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(Dix heures une minute)
Le Président (M. Vaugeois): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Marx: M. le Président, je pense que le projet de loi
236 est retiré pour le moment; il sera présenté à
nouveau au mois de novembre.
M. Johnson (Anjou): Le projet de loi 236, donnez-moi le nom?
Le Président (M. Vaugeois): Loi concernant certains lots
du cadastre officiel de Pointe-aux-Trembles.
M. Marx: Je pense que c'est suspendu. Le Président (M.
Vaugeois): Très bien.
M. Johnson (Anjou): C'est vous qui le parrainiez?
M. Marx: C'est cela, oui.
M. Johnson (Anjou): Vous avez décidé de le
suspendre.
M. Marx: J'ai parlé aux avocats des demandeurs. Il est
suspendu puisqu'il va y avoir d'autres discussions avec les juristes de votre
ministère.
M. Johnson (Anjou): Nous considérions que nous avions
réglé cela, mais enfin!
Le Président (M. Vaugeois): Vu qu'on ne commence pas avec
ce projet de loi.
M. Johnson (Anjou): Si le demandeur a décidé de se
désister pour le moment, nous ne pouvons pas nous opposer à
cela.
Le Président (M. Vaugeois): Alors, sous réserve
d'autres renseignements en cours de séance, nous ne procéderons
pas à l'étude du projet de loi 236.
Je crois que nous pourrions commencer par le projet de loi 221.
D'ailleurs, il en avait été convenu ainsi.
M. Marx: Juste avant qu'on commence...
Le Président (M. Vaugeois): Je vais prendre acte du
quorum, si vous me le permettez, pendant que nous l'avons. M. Marx: Oui,
le quorum.
Le Président (M. Vaugeois): Voulez-vous constater les
présences, M. le secrétaire?
Le Secrétaire: D'accord. Les membres de cette commission
sont: MM. Dussault (Châteauguay), Payne (Vachon), Johnson (Anjou),
Vaugeois (Trois-Rivières), Marx (D'Arcy McGee), Mme Saint-Amand
(Jonquière).
Pour l'étude du projet de loi, M. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce) remplace M. Rivest (Jean-Talon).
Le Président (M. Vaugeois): Cela va. Vous avez
constaté le quorum, M. le secrétaire?
Le Secrétaire: C'est cela.
Demande de documents
M. Marx: M. le Président, avant que nous commencions
l'étude du projet de loi, à la dernière séance de
cette commission, quand le ministre était présent, il nous a
promis de fournir certaines informations, relativement aux prisons et d'autres
informations qu'on avait demandées lors de l'étude des
crédits. Cela fait déjà plus de six semaines et nous
n'avons pas reçu ces informations. J'aimerais les demander au
ministre.
Le Président (M. Vaugeois): Est-ce que vous en avez la
liste vous-même ou si, en cours de discussion, vous avez souhaité
plus d'informations et vous avez compris que le ministre y donnerait suite? Il
y a un problème; on peut bien faire un rappel, mais il faudrait avoir
une idée assez précise de ce sur quoi nous attendons des
informations supplémentaires.
M. Marx: Je suis sûr que les attachés politiques du
ministre ont fait un "deep briefing" de la commission et qu'ils ont une liste
de tout ce que nous avons demandé. Je peux dresser à une autre
liste, mais...
Le Président (M. Vaugeois): M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): M. le Président,
étant donné que le député trouve cela
extrêmement important - c'est dans son rôle et dans ses
attributions de le faire - je suis sûr que tous les sujets sur lesquels
il voulait de la documentation lui reviendront à l'esprit et qu'il
pourra les énumérer.
M. Marx: Si le ministre veut que je fasse la "job" de ses
attachés politiques, je suis prêt à le faire. On peut
commencer avec les fiches techniques des prisons. Je pense que ce n'est pas
tellement difficile de nous fournir ces renseignements après six
semaines.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, d'abord, je reconnais
bien le député de D'Arcy McGee par sa façon de
procéder et par son ton. Je me demandais s'il accordait une
priorité particulière à certains de ces documents.
Effectivement, nous avons rencensé les travaux de la commission et fait
le nécessaire pour nous assurer que nous pourrons transmettre aux
membres de la commission les documents que nous nous sommes engagés
à livrer. Je posais la question au député de D'Arcy McGee
pour savoir s'il y avait un ordre qu'il préférait étant
donné que faire travailler des gens sur tout le dossier peut prendre un
certain temps. Alors, nous avons amorcé déjà un certain
nombre de choses. Je pense me souvenir effectivement que, à la question
des fiches des prisons, il avait manifesté un intérêt
particulier. Est-ce qu'il y a un autre sujet qui, pour lui, exigeait que cela
se fasse le plus rapidement possible?
M. Marx: Si on peut commencer avec les fiches techniques sur les
prisons, si on peut les avoir cette semaine, ce sera déjà un pas
en avant.
M. Johnson (Anjou): Je ne peux garantir que ce sera cette
semaine, M. le Président, mais normalement ce sera fait avant
l'ajournement des travaux ou avant la prorogation de la session.
M. Marx: C'est assez long, trois mois, pour faire des photostats
de quelques documents. Je pense que c'est un peu exagéré. Que
cela prenne trois mois pour avoir des fiches techniques, je pense que c'est un
peu exagéré. Je vois mal comment la commission pourrait
fonctionner d'une façon efficace si cela prend trois mois pour avoir des
photostats de quelques documents. Si ce sont là les réponses
qu'on aura, l'exécutif ne nous prend pas au sérieux.
Le Président (M. Vaugeois): Cela dit, M. le
député, est-ce que vous seriez d'accord pour qu'on revienne
à l'ordre du jour de ce matin?
M. Marx: Est-ce que le président est d'accord que cela
prenne trois mois pour avoir des photostats de quelques documents que son
sous-ministre possède déjà?
Le Président (M. Vaugeois): Je m'excuse, M. le
député. Par exemple, à l'occasion de l'étude des
engagements financiers, ce dont nous devrions discuter ce matin lorsque nous
aurons un quorum pour tenir une séance de travail, on convient de
façon précise que nous voulons des informations
supplémentaires. Nous en prenons acte et le secrétaire de la
commission fait le rappel nécessaire. Cette fois-ci, je voudrais bien
faire remarquer que nous sommes responsables et je parle pour le
président de la commission, le vice-président et le
secrétaire. Je pense qu'il se dit beaucoup de choses de cette nature:
Nous souhaiterions... Le ministre dit: Bien sûr, bien sûr. Le
ministre ne dit jamais non quand on lui demande de l'information. Mais nous
aurions dû, dans cette circonstance, faire un rappel précis des
points sur lesquels on avait convenu qu'il y aurait de l'information
supplémentaire. Nous ne l'avons pas fait.
Alors, je ne tiendrai pas rigueur au ministre de ne pas y avoir
donné suite, encore que je suis convaincu que ses fonctionnaires ont
noté les points sur lesquels il devait venir de l'information
supplémentaire, mais nous ne l'avons pas demandée. Je pense que
nous allons nous-mêmes nous entendre avec les conseillers du ministre et
peut-être avec vous-même pour vérifier si nous pouvons
dresser une liste de ce sur quoi il faut de l'information
supplémentaire. Sur tous les points, on peut aller chercher de
l'information supplémentaire.
M. Marx: Ce qu'on n'a pas fait.
Le Président (M. Vaugeois): Alors, on va faire cette
vérification.
M. Marx: Seulement une précision, M. le Président.
Il y a déjà deux ou trois semaines, j'ai écrit au ministre
pour avoir ces informations. Je n'ai pas encore reçu l'accusé de
réception de ma lettre.
Le Président (M. Vaugeois): J'attends ma prison depuis
sept ans. Alors...
M. Marx: Non mais c'est...
M. Johnson (Anjou): J'ai pris acte, M. le Président.
Le Président (M. Vaugeois): D'accord. On va aussi faire
notre travail à cet égard.
Si j'ai bien compris, les gens s'entendent pour qu'on commence par
le
projet de loi 221 pour permettre au député de
Notre-Dame-de-Grâce de livrer son discours en Chambre. M. Brouillet, le
député de Chauveau, est avec nous et il est le proposeur de ce
projet de loi concernant la Coopérative d'habitation Artémis de
Québec.
Projet de loi 221
M. Brouillet: M. le Président, il me fait plaisir de
parrainer ce projet de loi qui consiste à régulariser une
situation qui, je crois, a résulté d'une inadvertance. Je ne
pense pas que le projet de loi pose des problèmes. Je vais laisser les
représentants de la coopérative faire l'exposé des
modifications et des articles de ce projet de loi en vue de régulariser
cet acte de vente fait il y a quelques mois. M. le Président, est-ce que
vous leur cédez la parole?
Le Président (M. Vaugeois): Pourriez-vous vous
présenter, s'il vous plaît?
Avis de la Commission des biens culturels
M. Martin (Roger): Oui notaire Roger Martin. Je me suis
occupé du dossier de la coopérative. Effectivement, le 26
janvier, à la suite d'une saisie par le Trust général du
restaurant L'Ancêtre, le shérif de Québec a vendu deux
bâtisses, c'est-à-dire les lots 2915 et 2916 du quartier du
Palais, de Québec. Une de ces bâtisses est classée monument
historique par le ministère des Affaires culturelles. Cet avis a
été déposé, comme en fait foi le projet de loi, le
1er mai 1967.
Si on s'en tient à la Loi sur les biens culturels, à
l'article 32, on lit: "Aucun bien classé ne peut être
aliéné sans l'autorisation écrite du ministre qui prend
l'avis de la commission. Dans tous les cas, l'acte d'autorisation doit
accompagner l'acte d'aliénation. Dans le cas des immeubles, l'acte
d'autorisation doit être déposé avec l'acte
d'aliénation au bureau d'enregistrement de la division où il est
situé."
Si on s'en tient à l'article 56 de cette même loi, on y
lit: "Toute aliénation d'un bien culturel faite en violation de la
présente loi est nulle. Les droits d'action visant à faire
reconnaître cette nullité sont imprescriptibles."
Donc, on est arrivé à la situation suivante. Par
inadvertance, au cours de la procédure de saisie, l'autorisation n'a pas
été demandée au ministre des Affaires culturelles et le
shérif, en toute bonne foi, a vendu les immeubles, a vendu les deux
lots. Pour un des immeubles, c'est correct puisque ce n'est pas un bien
culturel; pour l'autre, qui est un bien culturel, l'autorisation de la
commission aurait été nécessaire. Comme on n'a pas eu
cette autorisation avant le 10 février, alors que la vente a
été faite le 28 janvier, si on s'en tient aux prescriptions de la
loi, la vente est nulle pour un lot seulement. La vente au shérif est
bonne pour un immeuble, mais pas pour l'autre.
On ne pouvait pas annuler la vente au shérif à cause des
différents inconvénients que cela aurait occasionnés;
l'argent a été distribué, les créanciers sont
payés, ils ont perdu beaucoup d'argent là-dedans et la
coopérative a fourni beaucoup d'efforts pour mettre en valeur cette
bâtisse. Techniquement, au point de vue du droit, je ne sais pas si on
aurait pu demander une annulation de cette vente et la reprise de la vente,
mais, dans les faits, étant donné que la moitié
était correcte et que l'autre ne l'était pas, je ne sais pas
comment un juge aurait pu donner l'autorisation de reprendre cette vente au
shérif, ce qui aurait pu causer des torts considérables à
la coopérative du fait qu'elle avait déjà entrepris des
travaux.
Effectivement, la seule façon de ne porter préjudice
à personne dans cette histoire, c'est de faire adopter un projet de loi
privé pour stipuler que, même si l'adjudication n'a pas
été produite à l'époque voulue, lors de la vente
par le shérif, la vente par le shérif est bonne et ça
constitue un titre incontestable pour la coopérative.
Le Président (M. Vaugeois): La loi que vous avez
citée, c'est celle de quelle année?
M. Martin: C'est la Loi sur les biens culturels, qui a
été modifiée en 1982.
Le Président (M. Vaugeois): Pas en 1982.
M. Martin: Dans les Lois du Québec, au chapitre 21, il y a
une modification. C'est la loi de 1972, si je ne me trompe pas. C'est la
dernière, d'une façon ou d'une autre.
M. Johnson (Anjou): Chapitre B-4, M. le Président.
M. Martin: Oui, Lois refondues du Québec, chapitre
B-4.
Le Président (M. Vaugeois): Ce n'est pas la bonne loi.
M. Martin: Lois refondues du Québec, chapitre B-4.
Le Président (M. Vaugeois): Elle a été
modifiée, la Loi sur les biens culturels.
M. Martin: Elle a été modifiée par le
chapitre 21 des Lois du Québec, en 1982.
Le Président (M. Vaugeois): C'est moi qui l'ai
modifiée et je n'étais plus ministre
en 1982.
M. Martin: Je cite les documents que j'ai en main.
Le Président (M. Vaugeois): Mettons cela entre
parenthèses...
M. Martin: D'accord, mais d'une façon ou d'une autre,
c'étaient peut-être des modifications...
Le Président (M. Vaugeois): La loi a été
modifiée sur les éléments que vous venez de citer. Je
voudrais être certain qu'on se réfère à la bonne
loi. Puisqu'on a oublié la loi, je commence à être
méfiant. (10 h 15)
M. Martin: Oui, d'accord. J'ai eu beaucoup de communications avec
le ministère des Affaires culturelles.
Le Président (M. Vaugeois): C'est ce que j'allais vous
demander. Est-ce que vous avez un avis de la Commission des biens culturels sur
le problème que vous soulevez?
M. Martin: Un avis dans quel sens?
Le Président (M. Vaugeois): Normalement, cette transaction
aurait dû être autorisée par le ministre.
M. Martin: Oui, d'accord.
Le Président (M. Vaugeois): Le ministre, en ces
matières, prend avis de la Commission des biens culturels. Pour nous
soumettre, ce matin, ce projet de loi privé, avez-vous un avis ou du
ministre des Affaires culturelles ou de la Commission des biens culturels?
M. Martin: On a même l'autorisation du ministre qui a
été rendue le 10 février 1984.
Le Président (M. Vaugeois): Et de la
Commission des biens culturels?
M. Martin: Le ministre rend sa décision à la suite
de l'avis de la Commission des biens culturels. Pour la commission, c'est un
document interne.
Le Président (M. Vaugeois): Non, les avis de la Commission
des biens culturels doivent être rendus publics.
M. Martin: Disons que je n'ai pas officiellement le document
public dans mon dossier. On a ici l'autorisation.
Le Président (M. Vaugeois): De la
Commission des biens culturels.
M. Martin: Oui, l'autorisation de vente, je l'ai ici,
officiellement.
Le Président (M. Vaugeois): Voulez-vous nous lire l'avis
produit par la Commission des biens culturels?
M. Martin: "Gouvernement du Québec, ministère des
Affaires culturelles, autorisation d'aliénation d'un bien culturel. Le
ministre des Affaires culturelles, pour et au nom du gouvernement du
Québec, agissant par M. Bernard Ouimet, directeur général
du réseau, dûment autorisé par le règlement sur la
signature de certains actes, documents ou écrits du ministère des
Affaires culturelles, décret no 1505-83 publié à la
Gazette officielle du Québec partie 2, no 35 du 17 août 1983, page
3725, corrigé par un erratum publié à la Gazette, partie
2, no 41 du 28 septembre 1983, page 4121, après avoir pris avis de la
Commission des biens culturels du Québec, autorise par les
présentes l'acte d'aliénation à savoir: la vente...
