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Version finale

31st Legislature, 3rd Session
(February 21, 1978 au February 20, 1979)

Tuesday, May 16, 1978 - Vol. 20 N° 77

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 92 - Loi sur la consultation populaire


Journal des débats

 

Etude du projet de loi no 92

(Dix heures vingt-trois)

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente de la présidence du conseil et de la constitution est réunie pour procéder à l'étude article par article du projet de loi no 92, intitulé Loi sur la consultation populaire.

Les membres de cette commission sont: M. Bisaillon (Sainte-Marie), remplacé par M. Fallu (Terrebonne); M. Burns (Maisonneuve), M. Char-bonneau (Verchères), M. Vaillancourt (Jonquière) en remplacement de M. Clair (Drummond); M. Lavoie (Laval) en remplacement de M. Garneau (Jean-Talon); M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Laberge (Jeanne-Mance); M. Gratton (Gatineau) en remplacement de M. Lèvesque (Bonaventure), M. Paquette (Rosemont), M. Roy (Beauce-Sud), M. Samson (Rouyn-Noranda).

Les intervenants sont: M. Bertrand (Vanier)...

M. Burns: Peut-être une dernière modification, M. le Président. A la place de M. Charbon-neau (Verchères), je vous suggérerais d'inscrire le nom de M. Rolland Dussault (Châteauguay).

Le Président (M. Clair): En remplacement de M. Charbonneau (Verchères), M. Dussault (Châteauguay).

Je reviens aux intervenants: M. Bertrand (Vanier), M. Brochu (Richmond), M. Dussault (Châteauguay), M. Guay (Taschereau), M. Ciaccia (Mont-Royal) en remplacement de M. Lavoie (Laval), M. Lèvesque (Taillon), M. Morin (Louis-Hébert).

M. Lavoie: II y a quelque chose qui ne marche pas...

Le Président (M. Clair): En ce qui concerne la liste des intervenants, effectivement. Le secrétaire de la commission est allé vérifier puisqu'il semble bien que, du côté de l'Opposition officielle, au moins un intervenant n'est pas mentionné sur la liste qui m'a été remise par le secrétaire de la commission. Le secrétaire est allé vérifier, il n'y a actuellement qu'un intervenant pour l'Opposition officielle et normalement il devrait y en avoir deux. D'ailleurs, sur la liste qui m'avait été remise, M. Roy (Beauce-Sud) apparaissait à la fois comme intervenant et comme membre.

M. Roy: Merci...

Le Président (M. Clair): J'ai deviné que le député de Beauce-Sud préférerait être membre.

M. Lavoie: Nous allons ajouter, du moins pour la séance d'aujourd'hui, M. Harry Blank, qui sera ici un peu plus tard durant la séance.

Le Président (M. Clair): M. Blank (Saint-Louis) comme intervenant. J'imagine que c'est en remplacement de quelqu'un qui apparaissait officiellement sur la liste.

Avant de commencer les travaux, il y aurait lieu de désigner un rapporteur pour les travaux de cette commission. Quelqu'un a-t-il une suggestion à faire?

M. Burns: M. le Président, je proposerais M. Henri Laberge.

Le Président (M. Clair): M. Laberge accepte-t-il?

M. Laberge: Avec plaisir.

Le Président (M. Clair): Alors, M. Laberge agira comme rapporteur de cette commission. M. le ministre.

Remarques préliminaires M. Robert Burns

M. Burns: M. le Président, mes remarques vont, au début de nos travaux, être très brèves. Je pense bien que je n'ai pas à ajouter aux assez substantielles remarques que j'avais tenté de faire lors du débat en deuxième lecture. Je veux tout simplement dire que c'est avec beaucoup d'ouverture d'esprit que nous abordons l'examen du projet de loi no 92, en reconnaissant l'aspect délicat, dans certains domaines plus particulièrement, d'un projet de loi sur la consultation populaire puisque, évidemment, on ne se le cachera pas, l'ombre du référendum sur l'avenir politique du Québec va constamment planer autour de cette commission, même si c'est une loi organique sur la consultation populaire en général. Je suis bien certain que, comme à nos autres travaux, on fera, à l'occasion, des références à un référendum en particulier. Je tiens, quant à moi, à vous dire que ce projet de loi a été conçu, préparé en ayant en vue la consultation populaire en général, tout en tenant compte, évidemment, que peut-être la première application que cette loi aura sera un référendum sur l'avenir politique du Québec. Mais il n'y a pas de dispositions spéciales relativement à ce référendum.

Donc, c'est avec beaucoup d'ouverture d'esprit que nous abordons l'étude de ce projet de loi. Je remercie, soit dit en passant, les représentants de l'Opposition de m'avoir fait parvenir d'avance copie de leurs éventuels amendements, bien que, comme je le leur ai dit, ce n'est pas une fin de non-recevoir à d'autres amendements. Ce n'est pas limitatif; je n'ai pas compris que vous vous limitiez, dans l'Opposition, aux amendements que vous nous suggériez. Cela nous a quand même permis de les examiner, d'avoir déjà une assez bonne idée de faite, quitte à entendre les argu-

merits que les représentants de l'Opposition auront à faire à ce sujet.

Quand je parle d'ouverture d'esprit, je tiens à dire au départ que cette ouverture d'esprit doit tenir compte également du fait qu'il y a quand même deux principes très importants dans ce projet de loi que le gouvernement n'a nullement l'intention de mettre de côté. L'un de ces principes, c'est qu'il s'agit d'une loi organique sur la consultation populaire et non pas d'une loi spécifique; donc, c'est une loi à caractère général sur toutes les consultations populaires ou sur tous les référendums. C'est une décision qui a été prise par le Conseil des ministres, une décision qui est politique au sens large du mot, au sens élevé du mot. Dans ce sens, je pense bien que nous ne pourrons pas accepter d'amendements qui pourraient viser à contrecarrer ce premier principe.

Le deuxième principe que sous-tend ce projet de loi et auquel tient énormément le gouvernement, c'est le principe de l'égalité des chances lequel, jusqu'à ce que l'on me trouve une autre solution, semble se retrouver dans la solution des comités nationaux. Quant au reste, en termes populaires, j'ai l'impression qu'on peut dire que c'est de la plomberie. C'est de la mécanique. C'est quelque chose sur quoi on peut se pencher individuellement en essayant de trouver les meilleures solutions possibles, les solutions les plus pratiques en vue d'en arriver à une loi sur la consultation populaire qui garantisse complètement à la population la possibilité de s'exprimer avec toute l'impartialité et l'efficacité requises dans ces cas. Je pense que ce sont les deux thèmes qu'on voudrait retrouver dans n'importe quelle loi sur la consultation populaire à savoir efficacité et impartialité, évidemment, pour que la consultation prenne son vrai sens. (10 h 30)

M. le Président, je n'ai pas d'autres remarques à faire. Quant à moi, je suis prêt à entreprendre l'étude du projet de loi, article par article. Je présume que d'autres personnes ont des déclarations préliminaires à faire. En ce qui me concerne, je me limiterai à cela pour le moment.

Le Président (M. Clair): M. le député de Laval.

M. Lavoie: M. le Président, avec la permission du ministre responsable du projet de loi, je voudrais rendre publique une entente que nous avons discutée et sur laquelle il y a eu acceptation, à savoir que la première séance de la journée portant sur l'étude de ce projet de loi en commission parlementaire serait plutôt de portée générale afin qu'on puisse faire un tour d'horizon, un peu comme en deuxième lecture et ce, sans tomber à l'article 1 au début.

A cause de l'importance de ce projet de loi, je ne voudrais pas que, dans cette première séance, les règles soient archisévères ou archistrictes, ceci pour permettre à tous les membres de la commission, autant du côté ministériel que du côté de l'Opposition officielle et des autres Oppositions, de faire un tour d'horizon sans aller dans le prin- cipe. Il n'est pas question pour nous de discuter ou de réouvrir le débat sur le principe. On devra aller dans les détails. C'est le rôle de cette commission. Avec votre consentement et celui des membres de cette commission, je voudrais que cette entente soit ratifiée et qu'on ne soit pas d'une sévérité absolue pour la première séance.

Le Président (M. Clair): M. le député de Laval et M. le ministre, le président veut bien agréer toute convention unanimement acceptée par les membres de cette commission, surtout si elle a déjà fait l'objet d'un accord. Cependant, simplement pour faciliter la tâche du président, j'aimerais qu'on me précise un peu plus quelle est la nature de cette entente, dans le but de pouvoir continuer à présider les travaux de façon équitable.

M. Burns: M. le Président, c'est un fait, ce que le député de Laval mentionne. Nous avons eu l'occasion, en dehors de l'Assemblée nationale ou de toute commission, de discuter de la procédure à suivre lors de l'étude de ce projet de loi. Je me souviens très bien que le député de Laval m'avait fait cette proposition à laquelle je n'avais pas opposé de dénégation. J'ai dit que je n'avais même pas d'objection à cela, sauf que je voudrais qu'on précise ce qu'on entend par une séance. Comme on le sait, une séance, en ce qui me concerne, c'est la séance de ce matin. Cet après-midi, c'est une autre séance. On a déjà une décision du vice-président de l'Assemblée nationale en ce sens.

Quant à moi personnellement, je serais d'accord à ce qu'on consacre l'avant-midi à cela. Si on trouve qu'on a encore besoin de le faire cet après-midi, je n'y ai pas d'objection. Je ne voudrais pas qu'on se limite absolument toute la journée à reprendre le débat de deuxième lecture. Je n'ai pas d'objection, si on s'aperçoit que la séance de ce matin est insuffisante pour que chacun puisse s'exprimer en long et en large sur les grandes lignes de ce projet de loi, qu'on y revienne cet après-midi. En principe, je souhaiterais personnellement, en tout cas, qu'on soit capables d'entrer nos remarques tout au moins dans la période de temps qu'on a consacrée à la deuxième lecture, c'est-à-dire à peu près cela, deux heures et demie.

C'est la suggestion que je vous fais simplement. D'autre part, je dois vous dire qu'effectivement j'ai donné mon consentement à ce que les premières heures de la commission soient consacrées à des remarques à caractère général.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mégantic-Compton, sur ce sujet.

M. Grenier: Non pas sur l'entrée en matière mais pour faire préciser davantage la question posée par le leader, qui m'a quasiment enlevé les mots de la bouche. C'était cela, moi aussi, les questions que je voulais faire préciser, à savoir qu'il n'est pas question de déposer les amende-

merits à cette séance, à ce que je sache. Je ne le pense pas, en tout cas. Je pense aussi que la séance de ce matin serait peut-être suffisante pour faire l'étude et pour pacler très généralement sur la loi. Je pense bien qu'il faudrait commencer à travailler cet après-midi, après la période des questions, et commencer à procéder. Pour moi, la loi, on commence à la connaître et on sait ce qu'il y a là-dedans, dans le moment, avec les amendements qu'on va apporter.

Je pense bien que ce n'est pas une commission où on devra faire durer l'étude des semaines et des semaines. La population attend le référendum. Il faut se donner la loi. La population n'est pas surprise qu'il va arriver un référendum. La population est peut-être plus surprise de voir qu'on veut faire l'indépendance, mais pas surprise de voir arriver un référendum, et si on veut faire un référendum, il faut se donner une loi. Je ne voudrais pas qu'on perde toute la journée uniquement dans des considérations générales alors qu'on pourrait peut-être résumer cela au cours de la présente séance.

Le Président (M. Clair): Si vous me permettez, j'interprète la convention de la façon suivante: pour la séance de ce matin, jusqu'à 13 heures...

M. Burns: 13 h 30.

M. Lavoie: Quoi? Jusqu'à 1 h 30?

M. Grenier: Jusqu'à midi trente.

M. Burns: 12 h 30, pardon.

Le Président (M. Clair): ... pour la séance de ce matin, soit jusqu'à 12 h 30, à toutes fins utiles, j'interpréterai l'entente comme signifiant qu'on n'entrera pas dans l'étude de l'article 1 et qu'on prendra toute la séance pour des commentaires généraux avant d'entamer l'étude de l'article 1. Le sens des propos qui devront être tenus est celui des commentaires généraux qu'on tient habituellement au début d'une commission lors de l'étude article par article d'un projet de loi. Est-ce que je comprends bien?

M. Burns: Oui, vous comprenez bien.

M. Lavoie: Avec l'adoucissement que si jamais on devait un peu continuer cet après-midi après la période de questions...

M. Burns: Je vous le dis d'avance, je vais vous donner mon consentement, comme je présume que vous allez donner votre consentement, si cela prend moins de temps, pour qu'on puisse aborder l'article 1.

M. Lavoie: Personne ne désire perdre le temps de quiconque.

M. Burns: C'est cela.

Le Président (M. Clair): Sur ce même sujet, M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Merci, M. le Président. Seulement un mot. J'aimerais savoir de quoi il retourne sur la limite du temps de parole qui pourra être accordé aux différents représentants des partis qui siègent autour de cette table. J'aimerais savoir si les ententes prévalent et si les ententes font en sorte que durant cette matinée...

M. Burns: Le règlement.

M. Roy:... le Parti libéral peut avoir une heure, l'Union Nationale une autre heure et que les autres intéressés à intervenir durant cette première séance peuvent en être empêchés à cause de la limite de temps.

Le Président (M. Clair): Si vous en faisiez une question de règlement, M. le député de Beauce-Sud, je pourrais vous assurer que je verrais quand même, dans le cadre de cette entente, à ce que l'article 160 de notre règlement soit respecté et à privilégier le droit de parole de tous et chacun des intervenants. A mon sens, il n'est pas question d'une entente à savoir que seuls les représentants des trois partis officiels prennent tout le temps. Il y a des députés ministériels. Il y a d'autres députés tel que vous et le député de Rouyn-Noranda, qui vient justement de me demander la parole sur le même sujet. M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, je suis un peu du même avis que l'honorable député de Beauce-Sud. Je suis d'accord avec ce qui a été dit au tout début, avec cette réserve, cependant, qu'on permette à tous les représentants de tous les partis qui sont ici présents de s'exprimer. Si cela devait durer un peu plus longtemps, à ce moment, qu'on tienne compte de cela et qu'on en tienne compte immédiatement pour qu'on ne soit pas obligé de commencer un débat qui durera une autre demi-heure au début de la prochaine séance. C'est la réserve que j'aimerais qu'on accepte.

Le Président (M. Clair): Je vous réitère mon affirmation, M. le député de Rouyn-Noranda, que je verrai à privilégier le droit de parole de tous et de chacun des députés.

Nous revenons au député de Laval.

M. Lavoie: Un simple et bref commentaire. C'est un peu pour cela que je parlais de l'article 160. Dans mes remarques préliminaires, si jamais j'avais besoin d'un peu plus de vingt minutes, disons une demi-heure, je ne voudrais pas qu'on applique à la lettre l'article 160, à cause de l'importance du projet de loi et tout. Ce temps que j'emploierai même en surplus au départ permettra de raccourcir le débat en cours de route après, parce que je n'ai pas l'habitude de me répéter indéfiniment.

Le Président (M. Clair): Je verrai, M. le député de Laval, à interpréter et l'entente et le règlement au meilleur de mon jugement et, encore une fois, en privilégiant le droit de parole de tous et de chacun des membres de la commission.

M. le député de Laval.

M. Jean-Noël Lavoie

M. Lavoie: Nous abordons une des étapes terminales, si on peut dire, du projet de loi. Nous avons déjà eu l'occasion d'étudier un livre blanc en commission parlementaire. Il y a eu le dépôt en première lecture et le débat également de deuxième lecture. Il n'est pas dans notre intention, actuellement, de revenir sur le principe du projet de loi qui a pour but, au moyen d'une loi-cadre, de permettre au gouvernement de consulter la population sur une question ou quelque question que ce soit.

Nous n'avons pas l'intention non plus, à ce stade-ci, ce matin, de revenir sur la position de l'Opposition officielle que nous avions prise dès le début, soit que nous aurions préféré sur un projet de loi aussi important, suite à l'engagement du gouvernement actuel avant son élection de tenir un référendum bien précis sur l'indépendance du Québec — notre position est encore la même — avoir une loi spécifique, bien déterminante, au lieu d'une loi-cadre qui dilue, dans un sens, cette question aussi capitale de l'avenir constitutionnel du Québec sur lequel les Québécois auront à se prononcer.

Je n'aborderai pas, non plus, en détail l'ajout dans le projet de loi d'un élément qui n'existait pas dans le livre blanc, même si on se pose un paquet de questions — nous aurons l'occasion, lors de l'étude article par article, d'apporter des amendements, des modifications, des suggestions — notamment en ce qui concerne le conseil du référendum. Nous avons beaucoup de réserves sur la manière dont il est composé et surtout sur les pouvoirs trop limités que ce conseil possède.

Un autre élément que nous aborderons au cours de l'étude article par article est, sans aucun doute, la formulation de la question. Nous avons eu, à un certain moment, l'engagement répété du ministre — comme il l'a fait ce matin, il l'a répété au moins 25 fois — qu'il aurait beaucoup d'ouverture d'esprit, qu'il venait ici de bonne foi et qu'il était à l'écoute autant de l'Opposition que de la population. Je me pose la question suivante: Cet engagement n'est-il pas que du verbe et des paroles? On l'a vu. On sait que le projet de loi no 92, en somme, est une copie quasi conforme du livre blanc dans son esprit; il y a peut-être eu deux changements. Il y a eu ce semblant de conseil du référendum, à la suite d'une demande de l'Union Nationale et d'une certaine demande de l'Opposition officielle. Un conseil du référendum, ce n'est pas de la façon dont il est créé dans la loi que nous l'aurions vu.

Le ministre nous a dit qu'il préférait — il était toujours sous le couvert de son opinion personnelle — qu'il souhaitait une question claire et précise, qui n'amenait qu'un oui ou un non. Dans la loi, on ne retrouve aucune garantie à cet effet. Dans tous les pays que je connais — je pourrais donner au moins une dizaine d'exemples que je mentionnerai tout à l'heure sur un autre sujet — les lois référendaires obligent le gouvernement ou le Parlement à poser une question claire et précise, qui n'invite la population qu'à donner une réponse bien claire, soit positive ou négative.

La tradition parlementaire, un peu partout, force un engagement du gouvernement à respecter la décision rendue par la population, même si ce n'est pas dans toutes les lois. En Angleterre, dans le livre blanc, il y a eu un engagement formel du gouvernement de respecter et de faire suite à la décision qui sera rendue par la population. Encore ici, dans notre loi, nous n'avons aucune garantie à cet effet. Je ne parlerai pas de la plomberie, comme l'a mentionné le ministre, nous en parlerons lorsque nous arriverons à ces articles. Nous parlerons de la clôture du débat, du droit de parole limité des députés, des échéances, des délais très courts, autant pour l'émission des brefs, la période référendaire, que des délais archirestreints dans la formation des comités nationaux.

Par contre, ce matin, même si nous n'apporterons pas d'amendement précis au projet de loi, durant la première séance, je voudrais dire que nous allons prendre tout le temps qu'il faut pour étudier cet important projet de loi. Même si nous désirons que ce référendum se tienne le plus rapidement possible — je pense que c'est un voeu très majoritaire de la population — nous savons, d'autre part, qu'il ne semble pas y avoir d'urgence de la part du gouvernement. On sait que le premier ministre, il n'y a pas tellement longtemps, a commencé à lever le voile et il a déclaré qu'il commençait à voir un peu plus clair et qu'il verrait la tenue du référendum pour la fin de 1979. C'est la raison pour laquelle, tout en souhaitant que ce référendum ait lieu le plus rapidement possible, nous allons prendre tout le temps nécessaire pour étudier ce projet de loi. (10 h 45)

Nous aurons de très nombreux amendements à proposer et nous entendons avoir avec le ministre une discussion sérieuse et adulte. Nous allons chercher à renforcer l'autorité de l'Assemblée nationale sur le processus référendaire; nous allons chercher à définir, à l'intérieur de la loi 92, un régime référendaire acceptable pour la tenue des référendums et spécifiquement du référendum particulier sur l'indépendance et nous allons chercher à élargir le champ de la liberté d'expression et d'association des Québécois au niveau de la constitution des groupes-parapluies et à celui de la limitation et du contrôle des dépenses.

Dans un premier temps, M. le Président, je voudrais faire un appel aux media d'information du Québec, et ce n'est pas un reproche que je voudrais leur faire. Etudions, depuis le début, ce qui a été donné à titre d'information sur la loi 92 ou sur le livre blanc. Je crois qu'il y a une raison à cela; c'est sans doute dans la stratégie du ministre

que nous avons en face de nous, lorsqu'on considère les dates des moments du cheminement de l'étude de ce projet de loi. Si on se rappelle bien, le livre blanc a été déposé le 24 août 1977, à la toute fin d'une session ou à l'occasion d'une clôture; nous avions étudié, pendant tous les mois d'été, la loi 101. La session ajournait le 25 ou le 26 août et, non à la surprise générale, mais après une certaine préparation, le ministre annonçait le dépôt de son livre blanc le 24 août, alors que la plupart des députés — c'est normal — espéraient quelques jours de vacances et il en allait de même pour les journalistes, je crois. Il arrive un certain moment, aux fins de sessions, où on perd un certain intérêt sur ce qui se passe à l'Assemblée lorsqu'on sait qu'une loi aussi importante est à l'étape de la troisième lecture et que tous les partis et le gouvernement ont annoncé que la session ajournait dans les jours qui suivaient.

Deuxième étape importante de l'étude de ce projet de loi: Le dépôt de la loi, le 21 décembre 1977, encore là, alors que le Parlement terminait des travaux importants, suite à une autre clôture sur la Loi sur l'assurance automobile, deux ou trois jours avant Noël. Le ministre me fait sourire, mais il ne me fera pas sourire longtemps; il m'a fait sourire souvent dans le passé, mais le ministre...

M. Burns: Le ministre sourit, il ne vous fait pas sourire actuellement!

M. Lavoie: Je ne jouerai pas son jeu; en avocat, sans doute très habile, il nous a joué le scénario le plus machiavélique depuis qu'il a pris en main ce dossier. Je voudrais, dans un premier temps, démasquer cette stratégie.

M. Bertrand: Les gros mots!

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Bertrand: Le ton monte!

M. Lavoie: Surtout lorsqu'il a tenté de se couvrir d'une manière continue et répétée avec le grand système démocratique anglo-saxon qui existe en Grande-Bretagne. Et même ce jeu a été joué par le premier ministre qui, en certaines occasions, pour tranquilliser la population et pour diluer l'importance du projet de loi, pour ne pas apeurer la population et pour se couvrir de toutes les vertus, a toujours répété à qui voulait l'entendre qu'il n'y avait pas de danger, qu'on allait respecter ce qu'il y avait de plus sincère, de plus honnête dans les institutions britanniques. Citons au passage ici l'introduction au livre blanc déposé le 24 août 1977: "On constatera que les dispositions retenues, tout en s'inspirant de plusieurs pays à très forte tradition démocratique, sont en tout premier lieu tributaires de l'expérience vécue par la Grande-Bretagne lors du référendum de 1975 sur le maintien des liens avec le Marché commun. Le régime parlementaire, la longue tradition démocratique et le sens profond du "fair play" sont autant d'institutions britanniques que les Québécois ont absorbées dans leurs propres traditions politiques. Les mécanismes référendaires institués par la Grande-Bretagne à partir de ces institutions apparaissent au gouvernement du Québec comme un guide précieux dans l'amélioration de nos propres institutions."

Comment le ministre pouvait-il se permettre une telle déclaration lorsqu'on sait — je l'ai d'ailleurs dit une fois au mois de novembre 1977 — que la seule analogie, à peu près que l'on peut faire entre l'expérience britannique et l'expérience du Québec, le seul parallèle que l'on peut faire, la seule comparaison, c'est que là-bas, effectivement, il y a eu un référendum en 1975 sur l'appartenance au Marché commun, et il semble qu'au Québec on va avoir une espèce de référendum. Cela se limite là ma comparaison avec le système britannique! D'ailleurs on sait qu'en Angleterre, et je voudrais apporter ici certains parallèles, au Parlement anglais, avant le dépôt du livre blanc, le ministre responsable, qui était un ministre un peu moins politisé que celui que nous avons en face de nous, M. Short...

M. Burns: M. Short était leader parlementaire de la Chambre également.

M. Lavoie: II était comme vous, mais il était un peu moins politisé. Il y a différents dosages.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bertrand: Politisé, ce n'est pas péjoratif!

M. Lavoie: II y a eu beaucoup de choses écrites, entre autres, ici, par M. David Butler et U. Kitzinger, The 1975 Referendum, où on lit à la page 55 l'exemple d'une chose qui n'a pas existé ici, à. la suite d'une première déclaration de M. Wilson au Parlement, le 23 janvier 1975, et du dépôt d'un livre blanc le 26 février. "Early in February, the Lord President and members of the referendum unit consulted extensively with the umbrella-organizations and the political parties. But essentially the officials had to prepare the white paper with such guidance as they could get from the Cabinet as a whole. They saw their problems concentrated in five major areas: the counting of the votes, the broadcasting arrangements, the control of expenditure, the wording of the question and the government's information policy." Vous voyez que là-bas, même avant le dépôt du livre blanc, au lieu de jouer un peu à cache-cache comme ici, il y a eu une consultation intense non seulement avec les partis politiques, mais également avec tous les groupes qui étaient déjà formés là-bas autant en faveur que contre le maintien de l'Angleterre dans le Marché commun.

M. Burns: Est-ce que le député me permet une question?

M. Lavoie: Après. Dans le livre blanc, on avait déjà formulé la question qui était incluse non seulement dans la loi — ici, nous ne l'avons même pas dans Ja loi; c'est vrai que c'est une loi d'ordre général, mais rien n'empêche le gouvernement de faire connaître la question — mais aussi dans le livre blanc. Je l'ai dit, là-bas, c'était une loi spécifique et non une loi-cadre. C'était une loi spécifique sur un projet de loi bien précis. Le gouvernement s'est engagé, dans le livre blanc, à respecter, à être lié par le verdict du peuple britannique.

Alors qu'on nous a répété à satiété qu'il y avait un contrôle des dépenses là-bas, c'est faux. Je le répète encore une fois. Cela fait 100 fois que je le répète. Il n'y a eu aucun contrôle des dépenses en Angleterre, ni par les personnes physiques, ni par les personnes morales.

Là-bas, il est reconnu que tout a été préparé. Il y a eu un comité d'étude dirigé par des fonctionnaires non politisés. On a donné carte blanche à M. Jamieson, un ancien sous-ministre de l'Education, que M. Short avait choisi. On lui a dit de former une équipe, d'aller étudier ce qui se passe en France sur le Marché commun et tout et de préparer une loi du référendum.

Lors de l'étude des mémoires, j'ai demandé ici en commission parlementaire pourquoi le gouvernement actuel n'avait pas procédé de la même façon. On m'a répondu — c'est encore une demi-vérité et je dirais un mensonge — qu'on avait agi de la même façon et que notre Jamieson québécois était un fonctionnaire non politisé qui s'appelait M. Louis Bernard. Je n'ai jamais connu un fonctionnaire aussi politisé non dans le sens péjoratif du mot, mais il a quitté un poste de sous-ministre pour prendre position pour un parti politique, devenir chef de cabinet et continuer avant comme après l'élection. Ce n'est pas un reproche que je fais à M. Louis Bernard, mais je dis qu'il n'est pas à l'abri des attaques parce que c'est un des fonctionnaires les plus politisés au Québec, sans mentionner M. Larocque qui est ici et qui a travaillé effectivement au dossier.

M. Burns: C'étaient, à l'époque, mes deux sous-ministres.

M. Lavoie: M. le Président, on nous a dit ici, effrontément, qu'il s'agissait de fonctionnaires non politisés.

M. Burns: Ce sont des sous-ministres. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise?

M. Lavoie: On nous a dit également, le 17 novembre, que là-bas, alors qu'on avait un ministre qui s'appelait M. Short, il ne s'est occupé, d'aucune façon, de la campagne référendaire et il n'a pas été sur la ligne de feu. J'ai demandé également si c'était la position du ministre que nous avons en face de nous et qui est responsable du dossier. Il m'a dit: Maintenant que je suis dans cela, je ne participe plus aux activités partisanes de mon parti en ce qui concerne le comité référen- daire et je ne fais plus partie d'un certain comité où se trouvent M. Claude Morin et M. Léger. Vous continuez à vous balader dans les instances de votre parti sur la question référendaire.

M. Burns: II ne s'agit pas d'une attaque de virginité à partir du moment où j'ai présenté ce projet de loi.

M. Lavoie: Dites-nous la vérité et prenez vos responsabilités!

M. Burns: Je suis encore membre d'un parti politique.

M. Lavoie: Ayez de la transparence! M. Burns: Bien oui!

M. Paquette: Vous parliez de discussion adulte, tantôt. Il serait peut-être temps de commencer.

M. Bertrand: C'est la première séance, il ne faudrait pas que le sang monte si vite à la tête du député de Laval.

M. Lavoie: M. le Président, on a continué à nous mentir en pleine face, non seulement aux députés de l'Opposition, mais à la Chambre, à la commission et à la population. On nous a dit, le 17 novembre, qu'en Australie on avait limité les dépenses lors des référendums. J'ai vérifié en Australie. C'est faux. En Australie, on a adopté une loi...

M. Burns: Troisième lecture.

M. Lavoie: ... pour limiter les dépenses des partis politiques dans les référendums, uniquement, sans restreindre aucunement le droit des citoyens de s'associer, de s'exprimer et de se réunir. Plus que cela, cette loi qui a été adoptée n est pas en vigueur. Elle n'a pas été acceptée à la Chambre haute. Il y a eu une dissolution, après cela. Ne venez pas nous dire que l'Australie a limité les dépenses! C'est encore un mensonge éhonté que vous nous avez fait, à cette commission.

En voulez-vous un autre mensonge? Quand vous êtes allés vous ballader en Angleterre durant I étude du projet de loi en commission parlementaire, vous êtes allés passer un week-end en Angleterre, vous êtes revenu nous dire, le 17 novembre, ici, que leur seul regret là-bas, c'est de ne pas avoir pris la formule que le Québec prenait pour limiter les dépenses. Je vais vous dire une chose. C'est un mensonge éhonté puisqu'ils ont déposé deux autres lois depuis ce temps: la loi de Scotland et de Wales.

M. Burns: Devolution Bills!

M. Lavoie: Oui. Il y a un petit renseignement que j'ai eu d'Angleterre hier. Le Scotland Act de 1978 a subi la troisième lecture à Londres, le 23

février 1978. Non seulement il n'y a pas de limites de dépenses, "there is no subsidy from the State to help any group". Il n'y a même aucune contribution de l'Etat, comme il y avait eu une contribution minime lors de l'appartenance au Marché commun.

Je vais vous lire l'article 80: The schedule 17, item 5, and I quote: "An order in Council under this schedule shall not charge any sum on the consolidated fund but may provide for the expenses of returning officers to be defrayed as administrative expenses of the Secretary of State".

C'est un mensonge quand vous nous avez dit que l'Angleterre ou ceux que vous avez rencontrés là-bas, autant les tenants du oui ou du non du référendum de 1975, avaient un regret de ne pas avoir limité les dépenses dans leur loi. Ils ont déposé deux lois depuis ce temps. Il n'y a aucune limite, autant pour les personnes morales que pour les personnes physiques. Plus que cela, il n'y a pas de subsides de l'Etat.

Je vous dis que c'est malheureux que le ministre nous ait induits en erreur depuis le début. Cela pose de fond en comble toute cette opération référendaire. Est-ce l'esprit qui anime le gouvernement sur la question de fond? C'est un peu cela que nous vivons. Cette question — peut-être la plus brûlante et la plus importante sur laquelle les Québécois devront se prononcer — est ravalée actuellement à une simple stratégie électoraliste. On ne connaît pas la date, on ne connaît pas la question. Le gouvernement n'a pas établi ses positions. Même dans la tuyauterie, tout est faussé. (11 heures)

Dans un deuxième temps, M. le Président, avec votre permission, je voudrais parler des comités nationaux. C'est vrai qu'on a adouci, à partir du livre blanc, avec vos $300. C'est le seul adoucissement que vous avez autorité pour permettre à un individu $300. Je vous dis qu'il n'existe aucun exemple au monde où on brime autant les droits de réunion, d'association et d'expression des individus.

M. Burns: Ce n'est pas ce que pense M. Ryan.

M. Lavoie: Ni en Norvège, ni en Australie, ni en Californie, ni au Danemark, ni en France, ni en Irlande, ni en Grande-Bretagne, ni en Suisse, qui ont peut-être 10 ou 20 référendums par année. Aucun de ces pays ne limite les droits, n'a une mesure aussi...

M. Fallu: Le livre blanc de Lalonde.

M. Lavoie: ... qui amène le silence et qui force les individus dans ces carcans. Vous allez voir...

M. Fallu: $5000 pour des individus.

M. Lavoie: ... les conséquences. Je vais vous donner des exemples. On pourrait sortir 25 ou 30 hypothèses que votre loi, telle que rédigée en ce qui concerne les comités nationaux, n'est pas applicable. Je vais vous donner un exemple. Tel que c'est rédigé, le oui pourrait être contrôlé par les députés du côté ministériel et le non par les députés majoritaires dans l'Opposition, en l'occurrence le Parti libéral. Pour ces comités, tels que prévus dans votre loi, nous avons élu un président, il fait ses propres règlements. Nous pourrions dire à nos amis de l'Union Nationale, du Ralliement créditiste et du Parti national populaire: Messieurs, restez sur le petit banc. On pourrait leur refuser, les empêcher de participer à toute campagne référendaire.

