Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Dix heures six minutes)
Le Président (M. Jolivet): Bonjour! La commission de
l'industrie, du commerce et du tourisme est réunie ce matin pour
entendre une question avec débat. Cette question a trait, selon le
mandat qui nous est donné, au développement économique
régional et plus particulièrement à celui de la
Côte-Nord.
Les membres de cette commission sont: M. Baril
(Rouyn-Noranda-Témiscamingue), M. Biron (Lotbinière), M. Dean
(Prévost), M. de Belleval (Charlesbourg), M. Fortier (Outremont), M.
Johnson (Vaudreuil-Soulanges), M. Lavigne (Beauharnois), M. Maciocia (Viger),
M. Paré (Shefford), M. Payne (Vachon), M. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce).
Les intervenants sont: M. Beaumier (Nicolet), M. Bélanger
(Mégantic-Compton), M. Champagne (Mille-Îles), M. Dubois
(Huntingdon), M. Grégoire (Frontenac), M. Rocheleau (Hull), M. Rodrigue
(Vimont), M. Vaillancourt (Orford).
Les paramètres de cette rencontre sont toujours les mêmes,
c'est-à-dire que la personne qui fait la demande d'une question avec
débat est la première à intervenir; donc, c'est le
député de Vaudreuil-Soulanges qui sera le premier à
intervenir. Le second, ce sera le ministre responsable qui a été
convoqué, le ministre d'État au Développement
économique. Ensuite, de chaque côté de la salle viendront
les questions, les interprétations qu'on voudra bien donner, tout en
sachant que toute personne, une fois que le débat est lancé, a le
droit d'intervenir selon la formule habituelle, c'est-à-dire vingt
minutes avec questions et réponses, et on essaie de cerner l'ensemble du
sujet entre 10 heures du matin et 13 heures, au début de
l'après-midi.
Le débat est maintenant lancé. Oui, M. le
député.
M. Perron: Est-ce qu'il y aurait possibilité, avec
l'accord de l'Opposition, de faire inscrire le ministre de l'Énergie et
des Ressources?
Le Président (M. Jolivet): II n'y a pas d'objection
puisque toute personne à ces commissions-là peut intervenir. Je
n'ai nommé les gens que parce que c'est la commission normale, soit
celle de l'industrie, du commerce et du tourisme qui est convoquée ici,
mais toute personne peut intervenir. J'inscris par le fait même comme
intervenant le ministre de l'Énergie et des Ressources.
M. Scowen: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: ... avant de commencer, est-ce que je peux simplement
proposer un petit amendement à nos procédures, soit
qu'après les interventions au départ on considère la
possibilité de limiter les interventions par la suite à dix
minutes? Ces questions avec débat, avec les interventions de vingt
minutes, ont tendance à devenir des discours d'un côté ou
de l'autre et, si les interventions sont un peu plus courtes, c'est possible,
des deux côtés, de poser les questions et d'avoir des
réponses plus claires et en plus grand nombre pendant le cours du
débat. Je le propose tout simplement comme une suggestion pour le rendre
plus intéressant et plus pertinent.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Landry: Je pense qu'on devrait plutôt ajuster nos
procédures au déroulement du débat lui-même sans
s'enferrer d'avance dans des limitations. Si l'Opposition trouve qu'elle n'a
pas assez de temps pour parler, les ministériels tâcheront de se
refréner parce que je pense que nous sommes plus nombreux que les gens
de l'Opposition. Essayons de travailler en équité. Si vous
ressentez quelques frustrations, ce qui n'est pas inhabituel dans la position
de l'Opposition, vous nous le ferez savoir et nous tâcherons de
rétablir l'équité du mieux qu'on peut sans s'enferrer
d'avance dans des règlements trop rigides.
Le Président (M. Jolivet): Je dois vous dire que, le
règlement étant ce qu'il est, je tiens pour acquis que le
député de Notre-Dame-de-Grâce faisait une suggestion
à l'ensemble. Le ministre renchérit sur cette suggestion, je vais
donc donner la parole, pour débuter, au député de
Vaudreuil-Soulanges.
Exposé du sujet M. Daniel Johnson
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, M. le Président.
Je suis heureux de constater, avec le ministre, qu'effectivement, au pouvoir,
en général, on est plus nombreux que dans l'Opposition, ce qui
pose des difficultés très réelles. Et malgré tout,
avec les moyens limités dont nous disposons, nous avons réussi,
nous de l'Opposition, à donner suite à des engagements que nous
avons pris à l'égard des régions du Québec qui
étaient, dans certain cas, misérablement négligées
par le gouvernement. Et c'est dans cet esprit que nous nous sommes rendus,
certains collègues de la mission développement économique
de l'Opposition officielle, à Sept-Îles, dans la région de
Sept-Îles, le 15 octobre dernier, afin de constater sur place, afin de
rencontrer sur place les véritables problèmes dont les
médias nous avaient entretenus, de façon active, depuis neuf ou
dix mois sans que, on doit le dire, le gouvernement jusqu'alors n'ait fait quoi
que ce soit pour répondre aux désirs, aux aspirations de la
population.
C'est donc dans le contexte, et c'est dans cet esprit qu'on a
posé la question, des politiques de développement régional
dont se targue très souvent le gouvernement que nous avons abordé
le problème de la Côte-Nord. On pourrait très facilement
déborder dans des débats interminables sur le
développement régional comme tel. Mais je crois qu'il est
important, par voie d'illustration, de regarder comment le rôle du
gouvernement en matière de développement régional se
déroule dans le cas précis et direct de la Côte-Nord.
J'aimerais simplement, pour tracer la toile de fond, dresser ce que le
ministre lui-même a décrit comme étant les
paramètres de l'action du gouvernement en matière de
développement régional, c'est-à-dire quels sont
véritablement les préalables qui doivent exister lorsqu'un
gouvernement, dans l'exercice de son rôle d'acteur et de promoteur de
l'activité économique, doit essayer de constater ou de
définir avant même d'intervenir. Je m'abreuve à une source
intarissable qui a été rapportée dans un numéro
spécial sur l'économie du Québec dans les
suppléments des hebdos régionaux où le ministre
d'État au Développement économique a dressé
justement cette liste des préalables. Le ministre lui-même disait
qu'il fallait une presse régionale qui se préoccuperait des
problèmes de sa région. Si je me réfère aux
rencontres que nous avons eues sur la Côte-Nord, le 15 octobre, il n'y a
aucun doute dans mon esprit - le député de Duplessis qui est ici
présent pourra le confirmer - que les médias locaux et
régionaux de la Côte-Nord sont extrêmement actifs dans la
promotion de la clarification du problème de la crise que traverse
actuellement la Côte-Nord. Ce préalable-là existe. Il y a
sensibilisation de la population.
Le deuxième préalable décrit par le ministre
lui-même, c'est la volonté des gens de la région de se
prendre en main, de définir les problèmes, d'essayer d'envisager
les solutions possibles et tout ce qui en découle. Encore une fois,
à l'occasion de notre visite, nous avons constaté que les
intervenants, les agents locaux sont extrêmement actifs,
extrêmement bien organisés, extrêmement soucieux, je dirais
qu'ils sont embarqués dans la résolution du problème
économique de la Côte-Nord.
Il y a eu, à titre d'exemple, un sommet économique, en
mars dernier, qui réunissait tous ces intervenants à
Sept-Îles, sommet qui a donné lieu à un rapport que,
malheureusement, selon ce qu'on a entendu sur les lieux, le premier ministre,
lors de sa tournée électorale dans la région, n'avait
même pas consulté. C'est l'opinion des gens du milieu qui ont
exprimé leur déception lors de notre passage, à savoir
qu'il n'y a pas de volonté politique parce qu'il n'y a pas d'information
au niveau des autorités politiques sur les problèmes de la
Côte-Nord.
Troisièmement, le ministre dit: II faut absolument que les
ressources locales soient également engagées dans la solution des
difficultés économiques qui peuvent avoir cours dans la
région. Dans ce sens-là, encore une fois, ne serait-ce qu'au
niveau des ressources humaines, on a pu constater que toute la base
économique, tous les intervenants, les syndicats, les
commerçants, les patrons de petites entreprises, à des
degrés divers, les gens qui travaillent dans les grandes entreprises
sont effectivement préoccupés et ont pris l'engagement de tenter
de régler, par leurs propres moyens, en attendant, le problème de
la Côte-Nord. (10 h 15)
Quant au niveau des ressources financières, c'est là le
quatrième élément, elles sont, évidemment, compte
tenu du ralentissement économique de la Côte-Nord, beaucoup plus
limitées qu'autrement elles ne le seraient. C'est à ce
moment-là que le quatrième élément, l'appui du
gouvernement du Québec, doit intervenir.
Les préalables posés par le ministre existent, et il faut
maintenant que le gouvernement du Québec agisse dans les dossiers qui
sont extrêmement chauds dans cette région, après la
solution desquels les citoyens de la région attendent encore avec
beaucoup de patience. Avec tellement de patience que dans les journaux on peut
même dire que les régions attendent l'aide du gouvernement, sauf
sur la Côte-Nord où on n'attend pas parce qu'on n'en a aucunement
besoin, M. le Président. C'est précisément parce qu'on est
maintenant déçu de voir qu'il
ne sert à rien d'attendre. C'est l'objet des commentaires qu'on
entend. Ils sont déçus d'attendre sans résultat l'aide du
gouvernement dans ces dossiers.
Ce dossier, de façon objective et selon les mesures les plus
récentes qui sont disponibles, celles du mois dernier, fait état
d'un taux de chômage de 25,4%, et le député de Duplessis
est au courant. 25,4% de taux de chômage sur la Côte-Nord. Un
chiffre qui, à sa face même, est probablement
sous-évalué parce que vous savez fort bien qu'en raison de la
mobilité de certaines des classes de métier qu'on retrouve dans
ces régions les gens qui n'ont pas de travail n'y demeurent pas. Soit
qu'ils retournent vers la Gaspésie, soit qu'ils remontent le
Saint-Laurent, ils se dirigent vers d'autres régions tout simplement,
dont, très souvent, ils sont originaires de toute façon.
Ce taux de chômage de 25,4%, finalement, n'est qu'une portion
à déterminer, mais déjà très dramatique, du
problème du chômage sur la Côte-Nord.
Le taux de vacance atteint pour les immeubles résidentiels,
à Sept-Îles, au 1er octobre est d'environ 22%. C'est
extrêmement sérieux de voir que des gens qui, n'ayant plus de
travail, désireraient céder leur résidence sont incapables
de le faire. C'est un cercle vicieux dont il est absolument impossible de
sortir dans les conditions actuelles de manque d'injection d'aide de la part du
gouvernement.
Ce n'est pas un problème récent. Je pense qu'on conviendra
qu'à tout le moins, le début du déclin de la
Côte-Nord remonte, si on veut déterminer une date, au 30 octobre
1978, lors de la journée du fer au cours de laquelle un tas
d'intervenants, qui étaient préoccupés par les
marchés mondiaux du fer, par l'activité de transformation du
minerai, d'exploitation de ce minerai sur la Côte-Nord, se sont
réunis et ont constaté à l'unanimité que la
conjoncture de ce marché, pour ce produit, était
extrêmement défavorable pour la région de la
Côte-Nord. Il nous a semblé à nous, de l'Opposition, que,
devant l'habitude constante du gouvernement de déterminer des plans
d'ensemble à long terme - ce qui, en soi, est extrêmement louable
- devant cet engagement toujours renouvelé de planifier à long
terme le développement économique du Québec, on n'a pas,
depuis maintenant trois ans et un mois et demi, fait quoi que ce soit pour
ajuster ce plan de développement économique et tenir compte de la
réalité qui est vécue et qui a été
constatée et diagnostiquée, en octobre 1978, sur la
Côte-Nord.
Il n'y a pas eu d'action, il y aurait peut-être eu planification,
il y en a peut-être. Le ministre répondra peut-être
qu'effectivement, les plans de développement de l'activité
économique ont été ajustés en conséquence,
mais les gens de la région attendent encore de l'action, une action qui
aurait pu se traduire, si on en croit les promesses qui existent depuis janvier
1981, dans le portrait de la Côte-Nord, des promesses qui remontent, dans
certains cas, au 11 mars où on prévoyait, pour la mi-mars,
c'est-à-dire dans les jours qui suivaient l'émission des brefs de
la dernière élection, le début du plan de relance et de
redressement de la situation économique de la Côte-Nord.
Les élections passent et, le 2 mai, on annonce 35 000 000 $
d'investissements dans ce plan de relance sur une période de trois ans
qui devrait prendre forme et commencer véritablement en juillet,
toujours en juillet dernier. Le 3 juin, on rapproche les
échéances, c'est devenu le 15 juin pour le début du plan
de relance. On présume que le Conseil du trésor, les
comités interministériels, le cabinet, tout le monde se penche
là-dessus au gouvernement du Québec. Sauf que, le 18 juin, trois
jours après cette échéance magique, on annonce que ce sera
d'ici trois semaines, un mois au plus tard que le plan de relance sera
commencé et que des sommes d'argent nécessaires au
développement de la région seront injectées.
Aux dernières nouvelles, on se promène et on promet 115
000 000 $ sur cinq ans; alors je ne vois pas ce qui empêche aujourd'hui
les gens du gouvernement de nous promettre au moins 1 000 000 000 $ sur les
vingt prochaines années. Ce serait extrêmement agréable
d'entendre ça aujourd'hui et je suis sûr que les gens de la
Côte-Nord attendent avec beaucoup d'impatience le dévoilement des
intentions du gouvernement à cet effet.
Qu'est-ce qu'on va faire de façon pratique? On peut jouer avec
des échéanciers, on peut rapprocher des projets, on peut
rapprocher le début de certains travaux de la date d'aujourd'hui, on
peut jouer avec les cycles budgétaires, les prévisions
budgétaires du gouvernement et engager aujourd'hui des sommes pour
l'avenir, qui est presque imprévisible. Mais ce sont surtout les
nouveaux montants; qu'est-ce qui est prévu spécifiquement dans le
plan de développement économique pour la Côte-Nord? Quelles
sont les nouvelles sommes, à brève échéance, qui
seront investies par le gouvernement dans le plan de relance de la
Côte-Nord? Quelle est véritablement la philosophie du gouvernement
sur l'orientation du développement de la Côte-Nord? Est-ce qu'on
s'est même penché sur la vocation propre de cette région?
Est-ce qu'on a remis en question la vocation propre de cette région?
Les gens de la région l'ont fait, ils ne veulent plus simplement
dépendre de l'exploitation d'une richesse naturelle, le fer, et avec
raison. On doit diversifier et ne pas
mettre tous ses oeufs dans le même panier. C'est une région
maritime, grandement, c'est pour ça qu'on entend surtout parler des
pêches, donc, de toutes les industries de transformation possibles et
imaginables, mais on attend encore que des promesses précises soient
réalisées. C'est une région maritime, donc, on parle d'un
port, on parle d'une voie d'accès au Saint-Laurent, qui est une grande
voie de circulation qui va au coeur même de l'Amérique du Nord, au
coeur industriel de l'Amérique du Nord. Quand va-t-on se décider
à se joindre aux gens des Grands Lacs qui ont mis sur pied des
comités, aux gens de l'Ontario qui ont mis sur pied des comités,
qui ont déposé des rapports sur l'exploitation du fleuve
Saint-Laurent, de la voie maritime et des Grands Lacs? Qu'est-ce que le
gouvernement du Québec attend pour se joindre à ces efforts, pour
développer autour du Saint-Laurent - j'en fais la suggestion - tout un
ensemble de politiques concertées dont un des premiers
bénéficiaires serait la région de la Côte-Nord?
Il est évident que c'est tout un programme qui appelle une
réponse précise de la part du gouvernement aux attentes des gens
de la région de la Côte-Nord. Déjà, sans plus
tarder, je passe le micro au ministre d'État au Développement
économique, qui est accompagné - on l'a souligné - par
deux de ses collègues du cabinet. C'est la première fois, de
mémoire de parlementaires, que, dans ce format de questions avec
débat, le gouvernement manifeste finalement assez d'intérêt
à ces questions pour ne pas y envoyer un seul représentant.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, vous avez
maintenant la parole.
Réponse du ministre M. Bernard Landry
M. Landry: Je vous remercie, M. le Président. Les
ministériels remercient également l'Opposition de leur donner
cette occasion de passer en revue pendant une période de temps
relativement longue un des problèmes régionaux les plus cruciaux,
je dirais même le problème régional le plus crucial qui se
pose dans l'espace économique québécois
présentement, le plus crucial, dis-je, parce que nous sommes en face
d'une région qui non seulement est déprimée et
sinistrée, mais surtout d'une région dont les possibilités
naturelles: la situation géographique, le sous-sol, les ressources
humaines, la main-d'oeuvre, une des plus jeunes, des plus actives du
Québec, ont eu pour habitude d'être employées presque
à pleine capacité depuis pratiquement 1950. Il ne s'agit pas
d'une région qui n'a pas pris son décollage économique
comme une autre au Québec - il y en a peut-être une autre qui n'a
pas pris ce décollage - mais c'est une région qui avait
même décollé d'une façon brillante. Or, pour des
raisons de conjoncture qu'on va essayer d'approfondir le plus honnêtement
possible, elle se retrouve dans la situation lamentable que l'on connaît.
C'est précisément parce que nous considérons cette
situation comme extrêmement grave que le député de
Duplessis est à mes côtés, lui qui vit sans relâche
les problèmes de cette région, est en contact constant avec ses
administrés.
Quand on considère que, lorsqu'il parcourt son comté pour
aller de Sept-Îles à Lourdes-de-Blanc-Sablon, il fait la distance
de Montréal à Sept-Îles et il n'a vu à peu
près que trente villages, c'est dire quelle est la responsabilité
d'un député d'une étendue aussi vaste. C'est la raison
pour laquelle aussi mon collègue de l'Énergie et des Ressources
m'accompagne ici ce matin, de même qu'un certain nombre d'autres
collègues.
Le gouvernement ne prend pas cette affaire à la
légère. Le gouvernement est catastrophé par ce qui se
passe sur la Côte-Nord et nous allons essayer de voir les causes, de voir
le genre d'efforts que nous avons déployés et de voir le genre
d'efforts que ceux qui ont les moyens et les juridictions n'ont pas
déployés.
Mais commençons logiquement par nous demander pourquoi la
Côte-Nord, une des régions économiques les plus solides du
Québec, se retrouve dans l'état où elle est aujourd'hui.
La Côte-Nord est appuyée sur une industrie d'extraction primaire
et de transformation élémentaire en semi-produits de sa richesse
naturelle principale, le minerai de fer. Le minerai de fer, transformé
en acier et autres produits métalliques, est largement dépendant,
d'une part, de la construction automobile et, d'autre part, de la construction
tout court: armatures, structures, poutrelles, etc.
Dans le continent nord-américain, ces deux secteurs
névralgiques, construction et construction automobile, connaissent une
crise sans précédent qui a fait que la demande pour le
métal s'est effondrée et que la demande pour le minerai a fini
par être atteinte. En d'autres termes, ce qui se passe sur la
Côte-Nord a les mêmes causes que ce qui s'est passé dans
l'industrie de l'automobile des États-Unis d'Amérique et de
l'Ontario, sauf que les travailleurs de la Côte-Nord sont
installés dans une production qui est en amont des autres, mais qui est
frappée exactement au même titre et dans les mêmes
proportions. (10 h 30)
Je ne peux pas faire la genèse de cette crise sans faire un
parallèle, un parallèle que les gens de la Côte-Nord doive
étudier de près, de même que tous les citoyens du
Québec et l'Opposition officielle si elle est encore capable de
réagir à ce genre d'argument, en dépit de son habituel
aveuglement vis-à-vis de tout ce qui concerne l'action du gouvernement
du Canada. Le parallèle est le suivant: La crise de l'automobile
à laquelle j'ai fait allusion a déterminé des
problèmes aussi graves, sinon davantage, chez les constructeurs
d'automobiles ontariens et les constructeurs de machines agricoles. Je pense
à Massey-Ferguson, à Chrysler, à Ford et à d'autres
industries de ce genre situées dans le sud de l'Ontario, situées
en partie, d'ailleurs, dans la circonscription électorale
représentée par le ministre fédéral de l'Industrie
et du Commerce.