Le Président (M. Vaugeois): "Après avoir pris
avis."
M. Martin: Oui.
Le Président (M. Vaugeois): La note que vous êtes en
train de me lire est produite par le ministère des Affaires
culturelles.
M. Martin: C'est un document qui est signé officiellement
par le ministère des Affaires culturelles. C'est l'autorisation...
Le Président (M. Vaugeois): Elle est signée par M.
Ouimet.
M. Martin: Ce doit être sa signature. C'est inscrit
directeur général du réseau.
Le Président (M. Vaugeois): D'accord. Vous n'avez pas
l'avis de la commission.
M. Martin: Je n'ai pas présentement l'avis de la
commission. C'est bien marqué dans son autorisation de vente que c'est
après avoir pris avis de la Commission des biens culturels. Il y fait
lui-même référence. C'est un document qui est un peu
interne, si l'on veut.
Le Président (M. Vaugeois): Justement pas.
M. Martin: Pardon?
Le Président (M. Vaugeois): Justement pas. La Commission
des biens culturels rend des avis qui doivent être rendus publics et
même doivent être déposés au Parlement.
M. Martin: D'accord.
Le Président (M. Vaugeqis): Continuez de lire le document
en espérant qu'au moins c'est dans le même sens.
M. Martin: Oui. Il autorise la vente par le shérif du
district de Québec, palais de justice de Québec...
Le Président (M. Vaugeois): A posteriori.
M. Martin: ...à la Coopérative d'habitation
Artémis de Québec. En définitive, cette autorisation a
été rendue le 10 février, alors que la vente a eu lieu le
28 janvier. Cette autorisation aurait dû, en principe, être rendue
le 27 pour que notre vente soit bonne. Le ministre nous a autorisés
à le vendre, mais à la personne, en définitive, qui a
été adjudicataire le 28 janvier. Simplement, c'est que la
technicité de la loi dit qu'aucune aliénation ne peut être
faite sans la signature ou l'autorisation du ministre. Comme cette autorisation
est postérieure, il reste que notre vente, à toutes fins utiles,
est nulle du fait de l'article 56 de la loi.
Le Président (M. Vaugeois): Cela va. Quand on aura
seulement ce problème-là, on n'aura pas de difficulté.
J'ai de la difficulté à aller plus loin si je ne connais pas
l'avis de la Commission des biens culturels.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, sur cette question,
notre ministère a fait les vérifications habituelles, d'abord,
avec les procureurs, en l'occurrence, le notaire du demandeur dans ce projet de
loi, deuxièmement, auprès des ministères. Nous avons pris
avis du contentieux du ministère des Affaires culturelles. Nous avons
produit les documents qui nous permettent de constater qu'en vertu de la loi le
ministre, à cause des circonstances très bien expliquées
par le notaire, n'a pas pu produire l'autorisation dans le délai qui
permettrait qu'on soit dans une situation où on n'est pas obligé
de venir devant cette commission parlementaire. Cependant, je ne disconviens
pas du fait que nous n'avons pas au dossier l'avis de la commission. Ce que
nous avons, ce sont les documents légaux et la consultation qui a
été faite avec le contentieux des Affaires culturelles.
En l'occurrence, tout en comprenant vos préoccupations, M. le
Président, qui réapparaissent tout à fait
légitimes, fondées et normales, je considère que, pour ce
que nous avions à faire au ministère de la Justice et ce qu'avait
à faire le demandeur, le nécessaire a été fait. Si,
par ailleurs, il s'avérait que le ministre ait autorisé a
posteriori cette vente et qu'il n'ait pas suivi l'avis de la commission, qui
aurait émis un avis défavorable, je pense que c'est un sujet qui
pourrait être extrêmement fascinant, mais au niveau de la
Commission des affaires culturelles. Il ne nous appartient pas, au
ministère de la Justice, de poser un jugement d'opportunité sur
les décisions prises par les membres du Conseil exécutif à
partir du moment où la légalité est respectée. De
toute évidence, la décision du ministre d'autoriser cette vente,
même après qu'elle eut été faite par le
shérif, est un pouvoir qu'avait le ministre. La seule conséquence
de l'exercice de ce pouvoir est civile, au sens où son autorisation
intervenant après la vente par le shérif où il y a eu
erreur de toute évidence l'acte pourrait être entaché de
nullité absolue imprescriptible.
Quant au jugement d'opportunité sur la décision qu'a
rendue le ministre, que ce soit conforme ou pas à la recommandation, et
je dis bien à la recommandation et non pas à la décision
de la Commission des biens culturels, je pense qu'il ne nous appartenait pas,
au ministère de la Justice, de le faire.
Le Président (M. Vaugeois): Je suis bien d'accord avec
votre point de vue, M. le ministre. Tout de même, je viens de m'entendre
avec le proposeur, le député de Chauveau, qui va faire une
vérification téléphonique auprès de la commission.
Ce serait, pour nous, beaucoup plus clair.
M. Martin: Quoiqu'il reste que le ministre n'est pas tenu de
suivre l'avis de la commission.
Le Président (M. Vaugeois): Mais nous sommes des
législateurs parfois et, malheureusement, il arrive que le
président de cette commission a, par le passé, modifié
cette loi en renforçant les pouvoirs de la commission, en faisant en
sorte que les avis de la commission doivent être rendus publics, que la
commission puisse tenir des audiences publiques, etc. C'est quand même
assez grave, ce qui arrive actuellement. Tout simplement, je pense qu'il n'y a
pas de problème. On a neuf chances sur dix que l'avis de la commission
soit favorable à votre démarche, mais on va en être certain
dans quelques minutes.
Si vous me le permettez, on pourrait suspendre pour cette question et
revenir un peu plus tard. Écoutez, il y a une chose qu'on peut faire
aussi, on peut peut-être interrompre pour faire notre séance de
travail. C'est une affaire de deux ou trois minutes, le temps d'avoir une
réponse téléphonique. On suspend cette séance. Nous
nous transformons en séance de travail. On s'excuse pour nos
invités, ce ne sera pas très long.
(Suspension de la séance à 10 h 23)
(Reprise de la séance à 10 h 40)
Étude détaillée
Le Secrétaire: Les articles 1 à 3 de la Loi
concernant la Coopérative d'habitation Artémis de Québec
sont remplacés par les suivants: "1. Malgré l'article 56 de la
Loi sur les biens culturels (L.R.Q., chapitre B-4), le titre de la
Coopérative d'habitation Artémis de Québec sur le lot 2916
du cadastre officiel de la cité de Québec (quartier du Palais) et
sur l'édifice érigé dessus portant les numéros
municipaux 17 et 17 1/2, rue Couillard, à Québec, ne peut
être attaqué en raison du fait que l'acte de vente par le
shérif de ce lot et de cet édifice, enregistré au bureau
de la division d'enregistrement de Québec sous le numéro 1103020,
n'était pas accompagné, au moment où il a
été délivré ni au moment où il a
été enregistré, d'un acte d'autorisation d'aliéner
un bien culturel classé délivré par le ministre des
Affaires culturelles conformément à l'article 32 de la Loi sur
les biens culturels. "2. L'enregistrement du dispositif de la présente
loi se fait par dépôt."
M. Johnson (Anjou): La modification au dispositif, M. le
Président, a pour but de limiter la portée de la loi à la
correction des vices qui sont explicitement décrits, à savoir le
fait que l'acte de vente par le shérif de l'immeuble concerné a
été délivré et enregistré avant
l'autorisation ministérielle. Par la suite, il y aura un amendement qui
réfère à la notion d'enregistrement.
Le Président (M. Vaugeois): Est-ce qu'il y a des membres
de cette commission qui ont des commentaires sur cet amendement? Cela va.
M. le secrétaire, voulez-vous nous lire l'amendement suivant?
M. Johnson (Anjou): Est-ce qu'il est adopté, M. le
Président?
Le Président (M. Vaugeois): On peut les voir tous et
puis...
M. Johnson (Anjou): On pourra le demander par la suite, si vous
voulez.
Le Président (M. Vaugeois): Pour avoir une vue d'ensemble
de ce que cela donne.
M. Johnson (Anjou): D'accord. Le deuxième amendement vise
le préambule, premier alinéa.
Le Secrétaire: Le préambule de la Loi concernant la
Coopérative d'habitation Artémis de Québec est
modifié par le remplacement, aux quatrième et cinquième
lignes du premier alinéa, des mots "du quartier du Palais, division
d'enregistrement de Québec" par les mots "de la cité de
Québec (quartier du Palais)".
M. Johnson (Anjou): M. le Président, il s'agit
essentiellement d'une modification technique. La véritable description
pour les fins de l'enregistrement, c'est: de la cité de Québec
(quartier du Palais) plutôt que ce qu'on retrouve dans le projet de
loi.
Cela va-t-il, M. le Président? Je peux passer à
l'autre.
Le Président (M. Vaugeois): II n'y a pas d'autres
commentaires.
Le Secrétaire: Le préambule, deuxième
alinéa: "Le préambule de la Loi concernant la Coopérative
d'habitation Artémis de Québec est modifié par le
remplacement, aux deuxième et troisième lignes du deuxième
alinéa, des mots "sous le numéro 611/977 au sens de la Loi sur
les biens culturels (L.R.Q., chapitre B-4)" par ce qui suit: "et que cet
arrêté en conseil a été enregistré au bureau
de la division d'enregistrement de Québec sous le numéro
611/977."
M. Johnson (Anjou): M. le Président, essentiellement,
c'est que le préambule à son deuxième paragraphe dans sa
formulation actuelle semble dire qu'il a été classé sous
le numéro 611/977, alors qu'en fait il a été
enregistré sous ce numéro. Il a été classé
sous 1200 qui est un décret. C'est une affaire technique,
également.
Le Président (M. Vaugeois): Sur ce point, est-ce qu'on
pourrait demander au notaire Martin comment on explique l'oubli? Il y a eu une
vérification au bureau d'enregistrement? Le shérif a...
M. Martin: Personnellement, j'ai fait la vérification
postérieure; à la suite de l'adjudication, je me suis rendu
moi-même pour la distribution des deniers, pour procéder à
la vente pour faire payer le shérif en conséquence parce que la
coopérative se portait adjudicataire de l'immeuble. Nous nous sommes
rendus là le matin; après, j'ai fait mes vérifications
parce qu'il y a eu un financement sur cela. Je me suis aperçu, en
définitive, que cette chose manquait. J'ai vérifié
auprès du shérif. Le shérif a dit: Je ne m'occupe pas de
cela, ce n'est pas mes affaires. J'ai alors référé
à l'avocat qui s'est occupé de la saisie, le procureur du Trust
général du Canada. Effectivement, il s'est rendu compte,
après que je lui en ai parlé, que cette lacune résultait
de sa faute en définitive, qu'il avait lui-même omis de
procéder, peut-être par négligence ou par manque de temps
ou je ne
sais quoi. D'une façon ou d'une autre, c'était un oubli de
sa part, le fait d'avoir cette autorisation. S'il avait demandé cette
autorisation à cette époque, on ne serait pas rendu ici ce matin.
C'est simplement cette technicité qui s'est produite à ce moment.
Comme les montants étaient tous distribués, que la vente
était faite et qu'elle portait sur un immeuble classé et sur un
qui n'est pas classé, comme on ne peut pas avoir une moitié
d'adjudication, c'est l'un et ce n'est pas l'autre.
Le Président (M. Vaugeois): C'est vous qui avez
vérifié les titres, de toute façon.
M. Martin: C'est moi qui les ai vérifiés
postérieurement.
Le Président (M. Vaugeois): L'inscription au registre des
biens culturels accompagne les titres.
M. Martin: J'ai un certificat de recherche qui dénote,
effectivement... C'est un certificat délivré par le bureau
d'enregistrement de Québec. Ici, c'est le certificat de recherche
611/977 enregistré le 27 juillet 1967. On a l'arrêté en
conseil no 1200. C'est un document officiellement enregistré à
l'index aux immeubles. C'est là et il n'y a personne qui peut dire qu'il
ne l'a pas vu. 11 est enregistré et à l'index.
Le Président (M. Vaugeois): Alors, il n'y a pas
normalement de difficulté pour un professionnel dans les méthodes
suivies pour l'inscription d'un bien au registre des biens culturels.
M. Martin: C'est seulement de le voir. C'est peut-être
seulement un oubli. D'une façon ou d'une autre, ce sont des choses qui
arrivent.
Le Président (M. Vaugeois): Ce sont des choses qui ne
devraient pas arriver parce que...
M. Martin: D'accord.
Le Président (M. Vaugeois): ...c'est "la job" d'un notaire
de vérifier les titres.
M. Martin: J'ai vérifié et je m'en suis
aperçu; mais l'avocat qui est passé précédemment,
lui, il l'a oublié. C'est pour cela qu'on est ici.
Le Président (M. Vaugeois): II y a environ 500
propriétés inscrites au registre des biens culturels?
M. Martin: Je ne pourrais pas vous le dire actuellement, mais je
sais que cela paraît à l'index.
Le Président (M. Vaugeois): D'ailleurs, cela va plus loin
que cela, parce que vous devez aussi tenir compte de ce qui se trouve dans un
aire de protection.
M. Martin: Oui.
Le Président (M. Vaugeois): C'est peut-être plus
difficile à vérifier.
M. Martin: Effectivement. C'est peut-être pour cela qu'il y
a beaucoup de bâtisses dans la région ou dans le
Vieux-Québec qui ne sont pas...
Le Président (M. Vaugeois): II me semble que le
réflexe d'un notaire qui travaille dans le Vieux-Québec serait
de... 11 est dans un arrondissement historique en partant.
M. Martin: Exactement. La bâtisse suivante suit-elle le
même cheminement?
Le Président (M. Vaugeois): Ce n'est pas aussi rigoureux.
Y a-t-il d'autres commentaires ou d'autres questions sur l'amendement?
M. Johnson (Anjou): L'élément suivant, M. le
Président?
Le Président (M. Vaugeois): Oui.
M. Johnson (Anjou): Un alinéa inséré
après le deuxième.
Le Secrétaire: Insertion d'un alinéa après
le deuxième: Le préambule de la Loi concernant la
Coopérative d'habitation Artémis de Québec est
modifié par l'insertion, après le deuxième alinéa,
du suivant: "Que, le 3 février 1984, l'acte de vente par le
shérif a été enregistré au bureau de la division
d'enregistrement de Québec sous le numéro 1103020;".
M. Johnson (Anjou): M. le Président, il s'agit d'indiquer
que l'acte de vente par le shérif a été enregistré
avant que le ministre des Affaires culturelles autorise l'aliénation au
niveau des faits.
Le Président (M. Vaugeois): On continue. M. le ministre,
cela va? Il n'y a pas d'autres commentaires?
M. Johnson (Anjou): Le suivant?
Le Président (M. Vaugeois): Le suivant, d'accord.
M. Johnson (Anjou): Alors, le cinquième alinéa.
Le Secrétaire: Le préambule de la Loi
concernant la Coopérative d'habitation Artémis de
Québec est modifié par le remplacement du cinquième
alinéa par le suivant: "Que cette vente est attaquable vu que l'acte de
vente par le shérif n'était pas accompagné, au moment
où il a été délivré ni au moment où
il a été enregistré, d'un acte d'autorisation
d'aliéner un bien culturel classé délivré par le
ministère des Affaires culturelles conformément à
l'article 32 de la Loi sur les biens culturels;".