M. Burns: Cela nous ferait une belle jambe.

M. Lavoie: Oui, mais est-ce qu'on fait des jambes ou est-ce qu'on fait une loi? Ce n'est pas une loi spécifique, messieurs. Cette loi, ce n'est pas pour une fois. Cette loi sera dans les statuts du Québec. Elle peut servir à ce gouvernement et à d'autres gouvernements qui vont vous suivre, sur quelque sujet que ce soit. On pourrait dire: M. Samson, MM. de l'Union Nationale, M. Roy, à trois mois des élections, pourquoi nous le Parti libéral on va vous mettre en vedette? Restez donc sur le petit banc. Vous n'auriez pas le droit de tenir de réunions. Vous n'auriez pas le droit de participer à la campagne référendaire.

M. Roy: Vous pensez...

M. Lavoie: ... tel que la loi est rédigée.

M. Roy: Vous pensez qu'on resterait sur le petit banc. En ce qui me concerne...

M. Lavoie: On devient hors la loi.

M. Roy: ... peut-être hors la loi, mais certainement pas sur le petit banc. Je tiens à vous le dire.

M. Burns: C'est absolument faux ce que vous dites.

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Burns: Vous avez mal lu la loi encore, comme vous lisez mal tout le temps.

Le Président (M. Clair): M. le leader parlementaire du gouvernement, messieurs, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. Burns: Pourtant, un notaire, d'habitude, cela sait lire.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lavoie: Vous êtes un menteur public, avez-vous compris?

M. Paquette: Question de règlement, quand même, bon Dieu, il y a un bout.

M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement.

Le Président (M. Clair): Le député de Jonquière, sur une question de règlement.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je remarque que le député de Laval a commencé à parler à 10 h 40 et qu'il est maintenant 11 h 5, et je ne pense pas que vous ayez demandé le consentement unanime dans le cas du député de Laval.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière, étant forcé...

M. Lavoie: J'en aurais à peu près pour une dizaine de minutes.

Le Président (M. Clair): ... d'interpréter et le règlement et l'entente, je laisserai la parole encore pour un certain temps au député de Laval, l'invitant cependant à ne pas prendre toute la séance parce qu'à ce moment...

M. Lavoie: Non, ce n'est pas mon intention.

Le Président (M. Clair): ... l'entente ne signifierait rien. M. le député de Laval, vous avez la parole.

M. Lavoie: II reste encore au moins une heure et demie. Je laisserai tout le temps voulu à tous les membres de cette Assemblée.

M. Charbonneau: M. le Président, qu'il utilise des termes parlementaires.

M. Lavoie: La loi telle que rédigée limite aux parlementaires le contrôle absolu des comités oui et non. Un exemple: la Norvège, entre autres, sur le Marché commun, où tous les partis politiques étaient plutôt favorables à l'entrée de la Norvège dans le Marché commun. Si de tels carcans, enrégimentations avaient existé comme ici, 130 000 citoyens en Norvège n'auraient pas pu participer, eux qui étaient contre l'entrée au Marché commun de la Norvège parce que tous les partis, l'establishment là-bas, tous les parlementaires, tous les partis politiques étaient favorables à l'entrée de la Norvège dans le Marché commun, et c'est un groupe venant de la base, du "grass root" de 130 000 personnes qui a pu former un mouvement pour le non, ce qui n'aurait pas été permis possiblement si cela avait été contrôlé comme ici par les partis politiques.

M. Paquette: Vous n'avez pas lu la loi.

M. Lavoie: J'en ai lu pas mal plus long que vous sur cela.

Si c'est limité uniquement par les parlementaires, M. le Président, pour un référendum quelconque, prenons un exemple, dans le but d'étendre le mandat des parlementaires ou augmenter les salaires des parlementaires, ce serait facile, la chair étant faible, de permettre que tous les parlementaires prennent le contrôle des comités. Aucune personne de la base ne pourrait être intégrée pour participer au référendum. Il pourrait y avoir un référendum pour pouvoir limiter le droit de grève. Vos comités nationaux sont ainsi faits que les partis politiques pourraient, possiblement, être tous favorables à cela, ce qui empêcherait la participation autant des syndicats que des gens en dehors de l'Assemblée nationale pour obtenir l'aide de l'Etat, parce qu'ils ne seraient pas acceptés dans ces comités nationaux contrôlés strictement par les parlementaires.

Je vais vous donner un autre exemple. Il pourrait y avoir un référendum, disons genre nanan, bonbon, disant: Est-ce que vous êtes favorables à ce que le Québec récupère d'Ottawa tous ses pouvoirs en communications et en culture? Il est évident que tous les parlementaires en grande majorité seraient favorables à cela. Si vous décidez d'aider les deux causes avec $500 000 ou $300 000, il pourrait y avoir un seul député à l'Assemblée nationale qui serait extrêmement pro-british ou plus fédéraliste que les autres qui pourrait former le comité à lui tout seul et profiter à lui seul dans son comité...

M. Vaillancourt (Jonquière): Comme vous.

M. Lavoie:... parce qu'il est parlementaire, de tous les fonds qui seraient disponibles pour une des possibilités.

M. Charbonneau: ... être fédéraliste c'est être probritish.

M. Paquette: II en aurait besoin.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs, s'il vous plaît!

M. Lavoie: Avec cette loi telle qu'elle est rédigée, pour vous dire combien ce n'est pas praticable, un même parti politique pourrait contrôler les deux clans. Avec 80 députés ou même avec 75 députés, un parti ministériel pourrait avoir la majorité...

M. Burns: C'est possible.

M. Lavoie: ... autant dans l'option "oui" que dans l'option "non". Où est la démocratie, si même aux députés de l'Opposition, minoritaires dans la minorité dans ces comités, on pourrait refuser toute participation dans un référendum possible?

Une autre chose, c'est tellement peu praticable... Je n'accepte pas le prérequis proposé par le ministre lorsqu'il veut limiter justement le contrôle des dépenses pour donner chance égale aux deux options. C'est cela le but. Pourquoi une telle contrainte si vous voulez donner chance égale aux deux options? Moi, je me dis qu'il faut se fier à la démocratie. Prenons une question qui pourrait être posée à la population — je vous donne un

exemple — sur l'avortement ou une autre question, l'énergie nucléaire. Prenons l'hypothèse que tous les sondages, pour une raison ou pour une autre, donneraient pour l'avortement, 25% de la population et 75% démocratiquement contre. Soit au moyen d'un test ou s'il y avait moyen d'avoir le résultat final, supposons que la démocratie, au Québec, sur une question donnée, s'exprimerait à 25% contre 75%. Pourquoi, dans un tel cas où la démocratie pourrait s'exprimer dans une telle proportion, voulez-vous donner un prérequis, au départ, de chance égale pour les deux options qui ont le droit de dépenser $0.50 par électeur, soit, pour 4 millions d'électeurs, $2 millions à un et $2 millions à l'autre? Ce contrôle strict des dépenses vous amène justement à brimer des droits de nos concitoyens. Je ne vois pas pourquoi et je ne comprends pas cette logique. Moi, je dis qu'il faut faire confiance à la démocratie. Nous aurons, d'ailleurs, lorsque nous aborderons cette question, tout en limitant les dépenses, tout en contrôlant les dépenses, des amendements à apporter qui respecteront les droits fondamentaux des citoyens.

Je dis en terminant, M. le Président, qu'il s'agit d'une mesure — c'est bizarre, le ministre va sauter — d'extrême droite que vous amenez actuellement en limitant...

M. Paquette: C'était dans l'article de Johnson cela aussi.

M. Lavoie: ... les gens, en privant les organismes, en privant les individus de participer à un débat public.

M. Bertrand: Retirez la loi.

M. Paquette: Avant c'était le Devoir. Maintenant c'est le Globe and Mail.

M. Lavoie: J'aurais bien voulu vous voir dans l'Opposition si un parti traditionnel avait amené une loi de la sorte. N'oubliez pas une chose. Sous le grand paravent de la vertu, vous allez empêcher les individus, les citoyens, les organismes de s'exprimer et de participr à des débats publics et à un débat aussi important que celui sur l'avenir du Québec. C'est une loi de bâillon, c'est une mesure du silence, c'est une loi malhonnête, sectaire et antidémocratique. C'est un contrôle excessif. C'est un débat public et il faut se fier à la démocratie. D'ailleurs, vous avez les restrictions — on vous les a mentionnées et je ne voudrais pas les répéter — de la Commission des droits de la personne. Les représentants de cette commission nous ont dit, lorsqu'ils sont venus en commission parlementaire, qu'ils préféraient s'exprimer sur une loi au lieu d'un livre blanc. La loi est actuellement déposée et j'ai reçu un télégramme ce matin à la suite d'une demande que je leur ai faite au mois d'avril. Je peux vous le lire, il est plutôt intéressant. Si vous voulez bien m'accorder quelques instants.

Le Président (M. Clair): Je veux bien vous accorder quelques instants, M. le député de Laval. J'en profiterai pour vous indiquer que vous m'aideriez énormément à interpréter équitablement l'entente si vous terminiez dans environ trois minutes, puisqu'il y a déjà 42 minutes que vous exercez votre droit de parole.

M. Lavoie: Je le trouverai tout à l'heure. En deux mots, la commission dit qu'elle s'est prononcée sur le livre blanc et qu'elle n'entend pas se prononcer sur la loi. Je la comprends lorsque je lis que, le 20 avril 1978, en commission parlementaire qui a étudié les crédits de la Justice, M. Hurtubise, par la bouche du ministre de la Justice, disait les choses suivantes à la suite d'une demande du député de Marguerite-Bourgeoys qui invitait la commission à donner son opinion sur le livre blanc: "Ceci dit, dans la mesure où le projet de loi ne ferait que reprendre ces grands principes, je pense qu'il n'y aurait pas lieu de revenir à la charge puisque notre fonction est tout simplement, et je tiens à le préciser, d'appliquer une grille d'analyse qui est celle qu'on retrouve dans la charte. La charte énonce un certain nombre de valeurs. Nous vérifions si un projet de loi est respectueux de ces valeurs ou non et nous transmettons l'avis. Après cela, notre rôle se termine. Dans la mesure où ce que nous avons dit sur le livre blanc est à peu près ce qu'on pourrait répéter sur le projet de loi, je pense que nous n'avons pas l'intention de revenir". Cela veut dire qu'il pourrait répéter les mêmes commentaires; ce sont les mots du président Hurtubise.

M. Paquette: Ils ne sont pas mauvais, ces commentaires.

M. Lavoie: Cela vient un peu en contradiction avec le ministre lorsqu'il a dit...

M. Paquette: On va vous lire le rapport, tantôt.

M. Vaillancourt (Jonquière): On va vous lire le rapport de la commission, tout à l'heure.

M. Lavoie: Le rapport que nous avons eu?

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, oui.

M. Lavoie: J'en ai une copie ici.

Le Président (M. Clair): Messieurs les députés ministériels...

M. Vaillancourt (Jonquière): Très bon.

M. Lavoie: Et vous savez toutes les réserves qu'il y a sur les droits d'association?

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Paquette: Vous faites de la lecture sélective.

Le Président (M. Clair): A l'ordre! Messieurs les députés ministériels, j'ai prié le député de Laval de conclure au plus tôt. Je suis convaincu que vous allez m'aider et l'aider également à conclure. Avez-vous terminé?

M. Lavoie: Je disais donc que la Commission des droits de la personne semble dire que les mêmes remarques qu'elle a faites sur le livre blanc s'appliqueraient à la loi; cela vient en contradiction avec le ministre qui nous a dit: On n'a plus besoin de l'opinion de la commission tellement on a bonifié le projet de loi. Vous l'avez dit en Chambre, d'ailleurs.

M. Burns: Pas comme cela. Vous interprétez constamment.

M. Lavoie: J'aimerais savoir vos commentaires sur cela, de toute façon.

M. Burns: Voulez-vous que je vous répète ce que j'ai dit?

M. Lavoie: Un instant! Je vais terminer et je vous donnerai la parole après.

M. Burns: Ah bon! Vous n'avez pas à me donner la parole.

Le Président (M. Clair): C'est moi qui vous donnerai la parole.

M. Burns: Ce n'est surtout pas vous qui allez me donner la parole.

M. Lavoie: Je vous céderai la parole après.

M. Burns: C'est cela, employez un vocabulaire plus normal, plus compatible avec les fonctions que vous occupez actuellement.

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Lavoie: Depuis le début, les dés sont pipés, c'est un scénario. Nous allons apporter énormément d'amendements pour clarifier, pour bonifier ce projet de loi en ce qui concerne la question afin qu'elle ne demande qu'un oui ou un non. Soyez assurés que nous allons faire une bataille sans relâche, surtout en ce qui concerne les comités nationaux parce que ce qui est actuellement dans le projet de loi non seulement n'est pas applicable, mais c'est contre nos principes de base de démocratie et de libeté que nous avons toujours connus au Québec. (11 h 15)

Le Président (M. Clair): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Fernand Grenier

M. Grenier: M. le Président, je serai très bref, puisque j'ai en main trois longs discours faits par notre parti et que nos positions sont maintenant connues, soit par le leader parlementaire adjoint, M. Brochu. J'ai eu à parler à deux reprises à cette commission. Inutile de vous dire que je serai bref dans mes recommandations et que j'ai déjà hâte qu'on passe à l'étude de cette loi.

Je dois aussi vous dire que ce n'est pas dans l'esprit de l'Union Nationale de mélanger l'étude de la loi et le référendum pendant que nous allons être à cette table.

Nous avons déposé, il y a quelques années, une loi du référendum qui pouvait être appliquée pour le règlement de différents problèmes. Je pense que cette loi est un peu la continuité de l'esprit qui animait notre formation politique à ce moment. C'est pourquoi nous avons hâte d'avoir en main cet outil de travail. Nous n'avons pas l'intention de mettre en doute chacun des articles de la loi en l'épurant, en y apportant toute la sécurité qu'on doit lui apporter, mais nous ne voulons pas terminer cette commission d'étude en laissant la population dans le doute, à savoir qu'on s'est donné le mauvais outil et qu'on pourra conséquemment donner un référendum qui ne répondra pas aux aspirations des Québécois.

Nous voulons travailler pour que la population ait confiance dans son outil de travail. Qu'on soit assuré que, lors du prochain référendum, si ce devait être celui qui amènera l'indépendance du Québec — je veux dire comme étude — nous voulons que la population ait confiance dans son instrument de travail, dans cette loi que nous sommes en train d'élaborer. La population désire ce référendum; pour ce qui est du résultat, on en discutera. Il est clair que les gens, qui ne sont pas des politiciens comme nous, ont hâte qu'on arrête de discuter de ce projet de loi qui deviendra loi, pour enfin passer aux gestes. La population en général se demande pourquoi tant d'heures passées à l'étude de cette loi. Il est de toute évidence que nous travaillerons, que nous aurons au moins une demi-douzaine d'amendements, mais que nous avons hâte d'être capables de nous donner cet instrument pour passer à la véritable étape qui est celle du référendum.

Quant au projet de financement de ces comités nationaux, nous n'avons rien à dénoncer du fait qu'on limite les dépenses dans le référendum puisqu'il est peut-être temps qu'on comprenne que les orgies de dépenses au Québec, que ce soit en période référendaire ou en élection, il y a un terme à apporter à cela. On l'a dénoncé dans la loi du fédéral, quand elle a été déposée il y a quelques semaines, et on continuera à le dénoncer s'il devait y arriver des amendements de part ou d'autres, amendements voulant donner une finance sans fin pour la mise en place de ce référendum. Encore une fois, qu'on ait bien à l'esprit que notre formation politique n'entend pas se servir de cette chaire pour parler de référendum, pour lancer la bataille du référendum. Il y aura un temps pour cela et je pense qu'il y a une limite à apeurer la population. Nous allons nous donner cet outil de travail.

Je voudrais bien qu'on me comprenne, autour de cette table. Qu'on soit des gens qui désirent l'indépendance du Québec, qu'on soit des gens qui désirent un fédéralisme qu'on connaît depuis plus de cent ans, ou qu'on soit des gens qui

désirent un fédéralisme renouvelé, de nouveaux liens canadiens, peu importe notre option, je pense que le sujet est trop noble pour se permettre de faire de la petite politique, de la parti-sanerie, et tenter de gagner des votes à même un référendum, qu'on s'appelle péquistes, libéraux ou unionistes ou d'autres formations politiques. Nous allons travailler ici, qu'on ait l'expérience ou pas. Certains députés veulent faire flèche de tout bois. Je vous dis immédiatement que notre formation politique, que j'occupe le fauteuil de l'Union Nationale ou que ce soit un autre député comme intervenant, ne se servira pas de cette table de travail pour faire, ici, de la partisanerie. Il y a d'autres champs d'activité pour recruter des votes, recruter des adhérents à une formation politique. Cette question est depuis trop longtemps discutée au Québec et au Canada pour qu'on vienne ici la politiser. J'ai joliment hâte qu'on ait tranché cette question. S'il y a des agonies quelconques du côté économique, c'est principalement dû à cette question. Et quand on aura un outil valable en main que je voudrais le plus parfait possible, que toute cette table voudrait le plus parfait possible, il sera temps de passer au référendum. Quant aux politiciens qui sont habitués, aux nouveaux politiciens, que ce soit une table où il y a de la sincérité d'un côté comme de l'autre. C'est l'appel que je lance ici. C'est peut-être une période préréférendaire que nous vivrons pendant l'étude de cette loi. Je serais joliment désappointé qu'on passe ici des semaines à l'étude de cette loi. Je pense qu'il y aura un temps pour régler la question du référendum et un temps pour régler la loi du référendum, et c'est pour moi, dans l'esprit de l'Union Nationale, deux choses fort différentes. Nous allons régler ce projet de loi. Nous allons le faire le plus honnêtement possible, en se faisant peut-être plus confiance qu'on ne l'a entonné ce matin en lançant le débat, en se faisant plus confiance des deux côtés de la table. Je fais également appel aux media d'information pour comprendre, comme on l'a fait tout à l'heure ici, qu'autour de cette table il y a des gens qui ne représentent peut-être pas la majorité ni l'Opposition officielle, mais qui ont quand même des opinions fort valables à émettre et qui sentent le courant de la population, qui ont le pouls de la population. La population en a assez des études que nous sommes à faire sur cette loi du référendum. Cela fait 20 ans qu'on parle d'études sur le référendum et la plupart des partis ont parlé de référendum à l'intérieur de leur comité d'étude. Certains partis l'ont mis à leur programme électoral et je pense qu'il est temps qu'on procède.

Personnellement, je vous garantis que vous avez mon entière collaboration. Je ferai ici les amendements que l'Union Nationale proposera, au nombre d'une demi-douzaine à peu près, et je n'entrerai pas, jamais, dans un amendement qui viendra ici faire perdre le temps de la table; et je le dénoncerai, qu'il vienne d'un bord ou de l'autre de la table. Je pense qu'il est temps, une fois pour toutes, qu'on procède. L'esprit qui a animé notre parti depuis que nous sommes ici a toujours été le même. C'est dans cet esprit positif que nous abordons aujourd'hui cette période de travail. A ce stade de nos travaux, les efforts de l'Union Nationale porteront sur les améliorations à apporter au projet de loi de telle sorte que l'on puisse en faire une loi qui, d'aucune manière, ne puisse arrêter le flanc à la critique.

C'est principalement le chapitre II concernant le Conseil du référendum qui fera l'objet des attentions de l'Union Nationale qui en lançait l'idée en mars 1977 et en avait réclamé la création jusqu'à ce que le gouvernement en reconnaisse le bien-fondé et l'inscrive dans son projet de loi 92. N'étant pas étrangers à la conception du Conseil du référendum, nous entendons réclamer pour lui toute la dimension qu'il possède dans notre esprit. Le Conseil du référendum doit apparaître comme le véritable garant de la liberté et de la sincérité de la consultation, laquelle sera utilisée. Cette loi organique de la consultation populaire devra être acceptée de tous les citoyens, quelle que soit leur attitude à l'endroit de la question posée. Elle devra garantir à chaque Québécois qu'il lui sera loisible de s'exprimer en toute sincérité et liberté et que son expression d'opinion sera considérée en toute honnêteté grâce à un mécanisme de consultation parfaitement étanche et impartial. Il est essentiel que nous en arrivions à créer ce climat de confiance si nous aspirons véritablement à obtenir un résultat significatif lors d'un référendum. Ainsi, dans un tel climat, le débat portera sur la question de fond, sur la finalité de la consultation, et non sur tout à la fois, tant forme que fond.

L'Union Nationale, encore et toujours, place bien au-delà des petits avantages partisans le bien-être de la démocratie au Québec; en aucun moment il ne doit y avoir place pour la démagogie, comme je l'ai dit tout à l'heure, lorsque les intérêts supérieurs de la nation sont en cause. C'est en vrais Québécois, mandatés par les Québécois, que nous, législateurs, devons travailler à formuler la meilleure définition d'un outil éminemment démocratique afin de faire participer tous les Québécois au développement et à l'épanouissement du Québec des réalités.

M. le Président, je vous réitère en terminant que vous pouvez compter sur notre collaboration, pour autant qu'on se donnera ici un outil capable de donner confiance à la population. Il faut déjà préparer, à cette table de travail, l'après-référendum. Ce n'est pas en voulant se passer des sapins d'un bord ou de l'autre de la Chambre, ou en voulant faire de la petite politique ici que nous donnerons cet esprit de confiance dont les gens auront besoin le lendemain du référendum pour être capable d'accepter un succès ou une défaite. C'est la position de l'Union Nationale. Je suis convaincu qu'à la fin de votre période de travail c'est peut-être celle qui prévaudra.

Le Président (M. Clair): Je vous remercie, M. le député de Mégantic-Compton. M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, j'aimerais énormément que le ministre soit présent. Je ne sais pas s'il est sorti pour longtemps.

M. Paquette: II a une rencontre qui ne peut pas attendre. Il revient tout de suite.

M. Samson: Je vais quand même commencer mes observations, M. le Président, en vous demandant de lui faire part de certaines de ces observations.

Le Président (M. Clair): Vous pouvez être assuré que je lui en ferai part par le biais du journal des Débats.

M. Camil Samson

M. Samson: Je n'ai pas à annoncer des dizaines et des dizaines d'amendements, mais il y a des remarques que je voudrais faire. Je voudrais que le ministre puisse en prendre connaissance et nous donner son idée, une fois qu'il aura pris connaissance de ces remarques.

Il me semble très important, au début de l'étude de la loi no 92, et même je considère que cela devrait être un prérequis, étant donné que la loi 92 sur la consultation populaire est en même temps une loi qui amende la Loi électorale et la Loi du financement des partis politiques, que, tout au cours des discussions en commission parlementaire sur la loi 92, nous ayons la présence et du président des élections et du président de bureau du financement des partis politiques.

L'importance de leur présence est due au fait que ces deux personnages auront un rôle de premier plan à jouer lors d'un éventuel référendum, étant donné que l'un sera le maître d'oeuvre du référendum lui-même et que l'autre sera celui qui aura à surveiller et à contrôler les dépenses et les entrées concernant le financement.

Si je fais cette demande au tout début de mes remarques, c'est que nous avons vécu, à titre d'expérience, il y a à peu près une dizaine de mois maintenant, les discussions sur la loi no 2. Bien sûr, nous ne pouvions pas, à ce moment, avoir la présence du président du financement des partis politiques parce qu'il n'était pas nommé. Cela n'était pas possible, mais nous avons vu à l'expérience que la mise en application de la loi a été un peu difficile à ses débuts, compte tenu du fait que ni le président ni ses deux adjoints n'avaient été présents à l'occasion des discussions de cette loi qu'ils doivent maintenant appliquer.

Puisque nous aurons à amender cette loi, puisqu'ils auront à appliquer cette loi, il me semble que cela devrait être absolument un prérequis qu'ils soient présents à l'occasion des discussions pour savoir ce qui se dit, connaître la philosophie de la loi, connaître davantage l'esprit de la loi que nous sommes à discuter et, à l'occasion, s'il y a lieu — je dis bien s'il y a lieu — si nous avons des questions à poser, ces deux personnages importants pourront être à la disposition du ministre pour le conseiller sur les réponses qu'il pourra nous donner.

M. le Président, cette loi sur la consultation populaire que nous étudions aujourd'hui, le principe en a été voté. Je pense que tout le monde est d'accord sur le principe d'une loi sur les consulta- tions populaires. Je souligne encore qu'il est temps de penser à la possibilité, par les amendements qui pourront être amenés devant cette assemblée, d'en faire une loi spéciale sur les référendums ou encore, au moins, une loi sur les référendums constitutionels.

Je dis, M. le Président, que même en ne voulant faire d'aucune façon de la partisanerie politique, il reste qu'il y a des choses qui doivent être spécifiées et dites. Nous aimerions que le gouvernement ne prenne pas avantage de la situation privilégiée qui peut être la sienne à l'occasion d'un référendum. (11 h 30)

Bien sûr, on a spécifié qu'il y aura dans cette loi une limite des dépenses en vue — je veux bien le croire — de ne pas privilégier une option plus qu une autre quant au financement. Je souligne à l'attention de cette commission que, s'il est important que nous ayons une loi sur le financement des partis politiques et une loi limitant les dépenses électorales, puisque cette loi limitant les dépenses électorales établit justement I'équité entre les différentes options à l'occasion d'une élection, il ne faut pas oublier qu'il y a quand même, toutes proportions gardées, une bonne différence entre la limitation des dépenses à I'occasion d une élection et la limitation des dépenses à l'occasion d'un référendum.

Le fait est qu'à l'occasion d une élection générale les Chambres sont dissoutes. Donc, le gouvernement, les ministres doivent faire campagne de la même façon que les candidats de tous les autres partis politiques, c'est-à-dire avec les deniers des partis, deniers qui sont assujettis maintenant à la loi du financement des partis politiques. A l'occasion d'un référendum, rappelons-nous que tous les ministres seront encore en poste. S'il est vrai que la limitation des dépenses peut être une chose qui limite différents partis politiques, par le biais d'une tournée ministérielle, par le biais d un discours d'un ministre, par le biais d'une conférence bien préparée à l'avance et dont la publication est faite par d'autres groupes que ceux qui sont enregistrés au référendum, par tous ces biais il pourrait y avoir — la loi ne I'empêche pas présentement — de facto un déséquilibre, compte tenu du fait que le parti ministériel pourrait utiliser ce genre de privilège. Je ne lui prête pas de mauvaises intentions, mais je dis que la loi ne I'empêche pas. Il faudra y penser au cours de l'étude du projet.

Le gouvernement est, bien sûr, avantagé dans les questions référendaires, quelle que soit la question, quel que soit le référendum, s il y en a plusieurs, si le gouvernement conserve sa loi-cadre. S'il ne la conserve pas et si cela devient une loi spéciale, le gouvernement demeure quand même privilégié parce qu'il est le seul — tout le monde va le reconnaître — à connaître la stratégie du référendum. Quant à la question que personne autour de cette table de l'Opposition — je dis bien de lOpposition — ne connaît encore, quant à la date où sera connue cette question et quant à la date du référendum, le gouvernement est le seul à connaître ces détails.

Nous retrouvons dans cette loi un article qui veut qu'un référendum qui est en cours soit annulé automatiquement par le déclenchement d'une élection générale. Seul le gouvernement sait maintenant ou saura plus tard, le cas échéant, s'il y aura, oui ou non, une élection générale déclenchée durant le cours d'un référendum. N'oublions pas qu'il est encore du droit du premier ministre de déclencher à sa guise une élection générale. Donc, les membres des partis de l'Opposition, de bonne foi, entrent dans une campagne — je dis cela à titre d'exemple — référendaire et peuvent hypothétiquement dépenser les sommes d'argent prévues et qui sont limitées, en prévoyant, au début, une certaine somme, et en prévoyant, vers la fin de la campagne, peut-être des dépenses plus fortes, les derniers jours.

A l'encontre de cela, le gouvernement seul, connaissant sa stratégie, pourrait — je dis pourrait, je ne l'accuse pas de vouloir le faire, remarquez bien, mais il n'y a rien qui l'empêcherait de le faire, d'après la loi telle qu'elle est présentement — pourrait, lui, y aller à fond de train de dépenses et de propagande au cours et au début de la campagne, sachant d'avance qu'il a l'intention de déclencher une campagne électorale générale en cours de référendum. De ce fait, la limite de dépenses ne voudrait plus rien dire pour le gouvernement parce qu'il aurait, par ce moyen technique qui n'est pas défendu par la loi, la possibilité de dépenser deux fois plus d'argent que les opposants au référendum s'il advenait qu'il ait l'intention, dans sa stratégie, de déclencher des élections générales en cours de référendum.

Une Voix: Vous leur donnez des idées.

M. Samson: Oui, ce sont peut-être des idées que je leur donne, mais je n'ai pas l'impression pour que même toutes les Oppositions concertées peuvent donner des idées à ce gouvernement. Il en a passablement lui-même. M. le Président, je dis...

Une Voix: C'est interdit par la loi.

M. Samson: Ce n'est pas interdit par la loi, au contraire. M. le Président, je dis que la valeur du référendum, telle que prévue par la loi, n'étant qu'une valeur consultative et n'engageant pas le gouvernement, n'est pas tout à fait dans l'esprit de ce que ce gouvernement a laissé entendre à la population avant de prendre le pouvoir. Il y a autre chose qui ne se retrouve pas dans la loi et qu'il me semble assez important de discuter, qui pourrait se faire par le moyen d'amendements. Je le répète encore parce que le ministre n'était pas là au début de mes remarques — d'accord, je n'en fais pas de reproche au ministre — je réitère que je n'annonce pas là des amendements que je déposerai. Je fais des remarques, j'espère qu'elles seront prises en considération et qu'on pourra, en temps et lieu, peut-être faire des corrections.

Le pourcentage des votes requis pour qu'un référendum soit reconnu comme valeur consultative normale devrait, il me semble, être inclus dans la loi. Autre matière, le Conseil du référendum sera composé du juge en chef de la Cour provinciale et de deux autres juges nommés par le gouvernement. Je suggère également qu'à ce poste on puisse en arriver — et j'aimerais, M. le Président, c'est un souhait que j'ose faire, qu'il y ait là plusieurs amendements — à un consensus, parce qu'il s'agit d'une loi d'une grande importance qui, il me semble, doit se situer au-delà des partisane-ries politiques. Le consensus pourrait nous permettre d'arriver à quelque chose de valable comme outil, et la population sentirait réellement un effort du parlementarisme d'aller à la consultation. Quand je parle du Conseil du référendum, du juge en chef de la Cour provinciale qui en fera partie et de deux autres juges nommés par le gouvernement, il me semble que les deux autres juges devraient être nommés autrement que par le gouvernement, par d'autres méthodes, qui peuvent être discutables, évidemment. Je vois les signes que le ministre me fait, il semble qu'ils ont pensé à une possibilité, en tout cas, de placer ce Conseil du référendum hors de toute atteinte possible et de toute critique possible.

Il me semble aussi que, pour les fins du ou des référendums, il serait peut-être valable, en tout cas, parce que c'est un genre de loi qui est nouveau chez nous, il serait valable qu'on pense à former un conseil consultatif en plus du Conseil du référendum dont les rôles sont assez limités. Il me semble qu'un conseil consultatif des représentants de chaque parti à l'Assemblée nationale pourrait avoir une certaine valeur. Nous avons vu que le conseil consultatif a eu une grande valeur, en tout cas en ce qui concerne la mise en place de la loi 2. C'était une loi nouvelle, une forme nouvelle de financement des partis politiques et en quelque sorte du droit nouveau, et la participation du conseil consultatif a permis en tout cas de mettre la machine en place, ce qui aurait été beaucoup plus difficile autrement.

J'en viens aux comités nationaux ou encore les comités-parapluies; il me semble que ce n'est pas là la meilleure formule pour permettre l'expression libre de la démocratie. Les comités-parapluies seront pour le oui ou pour le non, toujours en prétendant qu'il y aura possibilité d'avoir une question claire qui appellera un oui ou un non, parce qu'il me semble que cette question devra être claire et devra appeler un oui ou un non, comme c'est le cas dans plusieurs autres pays. Mais ces comités-parapluies, qui sont et pour le oui et pour le non, sont des comités qui, comme le disait le leader de l'Opposition officielle tantôt, risquent fort de semer, sinon de la division, au moins de la confusion dans les rangs d'au moins l'un des deux comités. Le comité dans lequel le gouvernement fera son lit fera sûrement l'unanimité des députés du gouvernement, donc la majorité, et l'autre comité risquerait fort bien de se retrouver avec le parti qui a le plus grand nombre de députés qui, automatiquement, prend le leadership, parce qu'il a la majorité des membres. Il

me semble que cela n'est pas dans l'esprit démocratique.