Quand cette crise est survenue, à Toronto, à Oshawa,
à Windsor et surtout à Ottawa, "of all places", on a sorti la
croix et la bannière, et croix et bannière entendent des
centaines de millions. Combien le gouvernement du Canada a-t-il mis pour
rescaper Massey Ferguson? Combien le gouvernement du Canada a-t-il mis pour
rescaper Chrysler? Combien le gouvernement du Canada a-t-il mis pour aider Ford
à passer à travers ses difficultés? Si vous additionnez
tous ces montants qui sont déjà dépensés, vous
dépassez le milliard de dollars en dépenses directes ou en
garanties aux firmes. Pourquoi est-ce qu'on a fait cela? On a fait cela parce
qu'il y avait des femmes à Windsor et des hommes à Oshawa et dans
tous les centres de construction automobile du sud de l'Ontario qui
étaient en chômage, et nul ne peut blâmer le gouvernement du
Canada d'avoir mis ces centaines de millions et ce milliard de dollars. Cela
s'est fait au vu et au su de la population du Québec et de la
Côte-Nord et de toute la population du Canada. Or la cause était
rigoureusement la même: une crise dans l'industrie de l'automobile
détermine une action, avec nos taxes, d'une énergie
extraordinaire de la part du gouvernement du Canada en Ontario.
Mon parallèle est pour amener l'Opposition à admettre
ceci. C'est une période de questions avec débat, cela pourrait
aussi être une période de débats avec questions. J'aimerais
entendre votre opinion là-dessus.
Est-ce qu'il est plus grave d'être chômeur ou chômeuse
à Oshawa qu'à Sept-Îles ou à Port-Cartier? Comment
se fait-il que le gouvernement, qui détient les véritables
leviers économiques et les immenses budgets, trouve qu'il y a lieu de
déclencher une opération sans précédent pour aider
des braves gens du sud de l'Ontario mais ne trouve pas le moyen de
dépenser plus de 300 000 $, écoutez bien cela, pour la
région québécoise de la Côte-Nord?
Jusqu'à maintenant, le gouvernement, qui y est allé
à coups de centaines de millions et de milliards de dollars en Ontario
pour le même problème, a dépensé, pour des
études, sur la Côte-Nord 100 000 $ pour Tembec, 100 000 $ pour le
papier Cascade, 95 000 $ à une firme d'ingénieurs pour
étudier un projet à Pointe-Noire. Grand total, 295 000 $.
Les voyages en avion des ministres fédéraux vers le sud de
l'Ontario ont coûté plus que cela dans la crise de l'automobile.
Pourquoi ce traitement inégal? Pourquoi l'Opposition n'a-t-elle pas
songé à évoquer, dans l'exposé qu'a fait le
député de Vaudreuil-Soulanges, ce traitement scandaleusement
différent, suivant qu'on chôme dans le sud de l'Ontario ou qu'on
chôme à Sept-Îles ou qu'on est congédié de
l'usine de bouletage de Pointe-Noire?
C'est un sujet de réflexion que les populations locales, à
mon avis, connaissent. Le député de Vaudreuil-Soulanges a
parlé des populations locales. Je vais lui en parler un peu, moi aussi,
à coups de statistiques. D'abord, je conviens d'emblée que les
gens de la Côte Nord forment un des plus beaux fleurons de la
main-d'oeuvre active du Québec, en termes de moyenne d'âge, de
moyenne de scolarité, de capacité de gérance,
d'administration et également de travaux pénibles. La manutention
du minerai de fer, à moins 30 degrés, est une activité qui
n'est pas réservée à des gens de faible constitution.
Qu'est-ce qu'ils font les gens de la Côte-Nord vis-à-vis de
ces problématiques presque éternelles entre Québec et
Ottawa? D'abord, ils ont compris depuis longtemps que si les vrais pouvoirs
économiques, les vrais moyens d'intervention et toutes les taxes
étaient à Québec, les retombées, les chances de
retombées sur la Côte-Nord seraient incommensurablement
supérieures. Cela saute aux yeux.
En 1976, le comté de Duplessis, qui est le plus touché, a
voté pour notre formation politique à 59,2% de ses suffrages
exprimés. En 1976, déjà il avait compris que
c'était la consolidation à Québec qui ultimement
mènerait la consolidation de la Côte-Nord. Les
événements que vous avez décrits sont survenus. La crise
de l'automobile s'est amorcée. Les gens de la Côte-Nord ont
continué leur réflexion. En 1981, ils ont voté à
65,3% en faveur du député de la majorité gouvernementale
et du député à Québec. Et au
référendum, ce qui m'apparaît encore plus probant, ces
gens-là ont voté à beaucoup plus de 10% au-delà de
la moyenne nationale des oui exprimés. La Côte-Nord a voté
à 54,7. Alors, quand le député de Vaudreuil-Soulanges me
dit que la population locale est animée, oui. Qu'elle est lucide, oui.
Qu'elle sait quels sont les bons moyens à prendre, oui. Cela va de
soi.
En conséquence, cela veut dire que le gouvernement du
Québec, s'il n'a pas accès aux clés fondamentales de la
solution du
problème, s'il constate avec effarement le traitement
discriminatoire à un niveau invraisemblable dont ont été
victimes les habitants de la Côte-Nord par rapport à ceux d'Oshawa
et des centres de l'automobile, n'a pas le droit et n'a pas l'intention non
plus de se laver les mains. Et il ne s'est pas lavé les mains.
Dès le début de cette crise, avec nos modestes moyens de
gouvernement provincial - avec beaucoup de "r", vous aimez cela un gouvernement
provincial vous autres, vous êtes commis à ce que notre
gouvernement ici et cette Assemblée nationale restent à jamais
provinciaux - avec nos faibles moyens de provinciaux, nous sommes en mesure de
dire, aujourd'hui, que nous avons consacré à la Côte-Nord,
beaucoup plus d'énergie, d'une part, et d'argent même, d'autre
part, c'est cela qui est paradoxale, que le gouvernement qui est responsable de
la crise, que le gouvernement fédéral qui a répandu la
manne sur les régions du sud de l'Ontario.
Je vais vous donner quelques chiffres. D'abord, dès les premiers
signes de la crise, tous les mécanismes d'intervention en région
du gouvernement du Québec ont été alertés, ont
reçu comme directive formelle de privilégier tous les projets et
toutes les interventions requises dans deux régions du Québec: la
Côte-Nord et la région de l'amiante. Avec le résultat que
dans la seule opération solidarité économique, 340 emplois
ont été créés sur la Côte-Nord, dont
l'immense majorité permanente c'est-à-dire 255. 1 164 000 $
dépensés pour arriver à ces fins, quatre fois plus que le
gouvernement du Canada. Somme minime, je n'en disconviens pas; à
gouvernement provincial, dépenses proportionnées. Somme minime
à côté de ce qui a été fait à Windsor
et à Oshawa, mais quatre fois plus que ce que les fédéraux
ont fait.
Les équipes de l'OPDQ en particulier, avec une vigueur admirable,
se sont rabattues sur cette région, ont affecté du personnel
spécial à la région. En même temps que cela se
poursuivait, le gouvernement, toujours avec les moyens dont il dispose, a
commencé à établir un plan. Le député de
Vaudreuil-Soulanges réclame des plans bien que sa philosophie politique
soit totalement à l'encontre des plans; vous répandez dans toutes
les régions du Québec que le gouvernement intervient trop et
qu'il devrait se retirer de l'activité économique. Il faut dire
que le député de Vaudreuil-Soulanges l'a moins dit parce qu'il
est rouge depuis moins longtemps que les autres, mais les autres nous ont servi
cela pendant cinq ans. Vous allez avoir des ajustements de philosophie à
faire avec mon honorable ami, le député de
Notre-Dame-de-Grâce, parce que, sur ces questions, en
général nous ne nous entendons d'aucune manière. Il est
anti-interventionniste et notre gouvernement social-démocrate est
interventionniste. Mais puisqu'on a votre caution, M. le député
de Vaudreuil-Soulanges, et que vous réclamez des interventions, je dois
vous dire...
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le...
M. Landry: Oui. Est-ce que le député de
Notre-Dame-de-Grâce pose une question de privilège parce que je
l'ai appelé honorable?
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, il n'y a pas de question de privilège. Vous
aurez l'occasion de rectifier les faits lors de votre intervention, si vous le
désirez.
M. Scowen: II n'est pas question de régler les questions
de fait qui touchent directement un membre de l'Assemblée nationale
quand un ministre dit quelque chose qui est effectivement un mensonge.
Le Président (M. Jolivet): Non, je pense que vous aurez
l'occasion de le faire puisque vous allez intervenir. Dans ces circonstances,
la commission parlementaire présentement réunie n'a ni question
de privilège, ni motion, ni vote. Vous aurez certainement l'occasion de
revenir tout à l'heure.
M. Scowen: On va s'amuser royalement comme cela.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, vous pouvez
continuer.
M. Landry: Quoiqu'il en soit, M. le Président, même
s'il n'y a pas de question de privilège dans la procédure de
cette commission, je ne voudrais d'aucune manière léser ceux de
mon ami, le député de Notre-Dame-de-Grâce. Si nous
divergeons sur les faits, je lui rappelle que la question de privilège
est réservée pour la défense à des attaques
personnelles, à l'intégrité, etc. Il est bien entendu que
d'aucune manière... Mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce est
une assez bonne cible sur le plan de ses idées politiques et
économiques que je n'ai pas besoin de l'attaquer personnellement pour
avoir raison de lui sans trop de difficultés.
Je reviens à mon propos. Le député de
Vaudreuil-Soulanges parle de plan, d'intervention, bien sûr. Depuis des
mois, dans les ministères à vocation économique, au
ministère de l'Énergie et des Ressources en particulier, une
grande partie de la réflexion se fait sur la problématique de la
Côte-Nord, de même qu'au ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation. Mais nous n'allons pas, d'une
façon démagogique, promettre aux gens de la Côte-Nord des
solutions miracles qui,
d'aucune façon, ne pourraient les aider à faire face
à la conjoncture présente pour liquider ne serait-ce qu'une
partie des effets néfastes de la politique fédérale.
Surtout nous n'allons pas faire croire à ces populations de la
Côte-Nord, qui, de toute façon, ne le croiraient pas, c'est
entendu, que le problème de la diversification économique de la
Côte-Nord va se régler rapidement. C'est vrai qu'il y a là
un travail de diversification à mener, diversification dans
l'activité primaire, donc dans les minéraux que l'on extrait du
sous-sol de la Côte-Nord, diversification également dans
l'activité secondaire, c'est-à-dire l'industrie de la
Côte-Nord, et également diversification dans l'activité
portuaire.
Le député de Vaudreuil-Soulanges a parlé longuement
du Saint-Laurent, des ports. Encore là, je lui rappelle que le
gouvernement du Québec a amorcé depuis longtemps ses travaux pour
une politique du Saint-Laurent, mais je dois lui rappeler aussi que la plupart
des juridictions essentielles attachées à la voie fluviale, la
navigation, les ports, les permis de pêche en haute mer et dans le golfe,
ne relèvent pas du gouvernement qu'ils veulent voir à jamais
provincial. Il ne faut pas nous demander des interventions quand les gens qui
ont fait campagne pour le non se sont évertués à
démontrer qu'elles devaient relever du gouvernement d'Ottawa. (10 h
45)
Le Président (M. Jolivet): Merci, M. le ministre.
M. le député de Vaudreuil-Soulanges.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, on
m'avait averti, lorsque nous avons inscrit la question avec débat au
feuilleton, à tort, je le croyais vraiment, que le ministre
d'État au Développement économique était un
spécialiste dans la non-réponse aux questions précises qui
lui sont posées, qu'il avait une tendance très marquée
à blâmer de façon extrêmement articulée le
gouvernement fédéral pour la plupart des maux qui regardent
l'activité économique du Québec, que, par ailleurs, il se
réclamait très facilement de la capacité
inégalée, même en regardant le Japon, l'Europe et tout ce
que vous voulez, de créer des emplois de la part d'un gouvernement du
Québec, que le ministre était un spécialiste en
contradiction interne dans ses discours. J'ai nié avec
véhémence, ayant connu le titulaire de ce ministère il y a
une vingtaine d'années, au collège et à
l'université, que cela pouvait être le cas avec 20 ans de
maturité de plus. Parce que, effectivement, il était comme cela
à l'époque.
Une voix: On ne change pas beaucoup.
Une voix: II n'a pas changé.
Argumentation
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Malheureusement, les
années n'ont rien changé et ce qui est surtout pénible
pour les gens de la Côte-Nord, c'est de voir que le ministre qui est
chargé des activités du développement économique a
commencé ses propos en parlant de la catastrophe, de la
dépression et du sinistre dont on est témoin sur la
Côte-Nord. Les premiers à s'opposer, et, avec eux,
j'espère, leur député, seront les gens de la
Côte-Nord, qui jamais n'ont exprimé leur sentiment d'être
sinistrés, d'être déprimés ou paniqués.
Si on veut évidemment créer l'impression que cela ira
toujours mal sur la Côte-Nord, on n'a qu'à employer des propos
négatifs à l'endroit des gens de la Côte-Nord. Nous les
avons rencontrés, il n'en est rien. Les gens de la Côte-Nord ont
réuni les conditions que le ministre lui-même souhaite voir avant
que le gouvernement du Québec n'intervienne. On va y revenir, la presse
régionale est embarquée dans les solutions. Les instances locales
économiques sont embarquées dans ces solutions. Les ressources
humaines sont consacrées presque exclusivement à la solution des
problèmes d'activité économique de la Côte-Nord. Et
le seul intervenant qui a lui aussi les moyens, parce qu'il les a promis, c'est
le gouvernement du Québec qui ne donne pas suite à ses
engagements.
Le ministre s'est fait fort de démontrer que c'était la
conjoncture à l'égard de la construction et de la fabrication
d'automobiles qui était responsable en grande partie de la faiblesse du
marché pour le minerai de fer. On pourrait présumer, on pourrait
être aveuglé par l'évidence que, si on aide l'industrie
automobile, cela va se répercuter sur le marché du fer. Or,
effectivement, il y a un gouvernement qui s'est lancé à coups de
milliards, nous dit-on de l'autre côté de la Chambre, dans
l'amélioration des conditions et de l'aide à la survie de
l'industrie automobile. Cela devrait normalement et cela aide
inévitablement les producteurs d'acier, donc, les producteurs, les
exploiteurs du minerai de fer.
Le gouvernement fédéral est responsable du taux de
chômage ici, mais le gouvernement du Québec réalise des
miracles en création d'emplois en même temps. Il faudrait savoir
où est la vérité. La vérité est
au-delà de ces chiffres-là. La vérité est au niveau
des engagements que le gouvernement a contractés depuis janvier 1981. On
n'attend pas après le fédéral ni après personne
pour réaliser des voies d'accès, pour donner suite à des
engagements d'améliorer les équipements communautaires, de
loisir, d'éducation. Ce n'est pas la faute du fédéral si,
après des promesses de budget doublé pour la pêche, il n'y
a encore aucune
retombée dans la région de Sept-Îles et
Port-Cartier, ce qui ne répond absolument pas en ampleur aux
représentations qui ont été faites par les gens de la
région.
On a parlé de 115 000 000 $. Les gens de la Côte-Nord
veulent savoir où est le premier million et quand il viendra. Il sera
suivi d'un deuxième, d'un cinquième et d'un dixième
million, mais quand? C'est ce qu'ils veulent savoir. On ne veut pas savoir si
le résultat du référendum est une preuve de
lucidité ou si le résultat des élections est une preuve
d'intelligence, ça n'a rien à voir avec le débat. Nous
sommes allés voir les gens de la Côte-Nord, nous ne leur avons pas
demandé, en aucun cas, leur allégeance politique. Le
député de Duplessis connaît les gens que nous avons
rencontrés et il connaît les maires des différentes villes
que nous avons rencontrés, sans présumer des intentions de vote
de ces gens ou de leur historique d'organisation ou de contribution à
l'activité politique de la Côte-Nord. Le député de
Duplessis sait fort bien qu'il y a des gens de tous les partis qui sont
impliqués dans cet effort de redressement et de relance de cette
région.
La question était, il me semble, fort précise. D'où
vient le premier million? D'où viendra le cinquième million qui
relève encore et relèvera toujours, je l'espère, moi
aussi, du gouvernement du Québec et de ses actions? Il y a des choses
à faire, à moins qu'il n'y ait rien à faire et que ce
soient des promesses en l'air. Il y a des choses qui relèvent
carrément des budgets des différents ministères. Il y
aurait huit ministères d'impliqués à l'heure actuelle, y
compris le ministère des Affaires municipales, apparemment. Qu'est-ce
qu'ils ont fait? Quels sont les engagements que chacun de ces huit
ministères a contractés? Quel est l'échéancier
précis pour la réalisation de ces promesses? Quels sont les plans
directeurs? On ne se lance pas dans la planification, loin de moi l'idée
de suggérer des exercices de planification; j'ai clairement parlé
de plans d'action à l'intérieur d'une analyse à long terme
de ce qu'il faut faire pour changer la vocation de la Côte-Nord, pour
diversifier ses activités, c'est la moindre des choses. Les grosses
entreprises capitalistes font de la planification et le ministre le sait fort
bien, mais elles font aussi de l'action. Qu'en est-il, aujourd'hui - il n'y a
que trois ministres ici aujourd'hui, on présume qu'il en manque cinq -
des budgets que chacun d'eux administre? Quelles sont les actions
précises dont on a fait miroiter l'existence aux yeux des gens de la
Côte-Nord? Est-ce qu'on pourrait avoir une réponse à cette
question extrêmement précise, M. le Président?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Landry: J'ai, dans mon introduction générale,
évoqué beaucoup de choses. Celui qui vit ces choses au jour le
jour, le député de Duplessis, - et j'espère que le
député de Vaudreuil-Soulanges aura la bonne foi de le
reconnaître, j'ai déjà fait allusion à une somme de
1 500 000 $ qui est déjà dépensée, ce qui est
quatre fois plus que celle du fédéral - qui vit sur la
Côte-Nord et qui est élu par ces gens, va aller plus loin dans
l'énumération détaillée. J'espère que le
député de Vaudreuil-Soulanges aura la bonne foi de
reconnaître que notre gouvernement a agi incommensurablement plus vite et
avec plus de moyens que le gouvernement responsable de la crise. J'aimerais
qu'il provoque, une prochaine fois, une question avec débat sur
l'inertie du gouvernement fédéral sur la Côte-Nord et une
analyse comparée de ce qu'il a fait à Windsor et à Oshawa
et ce qu'il a fait à Sept-Îles et à Pointe-Noire. On
pourrait passer un beau vendredi matin là-dessus si le
député de Vaudreuil-Soulanges - la semaine prochaine, dit mon
collègue, et nous serions prêts - avait l'honnêteté,
s'il veut vraiment servir la Côte-Nord, d'aller jusqu'au fond de
l'analyse.
Écoutons maintenant, avec votre permission, M. le
Président, le député de Duplessis.
Le Président (M. Jolivet): M. le
député...
M. Scowen: Question de règlement.
J'accepte que le député de Duplessis parle maintenant mais
je pense que, d'après le règlement, le principe est l'alternance.
Je ne pense pas que le ministre d'État au Développement
économique soit le maître de cérémonie de cette
affaire. On va écouter deux discours de suite du côté
gouvernemental et je vous demande de proposer au ministre et aux autres
députés de ce parti qu'ils respectent le règlement dont
ils réclament eux-mêmes le respect.
Le Président (M. Jolivet): Sur une question... juste un
instant...
M. Landry: Est-ce que mon intervention n'était pas tout
simplement le contrepoids de la fausse question de privilège et de
l'opération de diversion qu'avait tenté de faire le
député de Notre-Dame-de-Grâce?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, je vais
régler le problème en disant que j'ai cru comprendre, dans la
deuxième intervention du député de Vaudreuil-Soulanges,
une question posée au ministre. J'étais cependant sur le point de
donner la parole au député de Duplessis, puisque c'est lui qui
l'avait demandée, en alternance, je la cède donc au
député de Duplessis.
