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Etude du projet de loi no 53 Loi sur la fonction
publique
(Dix heures dix minutes)
Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, messieurs!
Nous avons maintenant quorum. Je déclare donc ouverte cette
séance de la commission de la fonction publique.
Sont membres de cette commission: M. Bel-lemare (Johnson), M. Boucher
(Rivière-du-Loup), M. Caron (Verdun)...
M. Pagé: Remplacé par M. Marchand...
Une Voix: M. Marchand est inscrit à la commission.
M. Pagé: M. Marchand (Laurier) fait partie de la
commission?
Le Président (Mme Cuerrier): Oui, M. Marchand fait partie
de la commission.
M. Pagé: C'est moi qui remplace M. Caron.
Le Président (Mme Cuerrier): M. Caron (Verdun)
remplacé par M. Page (Portneuf); M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. de
Belleval (Charlesbourg), M. Dussault (Châteauguay), M. Gendron
(Abitibi-Ouest), M. Gravel (Limoilou), M. Grégoire (Frontenac), M.
Jolivet (Laviolette), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Le Moignan (Gaspé),
M. Marchand (Laurier), M. Marcoux (Rimouski), Mme Ouellette (Hull), M. Picotte
(Maskinongé), M. Vaillancourt (Orford).
M. Pagé: M. Picotte est remplacé par M. Gar-neau
(Jean-Talon).
Le Président (Mme Cuerrier): M. Picotte
(Maskinongé) remplacé par M. Garneau (Jean-Talon).
Cette commission entendra aujourd'hui le Syndicat des professeurs de
l'Etat du Québec, dont le porte-parole est M. Jean Lalonde,
président, et, si c'est possible, le Syndicat des professionnels du
gouvernement du Québec, dont Mme Renée Lebrun est
secrétaire et porte-parole.
M. Pagé: Mme le Président...
Le Président (Mme Cuerrier): Le Syndicat des professeurs
de l'Etat du Québec veut-il s'approcher, s'il vous plaît!
M. Bellemare: Mme le Président, je soulève un point
de règlement.
Je comprends qu'un avis avait été donné, par M.
Jacques Pouliot, le secrétaire des commissions, pour qu'on puisse
entendre le Syndicat des fonctionnaires provinciaux et, deuxièmement, le
Syndicat des professionnels du gouvernement du
Québec. C'est l'avis qu'on a reçu. Il y a un autre avis
qui a précédé cela, qui nous disait que tout avait
été changé après cela, le mercredi 19 octobre, le
20 octobre, tout le mois d'octobre était rempli pour d'autres.
Ceux-là, je pense, ont dû recevoir les avis, mais je ne
trouve pas celui à qui vous demandez ce matin de se faire entendre. Je
ne sais pas si, en vertu de l'article 119, les avis ont été
envoyés conformément à notre règlement.
M. Pagé: Sur la question de règlement...
Le Président (Mme Cuerrier): Je n'ai pas entendu la fin de
votre...
M. Beilemare: Est-ce que celui que vous avez invité, le
Syndicat des professeurs de l'Etat du Québec, a reçu un avis de
sept jours?
M. Lalonde (Jean): J'ai reçu un avis de sept jours. J'ai
reçu un avis pour le 16 et j'ai demandé qu'il soit reporté
au 17. Ce qu'on m'a accordé.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: Mardi soir dernier, lorsque nous avons
terminé nos travaux, vous avez ajourné cette commission sine die.
On se rappellera que beaucoup de gens croyaient que la commission aurait pu,
somme toute, recommencer les travaux hier matin. J'aimerais savoir si vous avez
donné au Syndicat des fonctionnaires provinciaux, un avis pour
comparaître ici ce matin, dans un premier temps. C'était la
question du député de Johnson. Il apparaît que les groupes
qui interviennent devant nous ce matin ont reçu, effectivement, l'avis
de sept jours. Je voudrais m'enquérir auprès de vous pour savoir
par le fait même, étant donné que le Syndicat des
fonctionnaires provinciaux du Québec n'avait pas terminé son
audition et qu'on est encore en train de se poser mutuellement des questions
si vous lui avez donné avis de venir nous rencontrer ce
matin.
Le Président (Mme Cuerrier): Les avis sont donnés
en Chambre, MM. les députés, sont donnés à
l'Assemblée nationale; comme vous l'avez entendu dire par M. le leader
du gouvernement, les travaux de la Chambre sont chargés, les commissions
sont nombreuses. Il vous a dit, à ce moment, et je ne fais que
répéter ce qu'il disait, que le syndicat a été
reçu deux fois. J'imagine qu'il pourrait être possible qu'il soit
reçu après les auditions des différents mémoires,
je n'en sais rien, sauf qu'il reste encore des associations et des syndicats
qui n'ont pas été entendus. Il faut que tout le monde ait la
chance d'être entendu. Selon ce que j'ai su, les avis ont
été donnés en bonne et due forme. Je ne fais que m'en
tenir aux avis qui sont donnés à l'Assemblée nationale,
comme la commission doit le faire d'ailleurs.
M. Pagé: D'accord, Mme le Président. Sur la
question des avis qui sont donnés à l'Assemblée nationale,
je suis d'accord là-dessus. Cependant, ce que je voudrais savoir, c'est
si cette commission, si le secrétariat des commissions a donné un
avis au Syndicat des fonctionnaires provinciaux, lui offrant de venir
comparaître devant nous ce matin. Mme le Président, j'ai
posé une question en vertu de l'article 34, hier, on se le rappellera,
et le président m'a référé à la commission
d'aujourd'hui.
Le Président (Mme Cuerrier): De toute façon, M. le
député, ce n'est pas à moi d'appeler les associations ici,
à la commission, mais bien au leader du gouvernement de donner ces avis
en Chambre. Je vous demanderais de reporter votre question en Chambre si...
M. Pagé: Mme le Président, je soulève une
question de règlement. Je l'ai soulevée en Chambre hier, en vertu
de l'article 34. Ce qu'on m'a répondu...
Le Président (Mme Cuerrier): Bon! Ecoutez! Je m'en
tiens...
M. Pagé: Ecoutez! On ne commencera pas un débat ce
matin...
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Portneuf, s'il vous plaît!
M. Pagé: Je l'ai posée en vertu de l'article 34 et
on m'a référé à la commission, ici ce matin.
Le Président (Mme Cuerrier): Je m'en tiens aux avis qui
m'ont été donnés et, ce matin, nous recevons le Syndicat
des professeurs de l'Etat du Québec. C'est ce à quoi je suis tenu
par le mandat qui est donné à cette commission.
M. Bellemare: Mme le Président, on perd un temps
considérable, puisque je pense, moi, au point de vue constitutionnel et
au point de vue de la procédure, que c'est normal; si les messieurs qui
sont devant nous ont reçu, depuis sept jours, une convocation, c'est
normal que nous les entendions et je pense qu'on perd un temps pour rien en
procédure, parce qu'on a un organisme, toujours, qui est
véritablement bien accrédité et on devrait procéder
immédiatement.
Le Président (Mme Cuerrier): Alors, nous entendons
immédiatement le Syndicat des professeurs de l'Etat du Québec, M.
Jean Lalonde, président. Vous avez la parole, monsieur.
Syndicat des professeurs de l'Etat du
Québec
M. Lalonde (Jean): Je voudrais, avant de commencer,
présenter les membres qui sont avec moi. A ma gauche, Yvon Thiboutot,
représentant du secteur des Affaires culturelles, arts
dramatiques...
M. Bellemare: Yvon?
M. Lalonde (Jean): Yvon Thiboutot.
M. Bellemare: Thiboutot.
M. Lalonde (Jean): On ne prononce pas le "t".
M. Bellemare: Chez nous, on a des familles de Thiboutot à
Acton. On les appelles Thiboutot.
Le Président (Mme Guerrier): Si vous voulez. M. le
Président.
M. Lalonde (Jean): Hervé Perret, secteur de l'Institut de
tourisme et d'hôtellerie du Québec, ministère du Tourisme,
de la Chasse et de la Pêche.
M. Bellemare: Perret.
M. Lalonde (Jean): II y a un "t" là aussi.
M. Bellemare: Hervé Perret.
M. Lalonde (Jean): Perret. P-E-R-R-E-T.
M. Bellemare: Perret, ah oui...
M. Lalonde (Jean): Et non, Perret.
M. Bellemare: D'accord. Perret. Vous venez de la Bretagne, vous.
Perret.
M. Lalonde (Jean): Daniel Fines, ministère de
l'Immigration, centre d'orientation et de formation des immigrants.
M. Bellemare: Flynn? Est-ce qu'il parle français, oui?
M. Lalonde (Jean): II faut le lui demander.
Absent, Jean-François Beaudet, secteur Agriculture, et Jean
Bouchard, Conservatoire de musique, qui sont retenus par leurs tâches
professionnelles.
Nous avons présenté un mémoire qui a
été axé sur trois points, dont le premier,
réaménagement du pouvoir patronal et restriction des objets de
négociation.
Quand on parle de l'article 3, insuffisance, révocation,
suspension, rétrogradation, congédiement, mise en
disponibilité, etc., ces articles restent-ils négociables?
M. Bellemare: Mme le Président, ne serait-il pas
préférable, avant que le syndicat ne nous pose des questions,
qu'on entende son mémoire et, après cela, nous pourrons lui poser
des questions? S'il en a, il pourrait les ajouter. Je crois que c'est normal.
C'est ainsi que la procédure va.
Le Président (Mme Cuerrier): M. Lalonde, ou bien vous
pouvez lire le mémoire, ou bien le résumer.
Merci.
M. Fines (Daniel): Le Syndicat des professeurs de l'Etat du
Québec a été accrédité pour
représenter les professeurs à l'emploi du gouvernement. Il compte
450 membres dans ses rangs. Les professeurs dispensent leur enseignement dans
des institutions du ministère des Affaires culturelles, du
ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, du
ministère de l'Immigration et du ministère de l'Agriculture.
Sur la base des interventions, les représentants du
présent gouvernement, les membres de la fonction publique ont pu
espérer une amélioration de leurs conditions de travail et une
plus grande satisfaction dans l'exercice de leurs fonctions.
Il était notamment question de transparence de la fonction
publique, d'élimination de l'arbitraire, d'augmentation de
l'efficacité. De façon générale, nous devons vous
soumettre que le projet de loi 53 ne vient pas combler ces espoirs. Tout au
contraire.
Réaménagement du pouvoir patronal et restriction des
objets de négociation. Tout d'abord, les salariés et les
syndicats dûment accrédités qui les représentent
sont absents des objets de ce projet de loi. Celui-ci ignore une des
réalités essentielles en matière de relations de travail
et ne traite que du réaménagement du pouvoir patronal.
Dans les circonstances, le gouvernement a, de toute évidence,
succombé à la tentation de réaménager à la
hausse son pouvoir, en soustrayant du champ de la négociation de la
convention collective un certain nombre d'éléments qui s'y
trouvent présentement.
Nous pensons que le gouvernement fait fausse route en s'imaginant que le
décret d'un ministre est préférable à des
conditions de travail librement négociées par les parties, si
nous envisageons cette question sous l'angle du rendement, de
l'efficacité au travail des membres de la fonction publique.
Une telle orientation gouvernementale va pourtant dans le sens contraire
des leçons qui ont été tirées des
expériences et des décrets de conventions collectives au cours
des dix dernières années au Québec.
Dans les circonstances, nous devons réaffirmer le
caractère essentiel, à notre avis, de la libre négociation
entre le gouvernement et les syndicats. Les restrictions à cette
négociation apparaissant au projet de loi 53 devraient donc en
être retirées.
Responsabilité du recrutement et du mouvement de personnel. Le
gouvernement a jugé à propos de confier à l'Office de
recrutement la responsabilité, notamment, de nommer les candidats
à la fonction publique, et, dans un même souffle, de permettre une
délégation de cette responsabilité à tout
sous-ministre.
Cette dernière délégation nous apparaît
multiplier indûment les autorités qui peuvent exécuter la
même fonction, et équivaut à faire perdre à l'Office
le reste de l'utilité qu'il pouvait posséder.
En vertu du projet de loi, l'Office n'a pas juridiction notamment dans
le cas des sous-ministres et autres employés de rang équivalent,
et dans le cas des employés occasionnels.
Quelle juridiction sera exercée par l'office si la
délégation au sous-ministre est le moindrement mise en
application? Faut-il ne voir dans l'office de recrutement qu'un simple paravent
visant à camoufler l'autorité réelle du ministre de la
Fonction publique en matière de recrutement: que ce soit une
autorité directe ou par personne interposée?
De façon particulière, au Syndicat des professeurs de
l'Etat du Québec, le mode actuel de recrutement et sélection des
candidats à un poste vacant d'enseignant dans la fonction publique est
régi par l'arrêté en conseil no 909, en date du 18 mai
1966, et accorde à notre syndicat la présence d'un
représentant au sein du jury et des sous-comités de
sélection. Cette procédure fut établie à la suite
de représentations en ce sens, durant plusieurs années, par les
officiers des associations d'enseignants à l'emploi du gouvernement.
Vous comprendrez que nous n'allons pas renoncer aisément à cet
acquis. Le projet de loi 53 ne fait aucune mention de cette
réalité: son sort dépend de la réglementation
qu'adoptera l'Office de recrutement.
Par ailleurs, le ministre de la Fonction publique assujettit
carrément les mouvements de personnel à son autorité.
Le projet de loi 53 lui accorde, à notre avis, des pouvoirs
exorbitants, des pouvoirs comme on n'en trouve même pas dans les
conventions collectives entre un employeur puissant et un syndicat faible. Dans
un tel cas, les salariés ont toujours la possibilité de soumettre
leurs griefs à l'arbitrage d'un tiers impartial.
Possibilité que les membres de la fonction publique n'auront pas,
car leurs contestations sont dirigées vers un organisme qui doit
s'acquitter de rôles incompatibles.
En effet, la Commission de la fonction publique doit remplir un
rôle de consultant du ministre de la Fonction publique et du Conseil du
trésor en matière de règlements relatifs au recrutement et
au mouvement pour quelque cause du personnel de la fonction publique.
Dans un même temps, la commission devrait agir comme instance
impartiale pour juger de certains recours exercés par les membres de la
fonction publique.
Nous pensons que le projet de loi 53 crée une instance
discréditée, avant même que celle-ci n'ait entendu un seul
dossier. C'est une structure inacceptable.
La règle du mérite. Le projet de loi 53 établit la
règle du mérite en matière de recrutement et de promotion
du personnel de la fonction publique.
Voilà une notion particulièrement grise: un peu comme la
justice, l'équité. A l'examen, au surplus, nous constatons que le
mérite s'accommode mal d'une structure à deux temps, comme celle
proposée par le projet de loi 53 en matière de recrutement et de
mouvement, pour quelque cause du personnel.
Au fond, la séparation de ces tâches en deux temps ou deux
instances nous apparaît bien artificielle. L'examen de
l'élément du mérite accentue l'impression du paravent, de
l'inutilité de l'office
de recrutement dont nous avons traité plus haut. Nous constatons
que cette double structure peut même constituer une source d'injustice
pour les fonctionnaires et occasionner une bonne part de frustration.
Un exemple permettrait d'illustrer notre point de vue. Un fonctionnaire
présente une demande à un poste vacant qui représenterait
pour lui une promotion. Il se trouve parmi un groupe de cinq fonctionnaires
intéressés au poste. Le ministre de la Fonction publique
décide, en vertu des règlements et de la règle du
mérite, de ne retenir aucune des cinq candidatures de fonctionnaires et
il fait appel à l'Office de recrutement. En vertu du règlement et
de la règle du mérite, l'office nomme un candidat de
l'extérieur de la fonction publique.
Même si nous pouvons espérer que les règlements, en
matière de recrutement, et que les règlements, en matière
de promotion, seront équivalents, sinon identiques, puisqu'ils seront
filtrés au Conseil du trésor, il reste qu'une instance A a
apprécié le mérite de notre fonctionnaire et qu'une
instance B a apprécié le mérite du candidat de
l'extérieur. Aucune instance ne pourra jamais apprécier si notre
fonctionnaire avait plus de mérite que le candidat de
l'extérieur. Ils n'ont jamais été mesurés l'un
à l'autre.
C'est pour cela que nous disons que cette structure bicéphale est
génératrice d'injustices et va entraîner bon nombre de
frustrations au sein du personnel de la fonction publique.
Non seulement l'office de recrutement et le ministre de la Fonction
publique devraient-ils appliquer des règlements identiques, il faudrait
que ces règlements soient appliqués par les mêmes
personnes, pour assurer, au moins, que la justice paraisse avoir
été rendue.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.
M. de Belleval: Je vous remercie d'abord d'avoir
présenté ce mémoire. Il y a une partie qui
m'apparaît particulièrement intéressante. C'est celle qui
traite de la collaboration qui devrait exister entre le ministère, d'une
part, et l'office de recrutement, d'autre part, dans l'administration des
règlements.
Effectivement, nous avons étudié cette question et il est
possible, par une réglementation appropriée, de faire en sorte
que, comme vous le dites, non seulement les mêmes règlements
s'appliquent, mais que les mêmes personnes appliquent des
règlements identiques.
Il n'y a rien qui empêcherait, par exemple, en vertu des
règlements, que les jurys qui apprécient les candidats de
l'intérieur et de l'extérieur pour un même poste ou une
même série de postes, soient les mêmes personnes, ce qui
permet d'éviter les ambiguïtés que vous soulignez. Je dois
signaler que, dans le cas de concours généraux, il arrive que
plusieurs phases ou certaines phases d'un concours ne soient pas
administrées par les mêmes personnes, compte tenu du trop grand
nombre de candidats. Parfois, il faut faire siéger plusieurs jurys en
même temps.
Autrement dit, le problème ne disparaît pas, même si
on confie à un même organisme l'organisation d'un concours. Il se
peut fort bien que des phases de ce concours doivent être
appréciées par différentes personnes, compte tenu des
masses en cause. Enfin, c'est tout le problème des concours qui
resterait de toute façon, quelle que soit l'instance qui les
administre.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: A la page 3 de votre mémoire, vous vous
demandez s'il ne faut pas voir dans l'office de recrutement projeté un
simple paravent visant à camoufler l'autorité réelle du
ministre de la Fonction publique en matière de recrutement.
J'aimerais que vous élaboriez davantage cette opinion que vous
avez à ce sujet. J'aimerais aussi en particulier que vous nous expliquez
de quelle façon l'office serait un paravent pour le ministre de la
Fonction publique.
M. Lalonde (Jean): C'est que, pour nous, actuellement, on ne
connaît pas... enfin on a le règlement qui nous régit face
au recrutement, l'arrêté en conseil 909. On le connaît.
Mais, est-ce que ce règlement va être introduit dans le nouveau
règlement du ministre? C'est que, face à l'office de recrutement,
il y a des règlements qui devront être établis. On ne les
connaît pas. Devant l'inconnu, on se pose des questions. C'est cela notre
problème. Je pense que le projet de loi, en partie, c'est cela.
On dit: Règlement du ministre. Je suis bien d'accord avec le
règlement du ministre. Il peut en faire des règlements, le
ministre, mais c'est quoi, le règlement? Je ne le connais pas. L'office
de recrutement, je ne peux pas en dire plus, je ne connais pas les
règlements qui vont régir l'office de recrutement. On dit: Un
office de recrutement. J'aimerais connaître le règlement qui va
faire que l'office de recrutement va fonctionner d'une certaine
façon.
M. Chevrette: Mais il y a un règlement qui existe
présentement?
M. Lalonde (Jean): Oui.
M. Chevrette: II va continuer à exister tant et aussi
longtemps qu'il ne sera pas changé.
M. Lalonde (Jean): Oui, mais qui va nous dire cela? Est-ce que
vous nous dites, ce matin, qu'il va continuer à fonctionner, que c'est
acquis, qu'on va toujours être représenté aux concours pour
les nouveaux candidats...
M. de Belleval: Là-dessus...
M. Lalonde (Jean): ... parce qu'il n'y a pas de mouvement
je veux apporter la décision de personnel chez nous. Quand un
professeur est engagé professeur de violon, on ne peut pas lui demander
de jouer de la flûte.
M. de Belleval: Non, je sais que...
M. Lalonde (Jean): Un professeur de cuisine, c'est la même
chose, on ne peut pas lui demander de...
M. de Belleval: De jouer du violon.
M. Lalonde (Jean): ... de faire du français.
M. de Belleval: Non, il peut...
M. Lalonde (Jean): Oui.
M. de Belleval: Là-dessus, le problème n'est pas
différent, parce qu'il y a un projet de loi, par rapport à la
situation actuelle. Actuellement, c'est la commission qui fait ces
règlements. La commission a fait un règlement, mais le projet de
loi indique très bien que les règlements des anciennes instances
demeurent en vigueur tant qu'on ne les a pas changés, de la même
façon que le règlement que vous avez actuellement demeure en
vigueur tant qu'il n'est pas changé. S'il doit être changé,
il n'est pas éternel, ce règlement, il n'a pas la promesse de la
vie éternelle comme l'Eglise catholique.
A un moment donné, un ministre peut décider ou la
commission actuellement peut décider de le changer, comme un ministre,
à l'avenir, pourra décider de le changer. S'il faut le changer,
à ce moment-là, il le sera. Comme vous le savez, en vertu de la
nouvelle procédure, ce sera fait d'une façon beaucoup plus
transparente que maintenant, puisque, si le ministre, dans l'avenir, veut
changer ce règlement, il faudra qu'il demande l'avis de la nouvelle
Commission de la fonction publique, qui donnera un avis pour juger du point de
vue de la règle du mérite. Cet avis sera transmis à
l'Assemblée nationale qui pourra aussi en discuter en Commission
permanente de la fonction publique, si c'est une question suffisamment
importante.
Dans le cadre de vos conventions collectives, vous pourrez en discuter.
Vous avez des comités permanents avec vos employeurs, vous pourrez en
discuter. C'est actuellement la situation. De ce point de vue, il n'y a pas de
changement. C'est la même chose. Les règlements, vous les
connaissez, ils sont en vigueur. Ils peuvent être changés
maintenant, comme ils pourront l'être dans l'avenir. Tout le reste est
ouvert à la libre négociation des parties.
M. Lalonde (Jean): Quand vous dites que la nouvelle loi reporte
ces règlements, à quel article est-ce? Je ne l'ai pas
trouvé, je m'excuse, M. le ministre.
M. de Belleval: Dans les dispositions transitoires, il y a une
disposition qui indique que les règlements qui sont en vigueur, en vertu
des pouvoirs de la Commission de la fonction publique, demeurent en vigueur,
jusqu'à ce que les nouvelles instances...
M. Lalonde (Jean): Jusqu'à la fin de la convention
collective?
M. de Belleval: Non, ils demeurent en vigueur
indéfiniment, jusqu'à ce qu'ils soient changés. Quant
à votre convention collective, elle demeure intégralement en
vigueur elle aussi. Le processus de négociation va continuer avant comme
après.
Comme vous le savez, en vertu des clarifications et même des
projets d'amendements que j'ai déposés, même en ce qui
concerne la procédure des griefs en dernier recours, le statu quo sera
maintenu, même après l'expiration de votre convention collective.
C'est le jeu de la libre négociation qui va jouer. Entre autres, c'est
à la suite d'interventions que vous avez obtenu dans le règlement
actuel d'être consultés pour les promotions, d'avoir un membre qui
fasse partie du jury. Ce n'est pas en vertu des pouvoirs du ministre ou de
l'ancienne commission.
M. Lalonde (Jean): C'est en vertu de l'ancienne...
M. de Belleval: C'est à la suite de la libre
négociation. La libre négociation va continuer.
M. Lalonde (Jean): Ici, j'ai l'arrêté en conseil 909
qui dit bien: Règlement de la Commission de la fonction publique relatif
au personnel enseignant.
M. de Belleval: C'est ce que je dis. C'est en vertu d'un...
M. Lalonde (Jean): Ce n'est pas contenu dans notre convention
collective, ce règlement.
M. de Belleval: Non. Cela ne l'était pas autrefois. Cela
ne l'est pas actuellement. C'est en vertu d'un règlement de la
Commission de la fonction publique. A l'avenir, tant que ce règlement ne
sera pas changé par le ministre, il va demeurer en vigueur. Cela va
continuer. Vous aviez fait des représentations, je suppose, aux anciens
gouvernements pour obtenir des dispositions particulières dans le cadre
de cet arrêté en conseil, de ce règlement. C'est vous qui
aviez demandé d'être membre d'un jury ou vous l'a-t-on
concédé gracieusement?
M. Lalonde (Jean): On ne concède jamais rien
gracieusement.
M. de Belleval: Vous l'aviez demandé? C'est ce que je dis.
C'est en vertu de la libre négociation des parties que vous avez obtenu
qu'un règlement de la commission vous accorde des dispositions
particulières et des avantages particuliers. C'est exactement la
même situation qui va se produire, une fois le projet de loi 53
adopté sauf que le règlement, au lieu d'être proposé
par la commission, sera proposé par le ministre. Les dispositions
internes de ce règlement, sur lesquelles vous êtes intervenus...
Vous allez continuer à intervenir. Si, dans l'avenir, on voulait changer
ce règlement...
M. Lalonde (Jean): Vous allez nous en parler.
M. de Belleval: L'ancienne commission n'était pas
obligée de vous en parler. L'ancien gouvernement qui a
élaboré ce règlement, qui a fait des
représentations à la commission parce que c'est la
commission qui l'a élaboré, ce règlement vous en
avait parlé. Cela va continuer, c'est la même chose. Vous allez
continuer à vous parler. Autrement dit, il n'y a pas de changement dans
la situation actuelle de ce point de vue. L'article en question, c'est
l'article 129.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Portneuf, M. le député de Johnson et M. le député
d'Abitibi-Ouest m'avaient demandé la parole.
M. le député de Portneuf.
M. Pagé: Merci, Mme le Président. D'abord, je
voudrais remercier nos intervenants de ce matin de nous présenter leur
mémoire...
M. Lalonde (Jean): Je m'excuse, je vous entends mal.
M. Pagé: Oui? On va parler plus fort. On va rapprocher les
micros.
M. de Belleval: La voix du député de Portneuf est
comme son parti, elle est éteinte.
M. Bellemare: Celle du ministre est bien enrhumée.
M. Pagé: Mme le Président, sur cette question, je
comprends les blagues du ministre...
M. Lalonde (Jean): On n'est pas ici pour chercher qui va mourir
ce matin.
Le Président (Mme Cuerrier): Je serais censée vous
prêter la vôtre de temps en temps...
M. Marchand: Le cercueil était assez grand pour cela.
Le Président (Mme Cuerrier): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le ministre, à l'ordre! C'est M. le député
de Portneuf qui a la parole maintenant.
M. de Belleval: Cela n'a pas pris trois jours pour
ressusciter.
M. Pagé: Soyez donc sérieux! Messieurs, je tiens
à vous remercier...
M. de Belleval: II faut mettre une pointe d'humour
là-dedans, Mme le Président.
M. Pagé: Mme le Président, est-ce que je
dérange le ministre?
M. de Belleval: Je m'excuse.
Une Voix: Ce n'est pas de l'esprit breton, c'est de l'esprit
gaulois.
Le Président (Mme Cuerrier): S'il vous plaît!
M. Bellemare: Ce n'est sûrement pas une belle mort qu'il a
faite.
Le Président (Mme Cuerrier): S'il vous plaît! M. le
député de Portneuf, vous avez toujours la parole.
M. Pagé: J'attendais qu'on ait terminé les farces
d'un côté et de l'autre.
Messieurs, je tiens à vous remercier de la présentation de
votre mémoire. Je voudrais tout d'abord aborder la question dont vous
avez fait état tout récemment, savoir la question des pouvoirs
réglementaires. En vertu de l'article de ce projet de loi, les
règlements, tels qu'ils sont édictés actuellement
subsistent jusqu'à ce qu'ils soient remplacés.
Je comprends votre inquiétude, mais je ne crois pas que le
ministre ou quiconque puisse vous confirmer, ce matin, que les
règlements continueront à s'appliquer, comme tels, ceux auxquels
vous faites référence, l'arrêté en conseil 909,
parce que, en vertu du projet de loi, lorsqu'il sera adopté, lorsqu'il
deviendra loi, ce pouvoir réglementaire sera conféré au
ministre.
Il y a beaucoup de choses qui peuvent se passer et qui peuvent
éventuellement motiver le ministre à modifier ces
règlements. On sait que le dépôt du rapport Martin aura
lieu au printemps. En fait, il y a toute une gamme de possibilités.
Vous semblez cependant inquiets de certains droits que vous avez acquis,
entre autres, le droit à la représentation syndicale au sein des
jurys. Je ne pense pas que cette commission, ce matin, puisse vous dire: Ne
soyez pas inquiets; le règlement va rester. Ce n'est pas le rôle
de la commission. Une chose est certaine, le ministre pourrait vous donner
l'assurance, soit que le règlement subsiste ou encore qu'à
l'intérieur d'un autre règlement, un tel pouvoir pourrait
continuer à vous être conféré. Je pense que le
ministre aurait dû profiter du fait que nos intervenants, ce matin,
s'interrogent sur cette question, pour vous confirmer que son intention demeure
de faire en sorte que vous ayez ce droit. Quant à moi, je serais
prêt à céder la parole au ministre pour avoir ses
commentaires là-dessus. D'accord que le règlement peut être
modifié. Ces gens-là vous demandent, ce matin: Est-ce que c'est
votre intention de nous conférer le pouvoir qui nous appartient
actuellement? C'est quand même un pouvoir, un principe assez important,
la représentation syndicale au sein de jurys et d'organismes qui ont
à choisir vos collègues au sein de concours ou de choses
semblables.