Or, est-ce que nous devons penser à une formule différente? Je dis, M. le Président, que, oui, nous devons penser à une formule différente, même s'il n'y a que deux options et, ce que j'espère toujours, qu'il y aura une option qui appellera un oui ou un non. Mais, même s'il n'y a que deux options, il me semble qu'il y aurait moyen de faire en sorte, tout en respectant la limite des dépenses prévues, de laisser l'autonomie de chaque parti politique, c'est-à-dire que nous n'aimerions pas être embrigadés par la force et par la loi dans un comité en tant que représentant d'un parti politique. Je suis persuadé, pour en avoir discuté avec nos gens chez nous, que nos gens ne seraient pas heureux d'être embrigadés par la loi dans un comité-parapluie où ils ne pourraient pas prendre les décisions, ils ne pourraient pas participer directement aux décisions. Ce que le leader parlementaire de l'Opposition officielle a mentionné tantôt comme exemple, que les partis moins représentés à l'Assemblée nationale pourraient risquer de se retrouver en arrière, c'est peut-être un exemple exagéré, si on veut, mais qui explique clairement ce qui pourrait arriver. On explique souvent par le pire, pour mieux se faire comprendre, mais cela pourrait effectivement et techniquement arriver.

On m'apportera peut-être en contreproposi-tion le fait qu'il y aura une subvention prévue dans ce projet de loi pour les comités et que cette subvention sera versée par le ministre des Finances, subvention à être discutée et dont le montant sera versé par le ministre des Finances, comme subvention de départ, et que, par la suite, les règles seront celles de la loi 2 pour le financement et la limite des dépenses.

Je dis, et je le dis à l'attention spécifique du ministre, qu'il y aurait peut-être lieu de voir à la possibilité d'utiliser la même formule, quant à la subvention de départ, que celle utilisée pour le financement public des partis politiques, c'est-à-dire au pourcentage des votes reçus lors de la dernière élection, ce qui pourrait constituer la subvention de départ, et que chaque parti politique ait le libre choix ou bien d'adhérer à un comité ou de pas y adhérer et de faire campagne selon sa philosophie, selon ses convictions pour l'option de son choix. Il me semble que c'est un minimum de démocratie qu'on doit respecter. (11 h 45)

Ces comités-parapluies peuvent créer beaucoup de confusion et ne pas servir la démocratie. J'espère qu'on pourra, au cours de l'étude article par article, trouver une formule qui ferait le consensus. Je continue à souhaiter qu'on pourra procéder le plus possible par amendements par voie de consensus.

La limite des dépenses pour un référendum ou pour une élection. C'est notre premier référendum en vue. Nous savons tous que la limite des dépenses, à l'occasion d'une élection générale, est de $0.60 par électeur dans chaque circonscription pour les premiers 10 000 électeurs, $0.50 pour les 10 000 électeurs suivants et $0.40 pour les autres électeurs. Le parti peut, lui, dépenser $0.25 par électeur comme parti politique. Nous retrouvons dans la loi des dépenses moindres que celles-là. Je le porte à l'attention du ministre, compte tenu du fait que déjà il semble à pas mal de monde que les limites de la Loi électorale actuelle auraient tout avantage à être indexées, parce que ces limites ont été fixées en 1965, je crois, et ont été mises en application la première fois à l'élection de 1966. Cela fait déjà douze ans et depuis ce temps-là il y a eu une augmentation du coût de la vie, il y a eu une augmentation...

M. Burns: Est-ce que le député me permet de répondre à cette question? Elle est beaucoup plus technique qu'autre chose.

M. Samson: Oui.

M. Burns: Dans les faits, si vous calculez le prorata des $0.60, $0.50 et $0.40 auquel vous faisiez référence tout à l'heure par circonscription électorale, en moyenne, cela donne à peu près $0.50 par électeur à peu près partout. Il y a des circonscriptions où cela donne plus parce que ce sont de petites circonscriptions...

M. Samson: J'en conviens, la moyenne est d'environ $0.50.

M. Burns: ... mais si vous êtes dans la moyenne de comté de 32 000 électeurs, cela donne à peu près $0.50.

M. Samson: Je conviens que la moyenne est d'environ $0.50 par électeur par comté, mais il y a $0.25 par parti en plus.

M. Burns: Quant au deuxième aspect de votre question, je peux vous dire tout de suite que nous envisageons de déposer, si possible avant la fin de la présente session — j'espère qu'on ne m'accusera pas de le faire encore à la fin d'une session — mais non pas pour adoption lors de cette session, une espèce de grande réforme de la Loi électorale. Ce pourrait être un des éléments qui entreraient dans la réforme de la Loi électorale comme telle.

M. Samson: Je remercie le ministre de ses précisions. Il vient, en quelque sorte, confirmer mes inquiétudes et confirmer également que si on a en tête la possibilité d'augmenter ou de modifier ces limites de dépenses pour les fins électorales, pour de très bonnes raisons, je pense, pour la présente loi, la loi 92, on ne devrait pas attendre la Loi électorale, mais on devrait immédiatement songer à la rendre plus réaliste. C'est là une perche que je tends pour qu'on puisse y penser d'ici le moment où on fera les discussions.

Le Président (M. Clair): M. le député de Rouyn-Noranda, étant donné que vous étiez vous-même partie à la convention et pour me faciliter l'interprétation de l'entente, je vous indique que

vous exercez votre droit de parole depuis 23 minutes, maintenant. Sans vouloir être restrictif, vous m'aideriez beaucoup si vous vouliez conclure dans quelques minutes.-

M. Samson: M. le Président, je vais être d'une collaboration qui va vous surprendre.

Je termine, M. le Président, en soulignant — parce que le ministre n'était pas là; je sais qu'on a peut-être fait le message, mais je veux être bien sûr qu'il l'a — que j'aimerais, pas pour ce matin, mais pour les prochaines séances, peut-être à compter de demain ou, si possible, à compter du moment où on en arrivera à l'article 1 dans l'étude article par article, qu'on ait la présence du président des élections et du président du — on vous a fait le message, vous avez une équipe qui est extrêmement efficace, M. le ministre — financement des partis politiques. Je suggère qu'on repense sérieusement la possibilité, sinon que cette loi devienne spéciale pour le référendum que nous visons, au moins d'avoir une loi qui est spéciale pour les référendums sur les matières constitutionnelles. Qu'il y ait un pourcentage minimum de votes requis, que la question à être posée, qui fera l'objet d'un débat de 30 heures à l'Assemblée nationale, exige — j'en fais une proposition — l'approbation des deux tiers des membres de l'Assemblée nationale pour qu'on ait réellement là une question posée par l'Assemblée nationale et qu'on n'ait pas l'impression que c'est posé par l'Assemblée nationale si elle est adoptée seulement à la majorité simple. En effet, tout le monde va convenir que, lorsqu'une question est adoptée à la majorité simple à l'Assemblée nationale, c'est le gouvernement qui décide et non pas l'Assemblée nationale comme corps. Or, comme dans les matières qui relèvent de l'Assemblée nationale, autant nous exigeons pour la nomination du président des élections, pour la nomination du directeur du financement des partis politiques, pour la nomination du Vérificateur général, pour la nomination de lom-budsman, les deux tiers de l'Assemblée nationale, je pense que la question posée, qui devra faire l'objet d'un débat, devrait aussi exiger une majorité des deux tiers de l'Assemblée nationale. Qu'on nous garantisse que ce soit une question claire et qui appelle un oui ou un non. Là-dessus, M. le Président, je ne peux que terminer en souhaitant que l'on puisse faire un bon travail, objectivement, positivement et qu'on puisse arriver à avoir la meilleure des lois sur les référendums, autant que possible, par consensus.

Le Président (M. Clair): Je vous remercie, M. le député de Rouyn-Noranda. M. le député de Beauce-Sud.

M. Fabien Roy

M. Roy: Merci, M. le Président. Il y aura bientôt un an que le ministre responsable a présenté un livre blanc sur la consultation populaire, puisque, effectivement, ce livre blanc a été présenté au mois d'août 1977. Après avoir entendu les remar- ques, tant du côté ministériel que du côté de l'Opposition, je constate que le dossier n'a pas tellement évolué jusqu à présent. Il y a eu beaucoup de discussions, mais il y a encore beaucoup de questions qui sont posées et pour lesquelles nous attendons des réponses. Il nous faudra avoir des réponses et je dis qu'il y a urgence; pas urgence au point d'apporter le bâillon pour l'étude de la loi — je ne voudrais pas aller jusque-là, nous en avons assez eu jusqu'à maintenant — mais il y aurait une certaine urgence. La loi devrait être étudiée de façon normale, mais qu'on ne perde pas de temps inutilement pour arriver à son adoption. Parce que, si nous continuons à discuter sur la loi du référendum, voire même à nous engueuler à certaines occasions, je ne pense pas qu'on fasse avancer le débat constitutionnel au Québec, lequel doit être placé bien au-dessus de toutes les préoccupations partisanes des différentes formations politiques en place.

Est-ce que cette loi finira par servir? Ma question peut peut-être en étonner plusieurs ce matin, mais les récents événements qui se sont déroulés non seulement au Québec, mais à Ottawa nous ont démontré clairement qu'il est plus que probable que le référendum n'ait pas lieu en 1979, tel qu'il a été annoncé antérieurement, puisque personne ne peut dire aujourd'hui s'il y aura des élections fédérales à l'automne ou si ce sera l'an prochain.

M. Burns: Avez-vous des nouvelles récentes à nous communiquer sur la date?

M. Roy: Je n'ai pas de nouvelles récentes et je serais étonné que le parrain du projet de loi, le leader du gouvernement, ait des nouvelles récentes à nous communiquer.

M. Burns: Non, elles ne sont pas récentes.

M. Roy: Mais, comme nous ne sommes pas dans un règne politique qui favorise les élections à date fixe, je dois dire qu'aujourd'hui il n'y a personne en mesure de m'assurer qu'il n'y aurait pas possibilité d'avoir des élections générales au Québec avant le référendum. C'est une question qui est posée actuellement et on admettra que de plus en plus de gens se la posent. C'est pourquoi je dis que, sur cette question nationale, sur cette question de la consultation populaire — je me réfère uniquement à la question constitutionnelle, puisqu'il n'y a pas d'autres référendums dans l'air — il n'y a pas de temps à perdre. Il va falloir procéder le plus rapidement possible à l'adoption de cette loi, de façon à aborder le vrai débat, le grand débat, le plus tôt possible.

M. Burns: Est-ce que le député me le permet? Deux secondes, ce sera très bref.

M. Roy: Oui.

M. Burns: Le député devra cependant reconnaître que c'est un engagement électoral de la

part du parti ministériel, tant par la voix de son premier ministre que par la voix du gouvernement, tellement de fois répété depuis ce temps, qu'il y ait un référendum avant les prochaines élections générales. Je pense que c'est un engagement. Le gouvernement se fera juger à ce moment-là sur ie fait d'avoir mis de côté cet engagement électoral, si jamais il ne le respecte pas.

M. Roy: Nonobstant les engagements politiques du gouvernement, je veux bien faire foi au gouvernement, mais on sait très bien que, peu importe le gouvernement en place, les engagements électoraux sont une chose et les possibilités en sont une autre. La politique, c'est toujours l'art du possible. Mais il ne faudrait pas oublier ce point-là. Je veux bien prendre la parole du ministre ce matin, mais même là je dois dire qu'il y a un certain nombre d'éléments qui sont absolument en dehors du contrôle du ministre et un certain nombre d'éléments qui sont complètement en dehors du contrôle du gouvernement lui-même. Il ne faut pas l'oublier. Je pense qu'il faut regarder les choses avec un sain réalisme.

Si nous sommes aujourd'hui rendus à l'étude article par article de cette Loi sur la consultation populaire au Québec, mon intention n'est pas de reprendre un à un tous les arguments et inquiétudes déjà énoncés sur ce projet de consultation populaire. Cependant, je dois rappeler que nous sommes toujours d'accord sur le principe même de la consultation populaire qui, je crois, pourra devenir un important outil de travail pour nous, parlementaires. Toutefois, il m'est impossible de souscrire entièrement au mécanisme mis de l'avant dans ce projet de loi 92. Je suis toujours convaincu que ces mécanismes, bien qu'on nous louange leur nécessité pour assurer la démocratie référendaire, sont des obstacles — il ne faudrait pas l'oublier — à la libre expression de notre population. Je persiste à croire que ce n'est pas en multipliant les contrôles, même si un minimum de contrôle est nécessaire, qu'on nous mettra à l'abri de cette maladie gouvernementale qui semble devenir de plus en plus incurable et que l'on aura un meilleur exercice de la démocratie.

On parle d'un certain contrôle et non pas d'un contrôle certain des dépenses qui pourront être faites à l'occasion de la consultation référendaire, parce que cette loi ne peut pas s'appliquer ailleurs qu'au Québec, on en conviendra. Il y a de la publicité qui peut se faire ailleurs qu'au Québec. Même si les Québécois sont les premiers et les plus directement concernés par cette consultation sur leur avenir constitutionnel, il n'en demeure pas moins qu'il y en a d'autres qui ne peuvent pas être tout à fait désintéressés sur cette question. Est-ce que cela va être plus facile de s'exprimer en Ontario? Est-ce que cela va être plus facile et moins contraignant de s'exprimer au Nouveau-Brunswick? Ce sont des questions que nous devons nous poser. Je ne veux pas faire de démagogie sur cette question, mais il ne faut pas se fermer les yeux non plus.

Il y a toute la publicité hors Québec, et il y a aussi la publicité gouvernementale. On connaît très bien toutes les subtilités possibles, "permises" qui peuvent être utilisées, que ce soit même à l'occasion d'une décision politique prise par un autre gouvernement, par le gouvernement fédéral comme tel, pour amener, dans le débat constitutionnel, dans le débat référendaire, une nouvelle dimension et faire en sorte que, par leur action et par leurs obligations, des ministres responsables de porte-feuille et faisant partie du Conseil exécutif de la province seront obligés d'intervenir et que la publicité gouvernementale entre en ligne de compte en faveur de l'option gouvernementale. S'il y a des contrôles pour ceux qui veulent en faire la contrepartie ou qui veulent faire connaître à la population l'envers de la médaille, il y a un risque de déséquilibre extrêmement sérieux. On n'a pas le droit de se fermer les yeux là-dessus. (12 heures)

II y a aussi tous les déplacements ministériels. Mon collègue de Rouyn-Noranda en a parlé tout à l'heure. Les déplacements ministériels ne sont pas les mêmes dans une période référendaire, comme dans une campagne électorale. Les ministres ont les services gouvernementaux à leur disposition, c'est-à-dire les voitures du gouvernement pour se déplacer, ce qui n'est pas le cas pour les autres formations politiques, les partis d'Opposition ou encore pour ceux qui s'opposeraient au projet gouvernemental.

Il y a aussi les voyages à l'étranger qu'il ne faut pas oublier non plus, auxquels une grande publicité revient grâce à l'électronique, grâce même aux journaux. Etant donné les limites qu'on peut avoir à l'intérieur du Québec pour faire connaître notre point de vue et exercer notre droit de parole, est-ce qu'il ne serait pas plus subtil d'organiser un voyage en France, à New York, à Chicago ou ailleurs, et, à ce moment, faire en sorte que toute la presse écrite et parlée au Québec soit tenue d'accompagner les instances gouvernementales qui iront, à grand renfort de publicité, faire de grandes déclarations à l'étranger, tout en faisant en sorte que les gens, à l'intérieur du Québec, soient contrôlés et limités? Il ne faudrait pas oublier cela non plus. Le gouvernement ne peut pas, de par la loi no 92, avoir un droit de regard strict sur les articles que je viens de mentionner et de souligner, Si cela s'applique, M. le Président, peu importent les opinions qu'on peut avoir à l'égard du référendum, il ne faudrait pas oublier que cette loi n'est pas la loi du référendum sur l'avenir constitutionnel. C'est la loi des référendums. On risque de créer des précédents à ce moment. Dans d'autres moments de notre vie politique au cours de laquelle on fera appel à la consultation populaire, on pourra se servir des précédents créés pendant la consultation populaire sur l'avenir constitutionnel et exercer et pratiquer ce qui a été mis en application durant cette période.

Il y a tous les organismes publics et parapublics. Je pourrais citer de multiples exemples pour lesquels le gouvernement n'aura pas de contrôle. Encore une fois, il ne faudrait pas qu'on se place

dans une situation... Je m'excuse d'avoir dérangé mon collègue, l'honorable député de Jonquière. Je vais essayer d'être bref pour ne pas vous déranger trop longtemps. Je ne peux pas reprendre ce que je disais à l'occasion de la deuxième lecture, mais, comme je l'exprimais, dans la vie démocratique des peuples, il y a ce qu'on appelle les droits et libertés fondamentales, dont le droit d'expression des peuples, des minorités et des ethnies. Ce n'est que par la reconnaissance de cette pluralité des options nationalistes de notre population que ce projet de loi sur la consultation populaire servira réellement au plein épanouissement de la démocratie chez nous.

Tout à l'heure, on a parlé de la fameuse question qui sera posée. Elle devra être la plus claire possible pour éviter les débats et les luttes le lendemain du référendum de façon que la réponse qui soit donnée soit une réponse claire de la part de la population. Je souscris entièrement à l'idée. D'ailleurs, c'est un point que j'avais soulevé dès mes premières observations lors du dépôt du livre blanc, à savoir que la question soit décidée aux deux tiers des votes de l'Assemblée nationale. C'est une question qui est fondamentale. Ce doit être un principe qui doit être accepté d'emblée, sans même que ce soit nécessaire d'en discuter excessivement longtemps.

Il faudra qu'on pense aussi à un autre point lors de cette consultation populaire. Sur une question aussi importante que celle de l'avenir constitutionnel, est-ce qu'on peut se limiter à considérer la réponse d'un oui ou d'un non? Peut-on considérer cette réponse à partir d'une simple expression d'une majorité simple. J'aimerais citer de très petits exemples pour illustrer jusqu'à quel point le législateur a été prudent dans les années passées dans certaines lois régissant les entreprises, notamment le secteur des coopératives. On sait très bien que pour toute modification de documents ou de la constitution interne d'une institution coopérative, que ce soit une caisse d'épargne ou une association coopérative, on exige les deux tiers des votes présents pour pouvoir apporter un amendement à ladite constitution, en n'oubliant pas, cependant, que si un amendement est adopté il faut l'appliquer. S'il n'y a qu'une majorité simple qui se prononce de façon favorable, comment pourra-t-on espérer pouvoir l'appliquer de façon concrète le lendemain, lorsque ce sera le temps de prendre des décisions? Je n'ai pas de réponses magiques à fournir au gouvernement de ce côté. Il va falloir qu'on examine sérieusement dans la loi si, en ce qui concerne une consultation populaire, nous devons nous limiter à considérer le verdict à partir d'une majorité simple.

En plus de ces précisions, nous nous interrogeons tout particulièrement sur l'à-propos des deux fameux organismes dits organismes parapluies sous lesquels devront s'enrégimenter tous ceux et celles qui voudront s'exprimer sur le sujet lors d'un référendum. Sur ce point, nous exigeons que les formations politiques présentes, reconnues de la Loi électorale, reconnues par la Loi du financement des partis politiques, aient la marge de manoeuvre nécessaire. C'est extrêmement important, et j'estime que ce serait extrêmement préjudiciable. Je reprends un peu les propos qu'a tenus le leader de l'Opposition officielle lorsqu'il disait que les gens des tiers partis devraient être sur le banc arrière du Parti québécois qui sera majoritaire sur une des options dans un organisme-parapluie ou sur le banc arrière de l'Opposition officielle qui, elle, serait majoritaire dans l'autre organisme-parapluie. Il y a là un danger.

Je pense que s'il y a plusieurs formations politiques dans le Québec, il ne faudrait pas oublier qu'il y en a plusieurs dans d'autres Parlements aussi, dans le monde. Sans vouloir se faire péter les bretelles, très souvent, ce sont les tiers partis et les petites formations politiques qui ont contribué énormément à faire bouger les grosses et à faire avancer le débat. Je n'ai pas l'intention — je tiens à être bien clair là-dessus, je veux qu'on note bien — de m'asseoir sur aucun banc arrière pendant le référendum, que ce soit du côté des oui ou du côté des non. Je préférerais être un hors-la-loi plutôt que d'être assis sur le banc arrière. Je tiens à ce que ce soit bien clair. A ce que je sache, je ne pense pas que ce soit là l'intention du gouvernement, d'où la nécessité de bien mesurer la portée de la loi et de bien mesurer les mécanismes d'application de la loi.

Si un député de l'Assemblée nationale a le droit de s'exprimer sur n'importe quel sujet, n'importe où, au Québec, dans n'importe quelle circonstance et dans n'importe quelle salle, je verrais très mal qu'un député, quel qu'il soit, qu'il soit membre d'un tiers parti ou qu'il soit membre d'une formation politique reconnue avec laquelle il ne serait pas d'accord, au cours du référendum, soit limité dans ses droits d'expression sur un sujet bien précis qui serait celui de la consultation populaire sur l'avenir constitutionnel du Québec. Sur ce point, je tiens à dire qu'il y a une question de principe qui va aussi loin, et que je pars du fait suivant: je préférerai être hors-la-loi pendant le référendum plutôt que d'être assis sur un banc arrière.

Je termine ces brefs commentaires généraux en souhaitant que cette commission étudie de façon honnête et objective chacun des articles de ce projet et ce, sans crainte qu'il y ait lieu de procéder à des modifications, à des changements substantiels dans l'intérêt de toute la population et dans le respect intégral de la liberté d'expression de chaque citoyen du Québec.

Le Président (M. Clair): Merci, M. le député de Beauce-Sud. M. le député de Rosemont.

M. Gilbert Paquette

M. Paquette: M. le Président, j'ai écouté avec énormément d'intérêt les commentaires, remarques et suggestions des députés de l'Opposition particulièrement ceux de l'Union Nationale, du Ralliement créditiste et du Parti national populaire qui, contrairement à leurs collègues de l'Opposi-

tion officielle, ont été les seuls à ne pas dire qu'ils auraient une attitude adulte dans le débat. Je pense qu'ils ont plutôt prêché par les actes que par la parole.

Heureusement que le député de Laval nous a dit, au début de son exposé, qu'il allait avoir une attitude adulte parce qu'on ne s'en serait pas aperçu. Il commence par dire qu'il aura une attitude adulte et il termine son exposé en traitant le ministre de menteur public.

Je pense que la caractéristique principale de son exposé, c'est de tourner autour du pot. Au lieu de parler du contenu, exception faite des comités nationaux, le député de Laval a préféré essayer d'attaquer la crédibilité du ministre. Je pense que c'est un procédé courant en cette Chambre. C'est pour cela qu'on ne lui a pas demandé de revenir à des propos parlementaires comme on en a l'habitude.

Le député de Laval a essentiellement repris les articles du Globe and Mail, sous la signature de William Johnson, que je ne commenterai pas en détail, mais où on retrouve à peu près tous les éléments essentiels de son exposé, c'est-à-dire la question de la loi des référendums en Australie, le fait qu'il n'y a pas de contrôle des dépenses en Angleterre, également la question des dépenses et aussi le fait que, en Angleterre, les gens auraient été unanimes, selon le ministre, pour réclamer un contrôle des dépenses, alors que ce ne serait pas le cas.ll y a également, sur la question, beaucoup de mystère et de fausse vérité: Untruth, half truth and misleading possibilities, ont été véhiculés par le Parti gouvernemental.

Je suis heureux de constater que les sources d'inspiration du député de Laval sont passées du Devoir au Globe and Mail.

M. Lavoie: C'est peut-être publié au Québec aussi cela.

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Paquette: Mais il y a une bonne raison pourquoi cela n'a pas été publié au Québec.

M. Lavoie: Ah!

M. Paquette: Une des bonnes raisons, c'est qu'avant d'accuser le ministre d'être un menteur public, je pense que le député de Laval aurait dû vérifier les déclarations du ministre. Je donne un exemple. Le député de Laval a affirmé que le ministre aurait dit que les dépenses étaient réglementées en Grande-Bretagne. Je ne me souviens pas une seule fois avoir entendu le ministre... J'ai siégé à toutes les commissions parlementaires.

M. Lavoie: Le 17 novembre.

M. Paquette: Et dans le livre blanc, vous admettrez que le gouvernement a eu l'honnêteté de décrire exactement ce qui se passait en Grande-Bretagne puisqu'on dit au troisième paragraphe de la page 21 : Aucune limite ne fut imposée aux dépenses que pouvait encourir chaque organisation en Grande-Bretagne. On l'a dit dans le livre blanc. On l'a répété à plusieurs reprises. On n'a jamais prétendu que les dépenses étaient réglementées en Grande-Bretagne. Cependant, on a dit qu'on s'était inspiré, qu'on avait étudié la situation là-bas, sans dire qu'on avait copié tous les détails et on pense honnêtement avoir amélioré cette loi de la Grande-Bretagne et de l'avoir adaptée à la situation du Québec où le contrôle des dépenses est accepté lors des élections et est beaucoup plus rigide que là-bas. C'est normal d'essayer de transposer cela dans une campagne référendaire qui est encore plus importante, qui touche l'avenir constitutionnel du Québec et d'autres sujets importants également, et possibles.

On s est également base sur la question de la loi australienne. Il me semble que le ministre a dit que cette loi avait été déposée devant le Parlement en troisième lecture.

M. Burns: Adoptée en troisième lecture.

M. Paquette: Adoptée en troisième lecture, mais on n'a jamais affirmé qu'elle était passée dans les faits. Mais le simple fait qu'un gouvernement ait adopté une telle loi en troisième lecture, cela montre au moins que la loi n'est pas incompatible avec le régime parlementaire britannique, comme nous le répète l'Opposition continuellement sans jamais nous apporter un seul exemple d'incompatibilité d'une loi organique des consultations populaires avec les institutions parlementaires britanniques. Il n'y en a pas d'incompatibilité.

Ensuite, le député de Laval a élaboré longuement sur la question des comités nationaux. Lorsqu'il accuse le ministre d'être un menteur public, on pourrait lui retourner le compliment, parce que je reprends à peu près ses paroles, je ne m'en souviens pas textuellement, mais il nous a dit: En Norvège, lors de l'entrée dans le Marché commun, il y avait 125 000 ou 300 000 citoyens qui étaient contre et tous les partis politiques qui étaient pour. Si ces gens avaient été au Québec, les 125 000 qui étaient contre n'auraient pas pu se faire entendre durant la campagne référendaire. C est complètement faux. Je pourrais accuser le député de Laval d'être un menteur public, mais je ne voudrais pas tomber dans ce genre de partisa-nerie. Je lirai simplement l'article 22 du projet de loi, que manifestement le député de Laval n'a pas lu, et qui dit ceci: "Lorsqu'à la fin du délai prévu — au premier alinéa, pour la formation des comités provisoires — s'il n'y a aucun membre de l'Assemblée nationale du Québec qui se soit inscrit en faveur d'une des options — c'est le cas évoqué par le député de Laval — le directeur général des élections peut inviter au moins trois et au plus vingt électeurs à former le comité provisoire en faveur de cette option". (12 h 15)

II me semble que c'est bien clair. Si tous les députés se retrouvent d'un bord et qu'il n'y en a pas un de l'autre bord, ceux qui sont contre

pourront également être représentés à un comité provisoire, lesquels comités provisoires formeront éventuellement les comités nationaux, les comités permanents.

Je pourrais relever également les exemples farfelus. Les comités nationaux ont peut-être des défauts — il y en a qui ont été soulignés par les membres des autres partis; je vais revenir là-dessus après — mais ils n'ont quand même pas tous les vices, et surtout pas à ce point-là, pas au point de permettre à des gens qui seraient contre et qui ne seraient pas représentés par aucun des partis politiques de ne pouvoir se faire entendre.

J'ai aussi trouvé assez farfelu le fait qu'un même parti puisse contrôler les deux clans, à moins d'être très majoritaire en Chambre et que ce soit une question qui fasse l'effet d'une division interne à l'intérieur du parti. Je pense que c'est la situation la plus plausible. Je trouve tout à fait sain que les membres d'un parti puissent se diviser en différentes options lors d'un référendum.

Une autre objection, c'est le cas où il n'y aurait qu'un seul député à un comité. S'il n'y a qu'un seul député à un comité, c'est comme quand il n'y en a pas. Je trouve que ce député ou ces citoyens qui n'ont aucun représentant au Parlement en faveur de leur option ont drôlement besoin d'avoir autant de financement que l'autre comité en face pour faire triompher leur option. Si on croit à la démocratie, si on croit au progrès, on ne peut faire autrement que de supposer au départ que les deux options recueillent à peu près le même pourcentage dans la population et ont droit à un financement égal. Qu'il y ait un député, qu'il n'y en ait pas, qu'il y en ait 50 d'un bord, c'est une question de justice élémentaire. Dans ce sens, Ottawa n'a pas de leçon de démocratie à nous donner.

Je reviens à la seule objection valable — je constate qu'elle est valable parce qu'elle a été reprise par les trois représentants des autres partis. C'est concernant le fait que dans un comité national, un parti pourrait avoir un contrôle excessif sur les autres. Je comprends particulièrement le député de Beauce-Sud et le député de Rouyn-Noranda d'être extrêmement méfiants face à cette disposition du comité. Leur préoccupation rejoint d'ailleurs les seules nuances que la Commission des droits et libertés de la personne indiquait dans son rapport, en disant: On est d'accord pour le contrôle des dépenses, c'est une question de démocratie, mais on a des doutes sur les comités nationaux, il pourrait y avoir des abus, on pourrait encarcaner un peu trop les gens et nuire à leur liberté d'association. La commission émettait un doute qui a été repris par les partis d'Opposition; jamais je ne croirai qu'ensemble on ne pourra trouver un mécanisme qui permette de lever cette objection.

Un mécanisme qui serait possible serait de mettre des balises à ce que peuvent faire les comités. Je vois tout de suite le Parti libéral dire: Vous allez tout contrôler!

M. Lavoie: Encore des contrôles.

M. Paquette: Des contrôles. C'est une mesure d'extrême droite. Vous allez non seulement créer des comités nationaux, mais vous allez leur dire comment faire. Je pense que ce n'est pas forcé. Il y a peut-être moyen, tous ensemble, d'essayer de trouver des balises. Par exemple, on pourrait dire: Les comités nationaux doivent répartir équitablement leurs fonds entre les groupes qui en font partie, laisser cela vague et, s'il y a abus, on pourrait peut-être mettre une instance d'appel qui pourrait être le Conseil du référendum ou autre chose. Je lance cette suggestion à titre personnel, c'en est une. Le député de Rouyn-Noranda en a fait une qui me satisfait un peu moins parce qu'elle fait passer tout le financement uniquement par les partis politiques et elle laisse de côté les groupes et les mouvements qui, dans une campagne référendaire, dans le fond, devraient être, en principe, sur le même pied. Au sein des comités référendaires, on peut leur faire une place adéquate à leur représentativité.

M. Samson: Est-ce que le député me permettrait une question?

M. Paquette: Oui.

M. Samson: Le député ne considère-t-il pas que les partis politiques qui sont en présence, advenant un référendum, pourraient quand même canaliser les options ou les opinions ou les efforts que veulent faire les citoyens soit dans l'une ou dans l'autre des formations, qui peuvent être de l'une ou de l'autre des options? On ne présume pas pour le moment mais...

M. Paquette: II y a le danger du même contrôle d'un parti politique sur des groupes et je vous donne un exemple bien concret. Dans le mouvement indépendantiste — dans le Parti québécois, il y a des gens de centre, il y a des gens de centre-gauche — c'est beaucoup plus large que cela, cela va de la droite à l'extrême gauche; du côté fédéraliste également. Si, par exemple, le Parti québécois contrôlait les fonds et que les centrales syndicales ou un mouvement nationaliste de droite quelconque, ou encore les trotskistes, à l'extrême gauche, qui se déclarent indépendantistes, décidaient de faire une campagne de promotion de la souveraineté-association mais en fonction de leurs propres objectifs, et en mettant leurs nuances et leur vision de la société là-dedans, il y aurait le danger que le Parti québécois contrôle leur financement et les empêche de s'exprimer. On risquerait d'avoir un peu le même genre de problème avec votre suggestion.

M. Samson: S'il y a des comités-parapluies, de toute façon, ils seraient contrôlés à l'intérieur d'un comité-parapluie. Il faut trouver quelque chose.

M. Paquette: C'est pour cela que je propose qu'on assouplisse le mécanisme des comités-parapluies et qu'on mette un certain nombre de balises pour empêcher les groupes majoritaires,

dans les comités-parapiuies, de mettre certains groupes sur le petit banc, comme le disait le député de Laval.

A la fin de son exposé, le député de Laval nous dit: il faut se fier à la démocratie. Je pense que, si on a des balises suffisantes, on pourra se fier à la démocratie des gens à l'intérieur des comités-parapluies qui auront suffisamment de sens politique pour ne pas éliminer les gens qui veulent appuyer la même option qu'eux.

Finalement, j'aimerais dire qu'en arrivant ici, j'avais une certaine illusion, je pensais obtenir la collaboration de l'Opposition officielle et obtenir l'unanimité sur ce projet de loi. Lors de mon discours en deuxième lecture, j'avais fait le tour de tous leurs arguments et je leur avais dit: Ce sont des prétextes; si vous vous basez sur de tels prétextes, qui peuvent être réglés au niveau de l'étude article par article, pour voter contre le principe du projet de loi, je vais être obligé de conclure que vous voulez à l'avance dénaturer le référendum en disant: Ce n'est pas démocratique, ce n'est pas jouer franc-jeu et en contestant, en se donnant la chance d'en contester, en quelque sorte, les résultats. C'est un doute que j'avais au moment de la deuxième lecture, c'est maintenant une certitude. Quand je regarde la performance du député de Laval, en s'attaquant à la crédibilité du ministre au lieu de s'attaquer à des améliorations au projet de loi — ce qui est notre rôle ici, en commission parlementaire — je suis obligé de tirer, malheureusement, cette conclusion, à moins que les députés de l'Opposition officielle me détrompent, et je dois leur dire que si, au contraire, il s'agit d une saine méfiance que toute Opposition doit avoir, surtout une Opposition systématique, je pense qu'ils n'ont absolument pas compris notre démarche.

