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Version finale

30th Legislature, 3rd Session
(March 18, 1975 au December 19, 1975)

Tuesday, June 3, 1975 - Vol. 16 N° 120

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère de la Justice


Journal des débats

 

Commission permanente de la justice

Etude des crédits du ministère de la Justice

Séance du mardi 3 juin 1975

(Onze heures une minute)

M. Lafrance (président de la commission permanente de la justice): A l'ordre, messieurs! Nous étudions les crédits du ministère de la Justice pour l'année 1975/76. Nous en étions au programme 4: Protection de la société, des citoyens et de leurs biens.

L'honorable député de Chicoutimi.

Protection de la société (suite)

M. Bédard (Chicoutimi): Je vois que notre ministre de la Justice est arrivé en retard; le principal, c'est qu'il n'écope pas d'un billet de vitesse. En fin de semaine, le ministre a fait une déclaration promettant la loi et l'ordre; il se posait des questions à savoir pourquoi nous avions le championnat des accidents de la route. Il disait également que l'irrespect de la loi caractérisait, d'une certaine façon, la situation sociale inquiétante au Québec. Le ministre de la Justice nous disait qu'il avait augmenté les effectifs de sécurité. D'autre part, quand on a attiré l'attention du ministre, la semaine passée, sur le fait qu'un député avait été arrêté pour excès de vitesse alors qu'une auto gouvernementale, avec un ministre a son bord, était passée à 100 milles à l'heure sans être inquiétée d'aucune façon par les agents de la sécurité routière, le ministre a semblé prendre cette situation avec le sourire.

En relation avec la déclaration qu'il a faite en fin de semaine, où il promet, encore une fois, la loi et l'ordre, est-ce que cette obligation de respect de la loi pour les uns — c'est peut-être seulement un petit exemple mais il me semble que cela peut caractériser, pour employer les mêmes mots que le ministre de la Justice une certaine attitude du gouvernement — serait obligatoire et que les autres, de par leur fonction ou de par leurs responsabilités, pourraient bénéficier d'une situation qui les placerait, eux, au-dessus de la loi?

Même si c'est un cas qui peut, à prime abord, sembler anodin, il me semble qu'il traduit, encore une fois, cette situation sociale qui fait qu'il y en a qui doivent respecter les lois et d'autres ne doivent pas les respecter.

M. Choquette: D'abord, je pense que les faits exacts ne sont pas connus sur cette prétendue infraction au code de la route commis, dit-on ou a-t-on dit, par un député. Les faits ne sont pas connus exactement.

M. Bédard (Chicoutimi): C'est le témoignage d'un député.

M. Choquette: Dans ce sens que, d'abord, c'est sûr que ce n'était pas un ministre qui était au volant.

M. Bédard (Chicoutimi): Non, j'imagine.

M. Choquette: Le ministre n'est pas nécessairement chargé de vérifier le compteur de vitesse de la voiture, à tout moment, pour voir si son chauffeur observe les lois de la circulation. Je comprends que cela peut être le devoir d'un ministre en général de voir à ce que son chauffeur se conforme aux lois, mais le ministre a d'autres préoccupations que d'être un pion qui surveille son chauffeur à tout moment.

Deuxième chose, est-ce qu'il a été établi qu'il y avait eu infraction? Les renseignements que je possède, à l'heure actuelle, sont que le radar sur lequel la vitesse de la voiture du ministre en question a été enregistrée indiquait une vitesse de 71 milles à l'heure, la limite étant de 70. Or, la Sûreté du Québec — pour ne pas perdre de cause, pour donner une certaine marge à l'observance des lois, d'autant plus que le radar peut comporter certaines imprécisions légères — tolère une marge de quelques milles à l'heure au-delà de la limite prescrite avant de donner une contravention. Ainsi, les affirmations du député de Sainte-Anne et les insinuations du député de Sainte-Anne me paraissent assez douteuses,à l'égard de ce ministre.

Maintenant, je dirais une chose, le député de Sainte-Anne est un policier, tout le monde le sait. Deuxièmement, s'il a le sens du devoir et s'il a été témoin de la commission d'une infraction, c'est son droit le plus absolu d'aller déposer une plainte.

M. Bédard (Chicoutimi): Son devoir.

M. Choquette: Bien, enfin, on va le laisser l'interprète de son devoir. Je ne suis pas pour lui dicter son devoir. Mais je dirais que c'est son droit, s'il le veut, d'aller déposer une plainte contre le chauffeur du ministre en question.

Maintenant, j'ai trouvé que les circonstances dans lesquelles la question a été posée étaient tout à fait ridicules et que cela ne méritait pas une réponse plus circonstanciée que celle que j'ai donnée au député de Sainte-Anne.

Quand les députés commencent à relever des prétendues infractions au code de la circulation à l'Assemblée nationale, je trouve que cela fait petit, cela fait mesquin. Je n'approuve pas — le député peut en être sûr — l'inobservance des lois et non plus que du code de la route. Il peut en être assuré.

Par contre, je pense que, dans cette affaire, il y a de l'exagération, d'autant plus que je pense que notre policier n'avait pas le devoir, compte tenu de la preuve qu'il avait devant lui, de porter une plainte ou de donner un billet au chauffeur du ministre en question.

M. Bédard (Chicoutimi): Remarquez que... M. Choquette: Enfin, de toute façon, je

conçois qu'il soit raisonnable que le député s'en-quière. En fait, le député de Chicoutimi, ce n'est pas lui qui a soulevé...

M. Bédard (Chicoutimi): Je pense que ce qui est important, ce n'est pas tellement la vitesse, quoi que cela demeure important en termes de sécurité routière, comme l'exemple que cela donne, surtout lorsqu'on se réfère à toutes les recommandations de la commission Gauvin sur la sécurité routière, même les interventions faites par le ministre de la Justice pour un respect des lois dans ce sens.

Je pense aussi que, lorsque le ministre me dit que "c'était le chauffeur qui conduisait", il n'est pas tellement sérieux, je pense, dans le sens que je ne considère pas ça comme une réponse très sérieuse. On sait très bien que c'est le chauffeur qui conduisait. Mais par analogie, à un moment donné, cela peut donner l'impression de ce qui se passe un peu dans le Québec, par comparaison... Je comprends que le ministre, qui est sur la banquette arrière, peut avoir d'autres préoccupations de voir à être conduit dans le respect des règles de la sécurité routière.

Par analogie, cela peut donner un peu l'exemple d'un gouvernement qui est assis sur la banquette arrière mais qui regarde les règlements violés, à l'avant, sans intervenir. Dans ce sens, je pense que l'exemple...

Encore une fois, c'est un cas qui peut paraître anodin.

M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): Mais, étant donné que cela a été dévoilé par le député de Sainte-Anne, il y a avantage, je crois, que, d'une part, il y ait enquête, que, d'autre part, le député de Sainte-Anne, s'il a des gestes à poser, puisqu'il est respectueux de l'ordre, les pose.

M. Choquette: En plus de cela, c'est un policier. Il connaît le chemin du palais de justice. Il a juste à aller déposer une plainte. On va voir si c'est un bon policier.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce exact que le ministre a fait enquête dans ce cas?

M. Choquette: Oui, c'est-à-dire que j'ai fait une enquête sommaire. D'après les renseignements que j'ai obtenus, le radar n'indiquait pas une contravention à l'égard de laquelle la Sûreté agit ordinairement, compte tenu de cette légère marge qu'elle s'accorde pour ne pas appliquer la loi d'une façon mesquine et, en plus de cela, qui pourrait soulever des contestations devant les cours.

M. Bédard (Chicoutimi): On se fait souvent répondre que le ministre a fait une enquête sommaire dans tel cas ou dans tel cas. Qu'est-ce que le ministre entend par une enquête sommaire? Disons dans ce cas précis, je comprends que cela ne veut pas dire que le ministre a communiqué directement avec les officiers concernés, mais est-ce que le ministre veut dire, à ce moment-là, que de fait et très clairement, des personnes de son ministère ont été chargées de contacter...

M. Choquette: Mais j'ai obtenu des renseignements.

M. Bédard (Chicoutimi): ... d'une part, le député de Sainte-Anne et les policiers qui pouvaient être concernés?

M. Choquette: J'ai obtenu des renseignements à cet effet. Si le député veut que je lui donne cela avec plus de certitude, je vais...

M. Bédard (Chicoutimi): J'aimerais.

M. Choquette: ...faire vérifier ces faits que je viens d'affirmer ce matin.

M. Bédard (Chicoutimi): D'accord.

M. Choquette: Mais je trouve que tout le...

M. Bédard (Chicoutimi): Mais vous avez affirmé qu'il y avait une enquête sommaire.

M. Choquette: Oui, oui.

M. Bédard (Chicoutimi): J'imagine qu'elle a été faite.

M. Choquette: Oui, oui. Sommaire.

M. Bédard (Chicoutimi): Au niveau de ce programme, M. le Président, il y aurait également un sujet sur lequel je voudrais attirer l'attention du ministre et avoir ses commentaires. C'est la commission de la réforme policière de l'Eglise de Scientologie de Québec qui, je crois, a fait parvenir un mémoire au ministre de la Justice soulevant le cas de l'accession trop facile des services de l'Interpol aux dossiers judiciaires, d'une part, et surtout aux renseignements sur des personnes qui n'ont pas de dossier judiciaire, dans le sens qu'elles n'ont pas été comdamnées, mais qu'elles peuvent être soupçonnées d'avoir commis un méfait ou de vouloir en commettre un.

A ce moment-là, l'Eglise de Scientologie de Québec laissait entendre qu'il n'y avait aucune mesure corrective prévue afin de corriger toute fausse information qui pouvait être contenue dans un dossier qui était remis à l'Interpol et qui faisait état non pas des condamnations mais des soupçons gui pouvaient peser sur certains individus. A cet effet, elle prétendait, je crois à juste titre, que c'était une menace, d'une certaine façon, aux droits civils de tous les citoyens québécois qui ont le droit de savoir ce qu'il y a dans leur dossier.

M. Choquette: Oui, j'ai reçu une lettre à cet effet, il y a quelques instants. Par conséquent, je n'ai pas eu le temps de l'étudier dans ses moindres détails.

M. Bédard (Chicoutimi): Sur l'aspect du principe?

M. Choquette: Ce que je pourrais répondre, d'une façon préliminaire, au député de Chicoutimi, c'est que la Sûreté du Québec ne participe pas à l'Interpol. C'est la Gendarmerie royale du Canada qui fait partie de cet organisme international de renseignement. Je ne pense pas que la Sûreté du Québec puisse être impliquée.

M. Bédard (Chicoutimi): Mais des relations existent régulièrement entre la Gendarmerie royale et la Sûreté du Québec. J'imagine que, concernant certains individus, il y a un échange de dossiers, que la Sûreté du Québec produit à la Gendarmerie royale des dossiers sur les agissements de certains individus, non seulement ceux qui ont été condamnés, mais également ceux qui peuvent être soupçonnés de mettre en danger la sécurité de l'Etat.

M. Choquette: M. Tellier, le directeur général adjoint de la Sûreté du Québec, est ici présent et il m'informe que la Sûreté du Québec n'a pas de communications avec l'Interpol. En fait, c'est la GRC, qui ne dépend pas de mon autorité, qui serait l'organisme policier susceptible de communiquer, à l'occasion, des renseignements à l'Interpol ou d'en recevoir. Je pense que le mémoire auquel vous faites allusion, et que j'ai reçu, devrait plutôt être dirigé vers les autorités fédérales.

M. Bédard (Chicoutimi): Je pense que le ministre ne comprend pas ma question. Même si c'est la Gendarmerie royale qui communique avec l'Interpol, le ministre vient de me dire qu'étant donné les relations normales qui doivent exister entre la Gendarmerie royale et la Sûreté du Québec, il arrive continuellement que la Sûreté du Québec entre en contact avec la Gendarmerie royale.

La Sûreté du Québec communique à la Gendarmerie royale les informations sur des invidivus qui peuvent être soupçonnés, non seulement qui ont été condamnés, mais qui peuvent simplement faire l'objet de soupçons ou de surveillance de la part de la Sûreté du Québec. Et une fois que ces informations —le ministre l'admettra avec moi — ont été communiquées par la Sûreté du Québec à la Gendarmerie royale, la Gendarmerie royale peut en faire l'usage qu'elle veut. Est-ce qu'au moins, dans l'esprit du ministre, la Sûreté du Québec exprime ses réticences à la Gendarmerie royale, à l'effet de ne pas communiquer ces renseignements surtout quand il s'agit de gens simplement soupçonnés?

M. Choquette: Quels renseignements?

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que le ministre veut me dire là... Je comprends que le ministre n'a pas l'air de vouloir répondre.

M. Choquette: Oui, je veux répondre, mais je veux vous faire préciser votre question.

M. Bédard (Chicoutimi): Les renseignements que vous donnez à la Gendarmerie royale, sur des personnes qui sont soupçonnées de vouloir commettre un acte criminel, qui sont soupçonnées d'en avoir commis, mais qui n'ont pas été accusées et qui n'ont pas été condamnées.

M. Choquette: Avant d'avoir la preuve que quelqu'un a commis un crime, on commence par avoir des soupçons. Donc, les corps de police peuvent se communiquer leurs soupçons.

M. Bédard (Chicoutimi): D'accord, mais c'est justement ce que je vous demande. Les soupçons sur des individus que vous communiquez à la Gendarmerie royale, est-ce qu'il y a des indications ou une réglementation sévère — je ne sais pas l'attitude du ministre, moi — voulant que pour les gens qui ne sont que soupçonnés, les citoyens du Québec qui ne sont l'objet que de soupçons, la Gendarmerie royale ne communique pas ces renseignements à l'Interpol? Est-ce qu'il y a une sorte d'embargo de la part de la Sûreté du Québec?

M. Choquette: Mais comment pourrait-on limiter la communication de renseignements exclusivement au cas de situations ou de gens où on a une preuve absolue ou encore où on a eu une condamnation? Ce serait la négation de tout travail policier.

M. Bédard (Chicoutimi): Bien non!

M. Choquette: Bien oui.

M. Bédard (Chicoutimi): II s'agit de le vouloir.

M. Choquette: Ce n'est pas juste une question de vouloir, c'est une question logique. Comment pourrait-on, avant d'être arrivé à accumuler toute une preuve à l'égard de la commission d'un crime, ne pas communiquer antérieurement à ce stade? On ne pourrait jamais se rendre au stade que vous mentionnez.

M. Bédard (Chicoutimi): Je vous pose mes questions en fonction de la Gendarmerie royale qui donne des renseignements à l'Interpol. Est-ce que je dois comprendre que le ministre de la Justice, lorsqu'il fait parvenir des rapports sur des personnes, sur des citoyens québécois à la Gendarmerie royale, mais des rapports qui font état seulement de soupçons ou encore qui relatent, non pas des condamnations, mais des soupçons sur des personnes, est-ce qu'il exige de la Gendarmerie royale que cela reste confidentiel entre les deux corps policiers? Ou encore, le ministre de la Justice trouve-t-il que c'est normal que la Gendarmerie royale puisse communiquer à l'Interpol tous les renseignements qu'elle obtient de la Sûreté du Québec, sur les personnes qui sont soupçonnées et non condamnées dans le Québec?

M. Choquette: Je ne voudrais pas exprimer des règles générales là où il n'y a pas lieu d'exprimer de grands principes et des règles générales.

M. Bédard (Chicoutimi): II y en a un là, un grand principe, le droit civil d'un citoyen...

M. Choquette: Le droit de ne pas être soupçonné?

M. Bédard (Chicoutimi): Bien non! le droit de savoir ce qu'il a dans son dossier judiciaire.

M. Choquette: Où avez-vous trouvé ce droit? M. Bédard (Chicoutimi): Bien, voyons.

M. Choquette: Où est-il inscrit, ce droit? J'aimerais savoir où il est.

M. Bédard (Chicoutimi): II a au moins le droit de savoir que seulement les soupçons qui peuvent peser sur lui ne font pas l'objet d'une sorte de pu-blicisation à l'intérieur, non seulement ici. A l'intérieur du Québec et du Canada, disons que cela peut s'accepter, mais vis-à-vis d'Interpol...

M. Choquette: Oui...

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que votre position est que n'importe quel renseignement peut être communiqué à Interpol?

M. Choquette: Ceux qui connaissent la GRC savent que la GRC est très prudente dans sa façon de communiquer des renseignements et qu'elle n'en communique pas plus qu'il le faut en chaque occasion. Alors, par conséquent, je n'ai aucune espèce de raison de croire que la GRC serait négligente dans sa façon, ou dans ses rapports ou relations avec d'autres organismes policiers, que ce soit l'Interpol, que ce soit le FBI, que ce soit d'autres corps de police américains.

Je vous donne un exemple qui va vous montrer comment cela peut fonctionner sur le plan international. Admettons qu'on pense qu'il y a un réseau de drogue qui passe par le Québec et qu'il s'agit, par exemple, de transporter des quantités de drogue: de Marseille par Montréal et de Montréal vers New York, ou cela peut être des quantités de drogue qui arrivent par le Mexique et qui passent par les Etats-Unis et qui pourraient s'en venir ici.

Là, il est évident que les corps de police intéressés travaillent sur ces cas car les activités d'un tel réseau ou de tels réseaux se situent dans différents pays à la fois. Alors, il va de soi qu'ils doivent se communiquer des renseignements et que ces renseignements sont communiqués avant qu'on ait obtenu une condamnation contre qui que ce soit qui participe à un tel réseau de drogue.

Dans la phase préliminaire, il s'agit de trouver la preuve. Il s'agit de voir jusqu'à quel point il peut y avoir eu du trafic de drogue sur le plan international. Alors, je pense que la règle, en somme, que le député essaie d'élaborer et de laquelle il part comme une règle de conduite pour les corps de police, n'est pas une règle qui s'applique, ni sur le plan pratique, ni ne peut être justifiée sur le plan théorique.

Les corps de police ont le droit de se communiquer des soupçons, des éléments de preuve avant qu'il y ait eu condamnation. Cela fait partie du travail normal de la police.

Evidemment, je comprends que le député pourrait faire des reproches à l'un ou l'autre de ces corps de police. S'il y avait négligence dans la façon de traiter ces renseignements, ou ces éléments de preuve, et si on les laissait, disons, figurer dans les journaux ou si on en faisait état publiquement alors qu'on n'aurait pas obtenu de condamnation, à ce moment-là je serais bien d'accord. Mais tant que le caractère confidentiel de ces renseignements est suffisamment respecté, je ne vois pas de mal à ce que nous communiquions ou que la GRC communique avec tous les corps de police du monde pour échanger des renseignements.

M. Bédard (Chicoutimi): Autrement dit...

M. Choquette: D'ailleurs je suggère au député de lire un livre. "Day of the jackal", qui va beaucoup l'intéreser; en français c'est "Chacal". Ou allez au cinéma voir ce film.

M. Bédard (Chicoutimi): ... "Chacal".

M. Choquette: Peut-être que cela pourrait abréger les séances de la commission parlementaire de la Justice...

M. Bédard (Chicoutimi): Non, mais...

M. Choquette: ... si le député de Chicoutimi voulait aller au cinéma voir ce film. Il pourra voir que dans ce roman...

M. Bédard (Chicoutimi): Faites comme pour le billet de vitesse, tournez ça au "fun", après cela le...

M. Choquette: Non, non.

M. Bédard (Chicoutimi): ... "fun" va se retourner contre vous.

M. Choquette: Non, non, non. M. Bédard (Chicoutimi): Non? M. Choquette: Si le député...

M. Bédard (Chicoutimi): Laissez le cinéma de côté et discutons...

M. Choquette: Bien non! si le député... J'essaie...

M. Bédard (Chicoutimi): Vous pourriez aller voir le film "Les ordres" aussi, où vous avez eu une participation très active, qui a obtenu le premier prix.

M. Choquette: Mais vous savez quelle a été la réaction des journalistes français...

M. Bédard (CHicoutimi): Vous auriez dû être mentionné...

M. Choquette: ... lorsqu'on a tourné "Les ordres".

M. Bédard (Chicoutimi): ... vous auriez dû avoir un prix...

Le Président (M. Lafrance): A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bédard (Chicoutimi): ... pour la participation que vous avez eue dans ce film.

Le Président (M. Lafrance): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Choquette: Mais parlant du film "Les ordres", savez-vous quelle a été la réaction des journalistes français qui ont vu le film déjà?

Le Président (M. Lafrance): On pourrait peut-être ajourner pour aller voir ce film et revenir!

M. Choquette: Les journalistes français ont dit: C'est formidable comme votre police est douce! Pour eux, c'est une révélation.

M. Bédard (Chicoutimi): Ah! Vous prenez ça... M. Choquette: Alors, je pense que le film...

M. Bédard (Chicoutimi): ... pour le "fun" aussi!

M. Choquette: Non, non. Le film, en Europe et en France en particulier, "Les ordres"...

M. Bédard (Chicoutimi): Etes-vous allé le voir?

M. Choquette: ... est plutôt considéré comme une façon de faire l'éducation de la police française.

M. Bédard (Chicoutimi): Etes-vous allé le voir, le film "Les ordres"?

M. Choquette: Je ne l'ai pas vu, non.

M. Bédard (Chicoutimi): Ah!

M. Choquette: Je n'ai pas eu le temps.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous auriez eu l'occasion de vous visualiser un peu...

M. Choquette: Non, non.

M. Bédard (Chicoutimi): ... en partie!

Le Président (M. Lafrance): En avez-vous d'autres à nous suggérer?

M. Choquette: Bien, il y a "Chacal". Dans "Chacal", il s'agit d'un complot pour assassiner le général de Gaulle.

Alors, là, il y a des éléments de l'OAS qui retiennent un tueur à gages, qui est en Angleterre, pour venir commettre l'assassinat et le tueur à gages est obligé d'aller acheter ses papiers et son équipement en Belgique.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous pensez vraiment que c'est sérieux de continuer sur "Chacal"?

M. Choquette: Non, non, mais je le donne comme une illustration au député, parce que le député ne voudrait pas que je lui donne des cas vécus, réels.

M. Bédard (Chicoutimi): Comme, tout à l'heure, j'ai pris le biais de la vitesse pour vous donner une illustration du gouvernement assis sur la banquette arrière.

M. Choquette: Non, mais, dans son souci de discrétion, le député ne voudrait pas que je lui cite des cas réels que j'ai actuellement ou, enfin, que je pourrais connaître à l'heure actuelle. C'est pour cela que je lui donne un exemple romancé pour illustrer le cas.

Apprenant le complot pour assassiner le générai de Gaulle, les policiers de différents pays, France, Angleterre, Belgique, etc., se concertent et échangent des renseignements, justement, pour arriver à déceler le meurtre avant qu'il soit commis.

Le Président (M. Lafrance): Est-ce que c'est au programme 10, cette analyse?

M. Choquette: Non, non mais le député...

M. Bédard (Chicoutimi): Je suis porté à dire: Vous avez prouvé quoi, là? Vous vous êtes amusé, mais...

M. Choquette: Non, non. J'ai prouvé que la communication de renseignements est essentielle.

M. Bédard (Chicoutimi): Ce que je vous demande, ce n'est pas compliqué. Je pense que vous allez me répondre très clairement. C'est au sujet des renseignements que donne la Sûreté du Québec à la Gendarmerie royale.

M. Choquette: Ce sont toujours de bons renseignements.

M. Bédard (Chicoutimi): Sans se prononcer sur la valeur des renseignements...

M. Choquette: Toujours.

M. Bédard (Chicoutimi): ... est-ce que la politique générale ou encore l'idée du ministre est qu'une fois la Gendarmerie royale en possession de ces renseignements obtenus de la Sûreté du Québec elle peut les utiliser comme elle le veut et, deuxièmement, est-ce qu'elle peut les communiquer à l'Interpol, en fait?

M. Choquette: Si nous mettons des embargos, cela limite la communication des renseignements. Si nous ne mettons pas d'embargos sur la communication des renseignements, ils peuvent être communiqués à d'autres, mais avec un certain souci de...

M. Bédard (Chicoutimi): Mais cela ne me donne pas ma réponse. C'est clair que, s'il y a un embargo, ils ne les communiqueront pas. Je vous demande s'il peut arriver qu'il y ait embargo.

M. Choquette: II n'y a pas de règle de conduite absolue dans ce domaine. Tout dépend des circonstances et des cas particuliers. Il y a des domaines où il existe des embargos sur les renseignements qu'on communique. En effet, si nous avons des renseignements qui peuvent être utiles à d'autres, mais, aussi, qui sont très utiles à nous et qu'il ne faudrait absolument pas que ces renseignements soient connus, parce qu'on est sur une opération ici, au Québec, là, on peut placer un embargo sur des renseignements, mais ce n'est pas toujours le cas.

La difficulté, dans ce problème, c'est de poser des règles générales qui seraient intangibles et qui empêcheraient la communication de renseignements. Pour moi, il ne faut pas s'en prendre au principe ou à la communication de renseignements comme telle. Au contraire, c'est excellent pour le travail de la police. D'ailleurs, cela nous a permis de réussir un certain nombre d'opérations policières, entre autres toutes les affaires de drogue, qui ont résulté en des condamnations devant les tribunaux américains. Il s'agissait de travail conjoint entre le FBI, la Sûreté du Québec, la GRC et divers autres corps de police, dont les Français. De là est résultée la condamnation de Frank Co-troni, de Frank Dasti, de Lucien Madère, de Paul Odo enfin, de toute une série de trafiquants de drogues internationaux.

M. Bédard (Chicoutimi): Ce que je veux...

M. Choquette: Non, non, mais je donne des exemples précis. Tout à l'heure, j'ai donné "Chacal". Là, je donne des exemples réels, vécus, où il y avait inévitablement communication de renseignements.

Il va de soi que, lorsqu'on est au stade de l'enquête, on évite par tous les moyens possibles que les renseignements ne soient dilapidés ou galvaudés car, à ce moment-là, cela peut empêcher la réussite d'une condamnation devant les tribunaux. C'est la raison pour laquelle les corps de police sont généralement extrêmement discrets et s'assurent d'une manière très très sérieuse que ces renseignements ne sont connus parfois que dans certains services particuliers de leur corps de police.

C'est une des réalités du travail de la police que celle que je décris, mais elle laisse entendre, sûrement, ou elle comprend l'idée que les renseignements doivent et peuvent être communiqués.

Le Président (M. Lafrance): Programme 4?

M. Bédard (Chicoutimi): Non. Le Président (M. Lafrance): Non?

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, tout le monde connaît la bataille que fait — nous avons eu l'occasion d'en parler en commission parlementaire — le ministre de la Justice concernant une réclamation, au fédéral, à M. Allmand.

Il s'agit en l'occurrence, des frais que représente la police provinciale, ici dans le Québec, qui se trouve à remplir des fonctions de sécurité qui sont remplies par un autre corps policier, la Gendarmerie royale, dans d'autres provinces.

Je fais simplement ce préambule pour en arriver à un autre cas de réclamation qui se fonde sur les mêmes principes que ceux énoncés par le ministre de la Justice vis-à-vis de M. Allmand, en gros, à savoir la réclamation que fait le maire La-montagne qui exige, de la part du gouvernement du Québec, une somme approximative de $3 millions pour le travail que les policiers municipaux ont à faire pour l'application des lois provinciales. M. Lamontagne — d'ailleurs, le ministre est au courant — avait déploré cette situation qui, d'après lui, était discriminatoire. Il employait le même terme que le ministre vis-à-vis de M. Allmand. Il était discriminatoire pour le contribuable de la ville de Québec — non seulement de la ville de Québec, mais on peut transposer cela à l'échelle du Québec, de toutes les villes du Québec — d'être obligé, indirectement, de contribuer à ces frais par leurs impôts, alors que, dans le fond, c'est le gouvernement du Québec qui devrait assumer cette responsabilité financière.

Qu'est-ce que le ministre pense de la réclamation et des arguments de M. Lamontagne pour étoffer sa réclamation vis-à-vis du gouvernement du Québec et quelle attitude entend-il prendre?

M. Choquette: Pour moi, c'est une pure et simple question d'argent. Il s'agit de savoir combien d'argent on a à notre disposition, combien on peut prélever sur les revenus des contribuables et combien on peut consacrer à aider des corps de police municipaux dans leur travail. J'ai bien l'impression qu'un jour on verra le gouvernement du Québec donner un appui financier au moins à certains corps de police municipaux, entre autres, les corps de police municipaux régionalisés, tel que c'est le cas pour le service de la police de la Communauté urbaine de Montréal, ou même d'autres corps de police municipaux qui, de par leur importance et les problèmes de criminalité auxquels ils doivent faire face, seraient en droit d'avoir un appui financier du gouvernement du Québec. Mais c'est purement et simplement une question pratique pour moi que l'effort financier que nous pouvons consacrer pour soutenir ces corps de police.

Je ne rejette pas du tout le point de vue exprimé par la ville de Québec et par son maire. Je dis simplement que la capacité financière du gouvernement du Québec est le facteur déterminant dans l'assistance que nous pourrons lui donner dans l'avenir.

M. Bédard (Chicoutimi): Face à cette demande qui avait été faite par M. Lamontagne, est-ce que le ministre croit opportun d'instituer une sorte d'enquête? Pas une enquête royale, mais une enquête à l'effet de comptabiliser, d'une certaine façon, ce que pourraient représenter ces charges qui doivent, à l'heure actuelle, être assumées directement par les contribuables des municipalités.

M. Choquette: En fait, nous avons étudié la situation des finances municipales en rapport avec leur corps de police. Une chose est certaine, c'est que la police représente un élément très important dans les budgets municipaux. Nous sommes très conscients du fait qu'à cause de leur l'importance des dépenses encourues par les services de la police pèsent assez lourdement sur les contribuables.

Nous étudions, pour l'avenir, des formules d'assistance financière qui pourraient possiblement être mises en vigueur, mais, pour le moment, je n'ai pas, le gouvernement n'a pas pris de décision à cet effet. Le gouvernement n'est engagé d'aucune façon dans un acquiescement de principe à l'égard d'un soutien financier à la ville de Québec pour son corps de police, ou à toute autre municipalité.

Par contre, il faut ajouter que dans le cas de la ville de Québec, celle-ci reçoit des subventions annuelles assez importantes qu'elle est libre d'utiliser pour la police ou pour d'autres services. Car on sait que le gouvernement du Québec donne des subventions considérables à la Communauté urbaine de Montréal, pour son service de police, pour le transport en commun; elle donne des subventions importantes à la ville de Montréal, elle en donne à la ville de Laval, elle en donne à la ville de Québec. En fait, elle en donne aux grandes agglomérations qui ont vu leurs obligations financières augmenter considérablement dans les dernières années.