Ma première question, Mme le Président, je l'adresserai au
ministre. Je lui demanderai s'il a l'intention de conserver ce principe qui est
déjà établi par un arrêté en conseil,
préalablement adopté?
M. Bellemare: 909.
M. Pagé: Oui, l'arrêté en conseil 909.
M. Bellemare: Le 16 mai 1966.
M. Pagé: 16 mai 1966.
M. Bellemare: C'est un droit acquis.
M. Pagé: Par surcroît.
M. Bellemare: Bien sûr!
M. Pagé: Mais qui peut être modifié.
M. Bellemare: Qui peut être modifié en vertu de
l'article 129.
M. Pagé: C'est juste.
Le Président (Mme Cuerrier): Alors, vous mettez la
question dans la bouche du président du Syndicat des professeurs?
M. Pagé: Oui, je mets la question... Parce que, M. le
Président, vous comprendrez que Mme le Président, notre
président ici, est très réticente je lui dis bien
respectueusement à ce que je pose des questions au ministre.
La question que je viens de formuler, est-ce que vous la faites
vôtre?
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Portneuf, je vous fais remarquer que nous sommes ici...
M. Pagé: Si vous la faites vôtre, le ministre va
répondre.
Le Président (Mme Cuerrier): ... pour entendre le Syndicat
des professeurs...
M. Lalonde (Jean): Je la fais mienne.
Le Président (Mme Cuerrier):... et que si vous avez
à poser des questions au Syndicat des professeurs, je suis
entièrement d'accord, parce que c'est là le mandat de la
commission.
M. Pagé: Mme le Président, je réitère
ma question. M. le président du Syndicat des professeurs, vous faites
vôtre la question que j'aurais aimé poser au ministre, à
savoir s'il a l'intention...
Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre... M.
Pagé: ... de conserver ce principe...
Le Président (Mme Cuerrier): ... est déjà
prêt à répondre.
M. Pagé: Merci.
M. de Belleval: Je voudrais simplement apporter une
précision additionnelle en ce qui concerne le recrutement de nouveaux
professeurs qui seraient, normalement, ensuite, une fois recrutés, dans
votre unité d'accréditation; c'est l'office de recrutement qui
fera les règlements à l'avenir.
Donc, quant à la disposition qui touche la formation des jurys,
la situation va être exactement la même qu'actuellement sur le plan
juridique, puisque, au lieu que ce soit la Commission de la fonction publique
qui fasse le règlement, ce sera l'office de recrutement. Autrement dit,
on change de... C'est bonnet blanc, blanc bonnet. Du point de vue de ce qui
vous intéresse tout particulièrement, la présence d'un de
vos membres dans un jury de sélection, c'est l'office de recrutement qui
va se trouver à faire le règlement. Donc, il n'y a pas de
changement, de toute façon.
En ce qui concerne un jury d'avancement, là, effectivement, ce
serait le ministre, et, comme je l'ai dit, le règlement sera en vigueur
tant qu'on ne jugera pas opportun de le changer. Quand sera-t-il changé?
Je ne le sais pas. Comme je l'ai dit tantôt, il n'a pas la permanence
éternelle, ce règlement.
Ai-je l'intention de le changer demain matin? J'avoue que je n'ai
vraiment pas étudié l'ensemble des milliers ou des centaines de
règlements qui existent à la commission; mais, comme je l'ai dit,
cela fera l'objet... S'il faut jamais changer cela, il est sûr qu'on va
s'en parler.
M. Pagé: Je ne crois pas que la question de M. Lalonde
était dans ce sens. Je pense que tout le monde convient, ce matin, que
le règlement peut être éventuellement changé.
D'ailleurs, c'est conféré dans le projet de loi: "... l'office
pourra modifier ce règlement...", toujours selon l'approbation du
Conseil du trésor, cependant.
Ce qui vous a été demandé, M. le ministre, c'est
ceci: Est-ce votre intention de conserver, de garder ce principe, ce droit
acquis auprès de nos intervenants, ce matin, abstraction faite des
modifications qui peuvent être apportées aux règlements
éventuellement et ce, pour juste cause? Avez-vous l'intention de
conserver le principe de la représentation syndicale au sein des
jurys?
M. de Belleval: Ecoutez. On ne jouera pas au fou ce matin.
M. Pagé: Je ne vous demande pas de jouer au fou. Je vous
demande de répondre aux questions.
M. de Belleval: Voulez-vous me laisser répondre?
M. Pagé: Oui.
M. de Belleval: J'ai le droit de vous répondre ce que je
veux.
M. Pagé: Oui. Si vous voulez qu'on ait une bonne
collaboration ici, qu'on travaille et qu'on ait des résultats...
M. de Belleval: Ecoutez la réponse dans ce cas.
M. Pagé: Vous êtes égal à
vous-même, monsieur.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Johnson.
M. Pagé: J'ai d'autres questions, Mme le
Président.
Le Président (Mme Cuerrier): Bon. Allez.
M. Pagé: Mme le Président, vous semblez
pressée ce matin. Nous avons tout le temps qu'il faut.
Le Président (Mme Cuerrier): Vous avez des questions
à poser aux représentants du Syndicat des professeurs? Allez-y,
M. le député de Portneuf.
M. Pagé: Oui, j'ai des questions. Je n'ai pas eu de
réponse à ma première question.
M. de Belleval: Puis-je répondre? M. Pagé:
Allez-y.
M. de Belleval: Si vous arrêtiez de m'interrompre.
M. Pagé: Ce n'est pas moi qui suis président.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.
M. de Belleval: Je vais répondre une fois pour toutes
à toutes ces questions parce qu'on n'en sortira pas. Vous pourrez me
poser cette question...
M. Pagé: Répondez. On ne demande pas mieux.
M. de Belleval: ... sur chacun des règlements de la
Commission de la fonction publique qui existent actuellement, à savoir
si j'ai l'intention de les maintenir en vigueur ou non.
On n'est pas ici pour discuter des règlements en vigueur de la
Commission de la fonction publique, à savoir si le ministre va les
maintenir en vigueur ou non, s'il a l'intention de changer tel règlement
ou de ne pas le changer. Cela ne fait pas l'objet de nos
délibérations.
M. Pagé: C'est ce sur quoi les gens s'inquiètent ce
matin. C'est un des trois points.
M. de Belleval: Voulez-vous me laisser finir. Vous m'interrompez
tout le temps, M. le député.
M. Pagé: Tantôt aussi, vous m'avez interrompu. C'est
un des trois points qui est soulevé par nos intervenants ce matin.
Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, s'il vous
plaît! A l'ordre!
M. le ministre, c'est vous qui avez la parole.
M. de Belleval: Alors, je donne la réponse une fois pour
toutes au député de Portneuf, de façon à lui
permettre de réserver sa salive pour l'avenir. On n'est pas ici,
actuellement, pour discuter des règlements qui sont en vigueur, pour
savoir si oui ou non, ils seront maintenus en vigueur, quand j'ai l'intention
de les changer ou que l'office de recrutement qui sera créé les
changera ou la nouvelle Commission de la fonction publique les changera.
Il y en a qui seront changés et d'autres qui ne le seront pas. Je
ne peux pas porter un jugement de valeur sur chacun des dizaines de
règlements qui existent. Ce n'est pas l'objet des travaux de notre
commission.
L'objet des travaux de notre commission est de discuter de
l'architecture générale du projet de loi, de ses principes
fondamentaux. A cet égard, je pense qu'on se comprend très
bien.
Alors, si vous voulez bien, on pourrait continuer sur ces aspects
fondamentaux.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: Merci, Mme le Président. Somme toute, on
n'a pas de réponse du ministre. Libre à lui d'en donner une ou de
ne pas en donner; mais, il aurait pu profiter de la situation pour
améliorer le climat de discussion dans le cadre de ce projet de loi.
Je l'ai dit plusieurs fois, c'est déplorable que le ministre se
refuse à répondre aux questions et se refuse à participer
plus étroitement aux délibérations de notre commission
relativement aux points soulevés par nos intervenants.
Dans votre mémoire, vous dites dès le début: "De
façon générale..."
M. Lalonde (Jean): M. le député, on aurait une
question pour poursuivre. Vous voulez changer le sujet?
M. Pagé: Allez-y.
M. Bellemare: S'il change de sujet, j'ai le droit de parole avant
cela.
Le Président (Mme Cuerrier): Oui, M. le
député de Johnson.
M. Pagé: Allez-y, je vous en prie. On va les entendre
tous.
M. Thiboutot (Yvon): Compte tenu de la déclaration que
vous avez faite aux syndicats lors des séances précédentes
à savoir que vous n'avez pas l'intention de négocier point par
point à la table, ici, les points...
Le Président (Mme Cuerrier): Si vous permettez,
voulez-vous vous identifier pour le journal des Débats.
M. Thiboutot: Yvon Thiboutot.
Le Président (Mme Cuerrier): M. Thiboutot, c'est vous qui
avez la parole.
M. Thiboutot: Dans vos interventions, lors des séances
précédentes, vous avez dit que vous
n'aviez pas l'intention d'intervenir sur les différents points
à l'intérieur du projet de loi, comme les différents
règlements, et, comme vous venez de le répéter, que vous
avez plutôt l'intention de discuter au niveau du principe et du fond du
projet de loi.
Quant à nous vous comprendrez certainement cette position
à caractère syndical lorsqu'il y a des droits acquis
à des syndicats, les syndicats, généralement, voient d'un
très mauvais oeil un principe réglementaire qui ne les garantit
pas dans une succession de législation.
Or, nous sommes en face de cette succession de législation. Il y
a une transformation fondamentale de la loi. Vous dites que les droits y sont
maintenus. Je dirais: peut-être que oui, peut-être que non.
Vous me direz que c'est une réponse de Normand. Mais ce qui me
paraît aussi fondamental que cela, c'est qu'on a déplacé
dans cette loi le principe de l'autorité et il y a un déplacement
majeur qui change complètement la philosophie de la Loi de la commission
de la fonction publique.
L'ancienne loi de la Commission de la fonction publique avait comme
philosophie un recours au niveau de l'autorité décisionnelle, au
niveau du cabinet, du Conseil des ministres, enfin, du lieutenant-gouverneur en
conseil, alors que, dans cette présente loi, le pouvoir fondamental est
enlevé au cabinet, au Conseil des ministres, au lieutenant-gouverneur en
conseil, pour être transféré au Conseil du trésor.
Je pense qu'il y a là un principe fondamental qui est
modifié.
Permettez-moi une interprétation. On part d'une
vérification des décisions d'une Commission de la fonction
publique par le lieutenant-gouverneur en conseil, donc les représentants
des élus, au niveau d'un Conseil du trésor dont la principale
tâche est d'administrer. Donc, la vision des décisions qui seront
faites et prises, par rapport aux règlements que vous pourrez faire,
sera toujours en fonction d'un principe d'administration et d'un principe
d'efficacité administrative. Nous pensons qu'à partir de cela, il
peut y avoir des questions syndicales qui se posent et des questions
extrêmement graves.
D'autre part, dans la loi, tel qu'il est prévu actuellement, par
l'article 3, un très grand nombre de sujets qui étaient dans
l'aire des négociations tombent dans l'aire du décret; du
décret, qu'on l'appelle un règlement formulé par le
ministre, entériné ou approuvé par la Commission de la
fonction publique ou par l'office de recrutement, dans le cas des deux
organismes qui ont des pouvoirs, l'un d'arbitrage et l'autre de
sélection des candidats, ces deux secteurs ne peuvent et ne pourront
fonctionner en fonction des règlements que vous édicterez
qu'à la condition expresse que le Conseil du trésor vous en donne
l'autorisation par la décision finale. Ce qui revient à dire que
la loi qu'on a devant nous n'est pas la réponse du ministre de la
Fonction publique, mais peut-être plus la réponse du Conseil du
trésor, en dernier ressort.
Vous comprendrez que des droits acquis sur un plan syndical, quant
à nous et, je pense, quant à tous les autres syndicats... On voit
très mal de se retrouver devant une décision
réglementaire. Bien sûr, vous pouvez plaider le fait que vous avez
l'intention de maintenir le statu quo tel qu'il est prévu dans la loi,
mais, généralement, dans une loi telle qu'elle est
stipulée actuellement, si on maintenait le statu quo au niveau du
caractère décisionnel, j'aurais plus tendance à être
favorable à une réponse qui me demande un acte de foi.
Actuellement, il y a une transformation fondamentale de la loi. D'autre part,
et vous le savez très bien, l'exercice des droits acquis ou l'exercice
des droits au niveau des syndicats se fait généralement d'une
façon agréable, dans un climat où il n'y a pas de
conflit.
Dans un climat où il y a un conflit, il faut donc prévoir
des mécanismes où le jeu de l'arbitrage des négociations
est maintenu et non pas que, soudainement, une décision soit prise par
rapport à une table de négociation où un conflit se
manifeste et que cette décision soit justement une réglementation
ministérielle dans les sujets qui sont actuellement en
négociation sur la table. Or, vous comprendrez notre inquiétude
à ce niveau et je pense que c'est une inquiétude
justifiée, autant de notre part que de celle des autres syndicats. Nous
voulons vous demander, avec beaucoup de précision, parce que c'est
là le problème fondamental: Est-ce que, oui ou non, les
dispositions incluses dans l'article no 3 sont restreintes à un
règlement ou sont dans l'aire des négociations? Est-ce que a),
b), c), d) sont des matières négociables, oui ou non?
Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.
M. de Belleval: Vous avez touché à plusieurs
points, dont un point qui m'apparaît assez intéressant, qui nous
sort du débat un peu fastidieux qu'on a eu à certains points de
vue depuis le début, la question de transfert fondamental de
l'autorité, en matière de gestion du personnel, d'un type
d'autorité à un autre.
J'ai expliqué que, là-dessus, effectivement, il y avait un
choix fondamental qui était fait, en vertu du projet de loi 53, qui
était de donner à l'autorité politique la
responsabilité d'initiative et d'exécution en matière de
gestion de son personnel, du personnel gouvernemental, du personnel de la
fonction publique. Pourquoi? Parce que, dans notre régime politique,
c'est le gouvernement, ce sont les ministres, collégialement ou
individuellement, qui sont responsables, vis-à-vis de la population, de
l'exécution de leur politique. L'exécution de ces politiques, de
ces programmes, de leurs priorités, sur lesquelles, souvent, ils ont
été élus d'ailleurs, dépend pour une large part de
la façon dont s'est organisé leur principal instrument
d'exécution, c'est-à-dire la fonction publique.
Là-dessus, il est normal que les ministres, avec la
responsabilité, aient aussi les pouvoirs. Actuellement, ce pouvoir
d'initiative, ce pouvoir d'exécution est confié largement
à une commission indépendante, soi-disant indépendante,
qui est la Commission de la fonction publique. L'indépendance de cette
commission est toute relative, ses membres sont nommés par le
gouvernement,
de façon discrétionnaire, absolument
discrétionnaire, et, deuxièmement, en vertu d'un acte, d'un
arrêté en conseil.
Cette commission n'a aucune ouverture au-delà du gouvernement,
elle ne fait pas rapport autrement que d'une façon purement formelle,
par un rapport annuel, comme tous les organismes, à l'Assemblée
nationale, mais elle ne fait pas rapport autrement, statutairement, à
l'Assemblée nationale ou à une commission de l'Assemblée
nationale ou au public en général, autrement que par son rapport
annuel, qui est purement formel, de toute façon.
Cette commission a des pouvoirs, non seulement de chien de garde,
d'enquête, par exemple, de contrôle, mais elle a en même
temps des pouvoirs d'exécution. Elle exécute des tâches
administratives bien précises, de sorte que, contrairement à nos
principes de droit administratif, cette commission est à la fois juge et
partie de son propre fonctionnement. Elle est censée surveiller
l'application de la loi, mais l'application de la loi lui est confiée
largement. Elle est appelée à faire des concours de recrutement
ou de promotion, elle est appelée à enquêter sur ses
propres concours de promotion ou de recrutement, en vertu même de la
loi.
Ce sont ces choses que l'on veut changer en disant qu'il faut revenir
à des principes de droit fondamentaux et à des principes de
responsabilité ministérielle qui sont au coeur même de
notre régime démocratique fondamental, à savoir qu'il y
aura effectivement une commission, que cette commission sera beaucoup plus
indépendante que l'ancienne commission, puisqu'elle sera nommée
dorénavant par l'Assemblée nationale et à une
majorité des deux tiers, ce qui veut dire qu'en vertu de notre
régime parlementaire et de la coutume parlementaire, cela signifie,
à toutes fins pratiques, qu'elle doit être nommée à
l'unanimité de la Chambre, comme le Vérificateur
général, le président général des
élections, des postes comme ça.
Deuxièmement, cette commission est ouverte maintenant, elle n'est
plus refermée sur elle-même, elle fait rapport à
l'Assemblée nationale sur les règlements du ministre. Mais le
ministre, à ce moment, récupère les pouvoirs
d'exécution, non pas les pouvoirs de contrôle, mais seulement les
pouvoirs d'exécution. Ensuite, la façon d'aménager
l'approbation finale de ces pouvoirs, est-ce que ça doit aller au
Conseil des ministres ou est-ce que ça doit s'arrêter au Conseil
du trésor? C'est un jugement d'opportunité sur l'organisation de
la machine administrative.
Vous pouvez me dire: Oui, mais ce sont des choses tellement importantes,
tellement cruciales que ça devrait être le Conseil des ministres
qui approuve les règlements plutôt que le Conseil du
trésor. C'est un jugement d'opportunité, remarquez que tous les
organismes, tous les intervenants, dans quelque secteur d'activité
gouvernementale, voudraient tous voir leurs mémoires, leurs projets
approuvés par le Conseil des ministres.
Il va sans dire que c'était souvent la pratique dans le
passé, de sorte que le Conseil des ministres devenait une machine
absolument inefficace et que cette soi-disant autorité politique
suprême était tellement engorgée qu'elle n'était pas
en mesure de vraiment faire son travail d'orientation
générale.
Dans le cas de ce qui nous occupe, je dois dire que, de toute
façon, depuis 1970, en vertu de la Loi sur l'administration
financière, c'est effectivement le Conseil du trésor qui approuve
les règlements en question. Depuis 1970, c'est le cas. Peut-être
que vous n'étiez pas conscients de cette situation, mais, depuis la loi
passée sous M. Gar-neau, sous le gouvernement libéral, la Loi sur
l'administration financière, c'est effectivement le Conseil du
trésor qui approuve ces choses.
Il faut bien voir. Le Conseil du trésor, ce n'est pas un
organisme administratif, c'est un organisme politique. C'est un comité
du cabinet, composé exclusivement de ministres, qui reçoit une
délégation d'autorité de la part du cabinet. Je dois dire
que ce n'est pas une autorité nécessairement finale, dans le sens
que, s'il existe un désaccord, ou si, pour une question absolument
importante, un ministre désire qu'une question, même si elle est
approuvée au Conseil du trésor, soit référée
au cabinet, bien sûr, cette question est toujours
référée au cabinet, en vertu des principes non
écrits de responsabilité ministérielle.
Dans ce sens-là, il ne s'agit pas d'une simple autorité
administrative dont le seul principe d'action serait une efficacité
désincarnée. Il s'agit vraiment d'un organisme politique qui
prend, sur les projets qu'on lui propose, un point de vue tout autant politique
qu'administratif.
Comme vous voyez, je pense que, de ce côté-là, il
s'agit d'un projet de réforme qui, effectivement, déplace un
certain nombre de choses, déplace un centre d'autorité, mais, en
tout état de cause, il le fait au grand jour, il le fait avec des
mécanismes de contrôle, d'encadrement, qui sont non seulement
formels, qui sont non seulement légaux, mais qui sont plus que cela, qui
sont politiques, puisque, en fin de compte, le contrôle se fait au niveau
de l'Assemblée nationale. A ce niveau, comme vous le savez, le
contrôle dépasse largement les aspects purement formels pour
rejoindre les aspects d'opportunité politique, au sens large.
A mon avis, c'est un immense progrès de voir qu'à
l'avenir, la gestion même de la fonction publique fera
régulièrement l'objet d'une attention politique au sens le plus
noble du terme, c'est-à-dire au sens d'un débat
d'opportunité politique, au sein même de l'Assemblée
nationale, et non plus au sein d'organismes purement technocratiques,
administratifs, comme c'est le cas actuellement.
Quant à savoir si toute cette transposition des choses risque
d'affecter ce qui existe actuellement en matière de régime
syndical, j'ai déjà indiqué à plusieurs reprises, y
compris à votre président, que ce n'était absolument pas
notre intention, qu'effectivement, il y avait deux grands piliers dans
l'administration de la fonction publique: la
loi, qui comprend un certain nombre de principes d'organisation
étatique et d'intérêts publics et, d'autre part, les
conventions collectives, de façon que ces deux piliers soient à
la fois distincts et bien présents. En vertu du projet de loi 53, toutes
les questions qui traitent du régime syndical seront regroupées
dorénavant dans une loi séparée. Jusqu'à nouvel
ordre, cette loi nouvelle, mais qui reprend les articles en vigueur
intégralement, ne modifie pas, ne vise pas à modifier d'aucune
façon le statu quo. Toutes les questions qui, jusqu'à maintenant,
ont fait l'objet, entre vous et le gouvernement, du jeu de la libre
négociation des parties, continueront de l'être et il est
expressément prévu, à l'article 91 du projet de loi, entre
autres, que tous les pouvoirs du ministre, en vertu de l'article 3, sont
assujettis aux dispositions du régime syndical, donc des
négociations collectives.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Johnson.
M. Bellemare: La première chose qui me vient est pour vous
féliciter du courage que vous manifestez. Pour venir devant le
gouvernement établir vos positions aussi clairement, il faut être
courageux, actuellement. Je vous félicite.
Je voudrais me poser une question à moi-même, pas au
ministre. Serait-il possible que le ministre, après avoir entendu tous
les rapports, puisse apporter des amendements à la loi? Après
avoir entendu tous ceux qui font des revendications justes et raisonnables,
serait-il possible que le ministre, comme pour d'autres cas, d'autres
commissions parlementaires, puisse apporter des amendements au projet de loi
53?
Je me dis peut-être, mais je n'en suis pas sûr, voyant la
position qu'il a prise jusqu'ici devant chacune des remarques qui lui ont
été faites. Il trouve toujours une justification qui,
d'après lui, est juste et raisonnable selon la loi. Je pense que cela
devient véritablement une loi qui s'appellera la loi de Belleval et qui
ne sera pas, comme on dit, la Loi de la fonction publique ou, comme le projet
de loi change de nom, la loi des relations de travail. Il y aura beaucoup de
transparence dans la loi peut-être, mais pas dans le ministre. Il y aura,
comme vous le dites, peut-être l'élimination du patronage ou de
l'arbitraire cela existe déjà qui sera écrit
dans la loi, mais peut-être pas dans les agissements du ministre.
Il y aura aussi, je pense, une diminution de l'efficacité. On a
constaté jusqu'à maintenant que certains mémoires ne sont
pas tout à fait satisfaits du projet de loi. C'est pour cela que je me
demande si le ministre va apporter des amendements qui seront des amendements
permettant surtout aux droits acquis d'être reconnus officiellement.
Même si on dit: Oui, on vous dit que l'arrêté
ministériel 909 du 18 mai 1966 est bon, mais il est sujet à
changement, ce n'est pas une certitude du respect des droits acquis. Vous avez
raison de le noter.
Il y a une chose, par exemple, dans votre mémoire, qui me cause
certaines inquiétudes. C'est quand vous dites
"réaménagement du pouvoir patronal et restriction des objets de
négociation", je comprends que vous parlez de l'article 3 et des
différents points a), b), c), d) qui sont exclus, mais est-ce que les
syndicats dûment accrédités, qui sont
représentés, auront le droit de se prévaloir de cet
article 3 a), b), c), d) et des autres qui concernent véritablement le
pouvoir du ministre? Vous dites qu'ils sont absents. Le mot "absents" me
surprend. Quand on dit "absents", on nie formellement le pouvoir de
négociation qu'ont les syndicats qui ont acquis ce droit dans les
différents stades de la procédure.
Il y a une autre question qui vient renforcer mon argumentation. Vous
dites que le gouvernement, de toute évidence, a succombé à
la tentation de réaménager "à la hausse" son pouvoir
dictatorial, en soustrayant du champ de la négociation, dans la
convention collective, un certain nombre d'éléments essentiels.
Je pense que vous avez sûrement là une question qui pourrait nous
aider à mieux comprendre, si vous vouliez bien l'étayer. Je suis
bien d'accord qu'il devrait y avoir des modifications au projet de loi pour
donner véritablement, à ceux qui ont des droits acquis, le
respect des droits acquis.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le Président du
syndicat. M. Thiboutot?
M. Thiboutot: Oui.
Le Président (Mme Cuerrier): C'est M. Thiboutot.
M. Thiboutot: Je vous remercie pour la qualité de courage,
mais je suis ici en tant que représentant de mes membres et ce n'est pas
du courage, je suis un porte-parole.
M. Bellemare: Surtout vous et votre épouse.
M. Thiboutot: Si vous voulez vous embarquer dans la condition
féminine, ce sera à une autre commission.
M. Bellemare: Non, je ne fais pas de politique. Je ne dis pas
qu'elle est PQ.
M. Thiboutot: Je voudrais répondre quand même au
ministre de Belleval, parce que vous avez fait...
Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, s'il vous
plaît! C'est M. Thiboutot qui a la parole.
M. Thiboutot: Je voudrais répondre au ministre de
Belleval, parce que vous avez répondu, en fait, à l'intervention
que j'ai faite. J'ai noté, dans votre réponse, la mention de
relation d'opportunité. C'est bien ce que je disais. Ce n'est plus une
relation à caractère politique, c'est une relation à
caractère d'opportunité administrative. Vous avez
précisé d'opportunité politique.
Le problème est celui-ci: Est-ce que le Conseil du trésor
est l'organisme politique du cabinet?
Une Voix: Oui.
M. Thiboutot: II est l'organisme politique. Il est aussi
l'organisme administratif, économiquement.
M. de Belleval: C'est-à-dire que, dans tout organisme
politique, qu'il s'agisse d'un ministre ou d'un comité du cabinet, il
existe des organismes administratifs pour l'alimenter, c'est évident. La
même chose pour le Conseil des ministres, d'ailleurs.
M. Marchand: ... vous avez l'air de donner un exemple...
M. Pagé: ... politiques et administratif...
M. Thiboutot: Oui, ce qui est notre inquiétude. Je pense
que vous avez compris l'intervention, dans le sens que vous avez tenté
de démontrer qu'on n'avait pas raison d'être inquiet. Je vous dis
qu'on a encore raison d'être inquiet. Je vais vous poser peut-être
une question. J'aimerais savoir à quel moment on a l'intention de
terminer les travaux de cette présente commission parlementaire,
approximativement.
M. de Belleval: Je dois dire que, là-dessus, il n'y a pas
de règle fixe. On laisse a chacun le soin d'exprimer son opinion, tant
du côté des députés que des intervenants, de
façon que le débat soit le plus ouvert et le plus calme possible.
De ce point de vue, je ne saurais préjuger de la soif d'information de
l'Opposition, ni de la soif de communication des intervenants. Je suppose que,
dans les prochains jours, les toutes prochaines semaines, la commission aura
terminé ses travaux, vraisemblablement.
M. Thiboutot: Ce qui veut dire que le résultat de la
commission Martin qui a pour mandat, et je cite: "le contenu de l'aire des
négociations", si le rapport de la commission Martin s'avérait
contradictoire avec les pouvoirs accordés quant à l'article 3, la
loi 53 primerait, ce qui voudrait dire, d'une certaine façon, que les
interventions que l'on fait actuellement, sur la base d'une évaluation,
vous me direz, lointaine, comme vous pouvez me donner comme réponse
également: Je ne peux pas vous dire que je ne l'abandonnerai pas, que je
n'abolirai pas tel règlement, etc., cela veut dire que nous, en tant que
syndiqués, ne pouvons plus intervenir sur l'aire des
négociations. Si on ne peut plus intervenir, à ce moment, sur
l'aire des négociations, notre pouvoir comme tel, de syndicat, n'existe
à peu près plus, parce que nous serions soumis, à ce
moment, a une réglementation contre laquelle nous serions
peut-être intervenus actuellement, mais, devant l'argumentation que l'on
formule, vous ne pouvez que dire: Ecoutez, je ne sais pas, attendez les
règlements. Par contre, on demande à la commission Martin de nous
entendre pour, justement, déterminer ce régime syndical et l'aire
des négociations. Ce qui veut dire, sur un plan strictement pratique,
que le projet de loi 53 et le futur projet de loi du régime syndical ont
une relation d'autorité à effet, si vous voulez. Le projet de loi
53 va déterminer les zones de négociation. La commission Martin
pourra vous faire les recommandations. Si elles arrivent à l'inverse du
projet de loi 53, elles ne seront pas écoutées ou entendues ou
inscrites.