Notre démarche est de sortir du "quêtage" à Ottawa, d année en année, de décennie en décennie — on pourrait quasiment dire de siècle en siècle — pour aller demander des compétences permettant l'évolution, la survie, le développement et l'épanouissement des Québécois. On s'est toujours heurté à un mur; on a l'exemple récent de la taxe de vente, mais ce n'est pas le seul, on pourrait en trouver presque chaque année, dans le domaine des affaires sociales, dans le domaine de la main-d oeuvre, dans le domaine économique; on a toujours...

M. Lavoie: N'oubliez pas que c est une loi-cadre.

M. Paquette: Oui, mais je suis en train de dire comment vous voulez dénaturer à l'avance le référendum parce que vous n'avez pas compris notre démarche et on veut en sortir.

Pour en sortir, on a dit: La seule façon, c'est que les Québécois répondent clairement à la question: "What does Quebec want?"

M. Ciaccia: Vous bloquez le référendum pendant ce temps-là.

M. Paquette: II faut répondre à cette question. La seule façon dont cela va pouvoir débloquer, c'est d'avoir un référendum clair, net et dont personne ne pourra contester les résultats. Vous venez de me démontrer encore une fois que vous n avez pas compris la démarche. Que les Québécois nous disent non à la souveraineté-association lors du référendum, il faudra qu'un autre parti, ou peut-être même le Parti québécois en tienne un autre, peut-être sur une autre option. A un certain moment il va falloir que les Québécois disent clairement: Voici ce que nous voulons. C'est la seule façon, quand on est minoritaire dans un pays, d obtenir un changement de cette importance qui est vital pour les Québécois. La seule façon de le faire c'est que le référendum ne soit pas truqué, que la question soit claire et précise, que les résultats ne puissent pas être mis en doute par qui que ce soit, et qu'on ait le "bargaining power" suffisant pour obtenir les changements qu'on demande. Vous ne comprenez pas notre démarche, ou vous l'avez trop bien comprise et vous essayez de la dénaturer à l'avance pour pouvoir dire ensuite... Et vous mettre du bord des plus forts encore une fois. Toujours la liberté des plus forts. C est cela votre politique!

Le Président (M. Clair): M. le député de Terrebonne.

M. Elie Fallu

M. Fallu: M. le Président, ce matin j'avais un peu I'intention — il nous reste encore quelques minutes, M. le Président, vous me les accordez et je demanderai la suspension de nos travaux.

Le Président (M. Clair): Oui, vous avez encore quatre minutes environ.

M. Fallu: Ce matin, dans lascenceur, je rencontrais les collègues et j'avais un peu l'intention de leur offrir de prendre des petites gageures sur la durée de la commission. Les gageures étaient ouvertes: Quinze jours, trois semaines peut-être bien; parce que moi aussi je croyais qu'on pourrait, raisonnablement à cette table, dans une salle un peu rafraîchie, un peu fraîche, ce printemps, s'arrêter, discuter très calmement d'un outil essentiel dont nous avons besoin comme Québécois, non seulement pour un référendum qui s'en vient, mais comme outil de transformation de nos institutions politiques. M. le Président, je vous annonce maintenant que je ne prends plus aucune gageure. Ayant assisté à cette première ronde à cette table, ayant assisté notamment à ce qu'on pourrait appeler lannonce des couleurs des divers partis en lice ici, on voit un peu mieux peut-être le déroulement à venir de la commission. Les premiers intervenants, l'Opposition officielle, m'ont profondément déçu parce que j'espérais pour le moins une autre attitude. Qu'est-ce qu'on a eu ce matin? C est une kyrielle, j'allais dire une litanie, d'injures inqualifiables. Je me suis permis de

noter, comme cela, au hasard, verbatim et literatim ce qui en est. Alors on trouve: Démasquer cette stratégie, une espèce de référendum. Evidemment le mot "espèce", en contexte, étant péjoratif. Un ministre politisé — politisé étant encore non pas une vertu, mais un défaut — des fonctionnaires politisés — évidemment cela veut dire malhonnêtes — ...

M. Lavoie: M. le Président, c'est de l'interprétation... être libre.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Fallu: ... un ministre menteur.

M. Ciaccia: Allez-vous défendre le projet de loi ou défendre le ministre?

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Burns: C'est à votre tour.

M. Paquette: On va sur le terrain...

M. Burns: C'est à votre tour de souffrir. J'ai souffert tout à l'heure.

M. Fallu: J'ai entendu et j'ai noté également "fausser l'opération référendaire, une stratégie électoraliste, une tuyauterie faussée". Là, je demanderais aux plombiers du 144 de m'expliquer ce que c'est.

Le Président (M. Clair): M. le député de Terrebonne, il est midi trente.

M. Fallu: Vous me permettrez de continuer cet après-midi?

Le Président (M. Clair): La commission ajourne ses travaux sine die.

(Suspension de la séance à 12 h 29)

Reprise de la séance à 16 h 43

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plait!

La commission permanente de la présidence du conseil et de la constitution est réunie pour continuer l'examen article par article du projet de loi no 92, intitulé Loi sur la consultation populaire.

Les membres de cette commission sont: M. Fallu (Terrebonne), qui remplace M. Bisaillon (Sainte-Marie); M. Burns (Maisonneuve), M. Char-bonneau (Verchères), M. Vaillancourt (Jonquière) qui remplace M. Clair (Drummond); M. Lavoie (Laval) qui remplace M. Garneau (Jean-Talon), M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Laberge (Jeanne-Mance), M. Gratton (Gatineau) qui remplace M. Levesque (Bonaventure); M. Paquette (Rosemont),

M. Roy (Beauce-Sud) et M. Samson (Rouyn-Noranda).

Les intervenants sont: M. Bertrand (Vanier), M. Brochu (Richmond), M. Dussault (Châteauguay), M. Guay (Taschereau); M. Ciaccia (Mont-Royal) qui remplace M. Lavoie (Laval); M. Bisaillon (Sainte-Marie) qui remplace M. Lévesque (Taillon); M. Morin (Louis-Hébert) et M. Raynauld (Outremont).

Au moment où nous avons ajourné nos travaux, c'est le député de Terrebonne qui était en train d'exercer son droit de parole. Hormis qu'une nouvelle entente ne soit portée à ma connaissance, à compter de maintenant je considérerais uniquement l'article 160 de notre règlement aux fins de déterminer le droit de parole des députés, ce qui donnerait 20 minutes complètes au député de Terrebonne.

M. Burns: D'accord, M. le Président, cela va. Je suis d'accord avec cela.

M. Lavoie: Vingt minutes par député.

Le Président (M. Clair): Vingt minutes par député au niveau des commentaires généraux; il n'y aurait pas d'autres 20 minutes, cependant, pour ceux qui ont déjà exercé un droit de parole.

M. Burns: Cela va.

M. Paquette: Sauf le droit de réplique.

Le Président (M. Clair): Sauf le droit de réplique du ministre, bien sûr.

M. le député de Terrebonne, vous avez la parole.

M. Lavoie: De quelle longueur? Je lui donne le consentement...

M. Burns: Je suis capable d'être très concis.

M. Lavoie: Oh! la! la! (16 h 45)

Le Président (M. Clair): M. le député de Terrebonne, vous avez la parole.

M. Fallu: M. le Président, ce matin, avec un humour un peu noir, un humour qui venait dans ma bouche et dont les paroles avaient été prononcées par d'autres, décrivait ce qu'on pourrait appeler un mal absolu, c'est-à-dire le projet de loi 92.

Si vous permettez, sans ironiser plus qu'il ne le faut, parce que c'est assez triste comme situation, je relèverais également certaines allusions qui ont été faites par l'Opposition officielle, de ces tirades à l'emporte-pièce, et je cite toujours au texte, car j'ai bien noté: ... "ce qu'on a appelé ces mesures d'extrême droite, loi de bâillon, mesure du silence, malhonnêteté, sectaire, antidémocratique ... Pour le reste, on se référera au journal des Débats. C'est peu édifiant, mais c'est ce qu'on a entendu.

Pour ce qui a trait au financement, on a soulevé ce qu'on a appelé un adoucissement entre le livre blanc et le projet de loi 92, à savoir: la possibilité, pour un électeur, de dépenser $300, à titre individuel, dans la campagne référendaire. Il s'agit donc d'un adoucissement. Le principe, certes, on l'a reconnu; j'allais dire, d'ailleurs, on l'avait presque négocié ensemble, en analysant trois aspects possibles de remaniement de ce financement. $300, c'est certainement à la portée de nombreuses bourses de Québécois; c'est un rapport assez personnel de la fortune moyenne du Québécois moyen; très certainement mieux, de toute façon, que la limite de $5000 prévue dans le livre blanc du gouvernement fédéral, dans lequel on peut lire: "Des dépenses de ce genre sont une manifestation normale de la liberté d'expression." J'aimerais demander aux assistants si $5000 c'est leur liberté habituelle, quotidienne, de leur capacité d'expression, de leur liberté d'expression. Avez-vous, tout le monde, $5000 comme mesure de votre liberté d'expression quotidienne?

L'ensemble de ce qui nous a été dit, ce matin, par l'Opposition officielle, que ce soient des dés pipés depuis le début ou un scénario monté, ce sont deux choses à mon avis: De l'un, c'est soit que l'Opposition officielle craint, à partir de maintenant, une défaite de toute son option, notamment — évidemment, puisque c'est son obsession, elle ne pense qu'au référendum sur la constitution québécoise — elle est tellement assurée de la défaite de son option qu'elle veut maintenant discréditer l'institution référendaire pour pouvoir, a posteriori annoncer que tout a été pipé. Mais, au-delà de cela, je crois, c'est plutôt une industrie de démolition démocratique, démolition d'abord de la réforme qui est entreprise alors que, évidemment, pour ne pas perdre la face, à l'époque, elle a accepté la Loi de financement des partis. Maintenant, d'une façon lignifiante, elle voudrait mettre tout cela dehors, ou à peu près, en refusant des comités nationaux ou, encore, en se donnant, à travers ces comités, la possibilité de dépenser, sous prétexte de liberté, mais la liberté qui a ses excès. Voire même, dans ce parti, je me demande si ce n'est pas tout simplement un certain mépris des institutions, y compris les institutions parlementaires quand on voit son chef qui refuse d'entrer à l'Assemblée nationale.

Il s'est passé chez elle, depuis un certain temps...

M. Ciaccia: Fais donc un référendum là-dessus.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! Messieurs, à l'ordre!

M. Fallu: ... dans ce parti...

M. Lavoie: ... va être nommé juge.

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Burns: C'est aussi vrai l'un que l'autre.

M. Fallu: ... un drôle de virage. Alors qu'on a cru, notamment au moment de l'étude du livre blanc, alors qu'on recevait des invités, que son attitude serait un peu celle de démocrates, une attitude réceptive, sans doute critique — on n'en attend pas moins d'elle, au contraire, on le lui reprocherait si elle ne l'était pas — de telle sorte que le débat, dans cette commission parlementaire, a été relativement édifiant. Vous vous en souvenez sans doute, M. le Président, il a été même chaleureux.

Toutefois, il est arrivé, je crois, dans leur propre parti, un virage assez étonnant et qui est un peu contradictoire en soi, puisque d'un côté, celui qu'ils pressentaient comme chef, allait plutôt approuver le passage du livre blanc au projet de loi 92. Il l'exprimait, d'ailleurs, dans un éditorial du 29 décembre 1977, en sept points bien numérotés.

A peu près au même moment, leur propre comité référendaire, sous la signature du président Jean Lesage, président de la Commission du référendum du Parti libéral du Québec. On assistait à un véritable revirement qui ressemblait à quelque chose comme le préélectoral du 15 novembre, la dernière séance d'information publique.

M. Paquette: Ce soir, on fait peur au monde! M. Fallu: Très exactement.

M. Fallu: ... dans lequel on trouve... J'ai l'impression que, au-delà de tout ce qu'on a perçu ce matin, c'est peut-être ce qu'il faut avoir en tête, maintenant, pour discuter ici, à cette table, avec ce parti, de la loi 92. Qu'est-ce qu'il en est?

Ce livre blanc, leur livre blanc et le référendum sur l'indépendance, on y trouve... Si vous permettez, M. le Président, je citerai, à la page 1, par exemple: "Ainsi élus sous de fausses représentations, ils — il s'agit du Parti québécois — doivent maintenant demander aux Québécois de se prononcer pour ou contre la séparation du Québec, par voie de référendum". "Elus sous de fausses représentations", on remet en cause la légitimité du gouvernement. On peut lire, au hasard, que le livre blanc sur la consultation populaire est dénoncé par le Parti libéral, que ce livre blanc cherche à noyer le poisson. Cette loi-cadre est un écran de fumée qui sert de prétexte aux péquistes — notez bien que les péquistes, dans leur bouche, ce sont des consonances malsaines - pour arriver à leur but sous le manteau de la démocratie.

Lisons encore, page 8: "Ce livre blanc du Parti québécois — pardon, du PQ — constitue le début d'une campagne insidieuse de propagande".

Lisons encore, page 14. "Le Parti libéral du Québec a déjà dénoncé les injustices du livre blanc péquiste — l'accent ne peut pas être produit au journal des Débats, je le regrette — sur les référendums".

M. Gratton: Est-ce que c'est souligné?...

M. Burns: Ce ne sera pas long, la TV s'en vient.

M. Fallu: M. le Président, c'est là justement qu'il faut prendre l'inspiration qu'on entend ce matin, de la part du Parti libéral. Je suis profondément choqué, comme parlementaire, de l'attitude qui est prise, parce que nous avons une chance, à cette Assemblée nationale, de faire des réformes en profondeur.

Déjà, je crois, et la bonne foi aidant, nous sommes arrivés ensemble à de nombreuses transformations de nos règlements de l'Assemblée nationale. Déjà ensemble, nous sommes arrivés, à l'unanimité également, à transformer, à créer une Loi du financement des partis politiques. Nos institutions méritent l'unanimité. Nos institutions méritent cela. Plusieurs ont fait appel, je vois le député de Rouyn-Noranda, au consensus à notre table de discussion.

C'est un mérite parce qu'il ne faut absolument pas que l'institution que nous allons implanter soit préalablement discréditée. Il en va, non seulement de l'avenir du Québec, mais de l'avenir de nos institutions. Je supplie le Parti libéral du Québec de faire un effort de "départisanisation" du débat. Je fais appel à sa conscience non seulement politique, mais à sa conscience sociale pour que l'avenir du Québec ne s'enfarge pas dans un débat de procédures référendaires; c'est essentiel.

Qu'il comprenne également que les Québécois n'ont pas l'intention d'assister à des "filibusters" qui dureraient des semaines et des semaines. Ce ne serait pas séant, je crois, de commencer une transformation de nos institutions sous l'égide, ou enfin, d'une façon aussi mal enclenchée.

L'Union Nationale, pour sa part, a demandé qu'on mette justement de côté l'esprit de parti. Je le veux bien. Je m'y engage personnellement comme je sais que les gens de notre formation ne mettront pas en doute votre appel. Le député de Mégantic-Compton a dit un mot qui est, je crois, absolument prophétique. Il faut que l'outil que nous nous apprêtons à nous donner, on y ait confiance. La confiance dans l'outil de travail, a-t-il dit; c'est cela qui est essentiel. Mais cette confiance, M. le député, sachez que nous allons l'obtenir pour autant qu'autour de cette table... Je vous supplie également de prier, comme je viens de le faire, l'Opposition officielle de se mettre résolument de la partie, car je ne sais trop si vous arrivez à la même analyse que moi aujourd'hui. Je doute, à partir de maintenant, qu'on puisse avoir confiance dans l'outil de travail qu'on va tenter de se donner, pour la bonne et simple raison que l'une des formations ici présentes tente préalablement d'enlever la confiance en l'outil qu'on veut se donner.

Je pense qu'il va falloir se serrer les coudes si le Parti libéral maintient cette ligne de parti pour qu'on puisse être plusieurs à dire qu'un référendum, c'est une chose utile dans une société, que peu importent certains petits détails qu'on a d'ailleurs largement ménagés en passant du livre blanc, ou à la Loi 92 qu'on s'apprête d'ailleurs à ménager encore lors de cette discussion, mais qu'au-delà de cela on fasse confiance quand même aux parlementaires à l'Assemblée nationale.

Il est évident, M. le Président, en écoutant le représentant de l'Union Nationale, que le Parti libéral voulait déjà enclencher ce matin la bataille du référendum, voulait pour le moins faire — je cite toujours le député de Mégantic-Compton — de la partisanerie et voulait encore apeurer la population. Un esprit de confiance, tel doit être notre leitmotiv au début de cette commission pour qu'on puisse sortir d'ici en proposant à l'Assemblée nationale, dans le rapport que le député de Jeanne-Mance va déposer, qui nous a confié le mandat d'étudier le projet de loi article par article, deux choses: un projet de loi qui ait fait le consensus et un projet de loi qui soit non seulement pour l'Assemblée nationale, mais pour tous les Québécois, crédible.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Gatineau.

M. Michel Gratton

M. Gratton: Merci, M. le Président. Après avoir écouté les propos que le député de Rosemont a tenus ce matin aussi bien que ceux du député de Mégantic-Compton et même ceux du député de Terrebonne à la fin de ses remarques, je vais tâcher de situer mon intervention dans cet esprit de recherche de consensus, dans cet esprit de confiance que tous, nous semblons être unanimes à rechercher pour l'étude de ce projet de loi 92.

Je ne reprendrai pas les arguments de principe que nous avons fait valoir à I'Opposition officielle au moment de l'étude du projet de loi en deuxième lecture. Je pense que nous les avons exprimés très clairement, que nous nous opposions à l'adoption d une loi-cadre. C'est un choix que nous avons fait et c est ce qui a expliqué, entre autres raisons, pourquoi nous avons voté contre l'adoption en deuxième lecture du projet de loi 92.

Mais toujours dans le but de tâcher de nous donner, à l'issue des travaux de la commission, un outil auquel toute la population du Québec pourra avoir confiance, je me demande s'il n'y a pas lieu de revenir sur la non-participation ou la participation éventuelle de la Commission des droits de la personne, dans l'étude des articles de ce projet de loi. (17 heures)

Je dirai d'abord, M. le Président, que je regrette énormément que le président de la Commission des droits de la personne ait indiqué, en réponse à un télégramme que lui faisait parvenir le député de Laval, qu'il n'a pas l'intention de se prononcer à nouveau sur les divers articles du projet de loi.

Si vous me permettez, M. le Président, je citerai le texte du télégramme qu'a reçu le député de Laval, ce matin, et qui donnait suite à une lettre que ce dernier avait fait parvenir à la Commission des droits de la personne le 20 avril 1978, dans

laquelle il demandait l'avis de la commission sur le projet de loi, sur le texte de loi déposé, et qu'il avait fait suivre d'un télégramme, le 12 mai 1978. La réponse du président de la Commission des droits de la personne est la suivante: "J'accuse réception de votre télégramme et de votre lettre du 20 avril; mille excuses pour n'avoir pas encore répondu à votre lettre. La Commission des droits de la personne du Québec n'entend pas émettre un avis sur le projet de loi no 92 puisqu'elle a déjà fait connaître son opinion le 11 novembre 1977, à l'occasion de la publication du livre blanc sur la consultation populaire. Il est facile de constater celles de ces recommandations qui ont été suivies. Nous vous remercions de votre demande et, par là, de la confiance qui nous est témoignée. Signé: René Hurtubise, président de la Commission des droits de la personne du Québec."

Je voudrais revenir sur cette phrase du télégramme: "II est facile de constater celles de ces recommandations qui ont été suivies. ' Effectivement, il est très facile de constater lesquelles, parmi les recommandations ou les constatations qu'avait faites la Commission des droits de la personne au moment de la présentation de ce qu'elle avait intitulé "Les réflexions préliminaires de la commission" et qui portait sur le contenu du livre blanc sur la consultation populaire, ont été suivies. Effectivement, il y a lieu de s'interroger sur le refus — apparent, en tout cas — du ministre de demander à la commission de nous fournir un deuxième avis.

D'ailleurs, M. le Président, quant à moi, je comprends fort bien pourquoi la commission et son président ne semblent pas être trop enclins à venir, sinon témoigner devant la commission, au moins lui fournir un avis écrit, car il est manifeste, dans l'attitude du ministre, qu'il ne sollicite pas, qu'il ne désire pas de nouvel avis de la commission.

J'aimerais reprendre certains propos tenus dans ces réflexions préliminaires de la commission.

M. Vaillancourt (Jonquière): On peut toutes les lire.

M. Gratton: Oui, n'ayez pas peur, on va toutes les lire, celles qui sont favorables comme celles qui ne le sont pas. C'est justement dans ce but que j'aborde la question. Ce matin, j'ai entendu le député de Rosemont, par exemple, faire une remarque semblable à celle du député de Jonquière, à l'effet que la Commission des droits de la personne était généralement assez favorable aux dispositions du livre blanc alors que nous, de l'Opposition, ne sommes pas du tout du même avis. On prétend plutôt le contraire.

Il me semble que dans cette recherche de cet esprit de confiance qui doit régner à cette commission, dans cet objectif que nous avons tous de faire en sorte que l'instrument de travail qu'on est en train de voter, qui est la Loi de la consultation populaire ne soit attaquable sur aucun plan, que la population — non seulement les membres de l'Assemblée — ait confiance en cet outil de travail. Il me semble que la meilleure façon de redonner confiance aux membres du parti de l'Opposition officielle serait justement de demander à ia Commission des droits de la personne de préciser encore plus ses réflexions qu'elle avait faites sur le livre blanc.

Dans ses remarques préliminaires, la commission dit: "II ne fait aucun doute que la Commission des droits de la personne préfère toujours se prononcer sur un projet de loi précis plutôt que sur un livre blanc qui n'est, somme toute, que l'énoncé d'une politique générale devant mener à l'adoption d'une loi. Cependant, il y avait eu invitation à la commission de s'exprimer sur le contenu du livre blanc, la dernière fois, et on voit bien que c'est important aux yeux de la commission puisqu'elle en fait un des premiers considérants. On avait invité la commission à donner un avis et elle l'a fait.

Cette fois-ci, dans le cas du projet de loi. on ne l'a pas fait, non seulement, on ne l'a pas fait, on a même refusé, de la part du ministre la semaine dernière, la présentation d'une motion demandant qu on fasse cette demande à la commission. Je me mets dans les souliers du président de la Commission des droits de la personne, sachant d'avance que les remarques n'ont peut-être pas été aussi bien accueillies qu'on l'aurait souhaité au moment où elles ont été faites sur le contenu du livre blanc, sachant fort bien que le ministre n en veut plus de ces avis qui viennent possiblement contredire ses énoncés quant aux dispositions de la loi 92. Ils refusent de venir nous donner leur avis, je les comprends.

Ce que je comprends moins bien, M. le Président, c est que le ministre, dans son souci de recueillir le plus grand consensus possible, ne nous permet pas à nous de l'Opposition officielle... En tout cas, je pense que nous ne sommes pas les seuls autour de cette table, mais même si nous étions les seuls, il me semble qu'on représente une partie assez importante de la population pour qu on tâche par tous les moyens possibles de nous rassurer.

On a fait grand état tantôt du côté ministériel de I'attitude "négative" du député de Laval ce matin vis-à-vis les énoncés, vis-à-vis des déclarations du ministre et des députés ministériels. Soyons honnêtes entre nous et disons-nous qu on peut faire toutes sortes d'interprétations lorsque le ministre lui-même se refuse à demander à la commission de nous dire si, effectivement, il y en a beaucoup de ces recommandations qui ont été suivies ou si, à son avis, il y en a quelques autres qui devraient l'être également.

M. le Président, on peut peut-être continuer la lecture du document. On parlait du fait que la commission, ayant été invitée à fournir ses réflexions préliminaires, s'était sentie justifiée de le faire. Egalement, considérant l'importance de I enjeu qui touche — selon les mots mêmes du ministre Burns; à ce moment-là, on citait le ministre — à I'essence même de nos institutions démocratiques, considérant les droits et libertés

fondamentaux qui sont mis en cause dans ce livre blanc en particulier, et on citait les articles de la Charte des droits et libertés de la personne...

Ces mêmes considérations existent et elles existent encore plus aujourd'hui au moment où, des mots mêmes de la commission, on parle maintenant d'un projet de loi précis et non pas strictement d'un livre blanc qui ne constitue qu'un énoncé de politique générale. La commission elle-même dit qu'elle préfère de loin se prononcer sur un projet de loi précis. C'est ce que nous avons devant nous à la commission. Pourtant, la semaine dernière, lorsqu'il a fallu obtenir le consentement unanime pour demander cet avis à la Commission des droits de la personne, c'est le ministre responsable du projet de loi qui s'y est opposé. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'on peut se poser énormément de questions sur les vraies intentions. En tout cas, c'est sûrement inviter justement le genre d'interprétations que plusieurs députés et plusieurs personnes au sein de la population vont faire des intentions du gouvernement de se refuser à demander un avis à la commission.

C'est la commission elle-même, dans ses réflexions préliminaires, qui parlait des écueils par rapport aux droits et libertés de la personne que pourrait présenter la future loi sur la consultation populaire si elle était adoptée conformément à la philosophie générale qui semble se dégager du livre blanc. Effectivement, à mon humble avis, le projet de loi no 92 reprend — peut-être pas dans tous les cas et j'en conviens qu'il y a eu des améliorations... Il y a eu des réserves exprimées dans l'avis préliminaire de la Commission des droits de la personne dont le ministre a tenu compte dans la rédaction du projet de loi no 92. On va revenir à ceux-là comme on va revenir aux autres.

M. Burns: Ce n'est pas ce que votre collègue disait ce matin.

M. Gratton: Laissez-moi finir et vous allez voir qu'on va bien s'entendre. Prenons-les un par un de façon très brève. Par exemple, la commission se posait des questions quant à la valeur du résultat d'un référendum tout en souscrivant à l'aspect consultatif proposé. Par contre, elle exprimait une réserve et je cite: "II lui semble en effet en vertu des libertés d'expression et d'association proclamées par la charte — il s'agit ici de la Charte des droits et libertés de la personne — que la future loi sur la consultation populaire devrait être assortie d'un engagement moral de la part du gouvernement, de se sentir lié par la majorité exprimée. Il s'agit ici de donner tout leur sens à ces libertés fondamentales en leur permettant de s'incarner d'un bout à l'autre du processus référendaire, notamment, pour le gouvernement en s'engageant à reconnaître les résultats de la majorité exprimée, selon la procédure normale prévue par notre système électoral. A ce jour, dans le projet de loi no 92, on ne satisfait pas cette interrogation de la Commission des droits de la personne.

Dans le cas du droit d'initiative, la commission donnait raison — je le dis à l'intention du député de Jonquière qui semblait s'inquiéter que je ne fasse allusion qu'aux recommandations de la commission qui étaient défavorables, au contraire — elle se disait tout à fait en accord avec la philosophie du livre blanc. J'en suis fort aise, M. le Président.

Là où cela marche moins bien, c'est sur la formulation de la question. Je cite le texte des réflexions préliminaires à la page 2: "Cependant, la présentation de la question à l'Assemblée nationale sous forme du projet de loi spécial à l'intérieur de la loi-cadre, plutôt que sous forme d'une motion assortie d'un débat d'une durée maximale de 25 heures" — j'ouvre une parenthèse pour dire qu'on a augmenté cela à 30 heures — c'est très bien, mais cela n'est pas encore assez. On va le voir, c'est la commission elle-même qui le dit: "... d'une durée maximale de 25 heures comme cela est proposé dans le livre blanc, nous apparaîtrait moins restrictive de la liberté d'expression à la fois des députés, mais surtout de la population qui, par la voie des média et, éventuellement, d'une commission parlementaire, serait plus directement associée au débat".

La commission le disait clairement, et je dois conclure du télégramme de la commission qu'a reçu le député de Laval ce matin, que c'est une des recommandations qui n'a pas été retenue par le gouvernement. C'est-à-dire de faire en sorte que la formulation de la question soit adoptée par le biais d'une loi spéciale plutôt que par une simple proposition ou une résolution présentée à l'Assemblée nationale.

Encore plus, à la page 3, la commission continue et dit qu'elle préférerait, en raison de l'importance de la motion, en supposant que c'est une motion qui est présentée et non un projet de loi, que le vote se prenne à la majorité des deux tiers plutôt qu'à la majorité simple, comme le prévoit la procédure parlementaire lorsqu'on recherche le plus large consensus entre les partis politiques. On recherche le plus grand consensus entre les partis politiques.

C'est la Commission des droits de la personne qui en faisait la suggestion. On ne retrouve pas cette suggestion dans le projet de loi no 92.

Le gouvernement me dira sûrement tantôt: C'est à nous de décider et nous avons jugé que cela n'était pas nécessaire. J'en conviens que c'est au gouvernement d'en décider. Justement, si le gouvernement est pour invoquer cet argument à chaque fois que l'Opposition n'est pas d'accord et nous dire: On a pris une décision politique, on fait notre lit et on est prêt à nous coucher dedans, qu'on ne nous demande pas, qu'on ne nous fasse pas des supplications comme l'a fait le député de Terrebonne tantôt, au plus grand consensus possible. Vous ne pouvez pas avoir les deux. Soit qu'on recherche un consensus ensemble, mais qu'en même temps le gouvernement fournisse à l'Opposition un minimum de garanties, ou bien vous allez nous envoyer promener comme vous l'avez fait dans le cas de la Commission des droits

de la personne. Continuez à nous envoyer promener, mais ne nous demandez pas d'être d'accord avec tout ce que vous allez nous proposer, lorsque vous ne nous permettez même pas de savoir si la Commission des droits de la personne — ce n'est quand même pas le Parti libéral du Québec — est satisfaite des améliorations que le gouvernement a apportées entre son livre blanc et son projet de loi 92.

On pourra faire les farces qu'on voudra de ce côté, on pourra faire toutes les interventions qu'on voudra, M. le Président, j'ai l'intention de vider cette question le plus rapidement possible.

La commission nous disait qu'elle ne pouvait qu'approuver le principe que spécifiait le livre blanc de conduire la campagne référendaire le plus possible selon la procédure prévue pour la tenue des élections. Donc, la commission était d'accord avec le gouvernement et nous aussi, on ne cherche pas à faire dire à la commission que le projet de loi 92 est tellement différent du livre blanc sur la consultation populaire que toutes les réserves exprimées dans ses réflexions préliminaires sont maintenant tombées du même coup. Ce que je suis en train de démontrer, ou de tenter de démontrer, c'est que ce n'est pas effectivement le cas. (17 h 15)

Tant et aussi longtemps que la Commission des droits de la personne ne me dira pas, noir sur blanc, qu'elle est, elle, satisfaite — et je tiens pour acquis qu'elle ne sera peut-être pas satisfaite et que je ne serai peut-être jamais satisfait, mais tout au moins que je sache ce que la commission en pense — tant et aussi longtemps que je ne saurai pas cela, M. le Président, je regrette, mais, comme le disait le député de Terrebonne, tantôt, il y a de fortes chances qu'on n'ait pas un consensus autour de tous les éléments du projet de loi qui sont trop importants, à nos yeux, pour qu'on les laisse passer comme cela.

Il y a tout l'aspect du regroupement forcé dont traitait la Commission des droits de la personne, après s'être dite d'accord avec l'objectif du gouvernement qui vise à accorder une chance égale à tous de faire valoir leur opinion, au moment du référendum. La commission se demandait cependant, et je cite: "Si la mise en oeuvre de cette égalité, surtout au niveau de la mécanique et du fonctionnement de ces organisations-parapluies ne risquerait pas de porter atteinte aux libertés fondamentales d'opinion, d'expression, d'association. Le livre blanc laisse, à cet égard, plusieurs questions sans réponses et quelques inconnues subsistent que la commission aimerait bien voir éclaircir par le gouvernement à ce stade de la discussion. "

M. le Président, que le gouvernement ne vienne pas me dire: Là on permet des dépenses jusqu'à $300 pour quelqu'un qui voudrait s'exprimer. Ce n'est pas là l'interrogation que se faisait la Commission des droits de la personne. En tout cas, même si je n'étais pas sûr, la meilleure façon de m'assurer, ce serait que la Commission des droits de la personne nous dise si elle est satisfaite de cette nouvelle disposition contenue dans le projet de loi ou si, à son avis, il n'y aurait pas lieu d'aller plus loin.

Je vous ferai grâce, M. le Président, des autres considérations. Je vous le dis tout de suite, si le député de Jonquière ou le député de Rosemont me disent: Vous n'avez pas tout lu! Je vais tout vous le lire, parce que c'est dans la même veine...

M. Burns: On l'a lu, on vous en dispense.

M. Gratton: J'irai simplement à la conclusion, M. le Président...

M. Burns: Elle est belle. C'est le "fun".

M. Gratton: "La Commission des droits de la personne souscrit aux objectifs du livre blanc. Elle met en garde, cependant, le législateur sur les atteintes possibles aux libertés fondamentales qui pourraient avoir des effets contraires aux objectifs poursuivis.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président.

