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Version finale

31st Legislature, 2nd Session
(March 8, 1977 au December 22, 1977)

Thursday, November 17, 1977 - Vol. 19 N° 247

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 53 — Loi sur la fonction publique


Journal des débats

 

Etude du projet de loi no 53 Loi sur la fonction publique

(Dix heures dix minutes)

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, messieurs!

Nous avons maintenant quorum. Je déclare donc ouverte cette séance de la commission de la fonction publique.

Sont membres de cette commission: M. Bel-lemare (Johnson), M. Boucher (Rivière-du-Loup), M. Caron (Verdun)...

M. Pagé: Remplacé par M. Marchand...

Une Voix: M. Marchand est inscrit à la commission.

M. Pagé: M. Marchand (Laurier) fait partie de la commission?

Le Président (Mme Cuerrier): Oui, M. Marchand fait partie de la commission.

M. Pagé: C'est moi qui remplace M. Caron.

Le Président (Mme Cuerrier): M. Caron (Verdun) remplacé par M. Page (Portneuf); M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. de Belleval (Charlesbourg), M. Dussault (Châteauguay), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Gravel (Limoilou), M. Grégoire (Frontenac), M. Jolivet (Laviolette), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Le Moignan (Gaspé), M. Marchand (Laurier), M. Marcoux (Rimouski), Mme Ouellette (Hull), M. Picotte (Maskinongé), M. Vaillancourt (Orford).

M. Pagé: M. Picotte est remplacé par M. Gar-neau (Jean-Talon).

Le Président (Mme Cuerrier): M. Picotte (Maskinongé) remplacé par M. Garneau (Jean-Talon).

Cette commission entendra aujourd'hui le Syndicat des professeurs de l'Etat du Québec, dont le porte-parole est M. Jean Lalonde, président, et, si c'est possible, le Syndicat des professionnels du gouvernement du Québec, dont Mme Renée Lebrun est secrétaire et porte-parole.

M. Pagé: Mme le Président...

Le Président (Mme Cuerrier): Le Syndicat des professeurs de l'Etat du Québec veut-il s'approcher, s'il vous plaît!

M. Bellemare: Mme le Président, je soulève un point de règlement.

Je comprends qu'un avis avait été donné, par M. Jacques Pouliot, le secrétaire des commissions, pour qu'on puisse entendre le Syndicat des fonctionnaires provinciaux et, deuxièmement, le Syndicat des professionnels du gouvernement du

Québec. C'est l'avis qu'on a reçu. Il y a un autre avis qui a précédé cela, qui nous disait que tout avait été changé après cela, le mercredi 19 octobre, le 20 octobre, tout le mois d'octobre était rempli pour d'autres.

Ceux-là, je pense, ont dû recevoir les avis, mais je ne trouve pas celui à qui vous demandez ce matin de se faire entendre. Je ne sais pas si, en vertu de l'article 119, les avis ont été envoyés conformément à notre règlement.

M. Pagé: Sur la question de règlement...

Le Président (Mme Cuerrier): Je n'ai pas entendu la fin de votre...

M. Beilemare: Est-ce que celui que vous avez invité, le Syndicat des professeurs de l'Etat du Québec, a reçu un avis de sept jours?

M. Lalonde (Jean): J'ai reçu un avis de sept jours. J'ai reçu un avis pour le 16 et j'ai demandé qu'il soit reporté au 17. Ce qu'on m'a accordé.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Mardi soir dernier, lorsque nous avons terminé nos travaux, vous avez ajourné cette commission sine die. On se rappellera que beaucoup de gens croyaient que la commission aurait pu, somme toute, recommencer les travaux hier matin. J'aimerais savoir si vous avez donné au Syndicat des fonctionnaires provinciaux, un avis pour comparaître ici ce matin, dans un premier temps. C'était la question du député de Johnson. Il apparaît que les groupes qui interviennent devant nous ce matin ont reçu, effectivement, l'avis de sept jours. Je voudrais m'enquérir auprès de vous pour savoir — par le fait même, étant donné que le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec n'avait pas terminé son audition et qu'on est encore en train de se poser mutuellement des questions — si vous lui avez donné avis de venir nous rencontrer ce matin.

Le Président (Mme Cuerrier): Les avis sont donnés en Chambre, MM. les députés, sont donnés à l'Assemblée nationale; comme vous l'avez entendu dire par M. le leader du gouvernement, les travaux de la Chambre sont chargés, les commissions sont nombreuses. Il vous a dit, à ce moment, et je ne fais que répéter ce qu'il disait, que le syndicat a été reçu deux fois. J'imagine qu'il pourrait être possible qu'il soit reçu après les auditions des différents mémoires, je n'en sais rien, sauf qu'il reste encore des associations et des syndicats qui n'ont pas été entendus. Il faut que tout le monde ait la chance d'être entendu. Selon ce que j'ai su, les avis ont été donnés en bonne et due forme. Je ne fais que m'en tenir aux avis qui sont donnés à l'Assemblée nationale, comme la commission doit le faire d'ailleurs.

M. Pagé: D'accord, Mme le Président. Sur la question des avis qui sont donnés à l'Assemblée nationale, je suis d'accord là-dessus. Cependant, ce que je voudrais savoir, c'est si cette commission, si le secrétariat des commissions a donné un avis au Syndicat des fonctionnaires provinciaux, lui offrant de venir comparaître devant nous ce matin. Mme le Président, j'ai posé une question en vertu de l'article 34, hier, on se le rappellera, et le président m'a référé à la commission d'aujourd'hui.

Le Président (Mme Cuerrier): De toute façon, M. le député, ce n'est pas à moi d'appeler les associations ici, à la commission, mais bien au leader du gouvernement de donner ces avis en Chambre. Je vous demanderais de reporter votre question en Chambre si...

M. Pagé: Mme le Président, je soulève une question de règlement. Je l'ai soulevée en Chambre hier, en vertu de l'article 34. Ce qu'on m'a répondu...

Le Président (Mme Cuerrier): Bon! Ecoutez! Je m'en tiens...

M. Pagé: Ecoutez! On ne commencera pas un débat ce matin...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf, s'il vous plaît!

M. Pagé: Je l'ai posée en vertu de l'article 34 et on m'a référé à la commission, ici ce matin.

Le Président (Mme Cuerrier): Je m'en tiens aux avis qui m'ont été donnés et, ce matin, nous recevons le Syndicat des professeurs de l'Etat du Québec. C'est ce à quoi je suis tenu par le mandat qui est donné à cette commission.

M. Bellemare: Mme le Président, on perd un temps considérable, puisque je pense, moi, au point de vue constitutionnel et au point de vue de la procédure, que c'est normal; si les messieurs qui sont devant nous ont reçu, depuis sept jours, une convocation, c'est normal que nous les entendions et je pense qu'on perd un temps pour rien en procédure, parce qu'on a un organisme, toujours, qui est véritablement bien accrédité et on devrait procéder immédiatement.

Le Président (Mme Cuerrier): Alors, nous entendons immédiatement le Syndicat des professeurs de l'Etat du Québec, M. Jean Lalonde, président. Vous avez la parole, monsieur.

Syndicat des professeurs de l'Etat du Québec

M. Lalonde (Jean): Je voudrais, avant de commencer, présenter les membres qui sont avec moi. A ma gauche, Yvon Thiboutot, représentant du secteur des Affaires culturelles, arts dramatiques...

M. Bellemare: Yvon?

M. Lalonde (Jean): Yvon Thiboutot.

M. Bellemare: Thiboutot.

M. Lalonde (Jean): On ne prononce pas le "t".

M. Bellemare: Chez nous, on a des familles de Thiboutot à Acton. On les appelles Thiboutot.

Le Président (Mme Guerrier): Si vous voulez. M. le Président.

M. Lalonde (Jean): Hervé Perret, secteur de l'Institut de tourisme et d'hôtellerie du Québec, ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche.

M. Bellemare: Perret.

M. Lalonde (Jean): II y a un "t" là aussi.

M. Bellemare: Hervé Perret.

M. Lalonde (Jean): Perret. P-E-R-R-E-T.

M. Bellemare: Perret, ah oui...

M. Lalonde (Jean): Et non, Perret.

M. Bellemare: D'accord. Perret. Vous venez de la Bretagne, vous. Perret.

M. Lalonde (Jean): Daniel Fines, ministère de l'Immigration, centre d'orientation et de formation des immigrants.

M. Bellemare: Flynn? Est-ce qu'il parle français, oui?

M. Lalonde (Jean): II faut le lui demander.

Absent, Jean-François Beaudet, secteur Agriculture, et Jean Bouchard, Conservatoire de musique, qui sont retenus par leurs tâches professionnelles.

Nous avons présenté un mémoire qui a été axé sur trois points, dont le premier, réaménagement du pouvoir patronal et restriction des objets de négociation.

Quand on parle de l'article 3, insuffisance, révocation, suspension, rétrogradation, congédiement, mise en disponibilité, etc., ces articles restent-ils négociables?

M. Bellemare: Mme le Président, ne serait-il pas préférable, avant que le syndicat ne nous pose des questions, qu'on entende son mémoire et, après cela, nous pourrons lui poser des questions? S'il en a, il pourrait les ajouter. Je crois que c'est normal. C'est ainsi que la procédure va.

Le Président (Mme Cuerrier): M. Lalonde, ou bien vous pouvez lire le mémoire, ou bien le résumer.

Merci.

M. Fines (Daniel): Le Syndicat des professeurs de l'Etat du Québec a été accrédité pour représenter les professeurs à l'emploi du gouvernement. Il compte 450 membres dans ses rangs. Les professeurs dispensent leur enseignement dans des institutions du ministère des Affaires culturelles, du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, du ministère de l'Immigration et du ministère de l'Agriculture.

Sur la base des interventions, les représentants du présent gouvernement, les membres de la fonction publique ont pu espérer une amélioration de leurs conditions de travail et une plus grande satisfaction dans l'exercice de leurs fonctions.

Il était notamment question de transparence de la fonction publique, d'élimination de l'arbitraire, d'augmentation de l'efficacité. De façon générale, nous devons vous soumettre que le projet de loi 53 ne vient pas combler ces espoirs. Tout au contraire.

Réaménagement du pouvoir patronal et restriction des objets de négociation. Tout d'abord, les salariés et les syndicats dûment accrédités qui les représentent sont absents des objets de ce projet de loi. Celui-ci ignore une des réalités essentielles en matière de relations de travail et ne traite que du réaménagement du pouvoir patronal.

Dans les circonstances, le gouvernement a, de toute évidence, succombé à la tentation de réaménager à la hausse son pouvoir, en soustrayant du champ de la négociation de la convention collective un certain nombre d'éléments qui s'y trouvent présentement.

Nous pensons que le gouvernement fait fausse route en s'imaginant que le décret d'un ministre est préférable à des conditions de travail librement négociées par les parties, si nous envisageons cette question sous l'angle du rendement, de l'efficacité au travail des membres de la fonction publique.

Une telle orientation gouvernementale va pourtant dans le sens contraire des leçons qui ont été tirées des expériences et des décrets de conventions collectives au cours des dix dernières années au Québec.

Dans les circonstances, nous devons réaffirmer le caractère essentiel, à notre avis, de la libre négociation entre le gouvernement et les syndicats. Les restrictions à cette négociation apparaissant au projet de loi 53 devraient donc en être retirées.

Responsabilité du recrutement et du mouvement de personnel. Le gouvernement a jugé à propos de confier à l'Office de recrutement la responsabilité, notamment, de nommer les candidats à la fonction publique, et, dans un même souffle, de permettre une délégation de cette responsabilité à tout sous-ministre.

Cette dernière délégation nous apparaît multiplier indûment les autorités qui peuvent exécuter la même fonction, et équivaut à faire perdre à l'Office le reste de l'utilité qu'il pouvait posséder.

En vertu du projet de loi, l'Office n'a pas juridiction notamment dans le cas des sous-ministres et autres employés de rang équivalent, et dans le cas des employés occasionnels.

Quelle juridiction sera exercée par l'office si la délégation au sous-ministre est le moindrement mise en application? Faut-il ne voir dans l'office de recrutement qu'un simple paravent visant à camoufler l'autorité réelle du ministre de la Fonction publique en matière de recrutement: que ce soit une autorité directe ou par personne interposée?

De façon particulière, au Syndicat des professeurs de l'Etat du Québec, le mode actuel de recrutement et sélection des candidats à un poste vacant d'enseignant dans la fonction publique est régi par l'arrêté en conseil no 909, en date du 18 mai 1966, et accorde à notre syndicat la présence d'un représentant au sein du jury et des sous-comités de sélection. Cette procédure fut établie à la suite de représentations en ce sens, durant plusieurs années, par les officiers des associations d'enseignants à l'emploi du gouvernement. Vous comprendrez que nous n'allons pas renoncer aisément à cet acquis. Le projet de loi 53 ne fait aucune mention de cette réalité: son sort dépend de la réglementation qu'adoptera l'Office de recrutement.

Par ailleurs, le ministre de la Fonction publique assujettit carrément les mouvements de personnel à son autorité.

Le projet de loi 53 lui accorde, à notre avis, des pouvoirs exorbitants, des pouvoirs comme on n'en trouve même pas dans les conventions collectives entre un employeur puissant et un syndicat faible. Dans un tel cas, les salariés ont toujours la possibilité de soumettre leurs griefs à l'arbitrage d'un tiers impartial.

Possibilité que les membres de la fonction publique n'auront pas, car leurs contestations sont dirigées vers un organisme qui doit s'acquitter de rôles incompatibles.

En effet, la Commission de la fonction publique doit remplir un rôle de consultant du ministre de la Fonction publique et du Conseil du trésor en matière de règlements relatifs au recrutement et au mouvement pour quelque cause du personnel de la fonction publique.

Dans un même temps, la commission devrait agir comme instance impartiale pour juger de certains recours exercés par les membres de la fonction publique.

Nous pensons que le projet de loi 53 crée une instance discréditée, avant même que celle-ci n'ait entendu un seul dossier. C'est une structure inacceptable.

La règle du mérite. Le projet de loi 53 établit la règle du mérite en matière de recrutement et de promotion du personnel de la fonction publique.

Voilà une notion particulièrement grise: un peu comme la justice, l'équité. A l'examen, au surplus, nous constatons que le mérite s'accommode mal d'une structure à deux temps, comme celle proposée par le projet de loi 53 en matière de recrutement et de mouvement, pour quelque cause du personnel.

Au fond, la séparation de ces tâches en deux temps ou deux instances nous apparaît bien artificielle. L'examen de l'élément du mérite accentue l'impression du paravent, de l'inutilité de l'office

de recrutement dont nous avons traité plus haut. Nous constatons que cette double structure peut même constituer une source d'injustice pour les fonctionnaires et occasionner une bonne part de frustration.

Un exemple permettrait d'illustrer notre point de vue. Un fonctionnaire présente une demande à un poste vacant qui représenterait pour lui une promotion. Il se trouve parmi un groupe de cinq fonctionnaires intéressés au poste. Le ministre de la Fonction publique décide, en vertu des règlements et de la règle du mérite, de ne retenir aucune des cinq candidatures de fonctionnaires et il fait appel à l'Office de recrutement. En vertu du règlement et de la règle du mérite, l'office nomme un candidat de l'extérieur de la fonction publique.

Même si nous pouvons espérer que les règlements, en matière de recrutement, et que les règlements, en matière de promotion, seront équivalents, sinon identiques, puisqu'ils seront filtrés au Conseil du trésor, il reste qu'une instance A a apprécié le mérite de notre fonctionnaire et qu'une instance B a apprécié le mérite du candidat de l'extérieur. Aucune instance ne pourra jamais apprécier si notre fonctionnaire avait plus de mérite que le candidat de l'extérieur. Ils n'ont jamais été mesurés l'un à l'autre.

C'est pour cela que nous disons que cette structure bicéphale est génératrice d'injustices et va entraîner bon nombre de frustrations au sein du personnel de la fonction publique.

Non seulement l'office de recrutement et le ministre de la Fonction publique devraient-ils appliquer des règlements identiques, il faudrait que ces règlements soient appliqués par les mêmes personnes, pour assurer, au moins, que la justice paraisse avoir été rendue.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.

M. de Belleval: Je vous remercie d'abord d'avoir présenté ce mémoire. Il y a une partie qui m'apparaît particulièrement intéressante. C'est celle qui traite de la collaboration qui devrait exister entre le ministère, d'une part, et l'office de recrutement, d'autre part, dans l'administration des règlements.

Effectivement, nous avons étudié cette question et il est possible, par une réglementation appropriée, de faire en sorte que, comme vous le dites, non seulement les mêmes règlements s'appliquent, mais que les mêmes personnes appliquent des règlements identiques.

Il n'y a rien qui empêcherait, par exemple, en vertu des règlements, que les jurys qui apprécient les candidats de l'intérieur et de l'extérieur pour un même poste ou une même série de postes, soient les mêmes personnes, ce qui permet d'éviter les ambiguïtés que vous soulignez. Je dois signaler que, dans le cas de concours généraux, il arrive que plusieurs phases ou certaines phases d'un concours ne soient pas administrées par les mêmes personnes, compte tenu du trop grand nombre de candidats. Parfois, il faut faire siéger plusieurs jurys en même temps.

Autrement dit, le problème ne disparaît pas, même si on confie à un même organisme l'organisation d'un concours. Il se peut fort bien que des phases de ce concours doivent être appréciées par différentes personnes, compte tenu des masses en cause. Enfin, c'est tout le problème des concours qui resterait de toute façon, quelle que soit l'instance qui les administre.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: A la page 3 de votre mémoire, vous vous demandez s'il ne faut pas voir dans l'office de recrutement projeté un simple paravent visant à camoufler l'autorité réelle du ministre de la Fonction publique en matière de recrutement.

J'aimerais que vous élaboriez davantage cette opinion que vous avez à ce sujet. J'aimerais aussi en particulier que vous nous expliquez de quelle façon l'office serait un paravent pour le ministre de la Fonction publique.

M. Lalonde (Jean): C'est que, pour nous, actuellement, on ne connaît pas... enfin on a le règlement qui nous régit face au recrutement, l'arrêté en conseil 909. On le connaît. Mais, est-ce que ce règlement va être introduit dans le nouveau règlement du ministre? C'est que, face à l'office de recrutement, il y a des règlements qui devront être établis. On ne les connaît pas. Devant l'inconnu, on se pose des questions. C'est cela notre problème. Je pense que le projet de loi, en partie, c'est cela.

On dit: Règlement du ministre. Je suis bien d'accord avec le règlement du ministre. Il peut en faire des règlements, le ministre, mais c'est quoi, le règlement? Je ne le connais pas. L'office de recrutement, je ne peux pas en dire plus, je ne connais pas les règlements qui vont régir l'office de recrutement. On dit: Un office de recrutement. J'aimerais connaître le règlement qui va faire que l'office de recrutement va fonctionner d'une certaine façon.

M. Chevrette: Mais il y a un règlement qui existe présentement?

M. Lalonde (Jean): Oui.

M. Chevrette: II va continuer à exister tant et aussi longtemps qu'il ne sera pas changé.

M. Lalonde (Jean): Oui, mais qui va nous dire cela? Est-ce que vous nous dites, ce matin, qu'il va continuer à fonctionner, que c'est acquis, qu'on va toujours être représenté aux concours pour les nouveaux candidats...

M. de Belleval: Là-dessus...

M. Lalonde (Jean): ... parce qu'il n'y a pas de mouvement — je veux apporter la décision — de personnel chez nous. Quand un professeur est engagé professeur de violon, on ne peut pas lui demander de jouer de la flûte.

M. de Belleval: Non, je sais que...

M. Lalonde (Jean): Un professeur de cuisine, c'est la même chose, on ne peut pas lui demander de...

M. de Belleval: De jouer du violon.

M. Lalonde (Jean): ... de faire du français.

M. de Belleval: Non, il peut...

M. Lalonde (Jean): Oui.

M. de Belleval: Là-dessus, le problème n'est pas différent, parce qu'il y a un projet de loi, par rapport à la situation actuelle. Actuellement, c'est la commission qui fait ces règlements. La commission a fait un règlement, mais le projet de loi indique très bien que les règlements des anciennes instances demeurent en vigueur tant qu'on ne les a pas changés, de la même façon que le règlement que vous avez actuellement demeure en vigueur tant qu'il n'est pas changé. S'il doit être changé, il n'est pas éternel, ce règlement, il n'a pas la promesse de la vie éternelle comme l'Eglise catholique.

A un moment donné, un ministre peut décider ou la commission actuellement peut décider de le changer, comme un ministre, à l'avenir, pourra décider de le changer. S'il faut le changer, à ce moment-là, il le sera. Comme vous le savez, en vertu de la nouvelle procédure, ce sera fait d'une façon beaucoup plus transparente que maintenant, puisque, si le ministre, dans l'avenir, veut changer ce règlement, il faudra qu'il demande l'avis de la nouvelle Commission de la fonction publique, qui donnera un avis pour juger du point de vue de la règle du mérite. Cet avis sera transmis à l'Assemblée nationale qui pourra aussi en discuter en Commission permanente de la fonction publique, si c'est une question suffisamment importante.

Dans le cadre de vos conventions collectives, vous pourrez en discuter. Vous avez des comités permanents avec vos employeurs, vous pourrez en discuter. C'est actuellement la situation. De ce point de vue, il n'y a pas de changement. C'est la même chose. Les règlements, vous les connaissez, ils sont en vigueur. Ils peuvent être changés maintenant, comme ils pourront l'être dans l'avenir. Tout le reste est ouvert à la libre négociation des parties.

M. Lalonde (Jean): Quand vous dites que la nouvelle loi reporte ces règlements, à quel article est-ce? Je ne l'ai pas trouvé, je m'excuse, M. le ministre.

M. de Belleval: Dans les dispositions transitoires, il y a une disposition qui indique que les règlements qui sont en vigueur, en vertu des pouvoirs de la Commission de la fonction publique, demeurent en vigueur, jusqu'à ce que les nouvelles instances...

M. Lalonde (Jean): Jusqu'à la fin de la convention collective?

M. de Belleval: Non, ils demeurent en vigueur indéfiniment, jusqu'à ce qu'ils soient changés. Quant à votre convention collective, elle demeure intégralement en vigueur elle aussi. Le processus de négociation va continuer avant comme après.

Comme vous le savez, en vertu des clarifications et même des projets d'amendements que j'ai déposés, même en ce qui concerne la procédure des griefs en dernier recours, le statu quo sera maintenu, même après l'expiration de votre convention collective. C'est le jeu de la libre négociation qui va jouer. Entre autres, c'est à la suite d'interventions que vous avez obtenu dans le règlement actuel d'être consultés pour les promotions, d'avoir un membre qui fasse partie du jury. Ce n'est pas en vertu des pouvoirs du ministre ou de l'ancienne commission.

M. Lalonde (Jean): C'est en vertu de l'ancienne...

M. de Belleval: C'est à la suite de la libre négociation. La libre négociation va continuer.

M. Lalonde (Jean): Ici, j'ai l'arrêté en conseil 909 qui dit bien: Règlement de la Commission de la fonction publique relatif au personnel enseignant.

M. de Belleval: C'est ce que je dis. C'est en vertu d'un...

M. Lalonde (Jean): Ce n'est pas contenu dans notre convention collective, ce règlement.

M. de Belleval: Non. Cela ne l'était pas autrefois. Cela ne l'est pas actuellement. C'est en vertu d'un règlement de la Commission de la fonction publique. A l'avenir, tant que ce règlement ne sera pas changé par le ministre, il va demeurer en vigueur. Cela va continuer. Vous aviez fait des représentations, je suppose, aux anciens gouvernements pour obtenir des dispositions particulières dans le cadre de cet arrêté en conseil, de ce règlement. C'est vous qui aviez demandé d'être membre d'un jury ou vous l'a-t-on concédé gracieusement?

M. Lalonde (Jean): On ne concède jamais rien gracieusement.

M. de Belleval: Vous l'aviez demandé? C'est ce que je dis. C'est en vertu de la libre négociation des parties que vous avez obtenu qu'un règlement de la commission vous accorde des dispositions particulières et des avantages particuliers. C'est exactement la même situation qui va se produire, une fois le projet de loi 53 adopté sauf que le règlement, au lieu d'être proposé par la commission, sera proposé par le ministre. Les dispositions internes de ce règlement, sur lesquelles vous êtes intervenus... Vous allez continuer à intervenir. Si, dans l'avenir, on voulait changer ce règlement...

M. Lalonde (Jean): Vous allez nous en parler.

M. de Belleval: L'ancienne commission n'était pas obligée de vous en parler. L'ancien gouvernement qui a élaboré ce règlement, qui a fait des représentations à la commission — parce que c'est la commission qui l'a élaboré, ce règlement — vous en avait parlé. Cela va continuer, c'est la même chose. Vous allez continuer à vous parler. Autrement dit, il n'y a pas de changement dans la situation actuelle de ce point de vue. L'article en question, c'est l'article 129.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf, M. le député de Johnson et M. le député d'Abitibi-Ouest m'avaient demandé la parole.

M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, Mme le Président. D'abord, je voudrais remercier nos intervenants de ce matin de nous présenter leur mémoire...

M. Lalonde (Jean): Je m'excuse, je vous entends mal.

M. Pagé: Oui? On va parler plus fort. On va rapprocher les micros.

M. de Belleval: La voix du député de Portneuf est comme son parti, elle est éteinte.

M. Bellemare: Celle du ministre est bien enrhumée.

M. Pagé: Mme le Président, sur cette question, je comprends les blagues du ministre...

M. Lalonde (Jean): On n'est pas ici pour chercher qui va mourir ce matin.

Le Président (Mme Cuerrier): Je serais censée vous prêter la vôtre de temps en temps...

M. Marchand: Le cercueil était assez grand pour cela.

Le Président (Mme Cuerrier): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre, à l'ordre! C'est M. le député de Portneuf qui a la parole maintenant.

M. de Belleval: Cela n'a pas pris trois jours pour ressusciter.

M. Pagé: Soyez donc sérieux! Messieurs, je tiens à vous remercier...

M. de Belleval: II faut mettre une pointe d'humour là-dedans, Mme le Président.

M. Pagé: Mme le Président, est-ce que je dérange le ministre?

M. de Belleval: Je m'excuse.

Une Voix: Ce n'est pas de l'esprit breton, c'est de l'esprit gaulois.

Le Président (Mme Cuerrier): S'il vous plaît!

M. Bellemare: Ce n'est sûrement pas une belle mort qu'il a faite.

Le Président (Mme Cuerrier): S'il vous plaît! M. le député de Portneuf, vous avez toujours la parole.

M. Pagé: J'attendais qu'on ait terminé les farces d'un côté et de l'autre.

Messieurs, je tiens à vous remercier de la présentation de votre mémoire. Je voudrais tout d'abord aborder la question dont vous avez fait état tout récemment, savoir la question des pouvoirs réglementaires. En vertu de l'article de ce projet de loi, les règlements, tels qu'ils sont édictés actuellement subsistent jusqu'à ce qu'ils soient remplacés.

Je comprends votre inquiétude, mais je ne crois pas que le ministre ou quiconque puisse vous confirmer, ce matin, que les règlements continueront à s'appliquer, comme tels, ceux auxquels vous faites référence, l'arrêté en conseil 909, parce que, en vertu du projet de loi, lorsqu'il sera adopté, lorsqu'il deviendra loi, ce pouvoir réglementaire sera conféré au ministre.

Il y a beaucoup de choses qui peuvent se passer et qui peuvent éventuellement motiver le ministre à modifier ces règlements. On sait que le dépôt du rapport Martin aura lieu au printemps. En fait, il y a toute une gamme de possibilités.

Vous semblez cependant inquiets de certains droits que vous avez acquis, entre autres, le droit à la représentation syndicale au sein des jurys. Je ne pense pas que cette commission, ce matin, puisse vous dire: Ne soyez pas inquiets; le règlement va rester. Ce n'est pas le rôle de la commission. Une chose est certaine, le ministre pourrait vous donner l'assurance, soit que le règlement subsiste ou encore qu'à l'intérieur d'un autre règlement, un tel pouvoir pourrait continuer à vous être conféré. Je pense que le ministre aurait dû profiter du fait que nos intervenants, ce matin, s'interrogent sur cette question, pour vous confirmer que son intention demeure de faire en sorte que vous ayez ce droit. Quant à moi, je serais prêt à céder la parole au ministre pour avoir ses commentaires là-dessus. D'accord que le règlement peut être modifié. Ces gens-là vous demandent, ce matin: Est-ce que c'est votre intention de nous conférer le pouvoir qui nous appartient actuellement? C'est quand même un pouvoir, un principe assez important, la représentation syndicale au sein de jurys et d'organismes qui ont à choisir vos collègues au sein de concours ou de choses semblables.

