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Version finale

32nd Legislature, 3rd Session
(November 9, 1981 au March 10, 1983)

Friday, November 13, 1981 - Vol. 26 N° 2

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Question avec débat: Le développement économique régional et plus particulièrement celui de la Côte-Nord


Journal des débats

 

(Dix heures six minutes)

Le Président (M. Jolivet): Bonjour! La commission de l'industrie, du commerce et du tourisme est réunie ce matin pour entendre une question avec débat. Cette question a trait, selon le mandat qui nous est donné, au développement économique régional et plus particulièrement à celui de la Côte-Nord.

Les membres de cette commission sont: M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), M. Biron (Lotbinière), M. Dean (Prévost), M. de Belleval (Charlesbourg), M. Fortier (Outremont), M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges), M. Lavigne (Beauharnois), M. Maciocia (Viger), M. Paré (Shefford), M. Payne (Vachon), M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce).

Les intervenants sont: M. Beaumier (Nicolet), M. Bélanger (Mégantic-Compton), M. Champagne (Mille-Îles), M. Dubois (Huntingdon), M. Grégoire (Frontenac), M. Rocheleau (Hull), M. Rodrigue (Vimont), M. Vaillancourt (Orford).

Les paramètres de cette rencontre sont toujours les mêmes, c'est-à-dire que la personne qui fait la demande d'une question avec débat est la première à intervenir; donc, c'est le député de Vaudreuil-Soulanges qui sera le premier à intervenir. Le second, ce sera le ministre responsable qui a été convoqué, le ministre d'État au Développement économique. Ensuite, de chaque côté de la salle viendront les questions, les interprétations qu'on voudra bien donner, tout en sachant que toute personne, une fois que le débat est lancé, a le droit d'intervenir selon la formule habituelle, c'est-à-dire vingt minutes avec questions et réponses, et on essaie de cerner l'ensemble du sujet entre 10 heures du matin et 13 heures, au début de l'après-midi.

Le débat est maintenant lancé. Oui, M. le député.

M. Perron: Est-ce qu'il y aurait possibilité, avec l'accord de l'Opposition, de faire inscrire le ministre de l'Énergie et des Ressources?

Le Président (M. Jolivet): II n'y a pas d'objection puisque toute personne à ces commissions-là peut intervenir. Je n'ai nommé les gens que parce que c'est la commission normale, soit celle de l'industrie, du commerce et du tourisme qui est convoquée ici, mais toute personne peut intervenir. J'inscris par le fait même comme intervenant le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Scowen: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: ... avant de commencer, est-ce que je peux simplement proposer un petit amendement à nos procédures, soit qu'après les interventions au départ on considère la possibilité de limiter les interventions par la suite à dix minutes? Ces questions avec débat, avec les interventions de vingt minutes, ont tendance à devenir des discours d'un côté ou de l'autre et, si les interventions sont un peu plus courtes, c'est possible, des deux côtés, de poser les questions et d'avoir des réponses plus claires et en plus grand nombre pendant le cours du débat. Je le propose tout simplement comme une suggestion pour le rendre plus intéressant et plus pertinent.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Landry: Je pense qu'on devrait plutôt ajuster nos procédures au déroulement du débat lui-même sans s'enferrer d'avance dans des limitations. Si l'Opposition trouve qu'elle n'a pas assez de temps pour parler, les ministériels tâcheront de se refréner parce que je pense que nous sommes plus nombreux que les gens de l'Opposition. Essayons de travailler en équité. Si vous ressentez quelques frustrations, ce qui n'est pas inhabituel dans la position de l'Opposition, vous nous le ferez savoir et nous tâcherons de rétablir l'équité du mieux qu'on peut sans s'enferrer d'avance dans des règlements trop rigides.

Le Président (M. Jolivet): Je dois vous dire que, le règlement étant ce qu'il est, je tiens pour acquis que le député de Notre-Dame-de-Grâce faisait une suggestion à l'ensemble. Le ministre renchérit sur cette suggestion, je vais donc donner la parole, pour débuter, au député de Vaudreuil-Soulanges.

Exposé du sujet M. Daniel Johnson

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, M. le Président. Je suis heureux de constater, avec le ministre, qu'effectivement, au pouvoir, en général, on est plus nombreux que dans l'Opposition, ce qui pose des difficultés très réelles. Et malgré tout, avec les moyens limités dont nous disposons, nous avons réussi, nous de l'Opposition, à donner suite à des engagements que nous avons pris à l'égard des régions du Québec qui étaient, dans certain cas, misérablement négligées par le gouvernement. Et c'est dans cet esprit que nous nous sommes rendus, certains collègues de la mission développement économique de l'Opposition officielle, à Sept-Îles, dans la région de Sept-Îles, le 15 octobre dernier, afin de constater sur place, afin de rencontrer sur place les véritables problèmes dont les médias nous avaient entretenus, de façon active, depuis neuf ou dix mois sans que, on doit le dire, le gouvernement jusqu'alors n'ait fait quoi que ce soit pour répondre aux désirs, aux aspirations de la population.

C'est donc dans le contexte, et c'est dans cet esprit qu'on a posé la question, des politiques de développement régional dont se targue très souvent le gouvernement que nous avons abordé le problème de la Côte-Nord. On pourrait très facilement déborder dans des débats interminables sur le développement régional comme tel. Mais je crois qu'il est important, par voie d'illustration, de regarder comment le rôle du gouvernement en matière de développement régional se déroule dans le cas précis et direct de la Côte-Nord.

J'aimerais simplement, pour tracer la toile de fond, dresser ce que le ministre lui-même a décrit comme étant les paramètres de l'action du gouvernement en matière de développement régional, c'est-à-dire quels sont véritablement les préalables qui doivent exister lorsqu'un gouvernement, dans l'exercice de son rôle d'acteur et de promoteur de l'activité économique, doit essayer de constater ou de définir avant même d'intervenir. Je m'abreuve à une source intarissable qui a été rapportée dans un numéro spécial sur l'économie du Québec dans les suppléments des hebdos régionaux où le ministre d'État au Développement économique a dressé justement cette liste des préalables. Le ministre lui-même disait qu'il fallait une presse régionale qui se préoccuperait des problèmes de sa région. Si je me réfère aux rencontres que nous avons eues sur la Côte-Nord, le 15 octobre, il n'y a aucun doute dans mon esprit - le député de Duplessis qui est ici présent pourra le confirmer - que les médias locaux et régionaux de la Côte-Nord sont extrêmement actifs dans la promotion de la clarification du problème de la crise que traverse actuellement la Côte-Nord. Ce préalable-là existe. Il y a sensibilisation de la population.

Le deuxième préalable décrit par le ministre lui-même, c'est la volonté des gens de la région de se prendre en main, de définir les problèmes, d'essayer d'envisager les solutions possibles et tout ce qui en découle. Encore une fois, à l'occasion de notre visite, nous avons constaté que les intervenants, les agents locaux sont extrêmement actifs, extrêmement bien organisés, extrêmement soucieux, je dirais qu'ils sont embarqués dans la résolution du problème économique de la Côte-Nord.

Il y a eu, à titre d'exemple, un sommet économique, en mars dernier, qui réunissait tous ces intervenants à Sept-Îles, sommet qui a donné lieu à un rapport que, malheureusement, selon ce qu'on a entendu sur les lieux, le premier ministre, lors de sa tournée électorale dans la région, n'avait même pas consulté. C'est l'opinion des gens du milieu qui ont exprimé leur déception lors de notre passage, à savoir qu'il n'y a pas de volonté politique parce qu'il n'y a pas d'information au niveau des autorités politiques sur les problèmes de la Côte-Nord.

Troisièmement, le ministre dit: II faut absolument que les ressources locales soient également engagées dans la solution des difficultés économiques qui peuvent avoir cours dans la région. Dans ce sens-là, encore une fois, ne serait-ce qu'au niveau des ressources humaines, on a pu constater que toute la base économique, tous les intervenants, les syndicats, les commerçants, les patrons de petites entreprises, à des degrés divers, les gens qui travaillent dans les grandes entreprises sont effectivement préoccupés et ont pris l'engagement de tenter de régler, par leurs propres moyens, en attendant, le problème de la Côte-Nord. (10 h 15)

Quant au niveau des ressources financières, c'est là le quatrième élément, elles sont, évidemment, compte tenu du ralentissement économique de la Côte-Nord, beaucoup plus limitées qu'autrement elles ne le seraient. C'est à ce moment-là que le quatrième élément, l'appui du gouvernement du Québec, doit intervenir.

Les préalables posés par le ministre existent, et il faut maintenant que le gouvernement du Québec agisse dans les dossiers qui sont extrêmement chauds dans cette région, après la solution desquels les citoyens de la région attendent encore avec beaucoup de patience. Avec tellement de patience que dans les journaux on peut même dire que les régions attendent l'aide du gouvernement, sauf sur la Côte-Nord où on n'attend pas parce qu'on n'en a aucunement besoin, M. le Président. C'est précisément parce qu'on est maintenant déçu de voir qu'il

ne sert à rien d'attendre. C'est l'objet des commentaires qu'on entend. Ils sont déçus d'attendre sans résultat l'aide du gouvernement dans ces dossiers.

Ce dossier, de façon objective et selon les mesures les plus récentes qui sont disponibles, celles du mois dernier, fait état d'un taux de chômage de 25,4%, et le député de Duplessis est au courant. 25,4% de taux de chômage sur la Côte-Nord. Un chiffre qui, à sa face même, est probablement sous-évalué parce que vous savez fort bien qu'en raison de la mobilité de certaines des classes de métier qu'on retrouve dans ces régions les gens qui n'ont pas de travail n'y demeurent pas. Soit qu'ils retournent vers la Gaspésie, soit qu'ils remontent le Saint-Laurent, ils se dirigent vers d'autres régions tout simplement, dont, très souvent, ils sont originaires de toute façon.

Ce taux de chômage de 25,4%, finalement, n'est qu'une portion à déterminer, mais déjà très dramatique, du problème du chômage sur la Côte-Nord.

Le taux de vacance atteint pour les immeubles résidentiels, à Sept-Îles, au 1er octobre est d'environ 22%. C'est extrêmement sérieux de voir que des gens qui, n'ayant plus de travail, désireraient céder leur résidence sont incapables de le faire. C'est un cercle vicieux dont il est absolument impossible de sortir dans les conditions actuelles de manque d'injection d'aide de la part du gouvernement.

Ce n'est pas un problème récent. Je pense qu'on conviendra qu'à tout le moins, le début du déclin de la Côte-Nord remonte, si on veut déterminer une date, au 30 octobre 1978, lors de la journée du fer au cours de laquelle un tas d'intervenants, qui étaient préoccupés par les marchés mondiaux du fer, par l'activité de transformation du minerai, d'exploitation de ce minerai sur la Côte-Nord, se sont réunis et ont constaté à l'unanimité que la conjoncture de ce marché, pour ce produit, était extrêmement défavorable pour la région de la Côte-Nord. Il nous a semblé à nous, de l'Opposition, que, devant l'habitude constante du gouvernement de déterminer des plans d'ensemble à long terme - ce qui, en soi, est extrêmement louable - devant cet engagement toujours renouvelé de planifier à long terme le développement économique du Québec, on n'a pas, depuis maintenant trois ans et un mois et demi, fait quoi que ce soit pour ajuster ce plan de développement économique et tenir compte de la réalité qui est vécue et qui a été constatée et diagnostiquée, en octobre 1978, sur la Côte-Nord.

Il n'y a pas eu d'action, il y aurait peut-être eu planification, il y en a peut-être. Le ministre répondra peut-être qu'effectivement, les plans de développement de l'activité économique ont été ajustés en conséquence, mais les gens de la région attendent encore de l'action, une action qui aurait pu se traduire, si on en croit les promesses qui existent depuis janvier 1981, dans le portrait de la Côte-Nord, des promesses qui remontent, dans certains cas, au 11 mars où on prévoyait, pour la mi-mars, c'est-à-dire dans les jours qui suivaient l'émission des brefs de la dernière élection, le début du plan de relance et de redressement de la situation économique de la Côte-Nord.

Les élections passent et, le 2 mai, on annonce 35 000 000 $ d'investissements dans ce plan de relance sur une période de trois ans qui devrait prendre forme et commencer véritablement en juillet, toujours en juillet dernier. Le 3 juin, on rapproche les échéances, c'est devenu le 15 juin pour le début du plan de relance. On présume que le Conseil du trésor, les comités interministériels, le cabinet, tout le monde se penche là-dessus au gouvernement du Québec. Sauf que, le 18 juin, trois jours après cette échéance magique, on annonce que ce sera d'ici trois semaines, un mois au plus tard que le plan de relance sera commencé et que des sommes d'argent nécessaires au développement de la région seront injectées.

Aux dernières nouvelles, on se promène et on promet 115 000 000 $ sur cinq ans; alors je ne vois pas ce qui empêche aujourd'hui les gens du gouvernement de nous promettre au moins 1 000 000 000 $ sur les vingt prochaines années. Ce serait extrêmement agréable d'entendre ça aujourd'hui et je suis sûr que les gens de la Côte-Nord attendent avec beaucoup d'impatience le dévoilement des intentions du gouvernement à cet effet.

Qu'est-ce qu'on va faire de façon pratique? On peut jouer avec des échéanciers, on peut rapprocher des projets, on peut rapprocher le début de certains travaux de la date d'aujourd'hui, on peut jouer avec les cycles budgétaires, les prévisions budgétaires du gouvernement et engager aujourd'hui des sommes pour l'avenir, qui est presque imprévisible. Mais ce sont surtout les nouveaux montants; qu'est-ce qui est prévu spécifiquement dans le plan de développement économique pour la Côte-Nord? Quelles sont les nouvelles sommes, à brève échéance, qui seront investies par le gouvernement dans le plan de relance de la Côte-Nord? Quelle est véritablement la philosophie du gouvernement sur l'orientation du développement de la Côte-Nord? Est-ce qu'on s'est même penché sur la vocation propre de cette région? Est-ce qu'on a remis en question la vocation propre de cette région?

Les gens de la région l'ont fait, ils ne veulent plus simplement dépendre de l'exploitation d'une richesse naturelle, le fer, et avec raison. On doit diversifier et ne pas

mettre tous ses oeufs dans le même panier. C'est une région maritime, grandement, c'est pour ça qu'on entend surtout parler des pêches, donc, de toutes les industries de transformation possibles et imaginables, mais on attend encore que des promesses précises soient réalisées. C'est une région maritime, donc, on parle d'un port, on parle d'une voie d'accès au Saint-Laurent, qui est une grande voie de circulation qui va au coeur même de l'Amérique du Nord, au coeur industriel de l'Amérique du Nord. Quand va-t-on se décider à se joindre aux gens des Grands Lacs qui ont mis sur pied des comités, aux gens de l'Ontario qui ont mis sur pied des comités, qui ont déposé des rapports sur l'exploitation du fleuve Saint-Laurent, de la voie maritime et des Grands Lacs? Qu'est-ce que le gouvernement du Québec attend pour se joindre à ces efforts, pour développer autour du Saint-Laurent - j'en fais la suggestion - tout un ensemble de politiques concertées dont un des premiers bénéficiaires serait la région de la Côte-Nord?

Il est évident que c'est tout un programme qui appelle une réponse précise de la part du gouvernement aux attentes des gens de la région de la Côte-Nord. Déjà, sans plus tarder, je passe le micro au ministre d'État au Développement économique, qui est accompagné - on l'a souligné - par deux de ses collègues du cabinet. C'est la première fois, de mémoire de parlementaires, que, dans ce format de questions avec débat, le gouvernement manifeste finalement assez d'intérêt à ces questions pour ne pas y envoyer un seul représentant.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, vous avez maintenant la parole.

Réponse du ministre M. Bernard Landry

M. Landry: Je vous remercie, M. le Président. Les ministériels remercient également l'Opposition de leur donner cette occasion de passer en revue pendant une période de temps relativement longue un des problèmes régionaux les plus cruciaux, je dirais même le problème régional le plus crucial qui se pose dans l'espace économique québécois présentement, le plus crucial, dis-je, parce que nous sommes en face d'une région qui non seulement est déprimée et sinistrée, mais surtout d'une région dont les possibilités naturelles: la situation géographique, le sous-sol, les ressources humaines, la main-d'oeuvre, une des plus jeunes, des plus actives du Québec, ont eu pour habitude d'être employées presque à pleine capacité depuis pratiquement 1950. Il ne s'agit pas d'une région qui n'a pas pris son décollage économique comme une autre au Québec - il y en a peut-être une autre qui n'a pas pris ce décollage - mais c'est une région qui avait même décollé d'une façon brillante. Or, pour des raisons de conjoncture qu'on va essayer d'approfondir le plus honnêtement possible, elle se retrouve dans la situation lamentable que l'on connaît. C'est précisément parce que nous considérons cette situation comme extrêmement grave que le député de Duplessis est à mes côtés, lui qui vit sans relâche les problèmes de cette région, est en contact constant avec ses administrés.

Quand on considère que, lorsqu'il parcourt son comté pour aller de Sept-Îles à Lourdes-de-Blanc-Sablon, il fait la distance de Montréal à Sept-Îles et il n'a vu à peu près que trente villages, c'est dire quelle est la responsabilité d'un député d'une étendue aussi vaste. C'est la raison pour laquelle aussi mon collègue de l'Énergie et des Ressources m'accompagne ici ce matin, de même qu'un certain nombre d'autres collègues.

Le gouvernement ne prend pas cette affaire à la légère. Le gouvernement est catastrophé par ce qui se passe sur la Côte-Nord et nous allons essayer de voir les causes, de voir le genre d'efforts que nous avons déployés et de voir le genre d'efforts que ceux qui ont les moyens et les juridictions n'ont pas déployés.

Mais commençons logiquement par nous demander pourquoi la Côte-Nord, une des régions économiques les plus solides du Québec, se retrouve dans l'état où elle est aujourd'hui. La Côte-Nord est appuyée sur une industrie d'extraction primaire et de transformation élémentaire en semi-produits de sa richesse naturelle principale, le minerai de fer. Le minerai de fer, transformé en acier et autres produits métalliques, est largement dépendant, d'une part, de la construction automobile et, d'autre part, de la construction tout court: armatures, structures, poutrelles, etc.

Dans le continent nord-américain, ces deux secteurs névralgiques, construction et construction automobile, connaissent une crise sans précédent qui a fait que la demande pour le métal s'est effondrée et que la demande pour le minerai a fini par être atteinte. En d'autres termes, ce qui se passe sur la Côte-Nord a les mêmes causes que ce qui s'est passé dans l'industrie de l'automobile des États-Unis d'Amérique et de l'Ontario, sauf que les travailleurs de la Côte-Nord sont installés dans une production qui est en amont des autres, mais qui est frappée exactement au même titre et dans les mêmes proportions. (10 h 30)

Je ne peux pas faire la genèse de cette crise sans faire un parallèle, un parallèle que les gens de la Côte-Nord doive étudier de près, de même que tous les citoyens du

Québec et l'Opposition officielle si elle est encore capable de réagir à ce genre d'argument, en dépit de son habituel aveuglement vis-à-vis de tout ce qui concerne l'action du gouvernement du Canada. Le parallèle est le suivant: La crise de l'automobile à laquelle j'ai fait allusion a déterminé des problèmes aussi graves, sinon davantage, chez les constructeurs d'automobiles ontariens et les constructeurs de machines agricoles. Je pense à Massey-Ferguson, à Chrysler, à Ford et à d'autres industries de ce genre situées dans le sud de l'Ontario, situées en partie, d'ailleurs, dans la circonscription électorale représentée par le ministre fédéral de l'Industrie et du Commerce.