M. Burns: Lisez tout, pas seulement la conclusion.

M. Gratton: Je vais le lire au complet, à condition que vous me donniez le temps de conclure après cela.

M. Burns: Oui, consentement, lisez tout cela, c'est important.

Le Président (M. Clair): Oui, je vais vous donner le temps, s'il y a consentement.

M. Gratton: Je recommence, M. le Président, au début: "La Commission des droits de la personne souscrit aux objectifs du livre blanc: la démocratisation de nos institutions politiques, l'association directe des électeurs à la gouverne de l'Etat, l'élargissement progressif de la participation populaire. La commission se réjouit...

M. Burns: C'est pas pire, ça non plus!

M. Gratton: Je n'ai pas besoin de lui pour me souffler les pas pire, M. le Président.

M. Burns: C'est pour vous aider, pour vous montrer jusqu'à quel point j'apprécie votre intervention.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Gratton: M. le Président, sur une question de règlement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Gatineau sur une question de règlement.

M. Gratton: M. le Président, je me suis abstenu, ce matin, de faire quelque commentaire que ce

soit, pendant qu'intervenaient le ministre, les députés ministériels...

M. Burns: D'accord, M. le Président, je m'amende!

M. Gratton: Si on veut jouer à cela, je suis capable de jouer comme lui. D'ailleurs, j'ai appris de lui entre 1972 et 1976, je peux jouer le même jeu moi aussi. Je suis sûr que ce n'est pas ce que le ministre désire.

Le Président (M. Clair): Messieurs, je vous invite à la modération. M. le député de Gatineau, vous avez la parole.

M. Gratton: Je continue, M. le Président: "La commission se réjouit de retrouver dans le livre blanc sur la consultation populaire au Québec le principe fondamental de l'égalité entre les individus tel que reconnu par la Charte des droits et libertés de la personne, et l'autre principe, non moins important, affirmé dans la loi sur le financement des partis politiques, celui d'une meilleure réglementation des revenus et dépenses politiques."

M. le Président, jusque-là on se réjouit de cela, qu'on retrouve ces éléments dans le projet de loi no 92. Mais là où on est moins tordu de réjouissance, c'est quand on poursuit la lecture et qu'on lit: "Elle met cependant en garde le législateur sur les atteintes possibles aux libertés fondamentales qui pourraient finalement avoir des effets contraires aux objectifs poursuivis. On voit bien qu'on peut avoir des objectifs très nobles, mais qu'on peut encarcaner tout cela dans des mécanismes qui font qu'on a des résultats contraires ou des effets contraires aux objectifs poursuivis, — ce n'est pas moi qui le dis, c'est la commission, M. le Président — notamment au niveau de la participation des citoyens au débat et au niveau de la démocratisation de nos institutions politiques. Ces libertés sont, comme on l'a vu, les libertés d'opinion, d'expression et d'association. C'est maintenant au gouvernement, en tant que législateur, qu'appartient le fardeau de prouver que la législation sur la consultation populaire au Québec ne portera pas atteinte à ces libertés."

C'est ce que je dis à ma façon. C'est effectivement au gouvernement qu'appartient le fardeau de prouver que la Loi sur la consultation populaire au Québec ne portera pas atteinte à ces libertés. Si on me donne cette assurance de quelque façon, je vais voter en faveur de l'adoption du projet de loi no 92. Mais ce sera différent si on me refuse d'entendre, ou même pas d'entendre mais de connaître l'avis de la commission comme elle l'a déjà fait à partir du livre blanc. Elle avait même indiqué préférer pouvoir le faire sur un texte de loi précis, et c'est le cas avec le projet de loi no 92. Si on me refuse cela, je serai obligé d'en conclure ce que j'en conclurai! De faire l'interprétation moi aussi! Et n'en déplaise au député de Mégantic-Compton, ce matin, qui semblait dire qu'il faut laisser toute partisanerie de côté — je pense que je n'en ai pas encore fait — il ne s'agit pas d'essayer de voter ce projet de loi ce soir ou finir demain midi, sans avoir de réponses à nos interrogations. Encore si c'était simplement les nôtres, on pourrait dire que c'est de la politicaillerie. Ce sont des interrogations qui ont été soulevées par la Commission des droits de la personne.

M. le Président, je ne sais trop comment procéder. Je voudrais que le ministre me donne l'assurance que son refus de la semaine dernière d'accorder son consentement à la présentation de la motion du député de Laval qui visait à demander l'avis de la commission était basé sur des considérations d'économie de temps de l'Assemblée nationale et qu'effectivement il n'a pas d'objections, et j'irais même jusqu'à dire qu'il ne craint pas que la Commission des droits de la personne s'exprime sur le projet de loi no 92. Je voudrais avoir cette assurance-là, M. le Président, et je me dis que la seule façon de le faire est de présenter une motion à la commission. Mais je me dis également, après avoir écouté mes collègues tant ministériels que de l'Opposition, si je présente une motion à cet effet, on va tout de suite se mettre à crier: Mesures dilatoires, "filibuster ", obstruction systématique, le Parti libéral du Québec est encore à la remorque et envoyé donc par là!

Je vous demande s'il ne serait pas possible de demander au ministre s'il a l'intention de faire en sorte que la commission se prononce. En fait j'irai même plus loin. Je vais demander au ministre de s'engager à demander l'avis de la Commission des droits de la personne. Et, s'il devait me dire non, je présenterai une motion en bonne et due forme pour que nous puissions la débattre. Je dirai tout de suite que tout cela ne visera pas à retarder l'étude des articles du projet de loi. Au contraire, je pense qu'on pourrait aborder — je ne parle pas pour les autres mais quant à moi — l'étude article par article, aller à l'article 1 immédiatement après les interventions de nos collègues, quitte à suspendre l'étude des articles qui pourraient être touchés par lavis — on l'a déjà dans les réflexions préliminaires de la commission — suspendre ces articles, demander à la commission de nous fournir cet avis d'ici une semaine par exemple. Je pense bien qu'il ne s'agit pas de recherches à n'en plus finir à la commission, le travail est déjà en grande partie fait. Si j'avais cette assurance du ministre, j'ai l'impression que ce que souhaitaient le député de Rosemont aussi bien que le député de Mégantic-Compton, le député de Rouyn-Noranda et le député de Terrebonne, on risquerait possiblement de l'avoir. En tout cas, on aurait au moins une chance de l'avoir. Ce que je dis très candidement, on n'a aucune chance de l'avoir, si on nous refuse d'avoir l'avis de la Commission des droits de la personne. C'est aussi simple que cela, c'est aussi clair que cela. Là-dessus je demanderais au ministre de nous dire ce qu'il en pense, sinon je me réserverai le droit, à un moment ultérieur, de présenter une motion en bonne et due forme pour requérir l'avis de la commission.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mont-Royal.

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: M. le Président, l'objectif qu'on devrait rechercher dans ce projet de loi, c'est d'avoir un référendum équitable ouvert et honnête. C'est le but que chacun de nous et même le ministre devraient avoir pour la rédaction des clauses du projet de loi. Je pense que la loi, telle qu'elle est rédigée maintenant, ne permet pas d'avoir un référendum équitable, ouvert et honnête.

Je vais m'arrêter à trois raisons principales pour démontrer comment, par la façon dont ce projet de loi est rédigé, le gouvernement va pouvoir diriger le référendum. Les trois points du projet de loi que je voudrais critiquer, ce sont, premièrement, les comités nationaux, deuxièmement, le conseil des référendums et, troisièmement, la question des limites de dépenses.

Le ministre doit savoir non seulement que la loi doit être juste, mais qu'elle doit avoir aussi l'apparence d'être juste. Dans le cas présent, non seulement la loi n'est pas juste, mais elle est loin d'avoir cette apparence d'être juste.

C'est vrai que le député de Laval s'est référé ce matin aux déclarations du ministre quant à la loi en Australie et en Grande-Bretagne. Le député de Rosemont s'est choqué un peu, mais je dois vous dire que les déclarations du ministre — peut-être que cela n'était pas son intention; je ne veux pas lui prêter des intentions — quant à la loi de la Grande-Bretagne, ont donné l'impression que, vraiment, ce projet de loi-ci avait pris comme modèle le référendum sur le Marché commun en Grande-Bretagne. On a voulu donner l'impression que si c'est le droit britannique, ce doit être "fair play" et que cela doit être juste. Mais il y a plus d'exceptions ici et elles sont tellement majeures que, vraiment, cela a faussé la réalité. Quand on utilise de semblables tactiques, le moins qu'on puisse dire, c'est que ie ministre est suspect en employant ce genre de tactiques parce que le ministre ne les a pas soulignées au début lorsqu'il a fait ses déclarations et lorsqu'il a déposé son livre blanc.

L'impression qu'il a donnée, c'est: Nous allons faire comme les autres pays, mais il y a tellement d'exceptions que, franchement, il ne le fait pas.

Prenons les comités nationaux. C'est absolument irréaliste de suggérer que, dans les brefs délais qui sont inclus dans le projet de loi, il va y avoir un comité national qui va essayer d organiser les six millions de Québécois pour une option fédéraliste. Le député de Beauce-Sud a déjà dit, à moins que je ne l'aie pas bien compris ce matin, que la loi ne l'empêcherait pas de parler et d avoir sa liberté d'expression. C'est quasiment un avertissement qu'il n'obéira pas à cette loi parce qu'elle est injuste à ce point de vue. Pouvez-vous vous imaginer que, dans un délai de 30 jours, il va falloir faire les règlements, organiser le député de Beauce-Sud, le Crédit social, l'Union Nationale et les libéraux pour travailler ensemble et aller organiser les groupes minoritaires, les nombreux et différents groupes qui sont pour loption fédéraliste pour les placer dans ce comité national? C'est absolument irréaliste.

Quand le député de Rosemont a dit: "Montrez-nous où ce projet de loi est contre les lois britanniques, contre l'esprit du parlementarisme, c est exactement sur cet aspect. On brime le droit d'association. On brime absolument le droit d expression.

M. Paquette: Le droit d association n'a rien à voir avec le parlementarisme.

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Ciaccia: C est tellement un droit sacré que même dans la constitution américaine, on a gardé dans le "Bill of Rights" le droit d'expression.

M. Paquette: C'est un régime présidentiel.

M. Ciaccia: Oui, mais cela découle du système britannique. Cela découle du "Common Law" et jamais on n'a essayé de brimer le droit d'association comme on le fait dans ce projet de loi. (17 h 30)

Prenez, par exemple, les groupes minoritaires, les groupes ethniques. Ils sont habitués, eux, à travailler par l'entremise de leur association. Ils ne sont pas habitués à la question d'un comité-parapluie qui doit être organisé dans les délais de 30 jours, ici, avec les règlements, etc. Ce que vous faites, c'est que vous limitez la participation de ceux qui prônent l'option fédéraliste.

M. Paquette: On vous laisse la chance de la limiter, ce n'est pas pareil.

M. Ciaccia: M. le Président, s'il vous plaît! Chaque fois qu'on expose un point, on est interrompu. Je ne vous ai pas interrompu. Je demanderais la même courtoisie.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Mont-Royal, je me porte à votre défense. M. le député de Rosemont, je vous prie de respecter le droit de parole du député de Mont-Royal. M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. On limite. Vous pouvez dire: Ce n'est pas notre intention. Je vous dis ce qui va arriver. Même si je ne veux pas vous imputer d'intentions, ce qui va arriver, avec vos comités nationaux, c'est qu'on va limiter la participation des centaines et des centaines de groupements, au Québec, qui sont en faveur de l'option fédéraliste parce qu'ils ne seront pas capables physiquement de s'organiser dans un comité. Chacun va avoir sa manière de s'exprimer, sa manière de s'organiser et vous dites: Non.

Je voudrais spécialement signaler la question des groupes ethniques, des groupes minoritaires. Vous allez certainement avoir un gros pourcentage de ces groupements qui ne pourront pas participer à votre référendum.

La question qu'on peut se poser, c'est: Pourquoi le gouvernement se laisse-t-il ouvert à cette accusation? Pourquoi limiter le droit d'association, un droit qui est sacré pour nous, un droit qui est sacré pour tout le Québec, pour tous les Canadiens et pour tous les citoyens? Pourquoi? Vous n'avez pas justifié cela. La question de limiter les dépenses, c'est un autre principe qui ne peut pas justifier le principe fondamental dans une démocratie de s'associer et d'exprimer notre point de vue.

Quand le député de Rosemont dit: On croit nous, à la liberté des plus forts...

M. Paquette: C'est vous!

M. Ciaccia: Que nous, de l'Opposition officielle, croyons à la liberté des plus forts, c'est un drôle de concept et cela m'inquiète quand vous parlez de cette façon. Quand il y en a plus d'un côté que d'un autre, cela veut dire que le pourcentage est plus fort. Est-ce qu'on va faire un handicap pour égaliser cela? Ceux qui prônent l'option fédéraliste sont plus nombreux que ceux qui prônent l'option séparatiste. D'après votre théorie, cela, c'est la liberté des plus forts. On doit brimer nos libertés, parce qu'il y en a plus pour nous autres. Je trouve cela un concept un peu difficile à digérer, que c'est le gouvernement qui va décider quelle sorte de liberté il va accorder à différents groupes. On n'aura pas une liberté pour tout le monde. Franchement, si c'est la philosophie de ce projet de loi, je la trouve totalement inacceptable.

Quant au Conseil du référendum, ici, le gouvernement devient juge et jury. Cela, c'est une autre question que le ministre n'a pas expliquée. Je demanderais des explications. C'est totalement inacceptable d'enlever les tribunaux et de créer un Conseil du référendum que le gouvernement va nommer. Pour tous les litiges possibles, toutes les difficultés possibles, ce ne sera pas aux tribunaux qu'on pourrait aller. Cela va être réglé, jugé et exécuté par le Conseil du référendum nommé par le gouvernement. Cela, c'est vraiment une attaque à notre système judiciaire. Cela, c'est quelque chose qui est absolument inacceptable.

Nous avons des institutions, les tribunaux. Ce sont des institutions qui ont une objectivité, une impartialité dans notre système. Si nous portons atteinte à ce principe, c'est toute notre société qui va en souffrir. Le gouvernement ne peut pas faire ce mélange. Il faut qu'il y ait la séparation de l'exécutif, la séparation du judiciaire, la séparation du législatif. Dans ce projet de loi, on ne voit pas cela.

La question qu'on pourrait poser au ministre, qu'on pourrait poser au gouvernement: Est-ce une admission, de la part du gouvernement qu'il y a tellement d'injustices dans ce projet de loi, tellement d'irrégularités et même tellement d'illégalités? Il y a peut-être des clauses illégales quant à la loi 50 sur les droits de la personne. Est-ce qu'il y a tellement d'illégalités que le gouvernement craigne de laisser les tribunaux décider des problè- mes légaux, décider des problèmes qu'un individu peut avoir? Le seul recours, dans notre société, M. le Président, que l'individu a, ce n'est pas au Parlement, ce n'est pas au gouvernement, c'est par les tribunaux. C'est cela qui fait l'équilibre dans notre société, c'est cela qui protège l'individu. Si le gouvernement a certaines décisions à prendre, des décisions politiques, il peut les prendre, mais un individu ne peut pas attendre quatre ans. Il ne peut pas attendre que le gouvernement soit battu aux élections. Il a des droits personnels, il a des droits individuels, et sa seule protection, c'est par l'entremise des tribunaux. Si vous lui enlevez cela, vous lui enlevez ses libertés, vous lui enlevez ses droits, et c'est cela que le conseil du référendum fait. C'est cela qui est inacceptable. Alors, quand on parle d'avoir un consensus, quand on parle d'avoir un référendum juste et équitable "you cannot stack the cards" et c'est cela que vous faites ici. "You are stacking the decks". Vous limitez la participation des groupes fédéraux, vous enlevez le recours des droits individuels pour ceux qui se sentent brimés. Naturellement, c'est un contrôle, mais l'aspect collectiviste, c'est votre philosophie collectiviste qui est démontrée dans ce projet de loi.

M. Dussault: Des attaques personnelles...

M. Ciaccia: On a accusé l'Opposition officielle de faire des attaques personnelles. Ce ne sont pas des attaques personnelles que je fais, je vous souligne des termes, dans ce projet de loi, qui sont contre les libertés des individus et qui permettent au gouvernement de manipuler, de diriger ce référendum. Naturellement, le moins de fédéralistes qui vont s'impliquer, qui vont pouvoir participer, plus cela va augmenter le pourcentage de ceux qui vont voter séparatiste. C'est clair, mais c'est quelque chose qu'on ne peut pas accepter.

La question de la limite des dépenses. Encore une fois, quand on dit qu'on veut confirmer le concept d'égalité, je me méfie toujours quand on veut me confirmer cela, parce qu'habituellement c'est l'inverse qu'on fait. On confirme l'illégalité sous prétexte d'être légal. Vous avez toute la machinerie gouvernementale. Qui va limiter vos dépenses? Les dossiers noirs des fonctionnaires, la publicité, la propagande qui se fait dans tous les ministères. Quand le ministre de l'Environnement passe un message pour l'environnement à l'effet que, si nous sommes de bons québécois, nous aurons un Québec sain dans un Québec souverain, est-ce que c'est la limite des dépenses? Vous ne trouvez pas que cela affecte le référendum et que cela dépasse le cadre de cette loi, mais vous le faites légalement. Et vous osez maintenant nous dire: On va limiter les dépenses pour le côté fédéraliste. Vous allez limiter les dépenses, pas de votre côté à vous.

Le budget de Radio-Québec de $22 millions qui est sous la juridiction du ministère des Communications, les politiques de Radio-Québec qui sont dirigées par le gouvernement, cela ne compte pas?

M. Charbonneau: Et Radio-Canada?

M. Ciaccia: Et la totalité, on parle d'un projet de loi au Québec.

Oui, parlons-en. On peut en parler. Si j'avais le temps, je vous en parlerais, de Radio-Canada.

M. Charbonneau: Faites-le.

M. Ciaccia: On ne veut pas dire que cela peut être de l'hypocrisie que d'essayer de limiter les dépenses sous le concept de légalité mais, d'autre part, le gouvernement a toute la liberté au monde pour faire toutes les dépenses qu'il veut, sous d'autres excuses.

M. le Président, les principes du projet de loi ici, tels que rédigés, affectent les droits fondamentaux des Québécois. Cela affecte nos droits d'association, cela affecte notre droit d'expression, cela affecte nos recours aux tribunaux. Qu'est-ce qu'il nous reste? C'est un projet de loi qui est restrictif et qui est répressif. Cela ouvre la porte à la manipulation, à la direction de la population dans la campagne référendaire.

Le gouvernement nous donne vraiment l'impression que cette loi, c'est le cheval de Troie pour le référendum. Même si la Commission des droits de la personne a soulevé certaines questions, vous ne pouvez pas justifier ce que vous avez inclus dans ce projet de loi.

Je voudrais seulement rappeler au gouvernement qu'il faut y penser aussi, il va falloir qu'on vive ensemble le lendemain du référendum. Si vous avez empêché la participation d'une certaine partie de la population, si le lendemain la population trouve qu'elle s'est fait avoir parce que, de la façon que cela a été organisé, elle n'a pas eu la chance, l'occasion ouvertement de s'exprimer, de s'organiser, que vont être les conséquences sociales? Ce n'est pas assez de dire: On va tout faire pour le gagner. Cela est l'impression que vous donnez. Vous voulez le gagner à tout prix; puis, même si vous ne pouvez pas le gagner à tout prix, vous voulez éliminer la participation d'assez de fédéralistes pour augmenter votre pourcentage. C'est cela l'impression que vous donnez ici pour pouvoir dire que ce n'est pas réglé clairement. Cela n'a pas été clairement réglé.

M. Dussault: Vous avez peur.

M. Ciaccia: II va falloir avoir un autre référendum. L'incertitude et les conflits possibles vont augmenter de plus en plus.

Le lendemain du référendum, il faut que tout le monde, des deux côtés, sente vraiment que cela a été équitable, qu'ils ont eu une juste chance, qu'ils ont tous eu les mêmes droits, que ceux qui ne sont pas du côté du gouvernement n'ont pas eu moins de droits que ceux du côté gouvernemental.

Je reviens aux comités nationaux, il y a un parti politique qui prône le séparatisme et cela est organisé...

M. Dussault: C'est quoi cela?

M. Ciaccia: ... c'est cela que... Alors vos 30 jours ici, peut-être qu'il n'y aura pas beaucoup de problème pour vous, parce que c'est déjà organisé. Vous l'avez votre comité national, d'accord. Vous avez une avance...

M. Charbonneau: Puis vous autres, là?

M. Ciaccia: Sur le côté fédéraliste, il y en a beaucoup de groupements différents. Ils n'ont pas ce comité national.

M. Charbonneau: Qu'est-ce qu'il fait, M. Cas-tonguay?

M. Ciaccia: Ils n'ont pas la machinerie gouvernementale...

M. Charbonneau: Ils ont la machinerie fédérale.

M. Ciaccia: ... quant à l'argent, quant aux droits de publicité.

M. le Président, on dirait que le ministre pense qu'il n'y a pas de tradition de liberté et de démocratie au Québec et qu'il peut se permettre de présenter un projet de loi de cette façon. Cela va être expliqué à la population. Je veux avoir un référendum le plus vite possible, mais je veux avoir les mêmes chances et le même droit d'expression que vous. Je n'en veux pas plus, mais je n'en veux pas moins. De la façon que c est rédigé, vous nous en donnez moins de ce côté-ci, parce que tout le contrôle est de vous, le timing' , la date, la question, les dépenses, la publicité, les délais. Que reste-t-il de ce côté-ci? Avez-vous pensé que c'est de même être équitable?

Je me répète, pensez au lendemain, parce qu'il n'y a rien de pire que quand une population réalise que vraiment on a pris avantage d'elle.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mont-Royal!

M. Ciaccia: En conclusion, M. le Président, je dirais que les principes qui sont à la base de notre système démocratique ne sont pas respectés. Nous sommes dans une société libre, nous devons demeurer dans une société libre. Par cette loi, telle quelle est rédigée, on porte atteinte à cette liberté. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): Merci, M. le Président, je cède mon droit de parole.

Le Président (M. Clair): M. le député de Verchères. (17 h 45)

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: Je serai bref car je crois que le ministre voudrait intervenir. Ce qui me frappe,

en écoutant particulièrement les gens de l'Opposition officielle, c'est qu'au départ on aurait pu penser qu'ils auraient été subtils dans leur façon d'aborder les attaques au sujet du référendum et de l'avenir constitutionnel du Québec. Plus cela va et plus on se rend compte que, finalement, ils n'ont en tête qu'un seul objectif. Toute leur stratégie, toutes leurs actions, toutes leurs paroles sont concentrées vers cet objectif, celui de discréditer avant coup le résultat du référendum, probablement parce qu'ils craignent ce résultat. Ce qui est important pour eux, c'est que déjà les Québécois soient convaincus que ce sera un référendum faussé au départ, que le vote majoritaire des Québécois ne sera pas significatif et que, juridiquement parlant, tant au Québec, au Canada qu'au niveau international, il n'aura aucune valeur, donc que personne ne sera tenu de s'y conformer, que personne ne sera tenu de respecter la volonté exprimée par ce référendum.

D'ailleurs, quand on entend le député de Mont-Royal utiliser les mots "manipuler", "diriger", on se rend bien compte que sa façon d'attaquer le projet de loi ne vise uniquement qu'à discréditer non pas le projet de loi lui-même, mais à discréditer le référendum auquel tout le monde pense.

M. Ciaccia: Je vous ai donné des exemples.

M. Charbonneau: Les exemples que vous nous avez donnés, on pourrait en reparler, comme on dit chez nous, étape par étape. Ce qu'il est important d'abord de dire bien clairement, c'est cette intention...

Une Voix: Un autre étapiste!

M. Charbonneau: Non, non, ce n'est pas le même genre d'étape. Cela dépend de quel Claude vous parlez. J'ai eu plusieurs maîtres à penser.

M. Grenier: Claude Castonguay?

M. Charbonneau: Donc, pour revenir au sujet qui nous occupe...

M. Roy: Trop de maîtres à penser finissent par égarer!

M. Charbonneau: Oui, mais parfois, quand on s'en rend compte, on en sort. Il y en a qui n'ont pas compris encore.

M. Roy: A la condition de s'en rendre compte. M. Charbonneau: Oui, mais cela se fait. M. Roy: Je m'excuse, M. le Président.

M. Charbonneau: Tout cela pour dire — ces remarques ne faisant qu'alléger la conversation — qu'il est important que les gens ne soient pas dupes de ce qui va se passer ici au cours des prochaines semaines. C'était beau d'entendre le député de Gatineau, je crois, dire qu'eux seraient prêts, éventuellement, à appuyer un projet de loi qui, par ailleurs, a été vertement dénoncé, démoli par son collègue le député de Mont-Royal qui serait prêt à l'appuyer si jamais il y avait une recommandation de la Commission des droits de la personne. C'est comme, finalement, si on oubliait une chose; c'est qu'il n'y a pas uniquement un petit groupe de privilégiés dans cette société qui a l'apanage de pouvoir se prononcer sur les droits de la personne. Ce n'est pas parce que quelques personnes ont été nommées par différents gouvernements — et je pense qu'elles ont fait l'unanimité des gens à l'Assemblée nationale — qu'elles sont les seules habilitées à se prononcer sur la valeur d'un projet de loi. Si c'était le cas, je me demande quelle signification on accorde à des législateurs dans une société.

Je vois le député de Mont-Royal qui se frotte les mains en se disant: Le député de Verchères vient de dire que ce n'est pas important, la commission. Ce n'est pas ce que j'ai dit. Ce que je dis, c'est qu'il n'y a pas uniquement eux qui peuvent se prononcer au Québec concernant les droits de la personne et les droits des Québécois.

M. Ciaccia: Qu'ils commencent par se prononcer, au moins.

M. Charbonneau: Ils se sont prononcés, mais vous voulez faire croire aux Québécois, à la population — c'est votre jeu — qu'ils ne se sont pas prononcés, alors qu'ils se sont prononcés. Vous auriez aimé qu'ils se prononcent en faveur de votre thèse, qu'ils le fassent plus clairement, qu'ils le fassent d'une façon tellement explicite que vous n'auriez pas eu à faire le travail que vous essayez de faire aujourd'hui. Vous auriez eu uniquement à vous cacher derrière la Commission des droits de la personne.

Pour revenir à ce que je disais, je pense qu'il y a une réalité. Il n'y a pas uniquement la commission, il y a des gens qui ont été élus démocratiquement, qui sont des législateurs et qui, eux aussi, parlent au nom de ta population du Québec et qui, probablement, autant que ces sages de la commission, peuvent, eux aussi, discuter des droits de la personne. C'est, d'ailleurs, eux qui, finalement et fondamentalement, votent les lois, qui même ont voté pour la création d'une telle commission. Alors, si les députés ne peuvent pas se prononcer et si les députés doivent attendre les opinions de d'autres avant de se prononcer sur la valeur d'un projet de loi, je pense qu'on fait fausse route.

Je pense que je terminerai sur cela, parce que c'est là qu'on voit finalement jusqu'où la bassesse peut aller quand on essaie d'imputer au gouvernement actuel des intentions collectivistes — on n'a pas osé utiliser le mot communiste, mais c'est ce que le député de Mont-Royal voulait dire — pour essayer de faire peur au monde...

M. Ciaccia): Question de règlement, M. le Président, article 96.

M. Charbonneau: II n'y a pas de question de règlement en commission parlementaire.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mont-Royal, sur une question de règlement.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, à la fin de l'intervention, à moins du consentement du député.

M. Ciaccia: A la fin de son intervention, j'aurais l'intention de...

Le Président (M. Clair): ... d'exercer votre droit en vertu de l'article 96? Cela va.

M. Charbonneau: Vous le ferez, monsieur.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est ce que j'ai dit: A moins du consentement du député.

M. Charbonneau: Ecoutez, s'il veut absolument rectifier.

Le Président (M. Clair): M. le député de Verchères, vous avez la parole.

M. Charbonneau: Merci, M. le Président. Je disais donc que le député de Mont-Royal, subtilement, comme c'est son habitude — je l'ai vu faire à d'autres commissions parlementaires, particulièrement à la commission parlementaire sur la loi 101 — souvent attaque indirectement, n'ose pas utiliser les vrais termes, mais passe les messages subtilement, en pensant que les gens vont le comprendre, mais en se disant: Je n'aurai pas l'odieux d'avoir utilisé certaines expressions qui me feront paraître comme un démagogue. Finalement, quand on parle d'esprit collectiviste, quand on qualifie le gouvernement de gens qui ont l'esprit collectiviste, je pense que ce que vous voulez dire, dites-le franchement, c'est qu'on est des communistes, des épouvantables communistes qui veulent brimer les libertés idividuelles, qui veulent restreindre le droit d'association, qui veulent réprimer...

M. Lavoie: J'ai dit que vous étiez d'extrême droite, au contraire. J'ai dit que votre loi est une loi d'extrême droite pour empêcher les gens de s'exprimer.

M. Charbonneau: il faudrait peut-être que vous vous entendiez, dans ce cas.

M. Paquette: Je pense qu'il n'y a pas beaucoup de collectivistes qui sont à l'extrême droite.

M. Charbonneau: J'ai eu une expérience récente avec les fédéralistes et je me rendais compte qu'ils avaient habituellement besoin de traîner leur dictionnaire. Il faudrait peut-être que vous commenciez par comprendre la signification des termes.

M. Alfred: Eux, ils sont d'extrême centre.

M. Paquette: Ils passent des lois d'extrême centre.

M. Charbonneau: On voit dans quelle attitude, subtilement, on essaie de créer un climat. On a essayé d'en créer un autour de la loi 101, pour...

M. Ciaccia: M. le Président, relativement à l'article 99.9 de notre règlement.

M. Charbonneau: Cela vous chicote de vous faire démasquer!

M. Ciaccia: Non. Parce que je vois le jeu du député de Verchères. Il va aller jusqu'à 18 heures et ne me donnera pas le droit de parole.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mont-Royal, vous soulevez une question de règlement?

M. Ciaccia: Oui, l'article 99, paragraphe 9.

Le Président (M. Clair): M. le député...

M. Burns: ... méchantes choses à votre sujet. Cela crève votre petit coeur! Cela vous fait de la grosse pé-peine!

Le Président (M. Clair): M. le député de Mont-Royal, dans la mesure où il s'agit... A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ciaccia: Je ne peux pas laisser...

M. Samson: On devrait partir une garderie... des prérequis.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mont-Royal, dans la mesure où vous invoquez l'article 99 paragraphe 9, il me semble que ce que vous avez effectivement et de façon efficace essayé de faire, c'est de soulever une question de privilège. Comme il n'y a pas de question de privilège en commission, je dois considérer votre question comme étant une question de règlement, et je profite immédiatement de l'occasion pour inviter le député de Verchères à être respectueux de l'article 99, paragraphe 9, sans pour autant considérer qu'il y a là matière à une question de règlement pour l'instant.

M. le député de Verchères, vous avez la parole.

M. Charbonneau: Merci, M. le Président. Je pense que j'étais dans mon droit de parlementaire et, dans ce sens, je ne pense pas avoir outrepassé les règlements de l'Assemblée nationale en tentant de démasquer finalement la stratégie de l'Opposition officielle qui veut répéter le coup raté de la loi 101, c'est-à-dire créer une espèce de climat d'agressivité à l'endroit du gouvernement pour tenter de discréditer non seulement le projet de loi lui-

même, non seulement le gouvernement, mais éventuellement un référendum qui portera sur l'avenir des Québécois.

M. Gratton: Le peuple.

M. Charbonneau: Le peuple oui. Vous avez peur des mots?

M. Gratton: On est en train de discréditer le peuple québécois.

M. Charbonneau: Non. C'est ce que vous essayez de faire...

Le Président (M. Clair): Messieurs, nous ne sommes pas...

M. Charbonneau: ... c'est de discréditer un référendum qui portera sur l'avenir d'un peuple, du vôtre, à moins que vous ne reniiez votre appartenance!

M. Gratton: Je m'excuse, mais...

M. Charbonneau: Donc, M. le Président, je pense...

M. Gratton: En guise de conclusion...

M. Lavoie: On peut ajourner!

M. Charbonneau: M. le Président, ce que je voulais dire en conclusion...

Une Voix: C'est le désir unanime.

M. Charbonneau: ... c'était que ce genre de stratégie, ce genre de bassesse auquel on a été habitué par la commission parlementaire sur la loi 101, les Québécois doivent en être avisés. Ils doivent être conscients de ce qui va se passer ici autour de cette table au cours des prochaines semaines. Ils ne doivent surtout pas être dupes d'une stratégie qui vise finalement un seul but, non pas améliorer un projet de loi, mais discréditer, avant coup, un référendum qu'on sait qu'on va perdre de toute façon.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mont-Royal, en vertu de l'article 96.

M. Ciaccia: Quand j'ai utilisé le mot "collectivisme", M. le Président, je n'ai attaqué personne individuellement. J'ai utilisé ce mot pour donner la philosophie que je voyais dans ce projet de loi. Je n'ai pas accusé le gouvernement d'être communiste. Pour l'information du député de Verchères, être collectiviste, ce n'est pas nécessairement être communiste. Je ne voudrais pas trop montrer votre ignorance.