M. de Belleval: Ce n'est pas le projet de loi 53 qui
détermine le régime syndical. Le projet de loi 53 ne touche pas
au régime syndical. Ce sont les articles des lois en vigueur
actuellement qui sont regroupés en vertu de l'article 117 dans la Loi
sur le régime syndical, qui déterminent le régime
syndical. Le projet de loi 53 ne touche pas au régime syndical.
M. Bellemare: Au début... celle de tout mener sous...
M. Thiboutot: L'article 119...
M. de Belleval: L'article 117? Ecoutez, je pense que cela ne sert
à rien de continuer là-dessus trop longtemps. Je pense que tout
cela a été élaboré en détail depuis fort
longtemps.
M. Pagé: Le problème est là. Vous l'avez
cerné, le problème, et il est là, le problème.
M. de Belleval: Est-ce que vous pourriez me laisser terminer, M.
le député?
M. Pagé: Ils l'ont cerné, le problème.
M. de Belleval: Vous devenez dissipé, ce n'est pas
possible. J'ai expliqué, à plusieurs reprises, que tout ce qui
concerne le régime syndical, l'aire de négociation, tout cela, je
viens de vous le dire, il y a à peine dix minutes, tout cela est sorti
de la Loi de la fonction publique et fera l'objet, à l'avenir, d'une loi
séparée, Loi sur le régime syndical. Si la commission
Martin a des recommandations à nous faire là-dessus et qu'on juge
bon de les appliquer, ce sera la Loi sur le régime syndical qui sera
modifiée non pas la Loi sur la fonction publique. Je pense qu'il y a
aussi un malentendu considérable qui risque de se produire, c'est que la
Loi sur la fonction publique... Le projet de loi 53, premièrement, ne
s'adresse pas seulement à des syndiqués. Il s'adresse à un
tas d'employés qui ne sont pas syndiqués. Il traite de questions
qui sont bien au-delà du régime syndical, comme je viens de
l'expliquer, et des relations de travail.
Il traite des principes d'organisation mêmes de l'Etat et des
principes d'intérêt public qui n'ont rien à voir avec le
régime syndical ou avec l'aire de négociation et, justement pour
que cette chose soit encore plus claire, on a décidé qu'à
l'avenir, ce que j'appelle ce grand pilier aussi de la gestion de la fonction
publique que constitue le régime des conventions collectives soit
l'objet d'une autre loi, de la Loi sur le régime syndical, de sorte
qu'on aura, à ce moment-là, ces deux piliers traités
dans
deux lois séparées, la loi 53 sur les principes
généraux d'intérêt public et d'organisation de
l'Etat et la Loi sur le régime syndical, qui traite des convention s
collectives et de l'aire de négociation. Tantôt, j'écoutais
le député de Johnson dire que la loi est parfaite, que je n'ai
pas l'intention de bouger, que je n'ai rien à dire, que je fais
simplement répondre à vos objections, ou enfin, aux remarques
qu'on me fait, que le projet de loi est parfait, c'est faux de façon
patente, puisque j'ai déjà déposé, entre autres,
des projets d'amendement qui se trouvent à répondre directement
aux principales objections que m'ont faites les associations syndicales.
Là-dessus, je dois dire que...
M. Thiboutot: M. le ministre, je voudrais... Permettez-moi, parce
que votre affirmation...
M. de Belleval: Je voudrais terminer là-dessus. J'ai donc
déjà déposé des projets d'amendement qui clarifient
davantage encore cette question et, en particulier, en vertu de projets
d'amendement à l'article 91, statuent clairement là, je
reviens au point fondamental de votre argumentation que les pouvoirs du
ministre, en vertu de l'article 3, les pouvoirs réglementaires, sont
assujettis aux dispositions des conventions collectives, mais le ministre... Il
faut qu'on détermine, dans notre structure étatique, qui, quand
même, a l'initiative de la réglementation et, deuxièmement,
quand cette réglementation ne touche pas aux conventions collectives en
vigueur, quand elle touche, cette réglementation, à des gens qui
ne sont pas syndiqués ou qu'elle touche à des matières
qui, de toute façon, ne font pas l'objet de l'aire de
négociation, il faut que quelqu'un en soit responsable et, de ce point
de vue, il n'y a aucun changement par rapport à la loi actuelle. Si vous
allez à la loi en vigueur actuellement et que vous lisez les pouvoirs de
la Commission de la fonction publique, on ne fait aucunement
référence, dans ces pouvoirs de la Commission de la fonction
publique, au régime syndical en vigueur, parce que, par ailleurs, il
existe des dispositions qui disent que telle chose est négociable et
telle chose n'est pas négociable et que, par conséquent, en ce
qui concerne l'aire de négociation et le régime syndical, c'est
le régime syndical qui prime. C'est exactement la même chose avec
la présente loi. Il n'y a pas de changement là-dessus.
Le Président (Mme Cuerrier): M. Thiboutot.
M. Thiboutot: Oui, je voulais simplement dire que j'ai bien lu
votre amendement, mais j'y ai lu aussi le dernier paragraphe, qui
précise que, à moins que, selon le sujet qui est attribué
par la Loi sur la fonction publique à la Commission de la fonction
publique, à l'Office de recrutement et au ministre de la Fonction
publique, la commission, l'office ou le ministre n'y concoure par
règlement ou que tel règlement ne soit approuvé par le
gouvernement, c'est-à-dire que ce qu'on donne comme aire de
négociation, on l'élimine d'une certaine façon, enfin, on
ne l'élimine pas, mais on dit:
On vous prévient tout de suite: si, par hasard, on a
décidé de faire un décret là-dessus, c'est le
décret qui passe.
M. de Belleval: C'est le contraire que ça dit. Cela dit
que...
M. Marchand: L'épée de Damoclès.
M. de Belleval: Est-ce que je peux terminer là-dessus?
Vous êtes le premier à apporter cette objection. D'ailleurs,
ça fait longtemps que cette disposition, que vous me lisez, existe dans
la loi actuelle. Tout ce qu'elle permet, c'est une soupape en ce qui concerne
certaines choses qui, en vertu du statu quo en vigueur, en vertu des
dispositions en vigueur, relèvent de la Commission de la fonction
publique et ne tombent donc pas dans l'aire de négociation. Elles
peuvent quand même tomber dans l'aire de négociation, si le
gouvernement y consent...
Une Voix: C'est ça.
M. de Belleval: Donc, il n'y a pas de changement par rapport
à la situation actuelle, c'est déjà comme ça, sauf
qu'il y a une amélioration considérable, à mon point de
vue. C'est qu'à l'avenir ces pouvoirs d'exception, au lieu d'être
confiés à la commission, étant confiés directement
maintenant au ministre de la Fonction publique, l'organisme syndical n'a plus
qu'un interlocuteur devant lui, celui avec qui il négocie les
conventions collectives. Le ministre ne peut plus se retrancher derrière
l'autorité d'une commission indépendante; c'est lui-même
qui a le pouvoir, donc, c'est lui-même qui a le pouvoir de consentir, par
règlement, à négocier des choses qui, jusqu'à
maintenant cela se continuera avec le projet de loi no 53, on maintient
le statu quo ne sont pas négociables, sauf que c'est une
amélioration.
M. Pagé: Mme le Président...
M. Dussault: Question de règlement, Mme le
Président.
Le Président (Mme Cuerrier): Sur une question de
règlement, M. le député de Châteauguay.
M. Dussault: II est bien exact qu'à une commission
parlementaire, les seuls intervenants, les seuls qui peuvent s'exprimer sont
des membres de cette commission ainsi que les invités que nous avons
à cette commission. C'est exact?
Le Président (Mme Cuerrier): Voulez-vous me
répéter la question?
M. Dussault: Les seules personnes qui peuvent s'exprimer à
cette commission sont les membres de cette commission ainsi que nos
invités. C'est bien exact? A moins d'un consentement unanime. C'est
cela. Alors, il se produit depuis le début de cette séance
quelque chose de fort dé-
sagréable. Il y a derrière M. le député de
Portneuf, un recherchiste qui, par des sémaphores, de grands signes de
tête ainsi que de grands signes des mains, intervient continuellement
dans les travaux de cette commission.
M. Pagé: Est-il fort celui-là! On va y revenir.
M. Dussault: II le fait pendant toute la séance. Je vous
demanderais, Mme le Président, d'intervenir pour faire en sorte que ce
recherchiste n'intervienne plus, en aucune façon, en s'exprimant ainsi
auprès de nos invités, ici, à la commission. Il le fait
depuis le début des travaux et on le trouve désagréable.
On nous le faisait remarquer encore tout à l'heure, ici. Je vous
demanderais, s'il vous plaît, d'intervenir pour qu'il cesse de s'exprimer
de cette façon, parce que c'est une forme d'expression qui, en fait,
gêne les travaux de la commission.
Je vous remercie, Mme le Président.
M. Pagé: Mme le Président, sur la question de
règlement.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Portneuf, sur la question de règlement.
M. Pagé: D'abord, Mme le Président...
Le Président (Mme Cuerrier): ... et le président du
syndicat.
M. Pagé: ... je considère que cette question est
farfelue et non avenue. Le fait que le député de
Châteauguay, je crois, l'ait soulevée démontre purement et
simplement que celui-ci aura voulu se faire valoir quelques minutes pendant les
travaux de cette commission. Tout le monde sait que les membres de cette
commission, soit du côté de l'Opposition officielle, du
côté du pouvoir, ont des équipes de recherchistes qui
travaillent en étroite collaboration avec eux. Or, c'est normal et
explicable. La tradition est là. Je remarque que personne de
l'équipe ministérielle qui était ici depuis 1970... si,
Mme le Président, vous-même aviez été ici depuis
1970, vous auriez constaté que lorsque votre parti était...
M. Dussault: Question de règlement, Mme le
Président.
M. Pagé: Je suis sur une question de règlement et
vous allez me laisser terminer. D'accord?
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Portneuf...
M. Oussault: C'est une question de privilège qu'il est en
train de faire, et ce n'est pas permis en commission parlementaire.
M. Pagé: Mme le Président...
Le Président (Mme Cuerrier): Un moment, s'il vous
plaît! M. le député de Châteauguay, vous soulevez une
question de privilège?
M. Pagé: Non. On n'a pas le droit de soulever des
questions de privilège en commission.
Le Président (Mme Cuerrier): Bon. D'accord. En
commission...
M. Dussault: Puisqu'on ne peut soulever de question de
privilège, je fais remarquer que M. le député de Portneuf
en fait une question de privilège actuellement et que cela n'est pas
permis en commission parlementaire.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Châteauguay, vous n'avez pas à soulever de question de
privilège.
M. Pagé: C'est cela. Apprenez donc votre
règlement!
Le Président (Mme Cuerrier): D'ailleurs, M. le
député de Portneuf, vous avez déjà terminé
votre intervention.
M. Pagé: Non. Je n'ai pas terminé, Mme le
Président, sur la question de règlement. J'étais en train
de vous faire part...
Le Président (Mme Cuerrier): Sur la question...
M. Pagé: Mme le Président, vous connaissez votre
règlement. Je présume que le ministre doit le connaître lui
aussi...
M. de Belleval: ...
Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, M. le ministre! M.
le député de Portneuf.
M. Pagé: J'étais en train de faire état de
précédents qui ont toujours existé. Selon la coutume ici,
la tradition, nos équipes sont toujours avec nous. Je vous rappellerai
que depuis 1970 entre 1970 et 1976 les recherchistes du Parti
québécois étaient assis à la table, à la
table! Si vous aviez été ici, vous vous le rappelleriez.
Parlez-en à votre leader et il va vous dire que votre question est non
avenue...
M. Dussault: Mme le Président, question de
règlement.
M. Pagé: ... et laissez donc poursuivre le débat.
Cela va bien. Cela commence à bien aller.
Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre!
M. Pagé: Ces gens ont cerné le
problème...
Le Président (Mme Cuerrier): S'il vous plaît!
M. Pagé:... et laissez donc continuer le débat.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Portneuf, à l'ordre!
M. Dussault: Mme le Président...
Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre! Je veux simplement
faire remarquer à cette commission qu'il est évident que des
recherchistes sont là pour rendre service aux différents
députés membres de la commission, mais je leur demanderais
spécifiquement de ne pas intervenir comme tel, sauf auprès du
député qu'ils doivent aider de leurs remarques, mais sans
manifester en aucune façon leur approbation ou leur
désapprobation des interventions des membres de la commission.
M. le Président du syndicat, vous aviez demandé la
parole.
M. Lalonde (Jean): Oui. Je voudrais quand même rassurer les
membres de la commission que je n'ai pas entendu parler qui que ce soit et il
peut faire les gestes qu'il veut. On est venu ici et on sait quoi dire.
Le Président (Mme Cuerrier): Je ne suis pas d'accord sur
votre façon de comprendre la chose, M. le président...
M. Marchand: Vous acceptez tout ce que l'on dit de l'autre
côté.
Le Président (Mme Cuerrier): ... parce qu'il est bien
sûr, de tradition, dans cette Assemblée, qu'un recherchiste
soutienne son député et il a fort bien le droit de le faire.
C'est vrai aussi, et c'est peut-être parce que vous n'êtes
pas tout à fait habitué aux règles de procédure de
cette Assemblée, M. le Président, mais un recherchiste n'a pas
à faire valoir son approbation ou sa désapprobation comme telle,
il peut toujours la confier tout bas à la personne qu'il soutient,
pendant la séance.
M. Dussault: Merci, Mme le Président.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député
d'Abitibi-Ouest, vous aviez une intervention à faire.
M. Pagé: C'est une brillante intervention. Vous enverrez
cela dans votre journal, cela va bien paraître. Vous aurez parlé
au moins une fois à l'Assemblée.
Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre s'il vous
plaît, M. le député de Portneuf!
M. Pagé: Félicitations!
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Portneuf, s'il vous plaît! C'est M. le député
d'Abitibi-Ouest qui a maintenant la parole.
M. Gendron: M. le Président, je tiens à vous
remercier de la présentation de votre mémoire. Effectivement,
dans votre mémoire, vous m'apparaissez très
préoccupé par l'absence de dispositions dans le projet 53 qui
garantiraient la présence d'un membre de votre syndicat au sein du jury
et des comités de sélection pour le recrutement des professeurs.
J'aimerais savoir si, d'après vous, dans l'actuelle loi de la fonction
publique, il existe une disposition à cet effet. Premier volet de la
question. Deuxièmement, comment d'après vous, serait-il plus
facile et opportun pour l'Office de recrutement de vous retirer cet avantage
que ce ne le serait pour l'actuelle commission?
M. Lalonde (Jean): L'arrêté en conseil 909
prévoit cela, un membre du syndicat. Je ne sais pas si vous avez le
règlement, l'arrêté en conseil 909, qui prévoit
qu'un professeur représente la partie syndicale?
M. Gendron: D'accord, c'est au niveau de l'arrêté en
conseil, mais il n'existe pas de disposition à cet effet dans la Loi de
la fonction publique actuelle.
M. Lalonde (Jean): C'est cela, c'est notre disposition.
M. Gendron: C'est l'arrêté en conseil.
M. Lalonde (Jean): C'est l'arrêté en conseil qui
prévoit le fonctionnement du jury de sélection. C'est
l'arrêté en conseil comme tel qui prévoit cette
réglementation. Naturellement, cette réglementation a
été, au cours des années, sous forme de
négociation, même si on ne veut pas appeler cela une
négociation, a évolué dans ce sens qu'actuellement tous
les concours de professeurs qui sont ouverts au public lorsqu'on forme un jury,
le syndicat envoie un représentant, mais un représentant
spécialisé dans cette matière, si c'est en
français, c'est un professeur de français, si c'est en violon, on
prend un professeur de violon, et ainsi de suite. La formule a très bien
fonctionné. Naturellement, quand M. le ministre nous dit: Je ne
prévois pas changer tout cela, c'est sa bonne foi, mais, vous
permettrez, la bonne foi, cela m'a joué de vilains tours. Les gens sont
de bonne foi, mais on ne sait pas. Est-ce que cela va rester? S'il nous dit
qu'il va garder le règlement et que, s'il y a des modifications à
faire à ce règlement, il va nous consulter, s'il est prêt
à nous dire cela aujourd'hui, c'est une position qui serait acceptable,
mais ce n'est pas ce que j'ai compris du ministre ce matin.
M. Gendron: Mais êtes-vous d'accord, M. le
Président, que cette disposition est particulière à votre
groupe? Vous dites: C'est un arrêté en conseil. Vous mentionnez:
C'est un arrêté en conseil, chez nous, qui nous donne
l'autorisation d'avoir un représentant sur les jurys. C'est exact? C'est
une disposition particulière à votre groupe. Actuellement, la loi
53 est une loi globale qui va régir l'ensemble du cadre de la fonction
publique. Est-ce qu'il existe d'autres groupes qui ne disposent pas de cet
arrêté ministériel particulier au niveau des... C'est tout
simplement pour vous dire un instant que je pense que cette
disposition, on ne peut pas l'inclure directement ou nommémentdans la
Loi de lafonction publique, si elle est une disposition particulière
à votre groupe.
M. Lalonde (Jean): Vous permettrez, je ne peux pas
répondre pour les autres syndicats. Je suis représentant du
syndicat des professeurs.
M. Gendron: Je comprends, ce n'est pas pour les autres
syndicats...
M. Lalonde (Jean): Je me préoccupe de mes membres et de
garder ce qu'on a, c'est-à-dire les privilèges qu'on a, les
garanties qu'on a actuellement, je veux les garder. Si les autres l'ont, je ne
peux pas vous le dire, mais je ne crois pas qu'il y en ait beaucoup qui aient
cette disponibilité dans la loi.
M. Gendron: Je suis tout à fait d'accord. Je voulais
seulement savoir si vous croyez qu'il est normal qu'on ne puisse l'inclure dans
la Loi de la fonction publique, compte tenu de cette réserve qu'en
mettant cela dans la Loi de la fonction publique, cette garantie au niveau de
la réglementation qui vous régit, à ce moment-là,
on présume que cette disposition existe pour l'ensemble des groupes qui
sont représentés dans la fonction publique, ce qui, vous le savez
très bien, n'est pas le cas.
C'est seulement cela que je voulais savoir. Autrement dit, est-ce que
vous n'êtes pas d'accord avec nous que, si on vous donne une garantie
formelle, il faut vous la donner ailleurs que dans la loi 53? C'est ça
que je veux savoir de vous.
M. Lalonde (Jean): Les modalités de l'inscrire ou pas, je
ne suis pas juriste là-dedans, je pense que M. de Belleval est plus
spécialisé. D'ailleurs, son projet de loi nous donne un reflet de
ce qu'il veut...
M. Pagé: S'il comprenait mieux.
M. Gendron: D'accord, je termine, mais votre exigence, c'est:
Garantissez-le-nous, peu importe l'endroit. Ce qu'on veut, c'est la garantie
formelle que ça va demeurer comme c'est. C'est ce que vous demandez?
M. Lalonde (Jean): C'est sûr.
M. Gendron: Pour tout de suite, ça va.
Le Président (M. Marcoux): M. le député
de... vous voulez compléter votre réponse?
M. Lalonde (Jean): J'aurais une question à poser pour
clore le débat...
Le Président (M. Marcoux): Sur la même question, il
y a déjà deux autres députés qui ont soulevé
des questions.
M. Lalonde (Jean): Non, non.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Gaspé.
M. Pagé: Après, est-ce que ce sera à moi?
J'avais donné mon nom à partir...
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Gaspé, allez-y.
M. Le Moignan: Comme ça, le député de
Port-neuf me permet de passer tout de suite. J'aurais quelques petites
questions à poser à M. le président ou à un autre.
Quand vous parlez des responsabilités de recrutement et de mouvement de
personnel, je comprends très bien vos inquiétudes, surtout quand
il s'agit de la délégation des responsabilités qui,
à votre point de vue, semblent agir de façon indue et, en
même temps, faire perdre à l'office l'utilité qu'elle peut
encore posséder. Vous semblez très sensibles à cette perte
de délégation. Est-ce que vous pourriez préciser votre
point de vue là-dessus?
M. Lalonde (Jean): Si on prend le mouvement de personnel, des
professeurs, c'est sûr qu'on s'inquiète, parce que si on les bouge
un peu, on nous les enlève. A l'intérieur de notre corps
d'emploi, de professeurs comme tel, on est engagé comme professeur
spécialisé, point. Si on prend l'hypothèse que, demain
matin, on réduit les effectifs des écoles, tout ça, on
crée un mouvement de professeurs. Automatiquement, ils deviennent
accrédités à d'autres syndicats. C'est sûr que, dans
notre convention, l'article 14 prévoit ce mouvement. C'est pour
ça qu'on se pose la question. Comment se fait-il que le reclassement
parce que ça devient du reclassement à l'article 3,
le ministre l'inclue dans sa réglementation et que, dans notre
convention collective, l'article 14 prévoie que ce sera
négociable pour nous? On s'est posé des questions
là-dessus. On n'a pas les réponses, parce qu'on n'a pas toujours
ces règlements. Le ministre nous a dit ce matin qu'il était pour
reporter, possiblement, certains règlements, mais c'est encore sur sa
bonne foi.
M. Le Moignan: Justement, tenant compte de votre explication, si
on se rapporte à l'arrêté en conseil no 909, vous dites que
vous n'êtes pas prêts à renoncer à vos droits acquis.
Maintenant, comme jusqu'à maintenant le ministre n'a pas
été très volubile sur l'article 3, même devant les
autres groupes qui sont venus ici, vous avez tout de même des mesures
pour essayer de conserver vos droits. Est-ce que cela peut se faire, soit par
grief, soit encore dans le cadre de votre convention collective? Qu'est-ce que
vous prévoyez de mieux ou de pire?
M. Lalonde (Jean): Prévoir le mieux ou le pire, je ne
voudrais pas prêter d'intentions au ministre ici ce matin. C'est
évident que, si un règlement est adopté, les recours sont
très restreints, même si on fait des griefs, même si on
crie, le règlement va s'appliquer. On ne le sait pas, on reste dans
l'incertitude.
M. de Belleval: Là-dessus, M. Lalonde, le règlement
en question a été approuvé par qui?
M. Lalonde (Jean): Le règlement pour...
M. de Belleval: Les règlements en question, toutes les
dispositions en question, ont été approuvés par qui?
M. Lalonde (Jean): Le lieutenant-gouverneur en conseil.
M. de Belleval: Le lieutenant-gouverneur en conseil, le
gouvernement. Il n'y a rien qui empêche le gouvernement, demain matin, de
changer ça s'il le veut. Qu'est-ce que vous en pensez?
M. Lalonde (Jean): C'est sûr...
M. de Belleval: Alors en quoi la nouvelle loi...
M. Lalonde (Jean): ... il peut tout changer s'il le veut, demain
matin. Mais nous autres, on veut avoir la certitude...
M. de Belleval: ... en quoi la nouvelle loi change-t-elle quelque
chose de ce côté?
M. Lalonde (Jean): On aimerait avoir la certitude que, quand vous
allez changer des règlements, on va participer...
M. de Belleval: Est-ce que vous avez cette certitude
actuellement?
M. Lalonde (Jean): Non.
M. de Belleval: En vertu des lois qui sont en vigueur
actuellement, est-ce que vous avez cette certitude?
M. Lalonde (Jean): Pour l'engagement de nos professeurs, je vous
dis oui.
M. de Belleval: Vous l'avez? M. Lalonde (Jean): Oui.
M. de Belleval: Vous m'avez dit tantôt que je peux changer
cela demain matin.
M. Lalonde (Jean): C'est sûr. Mais est-ce que vous allez
nous consulter quand vous allez le changer?
M. de Belleval: On va prendre cela tranquillement. Demain matin,
le Conseil des ministres peut décider de changer cela. C'est d'accord?
Si, demain matin, le lieutenant-gouverneur décide de changer cela,
est-ce que vous avez la certitude que vous allez être
consultés?
M. Lalonde (Jean): Non.
M. de Belleval: Vous ne l'avez pas. Donc, la loi ne change rien
là-dessus. Et si c'est dans le champ de négociation, clairement,
ce sont vos conventions collectives qui s'appliquent. A ce que je sache, vos
conventions collectives vont continuer à s'appliquer.
C'est ce que je dis, c'est un faux problème. On maintient le
statu quo de ce côté. Si vous n'avez pas de certitude
actuellement, vous n'en aurez pas plus après. Mais si vous en avez
actuellement, vous gardez vos mêmes certitudes.
Le Président (Mme Cuerrier): M. Thiboutot, vous avez
demandé la parole?
M. Thiboutot: Oui. Je voudrais dire que, d'une certaine
façon, compte tenu de l'état actuel, ce sont des droits qu'on a
acquis. Actuellement, nous sommes devant un projet de loi qui est quand
même un réaménagement du pouvoir comme tel. Permettez-nous
d'avoir cette inquiétude, on peut vraisemblablement avoir
l'inquiétude d'être aussi face à une réorganisation
de tous les droits qu'on a, par règlement, puisqu'il y a un
réaménagement du pouvoir par la loi.
M. de Belleval: Je veux bien croire, mais vous avez admis
tantôt, le président a admis que...
M. Thiboutot: On ne voit pas tellement pourquoi il y
aurait...
M. de Belleval: ... actuellement, en vertu des lois actuelles,
ces choses peuvent être changées puisqu'elles relèvent de
l'autorité gouvernementale. Le gouvernement ne vous a pas
décrété un arrêté en conseil jusqu'à
la fin des temps. Il peut le changer demain matin. Il y a des procédures
qui s'appliquent s'il veut le changer. De ce point de vue, la loi ne change
rien. Elle ne change absolument rien.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le Président du
syndicat.
M. Lalonde (Jean): Actuellement, pour l'engagement de nouveaux
candidats, c'est sûr qu'on a changé le concours comme tel, de 1966
à 1977. Mais on nous a toujours consultés.
M. de Belleval: En vertu de quel article de la loi en vigueur
vous a-t-on consultés?
M. Lalonde (Jean): En vertu de notre participation à
909.
M. de Belleval: A quoi à 909?
M. Lalonde (Jean): 909, l'arrêté en conseil.
M. de Belleval: En vertu de quel article?
M. Lalonde (Jean): C'est en vertu de cela que la commission nous
consulte.
M. de Belleval: M. Lalonde, en vertu de quel article de la Loi de
la fonction publique, qui existe actuellement, avez-vous été
consultés?
M. Lalonde (Jean): Pour l'engagement des professeurs?
M. de Belleval: Pour la rédaction de l'arrêté
en conseil 909?
M. Lalonde (Jean): Pour l'arrêté en conseil 909, ils
ont été consultés en 1966, sur l'arrêté en
conseil.
M. de Belleval: Oui. Mais vous n'avez pas été
consultés en vertu d'un article de loi en vigueur. Vous avez
été consultés en vertu d'une négociation de bonne
foi.
M. Lalonde (Jean): Oui.
M. de Belleval: Bon! Ça va continuer après. Le
projet de loi 53 ne change rien là-dessus.
M. Lalonde (Jean): Vous nous le garantissez?
M. de Belleval: Vous allez continuer à être
consultés en vertu d'une négociation de bonne foi.
M. Lalonde (Jean): Vous nous garantissez qu'il va y avoir de la
négociation de bonne foi?
M. de Belleval: Ecoutez, la négociation de bonne foi, par
définition, c'est quelque chose qui repose, non pas sur un texte
écrit, mais qui repose justement sur la bonne foi. Ce n'est pas parce
qu'on change un texte écrit qui, déjà, ne vous donnait
aucune garantie juridique, que le statu quo est changé. On maintient
exactement la même chose.
C'est comme si vous me disiez qu'on ne peut rien changer à la Loi
de la fonction publique parce qu'en changeant cela, cela remet en cause des
négociations qui, jusqu'à maintenant, ont lieu de bonne foi. Non.
Si on n'en discutait pas avant, s'il n'y avait aucun article dans les anciennes
lois qui touchaient à cela et qu'il n'y en a aucun qui y touche dans la
nouvelle loi, c'est le statu quo. C'est la bonne foi entre les parties qui fait
la loi. Et dans le cas des négociations collectives, c'est le
résultat des négociations collectives.
Vous me demandez si, la prochaine fois, nous allons négocier une
convention collective de bonne foi. Premièrement, la loi m'oblige
à négocier de bonne foi, et je ne vois pas en quoi vous auriez
plus d'appréhension envers moi, de ce côté-là, que
vous en aviez envers l'ancien gouvernement.
M. Lalonde (Jean): Notre expérience, dans le passé,
nous a démontré que la bonne foi ne vient pas tout de suite, cela
prend du temps. J'ai négocié deux conventions collectives, la
première a pris deux ans, et la deuxième a pris un an, pour la
bonne foi.
M. de Belleval: Vous partez de moins loin avec le nouveau
gouvernement, de ce côté-là.
M. Lalonde (Jean): C'est une affirmation gratuite.
M. Pagé: C'est une affirmation gratuite, vous avez raison,
monsieur.
M. de Belleval: Donc, on se comprend. Tout cela relève des
questions de négociation collective. Ce n'est pas une disposition de la
loi, pas plus de l'ancienne que de la nouvelle.
M. Lalonde (Jean): J'aimerais vous poser une question, M. le
ministre. Quand vous parlez du mérite, comment allez-vous l'appliquer
aux professeurs?
M. de Belleval: Comment est-il appliqué actuellement?
M. Lalonde (Jean): Le mérite? On a le mérite
d'être professeur, c'est tout ce qu'on a.
M. de Belleval: Oui. Comment est-il appliqué dans le cas
d'une promotion, etc.?
