui devrait profiter de la nuit pour sommeiller, sommeille
aussi le jour, comme il le fait actuellement, à moins qu'il ne soit
simplement parti pour quelques instants. Ah! Il fait signe que oui.
M. Grégoire: Permettez, M. le Président, sur une
question de règlement.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Frontenac.
M. Grégoire: Jusqu'ici, à la commission, cela a
bien été. Nous laissons dire tout ce qu'il veut au
député de Hull, mais je pense bien qu'il y a des remarques que,
même au sein... Moi aussi, j'avais peut-être les yeux
fermés. Quand j'écoute un prédicateur, je me ferme les
yeux pour mieux comprendre. Si le ministre veut faire la même chose...
Mais je pense bien que prêter de telles intentions, ce n'est pas gentil;
on vous a laissé faire, mais il y a quand même des limites.
M. Rocheleau: M. le Président, je ne voudrais pas laisser
un sujet aussi intéressant pour simplement commenter ce que le
député de Frontenac vient de me dire. On a eu sa présence
à la commission municipale, hier soir, et je dois vous avouer que
ça ne m'a pas impressionné, les quelques instants pendant
lesquels il nous a parlé de son amiante.
Alors, M. le Président, je n'ai sûrement pas l'impression
de vous impressionner vous non plus et je n'ai pas l'impression, M. le
Président, de pouvoir impressionner un péquiste parce
qu'actuellement, la composition de votre cerveau pourrait se limiter à
peu près à ce qu'un serin pourrait avoir comme cervelle. Alors,
je n'ai pas l'intention de vous impressionner. Loin de là,
messieurs.
M. Gagnon: C'est encore trop fort comme évaluation pour la
vôtre.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît, s'il
vous plaît: C'est le député de Hull qui a la parole.
M. Rocheleau: M. le Président, quand on se pète les
bretelles d'administrer le Québec de la façon qu'on le fait
actuellement, on n'a qu'a retouner en 1979, quand votre gouvernement, M. le
président du Conseil du Trésor, a acheté les conventions
collectives des fonctionnaires du gouvernement du Québec afin de
minimiser les complications que le référendum du 20 mai 1980
allait vous apporter; vous avez tenté par tous les moyens d'acheter ce
référendum. Vous avez tenté par tous les moyens de donner
des cadeaux et aujourd'hui, en 1982, vous êtes obligés de refaire
vos comptes. Vous êtes obligés de réexaminer les
capacités des Québécois et des Québécoises
de payer et, malheureusement, vous vous voyez obligés de couper, non pas
dans le gras, M. le Président, mais maintenant dans le maigre, parce que
vous dites aux fonctionnaires du Québec: "On vous coupe 521 000 000 $,
mais on va négocier quand même." Mais, ce que les fonctionnaires
savent, c'est que les 521 000 000 $ sont partis du budget et que, même
s'il y avait des négociations, le gouvernement ne remettra pas 521 000
000 $, alors qu'il prévoit déjà, pour l'année
courante, un déficit d'au-delà de trois milliards.
Je pense, M. le Président, que c'est une façon malheureuse
d'aborder les prochaines négociations avec ses employés et je
trouve d'autant plus malheureux, M. le Président, que ce gouvernement,
qui s'est toujours dit un gouvernement social-démocrate, coupe partout.
J'ai pu me rendre compte qu'aux Affaires sociales, entre autres, et
sûrement que ma collègue de L'Acadie a eu l'occasion, au cours de
la commission parlementaire, de le mentionner au ministre des Affaires
sociales. Chez nous, entre autres, dans les foyers d'hébergement et les
foyers d'accueil, on a coupé les budgets, on a diminué les
services, et on a, du même coup, diminué la qualité. Ce bon
gouvernement, de 1976 à 1981, qui s'était caché
derrière toutes sortes de paravents, depuis 1981, on voit maintenant son
vrai visage. M. le Président, je trouve cela malheureux, parce que nos
personnes âgées, au Québec, ne méritent
sûrement pas le traitement que nous leur réservons actuellement.
C'est vous, le gouvernement actuel, qui faites en sorte de priver des services
nécessaires ces personnes âgées dans ces foyers d'accueil
ou ces foyers d'hébergement. On pourrait continuer et en parler
longuement.
Nous avons déposé à l'Assemblée nationale,
au cours des dernières semaines, des pétitions de fonctionnaires
du gouvernement du Québec qui s'opposent à l'adoption des projets
de loi 68 et 70. Comme je l'expliquais ce matin, M. le Président, dans
l'Outaouais, plus particulièrement dans le comté de Hull, nous
comptons quelques milliers de travailleurs de la fonction publique provinciale,
mais nous comptons aussi à peu près 25 000 travailleurs du
gouvernement fédéral, qui, jamais, ne se verraient offrir un
projet de loi semblable. Jamais, M. le Président. Dans le contexte
actuel, je comprends très bien les fonctionnaires du gouvernement du
Québec de se ramasser en avant du parlement, ici, la semaine
dernière, et venir contester. On me dit qu'il y avait plus de 18 000
fonctionnaires qui étaient ici.
Pendant ce temps-là, on vous retrouvait dans mon comté,
à Hull, en train d'essayer d'organiser une élection
fédérale, alors qu'il y a des problèmes ici à
Québec. Alors que ce gouvernement est en train de ruiner
l'économie du Québec, on pense à aller représenter
le Québec au gouvernement fédéral pour tenter de ruiner ce
qui reste du Canada. M. le Président, je pense que vous avez du culot.
Au lieu de penser à vous sauver tour à tour de vos comtés
et vous présenter au fédéral, vous feriez bien mieux, M.
le Président du Conseil du trésor, de demander à votre
chef, le premier ministre du Québec, d'aller au peuple. C'est
peut-être le temps d'aller au peuple, quand on accepte de passer des
projets de loi matraques comme le projet de loi 37 sur une fusion forcée
de deux municipalités, quand on oublie la base même de la
démocratie, vous qui aviez cette mission, avant les années 1976
et plus particulièrement avant les années 1981, de la
transparence, de la participation, de la collaboration. Vous disiez, à
ce moment-là, aux Québécois et aux
Québécoises qu'il fallait qu'ils se prennent en main. Bien oui,
ces gens-là ont tenté de se prendre en main, ont voulu être
consultés; mais non, projet de loi matraque. La même chose, M. le
Président, avec le projet de loi 70, avec le projet de loi 68, et on
pourrait continuer.
En terminant, M. le Président, j'ose espérer que ce
gouvernement sera conscient qu'il ne corrige pas une situation en imposant des
lois semblables. Il serait davantage responsable en allant s'asseoir à
une table de négociation et de comprendre, avec les syndicats, les
problèmes auxquels nous faisons face actuellement, Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. Comme il est dix-huit
heures, à moins d'un consentement des membres pour continuer, je vais
suspendre la séance jusqu'à ce soir, vingt heures.
M. Bérubé: C'est un des plus beaux discours que
j'aie entendus depuis longtemps.
Le Président (M. Bordeleau): La commission suspend ses
travaux jusqu'à ce soir, vingt heures.
(Suspension de la séance à 18 h 01)
(Reprise de la séance à 20 h 23)
Le Président (M. Bordeleau): Nous reprenons donc
l'étude article par article du projet de loi no 70. Nous en
étions, à la suspension, aux remarques préliminaires, mais
je pense que c'était terminé, en tout cas selon les droits de
parole que j'avais déjà retenus.
Mme Lavoie-Roux: ... son temps de parole?
Le Président (M. Borde leau): Selon mes calculs, oui,
Madame.
J'appellerai donc l'article 1.
M. Bérubé: Adopté, M. le
Président.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que l'article 1 sera
adopté?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Un instant. On ne calcule pas
de la même façon.
Mme Lavoie-Roux: On les a contestés un peu,
c'est-à-dire la façon dont on les présente.
M. Bérubé: Si peu. Enfin, j'admets que j'ai une
façon de les présenter que je ne dirais pas discutable...
Mme Lavoie-Roux: Qui n'est pas partisane du tout.
M. Blais: Ça fait plaisir de vous l'entendre dire, Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: C'est vrai que ça va être
enregistré.
M. Blais: Non, ce n'est pas enregistré encore. Laissez-la
parler, laissez-la parler!
Le Président (M. Bordeleau): C'est enregistré,
mais, quand tout le monde parle en même temps, c'est difficilement
enregistrable.
M. Lachance: Heureusement qu'il n'enregistre pas nos rires!
M. Bérubé: Non, je ne parle plus. Je n'ai pas
parlé de l'après-midi, j'ai dormi.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, c'est
enregistré.
M. Bérubé: Oui, oui, c'est vrai.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît!
M. Bérubé: Ce sont des choses
intéressantes.
Mme Lavoie-Roux: Ah oui, ah oui!
Étude article par article
Interprétation
Le Président (M. Bordeleau): Alors, sur l'article 1.
M. Grégoire: Article 1, adopté, M. le
Président. C'est un article d'interprétation. Il n'y a rien
à dire là-dessus.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, à moins que...
M. Bérubé: II porte essentiellement sur Sa
Majesté.
Une voix: Sur les définitions?
M. Bérubé: Oui, sur les définitions.
Attendez un peu, M. le Président, je veux être certain.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II y a une note dont il veut
nous faire partager la teneur.
M. Bérubé: Non, j'ai des amendements.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Bon, déjà!
M. Bérubé: Peut-être qu'il serait
approprié de distribuer une série d'amendements, parce que
j'avais préparé des amendements dès le début de la
loi, mais je n'aurai pas ma copie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, est-ce que le ministre a
l'intention de les déposer tous en même temps?
M. Bérubé: Oui.
Mme Lavoie-Roux: Pour qu'on puisse les examiner.
M. Bérubé: Oui, oui. Pour faciliter le travail.
M. Blais: Une suspension de quelques minutes.
M. Bérubé: On supend la séance pendant
quelques minutes?
Mme Lavoie-Roux: Parfait.
M. Bérubé: Normalement, les gens qui
m'accompagnent, comme il y avait une réception en l'honneur d'un
sous-ministre qui partait, se sont tous retrouvés à la
réception
et je me retrouve sans appui technique, ce qui est très
désagréable; et malheureusement, j'avais des copies à
votre intention.
Mme Lavoie-Roux: Vous allez être en danger!
Le Président (M. Bordeleau): Nous allons suspendre la
séance pendant quelques minutes.
(Suspension de la séance à 20 h 26)
(Reprise de la séance à 20 h 35)
Le Président (M. Bordeleau): La commission reprend donc
ses travaux. S'il vous plaît! M. le ministre, vous étiez en train
de nous dire que vous aviez des amendements et que vous étiez prêt
à les distribuer aux membres de la commission.
M. Bérubé: M. le Président, si vous me
donnez les copies, cela va me rendre service.
Le Président (M. Bordeleau): Les copies sont
déjà distribuées aux membres.
M. Bérubé: Madame va me passer une copie.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, est-ce que
vous voulez nous faire part, d'abord, de l'amendement à l'article no
1.
M. Bérubé: Oui, M. le Président. Il s'agit
ici de définitions. À l'article 1, premier alinéa, il
faudrait ajouter une virgule après le mot "accréditation". "...
l'association reconnue par décision de l'agent d'accréditation,
du commissaire du travail ou du tribunal...", alors il y a une virgule. Aussi,
il faudrait ajouter, après le mot "tribunal", les mots "du travail",
pour identifier de quel tribunal il s'agit.
Il y a un deuxième amendement qui se lirait ainsi: par le
remplacement, dans la quatrième ligne de l'alinéa 1; des mots
"par l'effet de l'article 110", par les mots "en vertu de l'article 110 ou de
l'article 112". Si je ne me trompe, c'est pour couvrir les professionnels et
les fonctionnaires. Si vous avez des questions techniques, nous pourrons vous
répondre.
Une voix: Adopté, M. le Président.
M. Bérubé: À l'article 112, je crois que ce
sont les professionnels, c'est cela. On avait oublié que, effectivement,
les professionnels n'étaient pas couverts par le même article de
la Loi sur la fonction publique.
M. Grégoire: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): L'amendement...
M. Grégoire: L'amendement, l'amendement...
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce qu'on...
M. Grégoire: L'amendement à l'article.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît, M. le
député de Frontenac, quand même.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Du calme.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que l'amendement sera
adopté?
Mme Lavoie-Roux: Évidemment, vous avez voulu couvrir tous
les groupes à qui les mesures prévues dans la loi
s'appliqueraient. Pour la question des juges, retournez-vous chercher de la
rémunération, là?
M. Bérubé: Non. Là, il s'agit des
définitions...
Mme Lavoie-Roux: C'est du monde gelé, cela.
M. Bérubé: C'est du monde gelé par le biais
de leur alignement sur les cadres.
Mme Lavoie-Roux: Ah! oui, c'est cela; alors cela ne s'applique
pas à eux.
M. Bérubé: Non.
Mme Lavoie-Roux: Évidemment, quand arrivera le tour des
députés, cela va être aussi par une loi spéciale,
parce qu'ils n'entrent pas là-dedans.
M. Bérubé: Ce sera la Loi sur l'Assemblée
nationale.
Mme Lavoie-Roux: La Loi sur l'Assemblée nationale. Bon,
d'accord.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? Alors l'amendement
à l'article 1 est adopté. L'article 1 tel qu'amendé est-il
adopté?
M. Blais: Adopté.
Le Président (M. Bordeleau): Adopté.
Mme Lavoie-Roux: Adopté.
Le Président (M. Bordeleau): Article 2.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, comme
à l'article 68. Toutes ces choses-là.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, sur division. Alors
l'article 1 est adopté tel qu'amendé sur division. Cela va?
Application
L'article 2. M. le ministre, sur l'article 2, vous avez des changements
ou des explications à fournir?
M. Bérubé: Oui, M. le Président, nous avons
également un changement à apporter. Nous avons
précisé les définitions, maintenant nous allons couvrir
les employeurs. Je vous présente immédiatement les amendements:
le remplacement du premier alinéa par les suivants: "1 le gouvernement
et ses ministères; 2 tout organisme dont le personnel est nommé
ou rémunéré suivant la Loi sur la fonction publique, y
compris les services de l'Assemblée nationale du Québec et toute
personne désignée par celle-ci en vertu de la loi."
Je vous explique rapidement l'amendement. C'est pour être bien
certain que, par l'identification des organismes, on pouvait également
étendre ce concept d'organisme au Vérificateur
général, à ses bureaux, au président des
élections, si je ne m'abuse, enfin il y en a quelques-uns. C'est cela.
Le président du financement des partis politiques ou le directeur du
financement des partis politiques. À ce moment-là, on m'a
laissé comprendre que les organismes n'étaient peut-être
pas suffisamment clairs au sens de la loi et, dans le cas présent, ce
que nous faisons, c'est que nous précisons très clairement le
sens "d'organismes" pour être bien certain que ça s'applique
à tous les employés du secteur public.
Le Président (M. Bordeleau): Premier amendement, ça
va?
M. Bérubé: Premier alinéa, est-ce que c'est
plus clair?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui. Bien, fondamentalement, il
y a un ajout des mots "y compris les services". Vous avez
réaménagé en même temps la numérotation.
M. Bérubé: C'est ça.
Mme Lavoie-Roux: L'article 2.
M. Bérubé: Alors, il s'agit de tout organisme qui
relève du gouvernement, de la Loi sur la fonction publique, d'une part,
mais, d'autre part, il s'agit de s'assurer que l'Assemblée nationale est
bel et bien couverte également ainsi que les organismes qui en
dépendent, ce qui n'était pas nécessairement clair en
vertu de la loi spéciale sur l'Assemblée nationale.
Le deuxième alinéa de l'article... Oui.
Mme Lavoie-Roux: Excusez-moi. C'est simplement une question. Les
universités, évidemment, négocient indépendamment
de la fonction publique et parapublique. Il n'y a rien qui s'applique à
elles, sauf le gel? Ah, dans une autre partie.
M. Bérubé: II y a une autre partie, au chapitre
III, qui porte sur les universités et les institutions d'enseignement
privé.
Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse.
M. Bérubé: De rien, Mme la députée de
L'Acadie.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, est-ce qu'on pourrait
adopter le premier amendement?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Le Président (M. Bordeleau): Premier amendement,
adopté.
Le deuxième, M. le ministre.
M. Bérubé: Alors, c'est le deuxième
amendement...
Le Président (M. Bordeleau): ... de l'article 2.
M. Bérubé: ... de l'article 2, paragraphe 2, par
l'insertion, à la fin du deuxième paragraphe du premier
alinéa, des mots "ainsi que les commissions scolaires Crie et Kativik".
Nous avons oublié la convention de la Baie-James et les lois que nous
avons adoptées ici créant ces commissions scolaires et, dans le
cas présent, il faut les intégrer.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que ça va pour
l'amendement no 2?
M. Polak: C'est mon chef qui décide. Oui, oui, c'est
technique.
M. Bérubé: Et le troisième amendement...
Le Président (M. Bordeleau): Adopté, donc.
M. Bérubé: ... est simplement un amendement de
renumérotation des articles, compte tenu des changements que nous venons
d'y apporter.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, ça va aussi
pour l'amendement no 3?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
Renumérotation. Ça va.
Le Président (M. Bordeleau): Adopté. Est-ce que
l'article 2 sera adopté tel qu'amendé?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Quant à l'article 2 tel
qu'amendé, je me reporte...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Vaudreuil-Soulanges.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): ... à vendredi dernier
alors que nous avions ici, en commission parlementaire, les chefs syndicaux du
front commun et je me souviens qu'ils ont soulevé le problème de
savoir comment il se fait que ce n'est pas tout le monde dans la fonction
publique. Il y avait quelques exceptions qui sont dans le dernier paragraphe de
l'article 2 qu'ils ont, eux aussi, évoquées, et le ministre avait
eu une réponse, ma foi, assez intéressante dans le cas des
membres de la Sûreté du Québec. Lorsqu'on lui a
demandé pourquoi ils n'étaient pas couverts par l'application de
la loi 70, le ministre a répondu, et je cite de mémoire, sujet
à vérifier cela: "II faut comprendre que les agents de la
Sûreté du Québec bénéficient de conditions de
travail régies par une convention collective en cours." J'aimerais
beaucoup qu'on m'explique la différence entre la convention collective
en cours à l'égard des gens frappés par les premier,
deuxième, troisième, quatrième et cinquièmement de
l'article 2 et les agents de la Sûreté du Québec.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Parce que, à ma
connaissance, la convention collective est en cours jusqu'au 31
décembre.
M. Bérubé: L'esprit de la loi, la lettre de la loi
est ainsi conçue qu'elle prolonge de trois mois les conventions
collectives qui arrivent à échéance le 31 décembre
1982. Comme la convention collective de la Sûreté du Québec
n'est pas échue le 31 décembre, quand bien même je
prolongerais les termes de la convention collective, il faudrait que je rouvre
celle-ci, ce que nous ne faisons pas par la présente loi. Donc, c'est la
raison pour laquelle vous ne pouvez pas, dans cette loi, prévoir le
problème des agents de la Sûreté du Québec qui est
un problème qui ne se posera que le 1er janvier 1983, si je ne me
trompe... 1984.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Plutôt que le 31
décembre... 1984, un an plus tard. Et quant aux agents de la paix, pour
autant que je me souvienne, ceux qui sont en négociation...
M. Bérubé: Ils n'ont même pas de convention
à l'heure actuelle, compte tenu, d'ailleurs, du débat que nous
avons eu à l'Assemblée nationale où nous avons,
effectivement, permis aux agents de la paix, premièrement, de se
désaccréditer du syndicat unique dont ils faisaient tous partie
pour se reformer dans de nouvelles unités d'accréditation qui, si
je ne m'abuse, sont maintenant approuvées par le commissaire du travail,
mais pour lesquelles il n'y a pas encore de convention collective. Donc, ils
n'ont pas encore de convention collective à l'heure actuelle. N'ayant
pas de convention collective, on va régler notre problème dans
les conventions collectives.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je crois me souvenir que, dans
l'énumération des corps d'emplois qui ne sont pas touchés,
il y avait des employés de la Société des alcools. Est-ce
que c'est possible cela? De mémoire?
M. Bérubé: C'est exact.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Parce que la convention ne se
termine pas le 31?
M. Bérubé: Ce n'est pas un organisme
budgétaire. La Société des alcools n'émarge pas au
budget du gouvernement.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Et pour mémoire, quels
sont les autres qui ne sont pas touchés? Il y a l'Hydro,
évidemment.
M. Bérubé: Ils n'émargent pas au budget du
gouvernement du Québec.
M. de Belleval: La SAQ.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, cela on vient de le
dire.
M. Bérubé: Seuls les organismes qui émargent
au budget du Québec, soit par le biais de subventions, soit par le biais
d'un recours direct au fonds consolidé, sont couverts dans la
présente loi.
M. Grégoire: La SNA?
M. Bérubé: Non, elle n'émarge pas, non plus,
au budget du Québec.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que la majorité des
sociétés d'État...
M. Bérubé: Ne sont pas touchées.
Mme Lavoie-Roux: ... ne serait pas touchée, comme la SGF
et tout cela?
M. Bérubé: Non.
Mme Lavoie-Roux: Quand vous allez toucher aux cadres relativement
au gel, elles ne seront pas touchées là non plus?
M. Bérubé: Non, dans la mesure où les
sociétés d'État sont, en général je dis
bien, des sociétés commerciales qui ont un marché qui leur
est propre. D'une façon générale, d'ailleurs, on constate
que la rémunération dans nos sociétés d'État
est mieux alignée sur le marché, sauf pour
l'Hydro-Québec.
Mme Lavoie-Roux: Mais, M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Si l'on pense à SIDBEC, par exemple, qui,
je comprends, a son propre marché, dans le sens où le ministre le
dit, mais qui est subventionnée quand même à peu
près chaque année pour x millions, qui sont assumés par
les contribuables du Québec, je ne vois pas pourquoi eux, du moins au
niveau des cadres, ne sont pas l'objet d'une même mesure.
M. Bérubé: SIDBEC ne reçoit aucune
subvention du gouvernement du Québec.
Mme Lavoie-Roux: C'est par emprunts?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Le gouvernement du
Québec souscrit au capital-actions...
M. Bérubé: II est actionnaire.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): additionnel et SIDBEC
émet des actions.
M. Bérubé: Actionnaire presqu'au même titre
que nous sommes actionnaires dans la Domtar.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Ce qui fait penser à la
Caisse de dépôt qui, évidemment, n'est pas couverte, elle
est exclue.
M. de Belleval: Elle est exclue de la Loi sur la fonction
publique.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Cela m'amène à
une question d'ordre général à l'égard des
régimes de rémunération dans toutes ces
sociétés-là. Je me demandais si le gouvernement, à
titre d'actionnaire...
M. Bérubé: Je m'excuse.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je vous en prie.
M. Bérubé: On me dit que SIDBEC a annoncé
qu'elle gelait ses cadres, suivant la proposition gouvernementale.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
C'était le sens de ma question à l'égard de SIDBEC,
je m'en souviens, je me demande même s'ils n'ont pas accepté des
baisses? Il y a eu 75 mises à pied de cadres, ils ont
allégé considérablement les frais généraux
et il y a gel quant aux autres. Je me demande si on assiste à un
précédent qui sera suivi dans tous les autres organismes qui
n'émargent pas au budget.
M. Bérubé: Les lois du Québec sont
maintenant rédigées de manière, à donner un pouvoir
de directive au gouvernement quant aux objectifs et orientations de la
société. Mais l'action gouvernementale se limite à ce
nouveau niveau, d'autant plus que l'Opposition libérale a signalé
à plusieurs reprises le danger de l'ingérence gouvernementale
dans le fonctionnement des sociétés d'État.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Vous ne vous souvenez pas que
j'ai posé une question qui touchait la nature des directives qui
pouvaient être émises par le gouvernement. Je voulais savoir,
étant donné sa qualité d'actionnaire et,
évidemment, de récipiendaire des décisions et des
orientations qui peuvent venir de l'initiative même de ces
sociétés-là, si le gouvernement était en mesure de
faire partager aux membres de la commission parlementaire son impression de la
direction qu'entendent prendre ces sociétés-là. Est-ce que
le gouvernement a senti que l'on répond, dans les sociétés
d'État non couverte par la loi 70, d'une façon qui est conforme
aux objectifs que le gouvernement veut imposer à ses
employés?
M. Bérubé: Je pense qu'il faut distinguer entre,
d'abord, les sociétés d'État qui, en vertu de la loi 55,
doivent faire approuver leur mandat de négociation par le gouvernement,
par le Conseil du trésor, et les sociétés d'État
qui n'ont pas à faire approuver leur mandat de négociation par le
gouvernement. Je pense que l'attitude devrait être tout autre, suivant le
cas.
Indéniablement, dans le cas des sociétés qui vont
faire approuver leur mandat de négociation par le gouvernement, ce sont
généralement des sociétés d'État qui offrent
beaucoup plus de services à la population que des sociétés
de types commercial et, de fait, notre intention est de sortir de la loi 55 les
sociétés d'État de type commercial en disant: ce sont des
sociétés commerciales, elles sont en concurrence et le
gouvernement interfère moins dans leur gestion...
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous
plaît, je m'excuse, M. le ministre. M. le député de
Charlesbourg, est-ce que vous pouvez parler moins fort ou faire votre caucus un
peu plus loin? Il semblerait que ça dérange les membres de la
commission. M. le ministre, vous pouvez continuer.
M. Bérubé: Donc, dans le cas des
sociétés à vocation commerciale, moins il y a
d'ingérence de l'État dans le fonctionnement de ces
sociétés, plus l'imputabilité des gestes de la
société aux administrateurs est facile et grande. Par
conséquent, je pense que les politiques salariales des
sociétés d'État de type commercial qui n'ont pas à
faire approuver leur mandat de négociation devraient rester de leur
strict ressort. Il n'appartient qu'à elles de montrer des bilans
favorables et, pour autant qu'une société a des bilans
favorables, je pense qu'on devrait éviter d'avoir à intervenir.
Ce n'est que lorsqu'une société est effectivement
déficitaire qu'un gouvernement a à intervenir dans le
fonctionnement de l'entreprise en prenant les moyens, comme actionnaire, de
corriger le tir si besoin est. C'est la première partie de ma
réponse.
Quant aux organismes ou sociétés d'État qui doivent
faire approuver leur mandat de négociation par le gouvernement, par le
Conseil du trésor, il est bien évident que nous tenons compte,
dans les mandats approuvés, de la politique salariale
gouvernementale.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II est intéressant de
voir que, dans les sociétés à caractère un peu
commercial, le degré d'imputabilité est plus élevé,
c'est évident, et qu'à ce moment-là, le degré
d'autonomie est plus directement relié à la performance. Le
degré d'autonomie à fixer des rémunérations devient
presque automatiquement relié à des appréciations de la
performance de la société. Je me demandais si - peut-être
qu'on déborde trop - à l'intérieur de la fonction publique
comme telle, on est déjà en mesure, au Conseil du trésor,
de suivre cet exemple. Non pas que les activités de certains services
gouvernementaux sont à caractère commercial
nécessairement, ou même assimilables, mais je me demandais si la
discipline qu'une mesure de performance peut imposer ne pourrait pas être
utilisée afin de ne pas geler, comme s'ils étaient tous
exactement des pions identiques, tous les employés de la fonction
publique, de sorte que les services qui ont une bonne performance, par
opposition à ceux qui n'en ont pas, les employés donc qui
réussissent à l'intérieur de ce service-là, par
opposition à ceux qui ne le font pas, ne seraient pas tous
traités de la même façon. On peut dire, dans les
circonstances actuelles, que les gens qui ont la chance d'être à
l'emploi d'une société d'État, donc qui ne sont pas
obligés de faire approuver leur mandat de négocier, s'en tirent
bien s'ils ont une bonne performance.
M. Bérubé: La ministre de la Fonction publique et
le député de Charlesbourg qui nous font l'honneur de s'asseoir
à notre table et de suivre l'évolution de nos travaux, s'ils
avaient le droit de parole...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
Question de règlement. Je ne pense pas que les deux
députés en cause suivent nos travaux. Je pense que nous sommes
astreints à suivre leurs discussions à ce moment-ci, à tel
point qu'ils n'ont même pas remarqué vos interventions, M. le
ministre.