Ma première question, Mme le Président, je l'adresserai au ministre. Je lui demanderai s'il a l'intention de conserver ce principe qui est déjà établi par un arrêté en conseil, préalablement adopté?

M. Bellemare: 909.

M. Pagé: Oui, l'arrêté en conseil 909.

M. Bellemare: Le 16 mai 1966.

M. Pagé: 16 mai 1966.

M. Bellemare: C'est un droit acquis.

M. Pagé: Par surcroît.

M. Bellemare: Bien sûr!

M. Pagé: Mais qui peut être modifié.

M. Bellemare: Qui peut être modifié en vertu de l'article 129.

M. Pagé: C'est juste.

Le Président (Mme Cuerrier): Alors, vous mettez la question dans la bouche du président du Syndicat des professeurs?

M. Pagé: Oui, je mets la question... Parce que, M. le Président, vous comprendrez que Mme le Président, notre président ici, est très réticente — je lui dis bien respectueusement — à ce que je pose des questions au ministre.

La question que je viens de formuler, est-ce que vous la faites vôtre?

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf, je vous fais remarquer que nous sommes ici...

M. Pagé: Si vous la faites vôtre, le ministre va répondre.

Le Président (Mme Cuerrier): ... pour entendre le Syndicat des professeurs...

M. Lalonde (Jean): Je la fais mienne.

Le Président (Mme Cuerrier):... et que si vous avez à poser des questions au Syndicat des professeurs, je suis entièrement d'accord, parce que c'est là le mandat de la commission.

M. Pagé: Mme le Président, je réitère ma question. M. le président du Syndicat des professeurs, vous faites vôtre la question que j'aurais aimé poser au ministre, à savoir s'il a l'intention...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre... M. Pagé: ... de conserver ce principe...

Le Président (Mme Cuerrier): ... est déjà prêt à répondre.

M. Pagé: Merci.

M. de Belleval: Je voudrais simplement apporter une précision additionnelle en ce qui concerne le recrutement de nouveaux professeurs qui seraient, normalement, ensuite, une fois recrutés, dans votre unité d'accréditation; c'est l'office de recrutement qui fera les règlements à l'avenir.

Donc, quant à la disposition qui touche la formation des jurys, la situation va être exactement la même qu'actuellement sur le plan juridique, puisque, au lieu que ce soit la Commission de la fonction publique qui fasse le règlement, ce sera l'office de recrutement. Autrement dit, on change de... C'est bonnet blanc, blanc bonnet. Du point de vue de ce qui vous intéresse tout particulièrement, la présence d'un de vos membres dans un jury de sélection, c'est l'office de recrutement qui va se trouver à faire le règlement. Donc, il n'y a pas de changement, de toute façon.

En ce qui concerne un jury d'avancement, là, effectivement, ce serait le ministre, et, comme je l'ai dit, le règlement sera en vigueur tant qu'on ne jugera pas opportun de le changer. Quand sera-t-il changé? Je ne le sais pas. Comme je l'ai dit tantôt, il n'a pas la permanence éternelle, ce règlement.

Ai-je l'intention de le changer demain matin? J'avoue que je n'ai vraiment pas étudié l'ensemble des milliers ou des centaines de règlements qui existent à la commission; mais, comme je l'ai dit, cela fera l'objet... S'il faut jamais changer cela, il est sûr qu'on va s'en parler.

M. Pagé: Je ne crois pas que la question de M. Lalonde était dans ce sens. Je pense que tout le monde convient, ce matin, que le règlement peut être éventuellement changé. D'ailleurs, c'est conféré dans le projet de loi: "... l'office pourra modifier ce règlement...", toujours selon l'approbation du Conseil du trésor, cependant.

Ce qui vous a été demandé, M. le ministre, c'est ceci: Est-ce votre intention de conserver, de garder ce principe, ce droit acquis auprès de nos intervenants, ce matin, abstraction faite des modifications qui peuvent être apportées aux règlements éventuellement et ce, pour juste cause? Avez-vous l'intention de conserver le principe de la représentation syndicale au sein des jurys?

M. de Belleval: Ecoutez. On ne jouera pas au fou ce matin.

M. Pagé: Je ne vous demande pas de jouer au fou. Je vous demande de répondre aux questions.

M. de Belleval: Voulez-vous me laisser répondre?

M. Pagé: Oui.

M. de Belleval: J'ai le droit de vous répondre ce que je veux.

M. Pagé: Oui. Si vous voulez qu'on ait une bonne collaboration ici, qu'on travaille et qu'on ait des résultats...

M. de Belleval: Ecoutez la réponse dans ce cas.

M. Pagé: Vous êtes égal à vous-même, monsieur.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson.

M. Pagé: J'ai d'autres questions, Mme le Président.

Le Président (Mme Cuerrier): Bon. Allez.

M. Pagé: Mme le Président, vous semblez pressée ce matin. Nous avons tout le temps qu'il faut.

Le Président (Mme Cuerrier): Vous avez des questions à poser aux représentants du Syndicat des professeurs? Allez-y, M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Oui, j'ai des questions. Je n'ai pas eu de réponse à ma première question.

M. de Belleval: Puis-je répondre? M. Pagé: Allez-y.

M. de Belleval: Si vous arrêtiez de m'interrompre.

M. Pagé: Ce n'est pas moi qui suis président.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.

M. de Belleval: Je vais répondre une fois pour toutes à toutes ces questions parce qu'on n'en sortira pas. Vous pourrez me poser cette question...

M. Pagé: Répondez. On ne demande pas mieux.

M. de Belleval: ... sur chacun des règlements de la Commission de la fonction publique qui existent actuellement, à savoir si j'ai l'intention de les maintenir en vigueur ou non.

On n'est pas ici pour discuter des règlements en vigueur de la Commission de la fonction publique, à savoir si le ministre va les maintenir en vigueur ou non, s'il a l'intention de changer tel règlement ou de ne pas le changer. Cela ne fait pas l'objet de nos délibérations.

M. Pagé: C'est ce sur quoi les gens s'inquiètent ce matin. C'est un des trois points.

M. de Belleval: Voulez-vous me laisser finir. Vous m'interrompez tout le temps, M. le député.

M. Pagé: Tantôt aussi, vous m'avez interrompu. C'est un des trois points qui est soulevé par nos intervenants ce matin.

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre!

M. le ministre, c'est vous qui avez la parole.

M. de Belleval: Alors, je donne la réponse une fois pour toutes au député de Portneuf, de façon à lui permettre de réserver sa salive pour l'avenir. On n'est pas ici, actuellement, pour discuter des règlements qui sont en vigueur, pour savoir si oui ou non, ils seront maintenus en vigueur, quand j'ai l'intention de les changer ou que l'office de recrutement qui sera créé les changera ou la nouvelle Commission de la fonction publique les changera.

Il y en a qui seront changés et d'autres qui ne le seront pas. Je ne peux pas porter un jugement de valeur sur chacun des dizaines de règlements qui existent. Ce n'est pas l'objet des travaux de notre commission.

L'objet des travaux de notre commission est de discuter de l'architecture générale du projet de loi, de ses principes fondamentaux. A cet égard, je pense qu'on se comprend très bien.

Alors, si vous voulez bien, on pourrait continuer sur ces aspects fondamentaux.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, Mme le Président. Somme toute, on n'a pas de réponse du ministre. Libre à lui d'en donner une ou de ne pas en donner; mais, il aurait pu profiter de la situation pour améliorer le climat de discussion dans le cadre de ce projet de loi.

Je l'ai dit plusieurs fois, c'est déplorable que le ministre se refuse à répondre aux questions et se refuse à participer plus étroitement aux délibérations de notre commission relativement aux points soulevés par nos intervenants.

Dans votre mémoire, vous dites dès le début: "De façon générale..."

M. Lalonde (Jean): M. le député, on aurait une question pour poursuivre. Vous voulez changer le sujet?

M. Pagé: Allez-y.

M. Bellemare: S'il change de sujet, j'ai le droit de parole avant cela.

Le Président (Mme Cuerrier): Oui, M. le député de Johnson.

M. Pagé: Allez-y, je vous en prie. On va les entendre tous.

M. Thiboutot (Yvon): Compte tenu de la déclaration que vous avez faite aux syndicats lors des séances précédentes à savoir que vous n'avez pas l'intention de négocier point par point à la table, ici, les points...

Le Président (Mme Cuerrier): Si vous permettez, voulez-vous vous identifier pour le journal des Débats.

M. Thiboutot: Yvon Thiboutot.

Le Président (Mme Cuerrier): M. Thiboutot, c'est vous qui avez la parole.

M. Thiboutot: Dans vos interventions, lors des séances précédentes, vous avez dit que vous

n'aviez pas l'intention d'intervenir sur les différents points à l'intérieur du projet de loi, comme les différents règlements, et, comme vous venez de le répéter, que vous avez plutôt l'intention de discuter au niveau du principe et du fond du projet de loi.

Quant à nous — vous comprendrez certainement cette position à caractère syndical — lorsqu'il y a des droits acquis à des syndicats, les syndicats, généralement, voient d'un très mauvais oeil un principe réglementaire qui ne les garantit pas dans une succession de législation.

Or, nous sommes en face de cette succession de législation. Il y a une transformation fondamentale de la loi. Vous dites que les droits y sont maintenus. Je dirais: peut-être que oui, peut-être que non.

Vous me direz que c'est une réponse de Normand. Mais ce qui me paraît aussi fondamental que cela, c'est qu'on a déplacé dans cette loi le principe de l'autorité et il y a un déplacement majeur qui change complètement la philosophie de la Loi de la commission de la fonction publique.

L'ancienne loi de la Commission de la fonction publique avait comme philosophie un recours au niveau de l'autorité décisionnelle, au niveau du cabinet, du Conseil des ministres, enfin, du lieutenant-gouverneur en conseil, alors que, dans cette présente loi, le pouvoir fondamental est enlevé au cabinet, au Conseil des ministres, au lieutenant-gouverneur en conseil, pour être transféré au Conseil du trésor. Je pense qu'il y a là un principe fondamental qui est modifié.

Permettez-moi une interprétation. On part d'une vérification des décisions d'une Commission de la fonction publique par le lieutenant-gouverneur en conseil, donc les représentants des élus, au niveau d'un Conseil du trésor dont la principale tâche est d'administrer. Donc, la vision des décisions qui seront faites et prises, par rapport aux règlements que vous pourrez faire, sera toujours en fonction d'un principe d'administration et d'un principe d'efficacité administrative. Nous pensons qu'à partir de cela, il peut y avoir des questions syndicales qui se posent et des questions extrêmement graves.

D'autre part, dans la loi, tel qu'il est prévu actuellement, par l'article 3, un très grand nombre de sujets qui étaient dans l'aire des négociations tombent dans l'aire du décret; du décret, qu'on l'appelle un règlement formulé par le ministre, entériné ou approuvé par la Commission de la fonction publique ou par l'office de recrutement, dans le cas des deux organismes qui ont des pouvoirs, l'un d'arbitrage et l'autre de sélection des candidats, ces deux secteurs ne peuvent et ne pourront fonctionner en fonction des règlements que vous édicterez qu'à la condition expresse que le Conseil du trésor vous en donne l'autorisation par la décision finale. Ce qui revient à dire que la loi qu'on a devant nous n'est pas la réponse du ministre de la Fonction publique, mais peut-être plus la réponse du Conseil du trésor, en dernier ressort.

Vous comprendrez que des droits acquis sur un plan syndical, quant à nous et, je pense, quant à tous les autres syndicats... On voit très mal de se retrouver devant une décision réglementaire. Bien sûr, vous pouvez plaider le fait que vous avez l'intention de maintenir le statu quo tel qu'il est prévu dans la loi, mais, généralement, dans une loi telle qu'elle est stipulée actuellement, si on maintenait le statu quo au niveau du caractère décisionnel, j'aurais plus tendance à être favorable à une réponse qui me demande un acte de foi. Actuellement, il y a une transformation fondamentale de la loi. D'autre part, et vous le savez très bien, l'exercice des droits acquis ou l'exercice des droits au niveau des syndicats se fait généralement d'une façon agréable, dans un climat où il n'y a pas de conflit.

Dans un climat où il y a un conflit, il faut donc prévoir des mécanismes où le jeu de l'arbitrage des négociations est maintenu et non pas que, soudainement, une décision soit prise par rapport à une table de négociation où un conflit se manifeste et que cette décision soit justement une réglementation ministérielle dans les sujets qui sont actuellement en négociation sur la table. Or, vous comprendrez notre inquiétude à ce niveau et je pense que c'est une inquiétude justifiée, autant de notre part que de celle des autres syndicats. Nous voulons vous demander, avec beaucoup de précision, parce que c'est là le problème fondamental: Est-ce que, oui ou non, les dispositions incluses dans l'article no 3 sont restreintes à un règlement ou sont dans l'aire des négociations? Est-ce que a), b), c), d) sont des matières négociables, oui ou non?

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.

M. de Belleval: Vous avez touché à plusieurs points, dont un point qui m'apparaît assez intéressant, qui nous sort du débat un peu fastidieux qu'on a eu à certains points de vue depuis le début, la question de transfert fondamental de l'autorité, en matière de gestion du personnel, d'un type d'autorité à un autre.

J'ai expliqué que, là-dessus, effectivement, il y avait un choix fondamental qui était fait, en vertu du projet de loi 53, qui était de donner à l'autorité politique la responsabilité d'initiative et d'exécution en matière de gestion de son personnel, du personnel gouvernemental, du personnel de la fonction publique. Pourquoi? Parce que, dans notre régime politique, c'est le gouvernement, ce sont les ministres, collégialement ou individuellement, qui sont responsables, vis-à-vis de la population, de l'exécution de leur politique. L'exécution de ces politiques, de ces programmes, de leurs priorités, sur lesquelles, souvent, ils ont été élus d'ailleurs, dépend pour une large part de la façon dont s'est organisé leur principal instrument d'exécution, c'est-à-dire la fonction publique.

Là-dessus, il est normal que les ministres, avec la responsabilité, aient aussi les pouvoirs. Actuellement, ce pouvoir d'initiative, ce pouvoir d'exécution est confié largement à une commission indépendante, soi-disant indépendante, qui est la Commission de la fonction publique. L'indépendance de cette commission est toute relative, ses membres sont nommés par le gouvernement,

de façon discrétionnaire, absolument discrétionnaire, et, deuxièmement, en vertu d'un acte, d'un arrêté en conseil.

Cette commission n'a aucune ouverture au-delà du gouvernement, elle ne fait pas rapport autrement que d'une façon purement formelle, par un rapport annuel, comme tous les organismes, à l'Assemblée nationale, mais elle ne fait pas rapport autrement, statutairement, à l'Assemblée nationale ou à une commission de l'Assemblée nationale ou au public en général, autrement que par son rapport annuel, qui est purement formel, de toute façon.

Cette commission a des pouvoirs, non seulement de chien de garde, d'enquête, par exemple, de contrôle, mais elle a en même temps des pouvoirs d'exécution. Elle exécute des tâches administratives bien précises, de sorte que, contrairement à nos principes de droit administratif, cette commission est à la fois juge et partie de son propre fonctionnement. Elle est censée surveiller l'application de la loi, mais l'application de la loi lui est confiée largement. Elle est appelée à faire des concours de recrutement ou de promotion, elle est appelée à enquêter sur ses propres concours de promotion ou de recrutement, en vertu même de la loi.

Ce sont ces choses que l'on veut changer en disant qu'il faut revenir à des principes de droit fondamentaux et à des principes de responsabilité ministérielle qui sont au coeur même de notre régime démocratique fondamental, à savoir qu'il y aura effectivement une commission, que cette commission sera beaucoup plus indépendante que l'ancienne commission, puisqu'elle sera nommée dorénavant par l'Assemblée nationale et à une majorité des deux tiers, ce qui veut dire qu'en vertu de notre régime parlementaire et de la coutume parlementaire, cela signifie, à toutes fins pratiques, qu'elle doit être nommée à l'unanimité de la Chambre, comme le Vérificateur général, le président général des élections, des postes comme ça.

Deuxièmement, cette commission est ouverte maintenant, elle n'est plus refermée sur elle-même, elle fait rapport à l'Assemblée nationale sur les règlements du ministre. Mais le ministre, à ce moment, récupère les pouvoirs d'exécution, non pas les pouvoirs de contrôle, mais seulement les pouvoirs d'exécution. Ensuite, la façon d'aménager l'approbation finale de ces pouvoirs, est-ce que ça doit aller au Conseil des ministres ou est-ce que ça doit s'arrêter au Conseil du trésor? C'est un jugement d'opportunité sur l'organisation de la machine administrative.

Vous pouvez me dire: Oui, mais ce sont des choses tellement importantes, tellement cruciales que ça devrait être le Conseil des ministres qui approuve les règlements plutôt que le Conseil du trésor. C'est un jugement d'opportunité, remarquez que tous les organismes, tous les intervenants, dans quelque secteur d'activité gouvernementale, voudraient tous voir leurs mémoires, leurs projets approuvés par le Conseil des ministres.

Il va sans dire que c'était souvent la pratique dans le passé, de sorte que le Conseil des ministres devenait une machine absolument inefficace et que cette soi-disant autorité politique suprême était tellement engorgée qu'elle n'était pas en mesure de vraiment faire son travail d'orientation générale.

Dans le cas de ce qui nous occupe, je dois dire que, de toute façon, depuis 1970, en vertu de la Loi sur l'administration financière, c'est effectivement le Conseil du trésor qui approuve les règlements en question. Depuis 1970, c'est le cas. Peut-être que vous n'étiez pas conscients de cette situation, mais, depuis la loi passée sous M. Gar-neau, sous le gouvernement libéral, la Loi sur l'administration financière, c'est effectivement le Conseil du trésor qui approuve ces choses.

Il faut bien voir. Le Conseil du trésor, ce n'est pas un organisme administratif, c'est un organisme politique. C'est un comité du cabinet, composé exclusivement de ministres, qui reçoit une délégation d'autorité de la part du cabinet. Je dois dire que ce n'est pas une autorité nécessairement finale, dans le sens que, s'il existe un désaccord, ou si, pour une question absolument importante, un ministre désire qu'une question, même si elle est approuvée au Conseil du trésor, soit référée au cabinet, bien sûr, cette question est toujours référée au cabinet, en vertu des principes non écrits de responsabilité ministérielle.

Dans ce sens-là, il ne s'agit pas d'une simple autorité administrative dont le seul principe d'action serait une efficacité désincarnée. Il s'agit vraiment d'un organisme politique qui prend, sur les projets qu'on lui propose, un point de vue tout autant politique qu'administratif.

Comme vous voyez, je pense que, de ce côté-là, il s'agit d'un projet de réforme qui, effectivement, déplace un certain nombre de choses, déplace un centre d'autorité, mais, en tout état de cause, il le fait au grand jour, il le fait avec des mécanismes de contrôle, d'encadrement, qui sont non seulement formels, qui sont non seulement légaux, mais qui sont plus que cela, qui sont politiques, puisque, en fin de compte, le contrôle se fait au niveau de l'Assemblée nationale. A ce niveau, comme vous le savez, le contrôle dépasse largement les aspects purement formels pour rejoindre les aspects d'opportunité politique, au sens large.

A mon avis, c'est un immense progrès de voir qu'à l'avenir, la gestion même de la fonction publique fera régulièrement l'objet d'une attention politique au sens le plus noble du terme, c'est-à-dire au sens d'un débat d'opportunité politique, au sein même de l'Assemblée nationale, et non plus au sein d'organismes purement technocratiques, administratifs, comme c'est le cas actuellement.

Quant à savoir si toute cette transposition des choses risque d'affecter ce qui existe actuellement en matière de régime syndical, j'ai déjà indiqué à plusieurs reprises, y compris à votre président, que ce n'était absolument pas notre intention, qu'effectivement, il y avait deux grands piliers dans l'administration de la fonction publique: la

loi, qui comprend un certain nombre de principes d'organisation étatique et d'intérêts publics et, d'autre part, les conventions collectives, de façon que ces deux piliers soient à la fois distincts et bien présents. En vertu du projet de loi 53, toutes les questions qui traitent du régime syndical seront regroupées dorénavant dans une loi séparée. Jusqu'à nouvel ordre, cette loi nouvelle, mais qui reprend les articles en vigueur intégralement, ne modifie pas, ne vise pas à modifier d'aucune façon le statu quo. Toutes les questions qui, jusqu'à maintenant, ont fait l'objet, entre vous et le gouvernement, du jeu de la libre négociation des parties, continueront de l'être et il est expressément prévu, à l'article 91 du projet de loi, entre autres, que tous les pouvoirs du ministre, en vertu de l'article 3, sont assujettis aux dispositions du régime syndical, donc des négociations collectives.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson.

M. Bellemare: La première chose qui me vient est pour vous féliciter du courage que vous manifestez. Pour venir devant le gouvernement établir vos positions aussi clairement, il faut être courageux, actuellement. Je vous félicite.

Je voudrais me poser une question à moi-même, pas au ministre. Serait-il possible que le ministre, après avoir entendu tous les rapports, puisse apporter des amendements à la loi? Après avoir entendu tous ceux qui font des revendications justes et raisonnables, serait-il possible que le ministre, comme pour d'autres cas, d'autres commissions parlementaires, puisse apporter des amendements au projet de loi 53?

Je me dis peut-être, mais je n'en suis pas sûr, voyant la position qu'il a prise jusqu'ici devant chacune des remarques qui lui ont été faites. Il trouve toujours une justification qui, d'après lui, est juste et raisonnable selon la loi. Je pense que cela devient véritablement une loi qui s'appellera la loi de Belleval et qui ne sera pas, comme on dit, la Loi de la fonction publique ou, comme le projet de loi change de nom, la loi des relations de travail. Il y aura beaucoup de transparence dans la loi peut-être, mais pas dans le ministre. Il y aura, comme vous le dites, peut-être l'élimination du patronage ou de l'arbitraire — cela existe déjà — qui sera écrit dans la loi, mais peut-être pas dans les agissements du ministre.

Il y aura aussi, je pense, une diminution de l'efficacité. On a constaté jusqu'à maintenant que certains mémoires ne sont pas tout à fait satisfaits du projet de loi. C'est pour cela que je me demande si le ministre va apporter des amendements qui seront des amendements permettant surtout aux droits acquis d'être reconnus officiellement. Même si on dit: Oui, on vous dit que l'arrêté ministériel 909 du 18 mai 1966 est bon, mais il est sujet à changement, ce n'est pas une certitude du respect des droits acquis. Vous avez raison de le noter.

Il y a une chose, par exemple, dans votre mémoire, qui me cause certaines inquiétudes. C'est quand vous dites "réaménagement du pouvoir patronal et restriction des objets de négociation", je comprends que vous parlez de l'article 3 et des différents points a), b), c), d) qui sont exclus, mais est-ce que les syndicats dûment accrédités, qui sont représentés, auront le droit de se prévaloir de cet article 3 a), b), c), d) et des autres qui concernent véritablement le pouvoir du ministre? Vous dites qu'ils sont absents. Le mot "absents" me surprend. Quand on dit "absents", on nie formellement le pouvoir de négociation qu'ont les syndicats qui ont acquis ce droit dans les différents stades de la procédure.

Il y a une autre question qui vient renforcer mon argumentation. Vous dites que le gouvernement, de toute évidence, a succombé à la tentation de réaménager "à la hausse" son pouvoir dictatorial, en soustrayant du champ de la négociation, dans la convention collective, un certain nombre d'éléments essentiels. Je pense que vous avez sûrement là une question qui pourrait nous aider à mieux comprendre, si vous vouliez bien l'étayer. Je suis bien d'accord qu'il devrait y avoir des modifications au projet de loi pour donner véritablement, à ceux qui ont des droits acquis, le respect des droits acquis.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le Président du syndicat. M. Thiboutot?

M. Thiboutot: Oui.

Le Président (Mme Cuerrier): C'est M. Thiboutot.

M. Thiboutot: Je vous remercie pour la qualité de courage, mais je suis ici en tant que représentant de mes membres et ce n'est pas du courage, je suis un porte-parole.

M. Bellemare: Surtout vous et votre épouse.

M. Thiboutot: Si vous voulez vous embarquer dans la condition féminine, ce sera à une autre commission.

M. Bellemare: Non, je ne fais pas de politique. Je ne dis pas qu'elle est PQ.

M. Thiboutot: Je voudrais répondre quand même au ministre de Belleval, parce que vous avez fait...

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, s'il vous plaît! C'est M. Thiboutot qui a la parole.

M. Thiboutot: Je voudrais répondre au ministre de Belleval, parce que vous avez répondu, en fait, à l'intervention que j'ai faite. J'ai noté, dans votre réponse, la mention de relation d'opportunité. C'est bien ce que je disais. Ce n'est plus une relation à caractère politique, c'est une relation à caractère d'opportunité administrative. Vous avez précisé d'opportunité politique.

Le problème est celui-ci: Est-ce que le Conseil du trésor est l'organisme politique du cabinet?

Une Voix: Oui.

M. Thiboutot: II est l'organisme politique. Il est aussi l'organisme administratif, économiquement.

M. de Belleval: C'est-à-dire que, dans tout organisme politique, qu'il s'agisse d'un ministre ou d'un comité du cabinet, il existe des organismes administratifs pour l'alimenter, c'est évident. La même chose pour le Conseil des ministres, d'ailleurs.

M. Marchand: ... vous avez l'air de donner un exemple...

M. Pagé: ... politiques et administratif...

M. Thiboutot: Oui, ce qui est notre inquiétude. Je pense que vous avez compris l'intervention, dans le sens que vous avez tenté de démontrer qu'on n'avait pas raison d'être inquiet. Je vous dis qu'on a encore raison d'être inquiet. Je vais vous poser peut-être une question. J'aimerais savoir à quel moment on a l'intention de terminer les travaux de cette présente commission parlementaire, approximativement.

M. de Belleval: Je dois dire que, là-dessus, il n'y a pas de règle fixe. On laisse a chacun le soin d'exprimer son opinion, tant du côté des députés que des intervenants, de façon que le débat soit le plus ouvert et le plus calme possible. De ce point de vue, je ne saurais préjuger de la soif d'information de l'Opposition, ni de la soif de communication des intervenants. Je suppose que, dans les prochains jours, les toutes prochaines semaines, la commission aura terminé ses travaux, vraisemblablement.

M. Thiboutot: Ce qui veut dire que le résultat de la commission Martin qui a pour mandat, et je cite: "le contenu de l'aire des négociations", si le rapport de la commission Martin s'avérait contradictoire avec les pouvoirs accordés quant à l'article 3, la loi 53 primerait, ce qui voudrait dire, d'une certaine façon, que les interventions que l'on fait actuellement, sur la base d'une évaluation, vous me direz, lointaine, comme vous pouvez me donner comme réponse également: Je ne peux pas vous dire que je ne l'abandonnerai pas, que je n'abolirai pas tel règlement, etc., cela veut dire que nous, en tant que syndiqués, ne pouvons plus intervenir sur l'aire des négociations. Si on ne peut plus intervenir, à ce moment, sur l'aire des négociations, notre pouvoir comme tel, de syndicat, n'existe à peu près plus, parce que nous serions soumis, à ce moment, a une réglementation contre laquelle nous serions peut-être intervenus actuellement, mais, devant l'argumentation que l'on formule, vous ne pouvez que dire: Ecoutez, je ne sais pas, attendez les règlements. Par contre, on demande à la commission Martin de nous entendre pour, justement, déterminer ce régime syndical et l'aire des négociations. Ce qui veut dire, sur un plan strictement pratique, que le projet de loi 53 et le futur projet de loi du régime syndical ont une relation d'autorité à effet, si vous voulez. Le projet de loi 53 va déterminer les zones de négociation. La commission Martin pourra vous faire les recommandations. Si elles arrivent à l'inverse du projet de loi 53, elles ne seront pas écoutées ou entendues ou inscrites.