Mais pour ce qui est du cas spécifique de la police et d'une politique de subventions statutaires à l'égard des corps de police ou de certains corps de police qui, de par leur importance et leurs fonctions particulières, jouent un rôle important du point de vue du respect des lois et du maintien de l'ordre public, pour le moment, je ne suis pas en mesure de dire que nous allons subventionner d'une façon annuelle et régulière ces corps de police. Malgré que je pense que cela devra venir et que c'est une chose qui doit être envisagée très facilement et très raisonnablement, à mon sens, pour les prochaines années.

M. Bédard (Chicoutimi): Concernant la sécurité des membres du Conseil exécutif, est-ce que le ministre pourrait nous dire quel est le coût de la sécurité qui leur est accordé?

M. Choquette: Les crédits du service de sécurité qu'on trouve au programme 3 des crédits du ministère de la Justice, s'élèveront en 1975/76 à la somme de $643,900.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que le ministre peut me dire quels sont les ministres qui font l'objet de surveillance ou d'une protection spéciale?

M. Choquette: Ils ont tous un garde du corps qui est à la fois chauffeur et garde du corps.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce qu'il y a des ministres qui font l'objet d'une protection spéciale?

M. Choquette: Oui, il y a le premier ministre d'abord; il y a aussi le ministre de la Justice et il y a le leader du gouvernement qui bénéficient d'une protection particulière.

M. Bédard (Chicoutimi): Quel type de protection particulière?

M. Choquette: Bien, en général, ils sont protégés, eux, par des agents de là Sûreté du Québec. Et le personnel qui les protège est plus nombreux, surtout le premier ministre.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que vous pouvez dire, approximativement, quel serait le coût pour chacun de ces ministres qui a une protection spéciale?

M. Choquette: Bien, je n'ai pas mesuré le coût pour chacun. Il y a le premier ministre qui a certains effectifs policiers à sa disposition, autant ici à Québec qu'à Montréal. Il y a moi. Et il y a M. Levesque qui a une certaine protection policière, plus limitée.

Maintenant, le choix s'est fait, je pense bien, en fonction des dangers qu'offrent les fonctions des trois intéressés: le premier ministre, évidemment, à cause de ses grandes responsabilités, du fait qu'il est le premier du gouvernement et qu'il est susceptible d'être l'objet d'agressions, enfin comme cela s'est passé dans d'autres Etats. Il mérite cette protection pleinement, à mon sens. Moi-même, à cause de ma fonction de ministre de la Justice, qui est susceptible de me faire plus d'ennemis qu'un autre. Et M. Gérard...

M. Bédard (Chicoutimi): Des ennemis plus coriaces.

M. Choquette: Peut-être plus coriaces parce qu'ils sont susceptibles de se recruter dans les milieux criminels, même possiblement révolutionnaires. Et le vice-premier ministre, M. Gérard-D. Levesque, à cause de sa fonction de vice-premier ministre, ministre des Affaires intergouvernementales et leader du gouvernement à la Chambre.

M. Bédard (Chicoutimi): Je comprends que vous ne pouvez pas nous dire le coût que cela pourrait représenter pour chacun.

M. Choquette: Pour chacun, je ne peux pas le dire. Mais je peux probablement vous donner le total. $400,000. Ce qui veut dire que la sécurité coûterait à peu près $l million.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous nous avez dit qu'il y avait des agents de la Sûreté du Québec qui assuraient la surveillance. Est-ce qu'il y a des agents de compagnies privées aussi?

M. Choquette: Oui. Dans certains cas.

M. Bédard (Chicoutimi): Quels sont ces cas?

M. Choquette: Oui, dans certains cas, il y a des agences de sécurité qui s'occupent de la sécurité des membres du Conseil exécutif. Mais ces agences de sécurité ne sont utilisées, lorsqu'elles sont utilisées, que pour la garde de la famille ou de la maison de l'intéressé.

Pour ce qui est de M. Bourassa, sa protection est entièrement assurée par la Sûreté du Québec. Pour ce qui est de moi, une agence de sécurité garde ma maison. Et il y a eu d'autres ministres qui ont eu, à l'occasion, une protection par agence de sécurité lorsqu'ils étaient mêlés à certaines lois ou activités très controversées qui pouvaient possiblement requérir une protection de leurs maisons.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que le ministre du Travail a une protection spéciale?

M. Choquette: Voici. Je ne voudrais pas entrer dans trop de détails sur la question de sécurité parce que...

M. Bédard (Chicoutimi): Globalement. M. Choquette: ... les renseignements...

M. Bédard (Chicoutimi): Je ne vous demande pas quel type de sécurité, etc. Je ne veux pas aller trop dans les détails non plus.

M. Choquette: Non.

M. Bédard (Chicoutimi): Je vous demande simplement: Est-ce que le ministre du Travail...

M. Choquette: Oui, il l'est.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que le gouvernement a cru bon, dernièrement ou à d'autres occasions, d'assurer une sécurité spéciale au ministre du Travail?

M. Choquette: Oui, le ministre du Travail a une certaine protection. Mais ce n'est pas limité à son cas. La protection dans ce domaine n'est pas absolue.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que vous pouvez nous dire le nom des compagnies privées qui...

M. Choquette: L'agence Canadiana garde ma maison et a gardé la maison d'autres ministres à d'autres occasions.

M. Bédard (Chicoutimi): C'est cette agence, de façon générale, qui...

M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): ... assure la surveillance.

M. Choquette: Nous avons utilisé aussi d'autres agences de sécurité, SOPEQ entre autres, pour la garde de certains membres de la commission Cliche, la protection de certains membres de la commission Cliche, pour la protection du juge Dutil, soit alors qu'il était avocat au service de la commission Cliche, soit depuis qu'il est devenu président de la CECO.

Enfin, ce n'est pas limité aux ministres. La protection peut être donnée, par exemple, à des hauts fonctionnaires ou à des gens qui, à un moment donné, à cause de leurs fonctions, peuvent être dans une situation vulnérable.

M. Bédard (Chicoutimi): Mais quand vous nous parlez de $l million, c'est seulement ce qui est affecté aux membres du gouvernement.

M. Choquette: C'est pour le personnel, oui, affecté aux membres du gouvernement.

M. Bédard (Chicoutimi): Quand vous parlez de $l million, j'imagine que vous faites le compte même de ce que représentent les dépenses de salaires des agents de la Sûreté du Québec qui sont affectés là.

M. Choquette: Oui parce que, voyez-vous, j'ai pris $643,900 pour les crédits affectés au service de sécurité plus 20 agents de la Sûreté à $20,000, ce qui ferait $400,000, pour un total de $l million, en gros.

M. Bédard (Chicoutimi): Lorsqu'on se réfère au livre blanc, entre autres aux pages 47 et 48, où on parle d'une façon spéciale de la direction générale des affaires policières...

M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): ... lors de la création de cette direction générale des affaires policières en juillet dernier, vous aviez dit que cette nouvelle structure n'avait pas de vocation de contrôle mais uniquement de recherche et de consultation. Est-ce que le ministre pourrait nous dire quelle est la structure de cette direction générale...

M. Choquette: Le service ou la direction générale est dirigé par...

M. Bédard (Chicoutimi): ... nous donner une sorte d'organigramme de la direction?

M. Choquette: ... M. Paul Benoît. Sa direction est en train d'être mise sur pied. Elle n'a pas atteint sa forme définitive.

La direction générale de la sécurité publique a sous sa responsabilité le service de sécurité dont je parlais tout à l'heure et l'Institut de police de Québec, en plus de la fonction générale qui lui a été donnée lors de sa création, c'est-à-dire l'obtention de renseignements sur l'évolution des corps de police au Québec et la formulation de certaines grandes politiques en matière policière. Ainsi, par exemple, dans le domaine de la sécurité routière, la direction générale a été appelée à me suggérer des orientations — que j'ai exprimées publiquement dans des déclarations — qui ne s'imposaient pas d'une façon absolue aux différents corps de police ni surtout aux différents corps de police municipaux, mais qui recherchaient plutôt une adhésion volontaire de la part des corps de police municipaux dans une action plus énergique et plus concertée dans le domaine du contrôle de la circulation routière.

Dans ce domaine la direction générale a eu une fonction à jouer par la coordination de l'action des corps de police municipaux avec l'action de la Sûreté du Québec, à l'occasion de la reprise des travaux sur les chantiers de construction après le débrayage qui a été consécutif au dépôt du rapport de la commission Cliche.

Evidemment, les corps de police municipaux demeurent libres de collaborer dans la mesure qu'ils estiment raisonnable, mais, compte tenu des impératifs de la sécurité publique et du maintien de l'ordre et de la paix publics, ils acceptent de s'intégrer dans certaines grandes politiques générales ou certaines actions policières en particulier, telles que dans ce domaine de la construction ou dans le domaine de la sécurité routière. C'est plutôt dans cet ordre d'idées qu'oeuvre la direction générale de la sécurité publique.

Quant au nombre d'employés qui se trouvent dans cette direction générale, celui-ci est d'une dizaine, environ, à l'heure actuelle. La direction générale s'est vu confier beaucoup de mandats particuliers, par exemple, tout le domaine de la police sur les réserves indiennes ou auprès des territoires occupés par des Esquimaux ou des Inuit a été confié à la direction générale. Celle-ci a des rapports avec les chefs de bande indiens et les chefs inuit, de façon à établir les besoins de ces groupements au point de vue policier, de façon à mettre sur pied des programmes en vertu desquels ces groupements vont se policer par des policiers autochtones. Il y a tout un développement qui a lieu à ce niveau, sans compter d'autres mandats particuliers qui lui ont été confiés par moi.

M. Bédard (Chicoutimi): Sans entrer dans une longue discussion...

M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): ... à mesure que la direction générale prend forme, puisque c'est quand même récent, est-ce que le ministre pense qu'elle aura peut-être, par la force des choses, un peu plus une vocation de contrôle qu'il ne l'avait pensé auparavant?

M. Choquette: De contrôle. Cela dépend du contenu qu'on donne à cette définition de contrôle.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous parlez d'un territoire où vous lui avez donné la responsabilité, le contrôle?

M. Choquette: Non...

M. Bédard (Chicoutimi): Non? Ce n'est pas cela?

M. Choquette: ... nous ne donnons pas à la direction générale la responsabilité de voir à policer les réserves ou les territoires occupés par les autochtones. Ce que nous faisons, c'est que la direction générale établit des programmes pour le recrutement de policier autochtones et ceci, de concert avec les bandes et les chefs de bande, de façon que ces groupements autochtones, au lieu de se sentir policés par des Blancs, se policent eux-mêmes, ce qui contribue à de meilleures relations entre les policiers et les populations autochtones. Dans ce domaine-là, la direction générale n'a pas pour fonction de contrôler ces policiers autochtones, mais plutôt d'établir par exemple, le programme d'entraînement, le nombre de policiers autochtones qui pourraient être requis et d'encourager les réserves et les groupes autochtones à avoir recours à de telles solutions sans qu'à aucun moment la direction générale n'intervienne pour assumer une fonction de direction sur ces policiers en particulier.

M. Bédard (Chicoutimi): C'est par rapport à un exemple en particulier que le ministre s'exprime, mais, d'une façon générale, est-ce que le ministre croit que, pour une question d'efficacité, cette direction générale sera, par la force des choses, comme je le disais tout à l'heure, amenée à avoir plus une vocation de contrôle?

M. Choquette: Je n'en suis pas persuadé à l'heure actuelle, parce que les corps de police municipaux et le service de la police de la CUM collaborent avec la Sûreté du Québec et que le ministère de la Justice dans les occasions où il est utile ou même nécessaire de mettre sur pied des actions coordonnées en matière de police. Il est vrai que l'impulsion peut venir du ministère de la Justice, de moi en particulier.

Je peux en somme énoncer certaines politiques en matière policière. Je peux suggérer certaines opérations policières. Je peux encourager les corps de police à mettre sur pied des modes de consultation et de concertation dans certains domaines de la criminalité, mais je n'ai jamais été obligé de donner des ordres au service de police de la Communauté urbaine de Montréal ni à aucun corps de police municipal au Québec. En général, il suffit, me rendant compte qu'une situation requiert une action plus coordonnée, plus concertée, que je la suggère et naturellement, les corps de police vont donner leur collaboration à ce que j'ai suggéré. Pour le moment, je ne vois pas d'uti-

lité ou de nécessité que la loi prévoie que je puisse donner des ordres qui auraient une force juridique et s'imposeraient d'une manière absolue aux corps de police municipaux.

M. Bédard (Chicoutimi): Quels sont le budget et les moyens techniques qui sont mis à la disposition de cette direction générale?

M. Choquette: Le budget de cette direction générale est de $500,000, auquel il faudra ajouter les budgets des services qui en dépendent tels que le service de sécurité et l'Institut de police de Nicolet, qui a un budget particulier.

M. Bédard (Chicoutimi): Cela peut totaliser combien?

M. Choquette: A peu près $900,000, en tout et partout.

M. Bédard (Chicoutimi): J'aurais une question au ministre concernant le salaire des chefs de police. Le ministre sait que le 24 mai I974, la Commission de police adoptait le règlement no 11, visant à réglementer le salaire des chefs de police et également à déterminer leurs tâches, je crois. Depuis cette date, les journaux ont rapporté certaines histoires, laissant croire que ce règlement n'était pas appliqué. En premier lieu, au début de décembre I974, il y a eu l'histoire du chef Jean-Marc Gobeil, de la ville de Château-Richer, qui ne gagnait que $125 par semaine. En second lieu, en mars dernier, le Syndicat professionnel des chefs de police et pompiers émettait de fortes réserves quant à l'état de la situation de plusieurs chefs au Québec. Est-ce que le ministre est en mesure de nous dire s'il entend faire quelque chose pour régulariser la situation?

M. Choquette: L'échelle indicative qui a été mise en vigueur par le règlement auquel le député a fait référence ne suggère pas une échelle qui soit obligatoire et qui s'impose d'une façon absolue aux municipalités. Je dois dire cependant que l'échelle a été bien accueillie par les chefs de police, les directeurs des services de police, et je pense bien que la plupart des municipalités s'y conforment. Mais, il peut y avoir des différences. Il peut y avoir des exceptions. Pour le moment, je n'ai pas décidé de la rendre absolument obligatoire. Je pense que cela requerrait plus d'analyse avant d'imposer cette échelle d'une façon absolue.

Maintenant, vous me signalez le chef de Château-Richer qui...

M. Bédard (Chicoutimi): Qui semble être dans une situation particulière.

M. Choquette: Je ne connais pas la situation particulière de ce monsieur, de l'intéressé.

M. Bédard (Chicoutimi): Pourtant cela a fait pas mal de bruit. Est-ce que le ministre n'a pas fait enquête pour voir jusqu'à quel point pouvaient être fondées ces revendications?

M. Choquette: II peut y avoir un conflit entre le chef de police de cette municipalité et son conseil municipal. Mon sous-ministre me dit qu'il est possible qu'il y ait une enquête de la Commission de police dans ce corps de police ou sur ce chef de police. Alors, il faudrait voir les conditions particulières.

M. Desjardins: Son nom? Une Voix: Gobeil.

M. Bédard (Chicoutimi): Jean-Marc Gobeil. Dans ce cas, il y aurait lieu, sûrement, de faire une enquête. Quand on est rendu dans une situation où le maire est obligé de fuir devant la colère de la population qui considère que son chef de police n'a pas les moyens financiers suffisants pour pouvoir remplir adéquatement sa tâche, il me semble que cela crée un état d'urgence.

M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): On peut compter ' qu'il y aura une enquête dans ce cas particulier?

M. Choquette: Non. Mais ce qu'il s'agira de vérifier, c'est si la Commission de police a été saisie d'une demande d'enquête, sous une forme ou sous une autre, dans cette municipalité de Château-Richer. Cela est très possible.

Le Président (M. La francs): Le programme 4, éléments 1, 2 et 3, adopté.

Programme 5: Gestion interne et soutien à la Sûreté du Québec.

Sûreté du Québec

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que le ministre pourrait nous donner des explications générales sur ce programme concernant les augmentations budgétaires qu'on peut constater à chacun des éléments?

M. Choquette: Alors, l'accroissement des dépenses de ce programme résulte de l'augmentation des traitements, de l'accroissement des coûts d'exploitation de la flotte automobile et, en troisième lieu, de l'amétioration du réseau de communication par téléphone de la Sûreté du Québec.

M. Bédard (Chicoutimi): Ce sont quand même des augmentations assez appréciables.

M. Choquette: Je rappelle au député qu'en cours d'année, en 1974, nous avons dû demander des budgets supplémentaires pour venir accroître le budget originel. Les augmentations qui semblent indiquées par la comparaison entre le budget 1974/75 et le budget 1975/76 ne sont pas si considérables que cela, compte tenu des budgets supplémentaires votés en cours d'année.

M. Bédard (Chicoutimi): Concernant la gestion interne, le ministre sait que le contrat de travail des policiers provinciaux, qui a été signé en septembre dernier, au moins recommandait l'essai d'une formule de semaine de travail réduite à quatre jours. Est-ce que le ministre peut nous dire si, d'abord, l'expérience a été tentée jusqu'à présent? Si c'est le cas, pourrait-il nous en donner les résultats?

M. Choquette: Nous avons mis ce programme en vigueur dans certains postes de police qui ont été choisis et désignés parce que tout le monde était d'accord pour essayer la formule.

Mais, à l'heure actuelle, il est trop tôt pour évaluer le résultat de ces projets. Alors, je ne peux pas dire au député si cela sera généralisé à l'ensemble des activités de la Sûreté du Québec. Pour le moment, il s'agit plutôt de projets pilotes qui sont en voie d'être évalués.

M. Bédard (Chicoutimi):Ces projets pilotes se font où?

M. Choquette: Sept ou huit postes ont été choisis mais M. Tellier ne se souvient pas des postes qui ont été désignés.

M. Bédard (Chicoutimi): A la lumière du début d'expérience que vous avez dans ce domaine, est-ce que vous seriez en mesure de confirmer l'affirmation du nouveau directeur de la Sûreté du Québec, disant que cette politique, si on la généralisait, obligerait l'engagement de 500 policiers additionnels? Est-ce qu'à la lumière de la courte expérience que vous avez, vous êtes en mesure d'infirmer ou de confirmer cette appréciation qui a déjà été faite?

M. Choquette: Pour le moment, nous ne sommes pas en mesure d'évaluer l'expérience avec assez de précision pour donner même une indication au député de Chicoutimi.

M. Bédard (Chicoutimi): Pas d'une façon générale mais dans les endroits où vous avez tenté l'expérience, est-ce que, sur ce point précis, cette expérience s'est soldée par la nécessité d'adjoindre d'autres membres de personnel?

M. Choquette: Non.

M. Bédard (Chicoutimi): Non. Quand le ministre pense-t-il être en mesure de se former une opinion à la suite de ces expériences qui sont tentées dans des postes désignés?

M. Choquette: Nos expériences ont commencé le 1er avril 1975. Il est vraiment trop tôt pour...

M. Bédard (Chicoutimi): Je comprends que c'est vraiment trop tôt.

M. Choquette: ... se former un jugement. Quant au moment où on pourra vraiment évaluer le résultat des expériences, je ne peux pas le dire. Cela peut aller au mois de septembre, cela peut aller en octobre facilement.

M. Bédard (Chicoutimi): Je n'ai pas d'autres questions, M. le Président, sur le programme 5.

Le Président (M. Lafrance): Elément I, adopté. Elément 2, adopté. Elément 3, adopté. Le programme 5 est adopté.

Programme 6: Formation et perfectionnement des policiers.

Formation et perfectionnement des policiers

M. Bédard (Chicoutimi): Concernant le coût de l'entraînement des policies, le livre blanc donne des statistiques quant au nombre de policiers qui ont été formés ou encore qui ont été recyclés à l'Institut de police. Je voudrais savoir du ministre quel est le coût moyen de cette formation pour chaque type de cours per capita.

M. Choquette: Je pourrais possiblement vous donner une réponse approximative sur le coût de formation des nouveaux policiers car ceux-ci doivent subir un entraînement de quatre mois à l'Institut de police de Nicolet. On pourrait vous donner une idée de ce que cela nous coûte pour leur entraînement.

Quant au recyclage ou aux cours de perfectionnement qui sont donnés à des policiers qui sont déjà en fonction, étant donné que c'est très variable d'une catégorie à l'autre, je ne pense pas que je puisse vous donner de chiffre très très précis.

Il est extrêmement difficile de donner une réponse qui ait la moindre précision parce que tout dépend de ce que l'on va comprendre dans le coût par capita de l'entraînement de chaque cadet ou étudiant policier. On peut imputer à chacun d'entre eux une partie des frais d'entretien de l'édifice, on peut inclure toutes sortes de dépenses, mais je pense que si on disait $1,000 pour chaque candidat, pour la période de quatre mois, qui est la période d'entraînement on serait assez près de la vérité.

Ecoute électronique

M. Bédard (Chicoutimi): D'accord. Je comprends que cela défile assez vite concernant les programmes. J'aurais une question à poser concernant le programme précédent; j'imagine que la commission n'a pas d'objection.

M. Choquette: Du tout.

M. Bédard (Chicoutimi): Ce serait concernant l'écoute électronique.

M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): J'aimais mieux demander la permission avant de dire sur quoi par-

tait ma question. Dans le rapport qui a été présenté à l'Assemblée nationale concernant la Loi de la protection de la vie privée...

M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): ...on remarque, à la page 6, à l'élément a), que le nombre de demandes d'autorisation qui ont été présentées a été de 69. Ce que je voudrais savoir du ministre, c'est s'il peut nous assurer, avec conviction, qu'il n'y a pas d'autres personnes qui font l'objet d'écoute électronique que celles pour lesquelles des demandes d'autorisation ont été faites et accordées.

M. Choquette: Je peux l'affirmer avec une conviction totale, sauf pour un groupe, les gens qui pourraient faire l'objet d'écoute électronique pour des motifs de sécurité nationale et à l'égard desquels une autorisation aurait été donnée par le Solliciteur général du Canada, conformément à la Loi de la protection de la vie privée. Le député se rappellera qu'il y a deux catégories, en somme...

M. Bédard (Chicoutimi): De gens écoutés.

M. Choquette: Non, non, de cas d'écoute électronique. Il y a l'écoute qui est autorisée judiciairement — le rapport que j'ai produit et auquel le député a fait allusion vise ces cas — et il y a aussi, en vertu de la loi que nous avons mentionnée précédemment, des cas d'écoute électronique au nom de la sécurité nationale. Dans ces cas-là, l'autorisation judiciaire n'est pas requise, la seule autorisation requise étant une autorisation du Solliciteur général du Canada.

Etant donné que l'autorisation ne vient pas de moi, je ne suis pas en mesure de dire au député combien il pourrait y avoir de cas d'écoute électronique qui seraient faits consécutivement à une autorisation de M. Allmand.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que je dois comprendre que dans les cas qui relèvent de la sécurité nationale où la permission est accordée par le Solliciteur général, et qui concernent des citoyens québécois, le ministre de la Justice du Québec n'a pas un mot à dire là-dedans?

M. Choquette: Non.

M. Bédard (Chicoutimi): II n'est pas informé?

M. Choquette: Non.

M. Bédard (Chicoutimi): II n'est pas consulté?

M. Choquette: Non.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que le ministre de la Justice fait des recommandations?

M. Choquette: Non.

M. Bédard (Chicoutimi): II n'en a pas fait dans le passé sur qui que ce soit?

M. Choquette: Non.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous n'avez pas plus de contrôle là que sur les pardons?

M. Choquette: Moins.

M. Bédard (Chicoutimi): Encore moins.

M. Choquette: Moins. En fait, sur les pardons, je peux toujours intervenir, mais dans ce domaine...

M. Bédard (Chicoutimi): Quand on vous en informe avant qu'il soit accordé?

M. Choquette: Oui, si on m'informait avant qu'il soit accordé. Mais dans le domaine de l'écoute pour des motifs de sécurité nationale, hy-pothétiquement, il pourrait se faire que M. Allmand me consulte, mais cela n'est pas arrivé depuis que la loi est en vigueur.

M. Bédard (Chicoutimi): Mais, trouvez-vous cela normal que des citoyens québécois puissent faire l'objet de l'écoute électronique avec permission du Solliciteur général, sans que le ministre de la Justice du Québec soit informé?

M. Choquette: Ce qui est normal est ce qu'il y a dans la Loi de la protection de la vie privée. C'est la loi qui a été adoptée par le gouvernement du Canada. Je dois m'en rapporter à cette loi.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que vous trouvez que cette loi respecte vraiment la juridiction provinciale, respecte ce droit que devrait avoir le ministre de la Justice de savoir au moins quels sont les citoyens québécois qui font l'objet d'écoute électronique avec permission du Solliciteur général du Canada?

M. Choquette: Evidemment, si on avait un Etat séparé, tel que désiré par le député de Chicoutimi, il n'y a pas de doute que ce serait anormal...

M. Bédard (Chicoutimi): Vous pouvez tourner la question comme vous voudrez, vous sayez très bien que la question est sérieuse. J'aimerais avoir une réponse sérieuse de la part du ministre. Je lui demande ceci: Est-ce qu'il trouve normal qu'il ne soit pas consulté, qu'il ne soit pas informé que des citoyens du Québec puissent être l'objet d'écoute électronique de la part des autorités fédérales?

M. Choquette: C'est une question à laquelle je ne pourrais pas donner de réponse absolue. Il y a des circonstances où je pourrais être consulté. Il y en a d'autres où il peut y avoir des enquêtes en cours par la Gendarmerie royale...

M. Bédard (Chicoutimi): Avez-vous déjà été consulté?

M. Choquette: J'ai répondu: Non.

M. Bédard (Chicoutimi): D'accord.

M. Choquette: Mais on ne sait même pas s'il y en a eu des cas d'écoute électronique.

M. Bédard (Chicoutimi): Je ne vous demande pas s'il y en a eu, je vous demande si vous trouvez ça normal.

M. Choquette: Vous me posez une question d'opinion. Cela peut varier d'un cas a l'autre ou de certaines circonstances à d'autres. Franchement, j'aimerais mieux ne pas exprimer d'avis sur cela. De multiples facteurs peuvent justifier la Gendarmerie royale de procéder à de l'écoute électronique, pour des motifs de sécurité nationale. Il peut y avoir des cas d'espionnage, de contre-espionnage qui se passent à des niveaux diplomatiques ou autres dans lesquels, à proprement parler, je ne suis pas impliqué. Il ne s'agit pas, à ce moment, de violation de la loi ou du code criminel à proprement dire. Il s'agit plutôt de connaissance de renseignements par le gouvernement canadien qui peuvent lui être utiles au point de vue politique ou autres. Là, vous êtes à un niveau...

M. Bédard (Chicoutimi): C'est un niveau qui contrôle...

M. Choquette: Non, vous êtes à un niveau des activités des Etats pour leur propre protection qui débordent largement l'application du code criminel et des lois à portée criminelle.

On sait, par exemple, que beaucoup d'Etats ont des services de renseignements spéciaux, des services d'espionnage et de contre-espionnage. Il ne s'agit pas, dans ces cas, de violations proprement dites du code criminel, malgré que cela peut se produire. Il peut y avoir des violations d'autres lois de nature criminelle, la loi des secrets officiels, et, pourtant, il peut ne pas y avoir de violation du code criminel comme tel. Quels sont les principes qui doivent inspirer un Etat dans sa politique d'obtention de renseignements dans les domaines qui ne concernent pas l'application du droit criminel proprement dit? C'est une question qui demeure une matière d'opinion individuelle et qui peut facilement être controversée. On le voit aux Etats-Unis, à l'heure actuelle, avec les activités de la CIA, qui font l'objet d'un examen par un comité présidé par le vice-président des Etats-Unis. On l'a vu à d'autres occasions par les controverses qui ont eu lieu quant aux activités du FBI.

Il s'agit là d'un domaine qui intéresse la poursuite de certaines politiques d'un Etat et, à ce point de vue, je n'aimerais pas exprimer d'avis personnel.

M. Bédard (Chicoutimi): Je comprends qu'il y ait des cas particuliers où il faille faire des distinctions. Mais, du point de vue général, ne trouvez-vous pas anormal que des citoyens québécois puissent faire l'objet de l'écoute électronique de la part du gouvernement fédéral et que le ministre de la Justice du Québec ne soit pas consulté, ne soit même pas informé?

M. Choquette: Ecoutez...

M. Bédard (Chicoutimi): Ne parlons pas des cas particuliers.

M. Choquette: Non, non, je ne prends pas de cas particuliers, parce que je serais bien mal pris pour en parler, ne les connaissant pas.

M. Bédard (Chicoutimi): Bien oui.

M. Choquette: Alors, ce n'est pas tellement à ce niveau que je me situe. Je me situe plutôt au niveau du fait que, dans le monde actuel, il faut que les Etats se défendent non seulement sur le plan de la légalité, mais il faut qu'ils se défendent sur le plan de la politique et surtout de la politique internationale. Il peut être nécessaire, pour eux, d'avoir recours à certaines activités qui débordent, d'une certaine façon, les cadres traditionnels de l'application des lois. Cela demeure une question de philosophie, d'attitude, de politique. C'est le gouvernement fédéral qui a la responsabilité à ce point de vue et je ne lui dénie pas cette responsabilité juridique.

M. Bédard (Chicoutimi): Mais donnez-vous une responsabilité au Québec?

M. Choquette: Le Québec a certainement une responsabilité.

M. Bédard (Chicoutimi): Le gouvernement fédéral ne la reconnaît pas.

M. Choquette: Non, mais la preuve en est que, dans des cas d'écoute électronique par la Gendarmerie royale du Canada, qui ne tombent pas dans la catégorie que vous avez mentionnée tout à l'heure d'écoute électronique faite au nom de la sécurité nationale, la Gendarmerie royale du Canada se soumet alors et dans ces cas au contrôle du ministre de la Justice du Québec et des tribunaux du Québec et fait approuver ses officiers et ses agents qui sont préposés à ce genre d'opérations, de telle sorte que...