Quand cette crise est survenue, à Toronto, à Oshawa, à Windsor et surtout à Ottawa, "of all places", on a sorti la croix et la bannière, et croix et bannière entendent des centaines de millions. Combien le gouvernement du Canada a-t-il mis pour rescaper Massey Ferguson? Combien le gouvernement du Canada a-t-il mis pour rescaper Chrysler? Combien le gouvernement du Canada a-t-il mis pour aider Ford à passer à travers ses difficultés? Si vous additionnez tous ces montants qui sont déjà dépensés, vous dépassez le milliard de dollars en dépenses directes ou en garanties aux firmes. Pourquoi est-ce qu'on a fait cela? On a fait cela parce qu'il y avait des femmes à Windsor et des hommes à Oshawa et dans tous les centres de construction automobile du sud de l'Ontario qui étaient en chômage, et nul ne peut blâmer le gouvernement du Canada d'avoir mis ces centaines de millions et ce milliard de dollars. Cela s'est fait au vu et au su de la population du Québec et de la Côte-Nord et de toute la population du Canada. Or la cause était rigoureusement la même: une crise dans l'industrie de l'automobile détermine une action, avec nos taxes, d'une énergie extraordinaire de la part du gouvernement du Canada en Ontario.

Mon parallèle est pour amener l'Opposition à admettre ceci. C'est une période de questions avec débat, cela pourrait aussi être une période de débats avec questions. J'aimerais entendre votre opinion là-dessus.

Est-ce qu'il est plus grave d'être chômeur ou chômeuse à Oshawa qu'à Sept-Îles ou à Port-Cartier? Comment se fait-il que le gouvernement, qui détient les véritables leviers économiques et les immenses budgets, trouve qu'il y a lieu de déclencher une opération sans précédent pour aider des braves gens du sud de l'Ontario mais ne trouve pas le moyen de dépenser plus de 300 000 $, écoutez bien cela, pour la région québécoise de la Côte-Nord?

Jusqu'à maintenant, le gouvernement, qui y est allé à coups de centaines de millions et de milliards de dollars en Ontario pour le même problème, a dépensé, pour des études, sur la Côte-Nord 100 000 $ pour Tembec, 100 000 $ pour le papier Cascade, 95 000 $ à une firme d'ingénieurs pour étudier un projet à Pointe-Noire. Grand total, 295 000 $.

Les voyages en avion des ministres fédéraux vers le sud de l'Ontario ont coûté plus que cela dans la crise de l'automobile. Pourquoi ce traitement inégal? Pourquoi l'Opposition n'a-t-elle pas songé à évoquer, dans l'exposé qu'a fait le député de Vaudreuil-Soulanges, ce traitement scandaleusement différent, suivant qu'on chôme dans le sud de l'Ontario ou qu'on chôme à Sept-Îles ou qu'on est congédié de l'usine de bouletage de Pointe-Noire?

C'est un sujet de réflexion que les populations locales, à mon avis, connaissent. Le député de Vaudreuil-Soulanges a parlé des populations locales. Je vais lui en parler un peu, moi aussi, à coups de statistiques. D'abord, je conviens d'emblée que les gens de la Côte Nord forment un des plus beaux fleurons de la main-d'oeuvre active du Québec, en termes de moyenne d'âge, de moyenne de scolarité, de capacité de gérance, d'administration et également de travaux pénibles. La manutention du minerai de fer, à moins 30 degrés, est une activité qui n'est pas réservée à des gens de faible constitution.

Qu'est-ce qu'ils font les gens de la Côte-Nord vis-à-vis de ces problématiques presque éternelles entre Québec et Ottawa? D'abord, ils ont compris depuis longtemps que si les vrais pouvoirs économiques, les vrais moyens d'intervention et toutes les taxes étaient à Québec, les retombées, les chances de retombées sur la Côte-Nord seraient incommensurablement supérieures. Cela saute aux yeux.

En 1976, le comté de Duplessis, qui est le plus touché, a voté pour notre formation politique à 59,2% de ses suffrages exprimés. En 1976, déjà il avait compris que c'était la consolidation à Québec qui ultimement mènerait la consolidation de la Côte-Nord. Les événements que vous avez décrits sont survenus. La crise de l'automobile s'est amorcée. Les gens de la Côte-Nord ont continué leur réflexion. En 1981, ils ont voté à 65,3% en faveur du député de la majorité gouvernementale et du député à Québec. Et au référendum, ce qui m'apparaît encore plus probant, ces gens-là ont voté à beaucoup plus de 10% au-delà de la moyenne nationale des oui exprimés. La Côte-Nord a voté à 54,7. Alors, quand le député de Vaudreuil-Soulanges me dit que la population locale est animée, oui. Qu'elle est lucide, oui. Qu'elle sait quels sont les bons moyens à prendre, oui. Cela va de soi.

En conséquence, cela veut dire que le gouvernement du Québec, s'il n'a pas accès aux clés fondamentales de la solution du

problème, s'il constate avec effarement le traitement discriminatoire à un niveau invraisemblable dont ont été victimes les habitants de la Côte-Nord par rapport à ceux d'Oshawa et des centres de l'automobile, n'a pas le droit et n'a pas l'intention non plus de se laver les mains. Et il ne s'est pas lavé les mains. Dès le début de cette crise, avec nos modestes moyens de gouvernement provincial - avec beaucoup de "r", vous aimez cela un gouvernement provincial vous autres, vous êtes commis à ce que notre gouvernement ici et cette Assemblée nationale restent à jamais provinciaux - avec nos faibles moyens de provinciaux, nous sommes en mesure de dire, aujourd'hui, que nous avons consacré à la Côte-Nord, beaucoup plus d'énergie, d'une part, et d'argent même, d'autre part, c'est cela qui est paradoxale, que le gouvernement qui est responsable de la crise, que le gouvernement fédéral qui a répandu la manne sur les régions du sud de l'Ontario.

Je vais vous donner quelques chiffres. D'abord, dès les premiers signes de la crise, tous les mécanismes d'intervention en région du gouvernement du Québec ont été alertés, ont reçu comme directive formelle de privilégier tous les projets et toutes les interventions requises dans deux régions du Québec: la Côte-Nord et la région de l'amiante. Avec le résultat que dans la seule opération solidarité économique, 340 emplois ont été créés sur la Côte-Nord, dont l'immense majorité permanente c'est-à-dire 255. 1 164 000 $ dépensés pour arriver à ces fins, quatre fois plus que le gouvernement du Canada. Somme minime, je n'en disconviens pas; à gouvernement provincial, dépenses proportionnées. Somme minime à côté de ce qui a été fait à Windsor et à Oshawa, mais quatre fois plus que ce que les fédéraux ont fait.

Les équipes de l'OPDQ en particulier, avec une vigueur admirable, se sont rabattues sur cette région, ont affecté du personnel spécial à la région. En même temps que cela se poursuivait, le gouvernement, toujours avec les moyens dont il dispose, a commencé à établir un plan. Le député de Vaudreuil-Soulanges réclame des plans bien que sa philosophie politique soit totalement à l'encontre des plans; vous répandez dans toutes les régions du Québec que le gouvernement intervient trop et qu'il devrait se retirer de l'activité économique. Il faut dire que le député de Vaudreuil-Soulanges l'a moins dit parce qu'il est rouge depuis moins longtemps que les autres, mais les autres nous ont servi cela pendant cinq ans. Vous allez avoir des ajustements de philosophie à faire avec mon honorable ami, le député de Notre-Dame-de-Grâce, parce que, sur ces questions, en général nous ne nous entendons d'aucune manière. Il est anti-interventionniste et notre gouvernement social-démocrate est interventionniste. Mais puisqu'on a votre caution, M. le député de Vaudreuil-Soulanges, et que vous réclamez des interventions, je dois vous dire...

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le...

M. Landry: Oui. Est-ce que le député de Notre-Dame-de-Grâce pose une question de privilège parce que je l'ai appelé honorable?

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, il n'y a pas de question de privilège. Vous aurez l'occasion de rectifier les faits lors de votre intervention, si vous le désirez.

M. Scowen: II n'est pas question de régler les questions de fait qui touchent directement un membre de l'Assemblée nationale quand un ministre dit quelque chose qui est effectivement un mensonge.

Le Président (M. Jolivet): Non, je pense que vous aurez l'occasion de le faire puisque vous allez intervenir. Dans ces circonstances, la commission parlementaire présentement réunie n'a ni question de privilège, ni motion, ni vote. Vous aurez certainement l'occasion de revenir tout à l'heure.

M. Scowen: On va s'amuser royalement comme cela.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, vous pouvez continuer.

M. Landry: Quoiqu'il en soit, M. le Président, même s'il n'y a pas de question de privilège dans la procédure de cette commission, je ne voudrais d'aucune manière léser ceux de mon ami, le député de Notre-Dame-de-Grâce. Si nous divergeons sur les faits, je lui rappelle que la question de privilège est réservée pour la défense à des attaques personnelles, à l'intégrité, etc. Il est bien entendu que d'aucune manière... Mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce est une assez bonne cible sur le plan de ses idées politiques et économiques que je n'ai pas besoin de l'attaquer personnellement pour avoir raison de lui sans trop de difficultés.

Je reviens à mon propos. Le député de Vaudreuil-Soulanges parle de plan, d'intervention, bien sûr. Depuis des mois, dans les ministères à vocation économique, au ministère de l'Énergie et des Ressources en particulier, une grande partie de la réflexion se fait sur la problématique de la Côte-Nord, de même qu'au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Mais nous n'allons pas, d'une façon démagogique, promettre aux gens de la Côte-Nord des solutions miracles qui,

d'aucune façon, ne pourraient les aider à faire face à la conjoncture présente pour liquider ne serait-ce qu'une partie des effets néfastes de la politique fédérale. Surtout nous n'allons pas faire croire à ces populations de la Côte-Nord, qui, de toute façon, ne le croiraient pas, c'est entendu, que le problème de la diversification économique de la Côte-Nord va se régler rapidement. C'est vrai qu'il y a là un travail de diversification à mener, diversification dans l'activité primaire, donc dans les minéraux que l'on extrait du sous-sol de la Côte-Nord, diversification également dans l'activité secondaire, c'est-à-dire l'industrie de la Côte-Nord, et également diversification dans l'activité portuaire.

Le député de Vaudreuil-Soulanges a parlé longuement du Saint-Laurent, des ports. Encore là, je lui rappelle que le gouvernement du Québec a amorcé depuis longtemps ses travaux pour une politique du Saint-Laurent, mais je dois lui rappeler aussi que la plupart des juridictions essentielles attachées à la voie fluviale, la navigation, les ports, les permis de pêche en haute mer et dans le golfe, ne relèvent pas du gouvernement qu'ils veulent voir à jamais provincial. Il ne faut pas nous demander des interventions quand les gens qui ont fait campagne pour le non se sont évertués à démontrer qu'elles devaient relever du gouvernement d'Ottawa. (10 h 45)

Le Président (M. Jolivet): Merci, M. le ministre.

M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, on m'avait averti, lorsque nous avons inscrit la question avec débat au feuilleton, à tort, je le croyais vraiment, que le ministre d'État au Développement économique était un spécialiste dans la non-réponse aux questions précises qui lui sont posées, qu'il avait une tendance très marquée à blâmer de façon extrêmement articulée le gouvernement fédéral pour la plupart des maux qui regardent l'activité économique du Québec, que, par ailleurs, il se réclamait très facilement de la capacité inégalée, même en regardant le Japon, l'Europe et tout ce que vous voulez, de créer des emplois de la part d'un gouvernement du Québec, que le ministre était un spécialiste en contradiction interne dans ses discours. J'ai nié avec véhémence, ayant connu le titulaire de ce ministère il y a une vingtaine d'années, au collège et à l'université, que cela pouvait être le cas avec 20 ans de maturité de plus. Parce que, effectivement, il était comme cela à l'époque.

Une voix: On ne change pas beaucoup.

Une voix: II n'a pas changé.

Argumentation

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Malheureusement, les années n'ont rien changé et ce qui est surtout pénible pour les gens de la Côte-Nord, c'est de voir que le ministre qui est chargé des activités du développement économique a commencé ses propos en parlant de la catastrophe, de la dépression et du sinistre dont on est témoin sur la Côte-Nord. Les premiers à s'opposer, et, avec eux, j'espère, leur député, seront les gens de la Côte-Nord, qui jamais n'ont exprimé leur sentiment d'être sinistrés, d'être déprimés ou paniqués.

Si on veut évidemment créer l'impression que cela ira toujours mal sur la Côte-Nord, on n'a qu'à employer des propos négatifs à l'endroit des gens de la Côte-Nord. Nous les avons rencontrés, il n'en est rien. Les gens de la Côte-Nord ont réuni les conditions que le ministre lui-même souhaite voir avant que le gouvernement du Québec n'intervienne. On va y revenir, la presse régionale est embarquée dans les solutions. Les instances locales économiques sont embarquées dans ces solutions. Les ressources humaines sont consacrées presque exclusivement à la solution des problèmes d'activité économique de la Côte-Nord. Et le seul intervenant qui a lui aussi les moyens, parce qu'il les a promis, c'est le gouvernement du Québec qui ne donne pas suite à ses engagements.

Le ministre s'est fait fort de démontrer que c'était la conjoncture à l'égard de la construction et de la fabrication d'automobiles qui était responsable en grande partie de la faiblesse du marché pour le minerai de fer. On pourrait présumer, on pourrait être aveuglé par l'évidence que, si on aide l'industrie automobile, cela va se répercuter sur le marché du fer. Or, effectivement, il y a un gouvernement qui s'est lancé à coups de milliards, nous dit-on de l'autre côté de la Chambre, dans l'amélioration des conditions et de l'aide à la survie de l'industrie automobile. Cela devrait normalement et cela aide inévitablement les producteurs d'acier, donc, les producteurs, les exploiteurs du minerai de fer.

Le gouvernement fédéral est responsable du taux de chômage ici, mais le gouvernement du Québec réalise des miracles en création d'emplois en même temps. Il faudrait savoir où est la vérité. La vérité est au-delà de ces chiffres-là. La vérité est au niveau des engagements que le gouvernement a contractés depuis janvier 1981. On n'attend pas après le fédéral ni après personne pour réaliser des voies d'accès, pour donner suite à des engagements d'améliorer les équipements communautaires, de loisir, d'éducation. Ce n'est pas la faute du fédéral si, après des promesses de budget doublé pour la pêche, il n'y a encore aucune

retombée dans la région de Sept-Îles et Port-Cartier, ce qui ne répond absolument pas en ampleur aux représentations qui ont été faites par les gens de la région.

On a parlé de 115 000 000 $. Les gens de la Côte-Nord veulent savoir où est le premier million et quand il viendra. Il sera suivi d'un deuxième, d'un cinquième et d'un dixième million, mais quand? C'est ce qu'ils veulent savoir. On ne veut pas savoir si le résultat du référendum est une preuve de lucidité ou si le résultat des élections est une preuve d'intelligence, ça n'a rien à voir avec le débat. Nous sommes allés voir les gens de la Côte-Nord, nous ne leur avons pas demandé, en aucun cas, leur allégeance politique. Le député de Duplessis connaît les gens que nous avons rencontrés et il connaît les maires des différentes villes que nous avons rencontrés, sans présumer des intentions de vote de ces gens ou de leur historique d'organisation ou de contribution à l'activité politique de la Côte-Nord. Le député de Duplessis sait fort bien qu'il y a des gens de tous les partis qui sont impliqués dans cet effort de redressement et de relance de cette région.

La question était, il me semble, fort précise. D'où vient le premier million? D'où viendra le cinquième million qui relève encore et relèvera toujours, je l'espère, moi aussi, du gouvernement du Québec et de ses actions? Il y a des choses à faire, à moins qu'il n'y ait rien à faire et que ce soient des promesses en l'air. Il y a des choses qui relèvent carrément des budgets des différents ministères. Il y aurait huit ministères d'impliqués à l'heure actuelle, y compris le ministère des Affaires municipales, apparemment. Qu'est-ce qu'ils ont fait? Quels sont les engagements que chacun de ces huit ministères a contractés? Quel est l'échéancier précis pour la réalisation de ces promesses? Quels sont les plans directeurs? On ne se lance pas dans la planification, loin de moi l'idée de suggérer des exercices de planification; j'ai clairement parlé de plans d'action à l'intérieur d'une analyse à long terme de ce qu'il faut faire pour changer la vocation de la Côte-Nord, pour diversifier ses activités, c'est la moindre des choses. Les grosses entreprises capitalistes font de la planification et le ministre le sait fort bien, mais elles font aussi de l'action. Qu'en est-il, aujourd'hui - il n'y a que trois ministres ici aujourd'hui, on présume qu'il en manque cinq - des budgets que chacun d'eux administre? Quelles sont les actions précises dont on a fait miroiter l'existence aux yeux des gens de la Côte-Nord? Est-ce qu'on pourrait avoir une réponse à cette question extrêmement précise, M. le Président?

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Landry: J'ai, dans mon introduction générale, évoqué beaucoup de choses. Celui qui vit ces choses au jour le jour, le député de Duplessis, - et j'espère que le député de Vaudreuil-Soulanges aura la bonne foi de le reconnaître, j'ai déjà fait allusion à une somme de 1 500 000 $ qui est déjà dépensée, ce qui est quatre fois plus que celle du fédéral - qui vit sur la Côte-Nord et qui est élu par ces gens, va aller plus loin dans l'énumération détaillée. J'espère que le député de Vaudreuil-Soulanges aura la bonne foi de reconnaître que notre gouvernement a agi incommensurablement plus vite et avec plus de moyens que le gouvernement responsable de la crise. J'aimerais qu'il provoque, une prochaine fois, une question avec débat sur l'inertie du gouvernement fédéral sur la Côte-Nord et une analyse comparée de ce qu'il a fait à Windsor et à Oshawa et ce qu'il a fait à Sept-Îles et à Pointe-Noire. On pourrait passer un beau vendredi matin là-dessus si le député de Vaudreuil-Soulanges - la semaine prochaine, dit mon collègue, et nous serions prêts - avait l'honnêteté, s'il veut vraiment servir la Côte-Nord, d'aller jusqu'au fond de l'analyse.

Écoutons maintenant, avec votre permission, M. le Président, le député de Duplessis.

Le Président (M. Jolivet): M. le député...

M. Scowen: Question de règlement.

J'accepte que le député de Duplessis parle maintenant mais je pense que, d'après le règlement, le principe est l'alternance. Je ne pense pas que le ministre d'État au Développement économique soit le maître de cérémonie de cette affaire. On va écouter deux discours de suite du côté gouvernemental et je vous demande de proposer au ministre et aux autres députés de ce parti qu'ils respectent le règlement dont ils réclament eux-mêmes le respect.

Le Président (M. Jolivet): Sur une question... juste un instant...

M. Landry: Est-ce que mon intervention n'était pas tout simplement le contrepoids de la fausse question de privilège et de l'opération de diversion qu'avait tenté de faire le député de Notre-Dame-de-Grâce?

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, je vais régler le problème en disant que j'ai cru comprendre, dans la deuxième intervention du député de Vaudreuil-Soulanges, une question posée au ministre. J'étais cependant sur le point de donner la parole au député de Duplessis, puisque c'est lui qui l'avait demandée, en alternance, je la cède donc au député de Duplessis.