M. de Belleval: Ce n'est pas le projet de loi 53 qui détermine le régime syndical. Le projet de loi 53 ne touche pas au régime syndical. Ce sont les articles des lois en vigueur actuellement qui sont regroupés en vertu de l'article 117 dans la Loi sur le régime syndical, qui déterminent le régime syndical. Le projet de loi 53 ne touche pas au régime syndical.

M. Bellemare: Au début... celle de tout mener sous...

M. Thiboutot: L'article 119...

M. de Belleval: L'article 117? Ecoutez, je pense que cela ne sert à rien de continuer là-dessus trop longtemps. Je pense que tout cela a été élaboré en détail depuis fort longtemps.

M. Pagé: Le problème est là. Vous l'avez cerné, le problème, et il est là, le problème.

M. de Belleval: Est-ce que vous pourriez me laisser terminer, M. le député?

M. Pagé: Ils l'ont cerné, le problème.

M. de Belleval: Vous devenez dissipé, ce n'est pas possible. J'ai expliqué, à plusieurs reprises, que tout ce qui concerne le régime syndical, l'aire de négociation, tout cela, je viens de vous le dire, il y a à peine dix minutes, tout cela est sorti de la Loi de la fonction publique et fera l'objet, à l'avenir, d'une loi séparée, Loi sur le régime syndical. Si la commission Martin a des recommandations à nous faire là-dessus et qu'on juge bon de les appliquer, ce sera la Loi sur le régime syndical qui sera modifiée non pas la Loi sur la fonction publique. Je pense qu'il y a aussi un malentendu considérable qui risque de se produire, c'est que la Loi sur la fonction publique... Le projet de loi 53, premièrement, ne s'adresse pas seulement à des syndiqués. Il s'adresse à un tas d'employés qui ne sont pas syndiqués. Il traite de questions qui sont bien au-delà du régime syndical, comme je viens de l'expliquer, et des relations de travail.

Il traite des principes d'organisation mêmes de l'Etat et des principes d'intérêt public qui n'ont rien à voir avec le régime syndical ou avec l'aire de négociation et, justement pour que cette chose soit encore plus claire, on a décidé qu'à l'avenir, ce que j'appelle ce grand pilier aussi de la gestion de la fonction publique que constitue le régime des conventions collectives soit l'objet d'une autre loi, de la Loi sur le régime syndical, de sorte qu'on aura, à ce moment-là, ces deux piliers traités dans

deux lois séparées, la loi 53 sur les principes généraux d'intérêt public et d'organisation de l'Etat et la Loi sur le régime syndical, qui traite des convention s collectives et de l'aire de négociation. Tantôt, j'écoutais le député de Johnson dire que la loi est parfaite, que je n'ai pas l'intention de bouger, que je n'ai rien à dire, que je fais simplement répondre à vos objections, ou enfin, aux remarques qu'on me fait, que le projet de loi est parfait, c'est faux de façon patente, puisque j'ai déjà déposé, entre autres, des projets d'amendement qui se trouvent à répondre directement aux principales objections que m'ont faites les associations syndicales. Là-dessus, je dois dire que...

M. Thiboutot: M. le ministre, je voudrais... Permettez-moi, parce que votre affirmation...

M. de Belleval: Je voudrais terminer là-dessus. J'ai donc déjà déposé des projets d'amendement qui clarifient davantage encore cette question et, en particulier, en vertu de projets d'amendement à l'article 91, statuent clairement — là, je reviens au point fondamental de votre argumentation — que les pouvoirs du ministre, en vertu de l'article 3, les pouvoirs réglementaires, sont assujettis aux dispositions des conventions collectives, mais le ministre... Il faut qu'on détermine, dans notre structure étatique, qui, quand même, a l'initiative de la réglementation et, deuxièmement, quand cette réglementation ne touche pas aux conventions collectives en vigueur, quand elle touche, cette réglementation, à des gens qui ne sont pas syndiqués ou qu'elle touche à des matières qui, de toute façon, ne font pas l'objet de l'aire de négociation, il faut que quelqu'un en soit responsable et, de ce point de vue, il n'y a aucun changement par rapport à la loi actuelle. Si vous allez à la loi en vigueur actuellement et que vous lisez les pouvoirs de la Commission de la fonction publique, on ne fait aucunement référence, dans ces pouvoirs de la Commission de la fonction publique, au régime syndical en vigueur, parce que, par ailleurs, il existe des dispositions qui disent que telle chose est négociable et telle chose n'est pas négociable et que, par conséquent, en ce qui concerne l'aire de négociation et le régime syndical, c'est le régime syndical qui prime. C'est exactement la même chose avec la présente loi. Il n'y a pas de changement là-dessus.

Le Président (Mme Cuerrier): M. Thiboutot.

M. Thiboutot: Oui, je voulais simplement dire que j'ai bien lu votre amendement, mais j'y ai lu aussi le dernier paragraphe, qui précise que, à moins que, selon le sujet qui est attribué par la Loi sur la fonction publique à la Commission de la fonction publique, à l'Office de recrutement et au ministre de la Fonction publique, la commission, l'office ou le ministre n'y concoure par règlement ou que tel règlement ne soit approuvé par le gouvernement, c'est-à-dire que ce qu'on donne comme aire de négociation, on l'élimine d'une certaine façon, enfin, on ne l'élimine pas, mais on dit:

On vous prévient tout de suite: si, par hasard, on a décidé de faire un décret là-dessus, c'est le décret qui passe.

M. de Belleval: C'est le contraire que ça dit. Cela dit que...

M. Marchand: L'épée de Damoclès.

M. de Belleval: Est-ce que je peux terminer là-dessus? Vous êtes le premier à apporter cette objection. D'ailleurs, ça fait longtemps que cette disposition, que vous me lisez, existe dans la loi actuelle. Tout ce qu'elle permet, c'est une soupape en ce qui concerne certaines choses qui, en vertu du statu quo en vigueur, en vertu des dispositions en vigueur, relèvent de la Commission de la fonction publique et ne tombent donc pas dans l'aire de négociation. Elles peuvent quand même tomber dans l'aire de négociation, si le gouvernement y consent...

Une Voix: C'est ça.

M. de Belleval: Donc, il n'y a pas de changement par rapport à la situation actuelle, c'est déjà comme ça, sauf qu'il y a une amélioration considérable, à mon point de vue. C'est qu'à l'avenir ces pouvoirs d'exception, au lieu d'être confiés à la commission, étant confiés directement maintenant au ministre de la Fonction publique, l'organisme syndical n'a plus qu'un interlocuteur devant lui, celui avec qui il négocie les conventions collectives. Le ministre ne peut plus se retrancher derrière l'autorité d'une commission indépendante; c'est lui-même qui a le pouvoir, donc, c'est lui-même qui a le pouvoir de consentir, par règlement, à négocier des choses qui, jusqu'à maintenant — cela se continuera avec le projet de loi no 53, on maintient le statu quo — ne sont pas négociables, sauf que c'est une amélioration.

M. Pagé: Mme le Président...

M. Dussault: Question de règlement, Mme le Président.

Le Président (Mme Cuerrier): Sur une question de règlement, M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: II est bien exact qu'à une commission parlementaire, les seuls intervenants, les seuls qui peuvent s'exprimer sont des membres de cette commission ainsi que les invités que nous avons à cette commission. C'est exact?

Le Président (Mme Cuerrier): Voulez-vous me répéter la question?

M. Dussault: Les seules personnes qui peuvent s'exprimer à cette commission sont les membres de cette commission ainsi que nos invités. C'est bien exact? A moins d'un consentement unanime. C'est cela. Alors, il se produit depuis le début de cette séance quelque chose de fort dé-

sagréable. Il y a derrière M. le député de Portneuf, un recherchiste qui, par des sémaphores, de grands signes de tête ainsi que de grands signes des mains, intervient continuellement dans les travaux de cette commission.

M. Pagé: Est-il fort celui-là! On va y revenir.

M. Dussault: II le fait pendant toute la séance. Je vous demanderais, Mme le Président, d'intervenir pour faire en sorte que ce recherchiste n'intervienne plus, en aucune façon, en s'exprimant ainsi auprès de nos invités, ici, à la commission. Il le fait depuis le début des travaux et on le trouve désagréable. On nous le faisait remarquer encore tout à l'heure, ici. Je vous demanderais, s'il vous plaît, d'intervenir pour qu'il cesse de s'exprimer de cette façon, parce que c'est une forme d'expression qui, en fait, gêne les travaux de la commission.

Je vous remercie, Mme le Président.

M. Pagé: Mme le Président, sur la question de règlement.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf, sur la question de règlement.

M. Pagé: D'abord, Mme le Président...

Le Président (Mme Cuerrier): ... et le président du syndicat.

M. Pagé: ... je considère que cette question est farfelue et non avenue. Le fait que le député de Châteauguay, je crois, l'ait soulevée démontre purement et simplement que celui-ci aura voulu se faire valoir quelques minutes pendant les travaux de cette commission. Tout le monde sait que les membres de cette commission, soit du côté de l'Opposition officielle, du côté du pouvoir, ont des équipes de recherchistes qui travaillent en étroite collaboration avec eux. Or, c'est normal et explicable. La tradition est là. Je remarque que personne de l'équipe ministérielle qui était ici depuis 1970... si, Mme le Président, vous-même aviez été ici depuis 1970, vous auriez constaté que lorsque votre parti était...

M. Dussault: Question de règlement, Mme le Président.

M. Pagé: Je suis sur une question de règlement et vous allez me laisser terminer. D'accord?

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf...

M. Oussault: C'est une question de privilège qu'il est en train de faire, et ce n'est pas permis en commission parlementaire.

M. Pagé: Mme le Président...

Le Président (Mme Cuerrier): Un moment, s'il vous plaît! M. le député de Châteauguay, vous soulevez une question de privilège?

M. Pagé: Non. On n'a pas le droit de soulever des questions de privilège en commission.

Le Président (Mme Cuerrier): Bon. D'accord. En commission...

M. Dussault: Puisqu'on ne peut soulever de question de privilège, je fais remarquer que M. le député de Portneuf en fait une question de privilège actuellement et que cela n'est pas permis en commission parlementaire.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Châteauguay, vous n'avez pas à soulever de question de privilège.

M. Pagé: C'est cela. Apprenez donc votre règlement!

Le Président (Mme Cuerrier): D'ailleurs, M. le député de Portneuf, vous avez déjà terminé votre intervention.

M. Pagé: Non. Je n'ai pas terminé, Mme le Président, sur la question de règlement. J'étais en train de vous faire part...

Le Président (Mme Cuerrier): Sur la question...

M. Pagé: Mme le Président, vous connaissez votre règlement. Je présume que le ministre doit le connaître lui aussi...

M. de Belleval: ...

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, M. le ministre! M. le député de Portneuf.

M. Pagé: J'étais en train de faire état de précédents qui ont toujours existé. Selon la coutume ici, la tradition, nos équipes sont toujours avec nous. Je vous rappellerai que depuis 1970 — entre 1970 et 1976 — les recherchistes du Parti québécois étaient assis à la table, à la table! Si vous aviez été ici, vous vous le rappelleriez. Parlez-en à votre leader et il va vous dire que votre question est non avenue...

M. Dussault: Mme le Président, question de règlement.

M. Pagé: ... et laissez donc poursuivre le débat. Cela va bien. Cela commence à bien aller.

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre!

M. Pagé: Ces gens ont cerné le problème...

Le Président (Mme Cuerrier): S'il vous plaît!

M. Pagé:... et laissez donc continuer le débat.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf, à l'ordre!

M. Dussault: Mme le Président...

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre! Je veux simplement faire remarquer à cette commission qu'il est évident que des recherchistes sont là pour rendre service aux différents députés membres de la commission, mais je leur demanderais spécifiquement de ne pas intervenir comme tel, sauf auprès du député qu'ils doivent aider de leurs remarques, mais sans manifester en aucune façon leur approbation ou leur désapprobation des interventions des membres de la commission.

M. le Président du syndicat, vous aviez demandé la parole.

M. Lalonde (Jean): Oui. Je voudrais quand même rassurer les membres de la commission que je n'ai pas entendu parler qui que ce soit et il peut faire les gestes qu'il veut. On est venu ici et on sait quoi dire.

Le Président (Mme Cuerrier): Je ne suis pas d'accord sur votre façon de comprendre la chose, M. le président...

M. Marchand: Vous acceptez tout ce que l'on dit de l'autre côté.

Le Président (Mme Cuerrier): ... parce qu'il est bien sûr, de tradition, dans cette Assemblée, qu'un recherchiste soutienne son député et il a fort bien le droit de le faire.

C'est vrai aussi, et c'est peut-être parce que vous n'êtes pas tout à fait habitué aux règles de procédure de cette Assemblée, M. le Président, mais un recherchiste n'a pas à faire valoir son approbation ou sa désapprobation comme telle, il peut toujours la confier tout bas à la personne qu'il soutient, pendant la séance.

M. Dussault: Merci, Mme le Président.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député d'Abitibi-Ouest, vous aviez une intervention à faire.

M. Pagé: C'est une brillante intervention. Vous enverrez cela dans votre journal, cela va bien paraître. Vous aurez parlé au moins une fois à l'Assemblée.

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre s'il vous plaît, M. le député de Portneuf!

M. Pagé: Félicitations!

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf, s'il vous plaît! C'est M. le député d'Abitibi-Ouest qui a maintenant la parole.

M. Gendron: M. le Président, je tiens à vous remercier de la présentation de votre mémoire. Effectivement, dans votre mémoire, vous m'apparaissez très préoccupé par l'absence de dispositions dans le projet 53 qui garantiraient la présence d'un membre de votre syndicat au sein du jury et des comités de sélection pour le recrutement des professeurs. J'aimerais savoir si, d'après vous, dans l'actuelle loi de la fonction publique, il existe une disposition à cet effet. Premier volet de la question. Deuxièmement, comment d'après vous, serait-il plus facile et opportun pour l'Office de recrutement de vous retirer cet avantage que ce ne le serait pour l'actuelle commission?

M. Lalonde (Jean): L'arrêté en conseil 909 prévoit cela, un membre du syndicat. Je ne sais pas si vous avez le règlement, l'arrêté en conseil 909, qui prévoit qu'un professeur représente la partie syndicale?

M. Gendron: D'accord, c'est au niveau de l'arrêté en conseil, mais il n'existe pas de disposition à cet effet dans la Loi de la fonction publique actuelle.

M. Lalonde (Jean): C'est cela, c'est notre disposition.

M. Gendron: C'est l'arrêté en conseil.

M. Lalonde (Jean): C'est l'arrêté en conseil qui prévoit le fonctionnement du jury de sélection. C'est l'arrêté en conseil comme tel qui prévoit cette réglementation. Naturellement, cette réglementation a été, au cours des années, sous forme de négociation, même si on ne veut pas appeler cela une négociation, a évolué dans ce sens qu'actuellement tous les concours de professeurs qui sont ouverts au public lorsqu'on forme un jury, le syndicat envoie un représentant, mais un représentant spécialisé dans cette matière, si c'est en français, c'est un professeur de français, si c'est en violon, on prend un professeur de violon, et ainsi de suite. La formule a très bien fonctionné. Naturellement, quand M. le ministre nous dit: Je ne prévois pas changer tout cela, c'est sa bonne foi, mais, vous permettrez, la bonne foi, cela m'a joué de vilains tours. Les gens sont de bonne foi, mais on ne sait pas. Est-ce que cela va rester? S'il nous dit qu'il va garder le règlement et que, s'il y a des modifications à faire à ce règlement, il va nous consulter, s'il est prêt à nous dire cela aujourd'hui, c'est une position qui serait acceptable, mais ce n'est pas ce que j'ai compris du ministre ce matin.

M. Gendron: Mais êtes-vous d'accord, M. le Président, que cette disposition est particulière à votre groupe? Vous dites: C'est un arrêté en conseil. Vous mentionnez: C'est un arrêté en conseil, chez nous, qui nous donne l'autorisation d'avoir un représentant sur les jurys. C'est exact? C'est une disposition particulière à votre groupe. Actuellement, la loi 53 est une loi globale qui va régir l'ensemble du cadre de la fonction publique. Est-ce qu'il existe d'autres groupes qui ne disposent pas de cet arrêté ministériel particulier au niveau des... C'est tout simplement pour vous dire — un instant — que je pense que cette disposition, on ne peut pas l'inclure directement ou nommémentdans la Loi de lafonction publique, si elle est une disposition particulière à votre groupe.

M. Lalonde (Jean): Vous permettrez, je ne peux pas répondre pour les autres syndicats. Je suis représentant du syndicat des professeurs.

M. Gendron: Je comprends, ce n'est pas pour les autres syndicats...

M. Lalonde (Jean): Je me préoccupe de mes membres et de garder ce qu'on a, c'est-à-dire les privilèges qu'on a, les garanties qu'on a actuellement, je veux les garder. Si les autres l'ont, je ne peux pas vous le dire, mais je ne crois pas qu'il y en ait beaucoup qui aient cette disponibilité dans la loi.

M. Gendron: Je suis tout à fait d'accord. Je voulais seulement savoir si vous croyez qu'il est normal qu'on ne puisse l'inclure dans la Loi de la fonction publique, compte tenu de cette réserve qu'en mettant cela dans la Loi de la fonction publique, cette garantie au niveau de la réglementation qui vous régit, à ce moment-là, on présume que cette disposition existe pour l'ensemble des groupes qui sont représentés dans la fonction publique, ce qui, vous le savez très bien, n'est pas le cas.

C'est seulement cela que je voulais savoir. Autrement dit, est-ce que vous n'êtes pas d'accord avec nous que, si on vous donne une garantie formelle, il faut vous la donner ailleurs que dans la loi 53? C'est ça que je veux savoir de vous.

M. Lalonde (Jean): Les modalités de l'inscrire ou pas, je ne suis pas juriste là-dedans, je pense que M. de Belleval est plus spécialisé. D'ailleurs, son projet de loi nous donne un reflet de ce qu'il veut...

M. Pagé: S'il comprenait mieux.

M. Gendron: D'accord, je termine, mais votre exigence, c'est: Garantissez-le-nous, peu importe l'endroit. Ce qu'on veut, c'est la garantie formelle que ça va demeurer comme c'est. C'est ce que vous demandez?

M. Lalonde (Jean): C'est sûr.

M. Gendron: Pour tout de suite, ça va.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de... vous voulez compléter votre réponse?

M. Lalonde (Jean): J'aurais une question à poser pour clore le débat...

Le Président (M. Marcoux): Sur la même question, il y a déjà deux autres députés qui ont soulevé des questions.

M. Lalonde (Jean): Non, non.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Gaspé.

M. Pagé: Après, est-ce que ce sera à moi? J'avais donné mon nom à partir...

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Gaspé, allez-y.

M. Le Moignan: Comme ça, le député de Port-neuf me permet de passer tout de suite. J'aurais quelques petites questions à poser à M. le président ou à un autre. Quand vous parlez des responsabilités de recrutement et de mouvement de personnel, je comprends très bien vos inquiétudes, surtout quand il s'agit de la délégation des responsabilités qui, à votre point de vue, semblent agir de façon indue et, en même temps, faire perdre à l'office l'utilité qu'elle peut encore posséder. Vous semblez très sensibles à cette perte de délégation. Est-ce que vous pourriez préciser votre point de vue là-dessus?

M. Lalonde (Jean): Si on prend le mouvement de personnel, des professeurs, c'est sûr qu'on s'inquiète, parce que si on les bouge un peu, on nous les enlève. A l'intérieur de notre corps d'emploi, de professeurs comme tel, on est engagé comme professeur spécialisé, point. Si on prend l'hypothèse que, demain matin, on réduit les effectifs des écoles, tout ça, on crée un mouvement de professeurs. Automatiquement, ils deviennent accrédités à d'autres syndicats. C'est sûr que, dans notre convention, l'article 14 prévoit ce mouvement. C'est pour ça qu'on se pose la question. Comment se fait-il que le reclassement — parce que ça devient du reclassement — à l'article 3, le ministre l'inclue dans sa réglementation et que, dans notre convention collective, l'article 14 prévoie que ce sera négociable pour nous? On s'est posé des questions là-dessus. On n'a pas les réponses, parce qu'on n'a pas toujours ces règlements. Le ministre nous a dit ce matin qu'il était pour reporter, possiblement, certains règlements, mais c'est encore sur sa bonne foi.

M. Le Moignan: Justement, tenant compte de votre explication, si on se rapporte à l'arrêté en conseil no 909, vous dites que vous n'êtes pas prêts à renoncer à vos droits acquis. Maintenant, comme jusqu'à maintenant le ministre n'a pas été très volubile sur l'article 3, même devant les autres groupes qui sont venus ici, vous avez tout de même des mesures pour essayer de conserver vos droits. Est-ce que cela peut se faire, soit par grief, soit encore dans le cadre de votre convention collective? Qu'est-ce que vous prévoyez de mieux ou de pire?

M. Lalonde (Jean): Prévoir le mieux ou le pire, je ne voudrais pas prêter d'intentions au ministre ici ce matin. C'est évident que, si un règlement est adopté, les recours sont très restreints, même si on fait des griefs, même si on crie, le règlement va s'appliquer. On ne le sait pas, on reste dans l'incertitude.

M. de Belleval: Là-dessus, M. Lalonde, le règlement en question a été approuvé par qui?

M. Lalonde (Jean): Le règlement pour...

M. de Belleval: Les règlements en question, toutes les dispositions en question, ont été approuvés par qui?

M. Lalonde (Jean): Le lieutenant-gouverneur en conseil.

M. de Belleval: Le lieutenant-gouverneur en conseil, le gouvernement. Il n'y a rien qui empêche le gouvernement, demain matin, de changer ça s'il le veut. Qu'est-ce que vous en pensez?

M. Lalonde (Jean): C'est sûr...

M. de Belleval: Alors en quoi la nouvelle loi...

M. Lalonde (Jean): ... il peut tout changer s'il le veut, demain matin. Mais nous autres, on veut avoir la certitude...

M. de Belleval: ... en quoi la nouvelle loi change-t-elle quelque chose de ce côté?

M. Lalonde (Jean): On aimerait avoir la certitude que, quand vous allez changer des règlements, on va participer...

M. de Belleval: Est-ce que vous avez cette certitude actuellement?

M. Lalonde (Jean): Non.

M. de Belleval: En vertu des lois qui sont en vigueur actuellement, est-ce que vous avez cette certitude?

M. Lalonde (Jean): Pour l'engagement de nos professeurs, je vous dis oui.

M. de Belleval: Vous l'avez? M. Lalonde (Jean): Oui.

M. de Belleval: Vous m'avez dit tantôt que je peux changer cela demain matin.

M. Lalonde (Jean): C'est sûr. Mais est-ce que vous allez nous consulter quand vous allez le changer?

M. de Belleval: On va prendre cela tranquillement. Demain matin, le Conseil des ministres peut décider de changer cela. C'est d'accord? Si, demain matin, le lieutenant-gouverneur décide de changer cela, est-ce que vous avez la certitude que vous allez être consultés?

M. Lalonde (Jean): Non.

M. de Belleval: Vous ne l'avez pas. Donc, la loi ne change rien là-dessus. Et si c'est dans le champ de négociation, clairement, ce sont vos conventions collectives qui s'appliquent. A ce que je sache, vos conventions collectives vont continuer à s'appliquer.

C'est ce que je dis, c'est un faux problème. On maintient le statu quo de ce côté. Si vous n'avez pas de certitude actuellement, vous n'en aurez pas plus après. Mais si vous en avez actuellement, vous gardez vos mêmes certitudes.

Le Président (Mme Cuerrier): M. Thiboutot, vous avez demandé la parole?

M. Thiboutot: Oui. Je voudrais dire que, d'une certaine façon, compte tenu de l'état actuel, ce sont des droits qu'on a acquis. Actuellement, nous sommes devant un projet de loi qui est quand même un réaménagement du pouvoir comme tel. Permettez-nous d'avoir cette inquiétude, on peut vraisemblablement avoir l'inquiétude d'être aussi face à une réorganisation de tous les droits qu'on a, par règlement, puisqu'il y a un réaménagement du pouvoir par la loi.

M. de Belleval: Je veux bien croire, mais vous avez admis tantôt, le président a admis que...

M. Thiboutot: On ne voit pas tellement pourquoi il y aurait...

M. de Belleval: ... actuellement, en vertu des lois actuelles, ces choses peuvent être changées puisqu'elles relèvent de l'autorité gouvernementale. Le gouvernement ne vous a pas décrété un arrêté en conseil jusqu'à la fin des temps. Il peut le changer demain matin. Il y a des procédures qui s'appliquent s'il veut le changer. De ce point de vue, la loi ne change rien. Elle ne change absolument rien.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le Président du syndicat.

M. Lalonde (Jean): Actuellement, pour l'engagement de nouveaux candidats, c'est sûr qu'on a changé le concours comme tel, de 1966 à 1977. Mais on nous a toujours consultés.

M. de Belleval: En vertu de quel article de la loi en vigueur vous a-t-on consultés?

M. Lalonde (Jean): En vertu de notre participation à 909.

M. de Belleval: A quoi à 909?

M. Lalonde (Jean): 909, l'arrêté en conseil.

M. de Belleval: En vertu de quel article?

M. Lalonde (Jean): C'est en vertu de cela que la commission nous consulte.

M. de Belleval: M. Lalonde, en vertu de quel article de la Loi de la fonction publique, qui existe actuellement, avez-vous été consultés?

M. Lalonde (Jean): Pour l'engagement des professeurs?

M. de Belleval: Pour la rédaction de l'arrêté en conseil 909?

M. Lalonde (Jean): Pour l'arrêté en conseil 909, ils ont été consultés en 1966, sur l'arrêté en conseil.

M. de Belleval: Oui. Mais vous n'avez pas été consultés en vertu d'un article de loi en vigueur. Vous avez été consultés en vertu d'une négociation de bonne foi.

M. Lalonde (Jean): Oui.

M. de Belleval: Bon! Ça va continuer après. Le projet de loi 53 ne change rien là-dessus.

M. Lalonde (Jean): Vous nous le garantissez?

M. de Belleval: Vous allez continuer à être consultés en vertu d'une négociation de bonne foi.

M. Lalonde (Jean): Vous nous garantissez qu'il va y avoir de la négociation de bonne foi?

M. de Belleval: Ecoutez, la négociation de bonne foi, par définition, c'est quelque chose qui repose, non pas sur un texte écrit, mais qui repose justement sur la bonne foi. Ce n'est pas parce qu'on change un texte écrit qui, déjà, ne vous donnait aucune garantie juridique, que le statu quo est changé. On maintient exactement la même chose.

C'est comme si vous me disiez qu'on ne peut rien changer à la Loi de la fonction publique parce qu'en changeant cela, cela remet en cause des négociations qui, jusqu'à maintenant, ont lieu de bonne foi. Non. Si on n'en discutait pas avant, s'il n'y avait aucun article dans les anciennes lois qui touchaient à cela et qu'il n'y en a aucun qui y touche dans la nouvelle loi, c'est le statu quo. C'est la bonne foi entre les parties qui fait la loi. Et dans le cas des négociations collectives, c'est le résultat des négociations collectives.

Vous me demandez si, la prochaine fois, nous allons négocier une convention collective de bonne foi. Premièrement, la loi m'oblige à négocier de bonne foi, et je ne vois pas en quoi vous auriez plus d'appréhension envers moi, de ce côté-là, que vous en aviez envers l'ancien gouvernement.

M. Lalonde (Jean): Notre expérience, dans le passé, nous a démontré que la bonne foi ne vient pas tout de suite, cela prend du temps. J'ai négocié deux conventions collectives, la première a pris deux ans, et la deuxième a pris un an, pour la bonne foi.

M. de Belleval: Vous partez de moins loin avec le nouveau gouvernement, de ce côté-là.

M. Lalonde (Jean): C'est une affirmation gratuite.

M. Pagé: C'est une affirmation gratuite, vous avez raison, monsieur.

M. de Belleval: Donc, on se comprend. Tout cela relève des questions de négociation collective. Ce n'est pas une disposition de la loi, pas plus de l'ancienne que de la nouvelle.

M. Lalonde (Jean): J'aimerais vous poser une question, M. le ministre. Quand vous parlez du mérite, comment allez-vous l'appliquer aux professeurs?

