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Version finale

31e législature, 3e session
(21 février 1978 au 20 février 1979)

Le mercredi 7 juin 1978 - Vol. 20 N° 114

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 92 - Loi sur la consultation populaire


Journal des débats

 

Étude du projet de loi no 92

(Dix heures quinze minutes)

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente de la présidence du conseil et de la constitution est réunie pour continuer l'étude article par article du projet de loi no 92, Loi sur la consultation populaire.

Les membres de cette commission sont: M. Bédard (Chicoutimi), M. Bisaillon (Sainte-Marie) remplacé par M. Beauséjour (Iberville), M. Char-bonneau (Verchères), M. Clair (Drummond) remplacé par M. Godin (Mercier), M. Garneau (Jean-Talon) remplacé par M. Gratton (Gatineau), M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Laberge (Jeanne-Mance), M. Levesque (Bonaventure) remplacé par M. Lavoie (Laval), M. Paquette (Rosemont), M. Roy (Beauce-Sud) et M. Samson (Rouyn-Noranda).

Les intervenants sont: M. Bertrand (Vanier) remplacé par M. Dussault (Châteauguay).

M. Dussault: Je suis déjà intervenant.

Le Président (M. Clair): Vous êtes déjà intervenant, d'accord. M. Bertrand (Vanier), pas d'autre remplacement; M. Brochu (Richmond), M. Dussault (Châteauguay), M. Guay (Taschereau), M. Lavoie (Laval) remplacé par M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), M. Lévesque (Taillon), M. Morin (Louis-Hébert) et M. Raynauld (Outremont) remplacé par M. Ciaccia (Mont-Royal).

Au moment où nous avons ajourné nos travaux, nous en étions toujours à l'article 6 du projet de loi. Avant de reprendre cette étude, je pense que le ministre aurait un message à faire aux membres de la commission. M. le ministre.

Opinion de la Commission des droits de la personne

M. Bédard: C'est un message très court. C'est simplement pour informer, M. le Président, les membres de la commission l'étant déjà, pour la plupart, que nous avons reçu hier l'opinion de la Commission des droits de la personne concernant le projet de loi en question. J'en ai pris connaissance vers les cinq heures de l'après-midi. J'en ai fait faire des copies immédiatement, pour qu'elles soient acheminées vers les représentants des Oppositions et les membres de la commission parlementaire.

S'il y a des membres de la commission qui n'en ont pas reçu une copie, nous sommes disposés à leur en fournir une.

Nous étions rendus à l'article 6. Je pense bien qu'il s'agit de continuer.

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Sur la question soulevée par le ministre, avec votre consentement, sur les commentaires de la Commission des droits de la personne, peut-on poser des questions au ministre, à savoir quel traitement il a l'intention de donner à ce document?

M. Bédard: À l'heure actuelle...

M. Lalonde: A-t-il l'intention d'apporter des amendements, conformément aux recommandations de la commission?

M. Bédard: ... j'ai demandé au contentieux de l'examiner. À partir de l'étude article par article, nous serons en mesure d'entamer la discussion, à la lumière des représentations qui ont pu être faites par la Commission des droits de la personne, sur les différents articles que nous aurons à étudier. Je ne pense pas qu'il y ait lieu de faire un débat sur l'ensemble de l'opinion de la commission, si nous voulons avancer, je proposerais que nous continuions à procéder article par article.

Le Président (M. Clair): J'ai laissé le député de Marguerite-Bourgeoys poser sa question et le ministre y apporter une réponse. Ce n'est pas une directive que je rends, parce que j'aimerais réfléchir davantage à la question avant de rendre une décision, si j'avais à en rendre une, mais il me semble qu'on aurait avantage à étudier cette opinion, au fur et à mesure de l'étude article par article. Je n'ai pas eu l'occasion de prendre connaissance en détail de l'opinion de la commission, mais j'imagine que cela doit porter sur des choses précises qui sont à l'étude.

M. Lalonde: M. le Président, vous vous souvenez sûrement que cette commission, et non pas le gouvernement, avait unanimement adopté une résolution, je crois que c'était unanimement, demandant à la Commission des droits de la personne d'expliciter les commentaires qu'elle avait remis au gouvernement, cette fois, il y a plusieurs mois.

Il me semble qu'il est tout à fait dans l'ordre que les membres de cette commission s'interrogent sur le traitement non pas que le gouvernement va faire de cette opinion, mais que la commission va en faire maintenant, et pourquoi s'adresser au ministre de la Justice au sujet de la réaction directe à l'action de la commission. Il me semble que si on laissait simplement le gouvernement ou le ministre se préoccuper de cette opinion, je pense que la commission ne ferait pas son devoir.

Le Président (M. Clair): Je suis tout à fait d'accord avec vous, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Tout ce que je vous indique, c'est que, sur la méthode de procéder, il m'apparaît person-

nellement que, plutôt que d'en faire un débat général et de mettre ensuite de côté l'opinion de la commission, on devrait l'utiliser au fur et à mesure des articles et de chacun des sujets sur lesquels la commission a pu donner son avis.

Quoi qu'il en soit, j'ai l'impression de mener le débat tout seul. Je n'ai pas l'intention de le faire non plus.

M. Lalonde: Si on devait remettre à plus tard, à une autre séance, toute action de la commission sur cette opinion, je serais d'accord, parce qu'on vient de la recevoir. On ne peut pas intelligemment la commenter actuellement. Mais je ne suis pas sûr qu'on ne devrait pas — nous allons y réfléchir — suggérer à la commission, à une séance ultérieure, de discuter de cette opinion qui lui est adressée ou enfin qui est adressée au ministre à la suite de la demande de la commission.

Le Président (M. Clair): Dans la mesure, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, où je comprends que ce seront des suggestions à venir, je suis bien d'accord avec vous. À ce moment-là, je rendrai les décisions qu'il y a lieu de rendre, s'il y a lieu d'en rendre. Mais on s'entend pour dire qu'on ne commence pas ce matin par étudier l'opinion de la commission, qu'on continue l'étude article par article.

M. Lalonde: Oui, M. le Président, je pense que c'est sage. Nous allons toutefois, je pense, insister, et très bientôt, pour qu'on en tienne compte, parce que, déjà, si j'ai parcouru seulement les quelques premières pages, on a des commentaires aux tous premiers articles, dans cette opinion.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mégantic-Compton, avez-vous demandé la parole sur ce sujet?

M. Grenier: Oui, M. le Président, seulement pour dire que, prenant connaissance des documents un peu tard, avant l'ouverture de la commission, il y avait, bien sûr, des commentaires qui touchent chacune des parties d'exposés faits par le membre de cette commission.

Je pense qu'il appartient à cette commission de se servir de ce document, comme de tout autre document important qui nous est soumis et, lors de l'étude article par article, de s'en servir, afin qu'on ne laisse quand même pas à une commission paragouvernementale le soin de décider pour nous, aussi objective qu'on puisse la connaître, c'est nous qui sommes les gens qui doivent prendre des décisions.

C'est à cette table que le travail doit se faire et, je pense, aux députés de se servir de ces arguments pour le faire article par article. J'epère aussi qu'il nous sera permis d'étudier, de repasser les textes qui font partie d'articles qui ont déjà été adoptés.

Le Président (M. Clair): Le député de Mercier. Le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, je suis d'accord avec les membres de l'Opposition qui viennent de s'exprimer dans le sens que la Commission des droits de la personne vient de faire connaître une opinion qui a été effectivement demandée par vote unanime de la commission. J'ai devant moi le texte de la motion. Je n'ai pas besoin de la répéter. Je pense que tout le monde s'en souvient. D'ailleurs, dans la lettre adressée à l'honorable ministre de la Justice par le président de la commission, M. René Hurtubise, il est effectivement repris que c'est à la suite de la demande de la commission que ces commentaires nous sont parvenus.

Malgré que je trouve normal comme tout le monde qu'on se donne un peu de temps, même si, moi, je l'ai eue hier soir, il semble que d'autres ne l'ont pas eue hier soir. Ils n'ont donc pas eu le temps qu'il faut pour en prendre connaissance. Il me semble que nous devrions pouvoir utiliser certaines périodes, au cours de l'après-midi ou en soirée, pour qu'au moins la commission puisse prendre connaissance officiellement de ces recommandations, quitte à pouvoir en discuter et les revoir aux articles concernés, notamment les articles 6, 7, 8 et 9 et autres, 25, 27, 28, etc.

C'est tout simplement pour souligner que c'est une réponse à un geste officiel posé par la commission. C'est normal que la commission puisse en prendre connaissance officiellement aussi.

Le Président (M. Clair): Merci, M. le député de Rouyn-Noranda. Messieurs, avant de donner la parole au député de Mercier qui a demandé la parole, même si la séance a débuté depuis quelques minutes à peine, accepteriez-vous que le député de Jonquière, M. Vaillancourt, remplace M. Lévesque (Taillon) comme intervenant, la séance étant à son début? Alors, M. Vaillancourt (Jonquière) remplacera M. Lévesque (Taillon) comme intervenant.

M. le député de Mercier.

M. Godin: M. le Président, c'est pour une directive.

Le Président (M. Clair): C'est pour ou ce n'est pas?

M. Godin: C'est pour une directive. Est-ce que c'est maintenant qu'on doit se prononcer sur la recevabilité de ceci comme document à étudier ou si... parce que l'intervention du député de Marguerite-Bourgeoys n'est pas très précise là-dessus. Est-ce qu'on doit intervenir maintenant pour dire notre opinion sur les raisons de... se servir de cela comme document de soutien dans le cas de l'étude article par article, ou si on doit l'étudier comme tel, ou si on doit reporter cette analyse à une autre réunion, à la demande du député de Marguerite-Bourgeoys?

Le Président (M. Clair): Distinguons deux choses: le mandat de la commission c'est l'étude article par article du projet de loi.

M. Godin: C'est clair.

Le Président (M. Clair): C'est clair. Dans le cadre de cette commission, cependant, on peut utiliser tout document au point de vue d'un article spécifique. D'autre part, le député de Marguerite-Bourgeoys a dit qu'il aurait des suggestions à faire, si je l'ai bien compris, relativement à l'utilisation, ou à l'étude, ou à des demandes que pourrait formuler la commission au gouvernement, suite à la présentation de ce document par la Commission des droits de la personne. Mais, je ne peux pas rendre de décision sur les suggestions qui viendront...

M. Godin: D'accord, je vois que nos collègues d'en face ont donné leur opinion sur le sort qui devrait être réservé à cela. Est-ce que, de notre côté, on va attendre que les suggestions viennent ou si on peut se prononcer dès maintenant sur la façon, la venue de ce document à la commission?

M. Lalonde: M. le Président, puisqu'on a référé à ce que j'ai dit tantôt, je pense qu'actuellement, au moment où on se parle, personne n'est prêt, à moins que vous ne l'ayez vu longtemps avant nous.

M. Godin: Non, je ne l'ai pas vu, mais c'est seulement pour savoir si le débat a lieu maintenant sur...

Le Président (M. Clair): Personne n'a demandé, M. le député de Mercier...

M. Godin: ... la forme.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mercier, personne, à ma connaissance, si je comprends bien les événements qu'on vit actuellement, personne n'a demandé d'étudier spécifiquement, immédiatement, le document comme tel. Ce sont des réactions très préliminaires qui ont été faites par chacun des membres qui ont parlé jusqu'à maintenant, mais personne n'a demandé à faire connaître ses réactions officielles, précises, détaillées sur le contenu ou sur la méthode...

M. Godin: D'accord, c'est ce que je voulais savoir. Quant à la méthode d'étude de ce document...

Le Président (M. Clair): II n'y a pas de suggestion formelle.

M. Godin: ... dans le cadre d'article par article, en tant que tel, il y a deux tendances qui s'affrontent ici, actuellement...

Le Président (M. Clair): II n'y a pas d'autre chose, actuellement, de possible, puisque je n'ai pas rendu de décision sur d'autre motion que de se servir de ce document au cours de l'étude article par article, parce qu'il n'y a eu aucune autre motion, ni reçue, ni adoptée pour autre chose que ce soit.

M. Godin: Cela répond à ma question, M. le Président.

Le Président (M. Clair): II y avait le député de Laval...

M. Lavoie: Très brièvement, pour les fins de la bonne compréhension du journal des Débats, je ne demanderai pas la lecture intégrale du document, mais est-ce qu'il y aurait consentement de la commission qu'il soit annexé au journal des Débats comme document important. On en discute actuellement et les abonnés du journal des Débats, je pense qu'il serait utile qu'ils puissent en prendre connaissance par le moyen de l'annexe au journal des Débats.

M. Bédard: Je n'ai aucune objection là-dessus.

M. Samson: Oui.

Le Président (M. Clair): Même si, à ma connaissance, c'est surtout au niveau de l'étude après la première lecture qu'on a procédé comme suit. Étant donné qu'il y a un consentement unanime au niveau de la commission, cela va.

M. Bédard: Étant donné que c'est une opinion qui a été demandée officiellement par la commission, il me semble que ce serait normal que ce soit indiqué au journal des Débats.

Le Président (M. Clair): Je demande au journal des Débats de bien vouloir reproduire l'opinion de la Commission des droits de la personne.

M. Lavoie: In extenso.

Le Président (M. Clair): In extenso. (voir annexe)

M. Lavoie: Sans correction.

L'objet de la consultation

Le Président (M. Clair): Au moment où nous avions ajourné nos travaux, la semaine dernière, le député de Laval avait fait une motion d'amendement qui était à l'effet d'ajouter, à la fin de l'article, l'alinéa suivant: "Quel que soit l'objet du référendum, il doit s'agir d'une question à laquelle il ne peut être répondu que par un oui ou un non". Ensuite de cela, le député de Marguerite-Bourgeoys avait fait une motion de sous-amendement à l'effet de remplacer les mots "Quel que soit l'objet du référendum" par les mots suivants: "Dans le cas d'un référendum portant sur le statut constitutionnel du Québec".

Quelques membres étaient déjà intervenus. Est-ce que quelqu'un désire intervenir sur le sous-amendement ou si je le mets immédiatement aux voix? (10 h 30)

M. Lalonde: M. le Président, je voudrais...

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous aviez encore...

M. Lalonde: ... parler sur le sous-amendement.

Le Président (M. Clair): Sur le sous-amendement, vous aviez déjà exercé un droit de parole de trois minutes.

M. Lalonde: Je vous remercie, M. le Président.

J'ai examiné de façon très attentive les arguments qui ont été apportés par le député de Terrebonne et le ministre, jeudi soir dernier, à l'encontre de ma proposition de sous-amendement. J'ai examiné la transcription, pour être bien sûr de les avoir bien compris. J'ai pris quelques notes dont je voudrais vous faire part, M. le Président.

L'amendement que j'ai préparé à la motion du député de Laval avait pour but de rendre cette dernière acceptable au gouvernement. Je ne veux pas revenir là-dessus. On se souvient que le député de Maisonneuve — auteur de ce projet de loi — avait exprimé l'opinion que, dans le cas d'un référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec, il serait personnellement favorable à ce que la question n'amène qu'un oui ou qu'un non. Les porte-parole du Parti québécois ont répété à satiété que le référendum sur l'avenir politique du Québec et, par voie de conséquence, du Canada serait honnête et que la question serait claire et précise. Tous les péquistes se réclament de la plus grande honnêteté intellectuelle à cet égard. Or, limiter la réponse à un oui ou un non exige justement une question plus rigoureuse que celle qui donne ouverture à plusieurs choix. Une question, par exemple, qui inviterait la population à cocher l'une des propositions suivantes, suivant sa préférence: La séparation, l'indépendance, la souveraineté-association, la Confédération, le fédéralisme renouvelé et, enfin, le statu quo, risquerait de ne rien régler du tout. Voilà pourquoi nous préférons une question qui donne ouverture à un oui ou à un non.

La problématique du référendum est connue, mais je pense qu'il est bon de la rappeler, à ce stade de nos délibérations. Le Parti québécois réclame l'indépendance du Québec et décide de l'obtenir par les voies démocratiques, seule manière acceptable — sans doute — et aussi la seule possible dans le contexte politique nord-américain. Mais voilà, il faut se faire élire et les résultats des élections de 1970 et de 1973 indiquent que le projet constitutionnel du Parti québécois constitue son principal obstacle à son accession au pouvoir. Ironiquement, l'indépendance, raison d'être du PQ, est à la fois le principal objectif du Parti québécois et la principale objection des Québécois à ce dernier. Cette bizarre contradiction est à la source de l'ambiguïté opaque dans laquelle s'est carrément installé le Parti québécois en réclamant le pouvoir, non pas pour faire l'indépendance, mais pour faire un bon gouvernement, disait-il. Mais voilà, pourquoi étudions-nous le projet de loi no 92? Justement à cause de cette promesse du Parti québécois. Sans l'objection des Québécois à la séparation, la consultation populaire serait sûre- ment au dernier rang des priorités de ce gouvernement. La politique de consultation populaire, que je sache, n'a commencé à voir le jour, dans le programme du Parti québécois, que lorsqu'on a trouvé le truc du référendum...

M. Paquette: C'est ridicule! On corrigera après, M. le Président.

M. Lalonde: Mais il y a plus, M. le Président, au bazar des ambiguïtés du Parti québécois, on trouve autre chose.

M. Paquette: Basse partisanerie. Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Lalonde: S'étant solennellement engagé à obtenir un référendum sur l'indépendance, on a obtenu le pouvoir. Ayant maintenant le pouvoir, malgré l'indépendance, le Parti québécois ne veut plus permettre à l'indépendance de l'éloigner du pouvoir. Alors, le référendum sur l'indépendance, que l'on sait fort périlleux pour tout bon péquiste au pouvoir, on a commencé par le cacher derrière une loi générale, suite à un livre blanc qui chante les vertus de la consultation populaire, pierre angulaire de notre démocratie.

C'est dans cette perspective qu'on a conclu, du côté du gouvernement, à la nécessité d'un large consensus sur cette loi, il ne faut pas de controverse. Il faut un large consensus, sinon, toute l'opération est compromise.

Alors, pourquoi la réponse du gouvernement à mon amendement est-elle négative? Elle laisse présager un refus systématique du gouvernement de discuter du seul vrai référendum que tous les Québécois et les Canadiens attendent, celui sur l'indépendance. Non pas que la majorité des Québécois et des Canadiens soient en faveur; mais, étant donné que la question, le problème est posé, la majorité des Québécois et des Canadiens veulent que le référendum sur l'indépendance soit tenu. Vous me croyez peut-être pessimiste, M. le Président, de conclure au refus systématique du gouvernement de discuter du référendum sur l'avenir constitutionnel. Mais je crois que plusieurs indices vont en ce sens et les voici: premièrement, l'aveu du ministre; deuxièmement, la faiblesse lamentable des arguments du député de Terrebonne et du ministre dans leur argumentation l'autre soir; — j'en ferai une analyse plus tard — troisièmement, le caractère non controversé de ma motion, qui correspond, premièrement, à une promesse du Parti québécois, celle de tenir un référendum sur l'indépendance — c'est ce à quoi vise mon amendement — et, deuxièmement, à une déclaration du ministre parrain, original, mais auteur de ce projet de loi, le député de Maisonneuve, qui est appuyé par le premier ministre à savoir qu'il est souhaitable qu'on ait une question à laquelle on ne puisse répondre que par un oui ou par un non. Le Parti québécois s'engage à tenir un référendum sur l'indépendance. On ne peut pas me blâmer de faire un amendement dans ce

sens, réduit à un référendum sur l'avenir constitutionnel.

Le premier ministre et le député de Maisonneuve, auteur du projet de loi, déclarent publiquement que la question de ce même référendum devrait se répondre par un oui ou par un non. Comment nous blâmer, nous, de faire cet amendement? Et pourtant, le député de Terrebonne est contre, le ministre aussi. Voici leurs arguments. Le député de Terrebonne a commencé par un aveu; il reconnaît que le député de Maisonneuve, auteur de cette loi, est en faveur d'une question à laquelle on doive répondre par un oui ou par un non. À la page 1 de la transcription, du folio 295, le député de Terrebonne dit ceci: "Le ministre d'État s'engageait à recommander au gouvernement que, pour un référendum de nature constitutionnelle, la question soit simple et qu'on y réponde par un oui ou par un non. Ce n'est pas un engagement du gouvernement, mais un engagement personnel du ministre à recommander à son gouvernement une formule telle". Voilà pour l'aveu!

Deuxièmement, le député de Terrebonne reproche ensuite aux députés libéraux d'avoir plagié cet amendement à la loi fédérale qui, à certains égards, donne, d'après lui, une leçon ou tente de donner une leçon de démocratie au Parti québécois. On est très chatouilleux, de ce côté de la table, M. le Président, en ce qui concerne le projet de loi fédéral. Mais c'est absolument faux qu'on ait plagié cela du projet de loi fédéral. Bien avant que le projet de loi fédéral — et je vous avoue, entre vous et moi, que je ne l'ai pas lu, mais c'est simplement pour moi que je parle...

M. Paquette: Nous n'avons pas à prendre de leçon de démocratie!

M. Lalonde: Je n'ai pas à en juger ici, de toute façon. C'est faux qu'on ait pris cela du projet de loi fédéral. Je présume que le député de Terrebonne dit la vérité lorsqu'il dit que c'est dans le projet de loi fédéral, parce que je ne l'ai pas lu, mais on en parlait bien avant que le projet de loi fédéral soit déposé. Et même, quand cela serait. Et puis après? On dirait que le député de Terrebonne, aveuglé par la partisanerie, ne s'est pas aperçu que son argument s'inspire de l'intolérance, qu'il manque d'objectivité, qu'il participe au plus rétrograde mépris de l'intelligence. C'est exact, mais, parce que cela vient du fédéral, c'est mauvais.

M. Godin: C'est Bossuet!

M. Lalonde: Mais je pense qu'un tel argument laisse présager le régime d'autoritarisme intellectuel qu'on voit de plus en plus dans les décisions et les gestes de ce gouvernement.

M. Godin: C'est de Ryan, cela!

M. Lalonde: Enfin, le député de Terrebonne s'est lancé dans une démonstration qui se voulait drôle, la pauvreté du libellé de la loi fédérale. Belle pertinence, M. le Président!

Puis vint l'hypothèse des questions multiples dans le projet fédéral. À la page 299, à ce qui nous a valu à peu près la plus nébuleuse partie de l'intervention du député. À la fin, on ne savait plus s'il allait se déclarer pour l'amendement du député de Laval qui ne prévoit pas de question multiple et s'il allait justement favoriser cet amendement justement à cause du projet fédéral qui en prévoit. Mais non, une dernière pirouette a permis au député de Terrebonne de tout nier et de tout affirmer à la fois.

Au fond, la dialectique est simple: Tout ce qui est libéral est mauvais.

Enfin, le député fait l'étalage d'une ignorance étonnante pour un législateur aguerri. Il s'oppose à ce qu'il appelle l'introduction d'un principe de spécificité dans une loi-cadre.

Or, de nombreux précédents prouvent la pauvreté de la position du député. Je vous ferai simplement référence au Code des professions, à l'article 179, à l'article 44, à l'article 48, à l'article 41, à la Loi sur les jurés (1976, chapitre IX, article 41), à la Loi 101, une loi de ce gouvernement, aux articles 73, 81, 88, 96 et 97 où, dans une loi-cadre, on prévoit une disposition tout à fait spécifique. Même le projet de loi 92 prévoit des dispositions très spécifiques à l'article 20, alors qu'il dit: "Nonobstant l'article 19, la question inscrite sur les bulletins de vote utilisés dans les bureaux de votation situés sur une réserve indienne ou dans un endroit où vit une communauté amérindienne ou inuit, doit être rédigée en français et dans la langue, etc..." Peut-on avoir une disposition plus spécifique, plus détaillée que celle-là? C'est dans la loi-cadre.

M. Bédard: Oui, on vous expliquera pourquoi. C'est en relation avec des lois existantes.

M. Lalonde: Oui, je ne suis pas en désaccord avec ces dispositions, mais...

M. Bédard: C'est en relation avec des lois existantes.

M. Lalonde: ... c'est quand même l'introduction d'un principe de spécificité dans une loi-cadre, puisqu'il faut citer l'auteur. Il me semble que son argument est tout à fait inacceptable. On doit conclure, M. le Président, que c'est la seule façon que le député de Terrebonne a trouvée, a choisie, pour s'affranchir de l'engagement du député de Maisonneuve.

Devant la faiblesse étonnante des arguments du député de Terrebonne, je continue, quant à moi, de me réclamer de l'engagement du député de Maisonneuve pour inviter tous les députés à appuyer ma motion. Le ministre commence à souhaiter qu'on ne discute pas du seul vrai référendum, celui de l'indépendance, au cours de l'étude du projet de loi. C'est étonnant pour la transparence, mais c'est bien ce qu'il a fait au début de son intervention.

Pourtant, le référendum sur l'indépendance est une créature péquiste, mais le ministre ne veut

pas en parler. La théorie voulant que le gouvernement cache son vrai visage derrière la respectabilité d'une loi-cadre prendrait-elle de plus en plus de vraisemblance? Quoiqu'il en soit...

M. Bédard: C'est incroyable de faire une argumentation comme celle-là!

M. Lalonde: ... le ministre se pourfend d'une solennelle promesse d'une question claire, unique et précise. Va-t-il appuyer l'amendement? On s'y attend. Mais non, il déclare, au début de son intervention qu'il est pour une question claire, nette et précise...

M. Bédard: Même unique, claire et précise.

M. Lalonde: ... même unique, mais pourquoi ne pas mettre cela dans la loi?

M. Bédard: Vous ne comprenez pas ce qu'est une loi-cadre.

M. Lalonde: Le temps des promesses et des grandes déclarations ronflantes est terminé, c'est le temps d'écrire des lois, nous sommes des législateurs maintenant. Pourquoi ne pas le mettre dans la loi, pour ce qui concerne le référendum sur l'indépendance?

Le ministre a aussi l'argument que c'est une loi-cadre. J'ai déjà répondu. Je pense que cela vaut autant pour le ministre que pour le député de Terrebonne, sauf que j'aurais cru que le ministre de la Justice, le jurisconsulte du gouvernement, le grand patron des légistes, le rédacteur en chef des lois, nous donnerait une démonstration un peu plus sérieuse de sa connaissance en matière législative. (10 h 45)

Ensuite, il tente de distraire la galerie en dessinant un éventuel et hypothétique référendum sur le régime présidentiel. Pourquoi pas un éventuel référendum sur l'association avec Cuba ou avec les États-Unis? À ce moment-là, ce ne serait pas un oui ou un non qu'il faudrait prévoir, ce serait un "si " et un "no". Pourquoi pas un "da " et un "niet"?

M. Godin: "Que cultura"! M. Lalonde: Pourquoi pas?

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde: C'est complètement ridicule, M. le Président, et le ministre, qui n'a pas le sens du ridicule très développé, trouve le moyen de terminer son double saut périlleux de la façon suivante... Et, tenez-vous bien, le ministre avait bien dit qu'il ne pouvait pas appuyer mon amendement, mais, pourtant, à la page 1 du folio 304, il dit ceci: "Je pense que, concernant le référendum spécifique sur l'avenir constitutionnel du Québec que nous avons en tête, je n'ai pas besoin de répéter ce que j'ai dit au tout début, à savoir que cela devrait être une question unique, que cela devrait se répondre par un oui ou un non".

C'est l'opinion du ministre, c'est l'opinion de l'auteur du projet de loi, et il n'y a pas un député qui veut voter en faveur. Pourquoi? Je pense, M. le Président, que le gouvernement se voit démasqué dans sa tentative de donner des grands airs de respectabilité à son option constitutionnelle, en la cachant derrière une loi générale, une loi-cadre. Ce n'était pas aussi évident jusqu'à ce qu'on aborde l'article 6, il faut l'avouer. On avait déjà un climat d'ouverture assez évident au début, avec le député de Maisonneuve, simple coïncidence, j'espère, depuis l'arrivée du ministre de la Justice, la fermeture et l'étalage d'arguments fallacieux et inutiles.

Le débat ne devrait pas être politique dans le sens partisan, parce qu'on parle d'une loi-cadre sur le référendum. Mais il risque de l'être si le gouvernement se refuse à parler du vrai et du seul référendum qui préoccupe les Québécois, le référendum sur l'indépendance. M. le Président, j'ai terminé.

Le Président (M. Clair): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, j'aimerais appuyer le sous-amendement fait par le député de Marguerite-Bourgeoys à l'amendement proposé par le député de Laval. En fait, c'est pour se rendre à la demande du parrain du projet de loi, le député de Maisonneuve, que le député de Marguerite-Bourgeoys, à notre dernière séance, a fait cette motion de sous-amendement, pour spécifier que. dans le cas d'un référendum portant sur le statut constitutionnel du Québec, et seulement dans ce cas précis, il devait s'agir d'une question à laquelle il ne pourrait être répondu que par un oui ou par un non.

Au cours du débat sur la motion d'amendement originale du député de Laval, le député de Maisonneuve, ministre d'État à la réforme électorale, avait indiqué à plusieurs reprises que son objection à l'adoption de l'amendement n'en était pas une de fond, mais bien plutôt une de forme.

Je vous citerai, à cet effet, certains extraits des épreuves du journal des Débats du 18 mai, au numéro 271, par exemple, où M. Burns dit: "Si celle-ci était de cette nature, c'est-à-dire dans une loi à caractère spécifique, on peut très bien, immédiatement, dès l'adoption de la loi. savoir à peu près dans quel genre la question va être formulée. À ce moment-là, on ne prévoit même pas de cas hypothétiques qui peuvent se présenter dans deux ans, trois ans, quatre ans, cinq ans. dix ans: c'est là où se trouve la difficulté dans une loi à caractère organique, savoir justement se lier les mains à un type particulier de référendum, à un type particulier de question".

Ai-je besoin de vous rappeler, M. le Président, que c'était là une des raisons qui nous ont fait opter dès le début, avant même le dépôt du projet de loi, c'est-à-dire au moment de la divulgation du

livre blanc, qui nous avait fait opter, dis-je, pour une loi spécifique plutôt qu'une loi organique de la consultation populaire? C'était une des considérations qui nous avaient convaincus que le référendum auquel tous au Québec pensent, le seul référendum qui a une certaine importance au moment où on se parle, que ce référendum, dis-je, se devait d'être retenu à partir d'une loi spécifique plutôt que d'une loi-cadre.

Le ministre responsable de la réforme électorale disait au même rouleau, un peu plus loin: "Je veux vous répéter, encore une fois, pour la "nième" fois, que je suis personnellement favorable à une question qui se réponde, dans le cas du référendum sur l'avenir politique du Québec, par un oui ou par un non". C'était bien clair. Je pense qu'on ne l'a pas caché. Je pense même que le premier ministre ne l'a jamais caché. C'est un cas, sauf que je vous dis qu'il y a beaucoup d'argumentation qui peut être faite pour votre position, c'est-à-dire pour l'adoption de l'amendement proposé, amendement du député de Laval, sans la précision apportée par le sous-amendement du député de Marguerite-Bourgeoys, pour votre position. Il y a beaucoup d'argumentation qui peut être faite contre cette position, pour laisser plutôt cette ouverture à la loi pour des cas qu'on n'imagine pas encore. Cette loi doit être à caractère général.

Nous convenons que la loi doit être à caractère générai, mais, comme l'a expliqué le député de Marguerite-Bourgeoys il y a quelques instants, il y a plusieurs précédents, plusieurs exemples de lois-cadres où des dispositions viennent préciser la portée de certains articles. C'est tout ce que vise à faire la motion de sous-amendement du député de Marguerite-Bourgeoys dont nous discutons ce matin.

Le député de Maisonneuve disait au rouleau 272 de cette même séance du 18 mai: "Je dis que s'il s'agissait d'une loi spécifique pour un référendum et, en particulier celui auquel probablement le député de Laval pense de façon plus intense, parce que c'est le plus invitant et le plus rapproché — on parle, bien entendu de celui sur l'avenir constitutionnel du Québec — je n'aurais pas de difficulté à me ranger à son idée. Possiblement, je demanderais au Conseil des ministres de m'autoriser à inclure dans la loi un oui ou un non comme question". Il me semble que c'est clair.

M. Bédard: ...

M. Gratton: Je ne peux pas vous dire qu'il a parlé d'un oui ou d'un non comme question. C'est le ministre qui a fait l'erreur, ce n'est pas moi, je le citais.

C'est clair que ce que le député de Maisonneuve nous disait le 18 mai c'était: Je suis d'accord en principe sur votre amendement, je suis d'accord sur le fond de votre amendement et je l'adopterais volontiers tout de suite, au nom du Conseil des ministres, je le proposerais au Conseil des ministres, si on était en train de discuter d'une loi spécifique, mais, malheureusement, c'est d'une loi-cadre qu'on discute d'ailleurs.

C'est bien de valeur, on va répéter et on va répéter à satiété qu'on a l'impression, du côté de l'Opposition, que c'est justement une des principales raisons pour lesquelles le gouvernement a préféré proposer une loi-cadre plutôt qu'une loi spécifique, que c'est justement dans le but d'être le plus ambigu possible, en tout cas, d'être dans une position de préciser le moins possible d'avance et le moins tôt d'avance, dans la discussion, ses vraies intentions. C'est tout à fait caractéristiques de toute la démarche du gouvernement vis-à-vis du référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec, tant par son refus systématique de publier ses études, de préciser son option souveraineté-association aussi bien que de préciser, dans un texte de loi, les moyens, l'outil que constitue le projet de loi que nous discutons ce matin.

C'est, je pense, très évident pourquoi le député de Marguerite-Bourgeoys a présenté cette motion de sous-amendement, c'est justement pour se rendre au voeu du ministre d'État à la réforme électorale qui le disait en toutes lettres.

Je continue, au rouleau 272, de citer le député de Maisonneuve: "M. le Président, à ce moment-là, dis-je, je n'aurais pas eu de difficulté à me ranger à cette opinion, mais, comme la loi est à caractère général, je pense qu'on doit garder cette prudence vis-à-vis d'éventuels autres référendums".

M. Bédard: Vous avez la réponse... M. Gratton: Oui, c'est cela.

M. Bédard: L'argumentation du ministre qui m'a précédé est la même pour moi et vous ne voulez pas comprendre...

M. Gratton: Oui, c'est cela! M. Bédard: ... l'argumentation.

M. Gratton: Effectivement, M. le Président, si on parle des interventions du ministre de la Justice, qui est venu remplacer le ministre de la réforme électorale, malheureusement indisposé par la maladie, au lendemain du 18 mai, on voyait, sur huit colonnes, photo du ministre de la Justice à l'appui — il s'agit ici du journal Le Droit, vendredi...

M. Grenier: Ce n'est pas votre meilleure!

M. Lalonde: II n'avait pas l'air bien convaincant là-dessus!

M. Gratton: ... 2 juin 1978...

M. Bédard: Quand on en est rendu à analyser des photos, vous n'êtes pas sérieux franchement.

M. Lalonde: C'est vous qui avez dit que c'était beau.

M. Bédard: C'est comme votre argumentation.

M. Lavoie: Tâchez d'avoir un peu d'humour, voyons!

Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs!

M. Gratton: M. le Président, question de règlement. Je ne pense avoir fait allusion, d'aucune façon, à l'analyse de la photo. D'ailleurs...

M. Bédard: Allons dans l'argumentation. Je suis sûr que vous la trouvez bonne!

M. Lavoie: On va laisser cela à la gent féminine.

M. Bédard: C'est cela!

M. Gratton: ... la photo ne lui rend pas justice.

M. Bédard: Ce sont les arguments qui sont importants.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît, messieurs!

M. Gratton: Je me réfère donc à une dépêche de la Presse canadienne que j'ai retrouvée dans l'édition du 2 juin du journal Le Droit. Le titre sur huit colonnes: "Référendum, une question unique, claire et précise, Marc-André Bédard ". C'est d'ailleurs ma mère, M. le Président, qui, au moment où je l'ai rencontrée, la fin de semaine suivante, me disait: "Enfin, le gouvernement a accepté de poser une question unique, claire, et qui appellerait une réponse par un oui ou par un non".

M. Godin: Son fils l'a intoxiquée!

M. Paquette: On va aller lui parler à sa mère!

M. Gratton: M. Bédard l'a dit...

Une voix: II a dit bien d'autres choses.

M. Gratton: M. Burns l'a dit, M. Lévesque, René (Taillon) l'a dit, mais il n'y a pas un seul de ses ministres qui ait accepté de le mettre dans la loi. Le ministre disait tantôt: "Des mots". S'il y a un gouvernement qui connaît cela des mots, c'est bien celui qui est en face de nous, M. le Président. Des mots, en voulez-vous des mots!

Lisons un peu le texte de l'article: "Le gouvernement posera une question unique, claire et précise, qui amènera une réponse précise de la population". C'est l'assurance qu'a donnée, hier soir, le ministre de la Justice, Me Marc-André Bédard, alors qu'il parrainait, pour la première fois, l'étude en commission parlementaire du projet de loi no 92...". Le ministre l'a dit. Grande déclaration, photo — de téléphoto PC — et titre ronflant de la PC sur huit colonnes, mais dans la loi, rien! Toujours rien, parce que, voyez-vous, chers électeurs, il ne s'agit pas d'une loi-cadre sur le référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec, il s'agit d'une loi-cadre. Imaginez-vous donc! On va peut-être poser toutes sortes de questions sur toutes sortes de sujets à la population québécoise. Pourquoi s'encarcaner immédiatement à préciser, dans le projet de loi, que la question, au moment du référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec, devra appeler une question par un oui ou par un non, parce que peut-être bien on tiendra un référendum sur le port obligatoire de la ceinture de chasteté, par exemple. Peut-être vou-dra-t-on, à ce moment, que les gens répondent par un oui ou par un non, mais peut-être par un "peut-être". Sait-on jamais quelle sera la position de la population vis-à-vis de cette importante question de la ceinture de chasteté qui fera peut-être l'objet du rodage dont parlait le ministre de la réforme électorale, de cet outil qu'on de donne avec la loi no 92? C'est de la foutaise, M. le Président! C'est complètement ridicule et j'irai même plus loin, c'est hypocrite...

M. Vaillancourt (Jonquière): II aurait dû dormir quelques heures de plus!

M. Paquette: Allez donc dormir encore un peu, cela va vous faire du bien!

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Gratton: C'est hypocrite, dis-je, M. le Président, de la part de tous ceux qui dans ce gouvernement... Il y a une expression en anglais qui dit: "To pay lips service", "that is what you are doing, you are paying lips service " à une question unique, claire et précise, mais lorsqu'il s'agit d'entériner vos belles intentions et vos belles paroles, dans le texte du projet de loi: "Ah non, c'est une loi-cadre! " Imaginez donc!

M. le Président, je citerai à nouveau... En fait, M. le Président, vous permettrez une brève dis-gression...

M. Lalonde: Digression! M. Gratton: Digression.

M. Paquette: Vous n'êtes pas dans une digression depuis le début?

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Gratton: Non, pas à ma connaissance. Voulez-vous faire appel au règlement, sur la pertinence? Allez-y.

M. Paquette: Non, cela va. Continuez, je vous en prie.

M. Gratton: Si vous n'avez rien à dire, laissez-moi parler. (11 heures)

Justement, sous le même article dont je parlais tantôt, il y a un autre titre, toujours de la Presse canadienne: "Le référendum sur l'indépendance, la CEQ réclame une loi spéciale". Il ne s'agit sûrement pas d'une officine du Parti libéral, on parle de la CEQ. "Les 200 membres du conseil général de la CEQ ont rejeté hier l'institutionnalisation des consultations populaires prévue par le projet de loi 92 et ont réclamé que le référendum

sur l'indépendance fasse l'objet d'une loi spéciale. C'est ce que la CEQ réclame".

On ne parle plus des gros méchants du Parti libéral, on parle de la bonne et unique CEQ. Pourquoi veut-elle cela? On pourrait lire le reste du texte pour se rendre compte qu'elle ne croit pas à cet outil de la démocratie. Ce n'est pas de cela qu'on parle ici. Si on pouvait dire à la CEQ: On ne vous donne pas ce que vous désirez, c'est-à-dire une loi spéciale sur le référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec, on vous donne une loi-cadre, parce qu'on a décidé de faire cela; mais, dans notre loi-cadre, on vous dit tout de suite que, dans le cas de ce référendum en particulier, la question sera unique, claire, et appellera comme réponse uniquement un oui ou un non.

J'ai l'impression que la CEQ serait déjà moins en opposition avec le projet de loi 92, parce que, justement, la CEQ voudrait comme combien d'autres Québécois, pas nécessairement strictement des fédéralistes, un tas innombrable d'indépendantistes, de vrais indépendantistes eux aussi, bien voir le gouvernement faire son lit une fois pour toutes, dire clairement ce qu'il représente. Forcément, les vrais indépendantistes sont aussi mélangés que les fédéralistes quand ils lisent les déclarations du député de Mercier à Toronto, à comparer à celles du député de Deux-Montagnes à Chibougamau et celles du premier ministre, qui est tiraillé entre les deux extrêmes. Comment s'y retrouver, surtout lorsque le seul endroit où on peut réellement discuter de façon concrète de ce référendum dont tout le monde parle, c'est ici en commission parlementaire, à l'étude du projet de loi no 92? C'est ce qu'on fait, M. le Président, en proposant de spécifier dans la loi, dans cette loi-cadre dont personne ne doute que tout le monde comprend bien pourquoi on a une loi-cadre plutôt qu'une loi spécifique sur le référendum qui nous intéresse.

À moins que le gouvernement se ravise, à moins que les députés ministériels membres de la commission, qui sont pourtant solidaires du programme du Parti québécois, à moins que tous ces gens ne soient des hypocrites, j'en conclus qu'ils devront adopter la motion de sous-amendement du député de Marguerite-Bourgeoys, aussi bien que la motion d'amendement, non pas pour encarcaner le gouvernement dans quelque voie irrémédiable que ce soit, mais strictement pour en arriver à faire, dans le texte de loi, ce qu'on dit vouloir faire dans toutes les déclarations ronflantes qu'on a pu entendre de la part du ministre de la Justice, de la part du ministre responsable de la réforme électorale aussi bien que de la part du premier ministre lui-même et de tous les membres de son gouvernement.

Tout le monde dit qu'il y aura seulement une question claire, précise et unique. D'ailleurs, M. le Président — je terminerai là-dessus — le ministre de la Justice a laissé entendre aux journalistes de la Presse canadienne, dans cet article du 2 juin, que la démarche de l'Opposition visait à faire du projet de loi 92 un projet de loi ne s'adressant qu'au référendum sur la question constitutionnelle ou sur l'avenir constitutionnel du Québec. Je vous citerai deux courts paragraphes, M. le Président: "Pour ce qui est de réduire la portée de la loi au seul cas d'un référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec, le ministre Bédard s'y objecte pour la raison bien simple que le projet de loi qui est présentement à l'étude en est un de type cadre".

M. le Président, il n'a jamais été question, il n'est pas question dans la motion d'amendement du député de Laval ou dans la motion de sous-amendement du député de Marguerite-Bourgeoys, de réduire la portée du projet de loi 92 au seul référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec. Il n'est pas question de cela du tout. Il est strictement question de spécifier que, dans le cas de cette consultation populaire...

M. Godin: Savez-vous...

M. Gratton: Pardon?

M. Godin: Savez-vous lire?

M. Gratton: Oui.

M. Godin: Ce que vous dites le contredit.

M. Gratton: Non.

M. Godin: L'amendement Lavoie parle de tous les référendums.

M. Lalonde: Non, avec le sous-amendement, cela réduit simplement.

M. Godin: Non, mais il parle de l'amendement Lavoie, il ne parle pas seulement du sous-amendement.

M. Gratton: II faut bien que je parle de l'amendement Lavoie. On n'est pas en train d'amender l'article, on est en train de sous-amender l'amendement du député de Laval. Je sais lire et j'ai compris cela. J'espère qu'on se comprend, M. le député de Mercier.

M. Godin: Vous, vous ne comprenez pas.

M. Gratton: Voyons donc!

M. Godin: On verra tout à l'heure.

M. Gratton: Le député de Laval propose tout simplement que, dans tous les cas, la question appelle une réponse par un oui ou par un non.

M. Godin: Que ce soit oui ou non. Cela réduit le champ.

M. Gratton: Cela ne réduit absolument rien, c'est dans tous les cas. Là où on réduit, c'est avec le sous-amendement du député de Marguerite-Bourgeoys, qui répond aux objections qu'avait soulevées le député de Maisonneuve lors de la présentation de la motion du député de Laval qui

nous disait... Cela fait vingt minutes que je dis cela, M. le Président, devrais-je reprendre...

M. Bédard: Je me demande pourquoi vous vous reprenez d'ailleurs.

M. Gratton: Parce que le député de Mercier ne semble pas avoir compris, c'est bien simple.

M. Bédard: II a très bien compris et on comprend très bien.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Gatineau, vous avez encore une minute.

Une voix: C'est de la non-pertinence.

M. Gratton: Je termine en disant et en répétant que la motion, telle que sous-amendée par le député de Marguerite-Bourgeoys, ne vise aucunement et n'a pas pour effet de réduire la portée du projet de loi 92 au seul référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec. Je pense bien que si les députés ministériels ne comprennent pas cela, en fait, je suis convaincu qu'ils le comprennent, mais je vous dis que s'ils votent contre l'adoption de cet amendement tel que sous-amendé, ils feront preuve d'hypocrisie, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Le député de Mercier.

M. Godin: M. le Président, j'ai l'impression que l'Opposition officielle ne s'est pas encore rendu compte qu'il y avait eu un changement de gouvernement.

M. Lalonde: Ah oui!

M. Godin: Depuis le début, j'ai participé à plusieurs commissions parlementaires et les libéraux veulent constamment modifier le fond même des lois qu'on étudie ici.

M. Lalonde: On n'a pas le droit?

M. Godin: Vous avez le droit, sauf que, ne vos étonnez pas...

M. Lalonde: Voulez-vous gouverner par décret maintenant?

M. Godin: Est-ce que j'ai la parole, M. le Président?

M. Lalonde: Voulez-vous gouverner par décret maintenant?

Le Président (M. Clair): M. le député de Mercier, vous avez la parole sur le sous-amendement du député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Godin: D'accord. Ne vous étonnez pas si nous avons une autre logique que la vôtre, parce que ce référendum, pour nous, suite à une réflexion sur la manière de permettre la participation la plus démocratique possible des Québécois à leur avenir, dans bien des secteurs et pas seulement constitutionnellement, nous avons décidé d'ajouter à l'arsenal, à l'éventail des lois qui existent au Québec, une loi qui incarnerait le principe parlementaire britannique du "consent by the people", le consentement du peuple, qui s'ajouterait au consentement du Parlement.

Nous voulons que cette loi-ci, qui est devant nous, soit la loi qui porte sur le consentement populaire qui viendrait confirmer, entériner un consentement parlementaire. L'Opposition s'acharne à vouloir réduire le champ d'application de cette loi générale. En l'occurrence, l'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys serait à classer dans ce que le principe appelle "de minimis non curat lex", des choses secondaires la loi n'a cure. En l'occurrence, l'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys est un détail très spécifique et très secondaire par rapport à la loi générale.

Quand le moment viendra — et ces messieurs d'en face seront toujours là, j'espère, et peut-être même un de plus — de venir...

M. Lalonde: Vous n'avez pas bien confiance en votre candidat dans NDG.

M. Godin: ... de venir...

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Godin: Quand le moment viendra, M. le Président, de venir à demander le consentement...

M. Bédard: Le vôtre n'a pas eu confiance non plus.

M. Ciaccia: II le concède. M. Lalonde: II le concède.

M. Godin: Quand le moment viendra de venir devant le peuple pour lui demander son consentement à une loi ou à une autre, à une décision ou à une autre, nous proposerons à la Chambre des documents spécifiques, des questions spécifiques. Ce sera le moment, si on n'est pas d'accord sur ces questions spécifiques qui, dès lors, ne seront plus du domaine "de minimis" c'est-à-dire des choses secondaires, parce que ce sera la loi particulière portant sur un tel sujet, il sera temps d'apporter des nuances, des précisions sur la formulation de la question; mais on se trompe de porte, on se trompe de loi, on se trompe de moment. On veut se substituer dans le temps à ce qui sera le privilège du Parlement quand le moment sera venu.

Le député de Marguerite-Bourgeoys, de commission en commission, continue à distribuer des médailles, des prix d'excellence, des qualificatifs de fallacieux, d'ambiguïté ou d'hypocrisie; après chaque intervention ministérielle, il met des zéros sur dix, des deux sur dix, des quatre sur dix, il continue à faire cela ici et il reproche au gouvernement d'avoir gagné, en mettant sur le tapis son

option souverainiste. Supposons, M. le Président, que nous aurions dit: Si nous prenons le pouvoir, la souveraineté politique est faite. Ils auraient été les premiers à dénoncer cette pratique qui fut pourtant celle du parti de MacDonald et Cartier dans le cas de la Confédération elle-même; sans aucun mandat populaire, nous avons été entraînés de force, comme peuple, dans la Confédération, et nous voulons en sortir démocratiquement. La population de Terre-Neuve a eu le choix d'entrer dans la Confédération. Nous n'avons pas été consultés, quand Terre-Neuve est entrée dans la Confédération. Cela nous coûte des taxes, une partie de mon talon de chèque que j'envoie à Ottawa et qui s'en va directement à Terre-Neuve. Je n'ai jamais été consulté là-dessus. Le précédent est là.

M. Grenier: ...

M. Godin: Je continue, M. le Président, si on me permet. Il nous reproche d'avoir recours au référendum, comme à une fourberie inventée pour tromper le peuple québécois. Sans référendum, nous disent-ils, vous auriez été battus, comme si les turpitudes du gouvernement précédent n'étaient pas une raison suffisante pour qu'il soit battu. Le référendum est tout simplement un mécanisme démocratique qui est d'ailleurs pratiqué dans les municipalités du Québec, depuis un siècle au moins. On consulte le peuple dans les municipalités sur les emprunts, sur les travaux, sur un tas de questions, même sur des arénas. Ce qui montre bien que, dans la jurisprudence québécoise elle-même, il y a des précédents. Dans certains cas, on offre le choix, plusieurs choix.