M. Denis Perron

M. Perron: Merci, M. le Président. Si vous permettez, je voudrais relever certains points qui ont été soulevés par le député de Vaudreuil-Soulanges et qui se rapportent, par exemple, au fait que le gouvernement n'a rien fait depuis un certain temps sur la Côte-Nord et spécialement dans le comté de Duplessis. Il parle en même temps de promesses qui auraient été faites. D'autre part, je voudrais soulever des points et donner des informations aux députés de l'Opposition sur divers projets qui ont déjà été approuvés et des projets d'avenir en rapport avec le plan d'intervention, soit le plan de redressement.

Premièrement, le gouvernement du Québec n'a rien fait sur la Côte-Nord. Si vous permettez, M. le Président, je vais faire une petite rétrospective en rapport, par exemple, avec la route 389, la route Manic-Gagnon, ce que le député de Vaudreuil-Soulanges a d'ailleurs soulevé, si ma mémoire est bonne, lorsqu'il est intervenu à Sept-Îles, au poste CKCN. En passant, M. le Président, pour votre information et pour l'information des personnes ici présentes de ceux et celles qui nous écoutent, le député de Vaudreuil-Soulanges a parlé des agents locaux, de beaucoup de personnes qu'il a rencontrées lorsqu'il est passé dans le comté de Duplessis, surtout à Sept-Îles. Je voudrais lui dire, premièrement, que le comté de Duplessis, ce n'est pas seulement Sept-Îles, ça part de Pointe-aux-Anglais et ça va jusqu'à Blanc-Sablon, ce qui inclut les villes de Gagnon, Fermont et Schefferville. Il faudrait qu'il patauge pas mal longtemps pour comprendre ce que c'est le comté de Duplessis avec toutes ses disparités, je peux vous l'assurer.

Les personnes qu'il a rencontrées spécialement, c'est l'ancien candidat du Parti libéral du comté de Duplessis, qui est actuellement à CKCN.

M. Lessard: Très brillant, très brillant.

M. Landry: Un agent.

M. Lessard: Il était très brillant.

M. Perron: Il a toutes les informations...

M. Landry: Il est remarquable, c'est un agent libéral.

M. Perron: Oui, toutes les informations qu'il vient de soulever, il les a assurément obtenues de lui. Si ma mémoire est bonne, durant cette journée du 15 octobre, vous avez rencontré le soir 57 personnes qui étaient justement de votre allégeance politique, dans un endroit de Sept-Îles.

Écoutez, lorsqu'on regarde ce que vous avez fait lorsque vous êtes venu dans le comté de Duplessis, vous avez un maudit bout de chemin à faire pour faire ce que j'ai fait depuis quatre ans et ce que le gouvernement du Québec a fait depuis quatre ans et demi. Vous pouvez en être assuré.

Je reviens à la route 389 pour vous dire que, de la façon dont vous procédiez et pour nous reporter à la façon dont nous procédons, en 1972, dans le journal Le Nordique, lors des élections partielles, en rapport avec la route 389, sur laquelle il y avait 95 milles de route à construire, le Parti libéral, par le biais de son candidat, à ce moment-là, avait déclaré: L'hiver prochain - remarquez bien, en 1972 - vous irez à Manic 5 en auto. Vous imaginez-vous, construire une route, sur une longueur de 95 milles, en une année? C'était pratiquement impossible. En 1973, vous avez fait la même chose avec le candidat du Parti libéral, qui a été réélu à ce moment-là, toujours le même point, mais jamais de travaux faits. Par contre, en 1976, lorsqu'on a été élu, un des premiers dossiers sur lesquels j'ai travaillé, c'est celui de la route 389. Actuellement, au moment où on se parle, il y a près de 15 000 000 $ engagés dans cette route et il y a plus de 60 milles de route de construits. (11 heures)

Nous n'avons pas fait entrer de la machinerie, durant la période électorale, à chaque bout de la route, soit à Gagnon ou encore à Manic, pour faire croire aux gens qu'on était pour la construire et, après les élections, retirer la machinerie. On a amené la machinerie là et on a travaillé. On a fait travailler des gens et on a fait faire tout le travail en régie. Cela fait près de cinq ans que les travaux durent. On avance, peut-être pas aussi rapidement que la population le voudrait, mais on avance.

Pour revenir directement à l'axe Sept-Îles-Port-Cartier, vous avez parlé de promesses qui avaient été faites. Pour votre information, messieurs de l'Opposition, celui qui vous parle, et encore moins le ministre Landry lui-même, n'a fait de promesse de quoi que ce soit. Ce qu'on a dit, c'est ceci, et je me dois de faire une rétrospective en rapport avec le plan de redressement, le plan d'intervention, si vous voulez: Le 9 janvier 1981, la compagnie Iron Ore faisait sa déclaration de mise à pied de 650 personnes, 500 à Sept-Îles et 150 à Schefferville. Le 18 janvier, le ministre d'État au Développement économique, M. Landry, demandait à l'OPDQ et à la conférence administrative régionale de lui soumettre un rapport sur des projets susceptibles d'être mis de l'avant dans un délai tout de même assez court. Le 19 mars, le premier rapport lui parvient. C'est lors de cette journée que le ministre lui-même a pris la décision de retourner le rapport puisque le rapport, selon lui et selon moi

aussi, n'était pas complet.

Le 11 juin, un mémoire est remis par le ministre Landry au CMPDE. Le 3 septembre, le mémoire est rendu au Conseil des ministres et celui-ci, en tenant compte de certains événements et certains problèmes économiques, comme par exemple, les taux d'intérêt, comme par exemple, ce qu'on vit actuellement dans le cadre de la récession à travers le Québec et même à travers tout le monde occidental, a retourné le rapport au CMPDE. Le 24 septembre, le CMPDE prend la décision d'endosser un rapport. On l'a ici. Le 13 octobre, le Conseil du trésor endosse le rapport en question. Le 28 octobre 1981, le Conseil des ministres prend la décision d'aller de l'avant avec le plan de redressement.

Ce qu'on a fait depuis la fermeture de Rayonier Québec, en 1979, c'était assurément de mettre l'accent sur ce qu'on avait comme outil, qui était tout de même très important, ce qu'on appelle le programme OSE, et aussi d'autres projets qui étaient dans l'air depuis un bon nombre d'années et qu'on n'avait pas réussi à passer.

Au titre des projets - je vais vous parler du programme OSE par la suite - que nous avons, et des budgets en 1981-1982 - ce sont des choses qui étaient incluses à l'intérieur du plan de redressement - vous avez, par exemple, la base de plein air de Port-Cartier, avec un engagement financier de 300 000 $, dont 150 000 $ cette année et 150 000 $ l'an prochain. Vous avez le camp des jeunes du lac du Rapide, un engagement de 165 000 $, 60 000 $ cette année et la différence l'an prochain. Vous avez une étude d'économie forestière qui a été engagée. D'ailleurs, le ministre de l'Énergie et des Ressources pourra vous parler de ce dossier d'une façon beaucoup plus élaborée, une étude qui a coûté 50 000 $. Vous avez la construction - vous le savez, vous n'avez peut-être pas été à Port-Cartier, mais on doit annoncer les appels d'offres à partir du 25 novembre - du débarcadère de Port-Cartier au coût de 8 000 000 $. Je continue. Dans l'engagement financier qui a été pris dans ce plan de redressement ici, qui a été endossé par le Conseil des ministres, vous avez la bibliothèque centrale de Sept-Îles, 400 000 $; le Centre de santé de Port-Cartier, 930 000 $; le CLSC de Sept-Îles, 200 000 $; la rénovation du centre de santé de Schefferville, 75 000 $; la réfection de la toiture de l'hôpital de Sept-Îles, 391 000 $; le remplacement des fenêtres à l'hôpital de Sept-Îles, 136 000 $.

Je continue. Dans le domaine de l'éducation, 180 000 $. Toujours dans le domaine de l'éducation, 760 000 $ pour l'amélioration et le transfert d'équipements, toujours dans la région de Sept-Îles-Port-Cartier. Ce n'est pas à Vancouver, c'est dans la région de Sept-Îles-Port-Cartier et Schefferville. La construction du gymnase à Longue-Pointe-de-Mingan égale X. Ce n'est pas dans l'Ouest du Canada et ce n'est pas sur la Côte-Sud du Québec non plus, mais c'est dans l'axe Sept-Îles-Port-Cartier 1 600 000 $; la route d'accès à la réserve Port-Cartier, 100 000 $; la réfection du camping de Moisie, 150 000 $; les chalets de la réserve Port-Cartier, 50 000 $; la rénovation du centre de loisirs de Schefferville, 154 000 $, tout cela pour un beau total de 13 386 000 $.

Maintenant, je me réfère de plus au programme OSE dont le ministre, M. Bernard Landry, a parlé tout à l'heure. Dans les deux dernières années, on a quadruplé le montant qui avait été investi par le biais du programme OSE sur la Côte-Nord.

M. Landry: Quadruplé.

M. Perron: On l'a quadruplé. En 1980-1981, sur le budget 1980-1981, les engagements totaux ont été de 3 379 407 $ sur des projets globaux de 7 385 013 $, pour la création de 367 emplois permanents et, de 379 emplois temporaires.

Vous nous dites qu'on n'a rien fait sur la Côte-Nord. Si je compare cela à ce que le fédéral a fait, je pense qu'on a fait un maudit bout de chemin.

Je continue avec 1980. Ce sont les engagements d'avril 1981 à septembre 1981: 1 164 000 $, 340 emplois dont 255 permanents. Je pense que c'est vraiment une façon de réagir à toute la récession économique que nous vivons actuellement sur la Côte-Nord et spécialement l'axe Sept-Îles-Port-Cartier.

Bien entendu, le député de Vaudreuil-Soulanges a soulevé plusieurs problèmes que l'on vit. C'est vrai qu'on vit les problèmes. J'ai toujours mentionné que ce n'était pas la fin du monde, que c'était, bien sûr, des problèmes que nous vivons actuellement, mais que ce n'était pas la catastrophe. Comme gouvernement du Québec, nous faisons tous les efforts possibles pour redresser la situation, avec les moyens du bord. Nous faisons pratiquement l'impossible pour ce faire. Les chiffres que je viens de donner démontrent que le gouvernement du Québec a certainement réagi.

De plus, je voudrais ajouter les projets actuellement en marche et ce, depuis à peu près un an, même pas, depuis que le ministre, M. Bernard Landry, a pris sa décision. D'ailleurs, je le remercie, ainsi que ses fonctionnaires qui ont travaillé avec lui. Pour 1982, 1983 et 1984, parmi les projets en marche, soit au niveau des études, des plans et devis, de la préparation, vous avez le parc industriel de Sept-Îles, phase II, 175 000 $; la voie de dégagement de la circulation de Sept-Îles, 2 000 000 $; le

parc urbain, 3 000 000 $; le parc nautique, 4 000 000 $; la construction d'un nouveau pont au barrage Sainte-Marguerite, 2 000 000 $; la réfection de la route 138 à partir de la rue Ratté à Sept-Îles jusqu'au viaduc, 1 250 000 $. Pour l'accès à l'aéroport de Havre-Saint-Pierre - vous me direz que c'est 140 milles à l'est de Sept-Îles, mais il reste que cela a tout de même des répercussions dans notre coin - il y a 264 000 $; pour la construction de voies d'accès aux ressources forestières entre Baie-Trinité et Rivière-Saint-Jean, 730 000 $; pour la route 138 à l'est du viaduc, jusqu'à la réserve Malioténam, 2 000 000 $; pour la route d'accès à la réserve Matimek, 200 000 $; pour l'implantation d'un CLSC à Havre-Saint-Pierre, 1 000 000 $. Des projets, en voulez-vous, on en a.

Avec l'aide de M. Landry, de celle du ministre de l'Énergie et des Ressources, de celle de mon collègue de Saguenay et de celle du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, M. Lessard, on va faire tout ce qui est nécessaire et tout ce qui est dans la mesure des possibilités pour que ces projets aillent de l'avant. De gros projets d'envergure, je peux en ajouter, on en a plusieurs, mais il serait peut-être bon que le fédéral s'implique dans ces projets d'envergure dont je vais parler.

Vous avez la route d'accès à Pointe-Noire. Les fonds sont actuellement disponibles. Les plans et devis sont prêts. Mais, par exemple, le fédéral n'a pas encore pris la décision d'aller de l'avant avec la construction de Pointe-Noire. Il y a un engagement, je pense que c'est de 100 000 $ qui a été pris dans ce domaine-là, alors 16 000 000 $. Vous avez le prolongement de la route 138, dont d'ailleurs le député de Vaudreuil-Soulanges a parlé, et je peux l'assurer que je connais le dossier beaucoup mieux que lui pour l'avoir vécu durant les cinq dernières années. D'ailleurs c'est une des promesses qui avaient été faites par le Parti libéral en 1976 de construire la route à l'est de Havre-Saint-Pierre et on m'impute aujourd'hui d'avoir promis cette route-là alors que c'est le Parti libéral qui l'avait promise. Oui, elle devait se terminer en 1976.

M. Scowen: Juste une question que j'aimerais poser à la fin.

Le Président (M. Jolivet): A la fin, M. le député.

M. Perron: Je termine, M. le Président.

Alors il y a le prolongement de la route à l'est de Havre-Saint-Pierre qui est évalué, actuellement, approximativement à 39 000 000 $ et vous avez la mise en place d'un réseau de scieries entre Godbout et Rivière-Saint-Jean dont le ministre va sûrement parler tout à l'heure; c'est de l'ordre d'environ 26 000 000 $. Alors ce sont des projets, mais on attend aussi dans d'autres domaines des promoteurs. C'est entendu que ce n'est pas le gouvernement du Québec qui va arriver et qui va investir tous ces montants-là sans avoir de promoteur. Il y a des endroits où, nous, en tant que gouvernement, on doit s'impliquer, mais il ne faut tout de même pas "charrier" et, par exemple, aller nous dire qu'on devrait aider Iron Ore dans ceci et dans cela ou encore aider Wabush dans ceci ou dans cela.

Alors, ce qu'il faut faire c'est attendre des promoteurs et pousser les promoteurs pour qu'ils viennent investir. Soyez assuré d'une chose, c'est que depuis un certain nombre de mois, pour ne pas dire un certain nombre d'années, le gouvernement du Québec, par le biais de certains ministres dont le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, dont le ministre de l'Énergie et des Ressources, dont le ministre d'État au Développement économique, a fait tous les efforts pour que des investissements s'en viennent chez nous, pour aller chercher des promoteurs, mais c'est sûr et certain qu'on ne peut pas donner toutes les informations ici ce matin.

Alors, je termine là-dessus, M. le Président, cet exposé de la situation. Pour avoir des faits précis, peut-être que la prochaine fois que les députés de Vaudreuil-Soulanges et de Notre-Dame-de-Grâce viendront dans la région de Sept-Îles et Port-Cartier, au lieu de rencontrer certains de leurs organisateurs qui ne connaissent pratiquement rien au dossier, ce serait peut-être bon de me rencontrer pour que je puisse les informer.

Le Président (M. Jolivet): Avant de donner la parole au député d'Outremont, sans lui enlever le droit de parole qu'il a maintenant, le député de Notre-Dame-de-Grâce veut poser une question au député de Duplessis.

M. Scowen: II me semble que le député nous reproche un peu d'être allés sur la Côte-Nord lorsque nous avons constaté un problème, d'avoir parlé aux principaux intervenants et d'avoir soulevé cette question en Chambre aujourd'hui. Il a suggéré qu'on n'a vu que des libéraux là; ce n'est pas le cas. On a essayé de rencontrer les maires et les principales personnalités de toutes les villes de la région. Quant à nous, on l'avait fait de bonne foi, on s'est déplacé pour s'informer. On est revenu ici et nous avons soulevé la question en Chambre aujourd'hui pour que tout le monde puisse connaître le problème et essayer de le régler.

Le député, semble-t-il, nous reproche de l'avoir fait, je ne sais pas, je veux lui demander: Est-ce qu'il nous reproche ou est-

ce qu'il nous félicite d'avoir fait la visite et d'avoir insisté sur ce débat aujourd'hui?

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Duplessis.

M. Perron: M. le Président, pour l'information des personnes qui sont présentes ici et de ceux et celles qui nous écoutent, je ne reproche pas aux deux personnes qui y sont allées, soit les députés de Notre-Dame-.de-Grâce et de Vaudreuil-Soulanges, d'être allées à Sept-Îles, cela les a vraiment informées et cela nous permet aujourd'hui d'être ici. Mais je leur reproche, par exemple, les fréquentations qu'ils ont eues face à certaines personnes qu'ils ont rencontrées lorsqu'ils sont allés à Sept-Îles, et je...

Le Président (M. Jolivet): M. le député...

M. Perron: Et je n'ai pas dit toutes les fréquentations, j'ai dit certaines fréquentations.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Outremont.

M. Pierre-C. Fortier

M. Fortier: M. le Président, je dois vous dire que pour ma part j'ai beaucoup de sympathie pour le député de Duplessis. De toute évidence il fait des efforts sincères pour aider la population qui l'a élu, et je crois que d'une façon générale la population de la Côte-Nord devrait toujours remercier son député, quel qu'il soit, parce qu'il s'agit d'un comté considérable et qui demande un travail énorme.

J'ai beaucoup de sympathie pour lui également parce que le ministre d'État au Développement économique nous a dit qu'il était absolument sans pouvoir pour faire quoi que ce soit pour la population. (11 h 15)

II me semble, M. le Président, qu'il s'agit là de fausses représentations. Il a dit: Vous savez, notre député a été élu en 1976, il a été réélu en 1981. Si, à la veille des élections, la population du comté de Duplessis avait su ce que le ministre au développement économique vient de nous dire ce matin, je me demande bien sincèrement si le député aurait été élu. Je ne lui en impute pas la faute et je crois qu'on doit avoir de la sympathie pour un député comme lui, qui essaie de faire son travail, mais qui n'est pas appuyé et à qui on refile les informations ou de faux espoirs quant à la possibilité de régler les problèmes économiques d'une région comme celle pour laquelle il a été élu.

Bien sûr, on nous reproche quasiment de s'intéresser à la question. Je crois que le député devrait nous remercier et nous féliciter parce que la population a dit à ceux parmi nous qui sont allés à Sept-Îles qu'elle attendait depuis longtemps qu'un plan de redressement soit considéré et approuvé. Le député vient de nous dire que, dix jours après la visite du Parti libéral à Sept-Îles, ceci a été fait. M. le député, vous devriez nous remercier parce que c'est à cause de notre intervention que ce plan-là a été approuvé finalement.

Pour ma part, j'ai eu un peu d'hésitation parce que le député nous dit: II n'y a pas de problème, on a des projets, on en a et on va en avoir beaucoup d'autres. Et le ministre d'État au Développement économique nous dit que c'est une catastrophe. Il faudrait bien que le Parti québécois nous dise une fois pour toutes: Est-ce qu'il s'agit d'une catastrophe ou bien est-ce qu'il est réellement conscient qu'il a tous les pouvoirs et qu'il y a quantité de projets qui peuvent être mis de l'avant pour régler tout ce problème-là?

