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Étude du projet de loi no 92
(Dix heures quinze minutes)
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission permanente de la présidence du conseil et de la
constitution est réunie pour continuer l'étude article par
article du projet de loi no 92, Loi sur la consultation populaire.
Les membres de cette commission sont: M. Bédard (Chicoutimi), M.
Bisaillon (Sainte-Marie) remplacé par M. Beauséjour (Iberville),
M. Char-bonneau (Verchères), M. Clair (Drummond) remplacé par M.
Godin (Mercier), M. Garneau (Jean-Talon) remplacé par M. Gratton
(Gatineau), M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Laberge (Jeanne-Mance), M.
Levesque (Bonaventure) remplacé par M. Lavoie (Laval), M. Paquette
(Rosemont), M. Roy (Beauce-Sud) et M. Samson (Rouyn-Noranda).
Les intervenants sont: M. Bertrand (Vanier) remplacé par M.
Dussault (Châteauguay).
M. Dussault: Je suis déjà intervenant.
Le Président (M. Clair): Vous êtes
déjà intervenant, d'accord. M. Bertrand (Vanier), pas d'autre
remplacement; M. Brochu (Richmond), M. Dussault (Châteauguay), M. Guay
(Taschereau), M. Lavoie (Laval) remplacé par M. Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys), M. Lévesque (Taillon), M. Morin
(Louis-Hébert) et M. Raynauld (Outremont) remplacé par M. Ciaccia
(Mont-Royal).
Au moment où nous avons ajourné nos travaux, nous en
étions toujours à l'article 6 du projet de loi. Avant de
reprendre cette étude, je pense que le ministre aurait un message
à faire aux membres de la commission. M. le ministre.
Opinion de la Commission des droits de la
personne
M. Bédard: C'est un message très court. C'est
simplement pour informer, M. le Président, les membres de la commission
l'étant déjà, pour la plupart, que nous avons reçu
hier l'opinion de la Commission des droits de la personne concernant le projet
de loi en question. J'en ai pris connaissance vers les cinq heures de
l'après-midi. J'en ai fait faire des copies immédiatement, pour
qu'elles soient acheminées vers les représentants des Oppositions
et les membres de la commission parlementaire.
S'il y a des membres de la commission qui n'en ont pas reçu une
copie, nous sommes disposés à leur en fournir une.
Nous étions rendus à l'article 6. Je pense bien qu'il
s'agit de continuer.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Sur la question soulevée par le ministre, avec
votre consentement, sur les commentaires de la Commission des droits de la
personne, peut-on poser des questions au ministre, à savoir quel
traitement il a l'intention de donner à ce document?
M. Bédard: À l'heure actuelle...
M. Lalonde: A-t-il l'intention d'apporter des amendements,
conformément aux recommandations de la commission?
M. Bédard: ... j'ai demandé au contentieux de
l'examiner. À partir de l'étude article par article, nous serons
en mesure d'entamer la discussion, à la lumière des
représentations qui ont pu être faites par la Commission des
droits de la personne, sur les différents articles que nous aurons
à étudier. Je ne pense pas qu'il y ait lieu de faire un
débat sur l'ensemble de l'opinion de la commission, si nous voulons
avancer, je proposerais que nous continuions à procéder article
par article.
Le Président (M. Clair): J'ai laissé le
député de Marguerite-Bourgeoys poser sa question et le ministre y
apporter une réponse. Ce n'est pas une directive que je rends, parce que
j'aimerais réfléchir davantage à la question avant de
rendre une décision, si j'avais à en rendre une, mais il me
semble qu'on aurait avantage à étudier cette opinion, au fur et
à mesure de l'étude article par article. Je n'ai pas eu
l'occasion de prendre connaissance en détail de l'opinion de la
commission, mais j'imagine que cela doit porter sur des choses précises
qui sont à l'étude.
M. Lalonde: M. le Président, vous vous souvenez
sûrement que cette commission, et non pas le gouvernement, avait
unanimement adopté une résolution, je crois que c'était
unanimement, demandant à la Commission des droits de la personne
d'expliciter les commentaires qu'elle avait remis au gouvernement, cette fois,
il y a plusieurs mois.
Il me semble qu'il est tout à fait dans l'ordre que les membres
de cette commission s'interrogent sur le traitement non pas que le gouvernement
va faire de cette opinion, mais que la commission va en faire maintenant, et
pourquoi s'adresser au ministre de la Justice au sujet de la réaction
directe à l'action de la commission. Il me semble que si on laissait
simplement le gouvernement ou le ministre se préoccuper de cette
opinion, je pense que la commission ne ferait pas son devoir.
Le Président (M. Clair): Je suis tout à fait
d'accord avec vous, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Tout ce
que je vous indique, c'est que, sur la méthode de procéder, il
m'apparaît person-
nellement que, plutôt que d'en faire un débat
général et de mettre ensuite de côté l'opinion de la
commission, on devrait l'utiliser au fur et à mesure des articles et de
chacun des sujets sur lesquels la commission a pu donner son avis.
Quoi qu'il en soit, j'ai l'impression de mener le débat tout
seul. Je n'ai pas l'intention de le faire non plus.
M. Lalonde: Si on devait remettre à plus tard, à
une autre séance, toute action de la commission sur cette opinion, je
serais d'accord, parce qu'on vient de la recevoir. On ne peut pas
intelligemment la commenter actuellement. Mais je ne suis pas sûr qu'on
ne devrait pas nous allons y réfléchir
suggérer à la commission, à une séance
ultérieure, de discuter de cette opinion qui lui est adressée ou
enfin qui est adressée au ministre à la suite de la demande de la
commission.
Le Président (M. Clair): Dans la mesure, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, où je comprends que ce
seront des suggestions à venir, je suis bien d'accord avec vous.
À ce moment-là, je rendrai les décisions qu'il y a lieu de
rendre, s'il y a lieu d'en rendre. Mais on s'entend pour dire qu'on ne commence
pas ce matin par étudier l'opinion de la commission, qu'on continue
l'étude article par article.
M. Lalonde: Oui, M. le Président, je pense que c'est sage.
Nous allons toutefois, je pense, insister, et très bientôt, pour
qu'on en tienne compte, parce que, déjà, si j'ai parcouru
seulement les quelques premières pages, on a des commentaires aux tous
premiers articles, dans cette opinion.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Mégantic-Compton, avez-vous demandé la parole sur ce sujet?
M. Grenier: Oui, M. le Président, seulement pour dire que,
prenant connaissance des documents un peu tard, avant l'ouverture de la
commission, il y avait, bien sûr, des commentaires qui touchent chacune
des parties d'exposés faits par le membre de cette commission.
Je pense qu'il appartient à cette commission de se servir de ce
document, comme de tout autre document important qui nous est soumis et, lors
de l'étude article par article, de s'en servir, afin qu'on ne laisse
quand même pas à une commission paragouvernementale le soin de
décider pour nous, aussi objective qu'on puisse la connaître,
c'est nous qui sommes les gens qui doivent prendre des décisions.
C'est à cette table que le travail doit se faire et, je pense,
aux députés de se servir de ces arguments pour le faire article
par article. J'epère aussi qu'il nous sera permis d'étudier, de
repasser les textes qui font partie d'articles qui ont déjà
été adoptés.
Le Président (M. Clair): Le député de
Mercier. Le député de Rouyn-Noranda.
M. Samson: M. le Président, je suis d'accord avec les
membres de l'Opposition qui viennent de s'exprimer dans le sens que la
Commission des droits de la personne vient de faire connaître une opinion
qui a été effectivement demandée par vote unanime de la
commission. J'ai devant moi le texte de la motion. Je n'ai pas besoin de la
répéter. Je pense que tout le monde s'en souvient. D'ailleurs,
dans la lettre adressée à l'honorable ministre de la Justice par
le président de la commission, M. René Hurtubise, il est
effectivement repris que c'est à la suite de la demande de la commission
que ces commentaires nous sont parvenus.
Malgré que je trouve normal comme tout le monde qu'on se donne un
peu de temps, même si, moi, je l'ai eue hier soir, il semble que d'autres
ne l'ont pas eue hier soir. Ils n'ont donc pas eu le temps qu'il faut pour en
prendre connaissance. Il me semble que nous devrions pouvoir utiliser certaines
périodes, au cours de l'après-midi ou en soirée, pour
qu'au moins la commission puisse prendre connaissance officiellement de ces
recommandations, quitte à pouvoir en discuter et les revoir aux articles
concernés, notamment les articles 6, 7, 8 et 9 et autres, 25, 27, 28,
etc.
C'est tout simplement pour souligner que c'est une réponse
à un geste officiel posé par la commission. C'est normal que la
commission puisse en prendre connaissance officiellement aussi.
Le Président (M. Clair): Merci, M. le député
de Rouyn-Noranda. Messieurs, avant de donner la parole au député
de Mercier qui a demandé la parole, même si la séance a
débuté depuis quelques minutes à peine, accepteriez-vous
que le député de Jonquière, M. Vaillancourt, remplace M.
Lévesque (Taillon) comme intervenant, la séance étant
à son début? Alors, M. Vaillancourt (Jonquière) remplacera
M. Lévesque (Taillon) comme intervenant.
M. le député de Mercier.
M. Godin: M. le Président, c'est pour une directive.
Le Président (M. Clair): C'est pour ou ce n'est pas?
M. Godin: C'est pour une directive. Est-ce que c'est maintenant
qu'on doit se prononcer sur la recevabilité de ceci comme document
à étudier ou si... parce que l'intervention du
député de Marguerite-Bourgeoys n'est pas très
précise là-dessus. Est-ce qu'on doit intervenir maintenant pour
dire notre opinion sur les raisons de... se servir de cela comme document de
soutien dans le cas de l'étude article par article, ou si on doit
l'étudier comme tel, ou si on doit reporter cette analyse à une
autre réunion, à la demande du député de
Marguerite-Bourgeoys?
Le Président (M. Clair): Distinguons deux choses: le
mandat de la commission c'est l'étude article par article du projet de
loi.
M. Godin: C'est clair.
Le Président (M. Clair): C'est clair. Dans le cadre de
cette commission, cependant, on peut utiliser tout document au point de vue
d'un article spécifique. D'autre part, le député de
Marguerite-Bourgeoys a dit qu'il aurait des suggestions à faire, si je
l'ai bien compris, relativement à l'utilisation, ou à
l'étude, ou à des demandes que pourrait formuler la commission au
gouvernement, suite à la présentation de ce document par la
Commission des droits de la personne. Mais, je ne peux pas rendre de
décision sur les suggestions qui viendront...
M. Godin: D'accord, je vois que nos collègues d'en face
ont donné leur opinion sur le sort qui devrait être
réservé à cela. Est-ce que, de notre côté, on
va attendre que les suggestions viennent ou si on peut se prononcer dès
maintenant sur la façon, la venue de ce document à la
commission?
M. Lalonde: M. le Président, puisqu'on a
référé à ce que j'ai dit tantôt, je pense
qu'actuellement, au moment où on se parle, personne n'est prêt,
à moins que vous ne l'ayez vu longtemps avant nous.
M. Godin: Non, je ne l'ai pas vu, mais c'est seulement pour
savoir si le débat a lieu maintenant sur...
Le Président (M. Clair): Personne n'a demandé, M.
le député de Mercier...
M. Godin: ... la forme.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Mercier, personne, à ma connaissance, si je comprends bien les
événements qu'on vit actuellement, personne n'a demandé
d'étudier spécifiquement, immédiatement, le document comme
tel. Ce sont des réactions très préliminaires qui ont
été faites par chacun des membres qui ont parlé
jusqu'à maintenant, mais personne n'a demandé à faire
connaître ses réactions officielles, précises,
détaillées sur le contenu ou sur la méthode...
M. Godin: D'accord, c'est ce que je voulais savoir. Quant
à la méthode d'étude de ce document...
Le Président (M. Clair): II n'y a pas de suggestion
formelle.
M. Godin: ... dans le cadre d'article par article, en tant que
tel, il y a deux tendances qui s'affrontent ici, actuellement...
Le Président (M. Clair): II n'y a pas d'autre chose,
actuellement, de possible, puisque je n'ai pas rendu de décision sur
d'autre motion que de se servir de ce document au cours de l'étude
article par article, parce qu'il n'y a eu aucune autre motion, ni reçue,
ni adoptée pour autre chose que ce soit.
M. Godin: Cela répond à ma question, M. le
Président.
Le Président (M. Clair): II y avait le
député de Laval...
M. Lavoie: Très brièvement, pour les fins de la
bonne compréhension du journal des Débats, je ne demanderai pas
la lecture intégrale du document, mais est-ce qu'il y aurait
consentement de la commission qu'il soit annexé au journal des
Débats comme document important. On en discute actuellement et les
abonnés du journal des Débats, je pense qu'il serait utile qu'ils
puissent en prendre connaissance par le moyen de l'annexe au journal des
Débats.
M. Bédard: Je n'ai aucune objection là-dessus.
M. Samson: Oui.
Le Président (M. Clair): Même si, à ma
connaissance, c'est surtout au niveau de l'étude après la
première lecture qu'on a procédé comme suit. Étant
donné qu'il y a un consentement unanime au niveau de la commission, cela
va.
M. Bédard: Étant donné que c'est une opinion
qui a été demandée officiellement par la commission, il me
semble que ce serait normal que ce soit indiqué au journal des
Débats.
Le Président (M. Clair): Je demande au journal des
Débats de bien vouloir reproduire l'opinion de la Commission des droits
de la personne.
M. Lavoie: In extenso.
Le Président (M. Clair): In extenso. (voir annexe)
M. Lavoie: Sans correction.
L'objet de la consultation
Le Président (M. Clair): Au moment où nous avions
ajourné nos travaux, la semaine dernière, le député
de Laval avait fait une motion d'amendement qui était à l'effet
d'ajouter, à la fin de l'article, l'alinéa suivant: "Quel que
soit l'objet du référendum, il doit s'agir d'une question
à laquelle il ne peut être répondu que par un oui ou un
non". Ensuite de cela, le député de Marguerite-Bourgeoys avait
fait une motion de sous-amendement à l'effet de remplacer les mots "Quel
que soit l'objet du référendum" par les mots suivants: "Dans le
cas d'un référendum portant sur le statut constitutionnel du
Québec".
Quelques membres étaient déjà intervenus. Est-ce
que quelqu'un désire intervenir sur le sous-amendement ou si je le mets
immédiatement aux voix? (10 h 30)
M. Lalonde: M. le Président, je voudrais...
Le Président (M. Clair): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, vous aviez encore...
M. Lalonde: ... parler sur le sous-amendement.
Le Président (M. Clair): Sur le sous-amendement, vous
aviez déjà exercé un droit de parole de trois minutes.
M. Lalonde: Je vous remercie, M. le Président.
J'ai examiné de façon très attentive les arguments
qui ont été apportés par le député de
Terrebonne et le ministre, jeudi soir dernier, à l'encontre de ma
proposition de sous-amendement. J'ai examiné la transcription, pour
être bien sûr de les avoir bien compris. J'ai pris quelques notes
dont je voudrais vous faire part, M. le Président.
L'amendement que j'ai préparé à la motion du
député de Laval avait pour but de rendre cette dernière
acceptable au gouvernement. Je ne veux pas revenir là-dessus. On se
souvient que le député de Maisonneuve auteur de ce projet
de loi avait exprimé l'opinion que, dans le cas d'un
référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec, il
serait personnellement favorable à ce que la question n'amène
qu'un oui ou qu'un non. Les porte-parole du Parti québécois ont
répété à satiété que le
référendum sur l'avenir politique du Québec et, par voie
de conséquence, du Canada serait honnête et que la question serait
claire et précise. Tous les péquistes se réclament de la
plus grande honnêteté intellectuelle à cet égard.
Or, limiter la réponse à un oui ou un non exige justement une
question plus rigoureuse que celle qui donne ouverture à plusieurs
choix. Une question, par exemple, qui inviterait la population à cocher
l'une des propositions suivantes, suivant sa préférence: La
séparation, l'indépendance, la souveraineté-association,
la Confédération, le fédéralisme renouvelé
et, enfin, le statu quo, risquerait de ne rien régler du tout.
Voilà pourquoi nous préférons une question qui donne
ouverture à un oui ou à un non.
La problématique du référendum est connue, mais je
pense qu'il est bon de la rappeler, à ce stade de nos
délibérations. Le Parti québécois réclame
l'indépendance du Québec et décide de l'obtenir par les
voies démocratiques, seule manière acceptable sans doute
et aussi la seule possible dans le contexte politique
nord-américain. Mais voilà, il faut se faire élire et les
résultats des élections de 1970 et de 1973 indiquent que le
projet constitutionnel du Parti québécois constitue son principal
obstacle à son accession au pouvoir. Ironiquement,
l'indépendance, raison d'être du PQ, est à la fois le
principal objectif du Parti québécois et la principale objection
des Québécois à ce dernier. Cette bizarre contradiction
est à la source de l'ambiguïté opaque dans laquelle s'est
carrément installé le Parti québécois en
réclamant le pouvoir, non pas pour faire l'indépendance, mais
pour faire un bon gouvernement, disait-il. Mais voilà, pourquoi
étudions-nous le projet de loi no 92? Justement à cause de cette
promesse du Parti québécois. Sans l'objection des
Québécois à la séparation, la consultation
populaire serait sûre- ment au dernier rang des priorités de ce
gouvernement. La politique de consultation populaire, que je sache, n'a
commencé à voir le jour, dans le programme du Parti
québécois, que lorsqu'on a trouvé le truc du
référendum...
M. Paquette: C'est ridicule! On corrigera après, M. le
Président.
M. Lalonde: Mais il y a plus, M. le Président, au bazar
des ambiguïtés du Parti québécois, on trouve autre
chose.
M. Paquette: Basse partisanerie. Le Président (M.
Clair): À l'ordre!
M. Lalonde: S'étant solennellement engagé à
obtenir un référendum sur l'indépendance, on a obtenu le
pouvoir. Ayant maintenant le pouvoir, malgré l'indépendance, le
Parti québécois ne veut plus permettre à
l'indépendance de l'éloigner du pouvoir. Alors, le
référendum sur l'indépendance, que l'on sait fort
périlleux pour tout bon péquiste au pouvoir, on a commencé
par le cacher derrière une loi générale, suite à un
livre blanc qui chante les vertus de la consultation populaire, pierre
angulaire de notre démocratie.
C'est dans cette perspective qu'on a conclu, du côté du
gouvernement, à la nécessité d'un large consensus sur
cette loi, il ne faut pas de controverse. Il faut un large consensus, sinon,
toute l'opération est compromise.
Alors, pourquoi la réponse du gouvernement à mon
amendement est-elle négative? Elle laisse présager un refus
systématique du gouvernement de discuter du seul vrai
référendum que tous les Québécois et les Canadiens
attendent, celui sur l'indépendance. Non pas que la majorité des
Québécois et des Canadiens soient en faveur; mais, étant
donné que la question, le problème est posé, la
majorité des Québécois et des Canadiens veulent que le
référendum sur l'indépendance soit tenu. Vous me croyez
peut-être pessimiste, M. le Président, de conclure au refus
systématique du gouvernement de discuter du référendum sur
l'avenir constitutionnel. Mais je crois que plusieurs indices vont en ce sens
et les voici: premièrement, l'aveu du ministre; deuxièmement, la
faiblesse lamentable des arguments du député de Terrebonne et du
ministre dans leur argumentation l'autre soir; j'en ferai une analyse
plus tard troisièmement, le caractère non
controversé de ma motion, qui correspond, premièrement, à
une promesse du Parti québécois, celle de tenir un
référendum sur l'indépendance c'est ce à
quoi vise mon amendement et, deuxièmement, à une
déclaration du ministre parrain, original, mais auteur de ce projet de
loi, le député de Maisonneuve, qui est appuyé par le
premier ministre à savoir qu'il est souhaitable qu'on ait une question
à laquelle on ne puisse répondre que par un oui ou par un non. Le
Parti québécois s'engage à tenir un
référendum sur l'indépendance. On ne peut pas me
blâmer de faire un amendement dans ce
sens, réduit à un référendum sur l'avenir
constitutionnel.
Le premier ministre et le député de Maisonneuve, auteur du
projet de loi, déclarent publiquement que la question de ce même
référendum devrait se répondre par un oui ou par un non.
Comment nous blâmer, nous, de faire cet amendement? Et pourtant, le
député de Terrebonne est contre, le ministre aussi. Voici leurs
arguments. Le député de Terrebonne a commencé par un aveu;
il reconnaît que le député de Maisonneuve, auteur de cette
loi, est en faveur d'une question à laquelle on doive répondre
par un oui ou par un non. À la page 1 de la transcription, du folio 295,
le député de Terrebonne dit ceci: "Le ministre d'État
s'engageait à recommander au gouvernement que, pour un
référendum de nature constitutionnelle, la question soit simple
et qu'on y réponde par un oui ou par un non. Ce n'est pas un engagement
du gouvernement, mais un engagement personnel du ministre à recommander
à son gouvernement une formule telle". Voilà pour l'aveu!
Deuxièmement, le député de Terrebonne reproche
ensuite aux députés libéraux d'avoir plagié cet
amendement à la loi fédérale qui, à certains
égards, donne, d'après lui, une leçon ou tente de donner
une leçon de démocratie au Parti québécois. On est
très chatouilleux, de ce côté de la table, M. le
Président, en ce qui concerne le projet de loi fédéral.
Mais c'est absolument faux qu'on ait plagié cela du projet de loi
fédéral. Bien avant que le projet de loi fédéral
et je vous avoue, entre vous et moi, que je ne l'ai pas lu, mais c'est
simplement pour moi que je parle...
M. Paquette: Nous n'avons pas à prendre de leçon de
démocratie!
M. Lalonde: Je n'ai pas à en juger ici, de toute
façon. C'est faux qu'on ait pris cela du projet de loi
fédéral. Je présume que le député de
Terrebonne dit la vérité lorsqu'il dit que c'est dans le projet
de loi fédéral, parce que je ne l'ai pas lu, mais on en parlait
bien avant que le projet de loi fédéral soit
déposé. Et même, quand cela serait. Et puis après?
On dirait que le député de Terrebonne, aveuglé par la
partisanerie, ne s'est pas aperçu que son argument s'inspire de
l'intolérance, qu'il manque d'objectivité, qu'il participe au
plus rétrograde mépris de l'intelligence. C'est exact, mais,
parce que cela vient du fédéral, c'est mauvais.
M. Godin: C'est Bossuet!
M. Lalonde: Mais je pense qu'un tel argument laisse
présager le régime d'autoritarisme intellectuel qu'on voit de
plus en plus dans les décisions et les gestes de ce gouvernement.
M. Godin: C'est de Ryan, cela!
M. Lalonde: Enfin, le député de Terrebonne s'est
lancé dans une démonstration qui se voulait drôle, la
pauvreté du libellé de la loi fédérale. Belle
pertinence, M. le Président!
Puis vint l'hypothèse des questions multiples dans le projet
fédéral. À la page 299, à ce qui nous a valu
à peu près la plus nébuleuse partie de l'intervention du
député. À la fin, on ne savait plus s'il allait se
déclarer pour l'amendement du député de Laval qui ne
prévoit pas de question multiple et s'il allait justement favoriser cet
amendement justement à cause du projet fédéral qui en
prévoit. Mais non, une dernière pirouette a permis au
député de Terrebonne de tout nier et de tout affirmer à la
fois.
Au fond, la dialectique est simple: Tout ce qui est libéral est
mauvais.
Enfin, le député fait l'étalage d'une ignorance
étonnante pour un législateur aguerri. Il s'oppose à ce
qu'il appelle l'introduction d'un principe de spécificité dans
une loi-cadre.
Or, de nombreux précédents prouvent la pauvreté de
la position du député. Je vous ferai simplement
référence au Code des professions, à l'article 179,
à l'article 44, à l'article 48, à l'article 41, à
la Loi sur les jurés (1976, chapitre IX, article 41), à la Loi
101, une loi de ce gouvernement, aux articles 73, 81, 88, 96 et 97 où,
dans une loi-cadre, on prévoit une disposition tout à fait
spécifique. Même le projet de loi 92 prévoit des
dispositions très spécifiques à l'article 20, alors qu'il
dit: "Nonobstant l'article 19, la question inscrite sur les bulletins de vote
utilisés dans les bureaux de votation situés sur une
réserve indienne ou dans un endroit où vit une communauté
amérindienne ou inuit, doit être rédigée en
français et dans la langue, etc..." Peut-on avoir une disposition plus
spécifique, plus détaillée que celle-là? C'est dans
la loi-cadre.
M. Bédard: Oui, on vous expliquera pourquoi. C'est en
relation avec des lois existantes.
M. Lalonde: Oui, je ne suis pas en désaccord avec ces
dispositions, mais...
M. Bédard: C'est en relation avec des lois existantes.
M. Lalonde: ... c'est quand même l'introduction d'un
principe de spécificité dans une loi-cadre, puisqu'il faut citer
l'auteur. Il me semble que son argument est tout à fait inacceptable. On
doit conclure, M. le Président, que c'est la seule façon que le
député de Terrebonne a trouvée, a choisie, pour
s'affranchir de l'engagement du député de Maisonneuve.
Devant la faiblesse étonnante des arguments du
député de Terrebonne, je continue, quant à moi, de me
réclamer de l'engagement du député de Maisonneuve pour
inviter tous les députés à appuyer ma motion. Le ministre
commence à souhaiter qu'on ne discute pas du seul vrai
référendum, celui de l'indépendance, au cours de
l'étude du projet de loi. C'est étonnant pour la transparence,
mais c'est bien ce qu'il a fait au début de son intervention.
Pourtant, le référendum sur l'indépendance est une
créature péquiste, mais le ministre ne veut
pas en parler. La théorie voulant que le gouvernement cache son
vrai visage derrière la respectabilité d'une loi-cadre
prendrait-elle de plus en plus de vraisemblance? Quoiqu'il en soit...
M. Bédard: C'est incroyable de faire une argumentation
comme celle-là!
M. Lalonde: ... le ministre se pourfend d'une solennelle promesse
d'une question claire, unique et précise. Va-t-il appuyer l'amendement?
On s'y attend. Mais non, il déclare, au début de son intervention
qu'il est pour une question claire, nette et précise...
M. Bédard: Même unique, claire et
précise.
M. Lalonde: ... même unique, mais pourquoi ne pas mettre
cela dans la loi?
M. Bédard: Vous ne comprenez pas ce qu'est une
loi-cadre.
M. Lalonde: Le temps des promesses et des grandes
déclarations ronflantes est terminé, c'est le temps
d'écrire des lois, nous sommes des législateurs maintenant.
Pourquoi ne pas le mettre dans la loi, pour ce qui concerne le
référendum sur l'indépendance?
Le ministre a aussi l'argument que c'est une loi-cadre. J'ai
déjà répondu. Je pense que cela vaut autant pour le
ministre que pour le député de Terrebonne, sauf que j'aurais cru
que le ministre de la Justice, le jurisconsulte du gouvernement, le grand
patron des légistes, le rédacteur en chef des lois, nous
donnerait une démonstration un peu plus sérieuse de sa
connaissance en matière législative. (10 h 45)
Ensuite, il tente de distraire la galerie en dessinant un
éventuel et hypothétique référendum sur le
régime présidentiel. Pourquoi pas un éventuel
référendum sur l'association avec Cuba ou avec les
États-Unis? À ce moment-là, ce ne serait pas un oui ou un
non qu'il faudrait prévoir, ce serait un "si " et un "no". Pourquoi pas
un "da " et un "niet"?
M. Godin: "Que cultura"! M. Lalonde: Pourquoi pas?
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Lalonde: C'est complètement ridicule, M. le
Président, et le ministre, qui n'a pas le sens du ridicule très
développé, trouve le moyen de terminer son double saut
périlleux de la façon suivante... Et, tenez-vous bien, le
ministre avait bien dit qu'il ne pouvait pas appuyer mon amendement, mais,
pourtant, à la page 1 du folio 304, il dit ceci: "Je pense que,
concernant le référendum spécifique sur l'avenir
constitutionnel du Québec que nous avons en tête, je n'ai pas
besoin de répéter ce que j'ai dit au tout début, à
savoir que cela devrait être une question unique, que cela devrait se
répondre par un oui ou un non".
C'est l'opinion du ministre, c'est l'opinion de l'auteur du projet de
loi, et il n'y a pas un député qui veut voter en faveur.
Pourquoi? Je pense, M. le Président, que le gouvernement se voit
démasqué dans sa tentative de donner des grands airs de
respectabilité à son option constitutionnelle, en la cachant
derrière une loi générale, une loi-cadre. Ce
n'était pas aussi évident jusqu'à ce qu'on aborde
l'article 6, il faut l'avouer. On avait déjà un climat
d'ouverture assez évident au début, avec le député
de Maisonneuve, simple coïncidence, j'espère, depuis
l'arrivée du ministre de la Justice, la fermeture et l'étalage
d'arguments fallacieux et inutiles.
Le débat ne devrait pas être politique dans le sens
partisan, parce qu'on parle d'une loi-cadre sur le référendum.
Mais il risque de l'être si le gouvernement se refuse à parler du
vrai et du seul référendum qui préoccupe les
Québécois, le référendum sur l'indépendance.
M. le Président, j'ai terminé.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, j'aimerais appuyer le
sous-amendement fait par le député de Marguerite-Bourgeoys
à l'amendement proposé par le député de Laval. En
fait, c'est pour se rendre à la demande du parrain du projet de loi, le
député de Maisonneuve, que le député de
Marguerite-Bourgeoys, à notre dernière séance, a fait
cette motion de sous-amendement, pour spécifier que. dans le cas d'un
référendum portant sur le statut constitutionnel du
Québec, et seulement dans ce cas précis, il devait s'agir d'une
question à laquelle il ne pourrait être répondu que par un
oui ou par un non.
Au cours du débat sur la motion d'amendement originale du
député de Laval, le député de Maisonneuve, ministre
d'État à la réforme électorale, avait
indiqué à plusieurs reprises que son objection à
l'adoption de l'amendement n'en était pas une de fond, mais bien
plutôt une de forme.
Je vous citerai, à cet effet, certains extraits des
épreuves du journal des Débats du 18 mai, au numéro 271,
par exemple, où M. Burns dit: "Si celle-ci était de cette nature,
c'est-à-dire dans une loi à caractère spécifique,
on peut très bien, immédiatement, dès l'adoption de la
loi. savoir à peu près dans quel genre la question va être
formulée. À ce moment-là, on ne prévoit même
pas de cas hypothétiques qui peuvent se présenter dans deux ans,
trois ans, quatre ans, cinq ans. dix ans: c'est là où se trouve
la difficulté dans une loi à caractère organique, savoir
justement se lier les mains à un type particulier de
référendum, à un type particulier de question".
Ai-je besoin de vous rappeler, M. le Président, que
c'était là une des raisons qui nous ont fait opter dès le
début, avant même le dépôt du projet de loi,
c'est-à-dire au moment de la divulgation du
livre blanc, qui nous avait fait opter, dis-je, pour une loi
spécifique plutôt qu'une loi organique de la consultation
populaire? C'était une des considérations qui nous avaient
convaincus que le référendum auquel tous au Québec
pensent, le seul référendum qui a une certaine importance au
moment où on se parle, que ce référendum, dis-je, se
devait d'être retenu à partir d'une loi spécifique
plutôt que d'une loi-cadre.
Le ministre responsable de la réforme électorale disait au
même rouleau, un peu plus loin: "Je veux vous répéter,
encore une fois, pour la "nième" fois, que je suis personnellement
favorable à une question qui se réponde, dans le cas du
référendum sur l'avenir politique du Québec, par un oui ou
par un non". C'était bien clair. Je pense qu'on ne l'a pas caché.
Je pense même que le premier ministre ne l'a jamais caché. C'est
un cas, sauf que je vous dis qu'il y a beaucoup d'argumentation qui peut
être faite pour votre position, c'est-à-dire pour l'adoption de
l'amendement proposé, amendement du député de Laval, sans
la précision apportée par le sous-amendement du
député de Marguerite-Bourgeoys, pour votre position. Il y a
beaucoup d'argumentation qui peut être faite contre cette position, pour
laisser plutôt cette ouverture à la loi pour des cas qu'on
n'imagine pas encore. Cette loi doit être à caractère
général.
Nous convenons que la loi doit être à caractère
générai, mais, comme l'a expliqué le député
de Marguerite-Bourgeoys il y a quelques instants, il y a plusieurs
précédents, plusieurs exemples de lois-cadres où des
dispositions viennent préciser la portée de certains articles.
C'est tout ce que vise à faire la motion de sous-amendement du
député de Marguerite-Bourgeoys dont nous discutons ce matin.
Le député de Maisonneuve disait au rouleau 272 de cette
même séance du 18 mai: "Je dis que s'il s'agissait d'une loi
spécifique pour un référendum et, en particulier celui
auquel probablement le député de Laval pense de façon plus
intense, parce que c'est le plus invitant et le plus rapproché on
parle, bien entendu de celui sur l'avenir constitutionnel du Québec
je n'aurais pas de difficulté à me ranger à son
idée. Possiblement, je demanderais au Conseil des ministres de
m'autoriser à inclure dans la loi un oui ou un non comme question". Il
me semble que c'est clair.
M. Bédard: ...
M. Gratton: Je ne peux pas vous dire qu'il a parlé d'un
oui ou d'un non comme question. C'est le ministre qui a fait l'erreur, ce n'est
pas moi, je le citais.
C'est clair que ce que le député de Maisonneuve nous
disait le 18 mai c'était: Je suis d'accord en principe sur votre
amendement, je suis d'accord sur le fond de votre amendement et je l'adopterais
volontiers tout de suite, au nom du Conseil des ministres, je le proposerais au
Conseil des ministres, si on était en train de discuter d'une loi
spécifique, mais, malheureusement, c'est d'une loi-cadre qu'on discute
d'ailleurs.
C'est bien de valeur, on va répéter et on va
répéter à satiété qu'on a l'impression, du
côté de l'Opposition, que c'est justement une des principales
raisons pour lesquelles le gouvernement a préféré proposer
une loi-cadre plutôt qu'une loi spécifique, que c'est justement
dans le but d'être le plus ambigu possible, en tout cas, d'être
dans une position de préciser le moins possible d'avance et le moins
tôt d'avance, dans la discussion, ses vraies intentions. C'est tout
à fait caractéristiques de toute la démarche du
gouvernement vis-à-vis du référendum sur l'avenir
constitutionnel du Québec, tant par son refus systématique de
publier ses études, de préciser son option
souveraineté-association aussi bien que de préciser, dans un
texte de loi, les moyens, l'outil que constitue le projet de loi que nous
discutons ce matin.
C'est, je pense, très évident pourquoi le
député de Marguerite-Bourgeoys a présenté cette
motion de sous-amendement, c'est justement pour se rendre au voeu du ministre
d'État à la réforme électorale qui le disait en
toutes lettres.
Je continue, au rouleau 272, de citer le député de
Maisonneuve: "M. le Président, à ce moment-là, dis-je, je
n'aurais pas eu de difficulté à me ranger à cette opinion,
mais, comme la loi est à caractère général, je
pense qu'on doit garder cette prudence vis-à-vis d'éventuels
autres référendums".
M. Bédard: Vous avez la réponse... M. Gratton:
Oui, c'est cela.
M. Bédard: L'argumentation du ministre qui m'a
précédé est la même pour moi et vous ne voulez pas
comprendre...
M. Gratton: Oui, c'est cela! M. Bédard: ...
l'argumentation.
M. Gratton: Effectivement, M. le Président, si on parle
des interventions du ministre de la Justice, qui est venu remplacer le ministre
de la réforme électorale, malheureusement indisposé par la
maladie, au lendemain du 18 mai, on voyait, sur huit colonnes, photo du
ministre de la Justice à l'appui il s'agit ici du journal Le
Droit, vendredi...
M. Grenier: Ce n'est pas votre meilleure!
M. Lalonde: II n'avait pas l'air bien convaincant
là-dessus!
M. Gratton: ... 2 juin 1978...
M. Bédard: Quand on en est rendu à analyser des
photos, vous n'êtes pas sérieux franchement.
M. Lalonde: C'est vous qui avez dit que c'était beau.
M. Bédard: C'est comme votre argumentation.
M. Lavoie: Tâchez d'avoir un peu d'humour, voyons!
Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs!
M. Gratton: M. le Président, question de règlement.
Je ne pense avoir fait allusion, d'aucune façon, à l'analyse de
la photo. D'ailleurs...
M. Bédard: Allons dans l'argumentation. Je suis sûr
que vous la trouvez bonne!
M. Lavoie: On va laisser cela à la gent
féminine.
M. Bédard: C'est cela!
M. Gratton: ... la photo ne lui rend pas justice.
M. Bédard: Ce sont les arguments qui sont importants.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît, messieurs!
M. Gratton: Je me réfère donc à une
dépêche de la Presse canadienne que j'ai retrouvée dans
l'édition du 2 juin du journal Le Droit. Le titre sur huit colonnes:
"Référendum, une question unique, claire et précise,
Marc-André Bédard ". C'est d'ailleurs ma mère, M. le
Président, qui, au moment où je l'ai rencontrée, la fin de
semaine suivante, me disait: "Enfin, le gouvernement a accepté de poser
une question unique, claire, et qui appellerait une réponse par un oui
ou par un non".
M. Godin: Son fils l'a intoxiquée!
M. Paquette: On va aller lui parler à sa mère!
M. Gratton: M. Bédard l'a dit...
Une voix: II a dit bien d'autres choses.
M. Gratton: M. Burns l'a dit, M. Lévesque, René
(Taillon) l'a dit, mais il n'y a pas un seul de ses ministres qui ait
accepté de le mettre dans la loi. Le ministre disait tantôt: "Des
mots". S'il y a un gouvernement qui connaît cela des mots, c'est bien
celui qui est en face de nous, M. le Président. Des mots, en voulez-vous
des mots!
Lisons un peu le texte de l'article: "Le gouvernement posera une
question unique, claire et précise, qui amènera une
réponse précise de la population". C'est l'assurance qu'a
donnée, hier soir, le ministre de la Justice, Me Marc-André
Bédard, alors qu'il parrainait, pour la première fois,
l'étude en commission parlementaire du projet de loi no 92...". Le
ministre l'a dit. Grande déclaration, photo de
téléphoto PC et titre ronflant de la PC sur huit colonnes,
mais dans la loi, rien! Toujours rien, parce que, voyez-vous, chers
électeurs, il ne s'agit pas d'une loi-cadre sur le
référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec, il
s'agit d'une loi-cadre. Imaginez-vous donc! On va peut-être poser toutes
sortes de questions sur toutes sortes de sujets à la population
québécoise. Pourquoi s'encarcaner immédiatement à
préciser, dans le projet de loi, que la question, au moment du
référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec, devra
appeler une question par un oui ou par un non, parce que peut-être bien
on tiendra un référendum sur le port obligatoire de la ceinture
de chasteté, par exemple. Peut-être vou-dra-t-on, à ce
moment, que les gens répondent par un oui ou par un non, mais
peut-être par un "peut-être". Sait-on jamais quelle sera la
position de la population vis-à-vis de cette importante question de la
ceinture de chasteté qui fera peut-être l'objet du rodage dont
parlait le ministre de la réforme électorale, de cet outil qu'on
de donne avec la loi no 92? C'est de la foutaise, M. le Président! C'est
complètement ridicule et j'irai même plus loin, c'est
hypocrite...
M. Vaillancourt (Jonquière): II aurait dû dormir
quelques heures de plus!
M. Paquette: Allez donc dormir encore un peu, cela va vous faire
du bien!
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Gratton: C'est hypocrite, dis-je, M. le Président, de
la part de tous ceux qui dans ce gouvernement... Il y a une expression en
anglais qui dit: "To pay lips service", "that is what you are doing, you are
paying lips service " à une question unique, claire et précise,
mais lorsqu'il s'agit d'entériner vos belles intentions et vos belles
paroles, dans le texte du projet de loi: "Ah non, c'est une loi-cadre! "
Imaginez donc!
M. le Président, je citerai à nouveau... En fait, M. le
Président, vous permettrez une brève dis-gression...
M. Lalonde: Digression! M. Gratton: Digression.
M. Paquette: Vous n'êtes pas dans une digression depuis le
début?
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Gratton: Non, pas à ma connaissance. Voulez-vous faire
appel au règlement, sur la pertinence? Allez-y.
M. Paquette: Non, cela va. Continuez, je vous en prie.
M. Gratton: Si vous n'avez rien à dire, laissez-moi
parler. (11 heures)
Justement, sous le même article dont je parlais tantôt, il y
a un autre titre, toujours de la Presse canadienne: "Le
référendum sur l'indépendance, la CEQ réclame une
loi spéciale". Il ne s'agit sûrement pas d'une officine du Parti
libéral, on parle de la CEQ. "Les 200 membres du conseil
général de la CEQ ont rejeté hier l'institutionnalisation
des consultations populaires prévue par le projet de loi 92 et ont
réclamé que le référendum
sur l'indépendance fasse l'objet d'une loi spéciale. C'est
ce que la CEQ réclame".
On ne parle plus des gros méchants du Parti libéral, on
parle de la bonne et unique CEQ. Pourquoi veut-elle cela? On pourrait lire le
reste du texte pour se rendre compte qu'elle ne croit pas à cet outil de
la démocratie. Ce n'est pas de cela qu'on parle ici. Si on pouvait dire
à la CEQ: On ne vous donne pas ce que vous désirez,
c'est-à-dire une loi spéciale sur le référendum sur
l'avenir constitutionnel du Québec, on vous donne une loi-cadre, parce
qu'on a décidé de faire cela; mais, dans notre loi-cadre, on vous
dit tout de suite que, dans le cas de ce référendum en
particulier, la question sera unique, claire, et appellera comme réponse
uniquement un oui ou un non.
J'ai l'impression que la CEQ serait déjà moins en
opposition avec le projet de loi 92, parce que, justement, la CEQ voudrait
comme combien d'autres Québécois, pas nécessairement
strictement des fédéralistes, un tas innombrable
d'indépendantistes, de vrais indépendantistes eux aussi, bien
voir le gouvernement faire son lit une fois pour toutes, dire clairement ce
qu'il représente. Forcément, les vrais indépendantistes
sont aussi mélangés que les fédéralistes quand ils
lisent les déclarations du député de Mercier à
Toronto, à comparer à celles du député de
Deux-Montagnes à Chibougamau et celles du premier ministre, qui est
tiraillé entre les deux extrêmes. Comment s'y retrouver, surtout
lorsque le seul endroit où on peut réellement discuter de
façon concrète de ce référendum dont tout le monde
parle, c'est ici en commission parlementaire, à l'étude du projet
de loi no 92? C'est ce qu'on fait, M. le Président, en proposant de
spécifier dans la loi, dans cette loi-cadre dont personne ne doute que
tout le monde comprend bien pourquoi on a une loi-cadre plutôt qu'une loi
spécifique sur le référendum qui nous
intéresse.
À moins que le gouvernement se ravise, à moins que les
députés ministériels membres de la commission, qui sont
pourtant solidaires du programme du Parti québécois, à
moins que tous ces gens ne soient des hypocrites, j'en conclus qu'ils devront
adopter la motion de sous-amendement du député de
Marguerite-Bourgeoys, aussi bien que la motion d'amendement, non pas pour
encarcaner le gouvernement dans quelque voie irrémédiable que ce
soit, mais strictement pour en arriver à faire, dans le texte de loi, ce
qu'on dit vouloir faire dans toutes les déclarations ronflantes qu'on a
pu entendre de la part du ministre de la Justice, de la part du ministre
responsable de la réforme électorale aussi bien que de la part du
premier ministre lui-même et de tous les membres de son gouvernement.
Tout le monde dit qu'il y aura seulement une question claire,
précise et unique. D'ailleurs, M. le Président je
terminerai là-dessus le ministre de la Justice a laissé
entendre aux journalistes de la Presse canadienne, dans cet article du 2 juin,
que la démarche de l'Opposition visait à faire du projet de loi
92 un projet de loi ne s'adressant qu'au référendum sur la
question constitutionnelle ou sur l'avenir constitutionnel du Québec. Je
vous citerai deux courts paragraphes, M. le Président: "Pour ce qui est
de réduire la portée de la loi au seul cas d'un
référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec, le
ministre Bédard s'y objecte pour la raison bien simple que le projet de
loi qui est présentement à l'étude en est un de type
cadre".
M. le Président, il n'a jamais été question, il
n'est pas question dans la motion d'amendement du député de Laval
ou dans la motion de sous-amendement du député de
Marguerite-Bourgeoys, de réduire la portée du projet de loi 92 au
seul référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec. Il
n'est pas question de cela du tout. Il est strictement question de
spécifier que, dans le cas de cette consultation populaire...
M. Godin: Savez-vous...
M. Gratton: Pardon?
M. Godin: Savez-vous lire?
M. Gratton: Oui.
M. Godin: Ce que vous dites le contredit.
M. Gratton: Non.
M. Godin: L'amendement Lavoie parle de tous les
référendums.
M. Lalonde: Non, avec le sous-amendement, cela réduit
simplement.
M. Godin: Non, mais il parle de l'amendement Lavoie, il ne parle
pas seulement du sous-amendement.
M. Gratton: II faut bien que je parle de l'amendement Lavoie. On
n'est pas en train d'amender l'article, on est en train de sous-amender
l'amendement du député de Laval. Je sais lire et j'ai compris
cela. J'espère qu'on se comprend, M. le député de
Mercier.
M. Godin: Vous, vous ne comprenez pas.
M. Gratton: Voyons donc!
M. Godin: On verra tout à l'heure.
M. Gratton: Le député de Laval propose tout
simplement que, dans tous les cas, la question appelle une réponse par
un oui ou par un non.
M. Godin: Que ce soit oui ou non. Cela réduit le
champ.
M. Gratton: Cela ne réduit absolument rien, c'est dans
tous les cas. Là où on réduit, c'est avec le
sous-amendement du député de Marguerite-Bourgeoys, qui
répond aux objections qu'avait soulevées le député
de Maisonneuve lors de la présentation de la motion du
député de Laval qui
nous disait... Cela fait vingt minutes que je dis cela, M. le
Président, devrais-je reprendre...
M. Bédard: Je me demande pourquoi vous vous reprenez
d'ailleurs.
M. Gratton: Parce que le député de Mercier ne
semble pas avoir compris, c'est bien simple.
M. Bédard: II a très bien compris et on comprend
très bien.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Gatineau, vous avez encore une
minute.
Une voix: C'est de la non-pertinence.
M. Gratton: Je termine en disant et en répétant que
la motion, telle que sous-amendée par le député de
Marguerite-Bourgeoys, ne vise aucunement et n'a pas pour effet de
réduire la portée du projet de loi 92 au seul
référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec. Je
pense bien que si les députés ministériels ne comprennent
pas cela, en fait, je suis convaincu qu'ils le comprennent, mais je vous dis
que s'ils votent contre l'adoption de cet amendement tel que
sous-amendé, ils feront preuve d'hypocrisie, M. le Président.
Le Président (M. Clair): Le député de
Mercier.
M. Godin: M. le Président, j'ai l'impression que
l'Opposition officielle ne s'est pas encore rendu compte qu'il y avait eu un
changement de gouvernement.
M. Lalonde: Ah oui!
M. Godin: Depuis le début, j'ai participé à
plusieurs commissions parlementaires et les libéraux veulent constamment
modifier le fond même des lois qu'on étudie ici.
M. Lalonde: On n'a pas le droit?
M. Godin: Vous avez le droit, sauf que, ne vos étonnez
pas...
M. Lalonde: Voulez-vous gouverner par décret
maintenant?
M. Godin: Est-ce que j'ai la parole, M. le Président?
M. Lalonde: Voulez-vous gouverner par décret
maintenant?
Le Président (M. Clair): M. le député de
Mercier, vous avez la parole sur le sous-amendement du député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Godin: D'accord. Ne vous étonnez pas si nous avons une
autre logique que la vôtre, parce que ce référendum, pour
nous, suite à une réflexion sur la manière de permettre la
participation la plus démocratique possible des Québécois
à leur avenir, dans bien des secteurs et pas seulement
constitutionnellement, nous avons décidé d'ajouter à
l'arsenal, à l'éventail des lois qui existent au Québec,
une loi qui incarnerait le principe parlementaire britannique du "consent by
the people", le consentement du peuple, qui s'ajouterait au consentement du
Parlement.
Nous voulons que cette loi-ci, qui est devant nous, soit la loi qui
porte sur le consentement populaire qui viendrait confirmer, entériner
un consentement parlementaire. L'Opposition s'acharne à vouloir
réduire le champ d'application de cette loi générale. En
l'occurrence, l'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys
serait à classer dans ce que le principe appelle "de minimis non curat
lex", des choses secondaires la loi n'a cure. En l'occurrence, l'amendement du
député de Marguerite-Bourgeoys est un détail très
spécifique et très secondaire par rapport à la loi
générale.
Quand le moment viendra et ces messieurs d'en face seront
toujours là, j'espère, et peut-être même un de plus
de venir...
M. Lalonde: Vous n'avez pas bien confiance en votre candidat dans
NDG.
M. Godin: ... de venir...
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Godin: Quand le moment viendra, M. le Président, de
venir à demander le consentement...
M. Bédard: Le vôtre n'a pas eu confiance non
plus.
M. Ciaccia: II le concède. M. Lalonde: II le
concède.
M. Godin: Quand le moment viendra de venir devant le peuple pour
lui demander son consentement à une loi ou à une autre, à
une décision ou à une autre, nous proposerons à la Chambre
des documents spécifiques, des questions spécifiques. Ce sera le
moment, si on n'est pas d'accord sur ces questions spécifiques qui,
dès lors, ne seront plus du domaine "de minimis" c'est-à-dire des
choses secondaires, parce que ce sera la loi particulière portant sur un
tel sujet, il sera temps d'apporter des nuances, des précisions sur la
formulation de la question; mais on se trompe de porte, on se trompe de loi, on
se trompe de moment. On veut se substituer dans le temps à ce qui sera
le privilège du Parlement quand le moment sera venu.
Le député de Marguerite-Bourgeoys, de commission en
commission, continue à distribuer des médailles, des prix
d'excellence, des qualificatifs de fallacieux, d'ambiguïté ou
d'hypocrisie; après chaque intervention ministérielle, il met des
zéros sur dix, des deux sur dix, des quatre sur dix, il continue
à faire cela ici et il reproche au gouvernement d'avoir gagné, en
mettant sur le tapis son
option souverainiste. Supposons, M. le Président, que nous
aurions dit: Si nous prenons le pouvoir, la souveraineté politique est
faite. Ils auraient été les premiers à dénoncer
cette pratique qui fut pourtant celle du parti de MacDonald et Cartier dans le
cas de la Confédération elle-même; sans aucun mandat
populaire, nous avons été entraînés de force, comme
peuple, dans la Confédération, et nous voulons en sortir
démocratiquement. La population de Terre-Neuve a eu le choix d'entrer
dans la Confédération. Nous n'avons pas été
consultés, quand Terre-Neuve est entrée dans la
Confédération. Cela nous coûte des taxes, une partie de mon
talon de chèque que j'envoie à Ottawa et qui s'en va directement
à Terre-Neuve. Je n'ai jamais été consulté
là-dessus. Le précédent est là.
M. Grenier: ...
M. Godin: Je continue, M. le Président, si on me permet.
Il nous reproche d'avoir recours au référendum, comme à
une fourberie inventée pour tromper le peuple québécois.
Sans référendum, nous disent-ils, vous auriez été
battus, comme si les turpitudes du gouvernement précédent
n'étaient pas une raison suffisante pour qu'il soit battu. Le
référendum est tout simplement un mécanisme
démocratique qui est d'ailleurs pratiqué dans les
municipalités du Québec, depuis un siècle au moins. On
consulte le peuple dans les municipalités sur les emprunts, sur les
travaux, sur un tas de questions, même sur des arénas. Ce qui
montre bien que, dans la jurisprudence québécoise
elle-même, il y a des précédents. Dans certains cas, on
offre le choix, plusieurs choix.
Par conséquent, dans une loi générale, on ne peut
pas se lier les mains et faire entrer des choses particulières, des
détails particuliers. Cela viendra quand le moment sera venu de
soumettre aux Chambres une question particulière sur un sujet
particulier. D'ailleurs, après avoir participé aux
réflexions préalables, préliminaires à la
publication du livre blanc, nous avons même pensé, à un
moment donné, à inscrire dans ce livre blanc l'initiative
populaire, comme un des mécanismes permettant la tenue d'un
référendum. Par conséquent, dans notre esprit, il
s'agissait bien de mettre en place dans l'arsenal des lois le moyen de
consulter le peuple sur des choses qui apparaissent au gouvernement quel qu'il
soit... car cet arsenal existera, cette loi existera même dans 20 ans,
dans 25 ans. Peut-être bien que le gouvernement ne sera plus là,
mais d'autres gouvernements auront recours à cette loi. Il
apparaîtra, à ce moment, dans les perspectives historiques
peut-être un peu aberrant de voir les arguments et les amendements et
sous-amendements des députés de Marguerite-Bourgeoys et de Laval.