M. Bédard (Chicoutimi): Oui, mais...

M. Choquette: Laissez-moi terminer avant d'interrompre.

M. Bédard (Chicoutimi): D'accord.

M. Choquette: De telle sorte que tous les corps de police du Québec se soumettent à l'autorité provinciale pour ce qui est de l'application des lois criminelles, pour ce qui est des cas d'écoute électronique qui seront autorisés soit par mes mandataires, soit par moi personnellement et qui seront subséquemment autorisés par les cours de justice, et ceci conformément aux dispositions de la Loi de la protection de la vie privée.

Mais, quand on arrive dans le domaine de la sécurité nationale, les opérations sont autorisées par le Solliciteur général du Canada et il lui est

loisible de les accepter ou de les refuser. Le Parlement du Canada lui a donné ces pouvoirs et je présume qu'il s'en charge bien.

D:ailleurs, il n'est pas venu à ma connaissance qu'il y avait eu d'abus à ce point de vue.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous ne pouvez pas savoir s'il y a des abus, vous n'êtes pas au courant.

M. Choquette: On aurait pu le savoir, parce que j'ai vu que la CSN se plaignait d'être infiltrée mais, en fait, il n'est pas venu à notre connaissance de cas particulier où des écoutes aient été relevées qui auraient été faites irrégulièrement ou indûment suivant une autorisation du Solliciteur général.

M. Bédard (Chicoutimi): Quand vous prenez le cas de la CSN, est-ce que je dois comprendre que l'écoute électronique dont elle prétendait être victime...

M. Choquette: Non, la CSN, ce n'était pas tellement cela. C'était l'infiltration dont elle se plaignait.

M. Bédard (Chicoutimi): L'infiltration... Quand vous parlez de la Gendarmerie royale, je comprends qu'elle réfère certains cas au ministre de la Justice du Québec. Lorsqu'elle veut procéder, elle passe par la réglementation.

M. Choquette: La Gendarmerie royale du Canada se soumet à ma réglementation et au mandataire que j'ai désigné. Elle y soumet son personnel affecté à ce genre, d'opération chaque fois qu'il s'agit de l'application du code criminel.

M. Bédard (Chicoutimi): Mais si la Gendarmerie royale croit qu'il est bon de procéder à l'écoute électronique de certaines personnes au nom de la notion de la sécurité nationale...

M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): ...à ce moment-là, c'est au Solliciteur général qu'elle s'adresse.

M. Choquette: Exactement.

M. Bédard (Chicoutimi): Et elle n'informe pas le ministre de la Justice.

M. Choquette: Non, exactement. A ce moment-là, je crois qu'elle a des services spéciaux pour ce genre de choses.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous trouvez cela normal?

M. Choquette: Normal, je n'ai pas d'opinion à exprimer. C'est la loi.

M. Bédard (Chicoutimi): Mais vous trouvez normal que la Gendarmerie royale, elle, puisse elle-même décider que, dans tel cas, c'est une question de sécurité nationale. Donc, le ministre de la Justice n'est pas concerné et on va s'en aller directement au Solliciteur général.

M. Choquette: Pour être absolument sincère avec vous, je crois que c'est normal. Je vais vous dire pourquoi. Ce n'est pas moi qui dirige la politique extérieure du Canada. Moi, ma responsabilité, c'est de m'occuper de l'application des lois et du code criminel.

M. Bédard (Chicoutimi): Oui mais...

M. Choquette: Un instant. Vous parlez constamment, vous m'interrompez constamment. La politique internationale du gouvernement canadien, je n'ai pas été élu pour la faire. Je ne connais pas de mandat constitutionnel qui appartienne au gouvernement du Québec de s'immiscer dans la politique du gouvernement canadien au point de vue du droit international. Les électeurs pourront juger le gouvernement de M. Trudeau; ils pourront juger les ministres de M. Trudeau et les députés élus ici à l'occasion de l'élection fédérale. S'ils sont mécontents, ils pourront les mettre dehors. Mais, jusqu'à nouvel ordre, c'est ce gouvernement qui a la responsabilité constitutionnelle de la conduite des opérations dans l'ordre international des affaires canadiennes. Je n'irai pas m'immiscer là-dedans. Je ne considère pas que le gouvernement fédéral doive me rendre des comptes à ce point de vue.

M. Bédard (Chicoutimi): Cela va loin votre raisonnement. Si, au nom de la motion de la sécurité nationale, le gouvernement fédéral croyait normal et nécessaire que les membres du Parlement du Québec soient sujets à l'écoute électronique, vous trouveriez normal de n'en pas être informé?

M. Choquette: Comme je l'ai dit, il y a un partage des tâches sur le plan constitutionnel. Les procureurs généraux des provinces ont une responsabilité légale et constitutionnelle: c'est de s'occuper de l'application du droit criminel et des lois criminelles en général, peut-on dire. Donc, à ce point de vue, le Parlement fédéral a légiféré que, dans ces cas, il y a une procédure à suivre pour l'écoute électronique.

Quand on arrive au niveau de la sécurité nationale, je ne dis pas qu'il ne pourrait pas y avoir d'abus, car la procédure qui s'applique dans ces cas est moins serrée que dans les cas concernant l'application du droit criminel ordinaire. On peut comprendre cependant qu'un Etat, pour sa sécurité, pour sa politique extérieure, pour faire face à l'espionnage étranger et le dépister, veuille se donner une procédure plus souple que la procédure qui, autrement, s'applique dans les cas ordinaires relevant du droit criminel. Là, il s'agit de l'intérêt national.

Evidemment, cette procédure plus souple peut permettre qu'il y ait un contrôle réduit ou moindre sur de telles opérations, mais encore faudrait-il justifier qu'il y aurait de tels abus, en-

core faudrait-il le démontrer, encore faudrait-il le préciser dans certains cas particuliers. Moi, je ne connais pas d'Etat qui soumette ses enquêtes ou ses cas d'écoute électronique à un contrôle lourd, à un contrôle soit judiciaire, soit par la consultation d'autres personnes. Il va de soi qu'étant un domaine de la sécurité nationale, tout cela est laissé à la conscience et au bon jugement de ceux qui en ont la responsabilité première. En l'occurrence, au Canada, c'est le Solliciteur général du Canada, c'est le gouvernement canadien avec le conseil des ministres canadiens.

Si vous voulez une réponse absolument précise, cela ne me scandalise pas. Au contraire, cela me paraît assez normal vu la pratique des Etats modernes et cela me paraît assez compatible avec un fédéralisme qui existe au Canada à l'heure actuelle. Je ne vois pas l'occasion de scandale dans tout cela.

M. Bédard (Chicoutimi): La question n'est pas d'être à la recherche de scandale, mais je peux vous dire que je trouve cela anormal...

M. Choquette: Cela peut être votre opinion.

M. Bédard (Chicoutimi): ... qu'au nom de la sécurité nationale un ministre de la Justice du Québec ne soit pas informé, ne soit pas même consulté concernant les cas d'écoute électronique même pour la sécurité nationale. La sécurité nationale, ce n'est pas seulement la sécurité en fonction du danger que pourraient représenter d'autres pays, c'est la sécurité à l'intérieur de l'ensemble du Canada dont nous faisons partie, à l'heure actuelle, nous la province de Québec. Il me semble que le Québec, les provinces devraient avoir un droit de regard, au moins un droit d'information sur ce qui se fait sur leur territoire concernant la sécurité, concernant l'écoute électronique, d'une façon plus particulière.

Cela donne comme résultat, au bout, que vous ne pouvez pas nous dire s'il y a des abus, vous ne savez pas qui est l'objet d'écoute à l'heure actuelle. Vous ne pouvez même pas nous dire si, effectivement, tout ce qui devrait être l'objet d'écoute, en vrais termes de sécurité nationale, on y procède dans le Québec parce que vous n'êtes pas au courant non plus, vous ne faites même pas de recommandation au Solliciteur général. Comme ministre de la Justice qui doit assurer la protection des citoyens, la protection d'un droit sacré, la vie privée, vous n'avez absolument rien en main pour garantir cette sécurité, sur l'aspect principal de l'écoute électronique.

Si je vous demandais: Est-ce que le ministre peut me dire si les membres du Parlement font l'objet d'écoute électronique de la part du Solliciteur général ou de la Gendarmerie royale au nom du principe de la sécurité nationale? Est-ce que le ministre peut me dire: Non.

M. Choquette: Vous avez parlé de... M. Bédard (Chicoutimi): Non, non...

M. Choquette: Laissez-moi répondre. Je ne suis pas obligé de répondre comme vous le voulez. Laissez-moi donner mes propres réponses.

M. Bédard (Chicoutimi): Répondez à la question, par exemple.

M. Choquette: Oui, je réponds aux questions, mais laissez-moi répondre à mon goût, pas à votre goût.

M. Bédard (Chicoutimi): D'accord.

M. Choquette: Vous me parlez du principe sacré du respect de la vie privée. Sacré jusqu'à quel point? La sécurité nationale passe avant le caractère sacré de la protection de la vie privée, cela me paraît assez clair. N'importe qui va admettre cela. Je ne vois pas... Tous les principes doivent s'ordonner les uns par rapport aux autres. Les principes absolus, je n'en connais pas beaucoup.

Donc, je vous dis que, personnellement, je trouve justifiée la loi actuelle sur ce point-là. Ce qui ne veut pas dire que je considérerais justifié qu'on en abuse, par exemple. Ce qui ne voudrait pas dire que je considérerais ou que j'approuverais des mesures de cette sorte qui s'appliqueraient à des gens, à des honnêtes citoyens qui peuvent avoir des idées politiques différentes des autorités ou des partis politiques qui ont les responsabilités à l'heure actuelle. Tout dépend, en fait, de la réserve, du jugement et de l'intégrité de ceux qui administrent ce genre de loi.

Je pense, M. le député, que, dans le cas actuel, je ne peux pas donner de réponse, d'autant plus que les seules réponses qui pourraient être logiquement et raisonnablement données pourraient l'être dans un autre Parlement, c'est-à-dire au Parlement fédéral. Même là, je pense que M. Allmand serait dans une situation où il lui serait impossible de donner des réponses précises à des collègues de l'Opposition qui pourraient l'interroger, comme vous, vous m'interrogez. Peut-être que, privément, dans une réunion à huis clos, il pourrait communiquer certains renseignements aux principaux représentants de l'Opposition, en leur disant l'étendue de l'usage de ces méthodes pour les fins de la sécurité nationale, et ceci pour qu'il y ait au moins un certain contrôle, une certaine critique possible par les partis d'Opposition dans ce Parlement. Mais, moi, je dois prendre le droit criminel tel qu'il est, je dois prendre la situation politique telle qu'elle est au Canada. Nous avons un régime fédéral. Le gouvernement fédéral a des responsabilités bien précises et je n'ai pas l'intention, pour ma part, d'aller m'immiscer ou de prendre des positions publiques qu'il serait, en somme irréaliste de prendre, compte tenu de l'organisation politique actuelle et de la constitution actuelle du Canada.

Vous m'interrogez, au fond, sur un sujet qui ne me regarde pas, à l'heure actuelle.

M. Bédard (Chicoutimi): On peut aller jusqu'à une heure.

Le Président (M. Lafrance): Avez-vous l'intention d'aller jusqu'à une heure?

M. Bédard (Chicoutimi): Oui.

M. Desjardins: On avait convenu 12 h 30.

M. Bédard (Chicoutimi): Une dernière question.

Le Président (M. Lafrance): Une dernière, d'accord.

M. Bédard (Chicoutimi): Si je comprends bien, vous avez, d'une part, la Sûreté du Québec qui fait certaines écoutes électroniques...

M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): ... selon une réglementation établie.

M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): D'accord.

M. Choquette: La police...

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce qu'elle en fait d'autres sans demander cette permission?

M. Choquette: Non.

M. Bédard Chicoutimi): D'accord.

M. Choquette: Je suis persuadé...

M. Bédard (Chicoutimi): Ce n'est pas cela ma question. D'autre part, vous avez la Gendarmerie royale qui peut faire...

M. Choquette: II y a le service de la police de la Communauté urbaine de Montréal qui en fait aussi.

M. Bédard (Chicoutimi): Qui en fait aussi.

M. Choquette: II y a d'autres corps de police qui en font ou qui vont en faire.

M. Bédard (Chicoutimi): Mais je veux parler de ce qui peut se faire par d'autres corps extérieurs au Québec, sur lesquels le Québec n'a aucun contrôle. Il y a, d'une part, le Gendarmerie royale, dans le Québec, qui lorsqu'il s'agit de questions de sécurité nationale peut procéder à l'écoute électronique, mais doit demander la permission au Solliciteur général. Il y a le Solliciteur général lui-même qui peut accorder, pour des raisons de sécurité nationale, des permis d'écoute.

M. Choquette: C'est cela.

M. Bédard (Chicoutimi): Je ne veux pas demander des noms; je sais bien qu'à ce moment ce ne serait pas conforme à ce qu'on appelle la notion de sécurité nationale. Le but de mes questions, c'est surtout de savoir, d'avoir au moins la conviction que, concernant l'écoute électronique, que ce soient des questions de sécurité nationale ou des questions d'enquêtes policières à l'intérieur du Québec, le ministre de la Justice est informé. Je n'ai pas besoin de l'être moi-même, mais je ne peux pas trouver normal que le ministre de la Justice ne soit pas informé des cas d'écoute électronique qui peuvent se faire au nom de la sécurité nationale par la Gendarmerie royale, d'une part, par la Solliciteur général du Canada, d'autre part, surtout que cette notion de sécurité nationale peut donner lieu, je pense, à des définitions qui peuvent être différentes et qui peuvent être très extensibles.

Je voudrais savoir du ministre s'il peut nous donner l'assurance que les membres du Parlement du Québec ne sont pas l'objet d'écoute électronique de la part de la Gendarmerie royale ou du Solliciteur générale du Canada, au nom de la sécurité nationale. Est-ce qu'il peut nous donner l'assurance qu'au nom de la sécurité nationale, puisque vous parliez de divergences d'opinions politiques, tout à l'heure, les députés du Parti québécois ne font pas l'objet d'écoute électronique, soit de la part de la Gendarmerie royale, du Solliciteur général ou encore de la part des forces policières qui le feraient en dehors des règlements qui leur sont imposés?

M. Choquette: Illégalement. Voici, vous parlez de divergences politiques. Moi, je dis que des divergences politiques ne justifieraient d'aucune façon l'écoute électronique parce que cela ouvrirait la porte à n'importe quel procédé d'enquête qui n'aurait pas sa place, à mon sens. Alors, il ne s'agit pas simplement d'une question de divergences politiques. C'est pour cela, je pense bien, que le député de Chicoutimi peut dormir sur ses deux oreilles et être bien sûr qu'il n'est pas écouté.

M. Bédard (Chicoutimi): Remarquez que cela ne m'inquiète pas personnellement.

M. Choquette: Non, non, d'accord. Mais lui ou d'autres.

M. Bédard (Chicoutimi): Mais cela m'inquiète de savoir jusqu'à quel point le ministre de la Justice a son mot à dire là-dedans.

M. Choquette: Non, non, mais lui ou d'autres. Je pense que ce ne sont pas les divergences politiques, car nous vivons dans une démocratie... Il y a des partis politiques et ces partis politiques ont le droit de représenter différentes idées politiques. Ces partis politiques ont le droit de ne pas être inquiétés ou de ne pas subir d'enquête dans leurs activités légitimes de faire valoir auprès des électeurs leur programme politique. Donc, il ne s'agit pas du tout de mettre la discussion sur cette base. Je pense que tout le monde s'entend très bien sur ces principes.

D'autre part, je puis vous dire que si, par exemple, la Sûreté du Québec ou la police de la CUM devaient tomber sur des cas intéressant la sécurité nationale, il serait loisible, dans ces cas, au Solliciteur général du Canada de donner une autorisation à un corps de police, qui serait un autre corps de police que la GRC, pour faire de l'écoute électronique au plan de la sécurité nationale. Mais je n'ai jamais entendu dire que cela se faisait.

M. Bédard (Chicoutimi): Le ministre exprime son idée sur l'opposition qu'il aurait à ce que des membres du Parlement ou encore des membres de factions politiques précises puissent être l'objet de l'écoute électronique.

M. Choquette: Cela prendrait des raisons extrêmement sérieuses et graves.

M. Bédard (Chicoutimi): Mais comme le Québec et vous, comme ministre de la Justice, n'avez rien à dire sur la définition de la notion de la sécurité nationale, qu'est-ce qui vous dit que le gouvernement fédéral, au nom de la sécurité nationale, lui, ne croit pas qu'il s'impose que les membres du Parlement du Québec, d'une façon globale, puissent être l'objet d'écoute électronique, que les membres d'une faction bien précise, du Parti québécois, qui prônent une idée très précise, l'indépendance, à ce moment...

M. Choquette: Parce qu'il y a des factions dans le Parti québécois?

M. Bédard (Chicoutimi): Non...

M. Choquette: Bien, c'est ce que vous avez dit.

M. Bédard (Chicoutimi): Une faction très précise par rapport aux autres partis.

M. Choquette: Vous avez dit que vous êtes divisés, qu'il y a différentes factions.

M. Bédard (Chicoutimi): Non. Vous savez très bien ce que j'ai voulu dire.

M. Choquette: II y a une bonne faction et il y en a une moins bonne.

M. Bédard (Chicoutimi): Non, non, il y a des factions politiques, le Parti libéral...

M. Choquette: II y a la faction de droite... M. Bédard (Chicoutimi): Bon. Je parle... M. Choquette: ... et la faction de gauche.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous pouvez rire, mais vous savez très bien que le sujet est bien plus sérieux que vous ne semblez vouloir le laisser paraître. Qu'est-ce qui vous dit qu'au nom de la sé- curité nationale — vous n'avez pas un mot à dire sur la définition, vous acceptez cela et vous trouvez cela normal — le gouvernement fédéral ne croit pas que les membres d'un parti politique qui prône l'indépendance doivent être l'objet d'écoute électronique? Vous accepteriez cette situation?

M. Choquette: C'est l'inverse que j'ai dit tout à l'heure. Je n'ai pas dit cela du tout. J'ai dit que nous vivons dans un pays démocratique, qu'on peut avoir les idées que l'on veut tant qu'elles se conforment à la loi et qu'on peut essayer de persuader les électeurs qu'on a raison. Donc, ce ne sont pas les divergences politiques qui doivent justifier des opérations d'écoute électronique. Si cela devait être, non seulement un gouvernement quel qu'il soit pourrait-il se considérer habilité à écouter les gens du Parti québécois, mais on pourrait possiblement vouloir écouter les membres du Parti créditiste, les membres du parti de l'Union Nationale, etc. Il n'y aurait pas de limite, en somme, aux abus dans ce domaine.

Je dis donc qu'il ne s'agit pas, à mon sens, du tout d'une question de divergences sur une base politique qui puisse le justifier.

Maintenant, la loi fédérale, en ce qui concerne l'écoute électronique, a les dispositions que vous connaissez. Je les prends comme telles et je dis que je ne connais pas, pour ma part, d'abus aux mécanismes qui ont été mis sur pied pour justifier ou autoriser de tels procédés lorsque cela est nécessaire.

M. Bédard (Chicoutimi): En fait, vous dites qu'on pourrait tous être l'objet de l'écoute électronique, de la part du fédéral, au nom du principe de la sécurité nationale, mais vous n'avez pas un mot à dire là-dessus, parce que vous n'êtes pas consulté, vous n'êtes pas informé.

M. Choquette: C'est cela.

M. Bédard (Chicoutimi): Puis vous trouvez ça normal.

M. Choquette: Je n'ai pas à trouver ça normal ou anormal. En fait, la loi est là. Comme je l'ai dit tout à l'heure, et je ne suis pas pour revenir sur l'argumentation qui justifie un tel état de choses, cela existe dans tous les Etats que je connais. Je sais très bien qu'aux Etats-Unis, si le FBI ou la CIA, pour des questions de sécurité nationale décident d'écouter M. Untel dans l'Etat de New York, le Procureur général de l'Etat de New York n'a pas d'autorisation à donner à une telle écoute.

M. Bédard (Chicoutimi): Aux Etats-Unis, il se fait une enquête aussi sur l'abus de l'écoute électronique.

M. Choquette: Ecoutez, faites-en une. Présentez-vous au fédéral puis soulevez la question au fédéral et contestez M. Allmand puis trouvez des abus de sa part.

M. Bédard (Chicoutimi): Puis le Québec n'a rien à dire.

M. Choquette: Ce n'est pas que le Québec n'a rien à dire, mais il me semble que vous faites une grosse affaire avec une niaiserie qui n'est rien du tout. Cela existe dans tous les Etats du monde.

M. Bédard (Chicoutimi): La protection de la vie privée, le ministre veut dire que c'est une niaiserie.

M. Choquette: II n'y a pas de principe absolu, et pas plus celui de la protection de la vie privée.

M. Bédard (Chicoutimi): Non, mais elle existe.

M. Choquette: Elle existe, mais c'est sujet à des impératifs nationaux. Il s'agit de savoir si les impératifs nationaux, à un moment donné, peuvent être tellement puissants, tellement forts, qu'ils s'imposent au-delà de toute autre considération.

M. Bédard (Chicoutimi): Dernière question. En quoi cela pourrait-il nuire que le ministre de la Justice — je ne dis pas tous les membres du Parlement, je ne dis pas toute la population — soit au moins informé, s'il n'est pas consulté, soit au moins informé de ces cas qui font l'objet de l'écoute électronique?

M. Choquette: Parce que la politique extérieure canadienne et la sécurité nationale canadienne sont sans aucun doute des matières qui appartiennent au gouvernement fédéral. S'il devait y avoir des complots ou des tractations ou des activités intéressant la sécurité nationale canadienne, tramées à l'intérieur ou avec des éléments extérieurs, il s'agirait, à ce moment, pour le gouvernement fédéral de prendre les moyens voulus pour contrecarrer les visées de ces gens et le faire le mieux possible et en utilisant les moyens les plus appropriés, les moins discutables possible, et que ce n'est pas ma responsabilité de le faire. Il ne sert à rien de m'imputer des responsabilités qui ne m'appartiennent pas, qui ont été attribuées de par la loi au Solliciteur général du Canada. Moi je pense que si vous avez des renseignements à demander, je vous suggère d'écrire à M. Allmand.

M. Bédard (Chicoutimi): Je n'écrirai pas à M. Allmand, mais je peux dire au ministre de la Justice que je crois qu'il n'assume pas ses responsabilités lorsqu'il n'exige pas du fédéral ou de la Gendarmerie royale d'être au moins, pour les cas concernant les citoyens du Québec, informé, d'être consulté sur ces cas d'écoute électronique qui se font vis-à-vis des citoyens du Québec.

M. Choquette: C'est l'opinion du député de Chicoutimi, ce n'est pas la mienne.

Le Président (M. Lafrance): Sur ce sujet très intéressant, la commission de la justice ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 50)

Reprise de la séance à 16 h 25

M. Picard (président de la commission de la justice): A l'ordre, s'il vous plaîtl La commission de la justice continue, cet après-midi l'étude des crédits du ministère de la Justice. Nous en étions à l'étude du programme 6, mais le député de Sainte-Anne m'a demandé la parole.

Mise au point de M. Springate

M. Springate: Mr Speaker, not to prolong the debate but basically to refer to something that was said this morning, concerning my famous speeding ticket that I earned on the Montreal-Quebec highway. It is true that I informed the Minister of Justice of this last week and of the circumstances arounding it. I am sure that the Minister of Justice wants equal application of the law for everyone, justice for all. And as a man who happens to teach police officers and police technology courses, I know that he is trying for that and I can see the results of the various courses that he has brought in and I know that the QPF, and the Montreal Police Force have improved tremendously since he has been there. So we are not going to get into that. I should also state and I think this has been repeated a number of times and the Minister repeated this this morning, that the Minister was not driving the vehicle. So I do not want to get into whether chauffeurs are responsible or what but we will leave it at that.

I should also state, as many newspapermen have accused the present Minister of Justice of having been the culprit, that it is not the Minister of Justice. Other people happen to drive Buicks too and I do not think there is any reason to name the Minister at this time or even in the future and I have no intention then or there.

Also, the Minister made one mistake this morning. He stated that I was a policeman. I was but I no longer am a policeman. Otherwise, I am very proud to have practiced that sacred profession for eleven and a half years and possibly, the Minister said, I still maintain that policeman philosophy. Maybe I do and I will make no excuses for it. And the matter is closed.

M. Burns: Ce qu'il y a de grave, c'est qu'en ne nommant pas le ministre et en excluant en particulier le ministre de la Justice, ce sont tous les autres ministres qui sont visés. Le député de Sainte-Anne pourrait nommer tous les ministres qui ne sont pas concernés.

M. Choquette: Le député de Maisonneuve n'était pas ici ce matin.

M. Burns: Non, c'est vrai. J'étais à la commission du travail.

M. Choquette: Ce n'est pas un blâme que je fais mais c'est simplement parce que la question a été soulevée par son collègue de Chicoutimi.

M. Burns: Je le sais.

M. Choquette: J'ai répondu à son collègue sur les faits pertinents. C'est à la suite de ces explications que j'ai données que le député de Sainte-Anne a décidé de se prévaloir de son droit de venir faire une courte déclaration à la commission. Cela me fait plaisir qu'il l'ait fait.

D'autre part, M. le Président, s'il veut rester avec nous pour continuer à débattre les crédits du ministère de la Justice, il est le bienvenu aussi.

M. Burns: C'est vrai. Je suis entièrement d'accord avec le ministre. Restez avec nous, le député de Sainte-Anne.

Le Président (M. Picard): Programme 6. Ecoute électroniique (suite)

M. Burns: Même s'il y a des nuances qu'on ne comprend pas dans ce que vous dites, cela ne fait rien.

M. le Président, je sais que ce matin, on a parlé d'écoute électronique. Ce n'était peut-être pas nécessairement au bon programme. Vous avez été très tolérant là-dessus. Egalement, ce matin, j'ai appris, via la commission de la présidence du conseil, à laquelle le chef de l'Opposition participait, que le fameux CAD — c'est un peu le sens de ma question qui se relie à l'écoute électronique — le Centre d'analyse et de documentation, qui relève du Conseil exécutif, avait, quant aux Affaires intergouvernementales — c'est assez étonnant — un terminal relié à toute émission de télex — ce n'est peut-être pas nécessairement de télex mais au point de vue des télécommunications — ou de télécommunications relevant du ministère des Affaires intergouvernementales. Il semble aussi qu'une partie du budget ou de la juridiction de ce fameux CAD, Centre d'analyse et de documentation, soit transférée au ministère de la Justice. Est-ce exact?

M. Choquette: Oui. M. Burns: C'est un fait.

M. Choquette: Cela va se faire incessamment. Des dispositions furent prises pour que cela se fasse.

M. Burns: Bon.

M. Choquette: Maintenant, ce n'est pas le CAD comme tel qui serait transféré au ministère de la Justice. C'est une des fonctions du Centre d'archives et de documentation et quelques personnes appartenant au CAD.

Les personnes seront dorénavant préposées, alors qu'elles seront fonctionnaires au ministère de la Justice, à faire les communications appropriées entre le premier ministre et la Sûreté du Québec. Si le premier ministre requiert des renseignements de la Sûreté du Québec, cela va passer par le canal du ministère de la Justice.

M. Burns: C'est quoi? C'est une section, un département, un service?

M. Choquette: C'est une des fonctions qui étaient accomplies par certaines personnes au Centre d'archives et de documentation, qui se trouvaient en communication avec la Sûreté du Québec pour certains renseignements faisant partie d'un ensemble de faits qui étaient colligés au niveau du Centre d'archives et de documentation, de façon à donner au premier ministre, en tout temps, un état de la situation sociale, soit générale, soit locale, au Québec.

Dorénavant, plutôt que d'avoir des rapports ou des relations directes entre le Centre d'archives et de documentation et la Sûreté du Québec, les personnes qui seront à même de demander des renseignements à la Sûreté du Québec seront situées au ministère de la Justice, à l'intérieur de la direction générale de la sécurité publique.

M. Burns: Mais dans le but de tenir le chef du gouvernement au courant.

M. Choquette: Dans le but de tenir soit le chef du gouvernement, soit le ministre de la Justice au courant.

M. Burns: En tout cas, cela me surprend, parce que, depuis toujours, le fameux CAD a présenté le visage d'un organisme purement et simplement d'information. Qu'on le transfère au ministère de la Justice, cela m'étonne et je fais une relation; je me demande si ce n'est pas dans ce sens-là que, dans le fond, le CAD, sans s'appeler comme tel, mais s'appelant Paul Desrochers à un moment donné, a eu accès à des bandes enregistrées relativement, particulièrement, à une enquête très précise concernant MM. Gagnon, Jean-Jacques Côté, Pierre Laporte à l'intérieur de l'enquête sur le crime organisé.

M. Choquette: Je ne pense pas que, même à l'époque où M. Desrochers aurait eu des contacts avec la Sûreté du Québec, le Centre d'archives et de documentation existait. Je pense qu'il n'existait même pas à ce moment-là.

M. Burns: Ce n'est pas cela que je dis au ministre. Je m'excuse, j'ai peut-être mal exprimé ce que je voulais dire. La section CAD qui s'en vient — qui s'appellera autrement, je suis d'accord — sous la juridiction du ministre de la Justice, je me demande si elle n'a pas toujours existé dans le fond, parce que le conseiller spécial du premier ministre agissait, à toutes fins pratiques comme cette section-là et avait même accès à des documents privilégiés d'enregistrement via l'écoute électronique.

M. Choquette: Non, je ne crois pas qu'on puisse jamais...

M. Burns: Vous ne croyez pas, non?

M. Choquette: ... expliquer les choses comme cela.

M. Burns: Mais dans le cas où M. Desrochers était allé dans les voûtes, à Parthenais, où apparemment une importante documentation se trouve, prendre connaissance de documents au nom du premier ministre en vertu de quelle autorité M. Desrochers était-il allé là?

M. Choquette: En vertu d'une autorité qui lui avait été conférée spécifiquement par le premier ministre, semble-t-il.

M. Burns: Sans passer par le ministre de la Justice.

M. Choquette: Non, mais enfin, ce n'était pas...

M. Burns: Les personnes qui sont chargées de l'écoute électronique sont sous la juridiction du ministre de la Justice.

M. Choquette: C'est-à-dire qu'elles sont à la Sûreté du Québec parce qu'il y a seulement la Sûreté du Québec qui fait de l'écoute électronique.