Pour ma part, M. le Président, j'aimerais soulever une question en ce qui a trait à des problèmes qui ont été soulevés lors de la dernière commission parlementaire d'Hydro-Québec, au mois de février dernier, et d'ailleurs le député de Duplessis s'en souviendra, puisqu'il était présent, alors que nous avons entendu des représentations faites par la Corporation de développement économique de la région de Port-Cartier qui nous disait, en particulier: Hydro-Québec, à titre d'entreprise parapublique, doit être sensible aux problèmes des régions. Je crois qu'Hydro-Québec, d'une façon générale, a dit qu'elle était sensible et qu'elle était prête à collaborer. Ils nous ont dit également que les programmes publics d'investissements, dont ceux d'Hydro-Québec, doivent être mis en place lorsque l'économie privée est en lutte et en difficulté. La Chambre de commerce de Sept-Îles avait fait des représentations semblables et d'ailleurs moi-même j'avais opiné dans le sens de ses remarques. Ce qu'elle demandait, tout simplement, c'était de faire en sorte qu'Hydro-Québec, lorsqu'elle considère ses plans d'équipements, fasse en sorte qu'une région désolée comme celle de la Côte-Nord puisse être avantagée.

Pour ma part, je ne recommanderais jamais au gouvernement d'inciter Hydro-Québec à faire des investissements s'ils s'avéraient moins économiques que ceux qui pourraient être faits dans les prochaines dix années. À ce sujet, M. le Président, si on regarde une publication qui a été faite, un rapport préparé dans le cadre de l'élaboration de l'énoncé de politique économique: Bâtir le Québec et traitant de l'électricité, on s'aperçoit que, lorsque dans ce document on a fait des comparaisons, j'imagine que ceci a été fait en collaboration

avec Hydro-Québec par l'OPDQ, on s'aperçoit que la rivière Romaine est considérée comme étant très compétitive par rapport à d'autres rivières qui sont présentement dans le plan d'Hydro-Québec et par rapport au nucléaire.

Bien sûr, à plusieurs reprises, j'ai entendu le ministre qui nous a dit, le ministre et d'autres ministres avant lui du gouvernement qui nous dirige qui nous ont dit: Vous savez, avant de faire du nucléaire, il y a beaucoup d'eau qui va passer dans le Saint-Laurent et, même s'il nous faut payer 10%, 20% ou 30% de plus que le nucléaire, si la population l'acceptait, nous irions dans cette direction-là.

Mais, dans le cas de la Romaine, M. le Président, cette rivière-là pourrait coûter meilleur marché que le développement d'autres rivières et en particulier de certaines rivières qui sont dans le plan d'équipement d'Hydro-Québec. Et l'on sait pertinemment que, compte tenu de la conjoncture économique, il peut être difficile dans le moment d'amener de nouvelles industries, quoique mon collègue de Vaudreuil-Soulanges ait insisté pour avoir une action, une action véritable et une volonté politique de régler ces problèmes-là.

Ce que les gens de la Côte-Nord nous avaient dit lors de la commission parlementaire du mois de février, c'était, compte tenu du fait que l'implantation de certaines industries pourrait prendre un certain temps: Est-ce que le gouvernement ne pourrait pas considérer de conseiller à Hydro-Québec d'avancer le développement de la rivière Romaine pour permettre justement qu'il y ait un développement économique, une création d'emploi pendant une certaine période d'années?

J'avais opiné dans ce sens-là personnellement, compte tenu du fait que l'aménagement de la rivière Romaine est concurrentiel et que, justement, cet avancement, avec les études qui devraient être faites et les travaux de construction, pourrait créer des milliers d'emplois. J'admets immédiatement, comme le ministre, que ceci ne durerait que quatre ou cinq ans, mais il me semble que c'est justement ce genre de période de quatre, cinq ou six ans dont la région de la Côte-Nord a besoin, aidée du gouvernement s'il y avait une volonté politique, pour faire en sorte que le problème du chômage soit réglé du moins pour une période donnée. Cela nous permettrait au moins de nous retourner et de faire en sorte que les gens puissent continuer à vivre sur la Côte-Nord, et cela donnerait au gouvernement tout le temps, puisqu'il aime prendre bien son temps dans ce domaine, de considérer le genre d'investissement. Il pourrait attirer ces investisseurs sur la Côte-Nord.

Je pose cette question: À la suite de ces demandes qui ont été faites en février 1981 - cela fait quand même plusieurs mois - le ministre de l'Énergie et des Ressources ou le ministre d'État au Développement économique a-t-il fait des représentations officielles à Hydro-Québec dans ce sens-là? Est-ce qu'ils ont fait des études approfondies de cette suggestion qui avait été faite par les représentants de la Côte-Nord? Est-ce qu'ils peuvent nous dire le genre d'investissement qui serait considéré et le nombre d'emplois créés si les investissements se faisaient?

Bien sûr, je suis à peu près certain que le ministre d'État au Développement économique, ou le ministre de l'Énergie et des Ressources, dira: M. le député d'Outremont, vous savez pertinemment que nous avons présentement des problèmes avec Terre-Neuve et que, compte tenu du fait que le haut de la rivière se trouve supposément dans un territoire sous le contrôle de Terre-Neuve, il est tout à fait inacceptable de considérer une telle proposition. J'en profite donc pour demander au ministre ce qui se fait dans ce dossier. On n'en entend pas parler. De toute façon, compte tenu des besoins de la Côte-Nord, il s'avérerait absolument utile et nécessaire que le gouvernement prenne une décision politique dans ce dossier et intervienne, compte tenu de l'économie de la Romaine, pour que le plan d'équipement d'Hydro-Québec puisse, dans une certaine mesure, alléger le fardeau incommensurable de la Côte-Nord présentement.

D'ailleurs, on ne sait absolument pas ce qui se passe dans ce dossier parce que, même si la présentation d'Hydro-Québec a été faite au mois de février 1981, à ma connaissance, le plan d'équipement d'Hydro-Québec n'est même pas approuvé et nous sommes maintenant au mois de novembre 1981. Il me semble que ces demandes des représentants de la Côte-Nord n'ont pas été entendues et que le ministre, semble-t-il, n'a pas fait de représentations. S'il en a fait, il n'en a pas informé le public. À ma connaissance, ces gens de la Côte-Nord n'ont pas eu de réponse satisfaisante à la demande tout à faite normale qu'ils faisaient.

M. le Président, je crois que le ministre a des explications à donner et j'aimerais bien qu'il nous éclaire sur ce dossier.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Yves Duhaime

M. Duhaime: M. le Président, d'abord, je voudrais, en quelque sorte - cela va peut-être surprendre les gens d'en face - les féliciter de leur préoccupation pour ce qui est du développement économique régional. Là où mes félicitations vont s'arrêter, c'est

sur leur façon de faire. Je voudrais rappeler au député d'Outremont, en particulier, et à son collègue de Notre-Dame-de-Grâce, que s'ils ont la même façon de procéder dans toutes les régions du Québec qu'ils visitent que celle qu'ils ont utilisée en Mauricie, j'ai comme l'impression que cela va donner des conférences de presse comme celle que nous avons eu l'occasion de vivre à Shawinigan.

Les députés élus par une population qui sont de l'ouest de Montréal, ou d'encore plus loin, et qui arrivent dans une région, passent quelques heures à un bar d'hôtel en discussion avec un entrepreneur qui, comme par hasard, est aujourd'hui le président de l'association libérale du comté de Saint-Maurice, un entrepreneur qui était candidat libéral aux dernières élections - je remercie les électeurs et les électrices de mon comté d'avoir pu le battre par 5000 voix - et qui n'ont rencontré personne des CRD, ni des commissions d'expansion économique, aucun commissaire industriel, à ma connaissance...

M. Fortier: M. le Président, le ministre est en dehors du sujet. On parle de la Côte-Nord et il parle du Saint-Maurice.

M. Landry: Question de règlement, M. le Président. Que le député d'Outremont relise donc le thème de la question avec débat qu'ils ont eux-même inscrite - par écrit - aux travaux de ce matin. Il est question de développement régional et, en particulier, de la Côte-Nord.

Vous avez beau vouloir vous obséder, M. le député d'Outremont, sur ce que vous pensiez être un bon filon et qui se retourne contre vous, lisez donc les écrits de votre propre parti avant de faire...

M. Fortier: Pourquoi êtes-vous si agressif?

M. Duhaime: Je ne suis pas agressif, M. le Président.

M. Landry: ... des déclarations comme celle que vous venez de faire, qui...

M. Fortier: Pourquoi êtes-vous si agressif?

M. Landry: ... dénote non seulement que vous ne connaissez pas la question traitée, mais que vous ne connaissez même pas le sujet que votre propre parti avait inscrit à l'ordre du jour de ce matin.

M. Fortier: M. le Président...

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Sur la question de règlement, il était clairement entendu, lorsque l'inscription a été faite, que c'était afin de nous assurer de la présence du plus grand nombre possible de vos collègues du cabinet que nous avons tenté d'alléguer que c'est dans une perspective de l'action du gouvernement sur la Côte-Nord, une perspective de développement économique régional en particulier, et c'est clairement indiqué, par voie d'illustration, c'est évident. Des conversations ont eu lieu entre les deux partis avant que, par dérogation aux règles, cette question soit inscrite avec un avis beaucoup plus court que de coutume, c'est à la suite des discussions que nous avons eues, et il était notoire dans tous les cabinets de tous ces ministres-là que nous étions allés sur la Côte-Nord et que c'était la question dont nous voulions parler. Nous sommes extrêmement heureux de voir le député de Duplessis ici et je ne vois pas comment on s'en va dans toutes les régions à droite et à gauche. On est en train de poser des questions spécifiques...

Le Président (M. Jolivet): Un instant! Je vais quand même clarifier...

Une voix: La motion le dit.

Une voix: La question...

M. Landry: ... M. le Président, que les écrits des libéraux ne sont souvent pas plus solides que leurs paroles.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le ministre, j'ai l'obligation de dire que, quant à moi, je n'ai eu aucun vent de la discussion qui a pu avoir lieu entre les deux leaders de l'Opposition et du gouvernement...

M. Duhaime: II n'y a rien eu là.

Le Président (M. Jolivet): En conséquence, je lis le texte et je le relis pour les besoins de la cause: "Le sujet sera le développement économique régional et plus particulièrement celui de la Côte-Nord..."

Une voix: Voilà!

Le Président (M. Jolivet): Je ne peux donc en aucune façon interpréter les choses autrement que par le texte qui m'est donné et que je dois malheureusement faire respecter ce matin dans les discussions.

Je comprends particulièrement ce que dit le député de Vaudreuil-Soulanges dans les discussions qui ont eu lieu en dehors de la Chambre, mais, quant à moi, j'ai malheureusement un texte qui est clair.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Si vous me permettez, non pas en ce qui concerne les discussions qui auraient eu lieu en dehors de la Chambre, mais simplement en suivant la trame de la discussion qui se déroule maintenant, les questions que nous posons de façon claire et précise se

rapportent à des problèmes de la Côte-Nord. Évidemment, je comprends que le ministre veuille alléguer des choses qui regardent son comté; je comprends qu'un autre député ou ministre veuille alléguer des choses qui concernent son comté et l'action extraordinaire du gouvernement en création d'emplois et en création de chômage dans les diverses régions. On pose des questions sur la Côte-Nord à ce moment-ci et on aimerait avoir des réponses sur le plan de HydroQuébec et ces choses-là en ce qui concerne la Côte-Nord.

Le Président (M. Jolivet): Le problème que j'ai...

M. Landry: M. le Président, toujours sur l'incident...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Landry: ... je ne cache pas que le gouvernement, vu la gravité de la situation, aurait préféré que la question ne porte que sur la Côte-Nord.

M. Fortier: C'est ce que nous faisons.

M. Landry: Cependant, dans leur écrit, comme vous l'avez si bien relaté, M. le Président, et c'est le comble de l'incompétence, ils viennent nous demander des réponses et ils ne savent même pas la question qu'ils ont posée.

Dans leur écrit, ils l'ont élargie au développement régional, et si ce n'était que cela, mais, dans son introduction, dans son intervention, le député de Vaudreuil-Soulanges a fait allusion aux politiques - au pluriel -de développement régional.

M. Fortier: Sur la région de la Côte-Nord.

M. Landry: Vous n'avez pas dit à l'égard de la Côte-Nord, vous avez parlé de planification, des plans, ce sont vos propres mots. Comment avez-vous pu vous présenter ce matin dans un tel état de non-préparation alors que vous avez... Cela vous gêne. Je sais pourquoi cela vous gêne que le débat soit ouvert au-delà de la Côte-Nord et que vous essayiez, comme on dit, de "back-traquer" présentement. C'est parce que le développement régional au Québec est un des succès prodigieux du gouvernement durant son premier mandat.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre...

Une voix: La question de règlement est vidée.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, je vais...

M. Landry: Non. Un succès prodigieux en Abitibi, au Saguenay-Lac-Saint-Jean, dans les Bois-Francs...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Landry: À Laval, dans l'île de Montréal, sur la rive sud.

Une voix: Le micro.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, M. le ministre. Je pense que je vais clore le débat parce que j'ai une obligation, comme président, de faire en sorte que le sujet qui est inscrit à l'ordre du jour soit respecté. Je vous l'ai dit, je vous le répète, et, à partir de ce moment, si vous voulez continuer d'un côté à parler de la Côte-Nord et de l'autre côté à parler de l'ensemble des régions, si nous continuons un débat de procédure, nous n'aurons l'occasion de parler ni de l'un ni de l'autre. (11 h 30)

En conséquence, j'ai malheureusement devant moi un texte qui est clair. Je ne peux pas déclarer que le ministre de l'Énergie et des Ressources a enfreint le règlement, puisqu'il parle du développement régional. En conséquence, je suis dans l'obligation de lui recéder la parole et de faire en sorte que vos questions, quant à vous, portent sur la Côte-Nord, et quant à vous, portent sur le sujet du développement régional, à votre guise.

M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Duhaime: Je vous remercie, M. le Président. Je voudrais dire tout de suite aux libéraux d'en face - parce que moi, je n'ai pas d'amis en face, je vous le dis honnêtement - que je reviendrai sur la Côte-Nord tantôt. Mais je ne veux pas laisser passer cette occasion parce que quand j'ai lu, j'ai le feuilleton devant moi... Nous sommes prêts, de ce côté-ci, à discuter du développement économique régional, ce matin, de n'importe quelle des régions économiques du Québec et plus particulièrement de celui de la Côte-Nord. Je vous suggérerais de maintenir cette bonne habitude que chaque vendredi matin - c'est d'ailleurs sur mon agenda, j'ai bloqué tous mes vendredis, pour le cas où la bonne idée vous reviendrait d'inscrire, de façon bien précise cette fois-là, la région économique de votre choix - on se retrouve ici. J'ai bloqué mon horaire en conséquence.

Mais, M. le Président, je ne laisserai pas passer une pareille occasion parce que vous êtes venu passer quelques heures dans

mon comté, dans ma région et, avant de repartir, vous avez insulté la population en lui disant qu'elle était 20 ans en retard. Cela, c'est vous qui l'avez dit, M. le député d'Outremont. Là-dessus, on va se parler. Si vous aviez rencontré les gens qui s'occupent du développement industriel, on vous aurait dit, par exemple, qu'en Mauricie, un programme d'investissements est en cours dans le secteur des pâtes et papiers. Ce programme va prendre, pour la seule vallée du Saint-Maurice, le tiers de l'ensemble des 2 500 000 000 $ suscités par le plan de relance et de modernisation mis sur pied par le gouvernement du Québec et financé à frais partagés avec le gouvernement fédéral. Il a fallu un an et demi de discussions avec les fédéraux avant qu'on puisse le mettre en route. On vous aurait dit également, M. le député d'Outremont, si vous aviez parlé avec les gens de la Consol, que dans la seule ville de Shawinigan, au moulin à papier de la Belgo, on va investir 159 000 000 $.

La route que vous avez empruntée pour venir en Mauricie, la 55, vous, les libéraux, vous l'avez commencée en 1961. C'est une des plus longues routes du monde, parce qu'elle a 18 milles de long, et ça a pris 20 ans à la compléter. De 1976 à 1981, notre gouvernement a investi 35 000 000 $, plus que la moitié du coût total en 4 ans. M. le Président, je pourrais vous parler de la récente annonce faite par la compagnie Alcan, 20 000 000 $, dans une nouvelle usine de câblerie et de tréfilerie; je ne vous ai pas entendu faire un commentaire là-dessus. Je ne vous ai pas entendu faire un commentaire sur les investissements dans le textile qui est en train de se moderniser dans notre région, les investissements à Trois-Rivières pour 5 000 000 $, à Shawinigan pour 1 000 000 $.

Je ne vous ai pas entendu commenter non plus le fait que la compagnie Bandag venait d'annoncer un investissement de 4 500 000 $ qui va doubler sa production. Je ne vous ai pas entendu non plus commenter la nouvelle que la compagnie B. F. Goodrich va également moderniser ses installations à Shawinigan. Je ne vous ai pas entendu commenter l'investissement de la Westinghouse à Trois-Rivières. Bref, vous avez rencontré, durant votre séjour en Mauricie, des hurluberlus du Parti libéral en particulier. Je vous inviterais cependant à revenir, et si vous voulez rencontrer les gens qui sont au courant des dossiers du développement économique en Mauricie, je peux vous aider à les rencontrer. Les nouvelles que vous allez en ressortir vont être bien différentes de ce que vous annoncez.

Maintenant, M. le Président, je voudrais garder l'essentiel de mon intervention pour la Côte-Nord. Je félicite les libéraux de s'intéresser à cette question. J'ai des réserves sur leur façon de faire et j'ai également beaucoup de réserves quand je vois ce qu'ils ont fait dans le passé sur la Côte-Nord, dans les années récentes, dans deux grands dossiers. Vous excuserez peut-être mes paroles, M. le Président, mais le dossier de ITT Rayonier, investissement fait par une multinationale, un gouvernement rampant, libéral et avec une subvention repayable au bout de 25 ans avec une concession forestière de la grandeur de la Belgique, si ma mémoire est bonne, est devenu, au fil des années, le plus grand merdier économique de l'histoire de la Côte-Nord. C'est vous autres, les libéraux, qui avez fait ça, en 1971, avec des millions de subvention payés par les travailleurs du Québec. Il me semble que j'aurais peut-être un peu honte.

On vient de nous reprocher aujourd'hui d'avoir des lenteurs dans ce dossier? Même les Chinois de Chine ont des réserves à aborder le dossier de ITT. Je peux dire que nous avons poursuivi sept études - quand je dis nous, je dis l'ensemble - de conversion de production Sandwell, Conibec, etc. Il faut avoir un culot assez extraordinaire pour s'intéresser à la Côte-Nord, dix ans après. J'espère que c'est le remords qui vous guide.

Deuxième dossier, M. le Président. La crise actuelle dans le minerai de fer illustre éloquemment le génie économique de l'ancien premier ministre du Québec, M. Bourassa, de ses conseillers, M. Saint-Pierre et de ceux qui s'en inspirent aujourd'hui, ceux qui sont en face de nous, ce matin. Je ne peux pas faire autrement que d'apporter certaines précisions. Le montant des investissements, dans le dossier minier SIDBEC-Normines, a été de l'ordre de 472 000 000 $, investissements basés sur le fait que les aciéries de SIDBEC-DOSCO auraient besoin de 3 000 000 de tonnes de boulettes par année pour leur production, ces années-ci. La marge d'erreur dans la prévision est de l'ordre de 100% et plus.

Oui, il y a un déficit et je vais vous expliquer pourquoi.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):

Comme les déficits du gouvernement.