M. Johnson (Anjou): M. le Président, il s'agit d'un
nouveau cinquième alinéa qui présente essentiellement deux
différences par rapport à celui qu'il remplace. D'une part, il
indique qu'il y a un second vice au titre, c'est-à-dire le fait que
l'acte de vente par le shérif a été enregistré
avant que le ministre des Affaires culturelles autorise l'aliénation; la
seconde différence, cependant, consiste dans le fait que la vente est
qualifiée d'attaquable et non pas de nulle, parce que nous croyons qu'il
ne nous appartient pas ici de nous prononcer sur la nullité, mais
d'évoquer la notion du fait que c'est attaquable.
Le sixième alinéa, M. le Président? À moins
qu'il n'y ait des questions?
Le Président (M. Vaugeois): Oui, il y en aurait une par
curiosité. On est d'accord avec l'amendement que vous proposez, mais, en
fait, devant un tribunal, n'aurait-on pas toutes les chances d'avoir une
transaction déclarée nulle?
M. Johnson (Anjou): Oui. En pratique, nous sommes convaincus, aux
affaires législatives et juridiques au ministère, aux affaires
civiles, que, effectivement, si c'était contesté devant les
tribunaux, il y aurait sans doute nullité. La Loi sur les biens
culturels est bien claire à ce sujet. Cependant, nous croyons qu'il ne
faut pas poser de précédent ici à la commission en
décrétant cette notion. Nous pensons que cela appartient aux
tribunaux.
Le Président (M. Vaugeois): D'accord. C'est très
juste.
M. Martin: II y a deux immeubles. D'après ce qu'on dit,
est-ce à moitié bon?
Le Président (M. Vaugeois): Ne vous en faites pas avec
cela. On a des spécialistes de la copropriété ici. On vous
arrangerait cela autrement.
M. Martin: C'est simplement parce qu'on met le titre attaquable
à ce niveau. C'est pour apporter la précision en
conséquence.
Le Président (M. Vaugeois): On va terminer les
amendements, M. le député, si vous le permettez.
M. Johnson (Anjou): Sixième alinéa, M. le
Président.
Le Secrétaire: Le préambule de la Loi concernant la
Coopérative d'habitation Artémis de Québec est
modifié par le remplacement du sixième alinéa par le
suivant: "Qu'il est opportun de supprimer ces vices du titre de la
Coopérative d'habitation Artémis de Québec afin que le
ministre des Affaires culturelles puisse débourser les subventions
accordées à cette coopérative;".
M. Johnson (Anjou): M. le Président, dans cette
modification, je vous rappelle que le dernier paragraphe qu'on voit à la
première page du projet de loi parle de "rendre incontestables" les
titres de propriété, alors que nous préférons
limiter la portée du projet de loi à la correction des deux vices
qui ont été explicitement décrits dans les paragraphes
précédents du préambule.
Maintenant, il est très clair que la conséquence de cela
est de permettre l'accès aux subventions à titre de bien
culturel. C'est au niveau du préambule. C'est un début, n'est-ce
pas? C'est-à-dire que, dans le fond, on veut corriger...
Le Président (M. Vaugeois): 11 me semble qu'on n'a pas
à se mêler de cela. Le ministère des Affaires culturelles
fera ce qu'il voudra à partir du moment où la transaction sera
légale et claire. Il y aura subvention s'il doit y avoir subvention.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je suggérerais
donc un sous-amendement pour les fins d'être expéditifs dans nos
travaux: Qu'on supprime les mots "afin que le ministère des Affaires
culturelles puisse débourser les subventions accordées à
cette coopérative;" et en introduisant un point après le mot
"Québec", de telle sorte que notre amendement se lirait comme suit:
"Qu'il est opportun de supprimer ces vices du titre de la Coopérative
d'habitation Artémis de Québec."
Le Président (M. Vaugeois): On va faire la même
chose vis-à-vis du ministère que vis-à-vis des tribunaux.
On ne préjugera pas. Cela va? Cela ne vous embarrasse pas, M. le
procureur?
M. Martin: Pas du tout.
Le Président (M. Vaugeois): Bon. M. le
député de Chauveau, voulez-vous nous informer du résultat
de vos démarches.
M. Brouillet: Oui. Je suis entré en
contact avec M. Paul-Louis Martin, de la Commission des biens culturels.
Il m'a fait part que la commission a rendu un avis favorable en date du 8
février 1984 et l'avis du ministre est en date du 10 février.
Le Président (M. Vaugeois): Sans autre commentaire.
M. Brouillet: Sans autre commentaire. 11 m'a lu le texte, un
texte bref qui autorisait l'aliénation du bien.
Le Président (M. Vaugeois): On voit bien là
l'efficacité de la commission et l'excellence du ministère.
M. Brouillet: Et la nécessité d'un parrain.
Le Président (M. Vaugeois): Est-ce qu'il y a d'autres
remarques sur ce projet de loi et les amendements qui ont été
proposés? Alors, nous acceptons...
M. Johnson (Anjou): M. le Président, est-ce que nous
pourrions procéder formellement à l'adoption des amendements sans
procéder à la relecture et, ensuite, à l'adoption du
projet de loi?
M. Dussault: M. le Président, est-ce qu'on pourrait
proposer l'adoption des amendements globalement et des sous-amendements qui ont
été proposés?
Le Président (M. Vaugeois): Ce serait assez clair comme
cela?
Une voix: M. le secrétaire.
Le Président (M. Vaugeois): Est-ce que vous voulez les
énumérer? Énumérez-les sans les relire.
Le Secrétaire: D'accord. L'amendement au dispositif des
articles 1 à 3 de la Loi concernant la Coopérative d'habitation
Artémis de Québec.
Le Président (M. Vaugeois): Adopté? M. Dussault:
Adopté. Une voix: Adopté.
Le Secrétaire: Est-ce que les articles 1 à 3 de la
Loi concernant la Coopérative d'habitation Artémis de
Québec tels qu'amendés sont adoptés?
M. Dussault: Adopté.
Une voix: Adopté.
Le Secrétaire: Est-ce que l'amendement au premier
alinéa du préambule est adopté? M. Dussault:
Adopté. Une voix: Adopté.
Le Secrétaire: Est-ce que le premier alinéa du
préambule tel qu'amendé est adopté?
M. Dussault: Adopté.
Le Secrétaire: Quant au deuxième alinéa du
préambule, son amendement est-il adopté?
M. Dussault: Adopté.
Le Secrétaire: Est-ce que le deuxième alinéa
du préambule tel qu'amendé est adopté?
M. Dussault: Adopté.
Le Secrétaire: Est-ce que l'insertion d'un alinéa
après le deuxième alinéa est adoptée?
M. Dussault: Adopté.
Le Secrétaire: Est-ce que le cinquième
alinéa tel qu'amendé est adopté?
M. Dussault: Adopté.
Le Secrétaire: Est-ce que l'amendement au sixième
alinéa est adopté?
M. Dussault: Adopté.
M. Payne: Avec les modifications...
Le Secrétaire: Est-ce que le sous-amendement est
adopté?
M. Payne: Un sous-amendement pour supprimer les mots "le
ministère" jusqu'à "coopérative".
Le Secrétaire: Est-ce que ce sous-amendement est
adopté?
M. Dussault: Adopté.
Le Secrétaire: Est-ce que le sixième alinéa
du préambule tel qu'amendé est adopté?
M. Dussault: Adopté.
Le Secrétaire: Est-ce que le titre du projet de loi est
adopté?
M. Payne: Adopté.
Le Secrétaire: Est-ce que l'ensemble du
projet de loi, Loi concernant la Coopérative d'habitation
Artémis de Québec, est adopté?
M. Dussault: Adopté tel qu'amendé. Le
Secrétaire: Tel qu'amendé, adopté? M. Dussault:
Adopté.
Le Secrétaire: L'article 4 du projet de loi est
adopté.
Le Président (M. Vaugeois): Cet article n'a pas
été amendé.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je pense qu'il faut
présenter une motion de renumérotation.
Le Secrétaire: II faudrait adopter l'article 4 qui n'a pas
été adopté.
M. Johnson (Anjou): Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Vaugeois): Est-ce qu'il faut changer la
numérotation?
M. Dussault: Les trois articles ont été
remplacés par deux, M. le Président.
Le Président (M. Vaugeois): Pour que ce soit bien clair,
nous allons appeler l'ensemble du préambule tel qu'amendé.
L'ensemble du préambule tel qu'amendé est-il adopté?
M. Dussault: Adopté.
Le Président (M. Vaugeois): Si nécessaire, est-ce
que nous sommes d'accord pour une nouvelle numérotation du projet de
loi?
M. Dussault: II faudrait l'adopter.
Le Président (M. Vaugeois): Ce qui nous ferait adopter
également l'actuel article 4 pour permettre l'entrée en vigueur
le jour même de sa sanction.
M. Dussault: Adopté.
Le Président (M. Vaugeois): Je pense qu'on n'a rien
oublié de cette façon.
M. Dussault: On l'espère.
Le Président (M. Vaugeois): Nous l'espérons. Cela
va?
Projet de loi 208
Nous allons procéder à l'étude du projet de loi
208, Loi concernant certains recours de Victor Auclair en matière de
responsabilité médicale ou hospitalière. Le proposeur de
ce projet de loi est M. le député de Notre-Dame-de-Grâce,
M. Scowen, qui nous honore de sa présence. Nous vous invitons à
nous présenter le projet de loi, M. le député. Est-ce que
vous avez convoqué les journalistes?
M. Scowen: Absolument pas, ça m'étonne. C'est le
ministre, probablement, c'est lui qui a des attachés de presse et
tout.
M. Johnson (Anjou): Come on! Come on!
Le Président (M. Vaugeois): J'aimerais que les
caméras se tournent d'abord vers la présidence.
M. Scowen: Si je comprends bien, cette commission et le projet de
loi ont été annoncés publiquement?
Le Président (M. Vaugeois): Ah oui, nous siégeons
ici de façon publique, effectivement.
M. Scowen: Je présume que les journalistes...
Le Président (M. Vaugeois): M. le député, on
vous écoute.
Remarques préliminaires M. Reed Scowen
M. Scowen: Je vais commencer en disant que nous avons ici, avec
nous, M. Auclair et son avocat, M. Wilfrid Kravitz. M. Auclair est du
côté gauche. (11 heures)
M. le Président, c'est un cas un peu compliqué, mais je ne
veux pas prendre trop de temps. Je vais essayer de résumer très
brièvement la situation de ce projet de loi. Premièrement, il
faut que la commission comprenne que c'est le troisième et le dernier de
trois cas qui essaient d'avoir recours par un projet de loi privé au
droit de faire une poursuite contre soit un médecin ou un
hôpital.
Je vais expliquer brièvement comment ce problème est
arrivé. Je veux souligner, au départ, que les deux autres cas.
qui sont semblables ont été réglés par un projet de
loi privé qui a été adopté il y a un an, soit le
projet de loi 221 concernant le cas de Alfred Warf et de Paul-Henri Gaudreau.
À la demande du ministère à l'époque - j'ai
parrainé les trois projets de loi - j'ai accepté de diviser les
trois cas en deux projets de loi, parce que le cas de M. Auclair est un peu
différent sur le plan juridique, sinon sur le plan humain, des deux
autres.
Effectivement, en 1969, M. Auclair
était victime d'un accident de voiture dans la région de
Rimouski. Il a été amené à l'hôpital de
Rimouski où il est resté à peu près neuf mois. Il
avait une rupture de la corde cervicale. En conséquence, il est devenu,
à toutes fins utiles, un quadriplégique. Cela n'a pas
été contesté, puisque cela a été
causé par l'accident. Cependant, pendant la période où il
a été à l'hôpital, il a été victime de
plaies de lit assez graves. M. Auclair et ses avocats prétendent que
cela a été causé par une négligence
médicale. On n'est pas ici, aujourd'hui, pour ces questions. On veut
simplement donner recours à M. Auclair devant les tribunaux.
On arrive, maintenant, au problème de jurisprudence. À
l'époque, tout le monde croyait qu'il existait des délais de 30
ans à l'intérieur desquels on pouvait avoir recours dans un tel
cas. Ce n'était pas clair, mais c'était l'opinion la plus
générale. Les avocats du médecin de M. Auclair avaient
intenté une poursuite contre lui, parce qu'il n'avait pas payé la
facture. C'était avant l'arrivée de notre système
d'assurance-maladie. 11 a intenté une poursuite en contrepartie contre
le médecin, et, par la suite, une deuxième poursuite contre un
médecin et l'hôpital même.
Tous ces procès étaient en cours devant le juge, en 1974,
quand la Cour suprême, dans un jugement qui s'appelle l'hôpital
Notre-Dame-de-Grâce contre Patry, a réduit les délais
permis de 30 ans à un an. À cause de cette décision, parce
que les deux parties pensaient qu'elles ne pouvaient pas aller plus loin, elles
ont signé des quittances l'une de l'autre, match nul, si vous
voulez.
Le gouvernement du Québec, quelques mois seulement après,
en 1974, a présenté ici à l'Assemblée nationale le
projet de loi 92 qui avait pour effet d'élargir cette période
d'un an à trois ans par la loi et qui avait aussi pour effet de donner
aux personnes qui avaient intenté des poursuites avant et qui les
avaient abandonnées à cause d'une décision de la Cour
suprême, l'autorisation de rouvrir les dossiers. Cependant, à
cause du fait que, dans ce cas-ci, le dossier était fermé par une
quittance, le texte du projet de loi 92 dans sa rédaction n'a pas permis
à quelqu'un qui avait signé une quittance de rouvrir le
dossier.
Les avocats de M. Auclair ont fait des représentations
auprès du ministre de la Justice de l'époque, c'était un
gouvernement libéral. Excusez-moi, entre-temps, le gouvernement a
changé et c'était effectivement M. Bédard qui a dit qu'il
fallait faire quelque chose. Il a essayé en 1977 de le faire par
l'entremise d'un projet de loi public, soit la loi 65. Il y avait beaucoup
d'objections de la part des avocats de tous les côtés. Finalement,
il retira l'article qui pouvait donner recours à ces personnes qui
n'avaient pas le droit d'intenter des poursuites. Il a été
obligé de le retirer parce que, du fait que c'était dans un
projet de loi public, il avait des craintes que la portée de cette
décision puisse être trop large. Donc, le ministre de la Justice a
écrit aux trois personnes - et je répète qu'il n'existe
que trois personnes qui se sont impliquées dans cette affaire - en
disant: Je vais régler votre problème par l'entremise d'un projet
de loi privé. En 1978, sous le nom de Michel Clair, qui était
député à l'époque, le projet de loi privé
190 fut présenté à l'Assemblée nationale pour
permettre à ces trois personnes, M. Auclair et les deux autres, dont je
vous ai parlé tantôt M. Warf et M. Gaudreau, d'exercer leur droit
de poursuivre les hôpitaux.
Cela a traîné ici, à l'Assemblée nationale.
Par la suite, M. Clair est devenu ministre; parce qu'un ministre ne peut pas
parrainer, un projet de loi privé, le projet en question est
tombé en désuétude, rien n'a été fait.
Finalement, je suis arrivé dans le portrait en 1981, quand une des
victimes, M. Warf, qui demeure dans mon comté, est venu dans mon bureau
et m'a dit: Ne pouvez-vous pas faire quelque chose? Cela fait douze ans et on
attend encore.
J'ai parlé avec le ministre de la Justice, ainsi qu'avec les
membres de son cabinet et celui-ci était prêt à
procéder. 11 m'a suggéré de diviser les trois cas en deux,
parce qu'il trouvait que le cas de M. Auclair, sur le plan juridique,
était un peu différent, même si sur le plan humain, c'est
exactement la même chose.