On se demandera: Comment se fait-il que, dans une loi générale,
on a mis cela, puisque la question constitutionnelle vraisemblablement sera
résolue? Donc, au lieu d'être forcés après coup
à faire disparaître les paragraphes désuets d'une loi
générale, nous aimons mieux rester dans l'ordre
général. (11 h 15)
D'ailleurs je termine là-dessus l'Opposition, au
fond, ce qu'elle veut et cela se lit entre les lignes c'est de
discréditer d'avance la consultation populaire. C'est de
discréditer d'avance le référendum sur la
souveraineté qui sera l'étape suivant éventuellement cette
première éta-te. Mais il n'est pas dit que ce sera la
première. Il n'y a personne qui a dit cela. Cette commission n'a pas
été saisie du fait que ce sera la première consultation
populaire, celle qui sera faite sur le référendum. Jamais. Donc,
elle n'a pas d'affaire ici, cette question, au fond.
Enfin, M. le Président, il est sûr que l'Opposition, tout
en étant contre le recours au peuple pour entériner une
décision essentielle ou importante du Parlement, aimerait bien poser la
question elle-même. L'actuel et nouveau chef du Parti libéral,
dès que le Parti québécois a pris le pouvoir, a
proposé la création d'un comité de sages dont il se voyait
déjà président, qui aurait été
chargé, en dehors du Parlement, de préparer la question, ce qui
était humiliant pour cette institution, puisque les élus sont
ici. Il aurait bien aimé que la question, par exemple, soit:
Êtes-vous pour ou contre l'incertitude? Êtes-vous pour ou contre le
séparatisme? C'est la question que l'Opposition veut qu'on pose. Par des
voies détournées, elle essaie d'imposer à la
majorité démocratiquement élue la question qu'elle
soumettra au Parlement et ensuite au peuple. C'est pour cette raison, M. le
Président, que je voterai contre cette motion, tout en ajoutant que s'il
est vrai que, depuis dix ans, un parti indépendantiste a
été littéralement avalé par un parti souverainiste,
il est non moins vrai que des fédéralistes, il n'y en a plus.
Même le nouveau chef du Parti libéral a été
élu, en reprenant une phrase célèbre d'Yvon Deschamps:
"Nous voulons un Québec libre dans un Canada fort". Il a dit cela dans
la partie anglaise dé son discours et, ayant l'avantage d'être
bilingue, je l'ai compris, je l'ai enregistré et je me le
répète souvent pour faire la preuve qu'il n'y a plus de
fédéralistes au sens où il y en avait, il y a dix ans.
Même les gens de l'Opposition parlent d'un fédéralisme
renouvelé. On attend nous autres aussi qu'ils déposent les
documents qui diraient ce qu'est le fédéralisme renouvelé.
Mais j'ai l'impression qu'on va les attendre beaucoup plus longtemps qu'eux
vont attendre les documents qu'ils réclament à grands cris,
accrochés aux rideaux, jour après jour, au Parlement:
"Déposez vos documents, on a hâte de voir cela". Vous allez les
voir, messieurs, et vous serez étonnés des conclusions de ces
documents. Cela vous apprendra des choses dont vous n'avez...
M. Lalonde: On ne sera pas étonné, parce que c'est
vous qui les préparez.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Godin: Le député n'a pas la parole.
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Godin: C'est le premier parti dans ce pays,
le Canada, qui décide de faire le bilan du
fédéralisme. Il est temps que soit fait ce bilan, parce que c'est
une institution qui doit être testée et critiquée comme
toutes les autres, et pourtant elle est présentée comme une vache
sacrée, très successivement, par les gouvernements qui se
succèdent à Ottawa. Comme par hasard une des vaches qui donnent
du lait, c'est le Québec, dans ce système qui tient plus de
l'étable que de la politique.
M. Lavoie: Est-ce que vous parlez du ministre des Finances qui
regarde passer le train?
M. Godin: Quand le député de Laval aura la parole,
nous l'écouterons avec intérêt et plaisir, mais, pour
l'instant, c'est moi qui l'ai.
M. Lalonde: Le train est-il arrivé?
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Godin: M. le Président, il était temps que ce
bilan du fédéralisme "canadien " comme on l'appelle soit fait. Il
est temps que le peuple du Québec, qui a été
embarqué dans cette patente sans être consulté, sache dans
quoi il s'est embarqué. Il est temps que le peuple du Québec
sache où il s'en va, et il aura l'occasion de se pencher
là-dessus. Mais, auparavant je conclus vraiment là-dessus
il nous faut une loi-cadre qui nous permette de le consulter pas
seulement sur la constitution, mais sur tout sujet que le Parlement, qui est
l'institution souveraine dans le Québec, décidera de le consulter
sur n'importe quel sujet.
Le député de Gatineau fait des farces sur le port des
bretelles ou des ceintures de chasteté. Libre à lui de
ridiculiser la consultation populaire en général. Mais, pour
nous, c'est sérieux, pour nous c'est important...
M. Lalonde: C'est de la démagogie.
M. Godin: La démagogie est de ce
côté-là.
M. Lalonde: Vous faites de la démagogie dans ce
temps-là, cela me surprend de la part d'un poète. Cela me
déçoit.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Marguerite-Bourgeoys...
M. Bédard: Cela n'empêche pas d'être pratique.
Ce que vous n'êtes pas.
M. Godin: Décevoir le député de
Marguerite-Bourgeoys est souvent un honneur, M. le Président, car nous
n'avons pas les mêmes règles ni les mêmes valeurs.
M. Lalonde: Vous avez beaucoup de succès là-dedans,
M. le député de Mercier.
M. Godin: Je me fous totalement de vous décevoir, je ne
suis pas ici pour vous plaire.
M. Lalonde: Oui, mais ne vous foutez pas de la population.
M. Godin: Nous voulons encadrer le principe du "consent by the
people", c'est tout ce qu'on veut, ici, ce matin. Toute motion visant à
réduire le champ de cette loi est une motion dilatoire qui n'a pas sa
place ici. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Clair): Le député de
Rosemont et, dans l'ordre, le député de Mégantic-Compton
et le député de Laval.
M. Paquette: M. le Président, on assiste, depuis ce matin,
encore une fois, à un dialogue de sourds. D'un côté, on
mentionne que, dans l'optique d'un certain référendum, il
faudrait qu'il y ait une question qui provoque un oui ou un non. Le ministre,
parrain de la loi, et le nouveau ministre qui lui a succédé,
l'ont répété à plusieurs reprises; le premier
ministre l'a fait également. D'un autre côté, nous
prétendons que se trouve devant nous une loi organique et qu'il y aurait
éventuellement une autre motion ou une autre loi qui va préciser
la question sur laquelle l'Opposition aura à intervenir.
M. le Président, quand on est devant un tel dialogue de sourds,
je me pose des questions. Ce n'est pas la première fois que cela arrive.
Cela veut dire, soit qu'on est en présence de tactiques dilatoires ou
encore de gens qui n'ont pas encore accepté leur défaite lors du
vote de deuxième lecture. Cela est arrivé à l'occasion de
la loi 101, de la Loi sur l'assurance automobile, et de la loi créant la
Société nationale de l'amiante. Chaque fois, lorsqu'on arrive
à l'étude article par article, en deuxième lecture, on
essaie toujours de remettre en question le principe de façon
détournée. On remet le principe, de façon
détournée, pour la raison suivante. On a là une loi
organique qui vise à préciser tous les mécanismes de la
consultation populaire. De la même façon qui est inacceptable
à chaque élection, un gouvernement décide de changer les
règles du jeu, le mécanisme, le fonctionnement...
M. Lalonde: M. le Président, j'ai une question de
règlement à soulever ici.
Le Président (M. Clair): Le député de
Marguerite-Bourgeoys, sur une question de règlement.
M. Lalonde: II me semble, M. le Président, que
l'argumentation du député de Rosemont, voulant que l'amendement
aille à l'encontre du principe accepté en deuxième lecture
est une négation de votre décision, lorsque vous avez
déclaré l'amendement recevable. Alors, en déclarant
l'amendement recevable, je pense que le président exprimait bien
clairement que l'amendement ne va pas à l'encontre du
règlement.
M. Paquette: M. le Président, sur la question de
règlement.
Le Président (M. Clair): Je peux disposer de la
question de règlement, à moins que vous n'insistiez.
M. Paquette: Oui, M. le Président, je n'ai nullement remis
en question votre décision. L'amendement, je le répète, me
paraît parfaitement recevable...
M. Lalonde: Donc, il ne va pas à l'encontre du
principe.
M. Paquette: Je disais que si vous me laissez continuer,
M. le Président l'on essaie constamment, de façon
détournée et parfois légale parce qu'il y a
beaucoup de leurs amendements qui sont déclarés recevables,
celui-ci l'a été justement; je ne remets pas en cause la
décision du président de rattraper le principe d'une
façon ou de l'autre. Je donne l'exemple de la loi 101, parce qu'à
chaque article, on avait un amendement pour introduire l'anglais, alors que le
principe de la loi posait le français comme seule langue officielle.
M. Lalonde: Les jugements de cour...
M. Paquette: C'est ce que je veux dire, M. le Président,
et je ne mets aucunement en cause votre décision.
Le Président (M. Clair): Effectivement, M. le
député de Rosemont et M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, il ne saurait être question de remettre en cause ma
décision quant à la recevabilité du sous-amendement. Je
comprends, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, que
c'était une allusion à des choses qui se sont passées,
préalablement, dans d'autres commissions et auxquelles M. le
député de Rosemont faisait allusion. Je pense qu'il était
dans la pertinence du débat.
M. le député de Rosemont, vous avez la parole, sur le
sous-amendement cependant je vous le rappelle.
M. Paquette: M. le Président, j'étais en train de
dire que le sous-amendement du député de Marguerite-Bourgeoys
restreignait considérablement la portée et le champ d'action de
la loi no 92. C'est dans ce sens que, de façon détournée,
tout en étant parfaitement recevable, il attaque un principe que
l'Opposition n'a jamais accepté parce qu'elle craint comme la peste
l'utilisation de la consultation populaire. Peut-être
préfère-t-elle, comme le disait mon collègue de Mercier,
la façon dont la constitution canadienne actuelle a été
imposée aux Québécois.
Telle n'est pas notre optique. Nous pensons que la seule façon de
rompre le dilemme actuellement et là, je suis d'accord avec
l'intervention précédente du député de
Marguerite-Bourgeoys c'est de bénéficier de la pression
populaire, de bénéficier d'une prise de position claire de la
population québécoise. Prise de position claire nécessite
question claire, précise. Cela est évi- dent, tout le monde
s'entend là-dessus. Dans ce sens, c'est vrai qu'on essaie d'avoir le
consensus le plus large possible à la commission parlementaire, mais pas
au mépris de la démocratie, pas au mépris de la souplesse
de l'instrument, pas au mépris d'une restriction de la portée de
la loi. C'est exactement, encore une fois, ce que fait le sous-amendement du
député de Marguerite-Bourgeoys.
Cela restreint la porté de la loi, M. le Président, parce
que, bien qu'on trouve oiseux l'exemple donné par le ministre de la
Justice concernant le régime présidentiel, ce n'est pas du tout
une chose qui est hors de notre esprit. Quand on nous dit: II faut une question
simple, claire, précise; il n'y a rien d'original là-dedans. Cela
fait dix ans qu'on le dit dans le programme du Parti
québécois...
M. Lalonde: C'est le temps de le mettre dans la loi!
M. Paquette: On le dit depuis le début dans notre
programme: Faire adopter une loi organique sur les référendums.
Cela était bien avant qu'on ne parle du référendum sur la
souveraineté, mais une loi organique sur les référendums
garantissant que les options offertes seront claires et distinctes, de
formulation non ambiguë, permettant l'expression de choix
véritables.
Quelques années plus tard et là, je reviens
à l'exemple donné par le ministre de la Justice est apparu
un référendum sur la constitution, parce qu'on s'est dit: La
constitution actuelle du Canada, l'un des problèmes pour lesquels, 20
ans après on commençait à parler de
fédéralisme renouvelé dans le temps de Mercier, en 1887
il commençait à y avoir des problèmes, cela ne
satisfaisait pas le Québec. C'est parce que les gens n'avaient pas
été consultés sur la constitution et sur le genre de
régime. Alors, on a inclus un référendum sur une
constitution, de façon qu'elle soit on parlait même
d'assemblées constituantes dans les comtés... Ce n'est pas une
proposition en l'air que lance le ministre de la Justice. À un moment
donné, on sera probablement appelé, si les
Québécois appuient la démarche d'une majorité
croissante d'entre eux vers la souveraineté, à se donner une
constitution et à la faire approuver par le peuple. À ce moment,
ce n'est peut-être pas deux choix qu'on aura, mais trois choix: un
régime présidentiel; le maintien, en gros, du régime
parlementaire actuel, et un régime mixte. Maintenant, ce ne sera
peut-être pas la seule question, parce que ce n'est pas le seul aspect
dans une constitution. Il y aura peut-être plusieurs questions au
même référendum ou il y aura peut-être deux
référendums.
Je pense qu'il faut se préoccuper, même dans une loi
organique, que la question soit claire, précise. On le dit, dans notre
programme, depuis dix ans. Pas seulement dans le référendum sur
l'avenir constitutionnel du Québec, mais dans tous les
référendums. Mais il faut distinguer cela d'une question qui se
répond par oui ou non; une
question peut être claire et précise sans se
répondre par oui ou non. C'était le cas des deux
référendums à Terre-Neuve. Les gens ont dit que, parce
qu'il y avait trois options, il y a eu de l'ambiguïté. Les trois
options étaient, toutes les trois, très claires. Lors du premier
référendum, il y en a deux qui sont ressorties nettement et les
Terre-Neuviens ont décidé de tenir un deuxième
référendum, entre les deux options. Les partisans de la
troisième option, la plus minoritaire, ne se sont pas sentis
lésés parce qu'ils ont dit: On a eu notre chance au premier
référendum. Je ne dis pas que c'est ce que nous devrions faire
pour le référendum sur l'avenir du Québec, parce qu'il
m'apparaît que, maintenant, les positions sont assez cristallisées
entre le fédéralisme renouvelé et la
souveraineté-association. Mais, s'il y avait eu trois options qui
s'étaient dégagées, avec des forces à peu
près égales, j'aurais été partisan d'un
référendum à deux tours; un premier
référendum avec trois ou quatre options et un deuxième qui
retient les deux principales. C'est la proposition que j'avais faite il y a
quelques mois. (11 h 30)
On pourrait multiplier les exemples. Il y a d'autres cas où, tout
simplement sur une question très controversée... Prenons
l'exemple de l'avorte-ment; le gouvernement n'a pas une législation ou
une constitution ou une pièce législative immédiatement
à l'esprit, mais il veut savoir l'état de l'opinion. Il peut
poser une question offrant trois ou quatre choix sur l'avortement:
Êtes-vous pour l'avortement libre sur demande, êtes-vous pour
l'avortement thérapeutique tel que défini dans la loi actuelle,
êtes-vous pour une ou deux autres mesures intermédiaires?
À la lumière de l'opinion publique, on pourrait ensuite
réunir le Parlement et dire: Voici, on a préparé une loi
à partir de cela.
M. Lalonde: Mon sous-amendement permet cela, M. le
député; je constate que mon sous-amendement permettrait cela.
M. Paquette: Par une série de questions oui ou non, c'est
possible.
M. Lalonde: Non, parce que mon sous-amendement restreint le oui
ou le non au référendum constitutionnel. Alors pour l'avortement,
vous pourriez...
M. Paquette: D'accord, je vous l'accorde, M. le
député. Alors, je pense que même dans le cas
constitutionnel, j'ai donné suffisamment d'exemples pour vous montrer
qu'il peut arriver... Il y a un doute probable je ne vous dis pas qu'on
le fera qu'on soit amené à poser des questions auxquelles
on ne répond pas par oui ou non.
Je vais vous citer un passage de l'avis qu'on a reçu hier et ce
matin de la Commission des droits de la personne sur cette question, avis que
vous avez réclamé énormément, comme dans le cas de
la loi de l'amiante où vous aviez convoqué des gens du milieu en
pensant que vos propres partisans vous donneraient raison et vous vous
êtes fait amiantoser. On se rend compte, à première vue, et
on va l'étudier plus à fond, que le document est pas mal plus
nuancé que les positions de l'Opposition. Il met des doutes sur
certaines choses, il parle du difficile équilibre entre un certain
nombre de droits fondamentaux. C'est bien de cela qu'il s'agit dans cette loi
et sur la question, le document ne dit pas grand-chose, c'est tout simplement
une expression de satisfaction à la page 2. C'est une autre question,
j'imagine...
M. Lavoie: Les deux tiers de l'Assemblée... M.
Paquette: C'est une autre question. M. Bédard: Ce n'est pas
une question de...
M. Paquette: C'est une autre question, ce n'est pas de cela qu'on
parle. À la page 2...
M. Lalonde: Je savais que vous alliez trouver la façon de
vous en sortir.
M. Paquette: M. le Président, est-ce que j'ai toujours la
parole?
Le Président (M. Clair): Oui.
M. Paquette: Merci!
M. Lalonde: Le ministre vous a interrompu...
M. Paquette: Non, je pense que c'est le député de
Laval qui m'a interrompu avec une question qui est complètement hors
sujet.
Le Président (M. Clair): Ne nous chicanons pas pour savoir
qui a interrompu l'autre; M. le député de Rosemont, vous avez la
parole.
M. Paquette: À la page 2, la Commission des droits de la
personne dit uniquement ceci: "L'alternative elle parle de l'article 6
et des suivants question, soit sous forme de motion, soit sous forme de
projet de loi, proposée aux articles 6, 7, 8 et 9 du projet de loi 92,
de même que l'allongement de la durée du débat d'un minimum
de 25 heures et d'un maximum de 30 heures dans le cas où le
référendum porte sur une question proposée par le premier
ministre et non sur le projet de loi, s'inscrivent dans le sens des
recommandations de la commission à propos du livre blanc". C'est tout ce
qu'on dit, on ne nous dit pas que la question devrait impliquer les
réponses oui ou non. Pourquoi? Parce que la Commission des droits de la
personne sait que c'est une loi organique. Elle sait également que la
loi permet, va exiger, éventuellement, une motion devant cette
assemblée avec un débat de 30 heures, ou encore un projet de loi
qui subira toutes les étapes normales d'un projet de loi et à ce
moment-là, on saura, et l'Opposition pourra protester
véhémentement si le ministre et le premier ministre reviennent
sur leur parole; ils se sont prononcés publi-
quement pour une question oui ou non concernant le
référendum sur l'avenir constitutionnel.
En somme, cet amendement... Même si on cherche et si on souhaite
un très large consensus de cette commission, on n'est quand même
pas pour massacrer un outil pour lequel on se bat depuis dix ans, qu'on inscrit
à notre programme politique depuis dix ans, et qui vise à
intégrer la population aux décisions majeures qui la concernent,
sous prétexte que l'Opposition veut faire de la petite politicaillerie
avec cela, veut créer de la confusion, veut laisser dans l'opinion
publique l'impression que le gouvernement veut se camoufler et veut avoir une
question qui n'est pas claire et qui n'est pas précise. Cela fait dix
ans qu'on dit qu'on veut une question claire et précise, arrêtez
de dire cela...
M. Lalonde: ... le mettre...
M. Paquette: Ce n'est pas lié à une question oui ou
non. Dans le contexte actuel concernant le référendum sur
l'avenir constitutionnel du Québec, je suis assez prêt à me
rallier, étant donné la cristallisation des opinions; on peut
faire une question oui ou non; dans d'autres cas...
M. Lalonde: Si vous n'êtes pas d'accord avec le
député de Maisonneuve...
M. Paquette: Probablement pas, M. le Président. Je pense
que ce n'est pas pour ces raisons d'une crainte de la petite politicaillerie
que fait l'Opposition pour dénaturer à l'avance le
référendum et la démarche du gouvernement; malgré
qu'on voudrait un très large consensus, on va dénaturer le projet
de loi en acceptant ce sous-amendement, de même que l'amendement du
député de Laval.
Le Président (M. Clair): Le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: M. le Président, inutile de vous dire, comme
je l'ai dit d'ailleurs avant, notre position face à ce sous-amendement,
puisqu'il est à peu près le même que celui que nous avions
préparé qui disait: "À l'occasion de
référendums ayant pour objet le statut constitutionnel, il doit
s'agir d'une question à laquelle il ne peut être répondu
que par un oui ou par un non". C'est même inscrit au journal des
Débats, vers le 17 mai, je pense, en soirée.
Inutile de vous dire que les arguments qui nous sont servis actuellement
par le côté ministériel ne me convainquent pas. J'ai
entendu le député de Mercier qui a déjà
été plus convaincant dans d'autres secteurs. Il n'avait vraiment
pas les arguments pour nous dire que, dans une loi précise, une loi
spécifique ou dans une loi-cadre, c'était utile ou pas d'avoir
cette question du oui ou du non.
Le député de Rosemont nous a donné des arguments
plus valables qui sont agréables à entendre; il nous donnait des
exemples, en fait, qui nous trempaient dans l'atmosphère d'un
éven- tuel référendum qui portera sur l'avenir
constitutionnel du Québec, faisant allusion aux autres
référendums, principalement ceux qui se sont faits à
Terre-Neuve, mais tous ces arguments ne me convainquent pas que le gouvernement
nous offre, ce matin, sa transparence à laquelle on s'attendait.
Je ne vois pas, mais je ne vois vraiment pas que ce soit à
l'intérieur d'une loi-cadre ou d'une loi spécifique
l'amendement le précise ici s'il s'agit d'une loi de
référendum portant sur l'avenir constitutionnel, on voudrait
avoir une question aussi claire pour être capable de répondre par
un oui ou par un non.
On a parlé de limpidité de la question, de clarté
de la question et on a ajouté à cela une question unique. Mais,
dans tout cela, bien sûr, on n'a pas tous ces adjectifs, ce que je
connais des définitions de ces adjectifs. On a changé le mot
"transparence" qui commence à être passablement galvaudé
par le mot "limpide", mais, tous ces adjectifs ne disent pas que la question
sera répondue par un oui ou par un non.
On s'en soumet donc à des règlements qui nous seront
donnés. On peut avoir certaines réticences à
l'égard des règlements qui nous sont préparés sur
lesquels cette table de travail n'a pas d'autorité.
Les députés qui ont parlé antérieurement du
côté ministériel parlaient de consultation populaire contre
laquelle l'Opposition se manifestait. Je n'ai pas besoin de vous rappeler ce
matin, à cette commission, que depuis longtemps, l'Union Nationale est
favorable aux consultations populaires et c'est apparu dans ses programmes
électoraux de 1970, de 1973 et de 1976, de façon plus ou moins
spécifique dépendant des élections. En tout cas, chaque
fois, on parlait de consultation populaire et c'était là le
programme de l'Union Nationale.
Nous sommes, bien sûr, favorables à cette loi-cadre et je
ne vois vraiment pas pourquoi on pourrait refuser, concernant cette question de
répondre par un oui ou par un non, de l'intégrer dans le texte de
la loi. Nous aurons, bien sûr, un débat qui portera sur la
question elle-même, un débat, je pense, qui est allongé
à trente heures. Je ne pense pas être dans l'erreur en disant
qu'il est porté à trente heures. Bien sûr qu'à ce
moment-là on pourra statuer sur l'état de la question
elle-même, mais je pense que, dans la loi, ce matin, peu importe le
référendum qu'on aura, on est toujours capable, dans toute forme
de référendum, d'avoir la volonté populaire, de
dégager une majorité de la volonté populaire par une
question qui peut se répondre par un oui ou par un non.
Je pense qu'il suffit d'étudier plus longuement la question afin
d'en arriver à cela. Cette question mérite d'être
clarifiée ce matin. Je ne vois pas pourquoi on perdrait du temps.
L'Opposition a probablement moins parlé aujourd'hui que ne l'a fait le
gouvernement et on se demande qui est en train de "filibuster" cet article de
la loi. Je ne verrais pas pourquoi on perdrait du temps et on n'accepterait pas
cet amendement qui nous est proposé ce matin.
C'était dans l'esprit. C'est ce que déclare le
premier ministre à l'extérieur du Québec ou au
Québec. C'est ce qu'a déclaré le ministre d'État
à la réforme parlementaire. C'est l'esprit de plusieurs membres
du cabinet. Je ne verrais pas pourquoi on attendrait de voir arriver cela au
niveau des règlements et on n'accepterait pas de le mettre dans la
consultation populaire. Si on doit s'inspirer du texte qui nous a
été remis ce matin par la Commission des droits de la personne,
on peut faire dire à ce texte passablement de choses. Chacun tirera la
couverture de son côté quand on arrivera sur différents
articles, mais il y a une chose qui doit demeurer, c'est que cette Commission
des droits de la personne, si respectable soit-elle, a présenté
un document d'inspiration qui va servir aux membres de cette commission
uniquement.
À partir de là, nous prendrons ce qui fait bien notre
affaire là-dedans, mais je ne pense pas qu'on doive se couler les pieds
dans le ciment pour dire que ce qui est écrit par la Commission des
droits de la personne doit être reproduit.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Mégantic-Compton, je voudrais bien être le plus large possible.
Cependant, je vous demande de prendre garde à la pertinence du
débat relativement au sous-amendement du député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Grenier: Je pense que le député de
Rosemont...
Le Président (M. Clair): Je veux seulement vous indiquer
que j'ai un peu de difficulté. J'ai confiance que vous allez revenir
rapidement à la pertinence du débat.
M. Grenier: J'ai l'impression que le député de
Rosemont a fait appel...
M. Paquette: Vous êtes pas mal moins loin de la pertinence
du débat qu'on ne l'est d'habitude.
M. Grenier: Pardon?
M. Paquette: Vous êtes pas mal moins loin de la pertinence
du débat qu'on ne l'est d'habitude, que certains le sont.
M. Grenier: Oui, que certains l'ont été. M.
Lalonde: C'est un aveu?
M. Godin: Que nous ne le nommerons pas, M. le Président,
par respect pour l'Opposition officielle.
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Grenier: Je ferai remarquer au député de Mercier
que j'ai signalé, en son absence, qu'il avait déjà fait de
meilleures performances dans d'autres projets de loi que celle qu'il a faite ce
matin. J'ai même dit cela ce matin.
M. Godin: Un autre distributeur de médailles! Mon Dieu,
Seigneur! Ce sont tous des maîtres d'école.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs!
M. Grenier: II faut bien quand même constater les
faits.
Le Président (M. Clair): À l'ordre! M. le
député de Mégantic-Compton, vous avez la parole.
M. Grenier: M. le Président, je reviens à cet
amendement. Dans l'amendement qui est proposé ce matin, ce
sous-amendement qui est proposé, je vois mal que le gouvernement veuille
garder si large cette question et qu'on n'en arrive pas à se donner,
dans ce projet de loi, cette partie d'instrument qui nous est utile ici, qui
nous est utile au niveau de chacun des référendums qu'on peut
faire.
Il n'y a pas de raison, à mon sens, qu'on ne l'ait pas. Et
l'amendement qu'on présente ce matin devrait être accepté
par toute cette table de travail. Il fait allusion, il réfère
directement au statut constitutionnel d'un référendum. Il n'y a
pas de raison, à ce moment-là... Il s'incorpore... Si jamais il y
a d'autres référendums qui portent sur d'autres sujets, le
paragraphe c) tombera tout simplement à l'occasion d'autres
référendums. Mais je verrais mal que le gouvernement s'oppose...
On a fait allusion... On a même assez clairement signifié tout
à l'heure, par la bouche du député de Rosemont, que la
question pouvait avoir certains volets. Je crains qu'une question... On
voudrait voir cette question tranchée une fois pour toutes. Il y a
longtemps qu'on en parle. C'est le député de Rosemont qui disait
tout à l'heure que les volontés semblent se cristalliser autour
de deux options bien précises. Pour certains c'est la
souveraineté-association, pour d'autres ce sont les nouveaux liens,
c'est une fédération renouvelée, c'est une constitution
renouvelée. On s'entend autour de deux termes passablement
précis.
À partir de là, je me demande pourquoi on n'accepterait
pas de le mettre, tel que reproduit. On pourrait en formuler d'autres qui
seraient à peu près semblables, mais celui-ci est clair. Je me
demande pourquoi le gouvernement, s'il n'a pas quelque chose à nous
apporter un peu plus tard lors de la question, je me demande pourquoi on se
refuse à mettre cette question bien précise dans la loi sur les
référendums.
Le Président (M. Clair): Laval. Jonquière.
Jeanne-Mance. Avez-vous terminé, M. le député?
M. Grenier: Oui.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Laval.
M. Godin: M. Grenier, change pour change, vous avez
déjà été meilleur que cela.
M. Grenier: Si je savais que ce n'est pas au journal des
Débats, je vous répondrais.
M. Lavoie: M. le Président, je voudrais intervenir sur le
sous-amendement. Je pense bien que ce sera le dernier intervenant en ce qui
concerne l'Opposition officielle sur le sous-amendement. Je pense bien qu'on
fait le tour actuellement du problème de la question. J'ai l'impression
qu'on serait prêt, en ce qui nous concerne, à voter après
cette intervention sur le sous-amendement et l'amendement.
Nous aurions préféré, tel que la motion
d'amendement a été faite, que sur tout référendum
quel qu'il soit... C'est la conception que nous avons du
référendum. C'est une consultation, c'est une opinion de la
population qui est sollicitée soit par le gouvernement ou
l'Assemblée nationale. Le gouvernement, l'Assemblée nationale
veut se faire éclairer par la population sur une question bien
précise. C'est notre conception et c'est notre définition que
nous donnons du référendum.
(11 h 45)
La population, tout le monde, se plaint que c'est long d'obtenir une
décision de l'État à cause de la lourdeur de la machine et
tout. C'est la raison pour laquelle, si l'Assemblée nationale prend la
peine de solliciter une opinion de la population, ce n'est pas pour avoir une
réponse ambiguë, ce n'est pas pour avoir des peut-être ou des
possibilités d'effritement de l'opinion. En somme, dans des
pourcentages, si on donne l'option à la population de s'exprimer sur
trois ou quatre options, notre opinion, notre impression, c'est que cela ne
mène nulle part. Cela ouvre la porte, comme le disait le
député de Rosemont, à un deuxième
référendum et à un troisième. Je ne pense pas que
ce soit l'idéal et que ce soit le désir d'un gouvernement ou
d'une Assemblée nationale responsable.
On veut avoir une opinion claire de la population pour pouvoir
légiférer dans les meilleurs délais. Si on a une question
claire, précise, cela circonscrit le débat, cela diminue le
corridor et cela permet à la population d'exprimer son opinion par un
oui ou par un non et, de là, cela permet au gouvernement d'agir.
C'est très intéressant. Pendant le long débat que
nous avons eu cette nuit, nous avons eu le temps de prendre connaissance d'un
document sur la revalorisation du pouvoir municipal qui a été
distribué. Il y a justement un chapitre sur le référendum
au niveau local, une espèce de minithèse sur le
référendum. C'est très intéressant. Depuis qu'on
parle de la consultation populaire, je pense qu'on va avoir une multitude
d'experts, au Québec, sur cette question de la consultation populaire et
de la question référendaire. Je voudrais vous en faire part, pour
ceux qui n'ont pas eu le temps de le consulter, étant donné que
ce document nous a été distribué hier seulement.
Notions du référendum? C'est dans le document
distribué par le ministère des Affaires municipales. La
revalorisation du pouvoir municipal. Démocratie 2. Mécanismes de
décision.
C'est très intéressant. À la page 21, sous un titre
qui s'appelle Notions du référendum, on donne quatre
mécanismes de consultation populaire. Premièrement, le veto. "Le
veto est la possibilité donnée au peuple de s'opposer à la
mise en vigueur d'une mesure législative prise par les gouvernements".
Cela existe dans certains États américains, je crois.
Deuxième possibilité, c'est le référendum. "Le
référendum proprement dit ou référendum
obligatoire contrairement au veto, implique que la mise en vigueur d'une
mesure prise par les gouvernants ne peut avoir lieu qu'après que la
majorité des gouvernés se soit prononcée favorablement en
ce sens". Ce qui est intéressant, c'est que la troisième formule
de consultation populaire s'appelle l'option. L'option, la définition
qu'on en donne, c'est: "Mécanisme rarement employé. L'option
offre un certain élément d'originalité en ce sens qu'elle
fournit aux gouvernés le choix de se prononcer sur plusieurs avenues
législatives. Ce mécanisme offre, par exemple, la
possibilité au peuple de se prononcer sur les solutions a), b) ou c) ".
Quatrièmement, l'initiative populaire que tout le monde connaît,
quatrième formule. Si j'étais un expert en droit constitutionnel,
j'en viendrais pratiquement à la conclusion qu'un
référendum veut dire, est synonyme de questions qui
amènent oui ou non, qui amènent une décision alors que
l'option laisse la possibilité de plusieurs choix. J'aimerais même
que cette étude puisse être approfondie. On dit: Un
référendum amène une décision mais, une autre
possibilité, c'est l'option. Je pense que dans l'étude de la loi
sur la consultation populaire qu'on fait actuellement, on parle bien de
référendum. À ma connaissance, on n'a jamais parlé
de consultation populaire par option.
M. Lalonde: Le député me permet-il une question?
Est-ce l'Opposition qui a fait ce document?
M. Lavoie: Non, c'est le gouvernement actuel, le ministère
des Affaires municipales.
M. Lalonde: Pardon! C'est parce qu'on n'avait pas donné la
description complète.
M. Lavoie: On le dit d'ailleurs très bien. M.
Bédard: Le théâtre!
M. Paquette: Question inutile. Vous n'auriez jamais pu faire un
document comme cela.
M. Bédard: C'est assez, le cinéma!
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Lavoie: Je ne doute pas que ce document ait été
préparé par des experts du ministère des Affaires
municipales, qui en connaissent même sans doute plus long que nous sur la
question référendaire de la consultation populaire. Ils ont quand
même pris la peine de l'écrire, de la coucher sur texte et sous la
responsabilité d'un ministère du gouvernement actuel.
M. le Président, ce ne sera pas très long, ne vous en
faites pas, surtout à l'heure qu'on s'est
couché, cela prend tous les efforts pour mettre nos idées
en place.
M. Paquette: On peut suspendre.
M. Bédard: Moi qui voulais qu'il prenne son temps.
M. Lavoie: Pour répondre au député de
Terrebonne, je pense que c'est malhonnête de dire qu'on a voulu se coller
sur la position fédérale, car, lorsqu'on a déposé
la position du Parti libéral, cela date de près d'un an, je
crois, c'est bien avant le projet de référendum
fédéral. Notre position, dès le début, a
été notre exigence d'avoir la question la plus précise, la
plus transparente, la plus limpide, la plus claire possible, la plus
honnête possible pour amener un oui ou un non.
M. Godin: Même à Joliette, cela suit votre position,
d'ailleurs. Je peux en témoigner.
M. Lavoie: Oui, et c'est avant le dépôt. J'ai un
témoin et pas le moindre.
M. Lalonde: Nous ne sommes pas aussi fous qu'on peut le
croire.
M. Lavoie: Un autre exemple. Dans notre première
argumentation, on vous a donné l'exemple d'au moins quinze pays
je ne voudrais pas me répéter et d'États
américains qui ont connu, vécu la formule, le processus, le
mécanisme référendaire, certains depuis déjà
50, 75 ou 100 ans. Je n'ai pas à me répéter. Dans tous ces
cas, partout, il n'y a aucune exception, à mon point de vue, dans tous
les pays du monde, dans tous les États américains où le
mécanisme du référendum existe, c'est toujours par un oui
et par un non, et c'est dans des textes de loi, tel que je l'ai cité. En
ce qui concerne l'État de la Californie, c'est un terrain
expérimenté, un endroit où vraiment la formule
référendaire a été éprouvée et
expérimentée à de très multiples reprises.
Nous sommes au troisième ministre qui fait une
déclaration, à la suite du premier ministre, à la suite du
parrain initial de ce projet de loi, le député de Maisonneuve,
qui nous dit: Nous souhaitons personnellement, nous voulons une question claire
qui n'amène qu'un oui ou un non. Cela, le premier ministre l'a
répété à satiété. Le
député de Maisonneuve, parrain du projet de loi, l'a dit. Son
successeur ici, que nous apprécions beaucoup, est allé dans la
même voie. Cela a également été un voeu personnel.
On ne voudrait pas être méchant et dire qu'on souhaiterait voir
parader les 25 autres ministres. Les trois plus pesants dans ce dossier,
à la suite du premier ministre, nous disent qu'ils veulent un oui ou un
non. Je souhaiterais que le ministre de l'Éducation, le ministre des
Affaires intergouvernementales viennent, à tour de rôle, nous dire
qu'également... Peut-être que, dans quelque temps, on pourrait
faire l'addition.
M. Lalonde: C'est clair, cela.
M. Godin: II y aurait le caucus après.
M. Vaillancourt (Jonquière): On s'est consulté chez
nous.
M. Lavoie: ... une majorité de l'Exécutif.
M. Samson: Le ministre des Consommateurs pourrait décider
de démissionner. Attention!
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît, messieurs!
M. Lavoie: Bon! Messieurs, je termine. Mon dernier argument est
le suivant, M. le président. On ne vous demande pas une chose qui soit
un principe de fond contradictoire, une philosophie qui s'oppose radicalement
à la position du gouvernement. La preuve, c'est que le premier ministre,
le député de Maisonneuve et le ministre de la Justice nous disent
qu'ils sont dans le même sens que nous. Cela veut dire qu'il n'y a pas un
fossé qui nous sépare sur cette question. Votre coeur le
désire. Votre esprit le désire. Ce qui vous reste de
démocrate le désire. Il n'y a pas un fossé, il n'y a pas
un cratère qui nous sépare.
Je rattache à cela que tous les ministres qui sont passés
à cette commission nous disent: On cherche un consensus. On voudrait que
cette loi soit acceptée par le plus grand nombre possible de
parlementaires. M. le ministre, cela vous est demandé par les quatre
partis d'Opposition, ici, par les représentants de l'Opposition
officielle, les représentants de l'Union Nationale, les
représentants du Ralliement créditiste et du Parti national
populaire. Que voulez-vous de plus? Nous sommes quand même les
porte-parole de 59% de la population, selon les résultats des
dernières élections. Que voulez-vous de plus, si on n'a pas un
fossé qui nous sépare sur une question de principe, de base, de
raison d'être de nos partis politiques? En plus de cela, vous nous
demandez un consensus et vous souhaitez ce consensus. Pourquoi ne pas nous
l'accorder? C'est dans la lancée, c'est dans l'expérience des
référendums, en plus de cela, partout. On ne vous demande rien
d'impossible, rien d'extraordinaire. Quel beau geste ce serait, M. le ministre
de la Justice, de voter pour ce sous-amendement?
M. Godin: Chanteur de pomme!
Le Président (M. Clair): M. le député de
Jonquière.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président,
brièvement. Je n'ai pas l'habitude d'intervenir souvent.
M. Grenier: On ne peut faire additionner le temps.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président,
personnellement, le débat que nous avons ce matin ne me surprend pas,
puisqu'il met en cause, en fait, le débat essentiel et fondamental que
nous avons eu et en deuxième lecture et en commission parlementaire lors
de l'étude du livre blanc, c'est-
à-dire que c'est tout le problème de la loi organique par
rapport à la loi spéciale. Corroborant le député de
Rosemont, j'irai jusqu'à dire que cette motion de sous-amendement
présentée par le député de Marguerite-Bourgeoys est
un moyen détourné pour remettre en cause le débat
fondamental loi organique, loi spéciale.
Donc, l'Opposition est tellement traumatisée par ce sujet
fondamental à nos yeux que je ne suis pas surpris et je ne serais pas
surpris de voir bientôt un amendement qui suggérerait la question
elle-même, les termes mêmes de la question.
Une voix: Ce n'est pas bête.
M. Lalonde: On n'y avait pas pensé.
M. Samson: C'est une bonne idée.
M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne veux pas lui donner des
idées, M. le Président. Le député de Rosemont a
fait allusion tout à l'heure au fait que l'Opposition aimerait pouvoir
poser la question, a même fait des hypothèses de questions que
l'Opposition voudrait poser.
Une voix: Une minute!
M. Lalonde: C'est possible. On va y penser cet été
ou on le fera au mois de septembre, au retour.
M. Vaillancourt (Jonquière): L'Opposition est tellement
traumatisée...
M. Bédard: Ainsi, on ne peut pas la voter. C'est ce qui
montre votre intention de ne pas voter la loi dans cette partie de la
session.
M. Samson: Cela dépend comment vous voulez la voter. On ne
votera pas sur n'importe quoi.
M. Vaillancourt (Jonquière): Je disais donc que
l'Opposition est tellement traumatisée par ce sujet que non seulement je
ne suis pas surpris de parler de cela ce matin et d'en parler longtemps,
d'ailleurs, mais je ne serais même pas surpris, puisqu'on a eu des
hypothèses de questions lors d'autres commissions parlementaires, qu'on
en arrive à dire quelle devrait être la question qui sera
posée. Or, je pense que le gouvernement, là-dessus, a
annoncé très clairement ses couleurs. D'abord, depuis des
années, le parti annonce ses couleurs sur une loi organique du
référendum, et ce, bien avant que le référendum en
question soit inscrit dans le programme du parti politique.
D'autre part, dès la parution du livre blanc, le gouvernement
annonçait encore une fois ses couleurs en insistant pour que l'outil que
l'on se donne soit un outil qui puisse servir dans plusieurs cas et non pas
dans le cas d'un référendum particulier. Je pense que
l'Opposition, ce matin, veut revenir encore une fois à la charge,
traumatisée qu'elle est par ce référendum précis
sur l'avenir constitutionnel du Québec pour nous en faire reparler
davantage.
Le député de Laval a dit que les trois ministres les plus
pesants dans ce secteur avaient fait un voeu personnel, à savoir que la
question devrait être claire, précise, unique et demande une
réponse par un oui ou par un non. À sa place, je serais
optimiste. Ces trois ministres ayant pris position dans ce sens, je pense qu'il
y a lieu d'espérer, pour les gens de l'Opposition et pour tous ceux qui
partagent cette vue. Je dois vous dire que, personnellement aussi...
M. Lavoie: Un autre qui est pour le oui ou le non. Bon.
M. Lalonde: On va avoir un petit référendum...
Une voix: ... à l'intérieur du PQ.
M. Lalonde: On peut faire notre référendum à
l'intérieur du Parti québécois.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Vaillancourt (Jonquière): Messieurs, je pense que vous
devez être optimistes non pas devant le voeu du député de
Jonquière...
M. Lalonde: II n'est pas pesant, lui.
M. Vaillancourt (Jonquière): ... puisqu'il n'est pas
pesant dans le dossier, mais du moins pour ce qui concerne les voeux
exprimés par les trois ministres en question et même par le
premier ministre.
M. le Président, en terminant, je pense qu'il faut faire la
distinction entre l'outil qu'est la Loi sur la consultation populaire et le
référendum lui-même. J'ai eu l'occasion de dire, sur le
recours collectif, qu'il y avait lieu de faire la distinction entre le recours
collectif qui est un moyen de procédure et le jugement d'un tribunal. La
Loi sur la consultation populaire, c'est un outil, c'est un instrument qui
pourra peut-être s'appliquer à une occasion, qui pourra
peut-être s'appliquer à plusieurs occasions. Le problème
n'est pas là. À d'autres articles, il est prévu des
délais minimaux à l'Opposition et à tous les membres de
l'Assemblée nationale pour émettre leurs opinions et leurs points
de vue sur la question. Connaissant les talents du député de
Laval et d'autres membres de cette auguste Assemblée, en supposant que
les voeux exprimés par ces trois personnages influents dans ce secteur
ne soient pas exaucés par le Conseil des ministres ce sera sans
doute là leur premier argument je suis sûr qu'ils seront
les premiers à soulever ce fait lors de la motion
présentée à l'Assemblée nationale et contenant la
formulation de la question. (12 heures)
M. le Président, je fais donc confiance, je suis optimiste en ce
qui me concerne. Je pense qu'accepter la motion du député de
Laval serait faire échec à ce principe de la loi-cadre que le
gouvernement, par le parti, dans son programme et dans son livre blanc, a
toujours voulu garder.
Je citerai tout simplement une phrase du ministre d'État à
la réforme électorale qui disait, lors de son allocution
d'ouverture: L'un des deux points inchangeables dans le projet de loi,
là où nous ne changerons pas d'idée, c'est loi-cadre
versus loi spéciale. Je pense que recevoir le sous-amendement du
député de Laval ou du député de
Marguerite-Bourgeoys serait faire échec, sinon totalement du moins
grandement, à ce principe de la Loi sur la consultation populaire comme
loi-cadre. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Président (M. Clair): Dans l'ordre, le
député de Jeanne-Mance, le député de Rouyn-Noranda
et le ministre.
M. Laberge: M. le Président, je vous remercie. Mon
intervention ne sera pas longue. Je peux simplement vous signaler que,
dès les 1er juin, en cours de soirée, alors qu'on a
commencé à discuter de cet amendement à l'article 6, il
était clair, dans mon esprit, d'ailleurs, que l'amendement
proposé si je dois parler sur le sous-amendement, cela s'englobe
quand même se référait tout de suite à
l'opinion, à mon point de vue, que l'Opposition a que cette loi n'est
faite que pour un référendum. Pourtant, en deuxième
lecture, on s'est bien entendu sur le principe que cette loi ne doit pas servir
qu'à un référendum en particulier, que tout le monde a
à l'esprit, mais à divers référendums. Même
dans le cadre de l'amendement proposé, je vous dis tout de suite que je
dois sincèrement me prononcer contre l'amendement, parce qu'on dit: "...
dans le cas d'un référendum portant sur le statut constitutionnel
du Québec," ce qui voudrait dire, dans l'esprit de l'amendement, qu'il
n'y aurait qu'un référendum sur le statut constitutionnel du
Québec. Pourtant, si les Québécois le décidaient un
jour, lorsqu'il y aura un premier référendum demandant aux
Québécois s'ils donnent à leur gouvernement un mandat de
changer la situation actuelle, il y aura certainement plus d'un
référendum par la suite. Il y en aura certainement au moins un
autre pour choisir quel sera le cadre constitutionnel dans lequel on sera
ensuite régi, comme le disait le député de Rosemont,
est-ce que ce sera un régime présidentiel ou un régime
apparenté à ce que nous vivons présentement, le
régime parlementaire britannique?
À ce moment-là, même le sous-amendement n'est pas
acceptable, à mon point de vue, parce qu'il se peut que, dans un de ces
référendums éventuels sur l'avenir constitutionnel, il y
ait plus d'une option et que la réponse ne puisse être
donnée automatiquement par un oui ou par un non. Je ne voudrais pas
répéter les arguments et du député de Rosemont, du
député de Mercier et du député de Jonquière.
J'abonde dans leur sens. C'est pourquoi je me prononce contre l'amendement
proposé.
Je voudrais terminer en disant que le sous-amendement du
député de Marguerite-Bourgeoys m'aurait paru plus clair s'il
avait été formulé de la façon suivante: "Dans le
cas du référendum portant sur le statut constitutionnel", et non
d'un référendum. À ce moment-là, il aurait vraiment
affiché sa couleur, à savoir qu'il ne croit qu'à un
référendum. Il a encore trouvé une façon de diluer
la sauce de façon, pour ma part que je considère inacceptable. De
toute façon, je suis totalement contre le sous-amendement comme
l'amendement proposés à l'article 6. Je vous remercie.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Rouyn-Noranda.
M. Samson: M. le Président, j'aimerais souligner, pour le
profit des membres de cette commission qui font partie du gouvernement, que le
sous-amendement qui a été amené par le
député de Marguerite-Bourgeoys est un sous-amendement qui aurait
pu tout aussi bien être amené par le député de
Mégantic-Compton que par moi-même ou par le député
de Beauce-Sud. Nous avions tous la même opinion. Il s'agit
peut-être un peu de la formulation ou de nuancer la formulation, parce
que tout ce qu'on a retrouvé de différent entre le
sous-amendement proposé et ceux que nous avions prêts à
proposer, c'étaient des nuances qui n'amenaient même pas de
différence, ni dans la forme ni dans le principe du sous-amendement. Or,
ce serait faux de prétendre qu'il n'y a que le député de
Marguerite-Bourgeoys qui veut ce genre de sous-amendement et qu'il n'y a qu'un
seul parti qui le veut. Les quatre partis de l'Opposition ont manifesté
clairement leur position là-dessus. Le député de
Jeanne-Mance qui vient de parler a apporté une nuance
supplémentaire en soulignant que si on disait: ... du
référendum, il serait davantage intéressé à
le supporter.
Une voix: C'est clair.
M. Laberge: Cela aurait été plus clair.
M. Samson: Ce n'est pas tellement loin de ce qui a
été dit sur le principe même de ce qui a été
proposé. Je pense qu'il faut arrêter de se regarder et de ne pas
se dire exactement ce qu'on pense. Tout le monde pense au même
référendum. Bon. Nommons-le par son nom, ce
référendum. C'est à cela qu'on pense quand on dit qu'en
matière constitutionnelle, on veut avoir, au moins sur cette question,
une question qui se répondra par un oui ou par un non. Cette loi
s'appelle la Loi sur la consultation populaire. Tantôt, le
député de Laval parlait d'un document qui se
référait au référendum comme tel et où,
selon la définition qui en est donnée, c'était
décisionnel. Je vous rappelle qu'à l'article 6, exactement, il
est dit clairement que le gouvernement peut ordonner que les électeurs
soient consultés par référendum. On ne parle pas de
consultation populaire; on parle de référendum.
Donc, si je joins cela à l'explication donnée dans l'autre
document, qui vient du même gouvernement, qui dit que, dans un
référendum, c'est une question qui est posée, qui apporte
une décision, c'est différent du genre de chose, du genre
de couleuvre que le côté gouvernemental tente de nous faire
avaler ce matin.
Bien sûr, j'ai entendu et le ministre de la Justice pour qui j'ai
beaucoup de respect, et le ministre d'État à la réforme
parlementaire et le premier ministre et le ministre des Finances qui, au cours
de la fin de semaine, a affiché ses couleurs d'une façon
très directe. Il l'a répété en Chambre hier. Si on
prend la parole de tout ce monde, y compris le député de
Jonquière qui vient d'ajouter la sienne, on s'aperçoit que tout
le monde veut nous dire sa bonne foi. Tout le monde veut nous dire que, sur le
référendum dont il est question au sous-amendement, on veut des
réponses par un oui ou par un non. Tout le monde affiche donc sa bonne
foi. Autrement dit, tout le monde veut aller au ciel, mais on dirait que
personne ne veut mourir. C'est à peu près ce que vous voulez nous
dire, ce matin. Vous nous dites: On est d'accord. C'est cela qu'on veut. Tout
le monde dit cela. Plus il y a d'intervenants, plus il y a d'intervenants qui
nous disent la même chose. On vous le dit, mais seulement, on ne veut pas
l'écrire.
Je trouve qu'il y a quelque chose qui ne tourne pas rond quelque part.
Ou bien on nous le dit, on l'écrit et on les reçoit; ou bien on
nous le dit, on ne l'écrit pas et on ne les croit pas. C'est aussi clair
que cela. Dans ce passé gouvernemental qui est quand même
relativement court, je pense qu'il y a déjà des
précédents qui font qu'on s'est fait dire des choses à la
même commission de la présidence du conseil, il y a moins d'un an.
Il me semble que c'est important, la parole d'un ministre parrain, à
l'occasion de l'adoption d'une loi. Nous avons donné notre consentement
à la loi 2 à laquelle je me réfère. Exactement de
la même façon, on avait fait appel à un consensus.
M. Ciaccia (Mont-Royal): ... n'a pas de parole. M. Paquette:
C'est une bonne loi.
M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement,
M. le Président.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Jonquière, sur une question de règlement.
M. Vaillancourt (Jonquière): Je viens d'entendre certaines
paroles qui ont été prononcées par le député
de Mont-Royal et j'aimerais que vous lui demandiez de retirer ces paroles.
M. Samson: M. le Président, question de règlement.
Le député de Mont-Royal n'avait pas la parole. C'est moi qui
avais la parole.
M. Vaillancourt (Jonquière): Cela ne fait rien. Question
de règlement, M. le Président.
M. Lavoie: Non, c'est du bruit. Je n'ai même pas
entendu.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Jonquière, je n'ai absolument rien entendu. J'ai écouté
attentivement le député de Rouyn-Noranda qui, me semble-t-il,
était sur la limite de la pertinence du débat.
M. Samson: Vous avez raison de m'écouter, M. le
Président.
M. Vaillancourt (Jonquière): II a dit: II n'a pas de
parole. M. le Président, je suis sûr que, si le
député de Mont-Royal était sincère et s'il osait
répéter publiquement les paroles que j'ai entendues de sa bouche,
il les retirerait parce qu'il ne les pense pas.
M. Lavoie: M. le Président, question de
règlement.