M. Burns: Plus la GRC et plus, peut-être, le CAD.

M. Choquette: Oui, oui. Non, je n'ai jamais entendu dire que le CAD ait fait aucune écoute électronique.

M. Burns: Etes-vous en mesure de nous assurer qu'ils n'en font pas?

M. Choquette: Je suis en mesure, moralement, d'affirmer qu'à ma connaissance le CAD n'a jamais fait d'écoute électronique. C'est à ma connaissance. Je suis moralement certain que non. Comme je l'ai dit à votre collègue ce matin, ceci est une vérité qu'on peut prendre comme absolue dans l'état actuel des choses.

Mais dans le passé, je n'ai jamais entendu dire qu'on ait fait quoi que ce soit dans ce domaine au CAD.

Le CAD, dans le passé, a plutôt pris connaissance de certains rapports de la Sûreté, de rapports qui provenaient du ministère du Travail et de rapports qui provenaient d'autres sources pour dresser un bilan quotidien ou hebdomadaire de l'évolution des situations qui seraient de nature à intéresser directement le premier ministre, soit pour des actions législatives, soit pour des actions administratives ou des prises de position publiques qu'il était appelé à prendre. Mais je n'ai jamais entendu dire que le CAD ait fait une enquête quelconque ou une opérations d'écoute électronique quelconque.

M. Burns: D'abord, ce serait peut-être utile, si le ministre le sait déjà, de nous dire quelles sont les personnes du CAD actuel qui seront transférées sous la juridiction du ministère de la Justice.

M. Choquette: M. Scotti et M. Barrette.

M. Burns: M. Scotti. Est-ce que M. Scotti serait le même M. Scotti qui faisait les enquêtes sur l'allégeance politique?

M. Choquette: II ne fait pas d'enquête sur l'allégeance politique, il fait des enquêtes...

M. Burns: Mais à la commission Cliche, à un moment donné, il y a M. Gagnon qui a dit relativement à M. Joyal, je crois: Nous avons vérifié...

M. Choquette: Oui, je me rappelle...

M. Burns: ...c'est-à-dire M. Scotti a vérifié l'allégeance... Non, nous avons vérifié l'allégeance politique... C'est de mémoire, vous allez me pardonner, je n'ai pas le texte sous les yeux...

M. Choquette: Oui, oui.

M. Burns: Je ne fais aucune erreur, c'est M. René Gagnon qui disait devant la commission Cliche: Nous avons fait faire une enquête concernant l'allégeance politique de l'individu en question qui s'appelait en l'occurrence M. Bergeron, je pense. C'est M. Bergeron ou M. Joyal, mais je pense que c'est M. Bergeron. Cela me revient.

M. Choquette: Oui.

M. Burns: Et M. Gagnon disait: Par la suite, cela a été confié à M. Scotti, ce genre d'enquête. Vous vous en souvenez, M. le ministre, je vous ai posé quelques questions en Chambre là-dessus, ce qui a donné lieu à quelques prises de bec entre vous et moi. Je n'ai pas du tout l'intention de reprendre cela aujourd'hui, mais est-ce que c'est le même M. Scotti qui était désigné dans le témoignage de M. Gagnon?

M. Choquette: Je ne sais pas s'il est question de M. Scotti dans le témoignage de M. Gagnon, vous me permettrez d'en douter. Mais il est certain que M. Scotti exerçait une fonction en vertu de laquelle il a à vérifier les antécédents de certaines personnes que le gouvernement serait sur le point d'embaucher. Vous savez que le gouvernement a eu, à quelques occasions, des problèmes avec des personnes qui ont été nommées à certains postes ou désignées à certaines fonctions. Il n'est donc que normal qu'avant leur nomination, on prenne les renseignements appropriés.

Maintenant, M. Scotti va continuer à remplir une fonction dans ce sens.

M. Burns: Est-ce que c'est un monsieur qui a une formation de policier, ce M. Scotti? Au fait, quel est le prénom de M. Scotti? Son prénom n'est pas nommé dans le témoignage de M. Gagnon.

M. Choquette: Anthony. M. Burns: Anthony.

M. Choquette: Anthony J. Scotti. Il a une expérience dans les corps de prévôté de l'armée. Il a occupé un poste de colonel dans l'armée.

M. Burns: Ah! bon. Disons, à toutes fins pratiques, les corps policiers de l'armée.

M. Choquette: Dans la police de l'armée.

M. Burns: C'est sa formation policière dans l'armée.

M. Choquette: C'est cela.

M. Burns: Le second personnage?

M. Choquette: L'autre personnage est M. Barrette qui n'était pas au Centre d'archives et de documentation, mais que nous avons engagé récemment. M. Barrette était, je crois, directeur de la sécurité à la Banque de Montréal.

M. Burns: II n'était pas, lui, au CAD? M. Choquette: Non. M. Burns: Mais M. Scotti y était. M. Choquette: II y était, oui.

M. Burns: Le prénom de M. Barrette, c'est quoi?

M. Choquette: Je n'ai pas son prénom à la mémoire, à ce moment-ci.

M. Burns: Vous dites qu'il était directeur de la sécurité?

M. Choquette: M. Barrette était, je pense, directeur de la sécurité à la Banque de Montréal. Et avant d'être à la Banque de Montréal, il a été agent et officier à la Gendarmerie royale du Canada.

M. Burns: Est-ce que — c'est la question normale qu'on est en droit de se poser à cause de ce transfert — normalement la venue de MM. Scotti et...

M. Choquette: Barrette.

M. Burns: ... Barrette — d'ailleurs, on devrait peut-être dire M. Scotti avec l'expression anglaise...

M. Choquette: II est francophone.

M. Burns: ... étant donné que son prénom est Anthony...

M. Choquette: Oui. Mais il est francophone.

M. Burns: Remarquez qu'on pourrait dire que mon prénom est Robert aussi.

M. Choquette: Robert Gordon Burns.

M. Burns: Robert Gordon. Mon Dieu, vous avez mon dossier sur votre bureau!

M. Choquette: Je n'ai pas besoin de dossier, je l'ai ici.

M. Burns: Non! Mais est-ce que cela veut dire, si on veut redevenir sérieux, que le filtrage de personnes clefs à l'intérieur du gouvernement ou de personnes qu'on veut éventuellement embaucher à l'intérieur du gouvernement se fera maintenant strictement par cette voie?

M. Choquette: Oui.

M. Burns: Cela veut dire que cela ne pourra plus se faire par l'entremise des cabinets des différents ministères.

M. Choquette: II y a beaucoup de propositions d'embauche qui peuvent provenir des cabinets de ministère comme de différentes autres personnes. Je veux dire que le gouvernement est un organisme assez immense, considérable par le nombre, que des suggestions quant à embaucher des personnes peuvent nous venir de multiples sources. Je pense bien que le député de Maisonneuve comprend facilement que, à un moment donné si quelqu'un se cherche un emploi ou pense qu'il aurait des dispositions pour occuper une fonction, eh bien! il peut le faire savoir par bien des personnes, que ce soit par des ministres, que ce soit par des députés, que ce soit par des cabinets. Donc, en fait, il n'y a pas de monopole qui est arrêté et qui détermine que toutes les personnes embauchées ou nommées par le gouvernement viennent toutes d'une source.

Mais, d'un autre côté, la vérification de leurs qualifications sur le plan police, sur le plan intégrité, enfin sur le plan des antécédents va se faire par les services de M. Scotti.

M. Burns: Alors, il est à présumer que tout ce qui appelle une vérification ou une enquête relativement à du personnel, qui est destiné à l'emploi du gouvernement, passera par là et non pas par ailleurs...

M. Choquette: Exact.

M. Burns: ... pour la suite.

M. Choquette: Exactement.

M. Burns: Bon. Est-ce que, dans le fond, le fait — je vais peut-être exprimer une opinion dans ma question mais en tout cas je vous demande de me la passer — que M. Scotti vienne du CAD et qu'une partie des crédits qui étaient affectés au CAD va nécessairement, je présume, être remise au ministère de la Justice avec la venue de M. Barrette, est-ce que, connaissant les qualifications de M. Scotti et de M. Barrette, on n'est pas en train d'admettre, tranquillement, que le CAD, du moins jusqu'à ce transfert, est une espèce d'organisme d'information du type CIA? Je vous le soumets et

c'est pour cela que je vous disais qu'il y a peut-être un élément d'opinion dans ma question. Mais cela a été l'objet de questions qui ont été soulevées par certains media, il y a quelque temps, c'est-à-dire que cela remonte déjà à plus d'un an. Certaines questions sont venues de l'Opposition, en l'occurrence de moi-même entre autres, demandant si ce ne serait pas une espèce de CIA québécois qu'on essaie de déguiser sous une espèce d'organisme qui collige des archives, de l'information, de la documentation, etc.

M. Choquette: Vraiment, non.

M. Burns: Est-ce que ce n'est pas une admission, entre autres, que M. Scotti , avec les qualifications qu'il avait, faisait partie du CAD?

M. Choquette: M. Scotti , avant d'entrer au CAD pour exercer une fonction, qu'il va d'ailleurs continuer à remplir alors qu'il sera au ministère de la Justice, était déjà à l'emploi du gouvernement comme directeur de la sécurité pour le ministère des Travaux publics.

M. Scotti a donc fait une certaine carrière à l'intérieur de la fonction publique québécoise. Le dernier poste qu'il a occupé avant d'entrer au CAD était celui de directeur de la sécurité au ministère des Travaux publics, qui a un certain nombre d'employés qui s'occupent de la garde des édifices publics et tout ça.

Donc, M. Scotti , je ne lui connais pas de "background" politique comme tel ou je n'ai aucune connaissance qu'il ait exercé une fonction qui serait de nature... vous savez de la nature du travail de la CIA. Il ne s'agit absolument pas de ça.

M. Scotti et M. Barrette, enfin, en autant que leurs fonctions sont concernées, vont être au ministère de la Justice. Il s'agit d'un aménagement plus adapté aux conditions actuelles et d'un ajustement des fonctions du ministère de la Justice par rapport à d'autres éléments du gouvernement, dont le premier ministre et le bureau du premier ministre.

Alors, il n'y a pas de mystère là-dedans, malgré que je comprends qu'un organisme comme le Centre d'archives et de documentation puisse susciter des interrogations parmi nos collègues. Mais, il n'y a vraiment pas de mystère dans tout ça. Je pense que le gouvernement s'est tout simplement équipé d'un service pour avoir une documentation appropriée, pour être en mesure d'apprécier la situation qui évolue constamment, comme on le sait.

Pour prendre des décisions, il faut vraiment être fixé sur l'évolution de cette situation et si on n'a pas les personnes en place pour le faire, cela peut entraîner des erreurs de jugement avec des conséquences assez graves.

Donc, c'est en plus, évidemment, de la fonction de vérifier les antécédents des personnes qui peuvent être nommées par le gouvernement, ce qui, également, me paraît tout à fait normal.

M. Burns: J'imagine que les salaires de MM. Scotti et Barrette vont émarger d'un certain pro- gramme, qui sera probablement le programme général des salaires.

M. Choquette: Le programme no 3, la direction générale de la sécurité.

M. Burns: La direction de la sécurité. Est-ce qu'il y aura des services accessoires qui leur seront affectés? Est-ce qu'il y a des budgets de prévus pour ça?

M. Choquette: Oui. Un très petit personnel de bureau, probablement des secrétaires, peut-être des commis de bureau, enfin des fonctions comme celles-là.

M. Burns: Est-ce que par l'entremise de la Sûreté du Québec on a déjà discuté du type de collaboration qui devait être fournie à MM. Scotti et Barrette?

M. Choquette: Oui, oui.

M. Burns: Quel est ce type de collaboration?

M. Choquette: Bien, écoutez il y a des renseignements qui leur seront assez facilement disponibles. Je pense, par exemple, dans le cas de M. Scotti, s'il demande à la Sûreté du Québec: Quels sont les antécédents judiciaires de M. X? A-t-il un dossier judiciaire? A-t-il déjà été condamné et tout ça? La Sûreté du Québec pourra probablement lui donner les renseignements très rapidement et très facilement. Par contre, si M. Scotti voulait être mis au courant de certaines enquêtes en cours a l'heure actuelle, en rapport avec une personne, à ce moment, il pourra possiblement avoir de tels renseignements pour que le gouvernement puisse agir en connaissance de cause. Mais là, les renseignements, qui lui seront communiqués par la Sûreté du Québec sont sujets à être plus contrôlés que dans le premier cas.

De la même manière, M. Barrette, qui agira comme le "channel", le canal pour la communication de renseignements au premier ministre, pourra obtenir très aisément des renseignements. On sait que la Sûreté du Québec est équipée, à cause de ses postes régionaux, pour dresser un peu le bilan de la situation sociale, telle qu'elle se présente.

Nos postes régionaux peuvent, à cause de l'entraînement qui a été donné aux policiers, porter un jugement et énoncer quelle est la situation de fait. Est-ce que tout est paisible? Est-ce qu'il y a des mouvements de contestation ou de revendication? Comment s'expriment-ils? Donc, la Sûreté, par ses services, dresse elle-même un bilan policier de la situation telle qu'elle peut exister au Québec et ceci d'une façon régulière. Ces renseignements sont facilement accessibles à M. Barrette pour être communiqués en plus haut lieu, de façon à donner le bilan de la situation. Maintenant, il peut y avoir d'autres renseignements de la Sûreté qui sont de nature plus confidentielle. Evidemment, avant d'être communiqués, il y aurait des exigences quant au caractère d'accessibilité des renseignements en question.

M. Burns: Est-ce qu'ils auront, par exemple, accès aux documents enregistrés via l'écoute électronique?

M. Choquette: En principe, non.

M. Burns: En principe non, mais en pratique?

M. Choquette: Non, à moins que... Ces fonctionnaires du ministère de la Justice ne sont nullement autorisés à aller fouiller dans les dossiers de la Sûreté du Québec et à être lâchés libres.

M. Burns: C'est parce que je reviens à M. Desrochers qui, lui, n'était même pas un fonctionnaire du ministère de la Justice, qui avait accès à ces documents très "top secret", si on peut les désigner ainsi, et qui, sauf erreur, avait été autorisé, non pas par le ministre de la Justice, mais par Julien Chouinard qu'on devra appeler, d'ici quelque temps, M. le juge Julien Chouinard, je pense, qui était secrétaire exécutif au Conseil exécutif. C'est assez étonnant...

M. Choquette: Non, non.

M. Burns: ...que, dans le cas d'une autorisation venant à M. Desrochers qui ne relève pas du ministère de la Justice, ce soit à un fonctionnaire, qui ne relève pas du ministère de la Justice, mais du Conseil exécutif, qu'on se fie pour obtenir une information.

M. Choquette: Tout d'abord...

M. Burns: Je me dis à ce moment: Est-ce que ce CAD, dans le fond, n'est pas... Je le dis dans votre intérêt, M. le ministre; tout à coup que ce serait une tête de flèche qu'on mettrait dans votre ministère pour vous surveiller vous-même. C'est pour cela que je parlais de la CIA.

M. Choquette: Tout d'abord, je ferai remarquer au député de Maisonneuve qu'il caricature pas mal les rencontres qui ont eu lieu entre M. Desrochers et certains officiers de la Sûreté du Québec. Ces rencontres ont eu lieu à l'intérieur d'un mandat prédéterminé qui a été d'ailleurs mentionné, je pense, devant la commission Cliche, aucune permission n'avait été donnée à M. Desrochers d'aller explorer dans tous les dossiers de la Sûreté. M. Desrochers allait chercher des renseignements très particuliers, très précis qui concernaient le fonctionnement de la Société d'habitation du Québec, si je me le rappelle bien. Donc, je pense qu'à ce point de vue il n'y a absolument rien de critiquable dans la démarche ou le mandat qui a été donné à M. Desrochers, non plus que du côté de la Sûreté. On peut être sûr que, de la même façon, dans le cas actuel, ces fonctionnaires, malgré qu'ils pourront communiquer aisément avec la Sûreté, n'auront pas un mandat de faire des inspections, des vérifications, de regarder dans tous les dossiers à la fois. Il faudra que les démarches soient justifiées par les crconstan-ces et par les demandes de renseignements qui pourront être faites, par moi-même ou par le premier ministre.

M. Burns: A ce moment, cela devient particulièrement important de cadrer le mandat qu'ils auront à l'intérieur du ministère de la Justice. Est-ce que vous êtes en mesure de nous le définir le plus précisément possible?

M. Choquette: Très facilement. Dans le cas de M. Scotti, il me semble que je l'ai bien défini. C'est de vérifier les antécédents et les activités de certaines personnes dont il est question de retenir les services pour le gouvernement, soit qu'elles pourraient occuper des hauts postes au sein de la fonction publique ou soit qu'elles pourraient être désignées à certaines fonctions parmi les commissions du gouvernement.

Dans le cas de M. Barrette, il s'agit d'être un canal pour les renseignements qui peuvent venir de la police et qui peuvent être utiles au ministère de la Justice ou au premier ministre dans son appréciation de la situation économique, de la situation sociale et politique au sens large du terme.

Il ne s'agit pas de petite politique ou de politique partisane, il s'agit de voir... On sait qu'il y a une grève dans le secteur de l'amiante à l'heure actuelle. Quel est le climat qui y règne? C'est un facteur qu'il faut prendre en considération au fur et à mesure des décisions gouvernementales. Tout cela mérite d'être acheminé, je pense, au niveau du premier ministre.

M. Burns: Ce qui veut dire que l'aspect emploi des futurs employés du gouvernement sera exclusivement sous la juridiction de M. Scotti et que sa juridiction sera limitée à cela. C'est-à-dire qu'il ne dépassera pas...

M. Choquette: C'est exact.

M. Burns: ... les problèmes qui peuvent concerner autre chose que les futurs employés du gouvernement.

M. Choquette: Exact. Il pourra peut-être aussi être appelé à vérifier les antécédents de personnes ou d'entreprises qui veulent traiter avec le gouvernement. On met cela dans le même ordre d'idées qu'un emploi.

M. Burns: Cela veut dire qu'il n'aura pas à s'intéresser à d'autres problèmes concernant la situation sociale au Québec.

M. Choquette: Non.

M. Burns: Dans l'exécution du mandat qu'il aura, est-ce que l'allégeance politique des individus devra être un élément qui le concernera?

M. Choquette: En principe, non. Cela ne l'a jamais vraiment été, excepté qu'il pourrait se faire que dans certaines situations particulières on en tienne compte. Enfin, c'est assez difficile à définir d'avance. Je pense qu'un gouvernement est en

droit d'exiger de la loyauté de la part de ses hauts fonctionnaires. Il ne s'agit pas de vérifier leurs opinions politiques ou ce qu'ils pensent personnellement, de telles questions, mais si les activités politiques de certaines personnes devaient constituer un empêchement fondamental à ce qu'elles exercent une certaine fonction, je pense bien que le gouvernement devrait en tenir compte.

M. Bédard (Chicoutimi): C'est une question peut-être...

M. Choquette: C'est une question de largeur de vues et c'est assez difficile à formuler. C'est une question d'appréciation de chaque candidature. En principe, on peut être sûr que nous ne faisons pas entrer de considérations personnelles dans le travail qui devra être accompli par M. Scotti.

M. Bédard (Chicoutimi): Tout à l'heure, mon collègue de Maisonneuve a parlé du témoignage de M. Desrochers en relation avec M. Chouinard. M. Desrochers, dans son témoignage à la commission Cliche, a laissé entendre très clairement que, lorsqu'il est allé vérifier les bandes enregistrées, c'est à la suite d'une demande qui lui avait été faite par M. Julien Chouinard, du bureau du premier ministre. Est-ce que M. Chouinard avait eu une autorisation ou avait-il eu un ordre de la part du ministre de la Justice ou de la part d'un autre ministre en titre pour formuler cette exigence à M. Desrochers?

M. Choquette: On présume qu'il avait une autorisation de la part du premier ministre.

M. Bédard (Chicoutimi): II avait une autorisation de la part du premier ministre pour demander à M. Desrochers...

M. Choquette: Bien oui, si M. Chouinard a fait...

M. Bédard (Chicoutimi): ... d'aller vérifier les bandes.

M. Choquette:... la démarche en rapport avec M. Desrochers, c'est que c'était autorisé par le premier ministre. Il n'y avait rien de clandestin dans cette démarche.

M. Bédard (Chicoutimi): Non, non.

M. Choquette: Elle était tout à fait conforme.

M. Bédard (Chicoutimi): C'est important de le savoir.

M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): La question n'avait jamais été posée, disons, au niveau de la commission Cliche.

M. Burns: Je veux terminer là-dessus. Le mi- nistre de la Justice trouve normal qu'au-dessus de sa tête on passe directement à la Sûreté du Québec pour des choses qui relèvent exclusivement de son administration?

M. Choquette: Je ne me rappelle pas précisément dans quelles circonstances cela s'est passé. Cela s'est passé aux mois de février et mars I97I; donc, cela nous ramène très loin en arrière et, par conséquent, c'est assez difficile pour moi de préciser. Maintenant, il faut se rappeler que ce qui intéressait M. Desrochers au point de vue du contenu des renseignements qu'il voulait obtenir, c'étaient certains renseignements au sujet de la Société d'habitation du Québec qui, par ailleurs, dépend du ministre des Affaires municipales et où, je pense bien, il n'y a pas un intérêt exclusif du ministre de la Justice.

M. Bédard (Chicoutimi): On peut en profiter pour vérifier d'autres choses.

M. Burns: Est-ce qu'il y a d'autres ministres qui peuvent avoir autorité pour envoyer un conseiller spécial ou un haut fonctionnaire prendre connaissance d'un certain nombre de documents...

M. Choquette: Non.

M. Burns: ... comme cela a été fait dans le cas de M. Desrochers?

M. Burns: Non. Je pense que le seul, ce serait le premier ministre lui-même, qui est le patron.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que vous, comme ministre de la Justice, vous avez été informé par le premier ministre qu'il avait formulé cette demande à M. Chouinard pour qu'il la fasse exécuter par M. Desrochers?

M. Choquette: Cela fait bien longtemps de cela et c'est très difficile pour moi de me le rappeler.

M. Burns: Vous aviez une meilleure mémoire l'autre fois.

M. Choquette: Oui, mais vous savez, il y a quatre ans. Cela fait très longtemps.

M. Burns: Bon. Dernière question là-dessus. Est-ce que, à cause de l'importance véritable ou imaginée que ce service pourrait prendre à l'intérieur — je dis véritable ou imaginée, c'est-à-dire qu'on peut s'imaginer toutes sortes d'affaires relativement à cet organisme — à l'avenir, le ministre de la Justice a l'intention, au même titre, par exemple, que le directeur général de la Sûreté du Québec est présent à l'étude des crédits, d'inviter un de ces personnages à assister à l'étude des crédits pour que si jamais il y a des questions précises qui doivent leur être posées, cela puisse leur être posé directement?

M. Choquette: Je n'aurais aucune objection.

Le responsable de ce service, c'est M. Paul Benoît, n'est-ce pas?

M. Burns: Autrefois le directeur de la Sûreté.

M. Choquette: Autrefois le directeur général de la Sûreté du Québec. Mais, je n'aurais sûrement pas d'objection à communiquer des renseignements à l'Opposition.

M. Burns: D'accord.

Institut de police

M. Burns: Toujours au programme 6, M. le Président, ou, à toutes fins pratiques, en revenant véritablement au programme 6, j'aimerais vous parler de la localisation de l'Institut de police. J'imagine que le ministre s'y attendait, cela revient à tous les ans, cette question, et particulièrement depuis l'incendie qui a ravagé une partie de l'Institut de police à Nicolet. Bien que les locaux aient été réparés depuis longtemps, les rumeurs veulent que l'Institut de police quitte éventuellement cette ville. L'année dernière, à l'étude des crédits, le ministre, à qui nous posions de semblables questions, nous avait répondu qu'aucune décision finale n'avait été prise, ce qui, déjà, nous laissait un peu songeurs. Etant donné que Nicolet était très loin des endroits où se trouve la plus forte concentration des corps policiers à l'intérieur du Québec, cela représentait un certain inconvénient de maintenir l'Institut de police à Nicolet. Evidemment, il y a eu le feu qui était un hasard et qui a provoqué toute cette situation.

Alors, depuis cette date, le premier ministre et le ministre de la Justice ont fait des déclarations quant à l'imminence d'une décision dans ce cas à la lumière d'un rapport condamné par la firme Pluram.

M. Choquette: Commandé.

M. Burns: C'est-à-dire, oui, je m'excuse, commandé, pas condamné, commandé par la firme Pluram. Et le livre blanc, à la page 81, en particulier, propose une décentralisation de l'enseignement policier. J'aimerais savoir si vous êtes aujourd'hui en mesure de nous donner plus de clarté et de rassurer une certaine population qui est, à bon droit, inquiète de l'ensemble de la situation.

M. Choquette: Oui, alors, la recommandation 1.14 de La justice contemporaine se lit comme suit: "Que l'Institut de police continue à assurer à Nicolet cette partie de la formation policière de base des aspirants policiers qui requièrent un stage en résidence et que l'Institut se fixe à Montréal pour le perfectionnement et le recyclage."

Ce qui veut dire que nous allons scinder la formation de base des policiers du perfectionnement des policiers qui sont déjà dans les corps de police. Nous allons garder la formation des cadets policiers à Nicolet où nous pouvons les recevoir en milieu fermé pendant une période de quatre mois. Donc, l'Institut de police va continuer à exis- ter et à dispenser ses cours à Nicolet pour ces fins.

D'autre part, nous allons organiser une autre section de l'Institut de police à Montréal pour le perfectionnement et le recyclage.

Ces décisions nous sont recommandées par le rapport Pluram auquel le député a fait allusion.

M. Burns: Pas condamnées, mais commandées par...

M. Choquette: La raison d'être de notre décision d'aller donner le perfectionnement et le recyclage à Montréal est que la plus grande partie des effectifs policiers sont situés dans la région montréalaise. Donc, nous rendrons ces cours beaucoup plus accessibles aux policiers qui sont en fonction dans les corps de police.

M. Burns: Est-ce que cela devrait avoir pour effet de diminuer l'importance de l'Institut de police à Nicolet ou si on peut s'attendre que l'Institut de police demeure, au point de vue de l'importance, à peu près le même qu'il est actuellement?

M. Choquette: Je crois que l'institut va garder à peu près la même importance à Nicolet, parce que, simultanément à cette décision d'envoyer le recyclage et le perfectionnement à Montréal, l'Ecole de police de la police de Montréal va être fermée, de telle sorte que ce sera l'Institut de police qui va assurer la formation des nouveaux policiers à l'emploi du service de police de la CUM. Je crois que ceci devrait compenser, d'une certaine façon, pour la perte qui résulterait du recyclage et de la formation.

M. Burns: L'entente est faite à ce sujet ou... M. Choquette: Pardon?

M. Burns: Est-ce que l'entente est faite de façon définitive?

M. Choquette: Ce n'est pas conclu d'une manière définitive, mais c'est en voie d'être négocié entre le ministère de la Justice et l'Institut de police, ainsi que le service de la police de la Communauté urbaine de Montréal.

M. Burns: Quand peut-on s'attendre à des décisions définitives là-dessus?

M. Choquette: Enfin, d'ici quelques mois.

M. Burns: Avant l'automne, quoi?

M. Choquette: Oui.

M. Burns: D'accord, M. le Président.

Le Président (M. Picard): Programme 6, adopté.

M. Burns: Adopté.

Le Président (M. Picard): Programme 7?

M. Bums: M. le Président, juste avant qu'on quitte le programme 6, avec votre permission, est-ce que je pourrais, tout simplement, poser une ou deux questions précises relativement à l'Institut de police de Nicolet?

M. Choquette: Oui.

M. Burns: D'abord, quelle est la durée des cours? Je pense que vous nous avez indiqué que c'était quatre mois, tout à l'heure.

M. Choquette: 19 semaines précisément.

M. Burns: 19 semaines précisément. Quel est le nombre de policiers que vous inscrivez habituellement à chaque cours?

M. Choquette: Nous formons environ 300 nouveaux policiers par année. Chaque promotion est d'environ 40 à 45 policiers.

M. Burns: Bon. Merci, M. le ministre. Là, assurément, le programme 6 serait adopté.

Le Président (M. Picard): Adopté. Programme 7?

Exercice des fonctions de police

M. Burns: M. le Président, au programme 7, j'aimerais vous référer à une déclaration récente du maire de Gatineau, qui annonçait son intention de s'adresser à la CPO, à la Commission de police, afin que celle-ci étudie les avantages à effectuer l'intégration des forces policières de la région de Hull.

M. Choquette: Oui, il y a un mouvement assez fort dans la région de l'Ouest du Québec pour l'intégration des forces de police. Je pense qu'on répond, d'une certaine façon, à ces aspirations par l'unification des services de police de trois villes qui ont fusionné, n'est-ce pas, par une loi récente qui a été adoptée il y a quelques mois.

M. Burns: Nous l'avions réclamé, d'ailleurs, lors de la loi ordonnant l'intégration.

M. Choquette: Ordonnant?

M. Burns: C'est-à-dire que l'aide financière qui a été accordée éventuellement, nous l'avions réclamée lors de l'étude de la loi elle-même. Je tiens à le souligner sans vouloir me péter les bretelles.

M. Choquette: Tout le monde réclame de l'aide financière pour les municipalités et les corps de police. Cela me semble normal. Je n'y vois aucun mal.

Quant à la régionalisation de tous les corps de police des municipalités qui se trouvent autour de la ville de Hull, je ne pense pas qu'il faille l'envisager dans l'immédiat et, pour être réaliste, qu'il faille mettre cette mesure de l'avant, parce qu'elle me semblera comporter inévitablement des coûts financiers assez prévisibles et dont les contribuables fonciers devront faire les frais avec toutes les incidences que ceci comporte sur la taxation municipale et scolaire. Comme je l'ai dit dans le livre blanc, et comme je l'ai dit en de multiples occasions, je ne peux pas à l'heure actuelle préconiser la régionalisation ou l'intégration sur une base régionale des corps de police municipaux sans que l'on ait pris les dispositions voulues pour donner des montants annuels et statutaires qui aideraient les populations locales à assumer les frais inhérents à de telles intégrations.

Je ne pense donc pas que je doive donner suite à des voeux exprimés, même par des autorités municipales, à l'effet d'intégrer leurs corps de police municipaux, au moins dans l'état actuel des choses.