M. de Belleval: Comment est-il appliqué actuellement?

M. Lalonde (Jean): Le mérite? On a le mérite d'être professeur, c'est tout ce qu'on a.

M. de Belleval: Oui. Comment est-il appliqué dans le cas d'une promotion, etc.?

M. Lalonde (Jean): II n'y a pas de promotion chez nous.

M. de Belleval: Vous n'avez pas de promotion?

M. Lalonde (Jean): Non.

M. de Belleval: Quel est le problème?

M. Lalonde (Jean): A un moment donné, on sait que le problème va venir, parce qu'on sent que, dans les conventions...

M. de Belleval: La règle du mérite s'applique en cas d'une promotion. Vous me dites qu'il n'y a pas de promotion. Il n'y a donc pas de problème.

Le Président (Mme Cuerrier): Je dois faire une remarque. Je croyais avoir dit tantôt que M. le député de Portneuf devait parler avant M. le député de Gaspé. Je ne dois pas avoir été assez explicite. C'est M. le député de Portneuf...

M. Le Moignan: II y a eu une entente. J'ai seulement une petite question à poser.

Le Président (Mme Cuerrier): A moins que vous n'ayez terminé, M. le député de Gaspé.

M. Pagé: II restait une petite question au député de Gaspé, je vais le laisser la poser.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: Sur cette question de mérite, M. le ministre vient de dire — je pense qu'on l'a avoué aussi en face — qu'il n'y a pas de promotion chez vous, mais il y a tout de même le recrutement?

Une Voix: Exactement.

M. de Belleval: C'est le président qui dit qu'il n'y a pas de promotion dans son cas.

M. Lalonde (Jean): Oui, mais il y a du recrutement.

M. Le Moignan: Non, mais il peut y avoir du recrutement. Je pense que c'est le point qui semble les inquiéter le plus. Quand on nous parle de notion...

M. de Belleval: C'est la question que je lui posais. Dans le cas du recrutement, comment le mérite s'applique-t-il actuellement?

M. Le Moignan: Je termine, M. le ministre.

Le Président (Mme Cuerrier): C'est M. le député de Gaspé qui avait la parole, en effet. Allez-y M. le député.

M. de Belleval: M. le député, je vous en prie, je m'excuse, je croyais que vous m'aviez donné à nouveau la parole. Je vous écoute religieusement, M. le curé.

M. Pagé: C'est le cas de le dire d'ailleurs.

M. Le Moignan: Justement, en parlant de cette notion grise, cela ressemble peut-être au temps qu'il fait ce matin, on ajoute un peu comme la justice et l'équité. Votre crainte, je pense, ce n'est pas tellement la compétence ou le conflit entre compétence, politique ou favoritisme, c'est un peu cela votre idée? Quand il s'agit de recrutement au mérite, c'est là où c'est dangereux pour votre groupe?

M. Lalonde (Jean): Oui, de recrutement, c'est cela, oui.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre

M. de Belleval: En quoi là-dessus y a-t-il des changements dangereux? J'attends qu'on m'explique cela.

M. Lalonde (Jean): C'est qu'on a, durant les deux dernières négociations, évolué. On sait que nous, les professeurs, on a le mérite d'avoir une échelle de salaires avec les années de scolarité et les années d'expérience. On sait fort bien qu'à quinze ans cela s'arrête là et c'est tout. On se rend compte aussi que, dans le contexte actuel, il va falloir trouver une autre formule, parce qu'on a dit, à la dernière négociation, que tous ceux qui ont moins de seize ans de scolarité auront seize ans de scolarité. A la prochaine négociation, on va réduire l'écart entre vingt ans de scolarité et seize ans. A un moment donné, il va falloir trouver une autre solution.

Nous, on prétend qu'il va y avoir une règle de mérite qui va s'appliquer. En prenant cette hypothèse, comment allez-vous appliquer la règle de mérite pour les professeurs, en prenant comme hypothèse que le système actuel de rémunération devienne périmé? On le sent depuis deux négociations, cela a réduit.

M. de Belleval: Je vous retourne la question que je vous retournais tantôt, en quoi le projet de loi 53, de ce côté, modifie-t-il quelque chose pour vous?

M. Lalonde (Jean): Actuellement, il ne modifie rien, mais nous on aimerait savoir...

M. de Belleval: Bon, c'est ce que je dis.

M. Lalonde (Jean):... dans les procbaines négociations...

M. de Belleval: On négociera, M. Lalonde, on n'est pas ici en négociation.

M. Lalonde (Jean): Vous me dites qu'on va négocier la règle du mérite. C'est cela que vous me dites.

M. de Belleval: Non, on s'entend en ce que le projet de loi 53, de ce côté, ne modifie pas les règles du jeu. On s'en retourne donc au niveau des négociations collectives. Les négociations collectives, on les négociera de bonne foi la prochaine fois, mais cela n'a rien à voir avec le projet de loi 53, puisque le projet de loi 53 maintient le statu quo de ce côté.

Je pense que c'est important, pour vous comme pour les autres, que vous réalisiez que le projet de loi 53, ce n'est pas une convention collective, c'est un projet de loi, d'autant plus que, comme je l'ai dit pour ce qui concerne les conventions collectives, toutes les dispositions qui touchent cela sont maintenues en vigueur et se retrouveront à l'avenir dans une autre loi, qui va s'appeler la Loi sur le régime syndical.

La question que vous me posez, vous voulez savoir comment je vais négocier la prochaine convention collective, je vous dis: Attendez, quand on arrivera à cette rivière, on traversera le pont. On n'est pas encore rendu à négocier vos conventions collectives. C'est une autre chose. Je comprends que vous allez avoir des revendications à me faire la prochaine fois. On regardera cela ensemble et vous allez voir qu'on va bien s'entendre.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, Mme le Président. J'aurai une dernière question, mais avant, je voudrais formuler un commentaire. Pardon?

M. de Belleval: On s'y attendait.

M. Pagé: Oui, c'est normal. On est ici pour cela.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: C'est parce que j'ai été interrompu. Dites-leur d'arrêter de m'interrompre, regardez-les, surveillez-les, ce sont eux...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf, est-ce que je dois vous faire un dessin pour dire que quand...

M. Pagé: Non, Mme le Président, je comprends très bien, mais j'espère que vous n'avez pas besoin de faire de dessin aux autres.

Le Président (Mme Cuerrier): Quand je vous redonne la parole, je dis, implicitement, que les autres interventions sont superflues.

M. Pagé: C'est cela. Vous êtes superflus, tenez-vous tranquilles!

Le Président (Mme Cuerrier): J'espère que ce n'est pas à moi que vous le dites?

M. Pagé: Non, Mme le Président, je ne vous ferai pas un dessin, j'ai montré du doigt.

Vous avez très bien cerné le problème ce matin. Vous l'avez fait ressortir. J'espérais, quant à moi, que votre intervention et votre contribution aux travaux de notre commission nous permettraient d'avoir des réponses précises de la part du ministre. Car, on conviendra que l'article 119, tel qu'amendé et déposé par le ministre, prévoit un champ de négociation. Qu'est-ce qui est négociable? Comme M. Thiboutot en a fait état tout à l'heure, au deuxième paragraphe de l'article 119, et on a eu l'occasion d'en faire état et d'en discuter mardi soir avec le Syndicat des fonctionnaires, dans le deuxième paragraphe de l'article 119, à partir des termes "à moins que, selon que le sujet est attribué par la Loi sur la fonction publique, à la commission, au ministre ou à l'office," on revient à l'article 3 qui confère un pouvoir réglementaire au ministre au niveau de la gestion du personnel... La question est de savoir si ce qui est prévu à l'article 3 sera négociable. C'est là le noeud du problème. J'aurais apprécié, quant à moi, et je suis certain que c'est la même chose pour vous — vous pourrez me le confirmer — que le ministre nous dise, de façon précise et définitive, si ce qui est prévu à l'article 3 va être négociable, oui ou non. En tout temps, il peut, par son pouvoir réglementaire, retirer certaines choses du champ de négociation. On l'a vu avec le problème des frais de transport, la campagne "Je ne roule plus" des itinérants de la fonction publique du gouvernement du Québec. Cela a été le plus bel exemple, où une chose qui était perçue comme pouvant être négociable, n'a pas été négociée à cause du pouvoir réglementaire.

Ma première question, premier volet: Ne croyez-vous pas que tout le problème des questions que vous soulevez ce matin et des interprétations et des interrogations qu'on se pose et qu'on se fait de part et d'autre, est strictement relatif à l'interprétation qu'on doit donner à l'application, et de l'article 119 et de l'article 3?

Je pense que si M. le ministre de la Fonction publique avait voulu, il aurait pu clarifier cette situation et dire exactement ce qui est négociable et ce qui ne le sera pas. Le problème aurait été réglé pour beaucoup d'intervenants. Je pense, entre autres — c'est ce que je vous demande de me confirmer — que cela aurait répondu aux questions que vous nous formulez ce matin et que vous êtes en droit de poser, parce que c'est inquiétant d'avoir une épée de Damoclès et un pouvoir réglementaire. Vous ne saurez pas ce qui est négociable et ce qui ne l'est pas, ce qui peut, éventuellement, être retiré du champ de négociation de la part du ministre par un simple règlement sur lequel, par surcroît, il n'y a aucune obligation de vous consulter. En vertu de l'article 52 de l'ancienne loi, vous pouviez être consultés et vous l'avez été. Si le ministre, ce matin, ne peut pas répondre à la question qui est posée depuis le début des travaux de cette commission, c'est-à-dire l'article 3, comment l'interprétera-t-il? Au moins, il aurait pu faire part de son intention de consulter les parties, tout comme cela se faisait auparavant. Deuxième volet de ma question...

M. de Belleval: C'est évident...

M. Pagé: Vous venez d'arriver. Laissez-moi compléter. Dites-le si c'est évident.

M. de Belleval: C'est ce que je dis.

M. Pagé: L'autre soir... De toute façon, vous n'étiez pas ici.

M. de Belleval: Je l'ai dit au moins dix fois.

M. Pagé: C'est parce qu'on ne se comprend pas ou que vous parlez en termes voilés, mais dites-le donc en noir sur blanc ce qui va être dans le champ de négociation...

M. de Belleval: Passez-moi un papier, et je vais vous écrire oui.

M. Pagé: L'autre jour, la question vous a été posée et vous n'avez pas voulu y répondre, mardi soir dernier, vous vous rappelez?

M. de Belleval: Voyons donc! On a répondu à cela des dizaines de fois.

M. Pagé: Deuxième volet de ma question... M. de Belleval: La réponse est oui.

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Pagé: Vous avez fait état tout à l'heure du dépôt du rapport...

M. de Belleval: C'est en noir sur blanc, vous voyez, c'est là.

M. Pagé: ... Martin. Ne croyez-vous pas que l'Assemblée nationale devrait reporter l'étude en

deuxième lecture du projet de loi jusqu'à ce que le rapport Martin soit déposé?

C'est ce que plusieurs membres de cette commission ont demandé au ministre.

Le ministre nous a dit — vous avez certainement pris connaissance de ça — que le projet de loi no 53 ne serait pas adopté avant le dépôt du rapport Martin, mais le ministre n'a pas parlé de la deuxième ou de la troisième lecture. C'est là que c'est important, parce que si la deuxième lecture est adoptée, qu'on étudie le projet, article par article, on peut prévoir que, dans la stratégie du ministre... ce qui s'inscrit quand même dans sa politique autoritaire, parce qu'il faut l'identifier; c'est cela. C'est lui qui a raison et la vérité, c'est lui qui l'a, purement et simplement.

On peut présumer qu'on va procéder à l'étude du projet de loi en deuxième lecture, article par article. On aura le dépôt du rapport et on ne pourra pas, sur la foi des recommandations de ce rapport, avoir un débat ici, en commission parlementaire, au moment de l'étude, article par article. C'est ça, le problème, et ce grand démocrate nous arrive avec des choses comme ça.

Moi, je vous la pose, la question: Est-ce que, en tant qu'organisme directement visé par le projet de loi no 53, vous recommandez que l'Assemblée surseoie à l'étude du projet de loi, n'aille pas en deuxième lecture jusqu'au dépôt du rapport de la commission Martin?

C'est ma dernière question. Je sais que j'aurai de la difficulté à revenir, alors je tiens, messieurs, à vous remercier. Votre contribution est valable, positive et elle est concluante. Quant à moi, j'ose croire que le ministre pourra se reprendre dans sa déclaration de remerciement pour vous dire exactement ce qui en est de tout le problème de l'interprétation de l'article 3 et de l'article 119.

Merci, messieurs.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre. M. Jolivet: ... viennent de parler.

M. de Belleval: Là-dessus...

M. Pagé: Mme le Président, je m'excuse. Ma question était à M. le président...

M. de Belleval: Est-ce que je peux prendre la parole d'abord?

M. Pagé: ... le ministre pourra revenir par la suite.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le Président, est-ce que vous aviez demandé la parole?

M. Pagé: Je lui ai posé une question, Mme le Président.

M. de Belleval: Mme le Président, je voulais simplement faire une remarque...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le président du Syndicat...

M. de Belleval: ... avant, c'est que je...

M. Pagé: Mme le Président, question de règlement. Je m'excuse auprès de nos intervenants.

M. de Belleval: J'ai la parole. Ce n'est pas vous qui avez la parole.

M. Pagé: Je soulève une question de règlement, là.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Mme le Président vient de donner la parole à ces gens-là. Soyez donc poli!

Le Président (Mme Cuerrier): M. le Président ne me manifeste pas l'intention d'intervenir.

M. Pagé: Mais il veut répondre.

Le Président (Mme Cuerrier): Est-ce que vous avez l'intention de le faire? Bon! M. le président du Syndicat, avec plaisir, je vous donne la parole.

M. Lalonde (Jean): A votre question, à savoir si on a l'intention de demander au ministre de reporter l'étude du projet de loi en deuxième et en troisième lectures, je me permettrai de vous fournir par écrit cette réponse, si vous me le permettez. Par suite des discussions que nous avons eues aujourd'hui ici, nous devrons rencontrer nos membres et tout ça, et on aura certainement une position à prendre.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.

M. de Belleval: Est-ce que je peux prendre la parole, Mme le Président, maintenant? Oui?

Le Président (Mme Cuerrier): Allez-y, M. le ministre, je vous la donne.

M. de Belleval: Je ne veux surtout pas être l'objet d'une question de règlement de la part du préfet de discipline de cette commission qu'est devenu le député de Portneuf.

M. Pagé: Bon! Le préfet de discipline. Vous en auriez besoin, de discipline...

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, M. le... Bon! J'ai failli faire un lapsus.

M. Pagé: Oui?

M. de Belleval: Mme le Président, je comprends beaucoup l'angoisse du député de Portneuf et de ses amis quant à l'étude en deuxième lecture et même, article par article, du projet de loi no 53. A ce moment-là, Mme le Président, ils seront obligés non pas de discuter de la dentelle du projet de loi, mais ils vont être obligés de discuter du fond du projet de loi.

M. Pagé: Le début du fond.

M. de Belleval: Ils vont être obligés...

M. Pagé: Mettez donc de côté vos flèches partisanes...

M. de Belleval: Est-ce qu'il va arrêter de m'in-terrompre comme ça? Il m'interrompt tout le temps.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf, à l'ordre!

M. Pagé: ... et répondez donc aux questions de ces gens-là.

Le Président (Mme Cuerrier): C'est M. le ministre qui a la parole actuellement.

M. de Belleval: Je n'ai jamais vu un jeune homme aussi dissipé. Je vais en parler à son chef, certain.

M. Jolivet: II n'en a pas. Quel chef?

M. Pagé: On a un bon chef et on va en avoir un bon. On va en avoir un permanent tantôt. On va vous battre au référendum, on va vous battre aux élections et préparez-vous...

M. de Belleval: On va en parler à ses chefs.

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, à l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Pagé: ... dans vos comtés. J'arrive du comté de Laviolette et du comté de Rimouski...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf, je dois vous rappeler à l'ordre.

M. Pagé: Je vous dis qu'à votre place je serais inquiet.

M. Marcoux: ... vous voyagez beaucoup. M. de Belleval: Ce n'est pas possible.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre, c'est vous qui avez la parole...

M. de Belleval: D'accord.

M. Marcoux: ... tout le Québec. Il est temps que vous vous rapprochiez.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le Président du Syndicat a manifesté l'intention de la prendre ensuite.

M. le ministre.

M. de Belleval: Alors, j'en parlerai à ses chefs, donc. Mais, pour revenir au fond de la question, je comprends pourquoi ils veulent maintenir, par des mesures dilatoires, le débat sur des points périphériques, parce qu'ils vont être obligés, a ce moment-là, de se prononcer sur le fond. Je pense que les associations syndicales vont facilement démasquer les faux amis qui sont actuellement devant eux et qui leur lancent de belles balles, soi-disant comme s'ils étaient devenus...

M. Pagé: ... de Belleval?

M. de Belleval:... tout d'un coup, depuis le 15 novembre, des partisans et des défenseurs des droits syndicaux. On va se rendre compte qu'à ce moment-là, sur beaucoup d'aspects, leurs positions sont beaucoup plus radicales et beaucoup plus antisyndicales que ce que pourrait receler le projet de loi et qu'il ne recèle pas du tout, d'ai-leurs.

M. Pagé: Notre position n'a jamais changé, nous, par exemple.

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, M. le député de Portneuf!

M. de Belleval: Je comprends que c'est ça, au fond, votre problème. Vous...

M. Pagé: Je soulève une question de règlement ici.

M. de Belleval: ... voulez retarder le plus longtemps possible l'étude, article par article, du projet de loi.

M. Pagé: Je soulève une question de règlement. Question de règlement, Mme le Président.

Le Président (Mme Cuerrier): Sur la question de règlement...

M. Pagé: Oui.

Le Président (Mme Cuerrier): ... M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Mme le Président...

M. de Belleval: J'avais terminé, Mme le Président...

M. Pagé: Bon!

M. de Belleval: Vous pouvez maintenant donner la parole à quelqu'un d'autre.

M. Pagé: Sur la question de règlement, Mme le Président, je voulais faire valoir, parce qu'on a le droit... On n'a pas le droit de soulever une question de privilège, mais on a le droit de soulever une question de règlement pour soulever son privilège de député.

Le Président (Mme Cuerrier): Je vous donne la parole sur la question de règlement, M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Je ne comprends pas que le ministre intervienne comme cela, ce matin. Je lui ai demandé de répondre à des questions. J'ai formulé des questions aux intervenants et le ministre s'est embarqué dans un discours de flèches partisanes...

M. Marcoux: Question de règlement, question de règlement...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Mme le Président, j'ai quand même le droit de rétablir certains faits et je dirai ceci: Nous, notre position n'a jamais changé.

M. Jolivet: Non.

M. Marcoux: Question de règlement.

M. Pagé: Vous avez tellement "flirté" avec les syndicats que vous êtes mal à l'aise aujourd'hui. Soyez donc francs et mettez donc les cartes sur la table!

M. Marcoux: Mme le Président, question de règlement.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf, votre question de règlement s'apparente à une intervention, alors que ce n'est pas vous qui avez la parole actuellement.

M. Lalonde (Jean): M. Thiboutot voulait faire une intervention.

Le Président (Mme Cuerrier): M. Thiboutot, vous vouliez parler?

M. Thiboutot: J'aimerais bien que le débat ne s'engage pas dans une voie à caractère électora-liste ou politique. Nous, on est ici en tant que syndicat. Que l'Opposition nous dise qu'on a raison, que le parti au pouvoir nous dise qu'on a tort, ou que ce soit l'inverse, ce n'est pas le but de notre présence ici. On est en train, actuellement, de défendre nos membres et non pas de prendre une position à caractère politique ou électoraliste.

Je voudrais, d'une certaine façon, M. de Belle-val, vous répéter que vos interventions et vos réponses nous laissent quand même dans l'incertitude par rapport à l'article 3. Avec les éléments de réglementation qui y sont déterminés, l'article 119, que vous avez fait en amendement à l'article 52a du projet de loi si ma mémoire est bonne, constitue un article qui apparaissait dans l'ancienne loi. Par contre, le paragraphe qui suit cet article, qui apparaissait dans l'ancienne loi, ne fait que maintenir, au fond, l'article 3a comme tel...

M. de Belleval: L'article 119. M. Thiboutot: Oui, 119.

M. de Belleval: ...et il maintient le statu quo. Ce qui existait avant...

M. Thiboutot: Oui.

M. de Belleval: ... avec les changements, comme on les appelle, de concordance.

M. Thiboutot: Mais, par contre, il fait référence dans son dernier paragraphe aux pouvoirs à caractère réglementaire. Ces pouvoirs réglementaires sont inscrits dans l'article 3 de la loi.

M. de Belleval: Oui, c'est-à-dire que, comme je vous l'ai expliqué tout à l'heure, de la même façon que l'ancienne loi le permettait à l'ancienne commission, ou enfin à la commission actuelle tant que le projet de loi restera un projet de loi, il permet à la commission de concourir, par règlements, à négocier des choses qui ne sont pas, soi-disant, négociables en vertu de la loi actuelle. Cela permet la même chose, maintenant, au ministre de la Fonction publique.

Autrement dit, comme maintenant, à l'avenir, le pouvoir sera transféré de la commission au ministre de façon à garder la soupage ouverte, la porte ouverte. C'est maintenant le ministre qui va pouvoir, par règlement, concourir à cela. Mais, sur le fond légal, cela ne change absolument rien, comme vous le savez, puisque, de toute façon, ces règlements devaient être approuvés par le Conseil du trésor, qu'il s'agisse de l'ancienne commission ou de la commission actuelle, ou des pouvoirs ministériels.

Il n'y a aucun changement. L'article 52a est maintenu intégralement. D'ailleurs, de ce point de vue, les intervenants qui sont venus avant vous n'ont pas contesté ce point de vue que l'article 52a est maintenu intégralement. Mais, comme je l'ai dit, il y a un avantage supplémentaire, compte tenu du transfert de pouvoirs qu'opère la loi. C'est que, maintenant, votre interlocuteur véritable, c'est le ministre de la Fonction publique. A l'avenir, quand vous négocierez une convention collective il sera aussi votre interlocuteur véritable en matière de règlements, tandis que maintenant c'est une commission, que vous ne voyez jamais. La commission, vous ne négociez pas avec elle. Alors, pour vous, c'est quand même un avantage supplémentaire. S'il y a un changement qu'opère l'article 52a ou 119, c'est un changement plutôt de votre côté. Il est plutôt en votre faveur. Comprenez-vous?

M. Thiboutot: J'aimerais vous citer différents articles de notre convention collective qui, de par l'article 3a, n'y apparaîtront plus.

M. de Belleval: Bien oui, ils vont continuer à y apparaître parce que l'article 91, je l'ai dit à plusieurs reprises, dit que les pouvoirs que le ministre exerce en vertu de l'article 3, y compris 3a, sont soumis à 52a, à la Loi sur le régime syndical. J'aurai beau changer le monde en vertu de l'article 3...

M. Thiboutot: Mais, M. le ministre...

M. de Belleval: ... il faut que je change le monde sous réserve de vos conventions collectives.

Le Président (Mme Cuerrier): M. Thiboutot.

M. Thiboutot: M. le ministre, l'article 52a, si je lis le projet de loi, vient après l'article 3.

M. de Belleval: Non, il ne vient pas après, il vient dans une autre loi. A l'avenir, ce sera la Loi sur le régime syndical.

Je ne peux pas utiliser les pouvoirs que me donne la loi sur la fonction publique à l'encontre de la Loi sur le régime syndical. Autrement dit, le projet de loi 53 est subordonné, en ce qui concerne les conventions collectives, à la Loi sur le régime syndical. Comprenez-vous? C'est une loi inférieure de ce point de vue à la Loi sur le régime syndical. Ce sont les dispositions de la Loi sur le régime syndical qui prévalent sur le projet de loi 53, sur l'article 3. Mais l'article 3 ne touche pas simplement des syndiqués. Premièrement, il dit qui, à l'intérieur du gouvernement, est responsable de l'initiative et, deuxièmement, il touche à des non-syndiqués, mais, en ce qui touche les syndiqués, quand il y a une convention collective, ce que dit l'article 91, ce sont les dispositions de la convention collective qui s'appliquent. Si les dispositions d'une convention collective disent: C'est noir, je ne peux pas dire, en vertu du règlement: C'est blanc. Il faut que je dise noir, et, si je dis blanc, c'est illégal, parce que, ce qui prévaut devant les tribunaux, devant la loi, devant vos arbitres, etc., c'est ce qui est inscrit dans votre convention collective. C'est ce que cela dit, juridiquement parlant. Repensez-y un peu, discutez de cela avec vos avocats et, de toute façon, quand on sera en deuxième lecture, article par article, on pourra d'ailleurs en discuter avec les ardents défenseurs de la cause syndicale qui sont à ma gauche.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Sainte-Anne.

M. Lacoste: Mme le Président, en fait, je pense qu'il est bel et bien évident qu'au niveau de l'article 3 il va falloir mettre l'esprit, ce que le ministre dit, et le formuler de façon claire au niveau de la loi. Je pense que c'est tout simplement à ce niveau, que c'est un peu embrouillé, pour moi du moins. Quand même au niveau, de votre mémoire, au deuxième paragraphe de la page 3, vous semblez déplorer que l'Office n'ait pas de juridiction dans le cas des sous-ministres. Est-ce à dire que vous trouvez normal qu'il y ait des concours publics institués lorsqu'il s'agit de nommer les sous-ministres? Pouvez-vous m'indiquer une juridiction où cela se pratique? Dans l'affirmative, pourriez-vous informer cette commission sur la façon dont de tels concours sont tenus, comment, par exemple, l'on constitue des jurys?

M. Lalonde (Jean): Le deuxième paragraphe, vous avez bien dit?

M. Lacoste: A la page 3, deuxième paragraphe.

M. Lalonde (Jean): Je m'excuse, mais je ne comprends pas votre question. Je ne pense pas qu'on fasse allusion, dans ce paragraphe, à ce que les sous-ministres soient nommés par concours. On parle de délégation, non?

M. Lacoste: Vous écrivez: En vertu du projet de loi, l'office n'a pas juridiction, notamment dans le cas de sous-ministres et autres employés de rang équivalent et dans le cas des employés occasionnels. Vous pourriez peut-être expliquer l'esprit de ce paragraphe?

M. Fines: II faudrait mettre l'accent sur le dernier bout de phrase: Et dans le cas des employés occasionnels. Pour nous, les employés occasionnels sont les professeurs suppléants qui font exactement le même travail que nous, les mêmes fonctions, ont plus ou moins la même rémunération, qui exercent exactement le même travail que nous. Il est important qu'on puisse avoir des gens qualifiés. Par exemple, si une personne va en vacances, notamment dans le cas des COFI, on enseigne douze mois par année, nous avons fréquemment besoin de personnes pour remplacer les professeurs qui sont là. Il est important d'avoir la même qualité, le même degré de bons professeurs pour enseigner de manière que la classe se poursuive sans accroc. C'est pour cela qu'on demanderait que les employés occasionnels répondent à la même chose que les autres employés, que, pour choisir les employés occasionnels, on fasse exactement de la même manière que pour les professeurs réguliers ou permanents.

M. Lacoste: Mais la raison de votre petit bout de phrase: L'office n'a pas de juridiction notamment dans le cas de sous-ministres...

M. Fines: C'est un exemple qu'on voulait prendre où il y avait certaines catégories d'employés qui ne seront pas régies par l'office, notamment les sous-ministres et autres employés de rang équivalent et aussi les employés occasionnels.

Le Président (Mme Cuerrier): Cela répond à votre question, M. le député de Sainte-Anne? M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: M. Lalonde, à lire votre mémoire et à écouter les questions que vous avez posées directement au ministre, vous semblez craindre énormément la perte des droits acquis. Vous semblez vouloir, tout au moins, conserver l'aire ou le champ de négociation existant présentement.

De plus, vous semblez vouloir agrandir le champ de juridiction, si possible, au niveau des

conventions collectives; c'est ce que j'ai cru comprendre dans votre mémoire. Au-delà des textes de loi qu'il y a là, qui étaient, à l'époque, purement et simplement des mémoires, des échanges sur les différents principes qu'on y retrouve, je voudrais faire un commentaire. Je ne sais pas si ça peut contribuer à vous rassurer. J'ai fait le même commentaire devant les fonctionnaires provinciaux, je crois que c'est mardi soir. On s'est engagé à plusieurs reprises — je comprends que ce n'est pas clair parce qu'il y a peut-être certains individus qui ont intérêt à conserver l'ambiguïté au niveau du texte existant — il est clair, le ministre s'est engagé, l'équipe ministérielle ici, on ne s'est pas gêné pour le dire, il n'est question d'aucune façon de rétrécir le champ de juridiction existant actuellement.