M. Vaillancourt (Jonquière): Vous n'avez pas entendu, M.
le Président. Moi, j'ai entendu.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Lavoie: Moi, je ne l'ai pas entendu, de toute
façon.
M. Vaillancourt (Jonquière): Moi, je l'ai entendu. Je lui
demande, pour voir...
M. Lavoie: M. le Président, je vous demanderais de statuer
sur cela.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Lavoie: Très brièvement, il est reconnu que,
quand un député n'a pas la parole, c'est considéré
d'ailleurs comme du bruit ou du désordre.
M. Vaillancourt (Jonquière): Du bruit? Ah, bon!
M. Lavoie: Écoutez! Moi, je n'ai rien entendu, de toute
façon.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Vaillancourt (Jonquière): Vous n'avez rien entendu
parce que vous ne voulez rien entendre, M. le député de
Laval.
M. Samson: Ils entendent des cloches, de l'autre
côté, ce matin.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Lavoie:... vous ne l'avez pas entendu vous-même, M. le
Président.
M. Paquette: Sur la question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, par
votre intermédiaire, je demande au député de Mont-Royal
s'il maintient les accusations qu'il vient de lancer?
M. Samson: II n'a rien dit, voyons donc!
M. Vaillancourt (Jonquière): Je peux vous
répéter mot à mot ce que vous avez dit à part
cela.
M. Lavoie: On va vous demander de le retirer, si vous le dites,
si ce n'est pas parlementaire.
M. Samson: C'est cela. Prenez-le à votre compte.
M. Vaillancourt (Jonquière): Je vous pose une question, M.
le député de Mont-Royal. Êtes-vous prêt à
retirer ce que vous avez dit? Est-ce que vous avez dit quelque chose, vous vous
en rappelez?
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Ciaccia: II n'a pas assez dormi, M. le député de
Jonquière.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Vaillancourt (Jonquière): Dormi ou pas dormi, je
n'insulte pas les autres, M. le député de Mont-Royal.
M. Paquette: M. le Président, sur la question de
règlement.
Le Président (M. Clair): Sur la question de
règlement, mais il me semble qu'elle est inexistante.
M. Paquette: Je vais être très bref, c'est que mon
collègue de Jonquière a réagi à des propos du
député de Rouyn-Noranda qui a affirmé qu'à
plusieurs occasions des ministres avaient manqué à leur parole.
Il a donné l'exemple du parrain initial de ce projet de loi, en disant
qu'il avait manqué à sa parole concernant la loi no 2. J'aimerais
qu'il étaye ses accusations ou qu'il les retire.
M. Vaillancourt (Jonquière): C'est là-dessus, M. le
Président, que le député de Mont-Royal a dit: Ils n'ont
pas de parole.
M. Lavoie: Oh! là là! Vous avez la peau...
M. Vaillancourt (Jonquière): J'espère que ce que
vous avez dit a été noté dans le journal des
Débats, même si vous n'aviez pas la parole.
M. Lavoie: Ce n'est même pas antiparlementaire.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs!
M. Vaillancourt (Jonquière): De toute façon ce n'est pas
surprenant ce que vous avez dit, cela fait un an et demi que vous faites
cela.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Jonquière, à l'ordre, s'il vous plaît! M. le
député de Jonquière, à l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Ciaccia: Franchement, vous êtes bien nerveux, ce matin.
M. le député de Jonquière.
M. Lavoie: Dodo, dodo.
Le Président (M. Clair): Messieurs, pour disposer de la
question de règlement.
M. Ciaccia: On va revenir à cela. M. le
député de Jonquière, ne vous inquiétez pas.
Le Président (M. Clair): À l'ordre! M. le
député de Jonquière, sur votre question de
règlement, il n'y avait pas lieu d'invoquer le règlement puisque
je n'ai absolument rien entendu et je n'ai eu connaissance que des paroles du
député de Rouyn-Noranda.
Quant aux paroles prononcées par le député de
Rouyn-Noranda, et à la question de règlement soulevée par
le député de Rosemont, il n'y a pas matière à
question de règlement sur ce sujet non plus, mais cependant, sur un
autre point, j'invite le député de Rouyn-Noranda à bien
prendre garde de demeurer dans la pertinence du débat, soit le
sous-amendement du député de Marguerite-Bourgeoys.
M. le député de Rouyn-Noranda.
M. Samson: M. le Président, le sous-amendement auquel nous
faisons référence qui amenderait l'article 6 a amené des
déclarations, de la part du gouvernement, que tout le monde a entendues.
On s'est fait dire: Ce que vous demandez là, c'est cela qu'on va faire,
mais on ne veut pas l'écrire. M. le Président, il me semble que
c'est très pertinent de soulever la question de
crédibilité, à ce moment-ci. Il est très pertinent
de soulever la question de crédibilité.
Comme il est toujours permis, selon notre règlement, par
analogie, de faire référence à autre chose de semblable,
je faisais référence au débat que nous avons eu sur la loi
2 et où nous avions manifesté, tout le monde, le désir
d'en arriver à un consensus. D'ailleurs, je pense que le consensus a
été obtenu, parce que la loi 2 dont nous faisons mention a
été votée à l'unanimité en troisième
lecture.
Ceci dit, M. le Président, je me rappelle fort bien, et des
membres de cette commission se rappelleront fort bien certaines
déclarations faites par le ministre parrain, en toute bonne foi
remarquez que je ne dis pas que le ministre parrain a été de
mauvaise foi indiquant que c'était là le genre de loi que
nous devrions tous ensemble roder, et il fallait une certaine souplesse au
départ, et il nous garantissait tout cela. Mais tout cela a fait que
nous lui avons donné ce consensus qu'il avait demandé pour avoir
une application plus normale et plus facile de sa loi 2. Mais, sans mettre
en
cause la bonne foi du ministre parrain de cette même loi, je pense
qu'il y a assez de monde autour de cette table qui sait que la mise en place,
l'application de cette loi a causé d'énormes problèmes
à tout le monde... (12 h 15)
M. Paquette: ... pas mal tous de votre part.
M. Samson: ... du côté de l'Opposition et même
du côté gouvernemental, excluant le député de
Rosemont, parce que lui, il est plus radical que les autres, il voulait passer
la hache dans l'Opposition. Mais, M. le Président, il n'est pas seul, le
député de Rosemont, il y en a d'autres qui sont moins radicaux
que lui, du côté gouvernemental.
M. Paquette: M. le Président, j'accepte...
M. Samson: Puis, il y en a d'autres qui pensent encore que
l'Opposition a été élue avec 59% du vote et que c'est
aussi important que le gouvernement avec 41%, M. le Président. Il y en a
encore qui pensent cela dans le gouvernement.
Je dis que nous avons eu des difficultés d'application, des
difficultés de démarrage. Ces difficultés, M. le
Président, on ne les aurait pas eues, s'il y avait eu quelqu'un capable
de mettre en pratique ce qu'on nous avait garanti à la commission
parlementaire. C'est là une façon de démontrer à
l'actuel ministre...
M. Paquette: Je trouve...
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Samson: ... que le consensus qui a été
réclamé au début et que nous espérons pouvoir
donner avec le genre d'argumentation qu'on a ce matin, avec le genre de
position absolument rigide que le gouvernement tient, malheureusement, vous
n'en aurez pas de consensus. Vous allez arriver, à la fin de
l'étude de ce projet de loi, avec des votes à tous les articles,
où l'Opposition va voter contre tous les articles ou presque, vous allez
arriver à la fin avec un mécanisme, dont vous pourrez vous vanter
au départ, un mécanisme qui sonne assez faux, qu'on n'a
même pas pu accorder le violon avant de le mettre à la disposition
de la population. C'est cela le genre de mécanisme que vous risquez
d'avoir, si vous n'acceptez pas au moins je dis au moins de faire
en sorte que votre position soit un peu plus souple et qu'on se rejoigne. Je ne
dis pas qu'on ne pourrait peut-être pas faire encore un petit pas pour
utiliser les paroles populaires du côté gouvernemental qui
sortent d'ailleurs directement des pensées de Mao mais je ne dis
pas qu'on ne pourrait pas faire...
M. Godin: C'est Kissinger c'est Henry Kissinger qui a dit
cela.
M. Samson: ... quelques petits pas, mais il faudrait que du
côté gouvernemental on fasse un "step" aussi, là.
M. Godin: Don Camillo.
Question de règlement, M. le Président.
M. Samson: Parce que s'ils ne font rien du côté
gouvernemental, on va se retrouver, M. le Président...
Le Président (M. Clair): M. le député de
Rouyn-Noranda, le député de Mercier invoque le
règlement.
M. Godin: Je voudrais rappeler à Don Camillo que l'auteur
de ces paroles n'est pas Mao Tsé-Toung mais Henry Kissinger.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Mercier, ce n'était pas une question de règlement. N'en abusez
point.
M. Samson: M. le Président, sur la même question de
règlement, j'avoue que le député de Mercier aurait pu
être l'auteur de cela aussi. Remarquez bien qu'il n'est pas loin de
l'auteur, de toute façon.
M. Godin: Très flatteur.
M. Samson: II prend cela comme une flatterie, par-dessus le
marché, imaginez-vous donc!
M. Godin: Kissinger. Henry Kissinger.
M. Samson: II prend cela pour un compliment.
M. Godin: Certainement.
M. Samson: On ne peut pas, M. le Président, avec du monde
comme cela en avant de nous discuter sérieusement.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Rouyn-Noranda.
M. Paquette: M. le Président, je pense que vous voyez
pourquoi il y a des difficultés d'application de la loi no 2.
Le Président (M. Clair): M. le député...
M. Samson: Je dis, M. le Président, que la pertinence du
débat exige que je vous dise ce que je viens de vous dire. Je dis cela
que la pertinence du débat exige que je continue à faire
comprendre à l'actuel ministre de la Justice qui est venu prendre la
relève du ministre d'État aux Affaires parlementaires, que s'il
n'a pas le mandat de la souplesse qui est nécessaire dans les
circonstances, il devrait accepter de suspendre cet article et d'aller en
discuter avec ceux qui pourraient lui donner le mandat d'avoir plus de
souplesse à l'article 6. Je reconnais que le ministre de la Justice a,
de bonne foi, une certaine ligne de conduite, il a des balises, mais s'il n'a
pas le mandat nécessaire pour pouvoir aller plus loin dans la
possibilité d'accepter, sinon notre amendement, au moins un amendement
qui pourrait être présenté par le gouvernement dans
à peu près le même sens, s'il n'a pas cette
possibilité, je pense qu'il serait normal que le ministre de la Justice
accepte de suspendre cet
article et de parler soit au premier ministre, soit à ceux
à qui il doit demander le mandat nécessaire pour élargir
un peu et nous revienne avec des propositions qui seraient celles d'accepter ce
que nous avons suggéré ou encore des propositions
différentes. Je ne m'arrête pas, M. le Président, à
la formulation. Je ne voudrais pas être trop formaliste parce qu'il y a
trois partis d'Opposition qui ont apporté des amendements un peu
différents, mais on se rejoint. Vous voyez, on a fait, nous, les
approches nécessaires pour tenter de faire le consensus. Il reste un
petit pas à faire du côté gouvernemental. Il y a encore,
comme on dit, une petite rigole entre les deux...
M. Gratton: On a un petit groupe à convaincre.
M. Samson: C'est assez sérieux parce que, si nous
n'obtenons pas un assouplissement à l'article 6, c'est tout le projet de
loi qui devient inacceptable pour l'Opposition. C'est pour donner un exemple de
l'importance qu'on doit donner à cela. Quand on demande... Pardon, M. le
Président?
Le Président (M. Clair): Je m'excuse de vous interrompre.
M. le député de Rouyn-Noranda, je vous prierais de conclure,
parce que sur ce sous-amendement, lors de la réunion
précédente de la commission, vous aviez exercé un droit de
parole de huit minutes. Aujourd'hui, vous avez commencé à midi
trois minutes, et en retranchant même cinq minutes pour les questions de
règlement qu'il a pu y avoir, vous avez déjà
dépassé de deux ou trois minutes les 20 minutes. Alors, je vous
prierais de conclure rapidement.
M. Samson: Oui, M. le Président. Je reviendrai sur
l'amendement si nécessaire. Je conclus en disant que ce qu'on demande au
ministre, s'il n'est pas capable de nous l'accorder ce matin, faute de mandat,
au moins il pourrait nous accorder de suspendre l'article et de nous revenir
cet après-midi après avoir fait les consultations utiles au
gouvernement.
Le Président (M. Clair): M. le ministre.
M. Bédard: M. le Président, je n'ai pas l'intention
de revenir sur les arguments que j'ai énoncés jeudi soir à
l'encontre du sous-amendement qui a été fait par l'Opposition. Je
crois que le député de Rosemont a explicité sur ces
arguments avec beaucoup de brio et avec beaucoup de conviction à partir
du moment où l'Opposition veut bien comprendre que nous avons
présentement à nous pencher sur une loi-cadre et non pas sur une
loi spéciale. Je n'ai pas besoin de mandat non plus, de la part du
Conseil des ministres, pour savoir s'il y a lieu d'accepter ou de refuser le
sous-amendement de l'Opposition. Il s'agit simplement de s'inscrire dans la
logique de cette loi qui est une loi-cadre et non pas une loi qu'on veut
particulariser à quelque référendum que ce soit pour
savoir et comprendre que le sous-amendement proposé par l'Opposition
aurait pour effet de venir à l'encontre du principe fondamental de cette
loi-cadre, dans le sens qu'il restreindrait le principe.
M. le Président, j'ai dit et je redis qu'en ce qui regarde le
référendum que nous avons à l'esprit concernant l'avenir
constitutionnel du Québec, je favorisais une question unique, claire et
précise de manière à obtenir une réponse
précise, significative de la part des Québécois. Je pense
que c'est la seule manière de procéder si on respecte les
Québécois et si nous voulons avoir ce que nous désirons
tous, ou du moins de ce côté-ci de la Chambre, une réponse
significative des Québécois. Ce que je dis, de toute
façon, cela a déjà été dit par le ministre
d'État à la réforme parlementaire et endossé par le
premier ministre, et cela constitue, à mon sens, déjà une
indication très claire de l'intention du gouvernement d'aller dans le
référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec avec une
question unique, claire et précise. Je dirais que c'est plus que de la
transparence, c'est même un commencement d'engagement qui me semble
très ferme de la part de ceux qui ont eu à se prononcer, tout au
moins sur cet élément. Les parlementaires, lorsque nous aurons
à discuter soit de la question, soit d'un projet de loi, selon ce que
prévoit la loi-cadre, seront à même de constater
jusqu'à quel point le gouvernement ou certains ministres ont
donné suite à leur manière de voir les choses et ils
pourront évaluer jusqu'à quel point la question est claire et
précise. La population aussi sera à même de constater
jusqu'à quel point une suite logique a été donnée,
suite aux déclarations qui ont été faites par ceux que
vous connaissez.
Alors, M. le Président, nous sommes à constituer, à
l'heure actuelle, un instrument de démocratie le plus parfait possible,
au service d'un gouvernement, de quelque gouvernement que ce soit, qui nous
permet d'associer la population à la prise de décision majeure.
Cet instrument, cette loi-cadre, nous allons essayer ensemble de la faire la
plus parfaite possible et je ne vois vraiment pas. quelle que soit l'importance
d'un référendum ou des référendums à venir,
comment on pourrait en venir à la conclusion qu'il n'y a pas de
possibilité de s'inscrire, justement, dans le respect de cette loi-cadre
que nous voulons comme un instrument de démocratie le plus parfait
possible. Que ce soit un référendum sur quelque question que vous
puissiez imaginer, que ce soit le référendum sur l'avenir
constitutionnel du Québec, je crois qu'il est important qu'il s'inscrive
et qu'il respecte justement les principes de démocratie que nous serons
en mesure d'élaborer à l'occasion de cette loi-cadre. Dans ce
sens, quand on parle de démocratie, le référendum sur
l'avenir constitutionnel du Québec ne fait pas exception à
quelque référendum que ce soit.
Il se doit d'être fait dans le respect des
Québécois, des gens que nous consultons et dans le respect des
règles générales de démocratie.
C'est pourquoi, M. le Président, à moins qu'il n'y ait
d'autres intervenants, nous serions également prêts à voter
sur l'amendement et sur le sous-amendement, puisque la même
argumenta-
tion reviendrait. Nous voulons, le plus possible, avancer le
débat.
Le Président (M. Clair): N'ayant pas d'autre intervenant
sur ma liste, je demanderai si la motion de sous-amendement du
député de Marguerite-Bourgeoys est adoptée? Je pense bien
que tout le monde en ayant parlé, on n'a pas besoin de la lire.
M. Lavoie: On a encore des droits de parole, mais on veut...
Le Président: Collaborer.
M. Lavoie: ... collaborer pour que ce projet de loi puisse
être adopté dans les délais convenables.
M. Bédard: Nous aussi, M. le Président, nous avons
encore droit de parole.
M. Vaillancourt (Jonquière): Rejeté, M. le
Président.
Le Président (M. Clair): La motion d'amendement du
député de Marguerite-Bourgeoys est-elle adoptée?
M. Lavoie: Adopté, M. le Président.
M. Vaillancourt (Jonquière): Rejeté, M. le
Président.
M. Samson: M. le Président, je demanderais qu'on
enregistre le vote.
Le Président (M. Clair): C'est bien. Veuillez indiquer si
vous êtes pour ou contre la motion d'amendement du député
de Marguerite-Bourgeoys.
M. Bédard (Chicoutimi)? M. Bédard: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Beauséjour
(Iberville)?
M. Beauséjour: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Charbonneau
(Verchères)?
M. Charbonneau: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Godin (Mercier)?
M. Godin: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Gratton (Gatineau)?
M. Gratton: Pour, M. le Président.
Le Président (M. Clair): M. Grenier
(Mégantic-Compton)?
M. Grenier: Pour.
Le Président (M. Clair): M. Laberge (Jeanne-Mance)?
M. Laberge: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Lavoie (Laval)?
M. Lavoie: Cela, c'est une question claire, M. le
Président. Pour ou contre, je suis pour, M. le Président.
Le Président (M. Clair): M. Paquette (Rosemont)?
M. Bédard: Vous voyez, vous n'avez pas besoin de dire oui
ou non, pour être clair.
M. Lavoie: Mettez pour ou contre également. C'est pareil,
on l'a déjà dit.
Le Président (M. Clair): M. Roy (Beauce-Sud)? M. Samson
(Rouyn-Noranda)?
M. Samson: Oui, M. le Président.
M. Bédard: II est d'accord avec nous, oui.
M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, ça s'en vient
vite.
Le Président (M. Clair): Les résultats sont les
suivants: Pour l'adoption: 4, contre: 6. La motion est rejetée.
Messieurs, il est 12 h 28, est-ce que quelqu'un désire exercer
son droit de parole sur l'amendement présenté par le
député de Laval ou si on suspend les travaux tout de suite?
M. Bédard: Nous serions prêts, M. le
Président, à voter immédiatement.
M. Lavoie: S'il n'y en a pas d'autres, nous serions
prêts.
Le Président (M. Clair): Vous êtes prêts
à voter sur l'amendement? L'amendement du député de
Marguerite-Bourgeoys, que je relis: "Ajouter à la fin de l'article 6,
l'alinéa suivant: Quel que soit l'objet du référendum, il
doit s'agir d'une question à laquelle il ne peut être
répondu que par un oui ou un non."
Je m'excuse, par le député de Laval, effectivement, c'est
une motion d'amendement.
M. Lavoie: J'espère que j'aurai plus de chance que le
député de Marguerite-Bourgeoys.
Le Président (M. Clair): Cette motion sera-t-elle
adoptée?
M. Lavoie: Oui, M. le Président.
M. Vaillancourt (Jonquière): Rejeté, M. le
Président.
M. Bédard: Je pense qu'on pourrait enregistrer le
même vote.
Le Président (M. Clair): On considère que c'est le
même...
M. Lavoie: II n'y en a pas qui changent d'idée?
Le Président (M. Clair): ... résultat, donc il y en
aurait 6 contre l'amendement et...
M. Bédard: On ne change pas d'idée, la question va
être claire et précise.
Le Président (M. Clair): ... 4 membres pour. L'amendement
du député de Laval est rejeté.
M. Bédard: Nous sommes prêts M. le Président,
à...
Le Président (M. Clair): À adopter l'article 6?
M. Bédard: ... adopter l'article, s'il n'y a pas
d'objection.
M. Lavoie: Oh non.
M. Samson: Un instant.
M. Lavoie: ... des amendements.
M. Samson: Deux mauvaises nouvelles en cinq minutes, c'est
assez.
M. Gratton: M. le Président.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Gatineau.
M. Bédard: Avec l'argumentation que vous aviez, ce ne sont
pas de si mauvaises nouvelles.
M. Gratton: À l'article 6, M. le Président...
M. Samson: Si vous compreniez, vous n'auriez même pas
besoin de notre argumentation.
M. Bédard: Si vous aviez compris, vous ne l'auriez
même pas présentée.
M. Samson: Cela fait longtemps qu'on vous comprend.
Le Président (M. Clair): À l'ordre.
M. Gratton: M. le Président, à l'article 6,
j'aimerais, en quelque sorte, donner un avis ou déposer une motion
d'amendement immédiatement avant qu'on ajourne de façon que les
députés ministériels puissent en prendre connaissance au
cours du déjeuner. Il s'agit d'ailleurs d'un amendement qui, j'en suis
sûr, suite aux consultations que vous avez faites auprès de nos
collègues de l'Opposition, recueillera l'appui de tous les
députés de l'Opposition à la commission (12 h 30)
Vote à l'Assemblée nationale
dans
le cas d'un référendum relatif au
statut
constitutionnel du Québec
L'amendement se lit comme suit: "Ajouter à l'article 6
l'alinéa suivant: Dans le cas d'un référendum relatif au
statut constitutionnel du Québec, une question ou un projet de loi
devant faire l'objet d'une consultation populaire doit être
approuvé par les deux tiers des membres de l'Assemblée
nationale".
M. le Président, je dirais, avant de vous proposer la suspension
ou l'ajournement de nos travaux, qu'il s'agit là d'un souhait
exprimé par la Commission des droits de la personne dans le
mémoire dont nous avons pris connaissance ce matin.
Nous demandons, M. le Président, l'ajournement de nos
travaux.
Le Président (M. Clair): Messieurs, il est 12 h 30. La
commission suspend ses travaux sine die.
(Suspension de la séance à 12 h 31)
(Reprise de la séance à 16 h 38)
Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs, s'il
vous plaît! La commission de la présidence du conseil et de la
constitution est réunie pour continuer l'étude article par
article du projet de loi 92.
Les membres de la commission sont M. Bédard (Chicoutimi), M.
Bisaillon (Sainte-Marie)...
Une voix: Remplacé par le député de
Jonquière.
Le Président (M. Clair): ... remplacé par M.
Vaillancourt (Jonquière);
Une voix: ... M. Beauséjour (Iberville).
Le Président (M. Clair): Votre tour viendra... M.
Charbonneau (Verchères), M. Clair (Drummond) remplacé par M.
Beauséjour (Iberville); M. Garneau (Jean-Talon) remplacé par M.
Gratton (Gatineau); M. Grenier (Mégantic-Compton)... M. Garneau
(Jean-Talon) est remplacé non pas par M. Gratton (Gatineau), mais
plutôt par M. Lavoie (Laval);
Une voix:...
Le Président (M. Clair): Lavoie (Laval).
M. Samson: Lavoie de Laval. J'avais compris la voix ravale.
Le Président (M. Clair): M. Laberge (Jeanne-Mance)...
M. Laberge: Présent.
Le Président (M. Clair):... M. Levesque (Bonaventure)
remplacé par M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys); M. Paquette (Rosemont),
M. Roy (Beauce-Sud)...
Une voix: M. Paquette (Rosemont) remplacé par M. Godin
(Mercier).
Le Président (M. Clair): M. Paquette (Rosemont)
remplacé par M. Godin (Mercier); M. Roy (Beauce-Sud) et M. Samson
(Rouyn-Noranda).
Les intervenants sont M. Bertrand (Vanier), M. Brochu (Richmond), M.
Dussault (Châteauguay), M. Guay (Taschereau)...
Une voix: Remplacé par M. Fallu (Terrebonne).
Le Président (M. Clair): ... remplacé par M. Fallu
(Terrebonne); M. Lavoie (Laval) remplacé par M. Gratton (Gatineau), M.
Lévesque (Taillon) remplacé par qui? Il n'est remplacé par
personne. M. Morin (Louis-Hébert) et M. Raynauld (Outremont)
remplacé par M. Ciaccia (Mont-Royal).
Au moment où nous avons suspendu nos travaux, ce matin, nous en
étions encore à l'étude de l'article 6. Le
député de Gatineau avait donné l'avis qu'il fallait
présenter une motion d'amendement. La motion d'amendement se lisait
comme suit... M. le député de Gatineau, vous faites effectivement
motion d'amendement à l'article 6?
M. Gratton: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Clair): Cette motion d'amendement se lit
comme suit: Ajouter, à l'article 6, l'alinéa suivant: "Dans le
cas d'un référendum relatif au statut constitutionnel du
Québec, une question ou un projet de loi devant faire l'objet d'une
consultation populaire doit être approuvé par les deux tiers des
membres de l'Assemblée nationale".
Avant de donner le droit de parole au proposeur sur sa motion,
quelqu'un...
M. Grenier: Je m'excuse, mais est-ce qu'il serait possible de
mettre comme intervenant le député de Nicolet-Yamaska, M.
Fontaine? Non, ce n'est pas terminé.
Le Président (M. Clair): Cela va. Au lieu de M. Brochu
(Richmond) comme intervenant, il y aura M. Fontaine (Nicolet-Yamaska).
J'allais dire qu'avant de commencer à entendre les intervenants
sur la motion d'amendement du député de Gatineau, il faudrait
d'abord disposer de la recevabilité de cette motion d'amendement.
Quelqu'un soulève-t-il la question de recevabilité de la motion
d'amendement du député de Gatineau? Je déclare la motion
du député de Gatineau recevable. J'apporte une dernière
modification, j'espère, à la liste des intervenants et des
membres: M. le député de Rosemont sera effectivement membre de
cette commission et il ne sera pas remplacé par M. Godin (Mercier).
Cependant,
M. Godin (Mercier) remplacerait M. Lévesque (Taillon) comme
intervenant.
M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que le
député de Jonquière est quelque part là-dedans?
Le Président (M. Clair): M. le député de
Gatineau, vous avez la parole.
M. Gratton: M. le Président, effectivement, au moment
d'ajourner ce matin, nous allions déposer une motion d'amendement
à l'article 6, qui est conséquente, d'ailleurs, avec la position
que le Parti libéral a adoptée dès le dépôt
du livre blanc sur la consultation populaire. On sait que plusieurs des
organismes qui sont venus comparaître devant la commission parlementaire
sur le livre blanc avaient indiqué au gouvernement leur appui à
cette façon d'adopter la question. Tous les intervenants, y compris la
Commission des droits de la personne qui a, ce matin, dans le rapport qu'elle
nous a soumis, repris ces considérations du 11 novembre 1977,
insistaient sur la nécessité de faire en sorte que, lors de
l'adoption de la question, quel que soit le référendum, s'il y
avait lieu de rechercher une formulation où la population s'y
retrouverait le mieux possible, il serait normal d'espérer que les
représentants de la population à l'Assemblée nationale
puissent, eux aussi, faire le consensus le plus large possible sur la
formulation de la question. À cet effet, il serait souhaitable que ce ne
soit pas la simple majorité des membres présents à
l'Assemblée qui puisse adopter le texte d'une question à
être soumise lors d'une consultation popuiaire, mais bien les deux tiers
des députés membres de l'Assemblée nationale.
Vous me permettrez, M. le Président, de signaler que la
Commission des droits de la personne, dans ses réflexions
préliminaires sur le livre blanc, sur la consultation populaire,
datées du 11 novembre 1977, nous disait ceci, à la page 3, et je
cite: Elle préférerait, "en raison de l'importance de la motion,
que le vote se prenne à la majorité des deux tiers plutôt
que la majorité simple, comme le prévoit la procédure
parlementaire lorsqu'on recherche, le plus large consensus entre les partis
politiques ". Et suite à la motion adoptée unanimement par
cette... (16 h 45)
M. Vaillancourt (Jonquière): ...
M. Gratton: Oui, et en continuant on... "...entre les partis
politiques, la nomination des commissaires de la Commission des droits de la
personne en est un exemple". C'est ça?
M. Vaillancourt (Jonquière): Non, "... il n'en va d'aucune
atteinte... ", vous pourriez continuer.
M. Gratton: Non...
M. Vaillancourt (Jonquière): "... il n'en va... Le
Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Gratton: Non, j'ai dit, M. le Président... Je ne sais
pas si je parle dans le vide à cette commission. Le député
de Mercier, ce matin, m'a posé des questions après que j'aie
passé quinze minutes à expliquer ce que je tentais de faire
comprendre à la commission. Là, le ministre de la Justice ne m'a
pas entendu dire, je suppose, que je parlais des réflexions
préliminaires. Je vais maintenant vous lire ce que la Commission des
droits de la personne nous a dit...
Une voix: Ce n'est pas la même chose. M. Godin:
D'accord.
M. Gratton: ... dans le rapport daté du 5 juin 1978 et qui
donnait suite à l'adoption unanime des membres de la commission d'une
motion leur demandant de nous faire parvenir leur avis sur le projet de loi no
92.
M. Godin: M. le Président, est-ce que vous nous autorisez
à tomber la veste, s'il vous plaît? M. le Président, est-ce
que vous nous autorisez à tomber la veste ou les règles du
Parlement vous font...
Le Président (NI. Clair): Je préférerais
procéder autrement, à savoir que vous ne me posiez pas la
question et que, si quelqu'un soulève une question de règlement,
je sois appelé à en disposer.
M. Vaillancourt (Jonquière): II y a beaucoup de
précédents.
M. Godin: D'accord.
M. Samson: Vous allez passer pour des tout-nus.
M. Bédard: Je suis habillé pour deux.
M. Gratton: Alors, M. le Président, dans son document dont
nous avons pris connaissance ce matin, la Commission des droits de la personne
dit, au bas de la page 2 et je cite: "La proposition sur un vote à la
majorité des deux tiers n'a cependant pas été retenue ".
Il s'agit de la proposition dont j'ai fait lecture il y a quelques instants.
Sans vouloir en faire une question de principe, ni en exagérer
l'importance, la commission continue de croire qu'un vote à la
majorité des deux tiers, comme le prévoit la procédure
parlementaire lorsqu'on recherche le plus large consensus entre les partis
politiques, serait préférable. Il n'en va d'aucune atteinte
à des libertés fondamentales, mais, simplement d'une garantie que
la question soumise à la consultation populaire, une fois
adoptée, ne fasse plus l'objet d'une contestation quelconque, qui aurait
pour conséquence d'orienter le débat sur des questions de forme
plutôt que sur des questions de fond.
M. le Président, nous non plus, la raison qui nous motive
à présenter cette motion d'amendement, n'en est pas une de fond,
comme telle, n'en est pas une de principe, mais s'inscrit simplement dans le
processus constant qu'on a suivi, depuis le début, depuis le
dépôt du livre blanc, c'est-à-dire que le ministre de la
réforme électorale, avant le ministre de la Justice ont tous deux
tenté d'assurer le plus grand consensus possible autour de cet outil de
la "démocratie" que constitue la loi 92 sur la consultation
populaire.
Et, comme le dit la Commission des droits de la personne, il s'agit en
proposant que la formulation de la question soit adoptée par les deux
tiers des membres de l'Assemblée nationale, tout simplement, d'assurer
ce consensus plus large.
M. le Président, si le gouvernement ne considère pas qu'il
soit important de faire en sorte que le plus grand nombre de
députés possible soient satisfaits que la question est claire,
limpide et produira des résultats probants et valables, on se demande ce
qu'on fait ici. Parce qu'on l'a dit et répété à
satiété que les résultats du référendum,
l'interprétation qu'on en fera, ne seront valables que dans la mesure
où nous nous serons assurés que nous donnons toutes les
possibilités à la population, d'abord, de comprendre la question
qui lui est posée et ensuite, de s'exprimer clairement quant à
son choix.
C'est l'objectif que visait la proposition d'amendement du
député de Laval, sous-amendée par le député
de Marguerite-Bourgeoys, et qui a été rejetée ce matin,
c'est encore ce que recherche la proposition d'amendement que j'ai faite ce
matin à l'article 6. Je ne parlerai pas plus longuement, M. le
Président, sur les diverses personnes qui ont souscrit à ce voeu,
à savoir que les deux tiers des députés adoptent la
formulation de la question. Je n'en citerai que deux parmi plusieurs, M. le
Président. En l'occurrence, un éditorial du journal Le Devoir du
vendredi 26 août 1977, signé par M. Michel Roy: "S'il est vrai que
l'on doive reconnaître au gouvernement la responsabilité qui est
la sienne pour déterminer la manière de poser la question sur une
affaire relativement mineure...
M. Godin: Ah bon!
M. Gratton: ... dont la réponse n'entraîne pas de
graves conséquences politiques, il en va autrement d'une consultation
sur l'avenir même d'un pays. On pourrait sans doute se mettre d'accord
sur une majorité des deux tiers' .
M. Lalonde: Sans doute.
M. Gratton: Sans doute on pourrait se mettre d'accord. On le
souhaite énormément en tout cas, M. le Président. C'est la
raison qui nous motive à formuler cet amendement. Un deuxième
témoignage du journal La Presse du samedi 27 août 1977,
signé par M. Marcel Adam: "La règle de la majorité simple
ne devrait-elle pas également être suspendue et remplacée
par celle établissant aux deux tiers la majorité requise pour
adopter la question d'un référendum..." À noter ici, M. le
Président, que M. Adam en fait même la suggestion par rapport
à n'importe quel référendum et pas nécessairement
strictement à un référendum portant sur l'avenir
constitutionnel du Québec,
comme vise à le faire l'amendement que j'ai proposé. Je
continue: "... Une règle qui est déjà prévue, que
je sache, pour des cas beaucoup moins importants que celui portant sur l'avenir
constitutionnel du Québec ". Fin de la citation. Donc, M. le
Président, inutile de citer une longue litanie de ces
témoignages, inutile de répéter ce que la Commission des
droits de la personne nous a dit à deux reprises différentes.
J'invite les ministériels d'abord à réaliser qu'il ne
s'agit pas de demander d'amender le projet de loi pour que toute question de
tout référendum soit adoptée par les deux tiers des
membres de l'Assemblée nationale, mais bien seulement du
référendum relatif au statut constitutionnel du Québec.
J'espère que le ministre ne se limitera pas à nous dire, comme il
l'a fait quant à la motion d'amendement du député de
Laval, que, parce que c'est une loi-cadre qu'on étudie, il n'est pas
question de spécifier, dans le projet de loi no 92...
M. Bédard: L'argument est différent.
M. Gratton: On va l'écouter avec grand soin, sauf que je
crains d'avance, M. le Président, que, les arguments étant
différents, le résultat risque d'être le même. Je
vous remercie.
Le Président (M. Clair): Le député de
Mégantic-Compton.
M. Bédard: Beaucoup d'intuition.
M. Grenier: Est-ce qu'il y a une intervention
ministérielle, comme l'habitude le veut?
M. Bédard: Pardon?
M. Grenier: Est-ce que ce sont les mêmes règles que
d'habitude? Non.
M. le Président, bien rapidement d'abord, sur l'amendement qui
nous est soumis, sur lequel il nous est permis de nous interroger, je n'ai pas
d'objection majeure à cet amendement, puisqu'on a vu que ça va
dans le sens de la Charte des droits et libertés de la personne, qui
fait une semblable recommandation dans ses principes.
On sait également que le Protecteur du citoyen est ainsi
nommé par le vote des deux tiers de cette Assemblée nationale. Il
en est de même du directeur général du financement des
partis politiques, poste institué en vertu de la loi 2, et le
Vérificateur général est aussi nommé par les deux
tiers de cette Assemblée.
Cependant, cela pose une particularité, à savoir que, dans
l'actuel gouvernement, il y a déjà 70 votes acquis par le
gouvernement, il n'en manque que quatre pour faire les deux tiers de la
Chambre. À partir de là, le principe est peut-être un peu
différent, dans ce sens que, pour assurer les deux tiers de cette
Chambre, il ne manque que quatre votes. Cela demande, bien sûr, une
certaine forme de consensus pour trouver ces quatre votes. Mais il est acquis
que, dans l'opinion publique, tout projet de loi devrait être une
initiative gouvernementale, on s'attend à ça, on s'attend
éga- lement que les décisions soient prises par le gouvernement.
Cela appelle, bien sûr, la responsabilité du gouvernement, on sait
ça.
Un autre problème sur lequel il faut s'interroger, c'est qu'il se
pourrait bien que, à demander plus qu'un gouvernement qui s'est fait
élire et qui veut nous amener un pareil référendum, une
pareille façon de se prononcer sur l'avenir constitutionnel du
Québec, il reste toujours une voie après, c'est que le
gouvernement, après avoir posé sa question, si elle n'est
acceptée que par une majorité simple, on devra la
débattre, elle devra être votée chez le public et si le
public n'en est pas satisfait, il pourra toujours battre ce gouvernement lors
d'une éventuelle élection.
Il y a une chose aussi qu'il ne faut pas négliger, c'est que le
fait de demander plus que la force d'un gouvernement qui est déjà
majoritaire-pourrait devenir une espèce de bois dans une roue
administrative, à savoir que courir après quelques autres votes,
cela pourrait facilement être une façon de ne jamais s'accorder
sur une question et risquer de porter ce référendum aux calendes
grecques.
Je pense que cela pose des problèmes que de demander les deux
tiers sur une question comme celle-là. Ce n'est pas exactement pareil
que de nommer, par exemple, le Protecteur du citoyen ou le directeur
général du financement, ou le vérificateur. Ce n'est pas
pareil. C'est un principe, alors que, là, on met en cause des personnes
à qui on donne un mandat.
Je vous dis qu'entre les deux, mon coeur balance. Je ne suis pas
convaincu que les deux tiers des votes soit une chose absolument essentielle.
J'attendrai davantage d'éclairage de la commission. Mais il y a
certainement des inconvénients, argument qui pourrait servir, encore une
fois, à faire reporter la question à plus tard, argument qui
pourrait desservir certaines formations politiques. On connaît les
conséquences que cela pourrait apporter.
Si on demande les deux tiers, selon la constitution actuelle de la
Chambre, pour avoir plus des deux tiers et les quatre députés
supplémentaires dont on a besoin, il faudra trouver ces
députés dans l'une ou l'autre des formations des partis reconnus,
si on garde l'unanimité des partis, comme c'est une coutume.
À partir de là, il pourrait y avoir du discrédit
à l'égard de l'une ou l'autre des formations politiques.
Personnellement, j'ai longuement défendu, et je continuerai de le faire
aussi, le principe de dire qu'un gouvernement fait son nid, pose ses gestes,
fait ses lois, et, quand on n'en est pas satisfait, on le bat. J'ai connu cela,
d'autres l'ont connu, d'autres le connaîtront.
Je garde mes réserves sur cet amendement
Le Président (M. Clair): M. le député de
Rouyn-Noranda.
M. Samson: M. le Président, je suis d'accord avec cet
amendement. Je pense que ce n'est pas un fait nouveau. J'ai annoncé mes
couleurs il y a pas mal de temps. Au tout début de cette com-
mission parlementaire, j'en ai parlé, je me rappelle, à
l'occasion du dépôt du livre blanc, à l'Assemblée
nationale, avoir posé une question à l'honorable ministre
d'État à la réforme parlementaire, le député
de Maisonneuve. Ma question portait justement sur cet aspect, à savoir
s'il accepterait cette possibilité d'introduire dans sa loi, de deux
façons, soit pour le choix de la question, un vote aux deux tiers de
l'Assemblée. J'avais même ajouté, à ce
moment-là, la possibilité que le référendum, devant
lier le gouvernement il n'était pas sûr que cela ne devait
pas lier le gouvernement aurait dû comporter une exigence d'un
vote des deux tiers de la population. Mais nous sommes présentement
devant une loi de la consultation popuiaire et ce qu'il y a de particulier dans
cette loi, c'est que cela ne lie pas le gouvernement.
Si l'on tient compte du fait que nous étudions ce projet de loi
principalement parce que l'actuel gouvernement en avait fait une promesse
solennelle avant les dernières élections
générales... C'est pour s'acquitter d'une promesse qu'il nous
présente le projet de loi sur les référendums, mais, en
nous présentant son projet de loi sur les référendums, en
même temps, il prend bien la précaution de ne pas en faire une loi
dans laquelle la réponse à un référendum lie le
gouvernement. (17 heures)
L'article 6, particulièrement, nous permet d'en parler. Cela
devient une espèce de loi... On aurait pu tout aussi bien l'appeler la
loi sur les sondages officiels et cela aurait donné la même chose,
parce qu'à la fin de la course, le gouvernement n'aura en main, comme
valeur, que la valeur d'un sondage.
Or, si l'on tient ce raisonnement et que l'on en accepte la teneur,
c'est-à-dire qu'on accepte qu'on va jouer au référendum
mais que, dans le fond on ne se lie à rien, si on accepte cela, bien
sûr, pour préparer la question, dans la ligne de pensée, la
majorité simple pourrait être suffisante, parce qu'on s'en va vers
un sondage. Il reste cet élément qui vient en quelque sorte
impliquer l'Assemblée nationale dans le processus, parce que le
gouvernement, en vertu de l'article 6, peut ordonner que les électeurs
soient consultés par référendum sur une question
approuvée par l'Assemblée nationale du Québec.
En théorie, c'est bien beau, mais, en pratique, je pense qu'on ne
réussira pas, avec les beaux discours qu'on peut faire de part et
d'autre, d'un côté ou de l'autre de la table, qu'on ne
réussira à faire croire à personne qu'une question soumise
à l'Assemblée nationale et n'appelant que la majorité
simple serait réellement une question qui provient de l'Assemblée
nationale, M. le Président. C'est une question qui provient du
gouvernement qui se servira de sa propre majorité pour la faire passer.
Quelles que soient les opinions d'autres membres de l'Assemblée, bien
sûr, en pratique, si le gouvernement décide que c'est telle
question qu'il présente devant l'Assemblée nationale, il a
suffisamment de membres pour l'adopter à la majorité simple et en
faire une question qui, sous le couvert d'une question en provenance de
l'Assemblée nationale, ne sera pas autre chose qu'une question
posée par le gouvernement lui-même.
Évidemment, je ne réfute pas le fait que le gouvernement
peut, s'il le veut et je ne trouverais pas cela illégitime du
tout poser lui-même une question, demander consultation sur sa
politique, mais je pense qu'il serait plus normal, dans un effort minimal de
courage, que le gouvernement nous dise clairement: C'est le gouvernement qui va
le faire. Qu'on nous le dise clairement. Là, ce n'est pas clair.
À l'article 6, ce n'est pas comme cela que c'est dit. Il est dit que
c'est l'Assemblée nationale, sur une question approuvée par
l'Assemblée nationale. Un instant! Je pense qu'on ne réussira pas
à berner la population au point de lui faire croire qu'avec la
majorité simple, c'est l'Assemblée nationale qui a
décidé cela. Non, c'est le gouvernement qui va avoir
décidé, c'est le gouvernement qui va voter, c'est le gouvernement
qui, grâce à la majorité simple, va imposer son action.
Remarquez...
M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que le
député de Rouyn-Noranda me permettrait une question?
M. Bédard: II faut donner un minimum d'intelligence
à la population quand même...
Le Président (M. Clair): À l'ordre! M. le
député de Rouyn-Noranda.
M. Samson: M. le Président, je viens d'entendre une parole
du ministre de la Justice que je n'accepte pas.
M. Bédard: II faut avoir confiance en la population. Elle
est capable de comprendre.
M. Samson: Ce que je viens de dire, la population le comprend
bien. Je ne voudrais pas, en aucune façon, mais si le gouvernement veut
le faire, c'est son affaire, mais vous ne m'associerez pas à ce genre de
choses... Je ne voudrais pas, en aucune façon, qu'on laisse croire, par
ce genre de loi. que la question qui sera posée va provenir de
l'Assemblée nationale. Ce n'est pas vrai. Elle va provenir du
gouvernement. Dites-le clairement. Je n'ai pas d'objection à ce que cela
vienne du gouvernement. Si le gouvernement veut le faire, qu'il fasse son nid,
qu'il prenne ses responsabilités. Ce n'est pas illégitime et ce
n'est pas illégal non plus. Ce que je n'aime pas...
M. Vaillancourt (Jonquière): Article 100. M. le
Président...
Le Président (M. Clair): M. le député de
Rouyn-Noranda, le député de Jonquière invoque l'article
100, je pense, pour vous demander si vous lui permettriez une question. Est-ce
que c'est bien cela?
M. Vaillancourt (Jonquière): Immédiatement ou
à la fin. comme vous le voulez.
M. Samson: Je n'ai pas d'objection à répondre
à une question.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Jonquière.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président,
est-ce que le député de Rouyn-Noranda voudrait dire que toute loi
adoptée à l'Assemblée nationale avec la majorité
simple n'est pas une loi de l'Assemblée nationale, mais une loi du
gouvernement?
M. Samson: M. le Président, une loi qui est adoptée
à l'Assemblée nationale, quand on a un gouvernement majoritaire,
il me semble que c'est élémentaire...
M. Vaillancourt (Jonquière): Une loi de l'Assemblée
nationale.
Le Président (M. Clair): Vous avez posé une
question, M. le député de Jonquière, attendez la
réponse.
M. Samson: ... que c'est le gouvernement qui impose ses vues.
M. Vaillancourt (Jonquière): ... parlementarisme.
M. Samson: Dans un contexte où le gouvernement est
minoritaire ce n'est pas encore arrivé à Québec,
mais c'est arrivé à Ottawa, à titre d'exemple c'est
réellement le Parlement, dans un contexte comme cela, dans toute la
force du mot... Le gouvernement seul ne peut pas obtenir la majorité
simple. Ce n'est pas le cas présentement à Québec. Vous
êtes devant un gouvernement majoritaire. Qu'on n'essaie pas de berner la
population. Ce n'est pas nécessaire. Ou bien vous acceptez...
Je dis qu'il y a deux choses possibles: Ou bien le gouvernement accepte
que dans la loi on inscrive que la question devra nécessiter les deux
tiers, c'est-à-dire que l'adoption de la question devra
nécessiter les deux tiers des membres de l'Assemblée, ce qui
dépasserait le cadre gouvernemental, en l'occurrence, ou bien, si vous
le laissez comme cela, modifions l'article 6 dans un autre sens...
M. Bédard: Est-ce que je pourrais...
M. Samson: Disons que la question est approuvée...
M. Bédard: Oui.
M. Samson: ... par la majorité à l'Assemblée
nationale. Cela va avoir un sens plus...
M. Bédard: Mais, là-dessus, est-ce que... M.
Samson: ... correct.
M. Bédard: ... je pourrais inviter le député
à regarder l'article 7, lorsqu'on parle de questions, c'est sur
proposition du premier ministre. Il me semble que ça précise des
choses sur la projection dont parle...
M. Samson: Je suis d'accord...
M. Bédard:... le député au niveau de
l'ensemble de la population.
M. Samson: ... avec le ministre de la Justice que ça
précise un petit peu, mais quand on regarde l'article 7, parce qu'il
semble que le ministre veuille que je parle de l'article 6 en
considération de l'article...
M. Bédard: S'il se réfère...
M. Samson: Non, avec référence, je suis d'accord.
Je n'ai pas d'objection à le faire, d'ailleurs, mais si je parle de
l'article 6 avec référence à l'article 7 pour mieux nous
comprendre c'est bien ça que le ministre de la Justice a voulu
dire si je fais ça comme ça, à ce moment-là,
l'article 7, dans sa formulation, ressemble à peu près au mot
à mot des lois qui ont été adoptées devant ce
Parlement et qui régissent, par exemple, les questions du Protecteur du
citoyen, de la Commission des droits et libertés de la personne, du
vérificateur, du directeur du financement des partis politiques et du
président des élections. C'est exactement le même genre de
formulation pour ces lois-là. On y dit: Sur proposition du premier
ministre, etc., mais on finit par dire que ça prend deux tiers, par
exemple.
Alors, si le ministre de la Justice tient à son argumentation, je
dis, d'accord, je le suis. Je tiens à dire que si le ministre tient
à cette argumentation, je le suis, mais qu'il poursuive son raisonnement
conformément à la tradition établie dans des cas comme
ça et il va s'apercevoir que ça débouche sur les deux
tiers dans les cas où on retrouve le même genre de chose dans
d'autres lois.
M. le Président, le ministre d'État à la
réforme parlementaire nous avait dit, quand j'ai posé cette
question au tout début, lors du dépôt du livre blanc: Ne
vous inquiétez pas. Je ne vous dis pas oui immédiatement, mais on
sera ouvert à toute forme de suggestion valable cette suggestion
était faite à ce moment-là il ne m'a pas dit non
à ce moment-là, mais il a été ouvert au point
où on en est rendu maintenant. C'est une ouverture dangereuse, M. le
Président. Si le gouvernement continue à s'ouvrir comme
ça, on risque finalement peut-être d'avoir des lois qui ont du bon
sens, mais il va falloir que vous continuiez à ouvrir un peu plus, parce
que là, vous n'êtes pas partis pour aller bien loin.
Quand on a commencé l'étude du projet de loi, dans les
remarques préliminaires, on est revenu sur la question, on a
tenté, une fois de plus, d'expliciter qu'il serait sage, dans les
circonstances... Parce que là, bien sûr, il y a une loi-cadre.
Mais cette loi-cadre n'est qu'un écran de fumée pour cacher ce
qu'on veut faire en réalité. Il
n'y a personne qui va me faire croire, dans ce gouvernement, qu'on va
faire des référendums toutes les semaines sur toutes sortes de
sujets, ce n'est pas vrai! Vous n'aurez pas le temps de faire ça,
surtout pas quand vous siégez jusqu'à 5 heures du matin, comme
vous l'avez fait hier soir. Et le coût des référendums et
ces choses-là, non.
Votre loi-cadre, c'est pour camoufler ce que vous voulez faire. Quand
vous en aurez fait peut-être deux pour sauver le principe, vous n'irez
pas trop trop loin là-dedans, parce que ce n'est pas votre habitude
d'ailleurs, ce n'est pas l'habitude du gouvernement, ils ont plutôt pris
l'habitude de décréter dans d'autres domaines, ce sont des
"décréteux". Ils ne viendront pas nous faire croire qu'ils ont
besoin de cette grande loi-cadre, parce qu'ils pourraient éventuellement
consulter la population sur tel sujet pour savoir si les boutons devraient
avoir cinq trous plutôt que quatre ou des choses comme cela, vous savez.
Non, on n'est pas à ce point dépourvu pour vous appuyer sur ce
genre de folie collective qui semble s'être emparée du
gouvernement depuis quelque temps.
Je dis, M. le Président, que ce référendum qui est
visé parce que ce n'est pas un autre qui est visé
on l'a bien identifié. Il est identifié par tout le monde. Ce
référendum qui est visé, il s'agit là de consulter
la population sur son avenir en tant que citoyen sur son appartenance au pays
ou non, c'est clair, c'est établi. C'est tellement clair que de plus en
plus les ministres qui ne voulaient pas en parler au début et qui
cherchaient toujours à dire: Ce n'est pas cela qu'on veut faire ne vous
inquiétez pas trop. Mais là, de plus en plus, c'est clair, c'est
précis, on nous dit: C'est l'indépendance qu'on veut. De toute
façon, on le comprend, parce que les ministres ne pouvaient
sûrement pas éternellement ne pas en parler. L'aile radicale du
Parti québécois leur a sûrement forcé la main,
surtout comment vous appelez cela le praesidium suprême,
qui se réunit de temps en temps, le soviet suprême...
M. Godin: C'est de l'histoire...
M. Samson: Cela vient du président.
M. Lalonde: C'est un lapsus présidentiel.
M. Samson: Vous voyez comme j'ai l'oreille aux aguets. Je n'avais
pas vu, mais j'avais entendu.
M. Bédard: Vous êtes très perspicace.
M. Samson: De toute façon, je ne dirai pas le soviet
suprême mais c'est un drôle de praesidium que vous avez. Ce qui
fait qu'on en a connu plusieurs. Ce qui fait que j'ai vu des ministres
d'aujourd'hui, M. le Président, dans l'Opposition, dire oui aujourd'hui
et dire non le lendemain, suite à une réunion d'un praesidium
suprême qui avait eu lieu, je ne sais pas trop où.
M. Paquette: C'est cela la démocratie, ce n'est pas le
chef qui décide.
M. Samson: Vous vous en rappelez de cela?
M. Lalonde: Surtout dans l'affaire de l'avortement, ce
n'était pas le chef...
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Samson: M. le Président, je ne voudrais pas que les
interventions viennent d'un bord et de l'autre et m'empêchent de
maintenir la pertinence du débat, parce que cela ne serait pas correct.