M. Denis Perron
M. Perron: Merci, M. le Président. Si vous permettez, je
voudrais relever certains points qui ont été soulevés par
le député de Vaudreuil-Soulanges et qui se rapportent, par
exemple, au fait que le gouvernement n'a rien fait depuis un certain temps sur
la Côte-Nord et spécialement dans le comté de Duplessis. Il
parle en même temps de promesses qui auraient été faites.
D'autre part, je voudrais soulever des points et donner des informations aux
députés de l'Opposition sur divers projets qui ont
déjà été approuvés et des projets d'avenir
en rapport avec le plan d'intervention, soit le plan de redressement.
Premièrement, le gouvernement du Québec n'a rien fait sur
la Côte-Nord. Si vous permettez, M. le Président, je vais faire
une petite rétrospective en rapport, par exemple, avec la route 389, la
route Manic-Gagnon, ce que le député de Vaudreuil-Soulanges a
d'ailleurs soulevé, si ma mémoire est bonne, lorsqu'il est
intervenu à Sept-Îles, au poste CKCN. En passant, M. le
Président, pour votre information et pour l'information des personnes
ici présentes de ceux et celles qui nous écoutent, le
député de Vaudreuil-Soulanges a parlé des agents locaux,
de beaucoup de personnes qu'il a rencontrées lorsqu'il est passé
dans le comté de Duplessis, surtout à Sept-Îles. Je
voudrais lui dire, premièrement, que le comté de Duplessis, ce
n'est pas seulement Sept-Îles, ça part de Pointe-aux-Anglais et
ça va jusqu'à Blanc-Sablon, ce qui inclut les villes de Gagnon,
Fermont et Schefferville. Il faudrait qu'il patauge pas mal longtemps pour
comprendre ce que c'est le comté de Duplessis avec toutes ses
disparités, je peux vous l'assurer.
Les personnes qu'il a rencontrées spécialement, c'est
l'ancien candidat du Parti libéral du comté de Duplessis, qui est
actuellement à CKCN.
M. Lessard: Très brillant, très brillant.
M. Landry: Un agent.
M. Lessard: Il était très brillant.
M. Perron: Il a toutes les informations...
M. Landry: Il est remarquable, c'est un agent libéral.
M. Perron: Oui, toutes les informations qu'il vient de soulever,
il les a assurément obtenues de lui. Si ma mémoire est bonne,
durant cette journée du 15 octobre, vous avez rencontré le soir
57 personnes qui étaient justement de votre allégeance politique,
dans un endroit de Sept-Îles.
Écoutez, lorsqu'on regarde ce que vous avez fait lorsque vous
êtes venu dans le comté de Duplessis, vous avez un maudit bout de
chemin à faire pour faire ce que j'ai fait depuis quatre ans et ce que
le gouvernement du Québec a fait depuis quatre ans et demi. Vous pouvez
en être assuré.
Je reviens à la route 389 pour vous dire que, de la façon
dont vous procédiez et pour nous reporter à la façon dont
nous procédons, en 1972, dans le journal Le Nordique, lors des
élections partielles, en rapport avec la route 389, sur laquelle il y
avait 95 milles de route à construire, le Parti libéral, par le
biais de son candidat, à ce moment-là, avait
déclaré: L'hiver prochain - remarquez bien, en 1972 - vous irez
à Manic 5 en auto. Vous imaginez-vous, construire une route, sur une
longueur de 95 milles, en une année? C'était pratiquement
impossible. En 1973, vous avez fait la même chose avec le candidat du
Parti libéral, qui a été réélu à ce
moment-là, toujours le même point, mais jamais de travaux faits.
Par contre, en 1976, lorsqu'on a été élu, un des premiers
dossiers sur lesquels j'ai travaillé, c'est celui de la route 389.
Actuellement, au moment où on se parle, il y a près de 15 000 000
$ engagés dans cette route et il y a plus de 60 milles de route de
construits. (11 heures)
Nous n'avons pas fait entrer de la machinerie, durant la période
électorale, à chaque bout de la route, soit à Gagnon ou
encore à Manic, pour faire croire aux gens qu'on était pour la
construire et, après les élections, retirer la machinerie. On a
amené la machinerie là et on a travaillé. On a fait
travailler des gens et on a fait faire tout le travail en régie. Cela
fait près de cinq ans que les travaux durent. On avance, peut-être
pas aussi rapidement que la population le voudrait, mais on avance.
Pour revenir directement à l'axe Sept-Îles-Port-Cartier,
vous avez parlé de promesses qui avaient été faites. Pour
votre information, messieurs de l'Opposition, celui qui vous parle, et encore
moins le ministre Landry lui-même, n'a fait de promesse de quoi que ce
soit. Ce qu'on a dit, c'est ceci, et je me dois de faire une
rétrospective en rapport avec le plan de redressement, le plan
d'intervention, si vous voulez: Le 9 janvier 1981, la compagnie Iron Ore
faisait sa déclaration de mise à pied de 650 personnes, 500
à Sept-Îles et 150 à Schefferville. Le 18 janvier, le
ministre d'État au Développement économique, M. Landry,
demandait à l'OPDQ et à la conférence administrative
régionale de lui soumettre un rapport sur des projets susceptibles
d'être mis de l'avant dans un délai tout de même assez
court. Le 19 mars, le premier rapport lui parvient. C'est lors de cette
journée que le ministre lui-même a pris la décision de
retourner le rapport puisque le rapport, selon lui et selon moi
aussi, n'était pas complet.
Le 11 juin, un mémoire est remis par le ministre Landry au CMPDE.
Le 3 septembre, le mémoire est rendu au Conseil des ministres et
celui-ci, en tenant compte de certains événements et certains
problèmes économiques, comme par exemple, les taux
d'intérêt, comme par exemple, ce qu'on vit actuellement dans le
cadre de la récession à travers le Québec et même
à travers tout le monde occidental, a retourné le rapport au
CMPDE. Le 24 septembre, le CMPDE prend la décision d'endosser un
rapport. On l'a ici. Le 13 octobre, le Conseil du trésor endosse le
rapport en question. Le 28 octobre 1981, le Conseil des ministres prend la
décision d'aller de l'avant avec le plan de redressement.
Ce qu'on a fait depuis la fermeture de Rayonier Québec, en 1979,
c'était assurément de mettre l'accent sur ce qu'on avait comme
outil, qui était tout de même très important, ce qu'on
appelle le programme OSE, et aussi d'autres projets qui étaient dans
l'air depuis un bon nombre d'années et qu'on n'avait pas réussi
à passer.
Au titre des projets - je vais vous parler du programme OSE par la suite
- que nous avons, et des budgets en 1981-1982 - ce sont des choses qui
étaient incluses à l'intérieur du plan de redressement -
vous avez, par exemple, la base de plein air de Port-Cartier, avec un
engagement financier de 300 000 $, dont 150 000 $ cette année et 150 000
$ l'an prochain. Vous avez le camp des jeunes du lac du Rapide, un engagement
de 165 000 $, 60 000 $ cette année et la différence l'an
prochain. Vous avez une étude d'économie forestière qui a
été engagée. D'ailleurs, le ministre de l'Énergie
et des Ressources pourra vous parler de ce dossier d'une façon beaucoup
plus élaborée, une étude qui a coûté 50 000
$. Vous avez la construction - vous le savez, vous n'avez peut-être pas
été à Port-Cartier, mais on doit annoncer les appels
d'offres à partir du 25 novembre - du débarcadère de
Port-Cartier au coût de 8 000 000 $. Je continue. Dans l'engagement
financier qui a été pris dans ce plan de redressement ici, qui a
été endossé par le Conseil des ministres, vous avez la
bibliothèque centrale de Sept-Îles, 400 000 $; le Centre de
santé de Port-Cartier, 930 000 $; le CLSC de Sept-Îles, 200 000 $;
la rénovation du centre de santé de Schefferville, 75 000 $; la
réfection de la toiture de l'hôpital de Sept-Îles, 391 000
$; le remplacement des fenêtres à l'hôpital de
Sept-Îles, 136 000 $.
Je continue. Dans le domaine de l'éducation, 180 000 $. Toujours
dans le domaine de l'éducation, 760 000 $ pour l'amélioration et
le transfert d'équipements, toujours dans la région de
Sept-Îles-Port-Cartier. Ce n'est pas à Vancouver, c'est dans la
région de Sept-Îles-Port-Cartier et Schefferville. La construction
du gymnase à Longue-Pointe-de-Mingan égale X. Ce n'est pas dans
l'Ouest du Canada et ce n'est pas sur la Côte-Sud du Québec non
plus, mais c'est dans l'axe Sept-Îles-Port-Cartier 1 600 000 $; la route
d'accès à la réserve Port-Cartier, 100 000 $; la
réfection du camping de Moisie, 150 000 $; les chalets de la
réserve Port-Cartier, 50 000 $; la rénovation du centre de
loisirs de Schefferville, 154 000 $, tout cela pour un beau total de 13 386 000
$.
Maintenant, je me réfère de plus au programme OSE dont le
ministre, M. Bernard Landry, a parlé tout à l'heure. Dans les
deux dernières années, on a quadruplé le montant qui avait
été investi par le biais du programme OSE sur la
Côte-Nord.
M. Landry: Quadruplé.
M. Perron: On l'a quadruplé. En 1980-1981, sur le budget
1980-1981, les engagements totaux ont été de 3 379 407 $ sur des
projets globaux de 7 385 013 $, pour la création de 367 emplois
permanents et, de 379 emplois temporaires.
Vous nous dites qu'on n'a rien fait sur la Côte-Nord. Si je
compare cela à ce que le fédéral a fait, je pense qu'on a
fait un maudit bout de chemin.
Je continue avec 1980. Ce sont les engagements d'avril 1981 à
septembre 1981: 1 164 000 $, 340 emplois dont 255 permanents. Je pense que
c'est vraiment une façon de réagir à toute la
récession économique que nous vivons actuellement sur la
Côte-Nord et spécialement l'axe Sept-Îles-Port-Cartier.
Bien entendu, le député de Vaudreuil-Soulanges a
soulevé plusieurs problèmes que l'on vit. C'est vrai qu'on vit
les problèmes. J'ai toujours mentionné que ce n'était pas
la fin du monde, que c'était, bien sûr, des problèmes que
nous vivons actuellement, mais que ce n'était pas la catastrophe. Comme
gouvernement du Québec, nous faisons tous les efforts possibles pour
redresser la situation, avec les moyens du bord. Nous faisons pratiquement
l'impossible pour ce faire. Les chiffres que je viens de donner
démontrent que le gouvernement du Québec a certainement
réagi.
De plus, je voudrais ajouter les projets actuellement en marche et ce,
depuis à peu près un an, même pas, depuis que le ministre,
M. Bernard Landry, a pris sa décision. D'ailleurs, je le remercie, ainsi
que ses fonctionnaires qui ont travaillé avec lui. Pour 1982, 1983 et
1984, parmi les projets en marche, soit au niveau des études, des plans
et devis, de la préparation, vous avez le parc industriel de
Sept-Îles, phase II, 175 000 $; la voie de dégagement de la
circulation de Sept-Îles, 2 000 000 $; le
parc urbain, 3 000 000 $; le parc nautique, 4 000 000 $; la construction
d'un nouveau pont au barrage Sainte-Marguerite, 2 000 000 $; la
réfection de la route 138 à partir de la rue Ratté
à Sept-Îles jusqu'au viaduc, 1 250 000 $. Pour l'accès
à l'aéroport de Havre-Saint-Pierre - vous me direz que c'est 140
milles à l'est de Sept-Îles, mais il reste que cela a tout de
même des répercussions dans notre coin - il y a 264 000 $; pour la
construction de voies d'accès aux ressources forestières entre
Baie-Trinité et Rivière-Saint-Jean, 730 000 $; pour la route 138
à l'est du viaduc, jusqu'à la réserve Malioténam, 2
000 000 $; pour la route d'accès à la réserve Matimek, 200
000 $; pour l'implantation d'un CLSC à Havre-Saint-Pierre, 1 000 000 $.
Des projets, en voulez-vous, on en a.
Avec l'aide de M. Landry, de celle du ministre de l'Énergie et
des Ressources, de celle de mon collègue de Saguenay et de celle du
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, M. Lessard, on va faire
tout ce qui est nécessaire et tout ce qui est dans la mesure des
possibilités pour que ces projets aillent de l'avant. De gros projets
d'envergure, je peux en ajouter, on en a plusieurs, mais il serait
peut-être bon que le fédéral s'implique dans ces projets
d'envergure dont je vais parler.
Vous avez la route d'accès à Pointe-Noire. Les fonds sont
actuellement disponibles. Les plans et devis sont prêts. Mais, par
exemple, le fédéral n'a pas encore pris la décision
d'aller de l'avant avec la construction de Pointe-Noire. Il y a un engagement,
je pense que c'est de 100 000 $ qui a été pris dans ce
domaine-là, alors 16 000 000 $. Vous avez le prolongement de la route
138, dont d'ailleurs le député de Vaudreuil-Soulanges a
parlé, et je peux l'assurer que je connais le dossier beaucoup mieux que
lui pour l'avoir vécu durant les cinq dernières années.
D'ailleurs c'est une des promesses qui avaient été faites par le
Parti libéral en 1976 de construire la route à l'est de
Havre-Saint-Pierre et on m'impute aujourd'hui d'avoir promis cette
route-là alors que c'est le Parti libéral qui l'avait promise.
Oui, elle devait se terminer en 1976.
M. Scowen: Juste une question que j'aimerais poser à la
fin.
Le Président (M. Jolivet): A la fin, M. le
député.
M. Perron: Je termine, M. le Président.
Alors il y a le prolongement de la route à l'est de
Havre-Saint-Pierre qui est évalué, actuellement,
approximativement à 39 000 000 $ et vous avez la mise en place d'un
réseau de scieries entre Godbout et Rivière-Saint-Jean dont le
ministre va sûrement parler tout à l'heure; c'est de l'ordre
d'environ 26 000 000 $. Alors ce sont des projets, mais on attend aussi dans
d'autres domaines des promoteurs. C'est entendu que ce n'est pas le
gouvernement du Québec qui va arriver et qui va investir tous ces
montants-là sans avoir de promoteur. Il y a des endroits où,
nous, en tant que gouvernement, on doit s'impliquer, mais il ne faut tout de
même pas "charrier" et, par exemple, aller nous dire qu'on devrait aider
Iron Ore dans ceci et dans cela ou encore aider Wabush dans ceci ou dans
cela.
Alors, ce qu'il faut faire c'est attendre des promoteurs et pousser les
promoteurs pour qu'ils viennent investir. Soyez assuré d'une chose,
c'est que depuis un certain nombre de mois, pour ne pas dire un certain nombre
d'années, le gouvernement du Québec, par le biais de certains
ministres dont le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, dont le
ministre de l'Énergie et des Ressources, dont le ministre d'État
au Développement économique, a fait tous les efforts pour que des
investissements s'en viennent chez nous, pour aller chercher des promoteurs,
mais c'est sûr et certain qu'on ne peut pas donner toutes les
informations ici ce matin.
Alors, je termine là-dessus, M. le Président, cet
exposé de la situation. Pour avoir des faits précis,
peut-être que la prochaine fois que les députés de
Vaudreuil-Soulanges et de Notre-Dame-de-Grâce viendront dans la
région de Sept-Îles et Port-Cartier, au lieu de rencontrer
certains de leurs organisateurs qui ne connaissent pratiquement rien au
dossier, ce serait peut-être bon de me rencontrer pour que je puisse les
informer.
Le Président (M. Jolivet): Avant de donner la parole au
député d'Outremont, sans lui enlever le droit de parole qu'il a
maintenant, le député de Notre-Dame-de-Grâce veut poser une
question au député de Duplessis.
M. Scowen: II me semble que le député nous reproche
un peu d'être allés sur la Côte-Nord lorsque nous avons
constaté un problème, d'avoir parlé aux principaux
intervenants et d'avoir soulevé cette question en Chambre aujourd'hui.
Il a suggéré qu'on n'a vu que des libéraux là; ce
n'est pas le cas. On a essayé de rencontrer les maires et les
principales personnalités de toutes les villes de la région.
Quant à nous, on l'avait fait de bonne foi, on s'est
déplacé pour s'informer. On est revenu ici et nous avons
soulevé la question en Chambre aujourd'hui pour que tout le monde puisse
connaître le problème et essayer de le régler.
Le député, semble-t-il, nous reproche de l'avoir fait, je
ne sais pas, je veux lui demander: Est-ce qu'il nous reproche ou est-
ce qu'il nous félicite d'avoir fait la visite et d'avoir
insisté sur ce débat aujourd'hui?
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Duplessis.
M. Perron: M. le Président, pour l'information des
personnes qui sont présentes ici et de ceux et celles qui nous
écoutent, je ne reproche pas aux deux personnes qui y sont
allées, soit les députés de Notre-Dame-.de-Grâce et
de Vaudreuil-Soulanges, d'être allées à Sept-Îles,
cela les a vraiment informées et cela nous permet aujourd'hui
d'être ici. Mais je leur reproche, par exemple, les fréquentations
qu'ils ont eues face à certaines personnes qu'ils ont rencontrées
lorsqu'ils sont allés à Sept-Îles, et je...
Le Président (M. Jolivet): M. le
député...
M. Perron: Et je n'ai pas dit toutes les fréquentations,
j'ai dit certaines fréquentations.
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Outremont.
M. Pierre-C. Fortier
M. Fortier: M. le Président, je dois vous dire que pour ma
part j'ai beaucoup de sympathie pour le député de Duplessis. De
toute évidence il fait des efforts sincères pour aider la
population qui l'a élu, et je crois que d'une façon
générale la population de la Côte-Nord devrait toujours
remercier son député, quel qu'il soit, parce qu'il s'agit d'un
comté considérable et qui demande un travail énorme.
J'ai beaucoup de sympathie pour lui également parce que le
ministre d'État au Développement économique nous a dit
qu'il était absolument sans pouvoir pour faire quoi que ce soit pour la
population. (11 h 15)
II me semble, M. le Président, qu'il s'agit là de fausses
représentations. Il a dit: Vous savez, notre député a
été élu en 1976, il a été
réélu en 1981. Si, à la veille des élections, la
population du comté de Duplessis avait su ce que le ministre au
développement économique vient de nous dire ce matin, je me
demande bien sincèrement si le député aurait
été élu. Je ne lui en impute pas la faute et je crois
qu'on doit avoir de la sympathie pour un député comme lui, qui
essaie de faire son travail, mais qui n'est pas appuyé et à qui
on refile les informations ou de faux espoirs quant à la
possibilité de régler les problèmes économiques
d'une région comme celle pour laquelle il a été
élu.
Bien sûr, on nous reproche quasiment de s'intéresser
à la question. Je crois que le député devrait nous
remercier et nous féliciter parce que la population a dit à ceux
parmi nous qui sont allés à Sept-Îles qu'elle attendait
depuis longtemps qu'un plan de redressement soit considéré et
approuvé. Le député vient de nous dire que, dix jours
après la visite du Parti libéral à Sept-Îles, ceci a
été fait. M. le député, vous devriez nous remercier
parce que c'est à cause de notre intervention que ce plan-là a
été approuvé finalement.
Pour ma part, j'ai eu un peu d'hésitation parce que le
député nous dit: II n'y a pas de problème, on a des
projets, on en a et on va en avoir beaucoup d'autres. Et le ministre
d'État au Développement économique nous dit que c'est une
catastrophe. Il faudrait bien que le Parti québécois nous dise
une fois pour toutes: Est-ce qu'il s'agit d'une catastrophe ou bien est-ce
qu'il est réellement conscient qu'il a tous les pouvoirs et qu'il y a
quantité de projets qui peuvent être mis de l'avant pour
régler tout ce problème-là?