En juin 1982, j'ai déposé le projet de loi 221 concernant
M. Warf et M. Gaudreau. Cela a été débattu en commission
parlementaire au mois de décembre 1982. Cela a été
vivement contesté par les avocats des compagnies d'assurances et des
hôpitaux. Le ministre a décidé de ne pas procéder
avant de réfléchir sur leur point de vue. Il a pris encore six
mois pour réfléchir. Le projet de loi a été
légèrement amendé et, finalement, au mois de juin 1983, il
y a un an, le projet de loi 221 était adopté. Cela veut dire que
M. Warf et M. Gaudreau avaient le droit de retourner devant les tribunaux.
Par la suite, je reviens à la charge avec le cas de M. Auclair.
Le ministère était prêt à recevoir le
deuxième projet de loi. La rédaction a été faite en
négociation entre le ministère et l'avocat de M. Auclair. Ils
sont arrivés à un texte qui a été accepté
par le ministère et par M. Auclair. Il a été
déposé, c'est le projet de loi qui est devant nous aujourd'hui.
Quinze ans plus tard, aujourd'hui, on est ici pour permettre à M.
Auclair, qui avait 21 ans à ce moment et qui a maintenant 36 ans, de
continuer cette poursuite.
Je vais brièvement vous donner deux informations additionnelles.
L'objet du projet de loi n'est pas compliqué. C'est un projet de loi de
sept articles et on va l'étudier article par article, mais dans ses
grandes lignes...
Le Président (M. Vaugeois): Auparavant, la
différence entre les deux cas précédents et le cas
présent, est-ce que c'est lié au fait que M. Auclair avait
déjà donné une quittance ou...
M. Scowen: Exactement. Les deux ont laissé tomber.
M. Johnson (Anjou): II avait abandonné son recours
antérieurement au jugement de la Cour suprême.
Le Président (M. Vaugeois): À titre d'information,
est-ce qu'on peut savoir pourquoi il avait donné quittance?
M. Johnson (Anjou): À cause du jugement de la Cour
suprême.
M. Scowen: À cause du jugement de la Cour suprême.
Les deux côtés pensaient qu'ils ne pouvaient pas aller plus
loin.
Le Président (M. Vaugeois): D'accord.
M. Scowen: Le projet de loi dit, au premier article, que les
quittances sont annulées. Au deuxièmement article, on donne
à M. Auclair et au médecin le droit de recommencer leurs
poursuites l'un contre l'autre. Au troisième article, on leur donne 60
jours pour intenter les poursuites d'une façon officielle. Le
quatrième article prévoit la possibilité d'une
conférence préparatoire parce que, si je comprends bien, le juge,
qui était responsable pour le cas au départ, a accepté -
il est encore juge - de reprendre le cas, ce qui va faire gagner beaucoup de
temps à tout le monde. Il y a un article qui établit les
intérêts afin de savoir jusqu'à quel point le juge peut
décider s'il y a des intérêts à payer. Aussi, il y a
une prescription qui touche les droits et les responsabilités des
compagnies d'assurances.
Il y a deux autres sujets que je veux toucher brièvement, puis je
terminerai. Dans le débat que nous avions eu ici lors des deux
commissions parlementaires sur l'autre projet de loi, les
représentations des avocats et du barreau - parce que le bâtonnier
lui-même nous a écrit un télex - c'était surtout sur
cette question de la rétroactivité. Tout le monde accepte qu'il y
a un élément de rétroactivité dans ce projet de loi
et le ministère en était très conscient dans sa
rédaction. Il n'y a que ces trois cas très précis qui sont
très connus depuis des années. Il n'y en a pas d'autres; s'il y
en avait d'autres après quinze ans, ce serait étonnant. Le
ministre a essayé de régler ces trois cas depuis 1976 avec les
projets de loi 65, 92 et avec celui de M. Michel Clair. Chaque fois, à
cause des délais, cela n'a pas été fait. Je pense qu'on
n'a pas accepté l'opinion des avocats que cela pouvait avoir une
influence sur d'autres décisions.
En passant, je souligne que, lorsque le bâtonnier s'est
opposé dans son télégramme du mois de décembre
1982, je lui ai téléphoné au mois de janvier pour lui
demander s'il avait une opinion de la part de son conseil d'administration et
il m'a dit qu'il n'avait même pas lu le projet de loi. Il a dit: Nous
nous opposons formellement, "as a matter of course", à tous les projets
de loi de nature rétroactive. Il n'avait même pas pris
connaissance du projet de loi. Il y a toutes sortes de choses qui sont
arrivées. Il y a un avocat qui est venu nous dire qu'on ne pouvait pas
justifier une poursuite parce qu'un des médecins était mort et
nous avons découvert par la suite que le médecin était
bien vivant. Je vous dis simplement que je crois que le ministre de la Justice
a bien étudié ce cas avant de rendre sa décision.
En terminant, je veux simplement vous lire deux paragraphes du ministre
de la Justice quand il a décidé, le 14 juin, de permettre
l'adoption du projet de loi 221. C'est une décision que je recommande
à tout le monde, parce que cela touche au fond de la question de la
responsabilité de la Législature de regarder non seulement les
précédents et la rétroactivité, mais l'aspect
humain de ces problèmes. Je crois que le discours très
improvisé du ministre de la Justice de l'époque était un
modèle. Je ne vais pas tout le lire, mais j'en lirai trois paragraphes.
Il a dit: "II est évident qu'il y a des décisions qui sont
difficiles à prendre, mais ce n'est pas une raison pour ne pas les
prendre. Je sais qu'il y a une logique juridique qui doit être
considérée avec beaucoup de respect parce que cette logique
juridique est essentielle pour l'ensemble d'une société. Je pense
que tous les membres de la commission en sont très conscients. Il y a
aussi des situations humaines qu'il est très difficile de concilier avec
la logique juridique très stricte si on n'accepte pas d'y apporter des
nuances comme législateurs." (11 h 15)
Je vais lire les deux autres paragraphes, parce que le premier est
très pertinent. 11 dit: "Après avoir décidé de
donner raison à M. Warf et à M. Gaudreau -c'est un paragraphe
clé; M. Bédard parlait au mois de juin - je signale qu'une
troisième personne, M. Victor Auclair, qui, grosso modo, présente
un cas similaire à ceux des requérants, a toujours offert les
mêmes représentations que ceux-ci et a l'intention de
requérir l'adoption d'un projet de loi privé
similaire. Il s'était, d'ailleurs, joint à une
époque aux deux requérants, M. Warf et Gaudreau. Or, comme les
circonstances juridiques sont tout de même un peu différentes, il
y aura lieu d'examiner séparément les prétentions du
requérant et d'examiner le contenu d'un éventuel projet de loi
avant d'examiner le tout en commission parlementaire. Il s'agit, cependant,
d'un cas bien identifié - il parle encore de M. Auclair - depuis 1975 et
le seul autre à ce moment-ci qui puisse prétendre aux mêmes
recours que ceux de MM. Warf et Gaudreau."
Il termine en disant: "Pour toutes ces raisons, M. le Président,
si les amendements que je propose - parce qu'on a fait des amendements à
la dernière minute - sont adoptés, j'opinerais dans le sens
d'adopter ce projet de loi en étant très conscient, et tout le
monde a été à même de le constater, qu'il n'est pas
facile de concilier logique juridique et logique humaine. Mais le recours
spécial que représente le bill privé a quand même
comme fondement qu'à un moment donné des citoyens peuvent
être dans des situations d'injustice si le législateur ne pose pas
les gestes qu'il croit en toute conscience être les plus
appropriés."
Je termine là-dessus. C'étaient les arguments de M.
Bédard dans les deux cas de M. Warf et M. Gaudreau. C'est évident
que les trois cas sont liés intimement dès le départ. Ce
sont les trois seuls connus après quinze ans. Si on règle le
problème de M. Auclair aujourd'hui, je suis persuadé, au moins
l'ancien ministre de la Justice est persuadé que c'est la fin de
l'affaire. On ne touche pas le fond de la question, c'est simplement pour
donner droit à M. Auclair après quinze ans de faire valoir ses
droits, s'il en a, devant les tribunaux.
Le Président (M. Vaugeois): Merci, M. le
député. M. le ministre.
M. Pierre-Marc Johnson
M. Johnson (Anjou): M. le Président, si vous me le
permettez, je dirai pour l'essentiel deux choses. Après, on entendra les
procureurs et on pourra ensuite revenir sur les articles.
La première chose que je dirai, c'est que nous avons
collaboré au niveau du ministère. Je pense que le
député de Notre-Dame-de-Grâce le reconnaîtra. Non
seulement avons-nous collaboré, mais c'est nous qui avons
rédigé le projet au ministère de la Justice depuis
quelques semaines et nous avons été heureux de le faire.
Deuxièmement, je voudrais bien établir que, malgré
cette collaboration que nous avons apportée au député de
Notre-Dame-de-Grâce, il ne saurait être question dans notre cas,
pas plus que dans le sien, que nous interprétions ce projet de loi, son
dépôt et son adoption par cette commission, si les membres y
consentent, comme étant une opinion du ministère de la Justice
sur le fond du litige qui oppose M. Auclair aux personnes qu'il a l'intention
de poursuivre si on donne droit au projet de loi. Il faut que ce soit
très clair. Cela l'est, mais peut-être que cela l'est encore plus
en le répétant.
Troisièmement, je dirai que, pour l'essentiel, la façon
dont le député de Notre-Dame-de-Grâce a relaté
l'enchaînement des faits et des précédents, la jonction
avec les cas Warf et Gaudreau et les affirmations qu'il a faites sur l'absence
d'autres cas, tout cela est, à notre connaissance, rigoureusement exact.
Nous sommes effectivement dans une situation, comme parlementaires, où
nous devons, encore une fois, nous servir de cet instrument exceptionnel qui
est le fait de siéger dans cette commission des institutions pour
entendre des projets de loi de nature privée et trancher entre ce que
serait la règle de droit normalement et la façon dont elle est
applicable dans un cas particulier. M. le Président, ce sont là
mes notes préliminaires. Je présume que les procureurs ont des
choses intéressantes à nous communiquer.
Le Président (M. Vaugeois): Merci, M. le ministre. Dans
quel ordre peut-on les entendre?
M. Johnson (Anjou): Les députés.
Le Président (M. Vaugeois): Mais dans quel ordre les
procureurs?
M. Johnson (Anjou): Peut-être le proposeur, M. le
Président.
Le Président (M. Vaugeois): Oui, et ensuite? Je constate
que vous avez à intervenir séparément et distinctement.
Vous représentez l'Ordre des médecins?
M. Rioux (François): Je représente les deux
médecins dont il est fait état dans le projet de loi: le Dr
Raymond Béraud et le Dr Rodolphe Tremblay.
Le Président (M. Vaugeois): D'accord. Et dans votre
cas?
M. Gendreau (Claude-Henri): Je m'appelle Claude-Henri Gendreau.
Je représente le Centre hospitalier régional de Rimouski.
Le Président (M. Vaugeois): D'accord. Et dans votre
cas?
M. Gendreau (Lucien): Je m'appelle Lucien Gendreau. Je suis
l'ancien directeur
médical à l'époque pour l'hôpital
Saint-Joseph de Rimouski.
Le Président (M. Vaugeois): Seriez-vous d'accord pour
qu'on vous entende dans l'ordre où vous êtes assis? Cela va?
M. Gendreau (Lucien): II a été convenu entre moi et
le procureur de l'hôpital que le procureur de l'hôpital
procéderait le premier.
Le Président (M. Vaugeois): Très bien. Alors, nous
allons, quand même, commencer avec le procureur de M. Auclair.
Voulez-vous vous identifier à nouveau?
M. Wilfred Kravitz
M. Kravitz (Wilfred): Je m'appelle Wilfred Kravitz, de
l'étude Rosenhek & Machlovitch, les procureurs de M. Auclair.
Je félicite M. Scowen pour son exposé. Tous les faits sont
exacts et je n'ai pas grand-chose à ajouter. M. le Président, il
faut souligner que nous sommes en face d'un cas exceptionnel qui exige des
remèdes exceptionnels. Après l'adoption des amendements, M.
Auclair faisait face à une situation où les amendements ne
couvraient pas sa cause. Il faisait, au début, partie de ce projet de
loi original par lequel MM. Gaudreau et Warf ont obtenu la justice à
laquelle ils ont droit. La seule différence entre le cas de M. Gaudreau
et M. Warf est que la cause de M. Auclair était pendante au moment
où le jugement de la Cour suprême a été rendu. La
jurisprudence était jusqu'à ce moment constante, à savoir
que les préjudices et les blessures prévus par cet acte
étaient prescrits pour 30 ans. Le jugement de la Cour suprême a
réduit cette prescription de 30 ans à un an. Il a
été prévu par l'Assemblée nationale que des gens
seraient pris par cette décision; ils ont amendé la loi pour ces
cas particuliers et ont prolongé le délai d'un an à trois
ans, avec des effets rétroactifs pour les cas plus urgents.
Malheureusement, la loi telle que rédigée ne couvrait pas le cas
de M. Auclair.
Ils ont prévu la possibilité d'une requête pour
mettre de côté des transactions de quittances signées par
des gens, mais pas pour le cas de M. Auclair. C'est pourquoi nous sommes ici
pour l'adoption d'un projet de loi privé permettant à M. Auclair
de continuer ses procédures et de mettre de côté les
quittances qu'il a signées face à ce jugement, sûrement
aussi pour que nous puissions et que nous continuions à avoir un
système judiciaire sain et humain.
C'est une situation complètement différente de la plupart
des cas où il y a des actes rétroactifs. Au temps de l'action de
M. Auclair, la loi n'était pas claire. Il y a des procureurs qui
pensaient que le délai de prescription était d'un an et d'autres
qui pensaient que le délai de prescription était de 30 ans.
Maintenant, nous avons une loi, après ces amendements, qui indique
clairement que la prescription dans ces cas est de trois ans. Cela laisse une
lacune dans la loi pour des cas comme celui de M. Auclair qui doit être
couvert par ce projet de loi privé.
On peut prendre un exemple. Si je suis victime d'un acte médical
fautif, je dois prendre mon action dans un délai de trois ans. C'est
bien clair, la quatrième année après cet acte, je ne peux
pas être devant vous pour demander une prolongation de cette
prescription, parce que la loi est claire. Je vais peut-être intenter une
action contre le procureur qui a été engagé pour prendre
une action contre moi.
Mais à ce moment-là les choses n'étaient pas du
tout les mêmes. C'était une situation exceptionnelle, un cas
d'espèce, qui doit être réglé maintenant par cette
commission, par un projet de loi privé. Il faut se rappeler que M.
Auclair était, dès le début, partie de ce projet de loi
avec MM. Gaudreau et Warf et, pour une raison technique, on a laissé
tomber son nom de la loi couvrant ces deux autres hommes.
Pour ces raisons, je pense que le projet de loi privé doit
être adopté. Cela ne cause aucun préjudice à mes
confrères. Ils savaient bien que ces projets de loi étaient
toujours devant l'Assemblée nationale. Tous les témoins sont
disponibles afin d'être entendus, si nécessaire, devant le juge
Bard, qui a déjà indiqué, par lettre, son intention,
à la suite de l'adoption de ce projet de loi, de continuer l'instruction
de la cause qui s'était terminée par la cause de Patry et les
quittances intervenues après cette cause. Nous sommes face à un
cas exceptionnel, un cas d'espèce, qui doit avoir un remède comme
le projet de loi privé qui est devant vous ce matin. C'est mon
exposé.
Le Président (M. Vaugeois): Me Kravitz, nous vous
remercions.