Mme Lavoie-Roux: Sont-ils membres de la commission?
M. Bérubé: M. le député de
Vaudreuil-Soulanges, ce que j'allais dire devrait, je pense, les amener
à tendre l'oreille, dans la mesure où ils seront directement
concernés par mes propos.
En effet, ces deux aimables confrère et consoeur vous parleraient
de la rémunération au mérite mise en place dans la
fonction publique en vertu de laquelle les cadres gouvernementaux font
maintenant l'objet d'une rémunération forfaitaire au
mérite. Je signalerais, par exemple, que, dans le gel de la masse
salariale aux cadres cette année, nous avons reconduit l'enveloppe
forfaitaire attribuable au mérite et cela pourrait vouloir dire, dans le
cas de cadres performants, que certains d'entre eux auraient droit à une
rémunération. En d'autres termes, dans l'augmentation de salaire
de l'année dernière, il y avait une augmentation de salaire sur
échelle et une augmentation forfaitaire reliée au mérite.
Comme nous reconduisons cette masse monétaire l'année prochaine,
à la suite du gel, il continuera à y avoir un forfaitaire et,
indéniablement, un sous-ministre pourrait très bien
décider de donner l'essentiel de sa masse forfaitaire à deux,
trois ou dix fonctionnaires-cadres qui fonctionnent bien. Par
conséquent, ceux-ci pourraient se voir attribuer une augmentation de
salaire qui dépasse le gel. Mais globalement, en masse, ils ne
dépasseraient pas.
La raison pour laquelle nous avons tenu à maintenir cette
politique, c'est exactement pour poursuivre l'idée du
député de Vaudreuil-Soulanges, qui nous l'a transmise sans doute
par télépathie, et nous l'avons trouvée très
bonne.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je remercie le ministre...
M. Grégoire: M. le Président, j'aurais juste...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): ... de cette dernière
remarque. Ce n'était pas de la télépathie autant qu'un
souci de voir si la loi 70, si jamais le gouvernement décide de
l'adopter, va conserver cet excellent principe dont j'ai été
témoin moi aussi. J'ai déjà été dans le
réseau, à des conseils d'administration de centres d'accueil ou
choses du genre, et j'étais au courant de cela. Mais il n'y a rien qui
me permettait de croire, à la face même du projet de loi no 70,
que cela avait été reconduit. Je dois avouer que je n'ai pas pris
connaissance du bottin, connu sous le nom de Document sessionnel no 350, et je
me demandais, quand on aura une chance de le voir tout à l'heure, si
ça se dégage que la reconduction de la masse comprend
également le forfaitaire ou si ça peut être un objet de
litige.
M. Bérubé: Non, la loi 70 ne s'applique qu'aux
employés syndiqués, donc couverts par une convention collective.
Or, nos cadres ne sont pas syndiqués et leurs conditions de travail font
l'objet d'une discussion avec les associations de cadres et d'un décret
gouvernemental. Ils ne sont donc pas couverts dans la présente loi.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? M. Grégoire:
M. le Président, j'aurais...
Le Président (M. Bordeleau): Sur le même sujet, M.
le député de Frontenac?
M. Grégoire: Oui, sur le même sujet, sur les
sociétés d'État. On parlait tantôt de
sociétés d'État et on les classait selon qu'elles
émargeaient ou qu'elles n'émargeaient pas au budget du
Québec. Or, elles peuvent émarger de deux façons au budget
du Québec: dans la colonne des dépenses et dans la colonne des
rentrées de fonds. Comme, par exemple, la Société des
alcools et Loto-Québec sont des sociétés d'État qui
émargent au budget du Québec non pas en sorties de fonds, mais en
rentrées de fonds, elles remettent leurs profits au fonds
consolidé pour venir augmenter le montant total des revenus.
Si le gel des salaires s'applique à ces sociétés,
où il n'y a pas de concurrence dans le domaine commercial, qui sont
exclusives dans leur domaine, que ce soit Loto-Québec ou que ce soit la
Société des alcools, si elle sont assujetties au même
projet de loi, les rentrées de fonds augmenteront, elles
émargeront donc non pas aux dépenses du budget, mais aux
rentrées de fonds.
M. Bérubé: Exactement.
M. Grégoire: Par le fait même, comme tous leurs
profits viennent émarger au budget du Québec, mais dans la
colonne des revenus, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'inclure ces deux
sociétés d'État - et peut-être d'autres qui ne me
viennent pas à la mémoire ou qui n'existent que parce qu'elles
constituent des rentrées de fonds... Hydro-Québec n'existe pas
que parce qu'elle constitue une rentrée de fonds, Hydro-Québec
peut avoir à prendre de ses revenus pour des investissements autres,
alors que la Société des alcools et Loto-Québec n'ont pas
d'investissements de barrages ou de construction, sauf pour les
activités courantes, j'entends.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Elles peuvent bâtir des
entrepôts, elles peuvent mettre sur pied un système de
distribution...
M. Grégoire: Oui, pour les activités courantes,
mais non pour des investissements de développement de services à
la...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, embouteillage, fabrique de
verre, de bouteilles, à la limite, si on s'intégre verticalement,
horizontalement, de tous bords de tous côtés.
M. Grégoire: Oui, mais elles n'ont pas encore ce
mandat-là. Alors, je me demande si ces sociétés
d'État, qui émargent au budget du Québec dans la colonne
des revenus, pour lesquelles les rentrées de fonds pourraient être
accrues, parce que tous leurs profits vont au fonds consolidé,
étant donné également que c'est leur but premier et
exclusif de voir à fournir des rentrées de fonds, et
également parce qu'elles sont dans un domaine où il n'y a pas de
concurrence, où il n'y a pas de comparaison possible avec l'entreprise
privée, n'y aurait-il pas lieu d'inclure ces deux sociétés
d'État dans le projet de loi?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Avec la permission du
député de Frontenac et du ministre...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Vaudreuil-Soulanges. (21 heures)
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): ... je voudrais
compléter l'argumentation du député, dans la mesure
où, entre autres, en vertu de la loi 16, Hydro-Québec est tenue
de verser un dividende, elle est tenue de payer au gouvernement une prestation
qui va entrer elle aussi dans la colonne des revenus. Les autres
sociétés d'État sont également tenues de verser des
dividendes, qu'il s'agisse de la SGF, etc., si on se réfère au
discours sur le budget de mars 1981. Il me semble, et, en vertu du même
argument, que chaque fois qu'une société d'État aura des
revenus qui lui permettraient de verser un dividende conformément
à la loi ou au désir exprimé par le ministre des Finances,
par extension,
elle devrait être couverte par le projet de loi no 70, selon
l'argumentation du député de Frontenac. Mais je ne pense pas que
cela justifie l'inclusion, incidemment, de ces sociétés comme
étant assimilables à celles qui émargent au budget du
Québec. Je pense qu'il y a une grande différence entre
émarger au budget du Québec tant dans la colonne crédit et
dans la colonne débit que simplement pour le crédit.
M. Bérubé: Là-dessus, je dois dire... M.
Grégoire: Juste pour compléter.
M. Bérubé: M. le Président, j'ai
demandé la parole...
M. Grégoire: Si vous me le permettez, je demanderais au
député...
Le Président (M. Bordeleau): Pour compléter la
question, si le député de Frontenac veut compléter la
question.
M. Bérubé: Je voulais simplement souligner, M. le
Président...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Interrompez-le.
M. Bérubé: ...que j'étais entièrement
d'accord avec le député de Vaudreuil-Soulanges et je trouvais
également que la suggestion du député de Frontenac, en
fait, était certainement difficile à accepter, dans la mesure
où on ne faisait pas les distinctions adéquates, mais je partage
entièrement le point de vue du député de
Vaudreuil-Soulanges.
M. Grégoire: Je faisais les distinctions adéquates
en ce sens que je parlais...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Frontenac.
M. Grégoire: ...des sociétés d'État
qui étaient là pour procurer des revenus au Québec. Je
parlais également des sociétés d'État qui
étaient exclusives et dont le rôle n'était pas de faire des
investissements, mais simplement de fournir des revenus au gouvernement. Je me
demandais pourquoi...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
J'aimerais qu'on puisse, entre autres, si je peux répondre pour
le ministre, décider si...
M. Bérubé: Vous pouvez tenter.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): ...c'est une vocation de faire
des investissements et une autre vocation de procurer des revenus.
M. Bérubé: Je peux suggérer que je me
déplace. Je vais m'installer de l'autre côté. J'ai
l'impression qu'il y a une compréhension beaucoup plus grande du projet
de loi...
M. Grégoire: Je crois que j'ai posé une question
sérieuse.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que le ministre veut
répondre?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je pensais que j'y avais
répondu.
Des voix: Ah!
M. Grégoire: En fin de compte, la Société
des alcools est tout de même une société gouvernementale
qui n'est pas une société d'investissement ou une
société commerciale comme la Société nationale de
l'amiante. C'est une société d'État beaucoup plus
reliée à la fonction publique. Alors, j'aimerais avoir la
réponse.
M. Bérubé: J'aimerais que vous posiez les questions
au ministre de Vaudreuil-Soulanges.
Une voix: Une autre prévision!
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Grégoire: La réponse, c'est non, je suppose.
Le Président (M. Bordeleau): Une réponse.
M. Bérubé: Non, c'est extra-budgétaire, en
ce sens qu'il ne s'agit pas d'organismes budgétaires pour lesquels,
à l'intérieur d'un équilibre financier d'une année,
il y aurait des déboursés budgétaires prévus dans
les livres des crédits. Je vais vous répondre simplement
également parce que la question que vous soulevez est quand même
une question passablement complexe. Prenons, par exemple, la
Société des alcools. Vous avez des employés qui ont des
conventions collectives qui vont jusqu'en 1984.
M. Grégoire: Je parle de conventions collectives qui
viennent à échéance le 31 décembre.
M. Bérubé: Oui, mais on se retrouve avec des
traitements distincts en fonction des syndicats à l'intérieur
d'une entreprise et on s'engage dans une solution qui ne m'apparaît pas
équitable pour l'ensemble des employés de l'entreprise. Je
comprends que le député de Frontenac a une idée lumineuse.
Mais le problème, c'est la variété. Vous avez, par
exemple, les caissiers, les employés
de bureau de la Société des alcools qui ont leur
convention collective qui arrivent à échéance le 30 juin
de cette année. Évidemment, comme ils doivent faire approuver
leur mandat par le Conseil du trésor, le gouvernement va tenir compte,
dans la négociation, des mandats. Le projet de loi no 70 - il faudrait
peut-être revenir au sens du projet de loi no 70 - vise à faire en
sorte que le déboursé en salaires du gouvernement soit
réduit de 521 000 000 $. Mais quand bien même je modifierais des
conventions collectives à Hydro-Québec ou à quelque
endroit que ce soit, cela ne modifie en rien, pour l'année courante, les
entrées de fonds. Cela va les modifier l'année suivante. Or,
l'année suivante, c'est une autre année budgétaire et,
à ce moment-là, cela doit faire l'objet d'une négociation
normale comme pour le reste des employés du secteur public.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Et c'est l'admission par le
ministre, évidemment, que le projet de loi no 70 est un exercice
d'équilibre financier pour l'année budgétaire se terminant
le 31 mars 1983.
M. Blais: On l'a toujours dit.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): On l'a toujours dit, oui.
M. Bérubé: C'est un projet de loi qui vise à
assurer la réalisation des équilibres budgétaires
prévus dans le discours sur le budget.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est bien marqué.
M. Bérubé: Indéniablement, je pense que
c'est une loi franche.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Transparente dans son
objectif.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie et, ensuite, M. le député de Sainte-Anne.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais revenir sur
la question de la Sûreté du Québec qui a été
exclue du projet de loi. J'aimerais demander au ministre ce que la
Sûreté du Québec représente comme masse salariale.
Ensuite, quel est le pourcentage d'augmentation, cette année, au plan
salarial, à la Sûreté du Québec.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: De mémoire, je ne saurais dire,
mais je peux cependant vous faire part du principe que nous avons
suggéré pour la rémunération, l'alignement sur une
trentaine de corps policiers du Québec, en ce sens que la CTCUM et son
corps de police jouent presque un rôle de leader dans le domaine des
salaires de la police au Québec. La conséquence est qu'il y a au
moins une trentaine de municipalités - 32, je crois - au Québec,
qui ont de gros corps de police, qui, finalement, sont tous à
parité.
Le problème, dans le cas de la Sûreté du
Québec, au moment où nous avons entrepris la négociation,
c'est qu'on se retrouvait avec le corps d'élite de police du
Québec, appelé à intervenir dans toutes ces
municipalités comme expert, mais moins bien
rémunéré que les policiers de la CTCUM. Si on doit aborder
la question de la rémunération de la police, il faudrait le faire
un peu globalement d'un commun accord avec la CTCUM, la Communauté
urbaine de Québec et autres, pour en arriver à une
stratégie et à une politique salariale uniformes pour les corps
de police au Québec.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Le sens de ma question - ce n'était
peut-être pas très clair - était de savoir si
l'augmentation qu'ils auront, en 1982-1983, se compare à celle que les
fonctionnaires, à qui on va reprendre de l'argent, auront pour
l'année 1982-1983, alors qu'ils allaient chercher une augmentation de
l'ordre d'à peu près 16%, globalement. Je pense que c'est cela,
14% ou 16%.
M. Bérubé: Comme c'est une augmentation de six
mois, en 1982-1983, c'est un peu plus difficile. Pour 1981-1982, c'était
14,04%.
Mme Lavoie-Roux: Oui, évidemment, c'est six mois.
Comparativement à la Sûreté du Québec, est-ce que
leurs augmentations étaient à peu près du même ordre
de grandeur? Si je pose la question, c'est que j'aimerais savoir, étant
donné qu'eux ne seront pas touchés par cette loi, ce que...
M. Bérubé: Les pourcentages de l'augmentation: pour
le 1er janvier 1982 à la Sûreté du Québec, c'est 9%;
pour le 1er janvier 1983, c'est 8% comme taux d'augmentation temporaire.
Mme Lavoie-Roux: Oui, quand vous dites "temporaire"...
M. Bérubé: II est à renégocier
à la fin de 1983.
Mme Lavoie-Roux: À la fin de 1983. De toute façon,
leur augmentation était moindre que celle de la fonction publique en
général.
M. Bérubé: Oui, mais il faudrait faire attention,
car il y a eu un rajustement du taux de base.
M. Blais: Les policiers? M. Bérubé: Oui.
M. Blais: Ils ne sont pas là-dedans, c'est hors sujet.
M. Bérubé: Non, ils ne sont pas dedans, mais au 1er
janvier 1982, on a donné une augmentation de 9% avec une clause
d'indexation. Quand on va connaître le résultat de l'IPC de 1982,
on va corriger les 9%. Pour 1983, on a donné une augmentation de 8%.
Mais on a convenu que ces 8%, en septembre, pourraient être
renégociés. Ils se disaient: On ne sait pas ce qui va être
donné à la fonction publique. Alors, il y a une clause de
réouverture en septembre 1983 pour savoir quel taux sera applicable au
1er janvier.
C'est une clause remorque sur la fonction publique.
Comme le gouvernement fait une disposition spéciale le 1er
janvier 1983...
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: À ce moment, est-ce que vous utiliserez
la même disposition que vous utilisez à l'égard de ceux qui
sont couverts par la présente loi?
M. Bérubé: Non, c'est encore difficile à
dire. En ce qui concerne le mandat de négociation avec la
Sûreté du Québec, il n'a pas encore fait l'objet de
décisions gouvernementales. Cela va dépendre du mandat de
négociation que nous aurons adopté pour l'ensemble du front
commun et des règlements qui s'ensuivront.
Mme Lavoie-Roux: II y a quand même une question
d'équité. C'est pour cela que je m'informais un peu de l'ordre de
grandeur ou de la moyenne des salaires à la Sûreté du
Québec, ce que vous n'êtes pas capable de me donner ce soir, je le
comprends bien. Vous allez quand même aller chercher de l'argent chez des
gens qui sont de très bas salariés dans la fonction publique, du
moins si les choses restent telles quelles, alors que pour une question
d'accident, une question presque fortuite - leur convention finit en 1983 et
celle des autres finit en 1982 - ils vont échapper à cette
règle de restitution d'une partie du salaire. Il se peut qu'à la
Sûreté du Québec, même si on regarde la moyenne des
salaires, ce soit passablement plus élevé que la moyenne dans la
fonction publique ou dans certains corps d'emploi ou certaines
catégories d'employés.
M. Bérubé: II faut comprendre, cependant, que dans
la mesure où ils ont une convention collective en cours, ce qui sera
négocié, à la fin de 1983, n'a pas d'incidence
budgétaire pour l'année en cours. Par conséquent, le seul
point en cause est un point d'équité de traitement, comme vous le
soulignez par rapport aux autres employés du secteur public. Je pense
que cette équité de traitement peut faire l'objet, à ce
moment, de mandat de négociation donné aux négociateurs
gouvernementaux, de manière à assurer un traitement comparable
à l'ensemble des employés du secteur public. Comme je Vous
disais, il dépendra sans doute du type de règlement qu'on aura
avec le front commun pour l'ensemble des trois années, pour
décider du genre de mandat qu'on accordera dans le cas de la
Sûreté, à la fin de cette année.
Mme Lavoie-Roux: En tenant compte de la
récupération de salaire que vous seriez allés chercher
dans la fonction publique?
M. Bérubé: Indéniablement, je pense que nous
tiendrons compte du traitement accordé à l'ensemble des
employés du secteur public, de manière à nous assurer que
le fardeau soit équitablement réparti. Ce n'est pas un fardeau
agréable, loin de là. La loi 70 n'est pas une loi douce et dont
je suis, disons, fier de défendre comme telle, si ce n'est qu'elle
permet d'épargner à nos concitoyens aux prises avec la pire crise
que l'on connaisse, que moi je n'aie jamais connue...
Une voix: Vous êtes jeune.
M. Bérubé: Oui, c'est ça, je suis jeune
encore, à 40 ans, je n'ai peut-être pas vu grand-chose. Mais c'est
la pire crise que j'ai pu connaître dans mon existence. Cette loi vise
donc à essayer de faire porter le poids par un peu tout le monde. Mais,
d'un autre côté, je pense que, dans une société,
personne n'acceptera de faire les frais d'une crise à eux seuls. Il faut
- vous avez parfaitement raison, Mme la députée de L'Acadie -
répartir équitablement le fardeau et c'est uniquement à
cette condition qu'on peut obtenir un consensus social. Je pense que vous avez
parfaitement raison là-dessus.
Le Québec peut traverser la crise, non seulement peut la
traverser, mais je suis convaincu que nous pouvons très bien traverser
la crise actuelle d'après ce que je peux voir. Mais ce n'est possible
que si nous obtenons ce consensus social. Or, je ne vous cache pas que la
maturité des Québécois me surprend continuellement avec
les années. Les Québécois montrent un niveau de
maturité sociale collective qui dépasse de
beaucoup ce que l'on observe partout ailleurs dans le monde. C'est dans
ce sens, je crois, que non seulement le Québec va tirer son
épingle du jeu de la crise, mais, à mon point de vue, va beaucoup
mieux s'en tirer que la plupart des pays dans le monde.
Mme Lavoie-Roux: Merci. Vous avez bien saisi ma
préoccupation, M. le ministre.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: Je n'ai que quelques questions. À l'article 2,
on parle des organismes dont le personnel est nommé suivant la Loi sur
la fonction publique. Est-ce qu'il y a des organismes où ce n'est pas
tout le personnel qui est nommé suivant la Loi sur la fonction publique,
où quelques-uns sont nommés suivant cette loi, mais où la
grande majorité ne l'est pas?
M. Bérubé: On me dit qu'il y en a.
M. de Belleval: Des organismes, moitié, moitié?
M. Polak: C'est justement ça, M. le Président. Je
pensais à ce qui arrive dans un cas où, par exemple, le
président d'une commission et quelques autres fonctionnaires sont
nommés suivant la Loi sur la fonction publique, mais le reste du
personnel... Je pense, par exemple, à la CSST. Je pense qu'on a un
cas...
M. de Belleval: Ils sont nommés suivant la Loi sur la
fonction publique.
M. Polak: Oui, mais pas tous les employés, pas tout le
personnel.
M. de Belleval: Oui, sauf certains cadres.
M. Bérubé: C'est l'organisme, à ce moment,
qui est couvert.
M. Polak: Les organismes dont le personnel est nommé. Je
voudrais dire, tout de même, que s'il y a des cas où quelques-uns
sont nommés suivant cette loi, mais le reste ne l'est pas, est-ce que
tout le monde tombe là-dessus, oui ou non? Lorsque vous dites "dont le
personnel est nommé", peut-être devrait-on être un peu plus
clair parce que, autrement, il peut y avoir du monde qui dit: Moi, je suis
engagé, j'ai un contrat direct avec l'organisme. Je ne suis pas
nommé suivant la Loi sur la fonction publique. (21 h 15)
M. Bérubé: Cela n'a pas d'importance, cela ne
s'applique qu'aux employeurs. Cela ne s'applique pas à l'individu qui
travaille pour l'employeur. Cela s'applique à l'employeur.
M. Polak: Quand on dit: "dont le personnel", il faut bien
comprendre que ce n'est pas la grande majorité du personnel, mais
seulement quelques personnes. Tout l'organisme est couvert, selon vous.
M. Bérubé: Oui.
M. Polak: Bon! Je suis d'accord avec cela, mais vous seriez mieux
de l'écrire un peu plus clairement dans le projet de loi, si telle est
votre intention.
Je voudrais maintenant revenir à l'autre élément du
paragraphe 4, les organismes qui sont mentionnés en annexe. M. le
Président, il y a tout de même, quelque part, de l'arbitraire
là-dedans. La meilleure preuve qu'il y a de l'arbitraire, c'est que vous
êtes obligé d'avoir une annexe qui décrit ceux qui sont
là-dedans, qui pensaient ne pas y être. On va prendre les
catégories. Ces gens, ces fonctionnaires ont lu la loi. Ils se sont dit:
Où suis-je? Suis-je là-dedans, oui ou non? Ils y trouvent la
Commission des droits de la personne, la Commission de formation
professionnelle de la main-d'oeuvre, la Commission des services juridiques - on
a parlé des policiers - et la Société des traversiers du
Québec. Ils sont là-dedans. La Régie des installations
olympiques y est aussi, mais ce que je trouve difficile à accepter,
c'est que le public ou la population voit le gars qui travaille à la
Société des alcools du Québec comme autant un
fonctionnaire public, par exemple, que quelqu'un de la Régie des
installations olympiques. Donc, le fait que vous soyez obligé d'avoir
une annexe démontre que vous avez de l'arbitraire. Vous devez vous
expliquer parce que vous n'êtes pas capable de définir.
M. Blais: Bonjour, M. le chef de l'Opposition.
M. Polak: De plus, il y a un autre élément
arbitraire. Le ministre a donné la réponse quand on a
parlé des policiers. Le ministre a dit: La Sûreté du
Québec n'est pas là-dedans, parce que sa convention prend fin
seulement le 31 décembre 1983, mais, même là, il y a de
l'arbitraire, parce que le pauvre gars qui a une convention qui prend fin le 31
décembre 1982 est pris là-dedans, tandis que celui qui est dans
une unité de négociation dont la convention prend fin
après le 1er janvier 1983 y échappe. Évidemment, je
comprends le raisonnement du ministre, parce qu'il se dit: Je ne veux pas
toucher le salaire de ceux qui ont une convention. C'est une formule que j'ai
appelée le "truc Bérubé". Vous essayez de faire
indirectement ce que vous n'avez pas
osé faire directement, mais c'est le même résultat.
Vous allez dire: On attend le 31 décembre. Ensuite, on va renouveler la
convention, prolonger la convention, sauf la clause la plus importante - ou une
des plus importantes - celle du salaire. Voici ce que je fais. Ce n'est pas un
renouvellement de ce qui existait, mais, quand on parle de la
Sûreté du Québec, par exemple, où la convention
prend fin au plus tard en 1983, vous n'y touchez pas. Il y a tout de même
quelque chose d'arbitraire. Mme la députée l'a mentionné,
qu'est-ce qui arrive pour ces policiers qui vont avoir pleine augmentation,
aucune coupure? On n'a même pas ajouté un article disant que,
quand leur convention prendra fin, on va prendre en considération ce qui
est arrivé dans d'autres secteurs, au moins pour indiquer à la
population qu'on ne traite pas quelqu'un qui travaille dans un domaine relevant
des deniers publics d'une manière différente de celui qui
travaille dans un autre domaine. Un gars qui travaille, par exemple, pour
Hydro-Québec, rue Dorchester, y échappe et l'autre qui travaille
rue Berri pour un ministère n'y échappe pas. C'est difficile pour
la population d'accepter cette distinction; on considère qu'il y a
quelque part de l'arbitraire. Au moins, si vous disiez, M. le ministre: Je ne
veux pas toucher ceux dont la convention prend fin après le 1er janvier
1983, mais il faudra au moins les toucher de quelque manière pour
montrer qu'on va prendre soin de ce cas-là plus tard et qu'au moins la
population sache qu'on demande aussi un sacrifice à ces employés
des secteurs public et parapublic. Tout le monde doit faire des sacrifices
à un moment donné. Il y a toute une grande catégorie qui
échappe à cela et d'autres n'y échappent pas.
Prenons, d'ailleurs, les corporations d'aide juridique. Il y a des fonds
qui entrent aux corporations d'aide juridique. Il y a des frais reliés
à des causes qui entrent. À la Société des
traversiers du Québec, il y a des fonds qui entrent. À la
Régie des installations olympiques, il y a des fonds qui entrent.
À la Commission des droits de la personne - c'est vrai - il n'y a pas de
fonds publics qui entrent. Le fait que vous êtes obligé d'avoir
une annexe explique votre dilemme.
Donc, j'ai un peu l'impression que vous n'avez pas résolu ce que
la population perçoit comme étant, quelque part, de l'arbitraire.
Évidemment, selon votre thèse, je comprends bien que vous essayez
de trouver une belle formule qui dise: On va tout respecter jusqu'au 31
décembre. Jusqu'à minuit, vous êtes corrects. Une minute
après minuit, le 1er janvier, là, je vous coupe. C'est la belle
formule que vous avez trouvée, mais il y en a beaucoup qui
échappent à cela seulement parce qu'ils ont la chance d'avoir une
convention collective qui, par hasard, prend fin une couple de mois plus tard,
six mois ou un an plus tard. Il y a quelque chose d'arbitraire. D'ailleurs, les
chefs syndicaux qui sont venus ici ont fait valoir exactement ce point. Ils ont
dit qu'il fallait que tout le monde soit puni de la même manière.
Ils ne voulaient pas être punis du tout, mais ils ont au moins fait la
remarque qu'il y avait de l'arbitraire là dedans. Je suis d'accord avec
cela. Si l'on est obligé de faire des sacrifices sur toute la ligne et
qu'on a le courage de le faire, mais il y a de l'arbitraire très
difficile à expliquer.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le
député de Charlesbourg.
M. de Belleval: Je peux peut-être répondre
rapidement au député de Sainte-Anne. Il y a deux principes qui
ont guidé le choix du gouvernement. Le premier principe, c'est le
respect de la convention collective jusqu'à sa date d'expiration.
J'admets les arguments du député de Sainte-Anne quand il dit:
Cependant, le lendemain de la journée de l'expiration de la convention,
vous agissez. Mais quand même, c'est le principe. Peu importe que vous le
trouviez boiteux ou pas, on ne s'entendra pas là-dessus, mais c'est
quand même le premier principe qu'on a suivi. On respecte la convention
jusqu'à la date d'expiration.
Le Président (M. Bordeleau): Non, non, mais sur le premier
principe...
M. de Belleval: Le premier principe...
Le Président (M. Bordeleau): L'un des membres n'a pas
compris votre première partie et me demandait...