Pour ma part, M. le Président, j'aimerais soulever une question
en ce qui a trait à des problèmes qui ont été
soulevés lors de la dernière commission parlementaire
d'Hydro-Québec, au mois de février dernier, et d'ailleurs le
député de Duplessis s'en souviendra, puisqu'il était
présent, alors que nous avons entendu des représentations faites
par la Corporation de développement économique de la
région de Port-Cartier qui nous disait, en particulier:
Hydro-Québec, à titre d'entreprise parapublique, doit être
sensible aux problèmes des régions. Je crois
qu'Hydro-Québec, d'une façon générale, a dit
qu'elle était sensible et qu'elle était prête à
collaborer. Ils nous ont dit également que les programmes publics
d'investissements, dont ceux d'Hydro-Québec, doivent être mis en
place lorsque l'économie privée est en lutte et en
difficulté. La Chambre de commerce de Sept-Îles avait fait des
représentations semblables et d'ailleurs moi-même j'avais
opiné dans le sens de ses remarques. Ce qu'elle demandait, tout
simplement, c'était de faire en sorte qu'Hydro-Québec,
lorsqu'elle considère ses plans d'équipements, fasse en sorte
qu'une région désolée comme celle de la Côte-Nord
puisse être avantagée.
Pour ma part, je ne recommanderais jamais au gouvernement d'inciter
Hydro-Québec à faire des investissements s'ils s'avéraient
moins économiques que ceux qui pourraient être faits dans les
prochaines dix années. À ce sujet, M. le Président, si on
regarde une publication qui a été faite, un rapport
préparé dans le cadre de l'élaboration de
l'énoncé de politique économique: Bâtir le
Québec et traitant de l'électricité, on s'aperçoit
que, lorsque dans ce document on a fait des comparaisons, j'imagine que ceci a
été fait en collaboration
avec Hydro-Québec par l'OPDQ, on s'aperçoit que la
rivière Romaine est considérée comme étant
très compétitive par rapport à d'autres rivières
qui sont présentement dans le plan d'Hydro-Québec et par rapport
au nucléaire.
Bien sûr, à plusieurs reprises, j'ai entendu le ministre
qui nous a dit, le ministre et d'autres ministres avant lui du gouvernement qui
nous dirige qui nous ont dit: Vous savez, avant de faire du nucléaire,
il y a beaucoup d'eau qui va passer dans le Saint-Laurent et, même s'il
nous faut payer 10%, 20% ou 30% de plus que le nucléaire, si la
population l'acceptait, nous irions dans cette direction-là.
Mais, dans le cas de la Romaine, M. le Président, cette
rivière-là pourrait coûter meilleur marché que le
développement d'autres rivières et en particulier de certaines
rivières qui sont dans le plan d'équipement
d'Hydro-Québec. Et l'on sait pertinemment que, compte tenu de la
conjoncture économique, il peut être difficile dans le moment
d'amener de nouvelles industries, quoique mon collègue de
Vaudreuil-Soulanges ait insisté pour avoir une action, une action
véritable et une volonté politique de régler ces
problèmes-là.
Ce que les gens de la Côte-Nord nous avaient dit lors de la
commission parlementaire du mois de février, c'était, compte tenu
du fait que l'implantation de certaines industries pourrait prendre un certain
temps: Est-ce que le gouvernement ne pourrait pas considérer de
conseiller à Hydro-Québec d'avancer le développement de la
rivière Romaine pour permettre justement qu'il y ait un
développement économique, une création d'emploi pendant
une certaine période d'années?
J'avais opiné dans ce sens-là personnellement, compte tenu
du fait que l'aménagement de la rivière Romaine est concurrentiel
et que, justement, cet avancement, avec les études qui devraient
être faites et les travaux de construction, pourrait créer des
milliers d'emplois. J'admets immédiatement, comme le ministre, que ceci
ne durerait que quatre ou cinq ans, mais il me semble que c'est justement ce
genre de période de quatre, cinq ou six ans dont la région de la
Côte-Nord a besoin, aidée du gouvernement s'il y avait une
volonté politique, pour faire en sorte que le problème du
chômage soit réglé du moins pour une période
donnée. Cela nous permettrait au moins de nous retourner et de faire en
sorte que les gens puissent continuer à vivre sur la Côte-Nord, et
cela donnerait au gouvernement tout le temps, puisqu'il aime prendre bien son
temps dans ce domaine, de considérer le genre d'investissement. Il
pourrait attirer ces investisseurs sur la Côte-Nord.
Je pose cette question: À la suite de ces demandes qui ont
été faites en février 1981 - cela fait quand même
plusieurs mois - le ministre de l'Énergie et des Ressources ou le
ministre d'État au Développement économique a-t-il fait
des représentations officielles à Hydro-Québec dans ce
sens-là? Est-ce qu'ils ont fait des études approfondies de cette
suggestion qui avait été faite par les représentants de la
Côte-Nord? Est-ce qu'ils peuvent nous dire le genre d'investissement qui
serait considéré et le nombre d'emplois créés si
les investissements se faisaient?
Bien sûr, je suis à peu près certain que le ministre
d'État au Développement économique, ou le ministre de
l'Énergie et des Ressources, dira: M. le député
d'Outremont, vous savez pertinemment que nous avons présentement des
problèmes avec Terre-Neuve et que, compte tenu du fait que le haut de la
rivière se trouve supposément dans un territoire sous le
contrôle de Terre-Neuve, il est tout à fait inacceptable de
considérer une telle proposition. J'en profite donc pour demander au
ministre ce qui se fait dans ce dossier. On n'en entend pas parler. De toute
façon, compte tenu des besoins de la Côte-Nord, il
s'avérerait absolument utile et nécessaire que le gouvernement
prenne une décision politique dans ce dossier et intervienne, compte
tenu de l'économie de la Romaine, pour que le plan d'équipement
d'Hydro-Québec puisse, dans une certaine mesure, alléger le
fardeau incommensurable de la Côte-Nord présentement.
D'ailleurs, on ne sait absolument pas ce qui se passe dans ce dossier
parce que, même si la présentation d'Hydro-Québec a
été faite au mois de février 1981, à ma
connaissance, le plan d'équipement d'Hydro-Québec n'est
même pas approuvé et nous sommes maintenant au mois de novembre
1981. Il me semble que ces demandes des représentants de la
Côte-Nord n'ont pas été entendues et que le ministre,
semble-t-il, n'a pas fait de représentations. S'il en a fait, il n'en a
pas informé le public. À ma connaissance, ces gens de la
Côte-Nord n'ont pas eu de réponse satisfaisante à la
demande tout à faite normale qu'ils faisaient.
M. le Président, je crois que le ministre a des explications
à donner et j'aimerais bien qu'il nous éclaire sur ce
dossier.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Yves Duhaime
M. Duhaime: M. le Président, d'abord, je voudrais, en
quelque sorte - cela va peut-être surprendre les gens d'en face - les
féliciter de leur préoccupation pour ce qui est du
développement économique régional. Là où mes
félicitations vont s'arrêter, c'est
sur leur façon de faire. Je voudrais rappeler au
député d'Outremont, en particulier, et à son
collègue de Notre-Dame-de-Grâce, que s'ils ont la même
façon de procéder dans toutes les régions du Québec
qu'ils visitent que celle qu'ils ont utilisée en Mauricie, j'ai comme
l'impression que cela va donner des conférences de presse comme celle
que nous avons eu l'occasion de vivre à Shawinigan.
Les députés élus par une population qui sont de
l'ouest de Montréal, ou d'encore plus loin, et qui arrivent dans une
région, passent quelques heures à un bar d'hôtel en
discussion avec un entrepreneur qui, comme par hasard, est aujourd'hui le
président de l'association libérale du comté de
Saint-Maurice, un entrepreneur qui était candidat libéral aux
dernières élections - je remercie les électeurs et les
électrices de mon comté d'avoir pu le battre par 5000 voix - et
qui n'ont rencontré personne des CRD, ni des commissions d'expansion
économique, aucun commissaire industriel, à ma
connaissance...
M. Fortier: M. le Président, le ministre est en dehors du
sujet. On parle de la Côte-Nord et il parle du Saint-Maurice.
M. Landry: Question de règlement, M. le Président.
Que le député d'Outremont relise donc le thème de la
question avec débat qu'ils ont eux-même inscrite - par
écrit - aux travaux de ce matin. Il est question de développement
régional et, en particulier, de la Côte-Nord.
Vous avez beau vouloir vous obséder, M. le député
d'Outremont, sur ce que vous pensiez être un bon filon et qui se retourne
contre vous, lisez donc les écrits de votre propre parti avant de
faire...
M. Fortier: Pourquoi êtes-vous si agressif?
M. Duhaime: Je ne suis pas agressif, M. le Président.
M. Landry: ... des déclarations comme celle que vous venez
de faire, qui...
M. Fortier: Pourquoi êtes-vous si agressif?
M. Landry: ... dénote non seulement que vous ne connaissez
pas la question traitée, mais que vous ne connaissez même pas le
sujet que votre propre parti avait inscrit à l'ordre du jour de ce
matin.
M. Fortier: M. le Président...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Sur la question de
règlement, il était clairement entendu, lorsque l'inscription a
été faite, que c'était afin de nous assurer de la
présence du plus grand nombre possible de vos collègues du
cabinet que nous avons tenté d'alléguer que c'est dans une
perspective de l'action du gouvernement sur la Côte-Nord, une perspective
de développement économique régional en particulier, et
c'est clairement indiqué, par voie d'illustration, c'est évident.
Des conversations ont eu lieu entre les deux partis avant que, par
dérogation aux règles, cette question soit inscrite avec un avis
beaucoup plus court que de coutume, c'est à la suite des discussions que
nous avons eues, et il était notoire dans tous les cabinets de tous ces
ministres-là que nous étions allés sur la Côte-Nord
et que c'était la question dont nous voulions parler. Nous sommes
extrêmement heureux de voir le député de Duplessis ici et
je ne vois pas comment on s'en va dans toutes les régions à
droite et à gauche. On est en train de poser des questions
spécifiques...
Le Président (M. Jolivet): Un instant! Je vais quand
même clarifier...
Une voix: La motion le dit.
Une voix: La question...
M. Landry: ... M. le Président, que les écrits des
libéraux ne sont souvent pas plus solides que leurs paroles.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le ministre,
j'ai l'obligation de dire que, quant à moi, je n'ai eu aucun vent de la
discussion qui a pu avoir lieu entre les deux leaders de l'Opposition et du
gouvernement...
M. Duhaime: II n'y a rien eu là.
Le Président (M. Jolivet): En conséquence, je lis
le texte et je le relis pour les besoins de la cause: "Le sujet sera le
développement économique régional et plus
particulièrement celui de la Côte-Nord..."
Une voix: Voilà!
Le Président (M. Jolivet): Je ne peux donc en aucune
façon interpréter les choses autrement que par le texte qui m'est
donné et que je dois malheureusement faire respecter ce matin dans les
discussions.
Je comprends particulièrement ce que dit le député
de Vaudreuil-Soulanges dans les discussions qui ont eu lieu en dehors de la
Chambre, mais, quant à moi, j'ai malheureusement un texte qui est
clair.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Si vous me permettez, non pas
en ce qui concerne les discussions qui auraient eu lieu en dehors de la
Chambre, mais simplement en suivant la trame de la discussion qui se
déroule maintenant, les questions que nous posons de façon claire
et précise se
rapportent à des problèmes de la Côte-Nord.
Évidemment, je comprends que le ministre veuille alléguer des
choses qui regardent son comté; je comprends qu'un autre
député ou ministre veuille alléguer des choses qui
concernent son comté et l'action extraordinaire du gouvernement en
création d'emplois et en création de chômage dans les
diverses régions. On pose des questions sur la Côte-Nord à
ce moment-ci et on aimerait avoir des réponses sur le plan de
HydroQuébec et ces choses-là en ce qui concerne la
Côte-Nord.
Le Président (M. Jolivet): Le problème que
j'ai...
M. Landry: M. le Président, toujours sur l'incident...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Landry: ... je ne cache pas que le gouvernement, vu la
gravité de la situation, aurait préféré que la
question ne porte que sur la Côte-Nord.
M. Fortier: C'est ce que nous faisons.
M. Landry: Cependant, dans leur écrit, comme vous l'avez
si bien relaté, M. le Président, et c'est le comble de
l'incompétence, ils viennent nous demander des réponses et ils ne
savent même pas la question qu'ils ont posée.
Dans leur écrit, ils l'ont élargie au développement
régional, et si ce n'était que cela, mais, dans son introduction,
dans son intervention, le député de Vaudreuil-Soulanges a fait
allusion aux politiques - au pluriel -de développement
régional.
M. Fortier: Sur la région de la Côte-Nord.
M. Landry: Vous n'avez pas dit à l'égard de la
Côte-Nord, vous avez parlé de planification, des plans, ce sont
vos propres mots. Comment avez-vous pu vous présenter ce matin dans un
tel état de non-préparation alors que vous avez... Cela vous
gêne. Je sais pourquoi cela vous gêne que le débat soit
ouvert au-delà de la Côte-Nord et que vous essayiez, comme on dit,
de "back-traquer" présentement. C'est parce que le développement
régional au Québec est un des succès prodigieux du
gouvernement durant son premier mandat.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre...
Une voix: La question de règlement est vidée.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, je vais...
M. Landry: Non. Un succès prodigieux en Abitibi, au
Saguenay-Lac-Saint-Jean, dans les Bois-Francs...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Landry: À Laval, dans l'île de Montréal,
sur la rive sud.
Une voix: Le micro.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, M. le
ministre. Je pense que je vais clore le débat parce que j'ai une
obligation, comme président, de faire en sorte que le sujet qui est
inscrit à l'ordre du jour soit respecté. Je vous l'ai dit, je
vous le répète, et, à partir de ce moment, si vous voulez
continuer d'un côté à parler de la Côte-Nord et de
l'autre côté à parler de l'ensemble des régions, si
nous continuons un débat de procédure, nous n'aurons l'occasion
de parler ni de l'un ni de l'autre. (11 h 30)
En conséquence, j'ai malheureusement devant moi un texte qui est
clair. Je ne peux pas déclarer que le ministre de l'Énergie et
des Ressources a enfreint le règlement, puisqu'il parle du
développement régional. En conséquence, je suis dans
l'obligation de lui recéder la parole et de faire en sorte que vos
questions, quant à vous, portent sur la Côte-Nord, et quant
à vous, portent sur le sujet du développement régional,
à votre guise.
M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.
M. Duhaime: Je vous remercie, M. le Président. Je voudrais
dire tout de suite aux libéraux d'en face - parce que moi, je n'ai pas
d'amis en face, je vous le dis honnêtement - que je reviendrai sur la
Côte-Nord tantôt. Mais je ne veux pas laisser passer cette occasion
parce que quand j'ai lu, j'ai le feuilleton devant moi... Nous sommes
prêts, de ce côté-ci, à discuter du
développement économique régional, ce matin, de n'importe
quelle des régions économiques du Québec et plus
particulièrement de celui de la Côte-Nord. Je vous
suggérerais de maintenir cette bonne habitude que chaque vendredi matin
- c'est d'ailleurs sur mon agenda, j'ai bloqué tous mes vendredis, pour
le cas où la bonne idée vous reviendrait d'inscrire, de
façon bien précise cette fois-là, la région
économique de votre choix - on se retrouve ici. J'ai bloqué mon
horaire en conséquence.
Mais, M. le Président, je ne laisserai pas passer une pareille
occasion parce que vous êtes venu passer quelques heures dans
mon comté, dans ma région et, avant de repartir, vous avez
insulté la population en lui disant qu'elle était 20 ans en
retard. Cela, c'est vous qui l'avez dit, M. le député
d'Outremont. Là-dessus, on va se parler. Si vous aviez rencontré
les gens qui s'occupent du développement industriel, on vous aurait dit,
par exemple, qu'en Mauricie, un programme d'investissements est en cours dans
le secteur des pâtes et papiers. Ce programme va prendre, pour la seule
vallée du Saint-Maurice, le tiers de l'ensemble des 2 500 000 000 $
suscités par le plan de relance et de modernisation mis sur pied par le
gouvernement du Québec et financé à frais partagés
avec le gouvernement fédéral. Il a fallu un an et demi de
discussions avec les fédéraux avant qu'on puisse le mettre en
route. On vous aurait dit également, M. le député
d'Outremont, si vous aviez parlé avec les gens de la Consol, que dans la
seule ville de Shawinigan, au moulin à papier de la Belgo, on va
investir 159 000 000 $.
La route que vous avez empruntée pour venir en Mauricie, la 55,
vous, les libéraux, vous l'avez commencée en 1961. C'est une des
plus longues routes du monde, parce qu'elle a 18 milles de long, et ça a
pris 20 ans à la compléter. De 1976 à 1981, notre
gouvernement a investi 35 000 000 $, plus que la moitié du coût
total en 4 ans. M. le Président, je pourrais vous parler de la
récente annonce faite par la compagnie Alcan, 20 000 000 $, dans une
nouvelle usine de câblerie et de tréfilerie; je ne vous ai pas
entendu faire un commentaire là-dessus. Je ne vous ai pas entendu faire
un commentaire sur les investissements dans le textile qui est en train de se
moderniser dans notre région, les investissements à
Trois-Rivières pour 5 000 000 $, à Shawinigan pour 1 000 000
$.
Je ne vous ai pas entendu commenter non plus le fait que la compagnie
Bandag venait d'annoncer un investissement de 4 500 000 $ qui va doubler sa
production. Je ne vous ai pas entendu non plus commenter la nouvelle que la
compagnie B. F. Goodrich va également moderniser ses installations
à Shawinigan. Je ne vous ai pas entendu commenter l'investissement de la
Westinghouse à Trois-Rivières. Bref, vous avez rencontré,
durant votre séjour en Mauricie, des hurluberlus du Parti libéral
en particulier. Je vous inviterais cependant à revenir, et si vous
voulez rencontrer les gens qui sont au courant des dossiers du
développement économique en Mauricie, je peux vous aider à
les rencontrer. Les nouvelles que vous allez en ressortir vont être bien
différentes de ce que vous annoncez.
Maintenant, M. le Président, je voudrais garder l'essentiel de
mon intervention pour la Côte-Nord. Je félicite les
libéraux de s'intéresser à cette question. J'ai des
réserves sur leur façon de faire et j'ai également
beaucoup de réserves quand je vois ce qu'ils ont fait dans le
passé sur la Côte-Nord, dans les années récentes,
dans deux grands dossiers. Vous excuserez peut-être mes paroles, M. le
Président, mais le dossier de ITT Rayonier, investissement fait par une
multinationale, un gouvernement rampant, libéral et avec une subvention
repayable au bout de 25 ans avec une concession forestière de la
grandeur de la Belgique, si ma mémoire est bonne, est devenu, au fil des
années, le plus grand merdier économique de l'histoire de la
Côte-Nord. C'est vous autres, les libéraux, qui avez fait
ça, en 1971, avec des millions de subvention payés par les
travailleurs du Québec. Il me semble que j'aurais peut-être un peu
honte.
On vient de nous reprocher aujourd'hui d'avoir des lenteurs dans ce
dossier? Même les Chinois de Chine ont des réserves à
aborder le dossier de ITT. Je peux dire que nous avons poursuivi sept
études - quand je dis nous, je dis l'ensemble - de conversion de
production Sandwell, Conibec, etc. Il faut avoir un culot assez extraordinaire
pour s'intéresser à la Côte-Nord, dix ans après.
J'espère que c'est le remords qui vous guide.
Deuxième dossier, M. le Président. La crise actuelle dans
le minerai de fer illustre éloquemment le génie économique
de l'ancien premier ministre du Québec, M. Bourassa, de ses conseillers,
M. Saint-Pierre et de ceux qui s'en inspirent aujourd'hui, ceux qui sont en
face de nous, ce matin. Je ne peux pas faire autrement que d'apporter certaines
précisions. Le montant des investissements, dans le dossier minier
SIDBEC-Normines, a été de l'ordre de 472 000 000 $,
investissements basés sur le fait que les aciéries de
SIDBEC-DOSCO auraient besoin de 3 000 000 de tonnes de boulettes par
année pour leur production, ces années-ci. La marge d'erreur dans
la prévision est de l'ordre de 100% et plus.
Oui, il y a un déficit et je vais vous expliquer pourquoi.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
Comme les déficits du gouvernement.