M. Lalonde (Jean): II n'y a pas de promotion chez nous.
M. de Belleval: Vous n'avez pas de promotion?
M. Lalonde (Jean): Non.
M. de Belleval: Quel est le problème?
M. Lalonde (Jean): A un moment donné, on sait que le
problème va venir, parce qu'on sent que, dans les conventions...
M. de Belleval: La règle du mérite s'applique en
cas d'une promotion. Vous me dites qu'il n'y a pas de promotion. Il n'y a donc
pas de problème.
Le Président (Mme Cuerrier): Je dois faire une remarque.
Je croyais avoir dit tantôt que M. le député de Portneuf
devait parler avant M. le député de Gaspé. Je ne dois pas
avoir été assez explicite. C'est M. le député de
Portneuf...
M. Le Moignan: II y a eu une entente. J'ai seulement une petite
question à poser.
Le Président (Mme Cuerrier): A moins que vous n'ayez
terminé, M. le député de Gaspé.
M. Pagé: II restait une petite question au
député de Gaspé, je vais le laisser la poser.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: Sur cette question de mérite, M. le
ministre vient de dire je pense qu'on l'a avoué aussi en face
qu'il n'y a pas de promotion chez vous, mais il y a tout de même
le recrutement?
Une Voix: Exactement.
M. de Belleval: C'est le président qui dit qu'il n'y a pas
de promotion dans son cas.
M. Lalonde (Jean): Oui, mais il y a du recrutement.
M. Le Moignan: Non, mais il peut y avoir du recrutement. Je pense
que c'est le point qui semble les inquiéter le plus. Quand on nous parle
de notion...
M. de Belleval: C'est la question que je lui posais. Dans le cas
du recrutement, comment le mérite s'applique-t-il actuellement?
M. Le Moignan: Je termine, M. le ministre.
Le Président (Mme Cuerrier): C'est M. le
député de Gaspé qui avait la parole, en effet. Allez-y M.
le député.
M. de Belleval: M. le député, je vous en prie, je
m'excuse, je croyais que vous m'aviez donné à nouveau la parole.
Je vous écoute religieusement, M. le curé.
M. Pagé: C'est le cas de le dire d'ailleurs.
M. Le Moignan: Justement, en parlant de cette notion grise, cela
ressemble peut-être au temps qu'il fait ce matin, on ajoute un peu comme
la justice et l'équité. Votre crainte, je pense, ce n'est pas
tellement la compétence ou le conflit entre compétence, politique
ou favoritisme, c'est un peu cela votre idée? Quand il s'agit de
recrutement au mérite, c'est là où c'est dangereux pour
votre groupe?
M. Lalonde (Jean): Oui, de recrutement, c'est cela, oui.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre
M. de Belleval: En quoi là-dessus y a-t-il des changements
dangereux? J'attends qu'on m'explique cela.
M. Lalonde (Jean): C'est qu'on a, durant les deux
dernières négociations, évolué. On sait que nous,
les professeurs, on a le mérite d'avoir une échelle de salaires
avec les années de scolarité et les années
d'expérience. On sait fort bien qu'à quinze ans cela
s'arrête là et c'est tout. On se rend compte aussi que, dans le
contexte actuel, il va falloir trouver une autre formule, parce qu'on a dit,
à la dernière négociation, que tous ceux qui ont moins de
seize ans de scolarité auront seize ans de scolarité. A la
prochaine négociation, on va réduire l'écart entre vingt
ans de scolarité et seize ans. A un moment donné, il va falloir
trouver une autre solution.
Nous, on prétend qu'il va y avoir une règle de
mérite qui va s'appliquer. En prenant cette hypothèse, comment
allez-vous appliquer la règle de mérite pour les professeurs, en
prenant comme hypothèse que le système actuel de
rémunération devienne périmé? On le sent depuis
deux négociations, cela a réduit.
M. de Belleval: Je vous retourne la question que je vous
retournais tantôt, en quoi le projet de loi 53, de ce côté,
modifie-t-il quelque chose pour vous?
M. Lalonde (Jean): Actuellement, il ne modifie rien, mais nous on
aimerait savoir...
M. de Belleval: Bon, c'est ce que je dis.
M. Lalonde (Jean):... dans les procbaines
négociations...
M. de Belleval: On négociera, M. Lalonde, on n'est pas ici
en négociation.
M. Lalonde (Jean): Vous me dites qu'on va négocier la
règle du mérite. C'est cela que vous me dites.
M. de Belleval: Non, on s'entend en ce que le projet de loi 53,
de ce côté, ne modifie pas les règles du jeu. On s'en
retourne donc au niveau des négociations collectives. Les
négociations collectives, on les négociera de bonne foi la
prochaine fois, mais cela n'a rien à voir avec le projet de loi 53,
puisque le projet de loi 53 maintient le statu quo de ce côté.
Je pense que c'est important, pour vous comme pour les autres, que vous
réalisiez que le projet de loi 53, ce n'est pas une convention
collective, c'est un projet de loi, d'autant plus que, comme je l'ai dit pour
ce qui concerne les conventions collectives, toutes les dispositions qui
touchent cela sont maintenues en vigueur et se retrouveront à l'avenir
dans une autre loi, qui va s'appeler la Loi sur le régime syndical.
La question que vous me posez, vous voulez savoir comment je vais
négocier la prochaine convention collective, je vous dis: Attendez,
quand on arrivera à cette rivière, on traversera le pont. On
n'est pas encore rendu à négocier vos conventions collectives.
C'est une autre chose. Je comprends que vous allez avoir des revendications
à me faire la prochaine fois. On regardera cela ensemble et vous allez
voir qu'on va bien s'entendre.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: Merci, Mme le Président. J'aurai une
dernière question, mais avant, je voudrais formuler un commentaire.
Pardon?
M. de Belleval: On s'y attendait.
M. Pagé: Oui, c'est normal. On est ici pour cela.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: C'est parce que j'ai été
interrompu. Dites-leur d'arrêter de m'interrompre, regardez-les,
surveillez-les, ce sont eux...
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Portneuf, est-ce que je dois vous faire un dessin pour dire que quand...
M. Pagé: Non, Mme le Président, je comprends
très bien, mais j'espère que vous n'avez pas besoin de faire de
dessin aux autres.
Le Président (Mme Cuerrier): Quand je vous redonne la
parole, je dis, implicitement, que les autres interventions sont
superflues.
M. Pagé: C'est cela. Vous êtes superflus, tenez-vous
tranquilles!
Le Président (Mme Cuerrier): J'espère que ce n'est
pas à moi que vous le dites?
M. Pagé: Non, Mme le Président, je ne vous ferai
pas un dessin, j'ai montré du doigt.
Vous avez très bien cerné le problème ce matin.
Vous l'avez fait ressortir. J'espérais, quant à moi, que votre
intervention et votre contribution aux travaux de notre commission nous
permettraient d'avoir des réponses précises de la part du
ministre. Car, on conviendra que l'article 119, tel qu'amendé et
déposé par le ministre, prévoit un champ de
négociation. Qu'est-ce qui est négociable? Comme M. Thiboutot en
a fait état tout à l'heure, au deuxième paragraphe de
l'article 119, et on a eu l'occasion d'en faire état et d'en discuter
mardi soir avec le Syndicat des fonctionnaires, dans le deuxième
paragraphe de l'article 119, à partir des termes "à moins que,
selon que le sujet est attribué par la Loi sur la fonction publique,
à la commission, au ministre ou à l'office," on revient à
l'article 3 qui confère un pouvoir réglementaire au ministre au
niveau de la gestion du personnel... La question est de savoir si ce qui est
prévu à l'article 3 sera négociable. C'est là le
noeud du problème. J'aurais apprécié, quant à moi,
et je suis certain que c'est la même chose pour vous vous pourrez
me le confirmer que le ministre nous dise, de façon
précise et définitive, si ce qui est prévu à
l'article 3 va être négociable, oui ou non. En tout temps, il
peut, par son pouvoir réglementaire, retirer certaines choses du champ
de négociation. On l'a vu avec le problème des frais de
transport, la campagne "Je ne roule plus" des itinérants de la fonction
publique du gouvernement du Québec. Cela a été le plus bel
exemple, où une chose qui était perçue comme pouvant
être négociable, n'a pas été négociée
à cause du pouvoir réglementaire.
Ma première question, premier volet: Ne croyez-vous pas que tout
le problème des questions que vous soulevez ce matin et des
interprétations et des interrogations qu'on se pose et qu'on se fait de
part et d'autre, est strictement relatif à l'interprétation qu'on
doit donner à l'application, et de l'article 119 et de l'article 3?
Je pense que si M. le ministre de la Fonction publique avait voulu, il
aurait pu clarifier cette situation et dire exactement ce qui est
négociable et ce qui ne le sera pas. Le problème aurait
été réglé pour beaucoup d'intervenants. Je pense,
entre autres c'est ce que je vous demande de me confirmer que
cela aurait répondu aux questions que vous nous formulez ce matin et que
vous êtes en droit de poser, parce que c'est inquiétant d'avoir
une épée de Damoclès et un pouvoir réglementaire.
Vous ne saurez pas ce qui est négociable et ce qui ne l'est pas, ce qui
peut, éventuellement, être retiré du champ de
négociation de la part du ministre par un simple règlement sur
lequel, par surcroît, il n'y a aucune obligation de vous consulter. En
vertu de l'article 52 de l'ancienne loi, vous pouviez être
consultés et vous l'avez été. Si le ministre, ce matin, ne
peut pas répondre à la question qui est posée depuis le
début des travaux de cette commission, c'est-à-dire l'article 3,
comment l'interprétera-t-il? Au moins, il aurait pu faire part de son
intention de consulter les parties, tout comme cela se faisait auparavant.
Deuxième volet de ma question...
M. de Belleval: C'est évident...
M. Pagé: Vous venez d'arriver. Laissez-moi
compléter. Dites-le si c'est évident.
M. de Belleval: C'est ce que je dis.
M. Pagé: L'autre soir... De toute façon, vous
n'étiez pas ici.
M. de Belleval: Je l'ai dit au moins dix fois.
M. Pagé: C'est parce qu'on ne se comprend pas ou que vous
parlez en termes voilés, mais dites-le donc en noir sur blanc ce qui va
être dans le champ de négociation...
M. de Belleval: Passez-moi un papier, et je vais vous
écrire oui.
M. Pagé: L'autre jour, la question vous a
été posée et vous n'avez pas voulu y répondre,
mardi soir dernier, vous vous rappelez?
M. de Belleval: Voyons donc! On a répondu à cela
des dizaines de fois.
M. Pagé: Deuxième volet de ma question... M. de
Belleval: La réponse est oui.
Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Pagé: Vous avez fait état tout à l'heure
du dépôt du rapport...
M. de Belleval: C'est en noir sur blanc, vous voyez, c'est
là.
M. Pagé: ... Martin. Ne croyez-vous pas que
l'Assemblée nationale devrait reporter l'étude en
deuxième lecture du projet de loi jusqu'à ce que le
rapport Martin soit déposé?
C'est ce que plusieurs membres de cette commission ont demandé au
ministre.
Le ministre nous a dit vous avez certainement pris connaissance
de ça que le projet de loi no 53 ne serait pas adopté
avant le dépôt du rapport Martin, mais le ministre n'a pas
parlé de la deuxième ou de la troisième lecture. C'est
là que c'est important, parce que si la deuxième lecture est
adoptée, qu'on étudie le projet, article par article, on peut
prévoir que, dans la stratégie du ministre... ce qui s'inscrit
quand même dans sa politique autoritaire, parce qu'il faut l'identifier;
c'est cela. C'est lui qui a raison et la vérité, c'est lui qui
l'a, purement et simplement.
On peut présumer qu'on va procéder à l'étude
du projet de loi en deuxième lecture, article par article. On aura le
dépôt du rapport et on ne pourra pas, sur la foi des
recommandations de ce rapport, avoir un débat ici, en commission
parlementaire, au moment de l'étude, article par article. C'est
ça, le problème, et ce grand démocrate nous arrive avec
des choses comme ça.
Moi, je vous la pose, la question: Est-ce que, en tant qu'organisme
directement visé par le projet de loi no 53, vous recommandez que
l'Assemblée surseoie à l'étude du projet de loi, n'aille
pas en deuxième lecture jusqu'au dépôt du rapport de la
commission Martin?
C'est ma dernière question. Je sais que j'aurai de la
difficulté à revenir, alors je tiens, messieurs, à vous
remercier. Votre contribution est valable, positive et elle est concluante.
Quant à moi, j'ose croire que le ministre pourra se reprendre dans sa
déclaration de remerciement pour vous dire exactement ce qui en est de
tout le problème de l'interprétation de l'article 3 et de
l'article 119.
Merci, messieurs.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre. M. Jolivet:
... viennent de parler.
M. de Belleval: Là-dessus...
M. Pagé: Mme le Président, je m'excuse. Ma question
était à M. le président...
M. de Belleval: Est-ce que je peux prendre la parole d'abord?
M. Pagé: ... le ministre pourra revenir par la suite.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le Président,
est-ce que vous aviez demandé la parole?
M. Pagé: Je lui ai posé une question, Mme le
Président.
M. de Belleval: Mme le Président, je voulais simplement
faire une remarque...
Le Président (Mme Cuerrier): M. le président du
Syndicat...
M. de Belleval: ... avant, c'est que je...
M. Pagé: Mme le Président, question de
règlement. Je m'excuse auprès de nos intervenants.
M. de Belleval: J'ai la parole. Ce n'est pas vous qui avez la
parole.
M. Pagé: Je soulève une question de
règlement, là.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: Mme le Président vient de donner la parole
à ces gens-là. Soyez donc poli!
Le Président (Mme Cuerrier): M. le Président ne me
manifeste pas l'intention d'intervenir.
M. Pagé: Mais il veut répondre.
Le Président (Mme Cuerrier): Est-ce que vous avez
l'intention de le faire? Bon! M. le président du Syndicat, avec plaisir,
je vous donne la parole.
M. Lalonde (Jean): A votre question, à savoir si on a
l'intention de demander au ministre de reporter l'étude du projet de loi
en deuxième et en troisième lectures, je me permettrai de vous
fournir par écrit cette réponse, si vous me le permettez. Par
suite des discussions que nous avons eues aujourd'hui ici, nous devrons
rencontrer nos membres et tout ça, et on aura certainement une position
à prendre.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.
M. de Belleval: Est-ce que je peux prendre la parole, Mme le
Président, maintenant? Oui?
Le Président (Mme Cuerrier): Allez-y, M. le ministre, je
vous la donne.
M. de Belleval: Je ne veux surtout pas être l'objet d'une
question de règlement de la part du préfet de discipline de cette
commission qu'est devenu le député de Portneuf.
M. Pagé: Bon! Le préfet de discipline. Vous en
auriez besoin, de discipline...
Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, M. le... Bon! J'ai
failli faire un lapsus.
M. Pagé: Oui?
M. de Belleval: Mme le Président, je comprends beaucoup
l'angoisse du député de Portneuf et de ses amis quant à
l'étude en deuxième lecture et même, article par article,
du projet de loi no 53. A ce moment-là, Mme le Président, ils
seront obligés non pas de discuter de la dentelle du projet de loi, mais
ils vont être obligés de discuter du fond du projet de loi.
M. Pagé: Le début du fond.
M. de Belleval: Ils vont être obligés...
M. Pagé: Mettez donc de côté vos
flèches partisanes...
M. de Belleval: Est-ce qu'il va arrêter de m'in-terrompre
comme ça? Il m'interrompt tout le temps.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Portneuf, à l'ordre!
M. Pagé: ... et répondez donc aux questions de ces
gens-là.
Le Président (Mme Cuerrier): C'est M. le ministre qui a la
parole actuellement.
M. de Belleval: Je n'ai jamais vu un jeune homme aussi
dissipé. Je vais en parler à son chef, certain.
M. Jolivet: II n'en a pas. Quel chef?
M. Pagé: On a un bon chef et on va en avoir un bon. On va
en avoir un permanent tantôt. On va vous battre au
référendum, on va vous battre aux élections et
préparez-vous...
M. de Belleval: On va en parler à ses chefs.
Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, à l'ordre!
A l'ordre, s'il vous plaît!
M. Pagé: ... dans vos comtés. J'arrive du
comté de Laviolette et du comté de Rimouski...
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Portneuf, je dois vous rappeler à l'ordre.
M. Pagé: Je vous dis qu'à votre place je serais
inquiet.
M. Marcoux: ... vous voyagez beaucoup. M. de Belleval: Ce
n'est pas possible.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre, c'est vous
qui avez la parole...
M. de Belleval: D'accord.
M. Marcoux: ... tout le Québec. Il est temps que vous vous
rapprochiez.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le Président du
Syndicat a manifesté l'intention de la prendre ensuite.
M. le ministre.
M. de Belleval: Alors, j'en parlerai à ses chefs, donc.
Mais, pour revenir au fond de la question, je comprends pourquoi ils veulent
maintenir, par des mesures dilatoires, le débat sur des points
périphériques, parce qu'ils vont être obligés, a ce
moment-là, de se prononcer sur le fond. Je pense que les associations
syndicales vont facilement démasquer les faux amis qui sont actuellement
devant eux et qui leur lancent de belles balles, soi-disant comme s'ils
étaient devenus...
M. Pagé: ... de Belleval?
M. de Belleval:... tout d'un coup, depuis le 15 novembre, des
partisans et des défenseurs des droits syndicaux. On va se rendre compte
qu'à ce moment-là, sur beaucoup d'aspects, leurs positions sont
beaucoup plus radicales et beaucoup plus antisyndicales que ce que pourrait
receler le projet de loi et qu'il ne recèle pas du tout, d'ai-leurs.
M. Pagé: Notre position n'a jamais changé, nous,
par exemple.
Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, M. le
député de Portneuf!
M. de Belleval: Je comprends que c'est ça, au fond, votre
problème. Vous...
M. Pagé: Je soulève une question de
règlement ici.
M. de Belleval: ... voulez retarder le plus longtemps possible
l'étude, article par article, du projet de loi.
M. Pagé: Je soulève une question de
règlement. Question de règlement, Mme le Président.
Le Président (Mme Cuerrier): Sur la question de
règlement...
M. Pagé: Oui.
Le Président (Mme Cuerrier): ... M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: Mme le Président...
M. de Belleval: J'avais terminé, Mme le
Président...
M. Pagé: Bon!
M. de Belleval: Vous pouvez maintenant donner la parole à
quelqu'un d'autre.
M. Pagé: Sur la question de règlement, Mme le
Président, je voulais faire valoir, parce qu'on a le droit... On n'a pas
le droit de soulever une question de privilège, mais on a le droit de
soulever une question de règlement pour soulever son privilège de
député.
Le Président (Mme Cuerrier): Je vous donne la parole sur
la question de règlement, M. le député de Portneuf.
M. Pagé: Je ne comprends pas que le ministre intervienne
comme cela, ce matin. Je lui ai demandé de répondre à des
questions. J'ai formulé des questions aux intervenants et le ministre
s'est embarqué dans un discours de flèches partisanes...
M. Marcoux: Question de règlement, question de
règlement...
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: Mme le Président, j'ai quand même le
droit de rétablir certains faits et je dirai ceci: Nous, notre position
n'a jamais changé.
M. Jolivet: Non.
M. Marcoux: Question de règlement.
M. Pagé: Vous avez tellement "flirté" avec les
syndicats que vous êtes mal à l'aise aujourd'hui. Soyez donc
francs et mettez donc les cartes sur la table!
M. Marcoux: Mme le Président, question de
règlement.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Portneuf, votre question de règlement s'apparente à une
intervention, alors que ce n'est pas vous qui avez la parole actuellement.
M. Lalonde (Jean): M. Thiboutot voulait faire une
intervention.
Le Président (Mme Cuerrier): M. Thiboutot, vous vouliez
parler?
M. Thiboutot: J'aimerais bien que le débat ne s'engage pas
dans une voie à caractère électora-liste ou politique.
Nous, on est ici en tant que syndicat. Que l'Opposition nous dise qu'on a
raison, que le parti au pouvoir nous dise qu'on a tort, ou que ce soit
l'inverse, ce n'est pas le but de notre présence ici. On est en train,
actuellement, de défendre nos membres et non pas de prendre une position
à caractère politique ou électoraliste.
Je voudrais, d'une certaine façon, M. de Belle-val, vous
répéter que vos interventions et vos réponses nous
laissent quand même dans l'incertitude par rapport à l'article 3.
Avec les éléments de réglementation qui y sont
déterminés, l'article 119, que vous avez fait en amendement
à l'article 52a du projet de loi si ma mémoire est bonne,
constitue un article qui apparaissait dans l'ancienne loi. Par contre, le
paragraphe qui suit cet article, qui apparaissait dans l'ancienne loi, ne fait
que maintenir, au fond, l'article 3a comme tel...
M. de Belleval: L'article 119. M. Thiboutot: Oui, 119.
M. de Belleval: ...et il maintient le statu quo. Ce qui existait
avant...
M. Thiboutot: Oui.
M. de Belleval: ... avec les changements, comme on les appelle,
de concordance.
M. Thiboutot: Mais, par contre, il fait référence
dans son dernier paragraphe aux pouvoirs à caractère
réglementaire. Ces pouvoirs réglementaires sont inscrits dans
l'article 3 de la loi.
M. de Belleval: Oui, c'est-à-dire que, comme je vous l'ai
expliqué tout à l'heure, de la même façon que
l'ancienne loi le permettait à l'ancienne commission, ou enfin à
la commission actuelle tant que le projet de loi restera un projet de loi, il
permet à la commission de concourir, par règlements, à
négocier des choses qui ne sont pas, soi-disant, négociables en
vertu de la loi actuelle. Cela permet la même chose, maintenant, au
ministre de la Fonction publique.
Autrement dit, comme maintenant, à l'avenir, le pouvoir sera
transféré de la commission au ministre de façon à
garder la soupage ouverte, la porte ouverte. C'est maintenant le ministre qui
va pouvoir, par règlement, concourir à cela. Mais, sur le fond
légal, cela ne change absolument rien, comme vous le savez, puisque, de
toute façon, ces règlements devaient être approuvés
par le Conseil du trésor, qu'il s'agisse de l'ancienne commission ou de
la commission actuelle, ou des pouvoirs ministériels.
Il n'y a aucun changement. L'article 52a est maintenu
intégralement. D'ailleurs, de ce point de vue, les intervenants qui sont
venus avant vous n'ont pas contesté ce point de vue que l'article 52a
est maintenu intégralement. Mais, comme je l'ai dit, il y a un avantage
supplémentaire, compte tenu du transfert de pouvoirs qu'opère la
loi. C'est que, maintenant, votre interlocuteur véritable, c'est le
ministre de la Fonction publique. A l'avenir, quand vous négocierez une
convention collective il sera aussi votre interlocuteur véritable en
matière de règlements, tandis que maintenant c'est une
commission, que vous ne voyez jamais. La commission, vous ne négociez
pas avec elle. Alors, pour vous, c'est quand même un avantage
supplémentaire. S'il y a un changement qu'opère l'article 52a ou
119, c'est un changement plutôt de votre côté. Il est
plutôt en votre faveur. Comprenez-vous?
M. Thiboutot: J'aimerais vous citer différents articles de
notre convention collective qui, de par l'article 3a, n'y apparaîtront
plus.
M. de Belleval: Bien oui, ils vont continuer à y
apparaître parce que l'article 91, je l'ai dit à plusieurs
reprises, dit que les pouvoirs que le ministre exerce en vertu de l'article 3,
y compris 3a, sont soumis à 52a, à la Loi sur le régime
syndical. J'aurai beau changer le monde en vertu de l'article 3...
M. Thiboutot: Mais, M. le ministre...
M. de Belleval: ... il faut que je change le monde sous
réserve de vos conventions collectives.
Le Président (Mme Cuerrier): M. Thiboutot.
M. Thiboutot: M. le ministre, l'article 52a, si je lis le projet
de loi, vient après l'article 3.
M. de Belleval: Non, il ne vient pas après, il vient dans
une autre loi. A l'avenir, ce sera la Loi sur le régime syndical.
Je ne peux pas utiliser les pouvoirs que me donne la loi sur la fonction
publique à l'encontre de la Loi sur le régime syndical. Autrement
dit, le projet de loi 53 est subordonné, en ce qui concerne les
conventions collectives, à la Loi sur le régime syndical.
Comprenez-vous? C'est une loi inférieure de ce point de vue à la
Loi sur le régime syndical. Ce sont les dispositions de la Loi sur le
régime syndical qui prévalent sur le projet de loi 53, sur
l'article 3. Mais l'article 3 ne touche pas simplement des syndiqués.
Premièrement, il dit qui, à l'intérieur du gouvernement,
est responsable de l'initiative et, deuxièmement, il touche à des
non-syndiqués, mais, en ce qui touche les syndiqués, quand il y a
une convention collective, ce que dit l'article 91, ce sont les dispositions de
la convention collective qui s'appliquent. Si les dispositions d'une convention
collective disent: C'est noir, je ne peux pas dire, en vertu du
règlement: C'est blanc. Il faut que je dise noir, et, si je dis blanc,
c'est illégal, parce que, ce qui prévaut devant les tribunaux,
devant la loi, devant vos arbitres, etc., c'est ce qui est inscrit dans votre
convention collective. C'est ce que cela dit, juridiquement parlant. Repensez-y
un peu, discutez de cela avec vos avocats et, de toute façon, quand on
sera en deuxième lecture, article par article, on pourra d'ailleurs en
discuter avec les ardents défenseurs de la cause syndicale qui sont
à ma gauche.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Lacoste: Mme le Président, en fait, je pense qu'il est
bel et bien évident qu'au niveau de l'article 3 il va falloir mettre
l'esprit, ce que le ministre dit, et le formuler de façon claire au
niveau de la loi. Je pense que c'est tout simplement à ce niveau, que
c'est un peu embrouillé, pour moi du moins. Quand même au niveau,
de votre mémoire, au deuxième paragraphe de la page 3, vous
semblez déplorer que l'Office n'ait pas de juridiction dans le cas des
sous-ministres. Est-ce à dire que vous trouvez normal qu'il y ait des
concours publics institués lorsqu'il s'agit de nommer les
sous-ministres? Pouvez-vous m'indiquer une juridiction où cela se
pratique? Dans l'affirmative, pourriez-vous informer cette commission sur la
façon dont de tels concours sont tenus, comment, par exemple, l'on
constitue des jurys?
M. Lalonde (Jean): Le deuxième paragraphe, vous avez bien
dit?
M. Lacoste: A la page 3, deuxième paragraphe.
M. Lalonde (Jean): Je m'excuse, mais je ne comprends pas votre
question. Je ne pense pas qu'on fasse allusion, dans ce paragraphe, à ce
que les sous-ministres soient nommés par concours. On parle de
délégation, non?
M. Lacoste: Vous écrivez: En vertu du projet de loi,
l'office n'a pas juridiction, notamment dans le cas de sous-ministres et autres
employés de rang équivalent et dans le cas des employés
occasionnels. Vous pourriez peut-être expliquer l'esprit de ce
paragraphe?
M. Fines: II faudrait mettre l'accent sur le dernier bout de
phrase: Et dans le cas des employés occasionnels. Pour nous, les
employés occasionnels sont les professeurs suppléants qui font
exactement le même travail que nous, les mêmes fonctions, ont plus
ou moins la même rémunération, qui exercent exactement le
même travail que nous. Il est important qu'on puisse avoir des gens
qualifiés. Par exemple, si une personne va en vacances, notamment dans
le cas des COFI, on enseigne douze mois par année, nous avons
fréquemment besoin de personnes pour remplacer les professeurs qui sont
là. Il est important d'avoir la même qualité, le même
degré de bons professeurs pour enseigner de manière que la classe
se poursuive sans accroc. C'est pour cela qu'on demanderait que les
employés occasionnels répondent à la même chose que
les autres employés, que, pour choisir les employés occasionnels,
on fasse exactement de la même manière que pour les professeurs
réguliers ou permanents.
M. Lacoste: Mais la raison de votre petit bout de phrase:
L'office n'a pas de juridiction notamment dans le cas de sous-ministres...
M. Fines: C'est un exemple qu'on voulait prendre où il y
avait certaines catégories d'employés qui ne seront pas
régies par l'office, notamment les sous-ministres et autres
employés de rang équivalent et aussi les employés
occasionnels.
Le Président (Mme Cuerrier): Cela répond à
votre question, M. le député de Sainte-Anne? M. le
député de Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: M. Lalonde, à lire votre mémoire et
à écouter les questions que vous avez posées directement
au ministre, vous semblez craindre énormément la perte des droits
acquis. Vous semblez vouloir, tout au moins, conserver l'aire ou le champ de
négociation existant présentement.
De plus, vous semblez vouloir agrandir le champ de juridiction, si
possible, au niveau des
conventions collectives; c'est ce que j'ai cru comprendre dans votre
mémoire. Au-delà des textes de loi qu'il y a là, qui
étaient, à l'époque, purement et simplement des
mémoires, des échanges sur les différents principes qu'on
y retrouve, je voudrais faire un commentaire. Je ne sais pas si ça peut
contribuer à vous rassurer. J'ai fait le même commentaire devant
les fonctionnaires provinciaux, je crois que c'est mardi soir. On s'est
engagé à plusieurs reprises je comprends que ce n'est pas
clair parce qu'il y a peut-être certains individus qui ont
intérêt à conserver l'ambiguïté au niveau du
texte existant il est clair, le ministre s'est engagé,
l'équipe ministérielle ici, on ne s'est pas gêné
pour le dire, il n'est question d'aucune façon de rétrécir
le champ de juridiction existant actuellement.