Si les textes ne disent pas ça, on va s'arranger pour qu'ils le disent. D'accord? C'est un premier point que je veux vous dire.

Deuxièmement, on s'est engagé aussi à ne pas adopter la loi 53 tant et aussi longtemps que la commission Martin n'aura pas publié son rapport. Advenant que la commission Martin produise un rapport et que ça nous oblige à élargir le champ, l'aire de négociation, on le fera, parce que la loi ne sera pas adoptée. Tout ce que vous gagnez par rapport à la situation ou à l'engagement d'aujourd'hui, c'est que ce sera plus que le statu quo actuel qu'on vous garantit déjà formellement.

Je ne sais pas si c'est clair encore. Cela fera partie d'une loi spéciale, l'aire de négociation, non plus de la loi 53. J'espère que cela aussi, c'est clair. Si vous avez une analyse à faire, des réponses à nous donner concernant la deuxième, la troisième lecture, vous tiendrez compte de ces engagements formels, parce qu'on a le pouvoir présentement, on a pris l'engagement et on n'a pas l'intention de reculer là-dessus. C'est clair aussi, j'espère? Il y a tous ceux qui ont intérêt à semer l'ambiguïté au niveau de l'adoption de ce projet de loi, selon les intervenants, pour les uns, ça peut être pour servir des fins personnelles, pour d'autres, pour des causes partisanes, mais, comme équipe ministérielle, on prend l'engagement formel de vous dire ça; on n'a aucune crainte de vous le dire: C'est nous qui allons l'amender.

On ne s'érigera pas en faux défenseur, parce qu'on a le pouvoir de le faire.

Je vous remercie infiniment d'être venu, au nom du gouvernement. Cela nous a fait plaisir de faire le tour de votre mémoire; je pense qu'il y a des points positifs et j'espère qu'on aura contribué à dissiper certaines craintes.

Quant à la période de négociation qui viendra subséquemment, je vous répète, si cela peut encore contribuer à vous rassurer, qu'elle se fera au moins dans le cadre du statu quo actuel, et peut-être plus, selon, bien sûr, le rapport de la commission Martin.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le président du syndicat, vous aviez manifesté l'intention d'intervenir.

M. Lalonde (Jean): Oui. Face aux discussions qu'on a eues ce matin, n'aurait-il pas été préférable, pour un tel projet de loi, de former une table de consultation, syndicats, membres du gouvernement, d'étudier ensemble, d'évoluer ensemble dans le dossier — je ne demande pas de réponse — plutôt que de venir en discussion comme ça ici? Je pense qu'il y a du temps qu'on a mis sur ça. On ne le regrette pas, ce n'est pas ça; au contraire, je pense qu'on apprend à connaître en étudiant les projets de loi. Pour nous, il me semble qu'il aurait été préférable qu'il y ait une consultation qui se fasse avec les syndicats de la fonction publique, parce que le passé prouve que nous avons négocié nos conventions collectives. Si on regarde les conventions collectives, on en a signé cinq, le Syndicat des professeurs, à comparer à bien d'autres secteurs.

Je pense qu'à l'intérieur de la fonction publique, les syndicats ont négocié de bonne foi, je pense qu'on l'a prouvé, et on aurait pu former une table pour discuter des changements apportés au niveau du projet de loi de la fonction publique. C'est une opinion que j'émets tout simplement.

M. de Belleval: Je vais répondre à votre question, je trouve que c'est très intéressant comme question. Cela ouvre des perspectives. Il y a plusieurs façons de procéder quand on présente un projet de loi ou qu'on annonce une nouvelle législation. On peut procéder par un livre vert, un livre blanc, on peut procéder aussi par un dépôt de projet de loi en bonne et due forme et, par la suite, tenir une commission parlementaire où chacun vient donner son point de vue.

Je n'ai pas besoin de vous dire qu'on a utilisé, de diverses façons les différentes méthodes depuis un an maintenant. Il y a plusieurs projets de livres blancs, ainsi que des livres blancs ou des livres verts qui sont en discussion, et aussi, des projets de loi. Là-dessus, c'est à la demande même des parties syndicales, entre autres, des associations syndicales que nous tenons actuellement ces commissions. A la suite du dépôt du projet de loi, on aurait pu procéder aussi par consultation directe, comme vous le dites. Je vois que votre atavisme syndical — je ne vous le reproche pas, d'ailleurs — revient à la surface, vous parlez de tables de concertation, sinon de négociation. J'ai déjà fait remarquer là-dessus qu'il n'est pas normal qu'un projet de loi qui touche à l'ensemble de la population et à l'ensemble des employés, y compris les non-syndiqués, fasse l'objet de telles négociations. Je pense que cela doit être, au contraire, une discussion ouverte, comme celle que l'on a actuellement.

Il n'y a rien qui interdise qu'une fois cette première prise de contact publique faite, une fois les séances de la commission passées, on ne se revoie pas pour échanger sur des choses plus précises, avant d'aller en deuxième lecture, ou même avant d'aller — parce que je pense que c'est là que cela peut être crucial — au niveau de la discussion article par article. De ce côté-là, je suis tout à fait disposé à rencontrer quelque associa-

tion que ce soit, pour examiner ces choses à tête reposée.

Je dois dire que, depuis un an, je ne vous ai refusé aucune demande de rendez-vous de ce côté, pas plus qu'à qui que ce soit.

M. Lalonde (Jean): On n'en a pas demandé.

M. de Belleval: Comme vous le voyez, ce n'est pas de mon côté qu'est la mauvaise volonté. Je ne dis pas non plus que ce soit de la mauvaise volonté de votre part de ne pas m'en avoir demandé. Tout ce que je veux dire, c'est qu'il n'y a pas de problème de ce côté.

Mais c'est bon d'avoir une bonne discussion ouverte. Je pense que c'est meilleur pour la démocratie, à mon avis, que la première discussion se fasse en public plutôt que de procéder d'une façon qui m'apparaît un peu dangereuse sur le plan de la démocratie, en général, cette façon un peu corporatiste d'organiser l'Etat et la discussion des projets de loi de l'Etat, à savoir que le gouvernement devrait d'abord négocier ses projets de loi avec les groupes de pression, avant de les mettre sur la place publique. Je trouve que c'est dangereux. On peut déposer des livres verts, des livres blancs, mais quand on est rendu au niveau des projets de loi comme tels, je pense que les premières réactions, les premières discussions doivent se faire au grand jour. On est loin d'être sûr que la démocratie sera mieux assurée par ces discussions de couloirs, même faites de la meilleure foi possible, entre les groupes de pression et l'Etat. Je pense que les premières discussions doivent se faire au grand jour, de ce côté.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Sainte-Anne.

M. Lacoste: J'aimerais, suite à ce que le ministre a dit, ajouter quelques mots. Si on veut revaloriser le rôle des députés non ministres, on parle souvent du back-bencher, lorsqu'il arrive une négociation entre le ministre et les différents groupes de pression, le député n'est pratiquement pas au courant de ce qui peut se passer à l'intérieur du Conseil exécutif.

Si on veut revaloriser le rôle du député, la commission parlementaire, je crois, c'est l'endroit voulu pour le faire. Je pense que c'est sain, en bonne démocratie, que le député soit au moins au courant des demandes syndicales des groupes de pression, des positions du ministre et des oppositions. Il y a aussi notre opposition à nous, les députés ministériels. C'est de la saine démocratie.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le Président du syndicat.

M. Lalonde (Jean): Vous me permettrez de conclure, de vous remercier de nous avoir reçus, nous espérons que la bonne foi du ministre se retrouvera dans les textes de la loi 53, on ose l'espérer. En terminant par une blague, je vous inviterais à participer aux cours qu'on donne à des élèves et où il y a souvent plus de discipline.

Le Président (Mme Cuerrier): II me reste à remercier le Syndicat des professeurs de l'Etat du Québec de son mémoire et de sa contribution au fonctionnement de cette commission parlementaire. Merci beaucoup, messieurs.

M. Pagé: Merci beaucoup. M. Thiboutot: Merci beaucoup.

Le Président (Mme Cuerrier): J'appellerai maintenant le Syndicat des professionnels du gouvernement dont le porte-parole est Mme Renée Lebrun.

M. le président du syndicat, voulez-vous vous identifier s'il vous plaît?

Syndicat des professionnels du gouvernement du Québec

M. Théberge (Marcel): Oui, Marcel Théberge, président du Syndicat des professionnels. Je pense qu'il y a une légère erreur en ce qui concerne le porte-parole. C'est moi. Ce n'est pas grave.

Le Président (Mme Cuerrier): M. Théberge, le mémoire du Syndicat des professionnels du gouvernement du Québec.

M. de Belleval: Vous n'êtes pas moins habile, M. Théberge, mais vous êtes moins joli.

M. Théberge: Je vous remercie. Mme le Président, messieurs, le dépôt du projet de loi no 53, par le ministre de la Fonction publique, le 26 juillet dernier, nous a profondément déçus en tant qu'organisation syndicale et en tant que salariés de la fonction publique du Québec.

Il nous apparaissait qu'à l'intérieur de la fonction publique il était grand temps de faire des réformes en profondeur, parce qu'on considérait que les lois qui nous régissaient nous empêchaient d'exercer efficacement et correctement notre rôle de syndicat qui n'est pas uniquement un rôle de protecteur et de défenseur de nos membres, mais qui est également un rôle de protecteur de la population par rapport à des pratiques qui se passent à l'intérieur de la fonction publique, pratiques qui ont été maintes fois dénoncées. A ce sujet, il semblerait que le ministre de la Fonction publique partage d'ailleurs passablement notre analyse de la situation qui prévaut actuellement à l'intérieur de la fonction publique, sauf qu'avec le projet de loi 53, on ne semble pas apporter les correctifs qui s'imposent par rapport à ces problèmes.

D'une part, il nous semble tout à fait évident que le projet de loi 53, autant par la façon dont il a été déposé et dont il est actuellement discuté, n'est pas conforme à une saine attitude démocratique.

D'autre part, il nous semble que le contenu du projet de loi ne répond pas aux besoins de la population et aux aspirations de nos membres.

Pour ce qui concerne la façon dont le débat sur le projet de loi 53 évolue actuellement, il nous semble que le ministre de la Fonction publique, fort heureusement, a reculé par rapport à ses positions initiales. Le ministre se rappellera que, le 20 juillet dernier, à sa demande, je l'avais rencontré avec un autre membre de l'exécutif. Il nous avait fait un résumé du projet de loi 53 et il nous avait indiqué à ce moment-là qu'il n'était absolument pas question, dans son esprit, de faire le moindre débat public sur cette question, ni de faire siéger une commission parlementaire.

Je constate, fort heureusement, qu'il y a eu des modifications substantielles en ce sens. Sur le contenu du projet de loi 53 comme tel, il nous apparaît extrêmement important, quant à nous, de dire que, contrairement à ce que le ministre de la Fonction publique affirme à l'heure actuelle, il y a, à l'intérieur du projet de loi 53, des dispositions très précises qui concernent nos conditions de travail.

Il est bien évident qu'en vertu des articles 117 et 118 le ministre de la Fonction publique va faire une loi spéciale sur le régime syndical dans la fonction publique. J'y reviendrai un peu plus tard. Je ne veux pas insister là-dessus pour le moment. Je veux simplement dire que, même à l'intérieur du projet de loi 53, à l'exception toujours de la loi spéciale qui s'annonce sur le régime syndical dans la fonction publique, il y a des conditions de travail qui y sont déterminées.

Concernant la règle du mérite, il nous apparaît, quant à nous, que c'est une condition de travail extrêmement importante. A l'article 70, lorsqu'on parle de recrutement et de promotion au mérite, on peut prétendre que ce sont les seules conditions de travail des employés de la fonction publique qui vont être régies par la règle du mérite, sauf que, par ailleurs, lorsqu'on parle de la Commission de la fonction publique, on indique très clairement que tous les règlements du ministre devront être passés au crible en vertu de la sacro-sainte règle du mérite. Il nous apparaît, par conséquent, que la règle du mérite va être une espèce de carcan à l'intérieur duquel on va se retrouver continuellement.

Sur le principe du mérite, on a des inquiétudes assez fondamentales, non pas qu'on soit contre la vertu, bien qu'on ne la pratique peut-être pas toujours, mais plutôt parce qu'on a des inquiétudes quant à l'objectivité d'une telle règle du mérite. Actuellement, le ministre de la Fonction publique nous dit: II faut nous faire confiance pour que la règle du mérite ne devienne pas un instrument politique ou patronal dangereux. On peut faire confiance ou ne pas faire confiance. Quant à nous, ce n'est pas là qu'est le problème. Quant à nous, c'est de trouver des critères objectifs pour déterminer de quelle façon les conditions de travail dans la fonction publique vont s'administrer. Sur la règle du mérite, on a fouillé quand même un peu les documents disponibles et on a constaté premièrement qu'en 1965 Jean Lesage nous avait dit lui aussi que désormais dans la fonction publique, fini le patronage, fini le favoritisme, cela va être la règle du mérite. D'ailleurs, le président actuel de la Commission de la fonction publique prétend lui aussi que cela fonctionne en vertu de la règle du mérite. Quand on constate, tout ce qu'on en est, de quelle façon cela se passe à l'intérieur de la fonction publique, il y a tout lieu de s'inquiéter de ladite règle du mérite.

D'ailleurs, là-dessus, je vous rappelle simplement qu'il semble qu'au niveau du gouvernement, il y ait certaines contradictions. Les principaux d'école, dans les commissions scolaires, ont un arrêté en conseil qui régit leurs conditions de travail, vous le savez. Ledit arrêté en conseil, qui a été adopté il y a quelques mois, précisait justement que désormais, à l'avenir, pour eux aussi, cela marcherait en vertu du sacro-saint principe du mérite, sauf qu'eux aussi, probablement, ont fouillé les documents, ont retardé la définition de mérite et ont fait sûrement comme nous, ils n'en ont pas trouvé. Ils ont constaté que, finalement, c'était au contraire une mesure tout à fait discrétionnaire, arbitraire au possible. Par rapport à cela, lors d'une rencontre tenue samedi dernier avec le ministre de l'Education, celui-ci a décidé de retirer le principe du mérite dans ledit arrêté en conseil qui régit leurs conditions de travail. Il a dit qu'il formerait une table avec les principaux d'école pour déterminer précisément des critères objectifs, plutôt que de laisser au ministre ou aux administrations locales le soin de définir ce qu'était le mérite. Il a été décidé de former une table pour préciser de façon objective les critères qui devront être retenus pour l'évaluation du personnel à l'intérieur de la fonction publique.

Par rapport à cela, il nous semble que le projet de loi 53 maintienne quand même un certain nombre de conditions de travail à l'intérieur de la fonction publique. Bien sûr, il y a la Loi sur le régime syndical dans la fonction publique. Là-dessus, d'ailleurs, il nous semble tout à fait contradictoire, au moment où la commission Martin est créée et n'a pas encore déposé son rapport, que le ministre ait déjà décidé qu'il va y avoir une loi spéciale sur le régime syndical dans la fonction publique. Une de nos revendications fondamentales, c'est précisément d'être débarrassés des diverses contraintes législatives qui contribuent à nous marginaliser, nous, les travailleurs de la fonction publique. On veut, comme tous les autres travailleurs du Québec, être assujettis au Code du travail. On veut avoir le droit de négocier toutes nos conditions de travail. Le ministre a déjà décidé qu'il va y avoir une loi spéciale sur le régime syndical dans la fonction publique. Il apparaît que c'est extrêmement contradictoire. En tout cas, il nous semble que, de cette façon, on mette sérieusement en doute la crédibilité de la commission Martin. D'ailleurs, remarquez que je n'ai pas vu le texte, il semblerait, d'après les renseignements que j'ai pris à Radio-Canada récemment, que le prochain Code du travail, qui est actuellement en voie de préparation, va exclure explicitement les employés de la fonction publique desdites dispositions du Code du travail.

Remarquez que ça, c'est sous toute réserve.

Je n'ai pas vu le texte. C'est l'information qui a été véhiculée à Radio-Canada.

M. de Belleval: C'est faux, M. Théberge, je vous arrête tout de suite là-dessus. C'est une fausse rumeur; c'est faux.

M. Théberge: Je vous donne simplement les nouvelles que j'ai prises; on vérifiera. Je n'ai pas le texte.

M. de Belleval: Cela m'a été rapporté. C'est une fausse rumeur. Je l'ai déjà niée, d'ailleurs.

M. Théberge: Bon! De toute façon, ça n'enlève rien au fait qu'il est déjà décidé qu'il va y avoir une loi spéciale sur le régime syndical dans la fonction publique.

Par rapport à ça, il ne nous semble pas que le projet de loi no 53 réponde vraiment aux besoins de la fonction publique québécoise et réponde aux aspirations de la population par rapport à ça. Il est bien certain qu'il était plus que temps, à l'intérieur de la fonction publique, qu'on ait un employeur qui assume l'ensemble des responsabilités. Nous autres aussi, comme le ministre, semble-t-il, d'après ce que j'ai compris ce matin, on était tanné d'avoir un organisme présumément neutre, présumément impartial, du style de celui de la Commission de la fonction publique, qui nous empêchait continuellement de négocier des conditions de travail extrêmement importantes. On est d'accord pour la disparition de cet organisme. On est d'accord pour que le ministre, l'employeur, assume l'ensemble des fonctions. On serait même d'accord pour qu'il prenne les responsabilités de l'office de recrutement, sauf peut-être que, politiquement, c'est embêtant, parce que tu exclus trop de monde avec l'office de recrutement. On est d'accord avec ça, sauf que nous, on se considère des salariés comme n'importe quel autre salarié au Québec et on veut avoir le droit de négocier toutes nos conditions de travail.

Il nous semble, là-dessus, que le projet de loi no 53 ne réponde absolument pas aux besoins et on espère que le débat qui se passe actuellement va être un peu plus serein, comme le signalait tout à l'heure le confrère du Syndicat des professeurs de l'Etat du Québec, ici, aujourd'hui, en commission parlementaire et qu'on pourra vraiment discuter du fond des problèmes en regard de ça.

Je vous remercie.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.

M. de Belleval: Je vous remercie beaucoup, M. Théberge, pour la qualité et la hauteur de vue de votre témoignage. Effectivement, je pense qu'on est en mesure maintenant d'avoir un débat beaucoup plus serein sur cette question qu'il était possible de le faire auparavant ou avec d'autres interlocuteurs.

Je voudrais reprendre seulement une couple de choses que vous avez dites, qui m'apparaissent quand même fondamentales. Tout d'abord, une première remarque. Je ne peux pas laisser passer sous silence l'affirmation que vous avez faite au tout début voulant qu'il n'était pas question d'avoir de débat public sur le projet de loi no 53. Premièrement, c'est une absurdité dans les termes puisqu'un projet de loi, par définition, fait l'objet d'un débat public et il est soumis à l'Assemblée nationale, et c'est bien l'endroit où il y a des débats publics.

Deuxièmement, quant à la modalité d'engager ce débat public, à savoir s'il doit se faire en commission parlementaire ou s'il doit se faire autrement, il est vrai que je vous ai laissé le choix des moyens et le mouvement syndical, dans son ensemble, et d'autres personnes, ont préféré qu'il s'engage, ce débat, par le biais d'une commission parlementaire. On n'est pas obligé de faire une commission parlementaire. C'est un peu au choix, à la fois, des membres de l'Assemblée nationale et aussi au choix des citoyens.

Mais je ne veux pas vous chicaner là-dessus. Quand même, je veux rétablir les faits. La question de la loi spéciale sur le régime syndical. Je n'ai pas pris position en décidant de créer, comme ça, une Loi sur le régime syndical. Cette loi-là, elle existe déjà. C'est, essentiellement, la section XV de la Loi de la Fonction publique, et l'article 52a, essentiellement, qui avait été ajouté en 1969 peut-être, je ne me rappelle plus trop, qui traite aussi de l'aire de négociation.

Alors, ce que je fais, je ne crée pas de nouveaux articles. Je ne crée pas un régime d'exception. Ce régime, il existe, et je le prends tel quel. La seule chose, c'est qu'il m'est apparu urgent... Je pense que, là-dessus, vous êtes d'accord aussi qu'il est urgent qu'à l'intérieur de la fonction publique, on crée, enfin, une autorité légitime, responsable de la gestion de la fonction publique.

Il est urgent qu'on sorte de l'espèce de situation où il y a trop d'intervenants, avec des pouvoirs qui se chevauchent et, souvent aussi, des pouvoirs qui sont contraires même aux préceptes de notre droit public, entre autres un organisme comme la commission qui est juge et partie. Il est temps, je pense, qu'on mette de l'ordre là-dedans.

Devant cette urgence et devant aussi le fait que je ne suis pas sans savoir, et je vous l'avais dit d'ailleurs, lors de notre première rencontre, lors d'une rencontre que nous avions eue là-dessus, combien ces questions peuvent être facilement l'objet de procédures démagogiques et de procédures qui visent à ameuter les gens beaucoup plus qu'à les renseigner, quand on touche à cette Loi de la fonction publique, combien il est important aussi qu'un gouvernement puisse agir rapidement là-dedans à la suite d'un premier mandat, parce que l'histoire des derniers gouvernements nous l'a démontré, eux aussi auraient bien voulu agir dans ce domaine, mais ils en ont été incapables parce qu'ils n'avaient plus à la fin la crédibilité pour présenter une pareille loi et, de ce point de vue, je n'ai quand même pas tout inventé le projet de loi actuel.

J'ai trouvé dans les dossiers du ministère des projets antérieurs. C'est à partir de ces projets et

des discussions des sept, huit, neuf dernières années que j'ai repris la tâche et, à mon avis, je l'ai reprise en améliorant beaucoup ce que j'appelle les aspects de transparence, de débat public qu'il doit y avoir autour de ces matières.

Comme il était urgent de faire cela, nous avons donc présenté le projet de loi 53 et, en ce qui concerne les articles en vigueur que je n'ai pas créés, que je n'ai pas inventés, je les ai regroupés comme tels dans un projet de loi qui est un projet de loi spécial, il est vrai, du point de vue de l'économie générale du Code du travail, mais c'est une loi spéciale que je n'ai point inventée. C'est un régime particulier qui existe déjà et que j'ai maintenu intégralement en vigueur, conformément d'ailleurs, à vos propres demandes. J'ai même apporté des projets d'amendement là-dessus et des projets d'éclaircissement pour être bien certain que, "si peu possible", on touche au statu quo de ce côté, étant entendu que, dans les mois qui vont venir, dans les années qui vont venir, plutôt dans les mois maintenant, il y aura possibilité d'apporter des amendements à ce régime d'exception que vous n'aimez pas, à tort ou à raison — c'est votre droit de ne pas l'aimer — suite au dépôt du rapport de la commission Martin. Même à ce moment, s'il y a des amendements à apporter, on n'aura même pas besoin de les apporter à la Loi de la fonction publique, mais c'est à la Loi sur le régime syndical qu'on devra les apporter, d'autant plus qu'il y a une disposition omnibus dans le projet de loi 53 qui prévoit que c'est la Loi sur le régime syndical qui prévaut sur le projet de loi 53 en matière de négociation collective.

De ce point de vue, s'il y a des changements à apporter, ils seront donc apportés à cette loi dite spéciale. Il se pourrait même qu'à ce moment, le législateur décide qu'on n'a plus besoin d'une loi spéciale, qu'on n'a même pas besoin de l'amender, qu'on peut l'abolir et qu'au contraire, les dispositions nécessaires soient apportées au Code du travail, par exemple. C'est une possibilité.

Notre champ est ouvert de ce côté, et cela sera nous-mêmes ou ceux qui nous succéderont qui auront à prendre les dispositions nécessaires, et le fait de maintenir le statu quo ne préjuge donc pas des conclusions de la commission Martin, mais cela nous permet en même temps d'agir le plus rapidement possible sur les autres aspects de la gestion de la fonction publique qui, eux, requièrent notre attention la plus urgente.

Vous dites que je vous demande de nous faire confiance sur la règle du mérite. Je regrette beaucoup, mais il existe déjà des dispositions qui touchent à cette règle du mérite ou à son application dans les lois actuelles, bien que cela ne soit pas mis explicitement comme tel dans le projet de loi.

Je ne vous demande pas de me faire confiance plus que vous ne faites confiance à la loi actuelle. Tout ce que je fais, c'est que j'explicite davantage ces règles pour que, justement, on fasse moins confiance, on ait besoin de moins faire confiance à l'arbitraire ministériel ou à la responsabilité ministérielle, pour qu'au contraire cet arbitraire, cette confiance ministérielle soient plus sévèrement encadrés. D'abord, le principe du mérite est plus clairement défini dans les articles 70, 71, 72 et 73. On y indique très bien qu'il doit y avoir, bien sûr, comme on dit actuellement, concours impartiaux, mais qu'il doit y avoir égalité d'accès à ces concours impartiaux et surtout que l'on doit respecter strictement le résultat de ces concours impartiaux.

Cela est très important quand on dit comment cela renforce les mécanismes contre le patronage et que cela va beaucoup plus loin que les belles assurances que M. Jean Lesage donnait, et qu'à l'avenir le ministre n'aura plus le loisir de nommer ou de ne pas nommer, à la suite d'un concours, quand il n'aime pas le résultat, donc il n'aura pas le loisir de substituer son jugement au jury, parce qu'après tout, même si les concours sont imparfaits et le seront toujours, même si le jugement des jurys est imparfait et sera toujours imparfait, dans quelque système que ce soit, au moins on ne substituera pas un jugement encore plus imparfait, celui d'un observateur extérieur qui, jusqu'à maintenant, a le pouvoir de dire: Ecoutez, vous, messieurs du jury, je ne respecte pas votre jugement. Je ne nomme personne à la suite de votre jugement. Deuxièmement, je les nomme dans l'ordre que je veux. Je ne respecte pas l'ordre de compétence, de mérite que vous avez accordé aux candidats au concours. Je nomme le cinquantième plutôt que le premier qui a eu le meilleur résultat au concours.

Vous savez très bien ce que permettaient ces dispositions actuelles que maintenant j'abolis. Cela permettait de faire du patronage par la porte d'en arrière, cela permettait à des gens dans des cabinets de filtrer des listes d'admissibilité et de dire ensuite au ministre: Nomme telle personne, même si elle est au 40e rang dans le concours, plutôt que la première, parce que celle-là est catholique, comme on dit en langage de bon patronage. C'est cela qu'on élimine. Je pense donc que c'est un progrès.

Maintenant, pour les modalités de ces concours, les critères d'admission, la façon dont les jurys seront formés, on se retrouve, après la loi 53 comme avant la loi 53, dans la même situation, à savoir qu'il faut améliorer nos procédures de ce coté, il faut que les choses soient de plus en plus étanches, il faut que les jurys soient formés de la façon la plus impartiale possible, sauf qu'il y a une grande différence, à l'avenir, ce ne sera pas le même organisme qui sera juge et partie dans l'organisation de ces concours et qui sera appelé à statuer sur l'adéquation de ces mêmes concours. Ce ne sera plus une commission qui ne se rapporte à personne d'ailleurs d'autre que le gouvernement, à toutes fins pratiques, qui sera le chien de garde de la qualité et de l'impartialité de ces concours, ce sera un organisme indépendant, nommé par l'Assemblée nationale, faisant rapport à l'Assemblée nationale, qui surveillera, à ce moment-là, soit l'office de recrutement, soit le ministre, dans la façon dont seront gérés ces concours. C'est une garantie. Quant à la participation des organismes syndicaux, des associations, même

des associations de cadres, puisqu'en vertu du projet de loi, maintenant, les associations de cadres auront des droits aussi, ce qu'elles n'ont pas actuellement, leur participation à l'organisation de ces concours, à l'élaboration de normes et tout cela, le champ reste ouvert. Il n'y a rien qui soit interdit en vertu de la nouvelle loi, pas plus d'ailleurs que cela n'était interdit en vertu de l'ancienne loi, la preuve est qu'on a vu, entre autres, les représentants syndicaux qui vous ont précédés, on a démontré qu'il y avait des aménagements qui avaient été possibles en vertu des négociations de bonne foi qui résultent ou qui sont au coeur même du processus de négociation collective. On retrouve cela d'ailleurs avec d'autres syndicats pour d'autres corps d'emploi. Le champ est ouvert et c'est en vertu de nos relations courantes, de nos relations de bonne foi, que nous pourrons aménager ces choses-là. Il y avait un principe quand même fondamental qu'il fallait mettre dans la loi, qu'on retrouve dans la plupart des lois de la fonction publique en ce domaine, à savoir que, compte tenu de la nature même de la fonction publique, qui n'est pas une usine comme une autre justement, il y a un principe fondamental qui doit présider à tout cela, c'est la règle du mérite.