M. Burns: Est-ce que la Commission de police s'est prononcée elle-même sur cette demande du maire de Gatineau, à votre connaissance?

M. Choquette: Non, elle ne s'est pas prononcée sur l'opportunité de régionaliser les corps de police municipaux dans une formule similaire à celle de la Communauté urbaine de Montréal. Là où elle a été appelée à intervenir, c'est dans l'organisation du service de police qui résulte de la fusion des trois villes qui ont été unifiées par une loi présentée par le ministre des Affaires municipales. Dans cette perspective ou dans ces limites, la Commission de police a été appelée à donner des conseils aux dirigeants du nouveau service de "police" intégré, de façon que le nouveau service de police puisse donner les résultats voulus.

M. Burns: Est-ce qu'on peut s'attendre que le ministre de la Justice réserve son opinion définitive jusqu'à ce que la Commission de police se prononce sur l'utilité de faire cette fusion ou sur la possibilité de cette fusion?

M. Choquette: Je pense que je n'ai même pas d'opinion à exprimer...

M. Burns: A partir de l'intégration, pardon.

M. Choquette: ...parce que la fusion des trois villes entraîne automatiquement l'intégration des services municipaux.

M. Burns: Non, mais je parle de la proposition du maire de Gatineau. Je reviens à ma question originale.

M. Choquette: L'intégration régionale... M. Burns: Oui.

M. Choquette: ...à l'intérieur d'une communauté urbaine?

M. Burns: A l'intérieur de la Communauté urbaine de Hull...

M. Choquette: De l'Outaouais?

M. Burns: ...comme le mentionnait dans sa déclaration le maire de Gatineau.

M. Choquette: Forcément, il faut que je réserve mon opinion, parce que, d'abord, nous n'avons pas de loi-cadre prévoyant l'intégration de corps de police municipaux à l'intérieur de communautés urbaines. Ce serait certainement un prérequis que d'avoir une telle loi-cadre. Deuxièmement, il y a un autre prérequis, c'est la capacité du gouvernement du Québec de donner une assistance financière. Donc, il y a deux obstacles...

M. Burns: Deux obstacles.

M. Choquette: ...importants à surmonter avant de donner suite à une telle proposition.

M. Burns: J'ai ici un extrait du journal Le Droit, du 27 mars 1975, où il semble que M. Poirier, qui est le maire de Gatineau, selon cette nouvelle, réclame l'unification des forces de la région. Je présume que c'est la région de Hull allant jusqu'à l'Outaouais. Ce n'est pas, à ma connaissance, plus précisé dans l'article. On dit: "M. Poirier a d'ailleurs l'intention de solliciter l'appui des autres municipalités dont Lucerne et Hull dans cette initiative." Je présume que c'est la région comme telle, si peu précisément que cela puisse être déterminé. Si je comprends bien, vous acceptez d'attendre au moins l'avis de la Commission de police, si un avis doit être donné à la suite de cette demande, avant de vous prononcer définitivement.

M. Choquette: Plus qu'un avis. Je dirais qu'avant qu'on puisse donner suite à cette demande, il faudrait adopter une loi-cadre prévoyant les modalités d'intégration des corps de police sur une base régionale.

Dans le cas de Montréal, le député de Maisonneuve sait que le plan d'allocation des ressources humaines et physiques est venu subséquemment à l'intégration elle-même. Cela ne nous paraît pas une procédure normale et même recommandable, malgré que nous avons dû en faire usage dans le cas de l'île de Montréal.

Nous pensons que, s'il doit y avoir une loi-cadre prévoyant des intégrations régionales, il faudrait que la Commission de police exprime un avis sur l'opportunité d'une telle intégration, ainsi qu'un avis sur les modalités d'intégration, pour que tout le monde ne soit pas pris par surprise une fois que l'intégration a été arrêtée et décidée. Donc, pour l'avenir, pour autant que nous sommes concernés, la loi-cadre qui devra éventuellement être adoptée par le Parlement prévoirait qu'avant une telle intégration la Commission de police fasse une enquête, voie les ressources en personnel, ainsi que les ressources physiques qui sont disponibles, propose aux autorités régionales, municipales un plan d'intégration qui soit de na- ture à les satisfaire. Là, le gouvernement y donnerait suite par une telle intégration régionale, en ajoutant évidemment ce prérequis d'une certaine assistance financière. Il n'y a pas à sortir de là, il y a toujours des conséquences financières à de telles mesures.

M. Burns: Cela est la recommandation 1.15, à la page 81 dans votre livre blanc, qu'une politique d'aide financière soit un prérequis à toute nouvelle intégration régionale de corps de police municipaux, ce sur quoi, je peux vous le dire tout de suite, nous sommes entièrement d'accord. C'est évident que toute intégration — nous nous en sommes rendu compte dans le cas de Montréal, surtout que Montréal était à toutes fins pratiques un projet pilote, c'était la première intégration policière qui se faisait au niveau d'une région — que la mise en place de l'intégration elle-même comporte des coûts qui ne paraissent pas aux budgets de toutes les municipalités concernées. Même en disant qu'on prend dans toutes les municipalités les fonds qui sont affectés à la police et qu'on les met dans un même montant, même en admettant que cette situation serait possible, on se retrouve avec des coûts additionnels tout simplement par le phénomène de l'intégration, que ce soit l'uniformisation des uniformes, des véhicules, des...

M. Choquette: Des salaires.

M. Burns: ...salaires, des moyens d'action, des communications, etc.

M. Choquette: Exactement.

M. Burns: Je pense bien que la recommandation reconnaît, et je le reconnais avec le ministre aussi, que la mise en place d'une intégration au niveau régional coûte en soi quelque chose par la simple action de l'intégration.

M. Choquette: En effet.

M. Burns: En résumé, je présume qu'on va attendre éventuellement une opinion précise avant de prendre une décision définitive dans le cas de la région de Hull, à la suite de la demande de M. Poirier.

M. Choquette: C'est ça.

M. Burns: D'accord. Toujours relativement au programme 7, M. le Président, j'aimerais référer le ministre au rapport annuel de 1973 de la Commission de police, qui réclamait des pouvoirs accrus afin de mettre en vigueur ses recommandations et également afin de faire appliquer ces règlements qui, d'ailleurs, doivent être approuvés, dans l'état actuel des choses, par le conseil des ministres.

Plus récemment encore, c'est-à-dire en janvier 1975, le juge Laperrière soulignait qu'outre ses pouvoirs de recommandation la Commission de police devait se fier au bon vouloir des politiciens locaux — je pense que le ministre est assez familier avec ce problème — ce qui, selon le juge La-

perrière, entraînait à la longue un malaise et même, disait-il, une stagnation de l'évolution des corps policiers.

J'aimerais savoir du ministre, à la suite du rapport annuel de 1973 et de la remarque d'un des membres de la Commission de police, le juge La-perrière, en janvier 1975, s'il a l'intention de présenter des amendements en ce sens.

M. Choquette: D'abord, la réglementation qui nous est proposée par la Commission de police et qui est à entériner par le lieutenant-gouverneur en conseil a force contraignante. Je tiens d'abord à signaler que pour ce qui est des règlements qui nous sont proposés par la Commission de police, une fois qu'ils ont été adoptés par le lieutenant-gouverneur en conseil, ils s'appliquent à toutes les municipalités du Québec et à tous les corps de police.

Par ailleurs, les rapports d'enquête de la Commission de police sur les problèmes vécus à l'intérieur de certains services de police, soit qu'il s'agisse d'une enquête demandée par un conseil municipal sur son corps de police qui ne va pas pour certaines raisons, soit qu'il s'agisse de demandes d'enquête par les autorités du corps de police lui-même qui parfois demande une enquête à la Commission de police, soit qu'il s'agisse de demandes d'enquête de citoyens, dans ces cas, le rapport d'enquête demeure un guide plutôt qu'une formule qui s'impose d'emblée au corps de police en question.

Je ne suis pas sûr, du moins à l'heure actuelle, qu'il faille, dans tous les cas, donner aux recommandations de la Commission de police, à l'égard des corps de police, une force absolue. Encore faudrait-il, une fois qu'on aurait adopté une telle mesure, trouver des mécanismes de sanctions au cas d'inobservance des conditions d'un rapport de la Commission de police.

Disons, par exemple, que la ville de Château-Richer a une enquête sur son corps de police et qu'on recommande qu'au lieu d'avoir un seul véhicule il y ait deux véhicules-patrouille, qu'on recommande que le poste de police existant soit fermé et qu'on en construise un nouveau, qu'on recommande l'engagement de personnel additionnel, c'est bien beau, mais une fois que la Commission de police a donné des recommandations dans ce sens, encore faut-il que quelqu'un passe à l'action pour les traduire dans les faits. Cela dépendrait naturellement des autorités municipales locales de le faire ou de ne pas le faire.

Comment allons-nous faire pour les contraindre de donner suite à de telles recommandations de la Commission de police? Quelles sanctions pourrions-nous employer à l'égard de ces autorités municipales récalcitrantes et agissant dans certaines occasions conformément au bon sens, parce qu'il y aurait une recommandation de la Commission de police à cet effet ou, dans d'autres occasions, contrairement au bon sens, ou enfin conformément au bon sens aussi, alors que la Commission de police aurait pu se tromper et aurait pu faire des recommandations qui dépassent les moyens des contribuables locaux, qui dépas- sent d'une certaine façon la capacité de payer? Donc, la Commission de police deviendrait une espèce d'instrument qui pourrait forcer les autorités locales à adopter des décisions entraînant des conséquences au point de vue de la fiscalité.

Cela pose pas mal de problèmes que cette recommandation de donner, au rapport de la Commission de police, un effet absolu qui s'impose aux autorités municipales locales. Pour le moment, moi je ne suis pas arrivé à des conclusions définitives sur ce sujet. Je vois bien les cas où on pourrait concevoir qu'il serait utile que les recommandations de la Commission de police s'imposent.

Mais il y a d'autres cas aussi où je ne suis pas sûr que c'est opportun.

M. Burns: Je reconnais avec le ministre le dilemme que ça pose. Soyez assuré que je suis en mesure de me rendre compte de ce dilemme. Mais ce qui nous avait frappés dans l'intervention du juge Laperrière, c'était jusqu'à quel point il mettait de l'insistance sur l'influence des milieux locaux politiques, disons-le, les conseils municipaux, les hommes politiques municipaux et jusqu'à quel point cette influence pouvait devenir nocive.

Encore là, je reconnais que, malgré la justification des remarques du juge Laperrière, ça peut poser un dilemme relativement au phénomène de taxation. Mais on retrouve également une telle remarque ou quelque chose de très semblable et de très proche dans le livre "Police et politique au Québec" du criminologue Guy Tardif qui parle de la manipulation, à toutes fins pratiques. Là, ce ne sont pas seulement des corps policiers, pas seulement des recommandations qui peuvent être faites par la Commission de police, mais des chefs de police.

Je me demande s'il n'est pas temps qu'on se mette à l'oeuvre pour tâcher de mettre un terme à cette situation qui, quand même, malgré le dilemme que cela pose et que je reconnais, sans aucune espèce de doute, rend la situation absolument intolérable. A partir du moment où vous avez des chefs de police locaux qui sont non seulement en principe, mais en pratique à la.merci — sauf, évidemment, les droits d'appel qu'ils peuvent avoir — des notables municipaux, des édiles municipaux, ils sont constamment ballotés et peuvent risquer de se retrouver sans emploi ou dans de sérieuses difficultés, s'ils ne se plient pas aux volontés des hommes politiques locaux.

Evidemment, vous allez me dire que c'est le cas du chef. Les autres policiers sont des syndiqués, mais cela ne peut pas faire autrement que de déteindre sur l'atmosphère qui règne à l'intérieur d'un corps de police municipal, si on permet cela. Je ne dis pas que tous les conseillers municipaux et que tous les maires, à l'intérieur du Québec, sont des gens qui font cela, mais, aux endroits où cela se fait, cela pose quand même un sérieux problème. C'est pour cela que je soulevais le cas. C'est une solution, je pense, qu'on peut percevoir à l'intérieur des remarques du juge Laperrière, mais y a-t-il d'autres solutions qui sont envisagées par le ministère de la Justice relative-

ment à ce phénomène que, semble-t-il, tout le monde reconnaît? Vous avez une autorité de la Commission de police qui le reconnaît et vous avez un criminologue bien connu, M. Tardif, qui le mentionne dans son bouquin.

Il me semble qu'il serait temps que le ministre de la Justice qui, lui-même, sans aucun doute est prêt à reconnaître la situation... Vous avez l'air de faire appel à certains de vos collègues pour contredire ce que je suis en train de dire?

M. Choquette: Non, pas nécessairement. Je regardais l'auditoire.

M. Burns: Y a-t-il quelque chose d'envisagé? Si ce n'est pas la solution proposée par le juge Laperrière, est-ce qu'autre chose est envisagé de la part du ministère de la Justice pour mettre un frein à cette situation?

M. Choquette: En gros, sans exclure des solutions plus précises, plus contraignantes, qui peuvent peut-être remédier à certaines situations particulières d'interventions indues dans le travail de la police par certains maires ou certains conseillers municipaux, je dirais qu'il faut plutôt rechercher la solution à ces problèmes dans l'évolution des mentalités vers une dépolitisation de l'action de la police. Je crois que c'est sur cela qu'on peut tabler avec le plus de chances de succès, soit tenter de créer cet esprit par lequel il existe un équilibre approprié entre les exigences des conseils municipaux et le rôle de la police. Quand je dis un équilibre approprié, je veux dire qu'il me semble que le maire d'une ville et son conseil municipal sont en droit d'interroger le directeur et son corps de police sur l'efficacité de leur action vis-à-vis de la criminalité. Ils sont en droit de leur poser des questions. Là où ils excèdent leurs pouvoirs, c'est s'ils interviennent dans des enquêtes particulières ou dans des actions de la police, pour mettre des bâtons dans les roues à une action efficace de la police ou encore nuire, pour des motifs politiques, personnels ou autres, à des actions ou à des enquêtes policières.

Je crois qu'au Québec plus nous allons, plus nous évoluons vers une mentalité assez normale de ce côté. Nous rencontrons de moins en moins fréquemment des cas d'interventions indues de la part des élus locaux dans les actions des polices locales. Je ne dis pas que cela n'a pas existé. Cela a sans doute existé.

D'autre part, je ne crois pas qu'il faille dramatiser et grossir ce problème. Je crois qu'il est quand même assez circonscrit.

La critique que je pourrais formuler à l'égard du livre de M. Tardif c'estqu'il a pris des cas historiques, dirais-je, de conflits entre des directeurs de police et leur conseil de ville.

Il n'a interrogé que les directeurs de police, il n'a pas interrogé les maires et les conseils municipaux sur les causes de ces conflits. En somme, il est comme un juge qui a entendu seulement une des parties, il n'a pas entendu le point de vue de l'autre partie. Je suis porté à croire que le livre est assez tendancieux et n'exprime pas toute la réalité du Québec, où il me semble que dans beaucoup de cas il existe des rapports très sains, harmonieux et équilibrés entre les corps de police municipaux et les personnes qui ont été élues pour représenter la population.

Dans l'évolution que j'entrevois dans ce domaine-là, il y a, d'une part, évidemment cette évolution des mentalités. Je crois que, si on se reporte à 25 ans en arrière, il est manifeste que l'influence des élus locaux était beaucoup plus prononcée sur les attitudes prises par la police. Ceci, d'ailleurs, correspondait à l'esprit du temps, qui se réflétait même au niveau provincial. On n'a pas besoin de revenir sur cette période-là. Le député de Maisonneuve sait comme moi que souvent la police, la Sûreté du Québec était un instrument entre les mains de certains hommes politiques qui agissaient souvent pour des fins politiques.

M. Burns: Même en période électorale.

M. Choquette: En période électorale, entre autres. De plus en plus, les choses s'améliorent et je crois que cette mentalité prévaut de plus en plus dans tous les milieux du Québec. Faisons confiance, à ce point de vue-là.

D'autre part, avec une régionalisation à venir des corps de police sur un plan régional, je pense qu'à ce moment-là on sortira carrément du problème de l'intervention indue de certaines personnes dans l'action de la police.

M. Burns: Vous avez l'air de dire que, plus le corps policier est éloigné de la direction politique locale, plus il a de chances d'être exempt des interventions que je répète être marginales. Ce n'est pas l'ensemble des conseils municipaux au Québec qu'on peut accuser de se servir du chef de police ou de son corps de police pour des fins politiques; je n'ose même pas parler de partisanerie ni de quoi que ce soit.

M. Choquette: Oui.

M. Burns: Mais vous semblez dire qu'au fur et à mesure que la direction politique locale va s'éloigner de l'administration de la police, celle-ci devenant régionalisée, les risques de tels abus sont aussi appelés à s'éloigner.

M. Choquette: Je réponds à la question du député de Maisonneuve en disant: Oui et non. Oui, dans le sens que, si un corps de police régional est dirigé par un conseil de sécurité auquel figurent des personnalités qui ont pu être désignées à ce conseil pour l'intérêt exclusif qu'elles ont dans la police, ceci peut aider à contrebalancer ou à neutraliser les efforts de personnalités politiques locales d'intervention dans les corps de police.

Par contre, il ne faudrait pas que la police et la direction de la police deviennent bureaucratisées et fonctionnarisées au point que les élus, sur le plan local, ne puissent pas faire ressentir leur influence sur la manière dont la police se charge de ses fonctions. C'est la raison pour laquelle il y a lieu, d'une autre façon, de rapprocher la police

des populations locales pour que la police corresponde le plus possible aux sentiments, aux aspirations et aux besoins locaux qui peuvent être manifestés, soit directement par les citoyens, soit par l'entremise de leurs élus.

Donc, c'est pour cela que je dis que c'est plutôt dans révolution des mentalités, des attitudes que le progrès va se faire, et il sera favorisé, sans aucun doute, par les intégrations qui pourraient se passer sur le plan régional. Je donne comme exemple, à Montréal, le conseil de sécurité; il est à moitié composé de personnes qui y sont désignées, à moitié composé de personnes qui représentent les citoyens et qui sont des maires ou des membres de conseils municipaux. On réalise très bien les problèmes du conseil de sécurité à l'heure actuelle, on les comprend facilement. Le conseil de sécurité doit assurer une direction efficace à la police, il doit donner à la police une administration saine.

Par contre, il ne faut pas que cette administration devienne trop éloignée des besoins des différentes populations dans l'île de Montréal qui sont assez variables d'un secteur à l'autre. C'est pour ça qu'on fait un effort de rapprochement avec des populations locales, mais sans sacrifier l'efficacité administrative qu'il est requis d'avoir pour un corps de police, sans sacrifier non plus à la dépense inconsidérée. Il faut quand même que les sommes d'argent soient administrées convenablement et que la gestion financière du personnel, du matériel soit faite suivant les meilleures normes administratives. C'est donc un équilibre que nous recherchons à travers l'expérience montréalaise et je pense qu'elle sera susceptible de nous éclairer à l'occasion d'autres intégrations régionales à venir.

M. Burns: Quand ce ne sont pas les édiles locaux qui s'en mêlent. D'autre part, il risque d'y avoir des personnalités politiques nationales qui s'en mêlent. Je pense, par exemple, au cas de M. Guay qui est actuellement à l'étude et qui a fait l'objet de commentaires du ministre de la Justice lui-même, peut-être involontaires, mais...

M. Choquette: J'étais obligé de répondre à une de vos questions à la Chambre.

M. Burns: Oui, oui, mais...

M. Choquette: Vous m'avez posé une question, vous vouliez que je vous réponde la vérité.

M. Burns: Je voulais que vous me répondiez la vérité, mais je ne voulais pas que vous vous substituiez à l'éventuel organisme, surtout que vous aviez vous-même le pouvoir de nommer cet organisme. Je n'ai pas l'intention d'entrer dans le fond de cette affaire, parce que là peut-être qu'on nuirait à M. Guay puis on nuirait au travail des commissaires que vous avez nommés. Mais je vous signale en passant que, même au niveau national, puisque vous occupez un poste national, considérant le Québec comme une nation et le Québec comme un territoire national, vous avez vous-même péché, M. le ministre, ce que vous seriez en mesure de reprocher à nos édiles municipaux.

M. Choquette: Dans ce cas particulier, il faut remarquer que les trois juges qui ont été désignés pour entendre l'affaire Guay ont été désignés par le juge en chef de la cour Provinciale, le juge Gold, sans aucune intervention de ma part.

Une Voix: Ce n'est pas sub judice cette affaire?

M. Choquette: On traite de l'organisation de la commission.

M. Burns: On n'a pas parlé du cas lui-même. M. Choquette: Par conséquent...

M. Burns: Mon Dieu que les présidents de commission sont nerveux. Cela fait deux fois dans la même journée que je me fais parler du problème de sub judice, par deux présidents de commission différents. Votre collègue, le député de Pointe-Claire, a été obligé de reconnaître par la suite que, même quand on parlait de M. Louis La-berge, on n'était pas en train de parler d'un cas sub judice.

Le Président (M. Picard): C'est parce que vous avez mentionné le nom d'un individu.

M. Burns: J'ai parlé de M. Louis Laberge, ce matin, puis là je vous parle de M. Guay cet après-midi. Je n'ai pas l'intention de faire un long exposé là-dessus, mais je dis à votre intention, M. le Président, et dans notre intérêt à tout le monde qu'à partir du moment où on nomme un individu qui est devant les tribunaux, on ne fait pas un accroc à la règle du sub judice. Penons le cas de M. Laberge. Si je me mettais à dire que M. Laberge a été condamé à tort ou condamné à raison — je le donne à titre d'exemple et je donne les deux choix de l'alternative, donc je ne me prononce pas sur la cause — je serais en train de m'immiscer dans la règle du sub judice. Mais si je prends l'occasion d'une condamnation de M. Laberge pour discuter d'un problème particulier qui en l'occurrence était ce matin l'application de la loi 30 au cas de M. Laberge, je ne pense pas que je m'immisce dans la règle où on ne doit pas se mêler des droits de quelqu'un qui est devant les tribunaux. Je pense bien qu'on le reconnaît.

M. Choquette: Malgré que même là, je ne ferais aucun commentaire sur cela, étant donné que M. Laberge attend sa sentence et que tout commentaire doit être empreint de prudence.

Brutalité policière

M. Burns: C'est d'ailleurs probablement cette prudence qui a forcé le député de Pointe-Claire à nous souligner que nous étions sur un terrain glissant, ce que nous avons reconnu et ce que nous

avons tenté de respecter dans nos remarques.

Toujours dans le domaine de la normalisation et la surveillance de l'exercice des fonctions de la police, c'est-à-dire le programme 7, j'aimerais, en terminant ce programme, soulever le problème qui a peut-être l'air péjoratif, si on le qualifie comme tel, mais soulever le problème de la brutalité policière.

Nous avons constamment dans les journaux des exemples. Ce sont des cas d'espèce, ce sont des cas qui sont soulevés. Il y a eu le cas très spectaculaire et récent des grévistes de United Aircraft qui avaient occupé — encore là, je ne veux pas me prononcer parce qu'il y a des choses qui sont devant les tribunaux; j'ai le droit de me référer quand même à la situation — apparemment l'usine. Sans me prononcer sur le geste précis posé par les grévistes, avec un grand tapage de publicité tant dans les journaux — il ne s'agit pas de publicité au sens que c'a a été moussé par qui que ce soit, mais on l'a rapporté — que dans les autres media, que ce soit la télévision ou la radio, on semble avoir, et le cas de United Aircraft est peut-être l'exemple le plus dramatique récent, l'occasion à tout bout de champ de trouver des cas où la police, semble-t-il, a agi avec beaucoup plus que la force nécessaire pour réprimer des gestes que la police considère comme illégaux, qui par la suite sont soumis aux tribunaux, et les tribunaux décident. C'est un autre problème.

Je me rappelle avoir vu, à la suite de l'affaire de United Aircraft, M. le directeur Beaudoin de la Sûreté du Québec venir faire l'apologie — je ne le blâme pas, c'est peut-être son rôle de le faire, je vous situe les faits — de ses policiers, venir dire qu'on n'a pas exercé de force excessive pour réprimer les actes.

D'autre part, on a eu des témoignages en série. Il y a même eu une émission spéciale, si je me rappelle bien, à la télévision de Radio-Canada — c'est-à-dire une émission spécialement consacrée à ça à l'intérieur de l'émission Format 60 — où vous aviez des grévistes qui venaient donner leur point de vue ainsi que le directeur de la Sûreté.

Remarquez que je n'étais pas là, ni dans le cas de United Aircraft, ni dans les autres cas, ni dans les manifestations, sauf quelques-unes où j'ai été à même de le voir, entre autre la fameuse manifestation d'octobre 1971, dans le cas de La Presse, où j'étais au premier rang, donc à même de voir un certain nombre de choses, où on pouvait reprocher des choses aux manifestants, bien sûr, et où on pouvait reprocher un certain nombre de choses aux policiers.

Si je soulève la question, ce n'est pas pour tomber sur le dos des policiers, ce n'est pas pour tomber sur le dos de l'administration de la justice, mais pour constater un fait: C'est que ces choses sont à long terme très souvent nocives quant à l'image qu'on se fait des corps policiers à l'intérieur du Québec.

Il me semble qu'il y a lieu de réexaminer la situation complète de la part du ministère de la Justice pour qu'on évite d'une part de nuire, dans l'opinion publique, à cet instrument très important qui s'appelle les corps policiers dans l'administration de la justice.

Est-ce qu'actuellement le ministère se préoccupe de cette situation? J'ouvre une parenthèse en disant qu'en général l'attitude policière s'est bien améliorée depuis au moins deux ans, tant dans les manifestations qu'ailleurs. Il reste quand même qu'on a des cas comme United Aircraft, où semble-t-il, de la part de personnes qui sont neutres dans la situation — je pense par exemple à un journaliste qui était sur les lieux — on se demande sérieusement s'il n'y a pas eu un excès de la part de la police.

Est-ce qu'il y a quelque chose qui fait que cette préoccupation qui est la mienne se traduit par quelque chose de concret auprès du ministre? Peut-être que le ministre préférerait répondre...

M. Choquette: Je vais répondre très brièvement.

M. Burns: Je ne voudrais pas...

M. Choquette: On pourra revenir, mais je voudrais répondre quand même assez brièvement et succinctement au député de Maisonneuve. Je pense que les cas de brutalité policière sont de plus en plus rares et je crois qu'en fait on peut dire que la police en général agit très correctement dans la grande majorité des circonstances.

Evidemment, il peut se produire à un moment donné des excès. Les policiers sont humains, ils subissent toutes sortes de frustrations alors qu'ils sont dans des manifestations où ils doivent faire face à des circonstances difficiles.

On se charge bien de les provoquer, dans certains milieux, de telle sorte qu'à un moment donné il est possible que les policiers exagèrent dans l'action qu'ils devraient adopter.

Pour notre part, de façon à remédier à cette situation, j'ai demandé à la Commission de police de préparer une étude, qui sera suivie d'un guide à l'endroit des policiers qui leur fixera leur règle de conduite à l'occasion de manifestations, de grèves, en fait d'actions qui peuvent requérir leur intervention, mais qui seraient susceptibles, aussi, d'entraîner des excès de leur part. La Commission de police a mis sur pied un comité qui a d'ailleurs, rédigé un rapport, à l'heure actuelle, sur la question. Ce rapport sera synthétisé dans un guide à l'usage des policiers. Je pense, que cela contribuera à assainir complètement le climat dans ce domaine et à faire en sorte qu'on ne puisse pas, excepté à l'occasion et dans des circonstances exceptionnelles, critiquer l'action policière.

M. Burns: J'aimerais qu'on y revienne après la suspension, puisqu'on est appelé à faire un vote, parce que, personnellement, je trouve que c'est un point sur lequel il vaudrait la peine, sinon de passer la soirée, disons de prendre quelques minutes pour en discuter. Personnellement, je le trouve suffisamment important pour qu'on ne l'élimine pas rapidement à cause du fait qu'on est appelé à aller voter en Chambre.

Le Président (M. Picard): Je me dois de suspendre les travaux sine die en attendant la décision de l'Assemblée nationale. Il est fort probable que nous allons siéger à huit heures quinze.

M. Choquette: Oui.

Le Président (M. Picard): La commission suspend ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 17 h 48).

Reprise de la séance à 20 h 29

M. Picard (président de la commission permanente de la justice): A l'ordre, messieurs! La commission de la justice continue, ce soir, l'étude des crédits du ministère de la justice. Programme 7. Le député de Chicoutimi.

M. Bédard (Chicoutimi): Adopté. Programme 8, M. le Président.

Le Président (M. Picard): Programme 7, adopté. Programme 8: Protection civile.

Protection civile

M. Bédard (Chicoutimi): Le programme 8, Protection civile, que fait-elle exactement? On a l'impression de ne jamais la voir. Je vous pose cette question de façon bien générale.

M. Choquette: La protection civile joue un rôle utile, peut-être pas spectaculaire, mais elle a mis sur pied des programmes avec les municipalités pour des cas de désastres ou cataclysmes naturels. Elle intervient dans certaines circonstances où, à cause d'événements imprévus, il est nécessaire de mettre en oeuvre des moyens de secours à la population. Ainsi, très près de la région du député de Chicoutimi, elle est intervenue et a coordonné les activités dans le cas de Saint-Jean-Vianney.

M. Bédard (Chicoutimi): Saint-Jean-Vianney, oui.

M. Choquette: Elle intervient lors des inondations au printemps. Enfin, elle ne comporte pas un personnel très nombreux. Je crois qu'elle comporte un personnel d'une centaine de personnes.

M. Bédard (Chicoutimi): Dans le cas d'un désastre tout récent, à savoir la tornade qui a balayé Saint-Rémi-de-Napierville et qui a causé des dommages pour près de $1 million, peut-être plus, qu'est-ce que la protection civile a pu faire dans ce cas?

M. Choquette: Dans le cas, elle a été appelée à intervenir après le fait parce qu'on sait qu'une tornade...

M. Bédard (Chicoutimi): Cela ne s'annonce pas trop d'avance.

M. Choquette: ... cela surgit rapidement et cela disparaît aussi rapidement. Là, évidemment; il y a la question des dommages subis par un certain nombre de citoyens. Il y aura possiblement des décisions gouvernementales à prendre quant à l'indemnisation partielle de ces citoyens. La protection civile ne peut pas jouer ce rôle. Mais dans les inondations, par exemple...