Par conséquent, dans une loi générale, on ne peut pas se lier les mains et faire entrer des choses particulières, des détails particuliers. Cela viendra quand le moment sera venu de soumettre aux Chambres une question particulière sur un sujet particulier. D'ailleurs, après avoir participé aux réflexions préalables, préliminaires à la publication du livre blanc, nous avons même pensé, à un moment donné, à inscrire dans ce livre blanc l'initiative populaire, comme un des mécanismes permettant la tenue d'un référendum. Par conséquent, dans notre esprit, il s'agissait bien de mettre en place dans l'arsenal des lois le moyen de consulter le peuple sur des choses qui apparaissent au gouvernement quel qu'il soit... car cet arsenal existera, cette loi existera même dans 20 ans, dans 25 ans. Peut-être bien que le gouvernement ne sera plus là, mais d'autres gouvernements auront recours à cette loi. Il apparaîtra, à ce moment, dans les perspectives historiques peut-être un peu aberrant de voir les arguments et les amendements et sous-amendements des députés de Marguerite-Bourgeoys et de Laval. On se demandera: Comment se fait-il que, dans une loi générale, on a mis cela, puisque la question constitutionnelle vraisemblablement sera résolue? Donc, au lieu d'être forcés après coup à faire disparaître les paragraphes désuets d'une loi générale, nous aimons mieux rester dans l'ordre général. (11 h 15)

D'ailleurs — je termine là-dessus — l'Opposition, au fond, ce qu'elle veut — et cela se lit entre les lignes — c'est de discréditer d'avance la consultation populaire. C'est de discréditer d'avance le référendum sur la souveraineté qui sera l'étape suivant éventuellement cette première éta-te. Mais il n'est pas dit que ce sera la première. Il n'y a personne qui a dit cela. Cette commission n'a pas été saisie du fait que ce sera la première consultation populaire, celle qui sera faite sur le référendum. Jamais. Donc, elle n'a pas d'affaire ici, cette question, au fond.

Enfin, M. le Président, il est sûr que l'Opposition, tout en étant contre le recours au peuple pour entériner une décision essentielle ou importante du Parlement, aimerait bien poser la question elle-même. L'actuel et nouveau chef du Parti libéral, dès que le Parti québécois a pris le pouvoir, a proposé la création d'un comité de sages dont il se voyait déjà président, qui aurait été chargé, en dehors du Parlement, de préparer la question, ce qui était humiliant pour cette institution, puisque les élus sont ici. Il aurait bien aimé que la question, par exemple, soit: Êtes-vous pour ou contre l'incertitude? Êtes-vous pour ou contre le séparatisme? C'est la question que l'Opposition veut qu'on pose. Par des voies détournées, elle essaie d'imposer à la majorité démocratiquement élue la question qu'elle soumettra au Parlement et ensuite au peuple. C'est pour cette raison, M. le Président, que je voterai contre cette motion, tout en ajoutant que s'il est vrai que, depuis dix ans, un parti indépendantiste a été littéralement avalé par un parti souverainiste, il est non moins vrai que des fédéralistes, il n'y en a plus. Même le nouveau chef du Parti libéral a été élu, en reprenant une phrase célèbre d'Yvon Deschamps: "Nous voulons un Québec libre dans un Canada fort". Il a dit cela dans la partie anglaise dé son discours et, ayant l'avantage d'être bilingue, je l'ai compris, je l'ai enregistré et je me le répète souvent pour faire la preuve qu'il n'y a plus de fédéralistes au sens où il y en avait, il y a dix ans. Même les gens de l'Opposition parlent d'un fédéralisme renouvelé. On attend nous autres aussi qu'ils déposent les documents qui diraient ce qu'est le fédéralisme renouvelé. Mais j'ai l'impression qu'on va les attendre beaucoup plus longtemps qu'eux vont attendre les documents qu'ils réclament à grands cris, accrochés aux rideaux, jour après jour, au Parlement: "Déposez vos documents, on a hâte de voir cela". Vous allez les voir, messieurs, et vous serez étonnés des conclusions de ces documents. Cela vous apprendra des choses dont vous n'avez...

M. Lalonde: On ne sera pas étonné, parce que c'est vous qui les préparez.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Godin: Le député n'a pas la parole.

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Godin: C'est le premier parti dans ce pays,

le Canada, qui décide de faire le bilan du fédéralisme. Il est temps que soit fait ce bilan, parce que c'est une institution qui doit être testée et critiquée comme toutes les autres, et pourtant elle est présentée comme une vache sacrée, très successivement, par les gouvernements qui se succèdent à Ottawa. Comme par hasard une des vaches qui donnent du lait, c'est le Québec, dans ce système qui tient plus de l'étable que de la politique.

M. Lavoie: Est-ce que vous parlez du ministre des Finances qui regarde passer le train?

M. Godin: Quand le député de Laval aura la parole, nous l'écouterons avec intérêt et plaisir, mais, pour l'instant, c'est moi qui l'ai.

M. Lalonde: Le train est-il arrivé?

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Godin: M. le Président, il était temps que ce bilan du fédéralisme "canadien " comme on l'appelle soit fait. Il est temps que le peuple du Québec, qui a été embarqué dans cette patente sans être consulté, sache dans quoi il s'est embarqué. Il est temps que le peuple du Québec sache où il s'en va, et il aura l'occasion de se pencher là-dessus. Mais, auparavant — je conclus vraiment là-dessus — il nous faut une loi-cadre qui nous permette de le consulter pas seulement sur la constitution, mais sur tout sujet que le Parlement, qui est l'institution souveraine dans le Québec, décidera de le consulter sur n'importe quel sujet.

Le député de Gatineau fait des farces sur le port des bretelles ou des ceintures de chasteté. Libre à lui de ridiculiser la consultation populaire en général. Mais, pour nous, c'est sérieux, pour nous c'est important...

M. Lalonde: C'est de la démagogie.

M. Godin: La démagogie est de ce côté-là.

M. Lalonde: Vous faites de la démagogie dans ce temps-là, cela me surprend de la part d'un poète. Cela me déçoit.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Marguerite-Bourgeoys...

M. Bédard: Cela n'empêche pas d'être pratique. Ce que vous n'êtes pas.

M. Godin: Décevoir le député de Marguerite-Bourgeoys est souvent un honneur, M. le Président, car nous n'avons pas les mêmes règles ni les mêmes valeurs.

M. Lalonde: Vous avez beaucoup de succès là-dedans, M. le député de Mercier.

M. Godin: Je me fous totalement de vous décevoir, je ne suis pas ici pour vous plaire.

M. Lalonde: Oui, mais ne vous foutez pas de la population.

M. Godin: Nous voulons encadrer le principe du "consent by the people", c'est tout ce qu'on veut, ici, ce matin. Toute motion visant à réduire le champ de cette loi est une motion dilatoire qui n'a pas sa place ici. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Le député de Rosemont et, dans l'ordre, le député de Mégantic-Compton et le député de Laval.

M. Paquette: M. le Président, on assiste, depuis ce matin, encore une fois, à un dialogue de sourds. D'un côté, on mentionne que, dans l'optique d'un certain référendum, il faudrait qu'il y ait une question qui provoque un oui ou un non. Le ministre, parrain de la loi, et le nouveau ministre qui lui a succédé, l'ont répété à plusieurs reprises; le premier ministre l'a fait également. D'un autre côté, nous prétendons que se trouve devant nous une loi organique et qu'il y aurait éventuellement une autre motion ou une autre loi qui va préciser la question sur laquelle l'Opposition aura à intervenir.

M. le Président, quand on est devant un tel dialogue de sourds, je me pose des questions. Ce n'est pas la première fois que cela arrive. Cela veut dire, soit qu'on est en présence de tactiques dilatoires ou encore de gens qui n'ont pas encore accepté leur défaite lors du vote de deuxième lecture. Cela est arrivé à l'occasion de la loi 101, de la Loi sur l'assurance automobile, et de la loi créant la Société nationale de l'amiante. Chaque fois, lorsqu'on arrive à l'étude article par article, en deuxième lecture, on essaie toujours de remettre en question le principe de façon détournée. On remet le principe, de façon détournée, pour la raison suivante. On a là une loi organique qui vise à préciser tous les mécanismes de la consultation populaire. De la même façon qui est inacceptable à chaque élection, un gouvernement décide de changer les règles du jeu, le mécanisme, le fonctionnement...

M. Lalonde: M. le Président, j'ai une question de règlement à soulever ici.

Le Président (M. Clair): Le député de Marguerite-Bourgeoys, sur une question de règlement.

M. Lalonde: II me semble, M. le Président, que l'argumentation du député de Rosemont, voulant que l'amendement aille à l'encontre du principe accepté en deuxième lecture est une négation de votre décision, lorsque vous avez déclaré l'amendement recevable. Alors, en déclarant l'amendement recevable, je pense que le président exprimait bien clairement que l'amendement ne va pas à l'encontre du règlement.

M. Paquette: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Président (M. Clair): Je peux disposer de la

question de règlement, à moins que vous n'insistiez.

M. Paquette: Oui, M. le Président, je n'ai nullement remis en question votre décision. L'amendement, je le répète, me paraît parfaitement recevable...

M. Lalonde: Donc, il ne va pas à l'encontre du principe.

M. Paquette: Je disais que — si vous me laissez continuer, M. le Président — l'on essaie constamment, de façon détournée et parfois légale — parce qu'il y a beaucoup de leurs amendements qui sont déclarés recevables, celui-ci l'a été justement; je ne remets pas en cause la décision du président — de rattraper le principe d'une façon ou de l'autre. Je donne l'exemple de la loi 101, parce qu'à chaque article, on avait un amendement pour introduire l'anglais, alors que le principe de la loi posait le français comme seule langue officielle.

M. Lalonde: Les jugements de cour...

M. Paquette: C'est ce que je veux dire, M. le Président, et je ne mets aucunement en cause votre décision.

Le Président (M. Clair): Effectivement, M. le député de Rosemont et M. le député de Marguerite-Bourgeoys, il ne saurait être question de remettre en cause ma décision quant à la recevabilité du sous-amendement. Je comprends, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, que c'était une allusion à des choses qui se sont passées, préalablement, dans d'autres commissions et auxquelles M. le député de Rosemont faisait allusion. Je pense qu'il était dans la pertinence du débat.

M. le député de Rosemont, vous avez la parole, sur le sous-amendement cependant je vous le rappelle.

M. Paquette: M. le Président, j'étais en train de dire que le sous-amendement du député de Marguerite-Bourgeoys restreignait considérablement la portée et le champ d'action de la loi no 92. C'est dans ce sens que, de façon détournée, tout en étant parfaitement recevable, il attaque un principe que l'Opposition n'a jamais accepté parce qu'elle craint comme la peste l'utilisation de la consultation populaire. Peut-être préfère-t-elle, comme le disait mon collègue de Mercier, la façon dont la constitution canadienne actuelle a été imposée aux Québécois.

Telle n'est pas notre optique. Nous pensons que la seule façon de rompre le dilemme actuellement — et là, je suis d'accord avec l'intervention précédente du député de Marguerite-Bourgeoys — c'est de bénéficier de la pression populaire, de bénéficier d'une prise de position claire de la population québécoise. Prise de position claire nécessite question claire, précise. Cela est évi- dent, tout le monde s'entend là-dessus. Dans ce sens, c'est vrai qu'on essaie d'avoir le consensus le plus large possible à la commission parlementaire, mais pas au mépris de la démocratie, pas au mépris de la souplesse de l'instrument, pas au mépris d'une restriction de la portée de la loi. C'est exactement, encore une fois, ce que fait le sous-amendement du député de Marguerite-Bourgeoys.

Cela restreint la porté de la loi, M. le Président, parce que, bien qu'on trouve oiseux l'exemple donné par le ministre de la Justice concernant le régime présidentiel, ce n'est pas du tout une chose qui est hors de notre esprit. Quand on nous dit: II faut une question simple, claire, précise; il n'y a rien d'original là-dedans. Cela fait dix ans qu'on le dit dans le programme du Parti québécois...

M. Lalonde: C'est le temps de le mettre dans la loi!

M. Paquette: On le dit depuis le début dans notre programme: Faire adopter une loi organique sur les référendums. Cela était bien avant qu'on ne parle du référendum sur la souveraineté, mais une loi organique sur les référendums garantissant que les options offertes seront claires et distinctes, de formulation non ambiguë, permettant l'expression de choix véritables.

Quelques années plus tard — et là, je reviens à l'exemple donné par le ministre de la Justice — est apparu un référendum sur la constitution, parce qu'on s'est dit: La constitution actuelle du Canada, l'un des problèmes pour lesquels, 20 ans après — on commençait à parler de fédéralisme renouvelé dans le temps de Mercier, en 1887 — il commençait à y avoir des problèmes, cela ne satisfaisait pas le Québec. C'est parce que les gens n'avaient pas été consultés sur la constitution et sur le genre de régime. Alors, on a inclus un référendum sur une constitution, de façon qu'elle soit — on parlait même d'assemblées constituantes dans les comtés... Ce n'est pas une proposition en l'air que lance le ministre de la Justice. À un moment donné, on sera probablement appelé, si les Québécois appuient la démarche d'une majorité croissante d'entre eux vers la souveraineté, à se donner une constitution et à la faire approuver par le peuple. À ce moment, ce n'est peut-être pas deux choix qu'on aura, mais trois choix: un régime présidentiel; le maintien, en gros, du régime parlementaire actuel, et un régime mixte. Maintenant, ce ne sera peut-être pas la seule question, parce que ce n'est pas le seul aspect dans une constitution. Il y aura peut-être plusieurs questions au même référendum ou il y aura peut-être deux référendums.

Je pense qu'il faut se préoccuper, même dans une loi organique, que la question soit claire, précise. On le dit, dans notre programme, depuis dix ans. Pas seulement dans le référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec, mais dans tous les référendums. Mais il faut distinguer cela d'une question qui se répond par oui ou non; une

question peut être claire et précise sans se répondre par oui ou non. C'était le cas des deux référendums à Terre-Neuve. Les gens ont dit que, parce qu'il y avait trois options, il y a eu de l'ambiguïté. Les trois options étaient, toutes les trois, très claires. Lors du premier référendum, il y en a deux qui sont ressorties nettement et les Terre-Neuviens ont décidé de tenir un deuxième référendum, entre les deux options. Les partisans de la troisième option, la plus minoritaire, ne se sont pas sentis lésés parce qu'ils ont dit: On a eu notre chance au premier référendum. Je ne dis pas que c'est ce que nous devrions faire pour le référendum sur l'avenir du Québec, parce qu'il m'apparaît que, maintenant, les positions sont assez cristallisées entre le fédéralisme renouvelé et la souveraineté-association. Mais, s'il y avait eu trois options qui s'étaient dégagées, avec des forces à peu près égales, j'aurais été partisan d'un référendum à deux tours; un premier référendum avec trois ou quatre options et un deuxième qui retient les deux principales. C'est la proposition que j'avais faite il y a quelques mois. (11 h 30)

On pourrait multiplier les exemples. Il y a d'autres cas où, tout simplement sur une question très controversée... Prenons l'exemple de l'avorte-ment; le gouvernement n'a pas une législation ou une constitution ou une pièce législative immédiatement à l'esprit, mais il veut savoir l'état de l'opinion. Il peut poser une question offrant trois ou quatre choix sur l'avortement: Êtes-vous pour l'avortement libre sur demande, êtes-vous pour l'avortement thérapeutique tel que défini dans la loi actuelle, êtes-vous pour une ou deux autres mesures intermédiaires?

À la lumière de l'opinion publique, on pourrait ensuite réunir le Parlement et dire: Voici, on a préparé une loi à partir de cela.

M. Lalonde: Mon sous-amendement permet cela, M. le député; je constate que mon sous-amendement permettrait cela.

M. Paquette: Par une série de questions oui ou non, c'est possible.

M. Lalonde: Non, parce que mon sous-amendement restreint le oui ou le non au référendum constitutionnel. Alors pour l'avortement, vous pourriez...

M. Paquette: D'accord, je vous l'accorde, M. le député. Alors, je pense que même dans le cas constitutionnel, j'ai donné suffisamment d'exemples pour vous montrer qu'il peut arriver... Il y a un doute probable — je ne vous dis pas qu'on le fera — qu'on soit amené à poser des questions auxquelles on ne répond pas par oui ou non.

Je vais vous citer un passage de l'avis qu'on a reçu hier et ce matin de la Commission des droits de la personne sur cette question, avis que vous avez réclamé énormément, comme dans le cas de la loi de l'amiante où vous aviez convoqué des gens du milieu en pensant que vos propres partisans vous donneraient raison et vous vous êtes fait amiantoser. On se rend compte, à première vue, et on va l'étudier plus à fond, que le document est pas mal plus nuancé que les positions de l'Opposition. Il met des doutes sur certaines choses, il parle du difficile équilibre entre un certain nombre de droits fondamentaux. C'est bien de cela qu'il s'agit dans cette loi et sur la question, le document ne dit pas grand-chose, c'est tout simplement une expression de satisfaction à la page 2. C'est une autre question, j'imagine...

M. Lavoie: Les deux tiers de l'Assemblée... M. Paquette: C'est une autre question. M. Bédard: Ce n'est pas une question de...

M. Paquette: C'est une autre question, ce n'est pas de cela qu'on parle. À la page 2...

M. Lalonde: Je savais que vous alliez trouver la façon de vous en sortir.

M. Paquette: M. le Président, est-ce que j'ai toujours la parole?

Le Président (M. Clair): Oui.

M. Paquette: Merci!

M. Lalonde: Le ministre vous a interrompu...

M. Paquette: Non, je pense que c'est le député de Laval qui m'a interrompu avec une question qui est complètement hors sujet.

Le Président (M. Clair): Ne nous chicanons pas pour savoir qui a interrompu l'autre; M. le député de Rosemont, vous avez la parole.

M. Paquette: À la page 2, la Commission des droits de la personne dit uniquement ceci: "L'alternative — elle parle de l'article 6 et des suivants — question, soit sous forme de motion, soit sous forme de projet de loi, proposée aux articles 6, 7, 8 et 9 du projet de loi 92, de même que l'allongement de la durée du débat d'un minimum de 25 heures et d'un maximum de 30 heures dans le cas où le référendum porte sur une question proposée par le premier ministre et non sur le projet de loi, s'inscrivent dans le sens des recommandations de la commission à propos du livre blanc". C'est tout ce qu'on dit, on ne nous dit pas que la question devrait impliquer les réponses oui ou non. Pourquoi? Parce que la Commission des droits de la personne sait que c'est une loi organique. Elle sait également que la loi permet, va exiger, éventuellement, une motion devant cette assemblée avec un débat de 30 heures, ou encore un projet de loi qui subira toutes les étapes normales d'un projet de loi et à ce moment-là, on saura, et l'Opposition pourra protester véhémentement si le ministre et le premier ministre reviennent sur leur parole; ils se sont prononcés publi-

quement pour une question oui ou non concernant le référendum sur l'avenir constitutionnel.

En somme, cet amendement... Même si on cherche et si on souhaite un très large consensus de cette commission, on n'est quand même pas pour massacrer un outil pour lequel on se bat depuis dix ans, qu'on inscrit à notre programme politique depuis dix ans, et qui vise à intégrer la population aux décisions majeures qui la concernent, sous prétexte que l'Opposition veut faire de la petite politicaillerie avec cela, veut créer de la confusion, veut laisser dans l'opinion publique l'impression que le gouvernement veut se camoufler et veut avoir une question qui n'est pas claire et qui n'est pas précise. Cela fait dix ans qu'on dit qu'on veut une question claire et précise, arrêtez de dire cela...

M. Lalonde: ... le mettre...

M. Paquette: Ce n'est pas lié à une question oui ou non. Dans le contexte actuel concernant le référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec, je suis assez prêt à me rallier, étant donné la cristallisation des opinions; on peut faire une question oui ou non; dans d'autres cas...

M. Lalonde: Si vous n'êtes pas d'accord avec le député de Maisonneuve...

M. Paquette: Probablement pas, M. le Président. Je pense que ce n'est pas pour ces raisons d'une crainte de la petite politicaillerie que fait l'Opposition pour dénaturer à l'avance le référendum et la démarche du gouvernement; malgré qu'on voudrait un très large consensus, on va dénaturer le projet de loi en acceptant ce sous-amendement, de même que l'amendement du député de Laval.

Le Président (M. Clair): Le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: M. le Président, inutile de vous dire, comme je l'ai dit d'ailleurs avant, notre position face à ce sous-amendement, puisqu'il est à peu près le même que celui que nous avions préparé qui disait: "À l'occasion de référendums ayant pour objet le statut constitutionnel, il doit s'agir d'une question à laquelle il ne peut être répondu que par un oui ou par un non". C'est même inscrit au journal des Débats, vers le 17 mai, je pense, en soirée.

Inutile de vous dire que les arguments qui nous sont servis actuellement par le côté ministériel ne me convainquent pas. J'ai entendu le député de Mercier qui a déjà été plus convaincant dans d'autres secteurs. Il n'avait vraiment pas les arguments pour nous dire que, dans une loi précise, une loi spécifique ou dans une loi-cadre, c'était utile ou pas d'avoir cette question du oui ou du non.

Le député de Rosemont nous a donné des arguments plus valables qui sont agréables à entendre; il nous donnait des exemples, en fait, qui nous trempaient dans l'atmosphère d'un éven- tuel référendum qui portera sur l'avenir constitutionnel du Québec, faisant allusion aux autres référendums, principalement ceux qui se sont faits à Terre-Neuve, mais tous ces arguments ne me convainquent pas que le gouvernement nous offre, ce matin, sa transparence à laquelle on s'attendait.

Je ne vois pas, mais je ne vois vraiment pas que ce soit à l'intérieur d'une loi-cadre ou d'une loi spécifique — l'amendement le précise ici — s'il s'agit d'une loi de référendum portant sur l'avenir constitutionnel, on voudrait avoir une question aussi claire pour être capable de répondre par un oui ou par un non.

On a parlé de limpidité de la question, de clarté de la question et on a ajouté à cela une question unique. Mais, dans tout cela, bien sûr, on n'a pas tous ces adjectifs, ce que je connais des définitions de ces adjectifs. On a changé le mot "transparence" qui commence à être passablement galvaudé par le mot "limpide", mais, tous ces adjectifs ne disent pas que la question sera répondue par un oui ou par un non.

On s'en soumet donc à des règlements qui nous seront donnés. On peut avoir certaines réticences à l'égard des règlements qui nous sont préparés sur lesquels cette table de travail n'a pas d'autorité.

Les députés qui ont parlé antérieurement du côté ministériel parlaient de consultation populaire contre laquelle l'Opposition se manifestait. Je n'ai pas besoin de vous rappeler ce matin, à cette commission, que depuis longtemps, l'Union Nationale est favorable aux consultations populaires et c'est apparu dans ses programmes électoraux de 1970, de 1973 et de 1976, de façon plus ou moins spécifique dépendant des élections. En tout cas, chaque fois, on parlait de consultation populaire et c'était là le programme de l'Union Nationale.

Nous sommes, bien sûr, favorables à cette loi-cadre et je ne vois vraiment pas pourquoi on pourrait refuser, concernant cette question de répondre par un oui ou par un non, de l'intégrer dans le texte de la loi. Nous aurons, bien sûr, un débat qui portera sur la question elle-même, un débat, je pense, qui est allongé à trente heures. Je ne pense pas être dans l'erreur en disant qu'il est porté à trente heures. Bien sûr qu'à ce moment-là on pourra statuer sur l'état de la question elle-même, mais je pense que, dans la loi, ce matin, peu importe le référendum qu'on aura, on est toujours capable, dans toute forme de référendum, d'avoir la volonté populaire, de dégager une majorité de la volonté populaire par une question qui peut se répondre par un oui ou par un non.

Je pense qu'il suffit d'étudier plus longuement la question afin d'en arriver à cela. Cette question mérite d'être clarifiée ce matin. Je ne vois pas pourquoi on perdrait du temps. L'Opposition a probablement moins parlé aujourd'hui que ne l'a fait le gouvernement et on se demande qui est en train de "filibuster" cet article de la loi. Je ne verrais pas pourquoi on perdrait du temps et on n'accepterait pas cet amendement qui nous est proposé ce matin.

C'était dans l'esprit. C'est ce que déclare le

premier ministre à l'extérieur du Québec ou au Québec. C'est ce qu'a déclaré le ministre d'État à la réforme parlementaire. C'est l'esprit de plusieurs membres du cabinet. Je ne verrais pas pourquoi on attendrait de voir arriver cela au niveau des règlements et on n'accepterait pas de le mettre dans la consultation populaire. Si on doit s'inspirer du texte qui nous a été remis ce matin par la Commission des droits de la personne, on peut faire dire à ce texte passablement de choses. Chacun tirera la couverture de son côté quand on arrivera sur différents articles, mais il y a une chose qui doit demeurer, c'est que cette Commission des droits de la personne, si respectable soit-elle, a présenté un document d'inspiration qui va servir aux membres de cette commission uniquement.

À partir de là, nous prendrons ce qui fait bien notre affaire là-dedans, mais je ne pense pas qu'on doive se couler les pieds dans le ciment pour dire que ce qui est écrit par la Commission des droits de la personne doit être reproduit.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mégantic-Compton, je voudrais bien être le plus large possible. Cependant, je vous demande de prendre garde à la pertinence du débat relativement au sous-amendement du député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Grenier: Je pense que le député de Rosemont...

Le Président (M. Clair): Je veux seulement vous indiquer que j'ai un peu de difficulté. J'ai confiance que vous allez revenir rapidement à la pertinence du débat.

M. Grenier: J'ai l'impression que le député de Rosemont a fait appel...

M. Paquette: Vous êtes pas mal moins loin de la pertinence du débat qu'on ne l'est d'habitude.

M. Grenier: Pardon?

M. Paquette: Vous êtes pas mal moins loin de la pertinence du débat qu'on ne l'est d'habitude, que certains le sont.

M. Grenier: Oui, que certains l'ont été. M. Lalonde: C'est un aveu?

M. Godin: Que nous ne le nommerons pas, M. le Président, par respect pour l'Opposition officielle.

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Grenier: Je ferai remarquer au député de Mercier que j'ai signalé, en son absence, qu'il avait déjà fait de meilleures performances dans d'autres projets de loi que celle qu'il a faite ce matin. J'ai même dit cela ce matin.

M. Godin: Un autre distributeur de médailles! Mon Dieu, Seigneur! Ce sont tous des maîtres d'école.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs!

M. Grenier: II faut bien quand même constater les faits.

Le Président (M. Clair): À l'ordre! M. le député de Mégantic-Compton, vous avez la parole.

M. Grenier: M. le Président, je reviens à cet amendement. Dans l'amendement qui est proposé ce matin, ce sous-amendement qui est proposé, je vois mal que le gouvernement veuille garder si large cette question et qu'on n'en arrive pas à se donner, dans ce projet de loi, cette partie d'instrument qui nous est utile ici, qui nous est utile au niveau de chacun des référendums qu'on peut faire.

Il n'y a pas de raison, à mon sens, qu'on ne l'ait pas. Et l'amendement qu'on présente ce matin devrait être accepté par toute cette table de travail. Il fait allusion, il réfère directement au statut constitutionnel d'un référendum. Il n'y a pas de raison, à ce moment-là... Il s'incorpore... Si jamais il y a d'autres référendums qui portent sur d'autres sujets, le paragraphe c) tombera tout simplement à l'occasion d'autres référendums. Mais je verrais mal que le gouvernement s'oppose... On a fait allusion... On a même assez clairement signifié tout à l'heure, par la bouche du député de Rosemont, que la question pouvait avoir certains volets. Je crains qu'une question... On voudrait voir cette question tranchée une fois pour toutes. Il y a longtemps qu'on en parle. C'est le député de Rosemont qui disait tout à l'heure que les volontés semblent se cristalliser autour de deux options bien précises. Pour certains c'est la souveraineté-association, pour d'autres ce sont les nouveaux liens, c'est une fédération renouvelée, c'est une constitution renouvelée. On s'entend autour de deux termes passablement précis.

À partir de là, je me demande pourquoi on n'accepterait pas de le mettre, tel que reproduit. On pourrait en formuler d'autres qui seraient à peu près semblables, mais celui-ci est clair. Je me demande pourquoi le gouvernement, s'il n'a pas quelque chose à nous apporter un peu plus tard lors de la question, je me demande pourquoi on se refuse à mettre cette question bien précise dans la loi sur les référendums.

Le Président (M. Clair): Laval. Jonquière. Jeanne-Mance. Avez-vous terminé, M. le député?

M. Grenier: Oui.

Le Président (M. Clair): M. le député de Laval.

M. Godin: M. Grenier, change pour change, vous avez déjà été meilleur que cela.

M. Grenier: Si je savais que ce n'est pas au journal des Débats, je vous répondrais.

M. Lavoie: M. le Président, je voudrais intervenir sur le sous-amendement. Je pense bien que ce sera le dernier intervenant en ce qui concerne l'Opposition officielle sur le sous-amendement. Je pense bien qu'on fait le tour actuellement du problème de la question. J'ai l'impression qu'on serait prêt, en ce qui nous concerne, à voter après cette intervention sur le sous-amendement et l'amendement.

Nous aurions préféré, tel que la motion d'amendement a été faite, que sur tout référendum quel qu'il soit... C'est la conception que nous avons du référendum. C'est une consultation, c'est une opinion de la population qui est sollicitée soit par le gouvernement ou l'Assemblée nationale. Le gouvernement, l'Assemblée nationale veut se faire éclairer par la population sur une question bien précise. C'est notre conception et c'est notre définition que nous donnons du référendum.

(11 h 45)

La population, tout le monde, se plaint que c'est long d'obtenir une décision de l'État à cause de la lourdeur de la machine et tout. C'est la raison pour laquelle, si l'Assemblée nationale prend la peine de solliciter une opinion de la population, ce n'est pas pour avoir une réponse ambiguë, ce n'est pas pour avoir des peut-être ou des possibilités d'effritement de l'opinion. En somme, dans des pourcentages, si on donne l'option à la population de s'exprimer sur trois ou quatre options, notre opinion, notre impression, c'est que cela ne mène nulle part. Cela ouvre la porte, comme le disait le député de Rosemont, à un deuxième référendum et à un troisième. Je ne pense pas que ce soit l'idéal et que ce soit le désir d'un gouvernement ou d'une Assemblée nationale responsable.

On veut avoir une opinion claire de la population pour pouvoir légiférer dans les meilleurs délais. Si on a une question claire, précise, cela circonscrit le débat, cela diminue le corridor et cela permet à la population d'exprimer son opinion par un oui ou par un non et, de là, cela permet au gouvernement d'agir.

C'est très intéressant. Pendant le long débat que nous avons eu cette nuit, nous avons eu le temps de prendre connaissance d'un document sur la revalorisation du pouvoir municipal qui a été distribué. Il y a justement un chapitre sur le référendum au niveau local, une espèce de minithèse sur le référendum. C'est très intéressant. Depuis qu'on parle de la consultation populaire, je pense qu'on va avoir une multitude d'experts, au Québec, sur cette question de la consultation populaire et de la question référendaire. Je voudrais vous en faire part, pour ceux qui n'ont pas eu le temps de le consulter, étant donné que ce document nous a été distribué hier seulement.

Notions du référendum? C'est dans le document distribué par le ministère des Affaires municipales. La revalorisation du pouvoir municipal. Démocratie 2. Mécanismes de décision.

C'est très intéressant. À la page 21, sous un titre qui s'appelle Notions du référendum, on donne quatre mécanismes de consultation populaire. Premièrement, le veto. "Le veto est la possibilité donnée au peuple de s'opposer à la mise en vigueur d'une mesure législative prise par les gouvernements". Cela existe dans certains États américains, je crois. Deuxième possibilité, c'est le référendum. "Le référendum proprement dit — ou référendum obligatoire — contrairement au veto, implique que la mise en vigueur d'une mesure prise par les gouvernants ne peut avoir lieu qu'après que la majorité des gouvernés se soit prononcée favorablement en ce sens". Ce qui est intéressant, c'est que la troisième formule de consultation populaire s'appelle l'option. L'option, la définition qu'on en donne, c'est: "Mécanisme rarement employé. L'option offre un certain élément d'originalité en ce sens qu'elle fournit aux gouvernés le choix de se prononcer sur plusieurs avenues législatives. Ce mécanisme offre, par exemple, la possibilité au peuple de se prononcer sur les solutions a), b) ou c) ". Quatrièmement, l'initiative populaire que tout le monde connaît, quatrième formule. Si j'étais un expert en droit constitutionnel, j'en viendrais pratiquement à la conclusion qu'un référendum veut dire, est synonyme de questions qui amènent oui ou non, qui amènent une décision alors que l'option laisse la possibilité de plusieurs choix. J'aimerais même que cette étude puisse être approfondie. On dit: Un référendum amène une décision mais, une autre possibilité, c'est l'option. Je pense que dans l'étude de la loi sur la consultation populaire qu'on fait actuellement, on parle bien de référendum. À ma connaissance, on n'a jamais parlé de consultation populaire par option.

M. Lalonde: Le député me permet-il une question? Est-ce l'Opposition qui a fait ce document?

M. Lavoie: Non, c'est le gouvernement actuel, le ministère des Affaires municipales.

M. Lalonde: Pardon! C'est parce qu'on n'avait pas donné la description complète.

M. Lavoie: On le dit d'ailleurs très bien. M. Bédard: Le théâtre!

M. Paquette: Question inutile. Vous n'auriez jamais pu faire un document comme cela.

M. Bédard: C'est assez, le cinéma!

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lavoie: Je ne doute pas que ce document ait été préparé par des experts du ministère des Affaires municipales, qui en connaissent même sans doute plus long que nous sur la question référendaire de la consultation populaire. Ils ont quand même pris la peine de l'écrire, de la coucher sur texte et sous la responsabilité d'un ministère du gouvernement actuel.

M. le Président, ce ne sera pas très long, ne vous en faites pas, surtout à l'heure qu'on s'est

couché, cela prend tous les efforts pour mettre nos idées en place.

M. Paquette: On peut suspendre.

M. Bédard: Moi qui voulais qu'il prenne son temps.

M. Lavoie: Pour répondre au député de Terrebonne, je pense que c'est malhonnête de dire qu'on a voulu se coller sur la position fédérale, car, lorsqu'on a déposé la position du Parti libéral, cela date de près d'un an, je crois, c'est bien avant le projet de référendum fédéral. Notre position, dès le début, a été notre exigence d'avoir la question la plus précise, la plus transparente, la plus limpide, la plus claire possible, la plus honnête possible pour amener un oui ou un non.

M. Godin: Même à Joliette, cela suit votre position, d'ailleurs. Je peux en témoigner.

M. Lavoie: Oui, et c'est avant le dépôt. J'ai un témoin et pas le moindre.

M. Lalonde: Nous ne sommes pas aussi fous qu'on peut le croire.

M. Lavoie: Un autre exemple. Dans notre première argumentation, on vous a donné l'exemple d'au moins quinze pays — je ne voudrais pas me répéter — et d'États américains qui ont connu, vécu la formule, le processus, le mécanisme référendaire, certains depuis déjà 50, 75 ou 100 ans. Je n'ai pas à me répéter. Dans tous ces cas, partout, il n'y a aucune exception, à mon point de vue, dans tous les pays du monde, dans tous les États américains où le mécanisme du référendum existe, c'est toujours par un oui et par un non, et c'est dans des textes de loi, tel que je l'ai cité. En ce qui concerne l'État de la Californie, c'est un terrain expérimenté, un endroit où vraiment la formule référendaire a été éprouvée et expérimentée à de très multiples reprises.

Nous sommes au troisième ministre qui fait une déclaration, à la suite du premier ministre, à la suite du parrain initial de ce projet de loi, le député de Maisonneuve, qui nous dit: Nous souhaitons personnellement, nous voulons une question claire qui n'amène qu'un oui ou un non. Cela, le premier ministre l'a répété à satiété. Le député de Maisonneuve, parrain du projet de loi, l'a dit. Son successeur ici, que nous apprécions beaucoup, est allé dans la même voie. Cela a également été un voeu personnel. On ne voudrait pas être méchant et dire qu'on souhaiterait voir parader les 25 autres ministres. Les trois plus pesants dans ce dossier, à la suite du premier ministre, nous disent qu'ils veulent un oui ou un non. Je souhaiterais que le ministre de l'Éducation, le ministre des Affaires intergouvernementales viennent, à tour de rôle, nous dire qu'également... Peut-être que, dans quelque temps, on pourrait faire l'addition.

M. Lalonde: C'est clair, cela.

M. Godin: II y aurait le caucus après.

M. Vaillancourt (Jonquière): On s'est consulté chez nous.

M. Lavoie: ... une majorité de l'Exécutif.

M. Samson: Le ministre des Consommateurs pourrait décider de démissionner. Attention!

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît, messieurs!

M. Lavoie: Bon! Messieurs, je termine. Mon dernier argument est le suivant, M. le président. On ne vous demande pas une chose qui soit un principe de fond contradictoire, une philosophie qui s'oppose radicalement à la position du gouvernement. La preuve, c'est que le premier ministre, le député de Maisonneuve et le ministre de la Justice nous disent qu'ils sont dans le même sens que nous. Cela veut dire qu'il n'y a pas un fossé qui nous sépare sur cette question. Votre coeur le désire. Votre esprit le désire. Ce qui vous reste de démocrate le désire. Il n'y a pas un fossé, il n'y a pas un cratère qui nous sépare.

Je rattache à cela que tous les ministres qui sont passés à cette commission nous disent: On cherche un consensus. On voudrait que cette loi soit acceptée par le plus grand nombre possible de parlementaires. M. le ministre, cela vous est demandé par les quatre partis d'Opposition, ici, par les représentants de l'Opposition officielle, les représentants de l'Union Nationale, les représentants du Ralliement créditiste et du Parti national populaire. Que voulez-vous de plus? Nous sommes quand même les porte-parole de 59% de la population, selon les résultats des dernières élections. Que voulez-vous de plus, si on n'a pas un fossé qui nous sépare sur une question de principe, de base, de raison d'être de nos partis politiques? En plus de cela, vous nous demandez un consensus et vous souhaitez ce consensus. Pourquoi ne pas nous l'accorder? C'est dans la lancée, c'est dans l'expérience des référendums, en plus de cela, partout. On ne vous demande rien d'impossible, rien d'extraordinaire. Quel beau geste ce serait, M. le ministre de la Justice, de voter pour ce sous-amendement?

M. Godin: Chanteur de pomme!

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, brièvement. Je n'ai pas l'habitude d'intervenir souvent.

M. Grenier: On ne peut faire additionner le temps.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, personnellement, le débat que nous avons ce matin ne me surprend pas, puisqu'il met en cause, en fait, le débat essentiel et fondamental que nous avons eu et en deuxième lecture et en commission parlementaire lors de l'étude du livre blanc, c'est-

à-dire que c'est tout le problème de la loi organique par rapport à la loi spéciale. Corroborant le député de Rosemont, j'irai jusqu'à dire que cette motion de sous-amendement présentée par le député de Marguerite-Bourgeoys est un moyen détourné pour remettre en cause le débat fondamental loi organique, loi spéciale.

Donc, l'Opposition est tellement traumatisée par ce sujet fondamental à nos yeux que je ne suis pas surpris et je ne serais pas surpris de voir bientôt un amendement qui suggérerait la question elle-même, les termes mêmes de la question.

Une voix: Ce n'est pas bête.

M. Lalonde: On n'y avait pas pensé.

M. Samson: C'est une bonne idée.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne veux pas lui donner des idées, M. le Président. Le député de Rosemont a fait allusion tout à l'heure au fait que l'Opposition aimerait pouvoir poser la question, a même fait des hypothèses de questions que l'Opposition voudrait poser.

Une voix: Une minute!

M. Lalonde: C'est possible. On va y penser cet été ou on le fera au mois de septembre, au retour.

M. Vaillancourt (Jonquière): L'Opposition est tellement traumatisée...

M. Bédard: Ainsi, on ne peut pas la voter. C'est ce qui montre votre intention de ne pas voter la loi dans cette partie de la session.

M. Samson: Cela dépend comment vous voulez la voter. On ne votera pas sur n'importe quoi.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je disais donc que l'Opposition est tellement traumatisée par ce sujet que non seulement je ne suis pas surpris de parler de cela ce matin et d'en parler longtemps, d'ailleurs, mais je ne serais même pas surpris, puisqu'on a eu des hypothèses de questions lors d'autres commissions parlementaires, qu'on en arrive à dire quelle devrait être la question qui sera posée. Or, je pense que le gouvernement, là-dessus, a annoncé très clairement ses couleurs. D'abord, depuis des années, le parti annonce ses couleurs sur une loi organique du référendum, et ce, bien avant que le référendum en question soit inscrit dans le programme du parti politique.

D'autre part, dès la parution du livre blanc, le gouvernement annonçait encore une fois ses couleurs en insistant pour que l'outil que l'on se donne soit un outil qui puisse servir dans plusieurs cas et non pas dans le cas d'un référendum particulier. Je pense que l'Opposition, ce matin, veut revenir encore une fois à la charge, traumatisée qu'elle est par ce référendum précis sur l'avenir constitutionnel du Québec pour nous en faire reparler davantage.

Le député de Laval a dit que les trois ministres les plus pesants dans ce secteur avaient fait un voeu personnel, à savoir que la question devrait être claire, précise, unique et demande une réponse par un oui ou par un non. À sa place, je serais optimiste. Ces trois ministres ayant pris position dans ce sens, je pense qu'il y a lieu d'espérer, pour les gens de l'Opposition et pour tous ceux qui partagent cette vue. Je dois vous dire que, personnellement aussi...

M. Lavoie: Un autre qui est pour le oui ou le non. Bon.

M. Lalonde: On va avoir un petit référendum... Une voix: ... à l'intérieur du PQ.

M. Lalonde: On peut faire notre référendum à l'intérieur du Parti québécois.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Vaillancourt (Jonquière): Messieurs, je pense que vous devez être optimistes non pas devant le voeu du député de Jonquière...

M. Lalonde: II n'est pas pesant, lui.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... puisqu'il n'est pas pesant dans le dossier, mais du moins pour ce qui concerne les voeux exprimés par les trois ministres en question et même par le premier ministre.

M. le Président, en terminant, je pense qu'il faut faire la distinction entre l'outil qu'est la Loi sur la consultation populaire et le référendum lui-même. J'ai eu l'occasion de dire, sur le recours collectif, qu'il y avait lieu de faire la distinction entre le recours collectif qui est un moyen de procédure et le jugement d'un tribunal. La Loi sur la consultation populaire, c'est un outil, c'est un instrument qui pourra peut-être s'appliquer à une occasion, qui pourra peut-être s'appliquer à plusieurs occasions. Le problème n'est pas là. À d'autres articles, il est prévu des délais minimaux à l'Opposition et à tous les membres de l'Assemblée nationale pour émettre leurs opinions et leurs points de vue sur la question. Connaissant les talents du député de Laval et d'autres membres de cette auguste Assemblée, en supposant que les voeux exprimés par ces trois personnages influents dans ce secteur ne soient pas exaucés par le Conseil des ministres — ce sera sans doute là leur premier argument — je suis sûr qu'ils seront les premiers à soulever ce fait lors de la motion présentée à l'Assemblée nationale et contenant la formulation de la question. (12 heures)

M. le Président, je fais donc confiance, je suis optimiste en ce qui me concerne. Je pense qu'accepter la motion du député de Laval serait faire échec à ce principe de la loi-cadre que le gouvernement, par le parti, dans son programme et dans son livre blanc, a toujours voulu garder.

Je citerai tout simplement une phrase du ministre d'État à la réforme électorale qui disait, lors de son allocution d'ouverture: L'un des deux points inchangeables dans le projet de loi, là où nous ne changerons pas d'idée, c'est loi-cadre versus loi spéciale. Je pense que recevoir le sous-amendement du député de Laval ou du député de Marguerite-Bourgeoys serait faire échec, sinon totalement du moins grandement, à ce principe de la Loi sur la consultation populaire comme loi-cadre. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Dans l'ordre, le député de Jeanne-Mance, le député de Rouyn-Noranda et le ministre.

M. Laberge: M. le Président, je vous remercie. Mon intervention ne sera pas longue. Je peux simplement vous signaler que, dès les 1er juin, en cours de soirée, alors qu'on a commencé à discuter de cet amendement à l'article 6, il était clair, dans mon esprit, d'ailleurs, que l'amendement proposé — si je dois parler sur le sous-amendement, cela s'englobe quand même — se référait tout de suite à l'opinion, à mon point de vue, que l'Opposition a que cette loi n'est faite que pour un référendum. Pourtant, en deuxième lecture, on s'est bien entendu sur le principe que cette loi ne doit pas servir qu'à un référendum en particulier, que tout le monde a à l'esprit, mais à divers référendums. Même dans le cadre de l'amendement proposé, je vous dis tout de suite que je dois sincèrement me prononcer contre l'amendement, parce qu'on dit: "... dans le cas d'un référendum portant sur le statut constitutionnel du Québec," ce qui voudrait dire, dans l'esprit de l'amendement, qu'il n'y aurait qu'un référendum sur le statut constitutionnel du Québec. Pourtant, si les Québécois le décidaient un jour, lorsqu'il y aura un premier référendum demandant aux Québécois s'ils donnent à leur gouvernement un mandat de changer la situation actuelle, il y aura certainement plus d'un référendum par la suite. Il y en aura certainement au moins un autre pour choisir quel sera le cadre constitutionnel dans lequel on sera ensuite régi, comme le disait le député de Rosemont, est-ce que ce sera un régime présidentiel ou un régime apparenté à ce que nous vivons présentement, le régime parlementaire britannique?

À ce moment-là, même le sous-amendement n'est pas acceptable, à mon point de vue, parce qu'il se peut que, dans un de ces référendums éventuels sur l'avenir constitutionnel, il y ait plus d'une option et que la réponse ne puisse être donnée automatiquement par un oui ou par un non. Je ne voudrais pas répéter les arguments et du député de Rosemont, du député de Mercier et du député de Jonquière. J'abonde dans leur sens. C'est pourquoi je me prononce contre l'amendement proposé.

Je voudrais terminer en disant que le sous-amendement du député de Marguerite-Bourgeoys m'aurait paru plus clair s'il avait été formulé de la façon suivante: "Dans le cas du référendum portant sur le statut constitutionnel", et non d'un référendum. À ce moment-là, il aurait vraiment affiché sa couleur, à savoir qu'il ne croit qu'à un référendum. Il a encore trouvé une façon de diluer la sauce de façon, pour ma part que je considère inacceptable. De toute façon, je suis totalement contre le sous-amendement comme l'amendement proposés à l'article 6. Je vous remercie.

Le Président (M. Clair): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, j'aimerais souligner, pour le profit des membres de cette commission qui font partie du gouvernement, que le sous-amendement qui a été amené par le député de Marguerite-Bourgeoys est un sous-amendement qui aurait pu tout aussi bien être amené par le député de Mégantic-Compton que par moi-même ou par le député de Beauce-Sud. Nous avions tous la même opinion. Il s'agit peut-être un peu de la formulation ou de nuancer la formulation, parce que tout ce qu'on a retrouvé de différent entre le sous-amendement proposé et ceux que nous avions prêts à proposer, c'étaient des nuances qui n'amenaient même pas de différence, ni dans la forme ni dans le principe du sous-amendement. Or, ce serait faux de prétendre qu'il n'y a que le député de Marguerite-Bourgeoys qui veut ce genre de sous-amendement et qu'il n'y a qu'un seul parti qui le veut. Les quatre partis de l'Opposition ont manifesté clairement leur position là-dessus. Le député de Jeanne-Mance qui vient de parler a apporté une nuance supplémentaire en soulignant que si on disait: ... du référendum, il serait davantage intéressé à le supporter.

Une voix: C'est clair.

M. Laberge: Cela aurait été plus clair.

M. Samson: Ce n'est pas tellement loin de ce qui a été dit sur le principe même de ce qui a été proposé. Je pense qu'il faut arrêter de se regarder et de ne pas se dire exactement ce qu'on pense. Tout le monde pense au même référendum. Bon. Nommons-le par son nom, ce référendum. C'est à cela qu'on pense quand on dit qu'en matière constitutionnelle, on veut avoir, au moins sur cette question, une question qui se répondra par un oui ou par un non. Cette loi s'appelle la Loi sur la consultation populaire. Tantôt, le député de Laval parlait d'un document qui se référait au référendum comme tel et où, selon la définition qui en est donnée, c'était décisionnel. Je vous rappelle qu'à l'article 6, exactement, il est dit clairement que le gouvernement peut ordonner que les électeurs soient consultés par référendum. On ne parle pas de consultation populaire; on parle de référendum.

Donc, si je joins cela à l'explication donnée dans l'autre document, qui vient du même gouvernement, qui dit que, dans un référendum, c'est une question qui est posée, qui apporte une décision, c'est différent du genre de chose, du genre

de couleuvre que le côté gouvernemental tente de nous faire avaler ce matin.

Bien sûr, j'ai entendu et le ministre de la Justice pour qui j'ai beaucoup de respect, et le ministre d'État à la réforme parlementaire et le premier ministre et le ministre des Finances qui, au cours de la fin de semaine, a affiché ses couleurs d'une façon très directe. Il l'a répété en Chambre hier. Si on prend la parole de tout ce monde, y compris le député de Jonquière qui vient d'ajouter la sienne, on s'aperçoit que tout le monde veut nous dire sa bonne foi. Tout le monde veut nous dire que, sur le référendum dont il est question au sous-amendement, on veut des réponses par un oui ou par un non. Tout le monde affiche donc sa bonne foi. Autrement dit, tout le monde veut aller au ciel, mais on dirait que personne ne veut mourir. C'est à peu près ce que vous voulez nous dire, ce matin. Vous nous dites: On est d'accord. C'est cela qu'on veut. Tout le monde dit cela. Plus il y a d'intervenants, plus il y a d'intervenants qui nous disent la même chose. On vous le dit, mais seulement, on ne veut pas l'écrire.

Je trouve qu'il y a quelque chose qui ne tourne pas rond quelque part. Ou bien on nous le dit, on l'écrit et on les reçoit; ou bien on nous le dit, on ne l'écrit pas et on ne les croit pas. C'est aussi clair que cela. Dans ce passé gouvernemental qui est quand même relativement court, je pense qu'il y a déjà des précédents qui font qu'on s'est fait dire des choses à la même commission de la présidence du conseil, il y a moins d'un an. Il me semble que c'est important, la parole d'un ministre parrain, à l'occasion de l'adoption d'une loi. Nous avons donné notre consentement à la loi 2 à laquelle je me réfère. Exactement de la même façon, on avait fait appel à un consensus.

M. Ciaccia (Mont-Royal): ... n'a pas de parole. M. Paquette: C'est une bonne loi.

M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière, sur une question de règlement.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je viens d'entendre certaines paroles qui ont été prononcées par le député de Mont-Royal et j'aimerais que vous lui demandiez de retirer ces paroles.

M. Samson: M. le Président, question de règlement. Le député de Mont-Royal n'avait pas la parole. C'est moi qui avais la parole.

M. Vaillancourt (Jonquière): Cela ne fait rien. Question de règlement, M. le Président.

M. Lavoie: Non, c'est du bruit. Je n'ai même pas entendu.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière, je n'ai absolument rien entendu. J'ai écouté attentivement le député de Rouyn-Noranda qui, me semble-t-il, était sur la limite de la pertinence du débat.