Maintenant, son aménagement particulier, tout reste ouvert, la signification profonde, en pratique, de cette règle, il y a une jurisprudence qui va s'élaborer, qui a déjà commencé à s'élaborer, en vertu des lois en vigueur d'ailleurs. C'est une matière vivante qui va continuer à vivre et à être appliquée concrètement au jour le jour dans le cadre de la loi et dans le cadre des négociations collectives.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le président du syndicat.

M. Théberge: Evidemment, beaucoup de choses viennent d'être dites, c'est difficile de me les rappeler toutes. Quant au premier point, à savoir qu'il y aurait un débat public sur cette question, je vous rappelle simplement que le 20 juillet, quand on s'était rencontré, vous nous aviez indiqué que, quant à vous, la loi devrait être adoptée à la fin du mois d'août. A moins que je ne me trompe, cela donne un laps de temps assez court pour faire un débat public. De toute façon, là-dessus, je pense qu'il n'y a pas trop de problème.

M. de Belleval: Les ministres ont toujours beaucoup d'espoir sur les dates d'adoption de leurs projets de loi, espoir souvent déçu d'ailleurs.

M. Théberge: La même chose pour nous relativement à la signature des conventions collectives.

M. de Belleval: Exactement.

M. Théberge: Bon, parfait. Je pense que l'intervention que vous venez de faire n'a pas répondu tout à fait à mes questions. Plusieurs points demeurent extrêmement obscurs dans mon esprit, en tout cas.

Je reviens simplement au principe du mérite, je vais essayer de restreindre un peu les interventions, on va les prendre sujet par sujet. Sur le principe du mérite, c'est exact de dire qu'il n'y a aucune garantie meilleure ou pire à l'avenir, en vertu de la loi 53, que ce qu'on a maintenant. C'était...

M. de Belleval: ... un peu. Je pense que j'ai essayé de vous démontrer en quoi c'était meilleur.

M. Théberge: Cela ne m'a pas rassuré, je vais vous dire pourquoi.

M. de Belleval: D'accord.

M. Théberge: C'est exact de dire aussi qu'il y a plusieurs gouvernements dans le monde qui ont adopté le sacro-saint principe du mérite, sauf que précisément, quand on regarde ce qui se passe dans les pays où on a adopté la règle du mérite, quand on regarde ici même au Québec, on l'a adopté, le président de la Commission de la fonction publique prétend qu'il l'a adopté, prétend que ça fonctionne actuellement en vertu de la règle du mérite, on s'aperçoit finalement que ça laisse la place la plus totale à l'arbitraire. La règle du mérite, il va falloir que quelqu'un, à un moment donné, dise ce qu'elle veut dire de façon pratique, de façon concrète. Au lieu de mettre des principes vertueux dans des lois, mettons des critères objectifs et, ne les mettons pas dans les lois, mettons-les dans les conventions collectives.

Sur cet aspect, ce n'est pas rassurant de se faire dire que la règle du mérite est une affaire extraordinaire, que ça va garantir l'impartialité de la fonction publique. Je vous ferais remarquer que les règlements de l'Office de recrutement de la fonction publique, du personnel de la fonction publique, devront être approuvés par le Conseil du trésor. Tout à l'heure, vous avez indiqué de façon très claire que le Conseil du trésor était un organisme politique. Je regrette, je ne suis pas d'accord pour dire que si on fait approuver des règlements par un organisme politique, ça va être une garantie d'impartialité. Indépendamment du gouvernement qui est en cause d'ailleurs.

Ce n'est pas une question d'individu, ce n'est pas une question de personnalité. Si on assujettit l'ensemble de la fonction publique au Conseil du trésor, si on assujettit la Commission de la fonction publique au Conseil du trésor et l'Office de recrutement de la fonction publique au Conseil du trésor, qui est un organisme politique par excellence — on parle d'un gouvernement parallèle — je pense qu'on n'a aucune garantie qu'on va avoir de l'impartialité à l'intérieur de ça.

Les critères sont facilement susceptibles d'être politisés à cet égard.

Je vais revenir tout à l'heure sur la question du premier sur la liste. Selon nous, ce n'est pas une garantie d'efficacité de la fonction publique. On a l'impression qu'avec cela on freinera toute

mobilité à l'intérieur de la fonction publique. Sur le mérite, c'est ce que je voulais dire. Si vous voulez intervenir, je vais vous laisser la parole. Par la suite, je reviendrai sur la question du premier sur la liste.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.

M. de Belleval: J'ai expliqué tout à l'heure, de façon assez longue, le fondement même du choix qui a été fait en vertu du projet de loi 53, soit de confier carrément aux responsables politiques, non seulement une responsabilité théorique, parlementaire, mais une responsabilité pratique. Je pense que vous assistiez à ma démonstration, dans la salle. Cela ne vous a peut-être pas convaincu, mais il reste que c'est le choix qui est fait. D'ailleurs, je pense que vous êtes d'accord avec ce choix, vous l'avez dit au tout début de votre intervention. A votre avis, ce n'est pas normal de laisser à une commission indépendante le soin de gérer la fonction publique. Il faut que ce soit carrément confié au pouvoir politique.

Là-dessus, je tiens à vous dire qu'on ne peut pas manger son gâteau et l'avoir encore, le confier au pouvoir politique et penser que le pouvoir politique va exercer cela d'une façon abstraite, sans mettre ses propres jugements de valeur à l'intérieur.

Le grand changement, vous glissez là-dessus, c'est qu'à l'avenir ces choix politiques, cette partialité politique, qui est légitime, à mon avis, elle devra se faire au grand jour. Elle devra se faire en vertu de règlements, qui seront soumis à une commission indépendante qui vérifiera si ces règlements sont de nature impartiale, c'est-à-dire s'ils respectent l'égalité des chances dans l'accès aux fonctions, aux promotions et l'impartialité des concours. C'est le point fondamental d'une commission indépendante, elle va donner des avis publics là-dessus. Cela va faire l'objet d'un débat politique, ce qui est normal dans notre régime démocratique. Ce n'est pas un régime technocratique, c'est un régime démocratique où il y a des choix qui sont faits par des hommes politiques. L'important, c'est que ces choix soient faits au grand jour et qu'ils soient discutés.

De ce point de vue, on offre une garantie supplémentaire: l'avis d'une commission neutre, indépendante, qui donnera son propre jugement sur le caractère impartial de ces règlements. On ne sera pas obligé de suivre l'avis de la commission, avec toutes les conséquences politiques qui en découlent. Quand un gouvernement va contre l'avis du Vérificateur général ou contre l'avis de la Commission des droits de la personne, il en porte les conséquences politiques. Ce sont les règles du jeu dans lesquelles on vit actuellement.

Vous dites que cela n'améliore pas. Justement, je pense que cela améliore, cela donne un fonctionnement beaucoup plus transparent, beaucoup plus ouvert, moins hypocrite. Vous demandez si la véritable neutralité, la véritable impartialité va venir quand on va négocier avec vous.

Je regrette beaucoup, mais si le gouvernement n'est pas impartial, vous l'êtes encore moins que nous de ce point de vue. Au moins, on a une légitimité qui dépasse la vôtre. Vous êtes bien obligés de l'admettre. Notre légitimité nous vient de l'ensemble de la population et nos objectifs ont trait à l'ensemble du bien public, à l'ensemble de la population. Vos objectifs à vous, je veux bien croire que vous n'êtes pas contre la vertu, vous êtes pour l'intérêt public également, mais votre premier mandat, c'est l'intérêt de vos membres. Ce n'est pas l'intérêt public. Mon premier mandat, le premier mandat du gouvernement, c'est véritablement l'intérêt public. De ce point de vue, vous êtes encore moins impartiaux que nous.

Il n'y a rien qui garantisse que le résultat de nos deux égoïsmes, de ce point de vue, mais, sur un plan plus noble, de nos deux objectifs qui ne sont pas les mêmes va être meilleur que celui qui est aménagé en vertu de la loi; pas du tout, et je pense qu'il serait moins légitime encore. Cela n'exclut pas cependant qu'effectivement, dans le cadre des négociations collectives, il y ait des aménagements en matière d'application de ces grands principes. Effectivement, il y en a déjà et il continuera à y en avoir.

De ce point de vue, vous n'êtes pas dans une situation pire que celle de maintenant. Je pense que vous êtes en meilleure situation puisque, comme je l'ai dit, il y a maintenant des mécanismes nouveaux qui améliorent les choses de ce point de vue, qui rendent plus transparente la façon dont le gouvernement applique sa loi qu'il n'est possible de le faire maintenant.

Je vous retournerai la question à ce moment-là. Si on n'utilise pas la règle du mérite, quelle règle va-t-on utiliser? Avez-vous quelque chose de mieux à proposer que de me dire: Faites-nous confiance à notre tour. Vous dites: Faites-moi confiance, on négociera cela ensemble. A part cela, la population qui nous regarde, je ne pense pas qu'elle ait très confiance dans une procédure semblable, en disant que c'est un ministre avec un chef syndical qui vont négocier cela. Ce n'est pas cela que la population veut savoir. Elle veut savoir bien plus que cela. Elle n'a pas beaucoup confiance non plus, je pense, au résultat de ces processus de marchandage que sont toujours des négociations collectives. Que voulez-vous qu'on y fasse? Là, on est au niveau des principes d'intérêt public. Qu'est-ce que vous proposez à la place de la règle du mérite? La règle du démérite?

M. Théberge: Je propose effectivement que cela se fasse par voie de négociations et de conventions collectives, point final, pour la bonne et simple raison que vous avez peut-être raison de parler de la légitimité du gouvernement par rapport à un syndicat, la légitimité du gouvernement étant évidemment beaucoup plus grande, sauf que je suis certain que vous ne disiez pas la même chose avant le 15 novembre 1976...

M. de Belleval: Je peux vous assurer que oui, de ce côté.

M. Théberge: ... et je suis certain que les membres de l'Opposition, ici à ma droite, ne di-

sent pas la même chose de votre gouvernement actuel.

Là-dessus, s'il vous plaît, la légitimité, cela n'existe pas en soi parce qu'on est le gouvernement, qu'on devient légitime, à un moment donné, tout d'un coup, qu'on devient défenseur automatiquement de l'intérêt public, tout d'un coup, parce qu'on est gouvernemental.

M. de Belleval: Là-dessus, M. Théberge...

M. Théberge: Je pense que, là-dessus, la seule voie possible, c'est effectivement la voie de négociation. Vous avez raison de dire qu'on a des intérêts divergents, c'est bien sûr, parce que vous êtes employeur, vous avez des intérêts à titre d'employeur, vous êtes un homme politique, vous avez des intérêts à titre d'homme politique. Nous autres, nous sommes des salariés de la fonction publique. On a des intérêts à titre de citoyens et on a des intérêts à titre de salariés également.

Essayons de confronter ces intérêts ensemble, des intérêts qui, sans doute, sur certains points, sont très divergents, on n'en doute pas, au lieu de laisser tout cela entre les mains d'une des seules parties en cause dans cette affaire.

M. de Belleval: Mon mandat, comme employeur, n'est pas différent de mon mandat comme homme politique. C'est toujours l'intérêt public. Je n'ai qu'un seul mandat. Je n'ai pas un mandat comme employeur qui serait différent de mon mandat comme gouvernement. Ce sont des distinctions purement abusives et artificielles. L'Etat employeur et l'Etat gouvernement, on aura beau faire toutes les distinctions qu'on voudra, c'est toujours le même. Vous avez raison de dire qu'effectivement tout cela doit être ensuite transcrit dans la pratique qui est hautement contestable, mais on n'a pas trouvé d'autres façons d'organiser l'Etat que de confier à des hommes hautement contestables cette légitimité. C'est normal, il n'y a pas moyen d'en sortir.

De ce point de vue, quand je vous dis que je n'ai pas changé d'idée depuis le 15 novembre, pas du tout. A mon avis, c'est un principe de droit public que je défends, à savoir que c'est le gouvernement qui a la responsabilité, en vertu de notre régime démocratique, et c'est lui qui a la plus grande légitimité dans notre système actuel. Que la façon dont il exerce cette légitimité soit contestable, je pense bien, c'est l'essence même du débat politique, mais le fond, le principe, on ne peut pas le contester. De ce point de vue, je n'ai pas changé d'avis.

Je pense que dire: Ne mettez pas la règle du mérite dans la loi, on négociera les dispositions en vertu des conventions collectives... Je vous retourne la question. A supposer qu'on fasse cela, on va le faire en vertu de quel principe, si on ne le fait pas en vertu du principe du mérite? Citez-moi donc, d'ailleurs, un gouvernement qui, comme cela, laisse à la libre négociation des parties une matière aussi importante! Je n'en connais pas.

M. Théberge: II y en a à peu près 40 gouvernements dans le monde en 1977, d'après une étude du Bureau international du travail...

M. de Belleval: La plupart, d'ailleurs, n'ont pas de règle du mérite. C'est l'arbitraire pur et simple.

M. Théberge: Mme le Président...

M. de Belleval: Si vous voulez remplacer la règle du mérite, par quoi allez-vous la remplacer?

M. Théberge: Je voudrais savoir comment cela fonctionne. Je ne suis pas habitué ici. Je suis habitué dans un conseil syndical. Je ne sais pas à qui est la parole. Je voudrais le savoir.

M. de Belleval: Je vous la laisse, c'est à vous.

M. Théberge: Ah bon! Parfait, je vous remercie. Il y a 40 pays dans le monde à peu près, à l'heure actuelle, selon une étude du Bureau international du travail, qui date de 1977. Toutes les conditions de travail à l'intérieur de la fonction publique sont négociables. Parmi ces pays, il y a le pays que votre premier ministre connaît bien, que notre premier ministre connaît bien, la France. Toutes les conditions de travail sont négociables. Il n'y a pas de loi qui dit: Désormais, cela va être la règle du mérite ou cela va être autre chose. On s'affronte avec des intérêts divergents, c'est bien sûr.

Quant à la subtilité de savoir si votre intérêt comme employeur et comme gouvernement est le même, j'aurais quelques réserves. Mais, en tout cas, ce serait un débat philosophique peut-être un peu stérile ici, sauf qu'il y a 40 pays dans le monde qui sont comme cela, a l'heure actuelle, qui ne mettent pas de contraintes législatives dans la négociation des conditions de travail, genre règle du mérite ou autres dispositions qui parle de la rétrogradation. On va revenir tantôt, je l'espère, sur la rétrogradation, la destitution, etc. Ce qu'il y a dans le projet de loi ne nous rassure pas du tout, j'aime autant vous le dire. Il y a 40 pays dans le monde qui ne sont pas contraints à des dispositions législatives de ce genre. Arrivons au XXe siècle nous autres aussi, ce ne serait pas une mauvaise idée!

M. de Belleval: Je trouve cela bon, parce que vous nous apporterez l'étude en question du BIT. On va vous citer des passages très intéressants où, justement, le BIT dit que c'est le Québec qui est le pays le plus avancé en matière de régimes de négociations collectives dans le secteur public et parapublic. C'est le jugement même du BIT.

M. Théberge: Le Bureau international du travail a une recommandation là-dessus. Vous avez probablement lu le texte, d'après ce que je peux voir; c'est parfait. On a les mêmes lectures, c'est excellent. Le Bureau international du travail re-

commande là-dessus que toutes les conditions de travail des employés de la fonction publique soient libres et entières. Vous vous rappelez sans doute cette recommandation...

M. de Belleval: Et, en même temps, il porte jugement sur la situation au Québec et il dit: C'est le Québec qui, dans le monde entier, est le plus avancé de ce côté-là. Alors, franchement, c'est quelque chose.

M. Théberge: Sauf que, par ailleurs, à la page 20, il nous rappelle qu'il y a 40 pays au monde qui ont des stipulations très différentes. Alors, là-dessus, on ne s'obstinera pas, sauf que je vous dis simplement qu'il y en a 40, d'après le Bureau international du travail.

M. Jolivet: Cela dépend de la définition des conditions de travail.

M. de Belleval: D'accord. Mais là-dessus, on s'entend, je pense, que la commission Martin va certainement prendre connaissance de tout ça et nous faire des recommandations, et on verra ce qui...

M. Théberge: Sauf qu'on voudrait que, dans le projet de loi no 53, il n'y ait pas de fioritures de ce genre pour nous dire que, désormais, ce sera la règle du mérite et que nous, on arrive à la table de négociation et qu'on dise: On prétend, nous, qu'une des façons de faire avancer le monde dans la fonction publique, ce n'est pas seulement par la règle du mérite qui va être définie par machin-chouette, je ne sais pas trop où et je ne sais pas trop comment, et que nous, par exemple, on dise, à un moment donné: II nous apparaît important qu'un gars qui a de l'ancienneté — Je prends un exemple, d'accord? Je ne veux pas insister sur cet exemple, on dit qu'on discute de façon générale ici, ce matin. Bon! Parfait! ... que nous, on arrive et qu'on dise — l'ancienneté, d'après nous, cela doit être un critère de promotion à la fonction publique et qu'on nous dise: Non, c'est illégal, parce que ce n'est pas sûr que ça entre dans la règle du mérite. C'est ça qu'on veut, nous. On ne veut pas de fioritures de ce genre, qui vont nous dire à tout bout de champ, comme ça c'est passé depuis 1965, tu sais, des affaires comme ça, ce n'est pas de l'invention que je fais.

A un moment donné, tu arrivais pour négocier des affaires et on disait: Cela, regrettable, la loi nous interdit de tenir compte de vos recommandations qui sont, par ailleurs, peut-être intéressantes. C'est ça qu'on veut.

M. de Belleval: Là-dessus, je vous ferais tout simplement remarquer que tout ça relève quand même de la libre négociation des parties, d'autant plus qu'en vertu du projet de loi actuel, c'est le ministre, désormais, qui pourra, par règlement, concourir à ce que des choses soi-disant non négociables le deviennent. Maintenant, est-ce qu'il voudra le faire? Cela, c'est une autre paire de manches, mais, justement, c'est ça, la négociation collective.

Vous pouvez, dans une entreprise privée, n'avoir rien qu'il soit interdit de négocier, mais si le patron ne négocie pas, vous n'êtes pas plus avancés. C'est la même chose dans la fonction publique, d'une certaine façon. Il y a bien des choses qui sont négociables actuellement et que les différents gouvernements ont refusé, à tort ou à raison, de négocier, parce qu'ils disent: On pense que l'on ne devrait pas négocier ça ou on pense qu'on ne devrait pas le négocier de telle façon ou de telle autre façon. Mais ça, c'est la loi même du régime des négociations collectives qui prévoit ça. A ce point de vue, le projet de loi no 53 ne vous enlève rien, il vous en ajoute même un petit peu plus, parce qu'il vous donne vraiment un interlocuteur responsable qui, lui-même, ne peut plus se retrancher derrière une commission indépendante pour accepter ou non.

Il est obligé de discuter des questions au mérite, c'est le cas de le dire, quand il négocie avec vous. Il dit: Je négocie telle chose de telle façon ou je ne la négocie pas parce que je pense que c'est mieux ainsi. Il peut se tromper, mais à ce moment, c'est le jeu des libres négociations, et vous prenez votre propre décision.

La rétrogradation est un bel exemple. Il n'y a rien dans la Loi de la fonction publique actuelle qui dise que c'est négociable ou non. On n'en parle même pas, mais cela a fait l'objet de la libre négociation des parties. Vous-même avez négocié une clause de rétrogradation qui s'appelle clause de réorientation de la carrière, etc. Peu importe le nom, la chose est là, et ça va continuer ainsi, après le projet de loi 53. Cela ne change rien de ce côté.

M. Théberge: Pourquoi tenez-vous à ce point que le principe du mérite soit inscrit dans la loi si vous dites qu'il fera l'objet des négociations? Qu'est-ce que ça donne de l'inclure, sinon de dire que désormais...

M. de Belleval: Je pense que c'est un choix que nous avons fait voulant que dans la fonction publique québécoise, comme dans de nombreuses autres fonctions publiques, cela doit être un principe fondamental inscrit dans la loi organique de la fonction publique, que la règle du mérite est à la base même de notre processus de recrutement et de promotion.

C'est un choix effectivement que nous faisons. Je dis que son aménagement pratique peut faire l'objet d'ententes spécifiques dans le cadre des conventions collectives, mais on a voulu mettre le principe comme tel dans la loi.

On peut critiquer ce choix. On peut dire que cela ne devrait pas être dans la loi. Je respecte absolument votre argumentation à ce sujet. Je ne dis pas que votre argumentation n'a pas de bon sens. Pas du tout. Je trouve que c'est un point de vue qu'on peut maintenir mais nous avons soutenu un autre point de vue à savoir que, jusqu'à maintenant, c'était la règle qui nous gouvernait et que

cela devait continuer à être cette règle, et mieux encore, que ce principe devait être plus strictement encadré pour s'assurer qu'effectivement il est appliqué.

Le Président (Mme Cuerrier): II est 13 heures. Je dois ajourner...

M. Pagé: Mme le Président, je voudrais bien l'entendre. Le ministre a-t-il terminé les questions...?

M. de Belleval: Je pense que j'ai terminé toutes les questions générales qui m'intéressent et qui intéressent peut-être même M. Théberge, bien que je crois que vous deviez avoir des questions plus particulières ensuite à discuter et que les autres membres de la commission auraient des choses.

M. Pagé: A la reprise, M. Théberge, nous aurons l'occasion de vous poser des questions.

M. de Belleval: Vous pouvez revenir vers 16 heures, 16 h 30?

Le Président (Mme Cuerrier): Cela dépendra, M. le ministre. Nous ne pouvons pas présumer...

M. de Belleval: Je m'excuse, Mme le Président.

Le Président (Mme Cuerrier): ... des avis de l'Assemblée. Je dois, à ce moment-ci, puisque nous n'avons pas d'avis de l'Assemblée nationale, ajourner les travaux sine die...

M. Théberge: Je tiens seulement à apporter une petite précision.

Le Président (Mme Cuerrier): ... ce qui n'empêche pas, bien sûr...

M. Théberge: Je ne sais pas si cela va être bien long cet après-midi, mais, à six heures, malheureusement, j'ai des obligations. Vous savez ce que c'est, on a toujours un peu d'obligations. Je vais être obligé de m'absenter. S'il y a possibilité que M. le ministre réponde rapidement aux questions comme à l'Assemblée nationale cet après-midi, il devrait être ici vers les 16 heures...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le Président du syndicat, si jamais nous siégeons cet après-midi, ce qui pourrait être demandé par le leader du gouvernement à l'Assemblée nationale, il est entendu que l'ajournement se fait toujours à 18 heures, ou la suspension selon l'avis qui nous est donné.

(Fin de la séance à 13 h 2)

Reprise de la séance à 16 h 50

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, messieurs!

Nous avons maintenant quorum. Je déclare cette séance de la commission de la fonction publique ouverte.

Les membres de cette commission sont: M. Bellemare (Johnson), M. Boucher (Rivière-du-Loup), M. Caron (Verdun), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. de Belleval (Charlesbourg).

M. Pagé: M. Caron (Verdun), remplacé par M. Verreault (Shefford).

Le Président (Mme Cuerrier): M. Caron (Verdun), remplacé par M. Verreault (Shefford). M. Dussault (Châteauguay), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Gravel (Limoilou), M. Grégoire (Frontenac), M. Jolivet (Laviolette), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Le Moignan (Gaspé), M. Marchand (Laurier), M. Marcoux (Rimouski), Mme Ouellette (Hull), M. Picotte...

M. Pagé: Remplacé par...

Le Président (Mme Cuerrier): ... remplacé par M. Pagé (Portneuf); M. Vaillancourt (Orford). Le rapporteur est M. Laviolette...

M. Pagé: M. Laviolette, oui, du comté de Jolivet.

Le Président (Mme Cuerrier): M. Jolivet (Laviolette)...

M. Pagé: ... quinze jours, ce sera peut-être le comté de Jolivet, je ne le sais pas.

M. Jolivet: C'est une question de temps.

M. Pagé: En toute humilité.

M. de Belleval: Est-ce qu'on y va?

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.

M. de Belleval: C'est fini? Vous avez fait votre point? Moi, je vous laisse la parole si vous voulez.

Le Président (Mme Cuerrier): Bon! M. Pagé:Vous avez terminé?

Le Président (Mme Cuerrier): M. le président du Syndicat, est-ce que vous avez une intervention à faire maintenant?

M. Théberge: ...

Le Président (Mme Cuerrier): Je m'excuse, M. le Président. J'avais déjà dit que M. le député de Portneuf avait la parole. Il l'avait déjà demandée avant l'ajournement sine die de ce matin. M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Mme le Président, MM. les membres de la commission, je vais être très bref. Je ne m'engagerai pas dans un débat de procédure. Je vous promets que ça ne durera pas plus qu'une minute.

Ce matin, Mme le Président, je vous ai posé une question et vous m'avez référé à la Chambre. J'ai soulevé la question en Chambre cet après-midi. Pour que ce soit encore plus vite et, plus ex-péditif, je ne reprendrai pas les termes de la question que j'ai posée. A la Chambre cet après-midi, Mme le Président, on m'a référé à vous, le président de l'Assemblée nationale faisant état d'une certaine confusion. Dans les circonstances, Mme le Président, j'aimerais savoir de votre part qu'est-ce qui arrive avec tout ça?

Le Président (Mme Cuerrier): Si je me souviens bien de votre intervention de ce matin, M. le député de Portneuf, vous vouliez savoir qui étaient les invités aujourd'hui?

M. Pagé: Quels avaient été les organismes convoqués et ce, depuis quand.

Le Président (Mme Cuerrier): C'est ça.

M. Pagé: Si des organismes avaient été convoqués pour hier. C'était le sens de ma question.

Le Président (Mme Cuerrier): Je ne saurais vous le dire actuellement, mais je pense que, de toute façon, vous pouvez toujours poser ces questions au leader ou vous auriez pu me les poser et j'aurais fait la recherche voulue. Maintenant, auprès du secrétaire...

M. Pagé: Mais, Mme le Président, je vous les ai posées.

Le Président (Mme Cuerrier): ... des commissions, on peut toujours obtenir cette information, je pense, et savoir qui a été invité pour aujourd'hui.

M. Pagé: D'accord.

Le Président (Mme Cuerrier): Sur la liste que j'avais ce matin...

M. Pagé: Oui.

Le Président (Mme Cuerrier):... il y avait deux organismes d'invités. C'est toute l'information que j'avais pour aujourd'hui.

M. Pagé: Si je pose cette question, ce n'est nullement dans le but d'embêter qui que ce soit, mais c'est strictement pour le précédent que cela peut créer. Il est dans les us et coutumes qu'au début des travaux d'une commission parlementaire, quelque membre de la commission puisse s'enquérir auprès du président pour connaître les organismes qui ont été convoqués, à quelle date ils ont été convoqués, pour quand ils ont été convoqués, le programme de la journée et le programme des prochains jours et des prochaines séances.

C'est dans ce sens que je vous ai posé ma question ce matin et je voudrais bien vous comprendre. Vous me dites que j'étais en droit de poser la question. C'est cela?

Le Président (Mme Cuerrier): Je tâcherai d'obtenir l'information, à savoir quand les invitations ont été faites. Quant aux organismes comme tels, nous avons donné réponse à cette partie de votre question.

M. le député de Portneuf.

M. Pagé: D'accord. Merci, Mme le Président. Vous voyez. Cela n'a pas duré plus d'une minute quant à moi.

Je voudrais tout d'abord remercier M. Thé-berge du mémoire qu'il a commencé à nous présenter ce matin. Quant à moi, j'ai bien apprécié les recommandations précises, bien déterminées qu'il formule aux pages 24 et suivantes de son mémoire.