M. Bédard (Chicoutimi): Mais relativement au danger de pillage après un désastre ou après un cataclysme?

M. Choquette: C'est plutôt la police qui va s'occuper de cela.

M. Bédard (Chicoutimi): Plutôt la police. M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): A part Saint-Jean-Vianney, peut-être simplement comme illustration, est-ce qu'il y a d'autres exemples que vous pouvez nous donner de ses activités?

M. Choquette: Les cas les plus remarquables des activités de la protection civile, c'est à l'occasion des inondations du printemps. Par exemple, on sait que dans la région de la Chaudière, il y a des inondations considérables au printemps. Dans la région de Montréal, il y a de grosses inondations. Là, la protection civile intervient.

M. Bédard (Chicoutimi): Le livre blanc sur la Justice, à la page 73, traitant de la protection civile d'une façon toute particulière, propose que le domaine de la protection civile soit confié dorénavant au ministère du Conseil exécutif. Est-ce que le Conseil exécutif a été consulté à ce sujet? Est-ce que, dans le cas d'une réponse affirmative, il y a un transfert de juridiction qui peut être prévisible?

M. Choquette: Oui, il y a un transfert de juridiction qu'on peut envisager. Le ministère du Conseil exécutif avait été pressenti sur cette proposition contenue au livre blanc parce que alors qu'autrefois, les actions de la protection civile étaient plutôt reliées au domaine de la police, aujourd'hui nous nous sommes rendu compte qu'elle est plutôt appelée à intervenir dans le cas de cataclysmes naturels. Etant donné qu'il y a beaucoup de ministères dont l'action entre en ligne de compte à ce moment-là, ainsi les Affaires sociales, les Affaires municipales, la Justice, par la Sûreté, etc., nous avons pensé qu'il serait peut-être opportun de donner la responsabilité de ce programme au ministère du Conseil exécutif.

M. Bédard (Chicoutimi): Quand le ministre prévoit-il ce transfert de juridiction?

M. Choquette: Une décision définitive n'a pas été prise. D'ailleurs, dans le livre blanc, nous avons proposé d'abandonner plusieurs programmes qui appartiennent actuellement au ministère de la Justice pour les confier à d'autres ministères. Je pense bien qu'il faudra regarder ces différents programmes qu'on suggère de confier à d'autres ministères, comme la Commission de contrôle des permis d'alcool, comme la Régie des loteries et des courses; il faudra regarder tous ces programmes ensemble pour voir à quel moment il est plus opportun de faire ces transferts.

M. Bédard (Chicoutimi): Je comprends qu'une grande partie de l'augmentation des crédits dans ce cas comme dans bien d'autres programmes est affectée à des augmentations de salaires.

M. Choquette: En effet.

Le Président (M. Picard): II y a d'autres questions au programme 8?

M. Bédard (Chicoutimi): Adopté.

Le Président (M. Picard): Programme 8, adopté.

Programme 9, Contentieux criminel et pénal.

Contentieux criminel et pénal

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que, d'une façon générale, le ministre pourrait nous donner un aperçu des motivations au sujet des augmentations qu'on peut remarquer et qui sont quand même assez appréciables, aux éléments I et 2 du programme?

M. Choquette: A l'élément I, l'un des facteurs d'augmentation est l'intégration des cours municipales de Longueuil, Greenfield Park et Saint-Hubert. Les crédits requis pour ce projet sont de $380,000. En plus de cette nouvelle activité, nous prévoyons aussi une augmentation d'environ 15% du volume de production au niveau du bureau juridique du code de la route. Egalement celui-ci a l'intention de suivre d'une façon plus approfondie les dossiers pénaux confiés aux avocats et aussi faire une analyse plus approfondie des billets d'infraction. De ce fait, des crédits additionnels de $215,000 ont été estimés, ce qui forme un total de $595,000 qu'il faut ajouter comme facteur d'augmentation pour cet élément.

Quant au contentieux criminel, il y a une augmentation naturelle du nombre d'affaires que nous sommes appelés à traiter. Ceci entraîne la création de postes additionnels avec des salaires afférents, d'autant plus qu'il faut ajouter évidemment l'augmentation des traitements du personnel qui se répercutent dans les crédits requis.

M. Bédard (Chicoutimi): Le livre blanc sur la justice, au chapitre traitant du ministère et de son organisation, nous indique que la direction générale des affaires criminelles, dont on retrouve le budget à l'élément 2 de ce programme, compte des effectifs permanents de 101 avocats agissant comme substituts du procureur général.

M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): Et également fait état de certains effectifs à temps partiel dont le nombre, selon le rapport, est restreint et en régression constante.

Au paragraphe suivant, celui qui traite de la direction générale des affaires civiles et pénales, on ne parle pas des effectifs d'avocats affectés au service du contentieux de façon permanente, bien

qu'on reconnaisse que le volume des affaires est considérable sur l'ensemble du territoire.

Le livre blanc spécifie à ce même chapitre, pages 46 et 47, que la direction générale confie certains mandats à des avocats exerçant en cabinet privé "surtout dans des dossiers requérant une expertise technique particulière."

On mentionne également que, pour ce qui est du bureau juridique du code de la route, les opérations sont entièrement mécanisées, tel que le spécifient les recommandations du livre blanc, à la page 78. Je voudrais savoir du ministre quels sont les domaines requérant les services d'avocats doués d'une expertise technique particulière pour employer...

M. Choquette: A quelle page?

M. Bédard (Chicoutimi): Aux pages 46 et 47.

M. Choquette: Bon, très bien.

M. Bédard (Chicoutimi): Les recommandations sont à la page 78.

M. Choquette: Oui. Dans le domaine criminel, notre personnel, qui nous représente devant les tribunaux, est un personnel qui est presque entièrement composé d'avocats permanents, de substituts du procureur général permanent. Je crois qu'il reste cinq ou six avocats, qui agissent comme substituts du procureur général, qui sont des avocats à temps partiel, mais la politique du ministère...

M. Bédard (Chicoutimi): Vous voulez dire dans la pratique privée?

M. Choquette: Oui, mais qui sont retenus à temps partiel pour agir comme procureurs de la couronne ou substituts du procureur général.

M. Bédard (Chicoutimi): Dans quel district?

M. Choquette: II y en a deux dans Beauharnois, deux dans Roberval, un dans Mégantic et deux dans l'Abitibi. Dans tous les autres districts judiciaires, les avocats qui agissent pour nous sont des avocats permanents. Maintenant, notre intention est de faire en sorte que dans les meilleurs délais nous soyons représentés partout par des avocats permanents.

Dans le domaine pénal et civil...

M. Bédard (Chicoutimi): Le ministre doit se douter un peu pourquoi je voudrais avoir plus d'explications concernant ce domaine. C'est parce que c'est peut-être dans ce secteur de la justice, à savoir le fait pour le ministère de la Justice de retenir les services d'avocats dans la pratique privée, que se présentent souvent les accusations les plus nombreuses de patronage et de favoritisme.

M. Choquette: Je crois que cette accusation...

M. Bédard (Chicoutimi): Est de moins en moins vraie.

M. Choquette: ... est de moins en moins vraie et est véritablement mal fondée, à l'heure actuelle. Je pense que depuis deux ans nous avons engagé au moins 50 avocats à temps plein et qui sont devenus substituts du procureur général, de telle sorte qu'en fait le problème des avocats à temps partiel, dans le domaine criminel, est tout simplement résiduaire, à l'heure actuelle. Si nous n'avons pas remplacé nos avocats de la pratique privée qui agissent encore pour nous dans quelques districts judiciaires, c'est parce que nous n'avons pas pu recruter d'avocats à temps plein. C'est donc un problème qui sera réglé au cours de cette année, certainement. Je suis sûr que l'année prochaine, à pareille époque, au moment de l'étude des crédits, l'ensemble ou la totalité des avocats qui nous représentent dans les causes criminelles seront des avocats qui consacreront entièrement leur travail au ministère de la Justice.

M. Giasson: Est-ce que le député de Chicoutimi aurait des candidats à suggérer pour les districts où vous devez procéder avec des avocats de pratique privée?

M. Choquette: Posez-lui la question.

M. Bédard (Chicoutimi): Jusqu'à maintenant, je n'ai jamais fait de recommandations en ce sens. De toute façon, je n'ai jamais été favorisé, je ne l'ai jamais demandé et je ne suis pas intéressé. Cela règle la question.

M. Choquette: Bien.

M. Bédard (Chicoutimi): Une chose est certaine, autant lorsque c'était l'Union Nationale que le Parti libéral il arrivait, par un hasard permanent, que lorsque le gouvernement changeait, les avocats — c'était même acquis, il n'y avait même pas de discussion — représentants du procureur...

M. Giasson: Depuis l'avènement du ministre Choquette, ces hasards heureux consécutifs n'existent plus.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous allez avoir le droit d'intervenir.

M. Choquette: Je crois que le député de Montmagny parle en connaissance de cause, parce que, dans le district judiciaire qu'il a l'honneur de représenter, j'ai justement désigné un avocat...

M. Giasson: Qui est membre de l'exécutif du Parti québécois.

M. Choquette: Exactement.

Une Voix: Sensationnel! Sensationnel!

M. Bédard (Chicoutimi): C'est pour dire que, quand on laisse le patronage de côté et qu'on va chercher la compétence, on s'oriente souvent vers des membres...

M. Choquette: On est prêt à se faire sermonner.

M. Giasson: Vous devriez examiner les plaidoyers du dernier procès criminel, dans le district judiciaire de Montmagny.

M. Bédard (Chicoutimi): Dois-je comprendre que vous en étiez satisfait ou pas?

M. Giasson: Vous n'avez rien à comprendre. Lisez-le.

M. Bédard (Chicoutimi): Je ne vois pas pourquoi vous nous invitez à le lire. Si vous voulez exprimer une opinion, exprimez-la.

M. Giasson: Je vous donne un petit conseil.

M. Bédard (Chicoutimi): C'est un conseil dont je peux me passer.

M. Choquette: Quoi qu'il en soit, nous avons maintenant une procédure simplifiée pour l'engagement des substituts du procureur général. Des amendements assez importants ont été apportés à la Loi des substituts du procureur général, qui permettent d'engager les avocats sur une simple déclaration d'engagement du ministre, qui est généralement précédée d'un examen par un jury composé du sous-ministre aux affaires criminelles, d'un procureur-chef de la couronne et, le plus souvent, d'un avocat de la défense qui examinent les qualifications du candidat.

Je dois dire avec une légitime fierté que, dans ce domaine, comme dans tant d'autres, le ministre de la Justice et le gouvernement actuel ont fait des efforts très considérables qui ont été couronnés de succès, de façon à dépolitiser entièrement l'administration de la justice.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous procédez avec célérité, à votre humble opinion!

M. Choquette: Dans quel domaine?

M. Bédard (Chicoutimi): Pour faire ces changements.

M. Choquette: Sans doute, je vous ai dit tout à l'heure que, depuis deux ans, je pense, nous en avions engagé 54 à temps plein, ce qui est déjà plus de la moitié de nos effectifs complets. J'ai eu le plaisir, samedi dernier, de rencontrer à Montréal tous les substituts du procureur général, qui sont venus de toutes les parties de la province. Au cours de cette réunion, nous avons échangé des vues sur l'application du droit criminel au Québec. Je dois dire que j'ai été extrêmement réjoui du calibre de ceux qui nous représentent devant les tribunaux.

M. Bédard (Chicoutimi): Remarquez que le but de mes questions n'était en aucune façon de mettre en doute leur qualité.

M. Choquette: Non, j'ai compris que le député veut se renseigner.

M. Bédard (Chicoutimi): Exactement. Maintenant, la situation que vous venez de me décrire concerne, naturellement, l'aspect du droit criminel.

M. Choquette: En effet.

M. Bédard (Chicoutimi): Concernant le droit pénal, d'une façon toute particulière, peut-être, l'application du code de la route, la situation est-elle aussi réjouissante?

M. Choquette: Elle n'est pas la même. Il faut savoir s'adapter à chaque circonstance, suivant ses impératifs propres.

M. Bédard (Chicoutimi): C'est plus difficile de couper?

M. Choquette: C'est beaucoup plus difficile, parce que, dans les divers contentieux du gouvernement, nous avons environ 200 avocats à temps plein qui agissent comme conseillers juridiques auprès des ministères, auprès d'organismes gouvernementaux. Ces avocats ont souvent comme responsabilité de donner des avis juridiques au ministère ou à l'organisme concerné, d'interpréter les lois qui s'appliquent à certains secteurs d'activité intéressant ces ministères ou ces organismes, de prendre des responsabilités en rapport avec les poursuites pénales qui résultent de ces mêmes lois, de préparer des projets de loi ou des projets de règlement qui intéressent le secteur dans lequel ils oeuvrent. Leur responsabilité de conseillers juridiques chevauche le droit civil, le droit statutaire et le droit pénal.

Alors, ils ont des responsabilités assez étendues. Il va de soi que nous ne sommes pas en mesure à l'heure actuelle de confier les litiges civils, soit engagés par le gouvernement ou contre le gouvernement, à ces 205 avocats. Et nous ne sommes pas en mesure non plus de leur donner toute la responsabilité de s'occuper des poursuites pénales et statutaires parce que ceci représenterait une telle quantité de travail que nous devons avoir recours à des avocats de la pratique privée.

Dans ces conditions, lorsqu'il s'agit de litiges civils, nous devons retenir des avocats de la pratique privée. Il y a bien sûr quelques cas où nos avocats agissent eux-mêmes devant les tribunaux, par exemple au ministère du Revenu, les avocats de ce contentieux, qui d'ailleurs est important, vont agir pour le gouvernement dans les causes fiscales devant les tribunaux. Dans d'autres secteurs, cela ne nous est pas possible.

Le ministère se doit donc de retenir des avocats de la pratique privée en droit civil comme aussi en droit pénal. En droit civil, s'il s'agit de matières qui sont importantes, qui impliquent des

sommes assez considérables pour le gouvernement, tout naturellement, nous allons à des spécialistes dans ces domaines comme, par exemple, dans les actions en dommages ou les causes d'expropriation. Nous avons alors recours à des avocats qui se spécialisent dans ces domaines. Dans le droit pénal, là, c'est une chose où cela ne requiert pas une compétence très particulière malgré que nous avons cherché à confier nos mandats à des avocats, confier des mandats en nombre suffisamment important pour vraiment intéresser l'avocat de la pratique privée. Le député de Chicoutimi est suffisamment au fait des conditions dans lesquelles les avocats de la pratique privée travaillent pour, je crois, apprécier le fait que si l'on envoyait une cause ou deux du code de la route ou une cause ou deux en vertu de la Loi de la protection du consommateur ou une cause ou deux en vertu de telle autre loi, le plus souvent l'avocat ne s'y intéresserait pas étant donné que ces mandats ne rapportent pas beaucoup, les honoraires qui y sont attachés sont assez petits, de telle sorte qu'il faut envoyer un volume assez considérable pour que l'avocat puisse vraiment s'y intéresser.

Nous avons cherché dans des domaines particuliers du droit pénal à confier des mandats en nombre suffisant à des avocats qui indiquent un intérêt dans ces secteurs et qui donnent un rendement suffisant au ministère.

M. Bédard (Chicoutimi): Quand on parle du code de la route et des poursuites pénales, j'ai bien l'impression qu'il n'y a pas grand avocats qui ont besoin d'une grande expertise...

M. Choquette: Non, c'est cela...

M. Bédard (Chicoutimi): ... qui soient doués d'une grande expertise pour plaider ces causes. C'est bien plus l'intérêt financier que cela peut représenter étant donné le nombre de causes assez important.

M. Choquette: Je suis d'accord avec le député que l'intérêt financier y est et qu'il faut savoir le reconnaître. Par contre, il y a des secteurs où il y a pas mal de technicalités et là...

M. Bédard (Chicoutimi): Je l'admets.

M. Choquette:... il faut aussi donner un nombre assez important de causes à des avocats pour qu'ils y prennent un intérêt.

M. Bédard (Chicoutimi): Mais dans le cas des causes pénales, il avait déjà été question que ce soit donné aux fins d'être plaidé aux représentants ou substituts du procureur général qui sont nommés d'une façon permanente. Une étude a été faite à cet effet et amenait comme résultat qu'au bout de la ligne, cela représenterait quand même une épargne assez importante pour le ministère de la Justice.

Qu'est-ce qui fait que le ministère de la Justice ne se décide pas à donner ces causes tout simplement aux procureurs permanents? Le ministre le sait, ces causes se plaident le matin...

M. Choquette: Je le sais, je connais cela.

M. Bédard (Chicoutimi): ... elles passent en série.

M. Choquette: Mais je dirais que dans le cas des substituts du procureur général, ils n'ont pas le temps, à l'heure actuelle, compte tenu du volume d'affaires criminelles qu'ils ont à traiter, de prendre en plus de cela tout le droit pénal.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que cela ne serait pas plus payant, même s'il fallait nommer un procureur permanent de plus? Disons qu'il aurait comme travail de s'occuper d'une façon tout à fait spéciale de ces causes, à l'intérieur de tout un district et même de deux districts dans certains cas, parce que ce serait assez facilement réalisable, tout dépendant, naturellement de l'étendue des districts judiciaires. Est-ce que cela ne serait pas plus payant et est-ce que cela ne permettrait pas...

M. Choquette: ... de réaliser des économies? M. Bédard (Chicoutimi): Bien oui.

M. Choquette: C'est possible, mais compte tenu de nos effectifs au point de vue des procureurs de la couronne pour le droit criminel, comme on n'avait pas encore réussi à satisfaire même nos besoins en matière de droit criminel, on ne pouvait pas penser au droit pénal. Mais je ne dis pas que pour l'avenir on n'aura pas recours à la solution d'avocats permanents dans le droit statutaire et pénal.

M. Bédard (Chicoutimi): Parce que c'est un des aspects où, on le sait, les accusations de patronage dans le domaine de la justice, concernant les avocats, se retrouvent le plus souvent.

M. Choquette: Je crois que tous les avocats inscrits au Barreau peuvent se qualifier pour représenter le ministère de la Justice et le gouvernement devant les tribunaux. Puisque le Barreau les a admis, puisqu'ils ont passé les examens et que le Barreau a reconnu leur intégrité, leur honnêteté, pourquoi ne pourraient-ils pas représenter le ministère de la Justice?

M. Bédard (Chicoutimi): Vous savez très bien...

M. Choquette: Le mot "patronage" me semble un mot saugrenu, à ce moment-ci de la discussion.

M. Bédard (Chicoutimi): Le ministre peut sourire, mais il sait très bien que par un hasard permanent, encore une fois, dans ce domaine, on se retrouve toujours avec des amis du pouvoir qui, effectivement, sont nommés pour remplir ce travail.

M. Choquette: M. le Président, je m'étonne d'entendre des paroles pareilles dans la bouche du député de Chicoutimi, alors que son ami, collègue et organisateur politique. Me Lucien Bouchard, a été retenu par le ministère de la Justice et la commission Cliche pour agir devant cette commission. Je m'étonne aussi...

M. Dufour: C'est inconcevable.

M. Choquette: ... d'entendre cela de sa bouche, alors que Me Lucien Bouchard représente le ministère de l'Education et enfin toute l'organisation scolaire de la région du Saguenay dans les négociations avec les professeurs.

M. Bédard (Chicoutimi): Là, vous parlez des secteurs...

M. Choquette: Comment peut-on parler de patronage lorsqu'on a un cas si proche de soi?

M. Bédard (Chicoutimi): Le ministre peut sourire.

M. Choquette: Non, mais je m'étonne...

M. Bédard (Chicoutimi): Vous êtes complètement en dehors de la question. Là, vous nous parlez des secteurs...

M. Choquette: C'est vraiment étonnant.

M. Bédard (Chicoutimi): Là, vous nous parlez des secteurs...

M. Choquette: Mais l'appétit du Parti québécois est incroyable!

M. Bédard (Chicoutimi): Là, vous nous parlez des secteurs où il faut vraiment avoir recours à des avocats doués quand même d'une certaine expertise.

M. Choquette: Alors, il y a des avocats doués pour vous et des avocats qui ne sont pas doués.

M. Bédard (Chicoutimi): Non, non, d'une certaine expertise.

M. Choquette: Où placez-vous le député d'Anjou, par exemple?

M. Bédard (Chicoutimi): Le ministre ne veut pas être sérieux. Cela lui fait mal, le ministre ne veut pas être sérieux.

Le Président (M. Picard): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Choquette: Le député de Beauce-Nord est-il un avocat doué, un avocat pas doué ou surdoué? Non, mais je vous donnais cet exemple pour vraiment...

M. Bédard (Chicoutimi): Le député d'Anjou va être placé dans la rosé d'Anjou, là.

M. Choquette: Je vous donnais cet exemple pour vraiment illustrer l'impartialité du ministère.

M. Bédard (Chicoutimi): C'est un mauvais exemple que vous avez apporté. Cela ne répond pas du tout à la question que je vous ai posée. On parle du droit pénal. On parle des petites causes du code de la route, vous le savez très bien.

M. Choquette: Alors, vous ne voulez pas que nous donnions de cause à des avocats, vos confrères. Vous voulez que j'agisse d'une manière brutale et extrême et que je retire toutes les causes de vos confrères.

M. Bédard (Chicoutimi): Si le ministre ne veut pas être sérieux...

M. Choquette: Oui, oui, je suis très sérieux. M. Bédard (Chicoutimi): Oui?

M. Choquette: Je vous donnais cet exemple pour vous illustrer que, si vous insistez absolument, nous pouvons retirer les mandats de M. Lucien Bouchard. Est-ce que vous le voulez? Est-ce que c'est cela que vous voulez?

M. Bédard (Chicoutimi): Je trouve vraiment que vous êtes à côté de la question.

Des Voix: Adopté.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous semblez l'aimer beaucoup, M. Bouchard.

M. Choquette: Oui, oui, je...

M. Bédard (Chicoutimi): Vous devez apprécier d'ailleurs ses qualités.

M. Choquette: Je crois, je crois.

M. Dufour: C'est un bon gars.

M. Choquette: II promet, il promet.

M. Bédard (Chicoutimi): ... prouver son intégrité...

M. Choquette: Pour revenir à un ton... M. Bédard (Chicoutimi): Plus sérieux.

M. Choquette:... plus au fait, parce que j'étais très sérieux tout à l'heure...

M. Bédard (Chicoutimi): Cela paraissait.

M. Choquette: ... mais pour être plus spécifique, plus particulier, je dirais ceci; c'est que dans le domaine des causes pénales, il y a un volume considérable. Vous savez, je ne suis pas absolument sûr, cela demeure à vérifier, que de confier ces causes à des avocats payés $20,000 ou $15,000 ou $22,000 par le ministère de la Justice,

avec tous les frais de secrétaires et bureaux que cela comporte, que le fait de confier ces causes à des avocats permanents représenterait nécessairement des économies. Cela demeure à voir. Mais je n'écarte pas, comme je l'ai dit, une solution qui ferait qu'on confierait à des avocats permanents des causes devant les tribunaux.

M. Bédard (Chicoutimi): Sur le plan de l'économie que cela pourrait représenter, en plus, je pense, de la possibilité d'une meilleure efficacité administrative, sur le simple plan de l'économie que cela pourrait représenter...

M. Dufour: On va faire une équipe...

M. Bédard (Chicoutimi):... est-ce que le ministre, puisqu'il est sérieux maintenant serait d'accord pour...

M. Choquette: ... opposer à cela. J'étais très sérieux, tout à l'heure, quand je parlais au député de Chicoutimi. Je disais littéralement des choses exactes. Je ne vois pas pourquoi le député de Chicoutimi me dit que je n'ai pas été sérieux au cours de la discussion. Mais enfin...

M. Bédard (Chicoutimi): Je vais laisser le ministre juger par lui-même.

Est-ce que, sur le plan de l'économie, le ministre pourrait s'engager à faire faire une étude comparative sur les coûts...

M. Dufour: M. Castonguay va...

M. Bédard (Chicoutimi): ... que pourrait représenter un système qui ferait que les causes pénales seraient entre les mains d'un avocat permanent nommé à cet effet comme substitut du procureur général, par rapport à ce que ce service représente à l'heure actuelle tel que confié à la pratique privée du droit?

M. Choquette: Je vais certainement regarder le problème, d'autant plus que le ministère de la Justice a décidé de créer très rapidement une direction générale des poursuites statutaires et pénales pour donner à ce secteur du droit toute l'importance qu'il mérite dans la période actuelle. Donc, je n'écarte pas du tout la suggestion du député de Chicoutimi, au contraire, mais je dirais ceci. C'est qu'il faudra aussi prendre en considération qu'un avocat qui entrerait au service du gouvernement, comme substitut du procureur général et qui se verrait confier exclusivement des causes de droit statutaire ou pénal pourrait, à plus ou moins brève échéance, devenir un peu abruti parce qu'il pourrait trouver que le travail manque d'intérêt. Il pourrait dire: Vous savez, cela, ce sont des petites causes et moi, je voudrais aller vers des causes plus importantes. Alors je devrai prendre ce facteur en considération, la possibilité de faire du recrutement d'avocats permanents pour s'occuper exclusivement d'un secteur du droit qui, en soi, et aux yeux des avocats, n'a jamais représenté beaucoup d'intérêt sur le plan juridique.

M. Bédard (Chicoutimi): II faut dire qu'il n'y a pas un gros "feeling" légal, si on peut employer l'expression, à plaider ce genre de cause. Maintenant, cela peut être confié, au départ, à des jeunes avocats qui veulent prendre un peu d'expérience. Remarquez que le ministre de la Justice, s'il accepte de faire une étude, pourra voir...

M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): ... du point de vue financier, ce que cela peut représenter comme économie, et jusqu'à quel point des avocats pourraient être intéressés à occuper ces fonctions.

M. Choquette: En fait, pour clore la discussion sur ce point, vu la réorganisation de tout ce secteur, il est certain que ces questions, nous nous les sommes posées.

Nous allons nous les poser avec plus de détail et faire les études appropriées pour en arriver à des conclusions.

M. Bédard (Chicoutimi): D'autant plus que c'est conforme...

M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi):... aux conclusions de votre livre blanc. Est.ce que le ministre pourrait nous faire le dépôt, dans un délai le plus rapide possible, du total des honoraires qui ont été payés pour des causes pénales, par district, avec le nom des avocats et les montants qui ont été versés en honoraires à ces avocats à travers tout le Québec?

M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): Cela peut prendre un délai de combien?

M. Choquette: Nous allons faire faire la compilation, ça peut prendre quelques jours.

M. Bédard (Chicoutimi): Quel est à l'heure actuelle le pourcentage des causes qui sont traitées par des avocats de la pratique privée au contentieux général?

M. Choquette: Le contentieux général ne plaide pour ainsi dire pas de causes devant les tribunaux civils; il s'occupe de donner des opinions...

M. Bédard (Chicoutimi): Des opinions juridiques.

M. Choquette: ... au gouvernement et s'occupe aussi de suivre les dossiers qui ont été confiés aux avocats de la pratique privée dans le domaine du droit civil.

M. Bédard (Chicoutimi): Mais, pour conseiller le gouvernement, celui-ci a recours à des avocats de la pratique privée.

M. Choquette: A l'occasion, dans les questions très compliquées, nous pouvons demander des avis juridiques à l'extérieur. Mais en général, lorsque le gouvernement a besoin d'avis en matière de droit statutaire, constitutionnel, administratif, etc., droit civil même, sans qu'il y ait des litiges d'engagés, c'est le contentieux général qui donne son avis.

M. Bédard (Chicoutimi): Je comprends que le ministre pourrait peut-être me donner dans un délai raisonnable le nom des avocats qui ont pu être consultés à titre d'experts et les sommes qui ont pu leur être versées en honoraires.

M. Choquette: Les avocats de la pratique privée que nous aurions pu retenir comme conseillers pour nous donner des opinions?

M. Bédard (Chicoutimi): C'est ça.

M. Choquette: Cela doit être difficile à compiler. On me dit que, dans les comptes publics, on trouvera rénumération des avocats.

M. Bédard (Chicoutimi): Mais il faut fouiller longtemps avant d'avoir le détail tel que j'aimerais l'avoir.

M. Choquette: La difficulté causée par la question du député de Chicoutimi, c'est qu'il faudrait que je limite la liste aux avocats qui ont été appelés à donner exclusivement des avis juridiques, sans litige. Ce serait assez difficile de faire une telle compilation dans les dossiers.

M. Bédard (Chicoutimi): Enfin, si ce n'est pas possible.

M. Choquette: Je ne vois pas comment on peut passer à travers tous les dossiers et dire que, dans tel dossier, il y a eu litige et que, dans tel autre dossier, ç'a été strictement un avis juridique qu'on a demandé.

M. Bédard (Chicoutimi): II y a quand même des avocats dont les services sont retenus d'une façon presque permanente dans l'entreprise privée.

M. Choquette: Non. Nous n'avons aucun avocat à qui nous donnons des "retainers", par exemple, sur une base annuelle.

M. Bédard (Chicoutimi): Non, mais je veux dire à qui vous demandez de façon permanente des avis dans des secteurs où il y a nécessité d'une certaine expertise.

M. Choquette: C'est variable, c'est suivant les domaines. Par exemple, s'il s'agit d'un domaine, on peut consulter un avocat qui est spécialiste dans tel domaine.

M. Bédard (Chicoutimi): ... municipal.

M. Choquette: Oui, alors il n'y a pas d'avocat attitré pour un domaine en particulier et on demande des avis à l'un, à l'autre.

M. Bédard (Chicoutimi): Quel est le pourcentage des causes traitées par des avocats de la pratique privée au service des poursuites du code de la route?

M. Choquette: Cela, je pourrais vous donner ça.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous avez ça? M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): Egalement, le pourcentage des causes traitées par des avocats de la pratique privée au service des poursuites en vertu des lois sur les alcools et le pourcentage des causes traitées par des avocats de la pratique privée au service central des réclamations.

M. Choquette: On me dit que, pour cette dernière catégorie, il y en a très, très peu.

M. Bédard (Chicoutimi): Bon. Au moins pour les...

M. Choquette: Le service central des réclamations, ce seraient des causes de droit civil.

M. Bédard (Chicoutimi): Oui, mais, en tout cas, s'il y en a très peu, ce n'est peut-être pas difficile de me donner le renseignement. Normalement, ce sont des causes qui ont une importance assez particulière. Est-ce possible d'avoir les renseignements pour ces trois catégories?