Mais, je dis ceci. Nous avons, quand même, si on veut réellement
consulter la population... Si on veut le faire de façon normale, d'une
façon juste et d'une façon qui donne, au moins, l'apparence de
démocratie, il faut qu'on prenne certaines mesures et, dans ces mesures,
les deux tiers qui sont suggérés, des votes des membres de
l'Assemblée nationale pour le choix de la question, me semblent
être un minimum. Cela ne veut pas dire que les deux tiers
empêcheraient le gouvernement de poser une question qui serait
raisonnable, au contraire. Autant, nous dit-on, le gouvernement sera
jugé, oui, mais n'oubliez pas que l'Opposition l'est aussi. L'Opposition
ne pourrait pas se permettre de faire un "filibuster" sur une question qui
serait raisonnable. L'Opposition ne pourrait pas se permettre de faire un
"filibuster" sur une question qui serait exactement une question qui appelle
une réponse juste. Est-ce que c'est réellement cela que l'on veut
par la Loi sur la consultation populaire, est-ce qu'on veut réellement
savoir l'opinion de la population? Si oui, si on veut connaître l'opinion
de la population, il faut prendre toutes les mesures pour connaître cette
opinion. Si, au contraire, on ne veut se servir de cela que pour laisser croire
qu'on veut connaître l'opinion de la population, mais qu'avec les
mécanismes entortillés qu'on est en train de nous arranger, on
aura la réponse qu'on veut, c'est une autre chose, qu'on ait le courage
de le dire. Si c'est cela qu'on veut faire, qu'on ait le courage de le dire.
Pour le moment, je ne prétends pas que ce soit ce qu'on veut faire, je
dis: Pour le moment. On verra. Il y a d'autres articles à venir.
Évidemment, d'ici à ce qu'on puisse passer à travers cela,
il va se passer pas mal de temps. Peut-être que le gouvernement va
pouvoir s'assagir et modifier un peu son projet de loi. Pour le moment, je ne
peux pas présumer que le gouvernement ne veut pas connaître la
réponse exacte à une question qui devrait être exacte. (17
h 15)
Mais cette question, M. le Président, quelle qu'elle soit, ou les
questions parce que nous n'avons encore rien qui nous garantisse que ce
sera une question sont de la plus haute importance. C'est l'avenir de
tous et chacun des Québécois qui sera en jeu, à partir du
travailleur, en passant par l'homme d'affaires, le père de famille, la
famille, l'enfant, c'est l'avenir de l'ensemble du peuple
québécois qui est en jeu. Or, ce peuple a le droit, d'autant plus
qu'il a eu la promesse solennelle que cela ne se ferait pas sans qu'il soit
consulté, la promesse que l'indépendance du Québec ne se
ferait pas sans qu'un référen-
dum vienne l'appuyer, si c'est cela qu'on a promis, M. le
Président, il ne faudrait pas le décevoir. Il faudrait lui
permettre de s'exprimer librement et lui permettre de dire exactement ce qu'il
pense avec une question très claire et qui amène une
réponse très claire. Pour s'assurer que la réponse va
être la plus claire possible et que cela va amener la réponse la
plus claire possible, il faut s'assurer que cela prenne plus que la
majorité simple. Bien sûr, il y a 71 députés, dont
un, le président, qui ne vote pas, cela fait 70, cela en prend, comme on
a dit tantôt, quatre autres pour former ces deux tiers. Un seul parti
possédant plus de quatre députés pourrait supporter le
gouvernement et ce serait suffisant. Cela ne veut pas dire que cela
amènerait une question qui ferait l'unanimité quand même,
mais il y aurait au moins plus de garantie aux deux tiers que la seule
majorité simple dans le cas présent. C'est cela, M. le
Président, que j'aimerais faire remarquer. Le ministre de la Justice,
qui a pris la relève dans ce dossier, me semble malheureusement un peu
lié par certaines balises.
Ce matin, sur le même article 6, quand j'ai suggéré
qu'on suspende et qu'on lui permette de voir s'il n'y avait pas moyen
d'élargir un peu le mandat qu'il semblait avoir, en réponse, il
m'a dit qu'il n'avait pas besoin de mandat. J'en ai donc conclu qu'il pouvait
prendre des décisions. S'il n'a pas besoin de mandat et qu'il peut
prendre des décisions, à ce moment-ci, c'est une décision
qu'il peut prendre et que je lui demande de prendre, d'accorder son appui
à cette motion qui est très valable, M. le Président. Dans
des cas comme cela, c'est un cas exceptionnel autant que la nomination du
président général des élections, autant que la
nomination du Vérificateur général, autant que les autres
nominations qui nécessitent les deux tiers et qui a besoin du maximum de
crédibilité possible.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Mercier.
M. Godin: Notre collègue de Rouyn-Noranda vient d'abolir
le Parlement, l'air de rien, M. le Président, en disant que toute loi
qui est soumise à l'Assemblée par le gouvernement n'est qu'une
loi du gouvernement et non pas une loi de l'Assemblée, quand elle est
votée. Cela veut dire que toutes les lois votées sous chaque
gouvernement...
M. Samson: M. le Président, j'invoque le
règlement.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Rouyn-Noranda, sur une question de règlement.
M. Samson: Je pense que c'est l'article 99...
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, c'est
l'article 96 et c'est à la fin de l'intervention que le
député...
M. Samson: Non, non, un instant! N'allons pas trop vite...
Le Président (M. Clair): À l'ordre! À
l'ordre! À l'ordre!
M. Samson: ... le radical de Jonquière, pas trop vite!
Le Président (M. Clair): M. le député de
Rouyn-Noranda, vous pouvez me parler, je vous écoute.
M. Vaillancourt (Jonquière): ... député de
Rouyn-Noranda.
M. Samson: J'ai dit l'article 99, M. le Président. On n'a
pas le droit de m'imputer ce genre de motif, parce que j'ai pris la peine de
dire que nous étions dans un contexte de gouvernement majoritaire et non
pas minoritaire et que, dans ce contexte, quand le gouvernement décide
quelque chose, il l'adopte quand c'est la majorité simple.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président,
question de règlement.
M. Samson: C'est l'article 99, 6e ou 7e paragraphe.
M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement,
M. le Président.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Samson: ... nonobstant le radicalisme du député
de Jonquière, c'est à l'article 99 que vous allez retrouver mon
droit.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président,
simplement pour dire...
Le Président (M. Clair): M. le député, sur
la même question de règlement ou sur une nouvelle question de
règlement?
M. Vaillancourt (Jonquière): Non, c'est simplement pour
dire que le député de Rouyn-Noranda s'est servi de l'article 99,
parce qu'il savait fort bien qu'il aurait dû se servir de l'article 96 et
qu'il ne pouvait pas le faire, parce qu'il n'avait pas le droit de le faire.
C'est tout.
Le Président (M. Clair): Messieurs, à l'ordre, s'il
vous plaît! M. le député...
M. Samson: M. le Président, sur la question de
règlement, je vous dis, pour votre gouverne, que je connais très
bien l'article 96 et que j'aurais pu m'en servir, si j'avais voulu
décider de me servir d'un autre article. Je n'ai pas de leçon de
règlement à recevoir du député de
Jonquière.
Le Président (M. Clair): Pour disposer de...
M. Vaillancourt (Jonquière):... à la fin de
l'intervention.
Le Président (M. Clair):... votre question de
règlement, M. le député de Rouyn-Noranda, tout comme je
suis convaincu que vous n'aviez l'intention d'imputer aucun motif indigne
à aucun membre de cette Chambre en alléguant qu'il s'agirait d'un
projet du gouvernement et non d'un projet de l'Assemblée nationale, je
pense que, dans la même mesure, le député de Mercier, quand
il tient les propos qu'il tenait, n'entendait pas vous imputer des motifs
indignes.
Je pense que si on tolère les propos de l'un, on tolère
les propos de l'autre.
M. Samson: Quand on dit que quelqu'un a voulu abolir le
Parlement, M. le Président, avec tout le respect que j'ai pour
vous...
Le Président (M. Clair): Je sais que vous en avez
beaucoup.
M. Samson: ... je vous demanderais d'empêcher celui qui
voudrait le faire.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Mercier.
M. Godin: M. le Président, en tant que journaliste, j'ai
couvert, il y a quelques années, le congrès du Parti
créditiste fédéral, qui décidait de fonder le parti
créditiste provincial. Je me souviens très bien d'une des
règles imposées démocratiquement par le chef du parti dans
le temps, M. Réal Caouette, qui avait dit à ses troupes, et M.
Samson était là, il avait fait un discours remarquable, M. Fabien
Roy aussi, à l'époque...
M. Roy: Faites attention à ce que vous allez dire,
j'étais là.
M. Godin: ... à l'époque où M. Roy
côtoyait de près, maintenant, je vois qu'il s'en éloigne de
plus en plus...
M. Roy: M. le Président...
M. Godin: ... et le chef avait dit, je retrouve dans les propos
du député de Rouyn-Noranda une tradition, en fin de compte, une
solution de continuité: On va aller au provincial, si on a 80% de
majorité. La majorité créditiste, par conséquent,
ce n'était pas 50 plus un, c'était 80%. Cela avait passé,
remarquez bien. Cela avait passé.
M. Samson: Vous avez remarqué que, quand on est convaincu,
ça passe.
M. Godin: Cela avait passé, M. le Président, sauf
que...
M. Samson: Vous autres, vous n'êtes pas convaincus.
M. Godin:... dans le même temps, il y avait M. Yvon Dupuis,
dans les toilettes, qui attendait que la démocratie s'exerce.
M. Roy: Je m'excuse, je m'excuse, il n'était pas dans les
toilettes, il était dans la petite chambre des vadrouilles, à
côté des toilettes.
M. Samson: On appelait ça la chambre des douches.
M. Godin: II se préparait à nettoyer.
M. Roy: J'étais à la porte et j'ai dû faire
place pour qu'on passe.
M. Samson: On appelait ça la chambre des douches et vous
auriez dû y passer, ça vous aiderait.
M. Godin: C'est la démocratie créditiste.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs, s'il
vous plaît! J'ai l'impression qu'on est rendu dans un corridor qui n'est
plus celui de la pertinence du débat.
M. le député de Mercier.
M. Godin: C'est la démocratie créditiste, M. le
Président, sauf que cette démocratie créditiste à
80% ou 66 1/3% vient en contradiction avec des règles fort anciennes et
fondamentales que connaît certainement mon collègue de Laval,
entre autres, ce qui s'appelle Articuli Baronum 1215. C'est la base même
de la Magna Carta, c'est-à-dire la Grande Charte, qui est la base de nos
libertés dans le système britannique, d'où nous venons. Et
la règle, c'est 50 plus un, major pars ex eis providerit vel
praeceperit.
M. Lavoie: Qu'est-ce que vous faites de la loi 101, l'usage du
français obligatoire?
M. Godin: De plus, dans la Grande Charte, article 49, cette
idée est reprise et, comme par hasard, l'histoire a de ses ironies, dans
l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, c'est la même section 49
qui dit que la majorité, c'est 50 plus 1. La démocratie, c'est
cela.
Il est évident que la règle des deux tiers a des attraits,
surtout pour les tiers partis, ou les quarts de parti, ou les huitièmes
de parti. Je vois très bien le leader, chef du caucus, whip en chef,
leader parlementaire du Parti créditiste négocier deux ou trois
bureaux de plus, si on a besoin de sa voix pour avoir les deux tiers en
question. Il l'a fait au moment de l'attribution des locaux.
M. Samson: M. le Président, article 99. Je pense que mon
honorable ami et collègue n'a sûrement pas l'intention de dire
cela sérieusement.
M. Godin: Pas moins que vous.
M. Samson: M. le Président, si cela devenait
sérieux, je me devrais de prendre toutes les dispositions pour
réfuter ce genre de choses. Mais je n'ai pas l'impression qu'il l'a dit
malicieusement.
M. Godin: Je reviens à l'essentiel, sur-le-champ.
M. Samson: M. le Président, je voudrais que mon honorable
collègue comprenne que je n'ai à négocier de droit
d'aucune façon et que je n'en négocierai pas.
M. Godin: Des privilèges, par exemple. Je poursuis, M. le
Président.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Mercier.
M. Godin: Au fond, ce que cela implique, c'est que nous aurions,
dans ce Parlement, l'établissement de la règle de la
minorité et non plus de la majorité. Un tiers de ce Parlement
pourrait décider du genre de loi que le gouvernement pourrait adopter.
Il suffirait qu'une personne au-delà de 71 décide que c'est non
et il n'y aurait plus de décision dans ce Parlement. C'est la
règle de la minorité que cela implique. Il est des cas où
la règle des deux tiers joue, effectivement. Il y en a deux, dans nos
lois: la nomination du Protecteur du citoyen et du président des
élections, qui sont les deux principaux, les deux plus connus et qui...
Vous interviendrez tout à l'heure, M. le député de Laval,
vous aurez amplement le loisir de parler vous aussi.
Je remarque que ces deux cas plus connus, ces deux cas plus souvent
cités, se réfèrent à des émanations non pas
de l'exécutif, mais du législatif, c'est-à-dire non pas du
gouvernement, mais du Parlement, comme tel. Quand le Parlement décide de
confier à un Protecteur du citoyen le soin de revenir sur ses propres
lois, il demande les deux tiers. Quand il nomme le président des
élections, car les élections sont une opération qui se
situe au-dessus des partis, il demande les deux tiers.
Mais, quand il s'agit d'adopter des lois, quand le gouvernement
décide de consulter les citoyens, de son propre chef, parce qu'il est
élu, en vertu de 49 Magna Carta et 49 British North America Act, il peut
consulter les citoyens quand il le juge à propos.
Et nous avons remarqué, après avoir étudié
les référendums dans d'autres pays, que plus il y a de la
confiance dans le peuple, moins les exigences pour déclencher un
référendum sont grandes. Dans certains États
américains, il suffit de 10 000 signatures pour déclencher un
référendum. En Suisse, on en exige 100 000. Les citoyens ont
beaucoup plus la chance de se prononcer quand on demande 10 000 signatures que
lorsqu'on en demande 100 000.
La direction que nous prendrions si nous appuyions cette motion, ce que
nous ne ferons pas, ce serait mettre les bâtons dans les roues dans la
consultation populaire. Ce serait l'empê- cher, à toutes fins
pratiques, car il est arrivé souvent, dans l'histoire du Parlement du
Québec, que le gouvernement n'avait pas les deux tiers des
sièges. Par conséquent, dans chacun de ces cas,
mathématiquement, il aurait pu être impossible de consulter le
peuple. Or, il apparaît au gouvernement actuel qu'il est essentiel de le
consulter sur certaines questions. Si la décision prise par le Parlement
devait être le oui ou le non dans la réponse, si le Parlement
décidait de l'avenir de la constitution canadienne lui-même,
peut-être qu'on pourrait lui mettre des bois dans les roues plus lourds,
mais là il s'agit de déclencher un mécanisme qui va nous
permettre de consulter la population, comme cela s'est fait au Canada anglais,
à Terre-Neuve, en 1949. C'est, par conséquent, la décision
du peuple qu'il s'agit d'aller chercher et de faciliter. (17 h 30)
Cette motion a pour effet de compliquer et de rendre
mathématiquement impossible dans certains cas la consultation populaire
et surtout, je le répète, elle revient à établir
dans le Parlement la règle de la minorité, "minority rule". C'est
une chose inacceptable et qui va à l'encontre de ce Parlement
lui-même à l'instant où il s'agit d'autre chose que de la
création de postes qui concernent directement le Parlement et non pas le
gouvernement. Je pense au poste de Protecteur du citoyen et du président
des élections.
En pratique, par conséquent, cela tente à empêcher
l'État de tenir un référendum. Après avoir
consulté Bourinot, Beauchesne et autres experts, la règle de la
majorité, elle est claire, c'est 50% plus une voix. La proposition du
député de Gatineau vient, si vous voulez, enlever le recours du
Parlement. On veut, par conséquent, défranchiser le peuple du
Québec en agissant ainsi. On veut l'empêcher d'être
consulté. On veut compliquer les choses au maximum. On ne veut pas que
ce soit facile rapidement. Cela va à l'encontre du principe même
du livre blanc sur la consultation populaire et de ce projet de loi 92 et cela
va à l'encontre même du programme du parti qui est maintenant au
pouvoir ici.
En plus, cela pose, M. le Président, un principe dans la mesure
où la partie la plus importante du mécanisme consiste à
consulter la population et que sur la partie la moins importante, qui est la
mise en marche du processus où on exigerait les deux tiers, une sorte de
précédent serait créé. Je vois fort bien
l'Opposition demander, puisque le principe des deux tiers serait reconnu dans
la mise en marche du mécanisme, que le principe des deux tiers soit
aussi reconnu dans le résultat de ce référendum. Cela
ouvrirait la porte, par conséquent, dans la mesure où le petit
est inclus dans le grand et qu'une règle pour le petit s'appliquerait au
grand on les voit venir à cent milles à la ronde
à l'exigence future que tout référendum ne saurait lier le
gouvernement, à moins qu'il ne recueille les deux tiers des voix.
Pour toutes ces raisons, M. le Président, je voterai contre cette
motion. De plus, on a l'impression que l'Opposition, ayant perdu
démocratique-
ment le pouvoir, tente de le reprendre par des voies
détournées.
On retrouve, par conséquent, cette fameuse tendance à
l'autoritarisme d'une minorité qui voudrait dicter au gouvernement ce
que le gouvernement doit faire, minorité qui aurait le loisir ainsi de
neutraliser le gouvernement, de le réduire à l'impuissance.
Pour toutes ces raisons, je pense que cette motion, sous des dehors de
vouloir donner plus de crédibilité au processus de consultation,
vise tout simplement à l'empêcher par tous les moyens possibles.
Nous serions alors dans la position, si nous acceptions cette motion, de devoir
négocier pour avoir deux voix de plus ou trois voix de plus et on ne
mettrait pas seulement notre propre gouvernement dans cette position
intenable... On l'a vu dernièrement dans le cas du Traité de
Panama, au Parlement, au Congrès américain où un
député s'est négocié un barrage
hydroélectrique dans son État, plus précisément un
gouverneur, en échange de son vote positif sur le Traité de
Panama. Nous serions dans cette situation en ce Parlement, pas seulement nous,
mais n'importe quel gouvernement futur qui voudrait lui aussi aller consulter
les gens. Une telle décision nuirait à la vie démocratique
dans la province de Québec. Loin, par conséquent, de la
faciliter, loin de donner plus de crédibilité, comme l'Opposition
le prétend et, en particulier, mon collègue de Rouyn-Noranda, et
mon collègue de Gatineau, sous des dehors de vouloir revaloriser la
consultation, on la neutralise, on la détruit, on l'annihile.
Pour toutes ces raisons, de ce côté, nous voterons contre
cette motion.
Le Président (M. Clair): Merci, M. le
député. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, j'aurais aimé entendre
le plaidoyer du député de Mercier, lorsque des lois ont
été adoptées, exigeant les deux tiers des membres de
l'Assemblée nationale pour la nomination de certains hauts
fonctionnaires détenant des fonctions, je dirais, stratégiques,
que ce soit le Protecteur du citoyen, le directeur du financement je
pense que le député de Mercier était là lorsque
cette loi a été adoptée, c'est-à-dire c'est dans ce
Parlement-ci ...
M. Godin: Je suis d'accord avec cela.
M. Lalonde:... Il y en a eu d'autres, que ce soit la Charte des
droits et libertés de la personne, qui prévoient que la
nomination des membres se fait aux deux tiers. Le ministre de la Justice
était présent en Chambre lorsque cette nomination a
été faite par un ancien gouvernement, je me souviens. Il y a le
Vérificateur de la province, il y a le directeur général
des élections et les membres de la Commission de réforme des
districts électoraux. Tous ces gens, ces personnes, ces hommes et ces
femmes, sont nommés...
M. Godin: Est-ce que je peux poser une question, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys?
M. Lalonde: Oui.
M. Godin: Est-ce qu'ils ne sont pas tous, d'une façon ou
d'une autre, des espèces d'extension du Parlement et non pas du
gouvernement? Est-ce qu'ils n'ont pas un compte à rendre d'abord et
avant tout au Parlement? Est-ce qu'ils ne visent pas à administrer des
choses qui touchent le Parlement et non pas le gouvernement? Il y a une
espèce de fil d'Ariane dans tous ces postes que vous me nommez.
M. Lalonde: Peut-être que ce serait une bonne question, une
question pertinente, quoique l'on sait que même si le Protecteur du
citoyen fait son rapport à l'Assemblée nationale, et il en est de
même pour la Commission des droits et libertés de la personne,
celle-ci relève quand même administrativement du ministre de la
Justice, c'est-à-dire que c'est le ministre de la Justice qui est le
ministre responsable de l'application de la charte à l'Assemblée
nationale.
M. Bédard: Fondamentalement, toutes les personnes que vous
avez mentionnées sont des officiers de l'Assemblée nationale et
appartiennent à l'Assemblée nationale.
M. Lalonde: C'est fort possible. Il ne me semble pas que cette
question...
M. Godin: C'est un fait. Ce n'est pas "possible", c'est un
fait.
M. Lalonde: Non, disons que je le présume. Je n'ai pas
examiné les...
M. Bédard: Le projet de loi 92 parle d'initiatives
gouvernementales, on n'a pas parlé d'initiatives parlementaires
Le Président (M. Clair): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, vous avez la parole.
M. Lalonde: Justement, j'ai permis une question. D'ailleurs, je
pense que la question était pertinente. On semble faire une distinction
entre ces cas où les personnes en question seraient rattachées,
de par leurs fonctions et de par les lois et le cadre des lois, à
l'intérieur desquelles elles fonctionnent, à l'Assemblée
nationale. Je pense que c'est justement ce qu'une recommandation de la
Commission des droits de la personne propose. C'est justement dans la
perspective de cette collaboration entre l'exécutif et le
législatif que la Commission des droits de la personne suggère,
désire, espère, souhaite, que l'on devrait justement confier
à l'Assemblée nationale un rôle plus grand. J'aimerais
voir... Non, on a voté...
M. Godin: Vous avez dévalué les domaines de
référendum dans ce document.
M. Lavoie: On a des réserves sur la valeur des
référendums.
M. Godin: Un document officiel de votre parti, signé Jean
Lesage.
M. Lalonde: Écoutez, j'avais la parole...
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît! Je vous invite à respecter le droit de parole du
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: On est contre la loi telle qu'elle nous est
proposée. Nous avons donné les raisons, à plusieurs
reprises, pour lesquelles nous sommes contre le projet de loi
général, parce que nous croyons que ce que les
Québécois désirent et attendent, c'est un
référendum sur la constitution, sur l'avenir constitutionnel du
Québec et qu'il ne sert à rien de faire faire le tour de la ville
à toute la population pour arriver au point où tout le monde veut
arriver, c'est-à-dire un référendum constitutionnel. Je ne
veux pas revenir là-dessus. Pour d'autres raisons aussi, d'autres
réserves que nous avons sur certains aspects de la loi.
Mais, dans sa communication qui a été faite à
l'invitation de la commission parlementaire, la Commission des droits de la
personne dit bien, et je cite, sur le droit d'initiative, à la
première page de son mémoire: "Selon ce qui avait
été annoncé dans le livre blanc, le droit d'initiative de
tout référendum appartient à l'action concertée de
l'exécutif et du législatif ".
C'était annoncé dans le livre blanc. D'accord. Le
gouvernement, c'est-à-dire l'exécutif, a un rôle à
jouer et a ses responsabilités à prendre, mais la commission des
droits poursuit: "... l'Assemblée nationale ayant un rôle à
jouer dans le processus référendaire ". Elle termine ce premier
paragraphe de cette façon, en affirmant le rôle de
l'Assemblée nationale. Il est déjà inscrit dans le projet
de loi, aux articles 6, 7, etc. Mais la commission poursuit: "... la
proposition sur un vote à la majorité des deux tiers n'a
cependant pas été retenue. Sans vouloir en faire une question de
principe, ni en exagérer l'importance..."
Oui, deux précautions de langage, comme elle dit un peu plus
loin, il ne s'agit pas d'une atteinte à des libertés
fondamentales, mais raison de plus d'attacher une importance à cette
recommandation. Ce qui m'étonne, et ce qui, je pense, devrait nous
impressionner, nous, comme membres de la commission, c'est qu'à notre
propre invitation, la commission insiste, et s'il ne s'agit pas d'une atteinte
à des libertés fondamentales, elle le dit. Raison de plus de le
prendre au sérieux. Pourquoi insiste-t-elle tant que ça? Elle l'a
déjà dit dans ses remarques préliminaires et elle revient
à la charge.
Elle dit: Donc, sans vouloir en faire une question de principe ni en
exagérer l'importance, la commission continue de croire qu'un vote
à la majorité des deux tiers, comme le prévoit la
procédure parlementaire, lorsqu'on recherche le plus large consensus
entre les partis politiques, serait préférable. Au cas où
on interprète mes paroles comme voulant cacher la réserve qui a
été faite, je répète la réserve: II n'en va
d'aucune atteinte à des libertés fondamentales, mais simple- ment
d'une garantie que la question soumise à la consultation populaire, une
fois adoptée, ne fasse plus l'objet d'une contestation quelconque,
etc.
C'est l'insistance de la commission et la perspective dans laquelle la
commission installe l'Assemblée nationale dans l'initiative de processus
référendaire qui m'impressionne. Pourquoi la commission a encore
insisté? Il ne s'agissait même pas d'une question d'atteinte
à des libertés fondamentales. C'est parce que...
M. Godin: Ce n'est pas de son ressort. M. Lalonde: ...
elle désire...
M. Godin: Ce n'est pas de son ressort, à ce
moment-là.
M. Lalonde: Ce n'est pas de son ressort. M. Godin: Ce
n'est pas de son ressort.
M. Lalonde: Raison de plus de se poser des questions à
savoir pourquoi elle revient à la charge.
M. Godin: De quoi elle se mêle si ce n'est pas de son
ressort?
M. Lalonde: Ah bien, si le député de Mercier veut
demander à la commission de se mêler de ses affaires, c'est
là une façon de réagir.
M. Godin: En vertu de sa loi.
M. Lalonde: Mais la mienne, moi, dans une attitude positive, dans
l'étude de ce projet de loi, je me dis: On doit pendre ça au
sérieux, justement, pour raccrocher ça à la question du
député de Mercier tantôt, selon laquelle les personnes que
j'ai mentionnées relevaient de l'Assemblée nationale. Justement
on veut impliquer davantage l'Assemblée nationale dans le processus,
dans l'initiative. Cela rejoint la préoccupation du député
de Mercier. Il dit: Quand l'Assemblée nationale est largement
impliquée, on peut prévoir des majorités
qualifiées. Enfin, je présume de sa question que c'est la
conclusion à laquelle on pourrait tendre. D'accord, si c'est
l'Assemblée nationale qui est impliquée, comme dans le cas du
Protecteur du citoyen, etc., mais on doit être aussi d'accord, puisque
c'est justement dans la perspective d'impliquer l'Assemblée nationale
dans l'initiative, dans le processus référendaire, que la
Commission des droits de la personne revienne à la charge et
gratuitement, je le dis, je l'avoue, je le reconnais, c'est ce qui
m'impressionne davantage... Je prends acte de l'absence d'impression du
député de Mercier, étant donné, naturellement, que
ce n'est pas... (17 h 45)
À la page 2 du même chapitre, le droit d'initiative, la
commission dit: "À notre avis, et je cite, le rôle de
l'Assemblée nationale dans la décision de tenir une consultation
populaire, telle que définie
dans le projet de loi, est beaucoup plus limitée que ne
l'annonçait le livre blanc".
Non seulement le gouvernement refuse la majorité
qualifiée, qui est le but de la motion du député de
Gatineau, mais le projet de loi qu'on nous a proposé a reculé par
rapport au livre blanc à cet égard. Je ne pense pas que cela soit
réellement un progrès. Si on veut faire un projet collectif de ce
référendum et de cette loi, il me semble qu'on devrait avoir...
Il faut que ce soit un projet collectif, il ne faut pas que cela soit
contesté par la suite.
M. Godin: D'accord, on est d'accord. M. Lalonde: Qui que
ce soit qui gagne...
M. Godin: C'est le résultat qui sera collectif, ce n'est
pas la machinerie.
M. Lalonde: Là, la partisanerie n'a plus sa place. Il faut
que cela soit au-dessus des partis.
M. Godin: Bravo! Il est temps. De votre côté, il est
temps.
M. Lalonde: Oui, mais j'aimerais voir, et ce qui m'a déplu
dans la position du gouvernement sur notre propre amendement ce n'est
pas parce que c'était le nôtre c'est qu'aussitôt
qu'on a touché au référendum constitutionnel, le
gouvernement est devenu muet, il est devenu fermé. Il a dit: On ne doit
pas pour toutes sortes de raisons farfelues, j'en ai mentionné ce
matin. Une des plus farfelues, c'est qu'on ne met pas cela dans une loi-cadre.
Voyons! Je vous donnerai des exemples, des détails qu'on donne dans des
lois-cadres.
Ce qui m'étonne, c'est justement que de plus en plus il est
apparent que le gouvernement, en refusant des dispositions concernant le
référendum constitutionnel, révèle, nous
révèle à nous qu'il inscrit le projt de loi 92 dans une
sorte de stratégie préréférendaire, donc, à
forts relents partisans. Le député de Mercier pourra faire signe
que non, mais le ministre des Finances n'est pas d'accord, parce que lui, il
dit; tout est préréférendaire. Toutes les décisions
sont préréférendaires...
M. Godin: Toute l'histoire du Québec jusqu'au
référendum est préréférendaire. C'est vrai.
C'est arrivé avant...
M. Lalonde: II ne faut quand même pas charrier. Ce n'est
pas ce que le ministre des Finances a dit. Il a dit: Toutes nos
décisions depuis qu'on est au pouvoir, c'est en vue de gagner le
référendum.
M. Bédard: ... mettra pas de côté parce qu'il
y a un référendum.
M. Godin: C'est un préfixe... Il a dit: "C'est
préréférendaire". "Pré" veut dire avant.
M. Lalonde: Si la loi 92 fait partie de cette grande
stratégie préréférendaire, M. le Président,
on n'est pas sorti du bois.
M. Godin: Question de règlement. Le Président
(M. Clair): À l'ordre!
M. Charbonneau: Toute votre attitude était guidée
par les mêmes intérêts.
M. Lalonde: Je pense, M. le Président, qu'on doit s'en
tenir au-dessus des partis, sinon, ni vous, ni nous ne pourrons nous
réjouir du résultat d'un référendum, quel qu'il
soit, parce qu'il ne sera pas crédible. À ce moment-là, le
commencement de vos troubles va être arrivé. C'est pour cela qu'il
me semble qu'en ce qui concerne les deux tiers, pour faire participer
l'Assemblée nationale, on devrait appuyer une telle motion qui n'est pas
partisane. La majorité des deux tiers, on l'a trouvée, M. le
Président, pour nommer le directeur du financement, qui a
été proposé par le parti ministériel, on l'a
trouvée même le ministre pourrait nous donner des
détails là-dessus, c'est un peu de la petite histoire
quand il s'est agi de nommer les membres de la Commission des droits de la
personne, il me semble qu'on a même eu l'unanimité. Il y avait eu
consultation.
M. Bédard: Oui, mais il y a une différence entre
nommer des gens qui appartiennent à l'Assemblée nationale...
M. Lalonde: M. le Président, j'ai le droit de parole.
M. Bédard: Oui, mais, là, vous vous
référez à moi.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs!
M. Lalonde: II répondra quand... Tout ce que je fais,
c'est de me faire interrompre.
M. Bédard: Ne venez pas demander des approbations de ma
part sans que je puisse parler.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous avez la
parole.
M. Lalonde: Le témoignage qu'on a eu est quand même
impressionnant. La commission m'apparaît la plus impressionnante, surtout
à cause de l'insistance qu'elle y met. Elle revient à la charge
à deux reprises. On peut parler, naturellement, des
éditorialistes, mon collègue de Gatineau l'a fait.
M. Bédard: On va en parier tantôt.
M. Lalonde: On va voir si le refus systématique qui nous a
été annoncé ce matin est réellement une politique
que le gouvernement veut maintenir à propos de l'étude de ce
projet de loi.
Ce serait réellement malheureux, non pas parce que cela prendrait
beaucoup plus de temps, on a déjà décidé, nous, et
on l'a annoncé, que, malgré les défauts importants qu'on
trouve à cette loi, et, à moins qu'on n'arrive à une
question de principe fondamentale, notre intérêt, comme
Québécois, et l'intérêt de nos concitoyens, de nos
électeurs, c'est que la loi soit votée le plus tôt
possible, donc, nous allons agir dans cette perspective, mais, chaque fois que
le gouvernement, par une décision, à l'égard d'un
amendement qu'on apporte, qu'on propose, prend une position partisane, se cache
derrière la stratégie préréférendaire dans
laquelle, de plus en plus, je crois, cette loi s'inscrit, à ce
moment-là, il réduit lui-même, et c'est de
l'auto-destruction, la portée de sa loi et la chance que cette loi nous
permette à nous, tous les Québécois, d'avoir
réellement un résultat crédible, qui va être cru,
qui va être suivi ensuite par la population.
M. le Président, je veux simplement relever un sophisme du
député de Mercier. Je ne sais pas s'il nous a quittés, je
ne veux pas le faire en son absence, mais il pourra quand même lire le
journal des Débats. Il a tenté de démontrer que la
majorité des deux tiers est la négation de notre système
parlementaire et en particulier du gouvernement. Il a donné un exemple.
Le député qui va faire les deux tiers, c'est une minorité,
ce député, sur 110, et c'est lui qui va faire pencher la balance.
M. le Président, c'est complètement ridicule. Dans le cas de la
majorité simple, nous sommes 110 députés, dans
l'hypothèse où il y aurait enlevons un président...
Disons qu'il y a eu 55 députés dans un parti, 54 dans un
deuxième et un dans un troisième, qu'on a nommé
président, justement pour garder la majorité. À ce
moment-là, vous avez toujours, dans toutes les décisions de 55
à 54, un député qui fait pencher la balance. À ce
moment-là, calculer ça, disséquer cette situation de cette
manière ne m'apparaît pas aider le débat. La
majorité des deux tiers permet d'avoir une question qui soit au-dessus
de tout soupçon. Oui, ça oblige le gouvernement, s'il n'a pas les
deux tiers des membres de l'Assemblée nationale, à être un
peu plus honnête. C'est justement le but, oui, être un peu plus
honnête.
M. Vaillancourt (Jonquière): Ils y étaient
habitués, eux.
M. Lalonde: On fait des grimaces de l'autre côté, M.
le Président. Ma proposition suggère qu'il peut arriver que ces
messieurs et ces mesdames ne soient pas honnêtes intellectuellement. Je
m'excuse, M. le Président. Vous n'avez pas vu les grands airs que j'ai
vus.
Oui, ça va forcer le gouvernement à être un peu plus
honnête, un peu plus...
M. Charbonneau: ... pas capable de juger?
M. Lalonde: Est-ce que vous voulez enlever les
députés? On parle de l'Assemblée nationale. À moins
que le député de Verchères trouve qu'il est inutile
à cette Assemblée nationale. Je serais d'accord avec lui.
M. Charbonneau: Les citoyens ne seraient pas capables de
juger.
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Lalonde: Les citoyens seraient capables de juger, mais ils ont
élu des députés justement pour faire ce job. À ce
moment-là...
M. Charbonneau: Ils ont élu, dans un système
parlementaire...
M. Lalonde: Un système parlementaire et le gouvernement
est tenu honnête à cause de l'Opposition.
M. Charbonneau: C'est ça.
M. Lalonde: C'est ça, c'est le rôle de l'Opposition.
M. Charbonneau: Exactement.
M. Lalonde: Le gouvernement va être d'autant plus limpide,
si c'est possible... On ne parle plus de transparence, parce qu'il me semble,
M. le Président, que la seule façon d'obtenir un gouvernement
transparent avec ce parti-là, ça va être de le faire
disparaître.
M. Charbonneau: Vous essaierez.
M. Lalonde: M. le Président, la seule façon d'avoir
une question transparente, une question qui procède réellement de
la plus grande honnêteté intellectuelle, c'est justement d'exiger
un corridor plus étroit pour s'y rendre. C'est la raison pour laquelle,
dans les cas que je vous ai nommés, on l'a exigé. On l'a fait et
vous aussi vous l'avez fait, dans la Loi sur le financement des partis. Vous
avez exigé les deux tiers pour que le résultat de la
décision soit au-dessus de tout soupçon, que personne ne puisse
douter et blâmer, reprocher au gouvernement une décision qui ne
plairait pas à un membre.
M. le Président, il me semble qu'en votant contre cette motion
d'amendement, le gouvernement, de plus en plus, réduit, et il a
commencé à le faire ce matin, sa crédibilité en ce
qui concerne ce projet de loi. Je le déplore. Nous avons offert notre
collaboration et nous allons le faire jusqu'à la fin pour que ce projet
de loi, à moins qu'on ne nous fasse pas siéger assez souvent,
soit adopté avant le 23 juin. Je sais que les problèmes de
santé du ministre d'État à la réforme parlementaire
ont créé un certain nombre de problèmes pour la
commission. Nous allons tenter de mettre les bouchées doubles pour y
arriver.
Il y a aussi d'autres travaux parlementaires, le ministre de la Justice
est au courant. Mais il me semble que le résultat que ce soit
adopté le 23 juin ou en septembre, cela dépend du gouverne-
ment, non pas de nous autres, à ce moment-là le
résultat va dépendre non pas de la date où cela va
être... Si le gouvernement le retire et décide de faire la
troisième lecture en septembre, c'est son problème, pas le
nôtre.
À ce moment-là, quelle que soit la date...
M. Charbonneau: Est-ce que le député de
Marguerite-Bourgeoys me permettrait une question?
M. Lalonde: Non.
M. Charbonneau: Cela ne me surprend pas.
M. Lalonde: Quelle que soit la date à laquelle le projet
de loi va être adopté, ce n'est pas tellement la date et la
rapidité avec laquelle on va l'adopter. C'est la position du
gouvernement, son attitude à l'égard des amendements non
partisans des députés. Vous demandez les deux tiers. C'est
simplement offrir au gouvernement un peu plus d'assurance. C'est une police
d'assurance qu'on vous offre. Elle ne coûte pas cher. La seule chose que
cela va vous coûter, c'est d'être un peu plus honnêtes.
M. Charbonneau: Vous n'avez pas de stratégie, vous autres,
n'est-ce pas?
M. Lalonde: Ah, vous en avez une? Est-ce que c'est cela, la
question du député de Verchères? Posez-la donc, votre
question.
M. Charbonneau: La loi n'est pas une stratégie, mais vous
autres, vous avez la stratégie de l'utiliser, par exemple.
M. Lalonde: Alors, quelle est votre stratégie? Le
Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Lalonde: M. le député de Verchères
suggère qu'il y ait une stratégie là-dedans.
M. Charbonneau: Le Parti québécois a une
stratégie et le gouvernement également, mais la loi est un outil
qui doit être au-dessus d'une stratégie, par exemple.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, M. le
député de Verchères!
M. Lalonde: Les masques tombent. Je vous dis, M. le
Président, que ce n'est pas beau en dessous du masque. Ce n'est pas
beau.
M. Charbonneau: Ce n'est pas cela que j'ai dit.
M. Lalonde: Comme cela, vous avouez que vous avez une
stratégie, que la loi 92 fait partie de votre stratégie
préréférendaire? Je comprends. Et la question aussi est
une stratégie? La question va être de la stratégie? Il ne
faut pas se soumettre aux deux tiers naturellement, si c'est de la
stratégie. Il faut faire cela dans les officines du gouvernement, en
catimini, dans le bunker, avec les merveilleuses choses que vont faire les
propagandistes.
M. Charbonneau: Le gouvernement qui pose une question? Voyons
donc!
Le Président (M. Clair): À l'ordre, M. le
député de Verchères.
M. Lalonde: Le député de Verchères veut me
parler de stratégie. Allez-y.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Charbonneau: Qui m'a posé la question?
Le Président (M. Clair): M. le député de
Verchères, à l'ordre, s'il vous plaît! M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, je vous indique que vous avez
encore une minute.
M. Lalonde: J'ai terminé, M. le Président. Je pense
que mon intervention, si elle n'a pas réussi à convaincre les
députés ministériels de voter en faveur de l'amendement du
député de Gatineau a quand même servi à faire tomber
un masque, c'est le premier.
M. Charbonneau: Vous voyez des masques où vous voulez.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: Quand je regarde le député, ce n'est
pas un masque...
M. Vaillancourt (Jonquière): On n'a pas deux visages, nous
autres.
M. Paquette: M. le Président, je pense que...
M. Charbonneau: ... qui est habitué de porter des
cagoules, M. le Président.
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Paquette: On va passer par-dessus les insinuations du
député de Marguerite-Bourgeoys, qui ne peut pas faire une
intervention sans voir de noirs complots. Je pense que cette motion va tout
simplement à l'encontre de l'économie du projet de loi. C'est un
projet de loi qui demandera probablement à être étendu sur
le plan de l'initiative populaire éventuellement, mais, pour le moment,
tout référendum qui se tient dans le cadre de la loi se fait
à l'initiative gouvernementale.
Par conséquent, il ne faut pas se mettre dans un système
où on va permettre à une minorité de l'Assemblée
nationale de décider si un référendum va se tenir ou ne se
tiendra pas. Si le projet de loi
ou la motion devait être adopté à la majorité
des deux tiers, il suffirait que les députés de l'Opposition,
qu'une minorité des députés s'entendent pour
décider qu'il n'y aura pas de référendum sur tel sujet,
parce que cela ne fait pas leur affaire.
Je pense que les noirs soupçons du député de
Marguerite-Bourgeoys, on pourrait les lui retourner et dire que cet amendement
met un instrument abusif entre les mains d'une minorité du Parlement.
C'est en contradiction avec l'économie du projet de loi.
Je vais donner un exemple qui va faire comprendre jusqu'où peut
aller cet amendement. Il y a deux possibilités dans l'amendement et dans
le projet de loi également, soit que le référendum soit
entrepris par une question contenue dans une motion débattable durant
trente heures devant l'Assemblée nationale, ou soit s'il s'agisse d'un
projet de loi.
Je vais prendre le cas du projet de loi. Supposons qu'on accepte
l'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys. On a un projet de
loi où, je ne sais pas, on décrit une politique... je reviens
à l'exemple de l'avortement, dans le domaine constitutionnel, où
on décrit un projet de constitution. Je pense que c'est un meilleur cas,
plus rapproché de notre objet. On a un projet de constitution, un projet
de loi qui décrit une constitution et on veut le soumettre à la
population pour approbation. Il faudrait qu'on ait une majorité des deux
tiers sur le projet de loi. Cela veut dire qu'iraient devant la population,
seulement les projets de loi les moins controversés, les projets de loi
qui font la quasi-unanimité, enfin, plus des deux tiers de
majorité des membres de l'Assemblée nationale. À ce
moment-là, on peut se demander à quoi sert une consultation
populaire.
M. Lalonde: Est-ce que le député me permet une
question pour faire un éclairage, tout simplement?
M. Paquette: Je comprends.
M. Lalonde: ... parce que le projet de loi,...
M. Chevrette: Vous avez refusé tantôt une
question.
M. Lalonde: ... en vertu du paragraphe b) de l'article 6, ne peut
pas porter sur une constitution. (18 heures)
M. Paquette: M. le Président, le député nous
annonce qu'il va peut-être faire un amendement en excluant le projet de
loi et en concentrant cela sur la motion.
M. Lalonde: Non, il est exclu par l'amendement.
M. Paquette: Pardon?
M. Lalonde: II est exclu. C'est simplement pour des consultations
populaires sur l'avenir constitutionnel. Cela ne peut être en vertu de
b)...
M. Bédard: C'est une particularité.
M. Lalonde: ... parce que b) couvre simplement les projets de loi
dont l'application entre en vigueur seulement sujet à un
référendum.
Une voix: C'est un c) qui s'ajoute.
M. Paquette: Je ne suis pas d'accord avec cette
interprétation. Je pense que cela s'applique à la fois à
l'un et à l'autre, votre amendement. On pourrait très bien
concevoir un référendum de nature constitutionnelle qui se fasse
en fonction d'un projet de loi, qui provienne d'un projet de loi.
M. Lalonde: À ce moment, cela s'appliquerait.
M. Paquette: Bon. Peut-être que vous voudrez
modifier...
M. Lalonde: Je ne suis pas tout à fait d'accord avec votre
interprétation, mais cela s'appliquerait suivant l'hypothèse que
vous soulevez.
M. Paquette: Cela pourrait s'appliquer dans le cas...
Le Président (M. Clair): M. le député de
Rosemont, je m'excuse de vous interrompre, mais je pense que vous en aviez
encore pour un moment.
M. Paquette: Je continuerai ce soir. Ce ne sera pas long, de
toute façon.
Le Président (M. Clair): II est 18 heures. La commission
suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 2)
(Reprise de la séance à 20 h 25)
Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs!
La commission permanente de la présidence du conseil et de la
constitution est réunie pour continuer l'étude, article par
article, du projet de loi no 92, Loi sur la constitution populaire.
Les membres de la commission sont les mêmes que ceux de cet
après-midi.
Au moment où nous avons suspendu nos travaux, à 18 h,
c'est le député de Rosemont qui avait commencé à
exercer son droit de parole et n'en avait utilisé que trois minutes. M.
le député de Rosemont, vous avez la parole.
M. Paquette: M. le Président, j'étais en train
d'expliquer au député de Marguerite-Bourgeoys toute
l'étendue de son amendement. Je ne sais pas s'il s'en est rendu compte,
mais, d'après l'interruption qu'il m'a faite tantôt, je ne pense
pas.
Dans le cas où on demanderait qu'un projet de loi soit
approuvé par les deux tiers de l'Assemblée nationale, il pourrait
arriver que ce projet de loi incite à une question de nature
constitutionnelle. Donc, dans ce cas, cela veut dire qu'il faudrait
qu'il y ait une quasi-unanimité de l'Assemblée nationale,
avant qu'un sujet, constitutionnel ou autre, soit soumis à la
population, pour fins de consultation populaire. À ce moment-là,
on peut se demander quel serait l'intérêt de le faire, si presque
tout le monde, à l'Assemblée nationale, est d'accord pour voter
un projet de loi.
Je reconnais que, dans le cas d'une motion, l'amendement a
peut-être un peu plus de fondement. Cependant, même dans ce cas, je
trouve tout à fait incompatible avec l'esprit du projet de loi qui mise
sur l'initiative gouvernementale, laquelle doit être balisée,
encadrée, doit s'assurer que le gouvernement ne puisse pas faire
n'importe quoi, je le reconnais. C'est un projet de loi qui mise sur
l'initiative gouvernementale. Il suffirait qu'une minorité de
députés décide qu'un référendum n'aura pas
lieu, pour qu'un gouvernement qui a décidé de consulter la
population sur ses politiques, soit empêché de le faire.
Or, M. le Président, je considère que si le
référendum ne doit pas être utilisé sur des
questions futiles, on ne doit pas faire en sorte, non plus, d'empêcher
son exercice. Cela voudrait dire qu'il faudrait deux conditions:
premièrement, que le gouvernement utilise son droit d'initiative et que,
deuxièmement, une minorité ne décide pas d'empêcher
un référendum ou qu'un référendum se tienne,
même dans le cas d'une motion.
M. le Président, je pense que c'est carrément un
amendement excessif. On a amené l'argument que la Commission des droits
de la personne l'avait proposé, lors de son rapport sur le livre blanc,
et qu'elle réitère cette proposition dans la note qui nous a
été remise, hier ou ce matin.
Mais je pense que le député de Marguerite-Bourgeoys a
reconnu que cette question ne faisait pas directement partie des
compétences de la commission, puisque la commission reconnaît
qu'il n'y a pas de libertés fondamentales en cause,
là-dedans.
Personnellement, je juge cette proposition de la Commission des droits
de la personne comme étant axée sur une certaine reconnaissance
des règles parlementaires. Les gens de la Commission des droits de la
personne sont des experts en ce qui concerne la charte des droits et leurs avis
doivent être pris extrêmement au sérieux lorsqu'ils nous
parlent de la difficile conciliation entre les différentes
libertés fondamentales qui fait l'objet de ce projet de loi. Mais quand
la commission nous dit que la question doit être approuvée aux
deux tiers, c'est une question de procédure parlementaire et de
fonctionnement et aussi de juger si on doit favoriser, et jusqu'à quel
point également on doit baliser l'action d'un gouvernement qui veut
consulter la population.
Là-dessus je pense que les parlementaires qui sont à cette
table et à l'Assemblée nationale sont de meilleurs juges que la
Commission des droits de la personne, avec tout le respect qu'on doit lui
porter, puisqu'il ne s'agit pas d'une question qui fait partie
particulièrement de sa compétence.
Que le référendum soit mis en marche par un projet de loi,
auquel cas l'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys
soulève d'énormes diffi- cultés, ou que ce soit sous forme
de motion, où, là encore, les difficultés sont assez
grandes, je pense que c'est un amendement nettement excessif qui va bloquer
l'utilisation de ce mécanisme extrêmement important de
participation de la population aux décisions.
Aux députés de l'Opposition qui craindraient une
possibilité pour le gouvernement de biaiser la question, qui voudraient
s'assurer que le gouvernement sera honnête, je leur dis qu'on n'a pas de
leçon d'honnêteté à recevoir de personne, cela fait
une dizaine d'années qu'on maintient qu'il faut une question claire,
précise dans notre programme politique. (20 h 30)
D'autre part, les mécanismes prévus ailleurs dans le
projet de loi permettent un débat public suffisamment large pour que la
pression non seulement de l'Opposition mais de l'opinion publique aussi
s'exerce. Un gouvernement qui procéderait quand même, avec une
question qui est fortement contestée, pas uniquement pour des motifs
stratégiques, cela pourrait arriver. Je ne veux pas prêter
d'intention à l'Opposition, mais il pourrait arriver qu'une Opposition
décide pour des motifs stratégiques, parce qu'elle sent l'appui
populaire lui échapper, elle pourrait décider de bloquer
indéfiniment un référendum. Même si, dans le
passé, elle a fait énormément de pressions pour qu'il se
tienne le plus tôt possible, de façon que les
Québécois n'aient pas le temps de s'informer sur la question, je
pense qu'il faut éviter cette possibilité de manipulation de
l'instrument pour des motifs stratégiques. La pression de l'opinion
publique, encore une fois, peut-être suite à l'action et aux
interventions dans le débat ou le projet de loi de l'Opposition, est le
meilleur garant, comme pour n'importe quel des projets de loi qu'on
étudie à cette Assemblée nationale.
Sur le référendum concernant l'avenir constitutionnel,
encore une fois, il n'est carrément pas dans l'intérêt de
n'importe quel gouvernement, que ce soit celui-ci ou un autre
éventuellement, d'aller à l'encontre d'une opinion publique qui
jugerait une question biaisée. C'est la meilleure façon pour un
gouvernement de perdre un référendum. Je pense qu'on a bien mal
compris la démarche du gouvernement, si on pense qu'on va faire une
gaffe de cette nature. Non. On va donner l'occasion aux Québécois
de se prononcer le plus clairement possible et toutes les garanties existent
dans le projet de loi, d'une part, pour qu'une minorité ne bloque pas
l'exercice du référendum et que, d'autre part, le gouvernement ne
puisse pas faire ce qu'il veut. Il y a la possibilité d'intervention
également du Conseil du référendum et il a surtout
c'est cela qui est le plus important la pression de l'opinion
publique.
Le Président (M. Clair): D'autres intervenants sur la
motion du député de Gatineau. J'appellerai...
M. Lavoie: Oui, je m'excuse.
Le Président (M. Clair): Oui, je m'excuse, M. le
député de Laval.
M. Lavoie: M. le Président, sur cette motion, je pense
bien que mon intervention ne prendra pas les vingt minutes auxquelles j'ai
droit, ce n'est pas mon intention.
M. Lalonde: C'est 19 seulement.
M. Lavoie: J'ai retenu des propos du député de
Mercier, lors de son intervention cet après-midi, un souhait, je crois,
unanime de tous les parlementaires et de tous les Québécois de
bonne volonté, que la décision qui sera rendue, notamment lors du
référendum constitutionnel sur l'avenir du Québec,
devienne une décision acceptée, agréée, acquise
d'une manière collective partout le Québec, que cette
décision ne soit contestée d'aucune façon. C'est un voeu
que je fais personnellement qu'il n'y ait aucun doute sur cette décision
dans un sens ou dans un autre, que ce soit clair et tout pour que les
Québécois, une fois pour toutes, puissent se prononcer, mais,
pour atteindre ce but, cet idéal, je crois qu'il y a un prérequis
essentiel.
La décision sera une décision de fond, tout le monde le
reconnaît. Le prérequis, c'est que l'étincelle qui va
mettre cela en marche, ce processus référendaire parte non
seulement de la loi elle-même, mais surtout de la question. Je crois
qu'il faudrait qu'il n'y ait aucun doute sur la question, que cette question
soit entourée d'une crédibilité, d'une
honnêteté absolue; il est d'autant plus important que cette
question de forme justement, si le fond ne doit laisser aucun doute, soit
justement la question qui sera posée à la population. Si on veut
obtenir ce but final, il faut que cette question de forme soit également
et surtout dégagée et libérée de tout doute.