M. Duhaime: SIDBEC-DOSCO absorbe 1 200 000 tonnes de boulettes.
Chaque année, 1 800 000 tonnes doivent être écoulées
à perte, sur le marché international, parce que Sidbec est
liée dans ses contrats avec ses coactionnaires. Ce n'est pas le Parti
québécois qui a signé ces contrats, ce n'est pas le
gouvernement fédéral non plus, M. le député de
Vaudreuil-Soulanges, je vous trouve bien mauvais farceur, c'est l'ancien
premier ministre du Québec, M. Robert Bourassa et sa troupe. D'ailleurs,
quand j'entends votre nom, M. le député de Vaudreuil-Soulanges,
j'ai beaucoup de
difficulté à le réconcilier avec le Parti
libéral.
Les engagements de SIDBEC - cette année seulement - dans
SIDBEC-Normines vont nous coûter une perte sèche de 35 000 000 $
et à peu près autant l'an prochain et pour les années
à venir. C'est le deuxième dossier. Pendant qu'on y est, M. le
Président, 472 000 000 $ d'investissements, c'est la valeur
actualisée en 1981.
Puisque dans le dossier d'amiante, dont vous n'avez pas voulu parler
cette semaine et je vous comprends, vous avez plutôt
préféré rester à l'abri, tranquille,
derrière une conférence de presse, plutôt que de poser des
questions à l'Assemblée nationale, les libéraux ont
commencé à comparer des dollars 1981 avec des dollars 1985,
l'investissement de 472 000 000 $, sur la même base de calcul que vous
avez utilisée dans le dossier d'Asbestos, c'est un investissement de 989
000 000 $ que ça représente, en 1985.
Maintenant, M. le Président, la position que nous prenons dans le
dossier de ITT est la suivante. Je pense que mon prédécesseur, M.
Bérubé, l'a dit très clairement dans le passé: nous
n'allons pas reprendre seuls, sur notre dos, ce dossier. Ce que nous disons,
nous avons en main toutes les études nécessaires pour permettre
à un groupe d'investisseurs qui voudraient prendre la relève, une
fois que leurs négociations seront terminées avec ITT, pour le
rachat de ses installations, une fois que ces investisseurs potentiels auront
pris la décision de maintenir la même production,
c'est-à-dire la pâte à dissoudre, ou encore terminé
l'examen d'une hypothèse qui a été avancée il y a
au-delà d'un an maintenant, à savoir si on pourrait y fabriquer
du papier journal; lorsque le tonnage requis sera connu, lorsque les
investissements requis seront connus, lorsque la rentabilité de ce
projet sera prouvée, le gouvernement du Québec, via sa
société d'État - je comprends que vous n'aimez pas
beaucoup les sociétés d'État, les gens d'en face, mais
parfois elles sont fort utiles - Rexfor, participera financièrement.
J'irai plus loin. Nous sommes à compléter les discussions avec la
compagnie ITT qui doit, bien sûr, un montant d'argent au gouvernement sur
la base du contrat qui a été signé et qui a
été rompu. Ce que je dis à toute la population de la
Côte-Nord, c'est que tout montant d'argent qui va découler du
contrat ou de l'indemnité et qui pourrait être versé
à Rexfor sera consacré prioritairement à des projets de
développement forestier. Cela peut représenter plusieurs millions
de dollars. Il n'y a rien de comparable avec les millions de La Prade, cela ne
sera pas 200 000 000 $. Cela pourrait être d'un ordre de grandeur, si on
regarde la valeur actualisée de cette indemnité au contrat, de 6
000 000 $ à 7 000 000 $. Il y a une chose qui est certaine, j'aime mieux
un montant de 6 000 000 $ ou 7 000 000 $ sûr que 200 000 000 $ qu'on ne
verra jamais en Mauricie avec l'affaire La Prade et les fédéraux
derrière.
Je voudrais dire aussi que dans le secteur...
M. Landry: ... la planification de l'usine de La Prade. S'ils ont
englouti 1 000 000 000 $ à La Prade, quels sont les
intérêts privés qui en ont profité?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre à
l'Énergie et Ressources a la parole.
M. Duhaime: Si vous voulez qu'on parle du dossier de La Prade, M.
le député d'Outremont, je vous ferai une suggestion...
M. Landry: ... La Prade.
M. Duhaime: Je serais même prêt à vous
rédiger la question. Nous pourrions nous retrouver ici.
M. Landry: Dans deux vendredis.
M. Duhaime: Dans deux vendredis. Le vendredi que vous choisirez.
Vous apporterez tous les experts nucléaires qui sont autour de vous et
nous ferons une discussion sur La Prade...
M. Landry: Ceux de Canatom...
M. Duhaime: Si vous voulez parler de Gentilly II aussi, on
pourrait en parler. Je pense que vous êtes bien familier avec le dossier,
mais je voudrais revenir à la Côte-Nord et vous parler de ce que
nous entendons faire sur le plan minier.
Je peux confirmer, et je le fais tout de suite, que pour l'exercice
financier qui vient - les libéraux vont me dire tout de suite: Le budget
n'est pas encore approuvé. Il le sera - nous allons consacrer sur la
Côte-Nord et dans la fosse du Labrador, pour l'exercice qui vient, un
montant d'à peu près 2 000 000 $, soit 1 910 000 $, pour
être bien précis. Je pense que cette injection de capitaux dans
des travaux d'exploration devrait tant à Schefferville qu'ailleurs sur
la Côte-Nord, mais peut-être davantage à Schefferville,
permettre à la population des travailleurs et des familles qui s'y
trouvent de mettre ce que j'appellerais - ce n'est pas une solution miracle -
un peu de baume sur leurs plaies. C'est tout le potentiel minier de la fosse du
Labrador.
Je suis un peu étonné de voir que le député
de Vaudreuil-Soulanges, dans sa première intervention, n'ait pas
cité ce qu'il est convenu d'appeler maintenant son livre
de chevet quand il est sur la Côte-Nord ou encore un écrit
biblique, le rapport Boucher; j'aurais été prêt à en
discuter avec lui ce matin. J'ai déjà eu l'occasion de dire en
commission parlementaire - je pense que le député d'Outremont va
s'en souvenir - que le rapport Boucher, quant à moi, ne passerait pas
à l'histoire. Quand une de ses recommandations nous dit: II faut faire
connaître au monde entier le potentiel de minerai de fer sur la
Côte-Nord, je pense que tout le monde est au courant que nous avons, sur
la Côte-Nord, dans la fosse du Labrador, des réserves pour les
mille ans à venir, 15 000 000 000 de tonnes de réserves de
minerai de fer. Mais il ne faut pas être grand expert pour comprendre,
quand la teneur en fer d'autres régions du monde, qui sont nos
concurrents et, en particulier, le Brésil, vient nous faire une
concurrence sur les marchés internationaux quant aux prix et qu'en
même temps, la demande s'effondre, parce qu'il y a une crise de l'acier
à l'échelle du monde entier; je n'ai pas besoin des commentaires
de M. Boucher pour venir me dire cela.
Je voudrais enfin, M. le Président, mentionner que, sur la
Côte-Nord actuellement, Hydro-Québec poursuit ses travaux sur le
projet Manic 5 de puissance additionnelle, mais je pense que la question du
député d'Outremont portait, de façon très
précise, sur la rivière Romaine.
M. Fortier: ... posée par les gens de la
Côte-Nord.
M. Duhaime: C'est une question fort pertinente. Je
répondrai essentiellement ceci, M. le Président: Cela me
paraît d'abord intéressant à examiner, mais à la
fois curieux à entendre des gens d'en face qui, tout récemment,
en commission parlementaire, mettaient en garde le gouvernement du
Québec et en particulier son ministre de l'Énergie et des
Ressources qu'il fallait laisser Hydro-Québec elle-même prendre
ses décisions en fonction de la rationalité des coûts. Ce
matin, est-ce que vous êtes en train de me dire que, dans ce dossier,
vous faites également un virage? Peut-être que mes
collègues ne sont pas au courant de cela, mais M. le
député d'Outremont et moi, récemment, on est allés
ensemble à une émission de télévision, Les lundis
de Pierre Nadeau. Je donne cela comme anecdote, parce que c'est un virage.
On parlait du dossier de l'amiante. Pierre Nadeau m'a posé cette
question: M. le ministre, vous négociez avec General Dynamics, mais, si
votre prix est déjà fait à 42 $, il n'y pas de
négociation? J'ai dit très clairement: 42 $, c'est le prix
plafond, pas un cent de plus. M. le député d'Outremont,
peut-être parce qu'il s'agissait d'une multinationale, a dit: 42 $, c'est
un prix plancher pour nous.
À partir du moment où la transaction se fait non pas sur
les actions d'Asbestos...
M. Fortier: Je l'ai dit tout à l'heure, mais on va le
laisser terminer.
M. Duhaime: ... mais sur le capital-actions de la General
Dynamics of Canada, votre voisin de gauche, M. le député
d'Outremont, le député de Vaudreuil-Soulanges, mardi, qui n'a pas
eu le coeur de poser une seule question en Chambre de toute la semaine sur ce
dossier, alors que vous aviez dit vous-même que notre offre était
trop faible, alors que notre offre a été acceptée par la
suite, le député de Vaudreuil-Soulanges a dit: Vous avez
payé trop cher. Je dis: Si vous voulez un ajournement de cinq minutes,
on peut vous l'accorder tout de suite. Vous allez parler ensemble.
M. Fortier: Si vous voulez entendre la réponse, je vais
vous la donner.
M. Duhaime: Vous virez dans toutes les directions, je n'ai jamais
vu une chose semblable. Si j'avais le pouvoir de directive...
Une voix: Ils n'ont plus de chef.
M. Duhaime: ... que vous refusez au gouvernement du
Québec, je vous dis tout de suite que je n'ai pas besoin d'un pouvoir de
directive. Entre gens civilisés, entre "gentlemen", comme on entend de
votre côté parfois, je peux très bien parler avec la
direction d'Hydro-Québec sans avoir un pouvoir de directive. C'est ce
que je ferai et c'est ce que j'ai déjà fait, non seulement dans
ce dossier, mais dans d'autres.
Mais le problème, M. le Président, c'est que cela implique
que, si nous disions: Faisons tout de suite la Romaine, ou bien, faisons tout
de suite la Sainte-Marguerite, ou bien faisons tout de suite le
Haut-Saint-Maurice, je ferais des heureux en très grand nombre dans mon
coin, M. le Président. Mais ce qu'il faut qu'on regarde, c'est le
coût de l'investissement au kilowattheure; ce qu'il faut qu'on regarde
aussi, c'est si on peut décaler ou jouer avec la planification faite
à ce jour. Est-ce qu'on va faire la Romaine avant LG 1, avant Brisay,
avant Laforge I? Est-ce qu'on va déplacer tous les équipements du
Nord-Ouest pour les approcher sur la Côte-Nord?
Je dis que, s'il y avait un grand projet industriel qui pouvait
justifier tout de suite l'écart des coûts, non seulement je
n'aurais pas besoin de faire une grande pression auprès
d'Hydro-Québec, mais je suis absolument certain que la
société regarderait l'aménagement de la Romaine d'une
façon très positive.
Je voudrais aussi dire, et je termine là-dessus, M. le
Président, que notre contentieux avec Terre-Neuve ne nous empêche
en aucune façon de travailler sur une problématique de
développement sur la Romaine parce que si, par hypothèse, nous
décidions d'aller de l'avant dans ce dossier et que la question de
l'hydraulicité à la tête de ce bassin n'était pas
réglée, cela pourrait nous enlever quelques mégawatts,
bien sûr, mais cela ne nous empêcherait pas d'aller de l'avant. Et
j'ai mes doutes sur le règlement à l'amiable du dossier de
Terre-Neuve, d'autant plus que, depuis quelques jours, je sais que c'est un
certain M. Peckford qui est l'auteur d'une motion qui s'est transigée
une nuit durant pour aboutir à une nouvelle constitution.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Reed Scowen
M. Scowen: Je dois céder la parole... est-ce que vous avez
une réplique? Il y a certainement des réponses que mon
collègue d'Outremont voudra donner aux déclarations du ministre
de l'Énergie.
Je dois faire mes excuses d'abord aux gens de la Côte-Nord, notre
intention était surtout de soulever les problèmes dont tout le
monde a eu connaissance et d'exiger quelques réponses précises de
la part du gouvernement. Dans les dernières minutes, le sujet a
débordé celui de la Côte-Nord, on touche un peu à
tous les problèmes économiques du Québec.
C'est clair, M. le Président, que cela leur fait mal, nos voyages
à l'extérieur de la ville de Québec pour examiner et
étudier ces problèmes. Je dois vous dire tout de suite que nous
avons quand même l'intention de continuer. Nous avons mis sur pied, dans
l'Opposition, un groupe de députés qui s'occupent du
développement économique; nous en avons quatre ici ce matin. M.
Bélanger, le député de Mégantic-Compton, est avec
nous et il n'a pas encore parlé.
J'ai remarqué que le ministre de l'Énergie était
piqué par le fait que nous soyons allés dans la Mauricie. Il
disait, de même que le député de Duplessis: Vous avez
écouté seulement les intervenants qui sont des libéraux.
Je vous assure que ce n'était pas notre intention, nous avons
demandé, invité les personnes responsables du
développement économique dans ces régions: les maires, les
commissaires industriels, les leaders syndicaux, et si la plupart de ces gens
sont des libéraux, je les félicite de leur bon jugement, ce n'est
pas notre faute.
Je dois vous dire, M. le Président, et j'annonce aujourd'hui que
vendredi prochain le groupe a l'intention d'aller à Drummondville. Nous
serons sur place pour parler et écouter les gens qui sont responsables
du problème économique dans la région de Drummondville et
la région de l'amiante. Si le ministre d'État au
Développement économique ou les députés de cette
région ont des suggestions à faire quant aux personnes que l'on
doit rencontrer vendredi prochain ou jeudi soir prochain, j'aimerais beaucoup
qu'ils fassent parvenir les noms à mon bureau et nous allons
certainement les voir.
Le vendredi suivant, nous serons dans une autre région du
Québec pour les mêmes fins et je vous promets, M. le
Président, que nous allons faire notre possible pour rencontrer tous
ceux qui s'occupent vraiment des problèmes économiques de la
région.
Nous le faisons pour une raison très simple. Le rôle de
l'Opposition, quant à moi, c'est de soulever les problèmes
sérieux dans les domaines propres à chaque député -
dans notre cas, c'est le domaine économique -pour que le gouvernement
prenne ses responsabilités. Dans le cas de la Côte-Nord, nous
avons été avertis par toutes sortes de signes, même par les
déclarations du député de Duplessis lui-même, qu'il
existe un grave problème. Aujourd'hui, il a dit: Ce n'est pas une
catastrophe, nous faisons telle et telle chose, ne vous inquiétez pas,
ce n'est pas un problème. Ce n'était pas notre perception et
lorsque nous voyons, d'après Statistique Canada, un taux de
chômage de presque 25% aujourd'hui, c'est difficile pour nous d'accepter
la déclaration du député et de croire que ce n'est pas une
catastrophe.
Le ministre d'État au Développement économique
lui-même a décrit la situation économique au Québec,
à travers la province, aujourd'hui, comme tragique. Si un taux de
chômage moyen de 10%, 12% est tragique, je pense qu'on a probablement le
droit de dire qu'un taux de chômage de 25% n'est pas loin d'une
catastrophe. C'est pourquoi nous avons provoqué ce débat
aujourd'hui en portant une attention particulière à la
Côte-Nord. C'est aussi pourquoi nous avons l'intention de continuer
semaine après semaine à visiter les régions du
Québec et à mettre devant le public soit ici les vendredis, soit
par des questions, soit par des débats spéciaux, les graves
problèmes économiques qui sont la responsabilité de ce
gouvernement. S'il nous reproche de le faire, c'est simplement une indication
qu'on touche à des nerfs sensibles et qu'il réalise qu'il ne
prend pas ses responsabilités. De notre part, à toutes les
critiques qu'on nous oppose, à toutes les déclarations qu'on
conteste quand nous visitons les régions, à savoir qu'il n'y a
pas de problème, que nous parlons avec des personnes qui ne sont pas les
vrais représentants, nous ne porterons pas beaucoup d'attention et nous
continuerons de faire notre travail.
Avant de redonner la parole à mes
collègues, qui vont traiter, j'espère, avec les
députés d'en face des problèmes spécifiques de la
Côte-Nord, je veux simplement aborder une question qui me vient à
l'esprit à la suite de la déclaration du ministre d'État
au Développement économique à savoir que le
député de Notre-Dame-de-Grâce n'était pas
interventionniste, mais que lui, il est interventionniste. C'est un exemple des
slogans démagogiques qui, dans la réalité, veulent dire
très peu de choses. Si je suis dans la politique aujourd'hui
plutôt que dans le secteur privé, c'est parce que, par
définition, je crois à l'intervention de l'État dans
l'économie. Je pense que tout le monde sait que moi et le Parti
libéral sommes non seulement d'accord avec les interventions de
l'État mais que c'est notre parti qui a été à
l'origine des grandes interventions de l'État dans l'économie du
Québec: l'Hydro-Québec, le projet de la Baie-James, la
Société générale de financement, SOQUIP, SOQUEM, la
Caisse de dépôt, la Société de développement
industriel, toutes ces institutions dont le Parti québécois est
très fier et avec raison ont été des créations du
Parti libéral du Québec. Je suis fier de m'associer à ces
décisions, à la création de ces institutions. Nous avons
même appuyé une initiative du gouvernement péquiste dans ce
domaine, il y a deux ans, quand il a créé la
Société Pétromont. On a dit que c'était une bonne
idée, une intelligente mesure, dans un secteur de pointe où on
doit intervenir et on a voté pour cette intervention.
Ce qu'on critique, c'est que, normalement, il fait de très
mauvaises interventions dans l'économie. Ce n'est pas la question de
savoir si on doit le faire oui ou non, c'est de savoir quoi faire, et je pense
que l'exemple que le ministre vient de citer de la compagnie Asbestos est un
très bel exemple d'une mauvaise intervention. On ne s'intéresse
pas tellement au prix. Le prix, comme vous le savez, c'est 42 $ l'action, qui
va totaliser 81 000 000 $ avant que le contrat ne soit réalisé
dans deux ans avec la société. Ce prix est de 81 000 000 $ de
trop et je vais vous dire pourquoi. Il n'existe aucune raison valable, soit
économique, soit sociale, de payer aux Américains 81 000 000 $
aujourd'hui pour une mine d'amiante dans la ville de Thetford-Mines. C'est une
dépense qui ne va créer aucun nouvel emploi non seulement sur la
Côte-Nord mais à Thetford-Mines même. (12 heures)
Le lendemain de cet achat, les gens de Thetford-Mines vont trouver que
leur situation est inchangée. Le marché de l'amiante ne sera pas
plus vaste, les règlements du gouvernement quant à la
salubrité dans les mines en général, dans les Cantons de
l'Est, ne seront pas changés. La sécurité d'emploi ne sera
pas plus forte. La Société nationale de l'amiante a
procédé à des mises à pied à la compagnie
Turner Newall, une filiale de Bell Asbestos, après l'avoir
achetée parce que ce n'était tout simplement pas rentable. Il ne
faut pas attendre que la sécurité d'emploi dépasse les
moyens de la société de vendre son produit. Mais ce sont 81 000
000 $ qui auraient été dépensés pour la
création d'emplois à un moment où le Québec se
trouve dans une position économique tragique, d'après
l'expression du ministre, et dans une situation où, après cinq
années de gouvernement péquiste, notre part
québécoise de l'économie canadienne a diminué d'au
moins 20%.
Notre taux de chômage est maintenant beaucoup plus
élevé qu'il était au moment où le Parti
québécois a pris le pouvoir. Notre part dans la création
de nouveaux emplois au Canada a diminué, d'environ 22% du total canadien
qu'elle l'était, jusqu'à 15% peut-être, cette année,
et les nouveaux investissements dans le secteur industriel, dans le secteur de
la fabrication, qui est la clé de tout renouvellement économique
dans une société, ont baissé. Avant l'arrivée au
pouvoir du Parti québécois, on avait à peu près 25%
de tous les investissements dans ce secteur qui étaient faits au Canada
et, cette année, on n'aura pas 20%. Alors, cet affaiblissement de
l'économie n'est pas causé par les interventions du gouvernement
ou par le manque d'interventions du gouvernement. C'est causé par les
mauvaises priorités, dont la société Asbestos est un
très bon exemple et dont l'idée de construire le mât
olympique pour 17 000 000 $ est un autre bel exemple des mauvaises
priorités. C'est le manque de compréhension, le manque
d'intérêt, le manque de connaissances dans le domaine
économique.