M. Samson: Vous avez raison de m'écouter, M. le Président.

M. Vaillancourt (Jonquière): II a dit: II n'a pas de parole. M. le Président, je suis sûr que, si le député de Mont-Royal était sincère et s'il osait répéter publiquement les paroles que j'ai entendues de sa bouche, il les retirerait parce qu'il ne les pense pas.

M. Lavoie: M. le Président, question de règlement.

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous n'avez pas entendu, M. le Président. Moi, j'ai entendu.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lavoie: Moi, je ne l'ai pas entendu, de toute façon.

M. Vaillancourt (Jonquière): Moi, je l'ai entendu. Je lui demande, pour voir...

M. Lavoie: M. le Président, je vous demanderais de statuer sur cela.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lavoie: Très brièvement, il est reconnu que, quand un député n'a pas la parole, c'est considéré d'ailleurs comme du bruit ou du désordre.

M. Vaillancourt (Jonquière): Du bruit? Ah, bon!

M. Lavoie: Écoutez! Moi, je n'ai rien entendu, de toute façon.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous n'avez rien entendu parce que vous ne voulez rien entendre, M. le député de Laval.

M. Samson: Ils entendent des cloches, de l'autre côté, ce matin.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lavoie:... vous ne l'avez pas entendu vous-même, M. le Président.

M. Paquette: Sur la question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, par votre intermédiaire, je demande au député de Mont-Royal s'il maintient les accusations qu'il vient de lancer?

M. Samson: II n'a rien dit, voyons donc!

M. Vaillancourt (Jonquière): Je peux vous répéter mot à mot ce que vous avez dit à part cela.

M. Lavoie: On va vous demander de le retirer, si vous le dites, si ce n'est pas parlementaire.

M. Samson: C'est cela. Prenez-le à votre compte.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je vous pose une question, M. le député de Mont-Royal. Êtes-vous prêt à retirer ce que vous avez dit? Est-ce que vous avez dit quelque chose, vous vous en rappelez?

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ciaccia: II n'a pas assez dormi, M. le député de Jonquière.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Vaillancourt (Jonquière): Dormi ou pas dormi, je n'insulte pas les autres, M. le député de Mont-Royal.

M. Paquette: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Président (M. Clair): Sur la question de règlement, mais il me semble qu'elle est inexistante.

M. Paquette: Je vais être très bref, c'est que mon collègue de Jonquière a réagi à des propos du député de Rouyn-Noranda qui a affirmé qu'à plusieurs occasions des ministres avaient manqué à leur parole. Il a donné l'exemple du parrain initial de ce projet de loi, en disant qu'il avait manqué à sa parole concernant la loi no 2. J'aimerais qu'il étaye ses accusations ou qu'il les retire.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est là-dessus, M. le Président, que le député de Mont-Royal a dit: Ils n'ont pas de parole.

M. Lavoie: Oh! là là! Vous avez la peau...

M. Vaillancourt (Jonquière): J'espère que ce que vous avez dit a été noté dans le journal des Débats, même si vous n'aviez pas la parole.

M. Lavoie: Ce n'est même pas antiparlementaire.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs! M. Vaillancourt (Jonquière): De toute façon ce n'est pas surprenant ce que vous avez dit, cela fait un an et demi que vous faites cela.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière, à l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Jonquière, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ciaccia: Franchement, vous êtes bien nerveux, ce matin. M. le député de Jonquière.

M. Lavoie: Dodo, dodo.

Le Président (M. Clair): Messieurs, pour disposer de la question de règlement.

M. Ciaccia: On va revenir à cela. M. le député de Jonquière, ne vous inquiétez pas.

Le Président (M. Clair): À l'ordre! M. le député de Jonquière, sur votre question de règlement, il n'y avait pas lieu d'invoquer le règlement puisque je n'ai absolument rien entendu et je n'ai eu connaissance que des paroles du député de Rouyn-Noranda.

Quant aux paroles prononcées par le député de Rouyn-Noranda, et à la question de règlement soulevée par le député de Rosemont, il n'y a pas matière à question de règlement sur ce sujet non plus, mais cependant, sur un autre point, j'invite le député de Rouyn-Noranda à bien prendre garde de demeurer dans la pertinence du débat, soit le sous-amendement du député de Marguerite-Bourgeoys.

M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, le sous-amendement auquel nous faisons référence qui amenderait l'article 6 a amené des déclarations, de la part du gouvernement, que tout le monde a entendues. On s'est fait dire: Ce que vous demandez là, c'est cela qu'on va faire, mais on ne veut pas l'écrire. M. le Président, il me semble que c'est très pertinent de soulever la question de crédibilité, à ce moment-ci. Il est très pertinent de soulever la question de crédibilité.

Comme il est toujours permis, selon notre règlement, par analogie, de faire référence à autre chose de semblable, je faisais référence au débat que nous avons eu sur la loi 2 et où nous avions manifesté, tout le monde, le désir d'en arriver à un consensus. D'ailleurs, je pense que le consensus a été obtenu, parce que la loi 2 dont nous faisons mention a été votée à l'unanimité en troisième lecture.

Ceci dit, M. le Président, je me rappelle fort bien, et des membres de cette commission se rappelleront fort bien certaines déclarations faites par le ministre parrain, en toute bonne foi — remarquez que je ne dis pas que le ministre parrain a été de mauvaise foi — indiquant que c'était là le genre de loi que nous devrions tous ensemble roder, et il fallait une certaine souplesse au départ, et il nous garantissait tout cela. Mais tout cela a fait que nous lui avons donné ce consensus qu'il avait demandé pour avoir une application plus normale et plus facile de sa loi 2. Mais, sans mettre en

cause la bonne foi du ministre parrain de cette même loi, je pense qu'il y a assez de monde autour de cette table qui sait que la mise en place, l'application de cette loi a causé d'énormes problèmes à tout le monde... (12 h 15)

M. Paquette: ... pas mal tous de votre part.

M. Samson: ... du côté de l'Opposition et même du côté gouvernemental, excluant le député de Rosemont, parce que lui, il est plus radical que les autres, il voulait passer la hache dans l'Opposition. Mais, M. le Président, il n'est pas seul, le député de Rosemont, il y en a d'autres qui sont moins radicaux que lui, du côté gouvernemental.

M. Paquette: M. le Président, j'accepte...

M. Samson: Puis, il y en a d'autres qui pensent encore que l'Opposition a été élue avec 59% du vote et que c'est aussi important que le gouvernement avec 41%, M. le Président. Il y en a encore qui pensent cela dans le gouvernement.

Je dis que nous avons eu des difficultés d'application, des difficultés de démarrage. Ces difficultés, M. le Président, on ne les aurait pas eues, s'il y avait eu quelqu'un capable de mettre en pratique ce qu'on nous avait garanti à la commission parlementaire. C'est là une façon de démontrer à l'actuel ministre...

M. Paquette: Je trouve...

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Samson: ... que le consensus qui a été réclamé au début et que nous espérons pouvoir donner avec le genre d'argumentation qu'on a ce matin, avec le genre de position absolument rigide que le gouvernement tient, malheureusement, vous n'en aurez pas de consensus. Vous allez arriver, à la fin de l'étude de ce projet de loi, avec des votes à tous les articles, où l'Opposition va voter contre tous les articles ou presque, vous allez arriver à la fin avec un mécanisme, dont vous pourrez vous vanter au départ, un mécanisme qui sonne assez faux, qu'on n'a même pas pu accorder le violon avant de le mettre à la disposition de la population. C'est cela le genre de mécanisme que vous risquez d'avoir, si vous n'acceptez pas au moins — je dis au moins — de faire en sorte que votre position soit un peu plus souple et qu'on se rejoigne. Je ne dis pas qu'on ne pourrait peut-être pas faire encore un petit pas pour utiliser les paroles populaires du côté gouvernemental — qui sortent d'ailleurs directement des pensées de Mao — mais je ne dis pas qu'on ne pourrait pas faire...

M. Godin: C'est Kissinger c'est Henry Kissinger qui a dit cela.

M. Samson: ... quelques petits pas, mais il faudrait que du côté gouvernemental on fasse un "step" aussi, là.

M. Godin: Don Camillo.

Question de règlement, M. le Président.

M. Samson: Parce que s'ils ne font rien du côté gouvernemental, on va se retrouver, M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Rouyn-Noranda, le député de Mercier invoque le règlement.

M. Godin: Je voudrais rappeler à Don Camillo que l'auteur de ces paroles n'est pas Mao Tsé-Toung mais Henry Kissinger.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mercier, ce n'était pas une question de règlement. N'en abusez point.

M. Samson: M. le Président, sur la même question de règlement, j'avoue que le député de Mercier aurait pu être l'auteur de cela aussi. Remarquez bien qu'il n'est pas loin de l'auteur, de toute façon.

M. Godin: Très flatteur.

M. Samson: II prend cela comme une flatterie, par-dessus le marché, imaginez-vous donc!

M. Godin: Kissinger. Henry Kissinger.

M. Samson: II prend cela pour un compliment.

M. Godin: Certainement.

M. Samson: On ne peut pas, M. le Président, avec du monde comme cela en avant de nous discuter sérieusement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Paquette: M. le Président, je pense que vous voyez pourquoi il y a des difficultés d'application de la loi no 2.

Le Président (M. Clair): M. le député...

M. Samson: Je dis, M. le Président, que la pertinence du débat exige que je vous dise ce que je viens de vous dire. Je dis cela que la pertinence du débat exige que je continue à faire comprendre à l'actuel ministre de la Justice qui est venu prendre la relève du ministre d'État aux Affaires parlementaires, que s'il n'a pas le mandat de la souplesse qui est nécessaire dans les circonstances, il devrait accepter de suspendre cet article et d'aller en discuter avec ceux qui pourraient lui donner le mandat d'avoir plus de souplesse à l'article 6. Je reconnais que le ministre de la Justice a, de bonne foi, une certaine ligne de conduite, il a des balises, mais s'il n'a pas le mandat nécessaire pour pouvoir aller plus loin dans la possibilité d'accepter, sinon notre amendement, au moins un amendement qui pourrait être présenté par le gouvernement dans à peu près le même sens, s'il n'a pas cette possibilité, je pense qu'il serait normal que le ministre de la Justice accepte de suspendre cet

article et de parler soit au premier ministre, soit à ceux à qui il doit demander le mandat nécessaire pour élargir un peu et nous revienne avec des propositions qui seraient celles d'accepter ce que nous avons suggéré ou encore des propositions différentes. Je ne m'arrête pas, M. le Président, à la formulation. Je ne voudrais pas être trop formaliste parce qu'il y a trois partis d'Opposition qui ont apporté des amendements un peu différents, mais on se rejoint. Vous voyez, on a fait, nous, les approches nécessaires pour tenter de faire le consensus. Il reste un petit pas à faire du côté gouvernemental. Il y a encore, comme on dit, une petite rigole entre les deux...

M. Gratton: On a un petit groupe à convaincre.

M. Samson: C'est assez sérieux parce que, si nous n'obtenons pas un assouplissement à l'article 6, c'est tout le projet de loi qui devient inacceptable pour l'Opposition. C'est pour donner un exemple de l'importance qu'on doit donner à cela. Quand on demande... Pardon, M. le Président?

Le Président (M. Clair): Je m'excuse de vous interrompre. M. le député de Rouyn-Noranda, je vous prierais de conclure, parce que sur ce sous-amendement, lors de la réunion précédente de la commission, vous aviez exercé un droit de parole de huit minutes. Aujourd'hui, vous avez commencé à midi trois minutes, et en retranchant même cinq minutes pour les questions de règlement qu'il a pu y avoir, vous avez déjà dépassé de deux ou trois minutes les 20 minutes. Alors, je vous prierais de conclure rapidement.

M. Samson: Oui, M. le Président. Je reviendrai sur l'amendement si nécessaire. Je conclus en disant que ce qu'on demande au ministre, s'il n'est pas capable de nous l'accorder ce matin, faute de mandat, au moins il pourrait nous accorder de suspendre l'article et de nous revenir cet après-midi après avoir fait les consultations utiles au gouvernement.

Le Président (M. Clair): M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, je n'ai pas l'intention de revenir sur les arguments que j'ai énoncés jeudi soir à l'encontre du sous-amendement qui a été fait par l'Opposition. Je crois que le député de Rosemont a explicité sur ces arguments avec beaucoup de brio et avec beaucoup de conviction à partir du moment où l'Opposition veut bien comprendre que nous avons présentement à nous pencher sur une loi-cadre et non pas sur une loi spéciale. Je n'ai pas besoin de mandat non plus, de la part du Conseil des ministres, pour savoir s'il y a lieu d'accepter ou de refuser le sous-amendement de l'Opposition. Il s'agit simplement de s'inscrire dans la logique de cette loi qui est une loi-cadre et non pas une loi qu'on veut particulariser à quelque référendum que ce soit pour savoir et comprendre que le sous-amendement proposé par l'Opposition aurait pour effet de venir à l'encontre du principe fondamental de cette loi-cadre, dans le sens qu'il restreindrait le principe.

M. le Président, j'ai dit et je redis qu'en ce qui regarde le référendum que nous avons à l'esprit concernant l'avenir constitutionnel du Québec, je favorisais une question unique, claire et précise de manière à obtenir une réponse précise, significative de la part des Québécois. Je pense que c'est la seule manière de procéder si on respecte les Québécois et si nous voulons avoir ce que nous désirons tous, ou du moins de ce côté-ci de la Chambre, une réponse significative des Québécois. Ce que je dis, de toute façon, cela a déjà été dit par le ministre d'État à la réforme parlementaire et endossé par le premier ministre, et cela constitue, à mon sens, déjà une indication très claire de l'intention du gouvernement d'aller dans le référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec avec une question unique, claire et précise. Je dirais que c'est plus que de la transparence, c'est même un commencement d'engagement qui me semble très ferme de la part de ceux qui ont eu à se prononcer, tout au moins sur cet élément. Les parlementaires, lorsque nous aurons à discuter soit de la question, soit d'un projet de loi, selon ce que prévoit la loi-cadre, seront à même de constater jusqu'à quel point le gouvernement ou certains ministres ont donné suite à leur manière de voir les choses et ils pourront évaluer jusqu'à quel point la question est claire et précise. La population aussi sera à même de constater jusqu'à quel point une suite logique a été donnée, suite aux déclarations qui ont été faites par ceux que vous connaissez.

Alors, M. le Président, nous sommes à constituer, à l'heure actuelle, un instrument de démocratie le plus parfait possible, au service d'un gouvernement, de quelque gouvernement que ce soit, qui nous permet d'associer la population à la prise de décision majeure. Cet instrument, cette loi-cadre, nous allons essayer ensemble de la faire la plus parfaite possible et je ne vois vraiment pas. quelle que soit l'importance d'un référendum ou des référendums à venir, comment on pourrait en venir à la conclusion qu'il n'y a pas de possibilité de s'inscrire, justement, dans le respect de cette loi-cadre que nous voulons comme un instrument de démocratie le plus parfait possible. Que ce soit un référendum sur quelque question que vous puissiez imaginer, que ce soit le référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec, je crois qu'il est important qu'il s'inscrive et qu'il respecte justement les principes de démocratie que nous serons en mesure d'élaborer à l'occasion de cette loi-cadre. Dans ce sens, quand on parle de démocratie, le référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec ne fait pas exception à quelque référendum que ce soit.

Il se doit d'être fait dans le respect des Québécois, des gens que nous consultons et dans le respect des règles générales de démocratie.

C'est pourquoi, M. le Président, à moins qu'il n'y ait d'autres intervenants, nous serions également prêts à voter sur l'amendement et sur le sous-amendement, puisque la même argumenta-

tion reviendrait. Nous voulons, le plus possible, avancer le débat.

Le Président (M. Clair): N'ayant pas d'autre intervenant sur ma liste, je demanderai si la motion de sous-amendement du député de Marguerite-Bourgeoys est adoptée? Je pense bien que tout le monde en ayant parlé, on n'a pas besoin de la lire.

M. Lavoie: On a encore des droits de parole, mais on veut...

Le Président: Collaborer.

M. Lavoie: ... collaborer pour que ce projet de loi puisse être adopté dans les délais convenables.

M. Bédard: Nous aussi, M. le Président, nous avons encore droit de parole.

M. Vaillancourt (Jonquière): Rejeté, M. le Président.

Le Président (M. Clair): La motion d'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys est-elle adoptée?

M. Lavoie: Adopté, M. le Président.

M. Vaillancourt (Jonquière): Rejeté, M. le Président.

M. Samson: M. le Président, je demanderais qu'on enregistre le vote.

Le Président (M. Clair): C'est bien. Veuillez indiquer si vous êtes pour ou contre la motion d'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Bédard (Chicoutimi)? M. Bédard: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Beauséjour (Iberville)?

M. Beauséjour: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Charbonneau (Verchères)?

M. Charbonneau: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Godin (Mercier)?

M. Godin: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Gratton (Gatineau)?

M. Gratton: Pour, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. Grenier (Mégantic-Compton)?

M. Grenier: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Laberge (Jeanne-Mance)?

M. Laberge: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Lavoie (Laval)?

M. Lavoie: Cela, c'est une question claire, M. le Président. Pour ou contre, je suis pour, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. Paquette (Rosemont)?

M. Bédard: Vous voyez, vous n'avez pas besoin de dire oui ou non, pour être clair.

M. Lavoie: Mettez pour ou contre également. C'est pareil, on l'a déjà dit.

Le Président (M. Clair): M. Roy (Beauce-Sud)? M. Samson (Rouyn-Noranda)?

M. Samson: Oui, M. le Président.

M. Bédard: II est d'accord avec nous, oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, ça s'en vient vite.

Le Président (M. Clair): Les résultats sont les suivants: Pour l'adoption: 4, contre: 6. La motion est rejetée.

Messieurs, il est 12 h 28, est-ce que quelqu'un désire exercer son droit de parole sur l'amendement présenté par le député de Laval ou si on suspend les travaux tout de suite?

M. Bédard: Nous serions prêts, M. le Président, à voter immédiatement.

M. Lavoie: S'il n'y en a pas d'autres, nous serions prêts.

Le Président (M. Clair): Vous êtes prêts à voter sur l'amendement? L'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys, que je relis: "Ajouter à la fin de l'article 6, l'alinéa suivant: Quel que soit l'objet du référendum, il doit s'agir d'une question à laquelle il ne peut être répondu que par un oui ou un non."

Je m'excuse, par le député de Laval, effectivement, c'est une motion d'amendement.

M. Lavoie: J'espère que j'aurai plus de chance que le député de Marguerite-Bourgeoys.

Le Président (M. Clair): Cette motion sera-t-elle adoptée?

M. Lavoie: Oui, M. le Président.

M. Vaillancourt (Jonquière): Rejeté, M. le Président.

M. Bédard: Je pense qu'on pourrait enregistrer le même vote.

Le Président (M. Clair): On considère que c'est le même...

M. Lavoie: II n'y en a pas qui changent d'idée?

Le Président (M. Clair): ... résultat, donc il y en aurait 6 contre l'amendement et...

M. Bédard: On ne change pas d'idée, la question va être claire et précise.

Le Président (M. Clair): ... 4 membres pour. L'amendement du député de Laval est rejeté.

M. Bédard: Nous sommes prêts M. le Président, à...

Le Président (M. Clair): À adopter l'article 6?

M. Bédard: ... adopter l'article, s'il n'y a pas d'objection.

M. Lavoie: Oh non.

M. Samson: Un instant.

M. Lavoie: ... des amendements.

M. Samson: Deux mauvaises nouvelles en cinq minutes, c'est assez.

M. Gratton: M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Gatineau.

M. Bédard: Avec l'argumentation que vous aviez, ce ne sont pas de si mauvaises nouvelles.

M. Gratton: À l'article 6, M. le Président...

M. Samson: Si vous compreniez, vous n'auriez même pas besoin de notre argumentation.

M. Bédard: Si vous aviez compris, vous ne l'auriez même pas présentée.

M. Samson: Cela fait longtemps qu'on vous comprend.

Le Président (M. Clair): À l'ordre.

M. Gratton: M. le Président, à l'article 6, j'aimerais, en quelque sorte, donner un avis ou déposer une motion d'amendement immédiatement avant qu'on ajourne de façon que les députés ministériels puissent en prendre connaissance au cours du déjeuner. Il s'agit d'ailleurs d'un amendement qui, j'en suis sûr, suite aux consultations que vous avez faites auprès de nos collègues de l'Opposition, recueillera l'appui de tous les députés de l'Opposition à la commission (12 h 30)

Vote à l'Assemblée nationale dans

le cas d'un référendum relatif au statut

constitutionnel du Québec

L'amendement se lit comme suit: "Ajouter à l'article 6 l'alinéa suivant: Dans le cas d'un référendum relatif au statut constitutionnel du Québec, une question ou un projet de loi devant faire l'objet d'une consultation populaire doit être approuvé par les deux tiers des membres de l'Assemblée nationale".

M. le Président, je dirais, avant de vous proposer la suspension ou l'ajournement de nos travaux, qu'il s'agit là d'un souhait exprimé par la Commission des droits de la personne dans le mémoire dont nous avons pris connaissance ce matin.

Nous demandons, M. le Président, l'ajournement de nos travaux.

Le Président (M. Clair): Messieurs, il est 12 h 30. La commission suspend ses travaux sine die.

(Suspension de la séance à 12 h 31)

(Reprise de la séance à 16 h 38)

Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs, s'il vous plaît! La commission de la présidence du conseil et de la constitution est réunie pour continuer l'étude article par article du projet de loi 92.

Les membres de la commission sont M. Bédard (Chicoutimi), M. Bisaillon (Sainte-Marie)...

Une voix: Remplacé par le député de Jonquière.

Le Président (M. Clair): ... remplacé par M. Vaillancourt (Jonquière);

Une voix: ... M. Beauséjour (Iberville).

Le Président (M. Clair): Votre tour viendra... M. Charbonneau (Verchères), M. Clair (Drummond) remplacé par M. Beauséjour (Iberville); M. Garneau (Jean-Talon) remplacé par M. Gratton (Gatineau); M. Grenier (Mégantic-Compton)... M. Garneau (Jean-Talon) est remplacé non pas par M. Gratton (Gatineau), mais plutôt par M. Lavoie (Laval);

Une voix:...

Le Président (M. Clair): Lavoie (Laval).

M. Samson: Lavoie de Laval. J'avais compris la voix ravale.

Le Président (M. Clair): M. Laberge (Jeanne-Mance)...

M. Laberge: Présent.

Le Président (M. Clair):... M. Levesque (Bonaventure) remplacé par M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys); M. Paquette (Rosemont), M. Roy (Beauce-Sud)...

Une voix: M. Paquette (Rosemont) remplacé par M. Godin (Mercier).

Le Président (M. Clair): M. Paquette (Rosemont) remplacé par M. Godin (Mercier); M. Roy (Beauce-Sud) et M. Samson (Rouyn-Noranda).

Les intervenants sont M. Bertrand (Vanier), M. Brochu (Richmond), M. Dussault (Châteauguay), M. Guay (Taschereau)...

Une voix: Remplacé par M. Fallu (Terrebonne).

Le Président (M. Clair): ... remplacé par M. Fallu (Terrebonne); M. Lavoie (Laval) remplacé par M. Gratton (Gatineau), M. Lévesque (Taillon) remplacé par qui? Il n'est remplacé par personne. M. Morin (Louis-Hébert) et M. Raynauld (Outremont) remplacé par M. Ciaccia (Mont-Royal).

Au moment où nous avons suspendu nos travaux, ce matin, nous en étions encore à l'étude de l'article 6. Le député de Gatineau avait donné l'avis qu'il fallait présenter une motion d'amendement. La motion d'amendement se lisait comme suit... M. le député de Gatineau, vous faites effectivement motion d'amendement à l'article 6?

M. Gratton: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Cette motion d'amendement se lit comme suit: Ajouter, à l'article 6, l'alinéa suivant: "Dans le cas d'un référendum relatif au statut constitutionnel du Québec, une question ou un projet de loi devant faire l'objet d'une consultation populaire doit être approuvé par les deux tiers des membres de l'Assemblée nationale".

Avant de donner le droit de parole au proposeur sur sa motion, quelqu'un...

M. Grenier: Je m'excuse, mais est-ce qu'il serait possible de mettre comme intervenant le député de Nicolet-Yamaska, M. Fontaine? Non, ce n'est pas terminé.

Le Président (M. Clair): Cela va. Au lieu de M. Brochu (Richmond) comme intervenant, il y aura M. Fontaine (Nicolet-Yamaska).

J'allais dire qu'avant de commencer à entendre les intervenants sur la motion d'amendement du député de Gatineau, il faudrait d'abord disposer de la recevabilité de cette motion d'amendement. Quelqu'un soulève-t-il la question de recevabilité de la motion d'amendement du député de Gatineau? Je déclare la motion du député de Gatineau recevable. J'apporte une dernière modification, j'espère, à la liste des intervenants et des membres: M. le député de Rosemont sera effectivement membre de cette commission et il ne sera pas remplacé par M. Godin (Mercier). Cependant,

M. Godin (Mercier) remplacerait M. Lévesque (Taillon) comme intervenant.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que le député de Jonquière est quelque part là-dedans?

Le Président (M. Clair): M. le député de Gatineau, vous avez la parole.

M. Gratton: M. le Président, effectivement, au moment d'ajourner ce matin, nous allions déposer une motion d'amendement à l'article 6, qui est conséquente, d'ailleurs, avec la position que le Parti libéral a adoptée dès le dépôt du livre blanc sur la consultation populaire. On sait que plusieurs des organismes qui sont venus comparaître devant la commission parlementaire sur le livre blanc avaient indiqué au gouvernement leur appui à cette façon d'adopter la question. Tous les intervenants, y compris la Commission des droits de la personne qui a, ce matin, dans le rapport qu'elle nous a soumis, repris ces considérations du 11 novembre 1977, insistaient sur la nécessité de faire en sorte que, lors de l'adoption de la question, quel que soit le référendum, s'il y avait lieu de rechercher une formulation où la population s'y retrouverait le mieux possible, il serait normal d'espérer que les représentants de la population à l'Assemblée nationale puissent, eux aussi, faire le consensus le plus large possible sur la formulation de la question. À cet effet, il serait souhaitable que ce ne soit pas la simple majorité des membres présents à l'Assemblée qui puisse adopter le texte d'une question à être soumise lors d'une consultation popuiaire, mais bien les deux tiers des députés membres de l'Assemblée nationale.

Vous me permettrez, M. le Président, de signaler que la Commission des droits de la personne, dans ses réflexions préliminaires sur le livre blanc, sur la consultation populaire, datées du 11 novembre 1977, nous disait ceci, à la page 3, et je cite: Elle préférerait, "en raison de l'importance de la motion, que le vote se prenne à la majorité des deux tiers plutôt que la majorité simple, comme le prévoit la procédure parlementaire lorsqu'on recherche, le plus large consensus entre les partis politiques ". Et suite à la motion adoptée unanimement par cette... (16 h 45)

M. Vaillancourt (Jonquière): ...

M. Gratton: Oui, et en continuant on... "...entre les partis politiques, la nomination des commissaires de la Commission des droits de la personne en est un exemple". C'est ça?

M. Vaillancourt (Jonquière): Non, "... il n'en va d'aucune atteinte... ", vous pourriez continuer.

M. Gratton: Non...

M. Vaillancourt (Jonquière): "... il n'en va... Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Gratton: Non, j'ai dit, M. le Président... Je ne sais pas si je parle dans le vide à cette commission. Le député de Mercier, ce matin, m'a posé des questions après que j'aie passé quinze minutes à expliquer ce que je tentais de faire comprendre à la commission. Là, le ministre de la Justice ne m'a pas entendu dire, je suppose, que je parlais des réflexions préliminaires. Je vais maintenant vous lire ce que la Commission des droits de la personne nous a dit...

Une voix: Ce n'est pas la même chose. M. Godin: D'accord.

M. Gratton: ... dans le rapport daté du 5 juin 1978 et qui donnait suite à l'adoption unanime des membres de la commission d'une motion leur demandant de nous faire parvenir leur avis sur le projet de loi no 92.

M. Godin: M. le Président, est-ce que vous nous autorisez à tomber la veste, s'il vous plaît? M. le Président, est-ce que vous nous autorisez à tomber la veste ou les règles du Parlement vous font...

Le Président (NI. Clair): Je préférerais procéder autrement, à savoir que vous ne me posiez pas la question et que, si quelqu'un soulève une question de règlement, je sois appelé à en disposer.

M. Vaillancourt (Jonquière): II y a beaucoup de précédents.

M. Godin: D'accord.

M. Samson: Vous allez passer pour des tout-nus.

M. Bédard: Je suis habillé pour deux.

M. Gratton: Alors, M. le Président, dans son document dont nous avons pris connaissance ce matin, la Commission des droits de la personne dit, au bas de la page 2 et je cite: "La proposition sur un vote à la majorité des deux tiers n'a cependant pas été retenue ". Il s'agit de la proposition dont j'ai fait lecture il y a quelques instants. Sans vouloir en faire une question de principe, ni en exagérer l'importance, la commission continue de croire qu'un vote à la majorité des deux tiers, comme le prévoit la procédure parlementaire lorsqu'on recherche le plus large consensus entre les partis politiques, serait préférable. Il n'en va d'aucune atteinte à des libertés fondamentales, mais, simplement d'une garantie que la question soumise à la consultation populaire, une fois adoptée, ne fasse plus l'objet d'une contestation quelconque, qui aurait pour conséquence d'orienter le débat sur des questions de forme plutôt que sur des questions de fond.

M. le Président, nous non plus, la raison qui nous motive à présenter cette motion d'amendement, n'en est pas une de fond, comme telle, n'en est pas une de principe, mais s'inscrit simplement dans le processus constant qu'on a suivi, depuis le début, depuis le dépôt du livre blanc, c'est-à-dire que le ministre de la réforme électorale, avant le ministre de la Justice ont tous deux tenté d'assurer le plus grand consensus possible autour de cet outil de la "démocratie" que constitue la loi 92 sur la consultation populaire.

Et, comme le dit la Commission des droits de la personne, il s'agit en proposant que la formulation de la question soit adoptée par les deux tiers des membres de l'Assemblée nationale, tout simplement, d'assurer ce consensus plus large.

M. le Président, si le gouvernement ne considère pas qu'il soit important de faire en sorte que le plus grand nombre de députés possible soient satisfaits que la question est claire, limpide et produira des résultats probants et valables, on se demande ce qu'on fait ici. Parce qu'on l'a dit et répété à satiété que les résultats du référendum, l'interprétation qu'on en fera, ne seront valables que dans la mesure où nous nous serons assurés que nous donnons toutes les possibilités à la population, d'abord, de comprendre la question qui lui est posée et ensuite, de s'exprimer clairement quant à son choix.

C'est l'objectif que visait la proposition d'amendement du député de Laval, sous-amendée par le député de Marguerite-Bourgeoys, et qui a été rejetée ce matin, c'est encore ce que recherche la proposition d'amendement que j'ai faite ce matin à l'article 6. Je ne parlerai pas plus longuement, M. le Président, sur les diverses personnes qui ont souscrit à ce voeu, à savoir que les deux tiers des députés adoptent la formulation de la question. Je n'en citerai que deux parmi plusieurs, M. le Président. En l'occurrence, un éditorial du journal Le Devoir du vendredi 26 août 1977, signé par M. Michel Roy: "S'il est vrai que l'on doive reconnaître au gouvernement la responsabilité qui est la sienne pour déterminer la manière de poser la question sur une affaire relativement mineure...

M. Godin: Ah bon!

M. Gratton: ... dont la réponse n'entraîne pas de graves conséquences politiques, il en va autrement d'une consultation sur l'avenir même d'un pays. On pourrait sans doute se mettre d'accord sur une majorité des deux tiers' .

M. Lalonde: Sans doute.

M. Gratton: Sans doute on pourrait se mettre d'accord. On le souhaite énormément en tout cas, M. le Président. C'est la raison qui nous motive à formuler cet amendement. Un deuxième témoignage du journal La Presse du samedi 27 août 1977, signé par M. Marcel Adam: "La règle de la majorité simple ne devrait-elle pas également être suspendue et remplacée par celle établissant aux deux tiers la majorité requise pour adopter la question d'un référendum..." À noter ici, M. le Président, que M. Adam en fait même la suggestion par rapport à n'importe quel référendum et pas nécessairement strictement à un référendum portant sur l'avenir constitutionnel du Québec,

comme vise à le faire l'amendement que j'ai proposé. Je continue: "... Une règle qui est déjà prévue, que je sache, pour des cas beaucoup moins importants que celui portant sur l'avenir constitutionnel du Québec ". Fin de la citation. Donc, M. le Président, inutile de citer une longue litanie de ces témoignages, inutile de répéter ce que la Commission des droits de la personne nous a dit à deux reprises différentes. J'invite les ministériels d'abord à réaliser qu'il ne s'agit pas de demander d'amender le projet de loi pour que toute question de tout référendum soit adoptée par les deux tiers des membres de l'Assemblée nationale, mais bien seulement du référendum relatif au statut constitutionnel du Québec. J'espère que le ministre ne se limitera pas à nous dire, comme il l'a fait quant à la motion d'amendement du député de Laval, que, parce que c'est une loi-cadre qu'on étudie, il n'est pas question de spécifier, dans le projet de loi no 92...

M. Bédard: L'argument est différent.

M. Gratton: On va l'écouter avec grand soin, sauf que je crains d'avance, M. le Président, que, les arguments étant différents, le résultat risque d'être le même. Je vous remercie.

Le Président (M. Clair): Le député de Mégantic-Compton.

M. Bédard: Beaucoup d'intuition.

M. Grenier: Est-ce qu'il y a une intervention ministérielle, comme l'habitude le veut?

M. Bédard: Pardon?

M. Grenier: Est-ce que ce sont les mêmes règles que d'habitude? Non.

M. le Président, bien rapidement d'abord, sur l'amendement qui nous est soumis, sur lequel il nous est permis de nous interroger, je n'ai pas d'objection majeure à cet amendement, puisqu'on a vu que ça va dans le sens de la Charte des droits et libertés de la personne, qui fait une semblable recommandation dans ses principes.

On sait également que le Protecteur du citoyen est ainsi nommé par le vote des deux tiers de cette Assemblée nationale. Il en est de même du directeur général du financement des partis politiques, poste institué en vertu de la loi 2, et le Vérificateur général est aussi nommé par les deux tiers de cette Assemblée.

Cependant, cela pose une particularité, à savoir que, dans l'actuel gouvernement, il y a déjà 70 votes acquis par le gouvernement, il n'en manque que quatre pour faire les deux tiers de la Chambre. À partir de là, le principe est peut-être un peu différent, dans ce sens que, pour assurer les deux tiers de cette Chambre, il ne manque que quatre votes. Cela demande, bien sûr, une certaine forme de consensus pour trouver ces quatre votes. Mais il est acquis que, dans l'opinion publique, tout projet de loi devrait être une initiative gouvernementale, on s'attend à ça, on s'attend éga- lement que les décisions soient prises par le gouvernement. Cela appelle, bien sûr, la responsabilité du gouvernement, on sait ça.

Un autre problème sur lequel il faut s'interroger, c'est qu'il se pourrait bien que, à demander plus qu'un gouvernement qui s'est fait élire et qui veut nous amener un pareil référendum, une pareille façon de se prononcer sur l'avenir constitutionnel du Québec, il reste toujours une voie après, c'est que le gouvernement, après avoir posé sa question, si elle n'est acceptée que par une majorité simple, on devra la débattre, elle devra être votée chez le public et si le public n'en est pas satisfait, il pourra toujours battre ce gouvernement lors d'une éventuelle élection.

Il y a une chose aussi qu'il ne faut pas négliger, c'est que le fait de demander plus que la force d'un gouvernement qui est déjà majoritaire-pourrait devenir une espèce de bois dans une roue administrative, à savoir que courir après quelques autres votes, cela pourrait facilement être une façon de ne jamais s'accorder sur une question et risquer de porter ce référendum aux calendes grecques.

Je pense que cela pose des problèmes que de demander les deux tiers sur une question comme celle-là. Ce n'est pas exactement pareil que de nommer, par exemple, le Protecteur du citoyen ou le directeur général du financement, ou le vérificateur. Ce n'est pas pareil. C'est un principe, alors que, là, on met en cause des personnes à qui on donne un mandat.

Je vous dis qu'entre les deux, mon coeur balance. Je ne suis pas convaincu que les deux tiers des votes soit une chose absolument essentielle. J'attendrai davantage d'éclairage de la commission. Mais il y a certainement des inconvénients, argument qui pourrait servir, encore une fois, à faire reporter la question à plus tard, argument qui pourrait desservir certaines formations politiques. On connaît les conséquences que cela pourrait apporter.

Si on demande les deux tiers, selon la constitution actuelle de la Chambre, pour avoir plus des deux tiers et les quatre députés supplémentaires dont on a besoin, il faudra trouver ces députés dans l'une ou l'autre des formations des partis reconnus, si on garde l'unanimité des partis, comme c'est une coutume.

À partir de là, il pourrait y avoir du discrédit à l'égard de l'une ou l'autre des formations politiques. Personnellement, j'ai longuement défendu, et je continuerai de le faire aussi, le principe de dire qu'un gouvernement fait son nid, pose ses gestes, fait ses lois, et, quand on n'en est pas satisfait, on le bat. J'ai connu cela, d'autres l'ont connu, d'autres le connaîtront.

Je garde mes réserves sur cet amendement

Le Président (M. Clair): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, je suis d'accord avec cet amendement. Je pense que ce n'est pas un fait nouveau. J'ai annoncé mes couleurs il y a pas mal de temps. Au tout début de cette com-

mission parlementaire, j'en ai parlé, je me rappelle, à l'occasion du dépôt du livre blanc, à l'Assemblée nationale, avoir posé une question à l'honorable ministre d'État à la réforme parlementaire, le député de Maisonneuve. Ma question portait justement sur cet aspect, à savoir s'il accepterait cette possibilité d'introduire dans sa loi, de deux façons, soit pour le choix de la question, un vote aux deux tiers de l'Assemblée. J'avais même ajouté, à ce moment-là, la possibilité que le référendum, devant lier le gouvernement — il n'était pas sûr que cela ne devait pas lier le gouvernement — aurait dû comporter une exigence d'un vote des deux tiers de la population. Mais nous sommes présentement devant une loi de la consultation popuiaire et ce qu'il y a de particulier dans cette loi, c'est que cela ne lie pas le gouvernement.

Si l'on tient compte du fait que nous étudions ce projet de loi principalement parce que l'actuel gouvernement en avait fait une promesse solennelle avant les dernières élections générales... C'est pour s'acquitter d'une promesse qu'il nous présente le projet de loi sur les référendums, mais, en nous présentant son projet de loi sur les référendums, en même temps, il prend bien la précaution de ne pas en faire une loi dans laquelle la réponse à un référendum lie le gouvernement. (17 heures)

L'article 6, particulièrement, nous permet d'en parler. Cela devient une espèce de loi... On aurait pu tout aussi bien l'appeler la loi sur les sondages officiels et cela aurait donné la même chose, parce qu'à la fin de la course, le gouvernement n'aura en main, comme valeur, que la valeur d'un sondage.

Or, si l'on tient ce raisonnement et que l'on en accepte la teneur, c'est-à-dire qu'on accepte qu'on va jouer au référendum mais que, dans le fond on ne se lie à rien, si on accepte cela, bien sûr, pour préparer la question, dans la ligne de pensée, la majorité simple pourrait être suffisante, parce qu'on s'en va vers un sondage. Il reste cet élément qui vient en quelque sorte impliquer l'Assemblée nationale dans le processus, parce que le gouvernement, en vertu de l'article 6, peut ordonner que les électeurs soient consultés par référendum sur une question approuvée par l'Assemblée nationale du Québec.

En théorie, c'est bien beau, mais, en pratique, je pense qu'on ne réussira pas, avec les beaux discours qu'on peut faire de part et d'autre, d'un côté ou de l'autre de la table, qu'on ne réussira à faire croire à personne qu'une question soumise à l'Assemblée nationale et n'appelant que la majorité simple serait réellement une question qui provient de l'Assemblée nationale, M. le Président. C'est une question qui provient du gouvernement qui se servira de sa propre majorité pour la faire passer. Quelles que soient les opinions d'autres membres de l'Assemblée, bien sûr, en pratique, si le gouvernement décide que c'est telle question qu'il présente devant l'Assemblée nationale, il a suffisamment de membres pour l'adopter à la majorité simple et en faire une question qui, sous le couvert d'une question en provenance de l'Assemblée nationale, ne sera pas autre chose qu'une question posée par le gouvernement lui-même.

Évidemment, je ne réfute pas le fait que le gouvernement peut, s'il le veut — et je ne trouverais pas cela illégitime du tout — poser lui-même une question, demander consultation sur sa politique, mais je pense qu'il serait plus normal, dans un effort minimal de courage, que le gouvernement nous dise clairement: C'est le gouvernement qui va le faire. Qu'on nous le dise clairement. Là, ce n'est pas clair. À l'article 6, ce n'est pas comme cela que c'est dit. Il est dit que c'est l'Assemblée nationale, sur une question approuvée par l'Assemblée nationale. Un instant! Je pense qu'on ne réussira pas à berner la population au point de lui faire croire qu'avec la majorité simple, c'est l'Assemblée nationale qui a décidé cela. Non, c'est le gouvernement qui va avoir décidé, c'est le gouvernement qui va voter, c'est le gouvernement qui, grâce à la majorité simple, va imposer son action. Remarquez...

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que le député de Rouyn-Noranda me permettrait une question?

M. Bédard: II faut donner un minimum d'intelligence à la population quand même...

Le Président (M. Clair): À l'ordre! M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, je viens d'entendre une parole du ministre de la Justice que je n'accepte pas.

M. Bédard: II faut avoir confiance en la population. Elle est capable de comprendre.

M. Samson: Ce que je viens de dire, la population le comprend bien. Je ne voudrais pas, en aucune façon, mais si le gouvernement veut le faire, c'est son affaire, mais vous ne m'associerez pas à ce genre de choses... Je ne voudrais pas, en aucune façon, qu'on laisse croire, par ce genre de loi. que la question qui sera posée va provenir de l'Assemblée nationale. Ce n'est pas vrai. Elle va provenir du gouvernement. Dites-le clairement. Je n'ai pas d'objection à ce que cela vienne du gouvernement. Si le gouvernement veut le faire, qu'il fasse son nid, qu'il prenne ses responsabilités. Ce n'est pas illégitime et ce n'est pas illégal non plus. Ce que je n'aime pas...

M. Vaillancourt (Jonquière): Article 100. M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Rouyn-Noranda, le député de Jonquière invoque l'article 100, je pense, pour vous demander si vous lui permettriez une question. Est-ce que c'est bien cela?

M. Vaillancourt (Jonquière): Immédiatement ou à la fin. comme vous le voulez.

M. Samson: Je n'ai pas d'objection à répondre à une question.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, est-ce que le député de Rouyn-Noranda voudrait dire que toute loi adoptée à l'Assemblée nationale avec la majorité simple n'est pas une loi de l'Assemblée nationale, mais une loi du gouvernement?

M. Samson: M. le Président, une loi qui est adoptée à l'Assemblée nationale, quand on a un gouvernement majoritaire, il me semble que c'est élémentaire...

M. Vaillancourt (Jonquière): Une loi de l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Clair): Vous avez posé une question, M. le député de Jonquière, attendez la réponse.

M. Samson: ... que c'est le gouvernement qui impose ses vues.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... parlementarisme.

M. Samson: Dans un contexte où le gouvernement est minoritaire — ce n'est pas encore arrivé à Québec, mais c'est arrivé à Ottawa, à titre d'exemple — c'est réellement le Parlement, dans un contexte comme cela, dans toute la force du mot... Le gouvernement seul ne peut pas obtenir la majorité simple. Ce n'est pas le cas présentement à Québec. Vous êtes devant un gouvernement majoritaire. Qu'on n'essaie pas de berner la population. Ce n'est pas nécessaire. Ou bien vous acceptez...

Je dis qu'il y a deux choses possibles: Ou bien le gouvernement accepte que dans la loi on inscrive que la question devra nécessiter les deux tiers, c'est-à-dire que l'adoption de la question devra nécessiter les deux tiers des membres de l'Assemblée, ce qui dépasserait le cadre gouvernemental, en l'occurrence, ou bien, si vous le laissez comme cela, modifions l'article 6 dans un autre sens...

M. Bédard: Est-ce que je pourrais...

M. Samson: Disons que la question est approuvée...

M. Bédard: Oui.

M. Samson: ... par la majorité à l'Assemblée nationale. Cela va avoir un sens plus...

M. Bédard: Mais, là-dessus, est-ce que... M. Samson: ... correct.

M. Bédard: ... je pourrais inviter le député à regarder l'article 7, lorsqu'on parle de questions, c'est sur proposition du premier ministre. Il me semble que ça précise des choses sur la projection dont parle...

M. Samson: Je suis d'accord...

M. Bédard:... le député au niveau de l'ensemble de la population.

M. Samson: ... avec le ministre de la Justice que ça précise un petit peu, mais quand on regarde l'article 7, parce qu'il semble que le ministre veuille que je parle de l'article 6 en considération de l'article...

M. Bédard: S'il se réfère...

M. Samson: Non, avec référence, je suis d'accord. Je n'ai pas d'objection à le faire, d'ailleurs, mais si je parle de l'article 6 avec référence à l'article 7 pour mieux nous comprendre — c'est bien ça que le ministre de la Justice a voulu dire — si je fais ça comme ça, à ce moment-là, l'article 7, dans sa formulation, ressemble à peu près au mot à mot des lois qui ont été adoptées devant ce Parlement et qui régissent, par exemple, les questions du Protecteur du citoyen, de la Commission des droits et libertés de la personne, du vérificateur, du directeur du financement des partis politiques et du président des élections. C'est exactement le même genre de formulation pour ces lois-là. On y dit: Sur proposition du premier ministre, etc., mais on finit par dire que ça prend deux tiers, par exemple.

Alors, si le ministre de la Justice tient à son argumentation, je dis, d'accord, je le suis. Je tiens à dire que si le ministre tient à cette argumentation, je le suis, mais qu'il poursuive son raisonnement conformément à la tradition établie dans des cas comme ça et il va s'apercevoir que ça débouche sur les deux tiers dans les cas où on retrouve le même genre de chose dans d'autres lois.

M. le Président, le ministre d'État à la réforme parlementaire nous avait dit, quand j'ai posé cette question au tout début, lors du dépôt du livre blanc: Ne vous inquiétez pas. Je ne vous dis pas oui immédiatement, mais on sera ouvert à toute forme de suggestion valable — cette suggestion était faite à ce moment-là — il ne m'a pas dit non à ce moment-là, mais il a été ouvert au point où on en est rendu maintenant. C'est une ouverture dangereuse, M. le Président. Si le gouvernement continue à s'ouvrir comme ça, on risque finalement peut-être d'avoir des lois qui ont du bon sens, mais il va falloir que vous continuiez à ouvrir un peu plus, parce que là, vous n'êtes pas partis pour aller bien loin.

Quand on a commencé l'étude du projet de loi, dans les remarques préliminaires, on est revenu sur la question, on a tenté, une fois de plus, d'expliciter qu'il serait sage, dans les circonstances... Parce que là, bien sûr, il y a une loi-cadre. Mais cette loi-cadre n'est qu'un écran de fumée pour cacher ce qu'on veut faire en réalité. Il

n'y a personne qui va me faire croire, dans ce gouvernement, qu'on va faire des référendums toutes les semaines sur toutes sortes de sujets, ce n'est pas vrai! Vous n'aurez pas le temps de faire ça, surtout pas quand vous siégez jusqu'à 5 heures du matin, comme vous l'avez fait hier soir. Et le coût des référendums et ces choses-là, non.

Votre loi-cadre, c'est pour camoufler ce que vous voulez faire. Quand vous en aurez fait peut-être deux pour sauver le principe, vous n'irez pas trop trop loin là-dedans, parce que ce n'est pas votre habitude d'ailleurs, ce n'est pas l'habitude du gouvernement, ils ont plutôt pris l'habitude de décréter dans d'autres domaines, ce sont des "décréteux". Ils ne viendront pas nous faire croire qu'ils ont besoin de cette grande loi-cadre, parce qu'ils pourraient éventuellement consulter la population sur tel sujet pour savoir si les boutons devraient avoir cinq trous plutôt que quatre ou des choses comme cela, vous savez. Non, on n'est pas à ce point dépourvu pour vous appuyer sur ce genre de folie collective qui semble s'être emparée du gouvernement depuis quelque temps.

Je dis, M. le Président, que ce référendum qui est visé — parce que ce n'est pas un autre qui est visé — on l'a bien identifié. Il est identifié par tout le monde. Ce référendum qui est visé, il s'agit là de consulter la population sur son avenir en tant que citoyen sur son appartenance au pays ou non, c'est clair, c'est établi. C'est tellement clair que de plus en plus les ministres qui ne voulaient pas en parler au début et qui cherchaient toujours à dire: Ce n'est pas cela qu'on veut faire ne vous inquiétez pas trop. Mais là, de plus en plus, c'est clair, c'est précis, on nous dit: C'est l'indépendance qu'on veut. De toute façon, on le comprend, parce que les ministres ne pouvaient sûrement pas éternellement ne pas en parler. L'aile radicale du Parti québécois leur a sûrement forcé la main, surtout — comment vous appelez cela — le praesidium suprême, qui se réunit de temps en temps, le soviet suprême...

M. Godin: C'est de l'histoire...

M. Samson: Cela vient du président.

M. Lalonde: C'est un lapsus présidentiel.

M. Samson: Vous voyez comme j'ai l'oreille aux aguets. Je n'avais pas vu, mais j'avais entendu.

M. Bédard: Vous êtes très perspicace.

M. Samson: De toute façon, je ne dirai pas le soviet suprême mais c'est un drôle de praesidium que vous avez. Ce qui fait qu'on en a connu plusieurs. Ce qui fait que j'ai vu des ministres d'aujourd'hui, M. le Président, dans l'Opposition, dire oui aujourd'hui et dire non le lendemain, suite à une réunion d'un praesidium suprême qui avait eu lieu, je ne sais pas trop où.