On vous écoute. Veuillez, d'abord, vous identifier, s'il vous
plaît, pour les fins de l'enregistrement.
M. Claude-Henri
Gendreau
M. Gendreau (Claude-Henri): Je suis Claude-Henri Gendreau, de la
firme Gendreau, Pelletier, de Rimouski, procureur du centre hospitalier.
M. le Président, je veux vous souligner, ce matin, la
différence qu'il y a entre le projet de loi de M. Auclair et le cas de
MM. Warf et Gaudreau. Je voudrais simplement compléter les faits en
ajoutant que, huit mois après que l'action eut été
intentée contre le centre hospitalier, soit le 20 mars 1973, il y avait
trois jours d'auditions à Rimouski. Le tout était ajourné
pour trois
autres journées d'auditions à Montréal, à
compter du 17 juin 1974. Et c'est le 19 juin, donc après six jours
d'auditions, qu'effectivement il y a eu une requête en
irrecevabilité présentée, invoquant la décision de
la Cour suprême quelques jours auparavant.
Pendant ces six jours d'auditions, d'après ce que l'on peut
retrouver dans le dossier - je vous expliquerai tout à l'heure pourquoi
je dis cela - environ quatorze témoins auraient été
entendus, bien que, si l'on vérifie la taxation des témoins, il
aurait pu y en avoir seize. Il y en a eu au moins quatorze. C'est à la
suite de l'audition de ces quatorze témoins et de l'ajournement qu'il y
a eu signature des quittances.
À la suite de ces quittances, comme la loi le lui permet, le
centre hospitalier croyant le dossier terminé, le dossier a
été détruit. Pour ce qui est du dossier du procureur du
centre hospitalier à l'époque, il a également
été détruit.
C'est le 21 mars 1983 qu'une lettre était adressée
à l'ancien procureur du centre hospitalier, lui mentionnant qu'une loi
privée serait présentée. Nous nous sommes donc remis
à la recherche de ce dossier pour découvrir qu'il n'était
pas au greffe de Rimouski. Après bien des recherches, soit le 9
août 1983, il était transféré au greffe de Rimouski.
Le 13 septembre, nous en prenions connaissance.
Je disais donc que, huit mois après l'instigation de ces
procédures, le demandeur commence sa preuve, fait entendre ses
témoins sur des événements datant d'environ quatre ans ou
moins. Nous retrouvons au procès-verbal du 22 mars 1973, soit au moment
de l'ajournement pour transférer l'audition à Montréal,
une demande, de la part des procureurs du demandeur, pour la transcription des
notes sténographiques. Ont-elles été transcrites? Je
l'ignore. Elles ne sont pas au dossier de la cour et, comme je l'ai
mentionné, les dossiers des procureurs ont été
détruits. Est-ce que le procureur de M. Auclair a ses notes
sténographiques? Je l'ignore également.
On retrouve, cependant, dans le dossier de la cour, la transcription de
témoignages, tels ceux du Dr Gingras et d'un M. Albin Hanslic, qui
auraient été entendus à Montréal. Si des
transcriptions sont au dossier du demandeur, il est bien évident que sa
preuve est sur le point de se terminer, bien qu'elle ne soit pas close. Cette
preuve aura été faite il y a dix ou onze ans. Une chose est
sûre, il y a quand même des témoignages qui apparaissent au
dossier. Donc, la situation du demandeur est celle-ci: il a fait sa preuve il y
a environ dix ou onze ans, sur des événements qui venaient de
s'écouler quatre ans et moins auparavant.
Au niveau du centre hospitalier, au dossier, il y a un volumineux
document qui semble être le dossier médical de M. Auclair. Est-il
complet ou non? Je l'ignore, je n'étais pas au dossier à ce
moment-là. Il y a également certaines expertises qui ont
été déposées. (11 h 30)
Au point de vue des témoignages, lorsque nous avons
été avisés de ce projet de loi, j'ai demandé au
centre hospitalier de tenter de retrouver le personnel qui était en
place. Je peux vous dire qu'à l'heure actuelle nous faisons encore des
recherches pour relocaliser des personnes qui étaient à l'emploi
au département où était traité M. Auclair, il y a
15 ans. Cependant, ceux que l'on pourra retracer devront témoigner 15
ans plus tard. Donc, le centre hospitalier devra faire sa preuve 10 ans
après que le demandeur aura fait la sienne. À ce
moment-là, est-ce que les témoins auront souvenance aussi bien
que ceux du demandeur et est-ce que l'on pourra présenter la
défense pleine et entière? Bref, le dossier pour le demandeur est
quasi complet; celui de la défenderesse, presque vide.
Les distinctions que je veux faire sont que, dans les cas de MM. Warf et
Gaudreau, il n'y avait pas de procédure judiciaire d'intentée,
donc les deux parties étaient sur un pied d'égalité. Tant
la demande que la défense devaient se présenter devant le
tribunal avec les éléments qu'ils avaient à cette
époque, soit plusieurs années après puisque les
événements, dans le cas de M. Gaudreau, remontaient
également à 1969. Comme, d'ailleurs, l'avait souligné M.
Bédard lors de l'étude du projet de loi 221, le cas de M. Auclair
était différent. Je vois une très grande différence
au niveau de la possibilité pour le centre hospitalier de
présenter une défense pleine et entière, alors que la
demanderesse l'a fait dix ou onze ans auparavant.
Vous savez qu'en matière civile ce ne sera que la
prépondérance de la preuve, ce n'est pas la preuve hors de tout
doute. Nous croyons que vous ne pouvez permettre à un tribunal de
conclure à la prépondérance de la preuve du demandeur, si
c'était le cas, parce que la défenderesse n'avait plus les
éléments nécessaires pour présenter une
défense pleine et entière à une preuve
élaborée il y a dix ans et que, à bon droit, on croyait
éteinte.
On peut croire que cette difficulté -qui fait que l'on ne
pourrait pas révoquer la preuve du demandeur, compte tenu des
délais écoulés - ne causerait qu'un préjudice
pécuniaire. Je vous ferais remarquer qu'il y a beaucoup plus. Car si,
faute d'amener une preuve complète, le centre hospitalier était
condamné à payer une certaine somme, ce jugement, qui sera
public, entachera nécessairement la réputation du centre
hospitalier non pas nécessairement parce qu'il y aura eu une faute, mais
parce qu'il y aura eu une prépondérance de preuve
préparée dix
ans avant.
Cela entachera non seulement le centre hospitalier, mais ses
professionnels et son personnel. Connaissant, d'ailleurs, déjà
très bien les difficultés que vivent les hôpitaux
périphériques, c'est sûr qu'un hôpital qui serait
condamné à payer des sommes d'argent... Je n'en suis pas sur la
somme, j'en suis sur l'effet que cela aurait tant sur son personnel que sur le
centre hospitalier lui-même.
Par ce projet de loi, vous tentez de faire vérifier par un
tribunal si M. Auclair a été victime d'une faute, s'il a droit
à une indemnité. Si l'objectif est louable, est-ce que le
remède est approprié? Dans le cas de MM. Warf et Gaudreau, les
deux parties, demandeur et défendeur, étaient sur un pied
d'égalité. Ils avaient les mêmes difficultés de
preuve et vous avez référé le tout au tribunal pour qu'il
juge et apprécie la prépondérance de la preuve.
Dans le cas de M. Auclair, si vous faites revivre le recours judiciaire,
vous placez le demandeur dans une situation plus favorable que la
défenderesse. La preuve du demandeur a été
déposée devant le tribunal huit mois après l'introduction
des procédures. La défenderesse devra faire contrer cette preuve
douze ans après le début de l'instance, alors que, depuis dix
ans, elle avait tout lieu de croire que ce dossier était
terminé.
Je terminerai en vous disant qu'en accordant le recours à M.
Auclair vous tentez d'apporter une compensation au demandeur en risquant de
créer d'innombrables injustices, tant au centre hospitalier qu'à
ses professionnels et à son personnel, ceux-ci ne pouvant sans
énormément de difficulté présenter une
défense pleine et entière et se trouvant donc dans une position
désavantageuse par rapport au demandeur.
Je voulais vous souligner cette différence entre ces deux projets
de loi. Dans le cas de Warf et Gaudreau, vous avez placé les gens sur le
même pied. Après quinze ans, allez devant un tribunal et faites
juger votre cause. Dans le cas que vous avez pour étude ce matin, la
preuve est très avancée pour la demanderesse et elle a
été faite alors que tous les événements
étaient frais à la mémoire de tout le monde. Maintenant la
défense, qui croyait à bon droit que le dossier était
fermé, éprouve beaucoup plus de difficulté à aller
contrer cette preuve. C'est ce que je voulais vous souligner, M. le
Président.
Le Président (M. Vaugeois): Est-ce que nous passons aux
questions maintenant ou si nous entendrons le procureur des
médecins?
M. Kravitz: Est-ce que je peux ajouter quelque chose?
Le Président (M. Vaugeois): Est-ce que les membres de la
commission sont d'accord? Allez-y.
M. Kravitz: Quant à cette prétention relative
à la souvenance des témoins, nous sommes tous des avocats et nous
plaidons régulièrement devant les tribunaux. J'avais
moi-même des causes qui ont été commencées il y a
sept ou huit ans avant leur instruction devant le juge. Le problème avec
les témoins et leur souvenance est le même pour presque toutes les
causes de ce genre qui sont entendues devant notre Cour supérieure
à Montréal. C'est un problème très connu et qui a
fait l'objet de beaucoup de publicité dans nos journaux
récemment. Le juge en chef essaie de faire de son mieux pour corriger
cette situation, mais elle est exactement la même pour la plupart des
causes de ce genre.
J'ai également ici une lettre signée par le juge Samuel
Bard, en date du 19 juillet 1973, adressée à Mme Céline
Ouellet, qui est le protonotaire adjoint au palais de justice de Rimouski dans
cette cause de Victor Auclair contre l'hôpital et le Dr Rodolphe
Tremblay. Elle se lit comme suit: "Madame, j'accuse réception de la
vôtre du 6 courant, incluant l'original des notes sténographiques
pour lesquelles je vous remercie. J'espère que tout le bon monde
à Rimouski se porte bien et je vous souhaite un été
agréable." Comme cela, M. Bard, qui a déjà indiqué
son intention et sa volonté de continuer les procédures devant
lui, a déjà reçu du palais de justice de Rimouski
l'original des notes sténographiques.
J'ai aussi vérifié ici, à l'Assemblée
nationale avec M. Bergeron qui a les dossiers entre les mains, les notes
sténographiques qui ont été transmises. Il m'a dit qu'il
en a une partie entre les mains. J'ignore laquelle exactement. Nous avons fait
nos propres démarches pour vérifier si les témoins sont
disponibles et ceux-ci sont disponibles s'il est nécessaire qu'ils
soient réentendus devant le juge Bard. Je ne vois aucun préjudice
que peut avoir le défendeur dans ces circonstances.
Le Président (M. Vaugeois): Un instant! Le
député de Châteauguay m'a demandé la permission de
poser une question tout de suite après.
M. Dussault: Je voudrais demander au procureur de l'hôpital
de me répéter l'essentiel de ce qui lui paraît être
la différence entre les deux cas qui font jurisprudence, qui
créent un précédent, et le cas qui nous occupe
présentement.
M. Gendreau (Claude-Henri): Dans les deux cas
précédents, aucune procédure judiciaire n'avait
été intentée. Il n'y avait
donc aucune procédure, aucun dossier de cour d'ouvert. Ils
avaient consulté un avocat, à souvenance, et on leur avait dit
que c'était prescrit.
Dans le cas que vous avez devant vous, des procédures ont
été intentées en 1972, pour ce qui concerne le centre
hospitalier. Il y a eu six jours d'auditions. Je viens d'apprendre qu'il
semblerait que d'autres notes sténographiques seraient entre les mains
du juge Bard. C'est ce que je comprends. Ce que j'ai trouvé comme notes
sténographiques dans le dossier qui était à Rimouski,
c'est la transcription de deux témoignages entendus à
Montréal au mois de juin. Pour la première partie, au mois de
mars, je n'en ai pas trouvé au greffe de Rimouski.- Est-ce qu'elles sont
là-bas? Je ne le sais pas. Là où je dis qu'il y a une
grande différence, c'est que quatre ans après les
événements la demanderesse a pu faire sa preuve pendant six jours
et faire entendre environ quatorze témoins. Aujourd'hui, dix ans plus
tard, alors qu'à bon droit le centre hospitalier croyait que cette cause
était terminée, on doit s'opposer à des
événements qui se sont passés quinze ans avant. Si
vraiment les notes sténographiques sont là, les gens avaient
beaucoup plus en mémoire les événements à cette
époque-là qu'aujourd'hui.
Il sera très difficile d'apporter une défense pleine et
entière puisque nous avons un délai. Ce n'est pas comme une cause
qui a été intentée et qui ne sera entendue que dix ans
plus tard, où les deux parties ont les mêmes difficultés de
remémorisation des faits. Ici, une partie a déjà fait sa
preuve, il y a dix ou onze ans, et on demandera à la partie demanderesse
de faire la sienne après ce délai. C'est là que je vois
une différence.
M. Dussault: M. le Président, je voudrais maintenant poser
une question au procureur de M. Auclair. Quelle est sa réaction face
à l'essentiel de ce qui paraît être la différence
entre les deux cas qui créent un précédent et ce
cas-ci?
M. Kravitz: La seule différence, c'est que les quittances
avaient été signées. Les quittances ont été
signées. Il faut se rappeler également que M. Auclair a
été poursuivi pour des honoraires par le Dr Béraud. Face
à ce jugement de la Cour suprême, nous avons pensé que
c'était la loi. On ignorait que l'Assemblée nationale allait
adopter une loi accordant une prolongation de la prescription et aussi des
dispositions quant à la mise de côté des quittances
signées.
C'est la seule différence. Ce n'est pas une grande
différence, car, si on lit la loi, la seule raison pour laquelle M.
Auclair ne pouvait pas mettre ses quittances de côté,
c'était parce que son préjudice a eu lieu avant les dates
prévues par la loi. C'est pourquoi nous avons besoin d'une loi
privée. À part cela, les faits sont exactement les mêmes.
Je ne vois aucun préjudice que les défendeurs pourraient subir.
On parle toujours des préjudices que peuvent subir les
défendeurs, mais les demandeurs sont de l'autre côté et
nous avons aussi le droit d'être entendus et d'avoir une demande pleine
et entière.
Le Président (M. Vaugeois): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Herbert Marx
M. Marx: Seulement deux ou trois points. Premièrement, il
faut dire que le fond du problème réside dans le fait que la
décision de la Cour suprême du Canada avait un effet
rétroactif. Selon la jurisprudence, la prescription était de 30
ans. C'était la jurisprudence de la Cour d'appel du Québec. Tout
le monde se fiait sur cette jurisprudence. En pratique, la décision de
la Cour suprême était rétroactive; pas en théorie,
si vous voulez, parce que la théorie veut que ce soit toujours ainsi.
Mais, si vous consultez la doctrine américaine, par exemple, où
l'on parle des décisions rétroactives, je pense qu'ils ont raison
de dire que c'était une décision rétroactive dans le
même sens qu'une loi rétroactive.
Donc, il a fallu que la Législature prenne action pour corriger
cette décision rétroactive. Je dirais que la Cour suprême
aurait peut-être dû dire, à l'époque, que
c'était une décision rétroactive applicable seulement pour
l'avenir. Il y a toute une jurisprudence américaine qui dit: "when it is
retroactive over ruling"; cela s'applique pour l'avenir et tout cela. Mais on
ne va pas s'embarquer dans cette question. Il a donc fallu que
l'Assemblée nationale intervienne et nous avons adopté une loi
qui n'a pas couvert trois causes qu'on essaie de couvrir par des projets de loi
privés.