D'ailleurs, c'est la raison d'être de l'intervention. Je dois même
vous dire que cela me surprend je suis bien honnête, on se parle
entre collègues de l'Assemblée nationale cette
intervention de la Commission des libertés de la personne qui a
donné son opinion sur cette question de deux tiers. Je ne pense pas
qu'on l'ait requise, c'était surtout la question des comités
nationaux, mais la Commission des libertés de la personne a jugé
à propos d'intervenir. Je me sers de l'argumentation qu'elle nous
propose dans son document. "Cette commission souhaite que la question soumise
à la consultation populaire, une fois adoptée, ne fasse plus
l'objet d'une contestation quelconque qui aurait pour conséquence
d'orienter le débat sur des questions de forme plutôt que sur des
questions de fond". Si jamais la question était boiteuse, mal
posée, vous voyez dans quel débat on s'aventurerait au
Québec, si 25% ou 10% ou peut-être même 5% de la population,
au départ, avaient des doutes, avaient des réserves, avaient des
critiques à faire sur la formulation de la question. La procédure
référendaire serait boiteuse au départ et ce serait une
charrette à trois roues. Pourquoi ne pas prendre toutes les garanties
voulues sur cette question?
Une autre chose me porte à invoquer cette formule ou cette
garantie absolue que nous devons avoir sur la question, pour qu'elle soit
justement, comme la femme de César, au-dessus de tout soupçon et
au-dessus de tout doute. Je pense que c'est une contribution positive et un
service qu'on rend même au gouvernement, surtout qu'on pourrait, en cours
de route, dans l'étude du projet de loi cela serait tout à
fait consistant avec ce qui existe un peu partout ailleurs apporter un
amendement qu'on n'a pas l'intention d'apporter, pour être bien logiques
avec nous-mêmes. On sait que le référendum est uniquement
consultatif. C'est un genre de grand sondage, en somme, cette consultation
populaire. Il n'a pas un pouvoir décisionnel, d'une manière
automatique. Cela donne un mandat ou cela ouvre la porte, dans notre
système confédératif, au gouvernement du Québec
pour amorcer des discussions, si jamais, dans l'hypothèse à
laquelle je ne crois pas, on se dirigeait vers une séparation ou quoi
que ce soit.
On pourrait apporter un amendement au projet de loi. Comme cela existe
dans la plupart des pays, ou une constitution écrite avec des
modalités prévues ce qui n'est pas le cas dans l'Acte de
l'Amérique du Nord britannique on exige souvent les deux tiers de
la décision populaire pour modifier cette constitution, une
majorité qualifiée. C'est très courant. On pose des
prérequis, par exemple en Australie, peut-être pas les deux tiers,
mais ils sont très forts, avant de pouvoir modifier la constitution. On
pourrait apporter cet amendement. Ce serait facile. Ce serait probablement un
amendement que vous pourriez considérer peut-être à bon
droit dilatoire, du fait que cette consultation populaire n'est pas
décisionnelle, qu'elle n'est que consultative. On pourrait l'apporter,
mais on ne l'apportera pas. La décision, pour apporter des changements
constitutionnels, devrait recueillir une majorité qualifiée assez
importante. On ne le fera pas et on ne le demandera pas, mais je pense qu'on
est sur du bon terrain pour demander que la formulation de la question exige
une majorité qualifiée. D'ailleurs, on l'a mentionné tout
le long du débat pour les grandes décisions que doit prendre
l'Assemblée nationale, même si on dit qu'il y a un fil d'Ariane ou
que c'est une continuation de l'Assemblée, c'est un argument qui n'est
pas trop assommant, qui n'est pas trop définitif. Prenez l'exemple de la
Commission des droits de la personne, ce n'est pas un prolongement de
l'Assemblée nationale. Elle ne figure pas au budget de
l'Assemblée nationale. Il est bien dit dans la loi que c'est le ministre
de la Justice qui est responsable de la commission, qui est l'agent de liaison
avec l'Assemblée...
M. Bédard: II fait rapport à l'Assemblée
nationale.
M. Lavoie: Des rapports à l'Assemblée? Tous les
ministères et tous les organismes publics et parapublics doivent
déposer des rapports à l'Assemblée nationale.
M. Bédard: ... nomination de personnes.
M. Lavoie: II ne faut pas charrier sur cette question.
M. Bédard: Ce sont des nominations de personnes. C'est
différent d'avec une question.
M. Lavoie: Je vous dis que ce n'est pas l'argument qui me
convainc le plus. Mais, on exige une majorité qualifiée à
six sur six décisions de l'Assemblée: Vérificateur
général, Protecteur du citoyen, les membres de la Commission des
droits de la personne, le directeur du financement des partis politiques et ses
deux adjoints...
M. Godin: ... réforme électorale.
M. Lavoie: Directeur des élections, maintenant, et les
membres de la Commission de la réforme des districts électoraux.
Six domaines où on a vécu quand même une expérience
depuis plusieurs années, où, à ma connaissance
ça fait quelques années que je siège au Parlement
que ce soit sous les libéraux, que ce soit sous l'Union Nationale, que
ce soit sous le Parti québécois, il n'y a jamais eu blocage,
affrontement, et vous craignez qu'il ne pourrait pas se tenir de
référendum? Quand même! Autant de notre
côté... On n'est pas plus bête qu'on en a l'air. On demande,
on exige, depuis un an et demi...
M. Godin: Cela dépend des jours.
M. Lavoie: ... qu'il y ait un référendum le plus
rapidement possible. Si vous nous apportiez justement une question normale,
honnête, assez précise, de quelle manière nous jugerait
l'opinion publique si on faisait de l'obstruction en refusant ou l'Union
Nationale, qui, en passant, détiendrait la balance du pouvoir,
pratiquement, dans un cas comme ça On fait confiance à une
majorité qualifiée des deux tiers de l'Assemblée.
Je vous dis que, pour des décisions, à ma connaissance,
depuis de très nombreuses années pour ces nominations, il n'y a
jamais eu de blocage, il n'y a jamais eu de situation où les nominations
ne pouvaient pas se faire, et, chaque fois, il y a eu unanimité.
Je vais vous donner un cas où il y a eu retard, c'est la
dernière expérience qu'on a vécue, c'est sur la nomination
du directeur du financement des partis politiques, où il y a eu des
réticences de la part du Parti libéral et de la part de l'Union
Nationale, et, je crois, du Ralliement créditiste, je ne sais pas si le
gouvernement l'avait consulté sur la nomination de M. X comme directeur
du financement des partis politiques.
Il y a eu une réticence je ne sais pas si elle se
révéla juste ou fausse; je ne veux pas porter un jugement
là-dessus mais, à cause de la réticence des partis
d'Opposition, il y a eu une bonification, une amélioration du
système par un amendement à la loi pour amener deux adjoints.
Cela a été bonifié, amélioré. Je
siège moi-même à ce comité de consultation. Je
crois, pour l'avoir vécue, que cette expérience a
été une bonne chose. Avoir deux adjoints, ça va,
même si c'est difficile, avec l'expérience qu'on a actuellement.
Je me demande dans quelle situation on serait s'il n'y avait pas ces adjoints,
les deux autres sont là un peu pour temporiser. Grâce, justement,
à ce consensus, à cette majorité qualifiée qui
était exigée, il y a eu un retard de peut-être deux ou
trois mois sur une nomination, cela a apporté un amendement à la
loi, une bonification de la loi et tout s'est terminé par. une
nomination unanime par toute l'Assemblée.
C'est un exemple qu'on peut fort bien apporter au sujet de la question
au référendum. Les hommes sont faillibles, et, qu'ils soient
péquistes ou d'autre allégeance, ils sont faillibles, tout le
monde est faillible...
M. Lalonde: Même eux?
M. Lavoie: Oui.
M. Lalonde: Vous pensez?
M. Lavoie: Et je crois que c'est une garantie
additionnelle...
M. Lalonde: Ah! C'est grave.
M. Lavoie:... la suggestion que nous faisons...
M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne suis pas si sûr
que ça.
M. Lalonde: ... ça va faire...
M. Lavoie: ... que vous êtes sans doute faillibles. Si vous
ne l'étiez pas et si vous ne vous considériez pas faillibles,
ça commencerait à être grave. Je pense qu'il faut cesser
d'être des héros, et devenir du monde ordinaire. Bon!
Justement, en laissant à la majorité gouvernementale,
seule, majorité simple, le libellé de la question, je crois que
ça ne serait pas prudent, quel que soit le gouvernement qui soit
là, surtout sur une question constitutionnelle, de laisser une
discrétion absolue à une équipe ou à un
gouvernement, de quelque couleur politique que ce soit. Mon opinion
personnelle, surtout pour toutes les raisons que je vous ai données tout
à l'heure, pour que ce prérequis, cette question ne soit l'objet
d'aucun doute, d'aucune contestation et qu'elle soit dégagée
justement de toute critique. (20 h 45)
D'ailleurs, en terminant, pour répondre aux propos tenus par le
député de Mercier et par d'autres, selon lesquels on
défend la simple majorité qu'on connaît, 50 plus 1...
M. Lalonde: Ah! oui.
M. Lavoie: Je voudrais m'appuyer sur des auteurs, des
parlementaires connus, chevronnés, qui auront je n'en doute pas
toute la reconnaissance, le respect de la part des députés
ministériels actuellement et qui déviaient justement de cette
majorité simple dans des débats assez récents ici à
l'Assemblée nationale. Je voudrais mentionner les propos du parrain de
ce projet de loi, le député de Maisonneuve, ainsi que du ministre
actuel de l'Éducation, le député de
Sauvé, lors des débats de l'Assemblée nationale,
lorsque justement la loi 50 a été adoptée qui était
la Charte des droits et libertés de la personne. Je voudrais vous citer
certains passages de ces deux parlementaires expérimentés
où ils mettaient justement, ils exigeaient une majorité
qualifiée.
M. Bédard: ... Nommer des personnes; c'est bien
différent que de proposer une question.
M. Lavoie: Non, laissez-moi donc terminer. M. Lalonde:
Cela le fatigue donc.
M. Lavoie: Ce n'est pas pour nommer des personnes...
M. Lalonde: Cela le fatigue.
M. Lavoie: C'est dans la législation; non pas pour des
nominations de personnes. Lorsque la loi de la Charte des droits et
libertés de la personne a été adoptée, et je cite
le député de Sauvé, ministre actuel de l'Éducation,
M. Jacques-Yvan Morin: "M. le Président, la nécessité
d'une loi fondamentale dont les principes primeraient des lois ordinaires et
qui ne pourraient être modifiés que par une majorité
spéciale ou qualifiée de cette Assemblée, n'est plus
à démontrer". Ce n'est même plus à démontrer,
il n'est même pas nécessaire d'argumenter. Lorsqu'on voudra
légiférer pour modifier certaines choses dans la charte, cela
prendra une majorité qualifiée.
Un peu plus loin...
M. Lalonde: Ce n'était pas pour des nominations. Vous en
êtes sûr?
M. Lavoie: Non, c'est dans la pure législation. M.
Lalonde: Mais pourtant...
M. Bédard: C'est dans le cas des violations; je vais vous
mettre au courant.
M. Lavoie: Ou des déviations à la loi; c'est de
la...
M. Bédard: Non, des violations de la loi.
M. Lavoie: Ce que j'appelle, moi, de la législation; ce ne
sont pas des nominations.
M. Lalonde: Vous en êtes sûr?
M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que le gouvernement
l'a accepté?
M. le député de Laval, me permettez-vous une question?
Le Président (M. Clair): À l'ordre! M. Lavoie:
Le 21...
M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que le gouvernement
libéral a accepté cette suggestion?
M. Lavoie: Monsieur, actuellement nous étudions un projet
de loi...
M. Vaillancourt (Jonquière): Mais je vous pose une
question.
M. Lavoie: ... sur la consultation populaire qui est
devant...
M. Vaillancourt (Jonquière): Vous ne l'avez pas
acceptée.
M. Lavoie: ... et j'enfreindrais le règlement si je
parlais d'autres questions.
M. Vaillancourt (Jonquière): Vous ne l'avez pas
acceptée et vous le savez. Vous ne l'avez pas acceptée.
M. Bédard: Vous ne l'avez pas acceptée.
M. Lalonde: À son grand regret, il ne l'a pas
acceptée. Mais il l'a regretté, par exemple.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, à
l'ordre! M. Lalonde: II a regretté...
M. Vaillancourt (Jonquière): C'est vrai qu'il ne pouvait
pas voter, il était président.
M. Lalonde: ... amèrement.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît! Messieurs, je vous en prie! Je vous en prie!
M. Lalonde: C'est une question que vous pouvez...
M. Vaillancourt (Jonquière): II ne pouvait voter; il
était président de l'Assemblée nationale.
Le Président (M. Clair): Messieurs, à l'ordre, s'il
vous plaît!
M. Lalonde: La seule raison de sa défaite, d'ailleurs.
M. Vaillancourt (Jonquière): Vous admettez avec moi que la
question était pertinente.
Le Président (M. Clair): Messieurs, je vous
prierais...
M. Lavoie: M. Burns...
Le Président (M. Clair): ... d'avoir pitié des gens
qui travaillent au journal des Débats. Ce n'est sûrement pas
drôle d'essayer de noter tout ce qui s'est dit en même temps.
M. Lavoie: 21 janvier 1975, M. Burns, député de
Maisonneuve: "C'est cela, je pense par exemple aux deux tiers ou aux trois
quarts...
M. Lalonde: Hé! Est-ce vrai?
M. Lavoie: C'est qualifié, aux trois quarts
ou à une autre formalité qui souligne qu'il s'agit d'un cas
véritablement exceptionnel dans la législation". Jeudi,
également, 23 janvier 1975, M. Burns: "Soit dit en passant, cela me
plaît beaucoup de voir cette attitude généralisée
des groupements intéressés qui viennent tenir cette attitude que
la loi se doit d'être une loi fondamentale, une loi transcendante. On
pourrait dire dans notre cas une question fondamentale et une question
transcendante. J'espère que le ministre de la Justice en tiendra compte
éventuellement en particulier votre recommandation sur le fait qu'on
doit rendre plus difficile l'amendement de droits ou la disparition de droits
qui se trouvent consacrés dans cette charte par un vote des deux tiers.
Ce n'est plus la majorité simple."
Et une dernière citation de M. Jacques-Yvan Morin: "D'accorder
des lois antérieures avec la Charte et qui empêcheraient toute
modification ultérieure de cette loi fondamentale que nous
prétendons adopter ces jours-ci, sans qu'intervienne un vote
spécial à une majorité qualifiée de
l'Assemblée nationale."
Je dis donc, sur des questions aussi importantes, sur la décision
peut-être la plus importante que le peuple québécois n'aura
jamais à prendre, ou n'a jamais eu à prendre depuis qu'il est en
terre d'Amérique...
M. Godin: Vous le reconnaissez, c'est nouveau.
M. Lavoie: Pourquoi prendre quelque risque que ce soit...
M. Godin: "Change of venue".
M. Lavoie: ... et dégager dans ce débat, surtout
qu'on sait je ne voudrais pas faire un débat plus politique qu'il
ne le faut dans quelle ambiance, dans quelle atmosphère nous
sommes actuellement, quelles sont les questions, les appréhensions,
autant des libéraux, autant de l'Union Nationale, de la population,
autant de vos propres partisans qui se posent des questions encore aujourd'hui,
dans le journal La Presse, sur la CSN, qui ne sont pas des alliés du
Parti libéral et qui se posent une multitude d'interrogations sur la
position, sur le scénario, comme dirait le député de
Verchères, sur ce contexte référendaire actuellement.
Messieurs, acceptez donc la perche qu'on vous tend. Acceptez donc la
police d'assurance qu'on vous offre.
M. Charbonneau: On n'a pas confiance au courtier.
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Lalonde: C'est un autre aveu que le député nous
fait.
M. Charbonneau: On n'a pas confiance en vous du tout.
M. Lalonde: Le ministre des Consommateurs n'avait pas
été aussi loin.
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Charbonneau: Vous reconnaissez que c'est vous autres, dans ce
cas-là.
M. Lavoie: M. le Président, je demanderais, dans ce
contexte, si le ministre ne pourrait pas, pour atteindre encore une fois ce
consensus tant désiré, ce consensus que vous nous avez
refusé lorsqu'on a exigé un oui ou un non, ce consensus que vous
demande encore l'Opposition unie... Le front uni de l'Opposition...
M. Bédard: Attendez, n'y allez pas si vite.
M. Lavoie: ... vous demande, c'est tellement simple, c'est
tellement pas compliqué. Et vous savez que vous aurez la contribution,
la collaboration des députés, si vous arrivez avec une question
convenable, une question claire, précise, une question que vous avez, je
l'espère, à coeur de poser.
C'est cela, M. le Président, et j'aimerais que le ministre prenne
en considération ce que nous lui soumettons.
Le Président (M. Clair): M. le ministre.
M. Bédard: M. le Président, nous avons reçu
l'avis de la commission sur certains points où elle prend la peine de
mentionner qu'il ne s'agit pas des libertés fondamentales, que cela ne
touche pas aux libertés fondamentales. Elle émet une opinion et
elle accepte, dès le départ, que c'est une opinion que nous
puissions discuter. D'ailleurs, toutes les opinions peuvent se discuter. Je
voyais, par exemple, l'opinion de la commission, à la page 2. Le
député de Marguerite-Bourgeoys en a fait état tout
à l'heure. La commission disait ceci et je cite: "À notre avis,
le rôle de l'Assemblée nationale, dans la décision de tenir
une consultation populaire telle que définie dans le projet de loi, est
beaucoup plus limité que ne l'annonçait le livre blanc".
D'autre part, j'ai une opinion qui a été émise par
quelqu'un que vous connaissez bien, qui est Claude Ryan, le chef du Parti
libéral, qui s'exprimait...
M. Lalonde: Allez-y, on vous écoute.
M. Bédard: ... dans les termes suivants et je cite: "Dans
le livre blanc d'août dernier il n'était pas clairement garanti
que toute question susceptible d'être soumise au peuple à
l'occasion d'un référendum serait d'abord présentée
pour approbation à l'Assemblée nationale.
On pouvait craindre que par subterfuge d'une loi-cadre, le gouvernement
cherche à se dispenser d'une telle obligation".
Et M. Ryan continue: "Mais le projet de loi no 92 dissipe cette
ambiguïté en garantissant que toute question sera soumise au
préalable à l'As-
semblée nationale. Il ne donne certes pas satisfaction à
ceux qui souhaitent que la question c'est normal de le souhaiter
relative au référendum sur l'avenir constitutionnel doive
être obligatoirement approuvée par au moins les deux tiers des
députés. Il assure - continue M. Ryan - néanmoins le droit
de regard des députés sur le libellé de la question et il
dispose, du même coup, de maintes objections que l'on pouvait formuler
à l'encontre du principe même d'une loi-cadre sur les
consultations populaires."
Dans ce sens-là, M. Ryan diffère avec l'expression
d'opinion émise par la commission. Je ne pense pas qu'il soit
anathème de ce fait. Concernant le vote des deux tiers, la commission
nous dit ceci: "Sans vouloir en faire une question de principe, ni en
exagérer l'importance, la commission continue de croire à un vote
à la majorité des deux tiers". Comme le prévoit la
procédure.
Pour ma part, je vous dis tout simplement que, sans vouloir en faire une
question de principe...
M. Lalonde: Allez jusqu'au bout du paragraphe.
M. Bédard: Oui, ... comme le prévoit la
procédure parlementaire, avec les explications qu'il donne concernant la
procédure parlementaire...
M. Lalonde: ... c'est ça.
M. Bédard: ... lorsqu'on recherche le plus large consensus
entre les partis politiques, ce serait préférable pour eux...
Je vous dis tout simplement, par conviction...
M. Lalonde: C'est le gros bon sens.
M. Bédard: ... que, sans vouloir en faire une question de
principe, ni en exagérer l'importance, nous croyons que la
majorité simple est indiquée dans les circonstances, parce que si
nous acceptions cet amendement, autrement dit, si ça prend les deux
tiers pour procéder à une consultation de la population, il
s'ensuit donc, par conséquent, qu'un tiers des membres de
l'Assemblée nationale est suffisant pour empêcher de
procéder à une consultation elle est là, la
question de principe et je me demande au nom de quel principe un tiers
de l'Assemblée nationale pourrait empêcher le peuple
québécois d'être consulté, pourrait empêcher
un gouvernement responsable de consulter la population sur une question
précise, sur une décision majeure qu'il pourrait avoir à
prendre.
Je pourrais, disons, argumenter longuement. Ce n'est pas mon intention.
La plupart des arguments on été explicités par les
députés ministériels. Je peux vous dire que je pense qu'on
est tous d'accord que, quel que soit le référendum, il faut en
arriver, il faut que le gouvernement, c'est sa responsabilité puisqu'il
s'agit d'un référendum d'initiative gouvernementale, en arrive
à la formulation d'une question claire et précise et qu'il doit
essayer, justement par son effort, de formuler une question claire et
précise, honnête, d'obtenir le plus large consensus possible, au
niveau des députés de l'Assemblée nationale, et le fait
que la loi stipule que la majorité simple n'empêchera en aucune
façon le gouvernement et c'est normal d'essayer, par une
question claire et précise, de rechercher et d'obtenir le consensus non
pas des deux tiers de l'Assemblée nationale, mais de l'ensemble des
membres de l'Assemblée nationale. (21 heures)
Mais, il reste qu'accepter, en fait, ce principe de majorité
qualifiée auquel a fait allusion tout à l'heure le
député de Laval, il sait très bien, la majorité
qualifiée, telle qu'on l'étiquette, est normalement
étrangère au régime parlementaire britannique. Il y a
toute une différence entre décider que ça prend les deux
tiers des membres de l'Assemblée nationale pour nommer des personnes
comme responsables d'organismes particuliers et exiger deux tiers des votes de
l'Assemblée nationale pour en arriver à la possibilité
pour le gouvernement de formuler une question et de consulter la population, ou
encore, selon l'autre hypothèse possible, d'exiger les deux tiers des
membres de l'Assemblée nationale pour un projet de loi qui pourrait
être soumis à l'attention, au niveau d'une consultation populaire.
Je vous dis bien sincèrement que tout en respectant les idées qui
ont été énoncées, les arguments qui ont
été explicités par l'Opposition, je ne vois pas pourquoi
on changerait les règles normales qui ont toujours prévalu pour
l'acceptation de motions au niveau d'expression d'idées à
l'Assemblée nationale, ou encore au niveau de projets de loi, je ne vois
pas pourquoi on renoncerait à ce qui a toujours été
suffisant, à savoir l'assentiment de la majorité simple des
membres de l'Assemblée nationale.
Nous sommes, à l'heure actuelle, à essayer ensemble de
mettre au point une loi organique ou une loi-cadre, la plus démocratique
possible, qui puisse permettre à n'importe quel gouvernement de faire
n'importe quel référendum quand il le voudra. Il ne faudrait pas
que dans la loi on insère des exigences qui donneraient à la fin
le résultat que le gouvernement ou les gouvernements qui voudraient s'en
servir, pourraient le faire difficilement. C'est bien beau de dire qu'on veut
forger ensemble un instrument démocratique qui servira à tous les
gouvernements, mais il ne faudrait pas, par des dispositions, faire en sorte
que cela ait comme résultat d'enterrer cet instrument dans un
coffre-fort fermé à clé. Je crois qu'un gouvernement
responsable sait très bien que lorsqu'il a une question à poser
ou encore une consultation de la population à faire, il doit la faire
avec une question précise, il doit essayer d'obtenir le plus large
consensus possible. C'est cela sa responsabilité. C'est là-dessus
que le gouvernement va être jugé. Sans vouloir insulter qui que ce
soit, je crois que nous n'avons pas besoin de police d'assurance pour garantir
l'honnêteté, la clarté et la précision de la
question que nous voudrons soumettre à la population du Québec,
ou que d'autres gouvernements... Nous faisons confiance à ces autres
gouvernements qui nous suivrons. Ce sera leur responsabilité de formuler
correctement les questions et de les soumettre à la consultation
populaire.
M. le Président, c'est dans cet esprit, un esprit quand
même constructif qui respecte les idées et les arguments
énoncés par l'Opposition, que nous croyons, non seulement pour le
gouvernement qui est là présentement, mais pour les autres
gouvernements qui voudront se servir de cet instrument, ne pas compliquer la
situation. Nous ne partageons pas tout simplement l'idée exprimée
ou la suggestion exprimée par l'amendement proposé par
l'Opposition.
Le Président (M. Clair): La motion d'amendement du
député...
M. Lalonde: M. le Président...
M. Bédard: Si vous me permettez, M. le Président,
j'aurais pu, mais je n'ai pas voulu le faire, mais puisqu'on dit qu'on se parle
très clairement entre nous, j'aurais pu le refuser simplement pour une
considération. Je suis ici, et les membres de la commission
parlementaire sont ici pour mettre au point une loi-cadre, pour la tenue de
référendum par n'importe quel gouvernement. Je vous le dis
très sincèrement, tous les amendements que vous allez apporter
qui auront pour effet de particulariser la loi, d'essayer de nous faire faire
d'une loi-cadre une loi spéciale pour un référendum que
nous pouvons avoir à l'esprit... En respectant carrément l'esprit
et le principe qui doit soutenir une loi-cadre, je ne vois pas comment ces
amendements qui ont pour but de particulariser une loi-cadre, pourraient
être acceptés. C'est pour cela que dans votre proposition qui
débute par les mots suivants: "Dans le cas d'un référendum
relatif au statut constitutionnel du Québec..." qui a donc comme effet
de vouloir particulariser la loi, de vouloir essayer de faire une distinction
avec un référendum sur quelque question que ce soit ou encore un
référendum d'ordre constitutionnel, à ce moment-là,
vous contribuez à essayer de particulariser une loi que nous ne voulons
pas particulariser. Je vous dis d'avance que si l'on veut vraiment
procéder un peu rapidement à l'étude de ce projet de loi,
je crois de mon devoir de vous le dire dès le départ, c'est une
question de principe, c'est une loi-cadre et cela va rester une loi-cadre.
M. Lalonde: M. le Président, je pense qu'il me reste une
minute. Je n'avais pas l'intention de la prendre jusqu'aux derniers propos du
ministre. Ceux-ci, je pense, constituent...
Le Président (M. Clair): ... une minute.
M. Lalonde: ... un mépris de l'Opposition en nous
avertissant, en nous menaçant d'avance que tout amendement...
M. Bédard: M. le Président...
M. Lalonde: Voulez-vous me laisser une minute, s'il vous
plaît? Vous avez eu le temps.
M. Bédard: Une question de règlement, M. le
Président. Je n'ai menacé en aucune façon, j'ai
simplement...
M. Lavoie: À la fin.
M. Lalonde: À la fin de mon intervention. ... constitue
une menace à l'égard de l'Opposition en laissant supposer que
tout amendement qui aurait pour effet de particulariser et qui serait
acceptable, comme vous en avez accepté, M. le Président, suivant
le règlement, serait d'avance refusé par le gouvernement. M. le
Président, si c'est cela l'attitude du gouvernement, je tiens à
dire au ministre qu'il a besoin de changer d'attitude. Nous n'allons pas
être impressionnés par ses menaces.
M. Charbonneau: Qui menace là?
M. Lalonde: II va devoir passer par toutes les étapes de
toutes les dispositions que le règlement met à notre service pour
bonifier cette loi. Je pense que nous venons d'assister à ce que nous
n'avions jamais vu à cette commission avant l'arrivée du
ministre, une tentative déguisée, comme d'habitude avec le
ministre de la Justice, c'est toujours de même de menacer
l'Opposition, pour que cela se passe comme il pense que cela devrait se passer.
M. le Président, ce n'est pas ainsi que cela va se passer.
Le Président (M. Clair): Votre minute est terminée.
M. le ministre, en vertu de l'article 96.
M. Bédard: M. le Président, en vertu de 96, je n'ai
en aucune façon menacé l'Opposition en quoi que ce soit, vous le
savez. J'ai tout simplement exprimé une conviction que j'ai. Nous sommes
ici, les membres de la commission parlementaire, pour mettre au point une
loi-cadre qui va servir à la tenue de n'importe quel
référendum, qu'il soit du point de vue constitutionnel ou qu'il
soit pour d'autres questions non constitutionnelles. Ma conviction est que nous
devons orienter nos efforts pour que cet instrument soit le plus parfait
possible de manière que n'importe quelle sorte de
référendum puisse être tenu à l'intérieur et
en respectant cette loi-cadre. C'est un exercice de démocratie que nous
sommes en train de faire, une loi-cadre qui permettra la tenue d'un
référendum...
M. Lalonde: On n'en veut pas de votre démocratie.
M. Bédard: Laissez-moi terminer. Vous le demandez aux
autres, ayez la même...
M. Lalonde: On n'en veut pas de votre démocratie.
M. Lavoie: Est-ce que vous parlez toujours en vertu de 96?
M. Bédard: Oui, simplement pour expliciter qu'il n'y a
aucune menace là-dedans et, M. le
Président, je crois que si on réussit à mettre au
point l'instrument le plus parfait possible, n'importe quelle sorte de
référendum, quelle que soit son importance, pourra s'exercer
à l'intérieur du respect de cette loi-cadre.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: Assez brièvement, parce que je n'ai pas
l'intention d'utiliser tout mon temps pour commenter certaines situations, pour
parler des arguments qui ont été servis des deux
côtés. On en a eu, je pense bien, des valables. J'aimerais
cependant faire remarquer que, le contexte actuel de la loi que nous
tâchons de bonifier se présente assez différemment que si
c'était celui d'un gouvernement qui serait élu avec une
majorité. On dit qu'il ne faut quand même pas qu'une
minorité de députés puisse empêcher une loi de
procéder, il ne faut pas oublier que cette minorité est quand
même une majorité d'électeurs. Me basant là-dessus,
je pense bien que dans les particularités que l'on pourrait amener, on a
aussi des amendements, il y en a eu de déposés, certains autres
vont s'amener, il y a des amendements qui pourraient caractériser cette
loi et n'empêcheraient pas que ce soit une loi-cadre, comme on le sait,
dans cet amendement-ci, en disant: Dans le cas d'un référendum
relatif au statut constitutionnel du Québec, je pense qu'à ce
moment-là, les amendements qui sont dans la loi et qui feront partie de
la loi pourront demeurer là et n'empêcheront pas, quand
même, une loi-cadre de servir à d'autres fins.
Je ne verrais pas pourquoi on se battrait contre ces amendements, si,
des deux côtés de la table, on est de bonne foi et qu'on dit qu'on
veut avoir une loi claire, une question claire et précise, une question
qui va rendre justice à l'ensemble des contribuables. Je vois mal,
après avoir dit ça, se le dire des deux côtés de la
table, qu'on s'oppose à ce qu'on mette un paragraphe c) à
l'article 6, qui ne servira jamais dans d'autres cas. On se servira du
paragraphe a) et du paragraphe b), et le paragraphe c) demeurera là pour
une loi qui pourra venir lors de l'élection d'éventuels
gouvernements qui voudront modifier le statut du Québec.
Je pense que c'est une prudence de plus qu'on inclut dans la loi.
Honnêtement, c'est mon argument majeur, je n'ai pas vu personne qui l'a
réfuté, c'est que dans le contexte actuel, et cela se produit
depuis déjà quelques années, depuis que d'autres
formations politiques ont fait leur apparition au Québec, depuis qu'on
n'a plus un gouvernement bipartite, il arrive que le gouvernement n'est plus en
majorité de vote. Cela s'est produit chez les libéraux, cela
s'est produit chez nous et ça se produit actuellement avec le
gouvernement.
La question qui pourrait être amenée, avec la force qu'un
gouvernement a, force de publicité, force de vente ce qui est
normal, si c'était un autre gouvernement, ce serait la même chose
et pris comme nous serons dans un comité unique, ce sera
probablement des forces inégales. À ce moment-là, à
mon point de vue, on ne peut pas négliger, s'il y a 60%
d'électeurs, et on ne peut pas ne pas avoir dans la loi ces
particularités qui vont protéger ce 60% d'électeurs. C'est
60%, et il se pourra qu'on forme un gouvernement encore avec moins de 40%.
Quand on sait que 71 députés sont élus avec 40%, on
pourrait bien se ramasser encore avec 60 députés et pas loin de
35%.
À ce moment-là, je pense que pour la minorité qu'on
appelle en Chambre, qui n'est pas le gouvernement, mais qui a encore une plus
grande majorité, on n'a pas le droit de faire ça. Surtout sur une
question aussi importante qu'une question constitutionnelle. Ah, si on vient
parler de question de zonage agricole, le premier ministre a dit qu'il n'y
aurait pas de référendum sur cette question, mais si on parlait
de zonage agricole, une loi qui est quand même à caractère
provincial, il y a moins de monde. C'est comme les lois sur les mines. Quand on
touche à la ville d'Asbestos et de Thetford, en tout cas dans le secteur
particulier des travailleurs, je ne parle pas de l'impact financier mais du
secteur particulier des travailleurs, on touche quand même à une
minorité de contribuables.
Dans l'aspect constitutionnel, l'avenir de notre province, je pense que
c'est plus important que ça. Bien honnêtement, je ne suis pas ici,
on le sait des deux côtés de la table, pour faire perdre le temps
à la commission, mais je suis ici pour bonifier la loi, la rendre
acceptable à tous points de vue.
Je ne trouve pas tout à fait correct que le gouvernement ne se
range pas en arrière d'un amendement qui n'engage pas le gouvernement
sur d'autres référendums, qui donne au gouvernement sa loi-cadre
quand même, qui ne l'empêcherait pas d'être plus efficace, et
alors les électeurs se trouveraient plus en confiance. Des arguments qui
ont été servis par différents députés, j'en
ai retenu un, c'est que nous, du côté de l'Opposition, on n'aurait
pas envie de faire rire de nous non plus, ça ne nous tente pas plus que
ça tente le gouvernement. Si on n'est pas le gouvernement, on n'a pas
envie de diminuer dans la faveur du public non plus.
Quand on détient 25 comtés, qu'on en détienne 10,
on n'a pas l'intention de baisser, on aimerait ça augmenter, nous aussi.
Pour ça, il ne faut pas avoir l'air ridicule. Quand on demande au
gouvernement de se prononcer et de nous donner un référendum, on
est d'avis qu'il nous en faut un. Pour avoir un référendum, je
pense qu'il nous faut une question. Pour avoir une question, il faut
s'entendre.
À partir de là, on n'est pas mieux pris que le
gouvernement. Je pense qu'il n'y a pas de raisons, dans les arguments qu'on
nous a servis ici, il n'y a pas eu de raison majeure que personne ne m'a
donné qui me fait croire que ce n'est pas possible de nous donner un
vote aux deux tiers. Je dois vous dire que je voterai en faveur de l'amendement
et c'est avec conviction que je le fais.
M. Lavoie: M. le Président...
M. Godin: M. le député de Mégantic-Compton,
vous permettez une question?
M. Grenier: Oui, M. le Président.
M. Godin: À l'époque où vous étiez
membre du gouvernement Johnson et ensuite du gouvernement Bertrand, qui n'avait
que 44%, des votes je pense, est-ce que vous estimez que certaines lois
très importantes ou certaines activités, entre autres la visite
du général de Gaulle, étaient faites par un gouvernement
responsable qui représentait le Québec ou qu'il aurait dû
être reçu, le général de Gaulle, par exemple, par
l'Opposition d'abord, représentant 58% des votes? (21 h 15)
M. Grenier: Oui, je réponds à votre question, si
vous me le permettez, M. le député de...
M. Godin: Mercier.
M. Grenier: ... Mercier. C'était si vrai qu'on se sentait
en minorité dans le public. On a déposé une loi du
référendum.
M. Godin: Mais les lois qui ont été adoptées
étaient quand même valides...
M. Grenier: Oui.
M. Godin: D'accord, c'est tout.
M. Grenier: Mais j'aurais aimé mieux qu'on soit un
gouvernement majoritaire.
M. Godin: Oui, mais ça, c'est le pluralisme.
M. Lavoie: M. le Président, je n'avais pas l'intention
d'intervenir à nouveau, mais il me reste quelques minutes, très
brièvement. Suite aux propos tenus par le ministre de la Justice, je
voudrais à mon tour protester et dire que je regrette les mots qu'il a
prononcés; ils sont superflus. À ma connaissance, c'est la
première fois que j'entends un ministre faire sont lit et dire au
départ: Messieurs, ne perdez pas votre temps; tous les amendements, si
vous voulez les particulariser, on ne voit pas comment on va pouvoir les
accepter. En voulant dire, c'est une fin de non-recevoir.
C'est regrettable et cela concorde très mal avec les propos de
votre prédécesseur, le député de Maisonneuve, et
vos propres propos que vous dites malheureusement trop souvent dans un style un
peu doucereux. Quand vous avez protesté, suite aux propos du
député de Marguerite-Bourgeoys, cela a très mal
concordé avec la politique de consensus, de bonne foi, d'ouverture que
vous nous avez prêchée depuis que le livre blanc a
été déposé il y a un an. Vous nous opposez une fin
de recevoir en disant: Ne perdez pas votre temps, si vous voulez particulariser
ce projet de loi, dans les cas de référendums, on va voter contre
et on ne voit pas comment on pourrait les accepter. C'est très simple,
dans la législation ordinaire, on ne demande pas que les lois soient
adoptées par les deux tiers. Dans les référendums
ordinaires qui peuvent se présenter soit sur la peine de mort,
l'avortement si c'était de notre compétence le
zonage agricole, on laisse la majorité simple, mais on reconnaît,
comme dans beaucoup d'États, qu'une question constitutionnelle est plus
importante qu'une question d'administration courante.
Dans ce cas particulier, étant donné que c'est
prévu même dans les décisions que la population doit rendre
dans ces référendums, soit en Suisse ou ailleurs, dans les
questions constitutionnelles on exige, pour le résultat, une
majorité qualifiée. Ce qu'on vous demande on est
très logique c'est qu'on considère les
référendums à caractère constitutionnel beaucoup
plus sérieux, plus importants, avec plus de conséquences qu'un
référendum sur l'administration courante d'une décision
normale d'un gouvernement. C'est la raison pour laquelle on a proposé
cet amendement.
Encore une fois, je crois que c'est une insulte et un mépris non
seulement envers l'Opposition, envers le parlementarisme et envers même
vos propres députés qui pourraient... Écoutez! Ils ne sont
pas dans un carcan, vos députés; ils pourraient, à titre
de députés, apporter une suggestion, une amélioration
même pour un référendum qualifié. C'est une insulte
même à vos députés ministériels. Je crois que
c'est notre devoir de protester contre une déclaration de la sorte et M.
le ministre, si c'était possible, vous devriez la retirer.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Verchères.
M. Bédard: Vous devriez commencer par la bien
comprendre.
M. Charbonneau: Est-ce que le député de Laval me
permettrait une question?
M. Lavoie: Certainement.
M. Charbonneau: Je veux simplement lui demander s'il ne
considère pas, finalement, que le débat qui va suivre la question
va suffisamment permettre à la population, par l'intermédiaire de
l'Opposition, de se faire une idée claire, précise du
caractère d'honnêteté et de rigueur intellectuelle de cette
question.
M. Lavoie: Pour répondre...
M. Charbonneau: Ne pensez-vous pas, finalement, que c'est un
débat assez artificiel?
M. Lavoie: Pour répondre très brièvement
à votre question. Mettons-nous dans le processus, la manière dont
on va procéder si le projet de loi reste tel quel. Il y a une question
de proposée par le gouvernement; elle peut être
légèrement ambiguë; elle peut être transparente; elle
peut ê-tre si elle n'est pas transparente
j'espère
qu'elle sera translucide; j'espère qu'elle n'aura pas de
défaut. Mais il est possible; vous êtes des gens faillibles. Avec
votre majorité ministérielle gouvernementale et un débat
avec la clôture de 30 heures, on l'aura la question et on sera
obligé de vivre avec. C'est comme cela que cela peut arriver. Même
si le débat et le référendum s'enchaînent par la
suite avec les brefs référendaires, si, au départ, on
passe une charette à trois roues, et que même la question est
déjà contestée dans la population, ce n'est pas
très sain pour l'opération référendaire.
M. Charbonneau: Oui, d'accord. Mais j'ai l'impression que vous
n'avez pas répondu.
M. Lavoie: On sera obligé de vivre avec cette
question.
M. Charbonneau: Mais vous n'avez pas répondu à ma
question, M. le député de Laval. Je suis d'accord avec vous sur
ce que vous venez de dire...
M. Lavoie: ... question, c'est cela que vous m'avez
demandé.
M. Charbonneau: Ce que je vous pose comme question, c'est: Ne
croyez-vous pas que la pression publique du simple fait qu'il y aura un
débat long, que de nombreuses heures seront consacrées à
cette question...
M. Lavoie: 30 heures.
M. Charbonneau: C'est beaucoup 30 heures.
M. Lavoie: Cela peut être une semaine avec les
règles suspendues de la Chambre; c'est une fin de session.
M. Charbonneau: Écoutez! Vous et moi, tous ceux qui
sont...
M. Lavoie: Cela peut être une semaine.
M. Charbonneau: Vous et moi, tous ceux qui sont autour de cette
table savons...
Le Président (M. Clair): Messieurs...
M. Charbonneau: ... aussi que ça se fait en public, ce
débat ne se fait pas en catimini.
M. Lavoie: Est-ce qu'il y avait du public à
l'Assemblée nationale, ce matin, à 5 heures lorsqu'on
siégeait?
Une voix: Non.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît, messieurs!
M. Charbonneau: Mais pensez-vous que les gens ignorent qu'on a
siégé jusqu'à 5 heures, par exemple?
M. Lavoie: II n'y a rien dans les journaux. Il n'y a pas un chat
au Québec qui sait qu'on a siégé jusqu'à 5 heures.
Ce n'est pas une accusation que je porte contre les media.
M. Charbonneau: J'ai été journaliste suffisamment
longtemps pour savoir que sur un débat comme celui-là, M. le
député, du simple fait qu'il doit être public, les craintes
que vous avez tombent automatiquement.
Une voix: Cela va être télévisé...
M. Charbonneau: Cela va être télévisé
à partir de septembre. Imaginez-vous. Pensez-vous que ce débat va
passer inaperçu? Voyons donc!
M. Vaillancourt (Jonquière): Votre chef ne sera même
pas là.
M. Lalonde: ... projet de loi...
M. Vaillancourt (Jonquière): Votre chef ne sera même
pas là... Il est parti.
Le Président (M. Clair): Est-ce que la motion du
député de Gatineau à l'effet d'ajouter à la fin de
l'article 6, l'alinéa suivant: Dans le cas d'un référendum
relatif au statut constitutionnel du Québec une question ou un projet de
loi devant faire l'objet d'une consultation populaire doit être
approuvé par les deux tiers des membres de l'Assemblée nationale,
est adoptée?
M. Lalonde: Adopté.
Une voix: Rejeté, M. le Président.
Le Président (M. Clair): Rejeté.
M. Lavoie: Prenez l'enregistrement des voix. Le
Président (M. Clair): Vote enregistré?
Une voix: Qui est membre?
Le Président (M. Clair): Je vais vous le dire au fur et
à mesure. Veuillez indiquer si vous êtes pour ou contre. M.
Bédard (Chicoutimi), pour ou contre l'amendement?
M. Bédard: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Vaillancourt
(Jonquière)?
M. Vaillancourt (Jonquière): Contre.
Le Président (M. Clair): M. Charbonneau
(Verchères)?
M. Charbonneau: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Beauséjour
(Iberville)?
M. Beauséjour: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Lavoie (Laval)?
M. Lavoie: Pour. Oui.
Le Président (M. Clair): M. Grenier
(Mégantic-Compton)?
M. Grenier: Pour.
Le Président (M. Clair): M. Laberge (Jeanne-Mance)?
M. Laberge: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys)?
M. Lalonde: Pour.
Le Président (M. Clair): M. Paquette (Rosemont)? M. Roy
(Beauce-Sud)? M. Samson (Rouyn-Noranda)?
M. Samson: Pour.
Le Président (M. Clair): Le résultat du vote est le
suivant: Pour l'adoption: 4. Contre: 5. La motion...
M. Lalonde: Cela a passé proche. Le Président
(M. Clair): ... est rejetée.
M. Vaillancourt (Jonquière): La majorité
simple.
Une voix: Deux-tiers.
M. Grenier: Est-ce qu'on peut reprendre le vote comme l'autre
jour à l'Assemblée nationale? On va aller chercher M. Roy.
Une voix: Si on avait été chercher M. Roy...
M. Charbonneau: Seulement pour vérifier, vous dites 5?
Le Président (M. Clair): C'est-à-dire le
contraire.
M. Lavoie: Cinq pour et quatre contre?
Le Président (M. Clair): Cinq contre et quatre pour.
M. Charbonneau: Est-ce qu'il y a des intervenants?
Le Président (M. Clair): II y a des intervenants.
M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce qu'on peut passer
à l'adoption de l'article 6?
Une voix: Adopté.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Clair): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, sur l'article 6.
M. Lalonde: M. le Président, on a vu l'hermétisme
chronique, maladif du gouvernement à l'égard de toute tentative
de l'Opposition de bonifier ce projet de loi en fonction d'un
référendum sur l'indépendance, qui, quand même, il
faut le reconnaître, et je pense que les députés
ministériels le reconnaîtront, ne fait que suivre les promesses du
Parti québécois. Le Parti québécois a promis un
référendum sur l'indépendance. On a tenté de
bonifier la loi à cet égard. M. le Président, on a eu une
fin de non-recevoir de la part du ministre en particulier, voilée de
menaces, il sait ce qu'on en pense. Cela nous a fait bien peur, M. le
Président, on en tremble actuellement. On va quand même tenter de
rassurer cette pauvre équipe ministérielle, qui craint beaucoup
de parler du référendum sur l'indépendance, et je vais
proposer l'amendement suivant qui s'adresse à tout
référendum.
Ajouter les alinéas suivants à l'article 6: "Aucun
référendum prévu au premier alinéa ne peut
être tenu sans que le gouvernement n'ait obtenu au préalable et
qu'il n'ait déposé à l'Assemblée nationale un avis
de la Commission des droits de la personne constituée en vertu de
l'article 57 de la Charte des droits et libertés de la personne, 1975,
Statuts du Québec, chapitre 6. L'avis prévu au
précédent alinéa porte exclusivement sur
l'opportunité de soumettre une question ou un projet de loi à une
consultation populaire en regard des conséquences qu'une telle
consultation populaire peut avoir sur les droits et libertés de la
personne et d'une certaine catégorie de personnes".
Le texte de l'amendement est distribué, je crois, M. le
Président.
M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce qu'on peut avoir
quelques minutes pour relire tranquillement l'amendement?
Le Président (M. Clair): Puisque c'est le voeu de la
commission.
M. Vaillancourt (Jonquière): Dans votre esprit, quand vous
dites le premier alinéa, est-ce que ce n'est pas le paragraphe a)? A est
un paragraphe ou un alinéa?
M. Lalonde: Ajouter les alinéas suivants. Ce ne sont pas
des paragraphes, ce sont des alinéas, parce qu'ils ne sont pas
numérotés.
M. Vaillancourt (Jonquière): D'accord.
M. Lalonde: ... adopté par toute la commission pour
demander l'avis de la commission là-dessus.
Le Président (M. Clair): Est-ce qu'on peut continuer ou
s'il y aurait lieu de...
M. Vaillancourt (Jonquière): Je n'ai rien à dire
sur la recevabilité, M. le Président.
M. Lalonde: M. le Président, je n'ai pas d'objection, moi
non plus.
Le Président (M. Clair): Personne ne soulève la
question de la recevabilité de cette motion d'amendement? Vous
êtes certain?
Une voix: Certain.
Le Président (M. Clair): C'est pour être plus
sûr que personne ne reviendra dans deux minutes.
M. Samson: N'insistez pas trop.
Le Président (M. Clair): Je déclare donc la motion
d'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys recevable.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Clair): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, sur la motion d'amendement.
M. Lalonde: ... je voudrais expliquer la portée de cet
amendement. Si on se souvient, certains Québécois ont
suggéré, lorsqu'on a abordé l'examen de la question
référendaire, le recours à un comité de sages qu'on
a appelé Conseil du référendum disons dans l'esprit
de l'Union Nationale Conseil du référendum qui a
été plagié grossièrement par le gouvernement qui
lui a enlevé tout son sens, d'ailleurs, au grand dam de l'Union
Nationale. Je reconnais que c'est malheureux. (21 h 30)
D'autres, dans le public, ont fait de même pour tenter d'assurer,
encore une fois et au-delà de la loi, le caractère de
crédibilité de la loi et des résultats des
référendums qui pourraient être tenus en vertu de cette
loi.
M. le Président, on ne peut pas, actuellement, discourir
longtemps sur l'opportunité de quelque gouvernement que ce soit de
soumettre à une consultation populaire certaines questions.
Généralement, dans les démocraties récentes ou
contemporaines, on a eu recours à ce mécanisme de consultation
pour régler un problème qu'on ne savait pas exactement comment
régler. C'est une tentation qui peut exister dans l'esprit de
gouvernants qui ne savent pas exactement comment se situer, où se situer
à l'égard d'un problème et par rapport à l'opinion
publique.
Est-ce qu'on doit, dans un tel cas, laisser à un gouvernement
l'entière liberté de décider de soumettre une certaine
question, entre guillemets, sans avoir la prudence élémentaire,
sans recourir à des précautions? Le conseil des sages ou le
Conseil du référendum, dans l'esprit ou tel que l'Union Nationale
l'avait suggéré à ce moment-là, était un
véritable conseil du référendum, totalement
indépendant, avec des pouvoirs, si je me souviens bien
peut-être que le député de Mégantic-Compton pourra
expliciter là-dessus tantôt auquel on donnait plus de
pouvoirs que de connaître simplement des contestations; il pouvait se
prononcer sur la question, sur l'opportunité de faire un
référendum sur une telle question.
C'est disparu. Le Conseil du référendum est devenu quoi?
Un tribunal. S'il n'y avait pas eu de conseil de référendum, il
aurait fallu avoir ce tribunal de toute façon. Mais on aurait
appelé cela la Cour provinciale, M. le Président. On appelle
ça le Conseil du référendum, mais ce sont des juges de la
Cour provinciale.
Alors, ce sont des petits tours de passe-passe, c'est un petit
maquillage qui a été fait; on a simplement pris le titre de
Conseil du référendum, on l'a mis au-dessus de trois juges et on
a décidé qu'on avait accepté la suggestion de l'Union
Nationale.
Quant à moi, n'étant pas un membre de ce parti, je trouve
que c'est une démarche indigne. Quand même, on a ça dans la
loi actuellement. Je pense qu'on doit remplacer le véritable conseil des
sages qu'on avait conçu, par ce qui existe, je pense, de plus
crédible actuellement, dans nos organismes, dans notre structure
démocratique, c'est-à-dire la Commission des droits de la
personne.
Pourquoi? Parce qu'il y a des questions qu'un gouvernement serait
tenté de soumettre à une consultation populaire et qui
objectivement, comportent des dangers évidents. Par exemple... Et en
fait, ça se réduit au problème des minorités.
Prenons comme exemple les minorités culturelles et linguistiques.
Que ce soit la question de la langue, la question des droits des indiens, par
exemple, est-ce que, par hypothèse, un gouvernement qui voudrait se
débarrasser d'un problème par le biais d'une consultation
populaire, est-ce qu'on pourrait lui laisser faire une consultation sur
l'opportunité de développer la baie James, même si
ça comporte des inconvénients graves pour les Amérindiens,
les Cris, les Inuit?
Par exemple, un référendum dans ce sens serait voué
au mépris le plus complet des droits des minorités- Les
minorités religieuses. Un référendum qui soumettrait
à l'opinion publique l'opportunité de faire...
C'est-à-dire quels sont les droits constitutionnels que l'on doit
reconnaître aux écoles protestantes du Québec? Quel serait
le sort d'un tel référendum? J'ouvre une parenthèse. Ce
n'est pas à ce gouvernement que je m'adresse. Actuellement, j'ai des
députés ministériels devant moi qui sont comme moi,
membres d'une commission parlementaire appelés à
légiférer. Le gouvernement y est représenté par le
ministre, naturellement, mais n'importe quel gouvernement, dans l'avenir,
pourrait se servir de cette loi. L'exemple que je veux souligner, c'est un
exemple tout à fait contemporain. Je ne sais pas si les
députés ont entendu parler du référendum qui a
été tenu en Egypte récemment, il y a à peine
quelques semaines, pour savoir si on devait reconnaître des droits au
Parti communiste, pour savoir si on devait reconnaître des droits
à d'autres minorités. Naturellement, le référendum
a été largement pour l'opinion que le gouvernement voulait
défendre et contre la minorité qui était ce parti. Cela
s'adonne que c'était le Parti communiste, dans ce cas; cela pourrait
être un autre parti minoritaire, je n'en regarde aucun, mais il y en a.