M. Duhaime: SIDBEC-DOSCO absorbe 1 200 000 tonnes de boulettes. Chaque année, 1 800 000 tonnes doivent être écoulées à perte, sur le marché international, parce que Sidbec est liée dans ses contrats avec ses coactionnaires. Ce n'est pas le Parti québécois qui a signé ces contrats, ce n'est pas le gouvernement fédéral non plus, M. le député de Vaudreuil-Soulanges, je vous trouve bien mauvais farceur, c'est l'ancien premier ministre du Québec, M. Robert Bourassa et sa troupe. D'ailleurs, quand j'entends votre nom, M. le député de Vaudreuil-Soulanges, j'ai beaucoup de

difficulté à le réconcilier avec le Parti libéral.

Les engagements de SIDBEC - cette année seulement - dans SIDBEC-Normines vont nous coûter une perte sèche de 35 000 000 $ et à peu près autant l'an prochain et pour les années à venir. C'est le deuxième dossier. Pendant qu'on y est, M. le Président, 472 000 000 $ d'investissements, c'est la valeur actualisée en 1981.

Puisque dans le dossier d'amiante, dont vous n'avez pas voulu parler cette semaine et je vous comprends, vous avez plutôt préféré rester à l'abri, tranquille, derrière une conférence de presse, plutôt que de poser des questions à l'Assemblée nationale, les libéraux ont commencé à comparer des dollars 1981 avec des dollars 1985, l'investissement de 472 000 000 $, sur la même base de calcul que vous avez utilisée dans le dossier d'Asbestos, c'est un investissement de 989 000 000 $ que ça représente, en 1985.

Maintenant, M. le Président, la position que nous prenons dans le dossier de ITT est la suivante. Je pense que mon prédécesseur, M. Bérubé, l'a dit très clairement dans le passé: nous n'allons pas reprendre seuls, sur notre dos, ce dossier. Ce que nous disons, nous avons en main toutes les études nécessaires pour permettre à un groupe d'investisseurs qui voudraient prendre la relève, une fois que leurs négociations seront terminées avec ITT, pour le rachat de ses installations, une fois que ces investisseurs potentiels auront pris la décision de maintenir la même production, c'est-à-dire la pâte à dissoudre, ou encore terminé l'examen d'une hypothèse qui a été avancée il y a au-delà d'un an maintenant, à savoir si on pourrait y fabriquer du papier journal; lorsque le tonnage requis sera connu, lorsque les investissements requis seront connus, lorsque la rentabilité de ce projet sera prouvée, le gouvernement du Québec, via sa société d'État - je comprends que vous n'aimez pas beaucoup les sociétés d'État, les gens d'en face, mais parfois elles sont fort utiles - Rexfor, participera financièrement. J'irai plus loin. Nous sommes à compléter les discussions avec la compagnie ITT qui doit, bien sûr, un montant d'argent au gouvernement sur la base du contrat qui a été signé et qui a été rompu. Ce que je dis à toute la population de la Côte-Nord, c'est que tout montant d'argent qui va découler du contrat ou de l'indemnité et qui pourrait être versé à Rexfor sera consacré prioritairement à des projets de développement forestier. Cela peut représenter plusieurs millions de dollars. Il n'y a rien de comparable avec les millions de La Prade, cela ne sera pas 200 000 000 $. Cela pourrait être d'un ordre de grandeur, si on regarde la valeur actualisée de cette indemnité au contrat, de 6 000 000 $ à 7 000 000 $. Il y a une chose qui est certaine, j'aime mieux un montant de 6 000 000 $ ou 7 000 000 $ sûr que 200 000 000 $ qu'on ne verra jamais en Mauricie avec l'affaire La Prade et les fédéraux derrière.

Je voudrais dire aussi que dans le secteur...

M. Landry: ... la planification de l'usine de La Prade. S'ils ont englouti 1 000 000 000 $ à La Prade, quels sont les intérêts privés qui en ont profité?

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre à l'Énergie et Ressources a la parole.

M. Duhaime: Si vous voulez qu'on parle du dossier de La Prade, M. le député d'Outremont, je vous ferai une suggestion...

M. Landry: ... La Prade.

M. Duhaime: Je serais même prêt à vous rédiger la question. Nous pourrions nous retrouver ici.

M. Landry: Dans deux vendredis.

M. Duhaime: Dans deux vendredis. Le vendredi que vous choisirez. Vous apporterez tous les experts nucléaires qui sont autour de vous et nous ferons une discussion sur La Prade...

M. Landry: Ceux de Canatom...

M. Duhaime: Si vous voulez parler de Gentilly II aussi, on pourrait en parler. Je pense que vous êtes bien familier avec le dossier, mais je voudrais revenir à la Côte-Nord et vous parler de ce que nous entendons faire sur le plan minier.

Je peux confirmer, et je le fais tout de suite, que pour l'exercice financier qui vient - les libéraux vont me dire tout de suite: Le budget n'est pas encore approuvé. Il le sera - nous allons consacrer sur la Côte-Nord et dans la fosse du Labrador, pour l'exercice qui vient, un montant d'à peu près 2 000 000 $, soit 1 910 000 $, pour être bien précis. Je pense que cette injection de capitaux dans des travaux d'exploration devrait tant à Schefferville qu'ailleurs sur la Côte-Nord, mais peut-être davantage à Schefferville, permettre à la population des travailleurs et des familles qui s'y trouvent de mettre ce que j'appellerais - ce n'est pas une solution miracle - un peu de baume sur leurs plaies. C'est tout le potentiel minier de la fosse du Labrador.

Je suis un peu étonné de voir que le député de Vaudreuil-Soulanges, dans sa première intervention, n'ait pas cité ce qu'il est convenu d'appeler maintenant son livre

de chevet quand il est sur la Côte-Nord ou encore un écrit biblique, le rapport Boucher; j'aurais été prêt à en discuter avec lui ce matin. J'ai déjà eu l'occasion de dire en commission parlementaire - je pense que le député d'Outremont va s'en souvenir - que le rapport Boucher, quant à moi, ne passerait pas à l'histoire. Quand une de ses recommandations nous dit: II faut faire connaître au monde entier le potentiel de minerai de fer sur la Côte-Nord, je pense que tout le monde est au courant que nous avons, sur la Côte-Nord, dans la fosse du Labrador, des réserves pour les mille ans à venir, 15 000 000 000 de tonnes de réserves de minerai de fer. Mais il ne faut pas être grand expert pour comprendre, quand la teneur en fer d'autres régions du monde, qui sont nos concurrents et, en particulier, le Brésil, vient nous faire une concurrence sur les marchés internationaux quant aux prix et qu'en même temps, la demande s'effondre, parce qu'il y a une crise de l'acier à l'échelle du monde entier; je n'ai pas besoin des commentaires de M. Boucher pour venir me dire cela.

Je voudrais enfin, M. le Président, mentionner que, sur la Côte-Nord actuellement, Hydro-Québec poursuit ses travaux sur le projet Manic 5 de puissance additionnelle, mais je pense que la question du député d'Outremont portait, de façon très précise, sur la rivière Romaine.

M. Fortier: ... posée par les gens de la Côte-Nord.

M. Duhaime: C'est une question fort pertinente. Je répondrai essentiellement ceci, M. le Président: Cela me paraît d'abord intéressant à examiner, mais à la fois curieux à entendre des gens d'en face qui, tout récemment, en commission parlementaire, mettaient en garde le gouvernement du Québec et en particulier son ministre de l'Énergie et des Ressources qu'il fallait laisser Hydro-Québec elle-même prendre ses décisions en fonction de la rationalité des coûts. Ce matin, est-ce que vous êtes en train de me dire que, dans ce dossier, vous faites également un virage? Peut-être que mes collègues ne sont pas au courant de cela, mais M. le député d'Outremont et moi, récemment, on est allés ensemble à une émission de télévision, Les lundis de Pierre Nadeau. Je donne cela comme anecdote, parce que c'est un virage.

On parlait du dossier de l'amiante. Pierre Nadeau m'a posé cette question: M. le ministre, vous négociez avec General Dynamics, mais, si votre prix est déjà fait à 42 $, il n'y pas de négociation? J'ai dit très clairement: 42 $, c'est le prix plafond, pas un cent de plus. M. le député d'Outremont, peut-être parce qu'il s'agissait d'une multinationale, a dit: 42 $, c'est un prix plancher pour nous.

À partir du moment où la transaction se fait non pas sur les actions d'Asbestos...

M. Fortier: Je l'ai dit tout à l'heure, mais on va le laisser terminer.

M. Duhaime: ... mais sur le capital-actions de la General Dynamics of Canada, votre voisin de gauche, M. le député d'Outremont, le député de Vaudreuil-Soulanges, mardi, qui n'a pas eu le coeur de poser une seule question en Chambre de toute la semaine sur ce dossier, alors que vous aviez dit vous-même que notre offre était trop faible, alors que notre offre a été acceptée par la suite, le député de Vaudreuil-Soulanges a dit: Vous avez payé trop cher. Je dis: Si vous voulez un ajournement de cinq minutes, on peut vous l'accorder tout de suite. Vous allez parler ensemble.

M. Fortier: Si vous voulez entendre la réponse, je vais vous la donner.

M. Duhaime: Vous virez dans toutes les directions, je n'ai jamais vu une chose semblable. Si j'avais le pouvoir de directive...

Une voix: Ils n'ont plus de chef.

M. Duhaime: ... que vous refusez au gouvernement du Québec, je vous dis tout de suite que je n'ai pas besoin d'un pouvoir de directive. Entre gens civilisés, entre "gentlemen", comme on entend de votre côté parfois, je peux très bien parler avec la direction d'Hydro-Québec sans avoir un pouvoir de directive. C'est ce que je ferai et c'est ce que j'ai déjà fait, non seulement dans ce dossier, mais dans d'autres.

Mais le problème, M. le Président, c'est que cela implique que, si nous disions: Faisons tout de suite la Romaine, ou bien, faisons tout de suite la Sainte-Marguerite, ou bien faisons tout de suite le Haut-Saint-Maurice, je ferais des heureux en très grand nombre dans mon coin, M. le Président. Mais ce qu'il faut qu'on regarde, c'est le coût de l'investissement au kilowattheure; ce qu'il faut qu'on regarde aussi, c'est si on peut décaler ou jouer avec la planification faite à ce jour. Est-ce qu'on va faire la Romaine avant LG 1, avant Brisay, avant Laforge I? Est-ce qu'on va déplacer tous les équipements du Nord-Ouest pour les approcher sur la Côte-Nord?

Je dis que, s'il y avait un grand projet industriel qui pouvait justifier tout de suite l'écart des coûts, non seulement je n'aurais pas besoin de faire une grande pression auprès d'Hydro-Québec, mais je suis absolument certain que la société regarderait l'aménagement de la Romaine d'une façon très positive.

Je voudrais aussi dire, et je termine là-dessus, M. le Président, que notre contentieux avec Terre-Neuve ne nous empêche en aucune façon de travailler sur une problématique de développement sur la Romaine parce que si, par hypothèse, nous décidions d'aller de l'avant dans ce dossier et que la question de l'hydraulicité à la tête de ce bassin n'était pas réglée, cela pourrait nous enlever quelques mégawatts, bien sûr, mais cela ne nous empêcherait pas d'aller de l'avant. Et j'ai mes doutes sur le règlement à l'amiable du dossier de Terre-Neuve, d'autant plus que, depuis quelques jours, je sais que c'est un certain M. Peckford qui est l'auteur d'une motion qui s'est transigée une nuit durant pour aboutir à une nouvelle constitution.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Reed Scowen

M. Scowen: Je dois céder la parole... est-ce que vous avez une réplique? Il y a certainement des réponses que mon collègue d'Outremont voudra donner aux déclarations du ministre de l'Énergie.

Je dois faire mes excuses d'abord aux gens de la Côte-Nord, notre intention était surtout de soulever les problèmes dont tout le monde a eu connaissance et d'exiger quelques réponses précises de la part du gouvernement. Dans les dernières minutes, le sujet a débordé celui de la Côte-Nord, on touche un peu à tous les problèmes économiques du Québec.

C'est clair, M. le Président, que cela leur fait mal, nos voyages à l'extérieur de la ville de Québec pour examiner et étudier ces problèmes. Je dois vous dire tout de suite que nous avons quand même l'intention de continuer. Nous avons mis sur pied, dans l'Opposition, un groupe de députés qui s'occupent du développement économique; nous en avons quatre ici ce matin. M. Bélanger, le député de Mégantic-Compton, est avec nous et il n'a pas encore parlé.

J'ai remarqué que le ministre de l'Énergie était piqué par le fait que nous soyons allés dans la Mauricie. Il disait, de même que le député de Duplessis: Vous avez écouté seulement les intervenants qui sont des libéraux. Je vous assure que ce n'était pas notre intention, nous avons demandé, invité les personnes responsables du développement économique dans ces régions: les maires, les commissaires industriels, les leaders syndicaux, et si la plupart de ces gens sont des libéraux, je les félicite de leur bon jugement, ce n'est pas notre faute.

Je dois vous dire, M. le Président, et j'annonce aujourd'hui que vendredi prochain le groupe a l'intention d'aller à Drummondville. Nous serons sur place pour parler et écouter les gens qui sont responsables du problème économique dans la région de Drummondville et la région de l'amiante. Si le ministre d'État au Développement économique ou les députés de cette région ont des suggestions à faire quant aux personnes que l'on doit rencontrer vendredi prochain ou jeudi soir prochain, j'aimerais beaucoup qu'ils fassent parvenir les noms à mon bureau et nous allons certainement les voir.

Le vendredi suivant, nous serons dans une autre région du Québec pour les mêmes fins et je vous promets, M. le Président, que nous allons faire notre possible pour rencontrer tous ceux qui s'occupent vraiment des problèmes économiques de la région.

Nous le faisons pour une raison très simple. Le rôle de l'Opposition, quant à moi, c'est de soulever les problèmes sérieux dans les domaines propres à chaque député - dans notre cas, c'est le domaine économique -pour que le gouvernement prenne ses responsabilités. Dans le cas de la Côte-Nord, nous avons été avertis par toutes sortes de signes, même par les déclarations du député de Duplessis lui-même, qu'il existe un grave problème. Aujourd'hui, il a dit: Ce n'est pas une catastrophe, nous faisons telle et telle chose, ne vous inquiétez pas, ce n'est pas un problème. Ce n'était pas notre perception et lorsque nous voyons, d'après Statistique Canada, un taux de chômage de presque 25% aujourd'hui, c'est difficile pour nous d'accepter la déclaration du député et de croire que ce n'est pas une catastrophe.

Le ministre d'État au Développement économique lui-même a décrit la situation économique au Québec, à travers la province, aujourd'hui, comme tragique. Si un taux de chômage moyen de 10%, 12% est tragique, je pense qu'on a probablement le droit de dire qu'un taux de chômage de 25% n'est pas loin d'une catastrophe. C'est pourquoi nous avons provoqué ce débat aujourd'hui en portant une attention particulière à la Côte-Nord. C'est aussi pourquoi nous avons l'intention de continuer semaine après semaine à visiter les régions du Québec et à mettre devant le public soit ici les vendredis, soit par des questions, soit par des débats spéciaux, les graves problèmes économiques qui sont la responsabilité de ce gouvernement. S'il nous reproche de le faire, c'est simplement une indication qu'on touche à des nerfs sensibles et qu'il réalise qu'il ne prend pas ses responsabilités. De notre part, à toutes les critiques qu'on nous oppose, à toutes les déclarations qu'on conteste quand nous visitons les régions, à savoir qu'il n'y a pas de problème, que nous parlons avec des personnes qui ne sont pas les vrais représentants, nous ne porterons pas beaucoup d'attention et nous continuerons de faire notre travail.

Avant de redonner la parole à mes

collègues, qui vont traiter, j'espère, avec les députés d'en face des problèmes spécifiques de la Côte-Nord, je veux simplement aborder une question qui me vient à l'esprit à la suite de la déclaration du ministre d'État au Développement économique à savoir que le député de Notre-Dame-de-Grâce n'était pas interventionniste, mais que lui, il est interventionniste. C'est un exemple des slogans démagogiques qui, dans la réalité, veulent dire très peu de choses. Si je suis dans la politique aujourd'hui plutôt que dans le secteur privé, c'est parce que, par définition, je crois à l'intervention de l'État dans l'économie. Je pense que tout le monde sait que moi et le Parti libéral sommes non seulement d'accord avec les interventions de l'État mais que c'est notre parti qui a été à l'origine des grandes interventions de l'État dans l'économie du Québec: l'Hydro-Québec, le projet de la Baie-James, la Société générale de financement, SOQUIP, SOQUEM, la Caisse de dépôt, la Société de développement industriel, toutes ces institutions dont le Parti québécois est très fier et avec raison ont été des créations du Parti libéral du Québec. Je suis fier de m'associer à ces décisions, à la création de ces institutions. Nous avons même appuyé une initiative du gouvernement péquiste dans ce domaine, il y a deux ans, quand il a créé la Société Pétromont. On a dit que c'était une bonne idée, une intelligente mesure, dans un secteur de pointe où on doit intervenir et on a voté pour cette intervention.

Ce qu'on critique, c'est que, normalement, il fait de très mauvaises interventions dans l'économie. Ce n'est pas la question de savoir si on doit le faire oui ou non, c'est de savoir quoi faire, et je pense que l'exemple que le ministre vient de citer de la compagnie Asbestos est un très bel exemple d'une mauvaise intervention. On ne s'intéresse pas tellement au prix. Le prix, comme vous le savez, c'est 42 $ l'action, qui va totaliser 81 000 000 $ avant que le contrat ne soit réalisé dans deux ans avec la société. Ce prix est de 81 000 000 $ de trop et je vais vous dire pourquoi. Il n'existe aucune raison valable, soit économique, soit sociale, de payer aux Américains 81 000 000 $ aujourd'hui pour une mine d'amiante dans la ville de Thetford-Mines. C'est une dépense qui ne va créer aucun nouvel emploi non seulement sur la Côte-Nord mais à Thetford-Mines même. (12 heures)

Le lendemain de cet achat, les gens de Thetford-Mines vont trouver que leur situation est inchangée. Le marché de l'amiante ne sera pas plus vaste, les règlements du gouvernement quant à la salubrité dans les mines en général, dans les Cantons de l'Est, ne seront pas changés. La sécurité d'emploi ne sera pas plus forte. La Société nationale de l'amiante a procédé à des mises à pied à la compagnie Turner Newall, une filiale de Bell Asbestos, après l'avoir achetée parce que ce n'était tout simplement pas rentable. Il ne faut pas attendre que la sécurité d'emploi dépasse les moyens de la société de vendre son produit. Mais ce sont 81 000 000 $ qui auraient été dépensés pour la création d'emplois à un moment où le Québec se trouve dans une position économique tragique, d'après l'expression du ministre, et dans une situation où, après cinq années de gouvernement péquiste, notre part québécoise de l'économie canadienne a diminué d'au moins 20%.

Notre taux de chômage est maintenant beaucoup plus élevé qu'il était au moment où le Parti québécois a pris le pouvoir. Notre part dans la création de nouveaux emplois au Canada a diminué, d'environ 22% du total canadien qu'elle l'était, jusqu'à 15% peut-être, cette année, et les nouveaux investissements dans le secteur industriel, dans le secteur de la fabrication, qui est la clé de tout renouvellement économique dans une société, ont baissé. Avant l'arrivée au pouvoir du Parti québécois, on avait à peu près 25% de tous les investissements dans ce secteur qui étaient faits au Canada et, cette année, on n'aura pas 20%. Alors, cet affaiblissement de l'économie n'est pas causé par les interventions du gouvernement ou par le manque d'interventions du gouvernement. C'est causé par les mauvaises priorités, dont la société Asbestos est un très bon exemple et dont l'idée de construire le mât olympique pour 17 000 000 $ est un autre bel exemple des mauvaises priorités. C'est le manque de compréhension, le manque d'intérêt, le manque de connaissances dans le domaine économique.