J'imagine que les avocats de l'hôpital étaient au courant
de cette situation depuis 1974. J'imagine que les avocats de l'hôpital
ont suivi le dossier, c'est-à-dire qu'en 1978 ils étaient au
courant du projet de loi 190 qui n'était pas adopté, mais dont
ils ont néanmoins, suivi le cheminement. Ils étaient au courant
qu'un projet de loi avait été déposé en 1978, qu'il
n'était pas encore adopté. Ils étaient au courant,
j'imagine, qu'un tel projet de loi serait adopté un jour.
Pour ce qui concerne les délais, peut-être est-ce la
différence entre Rimouski et Montréal, car, à Rimouski, la
Cour supérieure fonctionne assez vite et, à Montréal, le
ministre sait qu'il y a des délais de huit ans. Ce n'est pas anormal,
des délais de huit ans à la Cour supérieure de
Montréal; pour certaines causes, c'est huit
ans. Certaines causes ont pris treize ans avant d'obtenir une
décision finale. Donc, le problème de temps est moins
impressionnant, car, à Montréal, cela arrive assez souvent. (11 h
45)
Pour ce qui concerne la preuve, dans ce projet de loi, nous nous donnons
un droit d'action. Nous ne décidons pas qui a raison, qui a tort et, si
le demandeur ne peut pas faire sa preuve, il perdra sa cause.
C'est-à-dire qu'il n'y a pas de garantie que le demandeur gagnera sa
cause; tout ce que l'on donne, c'est un droit d'action et, s'il ne peut pas
faire la preuve pour une raison ou une autre, il ne gagnera pas sa cause et ce
sera la fin de l'affaire.
Pour ce qui est de la réputation de l'hôpital, j'aimerais
savoir si l'hôpital n'a jamais perdu une cause, car je n'ai pas suivi
toute la jurisprudence du centre hospitalier de Rimouski; j'imagine qu'il y a
eu d'autres causes d'intentées contre l'hôpital. En lisant les
journaux ces jours-ci, je vois qu'il y a beaucoup d'hôpitaux qui sont
devant des cours, pour une raison ou une autre, et cela ne m'empêcherait
pas d'aller à ces hôpitaux en tant que patient si j'étais
malade. Donc, je pense que tout se plaide, mais il y a des plaidoiries qui sont
meilleures que d'autres. Je pense que la réputation de l'hôpital
doit être en bas de la liste, mais je comprends les soucis des
avocats.
C'est tout pour le moment.
M. Gendreau (Claude-Henri): D'abord, si je me
réfère au débat parlementaire entourant le cas de MM. Warf
et Gaudreau, je crois noter que la jurisprudence à cette époque
n'était pas aussi catégorique, en disant 30 ans. Il semblerait
qu'il y avait un flottement. Je ne peux pas m'avancer là-dessus.
Pour ce qui est des délais d'audition, à Montréal,
de huit à treize ans, nous avons déjà connu cela dans
d'autres districts. Ce que je voulais souligner, c'est que là les deux
parties sont dans la même situation. Elles font leur preuve, toutes les
deux, le demandeur et le défendeur, après treize ans, alors que
dans le cas sous étude une partie l'a faite il y a dix ou onze ans et
l'autre partie devra la faire quinze ans plus tard. C'est là que je
voyais un déséquilibre. C'est toujours autour de la
défense pleine et entière à laquelle a droit, je crois,
tout citoyen. Ce sont les quelques remarques que je voulais faire.
Le Président (M. Vaugeois): Est-ce que je pourrais vous
poser une question, Me Gendreau? J'imagine qu'à l'époque le
centre hospitalier n'a pas pris à la légère la poursuite
le visant?
M. Gendreau (Claude-Henri): Absolument pas.
Le Président (M. Vaugeois): Indépendamment du fait
que le procès ait été interrompu, c'était quand
même quelque chose de très important qui était survenu.
Indépendamment d'un jugement de cour qui était
écarté, il y avait quand même pour l'hôpital une
évaluation des faits qui devait être faite. Donc, les faits
présentés par le demandeur ont dû être
examinés avec beaucoup de soin, pour qu'on se fasse une propre opinion
à l'intérieur de l'hôpital, pour porter son propre jugement
sur ce qui était arrivé. Il doit rester quelque chose de cela
à l'hôpital. Il me semble que, dans les circonstances, vous
devriez avoir des éléments extrêmement précis et
très importants pour vous faire votre propre opinion et préciser
les faits. Je ne vous demande pas quels étaient ces faits, mais
j'imagine que vous êtes dans une position excellente, compte tenu de ce
que vous avez dû faire avec cet incident-là.
M. Gendreau (Claude-Henri): D'abord, je vous mentionnerai
qu'à cette époque je n'étais pas là. Lorsque cela a
été porté à mon attention, on m'a dit à
l'hôpital que le dossier comme tel était détruit. On ne
gardait que le résumé, tel que la loi le prévoit,
après cinq ans. Est-ce que l'hôpital était au courant des
projets de loi de 1978? Je ne peux pas le dire.
Ce que je veux mentionner, je l'ai dit tout à l'heure, c'est que
dans le dossier de la cour, on retrouve quand même un dossier assez
volumineux qui semble être celui de M. Auclair. Est-ce que toutes les
feuilles sont là? Je l'ignore, mais il y en a quand même un bon
paquet. Mais à l'hôpital même, après cinq ans, comme
la loi le prévoit, tout semblerait avoir été
détruit.
Le Président (M. Vaugeois): Vous avez compris ma
question?
M. Gendreau (Claude-Henri): Oui, à ce moment-là, la
défense a sûrement travaillé parce qu'il y a eu six jours
d'auditions.
Le Président (M. Vaugeois): Je ne parle plus de la cour;
je parle de l'évaluation que la direction de l'hôpital a pu faire
de tout cela. J'imagine qu'on en a parlé, qu'on a revu les faits, qu'on
les a regardés très attentivement.
M. Gendreau (Claude-Henri): Sûrement qu'à
l'époque on l'a fait pour l'audition.
Le Président (M. Vaugeois): Pas juste pour une semaine,
mais pour l'avenir. M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je pense qu'il
faudrait peut-être donner l'occasion au procureur des deux autres
défendeurs dans la cause de s'exprimer. Il me semble que c'est un
éclairage qu'il a droit de nous donner.
M. François Rioux
M. Rioux (François): Merci, merci beaucoup! Mon nom est
François Rioux. Je représente les docteurs Rodolphe Tremblay et
Raymond Béraud dont il est fait état dans le projet de loi
privé que vous avez devant vous. Ces médecins, en passant, sont
vivants. Aucun n'est décédé. Mise à part cette
remarque, j'abonde dans le sens des remarques de mon confrère au sujet
des droits des médecins défendeurs et de l'hôpital qui ne
pourront se prévaloir de leur droit à une défense pleine
et entière à l'audition de cette cause qui aura lieu, à
toutes fins utiles, j'ai l'impression, à Montréal. On pourrait
rajouter deux ou trois ans, peut-être, avant que la cause soit
réentendue. Alors, on est en face d'un délai de treize ans entre
la présentation de la preuve du demandeur et la présentation de
la preuve de la défense. Ce précédent, on ne pourrait le
retracer nulle part dans les annales judiciaires au Québec, pour la
simple raison que la défense doit avoir en tête les
éléments de preuve qui ont été
présentés par la demande immédiatement après la
présentation de cette demande pour se prévaloir de son droit
à une défense pleine et entière.
Deuxièmement, le député de
Notre-Dame-de-Grâce a mentionné - d'ailleurs, Me Kravitz l'a dit -
que les cas de Warf et Gaudreau sont les mêmes que celui qui nous occupe
aujourd'hui. Je voudrais préciser que, devant la commission
parlementaire du 16 décembre 1982 pour l'adoption du projet de loi
privé concernant les cas de Warf et Gaudreau, le député de
Notre-Dame-de-Grâce et le ministre de la Justice de l'époque, M.
Bédard, à la page B-11593, avaient mentionné, en parlant
du cas Auclair qui nous occupe: "M. Bédard: Je m'excuse, il est clair,
mais il est différent. "M. Scowen: II est différent. "M.
Bédard: Dans le cas de M. Auclair, il y a eu effectivement des
procédures d'intentées, un procès avait eu lieu et on en
était au stade du délibéré. C'est un cas
complètement différent des deux que nous avons."
Alors, je voudrais porter à l'attention de la commission le fait
que c'est un cas complètement différent dans le sens que des
procédures sont intentées, la preuve de la demande est faite et
on donne, en somme, plus de droits au demandeur qu'il n'en avait en 1974. Par
le biais de cette loi, le Parlement touche le mérite et le fond de la
cause en s'immisçant dans le processus judiciaire et en transformant le
fardeau de la preuve qu'un demandeur et un défendeur doivent
établir dans un procès civil. De cette façon, une
condamnation pourrait en résulter, vu le long délai qui se serait
écoulé entre la présentation de la demande et celle de la
défense, ce qui affecterait, effectivement, le fond du litige. Alors,
c'était pour préciser que les cas étaient bien
différents.
Je ferai remarquer à la commission que notre position est la
suivante: ce bill privé équivaut, selon nous, à une
confiscation ou à une expropriation de droits qui résultent d'un
contrat et qui sont les quittances, dans le cas qui nous occupe. Il y a des
droits certains qui découlent d'une telle transaction. Une quittance
équivaut à une transaction, selon notre Code civil. L'article
1918 du Code civil mentionne que la transaction est un contrat par lequel les
parties mettent fin à un procès. Je ne citerai pas le texte de
l'article, mais il s'agit d'un contrat.
Pour les fins du débat, je voudrais lire le texte de la quittance
dont il est fait état dans le projet de loi privé, afin que les
membres et les députés sachent ce qui sera annulé par
celui-ci. Cette quittance concerne le Dr Rodolphe Tremblay et le texte de
celle-ci se lit comme suit: "Pour bonnes et valables considérations, le
demandeur en la présente cause donne quittance complète et finale
au défendeur, le Dr Rodolphe Tremblay, ses agents, employés,
ayants droit et préposés de toute réclamation, demande et
action de quelque nature que ce soit qu'il a, qu'il a eues ou qu'il pourra
avoir et s'engage à tenir ledit défendeur quitte et indemne de
toute réclamation, demande et action de quelque nature que ce soit
découlant des circonstances relatées dans le dossier de la
présente cause." Alors, on peut se rendre compte, d'après le
texte de la quittance, qu'elle a été donnée pour bonnes et
valables considérations.
Notre Code civil, à l'article 407, explique que: "Nul ne peut
être contraint de céder sa propriété, si ce n'est
pour cause d'utilité publique et moyennant une juste et préalable
indemnité." Dans le cas qui nous occupe, il faut dire que le projet de
loi privé confisque et abroge des droits contractuels appartenant au
défendeur et que cette abrogation et cette expropriation impliquent une
compensation. Je voulais porter ceci à l'attention de la commission. Il
serait superflu de dire que les tribunaux ont, à maintes reprises,
répété qu'il y a une forte présomption contre
l'expropriation sans compensation.
Puisqu'il s'agit d'un projet de loi privé, il est encore plus
vrai, dans ce cas-ci, que ce principe s'appliquerait puisqu'un projet de loi
privé est sujet à une interprétation restrictive. En
raison de ce qui précède et vu la compensation ou
l'indemnité éventuelle que les défendeurs seraient en
mesure de réclamer devant un tribunal civil à la suite
d'une condamnation éventuelle résultant de ce projet de
loi privé, nous suggérons à la commission d'amender ou de
proposer un amendement au projet de loi privé afin de préciser
que le montant d'une condamnation éventuelle sera défrayé
à même le fonds consolidé de la province de
Québec.
Un dernier point, au niveau de la rédaction du projet de loi
privé, si vous me le permettez. Dans le préambule du projet de
loi privé, au sujet des quittances - c'est le paragraphe 11 - on peut
lire: "Que, toutefois, cette loi ne permettait pas à Victor Auclair
d'obtenir l'annulation des actes de renonciation qu'il avait signés."
Alors, c'est un terme qui est employé, on ne sait pas si on se
réfère aux quittances ou à d'autres actes de renonciation,
ou à quelque chose d'autre. Je proposerais que, pour la concordance, les
mots "des actes de renonciation" soient remplacés par les mots "les
quittances dont il était fait mention dans le préambule".
Par ailleurs, le deuxième point, c'est qu'on mentionne dans le
projet de loi, à l'article 1: "Est annulé l'acte intitulé
"Quittance" signé le 22 octobre 1974 par Victor Auclair dans lequel
celui-ci a déclaré renoncer à tout recours." Alors, selon
le texte de la quittance, il n'y a pas de renonciation comme telle; il s'agit
plutôt de garder ou de donner une quittance complète et finale au
défendeur impliqué. Il ne s'agit aucunement de renonciation. Si
la chose pouvait être précisée, qu'il donne quittance
complète et finale plutôt qu'une renonciation, il y aurait
concordance avec le texte de la quittance.
C'étaient mes remarques, merci.
Le Président (M. Vaugeois): M. le député de
D'Arcy McGee, vous aviez une question?
(12 heures)
M. Marx: Peut-être une petite question. Je suis très
sensible à cette argumentation relative au Code civil, articles 1918 et
407, expropriation sans compensation. Il faut dire aussi que M. Auclair
était exproprié de ses droits - entre guillemets - par la Cour
suprême du Canada. Il y a cela aussi. À la Cour d'appel,
c'était une jurisprudence plus ou moins constante. Ce n'était
peut-être pas le cas au niveau des cours supérieures mais à
la Cour d'appel c'était une jurisprudence constante, à savoir
qu'on ait 30 ans. Pour pratiquement tous les avocats dans la doctrine,
c'était cela.
Donc, effectivement, il était exproprié de son droit
d'action. On va le lui retourner, comme on l'a retourné à toutes
les autres personnes dans la même situation.
M. Rioux: Je crois qu'il y a des principes à respecter,
dans un projet de loi ou une loi privée ou publique, si les principes
d'expropriation sont touchés. C'est tout ce que je voulais porter
à l'attention de la commission. Il est à présumer, dans ce
cas-ci, que l'expropriation et la confiscation se font avec compensation.
M. Marx: On a déjà fait cela pour toutes les
personnes dans la même situation, sauf pour M. Auclair. On a fait cela
dans le cas de Warf, dans le cas de M. Gaudreau et pour d'autres personnes qui
ont pris des actions au cours de la semaine qu'on leur a donnée pour le
faire, dans le cadre de la loi que nous avons adoptée.
Donc, si nous l'avons déjà fait, il s'agit de le
répéter pour la dernière fois.
M. Rioux: L'Assemblée nationale a certainement le droit
d'exproprier. Maintenant, de là à dire que la Cour suprême,
par un raisonnement juridique d'une loi, exclut un recours, commet une
expropriation, je n'irais pas jusque-là. C'était une
interprétation juridique qui se tenait et qui était
controversée, qui a été tranchée par la Cour
suprême. Maintenant, la rétroactivité de la loi
enlève la défense de la prescription au défendeur,
exproprie un contrat, une quittance complète et finale. Je voudrais
mentionner que, si c'est un précédent qui se crée, toutes
les transactions et quittances dans tous les dossiers judiciaires de la
province de Québec sont sujettes à révision. Cela n'est
pas peu dire, parce qu'un individu qui signe une quittance ou une transaction
peut miser sur cette quittance pour se sentir libre après les faits,
après la signature de cette quittance, de faire des déclarations
qui toucheraient peut-être la responsabilité. Comment
saurions-nous que les Drs Tremblay et Béraud n'ont pas fait de
déclaration préjudiciable à leur droit d'action, à
leur droit de défense qui pourrait leur être opposée dans
un procès éventuel, après avoir signé en toute
bonne foi une quittance, se sentant à l'aise d'avoir une poursuite
réglée? C'est un précédent extrêmement
dangereux, selon moi.