M. Charbonneau: II nous faudrait peut-être prendre des cours de base aux sciences politiques?

M. Ciaccia: On peut être faciste et être collectiviste et avoir toutes sortes de philosophies politiques.

Une Voix: Est-ce qu'on peut être péquiste?

M. Ciaccia: J'ai même pris les mots de votre ministre d'Etat au développement culturel.

M. Charbonneau: Ce n'est pas vrai cela.

M. Ciaccia: ... l'approche collectiviste. C'était pour rétablir ces faits, M. le Président. Je ne voulais aucunement dire que c'était communiste.

Le Président (M. Clair): Je vous remercie d'avoir été bref, M. le député de Mont-Royal. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants au niveau des commentaires généraux?

M. Gratton: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: ... j'avais posé une question au ministre.

M. Burns: Je vais répondre largement ce soir à vous et à votre collègue de Laval, ainsi qu'aux autres députés de l'Opposition qui se sont exprimés. Je pense bien que je vais avoir besoin d'au moins 20 minutes. En tout cas, je vais essayer de réduire cela le plus possible. Il y a des choses importantes auxquelles je dois répondre. Je le ferai au retour à 20 heures.

M. Lavoie: C'est tout à fait normal. M. Burns: D'accord. Merci.

Le Président: M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: Est-ce qu'on va avoir la présence de messieurs les présidents des élections et du financement des partis avant qu'on ne commence l'article 1?

Le Président (M. Clair): C'est la question à laquelle...

M. Burns: C'est une des questions auxquelles j'ai l'intention de vous répondre ce soir. Si vous me le permettez, je le ferai à ce moment tout d'un bloc. Cela me permettrait également de vous donner les raisons de mon attitude là-dessus. D'accord?

Le Président (M. Clair): La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

(Fin de la séance à 17 h 58)

Reprise de la séance à 20 h 15

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente de la présidence du conseil et de la constitution est réunie pour continuer l'étude article par article du projet de loi no 92. Au moment où nous avons suspendu nos travaux ce soir, à 18 heures, nous en étions rendus à la réplique du ministre d'Etat à la réforme électorale et parlementaire, au niveau des commentaires généraux. M. le ministre.

M. Robert Burns

M. Burns: M. le Président, je n'ai pas l'intention d'utiliser tout le temps qui m'est alloué, qui est un temps illimité, me dit-on; je n'ai pas l'intention de me faire un "filibuster ' à moi-même et au parti ministériel. Cependant, j'ai l'obligation — il m'apparaît — de relever un certain nombre de choses sur lesquelles je ne suis pas d'accord dans ce qui a été dit par les députés, plus particulièrement les députés de l'Opposition officielle cet après-midi.

Je tiens quand même à les remercier tous, y compris les députés du parti ministériel, pour un certain nombre de choses qu'ils nous ont dites. Je remercie également le "whip" de l'Union Nationale, le député de Mégantic-Compton, pour l'aspect positif qu'il a voulu donner à ce débat et je lui dis tout de suite que je partage entièrement ses vues. J'ai regretté, je vous le dis tout de suite... Je fais le parallèle — mais sans vouloir vous mettre en opposition — entre les deux types d'intervention: celui du député de Laval, qui parlait au nom de son parti, et celui du député de Mégantic-Compton, en me disant que l'approche du député de Mégantic-Compton m'apparaissait beaucoup plus conforme à la façon dont nous, du côté ministériel, voulons aborder l'étude de ce projet de loi.

Au départ, je vous le dis, qu'on veuille m'ac-cuser de faire de la politicaillerie, de la partisane-rie, d'être un ministre politisé, de confondre certaines décisions que j'ai à prendre qui sont, elles, partisanes, j'en conviens, comme leader parlementaire du gouvernement, et celles que j'ai à prendre comme ministre d'Etat à la réforme électorale, on a beau vouloir jouer ce jeu, je pense que depuis le début de l'exercice de mon mandat dans ces deux fonctions, j'ai tenté moi-même d'avoir une double personnalité.

D'ailleurs, le ministre d'Etat au développement culturel me surveille régulièrement pour voir si mon état de santé mentale va très bien là-dessus et je me soumets régulièrement à son auscultation psychiatrique au cas où j'aurais un phénomène très grave qui s'installerait dans ce phénomène de double personnalité. Mais je tiens à vous assurer que mon approche à l'étude d'un projet de loi comme celui-ci est tout à fait similaire à celle que j'avais tenté, je pense, de mettre de lavant quand nous avons étudié le projet de loi no 2 sur le financement des partis politiques, c'est-à-dire une approche qui se situe au-delà de toute partisanerie politique. Qu'on veuille voir — et cela, c est le droit du député de Laval d'essayer de fabuler, lui aussi, à ce sujet — dans mes attitudes un scénario qui est savamment monté, machiavéliquement monté pour essayer de vraiment prendre par surprise la population du Québec dans un éventuel référendum, de vouloir méchamment tromper la population, je pense que les faits ne supportent pas une telle thèse.

Je vous avoue que j'ai personnellement été déçu de cette réaction de la part du député de Laval, parce que je ne crois pas que quelque geste que j'ai pu poser pouvait justifier cela. Je passe vraiment par-dessus l'accusation de menteur qu on m'a adressée et je vous ferai remarquer M. le Président, que je ne l'ai même pas demandé de faire les rectifications voulues en vertu de notre règlement, parce que c'est le genre d'accusations que je ne prends plus au sérieux lorsque je pense que le dossier est éloquent par lui-même.

J'ai effectivement — parce que je suis obligé d'en faire un élément de ma réplique — tenté de m'éloigner le plus possible, pendant I'adoption de ce projet de loi, des aspects partisans, c est-à-dire de ce qui pouvait à l'intérieur de mon propre parti... Comme je le disais cet après-midi, je n'ai pas acquis une virginité politique à partir du moment où je suis devenu ministre d'Etat à la réforme électorale, pas plus, d ailleurs, que le président de I'Assemblée nationale — et le député de Laval en sait quelque chose — n acquiert une virginité partisane à partir du moment où il est nommé à ce poste-là. Il est quand même un député qui a été élu sous une bannière très particulière, et dans mon cas, sous la bannière — et j'en suis fier — du parti Québécois. Mais, je pense que le parrain d'un projet de loi comme celui-ci doit se tenir autant que possible, autant que les circonstances le permettent, loin d une certaine partisanerie que je qualifierais d interne.

J'ai fait tous les efforts, en accord, soit dit en passant, avec le Parti dont je suis membre et en accord aussi avec le Conseil des ministres, pour ne pas mêler les deux choses. J'ai voulu, depuis le début, garder ce débat en dehors de toute émotivi-té politique. J'ai senti, dans les remarques, entre autres, des députés de l'Opposition officielle, une certaine incrédulité relativement à ce que je vais dire, mais j'ai senti qu'il était nécessaire que le ministre qui parraine un tel projet de loi. tout en disant qu'il est membre d'un Parti — et quand même j'essaierais de vous dire le contraire, vous ne me croiriez pas et je le comprends — j'ai senti qu il était nécessaire que je me tienne loin des débats à ce stade-ci.

C'est très important qu à ce stade-ci il y ait quelqu un qui essaie de juger ce problème, comme ministre responsable, et avec ses collaborateurs et avec les membres de I'Opposition qui voudront bien — le député de Mégantic-Compton nous a offert cette collaboration et, malgré leur absence, je reconnais que le député de Rouyn-Noranda et le député de Beauce-Sud nous l'ont offerte. — garder cela au-dessus de toute partisanerie politique.

Personnellement, je souhaite l'adoption de ce projet de loi le plus rapidement possible. Ce devrait être un souhait qui satisferait, au point de vue idéal, l'Opposition officielle, elle qui nous presse constamment de soumettre le plus rapidement possible à la population une question ou des questions — mais je pense que, dans leur esprit, on parle d une question, si j'ai bien compris le député de Laval — pour, comme on dit dans le langage de tous les jours, "clairer " l'atmosphère, pour enlever une certaine incertitude relativement à ce problème.

Je vous cite là-dessus, parce que le député de Laval, M. le Président, cela n'a peut-être pas été enregistré au journal des Débats, a dit: Une incertitude, et il a ajouté: qui existe. Je dis non, je vous cite à ce sujet, parce que je ne suis pas convaincu que cette incertitude existe.

Je suis convaincu, bien au contraire — c'est peut-être la seule touche partisane que je vais mettre dans ce débat-ci et je me restreins vraiment — que les gens ont hâte d'avoir un projet de loi qui sera adopté par l'Assemblée nationale, qui leur donnera le cadre de l'exercice de cette participation de la population à la gouverne de l'Etat. C'est l'un des buts et c'est entre autres ce qu'a reconnu, soit dit en passant — et le député de Gatineau en a fait longuement état cet après-midi — la Commission des droits de la personne dans ses réactions au livre blanc. Elle n'a pas eu, jusqu'à maintenant, de réaction au projet de loi; là-dessus, on verra. Je suis en train de tenter d'obtenir, de façon plus précise, pour satisfaire et le député de Laval et le député de Gatineau, qui ont beaucoup insisté sur ce plan...

Puisque le député de Laval peut se permettre de communiquer avec la Commission des droits de la personne, je pense bien qu'on ne me blâmera pas de communiquer avec la Commission des droits de la personne également. Mais pendant qu'on est sur ce sujet, jusqu'à maintenant, un reproche m'a été fait par les deux députés que je viens de mentionner, soit d'avoir refusé de faire comparaître ou de forcer à comparaître la Commission des droits de la personne. Je connais très bien les attitudes de la Commission des droits de la personne devant l'adoption de projets de loi, pour une raison bien simple; c'est arrivé à d'autres occasions que j'ai été obligé de communiquer soit avec Me Hurtubise, qui en est le président, ou encore à l'époque avec M. Champagne, qui était le vice-président, pour me faire dire à chaque fois que la Commission des droits de la personne ne voulait pas intervenir dans le processus d'adoption d'une loi, que la Commission des droits de la personne avait — et c'est également mon opinion —suffisamment d'indépendance vis-à-vis du Parlement pour pouvoir, proprio motu, s'adresser au Parlement et lui dire qu'effectivement il y avait des choses, dans tel projet de loi, qui semblaient à ses yeux contrevenir à la Charte des droits et libertés de la personne.

C'est dans ce sens que l'autre jour j'ai dit que je n'avais pas l'intention de faire de démarches précises auprès de la Commission des droits de la personne pour les faire venir ici, en commission, parce que je suis à peu près à l'avance assuré de leur réponse. Si je me trompais là-dessus, je suis convaincu également que la Commission des droits de la personne, qui va entendre ces paroles via le journal des Débats, dirait: Non, M. le ministre, vous avez complètement tort relativement à ce que vous dites, nous n'intervenons pas parce que vous ne nous avez pas invités. Si tel était le cas, je vous dis tout de suite que je n'aurais aucune objection à la faire entendre. C'est justement parce que je considère cette commission trop importante pour la mêler, comme elle le dit elle-même, au processus d'élaboration d'un projet de loi et, surtout, d'élaboration de grandes politiques gouvernementales. Cette commission — si je me rappelle bien lorsque je siégeais sur les fauteuils d'en face, lorsque nous avons adopté le projet de loi no 50 — était une commission que l'on voulait mettre à l'abri de toute participation partisane dans l'adoption des projets de loi.

Ce qui me réchauffe le coeur, ce sont justement ces fameuses conclusions, que je ne relirai pas, mais que le député de Gatineau nous a lues, cet après-midi. Lorsque la Commission des droits de la personne nous dit qu'elle souscrit aux objectifs du livre blanc et que ce livre blanc était déjà, aux yeux de beaucoup de gens, très imparfait, il m'apparaît... Je reconnais qu'il est imparfait, c'est d'ailleurs normal qu'un livre blanc soit moins parfait qu'un projet de loi, c'est pour cela qu'on fait un livre blanc, pour améliorer l'éventuel projet de loi.

Il y a même un personnage que nos amis d'en face connaissent très bien qui, lui, a reconnu de nombreuses améliorations dans le projet de loi par rapport au livre blanc, il s'appelle Claude Ryan. Je ne sais pas si le nom sonne une cloche, je ne sais pas si cela vous dit quelque chose, mais M. Claude Ryan, le 29 décembre dernier...

M. Ciaccia: Etiez-vous bouffon, vous, avant de devenir député?

M. Vaillancourt (Jonquière): A l'ordre! M. le Président!

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs! M. le ministre.

M. Burns: Non, mais j'ai l'impression que vous l'êtes devenu depuis que vous êtes tombé dans l'Opposition.

De toute façon je peux vous dire ceci, c'est que cela vaudrait la peine... Je livre cet éditorial du 29 décembre, donc le projet de loi avait été déposé à ce moment, à l'Assemblée nationale. Dans une de ses épîtres, M. Ryan...

M. Lavoie: M. le Président, est-ce que je pourrais demander au leader... Je lui donnerais le consentement pour que son droit de parole soit prolongé, pour qu'il lise l'éditorial au complet au lieu de le disséquer en parties et prendre uniquement les phrases qui font son affaire. (20 h 30)

M. Burns: Non, non, non.

M. Lavoie: Je donne mon consentement pour qu'il lise l'éditorial au complet, s'il veut être honnête et transparent.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, une question de règlement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière, sur une question de règlement.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je pense que, tout d'abord, le ministre d'Etat à la réforme électorale et parlementaire a un droit de parole illimité.

M. Lavoie: Qu'il lise l'éditorial au complet.

M. Vaillancourt (Jonquière): Le député de Maisonneuve et ministre n'a pas besoin du consentement unanime pour exercer son droit de parole ici, car le règlement justement lui permet ce droit de parole qu'il exercera selon sa bonne volonté et son bon vouloir.

M. Lavoie: Est-vous consentant à lire l'éditorial au complet...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre!

M. Burns: Non.

M. Lavoie: ... pour les fins du journal des Débats?

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît, messieurs!

M. Burns: Si vous voulez, je vais le déposer.

M. Lavoie: Non, non. Lisez-le au complet.

M. Burns: Alors, je vais le déposer.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lavoie: Prenez uniquement ce qui fait votre affaire.

M. Burns: Non, non, parce que l'éditorial est fait en trois parties. Donc, on va faire une petite dissertation, si vous voulez. Il est fait en trois parties. La première partie de l'éditorial du 29 décembre est une introduction qui n'est pas si bête et qui commence par les mots: "Fidèle à son intention de faire connaître le plus tôt possible ses choix majeurs en ce qui touche l'instauration au Québec de l'institution référendaire, le gouvernement Lévesque, par l'entremise de M. Robert Burns, ministre d'Etat, etc., a déposé le 21 décembre, etc.". Déjà, c'est très gentil comme ton et je l'apprécie de la part de M. Ryan qui, de toute façon, semble me vouer de ce temps-ci une amitié que je ne connaissais pas. Il me désigne à des endroits où je n'ai même pas demandé à être nommé, mais, en tout cas, c'est son droit.

Une Voix: II veut même être député de ton comté, Robert.

M. Burns: Oui. C'est de la gentillesse.

M. Vaillancourt (Jonquière): De toute façon, c'est la seule chance qu'il aurait d'être élu dans Maisonneuve si M. Burns démissionnait.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! Messieurs, il ne s'agit pas d'un débat; il s'agit actuellement de la réplique du ministre aux commentaires généraux.

Une Voix: Ce n'est même pas un débat, c'est une jasette'.

M. Burns: Dans une deuxième partie, M. le Président...

Le Président (M. Clair): Je vous prierais de respecter son droit de parole.

M. Burns: ... c'est celle-là qui m'intéresse le plus parce que c'est le corps de l'article, il s'agit d'une comparaison qui est faite par M. Ryan. Je suis prêt à lire cette deuxième partie intégralement. Quant à la troisième partie, je n'ai pas d objection à la lire non plus, mais cela va être long inutilement.

Je suis prêt à répondre paragraphe par paragraphe parce que ce sont les réticences que M. Ryan — je vous le dis — a relativement au projet de loi. A ce moment-là, je devrai y répondre paragraphe par paragraphe.

M. Lavoie: On vous donnera le temps voulu.

M. Burns: De toute façon, je suis convaincu qu'au cours de l'étude article par article vous aurez l'occasion justement de soulever ces éléments. Mais je veux tout simplement, dans cette deuxième partie, contredire de façon très sérieuse, avec une autorité qui, maintenant, est une autorité non seulement journalistique, mais politique et même, je dirais, partisane, politisée, méchante.

Je veux tout simplement dire que, ce matin, le député de Laval me disait que j'avais présenté un livre blanc qui était une feuille de chou; que cette feuille de chou, je l'ai transformée. J'interprète, évidemment; ne vous servez pas de l'article 96 là-dessus. Vous n'avez pas dit cela textuellement mais ce que j'ai compris de vos arguments, c'est que j'ai présenté un livre blanc qui était une feuille de chou et tout à coup cette feuille de chou s'est retrouvée sous forme de projet de loi qui s'appelle 92.

Or, justement le chef du Parti libéral, le jeudi du 29 décembre, dans son épître dans le Devoir disait ceci. Cela vaut la peine qu'on le lise au

complet. C'est bizarre, mais là-dessus j'admire M. Ryan parce qu'il est en avance sur ses ouailles. Il a réussi à trouver sept modifications importantes qui valaient la peine de prendre une demi-page de son éditorial. En fait, c'est une colonne et quart sur trois colonnes. Connaissant l'importance que M. Ryan accordait à ses travaux dans ce Devoir, je pense bien que c'était quelque chose d'assez important pour lui.

Dans cette deuxième partie où il touche aux changements qui apparaissent dans le projet de loi no 92 par rapport au livre blanc, on peut lire ceci. Cela vaut la peine de le citer intégralement. Je m'excuse, cela va être un peu long. Qu'est-ce que vous voulez, c'est une colonne et quart. "Si on compare le projet de loi no 92 à ce que l'on connaissait déjà des intentions du gouvernement, le nouveau texte gouvernemental apporte nombre d'améliorations et de précisions utiles. Voici les principales: Premièrement, des bruits avaient circulé, ces derniers mois, voulant que le gouvernement, pour les fins du référendum, abaisse l'âge du vote de 18 ans à 16 ans. Ce projet semblait naturellement dangereux sinon pervers. Heureusement, il sera vite dissipé en fumée. Le gouvernement s'en tient, en effet, à la limite de 18 ans. Il fait, en cela, oeuvre de bon sens, voire de simple justice". Ici je ne cite plus M. Ryan. Je dis tout simplement qu'en commission parlementaire j'ai ouvertement et clairement résisté à toutes les possibilités de me convaincre que nous devions, dans le projet de loi, modifier les règles du jeu pour un référendum. C'est la philosophie qui est derrière le projet de loi no 92. C'est celle que j'avais exprimée à l'époque, c'est-à-dire de dire que nous avons des règles électorales et cela vaut également pour le contrôle des dépenses. Cela existe, le contrôle des dépenses en matière électorale. Nous avons résisté à cela comme à celui qui nous était suggéré relativement à l'abaissement de l'âge quant au droit de vote. Cela aurait été quelque chose auquel on aurait pu penser. Oui, il y a des gens sérieux, et je ne considère pas que les gens qui sont venus nous suggérer cela en commission parlementaire étaient des gens qui n'avaient pas la capacité de nous faire des recommandations sérieuses. La preuve, c'est que, dans d'autres cas, ces mêmes personnes et ces mêmes groupements nous ont fait des suggestions que nous avons suivies.

Deuxièmement — je continue la citation — on avait demandé que soient levées à l'occasion d'un référendum les interdictions qui, à l'occasion des élections régulières, pèsent sur certaines catégories de citoyens, en particulier sur les magistrats, les procureurs permanents de la couronne, le Protecteur du citoyen et les détenus. Le gouvernement a tenu compte de ce voeu. Un autre changement qu'on a fait par rapport au livre blanc.

Troisièmement, dans le livre blanc d'août dernier, il n'était pas clairement garanti que toute question susceptible — c'est celle qui va faire le plus mal, je pense, au genre d'opposition que je reçois depuis ce matin et même en deuxième lecture de la part de l'Opposition; cela vaut la peine que je le lise tout d'un trait parce que cela se comprend dans son ensemble, ce paragraphe, et c'est celui, je vais vous le dire tout de suite, qui me plaît le plus dans son éditorial.

Dans le livre blanc d'août dernier, il n'était pas clairement garanti que toute question susceptible d'être soumise au peuple à l'occasion d'un référendum serait d'abord présentée pour approbation à l'Assemblée nationale. On pouvait craindre que, par le subterfuge d'une loi-cadre, le gouvernement cherche à se dispenser d'une telle disposition, d'une telle obligation. Le projet de loi no 92 dissipe cette ambiguïté. En garantissant que toute question sera soumise au préalable à l'Assemblée nationale, il ne donne certes pas satisfaction à tous ceux qui souhaitent que la question relative au référendum sur l'avenir constitutionnel doive être obligatoirement approuvée par au moins deux tiers des députés. Attention, le bout intéressant s'en vient! Il assure néanmoins le droit de regard des députés sur le libellé de la question et, dit M. Ryan, il dispose du même coup de maintes objections que l'on pouvait formuler à l'encontre du principe même d'une loi-cadre sur les consultations populaires.

En tout cas, je trouve que M. Ryan, là-dessus, était tout à fait au rythme et désireux d'améliorer la législation du Québec; il a vu qu'une loi de cette nature ne devait pas, à chaque fois qu'un gouvernement voulait tenir un référendum, nécessairement passer par les mêmes étapes qu'actuellement. Moi, je dis: Qu'on prenne tout le temps voulu pour adopter un tel projet de loi, bravo! Si cela prend un mois, cela prendra un mois. Si cela prend six mois, cela prendra six mois. Je vous dis que M. Ryan, là-dessus, et moi, on partage le même avis. Nous croyons clairement et sincèrement...

M. Lavoie: M. le Président, je voudrais m'excuser auprès du ministre, j'aurais une question de règlement.

M. Burns: Non, je vais faire comme vous ce matin.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Laval, sur une question de règlement.

M. Lavoie: Cela ne vous dérange pas trop que je soulève une question de règlement?

M. Vaillancourt (Jonquière): Soulevez-la! Une Voix: Question de règlement.

M. Lavoie: Si je comprends bien, le ministre exerce actuellement un droit de réplique de portée générale sur les propos qui ont ou qui auraient été tenus par les différents députés de cette commission depuis ce matin. Il y a une question de pertinence du débat également.

M. Burns: Ce n est pas pertinent ce que votre chef dit?

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lavoie: Je vais vous interrompre dans vos clowneries si vous voulez.

M. Vaillancourt (Jonquière): Sur la question de règlement.

M. Lavoie: Je vais m'adresser à vous M. le Président.

Le Président (M. Clair): Effectivement, c est ce qu'il y a de mieux à faire.

M. Burns: Arrêtez donc d'être suffisant...

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Lavoie: C'est très intéressant cet éditorial de M. Ryan, d'ailleurs, mais je voudrais vous souligner — c est à vous de trancher la question — ce que cite le député de Maisonneuve, le ministre responsable du projet de loi. Premièrement — je l'ai laissé aller, d ailleurs, j'ai une copie de ce texte — sur le vote de 18 à 16 ans, c'était une discussion qui avait eu lieu en commission parlementaire lors de l'étude du livre blanc, l'au-tomne dernier, et cela n'a été soulevé par aucun député de cette commission depuis ce matin.

Le deuxième point: droit de vote qu on pourrait donner à certaines catégories de citoyens, les magistrats, les procureurs permanents de la couronne, le Protecteur du citoyen. A ma connaissance, je suis ici depuis ce matin, cela n'a été soulevé non plus par aucun député, cela a fait l'objet de discussions en commission parlementaire, lors de l'étude du livre blanc.

J'ai laissé aller le ministre également sur le troisième point, sur la question qu'il y aurait approbation de I'Assemblée. Cela n'a été soulevé non plus par aucun député et je me demande comment cela peut faire lobjet d une réplique du ministre si I'on veut sauver le temps de cette commission. Cela a déjà fait l'objet de discussions très détaillées en commission parlementaire I'année dernière, après le livre blanc.

J'anticipe maintenant sur le quatrième paragraphe où il est question, on aurait pu craindre... Laissez-moi terminer ma question de règlement, voulez-vous?

M. Vaillancourt (Jonquière): On n'est pas rendu à quatre encore.

M. Lavoie: On ne pourrait avoir de référendum en même temps qu une élection, cest le quatrième point de l'article de M. Ryan. Il n'en a été question par aucun député non plus.

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui.

M. Lavoie: D ailleurs, la loi prévoit maintenant qu'il ne peut pas y avoir de référendum en même temps qu'une élection.

M. Burns: II y avait même des doutes là-dessus.

M. Lavoie: Cinquièmement, on était inquiet du bilinguisme du bulletin. Cela n'a été soulevé par aucun député. Cela a fait I'objet de discussions en commission parlementaire lors de l'étude du livre blanc.

Sixièmement, les délais qu'il faut observer avant la tenue du référendum, cela non plus n'a été soulevé par aucun député. Septièmement, le décompte des voix. Encore là, cela a fait I'objet de l'étude en commission parlementaire, mais l'année dernière, et je ne vois pas la pertinence du débat aujourd'hui ni pourquoi cette réplique dans le vide de la part du ministre. M. le Président, je vous demanderais de statuer, c'est vous qui avez la haute décision. Le ministre s'il veut nous répondre, qu'il nous réponde donc sur les points que nous avons soulevés, ce matin: les droits fondamentaux des citoyens de réunion, d'opinion, d association, les limites de dépenses...

M. Burns: Oui. on s'en vient à cela. C'est dans mon introduction.

M. Lavoie: Autrement le ministre va parler pendant deux heures... C'est à vous de statuer, M. le Président.

M. Vaillancourt (Jonquière): Sur la question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! Si c est sur la même question de règlement, M. le député de Jonquière, je suis en mesure d en disposer immédiatement.

M. Vaillancourt (Jonquière): Mais j'aimerais quand même, M. le Président, très brièvement, exercer un droit de parole...

Le Président (M. Clair): Si vous insistez, étant donné que le président ne peut refuser à être éclairé, allez-y.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... tout d'abord, M. le Président, pour constater que les propos du ministre d Etat à la réforme électorale et parlementaire font énormément mal à l'Opposition officielle...

M. Lavoie: Parlez de règlement. Vous n avez pas le droit de soulever le débat dans une question de règlement.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lavoie: C'est un président de commission, cela!

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière, sur la question de règlement.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... je pense que, comme je le disais, les propos du ministre doivent énormément faire mal à l'Opposition officielle pour...

M. Lavoie: C'est hors du sujet, M. le Président.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... soulever une question de règlement aussi mal fondée. M. le Président, vous vous rappellerez sans doute que ce matin même le député de Laval a parlé du livre blanc, qu'il a parlé de la loi 92 et qu en ce sens, je pense, il est extrêmement important et pertinent que le ministre fasse part à cette commission parlementaire des améliorations importantes et profondes que le gouvernement a apportées à la loi 92 par rapport au livre blanc. D'autre part, M. le Président, et cela est le plus important, le député de Laval a employé ce matin une expression très grave. Il a employé le mot "scénario ". Je pense qu'il est du devoir du ministre d'Etat à la réforme électorale et parlementaire de démontrer que non seulement ce scénario n'existait pas dans le livre blanc, mais, encore plus, que le projet de loi 92, selon le chef actuel même du Parti libéral, a été considérablement amélioré. (20 h 45)

M. le Président, je pense que votre décision, de toute façon, était prête à être rendue, devant une si faible argumentation du député de Laval, mais j'aimais quand même dire et constater tout le mal que ces propos faisaient à l'Opposition officielle.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs! Pour disposer de la question de règlement, il m'apparaît simplement que, pour déterminer la pertinence des propos du ministre dans ce cas-ci, on doit appliquer les mêmes règles que pour déterminer la pertinence des propos des autres membres de cette commission par rapport au sujet en cause. Quand un député de l'Opposition ou un député ministériel exerce son droit de parole au niveau des commentaires généraux après que le ministre a pris la parole, ce député n'est absolument pas limité, quant à la pertinence du débat, à s'en tenir exactement à l'aspect du sujet qui a été traité par l'intervenant précédent. Sans quoi, on parlerait sans cesse et continuellement de la même chose.

La pertinence du débat m'apparaît devoir s'interpréter de façon intrinsèque au niveau de l'intervention en soi et, ne serait-ce qu'à la lecture même du document qui est faite par le ministre à ce moment-ci, il m'apparaît qu'effectivement c'est pertinent.

D'autre part, en ce qui concerne la durée du droit de parole, encore là, l'article 160, alinéa 2 de notre règlement indique qu'au niveau de la deu- xième lecture d'un projet de loi lors de l'étude article par article, la restriction quant aux 20 minutes "ne s'applique pas au proposeur du projet de loi, ni au ministre qui propose l'adoption de ses crédits".

En terminant, je vous indiquerai, sans aucune méchanceté à l'endroit d'aucun des intervenants, qu'il n'appartient pas au président de décider de l'intelligence des propos qui sont tenus, mais de la pertinence.

M. Lavoie: J'ai bien remarqué ce que vous venez de dire.

Le Président (M. Clair): Dans ce sens...

M. Lavoie: Est-ce que je peux soulever une question de privilège pour le ministre?

Le Président (M. Clair): M. le député de Laval, je suis en train de rendre ma décision et, en même temps, je voudrais qu'elle soit indicative...

Une Voix: Le député de Verchères va vouloir parler.

Le Président (M. Clair): ... pour la poursuite de ces travaux. Le président a à décider de la pertinence des propos qui sont tenus en soi. Ma décision sur cette question de règlement est de donner le droit de parole au ministre qui peut continuer son intervention, dans le même sens. M. le ministre.

M. Burns: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, à l'ordre!

M. Burns: M. le Président, je m'excuse. Je ne veux pas perturber les travaux de la commission, loin de là. Je pensais que, entre autres, les membres du Parti libéral seraient très heureux que j'offre peut-être la seule occasion, d'ici les prochaines élections générales, à M. Ryan de s'inscrire au journal des Débats, mais, apparemment, cela ne leur plaît pas. Cela me ferait plaisir, je vous l'avoue, de voir M. Ryan venir...

M. Paquette: Terminer sa carrière.

M. Burns: ... terminer sa carrière politique dans le comté de Maisonneuve. Cela me ferait plaisir. Je pensais vous rendre service là-dessus, mais si cela ne vous rend pas service...

Il reste quand même, M. le Président, que par acquit de conscience, je vais terminer la lecture; ce n'est pas tellement long. M. le Président, vous avez rendu votre décision et je vous remercie de me permettre de continuer. C'est uniquement, dans l'ensemble, pour contredire une des affirmations du député de Laval selon laquelle on n'avait rien changé entre le livre blanc et le bill 92; on avait tout simplement copié la loi 92. Je pense qu'un éminent membre de son Parti prétend le

contraire, du moins le prétendait le 29 décembre dernier.

Je vais terminer en disant: "Et il dispose — c'est très important, c'est cette partie qui m'intéresse — du même coup (ce projet de loi) de maintes objections qu'on pouvait formuler à l'en- contre du principe même d'une loi-cadre sur les consultations populaires".

Je ne sais pas si la politique du Parti libéral a changé là-dessus au cours de la fin de semaine ou depuis le 29 décembre ou depuis le congrès au leadership du Parti libéral, mais je n'ai pas compris que cette dernière phrase qui apparaissait dans l'éditorial de M. Ryan était présente dans les remarques du député de Laval ce matin.

En quatrième lieu, M. Ryan continue en disant: "On avait pu craindre que le gouvernement ne succombe à la tentation de faire coïncider la prochaine élection générale et le référendum sur l'avenir constitutionnel, créant ainsi une dangereuse confusion susceptible de fausser tout autant le résultat du référendum que celui de l'élection. Ici encore, l'objection est levée par le texte gouvernemental, toute coïncidence entre la date d'une élection et celle d'un référendum étant interdite dans le projet no 92".

Cinquièmement, on s'était inquiété de la langue, etc. Je passe rapidement parce que, déjà, le député de Laval a reconnu que nous avions fait des améliorations très importantes. D'ailleurs, au moins là-dessus, il suit son chef qui dit: "Mais le projet 92 dissipe ces appréhensions en prescrivant que le texte de toute question référendaire devra être présenté en français et en anglais ainsi que le veut d'ailleurs le réalisme le plus élémentaire". J'ajouterais qu'on est même allé aussi loin que de dire que cela pourrait être dans des langues d'autochtones, dans des milieux où il n'y a ni d'anglais ni de français de parlé. Cela va loin, c'est peut-être une des premières lois où on l'inscrit carrément, ce droit-là.

M. Lavoie: II y a le pays de Galles où c'était en gaélique.

M. Burns: Je dis nous, au Québec, c'est une des premières fois où cela existe.

M. Lavoie: C'est la première fois qu'il y a un référendum au Québec.

M. Burns: Après cela, on pourra nous faire tout un plat sur ces gens, du côté ministériel, qui veulent brimer les droits des gens, qui veulent "maganer" ce monde-là au Québec, ce n'est pas possible! Je n'ai jamais vu de gouvernement précédent aller aussi loin là-dessus, surtout après l'adoption d'un projet de loi no 101. On faisait référence à cela ce matin, comme étant une de ces méchantes choses que ce gouvernement-là avait commises durant son mandat. Après avoir entendu cela, je vous dis que ce matin je me disais: C'est incroyable! Je me demande sérieusement si le député de Laval a véritablement lu le projet de loi no 92.