M. de Belleval: Le premier principe, c'est qu'on respecte les
échelles salariales jusqu'à la date d'expiration de la
convention. Le deuxième principe, c'est qu'on ne touche que les
organismes qui émargent au budget. On ne touche à aucun organisme
dont les dépenses sont extra-budgétaires. Comme le disent les
notes explicatives du projet de loi, le but du projet de loi est de
réaliser l'équilibre budgétaire pour l'exercice 1982-1983.
Alors, pourquoi trouve-t-on les organismes en question à l'annexe? C'est
parce que ce sont tous des organismes budgétaires. Cependant, on ne
retrouve pas la SAQ parce que ce n'est pas un organisme budgétaire.
Donc, comme cela ne rencontre pas les objectifs du projet de loi qui sont
d'abord des objectifs budgétaires. Quand je parle du principe
budgétaire, c'est le principe budgétaire de l'année
budgétaire en cours: 1982-1983.
Ce qui va se passer sur l'exercice budgétaire 1983-1984, c'est
une autre paire
de manches. On traversera la rivière quand on y arrivera. Il
n'est pas nécessaire de rappeler, de toute façon, les
réponses du ministre aux questions de la députée de
L'Acadie, qui étaient très pertinentes et je pense que les
réponses étaient tout aussi pertinentes. Je pense que cela
répond à votre question. Il n'y a pas d'arbitraire à
l'intérieur des deux principes mentionnés. Vous, vous critiquez
les deux principes...
Mme Lavoie-Roux: On se fait des compliments.
M. Polak: M. le Président, une dernière
question.
M. de Belleval: ... mais à l'intérieur des deux
principes mentionnés, je pense qu'il n'y a pas d'arbitraire. Si vous
trouvez que dans l'application de ces deux principes il y a de l'arbitraire ou
si vous avez un exemple, vous nous le direz, on pourra regarder...
M. Polak: Je vais justement vous donner un exemple.
M. de Belleval: ... mais à l'intérieur des deux
principes, il n'y a pas d'arbitraire.
M. Polak: J'ai un exemple, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: Oui. Le député de Charlesbourg vient
d'expliquer ce qu'il en est des organismes budgétaires. Mais quelle est
la définition des organismes budgétaires? Je vais vous donner un
exemple. Le CSST est censée s'autofinancer parce que les employeurs
paient leur contribution. Il y a tout de même une grande contribution de
la part du gouvernement. Pour faire des inspections, il y a 40 000 000 $ des
fonds publics qui vont là-dedans. Est-ce que c'est un organisme
budgétaire, oui ou non? Selon le raisonnement du député de
Charlesbourg, peut-être pas; selon mon raisonnement, peut-être que
oui. Donc, est-ce que "organisme budgétaire" veut dire qu'il est
considéré comme tel dès qu'il reçoit quelque chose
du budget de la province et jusqu'à quel point?
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Charlesbourg.
M. de Belleval: Ce sont des organismes dont les dépenses
sont assumées à même les crédits votés par
l'Assemblée nationale.
M. Polak: Mais qu'est-ce qui arrive à un organisme qui
reçoit dans son enveloppe totale pour son fonctionnement financier,
disons 10%, pour un aspect particulier du gouvernement? Est-ce que c'est
considéré comme un organisme public? Pas selon le
député de Charlesbourg. Si le ministre n'est pas d'accord avec
cela, qu'il s'explique parce que je veux le comprendre.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, si vous
voulez ajouter quelque chose.
M. de Belleval: Les organismes en question...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Charlesbourg.
Une voix: Non, non.
M. de Belleval: Enfin, je peux juste compléter ma
réponse. Ces organismes en question sont nommés et
rémunérés selon la Loi sur la fonction publique. Les
salaires, dans ces organismes, sont établis sur la même structure
salariale que celle de la fonction publique. Par exemple, un employé de
la CSST est nommé et rémunéré selon la Loi sur la
fonction publique. Il appartient d'ailleurs au même syndicat que le
Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec. Par
conséquent, on ne peut avoir deux politiques salariales à
l'intérieur du même syndicat nommé en vertu de la
même loi. Est-ce que c'est compris?
M. Polak: Je comprends, mais le ministre, je ne veux pas tirer de
conclusion, mais par ses réactions j'ai eu l'impression qu'il
n'était pas tout à fait du même avis. Il peut
vérifier auprès de son fonctionnaire parce qu'il peut y avoir des
cas où c'est nébuleux.
M. Bérubé: Ce n'est pas nébuleux. La
définition ici est absolument limpide. C'est le gouvernement et ses
ministères ainsi que les organismes couverts par la Loi sur la fonction
publique. Chaque fois que la Loi sur la fonction publique concerne les
classifications, rémunérations... D'ailleurs, chaque organisme
dans sa loi constitutive prévoit que la Loi sur la fonction publique
s'applique. Donc, chaque organisme où la Loi sur la fonction publique
prévoit les patrons de rémunérations et d'encadrement, les
échelles, les changements de classe et autres, donc, prévoit les
conditions de travail des employés, à ce moment-là, ils
sont couverts par la présente loi. Tous les salariés des
organismes où la Loi sur la fonction publique s'applique sont
automatiquement couverts.
De plus, il y a également des organismes pour lesquels la Loi sur
la fonction publique ne s'applique pas mais que nous voulons couvrir, et ce
sont les organismes qui émargent directement au
budget. Vous les avez ici: Commission des droits de la personne,
commissions de formation professionnelle, Commission des services juridiques,
corporations d'aide juridique, Société des traversiers et
Régie des installations olympiques. Ce sont des organismes dont les
employés ne sont pas couverts par la Loi sur la fonction publique, mais
qui néanmoins émargent directement au budget du Québec sur
une base annuelle et, par conséquent, nous voulons les couvrir.
M. Polak: Est-ce que...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: ... tous les organismes qui tombent dans cette
catégorie sont mentionnés dans l'annexe? On ne peut pas trouver
une exception? Avez-vous bien regardé votre liste?
M. Bérubé: Évidemment, ceux dont les
conventions collectives venaient à échéance...
M. Polak: Après le 1er janvier. M.
Bérubé: Suivant le principe... M. Polak: L'autre
principe. M. Bérubé: Suivant le deuxième...
M. Polak: C'est difficile à expliquer, M. le ministre,
à la population, cet arbitraire. Parce qu'il y a de l'arbitraire
là-dedans.
M. Bérubé: II n'y a pas d'arbitraire.
M. Polak: Quelqu'un est chanceux si sa convention expire
après janvier. Le 1er janvier, il est correct, mais quelqu'un dont la
convention expire le 31 décembre devient victime. Cela est difficile
à accepter.
M. Bérubé: Ce n'est pas du tout difficile à
accepter. Il faut comprendre que cette personne dont la convention collective
arrive à échéance après va devoir négocier
de nouvelles conditions de travail et, par conséquent, c'est dans le
mandat de négociation que l'on incorporera... J'ai de la
difficulté à comprendre le raisonnement du député
de Sainte-Anne parce qu'une journée il nous dit: C'est
épouvantable de substituer au régime de négociation
l'arbitraire de la loi no 70 et, d'un autre côté, il me demande de
me substituer au processus normal de négociation. Ce que nous faisons
ici, c'est que nous disons tout simplement, pour les organismes qui
émargent au budget du Québec, d'ici à la fin de
l'année budgétaire, nous voulons réduire vos budgets
d'opération. Par conséquent, nous devrons, quand vos conventions
collectives arriveront à échéance le 31 décembre,
prolonger votre convention collective. Donc, principe tout à fait clair,
limpide.
Mais pour les employés du secteur public, après le 1er
avril... Vous allez me dire, mais quel va être le salaire? Cela
dépendra du salaire qui aura été négocié. Le
salaire après le 1er avril n'est pas fixé dans la loi. Il est
établi temporairement en attendant qu'un accord, si l'accord est
réalisé après le 1er avril, il est établi
temporairement à ce niveau-là en attendant l'accord. Si l'accord
était signé à l'automne, le salaire le 1er avril serait
différent de celui qui est prévu dans la loi. Donc tout
renouvellement de convention collective qui se produit après le 1er
janvier va faire l'objet d'une négociation et c'est dans le mandat de
négociation que nous définirons les niveaux de
rémunération. Là, on respecte les processus normaux de
négociation dans tout ce qui n'affecte pas le budget de 1982-1983. (21 h
30)
Le Président (M. Bordeleau): Le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: M. le Président, je n'ai pas d'autres questions.
J'ai travaillé souvent avec le ministre à la commission des
engagements financiers et je sais que si lui interprète les paroles d'un
député, il faut toujours répondre parce qu'il va nous
citer la prochaine fois. Donc, je ne veux pas que le ministre interprète
mes paroles d'une manière erronée. L'opinion de notre parti
politique, c'est qu'on est contre ce projet de loi pour des raisons biens
expliquées: la manière unilatérale ou indirecte de faire
quelque chose que vous n'auriez pu faire directement. Vu que nous sommes dans
la misère et que nous sommes des gens responsables, on regarde à
l'intérieur de votre misère ce que vous essayez de faire. On veut
même, à l'intérieur de votre misère, essayer
d'éviter l'arbitraire et indiquer qu'il y a tout de même, dans ce
que vous avez fait - ce que nous n'acceptons pas du tout comme étant
correct - des points de distinction à faire. Il faut donc comprendre ces
deux points de vue en même temps.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, cela va? L'article 2,
est-ce que c'est adopté?
M. Bérubé: Adopté.
Le Président (M. Bordeleau): Sur l'article 2, M. le chef
de l'Opposition.
M. Ryan: Est-ce que vous seriez en mesure de déposer une
liste de tous les organismes non budgétaires qui échappent
à cette loi?
M. Bérubé: Oui. Il faudrait voir M.
Brière; c'est une opération...
M. de Belleval: La liste des organismes non
budgétaires?
M. Bérubé: La liste complète de tous les
organismes non budgétaires relevant...
M. Ryan: Tous les organismes qui ne sont pas atteints par cette
loi.
M. de Belleval: Ce sont surtout les sociétés
d'État.
M. Bérubé: Oui, oui. Il faudrait relever la liste
de toutes les sociétés d'État, de tous les organismes. On
peut faire dresser - il y en a une collection assez complète, cela peut
être un processus assez long effectivement, on peut faire dresser la
liste de toutes les sociétés d'État et de tous les
organismes relevant d'une loi quelconque.
M. Ryan: Avec le nombre d'employés de chacune.
M. Bérubé: Oui.
M. Ryan: Cela va?
Juste une question. Les juges, il me semble que vous avez répondu
à cela l'autre jour.
M. Bérubé: Les juges...
M. Ryan: Si cela a été demandé, je ne ferai
pas répéter.
M. Bérubé: Les juges voient leurs
rémunérations décrétées par le gouvernement
et la politique suivie est l'alignement à un niveau d'administrateur qui
est celui de cadre en général. À ce moment, on applique
exactement les mêmes paramètres que les paramètres suivis
pour les cadres.
M. Ryan: Les paramètres suivis pour les cadres, on n'y
reviendra pas. Ce n'est pas dans la loi, les cadres.
M. Bérubé: Ils sont gelés.
M. Ryan: Ils sont gelés à partir du 30 juin.
M. Bérubé: C'est-à-dire qu'ils sont
gelés sur la base de la proposition de juillet. Les cadres
inférieurs vont recevoir une augmentation. C'est cela. Il y a beaucoup
de petits cadres, il faut tout de même se dire cela. Il y a les cadres
pour les tableaux de 1 m et 1 m 50 et il y a les petits cadres. Je pense aux
contremaîtres, aux employés d'hôpitaux travaillant, par
exemple, à l'entretien. Contrairement à ce que beaucoup de gens
pensent, ce sont souvent des employés qui ne sont pas
rémunérés à des salaires faramineux. On trouve les
cadres de niveau inférieur qui vont se voir accorder une augmentation le
1er juillet qui ne sera pas nulle mais qui sera celle proposée dans la
proposition de juillet avec un gel modulé, donc, une augmentation qui
part d'une pleine protection du pouvoir d'achat pour le salarié de 13
000 $ à 0, lorsqu'on atteint à peu près 40 000 $.
M. Ryan: La liste, quand pourra-t-on l'avoir?
M. Bérubé: Demain, on s'amusera au Conseil du
trésor. On essaiera de ne pas en oublier parce qu'il y en a une telle
collection que je me demande même si une telle liste existe.
M. Polak: Mettez une "tablette" sur cela.
M. de Belleval: Elle existe au Conseil exécutif.
M. Grégoire: C'est clair que le Conseil du trésor
sait tout ce que comporte le gouvernement.
M. Bérubé: Vous savez, à force d'adopter des
lois créant tel ou tel organisme à un moment donné, il y
en a qui nous échappent. Il doit bien exister quelque part un
organisme... Par exemple, je me souviens d'une commission créée
à l'époque de Duplessis...
Une voix: Pour inventorier les commissions.
M. Bérubé: Oui, un comité de surveillance
des... Il y en a une quantité invraisemblable. En tout cas, cela va
être amusant de voir.
M. de Belleval: II y a la Commission de l'électrification
rurale.
M. Bérubé: C'est cela, la Commission de
l'électrification rurale; celle-là m'avait épaté.
Effectivement, j'ai découvert qu'il y avait toujours cette Commission de
l'électrification rurale au gouvernement. Paraît-il que chaque
ministre responsable qui est passé là a voulu abolir cette
commission et, quand il s'est enfoncé dans les dédales
juridiques, pour abolir la commission, après un certain temps, il a
décidé que cela ne valait pas la peine.
Le Président (M. Bordeleau): M. le chef de
l'Opposition.
M. Ryan: Dans le cas des membres de la Sûreté du
Québec, quand la convention
présentement en vigueur a-t-elle commencé et quand se
termine-t-elle?
M. Bérubé: Elle a commencé le 1er janvier
1980, et elle se termine le 31 décembre 1983.
M. Ryan: Est-ce que vous avez les pourcentages d'augmentation des
salaires dans ce cas?
M. Bérubé: Nous vous les avons donnés
tantôt.
M. Ryan: Oui, d'accord. Excusez-moi.
M. Bérubé: Ce qu'on a donné, c'est l'indice
des prix à la consommation. C'est un pourcentage de base de 9% au 1er
janvier 1982 et corrigé pour l'inflation après le contrôle
des pourcentages.
M. Ryan: Vous avez signé vers le milieu de 1981, je
suppose?
M. Bérubé: Oui.
M. Ryan: En juin 1981. À ce moment, vous en étiez
encore à la politique de pleine indexation.
M. Bérubé: Oui.
Le Président (M. Bordeleau): M. le chef de
l'Opposition.
M. Ryan: C.Q.F.D.
M. de Belleval: Adopté M. le Président.
M. Ryan: Sur division.
Le Président (M. Bordeleau): L'article 2 est adopté
sur division.
M. Bérubé: La Sûreté du Québec
a eu l'avantage d'entrer en négociation trop tôt.
Le Président (M. Bordeleau): Sur division, mais tel
qu'amendé.
M. Ryan: Le réveil est tardif, c'est ce que je voulais
dire.
Conditions de travail en 1983
Le Président (M. Bordeleau): Alors, l'article 3.
M. de Belleval: C'est l'extension de la convention
collective.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, il y a également
un amendement, M. le ministre, à l'article 3.
M. Bérubé: Oui, M. le Président, à
l'article 3.
Le Président (M. Bordeleau): Voyons d'abord
l'amendement.
M. Bérubé: Oui. Il s'agit, d'abord, de modifier le
premier, je peux vous lire l'amendement. "Cet article est modifié par le
remplacement, dans la première ligne, du mot "termes" par le mot
"stipulations". C'est pour éviter qu'il y ait une confusion avec le
terme de la convention collective qui est l'échéance.
Deuxièmement: "Par l'addition de l'alinéa suivant: Dans les cas
où un employeur ou une association de salariés ne sont pas
liés par une convention collective le 26 mai 1982, les stipulations
négociées et agrées à l'échelle nationale en
vertu du chapitre 0-7.1 des lois refondues du Québec constituent, aux
fins du présent chapitre, une convention collective en vigueur le 26 mai
1982 et prévoyant la date d'expiration du 31 décembre 1982."
Nous avons constaté, après avoir fouillé
très soigneusement, que l'hôpital Notre-Dame n'a toujours pas de
convention collective et que quelques commissions scolaires n'ont toujours pas
de convention. On se serait retrouvés dans la situation où on
appliquait la loi à tous ceux qui avaient effectivement signé une
convention et ceux qui avaient carrément refusé de signer une
convention n'auraient pas été couverts par la loi. C'est une
précision pour s'assurer que tout le monde est couvert.
Mme Lavoie-Roux: Au plan scolaire, c'est uniquement au niveau
local qu'il n'y a pas de convention.
M. Bérubé: C'est cela.
Mme Lavoie-Roux: Mais cela n'a pas d'implication salariale, les
conventions locales.
M. Bérubé: Mais tant qu'il n'y a pas de convention
locale à l'éducation, la convention nationale...
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que les deux
amendements seraient adoptés?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Un instant, j'aurais - je ne
sais pas si c'est à titre de sous-amendement - une suggestion à
formuler, à moins que cela ait déjà été
fait. Je pensais que le mot "agréé" prenait deux "é" et un
"es" à la fin, à la quatrième ligne de...
M. Bérubé: Vous avez parfaitement raison. On me
souligne, de nouveau, que vous avez raison.
Mme Lavoie-Roux: C'est la façon dont il traite la langue
française.
M. Bérubé: Sur les virgules et les accents aigus,
vous vous trompez rarement.
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, s'il vous
plaît! Alors, il faudrait ajouter à l'amendement un "e"
finalement.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Un "e" accent aigu. Entre le
"e" accent aigu et le "e" sans accent.
M. Bérubé: C'est vraiment une subtilité de
la langue française avec trois "e" de suite;, il faut le voir. Mes
félicitations au député de Vaudreuil-Soulanges dont la
sagacité et l'oeil vif...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
Surtout.
Le Président (M. Bordeleau): Cela pourrait faire partie du
deuxième amendement.
Est-ce que les amendements seront adoptés?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je regarde la formulation et
j'aurais un commentaire d'ordre général à faire qui a
trait peut-être à l'interprétation des lois de façon
stricte dans l'utilisation de certains termes et au-delà de cela, des
choix politiques que le gouvernement a faits. Lorsque je vois "échelle
nationale", je me demande si l'emploi du mot "nationale" dans un texte de loi,
hormis l'indignation de l'Assemblée nationale du Québec avec
lequel on est tous d'accord...
M. de Belleval: C'est le terme utilisé dans les
conventions collectives.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est ce que je cherche comme
précédent, au point de vue interprétation, ce que cela
signifie.
M. de Belleval: C'est que dans les conventions collectives...
Une voix: ... n'applique pas sur...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Un à la fois.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, s'il vous plaît!
Exactement. M. le député de Charlesbourg.
M. de Belleval: Oui, en vertu de la loi, on a ce qu'on appelle
les stipulations agréées à l'échelle nationale et
les stipulations agréées à l'échelle locale et la
convention collective fait la distinction entre les deux types de
dispositions.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Vaudreuil-Soulanges.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Par voie de définition,
je présume que le terme "nationale" est décrit quelque part.
M. Bérubé: Dans la loi 55, la loi... Une voix:
Au chapitre O-7.1. M. Bérubé: Au chapitre 0-7.1.
M. de Belleval: Les négociations dans les secteurs public
et parapublic.
M. Bérubé: C'est cela. Une voix: La loi no
55.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: En fait, on ne réfère
pas... Moi, je n'aime pas beaucoup lorsqu'on identifie des lois par chapitre 0
ou O ou -7.1, j'ai beaucoup de difficulté à savoir, sauf que je
vais vous lire le titre, c'est la Loi sur l'organisation des parties patronales
et syndicales aux fins des négociations collectives dans les secteurs de
l'éducation, des affaires sociales et des organismes
gouvernementaux.
Mme Lavoie-Roux: ... 59, cela a été
passé.
M. Bérubé: Alors, cela devient terriblement lourd
à manipuler, finalement.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Là où je veux en
venir au point de vue de l'interprétation, purement et simplement, c'est
que je présume que "nationale", dans le contexte, réfère
au territoire connu et désigné sous le nom de Québec.
M. Bérubé: Comme l'Assemblée nationale,
comme l'Union Nationale.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, comme je l'ai
évoqué.
M. de Belleval: Ce n'est pas territorial cela.
Une voix: Y compris les îles au grand large.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Le
Parti national populaire.
M. Grégoire: Comme la ligue Nationale
de hockey.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): La ligue Nationale... Ah, non!
ah bon voilà!
Mme Lavoie-Roux: Ah! voilà le clou!
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Le député de
Frontenac a parlé de la ligue Nationale de hockey et je me
permets...
M. Grégoire: Je retire mes paroles, M. le
Président.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): ... de prétendre, c'est
pas dans la même...
M. Grégoire: Je retire mes paroles.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): acception du terme "national"
qu'il a employé dans son intervention le mot "national" et,
évidemment, il ne référait pas au même mot
"national" qu'on retrouve ici. C'est que je veux voir, au point de vue
juridique, où se trouve le lien, l'équation entre l'utilisation
du mot "national" et la désignation du territoire du Québec.
Mme Lavoie-Roux: C'est une réponse politique.
M. de Belleval: Alors, cela va.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Non.
Mme Lavoie-Roux: C'est parce que je...
M. de Belleval: La règle d'interprétation...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est marqué ou ce n'est
pas marqué!
M. de Belleval: La règle d'interprétation, c'est
que les lois...
Mme Lavoie-Roux: Je vois le conseiller du ministre qui se
retire.
M. de Belleval: ... n'ont pas de nature extra-territoriale.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Parce qu'il y a la ligue
Nationale de hockey, comme le fait remarquer le député de
Frontenac.
M. Bérubé: Non, non, mais la Loi sur l'organisation
des partis...
Mme Lavoie-Roux: II y a aussi la Société nationale
de l'Amiante.
M. Bérubé: ... patronale et syndicale, aux fins des
négociations, prévoit une définition pour les stipulations
négociées à l'échelle nationale de celles
négociées à l'échelle locale, et nous nous en
tiendrons à cette définition de la loi.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
L'article?
M. Bérubé: C'est le chapitre O.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, cela ça va.
M. Bérubé: -7.1.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): 0-7.1, oui.
M. Bérubé: Des lois refondues du Québec.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
Article?
M. Bérubé: Article 2.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Qui se lit?
M. Bérubé: Vous voulez lire la loi?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Non, pas toute la loi
simplement...
M. Bérubé: Bien, c'est parce que je vous
suggérerais.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): ... l'extrait pertinent
à moins que vous vouliez faire un "filibuster" absolument.
M. Bérubé: Non, non. Je vais juste vous donner
l'exemple d'un article: "Le présent chapitre s'applique à toute
convention collective liant une association de salariés et une
commission scolaire, un collège ou un établissement. "Les
stipulations d'une telle convention collective sont négociables et
agréées à l'échelle nationale ou à
l'échelle locale ou régionale conformément aux
dispositions qui suivent." Et suit à ce moment-là des
dispositions indiquant quel type d'article est négocié à
l'échelle nationale et quel type est négocié à
l'échelle locale.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): D'accord.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que cela va?
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, question
d'information.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, c'est
toujours sur le "national"?
Mme Lavoie-Roux: Oui, sur le "national".
Le Président (M. Bordeleau): Oui, allez-y, Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: C'est strictement une information qu'un
conseiller juridique pourrait nous donner, c'est que cette utilisation du terme
"national" en dehors de l'Assemblée nationale est survenue à
partir de 1977.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II y avait l'Union
Nationale.
M. Bérubé: Si je ne me trompe, enfin j'avais cru
entendre dire qu'au sein de la famille qui a donné naissance au
député de Vaudreuil-Soulanges, il y a eu des gens qui, à
ma connaissance, ont milité longtemps, de façon assez active,
d'ailleurs, au sein d'un autre parti politique qui, je crois, s'appelait
l'Union Nationale.
Mme Lavoie-Roux: Ah, oui, oui. Dans ce sens-là, il y avait
la Palestre nationale aussi. Non, ce que je voulais dire, est-ce que toutes les
lois antérieures ont conservé le terme provincial ou si vous les
avez toutes modifiées?
M. Bérubé: Je dois vous avouer que, en
général, dans nos lois, nous, on n'aime pas tellement le terme
"provincial".
M. Lachance: C'est péjoratif.
M. Bérubé: C'est péjoratif le terme
"provincial".
Mme Lavoie-Roux: Non, mais je parle des lois antérieures
à votre arrivée.
M. de Belleval: Non, non, mais, Mme la députée, il
y a des lois antérieures à 1976 où on utilise couramment
le mot "national" au lieu du mot "provincial". (21 h 45)
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: On me dit - c'est un commentaire qui est
intéressant, je ne vous en dirai pas la source - mais on me dit
qu'effectivement, à l'époque de l'Union Nationale, on
évitait d'avoir à mentionner "provincial" qui, effectivement, en
français, a une connotation un peu péjorative, du moins si vous
êtes parisien. À ce moment-là, on parlait du Québec,
on évitait tout le problème en parlant du Québec.
Mme Lavoie-Roux: C'était des...
M. Bérubé: Maintenant, disons que cette
pudicité n'a plus sa place et il est approprié de parler de la
nation québécoise et du territoire national de cette nation. Par
conséquent, je pense que l'on peut parler effectivement de
l'échelle nationale. Il faut parfois prendre ses distances au sein d'une
famille et se démarquer par rapport à l'influence parentale. Je
peux comprendre que le mot "national" perde son attrait, mais il ne faudrait
pas généraliser.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le chef de
l'Opposition.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II ne faudrait surtout pas
présumer...
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît:
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II n'y a pas de question de
privilège en commission parlementaire.
Mme Lavoie-Roux: C'est toujours une question de
règlement.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est une question de
règlement qui permet...
Le Président (M. Bordeleau): Je ne voudrais pas que vous
parliez tous les trois en même temps non plus. J'avais d'abord reconnu le
chef de l'Opposition, à moins que vous ne vouliez continuer sur le
"national" ou sur autre chose.
M. Ryan: Je ne suis pas pressé.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
J'essayais de voir la nature...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Vaudreuil-Soulanges.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, j'essayais de voir la
nature des propos du président du Conseil du trésor dans ses
dernières remarques. Peut-être veut-il jeter un éclairage
additionnel, mais je n'ai jamais saisi que, depuis mon entrée en
politique, j'ai pu être soupçonné de façon directe
ou indirecte, visible ou invisible, de ne pas tenter de représenter au
mieux de ma connaissance les intérêts des
Québécois.
M. Bérubé: Je remarque que vous utilisez
l'intérêt des Québécois.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Plutôt que
l'intérêt des indigènes du Québec...
M. Bérubé: L'intérêt national.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): ... ou l'intérêt
national?
M. de Belleval: Est-ce que l'article 3 serait adopté, M.
le Président?
M. Ryan: M. le Président, j'aurais une remarque sur ce
sujet-là.
Le Président (M. Bordeleau): II faudrait d'abord adopter
les amendements avant d'adopter l'article tel qu'amendé.
M. Ryan: J'avais une remarque à l'intention du ministre
à propos du mot "national".
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le chef de
l'Opposition.
M. Ryan: II me semble que cela aurait été plus
efficace si le gouvernement, dans les dernières négociations
constitutionnelles, avait essayé de faire insérer dans la
nouvelle constitution du pays la reconnaissance de la communauté
nationale québécoise, comme il s'était engagé
à le faire et comme il a omis de le faire. Il se l'est rappelé
à la toute fin de la conférence. Je comprends qu'aujourd'hui on
cherche refuge dans des formules verbales à défaut d'avoir pu
affirmer là où c'était la place les réalités
que l'on prétend servir.
M. Bérubé: Je suis d'accord avec le chef de
l'Opposition.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Je pense que les dernières rondes
de négociations ont véritablement marqué l'échec du
fédéralisme et la très grande difficulté qu'il y
avait à incorporer le concept d'une nation québécoise au
sein de l'univers pancanadien et je reconnais avec le chef de l'Opposition...