Si les textes ne disent pas ça, on va s'arranger pour qu'ils le
disent. D'accord? C'est un premier point que je veux vous dire.
Deuxièmement, on s'est engagé aussi à ne pas
adopter la loi 53 tant et aussi longtemps que la commission Martin n'aura pas
publié son rapport. Advenant que la commission Martin produise un
rapport et que ça nous oblige à élargir le champ, l'aire
de négociation, on le fera, parce que la loi ne sera pas adoptée.
Tout ce que vous gagnez par rapport à la situation ou à
l'engagement d'aujourd'hui, c'est que ce sera plus que le statu quo actuel
qu'on vous garantit déjà formellement.
Je ne sais pas si c'est clair encore. Cela fera partie d'une loi
spéciale, l'aire de négociation, non plus de la loi 53.
J'espère que cela aussi, c'est clair. Si vous avez une analyse à
faire, des réponses à nous donner concernant la deuxième,
la troisième lecture, vous tiendrez compte de ces engagements formels,
parce qu'on a le pouvoir présentement, on a pris l'engagement et on n'a
pas l'intention de reculer là-dessus. C'est clair aussi,
j'espère? Il y a tous ceux qui ont intérêt à semer
l'ambiguïté au niveau de l'adoption de ce projet de loi, selon les
intervenants, pour les uns, ça peut être pour servir des fins
personnelles, pour d'autres, pour des causes partisanes, mais, comme
équipe ministérielle, on prend l'engagement formel de vous dire
ça; on n'a aucune crainte de vous le dire: C'est nous qui allons
l'amender.
On ne s'érigera pas en faux défenseur, parce qu'on a le
pouvoir de le faire.
Je vous remercie infiniment d'être venu, au nom du gouvernement.
Cela nous a fait plaisir de faire le tour de votre mémoire; je pense
qu'il y a des points positifs et j'espère qu'on aura contribué
à dissiper certaines craintes.
Quant à la période de négociation qui viendra
subséquemment, je vous répète, si cela peut encore
contribuer à vous rassurer, qu'elle se fera au moins dans le cadre du
statu quo actuel, et peut-être plus, selon, bien sûr, le rapport de
la commission Martin.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le président du
syndicat, vous aviez manifesté l'intention d'intervenir.
M. Lalonde (Jean): Oui. Face aux discussions qu'on a eues ce
matin, n'aurait-il pas été préférable, pour un tel
projet de loi, de former une table de consultation, syndicats, membres du
gouvernement, d'étudier ensemble, d'évoluer ensemble dans le
dossier je ne demande pas de réponse plutôt que de
venir en discussion comme ça ici? Je pense qu'il y a du temps qu'on a
mis sur ça. On ne le regrette pas, ce n'est pas ça; au contraire,
je pense qu'on apprend à connaître en étudiant les projets
de loi. Pour nous, il me semble qu'il aurait été
préférable qu'il y ait une consultation qui se fasse avec les
syndicats de la fonction publique, parce que le passé prouve que nous
avons négocié nos conventions collectives. Si on regarde les
conventions collectives, on en a signé cinq, le Syndicat des
professeurs, à comparer à bien d'autres secteurs.
Je pense qu'à l'intérieur de la fonction publique, les
syndicats ont négocié de bonne foi, je pense qu'on l'a
prouvé, et on aurait pu former une table pour discuter des changements
apportés au niveau du projet de loi de la fonction publique. C'est une
opinion que j'émets tout simplement.
M. de Belleval: Je vais répondre à votre question,
je trouve que c'est très intéressant comme question. Cela ouvre
des perspectives. Il y a plusieurs façons de procéder quand on
présente un projet de loi ou qu'on annonce une nouvelle
législation. On peut procéder par un livre vert, un livre blanc,
on peut procéder aussi par un dépôt de projet de loi en
bonne et due forme et, par la suite, tenir une commission parlementaire
où chacun vient donner son point de vue.
Je n'ai pas besoin de vous dire qu'on a utilisé, de diverses
façons les différentes méthodes depuis un an maintenant.
Il y a plusieurs projets de livres blancs, ainsi que des livres blancs ou des
livres verts qui sont en discussion, et aussi, des projets de loi.
Là-dessus, c'est à la demande même des parties syndicales,
entre autres, des associations syndicales que nous tenons actuellement ces
commissions. A la suite du dépôt du projet de loi, on aurait pu
procéder aussi par consultation directe, comme vous le dites. Je vois
que votre atavisme syndical je ne vous le reproche pas, d'ailleurs
revient à la surface, vous parlez de tables de concertation,
sinon de négociation. J'ai déjà fait remarquer
là-dessus qu'il n'est pas normal qu'un projet de loi qui touche à
l'ensemble de la population et à l'ensemble des employés, y
compris les non-syndiqués, fasse l'objet de telles négociations.
Je pense que cela doit être, au contraire, une discussion ouverte, comme
celle que l'on a actuellement.
Il n'y a rien qui interdise qu'une fois cette première prise de
contact publique faite, une fois les séances de la commission
passées, on ne se revoie pas pour échanger sur des choses plus
précises, avant d'aller en deuxième lecture, ou même avant
d'aller parce que je pense que c'est là que cela peut être
crucial au niveau de la discussion article par article. De ce
côté-là, je suis tout à fait disposé à
rencontrer quelque associa-
tion que ce soit, pour examiner ces choses à tête
reposée.
Je dois dire que, depuis un an, je ne vous ai refusé aucune
demande de rendez-vous de ce côté, pas plus qu'à qui que ce
soit.
M. Lalonde (Jean): On n'en a pas demandé.
M. de Belleval: Comme vous le voyez, ce n'est pas de mon
côté qu'est la mauvaise volonté. Je ne dis pas non plus que
ce soit de la mauvaise volonté de votre part de ne pas m'en avoir
demandé. Tout ce que je veux dire, c'est qu'il n'y a pas de
problème de ce côté.
Mais c'est bon d'avoir une bonne discussion ouverte. Je pense que c'est
meilleur pour la démocratie, à mon avis, que la première
discussion se fasse en public plutôt que de procéder d'une
façon qui m'apparaît un peu dangereuse sur le plan de la
démocratie, en général, cette façon un peu
corporatiste d'organiser l'Etat et la discussion des projets de loi de l'Etat,
à savoir que le gouvernement devrait d'abord négocier ses projets
de loi avec les groupes de pression, avant de les mettre sur la place publique.
Je trouve que c'est dangereux. On peut déposer des livres verts, des
livres blancs, mais quand on est rendu au niveau des projets de loi comme tels,
je pense que les premières réactions, les premières
discussions doivent se faire au grand jour. On est loin d'être sûr
que la démocratie sera mieux assurée par ces discussions de
couloirs, même faites de la meilleure foi possible, entre les groupes de
pression et l'Etat. Je pense que les premières discussions doivent se
faire au grand jour, de ce côté.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Lacoste: J'aimerais, suite à ce que le ministre a dit,
ajouter quelques mots. Si on veut revaloriser le rôle des
députés non ministres, on parle souvent du back-bencher,
lorsqu'il arrive une négociation entre le ministre et les
différents groupes de pression, le député n'est
pratiquement pas au courant de ce qui peut se passer à
l'intérieur du Conseil exécutif.
Si on veut revaloriser le rôle du député, la
commission parlementaire, je crois, c'est l'endroit voulu pour le faire. Je
pense que c'est sain, en bonne démocratie, que le député
soit au moins au courant des demandes syndicales des groupes de pression, des
positions du ministre et des oppositions. Il y a aussi notre opposition
à nous, les députés ministériels. C'est de la saine
démocratie.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le Président du
syndicat.
M. Lalonde (Jean): Vous me permettrez de conclure, de vous
remercier de nous avoir reçus, nous espérons que la bonne foi du
ministre se retrouvera dans les textes de la loi 53, on ose l'espérer.
En terminant par une blague, je vous inviterais à participer aux cours
qu'on donne à des élèves et où il y a souvent plus
de discipline.
Le Président (Mme Cuerrier): II me reste à
remercier le Syndicat des professeurs de l'Etat du Québec de son
mémoire et de sa contribution au fonctionnement de cette commission
parlementaire. Merci beaucoup, messieurs.
M. Pagé: Merci beaucoup. M. Thiboutot: Merci
beaucoup.
Le Président (Mme Cuerrier): J'appellerai maintenant le
Syndicat des professionnels du gouvernement dont le porte-parole est Mme
Renée Lebrun.
M. le président du syndicat, voulez-vous vous identifier s'il
vous plaît?
Syndicat des professionnels du gouvernement du
Québec
M. Théberge (Marcel): Oui, Marcel Théberge,
président du Syndicat des professionnels. Je pense qu'il y a une
légère erreur en ce qui concerne le porte-parole. C'est moi. Ce
n'est pas grave.
Le Président (Mme Cuerrier): M. Théberge, le
mémoire du Syndicat des professionnels du gouvernement du
Québec.
M. de Belleval: Vous n'êtes pas moins habile, M.
Théberge, mais vous êtes moins joli.
M. Théberge: Je vous remercie. Mme le Président,
messieurs, le dépôt du projet de loi no 53, par le ministre de la
Fonction publique, le 26 juillet dernier, nous a profondément
déçus en tant qu'organisation syndicale et en tant que
salariés de la fonction publique du Québec.
Il nous apparaissait qu'à l'intérieur de la fonction
publique il était grand temps de faire des réformes en
profondeur, parce qu'on considérait que les lois qui nous
régissaient nous empêchaient d'exercer efficacement et
correctement notre rôle de syndicat qui n'est pas uniquement un
rôle de protecteur et de défenseur de nos membres, mais qui est
également un rôle de protecteur de la population par rapport
à des pratiques qui se passent à l'intérieur de la
fonction publique, pratiques qui ont été maintes fois
dénoncées. A ce sujet, il semblerait que le ministre de la
Fonction publique partage d'ailleurs passablement notre analyse de la situation
qui prévaut actuellement à l'intérieur de la fonction
publique, sauf qu'avec le projet de loi 53, on ne semble pas apporter les
correctifs qui s'imposent par rapport à ces problèmes.
D'une part, il nous semble tout à fait évident que le
projet de loi 53, autant par la façon dont il a été
déposé et dont il est actuellement discuté, n'est pas
conforme à une saine attitude démocratique.
D'autre part, il nous semble que le contenu du projet de loi ne
répond pas aux besoins de la population et aux aspirations de nos
membres.
Pour ce qui concerne la façon dont le débat sur le projet
de loi 53 évolue actuellement, il nous semble que le ministre de la
Fonction publique, fort heureusement, a reculé par rapport à ses
positions initiales. Le ministre se rappellera que, le 20 juillet dernier,
à sa demande, je l'avais rencontré avec un autre membre de
l'exécutif. Il nous avait fait un résumé du projet de loi
53 et il nous avait indiqué à ce moment-là qu'il
n'était absolument pas question, dans son esprit, de faire le moindre
débat public sur cette question, ni de faire siéger une
commission parlementaire.
Je constate, fort heureusement, qu'il y a eu des modifications
substantielles en ce sens. Sur le contenu du projet de loi 53 comme tel, il
nous apparaît extrêmement important, quant à nous, de dire
que, contrairement à ce que le ministre de la Fonction publique affirme
à l'heure actuelle, il y a, à l'intérieur du projet de loi
53, des dispositions très précises qui concernent nos conditions
de travail.
Il est bien évident qu'en vertu des articles 117 et 118 le
ministre de la Fonction publique va faire une loi spéciale sur le
régime syndical dans la fonction publique. J'y reviendrai un peu plus
tard. Je ne veux pas insister là-dessus pour le moment. Je veux
simplement dire que, même à l'intérieur du projet de loi
53, à l'exception toujours de la loi spéciale qui s'annonce sur
le régime syndical dans la fonction publique, il y a des conditions de
travail qui y sont déterminées.
Concernant la règle du mérite, il nous apparaît,
quant à nous, que c'est une condition de travail extrêmement
importante. A l'article 70, lorsqu'on parle de recrutement et de promotion au
mérite, on peut prétendre que ce sont les seules conditions de
travail des employés de la fonction publique qui vont être
régies par la règle du mérite, sauf que, par ailleurs,
lorsqu'on parle de la Commission de la fonction publique, on indique
très clairement que tous les règlements du ministre devront
être passés au crible en vertu de la sacro-sainte règle du
mérite. Il nous apparaît, par conséquent, que la
règle du mérite va être une espèce de carcan
à l'intérieur duquel on va se retrouver continuellement.
Sur le principe du mérite, on a des inquiétudes assez
fondamentales, non pas qu'on soit contre la vertu, bien qu'on ne la pratique
peut-être pas toujours, mais plutôt parce qu'on a des
inquiétudes quant à l'objectivité d'une telle règle
du mérite. Actuellement, le ministre de la Fonction publique nous dit:
II faut nous faire confiance pour que la règle du mérite ne
devienne pas un instrument politique ou patronal dangereux. On peut faire
confiance ou ne pas faire confiance. Quant à nous, ce n'est pas
là qu'est le problème. Quant à nous, c'est de trouver des
critères objectifs pour déterminer de quelle façon les
conditions de travail dans la fonction publique vont s'administrer. Sur la
règle du mérite, on a fouillé quand même un peu les
documents disponibles et on a constaté premièrement qu'en 1965
Jean Lesage nous avait dit lui aussi que désormais dans la fonction
publique, fini le patronage, fini le favoritisme, cela va être la
règle du mérite. D'ailleurs, le président actuel de la
Commission de la fonction publique prétend lui aussi que cela fonctionne
en vertu de la règle du mérite. Quand on constate, tout ce qu'on
en est, de quelle façon cela se passe à l'intérieur de la
fonction publique, il y a tout lieu de s'inquiéter de ladite
règle du mérite.
D'ailleurs, là-dessus, je vous rappelle simplement qu'il semble
qu'au niveau du gouvernement, il y ait certaines contradictions. Les principaux
d'école, dans les commissions scolaires, ont un arrêté en
conseil qui régit leurs conditions de travail, vous le savez. Ledit
arrêté en conseil, qui a été adopté il y a
quelques mois, précisait justement que désormais, à
l'avenir, pour eux aussi, cela marcherait en vertu du sacro-saint principe du
mérite, sauf qu'eux aussi, probablement, ont fouillé les
documents, ont retardé la définition de mérite et ont fait
sûrement comme nous, ils n'en ont pas trouvé. Ils ont
constaté que, finalement, c'était au contraire une mesure tout
à fait discrétionnaire, arbitraire au possible. Par rapport
à cela, lors d'une rencontre tenue samedi dernier avec le ministre de
l'Education, celui-ci a décidé de retirer le principe du
mérite dans ledit arrêté en conseil qui régit leurs
conditions de travail. Il a dit qu'il formerait une table avec les principaux
d'école pour déterminer précisément des
critères objectifs, plutôt que de laisser au ministre ou aux
administrations locales le soin de définir ce qu'était le
mérite. Il a été décidé de former une table
pour préciser de façon objective les critères qui devront
être retenus pour l'évaluation du personnel à
l'intérieur de la fonction publique.
Par rapport à cela, il nous semble que le projet de loi 53
maintienne quand même un certain nombre de conditions de travail à
l'intérieur de la fonction publique. Bien sûr, il y a la Loi sur
le régime syndical dans la fonction publique. Là-dessus,
d'ailleurs, il nous semble tout à fait contradictoire, au moment
où la commission Martin est créée et n'a pas encore
déposé son rapport, que le ministre ait déjà
décidé qu'il va y avoir une loi spéciale sur le
régime syndical dans la fonction publique. Une de nos revendications
fondamentales, c'est précisément d'être
débarrassés des diverses contraintes législatives qui
contribuent à nous marginaliser, nous, les travailleurs de la fonction
publique. On veut, comme tous les autres travailleurs du Québec,
être assujettis au Code du travail. On veut avoir le droit de
négocier toutes nos conditions de travail. Le ministre a
déjà décidé qu'il va y avoir une loi
spéciale sur le régime syndical dans la fonction publique. Il
apparaît que c'est extrêmement contradictoire. En tout cas, il nous
semble que, de cette façon, on mette sérieusement en doute la
crédibilité de la commission Martin. D'ailleurs, remarquez que je
n'ai pas vu le texte, il semblerait, d'après les renseignements que j'ai
pris à Radio-Canada récemment, que le prochain Code du travail,
qui est actuellement en voie de préparation, va exclure explicitement
les employés de la fonction publique desdites dispositions du Code du
travail.
Remarquez que ça, c'est sous toute réserve.
Je n'ai pas vu le texte. C'est l'information qui a été
véhiculée à Radio-Canada.
M. de Belleval: C'est faux, M. Théberge, je vous
arrête tout de suite là-dessus. C'est une fausse rumeur; c'est
faux.
M. Théberge: Je vous donne simplement les nouvelles que
j'ai prises; on vérifiera. Je n'ai pas le texte.
M. de Belleval: Cela m'a été rapporté. C'est
une fausse rumeur. Je l'ai déjà niée, d'ailleurs.
M. Théberge: Bon! De toute façon, ça
n'enlève rien au fait qu'il est déjà décidé
qu'il va y avoir une loi spéciale sur le régime syndical dans la
fonction publique.
Par rapport à ça, il ne nous semble pas que le projet de
loi no 53 réponde vraiment aux besoins de la fonction publique
québécoise et réponde aux aspirations de la population par
rapport à ça. Il est bien certain qu'il était plus que
temps, à l'intérieur de la fonction publique, qu'on ait un
employeur qui assume l'ensemble des responsabilités. Nous autres aussi,
comme le ministre, semble-t-il, d'après ce que j'ai compris ce matin, on
était tanné d'avoir un organisme présumément
neutre, présumément impartial, du style de celui de la Commission
de la fonction publique, qui nous empêchait continuellement de
négocier des conditions de travail extrêmement importantes. On est
d'accord pour la disparition de cet organisme. On est d'accord pour que le
ministre, l'employeur, assume l'ensemble des fonctions. On serait même
d'accord pour qu'il prenne les responsabilités de l'office de
recrutement, sauf peut-être que, politiquement, c'est embêtant,
parce que tu exclus trop de monde avec l'office de recrutement. On est d'accord
avec ça, sauf que nous, on se considère des salariés comme
n'importe quel autre salarié au Québec et on veut avoir le droit
de négocier toutes nos conditions de travail.
Il nous semble, là-dessus, que le projet de loi no 53 ne
réponde absolument pas aux besoins et on espère que le
débat qui se passe actuellement va être un peu plus serein, comme
le signalait tout à l'heure le confrère du Syndicat des
professeurs de l'Etat du Québec, ici, aujourd'hui, en commission
parlementaire et qu'on pourra vraiment discuter du fond des problèmes en
regard de ça.
Je vous remercie.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.
M. de Belleval: Je vous remercie beaucoup, M. Théberge,
pour la qualité et la hauteur de vue de votre témoignage.
Effectivement, je pense qu'on est en mesure maintenant d'avoir un débat
beaucoup plus serein sur cette question qu'il était possible de le faire
auparavant ou avec d'autres interlocuteurs.
Je voudrais reprendre seulement une couple de choses que vous avez
dites, qui m'apparaissent quand même fondamentales. Tout d'abord, une
première remarque. Je ne peux pas laisser passer sous silence
l'affirmation que vous avez faite au tout début voulant qu'il
n'était pas question d'avoir de débat public sur le projet de loi
no 53. Premièrement, c'est une absurdité dans les termes
puisqu'un projet de loi, par définition, fait l'objet d'un débat
public et il est soumis à l'Assemblée nationale, et c'est bien
l'endroit où il y a des débats publics.
Deuxièmement, quant à la modalité d'engager ce
débat public, à savoir s'il doit se faire en commission
parlementaire ou s'il doit se faire autrement, il est vrai que je vous ai
laissé le choix des moyens et le mouvement syndical, dans son ensemble,
et d'autres personnes, ont préféré qu'il s'engage, ce
débat, par le biais d'une commission parlementaire. On n'est pas
obligé de faire une commission parlementaire. C'est un peu au choix,
à la fois, des membres de l'Assemblée nationale et aussi au choix
des citoyens.
Mais je ne veux pas vous chicaner là-dessus. Quand même, je
veux rétablir les faits. La question de la loi spéciale sur le
régime syndical. Je n'ai pas pris position en décidant de
créer, comme ça, une Loi sur le régime syndical. Cette
loi-là, elle existe déjà. C'est, essentiellement, la
section XV de la Loi de la Fonction publique, et l'article 52a,
essentiellement, qui avait été ajouté en 1969
peut-être, je ne me rappelle plus trop, qui traite aussi de l'aire de
négociation.
Alors, ce que je fais, je ne crée pas de nouveaux articles. Je ne
crée pas un régime d'exception. Ce régime, il existe, et
je le prends tel quel. La seule chose, c'est qu'il m'est apparu urgent... Je
pense que, là-dessus, vous êtes d'accord aussi qu'il est urgent
qu'à l'intérieur de la fonction publique, on crée, enfin,
une autorité légitime, responsable de la gestion de la fonction
publique.
Il est urgent qu'on sorte de l'espèce de situation où il y
a trop d'intervenants, avec des pouvoirs qui se chevauchent et, souvent aussi,
des pouvoirs qui sont contraires même aux préceptes de notre droit
public, entre autres un organisme comme la commission qui est juge et partie.
Il est temps, je pense, qu'on mette de l'ordre là-dedans.
Devant cette urgence et devant aussi le fait que je ne suis pas sans
savoir, et je vous l'avais dit d'ailleurs, lors de notre première
rencontre, lors d'une rencontre que nous avions eue là-dessus, combien
ces questions peuvent être facilement l'objet de procédures
démagogiques et de procédures qui visent à ameuter les
gens beaucoup plus qu'à les renseigner, quand on touche à cette
Loi de la fonction publique, combien il est important aussi qu'un gouvernement
puisse agir rapidement là-dedans à la suite d'un premier mandat,
parce que l'histoire des derniers gouvernements nous l'a
démontré, eux aussi auraient bien voulu agir dans ce domaine,
mais ils en ont été incapables parce qu'ils n'avaient plus
à la fin la crédibilité pour présenter une pareille
loi et, de ce point de vue, je n'ai quand même pas tout inventé le
projet de loi actuel.
J'ai trouvé dans les dossiers du ministère des projets
antérieurs. C'est à partir de ces projets et
des discussions des sept, huit, neuf dernières années que
j'ai repris la tâche et, à mon avis, je l'ai reprise en
améliorant beaucoup ce que j'appelle les aspects de transparence, de
débat public qu'il doit y avoir autour de ces matières.
Comme il était urgent de faire cela, nous avons donc
présenté le projet de loi 53 et, en ce qui concerne les articles
en vigueur que je n'ai pas créés, que je n'ai pas
inventés, je les ai regroupés comme tels dans un projet de loi
qui est un projet de loi spécial, il est vrai, du point de vue de
l'économie générale du Code du travail, mais c'est une loi
spéciale que je n'ai point inventée. C'est un régime
particulier qui existe déjà et que j'ai maintenu
intégralement en vigueur, conformément d'ailleurs, à vos
propres demandes. J'ai même apporté des projets d'amendement
là-dessus et des projets d'éclaircissement pour être bien
certain que, "si peu possible", on touche au statu quo de ce côté,
étant entendu que, dans les mois qui vont venir, dans les années
qui vont venir, plutôt dans les mois maintenant, il y aura
possibilité d'apporter des amendements à ce régime
d'exception que vous n'aimez pas, à tort ou à raison c'est
votre droit de ne pas l'aimer suite au dépôt du rapport de
la commission Martin. Même à ce moment, s'il y a des amendements
à apporter, on n'aura même pas besoin de les apporter à la
Loi de la fonction publique, mais c'est à la Loi sur le régime
syndical qu'on devra les apporter, d'autant plus qu'il y a une disposition
omnibus dans le projet de loi 53 qui prévoit que c'est la Loi sur le
régime syndical qui prévaut sur le projet de loi 53 en
matière de négociation collective.
De ce point de vue, s'il y a des changements à apporter, ils
seront donc apportés à cette loi dite spéciale. Il se
pourrait même qu'à ce moment, le législateur décide
qu'on n'a plus besoin d'une loi spéciale, qu'on n'a même pas
besoin de l'amender, qu'on peut l'abolir et qu'au contraire, les dispositions
nécessaires soient apportées au Code du travail, par exemple.
C'est une possibilité.
Notre champ est ouvert de ce côté, et cela sera
nous-mêmes ou ceux qui nous succéderont qui auront à
prendre les dispositions nécessaires, et le fait de maintenir le statu
quo ne préjuge donc pas des conclusions de la commission Martin, mais
cela nous permet en même temps d'agir le plus rapidement possible sur les
autres aspects de la gestion de la fonction publique qui, eux,
requièrent notre attention la plus urgente.
Vous dites que je vous demande de nous faire confiance sur la
règle du mérite. Je regrette beaucoup, mais il existe
déjà des dispositions qui touchent à cette règle du
mérite ou à son application dans les lois actuelles, bien que
cela ne soit pas mis explicitement comme tel dans le projet de loi.
Je ne vous demande pas de me faire confiance plus que vous ne faites
confiance à la loi actuelle. Tout ce que je fais, c'est que j'explicite
davantage ces règles pour que, justement, on fasse moins confiance, on
ait besoin de moins faire confiance à l'arbitraire ministériel ou
à la responsabilité ministérielle, pour qu'au contraire
cet arbitraire, cette confiance ministérielle soient plus
sévèrement encadrés. D'abord, le principe du mérite
est plus clairement défini dans les articles 70, 71, 72 et 73. On y
indique très bien qu'il doit y avoir, bien sûr, comme on dit
actuellement, concours impartiaux, mais qu'il doit y avoir
égalité d'accès à ces concours impartiaux et
surtout que l'on doit respecter strictement le résultat de ces concours
impartiaux.
Cela est très important quand on dit comment cela renforce les
mécanismes contre le patronage et que cela va beaucoup plus loin que les
belles assurances que M. Jean Lesage donnait, et qu'à l'avenir le
ministre n'aura plus le loisir de nommer ou de ne pas nommer, à la suite
d'un concours, quand il n'aime pas le résultat, donc il n'aura pas le
loisir de substituer son jugement au jury, parce qu'après tout,
même si les concours sont imparfaits et le seront toujours, même si
le jugement des jurys est imparfait et sera toujours imparfait, dans quelque
système que ce soit, au moins on ne substituera pas un jugement encore
plus imparfait, celui d'un observateur extérieur qui, jusqu'à
maintenant, a le pouvoir de dire: Ecoutez, vous, messieurs du jury, je ne
respecte pas votre jugement. Je ne nomme personne à la suite de votre
jugement. Deuxièmement, je les nomme dans l'ordre que je veux. Je ne
respecte pas l'ordre de compétence, de mérite que vous avez
accordé aux candidats au concours. Je nomme le cinquantième
plutôt que le premier qui a eu le meilleur résultat au
concours.
Vous savez très bien ce que permettaient ces dispositions
actuelles que maintenant j'abolis. Cela permettait de faire du patronage par la
porte d'en arrière, cela permettait à des gens dans des cabinets
de filtrer des listes d'admissibilité et de dire ensuite au ministre:
Nomme telle personne, même si elle est au 40e rang dans le concours,
plutôt que la première, parce que celle-là est catholique,
comme on dit en langage de bon patronage. C'est cela qu'on élimine. Je
pense donc que c'est un progrès.
Maintenant, pour les modalités de ces concours, les
critères d'admission, la façon dont les jurys seront
formés, on se retrouve, après la loi 53 comme avant la loi 53,
dans la même situation, à savoir qu'il faut améliorer nos
procédures de ce coté, il faut que les choses soient de plus en
plus étanches, il faut que les jurys soient formés de la
façon la plus impartiale possible, sauf qu'il y a une grande
différence, à l'avenir, ce ne sera pas le même organisme
qui sera juge et partie dans l'organisation de ces concours et qui sera
appelé à statuer sur l'adéquation de ces mêmes
concours. Ce ne sera plus une commission qui ne se rapporte à personne
d'ailleurs d'autre que le gouvernement, à toutes fins pratiques, qui
sera le chien de garde de la qualité et de l'impartialité de ces
concours, ce sera un organisme indépendant, nommé par
l'Assemblée nationale, faisant rapport à l'Assemblée
nationale, qui surveillera, à ce moment-là, soit l'office de
recrutement, soit le ministre, dans la façon dont seront
gérés ces concours. C'est une garantie. Quant à la
participation des organismes syndicaux, des associations, même
des associations de cadres, puisqu'en vertu du projet de loi,
maintenant, les associations de cadres auront des droits aussi, ce qu'elles
n'ont pas actuellement, leur participation à l'organisation de ces
concours, à l'élaboration de normes et tout cela, le champ reste
ouvert. Il n'y a rien qui soit interdit en vertu de la nouvelle loi, pas plus
d'ailleurs que cela n'était interdit en vertu de l'ancienne loi, la
preuve est qu'on a vu, entre autres, les représentants syndicaux qui
vous ont précédés, on a démontré qu'il y
avait des aménagements qui avaient été possibles en vertu
des négociations de bonne foi qui résultent ou qui sont au coeur
même du processus de négociation collective. On retrouve cela
d'ailleurs avec d'autres syndicats pour d'autres corps d'emploi. Le champ est
ouvert et c'est en vertu de nos relations courantes, de nos relations de bonne
foi, que nous pourrons aménager ces choses-là. Il y avait un
principe quand même fondamental qu'il fallait mettre dans la loi, qu'on
retrouve dans la plupart des lois de la fonction publique en ce domaine,
à savoir que, compte tenu de la nature même de la fonction
publique, qui n'est pas une usine comme une autre justement, il y a un principe
fondamental qui doit présider à tout cela, c'est la règle
du mérite.