Je termine, M. le Président, et je reviens à la question
de la Côte-Nord. S'il y a des gens, par hasard, sur la Côte-Nord,
qui nous regardent aujourd'hui, j'espère qu'ils ont un stylo et un
morceau de papier, parce qu'il reste encore une heure pour ce débat.
J'espère que, dès maintenant, le gouvernement, les ministres ou
les députés vont commencer par nous dire, au sujet de la
Côte-Nord, exactement, point par point, ce qu'ils proposent de faire pour
régler le problème que le député de Duplessis a
qualifié de non catastrophique, mais que tous les membres du
gouvernement reconnaissent comme quelque chose de très sérieux et
surtout comme étant la raison principale de notre présence ici
aujourd'hui. Alors, il nous reste une heure, ce qui nous donne amplement de
temps pour que cette liste des actions, des actes précis qui sont faits
par le gouvernement, soit détaillée. J'invite les personnes de la
Côte-Nord qui nous regardent, comme je l'ai dit, à sortir un stylo
et un morceau de papier et à commencer à écrire parce que,
à la fin de
cette période, nous aurons peut-être eu quelque chose, un
résultat, une retombée positive de ce débat que le Parti
libéral du Québec a soulevé ce matin.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche.
M. Lucien Lessard
M. Lessard: Merci, M. le Président. Je suis d'abord
très heureux que les députés de l'Opposition aient
soulevé le problème de la situation tragique sur la
Côte-Nord. Mais je dois dire aux députés de l'Opposition
que la Côte-Nord leur a répondu depuis 1970 et en 1976, que la
Côte-Nord a justement balayé les députés
libéraux de son territoire. Ce n'est certainement pas le
député de Notre-Dame-de-Grâce, le député
d'Outremont et le député de Westmount qui vont venir nous dire
comment développer la Côte-Nord. Il y a, depuis 1970, un
député du Parti québécois dans le comté de
Saguenay et, depuis 1976, il y a Denis Perron qui a été
député du Parti québécois. D'ailleurs aux
dernières élections, la Côte-Nord vous a donné votre
réponse encore une fois en vous balayant et en balayant vos
candidats.
Mais, M. le Président, si la Côte-Nord a
décidé de répondre aux députés
libéraux, en 1970 et en 1976, c'est parce que la Côte-Nord a
rejeté justement une conception du développement
économique qui n'a pas changé encore du côté des
libéraux. J'ai eu l'occasion de visiter la Côte-Nord pendant la
campagne électorale, d'aller à Port-Cartier comme à
Sept-Îles et de voir la situation désastreuse,
particulièrement à Port-Cartier et je me sentais mauditement
malheureux -passez-moi l'expression, M. le Président -devant une telle
situation, lorsque je voyais des HLM littéralement fermés comme
des villes de l'Ouest.
Mais, pendant la campagne électorale, je n'ai pas pour autant,
dans les discours que j'ai faits, dit aux gens de la Côte-Nord que le
Parti québécois allait régler leurs problèmes d'un
coup, au lendemain de la campagne électorale. Je ne pouvais pas le leur
dire. Mais j'ai dit ceci aux gens de la Côte-Nord: La différence
entre le parti qui se présente contre nous, le Parti libéral, et
le Parti québécois, c'est que nous croyons d'abord aux ressources
du Québec, on croit d'abord aux gens du Québec et on croit
d'abord aux régions du Québec.
L'histoire de la Côte-Nord, c'est l'histoire
caractéristique de tout le Québec. Le développement
économique de la Côte-Nord, c'est à peu près
l'histoire du développement économique de tout le Québec
qui a été fait par nos prédécesseurs, par nos
gouvernements précédents. Et qu'est-ce que c'était, ce
développement économique ou cette conception économique
que le député de Notre-Dame-de-Grâce vient d'illustrer il y
a quelques minutes, et que le député de Nelligan a
illustré, hier, ici, à l'Assemblée nationale? Cette
conception, c'était toujours de se fier sur les autres pour assurer
notre développement économique, se fier sur les autres, se fier
sur les Américains, se fier sur les étrangers et sans
donner...
M. Scowen: SGF, Hydro-Québec... M. Lessard: Un
instant!
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le
député.
M. Scowen: Vous êtes contre ces institutions?
M. Lessard: Oui, vous vouliez débâtir ces
sociétés-là à l'occasion de la dernière
campagne électorale.
M. Scowen: Qui les a construites?
M. Lessard: Oui, se fier sur les autres. On en avait des
ressources sur la Côte-Nord et il y en a encore. Il y avait des
ressources forestières sur la Côte-Nord, partout, partout. On
était de maudits bons scieurs de bois sur la Côte-Nord, on ne se
syndiquait pas parce qu'on avait peur qu'elles partent. Les compagnies
forestières ont toutes "sacré le camp" et ont toutes
épuisé les ressources. Pourquoi? Parce qu'on n'avait aucun
pouvoir de décision. Ce sont elles qui décidaient à notre
place, qui nous développaient à notre place, qui prenaient le
contrôle de nos ressources. L'histoire de ITT Rayonier est la plus belle
illustration d'à-plat-ventrisme des libéraux en 1971 et de tous
les gouvernements précédents.
En 1971 - oui, on va parler de Reynolds - quand ITT est venue sur la
Côte-Nord, quand M. Bourassa a annoncé à grand renfort de
publicité la venue de ITT sur la Côte-Nord, avec 40 000 000 $ de
subvention directe sur un investissement de 160 000 000 $, soit 25% de
l'investissement direct qu'on fournissait. Alors qu'on dit que lorsqu'une
compagnie possède 10% de son capital, elle peut emprunter 90% de la
différence, on fournissait 25%, 40 000 000 $, plus des avantages
économiques considérables, ce qui totalisait 118 000 000 $ que le
gouvernement Bourassa cédait à ITT, plus 58 000 milles
carrés de territoire. Une grande partie, le dernier secteur forestier du
Québec.
Je comprends qu'il était peut-être difficile, mais ce que
j'ai dit à ce moment-là comme représentant de l'Opposition
en 1971, alors que j'étais critique en matière de terres et
forêts... On s'est battu ici jusqu'à 3 heures 55 du matin, parce
que dans ce
temps-là on siégeait aussi la nuit, pour dénoncer
le fait qu'ils nous passaient un Québec, la nuit à part
ça. On s'est dit une chose qui apparaît normale: Quand un
gouvernement investit 40 000 000 $ sur un investissement de 160 000 000 $, il
devrait être présent aux décisions, il devrait être
présent au niveau du conseil d'administration. Non, on nous a
répondu à ce moment-là: ITT ne veut pas que l'on soit
participant aux décisions. C'est là le problème
fondamental du développement économique du Québec. On a
cédé sans aucune condition, poings et mains liés, les
ressources du Québec sans que le Québec ait de
responsabilités en ce qui concerne les décisions de
l'administration de ces entreprises. Il aurait été normal qu'on
exige à ce moment-là de ITT Rayonier qu'elle puisse mettre en
même temps, à côté de nous, 40 000 000 $ dans le pot
avec nos 40 000 000 $ de subventions de telle façon que le gouvernement
du Québec aurait pu être participant et savoir ce qui se passait
à l'intérieur de l'entreprise. Non, M. le Président, on
leur a cédé 58 000 milles carrés de territoire, on leur a
cédé 118 000 000 $ et on nous a dit: Restez à genoux, la
compagnie vient, restez à genoux. Je me rappelle quand on a
inauguré ITT Rayonier, à Port-Cartier, on disait: Bienvenue, ITT
Rayonier. C'était même payé par le gouvernement du
Québec. Ils nous ont servi des barbecues, je comprends qu'avec 118 000
000 $ ça vit dans un poulailler! M. le Président, c'est ça
le développement économique que nous propose encore le Parti
libéral.
Le problème de la Côte-Nord, actuellement, vient, c'est
vrai, de deux sources; il vient de ITT Rayonier, à Port-Cartier, qui a
soulevé un problème considérable, il vient aussi d'une
autre source, la compagnie Iron Ore. Est-ce que c'est une compagnie qu'on
contrôle, la compagnie Iron Ore? Est-ce que c'est une compagnie sur
laquelle on peut avoir, un moment donné, une certaine influence? Non, la
compagnie Iron Ore est contrôlée ailleurs, aux États-Unis.
Quand Iron Ore, un moment donné, prend une décision, elle ne
vient pas en parler au gouvernement du Québec. Elle prend la
décision. Cette compagnie-là et toutes les autres compagnies du
Québec, ne viennent pas au Québec pour nos beaux yeux. Elles
viennent pour faire de l'argent et, tant et aussi longtemps qu'elles en font,
elles restent au Québec et, quand elles n'en font plus, elles s'en vont.
C'est là la différence, M. le Président.
La Côte-Nord, en 1970 et en 1976, a rejeté le Parti
libéral parce que la Côte-Nord a rejeté cette conception de
notre développement économique par et pour les autres. Je
comprends qu'on ne pourra pas régler - à part les cas ponctuels
dont le député de Duplessis a parlé tout à l'heure
- du jour au lendemain le problème de la Côte-Nord comme on ne
pourra pas régler du jour au lendemain le problème des autres
régions économiques qui ont été des
régions-ressources. C'est toute une transformation industrielle qu'il
faut faire dans tout le Québec.
C'est dans ce sens-là qu'on a lancé au gouvernement, par
exemple, Bâtir le Québec mais pas bâtir le Québec par
et pour les autres, bâtir le Québec par et pour les
Québécois. C'est la différence entre la conception de
développement économique qui nous est proposée par les
libéraux et celle qui est proposée par le Parti
québécois. Développer le Québec et dire aux
Québécois: Le Québec nous appartient d'abord et c'est par
les ressources du Québec, par les ressources humaines qu'on va
être capable de développer ce Québec. C'est dans ce
sens-là, M. le Président, que je trouve les députés
libéraux passablement hypocrites ce matin. Nous prenons une succession
qu'ils nous ont laissée et que les gouvernements
précédents nous ont laissée. On était rendu au
point qu'on n'était même plus capable de pêcher dans les
rivières à saumon parce que vous les aviez toutes
cédées aux entreprises privées. On pensait que le saumon
était tellement anglicisé qu'il ne mordait plus à la ligne
des Québécois.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Les
Indiens.
M. Lessard: M. le Président, nous autres, on n'a pas
lancé de grands projets. On n'a pas créé d'illusions au
monde mais on a dit par exemple: Lorsqu'on va lancer un petit projet, il va
être à nous autres, il va nous appartenir et on va le maintenir.
C'est dans ce sens-là qu'on veut prendre des mesures pour régler
le problème de la Côte-Nord mais pas vendre la Côte-Nord aux
étrangers pour autant mais vendre d'abord la Côte-Nord aux
Québécois.
Je pourrais vous parler de toute l'histoire des petits villages de la
Côte-Nord, de Tadoussac jusqu'à Blanc-Sablon. Même Mgr
Labrie avait fait des écrits pour dénoncer la façon dont
étaient exploitées nos ressources naturelles et
particulièrement notre forêt en 1948, 1949 et 1950. On continuait
de tout céder, mais avez-vous changé d'opinion? Allez-vous
changer de conception économique? Le ministre responsable du
développement économique essaie de voir dans quel sens vous vous
dirigez. Le député de Notre-Dame-de-Grâce disait qu'on
avait fait un erreur concernant Asbestos Corporation, qu'on ne créait
pas d'emplois. C'est pourquoi le Québec a décidé de
prendre, comme on l'a fait pour l'électricité, le contrôle
d'une ressource importante, soit le secteur de l'amiante? Parce qu'on est le
plus grand producteur au
monde et ceci va nous permettre d'être responsables des
décisions. Nationaliser les centres de décisions, M. le
Président, c'est important, ça, et ne pas se fier à des
décisions qui seront prises à New York ou à Toronto pour
notre développement économique. C'est important, ça. (12 h
15)
Le député de Nelligan, à l'Assemblée
nationale dénonçait, hier, le fait que le gouvernement du
Québec avait pris le contrôle de la Domtar. Or, la Domtar, avant
qu'on en prenne le contrôle, avait l'intention de faire quoi? De
déménager son siège social du Québec, "sacrer le
camp" du Québec. Et là, M. le Président, aussitôt
que la Domtar aurait changé son développement ou aurait
diminué son développement au Québec ou sa création
d'emplois au Québec, on se serait scandalisé, de l'autre
côté de la Chambre, on aurait dit: Le gouvernement du
Québec ne fait rien pour maintenir les emplois au Québec, le
gouvernement du Québec ne fait rien pour aider la Domtar. Là, il
aurait fallu se mettre à genoux devant la Domtar, selon leur conception
économique, et subventionner la Domtar pour qu'elle continue de
développer les ressources du Québec. Ce n'est pas ça qu'on
a fait, M. le Président. On a décidé de prendre le
contrôle des centres de décisions. On n'est plus à genoux
devant la Domtar, on la contrôle. La Domtar va continuer de
développer au Québec, mais elle est maintenant la
propriété, en grande partie, des Québécois. Cela,
c'est important; ça, c'est fondamental. C'est la différence entre
la conception du développement économique par et pour les
Québécois, qui est partagée de ce côté-ci de
la Chambre, alors que vous continuez d'avoir une conception du
développement économique par et pour les autres. C'est ça,
M. le Président, la différence.
Chaque fois que le gouvernement du Québec tente de faire un
effort pour essayer de contrôler ses centres de décisions, on
dirait que ces messieurs d'en face, les membres de l'Opposition, n'ont pas
reçu leur leçon. Le fouillis d'ITT n'a pas été une
leçon pour eux. Chaque fois qu'on veut prendre le contrôle de
centres de décisions, on réagit négativement.
Contrairement à ce qu'a dit le député de
Notre-Dame-de-Grâce, c'est vrai que ça va coûter 80 000 000
$ pour Asbestos Corporation, mais pas 80 000 000 $ actuellement, M. le
Président, on ne sort même pas d'argent, c'est d'à peu
près 16 000 000 $ dont on va avoir besoin. On nous prête les
actions de 42 $ à 16%. Actuellement, c'est un bon placement, ce n'est
pas si mal.
Mais prenez conscience de ce qu'est le Québec maintenant. Ce
n'est plus le Québec de 1951-1952. Le Québec a conscience de ses
ressources, de ses possibilités. Vous continuez encore à vendre
aux Québécois le développement économique par et
pour les autres, le développement économique par les gens de
l'Ontario, le développement économique par les États-Unis.
Ce n'est pas ça, M. le Président.
Il est certain que nous allons prendre des mesures et on en a pris, des
mesures. Comme ministre des Transports, j'ai eu l'occasion - c'est vrai et je
ne me le reproche pas, c'était le temps - de favoriser un certain nombre
de décisions sur la Côte-Nord, parce qu'on y était vingt
ans en arrière. Je m'étais battu, en tant que
député de l'Opposition, de 1970 à 1976, pour avoir
quelques investissements dans le réseau routier, tant dans mon
comté que dans le comté de Duplessis. On parlait de la route de
Gagnon, tantôt. Combien de fois on s'est battu et on a réuni des
organismes de tout le milieu. On a investi à peu près 1 500 000
$, de 1970 à 1976, et c'est allé à un patroneux du Parti
libéral.
Nous autres, ce n'est pas ça qu'on a fait; on a dit: la route de
Gagnon, on va mettre 14 000 000 $. Et allez voir, il y a du monde qui y
travaille. La Côte-Nord n'a pas besoin des députés de
l'Opposition pour la représenter. Denis Perron et moi-même, on est
capable de faire les pressions nécessaires pour corriger un certain
nombre de situations. Mais que la Côte-Nord ne pense pas, malgré
toutes les mesures qu'on va prendre... Je peux vous donner un autre exemple. On
parle de la participation du fédéral. M. Maltais, le
député de Manicouagan, a dit au gouvernement: Prenez vos
responsabilités. Il s'est promené avec quelque 100 000 000 $ dans
les poches, somme qu'on n'a jamais vue, je ne sais pas où elle est. 120
000 000 $, et on n'a pas vu encore un investissement, mais il y a des choses
concrètes qui sont à faire. Il y a des choses concrètes
sur lesquelles le député fédéral de Manicouagan
devrait prendre position à Baie-Trinité. À
Baie-Trinité, une entreprise a investi tout près de 2 000 000 $,
plus 3 000 000 $ ou 4 000 000 $ pour acheter deux bateaux pour faire la
pêche au hareng. Le ministre des Pêcheries et des Océans,
Roméo LeBlanc, avait émis - ce ne sont pas des fous, ils n'ont
pas acheté ces bateaux sans avoir le droit de pêche - des permis
de pêche pour pêcher le hareng et pour développer une
entreprise à Baie-Trinité qui créerait environ 60 emplois
directs. Quelques mois après, M. LeBlanc revient sur sa décision
et refuse l'émission des permis de pêche au hareng pendant qu'il
en donnait une quinzaine au Nouveau-Brunswick et dans toutes les provinces
maritimes, mais aucun permis de hareng pour la Côte-Nord et pour tout le
Québec. Cette compagnie a investi 5 000 000 $, 4 000 000 $ sur deux
bateaux et 1 500 000 $ sur une entreprise pour exploiter le hareng, et le
fédéral ne nous
donne pas de permis. Le député Maltais nous dit: Prenez
vos responsabilités, les députés provinciaux. Qu'il prenne
donc ses responsabilités, lui, et qu'il intervienne donc auprès
de son collègue Roméo LeBlanc pour qu'on puisse nous
émettre des permis à nous aussi, parce que nous aussi, les
Québécois, avons le droit de pêcher dans ce maudit fleuve.
Il me semble que le fédéral devrait prendre aussi ses
responsabilités.
Je termine, M. le Président. De plus, pour montrer le ridicule de
cela, le fédéral avait participé de quelque 200 000 $ pour
la construction de l'entreprise et là, il nous empêche de
pêcher, il refuse les permis. C'est le comble du ridicule. C'est certain
qu'on ne peut pas, ce matin, régler tous les problèmes que vivent
les citoyens de la Côte-Nord actuellement et que vit
particulièrement le député de Duplessis. Il est vrai que,
moi aussi, je subis certaines conséquences, mais elles ne sont pas aussi
tragiques que celles du député de Duplessis. On a quand
même des espoirs avec Reynolds à Baie-Comeau, mais on ne l'a pas
négocié à genoux, Reynolds. On ne lui a pas donné
nos ressources, on l'a négocié debout et elle est venue quand
même.
M. le Président, je dis que la Côte-Nord est très
bien représentée à l'intérieur du gouvernement.
Pour la première fois dans l'histoire de la Côte-Nord, il y a un
ministre qui siège au Conseil des ministres. Cela démontre au
moins que le Parti québécois a tenu compte de la
représentation régionale, il a tenu compte de la Côte-Nord.
Il y a le député du comté de Duplessis, M. Denis Perron,
qui est capable de défendre pas mal mieux que vous autres, et selon
notre conception, le développement économique par et pour les
Québécois, de défendre les intérêts de la
Côte-Nord. On ne cessera pas de les défendre et on n'a pas besoin
de votre appui. On vous en remercie, on s'en passera.
Le Président (M. Jolivet): Avant de permettre à
d'autres députés d'intervenir, je dois vous dire que les
règles du jeu nous indiquent que vers 12 h 40, nous cesserons toute
intervention, pour permettre dix minutes au député de
Vaudreuil-Soulanges, et dix minutes, au ministre d'État au
Développement économique pour conclure.
La parole est au député d'Outremont.
M. Fortier: M. le Président, je vais laisser la parole au
député de Mégantic-Compton, mais j'aurais quelques
remarques à faire, parce que tout à l'heure, mon collègue
de Notre-Dame-de-Grâce répliquait dans une certaine mesure, mais
le député de Saint-Maurice avait fait allusion à certaines
choses, et j'aimerais apporter certaines corrections.