Si on devait
soumettre à l'opinion publique, par voie de
référendum: Est-ce qu'on devrait continuer de reconnaître
le Ralliement créditiste au Québec, malgré la valeur des
députés, et peut-être du seul député qui est
ici, assis à cette commission. Étant donné l'état
des choses, est-ce que cela serait juste de soumettre une telle question
à un référendum?
Dans l'hypothèse où c'est le Parti québécois
qui, une fois le référendum battu, ou plutôt gagné
par l'option fédéraliste, se voit refuser la faveur populaire,
tombe dans les sondages, se retrouve aux prochaines élections avec un
pourcentage de votes minables et dans deux ou trois ans, est un parti marginal;
si un gouvernement, à ce moment, aussi libéral qu'il puisse
être, soumet à l'opinion publique: Est-ce qu'on devrait continuer
de tolérer des partis politiques qui recherchent la séparation du
Québec, par exemple? Réellement, c'est sérieux, parce que
nous sommes, très exceptionnellement, une des seules démocraties
qui, non pas tolèrent, mais acceptent de vivre quotidiennement avec un
parti qui recherche un changement radical de son statut constitutionnel.
Alors, dans l'hypothèse d'une autre situation dans quelques
années, le Parti québécois serait sûrement une des
victimes d'un tel référendum. Est-ce que ce serait acceptable?
Quant à moi, non. Nous légiférons aujourd'hui pour
l'avenir. Je pense qu'il est de notre devoir, nous, députés, de
quelque parti que nous soyons, de faire en sorte qu'il y ait une prudence
inscrite dans la loi. À ce moment, n'importe quel
référendum doit, au départ, recevoir un avis favorable,
préalable, de la Commission des droits de la personne, à savoir
que la question qui est soumise à la population ne violera aucune des
libertés fondamentales des gens, y compris des minorités.
Les minorités socio-économiques, par exemple; si un
gouvernement mal à l'aise devant la question du droit de grève
dans la fonction publique, voulait soumettre cela à un
référendum, à une consultation populaire, on voit
déjà d'avance que la très grande majorité de la
population c'est-à-dire 60 000 personnes plus les travailleurs
dans le secteur parapublic, à peu près 200 000 personnes, avec
leur famille, disons que cela fait 400 000 ou 500 000 personnes,
peut-être 600 000 la grande majorité n'a aucun
intérêt à maintenir un droit de grève. À ce
moment, la Commission des droits de la personne dirait au gouvernement: Non,
vous n'avez pas le droit de soumettre cela, parce que cela serait une
espèce de paravent derrière lequel un gouvernement pourrait se
cacher pour prendre ses responsabilités ou surtout pour ne pas les
prendre.
L'amendement que je propose est justement la précaution que le
ministre de la Justice, d'ailleurs comme ministre responsable de la Charte des
droits et libertés de la personne vis-à-vis de l'Assemblée
nationale, devrait recevoir avec beaucoup d'empressement. Il ne s'agit pas d'un
référendum constitutionnel. Il ne s'agit pas d'une
particularité. Il ne s'agit pas de particulariser la loi. Il ne s'agit
pas d'injecter dans la loi un principe de spécificité, comme
disait un député. Il s'agit simplement d'y injecter une police
d'assurance pour tous les citoyens, parce que nous sommes tous, à un
moment donné, quelques heures par jour, une minorité, qu'on le
veuille ou non. Nous sommes tous une minorité...
M. Bédard: Vous pouvez bien sourire.
M. Lalonde: Non, je ne souris pas. Je vois que le ministre ne
semble pas prendre cela au sérieux.
M. Bédard: Très au sérieux.
M. Lalonde: J'espère qu'il va l'appuyer. On va voir
jusqu'à quel point il prend cela au sérieux, à l'appui
qu'il va donner à cette motion. Je sais que vous, M. le
Président, vous prenez cela au sérieux; vous m'écoutez
avec sérieux.
Le Président (M. Clair): Je n'ai pas le droit de rire.
M. Lalonde: La question de la peine de mort, et là, le
ministre de la Justice encore cela s'adonne qu'on l'a avec nous
cela le concerne, comme ministre de la Justice, il sait très bien... Le
député de Verchères qui a eu affaire dans le milieu
policier, le milieu de la criminalité, sait très bien que si on
soumettait à une consultation populaire la question de la peine de mort,
il y aurait très probablement une majorité en faveur du maintien
de la peine de mort, alors qu'une grande majorité des gens qui se sont
penchés sur le sujet, y compris des criminalistes ou des criminologues,
pensent que ce n'est plus acceptable dans une société
civilisée. Voilà un sujet où la Commission des droits de
la personne dirait: Non, on ne peut pas soumettre cette question à une
consultation populaire.
C'est la raison pour laquelle, je pense que le gouvernement devrait
appuyer cette motion d'amendement qui ne veut que bonifier le projet de loi
pour faire en sorte que tous nos droits, en tant que nous sommes tous
minoritaires un jour ou l'autre, soient protégés.
Le Président (M. Clair): La motion d'amendement, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys sera-t-elle adoptée?
Vouliez-vous prendre la parole?
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président.
M. Grenier: II me semble que ce serait plus logique
qu'après un amendement, qu'il vienne du Parti libéral ou qu'il
vienne d'une autre formation politique, qu'un membre ministériel
intervienne, parce qu'il pourrait arriver que tout à coup on parle tous
pour rien, qu'on soit tous d'accord là-dessus. J'aimerais bien
connaître l'opinion... et je pense bien que, là-dessus, on
pourrait s'attendre que le gouvernement l'appuie. À plus forte raison,
il faudrait entendre la voix du gouvernement tout de suite.
Le Président (M. Clair): J'aimerais savoir si tous les
membres de l'Opposition représentée sont d'accord avec cela,
parce que je pense que
le député de Rouyn-Noranda n'a pas été
d'accord déjà, à un moment donné, où je
n'avais pas respecté l'ordre traditionnel...
M. Samson: M. le Président, l'ordre traditionnel, je pense
qu'on le connaît tous. Dans le cas présent, par consentement, on
pourrait sortir des sentiers battus un peu. Il me semble, en tout cas on
ne veut pas présumer des intentions du gouvernement
d'après ce qui a été dit à la table, qu'il serait
peut-être possible qu'on évite un long débat. Dans ces
conditions, j'ai l'impression qu'on devrait, et on reviendra par la suite
à l'ordre habituel, si nécessaire.
M. Roy: Aucune objection, en ce qui me concerne, à ce
qu'un membre du gouvernement parle immédiatement après que le
proposeur de la motion d'amendement ait intervenu, de façon qu'on
connaisse la position de l'autre côté de la table. En ce qui me
concerne, je ne ferai pas de débat de procédure
là-dessus.
Le Président (M. Clair): Je le considère simplement
pour cette fois, parce que je m'en suis déjà fait faire.
M. Roy: Sans que cela ne soit considéré comme un
précédent.
M. Samson: Un par un.
M. Grenier: M. le Président, si vous permettez, c'est
parce qu'on a déjà une série d'amendements. On sait
d'avance que le gouvernement ne les acceptera pas, d'après les propos
qu'on a eus tout à l'heure. Pardon?
Le Président (M. Clair): Vous êtes chanceux, je ne
les ai pas eus.
M. Grenier: Vous avez entendu la même chose que nous. Une
déclaration quand ce sera une spécificité.
M. Lalonde: C'est compliqué, mais demandez-le au
député de Terrebonne, il sait très bien ce que c'est, un
principe de spécificité.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Jonquière.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président,
inutile de vous dire tout d'abord que je ne parle pas au nom du gouvernement.
Je parle en mon nom personnel, comme député de Jonquière.
Mes premiers mots sont pour vous dire que je ne suis pas surpris du tout qu'une
telle motion soit présentée par le député de
Marguerite-Bourgeoys, pas du tout, puisque ce n'est pas la première fois
que j'ai l'occasion de voir jusqu'à quel point c'est ce
député de Marguerite-Bourgeoys qui fait les sales jobs de
l'Opposition officielle. (21 h 45)
M. Lavoie: M. le Président, j'invoque le
règlement.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Laval, sur une question de règlement.
M. Lavoie: Premièrement, cela n'a aucune pertinence.
M. Vaillancourt (Jonquière): J'y arrivais.
M. Lavoie: Et c'est tellement antiparlementaire de faire des
attaques personnelles contre un collègue qui fait des "sales jobs".
M. Lalonde: M. le Président, le mot "sale" est
antiparlementaire et je demande au député de le retirer.
M. Lavoie: Et c'est votre concept, comme président de
commission parlementaire, et souvent siégeant comme président de
l'Assemblée nationale. C'est comme cela que vous traitez vos
collègues parlementaires et d'institution.
M. Lalonde: Cela lui fait mal.
M. Lavoie: Et faire des attaques personnelles. Je n'ai jamais vu
cela.
M. Lalonde: Des sales "jobs", M. le Président, c'est
antiparlementaire, le mot "sales", et je demande au député de
Jonquière de le retirer.
M. Bédard: Le mot "sales ".
Le Président (M. Clair): Une chose est certaine...
M. Lavoie: Vous allez perdre beaucoup de votre
crédibilité au fauteuil.
M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne préside pas, M.
le député de Laval. S'il vous plaît, à l'ordre!
M. Lavoie: C'est comme hier soir, quand vous applaudissiez...
À l'ordre? Vous n'êtes pas président.
M. Vaillancourt (Jonquière): À l'ordre! À
l'ordre! Respectez mon droit de parole. D'accord.
M. Lalonde: Oh là, là! Il y a une question de
règlement qui a été soulevée.
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Lalonde: Je soulève une question de règlement,
M. le Président. Le mot "sales" à l'égard...
M. Lavoie: Quelle arrogance.
M. Charbonneau: Vous n'avez pas de leçon à donner
sur l'arrogance, vous, par exemple. S'il y a
quelqu'un d'arrogant ici, c'est bien le député de
Laval.
M. Lalonde: ... à l'égard du travail...
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Lalonde: M. le Président, j'ai soulevé une
question de règlement.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, si vous me laissez le temps de dire quelques mots dans le
but de permettre à chacun de reprendre son sang-froid, après
cela, je suis sûr qu'on va pouvoir continuer plus facilement.
Vous soulevez une question de règlement? M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Question de règlement. Je n'ai pas le
règlement avec moi, mais vous savez très bien qu'il existe dans
notre règlement une disposition, je pense que c'est l'article 99, qui
interdit à un parlementaire d'utiliser des termes qui ne sont pas
parlementaires.
M. le Président, je ne m'étendrai pas sur la nature de
l'argument.
M. Vaillancourt (Jonquière): Je retire mes propos. Mais je
ne suis pas surpris quand même, M. le Président, que ce soit le
député de Marguerite-Bourgeoys qui ait présenté une
telle motion. Pourquoi? Je pense qu'il était membre de ce gouvernement
qui a formé cette Commission des droits de la personne. Et je
considère la motion du député de Marguerite-Bourgeoys
comme une insulte, non seulement à la Commission des droits de la
personne, mais également à ses membres. La commission est
liée par une loi, est soumise à une loi et doit appliquer une
loi. Je référerais les membres de la commission à
l'article 67 de la charte.
Au paragraphe 1, on dit ceci: "La commission doit notamment recevoir les
suggestions, recommandations et demandes qui lui sont faites, touchant les
droits et libertés de la personne, les étudier et faire au
gouvernement les recommandations appropriées".
Donc, M. le Président, à la lecture même de
l'article 67, paragraphe 1) "tout citoyen du Québec, toute personne,
domiciliée et résidant au Québec, peut, s'il sent que ses
droits et libertés de la personne sont possiblement brimés, faire
des suggestions, porter une plainte, porter le tout à la connaissance de
la Commission des droits de la personne, et celle-ci, à ce moment, peut
faire des recommandations au gouvernement".
Je pense que, premièrement, le seul fait de présenter une
telle motion de la part d'un ancien ministre qui a lui-même
procédé à la formation de cette Commission des droits de
la personne est une insulte aux membres actuels et anciens de cette commission
et une insulte également à tous les membres, non pas du
gouvernement, mais de l'Assemblée nationale du Québec.
Je pense que le député de Marguerite-Bourgeoys n'a
aucunement réfléchi avant de présenter une telle motion,
car j'estime et j'ose espérer que mes confrères pensent
comme moi que la Commission des droits de la personne, qui est l'un des
organismes fondamentaux au Québec, n'a pas besoin d'une obligation
légale pour respecter la loi qui la régit. Je pense que la
Commission des droits de la personne nous a prouvé, au cours des
derniers mois et au cours des dernières années, qu'elle
était en mesure, sans aucune obligation légale autre que celle
des articles de la loi qui la régit, de remplir son mandat et de voir
à la protection des droits et libertés de la personne des
citoyens du Québec.
Je pense, comme premier argument, que le seul fait de présenter
cette motion est déjà pour la commission et les membres de la
commission, une insulte, puisqu'elle laisse présumer que l'Opposition
officielle, ou du moins le député de Marguerite-Bourgeoys, estime
que, sans aucune obligation légale, la commission n'est pas en mesure de
remplir son devoir et son rôle, tels que définis par la loi.
M. le Président, cette motion, d'autre part, est d'autant plus
surprenante qu'elle vient justement d'un membre qui, heureusement,
n'était pas là à ce moment-là, qui a bafoué
les libertés les plus fondamentales des Québécois en
1970.
M. Lavoie: La crise d'octobre! M. Lalonde: La crise
d'octobre!
M. Lavoie: La pertinence!
M. Vaillancourt (Jonquière): Je me dois de le dire, M. le
Président, et je pense, que c'est pertinent au débat...
M. Lalonde: La pertinence!
M. Vaillancourt (Jonquière): ... puisque je pense
précisément que les droits et libertés de la personne, en
1970, ont été bafoués. C'est justement le Parti
libéral...
M. Lalonde: On n'était pas là ni toi ni moi.
M. Vaillancourt (Jonquière): ... qui formait alors ce
gouvernement duquel émane le député de
Marguerite-Bourgeoys qui a bafoué, alors même que la commission
n'existait pas, les droits et libertés de la personne.
M. Lavoie: Une question de règlement. On n'est pas pour
faire le procès de tous les gouvernements qui ont existé depuis
la Confédération quand même.
M. Charbonneau: Mais on fait le vôtre, par exemple.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Laval sur une question de règlement. Je crois que cela va à
l'encontre du règlement, ce n'est pas pertinent au débat.
M. Lavoie: Premièrement, le député de
Marguerite-Bourgeoys n'était pas là et je n'étais pas du
gouvernement non plus. Si on veut faire des attaques ad hominem, ce n'est pas
la place.
M. Charbonneau: Vous l'avez endossé.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Jonquière, je pense que le corridor qu'on devrait respecter actuellement
en vertu de la motion d'amendement proposée par le député
de Marguerite-Bourgeoys ne permet pas, je pense, de revenir, en tout cas, pour
y revenir, à des événements qui se sont
déroulés. Si vous voulez parler de ces événements,
je pense que vous allez avoir à me convaincre qu'ils se situent dans le
cadre de la pertinence du débat sur la motion d'amendement.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président,
j'admets...
M. Lalonde: À ce moment-là, M. le Président,
on pourrait vous démontrer que les droits fondamentaux de M. Laporte ont
été brimés aussi.
M. Vaillancourt (Jonquière): ... avec vous que
c'était peut-être non pertinent au débat...
M. Charbonneau: On était obligé de...
M. Vaillancourt (Jonquière): ... mais je pense que je me
devais de le dire, parce que nous devons regarder cet argument pour voir la
bonne foi ou la mauvaise foi de l'Opposition officielle dans cette proposition
d'amendement. Je pense que c'est là l'un des points qu'il faut examiner
pour voir cette bonne foi ou cette mauvaise foi de celui ou du parti politique
qui propose cet amendement. J'ai à ma droite un confrère, un
collègue, dont les libertés fondamentales ont été
bafouées mais qui, grâce à la volonté populaire et
grâce à d'autres...
M. Lavoie: La pertinence du débat. On revient sur votre
décision, M. le Président.
M. Vaillancourt (Jonquière): ... a pu recouvrer sa
liberté.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Jonquière, je vous prie de revenir à la pertinence du
débat.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, en
date du 5 juin 1978, la Commission des droits de la personne envoyait son avis
au ministre de la Justice, il est daté du 5 juin, et, au deuxième
paragraphe c'est signé par M. René Hurtubise, le
président de la commission celui-ci dit ceci: Dois-je
préciser que le titre "Quelques commentaires " indique
bien que la commission entend s'en tenir à sa responsabilité qui
consiste à étudier ce projet de loi à la lumière
d'une grille d'analyse basée sur les droits et libertés
mentionnés dans la Charte, et ne vise d'aucune façon à se
substituer au législateur, au gouvernement ni à un membre de
l'Opposition en se prononçant sur l'opportunité c'est la
motion, M. le Président, c'est en plein la motion du
député de Marguerite-Bourgeoys ou la sagesse d'un projet
de loi spécifique ". Le député de Marguerite-Bourgeoys a
sa réponse même de la part du président de la Commission
des droits de la personne, qui répond à cet amendement comme s'il
avait anticipé l'amendement du député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. le Président, le Parti libéral, à cette
commission comme à d'autres, se retranche constamment derrière la
Commission des droits de la personne pour cacher son "filibuster".
J'estime, M. le Président, comme le dit M. Hurtubise dans sa
lettre...
M. Lalonde: II perd les pédales.
M. Vaillancourt (Jonquière): ... que cette Commission des
droits de le personne que le gouvernement libéral a créée
en 1975, je pense, est en mesure, sans obligation légale, de voir
à remplir les devoirs qui lui sont confiés par une loi que vous
avez vous-même adoptée. Aujourd'hui, l'Opposition officielle
voudrait que l'actuel gouvernement impose une deuxième obligation
légale à la commission. Non seulement la commission serait-elle
tenue de respecter la propre loi qui la régit, mais, encore, non
satisfaits, probablement, ou non satisfaits des garanties qu'offre la
Commission des droits de la personne, ces membres de l'Opposition officielle...
J'espère, M. le Président, que l'Union Nationale et que les
autres partis politiques ne cautionneront pas cette motion d'amendement de
l'Opposition officielle.
Je suis heureux que, par un concours de circonstances, le
député de Mégantic-Compton m'ait donné l'occasion
de parler. J'espère que les arguments que j'ai employés suffiront
à le convaincre que la Commission des droits de la personne est en
mesure, avec la loi qui la régit actuellement, d'assurer la sauvegarde
des droits et libertés de la personne, des citoyens
québécois.
Il est important de redire aujourd'hui, publiquement, je pense, que tout
citoyen québécois francophone, italien, irlandais peut, se
servant de l'article 67, paragraphe 1, porter une plainte comme citoyen
à part entière du Québec, alléguant que ses droits
et libertés ont pu être violés ou brimés. À
ce moment-là, il y a un processus d'enquête qui se
déclenche et la commission, effectivement, si les droits ont
été brimés, fera rapport, tout d'abord à l'individu
et fera des recommandations au gouvernement.
Il est faux de prétendre que les actions de la Commision des
droits de la personne sont limitées aux lois antérieures à
la charte. D'accord, elle examine les projets de loi antérieurs à
la charte, mais la Commission des droits de la personne, en vertu du paragraphe
1 de l'article 67, a le devoir de recevoir toute plainte et toute suggestion
qui lui sont faites dans ce sens. Non seulement cette motion est-elle une
insulte envers la commission, mais elle nous démontre encore une fois,
par cet
amendement, que l'Opposition officielle, contrairement d'ailleurs
à la commission, voudrait enlever toute initiative gouvernementale au
gouvernement.
Un gouvernement est élu pour gouverner. Nous avons eu d'autres
amendements qui visaient à enlever ce pouvoir de décision au
gouvernement, et nous assistons encore actuellement, à une motion
d'amendement qui laisse présumer non seulement que la commission n'est
pas capable de remplir son rôle, mais que l'Assemblée nationale,
pas le gouvernement, se compose d'un paquet de personnes qui ne sont pas
capables de respecter les droits et libertés des citoyens.
M. Lalonde: C'est vrai.
M. Vaillancourt (Jonquière): II ne faut pas oublier, M. le
Président, que c'est l'Assemblée nationale qui va adopter la
question.
M. Godin: M. le Président, je voudrais qu'ils apportent
des accusations précises ou qu'ils arrêtent de nous tirer de la
merde comme ils le font depuis un an et demi.
M. Lalonde: Vous perdez les pédales.
M. Godin: M. le député de Laval, est-ce qu'on va
endurer cela longtemps?
M. Lavoie: Un peu de calme.
M. Godin: Un peu de calme... on se fait traiter de racistes
depuis un an et demi, on n'a jamais porté une seule plainte.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Lavoie: C'est vous qui le dites.
M. Godin: S'il y a du sérieux, M. le député
de Laval, dans ce qu'il dit, qu'il porte plainte et on sera
condamnés?
M. Lalonde: Qu'est-ce que vous avez contre la Commission des
droits de la personne, qu'est-ce que vous avez contre la charte?
M. Lavoie: Qui vous a traité de racistes?
M. Godin: S'il dit que c'est vrai qu'on viole les droits de la
personne, qu'il porte plainte. Portez plainte.
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Lavoie: C'est vrai, la loi 101 en a été un
cas.
M. Charbonneau: La crise d'octobre...
M. Godin: Portez plainte, si c'est vrai; mettez le
mécanisme en marche.
M. Lavoie: La guerre des...
M. Charbonneau: La crise d'octobre, ce n'est pas en 1910;
c'était en 1970. Il y a quelqu'un à cette assemblée, ici,
à cette table, qui était là et qui a été
emprisonné...
M. Godin: Laisse faire, je me défendrai moi-même. On
n'endurera pas cela, M. le Président.
M. Lalonde: On l'a entendu à 4 h, hier matin,
celle-là.
Le Président (M. Clair): À l'ordre! Messieurs, j'ai
le pouvoir de suspendre les travaux de cette commission au cas de
désordre.
M. Lalonde: Question de directive, M. le Président. Est-ce
que vous avez aussi le pouvoir de leur faire prendre un peu de sommeil?
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Godin: Ce n'est pas une question de sommeil, M. le
Président, c'est une question que, personnellement, je n'endurerai pas
que qui que ce soit ici, dise qu'on viole les droits des personnes, ici.
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Godin: Ou alors, qu'il le prouve, qu'il mette son siège
au jeu et qu'il fasse des affirmations sérieuses devant la commission
qui existe.
M. Lalonde: Pas au jeu, en jeu.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît, messieurs!
M. Godin: Faites des farces tant que vous voudrez. Vous
m'écoeurez profondément, vous êtes dégueulasses.
M. Lalonde: Vous êtes ridicule.
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
messieurs...
M. Lalonde: Vous prenez des précautions que je veux mettre
dans la loi comme des accusations personnelles. C'est quasiment du masochisme
de votre part.
M. Godin: Votre comportement depuis un an et demi, par
exemple...
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Lalonde: Cela vous fait mal. Vous voulez gouverner par
décret! Ah Seigneur!
M. Lavoie: Qu'est-ce que cela donne, l'Opposition? C'est de trop,
l'Opposition?
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît, M. le député de Laval! Messieurs, je pense que si on
répète des incidents de ce genre de façon
répétée, même si c'est utilisé deux fois,
à peu de délai, on risque d'avoir de la difficulté
à donner à nos travaux toute la dignité qu'ils
méritent; on risque d'avoir de la difficulté à prendre en
considération les arguments des uns et des autres, on risque de violer
le règlement et, finalement, c'est l'instrument qu'on a pour pouvoir
mener les travaux les plus productifs possible. (22 heures)
Je voudrais vous fnviter à plus de respect à
l'égard du droit de parole des uns et des autres et également,
profiter de l'occasion pour rappeler à chacun des députés
l'article qui indique qu'aussi longtemps qu'un député a la
parole, aucun député ne doit l'interrompre, si ce n'est pour lui
demander la permission de poser une question ou de donner des explications.
Ce que je dis s'adresse à tous les membres de cette commission.
J'aimerais que tout le monde y porte attention. Je pense que même
physiquement, c'est très désagréable pour un
député qui a la parole d'entendre ses collègues qui,
même s'ils n'ont pas le droit de parole, disent toute sorte de choses ou
lancent des boutades ou des accusations qui ne sont pas reproduites au journal
des Débats de toute façon, mais qui viennent troubler l'ordre de
nos travaux.
M. le député de Jonquière, vous avez la parole et
vous avez encore dix minutes.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, pour
en revenir aux propos du député de Mercier, je dois vous dire que
je suis fier, comme membre de l'Assemblée nationale et comme membre,
surtout, du gouvernement, que j'ai été fier, en date du mois de
novembre 1977 de lire le premier rapport que la Commission des droits de la
personne envoyait à la commission parlementaire, suite à une
demande faite par la commission, lors de l'étude du livre blanc, que
j'étais fier le 11 novembre 1977.
Je dois dire que ma fierté était encore plus grande, hier
en date du 6 juin 1978, lorsque j'ai pris connaissance, je suis fier de le
dire, face à de pareilles motions et à de pareils arguments,
lorsque j'ai pris connaissance, cette fois-ci, du deuxième rapport de la
commission fait non pas sur un projet de loi, non pas sur un livre blanc, cette
fois, mais fait sur un projet de loi adopté, en principe, à
l'Assemblée nationale en deuxième lecture.
Je dois vous dire que c'est une fierté qui est bien naturelle,
mais elle est encore plus grande lorsqu'on se fait servir, pendant un an et
demi, par l'Opposition officielle, des accusations constantes d'atteintes aux
libertés et droits de la personne. Je serais heureux que le
député de Mont-Royal soit ici pour entendre la fierté que
j'ai à dire et à lire les rapports de la Commission des droits de
la personne.
Je suis également fier de lire et de dire publiquement que
l'éditorial du chef Ryan, Claude Ryan, du 29 décembre 1977,
confirme également, en tous points, les deux premiers rapports de la
Commission des droits de la personne. Non seulement cette motion d'amendement
est-elle une insulte pour le gouvernement et les membres de l'Assemblée
nationale, mais elle vient, en plus, contredire les propos mêmes et les
rapports faits par la Commission des droits de la personne en date du mois de
novembre et en date du mois de juin 1978; elle contredit même un
éditorial d'un ex-journaliste qui, à ce moment-là, ne se
doutait probablement pas qu'il serait, à ce moment-ci, chef du Parti
libéral.
Je me demande encore pourquoi le député de
Marguerite-Bourgeoys ose présenter un tel amendement et je me demande
s'il n'a pas lu, ou bien les deux rapports de la Commission des droits de la
personne, ou bien du moins, l'éditorial de l'ex-éditorialiste du
journal Le Devoir.
M. Lalonde: Vous pouvez répondre.
M. Vaillancourt (Jonquière): J'ai entendu M. le
Président, au début de cette commission parlementaire, et le
député de Mégantic-Compton sait que j'ai beaucoup
d'admiration pour la façon, non seulement à cette commission
parlementaire, mais à d'autres, à l'Assemblée nationale,
et à d'autres commissions parlementaires, dont il travaille, lui et son
parti. J'ose espérer, non pas pour des questions de partisanerie
politique, mais tout simplement pour des raisons de ne pas cautionner le
"filibuster " et les tactiques subtilement désapprobatrices de
l'Opposition officielle envers la Commission des droits de la personne et
envers tous les membres de l'Assemblée nationale, que l'Union Nationale
ne viendra pas cautionner cet amendement qui est présenté par le
député de Beauce-Sud. Je dois dire que...
M. Roy:.Ce n'est pas le député de Beauce-Sud qui a
présenté l'amendement.
M. Vaillancourt (Jonquière): ... par le
député de Marguerite-Bourgeoys. J'ai dit le député
de Beauce-Sud parce que j'allais dire que les remarques que je viens d'adresser
au député de Mégantic-Compton, j'allais également
les faire miennes à l'endroit du député de Beauce-Sud.
J'ose espérer que le député de Beauce-Sud ne se fera pas
la caution volontaire ou non de cet amendement libéral qui, en soi, est
une insulte non seulement aux membres de l'Assemblée nationale, mais
à la commission que cet ex-gouvernement qui forme aujourd'hui
l'Opposition officielle a lui-même créée.
Je suis sûr que le député de Mégantic-Compton
et le député de Beauce-Sud ont lu les deux rapports de la
Commission des droits de la personne du mois de novembre 1977 et du mois de
mars 1978. Je suis sûr qu'ils les ont lus d'une façon attentive,
non partisane, parce que je ne pense pas qu'on doive faire de la partisanerie
politique sur les droits et libertés de la personne. Je n'ai pas
l'habitude, non plus, en commission parlementaire, d'intervenir
régulièrement, et je vous prierais, je demanderais aux membres
de
cette commission parlementaire de bien vouloir respecter le
député de Jonquière qui parle comme député
membre de cette commission parlementaire, élu au même titre que
les autres, et qui n'agit pas, à ce moment-ci, comme président
d'une commission parlementaire.
Je sais que des députés font la part des choses et ne me
le reprocheront pas; mais j'aimerais que tous les membres de cette
Assemblée nationale ne reprochent pas à quelque
député que ce soit, qui est président à l'occasion
d'une commission parlementaire, d'intervenir lorsqu'il a des convictions dans
une autre commission parlementaire, sinon ce serait renier le mandat que les
électeurs de Jonquière m'ont donné le 15 novembre 1976.
Ils ne m'ont pas élu comme président de commissions
parlementaires, mais comme député de Jonquière pour dire
ce que j'avais à dire à cette commission parlementaire. J'ose
espérer que tous mes collègues respecteront cet état de
fait qui existe et qui doit continuer à exister. M. le Président,
ce sont mes remarques.
M. Lalonde: Nous allons vous donner le respect que vous
méritez.
M. Vaillancourt (Jonquière): Vous êtes aussi mesquin
que vous êtes petit.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: Bien brièvement, également, j'aimerais
vous faire savoir que je lis attentivement l'amendement qui est apporté.
Je ne voudrais pas, non plus, qu'on pense que ces députés, autour
de la table, sont remplacés par la Commission des droits de la personne.
Les suggestions, c'est-à-dire le texte qu'on nous a remis aujourd'hui et
qui vient de la Commission des droits de la personne est un éclairage,
pour moi, qui est important, qui n'est peut-être pas absolument
nécessaire, mais qu'on peut avoir et qui est, à mon sens, assez
judicieux.
Je ne prétends pas que c'est une insulte à l'égard
des députés que d'avoir cet éclairage qui vient de la
Commission des droits de la personne. Cela pourrait l'être si, avec ce
document, cela faisait un courant tel que cela devait nous influencer au point
de faire renverser les décisions du gouvernement ou faire renverser les
décisions pour lesquelles la Commission aimerait cautionner. Je ne
voudrais pas, encore une fois, que ce conseil devienne l'Assemblée
nationale, puisque ce ne sont pas des élus, ce sont des personnes
nommées.
J'ai cependant des réserves, puisque l'idée d'un conseil
du référendum qui a été suggéré par
l'Union Nationale a été acceptée, en principe, par le
gouvernement, mais actuellement, j'ai des amendements qui vont être
apportés à cet article de la loi. Ne sachant pas si ces
amendements seront acceptés, je voudrais quand même qu'on ait
entre les deux une espèce de moyen tampon qui nous permette d'avoir, non
pas des directives qu'on le sache bien mais qu'un
éclairage nous soit fourni. Bien honnêtement, ce qui est dit d'un
côté et de l'autre de la table, il y a des arguments qui sont
valables, je pense, et je ne veux pas qu'on me prenne pour la caution de cette
table je pense bien que cela ne passe pas dans l'idée de personne
mais il faut comprendre qu'il y a des débats qui pourraient
conduire à des référendums. Si on se donne une loi des
référendums, c'est de toute évidence qu'on a l'intention
de s'en servir et s'il arrivait qu'on se donne un référendum sur
la peine de mort, j'aimerais, à ce moment-là, que des personnes
qui s'appellent le Conseil du référendum puissent donner leur
avis, des personnes en qui on pourra avoir confiance, si tel est le cas. Si on
avait passé ce chapitre avant, bien honnêtement, j'aurais pu me
passer de cet amendement apporté. Comme cela ne se présentera que
plus tard, je verrai, avec les arguments qui nous seront donnés, quelle
sera ma position; mais bien honnêtement, je considère que ce qui a
été amené par le député de Jonquière
est valable.
D'ailleurs, je partage depuis tout le début je l'ai
signalé avant que cet amendement soit déposé sur la table
que le document qui nous a été remis ce matin n'est pas la
Bible et il y a trop longtemps que je combats, il y a trop longtemps que je dis
qu'un député est un législateur, un administrateur et
qu'il représente une portion de province, je pense qu'on ne doit pas
laisser aller nos droits à des personnes nommées par le
gouvernement. À ce titre, si on devait, encore une fois je ne
veux pas me répéter donner une importance telle que la
Commission des droits de la personne prévale sur les droits des
personnes élues, je m'objecterai à ce qu'on y donne tant de
crédibilité.
Bien sûr que ce sont des gens qui sont au-dessus des
législateurs et qui sont là pour protéger les gens qui
font de la politique parfois, et qui pourraient politiser les débats,
peu importe le gouvernement qui est en place ou l'Opposition qui est en place,
mais encore là, je pense qu'on a toujours un moyen, la population a un
moyen de se venger d'un gouvernement qui outrepasserait des droits; c'est de
s'en défaire quand le temps vient.
À partir de là, j'aimerais mieux attendre que les
débats se continuent et honnêtement, si j'avais à me
prononcer sur cela, je voudrais amener mes amendements au Conseil du
référendum, et j'hésiterai à voter en faveur de
l'amendement.
M. Charbonneau: M. le Président, est-ce que le
député de Mégantic-Compton me permettrait une
question?
M. Grenier: Oui.
M. Charbonneau: C'est simplement pour lui demander s'il est
d'accord avec le fait que non seulement la population peut répudier un
gouvernement, mais qu'en fonction comme le député de
Jonquière le signalait de la loi et de la charte, rien
n'empêche des gens, dans la période
référendaire, de demander un avis à la commission,
si jamais ces gens jugeaient que la question posée brime leurs droits ou
leurs libertés. Est-ce que vous êtes d'accord avec le fait que
c'est un élément additionnel?
M. Grenier: D'accord, mais il faudrait quand même, à
ce moment-là, qu'on sache que ce droit peut être demandé;
il peut être demandé via un parti d'opposition, également,
qui comprend quand même des personnes.
M. Charbonneau: Oui, je pense que...
M. Grenier: II faudrait être assuré de l'avoir en
main si le conseil du référendum, quand on en sera rendu à
la formation ou aux responsabilités du conseil du
référendum, ne répond pas à nos besoins, il
faudrait quand même s'assurer que ces demandes peuvent être faites.
Encore là, ce n'est pas une Bible.
M. Charbonneau: D'accord, merci.
M. Lalonde: M. le Président, une question de
règlement. Du discours du député de Jonquière qui a
été repris par la question du député de
Verchères, il m'apparaît que mes propos n'ont pas
été cités correctement. Je pense qu'il y a un
règlement qui me permet de rectifier des faits.
M. Bédard: C'est sur votre temps... Le Président
(M. Clair): M. le député... M. Lalonde: En vertu de
l'article 96.
M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne les ai pas
cités, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
Le Président (M. Clair): Est-ce que vous soulevez une
question de règlement, ou si vous...
M. Lalonde: De règlement.
Le Président (M. Clair): En vertu de l'article 96. En
fait, vous voulez exercer votre droit prévu à l'article 96; vous
ne soulevez pas une question de règlement.
M. Lalonde: C'est le règlement 96 que je
soulève.
Le Président (M. Clair): Vous invoquez l'article 96 pour
invoquer un droit de parole.
M. Lalonde: Oui.
M. Charbonneau: M. le Président, une question de
règlement.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Jonquière, sur une question de règlement.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président,
l'article 96 dit que le député qui veut se servir de cet article
et qui entend rectifier les faits doit le faire à la fin de
l'intervention du député qui les provoque. Or, le
député de Mégantic-Compton est intervenu après moi,
de sorte que l'article 96 ne peut s'appliquer dans ce cas.
M. Lalonde: C'est l'intervention du député de
Verchères, à ce moment-là, M. le Président.
M. Charbonneau: Je m'excuse, c'est une question que je posais au
député de Mégantic-Compton.
M. Lalonde: Cela ne fait rien, c'est une intervention.
M. Charbonneau: Écoutez...
M. Lalonde: Que ce soit une question ou une intervention, est-ce
qu'on va s'attacher à ce formalisme à cette commission?
M. Charbonneau: C'est vous qui nous dites cela?
M. Lalonde: Dans mon discours, j'ai bien cité ma motion au
complet et ma motion au complet, dans le deuxième paragraphe, dit bien
qu'il s'agit d'un avis de la commission, qu'aucun
référendum...
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je
demande que... directive, M. le Président.
Le Président (M. Clair): Sur une demande de directive, M.
le député de Jonquière.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, n'y
aurait-il pas lieu, lorsqu'un député invoque une question de
règlement comme je l'ai fait, suite à l'article 96, que vous
donniez une décision à savoir si le député de
Marguerite-Bourgeoys peut, à la suite des propos que j'ai tenus,
malgré que le député de Mégantic-Compton eut fait
une intervention entre les deux, puisse venir rectifier des propos que j'ai
tenus lors de mon intervention.
J'aimerais avoir une directive et savoir si un député peut
s'attendre à recevoir une décision sur une telle question de
règlement. (22 h 15)
Le Président (M. Clair): Sur la question de
règlement, je pense que, même si cela a été
difficile de déterminer pour le président, le
député de Marguerite-Bourgeoys a néanmoins indiqué
que la question de règlement qui est soulevée en vertu de
l'article 96 était suite à des paroles prononcées par le
dernier intervenant, soit le député de...
M. Charbonneau: M. le Président, je n'ai pas du tout
cité le député de Marguerite-Bourgeoys.
Le Président (M. Clair): Dans la formulation...
M. Lavoie: Vous allez l'entendre.
M. Charbonneau: J'ai posé une question au
député de Mégantic-Compton.
Le Président (M. Clair): À l'ordre! M. le
député de Verchères, vous reconnaîtrez
sûrement, quand même, que vous avez pris la parole et que, dans
votre question, il y avait un contenu. C'est sur ce contenu que le
député de Marguerite-Bourgeoys entend exercer son droit
prévu à l'article 96. Cependant, j'aimerais indiquer au
député de Marguerite-Bourgeoys que les explications qu'il entend
donner doivent être brèves, ne doivent apporter aucun
élément nouveau dans la discussion et ne peuvent engendrer un
débat. De plus, j'aimerais rappeler au député de
Marguerite-Bourgeoys que tous les membres de la commission ayant
déjà en main le contenu de son amendement intégral ne
pourraient donc y revenir puisque, à ce moment-là, je le
considère comme étant une partie de son droit de parole sur la
motion d'amendement. À ce moment-là, il ne lui resterait que
trois minutes et je devrai le compter dans ce sens.
Je veux bien vous permettre d'exercer votre droit prévu à
l'article 96, dans le cadre de ce corridor.
M. Lalonde: M. le Président, la question du
député de Verchères, et même les propos du
député de Mégantic-Compton mais par le biais seulement,
indirectement, référaient au dernier paragraphe, soit le
paragraphe e) de l'article 67 de la Charte qui permet à la Commission
des droits de la personne de faire des recommandations alors que mon
amendement, qui faisait partie de mon discours, dit bien qu'aucun
référendum ne peut être tenu sans que le gouvernement n'ait
obtenu, au préalable, et qu'il n'ait déposé à
l'Assemblée nationale un avis de la Commission des droits de la
personne. C'est tout à fait différent, M. le
Président.
Le Président (M. Clair): Alors, les explications que vous
vouliez donner le sont.
M. Charbonneau: Cela ne change rien.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Rouyn-Noranda.
M. Samson: M. le Président, compte tenu du fait que
l'amendement qui est déposé est quand même un peu de style
technique et que les gens qui voudront suivre, par le biais du journal des
Débats, devront pouvoir se retrouver dans ces amendements, au
début de mes remarques, je fais d'abord lecture de l'amendement avant
d'expliquer ce que j'en pense. Il est dit à l'amendement: "Ajouter les
alinéas suivants à l'article 6: Aucun référendum
prévu au premier alinéa ne peut être tenu sans que le
gouvernement n'ait obtenu, au préalable, et qu'il n'ait
déposé à l'Assemblée nationale un avis de la
Commission des droits de la personne constituée en vertu de l'article 57
de la Charte des droits et libertés de la personne, 1975, chapitre
VI.
L'avis prévu au précédent alinéa porte
exclusivement sur l'opportunité de soumettre une question ou un projet
de loi à une consultation populaire, en regard des conséquences
qu'une telle consultation populaire peut avoir sur les droits et
libertés de la personne ou d'une certaine catégorie de
personnes".
M. le Président, je souligne que je n'ai vu là aucune
espèce d'atteinte; je n'ai pas eu l'amendement avant le gouvernement, ni
avant les autres, mais à sa face même cet amendement ne constitue,
à mon sens, aucune espèce d'atteinte aux droits des
parlementaires. Ce qui est dit, je pense qu'il faut le comprendre tel que
rédigé et expliqué aussi, il est dit que non pas la
commission aurait une obligation... en vertu de cet amendement; cet amendement
n'oblige en rien la commission. Cet amendement fait une obligation au
gouvernement de requérir, avant la tenue d'un référendum,
au préalable, un avis de la commission et de le déposer.
L'amendement, dans sa deuxième partie, précise que cet avis
porterait exclusivement sur l'opportunité de soumettre une question ou
un projet de loi à une consultation populaire, en regard et
là c'est important, M. le Président, c'est surtout là que
nous devons considérer l'amendement à son mérite
des conséquences qu'une telle consultation populaire peut avoir ou
pourrait avoir sur les droits et libertés de la personne ou d'une
certaine catégorie de personnes.
Je vous avoue que, dès que l'amendement a été
adopté, j'ai eu l'impression nette que le gouvernement l'accepterait et
j'ai été fort surpris de voir cette fin de non-recevoir de la
part des représentants ministériels. Ce n'est pas un amendement
qui vient changer la loi; ce n'est pas un amendement qui fait que la loi-cadre
devient une loi spéciale, donc, ce n'est pas un amendement qui vient
à l'encontre des avertissements ou des informations que nous a
donnés le ministre de la Justice un peu plus tôt, à savoir
qu'il ne voulait accepter aucun amendement qui spécifierait...
M. Bédard: Qui fasse une loi spéciale d'une
loi-cadre.
M. Samson: ... dans une loi-cadre, et qui en ferait, en quelque
sorte, une loi spéciale, partiellement. Même partiellement, le
ministre de la Justice a dit qu'il n'en voulait pas. À mon sens, le
présent amendement ne vient pas changer la portée de la
loi-cadre; il s'agit et il faut bien se comprendre cet amendement
ne fait pas obligation à la commission de rédiger quelque chose
pour le gouvernement et cet amendement ne demande surtout pas de directives. Si
on lit cela, autant que possible en sortant un peu des opinions politiques,
propres à chacun d'entre nous il faut bien reconnaître que
chacun a droit à ses opinions, il n'est pas question de faire des
reproches à qui que ce soit, on est ici parce qu'on a eu des opinions
politiques et on va y demeurer si on
continue à en avoir au-dessus de toute partisa-nerie
politique, il me semble, j'ai été heureux, aussi fier que le
député de Jonquière l'a dit tantôt, de recevoir
l'avis de la Commission des droits de la personne.
J'ai appris, puisque cela vient de gens qui sont dans le milieu, qui
sont des experts en la matière et qui ont du temps à consacrer
à cela plus que nous peut-être comme parlementaires, des choses
qui peuvent apporter un certain éclairage et, surtout, favoriser un
assouplissement de la loi qui servirait à la bonifier. Je remarque, par
exemple, dans ces commentaires que nous ont faits les membres de la Commission
des droits de la personne, que sur le droit de l'initiative, il est dit: "Selon
ce qui avait été annoncé dans le livre blanc, le droit
d'initiative de tout référendum appartient à l'action
concertée de l'exécutif et du législatif,
l'Assemblée nationale ayant un rôle central à jouer dans le
processus référendaire. Le projet de loi no 92 vient
préciser, aux articles 6, 7, 8 et 9, la répartition des pouvoirs
à cet effet entre l'exécutif et le législatif. À
notre avis je souligne cela le rôle de l'Assemblée
nationale dans la décision de tenir une consultation populaire, tel que
défini dans le projet de loi, est beaucoup plus limité que ne
l'annonçait le livre blanc".
Voyez comme cela peut être intéressant de demander un avis;
on a cela noir sur blanc, le fait qu'il y a eu dans le processus, depuis le
livre blanc, en quelque sorte, un recul par rapport aux propositions initiales.
C'est un avis qui nous est donné et, bien sûr...
M. Bédard: M. Ryan est de l'avis contraire.
M. Samson: Écoutez, je ne suis pas là pour
défendre M. Ryan, je pense que le ministre de la Justice va bien
comprendre cela. Je ne le cite pas abondamment régulièrement,
donc on ne pourra pas me mettre en contradiction avec des citations de M. Ryan
que je fais, pas plus qu'on ne me mettra en contradiction avec d'autres sortes
de citations d'autres éditorialistes.
M. le Président, je pense et je le dis de façon à
n'attaquer personne en particulier, je voudrais qu'on comprenne que, dans une
situation qui pourrait parce que la loi-cadre, le ministre l'a dit
plusieurs fois, cela peut amener plusieurs référendums sous le
présent gouvernement et cela pourra amener plusieurs
référendums sous la juridiction d'autres gouvernements. Si on est
d'accord avec le principe selon lequel cela peut amener beaucoup de
référendums, d'un autre côté, cela nous chatouille
un peu les oreilles de se faire dire, comme on se l'est fait dire quelquefois
aujourd'hui: On est là pour gouverner et, quand même, on va
bousculer un peu. Ce n'est pas tout à fait... Il manque de la graisse
dans l'engrenage, il faudrait faire son lit. Si vous êtes là pour
gouverner, à ce moment-là, arrêtons de travailler sur une
loi de référendum...
M. Vaillancourt (Jonquière): C'est dans le respect des
lois.
M. Samson:... et gouvernons. Mais si on croit qu'il est valable
d'avoir recours au référendum pour des matières pour
lesquelles il est bon de consulter la population, bien, il faut concilier les
deux formes. En conciliant les deux formes, je dis que l'amendement qui est
présenté m'apparaît comme une mesure de prudence. Ce n'est
pas une mesure coercitive à l'endroit du gouvernement, en ce sens que si
on oblige le gouvernement à demander un avis, personne ne peut obliger
la commission à donner cet avis, s'il advenait que la commission
décide, pour une raison ou pour une autre, de dire: Sur ce sujet, on n'a
pas d'avis à donner. Avec le présent amendement, on ne pourrait
pas l'obliger à donner un avis.
D'un autre côté, une fois l'avis émis, advenant que
cet amendement serait accepté, advenant qu'avant un
référendum le gouvernement demande un avis et qu'il
reçoive l'avis, il n'y a rien, dans le présent texte dans
ce que j'ai devant moi qui oblige les parlementaires à suivre
l'avis à la lettre, d'aucune façon. C'est un avis qui peut
être utile. Dans l'ensemble des exemples qu'on pourrait donner sur
l'utilité d'un tel avis... Cela ne veut pas dire que les membres de la
commission ne sont pas capables, cela ne veut pas dire que les parlementaires
ne sont pas capables de trouver des exemples, cela ne veut pas dire que les
parlementaires ne seraient pas capables de prévenir certaines choses,
mais on sait que la législation ne se fait pas toujours avec beaucoup de
temps. Il arrive, dans des périodes comme celle que nous passons
présentement et ce, jusqu'au 23 juin, qu'on soit dans une période
bousculée. Cela n'a pas été inventé cette
année. Il reste qu'on arrive toujours à la période
d'été dans les mêmes conditions: on arrive toujours
à la période des fêtes dans les mêmes conditions.
Depuis que je suis au Parlement, M. le Président, depuis le 29 avril
1970, je vis ce genre de situation. Je souligne que ce n'est pas la meilleure
façon de légiférer. On est trop bousculé, on est
trop poussé, les députés n'ont pas toujours le temps de
fouiller les dossiers en profondeur.
Donc, un avis qui nous arrive de quelqu'un qui a pris le temps et qui
est un expert peut être valable. Je pense que rejeter, du revers de la
main, une possibilité d'avis dans des conditions comme celle qui serait
présentée par l'amendement qui nous est proposé, serait se
priver de la possibilité d'un éclairage au moment opportun.
À titre d'exemple, si un gouvernement ou un autre parce qu'il
faut parler au futur, la loi est là et j'imagine que si elle est bonne
elle sera là pour longtemps un bon jour, décide de faire
un référendum sur la question de l'euthanasie, en utilisant comme
argumentation que les personnes âgées coûtent pas mal cher
aux services de santé, coûtent cher à la Régie de
l'assurance-maladie, qu'il ne faudrait pas donner trop de soins après un
certain âge parce que les personnes ne sont plus productives. C'est le
genre de choses qui risqueraient de faire lutter les unes contre les autres des
personnes, parce que les unes auraient des intérêts à
protéger parce qu'elles sont les payeurs de
taxes et qu'elles sont surchargées, et les autres parce qu'elles
auraient une autre sorte d'intérêt à protéger, et
vous allez comprendre, ce serait leur vie. Je pense que c'est le premier des
intérêts que chaque être humain veut protéger. On va
reconnaître que les personnes âgées susceptibles
d'être victimes de l'euthanasie, par exemple, seraient beaucoup moins
nombreuses que les autres, donc deviendraient minoritaires et risqueraient, par
un débat dévié parce que les débats ne sont
pas toujours clairs de voir une mesure comme cela passée par un
Parlement et endossée par un référendum. (22 h 30)
C'est peut-être prendre un exemple dramatique; bien sûr, je
ne prête d'intention à personne, mais je considère que
d'autres exemples pourraient aussi tenir, pourraient être aussi mis de
l'avant, et un avis qui nous viendrait avant la déclaration ou
l'émission d'un bref de référendum ne pourrait être
que très utile aux parlementaires. C'est pourquoi je n'ai pas vu cela et
je ne reproche pas à mes collègues de l'avoir vu autrement;
peut-être qu'on voit cela avec chacun notre oeil et chacun nos optiques
et nos objectifs.
Il me semble que ce n'est pas le genre d'amendement qui vient perturber
la loi d'aucune façon. Compte tenu du fait qu'il me semble qu'on a tous
intérêt, une fois nos petites colères passées,
à retrouver je dis "passées", je ne parle pas de
colères futures, j'espère qu'il n'y en aura pas pour rien... Je
pense qu'on a tous intérêt à ce que cette loi, qui
deviendra l'instrument privilégié, en quelque sorte, des grands
débats, à ce que cette loi fasse le consensus. On a parlé
souvent de consensus, et il me semble qu'un minimum de collaboration s'impose
dans les circonstances. On n'a pas été, du côté de
l'Opposition, trop chanceux avec tous les amendements qu'on a
présentés de bonne foi chacun a présenté ses
arguments: l'Opposition a présenté les siens, le gouvernement a
présenté ses arguments on n'a pas été
chanceux, à un point tel qu'on est à l'article 6 depuis la
dernière séance où le député de Maisonneuve
était là.
Il me semble que, sans vouloir m'attaquer à personne de mes
collègues, je considère que tous ont une capacité de
s'exprimer qui est intéressante et qu'il me fait plaisir d'entendre
mais, trois jours sur le même article, cela fait de l'entendement qui est
difficile. Il me semble qu'on pourrait procéder pour arriver au moins
à accepter quelque chose. Pour accepter quelque chose, il faut que
chacun fasse sa part. Je vous le dis très honnêtement, si cet
article risquait de perturber le projet de loi, je voterais contre. Comme il
n'y a aucune conséquence mauvaise possible avec cet amendement, qu'il
n'y a qu'une possibilité d'un avis qui pourrait nous être utile en
temps et lieu, si ce n'est pas moi, ce sera d'autres qui prendront ma place un
jour, mais on ne légifère pas que pour aujourd'hui, il me semble
que ce sera utile à d'autres.
M. Bédard: On ne légifère pas seulement pour
un référendum, c'est vrai.
M. Samson: Oui, je prends les arguments que le ministre a
utilisés parce que je n'ai pas le choix. Je ne peux pas revenir en
arrière, le ministre a dit que c'était un projet de loi qui
demeurerait cadre. Bien sûr, je n'aime pas cela qu'il demeure cadre, mais
puisqu'il a dit qu'il a fait son lit, qu'il va demeurer cadre, je me rallie
maintenant à cette nouvelle dimension. Mais dans cette nouvelle
dimension, on peut bonifier et cet amendement à l'article 6 me semble en
tout cas très honnêtement, être quelque chose qui ne risque
de faire de mal à personne, mais qui ne peut qu'aider les parlementaires
qui en auront besoin en temps et lieu. C'est aussi simple que cela.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: Merci, M. le Président. J'ai lu avec
intérêt l'amendement proposé par mon collègue de
Marguerite-Bourgeoys et j'ai écouté les arguments qui ont
été apportés des deux côtés de la table. Il y
a une chose qu'il ne faut pas oublier au départ, c'est ce qu'est la
Commission des droits de la personne. C'est un organisme consultatif, point,
c'est tout. En aucune façon le Parlement, le gouvernement ne doit
être lié à cet organisme par des dispositions que l'on
retrouverait dans nos textes de loi. Je pense que nous n'avons pas besoin d'un
amendement de ce genre pour obtenir l'avis de la Commission des droits de la
personne.