Maintenant, son aménagement particulier, tout reste ouvert, la
signification profonde, en pratique, de cette règle, il y a une
jurisprudence qui va s'élaborer, qui a déjà
commencé à s'élaborer, en vertu des lois en vigueur
d'ailleurs. C'est une matière vivante qui va continuer à vivre et
à être appliquée concrètement au jour le jour dans
le cadre de la loi et dans le cadre des négociations collectives.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le président du
syndicat.
M. Théberge: Evidemment, beaucoup de choses viennent
d'être dites, c'est difficile de me les rappeler toutes. Quant au premier
point, à savoir qu'il y aurait un débat public sur cette
question, je vous rappelle simplement que le 20 juillet, quand on
s'était rencontré, vous nous aviez indiqué que, quant
à vous, la loi devrait être adoptée à la fin du mois
d'août. A moins que je ne me trompe, cela donne un laps de temps assez
court pour faire un débat public. De toute façon,
là-dessus, je pense qu'il n'y a pas trop de problème.
M. de Belleval: Les ministres ont toujours beaucoup d'espoir sur
les dates d'adoption de leurs projets de loi, espoir souvent déçu
d'ailleurs.
M. Théberge: La même chose pour nous relativement
à la signature des conventions collectives.
M. de Belleval: Exactement.
M. Théberge: Bon, parfait. Je pense que l'intervention que
vous venez de faire n'a pas répondu tout à fait à mes
questions. Plusieurs points demeurent extrêmement obscurs dans mon
esprit, en tout cas.
Je reviens simplement au principe du mérite, je vais essayer de
restreindre un peu les interventions, on va les prendre sujet par sujet. Sur le
principe du mérite, c'est exact de dire qu'il n'y a aucune garantie
meilleure ou pire à l'avenir, en vertu de la loi 53, que ce qu'on a
maintenant. C'était...
M. de Belleval: ... un peu. Je pense que j'ai essayé de
vous démontrer en quoi c'était meilleur.
M. Théberge: Cela ne m'a pas rassuré, je vais vous
dire pourquoi.
M. de Belleval: D'accord.
M. Théberge: C'est exact de dire aussi qu'il y a plusieurs
gouvernements dans le monde qui ont adopté le sacro-saint principe du
mérite, sauf que précisément, quand on regarde ce qui se
passe dans les pays où on a adopté la règle du
mérite, quand on regarde ici même au Québec, on l'a
adopté, le président de la Commission de la fonction publique
prétend qu'il l'a adopté, prétend que ça fonctionne
actuellement en vertu de la règle du mérite, on s'aperçoit
finalement que ça laisse la place la plus totale à l'arbitraire.
La règle du mérite, il va falloir que quelqu'un, à un
moment donné, dise ce qu'elle veut dire de façon pratique, de
façon concrète. Au lieu de mettre des principes vertueux dans des
lois, mettons des critères objectifs et, ne les mettons pas dans les
lois, mettons-les dans les conventions collectives.
Sur cet aspect, ce n'est pas rassurant de se faire dire que la
règle du mérite est une affaire extraordinaire, que ça va
garantir l'impartialité de la fonction publique. Je vous ferais
remarquer que les règlements de l'Office de recrutement de la fonction
publique, du personnel de la fonction publique, devront être
approuvés par le Conseil du trésor. Tout à l'heure, vous
avez indiqué de façon très claire que le Conseil du
trésor était un organisme politique. Je regrette, je ne suis pas
d'accord pour dire que si on fait approuver des règlements par un
organisme politique, ça va être une garantie
d'impartialité. Indépendamment du gouvernement qui est en cause
d'ailleurs.
Ce n'est pas une question d'individu, ce n'est pas une question de
personnalité. Si on assujettit l'ensemble de la fonction publique au
Conseil du trésor, si on assujettit la Commission de la fonction
publique au Conseil du trésor et l'Office de recrutement de la fonction
publique au Conseil du trésor, qui est un organisme politique par
excellence on parle d'un gouvernement parallèle je pense
qu'on n'a aucune garantie qu'on va avoir de l'impartialité à
l'intérieur de ça.
Les critères sont facilement susceptibles d'être
politisés à cet égard.
Je vais revenir tout à l'heure sur la question du premier sur la
liste. Selon nous, ce n'est pas une garantie d'efficacité de la fonction
publique. On a l'impression qu'avec cela on freinera toute
mobilité à l'intérieur de la fonction publique. Sur
le mérite, c'est ce que je voulais dire. Si vous voulez intervenir, je
vais vous laisser la parole. Par la suite, je reviendrai sur la question du
premier sur la liste.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.
M. de Belleval: J'ai expliqué tout à l'heure, de
façon assez longue, le fondement même du choix qui a
été fait en vertu du projet de loi 53, soit de confier
carrément aux responsables politiques, non seulement une
responsabilité théorique, parlementaire, mais une
responsabilité pratique. Je pense que vous assistiez à ma
démonstration, dans la salle. Cela ne vous a peut-être pas
convaincu, mais il reste que c'est le choix qui est fait. D'ailleurs, je pense
que vous êtes d'accord avec ce choix, vous l'avez dit au tout
début de votre intervention. A votre avis, ce n'est pas normal de
laisser à une commission indépendante le soin de gérer la
fonction publique. Il faut que ce soit carrément confié au
pouvoir politique.
Là-dessus, je tiens à vous dire qu'on ne peut pas manger
son gâteau et l'avoir encore, le confier au pouvoir politique et penser
que le pouvoir politique va exercer cela d'une façon abstraite, sans
mettre ses propres jugements de valeur à l'intérieur.
Le grand changement, vous glissez là-dessus, c'est qu'à
l'avenir ces choix politiques, cette partialité politique, qui est
légitime, à mon avis, elle devra se faire au grand jour. Elle
devra se faire en vertu de règlements, qui seront soumis à une
commission indépendante qui vérifiera si ces règlements
sont de nature impartiale, c'est-à-dire s'ils respectent
l'égalité des chances dans l'accès aux fonctions, aux
promotions et l'impartialité des concours. C'est le point fondamental
d'une commission indépendante, elle va donner des avis publics
là-dessus. Cela va faire l'objet d'un débat politique, ce qui est
normal dans notre régime démocratique. Ce n'est pas un
régime technocratique, c'est un régime démocratique
où il y a des choix qui sont faits par des hommes politiques.
L'important, c'est que ces choix soient faits au grand jour et qu'ils soient
discutés.
De ce point de vue, on offre une garantie supplémentaire: l'avis
d'une commission neutre, indépendante, qui donnera son propre jugement
sur le caractère impartial de ces règlements. On ne sera pas
obligé de suivre l'avis de la commission, avec toutes les
conséquences politiques qui en découlent. Quand un gouvernement
va contre l'avis du Vérificateur général ou contre l'avis
de la Commission des droits de la personne, il en porte les conséquences
politiques. Ce sont les règles du jeu dans lesquelles on vit
actuellement.
Vous dites que cela n'améliore pas. Justement, je pense que cela
améliore, cela donne un fonctionnement beaucoup plus transparent,
beaucoup plus ouvert, moins hypocrite. Vous demandez si la véritable
neutralité, la véritable impartialité va venir quand on va
négocier avec vous.
Je regrette beaucoup, mais si le gouvernement n'est pas impartial, vous
l'êtes encore moins que nous de ce point de vue. Au moins, on a une
légitimité qui dépasse la vôtre. Vous êtes
bien obligés de l'admettre. Notre légitimité nous vient de
l'ensemble de la population et nos objectifs ont trait à l'ensemble du
bien public, à l'ensemble de la population. Vos objectifs à vous,
je veux bien croire que vous n'êtes pas contre la vertu, vous êtes
pour l'intérêt public également, mais votre premier mandat,
c'est l'intérêt de vos membres. Ce n'est pas
l'intérêt public. Mon premier mandat, le premier mandat du
gouvernement, c'est véritablement l'intérêt public. De ce
point de vue, vous êtes encore moins impartiaux que nous.
Il n'y a rien qui garantisse que le résultat de nos deux
égoïsmes, de ce point de vue, mais, sur un plan plus noble, de nos
deux objectifs qui ne sont pas les mêmes va être meilleur que celui
qui est aménagé en vertu de la loi; pas du tout, et je pense
qu'il serait moins légitime encore. Cela n'exclut pas cependant
qu'effectivement, dans le cadre des négociations collectives, il y ait
des aménagements en matière d'application de ces grands
principes. Effectivement, il y en a déjà et il continuera
à y en avoir.
De ce point de vue, vous n'êtes pas dans une situation pire que
celle de maintenant. Je pense que vous êtes en meilleure situation
puisque, comme je l'ai dit, il y a maintenant des mécanismes nouveaux
qui améliorent les choses de ce point de vue, qui rendent plus
transparente la façon dont le gouvernement applique sa loi qu'il n'est
possible de le faire maintenant.
Je vous retournerai la question à ce moment-là. Si on
n'utilise pas la règle du mérite, quelle règle va-t-on
utiliser? Avez-vous quelque chose de mieux à proposer que de me dire:
Faites-nous confiance à notre tour. Vous dites: Faites-moi confiance, on
négociera cela ensemble. A part cela, la population qui nous regarde, je
ne pense pas qu'elle ait très confiance dans une procédure
semblable, en disant que c'est un ministre avec un chef syndical qui vont
négocier cela. Ce n'est pas cela que la population veut savoir. Elle
veut savoir bien plus que cela. Elle n'a pas beaucoup confiance non plus, je
pense, au résultat de ces processus de marchandage que sont toujours des
négociations collectives. Que voulez-vous qu'on y fasse? Là, on
est au niveau des principes d'intérêt public. Qu'est-ce que vous
proposez à la place de la règle du mérite? La règle
du démérite?
M. Théberge: Je propose effectivement que cela se fasse
par voie de négociations et de conventions collectives, point final,
pour la bonne et simple raison que vous avez peut-être raison de parler
de la légitimité du gouvernement par rapport à un
syndicat, la légitimité du gouvernement étant
évidemment beaucoup plus grande, sauf que je suis certain que vous ne
disiez pas la même chose avant le 15 novembre 1976...
M. de Belleval: Je peux vous assurer que oui, de ce
côté.
M. Théberge: ... et je suis certain que les membres de
l'Opposition, ici à ma droite, ne di-
sent pas la même chose de votre gouvernement actuel.
Là-dessus, s'il vous plaît, la légitimité,
cela n'existe pas en soi parce qu'on est le gouvernement, qu'on devient
légitime, à un moment donné, tout d'un coup, qu'on devient
défenseur automatiquement de l'intérêt public, tout d'un
coup, parce qu'on est gouvernemental.
M. de Belleval: Là-dessus, M. Théberge...
M. Théberge: Je pense que, là-dessus, la seule voie
possible, c'est effectivement la voie de négociation. Vous avez raison
de dire qu'on a des intérêts divergents, c'est bien sûr,
parce que vous êtes employeur, vous avez des intérêts
à titre d'employeur, vous êtes un homme politique, vous avez des
intérêts à titre d'homme politique. Nous autres, nous
sommes des salariés de la fonction publique. On a des
intérêts à titre de citoyens et on a des
intérêts à titre de salariés également.
Essayons de confronter ces intérêts ensemble, des
intérêts qui, sans doute, sur certains points, sont très
divergents, on n'en doute pas, au lieu de laisser tout cela entre les mains
d'une des seules parties en cause dans cette affaire.
M. de Belleval: Mon mandat, comme employeur, n'est pas
différent de mon mandat comme homme politique. C'est toujours
l'intérêt public. Je n'ai qu'un seul mandat. Je n'ai pas un mandat
comme employeur qui serait différent de mon mandat comme gouvernement.
Ce sont des distinctions purement abusives et artificielles. L'Etat employeur
et l'Etat gouvernement, on aura beau faire toutes les distinctions qu'on
voudra, c'est toujours le même. Vous avez raison de dire qu'effectivement
tout cela doit être ensuite transcrit dans la pratique qui est hautement
contestable, mais on n'a pas trouvé d'autres façons d'organiser
l'Etat que de confier à des hommes hautement contestables cette
légitimité. C'est normal, il n'y a pas moyen d'en sortir.
De ce point de vue, quand je vous dis que je n'ai pas changé
d'idée depuis le 15 novembre, pas du tout. A mon avis, c'est un principe
de droit public que je défends, à savoir que c'est le
gouvernement qui a la responsabilité, en vertu de notre régime
démocratique, et c'est lui qui a la plus grande légitimité
dans notre système actuel. Que la façon dont il exerce cette
légitimité soit contestable, je pense bien, c'est l'essence
même du débat politique, mais le fond, le principe, on ne peut pas
le contester. De ce point de vue, je n'ai pas changé d'avis.
Je pense que dire: Ne mettez pas la règle du mérite dans
la loi, on négociera les dispositions en vertu des conventions
collectives... Je vous retourne la question. A supposer qu'on fasse cela, on va
le faire en vertu de quel principe, si on ne le fait pas en vertu du principe
du mérite? Citez-moi donc, d'ailleurs, un gouvernement qui, comme cela,
laisse à la libre négociation des parties une matière
aussi importante! Je n'en connais pas.
M. Théberge: II y en a à peu près 40
gouvernements dans le monde en 1977, d'après une étude du Bureau
international du travail...
M. de Belleval: La plupart, d'ailleurs, n'ont pas de règle
du mérite. C'est l'arbitraire pur et simple.
M. Théberge: Mme le Président...
M. de Belleval: Si vous voulez remplacer la règle du
mérite, par quoi allez-vous la remplacer?
M. Théberge: Je voudrais savoir comment cela fonctionne.
Je ne suis pas habitué ici. Je suis habitué dans un conseil
syndical. Je ne sais pas à qui est la parole. Je voudrais le savoir.
M. de Belleval: Je vous la laisse, c'est à vous.
M. Théberge: Ah bon! Parfait, je vous remercie. Il y a 40
pays dans le monde à peu près, à l'heure actuelle, selon
une étude du Bureau international du travail, qui date de 1977. Toutes
les conditions de travail à l'intérieur de la fonction publique
sont négociables. Parmi ces pays, il y a le pays que votre premier
ministre connaît bien, que notre premier ministre connaît bien, la
France. Toutes les conditions de travail sont négociables. Il n'y a pas
de loi qui dit: Désormais, cela va être la règle du
mérite ou cela va être autre chose. On s'affronte avec des
intérêts divergents, c'est bien sûr.
Quant à la subtilité de savoir si votre
intérêt comme employeur et comme gouvernement est le même,
j'aurais quelques réserves. Mais, en tout cas, ce serait un débat
philosophique peut-être un peu stérile ici, sauf qu'il y a 40 pays
dans le monde qui sont comme cela, a l'heure actuelle, qui ne mettent pas de
contraintes législatives dans la négociation des conditions de
travail, genre règle du mérite ou autres dispositions qui parle
de la rétrogradation. On va revenir tantôt, je l'espère,
sur la rétrogradation, la destitution, etc. Ce qu'il y a dans le projet
de loi ne nous rassure pas du tout, j'aime autant vous le dire. Il y a 40 pays
dans le monde qui ne sont pas contraints à des dispositions
législatives de ce genre. Arrivons au XXe siècle nous autres
aussi, ce ne serait pas une mauvaise idée!
M. de Belleval: Je trouve cela bon, parce que vous nous
apporterez l'étude en question du BIT. On va vous citer des passages
très intéressants où, justement, le BIT dit que c'est le
Québec qui est le pays le plus avancé en matière de
régimes de négociations collectives dans le secteur public et
parapublic. C'est le jugement même du BIT.
M. Théberge: Le Bureau international du travail a une
recommandation là-dessus. Vous avez probablement lu le texte,
d'après ce que je peux voir; c'est parfait. On a les mêmes
lectures, c'est excellent. Le Bureau international du travail re-
commande là-dessus que toutes les conditions de travail des
employés de la fonction publique soient libres et entières. Vous
vous rappelez sans doute cette recommandation...
M. de Belleval: Et, en même temps, il porte jugement sur la
situation au Québec et il dit: C'est le Québec qui, dans le monde
entier, est le plus avancé de ce côté-là. Alors,
franchement, c'est quelque chose.
M. Théberge: Sauf que, par ailleurs, à la page 20,
il nous rappelle qu'il y a 40 pays au monde qui ont des stipulations
très différentes. Alors, là-dessus, on ne s'obstinera pas,
sauf que je vous dis simplement qu'il y en a 40, d'après le Bureau
international du travail.
M. Jolivet: Cela dépend de la définition des
conditions de travail.
M. de Belleval: D'accord. Mais là-dessus, on s'entend, je
pense, que la commission Martin va certainement prendre connaissance de tout
ça et nous faire des recommandations, et on verra ce qui...
M. Théberge: Sauf qu'on voudrait que, dans le projet de
loi no 53, il n'y ait pas de fioritures de ce genre pour nous dire que,
désormais, ce sera la règle du mérite et que nous, on
arrive à la table de négociation et qu'on dise: On
prétend, nous, qu'une des façons de faire avancer le monde dans
la fonction publique, ce n'est pas seulement par la règle du
mérite qui va être définie par machin-chouette, je ne sais
pas trop où et je ne sais pas trop comment, et que nous, par exemple, on
dise, à un moment donné: II nous apparaît important qu'un
gars qui a de l'ancienneté Je prends un exemple, d'accord? Je ne
veux pas insister sur cet exemple, on dit qu'on discute de façon
générale ici, ce matin. Bon! Parfait! ... que nous, on arrive et
qu'on dise l'ancienneté, d'après nous, cela doit
être un critère de promotion à la fonction publique et
qu'on nous dise: Non, c'est illégal, parce que ce n'est pas sûr
que ça entre dans la règle du mérite. C'est ça
qu'on veut, nous. On ne veut pas de fioritures de ce genre, qui vont nous dire
à tout bout de champ, comme ça c'est passé depuis 1965, tu
sais, des affaires comme ça, ce n'est pas de l'invention que je
fais.
A un moment donné, tu arrivais pour négocier des affaires
et on disait: Cela, regrettable, la loi nous interdit de tenir compte de vos
recommandations qui sont, par ailleurs, peut-être intéressantes.
C'est ça qu'on veut.
M. de Belleval: Là-dessus, je vous ferais tout simplement
remarquer que tout ça relève quand même de la libre
négociation des parties, d'autant plus qu'en vertu du projet de loi
actuel, c'est le ministre, désormais, qui pourra, par règlement,
concourir à ce que des choses soi-disant non négociables le
deviennent. Maintenant, est-ce qu'il voudra le faire? Cela, c'est une autre
paire de manches, mais, justement, c'est ça, la négociation
collective.
Vous pouvez, dans une entreprise privée, n'avoir rien qu'il soit
interdit de négocier, mais si le patron ne négocie pas, vous
n'êtes pas plus avancés. C'est la même chose dans la
fonction publique, d'une certaine façon. Il y a bien des choses qui sont
négociables actuellement et que les différents gouvernements ont
refusé, à tort ou à raison, de négocier, parce
qu'ils disent: On pense que l'on ne devrait pas négocier ça ou on
pense qu'on ne devrait pas le négocier de telle façon ou de telle
autre façon. Mais ça, c'est la loi même du régime
des négociations collectives qui prévoit ça. A ce point de
vue, le projet de loi no 53 ne vous enlève rien, il vous en ajoute
même un petit peu plus, parce qu'il vous donne vraiment un interlocuteur
responsable qui, lui-même, ne peut plus se retrancher derrière une
commission indépendante pour accepter ou non.
Il est obligé de discuter des questions au mérite, c'est
le cas de le dire, quand il négocie avec vous. Il dit: Je négocie
telle chose de telle façon ou je ne la négocie pas parce que je
pense que c'est mieux ainsi. Il peut se tromper, mais à ce moment, c'est
le jeu des libres négociations, et vous prenez votre propre
décision.
La rétrogradation est un bel exemple. Il n'y a rien dans la Loi
de la fonction publique actuelle qui dise que c'est négociable ou non.
On n'en parle même pas, mais cela a fait l'objet de la libre
négociation des parties. Vous-même avez négocié une
clause de rétrogradation qui s'appelle clause de réorientation de
la carrière, etc. Peu importe le nom, la chose est là, et
ça va continuer ainsi, après le projet de loi 53. Cela ne change
rien de ce côté.
M. Théberge: Pourquoi tenez-vous à ce point que le
principe du mérite soit inscrit dans la loi si vous dites qu'il fera
l'objet des négociations? Qu'est-ce que ça donne de l'inclure,
sinon de dire que désormais...
M. de Belleval: Je pense que c'est un choix que nous avons fait
voulant que dans la fonction publique québécoise, comme dans de
nombreuses autres fonctions publiques, cela doit être un principe
fondamental inscrit dans la loi organique de la fonction publique, que la
règle du mérite est à la base même de notre
processus de recrutement et de promotion.
C'est un choix effectivement que nous faisons. Je dis que son
aménagement pratique peut faire l'objet d'ententes spécifiques
dans le cadre des conventions collectives, mais on a voulu mettre le principe
comme tel dans la loi.
On peut critiquer ce choix. On peut dire que cela ne devrait pas
être dans la loi. Je respecte absolument votre argumentation à ce
sujet. Je ne dis pas que votre argumentation n'a pas de bon sens. Pas du tout.
Je trouve que c'est un point de vue qu'on peut maintenir mais nous avons
soutenu un autre point de vue à savoir que, jusqu'à maintenant,
c'était la règle qui nous gouvernait et que
cela devait continuer à être cette règle, et mieux
encore, que ce principe devait être plus strictement encadré pour
s'assurer qu'effectivement il est appliqué.
Le Président (Mme Cuerrier): II est 13 heures. Je dois
ajourner...
M. Pagé: Mme le Président, je voudrais bien
l'entendre. Le ministre a-t-il terminé les questions...?
M. de Belleval: Je pense que j'ai terminé toutes les
questions générales qui m'intéressent et qui
intéressent peut-être même M. Théberge, bien que je
crois que vous deviez avoir des questions plus particulières ensuite
à discuter et que les autres membres de la commission auraient des
choses.
M. Pagé: A la reprise, M. Théberge, nous aurons
l'occasion de vous poser des questions.
M. de Belleval: Vous pouvez revenir vers 16 heures, 16 h 30?
Le Président (Mme Cuerrier): Cela dépendra, M. le
ministre. Nous ne pouvons pas présumer...
M. de Belleval: Je m'excuse, Mme le Président.
Le Président (Mme Cuerrier): ... des avis de
l'Assemblée. Je dois, à ce moment-ci, puisque nous n'avons pas
d'avis de l'Assemblée nationale, ajourner les travaux sine die...
M. Théberge: Je tiens seulement à apporter une
petite précision.
Le Président (Mme Cuerrier): ... ce qui n'empêche
pas, bien sûr...
M. Théberge: Je ne sais pas si cela va être bien
long cet après-midi, mais, à six heures, malheureusement, j'ai
des obligations. Vous savez ce que c'est, on a toujours un peu d'obligations.
Je vais être obligé de m'absenter. S'il y a possibilité que
M. le ministre réponde rapidement aux questions comme à
l'Assemblée nationale cet après-midi, il devrait être ici
vers les 16 heures...
Le Président (Mme Cuerrier): M. le Président du
syndicat, si jamais nous siégeons cet après-midi, ce qui pourrait
être demandé par le leader du gouvernement à
l'Assemblée nationale, il est entendu que l'ajournement se fait toujours
à 18 heures, ou la suspension selon l'avis qui nous est
donné.
(Fin de la séance à 13 h 2)
Reprise de la séance à 16 h 50
Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, messieurs!
Nous avons maintenant quorum. Je déclare cette séance de
la commission de la fonction publique ouverte.
Les membres de cette commission sont: M. Bellemare (Johnson), M. Boucher
(Rivière-du-Loup), M. Caron (Verdun), M. Chevrette (Joliette-Montcalm),
M. de Belleval (Charlesbourg).
M. Pagé: M. Caron (Verdun), remplacé par M.
Verreault (Shefford).
Le Président (Mme Cuerrier): M. Caron (Verdun),
remplacé par M. Verreault (Shefford). M. Dussault (Châteauguay),
M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Gravel (Limoilou), M. Grégoire
(Frontenac), M. Jolivet (Laviolette), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Le Moignan
(Gaspé), M. Marchand (Laurier), M. Marcoux (Rimouski), Mme Ouellette
(Hull), M. Picotte...
M. Pagé: Remplacé par...
Le Président (Mme Cuerrier): ... remplacé par M.
Pagé (Portneuf); M. Vaillancourt (Orford). Le rapporteur est M.
Laviolette...
M. Pagé: M. Laviolette, oui, du comté de
Jolivet.
Le Président (Mme Cuerrier): M. Jolivet
(Laviolette)...
M. Pagé: ... quinze jours, ce sera peut-être le
comté de Jolivet, je ne le sais pas.
M. Jolivet: C'est une question de temps.
M. Pagé: En toute humilité.
M. de Belleval: Est-ce qu'on y va?
Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.
M. de Belleval: C'est fini? Vous avez fait votre point? Moi, je
vous laisse la parole si vous voulez.
Le Président (Mme Cuerrier): Bon! M. Pagé:Vous avez terminé?
Le Président (Mme Cuerrier): M. le président du
Syndicat, est-ce que vous avez une intervention à faire maintenant?
M. Théberge: ...
Le Président (Mme Cuerrier): Je m'excuse, M. le
Président. J'avais déjà dit que M. le député
de Portneuf avait la parole. Il l'avait déjà demandée
avant l'ajournement sine die de ce matin. M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: Mme le Président, MM. les membres de la
commission, je vais être très bref. Je ne m'engagerai pas dans un
débat de procédure. Je vous promets que ça ne durera pas
plus qu'une minute.
Ce matin, Mme le Président, je vous ai posé une question
et vous m'avez référé à la Chambre. J'ai
soulevé la question en Chambre cet après-midi. Pour que ce soit
encore plus vite et, plus ex-péditif, je ne reprendrai pas les termes de
la question que j'ai posée. A la Chambre cet après-midi, Mme le
Président, on m'a référé à vous, le
président de l'Assemblée nationale faisant état d'une
certaine confusion. Dans les circonstances, Mme le Président, j'aimerais
savoir de votre part qu'est-ce qui arrive avec tout ça?
Le Président (Mme Cuerrier): Si je me souviens bien de
votre intervention de ce matin, M. le député de Portneuf, vous
vouliez savoir qui étaient les invités aujourd'hui?
M. Pagé: Quels avaient été les organismes
convoqués et ce, depuis quand.
Le Président (Mme Cuerrier): C'est ça.
M. Pagé: Si des organismes avaient été
convoqués pour hier. C'était le sens de ma question.
Le Président (Mme Cuerrier): Je ne saurais vous le dire
actuellement, mais je pense que, de toute façon, vous pouvez toujours
poser ces questions au leader ou vous auriez pu me les poser et j'aurais fait
la recherche voulue. Maintenant, auprès du secrétaire...
M. Pagé: Mais, Mme le Président, je vous les ai
posées.
Le Président (Mme Cuerrier): ... des commissions, on peut
toujours obtenir cette information, je pense, et savoir qui a été
invité pour aujourd'hui.
M. Pagé: D'accord.
Le Président (Mme Cuerrier): Sur la liste que j'avais ce
matin...
M. Pagé: Oui.
Le Président (Mme Cuerrier):... il y avait deux organismes
d'invités. C'est toute l'information que j'avais pour aujourd'hui.
M. Pagé: Si je pose cette question, ce n'est nullement
dans le but d'embêter qui que ce soit, mais c'est strictement pour le
précédent que cela peut créer. Il est dans les us et
coutumes qu'au début des travaux d'une commission parlementaire, quelque
membre de la commission puisse s'enquérir auprès du
président pour connaître les organismes qui ont été
convoqués, à quelle date ils ont été
convoqués, pour quand ils ont été convoqués, le
programme de la journée et le programme des prochains jours et des
prochaines séances.
C'est dans ce sens que je vous ai posé ma question ce matin et je
voudrais bien vous comprendre. Vous me dites que j'étais en droit de
poser la question. C'est cela?
Le Président (Mme Cuerrier): Je tâcherai d'obtenir
l'information, à savoir quand les invitations ont été
faites. Quant aux organismes comme tels, nous avons donné réponse
à cette partie de votre question.
M. le député de Portneuf.
M. Pagé: D'accord. Merci, Mme le Président. Vous
voyez. Cela n'a pas duré plus d'une minute quant à moi.
Je voudrais tout d'abord remercier M. Thé-berge du mémoire
qu'il a commencé à nous présenter ce matin. Quant à
moi, j'ai bien apprécié les recommandations précises, bien
déterminées qu'il formule aux pages 24 et suivantes de son
mémoire.