M. Marx: C'est un prédécent qui, selon moi, n'aura
pas d'autre précédent. Cela s'arrête ici. Il est
évident que l'Assemblée nationale ne va pas intervenir dans
chaque quittance.
Je comprends les distinctions juridiques que vous faites entre les
décisions de la Cour suprême du Canada et un projet de loi
privé. Il y a des distinctions juridiques et il y a aussi des
distinctions sur le plan pratique. Sur le plan pratique, si on le demande
à M. Auclair, il n'y a pas de distinction entre les décisions de
la Cour suprême qui avaient un effet rétroactif et la loi qui
avait un effet rétroactif.
Je comprends bien vos distinctions et c'est un argument dont on tiendra
compte.
Le Président (M. Vaugeois): M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Je remercie Me Rioux et Me Gendreau. Ils ont
soulevé sous différents aspects des arguments qui, sur le plan
juridique, ne manquent pas de cohérence et doivent être
mentionnés.
Cette commission doit être pleinement consciente des
décisions qu'elle prendra à cet égard et, encore une fois,
du caractère exceptionnel, isolé, unique et distinct du cas de M.
Auclair, ainsi que d'un certain nombre de précédents qui
présentent simplement des similitudes et des analogies plutôt
qu'une identité de situation, ainsi que des précédents
législatifs, par interprétation, de même qu'à
l'égard de la notion d'expropriation qui existe. Je pense que tout cela
peut amener les membres de la commission à accepter les principes
contenus dans ce projet de loi, encore une fois, en étant conscients du
caractère absolument exceptionnel que prend la démarche de M.
Auclair, tout comme le dispositif de ce projet de loi privé.
Pour les fins de la discussion, je voudrais cependant mentionner que la
loi sanctionnée le 24 décembre 1974, au chapitre 80 qui touchait
certaines prescriptions, disait bien, à son article 4, qu'en
matière de responsabilité pour une faute commise le 1er janvier
1972 ou pour une faute commise avant cette date, si le préjudice s'est
manifesté graduellement et que la première manifestation est
survenue depuis cette date, l'une des parties peut, par requête produite
au greffe avant le 1er juillet 1975, obtenir, deuxièmement, l'annulation
de tout règlement, transaction ou désistement.
Donc, la nature du dispositif qu'on retrouve ici se trouvait dans cette
loi d'application générale aux causes soumises à ce
jugement de la Cour suprême, ce qui ne diminue en rien, je pense, la
valeur du discours que nous a tenu Me Rioux tout à l'heure, mais qui
peut-être le situe un peu plus dans son contexte.
Le jugement de la Cour suprême lui-même avait un
caractère rétroactif. En pratique, la loi de 1974 avait ce
même caractère, y compris à l'égard de ce qu'on
pourrait interpréter, en termes généraux, comme
l'équivalent d'une expropriation sans compensation. Dans la mesure
où l'on permettait que, sur requête, on puisse obtenir
l'annulation d'une transaction, surviennent les cas Warf et Gaudreau, le cas de
M. Auclair étant distinct de par le contexte juridique - je devrais dire
l'avancement des procédures ou sa situation dans le déroulement
des procédures - mais, pour le reste, ayant un caractère
plutôt analogique.
Il reste une dimension qu'a soulevée le procureur de
l'hôpital tout à l'heure qui est effectivement
préoccupante. C'est toute cette question de la preuve et du contexte
dans lequel sera faite la preuve. Je pense que mon collègue de D'Arcy
McGee, qui a une expérience des tribunaux, ou de la jurisprudence, si ce
n'est des tribunaux...
M. Marx: Les deux.
M. Johnson (Anjou): ...conviendra avec moi que la description
qu'il fait, toute caricaturale qu'elle soit, des délais en Cour
supérieure de Montréal a sa valeur, en termes de comparaison,
avec Rimouski. La notion des délais est une chose avec laquelle savent
vivre les justiciables de la région métropolitaine et que ne
savent tolérer les autres régions du Québec, ce qui est
à leur honneur à bien des égards.
Je remarque qu'en juillet 1973 - peut-être que les procureurs des
médecins et de l'hôpital pourraient m'éclairer sur cette
dernière chose - ont été interrogés les Drs
Béraud et Tremblay, de l'hôpital Saint-Joseph, le Dr
Bélanger, de l'hôpital de Mont-Joli, Mme Saint-Pierre, Mme
Clémence Gagnon, M. Jean-Yves Plourde, membre du personnel infirmier de
l'hôpital, qui s'était occupé de M. Auclair. Ces personnes
ont été interrogées le 13 juillet 1973. Dans ce que nous
avons pu voir de ce dossier, la transcription des témoignages de ces
personnes n'y était pas, à moins que le juge qui entendra le
procès ne l'ait. Mais je poserais une question: Ces personnes ont-elles
été contre-interrogées par la défense?
M. Rioux: ...
M. Johnson (Anjou): De l'interrogatoire de MM. Béraud et
Tremblay.
M. Gendreau (Claude-Henri): Pour vous répondre, je peux
seulement me référer aux notes que j'ai prises en lisant les
procès-verbaux qui étaient dans le dossier de la cour. Le
procès n'y était pas. Il semblerait que le Dr Béraud ait
été contre-interrogé. Je ne peux pas aller plus loin, car
je n'ai pas tous les renseignements. Je n'étais pas au
procès.
M. Johnson (Anjou): Quant à l'audience à
Montréal, quatre des huit témoignages sont disponibles, en tout
cas, à notre connaissance, très clairement dans ce dossier. Il y
a là-dedans, notamment, la transcription de la déposition du Dr
Gingras qui a témoigné pour la demande. À votre
connaissance, a-t-il été contre-interrogé lui aussi?
M. Gendreau (Claude-Henri): Je ne peux vraiment pas vous le dire.
Il faudrait que je revoie tous les procès-verbaux. Si j'avais
participé au procès, je serais plus à l'aise
pour vous répondre.
Généralement, ils sont toujours
contre-interrogés.
M. Johnson (Anjou): Je m'excuse de vous avoir posé la
question. On a découvert la réponse en vous en parlant. On a des
copies du dossier. Effectivement, les docteurs Béraud et Tremblay ont
été contre-interrogés. D'après les notes
sténographiques, dans le cas du docteur Gingras, il a été
contre-interrogé en partie.
Il reste que, malgré l'établissement de ces choses, ce
n'est pas totalement satisfaisant. Encore une fois, si on reprend le
raisonnement que votre mandat ainsi que votre profession vous obligent à
faire, vous devez présenter cet argument d'une façon
linéaire et pousser chacun des arguments jusqu'au bout, comme vous
l'avez fort bien fait. Disons que le rôle de la commission est
peut-être d'élargir un peu cette vision juridique. Encore une
fois, ce sont des raisonnements que je n'oserais pas qualifier de sans faille,
mais ce sont des raisonnements assez solides. Disons que l'addition de ces
raisonnements linéaires ne répond pas à une
préoccupation qui est celle d'une certaine cohérence à
l'égard des précédents que nous avons adoptés et de
la situation exceptionnelle qui a été créée par le
jugement de la Cour suprême, compte tenu d'une tradition qui remonterait,
à toutes fins utiles, à 1867, 1866, au moment de l'adoption du
Code civil du Bas-Canada.
Comme on dit à l'Académie française: "We are
dealing with a very gray zone." Je dois vous dire, MM. les procureurs, que la
décision de procéder à l'adoption du projet de loi, selon
que les membres le voudront ou pas - et même la forme du projet de loi
-laissera persister une incohérence sur le plan juridique à
l'égard de certains des arguments que vous avez adoptés mais,
à nos yeux, une cohérence de comportement à l'égard
d'un justiciable qui se retrouve parmi 6 000 000 d'habitants dans une position
exceptionnelle. Merci.
Le Président (M. Vaugeois): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, si on me le permet.
J'ai omis de mentionner à mes collègues que nous avons
reçu, ce matin, un télégramme du bâtonnier, M.
Pierre Sébastien, dont je résume le contenu étant
donné que je n'ai pas le texte. Il s'oppose au projet de loi pour les
motifs qu'il y a là de la rétroactivité, qu'une quittance
a été valablement donnée par M. Victor Auclair, annulable
devant les tribunaux pour un motif d'erreur ou de fraude. Donc, le projet de
loi privé n'est pas le bon recours.
Le Président (M. Vaugeois): Voulez-vous prendre la parole
maintenant, M. le député, ou si vous préférez
attendre? J'avais déjà donné la parole au
député de Notre-Dame-de-Grâce. Est-ce que vous
préférez...?
M. Dussault: J'aurais une très courte question à
poser. J'aimerais savoir si quelqu'un se rappelle l'attitude que le barreau
avait prise à l'égard de la loi qui permettait que le
délai d'un an soit élargi à trois ans.
M. Johnson (Anjou): C'est le barreau qui l'avait demandé.
(12 h 15)
M. Scowen: Si je peux me permettre, le barreau a accepté
cette rétroactivité et il s'oppose à ce deuxième
cas, si vous le voulez, mais le principe de la rétroactivité,
dans le cas de la loi 92, est accepté par le Barreau du
Québec.
M. Johnson (Anjou): C'était donc une bonne question.
M. Scowen: C'était une très bonne question.
Je pense que je vais soulever deux ou trois points très courts.
Premièrement, je pense que nous nous entendons tous maintenant sur cette
question de la différence qui existe entre les deux premiers cas et le
troisième.
Bien sûr, il existe une différence. Nous étions
d'accord là-dessus. C'est pourquoi nous avons déposé un
deuxième projet de loi. Sur le plan juridique, tout le monde convient
qu'il y a une différence et que le projet de loi doit être
rédigé d'une façon différente. Quand vous avez
cité le ministre et moi-même, c'est exactement ce que nous
voulions dire; c'est pourquoi nous faisons un deuxième projet de
loi.
On prétend, par contre, que sur le plan des faits, c'est
très semblable parce que, effectivement, à un moment
donné, ces trois personnes, à cause d'une situation qui
n'était pas causée par elles-mêmes, se trouvaient dans
l'impossibilité d'avoir recours et depuis ce temps, depuis l'adoption du
projet de loi 65, depuis ce moment, ces trois cas sont isolés.
C'était en 1974...
M. Johnson (Anjou): La loi sur les prescriptions, 1974.
M. Scowen: 1974. Depuis ce moment, ces trois cas sont connus de
tout le monde. On en parle ici, à l'Assemblée nationale; des
projets de loi ont été déposés, tout le monde
savait qu'au Québec, à notre connaissance, il y avait ces trois
cas à régler.
Pendant ce temps, personne n'est arrivé avec un quatrième
cas. Les trois cas sont connus des législateurs et nous avons
essayé
à notre façon à nous, tenant compte de tous les
autres problèmes que nous avions ici, de régler ce
problème, mais il n'y a pas de surprise.
Je ne me rappelle pas qui l'a dit ce matin - si c'est l'avocat - mais
c'est une répétition de quelque chose qui a été dit
la dernière fois: on prétend que possiblement tous les records et
toute l'information ne sont pas disponibles pour permettre que la cause soit
présentée comme il faut. Chaque fois que nous posons la question,
à savoir si cela n'existe pas, l'avocat est obligé de dire: Je ne
le sais pas.
Il me semble, M. le Président, que dans un cas connu comme
celui-ci, si les avocats arrivent devant la commission parlementaire en disant
qu'il est possible que nous n'ayons pas toutes les informations
nécessaires... On leur pose la question: Est-ce que vous les avez ou
non? Est-ce que le dossier existe? Est-ce que tel ou tel témoignage a
été fait? de nous dire qu'ils ne le savent pas, je ne dirais pas
que c'est difficile à croire, mais ce n'est pas très
cohérent, parce qu'il me semble qu'un avocat qui se prépare pour
un événement comme celui-ci, surtout si c'est quelque chose qui
existe depuis des années, dans le portrait, aurait pris la peine de
vérifier l'existence ou non de l'information nécessaire. C'est
une question, M. le Président, que vous avez posée
vous-même et qui est très pertinente dans ce sens.
Ce n'est tout simplement pas convaincant, quant à moi, et dans le
cas de M. Auclair, en terminant, je pense que c'est même plus probable
que l'évidence nécessaire pour poursuivre le cas existe autant
que dans les deux premiers cas. Au moins, celui-ci a déjà
été présenté devant les tribunaux, les deux avocats
se sont préparés, il y avait un certain travail de fait pour
arriver au point où ils étaient quand l'affaire a
été annulée. Tandis que, dans les deux autres cas, les
arguments des avocats étaient peut-être un peu plus forts dans le
sens qu'ils ont dit: Nous n'avons même pas commencé.
Alors, si nous avons décidé, la dernière fois, que
dans le cas qui n'était même pas amorcé, on pouvait exiger
qu'on recommence, il me semble que l'argument dans ce cas-ci est encore plus
fort.
M. Marx: M. le Président, merci.
Je vais revenir à l'argument de Me Gendreau concernant la preuve.
Je pense que nous sommes tous très sensibles à cette question. Il
est évident que Me Gendreau connaît son métier, sa
profession. Il a soulevé ce problème de la preuve.
Peut-être peut-on prendre des mesures pour que cela n'empire pas. Est-ce
que c'est possible d'inclure, dans le projet de loi, un article pour demander
à la cour de traiter cette cause de préférence? On peut
inclure cela dans un préambule, mais ce n'est pas contraignant. Est-ce
qu'on peut prévoir, dans la loi, que la cause sera traitée de
préférence et qu'il n'y aura pas un délai de trois, cinq
ou huit ans encore? Si on ne le fait pas, il pourrait arriver des délais
additionnels qui rendraient le travail des avocats encore plus difficile.
M. Johnson (Anjou): Je comprends la préoccupation du
procureur telle qu'évoquée par le député de D'Arcy
McGee. Cependant, je serais extrêmement hésitant à avoir un
tel article de loi qui, à toutes fins utiles, relève de
l'administration normale de la justice. Je dirai simplement qu'à ma
connaissance le juge Bard était un juge surnuméraire à la
cour. Deuxièmement, il est à Montréal.
Troisièmement, la cause doit être entendue à Rimouski. Je
me permets de présumer que le juge en chef, sans doute, dès qu'il
sera disponible, verra à ce que le juge Bard puisse se rendre à
Rimouski pour entendre la cause et faire sa conférence
préparatoire, le cas échéant, tel que prévu au
projet. Je serais hésitant.
Le Président (M. Vaugeois): Est-ce qu'il y a d'autres
questions? Vous avez des amendements, M. le ministre?
Étude détaillée
M. Johnson (Anjou): Oui, enfin, un amendement, essentiellement,
pour donner suite à une suggestion de Me Rioux en ce qui a trait
à la qualification du mot "quittance" par opposition à
"renonciation". L'amendement se lirait comme suit, M. le Président:
L'article 1 serait modifié, premièrement, par le remplacement,
à la deuxième ligne du premier alinéa, des mots "renoncer
à" par les mots "donner quittance complète et finale pour";
deuxièmement, par le remplacement, à la deuxième ligne du
deuxième alinéa, des mots "renoncer à" par les mots
"donner quittance finale et complète pour".