Je sais d'ailleurs que ce n'était pas son point de vue... Son point de
vue de véritable fédéraliste se défend, mais
malheureusement les véritables fédéralistes se meurent
à l'heure actuelle.
M. Ryan: Je voudrais simplement rappeler au ministre...
Le Président (M. Bordeleau): M. le chef de
l'Opposition.
M. Ryan: ... que jamais la délégation de son
gouvernement aux conférences constitutionnelles n'a déposé
de texte précis d'amendement constitutionnel qui aurait traduit ses
velléités dans des actions véritables à la table
des négociations. C'est malheureux, c'est malheureux!
M. Grégoire: Peut-être qu'on est un peu en dehors du
projet de loi.
M. Ryan: Oui, c'est vrai, mais on a été
entraîné de ce côté-là par des remarques du
ministre qui allaient pas mal loin de la question posée.
M. de Belleval: Revenons aux amendements.
M. Grégoire: C'est pourquoi je vous ai laissé
terminer.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Bordeleau): C'est une question de
règlement?
Mme Lavoie-Roux: C'est à vous de nous rappeler à
l'ordre et non au député de Frontenac.
Le Président (M. Bordeleau): N'importe quel membre peut
soulever une question de règlement pour ramener d'autres membres
à l'ordre.
Mme Lavoie-Roux: II n'a pas soulevé de question de
règlement.
Le Président (M. Bordeleau): II a voulu rappeler un autre
membre à l'ordre; je pense que c'est permis assez couramment dans nos
commissions.
M. Grégoire: Cela allait tellement bien que je ne voulais
pas invoquer le règlement inutilement.
Le Président (M. Bordeleau): De toute façon,
c'était assez vrai que l'on débordait largement du cadre de la
loi 70, de l'étude article par article.
Mme Lavoie-Roux: Mais ce projet de loi aura des
répercussions sur notre vie nationale dans le sens où vous
l'entendez.
M. Bérubé: Indéniablement.
Le Président (M. Bordeleau): Je n'ai pas dit le contraire
non plus.
Mme Lavoie-Roux: Alors, on n'enfreint pas le
règlement.
Le Président (M. Bordeleau): Mais je vous rappelle que
l'étude article par article du projet de loi, si nous voulons la suivre
à la lettre, c'est vraiment le mot à mot du projet de loi.
M. Bérubé: Je voudrais me porter quand même
à la défense du chef de l'Opposition,
non pas qu'il ait besoin de quelque défense contre le
député de Frontenac, mais j'admets que parfois le
député de Frontenac charrie.
M. de Belleval: II a plus de difficultés avec le
député de Richmond.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que cela va pour les
amendements à l'article 3? Les trois amendements? On peut les adopter et
ensuite on pourra continuer sur...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Les amendements, ensuite, on
peut revenir au cadre.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, on peut revenir au cadre
de l'article 3 amendé. Cela va? Les trois amendements?
M. Bérubé: II y a deux amendements... non, il y en
a trois.
Le Président (M. Bordeleau): Non, il y en a deux, je
m'excuse.
M. Bérubé: II y a deux amendements et un
sous-amendement.
M. Grégoire: Adopté.
Le Président (M. Bordeleau): Les amendements, d'habitude,
ça ne pose pas de problème. Alors, les deux amendements sont
adoptés et l'article 3, tel qu'amendé...
M. Ryan: Évidemment, l'article 3...
Le Président (M. Bordeleau): M. le chef de
l'Opposition.
M. Claude Ryan
M. Ryan: L'article 3 soulève des objections fondamentales
de notre part parce que c'est vraiment la première disposition du projet
de loi qui définit les intentions véritables du gouvernement. On
dit dans cet article que toute convention collective dont les stipulations en
vigueur le 26 mai 1982 prévoient la date d'expiration du 31
décembre 1982 demeure en vigueur jusqu'au 1er avril 1983 malgré
le terme qui y est stipulé. Il est bien clair ici que le gouvernement
nous demande d'entériner un dessein par lequel il voudrait que soient
prolongées unilatéralement sans qu'on passe par le processus de
la négociation les conventions collectives qui devaient expirer le 31
décembre 1982.
Ainsi que nous l'avons dit à plusieurs reprises jusqu'à
maintenant, nous croyons qu'une convention collective qui a été
signée par deux parties doit demeurer en vigueur tant qu'on n'a pas
décidé, de consentement réciproque, d'y apporter quelque
modification que ce soit. Dans ce cas-ci, comme l'indique la suite du texte, on
maintient cette convention en vigueur jusqu'au 1er avril pour ensuite la
modifier unilatéralement. Par conséquent, comme nous ne sommes
pas favorables au deuxième bout de la chaîne, nous ne pouvons
être en faveur du premier bout de la chaîne. Si le gouvernement
voulait simplement garder en vigueur la convention collective, il n'est pas
nécessaire de le dire dans un texte de loi, il n'a qu'à observer
un article des conventions qui sont actuellement en vigueur et l'article 59 du
Code du travail, et ça ira très bien. S'il prend le soin de le
dire de nouveau ici, c'est parce qu'il y a d'autres intentions qui s'en
viennent. Comme nous ne sommes pas favorables à l'ensemble de
l'opération, inutile de dire que nous ne pouvons pas souscrire au
début.
M. Bérubé; J'aimerais...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre.
M. Bérubé: ... souligner au chef de l'Opposition,
parce qu'il va trouver quand même le fait intéressant, qu'on me
confirme que, effectivement, dans l'ensemble des conventions collectives
signées par le gouvernement, il y a des conventions avec les
fonctionnaires et certaines clauses dans le réseau des Affaires sociales
où il n'y a pas de clause de reconduction automatique, car le Code du
travail permet d'insérer des clauses de reconduction dans les
conventions collectives mais n'en fait pas une obligation. Donc, ce n'est pas
en vertu du Code du travail qu'une telle clause pourrait être
insérée mais bien en vertu de la convention même. Or, j'ai
ici sous les yeux une liste des conventions collectives qui ne prévoient
pas le maintien des conditions de travail jusqu'à la signature d'une
prochaine convention. Dans la fonction publique, par exemple, les
professionnels, fonctionnaires, ouvriers, chirurgiens-dentistes,
médecins, professeurs. À l'Éducation, nous avons le
soutien de la CEQ pour les collèges; la FNEQ pour les collèges;
au secteur des Affaires sociales, le Cartel des organismes professionnels de la
santé, le COPS, la FIIQ; l'Union des employés du service, local
298; le Syndicat canadien de la fonction publique, toutes catégories; la
CEQ, toutes catégories.
Donc, je pense qu'il est important de souligner que beaucoup de nos
conventions collectives ne contiennent pas de clause de reconduction
automatique de la convention collective et l'argumentation du
député d'Argenteuil et chef du Parti libéral ne s'applique
véritablement qu'aux conventions où de telles clauses
existeraient.
Le Président (M. Bordeleau): M. le chef
de l'Opposition.
M. Ryan: Est-ce que le ministre disposerait de l'article 59 du
Code du travail? Ses conseillers l'ont sûrement à leur
disposition.
M. Bérubé: C'est une clause habilitante en vertu de
laquelle il n'y a pas de prescription.
M. Ryan: Maintenant, vous savez comme moi que,
indépendamment, du fait que ce soit inscrit ou non dans la convention,
il y a une convention à laquelle vous tenez tellement dans d'autres
domaines. Quand c'est le gouvernement fédéral qui est
impliqué surtout, vous montez sur les escaliers chaque fois...
M. de Belleval: Vous avez raison.
M. Bérubé: On ne se réfugiera pas
derrière cet argument-là.
M. Ryan: Pardon?
M. Bérubé: On ne se réfugiera pas
derrière cet argument-là.
M. Ryan: Très bien. Je pense que nous nous entendons
très bien pour dire que, surtout dans le domaine constitutionnel et dans
le domaine des relations du travail, qui présentent un certain nombre
d'affinités, les conventions, les habitudes, les
précédents ont une valeur très importante et, comme vous
reconnaissez que dans le cas dont nous parlons, la convention que
j'évoque, très importante, vous comprendrez pourquoi nous ne
voulons pas être partie à une mise en activité qui viserait
à la fouler au pied ou à la mettre de côté purement
et simplement, comme c'est le cas dans ce projet de loi.
M. de Belleval: Vous comprendrez aussi que, comme nous nous
sommes au pouvoir et que nous avons des responsabilités que vous n'avez
pas, nous sommes obligés de faire ça.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? M. Ryan: Je
pensais que...
Le Président (M. Bordeleau): M. le chef de
l'Opposition.
M. Ryan: ... être au pouvoir, c'était accepter,
encore plus que les sujets, d'être soumis à la règle
objective de la loi et des grandes conventions qui règlent les rapports
humains. Cela m'étonne beaucoup d'entendre ce raisonnement, mais il me
semblait...
Une voix: Pas moi!
M. Ryan: Pas vous?
M. de Belleval: M. le Président, quand vous assumez les
responsabilités du pouvoir, vous avez une règle ultime qui doit
vous gouverner, c'est que vous gouvernez pour le bien commun et cela impose des
responsabilités qui, parfois, sont douloureuses à assumer, mais
que nous avons décidé d'assumer.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Avec le sourire que nous fait
le député de Charlesbourg.
M. de Belleval: M. le Président, je ne souris pas et
j'interdis au député de Vaudreuil-Soulanges de dire que je
souris.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II m'interdit de constater la
réalité, c'est invraisemblable.
M. Paquette: Non, le député n'a jamais eu l'air
aussi bête!
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Évidemment, je ris de
lui!
M. de Belleval: Le député de Rosemont vient de
confirmer que je n'avais jamais eu l'air aussi bête que maintenant, M. le
Président.
Mme Lavoie-Roux: C'est parce que vous avez mis en péril le
bien commun que vous êtes obligé de recourir à des moyens
comme ceux-là.
Le Président (M. Bordeleau): M. le chef de l'Opposition,
vous voulez continuer?
M. Ryan: Oui, mais il y avait M. le ministre qui voulait
parler.
Le Président (M. Bordeleau): Vous attendez une
réponse du ministre?
M. Bérubé: M. le Président, je vais
attendre, je voulais simplement indiquer mon intention de répondre.
M. Paquette: C'est votre thèse, elle n'est
supportée par aucun fait.
M. Ryan: Très bien.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): ...
M. Ryan: Ici, le gouvernement reconnaît clairement,
j'espère, que, dans cet article 3, il décide de prolonger d'une
période de trois mois des conventions qui devaient expirer le 31
décembre 1982 et admet au moins qu'une telle décision, dans le
cours normal des choses, doit être le fruit
d'un accord entre les deux parties, la partie syndicale et la partie
patronale. Ou s'il veut dire que, parce que les conventions étaient
expirées - je tiens bien à ce qu'on précise, parce que
j'ai entendu des affirmations de principe qui peuvent aller assez loin - on
pouvait décider, après coup, que cela se prolonge de trois
mois.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Yves Bérubé
M. Bérubé: Non, M. le Président, le
Parlement est souverain et a toujours le pouvoir de légiférer des
conditions de travail dans l'ensemble des secteurs public et parapublic et
même du secteur privé, dans la mesure de ses pouvoirs
constitutionnels, en ce sens que nous ne pourrions pas imposer des conditions
de travail au secteur privé, puisque c'est un pouvoir qui, à ma
connaissance, relève du pouvoir fédéral. Je pense que pour
ce qui est des prix et des salaires, c'est Ottawa, si je comprends bien.
Une voix: À propos des prix et des salaires, c'est
nous.
M. Bérubé: Dans le secteur privé?
M. de Belleval: Disons les meuneries, on ne pourrait pas
décréter pour certains types d'entreprises...
M. Ryan: C'est bon à noter, M. le président du
Conseil du trésor.
M. Bérubé: C'est cela. C'est que
l'entreprise...
M. Paquette: II n'a pas eu le temps de s'occuper de
constitution...
M. de Belleval: On peut le faire dans le secteur
privé.
M. Ryan: Ce n'est pas encore son domaine, on voit qu'il
commence!
M. Paquette: Vous trouvez qu'il ne s'occupe pas assez de
constitution?
M. Ryan: C'est un gros morceau, c'est plus que le Labrador!
M. de Belleval: On ne pourrait pas, dans les meuneries, par
exemple...
M. Bérubé: Vous savez, dès qu'on s'embarque
dans cette jungle constitutionnelle où il s'agit de définir le
pouvoir d'une province, le pouvoir de l'État fédéral,
c'est extrêmement difficile. Je reconnais être un laïc en la
matière, mais ce qui me désole, c'est que, par rapport à
l'ensemble de mes concitoyens, je suis considéré comme un expert,
et tout ce que ça prouve, c'est que le système n'est pas
très bon, parce que évidemment il n'y a à peu près
personne qui peut se retrouver. Mais je sais que le conseiller du gouvernement
pourra sans doute nous détailler quels sont les pouvoirs dont dispose le
gouvernement et je suis sûr que le chef du Parti libéral, qui a
une longue connaissance du droit constitutionnel, pourra sans doute, lui aussi,
faire le partage de toutes les juridictions des provinces et des juridictions
fédérales. Mais j'avouerai qu'ils ne doivent pas être
très nombreux ces experts en la matière et je ne veux pas
m'embarquer dans les pouvoirs constitutionnels des provinces. Je veux
simplement revenir aux arguments du chef du Parti libéral. (22
heures)
Essentiellement, à l'article 3, le gouvernement prolonge des
conventions collectives. Suivant l'usage normal des négociations dans
les secteurs public et parapublic, le gouvernement a accepté de se
soumettre au Code du travail et au régime des négociations
conventionnelles. Toutefois, à de nombreuses reprises, dans le
passé, à un moment ou à un autre, l'État a
abandonné son chapeau d'employeur soumis au Code du travail et a
suspendu l'application du Code du travail et même des conventions avec
des clauses de reconduction valides, pour dicter de nouvelles conditions de
travail. Je pense qu'il ne l'a fait, en général, que dans les
occasions où il estimait qu'il y avait crise. Évidemment, je
dirais que, chaque fois qu'il l'a fait, il s'est toujours trouvé des
catégories de citoyens pour penser qu'il n'y avait pas crise. Toutes ces
lois, dites spéciales, qu'elles aient été adoptées
par le gouvernement actuel, par le gouvernement précédent ou par
l'autre avant, ont été, en général,
décriées par la partie syndicale comme étant un abus de
pouvoir, un refus de se soumettre au Code du travail et à la libre
négociation, et elles ont été violemment
condamnées, prétextant que toutes les étapes de la
négociation n'avaient pas été complètement
respectées.
Donc, on a vu, dans le passé, des gouvernements
légiférer des conditions de travail sans que les conventions
collectives, qui prévoyaient une clause de reconduction, n'aient
été négociées et modifiées à la suite
de ces négociations avec le libre consentement des deux parties, et le
gouvernement est intervenu. Il l'a fait, chaque fois, dans une situation qu'il
estimait de crise suffisamment grave pour intervenir. Je concède
cependant que l'ensemble de la société pouvait ne pas être
d'accord sur l'urgence. Dans certains cas, on a peut-être pensé
que le gouvernement était intervenu trop vite. Dans d'autres cas, on a
pensé qu'il
avait pris trop de temps à intervenir. Enfin, le jugement de
l'état d'une crise est un jugement très subjectif.
Ce qui se passe ici, c'est que le gouvernement analyse la situation
budgétaire, analyse les solutions qui s'offrent à lui et fait des
choix. Ayant fait un choix, il décide d'indiquer très clairement
qu'à moins qu'il y ait une entente négociée pour rajuster
la masse de salaire, au cours de cette année-ci, il devra dicter des
conditions salariales de manière à diminuer cette masse. On
pourra ne pas partager l'analyse que le gouvernement fait de la crise. On
pourra ne pas partager l'analyse que le gouvernement fait des choix. On pourra
ne pas partager également les origines de la crise. Mais, entre nous,
même si on ne partage pas l'analyse quant à l'origine de la crise,
je pense que c'est ce genre de débat stérile en ce sens que je
pourrai, pendant des heures, m'attaquer au fédéralisme comme
étant responsable de la crise, et l'Opposition, avec raison, dira:
Cessez de critiquer; peut-être que vous avez parfaitement raison, mais la
question n'est pas de savoir qui est coupable, qui est le bouc
émissaire, qui est la cause; la question, c'est de savoir: Étant
donné la situation, que faisons-nous?
Donc, que vous ayez raison ou tort quant à la cause de la crise,
que nous ayons raison ou tort quant aux causes de la crise, il y a une crise.
Tout le débat que l'Opposition a cherché à mener sur le
gouvernement comme étant la cause de la crise, pour moi, cela n'a
absolument aucune valeur dans la mesure où il nous faut, à un
moment donné, dire ce que nous faisons.
M. Polak: ... pas là, on n'aurait pas de crise comme
celle-là.
Le Président (M. Blais): S'il vous plaît, M. le
député de Sainte-Anne.
Mme Lavoie-Roux: II va falloir passer une loi spéciale
pour vous mettre au pas.
M. Bérubé: Si le député de
Sainte-Anne veut finir sa crise, on pourra peut-être continuer, M. le
Président.
Le Président (M. Blais): Merci beaucoup, M. le
ministre.
Une voix: M. le député de Sainte-Anne a raison. Si
on n'était pas là, il n'y aurait pas de crise.
M. Bérubé: M. le Président.
M. de Belleval: Cela n'a pas de bon sens, mais disons qu'on va
accepter cela.
M. Bérubé: Partant de cette analyse, on dit: II y a
une crise; il y a un choix de solutions. Nous faisons l'analyse et tirons un
certain nombre de conclusions que nous estimons, à notre connaissance -
nous n'avons jamais eu, même pas d'argumentation de la part de
l'Opposition - inévitables qui nous amènent à des choix
et, dans l'éventail de choix que nous avons devant nous, nous en
éliminons une série en disant: Non, ils sont à rejeter;
retenons le dernier. Ayant retenu le dernier, il ne faut pas induire en erreur
les travailleurs de l'État qui pourraient croire qu'ils vont pouvoir
s'asseoir à une table de négociation avec un partenaire ou un
adversaire qui va négocier de bonne foi, alors que cet employeur a, au
contraire, fait son lit, pris une décision quant au contenu des
conditions de travail qui devront prévaloir et, par conséquent,
va s'asseoir mais ne négociera pas de bonne foi, tel que le prescrit le
Code du travail.
Ayant fait son lit, la conséquence logique est la loi 70. Elle
est logique, mais il faut faire son lit. Je comprends pourquoi l'Opposition
libérale ne peut pas effectivement approuver la loi no 70, c'est parce
qu'elle ne sait pas quels choix elle aurait fait au milieu de la crise. Ne
sachant pas quels choix elle aurait fait, je comprends que la loi 70 ne soit
pas agréable à ses yeux. Le drame, c'est que nous sommes au beau
milieu d'une crise et, fort heureusement, le Parti libéral est dans
l'Opposition. Si le Parti libéral était au pouvoir et qu'il ne
savait que faire au milieu de la crise, là, nous serions
véritablement mal pris. Fort heureusement, il y a un gouvernement
à Québec et c'est grâce à cela qu'on pourra sortir
de la crise.
Le Président (M. Blais): Merci, M. le ministre.
Mme Lavoie-Roux: Ce n'était plus sérieux votre
affaire, M. le ministre, n'est-ce pas?
M. Claude Ryan
M. Ryan: Je tiens à rappeler au président du
Conseil du trésor que depuis plusieurs années le Parti
libéral du Québec enjoignait le gouvernement d'avoir plus de
discipline dans la gestion des finances publiques. Jusqu'au 13 avril 1981, vous
vous êtes moqués de ces propos, vous les avez tournés en
dérision, laissant entendre qu'un miracle économique était
en marche au Québec et qu'il y avait des prophètes de malheur qui
voulaient nous ramener au Moyen Âge. Vous allez infiniment plus loin que
nous ne l'avons jamais demandé quand nous vous proposions, à
temps, d'appliquer les freins là où il fallait les mettre. Vous
n'avez qu'à relever les propos de votre premier ministre, en
particulier, et de beaucoup d'autres membres du Parti québécois.
Vous
allez voir que vous vous êtes réveillés après
le 13 avril, quand vous êtes allés chercher une victoire sous de
fausses représentations.
Mme Lavoie-Roux: C'est exact.
M. Ryan: C'est un premier point que je voudrais rappeler à
la mémoire du ministre car c'est tellement évident et tellement
facile à vérifier par les comptes rendus des journaux des trois
années qui ont précédé l'élection.
En second lieu, j'entendais le président du Conseil du
trésor dire qu'il est arrivé souvent dans le passé que la
Législature, l'Assemblée nationale est intervenue, contrairement
aux règles ordinaires que définit le Code du travail à
l'intention des employeurs. C'est vrai. Je ne sais pas combien de fois c'est
arrivé sous le gouvernement actuel; je pense que c'est arrivé une
dizaine de fois, à peu près autant de fois que sous le
gouvernement précédent alors que c'était censé
être la fin des lois d'exception quand vous vous êtes amenés
au pouvoir en 1976. Vous aviez, vous autres, une intelligence supérieure
des problèmes de relations du travail et il n'était plus
censé être question de lois d'exception sous un gouvernement
péquiste. En l'espace de six ans, il y en a eu au moins une dizaine.
Je voudrais vous rappeler ceci, contrairement à ce que le
ministre a laissé entendre tantôt: D'abord, les lois d'exception,
même sous le gouvernement péquiste, n'ont été
introduites à l'Assemblée nationale qu'après que toutes
les étapes définies dans nos lois du travail eurent
été respectées. C'est la première fois, de
mémoire d'homme, que le gouvernement soumet à l'Assemblée
nationale un projet de loi avant même que se soient écoulés
les délais normaux de négociation. Même dans la très
grande majorité des cas - je pense qu'il y a eu une ou deux exceptions
tout au plus - où des lois d'exception ont été requises,
ces lois sont venues après que le droit de grève se fut
exercé pendant un certain temps. Des fois, cela a été
quelques jours, d'autres fois quelques semaines et parfois même quelques
mois. Je pense que c'est un premier point qu'il faut établir très
clairement, qui montre une différence radicale entre la situation devant
laquelle vous placez les législateurs québécois et celle
que nous avons connue dans les cas précédents de lois d'exception
en matière de relations de travail affectant les rapports entre le
gouvernement et les employés des secteurs public et parapublic.
Une deuxième différence majeure, et si je me trompe je
serai très heureux de recevoir la correction qui s'impose...
M. Bérubé: Juste une précision à la
suite d'une de vos questions. Le présent gouvernement est responsable,
jusqu'à maintenant, de 5 lois spéciales sur 18 qui ont
été adoptées par ce Parlement.
Le Président (M. Blais): Ce n'est pas une question de
règlement.
M. Bérubé: Non, ce n'est pas une question de
règlement, c'est une précision.
M. Ryan: C'est un bon procédé, je suis de bonne
composition dans ces choses.
Mme Lavoie-Roux: Plus quelques mises en tutelle.
M. Ryan: Vous voulez dire que vous avez adopté 18 lois
spéciales et pas seulement 5?
M. Bérubé: Non, dans l'histoire de la
Législature québécoise, si je comprends bien, il y en a eu
18 depuis 1967.
M. Ryan: Depuis 1976, combien? M. Bérubé:
Cinq.
M. Ryan: Ah non! Il y en a plus que cinq. Franchement, je
regrette, mais vous allez refaire vos calculs. C'est déjà
énorme, mais il me semble qu'il y en a plus que ça.
Mme Lavoie-Roux: Ils ont fait quelques tutelles un peu
barbares.
M. Ryan: Je suis prêt à accepter la
vérification.
M. Bérubé: On pourra vérifier la liste
exacte, mais c'est ce que j'avais comme chiffre, et, d'après la liste
des lois, il y en a 5 sur 18.
Mme Lavoie-Roux: La tutelle de la CECM est une loi
spéciale, à toutes fins utiles.
Le Président (M. Blais): S'il vous plaît, M. le chef
de l'Opposition. Mme la députée de L'Acadie, la parole est au
chef de l'Opposition, si vous permettez.
Mme Lavoie-Roux: De la façon dont ça s'est
passé, c'est la même chose qu'une loi spéciale.
M. Ryan: Je mentionnais d'abord un fait; ces lois
spéciales n'ont été soumises à l'Assemblée
nationale qu'après que cela ait été dûment mis
à l'épreuve. Tous les processus définis dans nos lois du
travail y compris dans à peu près tous les cas, sauf,
peut-être, la fameuse loi que nous avions adoptée en novembre
1980, loi qui essayait de prévenir la grève en imposant
temporairement - la loi 62, je pense. Sauf ce
cas, je pense que tous les autres cas de lois spéciales ont
été instaurés à l'Assemblée nationale
après qu'eussent été exercés tous les recours
prévus par nos lois du travail. Deuxièmement, dans les cas
où le gouvernement s'est senti obligé de soumettre des lois
d'exception à l'Assemblée nationale en matière de
relations du travail entre lui et les employés du secteur public et
parapublic, la raison motivant l'intervention extraordinaire du
législateur était toujours reliée, jusqu'à ce jour,
à la santé publique ou à la sécurité
publique, sauf dans le cas du transport en commun à Montréal.
Nous avons eu au moins deux lois d'exception. Il y en a eu au moins quatre ou
cinq depuis 1967.
Dans ce cas, puisqu'il s'agissait de la sécurité publique,
on peut dire oui dans un sens parce que la circulation étant
complètement déboussolée à Montréal, cela
met en danger la sécurité publique de toute évidence. Cela
augmente le risque d'accidents considérablement. On peut faire une
thèse là-dessus. Je pense que le gros argument qu'on invoquait
était la disruption presque totale de l'économie de la
région montréalaise, à ce moment. En tout cas, dans tous
les cas, les deux seules considérations qui ont prévalu, et ce
sont d'ailleurs les deux seules mentionnées au Code du travail, sont la
santé publique et la sécurité publique. Il est
arrivé un cas, la loi no 23, je pense, en 1976, où on a
rappelé au travail les enseignants parce que l'arrêt de travail se
poursuivait depuis tellement longtemps que l'année scolaire des enfants
était devenue gravement menacée. Encore là, c'était
l'intérêt manifeste d'une partie du public, c'est-à-dire
d'un groupe de citoyens qui avaient un droit essentiel à un service dont
ils étaient privés depuis trop longtemps ou allaient être
privés de manière injustifiée. C'était la
première fois.
On a toujours été extrêmement soucieux
d'éviter des lois spéciales qui procéderaient de
considérations purement économiques. Il y avait des lois qui
entraînaient les dommages considérables pour des secteurs vitaux
de l'entreprise, des grèves, des arrêts de travail ou des conflits
de travail. On se disait: II est très important d'éviter que le
gouvernement intervienne là-dedans et je pense qu'au Canada les seuls
cas où le gouvernement est intervenu dans les conflits de travail,
autant à Québec qu'à Ottawa, ce sont des cas qui
affectaient le transport, les services de transport, Air Canada, les chemins de
fer et le transport en commun à Montréal. On peut le comprendre
parce que c'est vraiment comme tout le système vital d'une
société qui est paralysé par une grève de transport
depuis très longtemps. Dans ce cas-ci, on n'a aucun de ces facteurs.
Pardon?
M. Bérubé: L'éducation.
M. Ryan: Oui, la même chose. Cela va là-dedans
aussi. Dans le domaine de l'éducation, c'est arrivé seulement une
fois, je pense, qu'il y ait arrêt de travail, deux fois, en 1967, si mes
souvenirs sont bons, la loi 25, et en 1976, avec la loi 23. Mais là,
c'est parce que l'année scolaire des enfants était
menacée. On avait laissé courir le conflit longtemps, dans
certains cas, jusqu'à deux, trois mois.
Mme Lavoie-Roux: Pour la région des Vieilles-Forges, une
loi spéciale. Avant 1976, oui, excusez-moi.