Je termine, M. le Président, et je reviens à la question de la Côte-Nord. S'il y a des gens, par hasard, sur la Côte-Nord, qui nous regardent aujourd'hui, j'espère qu'ils ont un stylo et un morceau de papier, parce qu'il reste encore une heure pour ce débat. J'espère que, dès maintenant, le gouvernement, les ministres ou les députés vont commencer par nous dire, au sujet de la Côte-Nord, exactement, point par point, ce qu'ils proposent de faire pour régler le problème que le député de Duplessis a qualifié de non catastrophique, mais que tous les membres du gouvernement reconnaissent comme quelque chose de très sérieux et surtout comme étant la raison principale de notre présence ici aujourd'hui. Alors, il nous reste une heure, ce qui nous donne amplement de temps pour que cette liste des actions, des actes précis qui sont faits par le gouvernement, soit détaillée. J'invite les personnes de la Côte-Nord qui nous regardent, comme je l'ai dit, à sortir un stylo et un morceau de papier et à commencer à écrire parce que, à la fin de

cette période, nous aurons peut-être eu quelque chose, un résultat, une retombée positive de ce débat que le Parti libéral du Québec a soulevé ce matin.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Lucien Lessard

M. Lessard: Merci, M. le Président. Je suis d'abord très heureux que les députés de l'Opposition aient soulevé le problème de la situation tragique sur la Côte-Nord. Mais je dois dire aux députés de l'Opposition que la Côte-Nord leur a répondu depuis 1970 et en 1976, que la Côte-Nord a justement balayé les députés libéraux de son territoire. Ce n'est certainement pas le député de Notre-Dame-de-Grâce, le député d'Outremont et le député de Westmount qui vont venir nous dire comment développer la Côte-Nord. Il y a, depuis 1970, un député du Parti québécois dans le comté de Saguenay et, depuis 1976, il y a Denis Perron qui a été député du Parti québécois. D'ailleurs aux dernières élections, la Côte-Nord vous a donné votre réponse encore une fois en vous balayant et en balayant vos candidats.

Mais, M. le Président, si la Côte-Nord a décidé de répondre aux députés libéraux, en 1970 et en 1976, c'est parce que la Côte-Nord a rejeté justement une conception du développement économique qui n'a pas changé encore du côté des libéraux. J'ai eu l'occasion de visiter la Côte-Nord pendant la campagne électorale, d'aller à Port-Cartier comme à Sept-Îles et de voir la situation désastreuse, particulièrement à Port-Cartier et je me sentais mauditement malheureux -passez-moi l'expression, M. le Président -devant une telle situation, lorsque je voyais des HLM littéralement fermés comme des villes de l'Ouest.

Mais, pendant la campagne électorale, je n'ai pas pour autant, dans les discours que j'ai faits, dit aux gens de la Côte-Nord que le Parti québécois allait régler leurs problèmes d'un coup, au lendemain de la campagne électorale. Je ne pouvais pas le leur dire. Mais j'ai dit ceci aux gens de la Côte-Nord: La différence entre le parti qui se présente contre nous, le Parti libéral, et le Parti québécois, c'est que nous croyons d'abord aux ressources du Québec, on croit d'abord aux gens du Québec et on croit d'abord aux régions du Québec.

L'histoire de la Côte-Nord, c'est l'histoire caractéristique de tout le Québec. Le développement économique de la Côte-Nord, c'est à peu près l'histoire du développement économique de tout le Québec qui a été fait par nos prédécesseurs, par nos gouvernements précédents. Et qu'est-ce que c'était, ce développement économique ou cette conception économique que le député de Notre-Dame-de-Grâce vient d'illustrer il y a quelques minutes, et que le député de Nelligan a illustré, hier, ici, à l'Assemblée nationale? Cette conception, c'était toujours de se fier sur les autres pour assurer notre développement économique, se fier sur les autres, se fier sur les Américains, se fier sur les étrangers et sans donner...

M. Scowen: SGF, Hydro-Québec... M. Lessard: Un instant!

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le député.

M. Scowen: Vous êtes contre ces institutions?

M. Lessard: Oui, vous vouliez débâtir ces sociétés-là à l'occasion de la dernière campagne électorale.

M. Scowen: Qui les a construites?

M. Lessard: Oui, se fier sur les autres. On en avait des ressources sur la Côte-Nord et il y en a encore. Il y avait des ressources forestières sur la Côte-Nord, partout, partout. On était de maudits bons scieurs de bois sur la Côte-Nord, on ne se syndiquait pas parce qu'on avait peur qu'elles partent. Les compagnies forestières ont toutes "sacré le camp" et ont toutes épuisé les ressources. Pourquoi? Parce qu'on n'avait aucun pouvoir de décision. Ce sont elles qui décidaient à notre place, qui nous développaient à notre place, qui prenaient le contrôle de nos ressources. L'histoire de ITT Rayonier est la plus belle illustration d'à-plat-ventrisme des libéraux en 1971 et de tous les gouvernements précédents.

En 1971 - oui, on va parler de Reynolds - quand ITT est venue sur la Côte-Nord, quand M. Bourassa a annoncé à grand renfort de publicité la venue de ITT sur la Côte-Nord, avec 40 000 000 $ de subvention directe sur un investissement de 160 000 000 $, soit 25% de l'investissement direct qu'on fournissait. Alors qu'on dit que lorsqu'une compagnie possède 10% de son capital, elle peut emprunter 90% de la différence, on fournissait 25%, 40 000 000 $, plus des avantages économiques considérables, ce qui totalisait 118 000 000 $ que le gouvernement Bourassa cédait à ITT, plus 58 000 milles carrés de territoire. Une grande partie, le dernier secteur forestier du Québec.

Je comprends qu'il était peut-être difficile, mais ce que j'ai dit à ce moment-là comme représentant de l'Opposition en 1971, alors que j'étais critique en matière de terres et forêts... On s'est battu ici jusqu'à 3 heures 55 du matin, parce que dans ce

temps-là on siégeait aussi la nuit, pour dénoncer le fait qu'ils nous passaient un Québec, la nuit à part ça. On s'est dit une chose qui apparaît normale: Quand un gouvernement investit 40 000 000 $ sur un investissement de 160 000 000 $, il devrait être présent aux décisions, il devrait être présent au niveau du conseil d'administration. Non, on nous a répondu à ce moment-là: ITT ne veut pas que l'on soit participant aux décisions. C'est là le problème fondamental du développement économique du Québec. On a cédé sans aucune condition, poings et mains liés, les ressources du Québec sans que le Québec ait de responsabilités en ce qui concerne les décisions de l'administration de ces entreprises. Il aurait été normal qu'on exige à ce moment-là de ITT Rayonier qu'elle puisse mettre en même temps, à côté de nous, 40 000 000 $ dans le pot avec nos 40 000 000 $ de subventions de telle façon que le gouvernement du Québec aurait pu être participant et savoir ce qui se passait à l'intérieur de l'entreprise. Non, M. le Président, on leur a cédé 58 000 milles carrés de territoire, on leur a cédé 118 000 000 $ et on nous a dit: Restez à genoux, la compagnie vient, restez à genoux. Je me rappelle quand on a inauguré ITT Rayonier, à Port-Cartier, on disait: Bienvenue, ITT Rayonier. C'était même payé par le gouvernement du Québec. Ils nous ont servi des barbecues, je comprends qu'avec 118 000 000 $ ça vit dans un poulailler! M. le Président, c'est ça le développement économique que nous propose encore le Parti libéral.

Le problème de la Côte-Nord, actuellement, vient, c'est vrai, de deux sources; il vient de ITT Rayonier, à Port-Cartier, qui a soulevé un problème considérable, il vient aussi d'une autre source, la compagnie Iron Ore. Est-ce que c'est une compagnie qu'on contrôle, la compagnie Iron Ore? Est-ce que c'est une compagnie sur laquelle on peut avoir, un moment donné, une certaine influence? Non, la compagnie Iron Ore est contrôlée ailleurs, aux États-Unis. Quand Iron Ore, un moment donné, prend une décision, elle ne vient pas en parler au gouvernement du Québec. Elle prend la décision. Cette compagnie-là et toutes les autres compagnies du Québec, ne viennent pas au Québec pour nos beaux yeux. Elles viennent pour faire de l'argent et, tant et aussi longtemps qu'elles en font, elles restent au Québec et, quand elles n'en font plus, elles s'en vont. C'est là la différence, M. le Président.

La Côte-Nord, en 1970 et en 1976, a rejeté le Parti libéral parce que la Côte-Nord a rejeté cette conception de notre développement économique par et pour les autres. Je comprends qu'on ne pourra pas régler - à part les cas ponctuels dont le député de Duplessis a parlé tout à l'heure - du jour au lendemain le problème de la Côte-Nord comme on ne pourra pas régler du jour au lendemain le problème des autres régions économiques qui ont été des régions-ressources. C'est toute une transformation industrielle qu'il faut faire dans tout le Québec.

C'est dans ce sens-là qu'on a lancé au gouvernement, par exemple, Bâtir le Québec mais pas bâtir le Québec par et pour les autres, bâtir le Québec par et pour les Québécois. C'est la différence entre la conception de développement économique qui nous est proposée par les libéraux et celle qui est proposée par le Parti québécois. Développer le Québec et dire aux Québécois: Le Québec nous appartient d'abord et c'est par les ressources du Québec, par les ressources humaines qu'on va être capable de développer ce Québec. C'est dans ce sens-là, M. le Président, que je trouve les députés libéraux passablement hypocrites ce matin. Nous prenons une succession qu'ils nous ont laissée et que les gouvernements précédents nous ont laissée. On était rendu au point qu'on n'était même plus capable de pêcher dans les rivières à saumon parce que vous les aviez toutes cédées aux entreprises privées. On pensait que le saumon était tellement anglicisé qu'il ne mordait plus à la ligne des Québécois.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Les

Indiens.

M. Lessard: M. le Président, nous autres, on n'a pas lancé de grands projets. On n'a pas créé d'illusions au monde mais on a dit par exemple: Lorsqu'on va lancer un petit projet, il va être à nous autres, il va nous appartenir et on va le maintenir. C'est dans ce sens-là qu'on veut prendre des mesures pour régler le problème de la Côte-Nord mais pas vendre la Côte-Nord aux étrangers pour autant mais vendre d'abord la Côte-Nord aux Québécois.

Je pourrais vous parler de toute l'histoire des petits villages de la Côte-Nord, de Tadoussac jusqu'à Blanc-Sablon. Même Mgr Labrie avait fait des écrits pour dénoncer la façon dont étaient exploitées nos ressources naturelles et particulièrement notre forêt en 1948, 1949 et 1950. On continuait de tout céder, mais avez-vous changé d'opinion? Allez-vous changer de conception économique? Le ministre responsable du développement économique essaie de voir dans quel sens vous vous dirigez. Le député de Notre-Dame-de-Grâce disait qu'on avait fait un erreur concernant Asbestos Corporation, qu'on ne créait pas d'emplois. C'est pourquoi le Québec a décidé de prendre, comme on l'a fait pour l'électricité, le contrôle d'une ressource importante, soit le secteur de l'amiante? Parce qu'on est le plus grand producteur au

monde et ceci va nous permettre d'être responsables des décisions. Nationaliser les centres de décisions, M. le Président, c'est important, ça, et ne pas se fier à des décisions qui seront prises à New York ou à Toronto pour notre développement économique. C'est important, ça. (12 h 15)

Le député de Nelligan, à l'Assemblée nationale dénonçait, hier, le fait que le gouvernement du Québec avait pris le contrôle de la Domtar. Or, la Domtar, avant qu'on en prenne le contrôle, avait l'intention de faire quoi? De déménager son siège social du Québec, "sacrer le camp" du Québec. Et là, M. le Président, aussitôt que la Domtar aurait changé son développement ou aurait diminué son développement au Québec ou sa création d'emplois au Québec, on se serait scandalisé, de l'autre côté de la Chambre, on aurait dit: Le gouvernement du Québec ne fait rien pour maintenir les emplois au Québec, le gouvernement du Québec ne fait rien pour aider la Domtar. Là, il aurait fallu se mettre à genoux devant la Domtar, selon leur conception économique, et subventionner la Domtar pour qu'elle continue de développer les ressources du Québec. Ce n'est pas ça qu'on a fait, M. le Président. On a décidé de prendre le contrôle des centres de décisions. On n'est plus à genoux devant la Domtar, on la contrôle. La Domtar va continuer de développer au Québec, mais elle est maintenant la propriété, en grande partie, des Québécois. Cela, c'est important; ça, c'est fondamental. C'est la différence entre la conception du développement économique par et pour les Québécois, qui est partagée de ce côté-ci de la Chambre, alors que vous continuez d'avoir une conception du développement économique par et pour les autres. C'est ça, M. le Président, la différence.

Chaque fois que le gouvernement du Québec tente de faire un effort pour essayer de contrôler ses centres de décisions, on dirait que ces messieurs d'en face, les membres de l'Opposition, n'ont pas reçu leur leçon. Le fouillis d'ITT n'a pas été une leçon pour eux. Chaque fois qu'on veut prendre le contrôle de centres de décisions, on réagit négativement. Contrairement à ce qu'a dit le député de Notre-Dame-de-Grâce, c'est vrai que ça va coûter 80 000 000 $ pour Asbestos Corporation, mais pas 80 000 000 $ actuellement, M. le Président, on ne sort même pas d'argent, c'est d'à peu près 16 000 000 $ dont on va avoir besoin. On nous prête les actions de 42 $ à 16%. Actuellement, c'est un bon placement, ce n'est pas si mal.

Mais prenez conscience de ce qu'est le Québec maintenant. Ce n'est plus le Québec de 1951-1952. Le Québec a conscience de ses ressources, de ses possibilités. Vous continuez encore à vendre aux Québécois le développement économique par et pour les autres, le développement économique par les gens de l'Ontario, le développement économique par les États-Unis. Ce n'est pas ça, M. le Président.

Il est certain que nous allons prendre des mesures et on en a pris, des mesures. Comme ministre des Transports, j'ai eu l'occasion - c'est vrai et je ne me le reproche pas, c'était le temps - de favoriser un certain nombre de décisions sur la Côte-Nord, parce qu'on y était vingt ans en arrière. Je m'étais battu, en tant que député de l'Opposition, de 1970 à 1976, pour avoir quelques investissements dans le réseau routier, tant dans mon comté que dans le comté de Duplessis. On parlait de la route de Gagnon, tantôt. Combien de fois on s'est battu et on a réuni des organismes de tout le milieu. On a investi à peu près 1 500 000 $, de 1970 à 1976, et c'est allé à un patroneux du Parti libéral.

Nous autres, ce n'est pas ça qu'on a fait; on a dit: la route de Gagnon, on va mettre 14 000 000 $. Et allez voir, il y a du monde qui y travaille. La Côte-Nord n'a pas besoin des députés de l'Opposition pour la représenter. Denis Perron et moi-même, on est capable de faire les pressions nécessaires pour corriger un certain nombre de situations. Mais que la Côte-Nord ne pense pas, malgré toutes les mesures qu'on va prendre... Je peux vous donner un autre exemple. On parle de la participation du fédéral. M. Maltais, le député de Manicouagan, a dit au gouvernement: Prenez vos responsabilités. Il s'est promené avec quelque 100 000 000 $ dans les poches, somme qu'on n'a jamais vue, je ne sais pas où elle est. 120 000 000 $, et on n'a pas vu encore un investissement, mais il y a des choses concrètes qui sont à faire. Il y a des choses concrètes sur lesquelles le député fédéral de Manicouagan devrait prendre position à Baie-Trinité. À Baie-Trinité, une entreprise a investi tout près de 2 000 000 $, plus 3 000 000 $ ou 4 000 000 $ pour acheter deux bateaux pour faire la pêche au hareng. Le ministre des Pêcheries et des Océans, Roméo LeBlanc, avait émis - ce ne sont pas des fous, ils n'ont pas acheté ces bateaux sans avoir le droit de pêche - des permis de pêche pour pêcher le hareng et pour développer une entreprise à Baie-Trinité qui créerait environ 60 emplois directs. Quelques mois après, M. LeBlanc revient sur sa décision et refuse l'émission des permis de pêche au hareng pendant qu'il en donnait une quinzaine au Nouveau-Brunswick et dans toutes les provinces maritimes, mais aucun permis de hareng pour la Côte-Nord et pour tout le Québec. Cette compagnie a investi 5 000 000 $, 4 000 000 $ sur deux bateaux et 1 500 000 $ sur une entreprise pour exploiter le hareng, et le fédéral ne nous

donne pas de permis. Le député Maltais nous dit: Prenez vos responsabilités, les députés provinciaux. Qu'il prenne donc ses responsabilités, lui, et qu'il intervienne donc auprès de son collègue Roméo LeBlanc pour qu'on puisse nous émettre des permis à nous aussi, parce que nous aussi, les Québécois, avons le droit de pêcher dans ce maudit fleuve. Il me semble que le fédéral devrait prendre aussi ses responsabilités.

Je termine, M. le Président. De plus, pour montrer le ridicule de cela, le fédéral avait participé de quelque 200 000 $ pour la construction de l'entreprise et là, il nous empêche de pêcher, il refuse les permis. C'est le comble du ridicule. C'est certain qu'on ne peut pas, ce matin, régler tous les problèmes que vivent les citoyens de la Côte-Nord actuellement et que vit particulièrement le député de Duplessis. Il est vrai que, moi aussi, je subis certaines conséquences, mais elles ne sont pas aussi tragiques que celles du député de Duplessis. On a quand même des espoirs avec Reynolds à Baie-Comeau, mais on ne l'a pas négocié à genoux, Reynolds. On ne lui a pas donné nos ressources, on l'a négocié debout et elle est venue quand même.

M. le Président, je dis que la Côte-Nord est très bien représentée à l'intérieur du gouvernement. Pour la première fois dans l'histoire de la Côte-Nord, il y a un ministre qui siège au Conseil des ministres. Cela démontre au moins que le Parti québécois a tenu compte de la représentation régionale, il a tenu compte de la Côte-Nord. Il y a le député du comté de Duplessis, M. Denis Perron, qui est capable de défendre pas mal mieux que vous autres, et selon notre conception, le développement économique par et pour les Québécois, de défendre les intérêts de la Côte-Nord. On ne cessera pas de les défendre et on n'a pas besoin de votre appui. On vous en remercie, on s'en passera.

Le Président (M. Jolivet): Avant de permettre à d'autres députés d'intervenir, je dois vous dire que les règles du jeu nous indiquent que vers 12 h 40, nous cesserons toute intervention, pour permettre dix minutes au député de Vaudreuil-Soulanges, et dix minutes, au ministre d'État au Développement économique pour conclure.

La parole est au député d'Outremont.

M. Fortier: M. le Président, je vais laisser la parole au député de Mégantic-Compton, mais j'aurais quelques remarques à faire, parce que tout à l'heure, mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce répliquait dans une certaine mesure, mais le député de Saint-Maurice avait fait allusion à certaines choses, et j'aimerais apporter certaines corrections.