M. Paquette: C'est cela la démocratie, ce n'est pas le chef qui décide.

M. Samson: Vous vous en rappelez de cela?

M. Lalonde: Surtout dans l'affaire de l'avortement, ce n'était pas le chef...

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Samson: M. le Président, je ne voudrais pas que les interventions viennent d'un bord et de l'autre et m'empêchent de maintenir la pertinence du débat, parce que cela ne serait pas correct. Mais, je dis ceci. Nous avons, quand même, si on veut réellement consulter la population... Si on veut le faire de façon normale, d'une façon juste et d'une façon qui donne, au moins, l'apparence de démocratie, il faut qu'on prenne certaines mesures et, dans ces mesures, les deux tiers qui sont suggérés, des votes des membres de l'Assemblée nationale pour le choix de la question, me semblent être un minimum. Cela ne veut pas dire que les deux tiers empêcheraient le gouvernement de poser une question qui serait raisonnable, au contraire. Autant, nous dit-on, le gouvernement sera jugé, oui, mais n'oubliez pas que l'Opposition l'est aussi. L'Opposition ne pourrait pas se permettre de faire un "filibuster" sur une question qui serait raisonnable. L'Opposition ne pourrait pas se permettre de faire un "filibuster" sur une question qui serait exactement une question qui appelle une réponse juste. Est-ce que c'est réellement cela que l'on veut par la Loi sur la consultation populaire, est-ce qu'on veut réellement savoir l'opinion de la population? Si oui, si on veut connaître l'opinion de la population, il faut prendre toutes les mesures pour connaître cette opinion. Si, au contraire, on ne veut se servir de cela que pour laisser croire qu'on veut connaître l'opinion de la population, mais qu'avec les mécanismes entortillés qu'on est en train de nous arranger, on aura la réponse qu'on veut, c'est une autre chose, qu'on ait le courage de le dire. Si c'est cela qu'on veut faire, qu'on ait le courage de le dire. Pour le moment, je ne prétends pas que ce soit ce qu'on veut faire, je dis: Pour le moment. On verra. Il y a d'autres articles à venir. Évidemment, d'ici à ce qu'on puisse passer à travers cela, il va se passer pas mal de temps. Peut-être que le gouvernement va pouvoir s'assagir et modifier un peu son projet de loi. Pour le moment, je ne peux pas présumer que le gouvernement ne veut pas connaître la réponse exacte à une question qui devrait être exacte. (17 h 15)

Mais cette question, M. le Président, quelle qu'elle soit, ou les questions — parce que nous n'avons encore rien qui nous garantisse que ce sera une question — sont de la plus haute importance. C'est l'avenir de tous et chacun des Québécois qui sera en jeu, à partir du travailleur, en passant par l'homme d'affaires, le père de famille, la famille, l'enfant, c'est l'avenir de l'ensemble du peuple québécois qui est en jeu. Or, ce peuple a le droit, d'autant plus qu'il a eu la promesse solennelle que cela ne se ferait pas sans qu'il soit consulté, la promesse que l'indépendance du Québec ne se ferait pas sans qu'un référen-

dum vienne l'appuyer, si c'est cela qu'on a promis, M. le Président, il ne faudrait pas le décevoir. Il faudrait lui permettre de s'exprimer librement et lui permettre de dire exactement ce qu'il pense avec une question très claire et qui amène une réponse très claire. Pour s'assurer que la réponse va être la plus claire possible et que cela va amener la réponse la plus claire possible, il faut s'assurer que cela prenne plus que la majorité simple. Bien sûr, il y a 71 députés, dont un, le président, qui ne vote pas, cela fait 70, cela en prend, comme on a dit tantôt, quatre autres pour former ces deux tiers. Un seul parti possédant plus de quatre députés pourrait supporter le gouvernement et ce serait suffisant. Cela ne veut pas dire que cela amènerait une question qui ferait l'unanimité quand même, mais il y aurait au moins plus de garantie aux deux tiers que la seule majorité simple dans le cas présent. C'est cela, M. le Président, que j'aimerais faire remarquer. Le ministre de la Justice, qui a pris la relève dans ce dossier, me semble malheureusement un peu lié par certaines balises.

Ce matin, sur le même article 6, quand j'ai suggéré qu'on suspende et qu'on lui permette de voir s'il n'y avait pas moyen d'élargir un peu le mandat qu'il semblait avoir, en réponse, il m'a dit qu'il n'avait pas besoin de mandat. J'en ai donc conclu qu'il pouvait prendre des décisions. S'il n'a pas besoin de mandat et qu'il peut prendre des décisions, à ce moment-ci, c'est une décision qu'il peut prendre et que je lui demande de prendre, d'accorder son appui à cette motion qui est très valable, M. le Président. Dans des cas comme cela, c'est un cas exceptionnel autant que la nomination du président général des élections, autant que la nomination du Vérificateur général, autant que les autres nominations qui nécessitent les deux tiers et qui a besoin du maximum de crédibilité possible.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mercier.

M. Godin: Notre collègue de Rouyn-Noranda vient d'abolir le Parlement, l'air de rien, M. le Président, en disant que toute loi qui est soumise à l'Assemblée par le gouvernement n'est qu'une loi du gouvernement et non pas une loi de l'Assemblée, quand elle est votée. Cela veut dire que toutes les lois votées sous chaque gouvernement...

M. Samson: M. le Président, j'invoque le règlement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Rouyn-Noranda, sur une question de règlement.

M. Samson: Je pense que c'est l'article 99...

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, c'est l'article 96 et c'est à la fin de l'intervention que le député...

M. Samson: Non, non, un instant! N'allons pas trop vite...

Le Président (M. Clair): À l'ordre! À l'ordre! À l'ordre!

M. Samson: ... le radical de Jonquière, pas trop vite!

Le Président (M. Clair): M. le député de Rouyn-Noranda, vous pouvez me parler, je vous écoute.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: J'ai dit l'article 99, M. le Président. On n'a pas le droit de m'imputer ce genre de motif, parce que j'ai pris la peine de dire que nous étions dans un contexte de gouvernement majoritaire et non pas minoritaire et que, dans ce contexte, quand le gouvernement décide quelque chose, il l'adopte quand c'est la majorité simple.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, question de règlement.

M. Samson: C'est l'article 99, 6e ou 7e paragraphe.

M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Samson: ... nonobstant le radicalisme du député de Jonquière, c'est à l'article 99 que vous allez retrouver mon droit.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, simplement pour dire...

Le Président (M. Clair): M. le député, sur la même question de règlement ou sur une nouvelle question de règlement?

M. Vaillancourt (Jonquière): Non, c'est simplement pour dire que le député de Rouyn-Noranda s'est servi de l'article 99, parce qu'il savait fort bien qu'il aurait dû se servir de l'article 96 et qu'il ne pouvait pas le faire, parce qu'il n'avait pas le droit de le faire. C'est tout.

Le Président (M. Clair): Messieurs, à l'ordre, s'il vous plaît! M. le député...

M. Samson: M. le Président, sur la question de règlement, je vous dis, pour votre gouverne, que je connais très bien l'article 96 et que j'aurais pu m'en servir, si j'avais voulu décider de me servir d'un autre article. Je n'ai pas de leçon de règlement à recevoir du député de Jonquière.

Le Président (M. Clair): Pour disposer de...

M. Vaillancourt (Jonquière):... à la fin de l'intervention.

Le Président (M. Clair):... votre question de règlement, M. le député de Rouyn-Noranda, tout comme je suis convaincu que vous n'aviez l'intention d'imputer aucun motif indigne à aucun membre de cette Chambre en alléguant qu'il s'agirait d'un projet du gouvernement et non d'un projet de l'Assemblée nationale, je pense que, dans la même mesure, le député de Mercier, quand il tient les propos qu'il tenait, n'entendait pas vous imputer des motifs indignes.

Je pense que si on tolère les propos de l'un, on tolère les propos de l'autre.

M. Samson: Quand on dit que quelqu'un a voulu abolir le Parlement, M. le Président, avec tout le respect que j'ai pour vous...

Le Président (M. Clair): Je sais que vous en avez beaucoup.

M. Samson: ... je vous demanderais d'empêcher celui qui voudrait le faire.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mercier.

M. Godin: M. le Président, en tant que journaliste, j'ai couvert, il y a quelques années, le congrès du Parti créditiste fédéral, qui décidait de fonder le parti créditiste provincial. Je me souviens très bien d'une des règles imposées démocratiquement par le chef du parti dans le temps, M. Réal Caouette, qui avait dit à ses troupes, et M. Samson était là, il avait fait un discours remarquable, M. Fabien Roy aussi, à l'époque...

M. Roy: Faites attention à ce que vous allez dire, j'étais là.

M. Godin: ... à l'époque où M. Roy côtoyait de près, maintenant, je vois qu'il s'en éloigne de plus en plus...

M. Roy: M. le Président...

M. Godin: ... et le chef avait dit, je retrouve dans les propos du député de Rouyn-Noranda une tradition, en fin de compte, une solution de continuité: On va aller au provincial, si on a 80% de majorité. La majorité créditiste, par conséquent, ce n'était pas 50 plus un, c'était 80%. Cela avait passé, remarquez bien. Cela avait passé.

M. Samson: Vous avez remarqué que, quand on est convaincu, ça passe.

M. Godin: Cela avait passé, M. le Président, sauf que...

M. Samson: Vous autres, vous n'êtes pas convaincus.

M. Godin:... dans le même temps, il y avait M. Yvon Dupuis, dans les toilettes, qui attendait que la démocratie s'exerce.

M. Roy: Je m'excuse, je m'excuse, il n'était pas dans les toilettes, il était dans la petite chambre des vadrouilles, à côté des toilettes.

M. Samson: On appelait ça la chambre des douches.

M. Godin: II se préparait à nettoyer.

M. Roy: J'étais à la porte et j'ai dû faire place pour qu'on passe.

M. Samson: On appelait ça la chambre des douches et vous auriez dû y passer, ça vous aiderait.

M. Godin: C'est la démocratie créditiste.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs, s'il vous plaît! J'ai l'impression qu'on est rendu dans un corridor qui n'est plus celui de la pertinence du débat.

M. le député de Mercier.

M. Godin: C'est la démocratie créditiste, M. le Président, sauf que cette démocratie créditiste à 80% ou 66 1/3% vient en contradiction avec des règles fort anciennes et fondamentales que connaît certainement mon collègue de Laval, entre autres, ce qui s'appelle Articuli Baronum 1215. C'est la base même de la Magna Carta, c'est-à-dire la Grande Charte, qui est la base de nos libertés dans le système britannique, d'où nous venons. Et la règle, c'est 50 plus un, major pars ex eis providerit vel praeceperit.

M. Lavoie: Qu'est-ce que vous faites de la loi 101, l'usage du français obligatoire?

M. Godin: De plus, dans la Grande Charte, article 49, cette idée est reprise et, comme par hasard, l'histoire a de ses ironies, dans l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, c'est la même section 49 qui dit que la majorité, c'est 50 plus 1. La démocratie, c'est cela.

Il est évident que la règle des deux tiers a des attraits, surtout pour les tiers partis, ou les quarts de parti, ou les huitièmes de parti. Je vois très bien le leader, chef du caucus, whip en chef, leader parlementaire du Parti créditiste négocier deux ou trois bureaux de plus, si on a besoin de sa voix pour avoir les deux tiers en question. Il l'a fait au moment de l'attribution des locaux.

M. Samson: M. le Président, article 99. Je pense que mon honorable ami et collègue n'a sûrement pas l'intention de dire cela sérieusement.

M. Godin: Pas moins que vous.

M. Samson: M. le Président, si cela devenait

sérieux, je me devrais de prendre toutes les dispositions pour réfuter ce genre de choses. Mais je n'ai pas l'impression qu'il l'a dit malicieusement.

M. Godin: Je reviens à l'essentiel, sur-le-champ.

M. Samson: M. le Président, je voudrais que mon honorable collègue comprenne que je n'ai à négocier de droit d'aucune façon et que je n'en négocierai pas.

M. Godin: Des privilèges, par exemple. Je poursuis, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mercier.

M. Godin: Au fond, ce que cela implique, c'est que nous aurions, dans ce Parlement, l'établissement de la règle de la minorité et non plus de la majorité. Un tiers de ce Parlement pourrait décider du genre de loi que le gouvernement pourrait adopter. Il suffirait qu'une personne au-delà de 71 décide que c'est non et il n'y aurait plus de décision dans ce Parlement. C'est la règle de la minorité que cela implique. Il est des cas où la règle des deux tiers joue, effectivement. Il y en a deux, dans nos lois: la nomination du Protecteur du citoyen et du président des élections, qui sont les deux principaux, les deux plus connus et qui... Vous interviendrez tout à l'heure, M. le député de Laval, vous aurez amplement le loisir de parler vous aussi.

Je remarque que ces deux cas plus connus, ces deux cas plus souvent cités, se réfèrent à des émanations non pas de l'exécutif, mais du législatif, c'est-à-dire non pas du gouvernement, mais du Parlement, comme tel. Quand le Parlement décide de confier à un Protecteur du citoyen le soin de revenir sur ses propres lois, il demande les deux tiers. Quand il nomme le président des élections, car les élections sont une opération qui se situe au-dessus des partis, il demande les deux tiers.

Mais, quand il s'agit d'adopter des lois, quand le gouvernement décide de consulter les citoyens, de son propre chef, parce qu'il est élu, en vertu de 49 Magna Carta et 49 British North America Act, il peut consulter les citoyens quand il le juge à propos.

Et nous avons remarqué, après avoir étudié les référendums dans d'autres pays, que plus il y a de la confiance dans le peuple, moins les exigences pour déclencher un référendum sont grandes. Dans certains États américains, il suffit de 10 000 signatures pour déclencher un référendum. En Suisse, on en exige 100 000. Les citoyens ont beaucoup plus la chance de se prononcer quand on demande 10 000 signatures que lorsqu'on en demande 100 000.

La direction que nous prendrions si nous appuyions cette motion, ce que nous ne ferons pas, ce serait mettre les bâtons dans les roues dans la consultation populaire. Ce serait l'empê- cher, à toutes fins pratiques, car il est arrivé souvent, dans l'histoire du Parlement du Québec, que le gouvernement n'avait pas les deux tiers des sièges. Par conséquent, dans chacun de ces cas, mathématiquement, il aurait pu être impossible de consulter le peuple. Or, il apparaît au gouvernement actuel qu'il est essentiel de le consulter sur certaines questions. Si la décision prise par le Parlement devait être le oui ou le non dans la réponse, si le Parlement décidait de l'avenir de la constitution canadienne lui-même, peut-être qu'on pourrait lui mettre des bois dans les roues plus lourds, mais là il s'agit de déclencher un mécanisme qui va nous permettre de consulter la population, comme cela s'est fait au Canada anglais, à Terre-Neuve, en 1949. C'est, par conséquent, la décision du peuple qu'il s'agit d'aller chercher et de faciliter. (17 h 30)

Cette motion a pour effet de compliquer et de rendre mathématiquement impossible dans certains cas la consultation populaire et surtout, je le répète, elle revient à établir dans le Parlement la règle de la minorité, "minority rule". C'est une chose inacceptable et qui va à l'encontre de ce Parlement lui-même à l'instant où il s'agit d'autre chose que de la création de postes qui concernent directement le Parlement et non pas le gouvernement. Je pense au poste de Protecteur du citoyen et du président des élections.

En pratique, par conséquent, cela tente à empêcher l'État de tenir un référendum. Après avoir consulté Bourinot, Beauchesne et autres experts, la règle de la majorité, elle est claire, c'est 50% plus une voix. La proposition du député de Gatineau vient, si vous voulez, enlever le recours du Parlement. On veut, par conséquent, défranchiser le peuple du Québec en agissant ainsi. On veut l'empêcher d'être consulté. On veut compliquer les choses au maximum. On ne veut pas que ce soit facile rapidement. Cela va à l'encontre du principe même du livre blanc sur la consultation populaire et de ce projet de loi 92 et cela va à l'encontre même du programme du parti qui est maintenant au pouvoir ici.

En plus, cela pose, M. le Président, un principe dans la mesure où la partie la plus importante du mécanisme consiste à consulter la population et que sur la partie la moins importante, qui est la mise en marche du processus où on exigerait les deux tiers, une sorte de précédent serait créé. Je vois fort bien l'Opposition demander, puisque le principe des deux tiers serait reconnu dans la mise en marche du mécanisme, que le principe des deux tiers soit aussi reconnu dans le résultat de ce référendum. Cela ouvrirait la porte, par conséquent, dans la mesure où le petit est inclus dans le grand et qu'une règle pour le petit s'appliquerait au grand — on les voit venir à cent milles à la ronde — à l'exigence future que tout référendum ne saurait lier le gouvernement, à moins qu'il ne recueille les deux tiers des voix.

Pour toutes ces raisons, M. le Président, je voterai contre cette motion. De plus, on a l'impression que l'Opposition, ayant perdu démocratique-

ment le pouvoir, tente de le reprendre par des voies détournées.

On retrouve, par conséquent, cette fameuse tendance à l'autoritarisme d'une minorité qui voudrait dicter au gouvernement ce que le gouvernement doit faire, minorité qui aurait le loisir ainsi de neutraliser le gouvernement, de le réduire à l'impuissance.

Pour toutes ces raisons, je pense que cette motion, sous des dehors de vouloir donner plus de crédibilité au processus de consultation, vise tout simplement à l'empêcher par tous les moyens possibles. Nous serions alors dans la position, si nous acceptions cette motion, de devoir négocier pour avoir deux voix de plus ou trois voix de plus et on ne mettrait pas seulement notre propre gouvernement dans cette position intenable... On l'a vu dernièrement dans le cas du Traité de Panama, au Parlement, au Congrès américain où un député s'est négocié un barrage hydroélectrique dans son État, plus précisément un gouverneur, en échange de son vote positif sur le Traité de Panama. Nous serions dans cette situation en ce Parlement, pas seulement nous, mais n'importe quel gouvernement futur qui voudrait lui aussi aller consulter les gens. Une telle décision nuirait à la vie démocratique dans la province de Québec. Loin, par conséquent, de la faciliter, loin de donner plus de crédibilité, comme l'Opposition le prétend et, en particulier, mon collègue de Rouyn-Noranda, et mon collègue de Gatineau, sous des dehors de vouloir revaloriser la consultation, on la neutralise, on la détruit, on l'annihile.

Pour toutes ces raisons, de ce côté, nous voterons contre cette motion.

Le Président (M. Clair): Merci, M. le député. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, j'aurais aimé entendre le plaidoyer du député de Mercier, lorsque des lois ont été adoptées, exigeant les deux tiers des membres de l'Assemblée nationale pour la nomination de certains hauts fonctionnaires détenant des fonctions, je dirais, stratégiques, que ce soit le Protecteur du citoyen, le directeur du financement — je pense que le député de Mercier était là lorsque cette loi a été adoptée, c'est-à-dire c'est dans ce Parlement-ci — ...

M. Godin: Je suis d'accord avec cela.

M. Lalonde:... Il y en a eu d'autres, que ce soit la Charte des droits et libertés de la personne, qui prévoient que la nomination des membres se fait aux deux tiers. Le ministre de la Justice était présent en Chambre lorsque cette nomination a été faite par un ancien gouvernement, je me souviens. Il y a le Vérificateur de la province, il y a le directeur général des élections et les membres de la Commission de réforme des districts électoraux. Tous ces gens, ces personnes, ces hommes et ces femmes, sont nommés...

M. Godin: Est-ce que je peux poser une question, M. le député de Marguerite-Bourgeoys?

M. Lalonde: Oui.

M. Godin: Est-ce qu'ils ne sont pas tous, d'une façon ou d'une autre, des espèces d'extension du Parlement et non pas du gouvernement? Est-ce qu'ils n'ont pas un compte à rendre d'abord et avant tout au Parlement? Est-ce qu'ils ne visent pas à administrer des choses qui touchent le Parlement et non pas le gouvernement? Il y a une espèce de fil d'Ariane dans tous ces postes que vous me nommez.

M. Lalonde: Peut-être que ce serait une bonne question, une question pertinente, quoique l'on sait que même si le Protecteur du citoyen fait son rapport à l'Assemblée nationale, et il en est de même pour la Commission des droits et libertés de la personne, celle-ci relève quand même administrativement du ministre de la Justice, c'est-à-dire que c'est le ministre de la Justice qui est le ministre responsable de l'application de la charte à l'Assemblée nationale.

M. Bédard: Fondamentalement, toutes les personnes que vous avez mentionnées sont des officiers de l'Assemblée nationale et appartiennent à l'Assemblée nationale.

M. Lalonde: C'est fort possible. Il ne me semble pas que cette question...

M. Godin: C'est un fait. Ce n'est pas "possible", c'est un fait.

M. Lalonde: Non, disons que je le présume. Je n'ai pas examiné les...

M. Bédard: Le projet de loi 92 parle d'initiatives gouvernementales, on n'a pas parlé d'initiatives parlementaires

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous avez la parole.

M. Lalonde: Justement, j'ai permis une question. D'ailleurs, je pense que la question était pertinente. On semble faire une distinction entre ces cas où les personnes en question seraient rattachées, de par leurs fonctions et de par les lois et le cadre des lois, à l'intérieur desquelles elles fonctionnent, à l'Assemblée nationale. Je pense que c'est justement ce qu'une recommandation de la Commission des droits de la personne propose. C'est justement dans la perspective de cette collaboration entre l'exécutif et le législatif que la Commission des droits de la personne suggère, désire, espère, souhaite, que l'on devrait justement confier à l'Assemblée nationale un rôle plus grand. J'aimerais voir... Non, on a voté...

M. Godin: Vous avez dévalué les domaines de référendum dans ce document.

M. Lavoie: On a des réserves sur la valeur des référendums.

M. Godin: Un document officiel de votre parti, signé Jean Lesage.

M. Lalonde: Écoutez, j'avais la parole...

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît! Je vous invite à respecter le droit de parole du député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: On est contre la loi telle qu'elle nous est proposée. Nous avons donné les raisons, à plusieurs reprises, pour lesquelles nous sommes contre le projet de loi général, parce que nous croyons que ce que les Québécois désirent et attendent, c'est un référendum sur la constitution, sur l'avenir constitutionnel du Québec et qu'il ne sert à rien de faire faire le tour de la ville à toute la population pour arriver au point où tout le monde veut arriver, c'est-à-dire un référendum constitutionnel. Je ne veux pas revenir là-dessus. Pour d'autres raisons aussi, d'autres réserves que nous avons sur certains aspects de la loi.

Mais, dans sa communication qui a été faite à l'invitation de la commission parlementaire, la Commission des droits de la personne dit bien, et je cite, sur le droit d'initiative, à la première page de son mémoire: "Selon ce qui avait été annoncé dans le livre blanc, le droit d'initiative de tout référendum appartient à l'action concertée de l'exécutif et du législatif ".

C'était annoncé dans le livre blanc. D'accord. Le gouvernement, c'est-à-dire l'exécutif, a un rôle à jouer et a ses responsabilités à prendre, mais la commission des droits poursuit: "... l'Assemblée nationale ayant un rôle à jouer dans le processus référendaire ". Elle termine ce premier paragraphe de cette façon, en affirmant le rôle de l'Assemblée nationale. Il est déjà inscrit dans le projet de loi, aux articles 6, 7, etc. Mais la commission poursuit: "... la proposition sur un vote à la majorité des deux tiers n'a cependant pas été retenue. Sans vouloir en faire une question de principe, ni en exagérer l'importance..."

Oui, deux précautions de langage, comme elle dit un peu plus loin, il ne s'agit pas d'une atteinte à des libertés fondamentales, mais raison de plus d'attacher une importance à cette recommandation. Ce qui m'étonne, et ce qui, je pense, devrait nous impressionner, nous, comme membres de la commission, c'est qu'à notre propre invitation, la commission insiste, et s'il ne s'agit pas d'une atteinte à des libertés fondamentales, elle le dit. Raison de plus de le prendre au sérieux. Pourquoi insiste-t-elle tant que ça? Elle l'a déjà dit dans ses remarques préliminaires et elle revient à la charge.

Elle dit: Donc, sans vouloir en faire une question de principe ni en exagérer l'importance, la commission continue de croire qu'un vote à la majorité des deux tiers, comme le prévoit la procédure parlementaire, lorsqu'on recherche le plus large consensus entre les partis politiques, serait préférable. Au cas où on interprète mes paroles comme voulant cacher la réserve qui a été faite, je répète la réserve: II n'en va d'aucune atteinte à des libertés fondamentales, mais simple- ment d'une garantie que la question soumise à la consultation populaire, une fois adoptée, ne fasse plus l'objet d'une contestation quelconque, etc.

C'est l'insistance de la commission et la perspective dans laquelle la commission installe l'Assemblée nationale dans l'initiative de processus référendaire qui m'impressionne. Pourquoi la commission a encore insisté? Il ne s'agissait même pas d'une question d'atteinte à des libertés fondamentales. C'est parce que...

M. Godin: Ce n'est pas de son ressort. M. Lalonde: ... elle désire...

M. Godin: Ce n'est pas de son ressort, à ce moment-là.

M. Lalonde: Ce n'est pas de son ressort. M. Godin: Ce n'est pas de son ressort.

M. Lalonde: Raison de plus de se poser des questions à savoir pourquoi elle revient à la charge.

M. Godin: De quoi elle se mêle si ce n'est pas de son ressort?

M. Lalonde: Ah bien, si le député de Mercier veut demander à la commission de se mêler de ses affaires, c'est là une façon de réagir.

M. Godin: En vertu de sa loi.

M. Lalonde: Mais la mienne, moi, dans une attitude positive, dans l'étude de ce projet de loi, je me dis: On doit pendre ça au sérieux, justement, pour raccrocher ça à la question du député de Mercier tantôt, selon laquelle les personnes que j'ai mentionnées relevaient de l'Assemblée nationale. Justement on veut impliquer davantage l'Assemblée nationale dans le processus, dans l'initiative. Cela rejoint la préoccupation du député de Mercier. Il dit: Quand l'Assemblée nationale est largement impliquée, on peut prévoir des majorités qualifiées. Enfin, je présume de sa question que c'est la conclusion à laquelle on pourrait tendre. D'accord, si c'est l'Assemblée nationale qui est impliquée, comme dans le cas du Protecteur du citoyen, etc., mais on doit être aussi d'accord, puisque c'est justement dans la perspective d'impliquer l'Assemblée nationale dans l'initiative, dans le processus référendaire, que la Commission des droits de la personne revienne à la charge et gratuitement, je le dis, je l'avoue, je le reconnais, c'est ce qui m'impressionne davantage... Je prends acte de l'absence d'impression du député de Mercier, étant donné, naturellement, que ce n'est pas... (17 h 45)

À la page 2 du même chapitre, le droit d'initiative, la commission dit: "À notre avis, et je cite, le rôle de l'Assemblée nationale dans la décision de tenir une consultation populaire, telle que définie

dans le projet de loi, est beaucoup plus limitée que ne l'annonçait le livre blanc".

Non seulement le gouvernement refuse la majorité qualifiée, qui est le but de la motion du député de Gatineau, mais le projet de loi qu'on nous a proposé a reculé par rapport au livre blanc à cet égard. Je ne pense pas que cela soit réellement un progrès. Si on veut faire un projet collectif de ce référendum et de cette loi, il me semble qu'on devrait avoir... Il faut que ce soit un projet collectif, il ne faut pas que cela soit contesté par la suite.

M. Godin: D'accord, on est d'accord. M. Lalonde: Qui que ce soit qui gagne...

M. Godin: C'est le résultat qui sera collectif, ce n'est pas la machinerie.

M. Lalonde: Là, la partisanerie n'a plus sa place. Il faut que cela soit au-dessus des partis.

M. Godin: Bravo! Il est temps. De votre côté, il est temps.

M. Lalonde: Oui, mais j'aimerais voir, et ce qui m'a déplu dans la position du gouvernement sur notre propre amendement — ce n'est pas parce que c'était le nôtre — c'est qu'aussitôt qu'on a touché au référendum constitutionnel, le gouvernement est devenu muet, il est devenu fermé. Il a dit: On ne doit pas — pour toutes sortes de raisons farfelues, j'en ai mentionné ce matin. Une des plus farfelues, c'est qu'on ne met pas cela dans une loi-cadre. Voyons! Je vous donnerai des exemples, des détails qu'on donne dans des lois-cadres.

Ce qui m'étonne, c'est justement que de plus en plus il est apparent que le gouvernement, en refusant des dispositions concernant le référendum constitutionnel, révèle, nous révèle à nous qu'il inscrit le projt de loi 92 dans une sorte de stratégie préréférendaire, donc, à forts relents partisans. Le député de Mercier pourra faire signe que non, mais le ministre des Finances n'est pas d'accord, parce que lui, il dit; tout est préréférendaire. Toutes les décisions sont préréférendaires...

M. Godin: Toute l'histoire du Québec jusqu'au référendum est préréférendaire. C'est vrai. C'est arrivé avant...

M. Lalonde: II ne faut quand même pas charrier. Ce n'est pas ce que le ministre des Finances a dit. Il a dit: Toutes nos décisions depuis qu'on est au pouvoir, c'est en vue de gagner le référendum.

M. Bédard: ... mettra pas de côté parce qu'il y a un référendum.

M. Godin: C'est un préfixe... Il a dit: "C'est préréférendaire". "Pré" veut dire avant.

M. Lalonde: Si la loi 92 fait partie de cette grande stratégie préréférendaire, M. le Président, on n'est pas sorti du bois.

M. Godin: Question de règlement. Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Charbonneau: Toute votre attitude était guidée par les mêmes intérêts.

M. Lalonde: Je pense, M. le Président, qu'on doit s'en tenir au-dessus des partis, sinon, ni vous, ni nous ne pourrons nous réjouir du résultat d'un référendum, quel qu'il soit, parce qu'il ne sera pas crédible. À ce moment-là, le commencement de vos troubles va être arrivé. C'est pour cela qu'il me semble qu'en ce qui concerne les deux tiers, pour faire participer l'Assemblée nationale, on devrait appuyer une telle motion qui n'est pas partisane. La majorité des deux tiers, on l'a trouvée, M. le Président, pour nommer le directeur du financement, qui a été proposé par le parti ministériel, on l'a trouvée — même le ministre pourrait nous donner des détails là-dessus, c'est un peu de la petite histoire — quand il s'est agi de nommer les membres de la Commission des droits de la personne, il me semble qu'on a même eu l'unanimité. Il y avait eu consultation.

M. Bédard: Oui, mais il y a une différence entre nommer des gens qui appartiennent à l'Assemblée nationale...

M. Lalonde: M. le Président, j'ai le droit de parole.

M. Bédard: Oui, mais, là, vous vous référez à moi.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs!

M. Lalonde: II répondra quand... Tout ce que je fais, c'est de me faire interrompre.

M. Bédard: Ne venez pas demander des approbations de ma part sans que je puisse parler.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous avez la parole.

M. Lalonde: Le témoignage qu'on a eu est quand même impressionnant. La commission m'apparaît la plus impressionnante, surtout à cause de l'insistance qu'elle y met. Elle revient à la charge à deux reprises. On peut parler, naturellement, des éditorialistes, mon collègue de Gatineau l'a fait.

M. Bédard: On va en parier tantôt.

M. Lalonde: On va voir si le refus systématique qui nous a été annoncé ce matin est réellement une politique que le gouvernement veut maintenir à propos de l'étude de ce projet de loi.

Ce serait réellement malheureux, non pas parce que cela prendrait beaucoup plus de temps, on a déjà décidé, nous, et on l'a annoncé, que, malgré les défauts importants qu'on trouve à cette loi, et, à moins qu'on n'arrive à une question de principe fondamentale, notre intérêt, comme Québécois, et l'intérêt de nos concitoyens, de nos électeurs, c'est que la loi soit votée le plus tôt possible, donc, nous allons agir dans cette perspective, mais, chaque fois que le gouvernement, par une décision, à l'égard d'un amendement qu'on apporte, qu'on propose, prend une position partisane, se cache derrière la stratégie préréférendaire dans laquelle, de plus en plus, je crois, cette loi s'inscrit, à ce moment-là, il réduit lui-même, et c'est de l'auto-destruction, la portée de sa loi et la chance que cette loi nous permette à nous, tous les Québécois, d'avoir réellement un résultat crédible, qui va être cru, qui va être suivi ensuite par la population.

M. le Président, je veux simplement relever un sophisme du député de Mercier. Je ne sais pas s'il nous a quittés, je ne veux pas le faire en son absence, mais il pourra quand même lire le journal des Débats. Il a tenté de démontrer que la majorité des deux tiers est la négation de notre système parlementaire et en particulier du gouvernement. Il a donné un exemple. Le député qui va faire les deux tiers, c'est une minorité, ce député, sur 110, et c'est lui qui va faire pencher la balance. M. le Président, c'est complètement ridicule. Dans le cas de la majorité simple, nous sommes 110 députés, dans l'hypothèse où il y aurait — enlevons un président... Disons qu'il y a eu 55 députés dans un parti, 54 dans un deuxième et un dans un troisième, qu'on a nommé président, justement pour garder la majorité. À ce moment-là, vous avez toujours, dans toutes les décisions de 55 à 54, un député qui fait pencher la balance. À ce moment-là, calculer ça, disséquer cette situation de cette manière ne m'apparaît pas aider le débat. La majorité des deux tiers permet d'avoir une question qui soit au-dessus de tout soupçon. Oui, ça oblige le gouvernement, s'il n'a pas les deux tiers des membres de l'Assemblée nationale, à être un peu plus honnête. C'est justement le but, oui, être un peu plus honnête.

M. Vaillancourt (Jonquière): Ils y étaient habitués, eux.

M. Lalonde: On fait des grimaces de l'autre côté, M. le Président. Ma proposition suggère qu'il peut arriver que ces messieurs et ces mesdames ne soient pas honnêtes intellectuellement. Je m'excuse, M. le Président. Vous n'avez pas vu les grands airs que j'ai vus.

Oui, ça va forcer le gouvernement à être un peu plus honnête, un peu plus...

M. Charbonneau: ... pas capable de juger?

M. Lalonde: Est-ce que vous voulez enlever les députés? On parle de l'Assemblée nationale. À moins que le député de Verchères trouve qu'il est inutile à cette Assemblée nationale. Je serais d'accord avec lui.

M. Charbonneau: Les citoyens ne seraient pas capables de juger.

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Lalonde: Les citoyens seraient capables de juger, mais ils ont élu des députés justement pour faire ce job. À ce moment-là...

M. Charbonneau: Ils ont élu, dans un système parlementaire...

M. Lalonde: Un système parlementaire et le gouvernement est tenu honnête à cause de l'Opposition.

M. Charbonneau: C'est ça.

M. Lalonde: C'est ça, c'est le rôle de l'Opposition. •M. Charbonneau: Exactement.

M. Lalonde: Le gouvernement va être d'autant plus limpide, si c'est possible... On ne parle plus de transparence, parce qu'il me semble, M. le Président, que la seule façon d'obtenir un gouvernement transparent avec ce parti-là, ça va être de le faire disparaître.

M. Charbonneau: Vous essaierez.

M. Lalonde: M. le Président, la seule façon d'avoir une question transparente, une question qui procède réellement de la plus grande honnêteté intellectuelle, c'est justement d'exiger un corridor plus étroit pour s'y rendre. C'est la raison pour laquelle, dans les cas que je vous ai nommés, on l'a exigé. On l'a fait et vous aussi vous l'avez fait, dans la Loi sur le financement des partis. Vous avez exigé les deux tiers pour que le résultat de la décision soit au-dessus de tout soupçon, que personne ne puisse douter et blâmer, reprocher au gouvernement une décision qui ne plairait pas à un membre.

M. le Président, il me semble qu'en votant contre cette motion d'amendement, le gouvernement, de plus en plus, réduit, et il a commencé à le faire ce matin, sa crédibilité en ce qui concerne ce projet de loi. Je le déplore. Nous avons offert notre collaboration et nous allons le faire jusqu'à la fin pour que ce projet de loi, à moins qu'on ne nous fasse pas siéger assez souvent, soit adopté avant le 23 juin. Je sais que les problèmes de santé du ministre d'État à la réforme parlementaire ont créé un certain nombre de problèmes pour la commission. Nous allons tenter de mettre les bouchées doubles pour y arriver.

Il y a aussi d'autres travaux parlementaires, le ministre de la Justice est au courant. Mais il me semble que le résultat — que ce soit adopté le 23 juin ou en septembre, cela dépend du gouverne-

ment, non pas de nous autres, à ce moment-là — le résultat va dépendre non pas de la date où cela va être... Si le gouvernement le retire et décide de faire la troisième lecture en septembre, c'est son problème, pas le nôtre.

À ce moment-là, quelle que soit la date...

M. Charbonneau: Est-ce que le député de Marguerite-Bourgeoys me permettrait une question?

M. Lalonde: Non.

M. Charbonneau: Cela ne me surprend pas.

M. Lalonde: Quelle que soit la date à laquelle le projet de loi va être adopté, ce n'est pas tellement la date et la rapidité avec laquelle on va l'adopter. C'est la position du gouvernement, son attitude à l'égard des amendements non partisans des députés. Vous demandez les deux tiers. C'est simplement offrir au gouvernement un peu plus d'assurance. C'est une police d'assurance qu'on vous offre. Elle ne coûte pas cher. La seule chose que cela va vous coûter, c'est d'être un peu plus honnêtes.

M. Charbonneau: Vous n'avez pas de stratégie, vous autres, n'est-ce pas?

M. Lalonde: Ah, vous en avez une? Est-ce que c'est cela, la question du député de Verchères? Posez-la donc, votre question.

M. Charbonneau: La loi n'est pas une stratégie, mais vous autres, vous avez la stratégie de l'utiliser, par exemple.

M. Lalonde: Alors, quelle est votre stratégie? Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Lalonde: M. le député de Verchères suggère qu'il y ait une stratégie là-dedans.

M. Charbonneau: Le Parti québécois a une stratégie et le gouvernement également, mais la loi est un outil qui doit être au-dessus d'une stratégie, par exemple.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, M. le député de Verchères!

M. Lalonde: Les masques tombent. Je vous dis, M. le Président, que ce n'est pas beau en dessous du masque. Ce n'est pas beau.

M. Charbonneau: Ce n'est pas cela que j'ai dit.

M. Lalonde: Comme cela, vous avouez que vous avez une stratégie, que la loi 92 fait partie de votre stratégie préréférendaire? Je comprends. Et la question aussi est une stratégie? La question va être de la stratégie? Il ne faut pas se soumettre aux deux tiers naturellement, si c'est de la stratégie. Il faut faire cela dans les officines du gouvernement, en catimini, dans le bunker, avec les merveilleuses choses que vont faire les propagandistes.

M. Charbonneau: Le gouvernement qui pose une question? Voyons donc!

Le Président (M. Clair): À l'ordre, M. le député de Verchères.

M. Lalonde: Le député de Verchères veut me parler de stratégie. Allez-y.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Charbonneau: Qui m'a posé la question?

Le Président (M. Clair): M. le député de Verchères, à l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Marguerite-Bourgeoys, je vous indique que vous avez encore une minute.

M. Lalonde: J'ai terminé, M. le Président. Je pense que mon intervention, si elle n'a pas réussi à convaincre les députés ministériels de voter en faveur de l'amendement du député de Gatineau a quand même servi à faire tomber un masque, c'est le premier.

M. Charbonneau: Vous voyez des masques où vous voulez.

Le Président (M. Clair): M. le député de Rosemont.

M. Paquette: Quand je regarde le député, ce n'est pas un masque...

M. Vaillancourt (Jonquière): On n'a pas deux visages, nous autres.

M. Paquette: M. le Président, je pense que...

M. Charbonneau: ... qui est habitué de porter des cagoules, M. le Président.

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Paquette: On va passer par-dessus les insinuations du député de Marguerite-Bourgeoys, qui ne peut pas faire une intervention sans voir de noirs complots. Je pense que cette motion va tout simplement à l'encontre de l'économie du projet de loi. C'est un projet de loi qui demandera probablement à être étendu sur le plan de l'initiative populaire éventuellement, mais, pour le moment, tout référendum qui se tient dans le cadre de la loi se fait à l'initiative gouvernementale.

Par conséquent, il ne faut pas se mettre dans un système où on va permettre à une minorité de l'Assemblée nationale de décider si un référendum va se tenir ou ne se tiendra pas. Si le projet de loi

ou la motion devait être adopté à la majorité des deux tiers, il suffirait que les députés de l'Opposition, qu'une minorité des députés s'entendent pour décider qu'il n'y aura pas de référendum sur tel sujet, parce que cela ne fait pas leur affaire.

Je pense que les noirs soupçons du député de Marguerite-Bourgeoys, on pourrait les lui retourner et dire que cet amendement met un instrument abusif entre les mains d'une minorité du Parlement. C'est en contradiction avec l'économie du projet de loi.

Je vais donner un exemple qui va faire comprendre jusqu'où peut aller cet amendement. Il y a deux possibilités dans l'amendement et dans le projet de loi également, soit que le référendum soit entrepris par une question contenue dans une motion débattable durant trente heures devant l'Assemblée nationale, ou soit s'il s'agisse d'un projet de loi.

Je vais prendre le cas du projet de loi. Supposons qu'on accepte l'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys. On a un projet de loi où, je ne sais pas, on décrit une politique... je reviens à l'exemple de l'avortement, dans le domaine constitutionnel, où on décrit un projet de constitution. Je pense que c'est un meilleur cas, plus rapproché de notre objet. On a un projet de constitution, un projet de loi qui décrit une constitution et on veut le soumettre à la population pour approbation. Il faudrait qu'on ait une majorité des deux tiers sur le projet de loi. Cela veut dire qu'iraient devant la population, seulement les projets de loi les moins controversés, les projets de loi qui font la quasi-unanimité, enfin, plus des deux tiers de majorité des membres de l'Assemblée nationale. À ce moment-là, on peut se demander à quoi sert une consultation populaire.

M. Lalonde: Est-ce que le député me permet une question pour faire un éclairage, tout simplement?

M. Paquette: Je comprends.

M. Lalonde: ... parce que le projet de loi,...

M. Chevrette: Vous avez refusé tantôt une question.

M. Lalonde: ... en vertu du paragraphe b) de l'article 6, ne peut pas porter sur une constitution. (18 heures)

M. Paquette: M. le Président, le député nous annonce qu'il va peut-être faire un amendement en excluant le projet de loi et en concentrant cela sur la motion.

M. Lalonde: Non, il est exclu par l'amendement.

M. Paquette: Pardon?

M. Lalonde: II est exclu. C'est simplement pour des consultations populaires sur l'avenir constitutionnel. Cela ne peut être en vertu de b)...

M. Bédard: C'est une particularité.

M. Lalonde: ... parce que b) couvre simplement les projets de loi dont l'application entre en vigueur seulement sujet à un référendum.

Une voix: C'est un c) qui s'ajoute.

M. Paquette: Je ne suis pas d'accord avec cette interprétation. Je pense que cela s'applique à la fois à l'un et à l'autre, votre amendement. On pourrait très bien concevoir un référendum de nature constitutionnelle qui se fasse en fonction d'un projet de loi, qui provienne d'un projet de loi.

M. Lalonde: À ce moment, cela s'appliquerait.

M. Paquette: Bon. Peut-être que vous voudrez modifier...

M. Lalonde: Je ne suis pas tout à fait d'accord avec votre interprétation, mais cela s'appliquerait suivant l'hypothèse que vous soulevez.

M. Paquette: Cela pourrait s'appliquer dans le cas...

Le Président (M. Clair): M. le député de Rosemont, je m'excuse de vous interrompre, mais je pense que vous en aviez encore pour un moment.

M. Paquette: Je continuerai ce soir. Ce ne sera pas long, de toute façon.

Le Président (M. Clair): II est 18 heures. La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 2)

(Reprise de la séance à 20 h 25)

Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs!

La commission permanente de la présidence du conseil et de la constitution est réunie pour continuer l'étude, article par article, du projet de loi no 92, Loi sur la constitution populaire.

Les membres de la commission sont les mêmes que ceux de cet après-midi.

Au moment où nous avons suspendu nos travaux, à 18 h, c'est le député de Rosemont qui avait commencé à exercer son droit de parole et n'en avait utilisé que trois minutes. M. le député de Rosemont, vous avez la parole.

M. Paquette: M. le Président, j'étais en train d'expliquer au député de Marguerite-Bourgeoys toute l'étendue de son amendement. Je ne sais pas s'il s'en est rendu compte, mais, d'après l'interruption qu'il m'a faite tantôt, je ne pense pas.

Dans le cas où on demanderait qu'un projet de loi soit approuvé par les deux tiers de l'Assemblée nationale, il pourrait arriver que ce projet de loi incite à une question de nature constitutionnelle. Donc, dans ce cas, cela veut dire qu'il faudrait

qu'il y ait une quasi-unanimité de l'Assemblée nationale, avant qu'un sujet, constitutionnel ou autre, soit soumis à la population, pour fins de consultation populaire. À ce moment-là, on peut se demander quel serait l'intérêt de le faire, si presque tout le monde, à l'Assemblée nationale, est d'accord pour voter un projet de loi.

Je reconnais que, dans le cas d'une motion, l'amendement a peut-être un peu plus de fondement. Cependant, même dans ce cas, je trouve tout à fait incompatible avec l'esprit du projet de loi qui mise sur l'initiative gouvernementale, laquelle doit être balisée, encadrée, doit s'assurer que le gouvernement ne puisse pas faire n'importe quoi, je le reconnais. C'est un projet de loi qui mise sur l'initiative gouvernementale. Il suffirait qu'une minorité de députés décide qu'un référendum n'aura pas lieu, pour qu'un gouvernement qui a décidé de consulter la population sur ses politiques, soit empêché de le faire.

Or, M. le Président, je considère que si le référendum ne doit pas être utilisé sur des questions futiles, on ne doit pas faire en sorte, non plus, d'empêcher son exercice. Cela voudrait dire qu'il faudrait deux conditions: premièrement, que le gouvernement utilise son droit d'initiative et que, deuxièmement, une minorité ne décide pas d'empêcher un référendum ou qu'un référendum se tienne, même dans le cas d'une motion.

M. le Président, je pense que c'est carrément un amendement excessif. On a amené l'argument que la Commission des droits de la personne l'avait proposé, lors de son rapport sur le livre blanc, et qu'elle réitère cette proposition dans la note qui nous a été remise, hier ou ce matin.

Mais je pense que le député de Marguerite-Bourgeoys a reconnu que cette question ne faisait pas directement partie des compétences de la commission, puisque la commission reconnaît qu'il n'y a pas de libertés fondamentales en cause, là-dedans.

Personnellement, je juge cette proposition de la Commission des droits de la personne comme étant axée sur une certaine reconnaissance des règles parlementaires. Les gens de la Commission des droits de la personne sont des experts en ce qui concerne la charte des droits et leurs avis doivent être pris extrêmement au sérieux lorsqu'ils nous parlent de la difficile conciliation entre les différentes libertés fondamentales qui fait l'objet de ce projet de loi. Mais quand la commission nous dit que la question doit être approuvée aux deux tiers, c'est une question de procédure parlementaire et de fonctionnement et aussi de juger si on doit favoriser, et jusqu'à quel point également on doit baliser l'action d'un gouvernement qui veut consulter la population.

Là-dessus je pense que les parlementaires qui sont à cette table et à l'Assemblée nationale sont de meilleurs juges que la Commission des droits de la personne, avec tout le respect qu'on doit lui porter, puisqu'il ne s'agit pas d'une question qui fait partie particulièrement de sa compétence.

Que le référendum soit mis en marche par un projet de loi, auquel cas l'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys soulève d'énormes diffi- cultés, ou que ce soit sous forme de motion, où, là encore, les difficultés sont assez grandes, je pense que c'est un amendement nettement excessif qui va bloquer l'utilisation de ce mécanisme extrêmement important de participation de la population aux décisions.

Aux députés de l'Opposition qui craindraient une possibilité pour le gouvernement de biaiser la question, qui voudraient s'assurer que le gouvernement sera honnête, je leur dis qu'on n'a pas de leçon d'honnêteté à recevoir de personne, cela fait une dizaine d'années qu'on maintient qu'il faut une question claire, précise dans notre programme politique. (20 h 30)

D'autre part, les mécanismes prévus ailleurs dans le projet de loi permettent un débat public suffisamment large pour que la pression non seulement de l'Opposition mais de l'opinion publique aussi s'exerce. Un gouvernement qui procéderait quand même, avec une question qui est fortement contestée, pas uniquement pour des motifs stratégiques, cela pourrait arriver. Je ne veux pas prêter d'intention à l'Opposition, mais il pourrait arriver qu'une Opposition décide pour des motifs stratégiques, parce qu'elle sent l'appui populaire lui échapper, elle pourrait décider de bloquer indéfiniment un référendum. Même si, dans le passé, elle a fait énormément de pressions pour qu'il se tienne le plus tôt possible, de façon que les Québécois n'aient pas le temps de s'informer sur la question, je pense qu'il faut éviter cette possibilité de manipulation de l'instrument pour des motifs stratégiques. La pression de l'opinion publique, encore une fois, peut-être suite à l'action et aux interventions dans le débat ou le projet de loi de l'Opposition, est le meilleur garant, comme pour n'importe quel des projets de loi qu'on étudie à cette Assemblée nationale.

Sur le référendum concernant l'avenir constitutionnel, encore une fois, il n'est carrément pas dans l'intérêt de n'importe quel gouvernement, que ce soit celui-ci ou un autre éventuellement, d'aller à l'encontre d'une opinion publique qui jugerait une question biaisée. C'est la meilleure façon pour un gouvernement de perdre un référendum. Je pense qu'on a bien mal compris la démarche du gouvernement, si on pense qu'on va faire une gaffe de cette nature. Non. On va donner l'occasion aux Québécois de se prononcer le plus clairement possible et toutes les garanties existent dans le projet de loi, d'une part, pour qu'une minorité ne bloque pas l'exercice du référendum et que, d'autre part, le gouvernement ne puisse pas faire ce qu'il veut. Il y a la possibilité d'intervention également du Conseil du référendum et il a surtout — c'est cela qui est le plus important — la pression de l'opinion publique.

Le Président (M. Clair): D'autres intervenants sur la motion du député de Gatineau. J'appellerai...

M. Lavoie: Oui, je m'excuse.

Le Président (M. Clair): Oui, je m'excuse, M. le député de Laval.

M. Lavoie: M. le Président, sur cette motion, je pense bien que mon intervention ne prendra pas les vingt minutes auxquelles j'ai droit, ce n'est pas mon intention.

M. Lalonde: C'est 19 seulement.

M. Lavoie: J'ai retenu des propos du député de Mercier, lors de son intervention cet après-midi, un souhait, je crois, unanime de tous les parlementaires et de tous les Québécois de bonne volonté, que la décision qui sera rendue, notamment lors du référendum constitutionnel sur l'avenir du Québec, devienne une décision acceptée, agréée, acquise d'une manière collective partout le Québec, que cette décision ne soit contestée d'aucune façon. C'est un voeu que je fais personnellement qu'il n'y ait aucun doute sur cette décision dans un sens ou dans un autre, que ce soit clair et tout pour que les Québécois, une fois pour toutes, puissent se prononcer, mais, pour atteindre ce but, cet idéal, je crois qu'il y a un prérequis essentiel.