M. Ryan: Dans tous les cas dont nous avons connaissance,
jusqu'à ce jour, ce sont des raisons d'urgence publique reliées
à la santé publique, reliées au fonctionnement du
système économico-social, les transports, reliées à
l'intérêt des écoliers qui étaient menacés de
perdre une année complète, reliées à la
sécurité publique, une grève des policiers, par exemple,
à laquelle l'Assemblée nationale a été
obligée de mettre fin au moins une fois, en 1969, si mes souvenirs sont
bons. (22 h 15)
Cette fois-ci, la raison est entièrement différente, ce
sont les finances publiques du gouvernement, un gouvernement qui est là
depuis cinq ans, qui nous avait continuellement dit qu'il avait une très
bonne gestion. Il était censé y avoir des magiciens à la
tête de l'appareil financier de l'État. Tout à coup, il
nous arrive en catastrophe et nous dit: II y a une crise quelque part dans le
monde. Apparemment, c'est large, c'est dans le monde en général.
Au gouvernement, tout marche très bien. Il y a une crise dans le monde,
mais on est le seul gouvernement au Canada qui ait le problème de cette
manière, par exemple, mais, nous, on vous dit: On s'est trop
avancé le cou. On a des contrats qui ne marchent plus. On les avait
signés, mais, que veux-tu, ils ne marchent plus et on vous dit: On s'en
vient avec des choses d'exception.
Je voudrais que vous réalisiez bien clairement que, nonobstant le
raisonnement que le ministre essayait de nous servir tantôt, les
circonstances qui caractérisent cette intervention particulière
que le gouvernement requiert du législateur sont radicalement
différentes de celles que nous avons connues jusqu'à maintenant
et ne sont pas de nature à emporter l'adhésion autant que
d'autres cas dont il a été question ou dont il pourrait
être question dans un avenir rapproché en relation avec la
santé ou la sécurité publique. C'est pour cette raison que
nous avons tant de réticence et que nous veillons de manière tout
à fait spéciale à ne point nous laisser induire en erreur
par des raisonnements spécieux comme celui que nous venons d'entendre
des lèvres du ministre.
Le Président (M. Blais): Merci beaucoup. M. le
député de Charlesbourg.
M. Denis de Belleval
M. de Belleval: Je ne veux pas m'étendre là-dessus,
parce que je pense que le chef de l'Opposition a fait son point. Je voudrais
seulement mentionner un exemple ou relever une des affirmations qu'il a faites
quand il a dit que nous étions allés en élection le 13
avril 1981 et que c'est seulement après le 13 avril 1981 qu'on aurait
mis la population devant les réalités qu'on affronte. Je veux
seulement lui rappeler - il l'admettra quand même et, de ce point de vue,
je pense que son sens inné de l'analyse exacte va le servir - que nous
avons présenté un budget avant d'aller en élection le 13
avril 1981, qui comprenait non seulement le budget des revenus, mais aussi le
budget des dépenses - les crédits détaillés et que
ce budget comprenait des compressions budgétaires de 1 000 000 000 $
dont on sait que, par la suite, 800 000 000 $ ont été
réalisés à la fin de l'exercice. Nous n'avons pas
caché à la population la précarité des finances
publiques avant le 13 avril. Quand vous êtes rendus à faire des
compressions budgétaires de 1 000 000 000 $ - c'est sans
précédent -sur un budget d'environ 20 000 000 000 $ de
dépenses, c'est-à-dire un vingtième de vos dépenses
dans lesquelles vous sabrez tout d'un coup, vous admettrez avec moi que c'est
plus qu'une clochette d'alarme, c'est certainement un signal d'alarme
très important. Durant toute la campagne électorale, vous aviez
tout le loisir d'en parler et vous ne vous êtes pas fait faute,
d'ailleurs, d'en parler. Le ministre a aussi souligné tantôt,
durant votre absence, l'évolution des finances publiques depuis cinq ans
en ce qui concerne l'augmentation des effectifs de la fonction publique, qui
s'étaient accrus de 100 000 personnes pendant les cinq années
précédentes et dont l'augmentation a été nulle; on
constate maintenant une diminution, en chiffres absolus, de 4000
fonctionnaires. Le rythme d'augmentation des dépenses publiques est
aussi passé de 17% le 1er avril 1981 et a été
réduit à 13% en moyenne.
Je pense que ce sont tous des éléments qui indiquent bien
que nous avions agi avant le 13 avril 1981. Il est vrai, cependant, que depuis
ce temps, la crise s'est accentuée et qu'on est obligé d'en
arriver maintenant, pour des motifs qui, je l'admets, n'emportent pas
l'adhésion de la même façon qu'à la suite d'une
longue grève dans un secteur donné quand, de toute
évidence, la sécurité ou la santé publique est en
cause. Évidemment, là, on agit de façon préventive
pour des raisons d'intérêt public et de justice sociale beaucoup
plus larges. J'admets avec le chef de l'Opposition que cela n'attire pas
nécessairement le même genre d'adhésion, mais je reviens
quand même sur l'argument de tout à l'heure selon lequel quand
vous avez les responsabilités d'un gouvernement, vous avez des
décisions de ce type à prendre dans un contexte, bien sûr,
controversé. On ne peut pas s'attendre que dans un cas semblable
l'Opposition accepte d'emblée les raisons gouvernementales. C'est son
rôle de les critiquer, mais c'est en même temps notre rôle de
prendre nos responsabilités. Je pense que là-dessus au moins on
sera d'accord pour être en désaccord, mais on sera d'accord que
l'on prend nos responsabilités.
Le Président (M. Blais): Merci beaucoup, M. le
député de Charlesbourg. M. le président du Conseil du
trésor.
M. Yves Bérubé
M. Bérubé: Oui, M. le Président. Je voudrais
simplement souligner un article paru dans la Presse le 22 février 1982,
intitulé... Oui, M. le Président, c'est que je voulais souligner
quelque chose en réponse à l'intervention du chef du Parti
libéral. Donc, cet article de la Presse du lundi 22 février 1982
était intitulé: "La Belgique sous la loi des pouvoirs
spéciaux." Face à la crise économique qui, comme on le
sait, afflige douloureusement de nombreux pays européens, dont la
Belgique, qui connaît un niveau d'endettement deux fois supérieur
à celui des pays de la communauté européenne, celle-ci a
donc dû introduire un certain nombre de lois. En particulier, elle
suspend temporairement - je l'entends, je le conçois - l'indexation des
prix et des salaires dans les conventions collectives. En Belgique, comme on le
sait, la loi prévoit une telle indexation. Dans le cas présent,
on suspend cette indexation temporairement, justement à cause de la
crise, avec une protection des bas revenus qui, eux, jouiront d'une pleine
indexation, un peu dans le sens de la proposition que nous avons
déposée en juillet.
En d'autres termes, je pense que ce n'est pas exact de dire que l'action
gouvernementale est absolument exceptionnelle. Je pense que la situation de
crise est elle-même exceptionnelle. La nécessité de
partager et de répartir l'effort au sein de l'ensemble de la
société est également un devoir de l'État. Il est
d'ailleurs à la base d'un véritable consensus dans la mesure
où l'ensemble des citoyens ont la conviction que tout le monde a fait un
effort. Il est alors beaucoup plus facile d'amener, je pense, une
société à traverser une crise que si, par exemple, on
s'engage dans une série de troubles sociaux où, à un
moment donné, un groupe peut citer un autre groupe qui, lui, n'aurait
pas été touché par
la crise et invoquer cet aspect pour justifier des arrêts de
travail ou des troubles sociaux de première envergure.
Je pense que, face à une crise bien réelle, perçue
de tous, pour laquelle chacun a ses interprétations quant aux causes, il
aurait été de mauvais aloi, de mauvaise foi, de laisser croire
que l'État négocierait de bonne foi des niveaux de
rémunération alors qu'il avait au contraire pris une
décision très claire quant à l'intérêt public
à défendre. Je souligne également que reporter les
négociations dans le cadre normal, avec droit de grève le 1er
janvier dans l'éventualité d'une absence d'accord, aurait soumis
la société québécoise au moyen habituel de pression
dans le domaine des relations de travail, c'est-à-dire des
grèves. Donc, cela aurait amené la population du Québec
à connaître des désavantages importants.
Indéniablement, si l'intérêt public est en cause, le
gouvernement n'aurait pu céder. Par conséquent, on aurait pu
s'engager dans une kyrielle de grèves, pénalisant l'ensemble de
la société et cela, en pure perte, puisque le gouvernement aurait
été assis à une table de négociation mais n'aurait
pas négocié de bonne foi, ayant pris la décision qu'il
devait épargner 80% de nos concitoyens aux prises avec la crise et qui
n'ont pas les avantages des employés du secteur public. C'est cet aspect
que le chef de l'Opposition évite d'aborder, mais qui, je pense, est
fondamental. Je peux comprendre son point de vue, mais je trouve que son point
de vue reste un peu formel. Il s'accroche évidemment aux
mécanismes de la négociation. Il reconnaît que dans le
passé il y a eu des lois spéciales, donc, que celle-ci est
également une loi spéciale. Toutefois, elle est un peu
spéciale dans son caractère spécial, dans la mesure
où elle anticipe une situation plutôt que d'attendre de constater
un échec complet. Or, je pense que, dans la mesure où
l'État employeur a pris une décision, je pense qu'il ne serait
pas de bonne foi qu'il aille s'asseoir à une table de négociation
donnant à croire qu'il pourra effectuer des compromis à propos de
points sur lesquels il n'en fera pas au nom de l'intérêt public,
car la conséquence, c'est que la société aurait eu
à supporter des problèmes de relations du travail, une
période difficile en pure perte puisque, finalement, une fois l'ensemble
d'une population ulcérée, exacerbée, avec des services
à la population menacés, le gouvernement aurait dû, comme
dans le passé, invoquer une législation et forcer les
employés du secteur public, après avoir fait la grève en
pure perte, à rentrer au travail dans les conditions qu'il avait
définies.
Ceci aurait été une attitude de mauvaise foi dans nos
négociations, et la loi no 70, dans ce sens-là, est beaucoup plus
ouverte, plus franche. Elle évite de s'engager inutilement dans un
débat stérile puisqu'il ne pourra pas donner de résultat.
Alors, elle définit clairement les objets de la négociation
avant, mais elle ne se substitue pas à la négociation en ce sens
qu'elle dit: Nonobstant cette volonté gouvernementale de s'assurer que
nous épargnerons l'ensemble de nos concitoyens dans la crise, nous
devons nous asseoir à la table de négociation et chercher
ensemble comment, en renégociant l'ensemble des trois années
suivantes, l'ensemble des clauses normatives, l'ensemble des clauses
salariales, nous ne pourrions pas en arriver à un accord global qui
pourrait permettre de ne pas avoir à appliquer ce projet de loi.
Donc, ce projet de loi n'élimine pas le besoin de
négociation. Au contraire, il dit que la négociation
prévaudra sur le texte de la loi; cela, je pense que c'est dommage que
le chef du Parti libéral, qui est, dans ses analyses, extrêmement
objectif, pesant bien le pour et le contre, esquisse toujours trop rapidement
cet aspect fondamental qui demande qu'on porte d'abord un jugement sur les
moyens à prendre. Si le chef de l'Opposition devait dire au nom de son
parti: Nous, dans ces conditions, nous aurions taxé. Je pense que,
là, nous aurions une discussion objective. Nous pourrions choisir entre
taxer ou s'engager dans l'action entreprise par le gouvernement, et, là,
évidemment, il y a possibilité de débat, mais dans la
mesure où on rejette comme l'Opposition toutes les autres options, que
ce soit taxes, déficits parce qu'il faut quand même que
j'écoute les discours de l'Opposition.
L'Opposition me dit: Nous sommes opposés aux compressions;
deuxièmement, nous sommes opposés à vos déficits
faramineux, et nous sommes opposés à ces niveaux de taxation trop
élevés. À partir du moment où l'Opposition s'est
compromise quant au choix possible et à rejeter d'emblée un
ensemble de choix, je ne peux plus comprendre, à ce moment-là,
l'attitude de l'Opposition, si ce n'est que la comprendre par une sorte
d'attitude un peu formaliste qui est à peu près la suivante:
Nous, nous sommes dans l'Opposition; dans le fond, on est d'accord avec vous,
mais - vous savez que lorsqu'on est dans l'Opposition, il faut bien critiquer -
on va essayer de s'accrocher sur le seul point qui nous semble effectivement
possible d'attaquer, c'est le fait que vous adoptiez une loi spéciale
avant d'avoir commencé à négocier, mais sans traiter du
problème... Si nous avions commencé à négocier,
évidemment de mauvaise foi, puisque nous nous serions, à
l'avance, fait une idée quant à l'issue compatible avec
l'intérêt public et que nous nous serions retrouvés en
janvier sans accord et sans avoir aucune possibilité.
C'est-à-dire que, à ce moment-là, il aurait fallu soit
adopter une loi en décembre ou soit
l'adopter en janvier ou février au milieu des grèves. Je
ne peux pas comprendre la position du chef de l'Opposition parce qu'elle
m'apparaît incompatible avec l'intérêt public, incompatible
avec l'obligation de négocier de bonne foi et, de plus,
incohérente dans la mesure où elle ne dit pas à quelle
enseigne se loge le Parti libéral. Quel est le choix de moyens
privilégiés par le Parti libéral pour que le Québec
puisse traverser la crise.
Le Président (M. Blais): M. le chef de l'Opposition, il
vous reste trois minutes.
M. Claude Ryan
M. Ryan: Trois minutes, merci, cela va être suffisant.
Tout d'abord, je rappelle au ministre que si le gouvernement est
placé dans cette situation, c'est sa faute à lui. C'est notre
rôle de vous le rappeler parce qu'il faut que ce soit bien clairement
établi, je suis content de voir que vous l'admettez.
M. Bérubé: Non, nous ne l'admettons pas. (22 h
30)
M. Ryan: Non, vous n'avez pas compris, il va falloir l'expliquer
à nouveau.
M. Bérubé: J'admettrais n'importe quoi pour ne pas
l'entendre pour la nième fois.
Le Président (M. Blais): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, c'est votre opinion mais la
question n'est pas là.
M. de Belleval: En tout cas, c'est correct, c'est votre opinion.
On est d'accord.
M. Ryan: La question n'est pas là. Très bien.
M. de Belleval: D'accord?
M. Ryan: Alors, nous vous rappelons que c'est votre
responsabilité. C'est vous qui avez géré les finances
publiques de l'État québécois depuis six ans, c'est vous
qui avez signé ces conventions collectives devant expirer le 31
décembre 1982, c'est vous qui êtes responsables d'honorer la
signature des citoyens du Québec donnée par votre
intermédiaire. Ce n'est pas seulement la vôtre, vous nous dites
souvent: Nous sommes au pouvoir, c'est nous qui devons décider et tout,
vous êtes les serviteurs du peuple du Québec. Quand vous avez
signé des conventions, vous les avez signées en notre nom autant
qu'en votre nom à vous. Nous, comme citoyens du Québec, nous vous
disons que nous n'aimons pas que la signature que vous avez donnée en
notre nom soit reniée et altérée en cours de route. Cela,
c'est clair.
M. Bérubé: Non, ce n'est pas exact, M. le chef de
l'Opposition.
M. Ryan: Est-ce que je peux terminer? M. Bérubé:
Oui, je m'excuse.
M. Ryan: Deuxièmement, le ministre nous dit: Vous ne nous
offrez pas d'autres solutions. Il dit: Vous refusez qu'on augmente les taxes,
vous refusez qu'on augmente les emprunts, vous refusez qu'on accentue les
compressions budgétaires. On n'a dit un non catégorique à
aucune de ces avenues et la meilleure preuve que je puisse vous en donner... Il
faut tout de même que vous soyez logiques et sérieux de votre
côté, parce que, lorsque cela fait votre affaire, vous me faites
dire que j'ai déjà dit qu'il faudrait augmenter les taxes, et
vous l'avez fait dire combien de fois à notre ancien critique financier?
J'ai dit souvent: Si vous allez jusqu'à tel niveau de dépenses,
il faut que vous ayez le courage de vos décisions et que vous acceptiez
les corollaires qui se rattachent à cela. C'est à vous
d'établir le niveau de vos dépenses à un niveau qui
corresponde à celui de vos revenus possibles. C'est toujours la
thèse que nous avons soutenue. Le pouvoir d'emprunt, c'est la même
chose. Nous n'avons jamais dit qu'il était mathématiquement,
arithmétiquement épuisé à tel niveau. Cette
année, vous avez établi à 3 000 000 000 $ la
capacité de déficit que peut porter l'État
québécois actuellement. Cela aurait pu être 3,1 milliards,
3,2 milliards, 2,9 milliards. Je pense qu'il n'y a personne qui va soutenir
sérieusement que c'est une affaire mathématique au sujet de
laquelle on ne peut absolument rien faire. Cela, c'est un point.
J'ai donné un exemple ce matin d'une taxe qui coûte
très, très cher de perception. J'ai au moins donné cet
exemple, la taxe de Loto-Québec, une taxe qui rapporte 150 000 000 $ au
gouvernement et qui en coûte 450 000 000 $; c'est une taxe qui
coûte bien cher celle-là. Cela va bien, ce sont des taxes sans
douleur mais il y a tout de suite une marge importante de ce côté.
Je suis sûr que si vous exerciez votre imagination à plein dans ce
domaine, comme vous êtes capables de l'exercer dans d'autres, il y a bien
des avenues de solution qui se présenteraient pour ce problème.
Comme l'a déjà laissé entendre le chef du gouvernement
lui-même d'ailleurs, les avenues de solution peuvent être à
plusieurs volets ou compartiments. Il n'est pas nécessaire qu'on trouve
une solution seulement dans une voie.
Le ministre dit: Nous respectons le principe de la libre
négociation. Nous leur
disons: Mais c'est écrit dans le projet de loi. Il
s'étonne qu'on ne l'ait pas trouvé dans le projet de loi. Je le
trouve dans le projet de loi, je le trouve très bien. Ce que je trouve
dans le projet de loi, c'est une inversion indéniable de l'ordre dans
lequel les choses doivent se faire normalement. D'ordinaire, vous
négociez; ensuite, vous établissez vos conclusions après
que les deux parties se sont exprimées. Là, le gouvernement dit:
J'établis le cadre à l'intérieur duquel des conversations
peuvent avoir lieu, je laisse la porte ouverte à des ententes, mais la
loi c'est celle que je définis avant de partir. Ce n'est pas la vraie
négociation comme on l'entend. La vraie négociation comme on
l'entend, c'est une négociation au départ de laquelle chacune des
deux parties se fixe des paramètres...
Le Président (M. Blais): Si vous voulez conclure, M. le
chef de l'Opposition.
M. Ryan: ... des points au-delà desquels elle ne voudrait
pas aller. Il n'y a aucune des parties - c'est la première fois que je
vois cela - qui va dire de manière absolument catégorique,
légale: C'est ceci, maintenant, venez-vous-en les jeunes, si vous voulez
négocier, on va regarder cela ensemble. Si vous aimez mieux qu'on donne
3% à un plutôt que 4%, 2% à l'autre plutôt que 3%,
c'est très bien, on est prêts à négocier cela, vous
organisez un petit jeu pour que vous vous déchiriez un petit peu les uns
les autres, cela peut aller. Mais vous restreignez singulièrement le
cadre de la négociation! Encore là, c'est de l'innovation, nous
n'avons jamais vu un comportement comme celui-là de la part d'un
gouvernement. C'est cela que je voulais établir clairement et je voulais
rappeler au ministre que cette ère de négociations, qui est
laissée par le projet de loi, est tellement inusitée et
différente de ce que les saines coutumes nous apprennent qu'il vaut de
le souligner par un vote négatif de notre côté et c'est
plus que du formalisme, beaucoup plus que du formalisme. C'est toute une
conception de la société et des rapports entre les groupes
sociaux qui est mise en cause par cette mesure.
Le Président (M. Blais): Merci beaucoup, M. le chef de
l'Opposition. Article no 3, adopté?
M. Paquette: M. le Président...
Le Président (M. Blais): Pardon, un instant.
M. Paquette: Ce ne sera pas très long.
Le Président (M. Blais): Je ne sais pas lequel des deux a
demandé la parole le premier.
Mme Lavoie-Roux: Allez-y.
Le Président (M. Blais): M. le député de
Rosemont.
M. Gilbert Paquette
M. Paquette: M. le Président, je comprends les
réserves du chef de l'Opposition sur le projet de loi. Effectivement,
c'est une question délicate. Là où je le comprends moins,
c'est quand il affirme: - il vient juste de le dire d'ailleurs - Nous n'avons
jamais dit que nous ne pouvions pas augmenter les taxes. Nous n'avons jamais
dit que nous ne pouvons pas augmenter les emprunts. Nous n'avons jamais dit
qu'on ne pouvait pas accentuer les compressions budgétaires. J'ai ici
son discours en Chambre. J'ai écouté les discours de son
collègue de Vaudreuil-Soulanges et de plusieurs représentants de
son parti. Dans le discours de deuxième lecture sur le projet de loi 70
le chef de l'Opposition - et c'est dans le journal des Débats - explique
que, selon lui, les déficits ont augmenté de manière
faramineuse. Il porte donc un jugement de valeur signifiant qu'il ne faudrait
pas les augmenter davantage. Un peu plus loin, il nous dit: La hausse du
fardeau fiscal qui s'est accrue - là, il donne des chiffres quant au
pourcentage; - donc, cela devrait nécessiter qu'on ne doit pas les
augmenter davantage.
Un peu plus loin, il nous dit: II y a détérioration
continue de la qualité des services offerts au public, ce qui signifie
qu'on ne devrait pas augmenter les compressions. Sur le fond, je pense qu'il
faut distinguer le fond de la forme, ici. Sur le fond, on peut toujours
prétendre qu'il y aurait moyen de laisser augmenter le déficit de
200 000 000 $ ou 300 000 000 $. On pourrait prétendre cela, à la
limite. On pourrait prétendre qu'il y aurait moyen d'éliminer,
par exemple, l'universalité de certains programmes et d'aller chercher
quelques millions de ce côté. On pourrait prétendre que
certaines possibilités de revenus additionnels sont possibles.
Cependant, le chef de l'Opposition doit être conscient que la situation
économique se détériore à un rythme tel - on voit
le dollar qui est rendu à 77 cents et le taux d'intérêt
continue d'augmenter. En somme, un gouvernement central dépassé
par sa propre politique monétaire. Cela, je veux le faire en dehors de
toute partisanerie. C'est une chose reconnue par tous les observateurs. Il y a
plusieurs conseils au niveau fédéral qui ont émis de tels
jugements, des regroupements d'hommes d'affaires, des partis de l'Opposition
dans la Chambre des communes, des gouvernements provinciaux.
M. de Belleval: Les libéraux.
M. Paquette: La situation, donc, se détériore. Au
mois de mars, il fallait trouver 700 000 000 $; au mois de mai, il fallait
trouver 900 000 000 $. J'imagine que le chef de l'Opposition trouverait
irresponsable qu'on ne prévoie pas le cas où peut-être,
espérons que non mais peut-être, dans deux ou trois mois, cela
aurait été 1 000 000 000 $ ou 1 200 000 000 $ qu'il faudrait
aller chercher. Et si jamais ce n'était pas le cas, je pense qu'il
serait d'accord avec nous que tous les fonds supplémentaires qui
pourraient être dégagés par la petite marge de manoeuvre
qui reste devraient être investis dans la création d'emplois, dans
l'économie avec le chômage que l'on connaît
actuellement.
Quand on a reçu les centrales syndicales, le chef de l'Opposition
disait à peu près ceci: Nous, nous sommes partisans, au Parti
libéral, d'une réduction non pas mathématique,
arithmétique, mais d'une réduction raisonnable de l'écart
entre les travailleurs du secteur public et du secteur privé. Et je vais
interpréter, et là je ne voudrais pas dénaturer, mais il y
a une image qui m'est venue à l'esprit. Le chef de l'Opposition semblait
dire aux syndiqués du secteur public: Si nous étions au
gouvernement, nous irions vous en chercher plus mais plus tard. Je pense que
c'est cela qui nous sépare, dans le fond. Nous, on n'érige pas en
principe la réduction des écarts de salaires entre le
privé et le public parce que ce sont des emplois largement non
comparables. Il n'y a pas beaucoup d'équivalent aux infirmières
dans le secteur privé de même que les enseignants. On ne dit pas
c'est un principe, on dit dans le cadre de la crise économique actuelle,
peu importe qu'on diffère d'opinion sur les causes de cette crise, dans
ce cadre-là, il faut réduire l'écart. C'est plutôt
un moyen, ce n'est pas un principe. Le chef de l'Opposition semble nous dire
que c'est un principe, mais il dit qu'il ne faudrait pas le faire tout de
suite.
M. le Président, je pense que sur le fond c'est une attitude qui
n'est pas très responsable. La société
québécoise ne peut pas se permettre actuellement de telles
incertitudes compte tenu de la détérioration
accélérée de la situation économique. C'est aussi
simple que cela. À ce compte-là, je pense qu'il vaut mieux le
faire savoir clairement à l'ensemble de la société. C'est
le but de ce projet de loi. On va dire que cela renie la signature que vous
avez donnée. Je pense que je n'apprendrai rien à personne en
disant que nous avons eu des débats très intenses au sein de
notre formation politique, à savoir si on devait rouvrir les conventions
et protéger davantage les bas salariés dès le 1er juillet
ou attendre le 1er janvier en espérant que d'ici là il y aurait
une négociation et qu'on pourrait en arriver au même
résultat mais par la négociation. On a opté pour la
deuxième hypothèse parce que la première aurait
signifié rompre un contrat en cours de signature. Je vous signale que ce
contrat, M. le Président, ce n'est pas que nous le considérons
trop généreux, que nous regrettons la signature que nous avons
donnée en 1979, puisque sur le plan des salaires c'était
nettement moins avantageux pour les syndiqués que les conventions de
1976. On donnait l'exemple encore ce matin de la charge de travail des
enseignants qui a décru; le ratio maître-élèves
était de 1 pour 19,6 au début de la convention collective, en
1976, convention qui a été signée par l'ancien
gouvernement, et il était rendu à 1 pour 16,8 au moment des
dernières conventions collectives, et ce ratio s'est stabilité
depuis.
Alors, on ne peut pas dire que la convention collective de 1979
était trop généreuse. C'est la situation économique
qui a changé et les syndiqués ont signé cette convention
en toute bonne foi, le gouvernement également. Nous ne regrettons pas le
geste que nous avons posé, nous disons simplement que dans la situation
actuelle, si on veut poursuivre un certain nombre d'idéaux de justice
sociale et protéger les plus vulnérables de la
société, il faut non pas comme objectif mais comme moyen
réduire les écarts. On a choisi de le faire non pas en reniant la
signature puisque c'est seulement à l'expiration des conventions
collectives que va s'appliquer la loi no 70.
Finalement, il reste le jugement sur l'opportunité. Est-ce que ce
projet de loi va permettre d'arriver par la négociation à une
entente pour le 1er janvier, ce que tout le monde souhaite, ou est-ce qu'il va
l'en empêcher? C'est un pari, chacun peut faire le sien. Nous, on pense
que c'est plus honnête de dire que dans le cadre économique
actuel, quand on poursuit certains idéaux de justice sociale, la masse
salariale est fixée et elle est environ celle-là. Venez
négocier et on va voir comment la répartir.
Si le chef de l'Opposition préfère dire: Nous, nous
aurions été en chercher plus, comme le disait son ancien
collègue de Saint-Laurent, d'ailleurs, nous, on irait en chercher plus
en éliminant complètement ou presque les écarts entre le
public et le privé, donc, on irait en chercher plus mais plus tard,
nous, on pense qu'il faut aller en chercher moins mais tout de suite.