M. Lavoie: Je n'ai jamais mentionné la loi 101. Le Président (M. Clair): A l'ordre, à l'ordre!

M. Burns: "En sixième lieu, au chapitre des délais qu'il faudra observer avant la tenue d'un référendum, plusieurs assouplissements — ce ne sont pas mes paroles, c'est toujours M. Ryan qui parle — caractérisent le dernier texte gouvernemental. Les députés disposeront de 5 heures de plus, etc." Je vous fais grâce du reste. "La limite minimum de 28 jours paraît trop serrée, nous dit-il, il faudrait l'allonger; par rapport au livre blanc, il y a néanmoins amélioration." Enfin, "septièmement, le décompte des voix suivra le même modèle".

M. Lavoie: Vous en avez sauté un bout. M. Burns: Je peux tout lire, si vous voulez.

M. Lavoie: Lisez-le, on a tout le temps qu'il faut.

M. Burns: Oui, surtout si mon temps est illimité. Je relis ce sixième paragraphe au complet. "Au chapitre des délais qu'il faudra observer avant la tenue d'un référendum, plusieurs assouplissements caractérisent le dernier texte gouvernemental". Le bout que j'ai sauté, c'est le texte technique que tout le monde connaît. Je pensais que vous le connaissiez, je pensais que vous aviez lu la loi avant. "Les députés disposeront d'abord de 5 heures de plus, 30 au lieu de 25. pour l'étude de la question devant être soumise aux électeurs. Ensuite, il devra s'écouler un délai de 20 jours entre l'approbation parlementaire du texte de la question et l'émission des brefs sur le référendum". Tout cela est dans la loi. "Enfin, entre l'émission des brefs et la tenue du référendum, il faudra un nouveau délai pouvant aller de 28 à 60 jours". Tout cela est dans la loi et j'avais repris en disant: "La limite minimum de 28 jours paraît trop serrée". C'est bien sûr, je l'avais cité. "Mais il faudrait l'allonger, dit M. Ryan; par rapport au livre blanc, il y a néanmoins amélioration". Est-ce que cela vous va? La citation au complet?

M. Lavoie: Septièmement?

M. Burns: "Septièmement, enfin, le décompte...

M. Grenier: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mégantic-Compton sur une question de règlement.

M. Grenier: II est bien clair qu'on s'est donné un chef de parti qui est un éditorialiste. Si, à chaque fois que l'Opposition officielle désire lire des éditoriaux dans le journal des Débats, je ne sais pas, d'abord, en quoi cela va-t-il faire avancer

les débats? Ce sont des éditoriaux dont on a tenu compte, qui étaient probablement très bien, je n'ai pas à les juger un par un, mais on n'est quand même pas pour les faire inscrire un par un au journal des Débats. Avec autant de pertinence, je pourrais vous demander de lire l'éditorial où M. Ryan a demandé d'appuyer le Parti conservateur. Je vais vous demander d'inscrire au journal des Débats également quand il a demandé d'appuyer M. Bellemare le 28 août 1974, et je vais vous demander d'inscrire au journal des Débats que c'est lui qui a demandé de voter pour le PQ en novembre 1976 aussi. Je ne vois pas en quoi ce sera pertinent et si cela va aider à faire avancer la cause.

M. Burns: ... vous pourrez les insérer et je vous conseille de le faire.

M. Lavoie: Après cela, je vais demander qu'on lise les éditoriaux de M. Joe Clark.

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Grenier: II y a pas mal d'égalité avec ceux du temps.

M. Burns: M. le Président, vous m'avez permis de continuer, j'achève.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! Sur la question de règlement, s'il en est une, M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Sur la même question de règlement soulevée par le député de Mégantic-Compton, M. le Président, et c'est un peu un reproche que je lui fais au député de Mégantic-Compton...

M. Grenier: Bon, ça commence!

M. Gratton: Avec son expérience parlementaire, il devrait savoir que, lorsqu'un député ou un ministre est à court d'arguments, règle générale, il cite des éditoriaux là où il peut les trouver.

Le Président (M. Clair): Messieurs, à l'ordre, s'il vous plaît! Tout cela est de l'argumentation; finalement, s'il y a une question de règlement, ce serait de soulever une deuxième fois la même question de règlement. J'ai déjà eu l'occasion de dire que ce que le ministre est en train de faire m'apparaît tout à fait pertinent, d'autant plus que le document qu'il cite s'intitulait justement "Le projet de loi sur les référendums". M. le ministre.

M. Burns: D'accord. Merci, M. le Président, et je prie M. le député de Mégantic-Compton de patienter. Je m'excuse de choquer vos oreilles avec ces mots qui viennent de l'ennemi, pour vous; pour nous aussi peut-être, mais, en tout cas, si peu!

M. Lavoie: Cela le fatigue!

M. Grenier: II n'écrit pas, il agit!

M. Burns: Je pense que cela vous fatigue bien plus que moi, MM. les députés libéraux. Enfin, le décompte des voix suivra le même modèle que pour les élections générales, c'est-à-dire qu'il se fera par bureaux de votation et par districts électoraux. C'est la meilleure méthode à suivre; elle permet, mieux que tout autre, de savoir avec précision comment ont parlé les électeurs.

Enfin, à la fin de cette partie, à mon avis, importante, qui disait de quoi retournaient les changements par rapport au livre blanc, on lit M. Ryan qui dit: Voilà d'assez nombreux sujets sur lesquels le gouvernement s'est montré attentif aux suggestions qui lui étaient venues des divers organismes. En conséquence on est désormais loin — et il faudrait peut-être se le rappeler, ces paroles sont très importantes, là-dessus je partage entièrement les vues de M. Ryan également — du rouleau compresseur que l'on pouvait redouter lorsqu'il fut question, pour la première fois, d'introduire l'institution référendaire dans nos moeurs. Je trouve que c'est une opinion assez éclairée du chef du Parti libéral et il m'apparaîtrait assez important que certains députés qui représentent sa formation politique à l'Assemblée nationale relisent ces choses à l'occasion et ne cherchent pas à les oublier parce qu'elles ne font pas leur affaire pour des raisons d'ordre stratégique.

M. Lavoie: Cette partie de l'éditorial ne vous intéresse pas?

M. Burns: M. le Président, si vous voulez... Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs!

M. Ciaccia: Quand il vous critique, ce n'est pas bon!

M. Burns: Non, j'ai lu les critiques et d'ailleurs tout au court du débat je suis sûr que vous allez vous faire forts de me faire répondre à ces points-là. Comme je vous ai dit tout à l'heure, je suis prêt à le citer, mais ce sera très long, pour une raison bien simple, c'est que je devrai y répondre au fur et à mesure et vous n'aurez plus rien à dire au cours de la commission. Cela va vous faire de la peine! Je ne veux pas vous faire de la peine, que voulez-vous que je vous dise! Je veux que, à un moment donné, vous ayez quelque chose à dire. Vous cherchez des occasions pour parler, alors je vais vous en donner. Vous avez tous ces éléments que vous pourrez relever les uns après les autres, il me fera plaisir d'y répondre lorsqu'on arrivera article par article.

M. Lavoie: M. le Président, avec la permission du ministre. L'autre partie de l'article de M. Ryan couvre exactement tout le débat qui a été fait depuis le matin, autant par l'Opposition officielle que par l'Union Nationale, que par les députés de

Rouyn-Noranda et de Beauce-Sud. Pourquoi ne pas prendre la dernière partie qui a fait l'objet du débat de toute la journée?

M. Burns: Je vais vous dire, je voulais répondre en général aux faits. Il y a surtout une chose qu'il m'importait de vous dire, surtout à vous les membres de l'Opposition officielle, c'est que dans cette opinion ce qui m'apparaissait sensé c'est qu on ne semblait pas maintenant craindre une loi-cadre, à partir du moment où existaient certaines garanties, c'est-à-dire les sept qui sont énoncées dans la partie d'éditorial que je viens de citer. On ne semblait plus craindre quant à l'existence même d'une loi-cadre. C'est l'opinion qui ressort de tout cela et je n'ai pas vu, même dans le texte qui suit, de réticence de la part de M. Ryan. Je ne le prends pas non plus comme un évangéliste absolu, mais je dis: Si on se permettait, alors que j'étais dans l'Opposition, de nous citer des articles de M. Lévesque dans le Journal de Montréal, je ne vois pas pourquoi je ne me permettrais pas, maintenant, ce petit amusement...

M. Samson: Quand il n était pas en Chambre.

M. Burns: Quand il n'était pas en Chambre, il était exactement dans la même situation.

M. Charbonneau: Lui s'est présenté aux élections.

M. Grenier: Pas aux élections partielles.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs! (21 heures)

M. Burns: Tout ceci pour vous dire, M. le Président, que cette introduction que je faisais à ma réplique avait principalement pour but d'expliquer que les gens qui croient que le projet de loi 92... Je ne vous dérange pas trop, M. le député de Gatineau?

M. Gratton: Non, je répondais à une question du député de Verchères...

M. Burns: Je m'excuse.

M. Gratton:... qui se demandait à quelles élections complémentaires M. Lévesque avait refusé de se présenter.

M. Burns: Je m'excuse si vous m'interrompez.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, M. le député de Gatineau!

M. Gratton: Je lui ai cité 1971, 1972 dans les comtés de Duplessis et Gatineau et 1974 dans Johnson.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Parce que je voulais répondre à...

M. Burns: Je m'excuse si vous m'interrompez. Vous pouvez aller dans le corridor et peut-être jaser de cela avec le député en question.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Burns: Parce que j'ai essayé de n'interrompre personne et j'aimerais ne pas être interrompu.

M. Gratton: Vous n'avez pas réussi toute la journée.

Le Président (M. Clair): Messieurs, je vous invite à être respectueux du droit de parole des uns et des autres.

Une Voix: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le ministre.

M. Burns: Je veux maintenant, M. le Président...

Une Voix: A l'ordre!

M. Burns:... prendre point par point toutes les remarques, en tout cas, les principales. Il y en a quelques-unes que je vais mettre de côté et qui reviendront à la surface, je présume, au cours de l'étude article par article. Je pense avoir donné d'abord, quant à la présence de parties extérieures, d'organismes extérieurs ou d'individus extérieurs du... Non, non. Ecoutez! laissez-moi répondre. Je vais vous donner une réponse. Je ne réponds pas seulement à vous; je réponds aussi au député de Rouyn-Noranda qui a fait des remarques, à mon avis, que je ne peux pas mettre de côté parce que je trouve... Je dois dire que le député de Beauce-Sud et le député de Rouyn-Noranda m'ont fait réfléchir depuis cet après-midi sur un aspect. Je vous le dirai tout à l'heure. J'ai demandé à certains de nos légistes de regarder les possibilités de trouver des solutions aux problèmes que le député de Beauce-Sud et le député de Rouyn-Noranda nous ont très positivement suggérés cet après-midi.

Je vais prendre d'abord l'argumentation qui m'a été faite à gauche et à droite, en face de moi, relativement à la présence, d'une part, du directeur général des élections et du directeur général du financement des partis politiques, ce qui est une suggestion de la part du député de Rouyn-Noranda. D'autre part, j'ai touché tout à l'heure très brièvement à la question relative à la présence de la Commission des droits de la personne ou d'un de ses représentants.

Dans le deuxième cas, le député de Rouyn-Noranda n'était pas là; cela vaut peut-être la peine de répéter ce que j'ai dit très brièvement. J'ai dit que je ne refusais pas d'entendre la commission si elle sentait le besoin de se faire entendre. Je n'ai aucune espèce d'objection là-dessus, sauf que je ne crois pas, à cause de l'expérience passée avec la commission lors de l'adoption, entre autres, du

projet de loi 2 et lors de l'adoption d'autres projets de loi qui ne me concernaient pas directement et dont je n'étais pas le parrain, qu'il était du devoir — je change de chapeau — du leader du gouvernement ou même du ministre d'Etat à la réforme électorale et parlementaire de solliciter directement leur présence. Parce qu'on nous a dit très clairement de ce côté-là qu'on ne voulait pas, autant que possible, intervenir dans le processus d'adoption d'un projet de loi. C'est ce que j'ai dit substantiellement avant que le député de Rouyn-Noranda n'arrive.

Quant aux deux autres demandes qui ont été faites par le député de Rouyn-Noranda, il s'agit du directeur général des élections et du directeur général du financement des partis politiques. J'ai la chance de vous donner des nouvelles fraîches à ce sujet parce que je viens d'assister, à l'heure du souper, à l'assermentation du futur directeur général des élections, Me Pierre-F. Côté, qui a été assermenté à six heures et qui était là en présence du juge Drouin et aussi en présence du directeur général du financement des partis politiques, Me Pierre-Olivier Boucher. J'ai consulté les trois sur place. Je vous rapporte leurs paroles. Je vous rapporte surtout la sage expérience du juge Drouin, qui est le directeur général sortant des élections, indiquant qu'ils n'ont aucune objection à venir devant la commission, mais sur des questions purement et simplement techniques. C'est le voeu des trois personnes que je viens de mentionner.

Evidemment, dans le cas du juge Drouin, c'est vrai jusqu'au 25 mai puisqu'il prend sa retraite le 25 mai. Après le 25 mai, Me Pierre-F. Côté deviendra le directeur général en vertu de la décision prise à l'Assemblée nationale.

C'est également le point de vue que m'a servi le directeur général du financement des partis politiques. On nous a très clairement indiqué qu'on était prêt à venir donner des informations à caractère technique, mais qu'on voulait se garder loin — ce sont les mots mêmes des trois personnes en question que je viens de citer — de tout aspect politique du projet de loi. Elles sont à notre disposition si on croit, à un moment donné, devoir les consulter sur un point particulier ou sur un autre. Je vous suggérerais même, si jamais la question se soulève à l'occasion de l'étude d'un article, de suspendre l'adoption d'un article du projet de loi si c'est sur ce point que vous voulez avoir des éclaircissements. Je ne veux pas, et personne autour de la table ne veut cela non plus, que des hauts fonctionnaires de l'Assemblée nationale — je ne dis même pas du gouvernement parce que ce sont des gens nommés par l'Assemblée nationale — soient mis à notre disposition, alors que, dans un cas, le directeur général du financement des partis politiques a une loi à mettre en application. On sait qu'il en est encore à mettre en application cette loi qui est en vigueur, officiellement, depuis le 1er avril. Dans un deuxième cas, le nouveau directeur général des élections doit entrer en fonction le 26 mai et il doit immédiatement faire face à une élection partielle le 5 juillet prochain. Tout cela mis ensemble, je ne voudrais pas qu'on les nolise à la commission. Si, à l'occasion de l'étude d'un article, il y a des problèmes à caractère techniques auxquels je ne crois pas avoir la réponse — il est possible que cela arrive — je vous dis tout de suite que cela me fera plaisir de suspendre l'adoption de cet article — peut-être qu'on pourra en accumuler quelques-uns comme cela — et d'inviter ces hauts fonctionnaires à venir nous donner les réponses appropriées qu'ils croient devoir nous donner sur le plan technique, à une occasion qui fera l'affaire de notre commission et qui fera leur affaire également. Je pense que cela répond à la question que le député de Rouyn-Noranda m'avait posée.

M. Samson: M. le Président, est-ce que le ministre me permettrait une question?

M. Burns: Certainement.

M. Samson: C'est la seule façon que j'ai pour préciser davantage ma pensée. Le ministre ne croit-il pas que la présence de l'un et l'autre des directeurs concernés ou encore de leurs représentants aux débats de la présente commission ne pourrait pas être utile et à eux et à nous? C'était là ma pensée ce matin. S'il arrivait que nous ayons des questions d'ordre technique, par l'entremise du ministre, on pourrait leur demander des avis. Je devrais préciser que, dans ma pensée, je ne demandais pas qu'ils soient présents pour nous donner des avis politiques. Au contraire, c'est absolument technique.

M. Burns: D'accord. J'ai bien compris cela, d'ailleurs.

M. Samson: Ce que j'aimerais demander au ministre, c'est s'il ne pourrait pas reconsidérer l'à-propos qu'il y ait au moins un représentant de l'un ou l'autre des bureaux qui soit ici présent pour les délibérations, ce qui faciliterait la mise en application de la loi par la suite.

M. Burns: Encore une fois, j'ai heureusement la réponse toute fraîche à donner au député de Rouyn-Noranda à cause de l'occurrence que j'ai mentionnée tout à l'heure. J'ai mentionné cette possibilité justement à l'un et à l'autre directeur général et on m'a répondu très clairement qu'on avait pris des dispositions avec des représentants de mon bureau — je l'ignorais, mais j'étais très heureux que cela soit fait — pour que, dès que la transcription de nos travaux est émise — c'est-à-dire non pas le journal des Débats dans sa forme finale, mais la formule qui nous est remise à nous, les membres de la commission, laquelle comporte un certain nombre de ratures et de corrections — une copie leur en soit transmise. Il y a des gens de mon bureau qui se sont engagés à faire cela immédiatement. Ainsi, physiquement, ils ne seront peut-être pas ici, mais dans l'espace de 24 heures tous nos travaux vont être transmis directement à l'un et l'autre bureau des deux directeurs géné-

raux. Cela m apparaît comme quelque chose qui pourrait, à mi-chemin, répondre à la suggestion du député de Rouyn-Noranda.

Dans l'un et l'autre cas, sachant que ces deux bureaux actuellement ont des problèmes de fonctionnement, pas des problèmes dans le sens que cela fonctionne mal, mais des problèmes un peu extraordinaires dans le sens qu'il y a une élection et qu'il y a un début d'application d'une loi, dans l'autre cas, tout cela mis ensemble, on s'est dit: Ce serait peut-être plus pratique qu'au lieu de garder quelqu'un de l'un ou l'autre bureau, ici, de le garder au travail et que quelqu'un soit affecté à décortiquer le journal des Débats, du moins la première version qui nous est livrée, habituellement dans les 24 heures. D'accord? Quant à la présence des personnes, c'est un peu ce que j'avais à dire.

Maintenant, le plus rapidement possible — je ne veux pas prendre le temps de cette commission, Dieu sait que je suis le dernier qui voudrait retarder les travaux de cette commission — je suis quand même obligé de passer en revue un certain nombre d'arguments, du moins ceux qui m'ont paru être importants, ou encore qui m'ont semblé fausser le débat, pour essayer au moins d'apporter un certain nombre de rectifications. Là-dessus, je passerai l'une après l'autre les interventions.

D'abord, le député de Laval, un des premiers points — je vais être très bref là-dessus — qu'il reproche au projet de loi, c'est qu'il ne comporte aucune garantie que la question sera un oui ou un non, c'est-à-dire que la question comportera, comme réponse, un oui ou un non, qui devra appeler un oui ou un non. Nous avons pensé — on pourra, si vous le voulez, éventuellement, reprendre ce débat d'une façon plus extensive — qu'une loi-cadre, une loi à caractère général, une loi organique devrait ne pas "encarcaner ", pour n'importe quel référendum, le style de la question ou le style de réponse sollicitée.

J'ai mentionné maintes fois, et je pense que le premier ministre l'a mentionné à maintes reprises, que, dans un meilleur but d'efficacité et de clarté, la question qui inquiète beaucoup de gens, que je ne connais pas, soit dit en passant, la question sur l'avenir politique du Québec, nous souhaiterions éventuellement que nous soyions en mesure de la bâtir ensemble, avec les membres de l'Assemblée nationale, pour qu'on puisse y répondre par un oui ou par un non. Je réitère personnellement mon intention là-dessus. Je sais que le premier ministre partage mes vues là-dessus. Est-ce que ce sera cela? Je ne peux pas vous faire de promesses, je ne peux pas prendre un engagement à ce sujet mais il m'apparaîtrait qu'une loi-cadre est une loi faite pour donner suffisamment de souplesse pour qu'on ne soit pas obligés de l'amender chaque fois qu'on tient une consultation populaire.

Dans ce cas-ci — peut-être dans le cas de l'avenir politique du Québec — il serait peut-être souhaitable que nous puissions répondre à la question par un oui ou par un non. Peut-être trouverons-nous un autre cas de consultation populaire où on ne doit pas se limiter à un oui ou a un non et peut-être poser une, deux ou trois questions auxquelles on peut répondre d'une autre façon. L'Assemblée nationale a cette garantie qu'à chaque fois, avant que la population ne sont consultée, elle sera saisie de cette question ou de ce projet de question et qu'elle aura l'occasion d'en débattre avant qu'effectivement le référendum en question ait lieu, de sorte qu'il ne m'apparaîtrait pas souhaitable, dans un projet de loi à caractère général, que nous nous barrions les pieds dans le ciment relativement à une telle question.

L'autre point qui a été soulevé par le député de Laval — si vous l'avez remarqué, M. le député de Laval, je ne ferai même pas état de vos injures, en passant; je n'ai pas pensé que ce serait nécessaire de les relever— l'autre point était en ce sens que le gouvernement devait s'engager à respecter la décision. Je ne crois pas — pas plus dans quelques lois, dans le milieu — en tout cas, je n'en connais pas. S'il y en a, cela me surprendrait beaucoup. Dans le milieu parlementaire britannique, il n'y a pas beaucoup de lois où le référendum est autre chose que consultatif, c'est-à-dire que le résultat n'a qu'une valeur décisive. (21 h 15)

Cela pose, à notre avis, peut-être, des problèmes à caractère constitutionnel, de vouloir aller plus loin que des référendums à caractère consultatif, c'est-à-dire que c'est une indication de la volonté de la population. Je répète une chose que j'ai eu l'occasion de dire à de nombreuses reprises, quitte à passer pour un gars qui radote là-dessus. Que voulez-vous! Toutes les fois qu'on me pose la question je suis obligé de toujours donner la même réponse.

Un gouvernement qui ferait fi d'une opinion clairement majoritaire dans un sens, soit pour ou contre sa position, serait un gouvernement qui serait rapidement voué à l'échec, et le jeu de la démocratie continue, il ne faut pas l'oublier. Ce n'est pas la fin du monde, une consultation populaire; c'est une façon d'éclairer l'Assemblée natinale et le gouvernement sur ce que pense la population. C'est cela qui est le but final. Il ne faut pas s'imaginer qu'après le référendum c'est fini, il n'y a plus rien d'autre. Après quelque référendum que ce soit, il y aura des actes législatifs qui suivront. Il y aura des actes administratifs ou encore, dans le cas de l'avenir politique du Québec, il y aura sûrement des négociations, des discussions avec Ottawa, tout dépend du sort que réservera la population à la question qui lui sera posée. Alors, il ne faut pas s'imaginer qu'un référendum est quelque chose de final, que le monde s'arrête le lendemain. Ce n'est pas vrai, c'est une consultation populaire, c'est une façon de faire participer l'administration à la gouverne de l'Etat— l'ensemble de la population — chose qui est assez difficile à faire. Que voulez-vous, on ne peut pas demander à 4 millions d'électeurs de venir constamment voter tel ou tel projet de loi. C'est sûr que c'est pour cela qu'on a un régime comme le nôtre. C'est pour cela qu'à un moment donné il y a seulement 110 députés qui représentent 4 millions d'électeurs.

II faudrait peut-être se poser la question à savoir s'il ne faudrait pas avoir un Parlement d'un demi-million de personnes, si on veut élargir et absolument pousser la" démocratie au bout. Que voulez-vous, c'est une des contraintes. Cela est une des contraintes de la démocratie. A partir du moment où vous fonctionnez par représentation, vous êtes obligés de trouver des paliatifs. Un des palliatifs à cela, c'est dans des questions particulièrement difficiles à régler, dans des questions particulièrement sensibles entre l'écorce et l'arbre, je dirais qui taillent dans les chairs vives, à ce moment-là, c'est peut-être l'occasion rêvée d'utiliser le référendum. C'est dans ce sens qu'on le prend. Il ne faut pas s'imaginer que le sort du monde dépend d'un référendum. Mais il est très important comme indication. J'ai entendu, je me demande si c'est le député de Laval, oui c'est justement le député de Laval qui parlait et qui donnait l'exemple des sondages, qui érigeait pratiquement en statue de plâtre ou de bronze ou de n'importe quoi l'utilisation des sondages. Le sondage était quelque chose d'absolument magnifique. Si les sondages étaient si magnifiques, on ne prendrait pas la peine d'adopter une loi sur la consultation populaire.

Chaque sondage, suivant le résultat, est sujet à caution. Il est sujet à se faire poser des questions par surtout la partie perdante. On dit toujours: Le sondage n'a pas été bien fait. C'est évident que la même réaction pourrait venir à l'endroit d'une consultation populaire d'un référendum, si jamais les règles du jeu étaient pipées comme il dit. "If the decks were stacked", comme disent les quelques éditoriaux de la Gazette que j'ai lus à ce sujet-là. C'est absolument incroyable qu'on puisse se dire qu'on se fie complètement à des sondages et que les sondages sont une règle absolue, alors que là on prend toutes les précautions minutieuses, c'est-à-dire le gouvernement ne pourra pas monter des coups là-dessus. Le gouvernement qui va vouloir monter des coups là-dessus, je l'ai dit et je le répète, c'est un gouvernement qui va se desservir lui-même. La population n'est pas folle. La démocratie existe encore; si on pensait le contraire, je me demande ce que les députés qui sont autour de la table ici penseraient de leur propre élection, si la démocratie ne joue pas son rôle.

Personnellement, j'ai l'impression que les gens de Maisonneuve, lorsqu'ils m'ont envoyé siéger à l'Assemblée nationale, ils savaient ce qu'ils faisaient. J'ai l'impression que, dans le cas du député de Mégantic-Compton, c'était la même chose.

M. Grenier: Ils étaient clairvoyants.

M. Burns: C'est la même chose. C'est sûr qu'ils doivent l'être.

M. Vaillancourt (Jonquière): On se pose des questions des fois.

M. Burns: Des fois on se pose des questions, que voulez-vous, c'est une blague de trop. Sérieusement, je pense que tout le monde ici, autour de la table, a été élu de façon à respecter justement cette volonté populaire. On se dit: Les gens, ce ne sont pas des cruches, ils ne se laisseront pas emplir aussi facilement s'ils s'aperçoivent que les dés sont pipés. C'est la seule réponse que je peux donner à cela, relativement à ce problème.

Je passe vraiment très rapidement sur la stratégie du ministre, M. le Président, mais je ne peux pas m'empêcher de relever cette affirmation tellement grosse de la part du député de Laval qui disait qu'il constatait, tout à fait par hasard, ce matin, qu'il y avait eu une couverture insuffisante de ce problème. J'ai les coupures de presse, ici. C'est une faible partie, ce n'est même pas tout... Il y a des choses répétitives que je n'ai pas dans mon dossier, qui apparaissaient le même matin, soit une nouvelle de la Presse canadienne qui apparaissait dans quatre journaux, des choses comme cela, qui, évidemment, n'ont pas été conservées parce qu'elles se répétaient. C'était le même article.

Quand vous avez simplement, sur le plan sélectif, une pile comme celle que j'exhibe ici, de la couverture depuis moins d'un an du débat sur la loi sur le référendum et sur le livre blanc, il m'apparaît qu'au départ l'affirmation d'une couverture insuffisante, qui est la prémisse qui précède l'accusation que le député de Laval a faite à mon endroit par la suite, est déjà comme une réponse. Quand on voit une épaisseur d'à peu près un demi-pouce... Je vous le donne en mille, au point de vue de l'épaisseur.

M. Samson: Un centimètre.

M. Burns: Malheureusement, je ne suis pas encore rendu à la possibilité de transposer. Je pense que, surtout, cette prémisse annonçait ce fameux scénario dont parlait le député de Laval et, vraiment, je me sentais offensé de cette chose, parce que nous avons, au contraire, sur le plan stratégique, une stratégie du ministre, mais exactement dans le sens contraire de ce que tentait de vouloir fabuler, ce matin, le député de Laval.

Si nous avons déposé le livre blanc sur la consultation populaire à la fin d'août, le 4 août, plus exactement, avant la fin de la session et avant la reprise de l'autre, c'était justement pour donner tout le temps à tout le monde d'en prendre connaissance dans un cadre relaxé.

Imaginez-vous si j'avais déposé, je vous pose simplement la question, le livre blanc — d'abord il n'était pas prêt, je vais vous le dire très honnêtement, parce que cela demande quand même quelques heures de travail pour arriver à cela — en plein milieu du débat sur le bill 101, on m'aurait dit: Vous voulez, M. le ministre, noyer le poisson, vous voulez que cela passe quelque part sans que personne ne s'en aperçoive.

Quand j'ai vu que le projet de loi 101 était sur le point d'être adopté, on le sentait bien mainte-

nant que la clôture était adoptée, qu'on arrivait à la troisième lecture, etc., j'ai dit: C'est le moment idéal. On a même hâté nos échéances pour essayer d'y arriver afin de permettre et aux députés et à la population et aux commentateurs des média d'information d'en prendre connaissance largement avant qu'on entreprenne l'étude du livre blanc en commission parlementaire. Si c'est une stratégie pour essayer de noyer le poisson, je vous demande comment on ne le noie pas. C'est ce que je vous demande, M. le député de Laval.

Quand on me dit également, parce qu'on fait flèche de tout bois, apparemment, dans cette affaire, que pour le projet de loi, j'aurais très bien pu attendre, que le gouvernement aurait pu attendre et déposer le projet de loi uniquement au mois de mars, à la reprise de notre session...

Non, on s'est forcé pour que notre projet de loi... On a travaillé pratiquement jour et nuit. C'est pour cela que je me sentais profondément offensé par cette accusation tout à fait gratuite à mon endroit.

M. Lavoie (Laval): II a été déposé à quelle date?

M. Burns: II a été déposée le 21 décembre, justement pour la même raison, c'est-à-dire à la fin d'une session, en dehors de la période où, vraiment, il y a des activités très difficiles. Vous avez vous-même fait la relation, à chaque fois, avec le projet de loi 101. Dépôt, à la fin du projet de loi 101 et non pas pendant la chaleur du débat sur le projet de loi 101, du livre blanc et, deuxièmement, à la fin de la loi sur l'assurance automobile, le 21 décembre, également pour la même raison...

M. Lavoie: Le 21 décembre.

M. Burns: Oui, le 21 décembre. S'il y a eu une stratégie, elle est exactement contraire à celle que vous avez imaginée.

M. Lavoie: L'éditorial de M. Ryan est du 29 décembre.

M. Burns: Oui, c'est cela.

M. Lavoie: II ne se passe rien entre Noël et le Jour de l'An!

M. Burns: II y a quand même des gens qui continuent à s'occuper de politique même si Noël arrive. Ce n'est pas tout le monde qui s'en va à Paris pendant le temps des Fêtes! Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? En ce qui me concerne, je vous dis simplement ceci: C'est plutôt le contraire qui a été la stratégie du ministre responsable de ce dossier et du gouvernement. Cela a été de dire: On ne cachera pas chacune des étapes que nous allons franchir dans ce dossier; au contraire, nous allons le faire à un moment où les gens sont plus détendus. Je le répète et je ne le dirai pas suffisamment souvent: Ce que nous voulons, dans ce cas-ci, c'est que les gens aient la possibilité de réfléchir à ce problème. Ce sera la première fois au Québec que la population sera appelée à se prononcer directement sur des actions à être posées éventuellement par le gouvernement, d'une façon ou de I'autre, sur des suggestions. Ce sera une participation concrète de la population.

La Commission des droits de la personne a été très claire là-dessus. Elle l'a compris, elle, que c'était un des principes de base de ce projet de loi et elle nous en félicite. Vous devriez nous en féliciter.

M. Lavoie: Je vais m en garder.

M. Burns: Je le sais bien, vous n'êtes pas capable d un grand sentiment dans une affaire comme celle-là.

M. Gratton: Si jamais on a le droit de parole, on l'utilisera peut-être. Je ne sais pas quand cela va venir.

M. Burns: En tout cas, j'espère que vous serez capable, éventuellement, de vous amender et de faire preuve d'un sentiment plus élevé que d essayer de nous prêter des intentions.

M. Lavoie: Voulez-vous la Légion d'honneur, vous aussi?

M. Burns: Non, pas du tout. Je ne veux pas avoir la Légion d'honneur du tout!

M. Lavoie: Deux Légions d'honneur!

M. Fallu: On n'a pas de bretelles, nous, pour se les péter.

M. Burns: On me signale également un élément que j'oubliais, soit que tout cela se passait à la suite d'une commission parlementaire qui a siégé du 1er novembre au 1er décembre. On a quand même, du 1er décembre au 21 décembre, fait des efforts inouïs pour déposer un projet de loi qui est quand même — M. Ryan le mentionne — assez différent sur certains points du livre blanc. Quand je disais tout à l'heure qu'on a pratiquement travaillé jour et nuit, il s'agira de demander aux légistes et au greffier en loi du temps, Me Benoît Dufour, jusqu'à quel point on a mis des heures là-dessus, en dehors des séances de l'Assemblée nationale quand on sait, en décembre, à quel rythme on siégeait.