La décision sera une décision de fond, tout le monde le reconnaît. Le prérequis, c'est que l'étincelle qui va mettre cela en marche, ce processus référendaire parte non seulement de la loi elle-même, mais surtout de la question. Je crois qu'il faudrait qu'il n'y ait aucun doute sur la question, que cette question soit entourée d'une crédibilité, d'une honnêteté absolue; il est d'autant plus important que cette question de forme justement, si le fond ne doit laisser aucun doute, soit justement la question qui sera posée à la population. Si on veut obtenir ce but final, il faut que cette question de forme soit également et surtout dégagée et libérée de tout doute. D'ailleurs, c'est la raison d'être de l'intervention. Je dois même vous dire que cela me surprend — je suis bien honnête, on se parle entre collègues de l'Assemblée nationale — cette intervention de la Commission des libertés de la personne qui a donné son opinion sur cette question de deux tiers. Je ne pense pas qu'on l'ait requise, c'était surtout la question des comités nationaux, mais la Commission des libertés de la personne a jugé à propos d'intervenir. Je me sers de l'argumentation qu'elle nous propose dans son document. "Cette commission souhaite que la question soumise à la consultation populaire, une fois adoptée, ne fasse plus l'objet d'une contestation quelconque qui aurait pour conséquence d'orienter le débat sur des questions de forme plutôt que sur des questions de fond". Si jamais la question était boiteuse, mal posée, vous voyez dans quel débat on s'aventurerait au Québec, si 25% ou 10% ou peut-être même 5% de la population, au départ, avaient des doutes, avaient des réserves, avaient des critiques à faire sur la formulation de la question. La procédure référendaire serait boiteuse au départ et ce serait une charrette à trois roues. Pourquoi ne pas prendre toutes les garanties voulues sur cette question?

Une autre chose me porte à invoquer cette formule ou cette garantie absolue que nous devons avoir sur la question, pour qu'elle soit justement, comme la femme de César, au-dessus de tout soupçon et au-dessus de tout doute. Je pense que c'est une contribution positive et un service qu'on rend même au gouvernement, surtout qu'on pourrait, en cours de route, dans l'étude du projet de loi — cela serait tout à fait consistant avec ce qui existe un peu partout ailleurs — apporter un amendement qu'on n'a pas l'intention d'apporter, pour être bien logiques avec nous-mêmes. On sait que le référendum est uniquement consultatif. C'est un genre de grand sondage, en somme, cette consultation populaire. Il n'a pas un pouvoir décisionnel, d'une manière automatique. Cela donne un mandat ou cela ouvre la porte, dans notre système confédératif, au gouvernement du Québec pour amorcer des discussions, si jamais, dans l'hypothèse à laquelle je ne crois pas, on se dirigeait vers une séparation ou quoi que ce soit.

On pourrait apporter un amendement au projet de loi. Comme cela existe dans la plupart des pays, ou une constitution écrite avec des modalités prévues — ce qui n'est pas le cas dans l'Acte de l'Amérique du Nord britannique — on exige souvent les deux tiers de la décision populaire pour modifier cette constitution, une majorité qualifiée. C'est très courant. On pose des prérequis, par exemple en Australie, peut-être pas les deux tiers, mais ils sont très forts, avant de pouvoir modifier la constitution. On pourrait apporter cet amendement. Ce serait facile. Ce serait probablement un amendement que vous pourriez considérer peut-être à bon droit dilatoire, du fait que cette consultation populaire n'est pas décisionnelle, qu'elle n'est que consultative. On pourrait l'apporter, mais on ne l'apportera pas. La décision, pour apporter des changements constitutionnels, devrait recueillir une majorité qualifiée assez importante. On ne le fera pas et on ne le demandera pas, mais je pense qu'on est sur du bon terrain pour demander que la formulation de la question exige une majorité qualifiée. D'ailleurs, on l'a mentionné tout le long du débat pour les grandes décisions que doit prendre l'Assemblée nationale, même si on dit qu'il y a un fil d'Ariane ou que c'est une continuation de l'Assemblée, c'est un argument qui n'est pas trop assommant, qui n'est pas trop définitif. Prenez l'exemple de la Commission des droits de la personne, ce n'est pas un prolongement de l'Assemblée nationale. Elle ne figure pas au budget de l'Assemblée nationale. Il est bien dit dans la loi que c'est le ministre de la Justice qui est responsable de la commission, qui est l'agent de liaison avec l'Assemblée...

M. Bédard: II fait rapport à l'Assemblée nationale.

M. Lavoie: Des rapports à l'Assemblée? Tous les ministères et tous les organismes publics et parapublics doivent déposer des rapports à l'Assemblée nationale.

M. Bédard: ... nomination de personnes.

M. Lavoie: II ne faut pas charrier sur cette question.

M. Bédard: Ce sont des nominations de personnes. C'est différent d'avec une question.

M. Lavoie: Je vous dis que ce n'est pas l'argument qui me convainc le plus. Mais, on exige une majorité qualifiée à six sur six décisions de l'Assemblée: Vérificateur général, Protecteur du citoyen, les membres de la Commission des droits de la personne, le directeur du financement des partis politiques et ses deux adjoints...

M. Godin: ... réforme électorale.

M. Lavoie: Directeur des élections, maintenant, et les membres de la Commission de la réforme des districts électoraux. Six domaines où on a vécu quand même une expérience depuis plusieurs années, où, à ma connaissance — ça fait quelques années que je siège au Parlement — que ce soit sous les libéraux, que ce soit sous l'Union Nationale, que ce soit sous le Parti québécois, il n'y a jamais eu blocage, affrontement, et vous craignez qu'il ne pourrait pas se tenir de référendum? Quand même! Autant de notre côté... On n'est pas plus bête qu'on en a l'air. On demande, on exige, depuis un an et demi...

M. Godin: Cela dépend des jours.

M. Lavoie: ... qu'il y ait un référendum le plus rapidement possible. Si vous nous apportiez justement une question normale, honnête, assez précise, de quelle manière nous jugerait l'opinion publique si on faisait de l'obstruction en refusant — ou l'Union Nationale, qui, en passant, détiendrait la balance du pouvoir, pratiquement, dans un cas comme ça — On fait confiance à une majorité qualifiée des deux tiers de l'Assemblée.

Je vous dis que, pour des décisions, à ma connaissance, depuis de très nombreuses années pour ces nominations, il n'y a jamais eu de blocage, il n'y a jamais eu de situation où les nominations ne pouvaient pas se faire, et, chaque fois, il y a eu unanimité.

Je vais vous donner un cas où il y a eu retard, c'est la dernière expérience qu'on a vécue, c'est sur la nomination du directeur du financement des partis politiques, où il y a eu des réticences de la part du Parti libéral et de la part de l'Union Nationale, et, je crois, du Ralliement créditiste, je ne sais pas si le gouvernement l'avait consulté sur la nomination de M. X comme directeur du financement des partis politiques.

Il y a eu une réticence — je ne sais pas si elle se révéla juste ou fausse; je ne veux pas porter un jugement là-dessus — mais, à cause de la réticence des partis d'Opposition, il y a eu une bonification, une amélioration du système par un amendement à la loi pour amener deux adjoints. Cela a été bonifié, amélioré. Je siège moi-même à ce comité de consultation. Je crois, pour l'avoir vécue, que cette expérience a été une bonne chose. Avoir deux adjoints, ça va, même si c'est difficile, avec l'expérience qu'on a actuellement. Je me demande dans quelle situation on serait s'il n'y avait pas ces adjoints, les deux autres sont là un peu pour temporiser. Grâce, justement, à ce consensus, à cette majorité qualifiée qui était exigée, il y a eu un retard de peut-être deux ou trois mois sur une nomination, cela a apporté un amendement à la loi, une bonification de la loi et tout s'est terminé par. une nomination unanime par toute l'Assemblée.

C'est un exemple qu'on peut fort bien apporter au sujet de la question au référendum. Les hommes sont faillibles, et, qu'ils soient péquistes ou d'autre allégeance, ils sont faillibles, tout le monde est faillible...

M. Lalonde: Même eux?

M. Lavoie: Oui.

M. Lalonde: Vous pensez?

M. Lavoie: Et je crois que c'est une garantie additionnelle...

M. Lalonde: Ah! C'est grave.

M. Lavoie:... la suggestion que nous faisons...

M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne suis pas si sûr que ça.

M. Lalonde: ... ça va faire...

M. Lavoie: ... que vous êtes sans doute faillibles. Si vous ne l'étiez pas et si vous ne vous considériez pas faillibles, ça commencerait à être grave. Je pense qu'il faut cesser d'être des héros, et devenir du monde ordinaire. Bon!

Justement, en laissant à la majorité gouvernementale, seule, majorité simple, le libellé de la question, je crois que ça ne serait pas prudent, quel que soit le gouvernement qui soit là, surtout sur une question constitutionnelle, de laisser une discrétion absolue à une équipe ou à un gouvernement, de quelque couleur politique que ce soit. Mon opinion personnelle, surtout pour toutes les raisons que je vous ai données tout à l'heure, pour que ce prérequis, cette question ne soit l'objet d'aucun doute, d'aucune contestation et qu'elle soit dégagée justement de toute critique. (20 h 45)

D'ailleurs, en terminant, pour répondre aux propos tenus par le député de Mercier et par d'autres, selon lesquels on défend la simple majorité qu'on connaît, 50 plus 1...

M. Lalonde: Ah! oui.

M. Lavoie: Je voudrais m'appuyer sur des auteurs, des parlementaires connus, chevronnés, qui auront — je n'en doute pas — toute la reconnaissance, le respect de la part des députés ministériels actuellement et qui déviaient justement de cette majorité simple dans des débats assez récents ici à l'Assemblée nationale. Je voudrais mentionner les propos du parrain de ce projet de loi, le député de Maisonneuve, ainsi que du ministre actuel de l'Éducation, le député de

Sauvé, lors des débats de l'Assemblée nationale, lorsque justement la loi 50 a été adoptée qui était la Charte des droits et libertés de la personne. Je voudrais vous citer certains passages de ces deux parlementaires expérimentés où ils mettaient justement, ils exigeaient une majorité qualifiée.

M. Bédard: ... Nommer des personnes; c'est bien différent que de proposer une question.

M. Lavoie: Non, laissez-moi donc terminer. M. Lalonde: Cela le fatigue donc.

M. Lavoie: Ce n'est pas pour nommer des personnes...

M. Lalonde: Cela le fatigue.

M. Lavoie: C'est dans la législation; non pas pour des nominations de personnes. Lorsque la loi de la Charte des droits et libertés de la personne a été adoptée, et je cite le député de Sauvé, ministre actuel de l'Éducation, M. Jacques-Yvan Morin: "M. le Président, la nécessité d'une loi fondamentale dont les principes primeraient des lois ordinaires et qui ne pourraient être modifiés que par une majorité spéciale ou qualifiée de cette Assemblée, n'est plus à démontrer". Ce n'est même plus à démontrer, il n'est même pas nécessaire d'argumenter. Lorsqu'on voudra légiférer pour modifier certaines choses dans la charte, cela prendra une majorité qualifiée.

Un peu plus loin...

M. Lalonde: Ce n'était pas pour des nominations. Vous en êtes sûr?

M. Lavoie: Non, c'est dans la pure législation. M. Lalonde: Mais pourtant...

M. Bédard: C'est dans le cas des violations; je vais vous mettre au courant.

M. Lavoie: Ou des déviations à la loi; c'est de la...

M. Bédard: Non, des violations de la loi.

M. Lavoie: Ce que j'appelle, moi, de la législation; ce ne sont pas des nominations.

M. Lalonde: Vous en êtes sûr?

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que le gouvernement l'a accepté?

M. le député de Laval, me permettez-vous une question?

Le Président (M. Clair): À l'ordre! M. Lavoie: Le 21...

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que le gouvernement libéral a accepté cette suggestion?

M. Lavoie: Monsieur, actuellement nous étudions un projet de loi...

M. Vaillancourt (Jonquière): Mais je vous pose une question.

M. Lavoie: ... sur la consultation populaire qui est devant...

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous ne l'avez pas acceptée.

M. Lavoie: ... et j'enfreindrais le règlement si je parlais d'autres questions.

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous ne l'avez pas acceptée et vous le savez. Vous ne l'avez pas acceptée.

M. Bédard: Vous ne l'avez pas acceptée.

M. Lalonde: À son grand regret, il ne l'a pas acceptée. Mais il l'a regretté, par exemple.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, à l'ordre! M. Lalonde: II a regretté...

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est vrai qu'il ne pouvait pas voter, il était président.

M. Lalonde: ... amèrement.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît! Messieurs, je vous en prie! Je vous en prie!

M. Lalonde: C'est une question que vous pouvez...

M. Vaillancourt (Jonquière): II ne pouvait voter; il était président de l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Clair): Messieurs, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde: La seule raison de sa défaite, d'ailleurs.

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous admettez avec moi que la question était pertinente.

Le Président (M. Clair): Messieurs, je vous prierais...

M. Lavoie: M. Burns...

Le Président (M. Clair): ... d'avoir pitié des gens qui travaillent au journal des Débats. Ce n'est sûrement pas drôle d'essayer de noter tout ce qui s'est dit en même temps.

M. Lavoie: 21 janvier 1975, M. Burns, député de Maisonneuve: "C'est cela, je pense par exemple aux deux tiers ou aux trois quarts...

M. Lalonde: Hé! Est-ce vrai?

M. Lavoie: — C'est qualifié, aux trois quarts — ou à une autre formalité qui souligne qu'il s'agit d'un cas véritablement exceptionnel dans la législation". Jeudi, également, 23 janvier 1975, M. Burns: "Soit dit en passant, cela me plaît beaucoup de voir cette attitude généralisée des groupements intéressés qui viennent tenir cette attitude que la loi se doit d'être une loi fondamentale, une loi transcendante. On pourrait dire dans notre cas une question fondamentale et une question transcendante. J'espère que le ministre de la Justice en tiendra compte éventuellement en particulier votre recommandation sur le fait qu'on doit rendre plus difficile l'amendement de droits ou la disparition de droits qui se trouvent consacrés dans cette charte par un vote des deux tiers. Ce n'est plus la majorité simple."

Et une dernière citation de M. Jacques-Yvan Morin: "D'accorder des lois antérieures avec la Charte et qui empêcheraient toute modification ultérieure de cette loi fondamentale que nous prétendons adopter ces jours-ci, sans qu'intervienne un vote spécial à une majorité qualifiée de l'Assemblée nationale."

Je dis donc, sur des questions aussi importantes, sur la décision peut-être la plus importante que le peuple québécois n'aura jamais à prendre, ou n'a jamais eu à prendre depuis qu'il est en terre d'Amérique...

M. Godin: Vous le reconnaissez, c'est nouveau.

M. Lavoie: Pourquoi prendre quelque risque que ce soit...

M. Godin: "Change of venue".

M. Lavoie: ... et dégager dans ce débat, surtout qu'on sait — je ne voudrais pas faire un débat plus politique qu'il ne le faut — dans quelle ambiance, dans quelle atmosphère nous sommes actuellement, quelles sont les questions, les appréhensions, autant des libéraux, autant de l'Union Nationale, de la population, autant de vos propres partisans qui se posent des questions encore aujourd'hui, dans le journal La Presse, sur la CSN, qui ne sont pas des alliés du Parti libéral et qui se posent une multitude d'interrogations sur la position, sur le scénario, comme dirait le député de Verchères, sur ce contexte référendaire actuellement.

Messieurs, acceptez donc la perche qu'on vous tend. Acceptez donc la police d'assurance qu'on vous offre.

M. Charbonneau: On n'a pas confiance au courtier.

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Lalonde: C'est un autre aveu que le député nous fait.

M. Charbonneau: On n'a pas confiance en vous du tout.

M. Lalonde: Le ministre des Consommateurs n'avait pas été aussi loin.

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Charbonneau: Vous reconnaissez que c'est vous autres, dans ce cas-là.

M. Lavoie: M. le Président, je demanderais, dans ce contexte, si le ministre ne pourrait pas, pour atteindre encore une fois ce consensus tant désiré, ce consensus que vous nous avez refusé lorsqu'on a exigé un oui ou un non, ce consensus que vous demande encore l'Opposition unie... Le front uni de l'Opposition...

M. Bédard: Attendez, n'y allez pas si vite.

M. Lavoie: ... vous demande, c'est tellement simple, c'est tellement pas compliqué. Et vous savez que vous aurez la contribution, la collaboration des députés, si vous arrivez avec une question convenable, une question claire, précise, une question que vous avez, je l'espère, à coeur de poser.

C'est cela, M. le Président, et j'aimerais que le ministre prenne en considération ce que nous lui soumettons.

Le Président (M. Clair): M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, nous avons reçu l'avis de la commission sur certains points où elle prend la peine de mentionner qu'il ne s'agit pas des libertés fondamentales, que cela ne touche pas aux libertés fondamentales. Elle émet une opinion et elle accepte, dès le départ, que c'est une opinion que nous puissions discuter. D'ailleurs, toutes les opinions peuvent se discuter. Je voyais, par exemple, l'opinion de la commission, à la page 2. Le député de Marguerite-Bourgeoys en a fait état tout à l'heure. La commission disait ceci et je cite: "À notre avis, le rôle de l'Assemblée nationale, dans la décision de tenir une consultation populaire telle que définie dans le projet de loi, est beaucoup plus limité que ne l'annonçait le livre blanc".

D'autre part, j'ai une opinion qui a été émise par quelqu'un que vous connaissez bien, qui est Claude Ryan, le chef du Parti libéral, qui s'exprimait...

M. Lalonde: Allez-y, on vous écoute.

M. Bédard: ... dans les termes suivants et je cite: "Dans le livre blanc d'août dernier il n'était pas clairement garanti que toute question susceptible d'être soumise au peuple à l'occasion d'un référendum serait d'abord présentée pour approbation à l'Assemblée nationale.

On pouvait craindre que par subterfuge d'une loi-cadre, le gouvernement cherche à se dispenser d'une telle obligation".

Et M. Ryan continue: "Mais le projet de loi no 92 dissipe cette ambiguïté en garantissant que toute question sera soumise au préalable à l'As-

semblée nationale. Il ne donne certes pas satisfaction à ceux qui souhaitent que la question — c'est normal de le souhaiter — relative au référendum sur l'avenir constitutionnel doive être obligatoirement approuvée par au moins les deux tiers des députés. Il assure - continue M. Ryan - néanmoins le droit de regard des députés sur le libellé de la question et il dispose, du même coup, de maintes objections que l'on pouvait formuler à l'encontre du principe même d'une loi-cadre sur les consultations populaires."

Dans ce sens-là, M. Ryan diffère avec l'expression d'opinion émise par la commission. Je ne pense pas qu'il soit anathème de ce fait. Concernant le vote des deux tiers, la commission nous dit ceci: "Sans vouloir en faire une question de principe, ni en exagérer l'importance, la commission continue de croire à un vote à la majorité des deux tiers". Comme le prévoit la procédure.

Pour ma part, je vous dis tout simplement que, sans vouloir en faire une question de principe...

M. Lalonde: Allez jusqu'au bout du paragraphe.

M. Bédard: Oui, ... comme le prévoit la procédure parlementaire, avec les explications qu'il donne concernant la procédure parlementaire...

M. Lalonde: ... c'est ça.

M. Bédard: ... lorsqu'on recherche le plus large consensus entre les partis politiques, ce serait préférable pour eux...

Je vous dis tout simplement, par conviction...

M. Lalonde: C'est le gros bon sens.

M. Bédard: ... que, sans vouloir en faire une question de principe, ni en exagérer l'importance, nous croyons que la majorité simple est indiquée dans les circonstances, parce que si nous acceptions cet amendement, autrement dit, si ça prend les deux tiers pour procéder à une consultation de la population, il s'ensuit donc, par conséquent, qu'un tiers des membres de l'Assemblée nationale est suffisant pour empêcher de procéder à une consultation — elle est là, la question de principe — et je me demande au nom de quel principe un tiers de l'Assemblée nationale pourrait empêcher le peuple québécois d'être consulté, pourrait empêcher un gouvernement responsable de consulter la population sur une question précise, sur une décision majeure qu'il pourrait avoir à prendre.

Je pourrais, disons, argumenter longuement. Ce n'est pas mon intention. La plupart des arguments on été explicités par les députés ministériels. Je peux vous dire que je pense qu'on est tous d'accord que, quel que soit le référendum, il faut en arriver, il faut que le gouvernement, c'est sa responsabilité puisqu'il s'agit d'un référendum d'initiative gouvernementale, en arrive à la formulation d'une question claire et précise et qu'il doit essayer, justement par son effort, de formuler une question claire et précise, honnête, d'obtenir le plus large consensus possible, au niveau des députés de l'Assemblée nationale, et le fait que la loi stipule que la majorité simple n'empêchera en aucune façon le gouvernement — et c'est normal — d'essayer, par une question claire et précise, de rechercher et d'obtenir le consensus non pas des deux tiers de l'Assemblée nationale, mais de l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale. (21 heures)

Mais, il reste qu'accepter, en fait, ce principe de majorité qualifiée auquel a fait allusion tout à l'heure le député de Laval, il sait très bien, la majorité qualifiée, telle qu'on l'étiquette, est normalement étrangère au régime parlementaire britannique. Il y a toute une différence entre décider que ça prend les deux tiers des membres de l'Assemblée nationale pour nommer des personnes comme responsables d'organismes particuliers et exiger deux tiers des votes de l'Assemblée nationale pour en arriver à la possibilité pour le gouvernement de formuler une question et de consulter la population, ou encore, selon l'autre hypothèse possible, d'exiger les deux tiers des membres de l'Assemblée nationale pour un projet de loi qui pourrait être soumis à l'attention, au niveau d'une consultation populaire. Je vous dis bien sincèrement que tout en respectant les idées qui ont été énoncées, les arguments qui ont été explicités par l'Opposition, je ne vois pas pourquoi on changerait les règles normales qui ont toujours prévalu pour l'acceptation de motions au niveau d'expression d'idées à l'Assemblée nationale, ou encore au niveau de projets de loi, je ne vois pas pourquoi on renoncerait à ce qui a toujours été suffisant, à savoir l'assentiment de la majorité simple des membres de l'Assemblée nationale.

Nous sommes, à l'heure actuelle, à essayer ensemble de mettre au point une loi organique ou une loi-cadre, la plus démocratique possible, qui puisse permettre à n'importe quel gouvernement de faire n'importe quel référendum quand il le voudra. Il ne faudrait pas que dans la loi on insère des exigences qui donneraient à la fin le résultat que le gouvernement ou les gouvernements qui voudraient s'en servir, pourraient le faire difficilement. C'est bien beau de dire qu'on veut forger ensemble un instrument démocratique qui servira à tous les gouvernements, mais il ne faudrait pas, par des dispositions, faire en sorte que cela ait comme résultat d'enterrer cet instrument dans un coffre-fort fermé à clé. Je crois qu'un gouvernement responsable sait très bien que lorsqu'il a une question à poser ou encore une consultation de la population à faire, il doit la faire avec une question précise, il doit essayer d'obtenir le plus large consensus possible. C'est cela sa responsabilité. C'est là-dessus que le gouvernement va être jugé. Sans vouloir insulter qui que ce soit, je crois que nous n'avons pas besoin de police d'assurance pour garantir l'honnêteté, la clarté et la précision de la question que nous voudrons soumettre à la population du Québec, ou que d'autres gouvernements... Nous faisons confiance à ces autres gouvernements qui nous suivrons. Ce sera leur responsabilité de formuler correctement les questions et de les soumettre à la consultation populaire.

M. le Président, c'est dans cet esprit, un esprit quand même constructif qui respecte les idées et les arguments énoncés par l'Opposition, que nous croyons, non seulement pour le gouvernement qui est là présentement, mais pour les autres gouvernements qui voudront se servir de cet instrument, ne pas compliquer la situation. Nous ne partageons pas tout simplement l'idée exprimée ou la suggestion exprimée par l'amendement proposé par l'Opposition.

Le Président (M. Clair): La motion d'amendement du député...

M. Lalonde: M. le Président...

M. Bédard: Si vous me permettez, M. le Président, j'aurais pu, mais je n'ai pas voulu le faire, mais puisqu'on dit qu'on se parle très clairement entre nous, j'aurais pu le refuser simplement pour une considération. Je suis ici, et les membres de la commission parlementaire sont ici pour mettre au point une loi-cadre, pour la tenue de référendum par n'importe quel gouvernement. Je vous le dis très sincèrement, tous les amendements que vous allez apporter qui auront pour effet de particulariser la loi, d'essayer de nous faire faire d'une loi-cadre une loi spéciale pour un référendum que nous pouvons avoir à l'esprit... En respectant carrément l'esprit et le principe qui doit soutenir une loi-cadre, je ne vois pas comment ces amendements qui ont pour but de particulariser une loi-cadre, pourraient être acceptés. C'est pour cela que dans votre proposition qui débute par les mots suivants: "Dans le cas d'un référendum relatif au statut constitutionnel du Québec..." qui a donc comme effet de vouloir particulariser la loi, de vouloir essayer de faire une distinction avec un référendum sur quelque question que ce soit ou encore un référendum d'ordre constitutionnel, à ce moment-là, vous contribuez à essayer de particulariser une loi que nous ne voulons pas particulariser. Je vous dis d'avance que si l'on veut vraiment procéder un peu rapidement à l'étude de ce projet de loi, je crois de mon devoir de vous le dire dès le départ, c'est une question de principe, c'est une loi-cadre et cela va rester une loi-cadre.

M. Lalonde: M. le Président, je pense qu'il me reste une minute. Je n'avais pas l'intention de la prendre jusqu'aux derniers propos du ministre. Ceux-ci, je pense, constituent...

Le Président (M. Clair): ... une minute.

M. Lalonde: ... un mépris de l'Opposition en nous avertissant, en nous menaçant d'avance que tout amendement...

M. Bédard: M. le Président...

M. Lalonde: Voulez-vous me laisser une minute, s'il vous plaît? Vous avez eu le temps.

M. Bédard: Une question de règlement, M. le Président. Je n'ai menacé en aucune façon, j'ai simplement...

M. Lavoie: À la fin.

M. Lalonde: À la fin de mon intervention. ... constitue une menace à l'égard de l'Opposition en laissant supposer que tout amendement qui aurait pour effet de particulariser et qui serait acceptable, comme vous en avez accepté, M. le Président, suivant le règlement, serait d'avance refusé par le gouvernement. M. le Président, si c'est cela l'attitude du gouvernement, je tiens à dire au ministre qu'il a besoin de changer d'attitude. Nous n'allons pas être impressionnés par ses menaces.

M. Charbonneau: Qui menace là?

M. Lalonde: II va devoir passer par toutes les étapes de toutes les dispositions que le règlement met à notre service pour bonifier cette loi. Je pense que nous venons d'assister à ce que nous n'avions jamais vu à cette commission avant l'arrivée du ministre, une tentative déguisée, comme d'habitude — avec le ministre de la Justice, c'est toujours de même — de menacer l'Opposition, pour que cela se passe comme il pense que cela devrait se passer. M. le Président, ce n'est pas ainsi que cela va se passer.

Le Président (M. Clair): Votre minute est terminée. M. le ministre, en vertu de l'article 96.

M. Bédard: M. le Président, en vertu de 96, je n'ai en aucune façon menacé l'Opposition en quoi que ce soit, vous le savez. J'ai tout simplement exprimé une conviction que j'ai. Nous sommes ici, les membres de la commission parlementaire, pour mettre au point une loi-cadre qui va servir à la tenue de n'importe quel référendum, qu'il soit du point de vue constitutionnel ou qu'il soit pour d'autres questions non constitutionnelles. Ma conviction est que nous devons orienter nos efforts pour que cet instrument soit le plus parfait possible de manière que n'importe quelle sorte de référendum puisse être tenu à l'intérieur et en respectant cette loi-cadre. C'est un exercice de démocratie que nous sommes en train de faire, une loi-cadre qui permettra la tenue d'un référendum...

M. Lalonde: On n'en veut pas de votre démocratie.

M. Bédard: Laissez-moi terminer. Vous le demandez aux autres, ayez la même...

M. Lalonde: On n'en veut pas de votre démocratie.

M. Lavoie: Est-ce que vous parlez toujours en vertu de 96?

M. Bédard: Oui, simplement pour expliciter qu'il n'y a aucune menace là-dedans et, M. le

Président, je crois que si on réussit à mettre au point l'instrument le plus parfait possible, n'importe quelle sorte de référendum, quelle que soit son importance, pourra s'exercer à l'intérieur du respect de cette loi-cadre.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Assez brièvement, parce que je n'ai pas l'intention d'utiliser tout mon temps pour commenter certaines situations, pour parler des arguments qui ont été servis des deux côtés. On en a eu, je pense bien, des valables. J'aimerais cependant faire remarquer que, le contexte actuel de la loi que nous tâchons de bonifier se présente assez différemment que si c'était celui d'un gouvernement qui serait élu avec une majorité. On dit qu'il ne faut quand même pas qu'une minorité de députés puisse empêcher une loi de procéder, il ne faut pas oublier que cette minorité est quand même une majorité d'électeurs. Me basant là-dessus, je pense bien que dans les particularités que l'on pourrait amener, on a aussi des amendements, il y en a eu de déposés, certains autres vont s'amener, il y a des amendements qui pourraient caractériser cette loi et n'empêcheraient pas que ce soit une loi-cadre, comme on le sait, dans cet amendement-ci, en disant: Dans le cas d'un référendum relatif au statut constitutionnel du Québec, je pense qu'à ce moment-là, les amendements qui sont dans la loi et qui feront partie de la loi pourront demeurer là et n'empêcheront pas, quand même, une loi-cadre de servir à d'autres fins.

Je ne verrais pas pourquoi on se battrait contre ces amendements, si, des deux côtés de la table, on est de bonne foi et qu'on dit qu'on veut avoir une loi claire, une question claire et précise, une question qui va rendre justice à l'ensemble des contribuables. Je vois mal, après avoir dit ça, se le dire des deux côtés de la table, qu'on s'oppose à ce qu'on mette un paragraphe c) à l'article 6, qui ne servira jamais dans d'autres cas. On se servira du paragraphe a) et du paragraphe b), et le paragraphe c) demeurera là pour une loi qui pourra venir lors de l'élection d'éventuels gouvernements qui voudront modifier le statut du Québec.

Je pense que c'est une prudence de plus qu'on inclut dans la loi. Honnêtement, c'est mon argument majeur, je n'ai pas vu personne qui l'a réfuté, c'est que dans le contexte actuel, et cela se produit depuis déjà quelques années, depuis que d'autres formations politiques ont fait leur apparition au Québec, depuis qu'on n'a plus un gouvernement bipartite, il arrive que le gouvernement n'est plus en majorité de vote. Cela s'est produit chez les libéraux, cela s'est produit chez nous et ça se produit actuellement avec le gouvernement.

La question qui pourrait être amenée, avec la force qu'un gouvernement a, force de publicité, force de vente — ce qui est normal, si c'était un autre gouvernement, ce serait la même chose — et pris comme nous serons dans un comité unique, ce sera probablement des forces inégales. À ce moment-là, à mon point de vue, on ne peut pas négliger, s'il y a 60% d'électeurs, et on ne peut pas ne pas avoir dans la loi ces particularités qui vont protéger ce 60% d'électeurs. C'est 60%, et il se pourra qu'on forme un gouvernement encore avec moins de 40%. Quand on sait que 71 députés sont élus avec 40%, on pourrait bien se ramasser encore avec 60 députés et pas loin de 35%.

À ce moment-là, je pense que pour la minorité qu'on appelle en Chambre, qui n'est pas le gouvernement, mais qui a encore une plus grande majorité, on n'a pas le droit de faire ça. Surtout sur une question aussi importante qu'une question constitutionnelle. Ah, si on vient parler de question de zonage agricole, le premier ministre a dit qu'il n'y aurait pas de référendum sur cette question, mais si on parlait de zonage agricole, une loi qui est quand même à caractère provincial, il y a moins de monde. C'est comme les lois sur les mines. Quand on touche à la ville d'Asbestos et de Thetford, en tout cas dans le secteur particulier des travailleurs, je ne parle pas de l'impact financier mais du secteur particulier des travailleurs, on touche quand même à une minorité de contribuables.

Dans l'aspect constitutionnel, l'avenir de notre province, je pense que c'est plus important que ça. Bien honnêtement, je ne suis pas ici, on le sait des deux côtés de la table, pour faire perdre le temps à la commission, mais je suis ici pour bonifier la loi, la rendre acceptable à tous points de vue.

Je ne trouve pas tout à fait correct que le gouvernement ne se range pas en arrière d'un amendement qui n'engage pas le gouvernement sur d'autres référendums, qui donne au gouvernement sa loi-cadre quand même, qui ne l'empêcherait pas d'être plus efficace, et alors les électeurs se trouveraient plus en confiance. Des arguments qui ont été servis par différents députés, j'en ai retenu un, c'est que nous, du côté de l'Opposition, on n'aurait pas envie de faire rire de nous non plus, ça ne nous tente pas plus que ça tente le gouvernement. Si on n'est pas le gouvernement, on n'a pas envie de diminuer dans la faveur du public non plus.

Quand on détient 25 comtés, qu'on en détienne 10, on n'a pas l'intention de baisser, on aimerait ça augmenter, nous aussi. Pour ça, il ne faut pas avoir l'air ridicule. Quand on demande au gouvernement de se prononcer et de nous donner un référendum, on est d'avis qu'il nous en faut un. Pour avoir un référendum, je pense qu'il nous faut une question. Pour avoir une question, il faut s'entendre.

À partir de là, on n'est pas mieux pris que le gouvernement. Je pense qu'il n'y a pas de raisons, dans les arguments qu'on nous a servis ici, il n'y a pas eu de raison majeure que personne ne m'a donné qui me fait croire que ce n'est pas possible de nous donner un vote aux deux tiers. Je dois vous dire que je voterai en faveur de l'amendement et c'est avec conviction que je le fais.

M. Lavoie: M. le Président...

M. Godin: M. le député de Mégantic-Compton, vous permettez une question?

M. Grenier: Oui, M. le Président.

M. Godin: À l'époque où vous étiez membre du gouvernement Johnson et ensuite du gouvernement Bertrand, qui n'avait que 44%, des votes je pense, est-ce que vous estimez que certaines lois très importantes ou certaines activités, entre autres la visite du général de Gaulle, étaient faites par un gouvernement responsable qui représentait le Québec ou qu'il aurait dû être reçu, le général de Gaulle, par exemple, par l'Opposition d'abord, représentant 58% des votes? (21 h 15)

M. Grenier: Oui, je réponds à votre question, si vous me le permettez, M. le député de...

M. Godin: Mercier.

M. Grenier: ... Mercier. C'était si vrai qu'on se sentait en minorité dans le public. On a déposé une loi du référendum.

M. Godin: Mais les lois qui ont été adoptées étaient quand même valides...

M. Grenier: Oui.

M. Godin: D'accord, c'est tout.

M. Grenier: Mais j'aurais aimé mieux qu'on soit un gouvernement majoritaire.

M. Godin: Oui, mais ça, c'est le pluralisme.

M. Lavoie: M. le Président, je n'avais pas l'intention d'intervenir à nouveau, mais il me reste quelques minutes, très brièvement. Suite aux propos tenus par le ministre de la Justice, je voudrais à mon tour protester et dire que je regrette les mots qu'il a prononcés; ils sont superflus. À ma connaissance, c'est la première fois que j'entends un ministre faire sont lit et dire au départ: Messieurs, ne perdez pas votre temps; tous les amendements, si vous voulez les particulariser, on ne voit pas comment on va pouvoir les accepter. En voulant dire, c'est une fin de non-recevoir.

C'est regrettable et cela concorde très mal avec les propos de votre prédécesseur, le député de Maisonneuve, et vos propres propos que vous dites malheureusement trop souvent dans un style un peu doucereux. Quand vous avez protesté, suite aux propos du député de Marguerite-Bourgeoys, cela a très mal concordé avec la politique de consensus, de bonne foi, d'ouverture que vous nous avez prêchée depuis que le livre blanc a été déposé il y a un an. Vous nous opposez une fin de recevoir en disant: Ne perdez pas votre temps, si vous voulez particulariser ce projet de loi, dans les cas de référendums, on va voter contre et on ne voit pas comment on pourrait les accepter. C'est très simple, dans la législation ordinaire, on ne demande pas que les lois soient adoptées par les deux tiers. Dans les référendums ordinaires qui peuvent se présenter soit sur la peine de mort, l'avortement — si c'était de notre compétence — le zonage agricole, on laisse la majorité simple, mais on reconnaît, comme dans beaucoup d'États, qu'une question constitutionnelle est plus importante qu'une question d'administration courante.

Dans ce cas particulier, étant donné que c'est prévu même dans les décisions que la population doit rendre dans ces référendums, soit en Suisse ou ailleurs, dans les questions constitutionnelles on exige, pour le résultat, une majorité qualifiée. Ce qu'on vous demande — on est très logique — c'est qu'on considère les référendums à caractère constitutionnel beaucoup plus sérieux, plus importants, avec plus de conséquences qu'un référendum sur l'administration courante d'une décision normale d'un gouvernement. C'est la raison pour laquelle on a proposé cet amendement.

Encore une fois, je crois que c'est une insulte et un mépris non seulement envers l'Opposition, envers le parlementarisme et envers même vos propres députés qui pourraient... Écoutez! Ils ne sont pas dans un carcan, vos députés; ils pourraient, à titre de députés, apporter une suggestion, une amélioration même pour un référendum qualifié. C'est une insulte même à vos députés ministériels. Je crois que c'est notre devoir de protester contre une déclaration de la sorte et M. le ministre, si c'était possible, vous devriez la retirer.

Le Président (M. Clair): M. le député de Verchères.

M. Bédard: Vous devriez commencer par la bien comprendre.

M. Charbonneau: Est-ce que le député de Laval me permettrait une question?

M. Lavoie: Certainement.

M. Charbonneau: Je veux simplement lui demander s'il ne considère pas, finalement, que le débat qui va suivre la question va suffisamment permettre à la population, par l'intermédiaire de l'Opposition, de se faire une idée claire, précise du caractère d'honnêteté et de rigueur intellectuelle de cette question.

M. Lavoie: Pour répondre...

M. Charbonneau: Ne pensez-vous pas, finalement, que c'est un débat assez artificiel?

M. Lavoie: Pour répondre très brièvement à votre question. Mettons-nous dans le processus, la manière dont on va procéder si le projet de loi reste tel quel. Il y a une question de proposée par le gouvernement; elle peut être légèrement ambiguë; elle peut être transparente; elle peut ê-tre — si elle n'est pas transparente — j'espère

qu'elle sera translucide; j'espère qu'elle n'aura pas de défaut. Mais il est possible; vous êtes des gens faillibles. Avec votre majorité ministérielle gouvernementale et un débat avec la clôture de 30 heures, on l'aura la question et on sera obligé de vivre avec. C'est comme cela que cela peut arriver. Même si le débat et le référendum s'enchaînent par la suite avec les brefs référendaires, si, au départ, on passe une charette à trois roues, et que même la question est déjà contestée dans la population, ce n'est pas très sain pour l'opération référendaire.

M. Charbonneau: Oui, d'accord. Mais j'ai l'impression que vous n'avez pas répondu.

M. Lavoie: On sera obligé de vivre avec cette question.

M. Charbonneau: Mais vous n'avez pas répondu à ma question, M. le député de Laval. Je suis d'accord avec vous sur ce que vous venez de dire...

M. Lavoie: ... question, c'est cela que vous m'avez demandé.

M. Charbonneau: Ce que je vous pose comme question, c'est: Ne croyez-vous pas que la pression publique du simple fait qu'il y aura un débat long, que de nombreuses heures seront consacrées à cette question...

M. Lavoie: 30 heures.

M. Charbonneau: C'est beaucoup 30 heures.

M. Lavoie: Cela peut être une semaine avec les règles suspendues de la Chambre; c'est une fin de session.

M. Charbonneau: Écoutez! Vous et moi, tous ceux qui sont...

M. Lavoie: Cela peut être une semaine.

M. Charbonneau: Vous et moi, tous ceux qui sont autour de cette table savons...

Le Président (M. Clair): Messieurs...

M. Charbonneau: ... aussi que ça se fait en public, ce débat ne se fait pas en catimini.

M. Lavoie: Est-ce qu'il y avait du public à l'Assemblée nationale, ce matin, à 5 heures lorsqu'on siégeait?

Une voix: Non.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît, messieurs!

M. Charbonneau: Mais pensez-vous que les gens ignorent qu'on a siégé jusqu'à 5 heures, par exemple?

M. Lavoie: II n'y a rien dans les journaux. Il n'y a pas un chat au Québec qui sait qu'on a siégé jusqu'à 5 heures. Ce n'est pas une accusation que je porte contre les media.

M. Charbonneau: J'ai été journaliste suffisamment longtemps pour savoir que sur un débat comme celui-là, M. le député, du simple fait qu'il doit être public, les craintes que vous avez tombent automatiquement.

Une voix: Cela va être télévisé...

M. Charbonneau: Cela va être télévisé à partir de septembre. Imaginez-vous. Pensez-vous que ce débat va passer inaperçu? Voyons donc!

M. Vaillancourt (Jonquière): Votre chef ne sera même pas là.

M. Lalonde: ... projet de loi...

M. Vaillancourt (Jonquière): Votre chef ne sera même pas là... Il est parti.

Le Président (M. Clair): Est-ce que la motion du député de Gatineau à l'effet d'ajouter à la fin de l'article 6, l'alinéa suivant: Dans le cas d'un référendum relatif au statut constitutionnel du Québec une question ou un projet de loi devant faire l'objet d'une consultation populaire doit être approuvé par les deux tiers des membres de l'Assemblée nationale, est adoptée?

M. Lalonde: Adopté.

Une voix: Rejeté, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Rejeté.

M. Lavoie: Prenez l'enregistrement des voix. Le Président (M. Clair): Vote enregistré?

Une voix: Qui est membre?

Le Président (M. Clair): Je vais vous le dire au fur et à mesure. Veuillez indiquer si vous êtes pour ou contre. M. Bédard (Chicoutimi), pour ou contre l'amendement?

M. Bédard: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Vaillancourt (Jonquière)?

M. Vaillancourt (Jonquière): Contre.

Le Président (M. Clair): M. Charbonneau (Verchères)?

M. Charbonneau: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Beauséjour (Iberville)?

M. Beauséjour: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Lavoie (Laval)?

M. Lavoie: Pour. Oui.

Le Président (M. Clair): M. Grenier (Mégantic-Compton)?

M. Grenier: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Laberge (Jeanne-Mance)?

M. Laberge: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys)?

M. Lalonde: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Paquette (Rosemont)? M. Roy (Beauce-Sud)? M. Samson (Rouyn-Noranda)?

M. Samson: Pour.

Le Président (M. Clair): Le résultat du vote est le suivant: Pour l'adoption: 4. Contre: 5. La motion...

M. Lalonde: Cela a passé proche. Le Président (M. Clair): ... est rejetée.

M. Vaillancourt (Jonquière): La majorité simple.

Une voix: Deux-tiers.

M. Grenier: Est-ce qu'on peut reprendre le vote comme l'autre jour à l'Assemblée nationale? On va aller chercher M. Roy.

Une voix: Si on avait été chercher M. Roy...

M. Charbonneau: Seulement pour vérifier, vous dites 5?

Le Président (M. Clair): C'est-à-dire le contraire.

M. Lavoie: Cinq pour et quatre contre?

Le Président (M. Clair): Cinq contre et quatre pour.

M. Charbonneau: Est-ce qu'il y a des intervenants?

Le Président (M. Clair): II y a des intervenants.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce qu'on peut passer à l'adoption de l'article 6?

Une voix: Adopté.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, sur l'article 6.

M. Lalonde: M. le Président, on a vu l'hermétisme chronique, maladif du gouvernement à l'égard de toute tentative de l'Opposition de bonifier ce projet de loi en fonction d'un référendum sur l'indépendance, qui, quand même, il faut le reconnaître, et je pense que les députés ministériels le reconnaîtront, ne fait que suivre les promesses du Parti québécois. Le Parti québécois a promis un référendum sur l'indépendance. On a tenté de bonifier la loi à cet égard. M. le Président, on a eu une fin de non-recevoir de la part du ministre en particulier, voilée de menaces, il sait ce qu'on en pense. Cela nous a fait bien peur, M. le Président, on en tremble actuellement. On va quand même tenter de rassurer cette pauvre équipe ministérielle, qui craint beaucoup de parler du référendum sur l'indépendance, et je vais proposer l'amendement suivant qui s'adresse à tout référendum.

Ajouter les alinéas suivants à l'article 6: "Aucun référendum prévu au premier alinéa ne peut être tenu sans que le gouvernement n'ait obtenu au préalable et qu'il n'ait déposé à l'Assemblée nationale un avis de la Commission des droits de la personne constituée en vertu de l'article 57 de la Charte des droits et libertés de la personne, 1975, Statuts du Québec, chapitre 6. L'avis prévu au précédent alinéa porte exclusivement sur l'opportunité de soumettre une question ou un projet de loi à une consultation populaire en regard des conséquences qu'une telle consultation populaire peut avoir sur les droits et libertés de la personne et d'une certaine catégorie de personnes".

Le texte de l'amendement est distribué, je crois, M. le Président.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce qu'on peut avoir quelques minutes pour relire tranquillement l'amendement?

Le Président (M. Clair): Puisque c'est le voeu de la commission.

M. Vaillancourt (Jonquière): Dans votre esprit, quand vous dites le premier alinéa, est-ce que ce n'est pas le paragraphe a)? A est un paragraphe ou un alinéa?

M. Lalonde: Ajouter les alinéas suivants. Ce ne sont pas des paragraphes, ce sont des alinéas, parce qu'ils ne sont pas numérotés.

M. Vaillancourt (Jonquière): D'accord.

M. Lalonde: ... adopté par toute la commission pour demander l'avis de la commission là-dessus.

Le Président (M. Clair): Est-ce qu'on peut continuer ou s'il y aurait lieu de...

M. Vaillancourt (Jonquière): Je n'ai rien à dire sur la recevabilité, M. le Président.

M. Lalonde: M. le Président, je n'ai pas d'objection, moi non plus.

Le Président (M. Clair): Personne ne soulève la question de la recevabilité de cette motion d'amendement? Vous êtes certain?

Une voix: Certain.

Le Président (M. Clair): C'est pour être plus sûr que personne ne reviendra dans deux minutes.

M. Samson: N'insistez pas trop.

Le Président (M. Clair): Je déclare donc la motion d'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys recevable.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, sur la motion d'amendement.

M. Lalonde: ... je voudrais expliquer la portée de cet amendement. Si on se souvient, certains Québécois ont suggéré, lorsqu'on a abordé l'examen de la question référendaire, le recours à un comité de sages qu'on a appelé Conseil du référendum — disons dans l'esprit de l'Union Nationale — Conseil du référendum qui a été plagié grossièrement par le gouvernement qui lui a enlevé tout son sens, d'ailleurs, au grand dam de l'Union Nationale. Je reconnais que c'est malheureux. (21 h 30)

D'autres, dans le public, ont fait de même pour tenter d'assurer, encore une fois et au-delà de la loi, le caractère de crédibilité de la loi et des résultats des référendums qui pourraient être tenus en vertu de cette loi.

M. le Président, on ne peut pas, actuellement, discourir longtemps sur l'opportunité de quelque gouvernement que ce soit de soumettre à une consultation populaire certaines questions. Généralement, dans les démocraties récentes ou contemporaines, on a eu recours à ce mécanisme de consultation pour régler un problème qu'on ne savait pas exactement comment régler. C'est une tentation qui peut exister dans l'esprit de gouvernants qui ne savent pas exactement comment se situer, où se situer à l'égard d'un problème et par rapport à l'opinion publique.

Est-ce qu'on doit, dans un tel cas, laisser à un gouvernement l'entière liberté de décider de soumettre une certaine question, entre guillemets, sans avoir la prudence élémentaire, sans recourir à des précautions? Le conseil des sages ou le Conseil du référendum, dans l'esprit ou tel que l'Union Nationale l'avait suggéré à ce moment-là, était un véritable conseil du référendum, totalement indépendant, avec des pouvoirs, si je me souviens bien — peut-être que le député de Mégantic-Compton pourra expliciter là-dessus tantôt — auquel on donnait plus de pouvoirs que de connaître simplement des contestations; il pouvait se prononcer sur la question, sur l'opportunité de faire un référendum sur une telle question.

C'est disparu. Le Conseil du référendum est devenu quoi? Un tribunal. S'il n'y avait pas eu de conseil de référendum, il aurait fallu avoir ce tribunal de toute façon. Mais on aurait appelé cela la Cour provinciale, M. le Président. On appelle ça le Conseil du référendum, mais ce sont des juges de la Cour provinciale.

Alors, ce sont des petits tours de passe-passe, c'est un petit maquillage qui a été fait; on a simplement pris le titre de Conseil du référendum, on l'a mis au-dessus de trois juges et on a décidé qu'on avait accepté la suggestion de l'Union Nationale.

Quant à moi, n'étant pas un membre de ce parti, je trouve que c'est une démarche indigne. Quand même, on a ça dans la loi actuellement. Je pense qu'on doit remplacer le véritable conseil des sages qu'on avait conçu, par ce qui existe, je pense, de plus crédible actuellement, dans nos organismes, dans notre structure démocratique, c'est-à-dire la Commission des droits de la personne.

Pourquoi? Parce qu'il y a des questions qu'un gouvernement serait tenté de soumettre à une consultation populaire et qui objectivement, comportent des dangers évidents. Par exemple... Et en fait, ça se réduit au problème des minorités.

Prenons comme exemple les minorités culturelles et linguistiques. Que ce soit la question de la langue, la question des droits des indiens, par exemple, est-ce que, par hypothèse, un gouvernement qui voudrait se débarrasser d'un problème par le biais d'une consultation populaire, est-ce qu'on pourrait lui laisser faire une consultation sur l'opportunité de développer la baie James, même si ça comporte des inconvénients graves pour les Amérindiens, les Cris, les Inuit?

Par exemple, un référendum dans ce sens serait voué au mépris le plus complet des droits des minorités- Les minorités religieuses. Un référendum qui soumettrait à l'opinion publique l'opportunité de faire... C'est-à-dire quels sont les droits constitutionnels que l'on doit reconnaître aux écoles protestantes du Québec? Quel serait le sort d'un tel référendum? J'ouvre une parenthèse. Ce n'est pas à ce gouvernement que je m'adresse. Actuellement, j'ai des députés ministériels devant moi qui sont comme moi, membres d'une commission parlementaire appelés à légiférer. Le gouvernement y est représenté par le ministre, naturellement, mais n'importe quel gouvernement, dans l'avenir, pourrait se servir de cette loi. L'exemple que je veux souligner, c'est un exemple tout à fait contemporain. Je ne sais pas si les députés ont entendu parler du référendum qui a été tenu en Egypte récemment, il y a à peine quelques semaines, pour savoir si on devait reconnaître des droits au Parti communiste, pour savoir si on devait reconnaître des droits à d'autres minorités. Naturellement, le référendum a été largement pour l'opinion que le gouvernement voulait défendre et contre la minorité qui était ce parti. Cela s'adonne que c'était le Parti communiste, dans ce cas; cela pourrait être un autre parti minoritaire, je n'en regarde aucun, mais il y en a. Si on devait

soumettre à l'opinion publique, par voie de référendum: Est-ce qu'on devrait continuer de reconnaître le Ralliement créditiste au Québec, malgré la valeur des députés, et peut-être du seul député qui est ici, assis à cette commission. Étant donné l'état des choses, est-ce que cela serait juste de soumettre une telle question à un référendum?