Le Président (M. Blais): Merci, M. le député
de Rosemont. Mme la députée de L'Acadie. (22 h 45)
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Tout à
l'heure, j'entendais le ministre dire, pour justifier ce projet de loi, que ce
n'était pas la première fois que le gouvernement intervenait pour
suspendre des dispositions de notre Code du travail et qu'il était
intervenu à plusieurs reprises d'ailleurs les chiffres ont
été donnés tout à l'heure - et que,
généralement, c'est parce qu'il y avait crise. Il y avait crise
dans le domaine de la santé, dans le domaine de l'éducation, du
transport public, etc. et je pense que, là-dessus, on est d'accord.
Mais il y a une différence fondamentale, c'est que, dans ces
situations-là, c'était l'exercice du droit de grève ou
peut-être l'exagération des circonstances dans lesquelles le droit
de grève s'exerçait et que la santé ou la
sécurité du public, prise dans un sens large, était mise
en danger. Et cette crise était créée par l'action des
forces syndicales, dans un contexte qui était quand même
légitime, mais qui allait trop loin, selon le jugement du gouvernement.
Dans ce cas-ci, c'est tout à fait différent, parce que la crise
n'est pas créée par l'action syndicale, elle est
créée par le gouvernement du Québec.
M. Paquette: ...
Mme Lavoie-Roux: Je n'ai pas interrompu le député
de Rosemont, M. le Président, vous remarquerez que je l'ai laissé
aller.
M. Bérubé: C'est vrai.
Mme Lavoie-Roux: La crise a été créée
par le gouvernement. Au même moment où vous essayez de justifier
votre intervention pour modifier les règles du jeu en invoquant la
question de crise, je pense qu'il faut bien situer que dans les
premières crises qu'on voulait régler, c'était comme un
exercice exagéré ou que le législateur jugeait
exagéré le droit de grève des forces syndicales, tandis
que, dans ce cas-ci, la crise est créée par le gouvernement; il
ne faut pas l'oublier.
Évidemment, le gouvernement voudrait qu'on oublie tous les gestes
qu'il a posés et qui ont créé la situation dans laquelle
on se trouve. Il voudrait qu'on prenne un problème tout à fait
dans l'abstrait, c'est-à-dire qu'il manque 500 000 000 $ ou 700 000 000
$...
M. Paquette: ...
Mme Lavoie-Roux: II est vrai que parfois, moi, je me permets des
réflexions.
M. Bérubé: Ce n'est pas facile quand on est
interrompu lors d'une intervention, mais disons que nous avons tous cette
mauvaise habitude.
M. Paquette: ... Mme la députée.
Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est pour ça que je n'ai pas fait
de remarques.
Le gouvernement voudrait qu'on considère dans l'abstrait que la
seule chose qui existe, c'est que, tout à coup, il y a ce trou -
appelons-le un trou pour les fins de la discussion - de 700 000 000 $ dans le
budget du Québec. Là, il nous dit: Écoutez, si vous avez
un trou de 700 000 000 $, qu'est-ce que vous faites? Vous n'avez pas de
proposition à nous faire? C'est bien facile de nous blâmer et de
dire qu'on modifie les règles habituelles du Code du travail. Ce serait
trop facile pour le gouvernement qu'on puisse simplement évoquer qu'il
est arrivé un cataclysme et que, tout à coup, on s'est
trouvé privé de 500 000 000 $ ou 700 000 000 $. Mais je pense
qu'il faut que la population se rende compte - je pense que les
syndiqués s'en aperçoivent fort bien - que ceci est
l'aboutissement d'un grand nombre de gestes qui ont été
posés par le gouvernement.
Et je reviendrai sur la question des solutions, quand le ministre nous
dit tout le temps: Si on le prenait dans l'abstrait, ce cataclysme, ce
déficit de 500 000 000 $ qui nous tombe du ciel. Cela a
été un enchaînement de circonstances que l'on jugeait
dangereuses durant les dernières années, à cause des
gestes que le gouvernement a posés ou n'a pas posés et qui ont
fait que nous sommes arrivés devant ce problème
considérable.
Je ne vous en mentionnerai qu'un en passant; ce n'était pas une
solution, mais pour vous dire que, souvent, on a attiré votre attention.
Je me souviens très bien - à ce moment, j'étais critique
en éducation -quand nous avons étudié les crédits
du ministère de l'Éducation, en 1979. C'était au moment
où le gouvernement commençait à dire: II faut couper dans
le personnel de la fonction publique, ça coûte trop cher, etc. Et,
au même moment où on nous servait ce discours, aux crédits
de l'Éducation, on pouvait voir que le nombre de fonctionnaires
continuait d'augmenter. Cette année-là, je me souviens en
particulier du nombre de 84 fonctionnaires. Durant une fin de semaine, il avait
paru une page entière d'offres d'emplois dans la Presse, que j'avais vue
bien occasionnellement parce que je ne cherchais pas d'emploi, comme je le
disais, mais je l'avais vue. II y avait une offre d'emploi pour dix
fonctionnaires cadres à une moyenne de salaire de 40 000 $. Dans cette
seule page, vous aviez des offres d'emplois pour 500 000 $ - j'allais dire 500
000 000 $; n'exagérons rien - uniquement dans le secteur de
l'éducation alors que la population baissait, et le ministre le savait
depuis longtemps. Pourtant, je me souviens que le ministre des Finances disait:
Cette année, on
coupe de 1%. On avait commencé à dire: On coupe de 1%. Et
vous aviez une augmentation au ministère de l'Éducation de 85
personnes. C'est tout au long des années qu'on a attiré votre
attention là-dessus. Je me le rappelle parce que j'avais trouvé
cela tellement contradictoire, le discours et la réalité.
Le ministre nous disait tout à l'heure: Nous n'empêchons
pas la négociation parce que de fait il y a une clause qui
prévoit que, si on réussit à s'entendre sur un
réaménagement quelconque, la loi ne s'appliquera pas. Je ne
voudrais pas reprendre l'expression très colorée du
président de la FTQ qui a appelé cela le revolver sur la table,
mais j'appellerai cela l'épée de Damoclès.
M. Bérubé: II nous suggérait de mettre le
revolver dans notre poche et de l'ouvrir de temps en temps. C'était pas
mal la même chose.
Mme Lavoie-Roux: Ce n'était pas tout à fait dans ce
contexte-là, de la façon dont il... En tout cas, j'oublie. C'est
simplement l'expression que...
M. de Belleval: C'est le Parti libéral qui proposait
cela.
Mme Lavoie-Roux: C'est simplement l'expression de M. Laberge que
je voulais rappeler. C'est véritablement une épée de
Damoclès. Ce n'est pas une négociation libre parce que, d'un
côté, vous acceptez les conditions à l'intérieur...
Il faut que vous alliez récupérer les 521 000 000 $. Vous nous
l'avez dit constamment. Vous n'avez pas le choix. D'une façon ou d'une
autre, ce que cela permettrait...
M. Bérubé: Nous sommes conséquents.
Mme Lavoie-Roux: II serait souhaitable qu'il y ait une meilleure
répartition des coupures pour chacune des catégories
d'employés. Cela serait souhaitable. Je pense qu'on le souhaite de part
et d'autre. Mais il reste que cela ne changera rien au fait que la loi est
là comme une épée de Damoclès et c'est cela. Enfin,
c'est la loi. Si on ne se soumet pas aux conditions que le gouvernement exige
de nous, c'est la loi.
Il y a aussi l'autre aspect, à savoir qu'on demande aux
syndiqués de reverser au gouvernement les montants qui leur auront
été versés en vertu de conventions collectives
dûment signées et négociées de bonne foi. Essayer de
me convaincre qu'il n'y a pas là une anomalie dans le libre processus
des négociations ou dans le cours normal des négociations,
écoutez, je regrette de différer...
M. Bérubé: Nous sommes d'accord avec vous. On ne
diffère pas d'opinions. Nous sommes intégralement d'accord avec
vous.
Mme Lavoie-Roux: Bon! Vous savez, ces lois qui sont sur la
table... Si cela ne fonctionne pas, on agit. Il y a un exemple qui se
présente et qui, je pense, est une assez bonne analogie, dans le domaine
des affaires sociales relativement aux négociations touchant le
régime qui affectera les nouveaux diplômés en
médecine, qu'on aille ou qu'on n'aille pas en régions
éloignées. Là aussi le gouvernement s'est donné son
pistolet, si on veut utiliser la même expression. Il a fait adopter une
loi. Il a mis dedans un pouvoir de décret, à savoir qu'il
pourrait négocier à la baisse la rémunération des
médecins qui n'accepteraient pas d'aller en régions
éloignées. Je ne veux pas me prononcer sur le bien-fondé,
sur le fond du problème, à savoir s'il y a des problèmes
en régions éloignées ou pas, là-dessus, je pense
qu'on s'entend également.
M. Bérubé: On s'entend tout le temps.
Mme Lavoie-Roux: Non, on ne s'entend pas tout le temps. Il met
son décret. Si on ne réussit pas à négocier ou
à arriver à une entente avec les fédérations
là-dessus, c'est le décret. Le 13 mai, le gouvernement,
finalement, aboutit à des propositions touchant la baisse de la
rémunération, à la table des négociations, avec les
fédérations syndicales. Et c'est le 13 mai qu'il a
déjà son décret en poche. Le décret qui a
été préparé par le gouvernement, est daté du
13 mai, sauf qu'il l'a toujours dans sa poche. C'est un peu comme un pistolet,
mais, cette fois, c'est un décret.
M. Bérubé: Dans la poche.
Mme Lavoie-Roux: Dans la poche. Le gouvernement, coincé
par la date du 1er juin selon la Gazette officielle - parce que c'est le 1er
juillet que les gens commenceront leur pratique - c'est entre le 13 mai et le
1er juin qu'on n'a pas réussi à s'entendre. Pas de
problème! Il n'y a pas de problème du tout. Décret! Le
temps de négociation, en supposant qu'on ait négocié tous
les jours, a été de 17 jours.
M. Bérubé: J'invoquerais une question de
règlement.
Mme Lavoie-Roux: D'accord, si vous voulez rectifier cela, je n'ai
pas d'objection.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, sur une
question de règlement.
M. Bérubé: Je pense que le ministre
des Affaires sociales a rectifié. Les associations de
médecins avaient été avisées il y a plusieurs mois
et elles en ont discuté à plusieurs reprises bien avant le 13
mai, date à laquelle réfère la députée de
L'Acadie. D'ailleurs, cela a été confirmé par le ministre
des Affaires sociales en Chambre.
Mme Lavoie-Roux: Je regrette, les négociations n'ont
débuté que le 13 mai avec les fédérations.
Évidemment, elles avaient entendu, au moment de la loi 27, qu'il y avait
une possibilité de rémunération à la baisse, mais
les négociations avec les fédérations n'ont
commencé que le 13 mai. Je regrette, c'est entre le 13 mai et le 1er
juin.
M. Lachance: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Bellechasse.
M. Lachance: Est-on bien certain, M. le Président, qu'on
respecte la pertinence du débat à propos de l'article à
l'étude?
Le Président (M. Bordeleau): C'est sûr qu'on
s'écarte, à l'occasion, de la pertinence de l'étude de la
loi no 70 comme telle.
M. Bérubé: Nous en sommes même très
loin.
M. Lachance: J'aurais une information à ajouter, quant
à y être, M. le Président. Semble-t-il que le "PET" vaut
maintenant 0,7745 $.
Le Président (M. Bordeleau): Ce n'est pas tellement
pertinent, cela non plus, avec l'étude du projet de loi 70.
Une voix: Ce n'est même pas drôle!
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie, vous pouvez continuer.
Mme Lavoie-Roux: Je pense, M. le Président -
évidemment, cela demeure toujours un jugement subjectif - que
j'étais tout à fait dans la pertinence du débat. Je
signalais au ministre comment les dispositions de la loi créaient une
entrave à la négociation libre, avec une loi dans sa poche pour
aller négocier, de la même façon que le gouvernement
s'était comporté dans le cas du décret pour l'affectation
des médecins en régions éloignées. Je ne pense pas
que je m'étais éloignée du sujet. Si on ne peut plus se
servir d'exemples, c'est autre chose.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie, je ne veux pas être trop restrictif, mais nous sommes en
commission parlementaire pour étudier un projet de loi article par
article et c'est l'article no 3 qu'il nous faut étudier et sur lequel on
peut discourir pendant vingt minutes. Remarquez que, à l'occasion, il
est très difficile de garder une pertinence tout à fait
complète, mais l'article 3 est quand même très
précis. Tout à fait aimablement, je vous demanderais, comme l'a
souligné l'un des membres, de vous rapprocher le plus possible de la
pertinence du débat.
M. Bérubé: Aimablement, d'ailleurs. Qui ne peut
vous aimer?
M. Ryan: Elle s'en passerait.
Mme Lavoie-Roux: Oui, je n'ai que faire de votre
amabilité.
M. de Belleval: Oh! Cela n'est pas gentil!
Mme Lavoie-Roux: Dans les circonstances, j'entends.
M. de Belleval: Ce n'est pas gentil.
M. Ryan: C'est cela.
M. Lachance: La fraternité humaine.
Mme Lavoie-Roux: Ce qu'il faut essayer de faire, c'est de prouver
au gouvernement que l'attitude qu'il a prise pour résoudre ses
problèmes de finances publiques est une solution qui - le ministre,
avant le souper, m'a dit qu'il n'aime pas le terme "bafouer" -met de
côté - il aime mieux cela - met à l'écart les
règles habituelles de la négociation. Il faut en faire la
démonstration et je ne crois vraiment pas être hors sujet, M. le
Président. Le député de Rosemont - nous avons aussi
entendu cet argument de la part du ministre avant le souper - est revenu
là-dessus et on ne les a pas rappelés à l'ordre; alors,
j'espère que je ne le serai pas moi non plus.
Sur la question de l'augmentation des effectifs à 100 000
personnes dans les services publics, de 1970 à 1980, on a fait la
démonstration avant le souper, hors de tout doute, que cela a
coïncidé avec le développement de l'éducation et le
développement du réseau des affaires sociales.
M. Paquette: Oui, d'ailleurs, on pouvait se le permettre, dans le
temps.
Mme Lavoie-Roux: Et on pouvait se le permettre, en plus. Je suis
contente que cela vienne du député de Rosemont.
M. Paquette: Certainement.
Mme Lavoie-Roux: Quand on parle du...
M. Raquette: Donc, cela coûte cher. (23 heures)
Mme Lavoie-Roux: ... ratio, qui a baissé de 19 à 16
ou de 19 à 16,8 et quand on dit que cela a été
accordé par un gouvernement libéral, lors d'une
négociation, peut-être, à ce moment-là,
pouvions-nous nous le permettre. Je ne nierai pas qu'il y ait eu des
exagérations depuis longtemps dans les avantages de tous ordres qui ont
été accordés à la fonction publique - quand je dis
fonction publique, je veux dire publique et parapublique - c'est fort possible,
et dont les coûts se sont avérés extrêmement
coûteux au fur et à mesure des années, là-dessus, je
pense qu'on s'entend. Il faudrait peut-être rappeler aussi que cette
baisse de ratio s'est faite à l'avantage des enfants. Et peut-être
a-t-on oublié, du côté ministériel -moi, je
n'étais pas en politique, M. le Président, j'étais dans un
milieu d'éducation - l'exagération et le charriage que les gens
du Parti québécois, qui étaient dans l'Opposition,
à ce moment, faisaient; ce n'était jamais suffisant. Vous
étiez combien moins responsables que nous aujourd'hui, même
à l'égard des lois spéciales, auxquelles on a fait
allusion tout à l'heure, qui ont été adoptées sous
votre gouvernement, d'appuyer le gouvernement d'une façon responsable
dans des problèmes qui mettent en jeu la vie publique ou le bien commun,
ce que vous n'avez pas fait quand vous étiez dans l'Opposition, et vous
le savez fort bien.
C'est dommage, je ne les ai pas devant moi, mais je me souviens - je
sais exactement où ils sont dans mon bureau, si je pouvais aller les
chercher - des propos non pas d'un modeste député
d'arrière-ban comme moi, mais du chef de l'Opposition du temps à
l'égard des propositions gouvernementales dans le domaine de
l'éducation. C'est incroyable. D'après lui, il aurait dû y
avoir un professeur par dix-sept élèves. Et là, on ne
parle plus de ratio. Je vous assure que votre ratio, si vous tenez compte de
tous les groupes spéciaux d'enfants, ce n'était jamais suffisant,
ce que le gouvernement du temps accordait. Vous alliez sur les lignes de
piquetage pour dire: Allez-y, les gars et les femmes, parce que ce
gouvernement, il faut le battre à tout prix, il faut le mettre dans le
trou, etc. Vous avez charrié d'une façon absolument
irresponsable. Je n'ai aucune hésitation à le dire parce que je
l'ai vécu non pas d'une façon partisane, mais de l'autre
côté. Je me souviens d'avoir entendu le chef de l'Opposition - il
était député de Sauvé, je prends bien garde de le
dire, le chef de l'Opposition du temps - à une émission de
télévision. Je me disais: Mais, ce n'est pas possible. Il disait:
Pour l'éducation, il n'y a pas de limite, c'est notre richesse la plus
importante ce qu'on donne à l'éducation; c'est la richesse de
demain. Jamais une offre n'était suffisante pour vous, à
l'endroit des syndicats. Je reconnais qu'il y a eu des exagérations dans
le passé, peut-être, qu'on paie aujourd'hui. C'étaient,
jusqu'à un certain point, des exagérations parce qu'on a à
peine fini le rattrapage dans le domaine de l'éducation, de toute
façon. Il faut quand même se le dire. Mais venir rapporter des
choses comme ça, comme exemple de votre bonne administration, que le
ratio maitre-élèves est tombé de 16,9 à 16,6 au
lieu d'être tombé de 19 à 16, je ne trouve pas que c'est un
argument très fort, M. le Président.
Je disais tout à l'heure que le ministre veut envisager
absolument dans l'abstrait le trou qui nous est arrivé comme un
cataclysme. On ne l'attendait pas du tout. Il nous est tombé du ciel.
Oublions toutes les autres circonstances, tous les autres gestes que les
gouvernements ont faits. Le ministre nous dit: Vous autres, vous n'avez pas de
solutions. J'ai déjà indiqué certaines pistes, je pense,
au cours des propos que je viens de tenir. Nous avons constamment donné
au gouvernement des signaux d'alarme, des suggestions, que nous lui avons
faites de bonne foi, que ce soit à l'égard de l'expansion, par
exemple, de Radio-Québec, que ce soit à l'égard de
régies et d'offices qui ont été créés.
Certains et certaines étaient nécessaires, d'autres ne
l'étaient pas. Ils n'étaient créés que pour une
glorification quelconque d'intérêts souvent très
partisants.
J'ai encore dit qu'il était irresponsable pour le gouvernement,
dans le budget qui a précédé de deux jours le
déclenchement des élections, des dépenses prévues
au montant de 180 000 000 $ pour une allocation de disponibilité
universelle. Je me souviens que mon collègue de Saint-Laurent vous l'a
dit dans le temps, quand, par exemple, parce que vous aviez une promesse
électorale de donner les soins dentaires jusqu'à 18 ans, ce qui
est d'ailleurs encore dans votre programme... Évidemment, maintenant,
c'est devenu un idéal à réaliser. Vous faisiez l'ascension
de deux années à la fois. Quand vous êtes arrivés au
pouvoir, vous étiez rendus à dix ans. Vous avez commencé
à onze, douze, treize et quatorze ans, etc. Rendus à quinze ans,
vous avez réalisé que cela coûtait très cher et que
vous rattrapiez des enfants qui n'avaient jamais été dans le
système, qui n'avaient jamais eu de soins dentaires. Là, les
coûts sont montés en flèche. Il disait: Allez-y prudemment.
Cela coûte très cher. Aujourd'hui, on est obligé de couper
partout dans les soins dentaires. Là, je ne remets pas en question votre
solution des hygiénistes dentaires. C'est un autre point de vue. Non,
c'est le ministre qui dit qu'on n'a pas de solution et qu'on n'en a jamais eu.
Je pourrais continuer avec une
longue série de suggestions que nous avons faites au
gouvernement! de mises en garde et le gouvernement... Non, ses fins
électoralistes étaient plus importantes que l'équilibre
budgétaire et les saines finances du gouvernement du Québec. Je
comprends que le ministre souhaite qu'on traite de cela dans l'abstrait, mais
ce n'est pas un problème qui est né dans l'abstrait. C'est un
problème qui a été engendré par une série de
gestes, que je n'appellerai pas irresponsables, mais imprévoyants, en
tout cas, pour être très polis avec vous, de la part du
gouvernement.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. L'article 3 tel
qu'amendé sera-t-il adopté?
M. Polak: Non, M. le Président.
Le Président (M Bordeleau): Non? M. le
député de Sainte-Anne.
M. Maximilien Polak
M. Polak: M. le Président, tout à l'heure, le
ministre a dit que le Parti libéral n'a vraiment pas de solution. Il a
dit qu'il a écouté le discours du chef de l'Opposition, mais je
ne sais pas s'il a écouté le discours du chef de l'Opposition ou
s'il n'a cité que quelques portions de ce discours. M. le ministre, dans
notre formation, on a justement parlé de cela, d'avoir des solutions,
des alternatives. Il y a eu des discussions là-dessus et je suis fier de
dire que le chef de l'Opposition a parlé longuement des
différentes alternatives qui seraient possibles à cet article 3,
d'une tout autre manière de traiter le problème. Il est
malheureux que vos députés ne soient pas en Chambre pour
écouter ces discours, parce qu'il y en a toujours trois, quatre ou cinq,
et on est obligé, en commission parlementaire, de reprendre le
débat. Je pense qu'il est très injuste de dire: Vous ne faites
que des critiques et vous n'avez pas de solutions, parce qu'on en a, et je vais
en identifier quelques-unes.
Quand M. Laberge est venu ici, la semaine dernière, devant nous,
il a employé l'expression "le pistolet". Le ministre a dit tout à
l'heure: La seule différence entre notre opinion et la position du Parti
libéral, c'est que nous, on met peut-être le pistolet sur la
table, tandis que l'Opposition libérale a le pistolet dans sa poche et
le montre de temps en temps. Ce n'est pas du tout notre position. Notre
position, c'est qu'on n'a pas de pistolet. On a une plume dans notre poche.
Cela veut dire qu'on a une plume pour négocier, pour signer une entente.
Notre solution était de ne pas commencer à parler de ce
problème au mois de mars ou au mois d'avril, aux grands sommets. Vous
auriez dû prévoir cela au moins à l'automne. Le
problème était connu. Je me rappelle très bien qu'on en a
parlé après le dépôt du budget, il y a un an, au
mois de juin 1981. À ce moment-là, il y a eu des discours sur des
problèmes de nature financière. On avait déjà
informé le gouvernement qu'on était au bord de la faillite et
qu'on devait penser à prendre des mesures spéciales.
On n'a jamais eu, de la part du gouvernement, de politique salariale. On
n'a jamais pensé d'avance aux problèmes qui existaient et que
nous avions indiqués. Quand le chef de l'Opposition a
préparé... Cest vrai, c'est lui qui a eu beaucoup d'influence sur
la position prise par le parti. J'ai été fier d'adopter cela et
je n'ai eu aucun problème à prononcer un discours après
sur l'ensemble de ce projet de loi, parce qu'il y avait beaucoup de solutions
de rechange là-dedans. On a dit, par exemple: En regard de la politique
salariale, on ne doit pas venir à la dernière minute avec un
projet de loi comme un marteau sur la tête et ensuite espérer
négocier. Vous auriez dû faire cela déjà à
l'automne. Il y avait un problème. Vous auriez dû commencer
à en parler à ce moment-là. On a eu, par exemple - j'y ai
fait allusion - le facteur de productivité de la fonction publique.
C'est seulement il y a une ou deux semaines qu'on a sorti le rapport Bisaillon.
C'est un rapport très intéressant, mais ce problème
était connu. C'était connu déjà depuis des
années. Vous n'avez rien fait pour le corriger. Tout ce qu'on a, c'est
un rapport sur la table et je me demande ce qu'on va faire avec les
recommandations qui sont tout de même très intéressantes;
elles auraient pu épargner énormément d'argent à
l'État si on avait pris la peine de penser un peu plus à l'avance
et de ne pas gouverner par périodes de six mois en six mois.
Quand on a eu le budget, l'année dernière, tout de suite
après l'élection, au mois d'avril, au lieu de présenter un
budget à la province pour un an, comme cela se fait dans un pays normal
qui a le contrôle de ses finances publiques, on nous présente
encore un deuxième budget à l'automne. Et peut-être que
cette année, en 1983, on va avoir trois budgets parce qu'avec vous, tout
est possible.
Nous avons parlé de relance économique, mais aussi
longtemps que vous serez au pouvoir, il n'y aura jamais de relance
économique possible, jamais, jamais. Les gens ont perdu confiance en
vous. Tout le monde a perdu confiance. Les gens ne croient plus en tous ces
programmes de relance économique. Vous venez avec des petits programmes,
ici et là, programmes pour les assistés sociaux, pour les faire
travailler dans les champs, pour nettoyer les rivières et les eaux, mais
ce ne sont pas les programmes de relance économique dont on parle. Un
programme de relance économique,
cela veut dire avoir une base de confiance de la population pour
bâtir une province plus forte, pour éviter que tous ces gens et
toutes ces compagnies ne quittent le pays. Par exemple, la semaine
dernière, les péquistes ont ri quand nous avons parlé de
la Prudentielle: Ah! C'est une compagnie anglophone, ils sont mieux de partir.
On ne veut rien savoir de cela. Mais cela coûte de l'argent à la
province parce que chaque fois qu'il y a 50 ou 100 employés qui s'en
vont -on appelle cela, en anglais, le "ripple effect" - ce n'est pas juste un
individu qui s'en va, c'est sa famille aussi. Ils n'achètent plus le
pain, le lait, les souliers, les automobiles, l'appartement et la maison ici au
Québec, ils vont ailleurs.
Vous ne pouvez pas penser à cela parce que vous êtes
possédés par une idée fixe. Ce que vous voulez, et vous
êtes guidés par cette idée fixe, c'est la
séparation. Vous dites: On veut se débarrasser de tout cela.
Même cet après-midi, le ministre, lorsque je lui ai posé la
question à savoir si cela peut influencer la marge de manoeuvre, a admis
qu'il n'y a pas de marge de manoeuvre maintenant. J'ai dit: Qu'est-ce qui
arrive si le taux de chômage augmente de 2%, par exemple? Ou s'il y a
encore un exode de personnes, à cause de déclarations comme celle
qu'a faite, cette semaine, M. le premier ministre Lévesque, quand il a
dit: La seule solution, c'est la séparation. Il l'a dit, mais vous ne
savez pas que cela a un effet immédiat. Je lui ai demandé: Est-ce
que cela peut laisser entrevoir un effet négatif? Il a commencé
à rire et il a dit: C'est cela qu'il faut, parce que quand nous serons
séparés, nous serons dans notre pays et on pourra régler
tous les problèmes. Je ne crois pas cela du tout.
Je crois qu'on aurait dû prévenir et qu'on aurait dû
prévoir ces problèmes. On aurait dû agir. Par exemple, dans
la province de l'Ontario, on a commencé à attaquer ce
problème il y a un an ou deux, déjà. On a commencé
lentement et, eux, maintenant, ont une marge de manoeuvre. Et vous, vous avez
refusé de faire face à ce problème qui était connu,
peut-être pas jusqu'à un degré où l'on se trouve
maintenant, mais le problème de base était là. On a
refusé de s'y attaquer. On n'a rien fait du tout pour essayer de trouver
une solution, d'abord. Si on avait commencé, il y a six, sept ou huit
mois, à négocier avec les secteurs public et parapublic, avec une
plume sur la table au lieu d'un pistolet, le résultat aurait
peut-être été beaucoup différent.