Nous aurions, par la suite, un amendement au préambule en
concordance avec cet amendement.
Alors, on vous donne le texte...
M. le Président, est-ce que l'amendement est adopté?
M. Marx: Adopté.
Le Président (M. Vaugeois): Adopté.
M. Johnson (Anjou): Est-ce que l'article 1 est adopté, M.
le Président? Je me permets de...
Le Président (M. Vaugeois): De me bousculer un peu.
M. Johnson (Anjou): Je m'excuse, je ne
veux pas vous bousculer, M. le Président. Je me demandais si nous
attendions.
Le Président (M. Vaugeois): Je souhaiterais suspendre la
séance seulement pour 30 secondes. J'aurais une question à poser
au ministre en privé. Est-ce qu'on peut faire cela?
Une voix: C'est votre privilège. (Suspension de la
séance à 12 h 25)
(Reprise de la séance à 12 h 26)
Le Président (M. Vaugeois): Voulez-vous nous
présenter...
Le Secrétaire: L'article 1 est modifié,
premièrement, par le remplacement, à la deuxième ligne du
premier alinéa, des mots "renoncer à" par les mots "donner
quittance complète et finale pour"; deuxièmement, par le
remplacement, à la deuxième ligne du deuxième
alinéa, des mots "renoncer à" par les mots "donner quittance
finale et complète pour".
L'amendement est-il adopté?
Le Président (M. Vaugeois): L'amendement est-il
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Vaugeois): Le suivant.
Le Secrétaire: L'article 1 tel qu'amendé est-il
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Vaugeois): Article 2?
M. Scowen: Adopté.
Le Président (M. Vaugeois): L'article 2 est
adopté.
L'article 3?
M. Scowen: Oui.
Le Président (M. Vaugeois): L'article 4?
M. Scowen: Oui.
Le Président (M. Vaugeois): L'article 5?
M. Scowen: Oui.
Le Président (M. Vaugeois): L'article 6?
M. Johnson (Anjou): M. le Président, si vous me le
permettez, à l'article 4...
Le Président (M. Vaugeois): Oui, M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Je vais me permettre d'attirer votre
attention sur le fait qu'on prévoit, à l'article 4, qu'en vertu
de l'article 279 du Code de procédure civile il pourrait y avoir une
conférence préparatoire à l'instruction qui, je pense,
dans les circonstances, peut être utile pour les procureurs des parties
et pour les parties. Évidemment, ce n'est pas obligatoire dans la mesure
où on dit qu'elle peut être tenue. Pour éviter des
délais et pour s'assurer que cette conférence qui va être
convoquée par le juge qui a procédé à
l'instruction, soit le juge Bard, ou par un autre juge... On peut
présumer, à moins qu'il n'arrive des événements
particuliers, que ce sera le juge Bard.
M. Marx: Une telle conférence est prévue dans le
projet de loi qui est devant la Chambre.
M. Johnson (Anjou): Oui, mais...
M. Marx: Mais dans d'autres causes, donc...
M. Johnson (Anjou): Voilà!
M. Marx: ...on prévoit la même procédure ici
que celle prévue dans le projet de loi.
M. Johnson (Anjou): À toutes fins utiles, on reprend... On
prévoit le principe dans la mesure où cette loi va entrer en
vigueur le jour de sa sanction. Si jamais, avant l'été, des
choses bougeaient dans ce dossier, on ne veut pas s'en remettre à la
promulgation de ce qu'on retrouve dans notre projet de loi qui sera
adopté, normalement, d'ici au 24 juin.
M. Dussault: M. le Président.
Le Président (M. Vaugeois): Oui.
M. Dussault: Sur cette question, je voudrais savoir si cette
conférence préparatoire, qui va être déterminante
dans le dossier, va avoir un effet négatif sur le délai de 60
jours qui est prévu à l'article 3.
M. Johnson (Anjou): Non. Je ne pense pas que la conférence
préparatoire puisse avoir un effet négatif sur le délai.
Ce que dit l'article 3, c'est qu'à toutes fins utiles tout va être
réenclenché par. Si, dans les 60 jours, le procureur de Me
Auclair, en l'occurrence, ou le procureur des autres parties, s'ils ont une
demande reconventionnelle, dépose au greffe un acte de procédure
utile dans les 60 jours, à partir de là, il y aura
conférence préparatoire.
M. Dussault: Merci.
M. Johnson (Anjou): Et j'ai comme l'impression que M. Auclair a
donné des instructions à son procureur, si le projet de loi est
adopté, pour que celui-ci agisse dans les délais prévus
à l'article 3.
M. Marx: Si on adoptait le projet de loi avant le 21 juin - cela
peut être adopté cette semaine, si le ministre est d'accord.
M. Johnson (Anjou): Sûrement.
Le Président (M. Vaugeois): Est-ce que je pourrais
interrompre ici l'adoption des articles pour demander à Me Gendreau
comment il voit la tenue de cette conférence, prévue à
l'article 4, dans le contexte des arguments qu'il a fait valoir tout à
l'heure?
M. Gendreau (Claude-Henri): Tout à l'heure, il a
été mentionné que, possiblement... Je ne voudrais pas
affirmer qu'on ne retrouverait personne sauf que, lorsque j'ai
été approché pour ce dossier, j'ai demandé de me
sortir les noms et les adresses des gens qui avaient été
impliqués. À cette époque, soit en 1969, il semblerait que
c'est assez difficile au niveau des dossiers. Il y a des personnes qu'on a
retrouvées par des annotations dans le dossier de la cour et j'ai
demandé de retrouver ces personnes. On a des adresses qui remontent
à plusieurs années, mais les gens sont
déménagés un peu partout. Ce sont ces gens qu'on tente de
rechercher actuellement. Tous les efforts se font dans ce sens, de sorte que je
ne pouvais pas affirmer devant la commission que des gens étaient
introuvables et demeureraient introuvables, parce que j'ai donné des
instructions pour qu'on continue ces recherches. (12 h 30)
Maintenant, cette conférence préparatoire, lorsque le juge
aura été désigné, le juge Bard ou un autre,
permettra peut-être de déléguer le dossier, de voir
exactement où nous en sommes. Tout à l'heure, on semblait dire
qu'une partie de la preuve sténographique serait entre les mains du juge
Bard. Je l'ignorais avant ce matin car, dans le dossier de la cour, tout ce que
j'ai trouvé, c'est la transcription du témoignage du Dr Gingras
et de M. Asselin, je crois. Peut-être que cela me permettra de colmater
tout ce dossier qui s'est promené quand même de Rimouski à
Montréal, au bureau du juge Bard, pour revenir à Rimouski, il y a
quand même quelques années, comme on l'a mentionné tout
à l'heure.
Le Président (M. Vaugeois): Alors, l'article 4 est
adopté? Une voix: Adopté.
Le Président (M. Vaugeois): L'article 5? Une voix:
Adopté.
Le Président (M. Vaugeois): L'article 6? Une voix:
Adopté. Le Président (M. Vaugeois):L'article
7?
M. Johnson (Anjou): M. le Président, il y a des
amendements au préambule, qui sont essentiellement de concordance. Le
premier amendement: Le préambule est modifié par le remplacement,
à la deuxième ligne du neuvième alinéa, des mots
"renoncer aux" par les suivants: "donner quittance complète et finale
pour tout".
Le Secrétaire: Est-ce que l'amendement au préambule
est adopté?
M. Marx: Adopté.
M. Johnson (Anjou): Le second amendement. Je suis sûr que
le secrétaire va me pardonner de faire la lecture, M. le
Président, je suis habitué à la calligraphie de nos
gens.
Le préambule est modifié par le remplacement, à la
deuxième ligne du onzième alinéa, des mots "actes de
renonciation qu'il avait signés" par les mots "quittances qu'il avait
signées", au pluriel.
M. Marx: Adopté.
Le Secrétaire: Est-ce que cet amendement au
préambule est adopté?
M. Marx: Adopté.
M. Johnson (Anjou): Le préambule est également
modifié par le remplacement; à la deuxième ligne du
douzième alinéa, des mots "actes de renonciation qu'il avait
signés" par les mots "quittances qu'il avait signées", toujours
au pluriel.
Le Secrétaire: Est-ce que cet amendement au
préambule est adopté?
M. Marx: Adopté.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, nous n'avons pas
d'autre amendement au préambule.
Le Secrétaire: Est-ce que l'ensemble du préambule,
tel qu'amendé, est adopté?
M. Marx: Adopté.
Le Secrétaire: Est-ce que le titre du projet de loi est
adopté?
M. Marx: Adopté.
Le Secrétaire: Est-ce que l'ensemble du projet de loi 208,
Loi concernant certains recours de Victor Auclair en matière de
responsabilité médicale ou hospitalière, est
adopté, tel qu'amendé?
Une voix: Adopté.
M. Johnson (Anjou): Vous me permettrez, M. le Président,
avant de céder la parole au parrain du projet de loi, de remercier M.
Auclair de s'être déplacé, son procureur évidemment,
les procureurs et représentants de l'hôpital et les
défendeurs dans la cause. Je voudrais leur dire deux choses. D'abord,
encore une fois, je voudrais les rassurer en disant que dans leur cas en aucune
façon nous ne présumons, par ce projet de loi, du contenu et des
responsabilités des personnes impliquées, ou du bien-fondé
ou non de la demande de M. Auclair quant aux événements qui ont
donné suite à ces procédures.
Deuxièmement, je les remercie particulièrement pour la
rigueur de leurs exposés. Nous vivons ici ce qu'il arrive, à
l'occasion, à la Cour suprême de vivre et elle le vivra
bientôt dans un jugement qui portera sur le Manitoba où le droit
est clair, où les principes sont clairs mais où, de toute
évidence, il faut faire connaître quelques contorsions à la
logique juridique implacable.
M. Marx: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier M.
Auclair, son avocat, Me Kravitz, Me Gendreau et Me Rioux. Je dirais que ces
deux derniers avaient une côte à remonter; c'était
peut-être impossible de vraiment remonter cette côte, étant
donné les autres projets de loi que nous avons adoptés. Je pense
que les avocats ont vraiment présenté des arguments valables, que
nous avons considérés, mais nous en avons décidé
ainsi.
J'aimerais juste ajouter qu'en Angleterre on dit du Parlement, du moins
dans l'histoire des institutions parlementaires britanniques que c'est le "High
Court of Parliament", c'est-à-dire la cour de dernière instance.
En matière civile, aujourd'hui, je pense que c'est aussi
l'Assemblée nationale qui est la cour de dernière instance. En
effet, nous avons siégé, d'une certaine façon, comme une
cour de justice, en tant que commission. L'Assemblée nationale
également, dans cette cause, va siéger en tant que cour de
justice. Nous pensons que nous avons rendu justice, mais on va laisser le
dernier mot au juge. Merci.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, si vous me permettez,
puisque le député de Notre-Dame-de-Grâce a droit au dernier
mot - ce qui m'apparaît normal - j'interviendrai ici pour ne pas me
joindre aux propos du député de D'Arcy McGee sur la notion du
"High Court of Justice" dans le cas de l'Assemblée nationale, non pas
parce qu'elle est l'Assemblée nationale et non pas "the House of
Commons" mais, essentiellement, parce que ce que nous faisons ici
reflète, très conjoncturellement, ce que des hommes et des femmes
élus peuvent être appelés à décider avec les
pouvoirs de la souveraineté de ce Parlement et non pas parce qu'ils
prétendent agir comme un tribunal. Si nous avions prétendu agir
comme un tribunal, bien que nous soyons dans une situation aussi embarrassante
que celles qu'un tribunal peut connaître dans certaines causes, je pense
que nous aurions procédé de façon tout à fait
autre, notamment à l'égard des plaidoiries de ceux qui
étaient devant nous.
M. Marx: Mais le ministre n'a pas entendu mes derniers mots; j'ai
dit qu'on allait donner le dernier mot au juge. Donc, il y a cette nuance que
j'ai ajoutée à la fin.
Le Président (M. Vaugeois): Mais les circonstances, nous
allons demander au... Oui, M. le député.
M. Scowen: Est-ce que je peux dire un mot?
Le Président (M. Vaugeois): Bien sûr. Auparavant -
peut-être que vous pourriez en tenir compte dans vos dernières
remarques -compte tenu du caractère très particulier de ce projet
de loi, nous allons demander au ministre de faire rapport à
l'Assemblée nationale. M. le député.
M. Scowen: Premièrement, je veux remercier le ministre. Il
a parfaitement raison de dire qu'on a reçu une collaboration parfaite,
très étroite de la part de son personnel. Je veux le signaler
publiquement. Deuxièmement, je suis complètement en accord avec
lui pour que ni lui, ni mes collègues, ni moi ne prenions position
aujourd'hui sur le fond de la question. Il l'a dit et je le
répète parce que je pense que c'est essentiel.
Mes derniers mots sont pour M. Auclair, qui est avec nous aujourd'hui.
On était entouré aujourd'hui, M. Auclair, d'avocats à
gauche et à droite, de conseillers, du ministre et de mes
collègues. Nous ne sommes pas des avocats mais, en cours de route,
durant les trois dernières années où j'ai poursuivi
l'étude de ces trois dossiers, j'ai été capable, comme
citoyen ordinaire, si vous voulez, dans le sens juridique, de constater deux
choses et j'espère que vous allez les apprécier.
Premièrement, ce processus est parfois lent et frustrant et cela
est en partie attribuable à nos faiblesses humaines. Je constate,
même à l'intérieur de cette période de trois ans,
que j'aurais pu aller plus vite si je m'étais levé un peu plus
tôt le matin. Dans ce sens, je m'excuse personnellement; si je peux me le
permettre, je voudrais m'excuser auprès de tous ceux qui ont
été impliqués dans le dossier depuis des années et
des années. J'espère que vous allez comprendre, après
l'expérience d'aujourd'hui, que nous sommes obligés de
défendre tout un système de justice et de lois, qui n'est pas
très fort dans un sens, et il nous faut le défendre avec beaucoup
de soin. On a essayé de ne pas vous oublier, comme citoyen, pendant
toute cette période, mais de ne pas oublier non plus le fait que ce
qu'on essayait de faire pouvait avoir des effets sur plusieurs autres personnes
qui seront obligées de faire valoir leurs droits dans notre
système de justice.
J'espère, au moins, qu'après quinze ans vous êtes
content d'avoir le droit d'entreprendre la prochaine étape. C'est tout
ce qu'on peut faire pour vous aujourd'hui, mais on le fait. Je pense que je
parle pour tout le monde en disant qu'il nous fait plaisir d'être capable
de le faire. Bonne chancel
Le Président (M. Vaugeois): M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: M. le Président, brièvement, c'est
à l'occasion de travaux parlementaires comme ceux qu'on a connus
aujourd'hui qu'il arrive souvent aux députés de trouver un sens
profond au rôle qu'ils ont à jouer. Je voudrais profiter de
l'occasion pour dire à M. Auclair que je lui souhaite de sortir
très vite, le plus tôt possible, de cet enchevêtrement
légal dans lequel il se situe depuis des années.
Le Président (M. Vaugeois): À l'endroit de tout le
monde, puisque je pense que cela a été très
sérieux, je rappellerai un mot de Pierre Le Moyne d'Iberville
après la bataille du Pélican: "Chacun a parfaitement bien fait
son devoir, me semble-t-il." Merci.
La commission des institutions ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 12 h 42)