Dans l'hypothèse où c'est le Parti québécois qui, une fois le référendum battu, ou plutôt gagné par l'option fédéraliste, se voit refuser la faveur populaire, tombe dans les sondages, se retrouve aux prochaines élections avec un pourcentage de votes minables et dans deux ou trois ans, est un parti marginal; si un gouvernement, à ce moment, aussi libéral qu'il puisse être, soumet à l'opinion publique: Est-ce qu'on devrait continuer de tolérer des partis politiques qui recherchent la séparation du Québec, par exemple? Réellement, c'est sérieux, parce que nous sommes, très exceptionnellement, une des seules démocraties qui, non pas tolèrent, mais acceptent de vivre quotidiennement avec un parti qui recherche un changement radical de son statut constitutionnel.

Alors, dans l'hypothèse d'une autre situation dans quelques années, le Parti québécois serait sûrement une des victimes d'un tel référendum. Est-ce que ce serait acceptable? Quant à moi, non. Nous légiférons aujourd'hui pour l'avenir. Je pense qu'il est de notre devoir, nous, députés, de quelque parti que nous soyons, de faire en sorte qu'il y ait une prudence inscrite dans la loi. À ce moment, n'importe quel référendum doit, au départ, recevoir un avis favorable, préalable, de la Commission des droits de la personne, à savoir que la question qui est soumise à la population ne violera aucune des libertés fondamentales des gens, y compris des minorités.

Les minorités socio-économiques, par exemple; si un gouvernement mal à l'aise devant la question du droit de grève dans la fonction publique, voulait soumettre cela à un référendum, à une consultation populaire, on voit déjà d'avance que la très grande majorité de la population — c'est-à-dire 60 000 personnes plus les travailleurs dans le secteur parapublic, à peu près 200 000 personnes, avec leur famille, disons que cela fait 400 000 ou 500 000 personnes, peut-être 600 000 — la grande majorité n'a aucun intérêt à maintenir un droit de grève. À ce moment, la Commission des droits de la personne dirait au gouvernement: Non, vous n'avez pas le droit de soumettre cela, parce que cela serait une espèce de paravent derrière lequel un gouvernement pourrait se cacher pour prendre ses responsabilités ou surtout pour ne pas les prendre.

L'amendement que je propose est justement la précaution que le ministre de la Justice, d'ailleurs comme ministre responsable de la Charte des droits et libertés de la personne vis-à-vis de l'Assemblée nationale, devrait recevoir avec beaucoup d'empressement. Il ne s'agit pas d'un référendum constitutionnel. Il ne s'agit pas d'une particularité. Il ne s'agit pas de particulariser la loi. Il ne s'agit pas d'injecter dans la loi un principe de spécificité, comme disait un député. Il s'agit simplement d'y injecter une police d'assurance pour tous les citoyens, parce que nous sommes tous, à un moment donné, quelques heures par jour, une minorité, qu'on le veuille ou non. Nous sommes tous une minorité...

M. Bédard: Vous pouvez bien sourire.

M. Lalonde: Non, je ne souris pas. Je vois que le ministre ne semble pas prendre cela au sérieux.

M. Bédard: Très au sérieux.

M. Lalonde: J'espère qu'il va l'appuyer. On va voir jusqu'à quel point il prend cela au sérieux, à l'appui qu'il va donner à cette motion. Je sais que vous, M. le Président, vous prenez cela au sérieux; vous m'écoutez avec sérieux.

Le Président (M. Clair): Je n'ai pas le droit de rire.

M. Lalonde: La question de la peine de mort, et là, le ministre de la Justice encore — cela s'adonne qu'on l'a avec nous — cela le concerne, comme ministre de la Justice, il sait très bien... Le député de Verchères qui a eu affaire dans le milieu policier, le milieu de la criminalité, sait très bien que si on soumettait à une consultation populaire la question de la peine de mort, il y aurait très probablement une majorité en faveur du maintien de la peine de mort, alors qu'une grande majorité des gens qui se sont penchés sur le sujet, y compris des criminalistes ou des criminologues, pensent que ce n'est plus acceptable dans une société civilisée. Voilà un sujet où la Commission des droits de la personne dirait: Non, on ne peut pas soumettre cette question à une consultation populaire.

C'est la raison pour laquelle, je pense que le gouvernement devrait appuyer cette motion d'amendement qui ne veut que bonifier le projet de loi pour faire en sorte que tous nos droits, en tant que nous sommes tous minoritaires un jour ou l'autre, soient protégés.

Le Président (M. Clair): La motion d'amendement, M. le député de Marguerite-Bourgeoys sera-t-elle adoptée? Vouliez-vous prendre la parole?

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président.

M. Grenier: II me semble que ce serait plus logique qu'après un amendement, qu'il vienne du Parti libéral ou qu'il vienne d'une autre formation politique, qu'un membre ministériel intervienne, parce qu'il pourrait arriver que tout à coup on parle tous pour rien, qu'on soit tous d'accord là-dessus. J'aimerais bien connaître l'opinion... et je pense bien que, là-dessus, on pourrait s'attendre que le gouvernement l'appuie. À plus forte raison, il faudrait entendre la voix du gouvernement tout de suite.

Le Président (M. Clair): J'aimerais savoir si tous les membres de l'Opposition représentée sont d'accord avec cela, parce que je pense que

le député de Rouyn-Noranda n'a pas été d'accord déjà, à un moment donné, où je n'avais pas respecté l'ordre traditionnel...

M. Samson: M. le Président, l'ordre traditionnel, je pense qu'on le connaît tous. Dans le cas présent, par consentement, on pourrait sortir des sentiers battus un peu. Il me semble, en tout cas — on ne veut pas présumer des intentions du gouvernement — d'après ce qui a été dit à la table, qu'il serait peut-être possible qu'on évite un long débat. Dans ces conditions, j'ai l'impression qu'on devrait, et on reviendra par la suite à l'ordre habituel, si nécessaire.

M. Roy: Aucune objection, en ce qui me concerne, à ce qu'un membre du gouvernement parle immédiatement après que le proposeur de la motion d'amendement ait intervenu, de façon qu'on connaisse la position de l'autre côté de la table. En ce qui me concerne, je ne ferai pas de débat de procédure là-dessus.

Le Président (M. Clair): Je le considère simplement pour cette fois, parce que je m'en suis déjà fait faire.

M. Roy: Sans que cela ne soit considéré comme un précédent.

M. Samson: Un par un.

M. Grenier: M. le Président, si vous permettez, c'est parce qu'on a déjà une série d'amendements. On sait d'avance que le gouvernement ne les acceptera pas, d'après les propos qu'on a eus tout à l'heure. Pardon?

Le Président (M. Clair): Vous êtes chanceux, je ne les ai pas eus.

M. Grenier: Vous avez entendu la même chose que nous. Une déclaration quand ce sera une spécificité.

M. Lalonde: C'est compliqué, mais demandez-le au député de Terrebonne, il sait très bien ce que c'est, un principe de spécificité.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, inutile de vous dire tout d'abord que je ne parle pas au nom du gouvernement. Je parle en mon nom personnel, comme député de Jonquière. Mes premiers mots sont pour vous dire que je ne suis pas surpris du tout qu'une telle motion soit présentée par le député de Marguerite-Bourgeoys, pas du tout, puisque ce n'est pas la première fois que j'ai l'occasion de voir jusqu'à quel point c'est ce député de Marguerite-Bourgeoys qui fait les sales jobs de l'Opposition officielle. (21 h 45)

M. Lavoie: M. le Président, j'invoque le règlement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Laval, sur une question de règlement.

M. Lavoie: Premièrement, cela n'a aucune pertinence.

M. Vaillancourt (Jonquière): J'y arrivais.

M. Lavoie: Et c'est tellement antiparlementaire de faire des attaques personnelles contre un collègue qui fait des "sales jobs".

M. Lalonde: M. le Président, le mot "sale" est antiparlementaire et je demande au député de le retirer.

M. Lavoie: Et c'est votre concept, comme président de commission parlementaire, et souvent siégeant comme président de l'Assemblée nationale. C'est comme cela que vous traitez vos collègues parlementaires et d'institution.

M. Lalonde: Cela lui fait mal.

M. Lavoie: Et faire des attaques personnelles. Je n'ai jamais vu cela.

M. Lalonde: Des sales "jobs", M. le Président, c'est antiparlementaire, le mot "sales", et je demande au député de Jonquière de le retirer.

M. Bédard: Le mot "sales ".

Le Président (M. Clair): Une chose est certaine...

M. Lavoie: Vous allez perdre beaucoup de votre crédibilité au fauteuil.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne préside pas, M. le député de Laval. S'il vous plaît, à l'ordre!

M. Lavoie: C'est comme hier soir, quand vous applaudissiez... À l'ordre? Vous n'êtes pas président.

M. Vaillancourt (Jonquière): À l'ordre! À l'ordre! Respectez mon droit de parole. D'accord.

M. Lalonde: Oh là, là! Il y a une question de règlement qui a été soulevée.

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Lalonde: Je soulève une question de règlement, M. le Président. Le mot "sales" à l'égard...

M. Lavoie: Quelle arrogance.

M. Charbonneau: Vous n'avez pas de leçon à donner sur l'arrogance, vous, par exemple. S'il y a

quelqu'un d'arrogant ici, c'est bien le député de Laval.

M. Lalonde: ... à l'égard du travail...

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde: M. le Président, j'ai soulevé une question de règlement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, si vous me laissez le temps de dire quelques mots dans le but de permettre à chacun de reprendre son sang-froid, après cela, je suis sûr qu'on va pouvoir continuer plus facilement.

Vous soulevez une question de règlement? M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Question de règlement. Je n'ai pas le règlement avec moi, mais vous savez très bien qu'il existe dans notre règlement une disposition, je pense que c'est l'article 99, qui interdit à un parlementaire d'utiliser des termes qui ne sont pas parlementaires.

M. le Président, je ne m'étendrai pas sur la nature de l'argument.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je retire mes propos. Mais je ne suis pas surpris quand même, M. le Président, que ce soit le député de Marguerite-Bourgeoys qui ait présenté une telle motion. Pourquoi? Je pense qu'il était membre de ce gouvernement qui a formé cette Commission des droits de la personne. Et je considère la motion du député de Marguerite-Bourgeoys comme une insulte, non seulement à la Commission des droits de la personne, mais également à ses membres. La commission est liée par une loi, est soumise à une loi et doit appliquer une loi. Je référerais les membres de la commission à l'article 67 de la charte.

Au paragraphe 1, on dit ceci: "La commission doit notamment recevoir les suggestions, recommandations et demandes qui lui sont faites, touchant les droits et libertés de la personne, les étudier et faire au gouvernement les recommandations appropriées".

Donc, M. le Président, à la lecture même de l'article 67, paragraphe 1) "tout citoyen du Québec, toute personne, domiciliée et résidant au Québec, peut, s'il sent que ses droits et libertés de la personne sont possiblement brimés, faire des suggestions, porter une plainte, porter le tout à la connaissance de la Commission des droits de la personne, et celle-ci, à ce moment, peut faire des recommandations au gouvernement".

Je pense que, premièrement, le seul fait de présenter une telle motion de la part d'un ancien ministre qui a lui-même procédé à la formation de cette Commission des droits de la personne est une insulte aux membres actuels et anciens de cette commission et une insulte également à tous les membres, non pas du gouvernement, mais de l'Assemblée nationale du Québec.

Je pense que le député de Marguerite-Bourgeoys n'a aucunement réfléchi avant de présenter une telle motion, car j'estime — et j'ose espérer que mes confrères pensent comme moi — que la Commission des droits de la personne, qui est l'un des organismes fondamentaux au Québec, n'a pas besoin d'une obligation légale pour respecter la loi qui la régit. Je pense que la Commission des droits de la personne nous a prouvé, au cours des derniers mois et au cours des dernières années, qu'elle était en mesure, sans aucune obligation légale autre que celle des articles de la loi qui la régit, de remplir son mandat et de voir à la protection des droits et libertés de la personne des citoyens du Québec.

Je pense, comme premier argument, que le seul fait de présenter cette motion est déjà pour la commission et les membres de la commission, une insulte, puisqu'elle laisse présumer que l'Opposition officielle, ou du moins le député de Marguerite-Bourgeoys, estime que, sans aucune obligation légale, la commission n'est pas en mesure de remplir son devoir et son rôle, tels que définis par la loi.

M. le Président, cette motion, d'autre part, est d'autant plus surprenante qu'elle vient justement d'un membre qui, heureusement, n'était pas là à ce moment-là, qui a bafoué les libertés les plus fondamentales des Québécois en 1970.

M. Lavoie: La crise d'octobre! M. Lalonde: La crise d'octobre!

M. Lavoie: La pertinence!

M. Vaillancourt (Jonquière): Je me dois de le dire, M. le Président, et je pense, que c'est pertinent au débat...

M. Lalonde: La pertinence!

M. Vaillancourt (Jonquière): ... puisque je pense précisément que les droits et libertés de la personne, en 1970, ont été bafoués. C'est justement le Parti libéral...

M. Lalonde: On n'était pas là ni toi ni moi.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... qui formait alors ce gouvernement duquel émane le député de Marguerite-Bourgeoys qui a bafoué, alors même que la commission n'existait pas, les droits et libertés de la personne.

M. Lavoie: Une question de règlement. On n'est pas pour faire le procès de tous les gouvernements qui ont existé depuis la Confédération quand même.

M. Charbonneau: Mais on fait le vôtre, par exemple.

Le Président (M. Clair): M. le député de Laval sur une question de règlement. Je crois que cela va à l'encontre du règlement, ce n'est pas pertinent au débat.

M. Lavoie: Premièrement, le député de Marguerite-Bourgeoys n'était pas là et je n'étais pas du gouvernement non plus. Si on veut faire des attaques ad hominem, ce n'est pas la place.

M. Charbonneau: Vous l'avez endossé.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière, je pense que le corridor qu'on devrait respecter actuellement en vertu de la motion d'amendement proposée par le député de Marguerite-Bourgeoys ne permet pas, je pense, de revenir, en tout cas, pour y revenir, à des événements qui se sont déroulés. Si vous voulez parler de ces événements, je pense que vous allez avoir à me convaincre qu'ils se situent dans le cadre de la pertinence du débat sur la motion d'amendement.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, j'admets...

M. Lalonde: À ce moment-là, M. le Président, on pourrait vous démontrer que les droits fondamentaux de M. Laporte ont été brimés aussi.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... avec vous que c'était peut-être non pertinent au débat...

M. Charbonneau: On était obligé de...

M. Vaillancourt (Jonquière): ... mais je pense que je me devais de le dire, parce que nous devons regarder cet argument pour voir la bonne foi ou la mauvaise foi de l'Opposition officielle dans cette proposition d'amendement. Je pense que c'est là l'un des points qu'il faut examiner pour voir cette bonne foi ou cette mauvaise foi de celui ou du parti politique qui propose cet amendement. J'ai à ma droite un confrère, un collègue, dont les libertés fondamentales ont été bafouées mais qui, grâce à la volonté populaire et grâce à d'autres...

M. Lavoie: La pertinence du débat. On revient sur votre décision, M. le Président.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... a pu recouvrer sa liberté.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière, je vous prie de revenir à la pertinence du débat.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, en date du 5 juin 1978, la Commission des droits de la personne envoyait son avis au ministre de la Justice, il est daté du 5 juin, et, au deuxième paragraphe — c'est signé par M. René Hurtubise, le président de la commission — celui-ci dit ceci: Dois-je préciser que le titre — "Quelques commentaires " — indique bien que la commission entend s'en tenir à sa responsabilité qui consiste à étudier ce projet de loi à la lumière d'une grille d'analyse basée sur les droits et libertés mentionnés dans la Charte, et ne vise d'aucune façon à se substituer au législateur, au gouvernement ni à un membre de l'Opposition en se prononçant sur l'opportunité — c'est la motion, M. le Président, c'est en plein la motion du député de Marguerite-Bourgeoys — ou la sagesse d'un projet de loi spécifique ". Le député de Marguerite-Bourgeoys a sa réponse même de la part du président de la Commission des droits de la personne, qui répond à cet amendement comme s'il avait anticipé l'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys.

M. le Président, le Parti libéral, à cette commission comme à d'autres, se retranche constamment derrière la Commission des droits de la personne pour cacher son "filibuster".

J'estime, M. le Président, comme le dit M. Hurtubise dans sa lettre...

M. Lalonde: II perd les pédales.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... que cette Commission des droits de le personne que le gouvernement libéral a créée en 1975, je pense, est en mesure, sans obligation légale, de voir à remplir les devoirs qui lui sont confiés par une loi que vous avez vous-même adoptée. Aujourd'hui, l'Opposition officielle voudrait que l'actuel gouvernement impose une deuxième obligation légale à la commission. Non seulement la commission serait-elle tenue de respecter la propre loi qui la régit, mais, encore, non satisfaits, probablement, ou non satisfaits des garanties qu'offre la Commission des droits de la personne, ces membres de l'Opposition officielle... J'espère, M. le Président, que l'Union Nationale et que les autres partis politiques ne cautionneront pas cette motion d'amendement de l'Opposition officielle.

Je suis heureux que, par un concours de circonstances, le député de Mégantic-Compton m'ait donné l'occasion de parler. J'espère que les arguments que j'ai employés suffiront à le convaincre que la Commission des droits de la personne est en mesure, avec la loi qui la régit actuellement, d'assurer la sauvegarde des droits et libertés de la personne, des citoyens québécois.

Il est important de redire aujourd'hui, publiquement, je pense, que tout citoyen québécois francophone, italien, irlandais peut, se servant de l'article 67, paragraphe 1, porter une plainte comme citoyen à part entière du Québec, alléguant que ses droits et libertés ont pu être violés ou brimés. À ce moment-là, il y a un processus d'enquête qui se déclenche et la commission, effectivement, si les droits ont été brimés, fera rapport, tout d'abord à l'individu et fera des recommandations au gouvernement.

Il est faux de prétendre que les actions de la Commision des droits de la personne sont limitées aux lois antérieures à la charte. D'accord, elle examine les projets de loi antérieurs à la charte, mais la Commission des droits de la personne, en vertu du paragraphe 1 de l'article 67, a le devoir de recevoir toute plainte et toute suggestion qui lui sont faites dans ce sens. Non seulement cette motion est-elle une insulte envers la commission, mais elle nous démontre encore une fois, par cet

amendement, que l'Opposition officielle, contrairement d'ailleurs à la commission, voudrait enlever toute initiative gouvernementale au gouvernement.

Un gouvernement est élu pour gouverner. Nous avons eu d'autres amendements qui visaient à enlever ce pouvoir de décision au gouvernement, et nous assistons encore actuellement, à une motion d'amendement qui laisse présumer non seulement que la commission n'est pas capable de remplir son rôle, mais que l'Assemblée nationale, pas le gouvernement, se compose d'un paquet de personnes qui ne sont pas capables de respecter les droits et libertés des citoyens.

M. Lalonde: C'est vrai.

M. Vaillancourt (Jonquière): II ne faut pas oublier, M. le Président, que c'est l'Assemblée nationale qui va adopter la question.

M. Godin: M. le Président, je voudrais qu'ils apportent des accusations précises ou qu'ils arrêtent de nous tirer de la merde comme ils le font depuis un an et demi.

M. Lalonde: Vous perdez les pédales.

M. Godin: M. le député de Laval, est-ce qu'on va endurer cela longtemps?

M. Lavoie: Un peu de calme.

M. Godin: Un peu de calme... on se fait traiter de racistes depuis un an et demi, on n'a jamais porté une seule plainte.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lavoie: C'est vous qui le dites.

M. Godin: S'il y a du sérieux, M. le député de Laval, dans ce qu'il dit, qu'il porte plainte et on sera condamnés?

M. Lalonde: Qu'est-ce que vous avez contre la Commission des droits de la personne, qu'est-ce que vous avez contre la charte?

M. Lavoie: Qui vous a traité de racistes?

M. Godin: S'il dit que c'est vrai qu'on viole les droits de la personne, qu'il porte plainte. Portez plainte.

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Lavoie: C'est vrai, la loi 101 en a été un cas.

M. Charbonneau: La crise d'octobre...

M. Godin: Portez plainte, si c'est vrai; mettez le mécanisme en marche.

M. Lavoie: La guerre des...

M. Charbonneau: La crise d'octobre, ce n'est pas en 1910; c'était en 1970. Il y a quelqu'un à cette assemblée, ici, à cette table, qui était là et qui a été emprisonné...

M. Godin: Laisse faire, je me défendrai moi-même. On n'endurera pas cela, M. le Président.

M. Lalonde: On l'a entendu à 4 h, hier matin, celle-là.

Le Président (M. Clair): À l'ordre! Messieurs, j'ai le pouvoir de suspendre les travaux de cette commission au cas de désordre.

M. Lalonde: Question de directive, M. le Président. Est-ce que vous avez aussi le pouvoir de leur faire prendre un peu de sommeil?

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Godin: Ce n'est pas une question de sommeil, M. le Président, c'est une question que, personnellement, je n'endurerai pas que qui que ce soit ici, dise qu'on viole les droits des personnes, ici.

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Godin: Ou alors, qu'il le prouve, qu'il mette son siège au jeu et qu'il fasse des affirmations sérieuses devant la commission qui existe.

M. Lalonde: Pas au jeu, en jeu.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît, messieurs!

M. Godin: Faites des farces tant que vous voudrez. Vous m'écoeurez profondément, vous êtes dégueulasses.

M. Lalonde: Vous êtes ridicule.

Le Président (M. Clair): À l'ordre! messieurs...

M. Lalonde: Vous prenez des précautions que je veux mettre dans la loi comme des accusations personnelles. C'est quasiment du masochisme de votre part.

M. Godin: Votre comportement depuis un an et demi, par exemple...

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde: Cela vous fait mal. Vous voulez gouverner par décret! Ah Seigneur!

M. Lavoie: Qu'est-ce que cela donne, l'Opposition? C'est de trop, l'Opposition?

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît, M. le député de Laval! Messieurs, je pense que si on répète des incidents de ce genre de façon répétée, même si c'est utilisé deux fois, à peu de délai, on risque d'avoir de la difficulté à donner à nos travaux toute la dignité qu'ils méritent; on risque d'avoir de la difficulté à prendre en considération les arguments des uns et des autres, on risque de violer le règlement et, finalement, c'est l'instrument qu'on a pour pouvoir mener les travaux les plus productifs possible. (22 heures)

Je voudrais vous fnviter à plus de respect à l'égard du droit de parole des uns et des autres et également, profiter de l'occasion pour rappeler à chacun des députés l'article qui indique qu'aussi longtemps qu'un député a la parole, aucun député ne doit l'interrompre, si ce n'est pour lui demander la permission de poser une question ou de donner des explications.

Ce que je dis s'adresse à tous les membres de cette commission. J'aimerais que tout le monde y porte attention. Je pense que même physiquement, c'est très désagréable pour un député qui a la parole d'entendre ses collègues qui, même s'ils n'ont pas le droit de parole, disent toute sorte de choses ou lancent des boutades ou des accusations qui ne sont pas reproduites au journal des Débats de toute façon, mais qui viennent troubler l'ordre de nos travaux.

M. le député de Jonquière, vous avez la parole et vous avez encore dix minutes.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, pour en revenir aux propos du député de Mercier, je dois vous dire que je suis fier, comme membre de l'Assemblée nationale et comme membre, surtout, du gouvernement, que j'ai été fier, en date du mois de novembre 1977 de lire le premier rapport que la Commission des droits de la personne envoyait à la commission parlementaire, suite à une demande faite par la commission, lors de l'étude du livre blanc, que j'étais fier le 11 novembre 1977.

Je dois dire que ma fierté était encore plus grande, hier en date du 6 juin 1978, lorsque j'ai pris connaissance, je suis fier de le dire, face à de pareilles motions et à de pareils arguments, lorsque j'ai pris connaissance, cette fois-ci, du deuxième rapport de la commission fait non pas sur un projet de loi, non pas sur un livre blanc, cette fois, mais fait sur un projet de loi adopté, en principe, à l'Assemblée nationale en deuxième lecture.

Je dois vous dire que c'est une fierté qui est bien naturelle, mais elle est encore plus grande lorsqu'on se fait servir, pendant un an et demi, par l'Opposition officielle, des accusations constantes d'atteintes aux libertés et droits de la personne. Je serais heureux que le député de Mont-Royal soit ici pour entendre la fierté que j'ai à dire et à lire les rapports de la Commission des droits de la personne.

Je suis également fier de lire et de dire publiquement que l'éditorial du chef Ryan, Claude Ryan, du 29 décembre 1977, confirme également, en tous points, les deux premiers rapports de la Commission des droits de la personne. Non seulement cette motion d'amendement est-elle une insulte pour le gouvernement et les membres de l'Assemblée nationale, mais elle vient, en plus, contredire les propos mêmes et les rapports faits par la Commission des droits de la personne en date du mois de novembre et en date du mois de juin 1978; elle contredit même un éditorial d'un ex-journaliste qui, à ce moment-là, ne se doutait probablement pas qu'il serait, à ce moment-ci, chef du Parti libéral.

Je me demande encore pourquoi le député de Marguerite-Bourgeoys ose présenter un tel amendement et je me demande s'il n'a pas lu, ou bien les deux rapports de la Commission des droits de la personne, ou bien du moins, l'éditorial de l'ex-éditorialiste du journal Le Devoir.

M. Lalonde: Vous pouvez répondre.

M. Vaillancourt (Jonquière): J'ai entendu M. le Président, au début de cette commission parlementaire, et le député de Mégantic-Compton sait que j'ai beaucoup d'admiration pour la façon, non seulement à cette commission parlementaire, mais à d'autres, à l'Assemblée nationale, et à d'autres commissions parlementaires, dont il travaille, lui et son parti. J'ose espérer, non pas pour des questions de partisanerie politique, mais tout simplement pour des raisons de ne pas cautionner le "filibuster " et les tactiques subtilement désapprobatrices de l'Opposition officielle envers la Commission des droits de la personne et envers tous les membres de l'Assemblée nationale, que l'Union Nationale ne viendra pas cautionner cet amendement qui est présenté par le député de Beauce-Sud. Je dois dire que...

M. Roy:.Ce n'est pas le député de Beauce-Sud qui a présenté l'amendement.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... par le député de Marguerite-Bourgeoys. J'ai dit le député de Beauce-Sud parce que j'allais dire que les remarques que je viens d'adresser au député de Mégantic-Compton, j'allais également les faire miennes à l'endroit du député de Beauce-Sud. J'ose espérer que le député de Beauce-Sud ne se fera pas la caution volontaire ou non de cet amendement libéral qui, en soi, est une insulte non seulement aux membres de l'Assemblée nationale, mais à la commission que cet ex-gouvernement qui forme aujourd'hui l'Opposition officielle a lui-même créée.

Je suis sûr que le député de Mégantic-Compton et le député de Beauce-Sud ont lu les deux rapports de la Commission des droits de la personne du mois de novembre 1977 et du mois de mars 1978. Je suis sûr qu'ils les ont lus d'une façon attentive, non partisane, parce que je ne pense pas qu'on doive faire de la partisanerie politique sur les droits et libertés de la personne. Je n'ai pas l'habitude, non plus, en commission parlementaire, d'intervenir régulièrement, et je vous prierais, je demanderais aux membres de

cette commission parlementaire de bien vouloir respecter le député de Jonquière qui parle comme député membre de cette commission parlementaire, élu au même titre que les autres, et qui n'agit pas, à ce moment-ci, comme président d'une commission parlementaire.

Je sais que des députés font la part des choses et ne me le reprocheront pas; mais j'aimerais que tous les membres de cette Assemblée nationale ne reprochent pas à quelque député que ce soit, qui est président à l'occasion d'une commission parlementaire, d'intervenir lorsqu'il a des convictions dans une autre commission parlementaire, sinon ce serait renier le mandat que les électeurs de Jonquière m'ont donné le 15 novembre 1976. Ils ne m'ont pas élu comme président de commissions parlementaires, mais comme député de Jonquière pour dire ce que j'avais à dire à cette commission parlementaire. J'ose espérer que tous mes collègues respecteront cet état de fait qui existe et qui doit continuer à exister. M. le Président, ce sont mes remarques.

M. Lalonde: Nous allons vous donner le respect que vous méritez.

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous êtes aussi mesquin que vous êtes petit.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Bien brièvement, également, j'aimerais vous faire savoir que je lis attentivement l'amendement qui est apporté. Je ne voudrais pas, non plus, qu'on pense que ces députés, autour de la table, sont remplacés par la Commission des droits de la personne. Les suggestions, c'est-à-dire le texte qu'on nous a remis aujourd'hui et qui vient de la Commission des droits de la personne est un éclairage, pour moi, qui est important, qui n'est peut-être pas absolument nécessaire, mais qu'on peut avoir et qui est, à mon sens, assez judicieux.

Je ne prétends pas que c'est une insulte à l'égard des députés que d'avoir cet éclairage qui vient de la Commission des droits de la personne. Cela pourrait l'être si, avec ce document, cela faisait un courant tel que cela devait nous influencer au point de faire renverser les décisions du gouvernement ou faire renverser les décisions pour lesquelles la Commission aimerait cautionner. Je ne voudrais pas, encore une fois, que ce conseil devienne l'Assemblée nationale, puisque ce ne sont pas des élus, ce sont des personnes nommées.

J'ai cependant des réserves, puisque l'idée d'un conseil du référendum qui a été suggéré par l'Union Nationale a été acceptée, en principe, par le gouvernement, mais actuellement, j'ai des amendements qui vont être apportés à cet article de la loi. Ne sachant pas si ces amendements seront acceptés, je voudrais quand même qu'on ait entre les deux une espèce de moyen tampon qui nous permette d'avoir, non pas des directives — qu'on le sache bien — mais qu'un éclairage nous soit fourni. Bien honnêtement, ce qui est dit d'un côté et de l'autre de la table, il y a des arguments qui sont valables, je pense, et je ne veux pas qu'on me prenne pour la caution de cette table — je pense bien que cela ne passe pas dans l'idée de personne — mais il faut comprendre qu'il y a des débats qui pourraient conduire à des référendums. Si on se donne une loi des référendums, c'est de toute évidence qu'on a l'intention de s'en servir et s'il arrivait qu'on se donne un référendum sur la peine de mort, j'aimerais, à ce moment-là, que des personnes qui s'appellent le Conseil du référendum puissent donner leur avis, des personnes en qui on pourra avoir confiance, si tel est le cas. Si on avait passé ce chapitre avant, bien honnêtement, j'aurais pu me passer de cet amendement apporté. Comme cela ne se présentera que plus tard, je verrai, avec les arguments qui nous seront donnés, quelle sera ma position; mais bien honnêtement, je considère que ce qui a été amené par le député de Jonquière est valable.

D'ailleurs, je partage depuis tout le début — je l'ai signalé avant que cet amendement soit déposé sur la table — que le document qui nous a été remis ce matin n'est pas la Bible et il y a trop longtemps que je combats, il y a trop longtemps que je dis qu'un député est un législateur, un administrateur et qu'il représente une portion de province, je pense qu'on ne doit pas laisser aller nos droits à des personnes nommées par le gouvernement. À ce titre, si on devait, encore une fois — je ne veux pas me répéter — donner une importance telle que la Commission des droits de la personne prévale sur les droits des personnes élues, je m'objecterai à ce qu'on y donne tant de crédibilité.

Bien sûr que ce sont des gens qui sont au-dessus des législateurs et qui sont là pour protéger les gens qui font de la politique parfois, et qui pourraient politiser les débats, peu importe le gouvernement qui est en place ou l'Opposition qui est en place, mais encore là, je pense qu'on a toujours un moyen, la population a un moyen de se venger d'un gouvernement qui outrepasserait des droits; c'est de s'en défaire quand le temps vient.

À partir de là, j'aimerais mieux attendre que les débats se continuent et honnêtement, si j'avais à me prononcer sur cela, je voudrais amener mes amendements au Conseil du référendum, et j'hésiterai à voter en faveur de l'amendement.

M. Charbonneau: M. le Président, est-ce que le député de Mégantic-Compton me permettrait une question?

M. Grenier: Oui.

M. Charbonneau: C'est simplement pour lui demander s'il est d'accord avec le fait que non seulement la population peut répudier un gouvernement, mais qu'en fonction — comme le député de Jonquière le signalait — de la loi et de la charte, rien n'empêche des gens, dans la période

référendaire, de demander un avis à la commission, si jamais ces gens jugeaient que la question posée brime leurs droits ou leurs libertés. Est-ce que vous êtes d'accord avec le fait que c'est un élément additionnel?

M. Grenier: D'accord, mais il faudrait quand même, à ce moment-là, qu'on sache que ce droit peut être demandé; il peut être demandé via un parti d'opposition, également, qui comprend quand même des personnes.

M. Charbonneau: Oui, je pense que...

M. Grenier: II faudrait être assuré de l'avoir en main si le conseil du référendum, quand on en sera rendu à la formation ou aux responsabilités du conseil du référendum, ne répond pas à nos besoins, il faudrait quand même s'assurer que ces demandes peuvent être faites. Encore là, ce n'est pas une Bible.

M. Charbonneau: D'accord, merci.

M. Lalonde: M. le Président, une question de règlement. Du discours du député de Jonquière qui a été repris par la question du député de Verchères, il m'apparaît que mes propos n'ont pas été cités correctement. Je pense qu'il y a un règlement qui me permet de rectifier des faits.

M. Bédard: C'est sur votre temps... Le Président (M. Clair): M. le député... M. Lalonde: En vertu de l'article 96.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne les ai pas cités, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

Le Président (M. Clair): Est-ce que vous soulevez une question de règlement, ou si vous...

M. Lalonde: De règlement.

Le Président (M. Clair): En vertu de l'article 96. En fait, vous voulez exercer votre droit prévu à l'article 96; vous ne soulevez pas une question de règlement.

M. Lalonde: C'est le règlement 96 que je soulève.

Le Président (M. Clair): Vous invoquez l'article 96 pour invoquer un droit de parole.

M. Lalonde: Oui.

M. Charbonneau: M. le Président, une question de règlement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière, sur une question de règlement.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, l'article 96 dit que le député qui veut se servir de cet article et qui entend rectifier les faits doit le faire à la fin de l'intervention du député qui les provoque. Or, le député de Mégantic-Compton est intervenu après moi, de sorte que l'article 96 ne peut s'appliquer dans ce cas.

M. Lalonde: C'est l'intervention du député de Verchères, à ce moment-là, M. le Président.

M. Charbonneau: Je m'excuse, c'est une question que je posais au député de Mégantic-Compton.

M. Lalonde: Cela ne fait rien, c'est une intervention.

M. Charbonneau: Écoutez...

M. Lalonde: Que ce soit une question ou une intervention, est-ce qu'on va s'attacher à ce formalisme à cette commission?

M. Charbonneau: C'est vous qui nous dites cela?

M. Lalonde: Dans mon discours, j'ai bien cité ma motion au complet et ma motion au complet, dans le deuxième paragraphe, dit bien qu'il s'agit d'un avis de la commission, qu'aucun référendum...

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je demande que... directive, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Sur une demande de directive, M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, n'y aurait-il pas lieu, lorsqu'un député invoque une question de règlement comme je l'ai fait, suite à l'article 96, que vous donniez une décision à savoir si le député de Marguerite-Bourgeoys peut, à la suite des propos que j'ai tenus, malgré que le député de Mégantic-Compton eut fait une intervention entre les deux, puisse venir rectifier des propos que j'ai tenus lors de mon intervention.

J'aimerais avoir une directive et savoir si un député peut s'attendre à recevoir une décision sur une telle question de règlement. (22 h 15)

Le Président (M. Clair): Sur la question de règlement, je pense que, même si cela a été difficile de déterminer pour le président, le député de Marguerite-Bourgeoys a néanmoins indiqué que la question de règlement qui est soulevée en vertu de l'article 96 était suite à des paroles prononcées par le dernier intervenant, soit le député de...

M. Charbonneau: M. le Président, je n'ai pas du tout cité le député de Marguerite-Bourgeoys.

Le Président (M. Clair): Dans la formulation...

M. Lavoie: Vous allez l'entendre.

M. Charbonneau: J'ai posé une question au député de Mégantic-Compton.

Le Président (M. Clair): À l'ordre! M. le député de Verchères, vous reconnaîtrez sûrement, quand même, que vous avez pris la parole et que, dans votre question, il y avait un contenu. C'est sur ce contenu que le député de Marguerite-Bourgeoys entend exercer son droit prévu à l'article 96. Cependant, j'aimerais indiquer au député de Marguerite-Bourgeoys que les explications qu'il entend donner doivent être brèves, ne doivent apporter aucun élément nouveau dans la discussion et ne peuvent engendrer un débat. De plus, j'aimerais rappeler au député de Marguerite-Bourgeoys que tous les membres de la commission ayant déjà en main le contenu de son amendement intégral ne pourraient donc y revenir puisque, à ce moment-là, je le considère comme étant une partie de son droit de parole sur la motion d'amendement. À ce moment-là, il ne lui resterait que trois minutes et je devrai le compter dans ce sens.

Je veux bien vous permettre d'exercer votre droit prévu à l'article 96, dans le cadre de ce corridor.

M. Lalonde: M. le Président, la question du député de Verchères, et même les propos du député de Mégantic-Compton mais par le biais seulement, indirectement, référaient au dernier paragraphe, soit le paragraphe e) de l'article 67 de la Charte qui permet à la Commission des droits de la personne de faire des recommandations alors que mon amendement, qui faisait partie de mon discours, dit bien qu'aucun référendum ne peut être tenu sans que le gouvernement n'ait obtenu, au préalable, et qu'il n'ait déposé à l'Assemblée nationale un avis de la Commission des droits de la personne. C'est tout à fait différent, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Alors, les explications que vous vouliez donner le sont.

M. Charbonneau: Cela ne change rien.

Le Président (M. Clair): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, compte tenu du fait que l'amendement qui est déposé est quand même un peu de style technique et que les gens qui voudront suivre, par le biais du journal des Débats, devront pouvoir se retrouver dans ces amendements, au début de mes remarques, je fais d'abord lecture de l'amendement avant d'expliquer ce que j'en pense. Il est dit à l'amendement: "Ajouter les alinéas suivants à l'article 6: Aucun référendum prévu au premier alinéa ne peut être tenu sans que le gouvernement n'ait obtenu, au préalable, et qu'il n'ait déposé à l'Assemblée nationale un avis de la Commission des droits de la personne constituée en vertu de l'article 57 de la Charte des droits et libertés de la personne, 1975, chapitre VI.

L'avis prévu au précédent alinéa porte exclusivement sur l'opportunité de soumettre une question ou un projet de loi à une consultation populaire, en regard des conséquences qu'une telle consultation populaire peut avoir sur les droits et libertés de la personne ou d'une certaine catégorie de personnes".

M. le Président, je souligne que je n'ai vu là aucune espèce d'atteinte; je n'ai pas eu l'amendement avant le gouvernement, ni avant les autres, mais à sa face même cet amendement ne constitue, à mon sens, aucune espèce d'atteinte aux droits des parlementaires. Ce qui est dit, je pense qu'il faut le comprendre tel que rédigé et expliqué aussi, il est dit que non pas la commission aurait une obligation... en vertu de cet amendement; cet amendement n'oblige en rien la commission. Cet amendement fait une obligation au gouvernement de requérir, avant la tenue d'un référendum, au préalable, un avis de la commission et de le déposer. L'amendement, dans sa deuxième partie, précise que cet avis porterait exclusivement sur l'opportunité de soumettre une question ou un projet de loi à une consultation populaire, en regard — et là c'est important, M. le Président, c'est surtout là que nous devons considérer l'amendement à son mérite — des conséquences qu'une telle consultation populaire peut avoir ou pourrait avoir sur les droits et libertés de la personne ou d'une certaine catégorie de personnes.

Je vous avoue que, dès que l'amendement a été adopté, j'ai eu l'impression nette que le gouvernement l'accepterait et j'ai été fort surpris de voir cette fin de non-recevoir de la part des représentants ministériels. Ce n'est pas un amendement qui vient changer la loi; ce n'est pas un amendement qui fait que la loi-cadre devient une loi spéciale, donc, ce n'est pas un amendement qui vient à l'encontre des avertissements ou des informations que nous a donnés le ministre de la Justice un peu plus tôt, à savoir qu'il ne voulait accepter aucun amendement qui spécifierait...

M. Bédard: Qui fasse une loi spéciale d'une loi-cadre.

M. Samson: ... dans une loi-cadre, et qui en ferait, en quelque sorte, une loi spéciale, partiellement. Même partiellement, le ministre de la Justice a dit qu'il n'en voulait pas. À mon sens, le présent amendement ne vient pas changer la portée de la loi-cadre; il s'agit — et il faut bien se comprendre — cet amendement ne fait pas obligation à la commission de rédiger quelque chose pour le gouvernement et cet amendement ne demande surtout pas de directives. Si on lit cela, autant que possible en sortant un peu des opinions politiques, propres à chacun d'entre nous — il faut bien reconnaître que chacun a droit à ses opinions, il n'est pas question de faire des reproches à qui que ce soit, on est ici parce qu'on a eu des opinions politiques et on va y demeurer si on

continue à en avoir — au-dessus de toute partisa-nerie politique, il me semble, j'ai été heureux, aussi fier que le député de Jonquière l'a dit tantôt, de recevoir l'avis de la Commission des droits de la personne.

J'ai appris, puisque cela vient de gens qui sont dans le milieu, qui sont des experts en la matière et qui ont du temps à consacrer à cela plus que nous peut-être comme parlementaires, des choses qui peuvent apporter un certain éclairage et, surtout, favoriser un assouplissement de la loi qui servirait à la bonifier. Je remarque, par exemple, dans ces commentaires que nous ont faits les membres de la Commission des droits de la personne, que sur le droit de l'initiative, il est dit: "Selon ce qui avait été annoncé dans le livre blanc, le droit d'initiative de tout référendum appartient à l'action concertée de l'exécutif et du législatif, l'Assemblée nationale ayant un rôle central à jouer dans le processus référendaire. Le projet de loi no 92 vient préciser, aux articles 6, 7, 8 et 9, la répartition des pouvoirs à cet effet entre l'exécutif et le législatif. À notre avis — je souligne cela — le rôle de l'Assemblée nationale dans la décision de tenir une consultation populaire, tel que défini dans le projet de loi, est beaucoup plus limité que ne l'annonçait le livre blanc".

Voyez comme cela peut être intéressant de demander un avis; on a cela noir sur blanc, le fait qu'il y a eu dans le processus, depuis le livre blanc, en quelque sorte, un recul par rapport aux propositions initiales. C'est un avis qui nous est donné et, bien sûr...

M. Bédard: M. Ryan est de l'avis contraire.

M. Samson: Écoutez, je ne suis pas là pour défendre M. Ryan, je pense que le ministre de la Justice va bien comprendre cela. Je ne le cite pas abondamment régulièrement, donc on ne pourra pas me mettre en contradiction avec des citations de M. Ryan que je fais, pas plus qu'on ne me mettra en contradiction avec d'autres sortes de citations d'autres éditorialistes.

M. le Président, je pense et je le dis de façon à n'attaquer personne en particulier, je voudrais qu'on comprenne que, dans une situation qui pourrait — parce que la loi-cadre, le ministre l'a dit plusieurs fois, cela peut amener plusieurs référendums sous le présent gouvernement et cela pourra amener plusieurs référendums sous la juridiction d'autres gouvernements. Si on est d'accord avec le principe selon lequel cela peut amener beaucoup de référendums, d'un autre côté, cela nous chatouille un peu les oreilles de se faire dire, comme on se l'est fait dire quelquefois aujourd'hui: On est là pour gouverner et, quand même, on va bousculer un peu. Ce n'est pas tout à fait... Il manque de la graisse dans l'engrenage, il faudrait faire son lit. Si vous êtes là pour gouverner, à ce moment-là, arrêtons de travailler sur une loi de référendum...

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est dans le respect des lois.

M. Samson:... et gouvernons. Mais si on croit qu'il est valable d'avoir recours au référendum pour des matières pour lesquelles il est bon de consulter la population, bien, il faut concilier les deux formes. En conciliant les deux formes, je dis que l'amendement qui est présenté m'apparaît comme une mesure de prudence. Ce n'est pas une mesure coercitive à l'endroit du gouvernement, en ce sens que si on oblige le gouvernement à demander un avis, personne ne peut obliger la commission à donner cet avis, s'il advenait que la commission décide, pour une raison ou pour une autre, de dire: Sur ce sujet, on n'a pas d'avis à donner. Avec le présent amendement, on ne pourrait pas l'obliger à donner un avis.

D'un autre côté, une fois l'avis émis, advenant que cet amendement serait accepté, advenant qu'avant un référendum le gouvernement demande un avis et qu'il reçoive l'avis, il n'y a rien, dans le présent texte — dans ce que j'ai devant moi — qui oblige les parlementaires à suivre l'avis à la lettre, d'aucune façon. C'est un avis qui peut être utile. Dans l'ensemble des exemples qu'on pourrait donner sur l'utilité d'un tel avis... Cela ne veut pas dire que les membres de la commission ne sont pas capables, cela ne veut pas dire que les parlementaires ne sont pas capables de trouver des exemples, cela ne veut pas dire que les parlementaires ne seraient pas capables de prévenir certaines choses, mais on sait que la législation ne se fait pas toujours avec beaucoup de temps. Il arrive, dans des périodes comme celle que nous passons présentement et ce, jusqu'au 23 juin, qu'on soit dans une période bousculée. Cela n'a pas été inventé cette année. Il reste qu'on arrive toujours à la période d'été dans les mêmes conditions: on arrive toujours à la période des fêtes dans les mêmes conditions. Depuis que je suis au Parlement, M. le Président, depuis le 29 avril 1970, je vis ce genre de situation. Je souligne que ce n'est pas la meilleure façon de légiférer. On est trop bousculé, on est trop poussé, les députés n'ont pas toujours le temps de fouiller les dossiers en profondeur.

Donc, un avis qui nous arrive de quelqu'un qui a pris le temps et qui est un expert peut être valable. Je pense que rejeter, du revers de la main, une possibilité d'avis dans des conditions comme celle qui serait présentée par l'amendement qui nous est proposé, serait se priver de la possibilité d'un éclairage au moment opportun. À titre d'exemple, si un gouvernement ou un autre — parce qu'il faut parler au futur, la loi est là et j'imagine que si elle est bonne elle sera là pour longtemps — un bon jour, décide de faire un référendum sur la question de l'euthanasie, en utilisant comme argumentation que les personnes âgées coûtent pas mal cher aux services de santé, coûtent cher à la Régie de l'assurance-maladie, qu'il ne faudrait pas donner trop de soins après un certain âge parce que les personnes ne sont plus productives. C'est le genre de choses qui risqueraient de faire lutter les unes contre les autres des personnes, parce que les unes auraient des intérêts à protéger parce qu'elles sont les payeurs de

taxes et qu'elles sont surchargées, et les autres parce qu'elles auraient une autre sorte d'intérêt à protéger, et vous allez comprendre, ce serait leur vie. Je pense que c'est le premier des intérêts que chaque être humain veut protéger. On va reconnaître que les personnes âgées susceptibles d'être victimes de l'euthanasie, par exemple, seraient beaucoup moins nombreuses que les autres, donc deviendraient minoritaires et risqueraient, par un débat dévié — parce que les débats ne sont pas toujours clairs — de voir une mesure comme cela passée par un Parlement et endossée par un référendum. (22 h 30)

C'est peut-être prendre un exemple dramatique; bien sûr, je ne prête d'intention à personne, mais je considère que d'autres exemples pourraient aussi tenir, pourraient être aussi mis de l'avant, et un avis qui nous viendrait avant la déclaration ou l'émission d'un bref de référendum ne pourrait être que très utile aux parlementaires. C'est pourquoi je n'ai pas vu cela et je ne reproche pas à mes collègues de l'avoir vu autrement; peut-être qu'on voit cela avec chacun notre oeil et chacun nos optiques et nos objectifs.

Il me semble que ce n'est pas le genre d'amendement qui vient perturber la loi d'aucune façon. Compte tenu du fait qu'il me semble qu'on a tous intérêt, une fois nos petites colères passées, à retrouver — je dis "passées", je ne parle pas de colères futures, j'espère qu'il n'y en aura pas pour rien... Je pense qu'on a tous intérêt à ce que cette loi, qui deviendra l'instrument privilégié, en quelque sorte, des grands débats, à ce que cette loi fasse le consensus. On a parlé souvent de consensus, et il me semble qu'un minimum de collaboration s'impose dans les circonstances. On n'a pas été, du côté de l'Opposition, trop chanceux avec tous les amendements qu'on a présentés de bonne foi — chacun a présenté ses arguments: l'Opposition a présenté les siens, le gouvernement a présenté ses arguments — on n'a pas été chanceux, à un point tel qu'on est à l'article 6 depuis la dernière séance où le député de Maisonneuve était là.

Il me semble que, sans vouloir m'attaquer à personne de mes collègues, je considère que tous ont une capacité de s'exprimer qui est intéressante et qu'il me fait plaisir d'entendre mais, trois jours sur le même article, cela fait de l'entendement qui est difficile. Il me semble qu'on pourrait procéder pour arriver au moins à accepter quelque chose. Pour accepter quelque chose, il faut que chacun fasse sa part. Je vous le dis très honnêtement, si cet article risquait de perturber le projet de loi, je voterais contre. Comme il n'y a aucune conséquence mauvaise possible avec cet amendement, qu'il n'y a qu'une possibilité d'un avis qui pourrait nous être utile en temps et lieu, si ce n'est pas moi, ce sera d'autres qui prendront ma place un jour, mais on ne légifère pas que pour aujourd'hui, il me semble que ce sera utile à d'autres.

M. Bédard: On ne légifère pas seulement pour un référendum, c'est vrai.

M. Samson: Oui, je prends les arguments que le ministre a utilisés parce que je n'ai pas le choix. Je ne peux pas revenir en arrière, le ministre a dit que c'était un projet de loi qui demeurerait cadre. Bien sûr, je n'aime pas cela qu'il demeure cadre, mais puisqu'il a dit qu'il a fait son lit, qu'il va demeurer cadre, je me rallie maintenant à cette nouvelle dimension. Mais dans cette nouvelle dimension, on peut bonifier et cet amendement à l'article 6 me semble en tout cas très honnêtement, être quelque chose qui ne risque de faire de mal à personne, mais qui ne peut qu'aider les parlementaires qui en auront besoin en temps et lieu. C'est aussi simple que cela.