Une voix: Bravo!
M. Roy: Nous l'avons obtenu lors de l'étude du livre
blanc; nous avons l'avis de la Commission des droits de la personne qui est
daté du 5 juin 1978 ce n'est pas très
éloigné et je n'ai jamais entendu dire que la Commission
des droits de la personne refuserait de donner son opinion lorsque celle-ci lui
serait demandée.
Nous avons eu, au cours de différentes commissions
parlementaires, pour l'étude de différents projets de loi,
souventefois des discussions pour demander l'avis de la commission et, à
chaque fois, des motions ont été adoptées, nous nous
sommes adressés à la commission et celle-ci nous a fait parvenir
son avis. Je pense qu'il n'appartient pas à la commission de
décider et d'émettre une opinion sur la possibilité de
soumettre une question ou un projet de loi à une consultation populaire.
Les citoyens du Québec se sont choisi des députés pour les
représenter à l'Assemblée nationale; ils ont choisi
majoritairement, c'est-à-dire un nombre de députés
majoritaire pour former le gouvernement; ils ont le mandat de gouverner et ils
doivent prendre leurs responsabilités. C'est le rôle de
l'Opposition de surveiller le gouvernement; c'est le rôle de l'Opposition
d'étudier, à la loupe si nécessaire, des projets de loi;
c'est le rôle de l'Opposition de proposer des amendements, voire
même des sous-amendements; c'est son rôle de travailler à
bonifier un projet de loi.
M. le Président, je ne conteste pas ce rôle à
l'Opposition officielle mais, quand même, en ce qui me concerne, je ne
peux pas accepter une telle motion puisqu'elle va à l'encontre des
droits
de l'Assemblée nationale, elle va à l'encontre des droits
du gouvernement. Je pense que non seulement ce n'est pas nécessaire que
ce soit dans la loi, ce n'est même pas recommandable. Je donne mon
opinion en toute sincérité, M. le Président, et je tente
de la dire en toute objectivité. Je ne sache pas, pour avoir un certain
nombre d'années d'expérience sur le plan parlementaire et avoir
connu nos collègues de l'Opposition officielle, que s'ils avaient eu
à présenter un projet de loi, ils auraient accepté un
amendement de ce genre, ou s'ils l'auraient inscrit dans le projet de loi. Je
pense que si le gouvernement avait amené une telle disposition dans le
projet de loi, ils seraient peut-être les premiers à en demander
le retrait. Je ne veux pas faire de jugement mais je pense qu'on a le droit
d'exprimer notre opinion. En ce qui me concerne, je ne pense pas être
brimé dans mes droits, jamais, par le fait que telle disposition ne sera
pas dans la loi et que ceci nous empêchera de consulter, dans l'avenir,
la Commission des droits de la personne.
Je ne serai pas plus long, M. le Président. Il y a
déjà eu passablement de temps d'écoulé sur la
discussion de cet amendement. J'ai toujours eu à déplorer, je
déplore souventefois et je fais souven-tefois des reproches à ce
gouvernement de déléguer trop de pouvoirs à des personnes
interposées. Je n'irai certainement pas, ce soir, à l'encontre
des principes que j'ai toujours défendus et des recommandations que je
fais à l'Assemblée nationale, à l'effet qu'on remette
encore une partie de nos prérogatives une partie de nos
responsabilités à des personnes interposées qui sont
là pour être consultées. C'est un organisme consultatif. Ce
n'est pas un organisme décisionnel et le gouvernement et
l'Assemblée nationale ne doivent pas être liés d'aucune
façon et j'insiste là-dessus par des
recommandations ou des opinions exprimées par la Commission des droits
de la personne. Elle n'a quand même pas l'infaillibilité,
malgré tout le respect que j'ai pour elle.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Verchères.
M. Charbonneau: Merci, M. le Président. En fait, je viens
d'entendre le député de Beauce-Sud, qui est mon voisin de bureau
à l'étage. Devant son expérience parlementaire et devant
les arguments qu'il vient d'ajouter aux débats, je ne pense pas qu'il
soit indiqué d'ajouter quoi que ce soit pour le moment. On verra par la
suite.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Mercier.
M. Godin: Je passe, pour l'instant.
Le Président (M. Clair): M. le député
d'Iberville.
M. Beauséjour: M. le Président, le
député de Beauce-Sud nous enlève bien des choses quand on
passe un peu après les autres. Je voudrais quand même souligner
qu'il y a un danger qu'on retrouve dans les deux paragraphes de l'amendement
qui est proposé. Je retiens que le député de Rouyn-Noranda
a indiqué que rien n'oblige la commission de donner un avis. Quand on
lit le premier paragraphe: "Aucun référendum prévu au
premier alinéa ne peut être tenu sans que le gouvernement n'ait
obtenu au préalable et qu'il n'ait déposé à
l'Assemblée nationale un avis." S'ils ne veulent pas en donner, que
fait-on? Je vais plus loin que cela...
M. Samson: Ce sera marqué sur l'avis: Pas d'avis. C'est
aussi clair que cela!
M. Beauséjour: ... pas de référendum. Je
regarde l'article 76, dans la charte qui régit la commission, où
on dit: "La commission doit refuser de faire ou de poursuivre une
enquête, lorsqu'elle constate qu'elle n'a pas de compétence en
vertu de la présente loi." C'est ici que je rejoins surtout l'argument
du député de Beauce-Sud, dans le deuxième paragraphe,
quand on parle de l'opportunité de soumettre une question. Pour moi,
cela veut dire: Est-ce bon ou non de soumettre une question? À ce
moment, soit que je prenne l'un ou l'autre des textes qu'on a reçus
aujourd'hui, où M. Hurtubise nous met bien en garde sur le rôle de
la commission, et affirme qu'elle n'a pas à se prononcer sur des
opportunités de ce genre, cet amendement me paraît être une
espèce de camisole de force, où un projet de loi pourrait devenir
inefficace, c'est pourquoi, personnellement, je voterai contre
l'amendement.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Laval.
M. Lavoie: Je vais tenter de convaincre mes collègues de
là-propos de cet amendement. Je suis convaincu que le
député de Taillon, d'ailleurs, qui nous fait l'honneur de sa
présence le premier ministre s'il participait à ces
travaux, serait d'accord et approuverait notre amendement.
M. Lévesque (Taillon): Non.
M. Bédard: Vous avez la réponse.
M. Lalonde: Ce n'est pas enregistré.
M. Samson: II n'a pas eu d'avis, par exemple.
M. Lavoie: M. le Président, je ne vois absolument rien de
malin ou de sorcier à cet amendement. Cela créerait uniquement
une obligation pour le gouvernement de demander à un organisme
spécialisé, qui a été créé par le
gouvernement, par l'Assemblée nationale, qui est payé par les
deniers de l'État, qui est au service de la communauté, de donner
son avis sur la question qui serait posée à un
référendum, comme cela existe, d'ailleurs, dans certains pouvoirs
de réglementation du gouvernement, je crois, dans l'éducation,
où, avant de passer de la réglementation, on doit consulter,
entre autres, le Conseil supérieur de
l'éducation. Cela doit exister, dans ce rôle, à
titre consultatif, même si je ne suis pas tout à fait d'accord
avec le député de Beauce-Sud, que la commission n'est qu'un
organisme consultatif. Je crois que c'est plutôt un organisme quasi
judiciaire, parce qu'il a des pouvoirs d'enquête et même des
pouvoirs d'aller devant les tribunaux. Mais on ne fera pas un débat de
fond sur cela.
C'est quand même un organisme paragouvernemental payé
à même les deniers publics. S'il a une utilité, c'est quand
même d'être au service de la communauté. D'ailleurs, cela
élimine uniquement une formalité. À peu près dans
tous les cas, quel que soit le gouvernement qui sera au pouvoir, une fois que
la loi du référendum sera entrée dans les statuts, je
pense que ce sera demandé à chaque occasion, soit par
l'Opposition actuelle, soit par l'Union Nationale, à une autre occasion,
soit par le Parti québécois, si, dans un avenir plus ou moins
rapproché, avec l'alternative que nous connaissons, il est dans
l'Opposition. La loi du référendum étant devenue dans les
statuts comme loi-cadre, je crois que ce sera demandé. (22 h 45)
Vous allez me dire: Ce n'est pas nécessaire de le mettre dans la
loi si c'est demandé. Je ne suis pas d'accord avec certaines
interventions et je vais tenter de convaincre le député de
Beauce-Sud avec l'expérience que nous avons eue, entre autres depuis un
an et demi, lorsque nous avons demandé des avis à la commission,
à quatre occasions, et cela n'a pas toujours été facile.
Je vais vous rafraîchir la mémoire avec les expériences que
nous avons eues quand nous avons demandé des avis de la Commission des
droits de la personne.
C'est quand même délicat, un référendum; il y
a des droits, il existe des droits, comme le dit la motion des droits
individuels, des droits pour un certain groupe de citoyens. Dans la plupart des
cas, lorsque le gouvernement doit légiférer pour le bien commun,
pour une majorité de citoyens, très souvent, en
légiférant de bonne foi, pour plusieurs, pour la grande
majorité des citoyens, il peut atteindre ou attaquer certains droits
individuels; dans l'intérêt commun, je ne le nie pas.
Par exemple, une législaion sur la baie James qui serait dans
l'intérêt de toute la communauté québécoise
pourrait porter atteinte aux Inuit ou aux Amérindiens de cette
région.
N'oubliez pas que si une telle loi référendaire entre dans
les statuts du Québec, ce sera un instrument qui appartiendra à
quelque gouvernement que ce soit. Il peut arriver un gouvernement qui peut
être antisyndical ou quoi que ce soit, et qui pourrait soumettre à
un référendum une question de droit de grève et qui
pourrait attaquer des droits de certains individus, des droits fondamentaux qui
appartiennent à des syndiqués ou à d'autres. N'oubliez pas
que cela joue sur les deux côtés, une fois que cela fait partie
des statuts publics au service du gouvernement en place. Je crois qu'il est
toujours prudent, en légiférant pour le mieux-être et dans
l'intérêt de la grande collectivité, il faut toujours faire
attention aux droits de certains groupes de citoyens; qu'on parle du zonage
agricole ou d'autre chose; on peut zoner dans l'intérêt du
Québec, dans le cas du zonage agricole, mais on peut porter atteinte aux
intérêts économiques de certains cultivateurs ou
autres.
Il n'y a rien de sorcier; comme le disait le député de
Rouyn-Noranda, s'il y a un amendement qui ne crée aucune
difficulté, aucun inconvénient... Je reconnais que
peut-être l'amendement que nous avions proposé avant de soumettre
les deux tiers de la question à l'assemblée, pouvait, dans
certains cas, bloquer pour un certain temps, avant qu'il n'y ait modification
de la question ou quoi que ce soit, avant d'obtenir les deux tiers... Il peut y
avoir des inconvénients graves, des difficultés ou des enfarges
pour le gouvernement, mais pas dans ce cas-ci.
M. Bédard: Vous le reconnaissez.
M. Lavoie: Je crois que s'il y a un amendement qui doit
être accepté dans une politique d'ouverture et de consensus du
gouvernement, c'est un amendement de la sorte qui n'est ni malin, ni sorcier.
D'ailleurs, l'expérience que nous avons eue, je me rappelle lors de la
loi 2, c'est à la suite d'une multitude de questions que nous avions
posées des questions orales à l'assemblée au
leader parlementaire du gouvernement qui nous a toujours répondu et
combien de fois il nous l'a répondu, autant sur la loi 2 que sur la loi
92 actuellement... On lui demandait: Avez-vous l'intention de demander
l'opinion de la Commission des droits de la personne? Il répondait: Non.
je n'ai pas l'intention; la commission est assez grande et si elle le juge
à propos, elle le fera d'elle-même. Je vais vous sortir le journal
des Débats, cela nous a été répété
une dizaine de fois.
Si le ministre de la Justice veut le reconnaître, il va se
rappeler l'expérience qu'il a vécue lui-même; c'est sur la
loi 2 que la Commission des droits de la personne a remis... Nous l'avons eu
par l'entremise du ministre de la Justice, cette fois-là, parce qu'il y
a eu un court-circuit parce que le ministre et le député de
Maisonneuve et leader parlementaire n'étaient pas trop d'accord pour le
demander. Nous l'avons eu parce qu'il y avait eu un court-circuit entre le
leader parlementaire du gouvernement et le ministre de la Justice, et nous
l'avons obtenu par le biais du ministre de la Justice.
Sur la loi 101, il y avait un article je ne le sais pas par coeur
qui disait que tel article... 172, nonobstant la Charte des droits et
libertés de la personne... En somme, cet article sortait de la
juridiction de la commission. C'est à la suite d'une opinion de la
commission que le gouvernement a dû reculer. Je dis qu'ajouter cette
formalité de consultation, dans ce cas-ci, avant de mettre le
mécanisme en marche pour un gouvernement, c'est une simple
formalité. Sur le projet de loi no 92, nous l'avons eu, sur le livre
blanc. Il a fallu faire un débat au début; on a demandé la
comparution de la commission. Après cela on a reculé, la
commission a consenti à donner son avis.
Sur le projet de loi no 92, une fois que le livre blanc est devenu texte
de loi vous l'avez vécu, vous étiez présent
à l'Assemblée nationale je suis revenu à la charge
au moins cinq ou six fois pour demander au leader parlementaire du gouvernement
s'il avait l'intention de demander l'avis de la commission, suite au
dépôt du projet de loi no 92. Qu'est-ce qu'il nous a
répondu? Que ce n'était pas nécessaire, que vous aviez
déjà eu l'avis de la commission sur le livre blanc et que vous
aviez corrigé les défectuosités; que la commission
était assez grande, qu'elle pouvait juger à propos de
soumettre... Il a dit: Non, je n'ai pas l'intention de la demander; non, je ne
demanderai pas l'avis. Je suis revenu à la charge au moins à cinq
ou six reprises, vous en étiez tous témoins.
Comment a-t-on pu obtenir cet avis? Au début en posant une motion
ferme devant cette commission, en faisant un débat. Le gouvernement,
à la fin, s'est rallié pour obtenir l'avis. C'est quand
même l'expérience que nous avons vécue dans quatre cas
depuis un an et demi. Nous voulons ajouter plus de crédibilité
à la question; cela deviendra, dans ce cas et surtout, ce ne sont
pas des tierces parties, c'est un organisme du gouvernement, c'est une
création de l'Assemblée nationale. Elle a été
créée par des statuts, elle est payée par l'État,
ce sont des spécialistes. Pourquoi ne pas s'en servir et donner plus de
crédibilité, plus de force, plus de poids, plus
d'honnêteté à la question? De toute façon, cela va
être demandé par quelque autre gouvernement. Ne vaut-il pas la
peine de ne pas prendre de chance? Le gouvernement ne sera pas tenu de le
respecter, d'accord, mais qu'il le demande. Au lieu de faire des débats
en commission parlementaire avant d'amender l'article 1, il n'y a rien de malin
à cela. Je vous dis, à mon humble avis, que s'il y a une motion
qui devrait être acceptée, qui ne cause aucun embêtement,
aucune difficulté au gouvernement, c'est bien un amendement de la
sorte.
M. Lalonde: Est-ce que le député me permet une
question? N'a-t-il pas demandé lui-même un avis à la
commission? Il semble important...
M. Lavoie: Je vous remercie de votre question. J'ai
été obligé d'écrire moi-même...
M. Bédard: C'est du cinéma.
M. Lavoie: ... à la commission, suite au refus du leader
parlementaire du gouvernement. On est obligé, à titre de leader
de l'Opposition... Tel que la loi le prévoit, un avis est fourni...
M. Lalonde: Quelle a été la réponse?
M. Lavoie: Le télégramme disait que la commission
ne donnerait pas d'avis. On a été obligé de revenir
à la charge. Il y a eu un télégramme disant qu'elle ne
donnerait pas d'avis.
M. Lalonde: Eh oui!
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je
vous demande une directive.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Jonquière.
M. Bédard: ... cinéma.
M. Vaillancourt (Jonquière): Je voudrais savoir par quel
moyen un député peut rectifier des propos que l'on attribue
à un ministre absent, lorsque celui-ci ne peut rectifier ses propos et
qu'un député membre de ce côté-ci de la Chambre veut
rectifier les propos qu'on attribue à ce ministre? C'est la question que
je vous pose, c'est la directive que je vous demande
M. Lalonde: On va vous permettre de le faire, de
consentement.
M. Lavoie: Faites-le, on donne notre consentement. On ne se
chicanera pas, on...
M. Lalonde: On ne se chicanera pas sur des formalités.
M. Lavoie: ... que vous, voyons! On vous donne notre
consentement.
M. Lalonde: Rectifiez, rectifiez.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je
tiens simplement à dire que le ministre n'a jamais refusé de la
convoquer, sauf qu'il a toujours dit que la loi qui régit la Commission
des droits de la personne donnait à la commission le pouvoir de donner
cet avis quand elle le voulait.
M. Lalonde: II a refusé de le demander.
M. Vaillancourt (Jonquière): II n'a jamais refusé
de l'entendre.
M. Lalonde: II a refusé de le demander.
M. Vaillancourt (Jonquière): II m'a toujours dit, M. le
Président, que la loi donnait des prérogatives à la
commission qui pouvait, en tout temps, faire parvenir son avis. Je pense qu'il
faut être correct.
M. Lavoie: Est-ce que je peux ajouter quelques mots? Je pense que
je n'ai pas épuisé mon temps.
Le Président (M. Clair): Non, vous n'avez pas
épuisé votre temps.
M. Lavoie: Très brièvement. Vous rappelez-vous
je ne pense pas que vous allez réfuter cela que, quelques
jours à peine avant que cette commission n'étudie le projet de
loi no 92, article par article, j'ai proposé à l'Assemblée
nationale, par une motion non annoncée, étant donné
qu'il
restait quelques jours à peine, de demander l'avis de la
commission? Est-ce que le député de Jonquière va
réfuter le fait que le leader parlementaire du gouvernement, le
député de Maisonneuve, a refusé, au nom du
côté ministériel, la présentation de l'avis pour que
l'assemblée demande l'opinion de la Commission des droits de la personne
sur la loi 92.
M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne réponds pas aux
questions qui sont adressées au député de Maisonneuve,
sauf que je rectifie les propos que vous lui prêtez quand il n'est pas
là; c'est ce que j'ai fait.
M. Lavoie: Un peu de calme, c'est à vous que je pose la
question.
M. Vaillancourt (Jonquière): Faites votre discours.
M. Lalonde: Ce n'est pas un exemple, il a refusé de le
demander.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Gatineau sur une question de règlement.
M. Gratton: J'aimerais, à l'instar du député
de Jonquière, rectifier...
M. Bédard: Je me demande franchement ce que cela apporte
dans le débat.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît. À l'ordre!
M. Lavoie: Est-ce que cette motion ne tient pas debout?
M. Bédard: J'aurais à parler sur la motion, mais
peut-être que le député de Laval pourrait continuer son
intervention.
M. Lavoie: J'ai terminé pour le moment, M. le
Président.
M. Gratton: M. le Président, puis-je intervenir sur la
motion?
Le Président (M. Clair): Sur la motion? M. le
député de Gatineau.
M. Gratton: Très brièvement, M. le
Président, je rappellerai tout simplement au député de
Jonquière qui, semble-t-il, s'offusque ou prétend que le ministre
responsable de la réforme électorale n'a jamais refusé, de
quelque façon, que l'on demande à la Commission des droits de la
personne l'avis que nous avons reçu ce matin, qu'effectivement, il y a
eu présentation d'une motion non annoncée à
l'Assemblée nationale qui n'a pu être débattue ou
même discutée et sûrement pas adoptée parce que le
ministre de la réforme électorale a refusé son
consentement.
M. Vaillancourt (Jonquière): Elle a été
adoptée, cette motion.
M. Gratton: Non, cela nous a forcé à
présenter une motion...
M. Charbonneau: ...
M. Gratton: M. le Président, il y a quelque chose qui ne
marche pas du côté ministériel.
M. Charbonneau: C'est de votre côté que cela ne
marche pas.
M. Gratton: À l'Assemblée nationale, pas en
commission parlementaire... Le député de Jonquière peut-il
me dire, au micro pour que ce soit inscrit au journal des Débats, que
j'ai raison en disant que le ministre responsable de la réforme
électorale...
M. Vaillancourt (Jonquière): La pertinence du
débat, M. le Président.
M. Gratton: La pertinence du débat, c'est qu'on est en
train de démontrer que si on n'inscrit pas dans la loi, dans le texte de
loi, l'obligation d'obtenir un avis de la Commission des droits de la personne
avant d'adopter un texte d'une question, c'est qu'on ne l'aura jamais, parce
que le dernier avis, celui dont on se sert depuis ce matin, qu'on a reçu
ce matin, on l'a obtenu après des semaines d'effort.
M. Charbonneau: C'est parce qu'il n'y aurait pas eu de citoyens
qui se seraient sentis lésés et qu'ils n'auraient pas jugé
bon d'utiliser la loi pour demander un avis.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Verchères...
M. Gratton: Est-ce que le député de
Verchères veut dire que le député de Laval, parce qu'il
est député de Laval, ne qualifie pas comme citoyen? Il en a fait
la demande, M. le Président, on l'a tous fait et finalement,
après motion en Chambre et le consentement refusé par le leader
parlementaire du gouvernement, ministre responsable de la réforme
électorale, ii ne s'agissait pas de perdre trois jours en débats
futiles, il s'agissait simplement pour lui de dire: Consentement, motion
adoptée, une lettre était envoyée à la Commission
des droits de la personne, on avait l'avis. C'est tout ce dont il s'agissait,
à ce moment-là.
M. Charbonneau: Ce n'est pas de cela dont il s'agit
maintenant.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Verchères, j'aimerais simplement vous rappeler que tantôt, vous
avez manifesté le désir d'intervenir sur cette motion
d'amendement et quand je vous ai offert le droit de parole, vous avez
décidé
comme c'est votre privilège de ne pas l'exercer. Si
vous désirez encore intervenir, je vous indique que vous avez encore le
droit de parole, mais dans les circonstances, j'aimerais que le
député de Gatineau puisse intervenir comme les autres
députés.
M. Charbonneau: M. le Président, demandez-lui qu'il s'en
tienne à la pertinence du débat, il n'était même pas
là depuis tantôt.
M. Lavoie: M. le Président...
Le Président (M. Clair): M. le député de
Gatineau, vous avez la parole.
M. Lavoie: Je pense qu'on n'est pas intervenu... question de
règlement, on essaie de garder le ton le plus convenable possible; je
pense que le député de Gatineau n'est pas intervenu du tout et,
personnellement, je ne suis pas intervenu non plus.
M. Godin: C'est vrai.
M. Lavoie: Laissez donc les gens... qu'on garde un peu notre
calme.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît.
M. Godin: Espérons que ce sera vrai pour tout le
monde.
Le Président (M. Clair): Messieurs, je suis en mesure de
disposer immédiatement de la question de règlement du
député de Laval pour dire que j'en avais déjà
disposé par les propos que j'avais tenus préalablement. M. le
député de Gatineau, vous avez la parole.
M. Gratton: M. le Président, on se rend bien compte
qu'aussitôt qu'on veut tâcher de convaincre nos collègues
membres de la commission du bien-fondé d'une motion d'amendement... ce
n'est pas aussitôt, c'est qu'à chaque occasion qu'on a fait une
motion d'amendement, elle a été refusée par le
gouvernement pour toutes sortes de raisons; lorsqu'on fait des motions qui
visent un référendum en particulier, soit celui concernant le
statut constitutionnel du Québec, on nous dit: On se doit de le refuser
du côté ministériel parce qu'il s'agit d'une loi-cadre, le
projet de loi no 92, donc on ne veut pas accepter de motion d'amendement qui
spécifierait un référendum quelconque. (23 heures)
Lorsque, comme c'est le cas de l'amendement dont on discute
présentement, l'amendement est présenté et vise tous les
référendums possibles, on trouve encore d'autres excuses pour le
refuser. Lorsqu'un député de l'Opposition tente de faire valoir
des arguments à l'apui de l'adoption de la motion, et qu'on ne trouve
pas d'autres arguments du côté ministériel, on parle de la
pertinence du débat.
M. le Président, quoi de plus pertinent, au moment où la
notion d'amendement vise à faire en sorte que le gouvernement ne puisse
décréter la tenue d'un référendum à moins
d'avoir obtenu un avis de la Commission des droits de la personne, que de faire
ressortir la difficulté que la commission elle-même et les membres
de l'Assemblée nationale, quel que soit leur parti, ont eue à
obtenir cet avis dont nous avons reçu copie ce matin. J'étais en
train de relater les différentes étapes des efforts
déployés par les députés de l'Opposition, mais pas
par les députés ministériels; c'était
évident qu'ils ne voulaient pas de l'avis de la Commission des droits de
la personne. Pourtant, on voit, avec le dépôt de l'avis que nous
avons reçu ce matin, que ce n'était pas une affaire de Bonhomme
Sept Heures; cela n'a pas chambardé les travaux de la commission.
Du côté de l'Opposition, on va nous servir des arguments
qui sont contenus dans l'avis que nous avons reçu lorsque ceux-ci sont
à l'appui des motions que nous faisons, comme, par exemple, dans le cas
de la motion que nous avons faite cet après-midi et dont la commission a
disposé en la rejetant, quant à l'adoption de la formulation
d'une question par les deux tiers des députés. La Commission des
droits de la personne nous donnait raison, on l'a invoqué. Cela n'a pas
changé le résultat du vote; en fait, cela n'a pas changé
quoi que ce soit. Pourquoi a-t-on mis tant de temps, du côté
ministériel, à finalement accepter que la commission adopte la
motion que nous avons proposée au tout début de nos travaux, la
deuxième journée de nos travaux, au moment où nous avions
le mandat de faire l'étude article par article du projet de loi no 92?
Pourquoi, en Chambre, a-t-on refusé le consentement pour qu'une telle
motion soit adoptée au moment des motions non annoncées?
Pourquoi, durant toute la première journée, a-t-on fait une
discussion, de part et d'autre, à savoir s'il était opportun de
demander à la Commission des droits de la personne de se prononcer, ou
de réviser, ou de mettre à jour l'avis préliminaire, ou
les réflexions préliminaires que nous avions reçues?
Je vous dirai tout simplement ce qui est ma conviction personnelle
profonde, c'est que le ministre de la Réforme électorale,
à ce moment-là, et ses collègues ministériels
craignaient ce que pourrait dire la Commission des droits de la personne. Ils
savaient...
Le Président (M. Clair): M. le...
M. Gratton: ... d'avance que la Commission des droits de la
personne ne pourrait faire autrement que de reprendre les objections qu'elle
avait énoncées dans ses réflexions préliminares et
que le texte de loi n'était pas venu corriger en regard de ce qui
était contenu dans le livre blanc. Que voulez-vous? La Commission des
droits de la personne n'est pas comme le gouvernement actuel, elle est
conséquente, elle. Ayant exprimé un avis dans ses
réflexions préliminaires sur le livre blanc, ayant
constaté, au moment du dépôt du projet de
loi no 92, que certains éléments de ses réflexions
n'avaient pas été traduits dans les changements apportés
dans le texte du projet de loi no 92, elle se devait de faire ce qu'elle a fait
dans le document que nous avons reçu ce matin, c'est-à-dire
confirmer que le gouvernement ne s'est pas rendu à ses observations, n'a
pas donné suite à ses observations dans la préparation du
texte de loi.
Ce n'est pas la fin du monde. Le ministre de la Justice, j'en conviens
avec lui... Ce n'est pas la fin du monde que la Commission des droits de la
personne ait prétendu, dans ses réflexions préliminaires
aussi bien que dans le rapport qu'on a vu aujourd'hui, qu'elle
préférerait voir la formulation de la question adoptée par
les deux tiers. On en a fait motion, la commission l'a rejetée
tantôt.
De la même façon, ce n'est pas la fin du monde non plus que
le député de Marguerite-Bourgeoys nous propose maintenant que le
gouvernement ne puisse tenir une consultation populaire, ne puisse adopter une
question pour la tenue d'une consultation populaire avant qu'un avis de la
Commission des droits de la personne n'ait été
déposé à l'Assemblée nationale. Il n'y a rien
d'insultant dans cela, M. le Président. Si le gouvernement, comme il est
évident qu'il le fera, n'est pas intéressé à
s'encarcaner, selon lui, dans cette procédure, il votera contre
l'amendement.
Mais entre nous, M. le Président, quelle sorte d'amendement
devrons-nous proposer, nous, de l'Opposition, pour que ce soit acceptable pour
le gouvernement? Je commence réellement à être convaincu
qu'il n'y en a pas. Le gouvernement a produit un livre blanc. Il a fait
quelques corrections mineures au moment où il a traduit ce livre blanc
dans un texte de loi, qui est le projet de loi no 92, et maintenant, il dit
à l'Opposition: Quelles que soient vos prétentions, quelles que
soient les prétentions qui sont partagées par la Commission des
droits de la personne, qui sont partagées par la majorité des
organismes qui sont venus comparaître à la commission au moment de
l'étude du livre blanc, quelles que soient les opinions émises
par les éditorialistes, les journalistes, sur certains points, pas sur
tous les points, tout cela, on le met de côté. Nous, le
gouvernement, on sait où on va. On sait ce qu'on veut, on a
été élu, c'est nous qui menons, ne nous achalez pas avec
vos motions d'amendement.
Si cela achale le gouvernement qu'on présente des motions, je ne
sais réellement pas ce que nous faisons ici, nous, de l'Opposition. Nous
y croyons à cela.
M. Bédard: Vous avez le droit de les présenter.
Nous avons le droit de les refuser. C'est la démocratie.
M. Gratton: Oui, c'est cela.
M. Bédard: Alors, arrêtez de chialer. Continuez.
M. Gratton: Est-ce que je chiale? M. Bédard: Oui.
Vous vous lamentez.
Le Président (M. Clair): À l'ordre! s'il vous
plaît!
M. Gratton: Jusqu'au ministre de la Justice qui n'aime pas la
façon dont je m'exprime.
M. Bédard: Non, mais arrêtez de vous lamenter.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs!
M. Gratton: Je trouve curieux que le ministre de la Justice, qui,
à cause de son mandat, devrait me défendre, en tant que citoyen
du Québec, soit en train de m'attaquer sur ma façon de
m'exprimer.
Le Président (M. Clair): Mais vous m'oubliez. M. le
député de Gatineau.
M. Gratton: Heureusement que j'ai le président de la
commission, que je vous ai, oui.
Le Président (M. Clair): Vous m'oubliez.
M. Gratton: M. le Président, j'en suis rendu à mon
troisième président, aujourd'hui, et puis-je vous faire un aveu?
Vous êtes celui que je préfère des trois.
Le Président (M. Clair): Que c'est gentil! M. Lalonde:
Nommez-les.
M. Lavoie: Est-ce que vous avez eu le député de
Jonquière?
Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs!
M. Gratton: M. le Président, je dirai tout simplement, en
concluant, qu'il est évident que le gouvernement rejettera cet
amendement.
M. Lalonde: Non, non!
M. Lavoie: Défaitiste!
M. Lalonde: Le ministre n'a pas encore parlé!
M. Gratton: À moins que le ministre ne demande à
ses collègues ministériels de quitter, au moment du vote,
l'impression que je retiens des interventions du député de
Verchères, du député de Jonquière, aussi bien que
du député d'Iberville, je retiens de ces interventions que le
gouvernement s'apprête à défaire cette motion d'amendement.
Je le regrette infiniment. Il me semble qu'il n'y a rien là qui prive le
gouvernement de la possibilité d'agir. Il s'agissait simplement, il
s'agit encore d'ailleurs, tant que la commission n'en disposera pas, de faire
en sorte que la Commission des droits de la personne donne un avis au
gouvernement, que cet avis soit déposé à
l'Assemblée nationale avant qu'il soit possible pour le gouvernement de
tenir un référendum. Il ne s'agit pas non plus, dans le cas de
cet amendement, d'une dis-
position qui est spécifique à un référendum
quelconque, à un référendum donné, cela s'applique
à l'ensemble des référendums que pourrait vouloir tenir le
gouvernement. Je le regrette infiniment. Il semble que ce soit une
stratégie du gouvernement de n'accepter aucune motion d'amendement,
aucun changement au texte du projet de loi 92.
Je crains que, si le gouvernement s'entête dans cette attitude, le
seul résultat net sera que le consensus, ce grand consensus qu'a
souhaité le député de Maisonneuve, que souhaitait la
semaine dernière le ministre de la Justice, ne soit que des mots parce
que, en réalité, le consensus on l'a au sein du parti
ministériel et aux yeux de ces messieurs, c'est tout ce qui compte, les
députés de l'Opposition, représentant 59% de la
population, ne sont là que pour faire de l'obstruction. Ce n'est pas le
cas, M. le Président, et je pense que les prochains jours le
démontreront très clairement.
M. Beauséjour: Est-ce que le député me
permettrait une question, M. le Président?
M. Gratton: Oui, M. le député.
M. Beausé|our: Qu'arriverait-il si la commission en
arrivait à la conclusion que ce n'est pas de sa juridiction de porter un
avis sur l'opportunité de soumettre une question?
M. Lavoie: Bien, elle le dira dans le rapport.
M. Gratton: La question m'est posée à moi, M. le
député de Laval.
M. Lavoie: Excusez-moi.
M. Beauséjour: Est-ce que le député de Laval
doute de la compétence du député de Gatineau?
M. Lavoie: Non, non, au contraire.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Gatineau.
M. Lavoie: Je suis même convaincu que le
député de Gatineau va apporter une meilleure réponse que
celle que je vous ai fournie.
M. Beauséjour: J'espère.
M. Gratton: Non, non, M. le Président, je reprendrai
exactement ce que vient de dire le député de Laval.
Effectivement, ce n'est pas sorcier...
M. Beauséjour: En toute révérence.
M. Gratton: ... si la Commission des droits de la personne
décidait qu'il ne relève pas de sa compétence, en fait que
ce soit même un caprice de sa part qu'elle ne veuille pas fournir d'avis,
ce sera tout simplement un sol à décision et le gouvernement
pourrait, à ce moment-là, procéder.
Si le député d'Iberville veut faire de la
législation très exacte, j'espère qu'il ne m'invite pas
à proposer un sous-amendement au texte de loi, parce qu'on pourrait le
faire, pour satisfaire à son inquiétude. Je connais la tactique,
on l'a vécue tellement souvent à d'autres commissions. S'il
s'agit, pour le député d'Iberville, de me dire: Mon objection
principale, fondamentale, c'est que la commission pourrait refuser et donc, on
serait encarcané, je vais vous proposer une motion de sous-amendement
pour répondre à cette inquiétude. Mais je sais d'avance
qu'ayant répondu à cette inquiétude, vous m'en formulerez
une autre qui vous permettra encore de voter contre.
Si je me trompe, M. le député d'Iberville je vous
pose la question dites-le moi tout de suite et je vais vous faire une
motion de sous-amendement.
M. Beauséjour: Non, non, je ne m'obstinerai pas avec
vous.
M. Gratton: J'y ai bien pensé.
Le Président (M. Clair): M. le ministre.
M. Bédard: M. le Président, nous sommes, tel que
l'a dit le député précédent...
M. Grenier: On va clôturer le débat, j'imagine,
avant le vote? J'aimerais bien prendre une demi-minute.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: Bien brièvement, je me réservais
d'intervenir avant le vote, parce que je voulais avoir un éclairage
supplémentaire, en écoutant les membres de cette commission. Bien
honnêtement, je dois vous dire qu'on ne m'a pas convaincu du
bien-fondé de la motion, mais je craindrais qu'un vote contre la motion
veuille dire un peu plus tard que je ne veux pas avoir les avis de la
Commission des droits de la personne, et je ne voterai certainement pas contre
cette motion. Je m'abstiendrai pour l'autre raison aussi que des articles
subséquents nous diront quel sort on réserve au Conseil des
référendums. J'aurais aimé avoir d'autres arguments qui
m'auraient confirmé que c'était essentiel d'avoir cet avis de la
Commission des droits de la personne, mais je crains davantage, et c'est la
raison pour laquelle je ne voterai pas pour l'amendement, qu'on se serve de ces
documents, de ces avis qu'on donnera comme épouvantail et qu'on diminue
là le rôle du législateur à la table de travail.
Le Président (M. Clair): M. le ministre.
M. Bédard: M. le Président, le plus
brièvement possible, parce que la plupart des arguments, de part et
d'autre, ont été évoqués. Je voudrais dire,
à la suite de l'intervention du député de Rouyn-Noranda,
qui ne voit aucune obligation dans l'amende-
ment qui a été proposé par le député
de Marguerite-Bourgeoys, qu'on a peut-être le droit chacun à ses
opinions, c'est clair, mais on a aussi l'obligation de lire correctement les
amendements qui sont proposés. Il est clair que cet amendement, qui se
lit comme suit: "Aucun référendum prévu au premier
alinéa ne peut être tenu sans que le gouvernement n'ait obtenu, au
préalable, et qu'il n'ait déposé à
l'Assemblée nationale, un avis de la Commission des droits de la
personne, constitué etc., constitue une obligation. À moins qu'on
ne comprenne pas la proposition de la même façon, il me semble que
c'est très clair qu'on crée une obligation. (23 h 15)
II faudrait quand même replacer les choses dans leur contexte,
qu'on ait un respect pour la Commission des droits de la personne, c'est
normal, et je pense que tous les membres de cette commission parlementaire en
ont un. Mais il ne faut jamais oublier que la Commission des droits de la
personne relève de l'Assemblée nationale et il ne faudrait pas
assujettir ou encore amener des conditions telles qu'on en vienne au
résultat que c'est l'Assemblée nationale qui est assujettie au
contrôle de la Commission des droits de la personne, ce qu'aurait pour
effet cet amendement.
On a tous à coeur de rédiger un projet de loi-cadre qui
soit le plus démocratique possible dans le respect des droits
fondamentaux, des libertés fondamentales et, à cet effet, nous
avons demandé une opinion à la Commission des droits de la
personne, qui nous en a donné une aujourd'hui. De cette opinion, il
ressort clairement que le projet de loi-cadre du gouvernement sur la
consultation populaire ne porte aucunement atteinte aux droits fondamentaux et
aux libertés fondamentales. Il me semble que ceci constitue une opinion
de toute première importance qui nous indique que nous évoluons,
à l'heure actuelle, dans un cadre qui est vraiment acceptable, non
seulement acceptable, mais presque recommandable, si l'on se fie à
l'opinion de la Commission des droits de la personne, qui, après avoir,
dans des commentaires préliminaires, souscrit aux objectifs du
gouvernement de démocratisation de nos institutions politiques,
après avoir souscrit également à l'idée, à
l'objectif du gouvernement d'association directe des citoyens à la
gouverne de l'État, dans son opinion qui a été
livrée à notre attention aujourd'hui, va encore plus loin, elle
souscrit entièrement à un autre des objectifs fondamentaux de ce
projet de loi, qui est le contrôle des dépenses, pour assurer une
égalité des chances et permettre à chacun des
Québécois d'exercer un choix libre et un choix
éclairé.
On sait jusqu'à quel point on a essayé de nous charrier
sur la question du contrôle des dépenses, laissant entendre que
c'était la fin des droits et libertés individuels, la fin du
droit d'association, etc. C'est très heureux que nous ayons eu cette
opinion de la commission qui, à mon sens, va diminuer les ténors
qui s'agitaient dans le paysage en laissant croire que nous étions en
train, par le contrôle des dépenses, de fouler au pied des droits
fondamentaux et des libertés fondamentales.
Je ne suis pas d'accord avec cette proposition du député
de Marguerite-Bourgeoys, pour deux raisons, dont l'une nous vient de
l'Opposition même. Lorsqu'il a été question, à
l'article 5 du Conseil du référendum et de demander des avis sur
toute question c'était la formulation première au
Conseil des référendums, à ce moment-là j'ai
ici les notes sténographiques non seulement le gouvernement, mais
également le leader de l'Opposition ont conclu qu'il était mieux
de limiter ces avis à des questions de droit et à des questions
techniques, parce que la responsabilité du référendum, la
responsabilité de la question ou du projet de loi, la
responsabilité de juger de l'opportunité de consulter la
population, cela relevait du législateur.
Je peux citer là-dessus M. Lavoie, le leader de l'Opposition qui,
à l'article 5, recommandait ceci au gouvernement: "Au lieu de dire sur
toute question de limiter cela aux questions juridiques, aux questions
légales, aux questions techniques, je pense qu'il y aurait un meilleur
consensus. " Ce fut également l'opinion du gouvernement, parce qu'on en
venait à la conclusion qu'il y a un bout à se décharger de
nos responsabilités sur un Conseil du référendum.
Dans un deuxième temps, ce qu'essaie de faire la proposition du
député de Marguerite-Bourgeoys, c'est de nous décharger de
nos responsabilités de législateurs sur la Commission des droits
de la personne qui relève de l'Assemblée nationale. À un
moment donné, il faut, comme gouvernement et comme membres de
l'Assemblée nationale, prendre nos responsabilités. Et
l'opportunité de poser une question, l'opportunité de consulter
la population, c'est une responsabilité qui appartient
entièrement à tous les membres de l'Assemblée nationale.
Je pense que c'est un principe auquel on ne peut pas déroger.
Dans un deuxième temps, la meilleure réponse à
donner au député de Marguerite-Bourgeoys, c'est qu'il se sert
toujours, et un peu trop, de la Commission des droits de la personne pour
essayer de l'impliquer continuellement dans des sujets où elle ne
désire même pas être impliquée...
M. Lalonde: Abolissez-la.
M. Bédard: Non, il n'est pas question de l'abolir, il est
question de lui faire jouer le rôle quelle doit jouer et le rôle
que la Commission des droits de la personne veut jouer. Dans la lettre que
m'adressait la Commission des droits de la personne et qui accompagnait
l'opinion que vous avez en main, il était très clairement
indiqué, par la commission que l'intention de la Commission des droits
de la personne et je cite "... ne vise d'aucune façon
à se substituer au législateur, au gouvernement, ni à un
parti membre de l'Opposition, en se prononçant sur l'opportunité
ou la sagesse d'un projet de loi spécifique." Le président de la
commission ajoutait: "II est parfois opportun d'ainsi rappeler à
l'occasion la zone de
compétence de notre organisme afin d'éviter toute
ambiguïté."
Il me semble que c'est la meilleure réponse que je puisse faire
au député de Marguerite-Bourgeoys devant la motion qui nous est
présentée, et ce n'est pas seulement au nom du gouvernement, au
nom de chacun des membres de l'Assemblée nationale qui ont le droit de
décider de l'opportunité de consulter la population, mais
également au nom de la défense que je dois assumer de l'organisme
qu'est la Commission des droits de la personne, de respecter cette opinion
qu'elle soumet à notre attention dans la lettre qui accompagnait son
opinion.
Je crois que, à force de mêler la Commission des droits de
la personne à toutes les sauces, il faudrait prendre garde d'en faire,
au bout de la ligne, un organisme politique. C'est la dernière des
choses, je pense, comme membres de l'Assemblée nationale, comme membres
respectueux de la Commission des droits de la personne, c'est la
dernière des choses qu'on doive désirer. Je ne suis pas d'accord
avec cette proposition et, encore une fois, ce n'est pas seulement au nom du
gouvernement et des membres de l'Assemblée nationale, mais au nom
même de la Commission des droits de la personne que j'émets ma
conviction et ma désapprobation.
M. Lalonde: M. le Président, j'aurais une question
à poser au ministre, à la fin de son intervention, comme le
règlement me permet de le faire. Est-ce que le ministre me permet une
question?
M. Bédard: Oui.
M. Lalonde: II m'a accusé, tantôt, de me servir trop
souvent de la Commission des droits de la personne...
M. Bédard: À toutes les sauces, c'est ce que j'ai
dit.
M. Lalonde: Non. Est-ce que le ministre pourrait me donner des
exemples où le député de Marguerite-Bourgeoys a
mêlé la Commission des droits de la personne à toutes les
sauces? Deuxièmement, est-ce que le ministre pourrait nous dire le
nombre de fois que le gouvernement a consulté, proprio motu, la
commission sans que l'Opposition le lui demande?
M. Bédard: Vous n'avez pas l'air de respecter la loi qui
régit la commission...
M. Lalonde: Je vous ai posé une question. Vous ne me
répondez pas.
M. Bédard: Oui, je vous réponds.
M. Lalonde: Combien de fois l'ai-je mêlée?
M. Bédard: Vous n'avez pas l'air... Vous continuez
à ne pas respecter la loi qui régit la Commission des droits de
la personne, qui a le droit c'est dans la loi de faire
connaître son opinion lorsqu'elle a la conviction...
M. Lalonde: L'ai-je mêlée à toutes les
sauces...
M. Bédard: Laissez-moi terminer. Vous avez posé
votre question, laissez-moi terminer... qui a le droit, de par sa loi, de faire
connaître son opinion, si elle croit que des libertés
fondamentales ou des droits fondamentaux sont violés. À l'heure
actuelle, il y a eu une demande unanime des membres de la commission
parlementaire, pour que la Commission des droits de la personne fasse
connaître son opinion. C'est ce qu'elle a fait. Si la commission
elle a une liberté, si on la respecte désire ne pas faire
connaître son opinion, si elle croit opportun de ne pas la faire
connaître, cela la regarde. Si elle croit opportun de venir
témoigner en commission parlementaire, ou de ne pas venir
témoigner en commission parlementaire, c'est encore sa
responsabilité. C'est cela avoir du respect pour une Commission des
droits de la personne.
M. Lalonde: M. le Président, est-ce que le ministre
pourrait nous dire il n'a pas répondu à ma question
dans quel cas et à quelle reprise j'ai mêlé à toutes
les sauces la Commission des droits de la personne? Est-ce que c'est lorsque
j'ai voté je ne sais pas si c'est moi qui l'ai proposé
mais lorsque l'Opposition officielle a proposé la motion pour
laquelle les députés ministériels ont voté pour
demander à la commission son opinion que nous avons reçue
avant-hier? Est-ce que c'est cela mêler à toutes les sauces?
M. Bédard: Vous en parlez continuellement.
M. Lalonde: Est-ce qu'il y a d'autres exemples? Est-ce que c'est
lorsque j'ai demandé de retirer l'article 172 de la loi 101? J'ai
mêlé cela à toutes les sauces?
M. Bédard: Écoutez, là, vous...
M. Lalonde: Donnez-moi des exemples, parce que c'est une
accusation grave que vous faites.
M. Bédard: II n'y a pas d'accusation grave
là-dedans. Ce que je vous dis...
M. Lalonde: C'est cela, j'ai autant de respect... M.
Bédard: Ce que je vous dis et je le redis... M. Lalonde: Le
ministre n'a pas le...
M. Bédard: ... c'est que, quand on a le respect...
M. Lalonde: ... monopole du respect de la commission.
M. Bédard: ... de la Commission des droits de la personne,
on n'essaie pas de la mêler à toutes les sauces.
M. Lalonde: Quand est-ce que je l'ai mêlée à
toutes les sauces?
M. Bédard: Elle nous a donné, à l'heure
actuelle...
M. Lalonde: Si vous n'en avez pas, retirez vos paroles.
Le Président (M. Clair): S'il vous plaît!
M. Bédard: Quand on a parlé du contrôle des
dépenses, à un moment donné, cela avait l'air que
c'était encore une atteinte aux droits et libertés de la
personne, tout le monde criait que c'était une atteinte aux droits et
libertés de la personne. Lorsqu'on a parlé du
référendum, à ce moment-là, même votre
attitude, vous n'étiez pas d'accord avec une loi sur le
référendum. Vous prétendiez...
M. Lalonde: Question de règlement. M. Lavoie: On
n'a pas eu d'avis.
M. Bédard: ... que cela pouvait léser des
droits.
M. Lavoie: Question de règlement.
M. Bédard: là, vous avez changé
d'attitude...
M. Lavoie: Question de règlement.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bédard:... parce que vous vous apercevez que ce n'est
pas rentable.
M. Lavoie: Question de règlement.
M. Lalonde: On a eu l'avis, on a présenté une
motion et elle a été adoptée, vous avez voté
pour.
M. Bédard: Vous vous apercevez que ce n'est pas
rentable.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs!
M. Bédard: Vous avez voté contre le
référendum.
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Bédard: Vous avez voté contre en deuxième
lecture.
M. Lalonde: N'essayez donc pas de noyer le poisson.
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Lalonde: Répondez donc: Quand est-ce que j'ai
mêlé la commission à toutes les sauces?
M. Lavoie: Question de règlement, M. le Président,
question de règlement.
M. Charbonneau: Continuellement, vous parlez des droits de
l'homme; vous êtes celui qui les bafoue.
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Lalonde: Cela vous fatigue qu'on parle des droits de
l'homme?
M. Charbonneau: Non, mais on a vu comment vous vous
comportez.
M. Lalonde: C'est mon devoir de parler des droits de l'homme et
comptez sur moi, je vais continuer à parler des droits de l'homme.
M. Charbonneau: On a vu cela comment...
M. Lalonde: Je vais continuer à me référer
à la commission, n'importe quand, quand je vais penser que c'est
nécessaire...
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Lalonde:... pour défendre les droits individuels et les
libertés fondamentales, je vais le faire.
M. Charbonneau: On a vu...
Le Président (M. Clair): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys...
M. Lalonde: II y a quand même des limites de se faire
charrier pendant des minutes par un ministre qui ne sait même pas de quoi
il parle.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bédard: M. le Président, je vais donner un
exemple.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bédard: Voici un exemple patent, M. le
Président. Voici l'amendement que nous propose le député
de Marguerite-Bourgeoys, avec une explication qui se lit comme suit: L'avis
prévu au précédent alinéa porte exclusivement sur
l'opportunité de soumettre une question ou un projet de loi à une
consultation populaire, en regard des conséquences qu'une telle
consultation populaire peut avoir sur les droits et libertés de la
personne, ou d'une certaine catégorie de personnes".
Si nous n'avions pas la Commission des droits de la personne, qui vous
répond très carrément que ce n'est pas de son ressort de
se prononcer sur l'opportunité d'un projet de loi ou d'une question au
référendum, vous nous accuseriez de ne pas respecter la
Commission des droits de la per-
sonne, alors que vous êtes manifestement dans l'erreur.
M. Lalonde: M. le Président, une question de
règlement.
M. Bédard: On vous donnera d'autres exemples, quand
viendra le temps.
M. Lalonde: M. le Président, question de
règlement...
Le Président (M. Clair): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: ... parce que mon discours a été mal
interprété et il est très très mal rapporté
par le ministre.
M. Bédard: C'est votre proposition qui est baroque.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Mar-guerite-Bougeoys...
M. Lalonde: Le ministre, M. le Président, a le droit
d'être contre ma motion.
M. Bédard: La commission dit...
M. Lalonde: Mais il n'a pas le droit de fausser les faits.
Lorsqu'il dit que la commission, dans son opinion...
Le Président (M. Clair): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys...
M. Lalonde: ... supporte entièrement le projet de loi, il
ne dit pas la vérité. Je vais vous lire ceci, M. le
Président, on dit: Les écueils par rapport aux droits et
libertés de la personne...
M. Bédard: Question de règlement.
M. Lalonde: ... qui avaient été relevés
à propos du livre blanc n'ont pas complètement disparu.
M. Bédard: Question de règlement.
M. Lalonde: Cela veut dire qu'il reste encore des écueils
relativement aux droits et libertés de la personne.
M. Bédard: Question de règlement. Encore là,
on voit comment le député de Marguerite-Bourgeoys discute et
comment il écoute aussi. Il pense seulement à ce qu'il va dire,
il écoute rarement ce que les autres ont à dire.
M. Lalonde: Quand vous parlez.
M. Bédard: Ce que j'ai dit tout à l'heure
vous auriez été mieux d'écouter...
M. Lalonde: Qu'est-ce que vous avez dit?
M. Bédard: Ce que j'ai dit tout à l'heure et
textuellement c'est que, dans son opinion, la commission souscrivait
entièrement, c'est textuel, à l'objectif du contrôle des
dépenses.
M. Lavoie: M. le Président, est-ce que je peux intervenir?
J'ai encore...
M. Lalonde: Je ne suis jamais intervenu dans le contrôle
des dépenses.
M. Bédard: Non, non, mais c'est ce que j'ai dit.
Le Président (M. Clair): Messieurs, à l'ordre, s'il
vous plaît!
M. Lalonde: Pourquoi m'accusez-vous, à ce
moment-là, de mêler la commission à toutes les sauces?