Je voudrais tout d'abord reprendre une affirmation que monsieur le ministre a formulée ce matin. Il a lancé comme ça, il a répondu entre autres, sur toute cette question des fameuses listes d'admissibilité, que vous lui posiez, M. Théberge, que, à l'avenir, les listes d'admissibilité allaient être rédigées suite aux examens écrits, suite aux rencontres avec les jurys et que, le gouvernement m'obligeait, par les normes édictées, à prendre la première personne sur la liste, ensuite, la deuxième, puis la troisième, etc. Le ministre, on se le rappellera, a évoqué que cela mettait ainsi fin à une période qui semblait être terrible, où il y avait, selon lui du patronage, etc.

Mme le Président, je dois quand même constater — et M. Théberge pourra peut-être souscrire à mes propos — que même si le gouvernement s'oblige par le projet de loi et les règlements et les normes qui seront édictés, à faire en sorte que cela sera la première personne sur une liste d'admissibilité quelconque qui devra combler un poste, il faut quand même constater qu'une fois que cette personne sera définie, elle sera possiblement mutée, rétrogradée, destituée, affectée, reclassée, mise en disponibilité, et cela par le ministre, en vertu d'un pouvoir réglementaire.

Je voudrais bien, M. Théberge, que vous compreniez le sens de ma question, parce que vous savez que je dois poser des questions. Ne croyez-vous pas que, le fait que le ministre dise qu'il n'y a plus de problème, qu'il y a une liste d'admissibilité qui sera rédigée et que le gouvernement devra procéder par la première et, par la suite, la deuxième, la troisième, etc., ne croyez-vous pas, malgré tout, que cette personne ne sera peut-être pas placée dans une meilleure position lorsqu'elle aura son travail, qu'elle sera affectée à un travail particulier, parce qu'il subsistera toujours le pouvoir, pour le ministre — pouvoir quand même arbitraire, qu'il aura en vertu des règle-

ments — de muter de de faire ce que bon lui semblera pour les motifs qu'il jugera opportuns? C'est le sens de ma première question. Et je pourrais tout de suite passer à la deuxième.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le Président du syndicat.

M. Théberge: Sur cette question, c'est bien sûr qu'on entretient certaines inquiétudes. Nous existons depuis 1966. La bataille qu'on a faite en 1966, c'était pour obtenir le droit d'association, mais c'était également pour obtenir, à l'intérieur de la fonction publique, un plan de carrière. C'est peut-être un peu technique, alors je me permets de résumer assez rapidement ce qu'est un plan de carrière. Je vous expliquerai, après cela, le sens de nos inquiétudes en regard de cela.

Un individu entre dans la Fonotion publique, il est classé dans un corps d'emploi, je prends un exemple, agent de recherche et de planification socio-économique. Parfait. A l'intérieur de cela, l'individu en question a des possibilités d'avancement, c'est-à-dire qu'il y a des échelons, des classes. Il y a des possibilités de promotion. Cela implique qu'il change de corps d'emploi.

En 1966, donc, on s'est battu pour obtenir le droit à la syndicalisation, mais également que la fonction publique fonctionne en vertu du plan de carrière qui, d'après nous, offre une meilleure garantie d'efficacité. D'autre part, cela permet la mobilité des professionnels à l'intérieur d'un même corps d'emploi.

Ils peuvent passer d'agent de recherche et de planification socio-économique au ministère de l'Education et être mutés au ministère des Affaires sociales ou demander d'être mutés au ministère des Affaires sociales et vous avez là d'autres postes qui correspondent à cette classification.

Par rapport à ça, dans l'article 28 de la Loi actuelle de la fonction publique, il était prévu, à l'intérieur des corps d'emploi, une échelle minimale et maximale de rémunération, ce qui était, d'une certaine façon, une garantie législative; on avait un plan de carrière, non pas — vous m'excuserez l'expression; en dépit de la loi 101, je ne connais pas l'expression française —"a position plan" à l'intérieur de ça, à l'intérieur de la fonction publique.

Le "position plan", pour résumer encore bien succinctement, c'est être assis sur une chaise. Ils ont estimé que la chaise faisait ça, ça, ça et qu'elle valait x dollars. Si tu t'adonnes à être assis sur la chaise, tu vaux tant. A un moment donné, ils décident, vous le voyez dans le projet de loi 53, autant que dans la situation actuelle d'ailleurs, que les postes sont pondérés par le Conseil du trésor. A un moment donné, ils décident que la chaise ne fait plus tout à fait ce qu'elle faisait, elle diminue ou elle augmente. Sauf que, par rapport à ça, on revendique toujours le maintien du plan de carrière et ce qui nous inquiète, c'est la disparition de l'article 28 de la loi actuelle dans le projet de loi 53. Cela nous inquiète, cette disparition.

Là-dessus, on aimerait avoir des éclaircisse- ments de la part du ministre de la Fonction publique; après quoi, on va revenir sur un point que vous avez soulevé en ce qui concerne le premier, le deuxième et le troisième.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.

M. de Belleval: M. Théberge, si je vous ai bien compris, votre plan de carrière... Ce que vous appelez le plan de carrière des professionnels, où est-ce qu'il est garanti dans la loi actuelle?

M. Théberge: II est garanti à l'article 28.

M. de Belleval: A votre avis, il est garanti en vertu de l'article 28.

M. Théberge: Oui.

M. de Belleval: Je regrette beaucoup, mais tout ce que dit l'article 28... On va le lire ensemble: "Le traitement fixé pour chaque classe de fonctionnaires peut comprendre un taux minimum et un taux maximum d'appointement et des taux intermédiaires afin de pourvoir aux augmentations du minimum au maximum." Premièrement, ça ne traite pas du tout des plans de carrière, ça traite des traitements, ça dit que les traitements peuvent être fixés par minimum et maximum avec traitement intermédiaire; ce n'est pas une obligation, c'est une possibilité.

En ce qui concerne les employés syndiqués, toute la question des traitements, de toute façon, est pourvue par les conventions collectives de travail. Alors, c'est le statu quo qui est maintenu.

L'article 28 comme tel se retrouve maintenant dans les dispositions de l'article 3, qui dit qu'à l'avenir les règlements de classification sont faits par le ministre. C'est la même chose qu'actuellement. Il y a des règlements de classification qui sont faits, mais au lieu d'être faits par la commission, ils vont être faits par le ministre. Ces classifications pourront comprendre, comme aujourd'hui des échelles de traitement par échelon, sauf qu'en ce qui concerne les employés syndiqués, de toute façon, ce sont les conventions collectives qui y pourvoient. Il y a actuellement des classifications où il n'y a pas d'échelle de traitement par échelon, même au niveau des ouvriers. Il y a des taux fixes. Et pour les cadres, entre autres, il n'y en a pas. C'est le statu quo.

Je suis d'accord avec vous qu'une planification des effectifs, une gestion des effectifs, par classification générale, plutôt que par la poste, m'apparaît supérieure, en règle générale. De ce point de vue, vous avez raison de dire que la classification actuelle des professionnels m'apparaît meilleure, comme moyen de gestion, que celle des cadres qui est faite poste par poste.

Mais il m'est ainsi, non pas en vertu de la loi, mais en vertu des pouvoirs discrétionnaires donnés à la commission, maintenant au ministre, d'organiser la fonction publique selon un mode plutôt que l'autre. Mais le fait que l'article 28 disparaisse ne change rien. En fait, il ne disparaît

pas. La loi réaménage tous ces pouvoirs autrement. Mais comme je vous le dis, cela traite des traitements, cela ne traite pas du plan de carrière comme tel, cela ne traite pas de classification comme telle. De toute façon, c'est négociable en vertu des conventions collectives en vigueur. Je ne vois pas en quoi votre crainte existe.

M. Théberge: Si l'interprétation que vous donnez du fait que l'article 28 ne se retrouve plus dans le projet de loi actuel, c'est tout simplement qu'on va régler cela par voie de convention collective, je n'ai pas de problème là-dedans.

M. de Belleval: Vous admettez que les traitements sont décidés par voie de convention collective.

M. Théberge: Oui, il n'y a pas de problème. M. de Belleval: Cela va continuer ainsi.

M. Théberge: II n'y a pas de problème, à condition que, effectivement, on ne puisse interpréter aucun article du projet de loi en question comme étant un empêchement à ladite clause. C'est tout simplement cela.

M. de Belleval: Vous êtes d'accord que là-dessus, entre autres, l'article 91 est très clair. Il dit que le ministre ne peut pas déterminer les conditions de travail et les salaires des fonctionnaires, en dehors des conventions collectives, quand il y a une convention collective qui s'applique à une classe d'employés.

M. Théberge: D'accord; par ailleurs, au niveau de l'article 3, la classification n'étant toujours pas négociable — elle ne l'a jamais été, de toute façon — on n'a pas de garantie non plus là-dedans.

C'est pratique, malgré tout, de connaître un peu l'anglais. Quand on regarde la version anglaise, dans le projet de loi 53, on ne retrouve jamais la traduction anglaise de plan de carrière, on retrouve toujours l'expression anglaise "position", comme dans le "position plan".

M. de Belleval: Dans le projet de loi actuel, y a-t-il l'expression plan de carrière qui est employée quelque part?

M. Théberge: Dans le projet de loi ou dans la loi actuelle?

M. de Belleval: Dans l'un ou l'autre?

M. Théberge: Non.

M. de Belleval: Nulle part.

M. Théberge: Nulle part.

M. Pagé: Pour continuer, à la page 27 de votre mémoire, vous dites: "Le projet de loi 53, on l'a vu, ne corrige en rien les déficiences de la loi actuelle. Au contraire il affaiblit le seul garant efficace de la qualité des services publics, le syndicalisme". Vous arrivez avec une recommandation. Un peu avant, vous donniez plusieurs motifs, à la page 22, et vous en arriviez à la conclusion suivante: "Le Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec s'oppose fermement au projet de loi tel qu'il a été déposé".

Vous en arrivez, après cela, à plusieurs recommandations. Vous recommandez, entre autres, qu'aucune disposition de la présente loi ne puisse être interprétée comme une limite ou une entrave à la libre négociation des conditions de travail des employés de l'Etat.

Vous en avez fait état ce matin. Vous aviez dit, somme toute, que ce qui était souhaitable, vous référant à un document du Bureau international du travail, c'était que, dans les secteurs publics, toutes les conditions de travail soient négociables.

M. le ministre a répondu en prenant un autre élément de ce document qui dit que le régime qu'on connaît au Québec actuellement était, selon le même bureau, peut-être un des meilleurs, en envoyant ainsi, évidemment, des fleurs au gouvernement précédent, choses qui ne lui sont quand même pas familières. J'aimerais savoir, de votre part, quelle est l'interprétation que vous donnez à l'article 3 du projet de loi. Je m'excuse d'y revenir; je me propose d'y revenir avec tous les intervenants, parce que, pour certains intervenants, ces questions ne deviennent plus négociables parce que l'article 119 confère au ministre le droit de procéder dans ces secteurs par règlement, au niveau de la classification des emplois, des conditions de rémunération et de travail, de l'évaluation, de la promotion, de l'affectation, du classement, etc. On est sur la même longueur d'onde là-dessus. Les recommandations que vous formulez dans ce sens sont de quelle nature? Voudriez-vous, somme toute, que, dans la loi, il soit spécifié que ces questions sont exclues du pouvoir réglementaire du ministre et qu'on consacre le principe de la négociation relativement à ces onze éléments qui sont prévus à l'article 3?

M. Théberge: Voici la façon dont nous interprétons l'article 3. C'est une bonne idée que le ministre de la Fonction publique décide d'assumer ses responsabilités de ministre, qu'il se débarrasse de la Commission de la fonction publique qui a toujours été une entrave. J'imagine que du côté patronal, on doit dire la même chose, de toute façon, si j'en juge par le projet de loi qui est sur la table. Eux aussi sont un peu tannés d'avoir la Commission de la fonction publique dans les pattes. Mais par rapport à cela, effectivement, ce qu'on voudrait, c'est avoir la garantie — le ministre nous dit que cela ne peut être dans le projet de loi 53, cela va être dans la loi sur le régime syndical dans la fonction publique — quand même plus formelle que cela. Actuellement, on ne le sait pas du tout, le ministre prétend qu'il ne le sait pas lui non plus. Il dit: On va attendre le rapport de la Commission Martin. On ne sait pas ce qui va être

négociable et ce qui ne le sera pas, sauf qu'on sait qu'on va avoir une loi spéciale sur le régime syndical dans la fonction publique.

Ce qu'on dit par rapport à cela, c'est que c'est une bonne idée que le ministre assume ses responsabilités. Je suisd'accord avec l'interprétation qu'il en donnait ce matin, mais je maintiens que ce n'est pas une responsabilité que tu dois partager avec toi-même. C'est une responsabilité que tu dois accepter de négocier parce que tu es, effectivement, que tu le veuilles ou non, un employeur aussi. Tu es peut-être bien un homme politique qui a à coeur l'intérêt commun, le bien-être du public, sauf que tu es également un employeur, et, en ce sens, il est totalement inacceptable que nous autres, sous prétexte qu'on est à l'intérieur de la fonction publique, on n'ait pas le droit de négocier toutes nos conditions de travail, comme cela se fait, d'ailleurs, dans le secteur parapublic actuellement, et, bien sûr, dans le secteur privé.

C'est bien sûr qu'actuellement, face au pouvoir que le ministre veut se donner par l'article 3, on est d'accord avec cela, mais on dit: Partage ce pouvoir ou accepte, en tout cas, qu'il soit négociable. Si jamais ce pouvoir n'est pas négociable, ce n'est pas pour rien qu'on a mis l'effigie de Du-plessis en première page de notre mémoire. C'est parce que nous prétendons que cela va être effectivement un retour à l'ère de Duplessis, où, de façon extrêmement autoritaire, le ministre de la Fonction publique va décréter, parce que le fait de distinguer le décret du règlement nous paraît des subtilités, compte tenu que, de toute façon, les règlements du ministre de la Fonction publique vont être approuvés par le Conseil du trésor, organisme politique par excellence, on l'a vu, que les règlements de l'Office du recrutement vont être également sujets à approbation par le Conseil du trésor toujours et que les règlements de la Commission de la fonction publique vont être également assujettis au Conseil du trésor.

Dernier point là-dessus, quand tu as une garantie quelconque d'impartialité de la part de l'Office du recrutement ou de la commission, quant à nous, cela ne nous apparaît pas évident du tout qu'on va obtenir une garantie d'impartialité, parce que ce n'est pas le gouvernement, mais l'Assemblée nationale qui va nommer les membres, d'autant plus que, comme par hasard, ils sont nommés pour cinq ans, soit la durée normale d'un mandat de gouvernement.

On a l'impression — je ne sais pas ce que le ministre en pense — évidemment qu'ils vont placer un de leurs hommes à ces postes. On pourrait s'y attendre, comme on pourrait dire. Alors, par rapport à ça, on ne trouve pas là de garanties bien fortes d'impartialité.

M. Pagé: Vous dites, sur que ce qui est prévu à l'article 3: On est d'accord, pour autant que c'est négociable. Etes-vous conscient qu'un pouvoir réglementaire, ce n'est pas négociable? A partir du moment où le ministre adoptera le règlement, d'accord, il peut y avoir une consultation, mais il n'y a quand même pas de mécanisme prévu de négociation pour l'application que fera le ministre du pouvoir réglementaire qui lui est conféré à l'article 3.

M. Théberge: Ce qu'on dit là-dessus, c'est qu'on est d'accord avec les pouvoirs qui se donnent à l'article 3, sauf, que ces pouvoirs, au lieu de les exercer par voie réglementaire, il les exerce par voie de négociation. C'est purement et simplement ça qu'on dit. Par rapport au libellé actuel, c'est bien sûr, de l'article 3, on dit: Organise-toi pour mettre ailleurs ou mettre dans le même article que, de toute façon, tout ça est négociable.

M. de Belleval: C'est ce que je fais aussi, d'ailleurs.

M. Théberge: A quelle place déjà?

M. de Belleval: C'est ce que je fais, d'ailleurs, à l'article 91. Par exemple, d'ailleurs, c'est tellement clair que le contraire, évidemment, serait absurde, puisque, entre autres...

M. Pagé: A l'article 3, Mme le Président...

M. de Belleval: Oui, je vais seulement vous donner un exemple, M. le député. Je comprends que vous êtes moins au fait de ces choses-là que d'autres — je ne vous le reproche pas — mais, par exemple, le ministre fait des règlements concernant les conditions de rémunération et de travail. Cela va loin, ça, imaginez-vous, les conditions de rémunération et de travail. Cela veut dire que, par règlement, je peux déterminer quel est le salaire que va gagner un fonctionnaire. C'est ça que ça dit, ça, n'est-ce pas? Si ce pouvoir n'était pas...

M. Pagé: Cela dépend comment il est utilisé.

M. de Belleval: Non, mais si ce pouvoir n'était pas négociable, cela voudrait dire qu'il n'y aurait plus de convention collective. Cela voudrait dire que le syndicat ne pourrait pas négocier les salaires durant la prochaine négociation collective. Ce serait manifestement absurde, de toute évidence...

M. Pagé: Mais l'article 91, Mme le Président... M. de Belleval: Est-ce que je peux terminer? M. Pagé: Non...

M. de Belleval: Ce serait manifestement absurde. C'est sûr que ce n'est pas ça que signifie ce pouvoir réglementaire. Cela ne signifie pas que le ministre peut, d'une façon discrétionnaire ou de sa propre autorité, de sa seule autorité, déterminer les salaires des fonctionnaires, cela veut dire qu'il peut faire ça, d'accord; c'est lui qui a le pouvoir de faire ça, mais dans le cas des employés syndiqués, par exemple, il est soumis aux conventions collectives de travail; d'ailleurs, il y a une disposition omnibus qui dit que, justement, à l'article 91, le ministre détermine ça, n'est-ce pas, mais sous ré-

serve de la convention collective de travail et, quand il n'y a pas de convention collective de travail, évidemment, il faut que quelqu'un, quelque part, à un moment donné, ait l'autorité de déterminer un salaire et c'est le ministre qui le détermine. Alors, c'est pour ça que M.Théberge et moi, au fond, on est sur la même longueur d'ondes de ce côté-là et on dit: Bon! Il faut déterminer qui a la responsabilité? Sauf que, là où on se sépare au niveau du contenu, c'est que lui, il aimerait que tout ça au complet fasse l'objet des négociations collectives de travail, alors qu'en vertu...

M. Pagé: ...

M. de Belleval: C'est ça, alors qu'en vertu de la loi actuelle — ce n'est pas moi qui l'ai faite, cette loi; c'est un ancien gouvernement libéral, d'ailleurs, et les autres gouvernements qui se sont succédé l'ont maintenue—il y a des matières qui relèvent soi-disant de la Commission de la fonction publique et qui ne peuvent être négociées qu'avec l'accord de la Commission de la fonction publique.

Quand le projet de loi sera adopté, il y aura une amélioration de ce côté puisqu'ils pourront effectivement être négociés, mais avec l'accord du ministre de la Fonction publique, ce qui est une amélioration puisqu'il devient l'interlocuteur unique du syndicat à la table de négociation de ce point de vue.

On dit — je le répète une dernière fois, j'espère — que cet aspect relève du mandat de la commission Martin et relèvera, à l'avenir, d'une autre loi, la Loi sur le régime syndical. Si, à la suite du rapport de la commission Martin, il faut changer des choses, ce sera la Loi sur le régime syndical qu'on amendera. On n'aura même pas besoin de revenir au projet de loi 53.

M. Pagé: Ne croyez-vous pas M. Thé-berge — vous avez fait état, tout à l'heure, du rapport Martin, de la commission qui siège actuellement — que le gouvernement aurait dû attendre le dépôt de ce rapport avant de présenter le projet de loi ou, tout au moins, d'adopter le projet de loi?

M. Théberge: C'est bien certain. On a été, je pense, les premiers à dénoncer la contradiction qui existait entre le fait que le gouvernement ait déposé le projet de loi 53 une journée et que, le lendemain, il ait créé la commission Martin.

Il est bien évident, par ailleurs, que le ministre de la Fonction publique a déjà décidé... Il nous apparaît drôlement contradictoire, en dépit de tout ce qu'il peut dire, qu'il ait déjà décidé qu'il y aurait une loi spéciale sur le régime syndical dans la fonction publique.

Qu'il me dise qu'il n'y a rien de nouveau dans cette loi, c'est exact. Fondamentalement, il reconduit les articles qui existent actuellement dans la Loi de la fonction publique, sauf qu'il y a une différence assez fondamentale entre ce qui existe depuis 1965 et ce qui existera quand vous aurez décidé d'adopter le projet de loi 53. En 1965, et jusqu'à ce jour, c'était la Commission de la fonction publique qui était responsable d'une partie importante de nos conditions de travail.

En 1965 — je ne connais pas l'évolution des mentalités de façon bien précise — vous aviez décidé, comme Parlement, de donner cela à un tiers soi-disant impartial. Aujourd'hui, vous décidez que c'est le ministre qui va accaparer ces pouvoirs. Je vous le répète. Je suis d'accord sur cela, sauf que, le fait que, maintenant, ce soit l'employeur, le véritable employeur, le ministre qui ait ces pouvoirs, il nous apparaît évident, par rapport à cela, que toutes nos conditions de travail devraient, par conséquent, être négociables, exactement comme dans l'entreprise privée ou dans le secteur parapublic.

C'est drôle, mais l'interprétation que je donne à l'article 91 n'est pas tout à fait la même que celle qu'en donne le ministre de la Fonction publique. Je ne vois pas dans cet article, de façon bien précise...

M. de Belleval: De quel article parlez-vous? M.Théberge: De l'article 91.

M. de Belleval: 91. Vous avez parlé de l'article 91, tout à l'heure. Je ne vois pas dans cet article, de façon bien précise, que tous les pouvoirs du ministre soient négociables.

M. de Belleval: Non. Vous avez raison. Tous les pouvoirs du ministre ne sont pas négociables puisque, comme vous venez vous-même de le dire, c'est le statu quo en matière de champ de négociation. Alors, donc, c'est vrai que tout n'est pas négociable, à moins, parce qu'il y a la disposition...

M. Théberge: ... omnibus.

M. de Belleval: Oui, enfin, la soupape prévue dans la loi actuelle, et qui sera encore prévue dans la future loi, à savoir que, à moins que le ministre de la Fonction publique n'y concoure par règlement... Actuellement, c'est à moins que la Commission n'y concoure par règlement. Au fond, on joue un peu sur les mots quand on regarde cela.

Je trouve que les anciens législateurs, de ce point de vue, ont joué un peu sur les mots, sauf qu'autrefois, cela avait peut-être une raisonnance plus contraignante, en ce sens que c'était une commission indépendante. Maintenant, ce sera le ministre qui sera l'interlocuteur. Il y a quand même un aspect important là-dedans. C'est le fait — évidemment, je sais que vous n'êtes pas d'accord sur ce point de vue fondamental — que toute la loi repose, en partie, enfin, une bonne partie de la loi repose sur la règle du mérite telle que définie dans la loi. On dit: Les aspects...

M. Théberge: Telle que non définie dans la loi.

M. de Belleval: Bien, telle que définie... Enfin, c'est un point de vue.

M. Théberge: Où est-elle la définition?

M. de Belleval: On y reviendra tantôt, si vous voulez. J'en ai parlé assez longuement ce matin d'ailleurs. On pourra reprendre la transcription du journal des Débats à ce sujet. On peut être d'accord ou non sur... Je l'ai expliqué assez longuement.

C'est normal que les règlements qui touchent, qui sont susceptibles de toucher à la règle du mérite, soient soumis à l'examen d'une commission indépendante qui donne son avis là-dessus parce que, d'après nous, c'est un principe d'intérêt public. Mais, sous réserve de l'article 90 de la loi et avec l'amendement que j'ai proposé et sous réserve de l'application de la Loi sur le régime syndical, c'est très clair que les pouvoirs réglementaires du ministre sont assujettis à la Loi sur le régime syndical. Comme vous avez raison aussi de le faire remarquer, cela ne rend pas tout négociable, mais cela maintient le statu quo.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: Une brève intervention, Mme le Président. Je n'ai pas l'intention de défendre Duplessis parce que je serai obligé de défendre les libéraux en même temps, cela va engager un débat inutile, une perte de temps, étant donné qu'on doit terminer nos travaux à 18 heures. On a beaucoup parlé du mérite. Cela ne semble pas encore clair, M. Théberge. On pourrait en discuter. Je ne veux pas en discuter avec vous. Cela concerne surtout le ministre et tout ce que la loi, les cinq ou six articles disent concernant le mérite. Vous avez dit ce matin que cette loi du mérite, vous la remplaceriez surtout par la négociation collective, si j'ai bien compris. En même temps, vous voulez abolir la Commission de la fonction publique parce qu'elle a trop de libertés, elle a trop de pouvoirs. C'est un organisme surtout patronal et, en même temps, c'est le ministre qui assumerait, lui, toute la responsabilité qui serait le grand maître d'oeuvre. Justement, le point d'interrogation, même si le ministre, l'Etat employeur, au moment de vos négociations, comme il y a des choses qui sont tout à fait imprécises, que ce soit l'article 3 ou d'autres articles... A ce moment-là, est-ce que vous avez plus confiance, en vous débarrassant de la Commission de la fonction publique, de faire affaires directement avec le ministre? Est-ce que cela vous rassure plus en fonction de votre avenir?

M. Théberge: Cela ne nous rassure pas plus. Le problème qu'on avait avec la Commission de la fonction publique, c'est que, par voie législative, évidemment, en vertu de la loi qui existe à l'heure actuelle, la Commission de la fonction publique n'était pas l'employeur; par conséquent, la Commission de la fonction publique ne négociait pas les choses qui étaient sous sa responsabilité. C'est bien sûr que, désormais, étant donné que cela relève du ministre de la Fonction publique, il y aura peut-être possibilité — je dis bien peut-être possibilité — de négocier en disant tout simplement: Le règlement que vous voulez édicter, en vertu de l'article 3, sur l'un ou l'autre des sujets, va être négociable, sauf qu'à ce moment-là, on risque de s'embarquer dans des procédures quasi judiciaires, je dirais, pour déterminer si c'est négociable ou si ce ne l'est pas. Au lieu de cela, pour nous, ce n'est pas seulement une question de confiance, parce qu'en dépit de la confiance qu'on pourrait éventuellement avoir à l'endroit d'un ministre ou d'un autre, ce qu'on sait, c'est que les gouvernements passent et nous restons. On ne veut pas qu'à un moment donné, n'importe quel ministre nous arrive et nous dise: La loi nous interdit de négocier ces conditions de travail. C'est indiqué que cela se règle par voie de règlement. Là-dessus, on n'a pas plus confiance maintenant qu'antérieurement.

M. Le Moignan: Nous sommes à discuter présentement et on sait que le rapport de la commission Martin n'est pas encore publié. Si la commission Martin entrait en contradiction avec vos arguments, vous ou d'autres groupes, et les arguments du gouvernement, alors, comment, à ce moment-là, tout concilier? C'est pour cela que, pour cette loi qu'on étudie, on aurait peut-être eu intérêt à la retarder ou à la reporter à un mois ou deux plus tard, ou bien attendre le rapport de la commission Martin; ou est-ce qu'on peut concilier les deux à la fin?

M. Théberge: Je pense que ce serait certainement beaucoup plus habile de décider d'arrêter les travaux que de les continuer, parce qu'actuellement, je vous ai signalé ce matin, dans mon court laïus de présentation, qu'on considérait que le projet de loi 53 ne répondait pas aux aspirations et aux besoins à la fois de la population en général et des employés de la fonction publique. Ce qui se passe à l'heure actuelle, c'est qu'on a un climat qui est extrêmement malsain en regard de cela à l'intérieur de la fonction publique. Actuellement, personnellement, avec les autres membres de l'exécutif chez nous, nous sommes en tournée dans les différentes sections de notre syndicat pour une question de cotisation syndicale. Je n'ai pas l'intention de vous raconter mes problèmes là-dessus, si vous n'avez pas d'objection, sauf qu'en même temps, on parle du projet de loi 53. De toute façon, les membres ont déjà reçu le projet de loi, avant même que le ministre daigne nous l'envoyer — le petit livre bleu qu'il nous a envoyé — les membres l'avait reçu bien longtemps avant cela et ils avaient reçu de la documentation depuis ce temps-là.