Le Président (M. Clair): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Merci, M. le Président. J'ai lu avec intérêt l'amendement proposé par mon collègue de Marguerite-Bourgeoys et j'ai écouté les arguments qui ont été apportés des deux côtés de la table. Il y a une chose qu'il ne faut pas oublier au départ, c'est ce qu'est la Commission des droits de la personne. C'est un organisme consultatif, point, c'est tout. En aucune façon le Parlement, le gouvernement ne doit être lié à cet organisme par des dispositions que l'on retrouverait dans nos textes de loi. Je pense que nous n'avons pas besoin d'un amendement de ce genre pour obtenir l'avis de la Commission des droits de la personne.

Une voix: Bravo!

M. Roy: Nous l'avons obtenu lors de l'étude du livre blanc; nous avons l'avis de la Commission des droits de la personne qui est daté du 5 juin 1978 — ce n'est pas très éloigné — et je n'ai jamais entendu dire que la Commission des droits de la personne refuserait de donner son opinion lorsque celle-ci lui serait demandée.

Nous avons eu, au cours de différentes commissions parlementaires, pour l'étude de différents projets de loi, souventefois des discussions pour demander l'avis de la commission et, à chaque fois, des motions ont été adoptées, nous nous sommes adressés à la commission et celle-ci nous a fait parvenir son avis. Je pense qu'il n'appartient pas à la commission de décider et d'émettre une opinion sur la possibilité de soumettre une question ou un projet de loi à une consultation populaire. Les citoyens du Québec se sont choisi des députés pour les représenter à l'Assemblée nationale; ils ont choisi majoritairement, c'est-à-dire un nombre de députés majoritaire pour former le gouvernement; ils ont le mandat de gouverner et ils doivent prendre leurs responsabilités. C'est le rôle de l'Opposition de surveiller le gouvernement; c'est le rôle de l'Opposition d'étudier, à la loupe si nécessaire, des projets de loi; c'est le rôle de l'Opposition de proposer des amendements, voire même des sous-amendements; c'est son rôle de travailler à bonifier un projet de loi.

M. le Président, je ne conteste pas ce rôle à l'Opposition officielle mais, quand même, en ce qui me concerne, je ne peux pas accepter une telle motion puisqu'elle va à l'encontre des droits

de l'Assemblée nationale, elle va à l'encontre des droits du gouvernement. Je pense que non seulement ce n'est pas nécessaire que ce soit dans la loi, ce n'est même pas recommandable. Je donne mon opinion en toute sincérité, M. le Président, et je tente de la dire en toute objectivité. Je ne sache pas, pour avoir un certain nombre d'années d'expérience sur le plan parlementaire et avoir connu nos collègues de l'Opposition officielle, que s'ils avaient eu à présenter un projet de loi, ils auraient accepté un amendement de ce genre, ou s'ils l'auraient inscrit dans le projet de loi. Je pense que si le gouvernement avait amené une telle disposition dans le projet de loi, ils seraient peut-être les premiers à en demander le retrait. Je ne veux pas faire de jugement mais je pense qu'on a le droit d'exprimer notre opinion. En ce qui me concerne, je ne pense pas être brimé dans mes droits, jamais, par le fait que telle disposition ne sera pas dans la loi et que ceci nous empêchera de consulter, dans l'avenir, la Commission des droits de la personne.

Je ne serai pas plus long, M. le Président. Il y a déjà eu passablement de temps d'écoulé sur la discussion de cet amendement. J'ai toujours eu à déplorer, je déplore souventefois et je fais souven-tefois des reproches à ce gouvernement de déléguer trop de pouvoirs à des personnes interposées. Je n'irai certainement pas, ce soir, à l'encontre des principes que j'ai toujours défendus et des recommandations que je fais à l'Assemblée nationale, à l'effet qu'on remette encore une partie de nos prérogatives une partie de nos responsabilités à des personnes interposées qui sont là pour être consultées. C'est un organisme consultatif. Ce n'est pas un organisme décisionnel et le gouvernement et l'Assemblée nationale ne doivent pas être liés d'aucune façon — et j'insiste là-dessus — par des recommandations ou des opinions exprimées par la Commission des droits de la personne. Elle n'a quand même pas l'infaillibilité, malgré tout le respect que j'ai pour elle.

Le Président (M. Clair): M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: Merci, M. le Président. En fait, je viens d'entendre le député de Beauce-Sud, qui est mon voisin de bureau à l'étage. Devant son expérience parlementaire et devant les arguments qu'il vient d'ajouter aux débats, je ne pense pas qu'il soit indiqué d'ajouter quoi que ce soit pour le moment. On verra par la suite.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mercier.

M. Godin: Je passe, pour l'instant.

Le Président (M. Clair): M. le député d'Iberville.

M. Beauséjour: M. le Président, le député de Beauce-Sud nous enlève bien des choses quand on passe un peu après les autres. Je voudrais quand même souligner qu'il y a un danger qu'on retrouve dans les deux paragraphes de l'amendement qui est proposé. Je retiens que le député de Rouyn-Noranda a indiqué que rien n'oblige la commission de donner un avis. Quand on lit le premier paragraphe: "Aucun référendum prévu au premier alinéa ne peut être tenu sans que le gouvernement n'ait obtenu au préalable et qu'il n'ait déposé à l'Assemblée nationale un avis." S'ils ne veulent pas en donner, que fait-on? Je vais plus loin que cela...

M. Samson: Ce sera marqué sur l'avis: Pas d'avis. C'est aussi clair que cela!

M. Beauséjour: ... pas de référendum. Je regarde l'article 76, dans la charte qui régit la commission, où on dit: "La commission doit refuser de faire ou de poursuivre une enquête, lorsqu'elle constate qu'elle n'a pas de compétence en vertu de la présente loi." C'est ici que je rejoins surtout l'argument du député de Beauce-Sud, dans le deuxième paragraphe, quand on parle de l'opportunité de soumettre une question. Pour moi, cela veut dire: Est-ce bon ou non de soumettre une question? À ce moment, soit que je prenne l'un ou l'autre des textes qu'on a reçus aujourd'hui, où M. Hurtubise nous met bien en garde sur le rôle de la commission, et affirme qu'elle n'a pas à se prononcer sur des opportunités de ce genre, cet amendement me paraît être une espèce de camisole de force, où un projet de loi pourrait devenir inefficace, c'est pourquoi, personnellement, je voterai contre l'amendement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Laval.

M. Lavoie: Je vais tenter de convaincre mes collègues de là-propos de cet amendement. Je suis convaincu que le député de Taillon, d'ailleurs, qui nous fait l'honneur de sa présence — le premier ministre — s'il participait à ces travaux, serait d'accord et approuverait notre amendement.

M. Lévesque (Taillon): Non.

M. Bédard: Vous avez la réponse.

M. Lalonde: Ce n'est pas enregistré.

M. Samson: II n'a pas eu d'avis, par exemple.

M. Lavoie: M. le Président, je ne vois absolument rien de malin ou de sorcier à cet amendement. Cela créerait uniquement une obligation pour le gouvernement de demander à un organisme spécialisé, qui a été créé par le gouvernement, par l'Assemblée nationale, qui est payé par les deniers de l'État, qui est au service de la communauté, de donner son avis sur la question qui serait posée à un référendum, comme cela existe, d'ailleurs, dans certains pouvoirs de réglementation du gouvernement, je crois, dans l'éducation, où, avant de passer de la réglementation, on doit consulter, entre autres, le Conseil supérieur de

l'éducation. Cela doit exister, dans ce rôle, à titre consultatif, même si je ne suis pas tout à fait d'accord avec le député de Beauce-Sud, que la commission n'est qu'un organisme consultatif. Je crois que c'est plutôt un organisme quasi judiciaire, parce qu'il a des pouvoirs d'enquête et même des pouvoirs d'aller devant les tribunaux. Mais on ne fera pas un débat de fond sur cela.

C'est quand même un organisme paragouvernemental payé à même les deniers publics. S'il a une utilité, c'est quand même d'être au service de la communauté. D'ailleurs, cela élimine uniquement une formalité. À peu près dans tous les cas, quel que soit le gouvernement qui sera au pouvoir, une fois que la loi du référendum sera entrée dans les statuts, je pense que ce sera demandé à chaque occasion, soit par l'Opposition actuelle, soit par l'Union Nationale, à une autre occasion, soit par le Parti québécois, si, dans un avenir plus ou moins rapproché, avec l'alternative que nous connaissons, il est dans l'Opposition. La loi du référendum étant devenue dans les statuts comme loi-cadre, je crois que ce sera demandé. (22 h 45)

Vous allez me dire: Ce n'est pas nécessaire de le mettre dans la loi si c'est demandé. Je ne suis pas d'accord avec certaines interventions et je vais tenter de convaincre le député de Beauce-Sud avec l'expérience que nous avons eue, entre autres depuis un an et demi, lorsque nous avons demandé des avis à la commission, à quatre occasions, et cela n'a pas toujours été facile. Je vais vous rafraîchir la mémoire avec les expériences que nous avons eues quand nous avons demandé des avis de la Commission des droits de la personne.

C'est quand même délicat, un référendum; il y a des droits, il existe des droits, comme le dit la motion des droits individuels, des droits pour un certain groupe de citoyens. Dans la plupart des cas, lorsque le gouvernement doit légiférer pour le bien commun, pour une majorité de citoyens, très souvent, en légiférant de bonne foi, pour plusieurs, pour la grande majorité des citoyens, il peut atteindre ou attaquer certains droits individuels; dans l'intérêt commun, je ne le nie pas.

Par exemple, une législaion sur la baie James qui serait dans l'intérêt de toute la communauté québécoise pourrait porter atteinte aux Inuit ou aux Amérindiens de cette région.

N'oubliez pas que si une telle loi référendaire entre dans les statuts du Québec, ce sera un instrument qui appartiendra à quelque gouvernement que ce soit. Il peut arriver un gouvernement qui peut être antisyndical ou quoi que ce soit, et qui pourrait soumettre à un référendum une question de droit de grève et qui pourrait attaquer des droits de certains individus, des droits fondamentaux qui appartiennent à des syndiqués ou à d'autres. N'oubliez pas que cela joue sur les deux côtés, une fois que cela fait partie des statuts publics au service du gouvernement en place. Je crois qu'il est toujours prudent, en légiférant pour le mieux-être et dans l'intérêt de la grande collectivité, il faut toujours faire attention aux droits de certains groupes de citoyens; qu'on parle du zonage agricole ou d'autre chose; on peut zoner dans l'intérêt du Québec, dans le cas du zonage agricole, mais on peut porter atteinte aux intérêts économiques de certains cultivateurs ou autres.

Il n'y a rien de sorcier; comme le disait le député de Rouyn-Noranda, s'il y a un amendement qui ne crée aucune difficulté, aucun inconvénient... Je reconnais que peut-être l'amendement que nous avions proposé avant de soumettre les deux tiers de la question à l'assemblée, pouvait, dans certains cas, bloquer pour un certain temps, avant qu'il n'y ait modification de la question ou quoi que ce soit, avant d'obtenir les deux tiers... Il peut y avoir des inconvénients graves, des difficultés ou des enfarges pour le gouvernement, mais pas dans ce cas-ci.

M. Bédard: Vous le reconnaissez.

M. Lavoie: Je crois que s'il y a un amendement qui doit être accepté dans une politique d'ouverture et de consensus du gouvernement, c'est un amendement de la sorte qui n'est ni malin, ni sorcier. D'ailleurs, l'expérience que nous avons eue, je me rappelle lors de la loi 2, c'est à la suite d'une multitude de questions que nous avions posées — des questions orales à l'assemblée — au leader parlementaire du gouvernement qui nous a toujours répondu et combien de fois il nous l'a répondu, autant sur la loi 2 que sur la loi 92 actuellement... On lui demandait: Avez-vous l'intention de demander l'opinion de la Commission des droits de la personne? Il répondait: Non. je n'ai pas l'intention; la commission est assez grande et si elle le juge à propos, elle le fera d'elle-même. Je vais vous sortir le journal des Débats, cela nous a été répété une dizaine de fois.

Si le ministre de la Justice veut le reconnaître, il va se rappeler l'expérience qu'il a vécue lui-même; c'est sur la loi 2 que la Commission des droits de la personne a remis... Nous l'avons eu par l'entremise du ministre de la Justice, cette fois-là, parce qu'il y a eu un court-circuit parce que le ministre et le député de Maisonneuve et leader parlementaire n'étaient pas trop d'accord pour le demander. Nous l'avons eu parce qu'il y avait eu un court-circuit entre le leader parlementaire du gouvernement et le ministre de la Justice, et nous l'avons obtenu par le biais du ministre de la Justice.

Sur la loi 101, il y avait un article — je ne le sais pas par coeur — qui disait que tel article... 172, nonobstant la Charte des droits et libertés de la personne... En somme, cet article sortait de la juridiction de la commission. C'est à la suite d'une opinion de la commission que le gouvernement a dû reculer. Je dis qu'ajouter cette formalité de consultation, dans ce cas-ci, avant de mettre le mécanisme en marche pour un gouvernement, c'est une simple formalité. Sur le projet de loi no 92, nous l'avons eu, sur le livre blanc. Il a fallu faire un débat au début; on a demandé la comparution de la commission. Après cela on a reculé, la commission a consenti à donner son avis.

Sur le projet de loi no 92, une fois que le livre blanc est devenu texte de loi — vous l'avez vécu, vous étiez présent à l'Assemblée nationale — je suis revenu à la charge au moins cinq ou six fois pour demander au leader parlementaire du gouvernement s'il avait l'intention de demander l'avis de la commission, suite au dépôt du projet de loi no 92. Qu'est-ce qu'il nous a répondu? Que ce n'était pas nécessaire, que vous aviez déjà eu l'avis de la commission sur le livre blanc et que vous aviez corrigé les défectuosités; que la commission était assez grande, qu'elle pouvait juger à propos de soumettre... Il a dit: Non, je n'ai pas l'intention de la demander; non, je ne demanderai pas l'avis. Je suis revenu à la charge au moins à cinq ou six reprises, vous en étiez tous témoins.

Comment a-t-on pu obtenir cet avis? Au début en posant une motion ferme devant cette commission, en faisant un débat. Le gouvernement, à la fin, s'est rallié pour obtenir l'avis. C'est quand même l'expérience que nous avons vécue dans quatre cas depuis un an et demi. Nous voulons ajouter plus de crédibilité à la question; cela deviendra, dans ce cas — et surtout, ce ne sont pas des tierces parties, c'est un organisme du gouvernement, c'est une création de l'Assemblée nationale. Elle a été créée par des statuts, elle est payée par l'État, ce sont des spécialistes. Pourquoi ne pas s'en servir et donner plus de crédibilité, plus de force, plus de poids, plus d'honnêteté à la question? De toute façon, cela va être demandé par quelque autre gouvernement. Ne vaut-il pas la peine de ne pas prendre de chance? Le gouvernement ne sera pas tenu de le respecter, d'accord, mais qu'il le demande. Au lieu de faire des débats en commission parlementaire avant d'amender l'article 1, il n'y a rien de malin à cela. Je vous dis, à mon humble avis, que s'il y a une motion qui devrait être acceptée, qui ne cause aucun embêtement, aucune difficulté au gouvernement, c'est bien un amendement de la sorte.

M. Lalonde: Est-ce que le député me permet une question? N'a-t-il pas demandé lui-même un avis à la commission? Il semble important...

M. Lavoie: Je vous remercie de votre question. J'ai été obligé d'écrire moi-même...

M. Bédard: C'est du cinéma.

M. Lavoie: ... à la commission, suite au refus du leader parlementaire du gouvernement. On est obligé, à titre de leader de l'Opposition... Tel que la loi le prévoit, un avis est fourni...

M. Lalonde: Quelle a été la réponse?

M. Lavoie: Le télégramme disait que la commission ne donnerait pas d'avis. On a été obligé de revenir à la charge. Il y a eu un télégramme disant qu'elle ne donnerait pas d'avis.

M. Lalonde: Eh oui!

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je vous demande une directive.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière.

M. Bédard: ... cinéma.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je voudrais savoir par quel moyen un député peut rectifier des propos que l'on attribue à un ministre absent, lorsque celui-ci ne peut rectifier ses propos et qu'un député membre de ce côté-ci de la Chambre veut rectifier les propos qu'on attribue à ce ministre? C'est la question que je vous pose, c'est la directive que je vous demande

M. Lalonde: On va vous permettre de le faire, de consentement.

M. Lavoie: Faites-le, on donne notre consentement. On ne se chicanera pas, on...

M. Lalonde: On ne se chicanera pas sur des formalités.

M. Lavoie: ... que vous, voyons! On vous donne notre consentement.

M. Lalonde: Rectifiez, rectifiez.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je tiens simplement à dire que le ministre n'a jamais refusé de la convoquer, sauf qu'il a toujours dit que la loi qui régit la Commission des droits de la personne donnait à la commission le pouvoir de donner cet avis quand elle le voulait.

M. Lalonde: II a refusé de le demander.

M. Vaillancourt (Jonquière): II n'a jamais refusé de l'entendre.

M. Lalonde: II a refusé de le demander.

M. Vaillancourt (Jonquière): II m'a toujours dit, M. le Président, que la loi donnait des prérogatives à la commission qui pouvait, en tout temps, faire parvenir son avis. Je pense qu'il faut être correct.

M. Lavoie: Est-ce que je peux ajouter quelques mots? Je pense que je n'ai pas épuisé mon temps.

Le Président (M. Clair): Non, vous n'avez pas épuisé votre temps.

M. Lavoie: Très brièvement. Vous rappelez-vous — je ne pense pas que vous allez réfuter cela — que, quelques jours à peine avant que cette commission n'étudie le projet de loi no 92, article par article, j'ai proposé à l'Assemblée nationale, par une motion non annoncée, étant donné qu'il

restait quelques jours à peine, de demander l'avis de la commission? Est-ce que le député de Jonquière va réfuter le fait que le leader parlementaire du gouvernement, le député de Maisonneuve, a refusé, au nom du côté ministériel, la présentation de l'avis pour que l'assemblée demande l'opinion de la Commission des droits de la personne sur la loi 92.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne réponds pas aux questions qui sont adressées au député de Maisonneuve, sauf que je rectifie les propos que vous lui prêtez quand il n'est pas là; c'est ce que j'ai fait.

M. Lavoie: Un peu de calme, c'est à vous que je pose la question.

M. Vaillancourt (Jonquière): Faites votre discours.

M. Lalonde: Ce n'est pas un exemple, il a refusé de le demander.

Le Président (M. Clair): M. le député de Gatineau sur une question de règlement.

M. Gratton: J'aimerais, à l'instar du député de Jonquière, rectifier...

M. Bédard: Je me demande franchement ce que cela apporte dans le débat.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît. À l'ordre!

M. Lavoie: Est-ce que cette motion ne tient pas debout?

M. Bédard: J'aurais à parler sur la motion, mais peut-être que le député de Laval pourrait continuer son intervention.

M. Lavoie: J'ai terminé pour le moment, M. le Président.

M. Gratton: M. le Président, puis-je intervenir sur la motion?

Le Président (M. Clair): Sur la motion? M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Très brièvement, M. le Président, je rappellerai tout simplement au député de Jonquière qui, semble-t-il, s'offusque ou prétend que le ministre responsable de la réforme électorale n'a jamais refusé, de quelque façon, que l'on demande à la Commission des droits de la personne l'avis que nous avons reçu ce matin, qu'effectivement, il y a eu présentation d'une motion non annoncée à l'Assemblée nationale qui n'a pu être débattue ou même discutée et sûrement pas adoptée parce que le ministre de la réforme électorale a refusé son consentement.

M. Vaillancourt (Jonquière): Elle a été adoptée, cette motion.

M. Gratton: Non, cela nous a forcé à présenter une motion...

M. Charbonneau: ...

M. Gratton: M. le Président, il y a quelque chose qui ne marche pas du côté ministériel.

M. Charbonneau: C'est de votre côté que cela ne marche pas.

M. Gratton: À l'Assemblée nationale, pas en commission parlementaire... Le député de Jonquière peut-il me dire, au micro pour que ce soit inscrit au journal des Débats, que j'ai raison en disant que le ministre responsable de la réforme électorale...

M. Vaillancourt (Jonquière): La pertinence du débat, M. le Président.

M. Gratton: La pertinence du débat, c'est qu'on est en train de démontrer que si on n'inscrit pas dans la loi, dans le texte de loi, l'obligation d'obtenir un avis de la Commission des droits de la personne avant d'adopter un texte d'une question, c'est qu'on ne l'aura jamais, parce que le dernier avis, celui dont on se sert depuis ce matin, qu'on a reçu ce matin, on l'a obtenu après des semaines d'effort.

M. Charbonneau: C'est parce qu'il n'y aurait pas eu de citoyens qui se seraient sentis lésés et qu'ils n'auraient pas jugé bon d'utiliser la loi pour demander un avis.

Le Président (M. Clair): M. le député de Verchères...

M. Gratton: Est-ce que le député de Verchères veut dire que le député de Laval, parce qu'il est député de Laval, ne qualifie pas comme citoyen? Il en a fait la demande, M. le Président, on l'a tous fait et finalement, après motion en Chambre et le consentement refusé par le leader parlementaire du gouvernement, ministre responsable de la réforme électorale, ii ne s'agissait pas de perdre trois jours en débats futiles, il s'agissait simplement pour lui de dire: Consentement, motion adoptée, une lettre était envoyée à la Commission des droits de la personne, on avait l'avis. C'est tout ce dont il s'agissait, à ce moment-là.

M. Charbonneau: Ce n'est pas de cela dont il s'agit maintenant.

Le Président (M. Clair): M. le député de Verchères, j'aimerais simplement vous rappeler que tantôt, vous avez manifesté le désir d'intervenir sur cette motion d'amendement et quand je vous ai offert le droit de parole, vous avez décidé

— comme c'est votre privilège — de ne pas l'exercer. Si vous désirez encore intervenir, je vous indique que vous avez encore le droit de parole, mais dans les circonstances, j'aimerais que le député de Gatineau puisse intervenir comme les autres députés.

M. Charbonneau: M. le Président, demandez-lui qu'il s'en tienne à la pertinence du débat, il n'était même pas là depuis tantôt.

M. Lavoie: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Gatineau, vous avez la parole.

M. Lavoie: Je pense qu'on n'est pas intervenu... question de règlement, on essaie de garder le ton le plus convenable possible; je pense que le député de Gatineau n'est pas intervenu du tout et, personnellement, je ne suis pas intervenu non plus.

M. Godin: C'est vrai.

M. Lavoie: Laissez donc les gens... qu'on garde un peu notre calme.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît.

M. Godin: Espérons que ce sera vrai pour tout le monde.

Le Président (M. Clair): Messieurs, je suis en mesure de disposer immédiatement de la question de règlement du député de Laval pour dire que j'en avais déjà disposé par les propos que j'avais tenus préalablement. M. le député de Gatineau, vous avez la parole.

M. Gratton: M. le Président, on se rend bien compte qu'aussitôt qu'on veut tâcher de convaincre nos collègues membres de la commission du bien-fondé d'une motion d'amendement... ce n'est pas aussitôt, c'est qu'à chaque occasion qu'on a fait une motion d'amendement, elle a été refusée par le gouvernement pour toutes sortes de raisons; lorsqu'on fait des motions qui visent un référendum en particulier, soit celui concernant le statut constitutionnel du Québec, on nous dit: On se doit de le refuser du côté ministériel parce qu'il s'agit d'une loi-cadre, le projet de loi no 92, donc on ne veut pas accepter de motion d'amendement qui spécifierait un référendum quelconque. (23 heures)

Lorsque, comme c'est le cas de l'amendement dont on discute présentement, l'amendement est présenté et vise tous les référendums possibles, on trouve encore d'autres excuses pour le refuser. Lorsqu'un député de l'Opposition tente de faire valoir des arguments à l'apui de l'adoption de la motion, et qu'on ne trouve pas d'autres arguments du côté ministériel, on parle de la pertinence du débat.

M. le Président, quoi de plus pertinent, au moment où la notion d'amendement vise à faire en sorte que le gouvernement ne puisse décréter la tenue d'un référendum à moins d'avoir obtenu un avis de la Commission des droits de la personne, que de faire ressortir la difficulté que la commission elle-même et les membres de l'Assemblée nationale, quel que soit leur parti, ont eue à obtenir cet avis dont nous avons reçu copie ce matin. J'étais en train de relater les différentes étapes des efforts déployés par les députés de l'Opposition, mais pas par les députés ministériels; c'était évident qu'ils ne voulaient pas de l'avis de la Commission des droits de la personne. Pourtant, on voit, avec le dépôt de l'avis que nous avons reçu ce matin, que ce n'était pas une affaire de Bonhomme Sept Heures; cela n'a pas chambardé les travaux de la commission.

Du côté de l'Opposition, on va nous servir des arguments qui sont contenus dans l'avis que nous avons reçu lorsque ceux-ci sont à l'appui des motions que nous faisons, comme, par exemple, dans le cas de la motion que nous avons faite cet après-midi et dont la commission a disposé en la rejetant, quant à l'adoption de la formulation d'une question par les deux tiers des députés. La Commission des droits de la personne nous donnait raison, on l'a invoqué. Cela n'a pas changé le résultat du vote; en fait, cela n'a pas changé quoi que ce soit. Pourquoi a-t-on mis tant de temps, du côté ministériel, à finalement accepter que la commission adopte la motion que nous avons proposée au tout début de nos travaux, la deuxième journée de nos travaux, au moment où nous avions le mandat de faire l'étude article par article du projet de loi no 92? Pourquoi, en Chambre, a-t-on refusé le consentement pour qu'une telle motion soit adoptée au moment des motions non annoncées? Pourquoi, durant toute la première journée, a-t-on fait une discussion, de part et d'autre, à savoir s'il était opportun de demander à la Commission des droits de la personne de se prononcer, ou de réviser, ou de mettre à jour l'avis préliminaire, ou les réflexions préliminaires que nous avions reçues?

Je vous dirai tout simplement ce qui est ma conviction personnelle profonde, c'est que le ministre de la Réforme électorale, à ce moment-là, et ses collègues ministériels craignaient ce que pourrait dire la Commission des droits de la personne. Ils savaient...

Le Président (M. Clair): M. le...

M. Gratton: ... d'avance que la Commission des droits de la personne ne pourrait faire autrement que de reprendre les objections qu'elle avait énoncées dans ses réflexions préliminares et que le texte de loi n'était pas venu corriger en regard de ce qui était contenu dans le livre blanc. Que voulez-vous? La Commission des droits de la personne n'est pas comme le gouvernement actuel, elle est conséquente, elle. Ayant exprimé un avis dans ses réflexions préliminaires sur le livre blanc, ayant constaté, au moment du dépôt du projet de

loi no 92, que certains éléments de ses réflexions n'avaient pas été traduits dans les changements apportés dans le texte du projet de loi no 92, elle se devait de faire ce qu'elle a fait dans le document que nous avons reçu ce matin, c'est-à-dire confirmer que le gouvernement ne s'est pas rendu à ses observations, n'a pas donné suite à ses observations dans la préparation du texte de loi.

Ce n'est pas la fin du monde. Le ministre de la Justice, j'en conviens avec lui... Ce n'est pas la fin du monde que la Commission des droits de la personne ait prétendu, dans ses réflexions préliminaires aussi bien que dans le rapport qu'on a vu aujourd'hui, qu'elle préférerait voir la formulation de la question adoptée par les deux tiers. On en a fait motion, la commission l'a rejetée tantôt.

De la même façon, ce n'est pas la fin du monde non plus que le député de Marguerite-Bourgeoys nous propose maintenant que le gouvernement ne puisse tenir une consultation populaire, ne puisse adopter une question pour la tenue d'une consultation populaire avant qu'un avis de la Commission des droits de la personne n'ait été déposé à l'Assemblée nationale. Il n'y a rien d'insultant dans cela, M. le Président. Si le gouvernement, comme il est évident qu'il le fera, n'est pas intéressé à s'encarcaner, selon lui, dans cette procédure, il votera contre l'amendement.

Mais entre nous, M. le Président, quelle sorte d'amendement devrons-nous proposer, nous, de l'Opposition, pour que ce soit acceptable pour le gouvernement? Je commence réellement à être convaincu qu'il n'y en a pas. Le gouvernement a produit un livre blanc. Il a fait quelques corrections mineures au moment où il a traduit ce livre blanc dans un texte de loi, qui est le projet de loi no 92, et maintenant, il dit à l'Opposition: Quelles que soient vos prétentions, quelles que soient les prétentions qui sont partagées par la Commission des droits de la personne, qui sont partagées par la majorité des organismes qui sont venus comparaître à la commission au moment de l'étude du livre blanc, quelles que soient les opinions émises par les éditorialistes, les journalistes, sur certains points, pas sur tous les points, tout cela, on le met de côté. Nous, le gouvernement, on sait où on va. On sait ce qu'on veut, on a été élu, c'est nous qui menons, ne nous achalez pas avec vos motions d'amendement.

Si cela achale le gouvernement qu'on présente des motions, je ne sais réellement pas ce que nous faisons ici, nous, de l'Opposition. Nous y croyons à cela.

M. Bédard: Vous avez le droit de les présenter. Nous avons le droit de les refuser. C'est la démocratie.

M. Gratton: Oui, c'est cela.

M. Bédard: Alors, arrêtez de chialer. Continuez.

M. Gratton: Est-ce que je chiale? M. Bédard: Oui. Vous vous lamentez.

Le Président (M. Clair): À l'ordre! s'il vous plaît!

M. Gratton: Jusqu'au ministre de la Justice qui n'aime pas la façon dont je m'exprime.

M. Bédard: Non, mais arrêtez de vous lamenter.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs!

M. Gratton: Je trouve curieux que le ministre de la Justice, qui, à cause de son mandat, devrait me défendre, en tant que citoyen du Québec, soit en train de m'attaquer sur ma façon de m'exprimer.

Le Président (M. Clair): Mais vous m'oubliez. M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Heureusement que j'ai le président de la commission, que je vous ai, oui.

Le Président (M. Clair): Vous m'oubliez.

M. Gratton: M. le Président, j'en suis rendu à mon troisième président, aujourd'hui, et puis-je vous faire un aveu? Vous êtes celui que je préfère des trois.

Le Président (M. Clair): Que c'est gentil! M. Lalonde: Nommez-les.

M. Lavoie: Est-ce que vous avez eu le député de Jonquière?

Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs!

M. Gratton: M. le Président, je dirai tout simplement, en concluant, qu'il est évident que le gouvernement rejettera cet amendement.

M. Lalonde: Non, non!

M. Lavoie: Défaitiste!

M. Lalonde: Le ministre n'a pas encore parlé!

M. Gratton: À moins que le ministre ne demande à ses collègues ministériels de quitter, au moment du vote, l'impression que je retiens des interventions du député de Verchères, du député de Jonquière, aussi bien que du député d'Iberville, je retiens de ces interventions que le gouvernement s'apprête à défaire cette motion d'amendement. Je le regrette infiniment. Il me semble qu'il n'y a rien là qui prive le gouvernement de la possibilité d'agir. Il s'agissait simplement, il s'agit encore d'ailleurs, tant que la commission n'en disposera pas, de faire en sorte que la Commission des droits de la personne donne un avis au gouvernement, que cet avis soit déposé à l'Assemblée nationale avant qu'il soit possible pour le gouvernement de tenir un référendum. Il ne s'agit pas non plus, dans le cas de cet amendement, d'une dis-

position qui est spécifique à un référendum quelconque, à un référendum donné, cela s'applique à l'ensemble des référendums que pourrait vouloir tenir le gouvernement. Je le regrette infiniment. Il semble que ce soit une stratégie du gouvernement de n'accepter aucune motion d'amendement, aucun changement au texte du projet de loi 92.

Je crains que, si le gouvernement s'entête dans cette attitude, le seul résultat net sera que le consensus, ce grand consensus qu'a souhaité le député de Maisonneuve, que souhaitait la semaine dernière le ministre de la Justice, ne soit que des mots parce que, en réalité, le consensus on l'a au sein du parti ministériel et aux yeux de ces messieurs, c'est tout ce qui compte, les députés de l'Opposition, représentant 59% de la population, ne sont là que pour faire de l'obstruction. Ce n'est pas le cas, M. le Président, et je pense que les prochains jours le démontreront très clairement.

M. Beauséjour: Est-ce que le député me permettrait une question, M. le Président?

M. Gratton: Oui, M. le député.

M. Beausé|our: Qu'arriverait-il si la commission en arrivait à la conclusion que ce n'est pas de sa juridiction de porter un avis sur l'opportunité de soumettre une question?

M. Lavoie: Bien, elle le dira dans le rapport.

M. Gratton: La question m'est posée à moi, M. le député de Laval.

M. Lavoie: Excusez-moi.

M. Beauséjour: Est-ce que le député de Laval doute de la compétence du député de Gatineau?

M. Lavoie: Non, non, au contraire.

Le Président (M. Clair): M. le député de Gatineau.

M. Lavoie: Je suis même convaincu que le député de Gatineau va apporter une meilleure réponse que celle que je vous ai fournie.

M. Beauséjour: J'espère.

M. Gratton: Non, non, M. le Président, je reprendrai exactement ce que vient de dire le député de Laval. Effectivement, ce n'est pas sorcier...

M. Beauséjour: En toute révérence.

M. Gratton: ... si la Commission des droits de la personne décidait qu'il ne relève pas de sa compétence, en fait que ce soit même un caprice de sa part qu'elle ne veuille pas fournir d'avis, ce sera tout simplement un sol à décision et le gouvernement pourrait, à ce moment-là, procéder.

Si le député d'Iberville veut faire de la législation très exacte, j'espère qu'il ne m'invite pas à proposer un sous-amendement au texte de loi, parce qu'on pourrait le faire, pour satisfaire à son inquiétude. Je connais la tactique, on l'a vécue tellement souvent à d'autres commissions. S'il s'agit, pour le député d'Iberville, de me dire: Mon objection principale, fondamentale, c'est que la commission pourrait refuser et donc, on serait encarcané, je vais vous proposer une motion de sous-amendement pour répondre à cette inquiétude. Mais je sais d'avance qu'ayant répondu à cette inquiétude, vous m'en formulerez une autre qui vous permettra encore de voter contre.

Si je me trompe, M. le député d'Iberville — je vous pose la question — dites-le moi tout de suite et je vais vous faire une motion de sous-amendement.

M. Beauséjour: Non, non, je ne m'obstinerai pas avec vous.

M. Gratton: J'y ai bien pensé.

Le Président (M. Clair): M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, nous sommes, tel que l'a dit le député précédent...

M. Grenier: On va clôturer le débat, j'imagine, avant le vote? J'aimerais bien prendre une demi-minute.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Bien brièvement, je me réservais d'intervenir avant le vote, parce que je voulais avoir un éclairage supplémentaire, en écoutant les membres de cette commission. Bien honnêtement, je dois vous dire qu'on ne m'a pas convaincu du bien-fondé de la motion, mais je craindrais qu'un vote contre la motion veuille dire un peu plus tard que je ne veux pas avoir les avis de la Commission des droits de la personne, et je ne voterai certainement pas contre cette motion. Je m'abstiendrai pour l'autre raison aussi que des articles subséquents nous diront quel sort on réserve au Conseil des référendums. J'aurais aimé avoir d'autres arguments qui m'auraient confirmé que c'était essentiel d'avoir cet avis de la Commission des droits de la personne, mais je crains davantage, et c'est la raison pour laquelle je ne voterai pas pour l'amendement, qu'on se serve de ces documents, de ces avis qu'on donnera comme épouvantail et qu'on diminue là le rôle du législateur à la table de travail.

Le Président (M. Clair): M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, le plus brièvement possible, parce que la plupart des arguments, de part et d'autre, ont été évoqués. Je voudrais dire, à la suite de l'intervention du député de Rouyn-Noranda, qui ne voit aucune obligation dans l'amende-

ment qui a été proposé par le député de Marguerite-Bourgeoys, qu'on a peut-être le droit chacun à ses opinions, c'est clair, mais on a aussi l'obligation de lire correctement les amendements qui sont proposés. Il est clair que cet amendement, qui se lit comme suit: "Aucun référendum prévu au premier alinéa ne peut être tenu sans que le gouvernement n'ait obtenu, au préalable, et qu'il n'ait déposé à l'Assemblée nationale, un avis de la Commission des droits de la personne, constitué etc., constitue une obligation. À moins qu'on ne comprenne pas la proposition de la même façon, il me semble que c'est très clair qu'on crée une obligation. (23 h 15)

II faudrait quand même replacer les choses dans leur contexte, qu'on ait un respect pour la Commission des droits de la personne, c'est normal, et je pense que tous les membres de cette commission parlementaire en ont un. Mais il ne faut jamais oublier que la Commission des droits de la personne relève de l'Assemblée nationale et il ne faudrait pas assujettir ou encore amener des conditions telles qu'on en vienne au résultat que c'est l'Assemblée nationale qui est assujettie au contrôle de la Commission des droits de la personne, ce qu'aurait pour effet cet amendement.

On a tous à coeur de rédiger un projet de loi-cadre qui soit le plus démocratique possible dans le respect des droits fondamentaux, des libertés fondamentales et, à cet effet, nous avons demandé une opinion à la Commission des droits de la personne, qui nous en a donné une aujourd'hui. De cette opinion, il ressort clairement que le projet de loi-cadre du gouvernement sur la consultation populaire ne porte aucunement atteinte aux droits fondamentaux et aux libertés fondamentales. Il me semble que ceci constitue une opinion de toute première importance qui nous indique que nous évoluons, à l'heure actuelle, dans un cadre qui est vraiment acceptable, non seulement acceptable, mais presque recommandable, si l'on se fie à l'opinion de la Commission des droits de la personne, qui, après avoir, dans des commentaires préliminaires, souscrit aux objectifs du gouvernement de démocratisation de nos institutions politiques, après avoir souscrit également à l'idée, à l'objectif du gouvernement d'association directe des citoyens à la gouverne de l'État, dans son opinion qui a été livrée à notre attention aujourd'hui, va encore plus loin, elle souscrit entièrement à un autre des objectifs fondamentaux de ce projet de loi, qui est le contrôle des dépenses, pour assurer une égalité des chances et permettre à chacun des Québécois d'exercer un choix libre et un choix éclairé.

On sait jusqu'à quel point on a essayé de nous charrier sur la question du contrôle des dépenses, laissant entendre que c'était la fin des droits et libertés individuels, la fin du droit d'association, etc. C'est très heureux que nous ayons eu cette opinion de la commission qui, à mon sens, va diminuer les ténors qui s'agitaient dans le paysage en laissant croire que nous étions en train, par le contrôle des dépenses, de fouler au pied des droits fondamentaux et des libertés fondamentales.

Je ne suis pas d'accord avec cette proposition du député de Marguerite-Bourgeoys, pour deux raisons, dont l'une nous vient de l'Opposition même. Lorsqu'il a été question, à l'article 5 du Conseil du référendum et de demander des avis sur toute question — c'était la formulation première — au Conseil des référendums, à ce moment-là — j'ai ici les notes sténographiques — non seulement le gouvernement, mais également le leader de l'Opposition ont conclu qu'il était mieux de limiter ces avis à des questions de droit et à des questions techniques, parce que la responsabilité du référendum, la responsabilité de la question ou du projet de loi, la responsabilité de juger de l'opportunité de consulter la population, cela relevait du législateur.

Je peux citer là-dessus M. Lavoie, le leader de l'Opposition qui, à l'article 5, recommandait ceci au gouvernement: "Au lieu de dire sur toute question de limiter cela aux questions juridiques, aux questions légales, aux questions techniques, je pense qu'il y aurait un meilleur consensus. " Ce fut également l'opinion du gouvernement, parce qu'on en venait à la conclusion qu'il y a un bout à se décharger de nos responsabilités sur un Conseil du référendum.

Dans un deuxième temps, ce qu'essaie de faire la proposition du député de Marguerite-Bourgeoys, c'est de nous décharger de nos responsabilités de législateurs sur la Commission des droits de la personne qui relève de l'Assemblée nationale. À un moment donné, il faut, comme gouvernement et comme membres de l'Assemblée nationale, prendre nos responsabilités. Et l'opportunité de poser une question, l'opportunité de consulter la population, c'est une responsabilité qui appartient entièrement à tous les membres de l'Assemblée nationale. Je pense que c'est un principe auquel on ne peut pas déroger.

Dans un deuxième temps, la meilleure réponse à donner au député de Marguerite-Bourgeoys, c'est qu'il se sert toujours, et un peu trop, de la Commission des droits de la personne pour essayer de l'impliquer continuellement dans des sujets où elle ne désire même pas être impliquée...

M. Lalonde: Abolissez-la.

M. Bédard: Non, il n'est pas question de l'abolir, il est question de lui faire jouer le rôle quelle doit jouer et le rôle que la Commission des droits de la personne veut jouer. Dans la lettre que m'adressait la Commission des droits de la personne et qui accompagnait l'opinion que vous avez en main, il était très clairement indiqué, par la commission que l'intention de la Commission des droits de la personne — et je cite — "... ne vise d'aucune façon à se substituer au législateur, au gouvernement, ni à un parti membre de l'Opposition, en se prononçant sur l'opportunité ou la sagesse d'un projet de loi spécifique." Le président de la commission ajoutait: "II est parfois opportun d'ainsi rappeler à l'occasion la zone de

compétence de notre organisme afin d'éviter toute ambiguïté."

Il me semble que c'est la meilleure réponse que je puisse faire au député de Marguerite-Bourgeoys devant la motion qui nous est présentée, et ce n'est pas seulement au nom du gouvernement, au nom de chacun des membres de l'Assemblée nationale qui ont le droit de décider de l'opportunité de consulter la population, mais également au nom de la défense que je dois assumer de l'organisme qu'est la Commission des droits de la personne, de respecter cette opinion qu'elle soumet à notre attention dans la lettre qui accompagnait son opinion.

Je crois que, à force de mêler la Commission des droits de la personne à toutes les sauces, il faudrait prendre garde d'en faire, au bout de la ligne, un organisme politique. C'est la dernière des choses, je pense, comme membres de l'Assemblée nationale, comme membres respectueux de la Commission des droits de la personne, c'est la dernière des choses qu'on doive désirer. Je ne suis pas d'accord avec cette proposition et, encore une fois, ce n'est pas seulement au nom du gouvernement et des membres de l'Assemblée nationale, mais au nom même de la Commission des droits de la personne que j'émets ma conviction et ma désapprobation.

M. Lalonde: M. le Président, j'aurais une question à poser au ministre, à la fin de son intervention, comme le règlement me permet de le faire. Est-ce que le ministre me permet une question?

M. Bédard: Oui.

M. Lalonde: II m'a accusé, tantôt, de me servir trop souvent de la Commission des droits de la personne...

M. Bédard: À toutes les sauces, c'est ce que j'ai dit.

M. Lalonde: Non. Est-ce que le ministre pourrait me donner des exemples où le député de Marguerite-Bourgeoys a mêlé la Commission des droits de la personne à toutes les sauces? Deuxièmement, est-ce que le ministre pourrait nous dire le nombre de fois que le gouvernement a consulté, proprio motu, la commission sans que l'Opposition le lui demande?

M. Bédard: Vous n'avez pas l'air de respecter la loi qui régit la commission...

M. Lalonde: Je vous ai posé une question. Vous ne me répondez pas.

M. Bédard: Oui, je vous réponds.

M. Lalonde: Combien de fois l'ai-je mêlée?

M. Bédard: Vous n'avez pas l'air... Vous continuez à ne pas respecter la loi qui régit la Commission des droits de la personne, qui a le droit — c'est dans la loi — de faire connaître son opinion lorsqu'elle a la conviction...

M. Lalonde: L'ai-je mêlée à toutes les sauces...

M. Bédard: Laissez-moi terminer. Vous avez posé votre question, laissez-moi terminer... qui a le droit, de par sa loi, de faire connaître son opinion, si elle croit que des libertés fondamentales ou des droits fondamentaux sont violés. À l'heure actuelle, il y a eu une demande unanime des membres de la commission parlementaire, pour que la Commission des droits de la personne fasse connaître son opinion. C'est ce qu'elle a fait. Si la commission — elle a une liberté, si on la respecte — désire ne pas faire connaître son opinion, si elle croit opportun de ne pas la faire connaître, cela la regarde. Si elle croit opportun de venir témoigner en commission parlementaire, ou de ne pas venir témoigner en commission parlementaire, c'est encore sa responsabilité. C'est cela avoir du respect pour une Commission des droits de la personne.

M. Lalonde: M. le Président, est-ce que le ministre pourrait nous dire — il n'a pas répondu à ma question — dans quel cas et à quelle reprise j'ai mêlé à toutes les sauces la Commission des droits de la personne? Est-ce que c'est lorsque j'ai voté — je ne sais pas si c'est moi qui l'ai proposé — mais lorsque l'Opposition officielle a proposé la motion pour laquelle les députés ministériels ont voté pour demander à la commission son opinion que nous avons reçue avant-hier? Est-ce que c'est cela mêler à toutes les sauces?

M. Bédard: Vous en parlez continuellement.

M. Lalonde: Est-ce qu'il y a d'autres exemples? Est-ce que c'est lorsque j'ai demandé de retirer l'article 172 de la loi 101? J'ai mêlé cela à toutes les sauces?

M. Bédard: Écoutez, là, vous...

M. Lalonde: Donnez-moi des exemples, parce que c'est une accusation grave que vous faites.

M. Bédard: II n'y a pas d'accusation grave là-dedans. Ce que je vous dis...

M. Lalonde: C'est cela, j'ai autant de respect... M. Bédard: Ce que je vous dis et je le redis... M. Lalonde: Le ministre n'a pas le...

M. Bédard: ... c'est que, quand on a le respect...

M. Lalonde: ... monopole du respect de la commission.

M. Bédard: ... de la Commission des droits de la personne, on n'essaie pas de la mêler à toutes les sauces.

M. Lalonde: Quand est-ce que je l'ai mêlée à toutes les sauces?

M. Bédard: Elle nous a donné, à l'heure actuelle...

M. Lalonde: Si vous n'en avez pas, retirez vos paroles.

Le Président (M. Clair): S'il vous plaît!

M. Bédard: Quand on a parlé du contrôle des dépenses, à un moment donné, cela avait l'air que c'était encore une atteinte aux droits et libertés de la personne, tout le monde criait que c'était une atteinte aux droits et libertés de la personne. Lorsqu'on a parlé du référendum, à ce moment-là, même votre attitude, vous n'étiez pas d'accord avec une loi sur le référendum. Vous prétendiez...

M. Lalonde: Question de règlement. M. Lavoie: On n'a pas eu d'avis.

M. Bédard: ... que cela pouvait léser des droits.

M. Lavoie: Question de règlement.

M. Bédard: là, vous avez changé d'attitude...

M. Lavoie: Question de règlement.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bédard:... parce que vous vous apercevez que ce n'est pas rentable.

M. Lavoie: Question de règlement.

M. Lalonde: On a eu l'avis, on a présenté une motion et elle a été adoptée, vous avez voté pour.

M. Bédard: Vous vous apercevez que ce n'est pas rentable.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs!

M. Bédard: Vous avez voté contre le référendum.

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Bédard: Vous avez voté contre en deuxième lecture.

M. Lalonde: N'essayez donc pas de noyer le poisson.

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Lalonde: Répondez donc: Quand est-ce que j'ai mêlé la commission à toutes les sauces?

M. Lavoie: Question de règlement, M. le Président, question de règlement.

M. Charbonneau: Continuellement, vous parlez des droits de l'homme; vous êtes celui qui les bafoue.

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Lalonde: Cela vous fatigue qu'on parle des droits de l'homme?

M. Charbonneau: Non, mais on a vu comment vous vous comportez.

M. Lalonde: C'est mon devoir de parler des droits de l'homme et comptez sur moi, je vais continuer à parler des droits de l'homme.

M. Charbonneau: On a vu cela comment...

M. Lalonde: Je vais continuer à me référer à la commission, n'importe quand, quand je vais penser que c'est nécessaire...

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Lalonde:... pour défendre les droits individuels et les libertés fondamentales, je vais le faire.

M. Charbonneau: On a vu...

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys...

M. Lalonde: II y a quand même des limites de se faire charrier pendant des minutes par un ministre qui ne sait même pas de quoi il parle.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bédard: M. le Président, je vais donner un exemple.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bédard: Voici un exemple patent, M. le Président. Voici l'amendement que nous propose le député de Marguerite-Bourgeoys, avec une explication qui se lit comme suit: L'avis prévu au précédent alinéa porte exclusivement sur l'opportunité de soumettre une question ou un projet de loi à une consultation populaire, en regard des conséquences qu'une telle consultation populaire peut avoir sur les droits et libertés de la personne, ou d'une certaine catégorie de personnes".

Si nous n'avions pas la Commission des droits de la personne, qui vous répond très carrément que ce n'est pas de son ressort de se prononcer sur l'opportunité d'un projet de loi ou d'une question au référendum, vous nous accuseriez de ne pas respecter la Commission des droits de la per-

sonne, alors que vous êtes manifestement dans l'erreur.

M. Lalonde: M. le Président, une question de règlement.

M. Bédard: On vous donnera d'autres exemples, quand viendra le temps.

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement...

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: ... parce que mon discours a été mal interprété et il est très très mal rapporté par le ministre.

M. Bédard: C'est votre proposition qui est baroque.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mar-guerite-Bougeoys...

M. Lalonde: Le ministre, M. le Président, a le droit d'être contre ma motion.

M. Bédard: La commission dit...

M. Lalonde: Mais il n'a pas le droit de fausser les faits. Lorsqu'il dit que la commission, dans son opinion...

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys...

M. Lalonde: ... supporte entièrement le projet de loi, il ne dit pas la vérité. Je vais vous lire ceci, M. le Président, on dit: Les écueils par rapport aux droits et libertés de la personne...

M. Bédard: Question de règlement.

M. Lalonde: ... qui avaient été relevés à propos du livre blanc n'ont pas complètement disparu.

M. Bédard: Question de règlement.

M. Lalonde: Cela veut dire qu'il reste encore des écueils relativement aux droits et libertés de la personne.

M. Bédard: Question de règlement. Encore là, on voit comment le député de Marguerite-Bourgeoys discute et comment il écoute aussi. Il pense seulement à ce qu'il va dire, il écoute rarement ce que les autres ont à dire.

M. Lalonde: Quand vous parlez.

M. Bédard: Ce que j'ai dit tout à l'heure — vous auriez été mieux d'écouter...

M. Lalonde: Qu'est-ce que vous avez dit?

M. Bédard: Ce que j'ai dit tout à l'heure — et textuellement — c'est que, dans son opinion, la commission souscrivait entièrement, c'est textuel, à l'objectif du contrôle des dépenses.