Je vais laisser au député de Mégantic-

Compton le soin de continuer. Le député de Saguenay nous demande ce que l'on ferait si on était au pouvoir. La raison pour laquelle on a organisé ce débat, ce matin, c'est qu'on croit que la population du Québec veut savoir ce que le gouvernement au pouvoir va faire pour régler les problèmes. Quant à savoir ce qu'on ferait si on était là, si j'étais parmi la population de la Côte-Nord, je dirais que ce n'est pas pertinent au débat. Je me demande pour quelle raison on cherche tellement à avoir nos idées; peut-être qu'on est à court d'idées de l'autre côté de la Chambre, mais cela me semble un peu farfelu de nous poser cette question.

Si la population de la Côte-Nord nous écoute et si elle a suivi la suggestion de notre représentant de Notre-Dame-de-Grâce, à savoir de prendre une feuille de papier pour indiquer toutes les choses qui vont être faites par le gouvernement, je m'aperçois que la feuille de papier est encore blanche. Il nous reste, comme vous avez dit, 35 minutes. J'ose suggérer au gouvernement de dire des choses qu'il va faire pour que la population de la Côte-Nord puisse écrire sur sa feuille pour qu'à 13 heures elle ait quelque chose de positif et qu'elle puisse savoir à quoi s'en tenir.

Pour ma part, j'aimerais remercier le ministre de l'Énergie et des Ressources de nous avoir dit ce qu'il avait fait dans le dossier de ITT. Essentiellement, ce qu'il nous a dit, c'est: J'ai fait ce que j'avais à faire. Il a dit: La compagnie avait brisé son contrat et j'ai négocié une entente. On va recevoir bientôt 6 000 000 $. Parfait! Je crois que c'était le minimum qu'il devait faire. Il a assumé sa responsabilité ministérielle. Il n'y a pas grand-chose là.

Mais je reviens à la Romaine. Le ministre n'était pas là au mois de février, ce n'est pas lui qui était ministre de l'Énergie et des Ressources. J'y suis allé au mois de février. Je peux vous dire que je n'ai rien entendu de la part d'Hydro-Québec qui permet à la population de la Côte-Nord de savoir pour quelle raison exactement la Romaine ne peut pas être développée maintenant. Comme je l'ai dit, je n'ai pas accès aux dossiers confidentiels d'Hydro-Québec, mais je me fie à cette étude qui a été faite par l'OPDQ dans laquelle on nous dit que la Romaine va coûter moins cher à être développée que Laforge et Grande-Baleine. Je dis ceci: Le programme présenté par Hydro-Québec, présentement, prévoit que la Romaine ne sera aménagée qu'après ces rivières. Je pose cette question: Le ministre est-il satisfait de quelques conversations tout à fait anodines avec la direction d'Hydro-Québec? Pourquoi ne demande-t-il pas à Hydro-Québec de nous donner et de donner à la population de la Côte-Nord une réponse étoffée qui permettrait à l'Opposition de connaître les vraies raisons d'Hydro-Québec?

J'ai tout à fait confiance à Hydro-Québec mais, si le gouvernement devait assumer ses responsabilités - et on le ferait si on était à sa place - il exigerait d'avoir des réponses écrites pour que la population de la Côte-Nord sache à quoi s'en tenir.

Si le ministre veut faire avancer le débat sur la question de la Romaine, j'oserais lui demander qu'il fasse une demande expresse à Hydro-Québec de justifier ses décisions pour qu'on puisse les analyser en toute connaissance de cause.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Duhaime: M. le Président, je voudrais rassurer le député d'Outremont pour lui dire que ce ne sont pas que de vagues conversations qui ont lieu avec Hydro-Québec. D'ailleurs, mon collègue, le ministre d'État au Développement économique, est bien au fait de ce dossier.

Dans l'hypothèse où les plans, les études sur les données, qui sont encore aujourd'hui très préliminaires dans le cas, de la Romaine, nous amèneraient à la conclusion d'aller de l'avant et de procéder à l'aménagement de la Romaine tout de suite, je pense que c'est mon devoir de dire, M. le Président, plutôt que de laisser des illusions se répandre et être entretenues par le Parti libéral, que ce ne serait de toute manière pas avant le milieu des années quatre-vingt-dix.

M. Fortier: Ce que je demande, M. le Président, c'est qu'on rende l'étude publique.

M. Duhaime: Le député d'Outremont, puisqu'il a eu l'occasion de participer à la commission parlementaire de février 1981, est très bien au fait de l'évolution des coûts marginaux de production sur chacune des rivières incluses dans le plan décennal d'Hydro-Québec, de même que du prix quant à la rivière la Romaine.

Je voudrais peut-être apporter une précision. Au fur et à mesure que progressent les travaux à la Baie-James, Hydro-Québec fait une mise à jour continuelle de ses coûts de production sur chacune des rivières aménageables. Il est bien évident que, par exemple - je vais le donner pour l'information du député d'Outremont, mais pour ceux qui nous écoutent aussi - la puissance qui pourrait être installée est à peu près de 1400 mégawatts et elle est tout juste derrière LG 1, Brisay et Laforge I; vient ensuite la Romaine et Laforge II. Mais ces données sont basées sur des études très préliminaires. Il n'y a aucun secret là-dedans. Je pourrais même transmettre au député d'Outremont, pour son information, copie d'une lettre du PDG d'Hydro-Québec, datée du 24 septembre, qui va à peu près dans le même sens. (12 h 30)

Nous allons, bien sûr, poursuivre la mise à jour de ces données. Mais ce que je disais tantôt, qui a peut-être échappé au député d'Outremont, c'est ceci: Si nous avions un projet industriel majeur, nous pourrions très bien, avec Hydro-Québec, étudier la possibilité réelle d'accélérer ce projet-là, mais il faut aussi tenir compte des coûts. Très souvent, les libéraux d'en face reprochent à notre gouvernement de ne pas avoir beaucoup de rationalité économique. Je pense que c'est le rôle de l'Opposition de s'opposer, c'est, par définition, dans le dictionnaire, mais nous, de ce côté-ci, tout en étant conscients de l'effet d'entraînement et de l'impact économique réel qu'aurait sur la Côte-Nord un pareil projet, je dis au député d'Outremont - et je pense que c'est agir avec responsabilité - que je ne lancerai pas le projet de la Romaine de la même façon que le projet de la Baie-James a été lancé il y a quelques années le jour de la Saint-Robert. Nous le ferons lorsque nous aurons en main toutes les études techniques, et que nous aurons la certitude que l'énergie qui sera dégagée de cet aménagement aura une base économique solide, et pas avant.

Le Président (M. Jolivet): M. le député.

M. Fortier: Que le président d'Hydro-Québec envoie une lettre au ministre et que le ministre me donne cette lettre-là, cela ne m'éclaire pas davantage. Compte tenu de l'importance que ce dossier a pour la Côte-Nord et étant moi-même familier avec certaines de ces données-là, je dis simplement: Si moi-même, en tant qu'ingénieur, je ne peux comprendre les conclusions auxquelles est arrivé le président d'Hydro-Québec, je crois que les gens de la Côte-Nord ont beaucoup de difficulté à accepter cette conclusion. Sans intervenir par voie directionnelle à Hydro-Québec, il me semble que le ministre pourrait demander à Hydro-Québec de produire - je comprends bien que les études sont préliminaires, mais c'est sur la foi de ces études préliminaires qu'Hydro-Québec base sa décision - il me semble que ce serait tout à fait normal que le ministre demande à Hydro-Québec de produire un rapport - peut-être qu'il a déjà reçu ce rapport - qui nous donnerait les hypothèses de calculs, les raisons qui ont fait que ces coûts-là arrivaient à tels et tels chiffres qui ont motivé leur décision. A ce moment-là, on pourra en discuter. Les gens de la Côte-Nord seraient plus informés et nous, on pourrait en discuter d'une façon plus intelligente. C'est la demande que j'ai faite parce que, à venir jusqu'à maintenant, je n'ai rien entendu, j'ai entendu bien des conclusions mais je n'ai vu aucun rapport, aucune étude qui nous permette de conclure

comme le ministre présentement.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: Ecoutez, M. le Président, chacun son boulot. Le député d'Outremont est un député dans l'Opposition et je ne pense pas qu'Hydro-Québec va se fonder sur l'expertise de l'Opposition, si ingénieur soit-on, et la vôtre en particulier, dans le secteur nucléaire, me ferait me poser de sérieuses questions et des réserves sur la qualité de l'expertise. J'aimerais...

M. Fortier: M. le Président, le ministre fait dévier le débat...

M. Duhaime: ... peut-être mieux me fier à l'expertise de mon collègue.

M. Fortier: Je pose la question au nom des gens de la Côte-Nord. Je crois qu'au lieu de s'attaquer à moi, le ministre devrait donner des réponses qui devraient satisfaire les gens de la Côte-Nord.

M. Duhaime: Pas à vous. Je ne suis pas un ingénieur. Vous, vous invoquez votre métier. Je respecte cela, mais je vous dit que je ne peux pas aller plus loin dans l'information que je vous donne ce matin pour une raison très simple. Dans les projets Romaine, Brisay Laforge 1, Laforge 2, La Grande 1, quand Hydro-Québec fait ses comparaisons pour voir la marginalité des coûts, les études sur lesquelles repose la comparaison n'ont pas le même degré d'avancement. Je pense que c'est clair.

M. le Président, en tout état de cause, cela ne sert à rien de lancer des illusions sur ce que vous faites durant vos tournées sur la Côte-Nord autant qu'ailleurs dans d'autres régions, quand ce ne sont pas des tournées, simplement, de calomnie. Je dis ceci: II n'y aura rien, de toute manière, avant le milieu de la décennie 1990, dans la meilleure des hypothèses, à moins qu'un projet industriel majeur puisse justifier un dépassement de coût.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Vimont.

M. Jean-Guy Rodrigue

M. Rodrigue: A ajouter à ce que vient de nous mentionner le ministre de l'Énergie, la rivière Romaine sera la première des rivières de la Côte-Nord à être aménagée parce que c'est celle qui présente les coûts marginaux les plus bas, comme l'a souligné le ministre.

Cependant, il faut constater que selon les rapports d'Hydro-Québec, les bassins de la Nottaway-Broadback-Rupert, la terminaison des travaux sur la rivière La Grande de même que l'aménagement de la rivière Grande-Baleine qui se situe environ 100 milles au nord de la rivière La Grande, présentent des coûts unitaires un peu inférieurs à ceux de la Romaine. C'est donc dans la logique des choses qu'on les aménage avant.

Le ministre a souligné que la mise en service de la Romaine est prévue pour le milieu de la décennie quatre-vingt-dix, ce qui signifie, compte tenu que ces travaux peuvent durer environ de 10 à 12 années, que selon les prévisions d'Hydro-Québec, les travaux devraient commencer sur la rivière Romaine autour de 1985. Cela est relié à l'évolution des courbes de la demande. Selon des scénarios qu'Hydro-Québec a faits il y a environ un an, le début des travaux sur la Romaine était prévu pour 1984.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, une question de règlement.

M. Bélanger: M. le Président, je crois qu'au début de notre réunion, on a convenu qu'il y aurait alternance entre le Parti québécois et...

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse...

M. Bélanger: ... actuellement, je m'aperçois qu'à deux reprises, du côté ministériel, on prend la parole.

Le Président (M. Jolivet): Je vais vous donner la réponse. Puisque M. le député d'Outremont a posé des questions au ministre, c'est dans ce sens-là que j'ai interprété l'intervention du député d'Outremont comme question et réponse. Donc, la parole est au député de Vimont.

M. Rodrigue: Alors, les travaux, selon un scénario d'Hydro-Québec, devaient commencer en 1984.

M. Scowen: M. le Président, je veux simplement vous demander, tenant compte du fait que vous avez, dans ce sens, donné le droit de parole à deux députés de suite du côté ministériel, si vous pouvez accorder, avec le consentement de la Chambre, le droit au député de Mégantic-Compton de faire une brève intervention à la suite de celle qui est en train de se dérouler maintenant.

M. Landry: Je pense qu'on avait convenu, au début, que l'Opposition se verrait même la tâche facilitée, cela a été lamentable pour vous, même en dépit de notre générosité, mais on est prêt à aller encore plus loin si vous voulez vous enferrer davantage, faites-le parler le député de

Mégantic-Compton.

Le Président (M. Jolivet): S'il y a consentement, nous pouvons donc dépasser le temps. Je répète que, d'une façon ou d'une autre, il y a 10 minutes à protéger pour le député de Vaudreuil-Soulanges et 10 minutes pour le ministre d'Etat au Développement économique. La parole est au député de Vimont maintenant.

M. Rodrigue: Alors, je rappelle, M. le Président, que selon le scénario d'Hydro-Québec il y a environ un an, et selon les courbes de demandes que nous connaissions à ce moment-là, le début des travaux était prévu pour l'année 1984, de sorte qu'on puisse faire la mise en service au milieu de la décennie quatre-vingt-dix, comme l'a mentionné le ministre.

Cependant, ce qu'on sait maintenant, c'est que la courbe de demandes a fléchi sérieusement depuis environ six mois et il est possible que cela entraîne un retard d'environ une année dans la mise en service. De toute façon, on peut compter que la mise en chantier de la rivière Romaine devrait se situer au milieu de la décennie quatre-vingt, c'est-à-dire autour des années quatre-vingt-quatre ou quatre-vingt-cinq.

Maintenant, il faut dire ceci: Le député Perron tout à l'heure a mentionné un certain nombre de mesures concrètes et à court terme que le gouvernement du Québec a prises pour faire face à la situation difficile qu'on vit sur la Côte-Nord. Mais il faut mentionner aussi qu'il y a des solutions à plus long terme, dont les aménagements hydroélectriques, qui représentent quand même une lueur d'espoir assez importante. Hydro-Québec, depuis une dizaine d'années a investi un peu plus de 15 000 000 $ dans des études des rivières de la Côte-Nord. Et une bonne partie de ces sommes est allée en salaires versés à des gens de la Côte qui ont travaillé aux études préliminaires, entre autres, celles de la rivière Romaine.

Au moment où l'on se parlé - je le souligne à la demande du député Perron parce que tout à l'heure, cela lui a échappé Hydro-Québec entreprend des études d'avant-projet sur le lac Robertson, projet dont les coûts sont estimés à environ 85 000 000 $ et le coût des études préliminaires devrait se chiffrer par 10 000 000 $ ou 12 000 000 $.

Je voudrais quand même, cependant, faire une parenthèse ici, pour corriger une erreur que le député d'Outremont commet fréquemment. C'est celle de relier nécessairement l'aménagement des rivières de la Côte-Nord à une entente avec les gens de Terre-Neuve, concernant la frontière du Labrador. Il me semble, M. le Président, qu'il est temps qu'on sache et qu'on le dise, le Québec n'a pas besoin du Labrador pour aménager les rivières de la Côte-Nord. Dans le cas de la rivière Romaine en particulier, d'abord, il y a seulement 16% du bassin de la rivière à la tête qui est au Labrador. Deux solutions sont à examiner, soit une solution où on submergerait légèrement les territoires situés au Labrador et une solution où on ne toucherait pas au Labrador. La différence dans les deux cas n'est que de 80 mégawatts. Selon les dernières données que j'ai, la solution sans toucher au Labrador représente des coûts unitaires légèrement inférieurs à ceux qu'on aurait si on affectait le Labrador. Donc, dans le cas de la rivière Romaine - c'est le cas de l'ensemble des rivières - on n'a pas besoin du Labrador pour aménager les rivières de la Côte-Nord. Il me semble que, là, on devrait cesser de toujours relier cela au problème de la frontière.

Hydro-Québec a investi environ 15 000 000 $. On peut s'attendre que, dans les prochaines années, compte tenu du fait qu'un certain nombre de ces rivières comme la Sainte-Marguerite, celle du Petit Mécatina, la Magpie en particulier et, à plus long terme, la rivière Natashquan, présentent un intérêt certain pour des fins d'aménagement hydroélectriques, plusieurs centaines de millions de dollars soient dépensés en études d'avant-projet au cours de la décennie quatre-vingt. Ainsi, les travaux d'aménagement des autres rivières, si j'exclus la rivière Romaine, mais je parle des autres maintenant, dans le cadre du programme d'Hydro-Québec qui a été présenté en commission parlementaire l'automne dernier, pourraient commencer au début de la décennie quatre-vingt-dix.

J'étais responsable des études d'aménagement d'Hydro-Québec sur la Côte-Nord avant le 13 avril. J'ai donc eu une connaissance assez précise de l'ensemble des dossiers de ces rivières. Si je ne parle que de la rivière du Petit Mécatina, nous avons estimé à 110 000 000 $ le coût des études d'avant-projet qui devraient nécessairement se faire d'ici 1990 pour que la mise en service des turbines sur cette rivière puisse se faire vers l'an 2000, ce qui correspond à la programmation d'Hydro-Québec.

Les solutions à court terme, Denis Perron, le député de Duplessis, les a soulignées, mais il faut que les gens de la Côte-Nord sachent également qu'à moyen terme Hydro-Québec a des travaux extrêmement importants à entreprendre dans cette région, ce qui va procurer de l'emploi aux gens de la région. Je pense que le député, M. Perron, est bien informé du dossier et je suis sûr que les gens de la Côte-Nord sauront prendre les moyens pour que les retombées économiques de ces études et de ces travaux soient extrêmement fortes dans la région comme elles le sont actuellement dans le Nord-Ouest québécois à cause des travaux de la Baie-James.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Fabien Bélanger

M. Bélanger: Merci, M. le Président. En entendant les trois ministres nous faire part qu'au Québec tout allait bien, que des millions de dollars avaient été investis ici, des milliards de dollars là, qu'on avait l'intention d'en investir ailleurs, j'ai eu l'intention, à un certain moment, d'exercer mon droit de parole pour offrir au côté ministériel des excuses en mon nom personnel et au nom du Parti libéral du Québec pour vous avoir dérangés ce matin.

M. Landry: On est prêts tous les vendredis.

M. Bélanger: Mais je me suis rappelé une chose. C'est que moi aussi, je visite le Québec et moi aussi, je fais partie de la mission économique du Parti libéral. Dans chaque région que j'ai visitée, ce ne sont pas les mêmes paroles qu'on entendait, y compris la Mauricie, M. le ministre. Oui, j'étais à Shawinigan, où une étude a été faite. Je vais vous donner un cas précis, M. le ministre. À Shawinigan, une étude a été faite par les Rôtisseries Saint-Hubert, qui ont décidé tout simplement d'abandonner le projet parce que la Mauricie se meurt.

M. Duhaime: Vous savez pourquoi?

M. Bélanger: Oui, je sais pourquoi, M. le ministre, j'étais là.

M. Duhaime: C'est parce que votre candidat libéral était intéressé à la Rôtisserie Saint-Hubert.

M. Bélanger: M. le Président, M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre. (12 h 45)

M. Bélanger: Je me suis rappelé également qu'il y avait 320 000 chômeurs au Québec qui, eux aussi, comme moi, croient que c'est un état d'urgence, l'économie au Québec. Seul le gouvernement semblerait ne pas en être conscient. Les membres du gouvernement ne sembleraient pas conscients qu'on est dans un état d'urgence et qu'il faut faire quelque chose. Je suis déçu aussi de la tournure du débat. On était ici pour discuter en particulier, tout au moins, des problèmes de la Côte-Nord, mais, par contre, on a eu droit à toutes ces vieilles salades à l'effet que ça dépend du fédéral, que ça dépend du gouvernement précédent. Cela fait quinze ans, selon eux, que les mauvaises décisions ont été prises. Mais vous êtes là, messieurs, c'est à vous de prendre les décisions et prenez-les. Parce que nous, lorsqu'on va en province, lorsqu'on va rencontrer ces gens-là à la base, ils nous disent ce qui ne va pas et ils nous disent ce qu'il faut faire.