Je voudrais tout d'abord reprendre une affirmation que monsieur le
ministre a formulée ce matin. Il a lancé comme ça, il a
répondu entre autres, sur toute cette question des fameuses listes
d'admissibilité, que vous lui posiez, M. Théberge, que, à
l'avenir, les listes d'admissibilité allaient être
rédigées suite aux examens écrits, suite aux rencontres
avec les jurys et que, le gouvernement m'obligeait, par les normes
édictées, à prendre la première personne sur la
liste, ensuite, la deuxième, puis la troisième, etc. Le ministre,
on se le rappellera, a évoqué que cela mettait ainsi fin à
une période qui semblait être terrible, où il y avait,
selon lui du patronage, etc.
Mme le Président, je dois quand même constater et M.
Théberge pourra peut-être souscrire à mes propos que
même si le gouvernement s'oblige par le projet de loi et les
règlements et les normes qui seront édictés, à
faire en sorte que cela sera la première personne sur une liste
d'admissibilité quelconque qui devra combler un poste, il faut quand
même constater qu'une fois que cette personne sera définie, elle
sera possiblement mutée, rétrogradée, destituée,
affectée, reclassée, mise en disponibilité, et cela par le
ministre, en vertu d'un pouvoir réglementaire.
Je voudrais bien, M. Théberge, que vous compreniez le sens de ma
question, parce que vous savez que je dois poser des questions. Ne croyez-vous
pas que, le fait que le ministre dise qu'il n'y a plus de problème,
qu'il y a une liste d'admissibilité qui sera rédigée et
que le gouvernement devra procéder par la première et, par la
suite, la deuxième, la troisième, etc., ne croyez-vous pas,
malgré tout, que cette personne ne sera peut-être pas
placée dans une meilleure position lorsqu'elle aura son travail, qu'elle
sera affectée à un travail particulier, parce qu'il subsistera
toujours le pouvoir, pour le ministre pouvoir quand même
arbitraire, qu'il aura en vertu des règle-
ments de muter de de faire ce que bon lui semblera pour les
motifs qu'il jugera opportuns? C'est le sens de ma première question. Et
je pourrais tout de suite passer à la deuxième.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le Président du
syndicat.
M. Théberge: Sur cette question, c'est bien sûr
qu'on entretient certaines inquiétudes. Nous existons depuis 1966. La
bataille qu'on a faite en 1966, c'était pour obtenir le droit
d'association, mais c'était également pour obtenir, à
l'intérieur de la fonction publique, un plan de carrière. C'est
peut-être un peu technique, alors je me permets de résumer assez
rapidement ce qu'est un plan de carrière. Je vous expliquerai,
après cela, le sens de nos inquiétudes en regard de cela.
Un individu entre dans la Fonotion publique, il est classé dans
un corps d'emploi, je prends un exemple, agent de recherche et de planification
socio-économique. Parfait. A l'intérieur de cela, l'individu en
question a des possibilités d'avancement, c'est-à-dire qu'il y a
des échelons, des classes. Il y a des possibilités de promotion.
Cela implique qu'il change de corps d'emploi.
En 1966, donc, on s'est battu pour obtenir le droit à la
syndicalisation, mais également que la fonction publique fonctionne en
vertu du plan de carrière qui, d'après nous, offre une meilleure
garantie d'efficacité. D'autre part, cela permet la mobilité des
professionnels à l'intérieur d'un même corps d'emploi.
Ils peuvent passer d'agent de recherche et de planification
socio-économique au ministère de l'Education et être
mutés au ministère des Affaires sociales ou demander d'être
mutés au ministère des Affaires sociales et vous avez là
d'autres postes qui correspondent à cette classification.
Par rapport à ça, dans l'article 28 de la Loi actuelle de
la fonction publique, il était prévu, à l'intérieur
des corps d'emploi, une échelle minimale et maximale de
rémunération, ce qui était, d'une certaine façon,
une garantie législative; on avait un plan de carrière, non pas
vous m'excuserez l'expression; en dépit de la loi 101, je ne
connais pas l'expression française "a position plan" à
l'intérieur de ça, à l'intérieur de la fonction
publique.
Le "position plan", pour résumer encore bien succinctement, c'est
être assis sur une chaise. Ils ont estimé que la chaise faisait
ça, ça, ça et qu'elle valait x dollars. Si tu t'adonnes
à être assis sur la chaise, tu vaux tant. A un moment
donné, ils décident, vous le voyez dans le projet de loi 53,
autant que dans la situation actuelle d'ailleurs, que les postes sont
pondérés par le Conseil du trésor. A un moment
donné, ils décident que la chaise ne fait plus tout à fait
ce qu'elle faisait, elle diminue ou elle augmente. Sauf que, par rapport
à ça, on revendique toujours le maintien du plan de
carrière et ce qui nous inquiète, c'est la disparition de
l'article 28 de la loi actuelle dans le projet de loi 53. Cela nous
inquiète, cette disparition.
Là-dessus, on aimerait avoir des éclaircisse- ments de la
part du ministre de la Fonction publique; après quoi, on va revenir sur
un point que vous avez soulevé en ce qui concerne le premier, le
deuxième et le troisième.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.
M. de Belleval: M. Théberge, si je vous ai bien compris,
votre plan de carrière... Ce que vous appelez le plan de carrière
des professionnels, où est-ce qu'il est garanti dans la loi
actuelle?
M. Théberge: II est garanti à l'article 28.
M. de Belleval: A votre avis, il est garanti en vertu de
l'article 28.
M. Théberge: Oui.
M. de Belleval: Je regrette beaucoup, mais tout ce que dit
l'article 28... On va le lire ensemble: "Le traitement fixé pour chaque
classe de fonctionnaires peut comprendre un taux minimum et un taux maximum
d'appointement et des taux intermédiaires afin de pourvoir aux
augmentations du minimum au maximum." Premièrement, ça ne traite
pas du tout des plans de carrière, ça traite des traitements,
ça dit que les traitements peuvent être fixés par minimum
et maximum avec traitement intermédiaire; ce n'est pas une obligation,
c'est une possibilité.
En ce qui concerne les employés syndiqués, toute la
question des traitements, de toute façon, est pourvue par les
conventions collectives de travail. Alors, c'est le statu quo qui est
maintenu.
L'article 28 comme tel se retrouve maintenant dans les dispositions de
l'article 3, qui dit qu'à l'avenir les règlements de
classification sont faits par le ministre. C'est la même chose
qu'actuellement. Il y a des règlements de classification qui sont faits,
mais au lieu d'être faits par la commission, ils vont être faits
par le ministre. Ces classifications pourront comprendre, comme aujourd'hui des
échelles de traitement par échelon, sauf qu'en ce qui concerne
les employés syndiqués, de toute façon, ce sont les
conventions collectives qui y pourvoient. Il y a actuellement des
classifications où il n'y a pas d'échelle de traitement par
échelon, même au niveau des ouvriers. Il y a des taux fixes. Et
pour les cadres, entre autres, il n'y en a pas. C'est le statu quo.
Je suis d'accord avec vous qu'une planification des effectifs, une
gestion des effectifs, par classification générale, plutôt
que par la poste, m'apparaît supérieure, en règle
générale. De ce point de vue, vous avez raison de dire que la
classification actuelle des professionnels m'apparaît meilleure, comme
moyen de gestion, que celle des cadres qui est faite poste par poste.
Mais il m'est ainsi, non pas en vertu de la loi, mais en vertu des
pouvoirs discrétionnaires donnés à la commission,
maintenant au ministre, d'organiser la fonction publique selon un mode
plutôt que l'autre. Mais le fait que l'article 28 disparaisse ne change
rien. En fait, il ne disparaît
pas. La loi réaménage tous ces pouvoirs autrement. Mais
comme je vous le dis, cela traite des traitements, cela ne traite pas du plan
de carrière comme tel, cela ne traite pas de classification comme telle.
De toute façon, c'est négociable en vertu des conventions
collectives en vigueur. Je ne vois pas en quoi votre crainte existe.
M. Théberge: Si l'interprétation que vous donnez du
fait que l'article 28 ne se retrouve plus dans le projet de loi actuel, c'est
tout simplement qu'on va régler cela par voie de convention collective,
je n'ai pas de problème là-dedans.
M. de Belleval: Vous admettez que les traitements sont
décidés par voie de convention collective.
M. Théberge: Oui, il n'y a pas de problème. M.
de Belleval: Cela va continuer ainsi.
M. Théberge: II n'y a pas de problème, à
condition que, effectivement, on ne puisse interpréter aucun article du
projet de loi en question comme étant un empêchement à
ladite clause. C'est tout simplement cela.
M. de Belleval: Vous êtes d'accord que là-dessus,
entre autres, l'article 91 est très clair. Il dit que le ministre ne
peut pas déterminer les conditions de travail et les salaires des
fonctionnaires, en dehors des conventions collectives, quand il y a une
convention collective qui s'applique à une classe d'employés.
M. Théberge: D'accord; par ailleurs, au niveau de
l'article 3, la classification n'étant toujours pas négociable
elle ne l'a jamais été, de toute façon on
n'a pas de garantie non plus là-dedans.
C'est pratique, malgré tout, de connaître un peu l'anglais.
Quand on regarde la version anglaise, dans le projet de loi 53, on ne retrouve
jamais la traduction anglaise de plan de carrière, on retrouve toujours
l'expression anglaise "position", comme dans le "position plan".
M. de Belleval: Dans le projet de loi actuel, y a-t-il
l'expression plan de carrière qui est employée quelque part?
M. Théberge: Dans le projet de loi ou dans la loi
actuelle?
M. de Belleval: Dans l'un ou l'autre?
M. Théberge: Non.
M. de Belleval: Nulle part.
M. Théberge: Nulle part.
M. Pagé: Pour continuer, à la page 27 de votre
mémoire, vous dites: "Le projet de loi 53, on l'a vu, ne corrige en rien
les déficiences de la loi actuelle. Au contraire il affaiblit le seul
garant efficace de la qualité des services publics, le syndicalisme".
Vous arrivez avec une recommandation. Un peu avant, vous donniez plusieurs
motifs, à la page 22, et vous en arriviez à la conclusion
suivante: "Le Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec
s'oppose fermement au projet de loi tel qu'il a été
déposé".
Vous en arrivez, après cela, à plusieurs recommandations.
Vous recommandez, entre autres, qu'aucune disposition de la présente loi
ne puisse être interprétée comme une limite ou une entrave
à la libre négociation des conditions de travail des
employés de l'Etat.
Vous en avez fait état ce matin. Vous aviez dit, somme toute, que
ce qui était souhaitable, vous référant à un
document du Bureau international du travail, c'était que, dans les
secteurs publics, toutes les conditions de travail soient
négociables.
M. le ministre a répondu en prenant un autre
élément de ce document qui dit que le régime qu'on
connaît au Québec actuellement était, selon le même
bureau, peut-être un des meilleurs, en envoyant ainsi, évidemment,
des fleurs au gouvernement précédent, choses qui ne lui sont
quand même pas familières. J'aimerais savoir, de votre part,
quelle est l'interprétation que vous donnez à l'article 3 du
projet de loi. Je m'excuse d'y revenir; je me propose d'y revenir avec tous les
intervenants, parce que, pour certains intervenants, ces questions ne
deviennent plus négociables parce que l'article 119 confère au
ministre le droit de procéder dans ces secteurs par règlement, au
niveau de la classification des emplois, des conditions de
rémunération et de travail, de l'évaluation, de la
promotion, de l'affectation, du classement, etc. On est sur la même
longueur d'onde là-dessus. Les recommandations que vous formulez dans ce
sens sont de quelle nature? Voudriez-vous, somme toute, que, dans la loi, il
soit spécifié que ces questions sont exclues du pouvoir
réglementaire du ministre et qu'on consacre le principe de la
négociation relativement à ces onze éléments qui
sont prévus à l'article 3?
M. Théberge: Voici la façon dont nous
interprétons l'article 3. C'est une bonne idée que le ministre de
la Fonction publique décide d'assumer ses responsabilités de
ministre, qu'il se débarrasse de la Commission de la fonction publique
qui a toujours été une entrave. J'imagine que du
côté patronal, on doit dire la même chose, de toute
façon, si j'en juge par le projet de loi qui est sur la table. Eux aussi
sont un peu tannés d'avoir la Commission de la fonction publique dans
les pattes. Mais par rapport à cela, effectivement, ce qu'on voudrait,
c'est avoir la garantie le ministre nous dit que cela ne peut être
dans le projet de loi 53, cela va être dans la loi sur le régime
syndical dans la fonction publique quand même plus formelle que
cela. Actuellement, on ne le sait pas du tout, le ministre prétend qu'il
ne le sait pas lui non plus. Il dit: On va attendre le rapport de la Commission
Martin. On ne sait pas ce qui va être
négociable et ce qui ne le sera pas, sauf qu'on sait qu'on va
avoir une loi spéciale sur le régime syndical dans la fonction
publique.
Ce qu'on dit par rapport à cela, c'est que c'est une bonne
idée que le ministre assume ses responsabilités. Je suisd'accord
avec l'interprétation qu'il en donnait ce matin, mais je maintiens que
ce n'est pas une responsabilité que tu dois partager avec
toi-même. C'est une responsabilité que tu dois accepter de
négocier parce que tu es, effectivement, que tu le veuilles ou non, un
employeur aussi. Tu es peut-être bien un homme politique qui a à
coeur l'intérêt commun, le bien-être du public, sauf que tu
es également un employeur, et, en ce sens, il est totalement
inacceptable que nous autres, sous prétexte qu'on est à
l'intérieur de la fonction publique, on n'ait pas le droit de
négocier toutes nos conditions de travail, comme cela se fait,
d'ailleurs, dans le secteur parapublic actuellement, et, bien sûr, dans
le secteur privé.
C'est bien sûr qu'actuellement, face au pouvoir que le ministre
veut se donner par l'article 3, on est d'accord avec cela, mais on dit: Partage
ce pouvoir ou accepte, en tout cas, qu'il soit négociable. Si jamais ce
pouvoir n'est pas négociable, ce n'est pas pour rien qu'on a mis
l'effigie de Du-plessis en première page de notre mémoire. C'est
parce que nous prétendons que cela va être effectivement un retour
à l'ère de Duplessis, où, de façon
extrêmement autoritaire, le ministre de la Fonction publique va
décréter, parce que le fait de distinguer le décret du
règlement nous paraît des subtilités, compte tenu que, de
toute façon, les règlements du ministre de la Fonction publique
vont être approuvés par le Conseil du trésor, organisme
politique par excellence, on l'a vu, que les règlements de l'Office du
recrutement vont être également sujets à approbation par le
Conseil du trésor toujours et que les règlements de la Commission
de la fonction publique vont être également assujettis au Conseil
du trésor.
Dernier point là-dessus, quand tu as une garantie quelconque
d'impartialité de la part de l'Office du recrutement ou de la
commission, quant à nous, cela ne nous apparaît pas évident
du tout qu'on va obtenir une garantie d'impartialité, parce que ce n'est
pas le gouvernement, mais l'Assemblée nationale qui va nommer les
membres, d'autant plus que, comme par hasard, ils sont nommés pour cinq
ans, soit la durée normale d'un mandat de gouvernement.
On a l'impression je ne sais pas ce que le ministre en pense
évidemment qu'ils vont placer un de leurs hommes à ces
postes. On pourrait s'y attendre, comme on pourrait dire. Alors, par rapport
à ça, on ne trouve pas là de garanties bien fortes
d'impartialité.
M. Pagé: Vous dites, sur que ce qui est prévu
à l'article 3: On est d'accord, pour autant que c'est négociable.
Etes-vous conscient qu'un pouvoir réglementaire, ce n'est pas
négociable? A partir du moment où le ministre adoptera le
règlement, d'accord, il peut y avoir une consultation, mais il n'y a
quand même pas de mécanisme prévu de négociation
pour l'application que fera le ministre du pouvoir réglementaire qui lui
est conféré à l'article 3.
M. Théberge: Ce qu'on dit là-dessus, c'est qu'on
est d'accord avec les pouvoirs qui se donnent à l'article 3, sauf, que
ces pouvoirs, au lieu de les exercer par voie réglementaire, il les
exerce par voie de négociation. C'est purement et simplement ça
qu'on dit. Par rapport au libellé actuel, c'est bien sûr, de
l'article 3, on dit: Organise-toi pour mettre ailleurs ou mettre dans le
même article que, de toute façon, tout ça est
négociable.
M. de Belleval: C'est ce que je fais aussi, d'ailleurs.
M. Théberge: A quelle place déjà?
M. de Belleval: C'est ce que je fais, d'ailleurs, à
l'article 91. Par exemple, d'ailleurs, c'est tellement clair que le contraire,
évidemment, serait absurde, puisque, entre autres...
M. Pagé: A l'article 3, Mme le Président...
M. de Belleval: Oui, je vais seulement vous donner un exemple, M.
le député. Je comprends que vous êtes moins au fait de ces
choses-là que d'autres je ne vous le reproche pas mais,
par exemple, le ministre fait des règlements concernant les conditions
de rémunération et de travail. Cela va loin, ça,
imaginez-vous, les conditions de rémunération et de travail. Cela
veut dire que, par règlement, je peux déterminer quel est le
salaire que va gagner un fonctionnaire. C'est ça que ça dit,
ça, n'est-ce pas? Si ce pouvoir n'était pas...
M. Pagé: Cela dépend comment il est
utilisé.
M. de Belleval: Non, mais si ce pouvoir n'était pas
négociable, cela voudrait dire qu'il n'y aurait plus de convention
collective. Cela voudrait dire que le syndicat ne pourrait pas négocier
les salaires durant la prochaine négociation collective. Ce serait
manifestement absurde, de toute évidence...
M. Pagé: Mais l'article 91, Mme le Président...
M. de Belleval: Est-ce que je peux terminer? M. Pagé:
Non...
M. de Belleval: Ce serait manifestement absurde. C'est sûr
que ce n'est pas ça que signifie ce pouvoir réglementaire. Cela
ne signifie pas que le ministre peut, d'une façon discrétionnaire
ou de sa propre autorité, de sa seule autorité, déterminer
les salaires des fonctionnaires, cela veut dire qu'il peut faire ça,
d'accord; c'est lui qui a le pouvoir de faire ça, mais dans le cas des
employés syndiqués, par exemple, il est soumis aux conventions
collectives de travail; d'ailleurs, il y a une disposition omnibus qui dit que,
justement, à l'article 91, le ministre détermine ça,
n'est-ce pas, mais sous ré-
serve de la convention collective de travail et, quand il n'y a pas de
convention collective de travail, évidemment, il faut que quelqu'un,
quelque part, à un moment donné, ait l'autorité de
déterminer un salaire et c'est le ministre qui le détermine.
Alors, c'est pour ça que M.Théberge et moi, au fond, on est sur
la même longueur d'ondes de ce côté-là et on dit:
Bon! Il faut déterminer qui a la responsabilité? Sauf que,
là où on se sépare au niveau du contenu, c'est que lui, il
aimerait que tout ça au complet fasse l'objet des négociations
collectives de travail, alors qu'en vertu...
M. Pagé: ...
M. de Belleval: C'est ça, alors qu'en vertu de la loi
actuelle ce n'est pas moi qui l'ai faite, cette loi; c'est un ancien
gouvernement libéral, d'ailleurs, et les autres gouvernements qui se
sont succédé l'ont maintenueil y a des matières qui
relèvent soi-disant de la Commission de la fonction publique et qui ne
peuvent être négociées qu'avec l'accord de la Commission de
la fonction publique.
Quand le projet de loi sera adopté, il y aura une
amélioration de ce côté puisqu'ils pourront effectivement
être négociés, mais avec l'accord du ministre de la
Fonction publique, ce qui est une amélioration puisqu'il devient
l'interlocuteur unique du syndicat à la table de négociation de
ce point de vue.
On dit je le répète une dernière fois,
j'espère que cet aspect relève du mandat de la commission
Martin et relèvera, à l'avenir, d'une autre loi, la Loi sur le
régime syndical. Si, à la suite du rapport de la commission
Martin, il faut changer des choses, ce sera la Loi sur le régime
syndical qu'on amendera. On n'aura même pas besoin de revenir au projet
de loi 53.
M. Pagé: Ne croyez-vous pas M. Thé-berge
vous avez fait état, tout à l'heure, du rapport Martin, de la
commission qui siège actuellement que le gouvernement aurait
dû attendre le dépôt de ce rapport avant de présenter
le projet de loi ou, tout au moins, d'adopter le projet de loi?
M. Théberge: C'est bien certain. On a été,
je pense, les premiers à dénoncer la contradiction qui existait
entre le fait que le gouvernement ait déposé le projet de loi 53
une journée et que, le lendemain, il ait créé la
commission Martin.
Il est bien évident, par ailleurs, que le ministre de la Fonction
publique a déjà décidé... Il nous apparaît
drôlement contradictoire, en dépit de tout ce qu'il peut dire,
qu'il ait déjà décidé qu'il y aurait une loi
spéciale sur le régime syndical dans la fonction publique.
Qu'il me dise qu'il n'y a rien de nouveau dans cette loi, c'est exact.
Fondamentalement, il reconduit les articles qui existent actuellement dans la
Loi de la fonction publique, sauf qu'il y a une différence assez
fondamentale entre ce qui existe depuis 1965 et ce qui existera quand vous
aurez décidé d'adopter le projet de loi 53. En 1965, et
jusqu'à ce jour, c'était la Commission de la fonction publique
qui était responsable d'une partie importante de nos conditions de
travail.
En 1965 je ne connais pas l'évolution des
mentalités de façon bien précise vous aviez
décidé, comme Parlement, de donner cela à un tiers
soi-disant impartial. Aujourd'hui, vous décidez que c'est le ministre
qui va accaparer ces pouvoirs. Je vous le répète. Je suis
d'accord sur cela, sauf que, le fait que, maintenant, ce soit l'employeur, le
véritable employeur, le ministre qui ait ces pouvoirs, il nous
apparaît évident, par rapport à cela, que toutes nos
conditions de travail devraient, par conséquent, être
négociables, exactement comme dans l'entreprise privée ou dans le
secteur parapublic.
C'est drôle, mais l'interprétation que je donne à
l'article 91 n'est pas tout à fait la même que celle qu'en donne
le ministre de la Fonction publique. Je ne vois pas dans cet article, de
façon bien précise...
M. de Belleval: De quel article parlez-vous?
M.Théberge: De l'article 91.
M. de Belleval: 91. Vous avez parlé de l'article 91, tout
à l'heure. Je ne vois pas dans cet article, de façon bien
précise, que tous les pouvoirs du ministre soient
négociables.
M. de Belleval: Non. Vous avez raison. Tous les pouvoirs du
ministre ne sont pas négociables puisque, comme vous venez
vous-même de le dire, c'est le statu quo en matière de champ de
négociation. Alors, donc, c'est vrai que tout n'est pas
négociable, à moins, parce qu'il y a la disposition...
M. Théberge: ... omnibus.
M. de Belleval: Oui, enfin, la soupape prévue dans la loi
actuelle, et qui sera encore prévue dans la future loi, à savoir
que, à moins que le ministre de la Fonction publique n'y concoure par
règlement... Actuellement, c'est à moins que la Commission n'y
concoure par règlement. Au fond, on joue un peu sur les mots quand on
regarde cela.
Je trouve que les anciens législateurs, de ce point de vue, ont
joué un peu sur les mots, sauf qu'autrefois, cela avait peut-être
une raisonnance plus contraignante, en ce sens que c'était une
commission indépendante. Maintenant, ce sera le ministre qui sera
l'interlocuteur. Il y a quand même un aspect important là-dedans.
C'est le fait évidemment, je sais que vous n'êtes pas
d'accord sur ce point de vue fondamental que toute la loi repose, en
partie, enfin, une bonne partie de la loi repose sur la règle du
mérite telle que définie dans la loi. On dit: Les aspects...
M. Théberge: Telle que non définie dans la loi.
M. de Belleval: Bien, telle que définie... Enfin, c'est un
point de vue.
M. Théberge: Où est-elle la définition?
M. de Belleval: On y reviendra tantôt, si vous voulez. J'en
ai parlé assez longuement ce matin d'ailleurs. On pourra reprendre la
transcription du journal des Débats à ce sujet. On peut
être d'accord ou non sur... Je l'ai expliqué assez longuement.
C'est normal que les règlements qui touchent, qui sont
susceptibles de toucher à la règle du mérite, soient
soumis à l'examen d'une commission indépendante qui donne son
avis là-dessus parce que, d'après nous, c'est un principe
d'intérêt public. Mais, sous réserve de l'article 90 de la
loi et avec l'amendement que j'ai proposé et sous réserve de
l'application de la Loi sur le régime syndical, c'est très clair
que les pouvoirs réglementaires du ministre sont assujettis à la
Loi sur le régime syndical. Comme vous avez raison aussi de le faire
remarquer, cela ne rend pas tout négociable, mais cela maintient le
statu quo.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: Une brève intervention, Mme le
Président. Je n'ai pas l'intention de défendre Duplessis parce
que je serai obligé de défendre les libéraux en même
temps, cela va engager un débat inutile, une perte de temps,
étant donné qu'on doit terminer nos travaux à 18 heures.
On a beaucoup parlé du mérite. Cela ne semble pas encore clair,
M. Théberge. On pourrait en discuter. Je ne veux pas en discuter avec
vous. Cela concerne surtout le ministre et tout ce que la loi, les cinq ou six
articles disent concernant le mérite. Vous avez dit ce matin que cette
loi du mérite, vous la remplaceriez surtout par la négociation
collective, si j'ai bien compris. En même temps, vous voulez abolir la
Commission de la fonction publique parce qu'elle a trop de libertés,
elle a trop de pouvoirs. C'est un organisme surtout patronal et, en même
temps, c'est le ministre qui assumerait, lui, toute la responsabilité
qui serait le grand maître d'oeuvre. Justement, le point d'interrogation,
même si le ministre, l'Etat employeur, au moment de vos
négociations, comme il y a des choses qui sont tout à fait
imprécises, que ce soit l'article 3 ou d'autres articles... A ce
moment-là, est-ce que vous avez plus confiance, en vous
débarrassant de la Commission de la fonction publique, de faire affaires
directement avec le ministre? Est-ce que cela vous rassure plus en fonction de
votre avenir?
M. Théberge: Cela ne nous rassure pas plus. Le
problème qu'on avait avec la Commission de la fonction publique, c'est
que, par voie législative, évidemment, en vertu de la loi qui
existe à l'heure actuelle, la Commission de la fonction publique
n'était pas l'employeur; par conséquent, la Commission de la
fonction publique ne négociait pas les choses qui étaient sous sa
responsabilité. C'est bien sûr que, désormais, étant
donné que cela relève du ministre de la Fonction publique, il y
aura peut-être possibilité je dis bien peut-être
possibilité de négocier en disant tout simplement: Le
règlement que vous voulez édicter, en vertu de l'article 3, sur
l'un ou l'autre des sujets, va être négociable, sauf qu'à
ce moment-là, on risque de s'embarquer dans des procédures quasi
judiciaires, je dirais, pour déterminer si c'est négociable ou si
ce ne l'est pas. Au lieu de cela, pour nous, ce n'est pas seulement une
question de confiance, parce qu'en dépit de la confiance qu'on pourrait
éventuellement avoir à l'endroit d'un ministre ou d'un autre, ce
qu'on sait, c'est que les gouvernements passent et nous restons. On ne veut pas
qu'à un moment donné, n'importe quel ministre nous arrive et nous
dise: La loi nous interdit de négocier ces conditions de travail. C'est
indiqué que cela se règle par voie de règlement.
Là-dessus, on n'a pas plus confiance maintenant
qu'antérieurement.
M. Le Moignan: Nous sommes à discuter présentement
et on sait que le rapport de la commission Martin n'est pas encore
publié. Si la commission Martin entrait en contradiction avec vos
arguments, vous ou d'autres groupes, et les arguments du gouvernement, alors,
comment, à ce moment-là, tout concilier? C'est pour cela que,
pour cette loi qu'on étudie, on aurait peut-être eu
intérêt à la retarder ou à la reporter à un
mois ou deux plus tard, ou bien attendre le rapport de la commission Martin; ou
est-ce qu'on peut concilier les deux à la fin?
M. Théberge: Je pense que ce serait certainement beaucoup
plus habile de décider d'arrêter les travaux que de les continuer,
parce qu'actuellement, je vous ai signalé ce matin, dans mon court
laïus de présentation, qu'on considérait que le projet de
loi 53 ne répondait pas aux aspirations et aux besoins à la fois
de la population en général et des employés de la fonction
publique. Ce qui se passe à l'heure actuelle, c'est qu'on a un climat
qui est extrêmement malsain en regard de cela à l'intérieur
de la fonction publique. Actuellement, personnellement, avec les autres membres
de l'exécutif chez nous, nous sommes en tournée dans les
différentes sections de notre syndicat pour une question de cotisation
syndicale. Je n'ai pas l'intention de vous raconter mes problèmes
là-dessus, si vous n'avez pas d'objection, sauf qu'en même temps,
on parle du projet de loi 53. De toute façon, les membres ont
déjà reçu le projet de loi, avant même que le
ministre daigne nous l'envoyer le petit livre bleu qu'il nous a
envoyé les membres l'avait reçu bien longtemps avant cela
et ils avaient reçu de la documentation depuis ce temps-là.
Par rapport à ça, les membres sont extrêmement
inquiets de ce qui se passe actuellement à l'intérieur de la
fonction publique. Je ne vois pas d'un très bon oeil de quelle
façon toute cette affaire est en train de se dérouler à
l'heure actuelle. Effectivement, la contradiction, par exemple, entre la
commission Martin et le projet de loi 53 est vécue de façon un
peu dramatique chez nous.