M. Lavoie: M. le Président, est-ce que je peux intervenir? J'ai encore...

M. Lalonde: Je ne suis jamais intervenu dans le contrôle des dépenses.

M. Bédard: Non, non, mais c'est ce que j'ai dit.

Le Président (M. Clair): Messieurs, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde: Pourquoi m'accusez-vous, à ce moment-là, de mêler la commission à toutes les sauces?

M. Bédard: Vous parlez de mon intervention. Je vous dis exactement ce que j'ai dit.

M. Lalonde: Vous ne vous grandissez pas en faisant ce genre d'accusation.

M. Charbonneau: Cela fait un an et demi que vous en pariez continuellement.

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Lalonde: Et à raison, et on va continuer à en parler.

M. Charbonneau: Si on l'avait eu pendant la crise d'octobre.

M. Lalonde: Si on n'en parle pas, vous allez faire...

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Lalonde:... ce que vous voulez faire avec les droits et libertés de la personne.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Charbonneau: Si on l'avait eu pendant la crise d'octobre.

Le Président (M. Clair): À l'ordre! M. le député de Verchères, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, messieurs, à l'ordre, encore une fois! Messieurs, j'aimerais vous rappeler que la loi dont nous discutons actuellement, c'est la loi sur la consultation populaire. C'est une loi importante, je pense qu'elle mérite qu'on lui accorde... (23 h 30)

M. Samson:... M. le Président.

Le Président (M. Clair): Elle mérite qu'on lui accorde toute l'importance et toute la dignité possible. Je ne suis pas sûr qu'on respecte le règlement à ce moment-ci et je ne suis pas sûr

non plus qu'on prenne vraiment tout le soin nécessaire d'étudier dans la quiétude ce projet de loi.

M. Bédard: II y a un bout à se faire charrier.

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, au moment où vous aviez pris la parole, vous m'aviez indiqué que vous vouliez exercer, si j'ai bien compris, votre droit de parole en vertu de l'article 96.

M. Lalonde: Oui, c'est une question de règlement que j'ai soulevée. Il me reste trois minutes et je désire les prendre maintenant.

Le Président (M. Clair): Vous avez la parole.

M. Lalonde: M. le Président, brièvement, j'ai entendu plusieurs arguments à l'encontre ou en faveur de ma motion; j'en ai entendu du député de Rouyn-Noranda, du député de Beauce-Sud, objectivement. Certains ont convenu de ne pas voter, d'autres de voter pour et de voter contre. Je suis d'accord avec l'expression d'opinion.

Malheureusement, je regrette et je déplore l'intervention du député de Jonquière. Jamais je n'ai entendu un tel argument ad hominem de tous les débats auxquels j'ai participé, et j'ai participé à peu près à tous les grands débats depuis le début de ce Parlement. Venant d'un avocat, je mets cela sur le compte de la fatigue, parce que le député de Jonquière ne s'est pas grandi, je pense, en concluant que ma motion était mauvaise parce que c'était moi qui la présentais.

Je ne sais pas s'il s'aperçoit jusqu'à quel point cela participe d'un impérialisme intellectuel qui est totalement inacceptable dans nos débats.

M. Vaillancourt (Jonquière): Consentement, M. le Président...

M. Lalonde: Ceux qui sont passés par le même système d'enseignement et qui ont mon âge ont été habitués à être formés... Malheureusement, on leur a enseigné deux sortes d'arguments: l'argument d'autorité et l'argument ad hominem. L'argument d'autorité...

M. Fallu: Question de règlement, s'il vous plaît.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... consentement M. le Président.

M. Lalonde: II y a un consentement...

Le Président (M. Clair): M. le député de Terrebonne, sur une question de règlement.

M. Fallu: J'aimerais savoir si le député est en train d'écrire ses mémoires ou si...

M. Lavoie: C'est une contribution au débat.

M. Vaillancourt (Jonquière): II parle du député de Jonquière.

Le Président (M. Clair): II ne s'agit pas d'une question de règlement. M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous avez encore une minute et demie.

M. Lalonde: Je m'en prends à l'argument du député de Jonquière. L'argument d'autorité, M. le Président, c'était à peu près ceci: Mgr Lartigue l'a dit, donc ce doit être vrai; l'argument ad hominem: c'est un maudit Français ou un maudit Anglais, donc cela ne doit pas être bon. Ce genre d'argument ne rehausse pas le débat. Je regrette que le député de Jonquière y ait recouru.

On m'a accusé de faire une insulte à la commission. Je pense que c'est simplement un écran de fumée à l'endroit de la Commission des droits de la personne. C'est un écran de fumée qui vient de l'imagination du député de Jonquière. Je veux simplement que la commission soit impliquée dans le bien-fondé de la question lors d'un référendum. Certains ont vu, dans mon amendement, une accusation à l'endroit du gouvernement d'infraction aux droits et libertés de la personne. Naturellement, ce n'est pas moi qui ferai l'examen de conscience du gouvernement et les colères que j'ai vues tantôt, on pourra les juger à leur mérite.

Les exemples du député de Laval... c'est le principal argument, et d'ailleurs le député de Verchères l'a mentionné à plusieurs reprises, les citoyens ont le droit de recourir à la commission; les arguments du député de Laval... un simple citoyen qui, comme député de Laval, représente des dizaines de milliers de citoyens, qui. comme leader parlementaire de l'Opposition officielle, représente des centaines de milliers de citoyens et qui a essuyé un refus à la commission, je pense que c'est suffisant pour permettre à des législateurs de conclure qu'il vaut mieux mettre la consultation dans la loi.

M. Charbonneau: C'est vous qui avez fait cette loi.

M. Lalonde: Oui, mais cela n'a pas été suffisant. Alors, dans le cas d'un référendum, au nom des minorités dont nous sommes tous ici. je pense qu'on devrait accorder beaucoup plus de sérieux à cet amendement. Merci, M. le Président.

M. Vaillancourt (Jonquière): L'article 96, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): J'aimerais rectifier certains propos qui viennent d'être retenus par le député de Marguerite-Bourgeoys. Je n'ai jamais dit que l'amendement était mauvais parce qu'il venait de lui et je n'ai jamais voulu dire cela. S'il a compris cela, je pense qu'il a mal compris. Ce que j'ai voulu déplorer, M. le Président, dans ce que j'ai dit au début de mon intervention, et j'ai déjà retiré ces paroles, j'admets avoir employé les mauvais mots, ce que j'ai simplement voulu dire,

c'est que je déplorais, j'aimerais que le député de Marguerite-Bourgeoys m'écoute, que, lui, qui est un collègue, un confrère et qui a été Solliciteur général, soit celui qui, dans son parti, présente ce genre de motion impliquant une commission des droits de la personne. C'est tout simplement ce que j'ai voulu dire, et j'ai eu l'occasion d'assister à de nombreux amendements présentés par le député de Marguerite-Bourgeoys et qui étaient, la plupart du temps, dans 99.9% des cas, très valables.

En ce qui me concerne, je pense que l'incident est clos. Un amendement n'est jamais mauvais, parce qu'il est présenté par quelqu'un en particulier.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mercier.

M. Godin: Seulement quelques mots, M. le Président. J'ai entendu les débats sur la dernière partie. Il n'y a personne ici qui reproche à l'Opposition de vouloir consulter la commission, mais il y a, de façon permanente, une présomption que tout ce que le gouvernement fait vient à l'encontre des droits de la personne. C'est cela le problème. C'est ce qui explique mon éclat de tout à l'heure. Que l'Opposition et que le député de Marguerite-Bourgeoys présentent une proposition de ce type, c'est parfaitement acceptable, c'est leur droit le plus strict. Mais qu'il y ait une présomption permanente que tout ce que fait ce gouvernement vient à l'encontre des droits de la personne, et que, chaque fois, cette présomption est démentie, parce que la commission elle-même affirme et que, répétition après répétition, malgré des avis qui contreviennent au préjugé de l'Opposition à notre égard...

Une voix: C'est de la stratégie.

M. Godin: ... que, fois après fois, la commission dise: II n'y a rien qui vient à l'encontre de ces droits, on continue à revenir là-dessus, à tenir pour acquis, à interrompre les députés qui parlent, comme l'a fait tout à l'heure mon collègue de Marguerite-Bourgeoys, en alléguant, encore une fois, que nous violons les droits, chaque fois qu'il demande un avis, autrement dit, il présume que la réponse sera négative contre le gouvernement... Chaque fois, ce n'est pas ce qui se passe. Il y a des tribunaux qui existent. Cette commission existe, et moi-même, je me ferai un devoir de porter à l'attention de cette commission toute violation des droits de la personne.

Quant à la loi 101, entre parenthèses, elle fut devant les tribunaux, le juge Deschènes a rendu jugement là-dessus, c'est soi-disant d'après son jugement un viol de la constitution, mais, si tel est le cas, toutes les lois du Manitoba depuis 1870 sont anticonstitutionnelles, elles aussi. Cela ouvre une méchante "can of worms".

Nous n'avons pas d'objection que nos lois soient portées devant les tribunaux, qu'elles soient jugées par d'autres, aucune objection, mais, que chaque fois qu'il y a un doute, ils le fassent, ils ont une preuve, qu'ils la fassent connaître. Qu'ils poursuivent jusqu'à terme leurs accusations et nous vivrons avec elles et nous modifierons les lois effectivement, s'il est confirmé que cela contrevient à la charte adoptée par ces messieurs d'en face. C'est tout ce que j'avais à dire là-dessus, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Merci.

M. Lavoie: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Laval.

M. Lavoie: Je n'avais pas du tout l'intention d'intervenir, mais je crois que la vérité a ses droits. Suite aux propos tenus par le ministre de la Justice et le député de Mercier, bien calmement, je dois intervenir et je veux que, autant pour l'histoire, les archives ou pour lorsqu'on étudiera les débats qui entourent cette commission, le dossier soit complet.

Lorsque le député de Mercier nous dit qu'il semble y avoir une présomption lancée ou entretenue par l'Opposition contre le gouvernement sur les droits fondamentaux des citoyens, il y a deux choses que je voudrais apporter comme argument. Il y a l'expérience que, quand même, nous avons vécue depuis un an et demi, et, deuxièmement, il faut reconnaître qu'il y a — et c'est normal — dans toute société, un fossé philosophique entre le gouvernement actuel et l'Opposition. C'est reconnu, je pense, que cela a été diffusé dans tous les média, que chez le chef du gouvernement, par ses propos et ceux de plusieurs membres du cabinet, vous attachez, à cause de notre contexte peut-être québécois, énormément plus d'importance aux droits collectifs et il y a par contre une philosophie de certains députés de l'Opposition, entre autres de l'opposition libérale, où on attache peut-être plus de notre côté, et c'est sain dans une démocratie, un respect aux droits individuels. Vous pouvez différer d'opinion, ne faites pas de singeries, M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: Écoutez, vous nous faites assez de singeries, vous ne viendrez pas me donner de leçon, pas vous, n'importe qui, mais pas vous.

M. Lavoie: M. le Président, je continue.

M. Lalonde: Un autre argument ad hominem.

M. Lavoie: L'expérience que nous avons vécue, si ce n'est pas une présomption — disons qu'il n'y a pas de présomption — de jure ou peut-être tantum...

M. Lalonde: Juris tantum.

M. Lavoie: ... ou juris tantum; je vais vous rappeler deux ou trois expériences que j'ai vécues. D'ailleurs, pour ce qui est des attaques qui ont été

adressées au député de Marguerite-Bourgeoys lorsqu'il y a eu plainte concernant la loi 2, je voudrais faire une correction à l'adresse du ministre de la Justice. Il ne devrait pas diriger ces attaques vers le député de Margurite-Bougeoys, mais vers le député de Laval, parce que c'est moi-même, à ce moment-là, qui avais exigé une opinion de la Commission des droits de la personne. Cela a eu pour résultat, suite à l'avis que nous avons eu, une réimpression du projet de loi no 2. Des changements majeurs ont dû être apportés et des articles complets ont dû sauter. Si je me rappelle bien ceux qui étaient au dossier, il y a un article, entre autres, qui limitait énormément le droit de défendre une opinion politique ou autre. Le député de Maisonneuve et leader parlementaire du gouvernement a dit: Ce n'était pas notre intention.

Je réponds bien calmement, je pense, à l'argumentation. Ce sont des expériences que je raconte. Je dis que l'expérience que nous avons vécue, suite à une opinion que nous avons demandée à la Commission des droits de la personne, a amené — le trop fort ne casse pas, il y a des précautions à obtenir —.

M. Godin: Est-ce qu'on l'accepte, oui ou non?

M. Lavoie: ... je dis que cela a amené une réimpression du projet de loi 2, une modification profonde du projet de loi 2. À un article, entre autres, qui touchait les droits des gens d'appuyer ou d'aller à l'encontre d'une politique du gouvernement, le député de Maisonneuve a dit: Cela n'a jamais été mon intention, c'est une erreur. Il l'a retiré du projet de loi, suite aux avis de la Commission des droits de la personne.

Le député de Mercier va quand même reconnaître que lors de l'étude du projet de loi 1, il y a eu un avis, sur l'article 172, de la Commission des droits de la personne — ce n'est pas une présomption, mais c'est quand même une expérience vécue — la commission a dit qu'il y avait une atteinte aux droits. Le gouvernement d'ailleurs a retiré cet article.

Une voix: On vit avec.

M. Lavoie: Je continue sur l'expérience que nous avons eue, suite au rapport, aux commentaires que nous avons eus sur le livre blanc. Même si le ministre de la Justice, dans ses propos... Il va me faire sortir de mes gonds à certaines occasions, surtout lorsqu'il laisse entendre, pour les fins du journal des Débats, que la Commission des droits de la personne donnerait, dans son rapport, raison au gouvernement, dans l'esprit qui l'anime, dans la rédaction du projet de loi 92. Il me reste encore quelques minutes, je vais lire au texte, M. le Président, deux ou trois phrases de ce rapport. C'est pour cela que je dis que la vérité a ses droits, et cela doit être enregistré au journal des Débats, pour les lecteurs du journal des Débats qui vont suivre ces débats.

M. Bédard: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le ministre.

M. Bédard: Avant que le député de Laval ne s'engage dans la discussion de toute...

M. Lavoie: Cela ne m'empêchera pas de le lire.

M. Bédard: Non, vous le ferez quand même, vous voulez le faire pour le journal des Débats, je le sais.

M. Lavoie: C'est cela.

M. Bédard: Mais avant que vous ne vous engagiez dans la discussion sur l'ensemble de l'opinion, je tiens à vous rappeler que ce que j'ai dit tout à l'heure, et textuellement, c'est que. concernant le contrôle des dépenses, la Commission des droits de la personne souscrivait entièrement à cet objectif. Elle donnait des aménagements dont on aura à tenir compte lorsqu'on discutera des comités nationaux.

M. Lavoie: Vous avez terminé?

M. Beauséjour: Question de règlement. M. le Président.

M. Lavoie: Je vais lire...

M. Lalonde: II y a une autre question de règlement.

Le Président (M. Clair): M. le député d'Iberville.

M. Beauséjour: Combien reste-t-il de temps au député de Laval?

M. Lavoie: II me reste encore quatre ou cinq minutes, ne vous en faites pas.

M. Beauséjour: Je demande cela au président. Je m'excuse, mais le président, c'est celui à gauche.

Le Président (M. Clair): Ce n'est pas sûr que ce soit une question de règlement, mais je peux vous indiquer qu'il reste quatre minutes au député de Laval.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... Une directive d'émettre le renseignement, M. le Président, la directive.

M. Beauséjour: D'accord, je vous remercie. M. le Président.

M. Lavoie: Je lis donc deux ou trois phrases de ce rapport. Je cite au texte le rapport que nous

avons reçu de la Commission des droits de la personne, le 5 juin 1978. "Considérant en effet l'invitation qui lui a été faite sous la forme d'une motion votée à l'unanimité par la commission parlementaire chargée d'étudier le projet de loi 92, considérant que l'enjeu n'a en rien perdu de son importance et considérant que les écueils par rapport aux droits et libertés de la personne qui avaient été relevés à propos du livre blanc n'ont pas complètement disparu du projet de loi, la Commission des droits de la personne voudrait une fois de plus apporter l'éclairage particulier de la Charte des droits et libertés de la personne à l'étude du projet de loi 92 en reprenant l'analyse de ses chapitres les plus importants et en soulignant notamment les points qui lui apparaissent encore problématiques." (23 h 45)

Je cite de nouveau, à la page 5, au texte: "Les questions que la Commission des droits de la personne avait posées au gouvernement sur le regroupement obligatoire et l'interdiction pour toute autre option politique que celle représentée dans la question de participer à la campagne référendaire, n'a cependant pas obtenu dans le projet de loi des réponses qui la satisfont entièrement et sur tous les points.

Enfin, un troisième passage, à la page 8. L'équation difficile entre plusieurs droits et libertés qu'a tentée de réaliser le gouvernement dans ce projet de loi, présente encore des inconnues qui empêchent la commission de se prononcer catégoriquement sur son succès ou son échec. Les objectifs sont louables. Le mécanisme de la mise en oeuvre est précis, mais tout cela peut-il fonctionner sans danger pour les libertés d'opinion, d'expression ou d'association? C'est la question que la commission se permet de poser de nouveau au gouvernement en lui recommandant...

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est l'article 21.

M. Lavoie: ... une dernière fois la plus grande prudence dans la voie difficile où il s'est engagé."

M. Lalonde: On nous accuse de soulever les problèmes. C'est comme tuer le messager qui nous apporte une mauvaise nouvelle.

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Godin: ... vous n'avez pas la parole.

M. Lavoie: J'ai voulu — je termine par ceci — à la suite des propos du ministre de la Justice, pour les fins de la bonne connaissance du dossier et pour les fins du bon entendement de ce débat, citer au texte trois passages du rapport. Également, l'expérience que nous avons vécue autant sur la loi 2, sur la loi 101, sur le livre blanc de la loi 92, Loi sur la consultation populaire, et sur la loi... c'est en réponse à cette présomption prétendue ou invoquée ou réfutée du député de Mercier.

M. Godin: M. le Président, est-ce qu'il me reste du temps?

Le Président (M. Clair): M. le député de Mercier.

M. Godin: Que l'Opposition le fasse, c'est tout à fait normal, je le répète, mais nous n'accepterons pas qu'en dehors des procédures normales de consultation de cette commission, qu'en dehors des recours normaux que la loi donne à tout membre, à tout citoyen même du Québec et, à plus forte raison, à tout membre de ce Parlement, d'être injuriés comme nous le sommes souvent, comme nous l'avons été ce soir par un de vos collègues que je ne nommerai pas.

M. Lalonde: Un instant! Vous m'avez pointé, est-ce que vous voulez dire que je vous ai injurié?

M. Godin: Les insinuations, nous ne les prendrons pas. Maintenant, ce que je veux dire, et je termine là-dessus, je n'ai pas nommé personne.

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys invoque le règlement.

M. Vaillancourt (Jonquière): II n'y a pas de question de règlement là.

M. Lalonde: Le député de Mercier m'a pointé en disant que quelqu'un avait injurié. Je voudrais qu'il me dise... Si je l'ai fait involontairement, je vais retirer mes paroles, parce que mon intention n'est pas d'injurier qui que ce soit.

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Charbonneau: C'est un spécialiste de cela, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, depuis un an et demi. Vous et le député de Mont-Royal!

M. Lalonde: M. le Président, je demande au député de Verchères de retirer ses paroles.

M. Charbonneau: Non, M. le Président.

M. Lalonde: II a dit que j'étais un spécialiste de l'injure.

M. Charbonneau: Oui.

M. Lalonde: De cela, c'est de l'injure. Je ne pense pas que ce soit parlementaire.

M. Charbonneau: Non.

Le Président (M. Clair): Messieurs, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lavoie: Sur cette question de règlement, en vertu de l'article 99, connaissant le député de

Verchères, il va certainement considérer qu'en s'adressant au député de Marguerite-Bourgeoys, en lui disant, à un de ses collègues qui a eu la confiance de ses électeurs à au moins deux reprises, qui est un citoyen au même titre que le député de Verchères, il va reconnaître avec moi que c'est tout à fait antiparlementaire, que c'est un langage blessant à l'adresse d'un de ses collègues. Je lui demanderais de retirer ses paroles, cela, en vertu de l'article 99.8. Je vous demanderais, M. le Président, de statuer sur cette demande.

M. Charbonneau: M. le Président, je pense que je n'ai aucune raison de retirer ces paroles. Comme je reprends la phrase du député de Laval...

M. Lavoie: Je demande une décision sur cela. Il refuse de retirer, mais c'est au président à décider.

M. Charbonneau: Non, mais laissez-moi terminer!

M. Bédard: Laissez donc parler les gens, vous!

M. Charbonneau: Vous êtes bon pour les libertés individuelles, mais quand les autres passent...

M. Bédard: Pourtant, vous avez déjà été président de l'Assemblée nationale, mais c'est fini, cela.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît, messieurs!

M. Charbonneau: M. le Président, je vais reprendre la phrase du député de Laval. "Dans cette Assemblée nationale, la vérité a ses droits..."

M. Lavoie: M. le Président, je vous ai fait une demande.

M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement!

M. Lavoie: J'ai considéré que ces mots étaient antiparlementaires.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît, messieurs. Il y a une succession de questions de règlement dont je vais avoir de la difficulté à disposer si vous voulez continuer à les accumuler à un rythme aussi accéléré. Il y a eu d'abord le député de Marguerite-Bourgeoys qui s'est senti visé par des propos du député de Mercier. Ensuite, le député de Laval qui intervient pour des propos qui auraient été prononcés par le député de Verchères. J'aimerais d'abord disposer de la question de règlement soulevée par le député de Marguerite-Bourgeoys relativement à des gestes qu'auraient pu poser le député de Mercier en le pointant, semble-t-il...

M. Lalonde: M. le Président, étant donné que les "pointages" ne sont pas enregistrés dans le journal des Débats, je n'insisterai pas. Je voudrais simplement, étant donné que j'ai quand même senti qu'il me visait, savoir quelle injure j'aurais pu involontairement lui faire pour me donner l'occasion de la retirer parce que mon intention n'était pas d'injurier aucun député, surtout pas le député de Mercier.

Le Président (M. Clair): Je vous remercie de votre collaboration. Passons maintenant à la question de règlement soulevée par le député de Laval par rapport à des propos qu'aurait prononcés le député de Verchères.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que l'article 6 est adopté, M. le Président?

M. Lavoie: J'ai une demande formelle, M. le Président.

M. Lalonde: Non, M. le Président. Le député de Verchères m'a dit que j'étais un spécialiste de ça...

M. Charbonneau: De ça.

M. Lavoie: De l'injure.

M. Lalonde:... après avoir parlé d'injure. J'ai dit que je ne veux injurier personne. Il a dit: Vous êtes un spécialiste de ça. Je vous demande de statuer sur la demande du député de Laval.

Le Président (M. Clair): À l'heure qu'il est là, messieurs, je pense que tel que c'est mon droit, je vais prendre le tout en délibéré et je vérifierai.

M. Lavoie: La demande va revenir demain.

Le Président (M. Clair): Cela me donnera l'occasion de vérifier ce qui s'est réellement dit, la transcription du journal des Débats...

M. Lavoie: Vous pourrez vérifier la transcription du journal des Débats.

Le Président (M. Clair): ... et je rendrai ma décision demain sur ce sujet si aucun autre événement d'ici ce temps-là ne se produit.

M. Vaillancourt (Jonquière): Le vote sur l'amendement.

Le Président (M. Clair): M. le ministre.

M. Bédard: Suite aux propos du député de Laval, je voudrais ajouter simplement une chose en référence à l'ensemble de l'opinion de la Commission des droits de la personne, je voudrais lui faire remarquer qu'on n'est pas là pour discréditer l'opinion de la Commission des droits de la personne même si elle peut se tromper, parce que

cela peut lui arriver à elle aussi. Prenez, par exemple, à la page 4, la commission se pose la question suivante, à savoir, et je cite: "Au sujet du droit de vote, la commission demande quelles sont les raisons qui ont amené le gouvernement, contrairement à ce qu'avait laissé entendre le livre blanc, à n'éliminer que les incapacités frappant les prisonniers ", alors que vous savez très bien qu'on a éliminé toutes les incapacités. Mais, probablement que là, la commission n'a pas scruté suffisamment le...

M. Lalonde: Est-ce que je peux rappeler au ministre qu'il n'était pas à la commission lorsque nous avons adopté la motion demandant à la Commission des droits de la personne d'écrire. Dans une intervention, j'avais demandé à la commission d'expliciter chacun des points qu'elle avait soulevés dans ses remarques préliminaires. C'est peut-être pour cela qu'elle revient sur cette question.

M. Bédard: Mais là, on voit manifestement qu'elle a mal lu la loi. Je n'en fais pas reproche. Ce sont des choses qui peuvent arriver. À un moment donné...

M. Lavoie: Même le gouvernement est faillible. Même la commission.

M. Bédard: Oui, et à un moment donné il faut faire confiance aux hommes aussi. Il faut faire confiance au gouvernement qui doit assumer la responsabilité de gouverner. C'est aussi cela qu'il faut accepter.

Le Président (M. Clair): Messieurs, la motion d'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys...

M. Lalonde: Appel nominal.

Le Président (M. Clair): ... dont je n'ai probablement pas besoin de faire à nouveau lecture.

M. Lavoie: J'adresse une demande au ministre de la Justice...

M. Bédard: Mais là, on va voter.

M. Lavoie: D'accord, mais vous ne pouvez pas... C'est une dernière demande que je vous fais, quitte à ce qu'on ne vote pas immédiatement et que vous preniez l'amendement tel que proposé et que vous le fassiez réviser par vos conseillers, par vos légistes pour le rendre peut-être dans un texte convenable et acceptable pour le gouvernement sans lui causer de contrainte ou quoi que ce soit.

M. Vaillancourt (Jonquière): Le vote, M. le Président.

M. Lavoie: Dans un esprit d'ouverture et de dialogue.

M. Bédard: D'ouverture, il faut être logique, quand on parle d'ouverture, écoutez...

M. Vaillancourt (Jonquière): Le vote est appelé, M. le Président.

M. Bédard: ... on l'a dit tout à l'heure, la commission relève de l'Assemblée nationale; ce n'est pas l'Assemblée nationale qui relève de la commission. Cet article crée des obligations qui sont inacceptables et qui ont pour effet de décharger les élus de leurs responsabilités. Je crois qu'on est prêt à voter, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Messieurs, la motion d'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys, à l'article 6, à l'effet d'ajouter deux alinéas que je ne relirai pas puisqu'on en a discuté, je pense, pendant un bon moment, est-elle adoptée?

M. Samson: M. le Président, pour les fins du journal des Débats, je vous demande de la relire.

Le Président (M. Clair): Cela va! La motion du député de Marguerite-Bourgeoys est à l'effet d'ajouter les alinéas suivants à la fin de l'article 6: "Aucun référendum prévu au premier alinéa ne peut être tenu sans que le gouvernement n'ait obtenu au préalable et qu'il n'ait déposé à l'Assemblée nationale un avis de la Commission des droits de la personne constituée en vertu de l'article 57 de la Charte des droits et libertés de la personne, 1975, Statuts du Québec, chapitre 6. L'avis prévu au précédent alinéa porte exclusivement sur l'opportunité de soumettre une question ou un projet de loi à une consultation populaire en regard des conséquences qu'une telle consultation populaire peut avoir sur les droits et libertés de la personne ou d'une certaine catégorie de personnes". Cette motion sera-t-elle adoptée?

M. Vaillancourt (Jonquière): Rejetée, M. le Président.

Une voix: Vote nominal.

Le Président (M. Clair): Veuillez indiquer si vous êtes pour ou conte l'adoption de cette motion d'amendement. M. Bédard (Chicoutimi)?

M. Bédard: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Vaillancourt (Jonquière)?

M. Vaillancourt (Jonquière): Contre.

Le Président (M. Clair): M. Charbonneau (Verchères)?

M. Charbonneau: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Beauséjour (Iberville)?

M. Beauséjour: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Lavoie (Laval)?

M. Lavoie: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Grenier (Mégantic-Compton)?

M. Grenier: Je m'abstiens.

Le Président (M. Clair): M. Laberge (Jeanne-Mance)?

M. Laberge: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys)?

M. Lalonde: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Paquette (Rosemont)? M. Roy (Beauce-Sud)?

M. Roy: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Samson (Rouyn-Noranda)?

M. Samson: Pour.

Le Président (M. Clair): Le résultat est le suivant: Pour la motion d'amendement: 3; Contre: 6; Abstention: 1. La motion est donc rejetée.

M. Bédard: M. le Président, on propose l'adoption de l'article 6.

M. Lavoie: Non, nous avons encore un ou deux amendements que nous réservons pour demain.

M. Bédard: Nous avons cinq minutes.

M. Lavoie: M. le Président, je prends la parole. J'ai l'intention de soumettre...

M. Bédard: On pourra y réfléchir, M. le Président.

M. Lavoie: M. le Président...

M. Vaillancourt (Jonquière): ... que ce sera adopté, M. le Président?

M. Lavoie: ... un peu de calme. Il n'y a rien qui presse. Vous nous avez bousculés hier soir. Vous avez eu votre expérience. Ce n'est pas la manière dans un Parlement...

M. Vaillancourt (Jonquière): Arrêtez donc d'être suffisants.

M. Lavoie: Oui, mais arrêtez donc de nous bousculer.

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Lavoie: Acceptez donc l'Opposition.

M. Bédard: Je comprends que vous préféreriez parler d'hier soir plutôt que de ce soir.

M. Lavoie: Non, non.

Le Président (M. Clair): Messieurs, nous avons encore devant nous trois belles minutes.

M. Bédard: Si vous avez un amendement, j'imagine que vous en avez un de prêt.

M. Lavoie: J'ai l'intention d'apporter un amendement ici. Insulte il y a cette fois-ci...

M. Lalonde: Parce que cela a été échec épouvantable.

M. Lavoie: ... à l'adresse d'un député qui apportera un amendement pour particulariser; ce sera un amendement qui particularisera cette loi de la consultation populaire, dans le cas d'un référendum sur le statut constitutionnel.

M. le Président, je disais donc que si cela déplaît à l'Opposition, je ne voudrais pas que le député de Marguerite-Bougeoys soit le seul souffre-douleur de cette commission...

M. Bédard: On voit manifestement qu'on oblige l'Opposition à improviser. Alors on va leur permettre de réfléchir. Ils n'ont aucun texte d'amendement à nous proposer.

M. Vaillancourt (Jonquire): Cela aurait été agréable de le lire ce soir.

M. Lavoie: Notre stratégie, s'il y a stratégie en ce qui concerne ce projet de loi...

M. Bédard: Vous en avez une?

M. Lavoie: ... vous pouvez être assurés, qu'il est normal... À l'article 6, ici, c'est un des articles les plus...

M. Bédard: Des articles importants.

M. Lavoie: ... importants... M. Bédard: Je suis d'accord.

M. Lavoie: ... et nous allons annoncer encore une fois nos couleurs. Les amendements les plus nombreux que nous avons apportés jusqu'à maintenant et que nous continuerons d'apporter, je crois que nous en avons deux autres à l'article 6, et par la suite, je dois dire qu'en ce qui concerne l'Opposition officielle la majorité de nos amendements, d'ailieurs, sera dirigée sur le chapitre 8...

M. Bédard: Les comités nationaux.

ANNEXE

Opinion de la Commission des droits de la personne

Montréal le 5 juin 1978

Honorable Marc-André Bédard, Ministre de la Justice, 225 est, Grande Allée, Québec, Qué.

Monsieur le ministre,

Le 17 mai dernier, la Commission parlementaire chargée d'étudier le projet de loi 92, intitulé Loi sur la consultation populaire, adoptait à l'unanimité une motion demandant à la Commission des droits de la personne de faire parvenir au gouvernement les remarques et recommandations appropriées. Soucieuse de répondre à cette invitation, la Commission a fait siens les commentaires dont je joins copie à la présente, lors d'une réunion spéciale tenue le vendredi 2 juin 1978.

Dois-je préciser que le titre ("Quelques commentaires...') indique bien que la Commission entend s'en tenir à sa responsabilité qui consiste à étudier ce projet de loi à la lumière d'une grille d'analyse basée sur les droits et libertés mentionnés dans la Charte, et ne vise d'aucune façon à se substituer au législateur, au gouvernement, ni à un parti membre de l'opposition, en se prononçant sur l'opportunité ou la sagesse d'un projet de loi spécifique. Il est parfois opportun d'ainsi rappeler à l'occasion la zone de compétence de notre organisme afin d'éviter toute ambiguïté.

J'ose croire, monsieur le Ministre, que les commentaires ci-joints sauront vous être utiles et je vous prie d'accepter l'expression de mes sentiments distingués.

Le Président,

René Hurtubise, C.R.

Quelques commentaires de la Commission des droits de la personne sur le projet de loi No 92

Loi sur la consultation populaire

Les présents commentaires de la Commission des droits de la personne sur le projet de loi no 92 "Loi sur la consultation populaire" se situent dans le prolongement des réflexions préliminaires qu'elle a produites dans une première étape au sujet du Livre Blanc sur la Consultation populaire.

Considérant en effet l'invitation qui lui a été faite sous la forme d'une motion votée à l'unanimité par la Commission parlementaire chargée d'étudier le projet de loi no 92, considérant que l'enjeu n'a en rien perdu de son importance et considérant que les écueils par rapport aux droits et libertés de la personne qui avaient été relevés à propos du Livre Blanc n'ont pas complètement disparu du projet de loi, la Commission des droits de la personne voudrait une fois de plus, apporter l'éclairage particulier de la Charte des droits et libertés de la personne à l'étude du projet de loi no 92 en reprenant l'analyse de ses chapitres les plus importants et en soulignant notamment les points qui lui apparaissent encore problématiques.

M. Lavoie: ... la campagne des comités nationaux suite au document dont nous avons remis une copie aujourd'hui, que nous avons distribué.

M. Bédard: Et là, on aura l'occasion de parler du respect des remarques de la Commission des droits de la personne.

M. Lavoie: Et je crois que c'est dans le respect, et c'est dans l'étude normale d'un projet de loi de cette importance où il y a des amendements.

M. Bédard: Oui, oui. Parfaitement.

M. Lavoie: D'ailleurs, nous n'avons pas épuisé nos droits de parole jusqu'à maintenant sur les amendements que nous avons proposés, ni sur la motion principale.

Le Président (M. Clair): Messieurs, il est minuit. La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 0 heure)

Ces commentaires ne prétendent bien entendu à aucune expertise particulière sur le référendum comme tel, mais cherchent plutôt, comme la Charte en donne le mandat à la Commission, à promouvoir et à susciter dans le cadre particulier de ce projet de loi, le respect des droits et libertés de la personne.

1. Sur le droit d'initiative

Selon ce qui avait été annoncé dans le Livre Blanc, le droit d'initiative de tout référendum appartient à l'action concertée de l'exécutif et du législatif, l'Assemblée nationale ayant un rôle central à jouer dans le processus référendaire.

Le projet de loi no 92 vient préciser aux articles 6, 7, 8 et 9 la répartition des pouvoirs à cet effet entre l'exécutif et le législatif: à notre avis, le rôle de l'Assemblée nationale dans la décision de tenir une consultation populaire, tel que défini dans le projet de loi est beaucoup plus limité que ne l'annonçait le Livre Blanc.

Si l'on veut être exact, le rôle de l'Assemblée nationale réside moins dans l'initiative du référendum que dans les étapes qui suivent la décision initiale d'en déclencher un, à savoir la formulation de la question et la mise sur pied et l'organisation des comités nationaux. En vertu des articles 6 et 7, c'est le Premier ministre, dans le cas de la question, qui détient le pouvoir de déclencher un référendum, alors que dans le cas des projets de loi, même si le député a un pouvoir théorique de les présenter, on sait que l'initiative appartient surtout au gouvernement.

2. Sur la formulation de la question

Le projet de loi no 92 a retenu une partie des recommandations de la Commission des droits de la personne en ce qui concerne la forme que pourrait prendre la présentation de la question soumise au référendum devant l'Assemblée nationale et la durée du débat devant mener à sa formulation.

L'alternative question "sous forme de motion" /projet de loi proposée aux articles 6, 7, 8, 9 du projet de loi, de même que l'allongement de la durée du débat d'un maximum de 25 heures à un minimum de 30 heures dans le cas où le référendum porte sur une question proposée par le Premier ministre et non sur un projet de loi, s'inscrivent dans le sens des recommandations de la Commission à propos du Livre Blanc.

La Commission sait gré au gouvernement d'avoir dérogé à la règle de la durée maximale de 25 heures normalement prévue par la procédure parlementaire, dans le cas du Discours du budget et du Message inaugural par exemple, mais elle doit avouer qu'il lui est difficile de dire si cet ajout minimal de cinq heures à la durée du débat est suffisant, compte tenu de l'importance des questions qui seront soumises au référendum.

La proposition sur un vote à la majorité des 2/3 n'a cependant pas été retenue. Sans vouloir en faire une question de principe, ni en exagérer l'importance, la Commission continue de croire qu'un vote à la majorité des 2/3 comme le prévoit la procédure parlementaire lorsqu'on recherche le plus large consensus entre les partis politiques, serait préférable (1). Il n'en va d'aucune atteinte à des libertés fondamentales mais simplement d'une garantie que la question soumise à la consultation populaire une fois adoptée, ne fasse plus l'objet d'une contestation quelconque qui aurait pour conséquence d'orienter le débat sur des questions de forme plutôt que sur des questions de fond.

3. Les préalables au scrutin

Sur le rôle du Conseil du référendum, le processus de votation, le droit de vote et l'organisation tant matérielle que financière du référendum que l'on retrouve explicités aux chapitres II, V, VI, IX et X du projet de loi no 92, la Commission des droits de la personne a un certain nombre de commentaires à formuler. 3.1 Sur le Conseil du Référendum

La Commission des droits de la personne s'interroge d'abord sur l'article 2. Dans la même veine d'association entre le législatif et l'exécutif prônée par ce projet de loi, elle se demande si la désignation des deux autres juges du Conseil du Référendum ne pourrait pas être faite par l'Assemblée nationale sur proposition du Premier ministre, toujours en vue de réaliser le consensus le plus poussé entre les partis.

(1) Par procédure parlementaire, nous ne référons pas au Règlement de l'Assemblée nationale mais à la procédure suivie dans le cadre de certaines lois particulières pour la Commission des droits de la personne, le Protecteur du citoyen, le Vérificateur des comptes, le Directeur du financement des partis politiques, le Président des élections... etc.

Par ailleurs, la Commission note que les articles 39 et 40 confèrent une certaine discrétion en cas de contestation, au Conseil du Référendum. En effet, le paragraphe 3 de l'article 39 et le paragraphe 2 de l'article 40 précisent que ce Conseil ne peut accueillir la demande que dans la mesure où les faits allégués "seraient susceptibles de changer le résultat global de la consultation populaire".

Tout en comprenant qu'il soit normal qu'il en aille ainsi dans le cas de contestation d'une élection, la Commission invoquant le droit du public à l'information, rappelle qu'il serait important de savoir avec le plus d'exactitude possible, le pourcentage exact de la population qui a voté en faveur de chacune des options proposées, et cela tant au niveau d'une circonscription qu'au niveau du Québec. D'ailleurs, puisque la Charte, la Loi électorale et le projet de loi no 92 reconnaissent expressément les droits politiques de chaque électeur et considèrent l'exercice de ce droit comme un geste démocratique, pourquoi ne pas s'assurer qu'il a pu être posé sans entrave et comptabilisé au même titre que celui du voisin? 3.2

Au sujet du droit de vote, la Commission demande quelles sont les raisons qui ont amené le gouvernement, contrairement à ce qu'avait laissé entendre le Livre Blanc, à n'éliminer que les incapacités frappant les prisonniers. 3.3

En ce qui concerne les bulletins de vote, elle ne peut qu'être d'accord, conformément au droit à l'égalité de tous sans distinction fondée notamment sur la race et la langue proclamé à l'article 10 de la Charte, avec les dispositions des articles 19 et 20 du projet de loi qui prévoient l'inscription de la question dans les deux langues, française et anglaise, et dans le cas des autochtones, dans la langue française et celle de la majorité autochtone du lieu.

Une réserve cependant au sujet de ce dernier article 20. Dans la mesure où certains autochtones ne lisent pas leur propre langue, non plus qu'ils comprennent le français, ne conviendrait-il pas d'ajouter aussi la traduction anglaise de la question soumise au référendum, sur les bulletins de vote qui seront utilisés dans des bureaux de votation situés sur une réserve indienne ou dans un endroit où vit une communauté amérindienne ou inuit? Cela ne serait-il pas d'ailleurs conforme à l'esprit de l'article 88 de la Charte de la langue française ainsi qu'à la Convention de la Baie James?

4. Sur la campagne référendaire

Le projet de loi no 92 confirme avec force au chapitre VIII, la centralisation de toute la campagne référendaire au sein des comités nationaux, en nombre égal aux options proposées et les seuls reconnus, selon les termes mêmes du Livre Blanc "pour recevoir les contributions financières et procéder à des dépenses relatives au référendum".

Les questions que la Commission des droits de la personne avait posées au gouvernement sur le regroupement obligatoire et l'interdiction pour toute autre option politique que celles représentées dans la question de participer à la campagne référendaire n'ont cependant pas obtenu, dans le projet de loi, des réponses qui la satisfont entièrement et sur tous les points. 4.1 Au niveau du regroupement obligatoire

À cause du contrôle très strict sur l'ensemble des contributions et des dépenses qui pourront être faites durant la campagne référendaire, à cause aussi de la main-mise des comités nationaux sur tout l'aspect financier de la campagne la seule véritable manière de participer à la campagne référendaire en faveur d'une option est encore de s'associer au comité national qui lui correspond.

Il s'agit là d'une contrainte qui assujettit en quelque sorte le droit de tout citoyen ou de tout organisme de participer à la campagne référendaire (en encourant des frais en faveur ou contre une option) à l'obligation de faire partie de l'un des comités nationaux.

De l'avis de la Commission des droits de la personne, l'atteinte aux libertés d'expression et d'association qui peut se dégager de cet assujettissement, doit d'abord être vue à la lumière de l'objectif qui est poursuivi ici et auquel elle souscrit entièrement, à savoir assurer aux différentes options soumises à la consultation populaire une chance égale de faire valoir leurs avantages. La mise en oeuvre de l'égalité des chances entre les diverses options comporte nécessairement une part de contrainte et jusqu'à nouvel ordre, la Commission ne demande pas mieux que de l'accepter dans son principe.

Cependant, c'est la mesure de la contrainte qui l'inquiète encore et le projet de loi no 92 ne contribue pas toujours, il faut bien le dire, à en situer les paramètres exacts. Une première réponse se trouve sans doute dans les règlements eux-mêmes qui régiront, en vertu de l'article 23 les matières relatives au bon fonctionnement des comités nationaux et la façon dont ils seront constitués.

Pour la Commission, ces règlements sont d'une importance capitale, et elle se fera un devoir de les étudier et d'en signaler toute atteinte aux droits et libertés de la personne qu'ils pourraient comporter, conformément aux responsabilités qui découlent de l'interprétation qu'elle a donnée à l'article 66, lequel lui confie la tâche de promouvoir, par toutes mesures appropriées, les principes contenus dans la Charte. Et, comme, en vertu de l'article 56.3 de la Charte, le mot loi inclut un règlement... adopté sous l'autorité d'une loi, il va sans dire que les règlements adoptés par les comités nationaux en vertu de la Loi sur la consultation populaire, devraient faire l'objet d'une analyse approfondie par la Commission, avant d'être appliqués.

À ce sujet, la Commission souhaited abord que ces règlements soient publiés dans la Gazette officielle. De la même façon qu'à l'article 28 du projet de loi, l'on prévoit que la nomination de l'agent officiel de chaque comité national sera publiée par le Directeur général du financement des partis politiques dans la Gazette officielle du Québec, la même procédure pourrait être prévue pour les règlements qui régiront chaque comité national.

Sous réserve du tempérament qui suit, ces règlements devraient aussi garantir à tous les individus et groupes désireux de s'associer à un comité national: qu'ils soient accueillis et acceptés sans discrimination aucune, au sens de la Charte, par le comité directeur, qu'ils se voient accorder la chance de participer au débat référendaire; et qu'ils soient consultés par le comité directeur sur cet aspect capital qu'est l'utilisation des fonds.

En pratique, cependant, le contrôle des dépenses impliquant nécessairement le contrôle de toute la stratégie de la campagne référendaire pour chacun des comités nationaux, il se peut que des groupes refusent de se joindre au comité national correspondant à leur option de crainte de s'y voir indûment brimés dans leur liberté d'expression, par exemple parce qu'ils préféreraient mettre davantage l'accent sur une approche sociale ou culturelle plutôt que sur la dimension économique du problème débattu.

Alors, dans le but d'éviter le boycottage des comités nationaux et la multiplication des groupes oeuvrant hors de l'organisme-parapluie et d'atténuer significativement la contrainte pesant sur les libertés d'association et d'expression, la Commission propose d'introduire la notion de statut d'affilié pour les individus et groupes qui ne voudraient pas s'associer à la stratégie globale décidée par le comité national, tout en étant d'accord avec l'objectif visé en définitive.

En un tel cas, certes, pour que cette dissidence non sur les objectifs mais sur la stratégie ait un sens, il faudra bien sûr assurer une répartition proportionnelle des revenus entre le groupe majoritaire et les groupes "affiliés" selon des critères qui pourront être précisés pour chaque comité national, le cas échéant, dans ses règlements.

Est-il besoin pour terminer de rappeler au gouvernement que les règlements régissant les comités nationaux seront assujettis à la Charte des droits et libertés de la personne, et de lui souligner les nombreux écueils pour les droits et libertés de la personne qui jalonnent nécessairement la recherche de l'égalité stricte entre les options. Une seconde réponse à l'interrogation que la Commission formulait concernant la mesure de la contrainte, se trouve indubitablement dans les articles 26 et 27 du projet de loi, c'est-à-dire dans la liste des dépenses non réglementées qui seront permises pendant la campagne référendaire, et dans la définition de la période de temps où elles s'appliqueront.

L'on sait dès lors où commence et où s'arrête le droit de participer à la campagne référendaire en dehors des comités nationaux. Il va de soi que la liste des dépenses non réglementées s'applique à tous, que l'on soit associé ou non à un comité national, mais sous réserve des précisions que nous demandons plus loin sur l'article 25 et sur la participation des individus et groupes qui représentent ou favorisent d'autres options que celles soumises à la consultation populaire, les limites de la participation à la campagne référendaire pour ceux qui sont en dehors des comités nationaux, se trouvent tout de même dans la liste des dépenses non réglementées de l'article 26 du projet de loi.

Si l'on en saisit bien le sens, cette liste permet en quelque sorte aux individus et groupes non désireux de s'associer à un comité national pour une raison ou une autre, de contribuer de leur travail et de leurs efforts au débat référendaire à condition bien sûr que cela soit fait gratuitement ou bénévolement, le maximum de dépenses permises ayant été fixé au paragraphe h, à $300 "pour la tenue d'une réunion y compris la location de la salle et la convocation des participants".

Que dire sinon qu'il s'agit d'un minimum. De plus, si ces trois articles 23, 26 et 27 du projet de loi donnent une certaine idée de la mesure de la contrainte que représentera au niveau de la participation au débat référendaire la centralisation de toute la campagne à l'intérieur des comités nationaux, l'équation difficile entre plusieurs droits et libertés qu'a tenté de réaliser le gouvernement dans ce projet de loi présente encore des inconnues qui empêchent la Commission de se prononcer catégoriquement sur son succès ou son échec. Les objectifs sont louables, la mécanique de la mise en oeuvre est précise mais tout cela peut-il fonctionner sans danger pour les libertés d'opinion, d'expression ou d'association? C'est la question que la Commission se permet de poser de nouveau au gouvernement en lui recommandant une dernière fois la plus grande prudence dans la voie difficile où il s'est engagé.

4.2 En ce qui concerne la participation des individus et groupes qui représentent ou favorisent d'autres options que celles soumises à la consultation populaire.

La Commission avait dans ses commentaires préliminaires sur le Livre Blanc demandé au gouvernement quel cas il faisait des libertés d'opinion, d'expression et d'association des citoyens ou groupes partisans d'une option non représentée dans la question. Plus exactement, ce que voulait faire préciser la Commission, c'est la marge de manoeuvre permise en campagne référendaire aux citoyens et organismes qui ne favorisent ni l'une ni l'autre des options soumises au référendum, ou qui encore, voudraient intervenir à un niveau différent de celui qui aurait été fixé dans la question (soit par exemple en prônant l'abstention, soit en se prononçant sur la qualité du débat, soit en voulant coiffer de l'objectivité ou de la neutralité la plus stricte leur participation à la campagne référendaire, dans le cas par exemple d'associations et de groupes qui voudraient faire un travail d'information sur les différentes options auprès de leurs membres).

Ici encore, nonobstant la liste des dépenses non réglementées qui normalement devrait soumettre ces catégories particulières aux mêmes règles de participation que les autres, la Commission ne trouve pas de réponse claire dans le projet de loi no 92. L'ambiguïté de l'article 25 du projet de loi dans lequel on définit ce que sont les dépenses réglementées en est d'ailleurs peut-être la cause.

Que signifie en effet cet article 25? Possiblement, il voudrait dire que sous réserve de l'article 26, aucune dépense ne puisse être effectuée si elle ne vise pas la promotion d'une des options soumises à la consultation populaire, c'est là une hypothèse.

Mais alternativement, tel que formulé, cet article ne pourrait-il pas venir exempter de l'application des dépenses réglementées tous ceux qui engagent des frais pour toute autre option que celles représentées dans la question soumise au référendum ou qui ne travaillent pas précisément selon ses termes mêmes "pour favoriser ou défavoriser une option soumise à la consultation populaire"? Dans cette hypothèse, irait-on jusqu'à permettre aux groupes qui ne se sentent pas directement concernés par l'enjeu proposé ou qui voudraient se prononcer au débat référendaire sans être soumis aux dépenses réglementées? Ne serait-ce pas contradictoire avec les objectifs poursuivis en matière de réglementation des revenus ou des dépenses?

La Commission aimerait bien qu'on apporte à ces questions une réponse précise, en clarifiant, une fois pour toutes, la place dans la campagne référendaire de ces individus et groupes qui se situent en marge de l'enjeu précis de la consultation populaire.

Et cette réponse sera vitale. Surtout si le législateur n'accepte pas d'introduire la notion de groupe affilié mentionnée antérieurement puisqu'alors vraisemblablement le nombre de ces groupes s'en trouverait accru.

5. Le droit à l'information

La Commission des droits de la personne avait proposé dans ses commentaires sur le Livre Blanc d'étudier en rapport avec le modèle britannique la possibilité d'accorderau public le droit à une information la plus objective et la plus complète possible.

Le projet de loi no 92 n'a pas répondu à ses attentes.

Montréal, le 5 juin 1978

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