M. Landry: Ils l'ont dit aux élections aussi.

M. Bélanger: J'espère, M. le Président, qu'on va arrêter de se péter les bretelles parce qu'ils ont été réélus le 13 avril. Les Québécois ont acheté votre emballage et non votre contenu.

M. Duhaime: Dans votre cas, en tout cas.

M. Bélanger: M. le Président, avant de terminer, je voudrais dire que le Québec existait avant la venue au pouvoir du Parti québécois. Non seulement il existait, mais il se portait beaucoup mieux. Merci.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le député de Vaudreuil-Soulanges, en conclusion.

Conclusions M. Daniel Johnson

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je vous remercie, M. le Président.

Cette première expérience de question avec débat doit, pour porter ses fruits, autant pour le gouvernement que pour l'Opposition, faire l'objet d'une étude approfondie, sans doute, par le gouvernement, de la création d'autres comités, colloques et séminaires et devrait certainement porter l'Opposition à ne pas rédiger une question qui était bien simple et qui évoquait la Côte-Nord de façon spécifique, de façon à laisser une chance au gouvernement de se livrer à des interprétations abusives qui ont permis - les gens de la Côte-Nord l'auront constaté - à certains porte-parole du gouvernement de parler de toute autre chose.

On a eu droit évidemment à des discours variés sur ce qui se passait dans d'autres régions. On a eu droit à une récapitulation du vote au Québec, en particulier sur la Côte-Nord, depuis 1970. On a eu droit à des allusions généalogiques de part et d'autre de la Chambre. On a eu droit, de la part du député de Saguenay, à des discours qu'on entend souvent sur les conceptions de développement économique qui diviseraient apparemment les Québécois. On a eu droit, finalement, dans le cas de développement économique - et on ne peut pas laisser passer ça - de la part du député du Saguenay, à un réquisitoire ou une argutie en faveur de la détention d'actions de

sociétés qui opèrent ici, comme seul gage de l'accession à des centres de décisions des francophones québécois. Alors que la philosophie que nous partageons de ce côté-ci de la Chambre a pour but de permettre, par la législation de la langue de travail qui a été entreprise sous un gouvernement libéral, l'accès aux centres de décisions par les Québécois francophones qui sont maintenant à coups de milliards formés pour le faire. Nous avons effectué le rattrapage qui s'avérait absolument essentiel, mais pour que nous ayons accès à des postes de décision dans l'activité économique du Québec il faut qu'il y ait des investissements nouveaux; il faut que le climat de croissance et d'expansion de l'activité économique existe. Malheureusement, on a dû constater - le député de Notre-Dame-de-Grâce l'a évoqué -que depuis cinq ans, c'est justement la situation inverse qui prévaut. On pourra acheter tant qu'on veut les actions de qui on voudra si on ne permet pas l'expansion des entreprises, si on ne permet pas que les gens de l'extérieur du Québec, ou s'ils viennent participer à nos richesses, comme nous, les Québécois, participons dans d'autres occasions aux richesses des autres régions, si on ne permet pas à ces conditions de se réaliser, il est bien inutile de former des gestionnaires québécois francophones qui deviendront alors de gros poissons mais dans de plus petits étangs.

Quant aux problèmes particuliers de la Côte-Nord, ce matin, à deux reprises, depuis 25 minutes, nous avons suggéré aux téléspectateurs de se munir de crayon et papier à une fin extrêmement simple, c'est de voir si ce que le gouvernement compte annoncer, ou a annoncé, ou a évoqué, totalisant finalement les 115 000 000 $ sur la période de 36 mois que nous allons traverser, se réalisera. Ce sont les chiffres que le député de Duplessis, lui-même, a évoqués dans sa région; 115 000 000 $ en trois ans. On attend encore de voir si ces projets, ces programmes totalisent cette somme.

Je me permets simplement de relever certains aspects qui n'ont pas été mentionnés ou qui, s'ils l'ont été par les ministériels, l'ont été avec une désinvolture qui doit surprendre les gens de la Côte-Nord. Le ministre de l'Énergie et des Ressources a parlé du rapport Boucher qui ne passerait pas à l'histoire, qui n'est qu'un catalogue relativement insignifiant, selon lui. Son collègue, le député de Duplessis, a donné son appui entier, comme en font foi les journaux de la région, aux conclusions du rapport Boucher, et a demandé que le gouvernement prenne des dispositions pour qu'au moins certaines recommandations soient mises en marche. On ne demande pas à un gouvernement, lorsqu'il s'agit d'un rapport plus ou moins volumineux, de tout faire en même temps mais, au moins, qu'on manifeste la volonté de donner suite à ce rapport, afin d'étudier la diversité des ressources de la Côte-Nord. Il y a le dossier des tourbières, dont on nous a parlé, plus particulièrement de la région de Port-Cartier. Dossier d'ailleurs qui se retrouve dans d'autres régions que nous avons visitées à l'égard duquel le silence du gouvernement inquiète ou déçoit à tout le moins les gens de la Côte-Nord. Il y a le dossier des pêches commerciales, on a laissé flotter le fait, dans les journaux de la région encore une fois, d'avoir doublé apparemment le budget du ministère responsable de ce secteur économique. Elles produiraient des retombées extraordinaires dans la région même. Évidemment, il y a des aménagements à faire, on doit allouer les ressources selon les besoins des régions, mais au premier chef il me semblerait que la Côte-Nord a un droit prioritaire, à tout le moins, à ces budgets additionnels que nous cherchons encore.

Il y a le secteur du tourisme dont on a nous a parlé à peu près à toutes les occasions possibles et imaginables, étant donné surtout que la création d'emplois dans le domaine du tourisme est relativement peu dispendieuse lorsque le gouvernement donne de l'aide à certaines infrastructures ou à la formation des gens qui sont dans l'industrie touristique ou d'accueil, en général, aux voyageurs. On pourrait évoquer la politique d'achat des gouvernements du Canada et du Québec, d'Hydro-Québec et de leurs sociétés composantes, l'achat chez nous dans la région de la Côte-Nord, alors qu'on voit à titre d'exemple - malheureusement, le ministre du Loisir est disparu, appelé à d'autres occupations évidemment - que l'île d'Anticosti, qui fait partie, si je ne m'abuse, de la région administrative dont font partie également Sept-Îles et la région, s'approvisionne malgré tout en Gaspésie.

Je ne veux rien enlever à la Gaspésie, mais si on veut faire du développement économique de façon organisée, afin que les régions, entre elles, se supportent, il y aurait peut-être lieu d'avoir les améliorations considérables qu'on nous a fait remarquer lorsque nous sommes allés sur la Côte-Nord.

En résumé, je crois qu'avec toute la bonne foi qui nous animait, afin d'aider le député de Duplessis à sensibiliser le gouvernement aux problèmes que faisaient valoir les gens de la Côte-Nord, nous avons, en cette journée du vendredi, réussi au moins à mettre sur la place publique, pour tous les Québécois, qu'il y a des régions où ça ne va pas nécessairement très bien, merci.

On a vu la rapidité et la multiplication de prises de décision du gouvernement. Suite à notre visite sur la Côte-Nord, on peut également constater que certaines réalisations pourraient s'ensuivre. Nous, de l'Opposition, nous nous en félicitons. Nous

espérons en même temps que le député de Duplessis nous en reconnaîtra au moins le mérite, même si nous perdons les élections dans ces régions depuis quelques années, ça ne nous empêche pas de nous préoccuper des problèmes des Québécois, où qu'ils se trouvent, ça ne nous empêche pas de faire déborder un peu nos intérêts à l'extérieur de nos comtés, tous autant que nous sommes. Ce n'est pas l'apanage unique des ministres qui administrent le budget de la province, pour toute la province de se préoccuper de tous les Québécois. Quant à nous, nous entendons exercer, par notre action soutenue, continue dans les régions - vous vous ennuierez de nous, certains vendredis, messieurs, nous serons effectivement dans les régions et non en Chambre - nous entendons, de façon soutenue, aller voir ce que les Québécois attendent de leur gouvernement, voir avec eux quels sont les facteurs de la déception et du découragement, dans certains cas, qui les saisit devant l'inaction du gouvernement, rechercher avec eux quelles sont les avenues de solution, et, chaque fois que cela s'avérera utile, remettre le dossier devant la place publique afin que le gouvernement, de plus en plus, nous l'espérons, prenne ses responsabilités et réponde aux aspirations de tous les Québécois.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, nous ne pouvons que nous réjouir de voir certains députés de l'Opposition quitter leur château fort de l'ouest de Montréal pour aller voir un peu dans le Québec ce qui se passe. Par ailleurs, nous ne pouvons qu'être attristés de voir qu'en voyageant tellement, ils apprennent si peu de choses, y compris les réalités les plus élémentaires des régions au nom desquelles ils prétendent s'exprimer.

Il y a des dizaines d'exemples dans ce qui a été dit depuis trois heures. Je voudrais relever les plus récents. Le député de Vaudreuil-Soulanges parle des tourbières. Il dit qu'on ne s'est pas occupé des tourbières. Il y a probablement des gens qui nous écoutent à Sept-Îles et sur la Côte-Nord ce matin, qui eux, savent très bien, parce qu'ils connaissent leur région, que dans le cadre de l'Opération solidarité économique, en particulier, une entreprise - je vous en nomme une pour montrer que ce que vous avez dit est faux - Tourbière Sept-Îles Inc., aux abords de la rivière Moisie, par l'Opération solidarité économique et l'entreprise locale a créé, M. le député, combien d'emplois? À peu près une quarantaine. Cela ne vous fait rien. Vous êtes les représentants de "big business", vous êtes les représentants de vos commettants les plus assidus. Qu'un brave entrepreneur de la côte crée 40 emplois avec une subvention OSE, c'est contraire à l'approche du Parti libéral.

Parlons-en encore de l'Opération solidarité économique, que vous avez discréditée depuis qu'elle existe, parce qu'elle vous fait mal et qu'elle vous montre ce que vous auriez dû faire quand vous étiez au pouvoir: Région de Sept-Îles et Port-Cartier, d'avril 1981 à septembre 1981, 340 emplois créés. Vous avez demandé aux gens de prendre des crayons, j'espère qu'ils ont suivi, pour une fois, le conseil d'une Opposition aussi déboussolée et qu'ils le prennent le crayon.

Vous avez dit: Où est le premier million de l'action du gouvernement? Seulement dans OSE, entre avril 1981 et septembre 1981, il y a eu 1 164 000 $. En 1980-1981, c'est complet maintenant, seulement pour l'Opération solidarité économique, il y a eu 3 379 000 $, avec une participation locale - je complimente les intérêts locaux qui ont collaboré à cette opération - de 4 000 000 $.

Cela ne me surprend pas que le député de Vaudreuil-Soulanges n'ait pas vu ce qui se fait sur la Côte-Nord dans l'Opération solidarité économique, parce qu'il ne l'a pas vu dans son propre comté. Il nous a dit, le 27 mai 1981, ici même, que les emplois de l'Opération solidarité économique étaient des emplois temporaires. Je ne l'ai jamais corrigé là-dessus, c'est un néophyte vivement converti aux habitudes libérales, c'est-à-dire de dire le contraire de la vérité. Dans son propre comté de Vaudreuil-Soulanges -j'espère que les gens de Vaudreuil-Soulanges s'intéressent à la Côte-Nord et nous écoutent aussi ce matin - il y a eu 249 emplois permanents de créés. J'ai ici la liste des entreprises.

Quand le député de Vaudreuil-Soulanges suggère aux gens de se prendre des crayons, il devrait peut-être s'en prendre dans les tournées qu'il fait à travers le Québec et en prendre pour son propre comté.

Ce qui résume le mieux le débat, ce matin, c'est une chose évidente à la plupart des Québécois et des Québécoises depuis très longtemps. Le Parti libéral a une conception fluviale de l'économie du Québec, une conception de laisser-faire, de laisser-aller. Aux époques où le Parti libéral du Québec était nationaliste, où il a rompu avec cette tradition, il était diamétralement opposé à l'attitude que les libéraux d'aujourd'hui illustrent.

Il y avait René Lévesque au moment de la nationalisation de l'électricité, en particulier. Il y avait Jean Lesage également. C'était "maîtres chez nous" qu'ils prêchaient.

M. Fortier: ... sa jeunesse à Lévesque.

(13 heures)

M. Landry: Vous n'aurez aucune chance, et vous le savez très bien, de retrouver quelque crédibilité que ce soit au Québec, tant que vous ne vous axerez pas sur cette philosophie de "Québec d'abord", que vous n'avez pas été capable de soutenir pendant un mois seulement. À l'issue d'un de vos conseils nationaux, vous avez dit: Québec d'abord. Vous l'avez répété une demi-douzaine de fois et vous êtes revenus aux bonnes vieilles habitudes libérales de soumission et de passivité.

Nous n'avons pas des solutions pour tout de ce côté de la Chambre, mais les solutions que nous avons sont des solutions québécoises.

Vous avez parlé de l'écart de chômage. Tout le monde sait au Québec -probablement que vous le savez aussi - que l'écart du taux de chômage entre le Québec et l'Ontario, depuis qu'on possède des statistiques, a toujours été à peu près du simple au double. Tout le monde sait également, les publications étrangères comme les publications locales, que le Québec au cours des cinq dernières années a connu un essor économique sans précédent. Sur la croissance économique globale, nette d'inflation, ce qui est un des meilleurs indicateurs économiques, le Québec a fait 14% pendant que l'Ontario a fait 7%, une situation qui n'était jamais arrivée dans l'histoire.

Évidemment, cela fait mal à l'Opposition, cela fait tellement mal que l'Opposition a été lavée dans à peu près toutes les régions à l'est de la rue Saint-Laurent aux dernières élections. Cela devrait vous faire réfléchir.

Puisque vous êtes dans l'Opposition pour des raisons, en grande partie, d'illustration et d'information de la population, car vous n'avez pas le pouvoir et que vous ne pouvez pas agir, je vous suggérerais de tenter d'informer la population sur les véritables facteurs qui sont en train de casser littéralement les reins au plus bel essor économique que le Québec ait connu dans son histoire. Ces facteurs-là, vous le savez autant que nous, relèvent de décisions prises par la Banque du Canada, par le gouvernement du Canada. Tout le monde sait que les taux d'intérêt actuellement pratiqués massacrent littéralement le réseau de petites et de moyennes entreprises du Québec.

Je sais que vous, vous êtes des gens de "big business"; nous, on a été les gens de la PME. On a fait du Québec avec les moyens dont nous disposions, le paradis de la petite et de la moyenne entreprise. Actuellement, avec des taux d'intérêt qui sont dans les plus élevés du monde occidental et qui sont trois points plus élevés en particulier que les taux d'intérêt pratiqués aux États-Unis d'Amérique, la Banque du Canada et ses politiques monétaires obsessionnelles sont en train littéralement de massacrer la fine fleur de l'entrepreneurship québécois qui se retrouve sur la Côte-Nord comme il se retrouve dans la Beauce, en Abitibi, au Saguenay-Lac-Saint-Jean et dans la région des Bois-Francs. Allez consulter, je vous le suggère vivement, les chefs de PME et demandez-leur si c'est la politique du Parti québécois qui fait qu'ils ont des difficultés à faire leur fin de mois actuellement ou si c'est la politique fédérale des taux d'intérêt élevés.

On apprenait récemment, ce qui m'a semblé être une blague cynique, qu'on s'apprêtait à décerner l'Ordre du Canada à M. Bouey, gouverneur de la Banque du Canada. Je n'ai rien contre cet homme, évidemment, sauf que par stricte décence et par respect pour les chômeurs du Québec, pour les hommes et les femmes qui cherchent du travail, on aurait peut-être dû attendre quelques années avant de lui remettre sa médaille rouge et blanc. Essayez donc d'illustrer la situation telle qu'elle est. Vous savez que le Québec est prisonnier d'un système, sur le plan économique en particulier; sur quinze interventions fédérales analysées au cours des dernières années, douze étaient diamétralement opposées aux intérêts du Québec. Le gouvernement du Canada axe sa politique économique sur les nécessités de l'Ontario, assumant que cela devrait être bon pour les autres. Lorsqu'ils préconisent le remède ontarien, en général c'est pour nous un remède de cheval et ils nous mettent dans une situation plus pénible que celle que nous avions connue avant.

Je suis heureux de voir que l'Opposition voyage. Je lui propose même de retourner sur la Côte-Nord...

Une voix: Et en Mauricie.

M. Landry: Et en Mauricie, comme le dit mon collègue. Comme cela, les députés de l'Opposition pourront se confronter avec les véritables réalités. Ils pourront voir ce que le gouvernement a déjà fait avec les moyens dont il dispose. J'ai donné les chiffres pour la seule Opération solidarité économique. Vous devriez aussi apprendre qu'au cours des cinq dernières années, pour la Basse-Côte-Nord - vous ne savez probablement pas où c'est situé - notre gouvernement a dépensé plus qu'aucun gouvernement du Québec n'avait dépensé en un quart de siècle précédemment, grâce au courage, en particulier, de notre collègue Denis Perron et aux travaux qui ont été faits dans le cadre du rapport Payne. Il y a des gens qui ont vu de l'asphalte pour la première fois de leur vie dans leur région, sur la Basse-Côte-Nord. L'asphalte, ils voyaient cela quand ils venaient à Québec ou à Montréal ou à la télévision.

L'été dernier, j'avais décidé d'arrêter et de rester auprès de ma famille durant une quinzaine de jours. Mais la description que m'a faite de la Basse-Côte-Nord le député de Duplessis m'a déterminé à aller y passer une semaine. Sur les quinze jours de vacances que je m'étais réservés, j'en ai mis une à visiter les 26 villages de la Basse-Côte-Nord. Vous ne savez même pas que Kégashka existe, et je ne sais pas si vous avez la moindre notion de ce que peut être Lourdes-de-Blanc-Sablon. Allez donc voir! Allez donc voir ce que ces gens-là pensent du gouvernement du Parti québécois. Même les anglophones, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, dans ce coin-là, votent pour le Parti québécois parce que c'est le seul gouvernement qui s'intéresse à ces malheureuses populations depuis que le gouvernement du Québec existe.

Le Président (M. Jolivet): Merci.

M. Landry: Je vous remercie, M. le Président, et je remercie l'Opposition et je lui signale que tous les vendredis de l'année, si elle le veut, nous passerons en revue toutes les régions du Québec l'une après l'autre. Arrangez-vous pour formuler vos questions un peu mieux, la prochaine fois. Vous nous avez reproché d'élargir le débat alors que, par écrit, vous nous avez donné avis d'une question sur l'ensemble du développement régional de la Basse-Côte-Nord. Formulez vos questions convenablement et nous vous donnerons toutes les réponses que vous méritez. Je souhaite vous retrouver dans ce genre de débat, et mes collègues aussi, le plus souvent possible.

Le Président (M. Jolivet): Merci à tous les intervenants de ce débat. J'ajourne sine die les travaux de cette commission.

(Fin de la séance à 13 h 07)

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