M. Choquette: Je ne sais pas si je pourrai isoler les causes du service central des réclamations. Je pense que je pourrais vous donner les mandats civils qui ont été donnés, mais, même là, il y a des chevauchements d'une année à l'autre, la cause peut avoir été entreprise il y a deux ans et le compte envoyé deux ans après.

M. Bédard (Chicoutimi): En tout cas, le compte d'honoraires payés dans l'année.

M. Choquette: Oui, on peut vous donner cela. En droit civil, je peux vous donner, pour l'année dernière, le nombre de comptes que l'on a payés pour des avocats qui nous ont représentés dans des causes ou des affaires civiles.

M. Bédard (Chicoutimi): La même chose pour les deux autres catégories.

M. Choquette: Les deux autres catégories aussi.

M. Bédard (Chicoutimi): Les avocats et le montant d'honoraires payés.

M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): Sur ce sujet, je voudrais savoir qui sont les avocats de la pratique privée à qui la direction générale confie des mandats, par districts judiciaires, le nombre de causes en I974 par avocat et le dépôt de cette liste.

M. Choquette: Je ne pense pas que nous ayons une liste fixe et que je puisse vous donner cela par district judiciaire. Je pourrai vous donner des listes entières des avocats à qui nous avons payé des honoraires l'année dernière et, là, vous pourrez les répartir comme vous le voudrez dans les différents districts judiciaires, que ce soit en droit civil ou en droit pénal.

M. Bédard (Chicoutimi): Concernant le contentieux criminel, comme on le disait à l'élément I tout à l'heure, le livre blanc nous apprend, à la page 43, que le ministère s'est assuré les services de I0I substituts du procureur général à titre permanent et d'un certain nombre, en régression, de substituts à temps partiel exerçant normalement en cabinet privé.

Je voudrais savoir quelles sont les statistiques sur cette régression des substituts à temps partiel pour les cinq dernières années. Pouvez-vous nous les donner?

M. Choquette: II en reste cinq à temps partiel.

M. Bédard (Chicoutimi): D'accord. Je vous fais tout simplement la lecture des renseignements que l'on voudrait avoir, quitte à ce que vous nous les fournissiez le plus rapidement possible; entre autres, le dépôt de la liste par district judiciaire des avocats de la pratique privée agissant comme substituts du procureur général à temps partiel et comme procureurs ad hoc. Troisièmement, le volume des causes traitées pour chaque catégorie de substituts en pourcentage, que ce soit les permanents, ceux à temps partiel ou ceux qui sont nommés ad hoc.

M. Choquette: Je ne pourrai pas vous donner des pourcentages comme cela. Je vous ai dit qu'il en restait cinq à temps partiel, je vous ai donné les districts judiciaires. Je ne peux pas vous donner les proportions.

M. Bédard (Chicoutimi): Quel est le salaire moyen des substituts du procureur général?

M. Choquette: Moyen, je ne sais pas si je peux vous le donner, mais l'échelle...

M. Bédard (Chicoutimi): Le plus bas et le plus haut.

M. Choquette: ...s'étend de $33,000 qui est le maximum à $9,500. Certains procureurs chefs peuvent aller jusqu'à $33,000 et notre recrutement se fait en principe à $9,500.

A l'heure actuelle, nous recrutons, en fait à $11,000. A part cela, on monte très vite, quand on est compétent!

M. Bédard (Chicoutimi): Comme vous les choisissez tous compétents, ils montent tous très vite!

M. Choquette: Oui. Etant donné que le candidat actuel porte une barbe, je lui recommanderais plutôt d'aller dans un autre secteur.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous exigez...

M. Choquette: Nous n'exigeons pas, mais j'ai constaté, l'autre jour, que nous avons très peu de substituts du procureur général qui portent la barbe.

M. Bédard (Chicoutimi): Déplorez-vous cette situation, ou si vous êtes d'accord?

M. Choquette: Non, c'est plutôt du côté de l'aide juridique. A l'aide juridique, il y a plus de barbes.

M. Bédard (Chicoutimi): Comment expliquez-vous cela?

M. Choquette: Une double personnalité du ministère de la Justice. Que voulez-vous! Nous représentons la poursuite et, d'un autre côté, nous avons des intérêts dans la défense.

M. Bédard (Chicoutimi): Les idées progressistes seraient-elles à l'aide juridique et les idées conservatrices seraient...

M. Choquette: Non. Je pense que le député caricature.

M. Bédard (Chicoutimi): Non. Je pose la question. Je n'affirme pas.

M. Choquette: Non. A l'aide juridique, nous avons d'excellents avocats, avec des idées très progressistes. D'ailleurs, j'aime bien leur travail, il est excellent, à l'heure actuelle.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous aimez moins leur barbe.

M. Choquette: Non, pas du tout, mais ce n'est pas la même chose.

M. Bédard (Chicoutimi): D'accord.

M. Choquette: Ceux qui représentent la poursuite sont plutôt du côté "law and order", et ceux qui sont de la défense sont plutôt du côté des droits de l'homme. Je suis pris entre les deux et il faut...

M. Bédard (Chicoutimi): La protection de la vie privée, par exemple, c'est sacré.

M. Choquette: Oui, tout cela. M. Sylvain: In medio stat virtus!

M. Choquette: In medio stat virtus! Comme le dit le député de Beauce-Nord, avec beaucoup d'à-propos.

M. Bédard (Chicoutimi): Sauf quand il s'agit du salaire, ce n'est pas toujours dans le milieu qu'est la vertu.

M. Choquette: Qu'ils soient du côté de la poursuite, ou du côté de la défense avec l'aide juridique, nos avocats rendent d'excellents services. Je suis très heureux de l'évolution des choses, des deux côtés. Je crois que la justice est bien servie par ces deux groupes qui ont une personnalité un peu différente, mais cela est normal, compte tenu de leurs fonctions respectives.

M. Bédard (Chicoutimi): C'est sûr qu'on parle plus de syndicalisme possible dans un secteur que dans l'autre.

Le Président (M. Picard): Y a-t-il d'autres questions au programme 9?

M. Choquette: Je ne sais pas où nous pourrions situer exactement le député d'Anjou.

M. Tardif: Progressiste, malgré l'absence de barbe.

M. Bédard (Chicoutimi): Nous allons le situer à la table, assis bien tranquille.

Je n'ai pas d'autres questions, M. le Président, sur ce programme.

Garde des prévenus et des détenus

Le Président (M. Picard): Le programme 9 est adopté. Le programme 10: Garde des prévenus et des détenus.

M. Bédard (Chicoutimi): Le ministre pourrait-il me donner les remarques générales concernant les augmentations aux éléments I et 2 de ce programme? Il y a une augmentation de près de $5 millions à l'élément 2: Surveillance et transport. Comme cela représente une augmentation assez appréciable...

M. Choquette: Pour ce qui est de la surveillance et du transport, la hausse des traitements faisant suite à l'application des conventions collectives coûtera, en 1975/76, environ $3,995,700. La hausse du nombre de jours/hommes de travail occasionnée par l'augmentation de l'effectif en place prévu pour 1975/76, par rapport à 1974/75, nous oblige à prévoir des crédits additionnels de $246,500. La prise en charge complète du transport des détenus et des prévenus amène l'obligation d'acheter dix véhicules neufs, ce qui représente $66,000.

Il y a diverses autres augmentations, formant un total de $4,348,900. Par conséquent, on peut dire que l'augmentation est principalement expliquée par la hausse des traitements due aux conventions collectives et certaines autres dépenses qui sont assumées par le service en 1975/76.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que le ministre pourrait nous produire la liste des établissements de détention?

M. Choquette: Sans doute.

M. Bédard (Chicoutimi): Peut-être qu'il y aurait possibilité de nous faire le partage de la liste des établissements de détention où il n'y a aucune ségrégation entre les prévenus et les détenus. S'il y en a.

M. Choquette: II y a ségrégation dans tous les établissements. C'est-à-dire qu'en aucun endroit on n'héberge des prévenus et des détenus dans les mêmes locaux. Ainsi à Orsainville, à Bordeaux. Tous les établissements comportent la ségrégation. C'est d'ailleurs dans la loi des établissements de détention.

M. Bédard (Chicoutimi): L'an dernier, le ministère procédait à la régionalisation des centres de détention en fermant certaines prisons locales afin de réduire le coût de fonctionnement. Est-ce que le ministre serait en mesure de nous faire le bilan général de cette opération?

M. Choquette: On me dit que les mesures prises dans ce domaine ont apporté des économies substantielles. La liste des établissements qui ont été fermés mais qui demeurent comme postes relais est la suivante: Alma, Campbell's Bay, Chi-bougamau, La Malbaie, Sainte-Anne-des-Monts, Thetford-Mines. Voici la liste des établissements à activités réduite: Arthabaska, Montmagny, Percé, Saint-Jean-d'Iberville.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce qu'il y a un lien entre cette opération de régionalisation et les augmentations de près de $5 millions qu'on retrouve à l'élément 2 concernant la surveillance et le transport?

M. Choquette: Le député se rappellera que sur le total d'augmentation de $5 millions, il y a $4 millions qui sont dus à des augmentations de salaires attribuables aux conditions de la convention collective.

M. Bédard (Chicoutimi): Seulement attribuables à la convention collective?

M. Choquette: C'est exact. Il reste $l million qui sont attribuables à l'achat de véhicules additionnels et la responsabilité des transferts qui autrefois appartenait à la Sûreté du Québec.

Donc, il y a un dégrèvement du budget de la Sûreté du Québec pour le transport des prisonniers, et la direction générale des établissements de détention assume un fardeau additionnel pour le transport de ces prisonniers.

M. Bédard (Chicoutimi): Quand vous parlez d'achat de nouveaux véhicules, est-ce que ce sont des véhicules à sécurité augmentée, depuis certaines difficultés qui auraient pu se présenter dans le transport de certains criminels?

M. Choquette: On me dit que ce sont des camionnettes ordinaires qui sont assez sûres pour permettre le transport de prisonniers qui n'offrent pas de dangers spéciaux.

M. Bédard (Chicoutimi): Je n'ai pas d'autre question sur ce programme-là, M. le Président.

Réinsertion sociale des délinquants

Le Président (M. Picard): Programme 10, adopté. Programme 11. Réinsertion sociale des délinquants.

M. Bédard (Chicoutimi): Ce programme traite de la réinsertion sociale des délinquants et vise à amener les personnes délinquantes à réintégrer un cadre social acceptable, qui puisse être susceptible de les aider dans leur réhabilitation. Est-ce que le ministre pourrait nous exposer brièvement ou longuement, s'il en a l'idée, les progrès, pour autant qu'ils existent, qui ont pu être effectués au cours de l'année dans le domaine de la réinsertion sociale, en y incluant, si possible, les statistiques, le nombre de programmes spéciaux et les résultats de l'évaluation de ces programmes spéciaux en fonction d'une réinsertion sociale du délinquant?

M. Choquette: Tout d'abord, au point de vue budgétaire, les augmentations que l'on constate sont principalement dues à des augmentations de salaire et de traitement. Maintenant, la direction de la probation a vu, dans le passé et même récemment, son effectif croître au point de vue du nombre d'officiers de probation. A l'heure actuelle, ou du moins à la fin de 1974, notre effectif à cette direction était de 200 tandis qu'en 1973 il était de 177. Si je me reporte à l'année 1970/71, je pense que nous n'avions qu'environ 25 officiers de probation pour couvrir tout le Québec, de telle sorte que depuis les quatre ou cinq dernières années le nombre d'officiers de probation a crû de 25 à environ 150 à l'heure actuelle.

M. Bédard (Chicoutimi): Je comprends que c'est une augmentation appréciable du nombre, mais jusqu'à quel point cela répond-il, à l'heure actuelle, à la demande? Dans l'esprit du ministre, combien en faudrait-il pour répondre à la demande? Je ne dirai pas qu'il y a des critiques, mais il y a bien des demandes qui s'acheminent vers le ministère de la Justice concernant...

M. Choquette: On me dit que le principal est fait, que le nombre d'agents de probation, sans être totalement suffisant pour les besoins actuels, répond, quand même, aux exigences minimales. M. Gauthier m'informe que d'ici à 1980 nous au- rons environ 200 agents de probation, ce qui devrait pouvoir satisfaire à nos besoins. Il faut avouer aussi...

M. Bédard (Chicoutimi): 200 en I980, ce serait suffisant, dans l'esprit du ministre, pour répondre aux besoins?

M. Choquette: Oui. Il faut ajouter que nos agents de probation s'occupent de nos anciens détenus dans les prisons provinciales et non pas les anciens détenus dans les pénitenciers fédéraux.

Il faudrait quand même ajouter des effectifs qui sont ceux du gouvernement fédéral en matière d'agents de probation.

M. Bédard (Chicoutimi): C'est quoi les effectifs du gouvernement fédéral, approximativement?

Il n'a pas la même notion de l'agent de probation que le Québec.

M. Choquette: Ce sont des agents de libération conditionnelle. Maintenant, nos agents de probation, ici, s'occupent de la rédaction des rapports présentenciels que les juges exigent avant de rendre des sentences.

M. Bédard (Chicoutimi): Le chiffre de 200 en I960, pour répondre à la demande, me surprend parce que je suis convaincu que vous devez avoir de nombreuses demandes de la part de juges disant qu'il n'y a pas suffisamment d'agents de probation qui seraient en mesure de faire enquête en profondeur sur les délinquants qui sont amenés devant eux et à propos desquels ils ont une sentence à rendre. Surtout dans ce domaine, pour une justice qui s'oriente vers la réhabilitation, cela demande vraiment des enquêtes assez approfondies.

M. Choquette: Bien, écoutez, c'est basé sur l'expérience vécue à la direction de la probation. On m'a dit que 200 postes d'agents de probation dans quelques années, ce qui est dans les prévisions de la direction, devraient être suffisants pour combler les besoins. J'omets ici toute la probation juvénile qui tombe sous le ministère des Affaires sociales dans l'état actuel des choses.

M. Bédard (Chicoutimi): Oui, oui, quand il s'agit de la cour du Bien-Etre social.

M. Choquette: A l'heure actuelle, nous ne couvrons donc que les adultes.

M. Bédard (Chicoutimi): Le ministère a mis au point quelques programmes spéciaux en fonction de la réhabilitation des délinquants. Est-ce que le ministère envisage d'autres programmes spéciaux dans le même sens?

M. Choquette: Des programmes à l'intérieur des prisons?

M. Bédard (Chicoutimi): Non, non, à l'extérieur aussi.

M. Choquette: Ah oui! il y a tout un développement que connaît la direction au point de vue de la participation communautaire. Nous avons un officier au ministère, qui est chargé de la participation communautaire, qui est en relation avec les organismes sociaux qui s'intéressent aux détenus ou aux anciens détenus et qui suscite des initiatives bénévoles. Je pourrais donner des exemples: la Maison Painchaud, les Ateliers du gentilhomme rembourreur, les Ateliers Dominique...

M. Bédard (Chicoutimi): Vous avez une association qui s'est formée à Chicoutimi aussi en fonction...

M. Choquette: A Chicoutimi, il y a un groupe aussi.

M. Bédard (Chicoutimi): ...de la réhabilitation. M. Choquette: Alors, nous donnons...

M. Bédard (Chicoutimi): Quand c'est nécessaire, est-ce que vous allez jusqu'à leur apporter une aide financière?

M. Choquette: Sans doute. Et même à l'heure actuelle, tous ces programmes de participation communautaire, qui étaient en partie financés par le ministère des Affaires sociales, émargeront peu à peu au ministère de la Justice.

M. Bédard (Chicoutimi): Je n'ai pas d'autre question à ce programme.

Aide juridique et financière

Le Président (M. Picard): Programme 11, adopté. Programme 12, Aide juridique et financière.

M. Bédard (Chicoutimi): C'est peut-être une question qui se situe dans un autre programme. Elle ne sera pas aussi longue que celle sur l'écoute électronique. Dans quelle échéance le ministre entrevoit-il la réfection, le réaménagement ou la reconstruction de centres de détention dans l'île de Montréal en particulier, entre autres lorsqu'on parle de Parthenais, de Bordeaux?

M. Choquette: Cette année, nous avons les crédits appropriés pour la préparation des plans du nouveau centre de détention qui sera appelé à remplacer les prisons de Bordeaux et de Parthenais mais en tenant compte des délais voulus pour la construction, on peut dire que cette prison sera inaugurée dans trois ou quatre ans. Maintenant, il s'agit d'un budget approximatif de $40 millions, ce qui est une somme fort considérable.

M. Bédard (Chicoutimi): A moins qu'il y ait danger pour la spéculation, est-ce que ce nouveau complexe serait situé sur le site de Bordeaux ou ...

M. Choquette: Le site n'est pas encore établi. Evidemment, nous avons un vaste terrain à Bordeaux, le nouveau Bordeaux, où se trouve la prison actuelle. Il n'y a pas de doute que ce site représente des avantages incontestables.

M. Bédard (Chicoutimi): En ce qui a trait au programme 12, qui traite de l'aide juridique et financière, qui vise à assurer l'accès à la justice aux personnes économiquement défavorisées, est-ce que le ministre pourrait nous donner des renseignements sur les augmentations de crédits qui sont de l'ordre de presque $2 millions?

M. Choquette: Ces crédits résultent de l'augmentation des affaires juridiques dont s'occupe l'aide juridique, qu'il s'agisse d'affaires traitées par les avocats à temps plein, de l'aide juridique ou d'affaires qui sont confiées à des avocats de la pratique privée.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que le ministre pourrait nous fournir les statistiques sur cette augmentation?

M. Choquette: Oui. Vous aurez des statistiques probablement beaucoup plus récentes et intéressantes, M. le député de Chicoutimi, d'ici quelques jours, puisque je recevrai incessamment le rapport annuel de la Commission des services juridiques. On trouvera dans ce volume tous les détails appropriés sur le fonctionnement de ce programme.

Je pourrais mentionner, par exemple, au député de Chicoutimi, que nous avons à l'heure actuelle 250 avocats à temps plein au service de l'aide juridique dans les diverses régions du Québec.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que le ministère entrevoit que ce nombre va augmenter?

M. Choquette: Pour le moment, nous essayons de le stabiliser pour ne pas que l'on dépense...

M. Bédard (Chicoutimi): Où se situe le point de stabilisation dans l'esprit du ministre?

M. Choquette: Je dirais qu'il se situe actuellement à 250 avocats et à $19 millions de budget.

Je pense que nous sommes un des endroits du monde qui dépensent le plus pour l'aide juridique. J'ai eu l'occasion de comparer d'autres budgets à celui du Québec, comme le budget de l'Ontario, le budget de la Suède, etc. et je puis vous dire que le Québec est à l'avant-garde au point de vue de l'aide juridique.

M. Bédard (Chicoutimi): Au chapitre de l'aide juridique, à la page 232, le livre blanc sur la justice fait état d'abus pratiqués par certains avocats de la pratique privée, agissant dans le cadre de la loi, qui auraient entrepris, selon eux, des recours futiles pour des montants prohibitifs. Je voudrais connaître les commentaires du ministre de la Jus-

tice sur cet aspect qui a été souligné par le livre blanc.

M. Choquette: II s'agit soit de causes civiles et surtout de causes criminelles où des avocats ayant pris la défense de certains accusés laissent se dérouler le procès, ce qui est le droit strict de l'accusé, remarquez bien.

M. Bédard (Chicoutimi): Multiplient les procédures.

M. Choquette: Ou enfin allongent la durée des procédures et du procès, avec des coûts qui en résultent pour le gouvernement.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que cela se présente souvent, ces abus?

M. Choquette: Cela s'est présenté, mais je ne dis pas que c'est dans la majorité des cas. Dans le livre blanc nous avons tenu à indiquer qu'il pouvait y avoir des abus de ce côté. Nous cherchons des moyens qui, tout en laissant aux avocats et aux justiciables toute leur liberté d'action appropriée pour qu'ils se défendent convenablement devant les tribunaux, limiteraient quand même les abus.

M. Bédard (Chicoutimi): Je conçois que ce n'est pas facile de concilier le droit de l'individu de se faire défendre pleinement et entièrement et cet aspect qui est souligné par le livre blanc, mais de quel ordre sont les réformes envisagées par le ministre?

M. Choquette: Je n'ai pas adopté de formule définitive qu'on pourrait inscrire dans les lois et qui serait de nature à limiter ce genre d'abus. On en est plutôt à une période de réflexion sur les mesures qui pourraient être prises. Maintenant, j'ai pensé qu'un avertissement dans le livre blanc serait peut-être un commencement d'action.

M. Bédard (Chicoutimi): En vous disant que la crainte est le commencement de la sagesse.

M. Choquette: S'il y a trop d'abus, on va être obligé d'adopter des mesures. Ce serait peut-être un peu moins intéressant s'il y avait des mesures précises. Je ne voudrais pas, dans cette mesure, tomber dans une administration trop tatillonne à l'égard des avocats. S'il est possible d'éviter ce genre de mesure, je le ferai.

Le Président (M. Tardif): Le député de Beauce-Nord.

M. Sylvain: Sur le même sujet, M. le ministre, quand on examine le tarif, surtout au niveau des causes pénales et criminelles, est-ce qu'il n'y a pas là une porte ouverte à la multiplication des procédures? A l'article 234 ou l'article 236 du code criminel, plutôt à l'article 236, où il y a peu d'ouvertures à procès, la comparution, par exemple, va donner en honoraires à l'avocat $15.

M. Choquette: Est-ce que c'est la conduite en état d'ivresse ou avec facultés affaiblies?

M. Sylvain: Oui, l'ivressomètre. La comparution est de $15 et on accepte des frais de voyages limités. Il appert, selon une certaine expérience, qu'au premier abord l'avocat aurait à conseiller un plaidoyer de culpabilité et qu'il a d'enregistré un plaidoyer de non-culpabilité. Quand on doit aller en procès, même si c'est un procès simulé ou fictif, on voit des honoraires quand même — je ne dirai pas alléchants — un peu plus substantiels, pour arriver avec l'avocat qui a un client qui le paie en pratique privée sans passer par l'aide juridique. Je me demande si ces honoraires reconnus dans le tarif au niveau des Sessions de la paix surtout — ce n'est pas au niveau des causes civiles — n'incitent pas à multiplier des procédures qui n'auraient pas besoin d'avoir lieu du tout.

M. Choquette: La question du député de Beauce-Nord est certainement opportune. Maintenant comment favoriser l'intérêt de tout accusé de se défendre à l'égard d'une accusation qu'il juge mal fondée sans se substituer à lui et sans se substituer à son procureur? Cela demeure quand même une question d'appréciation et de jugement suivant les circonstances. C'est pour cela qu'il faudrait introduire des mesures probablement trop coercitives pour tenter de limiter ces abus qui peuvent se produire à l'occasion. Cela nous fait hésiter avant d'en proposer.

M. Bédard (Chicoutimi): Cela pourrait conduire à des dénis de justice parce que c'est un droit pour le prévenu, quel qu'il soit, non pas d'abuser mais d'user des procédures qui sont à sa disposition, du code criminel, comme l'avocat de se faire une opinion sur l'opportunité d'user de toutes les procédures ou de ne pas les employer.

M. Choquette: La Suède a des dispositions intéressantes dans sa loi d'aide juridique. L'une c'est que le juge, après avoir entendu le procès, peut énoncer dans son jugement que l'avocat n'a droit à aucun honoraire parce qu'il a abusé de l'aide juridique.

Elle a également une deuxième disposition intéressante, c'est que l'accusé qui est condamné, donc qui n'a pas été acquitté, est obligé de rembourser les honoraires de l'avocat qui l'a représenté en vertu du programme d'aide juridique, parce que la Suède pense que celui qui était coupable et qui a été condamné devrait payer éventuellement le montant des honoraires de l'avocat de l'aide juridique.

M. Sylvain: Je reviens là-dessus parce que ça pose, en fin de compte, deux problèmes, qui sont reliés mais qui sont quand même un peu différents, à la fois pour le client qui, en vertu de la Loi de l'aide juridique, a la liberté de choix entre l'avocat de l'aide juridique elle-même et l'avocat en pratique privée. Il semble qu'à l'heure actuelle — du moins dans des districts judiciaires où les bureaux d'avocats ne sont pas situés dans les mêmes lieux

que le palais de justice — les avocats de pratique privée déclinent toute offre de défendre des clients qui voudraient requérir les services de tels avocats à cause des honoraires.

Il se produit aussi que les bureaux d'avocats qui sont sur place, surtout à proximité du palais de justice, peuvent valablement gagner toute cette clientèle de l'aide juridique. Cela pose un problème en ce sens qu' à cause des honoraires qui sont de $15 pour une comparution avec 50 milles ou 60 milles à faire pour se rendre à un palais de justice, dans des districts en particulier, notamment dans le district judiciaire de Beauce, on se rend compte que les petits honoraires qui sont versés en vertu des tarifs négociés ne laissent plus cette liberté de choix. Les avocats de pratique privée, à la cour des Sessions de la paix surtout, ne veulent plus d'aucune façon comparaître.

M. Choquette: C'est la première fois que j'entends dire que nos tarifs sont insuffisants à la cour des Sessions de la paix dans le domaine du droit criminel.

M. Sylvain: Les tarifs sont suffisants, je pense, et ça amplement, j'ai eu l'occasion de les examiner, quand les procédures ont été complétées, quand il y a eu deux ou trois apparitions à différents stades des procédures en cours, au niveau des sections particulières du code criminel, notamment sur les infractions de la nature de celle que j'ai mentionnée tout à l'heure: ivressomètre et facultés affaiblies. C'est un point que je voudrais porter à votre attention.

M. Choquette: Très bien, je note vos observations.

Le Président (M. Picard): Le député d'Anjou.

M. Tardif: Sur le même sujet, M. le Président. Je n'ai pas été complètement satisfait de la réponse qui a été donnée. Ce qui se passe, c'est ceci. Supposons qu'un client qui est admissible à l'aide juridique vient voir un avocat à qui on confie le mandat de l'aide juridique. L'avocat reçoit le client et, au bout d'une demi-heure ou d'une heure de conversation, il se rend compte que le client en question — à supposer qu'il soit accusé de facultés affaiblies — est coupable. Pour le travail qu'il a effectué, pour le temps qu'il va passer à la cour, s'il décide de plaider coupable, il va recevoir seulement $15, ce qui n'est pas un montant très élevé, parce que je pense que $10 l'heure pour un avocat, ce n'est pas tellement payant.

Ce que certains avocats font à la place, ils décident — même s'ils savent que leur client est coupable — de plaider non coupable afin d'empocher les $150 qui s'attachent à un procès qui a été contesté. Il y a tout de même une différence de 90% entre les $15 qui sont payés pour la comparution et les $150 pour le procès. Je pense qu'on devrait tenir compte du fait que, même si un avocat fait plaider coupable à une accusation à son client, il peut consacrer assez de temps, que ce soit une heure ou deux heures, et le montant qu'on lui rembourse, qui est de $15, n'est certainement pas suffisant pour payer le travail qu'il a fait au cours de ces deux heures.

M. Choquette: Je note avec intérêt les observations du député d'Anjou. Tout ce que je peux lui dire c'est que, dans notre tarification, nous n'avons pas encore prévu d'honoraires de consultation, parce que nous avons craint qu'introduire les honoraires de consultation dans la tarification d'aide juridique ouvrirait des portes trop grandes à un type de services qu'il est assez difficile de contrôler.

Donc, pour le moment, nous n'avons pas voulu prévoir une telle chose. Il est possible que, dans l'avenir, nous révisions notre position, à l'occasion de négociations avec le Barreau, ou autres organismes qui représentent les avocats, pour prévoir un tarif s'appliquant à une consultation. Cela pourrait remédier à la situation que décrit le député, puisqu'il semble que la différence entre les honoraires s'attachant à la comparution et ceux s'attachant à un procès est tellement disproportionnée que, en soi, c'est une espèce d'incitation à amener la cause au procès.

Le Président (M. Picard): Le député de Beauce-Nord.

M. Sylvain: Simplement pour finir, l'accusation quant à l'ivressomètre, facultés affaiblies, ou conduite dangereuse amène, certes, au niveau de la comparution, souvent un plaidoyer de culpabilité, mais il faut penser aux problèmes qui en découlent, et par rapport au système des points de démérite, et par rapport au bureau des véhicules, et par rapport aux compagnies d'assurance. Il n'y a pas seulement le fait d'aller comparaître et d'enregistrer des plaidoyers de culpabilité. Il y a le fait, à un moment donné, d'indiquer au client,qui a la possibilité de se servir de l'aide juridique, tout le processus pour arranger son affaire après le plaidoyer de culpabilité. Je pense que c'est de l'ouvrage, outre le plaidoyer de culpabilité, qui devrait être reconnu à même le tarif de la préparation ou des conséquences du plaidoyer de culpabilité, sur le plan juridique.

M. Choquette: Je comprends qu'il y a une foule de conséquences qui découlent d'une comparution et d'un plaidoyer de culpabilité ou de non-culpabilité sur une affaire, en vertu du code de la route . Le député est en train d'indiquer qu'il ne s'agit pas exclusivement de cette affaire criminelle, qui intéresse le client, mais d'une foule d'autres incidences.

M. Bédard (Chicoutimi): L'aspect administratif, et les conséquences qui découlent...

M. Sylvain: Pour donner un exemple, deux ou trois semaines après, le directeur du bureau des véhicules dit:Votre permis est retiré, à moins que vous nous fournissiez la preuve d'un V-2-C. Le même client, encore sous la foi du même mandat ou non — de toute façon c'est relié de très près,

l'avocat n'a pas obtenu un autre mandat à l'intérieur du même mandat — va communiquer avec l'assureur, il va prendre des renseignements au niveau du bureau des véhicules. C'est tout cela qui fait qu'une comparution ou un plaidoyer de culpabilité sur ce genre d'infraction, ivressomètre, facultés affaiblies , a des conséquences au bureau des véhicules. En tout cas, j'ai cru voir bon nombre de bureaux, des gens en pratique privée qui refusaient des comparutions. La liberté de choix, pour le client, de l'avocat n'est plus valable dans ces cas-là, en particulier.

M. Choquette: Je note ce que dit le député de Beauce-Nord. Nous verrons, à l'occasion de l'étude des tarifs, s'il n'y a pas lieu de prévoir des modifications pour tenir compte du travail accru de l'avocat dans ces circonstances.