Je vais laisser au député de Mégantic-
Compton le soin de continuer. Le député de Saguenay nous
demande ce que l'on ferait si on était au pouvoir. La raison pour
laquelle on a organisé ce débat, ce matin, c'est qu'on croit que
la population du Québec veut savoir ce que le gouvernement au pouvoir va
faire pour régler les problèmes. Quant à savoir ce qu'on
ferait si on était là, si j'étais parmi la population de
la Côte-Nord, je dirais que ce n'est pas pertinent au débat. Je me
demande pour quelle raison on cherche tellement à avoir nos
idées; peut-être qu'on est à court d'idées de
l'autre côté de la Chambre, mais cela me semble un peu farfelu de
nous poser cette question.
Si la population de la Côte-Nord nous écoute et si elle a
suivi la suggestion de notre représentant de Notre-Dame-de-Grâce,
à savoir de prendre une feuille de papier pour indiquer toutes les
choses qui vont être faites par le gouvernement, je m'aperçois que
la feuille de papier est encore blanche. Il nous reste, comme vous avez dit, 35
minutes. J'ose suggérer au gouvernement de dire des choses qu'il va
faire pour que la population de la Côte-Nord puisse écrire sur sa
feuille pour qu'à 13 heures elle ait quelque chose de positif et qu'elle
puisse savoir à quoi s'en tenir.
Pour ma part, j'aimerais remercier le ministre de l'Énergie et
des Ressources de nous avoir dit ce qu'il avait fait dans le dossier de ITT.
Essentiellement, ce qu'il nous a dit, c'est: J'ai fait ce que j'avais à
faire. Il a dit: La compagnie avait brisé son contrat et j'ai
négocié une entente. On va recevoir bientôt 6 000 000 $.
Parfait! Je crois que c'était le minimum qu'il devait faire. Il a
assumé sa responsabilité ministérielle. Il n'y a pas
grand-chose là.
Mais je reviens à la Romaine. Le ministre n'était pas
là au mois de février, ce n'est pas lui qui était ministre
de l'Énergie et des Ressources. J'y suis allé au mois de
février. Je peux vous dire que je n'ai rien entendu de la part
d'Hydro-Québec qui permet à la population de la Côte-Nord
de savoir pour quelle raison exactement la Romaine ne peut pas être
développée maintenant. Comme je l'ai dit, je n'ai pas
accès aux dossiers confidentiels d'Hydro-Québec, mais je me fie
à cette étude qui a été faite par l'OPDQ dans
laquelle on nous dit que la Romaine va coûter moins cher à
être développée que Laforge et Grande-Baleine. Je dis ceci:
Le programme présenté par Hydro-Québec,
présentement, prévoit que la Romaine ne sera
aménagée qu'après ces rivières. Je pose cette
question: Le ministre est-il satisfait de quelques conversations tout à
fait anodines avec la direction d'Hydro-Québec? Pourquoi ne demande-t-il
pas à Hydro-Québec de nous donner et de donner à la
population de la Côte-Nord une réponse étoffée qui
permettrait à l'Opposition de connaître les vraies raisons
d'Hydro-Québec?
J'ai tout à fait confiance à Hydro-Québec mais, si
le gouvernement devait assumer ses responsabilités - et on le ferait si
on était à sa place - il exigerait d'avoir des réponses
écrites pour que la population de la Côte-Nord sache à quoi
s'en tenir.
Si le ministre veut faire avancer le débat sur la question de la
Romaine, j'oserais lui demander qu'il fasse une demande expresse à
Hydro-Québec de justifier ses décisions pour qu'on puisse les
analyser en toute connaissance de cause.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Duhaime: M. le Président, je voudrais rassurer le
député d'Outremont pour lui dire que ce ne sont pas que de vagues
conversations qui ont lieu avec Hydro-Québec. D'ailleurs, mon
collègue, le ministre d'État au Développement
économique, est bien au fait de ce dossier.
Dans l'hypothèse où les plans, les études sur les
données, qui sont encore aujourd'hui très préliminaires
dans le cas, de la Romaine, nous amèneraient à la conclusion
d'aller de l'avant et de procéder à l'aménagement de la
Romaine tout de suite, je pense que c'est mon devoir de dire, M. le
Président, plutôt que de laisser des illusions se répandre
et être entretenues par le Parti libéral, que ce ne serait de
toute manière pas avant le milieu des années
quatre-vingt-dix.
M. Fortier: Ce que je demande, M. le Président, c'est
qu'on rende l'étude publique.
M. Duhaime: Le député d'Outremont, puisqu'il a eu
l'occasion de participer à la commission parlementaire de février
1981, est très bien au fait de l'évolution des coûts
marginaux de production sur chacune des rivières incluses dans le plan
décennal d'Hydro-Québec, de même que du prix quant à
la rivière la Romaine.
Je voudrais peut-être apporter une précision. Au fur et
à mesure que progressent les travaux à la Baie-James,
Hydro-Québec fait une mise à jour continuelle de ses coûts
de production sur chacune des rivières aménageables. Il est bien
évident que, par exemple - je vais le donner pour l'information du
député d'Outremont, mais pour ceux qui nous écoutent aussi
- la puissance qui pourrait être installée est à peu
près de 1400 mégawatts et elle est tout juste derrière LG
1, Brisay et Laforge I; vient ensuite la Romaine et Laforge II. Mais ces
données sont basées sur des études très
préliminaires. Il n'y a aucun secret là-dedans. Je pourrais
même transmettre au député d'Outremont, pour son
information, copie d'une lettre du PDG d'Hydro-Québec, datée du
24 septembre, qui va à peu près dans le même sens. (12 h
30)
Nous allons, bien sûr, poursuivre la mise à jour de ces
données. Mais ce que je disais tantôt, qui a peut-être
échappé au député d'Outremont, c'est ceci: Si nous
avions un projet industriel majeur, nous pourrions très bien, avec
Hydro-Québec, étudier la possibilité réelle
d'accélérer ce projet-là, mais il faut aussi tenir compte
des coûts. Très souvent, les libéraux d'en face reprochent
à notre gouvernement de ne pas avoir beaucoup de rationalité
économique. Je pense que c'est le rôle de l'Opposition de
s'opposer, c'est, par définition, dans le dictionnaire, mais nous, de ce
côté-ci, tout en étant conscients de l'effet
d'entraînement et de l'impact économique réel qu'aurait sur
la Côte-Nord un pareil projet, je dis au député d'Outremont
- et je pense que c'est agir avec responsabilité - que je ne lancerai
pas le projet de la Romaine de la même façon que le projet de la
Baie-James a été lancé il y a quelques années le
jour de la Saint-Robert. Nous le ferons lorsque nous aurons en main toutes les
études techniques, et que nous aurons la certitude que l'énergie
qui sera dégagée de cet aménagement aura une base
économique solide, et pas avant.
Le Président (M. Jolivet): M. le député.
M. Fortier: Que le président d'Hydro-Québec envoie
une lettre au ministre et que le ministre me donne cette lettre-là, cela
ne m'éclaire pas davantage. Compte tenu de l'importance que ce dossier a
pour la Côte-Nord et étant moi-même familier avec certaines
de ces données-là, je dis simplement: Si moi-même, en tant
qu'ingénieur, je ne peux comprendre les conclusions auxquelles est
arrivé le président d'Hydro-Québec, je crois que les gens
de la Côte-Nord ont beaucoup de difficulté à accepter cette
conclusion. Sans intervenir par voie directionnelle à
Hydro-Québec, il me semble que le ministre pourrait demander à
Hydro-Québec de produire - je comprends bien que les études sont
préliminaires, mais c'est sur la foi de ces études
préliminaires qu'Hydro-Québec base sa décision - il me
semble que ce serait tout à fait normal que le ministre demande à
Hydro-Québec de produire un rapport - peut-être qu'il a
déjà reçu ce rapport - qui nous donnerait les
hypothèses de calculs, les raisons qui ont fait que ces
coûts-là arrivaient à tels et tels chiffres qui ont
motivé leur décision. A ce moment-là, on pourra en
discuter. Les gens de la Côte-Nord seraient plus informés et nous,
on pourrait en discuter d'une façon plus intelligente. C'est la demande
que j'ai faite parce que, à venir jusqu'à maintenant, je n'ai
rien entendu, j'ai entendu bien des conclusions mais je n'ai vu aucun rapport,
aucune étude qui nous permette de conclure
comme le ministre présentement.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: Ecoutez, M. le Président, chacun son boulot.
Le député d'Outremont est un député dans
l'Opposition et je ne pense pas qu'Hydro-Québec va se fonder sur
l'expertise de l'Opposition, si ingénieur soit-on, et la vôtre en
particulier, dans le secteur nucléaire, me ferait me poser de
sérieuses questions et des réserves sur la qualité de
l'expertise. J'aimerais...
M. Fortier: M. le Président, le ministre fait
dévier le débat...
M. Duhaime: ... peut-être mieux me fier à
l'expertise de mon collègue.
M. Fortier: Je pose la question au nom des gens de la
Côte-Nord. Je crois qu'au lieu de s'attaquer à moi, le ministre
devrait donner des réponses qui devraient satisfaire les gens de la
Côte-Nord.
M. Duhaime: Pas à vous. Je ne suis pas un
ingénieur. Vous, vous invoquez votre métier. Je respecte cela,
mais je vous dit que je ne peux pas aller plus loin dans l'information que je
vous donne ce matin pour une raison très simple. Dans les projets
Romaine, Brisay Laforge 1, Laforge 2, La Grande 1, quand Hydro-Québec
fait ses comparaisons pour voir la marginalité des coûts, les
études sur lesquelles repose la comparaison n'ont pas le même
degré d'avancement. Je pense que c'est clair.
M. le Président, en tout état de cause, cela ne sert
à rien de lancer des illusions sur ce que vous faites durant vos
tournées sur la Côte-Nord autant qu'ailleurs dans d'autres
régions, quand ce ne sont pas des tournées, simplement, de
calomnie. Je dis ceci: II n'y aura rien, de toute manière, avant le
milieu de la décennie 1990, dans la meilleure des hypothèses,
à moins qu'un projet industriel majeur puisse justifier un
dépassement de coût.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Vimont.
M. Jean-Guy Rodrigue
M. Rodrigue: A ajouter à ce que vient de nous mentionner
le ministre de l'Énergie, la rivière Romaine sera la
première des rivières de la Côte-Nord à être
aménagée parce que c'est celle qui présente les
coûts marginaux les plus bas, comme l'a souligné le ministre.
Cependant, il faut constater que selon les rapports
d'Hydro-Québec, les bassins de la Nottaway-Broadback-Rupert, la
terminaison des travaux sur la rivière La Grande de même que
l'aménagement de la rivière Grande-Baleine qui se situe environ
100 milles au nord de la rivière La Grande, présentent des
coûts unitaires un peu inférieurs à ceux de la Romaine.
C'est donc dans la logique des choses qu'on les aménage avant.
Le ministre a souligné que la mise en service de la Romaine est
prévue pour le milieu de la décennie quatre-vingt-dix, ce qui
signifie, compte tenu que ces travaux peuvent durer environ de 10 à 12
années, que selon les prévisions d'Hydro-Québec, les
travaux devraient commencer sur la rivière Romaine autour de 1985. Cela
est relié à l'évolution des courbes de la demande. Selon
des scénarios qu'Hydro-Québec a faits il y a environ un an, le
début des travaux sur la Romaine était prévu pour
1984.
Le Président (M. Jolivet): M. le député, une
question de règlement.
M. Bélanger: M. le Président, je crois qu'au
début de notre réunion, on a convenu qu'il y aurait alternance
entre le Parti québécois et...
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse...
M. Bélanger: ... actuellement, je m'aperçois
qu'à deux reprises, du côté ministériel, on prend la
parole.
Le Président (M. Jolivet): Je vais vous donner la
réponse. Puisque M. le député d'Outremont a posé
des questions au ministre, c'est dans ce sens-là que j'ai
interprété l'intervention du député d'Outremont
comme question et réponse. Donc, la parole est au député
de Vimont.
M. Rodrigue: Alors, les travaux, selon un scénario
d'Hydro-Québec, devaient commencer en 1984.
M. Scowen: M. le Président, je veux simplement vous
demander, tenant compte du fait que vous avez, dans ce sens, donné le
droit de parole à deux députés de suite du
côté ministériel, si vous pouvez accorder, avec le
consentement de la Chambre, le droit au député de
Mégantic-Compton de faire une brève intervention à la
suite de celle qui est en train de se dérouler maintenant.
M. Landry: Je pense qu'on avait convenu, au début, que
l'Opposition se verrait même la tâche facilitée, cela a
été lamentable pour vous, même en dépit de notre
générosité, mais on est prêt à aller encore
plus loin si vous voulez vous enferrer davantage, faites-le parler le
député de
Mégantic-Compton.
Le Président (M. Jolivet): S'il y a consentement, nous
pouvons donc dépasser le temps. Je répète que, d'une
façon ou d'une autre, il y a 10 minutes à protéger pour le
député de Vaudreuil-Soulanges et 10 minutes pour le ministre
d'Etat au Développement économique. La parole est au
député de Vimont maintenant.
M. Rodrigue: Alors, je rappelle, M. le Président, que
selon le scénario d'Hydro-Québec il y a environ un an, et selon
les courbes de demandes que nous connaissions à ce moment-là, le
début des travaux était prévu pour l'année 1984, de
sorte qu'on puisse faire la mise en service au milieu de la décennie
quatre-vingt-dix, comme l'a mentionné le ministre.
Cependant, ce qu'on sait maintenant, c'est que la courbe de demandes a
fléchi sérieusement depuis environ six mois et il est possible
que cela entraîne un retard d'environ une année dans la mise en
service. De toute façon, on peut compter que la mise en chantier de la
rivière Romaine devrait se situer au milieu de la décennie
quatre-vingt, c'est-à-dire autour des années quatre-vingt-quatre
ou quatre-vingt-cinq.
Maintenant, il faut dire ceci: Le député Perron tout
à l'heure a mentionné un certain nombre de mesures
concrètes et à court terme que le gouvernement du Québec a
prises pour faire face à la situation difficile qu'on vit sur la
Côte-Nord. Mais il faut mentionner aussi qu'il y a des solutions à
plus long terme, dont les aménagements hydroélectriques, qui
représentent quand même une lueur d'espoir assez importante.
Hydro-Québec, depuis une dizaine d'années a investi un peu plus
de 15 000 000 $ dans des études des rivières de la
Côte-Nord. Et une bonne partie de ces sommes est allée en salaires
versés à des gens de la Côte qui ont travaillé aux
études préliminaires, entre autres, celles de la rivière
Romaine.
Au moment où l'on se parlé - je le souligne à la
demande du député Perron parce que tout à l'heure, cela
lui a échappé Hydro-Québec entreprend des études
d'avant-projet sur le lac Robertson, projet dont les coûts sont
estimés à environ 85 000 000 $ et le coût des études
préliminaires devrait se chiffrer par 10 000 000 $ ou 12 000 000 $.
Je voudrais quand même, cependant, faire une parenthèse
ici, pour corriger une erreur que le député d'Outremont commet
fréquemment. C'est celle de relier nécessairement
l'aménagement des rivières de la Côte-Nord à une
entente avec les gens de Terre-Neuve, concernant la frontière du
Labrador. Il me semble, M. le Président, qu'il est temps qu'on sache et
qu'on le dise, le Québec n'a pas besoin du Labrador pour aménager
les rivières de la Côte-Nord. Dans le cas de la rivière
Romaine en particulier, d'abord, il y a seulement 16% du bassin de la
rivière à la tête qui est au Labrador. Deux solutions sont
à examiner, soit une solution où on submergerait
légèrement les territoires situés au Labrador et une
solution où on ne toucherait pas au Labrador. La différence dans
les deux cas n'est que de 80 mégawatts. Selon les dernières
données que j'ai, la solution sans toucher au Labrador représente
des coûts unitaires légèrement inférieurs à
ceux qu'on aurait si on affectait le Labrador. Donc, dans le cas de la
rivière Romaine - c'est le cas de l'ensemble des rivières - on
n'a pas besoin du Labrador pour aménager les rivières de la
Côte-Nord. Il me semble que, là, on devrait cesser de toujours
relier cela au problème de la frontière.
Hydro-Québec a investi environ 15 000 000 $. On peut s'attendre
que, dans les prochaines années, compte tenu du fait qu'un certain
nombre de ces rivières comme la Sainte-Marguerite, celle du Petit
Mécatina, la Magpie en particulier et, à plus long terme, la
rivière Natashquan, présentent un intérêt certain
pour des fins d'aménagement hydroélectriques, plusieurs centaines
de millions de dollars soient dépensés en études
d'avant-projet au cours de la décennie quatre-vingt. Ainsi, les travaux
d'aménagement des autres rivières, si j'exclus la rivière
Romaine, mais je parle des autres maintenant, dans le cadre du programme
d'Hydro-Québec qui a été présenté en
commission parlementaire l'automne dernier, pourraient commencer au
début de la décennie quatre-vingt-dix.
J'étais responsable des études d'aménagement
d'Hydro-Québec sur la Côte-Nord avant le 13 avril. J'ai donc eu
une connaissance assez précise de l'ensemble des dossiers de ces
rivières. Si je ne parle que de la rivière du Petit
Mécatina, nous avons estimé à 110 000 000 $ le coût
des études d'avant-projet qui devraient nécessairement se faire
d'ici 1990 pour que la mise en service des turbines sur cette rivière
puisse se faire vers l'an 2000, ce qui correspond à la programmation
d'Hydro-Québec.
Les solutions à court terme, Denis Perron, le
député de Duplessis, les a soulignées, mais il faut que
les gens de la Côte-Nord sachent également qu'à moyen terme
Hydro-Québec a des travaux extrêmement importants à
entreprendre dans cette région, ce qui va procurer de l'emploi aux gens
de la région. Je pense que le député, M. Perron, est bien
informé du dossier et je suis sûr que les gens de la
Côte-Nord sauront prendre les moyens pour que les retombées
économiques de ces études et de ces travaux soient
extrêmement fortes dans la région comme elles le sont actuellement
dans le Nord-Ouest québécois à cause des travaux de la
Baie-James.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Fabien Bélanger
M. Bélanger: Merci, M. le Président. En entendant
les trois ministres nous faire part qu'au Québec tout allait bien, que
des millions de dollars avaient été investis ici, des milliards
de dollars là, qu'on avait l'intention d'en investir ailleurs, j'ai eu
l'intention, à un certain moment, d'exercer mon droit de parole pour
offrir au côté ministériel des excuses en mon nom personnel
et au nom du Parti libéral du Québec pour vous avoir
dérangés ce matin.
M. Landry: On est prêts tous les vendredis.
M. Bélanger: Mais je me suis rappelé une chose.
C'est que moi aussi, je visite le Québec et moi aussi, je fais partie de
la mission économique du Parti libéral. Dans chaque région
que j'ai visitée, ce ne sont pas les mêmes paroles qu'on
entendait, y compris la Mauricie, M. le ministre. Oui, j'étais à
Shawinigan, où une étude a été faite. Je vais vous
donner un cas précis, M. le ministre. À Shawinigan, une
étude a été faite par les Rôtisseries Saint-Hubert,
qui ont décidé tout simplement d'abandonner le projet parce que
la Mauricie se meurt.
M. Duhaime: Vous savez pourquoi?
M. Bélanger: Oui, je sais pourquoi, M. le ministre,
j'étais là.
M. Duhaime: C'est parce que votre candidat libéral
était intéressé à la Rôtisserie
Saint-Hubert.
M. Bélanger: M. le Président, M. le
Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre. (12 h 45)
M. Bélanger: Je me suis rappelé également
qu'il y avait 320 000 chômeurs au Québec qui, eux aussi, comme
moi, croient que c'est un état d'urgence, l'économie au
Québec. Seul le gouvernement semblerait ne pas en être conscient.