Par rapport à ça, les membres sont extrêmement inquiets de ce qui se passe actuellement à l'intérieur de la fonction publique. Je ne vois pas d'un très bon oeil de quelle façon toute cette affaire est en train de se dérouler à l'heure actuelle. Effectivement, la contradiction, par exemple, entre la commission Martin et le projet de loi 53 est vécue de façon un peu dramatique chez nous.

Le fait que le ministre s'arroge tous ces pouvoirs, en dépit de la confiance ou de la non-confiance qu'on peut avoir à son endroit — c'est totalement indépendant de ça — est vu d'un très mauvais oeil de la part de nos membres. Actuellement, je sais qu'à l'intérieur des autres syndicats des autres membres de la fonction publique, il y a un climat extrêmement malsain en regard de cela. Il ne nous semble pas que la façon de procéder, dans cette affaire, ait contribué véritablement à créer un sain climat de travail à l'intérieur de la fonction publique.

Je vous parlais un peu tout à l'heure des problèmes qu'on avait avec l'ancienne loi, les membres s'inquiètent beaucoup de savoir ce qui va se passer avec la nouvelle loi. Ils n'ont peut-être pas encore saisi très bien toutes les subtilités du projet de loi en question, lorsqu'il sera adopté. L'inquiétude est très généralisée par rapport à ça. Parce que, en aucune manière, sauf des déclarations — et les déclarations ne sont pas des textes législatifs, ce n'est pas une obligation pour qui que ce soit de les respecter — à l'effet que probablement, ça va être négociable, on n'a rien contre le fait que la rétrogradation soit négociable, cela ne nous apparaît assez clair actuellement, dans les textes, en regard de tout ça.

De toute façon, demain matin, vous allez avoir encore plus de nouvelles là-dessus, on termine nos assemblées ce soir, on prend des votes là-dessus, on va vous faire connaître la position de nos membres en regard de ça.

Il m'apparaît extrêmement clair que la façon de procéder dans cette question, compte tenu du texte qu'on a devant les yeux, non pas compte tenu des déclarations à la radio, à la télévision ou dans les journaux, ou même ici en commission parlementaire, on n'offre pas les garanties que nous voudrions.

M. Le Moignan: Une dernière question. On a parlé, ce matin, de mécanismes de consultation qui auraient pu être mis en branle, où vous auriez pu être consultés, vous et d'autres, sur la préparation de cette loi. Est-ce que vos membres auraient été en état d'apporter des renseignements, avant la rédaction, puisqu'ils avaient déjà fait des études?

M. Théberge: C'est bien sûr, on a d'ailleurs déjà fait de nombreuses représentations sur ces questions. On l'a dit publiquement. On était heureux que le ministre de la Fonction publique se décide, parce qu'on était tannés nous aussi des dispositions de la loi actuelle, à amorcer un débat au sujet de la fonction publique, se décide à changer des choses là-dedans. On avait fait, de toute façon, de nombreuses représentations déjà, notamment sur la liberté syndicale, mais également sur d'autres questions, notamment des questions relatives à la transparence de la fonction publique, sur le droit du public à l'information qui se véhicule à l'intérieur de la fonction publique.

Voici une des questions fondamentales qu'on peut se poser également, qu'on est en train de dé- battre chez nous de façon assez sérieuse: Est-ce que nous, comme employés de l'Etat, sommes au service d'un parti politique temporairement au pouvoir qui privilégie l'intérêt commun — mais là-dessus, on a quelques réserves, des fois — ou si on doit travailler au service de la population? Si on doit travailler au service de la population, ce qu'on demande, c'est que le public ait droit, ait accès à l'information véhiculée à l'intérieur de la fonction publique.

A cet égard, encore une fois, le projet de loi 53, ne répond absolument pas à ce besoin. On le maintient toujours dans des situations avec des serments d'allégeance, des codes d'éthique, etc., qui nous empêchent de dire à la population ce qui se passe à l'intérieur de la fonction publique, de divulguer à la population l'information essentielle, un sain débat démocratique à l'intérieur de notre société.

Le problème qu'on a rencontré, il n'y a pas tellement longtemps au ministère de l'Education, au sujet des subventions aux universités, est un exemple patent. Des gens constataient que des choses se passaient, qui ne leur semblaient pas correctes. Ils ont décidé d'en parler. Mais le ministre de l'Education, si je ne m'abuse, à l'Assemblée nationale, a répondu à une question là-dessus, en disant qu'il n'était absolument pas question qu'un fonctionnaire divulgue de l'information, à moins que ce ne soit aux autorités supérieures de son ministère.

La population là-dedans, la transparence, le droit à l'information, où se retrouvent-ils par rapport à tout ça? On aurait souhaité que le projet de loi 53, qu'une éventuelle loi sur la fonction publique corrige des situations comme celle-là.

M. Le Moignan: Quant au ministère de l'Education, j'avais effectivement posé quelques questions à ce sujet.

M. Théberge: C'est vous qui aviez posé la question? Je ne le savais pas.

M. Le Moignan: Je vous remercie.

Le Président (Mme Cuerrier): Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

M. Théberge: Si vous me le permettez.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le Président du syndicat.

M. Théberge: Toujours par rapport au projet de loi 53, j'aimerais parler un peu de la possibilité de délégation, sujet qui nous inquiète également. On pense, bien sûr, que, dans une administration aussi considérable que la fonction publique, il est fort heureux que le ministre décide de ne pas tout faire lui-même. Pour sa santé, de toute façon, c'était nécessaire.

Mais la délégation pose également d'autres ordres de problèmes. Entre autres, on pense que c'est une façon de s'assurer qu'il va y avoir du pa-

tronage, à tout le moins, du patronage administratif, ou du népotisme, si l'on veut, à l'intérieur de la fonction publique, compte tenu que les supérieurs des employés vont se retrouver sur les jurys, si j'ai bien compris l'esprit de la délégation. Ils vont se retrouver sur les jurys, pour engager des personnes à leur service.

A ce moment-là, il nous semble extrêmement dangereux que lesdites personnes s'organisent pour trouver d'avance, comme c'est la pratique à l'heure actuelle, les candidats qu'ils veulent bien avoir, parmi leurs amis, leurs connaissances, peu importe. On pense que c'est également une façon d'agir qui, d'après le ministre, en tout cas, ne sera pas tout à fait une garantie que la règle du mérite va être acceptée, dans la mesure où on peut toujours accepter la règle du mérite non définie.

Cela nous inquiète un peu. J'aimerais que le ministre donne quelques éléments à ce sujet.

Le Président (Mme Guerrier): M. le ministre.

M. de Belleval: Le problème que vous soulevez est le problème de la réglementation sur les concours, la formation des jurys, la gestion des emplois. Quelle que soit la loi, on va toujours avoir ce problème. On l'a dans la loi actuelle, on va l'avoir dans la prochaine loi. Ce n'est pas la loi comme telle qui dispose de toutes ces questions, c'est la réglementation. Mais, à l'avenir, cette réglementation sera beaucoup plus publique qu'actuellement. Elle sera soumise à l'avis d'une commission impartiale, elle sera même soumise à l'examen de l'Assemblée nationale, si l'Assemblée nationale le juge opportun, puisque les avis de la commission iront à l'Assemblée nationale et qu'il y aura un organisme indépendant qui n'aura que cela à faire, d'ailleurs, contrairement à la loi actuelle, c'est-à-dire surveiller pour voir si cette réglementation, une fois jugée conforme à la règle du mérite, telle que définie aux articles 70 et suivants, et telle que la jurisprudence aussi va la définir durant les années à venir, pourra faire enquête sur la façon dont la réglementation est observée. De ce point de vue, cela rejoint vos objectifs de faire qu'il y ait plus de transparence dans la gestion de la fonction publique qu'il n'y en a maintenant.

Quant au pouvoir de délégation, vous l'avez fait remarquer, il est impossible que tout soit fait d'une façon centrale, par un seul homme, ou par un seul organisme. Effectivement, il n'y a pas actuellement de pouvoir de délégation qui appartienne à la Commission de la fonction publique, mais, dans les faits, on le sait très bien, l'organisation des concours, des jurys, etc., tout cela est, au fond, largement délégué, en dehors de tout contexte réglementaire en dehors de toute possibilité d'examen, par un organisme indépendant.

C'est ce qui fait que, de ce point de vue, la loi constitue aussi un progrès considérable dans le sens même des objectifs que vous poursuivez.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: J'ai deux choses. Premièrement, l'employeur étant à la fois législateur, par rapport à vos pouvoirs de négociation comme syndiqués, cela donnerait une forme de libre négociation de l'ensemble de vos conditions de travail. En quoi cette forme de négociation peut-elle permettre de mieux donner à l'ensemble de la population un service qu'on appelle le service à la communauté, le bien commun?

La deuxième partie de ma question, c'est la fin de votre intervention, sur le droit à l'information. Comment verriez-vous le droit à l'information au public, sans que, d'un côté, il y ait, de la part de l'employeur, une contrainte vis-à-vis de l'employé qui, comme vous le mentionniez tout à l'heure au niveau du ministère de l'Education, donne le droit à l'employeur de pénaliser l'employé? D'un autre côté, s'il y avait libre accès au droit à l'information, de la part de l'employé, qui par vengeance ou pour d'autres motifs comme ceux-là, pourrait décider de sortir de la documentation, simplement pour son avancement personnel ou en cas de jalousie ou encore de vengeance envers un ministre, un sous-ministre ou un sous-chef. Comment voyez-vous ces deux actions?

M. Théberge: Sur la première question, à savoir en quoi le syndicalisme peut-il permettre que le service offert à la population soit meilleur que si c'est uniquement par voie réglementaire ou de façon unilatérale, je pense qu'il s'agit simplement de regarder ce qui s'est passé au Québec depuis quelques années. Je ne sais pas quelle est votre interprétation personnelle de la situation, mais si on regarde, en tout cas, à mon point de vue, le déroulement des dernières négociations et des négociations antérieures, autant dans le secteur des Affaires sociales, de l'Education que de la Fonction publique, je pense qu'une bonne partie des revendications des syndicats de la fonction publique et des syndicats du secteur parapublic en général ont largement contribué à assurer des services de qualité pour les raisons suivantes:

L'employeur, dans ses négociations avec les employés des secteurs public et parapublic, s'est comporté exactement comme un employeur du secteur privé, c'est-à-dire visant uniquement une rentabilité à caractère économique. On a vu, lors des dernières négociations, par exemple, les questions de mobilité qui ont été longuement discutées dans le secteur des Affaires sociales. On a vu les prorata discutés dans le domaine de l'Education. On a vu, à l'intérieur de la fonction publique, la bataille qui s'est déroulée au sujet de la rétrogradation.

Il me paraît assez clair que les batailles menées par les syndicats là-dessus ont contribué à ce que les membres, les employés des secteurs public et parapublic aient une certaine autonomie, à la fois financière et professionnelle, leur permettant aujourd'hui d'assurer un service relativement indépendant du pouvoir unilatéral d'un supérieur quelconque.

En ce sens, je pense que cela a contribué à l'amélioration de la qualité des services. En regard

de cela — ce serait peut-être important — lorsqu'il y a eu des batailles importantes au sujet du prorata, du nombre d'étudiants par classe. C'est extrêmement important pour la qualité de l'enseignement que de savoir combien on va mettre d'étudiants par professeur. Il me semble que le débat qui s'est fait à ce sujet, en tout cas, quant à moi, a permis assez clairement de déterminer, de conclure que les revendications des syndicats permettaient à l'étudiant de recevoir un enseignement de meilleure qualité.

Sur l'aspect plus spécifique de la rétrogradation, par exemple, on a actuellement à l'intérieur de notre convention collective un article qui traite de la rétrogradation, sauf qu'on l'a assorti de stipulations telles qu'un employé ne sent pas au-dessus de lui une épée de Damoclès. La moindre entorse, la moindre coche qu'il fait de travers, aux yeux de son supérieur, en tout cas, ne peut pas entraîner automatiquement une rétrogradation. Il nous semble qu'en ce sens les syndicats, beaucoup plus que l'employeur, ont fait que les employés de la fonction publique aient un peu d'autonomie dans leur travail, de sorte qu'ils ne sont pas assujettis à l'épée de Damoclès à tout bout de champ. Je ne sais pas si cela répond à votre question.

M. Jolivet: Oui, il y a seulement une partie... Vous avez fait mention du secteur parapublic des Affaires sociales et de l'Education dans la réponse que vous m'avez donnée, mais sur la question des fonctionnaires comme tels, à l'intérieur de la loi, vous avez fait mention de la rétrogradation. Est-ce que le fait d'avoir le droit de négocier toutes vos conditions de travail va permettre un meilleur service ou ne permettra pas un meilleur service? C'est la première partie, suite à votre réponse.

La deuxième, face à ce que vous dites au sujet de la rétrogradation, le pouvoir actuellement exercé avec ce que permettent les négociations que vous avez tenues, selon les conventions collectives... Il y avait auparavant le congédiement pur et simple avec les recours possibles et il y a aujourd'hui la rétrogradation avec les recours possibles aussi. Qu'est-ce qui est le mieux pour vous? Est-ce mieux que la personne soit congédiée purement et simplement ou est-ce mieux qu'il y ait un intermédiaire entre les deux, ou ni l'un ni l'autre?

M. Théberge: Sur la rétrogradation comme telle, on ne dit pas que c'est une mesure qui doit être éliminée complètement. On a signé un article dans notre convention collective qui traite de la rétrogradation, sauf qu'on a négocié cet article.

M. Jolivet: J'y arrive. Sauf qu'on a négocié cette affaire. Les stipulations qu'on a actuellement à l'intérieur de notre convention collective nous semblent des garanties suffisantes par rapport à cela.

M. Jolivet: D'accord.

Sauf que si on regarde l'article 88 tel qu'il est rédigé ici, on trouve cela un peu plus inquiétant. Je vais lire l'article: "Le sous-ministre ou le dirigeant d'un organisme peut, par écrit — encore heureux — rétrograder à une classe comportant une rémunération maximum inférieure, révoquer ou destituer tout fonctionnaire incompétent dans l'exercice de ses fonctions ou incapable de les exercer."

M. de Belleval: Oui, c'est dans le cas où il n'y a pas de convention collective, mais dans le cas où il y a une convention collective, c'est votre convention collective qui prévaut.

M. Théberge: Attention! A quelle place voyez-vous dans le projet de loi actuel que la rétrogradation va être négociable?

M. de Belleval: Actuellement, est-ce que c'est négociable selon la loi?

M. Jolivet: ...

M. de Belleval: Si vous avez réponse à cela, si vous voulez, rapidement, M. le député.

M. Jolivet: Oui.

M. de Belleval: Cela va régler la question.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.

M. de Belleval: Si on va à l'article 119 qui reprend l'article 52a de l'ancienne convention collective, on dit que seules sont non négociables les matières qui relevaient, en vertu de la loi actuelle, de la Commission de la fonction publique. On se comprend bien? Cela va bien, M. Théberge?

M. Théberge: Oui, cela va.

M. de Belleval: Bon. En quoi la rétrogradation relevait-elle de la Commission de la fonction publique, en vertu de la loi actuelle?

M. Théberge: Non, elle ne relevait pas de la Commission de la fonction publique à l'heure actuelle.

M. de Belleval: Donc, c'est négociable et cela va continuer à être négociable.

M. Théberge: Voulez-vous me lire le texte exact là-dedans où c'est indiqué de façon bien claire que tout le reste est négociable?

M. de Belleval: On dit que l'article 119 qui reprend l'article 52a, avec le projet d'amendement que j'ai déposé qui le restitue dans son intégrité par rapport à l'ancien article 52a, dit que: Toutefois, aucune disposition d'une convention collective ne peut porter sur un autre sujet qui, en vertu de la présente loi, relève de la commission. Or, la

rétrogradation ne relève pas de la commission en vertu de la loi. Donc, c'est négociable. Cela va bien? D'ailleurs, la preuve que c'est négociable en vertu de la loi actuelle, c'est que vous l'avez négociée.

M. Théberge: Attention! En vertu de la loi actuelle, de la part de l'employeur, c'était illégal de nous proposer la rétrogradation.

M. de Belleval: Vous voulez dire que vous avez négocié une convention collective illégale?

M. Théberge: On veut dire que quand l'employeur est en même temps le législateur, vous savez qu'on a signé des conventions collectives de quatre ans, ce qui est à l'encontre du Code du travail. Quand l'employeur est en même temps le législateur, on a comme des inquiétudes, des fois, de signer certains articles, parce qu'Oswald Parent, du temps qu'il était ministre, nous disait: Effectivement, si vous ne signez pas la rétrogradation, on va vous l'imposer par voie législative. Qu'est-ce que vous auriez fait à notre place?

M. de Belleval: Là, vous m'avez dit tantôt...

M. Théberge: Qu'est-ce que vous auriez fait à notre place?

M. de Belleval: Là, écoutez, je n'étais pas à votre place. Dans ce temps, j'étais en train de me battre contre M. Oswald Parent pour le faire battre dans Hull et on a réussi. Je n'avais pas tellement le temps de m'occuper de la convention collective.

M. Pagé: Cela a passé juste. Qu'est-ce que cela vous a donné?

M. de Belleval: Cela nous a donné un député de plus, le plus beau député de l'Assemblée nationale et un des meilleurs.

M. Pagé: Un plus beau député que notre président?

Le Président (Mme Cuerrier): Plus jeune, en tout cas.

M. de Belleval: Ils sont tous les plus beaux. M. Pagé: Seigneur! Asinus asinum fricat.

M. de Belleval: M. Théberge, revenons aux choses sérieuses. Vous avez dit tantôt que vous-même, en principe, n'êtes pas contre une clause de rétrogradation, pourvu qu'elle soit aménagée avec les sauvegardes appropriées et qu'elle fasse l'objet de la libre négociation des partis. C'est ce qui s'est passé lors de la dernière convention collective. Vous avez négocié une clause de rétrogradation qui vous satisfait, semble-t-il... je ne sais pas si elle vous satisfait ou pas.

M. Théberge: Oui.

M. de Belleval: II y a des balises qui vous permettent de contrôler l'usage de cette formule. Vous me dites que vous auriez négocié ça de façon illégale et le gouvernement avec vous. Ce qu'on en sait, c'est que le jurisconsulte du gouvernement nous dit que cette clause était effectivement légale, qu'en vertu de la loi en vigueur, la rétrogradation ne relève pas de la Commission de la fonction publique. Par conséquent, c'est une matière négociable. J'ai déclaré à plusieurs reprises qu'effectivement, c'était mon intention de maintenir cet aspect de la gestion de la fonction publique dans le domaine du négociable et que la loi, telle que rédigée et telle qu'amendée, permet effectivement cette chose. Je n'ai absolument pas l'intention de sortir ça du champ négociable, parce qu'il y a des caractères qui peuvent être facilement odieux qui seraient attachés à un aspect semblable. Mais, même à ça, si, par hasard, ce n'est pas encore assez clair — je l'ai déclaré aussi à plusieurs reprises, on n'a qu'à ajouter le mot "rétrogradation" ou les mots "réorientation de la carrière", ou quoi que ce soit d'autre, dans les matières qui sont énumérées a), b), c), d), e), f), g); il n'y a pas de problèmes là-dessus.

M. Théberge: Je vous ferais remarquer à ce sujet qu'à l'article 90, c'est écrit "tout fonctionnaire incompétent dans l'exercice de ses fonctions"... Cela, c'est une raison particulière. "Tout fonctionnaire incompétent dans l'exercice de ses fonctions ou incapable de les exercer". Voilà deux raisons particulières pour rétrograder une personne.

M. de Belleval: C'est dans la convention collective.

M. Théberge: Non.

M. de Belleval: Dans quoi?

M. Théberge: Dans le projet de loi.

M. de Belleval: Oui.

M. Théberge: Dans le projet de loi, c'est de cette façon que c'est écrit: "Incompétent dans l'exercice de ses fonctions...

M. de Belleval: Vous parlez de l'article 88? M. Théberge: Oui.

M. de Belleval: Mais, comme l'a fait remarquer M. Jolivet, l'application de l'article 88 est assujettie à la Loi sur le régime syndical et je viens de vous le démontrer...

M. Théberge: De toute façon, j'aimerais mieux que ce soit écrit bien clairement, si c'était possible.

M. de Belleval: C'est le but de notre exercice...

M. Théberge: C'est ça.

M. de Belleval: C'est de voir sur quoi il peut y avoir besoin d'éclaircissements supplémentaires. Quand on arrivera en deuxième lecture, article par article, on pourra, à ce moment-là, clarifier ça, et je suis certain, comme je l'ai dit, que les valeureux défenseurs du syndicalisme que sont maintenant devenus...

M. Pagé: Je t'ai toujours été, Mme le Président.

M. de Belleval: ... les représentants de l'Opposition vont se faire fort de faire ça. Mais, pour plus de sûreté, savez-vous, on pourra peut-être se rencontrer d'ici ce temps pour en discuter plus en détail?

M. Théberge: Pour ma part, il n'y a pas là de problème. Ce que je veux, c'est que ce soit écrit.

M. de Belleval: Bien sûr.

M. Jolivet: La deuxième partie de ma question, Mme le Président...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: ... n'a pas encore eu de réponse: C'était au sujet du droit à l'information du fonctionnaire qui pourrait sortir de la documentation. Qu'est-ce qui donne les garanties, par rapport à l'autre actuelle, qui est celle du ministre, qui a un pouvoir dont vous faisiez mention au niveau du ministère de l'Education tout à l'heure?

M. Théberge: Je ne suis pas sûr de bien comprendre la question.

M. Jolivet: Vous dites: On devrait, comme fonctionnaires, avoir le droit d'informer la population de ce qui se passe à la fonction publique. C'est son droit d'être informée. Actuellement, vous avez dit que le ministre ou encore les sous-ministres ont le pouvoir de dire aux fonctionnaires, selon les règles d'éthique, de ne pas sortir de documentation qui se situe à l'intérieur des discussions du ministère. Vous avez fait mention de ce qui s'est passé au ministère de l'Education.

Je vous pose la question maintenant. Si ce droit était donné où le fonctionnaire aurait le droit de sortir, quelles sont les garanties qu'il faudrait avoir — si c'est cela que vous voulez avoir — pour qu'il n'utilise pas à des fins personnelles de vengeance, de jalousie ou peu importe les termes qu'on peut employer, pour faire croire aux gens qu'il donne de l'information alors que, simplement, il sert ses fins personnelles?

M, Théberge: Vous ne pouvez pas avoir de garantie extrêmement formelle là-dessus. De toute façon, actuellement, ce qui se passe, c'est que vous n'avez pas le droit de divulguer l'information. Par voie de conséquence, la seule information dont dispose la population en regard de ce qui se passe à l'intérieur de la fonction publique, c'est celle que veut bien lui laisser l'homme politique. D'accord? On constate cette situation. On se dit: II nous semble que, dans un régime démocratique, il devrait y avoir des stipulations. De toute façon, il y a beaucoup de pays qui légifèrent dans ce sens et il y a des modalités et il y a beaucoup d'affaires là-dedans, je suis bien d'accord, sauf que nous émettons le principe. On n'invente rien de nouveau. On reprend ce que René Lévesque disait en campagne électorale lorsqu'il nous avait annoncé que la fonction publique deviendrait transparente.

On dit: Câline, ils veulent faire une loi sur la fonction publique. Pourquoi n'ont-ils rien fait là-dessus? Je comprends qu'il y a beaucoup de modalités extrêmement compliquées. Il est bien entendu que nous serons d'accord — nous les premiers — pour dire que si, vous voulez construire une route quelque part, autant que possible, on n'annonce pas la nouvelle deux ans avant pour que la spéculation prenne dans te coin. On est entièrement d'accord sur cela. Le droit à l'information là-dedans, on serait un peu plus sélectif.

On dirait: La volonté qu'y mettait le chef du gouvernement lorsqu'il était en campagne électorale...

M. Jolivet: Cela va pour moi, cette partie sur l'éthique. Je pense qu'on a l'éthique professionnelle au niveau de la fonction publique. Ce n'est pas cela que je dis. Je dis: Quelles sont les formes de garantie qu'on doit donner pour que quelqu'un n'utilise pas, seulement par phénomène de vengeance ou pour vouloir avoir te poste de l'autre en haut, des documents qui appartiennent à un ministère pour dire après cela, sous le couvert du droit de la liberté de parole et d'information publique, que j'ai utilisé cela.

D'après vous, quelles seraient les garanties qu'on devrait donner?

M. Théberge: J'avoue que je ne le sais pas. Honnêtement, je ne sais pas. On pourra reparler de cela aussi.

Le Président (Mme Cuerrier): II est près de 18 heures. Y a-t-il d'autres interventions ou est-ce le moment de remercier...

M. Pagé: Mme le Président...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Je voudrais simplement remercier M. Théberge de sa participation d'aujourd'hui à nos travaux et lui faire part de mes meilleurs voeux de succès dans les objectifs qu'il veut atteindre par cette comparution.

M. le ministre faisait état tout à l'heure que vous auriez l'occasion de vous rencontrer sous peu, avant, peut-être, la rédaction d'amendements éventuels. C'est le même ministre qui nous di-sait,cependant, il y a quelques minutes, qu'il voulait que le débat soit public et que l'Opposition y

participe. De toute façon, on aura l'occasion d'y revenir à l'étude article par article et, quant a nous, vous pouvez être assurés que nous avons une position commune, soit l'opposition au projet de loi. En terminant, je voudrais vous remercier et vous dire que, quant à moi, il a été beaucoup plus agréable de vous rencontrer aujourd'hui et l'échange que nous avons eu aujourd'hui a été sûrement beaucoup plus agréable et plus serein que le dernier échange que nous avons eu.

M. Théberge: C'était une partie de hockey. Vous savez ce que c'est!

M. Pagé: Merci.

M. de Belleval: Alors, moi aussi, M. Thé-berge... Avez-vous quelque chose à dire avant, M. Le Moignan?

M. Le Moignan: Ah oui! Cela sera plus beau. Je vous laisse le dessert. Je veux simplement remercier M. Théberge des bonnes réponses qu'il a fournies à mes quelques petites questions et j'ai appris beaucoup de choses aujourd'hui.

Je m'intéresse, comme l'Union Nationale, à tout ce débat sur le projet de loi 53 et nous voulons vous souhaiter le plus grand succès possible et nous souhaitons que le gouvernement ne vous écoute pas toujours d'une oreille sourde.

Comme le ministre l'a dit, on le verra avec les preuves qu'il va nous apporter, avec les modifications, avec les garanties surtout, qu'il puisse se donner satisfaction et nous aurons là la véritable transparence, le ministre vient d'en parler, et nous essayons d'y croire encore et toujours aussi longtemps que le gouvernement va continuer. Je vous remercie, M. Théberge.

M. de Belleval: Merci de votre participation. Je note que ce matin, plutôt que de lire le projet original, le mémoire que vous avez envoyé, vous avez fait une déclaration extrêmement articulée d'ailleurs, qui ouvrait de larges horizons à la discussion. Cela nous a permis effectivement d'avoir, je pense, une discussion d'un niveau élevé qui tranchait sur celle que nous avions eue auparavant, à laquelle faisait référence le député de Port-neuf. Je pense que c'est effectivement le but que nous recherchions par cette commission. J'ai déjà déposé des projets d'amendements qui se refléteront dans une rédaction finale un peu plus tard et il y en aura sans doute d'autres. C'est normal, d'ailleurs, que, dans le cours des discussions qui sont actuellement publiques, il y ait aussi des rencontres avec les différents groupes, les associations, dans les semaines qui viennent, puisque, de toute façon, il n'y a pas péril en la demeure. Nous avons déjà dit que nous procéderions avec tout le temps nécessaire pour véhiculer la loi à travers les méandres de la législature. Il y aura donc certainement d'autres possibilités de se voir et de clarifier nos positions respectives dans ce domaine. Il reste que, sur le point fondamental que vous avez soulevé, l'élargissement de l'aire de négociation, c'est une matière qui relève d'une autre instance et qui, à l'avenir, d'ailleurs, relèvera d'une autre loi que la loi 53. Je suis certain que, sur ce plan-là aussi, on aura certainement de nouvelles rencontres. Je vous remercie encore une fois et je vous félicite.

Le Président (Mme Cuerrier): II me reste à me faire le porte-parole de la commission de la fonction publique pour remercier le Syndicat des professionnels du gouvernement du Québec pour sa contribution aux travaux de cette commission. J'ajourne les travaux de la commission de la fonction publique sine die.

(Fin de la séance à 17 h 52)

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