Maintenant, les facteurs de confiance. Je veux revenir là-dessus
parce que le ministre vient de dire: Mais qu'est-ce que vous auriez, vous
autres, comme solution? Vous ne semblez pas comprendre comment le facteur de
confiance est important, sur le plan psychologique, pour ceux qui veulent
investir ici. Je vais vous donner un exemple. J'étais, jusqu'à il
y a quelques mois, président d'une petite chambre de commerce du Canada
et des Pays-Bas. On avait reçu deux enquêtes de la part de
compagnies des Pays-Bas qui voulaient investir au Canada. L'une - je me
rappelle très bien - était une compagnie de tapis, qui pouvait
avoir 50 employés. Elle a fait une analyse de la situation en Ontario et
au Québec. Vu que j'étais au dossier, j'ai fait tout mon possible
pour la convaincre d'investir ici dans la province de Québec et pas en
Ontario. Mais quand elle a fait l'analyse de ce qu'était le
système en Ontario et de ce qu'était le système dans la
province de Québec, elle a dit: Ici, au Québec, il y a un
problème. Il y a un facteur d'incertitude; il y a, quelque part, un
facteur de manque de confiance; il y a quelque chose dans l'air qui ne va pas
bien, on a peur. On ne sait pas ce qui va arriver avec la politique du
gouvernement. Finalement, elle s'est décidée et elle est
maintenant établie en Ontario; 50 emplois de plus en Ontario, 50 emplois
qu'on aurait pu avoir. Je peux vous assurer que si l'on avait eu un
gouvernement qui avait voulu travailler dans l'ensemble de la
fédération canadienne, cette compagnie serait établie ici
dans la province de Québec et pas en Ontario. (23 h 15)
C'est cela que je veux dire par facteur de confiance et facteur de
relance économique, mais une vraie relance économique. Pas de
petits programmes, ici et là, de quelque 20 000 000 $ ou 30 000 000 $,
mais vraiment des investissements de la part des individus, pas toujours de
l'État, qui veulent le faire avec plaisir, avec fierté parce
qu'ils se sentent bien chez eux et les gens sont plus à l'aise,
même les francophones sont plus à l'aise. Et vous n'avez
qu'à regarder, pas juste vendredi dernier quand il y avait 15 000 de ces
employés qui marchaient dans la rue, mais vous n'avez qu'à
communiquer avec n'importe qui ici à Québec, avec les simples
travailleurs, les travailleuses, les serveuses, les chauffeurs de taxi.
Demandez-leur s'ils ont confiance. Est-ce que cela va bien? Ils ont totalement
perdu confiance et vous le savez. Vous n'avez qu'à regarder les
sondages, par exemple, c'est bien connu. Où est rendue votre
popularité maintenant? Vous avez certaines réponses. Donc,
demandez.
Vous allez me dire: Les libéraux n'ont pas de solution. On a bien
des solutions, mais vous ne serez jamais capables d'implanter ces
solutions-là, parce que ça prend quelque chose de plus que
d'être possédés par une idée fixe. Nous ne sommes
pas possédés par une idée fixe, nous sommes calmes, nous
sommes prêts à coopérer, à vivre en harmonie,
à rebâtir cet élément de base. Vous perdez de plus
en plus, chaque jour, cette base d'où le revenu vient, le
revenu des impôts, la taxation, parce que, chaque fois qu'il y a
encore une autre famille qui s'en va, on perd ici. Vous ne l'avez jamais
compris parce que je pense même, secrètement, que vous êtes
heureux que les gens s'en aillent parce que vous pensez: À ce
moment-là, on va être encore plus dans votre petite enclave;
finalement, on va être seul et bienheureux. Mais cela n'est pas une
solution.
C'est le chef de l'Opposition qui a écrit le document parce que,
très souvent, dans les dossiers de grande importance, c'est lui qui nous
donne les grandes lignes de conduite. On est fier de le suivre, il n'y aucun
problème du tout, c'est bien pensé. Il ne faut jamais dire: Vous
êtes négatifs, vous critiquez tout, vous êtes contre les
augmentations d'impôt, contre ce projet de loi. Qu'est-ce que vous
présentez comme solution? Vous refusez de nous écouter quand on
vient avec une solution positive. Quand on a fait des suggestions, je n'ai
jamais vu le gouvernement accepter une de nos solutions, jamais encore.
Depuis un an qu'on a des commissions parlementaires, on a tout de
même eu de bonnes idées; si c'est une idée qui vient de
nous, cela est un peu comme une idée du fédéral, on est
contaminé, ce n'est pas bon. Vous n'êtes même pas capables
d'essayer de travailler ensemble parce qu'on en est venu à un point
où on cherche les solutions. Donc, ne venez jamais dire, M. le ministre,
que l'Opposition n'est que négative; soit que vous n'ayez pas
écouté les débats, soit que vous n'ayez pas
étudié la teneur de ce que le chef de l'Opposition a dit, pas
seulement sur ce projet de loi mais sur le budget aussi. Notre formation a
toujours dit: Le rôle de l'Opposition, c'est de critiquer, mais aussi de
manière positive, parce qu'on sait très bien ce que la population
veut entendre. Qu'est-ce que vous auriez fait si vous aviez été
à notre place? On a parlé, on a suggéré, mais on
n'aurait jamais présenté deux budgets, on n'aurait jamais
essayé de gouverner par périodes de six mois en six mois jusqu'au
31 décembre. Ensuite, le 1er janvier, on se réveille avec un
autre système jusqu'au 31 mars; ensuite, le 1er avril, un autre
système. Cela ne donne pas beaucoup de sécurité à
la population, de la manière que vos projets de loi sont faits. On a
discuté de cela tout à l'heure, l'arbitraire qu'il y a
là-dedans. On demande aux gens de faire des sacrifices et même
là, il y a de l'arbitraire. Celui qui est assez chanceux parce que sa
convention expire dans le courant de l'année 1983 y échappe et
celui dont la convention expire le 31 décembre, c'est la victime. La
population ne comprend pas. On parle avec des gens ici. Il ne faut pas penser
que nous, on est le parti dont on a toujours dit: Les employeurs ne comprennent
rien à la population; on a le contact, vous seriez surpris, on parle
avec les gens et ils comprennent bien. Ils comprennent très bien qu'il
n'y a rien, il n'y a pas de ligne de conduite dans votre pensée, il n'y
a rien de définitif, de permanent. J'ai l'impression que vous gouvernez
par périodes de trois mois, de six mois en six mois, et cela est
grave.
Quand on compare tout cela aux provinces... On a pris l'exemple de la
Nouvelle-Écosse, savez-vous qu'en Nouvelle-Écosse, on a
augmenté les impôts d'une manière assez substantielle? Vous
auriez dû dire en même temps qu'avant, ils étaient beaucoup
moins élevés. Ils ont gardé, même avec
l'augmentation, une marge de manoeuvre. Nous n'avons plus de marge de
manoeuvre. Le ministre l'a admis quand je lui ai demandé cet
après-midi: Pourquoi 3 000 000 000 $ de ce qu'on appelle
déductible? 3 000 000 000 $, c'est acceptable; on ne peut pas aller
au-delà de 3 000 000 000 $. Il a répondu: Parce qu'après 3
000 000 000 $, on n'est plus capable de faire des emprunts sur le marché
financier où nous sommes des clients, la cote pourrait être
affectée.
Je lui ai demandé: Qu'est-ce qui arrivera s'il y encore plus de
gens, si les compagnies partent de la province de Québec, si on a des
revenus moindres et si, en même temps, on a une hausse imprévue de
dépenses, s'il y a un autre trou de 400 000 000 $, 500 000 000 $? Que
serez-vous obligé de faire dans trois mois? Encore revenir avec un autre
budget partiel, encore augmenter la taxe de l'essence ou je ne sais pas quoi?
C'est pour cela que les gens ont perdu confiance. Donc, cela est votre
solution. Notre solution était, je pense, qu'au point de vue des
administrateurs, nous sommes beaucoup mieux équipés pour
être de bons administrateurs responsables de la bourse publique et de la
situation financière publique de la province de Québec. Vous,
vous commencez à rire de cela. Mais vraiment, je note, depuis plus d'un
an que je suis ici - je n'ai rien contre les gars qui ont travaillé pour
les syndicats, je les respecte beaucoup, de même que les professeurs
-qu'il n'y a pas un homme d'affaires dans votre équipe. C'est cela le
problème. Quand vous avez eu un homme d'affaire, vous l'avez perdu. Je
pense que c'est le ministre Joron, j'oublie son nom. C'est un homme d'affaires,
il n'est pas resté, ou M. Tremblay. C'est cela le problème. On
note que vous êtes très bien sur le plan théorique, vous
avez de grandes théories, mais il n'y a pas un homme d'affaires dans
l'équipe. Il n'y a pas un homme d'affaires qui soit capable de dire
comment cela marche. J'ai dit, hier, au président du Conseil du
trésor...
M. Bérubé: Le député de Frontenac
pourrait acheter le député de Sainte-Anne bien des fois.
M. Polak: Oui. J'ai dit au président du Conseil du
trésor que la semaine prochaine, je serai à Montréal.
Venez donc à mon bureau d'avocat passer deux ou trois jours, pour savoir
ce qui se passe dans le monde du commerce, les appels qu'on reçoit des
gens qui veulent s'incorporer. Ils ne veulent plus avoir une charte
provinciale, ils demandent tous une charte fédérale. Il y a une
raison à cela, parce qu'on n'a plus de confiance.
M. Bérubé: ... au sein du Parti
québécois.
M. Polak: Cela, c'est grave. Le ministre commence à
parler, à rigoler parce qu'il n'aime pas cela et il n'écoute
plus. C'est cela qui arrive. Il faut voir dans le monde actuel ce qui se passe
au point de vue de la confiance. Il aurait fallu gouverner d'une manière
responsable en contrôlant la situation, penser pour une période
d'un an, par exemple pour la politique salariale, penser et chercher une
solution pour une période de deux ou trois ans, non pas avec le pistolet
sur la table mais avec une plume et dire: On veut arriver honnêtement
à une entente. C'est nécessaire, il faut mettre de l'eau dans son
vin. Tout le monde l'aurait compris. Le ministre a dit tout à l'heure
que la population québécoise est très responsable, qu'il
est très content de sa réaction, qu'elle commence, comme
collectivité, à accepter cela. Je suis convaincu de cela, vous
avez raison, mais pas avec ce projet de loi. Si on avait présenté
un plan collectif d'une manière responsable et négocié
avec les gens, oui mais pas après que le projet de loi aura
été adopté. L'article 3 dit clairement: On va
étendre votre convention du 31 décembre jusqu'au 1er avril 1983.
Plus tard, quand on aura la loi dans notre poche, là on va parler. Ce
n'est pas la manière d'agir.
C'est pour cela qu'on a eu tous ces gens ici, qu'il y en a 15 000 qui
sont venus faire une grande démonstration. De ces 15 000, je suis
convaincu qu'il y a eu peut-être 10 000 ou 12 000 qui avaient voté
PQ la dernière fois, dans ce groupe. Le plus drôle, c'est que
j'étais le bienvenu dans ce groupe et j'y suis allé. J'ai
demandé au ministre de m'accompagner et de rencontrer ces gens du
syndicat. Je n'ai eu aucun problème et j'ai parlé avec eux. Vous
auriez dû voir leurs réactions. Le monde est rendu à un
point qu'il n'est plus prêt à accepter votre solution et votre
manière d'administrer la bourse publique comme une épicerie du
coin. C'est cela le problème. Vous faites même des emprunts pour
payer l'épicerie. On dit que le Parti libéral, l'Opposition
officielle, n'a aucune solution, qu'il est là pour critiquer d'une
manière négative. En fait..
M. Paquette: Comme vous venez de faire là.
M. Polak: Pas du tout. C'est cela votre problème. On n'est
pas capable de pénétrer dans votre cerveau, et c'est malheureux.
Vous n'êtes même pas capables d'accepter une solution positive,
même pas. C'est malheureux. Je suis ici à cette commission
jusqu'à minuit. De temps en temps, j'appelle ma femme et elle me dit: "
Bon, as-tu réussi à faire quelque chose?" Oui, on a changé
une virgule, ils ont accepté cela. Hier, un amendement que j'ai fait sur
un point, ils l'ont accepté. Je suis tout surpris, mais c'est un point
tellement mineur. Tout le monde a ri. C'est triste et malheureux parce qu'il y
a tout de même plusieurs domaines où nous présentons des
solutions positives. Et même, on vous donne une chance de voler notre
formule. Allez-y, pour le bénéfice de la population. Vous ne le
faites pas. La porte est ouverte, on refuse, on dit: Mais il n'y a rien
là, il y a juste la critique. Ce n'est pas vrai. Lisez donc les
documents que M. Ryan a préparés sur le budget. M. Ryan a
écrit un document sur le budget d'à peu près 25 pages.
Vous devriez le passer dans votre formation politique. Demandez à ces
gens - oui, vous allez comprendre quelque chose.
M. Paquette: Allez le chercher. M. Blais: II n'y a rien
dedans.
M. Polak: II n'y a rien là parce que vous n'êtes
même pas capables de suivre ce qui se trouve dans le texte, c'est trop
compliqué peut-être pour vos petits cerveaux. Mais quand il s'agit
de problèmes constitutionnels, là vous voyez rouge. Mon ami, tout
le monde est prêt à parler
Mme Lavoie-Roux: Ils voient bleu.
M. Polak: À la commission, je ne sais,
d'Hydro-Québec, tout le groupe était prêt. Il y en a 30 ou
35 qui ont parlé sur cela. Dix minutes chacun, je m'en souviens. De
beaux discours. Quand on a parlé de la constitution canadienne, au mois
d'avril, en deux semaines on avait un projet de loi sur notre bureau, tout fait
et tout prêt pour dire: On n'accepte pas. Là tout le monde
parlait. Quand on parle de SDI, c'était, cet après-midi, la
commission de la SDI, c'est important, 100 000 000 $ de subventions, avec de
grands problèmes de vérification. Personne n'est là,
personne n'a parlé là-dessus sauf le ministre. C'est triste et,
quand on parle des affaires sur le plan financier, il n'y en a pas. Quand on
parle du budget, la moitié d'entre vous pense que c'est une affaire
constitutionnelle, vous n'êtes même pas capables de
répondre. C'est triste, c'est malheureux.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le
député de Sainte-Anne. Est-ce que l'article 3 tel
qu'amendé sera adopté?
Mme Lavoie-Roux: J'aurais une toute petite question.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que cela a rapport
à l'article 3, parce que vous pourriez la poser à l'article
4?
Mme Lavoie-Roux: Oui, absolument. Est-ce qu'une telle
éventualité pourrait se présenter? Je ne crois pas que
ceci arrive dans le monde de l'éducation, mais peut-être aux
affaires sociales ou dans d'autres services. Quelqu'un prend sa retraite le 31
décembre ou le 1er janvier. Évidemment, il aurait eu les
augmentations de juin et de décembre. À ce moment, il n'est plus
soumis à la convention puisqu'il est rendu à sa retraite. Est-ce
qu'il est soumis à la récupération de l'argent et de
quelle façon le serait-il?
M. Bérubé: II n'est pas soumis à la
récupération de l'argent.
Mme Lavoie-Roux: II n'est pas soumis à la
récupération de l'argent.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que l'article 3 tel
qu'amendé sera adopté?
M. Bérubé: Avant de l'accepter...
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
Mme Lavoie-Roux: Non, non. Vote enregistré, vote nominal,
M. le Président, sur l'article 3.
M. Bérubé: Avant de l'accepter...
Le Président (M. Bordeleau): Vous m'avez demandé la
parole et, comme vous l'avez dit tantôt, vous avez toujours un droit de
parole illimité.
M. Bérubé: II y a eu une intervention. Je pense que
cela vaut la peine de relever rapidement une intervention qui m'a frappé
parce que je pense qu'elle avait des éléments de
vérité. C'est lorsque la députée de L'Acadie a
souligné, par exemple, l'attitude que certains péquistes ont pu
avoir au cours des négociations en 1972, en 1976; à plusieurs
reprises, l'Opposition a souligné certaines déclarations de
l'époque. Et j'aurais peut-être tendance à être
d'accord avec elle. Je pense qu'il faut savoir reconnaître ses erreurs
quand on en a eu, mais je pense qu'il faut également les remettre dans
le contexte.
Je sais que la députée de L'Acadie aura beaucoup de
difficulté à comprendre cet état d'âme qui a pu
prévaloir à l'époque, mais c'est également
celui-là qui m'a amené en politique. Et je pense qu'il faut
également insister. Beaucoup de nos concitoyens au Québec
voudraient voir la société québécoise s'affirmer en
tant que société. Ils ont eu la très nette impression,
sous le gouvernement libéral de 1970 à 1976, que cette
espèce d'éveil de la société
québécoise, qui faisait de cette société une
société de plus en plus fière et désireuse
d'assumer ses destinées, était un peu mise en cause par un
régime libéral qui avait perdu cette foi dans le Québec et
qui mettait l'accent sur notre caractère provincial. Je reconnais que
peut-être, particulièrement de 1973 à 1976, notre
société a perdu ce consensus social. Il est également
très important. Lorsque vous parlez du consensus social que l'on peut
perdre par le présent projet de loi, je peux vous dire qu'il n'est pas
impossible également que ce projet de loi soit accepté par les
travailleurs, justement à cause de cette idée d'une
société québécoise qui, en même temps qu'elle
s'arrache à sa dépendance, réalise aussi qu'elle doit
assumer ses responsabilités. Et la notion d'indépendance pour une
société, que dénigre continuellement le
député de Sainte-Anne au point de la ridiculiser, ce que je ne
peux pas accepter parce que c'est un des biens les plus précieux, ce
désir d'indépendance d'une société, et
également un moteur d'élévation et de croissance, et de
développement intellectuel... Je pense que c'est un
élément. Chaque fois que j'écoute le député
de Sainte-Anne qui dénigre le nationalisme au Québec, je ne peux
pas l'accepter.
Que vous nous reprochiez...
M. Polak: Question de règlement parce que le
ministre...
Le Président (M. Bordeleau): Question de règlement
à condition que cela en soit une.
M. Polak: Tout de même, ce n'est pas à lui à
interpréter mes paroles. Je ne dénigre jamais personne. Vous
connaissez très bien ma théorie. Je suis aussi nationaliste que
vous...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne, s'il vous plaît.
M. Polak: ... sauf dans un contexte plus large. Et mes
fenêtres ne sont pas fermées, elles sont ouvertes.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît! M. le
député de Sainte-Anne, ce n'est pas une question de
règlement.
M. Polak: C'est toute la différence.
M. Blais: C'est faux, c'est faux.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Le seul point, Mme la
députée de L'Acadie, que je tiens à souligner, c'est que
c'est vrai qu'à un moment donné, dans notre
société, on a perdu ce consensus social. Je peux vous garantir
que revenir à une ère libérale nous ramènerait
rapidement à cette situation. Nous avons une chance collectivement de
nous en sortir, c'est en prenant conscience de notre force de nation.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. Alors, comme l'appel
nominal est demandé... Est-ce toujours demandé, Mme la
députée de L'Acadie?
Mme Lavoie-Roux: Oui. Parce que c'est l'article le plus
important.
Le Président (M. Bordeleau): J'appelle le vote sur
l'article 3 tel qu'amendé. M. Blais (Terrebonne) pour ou contre? (23 h
30)
M. Blais: Pour.
Le Président (M. Bordeleau): M. Rocheleau (Hull) absent,
M. de Belleval (Charlesbourg)?
M. de Belleval: Pour.
Le Président (M. Bordeleau): M. Johnson
(Vaudreuil-Soulanges), M. Ryan (Argenteuil)?
M. Ryan: Contre.
Le Président (M. Bordeleau): M. Gagnon (Champlain), M.
Grégoire (Frontenac)?
M. Grégoire: Pour.
Le Président (M. Bordeleau): M. Lachance
(Bellechasse)?
M. Lachance: Pour.
Le Président (M. Bordeleau): M. Polak (Sainte-Anne)?
M. Polak: Contre.
Le Président (M. Bordeleau): M. Paquette (Rosemont)?
M. Paquette: Pour.
Le Président (M. Bordeleau): M. Bérubé
(Matane)?
M. Bérubé: Pour.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, cela fait six pour,
deux contre. L'article 3 tel qu'amendé est donc adopté tel
qu'amendé.
Mme Lavoie-Roux: ... droit de vote. On m'a mise comme
intervenante.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, vous avez raison, Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je ne sais pas si j'avais le droit de demander
le droit de vote.
Le Président (M. Bordeleau): En vertu du règlement,
j'aurais pu ne pas accepter votre demande mais, de toute façon, je pense
que le climat est assez détendu. Alors, l'article 4. M. le ministre.
M. Bérubé: M. le Président, avant d'aborder
l'article 4 comme tel, je voudrais y apporter un amendement...
Le Président (M. Bordeleau): Oui.
M. Bérubé: ... qui vient au troisième
alinéa, je pense que vous l'avez sous les yeux. Le troisième
alinéa de l'article 4 se lisait: "Elles peuvent être
modifiées par entente entre les parties." L'inconvénient de cette
rédaction, c'est que l'on se référait aux parties telles
que les définit la loi no 55, et il pouvait y avoir, par exemple,
confusion entre la partie locale et la partie nationale où, normalement,
se négocient les matières salariales. Aussi, pour être
certains qu'il n'y a pas confusion, nous amenderions le troisième
alinéa pour lui faire dire ceci: Cet article est modifié par le
remplacement du troisième alinéa par le suivant: "Elles peuvent
être modifiées, à l'égard de salariés
représentés par une association accréditée, par
entente entre le gouvernement et l'agent négociateur habilité
à négocier au nom de cette association accréditée
suivant l'article 7 ou l'article 8 du chapitre O-7.1 des Lois refondues du
Québec." Il s'agit de clairement définir qu'il ne s'agit pas
d'une clause de négociation locale.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que l'amendement sera
adopté?
M. Polak: Je veux juste parler sur l'amendement.
Le Président (M. Bordeleau): Sur l'amendement. M. le
député de Sainte-Anne.
M. Polak: Est-ce que j'ai bien compris M. le ministre, pour
l'amendement, que cela vous donne plus de latitude pour le conquérir un
par un? Qu'est-ce qui arrive si, dans un secteur, on accepte, tandis que dans
d'autres, on ne veut pas? C'est comme cela que je lis l'article.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Non, il s'agit de la partie syndicale
telle que définie par la loi no 55. Ce chapitre O-7.1, c'est la loi no
55 qui définit l'organisation de la table de négociation. Par
conséquent, cela ne modifie pas la table de négociation pour les
conventions collectives, elle définit cependant clairement ce que le mot
"parties" voulait dire.
M. Polak: Si, par exemple, comme la semaine dernière, on
avait le front commun, qui est assez négatif, mais il y a un autre
groupe, et je pense que les fonctionnaires provinciaux semblaient avoir
l'oreille un peu plus ouverte. Disons que le gouvernement négocie avec
eux ou dans leur groupe et eux acceptent une certaine entente.
M. Bérubé: Oui.
M. Polak: Donc, cela peut couvrir ce secteur-là.
M. Bérubé: Exactement, oui.
M. Polak: Et peut-être d'autres secteurs.
M. Bérubé: Oui, oui. M. Polak: D'accord.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? Est-ce que
l'amendement est adopté?
M. Bérubé: Adopté.
Le Président (M. Bordeleau): L'amendement, oui?
Adopté. Alors, sur l'article 4 tel qu'amendé...
M. Blais: Adopté.
M. Polak: Est-ce que vous parlez, M. Ryan, sur l'article 4?
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que cela va?
M. Ryan: Pardon?
Le Président (M. Bordeleau): Sur l'article 4, est-ce que
cela va?
M. Ryan: L'article 4 adopté comme cela?
Le Président (M. Bordeleau): Tel qu'amendé,
oui?
M. Ryan: Non, non jamais.
Mme Lavoie-Roux: Non, non.
Le Président (M. Bordeleau): Non? D'accord. Vous avez le
droit de parole..
M. Bérubé: Sur division? On a pas objection
à l'adopter sur division.
M. Ryan: Non, non il n'y a pas de danger. Non, non, non, on veut
vous faire clarifier votre affaire parce qu'il y a des petites cachettes
ici.
M. Bérubé: Ah!
Le Président (M. Bordeleau): Alors, M. le chef de
l'Opposition, sur l'article 4.
M. Ryan: D'abord, il y a un premier point, M. le
Président, question d'information, avant que j'émette des
opinions. Pardon?
M. Paquette: Vous en avez déjà émis une,
vous avez dit qu'il y avait des cachettes.
M. Ryan: Je reviens justement là-dessus, puis
j'espère bien que, comme il l'a fait à quelques reprises depuis
le début de la discussion, le ministre confirmera mes
appréhensions ou mes constatations. Je regrette une chose, M. le
ministre, d'un grand tableau que vous avez distribué, de toute cette
série de tableaux que vous nous avez donnés, document sessionnel
no 350, vous nous auriez facilité les choses énormément si
vous aviez donné le tableau intégral qui était
nécessaire pour comprendre ce que vous faites. Là, vous nous
donnez les rémunérations à compter du 1er janvier 1983 et
ensuite au 1er avril 1983, et comme on n'a pas les points de repère,
c'est bien embarrassant pour nous, il faut fouiller partout.
M. Bérubé: Ah! oui.
M. Ryan: Et vous comprendrez que vous nous mettez dans une
situation extrêmement difficile. Heureusement, quand les...
M. Blais: C'est une question de temps.
M. Ryan: Ah! c'est une question de temps!
M. Blais: On n'a pas eu le temps de taper l'autre colonne.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît!
M. Ryan: Je sais bien que vous autres, vous êtes dans la
même position que nous et je ne vous blâme pas.
M. Blais: On ne l'a même pas, nous autres.
M. Ryan: Je parle des députés! Il n'y a pas un gars
sérieux qui peut travailler avec un document comme ça, sauf celui
qui a toutes les réponses à côté. Mais, dans la
comparution qu'ils ont faite ici, vendredi dernier, les dirigeants des
centrales syndicales nous ont apporté des tableaux qui nous fournissent
des renseignements plus précis et qui contenaient vraiment les
données que ça nous prenait pour comprendre ce que vous vouliez
dire. Ils vous donnent le taux actuel pour différentes catégories
d'emplois au 30 juin 1982; ensuite ils vous donnent le taux qui devrait
être en vigueur le 1er juillet 1982, en vertu des conventions
signées par le gouvernement et les syndicats; ensuite les taux qui
devraient être en vigueur le 31 décembre; ensuite ce que vous
voulez instituer le 1er janvier et ensuite ce qui serait imposé le 1er
avril, à défaut d'ententes négociées.
M. Bérubé: S'agit-il du document des fonctionnaires
ou de la CSN?
M. Ryan: Le document de la CSN. Maintenant, je peux vous donner
une série de chiffres, si vous voulez. En tout cas, on va voir. La
question que je veux vous poser est bien simple. Je vais vous lire ce qu'ils
disent dans ce document. J'ai fait des calculs et ça confirme leurs
prétentions. Peut-être les calculs ne sont-ils pas bons, mais vous
me corrigerez s'il y a lieu.
M. Bérubé: Je crois que, dans le document de la
CSN, cela me semblait correct.
M. Ryan: Oui. Alors, on va prendre un exemple, si vous le voulez
bien, M. le ministre. D'accord? Un commis, classe I, échelon 1, salaire
au 30 juin 1982: 252 $. Cela va?
M. Bérubé: Oui.
M. Ryan: Ensuite, au 1er juillet 1982, 8,65%, plus 347 $, ce qui
est un montant forfaitaire d'indexation, je suppose.
M. Blais: II y la prime d'enrichissement de 2,2%.
M. Bérubé: Non, 8,65%, c'est l'augmentation... Je
vais vous la calculer...
M. Ryan: Là, il y a la prime d'enrichissement, plus un
certain montant, n'est-ce pas?
M. Bérubé: Je vais vous le calculer.
M. Ryan: En tout cas, disons que ça fait 280,35 $...
M. Bérubé: Oui, c'est ça, la formule qui a
été...
M. de Belleval: On va laisser le chef de l'Opposition faire sa
démonstration et on verra après. Allez-y, faites-la au complet,
je pense que ça va être mieux.
M. Ryan: M. le Président, Mme la députée de
L'Acadie aurait une question d'information, si vous permettez?