Les membres du gouvernement ne sembleraient pas conscients qu'on est dans un
état d'urgence et qu'il faut faire quelque chose. Je suis
déçu aussi de la tournure du débat. On était ici
pour discuter en particulier, tout au moins, des problèmes de la
Côte-Nord, mais, par contre, on a eu droit à toutes ces vieilles
salades à l'effet que ça dépend du fédéral,
que ça dépend du gouvernement précédent. Cela fait
quinze ans, selon eux, que les mauvaises décisions ont été
prises. Mais vous êtes là, messieurs, c'est à vous de
prendre les décisions et prenez-les. Parce que nous, lorsqu'on va en
province, lorsqu'on va rencontrer ces gens-là à la base, ils nous
disent ce qui ne va pas et ils nous disent ce qu'il faut faire.
M. Landry: Ils l'ont dit aux élections aussi.
M. Bélanger: J'espère, M. le Président,
qu'on va arrêter de se péter les bretelles parce qu'ils ont
été réélus le 13 avril. Les Québécois
ont acheté votre emballage et non votre contenu.
M. Duhaime: Dans votre cas, en tout cas.
M. Bélanger: M. le Président, avant de terminer, je
voudrais dire que le Québec existait avant la venue au pouvoir du Parti
québécois. Non seulement il existait, mais il se portait beaucoup
mieux. Merci.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le
député de Vaudreuil-Soulanges, en conclusion.
Conclusions M. Daniel Johnson
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je vous remercie, M. le
Président.
Cette première expérience de question avec débat
doit, pour porter ses fruits, autant pour le gouvernement que pour
l'Opposition, faire l'objet d'une étude approfondie, sans doute, par le
gouvernement, de la création d'autres comités, colloques et
séminaires et devrait certainement porter l'Opposition à ne pas
rédiger une question qui était bien simple et qui évoquait
la Côte-Nord de façon spécifique, de façon à
laisser une chance au gouvernement de se livrer à des
interprétations abusives qui ont permis - les gens de la Côte-Nord
l'auront constaté - à certains porte-parole du gouvernement de
parler de toute autre chose.
On a eu droit évidemment à des discours variés sur
ce qui se passait dans d'autres régions. On a eu droit à une
récapitulation du vote au Québec, en particulier sur la
Côte-Nord, depuis 1970. On a eu droit à des allusions
généalogiques de part et d'autre de la Chambre. On a eu droit, de
la part du député de Saguenay, à des discours qu'on entend
souvent sur les conceptions de développement économique qui
diviseraient apparemment les Québécois. On a eu droit,
finalement, dans le cas de développement économique - et on ne
peut pas laisser passer ça - de la part du député du
Saguenay, à un réquisitoire ou une argutie en faveur de la
détention d'actions de
sociétés qui opèrent ici, comme seul gage de
l'accession à des centres de décisions des francophones
québécois. Alors que la philosophie que nous partageons de ce
côté-ci de la Chambre a pour but de permettre, par la
législation de la langue de travail qui a été entreprise
sous un gouvernement libéral, l'accès aux centres de
décisions par les Québécois francophones qui sont
maintenant à coups de milliards formés pour le faire. Nous avons
effectué le rattrapage qui s'avérait absolument essentiel, mais
pour que nous ayons accès à des postes de décision dans
l'activité économique du Québec il faut qu'il y ait des
investissements nouveaux; il faut que le climat de croissance et d'expansion de
l'activité économique existe. Malheureusement, on a dû
constater - le député de Notre-Dame-de-Grâce l'a
évoqué -que depuis cinq ans, c'est justement la situation inverse
qui prévaut. On pourra acheter tant qu'on veut les actions de qui on
voudra si on ne permet pas l'expansion des entreprises, si on ne permet pas que
les gens de l'extérieur du Québec, ou s'ils viennent participer
à nos richesses, comme nous, les Québécois, participons
dans d'autres occasions aux richesses des autres régions, si on ne
permet pas à ces conditions de se réaliser, il est bien inutile
de former des gestionnaires québécois francophones qui
deviendront alors de gros poissons mais dans de plus petits étangs.
Quant aux problèmes particuliers de la Côte-Nord, ce matin,
à deux reprises, depuis 25 minutes, nous avons suggéré aux
téléspectateurs de se munir de crayon et papier à une fin
extrêmement simple, c'est de voir si ce que le gouvernement compte
annoncer, ou a annoncé, ou a évoqué, totalisant finalement
les 115 000 000 $ sur la période de 36 mois que nous allons traverser,
se réalisera. Ce sont les chiffres que le député de
Duplessis, lui-même, a évoqués dans sa région; 115
000 000 $ en trois ans. On attend encore de voir si ces projets, ces programmes
totalisent cette somme.
Je me permets simplement de relever certains aspects qui n'ont pas
été mentionnés ou qui, s'ils l'ont été par
les ministériels, l'ont été avec une désinvolture
qui doit surprendre les gens de la Côte-Nord. Le ministre de
l'Énergie et des Ressources a parlé du rapport Boucher qui ne
passerait pas à l'histoire, qui n'est qu'un catalogue relativement
insignifiant, selon lui. Son collègue, le député de
Duplessis, a donné son appui entier, comme en font foi les journaux de
la région, aux conclusions du rapport Boucher, et a demandé que
le gouvernement prenne des dispositions pour qu'au moins certaines
recommandations soient mises en marche. On ne demande pas à un
gouvernement, lorsqu'il s'agit d'un rapport plus ou moins volumineux, de tout
faire en même temps mais, au moins, qu'on manifeste la volonté de
donner suite à ce rapport, afin d'étudier la diversité des
ressources de la Côte-Nord. Il y a le dossier des tourbières, dont
on nous a parlé, plus particulièrement de la région de
Port-Cartier. Dossier d'ailleurs qui se retrouve dans d'autres régions
que nous avons visitées à l'égard duquel le silence du
gouvernement inquiète ou déçoit à tout le moins les
gens de la Côte-Nord. Il y a le dossier des pêches commerciales, on
a laissé flotter le fait, dans les journaux de la région encore
une fois, d'avoir doublé apparemment le budget du ministère
responsable de ce secteur économique. Elles produiraient des
retombées extraordinaires dans la région même.
Évidemment, il y a des aménagements à faire, on doit
allouer les ressources selon les besoins des régions, mais au premier
chef il me semblerait que la Côte-Nord a un droit prioritaire, à
tout le moins, à ces budgets additionnels que nous cherchons encore.
Il y a le secteur du tourisme dont on a nous a parlé à peu
près à toutes les occasions possibles et imaginables,
étant donné surtout que la création d'emplois dans le
domaine du tourisme est relativement peu dispendieuse lorsque le gouvernement
donne de l'aide à certaines infrastructures ou à la formation des
gens qui sont dans l'industrie touristique ou d'accueil, en
général, aux voyageurs. On pourrait évoquer la politique
d'achat des gouvernements du Canada et du Québec, d'Hydro-Québec
et de leurs sociétés composantes, l'achat chez nous dans la
région de la Côte-Nord, alors qu'on voit à titre d'exemple
- malheureusement, le ministre du Loisir est disparu, appelé à
d'autres occupations évidemment - que l'île d'Anticosti, qui fait
partie, si je ne m'abuse, de la région administrative dont font partie
également Sept-Îles et la région, s'approvisionne
malgré tout en Gaspésie.
Je ne veux rien enlever à la Gaspésie, mais si on veut
faire du développement économique de façon
organisée, afin que les régions, entre elles, se supportent, il y
aurait peut-être lieu d'avoir les améliorations
considérables qu'on nous a fait remarquer lorsque nous sommes
allés sur la Côte-Nord.
En résumé, je crois qu'avec toute la bonne foi qui nous
animait, afin d'aider le député de Duplessis à
sensibiliser le gouvernement aux problèmes que faisaient valoir les gens
de la Côte-Nord, nous avons, en cette journée du vendredi,
réussi au moins à mettre sur la place publique, pour tous les
Québécois, qu'il y a des régions où ça ne va
pas nécessairement très bien, merci.
On a vu la rapidité et la multiplication de prises de
décision du gouvernement. Suite à notre visite sur la
Côte-Nord, on peut également constater que certaines
réalisations pourraient s'ensuivre. Nous, de l'Opposition, nous nous en
félicitons. Nous
espérons en même temps que le député de
Duplessis nous en reconnaîtra au moins le mérite, même si
nous perdons les élections dans ces régions depuis quelques
années, ça ne nous empêche pas de nous préoccuper
des problèmes des Québécois, où qu'ils se trouvent,
ça ne nous empêche pas de faire déborder un peu nos
intérêts à l'extérieur de nos comtés, tous
autant que nous sommes. Ce n'est pas l'apanage unique des ministres qui
administrent le budget de la province, pour toute la province de se
préoccuper de tous les Québécois. Quant à nous,
nous entendons exercer, par notre action soutenue, continue dans les
régions - vous vous ennuierez de nous, certains vendredis, messieurs,
nous serons effectivement dans les régions et non en Chambre - nous
entendons, de façon soutenue, aller voir ce que les
Québécois attendent de leur gouvernement, voir avec eux quels
sont les facteurs de la déception et du découragement, dans
certains cas, qui les saisit devant l'inaction du gouvernement, rechercher avec
eux quelles sont les avenues de solution, et, chaque fois que cela
s'avérera utile, remettre le dossier devant la place publique afin que
le gouvernement, de plus en plus, nous l'espérons, prenne ses
responsabilités et réponde aux aspirations de tous les
Québécois.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.
M. Bernard Landry
M. Landry: M. le Président, nous ne pouvons que nous
réjouir de voir certains députés de l'Opposition quitter
leur château fort de l'ouest de Montréal pour aller voir un peu
dans le Québec ce qui se passe. Par ailleurs, nous ne pouvons
qu'être attristés de voir qu'en voyageant tellement, ils
apprennent si peu de choses, y compris les réalités les plus
élémentaires des régions au nom desquelles ils
prétendent s'exprimer.
Il y a des dizaines d'exemples dans ce qui a été dit
depuis trois heures. Je voudrais relever les plus récents. Le
député de Vaudreuil-Soulanges parle des tourbières. Il dit
qu'on ne s'est pas occupé des tourbières. Il y a probablement des
gens qui nous écoutent à Sept-Îles et sur la
Côte-Nord ce matin, qui eux, savent très bien, parce qu'ils
connaissent leur région, que dans le cadre de l'Opération
solidarité économique, en particulier, une entreprise - je vous
en nomme une pour montrer que ce que vous avez dit est faux - Tourbière
Sept-Îles Inc., aux abords de la rivière Moisie, par
l'Opération solidarité économique et l'entreprise locale a
créé, M. le député, combien d'emplois? À peu
près une quarantaine. Cela ne vous fait rien. Vous êtes les
représentants de "big business", vous êtes les
représentants de vos commettants les plus assidus. Qu'un brave
entrepreneur de la côte crée 40 emplois avec une subvention OSE,
c'est contraire à l'approche du Parti libéral.
Parlons-en encore de l'Opération solidarité
économique, que vous avez discréditée depuis qu'elle
existe, parce qu'elle vous fait mal et qu'elle vous montre ce que vous auriez
dû faire quand vous étiez au pouvoir: Région de
Sept-Îles et Port-Cartier, d'avril 1981 à septembre 1981, 340
emplois créés. Vous avez demandé aux gens de prendre des
crayons, j'espère qu'ils ont suivi, pour une fois, le conseil d'une
Opposition aussi déboussolée et qu'ils le prennent le crayon.
Vous avez dit: Où est le premier million de l'action du
gouvernement? Seulement dans OSE, entre avril 1981 et septembre 1981, il y a eu
1 164 000 $. En 1980-1981, c'est complet maintenant, seulement pour
l'Opération solidarité économique, il y a eu 3 379 000 $,
avec une participation locale - je complimente les intérêts locaux
qui ont collaboré à cette opération - de 4 000 000 $.
Cela ne me surprend pas que le député de
Vaudreuil-Soulanges n'ait pas vu ce qui se fait sur la Côte-Nord dans
l'Opération solidarité économique, parce qu'il ne l'a pas
vu dans son propre comté. Il nous a dit, le 27 mai 1981, ici même,
que les emplois de l'Opération solidarité économique
étaient des emplois temporaires. Je ne l'ai jamais corrigé
là-dessus, c'est un néophyte vivement converti aux habitudes
libérales, c'est-à-dire de dire le contraire de la
vérité. Dans son propre comté de Vaudreuil-Soulanges
-j'espère que les gens de Vaudreuil-Soulanges s'intéressent
à la Côte-Nord et nous écoutent aussi ce matin - il y a eu
249 emplois permanents de créés. J'ai ici la liste des
entreprises.
Quand le député de Vaudreuil-Soulanges suggère aux
gens de se prendre des crayons, il devrait peut-être s'en prendre dans
les tournées qu'il fait à travers le Québec et en prendre
pour son propre comté.
Ce qui résume le mieux le débat, ce matin, c'est une chose
évidente à la plupart des Québécois et des
Québécoises depuis très longtemps. Le Parti libéral
a une conception fluviale de l'économie du Québec, une conception
de laisser-faire, de laisser-aller. Aux époques où le Parti
libéral du Québec était nationaliste, où il a rompu
avec cette tradition, il était diamétralement opposé
à l'attitude que les libéraux d'aujourd'hui illustrent.
Il y avait René Lévesque au moment de la nationalisation
de l'électricité, en particulier. Il y avait Jean Lesage
également. C'était "maîtres chez nous" qu'ils
prêchaient.
M. Fortier: ... sa jeunesse à Lévesque.
(13 heures)
M. Landry: Vous n'aurez aucune chance, et vous le savez
très bien, de retrouver quelque crédibilité que ce soit au
Québec, tant que vous ne vous axerez pas sur cette philosophie de
"Québec d'abord", que vous n'avez pas été capable de
soutenir pendant un mois seulement. À l'issue d'un de vos conseils
nationaux, vous avez dit: Québec d'abord. Vous l'avez
répété une demi-douzaine de fois et vous êtes
revenus aux bonnes vieilles habitudes libérales de soumission et de
passivité.
Nous n'avons pas des solutions pour tout de ce côté de la
Chambre, mais les solutions que nous avons sont des solutions
québécoises.
Vous avez parlé de l'écart de chômage. Tout le monde
sait au Québec -probablement que vous le savez aussi - que
l'écart du taux de chômage entre le Québec et l'Ontario,
depuis qu'on possède des statistiques, a toujours été
à peu près du simple au double. Tout le monde sait
également, les publications étrangères comme les
publications locales, que le Québec au cours des cinq dernières
années a connu un essor économique sans précédent.
Sur la croissance économique globale, nette d'inflation, ce qui est un
des meilleurs indicateurs économiques, le Québec a fait 14%
pendant que l'Ontario a fait 7%, une situation qui n'était jamais
arrivée dans l'histoire.
Évidemment, cela fait mal à l'Opposition, cela fait
tellement mal que l'Opposition a été lavée dans à
peu près toutes les régions à l'est de la rue
Saint-Laurent aux dernières élections. Cela devrait vous faire
réfléchir.
Puisque vous êtes dans l'Opposition pour des raisons, en grande
partie, d'illustration et d'information de la population, car vous n'avez pas
le pouvoir et que vous ne pouvez pas agir, je vous suggérerais de tenter
d'informer la population sur les véritables facteurs qui sont en train
de casser littéralement les reins au plus bel essor économique
que le Québec ait connu dans son histoire. Ces facteurs-là, vous
le savez autant que nous, relèvent de décisions prises par la
Banque du Canada, par le gouvernement du Canada. Tout le monde sait que les
taux d'intérêt actuellement pratiqués massacrent
littéralement le réseau de petites et de moyennes entreprises du
Québec.
Je sais que vous, vous êtes des gens de "big business"; nous, on a
été les gens de la PME. On a fait du Québec avec les
moyens dont nous disposions, le paradis de la petite et de la moyenne
entreprise. Actuellement, avec des taux d'intérêt qui sont dans
les plus élevés du monde occidental et qui sont trois points plus
élevés en particulier que les taux d'intérêt
pratiqués aux États-Unis d'Amérique, la Banque du Canada
et ses politiques monétaires obsessionnelles sont en train
littéralement de massacrer la fine fleur de l'entrepreneurship
québécois qui se retrouve sur la Côte-Nord comme il se
retrouve dans la Beauce, en Abitibi, au Saguenay-Lac-Saint-Jean et dans la
région des Bois-Francs. Allez consulter, je vous le suggère
vivement, les chefs de PME et demandez-leur si c'est la politique du Parti
québécois qui fait qu'ils ont des difficultés à
faire leur fin de mois actuellement ou si c'est la politique
fédérale des taux d'intérêt
élevés.
On apprenait récemment, ce qui m'a semblé être une
blague cynique, qu'on s'apprêtait à décerner l'Ordre du
Canada à M. Bouey, gouverneur de la Banque du Canada. Je n'ai rien
contre cet homme, évidemment, sauf que par stricte décence et par
respect pour les chômeurs du Québec, pour les hommes et les femmes
qui cherchent du travail, on aurait peut-être dû attendre quelques
années avant de lui remettre sa médaille rouge et blanc. Essayez
donc d'illustrer la situation telle qu'elle est. Vous savez que le
Québec est prisonnier d'un système, sur le plan économique
en particulier; sur quinze interventions fédérales
analysées au cours des dernières années, douze
étaient diamétralement opposées aux intérêts
du Québec. Le gouvernement du Canada axe sa politique économique
sur les nécessités de l'Ontario, assumant que cela devrait
être bon pour les autres. Lorsqu'ils préconisent le remède
ontarien, en général c'est pour nous un remède de cheval
et ils nous mettent dans une situation plus pénible que celle que nous
avions connue avant.
Je suis heureux de voir que l'Opposition voyage. Je lui propose
même de retourner sur la Côte-Nord...
Une voix: Et en Mauricie.
M. Landry: Et en Mauricie, comme le dit mon collègue.
Comme cela, les députés de l'Opposition pourront se confronter
avec les véritables réalités. Ils pourront voir ce que le
gouvernement a déjà fait avec les moyens dont il dispose. J'ai
donné les chiffres pour la seule Opération solidarité
économique. Vous devriez aussi apprendre qu'au cours des cinq
dernières années, pour la Basse-Côte-Nord - vous ne savez
probablement pas où c'est situé - notre gouvernement a
dépensé plus qu'aucun gouvernement du Québec n'avait
dépensé en un quart de siècle précédemment,
grâce au courage, en particulier, de notre collègue Denis Perron
et aux travaux qui ont été faits dans le cadre du rapport Payne.
Il y a des gens qui ont vu de l'asphalte pour la première fois de leur
vie dans leur région, sur la Basse-Côte-Nord. L'asphalte, ils
voyaient cela quand ils venaient à Québec ou à
Montréal ou à la télévision.
L'été dernier, j'avais décidé
d'arrêter et de rester auprès de ma famille durant une quinzaine
de jours. Mais la description que m'a faite de la Basse-Côte-Nord le
député de Duplessis m'a déterminé à aller y
passer une semaine. Sur les quinze jours de vacances que je m'étais
réservés, j'en ai mis une à visiter les 26 villages de la
Basse-Côte-Nord. Vous ne savez même pas que Kégashka existe,
et je ne sais pas si vous avez la moindre notion de ce que peut être
Lourdes-de-Blanc-Sablon. Allez donc voir! Allez donc voir ce que ces
gens-là pensent du gouvernement du Parti québécois.
Même les anglophones, M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, dans ce coin-là, votent pour le Parti
québécois parce que c'est le seul gouvernement qui
s'intéresse à ces malheureuses populations depuis que le
gouvernement du Québec existe.
Le Président (M. Jolivet): Merci.
M. Landry: Je vous remercie, M. le Président, et je
remercie l'Opposition et je lui signale que tous les vendredis de
l'année, si elle le veut, nous passerons en revue toutes les
régions du Québec l'une après l'autre. Arrangez-vous pour
formuler vos questions un peu mieux, la prochaine fois. Vous nous avez
reproché d'élargir le débat alors que, par écrit,
vous nous avez donné avis d'une question sur l'ensemble du
développement régional de la Basse-Côte-Nord. Formulez vos
questions convenablement et nous vous donnerons toutes les réponses que
vous méritez. Je souhaite vous retrouver dans ce genre de débat,
et mes collègues aussi, le plus souvent possible.
Le Président (M. Jolivet): Merci à tous les
intervenants de ce débat. J'ajourne sine die les travaux de cette
commission.
(Fin de la séance à 13 h 07)