Je prends vraiment offense — et je tiens à le dire — de cette affirmation du député de Laval qui, à mon avis, est tout à fait injuste, car elle est contraire à la vérité. Vous allez remarquer que je n'ai pas utilisé l'expression qu'il a utilisée à mon endroit ce matin, je ne voudrais pas m'abaisser à cela. Mais elle est contraire à la vérité, cette affirmation, parce que c'est exactement l'opposé qui s est passé. On a dit: II faudrait donner le temps aux députés, aux gens intéressés à cette situation, à ceux qui voudraient intervenir, que ce

soit la Commission des droits de la personne ou les media d'information, avant d'adopter le projet de loi, d'en prendre connaissance et dans une période où ils ne sont pas pris avec le bill 101 ou avec le bill 67. Je tenais particulièrement à souligner cette question-là.

Un seul point que je veux relever, toujours dans cette intervention du député de Laval ce matin. Je n'ai jamais, c'est clair et net — je cherche encore à quel endroit j'aurais pu dire cela et, si je l'ai dit, c'est un lapsus parce que cela ne m'a jamais traversé l'esprit — dit qu'en Angleterre il y avait des contrôles des dépenses. Je n'ai jamais dit cela. D'ailleurs, le député de Rosemont, ce matin, l'a très bien relevé en citant le livre blanc où on dit exactement le contraire, où on essaie de faire brièvement un portrait de la situation qui existait en Angleterre lors du référendum de 1975. Nous avons dit, au contraire, qu'en Angleterre il n'y avait pas de contrôles sur les dépenses. Pour l'information d'un certain nombre de gens, les gens du comité du oui avaient à leur disposition dix fois plus d'argent à dépenser au cours du référendum que le comité du non; c'était dans une proportion semblable à quelque chose comme 100 000 "pounds" par rapport à 1 000 000 de "pounds", à un point tel qu'à la fin de la campagne les gens du comité du oui se sont retrouvés, un peu comme M. Ryan, avec de l'argent de trop. Ils ne savaient pas trop où le placer, ils ont créé eux aussi une fondation — pas sur le fédéralisme — qui va éventuellement servir à des étudiants, ou je ne sais trop quoi. M. Ryan aurait peut-être pu penser à cela aussi. (21 h 30)

En tout cas, je vous dis qu'il n'y avait pas de contrôle et je n'ai jamais dit qu'il y avait des contrôles en Angleterre. Je vous ai cependant dit que, dans toutes mes rencontres, j'ai reconnu un commun dénominateur. J'ai utilisé cette expression parce que, à chacune des rencontres, que ce soit M. Foot, qui est l'actuel leader parlementaire de la majorité en Chambre et qui était à l'époque, même ministre, le porte-parole du comité du "non " — au cas où les gens ne le sauraient pas, à l'époque, le cabinet, volontairement, avait décidé que chacun allait de son côté; il y avait six ministres qui s'étaient inscrits contre la position majoritaire du gouvernement, il y avait six ministres dont M. Foot, l'actuel leader parlementaire ministériel, ou du moins qui l'était, je ne sais pas si cela a changé récemment, au mois de septembre dernier, quand je l'ai rencontré — autant M. Foot, que j'ai rencontré, que Sir Con O'Neill qui était l'organisateur en chef du comité du "oui " — c'est celui qui a monté l'organisation du "oui " — que M. Philip Butler, l'auteur du livre que citait partiellement, ce matin, le député de Laval, que d'autres personnages, effectivement, de préparer l'organisation du référendum, sur le plan mécanique, le commun dénominateur qui ressortait de toutes les personnes que j'ai rencontrées c'est que, à la question que je leur posais, avant de les quitter: Si vous aviez à refaire quelque chose, qu'est-ce que vous changeriez? Le député de Laval sait très bien que lorsqu'on est allé en Californie ensemble, relativement à la loi 2, quand on est allé à Washington, quand on est allé à Toronto et à Ottawa à ce sujet, la question qui était posée, soit par des députés de l'Opposition qui étaient présents ou par moi-même ou des députés ministériels qui étaient avec nous, la question qu'on posait, parce qu'on s'informait de législations existantes et de l'expérience qu'on en avait fait, avant de partir: Si vous aviez à refaire votre loi, y a-t-il quelque chose que vous changeriez? Y a-t-il quelque chose que vous reprendriez? J'ai justement posé cette question à des gens comme m. Jamieson, comme Sir Con O'Neill, comme M. Foot, comme à d'autres personnes que j'ai rencontrées et, généralement, ceux qui me donnaient une réponse, me disaient oui. Tant du côté du oui que du côté du non. Je le répète parce que si cela avait été M. Foot seul qui me l'avait dit, je n'aurais pas été impressionné. J'aurais dit: II a perdu, donc il n'est pas content. Au contraire il a dit: Les règles ont été absolument, parfaitement exécutées, mais il y a une chose dont je me plains, c'est qu'il aurait fallu avoir un plafond.

Je vous donne un petit élément de petite histoire, vous n'aurez pas besoin d'écrire ou d'appeler en Angleterre.

M. Lavoie: Est-ce que je pourrais vous poser une question?

M. Burns: Non, vous me direz cela après. Je vais vous rendre la même politesse que vous m'avez rendue ce matin.

M. Lavoie: Pour quelle raison sur la Loi Scotland, ils ne l'ont pas fait?

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Burns: Voulez-vous vous me poserez la question après?

M. Lavoie: Cela ne fait pas votre affaire?

M. Burns: Non, je vais vous parler de Scotland et de Wales après.

M. Gratton: Ah non!

M. Burns: Oui, j'en ai pour la soirée si vous voulez.

M. Lavoie: Cela va bien!

M. Burns: C'est peut-être une question d'éducation que je suis en train de faire à l'endroit de l'Opposition, et je ne vous charge rien, imaginez-vous, profitez-en!

M. Gratton: Allez-vous répondre à ma question durant ce temps-là?

M. Burns: Je vous dis simplement que, dans ce cas, vous n'aurez pas besoin d'écrire en

Angleterre et de demander quoi que ce soit en Angleterre. Il y a quelque chose de bien évident, c'est que, à un moment donné, nous avions la possibilité de nous faire dire, uniquement par ceux qui sont perdants... Ne vous inquiétez pas, vous pensez que je suis en train de me "filibuster", mais on va placer les choses clairement en partant. Cela vous amuse de me laisser parler, parfait, mais ne vous inquiétez pas, je ne suis pas victime de votre piège...

M. Gratton: II voit des pièges, maintenant!

M. Burns: J'ai trop vu neiger dans ma vie, vous ne me ferez pas croire à des affaires.

M. Lavoie: Vous êtes encore embourbé et cela paraît.

M. Burns: Je vous dis simplement qu'il m'ap-paraît normal que je réponde à ces questions. Si on me pose la question comme on a tenté de le faire tout à l'heure, cela évitera une question additionnelle relativement à ce qu'on appelle les deux "devolution bills" qui visent éventuellement à donner plus d'autonomie à l'Ecosse et au pays de Galles. Lors de cette visite, je m'étais informé des projets gouvernementaux sans, évidemment, m'in-sérer dans le secret du Conseil des ministres. Mais M. Foot, qui était le leader du gouvernement, m'avait dit à l'époque que, selon lui, ce serait à peu près le même phénomène qui se présenterait.

Pourquoi le gouvernement du Royaume-Uni, pourquoi la Chambre des communes a-t-elle décidé de ne pas contrôler les dépenses? Je l'ignore. Je ne suis pas en mesure de juger une décision politique. Peut-être a-t-on décidé que ce n'était pas approprié et peut-être a-t-on décidé que les personnes, à qui j'ai parlé et qui m'ont dit que la seule chose que nous changerions serait le contrôle des dépenses, n'avaient pas raison. C'est le droit le plus absolu et je n'ai pas à critiquer la décision du Conseil des ministres, encore moins celle de la Chambre des communes.

Je voulais rétablir ces faits. L'Australie est un autre cas qui m'a été soulevé; je suis obligé de le relever; je m'excuse si c'est long, M. le Président, mais que voulez-vous? Il y a quand même une limite à se faire dire des âneries. J'ai patienté ce matin, mais ce soir je ne suis pas patient — je n'ai jamais dit qu'en Australie la loi était en application. J'ai dit qu'à ma connaissance l'Australie avait adopté — effectivement, si le député de Laval peut avoir une copie du projet de loi, je vais lui envoyer...

M. Lavoie: J'en ai déjà une.

M. Burns: ... une copie de la loi adoptée en troisième lecture. Que cette loi n'ait jamais été en application, je ne le sais pas. Je prends votre parole là-dessus. Je ne vous traite pas de menteur quand vous me dites ça; je prends votre parole. Mais je vous dis ceci: C'est quand même assez significatif — c'était mon argumentation lorsque j'avais soulevé le cas de l'Australie — qu'un pays comme l'Australie, qui est de tradition référendaire et également de tradition parlementaire britannique, ait pris la peine de voter une loi, quand on sait ce que cela veut dire faire trois lectures pour adopter un projet de loi pour régir les finances politiques en matière référendaire. Je pense que c'est assez significatif. C'est dans ce sens-là que je le citais comme exemple. Je n'ai jamais dit et je n'ai jamais essayé de plaider que l'Australie contrôlait les dépenses; j'ai dit qu'une loi avait été adoptée. C'est tout ce que j'avais en main, c'est-à-dire la troisième lecture.

Le Sénat ne l'a peut-être pas acceptée. Peut-être que, devant le refus du Sénat, la Chambre des communes ou la Chambre basse en Australie ait décidé de se raviser; c'est peut-être le cas. Ecoutez! Je ne vais pas faire un voyage en Australie pour voir si c'est bien vrai et comment cette loi s'applique, etc. Je sais, cependant, et nous a-vons...

M. Grenier: Est-ce qu'on pourrait y aller?

M. Burns: Cela vous intéresse?

Une Voix: On devrait y aller en commission.

M. Burns: On pourrait peut-être organiser cela. On pourrait y aller en hiver.

M. Lavoie: Allez-y et on va adopter la loi pendant ce temps-là.

M. Burns: Oui, ce serait...

M. Lavoie: Bien améliorée d'ailleurs.

M. Burns: Oui, je suis convaincu que, si on vous la laissait, ce serait beau.

M. Lavoie: Ce serait très démocratique.

M. Burns: Je vous dis simplement ceci, M. le Président, en terminant, relativement aux arguments, parce que je ne veux pas accorder plus d'importance qu'il ne faut à ces remarques. Par contre, je trouvais qu'il y avait un certain nombre de choses inexactes qu'il fallait que je relève. Je ne pouvais pas laisser passer des faussetés, des choses absolument inexactes qui étaient dites par le député de Laval ce matin, dans une attitude que je ne comprends pas encore. Je n'ai pas l'impression d'avoir provoqué depuis le début des travaux de cette commission, ni depuis le début qui remonte au mois d'août, une certaine attitude partisane, politisée méchamment, comme le député de Terrebonne l'interprétait ce matin, dans ce débat. Au contraire, j'ai tenté de me situer au-dessus de cela. Là-dessus, j'en sais gré aux représentants des autres partis qui, eux, ont gardé le débat au niveau que nous avons tenté de le garder depuis le début.

Je fais tout simplement une dernière remarque. Je l'ai dit ce matin et je voudrais le dire pour

que ce soit très très clair: Encore une fois, le député de Laval a fait de la fabulation lorsqu'il donnait des exemples de non-applicabilité des comités nationaux en nous laissant croire — imaginez-vous — que le projet de loi pouvait empêcher le député de Rouyn-Noranda ou même le député de Beauce-Sud de faire partie d'un comité national.

Il ne faut pas avoir lu, vraiment pas avoir lu la loi pour en arriver à des conclusions comme celles-là. Il faut lire quand même les articles 21, 22 et suivants. Entre autres, l'article 22 qui nous dit carrément que tous les députés s'inscrivent aux comités provisoires. Ce sont ces comités provisoires qui donnent naissance aux comités nationaux. Que les députés minoritaires, comme c'est le cas, par exemple, des deux députés auxquels je faisais référence tout à l'heure, les députés de Rouyn-Noranda et de Beauce-Sud, soient un peu noyés dans un comité provisoire, bien sûr, je vais l'admettre. Je vais aller plus loin que cela. Je vais vous dire que c'est une des tares de la démocratie, mais c'est peut-être aussi un des grands bienfaits de la démocratie. Si la population n'a pas jugé que le Ralliement créditiste devait être plus nombreux en Chambre, il faut se pencher et dire qu'on lève notre chapeau devant ce verdict. On le regrette quand on est créditiste ou quand on est PNP, mais c'est comme cela.

Celui qui ricane actuellement est celui qui, soit dit en passant, a fait adopter ce règlement. Celui que j'entends ricaner actuellement, le député de Laval, qui nous lance de belles paroles... je ne sais pas ce qui lui est arrivé depuis qu'il n'est plus président de l'Assemblée nationale...

M. Lavoie: Cela va plus mal. Cela allait mieux avant.

M. Burns: On a l'impression qu'il est tombé sur la tête ou je ne sais trop quoi. Quand il nous présentait son projet de règlement qui a été adopté le 21 mars 1974, qui a donné...

M. Lavoie: Avez-vous voté contre?

M. Burns: Non, pas du tout. D'ailleurs, je vais vous prouver jusqu'à quel point vous êtes illogique. Vous avez vous-même dit, dans votre présentation signée du 21 mars, que vous avez "eu l'honneur de diriger le groupe de travail", et combien de fois vous vous êtes pété les bretelles sur ce règlement. C'est incroyable. Vous vous pétez encore les bretelles et vous, vous rougissez de jouissance lorsqu on vous dit "le code Lavoie".

M. Gratton: II n'en a jamais parlé. Question de règlement.

M. Burns: A part cela, question de règlement, voyons donc! J'en ai pris de bien pires que cela ce matin. Les petits gars, on va essayer de se parler.

Le Président (M. Clair): M. le député de Gatineau, sur une question de règlement.

M. Burns: Je me le rappelle parce qu'on ne se fait pas traiter de menteur à tous les jours sans l'oublier, surtout lorsque ce n'est pas vrai.

M. Gratton: M. le Président...

M. Ciaccia: Quand c'est vrai, vous l'oubliez?

M. Burns: Quand c'est vrai, tu te fermes la boîte et tu n'en parles plus. J'en parle ce soir. Cela ne m'est pas arrivé jusqu'à maintenant. Vous m'en sortirez des cas.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre vous avez la parole.

M. Burns: D'accord. Est-ce que j'ai encore la parole?

Le Président (M. Clair): Oui. Vous avez la parole, M. le ministre.

M. Burns: Je disais, M. le Président — c'était juste une introduction à cet argument — que celui que j'entends glousser en face de moi, depuis tout à l'heure, lorsque je dis qu'il y a des limites à la démocratie, c'est ce même monsieur, la même personne, Jean-Noël Lavoie, président de l'Assemblée nationale, évidemment "other days, other ways" probablement, autre temps, autre moeurs...

M. Lavoie: Vous rappelez-vous que vous m'aviez invité de rester président de l'Assemblée nationale?

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Burns: Oui, peut-être que vous auriez été...

M. Lavoie: Je ne coucherai jamais avec vous.

M. Burns: ... moins amer. C'est peut-être cela. Si on lit ce règlement, il y en a partout des restrictions. Par exemple, dans ce règlement, le pauvre député de Rouyn-Noranda, au secours de qui vous voliez ce matin, n'a même pas le droit de parler sur certaines motions...

M. Lavoie: II n'a pas besoin de défense.

M. Burns: Mon Dieu Seigneur! J'entendais ce député de Laval outré, ma chère, de voir le député de Rouyn-Noranda, ce pauvre petit garçon — tout le monde le sait — qui n'est pas capable de se défendre tout seul, qui n'a pas de voix. Quand il se fait "maganer", il ne dit pas un mot!

M. Lavoie: II est sur le petit banc!

M. Burns: Et son voisin de gauche, le pauvre petit député de Beauce-Sud; lui aussi, quand on le bouscule, il prend son trou et ne dit pas un mot. Heureusement qu'il y a eu la bienfaisante intervention ce matin de ce député protecteur de la démocratie qui est venu à leur secours! Pauvres

vous autres! Une chance que vous l'avez! C'est ce même gars qui dit aujourd'hui: Cela n'a pas de bon sens! C'est effrayant! A pleines pages, il y a des restrictions de temps de parole. A écouter le député de Lavai, ce matin, je me disais: Bon Dieu! Il faudrait peut-être réviser complètement notre règlement et abolir les limites de temps de parole! Il faudrait peut-être, à l'Assemblée nationale, que tout le monde ait le droit de parler de n'importe quoi, n'importe où, n'importe quand, tout le monde en même temps et autant de temps qu'on le veut. Ce serait parfait! (21 h 45)

M. Lavoie: A peu près comme vous, ce soir!

M. Burns: On serait donc bien! Des sessions à temps plein.

M. Lavoie: Vous en êtes un bel exemple ce soir. Cela fait une heure et demie qu'on vous entend.

M. Burns: Vous n'avez pas fini, à part cela, parce que, ià, j'essaie de trouver une certaine logique dans votre intervention. Vous vous plaignez de la motion de clôture. Je me souviens d'avoir été, comme député de l'Opposition, un de ceux qui avaient beaucoup de réticences sur cette motion de clôture.

M. Lavoie: Cela fait trois fois que vous nous coupez le cou!

M. Burns: Bien oui!

M. Lavoie: En un an et demi.

M. Burns: On a appris comment le faire alors qu'on se faisait couper le cou régulièrement, nous autres, dans l'Opposition.

Une Voix: Pas souvent!

M. Burns: On nous coupait parfois le cou d'autres façons, quand on nous disait, par exemple... En tout cas, une série de choses. On pourrait toutes les sortir. Vous connaissez le règlement autant que moi. C'est ce même monsieur qui vient nous parler de restrictions à la démocratie. La démocratie — il va falloir se le dire, il faut être clair là-dessus — en soi, elle comporte un certain nombre de règles et un certain nombre de règles qui sont, en soi, restrictives. C'est restrictif en bonyienne, par exemple, qu'il y ait 4 millions d'électeurs au Québec et que les 4 millions n'aient pas le droit de voter et de parler sur chacun des projets de loi. Il va falloir se dire cela. On a décidé de procéder par délégation de pouvoirs et, par voie de délégation de pouvoirs, d'encadrer les gens qui reçoivent cette délégation dans des choses comme celle-là: La Loi de la Législature, le règlement, la Loi du Conseil exécutif. Que voulez- vous que je vous dise? Je n'ai pas inventé la démocratie. On essaie de la garder dans des normes les plus acceptables possible pour permettre le plus possible l'expression de l'ensemble de la population.

Personnellement, j'ai toujours défendu qu à l'Assemblée nationale, même si c'était parfois pénible de voir un certain nombre de débats... Je suis sûr que, ce soir, certains membres en face de moi trouvent cela pénible de me voir intervenir.

Des Voix: Non!

M. Lavoie: Non, nous avons beaucoup de respect pour vous.

M. Burns: C'est leur droit comme moi. J'ai trouvé pénibles certaines interventions aujourd'hui. Je parle surtout des députés de l'Opposition officielle. Je ne parle surtout pas des gens de mon extrême droite, du côté de l'Opposition, les pauvres petits "maganés" qui ne peuvent pas se défendre. C'est effrayant!

M. Gratton: Incluez-vous le député de Mégantic-Compton?

M. Burns: Ce sont les quelques remarques que j'avais à faire relativement aux remarques du député de Laval. Je m'excuse de m'être étendu un petit peu plus longtemps là-dessus. Vraiment, il y a un certain nombre de choses que je ne pouvais pas laisser passer au début de ces travaux. Cela va peut-être "clairer" l'atmosphère. Je l'espère, en tout cas.

En terminant, je m'en voudrais de ne pas relever — parce que là je pourrais être beaucoup plus violent dans mon langage, je pense, parce que cela ne me concerne pas directement — je m en voudrais de ne pas m'en prendre à la façon vraiment ahurissante de la part d'un parlementaire qui se dit chevronné, surtout de quelqu'un qui prétend qu il est le gardien en cette enceinte de la démocratie, de traîner dans ce débat des personnes aussi respectables que mes deux sous-ministres de I'époque, c'est-à-dire Me Louis Bernard, qui est maintenant secrétaire général du Conseil exécutif, et M. André Larocque, qui est encore sous-ministre adjoint auprès du ministre d Etat à la réforme électorale. Je n'ai jamais vu d attaques aussi basses que celles-là à l'endroit de fonctionnaires, de hauts fonctionnaires. Je m'étais toujours gardé de le faire, lorsque j'étais dans I'Opposition. Et je vous prie de chercher un endroit où j'ai personnellement attaqué un fonctionnaire, à moins qu effectivement il y ait eu quelque chose que je considérais reprochable. Et là, si cela arrivait, j'ai fait une motion en Chambre comme cela doit se faire.

M. Lavoie: C est grave quand même.

M. Burns: C'est très grave ce que j'ai dit là.

M. Lavoie: Voulez-vous répéter ce que j'ai dit sur vos fonctionnaires? Pouvez-vous le répéter?

Je n'ai attaqué d'aucune façon. Il y a une limite de jouer aux vierges offensées.

Le Président (M: Clair): A l'ordre!

M. Vaillancourt (Jonquière): Ah non! C'est sorti du journal des Débats.

M. Burns: Vous n'étiez pas réveillé, ce matin, certain.

M. Lavoie: J'ai dit que c'étaient des gens politisés. C'est tout. On est tous politisés ici.

M. Burns: Avec quel ton et avec quelle saveur vous l'avez dit.

M. Lavoie: On interprète le ton maintenant et la saveur.

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Burns: Et tout le monde, de notre côté de la table, on se retenait pour ne pas intervenir parce qu'on s'est dit: Cela n'a pas de bon sens, on ne comprend pas ce que l'on entend. Cela ne se peut pas qu'un député qui se dit un gardien de la démocratie et qui s'est prétendu aussi longtemps qu'il l'a fait, de 1970 à 1976, un gardien de la démocratie qui nous arrive avec une chose comme celle-là, qu'on mette en doute la sincérité, l'honnêteté de hauts fonctionnaires qui ont prêté un serment, soit dit en passant...

M. Gratton: II n'a jamais été question de cela. Je m'excuse, j'étais là moi aussi. C'est bien clair.

M. Burns: Ah non!

M. Lavoie: Je le répète, je n'ai jamais mis en cause l'honnêteté intellectuelle de ces gens. J'ai fait une comparaison où en Angleterre on a pris des fonctionnaires non politisés pour préparer la loi, alors qu'ici on a pris des fonctionnaires politisés. C'est tout ce que j'ai dit.

M. Burns: C'est quoi la différence entre un sous-ministre de l'Education, M. Jamieson, en Angleterre, et le sous-ministre à la réforme électorale et parlementaire...

M. Lavoie: Je vais répondre à votre chose.

M. Burns: ... devenu secrétaire général du Conseil exécutif, le plus haut fonctionnaire du Québec et son adjoint, le sous-ministre associé.

M. Lavoie: Je vais répondre bien calmement... M. Burns: C'est quoi la différence?

M. Lavoie: Jamieson, en Angleterre, et son équipe, aucune de ces personnes n'avaient milité au sein d'un parti politique. C'est cela que j'ai voulu dire. C'est cela. Essayez donc de comprendre.

M. Burns: Voyons donc! Arrêtez donc!

M. Lavoie: J'ai dit qu'ils n'ont jamais milité, ils ne se sont jamais mouillés au point de vue politique, alors que les deux fonctionnaires qui sont ici...

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président.

M. Burns: C'est ce que j'appelle des attaques basses parce qu'on est justement à mi-chemin, on laisse couler des affaires comme une couleuvre...

M. Lavoie: Je ne laisse rien couler.

M. Burns: On essaie à l'endroit de gens qui sont... Soit dit en passant, si vous aviez eu des hauts fonctionnaires comme ceux-là dans le gouvernement précédent, peut-être qu'il n'aurait pas été défait aux dernières élections. Je n'accepte pas...

M. Lavoie: Une vierge offensée.

M. Burns: Pas une vierge offensée, un parlementaire offensé par quelque chose qui n'est pas vraiment parlementaire. Je n'accepte pas que des choses comme celle-là se fassent.

M. Lavoie: M. le Président, j'ai une question de règlement. C'est assez grave les accusations qu'on porte à mon égard. J'invite le leader parlementaire du gouvernement, bien sobrement, demain, à lire la transcription du journal des Débats. Je vous invite, vous, M. le Président, à le faire, j'invite tous les membres de cette commission à le faire.

Si j'ai porté une attaque le moindrement malhonnête sur ces deux personnes, je voudrais qu'on soulève la question en Chambre sur une question de privilège et qu'on prenne tous les moyens...

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, ce n'est pas une question de règlement.

M. Lavoie: Je mets mon siège en jeu, à l'Assemblée nationale, s'il y a eu une attaque quelconque contre ces personnes.

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Burns: Vous avez dit ce que vous aviez à dire, ce matin, je vous dis ce que j'avais à dire et je vais vous dire aussi comment on l'a compris et comment les sous-ministres en question l'ont compris.

M. Lavoie: Je pourrai m'expliquer avec eux, d'ailleurs.

M. Burns: Cela vaudrait la peine.

Le Président (M. Clair): M. le député de Laval, puisque vous avez soulevé une question de règlement, je pense que je dois en disposer et vous

indiquer que vous auriez plutôt dû exercer votre droit en vertu de l'article 96, mais votre message est passé.

M. Lavoie: Je crois que c'était assez grave pour être fait immédiatement.

M. Burns: M. le Président, je pense bien que se terminent là les remarques que j'avais à faire. J'ai répondu déjà à une question double du député de Rouyn-Noranda. Je le répète parce que je ne suis pas en mesure de donner une réponse immédiatement, j'ai pris en bonne note l'approche qu'il avait eue ce matin relativement à la participation de députés, disons, minoritaires, comme vous l'êtes à l'Assemblée nationale. Dans les comités nationaux, cela peut, je l'admet, à première vue, causer un certain nombre de problèmes.

En droit, dans les grandes théories du droit, mon collègue de Jonquière me corrigera si je me trompe quant à l'expression, cela fait quelques années que je n'ai pas pratiqué le droit, il existe une théorie qui s'appelle la thèse de la protection contre l'oppression des minorités. Est-ce cela? Ou quelque chose comme cela.

M. Vaillancourt (Jonquière): On vous fait confiance.

M. Burns: C'est en droit des compagnies surtout qu'elle a une application, cette thèse, lorsqu'une majorité se sert vraiment abusivement de son autorité numérique à l'endroit de certaines minorités. J'ai un peu pensé à cela comme parallèle en me disant qu'il y aurait peut-être des accommodements à apporter pour vous assurer, quitte à garder le système des comités nationaux... Il y aurait peut-être lieu, en tout cas, on va y songer... Il y a sans doute quelque chose dans ce que vous disiez. J'apprécie énormément l'attitude très positive que vous avez eue à cet égard, vous le député de Rouyn-Noranda, de même que le député de Beauce-Sud.

Quant à votre suggestion que la question soit adoptée aux deux tiers de l'Assemblée nationale, autant vous donner tout de suite mon opinion qui va peut-être vous paraître décevante, mais, personnellement, je ne peux pas partager cette opinion pour une raison bien simple, à cause de toute la philosophie qu'il y a derrière une consultation populaire. Vous avez deux types de consultations populaires: les consultations populaires de l'initiative du peuple, c'est-à-dire les initiatives populaires, dans le langage général, et les initiatives gouvernementales en matière de consultation populaire. Celle que nous nous apprêtons à adopter par le projet de loi no 92 est de l'initiative gouvernementale carrément.

J'ai dit à plusieurs reprises qu'à long terme, à la suite d'une expérience solide de cette Loi sur la consultation populaire qui est de l'initiative gouvernementale, nous ne mettrions pas de côté d'autres formules de participation de la population à la gouverne de l'Etat, telle l'initiative populaire elle-même, mais on s'est dit: Dans une première bouchée, c'est déjà beaucoup si on passe à travers cela et si cela devient un succès. La thèse derrière cela est que si c'est à l'initiative gouvernementale, il ne faut pas que les règles qui président à cette initiative gouvernementale puissent empêcher le gouvernement d'avoir recours à l'initiative gouvernementale. Du moins, c'est le raisonnement que je vois derrière cela, comme, par exemple, le jour où on ira jusqu'à l'initiative populaire, il ne faudra pas que, un nombre minimum de règles étant accepté, c'est-à-dire un certain nombre de signatures, etc., l'initiative populaire puisse être empêchée par des règles de mécanisme, des règles de fonctionnement.

Or, il est très rare que cela arrive dans l'histoire du Québec, en tout cas. C'est arrivé au cours de la dernière élection, celle de 1973, qui était un cas assez exceptionnel, que l'Assemblée nationale avait les deux tiers des membres du côté ministériel. C'est l'un des rares cas que je connaisse. Il y en a peut-être eu d'autres, peut-être le Parlement de 1952 ou dans les environs. Mais disons que c'est le cas d'exception que la majorité ministérielle représente les deux tiers de lAssem-blée nationale.

Dans ce sens, le fait d'accepter cela, cela voudrait dire que l'initiative gouvernementale n'existe plus; c'est-à-dire que, quand l'Opposition ne voudrait pas qu'il y ait consultation du peuple, il n'y en aurait pas. C'est ce que cela veut dire. On ne pourrait jamais en arriver à une question, si systématiquement l'Opposition décidait de bloquer un référendum en particulier. Cela ne m'ap-paraît pas sain pour la démocratie. Cela ne m'apparaît pas sain que le gouvernement n ait pas la possibilité d'agir de sa propre initiative, en consultant la population, en demandant à I Assemblée nationale de l'aider à bâtir sa question et à établir les règles et en demandant, tel qu'on le suggère dans la loi, d'être assisté par un Conseil du référendum, etc. Cela ne m'apparaîtrait pas sain qu'on mette des règles qui soient tellement rigides qu'elles puissent éventuellement, comme conséquence assez générale, donner la possibilité, disons-le, à l'Opposition, lorsqu'elle le veut, d'empêcher l'initiative gouvernementale. Ma position est claire là-dessus; au risque de vous décevoir, je vous dis que malheureusement, de la part du gouvernement, je ne pourrai pas accepter un amendement tel que vous le suggérez.

Le problème qui a été soulevé par le député de Beauce-Sud — malheureusement, il a dû quitter il y a quelques instants, mais il me fait quand même plaisir d'y répondre — c'est relativement à la restriction de publicité hors Québec. C est un problème qui est assez difficile à régler. Il est bien sûr que le problème de la publicité hors Québec existe. N'importe quel organisme pourra aller faire des conférences de presse à Ottawa et possiblement voir sa conférence de presse rapportée dans le journal Le Droit. C'est une question de bonne foi, c'est une question de "fair play". Toutes les lois peuvent être contournées, toutes les lois comportent toujours des trous, mais l'expérience de l'application des lois montre que

c'est la minorité des gens qui a tendance à chercher des façons de contourner des lois plutôt qu'à essayer de s y conformer. C'est en se fiant justement sur ce bon sens populaire qu'on se dit: C'est sûr qu'il y a des trous dans cette loi, c'est sûr qu'il y a des trous dans la loi 2 sur le financement des partis politiques, c'est sûr qu'il y a des trous dans toutes les lois que nous adoptons. Autrement, il n'y aurait jamais d'amendements à des lois déjà adoptées. Il n'y aurait pas d'amélioration possible. On dirait: Cette loi est tellement parfaite qu'il ne faut plus jamais l'amender. (22 heures)

La preuve, c'est que toutes les lois se font amender. Celle-ci, comme les autres, sera probablement amendée. Un des trous possibles de cette loi, c'est justement qu'on ne peut pas légiférer pour contrôler la publicité hors Québec. C'est pour cette raison qu'en certains endroits il y a du laxisme dans la loi. Je le regrette, mais par contre, on ne peut pas, aux dires de nos légistes qui nous conseillent là-dessus, corriger la situation. On essaiera de se fier à cette minorité de gens en espérant que cette minorité qui veut contourner la loi soit très petite.

M. le Président, je termine ainsi mon intervention. Je remercie les membres de la commission de leur patience, mais vous comprendrez que je me devais de répondre in extenso à un certain nombre de choses, même si, ce matin, j'avais été très bref dans mes commentaires d'ouverture. Je croyais qu'il n'était pas possible de laisser passer un certain nombre de choses que je considère tout à fait inexactes ou encore de choses qui méritaient d'avoir une réponse positive comme celle que je viens de mentionner un peu avant au député de Rouyn-Noranda.

Alors, M. le Président, là-dessus, je pense qu'il est dix heures.

Le Président (M. Clair): Messieurs, il est vingt-deux heures.

M. Gratton: C'est sûrement un oubli de sa part, mais le ministre n'a pas répondu à la seule question que je lui avais adressée cet après-midi. Pourrait-il s'engager à nous donner la réponse demain?

M. Burns: Sur les droits de la personne?

M. Gratton: Oui.

M. Burns: Je la lui ai donnée tout à l'heure.

M. Gratton: On va reprendre demain, M. le Président, parce qu'il n'a pas répondu à ma question.

M. Burns: Je l'ai dit. Je peux vous répéter ma réponse de tout à l'heure.

M. Gratton: Je l'ai entendue, mais vous n'avez pas répondu à ma question.

M. Burns: Ce n'est pas un refus. Comment vous n'avez pas...

M. Gratton: Je ne vous ai pas demandé de comparaison. Il est dix heures.

Le Président (M. Clair): La commission ajourne ses travaux à demain, dix heures.

(Fin de la séance à 22 h 3)

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