Le Président (M. Picard): Le député de Chicoutimi.

M. Bédard (Chicoutimi): Concernant l'aide juridique, le livre blanc, après s'être penché sur les conséquences budgétaires du recours à des services juridiques pour les citoyens à revenu moyen, propose la tenue d'une étude sur la question, étude qui serait effectuée conjointement par le Barreau et le ministère. Le ministre sait qu'à l'heure actuelle, selon les critères d'admissibilité à l'aide juridique, les citoyens à revenu moyen sont presque privés de ce recours.

Je crois que c'est une situation qu'il faudrait corriger parce que même le citoyen à revenu moyen peut avoir vraiment besoin d'être aidé en cas de poursuites judiciaires qu'il a à effectuer. Il y a des barèmes qui sont établis et on sait que passer du minimum requis, en termes de salaire, à la section où il n'est plus possible d'avoir l'aide juridique, parfois, il n'y a pas une grosse différence. Cela donne comme conséquence que le système lui-même — c'est normal — profite à ceux qui n'ont vraiment pas assez de revenu, mais il ferme la porte complètement à des citoyens qui ont des revenus moyens, qui peuvent peut-être gagner un salaire un peu plus élevé que le barème fixé par l'aide juridique, mais qui, d'autre part, sont affectés par des dettes à payer ou encore, simplement, ils dépassent si peu le barème fixé par l'aide juridique qu'ils sont, à proprement parler, presque dans la même situation que ceux qui peuvent y avoir recours.

Je pense qu'il faudrait — je ne sais pas quelle est l'idée du ministre là-dessus — penser à une formule qui puisse permettre à ces individus, à revenu moyen, d'avoir accès aux services de l'aide juridique.

M. Choquette: II est bien exact que les classes moyennes ne trouvent pas leur compte dans l'organisation de l'aide juridique actuelle. Celle-ci protège exclusivement les économiquement faibles dans certaines limites fixées par règlement. Par conséquent, on doit envisager, à plus ou moins courte échéance, diverses formules de couverture pour les gens qui, sans avoir de grands re- venus, sont quand même au-delà des normes reconnues pour bénéficier de l'aide juridique.

Il y a plusieurs formules possibles. Vous avez vu que le bâtonnier, Michel Robert, a fait une conférence, récemment, durant laquelle il a proposé une formule d'assurance pour frais juridiques. Il propose un système de contributions par voie de primes d'assurance qui assurerait aux gens de la classe moyenne une certaine couverture pour des services juridiques. Cette formule peut avoir un certain intérêt, je ne le nie pas. La question que je me suis posée, cependant, c'est: Est-ce que cette formule permettrait de couvrir suffisamment de personnes à l'intérieur de cette classe moyenne à laquelle nous nous sommes référés puisqu'il s'agirait d'une formule volontaire? Il faudrait envisager qu'elle serait mise en vigueur soit par une assurance qu'obtiendrait le Barreau auprès de certaines sociétés d'assurance ou encore ce serait les grandes entreprises qui donneraient cette espèce de couverture à leurs employés moyennant le paiement d'une prime ou encore, cela pourrait se faire par des associations coopératives ou syndicales.

Pour ma part, je ne suis pas convaincu que cette formule garantisse, d'une façon intéressante et suffisante, qu'on réussira véritablement à toucher un nombre relativement important de gens, parmi la classe moyenne, qui ne sont pas autrement couverts par l'aide juridique dans sa formule actuelle. C'est la raison pour laquelle, tout en exprimant de l'intérêt dans ce projet du Barreau, je ne suis pas encore sûr de sa réussite, du prolongement, du moins, de ce service à l'ensemble des personnes qui ne sont pas économiquement faibles.

M. Bédard (Chicoutimi): Je crois que cette formule ne réglera pas toutes les situations, c'est évident, mais elle contribuerait sûrement à une amélioration

M. Choquette: Tout dépend du nombre de personnes qui vont s'abonner ou qui vont s'inscrire à cette formule d'assurance services juridiques. On sait que les gens sont négligents et ne rechercheront pas l'occasion de payer des primes d'assurance pour payer des avocats éventuellement à l'occasion de consultations ou de litiges qu'ils pourraient avoir dans le cours de l'année.

J'exprime de l'intérêt, mais je ne suis pas sûr de la réussite.

M. Bédard (Chicoutimi): Cela peut être seulement une partie de solution, je pense.

M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): Peut-être une très petite partie de la solution qui pourrait s'accommoder d'autres formules, par exemple la possibilité d'une participation proportionnelle au revenu de l'individu. C'est-à-dire que l'Etat participerait, concourrait à aider le citoyen moyen, qui, à l'heure actuelle, n'est en aucune façon couvert par le système d'aide juridique, mais l'aiderait en tenant compte de son revenu.

M. Choquette: Cela pourrait être une formule de ce genre. Il est possible que ce serait à ce moment une formule qui permettrait de couvrir beaucoup plus complètement les classes moyennes que le député a à l'idée. Mais la participation de l'Etat exigera des déboursés qui représentent des sommes d'argent additionnelles à consacrer au programme d'aide juridique et qu'il faudra aller chercher dans les revenus des contribuables, en particulier les revenus des médecins. J'en vois un devant moi; c'est pour cela que je pense au revenu des médecins. On sait que les programmes de santé nous coûtent assez cher à l'heure actuelle au Québec. Même à cela les négociations...

M. Bédard (Chicoutimi): On a des problèmes, c'est pour cela que cela coûte cher.

M. Choquette: ...entre les professions médicales et le ministre des Affaires sociales ne semblent pas marcher sur des roulettes.

M. Bédard (Chicoutimi): Cela ne va pas bien dans les négociations, selon le ministre de la Justice?

M. Choquette: Non, je n'ai pas dit que cela allait mal, mais j'ai crû déceler par des nouvelles que j'ai lues dans les journaux, que les médecins ne semblent pas approuver la générosité de l'Etat à sa juste mesure. Les médecins, même si leur revenu se situe à de très hauts niveaux parmi la pyramide des revenus au Québec...

M. Bédard (Chicoutimi): Beaucoup plus que les avocats.

M. Choquette: ...malgré tout en veulent encore plus, d'une certaine façon.

M. Dufour: A l'ordre! Revenons à la pertinence du débat.

M. Choquette: C'est un exemple que je donne. Ce n'est pas parce que je voulais traiter le cas des médecins. C'est un exemple. On peut aller vers une couverture plus complète des classes moyennes, mais il va falloir trouver l'argent pour le faire.

M. Bédard (Chicoutimi): II va falloir que les classes plus favorisées acceptent d'y participer.

M. Choquette: Bien, c'est cela que j'avais le goût de dire et que le député de Chicoutimi dit si bien. Est-ce que nous devons, sérieusement, envisager de couper les revenus des médecins justement pour payer l'aide juridique pour les classes moyennes? C'est une solution intéressante.

M. Dufour: II faudra nous augmenter encore et ouvrir beaucoup plus de CLSC.

M. Sylvain: On peut vous placer dans un CLSC, on va avoir la paix.

M. Choquette: D'ailleurs, on ne taxera pas seulement les médecins et les classes supérieures.

Le Président (M. Picard): Est-ce que je pourrais demander à l'honorable ministre de changer son exemple...

M. Choquette: Oui, oui.

Le Président (M. Picard): ...et de ne pas susciter un débat avec le député de Vanier?

M. Choquette: Très bien, M. le Président, je vais suivre votre suggestion.

D'ailleurs, on sait que les revenus du gouvernement ne proviennent pas principalement des classes ayant un revenu supérieur dans la pyramide des revenus mais que, en fait, la masse des revenus de l'Etat proviennent des taxes payées par les gens qui sont justement au bas de la pyramide. De telle sorte que pour financer le programme d'aide juridique suggéré implicitement par le député de Chicoutimi et qui aurait beaucoup plus d'extension que le programme actuel...

M. Bédard (Chicoutimi): Que le ministre ne m'attribue pas quand même...

M. Choquette: Ah, j'ai pensé que le député me le suggérait.

M. Bédard (Chicoutimi): Non, non, je suivais le ministre dans ses réflexions.

M. Choquette: Ah bon, d'accord. De telle sorte que pour payer un programme d'aide juridique à couverture beaucoup plus ample au point de vue des catégories sociales, il faudra aller chercher cet argent dans les goussets des contribuables, parmi lesquels il y a les contribuables qui sont au bas de l'échelle des traitements.

Ceci pose donc un dilemme cornélien pour le ministre des Finances ainsi que pour le premier ministre et tous ses collègues.

M. Bédard (Chicoutimi): Je me faisais la réflexion que c'était agréable de voir le ministre de la Justice réfléchir avec tant d'à-propos sur la social-démocratie, la véritable social-démocratie.

M. Choquette: Oui, c'est évident...

M. Bédard (Chicoutimi): Et avoir tant d'hésitation et appartenir a un gouvernement qui en fait, non pas une application pratique, mais simplement une question d'image.

M. Choquette: S'il vous plaît... M. Tardif: C'est mesquin.

M. Choquette: M. le Président, que ces propos sont donc mal fondés.

M. Bédard (Chicoutimi): II s'agit de voir la législation pour comprendre.

M. Choquette: Mais le député se trompe complètement. Le député de Chicoutimi doit re-

connaître, avec ses collègues de ce côté-ci de la table, que le Québec a un régime de sécurité sociale — je parle dans tous les secteurs — qui est parmi les plus avancés au monde. Est-ce que le député de Chicoutimi...

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que c'est une raison pour s'arrêter devant les réflexions aussi élaborées que vient de faire le ministre de la Justice?

M. Choquette: Je n'ai pas dit cela, mais partons de la situation telle qu'elle existe et pas de nos rêveries ou de nos espoirs ...

M. Bédard (Chicoutimi): Je comprends que le ministre...

M. Choquette: ...mais de la réalité actuelle. Je pense que le député de Chicoutimi qui est un député de bonne foi, va reconnaître que les régimes de sécurité sociale au Québec, sont parmi les plus avancés au monde, plus avancés qu'aux Etats-Unis où la richesse nationale est bien plus considérable. La couverture, au point de vue de la santé publique, au point de vue de l'hospitalisation, au point de vue des médecins aux Etats-Unis, est ridicule comparativement aux régimes qui existent au Québec. Dans le domaine de l'aide juridique nous sommes bien en avant de tout ce qu'ils ont aux Etats-Unis. On pourrait aller dans l'aide sociale, on pourrait aller dans tous les secteurs, dans les médicaments, etc., au point de vue des dentistes pour les enfants, il n'y a pas de régime semblable aux Etats-Unis. Je vous donne les Etats-Unis comme exemple qui sont après tout, plus riches que nous, mais on pourrait aller dans n'importe quel autre pays et je crois que le Québec se comparerait avantageusement. Donc, je dis ceci: Quand le premier ministre parle de social-démocratie, je crois qu'il a raison.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous n'êtes pas sûr.

M. Choquette: A part cela, le député de Vanier m'approuve entièrement

M. Dufour: A 100%.

M. Bédard (Chicoutimi): II y a une différence entre en parler et l'appliquer.

M. Mercier: Je m'abstiens. M. Tardif: Cela est certain.

M. Choquette: Le député de Portneuf lui, c'est plutôt la loi des alcools.

M. Pagé: On en parlera au niveau des règlements.

M. Choquette: ... à ce programme.

M. Bédard (Chicoutimi): On va revenir au programme. Je pense que le ministre, étant donné qu'il se trouvait devant une foule de partisans, s'est étendu sur le sujet de la social-démocratie.

Il reste quand même que vous reconnaissez que les gens à revenus moyens sont complètement oubliés dans ce programme d'aide juridique.

M. Choquette: Surtout quand ils vont au bureau d'avocat du député de Chicoutimi.

M. Bédard (Chicoutimi): Là-dessus, je vous permettrais de parler. Je ne serais pas gêné.

M. Choquette: Ah oui?

M. Bédard (Chicoutimi): Oui, allez-y.

M. Choquette: Non, je comprends que c'est la situation qui existe.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que le Barreau a indiqué son intention de participer à une telle étude qui est proposée dans le livre blanc de la justice?

M. Choquette: C'est-à-dire que le Barreau a fait ses propres études. Je crois que nous allons rencontrer le Barreau pour voir ce qu'il a à proposer, et si ceci peut être favorisé par le ministère de la Justice, nous allons le faire, évidemment.

C'est-à-dire que nous allons aider le Barreau dans ses entreprises, si elles paraissent servir l'intérêt public.

M. Bédard (Chicoutimi): II est prématuré de demander quand les résultats de cette étude pourraient être connus?

M. Choquette: Je ne sais pas.

M. Bédard (Chicoutimi): A l'heure actuelle, les barèmes de l'aide juridique sont demeurés les mêmes que ceux fixés lors de l'application de la loi, il y a de cela près de trois ans?

Puisqu'on parle de social-démocratie, est-ce que le ministre de la Justice envisage de changer ces barèmes qui sont fixés de manière à les ajuster, en tenant compte de la hausse du coût de la vie?

M. Choquette: Oui. A l'heure actuelle, nous sommes en train d'examiner cette question des barèmes d'admissibilitéà l'aide juridique. Je pense bien que dans un avenir rapproché, nous pourrons proposer une nouvelle réglementation à ce sujet.

M. Bédard (Chicoutimi): Comme il y a des gens qui attendent, à l'heure actuelle, qui sont en dehors du système à cause de ces barèmes d'admissibilité qui ne sont pas révisés, est-ce qu'on peut au moins espérer que là-dessus, comme c'est assez clair en termes de nécessité de changement, ce changement arrivera assez rapidement?

M. Choquette: Oui, on peut l'espérer. Maintenant, je dirais que l'aide juridique a généralement interprété ses barèmes ou les barèmes existants

avec énormément de libéralisme et ne s'en est pas tenu à des calculs mesquins de revenus en déniant l'aide juridique à des personnes qui pouvaient dépasser les limites actuelles. Je crois que les barèmes disent que l'aide juridique peut quand même tenir compte aussi des honoraires impliqués dans une cause et de l'importance de la cause dans sa décision d'admettre ou de ne pas admettre quelqu'un à l'aide juridique.

Mon expérience, c'est que l'aide juridique a été généralement très large quant à l'admissibilité.

M. Bédard (Chicoutimi): On va terminer ce programme en espérant que ce changement s'effectuera le plus rapidement possible.

Le Président (M. Picard): Programme 12, adopté.

Programme 13: Enregistrement officiel.

Enregistrement officiel

M. Bédard (Chicoutimi): A l'élément I, on remarque une diminution des crédits affectés à l'enregistrement de l'état civil, des régimes matrimoniaux et de changement de nom des individus.

M. Choquette: C'est parce que nous coupons les dépenses. C'est un pur et simple cas de couper les dépenses.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous admettrez que c'est une réponse qui ne donne pas beaucoup de renseignements.

M. Choquette: Non, non mais c'est à cause de l'excellente gestion de M. René Langevin, ici présent, qui applique des mesures d'économie extrêmement sévères, de façon à nous permettre de réduire notre budget.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que M. Lange-vin serait en mesure de nous expliciter ces mesures d'économie?

M. Choquette: Nous avions fait des estimations quant a l'établissement d'un registre central de l'état civil. Nous avons révisé ces estimations vers la baisse. Donc, cela nous coûte moins cher. Donc, cela nous a permis de réaliser des réductions dans ...

M. Bédard (Chicoutimi): On voit une augmentation des crédits, à l'élément 2, qui concerne l'enregistrement d'actes relatifs au patrimoine.

M. Choquette: Alors là, il s'agit des bureaux d'enregistrement et, évidemment, les points principaux sont l'augmentation des traitements, comme d'habitude, et aussi l'accroissement du personnel dans ces bureaux d'enregistrement . A cause de l'augmentation du nombre d'actes qui sont enregistrés, il faut prévoir des augmentations de personnel.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que le minis- tère entrevoit soit des réaménagements ou des améliorations de certains bureaux d'enregistrement?

M. Choquette: En effet, oui, parce qu'actuellement, nous avons environ 80 bureaux d'enregistrement et nous allons en faire disparaître un certain nombre pour limiter cela à 50 bureaux.

Il y a des bureaux, vous le savez, qui ont été créés à des époques où il y avait assez d'activités notariales dans certains secteurs. Aujourd'hui, ces bureaux ne correspondent plus du tout au volume de l'activité économique qui a lieu dans ces régions. De plus, la réduction des distances par suite des meilleurs moyens de communications permet d'entrevoir la réduction du nombre de bureaux d'enregistrement.

M. Bédard (Chicoutimi): Dans un délai le plus rapide possible, est-ce qu'on pourrait avoir la liste des bureaux d'enregistrement existants à l'heure actuelle avec l'indication des bureaux qui doivent disparaître?

M. Choquette: Je pourrai vous donner la liste des bureaux existants. Il faudra légiférer pour permettre de changer les divisions d'enregistrement, et donc de réduire un certain nombre de bureaux existants.

M. Bédard (Chicoutimi): Peut-être un cas particulier, comme référence. Dans la région du Saguenay-Lac Saint-Jean, est-ce qu'il est question d'enlever un bureau d'enregistrement?

M. Choquette: Nous déplaçons le bureau d'enregistrement d'Hébertville pour l'amener à Aima. Chicoutimi demeure.

M. Bédard (Chicoutimi): Eh place.

M. Choquette: Chicoutimi résiste aux assauts de Jonquière.

M. Bédard (Chicoutimi): Une chance que le ministre n'est pas dans la région, ce serait la chicane continuelle.

M. Choquette: Je vais autant à Jonquière qu'à Chicoutimi.

M. Bédard (Chicoutimi): Ah!

M. Choquette: Et j'essaie de naviguer entre les deux.

M. Sylvain: C'est une grande barque.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous essayez de demeurer sur la ligne de démarcation.

M. Choquette: Toujours. C'est très difficile, je dois l'avouer.

M. Bédard (Chicoutimi): II y a des marées. Quels sont les revenus provenant des bureaux

d'enregistrement au chapitre de la consultation des pièces, de la reproduction des documents et des droits dus au moment de l'enregistrement?

M. Choquette: Je ne pense pas qu'on puisse vous donner ça avec tous ces détails, mais nous pouvons vous donner les recettes que nous recevons des bureaux d'enregistrement.

M. Bédard (Chicoutimi): Quitte à me faire parvenir les autres renseignements plus tard.

M. Choquette: Oui. On me dit qu'il ne sera pas possible de vous donner ça par catégorie, parce que tous nos honoraires sont perçus sous forme de timbres judiciaires et qu'on ne fait pas de distinction au moment du paiement des timbres.

Pour les bureaux d'enregistrement, les recettes totales sont de $3.9 millions. Pour les actes judiciaires, c'est-à-dire les pièces de procédures dans les procès, qui ne sont pas dans ce programme, je le ferais remarquer au député, les recettes sont de $3.2 millions.

M. Bédard (Chicoutimi): Là-dessus, qu'est-ce que ça coûte au contribuable?

M. Choquette: Quoi?

M. Bédard (Chicoutimi): En timbres?

M. Choquette: Cela lui coûte $3.9 millions dans les bureaux d'enregistrement.

M. Bédard (Chicoutimi): Le ministère de la Justice entrevoit-il d'augmenter les timbres?

M. Choquette: Le tarif de l'enregistrement des actes a été révisé en I972, à la hausse. Historiquement, les bureaux d'enregistrement ont toujours été déficitaires, si on fait le total des dépenses qui leur sont attribuables, par rapport aux recettes.

M. Bédard (Chicoutimi): Comment expliquez-vous cet aspect déficitaire?

M. Choquette: C'est un service public qui est accessible à tous. Je présume qu'on n'a jamais considéré que ce service devait s'autofinancer.

M. Bédard (Chicoutimi): II reste quand même que les gens ont à payer des sommes assez importantes.

M. Choquette: II y des dépenses de conservation des actes qui sont très considérables. Comme nous devons conserver les actes...

M. Bédard (Chicoutimi): Trente ans et plus.

M. Choquette: Cent ans et I50 ans. Tout cela coûte assez cher à manipuler, à entreposer. Faudrait-il faire payer ces frais par des usagers du service aujourd'hui? C'est assez discutable.

Institut Drouin

M. Bédard (Chicoutimi): J'aurais une question à poser au ministre concernant un sujet dont il a déjà entendu parler beaucoup dans le passé, il est peut-être oublié à l'heure actuelle, c'est la question des micro-films de l'Institut Drouin. On se souviendra des tentatives de l'Institut généalogique Drouin de vendre sa collection de microfilms au gouvernement du Québec. Ces tentatives, ainsi que celle des Mormons, concernant le microfilmage des registres ont fait déjà l'objet de débats, ici, en commission parlementaire. D'ailleurs, lors des discussions des crédits de l'année dernière, à cette occasion, le ministre s'était engagé à tenir l'Assemblée nationale au courant des développements du dossier, à la suite d'une enquête entreprise au sein de son ministère, sur ce sujet. Je voudrais savoir où en est rendu le dossier présentement.

M. Choquette: Nous avons décidé de ne pas acheter la collection Drouin. Alors le projet a été complètement abandonné.

M. Bédard (Chicoutimi): En ce qui a trait à l'offre des Mormons?

M. Choquette: Apparemment, il y a des rapports qui ont été liés entre l'Eglise des Mormons et l'épiscopat. Des dispositions semblent avoir été prises pour microfilmer les actes existant dans les paroisses.

M. Bédard (Chicoutimi): Les registres.

Le ministre joue avec le micro, il peut être sur qu'il est enregistré. Il y a l'écoute plus qu'électronique.

M. Choquette: Je fais mon métier habituel. J'installe des micros!

M. Bédard (Chicoutimi): Vous installez un micro. C'est votre travail!

M. Choquette: Le député avait-il d'autres questions intéressantes à poser sur I' écoute électronique?

M. Bédard (Chicoutimi): Le plaisir que semble prendre le ministre à jouer avec les micros m'inquiète.

Etant donné que le ministère a mis de côté et l'offre des Mormons et l'offre de l'Institut généalogique Drouin, que compte faire le ministère?

Est-ce que vous allez avoir une copie du microfilm que les Mormons vont donner?

M. Choquette: Nous allons entrer en communication avec...

M. Bédard (Chicoutimi): L'épiscopat? M. Choquette: ...l'épiscopat.

M. Bédard (Chicoutimi): Le comité spécial de l'enregistrement de l'Office de révision du code civil proposait la création d'un régistre central de l'état civil. Quelle est la position du ministre face à cette proposition?

M. Choquette: Nous n'avons pas adopté de position définitive. Il s'agirait d'une décision à être prise par le conseil des ministres dans son entier. Cela peut être une idée très intéressante que celle d'un régistre central de la population, mais cela pose des problèmes assez considérables d'organisation et de coûts, de telle sorte que pour le moment, une décision n'a pas été prise quant à la constitution d'un tel régistre.

M. Bédard (Chicoutimi): Concernant le libre accès au registre de l'état civil, suite à la publication de ce rapport, les sociétés de généalogie se sont vivement opposées à certaines de ces recommandations et, en particulier, à celle concernant le contenu des actes ainsi que la confidentialité des renseignements. Le ministre, suite à ces protestations, a dit avoir soumis le problème à l'attention de l'Office de révision. Est-ce qu'on pourrait savoir le résultat?

M. Choquette: II y a deux écoles de pensée sur cette question. L'Office de révision du code civil a exprimé l'avis que les registres récents devraient conserver un caractère confidentiel pour le motif qu'il s'agirait là de documents qui concernent des individus en particulier et que, par conséquent, il faudrait protéger leur confidentialité. Par contre, le groupe des généalogistes a exprimé un avis contraire selon lequel il devrait y avoir accessibilité sans réserve pour les chercheurs qui désirent faire des recherches généalogiques. Pour le moment, nous n'avons pas été appelés à prendre une position définitive. Il s'agira peut-être d'une décision à prendre dans l'avenir, soit à l'occasion de l'adoption du code civil ou à l'occasion d'une loi qui viserait à l'enregistrement des actes d'état civil.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que vous prévoyez avoir à prendre une décision assez rapidement là-dessus?

M. Choquette: Pas trop. Disons que ce n'est pas la décision la plus prioritaire de mon ministère.

M. Bédard (Chicoutimi): J'espère.

Le Président (M. Picard): Programme 13, adopté?

M. Bédard (Chicoutimi): Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Picard): Programme 13, adopté. Programme 14, Contrôle des jeux de hasard et des courses.

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, on avait parlé d'arrêter à dix heures et demie. De toute façon, on en a encore pour une séance puisqu'il reste quatre programmes. Je pense bien qu'il y aura lieu de passer à travers ces quatre programmes dans une séance. Si les membres de la commission n'ont pas d'objection, il y aurait peut-être lieu d'ajourner à demain matin.

Changements de noms

M. Sylvain: J'aimerais peut-être, si la commission me le permet, quoique le programme 3 soit adopté, poser une question qui ne m'était pas venue à l'idée à ce moment et qui va être brève.

Un groupe d'étudiants à Laval, en droit, s'intéresse à la question du changement des noms civils, des rectifications des registres, par rapport au problème que pose la transexualité chez la personne humaine. Evidemment, vous comprendrez, M. le Président que quand on a accepté le principe chez l'individu de changer son sexe, il est assez difficile d'être une belle blonde et de s'appeler Ti-Paul.

J'aimerais savoir si l'Office de révision du code civil, à la connaissance du ministre, s'est penché sur ce problème et si le ministre de la Justice a lui-même une opinion.

M. Choquette: J'ai une opinion. Il va sûrement falloir introduire des dispositions dans le code civil, pour permettre de changer de nom, dans ces circonstances.

M. Sylvain: C'est aussi clair que cela.

M. Choquette: C'est aussi clair que cela, parce que, comme vous dites, par exemple, on s'appelle Denis, il faudrait changer à Denise!

Il n'y a pas de doute que le problème s'est posé dans quelques cas particuliers. On a attiré mon attention sur le fait qu'il n'y a pas de dispositions qui permettent de changer de prénom, à la suite d'une telle intervention chirurgicale.

M. Bédard (Chicoutimi): Si on s'appelle Pierrot, il faut changer complètement de nom!

M. Choquette: Je ne sais pas.

M. Sylvain: Est-il à votre connaissance que l'Office de révision du code civil a étudié cette partie des rectifications des registres?

M. Choquette: L'Office de révision du code civil a tout étudié. Il n'a pas tout résolu, mais il a tout étudié!

M. Sylvain: Etes-vous au courant de la position? Est-ce la position que vous expliquez qui permettra, dans ces motifs...

M. Choquette: Je me fiche de la position de l'Office de révision du code civil. C'est moi le ministre. C'est moi qui...

M. Sylvain: Je veux simplement rendre service.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-il sérieux quand il dit cela?

M. Choquette: Je pense qu'ils ont étudié le problème, et je ne vois pas d'autre solution que celle de permettre un changement de nom.

M. Sylvain: Ma question est simplement dans le but de répondre à ces étudiants qui m'ont demandé, à moi-même, comme permanent de la commission, de poser cette question au ministre, par l'entremise du président.

M. Choquette: Je crois que vous pourrez répondre aux étudiants en question que vous êtes assuré qu'il va y avoir des changements.

M. Sylvain: II y avait aussi des étudiantes. M. Choquette: Alors, dites-le à tous.

Le Président (M. Picard): Le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, sur le même sujet, c'est quand même sérieux, j'aimerais savoir à quel moment le ministre entend déposer de tels amendements?

M. Choquette: Je ne considère pas que cela fait partie du programme d'urgence au point de vue législatif du ministère. Mais c'est sûrement une chose qu'il va falloir adopter dans un avenir pas trop éloigné. On me dit, d'autre part, que cette question soulève toutes sortes de problèmes incidents, comme l'adoption, le mariage. On sait que le mariage est interdit entre gens du même sexe. Si on est pour admettre les changements dans le sexe, donc des changements de noms, cela peut vouloir dire qu'on autorise des mariages entre personnes à l'égard desquelles cela aurait été, par ailleurs, défendu.

M. Pagé: Selon le ministre, la définition d'un avenir rapproché, qu'est-ce que c'est?

M. Choquette: Je donnerais une année. M. Pagé: Une année.

M. Dufour: Une année d'essai, s'ils ne font pas d'enfant, une séparation!

M. Pagé: Ce sont des gens intéressés par la question qui se sont adressés tant au député de Beauce-Nord qu'à moi-même, voyant que nous étions deux jeunes avocats intéressés par le droit nouveau.

M. Choquette: Ce n'est pas une large couche de vos électeurs.

M. Pagé: C'étaient des gens du comté de Louis-Hébert, entre autres.

M. Choquette: Ce n'est pas une majorité.

M. Sylvain: Quand même, ce sont des gens qui ont des problèmes.

M. Choquette: De toute façon, il va falloir faire quelque chose.

M. le Président, d'autre part, il y a un conseil des ministres demain. Il va falloir siéger obligatoirement à cette commission demain, vu que le député de Chicoutimi ne veut pas continuer à travailler...

M. Bédard (Chicoutimi): Ah non, ce n'est pas le sens de ma question.

M. Choquette: Moi, j'étais prêt à continuer.

M. Bédard (Chicoutimi): Je suis parfaitement d'accord. Nous pouvons continuer, j'ai simplement fait une suggestion à la commission et cette suggestion m'avait été faite préalablement par le président de la commission. Ce n'est pas plus grave que cela.

M. Choquette: Mais le député serait prêt à terminer...

M. Bédard (Chicoutimi): Je n'ai pas d'objection à continuer, mais une chose est certaine, c'est qu'on n'aura pas le temps de terminer ce soir. C'est dans ce sens que ...

Le Président (M. Picard): II faudra revenir pour une autre séance.

M. Bédard (Chicoutimi): ...je me disais que puisqu'on a besoin sûrement d'une autre séance... On peut peut-être, encore faire un autre programme.

M. Choquette: Si vous pensez qu'on a besoin d'une autre séance, alors...

Le Président (M. Picard): Sine die?

M. Choquette: Non, pas sine die, à demain matin, dix heures.

M. Bédard (Chicoutimi): Dix heures.

Le Président (M. Picard): Vous avez un conseil des ministres.

M. Choquette: Je n'irai pas. Parce que c'est un ordre de la Chambre de siéger demain.

Le Président (M. Picard): La commission ajourne ses travaux à demain matin, dix heures, même salle.

(Fin de la séance à 22 h 36)

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