Le fait que le ministre s'arroge tous ces pouvoirs, en dépit de
la confiance ou de la non-confiance qu'on peut avoir à son endroit
c'est totalement indépendant de ça est vu d'un
très mauvais oeil de la part de nos membres. Actuellement, je sais
qu'à l'intérieur des autres syndicats des autres membres de la
fonction publique, il y a un climat extrêmement malsain en regard de
cela. Il ne nous semble pas que la façon de procéder, dans cette
affaire, ait contribué véritablement à créer un
sain climat de travail à l'intérieur de la fonction publique.
Je vous parlais un peu tout à l'heure des problèmes qu'on
avait avec l'ancienne loi, les membres s'inquiètent beaucoup de savoir
ce qui va se passer avec la nouvelle loi. Ils n'ont peut-être pas encore
saisi très bien toutes les subtilités du projet de loi en
question, lorsqu'il sera adopté. L'inquiétude est très
généralisée par rapport à ça. Parce que, en
aucune manière, sauf des déclarations et les
déclarations ne sont pas des textes législatifs, ce n'est pas une
obligation pour qui que ce soit de les respecter à l'effet que
probablement, ça va être négociable, on n'a rien contre le
fait que la rétrogradation soit négociable, cela ne nous
apparaît assez clair actuellement, dans les textes, en regard de tout
ça.
De toute façon, demain matin, vous allez avoir encore plus de
nouvelles là-dessus, on termine nos assemblées ce soir, on prend
des votes là-dessus, on va vous faire connaître la position de nos
membres en regard de ça.
Il m'apparaît extrêmement clair que la façon de
procéder dans cette question, compte tenu du texte qu'on a devant les
yeux, non pas compte tenu des déclarations à la radio, à
la télévision ou dans les journaux, ou même ici en
commission parlementaire, on n'offre pas les garanties que nous voudrions.
M. Le Moignan: Une dernière question. On a parlé,
ce matin, de mécanismes de consultation qui auraient pu être mis
en branle, où vous auriez pu être consultés, vous et
d'autres, sur la préparation de cette loi. Est-ce que vos membres
auraient été en état d'apporter des renseignements, avant
la rédaction, puisqu'ils avaient déjà fait des
études?
M. Théberge: C'est bien sûr, on a d'ailleurs
déjà fait de nombreuses représentations sur ces questions.
On l'a dit publiquement. On était heureux que le ministre de la Fonction
publique se décide, parce qu'on était tannés nous aussi
des dispositions de la loi actuelle, à amorcer un débat au sujet
de la fonction publique, se décide à changer des choses
là-dedans. On avait fait, de toute façon, de nombreuses
représentations déjà, notamment sur la liberté
syndicale, mais également sur d'autres questions, notamment des
questions relatives à la transparence de la fonction publique, sur le
droit du public à l'information qui se véhicule à
l'intérieur de la fonction publique.
Voici une des questions fondamentales qu'on peut se poser
également, qu'on est en train de dé- battre chez nous de
façon assez sérieuse: Est-ce que nous, comme employés de
l'Etat, sommes au service d'un parti politique temporairement au pouvoir qui
privilégie l'intérêt commun mais là-dessus,
on a quelques réserves, des fois ou si on doit travailler au
service de la population? Si on doit travailler au service de la population, ce
qu'on demande, c'est que le public ait droit, ait accès à
l'information véhiculée à l'intérieur de la
fonction publique.
A cet égard, encore une fois, le projet de loi 53, ne
répond absolument pas à ce besoin. On le maintient toujours dans
des situations avec des serments d'allégeance, des codes
d'éthique, etc., qui nous empêchent de dire à la population
ce qui se passe à l'intérieur de la fonction publique, de
divulguer à la population l'information essentielle, un sain
débat démocratique à l'intérieur de notre
société.
Le problème qu'on a rencontré, il n'y a pas tellement
longtemps au ministère de l'Education, au sujet des subventions aux
universités, est un exemple patent. Des gens constataient que des choses
se passaient, qui ne leur semblaient pas correctes. Ils ont
décidé d'en parler. Mais le ministre de l'Education, si je ne
m'abuse, à l'Assemblée nationale, a répondu à une
question là-dessus, en disant qu'il n'était absolument pas
question qu'un fonctionnaire divulgue de l'information, à moins que ce
ne soit aux autorités supérieures de son ministère.
La population là-dedans, la transparence, le droit à
l'information, où se retrouvent-ils par rapport à tout ça?
On aurait souhaité que le projet de loi 53, qu'une éventuelle loi
sur la fonction publique corrige des situations comme celle-là.
M. Le Moignan: Quant au ministère de l'Education, j'avais
effectivement posé quelques questions à ce sujet.
M. Théberge: C'est vous qui aviez posé la question?
Je ne le savais pas.
M. Le Moignan: Je vous remercie.
Le Président (Mme Cuerrier): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions?
M. Théberge: Si vous me le permettez.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le Président du
syndicat.
M. Théberge: Toujours par rapport au projet de loi 53,
j'aimerais parler un peu de la possibilité de délégation,
sujet qui nous inquiète également. On pense, bien sûr, que,
dans une administration aussi considérable que la fonction publique, il
est fort heureux que le ministre décide de ne pas tout faire
lui-même. Pour sa santé, de toute façon, c'était
nécessaire.
Mais la délégation pose également d'autres ordres
de problèmes. Entre autres, on pense que c'est une façon de
s'assurer qu'il va y avoir du pa-
tronage, à tout le moins, du patronage administratif, ou du
népotisme, si l'on veut, à l'intérieur de la fonction
publique, compte tenu que les supérieurs des employés vont se
retrouver sur les jurys, si j'ai bien compris l'esprit de la
délégation. Ils vont se retrouver sur les jurys, pour engager des
personnes à leur service.
A ce moment-là, il nous semble extrêmement dangereux que
lesdites personnes s'organisent pour trouver d'avance, comme c'est la pratique
à l'heure actuelle, les candidats qu'ils veulent bien avoir, parmi leurs
amis, leurs connaissances, peu importe. On pense que c'est également une
façon d'agir qui, d'après le ministre, en tout cas, ne sera pas
tout à fait une garantie que la règle du mérite va
être acceptée, dans la mesure où on peut toujours accepter
la règle du mérite non définie.
Cela nous inquiète un peu. J'aimerais que le ministre donne
quelques éléments à ce sujet.
Le Président (Mme Guerrier): M. le ministre.
M. de Belleval: Le problème que vous soulevez est le
problème de la réglementation sur les concours, la formation des
jurys, la gestion des emplois. Quelle que soit la loi, on va toujours avoir ce
problème. On l'a dans la loi actuelle, on va l'avoir dans la prochaine
loi. Ce n'est pas la loi comme telle qui dispose de toutes ces questions, c'est
la réglementation. Mais, à l'avenir, cette réglementation
sera beaucoup plus publique qu'actuellement. Elle sera soumise à l'avis
d'une commission impartiale, elle sera même soumise à l'examen de
l'Assemblée nationale, si l'Assemblée nationale le juge opportun,
puisque les avis de la commission iront à l'Assemblée nationale
et qu'il y aura un organisme indépendant qui n'aura que cela à
faire, d'ailleurs, contrairement à la loi actuelle, c'est-à-dire
surveiller pour voir si cette réglementation, une fois jugée
conforme à la règle du mérite, telle que définie
aux articles 70 et suivants, et telle que la jurisprudence aussi va la
définir durant les années à venir, pourra faire
enquête sur la façon dont la réglementation est
observée. De ce point de vue, cela rejoint vos objectifs de faire qu'il
y ait plus de transparence dans la gestion de la fonction publique qu'il n'y en
a maintenant.
Quant au pouvoir de délégation, vous l'avez fait
remarquer, il est impossible que tout soit fait d'une façon centrale,
par un seul homme, ou par un seul organisme. Effectivement, il n'y a pas
actuellement de pouvoir de délégation qui appartienne à la
Commission de la fonction publique, mais, dans les faits, on le sait
très bien, l'organisation des concours, des jurys, etc., tout cela est,
au fond, largement délégué, en dehors de tout contexte
réglementaire en dehors de toute possibilité d'examen, par un
organisme indépendant.
C'est ce qui fait que, de ce point de vue, la loi constitue aussi un
progrès considérable dans le sens même des objectifs que
vous poursuivez.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Laviolette.
M. Jolivet: J'ai deux choses. Premièrement, l'employeur
étant à la fois législateur, par rapport à vos
pouvoirs de négociation comme syndiqués, cela donnerait une forme
de libre négociation de l'ensemble de vos conditions de travail. En quoi
cette forme de négociation peut-elle permettre de mieux donner à
l'ensemble de la population un service qu'on appelle le service à la
communauté, le bien commun?
La deuxième partie de ma question, c'est la fin de votre
intervention, sur le droit à l'information. Comment verriez-vous le
droit à l'information au public, sans que, d'un côté, il y
ait, de la part de l'employeur, une contrainte vis-à-vis de
l'employé qui, comme vous le mentionniez tout à l'heure au niveau
du ministère de l'Education, donne le droit à l'employeur de
pénaliser l'employé? D'un autre côté, s'il y avait
libre accès au droit à l'information, de la part de
l'employé, qui par vengeance ou pour d'autres motifs comme
ceux-là, pourrait décider de sortir de la documentation,
simplement pour son avancement personnel ou en cas de jalousie ou encore de
vengeance envers un ministre, un sous-ministre ou un sous-chef. Comment
voyez-vous ces deux actions?
M. Théberge: Sur la première question, à
savoir en quoi le syndicalisme peut-il permettre que le service offert à
la population soit meilleur que si c'est uniquement par voie
réglementaire ou de façon unilatérale, je pense qu'il
s'agit simplement de regarder ce qui s'est passé au Québec depuis
quelques années. Je ne sais pas quelle est votre interprétation
personnelle de la situation, mais si on regarde, en tout cas, à mon
point de vue, le déroulement des dernières négociations et
des négociations antérieures, autant dans le secteur des Affaires
sociales, de l'Education que de la Fonction publique, je pense qu'une bonne
partie des revendications des syndicats de la fonction publique et des
syndicats du secteur parapublic en général ont largement
contribué à assurer des services de qualité pour les
raisons suivantes:
L'employeur, dans ses négociations avec les employés des
secteurs public et parapublic, s'est comporté exactement comme un
employeur du secteur privé, c'est-à-dire visant uniquement une
rentabilité à caractère économique. On a vu, lors
des dernières négociations, par exemple, les questions de
mobilité qui ont été longuement discutées dans le
secteur des Affaires sociales. On a vu les prorata discutés dans le
domaine de l'Education. On a vu, à l'intérieur de la fonction
publique, la bataille qui s'est déroulée au sujet de la
rétrogradation.
Il me paraît assez clair que les batailles menées par les
syndicats là-dessus ont contribué à ce que les membres,
les employés des secteurs public et parapublic aient une certaine
autonomie, à la fois financière et professionnelle, leur
permettant aujourd'hui d'assurer un service relativement indépendant du
pouvoir unilatéral d'un supérieur quelconque.
En ce sens, je pense que cela a contribué à
l'amélioration de la qualité des services. En regard
de cela ce serait peut-être important lorsqu'il y a
eu des batailles importantes au sujet du prorata, du nombre d'étudiants
par classe. C'est extrêmement important pour la qualité de
l'enseignement que de savoir combien on va mettre d'étudiants par
professeur. Il me semble que le débat qui s'est fait à ce sujet,
en tout cas, quant à moi, a permis assez clairement de
déterminer, de conclure que les revendications des syndicats
permettaient à l'étudiant de recevoir un enseignement de
meilleure qualité.
Sur l'aspect plus spécifique de la rétrogradation, par
exemple, on a actuellement à l'intérieur de notre convention
collective un article qui traite de la rétrogradation, sauf qu'on l'a
assorti de stipulations telles qu'un employé ne sent pas au-dessus de
lui une épée de Damoclès. La moindre entorse, la moindre
coche qu'il fait de travers, aux yeux de son supérieur, en tout cas, ne
peut pas entraîner automatiquement une rétrogradation. Il nous
semble qu'en ce sens les syndicats, beaucoup plus que l'employeur, ont fait que
les employés de la fonction publique aient un peu d'autonomie dans leur
travail, de sorte qu'ils ne sont pas assujettis à l'épée
de Damoclès à tout bout de champ. Je ne sais pas si cela
répond à votre question.
M. Jolivet: Oui, il y a seulement une partie... Vous avez fait
mention du secteur parapublic des Affaires sociales et de l'Education dans la
réponse que vous m'avez donnée, mais sur la question des
fonctionnaires comme tels, à l'intérieur de la loi, vous avez
fait mention de la rétrogradation. Est-ce que le fait d'avoir le droit
de négocier toutes vos conditions de travail va permettre un meilleur
service ou ne permettra pas un meilleur service? C'est la première
partie, suite à votre réponse.
La deuxième, face à ce que vous dites au sujet de la
rétrogradation, le pouvoir actuellement exercé avec ce que
permettent les négociations que vous avez tenues, selon les conventions
collectives... Il y avait auparavant le congédiement pur et simple avec
les recours possibles et il y a aujourd'hui la rétrogradation avec les
recours possibles aussi. Qu'est-ce qui est le mieux pour vous? Est-ce mieux que
la personne soit congédiée purement et simplement ou est-ce mieux
qu'il y ait un intermédiaire entre les deux, ou ni l'un ni l'autre?
M. Théberge: Sur la rétrogradation comme telle, on
ne dit pas que c'est une mesure qui doit être éliminée
complètement. On a signé un article dans notre convention
collective qui traite de la rétrogradation, sauf qu'on a
négocié cet article.
M. Jolivet: J'y arrive. Sauf qu'on a négocié cette
affaire. Les stipulations qu'on a actuellement à l'intérieur de
notre convention collective nous semblent des garanties suffisantes par rapport
à cela.
M. Jolivet: D'accord.
Sauf que si on regarde l'article 88 tel qu'il est rédigé
ici, on trouve cela un peu plus inquiétant. Je vais lire l'article: "Le
sous-ministre ou le dirigeant d'un organisme peut, par écrit
encore heureux rétrograder à une classe comportant une
rémunération maximum inférieure, révoquer ou
destituer tout fonctionnaire incompétent dans l'exercice de ses
fonctions ou incapable de les exercer."
M. de Belleval: Oui, c'est dans le cas où il n'y a pas de
convention collective, mais dans le cas où il y a une convention
collective, c'est votre convention collective qui prévaut.
M. Théberge: Attention! A quelle place voyez-vous dans le
projet de loi actuel que la rétrogradation va être
négociable?
M. de Belleval: Actuellement, est-ce que c'est négociable
selon la loi?
M. Jolivet: ...
M. de Belleval: Si vous avez réponse à cela, si
vous voulez, rapidement, M. le député.
M. Jolivet: Oui.
M. de Belleval: Cela va régler la question.
Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.
M. de Belleval: Si on va à l'article 119 qui reprend
l'article 52a de l'ancienne convention collective, on dit que seules sont non
négociables les matières qui relevaient, en vertu de la loi
actuelle, de la Commission de la fonction publique. On se comprend bien? Cela
va bien, M. Théberge?
M. Théberge: Oui, cela va.
M. de Belleval: Bon. En quoi la rétrogradation
relevait-elle de la Commission de la fonction publique, en vertu de la loi
actuelle?
M. Théberge: Non, elle ne relevait pas de la Commission de
la fonction publique à l'heure actuelle.
M. de Belleval: Donc, c'est négociable et cela va
continuer à être négociable.
M. Théberge: Voulez-vous me lire le texte exact
là-dedans où c'est indiqué de façon bien claire que
tout le reste est négociable?
M. de Belleval: On dit que l'article 119 qui reprend l'article
52a, avec le projet d'amendement que j'ai déposé qui le restitue
dans son intégrité par rapport à l'ancien article 52a, dit
que: Toutefois, aucune disposition d'une convention collective ne peut porter
sur un autre sujet qui, en vertu de la présente loi, relève de la
commission. Or, la
rétrogradation ne relève pas de la commission en vertu de
la loi. Donc, c'est négociable. Cela va bien? D'ailleurs, la preuve que
c'est négociable en vertu de la loi actuelle, c'est que vous l'avez
négociée.
M. Théberge: Attention! En vertu de la loi actuelle, de la
part de l'employeur, c'était illégal de nous proposer la
rétrogradation.
M. de Belleval: Vous voulez dire que vous avez
négocié une convention collective illégale?
M. Théberge: On veut dire que quand l'employeur est en
même temps le législateur, vous savez qu'on a signé des
conventions collectives de quatre ans, ce qui est à l'encontre du Code
du travail. Quand l'employeur est en même temps le législateur, on
a comme des inquiétudes, des fois, de signer certains articles, parce
qu'Oswald Parent, du temps qu'il était ministre, nous disait:
Effectivement, si vous ne signez pas la rétrogradation, on va vous
l'imposer par voie législative. Qu'est-ce que vous auriez fait à
notre place?
M. de Belleval: Là, vous m'avez dit tantôt...
M. Théberge: Qu'est-ce que vous auriez fait à notre
place?
M. de Belleval: Là, écoutez, je n'étais pas
à votre place. Dans ce temps, j'étais en train de me battre
contre M. Oswald Parent pour le faire battre dans Hull et on a réussi.
Je n'avais pas tellement le temps de m'occuper de la convention collective.
M. Pagé: Cela a passé juste. Qu'est-ce que cela
vous a donné?
M. de Belleval: Cela nous a donné un député
de plus, le plus beau député de l'Assemblée nationale et
un des meilleurs.
M. Pagé: Un plus beau député que notre
président?
Le Président (Mme Cuerrier): Plus jeune, en tout cas.
M. de Belleval: Ils sont tous les plus beaux. M. Pagé:
Seigneur! Asinus asinum fricat.
M. de Belleval: M. Théberge, revenons aux choses
sérieuses. Vous avez dit tantôt que vous-même, en principe,
n'êtes pas contre une clause de rétrogradation, pourvu qu'elle
soit aménagée avec les sauvegardes appropriées et qu'elle
fasse l'objet de la libre négociation des partis. C'est ce qui s'est
passé lors de la dernière convention collective. Vous avez
négocié une clause de rétrogradation qui vous satisfait,
semble-t-il... je ne sais pas si elle vous satisfait ou pas.
M. Théberge: Oui.
M. de Belleval: II y a des balises qui vous permettent de
contrôler l'usage de cette formule. Vous me dites que vous auriez
négocié ça de façon illégale et le
gouvernement avec vous. Ce qu'on en sait, c'est que le jurisconsulte du
gouvernement nous dit que cette clause était effectivement
légale, qu'en vertu de la loi en vigueur, la rétrogradation ne
relève pas de la Commission de la fonction publique. Par
conséquent, c'est une matière négociable. J'ai
déclaré à plusieurs reprises qu'effectivement,
c'était mon intention de maintenir cet aspect de la gestion de la
fonction publique dans le domaine du négociable et que la loi, telle que
rédigée et telle qu'amendée, permet effectivement cette
chose. Je n'ai absolument pas l'intention de sortir ça du champ
négociable, parce qu'il y a des caractères qui peuvent être
facilement odieux qui seraient attachés à un aspect semblable.
Mais, même à ça, si, par hasard, ce n'est pas encore assez
clair je l'ai déclaré aussi à plusieurs reprises,
on n'a qu'à ajouter le mot "rétrogradation" ou les mots
"réorientation de la carrière", ou quoi que ce soit d'autre, dans
les matières qui sont énumérées a), b), c), d), e),
f), g); il n'y a pas de problèmes là-dessus.
M. Théberge: Je vous ferais remarquer à ce sujet
qu'à l'article 90, c'est écrit "tout fonctionnaire
incompétent dans l'exercice de ses fonctions"... Cela, c'est une raison
particulière. "Tout fonctionnaire incompétent dans l'exercice de
ses fonctions ou incapable de les exercer". Voilà deux raisons
particulières pour rétrograder une personne.
M. de Belleval: C'est dans la convention collective.
M. Théberge: Non.
M. de Belleval: Dans quoi?
M. Théberge: Dans le projet de loi.
M. de Belleval: Oui.
M. Théberge: Dans le projet de loi, c'est de cette
façon que c'est écrit: "Incompétent dans l'exercice de ses
fonctions...
M. de Belleval: Vous parlez de l'article 88? M.
Théberge: Oui.
M. de Belleval: Mais, comme l'a fait remarquer M. Jolivet,
l'application de l'article 88 est assujettie à la Loi sur le
régime syndical et je viens de vous le démontrer...
M. Théberge: De toute façon, j'aimerais mieux que
ce soit écrit bien clairement, si c'était possible.
M. de Belleval: C'est le but de notre exercice...
M. Théberge: C'est ça.
M. de Belleval: C'est de voir sur quoi il peut y avoir besoin
d'éclaircissements supplémentaires. Quand on arrivera en
deuxième lecture, article par article, on pourra, à ce
moment-là, clarifier ça, et je suis certain, comme je l'ai dit,
que les valeureux défenseurs du syndicalisme que sont maintenant
devenus...
M. Pagé: Je t'ai toujours été, Mme le
Président.
M. de Belleval: ... les représentants de l'Opposition vont
se faire fort de faire ça. Mais, pour plus de sûreté,
savez-vous, on pourra peut-être se rencontrer d'ici ce temps pour en
discuter plus en détail?
M. Théberge: Pour ma part, il n'y a pas là de
problème. Ce que je veux, c'est que ce soit écrit.
M. de Belleval: Bien sûr.
M. Jolivet: La deuxième partie de ma question, Mme le
Président...
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Laviolette.
M. Jolivet: ... n'a pas encore eu de réponse:
C'était au sujet du droit à l'information du fonctionnaire qui
pourrait sortir de la documentation. Qu'est-ce qui donne les garanties, par
rapport à l'autre actuelle, qui est celle du ministre, qui a un pouvoir
dont vous faisiez mention au niveau du ministère de l'Education tout
à l'heure?
M. Théberge: Je ne suis pas sûr de bien comprendre
la question.
M. Jolivet: Vous dites: On devrait, comme fonctionnaires, avoir
le droit d'informer la population de ce qui se passe à la fonction
publique. C'est son droit d'être informée. Actuellement, vous avez
dit que le ministre ou encore les sous-ministres ont le pouvoir de dire aux
fonctionnaires, selon les règles d'éthique, de ne pas sortir de
documentation qui se situe à l'intérieur des discussions du
ministère. Vous avez fait mention de ce qui s'est passé au
ministère de l'Education.
Je vous pose la question maintenant. Si ce droit était
donné où le fonctionnaire aurait le droit de sortir, quelles sont
les garanties qu'il faudrait avoir si c'est cela que vous voulez avoir
pour qu'il n'utilise pas à des fins personnelles de vengeance, de
jalousie ou peu importe les termes qu'on peut employer, pour faire croire aux
gens qu'il donne de l'information alors que, simplement, il sert ses fins
personnelles?
M, Théberge: Vous ne pouvez pas avoir de garantie
extrêmement formelle là-dessus. De toute façon,
actuellement, ce qui se passe, c'est que vous n'avez pas le droit de divulguer
l'information. Par voie de conséquence, la seule information dont
dispose la population en regard de ce qui se passe à l'intérieur
de la fonction publique, c'est celle que veut bien lui laisser l'homme
politique. D'accord? On constate cette situation. On se dit: II nous semble
que, dans un régime démocratique, il devrait y avoir des
stipulations. De toute façon, il y a beaucoup de pays qui
légifèrent dans ce sens et il y a des modalités et il y a
beaucoup d'affaires là-dedans, je suis bien d'accord, sauf que nous
émettons le principe. On n'invente rien de nouveau. On reprend ce que
René Lévesque disait en campagne électorale lorsqu'il nous
avait annoncé que la fonction publique deviendrait transparente.
On dit: Câline, ils veulent faire une loi sur la fonction
publique. Pourquoi n'ont-ils rien fait là-dessus? Je comprends qu'il y a
beaucoup de modalités extrêmement compliquées. Il est bien
entendu que nous serons d'accord nous les premiers pour dire que
si, vous voulez construire une route quelque part, autant que possible, on
n'annonce pas la nouvelle deux ans avant pour que la spéculation prenne
dans te coin. On est entièrement d'accord sur cela. Le droit à
l'information là-dedans, on serait un peu plus sélectif.
On dirait: La volonté qu'y mettait le chef du gouvernement
lorsqu'il était en campagne électorale...
M. Jolivet: Cela va pour moi, cette partie sur l'éthique.
Je pense qu'on a l'éthique professionnelle au niveau de la fonction
publique. Ce n'est pas cela que je dis. Je dis: Quelles sont les formes de
garantie qu'on doit donner pour que quelqu'un n'utilise pas, seulement par
phénomène de vengeance ou pour vouloir avoir te poste de l'autre
en haut, des documents qui appartiennent à un ministère pour dire
après cela, sous le couvert du droit de la liberté de parole et
d'information publique, que j'ai utilisé cela.
D'après vous, quelles seraient les garanties qu'on devrait
donner?
M. Théberge: J'avoue que je ne le sais pas.
Honnêtement, je ne sais pas. On pourra reparler de cela aussi.
Le Président (Mme Cuerrier): II est près de 18
heures. Y a-t-il d'autres interventions ou est-ce le moment de remercier...
M. Pagé: Mme le Président...
Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: Je voudrais simplement remercier M.
Théberge de sa participation d'aujourd'hui à nos travaux et lui
faire part de mes meilleurs voeux de succès dans les objectifs qu'il
veut atteindre par cette comparution.
M. le ministre faisait état tout à l'heure que vous auriez
l'occasion de vous rencontrer sous peu, avant, peut-être, la
rédaction d'amendements éventuels. C'est le même ministre
qui nous di-sait,cependant, il y a quelques minutes, qu'il voulait que le
débat soit public et que l'Opposition y
participe. De toute façon, on aura l'occasion d'y revenir
à l'étude article par article et, quant a nous, vous pouvez
être assurés que nous avons une position commune, soit
l'opposition au projet de loi. En terminant, je voudrais vous remercier et vous
dire que, quant à moi, il a été beaucoup plus
agréable de vous rencontrer aujourd'hui et l'échange que nous
avons eu aujourd'hui a été sûrement beaucoup plus
agréable et plus serein que le dernier échange que nous avons
eu.
M. Théberge: C'était une partie de hockey. Vous
savez ce que c'est!
M. Pagé: Merci.
M. de Belleval: Alors, moi aussi, M. Thé-berge...
Avez-vous quelque chose à dire avant, M. Le Moignan?
M. Le Moignan: Ah oui! Cela sera plus beau. Je vous laisse le
dessert. Je veux simplement remercier M. Théberge des bonnes
réponses qu'il a fournies à mes quelques petites questions et
j'ai appris beaucoup de choses aujourd'hui.
Je m'intéresse, comme l'Union Nationale, à tout ce
débat sur le projet de loi 53 et nous voulons vous souhaiter le plus
grand succès possible et nous souhaitons que le gouvernement ne vous
écoute pas toujours d'une oreille sourde.
Comme le ministre l'a dit, on le verra avec les preuves qu'il va nous
apporter, avec les modifications, avec les garanties surtout, qu'il puisse se
donner satisfaction et nous aurons là la véritable transparence,
le ministre vient d'en parler, et nous essayons d'y croire encore et toujours
aussi longtemps que le gouvernement va continuer. Je vous remercie, M.
Théberge.
M. de Belleval: Merci de votre participation. Je note que ce
matin, plutôt que de lire le projet original, le mémoire que vous
avez envoyé, vous avez fait une déclaration extrêmement
articulée d'ailleurs, qui ouvrait de larges horizons à la
discussion. Cela nous a permis effectivement d'avoir, je pense, une discussion
d'un niveau élevé qui tranchait sur celle que nous avions eue
auparavant, à laquelle faisait référence le
député de Port-neuf. Je pense que c'est effectivement le but que
nous recherchions par cette commission. J'ai déjà
déposé des projets d'amendements qui se refléteront dans
une rédaction finale un peu plus tard et il y en aura sans doute
d'autres. C'est normal, d'ailleurs, que, dans le cours des discussions qui sont
actuellement publiques, il y ait aussi des rencontres avec les
différents groupes, les associations, dans les semaines qui viennent,
puisque, de toute façon, il n'y a pas péril en la demeure. Nous
avons déjà dit que nous procéderions avec tout le temps
nécessaire pour véhiculer la loi à travers les
méandres de la législature. Il y aura donc certainement d'autres
possibilités de se voir et de clarifier nos positions respectives dans
ce domaine. Il reste que, sur le point fondamental que vous avez
soulevé, l'élargissement de l'aire de négociation, c'est
une matière qui relève d'une autre instance et qui, à
l'avenir, d'ailleurs, relèvera d'une autre loi que la loi 53. Je suis
certain que, sur ce plan-là aussi, on aura certainement de nouvelles
rencontres. Je vous remercie encore une fois et je vous félicite.
Le Président (Mme Cuerrier): II me reste à me faire
le porte-parole de la commission de la fonction publique pour remercier le
Syndicat des professionnels du gouvernement du Québec pour sa
contribution aux travaux de cette commission. J'ajourne les travaux de la
commission de la fonction publique sine die.
(Fin de la séance à 17 h 52)