Le Président (M. Bordeleau): Oui, Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Pourrait-on avoir le tableau des échelles
actuelles? Parce que, quand bien même vous nous remettriez le document
sessionnel de 365 pages, on n'a pas le temps de faire les calculs. Qu'est-ce
que c'est que vous...
M. Bérubé: Ce sera un autre document de 365 pages,
parce que ça va être toutes les échelles prévues
dans les conventions collectives. Vous allez donc avoir un document de 365
pages avec les anciennes... Parce que, dans le document sessionnel, ce que l'on
peut dire, c'est que peut-être on aurait dû avoir la colonne pour
le 30 juin.
Mme Lavoie-Roux: Ah! C'est ça?
M. Bérubé: C'est ça. Mais la
mécanique est simple...
M. Ryan: Est-ce que vous avez vos sources, M. le ministre?
M. Bérubé: Oui. La mécanique est simple.
Pour l'augmentation, évidemment, nous devons postuler une inflation qui
est de 10,4%. Il va de soi que cette inflation, nous la connaîtrons
véritablement à la fin, de juin à juin, et donc nous ne la
connaîtrons véritablement qu'en juillet ou en août.
M. Ryan: Mais je m'excuse, M. le Président, on est rendu
trop loin. Pour le moment, on n'interprétera pas tout de suite la
convention collective en vigueur, on va juste prendre les montants. Si vous
acceptez les montants, moi, ça fait mon affaire.
M. Bérubé: D'accord, alors vous me dites que le
premier...
M. Ryan: La somme de 280,35 $ au 1er juillet 1982.
M. Bérubé: Là, vous interprétez la
convention collective en disant ça.
M. Ryan: Je prends le document que vous sembliez trouver exact
tantôt.
M. Bérubé: Oui, mais vous interprétez la
convention collective. C'est-à-dire...
M. Ryan: C'est évident.
M. Bérubé: ... que le calcul est que vous avez une
inflation de 10,4%, qui était l'inflation postulée. Toutefois,
nous ne la connaîtrons véritablement que quelque part en
août et, par conséquent, il n'est pas impossible que ces chiffres
doivent être corrigés. Mais ils nous semblent à peu
près corrects, n'est-ce pas?
M. Ryan: Oui, c'est ça. Une voix: ...
M. Bérubé: Ils sont corrects. Donc le document de
la CSN...
M. Ryan: Alors, pour faire vos calculs, vous avez postulé
10,24%...
M. Bérubé: Non, 10,4%.
M. Blais: Comme la CSN, d'ailleurs.
M. Bérubé: Comme la CSN.
M. Ryan: La CSN, la même chose?
M. Bérubé: Oui.
M. Ryan: Alors, il n'y a pas de problème de ce
côté-là.
On continue: au 31 décembre 1982: 288,20 $. Cela va aussi? 2,8%
de forfaitaire, je pense, n'est-ce pas?
M. Bérubé: Oui, vous passez du 1er juillet
au...
M. Ryan: Oui, c'est cela. D'accord?
M. Bérubé: Oui, c'est tout à fait conforme
à nos chiffres.
M. Ryan: 288,20 $. Ensuite, on tombe sous le régime
d'austérité Spartiate, après les années
d'imprévoyance: 227,50 $ au 1er janvier 1983.
M. Bérubé: C'est exactement cela.
M. Ryan: Ensuite, au 1er avril 1983, 281,40 $.
M. Bérubé: En se disant bien qu'il ne s'agit pas
d'un salaire définitif, mais bien d'un salaire qui peut être
modifié par le contenu des conventions collectives.
M. Ryan: Sujet à la négociation.
M. Bérubé: Oui.
M. Ryan: Dans le carcan très étroit...
M. Bérubé: Non.
M. Ryan: ... que définit la loi.
M. Bérubé: Non, c'est contrairement à...
Effectivement, M. le chef de l'Opposition, à quelques reprises, j'ai eu
l'occasion de vous entendre réaffirmer cela et ce n'est malheureusement
pas correct. C'est contraire aux faits. Le salaire du 1er avril, nous aurions
pu, évidemment, nous engager dans la négociation en laissant les
salaires au niveau où ils étaient entre le 1er janvier et le 1er
avril. Mais, évidemment, c'était mettre les employés de
l'État dans une position de négociations extrêmement
difficile. Il fallait donc rehausser le salaire à un niveau quelconque,
niveau absolument temporaire, qui, dès qu'il y aura conclusion de la
convention collective des trois années suivantes, va être
automatiquement ajusté. Si l'accord est conclu avant le 1er janvier,
forcément, ce chiffre du 1er avril ne se réalisera jamais,
c'est-à-dire qu'il va se réaliser. À minuit moins une
seconde, ce sera tel salaire et, à minuit plus une seconde, le salaire
sera automatiquement changé au niveau fixé par les conventions.
Donc, il s'agit uniquement d'un salaire temporaire jusqu'à la conclusion
de la convention collective puisque, lors du renouvellement de la convention
collective, comme la convention collective inclut cette période,
automatiquement, ce salaire doit être ajusté.
M. Ryan: Voulez-vous dire qu'à partir du 1er avril 1983,
le plan d'augmentation en trois catégories, que vous aviez soumis il y a
deux mois, cela tombe?
M. Bérubé: Oui.
M. Ryan: Cela tombe.
M. Bérubé: C'est-à-dire...
M. Ryan: Vous n'avez aucune limite de fixée à
partir du 1er avril 1983?
M. Bérubé: Aucune. Cela fait l'objet de la
négociation.
M. Ryan: On va regarder le texte tantôt - j'ai le texte de
l'article - pour s'assurer qu'il dit bien cela. Si c'est cela, c'est tant
mieux. Cela fait un aspect du problème qui est simplifié.
Le Président (M. Bordeleau): Je
m'excuse, M. le chef de l'Opposition. M. Ryan: J'en viens avant
cela.
Le Président (M. Bordeleau): Avant que vous ne changiez de
sujet, M. le député de Rosemont.
M. Paquette: Là-dessus, si le chef de l'Opposition me le
permet. Ces salaires qui sont prévus par projections, sans
présupposer des négociations qui pourraient les modifier et qui
ne sont pas sujettes au projet de loi -c'est ce que vous dites, M. le ministre
- est-ce que ce sont ces chiffres-là qui ont servi de base aux
projections que vous avez faites pour les années budgétaires
1983-1984 et 1984-1985 dans le discours sur le budget? Est-ce que le niveau des
dépenses qui apparaissent à ce tableau est basé sur ces
salaires ou sur d'autres?
M. Bérubé: Effectivement, les chiffres
utilisés par le ministre des Finances présumaient une protection
pleine et entière du pouvoir d'achat. Donc, la masse salariale servant
à des fins de rémunération était indexée au
coût de la vie, et s'y ajoutait également un coût de
système inhérent. En d'autres termes, ce que...
M. Paquette: Et en tenant compte du projet de loi no 70.
M. Bérubé: Oui, pour la base. M. Paquette:
Pour la base.
M. Bérubé: Et non pour la projection dans le
temps.
M. Paquette: D'accord. Très bien.
Le Préaident (M. Bordeleau): M. le chef de
l'Opposition.
M. Ryan: Je n'ai pas eu le temps de faire ma démonstration
encore. On va y revenir. Nous admettons tous les chiffres que j'ai
mentionnés. Le dernier, vous dites que c'est sujet à modification
par le canal de la négociation. On va y revenir tantôt parce que
j'ai de la misère à comprendre l'article 4 à la
lumière de ce que vous avez dit. Mon point, pour l'instant, est le
suivant. Vous nous dites que le projet de loi réduit les salaires pour
trois mois de 18,8%.
M. Bérubé: Oui.
M. Ryan: N'est-ce pas? (23 h 45)
M. Bérubé: Hum!
M. Ryan: Le salaire de votre commis de classe I, au 31
décembre 1982, est rendu à 288,20 $.
M. Bérubé: Oui.
M. Ryan: Au 1er janvier, il tombe à 227,50 $.
M. Bérubé: Oui.
M. Ryan: Si je sais compter, cela fait une différence de
21% et non pas de 18,8%.
M. Bérubé: Cela dépend du point de
départ.
M. Ryan: Ouais, cela revient.
M. Polak: II est pauvre, donc, on frappe plus durement.
M. Ryan: C'est 21,1%.
M. Bérubé: C'est très simple. Je ne veux pas
faire de mauvaise blague, mais ce que cela veut dire, c'est que l'augmentation
de salaire du 31 décembre à minuit moins une seconde, il l'a
jusqu'au 1er janvier à minuit plus une seconde. En d'autres termes,
cette augmentation de salaire qu'il devait recevoir, il ne l'a strictement pas,
c'est-à-dire qu'il la voit passer.
M. Ryan: C'est vraiment...
Mme Lavoie-Roux: II ne la voit même pas passer.
M. Ryan: ... de la chimie avancée.
Mme Lavoie-Roux: Cela se passe dans la nuit, à part
cela.
M. Ryan: Franchement, il avait droit à cette augmentation
du 31 décembre. Donc, il y a un point X dans le temps, fût-il
infinitésimal, où il a eut droit au salaire de 288,20 $.
Très bien. À partir de ce moment jusqu'au matin du lendemain, il
est coupé de 21% et non pas de 18,8%.
M. Bérubé: Oui, mais c'est clair... M. Ryan:
Ce n'est pas clair d'après...
M. Bérubé: ... nous avons dit par rapport au
salaire du 1er juillet, c'est-à-dire que, par rapport au salaire que la
personne a amené chez elle hebdomadairement pendant six mois, par
rapport à ce salaire auquel la personne est habituée, il y a une
réduction de 18,85%. Par rapport au salaire auquel elle aurait eu droit
le 1er janvier, le taux est évidemment différent.
M. Paquette: Et c'est comme cela pour tous les
employés.
M. Bérubé: Oui.
M. Polak: Cela me fait de la peine, M. le ministre.
M. Paquette: Donc, le député de Sainte-Anne est
dans les patates.
M. Ryan: Je vois le député de Rosemont et le
député de Charlesbourg - et je pense aussi le président du
Conseil du trésor - qui reconnaissent que, par rapport au salaire auquel
les employés salariés des secteurs public et parapublic avaient
droit en vertu de la convention, dûment signée par le
gouvernement...
M. de Belleval: C'est sûr.
M. Ryan: ... il interviendra le 1er janvier une réduction
de 21,1%.
M. de Belleval: Oui. M. Paquette: C'est vrai. M. Ryan:
Très bien.
M. Paquette: Mais on peut regarder les choses de façon
optimiste aussi.
M. Bérubé: On ne peut rien vous cacher.
M. Paquette: On peut regarder les choses d'une façon
optimiste aussi.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: M. le chef de l'Opposition, on peut regarder les
choses de façon optimiste aussi si on compare le salaire au 31 juin 1982
avec celui du 1er avril 1983, neuf mois plus tard. Il va constater que, pour
les bas salariés, malgré ces hauts et ces bas au cours de la
période, il y a quand même une augmentation de 11,7%.
M. Ryan: Le 1er octobre, comment calculez-vous cela? Il vient de
nous dire que c'est négociable à partir du 1er avril et vous
êtes rendu au 1er octobre 1983.
M. Paquette: À moins que la négociation ne vienne
changer le taux de salaire le 1er avril 1983.
M. Ryan: Vous n'avez pas l'air d'y tenir.
M. Paquette: Cela peut être à la hausse.
M. Lachance: C'est au moins garanti.
M. de Belleval: Ce ne sera pas à la baisse.
M. Bérubé: Disons que c'est au moins garanti.
M. Ryan: Très bien. C'est un point que je voulais
établir clairement.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Bellechasse.
M. Lachance: Vous semblez - c'est votre droit, d'ailleurs - vous
réjouir d'avoir découvert cet élément. Sans doute,
allez-vous vouloir l'exploiter; d'autre part, on ne peut pas perdre ce qu'on
n'a pas. La personne qui, théoriquement, pouvait jouir durant deux
secondes de cet argent, ne l'a jamais eu, en fait. Donc, on ne peut pas le
calculer dans la diminution.
M. de Belleval: Le chef de l'Opposition a terminé son
point. Cela va.
M. Ryan: Très bien. Il y a un autre point que je voudrais
clarifier tout de suite, vu que vous l'avez évoqué tantôt,
M. le ministre. Vous m'avez dit qu'à compter du 1er avril, tout
était négociable. Tout. Je lis l'article 4 et vous allez me
l'expliquer: "Malgré l'article 3, pour la période du 1er janvier
1983 au 31 mars 1983 et à compter du 1er avril 1983, les traitements,
suppléments de traitement, primes et montants forfaitaires que peuvent
toucher les salariés liés par une convention collective sont
fixés par le document sessionnel no 350 déposé à
l'Assemblée nationale du Québec le 26 mai. "Les dispositions de
ce document font partie des conventions collectives qu'elles concernent et
lient les employeurs, les salariés et les associations
accréditées comme si elles y étaient stipulées.
"Elles peuvent être modifiées par entente entre les parties.
Toutefois, une telle modification n'a d'effet que si elle est approuvée
par le gouvernement."
M. Paquette: Jusqu'à conclusion d'une nouvelle convention
collective.
M. Bérubé: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre.
M. Bérubé: ... je sais que c'est contraire au
règlement de se référer à un article
subséquent, mais, dans la mesure où je pense que cela pourrait
répondre à la question du chef de l'Opposition, je le
référerais à l'article 15 du présent projet de loi.
Je lis: "Les conditions de travail qui, en vertu de la présente loi,
sont applicables aux
salariés à l'expiration de la période de
prolongation de la convention collective sont maintenues jusqu'à la
signature de nouvelles conventions collectives comme si le maintien des
conditions de travail applicables à cette date était
stipulé dans les conventions collectives dont la durée est
prolongée en vertu de la présente loi." En d'autres termes, cet
article vient dire que les conditions, à la fin de la période de
gel ou de récupération, du 1er avril après le
réajustement d'avril, sont prolongées dans le temps exactement
comme elles le sont normalement dans beaucoup de nos conventions collectives.
Et là, même, on va plus loin puisqu'un bon nombre de nos
conventions collectives, comme nous avons pu le souligner cet
après-midi, ne prévoient pas cette clause de prolongation de
convention collective à l'échéance de la convention. Nous
allons plus loin que ça, par loi, nous prévoyons automatiquement
la prolongation de cette convention collective que nous imposons pour
l'ensemble des employés, de sorte que les conditions de travail qui vont
prévaloir, si jamais nous sommes encore en négociations,
j'espère que nous ne le serons plus à ce moment, mais les
conditions de travail qui devraient prévaloir, s'il n'y avait pas encore
de conclusion d'entente, seraient celles du 1er avril, c'est-à-dire
incluant les salaires définis au 1er avril.
M. Ryan: Alors, on va retenir la discussion sur cet article. Je
tiens compte de la remarque que vous faites. On va suspendre la discussion sur
ce point précis. Nos objections demeurent pour d'autres aspects
très importants de cet article. Cela ne changera rien quant à
notre attitude. Je voudrais comprendre bien clairement ce que ça
signifie, pour les travailleurs, les dispositions qui sont annoncées. On
va reprendre notre exemple de tantôt. Vous avez une personne qui
travaille à l'Assemblée nationale ici, comme personne
d'entretien, qui gagnait disons 252 $ par semaine depuis le 1er janvier 1982.
D'accord? Cela va? C'est à peu près 13 000 $ par
année.
M. Bérubé: Depuis le 1er juillet 1981.
M. Ryan: Depuis le 1er juillet 1981, c'est encore mieux. Elle
gagnait 252 $. Là, le 1er janvier 1983, c'est-à-dire un an et
demi plus tard, elle va se trouver avec 227,50 $, sauf si des
négociations intervenaient et changeaient la répartition des
montants. Pendant ce temps, il est intervenu une inflation d'au moins 15%. Le
coût de la vie a augmenté d'au moins 15%.
Une voix: Si on veut.
M. Ryan: Alors, 252 $ plus 15% ça fait au moins 37 $ de
plus que ça lui coûte pour vivre que, normalement, elle aurait
dû toucher. Vous autres, vous lui réduisez son salaire de 25 $,
alors que ça lui en aurait pris...
M. Bérubé: Pendant la période de trois
mois.
M. Ryan: Oui, c'est correct. Pendant cette période de
trois mois, son salaire va être réduit de 27 $, alors que,
normalement, seulement pour maintenir son pouvoir d'achat, elle aurait besoin
de 37 $ de plus. Une personne à 13 000 $ par année, ce n'est pas
des farces. Vous vous rendez compte que ça n'a pas de bon sens.
Très bien, je suis content d'entendre le député de
Bellechasse reconnaître que, franchement, ça n'a pas de bon sens.
N'importe qui qui regarde cela va se rendre compte que ça ne tient pas
debout.
M. de Belleval: On ne dit pas que cela a du bon sens.
M. Ryan: Vous trouvez que cela a du bon sens?
M. de Belleval: Non, ce n'est pas ça qu'on dit non
plus.
M. Ryan: Non, franchement c'est pénible.
M. Bérubé: ... du Parti libéral national.
Est-ce que le chef du Parti libéral veut que je lui réponde?
M. Ryan: Oui, certainement, je l'apprécierais
énormément.
M. Bérubé: Si je prenais le plus bas salaire, et je
pense que son salaire de 252 $ doit correspondre à peu près
à 13 150 $, si je ne m'abuse, ou à peu près, parce que
c'est le plus bas salaire, c'est un des plus bas. Je voudrais prendre ce qui
nous apparaît le plus bas salaire, présentement dans la convention
ou à peu près. Ces 13 150 $. C'est bien 252 $. Il me semblait, de
mémoire, que c'était ça, 252 $, oui, parce que c'est 504 $
sur deux semaines. Donc, c'est 13 150 $. Cet employé aurait dû
recevoir, pour la période de neuf mois, soyons clairs, du 1er juillet au
1er avril, 1209 $ d'augmentation de revenu, dans la convention collective.
M. Ryan: Voulez-vous m'excuser? Vous avez dit du 1er juillet au
1er avril?
M. Bérubé: Du 1er juillet 1982 au 1er avril
1983.
M. Ryan: Vous ne pouvez pas le dire puisque la convention expire
le 31 décembre.
Mé Bérubé: Je projette tout simplement son salaire
du 1er janvier et je suppose qu'il n'y a pas d'augmentation. D'accord?
M. Ryan: Ah! Vous supposez qu'il n'a pas d'augmentation?
M. Bérubé: Pour l'instant, jusqu'au 1er avril.
M. Ryan: D'accord. C'est ce que je voulais savoir.
M. Bérubé: Je dis qu'à tout le moins, on
n'aurait peut-être pas dû donner l'augmentation si on ne
gèle pas. Donc...
M. Ryan: Très bien. Vous vous en venez vers le gel
plutôt que vers les réductions.
M. Bérubé: C'est cela, en présumant...
M. Ryan: Très bien. C'est déjà un
progrès! Vous vous rapprochez de nous.
M. Bérubé: ... que nous avons au moins convenu d'un
gel des salaires.
M. Ryan: C'est cela. Cela se rapproche de notre position.
M. Bérubé: Cette personne aurait donc dû
recevoir 1209 $ sur la base d'un gel au 1er janvier. Avec la proposition du 15
avril de ce gel modulé, elle aurait reçu 942,50 $ et, avec la
loi, elle recevra 422,50 $. Cela vous donne une idée de l'impact du
projet de loi.
M. Ryan: Mais, en supposant qu'elle aurait eu une augmentation
raisonnable de 8% pendant les trois premiers mois de 1983, comme on pourrait le
supposer en temps ordinaire, comme cela va se produire un peu partout, cela
veut dire qu'au lieu de 1209 $, cela aurait été quelque chose
comme...
M. Bérubé: C'est un peu plus élevé
sur trois mois. Il faudrait calculer 8% sur trois mois du salaire. Cela veut
dire l'équivalent de 2%.
M. Ryan: C'est environ 250 $ à 300 $ de plus.
M. Bérubé: Oui, à peu près.
M. Ryan: D'accord. Elle aurait eu quelque chose comme 1500 $. En
vertu de votre proposition d'avril, 942 $. En vertu de la loi, 422 $.
M. Bérubé: Attention! Non, si vous me dites qu'elle
a droit à trois mois, j'espère que, dans 942 $, vous allez lui
donner trois mois aussi. Vous ne pouvez pas ajouter trois mois d'un
côté. Cela me fait penser à l'argumentation du type de la
CEQ. Je voudrais...
M. Ryan: Non, mais écoutez mon raisonnement. Je pars de ce
à quoi elle aurait eu droit normalement si son contrat avait
été exécuté jusqu'au bout, si elle avait eu
l'augmentation réduite, seulement pour maintenir son pouvoir d'achat, un
peu en deçà. C'est ce qui serait objectivement désirable,
je mets 8%. Mais c'est seulement pour les fins de la discussion. Ensuite, je
prends votre proposition gouvernementale...
M. Bérubé: II va falloir supposer qu'on accepte les
mêmes principes.
M. Ryan: ... qui, elle, allait seulement jusqu'au 31
décembre. C'est ce que vous voulez dire...
M. Bérubé: Oui, exactement.
M. Ryan: ... et là, vous ajoutez, pour les fins de la
discussion, 8% qui est maintenant...
M. Bérubé: Ce qu'on aurait convenu si vous
décidez que 8% vous apparaît convenable. Il faudrait l'appliquer
partout.
M. Ryan: Oui, mais voulez-vous dire que, si votre proposition
avait été acceptée, vous auriez été
prêt à envisager une certaine augmentation pour l'année
prochaine?
M. Bérubé: Tout aurait dépendu de la
négociation. On aurait pu effectivement poser comme principe qu'on
favorise les bas salariés au détriment des plus hauts
salariés et se retrouver avec une formule comme celle-là.
M. Ryan: Là, on se ramasse - parce que personne n'a voulu
comprendre le bon sens gouvernemental - à 422 $ pour la personne
d'entretien.
M. Bérubé: Oui.
M. Ryan: Je trouve que c'est... Maintenant, 422 $... Il y a
seulement une chose que je voudrais vous demander pour compléter mon
intelligence de ceci: Quand vous la faites passer ensuite à 281,40 $ au
1er avril 1983, hypothétiquement, dans ces cas-là, c'est 8,65%
que vous avez proposé pour cette catégorie de
salariés.
M. Bérubé: Plus 2,8%. M. Ryan: Plus 2,8%...
M. Bérubé: Oui, au 31 décembre. C'est ce que
cela prenait pour maintenir son
pouvoir d'achat.
M. Ryan: ... et cela revenait à quelque chose comme
11%?
M. Bérubé: 11%.
M. Ryan: 11% par rapport à ce qu'elle avait au 30
juin...
M. Bérubé: C'est cela.
M. Ryan: ... c'est-à-dire au 1er juillet 1981.
M. Bérubé: C'est cela.
M. de Belleval: Au 1er juillet 1982.
M. Ryan: 1981.
M. de Belleval: Ah!
M. Ryan: 1981. N'oubliez pas. Il ne faut pas se tromper.
M. Bérubé: Oui, oui.
M. Ryan: Vous lui donnez 11% pour une affaire... Comment cela
fait-il, de juillet 1981 jusqu'à un an et demi? 11%. L'inflation ne
monte pas vite pour les employés à faible revenu.
M. de Belleval: Par rapport au 1er juillet 1982, 11%.
M. Ryan: Mais non! Au 1er juillet 1982, elle avait
déjà droit à 280 $.
M. Bérubé: Par rapport au 30 juin 1982. M. de
Belleval: Par rapport au 30 juin.
M. Ryan: Par rapport au 1er juillet 1981. Elle est restée
à ce salaire depuis le 1er juillet 1981. Do not forget.
M. Bérubé: Oui, mais je pense qu'il faut voir
comment fonctionne... J'ai l'impression que...
M. Ryan: Ah! Ah! C'est vrai.
M. Bérubé: Voyez-vous? Je vais vous expliquer la
mécanique à partir, d'ailleurs, de la petite équation que
l'on utilise. L'inflation est de 10,4%. Or, au début de l'année,
cet employé a reçu 3,5% comme avance à l'inflation. Je
m'explique. Le coût de la vie suit un processus un peu graduel. Ce que
nous faisons, c'est prendre une avance sur l'inflation, au début de
l'année, de 3,5%. et, subséquemment, le salaire est constant.
À la fin de l'année, on calcule l'écart entre l'inflation
réelle et l'avance et on complète.
Donc, la personne a déjà reçu 3,5% pour la
prémunir contre l'inflation. Même lorsque l'inflation
dépasse un certain seuil, il y a une protection du revenu qui s'applique
sous forme de forfaitaire, pour compenser les 3,5%. On présume que 3,5%,
c'est la moitié de l'inflation, si je ne m'abuse, alors, on a donc
présumé une inflation de 7%. (minuit)
M. Ryan: Voulez-vous m'excuser, juste une seconde. Voulez-vous
dire en début d'année contractuelle ou en début
d'année civile?
M. Bérubé: Ah! En début d'année
contractuelle, c'est-à-dire le 1er juillet 1981
M. Ryan: 1er juillet 1981. Très bien.
M. Bérubé: On lui a donné 3,5% parce qu'on a
présumé que l'inflation serait de 7%. A la fin de l'année,
on compare et l'on constate que ce sont 10,4%, on lui donne la
différence. D'ailleurs, lorsque l'écart est trop grand, il a
droit à un forfaitaire additionnel parce qu'il a eu effectivement un
pouvoir d'achat insuffisamment protégé en début
d'année. Donc, vous avez couvert, en payant plus que l'inflation,
pendant six mois. Il faut quand même vous dire cela. Vous l'avez fait
progresser en avance de l'inflation, maintenu son salaire pendant six mois.
Là, l'inflation vous rejoint. Les six mois subséquents, vous
êtes en dessous de l'inflation. Là, vous devez revenir
évidemment à votre point de départ, c'est-à-dire
qu'on vous donne 10,4% d'inflation moins les 3,5% qui vous ont
été accordés en début d'année, et
voilà votre augmentation de salaire qui vous ramène exactement
avec la pleine protection de votre pouvoir d'achat. Et là, je continue.
Je vous donne 1,75% qui est l'inflation anticipée pour les six mois qui
viennent. Donc, je vous fais prendre une avance par rapport à
l'inflation.
M. Ryan: À quelle date sommes-nous, là?
M. Bérubé: Là, nous sommes au 1er juillet
1982. Je vous donne 1,75% pour vous donner une avance par rapport à
l'inflation et évidemment, au bout de trois mois, l'inflation vous a
rejoint. Et là, vous continuez avec un salaire inférieur à
ce qu'il devrait être à cause de l'inflation, et le 31
décembre, on vous donne 2,8%, pour effacer complètement l'effet
de l'inflation, pour vous ramener exactement en ligne, là où vous
auriez dû être. On ajoute à cela 1,6% d'enrichissement.
C'est assez généreux.
Une voix: Même s'il n'y a pas eu de...
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît,
messieurs les membres de la
commission, je constate qu'il est minuit, même passé une
minute ou deux. Il est minuit.
M. Bérubé: Dr Schweitzer.
Le Président (M. Bordeleau): On reprendra...
M. de Belleval: Avant de terminer, M. le Président, ce qui
veut dire, pour préciser la démonstration du chef de
l'Opposition, qu'il faut bien prendre la date du 1er juillet 1982 et non pas du
1er juillet 1981.
M. Ryan: Juste une chose, avant que nous terminions. Quand le
document syndical parle du taux actuel, au 30 juin 1982, de 252 $, est-ce que
cela comprend les 3,5% qui ont été donnés...
M. de Belleval: ... d'avance...
M. Ryan: ... en avance au début de l'année
contractuelle?
M. Bérubé: II y a 3,5% et il y a 1,22% de richesse,
ce qui fait 4,72%.
M. Ryan: 1,22% de richesse.
M. de Belleval: Plus 1,22% d'enrichissement collectif qui a
été donné le 1er juillet 1981.
M. Ryan: Très bien. On pourra repartir de là
demain.
Le Président (M. Bordeleau): C'est cela, nous continuerons
demain. Alors, la commission ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 0 h 04)