M. Bédard: Vous parlez de mon intervention. Je vous dis
exactement ce que j'ai dit.
M. Lalonde: Vous ne vous grandissez pas en faisant ce genre
d'accusation.
M. Charbonneau: Cela fait un an et demi que vous en pariez
continuellement.
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Lalonde: Et à raison, et on va continuer à en
parler.
M. Charbonneau: Si on l'avait eu pendant la crise d'octobre.
M. Lalonde: Si on n'en parle pas, vous allez faire...
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Lalonde:... ce que vous voulez faire avec les droits et
libertés de la personne.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Charbonneau: Si on l'avait eu pendant la crise d'octobre.
Le Président (M. Clair): À l'ordre! M. le
député de Verchères, M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, messieurs, à l'ordre, encore une fois! Messieurs,
j'aimerais vous rappeler que la loi dont nous discutons actuellement, c'est la
loi sur la consultation populaire. C'est une loi importante, je pense qu'elle
mérite qu'on lui accorde... (23 h 30)
M. Samson:... M. le Président.
Le Président (M. Clair): Elle mérite qu'on lui
accorde toute l'importance et toute la dignité possible. Je ne suis pas
sûr qu'on respecte le règlement à ce moment-ci et je ne
suis pas sûr
non plus qu'on prenne vraiment tout le soin nécessaire
d'étudier dans la quiétude ce projet de loi.
M. Bédard: II y a un bout à se faire charrier.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, au moment où vous aviez pris la parole, vous
m'aviez indiqué que vous vouliez exercer, si j'ai bien compris, votre
droit de parole en vertu de l'article 96.
M. Lalonde: Oui, c'est une question de règlement que j'ai
soulevée. Il me reste trois minutes et je désire les prendre
maintenant.
Le Président (M. Clair): Vous avez la parole.
M. Lalonde: M. le Président, brièvement, j'ai
entendu plusieurs arguments à l'encontre ou en faveur de ma motion; j'en
ai entendu du député de Rouyn-Noranda, du député de
Beauce-Sud, objectivement. Certains ont convenu de ne pas voter, d'autres de
voter pour et de voter contre. Je suis d'accord avec l'expression
d'opinion.
Malheureusement, je regrette et je déplore l'intervention du
député de Jonquière. Jamais je n'ai entendu un tel
argument ad hominem de tous les débats auxquels j'ai participé,
et j'ai participé à peu près à tous les grands
débats depuis le début de ce Parlement. Venant d'un avocat, je
mets cela sur le compte de la fatigue, parce que le député de
Jonquière ne s'est pas grandi, je pense, en concluant que ma motion
était mauvaise parce que c'était moi qui la
présentais.
Je ne sais pas s'il s'aperçoit jusqu'à quel point cela
participe d'un impérialisme intellectuel qui est totalement inacceptable
dans nos débats.
M. Vaillancourt (Jonquière): Consentement, M. le
Président...
M. Lalonde: Ceux qui sont passés par le même
système d'enseignement et qui ont mon âge ont été
habitués à être formés... Malheureusement, on leur a
enseigné deux sortes d'arguments: l'argument d'autorité et
l'argument ad hominem. L'argument d'autorité...
M. Fallu: Question de règlement, s'il vous
plaît.
M. Vaillancourt (Jonquière): ... consentement M. le
Président.
M. Lalonde: II y a un consentement...
Le Président (M. Clair): M. le député de
Terrebonne, sur une question de règlement.
M. Fallu: J'aimerais savoir si le député est en
train d'écrire ses mémoires ou si...
M. Lavoie: C'est une contribution au débat.
M. Vaillancourt (Jonquière): II parle du
député de Jonquière.
Le Président (M. Clair): II ne s'agit pas d'une question
de règlement. M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous
avez encore une minute et demie.
M. Lalonde: Je m'en prends à l'argument du
député de Jonquière. L'argument d'autorité, M. le
Président, c'était à peu près ceci: Mgr Lartigue
l'a dit, donc ce doit être vrai; l'argument ad hominem: c'est un maudit
Français ou un maudit Anglais, donc cela ne doit pas être bon. Ce
genre d'argument ne rehausse pas le débat. Je regrette que le
député de Jonquière y ait recouru.
On m'a accusé de faire une insulte à la commission. Je
pense que c'est simplement un écran de fumée à l'endroit
de la Commission des droits de la personne. C'est un écran de
fumée qui vient de l'imagination du député de
Jonquière. Je veux simplement que la commission soit impliquée
dans le bien-fondé de la question lors d'un référendum.
Certains ont vu, dans mon amendement, une accusation à l'endroit du
gouvernement d'infraction aux droits et libertés de la personne.
Naturellement, ce n'est pas moi qui ferai l'examen de conscience du
gouvernement et les colères que j'ai vues tantôt, on pourra les
juger à leur mérite.
Les exemples du député de Laval... c'est le principal
argument, et d'ailleurs le député de Verchères l'a
mentionné à plusieurs reprises, les citoyens ont le droit de
recourir à la commission; les arguments du député de
Laval... un simple citoyen qui, comme député de Laval,
représente des dizaines de milliers de citoyens, qui. comme leader
parlementaire de l'Opposition officielle, représente des centaines de
milliers de citoyens et qui a essuyé un refus à la commission, je
pense que c'est suffisant pour permettre à des législateurs de
conclure qu'il vaut mieux mettre la consultation dans la loi.
M. Charbonneau: C'est vous qui avez fait cette loi.
M. Lalonde: Oui, mais cela n'a pas été suffisant.
Alors, dans le cas d'un référendum, au nom des minorités
dont nous sommes tous ici. je pense qu'on devrait accorder beaucoup plus de
sérieux à cet amendement. Merci, M. le Président.
M. Vaillancourt (Jonquière): L'article 96, M. le
Président.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Jonquière.
M. Vaillancourt (Jonquière): J'aimerais rectifier certains
propos qui viennent d'être retenus par le député de
Marguerite-Bourgeoys. Je n'ai jamais dit que l'amendement était mauvais
parce qu'il venait de lui et je n'ai jamais voulu dire cela. S'il a compris
cela, je pense qu'il a mal compris. Ce que j'ai voulu déplorer, M. le
Président, dans ce que j'ai dit au début de mon intervention, et
j'ai déjà retiré ces paroles, j'admets avoir
employé les mauvais mots, ce que j'ai simplement voulu dire,
c'est que je déplorais, j'aimerais que le député de
Marguerite-Bourgeoys m'écoute, que, lui, qui est un collègue, un
confrère et qui a été Solliciteur général,
soit celui qui, dans son parti, présente ce genre de motion impliquant
une commission des droits de la personne. C'est tout simplement ce que j'ai
voulu dire, et j'ai eu l'occasion d'assister à de nombreux amendements
présentés par le député de Marguerite-Bourgeoys et
qui étaient, la plupart du temps, dans 99.9% des cas, très
valables.
En ce qui me concerne, je pense que l'incident est clos. Un amendement
n'est jamais mauvais, parce qu'il est présenté par quelqu'un en
particulier.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Mercier.
M. Godin: Seulement quelques mots, M. le Président. J'ai
entendu les débats sur la dernière partie. Il n'y a personne ici
qui reproche à l'Opposition de vouloir consulter la commission, mais il
y a, de façon permanente, une présomption que tout ce que le
gouvernement fait vient à l'encontre des droits de la personne. C'est
cela le problème. C'est ce qui explique mon éclat de tout
à l'heure. Que l'Opposition et que le député de
Marguerite-Bourgeoys présentent une proposition de ce type, c'est
parfaitement acceptable, c'est leur droit le plus strict. Mais qu'il y ait une
présomption permanente que tout ce que fait ce gouvernement vient
à l'encontre des droits de la personne, et que, chaque fois, cette
présomption est démentie, parce que la commission elle-même
affirme et que, répétition après répétition,
malgré des avis qui contreviennent au préjugé de
l'Opposition à notre égard...
Une voix: C'est de la stratégie.
M. Godin: ... que, fois après fois, la commission dise: II
n'y a rien qui vient à l'encontre de ces droits, on continue à
revenir là-dessus, à tenir pour acquis, à interrompre les
députés qui parlent, comme l'a fait tout à l'heure mon
collègue de Marguerite-Bourgeoys, en alléguant, encore une fois,
que nous violons les droits, chaque fois qu'il demande un avis, autrement dit,
il présume que la réponse sera négative contre le
gouvernement... Chaque fois, ce n'est pas ce qui se passe. Il y a des tribunaux
qui existent. Cette commission existe, et moi-même, je me ferai un devoir
de porter à l'attention de cette commission toute violation des droits
de la personne.
Quant à la loi 101, entre parenthèses, elle fut devant les
tribunaux, le juge Deschènes a rendu jugement là-dessus, c'est
soi-disant d'après son jugement un viol de la constitution, mais, si tel
est le cas, toutes les lois du Manitoba depuis 1870 sont
anticonstitutionnelles, elles aussi. Cela ouvre une méchante "can of
worms".
Nous n'avons pas d'objection que nos lois soient portées devant
les tribunaux, qu'elles soient jugées par d'autres, aucune objection,
mais, que chaque fois qu'il y a un doute, ils le fassent, ils ont une preuve,
qu'ils la fassent connaître. Qu'ils poursuivent jusqu'à terme
leurs accusations et nous vivrons avec elles et nous modifierons les lois
effectivement, s'il est confirmé que cela contrevient à la charte
adoptée par ces messieurs d'en face. C'est tout ce que j'avais à
dire là-dessus, M. le Président.
Le Président (M. Clair): Merci.
M. Lavoie: M. le Président...
Le Président (M. Clair): M. le député de
Laval.
M. Lavoie: Je n'avais pas du tout l'intention d'intervenir, mais
je crois que la vérité a ses droits. Suite aux propos tenus par
le ministre de la Justice et le député de Mercier, bien
calmement, je dois intervenir et je veux que, autant pour l'histoire, les
archives ou pour lorsqu'on étudiera les débats qui entourent
cette commission, le dossier soit complet.
Lorsque le député de Mercier nous dit qu'il semble y avoir
une présomption lancée ou entretenue par l'Opposition contre le
gouvernement sur les droits fondamentaux des citoyens, il y a deux choses que
je voudrais apporter comme argument. Il y a l'expérience que, quand
même, nous avons vécue depuis un an et demi, et,
deuxièmement, il faut reconnaître qu'il y a et c'est normal
dans toute société, un fossé philosophique entre le
gouvernement actuel et l'Opposition. C'est reconnu, je pense, que cela a
été diffusé dans tous les média, que chez le chef
du gouvernement, par ses propos et ceux de plusieurs membres du cabinet, vous
attachez, à cause de notre contexte peut-être
québécois, énormément plus d'importance aux droits
collectifs et il y a par contre une philosophie de certains
députés de l'Opposition, entre autres de l'opposition
libérale, où on attache peut-être plus de notre
côté, et c'est sain dans une démocratie, un respect aux
droits individuels. Vous pouvez différer d'opinion, ne faites pas de
singeries, M. le député de Verchères.
M. Charbonneau: Écoutez, vous nous faites assez de
singeries, vous ne viendrez pas me donner de leçon, pas vous, n'importe
qui, mais pas vous.
M. Lavoie: M. le Président, je continue.
M. Lalonde: Un autre argument ad hominem.
M. Lavoie: L'expérience que nous avons vécue, si ce
n'est pas une présomption disons qu'il n'y a pas de
présomption de jure ou peut-être tantum...
M. Lalonde: Juris tantum.
M. Lavoie: ... ou juris tantum; je vais vous rappeler deux ou
trois expériences que j'ai vécues. D'ailleurs, pour ce qui est
des attaques qui ont été
adressées au député de Marguerite-Bourgeoys
lorsqu'il y a eu plainte concernant la loi 2, je voudrais faire une correction
à l'adresse du ministre de la Justice. Il ne devrait pas diriger ces
attaques vers le député de Margurite-Bougeoys, mais vers le
député de Laval, parce que c'est moi-même, à ce
moment-là, qui avais exigé une opinion de la Commission des
droits de la personne. Cela a eu pour résultat, suite à l'avis
que nous avons eu, une réimpression du projet de loi no 2. Des
changements majeurs ont dû être apportés et des articles
complets ont dû sauter. Si je me rappelle bien ceux qui étaient au
dossier, il y a un article, entre autres, qui limitait énormément
le droit de défendre une opinion politique ou autre. Le
député de Maisonneuve et leader parlementaire du gouvernement a
dit: Ce n'était pas notre intention.
Je réponds bien calmement, je pense, à l'argumentation. Ce
sont des expériences que je raconte. Je dis que l'expérience que
nous avons vécue, suite à une opinion que nous avons
demandée à la Commission des droits de la personne, a
amené le trop fort ne casse pas, il y a des précautions
à obtenir .
M. Godin: Est-ce qu'on l'accepte, oui ou non?
M. Lavoie: ... je dis que cela a amené une
réimpression du projet de loi 2, une modification profonde du projet de
loi 2. À un article, entre autres, qui touchait les droits des gens
d'appuyer ou d'aller à l'encontre d'une politique du gouvernement, le
député de Maisonneuve a dit: Cela n'a jamais été
mon intention, c'est une erreur. Il l'a retiré du projet de loi, suite
aux avis de la Commission des droits de la personne.
Le député de Mercier va quand même reconnaître
que lors de l'étude du projet de loi 1, il y a eu un avis, sur l'article
172, de la Commission des droits de la personne ce n'est pas une
présomption, mais c'est quand même une expérience
vécue la commission a dit qu'il y avait une atteinte aux droits.
Le gouvernement d'ailleurs a retiré cet article.
Une voix: On vit avec.
M. Lavoie: Je continue sur l'expérience que nous avons
eue, suite au rapport, aux commentaires que nous avons eus sur le livre blanc.
Même si le ministre de la Justice, dans ses propos... Il va me faire
sortir de mes gonds à certaines occasions, surtout lorsqu'il laisse
entendre, pour les fins du journal des Débats, que la Commission des
droits de la personne donnerait, dans son rapport, raison au gouvernement, dans
l'esprit qui l'anime, dans la rédaction du projet de loi 92. Il me reste
encore quelques minutes, je vais lire au texte, M. le Président, deux ou
trois phrases de ce rapport. C'est pour cela que je dis que la
vérité a ses droits, et cela doit être enregistré au
journal des Débats, pour les lecteurs du journal des Débats qui
vont suivre ces débats.
M. Bédard: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Clair): M. le ministre.
M. Bédard: Avant que le député de Laval ne
s'engage dans la discussion de toute...
M. Lavoie: Cela ne m'empêchera pas de le lire.
M. Bédard: Non, vous le ferez quand même, vous
voulez le faire pour le journal des Débats, je le sais.
M. Lavoie: C'est cela.
M. Bédard: Mais avant que vous ne vous engagiez dans la
discussion sur l'ensemble de l'opinion, je tiens à vous rappeler que ce
que j'ai dit tout à l'heure, et textuellement, c'est que. concernant le
contrôle des dépenses, la Commission des droits de la personne
souscrivait entièrement à cet objectif. Elle donnait des
aménagements dont on aura à tenir compte lorsqu'on discutera des
comités nationaux.
M. Lavoie: Vous avez terminé?
M. Beauséjour: Question de règlement. M. le
Président.
M. Lavoie: Je vais lire...
M. Lalonde: II y a une autre question de règlement.
Le Président (M. Clair): M. le député
d'Iberville.
M. Beauséjour: Combien reste-t-il de temps au
député de Laval?
M. Lavoie: II me reste encore quatre ou cinq minutes, ne vous en
faites pas.
M. Beauséjour: Je demande cela au président. Je
m'excuse, mais le président, c'est celui à gauche.
Le Président (M. Clair): Ce n'est pas sûr que ce
soit une question de règlement, mais je peux vous indiquer qu'il reste
quatre minutes au député de Laval.
M. Vaillancourt (Jonquière): ... Une directive
d'émettre le renseignement, M. le Président, la directive.
M. Beauséjour: D'accord, je vous remercie. M. le
Président.
M. Lavoie: Je lis donc deux ou trois phrases de ce rapport. Je
cite au texte le rapport que nous
avons reçu de la Commission des droits de la personne, le 5 juin
1978. "Considérant en effet l'invitation qui lui a été
faite sous la forme d'une motion votée à l'unanimité par
la commission parlementaire chargée d'étudier le projet de loi
92, considérant que l'enjeu n'a en rien perdu de son importance et
considérant que les écueils par rapport aux droits et
libertés de la personne qui avaient été relevés
à propos du livre blanc n'ont pas complètement disparu du projet
de loi, la Commission des droits de la personne voudrait une fois de plus
apporter l'éclairage particulier de la Charte des droits et
libertés de la personne à l'étude du projet de loi 92 en
reprenant l'analyse de ses chapitres les plus importants et en soulignant
notamment les points qui lui apparaissent encore problématiques." (23 h
45)
Je cite de nouveau, à la page 5, au texte: "Les questions que la
Commission des droits de la personne avait posées au gouvernement sur le
regroupement obligatoire et l'interdiction pour toute autre option politique
que celle représentée dans la question de participer à la
campagne référendaire, n'a cependant pas obtenu dans le projet de
loi des réponses qui la satisfont entièrement et sur tous les
points.
Enfin, un troisième passage, à la page 8.
L'équation difficile entre plusieurs droits et libertés qu'a
tentée de réaliser le gouvernement dans ce projet de loi,
présente encore des inconnues qui empêchent la commission de se
prononcer catégoriquement sur son succès ou son échec. Les
objectifs sont louables. Le mécanisme de la mise en oeuvre est
précis, mais tout cela peut-il fonctionner sans danger pour les
libertés d'opinion, d'expression ou d'association? C'est la question que
la commission se permet de poser de nouveau au gouvernement en lui
recommandant...
M. Vaillancourt (Jonquière): C'est l'article 21.
M. Lavoie: ... une dernière fois la plus grande prudence
dans la voie difficile où il s'est engagé."
M. Lalonde: On nous accuse de soulever les problèmes.
C'est comme tuer le messager qui nous apporte une mauvaise nouvelle.
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Godin: ... vous n'avez pas la parole.
M. Lavoie: J'ai voulu je termine par ceci à
la suite des propos du ministre de la Justice, pour les fins de la bonne
connaissance du dossier et pour les fins du bon entendement de ce débat,
citer au texte trois passages du rapport. Également, l'expérience
que nous avons vécue autant sur la loi 2, sur la loi 101, sur le livre
blanc de la loi 92, Loi sur la consultation populaire, et sur la loi... c'est
en réponse à cette présomption prétendue ou
invoquée ou réfutée du député de
Mercier.
M. Godin: M. le Président, est-ce qu'il me reste du
temps?
Le Président (M. Clair): M. le député de
Mercier.
M. Godin: Que l'Opposition le fasse, c'est tout à fait
normal, je le répète, mais nous n'accepterons pas qu'en dehors
des procédures normales de consultation de cette commission, qu'en
dehors des recours normaux que la loi donne à tout membre, à tout
citoyen même du Québec et, à plus forte raison, à
tout membre de ce Parlement, d'être injuriés comme nous le sommes
souvent, comme nous l'avons été ce soir par un de vos
collègues que je ne nommerai pas.
M. Lalonde: Un instant! Vous m'avez pointé, est-ce que
vous voulez dire que je vous ai injurié?
M. Godin: Les insinuations, nous ne les prendrons pas.
Maintenant, ce que je veux dire, et je termine là-dessus, je n'ai pas
nommé personne.
M. Lalonde: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys invoque le règlement.
M. Vaillancourt (Jonquière): II n'y a pas de question de
règlement là.
M. Lalonde: Le député de Mercier m'a pointé
en disant que quelqu'un avait injurié. Je voudrais qu'il me dise... Si
je l'ai fait involontairement, je vais retirer mes paroles, parce que mon
intention n'est pas d'injurier qui que ce soit.
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Charbonneau: C'est un spécialiste de cela, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, depuis un an et demi. Vous et le
député de Mont-Royal!
M. Lalonde: M. le Président, je demande au
député de Verchères de retirer ses paroles.
M. Charbonneau: Non, M. le Président.
M. Lalonde: II a dit que j'étais un spécialiste de
l'injure.
M. Charbonneau: Oui.
M. Lalonde: De cela, c'est de l'injure. Je ne pense pas que ce
soit parlementaire.
M. Charbonneau: Non.
Le Président (M. Clair): Messieurs, à l'ordre, s'il
vous plaît!
M. Lavoie: Sur cette question de règlement, en vertu de
l'article 99, connaissant le député de
Verchères, il va certainement considérer qu'en s'adressant
au député de Marguerite-Bourgeoys, en lui disant, à un de
ses collègues qui a eu la confiance de ses électeurs à au
moins deux reprises, qui est un citoyen au même titre que le
député de Verchères, il va reconnaître avec moi que
c'est tout à fait antiparlementaire, que c'est un langage blessant
à l'adresse d'un de ses collègues. Je lui demanderais de retirer
ses paroles, cela, en vertu de l'article 99.8. Je vous demanderais, M. le
Président, de statuer sur cette demande.
M. Charbonneau: M. le Président, je pense que je n'ai
aucune raison de retirer ces paroles. Comme je reprends la phrase du
député de Laval...
M. Lavoie: Je demande une décision sur cela. Il refuse de
retirer, mais c'est au président à décider.
M. Charbonneau: Non, mais laissez-moi terminer!
M. Bédard: Laissez donc parler les gens, vous!
M. Charbonneau: Vous êtes bon pour les libertés
individuelles, mais quand les autres passent...
M. Bédard: Pourtant, vous avez déjà
été président de l'Assemblée nationale, mais c'est
fini, cela.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît, messieurs!
M. Charbonneau: M. le Président, je vais reprendre la
phrase du député de Laval. "Dans cette Assemblée
nationale, la vérité a ses droits..."
M. Lavoie: M. le Président, je vous ai fait une
demande.
M. Vaillancourt (Jonquière): Question de
règlement!
M. Lavoie: J'ai considéré que ces mots
étaient antiparlementaires.
Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous
plaît, messieurs. Il y a une succession de questions de règlement
dont je vais avoir de la difficulté à disposer si vous voulez
continuer à les accumuler à un rythme aussi
accéléré. Il y a eu d'abord le député de
Marguerite-Bourgeoys qui s'est senti visé par des propos du
député de Mercier. Ensuite, le député de Laval qui
intervient pour des propos qui auraient été prononcés par
le député de Verchères. J'aimerais d'abord disposer de la
question de règlement soulevée par le député de
Marguerite-Bourgeoys relativement à des gestes qu'auraient pu poser le
député de Mercier en le pointant, semble-t-il...
M. Lalonde: M. le Président, étant donné que
les "pointages" ne sont pas enregistrés dans le journal des
Débats, je n'insisterai pas. Je voudrais simplement, étant
donné que j'ai quand même senti qu'il me visait, savoir quelle
injure j'aurais pu involontairement lui faire pour me donner l'occasion de la
retirer parce que mon intention n'était pas d'injurier aucun
député, surtout pas le député de Mercier.
Le Président (M. Clair): Je vous remercie de votre
collaboration. Passons maintenant à la question de règlement
soulevée par le député de Laval par rapport à des
propos qu'aurait prononcés le député de
Verchères.
M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que l'article 6 est
adopté, M. le Président?
M. Lavoie: J'ai une demande formelle, M. le Président.
M. Lalonde: Non, M. le Président. Le député
de Verchères m'a dit que j'étais un spécialiste de
ça...
M. Charbonneau: De ça.
M. Lavoie: De l'injure.
M. Lalonde:... après avoir parlé d'injure. J'ai dit
que je ne veux injurier personne. Il a dit: Vous êtes un
spécialiste de ça. Je vous demande de statuer sur la demande du
député de Laval.
Le Président (M. Clair): À l'heure qu'il est
là, messieurs, je pense que tel que c'est mon droit, je vais prendre le
tout en délibéré et je vérifierai.
M. Lavoie: La demande va revenir demain.
Le Président (M. Clair): Cela me donnera l'occasion de
vérifier ce qui s'est réellement dit, la transcription du journal
des Débats...
M. Lavoie: Vous pourrez vérifier la transcription du
journal des Débats.
Le Président (M. Clair): ... et je rendrai ma
décision demain sur ce sujet si aucun autre événement
d'ici ce temps-là ne se produit.
M. Vaillancourt (Jonquière): Le vote sur l'amendement.
Le Président (M. Clair): M. le ministre.
M. Bédard: Suite aux propos du député de
Laval, je voudrais ajouter simplement une chose en référence
à l'ensemble de l'opinion de la Commission des droits de la personne, je
voudrais lui faire remarquer qu'on n'est pas là pour discréditer
l'opinion de la Commission des droits de la personne même si elle peut se
tromper, parce que
cela peut lui arriver à elle aussi. Prenez, par exemple, à
la page 4, la commission se pose la question suivante, à savoir, et je
cite: "Au sujet du droit de vote, la commission demande quelles sont les
raisons qui ont amené le gouvernement, contrairement à ce
qu'avait laissé entendre le livre blanc, à n'éliminer que
les incapacités frappant les prisonniers ", alors que vous savez
très bien qu'on a éliminé toutes les incapacités.
Mais, probablement que là, la commission n'a pas scruté
suffisamment le...
M. Lalonde: Est-ce que je peux rappeler au ministre qu'il
n'était pas à la commission lorsque nous avons adopté la
motion demandant à la Commission des droits de la personne
d'écrire. Dans une intervention, j'avais demandé à la
commission d'expliciter chacun des points qu'elle avait soulevés dans
ses remarques préliminaires. C'est peut-être pour cela qu'elle
revient sur cette question.
M. Bédard: Mais là, on voit manifestement qu'elle a
mal lu la loi. Je n'en fais pas reproche. Ce sont des choses qui peuvent
arriver. À un moment donné...
M. Lavoie: Même le gouvernement est faillible. Même
la commission.
M. Bédard: Oui, et à un moment donné il faut
faire confiance aux hommes aussi. Il faut faire confiance au gouvernement qui
doit assumer la responsabilité de gouverner. C'est aussi cela qu'il faut
accepter.
Le Président (M. Clair): Messieurs, la motion d'amendement
du député de Marguerite-Bourgeoys...
M. Lalonde: Appel nominal.
Le Président (M. Clair): ... dont je n'ai probablement pas
besoin de faire à nouveau lecture.
M. Lavoie: J'adresse une demande au ministre de la Justice...
M. Bédard: Mais là, on va voter.
M. Lavoie: D'accord, mais vous ne pouvez pas... C'est une
dernière demande que je vous fais, quitte à ce qu'on ne vote pas
immédiatement et que vous preniez l'amendement tel que proposé et
que vous le fassiez réviser par vos conseillers, par vos légistes
pour le rendre peut-être dans un texte convenable et acceptable pour le
gouvernement sans lui causer de contrainte ou quoi que ce soit.
M. Vaillancourt (Jonquière): Le vote, M. le
Président.
M. Lavoie: Dans un esprit d'ouverture et de dialogue.
M. Bédard: D'ouverture, il faut être logique, quand
on parle d'ouverture, écoutez...
M. Vaillancourt (Jonquière): Le vote est appelé, M.
le Président.
M. Bédard: ... on l'a dit tout à l'heure, la
commission relève de l'Assemblée nationale; ce n'est pas
l'Assemblée nationale qui relève de la commission. Cet article
crée des obligations qui sont inacceptables et qui ont pour effet de
décharger les élus de leurs responsabilités. Je crois
qu'on est prêt à voter, M. le Président.
Le Président (M. Clair): Messieurs, la motion d'amendement
du député de Marguerite-Bourgeoys, à l'article 6, à
l'effet d'ajouter deux alinéas que je ne relirai pas puisqu'on en a
discuté, je pense, pendant un bon moment, est-elle adoptée?
M. Samson: M. le Président, pour les fins du journal des
Débats, je vous demande de la relire.
Le Président (M. Clair): Cela va! La motion du
député de Marguerite-Bourgeoys est à l'effet d'ajouter les
alinéas suivants à la fin de l'article 6: "Aucun
référendum prévu au premier alinéa ne peut
être tenu sans que le gouvernement n'ait obtenu au préalable et
qu'il n'ait déposé à l'Assemblée nationale un avis
de la Commission des droits de la personne constituée en vertu de
l'article 57 de la Charte des droits et libertés de la personne, 1975,
Statuts du Québec, chapitre 6. L'avis prévu au
précédent alinéa porte exclusivement sur
l'opportunité de soumettre une question ou un projet de loi à une
consultation populaire en regard des conséquences qu'une telle
consultation populaire peut avoir sur les droits et libertés de la
personne ou d'une certaine catégorie de personnes". Cette motion
sera-t-elle adoptée?
M. Vaillancourt (Jonquière): Rejetée, M. le
Président.
Une voix: Vote nominal.
Le Président (M. Clair): Veuillez indiquer si vous
êtes pour ou conte l'adoption de cette motion d'amendement. M.
Bédard (Chicoutimi)?
M. Bédard: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Vaillancourt
(Jonquière)?
M. Vaillancourt (Jonquière): Contre.
Le Président (M. Clair): M. Charbonneau
(Verchères)?
M. Charbonneau: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Beauséjour
(Iberville)?
M. Beauséjour: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Lavoie (Laval)?
M. Lavoie: Pour.
Le Président (M. Clair): M. Grenier
(Mégantic-Compton)?
M. Grenier: Je m'abstiens.
Le Président (M. Clair): M. Laberge (Jeanne-Mance)?
M. Laberge: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys)?
M. Lalonde: Pour.
Le Président (M. Clair): M. Paquette (Rosemont)? M. Roy
(Beauce-Sud)?
M. Roy: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Samson (Rouyn-Noranda)?
M. Samson: Pour.
Le Président (M. Clair): Le résultat est le
suivant: Pour la motion d'amendement: 3; Contre: 6; Abstention: 1. La motion
est donc rejetée.
M. Bédard: M. le Président, on propose l'adoption
de l'article 6.
M. Lavoie: Non, nous avons encore un ou deux amendements que nous
réservons pour demain.
M. Bédard: Nous avons cinq minutes.
M. Lavoie: M. le Président, je prends la parole. J'ai
l'intention de soumettre...
M. Bédard: On pourra y réfléchir, M. le
Président.
M. Lavoie: M. le Président...
M. Vaillancourt (Jonquière): ... que ce sera
adopté, M. le Président?
M. Lavoie: ... un peu de calme. Il n'y a rien qui presse. Vous
nous avez bousculés hier soir. Vous avez eu votre expérience. Ce
n'est pas la manière dans un Parlement...
M. Vaillancourt (Jonquière): Arrêtez donc
d'être suffisants.
M. Lavoie: Oui, mais arrêtez donc de nous bousculer.
Le Président (M. Clair): À l'ordre!
M. Lavoie: Acceptez donc l'Opposition.
M. Bédard: Je comprends que vous préféreriez
parler d'hier soir plutôt que de ce soir.
M. Lavoie: Non, non.
Le Président (M. Clair): Messieurs, nous avons encore
devant nous trois belles minutes.
M. Bédard: Si vous avez un amendement, j'imagine que vous
en avez un de prêt.
M. Lavoie: J'ai l'intention d'apporter un amendement ici. Insulte
il y a cette fois-ci...
M. Lalonde: Parce que cela a été échec
épouvantable.
M. Lavoie: ... à l'adresse d'un député qui
apportera un amendement pour particulariser; ce sera un amendement qui
particularisera cette loi de la consultation populaire, dans le cas d'un
référendum sur le statut constitutionnel.
M. le Président, je disais donc que si cela déplaît
à l'Opposition, je ne voudrais pas que le député de
Marguerite-Bougeoys soit le seul souffre-douleur de cette commission...
M. Bédard: On voit manifestement qu'on oblige l'Opposition
à improviser. Alors on va leur permettre de réfléchir. Ils
n'ont aucun texte d'amendement à nous proposer.
M. Vaillancourt (Jonquire): Cela aurait été
agréable de le lire ce soir.
M. Lavoie: Notre stratégie, s'il y a stratégie en
ce qui concerne ce projet de loi...
M. Bédard: Vous en avez une?
M. Lavoie: ... vous pouvez être assurés, qu'il est
normal... À l'article 6, ici, c'est un des articles les plus...
M. Bédard: Des articles importants.
M. Lavoie: ... importants... M. Bédard: Je suis
d'accord.
M. Lavoie: ... et nous allons annoncer encore une fois nos
couleurs. Les amendements les plus nombreux que nous avons apportés
jusqu'à maintenant et que nous continuerons d'apporter, je crois que
nous en avons deux autres à l'article 6, et par la suite, je dois dire
qu'en ce qui concerne l'Opposition officielle la majorité de nos
amendements, d'ailieurs, sera dirigée sur le chapitre 8...
M. Bédard: Les comités nationaux.
ANNEXE
Opinion de la Commission des droits de la
personne
Montréal le 5 juin 1978
Honorable Marc-André Bédard, Ministre de la Justice, 225
est, Grande Allée, Québec, Qué.
Monsieur le ministre,
Le 17 mai dernier, la Commission parlementaire chargée
d'étudier le projet de loi 92, intitulé Loi sur la consultation
populaire, adoptait à l'unanimité une motion demandant à
la Commission des droits de la personne de faire parvenir au gouvernement les
remarques et recommandations appropriées. Soucieuse de répondre
à cette invitation, la Commission a fait siens les commentaires dont je
joins copie à la présente, lors d'une réunion
spéciale tenue le vendredi 2 juin 1978.
Dois-je préciser que le titre ("Quelques commentaires...')
indique bien que la Commission entend s'en tenir à sa
responsabilité qui consiste à étudier ce projet de loi
à la lumière d'une grille d'analyse basée sur les droits
et libertés mentionnés dans la Charte, et ne vise d'aucune
façon à se substituer au législateur, au gouvernement, ni
à un parti membre de l'opposition, en se prononçant sur
l'opportunité ou la sagesse d'un projet de loi spécifique. Il est
parfois opportun d'ainsi rappeler à l'occasion la zone de
compétence de notre organisme afin d'éviter toute
ambiguïté.
J'ose croire, monsieur le Ministre, que les commentaires ci-joints
sauront vous être utiles et je vous prie d'accepter l'expression de mes
sentiments distingués.
Le Président,
René Hurtubise, C.R.
Quelques commentaires de la Commission des droits de
la personne sur le projet de loi No 92
Loi sur la consultation populaire
Les présents commentaires de la Commission des droits de la
personne sur le projet de loi no 92 "Loi sur la consultation populaire" se
situent dans le prolongement des réflexions préliminaires qu'elle
a produites dans une première étape au sujet du Livre Blanc sur
la Consultation populaire.
Considérant en effet l'invitation qui lui a été
faite sous la forme d'une motion votée à l'unanimité par
la Commission parlementaire chargée d'étudier le projet de loi no
92, considérant que l'enjeu n'a en rien perdu de son importance et
considérant que les écueils par rapport aux droits et
libertés de la personne qui avaient été relevés
à propos du Livre Blanc n'ont pas complètement disparu du projet
de loi, la Commission des droits de la personne voudrait une fois de plus,
apporter l'éclairage particulier de la Charte des droits et
libertés de la personne à l'étude du projet de loi no 92
en reprenant l'analyse de ses chapitres les plus importants et en soulignant
notamment les points qui lui apparaissent encore problématiques.
M. Lavoie: ... la campagne des comités nationaux suite au
document dont nous avons remis une copie aujourd'hui, que nous avons
distribué.
M. Bédard: Et là, on aura l'occasion de parler du
respect des remarques de la Commission des droits de la personne.
M. Lavoie: Et je crois que c'est dans le respect, et c'est dans
l'étude normale d'un projet de loi de cette importance où il y a
des amendements.
M. Bédard: Oui, oui. Parfaitement.
M. Lavoie: D'ailleurs, nous n'avons pas épuisé nos
droits de parole jusqu'à maintenant sur les amendements que nous avons
proposés, ni sur la motion principale.
Le Président (M. Clair): Messieurs, il est minuit. La
commission ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 0 heure)
Ces commentaires ne prétendent bien entendu à aucune
expertise particulière sur le référendum comme tel, mais
cherchent plutôt, comme la Charte en donne le mandat à la
Commission, à promouvoir et à susciter dans le cadre particulier
de ce projet de loi, le respect des droits et libertés de la
personne.
1.
Sur le droit d'initiative
Selon ce qui avait été annoncé dans le Livre Blanc,
le droit d'initiative de tout référendum appartient à
l'action concertée de l'exécutif et du législatif,
l'Assemblée nationale ayant un rôle central à jouer dans le
processus référendaire.
Le projet de loi no 92 vient préciser aux articles 6, 7, 8 et 9
la répartition des pouvoirs à cet effet entre l'exécutif
et le législatif: à notre avis, le rôle de
l'Assemblée nationale dans la décision de tenir une consultation
populaire, tel que défini dans le projet de loi est beaucoup plus
limité que ne l'annonçait le Livre Blanc.
Si l'on veut être exact, le rôle de l'Assemblée
nationale réside moins dans l'initiative du référendum que
dans les étapes qui suivent la décision initiale d'en
déclencher un, à savoir la formulation de la question et la mise
sur pied et l'organisation des comités nationaux. En vertu des articles
6 et 7, c'est le Premier ministre, dans le cas de la question, qui
détient le pouvoir de déclencher un référendum,
alors que dans le cas des projets de loi, même si le député
a un pouvoir théorique de les présenter, on sait que l'initiative
appartient surtout au gouvernement.
2.
Sur la formulation de la question
Le projet de loi no 92 a retenu une partie des recommandations de la
Commission des droits de la personne en ce qui concerne la forme que pourrait
prendre la présentation de la question soumise au
référendum devant l'Assemblée nationale et la durée
du débat devant mener à sa formulation.
L'alternative question "sous forme de motion" /projet de loi
proposée aux articles 6, 7, 8, 9 du projet de loi, de même que
l'allongement de la durée du débat d'un maximum de 25 heures
à un minimum de 30 heures dans le cas où le
référendum porte sur une question proposée par le Premier
ministre et non sur un projet de loi, s'inscrivent dans le sens des
recommandations de la Commission à propos du Livre Blanc.
La Commission sait gré au gouvernement d'avoir
dérogé à la règle de la durée maximale de 25
heures normalement prévue par la procédure parlementaire, dans le
cas du Discours du budget et du Message inaugural par exemple, mais elle doit
avouer qu'il lui est difficile de dire si cet ajout minimal de cinq heures
à la durée du débat est suffisant, compte tenu de
l'importance des questions qui seront soumises au référendum.
La proposition sur un vote à la majorité des 2/3 n'a
cependant pas été retenue. Sans vouloir en faire une question de
principe, ni en exagérer l'importance, la Commission continue de croire
qu'un vote à la majorité des 2/3 comme le prévoit la
procédure parlementaire lorsqu'on recherche le plus large consensus
entre les partis politiques, serait préférable (1). Il n'en va
d'aucune atteinte à des libertés fondamentales mais simplement
d'une garantie que la question soumise à la consultation populaire une
fois adoptée, ne fasse plus l'objet d'une contestation quelconque qui
aurait pour conséquence d'orienter le débat sur des questions de
forme plutôt que sur des questions de fond.
3.
Les préalables au scrutin
Sur le rôle du Conseil du référendum, le processus
de votation, le droit de vote et l'organisation tant matérielle que
financière du référendum que l'on retrouve
explicités aux chapitres II, V, VI, IX et X du projet de loi no 92, la
Commission des droits de la personne a un certain nombre de commentaires
à formuler. 3.1 Sur le Conseil du Référendum
La Commission des droits de la personne s'interroge d'abord sur
l'article 2. Dans la même veine d'association entre le législatif
et l'exécutif prônée par ce projet de loi, elle se demande
si la désignation des deux autres juges du Conseil du
Référendum ne pourrait pas être faite par
l'Assemblée nationale sur proposition du Premier ministre, toujours en
vue de réaliser le consensus le plus poussé entre les partis.
(1) Par procédure parlementaire, nous ne référons
pas au Règlement de l'Assemblée nationale mais à la
procédure suivie dans le cadre de certaines lois particulières
pour la Commission des droits de la personne, le Protecteur du citoyen, le
Vérificateur des comptes, le Directeur du financement des partis
politiques, le Président des élections... etc.
Par ailleurs, la Commission note que les articles 39 et 40
confèrent une certaine discrétion en cas de contestation, au
Conseil du Référendum. En effet, le paragraphe 3 de l'article 39
et le paragraphe 2 de l'article 40 précisent que ce Conseil ne peut
accueillir la demande que dans la mesure où les faits
allégués "seraient susceptibles de changer le résultat
global de la consultation populaire".
Tout en comprenant qu'il soit normal qu'il en aille ainsi dans le cas de
contestation d'une élection, la Commission invoquant le droit du public
à l'information, rappelle qu'il serait important de savoir avec le plus
d'exactitude possible, le pourcentage exact de la population qui a voté
en faveur de chacune des options proposées, et cela tant au niveau d'une
circonscription qu'au niveau du Québec. D'ailleurs, puisque la Charte,
la Loi électorale et le projet de loi no 92 reconnaissent
expressément les droits politiques de chaque électeur et
considèrent l'exercice de ce droit comme un geste démocratique,
pourquoi ne pas s'assurer qu'il a pu être posé sans entrave et
comptabilisé au même titre que celui du voisin? 3.2
Au sujet du droit de vote, la Commission demande quelles sont les
raisons qui ont amené le gouvernement, contrairement à ce
qu'avait laissé entendre le Livre Blanc, à n'éliminer que
les incapacités frappant les prisonniers. 3.3
En ce qui concerne les bulletins de vote, elle ne peut qu'être
d'accord, conformément au droit à l'égalité de tous
sans distinction fondée notamment sur la race et la langue
proclamé à l'article 10 de la Charte, avec les dispositions des
articles 19 et 20 du projet de loi qui prévoient l'inscription de la
question dans les deux langues, française et anglaise, et dans le cas
des autochtones, dans la langue française et celle de la majorité
autochtone du lieu.
Une réserve cependant au sujet de ce dernier article 20. Dans la
mesure où certains autochtones ne lisent pas leur propre langue, non
plus qu'ils comprennent le français, ne conviendrait-il pas d'ajouter
aussi la traduction anglaise de la question soumise au
référendum, sur les bulletins de vote qui seront utilisés
dans des bureaux de votation situés sur une réserve indienne ou
dans un endroit où vit une communauté amérindienne ou
inuit? Cela ne serait-il pas d'ailleurs conforme à l'esprit de l'article
88 de la Charte de la langue française ainsi qu'à la Convention
de la Baie James?
4. Sur la campagne référendaire
Le projet de loi no 92 confirme avec force au chapitre VIII, la
centralisation de toute la campagne référendaire au sein des
comités nationaux, en nombre égal aux options proposées et
les seuls reconnus, selon les termes mêmes du Livre Blanc "pour recevoir
les contributions financières et procéder à des
dépenses relatives au référendum".
Les questions que la Commission des droits de la personne avait
posées au gouvernement sur le regroupement obligatoire et l'interdiction
pour toute autre option politique que celles représentées dans la
question de participer à la campagne référendaire n'ont
cependant pas obtenu, dans le projet de loi, des réponses qui la
satisfont entièrement et sur tous les points. 4.1 Au niveau du
regroupement obligatoire
À cause du contrôle très strict sur l'ensemble des
contributions et des dépenses qui pourront être faites durant la
campagne référendaire, à cause aussi de la main-mise des
comités nationaux sur tout l'aspect financier de la campagne la seule
véritable manière de participer à la campagne
référendaire en faveur d'une option est encore de s'associer au
comité national qui lui correspond.
Il s'agit là d'une contrainte qui assujettit en quelque sorte le
droit de tout citoyen ou de tout organisme de participer à la campagne
référendaire (en encourant des frais en faveur ou contre une
option) à l'obligation de faire partie de l'un des comités
nationaux.
De l'avis de la Commission des droits de la personne, l'atteinte aux
libertés d'expression et d'association qui peut se dégager de cet
assujettissement, doit d'abord être vue à la lumière de
l'objectif qui est poursuivi ici et auquel elle souscrit entièrement,
à savoir assurer aux différentes options soumises à la
consultation populaire une chance égale de faire valoir leurs avantages.
La mise en oeuvre de l'égalité des chances entre les diverses
options comporte nécessairement une part de contrainte et jusqu'à
nouvel ordre, la Commission ne demande pas mieux que de l'accepter dans son
principe.
Cependant, c'est la mesure de la contrainte qui l'inquiète encore
et le projet de loi no 92 ne contribue pas toujours, il faut bien le dire,
à en situer les paramètres exacts. Une première
réponse se trouve sans doute dans les règlements eux-mêmes
qui régiront, en vertu de l'article 23 les matières relatives au
bon fonctionnement des comités nationaux et la façon dont ils
seront constitués.
Pour la Commission, ces règlements sont d'une importance
capitale, et elle se fera un devoir de les étudier et d'en signaler
toute atteinte aux droits et libertés de la personne qu'ils pourraient
comporter, conformément aux responsabilités qui découlent
de l'interprétation qu'elle a donnée à l'article 66,
lequel lui confie la tâche de promouvoir, par toutes mesures
appropriées, les principes contenus dans la Charte. Et, comme, en vertu
de l'article 56.3 de la Charte, le mot loi inclut un règlement...
adopté sous l'autorité d'une loi, il va sans dire que les
règlements adoptés par les comités nationaux en vertu de
la Loi sur la consultation populaire, devraient faire l'objet d'une analyse
approfondie par la Commission, avant d'être appliqués.
À ce sujet, la Commission souhaited abord que ces
règlements soient publiés dans la Gazette officielle. De la
même façon qu'à l'article 28 du projet de loi, l'on
prévoit que la nomination de l'agent officiel de chaque comité
national sera publiée par le Directeur général du
financement des partis politiques dans la Gazette officielle du Québec,
la même procédure pourrait être prévue pour les
règlements qui régiront chaque comité national.
Sous réserve du tempérament qui suit, ces
règlements devraient aussi garantir à tous les individus et
groupes désireux de s'associer à un comité national:
qu'ils soient accueillis et acceptés sans discrimination aucune, au sens
de la Charte, par le comité directeur, qu'ils se voient accorder la
chance de participer au débat référendaire; et qu'ils
soient consultés par le comité directeur sur cet aspect capital
qu'est l'utilisation des fonds.
En pratique, cependant, le contrôle des dépenses impliquant
nécessairement le contrôle de toute la stratégie de la
campagne référendaire pour chacun des comités nationaux,
il se peut que des groupes refusent de se joindre au comité national
correspondant à leur option de crainte de s'y voir indûment
brimés dans leur liberté d'expression, par exemple parce qu'ils
préféreraient mettre davantage l'accent sur une approche sociale
ou culturelle plutôt que sur la dimension économique du
problème débattu.
Alors, dans le but d'éviter le boycottage des comités
nationaux et la multiplication des groupes oeuvrant hors de
l'organisme-parapluie et d'atténuer significativement la contrainte
pesant sur les libertés d'association et d'expression, la Commission
propose d'introduire la notion de statut d'affilié pour les individus et
groupes qui ne voudraient pas s'associer à la stratégie globale
décidée par le comité national, tout en étant
d'accord avec l'objectif visé en définitive.
En un tel cas, certes, pour que cette dissidence non sur les objectifs
mais sur la stratégie ait un sens, il faudra bien sûr assurer une
répartition proportionnelle des revenus entre le groupe majoritaire et
les groupes "affiliés" selon des critères qui pourront être
précisés pour chaque comité national, le cas
échéant, dans ses règlements.
Est-il besoin pour terminer de rappeler au gouvernement que les
règlements régissant les comités nationaux seront
assujettis à la Charte des droits et libertés de la personne, et
de lui souligner les nombreux écueils pour les droits et libertés
de la personne qui jalonnent nécessairement la recherche de
l'égalité stricte entre les options. Une seconde réponse
à l'interrogation que la Commission formulait concernant la mesure de la
contrainte, se trouve indubitablement dans les articles 26 et 27 du projet de
loi, c'est-à-dire dans la liste des dépenses non
réglementées qui seront permises pendant la campagne
référendaire, et dans la définition de la période
de temps où elles s'appliqueront.
L'on sait dès lors où commence et où s'arrête
le droit de participer à la campagne référendaire en
dehors des comités nationaux. Il va de soi que la liste des
dépenses non réglementées s'applique à tous, que
l'on soit associé ou non à un comité national, mais sous
réserve des précisions que nous demandons plus loin sur l'article
25 et sur la participation des individus et groupes qui représentent ou
favorisent d'autres options que celles soumises à la consultation
populaire, les limites de la participation à la campagne
référendaire pour ceux qui sont en dehors des comités
nationaux, se trouvent tout de même dans la liste des dépenses non
réglementées de l'article 26 du projet de loi.
Si l'on en saisit bien le sens, cette liste permet en quelque sorte aux
individus et groupes non désireux de s'associer à un
comité national pour une raison ou une autre, de contribuer de leur
travail et de leurs efforts au débat référendaire à
condition bien sûr que cela soit fait gratuitement ou
bénévolement, le maximum de dépenses permises ayant
été fixé au paragraphe h, à $300 "pour la tenue
d'une réunion y compris la location de la salle et la convocation des
participants".
Que dire sinon qu'il s'agit d'un minimum. De plus, si ces trois articles
23, 26 et 27 du projet de loi donnent une certaine idée de la mesure de
la contrainte que représentera au niveau de la participation au
débat référendaire la centralisation de toute la campagne
à l'intérieur des comités nationaux, l'équation
difficile entre plusieurs droits et libertés qu'a tenté de
réaliser le gouvernement dans ce projet de loi présente encore
des inconnues qui empêchent la Commission de se prononcer
catégoriquement sur son succès ou son échec. Les objectifs
sont louables, la mécanique de la mise en oeuvre est précise mais
tout cela peut-il fonctionner sans danger pour les libertés d'opinion,
d'expression ou d'association? C'est la question que la Commission se permet de
poser de nouveau au gouvernement en lui recommandant une dernière fois
la plus grande prudence dans la voie difficile où il s'est
engagé.
4.2 En ce qui concerne la participation des individus et groupes qui
représentent ou favorisent d'autres options que celles soumises à
la consultation populaire.
La Commission avait dans ses commentaires préliminaires sur le
Livre Blanc demandé au gouvernement quel cas il faisait des
libertés d'opinion, d'expression et d'association des citoyens ou
groupes partisans d'une option non représentée dans la question.
Plus exactement, ce que voulait faire préciser la Commission, c'est la
marge de manoeuvre permise en campagne référendaire aux citoyens
et organismes qui ne favorisent ni l'une ni l'autre des options soumises au
référendum, ou qui encore, voudraient intervenir à un
niveau différent de celui qui aurait été fixé dans
la question (soit par exemple en prônant l'abstention, soit en se
prononçant sur la qualité du débat, soit en voulant
coiffer de l'objectivité ou de la neutralité la plus stricte leur
participation à la campagne référendaire, dans le cas par
exemple d'associations et de groupes qui voudraient faire un travail
d'information sur les différentes options auprès de leurs
membres).
Ici encore, nonobstant la liste des dépenses non
réglementées qui normalement devrait soumettre ces
catégories particulières aux mêmes règles de
participation que les autres, la Commission ne trouve pas de réponse
claire dans le projet de loi no 92. L'ambiguïté de l'article 25 du
projet de loi dans lequel on définit ce que sont les dépenses
réglementées en est d'ailleurs peut-être la cause.
Que signifie en effet cet article 25? Possiblement, il voudrait dire que
sous réserve de l'article 26, aucune dépense ne puisse être
effectuée si elle ne vise pas la promotion d'une des options soumises
à la consultation populaire, c'est là une hypothèse.
Mais alternativement, tel que formulé, cet article ne pourrait-il
pas venir exempter de l'application des dépenses
réglementées tous ceux qui engagent des frais pour toute autre
option que celles représentées dans la question soumise au
référendum ou qui ne travaillent pas précisément
selon ses termes mêmes "pour favoriser ou défavoriser une option
soumise à la consultation populaire"? Dans cette hypothèse,
irait-on jusqu'à permettre aux groupes qui ne se sentent pas directement
concernés par l'enjeu proposé ou qui voudraient se prononcer au
débat référendaire sans être soumis aux
dépenses réglementées? Ne serait-ce pas contradictoire
avec les objectifs poursuivis en matière de réglementation des
revenus ou des dépenses?
La Commission aimerait bien qu'on apporte à ces questions une
réponse précise, en clarifiant, une fois pour toutes, la place
dans la campagne référendaire de ces individus et groupes qui se
situent en marge de l'enjeu précis de la consultation populaire.
Et cette réponse sera vitale. Surtout si le législateur
n'accepte pas d'introduire la notion de groupe affilié mentionnée
antérieurement puisqu'alors vraisemblablement le nombre de ces groupes
s'en trouverait accru.
5. Le droit à l'information
La Commission des droits de la personne avait proposé dans ses
commentaires sur le Livre Blanc d'étudier en rapport avec le
modèle britannique la possibilité d'accorderau public le droit
à une information la plus objective et la plus complète
possible.
Le projet de loi no 92 n'a pas répondu à ses attentes.
Montréal, le 5 juin 1978